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Full text of "Actes de la Société linnéenne de Bordeaux"

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LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE 


DE BORDEAUX. 


TONE XAIL, 


Troisième Série : TOME Il. 


À 1 TV 
A PARIS, A BORDEAUX, 
CHEZ J.-B. BAILLIÈRE , LIBRAIRE, CHEZ TH. LAFARCGUE, LIBRAIRE, 


Rue Hautefeuille, 19; 


MÊME MAISON 


A LONDRES, MADRID ET NEW -YORK- Ÿ Rue Puits de Bagne-Cap , 5. 


1858. 


Imprimeur de la Sociélé Linnéenne, 


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SOGIÉTÉ LINNÉENNE DE BORDEAUX. 


PROGRAMME 


DES 


RÉCOMPENSES ACADÉMIQUES 


PROPOSÉES PAR LA SOCIÉTÉ 


Pour les Années 1959 et suivantes, 


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TYPOGRAPHIE DE TH. LAFARGUE, LIBRAIRE, 


Imprimeur de la Société Linnéenne , 


RUE PUITS DE BAGNE-CAP , 8. 


1859. 


PUBLICATION DE LA SOCIÉTÉ. 


La Société Linnéenne de Rordeaux publie le vingt-deuxième volume de ses 
Actes. 

L’abonnement annuel au volume en cours de publication est de 40 fr. Les 
livraisons sont envoyées franco par la poste. 


On souscrit : à Paris, chez BAILLIÈRE, libraire ; à Bordeaux, chez CHAUMAS, 
libraire, et chez Tu. LAFARGUE, libraire, Imprimeur de la Société. 


SOCIÈTÉ LENNÉENNE DE BORDEAUX. 


PROGRAMME 


DES 


RÉCOMPENSES ACADÉMIQUES 


PROPOSÉES PAR LA SOCIÉTÉ 


Pour Les années 1859 ct suivantes. 


AVWES. — La mort du vénérable Fondateur et Directeur de la Société, 
M. J.-F. LATERRADE père, ayant donné lieu à la Compagnie de supprimer, en 
signe de deuil, la Séance publique d’hiver de 1858, le présent Programme 
ouvre les concours dont les résultats seront proclamés dans la Séance publi- 
que d'hiver de 1859. 


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PREMIÈRE PARTIE. 


La Société Linnéenne de Bordeaux, en raison de l’importance des 
questions mises par elle au concours en 1856, a cru devoir les repro- 
duire non-seulement pour l’année 1859 , mais encore pour les suivantes. 
Ces questions se rattachent d’ailleurs à trois des grandes divisions des 
études spéciales de la Société : Botanique, Conchyliologie, Histoire 
naturelle appliquée. 


Se. 
CONCGHYLIOLOGIE. 


A. — Depuis les travaux spéciaux de M. de Basterot sur les fossiles 
du Sud-Ouest de la France , ceux plus récents de M. de Grateloup sur les 
fossiles des environs de Dax, de nombreuses fouilles ont été opérées, 
et beaucoup de nouvelles espèces sont venues augmenter le nombre de 


(4) 

celles antérieurement connues. Déjà, à plusieurs reprises , des notes, des 
mémoires ont été inscrits sur ce sujet dans les Acies de la Société par 
quelques-uns de ses membres; toutefois, il serait à désirer que ces com- 
munications, comme les découvertes nouvelles, ne restasseni pas isolées. 

En conséquence , la Société met au concours, pour l’année 1859, la 
question suivante : 

« Dresser le Catalogue exact et complet, par arrondissement , ou par 
« terrain, des productions paléontologiques du département de la 
« Gironde. » 


Le Prix sera : Une Médaille d'argent. 


B.— L’étude de la famille des Limaciens étant du plus haut intérêt 
en malacologie , la Société met au concours la question suivante : 

« Déterminer par des dissections anatomiques et des recherches phy- 
« siologiques , la délimitation exacte des genres AR10N et LImACE. » 


Prix : Une Médaille d'argent. 
$ II. 


ENTOMOLOGIE. 


Plusieurs genres de Lépidoptères étant d’une étude très-difficile , et fa 
distinction des espèces , souvent mal déterminées , étant très-minutieuse, 
la Société met au concours les questions suivantes : 


AÀ.— Déterminer et fixer, d’après des caractères positifs et constants, 
les espèces du genre SyricTaus. — Ajouter à ce travail l'habitat, les 
époques des métamorphoses, et des recherches sur la nourriture de ces 
diverses espèces. 

Même question pour les genres SesiA, PsycuE, LEuCANIA, Cara- 
PRrINA , ORTHOSIA , CIDARIA , EUPITHECIA. 


Prix : Une Médaille d’argeré DE GRAND OU DE PETIT MODULE , 
suivant l'importance du travail. 


B.— Aucun catalogue n’ayant encore été publié pour la Gironde , rela- 
tivement aux ordres des Orthoptères, Névroptères, Rhipithères, Hémip- 
tères, Hyménoptères et Diptères , la Société destine Ume Médaille 
d'argent, de petit ou de grand module, suivant le cas , à l’auteur du 
Catalogue de l’un de ces groupes d'insectes. On devra , autant que pos- 


(95) 
sible, y joindre des détails sur l'habitat, les mœurs , les métamorphoses 
et la nourriture de ces animaux, sur leur utilité dans l’industrie , les 
dégâts qu’ils occasionnent à l’agriculture et les moyens de les combattre 
victorieusement , ou du moins, d’en diminuer l'intensité. 


& II. 


BOTANIQUE. 


A. — Les Chênes de l’Europe occidentale ont été peu étudiés et sont 
généralement mal connus. On suppose que la France, le Sud-Ouest en 
particulier, en récèle plus d'espèces qu’on n’en a reconnu jusques à 
ce jour. En conséquence, la Société propose pour sujet du prix de Bota- 
nique qu’elle décernera en 1859 ou en 1860 : 


« Un travail complet sur les Chénes de la région du Sud-Ouest de la 
« France, les Basses-Pyrénées comprises. » 


Déterminer et fixer rigoureusement les espèces d’après des caractères 
positifs et invariables, déduits principalement de lanalyse des organes 
floraux, en général trop négligés, de ceux surtout de la fleur femelle. 
Soumettre chaque espèce à une diagnose latine, comparative, basée 
sur les caractères purement botaniques, mais suivie d’une description 
étendue où figurera, avec tous les développements nécessaires , l’en- 
semble des caractères, tant botaniques que forestiers. 

À la suite de chaque espèce typique, seront classées et décrites les 
variétés constantes et mentionnées des formes locales. On fera connaître, 
pour chacune d'elles , les époques de floraison et de foliation, et on 
notera le degré de température moyenne sous lequel ces évolutions se 
produisent. 

On se livrera à des observations critiques, à des travaux rigoureux de 
synonymie, qui auront principalement pour objet les espèces ou variétés 
indiquées dans les Flores générales ou locales de la France, ainsi que 
dans les ouvrages de MM. Tenore, Grisebach, Moddiges, Webb, Endli- 
cher, Kostchy, etc. On recherchera si certaines formes du Sud-Ouest ne 
se rapportent pas à des chênes déjà décrits ou mentionnés par ces 
auteurs. Les faits historiques qui méritent d’être recueillis trouveront 
également place dans ces observations. 

On terminera par des études sur les fibres ligneuses de toutes les 
formes observées , et on donnera le tableau comparatif de la densité de 


(6) 
leur bois. Enfin, on entrera dans quelques détails sur la qualité et la 
valeur de ces bois, leur emploi dans l’industrie, leurs usages dans les 
localités. 

On tiendra compte aux auteurs des recherches organogéniques aux- 
quelles ils se seront livrés sur les causes qui, dans l’ovaire des chênes, 
déterminent le développement d’un seul ovule et l’avortement constant 
de tous les autres. 

Des figures analytiques , nécessaires à l’intelligence du texte, accom- 
pagneront les mémoires déposés. 


Prix : Ume Médaille d’or. 


La Société ne s’était nullement dissimulé toutes les difficultés et la 
longueur du travail qu’elle avait mis au concours pour 1857 (1); en con- 
séquence , elle en a prorogé le terme pour les années suivantes 1858, 
99-60 ; et, jusqu’à cette époque , elle récompensera les travaux qui lui 
seraient envoyés et qui n’auraient pour objet qu’une partie des éléments 
de la question précédente. 


PB. — Les naturalistes n’ont pu jusqu'ici se mettre complètement 
d'accord sur le genre d’influences (physiques, chimiques ou météorologi- 
ques) qu’on doit considérer comme prépondérantes dans les conditions 
de station des plantes. Il existe une question liée à celle-ci par d’étroits 
rapports et dont la solution viendrait en aide à la connaissance positive 
de la Phytostatique. 

Cette question , que la Société Linnéenne remet au concours pour 1859 
et les années suivantes, peut se formuler ainsi : 

« Quels sont, dans les diverses conditions de station des végélaux , 
« les modes prédominants de reproduction (durée annuelle ou vivace ; 
« racines lracantes ; tiges souterraines ; marcotage naturel; graines 
« normales, où germination par propagules divers ; fissiparié; sexua- 
« lité; système unique où multiple de reproduction, etc.) ? » 

En d’autres termes : « Comment le milieu qu'habite une plante, 
€ influe-1-il le plus communément sur son mode de reproduction? » 


Le Prix consistera en : Une Médaille d’argent. 


(1) M. J. Gay (de Paris), dans des mémoires récents, a élucidé parfaitement quel- 
ques-uns des points dont l'étude était réclamée par la Société, en particulier la 
Synonymie , les Époques et la Durée de la maturation de quelques espèces indigènes. 
(Voy. Ann. des Sc. nal. 4e série, Bot. t. VI, p. 223 et suiv. — Bull. de la Sac. 
Bol, de France, 1. IN, p. 445 et 501 ) 


(#19) 
& IV. 


HISTOIRE NATURELLE GÉNÉRALE. 


Quels sont les faits ignorés jusqu'ici et se rapportant à l'une des 
branches de l'Histoire naturelle de la Gironde, qu'il serait important de 
constater dans l'intérél de cette science? 


Nota. — L'absence de limites posées à cette question a pour but 
d'appeler à concourir toutes les personnes qui, dans le département 
de la Gironde, s'occupent d'Histoire naturelle , et la Société est disposée 
à accueillir, à récompenser selon son mérite tout travail, toute décou- 
verte en ce genre qui lui seront présentés. 


PRIX : Des Médailles de bronze Où d'argent»: PETIT OU 
GRAND MODULE , selon l’importance des travaux produits au concours. 


$ V. 


HISTOIRE NATURELLE APPLIQUÉE. 


A. — Quand on examine la grande quantité de plantes indigènes que 
l’agriculture s’applique à détruire pour assurer ses cultures, on est sur- 
pris de l’apparente inutilité de végétaux aussi nombreux. 

Des essais ont été tentés pour faire servir des plantes regardées 
actuellement comme nuisibles. Il serait important de rechercher métho- 
._diquement les espèces qui promettent le mieux de devenir profitables, et 
d'indiquer les modifications que la culture devra leur faire subir pour 
obtenir les avantages demandés. 

Dans le but d'encourager cette étude, la Société Linnéenne propose, 
pour les années 1859 et suivantes, la question suivante : 

« Faire connaître quelles sont, parmi les plantes indigènes de la 
« Gironde, les espèces actuellement regardées comme nuisibles ou tout 
€ au moins Sans usage, qui peuvent le mieux étre utilisées ; et préciser 


« en même temps les essais à tenter et les améliorations que l’on devra” 
« chercher à obtenir dans la culture. » 


Prix : Une Médaille d'argent. 
B. — M. Lacaze-Duthiers a publié en 1853, dans les Annales des 


Sciences naturelles (3° série; Botan., t. XIX, p. 273), un important 
Mémoire sur les GALLES. Il les à considérées : 1° sous le point de vue 


(8) 

des insectes qui les produisent ; 2 sous celui de leur structure ; 3 sous 
celui de leur développement : ce sont là les faces de la question qui 
regardent l’histoire naturelle pure. Mais le savant auteur n’a pas abordé 
le côté PRATIQUE de cette question, c’est-à-dire l’analyse chimique et 
l'appréciation des ressources que les diverses Galles peuvent offrir à 
l’industrie pour diminuer le tribut considérable qu’il nous faut payer, 
en France , au commerce étranger , pour la fabrication de l’encre. 

La Société Linnéenne propose, en conséquence, la question suivante 
pour 1859 et 1860 : 

Faire connaître le dosage, en matières tinctoriales, des diverses sortes 
de Galles, et indiquer leur emploi le plus avantageux dans l’industrie. 


Prix : Une Médaille d’argent. 
—ARANC/Q XI D —— 


DEUXIÈME PARTIE. 


FORMALITÉS À REMPLIR POUR OBTENIR LES RÉCOMPENSES ACADÉMIQUES 
PROPOSÉES PAR LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE. 


Tout mémoire, se rapportant à l’une des questions posées dans ce 
programme , devra être adressé au Secrétaire-Général, au plus tard le 
31 Août, avec une épigraphe reproduite sur un billet cacheté , renfer- 
mant le nom de l’auteur. 

Pour les simples communications de découvertes en fossiles, plantes, 
animaux , etc....., il devra être adressé à la Société au moins un échan- 
tillon de l’objet découvert, avec tous les renseignements capables de la 
bien fixer sur la réalité et sur le mérite de la découverte. 

Enfin, la Société invite les personnes qui ont fait quelques travaux en 
histoire naturelle, quelques applications nouvelles et utiles de cette 
science à l’agriculture ou aux arts, de vouloir bien lui en donner con- 
naissance , afin qu’elle puisse les récompenser et les répandre le plus 
possible dans l'intérêt général. 


Délibéré et arrêté, en séance générale, à Bordeaux, le 16 Février 1859. 


CHARLES DES MOULINS, Président. 
D: Euc. LAFARGUE , Secrétaire-Général. 
HewrY-TRIMOULET , Secrétaire du Conseil. 


Bordeaux. — Imprimerie de Tn. LAFARGUE , Libraire. 


ACTES . 


DE 


LA SOCIÈTÉ LINNÉENNE 


DE BORDEAUX, 


CATALOGUE DES LÉPIDOPTÈRES 


DU DÉPARTEMENT DE LA GIRONDE; 


Par M. H. TRIMOULET, Secrétaire du Conseil. 


L'étude des Lépidoptères rend tous les jours d’éminents services à 
l’agriculture et à l’industrie. La connaissance des mœurs des Papillons 
et de leurs Chenilles, ainsi que celle de l’époque où ils apparaissent, est 
d’une utilité incontestable pour combattre les ravages qu’ils exercent 
sur les récoltes en les attaquant, soit dans leurs racines, soit dans 
leurs tiges, soit enfin dans les organes reproducteurs de l’espèce. Que 
de moissons détruites en partie ou même en totalité , et qui auraient été 
sauvées, si les auteurs de ces dégâts avaient été reconnus ! 

L'industrie retire d’un lépidoptère la soie, qui fait l’orgueil et la 
richesse de plusieurs de nos départements du sud-est, et peut-être un 
jour, quelques Bombyx de nos contrées pourront lutter avec leurs congé- 
nères asiatiques, les Bombyx du müûrier, du ricin et du chêne; car il est 
certain que la sériciculture est loin d’avoir dit son dernier mot. Qui peut 
dire, en effet, que les nids tissés par certaines chenilles vivant en 
familles , telles que les Processionnaires du Pin, si communes dans nos 
landes , ne sont pas appelés à fournir une soie, inférieure il est vrai, 
mais dont l’apparition amènera une véritable révolution dans l’industrie 
séricicole. 

Tome XXII. | 1 


(6) 

La Gironde, un des plus grands départements de la France, a été, 
jusqu’à présent, fort peu explorée pour l’histoire entomologique. Pour- 
tant, ce département doit être un des plus riches en lépidoptères, car 
il renferme dans son étendue, des marais, des landes immenses, des 
bois , des terrains incultes, des coteaux arides, etc. Mais on s’est tou- 
jours borné à faire des excursions fort restreintes, et qui laissent indu- 
bitablement beaucoup d’espèces nonvelles à découvrir. 

Je n’ai pas eu la prétention d'offrir ici un catalogue complet des lépi- 
doptères de notre département, mais j’ai pensé qu’en me bornant à 
l’'énumération succincte de ceux que j'ai eu le bonheur de recueillir et 
qui composent ma collection, je fournissais un cadre déjà assez étendu, 
autour duquel il serait facile de grouper les découvertes ultérieures. 


Nota. — Il existe déjà un Catalogue des lépidoptères de la Gironde, 
par M, l’abbé Lalanne ; mais ce travail, auquel je m'empresse de rendre 
justice, est fort insuffisant. J’ai pris soin, d’ailleurs, de désigner d’une 
manière spéciale par un astérisque (*) toutes les espèces qui ne se 
trouvent pas mentionnées dans l’ouvrage de mon prédécesseur. 

Quoique me livrant depuis longtemps à l’étude de l’entomologie, je 
dois , toutefois , avertir que mes excursions les plus sérieuses ont eu pour 
théâtre l'arrondissement de Bordeaux; encore même, ai-je été forcé de 
négliger, bien à contre cœur, l’exploration des landes : mais certaines_ 
chasses, et en particulier celle dite à la miellée, étant impossible dans 
les vastes forêts de pins ou dans les landes éloignées de tout abri, j'ai 
dû me résigner pour le moment, et désirer encore plus ardemment celui 
qui ne peut manquer, tôt ou tard, d'arriver, où des richesses nouvelles 
ou peu connues seront recueillies dans ces localités. 

En tant que Catalogue de la Gironde, ma collection est donc loin d’être 
complète , comme du moins j'entends cette dernière expression ; mais si 
tout le premier j'y trouve des vides à remplir, il est du moins un titre 
que je peux faire valoir en faveur de cette publication : c’est l’exactitude. 
Je n’ai jamais nommé une espèce sans l'avoir recueillie moi-même , ou 
sans en laisser la responsabilité à la personne qui m’en a donné connais- 
sance; el encore, n’ai-je admis que des témoignages de naturalistes 
dignes de créance. 

J'ai suivi dans ce travail, pour le classement des espèces, des genres 
et des tribus, l’ordre adopté par M. le docteur Boisduval, dans son /ndex 
methodicus. L’habitat et l’époque de l'apparition, que je considère comme 


#1) 
les points les plus essentiels, ont reçu tous mes soins. Pour rendre 
aussi clairs que possible les renseignements que je donne, j'ai divisé mon 
travail ainsi qu’il suit : 

Insecte parfait : 1° Manière de le chasser; 2° époque de son appari- 
tion ; 3° son habitat général; 4 indication des différentes localités où il 
se trouve. — Chenille : 1° Son habitat, s’il n’est pas le même que celui 
de l’insecte parfait; 2° l’époque de son apparition; 3° sa nourriture, — 
Chrysalide : époque et lieux où elle se trouve. 

Le nombre des espèces mentionnées dans ce catalogue est de 590, 
divisées de la manière suivante : Rhopalocères , 95; Hétérocères, 495; 
ces dernières se partagent en Crépusculaires et Bombyx, 127; Noctuelles, 
213, et Géomètres, 154. 

Les Rhopalocères doivent être à peu près complets. Les Crépusculaires 
également, à l'exception des genres Syrictus et Psyche, et des tribus 
Seseides et Lithosides. À l'exception des genres Phisia et Catocala, les 
Noctuelles doivent laisser beaucoup de vides, surtout dans les genres 
Hadena, Leucania et Caradrina. Les Géomètres fournissent les genres 
les plus incomplets, surtout les Cidaria et les Eupithecia. 

À ces courtes explications sur mon travail, je erois utile, sans avoir 
la prétention de vouloir faire ici un traité de Lépidoceptologie, de men- 
tionner les procédés reconnus les plus profitables dans nos contrées. Si 
je m’expose au reproche de répéter ce que l’on peut trouver ailleurs, je 
ne le ferai, du moins, que de la manière la plus concise possible et 
dans l'espérance que ce peu de lignes, tombant sous les yeux des jeunes 
lépidoptéristes, leur rendra quelques services. 


$ I. — CHASSE DES LÉPIDOPTÈRES. 


1° CHASSE À LA MAILLOCHE. — Apportée du Nord, par M. Th. Panessac, 
savant entomologiste de Bordeaux, est souvent très-fructueuse dans les 
bois tallis, pour se procurer soit l’insecte parfait, soit les chenilles, aux 
mois d'Avril, Mai, Août, Septembre et Octobre. 

20 CHASSE AU PARAPLUIE. — Pour recevoir les insectes qui tombent en 
battant les plantes hautes, les haïes et les branches basses des grands 
arbres. A l’aide de ce procédé connu presque partout, on peut se pro- 
curer une foule de bonnes chenilles, aux mois de Mai, Juillet et Octobre. 

3° CHASSE À LA CORDE MIELLÉE. — Procédé de M. H. Gaujac, amateur 
distingué de notre ville. Je saisis ici l’occasion de témoigner ma vive 


(8) 

reconnaissance à cet entomologiste zélé, pour la bienveillance qu’it a 
mise dans les communicattons qu’il a bien voulu me faire. Cette chasse 
se fait avec une corde enduite de miel, tendue sur la lisière d’un bois, 
dans un marais, ou tout autre endroit où l’on pense qu’il peut y avoir 
des Noctuelles. Ce procédé est fort avantageux ; car de cette manière, 
j'ai obtenu des espèces très-rares, et même nouvelles pour le départe- 
ment : Ramburü, œrithrina, leucogaster , popularis, fluviaria, etc. 
Cette manière de chasser exige deux personnes; ear il faut être éclairé 
par une lanterne, et être libre de ses mouvements, pour manier une 
pince et un filet, et piquer ensuite les lépidoptères qui y sont tombés. 
On peut, d’après un second procédé anciennement connu, mettre le 
miel contre des arbres, où l’on pique les lépidoptères au poignard; 
mais cette chasse ne peut se faire que dans des endroits où les arbres 
ont le pied dégagé de broussailles. 

On commence à chasser à la miellée après le crépuscule, et la chasse 
peut durer jusque vers onze heures; passé cette heure, les Noctuelles 
se laissent tomber et sont très-difficiles à prendre. 

4° CHASSE AU CRÉPUSCULE. — Sur Lonicera caprifolium, periclymenum 
et æylosteum ; Lavandula spica ; Valeriana officinalis; Tagetes erecta ; 
Epilobium angustifolium ; Lythrum salicaria ; Verbena Aubletii ; Mira- 
bilis jalappa. 

00 CHASSE A LA LANTERNE. — Faile sur les chasselas bien mûrs, cette 
application, découverte par M. Lamberty, de Bordeaux, produit de 
très-bons résultats. 


$ II. — ÉLÈVE DES CHENILLES. 


Il est utile, pour certaines chenilles arboricoles, de les élever sur 
l’arbre même, au moyen d’un sac de mousseline dont on enveloppe la 
branche où elles se tiennent; c’est le moyen le plus sûr de les conser- 
ver, car certaines espèces , surtout parmi celles qui passent l'hiver, ne 
pourraient pas vivre dans un appartement. 

Les commençants doivent également faire bien attention de séparer 
les chenilles campéphages (xeprnvayoy, mangeuses de chenilles), et les 
carnassières , que j'indique dans le catalogue, et de ne pas mêler de 
larves aux chenilles , car en peu de temps , toutes ces dernières seraient 
mises à mort. 

On peut élever facilement les chenilles lignivores avec de la sciure de 
bois de chêne, de saule , ou une pomme dont on a retiré les pepins. 


(à 52) 
$ III. — CONSERVATION DES CHRYSALIDES. 


Les chrysalides qui ont l'habitude de s’enfoncer dans le sol doivent 
être soigneusement tenues dans de la terre qui ne soit ni trop sèche ni 
trop humide , mais qui tienne, autant que possible, un juste milieu entre 
ces deux états; autrement, dans le premier cas, elles se dessèchent; 
dans le second, elles se moisissent. Pour éviter, ces inconvénients, on 
peut mettre les chrysalides sur de la mousse que l’on asperge de temps 
à autre, ou bien, mettre des éponges imbibées d’eau dans la caisse où 
on les renferme. 


$ IV. — CONSERVATION DES LÉPIDOPTÈRES. 


Il faut avoir des boîtes ou des cadres hermétiquement fermés, garantis 
le plus possible de l'humidité et de la lumière, afin de conserver les 
couleurs. Le mercure et les odeurs fortes telles que les essences de ser- 
polet et de romarin les préservent, aussi bien que les savons arsénicaux 
employés par d’autres entomologistes , des insectes rongeurs des autres 
ordres, et des Acarus. Mais, quand un lépidoptère est attaqué, on devra 
le frotter d’éther arseniqué. Cette composition ne tache pas les ailes et le 
consérvera désormais. 

Un fil enduit de nicotine ou de tabac macéré dans l'alcool, introduit 
dans le corps des grosses espèces, les préserve des insectes et soutient 
l'abdomen. 

On doit se servir d’éther de préférence à la térébenthine, pour dégrais- 
ser les lépidoptères ; on les place ensuite sous de la terre de Sommières 
qui pompe alors toute l'huile. 

Pour ramollir un papillon afin de l’étaler ou de le dépiquer, on frotte 
dans le premier cas, la base des ailes ; dans le second, le corselet, avec 
de l'alcool ; cela opère tout de suite, mais l’on peut, dans certaines espè- 
ces, dénaturer les couleurs. 

Je ne veux pas terminer ces quelques lignes, sans remercier les ento- 
mologistes qui par leurs communications ont bien voulu faciliter mon 
travail. J’ai les plus grandes obligations à MM. I. Gaujac, Serisier frères, 
Panessac et Auguste; je prie donc ces Messieurs, de vouloir bien rece- 
voir ici l'expression de toute ma gratitude. 


(10 ) 


RHOPALOCERA. 


IL. Fribus PAPILIONEBES. 


Genus PAPILIO. Lat., Bdv. 

1. Podaïirius L., Bdv. 1. Avril et Juillet. Vergers et champs. Bassens, 
le Bouscat, La chenille, en Juin, Août et Septembre, sur les 
Prunus spinosa, Amygdalus communis, Persicu vulgaris, Petro- 
selinum sativum. 

2. Naehaon L., Bdv. 2. Mai, Juillet et Août. Dans les jardins, les 
prairies, etc. Pessac, Bouliac, le Bouscaut, etc. La chenille, 
en Août et Septembre, sur les Fœniculum ofjicinale, Daucus 
carota. 

Var. Burdigalensis Nob. Juillet. Coteaux de Fargues et de Bon- 
netan ; terres incultes. 
Cette variété se distingue du type, par la couleur ochrée des 
ailes. 


II. Fribus PIERIDES. 


Genus PIERIS Bdv. 


3. Cratægi L., Bdv. 45. Mai et Juin. Jardins, vergers , etc. Pessac, 
Talence, etc., partout. La chenille, Avril et Mai, sur tous les 
arbres fruitiers, Cratæqus oxyacantha et pyracantha, Prunus 
spinosa. Elles passent l’hiver en famille et se dispersent en Avril. 

4. Brassieæ L., Bdv. 16. De Mai à Août. Partout. La chenille, d’Août 
à Octobre, sur le Brassica oleracea et autres crucifères. 

5. Rapæ L., Bdv. 17. Toute l’année. Dans les jardins, les prairies, etc. 
Partout. La chenille , toute l’année , sur presque toutes les cru- 
cifères et spécialement sur les Brassica napus et Tropeolum 
majus. 

. Napi L., Bdv. 18. Avril à Juillet. Dans les bois. À Pessac, Bou- 
hiac, etc. La chenille, en Automne, sur les crucifères sauvages. 


(er 


(11) 
Var. Napeæ Esp., Bdv. Septembre. Dans les prairies. À Pessac. La 
chenille, en Mai et Juin , sur les crucifères. 

7. Daplidiee L., Bdv. 21. Avril et Juillet. Dans les prairies arides. A 
Pessac, Bruges. La chenille, selon les auteurs, se nourrit de 
Brassica oleracea, Thlaspi perfoliatum et arenarium , -Reseda 
lutea. 

Var. Betidice Brahm., Bdv. Avril. Terrains arides. Pessac, Bruges, 
Beaucoup plus rare qne le type. Ne paraît qu’une seule fois par 
an. 


Genus ANTHOCARIS Bdv. 


8. Belia Fab., Bdv. 25. Mars, Avril. Terrains arides rapprochés des 
crucifères. A Pessac, Mérignac, le Bouscaut , Fargues, etc. On 
prétend que la chenille se nourrit de Biscutella lævigata. Le type 
du Bélia de la Gironde est remarquable par sa grandeur et les 
taches des ailes qui sont fortement nacrées. 

9. Ausomia Esp., Bdv. 26. De Juin à Septembre. Terrains arides, 
champs de seigle, les dunes du bord de la mer. À Bouliac, 
Bassens , le Bouscaut, La Teste. 

Cet Anthocharis, malgré ce que disent quelques auteurs, a 
. deux générations par an. 

La chenille d’abord en Juillet et ensuite en Septembre, se 
nourrit de Brassica erucastrum, Sinapis incana , dont elle mange 
les siliques. La chenille venue en Septembre, passe l’Hiver en 
chrysalide. 

10. Cardazmines L., Bdv. 30. Avril, Mai et Juin. Dans les bois, les 
prairies. À Pessac, Mérignac, Bouliac, etc. La Chenille , aux mois 
de Juillet et Août, sur les Cardamine pratensis et impatiens, 
Turritis glabra. Elle se chrysalide pour passer l’Hiver. 

Les Cardamines qui se montrent en Juin sont beaucoup plus 
grands que ceux des mois d'Avril et de Mai, et ne se trouvent 
que sur les côtes. 


Genus LEUCOPHASIA Steph., Bdv. 


11. Sinapis L., Bdv. 33. Mai, Juillet. Prairies. À Bouliac, Floirac. La 
chenille en Juin et Septembre, sur les Lotus corniculatus, 
Lathyrus pratensis. 

Var. Erysimi Bork., Bdv. Mai, même localité que le type. 


(12) 
* 42. Umbratica Nob. Avril, dans les bois, à Pessac. La chenille 
m'est inconnue. 
Cette espèce diffère beaucoup de la précédente par son habitat 
et par son époque d’éclosion. Voici sa description qui diffère 
aussi de celle du Sinapis : 


{res ailes. Blanches ; une grande tache noirâtre, oblongue, 
DESsus. . . sur l’angle supérieur. 
2es ailes... Blanches. 


Ares ailes. Blanc-jaune. 


Dessous. . k à Te 
12 ailes. Jaunes, marbrées de gris-jaune. 


Dans la 9, la tache des ailes suptrieures est beaucoup plus 
grise que dans le &. Enfin, la coupe des ailes inférieures est 
plus allongée que dans le Sinapis. 


Genus RHODOCERA Bdv. 


43. Rhamni L., Bdv. 35. Toute l’année. Partout. La chenille, toute 
l’année. Elle se nourrit de Rhamnus frangula et catharthicus. 
Var. Cleopatra L., Bdv. Cette belle variété, suivant quelques ento- 
mologistes, a été prise plusieurs fois dans la Gironde. 


Genus COLIAS Bdv. 


14. Edusa L., Bdv. 38. Juin à Septembre. Prairies , champs de blés et 
de trèfles. Partout. La Chenille, très-rare ; sur les Trifolium et 
Medicago sativa. Juin , Septembre. 

Var. Helice H., Bdv. Comme le type. Prairies des côtes, Fargues, 
Floirac. ; 


15. Hyale L., Bdv. 47. Mai, Août, Septembre. Champs de trèfles et de 


luzernes, côtes incultes. Bouliac, Floirac, partie Est de la 
Gironde. 


III, Tribus LYCÆNIDES. 


Genus THECLA F., Bdv. 


16. Betulæ L., Bdv. 48. Juillet, Août. Haies de pruneliers. À Bouliac, 
Floirac, Fargues, etc. La chenille, en Juin, sur le Prunus 
spinosa, s'élève facilement, mais elle est très-souvent ichneu- 
monée, 


22. 


23. 


24. 


25. 


26. 


(13) 


. WW. Album Illig., Bdv. 50. Juin. Promenades plantées d’ormes. 


La chenille, en Avril et Mai, sur l’Ulmus campestris. 


. Aeaciæ Fab., Bdv. 51. J'ai pris une seule fois ce Thecla, qui est 


nouveau pour le département, sur la route du Bouscaut, sur une 
haie de prunelier. 


. Æseuli Hub., Bdv. 52. Juin et Juillet. Partout. Pessac, Bouliac. 


La chenille, au mois de Mai, sur le Prunus spinosa. 


. Lynceus F., Bdv. 53. Juin et Juillet, bois et taillis de chênes. A 


Pessac, le Bouscaut. La chenille, en Mai, sur le Quercus robur 
et l’'Ulmus campestris. 


. Quereus L., Bdv. 55. Juillet. Bois et taillis de chêne. A Pessac, 


le Bouscaut. La chenille, Mai et Juin, sur le Quercus robur et 
pedunculata. 

Rubi L., Bdv. 57. Aril, Mai et Juin. Vole sur les genêts, les litto- 
raux des bois de pins et de chêne. A Pessac, Mérignac, etc. La 
chenille, fin Été, sur le Rubus fruticosus et cœsius, et selon 
certains auteurs, sur le Genista tinctoria et Hedysarum onobry- 
chis. Elle passe l’Hiver en chrysalide. 


Genus POLYOMMATUS Bdv. 


Phlæœas L., Bdv. 59. Toute l’année. Partout. Sur les routes, les 


prairies, les jardins. La chenille, toute la belle saison; celles 
de Septembre passent l’Hiver; elles se nourrissent de Rumex. 

Var. À. Brune, spéciale aux landes. Avril, comme le type. 

Hippothoe L., Bdv. 62. Juin et Août. Dans les marais, sur 
l’Inula dyssenterica. À Blanquefort, Bègles , Courégean , etc. La 
chenille, Avril et Juin, sur l’Iris pseudo-acorus. 

Gordius Esp., Bdv. 66. Juin et Juillet. Dans les plaines, sur le 
serpolet. À Pessac. Dans les bois, sur la ronce frutescente. A 
La Teste. 

Les Gordius de la Gironde se distinguent de ceux des autres 
localités, par un reflet violacé, très-brillant, dans le &. 

Xanthe F., Bdv. 68. Mai, Juillet et Août. Prairies sèches. Pessac, 
Fargues, etc. La chenille, en Juin et Septembre, se nourrit , 
selon Fabricius, de Rumex acetosa, et selon Duponchel, de 
Genista scoparix. 


30. 


31. 


39. 


(14) 


Genus LYCÆNA Bdv. 


. Bætiea L., Bdv. 10. Août, dans les jardins , sur le Colutea arbo- 


rescens et Genista. À Bègles. La chenille, en Juillet, se nourrit 
dans les gousses du Colutea arborescens. 


. Telieanus [ler., Bdv. 71. Dans les champs de genêts. A La Teste. 


Je pense que la chenille se nourrit des graines du Genista tinc- 
toria. 


. Amynéas Fab., Bdv. 72. Juin et Juillet. Dans les côtes et les 


prairies. À Bouliac, Pessac. La chenille, suivant divers auteurs, 
sur les Rhamnus frangula et calharticus. et Hedisarum onobry- 
chis. 

Var. Coretas Hub., Bdv. Juin, Juillet. Dans les côtes Est de la 
Gironde. Bouliac, etc. 

Hylas Fab., Bdv., 73. Mai, Juin. Sur le serpolet, le trèfle. Dans 
les côtes de Bouliac, Floirac, etc. La chenille se nourrit de 
diverses espèces de trèfles. 

Ægon Bork., Bdv. 76. Mai, Juin. Dans les landes. A Pessac, Méri- 
gnac, Facture, etc. La chenille, en Mai, sur les Genista tinc- 
toria et Sarathamnus scoparius. 

Quelques variations dans les points du dessous des ailes. 


2. Argus L., Bdv. 77. Juin, Août. Dans les prés secs, les côtes. A 


Bouliac , Pessac. La chenille, d’après les auteurs, en mai, sur 
les Hedisarum onobrychis et Melilotus officinalis et alba. 


. Agestis Esp., Bdv. 82. Juillet. Dans les prés secs des côtes. La 


chenille, sur les trèfles. 


. Alexis F., Bdv. 89. Tout l’Été. Partout. La chenille, fin Mai et fin 


Juillet, sur les Trifoliam, Medicago sativa , Ononis spinosa. On 
doit séparer les chenilles d’Alexis qui se dévorent entre elles. 

Beaucoup de variétés dans la ©; il y en a dont les teintes 
varient depuis le brun noir jusqu’au bleu fortement violacé. 

Adonis F., Bdv. 94. De Mai à Septembre. Dans les terrains cal- 

caires , les prairies et les côtes. À Bouliac, Floirac, Fargues, etc. 
La chenille, en Avril et Juin, sur les trêfles. 

Beaucoup de variétés intermédiaires entre la Q brune et la 
variété Q Ceronus. J'ai trouvé dans cette espèce deux herma- 
phrodites et plusieurs aberrations. 


(15 ) 
Var. Ceronus Hub., Bdv. De Mai à Septembre. Terrains calcaires, 
côtes. Bouliac, Fargues. 

Le Cercnus de la Gironde est remarquable par le brillant de sa 
couleur bleue qui atteint et même dépasse celui de lAdonis &. 
Cette belle espèce que plusieurs entomologistes ont cru être une 
espèce, n’est qu'une variété ® de l’Adonis. 

MM. Serisié frères m'ont assuré avoir trouvé un Adonis & 
accouplé avec un Ceronus. 

Var. A. Nob. De Mai à Septembre, comme l’Adonis. 

Cette variété & et © est constante, dans la suppression aux 
ailes inférieures, en dessous, des poinis ocellés , à l’exception de 
celui du centre et de la bande marginale fauve. 

36. Corydon F., Bdv. 96. Juillet à Septembre, Dans les côtes, sur le 
serpolet. À Bouliac, Floirac, Fargues. La chenille, sur les Tri- 

‘ folium. 
Var. © maris colore, mêmes localités. En Septembre. 

37. Aeis W., Bdv. 100. Mai. Prairies. Fargues. La chenille m’est incon- 
nue ; elle se nourrit de Melilotus officinalis et Astragalus glycy- 
phyllus, d’après les auteurs. 

38. Argiolus L., Bdv. 109. Juillet et Août. Sur les haies de ronces. 
Partout. La chenille, sur les Rhamnus. 


* 39. Alcon F., Bdv. 113. Juillet, Août. Dans les landes du Sud-Ouest. 
Saint-Médard, etc. Type très-grand, surtout la ©. 
40. Arion L., Bdv. 116. Fin Juillet et Août. Coteaux arides, Fargues, 
La Tresne. 
LV. Tribus ERICINEDES. 
Genus NEMEOBIUS Steph. Bdv. 


4. Lueina L., Bdv. 117. Mai et Juillet. Dans les allées des grands 
bois. Sur les ronces, au Bouscaut, etc. La chenille, en Juin et 
Septembre, ces dernières passent l’Hiver; elle se nourrissent de 
Primula officinalis et acaulis. 

VE. Tribus NYMPHALIDES. 
Genus LIMENITIS Bdv. 


* 42. Sibylla F., Bdv. 191. Juillet. Dans les bois, sur les chèvre- 
feuilles , les ronces. À Lestonac (Gradignan). La chenille , en Mai, 
sur le Lonicera peryclymenum. 


(16 ) 
Cette espèce, très-longtemps confondue avec la suivanie, est 
très-difficile à prendre; elle varie un peu de celle du Nord. 
43. Camilla F,, Bdv. 122. Mai, Juillet, Août. Voltige sur les haies, 
les ronces, etc. À Pessac, Bouliac, etc. La chenille, en Avril, 
Juin et Juillet, sur les Lonicera peryclymenum, xylosteum et 
capryfolium. 
Genus ARGYNIS Ochs., Bdv. 


41. Pandora Esp., Bdv. 124. Au mois d’Août. Voisinage des bois, sur 
le Dypsacus sylvestris. À Saint-André-de-Cubzac, Bazäs, Bègles. 

45. Paphia L., Bdv. 126. Mai à Juillet. Dans les bois humides, sur le 
Dypsacus sylvestris et les Rhamnus. À Gradignan , le Bouscaut, 
La Teste, etc. La chenille, en Mai, sur les violettes sauvages 
(Viola), et d’après certains auteurs , sur le Rubus idœus. 

46. Aglaja L., Bdv. 128. Juillet. Dans les prairies , les semis de pins; 
vole sur les ronces et les chardons en fleurs. A Gradignan , Toc- 
toucau, etc. La chenille , d’après les auteurs, au commencement 
de Juin, sur les violettes sauvages. 

Aberr. Charlota Bdv. a été prise une seule fois, à Cestas. 

* #7. Addipe F., Bdv. 130. En Juillet. Dans les bois et les prairies, sur 
les chardons en fleurs. La chenille, d’après les auteurs, dans les 
premiers jours de Juin, sur les Viola odorata et tricolor. 

Var. Cleodoxa Esp., Bdv. En Juillet, comme le type, t. r. 

48. Lathonia L., Bdv. 132. Mars et Avril, de Juin à Septembre. Par- 
tout. Les individus de la seconde époque sont beaucoup plus 
grands et ont les couleurs plus foncées que ceux de la première. 
La chenille, Mai et Août, sur les Viola, Hedysarum onobrychis, 
Borrago officinalis. 

49. Dia L., Bdv. 144. Avril, Mai, Juillet et Août, Partout. La chenille, 
en Juin et Septembre , d’après les auteurs , sur les violettes. 

50. Selene F., Bdv. 147, Dans les bois. À Gradignan , le Bouscat. La 
chenille, que je n’ai pas encore trouvée, pas plus qu'aucune 
chenille d’Argynis, est, selon les auteurs, très-difficile à décou- 
vrir. Elle se nourrit, comme ses congénères, de Viola et de 
Plantago major. 


Genus MELITÆA F., Bdv. 
51, Artemis F., Bdv. 155. Avril, Mai et Juillet. Dans les bois. À 


(OL) 
Pessac. Les chenilles, en Mars. Elles ont passé l’Hiver en famille, 
renfermées dans une toile. Elles sont très-faciles à élever. On les 
trouve sur les Scabiosa sylvatica, Lonicera peryclymenum et 
æylosteum. 
Var. Provincialis Bdv. Vole en même temps que le type, mais plus 
rare. 


52. Cinxia F., Bdv. 156. Mai et Juillet. Dans les prairies sèches. A 
Pessac, Gradignan. La chenille, en Avril et Juin, sur les Plan- 
tago lanceolata et major, Veronica chamædris, Cichorum intybus, 
Hieracium pilosella. 


53. Phæœbhe F., Bdv. 158. Mai et Juillet. Dans les champs arides , prés 
secs. Pessac, Fargues. La chenille, que je n’ai jamais élevée, 
en Mars et Juin, sur les Scabiosa arvensis et Erithrea centaurium. 

Cette espèce offre beaucoup de variations. 


54. Didyma F., Bdv. 162. Mai, Juillet. Dans les champs et les prairies 
arides. À Pessac. La chenille, en Avril et Juin , sur les Plantago, 
Veronica chamædris, Artemisia vulgaris et Linaria vulgaris. 

Beaucoup de variations. 

Var. Q Moulinsii Nob. Mai. Prairies arides. Pessac. Cette variété 
remarquable, que je dédie à mon honorable et savant collègue 
M. Des Moulins , président de la Société Linnéenne de Bordeaux, 
diffère entièrement des variétés © brunes. Le fond des premières 
ailes est entièrement fauve très-clair, fortément sablé de noir; les 
taches antérieures comme dans le type, les postérieures lunulées, 
bien marquées et formant trois lignes transverses suivies d’une 
autre ligne noire avec le côté interne denté. Aux ailes inférieures, 
le bord abdominal est entièrement noir avec deux taches fauve- 
clair, le reste de l’aile fauve-rouge avec les taches du type, mais 
arrondies et mieux marquées. Le dessous est exactement semblable 
à celui de Dydima % . | 

55. Parthenie Bork., Bdv. 165. Juillet et Août, même localité que le 
précédent. À Pessac, le Bouscaut. La chenille, en Juin, sur les 
Plantago lanceolata et major. 


56. Athalia Bork., Bdv. 166. Mai à Juillet. Dans les bois et les prairies. 
À Pessac, etc. La chenille, Avril et Mai, sur les Plantago lan- 
ceolata et major, et Valeriana officinalis. 

Nombreuses variétés insignifiantes. 


D7. 


58. 


59. 


60. 


61. 


62. 


63. 


64. 


(MB 
Genus VANESSA Ochs., Bdv. . 


Cardui L., Bdv. 168. Juillet, Août. Dans les prairies , les champs 
de trèfle, les chemins, sur les chardons. Partout. La chenille est 
assez rare. Juin et Août. Sur les Urtica urens, Eryngium cam- 
pestre, Carduus acanthoides. 

Atalanta L., Bdv. 169. Toute la belle saison. Partout. La Che- 
nille, sur les Parielaria diffusa et Urtica urens. Toute l’année. 

Xo L., Bdv. 170. Avril et Juillet. Fargues. La chenille, en Mai, Juin 
et Septembre, sur les Urtica urens et Humulus lupulus. 

Ces trois Vanessu varient beaucoup pour la taille. 

Antiopa L., Bdv. 171. Juillet et Août. Dans les lieux plantés de 
saules, oseraies, aubarèdes. Bègles, Cenon, Pessac, Méri- 
gnac , etc. La chenille, en Mai, Juin, sur les saules et les peu- 
pliers, spécialement sur les Salix caprea et alba. Cette chenille 
vit en famille. 

Quelques variétés fort rares. 

Utieæ L., Bdv. 172. Mai à Août. Partout. Quelques Ab. rares. 
Cette Vanessa est assez rare, maïs la chenille est très-commune, 
aux mois d'Avril et de Juillet, sur les Urtica dioica et urens. 

Comme la précédente, dans son jeune âge, elle vit en famille. 

Polyehlioroes L., Bdv. 174. Mai, Juin. Partout. La chenille, en 
famille nombreuse , en Mai, sur les saules, les peupliers et les 
ormes, elc. 

€. album L., Bdv. 182. Mars, Mai et Juin, Octobre. Partout. La 
chenille, en Mai et Août, sur les Ribes rubrum, Urtica urens, 
Ulmus campestris. 

Ïl existe deux types bien différents en dessous de C. Album, 
l’un très-clair, l’autre très-rembruni; celui d'Été et celui d’Au- 
tomne. Cette règle souffre beaucoup d’exceptions..J’ai pris deux 
fois en Octobre et j’ai dans ma collection une Ab. © teinte pâle, 
taches noires très-petites, et la tache blanche, comme un I est 
très-courte. 


VIHIX. Tribus APATURIDES. 
Genus APATURA Ochs., Bdv. 


Elia F. Bav. 182. Juin, Août. Lieux plantés de saules, aubarèdes. 


(19) 


À Bègles, La Bastide, Courégean, Caudrot, etc. La chenille, en 
Mai et Juillet, sur les saules et les peupliers. 
Var. Clytie Hub., Bdv. Mêmes époques et localités que le type. 


IX. Tribus SATYHREBDES. 


Genus ARGE Esp., Bdv. 


65. Galathen L., Bdv. 185. Juin, Juillet. Champs et prairies. Pessac, 
Mérignac, Bouliac. 


Genus SATYRUS Bdv. 


66. Phæara L., Bdv. 238. Juin, Juillet. Bois de pins, landes. Le 
Bouscaut, Saint-Médard , Gradignan, Cestas, etc. 

67. Fawuna KF., Bdv. 240. Juillet. Bois de pins, etc. La Teste, Toctou- 
cau, elc. 

68. HKerzmaieme L., Bdv. 241. Juin, Juillet. Châtaigneraies, bois de 
chênes , sur les côtes. À Bouliac, Floirac, La Tresne , Fargues, 
etc. La chenille se cache sous les pierres et se nourrit d’Anihox- 
antum odoratum et Lolium perenne. Elle se chrysalide dans la 
terre ainsi que celle de Girce et de Semele. 

* 69. Ciree F., Bdv. 242. Juillet. Dans les bois. À Pessac. La chenille, 
en Mai, comme celle d’Hermione. 

70. Briseis L., Bdv. 243. Août, Septembre. Dans les côtes arides. 
Fargues, Bonnetan. 

11. Semele L., Bdv. 247. Juillet et Août. Bois de pins et de chènes; 
se tient contre les arbres. Saint-Médard, Pessac, etc. La che- 
nille, en Mai, dans les graminées qui croissent dans les en- 
droits secs. 

* 72. Arethusa F., Bdv. 249. Août. J'ai pris cette espèce dans l’arron- 
dissement subsidiaire de la Gironde (art. 60 du Règl.), à Royan 
(département de la Charente-[nférieure), dans les terrains cal- 
caires. Elle diffère un peu du type du Nord. 

Var. Eryihia Hub. Bdv. Août. Landes. Saint-Médard, le Haillan. 
Cette variété est spéciale à l'Italie et au Sud-Ouest de la France. 

73. Jamira Ochs. Bdv. 253. Mai, Juin, Juillet. Prairies, haies Vole 
sur les fleurs de ronces. Partout. La chenille passe l’Hiver 
engourdie et se chrysalide fin Mai. Elle se nourrit de graminées, 
principalement de Poa pratensis. 


( 20 ) 

Aberr. Ge Satyre , si commun, varie très-peu ; cependant , M. Gaujac 
a trouvé, en 1855, une AB. © avec les ailes inférieures blan- 
ches. J’ai trouvé, moi-même, une ® marbrée de blanc, et un 
de mes amis , M. Joly, de Castillon, a eu l’extrème obligeance de 
me donner une AB. & des plus remarquables qu’il a trouvé aux 
environs de cette ville : sur le milieu des ailes supérieures, 
à la place du point noir est une tache triangulaire blanche, et 
sur les ailes inférieures, des marbrures blanches. 

74. Tithonus L., Bdv. 254. Juillet, Août. Vole sur les haies et les 
Erica vulgaris. À Pessac, Bouliac, partout. La chenille, en Mai 
et Juin, sur le Poa annua. 

75. Mæra L., Bdv. 259. Mai, Août. Dans les gorges des coteaux. 
Bassens, Fargues, etc. La chenille, en Avril et Juin, sur tous 
les graminées, surtout sur le Poa annua. 

76. Megæra L., Bdv. 262. Mars, Mai, Juin, Juillet. Partout. La che- 
nille, Avril et Septembre, sur tous les graminées qui croissent 
aux pieds des murs. 

77. Var. Meone (ægeria), Hub., Bdv. 264. Remplace le type. Mars, Avril 
et Mai, Juillet, Août et Septembre. Sur les haies, le long des 
chemins ombragés. Partout. La chenille, en Juin, se nourrit de 
quelques graminées et de Triticum repens. 

Le-type de la Gironde est très-foncé. 

78. Hyperantus L., Bdv. 266. Mai, Juillet et Août. Terrains un peu 
humides. Gradignan , le Bouscaut. 

* 79. Œdipus F., Bdv. 267. Juillet. Dans les Asières des landes. A 
Saint-Médard , Gradignan, le Bouscaut. 

80. Areanius L, Bdv. 270. Juillet, Août. Bois taillis, les côtes. 
Pessac, Bouliac, etc. Duponchel dit que la chenille se trouve en 
Maï, sur le Melica ciliata. 

81. Pamphilus L., Bdv. 277. Avril à Août. Dans les landes, les côtes, 
etc. Partout. La chenille, sur le Cynosurus cristatus, en Mai, 
Juin et Juillet. 

Aberr. Blanche, trouvée au Haiïllan , en Août, par M. Panessac. 


X. Tribus HESPERID Æ. 
Genus STEROPES Bdv. 


82. Araeynthus F., Bdv. 279. Juillet. À Gradignan. Il faut battre les 
buissons pour faire partir la ©. 


(21) 

Cette espèce remarquable, regardée comme propre au Nord de 
la France, a été trouvée par M. A. Guillemot, de Thiers , dans le 
département du Puy-de-Dôme, en 1853. Vers la même époque, 
M. Moustey, de Bordeaux, la signalait à Gradignan, département 
de la Gironde. 


Genus HESPERIA Bdv. 


83. Linea F., Bdv. 281. Mai, Juin, Juillet. Partout, sur les fleurs des 
Rubus et Dipsacus sylvestris. 

84. Limeola Ochs., Bdv. 282. Juin, Juillet. À Pessac, le Bouscaut. 
Fargues, etc. Comme le Linea avec lequel il a été longtemps 
confondu par les entomologistes de la Gironde. 

85. Sylvanus F., Bdv. 283. Juillet, Août. Partout. Vole le jour sur 
les fleurs des ronces et des chardons. À Pessac, Fargues, etc. 

* 86. Comma L., Bdv. 284. Juillet. Vole au grand soleil, dans la 
lande, sur les fleurs de bruyères. A Saint-Médard, le Haïllan. 

87. Aetæon Esp., Bdv. 285. Juillet et Août. Les côtes, terrains arides, 
sur les ronces. À Fargues, le Bouscaut. 


Genus SYRICTHUS Bdv. 


88. Malvæ F., Bdv. 289. Avril, Juin. Dans les prairies. Partout. La 
chenille , en Mars et Mai, se nourrit de Malva sylvestris, elle se 
- renferme dans les feuilles. : 
89. Alveus Hub., Bdv. 295. Juillet. Lieux secs, clairières des bois. 
À Pessac. 
* 90. Carthami Ochs., Bdv. 278. Juillet, Août. Prairies sèches, côtes 
arides. Fargues. 
Var. À. Bdv. Août. Fargues. 
* M. Serratulæ Ramb., Bdv. 299. Juillet, Août. Prairies sèches et 
arides. Fargues. 
92. Fritillum Hub., Bdv. 304. Juillet. Coteaux arides. Bonnetan. 
93. Alveolus Aub., Bdv. 305. Juillet, Septembre. Prairies sèches, 
côtes arides. Partout. 
* 94. Ballotæ Bdv. Juillet, Août. Landes, terrains arides. Pessac. 
* 95. Sao Hub., Bdv. 308. Juin, Août. Landes, terrains calcaires. 
Pessac, Fargues. 
Tome XXII. 


Lo 


(2) 
Nous devons posséder dans la Gironde d’autres Syricthus que 
‘ceux indiqués ci-dessus. Malgré toutes les études, ce genre n’a 
pas pu encore être bien divisé, les différences entre les espèces 
étant très-peu sensibles, il faudrait pour cela élever les Chenilles. 


Genus THANAOS Bdv. 


56. Tages L., Bdv. 310. Avril, Juillet, Août et Septembre. Dans les 
prairies. Partout. 


HETEROCERA. 


KXEX. Tribus SESIARLIÆ. : 
Genus THVRIS Illig., Bdv. 


97. Fenestrina F., Bdv. 319. Mai, in Vole sur les fleurs d om- 
bellifères. A Boule Floirac. Très-rare. 


Genus SESIA Lasp., Bdv. 


‘ 98. Tipuliformis L., Bdv. 336. Mai et Juin. Volant sur le Seringa 
odorant et le lilas de Perse. À Pessac, le Bouscaut. 

99. Nomadæformis Lasp., Bdv. 340. Juin. Vole sur les fleurs de 
troëne , de Seringa odorant. Au Bouscaut. 

+100. Culiciformis L., Bdv. 344. Juillet. 

101. Chrysidiformis Esp., Bdv. 3517. Mai et Juin. Dans les prairies, 
sur les fleurs. Partout. 

102. Asiliformis F., Bdv. 364. Juin et Juillet. Lieux plantés de saules 
et de peupliers. Contre ces arbres. À Courrégean, Mérignac, : 
Bègles. 

La chenille passe l’Hiver renfermée dans l’intérieur des saules 
et des peupliers d'Italie dont elle se nourrit, et elle se change en 
chrysalide en Automne. 

* 103. Apiformis L., Bdv. 367. Juin et Juillet. Comme Asiiformis. 

Il doit EE dans le département bien d’autres Sesies. Je n’ai 
pu cependant en observer un plus grand nombre : cette chasse 
étant très-difficile. Le vol de ces espèces étant très-rapide , elles 
se confondent avec des Hyménoptères,. 


104. 


106. 


106. 


107. 


108. 


109. 


110. 


(23 ) 
XELIE. Tribus SPHINGEDES. 


Genus MACROGLOSA Ochs., Bdv. 


Fusciformis L., Bdv. 368. Mai et Août dans les prairies, les 
jardins , bulinant sur les fleurs. À Pessac, Bouliac. La chenille, 
en Juin , Juillet et Septembre, sur les Lonicera et Galium verum. 

Bombyliformis Ochs., Bdv. 369. Avril et Mai. Les prairies, les 

_ jardins et les bois. Butinant sur les fleurs. À Pessac. La chenille, 
de Juin à Septembre, sur les Scabiosa arvensis et syluatica. 

Stellatarum L., Bdv. 371. Printemps et Automne. Prairies, 
jardins, etc. Partout. La chenille, Août et Septembre, sur le 
Galium mollugo. 


Genus PTEROGON Bdv. 


Œnotherzæ F., Bdv. 372. Juin. Au Vigean. La chenille, en Juillet 
et Août. Se cache très-bien le jour ; ne cherche sa nourriture que 
la nuit, sur les OEnotheræ et plus souvent sur l’Epiloba angus- 
tifolium. 


Genus DEILEPHILA Ochs., Bdv. 


Porcellus L., Bdv. 374. Juin et Août. Dans les jardins, buti- 
nant au crépuscule sur les verveines et le chèvrefeuille. La che- 
nille, en Juillet; se cache très-bien le jour, comme la précé- 
dente; sur les Galium mollugo et verum, et Epiloba angusti- 
folium. À Bassens, Fargues. 

Elpenor L., Bdv. 375. Juin et Août. Dans les jardins, sur les 
bords des rivières ; butinant au crépuscule ; sur les fleurs, comme 
le Porcellus. C’est le seul Deilephila que j'aie pris à la corde 
miellée. La chenille, en Juillet, Août et Septembre. Se nourrit, 
en captivité, de feuilles de vigne, mais elle préfère le Lithrum 
salicaria, Galium verum, Epilobium hirsutum. Partout. 

Celerio L., Bdv. 319. Septembre, Octobre. Dans les jardins. 
Butinant au crépuscule, sur les fleurs. À Talence, Gradignan, 
Mérignac. La chenille, en Juillet et Août, sur la vigne et le 
caille-lait, Galium verum. 


(24) 

Ce Deilaphila paraît tous les ans dans la Gironde, mais en 
pelit nombre. Cependant, dans les années très-chaudes , telles 
que 1846 et 1847, on a pu en faire une ample moisson. 

Var. Augustii Nob. Cette variété entièrement noire, mêmes dessins 
que le type, a été trouvée en 1855, par M. Auguste, de Bordeaux. 

‘ 111. Nerii L., Bdv. 380. Mai, Juin. Dans les jardins où il y a des 
lauriers-roses. À Talence, Bordeaux. La chenille, aux mois 
d’Août et Septembre, sur le Nerium oleander. 

Le Nerii a élé trouvé très-rarement dans la Gironde à l’état 
parfait ; je l’ai trouvé une seule fois dans un jardin et dans Bor- 
deaux. La chenille a été trouvée plusieurs fois sur des lauriers- 
roses en caisses. 

112. Euphorbiæ L., Bdv. 382. Juin, Août et Septembre. Grèves des 
rivières , bords de la mer. Tabanac, La Teste. La chenille, Juillet 
et Octobre, sur l’Euphorbia cyparissiæ. La Chenille et le Papillon 
varient beaucoup. 

* 413. Galii F., Bdv. 384. Août et Septembre. Dans les jardins. Butine 
sur le chèvre-feuille. Bègles. La chenille, sur les Rubia tinctoria, 
Galium verum, t.-r. 

114. Limeata F., Bdv. 384. Août. Butine, au crépuscule, dans les 
jardins, sur les chèvre-feuilles , les saponaires, les œillets. 
Partout. La chenille , au mois de Juin ; est poliphage et mange de 
préférence les Galium verum, Linaria et Rumex. 


Genus SPHINX Ochs., Bdv. 


115. Pinastri L., Bdv. 392. Juin, Août. Bois de pins. Pessac, Méri- 
gnac, Bruges , etc. Il est remarquable par sa teinte foncée. La 
chenille, en Septembre et Octobre, se nourrit de Pinus maritima 
et pinaster. La chrysalide, aux pieds de ces arbres , devient rare 
depuis les nombreuses coupes que l’on fait tous les ans. 

116. Ligustri L., Bdv. 393. Juin, Juillet. Au crépuscule, dans les 
jardins, sur les chèvre-feuilles et le Mirabilis jalapa. Au Vigean, 
Mérignac. La chenille, Août et Septembre, sur les Ligustrum 
vulgare, Syringa vulgaris, Viburnum tinus. 

117. Convolvuli L., Bdv. 394. Juillet, Août. Au crépuscule, sur les 
Convoloulus et Mirabilis jalapa. La chenille, difficile à élever; 
Août, Septembre et Octobre, sur les Convoluulus arvensis et 
tricolor. 


Genus ACHERONTIA Ochs. 


118. Atropos L., Bdv. 395. Juillet, Août et Septembre. Dans les 
champs de pommes de terre, d’où ils viennent dans les apparte- 
ments, attirés par la lumière. Partout. La Chenille se nourrit, 
aux mois de Juillet et Août, de Solanum tuberosum et dulcamara , 
et de toutes les Solanées. On trouve quelquefois une variété de 
chenilles noires , mais l’insecte parfait ne varie pas. 

Le à est très-remarquable par un bruit semblable à un cri, 
qu’il produit quand on le prend. 


Genus SMERINTHUS Ochs. 


4119. Tiliæ L., Bdv. 396. De Mai à Septembre. Dans les jardins, les 
promenades , les garennes. Contre les arbres. La chenille, de 
Juillet à Octobre. Mêmes localités que le Papillon. Se nourrit de 
Tillæa Europæu et d’Ulmus campestris. La chrysalide, aux pieds 
de ces arbres. 

* Var. Ulmi Schunc. Bdv. Mêmes localités que le type. 

120. Ocellata L., Bdv. 397. Juin. Vignes, oseraies, aubarèdes, vergers. 
À Bouliac, Mérignac, etc. La chenille, Août et Septembre, sur 
les Salix, Populus, Persica vulgaris, Pyrus malus, Amygdalus 
communs. 

121. Populi L., Bdv. 398. Avril à Juin, Août et Septembre. Lieux 
plantés de peupliers. Partout. La chenille , Juillet et Octobre, sur 
toutes sortes de peupliers et de saules. La chrysalide, aux pieds 
de ces arbres. 


XIV. Tribus ZYGÆNEDES. 


Genus ZYGÆNA Lat., Bdv. 


122. Sarpedon Bdv. 410. Juillet. Terrains calcaires. Fargues, très- 
rare. 

* 123. Achillæ Esp., Bdv. 411. Juin, Juillet. Terrains calcaires, côtes 
arides. Fargues, Bonnetan. La chenille, au mois de Mai. Se 
nourrit de trèfles. La chrysalide, fin Juin, à la pointe des grami- 
nées. Rare. 


( 26 ) 
Var. Bellidis Hub., Bdv. Comme le {ype, mais beaucoup plus 
nombreux. 

124. Œrifolii Esp., Bdv. 418. Mai, Juin, Août et Septembre. Dans les 
prairies. Partout. La chenille, Avril, Mai et Juillet. Sur les 
trèfles. 

Var. Orobi Hub., Bdv. Mêmes localités que le type, plus rare. Août. 

128. Filipendulzæ L., Bdv. 420. Mai, Juin, Juillet. Dans les prairies. 
Lamothe. Fargues , ete. La chenille, Avril, Mai, sur Spiræa fili- 
pendule , Taraxacum officinalis et les Trifolium. 

126. Fippocrepidis Ochs., Bdv. 423. Aout et Septembre. Coteaux 

secs , prairies arides. Léognan. 

Aberr. À ( Alis posticis luteis). Très-rare. Mai. À Bouliac. Je n’ai 
rencontré que trois individus de cette Aberr. 

Aberr. B. Nob. Les quatre ailes rouges ; trouvée par M. Serisié sur 
les côteaux de Fargues. 

127. Fawusta L., Bdv. 442. Août. Je n’ai pris cette jolie Zigène que 

dans l’arrondissement subsidiaire de la Gironde, à Royan (Cha- 
rente-Inférieure). 


Genus PROCRIS F., Bdv. 


L) 


128. Statiees L., Bdv. 448. Mai, Juin. Prairies sèches, bruyères, à 
Pes:ac, etc. 

* 129. Globulariæ Esp., Bdv. 450. Avril, Juillet. Lisières des-bois. 
Pessac, Mérignac, Gradignan. 

130. Infausta L., Bdv. 454. Juillet. Sur les pruneliers et les arbres 
fruitiers. Pessac, Toctoucau. La chenille, en Juin, dévore l’arbre 
qu’elle attaque et cause beaucoup de dégâts, si c’est un arbre 
fruilier. Sur les pruniers, les poiriers, les abricotiers, etc. 


Tribus KLITHOSEDES. 
Genus EUCHELIJA Bdv. 


131. Jacobæ L., Bdv. 458. Mai, Juin. Partout. La chenille, en Juillet, 
Août, Septembre. Se nourrit de Senecio vulgaris. Passe l'Hiver 
en chrysalide. | 

Genus EMYDIA Bdv. 


132. Cribwum L., Bdv. 462, Juillet. Landes. Le Haillan, Pessac. La 
chenille, Mai, Juin. Sur lés graminées. 


/ 


(21) 

* Var. Candida Ochs., Bdv. Mai, Juin, Juillet. Lieux arides , rochers, 
terrains calcaires. Fargues, Bouliac, Floirac. La chenille, en 
Mai, Juin, sur les graminées. 

133. Gramunien L., Bdv. 465. Juin, Septembre. Prairies, champs de 
genêts. Pessac, etc. La chenille, d'Avril à Juillet, sur le Genista 
tincloria. Se nourrit encore d’Artemisia, Galiuin verum, Urtica 
urens , Laïnium album, Prunus spinosa. 


Genus LITHOSIA Bdv. 


134, Quadra E., Bdv. 468. Juillet, Août et Septembre. Bois de chênes, 
en battant ou à la miellée. Pessac, Mérignac, Lormont. La che- 
nille, difficile à élever, en Mai, sur les chênes. 

*135. Griseelr Hub., Bdv. 469. Juin. Partout. La chenille, en Mai. 
136. Comglana L., Bdv. 470. Juillet. Champs de genêts. Gradignan 
137. Compliamuia Bdv. 471. Juin, Juillet. Partout. 

138. Depressa Esp., Bdv. 475. Mai, Juillet. Dans les bois. Pessac. 
*139. Luteolna Hub., Bdv. 479. Bois taillis. Pessac. 

*140. Aureolr Hub., Bdv. 481. Juin. Dans les bois. Mérignac, Gra- 

dignan. h 

+141. Muscexrda: Hub., Bdv. 482. J'ai pris deux fois cette Lithosie à 
Pessac, dans des bois de chênes, en Juin. 

“142. Rosea F., Bdv. 484. Juin, Juillet. A Pessac, en battant les 
haies. 

143. Mesozmella L., Bdv. 485. Juin, Juillet, Août. Partout. En bat- 


tant les arbres et les haies. 
Genus NACLIA Bdv. 


144. Ameilla L., Bdv. 493. Juillet. Dans les bois. Pessac. La chenille, 
en Mai et Juin, se nourrit des lichens des pierres et des arbres. 


Genus NUDARIA Bdv. 
* 445. Murina Esp. Bdv. 500. Août. Sur les murs des maisons. Par- 


tout. La chenille, Avril, Mai, Juin. Très-difficile à élever. Se 
nourrit de lichens des murs {Placodium). É 


(28 ) 


XVE. Tribus CIELONIDES. 


Genus CALLIMORPHA Bdv. 


146. Dominula L., Bdv. 501. Mai à Juillet. Dans les bois. Pessac, 
Gradignan, Mérignac. La Chenille passe l’Hiver. Mars, Avril, sur 
les Quercus robur, Salix capræa, Lamium album, Borrago offi- 
nalis, Anchusa officinalis. 

147. Hern L., Bdv. 503. Juillet, Août. Les haies. Partout. La chenille, 
en Avril, Mai. Sur les orties, les plantains et diverses plantes 
basses. 

* Var. À. (Alis poslicis luteis). Juillet. Gette remarquable variété, 
pour la Gironde , a été prise une seule fois , par M. Hector Gaujac, 
à Castelnau (Médoc). 


Genus NEMEOPHILA Steph. Bdv. 


118. Russula L., Bdv. 507. Août. Taillis, broussailles. Gradignan, 
Bassens , Pessac, etc. La © ne s’élevant que difficilement, est 
très-rare. La chenille, en Mai, Juin et Juillet, sur les Plantago 
major et lanceolata, Stellaria media, Taraxacum officinalis , 
Scabiosa arvensis et les Rumex. 


Genus CHELONIA Lat., Bdv. 


* 149. Civiea Hub., Bdv. 512. Mai, Juin, les haies, les broussailles 
des landes. Pessac, le Bouscat. La chenille passe l’Hiver engour- 
die. Avril, Mai, dans les broussailles. Se nourrit de Cichorum 
intybus, Plantago, Stellaria media, Lamium album. 

150. WVilliea L., Bdv. 515. Mai, Juin. Les haies, les broussailles. A 
Bassens, Bouliac, etc., ete. La chenille passe l’Hiver engourdie. 
Mars, Avril, Mai. Se nourrit d'Urtlica urens, Lamium album, 
Stellaria media, etc. 

151. Purpuren L., Bdv. 521. Juin, Juillet. Les haies et les vignes. 
Bruges, Talence, etc., etc. La chenille passe l’Hiver. Très-com- 
mune sur la vigne, en Mai. Elle se nourrit aussi de Galium verum 
et mollugo, Anchusa officinalis, Lamium album, Salvia pra- 
tensis. 


(29) 
152. Caja Bdv. 522. Mai, Juin, Août, Partout. La chenille, en Mars, 
Avril, Juin, Juillet; est polyphage. 
Beaucoup de variations dans les dessins , mais pas assez tran- 
chées pour constituer des variétès. 
* 153. Hebe L., Bdv. 524. Mai. J'ai vu une seule fois cette Chélonie 
vivante; on m’a assuré l’avoir prise dans les coteaux arides du 
Blayais. 


Genus ARCTIA Bdv. 


154. Fuliginosa L., Bdv. 529. Mai. Contre les murs, les bords des 
chemins. Pessac, Bruges. La chenille est polyphage. En Avril, 
sur les Urtica, les Rumex et les Taraxacum. 

155. Lubricipeda F, Bdv. 532. Juin, Juillet. Dans les bois, en bat- 
tant. Gradignan. La chenille, de Juillet à Octobre. Sur les Rubus 
idœus, Urtica urens, etc. 

156. Menthastri F.. Bdv. 534. Juillet. Partout. La Chenille, Août et 
Septembre. Sur les Turaxacum officinalis, Mentha rotundifolia, 
Urtica urens , Lamium album , Plantago major. 

157. Mendiea L., Bdv. 535. Mai, Août. Prairies, jardins. Partout. La 
Chenille, Juillet et Septembre, est polyphage. 


XVII. Tribus LIPARIDES. 


Genus LIPARIS Ochs., Bdv. 


* 458. Monacha L., Bdv. 541. Juillet. Dans les bois. Castelnau, Ces- 
tas, Gradignan, Léognan. La chenille, en Juin, sur le chêne. 

459. Dispar L., Rdv. 542. Juillet. Bois de chênes, promenades plan- 
tés d’ormes. Partout. La chenille. Mai, Juin. Sur les Quercus 
robur. Ulmus campestris , Populus, Platanus orientalis. 

160. Salieis L., Bdv. 544. Juin, Juillet, Août et Septembre. Lieux 
plantés de saules et de peupliers. Partout. La chenille, en Mai et 
ensuite en Juillet et Août. Sur les Populus et Salix. 

161. Auriflua F., Bdv. 545. Juillet. Les haies et les bois. Partout. La 
chenille passe l’Hiver en société, en Mai et Juin, sur les Quercus 
robur, Salix, Prunus, Cratægus. 

162. Chrysorrhea L., Bdv. 546. Juillet. Les haies, les jardins, les 
promenades. Partout. La chenille, en Mai et Juin , sur les arbres 
des promenades , des jardins et des vergers. 


( 30 ) 
Genus ORGYA Bd. 


* 163. VW. Nigrumm L., Bdv. 547. Juillet. Très-rare. La chenille, en 
Mai, sur les chênes. | 

164 Pudibunda L., Bdv. 549. Avril. Dans les bois de chênes, les 
endroits plantés de saules. Partout. La chenille, en Juillet, 
Août et Septembre, sur les Quercus robur, Ulmus campestris, 
Salix, Tillæa Europæa. 

‘165. Faseelina L., Bdv. 551. Août. Dans les champs de genêts et de 
bruyères. Pessac, Gestas , ete. La chenille, sur les Erica vulga- 
ris, Genista, et au besoin se nourrit de Prunus spinosa et 
Taraxacum officinalis. 

166. Coryli L., Bdv. 552. Avril , Mai, Juillet, Août. En battant les bois 
de chênes. Pessac, Gradignan, le Bouscaut, etc. La chenille , en 
Juin et Septembre, sur les Quercus robur, Carpinus betulus, 
Cratæqus oxyacanthæ et pyracanthæ. 

1U7. Gonostigma L., Bdv. 554. Juin, Août et Septembre. Sur les 
ormes et les chênes. La chenille, en Avril et Mai, Juillet et Août, 
sur les chênes et les ormeaux des promenades. 

158. Amtiqua L., Bdv. 555. Mai à Août. Haies, vergers, jardins , sur 
les arbres fruitiers , les ormes, etc. Partout. La chenille, en Avril, 
Mai, Juin, Juillet, sur les arbres fruitiers et le Rubus fruticosus. 


XVEEI. Æribus BOMBYCINE. 
Genus BOMBYX Bdv. 


169. Neustria L., Bdv. 563. Juin, Juillet. Sur les ormes, les arbres 
fruitiers, etc. Partout. La chenille, en Mai et Juin, sur les Pru- 
nus spinosa, Cratægus et Ulmus, etc. 

* 170. Castrensis L., Bdv. 564. Juillet. Landes, bruyères. Facture, 
Saint-Médard, Cestas. La chenille vit isolée , après avoir passé 
l’Hiver en famille. Mai, Juin, sur les Erica vulgaris. 

171. Lanestris L,, Bdv. 566. Février, Mars. Haies de Prunus spinosa. 
Le Bouscaut , Bouliac, Fargues. | 

Jamais je n’ai pris l’insecte parfait. La chenille se trouve en 
famille , au mois de Mai, dans les endroits cités plus haut, sur 
les Prunus et les Cratægus. La chrysalide reste quelquefois 
quatre ans à éclore. L’éclosion de la deuxième année est toujours 


(31) 
la plus forte ; il n’y en a qu’une seule par an, qui est toujours fin 
Février et Mars. 

172. Everia F., Bdv. 567. Octobre. Sur les haies. Partout. La chenille, 
très-abondante sur les haies de Prunus, Cralægus, Pyrus, 
Quercus, etc. Avril et Mai. 

Comme le Lanestris , l’Everia ne paraît qu’une fois, et la chry- 
salide reste {rois, quatre et cinq ans sans éclore. 

173. Pityocampa F., Bdv. 571. Juillet. Bois de pins. Pessac, Méri- 
gnac, La Teste, etc. La chenille, en familles nombreuses , sur le 
Pinus maritima. Avril et Mai. 

Cette chenille, ainsi que la suivante, doit se toucher avec 
beaucoup de précaution, car les poils qui se détachent très-faci- 
lement, entrent dans l’épiderme et occasionnent une grande 
inflammation. 

174. Processionea L., Bdv. 573. Juillet. Bois de chênes. Partout. La 
chenille, en Mai et Juin, sur le Quercus robur, en famille. La 
chrysalide , dans la toile du nid des Chenilles. 

175. Cratægi L., Bdv. 574. Août. Haies, broussailles. Partout. La 
chenille , Avril et Mai, sur les Cratægus et Prunus. 

176. Populi L., Bdv. 576. Octobre, Novembre. Bois de chênes. Pessac. 
La chenille, en battant, en Mai, sur le Quercus robur. 

* 477. Dumeti L , Bdv. 577. Novembre. Taillis des landes. Blanque-- 
fort. La chenille, en Mai, Juin et Juillet, sur les Taraxacum 
officinalis, Hieraucium pilosella. 

J’ai pris une seule fois un Dumeti  ; malgré tous mes soins, 
je n’ai pu sauver la ponte; à la troisième mue, les petites che- 
nilles ont refusé toute nourriture. 

178. Rubi L., Bdv. 579. Mai, Juin. Prairies, bois, champs. Partout. 
La chenille, en Septembre et Octobre. 

Prises à cette époque, on ne peut pas les sauver ; à l’'Automne, 
elles refusent la nourriture et meurent d’inanition. Au contraire, 
celles prises en Mars réussissent parfaitement en leur donnant des 
Rubus et des Trifolium. 

179. Quereus L., Bdv. 581. Juin, Juillet, Août. Les champs, les 
jardins, les bois, les prairies. Partout. La chenille a passé l’Hiver, 
Avril, Mai et Juin, surles Rubus fruticosus, Prunus , Cratægus, 
Quercus, Genista. 

Var. Guillemotii Nob. Comme le type. 


‘ 


180. 


181. 


183. 


185. 


(3) 

Cette variété & ©, trés-remarquable, remplacé, dans Ja 
Gironde, presque complètement le type du Nord; elle consiste 
dans le & , en ce que la bande des ailes inférieures est com- 
plètement jaune sans bordure rousse, et dans la © , la teinte du 
fond est roussâtre et non jaune, elle n’est pas plus grande que 
le 4. 

Je me fais un véritable plaisir de dédier cette variété à mon 
honorable collègue et correspondant, M. Guillemot , de Thiers, 
qui, le premier, a appelé l’attention sur elle. 

Trifolii F., Bdv. 532. Juin. Juillet. Vole au crépuscule. Pessac, 
Bouliac , etc. La chenille, en Mai, sur la vigne. Elle mange aussi 
des Trifolium, Medicago sativa, Mellilotus officinalis , Genista 
tincloria. 

Var. Medicaginis Hub. Bdv. Comme le type. Rare. 


Genus ODONESTIS Germ. 


Potatoria L., Bdv. 584. Juin, Juillet, Août. Bois humides, bords 
des ruisseaux. Bouliac, le Bouscaut, Bëègles, etc. La chenille, 
Mai, Juin, sur les Bromus et Alopecurus agrestis. 


Cenus LASIOCAMPA Lait. 


2. Pini L., Bdv, 585. Juin, Juillet. Grands bois, bois de pins. Saint- 


Médard, le Vigean. La chenille, en Mai, sur le Pinus maritima. 
Le cocon, contre les pins, en Mai. Le type du Pimi, de la 
Gironde, est très-foncé et très-grand. 

Pruni L., Bdv. 586. Juillet, bois de chênes, vergers. Pessac, le 
Bouscaut. La chenille, Avril à Juillet, sur les Quercus robur, 
Prunus, Ulmus, Pyrus. 

Aucune variété dans l’insecte parfait. M. Hector Gaujac a trouvé 
une fois la variété de la chenille à collier bleu-noir et bande 
rose. 


. Quercifolia L., Bdv. 587. Juillet. Les jardins, les vergers. Par- 


tout. La chenille, en Mai, sur les arbres fruitiers, le chêne, le 
Prunelier, etc. 

Populifolia F., Bdv. 588. Juillet. Lieux plantés de peupliers. 
Courrégean , Blanquefort, etc. La chenille, en Mai et Juin, en 
battant les peupliers. 


(33) 
XIX. Tribus SATURNEDES. 


Genus SATURNIA Schranck, Bdv. 


186. Pyri Bork., Bdv. 596. Jardins , promenades, vergers. Avril, Mai. 
Partout. La chenille, Juillet et Août, sur les Prunus domestica , 
spinosa, armemca, Pyrus malus, Ulmus campestris, Laurus 
nobilis, Amigdalus communis, Cratæqus, Salix, ete. 

187. Carpini Bork., Bdv. 598. Avril, Mai. Haies, bruyères. Gradignan, 
Lamothe , Cestas. La chenille, Juillet, sur l’Erica vulgaris. Elle 
se nourrit aussi de Prunus spinosa, Carpinus betulus, Rosa 
arvensis, Rubus fruticosus, Salix. 


XX. Tribus ENDROMIDES. 
Genus ENDROMIS Ochs., Bdv. 


* 488. Versicolor L., Bdv. 601. Ce beau lépidoptère a été trouvé une 
seule fois, près du Haut-Brion (Pessac), par M. de Vios, en Mars. 
Les auteurs donnent la chenille en Juin et Juillet , sur les Corylus 
avelana, Alnus glutinosa, Tillæa Europæa, Salix, Ulinus cam- 
pestris. 


XXE. Trihus ZEUZERIDES, 
Genus COSSUS Bdv. 


189. Ligniperda F., Bdv. 602. Juin. Promenades et plantations d’or- 
mes, de chênes, de saules. La chenille, toute l’année, dans le 
tronc de ces arbres. Cette chenille vit trois ans avant de se trans- 
former en chrysalide. On peut l’élever avec du son de chêne, de 
saule, ou avec une pomme dont on a Ôté les pépins. Ce papillon 
est remarquable par l’odeur très-forte qu’il exhale et qui aide à le 
découvrir. 


Genus ZEUZERA Lat., Bdv. 


190. Æseuli L., Bdv. 606. Juin, Juillet, Août. Partout rare, com- 
mune aux environs de Blaye. La chenille, en Mai. Je l'ai trouvée 
dans l’intérieur d’une branche de marronnier ( Æsculus hippo- 
castanum), elle se trouve aussi sur les Ulinus campestris, Pyrus 
vulgaris, Quercus robur. 


(34) 
Genus HEPIALUS F., Bdv. 


‘191. Carnus F., Bdv. 611. Juillet. Mérignac. Cette jolie Hépiale a été 
prise par M. Bureau. Je w’ai pas entendu dire qu’elle ait été prise 
d’autres fois dans la Gironde. 

192. Sylvinus L., Bdv. 612. Mai, Juin, Juillet. Bois, prairies, au 
crépuscule. À Pessac, le Bouscaut. 

* 493. Lupulinus L., Bdv. 614. Août. Bois de chênes. Le Bouscaut, 
Moulon. 


XXIX. Tribus PSYCHIDES. 
Genus PSYCHE Sch., Bdv. 


194. Museella F., Bdv. 631. Avril Vole au soleil, sur les chemins 
sablonneux. Pessac. 

* 195. Villosella Och., Bdv. 640. Juin, Juillet. Partout. La chenille, 
en Mai, sur les lichens des murs (Placodium). 

* 196. Graminella W., Bdv. 641. Juin, Juillet. Partout. La chenille, 
contre les murs, les clôtures, etc., en Mai. 

Les Psyche exigeant une étude spéciale, demandent beaucoup 

de temps; je n’ai pu les étudier à fond. Notre département doit 
renfermer bien d’autres espèces que les trois ci-dessus. 


XXIII. Tribus COCLIOPODES. 
Genus LIMACODES Lat., Bdv. 


197. Testudo G., Bdv. 643. Juillet. Dans les bois de chênes , en battant. 
Pessac, le Bouscaut. La chenille, en Septembre et Octobre, en 
battant le chêne. 


XXIV. ribus DREPANULEDES. 
Genus CILIX Leach., Bdv. 


198. Spinula Hub., Bdv. 644. Mai et Juin, Septembre. Vole au crépus- 
cule, sur les haies. La chenille, en Avril et Juillet, sur les Pru- 
nus spinosa, Carpinus betulus, Cralæqus oxyacantha et pyra- 
cantha. 


Genus PLATYPTERYX Lasp., Bdv. 


199. Curvatula Lasp., Bdv. 647. Mai, Juillet. Dans les bois de chênes, 


200. 


201* 


19 
(=) 
[2 


204. 


205. 


( 3 ) 
les haies d’aulnes. À Pessac, Mérignac. La chenille, en Juin, 
Octobre, sur les Quercus robur et Alnus glutinosa. 
Hamula Esp., Bdv. 649. Mai, Juillet. Dans les bois de chênes. 
À Pessac, Mérignac. La chenille, en Juin et Octobre, sur les 
Quercus robur. 


KXV. Mribus NOTODONTEMDES. 
Genus DICRANURA Lat., Bdv. 


. Bifida L., Bdv. 653. Mai, Juin, Août, Septembre. Bord des 
ruisseaux, lieux plantés de saules et de peupliers. Partout. La 
chenille, en Juillet et Octobre. Rare. 


2. Fureula L., Bdv. 655. Mai, Juin, Août, Septembre. Mêmes loca- 


lités que le Bifida ; moins rare. Les chenilles de ces deux Dicra- 
nura sont très-souvent ichneumonées. 


. Erminea Esp., Bdv. 656. Mai, Juin, Septembre. Lieux plantés 


de peupliers et de saules. Bègles , Courrégean , etc. La chenille, 
Août, Octobre, sur ces arbres. 

Vinuïa L., Bdv. 657. Mai, Juin, Septembre. Mêmes localités que 
l'Erminea. 

MM. Serisié frères, entomologistes de Bordeaux, ont obtenu 
sept hybrides Vinula-Erminea. M. Guillemot, de Thiers, a écrit 
un rapport sur ce fait, dans les Bulletins de la Société entomo- 
logique de France. 


Genus HARPYA Ochs., Bdv. 


Fagi L., Bdv. 659. Mai à Août. Bois de chênes , en battant. Pessac, 
le Bouscaut, etc. La chenille, en Juin, Juillet, Août et Septem- 
bre, en battant les chênes. 


* 206. Milhauseri F., Bdv. 660. Mai, Juin. Bois de chênes, garen- 


207. 


nes , chènes qui bordent les routes. Pessac, Gradignan, etc. La 
chenille , en battant, en Septembre, sur ces arbres. La chrysa- 
lide se trouve très-communément, mais vide. 


Genus PTILODONTIS St., Bdv. 


Palpina L., Bdv. 665. Avril, Août. Vole au crépuscule. Dans les 
prairies , les marais. A Bouliac, Bruges, Blanquefort. La che- 

- mille, en Juillet et Octobre, sur les Populus et Salix. La chrysa- 
lide, aux pieds de ces arbres. 


( 36 ) 
Genus NOTODONTA Ochs., Bdv. 


208. Camelina F., Bdv. 666. Mai, Juin, Août. En battant les bois de 
chênes. Pessac, Gradignan. La chenille, Juin, Octobre, sur les 
Quercus robur, Ulmus campestris. Alnus glutinosa. 

209. Dietæa L., Bdv. 669. Mai, Juillet, en battant les peupliers La 
chenille , en Juin et Septembre, sur les Populus et les Salix. 

* 210. Bromedarius L., Bdv. 671. Juillet. En battant les bois de 
chènes. Pessac, Gradignan, etc. La chenille, de même , en Avril, 
Mai, sur les Quercus robur. 

211. Tritophus F., Bdv. 672. Mai, Août. Contre les peupliers, en 
plaine. Partout, rare. La chenille, en Juillet et Septembre, se 
nourrit de peupliers, spécialement du Populus pyramidalis. 

212. Zigzae L., Bdv. 673. Mai, Août. Oseraies, bords des ruisseaux. 
Bègles, Bruges, Bautiran. La chenille, en Juillet et Septembre, 
même localité , sur les saules, peupliers , osiers, etc. 

213. Trepida F., Bdv. 675. Avril, Mai. En battant les bois de chênes. 
Pessac, le Bouscaut, etc. La chenille, de même, en Juin et 
Juillet. 

* 214. Velitaris Esp., Bdv. 677. Mai, Juin, Juillet. En battant les bois 
de chênes. Pessac, le Bouscaut. La chenille, en Juin, Juillet, 
Août. 

215. Querna W., Bdv. 681. Mai, Juin. La chenille, en Juillet, Août. 
Mêmes localités que les précédents. 

216. Chaonia Hub., Bdv. 682. Avril, Mai. En battant les chênes. La 
chenille, Juin, Juillet. | 

* 217. Dodonea W., Bdv. 683. Avril, Mai. En battant les chênes. La 
chenille, Juin, Juillet, sur les Quercus. 


Genus DILOBA Bdv. 


218. Cœruleocephala L., Bdv. 687. Octobre. Sur les haies. Partout. 
La chenille, en Mai, sur les haies de Prunus spinosa, Cratæqus 


oxyacanthua. 
Genus PYGERA Bdv. 


219. Buecephala L., Bdv. 688. Mai. Vergers, prairies, bois. Partout. 
La chenille, en Septembre, sur les Quercus robur, Populus, 
Ulmus campestris, Tillæa Europea. La chrysalide, tout l’Hiver, 
aux pieds de ces arbres. 


(280) 
Genus CLOSTERA Hoff., Bdv. 


220. Curtula L., Bdv. 690. Mai, Juillet. Oseraies , lieux plantés de 
saules et de peupliers. La chenille, en Mai, Juin, Septembre, 
Octobre, sur les Populus et les Salix. 

221. Anachoreta F., Bdv. 691. Avril, Juillet. Lieux plantés de saules, 
bords des ruisseaux. Bègles , La Bastide. La chenille, Mai ‘Juin, 
Août, Septembre. sur les Salix et les Populus. 

299, Reclusa F., Bdv. 692. Mai, Juillet et Août. En battant les chênes. 
Au Bouscaut. 


NOCTUÆ. 
XXVI. Tribus NOCTUOBOMBYXYCINE. 


Genus CYMATOPHORA Bdy. 


223. Ridens F., Bdv. 695. Mai. En battant les bois de chênes. Pes- 
sac, etc. La Chenille, en Septembre, sur le Quercus robur. 

* 224. Octogesima H., Bdv. 696. Avril, Août. À la miellée. Bords 
des ruisseaux, des rivières. Bruges, La Bastide, Lormont, etc. 
La Chenille, Juin, Juillet, Septembre, Octobre. En battant les 
peupliers. 

* 225. Or F., Bdv. 697. Avril, Août. À la miellée. Bords de la Garonne, 
de la Dordogne, Lormont, Moulon. La Chenille, en battant les 
peupliers, en Juin, Juillet, Septembre. 

* 226. Bipuneta Bork., Bdv. 102. Avril, Mai, Août. En battant les 
bois de chênes, aux bords des ruisseaux. Pessac, etc. La Chenille, 
Juin, Juillet, Août, Septembre sur les Populus, Alnus glutinosa. 


Genus PLASTENIS Bdv. 


* 2217. Subtusa Bdv. 705 Juillet. Aux bords des ruisseaux, des rivié- 
res. La Chenille , en Juin; sur les peupliers. 


XVIII. Tribus BOMYCOLDES. 
Genus ACRONYCTA Ochs., Bdv. 


228. Leporina L., Bdv. 707. Avril, Mai, Juin, Août, Septembre. En 
battant les peupliers, et à la miellée, aux bords des ruisseaux. 


ToME XXII. 3 


230. 


232. 


233. 


(38) 


Lormont, allées de Boutaut, Blanquefort, etc. La Chenille, 
Juillet, Août, Octobre, Novembre. Sur les Populus, Salix , Alnus 
glutinosa. 


. Aceris L., Bdv. 708.-De Mai à Août. En battant les bois de 


chênes. À Pessac, etc. La Chenille, Juillet, sur Les Quercusrobur, 
Ulinus campestris, Tillæa europæa. 

Megacephala F., Bdv. 709. De Juin à Août, Octobre. A la 
miellée. Bords des ruisseaux, des rivières. La Chenille, Juillet, 
Août, Septembre, en battant les peupliers , les saules. 


. Ligustri F., Bdv. 711. Avril. En battant les chênes. La Chenille, 


Juin, Juiilet, sur les Ligustrum vulgare et Lonicera. 

Mridens F., Bdv. 713. Avril, Mai. Promenadesplantées d’ormes, 
vergers. Partout. La chenille, Juillet, Août, sur Ulmus campes- 
tris, Cratægus oxyacantha et DA Prunus spinosa, 
Pyrus vulgaris. 

Psi Esp., Bdv. 714. Juin, Juillet, Août. Promenades, vergers. 
Partout. La Chenille, en Juillet, sur les Dimus carnpestnés, Pyrus 
vulgaris. Prunus domestica et spinosu. 


* 934. Auricoma F,, Bdv. 717. Avril, Mai, Juin. En battant les ché- 


235. 


nes. À Pesac, La Chenille, en Juillet, sur les Rumex, Plantago, 
Rubus, Salix caprea. ; 

Rumieis L., Bdy. 718. Avril, Mai, Août. Partout. La Chenille, 
Juin , Juillet, fin Août, Septembre, sur les Rubus, Rosa, Rumex, 
Polygonum, etc. 


* 936. Euphorbiæ F., Bdv. 719. Mai. En battant les chênes. La Che- 


nille, en Juillet, sur diverses espèces d’euphorbes. 


* 237. Euplhrasiæ Bork., Bdv. 720. Mai, Août, en battant les chênes. 


À Pessac, etc. La Chenille, sur les Euphorbes , sur les Euphra- 
sia officinalis, Rubus , Cratægus, etc. 


Genus DIPHTERA Ochs., Bdv. 


* 238. Orion Esp., Bdv. 724. Mai, Juin. Bois de chênes'et chênes isolés. 


239, 


Pessac, Toctoucau, etc. La Chenille, en Juillet, sur les chênes. 
L’insecte parfait est souvent remarquable par sa grandenr. 


Genus BRYOPHILA Tr., Bdv. 


Giandifera W.V., Bdv. 725. Juillet, Août, Septembre, contre les 
vieux murs, les arbres des promenades. À la miellée. Partout. 


( 39 ) 
La Chenille, Avril et Mai, sur les lichens des murs, spéciale- 
ment sur les olivacea, grisea, parielin«. 

240. Perla F., Bdv. 726. Août. À la miellée. Estey de Bègles. Je n’ai 
pris cette Briophila , qui est si abondante dans certaines contrées , 
qu’une seule fois. 

* 241. Algæ F., Bdv. 729. Juillet. Contre les arbres. Très-rare. 

* 242. Ereptrieula 732. Juillet, Août. Contre les vieux arbres. 

* 243. Receptricula Hub., Bdv. 1733. Juillet, Août. Comme la précé- 
dente. Toutes les deux três-rares. 


KXVWEIE. Vribus ANEPHEPIRERPES. 
Genus GONOPTERA Lat., Bdv. 


244. Küibatrix L., Bdv. 739. Toute l’année. Partout. À la miellée. La 
Chenille, Juin, Juillet, Septembre. Sur les Populus et les Salix. 


Genus AMPHIPYRA Ochs., Bdv. 


245. Pyramidea L., Bdv. 745. Août. À la miellée, lieux plantés de 
saules. La chenille , en Mai, sur les saules. 


Genus MANIA Tr., Bdv. 


246. NMEawra L., Bdv. 750. Juin, Juillet. Lieux obscurs et humides, 
dessous des ponts. A la miellée. Bouliac, Bruges, etc. La che- 
nille, Avril, Mai. Sur les Alnus glutinosa , Salix, Rumex , Pru- 
nus spinosa. 

* 947. TMypiea L., Bdv. 751. Juillet, Août. Comme le précédent. La 
chenille, en Mai. Sur les Salixæ, Urtica urens et dioica, Rumex, 
Cynoglossum. 


Genus RUSINA Steph., Bdv. 


* 248. Temebrosa Hub., Bdv. 752. Mai, Juin, Juillet. Landes. Pes- 
sac. À la miellée. 
XXEX. Tribus NOCTULDES. 
Genus SEGETIA Steph. Bdv. 
* 249. Xanthographa F., Bdv. 153. Août, Septembre. Prairies, 


jardins. À la miellée. Partout. La chenille, en Mars. Difficile à 
élever, Sur les gramminées, spécialement sur le Lobium perenne. 


(40) 
Genus CERIGO Steph., Bdv. 


250. Cytherea F., Bdv. 755. Août, Septembre. A la miellée. Les 
marais , bords des rivières , Bruges, Lormont , etc. 


Genus TRIPHÆNA Tr., Bdv. 


251. Linogrisea F., Bdv. 756. Juin. Bois taillis. Pessac, Gradignan. 
La chenille, sous les feuilles de chênes, en Février, commence- 
ment de Mars. Se nourrit de Rumex et de Primula officinalis. 

252. EInterjecta Hub., Bdv. 758. Juillet, Août, Septembre. En battant 
les haies. À la miellée. Bouliac , Floirac, etc. 

253. Janthina F., Bdv. 759. Mai à Août. En battant les haies. Bouliac, 
Floirac, etc. La chenille se cache sous les broussailles. Mars, 
Avril. Sur l’Arum maculatum. 


254. Fimbria L., Bdv. 760. Juin, Juillet, Août. Dans les bois, les 
haies. Pessac, le Bouscaut, Bouliac, etc. La chenille, sous les 
feuilles, dans les bois. Février, Mars, Avril. Se nourrit de Pri- 
mula officinalis, Rumex , Solanum tuberosum. 

Beaucoup de variétés dans l’insecte parfait. 
255. Orbona F., Bdv. 761. Juin à Septembre, Partout. La chenille, 


Février, Mars, Avril. Sous presque toutes les plantes basses. 
256. Pronuba L., Bdv. 763. Juin à Octobre. Partout, très-commune. 
La chenille, Mars, Avril. Sur les Primula, Senecio, Rumex, 
Cruciferes, etc. 
L’insecte parfait varie beaucoup. 


Genus CHERSOTIS Bdv. 


* 


257. Porphirea Hub., Bdv. 769. Juin, Juillet. Dans les bois, les 
bruyères. À la miellée. Pessac, etc. La chenille, fin Automne, 
sur les Erica vulgaris et cinerea. 

* 258. Agathina Dup., Bdv. 770. Juillet. Dans les bois. A la miellée. 
A Pessac, etc. La Chenille, fin Automne. Sur les Erica vulgaris 
et cinerea. 

* 259. Ærithrina Bdv. Juin. A la miellée. Dans les bois. Pessac, 
Gradignan, etc. 

20. Pleeta L., Bdv. 772. Avril, Août, Septembre. Les marais , les 

bords des rivières, des ruisseaux. À la miellée. Bruges, Lormont. 


(#19) 
La chenille, Juillet, Septembre. Sur les Cichorum intybus, Po- 
lygonum , Galium verum. 
* 261. Leucogaster Tr., Bdv. 713. Août, Septembre. Comme le 
Plecta, mais beaucoup moins abondant. Bruges , Blanquefort. 


Genus NOCTUA Tr., Bdv. 


262. €. Nigruan L., Bdv.771. Août, Septembre. Partout. À la miellée. 
Lormont, Blanquefort, etc. La chenille, Avril, Mai, Juin. Sur 
l’'Urtica urens, et le Lonicera. 

* 263. Bella Bork., Bdv. 1785. Septembre. Marais. Blanquefort. À la 
miellée. 

* 264. Dahlii Hub., Bdv. 191. Août. Marais. Blanquefort. À la miellée. 

* 265. Baja F., Bdv. 195. Fin Juillet. 


Genus SPÆLOTIS Bdv. 


* 266. Ravida Hub., Bdv. 799. Juin. Partout. 


Genus AGROTIS Ochs., Bdv. 


* 267. Agricola Hub., Bdv. 820. Août. Jai pris l’Agricola une seule 
fois , dans un jardin, à la miellée, près de Bègles. 

268. Saueia Hub., Bdv. 821. Septembre. Les prairies, les jardins. A 
la miellée. Lormont, Bruges, etc. La chenille se nourrit des 
racines de graminées. 

Var. Æqua Hub., Bdv. Septembre. Vole avec le type. 

269. Suffusa F., Bdv. 822. Septembre. Les prairies, les jardins. Lor- 
mont , Bruges. A la miellée. 

210. Segetum W. V., Bdv.{823. Avril, Août, Septembre. Prairies, 
jardins. Partout. À la miellée. La chenille se nourrit des racines 
de Triticum sativoum et de quelques autres plantes. 

* 271. Trux Hub., Bdv. 826. Juin. À la miellée. Rare. La chenille est 
poliphage. Avril, Mai. 

272. Exelamationis L., Bdv. 827. Avril, Août, Septembre. Les 
marais, le long des ruisseaux. Lormont, Bruges. La chenille, 
Juin, Octobre. Sur le Senecio vulgaris. 

273. Corticea W. V., Bdv. 829. Juillet. A la miellée. Bègles, etc. 

274. Tritici L., Bdv. 836. Juillet. À la miellée. Les prairies, le long 
des rivières. Lormont, etc. 


( 42) 

275. @belisen W. V., Bdv. 840. Septembre. Les marais, bords des 
rivières. À la miellée. Bruges, Lormont, etc. La chenille, en 
Avril. Sur les plantes basses, les Rumex, etc. 

* 276. Aquailiea W. V., Bdv. Juillet, Août. Vole sur les valérianes, 
au crépuscule. Partout. La chenille, en Avril. Sur le Cichorum 
intybus. 

© Var. Vitta. Pessac, comme le type. 
* Var. Rurris. Partout, comme le type. 

271. Fumosa F., Bdv. 846. Août, Septembre. Les marais. Bruges, 
Blanquefort. 

* 278. Pasta H., Bdv. 852. Avril, Août, Septembre. Les marais, bords 
des rivières. À la miellée. Bruges, Lormont., etc. La chenille, 
Mai, Septembre. Sur les graminées. 

* 219. Puéris L., Bdv. 853. Juin, Septembre. Les marais, bords des 
rivières. À la miellée. Lormont, Bruges, etc. La chenille, Mai, 
Août. Se nourrit de racines de graminées spécialement de raci- 
nes de Triticum repens. 

* 280. VWalligera F., Bdv. 855. Septembre. Valligera, à ma connais- 
sance, n’a été prise qu’une seule fois, à la miellée, dans un 
jardin, près de Bègles. 


Genus HELIOPHOBUS Bav. 


* 281. Fopularis L., Bdv. 864. Septembre. À la miellée. Jardins. À 
Moulon. 


XX. Fribus HAMDENSDES. 
Genus LUPERINA Ochs., Bdv. 


* 282. Testacea W. V., Bdv. 869. Mai, Août. Champs de genêts. Pes- 
sac, etc. La chenille, Juin, Octobre. Sur le Marrubium vulgare. 

* 983. Aliema Hub., Bdv. 874. Août, Septembre. Dans les marais. À 
la miellée. 

084. PEmastri L., Bdv. 883. Mai, Juillet, Août. Prairies, jardins, bois. 
À la miellée. Partout. La chenille, Avril, Octobre. Sur le Rumex. 

* 985. Hidhoxyleza W. V., Bdv. 885. Juin. En battant les chênes. Pes- 
sac, Gradignan. 

* 286. Polyoden L., Bdv. 886. Juin, Juillet. En battant les bois de 
chênes. Pessac, Gradignan. 


( 43 ) 
+ 987. Conspicilinris L., Bdv. 887. Avril, Mai. En battant les bois 
de chênes. Pessac, etc. 
Var. Melaleuca Bdv. Gomme le type. 
* 288. Basilinen F., Bdv. 892. Mai. En battant les bois de chênes. 
* 289, Gemima T., Bdv. 893. Septembre. Endroits marécageux. Blan- 
quefort. À la miellée. 
* Var. Secalina Hub., Bdv. Avec le type. 
* 290. Didyma Bork., Bdv. 895. Mai à Août. Partout. Pessac, Lor- 
mont. À la miellée. Beaucoup de variétés. 


Genus APAMEA Bdv. 


291. Strigilis L., Bdv. 901. Août. Partout. À la miellée ou sur les 
fleurs. 
Var. Latruncula Step. Comme le type. 
* 292. Suffurumeula T., Bdv. 902. Août, Pessac. À la miellée. 
* 203. Furwumeula W. V., Bdv. 603. Juin, Juillet, Août. A Pessac, 
Gradignan , Mérignac , etc. À la miellée. 
Var. Terminalis W. V., Bdv. Comme le type. 


Genus HADENA T., Bdv. 


* 294. Eutulemta W. V., Bdv. 914. Octobre. Dans les jardins, les 
champs de genêts. À la miellée. À Moulon. Sur les raisins. La 
chenille, en Mai. À passé l'hiver engourdie, sur les Genista tinc- 
toria et les Rumex. 

Var. Sedi Bdv. Avec le type. 

* 293. Æthiops Ochs., Bdv. 912. Octobre. Dans les jardins, les champs 
de genêts. À Moulon , etc. La chenille, comme celle de Lutulenta. 

296. Persienariæ L., Bdv. 913. Fin Juin. Marais. Blanquefort. La che- 
nille, Septembre et Octobre, sur beaucoup de plantes basses, 
spécialement sur les Rumex. La chrysalide passe l’hiver. 

* 297. Brassieæ L., Bdv. 915. Mai à Septembre. Jardins, prairies, etc. 
Partout. À la miellée. La chenille, Août, Septembre. Sur les 
Brassica et les Atriplex. 

* 298. Var. Aliena Bdv. (Suasa), Mai, Juin, Septembre. Marais. 
Partout. À la miellée. 

299. Oleracen L., Bdv. 917. Mai, Août. Dans les jardins, les prai- 
ries, ete. À la miellée. La chenille, Juillet et Septembre. Sur les 
plantes basses, spécialement sur les Polygonum et les Humulus. 


(44) 

300. Chenopodii E., Bdv. 924. Mai, Août, Septembre. Jardins, prai- 
ries. Lormont, Bègles. À la miellée. La chenille, Juillet, Sep- 
tembre, Octobre. Sur les Polygonum, Brassica, Rumex , Atri- 
plex , etc. 

* 301. Bentina Esp., Bdv. 928. Mai, Juin, Août. Dans les bois, en 
battant. Pessac, etc. Dans les jardins , les prairies. A la miellée. 
Lormont, etc. La chenille, Mai, Juin, Septembre, Octobre. Sur 
le Taraxacum officinalis. 

302. Atriplieis L., Bdv. 940. Juillet, Août. Dans les marais, les jar- 
dins, les prairies. À la miellée. Bègles, Lormont, Bassens. La 
chenille, Juillet, Août, Septembre. Très-commune dans les jar- 
dins. Sur les Polygonum , Atriplex et Rumex. 

* 303. Adusta Esp., Bdv. 945. Août. Prairies, près des rivières. Lor- 
mont, Bègles, Langoiran , etc. La chenille passe l’hiver sur les 
plantes basses. 

+ 304. Thaalassinma Bork., Bdv. 949. Avril, Mai, Juin. En battant les 
bois de chênes. À Pessac, etc. La chenille, en Septembre. Sur les 
Rumex. 

* 305. Genistæ Bork., Bdv. 951. Mai, Juin. En battant les bois de 
chênes. Pessac, etc. La chenille, Août, Septembre, Octobre. Sur 
les Rumezx , dans les champs de genêts. 

* 306. Contigua F., Bdv. 952. Mai, Juin. En battant les bois de ché- 
nes. Gradignan , etc. 

* 307. Protea Esp., Bdv. 959. Septembre, Octobre. Dans les bois de 
chênes. À la miellée. Le Bouscaut. 

* 308. Boboris Bdv. 960. Juin, Septembre, Octobre. Contre les chè- 
nes, dans les bois. A la miellée. Pessac, Gradignan, etc. La che- 
nille en Juin. Sur le Quercus robur. 

Var. Cerris Bdv. Se trouve avec le type. Très-rare. 


Genus PHLOGOPHORA Tr., Bdv. 


309. Lueipara L., Bdv. 963. Avril, Mai, Juin. En battant les bois de 
chênes, etc. À la miellée. Pessac, Gradignan. La chenille, en 
Septembre, passe l’Hiver. Elle se nourrit de Rumex, Echium 
vulgare, Rubus fruticosus et cœsius. 

* 310. Æzxpyrea Hub., Bdv. 964. Octobre. Dans les jardins , sur les 
raisins. Moulon, La Bastide, etc. La chenille, en Mai. En battant 
les haies. Elle se nourrit d’Urtica urens et dioica, de Rumex , etc. 


311. 


312. 


313. 


314. 


( 45 ) 
Meticulosa L., Bdv. 966. Toute la belle saison Partout. La 


chenille, toute l’année, sur presque toutes les plantes basses, 
Urtica, Rumex, Taraxacum , Artemisia , Primula, etc. 


Genus AGRIOPIS Bdv. 


Aprilina L., Bdv. 980. Septembre, Octobre. Contre les chênes. 
Pessac, Gradignan, etc. La chenille, Mai, Juin, Juillet. Sur le 
Quercus robur. Elle se tient, le jour, dans les crevasses de l’écorce 
où elle est très-difficile à distinguer à cause de sa couleur. 


Genus MISELIA Tr., Bdv. 


Oxyaeanthzæ L., Bdv. 983. Octobre, Novembre. Dans les haies. 
Partout. Le chenille, Avril, Mai. En battant les haies. Se nourrit 
de Prunus et de Cratægus. 

Var. Pyracanthæ Nob. Octobre, Novembre. Dans les haies. La Bas- 
tide , Bouliac. La chenille, en battant les haïes. Avril, Mai. Sur 
les Cratæqus et Prunus. 

Diffère du type par l’absence complète de marbrure verte rem- 
placée par une teinte rouge-brique. 


Genus DIANTH(ŒCIA Bdv. 


Albimaeula Bork., Bdv. 987. Juin, Juillet. Au crépuscule, dans 
les jardins , sur les fleurs. Dans les champs, sur les œillets. 


. Comspersa VW. V., Bdv. 988. Mai. En battant les chênes. A 


Pessac. 


. Comta F., Bdv. 989. Mai, Juin. Au crépuscule, dans les jardins, 


les champs, sur les œillets à fleurs simples. 


317. Capsincola Esp., Bdv. 997. Mai, Août et Septembre. Au cré- 


318. 


puscule. Dans les prairies, les champs. Sur les camomilles. 
Les chenilles de ces quatre premières Dianthæcia vivent de Juin 
à Octobre, dans l’intérieur des capsules du Lichnis dioica. 
Cucuhali W.V., Bdv. 998. Août. À la miellée. Allée de Boutaut, 
Lormont, etc. 


_* 319. Carpoplhaga Bork., Bdv. 1001. Juin. En battant les bois de 


320. 


chênes. À Pessac, Léognan, etc. 
Echii Bork., Bdv. 1003. Août. Au crépuscule. Dans les champs 
incultes , sur les fleurs. À Bruges, Blanquefort. 


( 46 ) 


Les chenilles des Cucubali, Carpophaga et Echi vivent dans 
l’intérieur des capsules du Silene inflata. 


Genus ILARUS Bdv. 


* 321. Gchroleuea W. V., Bdv. 1004. Août. Dans les coteaux secs, 
Au crépuscule. 

Treistschke dit que cette noctuelle aime à voltiger, sur les 
fleurs odorantes , à l’ardeur du soleil. Je n’ai jamais été à même 
de vérifier cette assertion. La chenille, Juin, Juillet, dans les 
blés. 


Genus POLIA Tr., Bdv. 


322. Dysodea W. V., Bdv. 1006. Juillet, Août. En battant les bois de 
chênes. Pessac, le Bouscaut. La chenille, en Avril. Sur les 
Aquilegia vulgaris, Petroselinum sativum , Artemisia vulgaris. 

323. Serena F., Bdv. 1008. Mai, Juin. Dans les prairies, les jardins, 
sur les fleurs. Au crépuscule. A la miellée. La chenille, sur les 
Sonchus palustris et Hieracium pilosella. 

* 324. Vetula Bdv. 1018. Août. A la miellée. Pris une seule fois à 
Pessac Ex 

* 325. Cæruleseens Bdv. 10021. Août. A la miellée. T. r. 

* 326. Ruficineta H. Gay, Bdv. 1022. Août. A la miellée. 

327. Flavieineta F., Bdv. 1023. Août. Dans les prairies, bords des 
rivières. À la miellée. La chenille, en Mai. Sur les Salix , Rumex , 
Cichorum, etc. 


Genus POLYPHÆNIS Bdv. 


* 328. Prospieua Pork., Bdv. 1033. Juin, Juillet. En battant les bois. 
À Pessac, le Bouscaut. La chenille, sous les feuilles, Mars, 
Avril. Se nourrit de Rumex. 


Genus PLACODES Bdv. 


* 329. Amethystina Hub., Bdv. 1036. Juillet. En battant les chênes. 
A Pessac, le Bouscaut. A la miellée, dans les taillis. 


Genus ERIOPUS Tr., Bdv. 


* 330. Pteridis F., Bdv. 1039. Juin, Juillet. En battant les bruyères. 


À Pessac, Toctoucau. La chenille, en Septembre et Octobre. Sur 
le Pleris aquilina. 


(247) 
Genus THYATYRA Ochs., Bdv. 


331. Batis L., Bdv. 1041. Mai, Juin, Août, Septembre. En battant les 
chênes. À la miellée. Pessac, Lormont, etc. La chenille, Juillet, 
Août, Septembre. Sur les Rubus. 

332. Berasa L., Bdv. 1042. Août, Septembre. À la miellée. Dans les 
prairies. Bassens. La chenille, en Septembre, sur les Rubus. 


KKXE. Tlribus LEUCANEDES. 
Genus MYTHIMNA Bdv. 


* 333. Œuren L., Bdv. 1043. Juin. En battant les bois de chênes, à 
Pessac. À la miellée. Dans les marais. La chenille, en Avril et 
Mai ; passe l’hiver sous les feuilles. Se nourrit de Briza media 
et est polyphage. 


Genus LEUCANIA Ochs., Bdv. 


+ 334. Comigera E., Bdv. 1044. Août, Septembre. A la miellée. Par- 
tout. Lormont, etc. La chenille, en Février. Sous les grami- 
nées. 

* 335. Albipasmeta F., Bdv. 1045. Mai, Août, Septembre. À la miel- 
‘lée. Partout. La chenille, en Février, Juin. Sous les graminées. 
Se nourrit de Plantago, etc. 

* 336. Lithargyria Esp., Bdv. 4046. Août, Septembre. Partout. A 
la miellée. La chenille, en Février, Mars. Sous les graminées. 
Se nourrit de Plantago, Stellaria. 

Var. Anargyria Bdv. Comme le type. À Lormont. 

* 837. Vitelima Hib., Bdv. 1047. Août, Septembre. Dans les marais, 
les prairies humides. À la miellée. À Lormont, Bruges. La che- 
nille, Octobre, sur les Rumex. 

338. Läittoralis Cur., Bdv. 1052. Juillet. Dans les dunes du cap Fer- 
ret, sur les chardons. 

* 339. Pudorima W,. V., Bdv. 1049. Juillet. Landes. Pessac, à la 
miellée. 

340. &. æHouma L., Bdv. 1056. Juin , Septembre, Octobre. Dans les 
marais, les prairies humides. A la miellée. Lormont, Bruges, etc. 
La chenille, Avril, Août. Plantes basses. 

* 341. Seirpi Bdv, 1065. Première quinzaine de Mai. Dans les bois, à 
la miellée. Pessac, Gradignan. 


( 48 ) 

342. Pallens L., Bdv. 1073. Mai, Août à Octobre. Marais, lieux 
humides. À la miellée. Bruges, Lormont. La chenille, Mars, 
Avril, Juin, Juillet. Sous les Rumex et Stellaria media. 

Beaucoup d’autres Leucanies doivent exister dans la Gironde. 
Ce genre, ayant son habitat dans les marais, est assez dan- 


gereux à chasser de nuit, et cette chasse demande de grandes 
précautions. 


XXXIT. Tribus CARADRINIDES. 
Genus GARADRINA Ochs., Bdv. 


343. Trilinea W. V., Bdv. 1093. Mai, Juin. En battant les haies. 
Pessac, Cenon, etc. La chenille, Septembre, Octobre, sur 
Plantago. 

344. Plantaginis Hub., Bdv. 1097. Août, Lieux humides. A la 
miellée. Pessac, Lormont. etc. La chenille, fin Mars. Passe 
l'hiver sur Urtica et Plantago. 

* 345. Respersa W. V., Bdv. 1095. Juin. en battant les chênes, à 


Pessac. 

* 346. Blanda Hub., Bdv. 1098. Mai, Août, Septembre. Partout. A 
la miellée. | 

* 347. Taraxaci Hub., Bdv. 1099. Juillet, Août. Lormont. A la miel- 
lée. 


* 348. Alsines Potk., Bdv. 1100. Juillet. Bruges, Lormont. Prairies, 
à la miellée. 
* 349. Kadenii Fr., Bdv. 1107. Août, Prairies, aubarèdes, etc. À la 
mieilée. Lormont, Bègles, etc. 
Var. Flavirena Bdv. Comme le type. Très-rare. 
350. Cubicularis W., Bdv. III. Août. Dans les marais , à Bruges, 
etc. À la miellée. 


* 


XXXEIT. Tribus ORTHOSIDES. 
Genus ORTHOSIA Ochs., Bdv. 


* 351, Gothiea L., Bdv. 1123. Mars. Dans les haies de pruneliers , de 
chônes et d’aubépines. Bouliac, Floirac. La chenille, en Mai, 
sur les Quercus et les Prunus. 

* 352, Litura L., Bdv. 1124. Août, Septembre. Dans les bois de Pes- 
sac, à la miellée. 


303. 


(49) 

Hebrnien Hub., Bdv. 1125. Juillet, Septembre, Octobre. Dans 
les bois de Pessac, à la miellée. La chenille, en Mai, sur les 
Rumex , etc. 


354. Negleeta Hub., Bdv. 1127. Août. Dans les bois de Pessac. A la 


2355: 
* 356. 
D JO: 
. 398. 


* 359. 


miellée. 
Cœcimacula F., Bdv. 1128. Septemhre. Dans les bois de Pes- 
sac, Gradignan. À la miellée. 
Gracilis F., Bdv. 1129. Avril. Bois de chênes. La chenille, en 
battant le Quercus robur. Mai. 
Var. Lunosa Curt., Bdv. 1134 (HKumulis). Septembre. Marais, 
Blanquefort, etc. À la miellée. 
Pistacina F., Bdv. 1135. Septembre. Bois de chênes. Pes- 
sac, etc. L’insecte parfait varie beaucoup. 
Macilenta F., Bdv. 1139. Septembre. Marais, lieux plantés de 
saules. À la miellée. 


360. Enstabilis F., Bdv. 1141. Mars, Avril. Dans les haies. Bouliac, 


Pessac, etc. La chenille, en Août, Septembre. Sur les Quercus 
robur et les Cratægus. 


Var. Contracta Esp., Bdv. Comme le type. 


* 361. 


Wpsilon VW. V., Bdv. 1142. Juillet, Août. Lieux plantés de 
peupliers. Gradignan. A la miellée. La chenille, sur le peuplier 
ordinaire. 


. Lota L., Bdv. 1144. Septembre. Dans les bois. À Pessac, La 


Teste, etc. 


. Stabilis Hub., Bdv. 1147, Mars, Avril. Bois de chênes. Pes- 


sac, etc. La chenille, Juin. Sur les Quercus, Prunus , Cratægus. 


. Minmiosa F., Bdv. 1150. Avril. En battant les chênes. Pessac, 


le Bouscaut. La chenille, en Septembre, sur les Quercus.. 
Ambigua Hub,, Bdv. 1151. Mars, Avril. En battant les chênes. 
À Pessac. La chenille, Juin, Juillet. Sur les Quercus. 


Genus COSMIA Ochs., Bdv. 


366. Affinis L., Bdv. 1155. Août, Septembre. En battant les ormeaux. 


Bouliac, etc. La chenille, Avril, sur l’Ulmus campestris. 


367. Trapezima L., Bdv. 1158. Juillet. En battant les chênes. Pessac, 


le Bouscaut, etc. La chenille, en Mai. Sur les Quercus et les 
Ulmus. Elles se dévorent entre elles. 


(50). 
Genus GORTYNA Ochs., Bdv. 


+ 368. Mieacea Esp., Bdv. 1166. Août. Dans les marais, en battant les 
fourrés. Bruges. 


Genus XANTHIA Ochs., Bdv. 


369. Ferruginea Hub., Bdv. 1174. Septembre. Bois de chênes. 
Pessac. À la miellée. La chenille, Mai. Sur le Quercus robur. 

* 370. Rufina L., Bdv. 1176. Septembre. Bois de chênes. À la miellée, 
Gradignan, Pessac. La chenille, en Mai, sur le Quercus robur. 

* 371. Silago Hub., Bdv. 1181. Octobre. Lieux plantés de saules. A la 
miellée. La chenille, Avril, Mai, sur le Salix caprea. 


* 372. Gilvago F., Bdv. 1183. Octobre. Partout. En battant les chênes 
et les peupliers. 


Var. Palleago Hub., Bdv. Rare. Avec le type. 


* 3173. Citrago L., Bdv. 1186. Septembre. En battant les peupliers. 
Allées de Boutaut. 


Genus HOPORINA Bdv. 


374. Croceago F., Bdv. 1187. Avril, Mai, Septembre, Octobre. Dans 


les bois de chênes. En frappant. Pessac, etc. La chenille, Mai, 
Juin, Octobre. Sur les chênes. 


Le Croceago a deux époques par an, contrairement à ce qu’in- 
diquent les auteurs. 


Genus DASYCAMPA Gue., Bdv. 


* 375. Rubiginea W.V., Bdv. 1188. Octobre. Marais. Blanquefort, etc 
À la miellée. 


Genus CERASTIS Ochs., Bdv. 


* 376. Vaeeini L., Bdv. 1191. Septembre, Octobre. Lieux plantés de 
saules et de peupliers. À la miellée. En battant. La chenille, en 
Mai, Juin, sur les saules et les peupliers. 
J'ai pris le Vaccini en Mai, très-rarement ; c’étaient quelques 
chrysalides en retard et non une seconde apparition. 


(51) 

377. Spadicea Hub., Bdv. 1191. Septembre, Octobre. Haies , buis- 
sons. Pessac, Blanquefort. La chenille, en Mai, Juin. Sur les 
Prunus et les Cratægus. 

Var. Ligula Esp., Bdv. Vole avec le Spadicea. 

* 378. Satellitia L., Bdv. 1195. Septembre, Octobre. Même localité 

que le Vaccini. 


+ 


XXXIV. Tribus XYLINIDES. 
Genus XYLINA Tr., Bdv. 


* 379. Vetusta Hub., Bdv. 1197. Mars, Septembre. Endroits maréca- 
geux. Bruges. 

380. Exoleta L., Bdv. 1198. Septembre. A la miellée. Bouliac, Pes- 
sac, etc. La chenille, sur les Urtica urens, Rumex, Genista. 

381. Comformis F., Bdv. 1201. Septembre. En battant les taillis de 
chênes , les peupliers. À Pessac. 

382. Rhizolitha F., Bdv. 1204. Mars, Septembre. Dans les bois de 
chênes. Pessac. La chenille, Mai, Juin, Octobre. Sur le Quercus 
robur. 

* 383. Petrifieata F., Bdv. 1205. Mars, Septembre. En battant les 
peupliers. La chenille, Mai, Juin, Octobre. 

* 384. Oeulata Germ., Bdv. 1206. Septembre. A la miellée. Pessac. 


Genus XYLOCAMPA Gue., Bdv. 
* 385. KHäthorhiza Bork.. Bdv. 1207. Mars. Dans les bois de chênes. 
_ Pessac, Gradignan, 
Genus CLOANTHA Bdv. 
* 386. Hyperiei F., Bdv. 1209. Juin. 
Genus CLEOPHANA Bdv. 


387. Lämariæ F,, Bdv. 1220. Mai, Septembre. Coteaux secs. Sur les 
chardons. Bouliac, Fargues. La chenille, Juillet, Octobre. Sur 
les Linaria. 

Genus CHARICLEA Kirby, Bdv. 

388. Delphinii L., Bdv. 1225. Août. Les jardins, les champs. Méri- 
gnac , Caudéran, etc. La chenille, Juin, Juillet. Assez difficile à 
élever, à cause de sa voracité. Les chrysalides ne sont même pas 
à l'abri des retardataires qui les dévorent. 


(52) 
Genus CUCULLIA Ochs., Bdv. 


* 389. Absinthii L., Bdv. 1233. Mai. Dans les bois de chênes. Pes- 
sac, etc. En frappant et à la miellée. Cette noctuelle a été trou- 
vée par MM. Serisier frères. ; 

* 390. Tanaeeti F., Bdv. 1240. Juin. Dans les bois. A la miellée. 
Pessac, Gradignan. d 

‘ 39. Umbratiea L., Bdv. 1243. Juillet. Dans les jardins, au cré- 
puscule , sur les fleurs. À Bassens, Bouliac. La chenille, en Juin. 
Sur les Sonchus arvensis. 

* 392. Chamomillæ W. V., Bdv. 1244. A la miellée. Pessac. 

* 393. Anthemidis de Lorquin. Juillet, Août. Vole au crépuscule, 
sur les fleurs. Le Bouscat, etc. 

Cette espèce a été découverte, à Bordeaux, par M. Th. 
Panessac. | 

394. Laetueæ Esp., Bdv. 1245. Août. Prairies, jardins, au crépus- 
cule, sur les fleurs. À la miellée. Bassens, Lormont. La chenille, 
Août, Septembre. Sur les Sonchus arvensis et oleraceus , Taraxa- 
cum officinale, lactuca sativa. 

* 395. Lyehnitis Ramb., Bdv. 1253. Juin. Pessac. La chenille, en 
Août. Sur le Verbascum lychnitis. 

* 396. Serophulariæ Ranb., Bdv. 1254. Avril, Mai, Juin. Bords des 
ruisseaux. Bègles, etc. La chenille, Juin, Juillet. Sur le Scro- 
phularix aquaticu. 

397. WVerbhasei L., Bdv. 1255. Avril, Mai. Partout. La chenille, en 
Juin, Juillet. Sur les Verbascum thapsus, lychnitis et nigrum. 


XXXVI. Tribus PLUSIDES. 


Genus ABROSTOLA Ochs., Bdv. 


* 398. Urtieæ Hub., Bdv. 1258. Août, Octobre. Au crépuscule. Sur les 
fleurs. À la miellée. Dans les prairies, les jardins. Lormont, 
Moulon. La chenille, Juillet, Septembre. Sur les Urtica urens et 
dioica. 

* 399. Triplasia L., Bdv. 1259. Août, Octobre. Au crépuscule, sur 
les fleurs. A la miellée. Dans les prairies et les jardins. Lormont, 
Moulon. La chenille, Juillet et Septembre. Sur les Urtica urens 
et dioica. 


( 53 ) 
Genus PLUSIA Ochs., Bdv. 


100. Festuez L., Bdv. 4270. Août. Les marais, les prairies bumides. 
Au crépuscule, sur les salicaires. À la miellée. Bruges , Lormont. 
La chenille, Juin, Juillet, sur le Fetuca fluilans, etc. 

101. Chrysitis L., Bdv. 1273. Mai, Août. Les marais. Au crépuscule. 
Sur les salicaires. À la miellée. Bruges, La Bastide. La chenille, 
Mai à Juillet, sur les Urtica urens et Lamium album. 

102. Cireumflexa L., Bdv. 4278. Juillet à Octobre. Dans les jar- 
dins, au crépuscule, sur la lavande. Pessac, Bouliac. La che- 
nille, en Mai, sur l’Urtica urens. 

103. Gamama L., Bdv. 1282. Toute la belle saison. Partout. La 
chenille, toute l’année, sur les Urtica, Senecio , Rumex. 

* 404. Ni Hub., Bdv. 1283. Juillet. Je n'ai vu prendre cette Plusie 
qu’une seule fois, à Pessac, par M. H. Gaujac, en battant des 
chênes. 


XXXVII. Tribus HELIOTHIDES. 
Genus ANARTA Ochs, Bdv. 


405. MEyrtilli L., Bdv. 1291. Avril, Juillet, Août. En battant les bruyé- 
res dans les landes. Saint-Médard. La chenille, Juillet , Septem- 
bre, sur l’Erica vulgaris. 

406. Arbuti F., Bdv. 1300. Mai. Dans les prairies. Vole en plein jour 
sur les petites marguerites. 


Genus HELIOTHIS Ochs. , Bd. 


407. Dypsacea F., Bdv. 1305. Mai, Août. Vole en plein midi dans 
les prairies sèches. Pessac, le Bouscaut. La chenille, Mars, Juin, 
sur les Rumex, Plantago, Dypsacus. 

* 408. Peltigera W. V., Bdv. 1307. Juin à Août. Pessac, Bouliac, etc. 
La chenille, Juillet, Septembre. Se nourrit de racines d’Ulex 
Europœus. 

* 409. Armigera Hub., Bdv. 1308. Juillet à Septembre. Pessac, 

Bouliac , etc. La chenille, Octobre sur l’Ulex Europœus. 

Les chenilles de Peltigera et d Armigera sont carnivores. 

Tome XXII. 4 


(54) 
* 4110. Marginata F., Bdv. 1309. Juillet, Août. Dans les prairies, à 
la miellée. Lormont. La chenille, Août et Septembre, sur 
l’'Ononis repens. 


MKXVEIE. Hribus ACONTEIDES. 
Genus ACONTIA Ochs. , Bdv. 


* AM. Solaris W. V., Bdv. 1822. Juin, Juillet. Vole le jour sur les 
mauves fleuries. Pessac, Bouliac, etc. Partout. La ehenille, 
Août, sur les Trifolium, Taraxacum , Malva sylvestris 

M2. Euetuosa W. V., Bdv. 1323. Mai, Août. Coteaux calcaires, 
prairies arides. Pessac, Bouliac. La chenille, tout le Printemps , 
sur les Plantago major , Malva sylvestris. 


KEÉKEX. Mribus CATOCALIDES. 
Genus CATEPHIA Ochs., Bdv. 


* 113. Masmburii Bdv., 1325. Août, Septembre. Prairies humides, 
lieux plantés de saules. A la miellée. Bruges, Lormont, etc. 

414. ÆAlelimiséa F., Bdv. 1326. Mai, Juin. Sur les chênes, dans les 
bois ; sur les ormeaux, dans les promenades. Mérignac, Pessac, 
Bordeaux. À la miellée. La chenille, Juillet, Août. Très-délicate 
à élever. Sur les Quercus et Ulmus campestris. 


Genus CATOCALA Ochs., Bdv. 


M5. Fæaxämi L., Bdv. 1327. Août, Septembre. À été trouvée plu- 
sieurs fois à Mérignac, Talence, et même sur les ormes des pro- 
_menades de la ville. La chenille vient en Mai, Juin, Juillet, sur 

les Populus. 

M6. Elocnta Esp., Bdv. 1328. Août, Septembre. Partout. Bouliac, 
Mérignac, Caudéran, etc. La chenille, Juin, Juillet, sur les 
Populus, Salix alba. 

M7. Nespéa L., Bdv. 1329. Août, Septembre. Partout. Bouliac, Bru- 
ges , Léognan. La chenille, sur les Populus, Salix alba. 

Ces deux dernières viennent très-bien à la miellée. 

118. Dilecta Hub., Bdv. 1330 Juillet. Bois de chênes. Pessac, Méri- 
gnac, Gradignan , le Bouscaut. La chenille, Mai, Juin, sur les 
Quercus robur. 


( 09 ) 

119. Sponsnr L., Bdv. 1331. Juillet. Bois de chênes. Pessac, le Bous- 
caut. Beaucoup plus rare que la Dilecta. La chenille, Mai, Juin, 
sur les Quercus robur. 

120. Promissa F., Bdv. 1332. Juin, Juillet. Bois de chênes. Pessac, 
Mérignac, le Bouscaut, ete. La chenille, en Mai, sur les Quér- 
cus robur. 

121. Conjumeta Esp., Bdv. 1333. Août. Cette Catocala a été prise 
dans l’arrondissement subsidiaire de la Gironde, (art. 60 du 
règl. ) à Royan (Char.-Inf.), dans les bois de chênes. 

* 122, Optata G., Bdv. 1334. Août. Aubarèdes, lieux plantés de saules. 
Bruges , Bègles , La Bastide. À la miellée. La chenille, sur les 
Populus, Salix alba. 

423. Eleeta Bork., Bdv. 1336. Août. Aubarèdes , lieux plantés de san- 
les, bois de chênes. Bruges, La Bastide, Fargues, Léognan. A la 
miellée. La chenille, sur les Populus, Salix alba, capreæa. 

. Agasmos Hub., Bdv. 1341. Juillet. Bois de chênes. Pessac, le 
Bouscaut, our 

425. Paramieaprn L., Bdv. 1342. Juillet. La Brède, dans les bois. 

Le chenille, en Mai, sur Prunus spinosa. 


Genus OPHIUSA Ochs., Bdv. 


126. Fasmaris :F., Bdv. 1350. Mai, Juin. Dans les broussailles des 
bois. Vole très-bien le jour. Pessac, le Bouscaut. La chenille, 
Juin , Juillet. En battant les chênes. Est assez commune et facile 
à élever. 


* 427. Craceæ F., Bdv. 1358. Septembre. Côteaux calcaires. En bat- 
tant et à la miellée. Fargues, Lormont. 


428. Algära L,, Bdv. 1363. Mai à Août. En battant les bois. Pessac, 
Bouliac. La chenille, d’après les auteurs , vit sur le Prunica 
granalum. 

Cet arbuste étant très-rare, et le papillon très-répandu, je 
pense qu'il doit avoir une autre nourriture. 


XL. Tribus NOCTUOPHALÆNEDES. 


Genus EUCLIDIA Ochs. Bdv. 


429. MEi L., Bdv. 1374. Mai, Juin, Juillet. Terrains calcaires. Prairies 
sèches. Vole Le jour. Cenon , Fargues , Bonnetan. 


(56 ) 
430. Gliphien L., Bdv. 1377. Avril, Mai, Juillet, Août. Dans les 
prairies. Partout. La chenille, Juin, Septembre, sur divers 
trèfles. 


Genus ANTHOPHILA Bdv. 


431, Ænea W. V., Bdv. 1385. Avril, Juillet. Landes, champs de blé. 
Le Bouscaut, Moulon, etc. 

* 432. Argentula Bork, Bdv. 1399. Mai à Août. Dans les herbes. Par- 
tout. Pessac, Blanquefort , Gradignan. 


Genus AGROPHILA Bdv. a 


433. Sulphurea Hob., Bdv. 1409, Mai à Août. Prairies arides, côtes, etc. 
Fargues. La chenille, Juin, Juillet, sur les Convoloulus arvensis. 

* 434. Unea W. V., Bdv. 1402,. Août. Dans les marais, en battant les 
broussailles. Bruges, etc. 


Genus ERASTRIA Bdv. 
* 435. Fuseula W. V.. Bdv; 1404. Été. Partout. 
Genus STILBIA St. , Bdv. 


* 13%. Stagnieola Tr., Bdv, 1409. Septembre. Bois de chêne. A la 
miellée, Pessac, etc. 


GEOMETRÆ. 
Genus GEOMETRA Bdv. 


437. Papillonaria L., Bdv. 1415. Mai, Juin, Juillet. Bois de chênes, 
haies. Pessac, Gradignan. La chenille, Juin , Septembre, sur les 
Coryllus avellana, Salix caprea. 


Genus PHORODESMA Bdv. 


438. Sumaragdaria Esp., Bdv. 1416. Juin, Juillet. Haies, Bouquets 


de ronces. Au Bouscaut. La chenille, en Mai, sur le Rubus fru- 


licosus. 
539. Bajularia Esp. Juin. Bois de chênes. Pessac. La chenille, en 
Mai, sur le Quercus robur. 


(51) 


Genus HEMITHEA Dup., Bdv. 


:10. Coronillaria Hub., Bdv. 1421. Juillet, Août. Bois. Pessac, le 
Bouscaut. La chenille, Avril, Mai, sur l'Ulex Europœus. 

M. Vernaria W.V., Bdv. 1422. Avril, Juin. Au crépuscule, vole sur 
les haies. La Bastide , Bouliac. La chenille, Mai, Septembre, sur 
les Prunus spinosa et Quercus robur. 

442. Viridaria Hub., Bdv. 1493. Mai, Juin, Juillet. Landes. À Saint- 
Médard. 

413. Herbaria Hub., Bdv. 1495. Mai. En battant les haies. Bouliac, 
Floirac. La chenille, en Octobre, sur le Prunus spinosa. 

* 444. Æruginaria W. V., Bdv. 1426. Mai. Partout: En battant les 
haies. La chenille, Juillet, Octobre, sur les Alnus glutinosa et 
Carpinus betulus. 

Cette espèce a été longtemps confondue avec Putataria L. qui 
vient en Allemagne. 

445. Æstivaria Esp., Bdv. 1428. Juin, Juillet. En battant les haies. 
Bouliac, Floirac , etc. La chenille, Juin, sur les Quercus robur et 
Prunus spinosa. 

446. Buplevaria W, V., Bdv. 1429. Mai, Juin. En battant les haies. 
Partout. Bouliac, etc. La chenille, Juin , sur les Prunus, Cratægus. 


Genus METROCAMPA Lat., Bdv. 


447. Margaritaria L., Bdv. 1432. Mai, Juin, Septembre. En battant 
les bois de chênes, les haïes. Pessac, Bruges, Fargues, Floi- 
rac, etc. La chenille, Avril, Juillet, etc., sur le Quercus robur. 

Le Margaritaria varie beaucoup pour la taille. En Septembre, 
époque de sa seconde apparition, les individus sont plus petits 
qu’en Mai et Juin. 


Genus URAPTERIX Kirby, Bdv. 


148. Sambuearia L., Bdv. 1435. Juillet. Haies, jardins, bois. Sur 
les sureaux. Le Bouscat, le Haiïllan , etc. La chenille, Avril, Mai, 
a passé l’Hiver. Se nourrit de Sambucus nigra, Prunus spinosa , 
Lonicera xylosteum et peryclimenum. 


(58) 
Genus RUMIA Dup., Bdv. 


449. Cratægaria Hub.; Bdv. 1436. Mai à Septembre. Dans les haies. 
Partout. La chenille , toute l’année, sur les Cratægus et Prunus. 


Genus ENNOMOS Dup., Bdv. 


450. Syringaria L., Bdv. 1437. Juin, Août. En battant les haies. 
Bouliac, Floirac. La chenille, Juin, Juillet, Septembre, sur les 
Liqustrum vulgare, Jasminum officinalis, Syringa vulgaris. 

451. Dolabraria L., Bdv. 1438. Avril, Mai, Juillet. Bois de chênes. 
Pessac, Gradignan, etc. La chenille, Juin , Juillet, sur les Quer- 
cus robur et Tillæa Europæa. 

2. Parallelaria W. V., Bdv. 1443. Juin, Juillet. En battant les 
haies. Au crépuscule. La Bastide, Lormont. La chenille, Juin, 
sur les Salix et Corylus avellana. 

* 453. Advenaria Esp., Bdv. 1444. Juin, haies. La Bastide. La che- 

nille , sur le Cratæqus. 

154. Eunaria W. V., Bdv. 1446. Mai, Juillet. Bois de chênes. Pessac. 
La chenille, sur les Quercus robur et Ulmus campestris. La che- 
nille de la deuxième génération passe l’Hiver en chyysalide. 

155. Delunaria Hub., Bdv. 1447. Avril. Bois de chênes, haies d’au- 
bépine. Partout. La chenille, Mai, sur le Prunus spinosa. 

156. Erosaria W.V., Bdv. 1451. Juillet. En battant les bois de chênes. 
Pessac. La chenille, Août, Septembre, sur les Quercus robur, 
Pyrus vulgaris. | 

* 457. Hlearia H. Gey., Bdv. 1552. Mai, Septembre. Bois. A la 
miellée. 

* 458. Tiliaria Hub., Bdv. 1454. Août, Septembre. En battant les 
bois de chênes. Pessac. La chenille, en Juillet, sur les Quercus 
robur et Ulmus campestris. 

159, Prunaria L., Bdv. 1458. Mai, Juin, Juillet. Bois de chênes, 
haies. Bouliac , Gradignan, Léognan, etc. La chenille, en Mai, 
sur les Prunus spinosa, domestica, cerasus, Pyrus vulgaris, 
Corylus avellana , Carpinus betulus. 

Var. Corylaria Esp., Bdv. Même époque et mêmes localités que le 
type. Beaucoup plus rare. 


es 
Qt 
19 


(99 ) 


Genus HIMERA Dup., Bdv. 


* 460. Pennaria L., Bdv. 1459. Octobre, Novembre. Bois de chênes, 
haies de pruneliers. Pessac, Bouliac. La chenille, en battant en 
Mai, sur les Quercus robur, Prunus spinosa, Carpinus betulus. 


Genus CROCALLIS Tr., Bdv. 


461. Elinguaria L., Bdv. 1462. Août. Haies, champs de genêts. 
Partout. La chenille, en Mai, sur les Quercus robur, Cratægus, 
Prunus, Genista scoparia. 


Genus MACARIA Cur., Bdv. 


462. Alternaria [Mub., Bdv. 1472. Avril, Mai, Août. Bois, marais. 
Partout. La chenille, Avril, Juillet, sur l’Alnus glutinosa. 


Genus ASPILATES Tr., Bdv. 


163. Calabraria Esp., Bdv. 1480. Juin, Juillet. Landes, côtes. 

Pessac, Bouliac, Fargues, Saint-Émilion, etc. 
La chenille, très-difficile à élever, en Avril, sur l’Asphodelus 

albus. 

464. Parpuraria L., Bdv. 1481. Juin, Août. Landes, côtes, champs 
de genêts. Bouliac, Pessac, Lamothe, etc. La chenille, Avril, 
Mai, sur l’Anthemis nobilis. 

165. Citraria Hub., Bdv. 1491. Avril, Mai. Bois, champs de genêts. 
Pessac. La chenille, en Avril, sur diverses graminées. 

* 466. Gloriosaria Bdv. 1494. Juin. Landes humides. Léognan, 
Cestas. En battant. 


. Genus FIDONIA Bdv. 


467. Piniaria L., Bdv. 4510. Avril, Mai. Bois de pins. Vole à la cime 
des arbres. Pessac, Mérignac, Bruges. La chenille, Août, Sep- 
tembre, Octobre. Sur le Pinus maritima. La chrysalide, tout 
l’Hiver, au pied de ces arbres et du Pinus pinaster. 


( 60 }) 

168. Atomaria L., Bdv. 1515. Avril, Mai, Juillet, Août. Partout. La 
chenille, Juin, Septembre, sur les Scabiosa arvensis et sylvatica, 
Artemisia vulgaris. La deuxième génération passe l’Hiver en 
chenille. 

Genus EUPISTERIA Bdv. 


469. Concordaria Hub., Bdv. 1516. Mai. Champs de genèêts, volant 
sur les fleurs. Pessac. La chenille, en Septembre, sur le Genista 
tinctoria. 

470. Hepararia Hub., Bdv. 1520. Mai, Juin. Bords des ruisseaux, 
haies. Pessac , Mérignac, Fargues, etc. La chenille, Août, Sep- 
tembre. Sur les Salix et Alnus glutinosa. 


Genus HIBERNIA Lat., Bdv. 


* 471. Rupicapraria W. V., Bdv. 1527. Février. Haies. Pessac, 
Bouliac, Floirac, etc. La chenille, en battant les haies. Avril, 
Mai. Sur les Cratægus et Prunus. 

* 472. Progemmaria Hub., Bdv. 1529. Première quinzaine de Mars. 
Bois, Peupliers. Blanquefort, etc. La chenille, Mai, Juin. Sur le 
Cralægus. 

* 473. Defoliaria L., Bdv. 1530. Mars, contre les arbres. Partout. La 
chenille, en Mai, sur les Cratægus, Prunus, Quercus. Cette 
espèce varie beaucoup. 

* 474. Leucophæaria W. V., Bdv. 1531. Février. Sur les haies. A 
Pessac, Mérignac. La chenille, en Juin, sur le Quercus robur. 

* 475. Bajaria Hub., Bdv. 1532. Décembre, Février. Sur les haies. 
Pessac, Bouliac. La chenille, Mai, Juin. Sur les Cratægus et les 
Prunus. Cette espèce varie beaucoup pour les teintes de ses cou- 
leurs. C’est la plus commune du genre. 

+ 476. Pilosaria W. V., Bdv. 1533. Février. Contre les ormeaux 
des promenades. A La Bastide. La chenille, Juillet, sur les 
Ulmus campestris , Prunus spinosa , Quercus. 


Genus AMPHIDASIS Dup., Bdv. 


* 4717. Hirtaria L., Bdv. 1542. Avril. Bois de chênes. Pessac, Méri- 
gnac. La chenille, de Juin à Septembre. Sur les Tilleæa europæa, 
Quercus robur, Ulmus campestris. 


(61) 

478. Betularia L., Bdv. 1543. Juillet, Août. Bois, promenades plan- 
tées d’ormes ou de tilleuls. Pessac, Bordeaux, etc. La chenille, 
même localité. Sur les Ulmus, Tillæa, Quercus. Très-difficile à 
élever. 

#79. Prodomaria Fab., Bdv. 1544. Février, Mars, Avril. Contre 
les chênes, dans les bois. Pessac, le Bouscaut. La chenille, 
Juin, Juillet. Sur les Quercus robur , Ulmus campestris, etc. 

Cette espèce varie beaucoup pour la couleur du fond. 


Genus BOARMIA Tr., Bdv. 


* 80. Repandaria W. V., Bdv. 1547. Avril, Juillet. En battant les 
bois de chênes. Très-rare. Pessac. 

* 481. Roboraria W. V., Bdv. 1548. Avril, Juillet. En battant les 
bois de chênes, à Pessac, Gradignan, etc. La chenille, Mai, 
Août. Sur les Quercus robur. 

432. Consortaria F., Bdv. 1551. Avril à Juillet. Bois de chênes. Par- 
tout. La chenille, Mai, Juin, Août, Septembre. Sur les Quercus 
robur, Populus et Salix. 

185. Rhomhoïdaria W. V., Bdv. 1554. Mai, Juin, Septembre. Par- 
tout , à la corde à miel. La chenille, Mai, Juillet. Sur les Pru- 
nus et Cratægus, etc. La seconde génération passe l’hiver en 
chenille. 

* 484 Cinetaria W. V., Bdv. 1559. Avril, Mai, Juillet, Août. En frap- 
pant les chênes. Pessac, Gradignan, etc. La chenille, Mars, 
Juin. Sur l’Erica vulgaris. La seconde génération passe l’hiver en 
chenille. 

* 485. Consimilaria Dup., Bdv. 1560. Avril. En battant les chênes. 
Pessac. Je n’ai trouvé cette Boarmie qu’une seule fois. 

486. Petrificaria Dup., Bdv. 1567. Avril, Juillet à Septembre. Contre 
les murs. Au crépuscule. À la miellée. Pessac, Moulon, Lor- 
mont. 

" 487. Lichenearia W. V., Bdv. 1510. Juillet. Contre les arbres. 
Pessac, Gradignan, etc. La chenille, Mai. Sur les Lichens 
(Omphaloïdes ). 

Tome XXII. 5 


( 62 ) 
Genus TEPHROSIA Tr., Bdv. 


488. Crepuscularia W. V., Bdv. 1571. Mars, Avril, Juillet, Août. 
Contre les murs et les pins. Bruges, le Bouscat. La chenille, 
Mai, Août, Septembre. Sur les Prunus spinosa, Salix, Sambu- 
cus nigra, elc. 

* 489. Ponctularia Hub., Bdv. 14574. Avril, Mai, Juillet. Aulnes, 
fourrés près des ruisseaux. Pessac, le Tondu, etc. La chenille, 
Juin. Sur l’Alnus glutinosa. 


Genus GNOPHOS , Bdv. 


* 490. Obseuraria Bvb., Bdv. 1589. Septembre. En battant les gené- 
vriers. Roches, terrains arides, côtes. Fargues, Bonnetan. 

* 491. Panessacnria Nob. Juin, Juillet. En battant les broussailles 
des Landes. Au Haiïllan , Saint-Médard. 

Cette phalène remarquable a été découverte par M. Panessac 
qui, le premier, a constaté son existence dans la Gironde, en 1850. 

Beaucoup plus petite que l’Obscuraria ; elle est d’une couleur 
noire, plus ou moins luisante, souvent très-charbonnée; avec 
deux lignes ondulées formant le cercle aux ailes supérieures, 
pointillées de petits atomes blancs, quelquefois très-nombreux, 
et dont le dernier vient se perdre à la base des inférieures. La 
frange des quatre ailes est fort courte, et les taches qu'on 
observe sur chacune d’elles sont presque toujours pleines ou mal 
indiquées, au lieu d’être bien marquées, comme dans sa congé- 
nère dont la frange est bien plus allongée. 

La couleur et les dessins de la femelle sont absolument identi- 
ques à ceux du mäle. 

Cette nouvelle Géomètre habite une localité très - restreinte de 
la lande du Haiïllan où elle vole en petit nombre parmi les Pina- 
tris maritima , vers la fin de Juin et Juillet. J’ai vainement cher- 
ché à me procurer la chenille. 

Ainsi, j'établis ici cette jolie phalène comme espèce nouvelle 
intermédiaire entre l’'Obscuraria et la Pullaria, la différence 
des dessins est assez tranchée pour faire apercevoir qu’elle n’ap- 
partient ni à l’une ni à l’autre espèce. Ce serait à tort qu'on la 


(63) ) 
considérerait comme une variété locale de l’'Obscuraria : 1° Elle 
ne parait pas à la même époque; 2° les localités sont bien loin 
d’être identiques; 3 dans la localité où l’on trouve l’Obscurariu, 
jamais on ne trouve l’autre, et vice versà ; 4° jamais on n’a trouvé 
de variétés intermédiaires. 


Genus EUBOLIA, Bdv. 


* 492. Partitaria Hub., Bdv. 1601. Juin, Juillet, Septembre. Dans 
les broussailles des côtes. Fargues, Bonnetan. 

* 493. Artesiaria W. V., Bdv. 1603. Juillet à Septembre. Bois taillis. 
Pessac, Lormont. A la miellée. 

494. Palumharia W. V., Bdv. 1606. Mai, Septembre. Bois. Pes- 
sac, etc. 

195. Mensuraria W. V., Juillet. En battant les broussailles, dans les 
côtes. Fargues, Bonnetan. La chenille, Avril. Sur le Prunus 
sposa. 

* 496. Periholaria Dup., Bdv. 1610. Septembre. Bois, landes. Pes- 
sac, le Bouscat, etc. La chenille, en mai. Sur l’Ulex europæus. 

497."Bipunetaria W. V., Bdv. 1616. Juillet, Août. Dans les bois. 
Partout. La chenille , Juillet. Sur le Lolium perenne. 

498. Miaria W. V., Bdv. 1627 Mai, Août, En battant les haies. Au 
crépuscule. Bouliac, Floirac, Cenon. La chenille, en Mai. 
Sur le Quercus. 

* 199. Nebularia Bdv. 1617. Mars. Contre les murs, les clôtures. 
Cette Géomètre a été trouvée pour la première fois, dans le dé- 
partement, par M. H. Gaujac, en 1855. 

500. Ferrugaria W. V., Bdv. 1628. Avril, Juillet. Bois, broussail- 
les. Pessac, etc. La chenille, Juin , Octobre. Sur l’Alsine media. 
La seconde génération passe l'hiver en chrysalide. 


Genus ANAITIS Dup., Bdv. 


501: Plagiaria Bdv. 1633. Mai, Juin. Partout. 
Le type de la Plagiaria est très-grand dans la Gironde, prin- 
cipalement ceux que l’on prend dans les landes. 


Genus LARENTIA Bdv. 


* 502. Dubitaria Bdv. 1637. Septembre. Dans les creux des murs des 
rochers, des arbres. Bouliac, le Bouscat, etc. 


(64) 

+ 503. Rhammaria Bdv. 1641. Mai, Juin. En battant les bois. Au 
crépuscule. Bouliac , Floirac , Bruges. 

504. Vitalbaria Dup., Mai, Juin. En battant les bois. Vole au cré- 
puscule avec la Rhamnauria. 

* 505. Gemmaria Bdv. 1644. Août. À la miellée. Dans les marais, 
aux bords des rivières. Bruges , Lormont. 

* 506. Fluviaria Août. À la miellée. Dans les marais, aux bords des 
rivières. Bruges, Lormont. 

507. Bilinearia Bdv. 1647. Mai à Juillet. Partout. 

C’est une des Géomètres qui abondent le plus dans le départe- 

ment. Variations insignifiantes. 

* 508. Tersaria Bdv. 1652. Mai. Trouvée une seule fois, par MM. 
Serisié frères, contre un mur. 

* 509. Lugdunaria H.-$S., Juin. Landes d’Arlac. 

Cette espèce, découverte à Lyon par M. Millière, et déterminée 

par M. Herrich-Schæffer, a été trouvée dans la Gironde, en 1856, 
par MM. Serisié frères. 

* 510. Ligmaria Bdv. 1656. Août. En battant les haies, les brous- 
sailles. Dans les marais. Bruges, Blanquefort. 

* 514. Petraria Esp., Bdv. 1659. Avril, Mai, Juin. En battant les 
fourrés des bois, à Pessac. 

* 512. Psittaearia Bdv. 1667. Mai, Septembre. Bois taillis. Pes- 
sac, etc. La chenille, Juillet, Octobre, sur le Quercus robur. 

513. Dilutaria Bdv. 1669. Octobre, Novembre. Haies. Bouliac, etc. 
La chenille, Mai, Juin. Sur les Quercus, Ulmus, Cratægus, etc. 
Le papillon varie beaucoup. 

* 54. Brumaria Esp., Bdv. 1670. Décembre, Janvier. Contre les 
arbres, dans les haies. Pessac, Mérignac. La chenille, Mai. Sur 
les Prunus spinosa, Cratæqus. 


Genus LOBOPHORA Curt., Bdv. 


‘515. Sexalaria PBdv. 1677. Juin. Marais. Sur le Salix alba. Blan- 
quefort, etc. À la miellée. 
*516. Sparsaria PBdv. 1685. Octobre. Marais. À la miellée. 


Genus EUPITHECIA Curt., Bdv. 


517. Centaurearia Bdv. 1694, Août, Septembre. À la miellée. Lor- 


(65) 

mont. La chenille, Juin, Juillet. Sur les Centaurea jacea et nigra, 
Ononis spinosa. 

* 518. EInnotaria Bdv. 1699. Mai, Juin. Partout. 

* 519. Hospitaria Bdv. 1701. Septembre, Octobre. Endroits maréca- 
geux. À la miellée. 

*520. Pusillaria Bdv. 1708. Juillet. Landes. En battant les bruyères. 

*521. Pauxillaria Ramb., Bdv. 1711. Septembre. Marais. A la 
miellée. 

* 522. Tamarisciaria Bdv. 1712. Septembre. Endroits marécageux. 
Blanquefort, etc. À la miellée. 

* 523. Pammilaria Bdv. 1713. Juin. Bois de chênes, en frappant. A 
Pessac, le Bouscaut. | 

*524. Austeraria Bdv. 1714. Septembre. Côtes, Fargues. En battant 
les haies. 

Ces deux dernières Eupithecia m’ont été communiquées par 

MM. Serisié frères. 

* 525. Indigaria Bdv. 1716. Septembre. Marais. A la miellée. 

* 526. Minutaria Bdv. 1718. Mai, Juin. En battant les chênes. Pessac. 

* 527. Denotaria Bdv. 1719. Dans les bois. Pessac, etc. 

528. Linmaria Bdv. 1720. Mai. Vole avec la précédente. 


Genus CHESIAS Bdv. 


* 529. Spartiaria Bdv. 1738. Octobre, Novembre. Champs de genêts. 
Saint-Médard , le Haïllan. La chenille, Mai, Juin. Sur le Genista 
tinctoria. 

* 530. Obliquaria W. V., Bdv. 1739. Avril, Août. Champs de genêts. 
Saint-Médard. À la miellée, à Lormont. 

*531. Chenopodiaria Bdv. 1746. Avril. Haies. Floirac. 


Genus CIDARIA Tr., Bdv. 


532. Rubidaria Bdv. 1751. Mai, Juin. Sur les côtes, en battant les 
haies. Bouliac, Floirac. La chenille, Avril; a passé l’hiver. Se 
nourrit de Cratæqus, Prunus, etc. 

*533. Derivaria Bdv. 1760. Avril. Haies. Floirac. 

834. Empluvaria Bdv. 1767. Avril à Juin. En battant les bois de 
chênes. 

635. Piearia Bdv. 1777. Mai, Juin. Partout. La chenille, Octobre. 
Sur les Prunus et Cratægus. 


( 66 ) 
Il est certain que la Gironde doit renfermer bien d’autres 


Cidaria; cependant, malgré mes recherches, je n’ai pu en dé- 
couvrir d’autres. 


Genus MELANIPPE Dup., Bdv. 


536. Maeularia L., Bdv. 1779. Avril, Mai. En battant les haies, les 
broussailles. Partout. La chenille, Août, Septembre, sur les 
chicoracées. 

537. Marginaria Hub., Bdv. 1780. Mai, Juin. Lieux frais, près des 
ruisseaux. La chenille, Avril, Mai, sur le Salix 

538. Rivularia Bdv. 1785. Juin. Dans les bois. La chenille, Septem- 
bre, sur les Quercus robur. 

539. Hydraria Bdv. 1786. Mai. Lieux frais, bords des ruisseaux. 
Dans les bois. Pessac. La chenille, selon les auteurs, sur les 
Quercus robur et Alnus glutinosa, en Septembre. 

840. Rivaria Bdv. 1787. Mai, Juin. En battant les haïes. La chenille, 
Septembre, sur les Quercus robur, Prunus spinosa. 

51. Alchemillaria Bdv. 1788. Mai à Août, en battant les haies, 
dans les marais. Bruges, etc. 


Genus MELANTHIA Bdv. 


* 542. Ocellaria Bdv. 1792. Mai, Août. Bords des ruisseaux. Pessac. 


La chenille, Juillet, Octobre, sur le Galiem verum. 

* 543. Fluctuaria Bdv. 1793. Mai, Juin. En battant les haies. Pes- 
sac, etc. 

* 544. Blandiaria Bdv. 1796. Juillet. En battant les buissons. Pes- 
sac, Gradignan , Mérignac, Talence, etc. 

543. Rubiginaria Bdv. 1800. Juin, Juillet. Plantations d’aulnes 
haies près des ruisseaux. Pessac, le Tondu. La chenille, en 
Mai, sur l’Alnus glutinosa. 

546. Adustaria Bdy. 1802. Mai, Juillet En battant les haies. Pes- 
cac. La chenille, sur l'Evonymus europœus. 


Genus ZERENE Dup., Bdv. 


547. Grossularia Pdv. 1804. Mai à Juillet. Dans toutes les haies. 
Partout. La chenille, Avril, Mai, sur les Prunus, Cratægus, 
Ribes, etc. 

C’est une des Géomètres les plus communes du département. 


(67) 
* 548. Pantaria L., Bdv. 1806. Mai. Contre les peupliers, à Bègles. 
La chenille, Octobre, à Bègles, sur le Fraxinus excelsior. 


Genus CABERA Dup., Bdv. 


549. Pusaria L., Bdv. 1809. Avril, Mai, Juillet, Août. Lieux frais, 
bords des ruisseaux. Pessac, etc. La chenille, Juin, Septembre, 
sur les Sulix , Alnus alutinosa. 

* 550. Albeolaria Ramb., Bdv. 1810. Juin. Je n’ai pris cette Géo- 
mètre qu’une seule fois, en battant des chênes, à Pessac. 

* 551. Exanthemeraria Esp., Bdv. 1311. Juin; Juillet. 

552. Contaminaria Hub., Bdv. 1815. Avril, Mai, Août, Septembre. 
Bois. Pessac, Mérignac. La chenille, Octobre, Juin, sur les 
Quercus robur. 

553. Permutaria Hub., Bdv. 1816. Avril, Août. Lormont. A la 
miellée. La chenille, Juin, Octobre, sur l’Alnus glutinosa. 

*554. Commutaria Hub., Bdv. 1817. Mai, Juin. Contre les peu- 

pliers. Bègles. 

* 555. Ononaria Botk, Bdv. 1820. Juin, Juillet. Coteaux arides. En 
battant les broussailles, les genévriers. Fargues, Bonnetan. La 
chenille, en Octobre, sur l’Ononis arvensis. 


Genus EPHYRA Dup., Bdv. 


* 556. Trilinearia Botk, Bdv. 1822. Juillet. En battant les haies. Pes- 
sac, eic. 

* 357. Punetaria L., Bdv. 18923. Avril, Mai, Août. Bois, haies , etc. 
Partout. La chenille, Juin, Septembre, sur le Quercus robur. 

* 558. Poraria Tr., Bdv. 1825. Mai à Juillet. En battant les haies. 
Bouliac, Floirac. La chenille, Septembre, sur les Quercus robur, 
Cratæqus et Prunus spinosa. 

559. Grbieularia Hub., Bdv. 1830. Avril à Juin. Dans les bois de 
chênes. Pessac. 

_ 560. Gmicronaria W. V., Bdv. 1831. Mai, Juin, Août, Septembre. 

En battant leshaies. Fargues, Bouliac, Floirac. La chenille, Juin, 

Juillet, Octobre , sur les Quercus robur , Prunus spinosa. 


( 68 ) 
Genus ACIDALIA Bdv. 


* 561. Temeraria Hub., Bdv. 1832. Juin. En battant les haies. Pes- 
sac, Bouliac. La chenille, Septembre, Octobre, sur le Prunus 
spinosa. 

562. Ornataria Esp., Bdv. 1835. Avril à Juillet. Dans les prairies 
sèches, les terrains arides. Au Tondu, etc. 

+563. Decoraria Hub., Bdv. 1836. Mai, Juin. Prairies sèches, ter- 
rains arides. Au Tondu, Fargues, etc. 

* 564. Immutaria Hub., Bdv. 1838. Été. Partout. En battant. 

* 565. Emmisaria. Juillet. Haies, fourrés. En battant. La Sauve. 

Cette espèce, dont je n’ai trouvé le nom dans aucun auteur , a 
été prise dans la 1° quinzaine de Juillet par MM. Sérisié frères. 

* 566. Ineanaria Hub., Bvd. 1841. Mai à Juillet. En battant les haies. 
Partout. La chenille, Octobre , sur le Prunus spinosa. 

* 567. Seutularia Hub., Bdv. 1850. Août. Marais. Blanquefort. A la 
miellée. 

* 568. Bisetaria Dup., Bdv. 1851. Mai à Juillet. En battant les haies. 
À Bouliac. La chenille, Octobre , sur le Prunus spinosa ; passe 
l'hiver engourdie. 

* 569. Lævigaria Hub.. Bdv. 1853. Août. Landes ; Caudéran. En bat- 
tant au crépuscule. 

Var. Q. Même localité que le type. 

*570. Cireuitaria Hub., Bdv. 1856. Août. Vole, au crépuscule, 
dans les prairies. Bruges. 

571. Auroraria Hub., Bvd. 1860. Juillet. Landes. Saint-Médard, 
Castelnau, Cestas. La chenille, Juin, sur le Pluntago major. 

572. Rufaria Hub., 1864. Juillet. Prairies sèches. Pessac, etc. La 
chenille en Mai, sur diverses graminées. 

573. Pallidaria Hub., Bdv. 1865. Juillet. Prairies sèches et arides. 
Vole avec la précédente. Pessac, Eysines. 

574. Rubricaria Hub. Bdv., 1866. Coteaux secs. Fargues. 

+575. Ossearia Hub., Bdv. 1877. Mai, Juin. En battant les haies. A 
Bouliac. 

“576. Palearia Ramb., 1878. 

577. Decoloraria Bdv. 1882. Mai, Juin. En battant les haies, au 
crépuscule. Pessac, Bruges. La chenille, Septembre, sur le 
Prunus spinosa. 


(69) 


578. Candidaria Hub., Bdv. 1885. Avril à Juin. En battant les haies. 
Bouliac. La chenille, Août, sur les Quercus robur et Carpinus 
belulus. 

579. Byssinaria Bdv. 1886. Juillet. En battant les haies. Bouliac, 
Fargues, etc. Cette espèce a été jusqu'ici indiquée comme étant 
spéciale à la Hongrie; elle a également été trouvée, dans le dé- 
partement des Landes, aux environs de Dax, par M. F. Lafaury. 

* 580. Punetaria Dev. Bdv. 1898. Avril. Dans les bois. Pessac, etc. 
La chenüle, Août, Septembre, sur le Quercus robur. 

* 581. Litigiosaria Ramb., Bdv. 1896. 

* 582. Remutaria Hub., Bdv. 1907. Juillet. En battant les haies et 
les broussailles. Bouliac, Floirac. 

* 583. Degeneraria Hub., Bdv., 1909. Juin. Partout. En battant. 

584. Aversaria Hub., Bdv. 1910. Mai, Juillet. En battant les haies. 

* 585. Emarginaria Hub., Bvd. 1911. Juillet. Bois de chênes humi- 
des. Pessac. La chenille, sur Convolvulus sæpium, Galium 
verum , en Juin. 

* 586. Prataria Bdv. 1917. Juin, Juillet. 

587. Emitaria Hub., Bdv. 1912. Mai, Juin. En battant les haies, les 
broussailles. Bouliac, Fargues. La chenille, Septembre, sur 
les Prunus spinosa , Cratægus oxyucantha et pyracantha. 

* 588. Emutaria Hub., 1913. Juin. En battant les haies. Partout. 


Genus TIMANDRA Dup., Bdv. 


589. Amataria L., Bdv., 1918. Mai, Juillet. En battant les haies. 
Partout. La chenille, Juin, Septembre, sur le Rumex polygonum. 


Genus STRENIA Dup., Bdv. 


* 590. Clathraria Hub. Bdv. 199. Juin, Juillet. Les côtes, les terrains 
calcaires. Bouliac, Floirac. 


Genus STHANELIA Bdv. 


‘591. Fuscaria Thunb., Bdv. 1931. Septembre. Landes. Pessac. A la 
miellée. 

“592, Hippoeastanaria Hub., Bdv. 1932. Avril, Mai, Octobre. Par- 
tout. À la miellée. Pessac, Lormont, Moulon, etc. La chenille, 
Juillet, Août; Novembre sur Erica vulgaris. 


Genus MINOA Dup., Bdv. 


593. Euphorhbiaria Hub., Bdv. 1941. Avril, Mai; Juillet, Août. 
Dans les broussailles des haies. Pessac, Bouliac, etc. La che- 
nille, Juin , Septembre sur plusieurs Euphorbes. 


ToME XXII. 6 


(70) 


TABLE ALPHABÉTIQUE DES GENRES 


CONTENUS DANS LE CATALOGUE. 


Abrostola, 52. 
Acherontia, 25. 
Acidalia, 68. 
Acontia, 54. 
Acronycta, 37. 
Agriopis, 45. 
Agrophila, 56. 
Agrotis, 41. 


Amphidasis, 60. 


Amphipyra, 39. 
Anaïitis, 63. 
Anarta, 53. 


Anthocharis, 41. 


Antophila, 56. 
Apamea, 437 
Apatura, 48. 
Arctia, 29. 
Arge, 19. 
Argynnis, 16. 
Aspilates, 59. 
Boarmia, 61. 
Bombyx, 30. 
Bryophila, 38. 
Cabera 67. 


Callimorpha, 28. 


Caradrina, 48. 
Catephia, 54. 
Catocala, 84. 
Cerastis, 50. 
Cerigo, 40. 
Chariclea, 51. 
Chelonia, 28. 
Chersotis, 40. 
Chesias, 65. 
Cidaria, 65. 
Cilix 34. 


Cleophana, 54. 
Cloantha, 51. 
Clostera, 37. 
Colias, 42. 
Cosmia, 49. 
Cossus, 33. 
Crocallis, 59. 
Cucullia, 52. 


Cymatophora, 37. 


Dasycampa, 50. 
Deilephila, 23. 
Dianthæcia, 45. 
Dicranura , 35. 
Diloba, 36. 
Diphtera, 38. 
Emydia, 26. 
Endromis, 33. 
Ennomos, 58. 
Ephyra, 67. 
Erastia, 56. 
Eriopus, 46. 
Eubolia, 63. 
Euchelia, 26. 
Euclidia, 55. 
Eupisteria, 60. 
Eupitecia, 64. 
Fidonia, 59. 
Geometra, 56. 
Gnophos, 62. 
Gonoptera , 39. 
Gortyna, 50. 
Hadena, 43. 
Harpya, 35. 
Heliophobus, 42. 
Heliotis, 53. 
Hemithea, 57. 


Hepialus, 34. 
Hesperia, 24. 
Hibernia, 60. 
Himiera 59. 
Hoporina, 50. 
Ilarus , 46. 
Larentia, 63. 
Lasiocampa, 32. 
Leucania, #7. 
Leucophasia, 414. 
Limacodes, 34. 
Limenitis, 45. 
Liparis, 29. 
Lithosia , 27. 
Lobophora, 64. 
Luperina, 42. 
Lycæna, 14. 
Macaria, 59. 
Macroglosa, 23. 
Mania, 39. 
Melanippe, 66. 
Melanthia , 66. 
Melitæa, 46. 
Metrocampa 57. 
Minoa, 69. 
Miselia, 45. 
Mythimna, 47. 
Naclia, 27. 
Nemeobius, 45. 
Nemeophila, 28. 
Noctua, 41. 
Notodonta, 36. 
Nudaria, 27. 
Odonestis, 32. 
Ophiusa, 55. 
Orgya, 30. 


Orthosia, 48, 
Papilio, 10. 
Phlogophora, #44. 
Phorodesma, 56. 
Pieris, 40. 
Placodes, 46. 
Plastenis, 37. 
Platypteryx, 34. 
Plusia, 53. 
Polia, 46. 
Polyommatus, 43. 
PolyphϾnis, 46. 
Procris, 26. 
Psyche, 34. 
Pterogon, 23. 
Ptilodontis, 35. 


CM) 


Pygæra, 36. 
Rhodocera, 12. 
Rumia, 58. 
Rusina, 39. 
Saturnia, 33. 
Satyrus, 49. 
Segetia, 39. 
Sesia, 22. 


Smerinthus, 25. 


Spœlotis, 41. 
Sphinx, 24. 
Steropes, 20. 
Sthanelia, 69. 
Stilbia, 56. 
Strenia, 69. 
Syricthus, 21. 


Tephrosia, 62. 
Thanaos, 22. 
Thecla, 12. 
Thyathyra, 47. 
Thyris, 22. 
Timandra, 69. 
Triphæna, 40. 
Urapterix, 57. 
Vanessa, 48. 
Xanthia, 50. 
Xylina, 51. 
Xylocampa, 51. 
Zerene, 66. 
Zeuxera, 33. 
Zygæna, 95. 


H. Tremmourer. 


NOTE. 


SUR UNE TORTUE FOSSILE TROUVÉE A MOISSAC, 
ET SUR LA CONSTITUTION ET L’AGE 


DES TERRAINS TERTIAIRES DES ENVIRONS DE CETTE VILLE ; 


Par M. LAGRÈZE-FOSSAT, Correspondant, 


Toutes les fois que les collines qui bordent la rive droite du Tarn, aux 
environs de Moissac, sont entamées assez profondément pour qu’on 
mette à nu les assises qui les constituent, on est presque certain de 
découvrir des fossiles intéressants ; en 1835, j'y recueillis un {bia de 
Palæotherium magnum que je présentai au Congrès scientifique de Tou- 
louse ; en 1843, j’y trouvai une mâchoire inférieure d'Anthracotherium 
magnum, qui fut déterminée par M. Leymerie, et décrite par ce savant 
dans une note insérée dans les Mémoires de l’Académie des Sciences de 
Toulouse (4e série, tom. 1, p. 388, 1851) (1); enfin, il y a deux ans, 


(1) Une dent trouvée par M. Ducos avait déjà été rapportée à cette espèce par 
M. Gervais, dans le Bulletin de la Sociélé Philomatique de Paris, pour 1845, 
p. 110. 


(72) 
dans le mois d'Octobre, je rencontrai dans la même localité le Chélo- 
nien qui fait l’objet de cette communication. 

La colline de Laroque, d’où je le retirai après beaucoup d’efforts, 
est située à l’Ouest de Moissac, à 200 mètres seulement de la ville. Elle 
offre à sa base, à 10 mètres environ en contre-haut de l’étiage du Tarn, 
la partie supérieure d’une couche argilo-marneuse, jaunâtre, parfaite- 
ment limitée, et au-dessus de cette couche, de haut en bas, la coupe 
suivante : 


9° Calcaire en bancs d'épaisseur variable , recouvert de terre végétale 
(Diluvium. 

4° Marne argileuse , blanchâtre ; servant de transition. 

3 Sable peu concret, plus ou moins ferrugineux. 

20 Marne argileuse, jaunâtre ou blanchâtre. 

4° Sable grisâtre ou cendré, plus ou moins concret, gîte des Palæo- 
therium et Anthracotherium magnum. 


C’est dans le sable inférieur (n° 1), qu'était enfoui mon chélonien, à 
100 mètres environ de distance horizontale du lieu où avait été trouvé 
en 1843 l’Anthracotherium magnum. Il avait été mis à nu pendant l’éta- 
blissement des remblais du chemin de fer du Midi, dans un emprunt 
fait aux flancs de la colline, au lieu de Lapicade; mais, malheureuse- 
ment, toute la partie antérieure du plastron et le côté gauche antérieur 
de la carapace avaient été enlevés obliquement par la pioche qui avait 
ravalé les talus à la fin des travaux; je l’avais entièrement séparé du 
bloc de mollasse qui le renfermait et dégagé aux deux tiers à l’intérieur, 
lorsque, sous la pression du sable qui remplissait encore l’espace com- 
pris entre les parties postérieures , et que des Cicindèles avaient miné 
dans tous les sens, la carapace se sépara du plastron et se brisa en plu- 
sieurs fragments. 

Cet accident ne pouvait m'empêcher d’arriver à la détermination de 
l'espèce , car j'avais eu le soin de prendre note, à mesure que le travail 
de dépouillement avait avancé, des caractères que j'avais observés; je 
savais donc alors : 


1° Que mon Chélonien avait la carapace ovalaire et fortement bombée, 
par conséquent qu’il devait rentrer dans le groupe des tortues terres- 
tres ; 

2° Que le bord postérieur de la carapace était ondulé et si aplati, qu'il 
formait avec le plan des lobes du plastron un angle très-peu ouvert ; 


(13) 


3° Enfin que ses dimensions étant, savoir : 


LongueuredetMeirapaces. 0. . 2200 UT 0x 68 
Larsetmdeplaitearanaces 4m ei7 ne. ea 0 45 
Largeur du plastron inférieurement. . . . . . .. 0 30 
Largeur de l’ouverture antérieure. . . . . . . . . 0 10 
Écartement des lobes du plastron . . . . . . . .. O0 18 
Distance entre la carapace et le plastron, vers le 

milieu du squelette. . . . . MES MT a Delon ele 0 30 


Il n’avait d’analogue parmi les espèces vivantes que celle de l'Inde. 


Jugeant ces caractères suffisants pour reconnaître l’espèce, si elle 
avait été décrite, mais n’ayant au reste aucune donnée à cet égard, je 
consultai M. le professeur Raulin. M. Raulin me répondit immédiate- 
ment, et avec sa bienveillance habituelle, qu’il n’avait rien trouvé dans 
l’atlas de Cuvier qui prouvât que ce savant eût connu celte espèce, mais 
que, d’après les dimensions du squelette et le croquis joint à ma lettre, 
mon Chélonien pouvait bien être le même que le Testudo Isselensis de 
M. Marcel de Serres, découvert dans le département de l’Aude, au 
milieu des sables d’Issel , non loin de Castelnaudary. M. Raulin m’enga- 
geait en même temps à consulter mes souvenirs, si je n’avais pas d’in- 
dications plus précises, et à chercher à me rappeler, si le bord 
postérieur de la carapace se composait de onze pièces , comme celui de 
l'espèce que M. Marcel de Serres avait décrite et nommée dans le Bul- 
letin de l’Académie des Sciences de Montpellier (1851-52, p. 14). Ces 
pièces n'étaient pas complètement dégagées lorsque la carapace se brisa, 
et depuis ce moment, je n’avais pas eu le courage de m’occuper de nou- 
veau de mon fossile. Stimulé par la réponse de M. Raulin, je me mis à 
l’œuvre pour la seconde fois et parvins, à force de temps et de patience, 
à reconstituer le bord désiré : onze pièces le composaient !! Ce caractère 
important ne pouvait laisser le moindre doute dans mon esprit, pas plus 
que dans celui de M. Raulin. Pour l’un et pour l’autre, la tortue décou- 
verte dans la mollasse de Moissac était donc le Testudo Isselensis de 
M. Marcel de Serres. 

Quelle est la conséquence de ce fait paléontologique ? 

Entraînés par l'opinion de M. Dufrénoy, la plupart des géologues qui 
avaient étudié les terrains tertiaires sous-pyrénéens rapportaient , il y a 
peu de temps encore, à la période miocène, les sables d’Issel, près de 
Castelnaudary; d’autres , tels que MM. Matheron et Gervais, les considé- 


(74) 

raient comme éocènes. M. Raulin, étant sur les lieux en Octobre 1854, 
changea d’avis, et se rangea à celui des deux savants que je viens de 
citer; je ne sais ce qu’en pense aujourd’hui M. Leymerie ; mais en 1853, 
il existait quelques doutes dans son esprit puisqu'il disait : « que les 
sables d’Issel pouvaient bien passer sous les calcaires à coquilles lacus- 
tres de Villeneuve-le-Comtat (1) », calcaires considérés en 1854 comme 
éocènes supérieurs par M. Noulet (2). Quant à nous, nous ne connais- 
sons pas, il est vrai, les sables d’Issel; mais en présence de l’affirmation 
de MM. Matheron , Gervais et Raulin, et des doutes de M. Leymerie, 
nous n’hésitons pas à les considérer comme éocènes, et, dès-lors , nous 
sommes en droit d'ajouter, que la mollasse de Moissac, puisqu'elle ren- 
ferme, comme les sables d’Issel, le Testudo Isselensis, appartient comme 
ceux-ci à la période éocène. 

M. Raulin, assigne le même âge à la mollasse de Moissac dans la note 
jointe à sa description d’une coupe géologique des collines qui bordent 
les rives droites de la Gironde, de la Garonne, du Tarn, de l’Aveyron 
et de la Leyre (3), en démontrant, contrairement à l'opinion émise par 
M. Leymerie : 4° que la présence de l’Anthracotherium magnum carac- 
térise essentiellement la période éocène ; 2 que les collines de la Gas- 
cogne et des environs de Toulouse, ne sont pas la continuation de celles 
de Moissac, puisque le calcaire qui couronne la mollasse de Boudou, 
plonge sous les dépôts miocènes de la rive gauche de la Garonne. La 
découverte du Testudo Isselensis dans la mollasse de Moissac, prolonge- 
ment évident et incontestable de celle de Boudou, est un argument de 
plus à l’appui de cetté manière de voir. Nous sommes d'autant plus heu- 
reux d’en être l’auteur, que son exposé nous fournit l’occasion d’entrer 
dans quelques détails touchant la constitution des terrains tertiaires des 
environs de Moissac, situés au nord de la Garonne et du Tarn. 

La coupe que nous avons donnée ci-dessus de la colline de Laroque, 
colline qui remplit tout l’espace compris entre les collines de Boudou et 
celle de Saint-Martin ou du Calvaire, derrière Moissac, se répète très- 
exactement dans la direction d'Agen. On remarque cependant que, à 
mesure qu'on s'approche de cette dernière ville , le calcaire qui cou- 
ronne la seconde assise de sable offre des bancs plus puissants , et que 


(1) Bulletin de la Société Géologique de France , séance du 20 Juin, p. 512. 

(2 Mémoires sur les coquilles fossiles des terrains d'eau douce de S.-0. de 
la France. 

(3) Actes de l’Académie de Bordeaux pour 1853. 


Fr re 


(15) 

sa texture devient plus compacte. Dans la colline de Laroque, la couche 
calcaire existe encore, moins puissante il est vrai qu’à Boudou, mais 
elle l’est cependant encore assez sur le versant Nord pour être exploitée 
comme pierre à chaux; dans celle de Saint-Martin ou du Calvaire, son 
épaisseur a beaucoup diminué; elle a néanmoins plus de 1 mètre, comme 
on peut le remarquer avant d'atteindre le bout de la côte Saint-Laurent, 
sur la route de Moissac à Bourg-de-Visa ; dans le coteau Saint-Michel ou 
de la Déroucade, on n’en voit plus que des indices , et il en est de 
même dans celui de Malari, à cinq kilomètres à l’Est de Moissac. A partir 
de ce point jusques aux terrains secondaires de Septfonds, près de 
Caussade , la coupe de Laroque se répête encore dans les collines des 
rives droites du Tarn et de l’Aveyron, moins le calcaire. Les assises de 
sable et de marne sont identiques, et elles récèlent sans doute les mêmes 
fossiles que celles de Moissac, puisque sur un point intermédiaire, à 
Malari , a été découverte la molaire supérieure d’Anthracotherium mag- 
num que je donnai à M. Leymerie en 1851 , et dont il est question dans 
sa note précitée. 

Éloignons-nous maintenant des rives du Tarn et de la Garonne, et soit 
de Boudou, soit de Moissac, marchons vers le Nord jusques aux terrains 
secondaires du Lot. L’espace compris entre ces terrains et notre point 
de départ est occupé par un système de collines dans la coupe desquel- 
les nous retrouvons les assises de celle de Laroque ; mais de même que 
dans la direction d'Agen, la couche calcaire augmente progressivement 
en épaisseur, et la texture de la roche devient de plus en plus compacte : 
à Giac, Saint-Jean-Lachapelle, Castelsagrat et Saint-Nazaire, elle forme 
corniche au sommet ou au-dessous du sommet de tous les coteaux; à 
Bourg-de-Visa, son épaisseur est deux fois plus considérable qu’à Giac 
et Saint-Jean-Lachapelle ; à Montaigu, elle constitue à elle seule les 
versants des vallons latéraux qui débouchent dans la vallée de la 
Séoune; enfin, sa puissance augmente encore en se rapprochant de la 
ligne où nos terrains tertiaires rencontrent, dans cette direction, les 
terrains secondaires du Querci. Les mêmes faits peuvent être observés, 
et d’une manière encore plus facile, en suivant dans toute sa longueur 
la vallée de la Barguelonne. Cette vallée qui se termine à Valence d'Agen, 
dans celle de la Garonne, se prolongeant en effet du Sud-Ouest au 
Nord-Est jusqu’au plateau jurassique qui domine Cahors, divise dans 
toute son étendue les dépôts tertiaires compris entre la rive droite de 
la Garonne et les terrains secondaires du Lot. 


(76) 

Sur les rives droites du Tarn et de la Garonne, et dans la partie supé- 
rieure du bassin sous-pyrénéen, l’on trouve donc un ensemble de collines 
dont la composition, sauf l’absence ou la présence du calcaire, est iden- 
tique. Si ces collines appartenaient, comme le pensent MM. Leymerie et 
Noulet à la période miocène, il existerait une grande lacune entre le 
terrain éocène du Périgord et celui de l’Albigeois. Or, à quelle cause 
probable pourrait-on avoir recours pour expliquer un fait géologique si 
important? Nous n’en voyons franchement aucune. En classant, avec 
M. Raulin, ces collines dans la période éocène, tout s'explique au 
contraire sans difficulté, et l’on complète ainsi au fond du bassin du 
Sud-Ouest une bande de terrain éocène qui, partant de la base des 
Pyrénées, s’étend sans interruption jusque dans le Périgord, en passant 
au pied des montagnes secondaires de l’Aude, du Tarn, de Tarn-et- 
Garonne, du Lot et de Lot-et-Garonne. 

Jusqu'ici nôus avons envisagé nos collines tertiaires comme si elles 
n'étaient composées que de deux assises : la première (2° dépôt de 
Chaubard), reposant sur une marne argileuse jaunâtre , dernier terme 
de la mollasse dont l’épaisseur est inconnue (1° dépôt de Chaubard); la 
seconde ( 3%° dépôt de Chaubard) , terminée ou non par une couche cal- 
caire. Indépendamment de ces deux assises principales, il en existe deux 
autres parfaitement distinctes , d’origine moins ancienne, mais sur quel- 
ques points seulement. Leur présence étant d’une importance majeure 
dans la question qui divise les géologues Toulousains et Bordelais, nous 
croyons utile d'indiquer quelques-uns de leurs caractères et les lieux où 
elles se trouvent. 

Au-dessus du calcaire de Boudou , au pied des moulins à vent qui 
dominent les carrières, on voit une couche de sable surmontée par des 
argiles et des marnes. En 1851, je le fis remarquer à M. Leymerie dans 
une excursion faite avec lui dans cette localité, et, en 14854, M. Raulin 
le mentionna dans son Mémoire. Ce sable n’est certainement pas un 
accident. On le retrouve en effet, aux environs de Moissac, à Malari, 
au bout de la côte du Brésidou, à Montescot et Saint-Laurent, et plus 
loin, à Malause au pied des moulins à vent, à Saint-Hubert, Saint- 
Amans et Giac, et, sur de très-grands espaces, entre Castelsagrat, Lau- 
zerte, Montaigu , Bourg-de-Visa et Brassac ; mais, à partir de la paroisse 
de Giac, distante de 4 à 5 kilomètres seulement, à vol d’oiseau, des 
coteaux de Boudou , on le voit surmonté d’une couche calcaire composée 
ordinairement de deux bancs. À Bourg-de-Visa et sur le plateau de Beau- 


(71) 

ville, ce calcaire a acquis une assez grande puissance, et les habitants, 
qui le désignent sous le nom de Pierre de bouvée , l’exploitent pour les 
constructions, préférablement à celui de l’assise subjacente quoique 
plus compacte et plur dur, mais ordinairement gélif. Pour M. Raulin, 
comme pour nous, ce sable et ce calcaire (4e dépôt de Chaubard), 
représentent sur les rives droites de la Garonne et du Tarn, en partie au 
moins, le terrain miocène de la Gascogne et des environs de Toulouse. 
Sa puissance il est vrai est loin d’être aussi considérable que dans la par- 
tie médiane du bassin ; mais ce fait n’a rien d'étonnant. L’altitude infé- 
rieure du terrain éocène sur les rives gauches du Tarn et de la Garonne, 
ne prouve-t-elle pas en effet que les dépôts miocènes y ont eu lieu dans 
des eaux plus profondes ? 

C’est sur les plateaux formés par le terrain miocène des rives droites 
du Tarn et de la Garonne, mais dans quelques localités seulement, à une 
distance presque égale du Lot et de la Garonne, qu’on rencontre l’as- 
sise supérieure. Elle constitue des collines isolées, sous forme de buttes, 
dirigées de l'Est à l'Ouest, et composées, comme le terrain miocène qui 
leur sert de base, de sable, de marnes et de calcaire (5®e dépôt de Chau- 
bard). On en remarque plusieurs, et d’une assez grande distance à cause 
de leur isolement, à Saint-Amans-de-Férussac, Saint-Gervais, Sainte- 
Cécile et Montaigu , dans le Tarn-et-Garonne , et au-dessus de Moncuq, 
près de Cahors, dans le Lot. Ces buttes représentent-elles sur les rives 
droites du Tarn et de la Garonne l’étage supérieur du dépôt miocène de 
Lyell ou le terrain pliocène du même auteur ? Nous ne les avons pas 
observées d’assez près pour le décider, et d’ailleurs, il faudrait peut-être 
les avoir comparées aux buttes analogues signalées par M. Chaubard dans 
la Gascogne, au Sud d'Agen. Quoi qu’il en soit, leur présence sur les 
rives droites du Tarn et de la Garonne, jointe à celle du sable et du cal- 
caire superposés à Giac, Beauville et ailleurs, aux deux assises des col- 
lines de Boudou, Laroque, Saint-Martin, etc., etc., est une preuve de 
plus en faveur de ceux qui classent la mollasse de Moissac dans le terrain 
éocène. 

Moissac , 23 Janvier 1858. 


LAGRÈZE-FossaT. 


MÉMOIRE 


SUR LES DÉPOTS LITTORAUX 


OBSERVÉS DE NANTES A BORDEAUX : 


Par M. MAIRAND, MEMBRE CORRESPONDANT A MARANS, 


( Charente-Inférieure ). 


INTRODUCTION. 


Dans sa 23° session, le Congrès scientifique de France, séant à la 
Rochelle , avait à examiner les causes et les lois des atterrissements qui 
s’opèrent sur nos côtes, et les modifications qu’ils apportent au port de 
cette ville; cette question fut le sujet de deux mémoires présentés et lus 
par deux membres du Congrès qui, dans leurs conclusions, se sont 
trouvés du même avis. 

Quelques personnes, en envisageant la question sous une autre forme, 
étrangère au Programme, ont pensé qu’il était nécessaire de donner la 
nature et l’origine des dépôts qui causent un si grand préjudice au com- 
merce du port de la Rochelle, et ont posé la question sous cette nouvelle 
forme : 

« Quelle est la nature et l’origine des Dépôts littoraux observés de 
« Nantes à Bordeaux? » 

Cette nouvelle question, au point de vue scientifique, devient beau- 
coup plus intéressante et en même temps plus sérieuse, en ce que l’on 
a à examiner plusieurs localités qui se trouvent dans la même position 
que la Rochelle; elle renferme une foule de causes à expliquer et exige 
de grandes recherches tant géologiques que chimiques. 

Les alluvions actuelles sont en effet un sujet d’étude très-important, 
soit pour la théorie, soit pour l'application; on apprend à connaître les 
diverses phases par lesquelles une contrée a passé, les mers qui l'ont 


slots. 0 mis à 


(19) 
couverte et les rivières qui l’ont sillonnée. Ensuite, en appliquant ces 
connaissances aux terrains plus anciens, on y trouve l'explication toute 
naturelle des formations qui nous ont précédé sur la terre. 

Ayant déjà eu l’occasion d'étudier le golfe de Luçon, relativement au 
mode de formation des buttes coquillières de Saint-Michel-en-l’Herm 
(Vendée), nous nous sommes proposé d'examiner cette question, après 
avoir, toutefois, parcouru le littoral et examiné les couches d’alluvions 
qui le bordent jusque dans leurs moindres parties. 

Afin de compléter l’étude de cet important problème , nous avons pensé 
qu’une esquisse rapide des terrains bordant l’Océan, de Nantes à Bordeaux, 
était indispensable au lecteur ; nous avons tâché de restreindre, le plus 
qu’il nous a été possible, cette esquisse qui, si elle n'avait été faite à 
grands traits, aurait pu devenir une description et dénaturer ainsi notre 
travail. 

Nous avons divisé notre Mémoire en trois chapitres : le premier, conte- 
nant l’esquisse ci-dessus indiquée; le deuxième, l’examen des dépôts 
littoraux; le troisième, enfin, est exclusivement réservé aux causes de 
ces dépôts et aux conclusions que nous avons cru devoir tirer. 

Nous avons joint une planche donnant la disposition des différentes 
sortes de dépôts littoraux. 

Qu'il nous soit permis de témoigner ici notre reconnaissance à plu- 
sieurs de nos honorables correspondants : M. Cailliaud, directeur du 
Musée de Nantes, qui nous a adressé, avec le plus louable empresse- 
ment, de très-bons renseignements sur les alluvions de la Loire; 
M. Raulin, professeur à la Faculté des Sciences de Bordeaux, qui a 
fourni, avec la plus gracieuse obligeance, de nombreux matériaux à 
notre travail ; enfin, M. Alcide d’Orbigny, qui nous aidait encore de ses 
bons et sages conseils, lorsqu'une mort prématurée vint l’enlever à la 
science. 


CHAPITRE Ier. — ESQUISSE DES TERRAINS BORDANT L'OCÉAN. 


Terrains primitifs. — Le Granite et le Gneiss forment toute la 
partie comprise entre Nantes et Pornic, et une bande continue des Sables 
d'Olonne à Napoléon-Vendée. Ils sont composés de feldspath blanc, à 
petits grains, et de mica noir. Mais ils présentent une différence bien 
tranchée à Pornic et à l’Ile-Dieu. Le granite, composé de feldspath 


( 80 ) 
rosé, de gros grains de quartz et de mica peu abondant, se désagrège 
assez difficilement , en donnant des roches arrondies à leur sommet; le 
gneiss, proprement dit, d’une consistance beaucoup plus ténue, offre des 
escarpements déchiquetés et anguleux. 

Le Gneiss, associé au Micaschiste, occupe toute la côte des Sables 
d'Olonne jusqu’au Veillon, près de Talmont (Vendée); l’on trouve dans 
cette roche, à la falaise de la Chaume (Sables d'Olonne), de l’amphibole, 
de la tourmaline et du grenat; au Payré, l’amphibole remplace le mica, 
et le schiste micacé passe au schiste amphibolique. 

Terrain de transition, — Il occupe la côte, de Saint-Gilles à 
Brétignolle (Vendée); mais au point de vue de la désagrégation, il ne nous 


paraît d'aucune importance. 

Porphyres quartzifères. — Ils se montrent sur la côte, de 
Brétignolle au Hävre de la Gachère , en filons assez rapprochés; on les 
remarque pareillement dans le terrain de transition de Saint-Gilles et 
dans le schiste micacé des Sables d'Olonne, mais en veinules assez rares, 
À Brétignolle, ils forment une roche compacte, d’un gris-clair, à cas- 
sure esquilleuse, contenant des cristaux de quartz gris, terminés des 
deux côtés. 

Terrain jurassique.— Arrivé à Saint-Vincent-sur-Goulet, nous 
quittons les terrains primitifs pour entrer dans le terrain jurassique, dont 
on traverse les quatre étages suivants des Sables d'Olonne à Rochefort : 

Le Lias se remarque, à 12 kilomètres Sud des Sables d'Olonne, aux 
Sards, près de Talmont (Vendée), et à Jard ; il a une épaisseur de 1" 00 
à 4% 50, et repose immédiatement sur le gneiss. On aperçoit d’abord 
quelques bancs minces de grès fin, gris-verdâtre , puis une roche sili- 
ceuse, un peu inclinée vers le Sud et recouverte par un calcaire com- 
pacte, ayant une cassure grenue et un peu brillante : c’est dans ce banc 
que les Belemnites sulcatus , Pecten œquivalvis, Gryphæa cymbium se 
montrent en prodigieuse abondance; ce groupe ne s’étend que jusqu’à 
la Conche où apparaît l’étage suivant : 

L’Étage oolithique inférieur, formé par des calcaires blancs fins, sou- 
vent exploités comme pierre de taille, se voit peu entre Talmont et Jard; 
mais il se développe vers Longeville et surtout dans les environs de Luçon. 


L'Étage oxfordien, qui commence à Chaillé-les-Marais , est formé, 
d'abord, par un calcaire compacte, séparé par des lits minces de calcaire 
argilo-schisteux , pouvant se détacher par plaquettes : les couches sont 
pour là plupart marneuses et fournissènt de médiocres pierres de taille. 


(81) 

Le calcaire forme toute la partie comprise entre Longeville et Esnandes, en 
passant par Luçon, Mareille, Marans, etc. Il disparait dans le golfe de 
Luçon, et l’on voit à Esnandes le sous-groupe supérieur de l’étage oxfor- 
dien (ou les marnes schistoïdes) qui se présente sous forme de calcaire 
compacte bleuâtre, très-argileux , se décomposant en boules. Ce calcaire 
est précédé par une couche pareillement de calcaire compacte d’un gris- 
clair et jaunâtre, contenant quelques paillettes de mica. À Marsilly, on 
perd de vue les couches oxfordiennes, et la falaise de la Repentie, ainsi que 
celle des Minimes , ne présente plus que l’étage corallien. 

Étage corallien. La baie sur laquelle est construit le port de la Rochelle 
est creusée dans une marne calcaire et schisteuse ; la pointe des Minimes, 
placée à gauche de l’entrée , est formée d’un calcaire argileux , contenant 
peu de fossiles. Les couches inférieures sont des marnes calcaires blan- 
ches, renfermant des parties dures et séparées par des rognons calcaires 
un peu siliceux. La couche supérieure à celles-ci, est formée de calcaire 
blanc argileux, fournissant d'excellents matériaux de construction. 

A la pointe du Ché, la marne indiquée aux Minimes est immédiate- 
ment recouverte par une marne d’un blanc jaunâtre, à l'aspect rugueux, 
renfermant des térébratules. Au-dessus de cette couche, on reñarque 
un calcaire grisätre à grains fins, de 5" dépaisseur; il est rugueux, sa 
surface raboteuse est très-dure , ce qui est dû à la réunion de polypiers, 
dont les cellules sont vides ou remplies de calcaire spathique. 

Quelques couches de calcaire compacte argileux, blanc-jaunûtre, 
séparent la pointe du Ché de celle d’Angoulins. A la base de celle-ci se 
présente une oolithe grossière se composant de grains pisolithiques blan- 
châtres , irréguliers , de grosseur variable , mais dépassant rarement celle 
d’un pois , ils sont empâtés dans un calcaire compacte blanc, terreux et 
lâche, caractérisé par la présence de nérinées ; au-dessous, viennent de 
nouvelles couches de calcaire compacte argileux , jaunâtre , recouvertes 
elles-mêmes par une seconde assise de calcaire à polypiers qui, par sa 
position dans la série oolithique et par la nature de ses fossiles, repré- 
sente l’assise corallienne à polypiers. À Angoulins, ce calcaire est sub- 
granulaire , grisâtre, parsemé de lamelles spathiques jaunâtres , prove- 
nant de débris d’entroques , et de points arrondis blanchâtres qui sont 
des débris de polypiers; il est moins dur et de couleur moins foncée que 
le calcaire de la pointe du Ché. 

Étage kimméridien. La côte s’abaisse après la pointe d’Angoulins, et 
une large baie la sépare de celle de Chatelaillon, dont les couches incli- 


(82) 

nées vers le Sud-Ouest doivent recouvrir les précédentes. Au pied de 
l’escarpement, et visibles seulement à marée basse, existent des couches 
de marnes bleuâtres , contenant une grande quantité de Gryphæa virqula. 
Ces marnes forment la séparation entre les étages corallien et kimmé- 
ridien; ce dernier se remarque encore au Rocher, après avoir disparu 
sous les alluvions, Deux roches bien distinctes se remarquent ici : la 
supérieure, schisteuse et dure, appartient au grès vert, et l’inférieure 
représente encore l'étage oolithique par son calcaire marneux jaunûtre, 
en lits minces et nombreux, renfermant une grande quantité de petites 
huîtres différant peu de celles de Chatelsilols et formant ainsi une 
espèce de lumachelle. 

Terrain crétacé. — Il se montre, sur les côtes de l'Océan, de 
Rochefort à Meschers, par presque toutes ses différentes assises ainsi : 
le grès vert se remarque de la pointe du Rocher jusqu’au fort de la 
Pointe près Rochefort ; le calcaire à Caprinelles vient sur une très-petite 
étendue ainsi que les marnes à ostracées et la craie marneuse; la craie 
à Ostrea vesicularis existe de Saint-Palais à Meschers. 

Le Grès vert, au Rocher, est contigu au terrain jurassique ; de là, il 
s’étend jusqu'à la pointe de Fouras , forme cette dernière et se perd dans 
les marais de Rochefort. A la base de la falaise de Fouras, on remarque 
des argiles massives, plastiques , et un peu au-dessus , ces argiles sont 
schisteuses, bleuâtres et micacées; les premiers contiennent beaucoup de 
fer sulfuré disséminé en rognons qui, lavés et ballotés par la mer forment 
en grande partie les galets de la plage. L’argile supérieure contient aussi 
ce minéral, mais en veinules plus ou moins suivies ; le gypse cristallin 
s’y observe pareïllement. Les sables et grès ferrugineux viennent pren- 
dre place sur les arigles ; les grès proviennent de sables jaunâtres , com- 
posés de silice, agglutinés par un ciment ferrugineux ; ils forment la 
partie supérieure de la falaise, et sont composés de grès friables à grains 
arrondis de quartz hyalin, associés à quelques grains de silicate de 
protoxyde de fer et à de rares paillettes de mica. 

Les Marnes à Ostracées , occupent une très-petite étendue , de l’em- 
bouchure de la Charente jusqu’à la pointe de l’Éguille; elles sont com- 
posées de calcaire grisàtre noduleux ou bréchoïde, avec un banc peu 
épais d'argile marneuse grisätre. 

Le Calcaire à Caprinelles , se présente près de Marennes par couches 
blanc-jaunâtres renfermant des parties spathiques provenant de l’accu- 
mulation de corps organisés ; dans ce calcaire , l’on trouve de d’hydrate 


(83) 

de fer, de l'argile et du sable siliceux. Ge groupe s’étend jusque dans 
l'intérieur du département, mais l’espace compris entre Marennes et 
Saint-Palais est formé d’alluvions. 

Le Calcaire à Ostrea vesicularis, ou la craie, apparaît à Saint-Pallais, 
et s’étend jusqu’au marais de Meschers. À Royan, ce groupe est formé : 
1° au faîte de la falaise, de calcaires blancs compactes , suboolithiques ; 
20 de bancs exclusivement composés d’Ostreæ, empâtées dans un sable 
argilo-calcaire, jaunâtre, d’une puissance de près de 2»; 3 d’une craie 
blanche, marneuse , formant à peu près le milieu de la falaise ; 4° enfin 
d’une seconde couche d’Ostrea formant le pied des escarpements. 


CHAPITRE II. — ExAMEN DES DÉPÔTS LITTORAUX. 


Aperçu général. — Les dépôts littoraux, figurant sous le nom 
de Roches Neptuniennes de transport, dans l’étage contemporain, méri- 
tent l’attention de l’observateur et l’examen scrupuleux du géologue, 
comme occupant la plus grande partie des côtes de l'Océan; il se forme 
simultanément, à la surface du globe et dans le sein des mers, des 
dépôts sédimentaires provenant, soit de l’action des pluies, des gelées ou 
autres agents érosifs , soit de l’action des vagues et de la propriété des- 
tructive de la mer; de là, deux genres de sédiments : les sédiments 
marins et les sédiments fluvio-terrestres. Ne devant nous occuper que des 
dépôts marins , nous allons tàcher d’expliquer le plus clairement possi- 
ble, les diverses phases suivies par ces genres de dépôts, et nous don- 
nerons les conclusions que nous eroyons devoir tirer, en les appuyant 
toutefois sur les observations que nous avons faites sur le littoral que 
nous habitons. 

Nous appelons sédiments marins toutes les particules terrestres, 
minérales ou autres qui, abstraction faite de leur dimension ou de leur 
provenance, se trouvent actuellement dans la mer et sur les rivages (1). 
Si nous parcourons le littoral, de Nantes à Bordeaux, nous verrons que 
la rive droite de la Loire est couverte, en certains points, de dunes; 
puis de galets et de sables granitiques jusqu’à la Baie-de-Bourgneuf, où 
des atterrissements vaseux occupent une surface immense; que le golfe 
de Luçon offre pareillement des sédiments vaseux considérables ; enfin, 
que la Charente-Inférieure présente , soit des galets ou sables, formant 


(4) Éléments spatigraphiques de M. AI. d'Orbigny. 


(84) 


des cordons littoraux, soit des anses vaseuses, soit des dunes qui se 
poursuivent jusqu’au-delà de Bayonne. 

D’après les géologues, les sédiments marins se forment de trois manié- 
res différentes : par le transport des particules terrestres, par l’usure 
des côtes, par le dépôt des corps organisés, plus ou moins usés et 
décomposés. À notre point de vue, les affluents terrestres sont loin d’ap- 
porter des sédiments , et nous pensons convaincre nos lecteurs sur ce 
point, en leur disant qu’une longueur de 1800 kilomètres exposée à l’ac- 
tion des vagues, fournit à elle seule plus des (‘°/,,) dix seizièmes des 
sédiments marins. En effet, des eaux courantes des rivières la Vie, le 
Lay, la Sèvre , la Charente, etc., demeurent dans une neutralité com- 
plète, même lors des grandes pluies; les dépressions du sol qu’elles par- 
courent, leurs méandres en un mot, empêchent qu’elles n’apportent à 
leurs embouchures même du sable fin. Nous ne pouvons donc faire 
entrer dans la formation des sédiments que les matériaux fournis par la 
Loire et la Gironde; ces deux fleuves sont en effet les seuls fournisseurs 
des sables fins que l’on rencontre dans leurs lits et sur leurs rives. 

Dans l’état actuel, les sédiments formés par l’usure des côtes sont 
les plus considérables ; et, si l’on veut se convaincre de l’action de la 
vague sur les rochers, l’on n’a qu’à parcourir, avant et après une tem- 
pête, les falaises de quelque partie que ce soit du littoral, l’on pourra 
alors se faire une juste idée des immenses changements qu’elle opère 
en enlevant des quantités considérables de matériaux, soit au-dessus, 
soit au-dessous du niveau moyen du balancement des marées. — Les 
points que l’on peut étudier avec le plus de facilité, sont les escar- 
pements de l’Ile-Dieu (Vendée) et la pointe de Châtelaillon (Gharente- 
Inférieure). 

Les corps organisés par leur usure et leur décomposition forment à 
peu près les deux seizièmes de l’ensemble des sédiments marins ; nous 
avons constaté leur présence dans les baies de la Rochelle et d’Angou- 
lins. Ils forment aussi des écueils dangereux à la pointe des Baleines 
(ile de Ré) et à celle de Chassiron (île d’Oleron). 

Ces divers matériaux concourent à former simultanément dans le sein 
de l'Océan et sur ses rivages, des dépôts de galets ou cordons littoraux, 
des dunes et des atterrissements limoneux dans les anses. 

Cordons Littoraux. — Les cordons littoraux sont ces bourrelets 
de matières meubles qui régularisent, par des courbes simples, les 
anfractuosités naturelles des côtes, et au moyen desquels la mer s’est 


ni cs 


( 85 ) 
formée à elle-même une enceinte stable qui la sépare définitivement des 
terres, en opposant une barrière à ses flots. 

Le mode de formation et de disposition de ces dépôts est facile à ex- 
pliquer par la puissante action de la mer sur les escarpements. Nous 
savons que les falaises exposées à la fureur de la mer sont déchirées et 
morcelées, selon cependant la nature de leurs roches; que les blocs 
détachés sont livrés au ballotement des vagues , et que tour à tour effet 
et cause d’un frottement continuel, ils sont réduits en galets et sables, et 
dispersés, à l’aide du balancement des marées et de l’action des courants, 
dans les anfractuosités des côtes. À l’approche du rivage, la profondeur 
devient assez petite, le mouvement des vagues commence à être gêné, les 
molécules d’eau ne peuvent continuer à transmettre leur vitesse dans l'in. 
térieur du fluide, occasionnent ce que l’on appelle les Lames de fond, les 
vagues s'élèvent alors davantage, et finissent même par se déchirer, par 
se briser en s’élançant plus haut sur le rivage qu’elles ne le font au large. 

Il résulte de ce phénomène un mouvement assez compliqué des eaux- 
sur la plage; le résultat de ce mouvement est que la mer rejette de son 
sein une certaine quantité de matières qui forment une espèce de talus, 
de levée, présentant le profil qui est le mieux en rapport avec le mou- 
vement des eaux. 

Par la manière même dont les vagues se brisent, la mer a sur un 
rivage plat (la Rochelle), plus de tendance à rejeter vers l’extérieur les 
objets qu’elle agite, qu’à les ramener vers l’intérieur ; parce qu’elle donne 
à son fond près du bord une inclinaison sur laquelle, par conséquent, 
elle n’a pas plus de tendance à rejeter vers l’extérieur qu’à ramener vers 
l'intérieur. L’inclinaison du talus ainsi formé va en augmentant jusqu’à 
la partie supérieure comme le montre la fig. 4, pl. L. La mer a plus de 
tendance à rejeter les grosses particules que les petites ; elle repousse 
donc d’abord les gros galets, puis les petits, et enfin le sable. 

Ces genres de dépôts se montrent principalement sur les côtes de la 
Charente-Inférieure où les roches se prêtent plus facilement à la désa- 
grégation; cependant sur le littoral de la Loire-Inférieure, de Paimbœuf 
à Pornic, il y a des galets et sables granitiques. Sur celui de la Vendée, 
dans la baie de Saint-Gilles, du hâvre de la Gâchère et des Sables-d’O- 
lonne, ce sont des roches schisteuses, d’un volume considérable, for- 
mant de dangereux écueils ; ils reposent sur une vaste plage sablonneuse 
et ondulée qui se prolonge jusqu’à Saint-Vincent-sur-Goulet où commence 
l’anse limoneuse du Golfe de Luçon. 

Tome XXI. 


1 


( 86) 

Le littoral de la Charente-Inférieure, vu la constitution de ses roches 
toutes calcaires, offre des dépôts considérables de galets et de sables. 
Ainsi, sur la côte intérieure de l’Ile-de-Ré, l’on remarque dans la baie 
d’Ars, une couche de sable siliceux recouverte par des galets qui se 
continuent jusqu’à la pointe de Loix. 


Dans le port de Saint-Martin, cette même couche sablonneuse est 


recouverte par une vase qui exhale une odeur comparable à celle du 
gaz hydrogène sulfuré. 

Dans la baie de la Rochelle, les galets, tous de nature calcaire, se 
montrent depuis le Fort-Louis jusqu'aux bains Jagueneau ; ils forment 
une levée légèrement ondulée , reposant sur un sable grossier calcaire, 
chargé d’argile. De la pointe des Minimes à celle d’Angoulins, l’on 
remarque ces mêmes dépôts offrant quelques solutions de continuité sur 


les points où la mer est légèrement agitée ; au Platin-d’Angoulins, l’on 


observe une étendue de 1500 mètres couverte de sables grossiers, formés 
de grains de quartz blanchâtre, de silex noirâtre et de débris coquilliers. 
Sur cette plage unie, l’on voit çà et là des amas de coquillages entiers, 
disposés perpendiculairement à la courbe que décrivent les vagues; 
quelques boules d’argile bleue s’y trouvent mélangées. D’Angoulins à 
Châtelaillon, ces mêmes couches se remarquent, surtout au dernier lieu 
où elles occupent une surface assez avancée dans la mer; les pointes 
de Fouras, du Chapus, montrent aux pieds de leurs falaises une assez 
grande quantité de galets et de sables chargés de carbonate de fer, et 
associés à du fer sulfuré. Enfin, la partie comprise entre la pointe du 
Chapus, et celle d’Arvert est occupée par des sables jaunes rougeâtres 
chargés d’oxide de fer. 

Dunes. — Sur les côtes de la Loire-Inférieure, de la Vendée, de la 
Charente-Inférieure et de la Gironde, il est des points sur lesquels il 
existe des sables mobiles. Ces mêmes sables forment de petites éléva- 
tions appelées dunes qui se forment, se modifient et se détruisent 
successivement suivant l’action des vents. Mais comme le vent vient 
surtout de la mer, en se dirigeant sur le continent, les sables tendent à 
s'avancer sur les prairies et sur le sol arable, et les empiètements des 
dunes, dont le sol est presque de nulle valeur, détruit ainsi des pro- 
priétés importantes. 

Le mode de formation des dunes est très-facile à suivre, et voici ce que 
nous avons observé sur le littoral des Sables-d'Olonne. Les vents par 
eux-mêmes n’ont qu'une bien faible action sur les masses minérales soli- 


\ 
if 
Ve 


(87) 
des; ce n’est guère que sur les dépôts de sables fins et meubles que 
leurs effets se font sentir et donnent lieu à quelques observations inté- 
ressantes. Dans les déserts d'Afrique et d'Arabie, les vents soulèvent 
des nuages immenses de sables brûlants, les transportent d’une extré- 
mité à l’autre, et déterminent subitement de vastes collines qu’un nou- 
veau coup de vent vient détruire. 

Les côtes sablonneuses de l’Océan sont exposées à des effets analogues. 
Lors de notre passage aux Sables-d'Olonne , les vents étaient Sud-Ouest, 
le moindre coup de vent mettait le sable sec en mouvement sur la plage 
et déterminait à la surface une multitude de rides séparées par un inter- 
valle plus ou moins large; à la bouffée de vent suivante, toutes ces 
rides rentraient en mouvement, et bientôt chacune d’elles se trouvait 
occuper la distance qui la séparait de la ride précédente. Le phénomène 
des dunes se produisait-là, car leur nombre augmentait continuelle- 
ment à mesure que le vent poussait les sables; ceux-ci suivant tou- 
jours leur marche, le vent poussait les sables du pied a d’une butte vers 
le sommet b, tombait suivant b c et formait un talus d’éboulement 
(Fig. 2, PI. TI) toujours plus rapide que le talus antérieur. Une butte 
comme a b c s'accroît donc successivement en arrière, si de nouveaux 
sables lui sont fournis en avant, ou se déplace, si ce sont les mêmes 
sables qui se trouvent continuellement remaniés. 

La partie du littoral où les dunes sont le plus remarquables, est la 
côte des landes de Gascogne. A partir de la Pointe-de-Grave , qui res- 
serre l’embouchure de la Gironde, en face de la tour de Cordouan, 
s'étend vers le sud une côte très-unie présentant peu de découpures 
jusqu’à l’entrée du bassin d'Arcachon, et qui continue ensuite de la 
même manière jusqu'à l'embouchure de l’Adour et aux falaises de 
Biarritz. 

Sur les côtes de la Vendée, les sables existent de Noirmoutiers jusqu’à 
la Tranche et même l’Aiguillon ; les dunes ont une hauteur de 15 à 20 
mètres. Sur celles de la Charente-Inférieure , elles sont moins étendues 
mais elles atteignent une hauteur de 60 mètres. 

Il est effrayant de penser à tout ce qu’ont pu causer les dunes, et si 
nous nous reportons à ce qui est déjà arrivé au château de Lesnevac 
(Loire-Inférieure ) et sur les côtes d’Arvert, nous pourrons nous faire 
une juste idée des ravages que cet élément perfide peut causer. Que l’on 
nous permette d'insérer ici le tableau pittoresque des dunes de la rive 
droite de la Loire, après leur irruption sur le bourg d’Escoublac, tracé par 


(58) 
M. Richer (1), un des écrivains les plus distingués de la Vendée. Nous 
sommes heureux quand, à travers des détails géologiques, presque 
toujours froids , secs et arides, nous pouvons varier notre travail, par 
la peinture attachante de la nature prise sur le fait, en même temps 
que nous faisons connaitre la topographie d’un sol inconnu au loin. 

Le château de Lesnevac, voisin du bourg d’Escoublac, est situé sur 
la rive droite de la Loire, vis-à-vis Paimbœuf, près d’un ruisseau qui, 
après quelques détours dans les dunes, vient tomber dans la mer, entrai- 
nant avec lui quelques grains de sable que les flots et les vents conjurés 
lui rapportent aussitôt. 

« En se promenant dans ces sables, dit M. Richer, on découvre quelques 
vallées où les eaux croupissent encore. Les revers de plusieurs collines sont 
bigarrés de blanc; ce sont des coquillages que les vents ont soulevé et 
entraîné avec eux. Le sol, prompt à se monter sous le vent d'Ouest 
qui le rase et l’exhausse sans cesse, a pris toutes les formes. Iei ce sont 
des crêtes escarpées comme des brèches dont le temps aurait adouei les 
contours ; là, ce sont des murs verticaux , dont quelques débris sont 
venus aplanir les pentes ; ailleurs, ce sont des buttes en mamelons, qu’un 
tourbillon vient arrondir ; quelques-unes s’élèvent en cône comme un 
pic isolé : nuages fantastiques qu’un souffle a créés et qu’un souffle 
peut détruire. 

« Quand une tempête a balancé cette arène mobile, qu’elle a comblé 
les vallons et creusé de nouveaux bassins , on voit paraître quelque- 
fois des pans de murailles ; et ces murs qui ne renferment plus que 
des sables, ces murs sur lesquels n’osent s'implanter la mousse, 
les lichens ou le lierre, paraissent plus affreux dans leur nudité que ces 
ruines des temps passés qu'il faut aller chercher sous les broussailles. 

« Dans des endroits se déroulent des pentes comme des nappes 
immenses , sur lesquels il ne croît pas un seul brin d’herbe , et que des 
ossements blanchis recouvrent çà et là en monceaux circulaires, comme 
s’ils avaient été réunis par des remous des vents. Ces ossements sont la 
digne décoration de ces lieux désolés, et le vent brülant de la mer sem- 
ble s’être plu à y flétrir les productions de la nature, comme le sable 
lui-même a englouti les travaux des hommes. » 

Après cette peinture, des dunes remarquables de la Loire nous pas- 
sons à celles de Noirmoutiers, non moins considérables et dont les désas- 


(1) Dans sa Notice sur Guérande. 


( 89 ) 
tres deviennent de jour en jour plus considérables. Là, les dunes sont, 
comme partout ailleurs, des monticules de sables que la mer rejette sur 
ses bords. Ces sables ne sont pas purement siliceux, ils font efferves- 
cence avec les acides et sont composés d’un mélange de silice, de quartz 
et de substances calcaires qui ne sont que des débris de coquilles. Ces 
sables sont tellement mouvants que si l’on se place au milieu des dunes 
pendant un ouragan, cette surface, d’une monotonie, d’une blancheur 
qui fatigue les yeux , soulevée par les vents en furie , ressemble, elle- 
même à la mer agitée; des brouillards d’un sable fin obscurcissent l'air ; 
les srains enlevés roulent aux pieds, et volent au-dessus de la tête, frap- 
pent la figure avec force ; on les voit s’étendre toujours en avant, former 
de nombreux monticules, ou aller ensevelir les maisons et les plus bel- 
les cultures. L’activité des sables , dans les parties de l’île qui sont à 
l'Ouest et au Sud-Ouest, a quelque chose d’effrayant. Si l’action de ces 
vents était contrebabancée par ceux de l'Est, les sables se maintiendraient 
dans un espace plus circonscrit, parce qu’ils seraient alternativement 
poussés et repoussés vers la terre et vers la mer ;mais malheureusement il 
n’en est pas ainsi, et l’on voit, chaque année, les dunes s’avancer progres- 
sivement de l'Ouest à l’Est, et menacer d’envahir la capitale de cette île. 

Des Sables d'Olonne à l’Aïguillon, l’aspect des dunes change beaucoup; 
leur pied, du côté des plaines, présente un commencement de végétation 
dont les espèces les plus fréquentes sont : l’Ephedra distachya , l'Ononis 
arvensis, l’'Arundo arenaria, le Gnaphalium stæchas et le Carex are- 
naria. L’immobilité dont elles sont pourvues est due aux efforts que l’on 
oppose aux vents et à l’action des courants. Les sables inférieurs des 
dunes de l’Aiguillon ‘sont grossiers et composés de grains de quartz 
anguleux , de feldspath blanc et de débris coquilliers. 

Ces dépôts sablonneux reparaissent à Saint-Trojan (Ile d’Oleron), à la 
Tremblade et sur les côtes d’Arvert, où ils ont encore exercé leurs 
déplorables ravages. Les sables sont couverts de tamarix et de pins 
maritimes qui affermissent leur surface, et ne leur permettent plus de se 
soulever comme dans les temps où ils engloutissaient des villages entiers. 
L'on croyait alors qu’un accident subit avait enseveli le Maine-Gaudin, 
près de Saint-Palais, comme il avait mis à découvert, en 1698, l’église 
de Notre-Dame-de-Buze ; mais aujourd’hui, l’on est convaincu que c’est 
jour par jour, que ces sables exercent leurs ravages : leur cours est 
semblable à celui du temps, il semble se traîner avant d'amener le mal- 
heur à son comble. 


(90) 


Néanmoins, le souvenir d'habitations ensevelies frappe toujours forte- 
ment la pensée. Pompéia, Herculanum ont péri à la suite d’une érup- 
tion du Vésuve; mais le sort de ces villes n’excite peut-être pas dans 
l’esprit des réflexions aussi amères. Une de ces grandes catastrophes, 
qui laissent un long souvenir dans la mémoire des hommes a, pour ainsi 
dire, ennobli leur chute, un nom fameux, celui de Pline, s’est associé 
aux leurs. Ici, au contraire, aucun nom ne se rattache aux évènements 
qui ont fait disparaître des villages ignorés. La nature n’a point éprouvé 
de secousses violentes. Un jour, quelques grains ‘de sable , poussés par 
le vent, sont venus franchir les obstacles qu’on leur opposait depuis tant 
d'années , et ont continué de recouvrir un espace qui ne leur était plus 
disputé, et qui ne conserve pas même aujourd'hui les traces de ce qu’il 
renfermait jadis. 

Tous ces désastres ont, depuis cinquante ans, attiré l'attention du 
Gouvernement, et aujourd’hui l’on se voit à l’abri de ces irruptions, de 
ces envahissements, par les soins qu’apporte une administration empres- 
sée, désireuse de ne plus voir dérouler sous ses yeux le tableau d’aussi 
déplorables ravages. 

Anses limoneuses.— Sur tout le parcours du littoral, de Nantes à 
l'embouchure de la Gironde, les principaux atterrissements sont ceux de 
la baie de Bourgneuf, du golfe de Luçon, des anses des Trois-Canons et 
de Marennes. 

La Baie de Bourgneuf formant le marais occidental de la Vendée, 
s'étend le long de la mer, depuis Saint-Gilles (Vendée), jusqu’à Bourg- 
neuf (Loire-Inférieure) , sur une longueur d’environ 40 kilomètres. Ce 
marais est presque coupé en deux parties égales par une presqu'île 
schisteuse qui, appuyant la base de son triangle à Machecoul et à Chal- 
lans, les deux points du marais les plus avancés dans les terres, en pro- 
jette le sommet jusqu’à Beauvoir. L’axe de cette presqu’ile étant prolongé 
à 4 kilomètres au-delà de Beauvoir par une ligne idéale, aboutit pré- : 
cisément à l'embouchure d’un canal appelé la Cahouette ou Grand 
Étier (1) : cette embouchure complète la séparation des deux marais par 
les caractères très-opposés que présente la côte au Nord et au Sud de 
cette ligne (2). Le terrain formant cet atterrissement est composé d’une 


(1) Les mots Étier, Eslier, Esler, Esley, qui se trouvent dans les glossaires romans, 
signifient un bras de mer , un canal où remonte la marée. En espagnol Estero , en 
anglais Estuary, en latin Æstuarium. 

(2) Selon M. Mourain de Sourdeval. 


(M) 

épaisse couche d’alluvion argileuse, que la mer a déposée sur le calcaire 
jurassique de même nature que celui que l’on trouve à Luçon (Vendée). 
Un échantillon de cette alluvion pris à Beauvoir, présentait une masse 
terreuse d’un gris jaune. Desséchée à l’étuve dans le laboratoire de 
l'École des ponts-et-chaussées , elle a perdu 6, 15 p. 100 d’eau, et a 
présenté les éléments suivants : 


Résidu argilo-siliceux insoluble dans les 


f 19, "94 
Alumine et peroxyde de fer. . . . . . . . 11, 77 ï 
Caronate de cha EM EEE ECS NES UE 8, 10 
Eau combinée, matières organiques et volatiles au 
rouee et produits NOnIAOSÉS EN "1. 11, 96 
100, 00 
AZOLEDOUTUO0 ER CCE 0, 215 


Afin de nous fixer sur la manière dont se forment ces atterrissements, 
nous avons mis en rapport les échantillons pris à Beauvoir et dans les 
plaines de la Loire. Dans le limon rougeâtre qui forme les vastes et bel- 
les plaines de la Basse-Loire , M. Nadault de Buffon a trouvé les élé- 
ments suivants (1) : 


Sable SIiCeUR EEE TE un 0) UN 32, 00 } 

ee D EN Ds me Le 31, 00 | PREND 

Carbonate TerChAUX EME N UPS ie en e eee 30, 00 

HUMUSIS0IUHIC CP INSOMUDIe PETER NE 7, 00 
100, 00 


D’après ces données , l’inépuisable fertilité des basses-plaines de la 
Loire, est une chose facile à comprendre. et elles sont d'autant plus 
riches que la vallée de la Loire est très-longue, qu’elle reçoit un grand 
nombre d’affluents, en un mot, qu’elle recueille les détritus d’une très- 
grande superficie de terrain. 

Malgré les notables différences existant dans la constitution de ces 
deux terres , celle de Beauvoir nous présente une végétation très active, 
et sa couleur noire foncée est probablement due à un long séjour au fond 
de la mer et au mélange du carbone, produit par la décomposition des 
matières animales et végétales. 

Comme nous avons dit, le Golfe de Lucon est limité par le terrain 


(1) Cours d'Agriculture et d’'Hydraulique Agricole, ter vol. , 2 partie, p. 273, 


(92) 

jurassique, et forme la partie comprise entre Longeville (Vendée) et 
Esnandes, jusqu’à l’'Houmeau (Charente-Inférieure , où l’on observe les 
dernières couches vaseuses. La Terre de bri formant ce vaste atterrisse- 
ment , aussi appelé marais méridional de la Vendée par M. Cavoleau, est 
divisée en deux couches bien distinctes : la 1re ayant 1" à 1 50 de pro- 
fondeur , présente un bri grisâtre à l’état sec, et bleuâtre quand il est 
mouillé ; la 2° d’une épaisseur indéterminable présente un bri pareille- 
ment grisätre à l’état sec, mais verdâtre quand il est mouillé. D’après 
les analyses de ces deux terres empruntées à M. Fleuriau de Bellevue, 
l’on trouve les principes constituants suivants : 


Bri supérieur. Bri inférieur. 
SITE Tec ie le 36, 0 à se OA 
; 5 
Alumine et oxyde de fer. 47, 4 Fer RUSSE ce 
Carbonate de chaux . . . . . .. ARMOR SE ORRREE 18, 0 
Eau et matière organique 4,04, MERE 4, 5 
100, 0 100, 0 


Afin de juger si les causes agissant aujourd’hui sur la formation des 
nouvelles terres de bri, ont aussi formé les marais qui nous occupent, 
nous avons pris un échantillon des vases de la pointe de J’Aiguillon et un 
échantillon des terres du golfe de Luçon , submergées chaque année de 
la mi-Octobre à la mi-Juin. Nous avons obtenu , pour le premier , les 
éléments suivants : 


Résidu argilo-siliceux, insoluble dans les acides. 66, 77 19. 54 
Alumine et peroxyde de fer. . . . . . . . , . . 49, 77 ? 
Carbonate de XChAUX EN EE PRE PE EEE 6, 56 
Eau combinée, matières organiques volatiles au rouge, 
ét PrOAULS TLONANSESE MEME TRE ONE RE 43, 90 
100. 00 
Le second nous a donné : 
Résidu argilo-siliceux, insoluble dans les acides. 76, 70 86. 80 
Alumine et peroxyde de fer. . . . . . . . . .. 10, 40 L 
Carbonate de chaux. tn CU TEE STONE 4, 25 
Eau combinée, matières organiques volatiles au rouge, 
et'produits nOMAOSÉS à: 54 ALT NNS NS RS 11, 95 
100, 00 


En considérant les résultats obtenus par l’analyse de chacun de ces 
échantillons, nous voyons qu'ils différent sensiblement entr’eux : et selon 


(93) 

les analyses rapportées par M. Manès, l’on est amené à croire que les 
atterrissements anciens du golfe de Luçon, sont de nature calcaire, en 
ce qu’ils renferment une grande proportion de carbonate de chaux ; alors 
on pourrait en conclure qu’ils ont été formés par les matières charriées 
par la Sèvre; mais les analyses de l’École des ponts et chaussées, nous 
font penser au contraire par la présence d’une très-grande proportion de 
silice, que les vases actuelles sont formées de détritus granitiques. Nous 
nous prononcerons sur le mode de formation des atterrissements dans le 
chapitre suivant, mais toujours est-il, d’après nos analyses, que ces ter- 
res sont classées dans la nomenclature des terrains agricoles, dans le 
groupe des terres argilo-siliceuses ou terres fortes et compactes. 

Au point de vue de l’agriculture , la couche supérieure de ces marais 
diffère essentiellement de l’inférieure , en ce qu’elle contient cinq fois 
moins de carbonate de chaux. Les causes de son infertilité sont faciles 
à saisir : d’abord , sa grande ténacité, les racines des plantes pivotantes 
ne pouvant y pénétrer que très-difficilement ; puis, ce qui est le plus 
nuisible, le manque d’égouttement; l’eau qu’elle retient, surabondam- 
ment, pendant au moins six mois y restant, comme stagnante, et nuisant à 
toute végétation. Par la sécheresse, un effet non moins contraire au dé- 
veloppement des plantes se manifeste : la dessication complète, le retrait, 
le crevassement du sol, font périr, en été, celles qui sont délicates. 
Enfin , toujours est-il que des terres de cette nature doivent être diffici- 
les à cultiver. Nous ne voulons point conclure de là, qu’on doive renon- 
cer à tirer parti de cette sorte de terrain ; car la science agricole a des 
moyens d'action qu’elle ne possédait pas autrefois, et dont il ne s’agit 
que de faire un usage opportun. 

La Baie de la Rochelle, creusée dans un calcaire marneux et schis- 
teux , est bordée à l’Ouest et au Nord-Ouest de cordons littoraux s’éten- 
dant du Fort-Louis jusqu’à l’entrée même du port, qui se trouve encom- 
brée de vases s’accumulant de jour en jour. Ces vases, à l'aspect 
noirâtre, sont en grande partie composées de débris coquilliers, leur 
analyse nous a fourni les éléments suivants : 


Résidu argilo-siliceux, insoluble dans les acides. 63, 58 


: 1, 08 
Alumine et peroxyde de fer. . . .. . . . . .. 7, 50 y 
CATDONALE A ELCNAUX EE RE RE RES 14, 03 
Carbonate de-magnésie : 5 Lu ne .. 0,04 
Eau combinée, matières organiques, etc . . . . . . . . 14, 88 

100, 00 


(94) 

En comparant les analyses des vases de la pointe de l’Aiguillon avec 
celle des vases du port de la Rochelle, l’on trouve que celles-ci différent 
notablement des premières, en ce qu’elles renferment le double de car- 
bonate de chaux, et en plus du carbonate de magnésie. Nous sommes 
donc porté à croire, d’après ces données, que les vases du port de la 
Rochelle sont de nature calcaire, et que les 63, 58 de matières argilo- 
siliceuses proviennent sinon en totalité du moins en partie sensible, 
de la désorganisation d'animaux infusoires, très-communs dans notre 
baie. 

Les Anses des Trois-Canons et de Marennes, situées entre le Rocher 
et Ja pointe de Châtelaillon, nous paraissant de même nature que celle 
de l’Aiguillon : des sables, graviers, chargés d’argile et mélangés de 
galets calcaires occupent la partie la plus avancée dans la mer. Afin de 
reconnaître si la Charente contribuait à la formation des vases placées à 
son embouchure , nous en avions pris un échantillon afin de le soumet- 
tre à l'analyse, mais ayant commis une erreur, nous ne pouvons l’in- 
troduire dans notre Mémoire. 

Entre Marennes et la Tremblade, les différents bras de la Seudre, 
forment des deltas aujourd’hui couverts de sables et graviers contenant 
une notable proportion de carbonate de chaux; leur analyse nous a 
donné les principes constituants suivants : 


SAC ee At etre eue delete CARRE 84, 75 
i te 7 87, 45 

Alumine et peroxyde de fer . . . . . . . . 2, 70 
Carbonate de chaux. . . . . ES ne oo 12, 50 
Mañères non dosées 0.0 RC EU EUENER 0, 05 
100, 00 


L’accumulation journalière de ces sables nous fait penser qu’à une 
époque plus ou moins reculée, l'Île d’Oleron sera réunie au continent. 

Alluvions de ia Gironde.— Les sédiments vaseux pris à 
l'embouchure de la Gironde, à Royan et au Verdon, présentent des diffé- 
rences, surtout dans les quantités de carbonate de chaux : la quantité 
d'azote contenue dans chacun d’eux est de 0,286 p. 100 pour Royan, 
0,276 pour le Verdon. | 

Soumises à l’analyse, les vases du port de Royan, ont donné les élé- 
ments suivants : 


(95) 


Résiduarsilossilicenx 2-0 4150/1400 tt 69, 27 ) 

: 78, 29 
Alumine et peroxyde de fer . . . . . . . . 9, 02 
Carbonate de ChAUXS EC L-- -R- ue e -Ue 41, 20 
Eau, matières organiques, etc. . . . . . . . . . . . 10, 51 

100, 00 
Et celles de la plage du Verdon renferment : 
Résidu arcilo-siliceux. 4. 212407... 68, 17 8. T4 
Alumine et peroxyde de fer . ., . .... 10, 57 2 
CAPDONAle AE ICNAUXE EP ES EC ee ie 6, 38 
Eau," matières organiques, etc: 4 . 22 7. 2.1 14, 88 
100, 00 


La vallée de la Gironde, de Mortagne à Blaye, présente, sur un fond 
d'argile marine, un dépôt d’alluvions fluviatiles provenant des atterris- 
sements dûs aux eaux extrêmement limoneuses de la Gironde, et qui 
forme le vaste marais compris partie dans la Charente-Inférieure, et 
partie dans la Gironde. Il présente à l’œil une vaste plaine d’aspect uni- 
forme , dont le sol inférieur, de 1m50c à 2°00°, au niveau du fleuve, est 
séparé de celui-ci par un bourrelet d’une terre végétale sédimentaire très 
fertile. 


Un échantillon des vases de la Gironde, pris à Blaye, a montré les 
matières suivantes : 


Résidu argilo-siliceux, insoluble dans les 


ACIdeS 6 dersn mess esse reeee 13, 27 gl. 04 
Alumine et peroxyde de fer . . . ..... 3017 : 
Garbonatemde Chaux, RENE RER ne 8, 52 
Eau combinée, matières organiques volatiles au 

TOUDO Ne lee te le De Al Pa er Le Meet ler date An le Mean © 0e 40, &4 

100, 00 


Perturhations dans les couches sédimentaires du lit- 
toral. — Les causes physiques actuelles telles que les marées, les tem- 
pêtes et les vents interrompent l’ordre des dépôts sédimentaires, et ontune 
action efficace sur la formation des couches irrégulières que l’on remar- 
que , soit dans les anses vaseuses, soit dans les cordons littoraux. 

Les vents ont une puissante action sur les dépôts sédimentaires lors 
même que le temps est beau. M. d’Orbigny nous a fait connaître, qu’en 


( 96 ) 

1846 , les vents d'Est, de Sud-Est et de Nord-Est ayant eu une plus 
longue durée que d'habitude, le littoral de la Rochelle qui en était abrité 
et se trouvait alors plus tranquille, fut couvert partout , sur les galets de 
la côte, sur les sables et même sur tous les parcs à huîtres de Nieul et 
de Marsilly, d’une épaisse couche de vase. Celle-ci resta tout l’Été, et 
ne fut enlevée qu’au mois d'Octobre lorsque les vents du Sud et de 
l'Ouest vinrent balayer la côte. 

Le 8 Mai 1857, nous avons observé un phénomène semblable; les 
vents, assez faibles, étaient Nord-Est, la mer dans l’état le plus calme; 
les vases du port de la Rochelle, de la rade d’Angoulins avaient reçu 
une’quantité prodigieuse de galets de la grosseur d’une noix; quelques 
jours après les vents ayant tourné à l'Ouest, ces petits galets furent 
recouverts de vase. 

Nous avons donc ici en petit le phénomène des perturbations géologi- 
ques, dont il y a un autre exemple remarquable à la pointe du Ché; nous 
croyons, comme le montre la fig. 8, pl. I, que les couches argileuses 
alternent avec les sables et galets calcaires. 

Les alluvions de la Gironde donnent pareillement un exemple de per- 
turbations survenues à l’époque de leur formation; dans les sondages 
effectués dans la partie basse des marais de Saint-Louis, l’on a trouvé 
les couches suivantes : 


Tourbe herbacée superficielle. . . . . . . . . . «= Om, 40c 
Argtile DIanche ML NN ET RCE 0 , 60 
Arpile DIenC- 2 ERP PME REP EN EEE 4 ,40 
Débris de végétaux présentant une structure organi-— 

que parfaitement conservée. . . . . . . . . . . . 0 , 40 
Aromé DIEUC 6x 2-0 TINEIERE . . Indéfinie. 


L’argile bleue avec son banc de lignite , représente ici la terre de bri 
ou l’alluvion marine; l’argile blanche et la tourbe, l’alluvion fluviatile 
qui a succédé à la première (1). 

Distribution des animaux mollusques vivant sur le 
littoral. — Les animaux côtiers, que nous avons trouvés sur le littoral 
sont assez nombreux , et mériteraient un examem plus attentif que celui 
que nous en avons fait; nous nous sommes seulement attaché à observer 
leurs modes d'habitations et les causes qui les attachent exclusivement 
aux lieux qu’ils ont choisis pour demeures. 


(1) Description géologique de la Charente-Inférieure , page 207. 


(197 ») 

Les animaux côtiers ne vivent pas indifféremment partout , et selon 
M. D'Orbigny, les causes qui président à leur distribution sur les côtes 
sont les courants, la température, la configuration et la nature des 
côtes ; enfin, la profondeur de la mer. 

En parcourant le littoral, de l'embouchure de la Loire à celle de la 
Gironde , on est étonné des différences que présentent les faunes. Ainsi, 
sur les points bordés de rochers vivent exclusivement : les Purpura im- 
bricata, Murex erinaceus, Trochus umbilicatus, Patella vulgata , Pho- 
las dactylus, Petricola ruperella, quelques Echinus, Serpula et Grapsus. 
Les fonds sablonneux de Noirmoutiers , de l’Ile-de-Ré et d’Angoulins ne 
montrent aucune espèce des genres cités, mais les Nassa reticulata , 
Dentalium costatum, Cassis saburon, Fusus lactœus, Cyprea cocci- 
nella, Nassa granulaia, Buccinum undatum, Cardium edule, Turbo 
auricoma, Paludina ulvarum , Bulla cornea , Solen vagina , Solen sili- 
qua, Luitraria elliptica, Mya arenaria, Avicula atlantica. Les fonds 
vaseux tels que ceux de la baie de l’Aiguillon, par exemple, montrent 
des Paludestrina, Lavignon, Lyonsia Cardium et les Tellina tenuis, 
Mya truncata, Solen ensis, Purpura lapillus, Unio sinuata, Unio lit- 
lorulis. 

Quant à la profondeur de la mer, au niveau des fortes marées des 
syzygies vivent sur les côtes rocailleuses, les Litiorina Lamarckü, 
Patella, les Grapsus, et sur les plages vaseuses, diverses espèces de Pa- 
ludestrina et Lavignon. Au niveau des marées ordinaires, les Littorina 
liüttorea, Trochus zyzyphinus, Murex, Purpura hemastoma, Mytilus 
edulis, Petricola, Pecten opercularis, Pecten varius, Venus, et plu- 
sieurs Echinus vivent sur les rochers; et les Nassa, Cardium edule, 
Ostrea edulis, O. hyppopus et O. spondyloides, Lutraria elliptica sur 
les plages sablonneuses ; enfin, sur les vases se trouvent en abondance 
certaines Tellina, Lyonsia, Mya truncata. Au-dessous du balancement 
des marées, à des niveaux différents de profondeur, vivent encore des 
Terabratula, Crania, et beaucoup d’Echinus, de Bryozaires pierreux et 
des polypiers flexibles. 

En résumé, la nature des côtes et les différentes zônes de profon- 
deur, soit ensemble, soit séparément occasionnent des différences 


constantes très-marquées dans la composition des faunes, souvent très- 
voisines les unes des autres. 


( 98 ) 
CHAPITRE III. — CAUSES QUI ONT PU FORMER LES DÉPÔTS LITTORAUX. 


Aperçu général. — L'importance de la question nous a obligé à 
réserver pour un chapitre spécial les causes qui forment les dépôts litto- 
raux , afin de pouvoir nous étendre davantage sur ce sujet. Les opinions 
émises sur le mode de formation des couches terrestres , sont trop diver- 
ses, et ont été l’objet de trop de contradictions pour que nous ne nous 
appliquions pas à les généraliser et à en tirer un principe; nous appor- 
tons une bien faible part à cette œuvre; cependant, nous essaierons 
d'expliquer, à notre point de vue, les sujets de tant de divergences parmi 
les opinions scientifiques, et aidé des conseils de plusieurs géologues 
érudits et éminents, nous tâcherons de ne pas nous écarter des justes et 
vraisemblables lois qui régissent notre planète. 

Nous savons que les dépôts littoraux sont formés de trois manières 
bien différentes : par le transport des affluents terrestres, l’usure des 
côtes, et par les corps organisés. L’heureuse pensée de recourir à ces 
différentes causes , pour expliquer la formation des couches terrestres, 
appartient tout entière à M. Constant Prévost qui, le premier, l’établit 
dans ses travaux géologiques. La science doit encore à M. Lyell un déve- 
loppement de ce système, appuyé de nombreuses recherches , aussi sa- 
vantes qu’ingénieuses. 

Dans un récent travail de M. Babinet, l’on trouve que les côtes de la 
Charente-Inférieure ont, depuis une époque indéterminée, subi une 
certaine modification dans leur hauteur, et que les atterrissements, s’o- 
pérant de nos jours, sont dûs au mouvement lent et successif du littoral; 
par conséquent, les dépôts qui nous occupent aujourd'hui se trouve- 
raient déjà formés dans la mer et se montreraient un jour au fur et à 
mesure que le rivage se soulèverait. En un mot, ce savant physicien 
attribue nos atterrissements à des causes semblables à celles qui occa- 
sionnent les changements lents et successifs des côtes de la Scandinavie. 

Nous ne pouvons admettre les conclusions de M. Babinet; car, à la 
suite d'observations bien précises , il a été reconnu que les falaises de la 
Charente-Inférieure n’ont point subi de modifications; seulement , nous 
pensons que les directions des courants sur nos côtes, bien modifiées 
depuis la formation des couches diluviennes, sont dues à un soulève- 
ment produit sur quelque point du globe. Comme chaque époque de 
soulèvement est marquée par plusieurs mouvements de bascule, il pour- 


(99 ) 
rait bien se faire que le soulèvement, qui se produit de nos jours dans 
la mer Baltique, influât sur les courants de l'Océan. 

Les hauteurs d’eau observées à Brest, depuis près d’un siècle , nous 
montrent que le niveau des eaux n’a point changé, mais cela ne nous 
suffit pas pour prouver que le littoral n’a point senti les effets d’un sou- 
lèvement; car avec un niveau de la mer constant, son fond pourrait 
avoir reçu quelques modifications, et par suite, les courants sous- 
marins avoir de nouveaux lits et de nouvelles directions. 

Nous pensons que les causes qui agissent sur la formation de nos 
alluvions, existent depuis le soulèvement des Alpes. Celui du Ténare 
qui s’est particulièrement manifesté dans la Morée n’a laissé ailleurs que 
de faibles traces, quoiqu'il ait cependant affecté en Sicile des dépôts qui 
renferment des traces d'industrie, ce qui prouve qu'il est postérieur à 
l'apparition de l’homme sur la terre. S'il est évident qu'il ne s’est pres- 
que rien passé en Europe après le grand évènement des Alpes, il n’en a 
pas été de même dans les autres parties du monde. Mais les tremble- 
ments de terre qui ont eu lieu sur les côtes du Chili en 1822, 1835 et 
1837, et qui ont produit des effets remarquables sur les côtes de Valdi- 
via et de Valparaiso, ont-ils apporté quelques changements dans les 
eaux qui bornent nos continents ? Nous ne saurions en juger; mais 
nous pouvons dire que les influences, sous lesquelles est placé notre 
littoral, sont dues à une oscillation fortuite du sol , produite par un 
mouvement d’un genre encore indéterminé. 

Relativement aux affluents terrestres, quelques personnes ont voulu 
prouver qu’ils contribuent puissamment à la formation des dépôts meu- 
bles; d’autres, au contraire, ont pensé que les rivières qui se jettent 
dans l'Océan, n’ont pu et ne peuvent aujourd’hui même apporter des 
sédiments à leurs embouchures. De ces deux opinions bien contraires, 
laquelle faut-il admettre ? le choix en est facile : suivons de nouveau le 
littoral, de l'embouchure de la Loire à celle de la Gironde, en faisant 
des observations, et nous pourrons juger des causes qui agissent sur la 
formation des alluvions. 

Les rivières que nous rencontrons dans notre parcours sont : la Vie, le 
Lay, la Sèvre , la Charente et la Seudre, qui, en moyenne débitent 30 
mètres cubes; peut-on concevoir, à l’aide de ces données, si faibles 
pour les effets qu’on leur attribue, qu’elles puissent apporter des sédi- 
ments à la mer? Nous laissons à nos lecteurs le soin de trouver la solu- 
tion de ce problème. Mais nous constalerons, qu’il est incontestable que 


( 100 ) 
les rivières débouchant dans l’Océan ne peuvent y apporter des sédiments ; 
car, étant partis des points les plus éloignés, par conséquent plus élevés, 
les sédiments terrestres s'arrêtent dans toutes les dépressions du sol, 
avec ou sans issue , sur tous les points où l’inégalité des pentes permet 
aux courants de se ralentir; ils se déposent encore sur les plaines, dans 
les coudes, dans les anses tranquilles , de sorte que s’il en arrive à l’em- 
bouchure des rivières , ce n’est qu’en très-petite quantité. 

La Loire et la Gironde , surtout la première, peuvent seules fournir 
à la mer des sédiments composés de sables et de matières limoneuses. 
La Loire, dans tout son parcours au milieu du terrain granitique, apporte 
et dépose dans son lit, surtout de Nantes à Saint-Nazaire, une quantité 
prodigieuse de sables grossiers, formant des bancs mobiles légèrement 
inclinés du côté de l’amont, et offrant une pente rapide du côté de la 
mer. Ces sables sont quartzeux, avec grains de jaspe, de schiste ardoi- 
sier et de fer titané, se déposant en zônes noires sur le sable fin. Au- 
delà de Saint-Nazaire, ils sont formés de grenat, de zircon et de quel- 
ques rubis en grains très-fins provenant de la trituration du gneiss par 
l’action des vagues (1). 

Nous voyons donc par ce court aperçu que les affluents terrestres sont 
loin de fournir les quantités de matières sablonneuses et limoneuses 
qu’on veut bien leur attribuer, seulement, nous observerons que la 
Loire et la Gironde seules font exception. 


Dans l’usure des côtes , les eaux jouent un rôle très-important dans les 
changements qui se font à la surface du globe, quelquefois par leur ac- 
tion dissolvante ; mais le plus souvent par leur action délayante, par 
leur poids, et surtout par les mouvements dont elles peuvent être ani- 
mées , par la force de transport qui résulte de leur vitesse. De là, des 
modifications diverses dont il faut apprécier l’importance et l’étendue. 

De nos jours, les sédiments formés par l’usure des côtes sont les plus 
considérables , et si nous examinons ce qui se passe sur les côtes de 
l’Ile-Dieu ( Vendée) et de Châtelaillon (Charente-Inférieure), nous trou- 
verons un phénomène assez compliqué dû à l’action des vagues sur les 
rochers. 


La marche de la mer, en pareil cas, est facile à suivre, et voici com- 


(4) Ces sables, possédant la propriété de l’émeri, sont employés par les lapidaires 
pour le polissage des agathes. 


(1019 

ment nous nous expliquons la présence des énormes blocs de rochers 
que l’on trouve sur les ruines de l’ancienne ville de Chätelaillon (Cas- 
tellum Allionis) : Quand la mer rencontre un escarpement, comme les 
falaises abruptes d’Angoulins et de Chatelaillon, elle l’attaque, elle le 
corrode en dessous, puis, quand le poids qui se trouve suspendu l’em- 
porte sur la cohérence, la masse s’écroule, la mer s’introduit immédia- 
tement dans la coupure qui s’est formée, et comme la séparation se fait 
le plus souvent suivant une face verticale, la mer se met à travailler de 
nouveau contre elle, tandis qu'en même temps elle attaque avec bien 
plus d'avantage la masse déjà tombée, dans les fentes de laquelle elle 
s’introduit pour achever d’en diviser les roches. Dans le même temps 
encore, les blocs qui ont déjà été attaqués à deux reprises et qui se trou- 
vent plus éloignés de la terre, sont de nouveau battus, minés, corrodés 
de la même manière jusqu’à ce que la mer puisse les ébranler, les 
frotter les uns contre les autres et les réduire en sables. Ce résultat peut 
paraître étonnant pour les personnes qui ne connaissent pas les effets de 
la mer, et celles-ci deviendraient peut-être encore plus incrédules si 
nous leur rappelions que, sur les côtes de l’Ile-Dieu, la mer agit de la 
même manière sur un granit très-dur, entremêlé de grosses veines de 
quartz plus dur encore. 

Après avoir ainsi constaté et établi la manière dont les vagues morcè- 
lent nos côtes, nous ne pouvons douter de l’importance qu'ont les sédi- 
ments provenant de leurs détritus; par la même raison, nous ne devons 
pas être étonné de l’envahissement progressif de la mer, sur une côte 
aussi favorable à la désagrégation que celle de Châtelaillon. Si l’on vou- 
lait se rendre compte de la quantité de sédiments qui a été fournie par 
celte falaise , on n’aurait qu’à en prendre la hauteur moyenne (15 mètres) 
et la longueur de la pointe qui s’avance dans la mer (1 kilomètre) peur 
obtenir le chiffre désiré. 

L’fluence de la mer, sur les côtes argilo-calcaires de Châtelaillon 
et d’Angoulins, est si considérable, que de l’ancienne capitale de l’Aunis 
(Castellum Allionis) qui, suivant les documents historiques, existait 
encore en 1780, on trouve des débris, seuls témoins de son existence, 
à plus d’un kilomètre en mer; un fort bâti sur cette même falaise, sous 
le règne de Napoléon [°, et qui, en 1825, se trouvait encore à plus de 
200 mètres du rivage, est presque anéanti; un pan de muraille reste 
seul au sommet de l’escarpement, et il est fort probable que, dans peu 
de temps, la mer l’aura reçu dans son sein. 

Tome XXIT. 8 


( 162) 

Le Château-fort de l’'fle-Dieu offre pareillement une preuve manifeste 
des immenses changements qui se sont opérés sur ces côtes. 

Les corps organisés par leur décomposition et leur usure, quoique 
loin de fournir des sédiments en aussi grande abondance que les côtes 
et les affluents terrestres, méritent néanmoins l’attention de l’observateur. 
D’après‘les Ingénieurs-hydrographes, ils forment une assez grande étendue 
sous-marine à la pointe de Chassiron (Ile d’Oleron), à celle des Baleines 
(Ile-de-Ré), et tapissent les roches de nos attérages. Les Échinides, les 
Foraminifères et les Infusoires abondent sur nos côtes, et par leur décom - 
position, ils forment une assez notable quantité des vases que l’on 
remarque dans les ports. 


En résumé, selon l'opinion de M. Alcide d'Orbigny, si nous prenons 
le chiffre 16 pour l’ensemble des sédiments marins, nous trouverons 
que ce nombre se compose des éléments suivanis : 


Sédiments fournis par les affluents terrestres . . . . . 4 
_ — l'usure des côtes . . . . . . ..., 10 

_— — les corps organisés . . . . . . . . 2 

16 


Par la double puissance destructive et créatrice de l'Océan , il se passe 
un phénomène bien remarquable, dû au mouvement oscillatoire des 
vagues ascendantes et descendantes, que sépare un moment de repos; 
c’est celui du triage que la mer fait des débris divers qu’elle entraîne et 
qu’elle dispose régulièrement sous forme de ceinture, de manière à ce 
que ces alterrissements présentent une succession uniforme de vases dans 
le fond, de sables près de l’ouverture des anses, enfin de galets sur les 
points les plus exposés aux flots. 

Formation des dépôts littoraux. — Dans notre examen des 
couches alluviales du littoral, nous avons émis notre opinion sur le mode 
de formation des Cordons lilloraux et des Dunes ; nous croyons avoir 
donné la vraie marche du phénomène, seulement nous nous sommes 
appuyé sur des causes locales particulières et sur l’état topographique 
du littoral de la Rochelle et de celui des Sables-d'Olonne. Les causes 
agissant sur la formation de semblables dépôts , dans les endroits où ils 
se rencontrent encore, sont, à peu de chose près, les mêmes; ainsi sur 


le littoral d'Escoublac, d’Arvert, les vents d'Ouest, seuls créateurs des 
dunes, prédominent aussi bien qu'aux Sables d'Olonne. 


(11031) 

Pour que de semblables dépôts existent sur une côte, il faut que la 
mer y soit très-agitée, que la pente soit très-faible et prolongée assez 
loin sous les eaux, afin que les vents aient prise sur le sable sec à marée 
basse ; c’est ce qui a lieu dans les deux localités précitées. 

Pour faciliter la formation des cordons littoraux, il faut que la côte 
plate soit balayée par une mer très-agitée ; celle-ci, après avoir battu en 
brèche et morcelé les points qui se trouvent exposés à la violence des 
vagues, apporte et dépose à l’aide des courants occasionnés par les 
marées, les galets qui forment les cordons littoraux ; c’est ce que l’on 
remarque sur la côte Nord-Ouest de la baie de la Rochelle. 

Nous regardons encore comme cordons littoraux les Deltas négatifs, 
qui se trouvent à l’embouchure de la Seudre; l’immense quantité de 
sables qui se trouvent à son embouchure ne peuvent être le résultat de 
son débit et de ses courants; ils sont donc formés par les courants 
venant de la côte d’Espagne et par ceux qui suivent les côtes entre le 
littoral et l’île d’Oleron. Nous avons remarqué de semblables dépôts dans 
les Pertuis d’Antioche où se trouve, entre le rocher de ce nom et le bourg 
de Saint-Denis (Île d’Oleron) un énorme banc de sables grossiers mêlés 
de débris coquilliers. La Loire et la Gironde, d’après les cartes hydro- 
graphiques, montrent pareillement dans leurs lits, d'immenses bancs 
de sables qui, par rapport aux Deltas du Rhône, sont regardés comme 
formant des Deltas négatifs. D’après ces considérations, nous dirons, 
que la présence de semblables dépôts, est due à la force des courants 
des fleuves et de l'Océan; le gros sable , provenant de la désagrégation de 
certaines roches, est livré aux courants, et ne possédant pas une densité 
trop grande, il est transporté dans la sphère où ces derniers exercent 
leur plus forte action; il est alors jeté soit à l'embouchure des fleuves 
soit à celle des Pertuis, comme aux extrémités des îles de Ré et d’Ole- 
ron, dans les pertuis Breton et d’Antioche. 

Pour les anses limoneuses, nous allons tâcher de remonter à leur 
origine et d'examiner la force qui agit sur leur formation. 

Le marais de Donges situé sur la rive droite de la Loire, entre Saint- 
Nazaire et Donges offre une étendue de près de 7000 hectares de marais 
des plus fertiles, un examen assez atlentif du mouvement des eaux, à 
l'embouchure de la Loire, ne peut manquer de faire reconnaître les 
diverses causes qui ont contribué à leur formation. 

D'abord, les masses énormes d’alluvions sablonneuses que ce fleuve 
charrie dans ses crues; ensuite, le mouvement périodique des marées, 


(104) 


qui font refluer les eaux sur des terrains bas et sans pente, ne peuvent 
mañquer de constituer aux abords du fleuve de vastes étendues maréca- 
seuses; c’est ce qui a eu lieu, en effet, depuis un temps immémorial. Ce 
n’est pas là toutefois, que les matières fournies par la Loire, jouent un 
très-grand rôle dans la formation et l’accroissement des atterrissements. 
Dans la Baie de Bourgneuf, il se produit des effets prodigieux. 

Afin de pouvoir se rendre compte de la formation de cette baie limo- 
neuse, il faut connaître l’influence qu'ont les courants sur la distribution 
des matières que charrie la Loire. Nous savons que deux grands courants 
sillonnent les côtes de l'Océan : celui du golfe de Gascogne qui vient se 
perdre au-dessus de l’Ile-Dieu, et celui de la Manche qui tourne sur les 
côtes du Finistère et vient se confondre avec la Loire un peu au-dessous 
du Croisic (1). Dans l’action de ces deux courants, nous trouvons la quan- 
tité de limon qui existe dans les baies et les anses de l’Océan. 

Par suite d'expériences faites à l'embouchure de la Loire, il est 
reconnu qu’un triage remarquable s’y effectue ; les sédiments apportés 
par ce fleuve, composés de sables et de limons, se répartissent de la 
manière suivante (2) : Les parties sablonneuses d’une assez forte densité 
sont rejetées sur la côte occidentale d’Escoublac qui, par sa disposition, 
est recouverte de dunes. Les parties limoneuses , restant plus longtemps 
en suspension dans l’élément aqueux, sont transportées dans la baie 
de Bourgneuf et sur la partie Nord-Est de l’Ile de Noirmoutier. 

M. Mourain de Sourdeval (3), assigne deux causes principales à la for- 
mation des limons dans la baie de Bourgneuf : 

4re Cause. — « Les côtes septentrionale et occidentale de l’île de Noir- 
« moutiers, surtout la dernière, s’étendaient autrefois dans la mer beau- 
« coup plus qu'aujourd'hui, c’est un fait dont il n’est pas permis de 
« douter. Le noyau de l’Ile est une roche granitique recouverte d’une 
« couche profonde de glaise et de limon que la violence des vagues, 
« poussées par les vents impétueux de l'Ouest et du Sud-Ouest, dégrade 
« sensiblement. Ces débris sont entraînés par deux courants qui se croi- 
« sent sur la côte occidentale ; l’un de mer montante, venant du Nord- 
« Ouest, les entraîne le long de la côte méridionale de l’île et les con- 
« duit, par le détroit de Fromentine, dans le bras de mer qui sépare l’île 


(1) Bouguet, Théorie des Courants de l'Atlantique. 
(2) Dubuisson, Méthode géologique. 
(3) Secrétaire perpétuel de l'Académie de Tours. 


( 4105) 
« du continent ; l’autre de mer descendante, venant du Sud-Ouest, les 
«entraîne sur le même point dans la baie de Bourgneuf. 

Qme Cause. — Une seconde cause, dont l’action est beaucoup plus 
énergique et plus continue, contribue surtout à la formation et à lac 
croissement rapide de cet atterrissement. « Avec beaucoup de sable, la 
« Loire entraîne dans son cours, une grande quantité d’argile et de terre 
« limoneuse que les eaux pluviales entraînent dans son lit et qu’elle 
« charrie dans la mer. Son embouchure se trouve placée dans la sphère 
« d'action des deux courants dont il vient d’être fait mention, et qui 
« doivent naturellement entraîner ces vases qu’elle transporte, qui n’ont 
« pas eu même le temps de se déposer au fond de la mer, et qui vont se 
« fixer sur la côte où se perd l’action des courants. » 

Comme l’on voit, les observations de M. Mourain de Sourdeval concor- 
dent assez bien avec les nôtres et les résultats attendus de l’action des 
courants; il en résulte donc que le vaste atterrissement de la baie de 
Bourgneuf est dû aux matières charriées par la Loire et à l'usure des 
côtes septentrionale et occidentale de l’île de Noirmoutiers. 

Dans la Baie de l’Aiguillon ou Golfe de Lucon, les causes à l’aide 
desquelles on peut expliquer la formation de la vaste étendue de marais 
comprise entre Longeville et Esnandes , deviennent très-confuses ; car 
les analyses des terres diffèrent essentiellement entre elles. Nous allons 
tâcher d'examiner les diverses causes qui ont pu présider à leur forma- 
tion, et d'expliquer la différence qui existe entre les analyses faites à 
dix ans d'intervalle. 

D’après les analyses de M. Fleuriau de Bellevue, dont le nom était 
entouré de respect dans la Charente-Inférieure , et dont les observations 
sont dignes de considération , les terres du golfe de Luçon sont de na- 
ture calcaire, en ce qu’elles renferment une très-grande proportion de 
carbonate de chaux. À l’aide de ces données , on est porté à croire que 
les courants, dirigés dans cette vaste baie, agissaient sur un terrain 

«calcaire , et, par conséquent, que les anciennes falaises jurassiques de 
Longeville, Luçon, Chaïllé-les-Marais, etc., fournissaient seules ces 
matériaux. | 

Aujourd’hui, d’après les analyses qui nous ont été fournies par le 
laboratoire de l’École des Ponts et Chaussées (1), et qui sont dignes 


(1) M. H. Mangon, ingénieur des ponts et chaussées, est directeur du laboratoire 
de l'École. 


( 106 ) 
d'une entière confiance, nous sommes convaincu que les atterrissements 
actuels, qui s’opèrent dans ce golfe , proviennent de détritus granitiques. 

Les causes qui agissaient, 1l y a cinquante ans, ont-elles cessé d’agir 
de nos jours? F’est-il manifesté sur quelque point du globe un soulève- 
ment qui aurait changé la direction des courants sous-marins ? La Sèvre 
n'a pas pu charrier, dans tout son parcours , des matières limoneuses 
en assez grande quantité pour avoir formé un aussi vaste attérissement ; 
car, si nous interrogeons ce qui se passe aujourd’hui à son embouchure, 
nous verrons qu'au lieu de verser des sédiments à la mer, elle en reçoit 
même en assez grande quantité. 

Pour arrêter le charriage de sédiments calcaires, il aurait fallu un 
cataclysme ; mais en réfléchissant et en suivant M. Fleuriau de Bellevue 
dans ses observations, nous pensons que les analyses qui lui ont été 
fournies sont entachées d’une erreur des plus graves; car ce savant 
naturaliste admet que les atterrissements sont de nature granitique et 
qu'ils renferment 15 p. 100 de carbonate de chaux. Il est bien reconnu 
que les détritus granitiques composés de feldspath, de mica et autres 
roches , ne peuvent donner une aussi grande proportion de chaux. Les 
analyses de M. Fleuriau de Bellevue sont donc incontestablement enta- 
chées d'erreur, et il n’est pas possible de pousser plus loin la discussion. 

Revenons alors sur le charriage que nous avons observé à la pointe de 
l’Aïguillon, et établissons , à notre point de vue , la manière dont s’opère 
l'accroissement de ce vaste atterrissement. Nous n’adopterons point la 
méthode de M. Babinet, afin d’expliquer la formation de la baie limo- 
neuse de l’Aiguillon ; car celle-ci ne se trouve nullement dans la sphère 
d'action des causes qui apportent des modifications aux côtes de Scan- 
dinavie. 

Les courants qui agissent sur les côtes de Bretagne, comme le mon- 
trent les immenses changements qui s’y opèrent chaque jour, le trans- 
port des détritus qui sont détachés par le mouvement des marées, et le 
courant qui débouche du Pertuis Breton; telles sont, pour nous, les 
seules et vraisemblables causes qui président au comblement de l’anse 
limoneuse de l’Aiguillon. La disposition et l’état topographique de ce 
golfe prêtent beaucoup aux atterrissements; car, se trouvant garanti, par 
les îles, de l’action des vents, les sédiments s’y déposent avec tranquillité, 
même à une petite distance. En résumé, pour l’existence de semblables 
dépôts , il faut un golfe aussi profond et aussi bien abrité que celui de 
Luçon; car, pour que les sédiments vaseux se déposent sur une côte 


(107 ) 
maritime et au niveau des hautes marées, il est nécessaire qu’ils se 
trouvent garantis , soit constamment, soit momentanément, de l’action 
immédiate des vents et des courants. 

Dans la Buie de la Rochelle, depuis bien des années, les habitants se 
préoccupent de l’origine des vases qui encombrent leur port; ils tra- 
vaillent sans cesse à leur opposer une barrière et à les jeter sur un autre 
point; mais leurs efforts deviennent inutiles, tout comme à Noirmoutier 
et à Bayonne. 

Un pareil état de choses est fâcheux pour l’avenir de cette ville; car le 
temps marche et la mer fait des progrès sur les côtes, qui perdent d’un 
côté ce qu’elles gagnent de l’autre. L’analyse des vases qui renferment 
une très-grande proportion de carbonate de chaux prouve qu’elles pro- 
viennent de l’usure des falaises placées à droite et à gauche de l’entrée 
du port. Les courants du pertuis d’Antioche , quoique bien atténués en 
arrivant dans cette baie, ne manquent pas non plus d'y apporter une 
notable quantité de sables et de débris coquilliers. La nature, suivant 
la route qui lui est tracée, ne permettra sans doute plus , dans quelques 
temps, aux Rochelais, de recevoir les navires d’un assez fort tonnage, 
dans leur port. Cet état de choses est fâcheux ; mais les remèdes à y ap- 
porter sont pour ainsi dire impraticables, et nous ne pouvons douter que 
le commerce de la Rochelle, après un laps de temps plus ou moins long, 
soit transféré aux pointes de Chef de Baie et des Minimes, entre lesquelles 
l’on pourrait faire un magnifique port en élevant des jetées assez formi- 
dables sur les restes de la digue du Cardinal de Richelieu. Avec de sem- 
blables travaux, l’on pourrait mettre la Rochelle au rang des ports du 
Havre, de Brest et de Marseille, et même lui donner le port militaire de 
Rochefort, qui devient inaccessible par la barre qui existe à l’'embou- 
chure de la Charente. | 

En résumé le port de la Rochelle tend sans cesse à se combler, et 
pour le défendre , le garantir des atterrissements nous pensons que les 
efforts du génie de l’homme sont sinon inutiles du moins inefficaces. 

La position géographique des anses des Trois-Canons et de Marennes 
exposées aux courants des côtes de l'Ile d'Oléron, qui dérivent du 
courant littoral de Gascogne , ne pouvait manquer de permettre la dépo- 
sition d'une très-grande quantité de sédiments marins provenant de 
l'usure des côtes voisines et de l’action immédiate qu’ont les courants 
sur les dépôts sous-marins ; les matières ainsi apportées dans ces anses 
renferment, outre les matières argileuses, de très-petites proportions 


( 108 ) 
de phosphate de chaux et de chlorure de sodium et d’autres sels alcalins 
qui sont un amendement des plus favorables pour le pays. 

Les alluvions de la Gironde , depuis son embouchure jusqu’à Blaye, 
présentent deux couches argileuses, bien distinctes; la première, qui 
s’observe de Meschers à Mortagne occupe la partie inférieure des marais 
s'étendant de ce dernier point à Blaye; les débris coquilliers trouvés 
dans les terres de Meschers , nous prouvent qu'elle est d’origine marine. 
La deuxième couche qui forme la partie supérieure des marais de Mor- 
tagne , par son caractère tourbeux , nous montre que la Gironde, dans 
ses crues, est venue recouvrir les dépôts marins et donner naissance à 
l'argile blanche qui se trouve à 0 40° de profondeur de la surface tour- 
beuse; la limite des courants de ce fleuve à Mortagne affermit notre 
opinion ainsi que l’analyse des vases de Blaye qui, mises en rapport avec 
celles du Verdon, donnent une preuve des effets de ces agents sur ces. 


deux points. 
Conclusions. — D’après les considérations énoncées sur le mode 


de formation des cordons littoraux , des dunes et des anses limoneuses, 
nous voyons qu'il se forme, en même temps, sur le littoral de Nantes à 
Bordeaux : 

4° Au-dessus du niveau des marées, sur les côtes plates, des dunes 
de sable non stratifiées , agitées sans cesse par les vents. 

2° Au niveau supérieur des marées, des couches horizontales de vase 
dans les golfes , sur les points abrités de la vague ou des courants, des 
sables ou des cordons littoraux de galets, sur les côtes lavées par des 
eaux en mouvement. | 

3° Au-dessous du balancement des marées, des bancs de sables gros- 
siers , dans le lit des courants, et des dépôts d'autant plus fins que la 
tranquillité est plus grande, à mesure qu'ils descendent dans les profon- 
deurs de l’Océan. 


MaArRAND. 


{er Août 1857. 


ie Avril 1955. 


DS 


Act. Soc. Linn Bord T 
| 


Fig. (Re 


Fig. D 

q 

. Le 

Cordons Littoraux. 4 Se 


Arôile Ferrugineuse = 


Galets et sables 


Ac, Soc Linn Bord° © XXII. PrAË 


Fig-1°° Profil transversal de la levée de falets de Ja Roohelle 


— 
PA \ 
. — BEN 
A \ À 
#7 ‘En \ \ 
Le er L2 € NEN 


Fig. EE arche probressive des Dunes 


Cordonsaliiioraux 


Agile Ferrugmeuse 


Galasebsables 


Marttalordinanres 


Arglle smeclique = 


Sables eteoquillages 


Fi. 3=Profil donnant les Couches Meubles d'Argiles ebde Galets tea pointeduChé, 


Marat ail Lacs Bords 


( 110) 

d’un demi-siècle, et l'Algérie vient de l’être. La plupart des îles de cette 
mer sont elles-mêmes assez bien connues; il suffit, en effet, pour s’en 
convaincre, de citer les Baléares, la Corse, la Sardaigne, les îles Lipari, 
la Sicile, Malte, les Cyclades, etc. L’une d’eiles cependant, la plus im- 
portante du bassin oriental de la Méditerranée, par sa position et son 
étendue, la Crète ou Gandie, est encore à peu près inconnue. Depuis 
Belon, qui y séjourna quelques mois, en 1550, Tournefort, qui y passa 
trois mois et demi, en 1700, il y a un siècle et demi, et Olivier qui 
ne put visiter que quelques points de la côte septentrionale, en Janvier 
4794, par suite des circonstances politiques , aucun naturaliste, à l’ex- 
ception du botaniste Sieber, n’y a mis le pied, probablement parce 
qu’elle ne se trouve sur aucune des nombreuses lignes de bateaux à 
vapeur qui sillonnent la Méditerranée. 

« C’est dans les ouvrages de ces quatre savants qu’il faut encore au- 


jourd’hui aller puiser les documents scientifiques sur la Crète; tout ce 


qu’on sait sur la conslitution géologique de cette grande île de 245 kilo- 
mètres de longueur, sur 32 de largeur moyenne, se trouve résumé en 
une page et demie, dans la Géologie de la Morée, par M. Virlet. 

« Les Cabinets de l’Europe ne paraissent pas renfermer de collections 
d'Histoire naturelle de la Crète ; le Muséum lui-même, si riche en objets 
de tous les pays, ne possède, à lexception du squelette humain de 
La Canée, qu’un seul échantillon de roche sans origine certaine; ses 
collections botaniques se réduisent à un certain nombre d'espèces sans 
localité précise, disséminées dans l’herbier général de Tournefort, et 
dans l’herbier d'Orient recueilli par Olivier. 

« La Crète est comprise dans le vaste espace triangulaire, dont les 
angles sont occupés par l'Égypte, la Morée et l'Algérie. Ces trois pays 
ont été explorés, au nom de la France, par des hommes appartenant en 
partie au Muséum d'Histoire naturelle. 11 semble qu'il soit réservé à 
PAdministration de cet Établissement de prendre l’initiative pour l’explo- 
ration d’une région qui parait devoir présenter beaucoup d'intérêt dans 
toutes les branches de l'Histoire naturelle (1). 

« La Carte géographique dressée à Paris, en 1825, par Lapie, d’après 
de simples renseignements écrits pour l'intérieur, est incomplète et pro- 
bablement fort inexacte quant au tracé du relief du sol. On n’y trouve la 


(1) L’exploration de la dernière grande île méditerranéenne, Chypre, a été confiée 
en 1855 à M. Albert Gaudry, attaché au même établissement. 


(AA?) 

hauteur d'aucun point au-dessus du niveau de la mer; et cependant la 
Crète doit renfermer des montagnes d'environ 2,500 mètres d’élévation, 
puisque le mont Ida, la cime la plus élevée de l’Archipel grec, conserve 
des neiges pendant une grande partie de l’année. Un nivellement général, 
fait à l’aide du baromètre et du sextant, déterminerait exactement le relief 
du sol, et fournirait des données importantes pour la géologie et les 
différentes zones d'animaux et de végétaux. 

« La Géologie et la Minéralogie de la Crète sont à peu près inconnues ; 
cependant , d’après la nature des terrains qui bordent le bassin oriental 
de la Méditerranée, il est fortement à présumer que les terrains crétacés 
du système méditerranéen y jouent un rôle important. S'il en était ainsi, 
ces terrains offriraient un grand intérêt lorsqu'on viendrait à les com- 
parer à ceux du Liban, de l'Égypte, de la Morée, de la Sicile, des 
Alpes et des Pyrénées, qui ont été depuis peu, ou qui sont encore, 
le sujet des études des géologues. Il sérait important de rechercher 
si les couches à Nummulites sont séparées des couches à Hippurites 
par une discordance de stratification, ou bien si elles passent de l’une 
à l’autre comme en Sicile. Si le terrain subapennin existe en Crète, ce 
qui est fort probable, il serait également intéressant de le comparer à 
celui de la Morée et de l'Italie. Il serait encore important d'examiner à 
La Canée les brèches à ossements humains et à coquilles marines, situées 
de 8 à 10 mètres au-dessus du niveau de la mer, et de vérifier l’origine 
naturelle ou artificielle du fameux labyrinthe de Gortyne. Enfin, la 
composition , la direction et par suite l’époque de formation des chaînes 
de montagnes de l’île, qui courent à peu près de l'E. à l’O., seraient 
fort curieuses à comparer à celles des chaînes de la Morée et de l’Attique, 
qui courent du N.-0. au S.-E., quoique à une distance peu grande. 

« En Botanique, indépendamment des espèces déjà décrites, qui inté- 
ressent la distribution géographique générale des végétaux, et des espèces 
nouvelles que l’on pourrait découvrir, il y aurait des recherches impor- 
tantes à faire sur la géographie botanique et sur les diverses zones de 
végétation inhérentes à la grande élévation des chaînes de montagnes. 
En effet, cette île située par 35° de latitude boréale est peut-être la seule 
grande île, située en dehors des tropiques, qui renferme de hautes mon- 
tagnes courant de l'E. à l'O. Cette disposition particulière pourrait avoir 
une influence sur la répartition des espèces. Le versant septentrional 
pourrait présenter une végétation assez analogue à celle de la Morée, 
tandis que le versant méridional posséderait une flore ayant des rappor!s 


(41124) 
avec celle de l'Égypte et de la Cyrénaïque. On conçoit facilement tout 
l'intérêt que l'étude d’un semblable pays offrirait au géologue et au 
botaniste. 

« En Zoologie, les petits mammifères , les oiseaux et les reptiles pré- 
senteront, sans doute, quelques espèces intéressantes ou nouvelles. 
Les poissons, notamment ceux d’eau douce, offriront un grand intérêt ; 
car, s’il est difficile de comprendre comment des espèces d’eau douce 
peuvent se trouver dans des îles éloignées des continents, il est fort 
important de constater quelles sont celles qui se trouvent dans ce cas. 
Le même genre d'intérêt s’attacherait aux articulés et aux mollusques 
terrestres et fluviatiles. 

« La Géologie trouverait encore, dans l’étude des mollusques et des 
zoophytes, des points de comparaison pour l'étude de ceux des terrains 
tertiaires subapennins qui existent sans doute dans l’île de Crète, comme 
en Morée, en Sicile, etc. » 

MM. les Professeurs-Administrateurs , par décision prise en assemblée, 
le 4 mars 1845, voulurent bien me confier la mission d'étudier et de 
recueillir les productions naturelles de l'ile de Crète, pour en enrichir 
les collections du Muséum ; ils ajoutèrent à mon traitement une somme 
de 2,300 fr. Pour subvenir aux frais du voyage, j’eus alors à ma dispo- 
sition une somme de 3,900 fr., qui fut à peu près suffisante. 

Je quittai Paris le 4 avril, et, sans séjourner ailleurs qu’à Syra, je 
ne pus forcément arriver en Crète que le 3 mai. J'ai passé sept mois et 
demi dans cette île, et je ne l’ai quittée que le 17 décembre, après une 
exploration que j'ai rendue aussi exacte et aussi minutieuse que je l’ai 
pu. J'étais moins pressé pour le retour ; je profitai d’une nouvelle voie 
de communication qui venait d’être ouverte par Chio sur Smyrne; là, je 
ne pus me décider à regagner l’Occident sans avoir jeté un coup d'œil 
furtif sur Constantinople. J’allai donc y prendre le paquebot français qui 
devait me ramener à Marseille et que je ne quittai que momentanément 
à Malte, pour faire quarantaine. J’arrivai à Paris le 15 février 1846. 

Les matériaux que j'ai rassemblés dans ce voyage, comprennent : 
4° un cahier de notes de près de 200 pages, environ 100 croquis de 
cartes locales, relevés à la boussole et à l’octant, 500 observations 
hypsométriques et une année d'observations météorologiques ; 2° 1,100 
échantillons de roches, dont 1,000 de la Crète et 100.de Malte, Syra, 
Chio, Smyrne et Constantinople, un herbier de plus de 700 espèces, 
ei des suites de divers animaux, notamment de mollusques et darticulés. 


( 113) 

Dès mon arrivée, el dans les moments de loisir que me laissait le 
Cours de Géologie dont j'avais été presque immédiatement chargé à 
Bordeaux, je m’occupai tant de dresser une nouvelle carte de la Crète, 
que du classement et de la détermination des objets que j'avais rapportés ; 
les circonstances politiques , si peu favorables à la mise au jour d’ou- 
vrages purement scientifiques, pendant les dix années qui viennent de 
s'écouler, et'aussi quelques autres travaux plus pressés, ne m'ont pas 
permis de procéder, jusqu’à présent, à une publication. Jai seulement 
coordonné mes matériaux pour une description de la Crète, sur un plan 
analogue à celui qui a été adopté par L. de Buch pour les îles Cana- 
rles. 

Aussi, depuis plus de douze années que j'ai terminé mon voyage, j'ai 
seulement écrit quelques lettres à M. Cordier et aussi à M. Boué, qui a 
bien voulu donner la traduction de l’une d'elles dans les Berichte de 
Vienne, séance du 31 mars 1848. Cependant, MM. d’Archiac et Agassiz 
ont compris dans le travail sur les Nummulites et dans le catalogue des 
Échinodermes les espèces que j'ai trouvées dans l’île. De Blainville à 
aussi donné, dans son Ostéographie, la description de fragments d'Hip- 
popotame. Plusieurs espèces nouvelles de plantes ont été décrites par 
M. Boissier dans ses Diagnoses ; et M. Lucas a publié, dans la Revue et 
Magasin de Zoologie pour 1853 et 1854, un Essai sur les animaux 
articulés , au nombre de 204 espèces , que j’ai recueillis. Enfin, dans la 
belle carte géologique de l’Europe qu'il a publiée en 1857, au moment 
où la mort est venue le frapper, A. Dumont a colorié l’île d’après un 
croquis que je lui avais adressé. 

Je pensais toujours à ma future publication, lorsque, il y a deux ans, 
Je reçus l'avis qu'un minéralogiste autrichien était sur le point de partir 
pour une exploration de la Crète, il devenait urgent de prendre un 
parti. Je m’adressai à la Société Linnéenne de Bordeaux. Celle-ci voulut 
bien agréer immédiatement pour ses Actes le texte du travail dont la 
rédaction n’était encore qu'ébauchée; mais ne pouvant faire les frais de 
la carte orographique et géologique, elle chargea M. Ch. Des Moulins, 
son Président, d'écrire à M. le Ministre de l'Instruction publique une 
lettre dont, j’extrais le passage suivant : « Il n’y a donc plus à différer la 
« publication des résultats du voyage de M. Raulin, si on désire con- 
« server à la France l'initiative qu’elle a toujours prise dans l’exploration 
« des pays méditerranéens, soit en Égypte, en Morée, en Algérie, et 
« {out récemment encore en Chypre; soit même en Crète, puisque c’est 


(114) 


« à Belon, à Tournefort et à Olivier qu'est dû presque tout ce qu’on sait 


sur cette île. 

« Encore une fois, Monsieur le Ministre, il est bien certain que vous 
approuverez le sentiment de véritable patriotisme , le sentiment fran- 
cais qui nous porte à chercher auprès de votre Excellence des res- 
sources que nous n'avons pas ef que nous ne pouvons recevoir 
d’ailleurs; mais ce qui nous reste à désirer bien vivement, c’est qu’il 
vous soit possible de nous accorder, sur les fonds destinés à l’encou- 
ragement des Sciences et des Lettres, soit cette année, soit l’année 
prochaine, la somme indispensable de mille francs. » 

M. Rouland a bien voulu accéder à cette demande ; par une lettre en 
date du 5 décembre 1856, il a annoncé à la Société qu'il était disposé à 
seconder la publication de la carte, qu’il allouait un premier crédit de 
300 fr. et qu'il se réservait de parfaire par des subventions, en 1857 et 


1 


A 


LI 


1858, la somme nécessaire. 

Dès la décision de la Société relative au texte, j'avais passé de nouveau 
en revue mes documents pour commencer la rédaction, et j'en avais extrait 
un aperçu, ayant surtout trait à la géographie physique et à la géologie, 
qui parut dans le Bulletin de la Société géologique de France, séance 
du 17 mars 1850. 

Dans le travail que je soumets au jugement des naturalistes, les ma- 
tières seront réparties de la manière suivante : 


Livre Ier. — Jiinéraire hors de Crète. — Aperçu historique sur la Crète. — 
Itinéraire en Crète. — Population, Agriculture, Industrie et 
Commerce. 

Livre IL — Géographie physique et mathématique. — Physique du sol. 
— Météorologie. 

LiYRE III. — Géologie. 

Livre IV. — Botanique. 

Livre V. — Zoologie. 


LIVRE T 


ITINÉRAIRES. — HISTOIRE. — STATISTIQUE. 


CHAPTERE [: 


ITINÉRAIRE HORS DE CRÈTE. 


De Paris à Marseille.— Après un mois passé en préparatifs, je parus 
par les Messageries royales, le vendredi 4 avril, à une heure de l’après- 
midi. Au bout de cinquante heures, la diligence entrait à Lyon avec une 
telle vitesse qu’en franchissant le pont du faubourg de Vaise, l’un des 
chevaux tomba mort d’un coup de sang; j'aurais pu voir là quelque 
funeste présage, mais je n’y songeai pas. Sur la route, comme à Paris, 
la végétation arborescente était dans un état de repos presque complet. 
Le lendemain, je descendis le Rhône sur le Mogador, et en dix heures 
nous arrivames à Avignon , après avoir aperçu des montagnes couvertes 
de neige, tant du côté du Plateau central que du côté des Alpes. Au-delà 
de Tain, en sortant des montagnes qui encaissent le Rhône, on entre 
dans la région méditerranéenne géologique ; çà et là des montagnes cal- 
caires, plus ou moins escarpées, d’un gris-jaunâtre ou de fumée, à cou- 
ches tantôt horizontales , tantôt, et le plus souvent, fortement inclinées. 
Dès Condrieu aussi, on était déjà dans un. autre pays pour l’état d’avance- 
ment de la végétation; les saules commençaient à verdoyer. À Avignon, 
les amandiers, les pêchers , les poiriers, quelques platanes étaient en 
fleur ; l’orme était chargé de fruits; les saules étaient tout verts. Du haut 
- de la colline de l’ancien château papal, j’aperçus au N.-E. le mont 
Ventoux, encore couvert d’une calotte de neige qui occupait le cinquième 
de sa hauteur totale, 300 à 400 mètres. De l’autre côté du pont, à Ville- 
neuve, je vis pour la première fois les plantations d’oliviers, au feuillage 
gris-verdâtre si triste. 

La diligence, partie d'Avignon à sept heures du soir, s’arrêta au milieu 
de la nuit à Salon dont la place, avec ses grands arbres et ses trois 


( 116 ) 

fraiches fontaines, s’est gravée dans mes souvenirs. De la poste de l’As- 
sassin, Où la voiture arriva au point du jour, nous traversàämes un pays 
accidenté, à pentes plus ou moins escarpées, avec oliviers et bois de pins ; 
puis vint la plaine ondulée, fertile de Marseille, limitée d’un côté par des 
montagnes nues déchiquetées, et de l’autre par la mer, d’un vert- 
bleuâtre foncé, sur laquelle semblait s'appuyer la voûte céleste d’un 
beau bleu. — J'avais vu la Manche à Dieppe trois ans auparavant; je 
voyais la Méditerranée pour la première fois; je me pris à penser que la 
mer ne se confondait avec le ciel que dans l’imagination des poètes ou 
bien par un temps brumeux. 

A Marseille, trois jours passèrent vite à faire les dernières emplettes , à 
visiter MM. Barthélemy, directeur du Musée d'Histoire naturelle, Matheron 
et Requien, et à préparer le départ. Le vendredi 11 avril, à cinq heures 
du soir, l'Eurotas quittait les eaux noires et fétides du port, et entrait à 
toute vapeur dans une mer moutonnée par un vent très-fort. J’étais 
recommandé au Dr Cruchet, chirurgien du bord, qui fut fort obligeant 
pour moi pendant toute la traversée. Parmi les passagers se trouvait 
M. Gœpp, consul de France à Larnaca , dont le père avait été plusieurs 
fois soigné par le mien, et une charmante Française, Mme C. Lenglé, 
qui retournait près de son mari à Odessa ; nous fimes vite connaissance, 
et nos journées et nos soirées se passèrent plus agréablement que je ne 
l'aurais cru sur mer, où le ciel et l’eau, vus du bord, forment un 
spectacle fort monotone et bien dépourvu d'intérêt, surtout pour un 
géologue. 

De Marseille à Syra. — Le bâtiment faisant le service postal des ports 
d'Italie, les côtes étaient souvent en vue. Le lendemain , les Alpes mari- , 
times et les montagnes de la Corse se laissèrent apercevoir couronnées 
de neige ; le surlendemain , après notre départ de Livourne, ce fut le tour 
de l’Ile-d’'Elbe. En quittant Civita-Vecchia, nous nous trouvâmes dans 
un brouillard assez fort qui nous déroba la flèche de Saint-Pierre de 
Rome; sur le soir, il se convertit en pluie qui nous accompagna à Naples, 
où nous arrivämes le 15, à deux heures et demie du soir. De la rade, 
je ne vis que Naples et les bases du Vésuve, le brouillard et les nuages 
enveloppant la partie supérieure et même le cap Sorrente. Depuis que 
nous étions dans les eaux papales et napolitaines, le beau ciel de l’Htalie 
n'était plus qu’un rêve. A trois heures du matin nous aperçûmes le cône 
du Stromboli, semblable à un gigantesque phare dont le feu aurait été 
surmonté d’un chapeau de fumée et de nuages ; la pente au $. était de 54°. 


CAES 


À sept heures et demie du soir, nous passions entre Carybde et Scylla, 
par un temps fort calme, peu propre à nous rappeler l'antique tradition ; 
nous entrions dans les eaux de l'Orient. Le 17, à six heures du matin 
Messine était déjà loin; la côte de Sicile apparaissait comme un bas 
plateau , légèrement incliné au S., et dans le N.-0. gisait l’'Etna que les 
neiges , dont il était couvert dans ses deux cinquièmes supérieurs, ren- 
daient d’un blanc resplendissant ; cône magnifique présentant des sillons 
noirs qui descendaient en divergeant du sommet, et qui étaient sans 
doute autant de vallons dans lesquels la neige était rare ou même déjà 
entièrement fondue. Dans l'après-midi, nous aperçümes Malte, et à cinq 
heures et demie, nous entrâmes dans le grand port, laissant à O., sur 
le plateau , la ville avec ses maisons jaunes à terrasses. 

Le lendemain, à deux heures de l’après-midi, le bâtiment partit; 
pendant deux jours et demi nous perdimes complètement la terre de vue ; 
du matin au soir la température de l’air restait stationnaire entre 16 et 
17 cent. À une nuit calme, pendant laquelle la lune qui répandait une 
magnifique clarté nous permit de rester jusqu’au-delà de minuit sur le 
pont, succéda une matinée brumeuse. À huit heures du matin, cepen- 
dant , le 21 , le brouillard se dissipa, et les côtes de la Grèce commen- 
cèrent à se dessiner à l'horizon. C’était la chaîne du Taygète, barrière 
insuflisante pour préserver la Messénie de la conquête, et les Ilotes, en 
particulier, de l'esclavage si cruel dans lequel ils furent réduits par les 
républicains de Sparte; elle se termine par le cap Matapan, le plus 
méridional de l’Europe orientale. À mesure que l’on approchait, je dis- 
cernais mieux les montagnes primitives arides, gris-rougeàtre , à pentes 
rapides , avec quelques escarpements verticaux. L’Eurotas passa à 200 
ou 300 mètres de la pointe qui est peu élevée, formée de rochers entre- 
mêlés de buissons verdoyants, sans arbres, ainsi que les parties appa- 
rentes de la chaîne. Je remarquai à sa base, du côté de l'E. jusqu’à une 
grande distance, la zone blanche attribuée à l'aura marina. A trois heures, 
nous passämes entre Élaphonisi et Tsérigo, dont le sol montueux, gris- 
rougetre , à pentes rapides buissonneuses, sans traces d'habitations, 
n'était guère fait pour me rappeler l'antique Cythère ; en y regardant à 
deux fois pourtant, je découvris quatre maisons blanches, disséminées 
dans des parties plus basses d’un beau vert, qui n’était certes pas celui 
des oliviers ; peut-être étaient-ce les descendants des myrtes que ché- 
rissait Vénus : je me plus à le croire. Le cap Malée, plus élevé que le 
cap Matapan, mais formé par le terrain crétacé, dont les couches con- 


(118) 


tournées plongent de 45° au S.-E., a le même aspect désolé; j'aperçus 
pourtant quatre villages sur son flanc oriental. Le 22, nous fûmes de 
grand matin entre Seriphos et Siphnos, puis, nous passèmes à peu de 
distance de la côte méridionale de Syra, dont les nombreux escarpements 
rougeàtres présentent des couches contournées ; après avoir dépassé l’ilot 
arrondi de Nate et le rocher conique de Skarpa, nous pénétrions à dix 
heures dans le port de Syra. 

Séjour à Syra et départ pour la Crète. — Je laissai mes compagnons 
continuer leur route vers Smyrne; et, une fois installé à l’hôtel, j’allai 
voir M. Gizy, chancelier du consulat de France. J’avais hâte d'arriver en 
Crète, pour me livrer à la récolte des plantes printanières que la cha- 
leur et la sécheresse faisaient, cette année , passer plus tôt que d’ordi- 
naire ; mais il me fallut passer à attendre l’arrivée et le départ du bâti- 
ment, qui devait me transporter à La Canée, dix jours que j'employai à 
explorer l'ile. Le sol est accidenté par des crêtes arides gris-rougeâtre et 
des vallons profonds avec des parties planes en culture (4). Les arbres 
ne sont pas nombreux; je n’ai vu que des figuiers et quelques caroubiers, 
oliviers et pommiers. Le 24 avril, la vigne était en boutons et on com- 
mençait la moisson des orges. L’acanthe et la mandragore sont communes. 
Presque sous chaque pierre on trouve des scorpions. La bécasse et la 
perdrix y sont fréquemment chassées. 


(1) Du point culminant de Syra, le mont Pyrgos , qui atteint 45{" d'altitude, on 
peut bien apprécier sa structure : au N.-E. est une crête presque aussi élevée, qui 
paraît longer la côte, et qui porte Syros sur une petite ramification et Hermoupolis à 
son extrémité inférieure; une dépression longitudinale la sépare du Pyrgos dont une 
ramification perpendiculaire, ayant sa terminaison au port, forme un chaïnon qui va 
au N.-0. de Posidia. Le reste de l’ile est un plateau moins élevé, qui.se relève 
cependant au S.-E. de Posidia et qui présente des vallons et un pâté montueux dans 
son centre. 

Le terrain primitif forme la charpente de l'ile; ses strates courent généralement du 
N.-N.-0. au S.-S.-E., mais avec des déviations locales. À la poudrière, des talschistes 
gris plongent de 45’ à l'E. 100$. En sortant d'Hermoupolis, on voit des talschistes 
verdâtres ct rougeâtres qui, derrière la Douane et au-dessous de Syros, plongent de 
750 à 800 au N. 200 O.; des bancs de calcaire. grenu, grisâtre , intercalés, plongent à 
un ancien moulin de 150 au N. 200 E,., et renferment des amas irréguliers, allongés 
dans le sens des strates, de limonite brune. Pour aller au mont Pyrgos, je remontai 
le grand ravin qui débouche à Hermoupolis. Au bas de Syros, les calcaires gris, un 
peu talcifères , plongent de 80° à l'E. 25° $.; puis on voit des micaschistes gris 
des calcaires à nodules blancs plongeant seulement de 45°; plus haut, il ya, dun 


(614) 

Le port, situé vers le milieu du côté oriental, est entouré par les 
bases des montagnes et possède deux ouvertures séparées par Pilot 
Grado, qui porte le phare. 

Syra , le premier port de commerce du royaume de Grèce, comprend 
deux parties bien distinctes : Syros, la vieille ville, située en amphi- 
théâtre sur une haute colline, limitée par une gorge profonde , sur le 
flanc S.-0. de laquelle sont étagés de nombreux jardins; elle est ter- 
minée par la cathédrale de Saint-Georges et habitée par des Grecs du 
rit latin, au nombre de 5,000. Hermoupolis, la ville nouvelle, la ville 
commerciale, qui s’étend sur une basse colline et surtout sur la plage, 
et dont les rues présentent à peine des traces de pavage, ainsi que les 
chemins des alentours; elle est habitée par 15,000 Grecs orthodoxes 
venus du dehors. Ces derniers sont considérés comme des intrus par les 
gens d’en haut; les uns et les autres, au reste, n’accordent le titre de 
chrétiens qu'à eux seuls, ainsi que cela a lieu , au surplus, chez beau- 
coup de sectes chrétiennes dans l'Occident. | 

A la ville haute, les églises, les costumes religieux sont, ainsi que 
les cérémonies, à peu près les mêmes que chez nous; j’ai pu m’en 
apercevoir en visitant l’évêque et le séminaire attenant à la cathédrale, 


côté, des talschistes verdâtres à filons de quartz, et de l’autre des calcaires grisâtres 
grenus qui constituent une grande assise inclinée de 3520 à l'E. 500 N.; celle-ci 
forme aussi le mont Pyrgos, d’où j’eus une vue magnifique sur les Cyclades, l’'Eubée 
et l’Attique qui, le 28, était un peu perdue dans un léger brouillard. La grande 
assise calcaire qui forme le Pyrgos et qui porte Syros et Hermoupolis doit traverser 
toute l'ile; et, d’après sa direction, elle paraît devoir passer dans la partie N.-E. de 
Paros , où se trouvent les: célèbres carrières de marbre, vis-à-vis de Naxos. 

En me rendant vers l’extrémité S.-0. de l'ile, à Posidia, au-dessus du port della 
Gratia , je vis, en partant d'Hermoupolis, des talschistes et micaschistes gris-verdà— 
tre ou rougeûtres renfermant des strates de calcaire grisàtre ou jaunâtre, plongeant 
fortement au N.-E.; puis j’arrivai dans une plaine élevée d'environ 100», sillonnée 
par des vallons assez profonds et entourée d’élévations rocheuses arides. Jusqu'à 
Posidia, la composition du sol est la même; les calcaires, ordinairement talcifères, 
- verdâtres, contiennent soit des nœuds, de la grosseur du poing, d’un calcaire grenu 

blanc, qui leur donnent un aspect bréchoïde, soit des strates de calcaire grenu, 
_grisätre. Sur la pente des montagnes qui sont au S. de Posidia, des talschistes 
verdâtres renferment des couches d’oligiste compacte noirâtre, qui plongent vers le 
N.-E.; au sommet, il y a des calcaires grenus, micacés, grisätres, inclinés de 20° 
au N.-E. 
Le fond des vallons offre dés éboulis de terre talqueuse et micacée brun-jaunâtre, 


( 120 ) 
et en assistant aux vépres de la Saint-Georges et à la messe célébrée 
avec pompe dans les églises latines de l’Orient, le 1% mai, jour de la 
fête du roi des Français, en reconnaissance de la protection spéciale 
dont la France entoure ses coréligionnaires dans les pays musuimans. 

A la ville basse, tout est différent. Dans les églises, extrêmement 
ornées, le chœur est un sanctuaire entièrement séparé du reste. Les 
costumes des papas et de l’évêque sont fort riches. J’assistai aux fêtes de 
la Pâque orthodoxe, qui était, cette année , le 27 avril (9 mai du calen- 
drier grec). Le Vendredi-Saint, à huit heures du soir, je me rendis, à 
travers les fusées et les pétards , à la cathédrale ; la galerie supérieure 
et extérieure élait couverte de femmes tenant chacune un petit cierge à 
la main; il en était de même pour beaucoup d'hommes qui remplissaient 
l’église et se tenaient à l’extérieur. À huit heures et demie, on promena 
autour de l’église, l’évêque en tête, une châsse renfermant un Christ 
couché ; et, lorsqu'elle fut rentrée, chaque fidèle alla la baiser, ainsi que 
de petites images de saints appendues aux murailles. Pendant toute la 
cérémonie, les papas et la foule récitaient des chants nazillards fort 
disgracieux, excepté sans doute pour des oreilles grecques. Dans la 
soirée du samedi et pendant toute la nuit, on lança encore force fusées et 
pétards. Le jour de Päques , en revenant d'une petite excursion, j’allai, 
à quatre heures , à la cathédrale ; l’évêque, assis sous un porche latéral, 
tenait un évangile in-4°, orné de figures, que les fidèles venaient baiser 
en déposant une pièce de monnaie; 1l y avait quête pour l’évêque en ce 


avec débris anguleux ou peu roulés des roches avoisinantes; mais les pentes et les 
bas plateaux, sur beaucoup de points, offrent des dépôts d'épaisseur variable d’un 
travertin compacte dur, finement cellulaire , jaune-rosâtre , qui empâte des fragments 
de quartz et de talschistes. On les voit entre Hermoupolis et Syros et sur les flancs 
du ravin, jusque non loin du sommet du Pyrgos. Ils sont fréquents sur le chemin de 
Posidia , et sur les pentes, au nord de ce hameau, ils sont parfois fort épais. Au port 
della Gratia , ils descendent jusqu’au-dessous du niveau de la mer. Ces calcaires, 
d'origine récente, ont probablement été déposés par des sources. 
Sur la plage, au S. d’Hermoufolis, des grès quartzeux polygéniques, assez durs, 
gris-jaunâtre, à cailloux de quartz, se forment aux dépens des sables que la mer 
rejette sur ses bords et sans dépasser son niveau; leurs couches très-régulières 
plongent de 15° perpendiculairement au rivage, cette inclinaison étant la même que 
celle des sables meubles remaniés à chaque instant par les lames. Au port della Gratia, 
il y en a de tout semblables au milieu des sables qui sont abondants sur ce point; 
ils renferment des coquilles marines. Ces grès ne sont évidemment autre chose que 
les sables de l'époque actuelle dont les grains ont été réunis par un ciment calcaire. 


(121 ) 
moment. Pendant la nuit, on dansa par toute la ville au son des violons, 
et il se fit un tel vacarme qu’il me fut impossible de fermer l’œil. 

Le 4° mai, à sept heures du soir, le bâtiment de Jérémiou quitta 
Syra; le lendemain, à six heures du matin, nous passions entre Pholé- 
gandros et Lagousa. À neuf heures, j’aperçus les hautes sommités de la 
Crète, le Psiloriti, puis les Aspra-Vouna, que le brouillard fit vite dispa- 
raître. À trois heures, je découvris le chaînon du cap Meleka, dont nous 
n’étions plus fort éloignés à cinq heures ; mais un calme plat qui survint 
nous cloua presque à la même place pendant toute la nuit. De grand 
matin, le 3 mai, de 2 à 3 milles de distance, j’aperçus parfaitement La 
Canée; à six heures du matin, Jérémiou pouvait laisser tomber son 
ancre dans le port. J'étais enfin arrivé# 

Départ de Crète, et relâche à Ghio. — Après sept mois et demi de sé- 
jour dans l’île, je la quittai le 17 décembre, à midi, sur le petit bateau 
à vapeur Kirit, que le Pacha avait fait construire en Angleterre pour un 
service régulier sur Syra et Smyrne ; l’équipage était entièrement anglais, 
à l'exception d’un comptable musulman. Pour la dernière fois, je revis, 
de la rade, la plaine de La Canée et le haut plateau qui est derrière ; 
quant aux hautes montagnes et au cap Spadha, la pluie qui y tombait en 
abondance les dérobait presque entièrement à la vue. À une heure, 
nous dépassämes le cap Meleka; la mer devint beaucoup plus agitée, 
car le vent d’O. soufflait avec force ; la pluie se mit àttomber, et à deux 
heures, la Crète avait complètement disparu. À sept heures et demie du 
matin , Vingt heures après le départ, nous mouillions dans le port de 
Syra, où nous séjournèmes jusqu’à cinq heures du soir, mais sans être 
en libre pratique, ce qui m'empêcha d’achever les explorations com- 
mencées à mon premier passage. Îl ne plut pas, et la température de 
l'air varia de 16° 7 à 15°5, celle de la mer étant de 16°. 

Pendant la nuit, par une pluie souvent interrompue, nous sillonnämes 
une mer rendue scintillante par les animaux qui l’habitent; nous nous 
dirigions vers Chio que nous découvrimes à l’aube du jour. La côte S.-0. 
présente des collines de 50 mètres d’élévation, d’un gris-rougeûtre, avec 
de petits buissons seulement; elles sont formées sans doute par des 
roches schistoïdes semblables à celles qui, au cap Mastiko, paraissent 
bien plonger de 40° au N.-0. Sur la côte S.-E., les coteaux sont également 
schisteux, et de petits arbres sont assez fréquents dans deux larges 
vallons qui viennent aboutir à la mer, et par lesquels on aperçoit des 
parties montagneuses assez élevées. Plus au N., un plateau tertiaire de 


( 122 


100 mètres environ d’élévation, découpé par des vallons, présente des 
couches à peu près horizontales, sans doute de calcaire, avec des 
alternances souvent marneuses, jaune-verdâtre et parfois des sables ; les 
hameaux et les petits arbres y sont plus fréquents. Le cap Haghia-Helenis 
est un plateau de même hauteur, rougeàtre, avec des lits d’un rouge 
vineux , peut-être argileux, à la base; il vient en s’abaissant vers les bas 
ilots Paspargos , également tertiaires. Après avoir dépassé ce cap, nous 
découvrimes la belle plaine, au bord de laquelle se trouve la ville de 
Kastro, que nous n’atteignimes qu’à dix heures et demie, après une tra- 
versée de dix-sept heures. Dans le port, la mer était à 17° et l’air à 46e. 
Celui-ci, comme en 1794, est fermé par une jetée à fleur d’eau, avec 
deux petites tours à l’entrée. Le lazaret, où nous n’allâmes pas, étant 
en libre pratique, consistait en quelques huttes à jour, bonnes tout au 
plus à loger des ânes ou des chiens. La Crète, pourtant si désolée par les 
massacres et les dévastations, pendant l’émancipation de la Grèce, est à 
côté de Chio, un pays très-florissant. La ville turque, fortifiée, a peu 
souffert ; elle est séparée , par une grande esplanade, de la ville grecque, 
complètement brûlée par les Turcs en 1822. C’est un assemblage de 
ruines, masqué par les maisons neuves du quai, et au travers des- 
quelles serpentent quelques rues nouvelles ; les maisons sont en moellons 
schisteux , et pour les portes et fenêtres, on emploie souvent un trachyte 
granitoide, jaunâtre, rougeâtre ou grisàtre, qui vient sans doute de. 
Smyrne. Je consacrai l’après-midi à une excursion jusque sur le plateau 
qui s’élève à l'O. (1). Le lendemain matin, je visitai la plaine qui s’étend 
au $. de la ville. Après le cimetière turc, ombragé de cyprès et renfer- 


(1) En sortant de Kastro, dans la direction de l’O., je montai de suite sur des 
collines à pentes peu rapides, formées par des talschistes quartzifères jaune-rougeâtre 
qui plongent de 450 au S. 259 O, et donnent des terres argileuses rouges par leur 
décomposition. Ce terrain est tout verdoyant de Poterium spinosum, Genisla acan- 
thoclada et autres petits buissons communs en Crète ; les haies sont formées de Rubus 
et de Smilax ; dans les lieux humides se trouve l’Inula viscosa. En remontant une 
crête en pente douce qui contient l’aqueduc alimentant la ville, je vis les roches 
précédentes renfermer de grands bancs de quartzite talqueux et de petites couches de 
talschistes phylladiens ; tous trois gris-verdâtre , plongent d’abord de 450 au S. 150 à 
300 E. , et plus loin de 700 au 5. Je finis par arriver à une grande fontaine, point de 
départ des eaux, qui se trouve à environ 500 mètres d'altitude et qui marquait 15°. 
Le terrain schistoïde forme un bas plateau, à nombreux vallons séparant des collines 
à contours arrondis; il paraît se prolonger un peu vers le N., où il est couvert d'habi- 


(123) 

mant des agaves, je passai, pendant près d’une heure, dans d’étroites 
ruelles , formées par les murs des jardins dont les brèches laissaient 
voir un spectacle navrant. Dans cette partie, la plaine n’est qu'un verger 
d’orangers dont les fruits ont une grande réputation, et près desquels ne 
sont rien ceux de Mourniès, le plus beau village de la Crète; elle renferme 
de nombreuses habitations en pierre argilo-sableuse, solide, mais se lais- 
sant tailler facilement, de couleur jaune et rouge; c’étaient autant de 
villas, dont aucune habitation de la Crète n’approche non plus pour 
l'aspect agréable et élégant; mais les neuf dixièmes sont en ruines, et le 
dixième restant sert souvent de refuge à des gens en haiïllons. Au-delà, 
on voit la plaine se continuer encore plus d’une heure, jusqu’à un grand 
village; elle renferme surtout des oliviers et des figuiers ; il y a aussi des 
azédarachs et des peupliers d'Italie. 

A trois heures, Le, Kïrit partit par un ciel presque entièrement couvert 


de gros nuages qui masquaient les parties élevées de Chio et de la côte 
d'Asie. 


tations et d’oliviers; au S., il se rétrécit, passe derrière un massif montueux calcaire, 
et cesse à environ deux lieues de la ville. 

Immédiatement au-dessus de la fontaine vient un système calcaire qui forme le 
plateau rocheux, nu, de 400 à 500 mètres d'altitude, que l’on aperçoit si bien du port; 
celui-ci porte à l’O.-N.-0. de Kastro un sommet qui s'élève à 960 mètres , et un autre 
au N., l’'Haghios-Elias, qui atteint 1,267. Je traversai d’abord des brèches récentes 
de calcaire compacte, puis je montai sur un grand talus d’éboulement de calcaire 
compacte grisâtre, avec des brèches de calcaire grenu, jaunâtre, ou des calcaires 
compactes rougeâtres , à fragments de calcaire compacte blanchâtre. La partie supé- 
rieure présente des rochers escarpés de calcaire compacte grisâtre, offrant le Salvia 
calycina. L'un des sommets du bord des montagnes, situé à l'O. 25° N. de la ville, 
est formé par un calcaire compacto-grenu , blanchâtre, dont la stratification peu dis- 
tincte paraît plonger de 800 au N. De là, on a une belle vue à l'O. sur des plateaux 
calcaires arides, montueux, et accidentés par des gorges profondes et escarpées; 
ils paraissent occuper plus de la moitié septentrionale de l’île, et vont en s’abaissant 
former le cap rocheux qui est vis-à-vis des îles de Spalmadore. Ce système calcaire 
a les plus grands rapports avec celui de la Crète, et je le crois’ comme lui de la 
période crétacée. 

Le lendemain je longeai le quai et m’avançai au S. de la ville, dans la grande plaine 
qui est à peine plus élevée que la mer, et qui en est séparée par les collines tertiaires du 
cap Haghia-Helenis. Après plus d’une heure, j’arrivai sur le bord occidental du massif 

_ montueux que j'avais aperçu la veille, et qui est formé par des calcaires compactes 
gris, à veines blanches, quelquefois à grains spathiques et à taches blanches orga- 
niques. Au pied et au bord de la plaine se trouve le terrain tertiaire jaune, dont les 


( 124) 

Arrivée el séjour à Smyrne.— En passant, deux jours auparavant, entre 
le cap Mastiko et l’ilot Venetico, j'avais parfaitement aperçu le plateau 
de Nikaria, les petites îles Phourni et la montagneuse Samos dont la moi- 
tié occidentale est séparée en deux par une partie plus basse. À mesure 
que le bâtiment s’était avancé dans le canal de Chio, où la mer est sou- 
vent calme, j'avais pu bien voir la structure de cette portion de l’Asie. 
Les montagnes du cap Koraka ne sont pas très-élevées, et au devant 
d'elles se trouve la partie basse de la presqu'île de Tchechmèëh qui est un 
plateau uni, à petites falaises blanchâtres tertiaires , projetant à l'O. la 
pointe du cap Blanc, dont les deux îles Paspargos sont des dépendances, 
et au N. deux pointes plus basses encore. Après avoir dépassé ces îles où 
le détroit n’a que 44» de profondeur, on voit les montagnes s’abaisser, 
puis se relever pour former le Kara-Bouroun-Dagh qui émet un prolon- 
gement vers l’île Hippi ou Ogni, et va ensuite en s’abaissant former le 
cap qui est assez élevé; cette petite île est, sans aucun doute, schis- 
teuse comme les bases de la montagne. 


couches plongent à l'E. vers la mer. Au contact des calcaires précédents ce sont des 
molasses jaunes, friables, renfermant des fragments calcaires, souvent de la grosseur 
de la tête, ou bien des rognons ou lits de molasse endurcie; quelquefois la molasse 
friable est colorée en gris et renferme des tiges végétales à l’état de lignite. Sur le 
bord opposé de la plaine, au pied des collines côtières, les calcaires forment une 
protubérance assez élevée, au pied de laquelle les premières couches tertiaires sont 
des poudingues caléaréo-siliceux, gris-jaunâtres, de quelques mètres d'épaisseur ; 
par-dessus viennent des molasses jaunes, à grains fins, avec des zones irrégulières , 
colorées en rouge. Cet ensemble, dont la stratification est peu distincte, a plus de 
50 mètres d'épaisseur, et présente à différentes hauteurs de petits lits de molasse jaune, 
plus grossière, très-micacée, tabulaire, avec petits lits noduleux irréguliers de 
limonite argileuse brun-rougeâtre ; sur quelques points aussi, il y a des veinules et 
des cavités géodiques de calcaire spathique blanc, D’anciennes carrières, très- 
nombreuses, ont sans doute fourni les pierres jaunes et rouges employées dans les 
constructions de la plaine et même dans quelques toitures. Au hant de Ja colline se 
trouve une chapelle en ruines, d’où j’eus une vue magnifique sur la côte d’Asie et sur 
la plaine de Chio qui se termine à deux heures au S. de la ville; les collines tertiaires 
qui s'élèvent allant se joindre aux montagnes calcaires dont la hauteur est devenue 
moins considérable. Je revins par la plage formée par un sable quartzeux jaunâtre, 
avec cailloux calcaires et siliceux. Des moulins, pour la plupart ruinés , situés près 
du lazaret , en partie bâtis en molasses, présentaient quelques fragments d’un calcaire 
argilo-siliceux jaune , formant sans doute quelques couches dans le terrain tertiaire. 
Une source ; légèrement saumâtre, située près du port, marquait 17° 5. 


(12% ) 

Le ÆKiril, après avoir passé devant les îles basses verdoyantes , habi- 
tées, de Spalmadore, formées par des roches schisteuses qui plongent au 
N.-0., doublait à sept heures du soir le cap Kara-Bouroun par une mer scin- 
tillante. La nuit m'empêcha de voir les détails du golfe, mais je le pus à 
mon retour. Le cap est divisé par deux vallons en trois chaïnons, les 
deux premiers à contours arrondis verdoyants sans doute schisteux , et 
l’oriental , plus élévé, rocheux, probablement calcaire; au pied, de 
petites collines tertiaires ont leurs couches s’inclinant un peu à la mer. 
Les îles d’Ourlak sont des plateaux ondulés verdoyants, de 30 à 40m 
d’élévation montrant sur quelques points des couches jaunes, alternati- 
vement dures et tendres , inclinées de quelques degrés au S.-E,; sur la 
rive opposée, en avant des montagnes, il y a de petites collines égale- 
ment jaunâtres et tertiaires. Le 21 décembre, douze heures après le départ 
de Chio, à trois heures du matin, nous jetions l'ancre devant Smyrne par 
une pluie assez forte. Muni d’une lettre de recommandation de M. Hitier, 
consul à La Canée, j’allai voir dans la matinée, M. Béclard, élève- 
consul, qui m'accueillit avec beaucoup de prévenance et voulut abso- 
lument que je vinsse prendre place à sa table et occuper une cham- 
bre au consulat en l’absence de M. David. À deux heures de l’après-midi, 
la mer était à 14° et l'air à 13° 2; en me promenant sur la plage au 
S.-0., je vis une douzaine de méduses, d’un bleu pâle, de 3 à 4 décimèe- 
tres de diamètre. 

La ville, fort étendue , borde la rade ou port qui offrait un grand nom- 
bre de bâtiments. Dans la partie septentrionale, le quartier des Francs, 
composé de maisons souvent en pierres, avec des volets en tôle contre 
les incendies si fréquents en Orient, borde le port depuis la pointe 
des moulins. Derrière , formant le centre , est la ville grecque dont une 
partie considérable avait été détruite au printemps par un incendie; c'était 
à peine si quelques maisons et boutiques étaient réédifiées aux angleset 
sur le trajet de quelques-unes des anciennes rues. Enfin dans la partie 
méridionale , s’élevant sur la pente d’une colline, se trouve la ville 
turque, avec ses dix-huit à vingt minarets recouverts en plomb. Toutes 
les maisons, tant turques que chrétiennes ont des toitures en tuile, assez 
surbaissées, rougeâtres; et si l’on ajoute l’absence de palmiers, on com- 
prendra facilement que j'aie été tout désappointé en ne rencontrant pas 
ici la physionomie orientale. Pourtant il est impossible de ne pas se sen- 
ür en Asie à la vue de ces longues files de chameaux chargés de mar- 
chandises et d’un énorme grelot au poitrail, qui parcourent les rues, 

Towe XXIL. 10 


( 126 ) 
ou que l’on rencontre sur les grands chemins; beaucoup d'habitants 
aussi portent des armes et fument le narghalé. 

Vers l’extrémité de la ville turque , au S.-E. , se trouve le cimetière 
juif qui est une fort grande pelouse en pente, à laquelle les tombes en 
saillie, recouvertes d’un marbre horizontal, donnent de loin l'apparence 
d’un véritable village. Au-dessus, se trouvent des cimetières tures, dans 
lesquels abondent les cyprès et l’ache; et enfin, un plateau verdoyant 
d’où l’on a une fort belle vue non-seulement sur la ville, mais sur tout 
le pays environnant. On est là près de l’ancien château génois en partie. 
détruit, qui dominait la ville. Dans la muraille de la tour qui flanque la 
porte d'entrée, se trouve enchâssée la tête colossale de femme, en marbre 
blanc, figurée par Tournefort (1). 


(1) Quatre excursions dans les environs de Smyrne m'ont permis d'étudier la consti- 
tution des environs. Après avoir suivi la plage à l'O. pendant plus d’une heure, 
et traversé une plaine basse marécageuse, j’arrivai au pied des contreforts les 
plus avancés des Deux-Frères ; les premières collines basses présentent des talschi:- 
Les gris-jaunâtre en décomposition, plongeant de 45° à l'E. et renfermant des rognons 
de quartzite talqueux gris-verdâtre , à veines de quartz. Après une nouvelle partie de 
la plaine , plus riche, et couverte d'oliviers , des collines un peu plus élevées sont 
fornées par les mêmes talschistes avec de grands bancs de quartzite talqueux gris à 
grains fins, ou gris-jaunâtre à grains moyens , inclipant de 70° aûù N.-0. Après un . 
vallon, je me trouvai au bas de la pente de la première grande montagne de forme 
conique, à pentes rapides verdoyantes, formée par des alternances des mêmes 
roches parmi lesquelles il y a des quartzites glandulaires gris-jaunâtre ; elle doit avoir 
environ 500n d'altitude. 

Au fond de la plaine, au-delà de Hadjilar, sur le chemin de Manissa, de basses 
collines sont formées par des calcaires compactes grisâtres , à rognons de silex rose, 
en couches inclinées de 700 à l'E. 250 S.; un instant après, ce sont des schistes argi- 
leux gris avec des bancs de macigno grossier , qui plongent de 80° en sens inverse; 
dans les monticules qui suivent, l’inclinaison n’est que de 400 dans la première direc- 
tion. En montant sur la montagne conique que l’on aperçoit si bien de la rade, et 
qui s'élève bien à 400%, je trouvai les pentes inférieures assez rapides, toutes ver- 
doyantes, formées par les schistes précédents avec de nombreuses assises intercalées 
de macigno gris, à grain plus ou moins fin. La partie supérieure comme celles des 
plateaux environnants , présente des escarpements arides formés par des calcaires 
compactes un peu phylladiens jaunâtres, exceptionnellement rougeâtres, à veines 
blanches ou gris-foncé ; ils renferment de nombreux rognons de silex le plus sou- 
vent rose, en saillie à la surface. Du sommet de la montagne, qui domine le col de 
Manissa , la vue s’étend à l'O. sur la plaine, le golfe de Smyrne et les terres basses 
qui le bordent au N. et au S.; à l'E. elle est limitée par des plateaux découpés par 


, 


(4275 

A l'extrémité de la ville grecque, sur le chemin de Manissa (Magnésie), 
se trouvent d’autres cimetières turcs non loin du pont des Caravanes. Plus 
loin, le grand chemin abandonné à la nature, rencontre deux ruisseaux 
ombragés de myrtes, d'Agnus-castus et de roseaux, souvent grossis et 
rendus bourbeux pendant la saison des pluies ; faute de ponts, je düs y 
prendre, à une température de 11° 4, des bains de jambes peu agréables. 

À Smyrne, je visitai l’église latine de Saint-Polycarpe, extrêmement 
chargée de dorures; la salle de spectacle petite et enfumée , où j’assistai 
à une représentation d’ombres chinoises donnée par un Français, qui, 
croyant n'être compris de personne , tenait dans les coulisses des propos 
assez peu édifiants dans notre langue. Je passai trop peu de temps dans 
la ville pour pouvoir fréquenter beaucoup les habitants; M. Béclard me 
conduisit, entr’autres , chez un professeur français qui avait amené 
quelques années auparavant, d'Alexandrie, une Égyptienne avec la- 
quelle il avait fait un de ces mariages temporaires, dits au capin; il 
n’en avait pas d'enfants et il se proposait, disait-on, de la renvoyre à 


de profonds vallons, dont le haut des pentes rapides présente des escarpements 
calcaires. Ce système a la plus grande analogie avec celui de la chaîne côtière de 
Messara dans l’ile de Crête, et je ne doute pas qu'il n’appartienne également à la 
période crétacée. 

Les montagnes situées au S.-E. de Smyrne sont formées par le même terrain, car 
au bord de la plaine, au bas de Kokloudja, je retrouvai les calcaires compactes 
gris, à veines blanches qui forment le plateau au-dessus du vallon et des montagnes 
‘du Nif-Dagh. Mais il en est autrement dans le voisinage immédiat de la ville; en 
montant à l’ancien fort génois, je vis de grandes couches d'argile plastique mica- 
cée jaune, renfermant un grand banc, de 8m d'épaisseur, de poudingue quartzeux , à 
ciment argileux, plongeant de 450 au S. 250 O. Ces argiles, dans lesquelles il y a de 
grandes exploitations , sont tertiaires. Dans la plaine, à l'E. de la ville, à la séparation 
des chemins de Manissa et de Bournabad, le même terrain constitue des petites 
collines de calcaire d'eau douce un peu concrétionné et cellulaire , jaunâtre, quel- 
quefois rose-foncé, dont les couches exploitées plongent de 50° au S.-0. Sur le 
bord septentrional de la plaine, à Bournabad, des collines basses sont formées par un 
poudingue jaunâtre de talschiste et de calcaire compacte à ciment spathique , recou- 
vert par des alternances de marnes jaunâtres et de calcaire qui, à la sortie du village, 
plongent de 25° tantôt au N. tantôt au S.; plus haut les marnes jaunâtres, en cou- 
ches plongeant de 400 à l'E. 500 N., ne renferment plus que des lits de 1 à 2 décim. 
de calcaire compacte marneux , jaunâtre. 

Au-dessus de ces marnes, s'élèvent des montagnes couvertes de pistachiers, 
d'yeuses et de ronces, qui atteignent 500 à 400m au N.-0. et sont formées par des 
trachytes le plus souvent schistoïdes brunâtres , à cristaux de feldspath blanchâtre: 


(1% ) 

ses parents au premier Jour. Il régnait une certaine aisance dans cette 
maison et pour peu que cette femme fût une Copte pauvre, elle n’aura pas 
laissé de regretter bien vivement d’être obligée de revenir à sa première 
condition. Là, comme chez les Smyrniotes, les cheminées étaient rem- 
placées par le mangal et le tandour. | 

Départ de Smyrne et séjour à Constantinople. — Le samedi 27, je 
partis, à quatre heures du soir, sur le Ferdinando Primo. La nuit me 
déroba les détails du plateau bas, sans doute schisteux, un peu plus 
‘élevé dans son milieu, de Mytilini, que j'avais aperçu des hauteurs de 
Chio, ainsi que les plateaux montagneux d’Aïvalu. La côte d'Asie, comme 
je le vis en revenant, est jaune-rougeâtre, avec petits buissons verts, et 
formée par des roches schistoïdes contournées. A six heures du matin, 
nous doublämes le cap Baba, qui est escarpé et assez élevé. La côte, au 
nord, offre de petites montagnes verdoyantes, sans doute schisteuses; 


une petite source qui s’en échappait, marquait 18° 5. Le coteau de Smyrne présente 
les mêmes roches au-dessous du vieux château et des cimetières; ce sont des tra- 
chytes porphyroïdes brun-rougeûtre , à cristaux de feldspath blanc et lamelles de mica ; 
ils sont traversés de fissures assez régulières inclinées de 50 à 40°, qui donnent une 
fausse apparence de stratification. A peu de distance de la ville, il y a quelques 
conglomérats trachytiques décomposés, gris-rougeâtre et quelques rochers , baignés 
par la mer, d’une obsidienne smalloïde gris-rougeâtre ou noirâtre, avec feldspath et 
mica. A une demi-heure de là on extrait, pour les constructions, des moellons d’un 
rachyte qui ne diffère du précédent que par sa couleur gris-verdätre qui paraît 
exceptionnelle. De nombreuses sources entretiennent le sol dans un état de fraîcheur 
remarquable ; cinq d’entr’elles, situées au bord de la rade, marquaient de 14 à 16o 
et même 180. A un peu plus d’une heure de la ville , les collines trachytiques cessent 
et on arrive à une grande plaine basse traversée par quelques petits ruisseaux, et 
formée, près de la mer, par un sable quartzeux et trachytique gris ; c’est elle qui, en 
se prolongeant en pointe basse, porte le Chateau de mer, dont les principales répa- 
rations consistent en badigeonnages à la chaux. 

A la plage basse de Smyrne , formée par des sables argileux grossiers gris, avec 
coquilles marines , succède la plaine alluviale unie qui renferme beaucoup de maisons, 
de jardins, dont quelques petits avec des orangers , et plus loin des cultures et &es 
oliviers. Par le ruisseau du vallon profond et étroit de Sainte-Anne, derrière le 
château génois, elle reçoit des cailloux et sables du macigno et du calcaire compacte, 
qui forment les montagnes au S.-E. Les ravins du chemin de Manissa lui en appor- 
1ent aussi : mais ceux de Bournabad sont jonchés de débris et de blocs trachytiques 
gris ou brun-rougeätre, quelquefois scoriacés , qui sont étalés assez loin dans la 
plaine, surtout par le ruisseau qui descend à l'E. du village. Au-delà, la plaine 
furmée par un dépôt argileux rouge, à nombreux cailloux de calcaire compacte, est 
à peu près inçulte, 


( 129») 

puis elle devient plus basse à petits escarpements , formés par des cou- 
ches horizontales évidemment tertiaires. L'ile de Ténédos, vis-à-vis, est 
un plateau uni de 30" environ d’élévation, avec un petit monticule dans 
la partie N.-E. ; elle présente des grands banes ondulés, recouverts par 
une terre végétale un peu rougeûtre. À neuf heures, le bateau s’arrêtait 
devant la ville pour prendre des passagers. Au-delà , la côte se présente 
sous forme d’un plateau bas à pentes rapides devant lequel sont des 
petits îlots de la branche méridionale du Mendéré (Scamandre). Ce ne 
fut pas sans un vif plaisir que j’aperçus les campagnes de Troie et l’île 
de Ténédos, dont la faible élévation doit donner une idée du peu d'im- 
portance de la flotte des Grecs qui avait pu se cacher derrière. 

À onze heures et quart, nous étions à l'entrée du détroit des Dar- 
danelles ouvert dans un plateau tertiaire de 30 d’élévation, montrant 
d’abord des souches horizontales jaunâtres, quelquefois verdâtres ou 
rougeâtres, puis plus loin, des alternances de marnes et de lits cal- 
caires. Le plateau atteint bien 100 à Gheliboli que nous quittions à six 
heures. En Europe, il se continue jusqu’au golfe de Saros; mais en Asie, 
à quelque distance, il y a des montagnes à plateaux, de 400 à 500" d’élé- 
vation, qui étaient blanchies par les neiges. La mer ne doit pas être très- 
profonde dans le détroit, car elle perd la couleur d’un beau bleu qu’elle 
avait dans l’Archipel pour prendre une teinte d’un vert-glauque. Chemin 
faisant, nous y fûmes plusieurs fois suivis et dépassés par des compa- 
gnies de dauphins qui bondissaient souvent hors de la mer qui, la nuit 
venue, parut phosphorescente. À dix heures, laissant de petites îles peu 
élevées au S., nous entràmes en pleine mer de Marmara. Le lendemain 
matin, à sept heures et demie, j’aperçus la côte d'Asie, assez élevée et 
accidentée, et, en avant, les îles montueuses des Princes. 

Sur la gauche, la côte d'Europe apparaissait comme un plateau uni 
très-bas. En avançant davantage, je vis se dessiner le château des Sept- 
Tours, les murailles de Constantinople, puis enfin la pointe du Seraï. 
Celle-ci dépassée , la vue s’étend sur le palais du Sultan et ses jardins ; 
sur la ville avec ses six grandes mosquées à dôme dépassé par les mi- 
narets; puis sur le port avec ses deux ponts, sa multitude de navires 
rangés, en grande partie, sur les deux rives, et ses innombrables goëlands. 
À droite, on voit Galata avec sa grande tour pointue, Péra au-déssus , 
avec le palais de France, et ceux d'Autriche jaunâtre et de Russie 
bleuâtre. Plus loin, au-dessous, est le quartier de Top-Hané avec sa 
grande et belle fontaine. L’ancre tomba à neuf heures; après avoir 


: (130) 
glissé quelques piastres dans la main du principal employé de la douane, 
je pus, sans ouvrir ma malle, aller m’installer chez un Grec, au second 
étage d’une maison en bois de Péra. 

Tant de voyageurs ont vu, dans ces dernières années, la capitale de 
l'empire Ottoman, en ont présenté des descriptions plus ou moins com- 
plètes, qu'on me saura gré de n’en pas donner une des plus incomplètes. 
Je me bornerai à quelques détails géologiques (1), et à reproduire une 
parlie de la lettre que j’écrivis en retournant à Smyrne. | 


(1) Les faubourgs de Galata et de Péra, au N. du port, sont bâtis sur des schistes 
de transition. En suivant la grande rue de Péra, j’arrivai au cimetière turc dit le 
Grand-Champ , qui est toujours sur le plateau; de là, me dirigeant à l'O., vers le 
fond du port, je traversai de suite plusieurs vallons; dans le premier et le second, 
les schistes argileux , arénifères, brun-jaunâtre , plongent de 45 à 50° à l’O. 25 à 39° 
N.; sur le flanc opposé du grand vallon de S. Dimitri, qui vient ensuite, l'inclinaison 
est la même, mais au S. 300 E , à peu près en sens inverse. Dans un quatrième 
vallon, avant le cimetière arménien, la stratification est à peu près perpendiculaire, 
plongeant de 450 à l'E. 30° N. Au bord du plateau, des schistes brun-verdâtre 
plongent de 60° à l'O. 5° N.; de là, on voit bien les collines vertes , de 100 mètres 
d'élévation environ, qui entourent une grande plaine aux bords de laquelle sont de 
nombreuses tuileries; au milieu se trouve l'extrémité du port, qui se bifurque et 
renferme de nombreuses îles basses. Les deux petites rivières qui y débouchent ame- 
naient des eanx d'un jaune rougeâtre foncé qui, par leur mélange avec celle du port, 
perdaient graduellement leur couleur; au pont de Galata, cependant, l’eau du Bos- 
phore était encore d’un vert jaunâtre. En revenant le long du port, je revis les 
schistes sur un grand nombre de points; derrière l’arsenal maritime, quelques 
grandes couches ont une couleur grise. 

Le 3 janvier, je poussai une excursion sur la rive du Bosphore jusqu’à Bouyuk- 
dèré. Je descendis du Grand-Champ au nouveau palais de Doulma-Baktchi, où des 
tranchées me montrèrent de grands bancs de schistes arénifères brun-jaunâtre, 
grossiers ou fins, quelquefois noirâtres ; ils plongent de 800 au S. 10° E., et pré- 
sentent quelques petites veines de quartz blanc. A l'extrémité de Béchiktach, à environ 
une heure, des schistes argileux gris-verdâtre plongent de 450 au N.-E. A Kourou- 
Tchesmé se trouve une grande tour blanche, vis-à-vis d'une autre sur fa rive 
asiatique; dans un cimetière turc, un peu avant la tour, je vis des schistes calcari- 
fères renfermant de grands bancs de calcaire compacte noirâtre, tantôt avec schiste, 
à structure amygdalaire, et tantôt assez pur, ils plongent de 450 à l'O. 30° N., et 
sont exploités sur un grand nombre de points pour les constructions et le pavage de 
Constantinople; mais je n’y ai pas vu la moindre trace de fossiles. 

Plus loin, un peu avant le port de Térapia, des alternances de schistes et de cal- 
caires plongent de 45° au N. 10° O.; et à l'angle S., au-dessus d'une caserne, ily a 
des conglomérats argiloïdes, décomposés, jaunâtres, à gros grain ou à grain fin, 


(134) 


« Comme il arrive souvent pour les belles choses dont on parle beau 
coup, l’aspect de Constantinople ne m'a pas causé le plaisir que j’atten- 
dais. Toutefois , je m’empresse de dire qu’il y avait beaucoup de la faute 
de la saison; car, lorsque la végétation est en pleine activité, je doute 
fort qu’il y ait rien de comparable à l'aspect de la ville et de ses faubourgs, 
y compris Skoutari. Le Bosphore que j’ai suivi jusqu’à Bouyukdèré m’a 
fait beaucoup de plaisir; les bords de la Seine avec leurs châteaux ne 
sont rien à côté. Pendant cinq ou six heures , le Bosphore, dont le cou- 
rant assez rapide est parfaitement visible, est comme un large fleuve lim- 
pide dont les rives sont bordées de coteaux verdoyants en partie boisés, 
divisés par de nombreux vallons. Des quais un peu délabrés, suivant la 
coutume turque , bordent la rive européenne et sont surmontés par des 


enchevêtrés l’un dans l’autre, et à stratification très-confuse. Au bourg, le Bosphoro 
en s'élargissant forme le bassin de Bouyukdèré, dans lequel la mer était un peu agitéc; 
après un petit fort, il y a de grandes couches de schiste argileux arénifère et micacé 
brunâtre, qui plongent de 800 à l'O. 200 $S.; ils renferment deux lits de Om 05, 
espacés de Om 15, dans lesquels il y a une très-grande quantité d'empreintes de 
Spirifer; quelques pas au-delà, un peu avant deux sources, des bancs de calcaire 
phylladifère plongent de 50 à 60° au N. A partir de Bouyukdèré, les collines devien- 
nent plus escarpées et les habitations disparaissent; à un fort qui se trouve à dix 
minutes au-delà, des schistes argileux gris alternent avec des bancs de calcaire 
phylladifère et amygdalaire noirâtre, et plongent de 60° au N. 20° O.; uu peu plus 
Join, c’est de 30° au S. 200 0. L'entrée de la mer Noire se trouve à une heure et 
demie plus loin et paraît avoir six degrés d’ouverture ; mais je n’ai pas aperçu les îles 
volcaniques Cyanées, ni d'Europe, ni d'Asie. Ces roches schisteuses et calcaire, 
appartiennent certainement aux terrains de transition; elles ont été rapportées 
récemment au terrain dévonien inférieur. 

Le 6 janvier, je fis une excursion hors de Constañtinople, à l'O. Après avoir mis 
une heure à traverser la ville et le faubourg, bâtis et pavés en calcaire blanc, j’at- 
teignis le rempart qui à la vérité tombait un peu en ruine, mais qui était d’une 
irréprochable blancheur. Je me trouvai sur un plateau uni très-étendu, cultivé, mais 
sans arbres. Dans un cimetière, à un quart-d'heure de la porte, quelques excavations 
me laissèrent voir, sur 2n d'épaisseur, des marnes blanches assez massives, à la partie 
supérieure desquelles il y a un lit de rognons de calcaire fibreux jaunâtre. Dans une 
autre fouille un peu plus élevée, on tire, sur 2m d'épaisseur, des calcaires jaunâtres 
argileux ou compacto-grenus, ou même grenus, renfermant de nombreuses em- 
preintes de cyrènes. Par-dessus se trouve un calcaire schistoïde grenu, friable, 
jaunâtre, qui a un mètre d'épaisseur. Ces dépôts, dont les couches sont à peu près 
horizontales, appartiennent au terrain tertiaire et sont sans doute de formation d'eau 
douce ou fluvio-marine, comme l’admettent MM. Boué et Viquesnel. 


(182) 
villages, des maisons de campagne et de nombreux palais, loujours en 
bois et fraîchement peints. Cä et là s’élèvent des pins pignons, des pla- 
tanes, des peupliers, des yeuses, des arbres de Judée, etc. Constanti- 
nople et Smyrne, vus de loin, n’ont pas pour l’Européen un eachet 
aussi original que Naples, Malte ou la Crète avec leurs terrasses; les 
maisons sont terminées par des toits en tuile, assez peu élevés, qui 
donnent à ces deux villes quelque ressemblance avec Candie. 

« Les seules choses à noter que j’aie vues, sont la grande mosquée du 
sultan Achmet avec son dôme surbaissé, ses six minarets et sa grande 
fontaine dans la cour; elle est en grande partie construite en marbre 
blanchâtre, comme beaucoup d’autres édifices. Au-devant, sur la place 
de l’'Hippodrome, se trouvent l’obélisque en syénite rouge, plus petit 
que celui de Louqsor, mais hardiment posé sur quatre dés de bronze 
qui laissent voir sa face inférieure; puis la colonne torse de Delphes, en 
bronze , et la colonne brûlée, en calcaire compacte, coquillier, jaunâtre. 
Un autre lieu intéressant est le grand bazar, où chaque corps d'industrie 
a son quartier distinct; je me suis bien gardé toutefois d’y rien acheter, 
car les dispositions des marchands pour le vol sont excessives, et il en 
est de même des Juifs qui servent d’interprètes; le mien était un de 
leurs compères bien certainement, car il prétendait que des objets, que 
l’on me faisait des prix fous, étaient à leur valeur. J’aurais bien voulu 
pénétrer dans une des belles mosquées, mais je trouvai 400 piastres un 
prix exorbitant pour voir des murailles blanches ou couvertes d’arabes- 
ques et des lampes garnies d'œufs d’autruche; je n’ai pu avoir accès 
que dans celle des derviches tourneurs dont les exercices, qui durent 
une demi-heure, ne m'ont pas semblé très-extraordinaires. 

u En outre des costumes, surtout ceux des femmes, et des carrosses 
tout dorés, dont les portières sont seulement grillées en bois, ce qui 
étonne le plus l'étranger, c’est cette multitude de chiens , plus ou moins 
galeux et couverts de plaies, que l’on heurte à chaque pas dans les rues 
commerçantes , où ils ont en général l'air fort penaud, portant la queue 
basse ; dans celles qui sont moins fréquentées, il y a presque à chaque 
porte une cavité occupée souvent par une chienne avec ses petits. Ces 
animaux semblent avoir pour principal office de faire disparaître de la 
ville, les détritus animaux provenant de l’intérieur des maisons. 

« Après être resté dix jours, j'ai été fort satisfait de repartir car, pour 
quelques journées avec de petites gelées et même un peu de neige, j'en 
al en d’autres couvertes et pluvieuses pendant lesquelles j'ai été obligé 


( 133 
de garder la chambre plusieurs jours, et encore n’ai-je pu me garantir 
d’un fort rhume. » 

De Constantinople à Smyrne et au Pirée. — Dans l'après-midi du 
7 janvier, le ciel étant très-nuageux, la chute de quelques gouttes de 
pluie favorisa l’apparition d’[ris. À six heures, le Tancrède était déjà en 
route pour Smyrne, où il arriva le surlendemain à six heures, après 
avoir été passablement balloté par les vagues. Mes caisses, augmentées 
de quelques autres de marbres antiques pour le Musée de Paris, furent 
acceptées, grâce à une réquisition de M. Béclard. À onze heures, nous 
partimes par un vent très-fort et une mer très-moutonnée dans le golfe ; 
nous traversämes des nuées de canards devant, le delta du Guedis-Tchaï 
(l’antique Hermus), dont les eaux jaunissent la mer à une certaine dis- 
tance. Aucune des montagnes en vue ne portait de neiges, preuve 
évidente que le climat est moins rigoureux que celui de la Thrace. 

Le bâtiment passa, à cinq heures et demie, devant le haut plateau de 
Chio ; et fendant, pendant la nuit, les flots de l’Archipel , soulevés par 
un vent du Nord très-fort, il arriva à l’aube du jour au cap Sounion, 
formé par des collines veraoyantes, de 100 à 150% d’élévation , offrant 
ües roches schisteuses rougeàtres contournées; l’une d’elles est couron- 
née par le temple de Minerve, dont il reste un double rang d'environ 
dix colonnes blanches, encore surmontées par l’entablement, qui ont 
donné lieu au nom moderne de cap Colonne. Le pays, jusque non loin 
du Pirée, est un plateau très-accidenté, découpé en collines arrondies 
rougeûtres, par de nombreux vallons sans arbres ni villages. L’Argolide, 
sur la côte opposée du golfe, est plus élevée, calcaire, à formes plus 
anguleuses ; Égine est montueuse, tandis que Salamine possède des con- 
tours arrondis. 

Une heure avant d’entrer au Pirée, je découvris la vaste plane 
d'Athènes , limitée au S.-E. par l’'Hymette; au N.-E., dans le lointain, 
par le mont Pentélique, et au N.-0. par la haute chaîne du Parnès, qui 
était en grande partie blanchie par la neige, ainsi que le Cithéron et 
l’'Hélicon, au-dessus de Mégare et de l’autre côté du golfe de Corinthe. 
Dans la plaine se trouvent deux ou trois petits monticules dont l’un 
porte le Parthénon. De la moderne Athènes, qui est située au pied N.-0., 
on n'aperçoit qu’un grand bâtiment blanc, qui est, m'a-t-on dit, le 
palais du roi Othon. Au N.-0. de la ville, la plaine unie est couverte de 
cultures et d’oliviers. Le bâtiment passa devant la rade à contours très- 
bas de Phalère et les deux petits ports de Phalère et de Mounychie ; et, à 


(134 ) 
onze heures, nous entrâmes au Pirée, port assez petit, entouré de 
basses collines rocheuses de calcaire jaunâtre tertiaire, en couches hori- 
zontales; on en tire une pierre blanchâtre employée dans la construction 
des maisons qui sont couvertes en tuiles. 

Quel désir n’avais-je pas de voir le pays où s'étaient inspirés, où 
avaient vécu Socrate et Platon ! mais je fus retenu par la perspective de 
huit jours d’une détention au lazaret, qui se serait renouvelée à Malte, 
et par le peu de certitude que j'avais que le capitaine du paquebot sui- 
vant consentirait à prendre mon nombreux matériel scientifique ; je remis 
à d’autres temps un voyage en Italie et en Grèce : ces temps viendront- 
ils? Chaque jour, je me prends à en douter davantage. 

À dix heures du soir, le bâtiment partit; le vent était tombé, la mer 
était beaucoup moins agitée ; un beau clair de lune me permit d’entre- 
voir Égine. Le 44 janvier, à huit heures et quart, nous doublions le cap 
Malée , laissant au midi Cythère, qui ne portait pas de neige. Peu après, 
Jj'aperçus la chaîne du Taygète et ses neiges d’un blanc éblouissant; en 
s’abaissant, elle se continue par la crète horizontale du Kakovouni, 
dépourvue de neige , malgré les 1217 d’allitude du Sandgia, et elle se 
termine par le cap Matapan. D’autres montagnes neigeuses dominaient 
également le fond du golfe de Laconie. En saluant, à midi, l’antique 
Ténare, je dis un dernier adieu à la terre d'Orient; le Tancrède s’'en- 
fonça dans les tristes solitudes d’une mer d’un bleu livide. ; 

Arrivée et séjour à Malle. — Séparé de la mort par l'épaisseur d’une 
planche, perdu, isolé au milieu d’inconnus, on se sent en mer, comme 
en pays étranger, attiré vers tout individu avec lequel on peut se croire 
quelques points communs. Dès Smyrne, j'avais lié connaissance avec 
un jeune industriel de Constantinople qui se rendait à Paris, j'avais 
aussi remarqué un gros Turc qui allait remplir les fonctions de secré- 
taire du bey de Tripoli, et qui ne se faisait nul scrupule de boire du 
rhum, malgré les prescriptions du Koran ; pourtant, en nous faisant ses 
adieux à Malte, il nous paya une bouteille de Champagne dont il s’abs- 
tint de prendre sa part. Le troisième jour, 13 janvier, à midi, j'aperçus 
à l'horizon Malte, qui s’offrait comme un petit plateau horizontal très- 
bas; elle grandit à vue d’œil, au fur et à mesure que nous approchâmes, 
et j'en pus mieux distinguer les pentes rapides et la couleur jaunâtre, les 
cultures, les buissons et l’absence d'arbres; passant, à quatre heures, au 
pied des formidables fortifications de Valetta, nous laissâämes à gauche le 
grand port et la ville, et nous entrâmes droit dans le port de la Quaran- 


(135 ) 

taine où nous devions purger la nôtre et où nous passämes la nuit. Le 
lendemain matin, nous débarquämes, et nous nous installämes au beau 
et commode lazaret. Nous admîmes dans notre chambre un capucin 
napolitain, le Padre Scognamiglio, qui était mandé de Constantinople à 
Rome par son supérieur, pour justifier d’une conduite, disait-on, peu 
exemplaire. Le temps passa moins tristement pour moi que pour mes 
onze compagnons; Car je m'occupai à mettre la dernière main à mes 
notes de voyage, et je vis arriver avec moins d’impatience le neuvième 
jour qui fut celui où, de grand matin, nous fûmes rendus à la liberté. 

Malte est le lieu de passage de trop de voyageurs, est trop connue pour 
que-je fasse plus que de donner quelques détails géologiques (1). En 
effet, c'est une de ces proies sur lesquelles les marchands de l'Angleterre 
s’abattent et s’implantent, de gré ou de force, sans respecter aucun droit, 
aucune nationalité, lorsque leur intérêt semble l’exiger. Gibraltar, 
Malte, les Iles Joniennes, dans la Méditerranée; tant d’autres lieux 


(1) À Malte, je n’ai vu que le terrain tertiaire moyen; mais il y a d’antres roches 
plus anciennes sur la côte méridionale, ainsi que l'indique le nom de l’ilot de Pietra- 
Nera. Au fond du grand port, quelques anciennes carrières montrent au niveau de la 
mer des calcaires grossiers jaunâtres, en assises de 5 à 6m de puissance, puis des 
bancs renfermant des oursins, et enfin un banc de 5-6 à grain plus fin. Au-dessus 
- du magasin à charbon des paquebots français, des escarpements sont formés par des 
calcaires jaunes à grains fins, dont la stratification, sur les deux flancs du port, plonge 
de 13c à l'O. 25 S.; ils renferment des nodules d'abord vermiculés durs , puis supé- 
rieurément Compactes ou un peu grenus, plus durs. Le sommet du plateau, élevé 
d'environ 50m, est couvert de pierres assez dures. Dans les murailles , il y a des blocs 
à empreintes de coquilles et ossements de poissons. Le port de la Quarantaine est 
ouvert dans des calcaires jaunes tendres, en couches horizontales; au fond, une 
source marquait 190 3. 

Le 22 janvier, j’allai avec mes compagnons jusqu’à Citta-Vecchia. Du faubourg de 
la Floriana, le plateau calcaire va en s’élevant graduellement. A Attard , j’achetai des 
dents de Carcharodon megalodon, provenant sans doute des carrières des environs; 
on m'en offrit aussi à Citta-Vecchia, dont le plateau est, dit-on, le plus élevé de 
l'île; d'après la mesure barométrique que j’ai prise à trois heures, la porte de la ville 
serait à 171m 4 d'altitude. La grotte de Saint Paul y est creusée dans des calcaires 
jaunâtres tendres, avec empreintes de coquilles turriculées. Les sources sont rares, 
même dans les dépressions du plateau de l'île; une d'elles alimente le jardin du 
gouvérneur ; les eaux de plusieurs autres réunies sont amenées à Valetta par l’aque- 
due de Vignacourt, qui a près d’un myriam. de longueur. La ville est à 55" d'altitude. 

En quittant Malte, j'aperçus Gozo, qui est aussi un plateau ceint. de falaises 
blanchâtres et sans doute tertiaire. J 


( 136 ) 

épars sur le globe; Périm, à l'entrée de la mer Rouge, en ce moment 
même, l’attestent suffisamment. Pour Malte, dont la population est 
plutôt arabe qu'italienne, ainsi que le témoignent les noms de tant de 
localités, ils ont eu la prétention d’en légitimer le rapt aux yeux de 
l'Europe; une inscription latine, gravée au fronton de leur palais, 
annonce qu'il a été sanctionné en 1814 par la voix du Sénat et l’amour 
des Maltais. On serait resté dans la vérité si l’on s’était borné à rappeler 
l'amour des filles maltaises pour les jaquettes des Higlanders écossais. 

Le climat de Malte est des plus agréables. Au milieu de janvier, j'y 
jouis d’une température presque estivale. Les fossés des fortifications 
renferment des orangers et des bananiers; dans les jardins des fau- 
bourgs, il y a des haies d’opuntia et des dattiers; au jardin du gouver- 
neur, dans une dépression du plateau, végètent en pleine terre et donnent 
des fruits , toutes les plantes des orangeries parisiennes; les orangers, 
néfliers du Japon, goyaviers, le Schinus molle, l'Agave americana. le 
papyrus, le bambou, etc. 

Rentrée en France. — Le 26 janvier, à sept heures du matin, le Tan- 
crède s’ébranla ; à midi et demi, les côtes de la Sicile vinrent en vue; 
et, à trois heures, l’Etna, blanchi par les neiges, apparut dans un léger 
brouillard. Le lendemain , il s’éleva un vent du N.-0. tellement violent 
que le bâtiment fut obligé de passer, en rade de Messine, une nuit pen- 
dant laquelle il tonna et tomba des averses considérables. Le 28, dans 
la matinée, le ciel s’éclaircit ; et après avoir passé le phare, sans danger 
pourtant, je vis le Stromboli duquel sortait une abondante fumée blanche 
qui, d’une part, se rabattait sur le flanc oriental, et, de l’autre, s’étalait 
au sommet en forme de nuage. Dans la matinée du lendemain, nous 
mouillämes en rade de Naples par un temps tellement couvert, que le 
Vésuve disparaissait entièrement dans le brouillard et la pluie. Ce fut 
surtout là que je pus admirer les employés sanitaires italiens ; avant 
d’avoir aperçu le timbre de la patente de santé que leur présentait à 
distance notre docteur, ils n'auraient pas touché un aviron , une corde, 
un bout de fil nous appartenant; mais une fois la bienheureuse paperasse 
tournée et retournée avec de longues pinces vinaigrées, ils passèrent 
d'une embarcation dans l’autre, échangèrent des poignées de main et 
embrassèrent même ceux dont, une seconde auparavant, ils auraient tout 
au plus consenti à toucher le pan de l’habit avec des pincettes. Ces 
hommes, transportés sur la scène, feraient certainement d'excellents 
comédiens. Depuis Malte, le Padre Scognamiglio nous parlait du plaisir 


qu'il aurait à voir son père pendant la relàche, à son débarquement, un 
ami lüi apprit sa mort arrivée quelques semaines auparavant. Lorsqu'il 
fut revenu à bord, l'indifférence avec laquelle 1l semblait prendre cette 
perte contrastait si fort avec les sentiments d'affection qu'il avait mani- 
festés quelques heures auparavant, que j’affectai de ne pas le reconnaître 
et que plusieurs passagers lui firent froide mine jusqu’au lendemain, à 
Civita-Vecchia. Dans ce port romain, le Tancrède le troqua contre un 
individu qui portait soutane et se faisait appeler l'abbé Hadeng..; véri- 
table chevalier d'industrie dont plus tard, à Bordeaux, je n’eus pas à me 
féliciter d’avoir fait la connaissance. 

À dix heures et demie, nous levämes l’ancre, et après avoir rencontré 
des caboteurs plus ou moins désemparés par la tempête de l’avant-veille, 
et en avoir même remorqué un jusqu’à un petit port de la côte, nous 
passâmes, à quatre heures, entre le mont Argentaro et l’ile del Giglio. Le 
lendemain , après avoir touché à Livourne, nous dépassions à peine le 
cap Corse , à trois heures de l’après-midi, lorsqu'il arriva à la machine 
un accident qui ne nous permit pas de lutter avec avantage contre le vent 
furieux de N.-0., ou mistral, qui commença le lendemain avec le jour, 
lorsque nous passions devant les îles d'Hyères. Nous dûmes nous diriger 
sur Toulon, où nous n’arrivämes qu’à une heure et demie. Le lende- 
main , le vent était tombé; mais pour atteindre Marseille, il fallut dix 
heures de navigation au voisinage de la côte et sur une mer des plus agi- 
tées, qui nous aurait fait rendre l’âme si cela avait été possible ; enfin, 
l'ancre tomba dans le port à six heures, et les passagers purent, après 
deux jours de retard, aller passer une nuit plus tranquille sur la 
Canebière. | 

Le 3 février , je fis vérifier par la douane mes nombreuses caisses, el 
je les expédiai à leurs diverses destinations; bientôt après, libre de tout 
bagage , je pris la diligence pour Lyon. Le débordement de la Saône m'y 
retint deux jours , les bateaux à vapeur ne pouvant faire leur service, 
les voitures étant encombrées de voyageurs et de soieries , et le chemin 
de fer n'étant alors qu’à l’état de vague projet. Enfin, je pus avoir une 
place pour Dijon et aller passer quelques jours près de mon ami 
J. Beaudouin , à Châtillon-sur-Seine , avant de prendre la route de Paris, 
où j'arrivai le 15 février 1846, après dix mois et demi d'absence. 

Observations météorologiques à Smyrne et à Malle — Pendant mes 
relâches sur ces deux points, j'avais noté plusieurs fois par jour la hau- 
teur du baromètre et la température de l'air. J'ai pensé qu'il y aurait 


( 138 ) 
quelque intérêt à établir quelle sorte de correspondance présentent les 
variations de la pression atmosphérique dans les diverses parties de la 
Méditerranée. J’ai donc dressé le tableau suivant, dans lequel se trou- 
vent les observations du milieu du jour faites soit par moi, à Smyrne ou 
à Malte, soit simultanément à l’observatoire de Marseille, à celui de 
Naples et à La Canée, enfin, par M. et Mme Gaspary. 
Les observations du baromètre sont réduites à 0° et rapportées au 
niveau de la mer. Les localités sont disposées dans l’ordre de leur plus 
grand éloignement du méridien de Paris. 


DÉC. | MARSEILLE, NAPLES, MALTE, LA CANÉE, SMYRANE, 
1845. midi. 3 h. du soir. midi. midi. midi. 
RE mill, deg. mill. deg. mil. deg. mill. deg mill. deg. 
22 | 754,0 6,2 | 767,3 8,7 » 7626 46 | 764,8 13 
23 | 742,3 7,4 | 754,4 8,3 » 759,2 17 | ‘758,1 

24 | 781,1 6,4 | 751,0) 7,9 » 754,9 46 | 754,5 

25 | 766,7 6,7 | 768,3 ‘7,9 » 761,3 16 | 758,7 | 
26 | 774,7 TAN UT 6 9,5 » 762,8 44 | 762,2 10,4 
27|. 770,8 9:64 0778,41 | 9,5 » 767,3 40,5 | 765,5 

JANY. 4 "+ 71 dub in 
1846. , 
14 | 758,9 192,9 | 765,4 13,7 | 766,2 16,2 | 768,0 13 » | 
15 | 759,4 13,6 | 765,6 15,2 | 764,0 16,5 | 769,0 15 » | 
16 | 762,5 43,7 | 763,1 43,7 | 763,0 15,2 | 769,7 14,5 » | 
17 | 759,8 44,4 | 759,7 45,2 | 762,6 45 | 763,6 13 » | 
18 | 758,6 42,6 | 764,2 12,7 | 763,2 46,1 | 761,7 44 » 

19 | 762,3 142,9.| 757,2 43,2 | 762,9 15,5 | 764,8 15 » 

20 | 761,4 42,9 | 757,6 44,2 | 768,1 46 | 765,9 13 » 

21 | 763,9 13,5 | 756,7 13,2 | 770,4 14,7 | 769,1 -43 » 

22 | 762,3 13,6 | 764,2 44,2 | 767,4 19 | 768,6 14 » 

03 | 757,7 14,7 | 759,3 13,7 766,4 17,5) | "TEL EME » 

24 | 764,5 13,4 | 764,7 45,7 | 765,2 418,5 | 766,0 12 » 

25 | 765,4 43,9 | 755,6 45,7 | 766,3 416 | 759,8 415 » 


Dans les observations de décembre, l’accord est assez remarquable 
pour cette période de six jours; le minimum de pression a eu lieu le 24, 
excepté à Marseille ; le maximum antérieur a eu lieu le 22; le postérieur 
le 26, pour Naples, et le 27, pour Marseille, La Canée et Smyrne. 

Dans celles de janvier, l'accord est encore aussi grand; on peut en effet 
remarquer que le grand minimum du 19, à Naples et à Malte, s’était pro- 
duit la veille à Marseille et à La Canée, et que le grand maaimum du 21, 
avait eu lieu la veille à Naples. 


(4390) 
CHAPITRE I 
APERÇU HISTORIQUE SUR LA CRÈTE. 


Coup-d'œil géographique et géologique. — La Crète, nommée I Kritj 

par ses habitants et Kirit par les Turcs, est désignée par les Occidentaux 
sous le nom de Candie ou Candia complètement inconnu dans l'ile, 
excepté de ceux qui parlent ce mauvais italien dit langue franque. On 
admet généralement que ce nom n’est qu’une légère altération de celui 
de Candida par lequel les Vénitiens désignèrent au moyen-âge Rhabd-el- 
* Khandak, fondée par les Arabes ; dans cette période d’ignorance et de 
barbarie , ils parurent ne pas se douter que l’île avait un nom et ils lui 
appliquèrent celui qu’ils avaient donné à la ville principale. 
* La Crète, l’une des cinq grandes îles de la Méditerranée, est au centre 
du bassin oriental, par 35 degrés de latitude et 21 à 24 degrés de 
longitude orientale de Paris. « Par sa position naturelle, dit Aristote (1), 
« la Crète semble appelée à dominer tous les peuples grecs, établis pour 
« la plupart sur les rivages des mers où s'étend cette grande île. D’une 
« part, elle touche au Péloponnèse, de l’autre à l’Asie vers Triope et l’île 
_ « de Rhodes : aussi Minos posséda-t-il l'empire de la mer et de toutes les 
« îles environnantes qu’il conquit ou colonisa ; il porta ses armes jusque 
« dans la Sicile où il mourut près de Camique. » Elle limite l’Archipel 
au S., et appartient bien à l’Europe, car elle est placée à une distance 
peu considérable de ces séries d'îles, dirigées du N.-0. au S.-E., qui 
sont des prolongements sous marins des chaînes montagneuses de l’Eu- 
bée, de l’Attique et de la Morée. Elle fait partie d’une série d'îles en arc 
de cercle, entre la Morée et l’Anatolie : Kaso , Skarpanto et Rhodes au 
N.-E., Tsérigo au N.-O. : 

La Crète est allongée de l'E. 7°$S. à l'O. T° N.; sa longueur est de 
245 kilomètres ; sa largeur moyenne est de 32 kilomètres, les extrêmes 
étant 42 au milieu et 12 dans l'E. Sa surface, y compris celle des petites 
iles qui en dépendent, est de 7,800 kilomètres carrés, un peu moins 
grande que celle de la Corse. Sous le rapport orographique, elle peut 
être divisée, suivant sa longueur , en sept massifs, qui sont, en allant 
de l'E. à l'O. : 


(1) Traduction de Barth. Saint-Hilaire, t. 1, p. 179. 


(140) 


4° Le pays montagneux de Sitia. 

20 Les montagnes de Lassiti. 

3° Le plateau accidenté de Megalo-Kastron (Candie). 

4° Les montagnes du Psiloriti (Ida). 

5° Le plateau accidenté de Rhethymnon (Relimo). 

Ge Les Aspra-Vouna ou montagnes de Sphakia. 

1° Le pays montagneux de Kisamos et Selino. 

Les cinq pays montagneux de Sitia, de Lassiti, du Psiloriti, de Sphakia 
et de Kisamos et Selino, sont disposés sur une ligne droite qui court 
suivant la plus grande longueur de l'ile. Le massif central du Psiloriti 
atteint environ 2,500 mètres; les deux latéraux , de Lassiti et de Spha- 
kia, sont un peu moins élevés : ils n’ont que 2,100 et 2,400 mètres. : 
Quant aux deux qui terminent l'ile, ceux de Sitia et de Kisamos et 
Selino , leur hauteur est beaucoup moins considérable, car ils n’attei- 
nent que 1,500 et 1,400 mètres. Les plateaux de Candie et de Retimo 
s'élèvent à 600 mètres ; mais tous deux sont limités au $S. par de bas 
chaïnons montagneux qui dépassent 1,000 mètres. L'ile n’est donc pas 
formée par une seule chaîne de montagnes. Les différenis massifs que 
nous venons d’énumérer sont séparés les uns des autres par des dépres- 
sions relativement très-basses, qui permettent des communications faci- 
les d’un versant à l’autre : ainsi les passages d'Épiskopi , entre Silia et 
Lassiti, de Kastel-Pedhiadha, dans le plateau de Candie, de Karé, dans 
le plateau de Retimo, et d’Epanokhoriv, entre Sphakia et Selino, ont 
seulement des altitudes approximatives de 150, 350, 400 et 650 mètres. 

. Excepté dans le massif le plus oriental , tous les points culminants de 
chacun des massifs sont rapprochés de la côte méridionale ; aussi le ver- 
sant méridional de l’île est-il , presque partout, plus court, plus rapide, 
que le versant opposé. Celui-ci est souvent prolongé par des parties 
montagneuses plus basses, des plateaux ou bien des plaines plus ou 
moins accidentées. Aussi , indépendamment de sa division en sept mas- 
sifs, y a-t-il deux plaines longitudinales qui, en raison de leur étendue 
et de leur uniformité, pourraient presque être considérées comme de 
petites régions naturelles : ce sont les plaines de Messara, dans la partie 
méridionale du plateau de Candie, et de La Canée ou Khania, au N. des 
montagnes de Sphakia. 

Chacun des sept massifs présente une configuration particulière pour 
ses montagnes , ses plateaux et ses plaines. En outre des grands vallons 
si nombreux qui sillonnent le sol et vont aboutir à la mer, la Crète ren- 


( 141 ) 
ferme des dépressions intérieures dont plusieurs , complètement isolées, 
forment de petits bassins fermés ; les deux principaux sont la plaine de 
Lassiti, au centre des montagnes de ce nom, et celle d’Omalos, dans les 
montagnes de Sphakia. Les eaux pluviales qui s’y rendent se perdent 
dans des gouffres, Khonos , analogues aux Katavothrons de la Morée. Les 
vallées dans plusieurs parties, principalement sur le pourtour des mon- 
tagnes de Sphakia, se transforment en de véritables crevasses du sol, 
Pharangi, très-profondes, dont la largeur au fond est de quelques mètres. 

Des cavernes plus ou moins grandes existent sur plusieurs points au 
milieu des roches calcaires ; les principales sont celles du cap Meleka, 
de Melidhoni, près du Kouloukouna, et de Sarko, au S.-0. de Candie. 
Nous ne pouvons ranger dans cette catégorie les excavations d’Ampelousa, 
au pied méridional du Psiloriti, que l’on décore habituellement du nom 
de Labyrinthe de Crète, mais qui ne sont que les carrières de l’antique 
Gortyne, ainsi que le disait Belon il y a trois siècles. 

La Crète est une contrée très-sèche ; car, d’une part, son sol est un 
véritable crible, étant presque partout formé par des calcaires en cou- 
ches bouleversées , remplies de sillons et de crevasses , et d’autre part, 
ce n’est que pendant quelques mois de l’année qu’il tombe de la pluie, 
et aussi de la neige sur les montagnes. Il résulte de là que les cours 
d’eau sont presque toujours interrompus sur une très-grande partie de 
la longueur de la vallée ; ils n’existent à l’état de nappe continue super- 
ficielle que dans les parties supérieure et inférieure, le plus souvent au 
voisinage de la côte. La partie moyenne n’est alors qu’un ruisseau de 
pierres roulées presque toujours calcaires, pendant la saison sèche et 
chaude qui dure environ sept mois, de mai à novembre. La partie la plus 
occidentale fait seule exception ; comme elle est formée par des couches 
imperméables , les ruisseaux y coulent sans interruption, et à peu près 
constamment depuis les sources jusqu’à l'embouchure ; en effet, le pays 
de Selino est formé par les talschistes, et celui de Kisamos, par un ter- 
tam marneux tertiaire. Pendant la durée de la partie pluvieuse de l’an- 
née, au contraire, de décembre à avril, presque toutes les grandes 
vallées renferment un torrent en général rapide. Assez souvent même, il 
suffit d'une grande averse pour que des torrents se forment de suite dans 
le fond des vallées. 

La Crète offre sur plusieurs points de son pourtour quelques îlots qui 
ne sont, pour la plupart, que des rochers arides; les principaux sont : les 
Dhionysiadhes et Dhia, sur la côte septentrionale , Gaudhos et Gaudho- 

Tome XXII. 11 


(12) 
Poula , à une distance un peu plus grande de la côte méridionale. Dhia , 
inhabitée , possède plusieurs ports fréquentés par les bâtiments qui vont 
à Candie. Gaudhos, moins aride , renferme plusieurs villages. 

Dans les plaines et sur les bas plateaux, jusqu’à 500 mètres d’altitude, 
l'olivier est l’arbre le plus abondant; dans la partie orientale, le carou- 
bier s’y mêle. Le platane abonde dans les endroits humides, sur le bord 
des ruisseaux. Autour de Retimo, on cultive le Quercus ægilops. Sur les 
pentes voisines de la côte méridionale, on rencontre sur plusieurs points 
le Pinus halepensis. Le châtaignier est commun sur les talschiste de 
Selino. Le figuier, l’oranger et le grenadier sont cultivés partout. Parmi 
les arbustes, on trouve communément les Pistacia lentiscus et atlan- 
tica, Tamarix gallica, Vitex agnus-castus, Arbutus unedo, Clematis 
cirrhosa. Les Bruyères ( Erica arborea et verticillaia) abondent sur le 
terrain talqueux partout où il existe, et le font reconnaître de très-loin. 
Le laurier-rose et le myrte existent sur le bord de tous les ruisseaux. 
Les broussaiiles qui couvrent partout le sol sont surtout formées par les 
Cistus salvifolius , Salvia calycina, Lavandula siæchas , Inula viscosa, 
Galium fruticosum, Hypericum ciliatum et empetrifolium, Poterium 
spinosum , Psoralea bituminosa. 1] y a encore les Acanthus spinosus , 
Euphorbia characias, Sambucus ebulus. On rencontre , dans les salines, 
les Salsola kali, Suæda fruticosa, Salicornia macrostachya ; dans les 
lieux maritimes, les Eryngium maritimum , Chicorium spinosum. 

De 500 à 1200 mètres , les pentes des montagnes présentent des bois 
clairsemés de Quercus ilex, Cretica et Acer creticum , avec le Cupressus 
horizontalis , qui s’élève encore un peu plus haut ; on y trouve en outre 
les Berberis crelica, Euphorbia spinosa, et plusieurs des espèces pré- 
cédemment énumérées. 

Au-dessus , les rochers sont nus ou présentent de simples broussailles , 
principalement composées des Astragalus creticus et echinoides, Salvia 
spinosa , Acantholimon androsacum , Daphne oleoides, Jumiperus 
oxycedrus. 

Chacune des trois zones de végétation a des plantes herbacées, en 
grande partie spéciales, dont le nombre va en diminuant très-rapide- 
ment, de la zone inférieure à la zone supérieure. 

Les roches qui composent l’île de Crète se groupent dans les cinq 
catégories suivantes : 

5° Terrains d’alluvion. 

4° Molasses, marnes et calcaires subapennins. 


( 143 ) 

3e Macigno et calcaires noirâtres, principalement crétacés. 

2° Serpentines, diorites, antérieurs au terrain crétacé. 

1° Talschistes primitifs. 

Les talschistes forment toute la partie centrale et occidentale du pays 
montagneux de Kisamos etSelino. Il s’en détache une bande qui se pro- 
longe à la base des montagnes de Sphakia du côté du Nord; ils consti- 
tuent en outre dans chacune des autres parties de l’île, des points isolés 
plus ou moins étendus dans les dépressions des montagnes ou bien en 
saillie à la surface des plateaux de Candie et de Retimo. 

Les diorites et les serpentines se trouvent en petits amas, principale- 
ment dans les montagnes de Lassiti et du Psiloriti. 

Le macigno et les calcaires forment les pays montagneux de Sitia, 
les montagnes de Lassiti, et du Psiloriti, de Sphakia, les chaînons mon- 
tagneux qui limitent au S. les plateaux de Candie et de Retimo, le 
pays montagneux de Selino, et des points isolés dans chacun de 
ces trois derniers. Sur la côte septentrionale, il forme aussi les petits 
massifs isolés des caps Sidhero, Dhrapano, Meleka, Spadha et Gra- 
bousa. C’est encore ce terrain qui forme les îles Dhionysiadhes, Dhia, 
Gaudho-Poula, et la partie élevée de celle de Gaudhos. fl est toujours 
en couches fortement redressées. 

Le terrain subapennin est principalement développé dans la partie 
septentrionale de l’île ; mais dans la partie orientale, il passe d’un côté 
à l’autre en deux endroits. C’est lui qui rattache les uns aux autres les 
massifs montagneux qui formaient presque autant d’îles isolées pendant 
qu’il se déposait à leur pied dans la mer; il y a cependant aussi quel- 
ques petits dépôts d’eau douce dans d’anciens lacs isolés. Il forme les 
parties basses du pays de Sitia sur l’un et l’autre versant, l’isthme de 
Hierapetra, qui le sépare des montagnes de Lassiti, et il se prolonge au 
pied de celle-ci sur la côte méridionale. Il constitue essentiellement le 
plateau de Candie, et se poursuit, entre le Psiloriti et la chaîne du 
Kophinos, jusqu’à là mer de Libye. Il forme aussi une grande partie du 
plateau de Retimo , d'où, par l’Apokorona, il relie, au N. des monta- 
gnes de Sphakia et dans le pays de Kisamos, les petits massifs de Dhra- 
pano, Meleka, Spadha et Grabousa. On le retrouve enfin dans la partie 
basse septentrionale de Gaudhos. 

Les terrains d’alluvion forment les parties basses des plaines de Mes- 
sara et de la Canée, et des plages sur plusieurs points, surtout de la 
côte septentrionale. 


(1) La fin de ce chapitre, étrangère à l'histoire naturelle, n'est pas insérée ici. 


CHAPITRE I. 
ITINÉRAIRE EN CRÈTE. 


49 PREMIERS VOYAGES DANS LE KHANIOTIKA ET LES ÉPARKHIES 
DE SPHAKIA ET D’APOKORONA (1). 


Arrivée à Khania, 3 Mai. — Trois heures après le passage du bâti- 
ment, entre Pholegandros et Lagousa , j'aperçus le Psiloriti et les Aspra- 
Vouna, bientôt masqués par le brouillard. Neuf heures après, nous vinmes 
en vue du haut et escarpé chaînon du cap Meleka, dominé dans sa partie 
orientale par la cime pointue du Skloka; à cinq heures, nous n’en 
étions plus fort éloignés; mais un calme plat nous empêcha d'avancer 
pendant toute la nuit. Le lendemain, de grand matin, de deux à trois 
milles de distance, j’aperçus, comme le représente Tournefort (2), les 
Aspra-Vouna et, comme à leur base, Khania qui n’est pas masquée par 
les rochers et la muraille assez basse qui sépare le port de la rade. La 
ville est sur une plage basse qui s’étend de chaque côté, surtout à 
droite, vers l’O., où elle se relève en collines qui portent Ghalata; 
celles-ci se terminent par un pâté de montagnes qui paraît venir atteimdre 
la plage au bas de Platania, et dont l’ilot d'Haghios-Théodoros semble 
une continuation. À gauche, vers l’E., la plaine arrive plus vite au pied 
des pentes qui s'élèvent au-dessus de Khalepa pour former l’Acroteri, 
dont la surface vient s’abaisser doucement au pied des montagnes, si 
escarpées du cap Meleka. Sur le second plan, se trouvent les plateaux 
noirs et élevés de Malaxa et de Keramia, et le pays plus accidenté qui, 


I 


(1) Les lieux importants en Crète, comme partout, sont désignés par les étrangers 
qui les fréquentent, sous des noms traduits, quelquefois même particuliers , inconnus 
dans le pays; les autres localités, en général moins connues, conservent toutes leur 
vrai nom. Pour éviter ce disparate dans une description, nous n’emploierons, con- 
formément aux tendances actuelles, dans le reste de l’ouvrage, que les noms du 
pays, les seuls réels. Ainsi, Khania ne sera jamais nommée La Canée ou Canea ; ni 
Rhethymnon, RFO ni Megalo-Kastron, Candie ou Candia, etc. Quant à l’ortbo= 
graphe, les +, à, 7 seront rendus par gh, dh et kh. 

Dans l'impossibilité où nous sommes de donner des planches étrangères à la Géo- 
graphie et à l'Histoire naturelle, nous rappellerons dans le cours de l’Itinéraire toutes 
celles qui ont été publiées par les-différents voyageurs en Crète, ou d° après eux. Les 
cartes et plans maritimes proprement dits trouveront leur mention dans la Géographie. 

Z) Voyage au Levant, 1. 1, p. 22 


( 145 ) 

par la dépression de Spelæa, se continue avec la crète élevée du cap 
Spadha qui limite le golfe à l'O. Enfin , sur le dernier plan, se trouvent 
les Aspra-Vouna ou Montagnes blanches, formées d’une multitude de 
cimes rapprochées les unes des autres et blanchies par la neige, sur une 
assez grande hauteur encore, et sur une longueur soutendant un arc de 
50, du S. 30° E. au S. 20° 0, entre Askypho et Omalos. Plus loin, à 
droite, se voit une cime moins élevée, l’Apopighari, et dans le lointain 
la masse noire, arrondie, de l’'Haghios-Élias. 

À six heures du matin, le bâtiment entra dans le port, et je débarquai 
immédiatement. Khania, la Canea des Vénitiens, le Rhabdh-el-Djobn 
des Arabes, est sur l’emplacement de Cydonia, d’après la description 
de Scylax, et quelques restes trouvés par L. Chevalier; elle fut rebâtie 
et fortifiée en 1252 par les Vénitiens, qui avaient besoin de contenir les 
habitants déjà mécontents de leurs nouveaux maîtres. Elle est de forme 
rectangulaire , enceinte de fortifications plus récentes, assez simples, et 
n'offre qu’une seule porte protégée par la principale demi-lune; les 
fossés sont en partie creusés dans le roc. Les bouches à feu , qui étaient 
au nombre de 162, ont été réduites par Méhémet-Ali à 86 canons et 
8 mortiers. Les rues larges, droites et assez bien pavées , présentent des 
fontaines dont les eaux sont amenées des montagnes voisines; celles 
des puits étant saumâtres et malsaines. Les maisons n’ont au-dessus du 
rez-de-chaussée en pierre qu’un premier étage, souvent en bois ; au lieu 
de toits, elles sont surmontées de terrasses en terre battue, qui donnent 
à la ville une physionomie un peu orientale, et sur lesquelles les habi- 
tants passent les nuits d'été roulés dans des tapis ; beaucoup d’entr’elles 
remontent au temps des Vénitiens, ainsi que le témoignent, en outre de 
l'architecture, quelques inscriptions (1). Celles qui donnent sur le port 
présentent souvent au premier étage des galeries en bois, assez misé- 
rables, d’où l’on a une vue belle, mais peu animée, les bâtiments étant 
toujours un objet fort rare dans le golfe, entre les caps Meleka et Spadha. 
Les mosquées sont presque toutes des églises grecques ou latines trans- 
formées. La population qui était de 5 à 6,000 âmes en 1700, était évaluée 
à 13,000 en 1813, et seulement à 5,800 en 1834. Elle s’est beaucoup 
accrue depuis que le port a été ouvert au commerce extérieur. Elle égale, 
dit-on, celle de Megalo-Kastron, quoique la superficie de la ville ne soit 
guère que le tiers. 


(1) M. Pashley, Travels in Cr le, t.], p.5 


( 146 ) 

Le port est fermé du côté de la mer par un banc de rochers s’élevant 
peu au-dessus de l’eau et portant une forte muraille assez basse ou môle, 
de 3717 de longueur, offrant dans son milieu une ancienne redoute, et 
se terminant par une tour où est le phare; du côté opposé de l'entrée 
qui est étroite et profonde de 8», se trouve la citadelle. Par les vents 
violents du N., les vagues passent par dessus la muraille et alors les 
bâtiments ancrés dans la partie du port la plus profonde, qui a 6", sont 
les plus exposés et peuvent y naufrager comme cela eut lieu une ou deux 
années avant mon arrivée; ceux qui naviguent dans le golfe par ce même 
vent sont également fort exposés. Le port, le moins mauvais de l’île, 
étant moins obstrué et comblé que ceux des autres villes, correspond à 
la partie la plus feriile ; il ne peut recevoir que 40 bâtiments de 300 
tonneaux ou bien 300 barques. Au fond, on aperçoit, au-dessus de la 
darse presque comblée, une rangée de chantiers voûtés que les Vénitiens 
avaient élevée pour construire et remiser leurs galères. 

Le consulat de France était à deux pas du port sur lequel donnait la 
chancellerie; en attendant une heure moins matinale pour m’y présen- 
ter, je me promenai sur le quai et les remparts qui sont au fond, et 
d’où l’on a sur le port une belle vue représentée par divers auteurs (1). 
Mon costume européen me fit connaître au chef de musique du régi- 
ment arabe, un Marseillais, qui m'offrit la pipe et du café dans de petites 
tasses portées dans des sortes de coquetiers métalliques à jour. J’eus 
ainsi un avant-goût des habitudes crétoises. | 

Au consulat, je fus reéu de la manière la plus cordiale par M. Hitier 
qui, aussitôt après le déjeûner , procéda à mon installation dans une 
chambre tout récemment appropriée au couvent catholique, dans l’inté- 
rieur de la ville. La Crète est un pays tellement en dehors du monde des 
affaires et des touristes, un pays si peu fréquenté par les étrangers , que 
dans sa principale place de commerce, hors le couvent catholique où 
quelques voyageurs connus peuvent se caser, il n’existe pas un seul 
hôtel, pas une auberge même très-médiocre ; il n’y a sur le port que 
des cabarets pour les matelots, les négociants du pays recevant chez eux 
les capitaines de navires ou les rares voyageurs de commerce auxquels 
ils ont affaire. 

Dans la journée, M. Hitier me mena faire visite au D° Caporal, à 
Khalepa, et le soir il me présenta au gouverneur qui nous reçut dans 


(1) Coronelli, 1solario, p. 207, Myller, et M. Pashley, Travels in Crete, t.1,p.1. 


(141) 

une grande salle du seraï peinte en blanc, dont l’ameublement consis- 
tait en naltes et un long divan qui occupait tout le fond. Après s’être 
levé pour saluer le consul , Moustapha, qui se tenait à l’un des angles 
du divan , nous fit asseoir à sa droite; M. Gaspary, chancelier-drogman, 
occupait un siége distinct à sa gauche. On apporta les longues pipes 
orientales de 2" de longueur et le café dans les petites tasses, puis, la 
conversation s’engagea en grec. Quoique né à peu près avec le siècle, le 
Pacha, par son état maladif, paraissait avoir plus de 45 ans ; apprenant 
que je m'occupais de mines, je ne dirai pas de minéralogie et de géologie, 
il me fit présenter des charbons, qui avaient été l’objet de recherches 
au S. de Rhethymnon, et demander ce que j’en pensais. C'était du lignite 
assez médiocre sur lequel il ne me parût pas que l’on püût faire grand 
fonds. Le lendemain, nous allâmes voir les principaux consuls étran- 
gers , MM. Ongley, pour l’Angleterre, Peroglou, pour la Grèce, Thoron, 
mon correspondant français, pour la Russie. 

Excursions aux environs de Khania. — Le jour suivant, je pus enfin 
aller dans la plaine et sur les collines et les plateaux. À la sortie de la 
ville se trouvent les boucheries, dans la demi-lune, puis les cimetières 
turcs avec leurs hauts cyprès. Gà etlà dans la plaine, se trouvent quel- 
ques tombeaux de riches aghas formés d’un dôme supporté par quatre 
colonnes assez grêles. Non loin de la ville aussi, comme dit Sonnini (1), 
« l'âme, est froissée, les sens sont péniblement affectés à la vue des 
huttes qui bordent la route. Ce sont les asiles des personnes des deux 
sexes, dévorées de cette horrible et contagieuse maladie de la peau 
( la lèpre), qui exerce encore ses ravages dans quelques parties de 
l'Orient, et que les Croisades avaient apportée en Europe, où l’on est 
venu à bout de s’en délivrer ». Mes premières explorations furent en 
grande partie consacrées à la botanique, car je voulais avoir recueilli 
les plantes qui forment le fond de la végétation et n'avoir plus à m'en 
occuper lorsque je me lancerais dans des explorations plus lointaines. 
Jallai seul et sans le moindre obstacle sur les pentes qui s'élèvent au 
N.-E. de Khalepa et sur le plateau qui les couronne. De là, on a sur 
la ville, la baie et les montagnes du cap Spadha, la vue magnifique 
représentée par Boschini, Dapper et surtout M. Pashley (2). Dans la 


(1) Voyage en Grèce el en Turquie, T.I, p. 396. 
(2) Boschini, IL Regno lutto da Candia, pl. VIT; Dapper, Descriplion exacte des 
iles de l’Archipel, p. 408, et M. Pashley, Travels in Crete, T. 1, frontispice. 


* (1487 
plaine , située à l'E., qui va aboutir à la baie de Soudha , je fus harcelé 
par une vieille femme dont je ne parvins à être débarrassé qu'après lui 
avoir crié cinq ou six fois : Dhèn katalavèno (je ne comprends pas ). 
En effet, ne la voyant pas trop mal vêtue, je ne compris pas qu’elle me 
priait de lui faire l’aumône. 

Ce que disait Belon (1) de la langue des Crétois, il y a trois siècles, 
est encore vrai : « Tous indifféremment parlent vn langage corrompu de 
l'antique : mais les vns plus élégant que les autres : toutefois leurs 
parolles approchent plus du bon Grec, que les paroles de l'Italien n’ap- 
prochent du Latin. Ceux des villes parlent aussi bien Italien comme 
Grec : mais les villageois ne parlent que pur Grec. Les Grecs n’ont dé- 
laissé les antiques appellations des choses appelées par noms propres, 
sinon ès lieux ou ils ont esté le plus fréquentez des autres nations; et 
beaucoup plus ès villes situées aux rivages, qu’en terre ferme : car, 
ayans depuis longtemps traffiqué avec les estrangers, tant Turcs que 
Italiens, ont emprunté des dictions qu’ils ont meslées auec leur vul- 
gaire. » La quantité de mots tures qui s’y sont introduits est assez 
considérable, d’après M. Pashley, pour qu’il soit nécessaire de plu- 
sieurs semaines pour être familiarisé avec ce langage. 

Le 8 Mai, le Dr Mongieri, chef du service sanitaire, me conduisit sur 
la montagne de Malaxa, au S.-E. de la ville. Au-dessus de Nerokourou, 
on quitte la plaine pour s’élever sur la pente formée d’abord par les 
calcaires gris et ensuite par les talschistes; plus haut, les calcaires 
reviennent et forment tant le col, où est un Pyrgo ou tour fortifiée 
gardée par les Arnaoutes, que le plateau proprement dit de Malaxa ; 
celui-ci, élevé de 600", présente des cultures et la même végétation 
naturelle que la plaine, mais avec un retard d’une quinzaine de jours 
environ. | 

A ce que j'ai dit de l'aspect des alentours de Khania, j'ajouterai que 
la plaine se prolonge vers l'E. jusqu’à la baie de Soudha et vers l'O. 
pendant trois à quatre lieues, entre le massif montueux de Platania au N. 
et les plateaux de Malaxa et de Keramia au $. Cette plaine est formée par 
des sables rouges plus ou moins caïllouteux diluviens. Les oliviers y sont 
tellement nombreux, que des hauteurs environnantes, elle présente 
l’aspect d’une grande forêt de laquelle sortent seulement les parties 
supérieures des habitations les plus élevées; pourtant, il y a des parties 


(1) Les Observations de plusieurs singularilés, fol. 5. 


CS 


( 149 ) 

assez vastes, incultes ou consacrées à la culture des céréales : çà et là 
se trouvent quelques pins Pignon et de rares dattiers qui, malgré leur 
stérilité ne contribuent pas moins, avec les maisons terminées par des 
terrasses, à donner au pays une physivnomie passablement orientale. 
Aux alentours de la ville, comme surtout au-delà du vieux pont du 
Kladiso, les chemins sont parfois bordés d’agaves dont les vastes giran- 
doles de fleurs d’un blanc verdâtre, font un très-bel effet. Vers Soudha, 
des parties étendues sont en pâturages et en prairies, et renferment près 
du rivage les principales salines de l’île. La plaine est bordée sur la baie 
de Khania par des sables jaunâtres d’alluvion qui forment de petites 
dunes, et dans lesquels des infiltrations calcaires produisent, sur cer- 
tains points, des calcaires sableux qui sont quelquefois employés dans 
les constructions. Le massif montueux de Platania, les montagnes qui 
entourent l’extrémité occidentale de la plaine et les pentes inférieures 
des’plateaux de Keramia et de Malaxa , sont formés de quartzites et de 
talschistes avec quelques assises de calcaire grenu et des filons de 
quartz; ces roches imperméables renferment une assez grande quantité 
d'humidité; dans les vallons, il y a fréquemment des sources et des 
ruisseaux bordés de myrtes et de laurier-roses coùverts de fleurs dans 
les mois de juin et de juillet; les pentes sont verdoyantes pendant touté 
l’année par la présence multipliée des bruyères et des arbousiers ; les 
oliviers y viennent également bien. 

Les plateaux de Keramia et de Malaxa, et le chaînon montueux du cap 
Meleka, sont formés par un système de çalcaires compactes et grenus, 
souvent magnésiens, gris ou noirs, ne renfermant que bien rarement des 
fossiles. Ceux-ci les classent dans les terrains crétacés et à Nummulites. 
Les Aspra-Vouna sont entièrement formés par ces calcaires. 

Le plateau de l’Akroteri est composé à la base de marnes, et supérieu- 
rement de calcaires grossiers blanchâtres, quelquefois assez durs, ils 
renferment des bancs de poudingue au voisinage des calcaires anciens, 
et appartiennent à la partie supérieure des terrains tertiaires. Le sol, 
formé par les marnes, est assez fertile et cultivé, mais.les calcaires, 
tant secondaires que tertiaires, donnent un terrain extrêmement aride qui 
ne peut être livré à la culture que dans les parties planes ou déprimées, 
là où se sont rassemblées des terres argileuses rouges. Sur queiques 
points, comme à Khalepa, les jardins sont entourés d’'Opuntia, dont les 


fruits mürissent en juillet. 


La végétation des plaines et des plateaux, dont laltitude ne dépasse 
Tome XXII. 12 


( 150 ) 

guëre 900 à 600, présente une très-grande uniformilé, à l'exception 
de celle du terrain talqueux qui possède une certaine fraîcheur, et que 
j'ai toujours aperçue avec une vive satisfaction; celle des autres parties 
a déjà au commencement de mai, un aspect desséché et brülé. Et com- 
ment en serait-il autrement dans un pays où les plantes buissonneuses 
sont presque toutes épineuses et à feuilles étroites, et où l'olivier est 
presque le seul arbre un peu répandu ; lui, dont l’étroitesse des feuilles 
ne procure que peu d’ombrage ? La seule compensation que l’on rencontre 
est dans l’odeur, souvent agréable, exhalée par la plupart des plantes. 
Aussi, la Crète, comme les autres parties de la Grèce, sans doute, peut- 
elle être considérée comme un pays d’épines et de senteur. L’abondance 
des plantes épineuses est telle, que partout les habitants portent des 
bottes qui leur montent jusqu'aux genoux, ce qui n’aurait certainement 
pas lieu dans un climat aussi chaud sans cette circonstance. Dans les 
jardins de Mourniès, le plus beau village des environs, comme dans 
ceux des autres, abondent les orangers , les grenadiers et les figuiers. 

A la ville, les chiers sont aussi nombreux que dans celles des autres 
pays turcs; les moustiques et les puces abondent dans la saison chaude. 
Les insectes ne sont pas très-nombreux dans la campagne, à l’excep- 
tion d’une grosse cigale qui fait grand bruit dans les oliviers ; de beaux 
lézards verts abondent dans les jardins, et dans les haies, les couleuvres 
ne sont pas rares. 

Partout les constructions publiques et privées des villes, et surtout 
des campagnes, sont relativement très-grossières. On emploie le plus 
souvent des pierres non taillées , de nature variée suivant les localités, 
assemblées avec de la terre, recouvertes d’un crépi et blanchies exté- 
rieurement. Les fenêtres sont seulement munies de grillages er bois, et 
de persiennes ou de volets extérieurs , et j'ai vu plus tard qu'il en est de 
même dans les montagnes, où le froid se fait sentir assez vivement en 
hiver; les vitres ne sont guère en usage que chez les Européens et quel- 
ques riches Musulmans des villes (1). Dans celles-ci, toutes les maisons 
sont pourvues de lafrines; mais dans les villages, les Musulmans seuls 
en possèdent. Les Chrétiens laissent à leurs nombreux cochons 
(ghourouni) le soin de nettoyer les cours et les ruelles, ce dont ces 
friands animaux s’acquittent parfois avec une prestesse incommode, si 


(1) Voir, comme intérieur d'habitations : au village, M. Pashley, Travels in Crele, 
t. I, p. 506, à Rhethymnon, Sicher, Reise nach der Inseln Kreta, pl. IV. 


l'on n’est armé d’un bâton; celle circonstance ne coritribue peut-être pas 
peu à augmenter la sainte horreur des Musulmans pour leur chair et leur 
graisse. 

Les églises grecques sont orientées de l'E. à l’O., et de fréquentes 
couches de badigeon les entretiennent dans un état de blancheur irré- 
prochable; aussi les aperçoit-on de fort loin. À leur intérieur, il n‘y a 
pas de figures en relief, mais seulement des peintures ordinairement 
très-grossières et sur bois. Quant aux mosquées, elles doivent être orien- 
tées de telle sorte que l’iman soit dirigé vers La Mecque en faisant la 
prière; dans celles qui sont des transformations d’églises chrétiennes, 
l'espèce de niche où il se place n'est pas placée symétriquement. Les 
Chrétiens qui ont commis de grands péchés ou des crimes, croient 
acquérir le pardon du ciel en faisant bâtir des chapelles; quant aux 
Musulmans, c’est en élevant des mosquées, des khans et des fontaines. 

Les cimetières turcs, qui se reconnaissent de loin aux cyprès pyra- 
midaux dont ils sont remplis; sont dépourvus de murailles ; aussi, dans 
ceux qui sont situés aux portes des villes, les pierres funéraires, cou- 
vertes d'inscriptions turques et surmontées d’un turban, sont assez sou- 
vent renversées. Ceux des Grecs, par opposition, sont complètement 
dépourvus d'arbres; les pierres, souvent sans inscriptions, n’y sont 
guère en meilleur état. Ceux des Juifs ne sont que des pelouses où les 
pierres, à inscriptions hébraïques, sont posées à plat sur le sol. 

Le 27 mai était un jour de réjouissance annuelle pour les esclaves 
noirs; ils étaient accourus en grand nombre des différentes parties de 
l'île sur la plage, à l'O. de la ville, avant l'embouchure du Kladiso, 
non loin du cimetière juif ; des marchands s’y étaient transportés avec 
force provisions et boissons rafraîchissantes , et avaient dressé quelques 
tentes. Les Noirs, vêtus de leurs plus beaux habits, et ruisselants de 
sueur et de poussière, se livraienf à des danses très-agilées et fort 
bruyantes, de trois sortes : les hommes, munis de bâtons, forment un 
grand cercle et dansent en frappant ceux-ci l’un contre l’autre en se 
retournant, tandis que l’un d’eux, placé au centre, dirige en battant du 
tambour; les hommes et les femmes exécutent une sorte de chassé à 
huit, accompagné de gestes assez peu pudiques; enfin, des femmes for- 
ment en battant des mains, un cercle au milieu duquel dansent un 
homme et une femme. 

Ces danses africaines sont fort différentes de celle des Chrétiens grecs 
qui a lieu au son d’une espèce de petite guitare, dans les fêtes des villages 


( 152:) 

et des monastères ; ele est ainsi décrite par Sonnini (4) : « La romeca, 
danse mêlée de chants, que les Grecs actuels ont reçue de leurs ancêtres , 
a de la simplicité et de la noblesse; on y trouve une tournure sérieuse 
et grave, trop éloignée de la gaîté que l’on s’attend à rencontrer dans les 
branles champêtres. Les chants n’ont pas plus de vivacité ; ils sont lerts 
et langoureux ; et l’habitude que les Grecs ont de chanter du nez, rend 
encore leurs chansons plus trainantes et moins gaies; leur ton nazillard 
est fort déplaisant. » 

Voyage en Sphakia avec M. Hitier, 12-17 mai. — Depuis quelque 
temps, M. Hitier désirait visiter, tant les petites extractions de pierre 
du Levant à aiguiser, qui se trouvent sur le versant méridional des Aspra- 
Vouna, que les gites de lignite de Preveli, sur la côte méridionale, au 
S. de Rhethymnon; nous décidimes d’y aller faire, pendant une se- 
maine, une excursion qui serait pour moi une leçon pratique sur la 
manière de voyager dans le pays. Le lundi, à six heures du matin, 
M. Hitier et un officier du pacha, dont la mission apparente était de Jui 
servir de garde-d’honneur, étaient tous deux sur des mulets avec des 
provisions ; moi à pied, en naturaliste qui veut faire des observations, et 
Testa, un Smyrniote, qui devait être mon guide par la suite. Nous quit- 
tâmes Khania en nous dirigeant vers Soudha.-Nous passèmes ensuite le 
petit col qui conduit dans le bassin ondulé tertiaire de l’Apokorona que 
nous suivimes dans toute sa longueur jusqu’à Prosnero, élevé d’environ 
300; au village, nous vimes la tour d’Alidhaki, démantelée par les 
Chrétiens après son abandon (2), et au-dessus, nous entrâmes dans les 
calcaires gris ou noirs, plus ou moins grenus, que nous ne devions plus 
quitter jusqu’à notre retour sur ce point. Après la petite plaine circulaire 
de Krapi, renfermant de larges puits ou citernes découvertes, nous 
atteignimes l’entrée du vallon ou gorge à fond très-incliné, par laquelle 
seulement on peut pénétrer de ce côté chez les Sphakiotes. Après avoir 
gravi une pente pierreuse au milieu d’yeuses et d’érables formant un bois 
peu épais, nous arrivämes à un nouveau cirque; et, montant encore, 
nous finimes par atteindre le sommet du chemin, d’où l’on a une belle 
vue sur une assez grande plaine circulaire entourée de hautes monta- 
gnes et inclinée au S. On est à environ 800 d'altitude, et une des- 
cente d'une demi-heure amène à Askypho, groupe de sept villages; 


(1) Voyage en Grèce et en Turquie, t. 1, p. 399. 
{2) Voir M. Pashley, Travels in Crele, t. I, p. 159. 


(153) 

quoique à une altitude peu inférienre à 100", le sol y est assez bien 
cultivé et produit de bon vin. Par suite des neiges qui tombent en abon- 
dance sur les montagnes et qui séjournent dans la plaine pendant plu- 
sieurs semaines, une partie des habitants descend dans les plaines de 
VE. ou à la côte, pendant l'hiver, de novembre à mars , avec les trou- 
peaux qui trouvent alors une abondance suffisante de nourriture (1). Il 
en est de même pour d’autres villages situés sur les plateaux de Sphakia; 
les habitants ont plus bas des maisons d'hiver, en partie groupées en 
villages, dans lesquels ils passent à la fin de l’automne; ainsi : 


Kalikrati. . . . Patsiano. | Dhramia. 

de Askypho. . . .: Ê 

{ Anomikiana. | Sphakia. 
Asphento. . . . j s 

| Kolokasia. Anopolis. . . . Loutro. 
NIDIOS MERE CC ANTrASK A: 


Nous étions attendus chez un riche habitant, Hadji-Rouso, qui mariait 
-sa fille ce même soir. Nous prîmes place à sa table, au milieu d’une 
douzaine d'hommes criant et chantant à tue-tête, de cette voix nasillarde 
avec laquelle j'avais fait connaissance à Syra. Je me crus au milieu de 
ces Crétois, dont Belon disait, il y a trois siècles (2) : « Tous estiment 
chose odieuse mettre de l’eau dedans leur vin; et encor, pour l'heure 
présente, boyuent d'autant l’vn à l’autre, et principalement ceux de 
Crète. Mais les Grecs boyuent souuent et à petits traicts de forte maluai- 
sie. Les tables des Grecs sont ordinairement moult basses, et ont cous- 
tume de boire à la rengette, ne perdans point l’ordre; et si quelqu’vn 
demandoit du vin hors son reng, il seroit réputé inciuil. Et celui qui est 
le plus pront à donner à boire, tient le pot au vin, versant à toute la 
troupe. La coustume est de boire auec vn petit voirre sans pied, et boire 
tout ce qui aura esté versé dedans, n’y laissant pas vne seule goute de 
vin. Et pour ce qu'ils boyuent le fort vin à petits traicts, et que cela les 
altère ; ils ont tousiours la cruche à l’eau auprès d’eux, et boyuent à 
mesmes, de grands traicts d’eau pour se désaltérer : autrement leur soif 
ne seroit pas estanchée. Les femmes n’assistent point à leurs banquets, 
etne sont présentes quand ils boyuent et mangent en compagnie ». Hadji- 
Rouso, prenant son verre, le remplit de vin, en but une partie et offrit 


(t) Voir M. Pashley, Travels in Crete, t. II, p. 188. 
(2) Les Observations de plusieurs singularités, p. 6. 


( 154 ) 

ce qui restait à M. Hitier. Le consul de France connaissait l'honneur 
qu'on voulait lui faire; il savait aussi qu’il est d’usage en Crète, que le 
maitre de la maison goûte le premier le liquide qu’il offre, afin de 
prouver à ses hôtes qu'ils n’ont pas à redouter le poison; il se hâta 
d’avaler le reste du vin. Mon tour vint; je vis ce que je devais faire 
aussi, el je bus, non sans que mes cheveux se dressassent un tant soit 
peu sur ma tête; car jamais peut-être je n'avais porté la main sur un 
verre aussi maculé de graisse et d’autres saletés. Il n’y a véritablement, 
en certaines choses, que le premier pas qui coûte; je n’ai plus jamas 
éprouvé de dégoût bien grand dans les plus misérables auberges où je 
me suis quelquefois vu forcé de séjourner dans mes courses géologiques. 
La maison était pleine de gens venus à la noce; on étendit des nattes et 
quelques vieux tapis et couvertures dans un cellier humide, au milieu 
de pièces de bois et d'objets de toute sorte; nous nous roulâmes dedans, 
et, la fatigue aidant, nous dormîmes assez bien. Nous étions sur le 
revers méridional des Aspra-Vouna , entièrement formé, comme le flanc 
septentrional, par les calcaires secondaires crétacés. 

Le lendemain matin, nous passions au milieu de bois d’yeuses et de 
cyprès horizontal, où la végétation était en retard d’une quinzaine de 
jours sur Khania; le chemin pierreux, des plus détestables, suit la pente 
fort accidentée des montagnes , au N. de Mouri, en traversant tantôt des 
collines et tantôt des vallons, dans l’un desquels se trouve une fontaine 
qui marquait 11° 3. Nous avions sur la droite les sommités neigeuses 
et les pentes sans végétation des hauts Aspra-Vouna; derrière nous, 
le Psiloriti, la plaine et la chaîne côtière de Messara; sur la gauche, 
des dépressions nous laissaient entrevoir la mer de Libye, et les deux iles 
de Gaudhos; çà et là, il y avait des parties planes, tantôt abandonnées 
aux bestiaux et tantôt en céréales. À midi, au milieu de bois très-clairs 
d’yeuses, de cyprès et de pins d'Alep, nous descendimes à la plaine 
d’Anopolis que nous apercevions depuis quelque temps et qui renferme 
plusieurs villages, situés à environ 600" d’allitude, et désignés sous 
ce nom collectif; elle est généralement épierrée et cullivée soigneu- 
sement, et la végétation y paraissait plus avancée qu'à Khania; la 
partie centrale est très-fertile en orge, avec blé et quelques ‘vignes, 
müriers et figuiers; elle renferme un assez beau village dont les habitants 
nous firent voir la cloche avec orgueil; car c’est chose fort rare et même 
un signe de grande liberté en Crète. Au ‘bord S.-E. de la plaine est le 
hameau de Rhiza, au pied d’une coHine, où se trouvent des ruines 


( 155 ) 
cyclopéennes (1) et d’où l'on a une vue magnifique sur la côte et, au- 
dessous de soi presque perpendiculairement, sur la plage et le village 
de Loutro. 

Après le diner nous remontâmes un peu, et en une heure nous 
arrivames au bord du Pharangha ou grand ravin qui prend naissance 
dans les hautes montagnes, et qui nous séparait d’Aradhena. Ce ravin, 
d'environ 100% de profondeur, longe le bord occidental de la plaine 
d’Anopolis, et atteint la mer à l'O. de Loutro; ses pentes sont très-rapides 
souvent même verticales , et le chemin pour le traverser fait une mulli- 
tude de zig-zags. Le fond, sur lequel coule un torrent pendant la saison 
des pluies, est couvert de pierres roulées souvent énormes. Dans la 
descente , le pied d’un des mulets s’engagea dans une fente de rocher, et 
ce ne fut pas sans peine que je parvins à le dégager avec mon marteau de 
géologue dont l'utilité fut alors bien comprise de l’officier du pacha. À 
six heures du soir nous parvinmes à Aradhena où nous nous arrêtâmes 
pour la nuit. Le sol arable, meilleur, mais moins étendu qu’à Anopolis, 
produit plus de blé que d'orge. Le temps avait été très-beau depuis notre 
départ ; mais vers quatre heures, un brouillard épais avait enveloppé les 
montagnes qui nous dominaient ; dans la soirée 1l tomba un peu de pluie 
qui eut pour résultat principal de rafraîchir agréabiement l’atmosphère. 

En sortant, nous traversämes un bois de pins, et en moins d’une 
heure nous arrivämes au bord du plateau, élevé de 650% au-dessus de 
la mer, d’où l’on a, jusqu’au cap Trividhi, une belle vue sur la côte 
. occidentale ; celle-ci est formée d’escarpements au pied desquels sont des 
talus d’éboulement plus où moins longs, de 200 à 300 de hauteur, 
qui présentent des yeuses et surtout des pins, jusqu’au bord de la mer. 
Vue du haut, cette dernière, qui est profonde, paraît d’un bleu foncé 
jusqu’à une petite distance de la côte où elle passe assez brusquement au 
vert glauque et enfin au blanchätre, sur la plage, par suite du mélange 
des parties terreuses tenues en suspension. Par la descente appelée 
Sloudha , d’abord extrêmement rapide, nous alteignimes enfin la petite 
chapelle de Haghios-Paulos ; il y a une grosse source très-froide qui 
forme habituellement un courant rapide, mais les vagues qui venaient 
déferler sur la plage nous empêchèrent de la trouver. Au-delà, les escar- 
pements se rapprochent et les talus d’éboulement cessent; jusqu'à une 
hauteur de 20v il y a des amas de sable formant plage inclinée et 


(1) M. Pashley, Travels in Crele, t. I], p. 255. 


( 156 ) 

renfermant des bancs de poudingue récent; en longeant la mer, je vis 
aussi des rochers qui portaient des trous de coquilles perforantes et des 
serpules, jusqu'à 3® au-dessus du niveau actuel, fait qui fournissait 
des témoignages irrécusables d’un récent exhaussement de la côte. A 
moitié chemin, il y a un grand vallon dont le fond est assez élevé au-dessus 
de la mer et qui pourrait bien être sec malgré le petit torrent qui sillonne” 
le talus sableux. | 

A l’entrée du grand vallon de Haghia-Roumeli, il y a un delta en saillie 
dans la mer, lequel fait suite à une petite plaine entourée latéralement par 
des coteaux escarpés, et limitée au fond par les pentes des hautes mon- 
tagnes, ainsi que le montre la belle planche de M. Pashley (1); le fond est 
recouvert, sur beaucoup de points, par des brèches calcaires très-dures 
quoique de formation contemporaine ; ur torrent, rapide dans la saison 
des pluies , n’était pas très-fort et marquait 16° 5. Le village est le seul 
où les Musulmans n’aient pas pénétré dans la dernière guerre; mais 
quelques maisons en ruines attestent qu'il n’en a pas été de même en 
1710 ; ainsi , dit M. Pashley, la plus grande partie d’un siècle ne suffit pas, 
sous la domination ottomane pour réparer la destruction causée par un 
mois de guerre ! Nous nous arrêtâmes au village qui est au fond de la 
plaine et dont les jardins renfermaient une grande quantité d’oliviers 
et de grenadiers. Plus haut, le vallon est formé d’une série de cirques à 
parois verticales, au moins d’un côté, de 400 à 500" de hauteur; ils 
sont réunis par des couloirs à parois également presque verticales, 
de 3à 4" de largeur seulement dans le fond, et de 40 à 15" dans le 
haut; les pentes présentent des pins, et dans le fond il y a d’assez 
grands platanes , et sur plusieurs points, des ruines de moulins. L’un des 
couloirs situé à une demi-heure au-dessus de Haghia-Roumeli est appelé 
Tzé-Portais (les Portes) ; il est si étroit qu’on ne peut passer que dans 
l’eau du torrent comme le montre la belle lithographie de M. Pashley (2). 
La source dite Kephalovrysis, est située au milieu d’un bouquet de pla- 
tanes , après une nouvelle heure de marche ; le thermomètre y desceñdit 
à 1920 8. Jusqu’au-dessus de Samaria, le lit à sec renferme de gros blocs 
et de profondes excavations dans les brèches récentes ; les parois calcaires 
des couloirs sont usées et polies jusqu’à 10 de hauteur, ce qui indi- 
que assez que les eaux sont très-fortes pendant les orages et les fontes 


(4) Travels in Crete, t. II, p. 267. 
(2) Travels in Crete, t. W, p. 264. 


(151) 
de neige. Samaria est dans un grand élargissement dont les pentes pré- 
sentent beaucoup de pins et de cyprès, et dont le fond, occupé par les 
brèches, est profondément raviné; malgré sa faible altitude, d'environ 
360, mais en raison de son entourage de hautes montagnes, l'olivier 
n’y est pas cultivé et il n’y a que de chétifs orangers. 
Le lendemain matin, M. Hitier ne se sentit pas de force à passer cinq 
heures à pied, sur les pentes rapides des montagnes, pour aller voir les 
trous où l’on tire quelquefois de la pierre à aiguiser ; à quatre heures du 
matin, je partis donc seul avec Testa et une sorte de forgeron, notre 
hôte , qui nous servit de guide dans cette partie des montagnes , où cer- 
tainement jamais œil scientifique n’avait porté ses regards. Après être 
monté, par un sentier très-escarpé., sur le flanc droit de la vallée, au 
S.-0. de Samaria, je redescendis dans un vallon, et j’arrivai sur les 
petites extractions ; la roche siliceuse qui est blanchâtre, à grains très- 
fins, forme plusieurs lits de 10 à 15 centimètres d'épaisseur dans des 
calcaires gris inclinés de 80° au S. 15° E. À neuf heures, j'étais de 
relour avec une provision suffisante d'échantillons de la pierre dite 
akoniès. Lorsque je fus suffisamment reposé, nous reprimes tous 
ensemble le même chemin par Haghia-Roumeli et Haghios-Paulos où 
nous arrivâmes à cinq heures du soir, non sans accident; car, en sautant 
de pierre en pierre dans les profonds et étroits couloirs, j'étais tombé et 
je m'étais foulé assez fortement le genou gauche. 

Pour aller à Preveli, nous continuâmes à passer au pied on sur la pente 
des talus d'éboulement qui sont à la base des grands escarpements ver- 
ticaux, et, à six heures, nous doublâmes la pointe Plako de laquelle j’a- 
perçus échelonnés derrière nous les caps Trividhi, Phlomi et de Selino- 
Kasteli. À sept heures et demie nous traversämes fort difficilement, au 
milieu des quartiers de rochers et des ravinements du sol, le débouché 
du grand pharangha d’Aradhena; ce fut seulement à neuf heures du soir, 
après une marche fort pénible et souvent incertaine, au clair de la lune, 


[2 4 


que nous parvinmes à Loutro , composé de quelques cabanes sur la plage, 
vis-à-vis, et à une grande distance de Sphakia. De Haghia-Roumeli l’of- 
cier avait été expédié en avant; aussi trouvàmes-nous un chevreau rôti 
et de l’eau saumâtre toute tirée, pour le repas dont nous avions le plus 
grand besoin. Nous nous couchâmes ensuite sur le sol de la cabane, 
enveloppés dans nos couvertures, et je dormis profondément jusqu’au 
lendemain matin. | 


À mon-réveil, mes premiers regards furent pour les pentes qui tombent 


(158) 


si abruptement dans la mer au-dessous de Mouri et d’Anopolis, pentes qui 
s'étendent depuis le port de Sphakia jusqu’à celui où nous étions, et dont 
la partie au-dessus de nos têtes a été si bien reproduite par M. Pashley (1). 
M. Hitier ne se souciant plus de pousser jusqu’à Preveli, je pris la tem- 
pérature de la source voisine de la mer, qui nous avait abreuvé la veille 
et qui était de 19 8, puis nous montâmes, par un sentier très-difficile, 
la pente souvent escarpée à pic, qui aboutit à Rhiza dont nous apercevions 
l’église blanchie de la Panaghia presqu’au-dessus de nos têtes. Au village 
on loua un âne, sur lequel je montai alternativement avee Testa qui se 
trouvait très-fatigué, et reprenant, à mon grand regret, le chemin: pré- 
cédemment suivi, nous vinmes coucher à Askypho; le lendemain 
samedi 17 mai, nous arrivämes à Khalepa dans la maison de M. Caporal, 
où l’on avait transporté, en notre absence, le mobilier de M. Hitier, 
ainsi que mon bagage. | 

Excursion au cap Meleka avec M. Gaspary, 80 mui-1° juin. — Pour 
achever de me familiariser avec les usages de la Crète et la. manière d’y 
voyager, nous résolûmes , M. Gaspary et moi, d’aller nous installer au 
monastère de Haghia-Triadha, pour de là visiter les montagnes et leurs 
grottes. Le 30 mai, trois heures et demie furent employées à monter sur 
le plateau tertiaire de Khalepa, puis à descendre , sans apercevoir d’ha- 
bitations, son plan doucement incliné, tantôt inculte, tantôt couvert d’o- 
liviers; après avoir traversé Je vallon de Kounoupidiana, nous arriyâmes à 
sept heures du soir et nous fûmes parfaitement accueillis par les kalogheri, 
qui reçoivent de fréquentes visites des habitants de Khania etparfois même 
du pacha. Le monastère, situé à 80" d'altitude, est entouré d’oliviers, 
de vignes et de champs, et on y arrive par une longue avenue de cyprès. 
Une belle cour en carré long, formée par une haute muraille, les cellules 
des religieux et les celliers à huile et à vin, renferme de beaux müriers ; 
au milieu d'eux s’élève l’église, commencée en 1631, et encore inache- 
vée par suile de la conquête turque; elle est en croix latine et ornée par 
devant de colonnes doriques et d'inscriptions (2) ; à l’angle oriental de la 
cour est le cimetière et une petite chapelle (3). En 1700 , et immédiate- 
ment avant la révolution grecque, il y avait cinquante pères, dont dix 
dans les environs, et treize diacres ; en 1834, il y avait seulement dix 


(1) Travels in Crele, t. Il, frontispice. 
(2) Sonnini, Voyage en Grèce el en Turquie, t. 1, p. 358. 
(5) M. Pasbley, Travels in Crele ,t.1, p. 19. 


(4599) 

pères, par suite de la dépopulation générale. « Nous les regardions (les 
papas et les caloyers), dit Tournefort (1), comme descendant en ligne droite 
de ces sages Curètes qui renfermoient dans leur tête toute la science de leur 
temps; ceux-ci pourtant sont de francs ignorans qui sçavent un peu 
mieux se mettre à leur aise que leurs voisins ; aussi possèdent:ils Le plus 
beau et le meilleur bien de l’isle. S'il y a un bon fond, une plaine fertile, 
de beaux Oliviers , des Vignes bien cultivées ; il ne faut pas demander à 
qui elles appartiennent, on trouve bientôt le monastère; s’il n’y a pas 
de monastère, le Papas ne loge pas loin de là. Toutes les belles fermes 
dépendent des couvents ; c’est peut-être ce qui a ruiné le pays, car les 
moines ne sont guère propres à soutenir un État. Il est vrai que ces 
moines Grecs sont de bonnes gens; ils ne s'occupent qu’à labourer la 
terre, et ne se mêlent pas de médecine : ces religieux font très-maigre 
chère; le gibier du pays serait inutile, s’il ne s’y trouvoit d’autres per- 
sonnes pour en faire usage. » 

Le lendemain , dès quatre heures, nous partions avec un frère servant 
«pour guide; et, après avoir suivi le pied des montagnes de calcaire 
secondaire, nous montâmes par une gorge rapide jusque sur le sommet, 
élevé de 320, où chaque soir les gardes-côtes allument un peu de 
bois pour prouver qu’ils sont à leur poste. Nous traversâmes ensuite un 
plateau rocheux et accidenté ; puis, descendant un profond ravin, nous 
renconträmes une première grotte tapissée de stalactites. Plus bas, on 
descend par un escalier de 135 marches au petit monastère de Katholiko, 
abandonné aux chauve-souris par suite des dévastations des pirates; il est 
d’une fraicheur et d’une conservation telles, à l’exception des boiseries, 
qu’on le croirait inhabité de la veille. Au devant, un pont d’une seule 
arche, élevé de 15", traverse le ravin. Un peu au-dessus d’une 
petite chapelle souterraine se trouve l’entrée de la grande grotte, dont 
nous parlerons plus tard, et qui est malheureüsement si fréquentée que les 
stalactites, d’un assez beau blanc, sont presque partout ternies et colo- 
rées en gris par la poussière et la fumée (2); de petites flaques d’eau 
intérieures accusaient 18°. 

« L’on ne peut imaginer de solitude plus parfaite, dit Sonnini (3), et 
en même lemps plus sauvage sans être hideuse, que celle où est situé 


1) Voyage au Levant, t. I, p. 88. 
2) M. Pashley, Travels in Crele, t. 1, p. 26. 
) Voyage en Grèce et en Turquie, t. 1, p. 385. 


(160 ) 


le petit couvent de Saint-Jean. Environné de monts perpendiculaires et 
hérissés de rochers nus, dont la triste et aride uniformité est interrompue 
par le feuillage de quelques arbrisseaux penchés sur leur surface, 
l’homme qui l’habite est dérobé à tout l'univers; les énormes rideaux 
qui semblent l’envelopper, ne lui laissent que la vue du ciel...; œil, en 
suivant le torrent ou le précipice qui règne entre les deux montagnes, 
découvre la mer comme par échappée, et cette vue fait diversion à des 
rêveries et à des occupations silencieuses. Mais, il faut l'avouer, la reli- 
gion ou la philosophie peuvent seules trouver des charmes dans un ré- 
duit âpre et solitaire, qui isole l’homme des autres hommes, et ne lui 
laisse de relation qu’avec la divinité et avec lui-même ». M. Pashley a 
compris toute la sauvage magnificence de ce site; car il en a donné une 
charmante lithographie (1). 

En remontant, nous fimes une station à une nouvelle grotte dite 
d’Arkoudhia ou de l’Ours, beaucoup plus largement ouverte que les pré- 
cédentes et au centre de laquelle se trouve une grosse stalagmite ressem- 
blant plus ou moins grossièrement à un ours assis; derrière se trouve, 
un bassin élevé rempli d’une eau pure à la température de 160. La grotte 
sert de remise à une habitation construite à l’entrée et occupée par un 
kaloghero chargé de la culture de cette partie du domaine. En conti- 
nuant à monter, nous arrivâmes au monastère de Haghios-Joannes ou 
Gouverneto, moins considérable et plus riche que celui de Haghia- 
Triadha , et dont l’église est inachevée pour la même cause; il est situé 
sur l’arête culminante, à l'extrémité N. d’une petite plaine circulaire, 
élevée d'environ 250 et entourée d'assez hautes sommités;, on y 
a cependant une belle vue au N. dans les montagnes, et au S. sur la 
plaine de l’Akroteri. Le monastère, également inachevé, fut abandonné, 
ainsi que les précédents, par les Vénitiens à la conquête turque, et 
occupé plus tard par les Grèes. Nous y fûmes parfaitement accueillis; et, 
après le diner, nous redescendimes en une heure au bord de la plaine 
et à Haghia-Triadha. La presqu’ile d’Akroteri renferme aussi un couvent 
de femmes que je ne vis pas et dont a parlé Savary. 

Le lendemain , nous quittâmes le monastère à quatre heures du matin; 
et, tournant à gauche en franchissant le seuil de la porte, nous allâmes 
par Khoridaki escalader le Skloka, cime orientale et la plus élevée du 
chaînon du cap Meleka, qui atteint environ 550%; nous y jouimes 


(1) Travels in Crele, t J, p. 27. 


(6 FO) 

d'une vue admirable sur l'Akroteri, et la plaine de Khania, la baie de 
Soudha, le cap Dhrapano, et beaucoup d’autres parties plus éloignées de 
l'île. De Rhizosko, qui est au pied, nous revinmes à Khalepa par la partie 
haute du plateau de l’Akroteri, non loin des pentes qui bordent la baie 
de Soudha et qui sont à plus de 200» d'altitude; nous passèmes par les 
villages de Sternes, Gharaghaso, Aroni, Pithari et Korakes. À ce dernier, 
on domine tout le plateau et on est séparé de Vothona par un vallon. 

Le lendemain matin, je me sentais frais et dispos ; le changement de 
climat n'avait aucune influence sur moi; j'étais tout prêt à entreprendre 
de nouvelles excursions. Il n’en fut pas de même pour M. Gaspary, quoi- 
qu'il eût parcouru à cheval le pays entre Khania et Haghia-Triadha; 
pendant plusieurs semaines ; il fut tellement fatigué et affaibli par sa 
course dans les montagnes, qu'il se promit bien de ne plus m’accom- 
pagner. 

Préparatifs de voyage. — Sans remonter aux auteurs antiques , par- 
fois peu favorables aux Crétois, tous les voyageurs en Grète se sont 
plaints des habitants de toute condition, presque tous les ont considérés 
avec Theuet, du milieu du XVIe siècle, comme vrognes sans eau et 
voleurs au-delà du possible. Tournefort lui-même, en 1700, crut devoir 
dire : Polybe asseure que de tous les hommes , il n’y avait que les Crélois 
qui ne trouvassent aucun.guin sordide. J'ai moi-même entendu des 
négociants Francs dire que maintenant, dans leurs relations avec eux, 
les habitants se rangent en trois catégories sous le rapport de la probité : 
d’abord les Musulmans, puis les Chrétiens, et enfin les papas et autres 
religieux : les moins ignorants étant là comme ailleurs les moins probes 
De grands changements cependant se sont opérés ; car M. Fabreguettes 
disait, en 1834 (1) : « Maintenant, on va tout aussi sûrement dans tous 
les coins des montagnes de Sphakia, d’Abadhia, de Setia, que dans les 
rues des forteresses. On voyage sans armes avec un seul domestique ou 
guide ; et partout, dans le khan le plus isolé, comme dans le meilleur 
monastère, on trouve une hospitalité aussi franche que désintéressée ». 
Quant à moi, pendant les sept mois et demi que j'ai passés dans l’île, 
j'ai visité toutes ses parties, même les plus sauvages et les moins fré- 
quentées , sans savoir la langue, et quelquefois seul, comme en Sphakia, 
avec de simples lettres de recommandation du pacha et de l’archevêque; 
il ne m'est jamais rien survenu de fàcheux. 


(4) Bulletin de la Société de Géographie, t. II, 1835, p.127. 


( 102 ) 

Chaque partie de l'ile peut ètre parcourue facilement à pied; rien 
n’est impraticable avec les habitants, qui ont partout des sentiers par 
lesquels eux et leurs troupeaux s’élèvent jusque sur les plus hautes 
sommités. Sur les grands chemins, les voyageurs ont pour auberges des 
bâtiments dits khan, dans lesquels ils ne trouvent pour eux et leurs mon- 
tures que des anneaux, des planchers, de l’eau et du café; quant aux 
aliments, à la paille et à l’avoine pour les mulets, si l’on n’a ayec soi des 
provisions , il faut aller à leur recherche dans les villages voisins. Par- 
- tout ailleurs, on va loger chez les habitants de l’une ou de l’autre reli- 
gion. Parfois, en arrivant dans un village, j’ai eu quelque peine à trouver 
un gîte, plutôt encore par crainte ou défiance que par mauvais vouloir. 
Dans ce pays pauvre, si longtemps opprimé, le désintéressement est 
rare et l’amour du gain commun; malgré ce qu'a cru observer le consul 
de France que je viens de citer, les habitants sont d’autant plus hospi- 
taliers que Chrétiens, et surtout papas et kalogheri, ils espèrent un 
meilleur cadeau : celui-ci, pour les derniers, est fait soi-disant pour 
l'église, dhia eklisia. Plusieurs fois, il m'est arrivé de laisser mécon- 
tents, à mon départ, des Chrétiens et surtout leurs femmes, ou bien 
encore des papas et des kalogheri, auxquels je n’avais donné que le 
double de la dépense que je leur avais occasionnée; mais n’en serait-il 
pas souvent de même en France, s’il n’y avait pas d’auberges et si l’on 
allait loger chez les villageois ? Ce que je me plais à proclamer, c’est 
que je n’ai à faire à aucun Crétois le reproche d’avoir manqué de probité 
à mon égard. La police sévère des Arnaoutes est pour beaucoup dans 
cette modification des mœurs; mais certainement une bonne part est due 
au régime égyptien, qui a rehaussé le moral des Chrétiens en suppri- 
mant les vexations de toutes sortes auxquels ils avaient été en butte 
jusqu’à lui. 

Pour un étranger qui ne connaît pas le grec moderne, il y a en Crète 
deux manières de voyager ; en grand seigneur, comme dans l’excursion 
de M. Hitier en Sphakia, avec un drogman, et quelques serviteurs et 
bètes de somme, pour porter les choses utiles à l’installation de chaque 
soir et renouveler les provisions, tant pour soi que pour les hôtes chez 
lesquels on s’arrête; ou bien, en modeste naturaliste, avec un serviteur- 
interprète et une ou deux bêtes pour le bagage indispensable. Si j'avais 
adopté le premier mode, Manias; qui avait accompagné M. Pashley, 
onze ans auparavant, dans toutes les parties de l'ile, m'aurait été fort 
utile; mais il m'aurait fallu un drogman, parce que le capitaine sphakiote 


- 
| 
| 


( 102 
ne connaissait pas l'italien, avec lequel, à la rigueur, je pouvais me 
tirer d'affaire. La faible capacité de la bourse que le Muséum m'avait 
confiée ne me permettait pas de prendre ce parti, sans un sacrifice 
notable de mes deniers auquel j'étais peu disposé. 

Mes goûts simples et mon habitude, extrêmement peu anglaise, de 
préférer à tout autre chose en voyage l’imprévu de la fortune du pot, 
me sollicitaient à voyager modestement; mon choix ne pouvait donc être 
douteux un seul instant. Si parfois quelques limaçons, comme au riche 
couvent de Gonia, ou bien un peu de lait ou de fromage chez de pauvres 
villageois, ont fait, avec du biscuit d’orge non tamisée, tous les frais de 
mon diner, et quelquefois rien du tout ceux du déjeûner (car il n’est pas 
d'usage de demander à emporter des provisions en quittant ses hôtes), 
je n'ai pas eu généralement à regretter le parti que j'avais pris; ce qui 
m'a salisfait par-dessus tout, c’est que ma santé n’a eu nullement à 
souffrir de ces excès de sobriété. 

Je pris pour interprète-serviteur Testa, homme à tous crins, presque 
effrayant à voir, mais délicat, paresseux et poltron, qui m’accompagna 
pendant tout le mois de juin et une partie de juillet dans la partie occi- 
dentale de l’île; j’achetai un mulet, ce qui était plus économique que de 
le louer. Puis, mettant sur le dos de ce dernier des couffes avec les 
objets nécessaires à mes récoltes scientifiques, et de plus du riz, du 
pain, du beurre, du sucre et quelques morceaux de saucisson, et par 
dessus une marmite de fer et une grosse couverture piquée pour me 
servir de lit, je partis pour une première excursion de trois jours. — 
En fait d'instruments , j'avais avec moi un petit octant avec son niveau à 
mercure, une boussole susceptible d'être montée sur un pied, un baro- 
mètre et des thermomètres. J'avais eu soin d'installer quelques jours 
auparavant, chez M. Gaspary, un second baromètre et un thermomètre, 
dont les indications, notées trois, fois par jour, devaient m'être d’une 
grande utilité pour la détermination des altitudes. 

Excursion à l’Almyron et au cap Dhrapano, 8-5 juin. — Je repris le 
chemin de Sphakia; en sortant de la ville on s’avance dans la plaine, 
qui présente des champs, des vignes, des prés et de beaux oliviers. 
L'ancienne route vénitienne n’est plus qu'une fondrière dans la partie 
marécageuse, insalubre et traversée de nombreux ruisseaux, qui se trouve 
au fond de la baie de Soudha et au bas de la montagne si connue de 
* Malaxa ou « Bérécynthe, puisqu'on n’oubliera jamais, dit Tournefort (1), 


(4) Tournefort, Voyage au Levant, t. 1, p. 82. 


( 164) 

le nom d’une montagne où les Dactyles Idéens trouvèrent l'usage du feu, 
du fer et du cuivre. » Après avoir dépassé Touzla, ou les salines, on 
côtoie la baie qui est abritée des vents principaux par le plateau de 
l’Akroteri, qui est au N., et celui de Malaxa , au S.; on passe près de 
trois des six tours bâties sur les deux côtés de la baie par les Turcs en 
1659 , tant pour battre le fort et empêcher les approvisionnements, que 
pour s’opposer au débarquement des Vénitiens pendant le siége de 
Candia. 

« Le golfe de la Sude, vaste port naturel, l’un dés plus beaux et des 
plus sûrs de l’Archipel, dit Olivier (1), se trouve au S. de la presqu'île 
du cap Melek. Sa bouche est à l’E., et son fond se dirige à l’O.-N.-0. ; 
il est non-seulement abrité par les angles et les caps que forment les 
terres, mais encore par les deux îlots de la Sude, sur l’un desquels est 
situé le fort que les Vénitiens avaient fait construire et qu’ils ont con- 
servé longtemps après que l’île ne leur appartenait plus. » « Il défend, dit 
Sonnini (2), ce port important que la nature a creusé, et qui est un des plus 
beaux et un des plus spacieux de la Méditerranée ; la flotte la plus nom- 
breuse peut y être rassemblée. Les vaisseaux peuvent jeter l’ancre sous 
la forteresse , mais ils n’y sont pas fort en sûreté; au lieu qu’en s’en- 
fonçant jusqu'à la côte qui termine la baie, et que l’on nomme la Culate, 
ils sont parfaitement à l’abri. Ce port a néanmoins l’inconvénient de ne 
présenter de mouillage qu’à la Culate même ; il n’y a point de fond dans 
le reste de sa longueur, de sorte que souvent l’on y est retenu longtemps, 
dans l’attente d’un vent favorable pour en sortir. 

« Le mouillage le plus fréquenté par les navires qui ne veulent que se 
mettre à l'abri d’un coup de vent, reprend Olivier, est au S.-S.-0. du 
cap Melek, derrière une petite île, connue par les marins sous le nom 
‘de Vieille Sude. Les gros vaisseaux de guerre mouillent dans tous les 
points, soit à l’entrée du golfe, soit à côté de l’île dont nous venons de 
parler. Les uns et les autres ne vont au fond du golfe que lorsqu'ils doi- 
vent rester longtemps au mouillage. Les bateaux du pays viennent sou- 
vent jeter l’ancre entre les deux îles de la Sude. » 

Celle qui porte la forteresse de Soudha, bâtie en 4229, s’élève de 15 
à 48 mètres environ au-dessus de la mer et ne possède que des citernes. 
Randolph (3) dit qu’en 1665, pendant un siége, il s’éleva du fond de la 


(1) Voyage dans l'Empire Olhoman, t. 1, p. 381. 
(2) Voyage en Grèce et en Turquie, t. 1, p. 394. 
(5) The present stale of. Archipelago, p. 95. 


( 165 ) 
mer un roc avec une fontaine suflisante pour alimenter la garnison ; il 
affirme , en 1687, avoir bu de son eau qui n’était pas fort agréable. La 
baie avait été à diverses reprises, surtout dans le XV[: siècle, un repaire 
de pirates ; la citadelle, tant qu’elle appartint aux Vénitiens, fut un lieu 
de refuge pour les malfaiteurs ou réfugiés grecs, parfois au nombre de 
400, qui fuyaient la justice ou la cruauté des Musulmans. 

Par un chemin exécrable , d’où la vue plane sur la baie, ainsi que le 
représentent les figures de Coronelli et de M. Pashley (1), on monte 
au col.élevé de 110", qu'il faut passer pour entrer dans l’Apokorona ; il 
est dans des calcaires tertiaires jaunâtres semblables à ceux de Malte, et 
au-dessus se trouvent sur un plateau, encore plus haut de 400", des 
ruines dites Palæokastron (ou vieux château), comme presque toutes 
celles de la Crète; ce sont, à ce qu’il paraît bien celles de l’anti- 
que Aptera, décrites par Olivier sous le nom d’Amphimale, et dont 
M. Pashley a publié des figures (2). Après être descendu, j’arrivai aux 
sources froides de Stylo , déjà signalées par Buondelmonti, en 1422; en 


_ hiver, elles donnent naissance à un gros courant rapide qui avait déjà 


beaucoup diminué; je m'arrêtai assez longtemps pour y pêcher des 
mollusques et recueillir des plantes et des insectes, ainsi que dans les 
deux ruisseaux qui en découlent et qui, formant une île intérieure, vont 
se jeter dans la mer, de chaque côté de la colline au pied de laquelle 
est Kalyves. 

L’Apokorona est une plaine élevée et accidentée qui s'étend du golfe 
de Soudha et du plateau du cap Dhrapano aux Aspra-Vouna, dans le fond 
de la sinuosité où se trouve le passage d’Askypho. Dans la partie centrale, 
les calcaires alternent avec des marnes qui renferment en abondance 
l'Ostrea navicularis ; à Prosnero , j’en avais trouvé précédemment d’au- 
tres espèces plus grandes. Je remontai devant Neo-Khorio et je redescendis 
coucher à Babali-Khan, non loin de Païdho-Khori et de Nero-Khori ; le 
lendemain matin, peu après mon départ, je quittài le chemin de Sphakia 
pour descendre à gauche le largè vallon du Boutaka que l’on traverse sur 
un antique pont hellène au milieu des yébles et des Pteris. Le vallon se 
resserre beaucoup, un peu avant un fort en ruines à quatre bastions, 
bâti par les Vénitiens pour empêcher les incursions des pirates ; un peu 
au-dessous se trouve la grande source saumâtre ou Almyron, qui sort d’un 


(1) Zsolario, p. 208-9, et Travels in Cre.e, t. 1, p. 28. 
(2) Travels in Crete, 1. 1, p. 36, 38, 61, et t. Il, p. !. 
Toue XII. 13 


( 166 ) 

rocher de calcaire secondaire ; les eaux qui étaient à la température de 
15°, renferment des néritines et de petites paludines , et forment un cou- 
rant qui se déverse dans le Boutaka avant d’atteindre la mer, et qui faisait 
tourner des moulins dans le XVIe siècle; du fond s’élèvent continuelle- 
ment des bulles gazeuses , qui en crevant produisent un bruit qui s'entend 
quelquefois de loin. De là, je montai à Xopolis, principalement dans les 
marnes tertiaires ; en suivant droit au N. le plateau de calcaire secondaire 
de Kephala, qui est à l’altitude de 350 et présente sur beaucoup de 

oints des cultures et des oliviers; je passai entre des cavités sans issue 
de 10 à 15" de profondeur dont le fond est cultivé avec soin; après 
avoir retrouvé le terrain tertiaire qui remplit une dépression, j'arrivai 
enfin à Kokkino-Khorio où je fus bien reçu par les cultivateurs chrétiens. 
Le lendemain , de grand matin, je gravis la montagne isolée, allongée 
de l'E. à l'O., dont le plateau tout rocheux est cultivé sur un grand 
nombre de points. La végétation naturelle, malgré son altitude de 
plus de 500", y est la même que plus bas; c’est le Quercus cretica qui 
forme presque tous les buissons. On y jouit d’une belle vue analogue 
à celle que l’on a du cap Meleka. Je descendis vers l’O. et j'atteignis à 
Kabia le calcaire tertiaire, puis enfin la côte, près de l’ancien château 
d’Apicorona où était l’un des antiques ports Kisamus. En longeant la 
plage sableuse , j’arrivai au gros village de Kalyves adossé à une colline 
blanche tertiaire, entre les deux branches du ruisseau de Stylo. De là, 
suivant la pente escarpée du bas plateau, je rejoignis la plaine de Sou- 
dha , où les myrtes commençaient à fleurir, et j’arrivai à Khalepa avant 
la nuit. | 


20 VOYAGES DANS LES EPARKHIES DE SELINO ET DE KISAMOS. 


Voyage à Epanokhorio et dans la partie méridionale de Selino, 8-18 juin. 
— Je partis enfin pour commencer sérieusement mon exploration de 
Vîle par les eparkhies de Selino et de Kisamos qui forment la partie la 
plus occidentale, Suivant la plage et la plaine basse, sableuse et caillou- 
(euse, je passai à l'extrémité de la longue arète rocheuse de calcaire 
secondaire gris qui porte Platania à son extrémité ; dans son prolonge- 
ment se trouve l’ilot rocheux, blanchâtre de Haghios-Theodhoros, sans 
aucune source, où les Vénitiens avaient établi des fortifications pour la 
défense du golfe et d’un mouillage situé à l’E., assez bon pour les grands 
bâtiments, mais qui n’est plus guère fréquenté maintenant ; lors de la 
conquête par les Tures, le commandant Giuliani se fit sauter avec le fort 


(167) 

plutôt que de se rendre. Le ruisseau de Platania, limpide et peu profond, 
coule assez fortement pendant toute l’année , et en le remontant on ren- 
contre de frais ombrages de gros platanes de 25 mètres de hauteur, parfois 
entrelacés de vignes, dont les troncs ont quelquefois 15 centimètres de 
diamètre; ces bois ont été l’objet de descriptions bien exagérées de la part 
de Savary surtout, et d’autres voyageurs ; les raisins y mürissent deux 
mois plus tard, et alimentent les tables de Khania jusqu’à la fin de 
décembre. Plus loin, je passai le Tavroniti bordé d’Agnus-castus, qui est 
un torrent furieux pendant trois mois de l’année; il était à sec, à l’excep- 
tion des parties déprimées de son lit qui renfermaient des flaques d’eau. 
Après avoir traversé le vallon de Spelæa rempli d’oliviers, je montai au 
village où les marnes tertiaires occasionnent des sources abondantes, et 
je logeai dans des dépendances de l’église, après toutefois avoir exhibé 
les lettres dont j'étais porteur. La défiance des habitants calmée, je fus 
bien accueilli; on me fournit un plancher pour étendre ma couverture, 
et je pus m’apercevoir que les Crétois ont l'habitude de conserver pen- 
dant toute la nuit une lampe allumée dans la pièce où ils couchent ; 
peut-être chez les Chrétiens est-ce une conséquence de la crainte qu’ils 
avaient autrefois d’être surpris par les Musulmans pendant leur sommeil. 

Le lendemain, de grand matin, j’allai au-dessus du village sur la 
colline formée par les calcaires gris, qui atteignent environ 230", et 
dans laquelle il y a, dit-on, une caverne ou spelé, assez vaste pour 
contenir quatre mille personnes. J’y eus une assez belle vue sur la haute 
crète du cap Spadha, fort escarpée vers l’O., sur le pays de Kisamos, 
incliné au N., et sur les montagnes du cap Grabousa, séparées par une 
large dépression, du cône de l’Haghios-Elias ; derrière moi se trouvaient 
les plateaux qui vont se rattacher aux montagnes de Sphakia et à l’Apo- 
pigbari; celui qui sépare le vallon de celui du Tavroniti présente à sa 
surface un dépôt diluvien rouge, renfermant une grande quantité de 
cailloux et de blocs métriques primitifs descéndus des basses montagnes ; 
aussi, voit-on de suite apparaître la végétation des bruyères si différente 
de celle des roches calcaires. À Voukoniès, où il y a une mosquée, la 
vallée est assez large et cultivée, et j’y vis les premiers châtaigniers ; les 
hauteurs sont occupées par des bois de chênes un peu clair-semés. En 
remontant le lit du torrent je trouvai, en amont du terrain tertiaire mar- 
neux , un endroit où un éboulement du terrain talqueux désagrégé, à 
pentes seulement de 8°, avait occasionné depuis sept ou huit ans un petit 
lac ; les troncs des oliviers qui avaient été frappés de mort y étaient encore 


(168) 
debout. Après avoir rencontré des agaves, à peu près sauvages, à l’alti- 
tude de 300%, j'atteignis Roumata où je fus parfaitement reçu par un 
riche propriétaire, M. Renieri. Il y avait pour maître d’école un Céri- 
gotte qui parlait français; il avait servi à l'ambassade de France à 
Constantinople, et avait été deux fois en France. 

10 juin. — Roumata, ainsi que je le vis bien en montant au N.-E., 
est dans un grand cirque dont le fond et même les pentes talqueuses 
sont occupées par des oliviers et des champs d’orge et d'avoine qui 
s'élèvent jusque sur les sommets, à 800 d’altitude. Aux châtaigniers 
se joignent quelques orangers, et sur les pentes il y a des chênes ordi- 
naires et le chêne Velani; j’aperçus, sur le flanc occidental, une petite car- 
rière de gypse blanc sans apparence de roches calcaires dans le voisinage. 
À trois heures, je partis en m’élevant sur une crète qui naît de l’Apopi- 
gbari et partage le cirque en deux parties; au haut, près d’une petite 
source à 13° 5’, je traversai le col qui conduit dans le cirque de Sevronas, 
et je continuai à m’élever sur le flanc de la montagne pour passer dans 


le vallon de Haghia-frini. Je comptais arriver à ce village, mais la nuit 


me surprit dans la descente, et comme le chemin était à peine tracé, il 
me fallut forcément m'arrêter. Comme j'avais quelques vivres et du foin, 
je pris très-vite mon parti de ce prétendu contretemps; le mulet fut 
déchargé et attaché à un buisson. J’avalai quelques aliments , et étendant 
mon tapis au pied d'un jeune platane, je m’y enroulai et dormis du 
plus profond sommeil jusqu’au lendemain matin, tout heureux d’échap- 
per à la voracité habituelle des puces, si fréquentes en été même dans 
les villes. | 

11 juin. — Quant à Testa, modèle de poltronnerie, quoique étendu 
à côté de moi il ne put fermer l’œil qu’à l’aube du jour, pendant que 
j'allais examiner les talschistes de l’Apopighari , et prendre son alti- 
tude que je trouvai de près de 4,400. Les neiges, m’a-t-on assuré, 
n'y restent que pendant les'trois mois d'hiver. À son sommet, comme 
sur presque tous les points culminants de l’île , il y a une petite cabane 
ou chapelle en pierres sèches décorée du nom pompeux de monastiri, 
lequel occasionne parfois des déceptions au voyageur qui s’attend à trouver 
quelque monastère avec de plus ou moins nombreux kalogheri. De là, on 
plane sur toute la partie occidentale de l’île , et sur la mer au N., à l'O. et 
au $.; la partie centrale, moins élevée, est limitée dans ces deux dernières 
directions, par des parties élevées; au S.-E., les Aspra-Vouna se pré- 
sentent comme une véritable muraille verticale; à V'E., Khania se dessi- 


(,169 ) 

nait assez bien par-dessus les plateaux de Laki et de Keramia. Je redes- 
cendis ensuite dans le grand cirque à fond cultivé, assez uni, terminé 
au S. par un large vallon contenant les maisons disséminées de Haghia- 
frini ; je vis pour la première fois des caroubiers qui étaient mêlés aux 
oliviers et à quelques châtaigniers ; là, comme au village suivant, le seigle 
est exceptionnellement la principale culture. Le vallon présente ici 
une particularité fort remarquable : étant barré par un col de 60m 
environ , il se continue par une crevasse profonde de 1,200 à 1,500" 
et à parois presque verticales, qui sépare l'extrémité occidentale des 
Aspra-Vouna du reste de la chaîne, et qui s'ouvre plus bas au vallon qui 
a pris naissance de l’autre côté du col. Après avoir franchi celui-ci, 
j'arrivai assez vile à Epanokhorio qui était le séjour d’un chef duquel 
relevaient tous les Arnaoutes de cette partie de l’île : j’allai loger chez 
une famille de papas dont le chef avait quatre-vingts ans, ce qui ne me 
parut pas un grand âge, car je venais de quitter à Haghia-frini un 
papas médicastre qui était assez bien portant, et auquel la commune 

renommée attribuait vingt-cinq ans de plus. 
12 Juin. — Je descendis le grand vallon qui fait la limite entre les 
talschistes et les calcaires gris, d’abord sur le flanc, et, à partir de 
Moné, dans le lit du torrent à sec qui descend par la crevasse de Haghia- 
Irini, entre Kroustogherako et Livadha, perchés sur de hauts plateaux, 
et cependant dévastés par les troupes de Moustapha. Avant d'atteindre la 
mer à Souia, la partie basse du fond du vallon est garnie de poudingues 
modernes, comme à Haghia-Roumeli, et il y a des traces de ruines. 
Près de la mer, sur le flanc occidental, les calcaires gris ou noirs 
renferment un grand amas gypseux sans stratification, offrant des arra- 
chements d’un beau blanc sur au moins 500% de longueur. Tous les 
rochers qui entourent la rade présentent des corrosions marines jusqu’à 
_5 mètres au-dessus du niveau de la mer; quelques trous plus grands 
renfermaient même des débris de coquilles perforantes. De retour à une 
source à 19°, qui est au bas de Moné, je montai au village où il y a des 
esclaves noirs de Benghazi; puis, suivant la pente des montagnes dont 
la vue est donnée par M. Pashley (1), j’arrivai à Rhodhovani, l’antique 
Elyros, qui est dans une espèce de cirque, à la partie supérieure du 
grand vallon; sur le flanc méridional, au-dessus de Kamalia , il y a, sur 
une longueur de 2 à 3 kilomètres, d'immenses arrachements blancs dans 


(1) Travels in Crete, t. 11, p. 106, 108. 


( 170 ) 
les gypses. Je fus parfaitement accueilli par le kapetania Kondhadha ; et 
comme ses fils avaient été étudier à Athènes et connaissaient les usages 
européens, on me fit la gracieuseté d'un matelas et de draps, toutes 
choses dont j'avais déjà commencé à perdre l'habitude. 

Le lendemain, je quittai, à midi, Rhodhovani, dont les maisons supé- 
rieures sont à près de 990" d’altitude, et laissai dans un vallon au 
N.-0. Temenia et les ruines de Hyrtakina (1). Après avoir longuement 
contourné les parois du cirque, j'arrivai au col qu'il faut traverser; 
près de lui se trouve un sommet qui a environ 950" d'altitude et duquel 
j'aperçus les deux îles Gaudhos et l’extrémité des Aspra-Vouna , qui se 
termine à la mer d’une manière fort abrupte. Je redescendis‘par Platania 
et Asphedhilias, devant le plateau de Prodormi, au bas duquel se trouve 
une petite plaine inclinée et peu largement ouverte à la mer, à la- 
quelle il est presque impossible d'arriver à cheval et qui renferme les 
ruines de Lissos.Après avoir tourné la montagne, j’arrivai à la profonde 
vallée d’Azohirès, sur l’un des flancs escarpés de laquelle il faut faire 
un énorme tour pour la traverser et atteindre le village qui n’est pas très- 
élevé au-dessus du fond. Les chemins sont affreux et tellement difficiles 
que, parfois, je dus, pendant que Testa tenait le mulet par la bride, le 
retenir par la queue pour l'empêcher de rouler dans les précipices ; 
l'animal, assez rétif ordinairement, devait avoir conscience du danger, 
car il se prêtait d’assez bonne grâce à une manœuvre certainement toute 
nouvelle pour lui. Je fus reçu par le soubachi ou régisseur des propriétés 
de la veuve d’un riche et cruel agha, mis à mort quatre ou cinq années 
auparavant par ordre de Moustapha-Pacha. 

14 juin. — Après avoir recueilli des échantillons de micocoulier en 
fruits, j'allai, en contournant la montagne, à Spaniako , où le derviche 
de la mosquée m’installa dans la salle d’école, qui était véritablement 
fort belle et fort propre. Dans la journée, je fis une excursion à l’embou- 
chure du Vlithias, dans lequel abondent les melanopsides, et je visitai la 
petite presqu’ile de Selino-Kasteli; cette petite ville fortifiée, bâtie en 
1280 et saccagée en 1435, ne présente plus que des ruines, séjour de 
plusieurs Arnaoutes, et quelques habitations de cultivateurs ; des barques 
de Khania apportent cependant à un magasin des provisions de blé pour 
la consommation des habitants de l’eparkhie. Une basse langue sableuse 
réunit un îlot formé inférieurement de calcaires rougeâtres avec lits de 


es e RE 


1) Travels in Crele, 1. IN, p. 114. 


(ET) 
silex jaspoïde de même couleur et de phyllade vert-grisätre appartenant 
à la base des calcaires secondaires; au-dessus, et jusqu’à 20" d’élé- 
vation , il y a des calcaires grossiers très-récents. 

15 et 16 juin. — Je traversai les vallons du Vlithias et de Sarakena, 
en laissant au S. les ruines de Kalamyde , visitées par M. Pashley (1), et 
je me rendis à Pelekano , au milieu de bois de myrtes de quatre à cinq 
mètres de hauteur, les plus beaux que j'aie vus dans l’île. Pour étudier 
les environs, je passai çhez un riche Crétois deux jours, pendant les- 
quels je pus prendre une idée de l’hospitalité musulmane. Les étrangers 
ne sont point admis dans la maison proprement dite; près de la porte de 
l’enclos se trouve un pavillon séparé à leur usage. Je fus installé au 
premier étage, dans une pièce garnie de nattes et de peaux de moutons, 
sur lesquelles, en plaçant ma couverture, j’eus un lit passable. Chaque 
soir, à mon arrivée, Vilal-Agha venait me tenir compagnie; et, par l’in- 
termédiaire de Testa, nous causions de choses et d’autres d'Occident, 
en attendant le souper. Lorsque celui-ci était prêt, un esclave noir 
apportait un tapis et une petite table ronde de 0" 70 de diamètre et 
haute seulement de 0" 20, sur laquelle il plaçait un plateau presque 
aussi large, renfermant une pyramide de pilav, ou riz cuit avec de petits 
morceaux de mouton; il y avait, en outre, à portée, une corbeille de 
pain, une cruche en terre remplie d’eau et une écuelle d’étain. Nous 
nous asseyions à la turque, jambes croisées, autour de la table, et, 
armés de cuillères de bois, chacun faisait sa brèche au plat. Ordinaire- 
ment en Crète, au départ du voyageur, les serviteurs se tiennent prêts à 
recevoir une gratification d’une valeur en général analogue à celle de la 
consommation ; Vilal-Agha voulut que son hospitalité fût complète, et au 
départ , il parut seul pour me faire ses adieux. Il n’avait qu’une femme, 
et celle-ci était curieuse de voir un étranger qui arrivait de loin, pour 
la satisfaire, son mari me mena faire un tour de promenade au jardin, 
de façon à ce que placée derrière une persienne , à une fenêtre du 
premier étage, elle pouvait me regarder à son aise et sans être aperçue. 

Le lendemain, je passai au-dessus de la mosquée, près d’une petite 
fontaine qui renferme beaucoup de mélanopsides, quoique située à 500 
mètres d'altitude, et ne donnant aucun filet d’eau se rendant à un des 
ruisseaux de l’île. Les talschistes forment toujours tout le pays, à l’ex- 
ception du sommet de la montagne, qui est de calcaire gris et qui atteint 


(1) Travels in Crete, 1. II, p. 125. 


( 172) 

750%; de là, on peut bien juger de la structure et de la composition du 
sol jusqu’au cap Krio. Un sommet, situé au-dessus de Sklavopoula 
est par contre entièrement talqueux, quoique son altitude dépasse 
1000%. Au col situé entre les deux, et qui est abaissé à la moitié 
de cette hauteur, passe le chemin conduisant à Elaphonisi, qui paraît 
une petite presqu’ile très-basse, à trois pointes, semblable à celle de 
Selino-Kasteli (1). J'avais eu très-chaud en montant depuis le village ; une 
heure de séjour au sommet, exposé à un fort vent de N.-E., en faisant 
mon relevé à la boussole et à l’octant, me refroidit profondément, et, 
sans mon gilet de flanelle, j'aurais bien pu prendre une fluxion de poi- 
trine; j'en fus quitte pour un accès de fièvre qui dura une bonne partie 
de la nuit, mais qui ne m’empêcha cependant pas de me remettre en 
route le lendemain. | 
17 et 18 juin. — Les hauts vallons talqueux de Sarakena contiennent 
beaucoup de petites sources ferrugineuses dues aux pyrites que renfer- 
ment des espèces de phyllades noirs; ils sont couverts d’arbousiers avec 
quelques châtaigniers. À partir du premier ruisseau qu'on rencontre, 
après être descendu dans la plaine de Kadano, on ne voit plus que des 
sables quarizeux et talqueux, quelquefois durcis, en couches horizon- 
tales, dépendant sans doute des derniers temps de la période tertiaire. 
Cette plaine, de plus d’un quart de myriamètre carré, est sillonnée par 
des wallons d'autant plus profonds, qu’on se rapproche davantage de 
l'extrémité S.-0. par où s'échappe le Vlithias, et près de laquelle se 
trouvent Vlithias, le monticule et les montagnes représentées par M. 
Pashley, ainsi que les différentes ruines figurées aussi près de ce village 
et de Khadros (2). J’arrivai tard à Kadano, et j’eus assez de peine à me 
caser pour la nuit; car les habitations sont fort disséminées, et le chef- 
lieu consiste seulement en une mosquée, deux cafés et quelques mai- 
sons. Le maître d’un des cafés fut pourtant trouvé; et, après deux heures 
d'attente, je pus avoir un peu de biscuit noir et une terrine de lait; c'était 
peu pour restaurer un fiévreux de la veille ; mais il fallut bien s’en con- 
tenter. À mon réveil, je trouvai les notables de l'endroit assemblés 


(1) M. Pashley, Travels in Crele,t. I, pages 76 à 81, décrit la partie N.-0. 
d'Ennea-Khoria , dont les principaux villages sont Kamposelorakho et Kounoné, et la 
côte, jusqu’à l’Haghios-Elias. Il cite, à quelques minutes au S. du premier village, 
une cascade de 7 mètres, et, à dix minutes du second, une autre de 20 mètres, 
alimentée par un petit ruisseau. 

(2) Travels in Crete , 1. IL, pages 126, 490, 115. 


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(173 ) 

devant la mosquée. On voulait me consulter sur une question fort grave, 
celle de savoir si le bâtiment était vraiment orienté de façon à ce que 
l’iman et les fidèles eussent le visage tourné vers La Mecque en faisant la 
prière. Je tirai ma boussole; et comme il était allongé de l’O.-N.-0. à 
V'E.-S.-E., je n’hésitai pas à dire que la direction était excellente, ce 
qui fit grand plaisir. C’est dans cette plaine que s'étaient réunis et 
que furent attaqués la plupart des Musulmans pendant l’émancipation 
hellène. Ici, comme dans beaucoup d’autres endroits, il y a des müriers 
et on élève des vers à soie; en partant, je vis les familles réunies dans 
les champs et occupées à mettre les cocons en état d’être dévidés. À 
Kouphalatos, je quittai la plaine pour monter sur le terrain talqueux 
fort accidenté et dans lequel il y a, plus fréquemment que partout ailleurs, 
de petits strates calcaires ; il est découpé par de grands vallons dans 
lesquels les sources sont fréquentes. Par Skaphi et Ergasteri, j'arrivai 
enfin chez les papas d'Epanokhorio, vers deux heures.— Dans la partie de 
Selino que je venais de parcourir, les châtaigniers sont rares et les 
caroubiers peu fréquents; les bruyères et les Pteris cretica contribuent, 
avec les plantes ordinaires, à couvrir les pentes des montagnes; le genêt 
d'Espagne est assez commun.— Dans la soirée, j'allai faire visite au chef 
Arnaoute, et j'achetai d’un de ses hommes un bouquetin femelle que 
j'envoyai à Khalepa le lendemain , en même temps que Testa, qui allait 
porter mes récoltes scientifiques et chercher quelques provisions. C’est 
le même individu qui fut envoyé un peu plus tard par M. Hitier au 
Muséum de Paris, et qui y vécut plusieurs années. 

Ascension du Volakia, 19 ef 20 juin. — Ayant résolu d'employer 
ainsi les deux jours que Testa devait mettre à son voyage, je partis à 
trois heures avec le papas pour aller coucher dans la plaine d’Omalos. 
De Haghia-Irini, nous gravimes la pente accidentée des montagnes de 
Sphakia, formée par les calcaires gris , puis nous nous engageâmes dans 
un haut et profond vallon de 4 kilomètres de longueur, par lequel nous 
montèmes d’abord, pour redescendre ensuite doucement pendant le der- 
. nier tiers; car, Omalos est un petit bassin sans issue dont le fond a 
environ un quart de myriamètre carré de superficie; les eaux surabon- ” 
- dantes se perdent dans une sorte de gouffre pierreux, situé sur le bord 
septeritrional. Nous nous dirigeämes vers le bord S.-0., où se trouvent 
un grand nombre de petites maisons, ou plutôt de celliers soigneusement 
fermés, à l’usage des habitants lorsqu'ils viennent y faire paître leurs 
bestiaux ou cultiver les céréales qui en font l'unique richesse. A cette 


(174 ) 


élévation de 1,100%, la neige, me dit le papas, persiste pendant les trois 
mois d'hiver, et atteint une épaisseur moyenne de 2 mètres; aussi 
la végétation est-elle. beaucoup plus tardive; tandis que les récoltes 
étaient déjà en partie faites dans tout le pays que je venais de parcourir, 
il s’en fallait de plus d’un mois que les céréales fussent arrivées à leur 
maturité. Les cyprès, les yeuses et des érables à feuilles à moitié avortées, 
forment les arbres très clair-semés de la partie méridionale de la plaine; 
quant à la végétation sous-frutescente , elle est à peu près la même que 
celle des bas plateaux de Khania ; dans une des mares, j’eus le plaisir 
de récolter une plante que j'avais ramassée quinze ans auparavant dans 
l'étang de Trappes, près de Paris, l’Elatine Alsinastrum. La partie 
orientale dépend de Laki et de Samaria. Nous nous installâmes dans la 
baraque du papas , et après avoir soupé nous nous endormimes, 

A deux heures et demie, le lendemain matin, nous gravissions déjà 
la crête d’un des contreforts de l’Aghatopi, dont les principaux végétaux 
sont le cyprès, les Berberis cretica, Juniperus Oxycedrus, Astragalus 
echinoides, Acantholimon androsaceum, Salvia spinosa, Galium olym- 
picum, etc. ; puis, par un long talus d’éboulement, nous arrivämes au 
col élevé qui conduit à Trypeté, l'antique Pækilassos, et qui sépare cette 
sommilé de l’énorme masse du Volakia, presque entièrement ceinte d’es- 
carpements verticaux. Dans la partie inférieure de cette pente, à environ 
1,500 d'altitude, une source abondante marquait 5° ; c’est probable- 
ment celle que Sieber désigne sous le nom d’Hellinoseli, et à laquelle, 
un 27 juin, il trouva la température de T° 5, celle de l’air étant de 20e. 
Vis-à-vis, sur le flanc du Volakia, il y avait de grandes excavations rem- 
plies de neige; celle-ci s’y conserve habituellement jusqu’en septembre. 
Embarrassé comme je l’étais de mon baromètre, de la boîte à botanique 
et de quelques échantillons de roches que j'avais déjà recueillis, ce ne 
fut qu'avec assez de peine que je parvins à une première sommilé, 
à laquelle je trouvai 2,000" d'altitude : elle est formée, comme la 
masse des Aspra-Vouna, par des calcaires noirâtres , présentant çà et là 
quelques lits de silex à aiguiser. Le Volakia proprement dit, plus élevé 
d’une centaine de mètres environ, était séparé par un col assez bas, que 
le temps ne me permit pas de franchir, ce que je ne regrettai pas trop, . 
l'atmosphère brumeuse me dérobant une partie de la magnifique vue dont 
on doit jouir de celte haute sommité, la première dont je faisais l’ascen- 
sion ; en effet, j’apercevais mal la montagne de Sklavopoula, et je distin- 
guais à peine Grabousa, Gonia et Haghios-Theodhoros. Du point où j'étais, 


(475) 

l’Aghalopi, aussi élevé, masquait complètement tout le pays dans la 
direction du cap Krio. Mais plus près de moi était la plaine d’Omalos, que 
je dominais complètement , ainsi que la partie supérieure de la vallée de 
Samaria , qui est si profonde et si escarpée ; derrière celle-ci, il y avait 
la grosse masse montagneuse plus élevée du Triamati, Nous descendimes 
par les mêmes pentes; et, après avoir pris un peu de repos dans la cabane 
d'Omalos , nous regagnämes Haghia-frini, et, enfin, Epanokhorio, où 
nous arrivämes vers six heures. 

Pendant mon séjour chez les papas, et-en attendant Testa qui s’était 
égaré, je pus me faire une idée de la nourriture des paysans crétois en 
cette saison : au biscuit d'orge cuit ordinairement pour un mois, aux 
œufs, au lait et au fromage, s’ajoutent des plats de toutes sortes d'herbes 
cuites dans l'huile, et des espèces de petites tartes (kalizounias) au fro- 
mage frais, cuites dans des feuilles de vigne et aromatisées avec les 
feuilles du Salvia calycina, qui leur donnent une très-grande acreté. Les 
jours de fête on mange du mouton rôti ou bouilli et, pendant les carêmes, 
de la morue sèche, presque toujours de la plus mauvaise qualité, le 
rebut, en un mot, des marchés de l'Occident. À l’inverse des autres 
habitants de la Turquie , le paysan crétois boit très-peu, même lorsqu'il 
voyage pendant la chaleur du jour ; aussi mon passage était-il toujours 
remarqué dans les villages, où Testa allait de porte en porte jusqu’à ce 
qu'il eût trouvé une écuelle ou un verre d’eau; celle-ci est souvent 
fraîche; car les mauvaises cruches dont on fait usage laissent suinter 
l’eau presque à la manière des Alcarazas , et sont fermées seulement par 
un bouquet de Poterium spinosum , toujours humide. 

Voyage à Ennea-Khoria et Kisamos ; 29-25 juin. —Je pris congé des 
papas et, repassant par Haghia-Irini, je remontai sur les quartzites 
talqueux au col de l’Apopighari, élevé de plus de 1,200", Je des- 
cendis à Spina, parfois dans le lit de ruisseaux ombragés par de beaux 
platanes; puis en cheminant, au midi de la haute crête qui limite le cir- 
que de Roumata, sur un sol peu accidenté où les roches talqueuses sont 
profondément décomposées , j'arrivai à Phloria; les châtaigniers y sont 
beaucoup plus nombreux qu’à Spina , les bruyères et les arbousiers cou- 
vrent le sol, et le seigle est l’une des principales cultures. Là, je me 
trouvai en face d’un cultivateur musulman, Soliman-Agha, qui ne se 
souciait pas de mon voisinage pour la nuit; cependant, lorsqu'il me vit 
installé sous un arbre devant sa porte, il m’envoya d'assez bonne grâce 
du pain, du lait et des fruits, c’est-à-dire à peu près de tout ce qu’il y 
avait dans sa maison. 


( 176 ) 

Le lendemain, je laissai sur la droite Hydris, qui est au milieu des 
châtaigniers , et le vallon profond qui donne issue au Nopiano-Potamos 
et par lequel j’aperçus au loin le monastère de Gonia dans l’angle du 
golfe de Khania. Je me disposais à passer le col qui conduit dans les 
vallées d’Ennea-Khoria , lorsqu'il prit fantaisie au mulet porteur de mes 
bagages, de se sauver en reprenant heureusement le même chemin. Nous 
nous mîmes à sa poursuite mais en vain, tant il allait vite; Testa seul 
continua et ne parvint à le rattrapper qu’à Phloria. Jusque-là, il nous 
avait précédé ou suivi la bride sur le cou ; pour éviter pareille escapade, 
qui m'avait fait perdre quatre heures, le licou fit rigoureusement son 
office jusqu’à la fin de mes voyages. Après le col, je descendis à Strovoliès 
et après l’église j’arrivai dans une petite plaine qui renferme au moins 
trois villages et dans laquelle les châtaigniers sont nombreux et magnifi- 
ques. Les hommes n’étaient pas encore rentrés des travaux des champs, 
et les femmes ne voulaient pas me recevoir espérant me décider ainsi à 
quitter de suite la vallée; mais comme je tenais à visiter le lendemain 
les sommités voisines, je ne pris pas garde à ces dispositions. Lorsqu'on 
me vit bien décidé à rester et installé dans un jardiù au pied d’un arbre, 
on se ravisa et on me fit offrir des aliments et même un gîte au retour 
des hommes; je refusai le tout avec hauteur, et je passai à la belle 
étoile une nuit aussi excellente que celle de la veille. Testa n’avait plus 
peur, car de jour il portait à sa ceinture l’un des deux grands pistolets 
que lui avait prêtés M. Hitier , et de nuit il les plaçait sous lui en guise 
de lit de plumes. 

Le 24, de grand matin, au travers des bruyères et des arbousiers, je 
parvins à l’Haghios-Dhikios-Korphi (pointe Saint-Just), la plus haute 
cime de cette partie, toujours formée par les quartzites talcifères ; 
malgré son élévation de plus de 1,200, les neiges n’y persistent guère 
qu’une dizaine de jours en raison du voisinage de la mer. Du sommet 
on à une vue magnifique et fort étendue tout autour de soi; d’abord 
sur toute la partie de Selino que j'avais déjà parcourue et les deux 
Gaudhos par derrière , puis sur le Volakia et le Triamati, le sommet du 
cap Dhrapano , l’Akroteri du cap Meleka , tout le flanc occidental du cap 
Spadha qui est très-escarpé surtout vers son extrémité. D’un sommet qui 
est un peu à l’O. la vue plane sur les vallons qui descendent à Elaphonisi 
où un bâtiment de commerce français avait échoué quelques années 
auparavant , el qui offrent, près de la mer, de grandes taches blanches 
gypseuses. Au N. un peu O., j'aperçus la petite île éscarpée rougeâtre de 
Petalidha, et plus loin Sæghilia (Cerigotto), Tserigo, et enfin un peu plus 


(: AP) 

au N. les côtes de la Morée. De là, je descendis au col d'Elaphonisi, élevé 
d'environ 600" au-dessus du niveau de la mer, où se trouve un cirque 
d’effondrement de 200" de diamètre et de 50 de profondeur; le fond plat, 
d’une égale largeur, est occupé par un petit lac dans la saison pluvieuse; 
les bords sont de hauteur inégale et à l’O. il y a une partie échancrée assez 
basse. Je m’élevai sur un sommet arrondi situé au N. et presque aussi haut 
que le Haghios-Dhikios, mais à pentes beaucoup plus douces et moins cou- 
vert de végétation. Le terrain talqueux y présente exceptionnellement des 
veines de limonite brune concrétionnée ; le même minéral, peu fréquent 
partout ailleurs , forme là de nombreux blocs superficiels. Dans l’après- 
midi je partis par le flanc opposé et beaucoup moins accidenté du val 
d'Ennea-Khoria ; près d’une maison où il y avait un beau Pinus Pinea, 
je vis un second cratère d’effondrement plus petit et dont le fond est 
un lac permanent. À Rhogdhia, situé à 600% d'altitude, où je n’arré- 
tai, il y a encore une grande quantité de châtaigniers. Une source y 
marquait 13° 8. 

Le 25, je suivis d’abord le fond de la vallée sur un sol peu ondulé, 
couvert de bruyères et d’arbousiers avec des sources et des ruisseaux 
bordés de lauriers-roses, dans les dépressions ; à Vlatos se trouvent les 
derniers châtaigniers. À deux heures de Rhogdhia, la vallée qui se rétré- 
cissait beaucoup, est subitement barrée par un chaïnon calcaire qui 
relie le Haghios-Elias au chaînon qui est au S. de Roumata; le ruisseau 
le traverse par une fente à parois presque verticales, dans laquelle tout 
passage est impraticable ; aussi le chemin s’élève sur le flanc gauche el 
franchit le chaïnon par un léger col élevé de plus de 550", où l’on voit 
les calcaires gris recouverts par le terrain tertiaire marneux du pays qui 
s’abaisse en pente douce au golfe de Kisamos. Le chemin passe d’abord 
dans un haut vallon, où se trouve une source à 15° 8 ; puis sur une crête 
courant au N. entre les deux grands vallons du Typhlos et du Kakope- 
ratos, et finissant par ne plus atteindre que 250" d’altitude. Le fond 
de ceux-ci est occupé par un petit ravin où coule pendant toute l’année 
un ruisseau recouvert d'un fourré impénétrable de vigne sauvage, 
de ronces et de Smilax, avec de nombreux myrtes et lauriers-roses. 
Avant de descendre à la plaine maritime , j’aperçcus Kisamo-Kasteli et le 
cap Grabousa, comme l’a figuré M. Pashley (1) ; celle-ci est assez large 
et formée par des sables renfermant de nombreux cailloux primitifs, dans 


(1) Travels in Crete, t. IT, p. 51. 


( FT) 
lesquels se perdent la plupart des ruisseaux qui descendent des monta- 
gnes. Je passai à Kamara qui est presque entièrement ruiné, et j’arrivai 
à Kisamo-Kasteli où le terrain récent élevé de 20 environ, ren- 
ferme des bancs de poudingue. Un médecin, M. Dalmaro, m'installa 
chez un cordonnier qui tenait auberge. Dans l’après-midi, je visitai la 
citadelle qui, d’après l’inscription placée au-dessus de la porte, avait été 
bâtie par les Vénitiens en 1554, et restaurée en 1638 ; lors de la capitu- 
lation avec les Turcs en 1647, la peste sévissait avec tant de force qu'il 
ne restait plus que soixante-dix Vénitiens pour résister à cinq cents 
Turcs. Elle est fort petite et renferme six à huit canons ou mortiers fort 


rouillés, et une garnison arabe. Au S.-E. se trouve la ville entourée de 


murailles, en grande partie ruinée, et occupée seulement par quelques 
familles musulmanes. Les Chrétiens , qui n’ont pas la permission d'y en- 
_trer, habitent le faubourg qui est maintenant la véritable ville et qui ren- 
ferme aussi des ruines; au $. et y attenant, se trouvent des restes de 
murailles massives en briques et peut-être un aqueduc appartenant à 
l'antique Kisamos. Dans la soirée, je reçus la visite du kadi, Hassan- 
Effendi, que je fis souper avec moi; il ne reparut plus par suite, sans 
doute , de la crainte qu’il eut d’être obligé de me rendre ma politesse. 
Excursions autour de Kisamos el retour à Khania, 26-30 juin. — 
Le premier jour j’allai visiter les ruines de l’antique Polyrrhenia. Près 
de Kaleriana, au S.-E. de Kisamos , il y a, en plusieurs endroits au-des- 
sous du village, des fosses desquelles on extrait, en automne , un gypse 
grenu stratifié, jaunâtre, renfermant de petits poissons fossiles ; après 
l'avoir converti en plâtre , on s’en sert tant dans la contrée qu’à Tserigo, 
pour absorber l’eau des vins et rendre par conséquent plus forte la pro- 
portion d'alcool; ces gypses donnent aux eaux de toute la plaine une 
saveur douceâtre et désagréable. En avançant, j’arrivai devant l’ancienne 
ville, appelée aujourd’hui Palæokastron ; elle est au S.-0. de la vallée du 
Kamara, au sommet d’une haute colline isolée de calcaire compacte qui 
forme au milieu du terrain tertiaire, un îlot qui atteint environ 430" 
d'altitude , 150" de plus que ce dernier; une profonde crevasse à 
parois verticales la limite au S.-E. La ville dont Pococke a figuré le plan 
sous le nom d’Aptera , et M. Pashley des murailles (4), est d’une assez 
grande étendue et entourée de murailles fort épaisses conservées presque 
partout, sur une hauteur de trois à six mêtres ; près du sommet, se trou- 


(1) Description of the East, pl. xxxY. Travels in Crele, t. WI, p. 46. 


( Are 

vent les restes de deux citernes et d’une chapelle chrétienne avec des 
restes de peintures ; l'enceinte ne renferme que des pierres déplacées, au 
milieu desquelles croissent les Phlomis fruticosa , Echinops viscosus . 
Anagyris fœtida, et notamment l’Euphorbia dendroïdes ; celle-ci est fort 
abondante, et les grands individus, hauts de 1 mètre 50 centimètres 
et dont le tronc a 5 centimètres de diamètre, constituent des buissons 
à rameaux dichotomes et divariqués ; ils donnent à la végétation de ce 
petit plateau un caractère tout particulier que je. n'ai retrouvé nulle 
part ailleurs dans l’ilé, car c’est à peine si sur deux ou trois autres 
points, j'ai retrouvé quelques individus moins beaux de cette espèce. 

En quittant ces ruines, je poussai jusqu’à l’église de Haghios-Poly- 
karpos, et en revenant à Kisamos, j’eus la satisfaction de retrouver 
l'Ostrea navicularis qui fixait d’une manière certaine l’âge de ces dépôts 
tertiaires , et établissait leur contemporanéité avec ceux de l’Apokorona. 

Le lendemain, en allant au cap Grabousa, j’achevai de traverser la 
plaine occupée par le terrain récent, dont les parties consolidées forment 
Sur la côte des roches, des digues et des sortes de jetées occasionnant un 
grand nombre de criques dans lesquelles viennent mouiller les petites 
barques. L’arète suivante qui se prolonge par le cap Kasteli et qui remonte 
vers Lousakiès, est entièrement formée par le macigno et les calcaires 
brunâires et rouges inférieurs. À l’O. est le petit bassin tertiaire de 
Mesoghia au-devant duquel se trouvent aussi des parties basses sableuses 
qui, dans l’angle S.-0. du golfe de Kisamos, donnent encore des roches et 
de petits ports; les roches calcaires y présentent aussi des perforations 
de mollusques récents jusqu’à 5 à 6 au-dessus du niveau de la mer. 
À peu de distance, il y a jusqu’à une hauteur de 2", une assez grande 
quantité de fragments roulés d’une-roche qui ne se trouve nulle part 
en place dans l'île; c'est une ponce grisâtre qui aura été apportée, 
par les courants marins, de quelques-unes des îles volcaniques de l’Ar- 
chipel ; ces ponces, au surplus, ne se trouvent pas que sur la côte sep- 
tentrionale de la Crète; j'en avais rencontré aussi à Selino, sur la côte qui 
fait face à l'Afrique. La partie élevée du cap est formée par les calcaires 
gris quelquefois roses, mais l’extrémité est un plateau de calcaire ter- 
üaire;, une fontaine assez abondante qui en sortait à 175" d’altitude, 
renfermait des mélanopsides , et marquait 48° 7. Au contact des calcaires 
anciens , le calcaire tertiaire est quelquefois si compacte, qu’il n’est pas 
toujours facile de distinguer les deux terrains. Ce fut avec une certaine 
difficulté que j'arrivai au sommet le plus septentrional qui a 700" 


( 180 ) 

d'altitude et qui est séparé des piés méridionaux par un grand amphi- 
théâtre à parois verticales, ouvert à l’O. et fermé à l'E. par une simple 
muraille. De ce sommet on a une belle vue sur le golfe et l’eparkhie de 
Kisamos , ainsi que sur une partie de la côté occidentale de l'ile. La 
presqu’ile, la petite île, qui enceignent le port dé Grabousa et celle qui 
est à l’extrémité du éap, toutes deux à pic, doivent être de calcaire ter- 
üaire,; la forteresse, bâtie sur celle du port, n’a que des citernes; elle a une 
garnison arabe, et le nombre des bouches à feu qui était de quatre-vingts 
sous les Vénitiens a été réduit à seize par Méhémet-Ali. Le port est bon 
et sûr, cependant la frégate anglaise Cambrian s’y perdit pendant la 
révolution grecque. | 

28 juin. — Le Haghios-Elias est la haute sommité arrondie qu’on 
aperçoit de Khania, et qui est située au S. des terrains tertiaires de Meso- 
ghia. Pour le visiter, je retournai à Haghios-Polykarpos ; puis à Lousa- 
kiès-Zachariana je quittai le terrain tertiaire pour monter par un vallon 
à Kanavas, d’abord sur les calcaires rouges inférieurs et ensuite sur les 
talschistes qui vont former une sommité située au S. 20° E. de l’Haghios- 
Elias; elle est un peu plus élevée , et son sommet est couronné par des 
poudingues talqueux gris que je n’ai retrouvé nulle part ailleurs, et qui 
me paraissent les plus anciennes roches sédimentaires de la Crète. Le 
Haghios-Elias qui a plus de 900" d'altitude présente ces mêmes roches 
à la base, maïs la masse de la montagne est formée par les calcaires gris 
ou jaunâtres ; du sommet, on a une vue magnifique sur toute la côte 
jusqu’au cap Dhrapano , sur tout le pays jusqu'aux Aspra-Vouna, et aussi 
au S.-0. sur la baïe de Sphinari. Tserigo était parfaitement visible. 

Le lendemain j’allai visiter la crête qui limite à l'O. le bassin tertiaire 
de Kisamos; le système inférieur très- développé, est formé comme 
partout, d’alternances de macigno vert et de calcaires gris veinés de 
blanc, avec lits de jaspe rouge ou vert; elle atteint 500", tandis que dans 
le petit bassin tertiaire de Mesoghia, l'altitude de ce dernier n’est que 
de 300"; c’est à Pouyana au bord de la terrasse tertiaire qui forme la : 
côte au-dessus de la petite plaine de Kavousi, et d’où l’on a sur le cap 
Grabousa une vue à peu près semblable à celle donnée, de ce dernier 
village, par M. Pashley (1). Supérieurement, et sur les bords, les couches 
sont calcaires; mais elles sont marneuses dans le centre et couvertes de 
vignobles estimés dont les produits sont exportés. Je repassai par le col du 


(1) Travels in Crete, t. H, p. 61. 


( 181 ) 

cap Kasteli; en arrivant à Kisamos, le mulet s’effraya près d’un homme 
fort inoffensif du reste, et je fus précipité par terre; je n’eus aucun mal, 
mais le tube de mon baromètre fut brisé; fort heureusement j'avais ter- 
miné mon relevé hypsométrique dans cette partie, et j'avais des tubes de 
rechange à Khania. Pendant mon séjour à Kisamo-Kasteli, la tempéra- 
ture ne dépassa pas 27 à 28° centigrades ; mais à cause sans doute de 
l'humidité répandue dans l'atmosphère par la mer, je n’eus jamais aussi 
chaud à l’état de repos; la sueur ruisselait à la surface de mon corps, de 
manière à mouiller par places mon pantalon comme s’il avait été trempé 
dans l’eau. 

Le 50, je repris le chemin de Khania par la plaine qui se rétrécit 
beaucoup à partir de Dhrapania ; à Nopia, je m’élevai sur le terrain ter- 
tiaire et après une fontaine, donnant une eau abondante à 18 3, je 
montai encore pour traverser, jusqu'à Spelæa, la naissance du cap Spa- 
dha, qui n’est pas très-élevée, et qui est formée par des crêtes de talschis- 
tes ou de calcaires gris, entourées, en partie, par le terrain tertiaire. 
* Ce ne fut pas sans une vive satisfaction que je me retrouvai, à six heures, 
près de M. Hitier, après une absence de trois semaines. 


30 NOUVEAUX VOYAGES DANS LE KHANIOTIKA. 


Excursion au cap Spadha et à Sevronas, 6-11 juillet. — Je pris par ia 
large plaine unie de Laghia qui prolonge à l'O. la baie de Soudha, et 
dont le point de partage des eaux du Kladiso et du Platania, élevé de 40, 
est à peine sensible; elle est séparée de la mer par un massif schisteux 
couvert de bruyères et d’arbousiers qui atteint 250" et qui se pro- 
longe au N. par la crête calcaire de Platania;, je longeai celle-ci en 
descendant la vallée , qui est assez large avec deux étranglements, et je 
suivis la plage en traversant plusieurs ruisseaux sur la barre sableuse de 
leur embouchure. À sept heures du goir, j'arrivai à Gonia, faible et 
fatigué par un rhume que j'avais pris deux jours auparavant à Khalepa ; 
c'est un grand monastère fréquemment visité, aussi y a-t-il un certain 
nombre de chambres pour les étrangers. Je fus assez bien reçu par l’he- 
goumenos ; mais au lieu d’un bon souper on ne me servit qu’un plat de 
limaçons (Helix vermicularis), dont la sauce un peu longue ressemblait 
fort à de l’eau. Je n'avais jamais mangé de ces mollusques et je fus très- 
vite rassasié. Les escargots de Crète jouissent pourtant d’une grande répu- 
tation dans le Levant, on en exporte jusqu’à Constantinople et Alexan- 
drie; mais l’assaisonnement y est sans doute pour beaucoup. Depuis mon 

Tome XII. 14 


(182 ) 

retour en France, je n'ai jamais eu la curiosité de goûter comparative- 
ment ni les Helix pomatia de Paris, ni les Helix aspersa de Bordeaux. Le 
vin yest, à ce qu'il paraît, trés-bon ainsi du reste que cela a lieu dans 
tous les monastères, même lorsque ceux de la contrée sont mauvais. Avant 
la révolution, il y avait quarante religieux et cinquante à soixante frères 
servants qui cultivaient huit fermes sous la direction des premiers ; aujour- 
d’hui celles-ci sont louées, à moitié fruits, à des cultivateurs ordinaires. 
Le monastère est bâti sur une petite terrasse tertiaire, à l’altitude de 
35%, adossée au calcaire secondaire et bordée par des calcaires récents en 
couches horizontales ; une espèce d’aloès y est presque naturalisée. 

Le lendemain, je fis seulement une petite excursion à Aghriviliana et 
Veni, en voyant de petits îlots talqueux noyés dans les marnes et les 
calcaires tertiaires. Près d’Aghriviliana, les montagnes schisteuses et les 
champs présentent des morceaux d’oligiste écailleux que Méhémet-Ali 
faisait dit-on ramasser, je vis là aussi en grande abondance ces araignées 
noires, appelées Phalangion, dont beaucoup d’anciens naturalistes ont 
parlé, mais encore inconnue aux modernes (Cyrlocephalus lapidarius). 

En allant, le 8, sur les hauteurs du cap Spadha je vis, presque en sor- 
tant, le couvent et les Aspra-Vouna, tels qu’ils sont représentés dans la 
lithographie de M. Pashley (1). Après Aphrata situé dans un vallon inté- 
rieur occupé par le terrain tertiaire, le chemin de Kantsillières, où se 
trouvent les ruines figurées par Pococke sous le nom de Dictamnum (2), 
s'élève rapidement au milieu des calcaires compactes; puis il passe 
sur une première terrasse élevée de 450%, qui porte sur plusieurs 
points de petits champs séparés par des crêtes rocheuses. Je finis par 
arriver au pied du grand cône de calcaire gris qui occupe le milieu du 
cap et qui ne présente pas, non plus que celui-ci, de grands escarpe- 
ments semblables à ceux du cap Grabousa. Du sommet qui n’afteint pas 
800", on a une très-belle vue sur toute la côte et sur l’intérieur du pays 
jusqu’à l’Apopighari. À quatre heures et demie, je pris congé du supé- 
rieur, et, en moins d’une heure et demie, passée presque constamment 
sur le terrain tertiaire, j’atteignis Spelæa. 

Le lendemain, j’allai faire des observations et prendre des altitudes 
sur les collines qui relient le cap Spadha au pays plus élevé du S., 


(1) Travels in Crete, t. 1, p. 27. 


(2) Description of (he East, pl. xxxv. 


( 183 ) 

dont j'ai déjà indiqué la composition. Le point le plus bas du chemin 
de Kisamos est à 240% environ; le terrain tertiaire s'élève à près de 330%; 
sur le flanc d’un petit pâté de calcaire gris de plus de 400% de hauteur, 
celui-ci est situé entre Topolia et Spelæa et traversé-par une grande fente 
à parois verticales, dans le fond de laquelle coule le Nopiano-Potamos. De 
là, je descendis sur les marnes blanchâtres , puis sur des sables argileux 
rouges avec blocs quelquefois métriques, quartzeux et talqueux ; Dhra- 
kona, est comme perdu dans les oliviers. 

De Voukoniès, où je retournai le 10, je montai à Kaphouros où l’on 
voit les derniers sommets tertiaires atteindre près de 400. La vallée 
au-dessus, jusqu’à Sevronas, offre le terrain talqueux, avec quel- 
ques petites couches calcaires; à une heure et demie avant le village, 
le flanc oriental présente, sur deux ou trois points, de grands enclaves de 
diorite massif, qui forme aussi de gros blocs dans le lit du ruisseau ; 
les roches talqueuses avoisinantes ne paraissent avoir éprouvé aucune 
altération. La vallée fort étroite et à flancs escarpés, s’épanouit subite- 
ment en une plaine assez grande, sur le bord N.-0. de laquelle se trou- 
vent, à 600% d'altitude, les quelques maisons du village et leurs 
châtaigniers. Je fus reçu dans la plus belle qui appartenait à un Musul- 
man dont le frère, après avoir parcouru l’Arabie, l'Inde et Java, s'était 
enfin fixé dans cette île, et ne se trouvait que momentanément en Crète 
pour vendre ses biens. 

Passant le col plus élevé de 50, je descendis à la plaine inclinée 
de Nea-Roumata sur une crête entre deux vallons ; après le ruisseau, un 
col assez bas et plusieurs vallons, je rejoignis le chemin d’Epanokhorio 
qui passe sur une crête séparée des montagnes par le profond vallon 
d’Orthouni ; à l’extrémité de celle-ci, il y a de basses montagnes dont 
les sommets toujours talqueux atteignent 500%. De là, on voit bien 
les montagnes calcaires d’Omalos à rochers nus, avec leurs contreforts 
couverts de bruyères et d’arbousiers , qui viennent porter Laki; puis les 
plateaux calcaires de Keramia séparés par les grandes plaines qui vont 
aboutir à la baie de Soudha. J’arrivai enfin dans la plaine de Skenès qui 
est presque circulaire , horizontale, en partie occupée par des oliviers 
et autres arbres , avec quelques Pinus Pinea ; elle est séparée par de bas 
contreforts de celle plus grande d’Alikianou qui présentait plusieurs 
lits de torrents à sec et un petit ruisseau utilisé pour la culture du maïs. 
Celle-ci se continue sans interruption par la plaine de Laghia qui pré- 
sente aussi quelques pins Pignon, et dans laquelle la petite rivière de 


( 184 ) 
Plalania sort des alluvions, peu au-dessus du moulin de M. Caporal. 
À six heures j’arrivai à Khalepa. 

Excursion à Theriso, au Soro et à Voukoniès ; 13-18 juillet. — Après 
Mourniès et ses jardins arrosés par des dérivations du ruisseau, je re- 
moniai le vallon au milieu des calcaires tertiaires qui plongent de 15 à 
20° vers la plaine; puis, tournant à droite, j’arrivai par une ramification 
à un col élevé de 400%, où ils buttent contre les calcaires gris; 
ceux-ci forment le plateau, sillonné de crêtes et découpé par des vallons 
à pic de plus de 100% de profondeur, qui se poursuit jusqu’à une 
heure avant Theriso. Là, on entre dans une gorge étroite et profonde à 
flancs escarpés, souvent à pic, qui rappelle le pharangha de Haghia- 
FRoumeli, et par lequel on arrive au village qui est dans une petite 
plaine. Ayant l'intention d’aller sur les hautes cimes des Aspra-Vouna, 
j'appris que l’ascension serait beaucoup plus facile par Dhrakona; re- 
montant alors un vallon vers l'E. et passant un col dans les talschistes , 
ainsi que les pentes suivantes, j'arrivai à ce village, où je fus admis par 
un paysan chrétien à coucher devant sa porte, son hospitalité n’allant 
pas jusqu’à me laisser pénétrer dans l’intérieur de sa maison. 

Le lendemain, je montai sur les calcaires gris à une petite plaine 
située à près de 1,000" d'altitude et renfermant des cultures et des 
puits; la journée se passa à herboriser sur les pentes des montagnes avoi- 
sinantes. Pour la nuit, je m’installai dans une aire à battre voisine, avec 
trois bergers dont l’un se chargea de me conduire sur les plus hautes 
sommités. 

Le 15, dès trois heures du matin, nous grimpions sur lés pentes 
calcaires rapides explorées la veille ; après un premier col, je me trouvai 
sur un plateau accidenté par de nombreux vallons courts, sans issue et 
d'une profondeur peu considérable; je passai par-dessus le mont Mavri, 
cône allongé du N: au $., élevé de 2,100", et formé par des cal- 
caires noirs qui se réduisent facilement en petits fragments et même en 
poussière. Par une crête peu large et assez longue, où était une cavité 
pleine de neige, j’atteignis une autre sommité aussi élevée. Je traversai 
un grand vallon longitudinal sans issue , et bientôt je pus me reposer 
près d’une source située à un peu plus de 2,000, et occasionnée par 
un lambeau de talschistes; elle marquait 4 5, et jy trouvai quel- 
ques bergers avec leurs troupeaux. C’est probablement celle que Sieber 
désigne sous le nom de Lakkos-tou-Nerou, et dont la température, un 
19 juillet, était de 5° 3, celle de l’air étant de 19°. Continuant à monter 


(185) 


par le flanc occidental d’un grand vallon perpendiculaire, puis suivant 
le bord d’un plateau incliné, dont les crevasses étaient remplies de 
neige, j'arrivai à la base du Soro , la grande montagne blanche en cône 
parfait qu’on aperçoit si bien de l’Apokorona, de tout Le plateau accidenté 
de Rhethymnom et des pentes et du sommet du Psiloriti. Sa hauteur 
n’atteint pas 2,400°, et n’est dépassée que par celles dn Theodhori, situé 
au-dessus de la fontaine, et du groupe du Triamati à l'O. un peu N. Elle 
est formée par des calcaires blanchätres, qui se délitent en petits frag- 
ments, donnant absolument partout de grands talus d’éboulement, où 
nulle plante, nul lichen même ne végèient. La vie, dans ces haules 
régions, ne se manifestait que par la présence de quelques petits oiseaux 
qui faisaient un assez grand bruit en volant dans cette solitude, contrai- 
rement à ce que j'aurais supposé, par suite de la raréfaction de l’air. 
Du sommet, la vue est assez belle sur les montagnes environnantes qui 
sont également blanchâtres et dénuées de végétation, excepté dans les 
parties supérieures du défilé d’Askypho et la vallée de Samaria; on 
domine l’Apokorona , on découvre la côte septentrionale jusqu’au Strom- 
bolo , le Psiloriti, le Kedros et la mer de Lybie; au N., une ceinture 
assez épaisse de nuages se tenait autour des montagnes, à une élévation 
de 1,200 à 1,500 mètres. 

Par des sentiers un peu différents, qui ne me firent rien voir de nou- 
veau, mon berger me reconduisit près de Testa qui, d’après ses goûts 
paresseux, m'avait attendu dans l’aire; je voulus redescendre à Dhrakona, 
mais la nuit nous ayant surpris dans ce chemin fort difficile, nous ceu- 
châmes au pied d’un rocher en surplomb, à quelque distance au-dessus 
du village. Testa m’apprit que le berger, me voyant recueillir des plantes, 
s'était mis en tête que j'étais à la recherche du Lampidoni, herbe dont 
tous les montagnards de la Crète parlent et qu'aucun d'eux n'a vue; 
cette herbe que les moutons, disent-ils, savent bien trouver et brouter, 
aurait la propriété merveilleuse de leur dorer les dents, ce qui tiendrait 
à la présence de l’or dans le sol où cette herbe implante ses racines. 
Buondelmonti racontait déjà en 1422 que, d'après les bergers, il se 
trouvait sur le mont Ida une grande abondance d'herbes lunaires jouis- 
sant de cette propriété. Quant à moi, en examinant, par la suite, des 
moutons, je n’ai vu sur leurs dents qu’un dépôt de tartre jaune sembla- 
ble à celui qui se produit par tout pays. 

Je redescendis de grand matin à Dhrakons pour retourner à Theriso , 
et achever mon exploration de la partie occidentale de l'ile. Comme je 


( 186 ) 


ne me souciais pas de repasser par le même chemin, je le fis reprendre 
à Tesia avec le mulet, et je me décidai à rejoindre Mourniès, ce qui me 
permettait de voir quelques-uns des quatorze villages du plateau de Kera- 
mia. Je descendis sur le terrain talqueux déjà fortement desséché, mais 
toujours verdoyant de bruyères et d’arbousiers, et j’arrivai, au bas de 
. Dhrakona, au fond du large et profond vallon, élevé de 3007, qui se 
termine par la véritable crevasse située entre Makerous et Stylo. Jeremontai 
devant Takodopora, et ce ne fut qu’au-dessus de Mourniès, près d’une 
* espèce de petit fort, que je retrouvai les calcaires gris, auxquels vient s’a- 
dosser le terrain tertiaire jusqu’à une grande hauteur. Une fois descendu à 
Mourniès, je ne résistai pas au plaisir de faire une pointe sur Khalepa. 
Après avoir déjeûné avec M. Hitier, je traversai de nouveau lestement la 
pleine de Khania, et avant la nuit j’arrivai à Theriso, vù Testa et un 
souper passable m’attendaient chez le chef des Arnaoutes. 

17 juillet. — De Theriso, où elle est étroite, la bande talqueuse va 
en s’élargissant à l’O. Je remontai la plaine dans cette direction; 
et, après un col bas atteignant environ 600, je descendis toujours 
sur le terrain primitif, en traversant deux ou trois vallons profonds ; 
j'avais devant moi Laki dans une espèce de cirque entouré de montagnes 
talqueuses , et dominé par les montagnes calcaires qui limitent au N. la 
plaine d’'Omalos, ainsi que le représente M. Pashley (1). Meskla, au bas, 
est sur un ruisseau assez fort, à 13°, qui fait tourner un moulin; je des- 
cendis la vallée, généralement assez large, en passant alternativement 
sur l’une et l’autre rive du ruisseau qui va se perdre dans la plaine de 
Skenès. De Phournès , grande ferme du pacha, perdue au milieu des oli- 
viers, je me rendis à Alikianou et à Vatolako , qui sont dans une même 
plaine; toutes deux présentent des cailloux roulés qui deviennent des 
blocs assez gros dans les lits de torrents à sec qui unissent le ruisseau 
précédent à la rivière de Platania. D’un hameau en ruines, situé sur le 
bord de la plaine, je montai sur les talschistes à Apothekès; mais, à 
partir de Dherès, des sables diluviens, à blocs quelquefois métriques de 
quartzite, masquent le terrain tertiaire qui doit être au-dessous. A 
Voukoniès, je logeai, tant bien que mal, dans un café musulman, au 
milieu des apprêts de la grande foire aux chevaux et mulets du 
lendemain. 

Pendant celle-ci, je pus serrer Ja main et offrir le café à plusieurs de 


(1) Travels in Crete, t. I, p. 146. 


(187) 

ceux qui m’avaient accueilli chez eux : M. Renieri, de Roumata, le futur 
Javanais, de Sevronas, et plusieurs autres. Là, comme dans toute la 
Crète, le café bien pulvérisé est mis au fond de la petite tasse, et l’eau 
bouillante versée par dessus. Habituellement le marc est en partie avalé; 
lorsqu'on y ajoute du sucre, le liquide, un peu pâteux, n’est pas 
dépourvu d'agrément. N'ayant pas trouvé un second mulet à ma conve- 
nance, je repartis à midi directement pour Khania : le chemin suit la 
vallée du Tavroniti, jusqu’à la jonction du vallon de Dherès, puis il 
monte sur le plateau tertiaire recouvert par le diluvium rouge; peu après 
le vallon de Gherani, il descend dans la plaine sableuse maritime et 
rejoint, au ruisseau de Platania, le chemin que j'avais déjà parcouru tant 
de fois, et sur lequel je n'avais plus une pierre à examiner, plus une 
plante à recueillir; j’arrivai à Khalepa à six heures et demie, fort satisfait 
d’avoir à peu près terminé mon exploration de cette partie de l'ile. 


4o VOYAGES DANS LE RHETHYMNIOTIKA ET LES EPARKHIES DE HAGHIO-VASILI, 
MYLOPOTAMOS ET AMARI. 


Arrivée à Rhethymnon, 27-28 juillet. — J'avais remplacé Testa 
par Michiele, un Maltais ; qui avait déjà voyagé en Afrique; c’était un 
homme robuste, plein de bonne volonté et de zèle , avec lequel je m’en- 
tendais parfaitement en Italien, et dont je n’eus qu’à me louer pendant 
les irois mois qu’il resta avec moi. Pour ces nouveaux voyages qui 
devaient durer plus longtemps , javais acheté un second mulet; celui-ci 
avait les allures et les habitudes de l’âne; il aimait à se rouler dans la 
poussière , tandis que le premier par ses allures indépendantes se rap- 
prochait beaucoup plus du cheval. Je simplifiai encore mon bagage en 
renonçant à emporter la marmite, qui ne m’avait pas été indispensable 
une seule fois, et la plus grande partie des provisions. Je repassai au pied 
de la montagne de Malaxa et, par l’Apokorona, j'arrivai à l’Almyros dont 
les eaux s’épanchaient toujours avec la même abondance; pour échapper 
aux fièvres qui y règnent dans cette saison, je descendis dans la plaine 
de sable rouge qui fait suite à la plage, et j’allai passer la nuit dans 
une grande ferme ou metokhi située sur le terrain tertiaire non loin de 
Dhramia. 

Le lendemain , après avoir traversé plusieurs vallons creusés dans les 
marnes et les calcaires, je gravis la pente rapide des montagnes calcaires 
avec l'espérance d’arriver au sommet d’un cône pointu blanchâtre ; mais 
une chaleur accablante m’empêcha de dépasser 950v, c’est-à-dire les. 


(188) 


trois-quarts de sa hauteur ; j’eus cependant une belle vue sur le plateau 


de Dhrapano qui tombe si abruptement dans le golfe, et au S. de, 


celui-ci, sur le plateau tertiaire, les montagnes calcaires qui l’enceignent 
à l'E. et au S. , et, dans le lointain, sur le Kouloukouna, le Psiloriti, le 
Kedros, etc. En descendant je vis, à 400" environ, quelques Euphorbia 
dendroides , et, au-dessous de moi, le lac de Kourna, le seul véritable 
de la Crète, situé à environ 25 d'altitude, et limité d’un côté par des 
escarpements verticaux de calcaires gris, et de l’autre par une petite 
arête tertiaire ; ses eaux douces et limpides, ont une profondeur très- 
grande, car il n’y a d'herbes que sur le bord même. Je n’y aperçus 
aucun animal aquatique, mais Buondelmonti en 1422, et M. Pashley 
en 4834, parlent des belles anguilles qui y sont fort abondantes. Non 
loin de là, au S.-E., sur les basses pentes des montagnes , est le grand 
village de Polis ou Ghaïdouropolis, l’antique Lappa, qui présente des 
ruines figurées par M. Pashley (1) et aussi des ruines vénitiennes avec 
cette inscription : Omnia mundi fumus et umbra. Dans un profond 
vallon voisin il y avait, d’après Boschini, au XVII: siècle, une grotte 
avec des sépultures et, dans une autre plus grande, une chapelle très- 
vénérée. è 

Le lendemain, je rejoignis la plage sableuse et pierreuse; je la suivis 
jusqu’à l'embouchure du Petrea que je traversai sur la barre sableuse de 
l'embouchure , le pont du chemin, reconstruit une centaine d’années 
auparavant, étant resté rompu depuis la révolution. Ce torrent sort 
d'une gorge à pic dans les calcaires compactes gris; ceux-ci forment 
ensuite un plateau découpé par de profonds vallons, qui présente à la 
mer des escarpements verticaux sur le bord desquels on est obligé de 
passer; j’arrivai sans m'en douter sur les calcaires tertiaires stratifiés , 
traversés aussi par un profond ravin sur lequel se trouve le pont à deux 
rangs d’arches représenté par M. Pashley (2) et situé de trois à quatre 
kilomètres avant la ville. La nuit étant venue, je descendis lentement dans 
la plaine; et, comme à mon arrivée les portes de la ville étaient fermées, 
je m’installai sur le perron d’une mosquée qui se trouve presque devant 
l’une d’elles. Le lendemain matin, à sept heures, j'étais parfaitement 
accueilli par notre agent consulaire, M. Emilio Barbieri. 

Rhethymnon, lantique Rhytymna, qui était beaucoup moins eonsidé- 


LA 


(1) Travels in Crete, t 1, p. 81. 
(2) Travels in Crete, t. 1, p. 101. 


( 189 ) 

rable , est sur une plage sableuse faisant suite à une plaine demi-circu- 
laire qui à à peine deux kilomètres de largeur, le sol se relevant assez 
vite en plateau découpé par des vallons, excepté vers l'E. Les sables 
modernes qui la forment sont parfois agglutinés en calcaires grossiers et 
coquillers qui atteignent jusqu'à 10 et 15" au-dessus de la mer. 
Au S. et au S.-E., il y a des parties plus élevées qui sont de véritables 
montagnes plus ou moins arides ; mais le pays avoisinant est très-riche 
et fertile, excepté à l’O., où la partie que je venais de parcourir est extré- 
mement rocheuse et aride. La ville bien bâtie a une forme demi-circu- 
laire, la base du côté de terre étant formée par une muraille rectiligne 
crénelée ; elle est abondamment fournie d’eau par un aquéduc et ren- 
ferme aussi quelques palmiers. Dans la partie N.-0., et dominant le port, 
se trouve sur un mamelon escarpé de calcaire gris, une ville-citadelle, 
exclusivement habitée par une centaine de Musulmans ; du coté de la mer, 
la nature a seule fait les frais de défense; le nombre des bouches à feu 
qui était de quarante-cinq autrefois, y compris de grands pierriers véni- 
tiens en bronze, a été porté à quatre-vingts par Méhémet-Ali, qui ne 
trouva pas la place en suffisant état de‘défense. | 

Le port, fermé par un môle, est fort petit et praticable seulement pour 
des barques; par suite de son encombrement successif, la population 
avait, comme celle de Megalo-Kastron, émigré à Khania. À la fin du der- 
nier siècle elle était, paraît-il, de six mille âmes environ, et au dire de 
Tancoigne, la ville était presque déserte en 1814. Mais sous la domination 
égyptienne , quelques travaux de draguage ont été faits et la ville a repris 
de la vie et de l’activité. M. Pashley évaluait en 1834 la population à 
3,200 habitants presque tous musulmans et agriculteurs. Les Chrétiens 
formaient quatre-vingts familles de boutiquiers et de mariniers. Le prin- 
cipal commerce qui se faisait autrefois avec la Morée et les îles de l’Ar- 
chipel est presque supprimé depuis l'émancipation de ces anciennes 
fractions de l’empire ottoman. Comme disait Tournefort : « Retimo 
s'étend sur le port et nous parût plus gaye et plus riante que la Canée, 
quoiqu’elle soit plus petite et enceinte de murailles plus propres à fermer 
un port, qu'à deffendre une place.de guerre ». Des vues ont été données 
par divers auteurs; presque toutes sont prises de Perivolia à VE. (1). 
Malgré les travaux , les barques seules peuvent pénétrer dans le port, et 


(!) Boschini. Z1 regno lullo di Candia, pl. xv. — Coronelli, Zsolario, p. 215. — 
Tournefort, Voyage au Levant, t. 1, p. 42. — Pashley, Travels in Crele, t. I, p. 101, 


(190 ) 


les bâtiments de commerce sont obligés d’ancrer dans la baie de Soudha 
et d’y attendre leur chargement. 

Excursion aux ligniles de Haghio-Vasili ; 29 juillet-1# août. — Je 
quittai Rhethymnon à deux heures, et après la petite plaine demi-circu- 
laire, je montai, au milieu d’alternances de marnes et de calcaires mar- 
neux, sur un plateau de calcaire dur tertiaire ; celui-ci confine à un pays 
formé par les talschistes quartzeux et sur lequel je m’élevai pendant une 
heure par un vallon couvert de bruyères et présentant çà et là des sources 
et quelques pins Pignon ; au haut, je descendis une dizaine de mètres, et 
je me trouvai dans la grande plaine unie, sableuse d’Armenous, qui paraît 
le prolongement, vers le S.-0., du plateau que j'avais traversé la veille. 
Elle est bordée à l'E. par le massif montueux de calcaire gris du Vrisi- 
nas, et à l'O. par les collines de Kastello; je traversai successivement 
des vignes, puis des oliviers mêlés de chêne Velani, et enfin des champs 
dans lesquels on monte un peu à Apano-Armenous, qui est sur le ter- 
rain tertiaire. Après un grand vallon, j'en remontai un plus petit dont 
les flancs laissent voir les bancs de calcaire tertiaire presque horizon- 
taux et bien réguliers ; au bout d’une heure, j’arrivai dans un évasement 
situé à l'O. et limité, de ce côté, par les montagnes de calcaire ancien, 
tandis que le côté oriental est formé par le terrain tertiaire qui s’élève à 
environ 50% au-dessus du col que l’on traverse peu après et dont 
l'altitude dépasse 500%. De là, je descendis sur les calcaires com- 
pactes noirs jusqu'à Palæoloutra, situé à la jonction du terrain talqueux, 
au bord de la longue plaine de Haghio-Vasili, qui paraît s’étendre depuis 
les Aspra-Vouna jusqu’au Kedros. Dans ce village, presque entièrement 
habité par des Musulmans, je fus installé dans une maison vide, et l’on 
me procura volontiers ce qui m'était nécessaire. 

Le 30, je vis le terrain talqueux s'élever sur le flanc opposé de la 
vallée, beaucoup au-dessus de Tatsiparé, et occasionner une source qui 
marquait 15°. Plus haut, se trouve la partie inférieure des calcaires, avec 
ses alternances de phyllade vert et ses lits de jaspe rouge. Les calcaires 
compactes noirâtres occupent cependant sur une grande hauteur la partie 
supérieure de la montagne entièrement nue et dont le sommet, tout formé 
de rochers et d’escarpements, est d’un accès véritablement pénible. Ce 
point culminant du chaïnon côtier atteint plus de 1,000" à Ja petite 
cabane de berger qui, exceptionnellement , y remplace le monastiri. On 
peut juger parfaitement de la structure de cette partie de l'ile, et voir la 
chaîne côtière dont elle fait partie s’étendre, depuis l’extrémité des Aspra- 


(19) 


Vouna jusqu'au Kedros, et séparer ainsi de la mer la plaine de Haghio- 
Vasili; au-dessous, cependant, se trouve le petit chaînon parallèle de 
Previli, et, vers l'O., on aperçoit les terrasses tertiaires , inclinées à la 
mer, de Franco-Castello et de Komitadhès. 

Dans l’après-midi, je suis allé voir les trous à lignite (ou charbon, 
gharvona), situés d’abord à la sortie de Palæoloutra, à 375% d’al- 
titude, puis de 2 à 3 kilomètres vers VE. C’est au milieu d’argiles et de 
marnes , avec lits de calcaire d’eau douce, qu’on a trouvé, à quelques 
mètres de profondeur, un banc de bois fossile, plutôt que de lignite, 
qui a, dit-on, environ À mètre d'épaisseur, mais qui paraît de trop 
mauvaise qualité pour avoir le moindre avenir industriel. c#é 

Le lendemain, je traversai obliquement , vers le S.-E., la plaine cou- 
verte d’oliviers ; et, peu après Koxaré et un pelit contrefort de molasse 
tertiaire, j'entrai dans la vallée étroite et profonde du Mega-Potamos, 
ouverte dans les calcaires gris phylladifères inférieurs. Après un petit 
affleurement de talschistes , la vallée se transforme en une gorge à parois 
souvent verticales, entièrement ouverte dans les calcaires compactes 
gris. Le vent de $., qui n’était cependant pas très-fort, soufllait avec une 
telle furie dans ce défilé, que ce ne fut qu’avec une certaine peine que, 
hommes et mulets chargés, nous le traversämes. En sortant, je retrouvai 
le terrain primitif, puis le terrain tertiaire; et, tantôt sur l’un, tantôt 
sur l’autre, j'arrivai par Asomatos et Mariou à Myrthio, qui est à la 
limite des deux, à 225" d’altitude. Je laissai ainsi sur ma gauche, au- 
dessous de moi, la petite plaine tertiaire où se trouve le monastère de 
Previli et le petit chaînon montagneux qui la sépare de la mer, et qui 
doit avoir environ 300" d’altitude. J’avais l'intention d’aller à Franco- 
Castello, où se trouve, dit-on, un monastère et des dépôts de grandes 
huitres; mais l’heure avancée m'’obligea à renoncer à mon projet. 
Je me bornai à descendre à la mer au bas du village, au milieu de 
poudingues et surtout de molasses fines, pour voir deux fosses, en 
partie remplies d’eau, d’où Méhémet-Ali avait fait retirer du lignite, en 
1836; la plus grande, située presque au niveau de la mer, présente des 
argiles grises avec ossements et empreintes de coquilles. Les lignites 
schistoïdes argileux renferment des empreintes de coquilles marines et 
ne doivent pas être de meilleure qualité que ceux de Palæoloutra. 

4+ août. — De Myrthio, je me décidai à retourner directement à la 
ville; après être monté sur le terrain talqueux, j'afteignis la partie du 
vallon qui est rétrécie par de grands escarpements calcaires; sur un 


(19) 
point, ce n’est plus qu’une gorge à parois verticales, de quelques mètres 
de largeur, ressemblant en petit au pharangha de Haghia-Roumeli; mais 
elle ne présente pas, comme celui-ci, de roches polies dans la partie 
inférieure, car il n’y passe que les eaux d’une petite surface inclinée. 
Le col, sitné au-dessus, est à 475" d'altitude; et, en redescendant 
de 20®, je me retrouvai dans la plaine de Haghio-Vasili qui est, là, 
très-étroite. Haghios-Joannes est sur une pente formée-par les molasses 
tertiaires, avec nombreux débris plus gros du terrain talqueux, contre 
lequel je les vis s’adosser jusqu’à 100% au moins au-dessus du niveau 
du col précédent. Le chemin monte sur le terrain primitif, couvert de 
bruyères et d’arbousiers, jusqu’à Kalisikia, où il passe dans un vallon 
formant limite entre eux et les calcaires secondaires; puis, pendant 
une heure, je retrouvai le terrain primilif qui pénètre assez loin vers 
l'O. entre des ramifications des montagnes calcaires. Après une bande 
de calcaire gris d’une demi-heure de traversée, j’atteignis le point de 
partage d’où l’on voit Roustika, et au N. 10° O., la crevasse par la- 
quelle le Petrea se rend à la mer, à l'E. de l’Almyros. En descendant, 
je trouvai, à 420" d'altitude, les grès et les calcaires tertiaires plus ou 
moins coquillers, dont la surface, plus loin, à Haïdhoura, est déjà moins 
élevée de 100%. Dans plusieurs profonds vallons suivants, les calcaires 


se montrent en grands bancs bien stratifiés ; après un chaïînon de calcaire - 


secondaire, reprennent les calcaires tertiaires qui portent Alitsopoulo. 
Avant de rejoindre le pont qui est sur le chemin, à l’0. de Rhethymnon, 
je rencontrai une bande de talschistes qui porte Priné, et des oliviers 
et chênes Velani. En cueillant des rameaux de ces derniers, sans des- 
cendre de mulet, je laissai maladroitement tomber mon baromètre dont 
le tube fut encore brisé; mais, le lendemain, cet accident fut réparé 
chez M. Barbieri. | 
Voyage dans l’eparkhie de Mylopotamos, 3-7 août. — En quittant 
Rhethymnon, je longeai Perivolia, où se trouvent une grande quantité 


de jardins produisant d'excellents légumes et fruits; puis, après avoir. 


suivi la plaine maritime jusqu’au Stavromeni , je m’élevai sur le terrain 
tertiaire dans lequel est excavé le vallon peu profond mais escarpé, à 
gros bancs calcaires, du Hiasmata, sur lequel il y a d'anciens moulins 
vénitiens. Laissant au N. un massif de calcaire ancien, je remontai sur 
le plateau de calcaire tertiaire qui porte, par exception, des arbousiers, 
et du bord duquel, à l'altitude de 200", on a une très-belle vue sur 
le bassin du Mylopotamos, limité au N. par les montagnes côtières 


( 193 ) 

du Kouloukouna et du Strombolo, et au S. par l'énorme massif du Psi- 
loriti. Par un sol ondulé, de marnes et de calcaires, et une plaine unie, 
j'arrivai à Perama et au Mylopotamos, qui ne présentait plus guère que 
des flaques d’eau habitées par des mélanopsides ; je le passai à gué, le 
pont n'ayant pas été relevé, et montant au N.-E., sur le terrain ter- 
tiaire d’abord et sur une colline de calcaire gris ensuite, je Gnis par 
redescendre à Melidhoni; ce village est dans une anse intérieure du ter- 
rain tertiaire, à 120% d'altitude; l’eau d’un puits y marquait 7e. Je fus 
parfaitement accueilli par M. Dhaphnomilli, un riche chrétien, qui avait 
servi pendant plus de vingt ans dans la marine autrichienne, et avec 
lequel je pus par conséquent converser en italien. 

Son fils voulut me servir de guide le lendemain, pour aller au Kou- 
loukouna, l’antique Tallée dédié à Mercure, la plus haute cime de la 
chaîne côtière. Nous passèmes sur le pied des montagnes calcaires jus- 
qu'à Laghia; puis, nous montâmes par des pentes rapides, escarpées. 
présentant, dans les parties supérieures, de beaux lapiaz ou accidents 
de dissolution superficielle des roches calcaires. La végétation épineuse 
ordinaire est remplacée, seulement à 800", par des bois d’yeuses un 
peu clair-semés; des calcaires grenus blancs forment le sommet qui a 
1100 d’altitude. De là, on a, encore mieux que de Melidhoni, la belle 
vue représentée par Sieber (1), sur la plaine ondulée, découpée par 
des vallons assez profonds, qui, de loin, ressemble à une forêt d’oliviers 
et de caroubiers , sur les pentes inférieures du massif du Psiloriti, pré- 
sentant quelques arbres jusqu’à 1100 à 1200", et sur les parties supé- 
rieures nues terminées par le sommet arrondi qui forme le point 
culminant de l’île. On aperçoit aussi la terminaison large et haute des 
Aspra-Vouna et, derrière Rhethymnon, le cap Dhrapano et le Skloka. 

Dans l’après-midi , il me conduisit à la fameuse grotte située au N.-0., 
à l’intérieur d’une colline élevée d'environ 150" au-dessus du village, 
dans un calcaire grénu blanc , semblable au précédent. L’entrée, située à 
"mi-côte, est peu grande, ayant été en partie comblée pendant la guerre 
de l’indépendance grecque. Je descendis d’abord dans une vaste salle à 
plusieurs ramifications, recouvertes de stalaclites, puis dans une autre 
également fort grande, dont M. Pashley a donné une vue (2); partout les 


(1) Reise nach der inseln Krela, pl. WE. 
(2) Travels in Crete, t. 1, p. 156. 


(194) 


stalactites sont salies par la poussière jointe à l'humidité, quoique l’eau ne 
dégoutte seulement que sur un ou deux points, et ne forme qu’une petite 
mare dont la température était de 17° 6. 

En septembre 1822, Khouséin-Bey et Moustapha-Pacha étant venus à 
Melidhoni avec des Musulmans crétois et leurs Arnaoutes, plus de trois 
cents habitants du village et des alentours, se réfugièrent dans la grotte 
avec des provisions pour six mois. Un messager et une femme envoyés 
pour les engager à sortir et vingt-quatre des Arnaoutes qui essayèrent 
de pénétrer, ayant été tués, le général jeta une première pierre, et 
l'entrée fut complètement obstruée en un instant. De petites ouvertures 
ayant été pratiquées, les deux nuits suivantes, par les réfugiés, des 
matières combustibles de toute sorte furent accumulées et le feu mis. 
Des tourbillons de fumée se répandirent dans les deux grandes salles, 
et les malheureux Chrétiens eurent à peine le temps de s’embrasser ; 
bientôt après, la fumée avait pénétré dans toutes les crevasses et les 
petites cavités latérales, où les plus lestes avaient espéré trouver un 
abri contre l’asphyxie. Après dix-huit jours d’attente, les Musulmans 
dépêchèrent , à l’intérieur, un Chrétien qui n’y trouva que le silence de 
la mort; trois jours après, ils y pénétrèrent en foule, dépouillèrent les 
cadavres et s’approprièrent tout ce qui avait quelque valeur. 

L'une et l’autre salle renferment en grande abondance des têtes et des 
ossements de ceux qui périrent; en les foulant aux pieds, je frémissais : 
d’indignation , comme M. Pashley, et je me disais qu’il n’y avait que des 
barbares capables de pareiïlles atrocités. Certainement, nous avions tous 
deux bien grand tort, nous ne comprenions rien à la guerre, et à son 
genre tout spécial d'humanité dans le XIX: siècle, puisque des généraux 
très-civilisés , français pour-tout dire, ont fait subir pareiïl traitement aux 
Arabes pendant les guerres de l'Algérie. Crainte d'accident, dans les 
sinuosités de la grotte, j'avais déposé mon baromètre dans un coin, près 
de l’entrée; peu avant de sortir, mon guide prit les devants, et pour 
m'être agréable il voulut le transporter au dehors. Il n’avait pas fait trois 
pas que le tube était brisé; mes précautions avaient tourné contre moi. 
Heureusement , il me restait un second tube et dans la soirée le malheur 
fut réparé, à la grande satisfaction du pauvre garçon. C'était le dernier 
des trois que j'avais emportés pour ma tournée hors de Khania, et je n’a- 
vais encore été absent que dix jours sur deux mois et demi! Je me promis 
de ne plus m’en séparer, je me tins parole et je le rapportai en parfait 
état à Khania. La récolte du ladanum se fait surtout dans les alentours 


(195 ) 

de Melidhoni avec un fouet à long manche et à double rang de courroies, 
ainsi que le décrit Tournefort. 

Le 5, j'offris à Me Dhaphnomilli, un petit cadeau métallique qui fut 
accepté de bien grand cœur, sans doute parce qu’il était susceptible 
d'entrer dans la confection de quelque collier ou bracelet; puis je des- 
cendis au S.-0., avant le coteau qui porte Dhaphnidhes sur les calcaires. 
gris qui forment aussi quelques collines au S. du Mylopotamos. Le 
terrain tertiaire se rencontre encore un peu au N. ainsi qu’à Papatevrysis, 
où les raisins commençaient à mürir;, mais peu après, le chemin passe 
sur un des contreforts calcaires du Kouloukouna, immédiatement au- 
dessous du point de jonction de la haute vallée du Mylopotamos qui est 
une crevasse à pic qui se prolonge, en s’élargissant cependant un peu, 
jusque vers Axos, et dans laquelle coule un ruisseau qui gonfle beaucoup 
par les pluies. Au-dessus, on entre dans un vallon boisé, à grandes pentes 
calcaires, puis, un peu au-dessus de la fontaine de Kania-Oglou qui est 
au coin du chemin d’Axos, dans une plaine de trois à quatre kilomètres 
de longueur, toute couverte de bruyères, dont le sol, de sables argileux 
rouges à fragments de talschistes, résulte sans doute de la désaggréga- 
tion de ces roches. De la partie élevée, située à 375% d'altitude, on 
monte un peu sur la pente des montagnes calcaires pour arriver au khan 
de Damasta qui était si bien pourvu de provisions que je pus y avoir une 
poule au riz. J’allai au S.-E. du village, pour étudier la structure de la 
contrée, sur le sommet le plus élevé, formé par des calcaires bréchoïdes 
noirâtres; celle-ci est hérissée de crêtes souvent rocheuses, courant à 
peu près de l'E. à l’O., jusqu’au massif du Psiloriti qui n’est ni si ie 
ni si rocheux et escarpé que les Aspra-Vouna. 
= Le lendemain, je redescendis à la fontaine pour prendre le chemin 
d'Axos; puis laissant sur la gauche Goniès et Anohia, ce dernier-village 
sur une crête verte, probablement primitive, je montai à Aïmon et au 
petit monastère de Khalepa, tous deux dans de petites plaines au milieu 
des calcaires. Après avoir traversé la vallée du Mylopotamos, au-dessus 
de la gorge précédemment indiquée, j’arrivai sur la colline calcaire qui 
porte presque à son sommet, à 510" d'altitude, une ancienne église, 
une tour génoise, des restes d’aquéduc et de vieilles murailles figurées 
par M. Pashley qui découvrit aussi plusieurs inscriptions (4). Sur la: 
pente méridionale est le village d’Axos, où je fis une courte halte, 


(1) Travels in Crete ,t.1, p. 145, 152, 155, 156. 


( 196 ) 

et un peu au-dessous, une source à 14 7. Après le vallon et un col, 
je passai devant le monastère de Haghios-Gheorghiou-Kamariotis, à l’hos- 
pitalité intéressée duquel j’eus de la peine à échapper. Je traversai ensuite 
une série de coteaux calcaires et de vallons à macigno et phyllades, appar- 
tenant à leur partie inférieure et portant un petit bois de chênes ; dans 
le vallon qui est près de Kalidhia, les talschistes font une courte appari- 
tion. Après les calcaires qui forment la haute montagne qui est au S.-E. 
de Haghios-Joannes, j’arrivai sur les calcaires tertiaires qui atteignent 
environ 920%, et qui en s’abaissant portent le village à 450" d'altitude. 
Ici, tous indistinctement, Chréliens et Musulmans contribuërent à me 
recevoir, l’un en donnant une chambre, d’autres en apportant la paille 
pour les mulets, Khalil-Agha enfin, un vrai Don Quichotte au phy- 
sique , en nous faisant participer à son diner ; personne, chose rare en 
Crète, ne voulut recevoir la moindre rémunération. 

7 août. — Pendant une grande partie de la journée, je traversai une 
série de vallons et de coteaux de calcaires tertiaires avec fossiles, assez 
près de leur jonction aux calcaires gris et quelquefois même sur ceux-ci. 
Dans le vallon , avant Avdhela, une fontaine marquait 16°5 ; dans celui 
qui est après Melisourghaki, une fontaine très-abondante, à 250 d’alti- 
tude, marquait 15° 8. Peu après Orthès je passai devant Tripodho qui 
est sur un plateau plus bas. J’aperçus plus loin Magarites, le principal 
village de l’eparkhie, qui est situé de même; en raison de la grande fer- 
tilité du sol, les Vénitiens s’y étaient largement établis, et il devint plus 
tard un apanage de la Sultane-mère. J’arrivai bientôt: à l'extrémité du 
dépôt calcaire qui atteint 570" d’altitude, près d’un profond vallon 
ouvert dans les calcaires gris, et qui naît dans les montagnes ; le bord 
opposé forme l’arête tertiaire qui limite à l'O. le bassin du Mylopotamos. 
Par un vallon latéral dans lequel se trouvent le macigno et les tal- 
schistes, je montai à un col élevé de 670% formé par ces derniers 
et peu après lequel on peut descendre à Arkadhi; mais je l’ignorais, 
et remontant sur le même terrain, je finis en descendant beaucoup 
ensuite, par atteindre le grand chemin d’Arkadhi à Asomatos, mais à 
une heure et demie trop loin. À mon arrivée à Arkadhi; la lettre du 
métropolitis me fit accueillir parfaitement par l’heghoumenos qui m’ins- 
talla dans une des belles chambres réservées aux étrangers , au premier 
étage. J'y passai la journée du lendemain , et Michiele que j'avais envoyé 
à Rhethymnon, me rapporta, pour l’anniversaire de ma naissance, des 
lettres de Paris, dont le contenu me fit voir une fois de plus, combien 


(SPA) 
peu il faut compter sur les hommes, même sur ceux qui se donnent 
comme des amis. 

Le monastère d’Arkadhi est à 500% d'altitude, dans une plaine acci- 
dentée, composée de calcaires tertiaires horizontaux, et aussi par les 
calcaires compactes, grossièrement nivelés par un dépôt plus récent; 
les pentes qui la limitent sont formées par ces derniers, excepté au S. où 
les collines, de 30 seulement de hauteur, sont tertiaires. Le bâtimeni 
fort beau occupe plusieurs côtés d’une vaste cour au centre de laquelle 
se trouve l’église dont la façade est vénitienne, en avant de l'entrée 
principale il y a des jardins et des vergers clos de murs. La maison possède 
de vastes terres, produisant en abondance le blé, l'huile, le miel ei 
d'excellents vins. Du temps de Tournefort, il y avait trois cents religieux 
dont les deux tiers habitaient les campagnes et cultivaient le sol. 
Depuis la révolution grecque leur nombre est extrêmement réduit et 
insuffisant pour l’entretien des cultures. Sieber et M. Pashley, ont 
donné une vue d'ensemble et une autre de l’intérieur de la cour (1). 

Voyage dans l’eparkhie d’Amari, 9 et 10 août. — Après le déjeüner, 
l’accolade reçue de l’heghoumenos et la pièce donnée aux jeunes novices, 
je partis pour Asomatos. Comme dit Tournefort (2) « on entre dans une 
grande vallée entre le mont Ida et le mont Kentro, toute plantée d’Oliviers, 
d’Orangers, de Grenadiers, de Meuriers, de Cyprès, de Noyers, de Myrtes, 
de Lauriers, et de toutes sortes d’arbres fruitiers; les villages y sont fré- 
quens , et les eaux admirables ; le mont Ida est un grand alembic, qui 
fournit de l’eau à tout le voisinage , c’est-à-dire à près d’un tiers de l'Isle; 
la vallée dont nous parlons, se perd insensiblement dans la plus belle et 
la plus fertile plaine de Candie, la Messaria ; cette plaine s’étend jusqu’à 
Girapetra. » Le chemin monte un peu sur les calcaires gris, puis passe 
sur un sol très-ondulé de talschistes, couvert de bruyères et d’arbousiers, 
en laissant à gauche les hautes pentes calcaires escarpées du Psiloriti et 
à droite, la grande masse du Kedros à pentes seulement fort rapides; 
une source dans un vallon marquait 16°. Après le col de Thronos, à 530" 
d'altitude, les calcaires gris forment une petite plaine en céréales et en 
oliviers, et en descendant on trouve le macigno inférieur, puis les mo- 
lasses tertiaires qui forment la plaine, à l’entrée de laquelle se trouve le 
monastère d'Asomatos, et les petites collines de 50 d’élévation qui la 


(1) Reise nach der Inseln Kreta, pl. IL. Trawels in Crete, t. 1, p. 509. 
(2) Voyage au Levant, t. I p. 56. 


Tome XXII. 15 


( 198 ) 

bordent. lei je fus logé dans une petite chambre au rez-de-chaussée , et 
ce ne fut qu'après quelques pourparlers que j'obtins la nourriture néces- 
saire. Le monastère dont M. Scott a donné une vue (1) a beaucoup 
déchu lors de la conquête turque, et les ruines des dernières guerres ne 
se relèvent que bien lentement, le nombre des religieux étant très-faible; 
cependant il y a, à proximité, de beaux vergers, de bonnes terres labou- 
rables, des oliviers très-productifs et des vignobles excellents. 

Le lendemain matin, un des novices me conduisit sur la montagne du 
Kedros qui atteint plus de 1800 et qui fait véritablement partie du 
massif du Psiloriti, malgré l’interposition de la vallée d’Asomatos ; nous 
remontèmes par une large vallée tertiaire à Amari, où commencent les 
calcaires inférieurs à lits de jaspe, sur lesquels on monte à une pelite 
plaine en vignes; celle-ci se termine dans les calcaires gris à un col d’où 
l’on débouche par une crevasse étroite, dans la plaine de Vrysæs qui est 
le fond d’un petit bassin de molasse’ d’eau douce qui s’élève à environ 
980%. Le village est déja sur les calcaires crétacés gris, parfois en 
bancs énormes, avec couches de schistes et lits de jaspe que l’on ne 
quitte plus qu’au sommet; à partir de 1200 la végétation des montagnes 
est très-manifeste par la présence fréquente des Berberis cretica, Astra- 
galus creticus, Euphorbia spinosa, au milieu de la végétation des plaines 
et des plateaux. « Kentro est une montagne pelée et sèche en apparence, 
dit Tournefort (2), quoiqu'il en sorte plusieurs belles sources , qui vien- 
nent se rendre à un gros village appelé Brices, c’est-à-dire les fontaines ». 
D’après la tradition il y en aurait cent une; je n’en vis qu’une seule aux 
deux tiers de la hauteur ; l’eau qui coulait fort peu, marquait 1408. Du 
sommet on a une vue un peu moins étendue que celle du Psiloriti, et dont 
je parlerai seulement pour dire que celui-ci se montre sous la forme 
d’un grand cône très-surbaissé et mamelonné , sans végétation , reposant 
sur un plateau assez uni qui présente à la vallée d’Asomatos des pentes 
rapides et de grands escarpements calcaires avec des arbres nombreux 
par-ci par-là. Je redescendis par ie même chemin et je quittai bientôt 
le monastère ; la plaine d’abord large se resserre, et après quelques 
coteaux tertiaires, j'arrivai à Visari. M. Phranghopoulo, pour lequel 
M. Barbieri m'avait donné une lettre, m'accueillit fort bien, et m’ins- 
talla dans une maison en réparation où il fit apporter notre diner. Il 


1) Rambles in Egypt and Candia, 1. W. p. 285. 


(2) Voyage au Levant , 1. X. p. 70. 


(199 ) 


me mena voir au-dessous du village, dans une petile plaine de cailloux 
roulés, les ruines d’une ancienne ville; il n’y a guère de conservé que les 
trois chœurs de l’église qui était plus grande qu'aucune de celles des 
villages de la Crète. 

Ascension du Psiloriti ou Ida; 11-12 août (1). — Je donne ici, 
comme préférable à une nouvelle rédaction faite à douze années d’inter- 
valle, la copie à peine modifiée d’une lettre que j'écrivis le lendemain à 
M. Millard, l’un des représentants de l’Aube à l’Assemblée nationale, 
en 1848 « Après avoir, en rédigeant les notes de la veille, attendu en 
vain notre agent consulaire de Rétimo , qui m'avait promis de venir avec 
moi sur l’Ida, je partis, à trois heures de l’après-midi, de Visari, dont 
la partie basse est à 3707 d'altitude, pour aller coucher sur un petit 
plateau situé dans les montagnes, et où il y avait, disait-on, une 
maison et un puits. J’avais avec moi mon domestique-interprète , et le 
neveu de mon hôte pour guide. Nous montâmes à Phourphouras, sur le 


terrain tertiaire qui s’élève encore au-dessus jusqu’à 600; puis, 


par un étroit sentier, nous gravimes le flanc des montagnes calcaires 
dénudées, en rencontrant, à 1,000, une abondante source qui mar- 


(1) Il ne sera pas sans intérêt de transcrire ici ce qu’ont dit de celte montagne les 
deux seuls naturalistes français qui l’aient visitée, Belon, vers 1550 et Tournefort, le 
3 juillet 1700. 

« Estans sus le coupet du mont Ida, dit Belon (fol. 16), le descriuismes comme 
s'ensuit. Le faiste du mont Ida est quasi pointu comme vne pome de pin, situé sur la 
summité des autres montaignes. Et combien que toute la masse de cette montaigne ariue 
iusques à l’vne et l’autre orée de la mer, et est appelée de ce nom Ida : toutes fois celle 
qui est la plus haulte par-dessus les autres, est celle qui particulièrement a obtenu ce 
nom. Il est bien vray que le mont Madara s’estend en plus grand’ largeur et grosseur 
que le mont Ida : ce néantmoins il n’est pas si hault eleué en l’air. Les Crètes ont 
changé le nom à ceste montaigne Ida, et l’ont nommé Psyloriti. Sur le susdict faiste 
au plus haut de la montaigne , il y a vne petite chapelle : mais ce n’est qu’vne mai- 
sonnette, qui est seulement faicte de pierres massonnées sans chaux, l’vne sur autre 
en manière d’yne voute, pour seruir de couuerture. Elle est en lieu si hault que 
souuentes fois les vents y soufflent si fort, qu’ils transportent les petites pierres de là. 
Van peu plus bas, au-dessoubz de ladicte chapelle , l’on voit vne planure enuironnée de 
montaignes de tous costez , en laquelle il vient grande abondance de pasturages, où 
les moutons et cheures de Crète s’engressent durant l’esté. Si quelqu’vn estant là monté 
sur ledict faiste de la montaigne, regardoit de toutes parts, peu s'en faudroit qu’il ne 
veist le circuit de l’isle , et aussi les autres isles circonuoisines de Crète, comme est 
Milo, Cerigo , Cicerigo et Cythera , et autres de l’Archipelago. » 

« Cette grande montagne qui occupe presque le milieu de l'ile, dit Tournefort, 


( 200 ) 
quait 44° 7, et dont je pris un peu d’eau par mesure de précaution. 
Au-dessus, nous traversämes un sol très-accidenté et rocheux présen- 
tant des chênes épineux et quelques pins qui forment une zone sur toute 
la partie supérieure de l’escarpement, de Thronos à Apodoulo et au- 
delà. Après une montée de près de quatre heures, nous arrivèmes sur 
le plateau en question, occupé, à près de 1,500 d’allitude, par des 
chênes qui ne s’élèvent pas plus haut. La maison se composait d’une 
huite en pierres sèches et d’un petit enclos pour les moutons, y attenant ; 
quant au puits, il était à une demi-heure de là, et l’eau n’en était pas 
potable. Je croyais pouvoir rester dans la prétendue maison ; mais il n’en 
fut pas ainsi; à peine y étions-nous depuis une seconde, que tous les 
trois nous apercûmes, moi mon pantalon, et mes deux compagnons 
leurs bottes, se couvrir de points noirs. En y regardant de plus près, 
nous vimes que chacun de nous était déjà possesseur de 200 à 300 puces. 
Comme vous le pensez bien, nous nous empressämes de sortir et de 
nous secouer avec soin. On se décida alors à faire une hutte de bran- 
chages dans l’enclos des moutons, dont les crottes bien sèches devaient 
nous servir de matelas; on alluma un grand feu qu’on eut soin d’entre- 


(p. 56), n’a rien de beau que son nom si fameux dans l’histoire ancienne. Ce célèbre 
mont Ida, ne montre qu'un gros vilain dos d’àne tout pelé : on n’y voit ni païsage, 
ni solitude agréable, ni fontaine, ni ruisseau; à peine s’y trouve-t-il un méchant puits; 
dont il faut tirer l’eau à force de bras , pour empècher les moutons et les chevaux de 
mourir de soif; on n'y nourrit que des haridelles , quelques moutons et de méchan- 
tes chèvres , que Ja faim oblige à brouter jusqu’à la Tragacantha, si hérissée de pi- 
quants, que les Grecs l’ont appelée Épine de bouc... De quelque côté que notre 
veue se portât , d’une hauteur à l’autre, il ne se présentoit que des fondrières et des 
abismes remplis de neige, depuis le règne de Jupiter, premier du nom. 

« Du sommet du mont Ida , qui est l’endroit de l’Isle le plusélevé, on voit la mer au 
S. et au N.; mais pourquoi se fatiguer si cruellement pour la voir-de si loin : cepen- 
dant c’est pour cette raison que dans la première antiquité , la montagne receut le nom 
d’Ida. Suivant Helladius on désignoit par ce mot toutes les montagnes d’où l’on décou- 
vroit beaucoup de pays; et suivant Suidas, on appeloit Ida, toutes les forêts dont la 
veue étoit agréable. Pour nous qui ne pensions pas dans ce temps-là à tous ces traits 
d’érudition , chagrins de ne trouver que des cailloux, et peu de plantes extraordinaires, 
n'ayant presque plus la force de mettre une jambe devant l’autre, pour n'avoir rien à 
nous reprocher, nous redoublämes tous nos efforts, pour aller jusqu’au dernier sommet, 
malgré la fureur de vents qui nous repoussoient ; et nous étans mis à l'abri d’une roche 
perpendiculaire , nous nous avisimes de faire du sorbet ,.…. après quoi, nous grim- 


pâmes avec plus de courage jusques à la pointe de ee rocher, quelqu’escarpé qu'il 
fût. » 


( 201 ) 
tenir toute la nuit, et nous soupâmes avec du pain, du fromage et du 
raisin que nous avions apporté, réservant l’eau pour le lendemain. Il 
faisait un vent très-violent, et, pour ma part, j’eus passablement froid ; 
je me réveillai tout transi, ce qui ne m'était pas encore arrivé en Crète. 

« Le lendemain mardi, à quatre heures et demie, nous parlimes pour 
aller au sommet de l’Ida. Le soleil n’était pas encore levé; peu d’ins- 
tants après cependant, les sommités des hautes montagnes de Sphakia, 
situées à plus de quatre myriamètres, devenaient purpurines, tandis que 
la base était à peine éclairée; peu après, les sommets blanchissaient en 
recevant les premiers rayons du soleil, ei la partie moyenne devenait 
purpurine à son tour. L’air était alors assez transparent, et j’apercevais 
bien distinctement le cap Spadha et même le cap Grabousa, le plus occi- 
dental de l’île, situé à près de dix myriamètres. Nous montâmes d’abord 
-sur un contrefort à pente assez rapide, puis ensuite, beaucoup plus 
péniblement, sur une immense pente droite formée d’abord par le ter- 
rain en place, dont la tranche des couches, inclinées de 50°, occasionne 
de grandes bandes horizontales alternativement blanchätres et grises, 
et, plus haut, par de véritables éboulis dont les fragments présentent 
habituellement de beaux exemples de corrosion des roches calcaires. 
Pendant que nous gravissions le flanc occidental de la montagne, le 
soleil s’élevait aussi sur l'horizon du côté opposé, et j'eus le plaisir de 
voir se raccourcir graduellement l’ombre, d’abord gigantesque, projetée 
par le massif du Psiloriti, sur le plateau accidenté de Rhethymnon. 
Cette pente, qui est parfaitement visible de toute la vallée d’Asomatos, 
est sans doute le gros viluin dos d'âne dont parle Tournefort. La végé- 
tation est plus pauvre ici qu’au Volakia : les espèces dominantes sont les 
Berberis cretica, Astragalus creticus et Acantholimon androsaceum. 
Arrivés au haut, nous tournâmes au S. pour nous élever sur le cône de 
l'Ida, proprement dit, à pente plus douce. 

« Nous étions monté pendant près de trois heures, lorsqu’à sept 
heures et quart j’atleignis la plus haute sommité, couronnée par la petite 
chapelle en pierres sèches de Stavro ou de la Croix, assez bien entre- 
tenue , et avec un petit enclos à côté; on vient y dire la messe une ou 
deux fois dans l’année, réminiscence sans doute de l’antique culte des 
hauts lieux. L'air était à 41° 5 et il faisait véritablement froid à l'ombre 
quoiqu'il y eut peu de vent. Le baromètre était alors à 572 mill. 8, ce 
qui donne une hauteur de 2500r environ pour ce point culminant de la 
Crète. À dix heures et quart, au départ, le thermomètre marquait déjà 


( 202 ) 
A7 et le soleil était fort chaud. Nous déjeünämes avec la viande, le 
raisin et le vin que nous avions apportés, mais sans eau , car je ne pus 
découvrir à portée la moindre trace de neige. 

« De la chapelle, on voyait parfaitement la mer au N. et au S. de l’ile, 
mais la brume légère qui existait dans l’atmosphère empêchait de voir 
les deux extrémités. Au N., j'avais au-dessous de moi, d’abord, un haut 
pays accidenté, blanchâtre, sans végétation , puis un autre plus bas et 
plus rocheux, recélant Anohia, Axos, etc.; puis la partie plus basse où 
passe la route de Megalo-Kastron à Damasta et qui se continue par la 
plaine du Mylopotamos; derrière, se projetait sur la mer, la chaîne cô- 
tière du Strombolo et du Kouloukouna. Au-delà de la vallée de Thronos 
qui débouche à la mer bien avant Rhethymnon, dont on aperçevait bien 
la citadelle , tout le pays qui s’étend à partir des racines de l’Ida, res- 
semblait à une grande plaine accidentée relevée vers le $. La vue , dans 
cette direction, ne s’étendait pas au-delà du cap Dhrapano, de la baie de 
Soudha et du front blanchäâtre , assez large, des montagnes de Sphakia. 
Au S.-0., le Kedros formait un massif, assez élevé encore, qui masquait 
une partie de la côte; cependant on apercevait bien les caps des envi- 
rons de Franco-Castello, les deux îles Gaudhos , assez unies, les Paxi- 
raadhi rocheuses et la vallée d’Asomatos qui débouche à la mer près de 
Dhibaki. Dans le $., une partie de la plaine de Messara était visible ainsi 
que la chaîne côtière dominée par le mont Kophinos. Vers l’E., la vue était 
très-masquée par de hauts contreforts de l’Ida et par un autre sommet 
presque aussi haut, situé à 2 kilom. environ; elle était bornée par les 
montagnes de Lassiti qui étaient même en partie couvertes d’épais 
nuages blancs. Au N.-E., Dhia paraissait un bas plateau tout blanc; 
Megalo-Kastron était masqué par les montagnes, mais la côte au-delà 
se dessinait bien sur la mer jusqu’au cap Haghios-Joannes qui se perdait 
dans les brumes. 

« Après trois heures passées au sommei pour mes diverses observa- 
tions, je partis à dix heures et quart pour Visari; nous redescendimes par 
une autre pente semblable à la première; le vent était si fort qu’il enleva le 
chapeau de paille de Michiele que nous vimes rouler pendant longtemps 
au-dessous de nous. Vers le bas, le guide se donna un plaisir fort goûté 
des pasteurs dans les montagnes , celui de mettre le feu aux Astragalus ; 
pour ma part, ce ne fut pas sans quelque étonnement que je vis ces buis- 
sons tout verts prendre feu et donner en pétillant des gerbes de flammes 
et de fumée , aussitôt après avoir été touchés par une simple allumette ; 


a a tte ee 


( 203 ) 
il est vrai que les pétioles des feuilles , ligneux et desséchés aident beau- 
coup à la combustion. Nous repassämes devant la fontaine où je pus enfin 
me désaltérer et après six heures, pendant lesquelles nous étions descendus 
d’un peu plus de 2000w, nous étions de retour chez M. Phranghopoulo. 

« Au mont Ida se rattachent bien des souvenirs mythologiques, puisqu'il 
est, si je me le rappelle bien , le berceau de Jupiter ; toutefois rien n’est 
moins poétique que son ascension comme vous pouvez en juger par ce 
que je viens de vous en dire. Il en est de même, je crois, pour bien d’au- 
tres lieux qu’il vaudrait mieux ne pas visiter, afin de pouvoir se donner le 
plaisir de faire des hypothèses plus ou moins séduisantes. Mais je m’a- 
perçois que j'ai oublié de vous dire de quoi est formé le mont Ida ; c’est 
par un calcaire compacto-grenu, gris, probablement crétacé, mais que 
J'appellerai peut-être Idéen, pour ne pas faire de faux rapprochements ; 
le cône terminal est formé par des calcaires mélangés de calschistes, ou 
bien grenus blanchâtres, qui renferment des nodules de la pierre à aigui- 
ser de Samaria et qui plongent de 20° au N.-E. Belon écrivait, il y a 
trois siècles, qu’on y avait trouvé le Ductylus idœus et autres bélemnites 
semblables à celles du Luxembourg (lias); quant à moi, je n’ai pas 
été si heureux et je crains bien qu’il n’y ait eu là quelque mystification 
ou illusion. » 

Traversée de l’Abadhia, 13 août. — Après le déjeüner, je quittai 

-Visari, et, traversant les molasses, j’arrivai sur un contrefort du Psilo- 
riti qui ferme la plaine tertiaire et qui est formé par le macigno i{rès- 
développé et les calcaires rougeâtres inférieurs. Là, on entre dans 
V’'Abadhia, sorte de petit district dont Olivier considérait la population 
comme un reste des Arabes, qui avaient occupé l’île dans les IX: et X° 
siècles, croyant, d’après des on dit, qu’ils avaient une physionomie 
particulière et qu’ils parlaient la langue arabe. Leurs habitudes de bri- 
gandage envers les villages voisins, le massacre de l’équipage et le pillage 
d’un navire anglais qui avait voulu faire de l’eau sur leur côte, en 1772, 
l'avaient confirmé dans cette opinion. Je ne m’aperçus de rien de par- 
ticulier en suivant le grand chemin et en passant dans plusieurs de leurs 
villages; mais je préfère laisser parler M. Fabreguettes, consul de 
France, qui y était passé, une dizaine d’années auparavant (1) : 

(J'avais pour but principal de rechercher ces Abadhiotes dont plu- 
sieurs auteurs ont parlé et qu'ils regardent comme les descendants des 


(1) Bulletin de la Sociélé de Géographie, 2e série, t. IL, 1834, p. 125. 


( 204 ) 
Sarrazins. Je me suis donc arrêté dans trois villages de l’Abadhia : Sata, 
Vatiaco et Apodoulo. L’Abadhia est le nom donné par les habitants à 
une des pentes sud-est du Mont-Ida. Sans être inaccessible, comme 
certains points des Monts-Sphakia, l’Abadhia offre un refuge assez sûr 
aux malfaiteurs , et jadis c’était là que se cachaient les Turcs que la 
justice poursuivait, comme les Grecs coupables se réfugiaient à Sphakia. 

« Les Abadhiotes, tous Turcs, avaient donc la mauvaise réputation 
des Sphakiotes, tous Grecs; mais moins nombreux qu’eux, et, comme 
je viens de le dire, moins bien défendus par la localité, ils n’échappaient 
pas toujours aux armes des Grecs de la plaine de Messara qui finissaient 
par se venger, au moyen de quelque irruption soudaine, des nombreux 
crimes commis sur leurs personnes ou sur leurs propriétés par ces 
féroces montagnards. 

€ Il est possible que l’Abadhia étant d’un abord difficile, les Sarrazins 
aient pu y échapper aux poursuites des vainqueurs, mais aujourd’hui 
rien ne distingue les habitants de l’Abadhia du reste des Tures de l’île ; 
ceux qui connaissent parfaitement la langue des Crétois n’établissent 
aucune différence entre la manière de parler des Abadhiotes et celle des 
autres paysans. Il est donc permis de croire que les Sarrazins ne se sont 
pas perpétués dans l’Abadhia comme les autres Grecs en Sphakia ; car 
ici tous les voyageurs, familiers avec la langue grecque, retrouvent à 
chaque instant, parmi les femmes surtout, des traces du dialecte 
dorique. » 

Quoiqu'il en soit, le sol, traversé par le chemin, est accidenté et 
toujours formé par le macigno, excepté à Apodhoulo qui est situé sur une 
langue peu large de calcaire, à 450" d’altitude. Après Sahta, j’atteignis 
enfin les molasses tertiaires de la plaine de Messara, à l’église de Klima, 
qui est à peine à 200%. Je descendis sur un sol incliné de sable argi- 
leux rouge, avec débris de macigno ; un vallon montre le calcaire ter- 
tiaire peu avant Dhibaki, où les terres sont blanches. Le kapetania ayant 
fait des difficultés, j’allai m’installer au corps-de-garde arnaoute, où je 
fus parfaitement accueilli. Il est construit en planches et élevé de plus 
de trois mètres au-dessus du sol, à cause des fièvres intermittentes qui 
sont attribuées aux émanations du sol et du Hiero-Potamos; je my 
trouvai parfaitement, mais il n’en fut pas de même de Michiele; il prit 
une fièvre tierce qui cessa assez promptement, toutefois, lorsqu'il put 


être traité à Megalo-Kastron. 
Vor RAULIN. 
{La suile au prochain numéro). 


( 205 ) 


NOTE SUR LE SGIRPUS DUVALIT Hop». 


DE VAYRES (Gironde )‘: 


Par M. CHarzes DES MOULINS. 


Le projet que j'ai formé d'adresser à M. le D' F. Schultz ( de Wissem- 
bourg ) pour son Herbier normal, des échantillons en nombre suffisant 
du beau Scirpus que je récoltai à Vayres en 1854, m'engage à exposer 
dans une note spéciale les raisons qui. m'ont déterminé à le rapporter 
au Scirpus Duvalii Hopp. 

Cette détermination est conforme à la première impression que pro- 
duisit la vue de la plante sur M. Du Rieu. Cet observateur dont le coup- 
d'œil est si juste, avait à citer le Sc. Duvalii comme espèce probable- 
ment existante dans notre département ( Notes détachées sur quelques 
plantes de la Flore de la Gironde ; in Act. Soc. Linn. Bord, T. XX, 
p. 61; Décembre 1854), et il disait de ce Scirpus, dont je n’avais 
pas encore terminé l'étude, qu'il « paraît se rapprocher beaucoup du 
« Duval, si ce n’est lui-même ». 

C'est au bord de la Dordogne, rive gauche, sur le talus de vase 
liquide, recouvert deux fois le jour par la marée, que je trouvai cette 
belle espèce en fleurs, le 20 Juillet 4854, croissant en abondance au 
milieu des Arundo phragmites, de quelques Saules têtards et autres 
végétaux communs sur les rives boueuses ( mais sans mélange d'aucune 
autre Cypéracée }, à l’extrémité du potager du château de Vayres, 
arrondissement et canton de Libourne. 


(1) J’emploie le nom spécifique Duvalii, comme plus connu et plus familier aux 
botanistes que carinalus Sm., bien que ce dernier doive probablement prévaloir, si 
du moins il demeure établi que ces deux dénominations sont synonymes. Je ne 
m'occupe , dans cette note, que de l'espèce en clle-même, et nullement du nom 
qu’elle doit porter. 


Tome XXII. 16 


( 206 ) 

Les chaumes les plus grands que j'aie obtenus dépassent un peu la 
longueur de 2" 10€ à partir du rhizôme, et ce qui me frappa dans leur 
aspect, ce fut la gracilescence du chaume et sa couleur d’un beau 
vert nullement glauque, combinées avec l’exiguité de l’anthèle compa- 
rativement à la taille de la plante, — exiguité qui semblait exclure l’idée 
du Scirpus lacustris. En outre, l’appareïl floral tout entier avait une 
teinte d’un brun plus foncé, plus noirâtre que dans cette dernière 
espèce; mais tout cela ne me mettait pas en possession d’un caractère 
spécifique de quelque valeur. Il n’en fut plus de même lorsque j’eus 
entre les mains quelques chaumes : ceux-ci sont cylindriques dans le 
bas, se compriment peu à peu vers leur milieu, et enfin deviennent 
trigones dans leur partie supérieure, mais trigones à angles très-obtus, 
l’une des faces étant plane et même légèrement concave, et les deux 
autres sensiblement convexes. 

C’est là le caractère que les auteurs assignent au chaume du Scrrpus 
Duvazu Hoppe; Kunth, Enum. n° 24; Gren. et Godr. F1. Fr. IE, p. 373. 
Schultz, Archiv. F1. de Fr. et d’Allem. I. p. 71 (1844); Koch, Syn. 
ed 2 n° 11. — (Sc. trigonus Nolt. non Roth); Koch, Syn. ed. 4° n° 10; 
Schultz, Exsice. n° 173. — Heleogiton trigonum Rchb. F1. germ. 
exeurs. [. p. 717. n° 535. — Scirpus carinatus Smith, Engl. Bot., 
Steudel, nomencelat.;, Lloyd, FL. Loire-[nférieure, p. 276 ; Nyman, 
Syll. europ. p. 391. n° 33 ). 

C’est aussi le caractère exprimé par la belle planche de Reichenbacht, 
Icon. Flor. German. T. 8. p. 42. n° 124, tab. CCCVIJII (1846), sous le 
nom de Sc. Duval. 

Et je n'hésite pas à dire que c’est là l’un des deux caractères essentiels 
de l'espèce, parce qu’il est plus intimément lié à la constitution de la 
plante, à sa nature profonde , que ne le sont tous les caractères de végé- 
talion dont on a fait usage ( et qui sont si variables dans les végétaux 
aquatiques ! ) pour la distinction des formes dé ce groupe difficile. — 
L'autre caractère essentiel est la forme de l’akène. 

Ce sont précisément les distinctions plus ou moins futiles dont je viens 
de parler, qui ont rendu un peu laborieuse la détermination de la plante 
de Vayres, et qui me forcent à entrer dans quelques détails pour justi- 
fier le parti auquel je me suis arrêté. 

Étudié minutieusement dans toutes ses parties, le Scirpus de Vayres 
semble tour à tour devoir être rapproché ou éloigné de deux autres 
bonnes espèces : 


( 207 ) 
4° Il se rapproche du Sc. lacustris 

par le sommet barbulé du filament de ses étamines, ou, si l’on 
veut , par l’apex cilié de ses anthères ; 

par ses soies hypogynes blanches ; 

par la forme ( en plan ) de son akène ; 

par ses stigmates fréquemment au nombre de trois ; 

par ses gaînes qui s’allongent souvent en pointe folüforme ; 

par sa couleur verte, non glaucescente. 

Mais il s’en éioigne 

par la forme ( en tant que solide ) de son akène , lequel est 
comprimé, applati au côté interne, bombé de côté du dos, mais non 
trigone, c’est-à-dire , qu’il n’est pas caréné sur le dos; 

par son chaume qui n’est pas cylindrique dans toute sa longueur, 
mais qui est semi-lérèle comme je viens de l’expliquer ( cylindrique en 
bas, puis comprimé, puis enfin obtusément trigone en haut ); on peut 
même dire que, les angles devenant presque aigus sous lanthèle, le 
chaume y devient presque friquètre. 

20 Il se rapproche du Sc. Tabernæmontani (1) 

par le sommet barbulé du filament de ses étamines ( si l’on admet 
le Tabernæmontani comme presque tous les auteurs que j'ai consultés, 
mais non comme MM. Grenier et Godron qui, seuls à ma connaissance, 
lui attribuent les anthères nues au sommet }); 

par ses stigmates plus fréquemment au nombre de deux que de 
trois. 


(1) Je n’ignore pas que quelques botanistes d’un haut savoir refusent d'admettre 
le Sc. Tabernæmontani au rang d’espèce distincte; mais il m’est impossible de me 
ranger à leur manière de voir, à cause de la forme de l’akène. Que celui-ci devienne 
trigone , quand la fleur se trouve avoir trois stigmates , je le concçois volontiers : 
c’est une anormalité fort explicable. Mais, dans des localités également humides, 
les deux plantes ont habituellement l’une deux, l’autre (rois stigmates et la forme 
correspondante dans le fruit : il y a donc là, je crois, deux nalures spécifiques, ou 
pour le moins deux fortes variétés. Si l’on en vient à faire bon marché de la forme 
de l’akène, comment se défendra-t-on d’en faire autant pour la forme du chaume ? 
De proche en proche on arriverait à réaliser le vœu de Cassini, en réduisant les 
genres à la condition monolypique, et ce n’est pas là un résultat désirable. On mé- 
connaîtrait tout autant, ce me semble, la réalité des faits naturels en outrant l’ex- 
cellent principe des limites jusqu'à un cerlain point flexibles de l'espèce, qu’en 
outrant le principe tout aussi excellent de la fivilé de ses caractères essentiels. 


( 208 ) 
Mais il s’en éloigne 
par son akène de même forme en tant que solide, mais moins 
élargi au sommet ; 
par ses gaînes à pointe foliiforme ; 
par sa couleur verte, non glaucescente; 
par son chaume non partout cylindrique, mais semi-térète comme 
il a été dit-plus haut. 
Enfin , il répond aux descriptions du Sc. Duvalii 
par son chaume qui change de forme en allant de la base au 
sommet; 
par sa couleur verte; 
par ses gaînes à pointe foluforme ; 
par ses stigmates plus souvent au nombre de deux ; 
par son akène non trigone et qui n’est pas très-élargi au sommet. 
Mais il s’en éloigne 
par l’apex cilié de ses anthères. 

On le voit, ce dernier caractère (apex cilié) est le seul qui semble 
faire obstacle à la détermination ; tout le reste est clair et fixe la place 
de la plante de Vayres dans l’espèce Duvalii. 

Je dis tout le reste, parce qu’on a fait mention d’autres caractères, 
dont on me permettra de proclamer l’inanité, au moyen de quelques 
observations de fait : 

4° Le renflement notable de la base du chaume à l’aide des gaines 
lèches qui l’embrassent, renflement si fortement accentué dans la figure 
de Reichenbach. 

J’objecte que, sur les mêmes rhizômes, je trouve des bases renflées et 
des bases non renflées, tant dans la plante de Vayres que dans les 
Scirpus lacustris et Tabernæmontani les mieux caractérisés ! 

20 Les points rouges saillants dont les écailles florales devraient être 
parsemées dans le seul Sc. Tabernæmontani, suivant la plupart des 
auteurs. 

J'objecte que ces points rouges existent ou manquent indifféremment 
dans les trois espèces ; — que, si le Scirpus de Vayres n’en montre pas, 
tandis qu’on les trouve sur l'échantillon du Sc. Duvalii des centuries de 
Schultz (sous le nom de {rigonus) et sur des Sc. Duvalii étiquetés par 
M. Boreau, Reichenbach dit précisément (Icon., t. VIII, p. 42 ), qu'on 
voit quelquefois ces points rouges sur le Duvalii ; — qu’enfin, Reichen- 
bach ajoute que, d’après M. Dœll, le Duvalii serait une simple variété 


( 209) 
du lacustris, espèce à laquelle les auteurs , en général, n’accordent pas 
l'existence de ces points rouges. 

3° La taille moins élevée qu’on assigne au Sc. carinatus Sm. (1809) 
qui est devenu plus tard Sc. Duvalii (1814), d’après Custor in Gaudin, 
Flor. Helvet, t. VI, appendix, p. 340. 

J’objecte que Reichenbach (loc. cit.) dit du Duvalii : calamo robus- 
hiore. — On dit souvent aussi que le Sc. Tabernæmontani est plus petit 
que le lacustris ; mais Custor et Gaudin lui donnent une variété B major, 
tandis qu’ils donnent au lacustris une variété plus petite, 8 Bodamicus. 
Tout cela est donc sans valeur spécifique. 

4e Le nombre des stigmates, caractère auquel je crois superflu de 
m'arrêter puisque, d’après les auteurs, il est variable, et cela seulement 
dans les limites du plus souvent et du moins souvent. 

9° L’appendice foliiforme qui termine les gaînes. 

J’objecte que Gaudin a dit, loc. cit., p. 340 : Scirpi Duvaliüi vaginæ 
supremæ mod aphyllæ, modè foholo plus minus longo terminatæ sunt. 
Cependant, à la page précédente, il avait dit que le Sc. lacustris, B 
Bodamicus « vaginà supremä verè folüferd à Scirpo Duvalii differt, » 
et encore que cette même variété « à Scirpo Tabernæmontani dignoscitur 
« vaginis culmeis foliferis. » Enfin, et toujours dans la même page 339, 
il avait transcrit les notes fournies par Gustor, où on lit cette phrase : 
« Vagina suprema Scirpi lacustris suBINDË, Sc. Duvalii sæPë, Sc. Taber- 
« næmontani NUNQUAM ?n foliolum breve desinit. » 

Ces citations suffiront, je présume , pour décider les botanistes à ne 
plus tenir compte de ces minuties au point de vue des caractères spéci- 
fiques de ce groupe. 

Mais est-il bien vrai que l’apex cilié ou non cilié des anthères ait une 
valeur plus grande ? J'avoue tout simplement que je ne le crois pas. 
Voici mes raisons : 

1° Custor in Gaud, loc. cit., p. 337, dit du Sc, Tabernæmontani & 
minor : « Anthera apice acuto sub lente ciliis 1-5 tenuissimis brevissimis- 
«que barbulato ; » — et de sa var. B major, « Antherarum apicibus 
€ CALVULIS..... cils 2-8 tenuissimis brevissimisque obsito, nec verè 
« calvo. » 

20 Gaudin (loc. cit., p. 339), discute les observations communiquées 
par Gustor, et il dit que la variété £ Bodamicus du Sc. lacustris diffère 
du Sc. Tabernæmontani , en ce que « Antheræ apice , lentis ope, tenuis- 
€ Süni ciliolatæ deprehenduntur. » Or, Reichenbach, loc. cit., p. 42, 


( 210 ) 

dit que le Se. Duvali diffère du Tabernæmontani « antherarum apicibus 
€ NUDIS NEC CILIATIS. » Faudrait-il conclure de là que le Sc. Tabern«æ- 
montani de Reichenbach n’appartient pas à la même espèce que celui de 
Gaudin ? Je suis bien loin de le penser, et j'aime bien mieux croire que 
ce caractère est variable et sans importance. 

3° Gaudin (loc. cit., p. 840), dit du Sc. carinatus Sm. (Duvalii Hopp.): 
« Aniheræ ciliis omnind carere vinenrur, » et plus bas, « Sc. carinaius 
€ à lacustri..…. antheris CALVIS...…. differt. » 

4 Kunth, Enum. (loc. cit.) dit du Sc. Duval : « antheris apice 
€ SUBDENTICULATIS. » 

9° Koch, Syn. {re et 2e édit., dit du Sc. Tabernæmontani : « Antheræ 
non semper planè imberbes, et M. Boreau, FI. du Centre, 2° édit. : 
« Anthères non barbues, ou légèrement ciliées, » 

6° ( Et ceci me semble décisif), M. Du Rieu a reçu de M. le capi- 
taine Petit un très-bel échantillon recueilli dans la principale localité 
classique française pour le Sc. Duvalii (Strasbourg), et il y a vu l’apex 
de l’anthère fortement cilié. L’inflorescence de cet échantillon est très- 
fournie et les épillets sont courts et petits (comme dans la planche des 
Icones de Reichenbach). Cette particularité donne à la plante un aspect 
un peu différent de celui de la plante de Vayres, qui a l’anthèle peu 
fournie et les épillets un peu allongés. Celle de Strasbourg est moins 
vigoureuse sous le rapport du rhizôme, et sa teinte est plus claire, plus 
rougeûtre, moins brune. Ces petites variations sont sans importance et 
dépendent du milieu où croît la plante; elles sont très-fréquentes ehez 
la plupart des Cypéracées. 

7° Enfin, MM. Grenier et Godron réunissent sous le même nom spéci- 
fique les Sc. lacustris et Tabernæmontani. Je crois cette opinion inad- 
missible, à cause de la différence des akènes ; mais je cite la réunion 
qu’ils proposent comme une preuve du peu d'importance que des 
botanistes éclairés attachent à la pubescence des anthères. Il n’est pas 
inutile de remarquer , en effet, qu’à l'exception de Kunth, dont l’auto- 
rité, en matière de spécification, est peu considérable, aucun des au- 
teurs que je suis à même de consulter n’a fait entrer l’apex cilié ou non 
cilié dans une diagnostique latine régulière : c’est parmi les observations 
que ce caractère est relégué. 

Je crois donc que cette façon d’agir est la plus sage et qu’il faut refuser 
à ce caractère, comme aux cinq caractères de végétation que j’ai discutés 
plus haut, toute valeur essentielle dans la délimitation de l'espèce. 


- 


(244) 

Je crois enfin qu'il faût adopter comme conclusions résultantes de 
l'étude ci-dessus, les deux règles suivantes : 

I. Accorder (dans ce groupe du genre Stirpus) les premiers rangs 
d'importance spécifique à la forme du chaume et à la forme de l’akène. 

IL. Considérer comme variables et comme dépourvus de valeur spéci- 
fique , l’apex #u ou barbulé de l’anthère , le stigmate bi- ou tri-fide, les 
points rouges saillants sur les écailles florales , la présence ou l’absence 
de la terminaison foliiforme des gaînes, et le renflement basal des 
chaumes. 

Reichenbach (loc. cit., p. 42), attribue encore au Sc. Duvalii un ca- 
ractère qui se retrouve dans la plante de Vayres, et que je n’ai pas fait 
entrer dans la discussion ci-dessus, parce que les autres auteurs n’en 
parlent pas : calumo molli omninû comprimendo nec ut affinium spe- 
cierum tactui resistente. 

Je ne puis qu’engager les personnes qui voudraient étudier à fond ce 
groupe d'espèces , à lire avec attention les notes si consciencieusement 
élaborées que Custor adressa à Gaudin et que ce respectable auteur 
inséra textuellement, en les discutant avec l’aménité polie qui lui était 
habituelle, dans l’appendice au 1% volume de sa Flora Helvetica 
( T. VI, pp. 337-340 ; 1830 ). Cette admirable étude, due à deux bota- 
nistes d’un mérite éminent , fait connaître beaucoup de menus détails 
comparatifs que je n’ai pu transerire ici, mais qui me semblent de nature 
à appuyer fortement les conclusions générales dont je viens de proposer 
l'adoption. La glaucescence elle-même du Sc. Tabernæmontani, qui 
passait généralement pour un bon caractère et qui, comme le remarque 
Custor ( p. 338 }), paraïîtrait devoir tenir à la nature intime de la plante 
( quæ proprietates characterem ex intimä plantæ naturä procedentem 
innuunt ), reçoit quelques atteintes à son importance spécifique, par 
le fait des exemples que l’observateur cite; et c’est ce qui m’a déter- 
miné à ne pas lui donner place dans la discussion. 

En terminant cette note, j'espère qu'il me sera permis de faire 
lapplication des conclusions que j'ai proposées, à des échantillons que 
je crois pouvoir considérer comme authentiques , puisqu'ils sont distri- 
bués par des botanistes éminents. 

Ainsi, je classe dans le 


SCIRPUS TABERNÆMONTANI Gmel. 


1° Le Scirpus découvert par M. Du Rieu dans les marais du Teich 


(2142) 
( bords du bassin d'Arcachon ) et qu’il a distribué sous ce nom aux élèves 
de son Cours de Botanique rurale. 

Cette plante semblerait répondre parfaitement, par le renflement 
basal de ses chaumes , et par l’apex nu de ses anthères , au Se. Duvalir 
de MM. Grenier et Godron et des Icones de Reichenbach, mais non pas 
au Duvalii de Kunth, puisque cet auteur lui attribue des anthères sub- 
denticulées au sommet. — Et, en effet, M. F. Schultz déclare ( Archiv. 
FI. de Fr. et d’Allem. I, p. 71; 1844 ) qu’il n’y a pas identité entre le 
Sc. Duvalii Hopp. etle Sc. trigonus Roth , que la plupart des auteurs 
lui donnent pour synonyme. Il dit que c’est au Duvalii Hopp. que se 
rapporte son échantillon n° 173 ( Exsicc. F1. Gall. et Germ.) ; mais, par 
malheur, cet échantillon ( celui du moins qui m’est échu ) n’a pas 
conservé une seule anthère , et je ne sais si c’est par les anthères que 
M. Schul{z distingue le {rigonus Roth du Duvalii Hopp. ( Koch, dans 
sa re et sa 2e édition, considère ces deux noms et le carinatus Smith, 
comme synonymes, ainsi que le fait Reichenbach dans ses Icones ). 

Le Scirpus du Teich ayant le chaume partout cylindrique et les 
anthères nues au sommet, n’est identique ni au Duval des auteurs, 
ni au Duvalii de Vayres, ni au Tabernæmontani de M. Boreau qui a les 
anthères barbues ; mais bien au Tabernæmontani de MM. Grenier et 
Godron que j’ai recueilli depuis bien des années à Blaye et à la Bastide 
(Gironde) et qui réunit les trois caractères : chaume cylindrique, 
anthères nues, écailles rehaussées de points rouges. 

20 L’échantillon n° 172 ( Sc. Tabernæmontani ) des Exsiccata de 
M. F. Schultz. 

3° Le Sc. lacustris B glaucus Goss. et Germ. Flor. paris.; échantillons 
de Mennecy ( Seine-et-Oise ) distribués par M. A. Ramond (sans anthères 
conservées ). / 

Tous ces échantillons, je le répète, sont pour moi Sc. Tabernæmon- 
ani, parce qu’ils ont le chaume partout cylindrique, et l’akène com- 
primé, non trigone , fort élargi au sommet. 

Je classe au contraire dans le 


Scirpus Duvazur Hopp. 


4° Les échantillons d'Angers, distribués par M. Boreau sous le nom 
de Sc. Tabernæmontani, et ceux de l'embouchure de la Loire, distri- 
bués par le même botaniste sous le nom de Sc. Duvalii , parce qu'ayant 
également le chaume semi-térèle dans sa partie supérieure et l’apex de 


(213) 
l’anthère barbulé ( dans échantillon étiqueté par lui Tabernæmontani ; 
celui étiqueté Duvalii n’a plus d’anthères ), ils sont identiques entr’eux 
et identique à la plante de Vayres. 

20 L’échantillon n° 173 des Exsiccata de M. Schultz, nommé sur 
l’étiquette trigonus Roth, et dans les Archives Duvalii Hopp. ( sans 
anthères conservées ). 

3 Enfin , le Scirpus de Vayres. 

Tous ces échantillons, je le répète , sont pour moi Sc. Duval, parce 
qu’ils ont le chaume semi-térète dans sa partie supérieure , et l’akène 
comprimé , non trigone, moins élargi au sommet que dans l’espèce 
précédente. 

Enfin , je crois pouvoir déduire des diverses descriptions des auteurs, 
que le Scirpus lacustris, essentiellement caractérisé par son chaume 
partout cylindrique et par son akène gros, {rigone, non comprimé, 
présente de notables variations dans la forme et la quantité de la pubes- 
cence de l’apex et ses anthères. 


Bordeaux, le 20 Mars 1858. L 
CxarLes DES Mouins. 


——RA@/O/XIDE—— 


QUESTIONNAIRE 


RELATIF AUX 


CÉTACÉS DU GOLFE DE GASCOGNE, 


Rédigé à Bordeaux par M. D.-F. Escaricar, professeur à l’Université de 
Copenhague, dans l’intérèt de la publication qu’il prépare sur ces animaux, 
et inséré dans les Actes de la Société Linnéenne, sur la demande de M. 
Geffroy, professeur à la Faculté des Lettres et Membre de l’Académie, par 
décision du Conseil d'Administration de la Société, qui désire contribuer 
ainsi à donner de la publicité au vœu exprimé par le savant cétologue 
danois. 


A. Quant aux Baleines : 


1. Ya-t-il des personnes qui se rappellent avoir vu, dans le golfe de 
Biscaye, de grandes et grosses Baleines à tête immense et sans nageoire 
au dos (vraies baleines ou baleines franches) ? 


( 214) 


2, Ne reste-t-il pas, conservé dans les musées ou chez les particuliers, 
provenant de l’ancienne pêche à la Baleine sur les côtes du golfe, quel- 
ques os, par exemple, des mâchoires inférieures (vulgairement réputées 
côtes) montées en forme de portes cochères? N’en trouverait-on pas 
enfouies en terre ? 

3. Ne trouve-t-on pas, enfouis en terre ou gardés par les paysans, des 
coquillages appartenant à des Cirripèdes parasites des Baleines ? Chaque 
pièce de cette sorte, même un fragment, serait importante, puisqu'on 
en pourrait induire l'espèce de Baleine. Ces coquillages s’appellent chez 
les zoologistes : T'ubicinella balænarum, Diadema balænaris et Coronula 
balænaris. 

4. Trouve-t-on dans la mer de Biscaye, en certaines saisons, de 
petits mollusques (Ptéropodes) nageant librement, ou des Crevettes en 
très-grande quantité, pouvant servir de nourriture aux Baleines ? 


B. Quant aux Marsouins : 


1. Les Marsouins qui se voient dans le bassin d'Arcachon sont-ils de 
véritables Marsouins (Phocæna) ou ne sont-ils pas plutôt des Dauphins 
(Delphis) ? 

Un crâne, même mutilé, ou seulement une dent, suffiraient pour en 
juger. 

2. Est-ce que les Marsouins se trouvent en toute saison dans le bassin 
d'Arcachon ? Y sont-ils plus abondants dans une certaine saison que dans 
une autre? Et dans ce dernier cas, pourrait-on fixer l’époque de leur 
arrivée et celle de leur départ ? 

3. Leur apparition ne correspondrait-elle pas avec celle du Royan ? 

4. Y a-t-il des données historiques rappelant une pêche régulière de 
ces Marsouins ou Dauphins, à l’époque où leur chair servait encore de 
nourriture aux habitants ? i 

5. Un ou deux squelettes de ces animaux, préparés même grossière- 
ment, la queue, la tête, les ailerons du dos, et les nageoires pectorales 
laissés intacts, seraient très-désirables. 


Bordeaux, Juillet 1858. 


NOTE SUR LE GENRE SPHENTA Turrow, 


Par M. €. RÉCLUZ, membre correspondant. 


Ce genre de Turton n’a pas été généralement adopté, et plusieurs 
de ceux qui s’en sont occupés n’ont vu, dans les espèces de l’auteur du 
British Bivalves , que des Saxicaves et de jeunes Myes. Obligé par nos 
études sur les mollusques marins de la France de rechercher les motifs 
de ce rejet, il nous est arrivé de pouvoir examiner à la fois l’animal et 
la coquille d’une des principales espèces de ce genre et d’en apprécier 
les caractères. De cet examen , que nous avons fait avec le plus grand 
soin , est résulté pour nous la preuve que le genre Sphénie mérite d’être 
maintenu; on en jugera par l’exposé des caractères génériques qui ont 
servi à notre étude; ils sont tirés du 


SPHENIA BENGHAMI, Turton, Brit. Bivaiv. p. 36, pl. 49. f. 3 
et pl. 3 f. 4. 5. 


COQUILLE inéquivalve, inéquilatérale, béante au côté postérieur, 
recouverte d’un épiderme qui la déborde en arrière. CHARNIÈRE dissimi- 
laire, sans dents cardinales : Valve droite, portant un chondrophore 
arrondi (1) obliquant en arrière et en dedans, sous le sommet, à bord 
épaissi en avant, très-mince et peu apparent en arrière; valve gauche , 
une fossette pour loger la saillie antérieure du chondrophore de la 
valve opposée , et en arrière un chondrophore en lame triangulaire, 
horizontale, quelquefois flabelliforme, prolongée souvent par une dent 
latérale lamelleuse, diminuant graduellement en pointe à son extré- 
mité. Ligament double ; l’externe très-court, situé entre les sommets; 
l’interne robuste , fixé sur les chondrophores. IMPRESSIONS MUSCULAIRES. 
subsimilaires, alternes : l’antérieure ovale -arrondie située près de 


l'angle inférieur des valves ; la postérieure plus grande, circulaire et sub- 


(1) Nous avons donné ce nom de Chondrophore ( dérivé de kondros, cartilage, et 
de phoro, je porte ), au support du ligament interne, nommé par les auteurs, dent, 
cuilleron , fosselte, etc., etc. ( Voir la Revue zoologique, par la Société Cuviérienne , 
publiée à Paris ). 


(216%) 
dorsale. IMPRESSION PALLÉALE formant une sinuosité profonde et arron- 
die au côté antérieur. 

ANENEAE, de la forme de sa coquille, enveloppé d’un manteau à 
lobes réunis dans tout leur contour et percés d’une ouverture inféro- 
antérieure pour le passage du pied, crénelée dans son contour, tronqué 
en arrière, où sont deux autres ouverlures séparées par un diaphragme, 
formant un tube très-court , non exsertile. Corps ovale - globuleux, 
terminé inférieurement par un pied très-court, sübcylindrique ( sans 
doute par sa contraction dans la liqueur ) ; ayant, en avant, une bouche 
très-petite, bordée de lèvres courtes, prolongées de chaque côté par une 
paire de palpes charnues , épaisses , pyramidales, aiguës et striées en 
travers. BrancHies, doubles de chaque côté du corps, minces, très- 
finement striées en travers de leur longueur : Les supériewres ou ex- 
lernes antérieures , ovales, moitié plus courtes que les inférieures ou 
internes , qui sont ovales-oblongues , et enveloppent tout le corps moins 
le pied. 

Cette espèce se trouve en France, à Saint-Servan près Saint-Malo, 
et sur le rocher du Four, à 2 kilomètres de Nantes, en pleine mer, 
dans les trous des roches sous-marines. 

MM. Forbes et Bouchard-Chantereaux rapportent au genre Mye, 
comme jeune individu, le Sphenia Benghami de Turton ; nous ne parta- 
geons pas leur sentiment , parce que nous lui avons trouvé des carac- 
ières qui le différencient de ce genre. 

Ainsi, les Myes sont des mollusques luticoles où vivant librement 
dans la vase ; elle sont régulières en ce sens que la forme de leurs valves 
est constante; qu’elles sont subéquilatérales et béantes aux deux extré- 
imités. 

Les Sphénies sont saxidomes, ou vivant dans les trous des roches 
sous-marines, d’où elles ne sortent jamais et y prennent des formes 
variées ; elles sont donc irrégulières , inéquivalves , très-inéquilatérales 
et ne montrent un peu de baillement qu’au côté postérieur seulement. 

Les chondrophores des Myes sont tous les deux horizontalement 
placés : celui de la valve droite en fossette creusée immédiatement sous 
le sommet de la valve, et celui de la gauche fait une saillie horizontale 
en avant, de façon à ressortir de la circonférence de la valve. 

Les supports ligamentaires des Sphénies sont également dissimilaires, 
mais celui de la valve droite est perpendiculaire et oblique ; et celui de 
la valve gauche horizontal, également un peu oblique , continué posté- 


( 247) 
rieurement par une dent latérale lamelleuse qui va en se rétrécissant 
graduellement en pointe : ce chondrophore est placé à côté d’une 
fossette située sous les sommets. 

Dans les Myes , les impressions musculaires sont opposées , subdor- 
sales et très-inégales entre elles : l’antérieure oblongue et subverticale, 
la postérieure arrondie-ovale. L’impression palléale est profondément 
excavée et tronquée en avant. 

Dans les Sphénies, les impressions musculaires sont alternes et sub- 
similaires : l’antérieure ovale-arrondie , située à la partie inférieure de 
la valve , la postérieure orbiculaire et subdorsale ; l’impression palléale 
est excavée , proportionnellement moitié moins en profondeur et arron- 
die en avant. 

Si des caractères différentiels des coquilles nous passons à ceux des 
animaux , nous {rouvons : 

Dans les Myes, des branchies plissées et lâchement striées en travers : 
les externes postérieures et triangulaires. — Dans les Sphénies elles sont 
striées finement en travers, jamais plissées , et les supérieures ou exter- 
nes antérieures et ovales. 

Dans les Myes la bouche est arrondie , bordée de lèvres mamelonnées 
dont les mamelons sont disposés deux de chaque côté, et de quatre 
palpes allongées , foliacées et souvent roulées sur elles-mêmes en spirale, 
dans la contraction alcoolique. — Les palpes des Sphénies sont épaisses, 
pyramidales, rétrécies en pointe et striées en travers. 

Les Myes ont les lobes du manteau prolongés en arrière en un long 
tube conique, permanent au dehors, c’est-à-dire contractile, mais 
non rétraclile , enveloppé d’une peau épaisse, brune , rugueuse. Ce tube 
est formé par deux siphons charnus , d’un blanc-rougeâtre faible, soudés 
côte à côte, dont les conduits sont séparés à l’intérieur par une cloison : 
leur orifice interne est de forme triangulaire : celui du supérieur (anal) 
est entouré d’une gaine en forme de rampe qui se prolonge jusques au 
muscle adducteur ; l’orifice inférieur ( branchial ) a, en-dessus, une 
valvule operculaire qui sert à le fermer, — Les Sphénies ont aussi deux 
ouvertures séparées par une cloison et forment un tube non ressortant 
et protégé par l’épiderme de la coquille ; leur orifice interne manque de 
rampe et de valvule operculaire. 

Il y a cependant des ressemblances entre les deux genres, ressem- 
blances qui conduisent à les admettre dans la même tribu, celle des 
Acéphales dimyaires bisiphoniphores et dans la même famille. 


(28) 


Ces ressemblances existent dans la triperforation du manteau ; celle 
pour le passage du pied, très-petite , et celle produite par la réunion 
des deux siphons ; la petitesse et la forme du pied ; l'inégalité des bran- 
chies ; l’inégalité des chondrophores ; l’état béant de la coquille au côté 
postérieur et l’excavation de la ligule palléale. 

L'animal de cette espèce a le manteau d’un orangé-brunâtre. Sa 
coquille est cunéiforme, très-inéquilatérale, inéquivalve, à sommets 
très-petits, opposés, revêtue d’un épiderme brun-foncé , sous lequel le 
test est d’un blanc-brunâtre, inégalement ridé en travers, tronqué ou 
arrondi au côté postérieur (selon les variétés), et débordé par l’épiderme 
à cette place. Intérieur blanchâtre. Cette face interne est revêtue, quand 
on en retire l’animal conservé dans la liqueur , d’une pellicule blanche, 
ressemblant à une mince pelure d’ognon. La description générique 
ayant été faite sur cette espèce, nous dispense d'entrer dans de plus 
longs détails. Nous ajouterons, toutefois, qu’une variété a le chondro- 
phore de la valve gauche beaucoup plus large et divisé dans le centre 
par une ligne légèrement saillante en forme de dent latérale si étroite 
qu'elle paraît filiforme. Hauteur : 8 millimètres; largeur : 43 mill.; 
épaisseur : 5 millim. 

Cette coquille varie beaucoup dans sa forme générale ; elle est par- 
fois tortue et sinueuse au bord ventral ; parfois pliée presque en deux; 
tantôt tronquée au côté postérieur, tantôt arrondie de ce côté ; variations 
qui tiennent à la forme du trou dans lequel la coquille à été logée. 

Le Sphenia Swainsoni Turton, 1. c. p. 37, pl. 19, £. 2 et pl. 3, f.3, 
nous paraît étre un jeune individu de la Mya arenaria ; mais comme 
nous ne l’avons pas vu en nature, nous n’affirmerons pas qu’il en soit 
réellement ainsi. C’est de notre part un jugement porté d’après l’inspec- 
tion de la figure publiée par Turton. 


NOTE SUR UNE JEUNE NATICE. 


Ayant recueilli un individu microscopique d’une Natice, nous avons 
pu reconnaître à un fort grossissement, que l'animal avait une forme 
ovale, arrondie en avant et en arrière, et qu'il faisait sortir quatre len- 
lacules ciliés, comme les jeunes d’autres animaux, à la sortie de l'œuf. 
1 rampait sur les bords du vase avec une grande vivacité, et tombait au 
fond de l’eau aussitôt que le moindre bruit se faisait entendre, en ren- 
tant complètement dans sa coquille qu’il fermait de son opercule. 


(12499) 

Il est probable que, dans un âge plus avancé , le pied prend sa forme 
normale, très-allongée , et qu’il perd deux de ses tentacules, si ce n’est 
tous les quatre. Dans ce dernier cas, ceux-ci ne seraient que des peignes 
de cils vibratiles caducs, ensuite remplacés par le voile prolongé de 
chaque côté par les deux tentacules normaux avec un lobe aveugle ou 
oculifère ( selon les espèces ) à leur base extérieure. 

MM. Quoy, Souleyet, Gould, Macgillivray, Eudes Deslonchamps, 
Philippi et nous, n'avons pu voir des yeux sur les Natices à opercule 
corné ou testacé; mais Forbes assure qu'ayant observé, en Algérie, 
deux espèces de Natices à opercule testacé, l’une d'elles avait, sur 
chaque lobe de la base des tentacules, un petit œil noir; tandis que 
l’autre n’en présentait aucun indice. A l’état de larve , la Natice étudiée 
par nous, n’en montrait aucune trace. 

Les Natices de la section des Névériles ( glaucines de Lk. ), ont un 
siphon très-court et plissé en rayonnant du centre à la circonférence, 
placé sur le côté gauche de la tête, au point de limite de la partie 
antérieure avec la partie postérieure du pied, qui se trouve à gauche 
et à droite du bord externe. Les autres divisions n’en montrent aucun 
indice. 

Paris, 20/Août 1858. 
C. RÉcLUZz. 


UNE EXCURSION BOTANIQUE 
DANS LA HAUTE KABYLIE. 


Lettre de M. O. Dereaux, Correspondant, à M. DurIEU DE MAISONNEUVE. 
Mon cHEr COLLÈGUE, 


Jusqu'à présent il avait été impossible aux naturalistes d'explorer la 
haute Kabylie et le massif du Djurjura. Soumis depuis un an à peine, 
après une longue et décisive campagne, ce pays offrait après sa conquête 
des dangers réels à la sécurité des botanistes ; mais ces dangers n’existent 
plus aujourd’hui. Les Kabyles rendent partout hommage à la modération 
de l’administration militaire de la France , et chez eux l'hospitalité offerte 
aux voyageurs français est aussi sacrée que chez l’Arabe des vastes tribus 
du sud de l’Algérie. Pour la première fois, depuis la soumission, deux 


( 220 ) 
modestes botanistes ont pu parcourir ce pays curieux et intéressant à 
plus d’un titre, et planter la bannière de Linné au plus haut sommet du 
Djurjura. 

M. le docteur Marès (de Paris), de retour à Alger d’un voyage bota- 
nique dans les oasis du Sahara algérien, m'a fait la gracieuseté, au 
commencement de ce mois, de venir me demander l’hospitalité au Fort- 
Napoléon, afin de faire connaissance avec la Kabylie. 

Après deux jours d’explorations autour de ma résidence qui occupe le 
point central et le plus culminant (1,025 mètres alt.) de la grande frac- 
tion des Aith-lraten, nous avons formé le projet, M. Marès et moi, de 
visiter le Djurjura qui s’élève devant nous, à environ une journée de 
marche du Fort-Napoléon (Souk-el-Arba des Kabyles). 

M. le capitaine Devaux , du 1% Zouaves , ex-chef du bureau arabe de 
Dra-el-Mizan et des Beni-Mansour, et aussi amateur de photographie, 
s’est associé à nous pour prendre des vues et des dessins du pays curieux 
que nous allions traverser. Un interprète indigène et deux cavaliers régu- 
guliers du bureau arabe ont été mis à notre disposition par M. le com- 
mandant supérieur du cercle, pour faciliter notre voyage et nous donner 
au besoin aide et protection. 

Le 6 juillet, notre caravane, forte de sept hommes et autant de mulets 
ou chevaux, munie de vivres pour plusieurs jours, de tout un attirail de 
photographie, et de papier pour conserver les plantes, s’est mise en 
route en prenant la direction de Tirourda, village situé au pied du 
massif du Djurjura oriental , et où nous devons coucher le soir même. 

Nous traversons successivement sans nous y arrêter les villages de 
Tigmounin, d’Ischriden, célèbre par le combat sanglant du 24 juin 1857, 
où notre armée expéditionnaire se couvrit de gloire et de succès. Nous 
nous arrêtons quelques instants à Tala-Oumalou, fontaine limite entre 
les Aith-[raten et les Aïth-Menguellath, qu'entourent de magnifiques 
micocouliers ( Cellis australis ). Le chemin est bordé de Calycotome spi- 
nosa, d'Erica arborea, et d'énormes Quercus Suber qui nous garantis- 
sent des ardeurs du soleil; nous jettons un coup-d’œil sur le misérable 
village d’Azerou (rocher), et nous prenons la direction de Taskenfouth, 
dont la blanche mosquée s’élève majestueuse au-dessus du village qui 
couronne un mamelon rocailleux. Laissant sur notre droite Taourirt- 
Menguellath, ancienne capitale des Aïth-Menguellath, nous suivons le 
chemin de Tiffardout des Aith-ben-Youssef. Ce chemin , tout-à-fait indi- 
gène, est à peine tracé au milieu de galets schisteux et d’un terrain mica- 


(221%) 

schisteux dont là végétation est des plus pauvres. Quelques Ruta tenui- 
folia, Carlina sulfurea, Kentrophyllum lanatum, çà et là, quelques 
touffes de Thymus algeriensis Boiss. et Reut., recouvrent ces terrains 
arides, grillés par le soleil. Nous approchons de Tazerouth, village, 
capitale des Aiïth-ben-Youssef. Le Caïd de cette localité, suivi d’une 
foule d'hommes et d'enfants , vient au devant de nous, et après les saluts 
d'usage, nous prie d'accepter l'hospitalité chez lui, ce que nous ne pou- 
vons malheureusement pas, pressés que nous sommes d'arriver le soir 
même à Tirourda. 

Après le village de Tazerouth, l’étroit sentier par lequel nous passons, 
hommes, mulets et chevaux, contourne plusieurs mamelons boisés de 
Quercus Suber, Quercus [lex , de Pistacia Lentiseus. La végétation her- 
bacée y est représentée à celte époque de l’année par les espèces sui- 
vantes : Clematis flammula, Echinops spinosus, Asclepias vincetoxicum , 
Clinopodium villosum de Noé, Origanum cinereum de Noé, Phlomis 
samia ; dans les lieux ombragés, au bord du chemin, j’aperçois Aspidium 
Virgilii Bory, et À. aculeatum ; toutes les parois des rochers sont recou- 
vertes de Selaginella denticulata. Le massif du Djurjura que nous allons 
bientôt atteindre s’offre en ce moment devant nous dans toute son 
effrayante beauté; nous arrivons à son pied au défilé de Fatmah qu'il 
nous reste à franchir encore avant d'arriver à Tirourda. Le chemin devient 
presque impraticable, et pour comble d’infortune, le soleil commence à 
se coucher. 

Il me serait impossible de vous dépeindre les peines infinies que nous 
avons eues pour sortir de cet affreux défilé. Pendant plus d’une heure, 
nous marchons à travers des blocs énormes de rochers, sur un sentier 
tracé sur les pentes abruptes d’une haute montagne. Chacun de nous 
tenant solidement les chevaux par la bride, nous éprouvons des diffi- 
cultés inouïes pour empêcher nos montures de s’abatire à chaque instant, 
ou de faire des faux pas qui eussent pu leur être funestes. Dans ces 
montagnes , où le crépuscule n'existe pas, la nuit arrive tout-à-coup ; 
nous marchons alors au milieu de l'obscurité, tantôt montant, tantôt des- 
cendant ; nous iraversons un petit ruisseau qui nous indique l'approche 
du village de Tirourda. L’Amin (chef), prévenu depuis deux jours 
de notre arrivée par les soins du Bureau arabe de Fort-Napoléon, avait 
envoyé des gens au-devant de nous pour nous aïder à gravir la rude 
pente qui conduit au village où nous entrons enfin à neuf heures du 
soir. L’Amin nous offre l’hospitalité chez lui, et nous fait servir immé- 


Tome XXII. 17 


(222 ) 


diatement un repas composé de couscouss , de poules bouillies ou rôties, 
de lait et d'œufs durcis, auquel nous faisons, je vous l’assure, le plus 
grand honneur, quoique le couscouss soit de temps en temps arrosé par 
notre hôte d’une sorte de bouillon noirätre et épais, dans lequel le 
piment et le poivre jouent le plus grand rôle. 

Nous préparons notre lit de campagne dans la pièce unique où nous 
nous trouvons qui , ainsi que je l’ai remarqué dans toutes les maisons 
des villages kabyles, est divisée en deux compartiments contigus, l’un 
plus élevé que l’autre. L’inférieur est réservé aux animaux, bœufs, 
vaches, moutons et brebis; le supérieur aux habitants de la maison. 
Quelquefois même de nombreuses poules perchent sur des branches 
d'arbre placées au-dessous de la toiture dans l’intérieur de l'habitation, 
et les indigènes ne paraissent nullement s'inquiéter d’un voisinage aussi 
malpropre qu’incommode. 

Le 7 juillet, nous sommes sur pied de grand matin, et nous réglons 
ainsi notre itinéraire de la journée : Passage du col de Tirourda ; explo- 
ration des hauts pâturages et des crêtes rocheuses des Aith-Illiten (Kabylie 
djurjurienne) ; descente dans la vallée des Aith-Ouabben , et enfin séjour 
et coucher dans le village d’Ali-ou-Abben, dépendant de la grande 
fraction des Aüh-Boudrar des Zouaouu. 

En quittant Tirourda , le chemin s’engage dans un col rocailleux au 
pied duquel coule un torrent. À l’entrée de ce col non moins périlleux 
que le défilé de Fatmah de la veille, mais cette fois éclairé par un soleil 
magnifique , je recueille quelques plantes montagneuses : Prunus pros- 
trala Labill., Anthyllis numidica Coss. et DR., Buplevrum monta- 
num Coss., Bup. spinosum , Rumex scutatus. À mesure que nous gra- 
vissons ces rochers où jamais botaniste n’avait mis le pied avant nous, 
je garnis mes cartons de Putoria calabricu, Asperula hirsuta , Scabiosa 
crenata, Sedum glanduliferum Guss. Sedum amplexicaule , Cuscuta 
Kotschii Des Moulins, Calamintha alpina, Lamium longiflorum Ten. 
Les bords du torrent que le sentier suit dans tout son parcours sont 
garnis de Nardosmia fragrans. Après une heure de cette rude ascension, 
le col s’élargit, et nous arrivons aux premiers pâturages, à environ 
1,200 mètres d'altitude. Je recueille çà et là quelques rameaux en 
fruits de Cralægqus monogyna var. hirsula Boiss., ainsi que Genista 
tricuspidala , Helichrysum lacteum Coss. et DR. Daphne laureola, Taæus 


baccala et Juniperus nana; le Buplevrum spinosum devient d’une abon- 
dance extraordinaire. 


( 223 ) 

Je salue enfin le Cedrus Libani var. atluntica que je vois pour la pre- 
mière fois èn loco natali. Une fontaine des plus limpides coule au pied 
d’un magnifique cèdre, et nous invite au repos. L’eau serpente quelque 
temps sur des galets schisteux, et finit par se perdre dans les pâturages 
inférieurs. Je profite de ces instants pour explorer les bords de la fon- 
taine , et j'ai le plaisir de recueillir sur les galets immergés deux petits 
mollusques, un Ancylus et une Paludina , voisine du P. viridis Drap. 
Chose remarquable pour l’histoire de l’Ancylus dont il s’agit, son habitat 
est identique sur le point le plus occidental de la chaîne du Djurjura, 
ainsi que l’a constaté M. Henri Aucapitaine, dans une excursion malaco- 
logique, au Djebeldirah , près d’Aumalé, et à la même altitude environ 
(1,400 à 1,500 mètres). 

Nous continuons notre ascension à travers des pâturages ras et dessé- 
chés, et nous arrivons sur le plateau d’Agouni-Aïmedh qui domine l’im- 
mense plaine de l’Oued Sahel, versant sud du Djurjura, au dessus de la 
vaste tribu des Beni-Mansour. M. le capitaine Devaux monte sa tente de 
photographe, el pendant qu’il prend des vues (épreuves négatives sur 
collodion ) du col pittoresque que nous venons de traverser, et que 
M. Marès fait provision des roches de ce point culminant (1,500 mètres), 
J'explore, en attendant le déjeüner qui se prépare, les prés secs ou 
humides de ce plateau; je retrouve le Prunus prostrata Labill., dont 
les branches tortueuses tapissent d'énormes blocs de rochers. Les Kabyles 
donnent à cel arbrisseau le singulier nom de Tsaf-an-Schaadi, prunier 
de singe. Je recueille en outre le Potentilla hirta? à fleurs jaunes ; un 
autre Potentilla à fleurs blanches, voisin du P. caulescens, ainsi que 
Jurinea humilis var. Bocconi, Cynoglosum montanum ? et Armeria 
allioides Boiss.; dans les lieux humides Lobelia Laurentia, Daphne lau- 
reola en grande abondance, et une petite mousse du genre Bartramia, 
déjà avancée. 

Nous nous réunissons tous pour le déjeüner ; nos provisions sont éta- 
lées sur l’herbe , à côté d’une fontaine, dont l’eau est à une température 
de 14° 3 centigrades, celle de l’air ambiant étant au soleil, à onze 
heures du matin, 15° centigrades. L’air vif du plateau d’Agouni-Aïmedh 
excite notre appétit, et en attendant le souper kabyle du soir, nous fai- 
sons honneur au déjeuner français renfermé dans nos cantines. 

Il est midi; nous nous mettons en route en prenant la direction de 
l’ouest, nous marchons longtemps encore au milieu de maigres pâturages 
qui recouvrent les points culminants de cette partie des Aith-Tlliten. Au 


milieu de ces päturages, je recueille Berberis œthnensis var. australis 
Boiss., Dianthus sylvestris, Vicia ochroleuca, Inula montana. À mesure 
que nous approchons des cèdres qui nous dominent , le terrain devient de 
plus en plus crétacé et rocailleux ; les pâturages cessent, et une nouvelle 
végétation remplace celle au milieu de laquelle nous nous trouvons 
depuis le matin. Le chemin devient cependant d’une difficulté imprati- 
‘able ; de vieux troncs de cèdres morts de vétusté, ou arrachés des 
flancs des montagnes par la violence des vents, entravent à chaque ins- 
tant la marche de nos chevaux et mulets; nous parvenons ainsi à la 
limite inférieure des cèdres (1,400 mètres d'altitude), et aussitôt mes 
cartons se remplissent des espèces suivantes : Arabis alpina var Sleveni, 
Dianthus liburnicus Guss., Cotoneaster.…. à feuilles glabres, Paronychia 
aurasiaca Webb.; Anthyllis..… , jolie petite plante à feuilles couvertes 
d’un duvet argenté soyeux; Scabiosa crenata, Pyrethrum corymbosum , 
Helichrysum lacteumn, Anthemis tuberculata, Catananche cœrulea, 
Calamintha alpina, Ruscus aculeatus. Parvenus à Thabourt-Guifry (porte 
de la caverne), après une heure environ de marche au milieu des cèdres, 
nous changeons de direction vers le sud, et nous suivons quelque temps 
les crêtes d’une montagne qui domine la tribu des Beni-Meguillet, dans 
l’'Oued-Sahel (versant sud du Djurjura); nous arrivons à l'entrée de la 
vallée d’Ou-Abben, encaissée entre deux chaînes de montagnes. Nous 
prenons un instant de repos auprès de la fontaine Tala-Tamziel, dont 
l’eau est d’une fraicheur remarquable (+ 8° centigrades). Autour de 
cette fontaine, je recueille quelques touffes en fleurs de Lonicera etrusca ; 
l’Ilex aquifolium forme cà et là des fourrés impénétrables. 

A mesure que nous descendons dans la vallée d’Ou-Abhen, la végéta- 
üon prend un caractère tout-à-fait méditerranéen ; nous arrivons rapi- 
dement sur les rives de l’Oued-Ou-Abben, que le chemin suit dans tout 
son parcours jusqu’au village de ce nom. Sur les rochers escarpés qui 
bordent le lit de ce ruisseau , je vois apparaître en abondance Erysimum 
australe Gay., var. longifolium, Acer monspessulanum et neapolita- 
num, Anthyllis wumidica très-abondant, Saxifraga globulifera, Plagius 
ageralifolius, Santolina canesceus, Nardosmia fragrans, Quercus Suber 
et Ballota. La vallée d’Ou-Abben est admirablement bien cultivée par 
les Kabyles dont les maisons sont éparpillées çà et là au milieu des 
Jardins arrosés par de nombreuses irrigations. 

Vers cinq heures du soir, nous entrons à Aith-Ali-Ou-Abben, village 
divisé en deux parties, sur le bord du ruisseau. L’Amin de la localité 


( 225 ) 

vient au-devant de nous; et, comme il n'a pas, dit-il, de logement à 
nous offrir, nous nous établissons dans la Djemma, maison commune, 
espèce de hangar ouvert à tous les vents. M. le capitaine Devaux profite 
du jour qui reste encore pour prendre plusieurs vues du village, et des 
pics élevés qui le dominent des deux côtés de la rivière; M. Marès con- 
tinue ses observations géologiques pendant que j’explore le versant sud 
d’un des mamelons voisin du village , d’où je ne rapporte que Delphi- 
nium junceum ou pubescens, Delphinium pentagynum , Dianthus serru- 
latus, Ruta tenuifolia, Pistacia Terebinthus. Les Acer monspessulanum 
et neapolitanum sont très-fréquents au bord du ruisseau. 

Je reviens cependant à notre Amin, beau vieillard à l’œil vif et intel- 
ligent, un peu rancunier à notre endroit, je crois, qui n’aime pas les 
Français, mais qui les supporte toutefois assez pour leur offrir au besoin 
une diffa confortable. Nous étions ses hôtes, et il s’est exécuté de bonne 
grâce avec nous, voyant qu'il avait à faire à des Toubib (médecin) et à 
un officier, dont il avait été l’administré alors que M. Devaux était chargé 
de la direction du Bureau arabe de Dra-el-Mizan. Mais en attendant le 
souper qui se prépare, le bruit se répand vite dans ce village, d'ordinaire 
si paisible, que des Toubib viennent d’arriver ; et aussitôt, les malades 
accourent en foule à la Djemma réclamer des conseils et des remèdes. 
Nous distribuons, M. Marès et moi, à ces malheureux Kabyles, les 
médicaments nécessaires dont je m'étais muni au Fort-Napoléon. Quel- 
ques instants après, le souper était servi par l’Amin sur des nattes 
qu’il avait fait transporter à la Djemma. Un mouton rôti accompagnait 
un immense plat de couscouss préparé avec une huile d’une rancidité 
extraordinaire ; mais on avait également servi à part pour les amateurs 
du miel dont l’odeur forte et pénétrante, et la couleur noirâtre, prou- 
vaient suffisamment qu’il était indigène ; un second vase renfermait du 
bouillon poivré; des figues , du lait frais et de l’eau ont servi de complé- 
ment indispensable à ce repas qui excitait chez les nombreux Kabyles 
accourus autour de nous par curiosité, des désirs apparents de convoi- 
tise. Le repas terminé, j'arrange mes plantes de la journée dans le 
papier, et je puis enfin prendre le repos dont j'ai tant besoin; car, le 
lendemain , nous devons faire l’ascension du Tamgouth, pic le plus élevé 
de la chaîne du Djurjura. 

Le 8 Juillet, nous sommes prêts à partir de bonne heure; nous 
n’attendons plus que les guides promis par l’Amin pour nous diriger 
dans ces hautes montagnes dont eux seuls connaissent les sentiers pra- 


( 226 ) 

ticables. L’Amin, qui est venu nous souhaiter le bonjour , nous déclare 
qu’il n’a personne de disponible dans le village pour nous accompagner, 
et nous indique vaguement le chemin que nous devons suivre. Faute 
d’un guide exercé, notre exploration pouvait ne pas avoir lieu. Je com- 
mençais à m'inquiéter de ce fàcheux incident, lorsque le capitaine 
Devaux s’adressant à l’Amin , sur le ton du commandement militaire, le 
somme de nous envoyer de suite trois Kabyles de son village, soit pour 
nous conduire au Tamgouth, soit pour conduire nos chevaux et mulets 
qui, ne pouvant nous suivre, devaient prendre un autre chemin. L’Amin, 
craignant sans doute de recevoir de la part du Bureau arabe du fort 
Napoléon de vifs et justes reproches sur sa conduite envers nous, nous 
envoie immédiatement, mais non sans crier et gesticuler beaucoup, les 
trois guides demandés. 

Nous partons enfin; nous suivons quelque temps le lit d’un torrent au 
bord duquel j’aperçois Valeriana ofjicinalis, Eupatorium cannabinum , 
et de nouveau Delphinium pentagynum. Arrivés au fond de la vallée 
d'Ou-Abben, à un endroit où le chemin se bifurque, il nous faut des- 
cendre de cheval et ne plus compter que sur nous maintenant pour notre 
excursion de la journée. Nous faisons diriger nos bêtes et nos bagages à 
Bouadnan, sous l’escorte d’un cavalier arabe porteur de nos instructions 


pour le caïd des Aith-Boudrar (Kabylie inférieure , versant Nord), tandis 


que, munis de provisions pour la journée, nous prenons un sentier à 
gauche, tracé sur le flanc d’une haute chaîne de montagnes. Nous tra- 
versons d’abord des bois de chênes-lièges, puis nous retrouvons les 
pâturages; et enfin, après deux heures d’une montée assez facile , nous 
parvenons à la limite inférieure des cèdres (1,100 d'altitude). La tempé- 
rature est en ce moment (dix heures) de 18° centigrades. Au milieu de 
ces cèdres, je ne vois que le Betonica algeriensis de Noé. Notre ascen- 
sion commence à devenir pénible, tant les cèdres, énormes en cet en- 
droit, embarrassent le sentier, à chaque pas, de leurs vastes branches 
étalées et rasant le sol, pour ainsi dire. Nous contournons un petit piton, 
et nous atteignons le plateau d’Agouni-Lahoua, situé entre trois pitons. 
Derrière le plus occidental de ces hauts sommets, s’élève le Tamgouth 
(Lalla-Kredidja), qu’il nous faudra bientôt gravir. Nous déjeünons à 
Agouni-Lahoua , à l'ombre d’un rocher, et tout auprès d’une faible fon- 
taine dont l’eau est excellente. Je recueille en cet endroit un Jasione.…. 
etle Carduncellus atractyloïdes Coss. et DR. 

Nous recommençons notre escalade, tantôt sur le flanc des pitons à 


( 227 ) 
travers les cèdres , tantôt sur les crêtes rocheuses, tantôt au milieu des 
pâturages qui couronnent le sommet de quelques mamelons inférieurs ; 
nous arrivons enfin sur les pentes du Tamgouth que nous contournons, 
l'ascension étant impossible sur le versant sud, où les cèdres sont 
d’ailleurs clair-semés. Nous voici enfin, mais non sans peine, à la limite 
supérieure des cèdres (1,800 à 2,000 mètres altitude). Je suis à bout de 
forces ; et, pendant que MM. Marès et Devaux atteignent le sommet de 
Lalla-Kredidja, situé à environ 200 mètres d'altitude du lieu où je me 
trouve, j'explore avec soin cette intéressante localité que je ne reverrai 
probablement pas de longtemps encore. 

Au-dessous et à l’ombre des cèdres, je trouve une végétation qui 
m'était jusqu'à présent inconnue. Parmi les plantes qui sont venues 
augmenter le nombre de mes richesses botaniques, j'ai hâte de vous citer 
les suivantes : Viola gracilis, Helianthemum (2 espèces), Alyssum 
allanticum, Draba hispanica , Arabis alpina var., Dianthus liburnicus, 
Arenaria (2 espèces), Geraslium atlanticum , Rosa Seraphini, formant, 
* au-dessous des cèdres, de vastes tapis de verdure parsemés de roses . 
odorantes du plus bel effet; Geum heterocarpum , Selinopsis montana, 
Senecio atianticus Coss. (abondant), Hieracium Pilosella ? et une autre 
espèce voisine de l'A. saxatile Vill., Lonicera arborea, Guscuta (2 es- 
pèces ), Sedum ( 2 espèces ), Juniperus nana, un Ornithogalum voisin 
de VO. umbellatum, en pleine floraison; Cynosurus Balansæ Coss. 
et DR., etc. 

Je n'oublie pas non plus de rechercher les mollusques de cette curieuse 
contrée ; je soulève toutes les pierres, à l'ombre des cèdres, sous les- 
quelles je recueille deux Helix, dont l’un me paraît voisin de l’Helix 
lanuginosa de Boissy, l’autre de l'Helix striata L., mais sur la déter- 
mination desquels je n’ai encore aucune donnée certaine. 

Pendant que j'étais ainsi agréablement occupé de mes récoltes bota- 
niques, mes compagnons de voyage sont de retour de l'ascension extrême 
de Lalla-Kredidja, dont ils ne rapportent qu’un petit Erodium, un 
Pyrethrum.. et le Senecio Gallerandiamus Coss. et DR. D’après les cal- 
culs des officiers de l’état-major du génie, le sommet de Lalla-Kredidja 
serait à une altitude de 2,280 mètres. M. Marès a également calculé cette 
altitude au moyen de son baromètre portatif, et il aurait trouvé une 
différence en moins de 300 mètres sur les calculs officiels; la température 
était à une heure, au sommet du pie, de 19 centigrades. Au sommet 
du pie de Lalla-Kredidja , les Kabyles ont érigé une petite Kouba ( mos- 


( 228 ) 
quée ), où les croyanis vont à certaines époques de l’année faire un 
pélerinage malgré les difficultés de l'ascension. 

Je charge mon cavalier arabe, qui se pare le plus souvent du titre de 
spahis aux yeux des Kabyles, du paquet énorme de plantes que je viens 
de recueillir sous les cèdres, et nous opérons une descente des plus 
rapides, mais non pas sans dangers, sur les pentes abruptes de cette 
haute montagne. Je retrouve en passant le Senecio Gallerandianus ; nous 
traversons de vastes pâturages, et nous arrivons au col de Tizi-Kouilet, 
auprès de la fontaine d’Azerou-Idermian (fontaine des pélerins), où nous 
nous reposons quelques instants. Je ne tarde pas à recueillir bientôt sur 
les pentes du Tizi-Kouilet le splendide Isatis Djurjuræ Goss. et DR. , en 
fruits, dont je fais une bonne provision. Ces pentes sont couvertes 
d'Artemisia Absinthium, de Lonicera etrusca, de Phlomis samia et de 
Daphne Cnidium, indice certain de la végétation méditerranéenne de 
cette partie montagneuse de la haute Kabylie. Nous contournons le col 
de Tizi-Tirkabin ; et, descendant aussitôt dans la plaine, nous suivons le 
chemin de Tala-Tazzert jusqu’à Thabourt-Azerou (porte du rocher), 
passage étroit d'environ 79 mètres taillé dans le rocher. Nous trouvons 
nos mulets que les guides ont conduit à notre rencontre, et quelques 
moments après nous faisons notre entrée à Bouadnan, capitale de la 
tribu des Aiïth-Boudrar. Nous recevons chez le Caïd de la localité un 
accueil des plus empressés et vraiment magnifique. Ce jeune chef indi- 
gène, un des plus fermes amis de la France, nous a offert une diffa 
remarquable par la profusion des mets. La moitié des habitants du village 
a participé , en notre honneur, à ce festin qui a duré jusqu’à minuit dans 
la cour intérieure de la maison du Caïd , alors que nous nous reposions 
depuis longtemps sur nos lits de campagne. 

Le lendemain matin, 9 juillet, après avoir préparé mes récoltes de la 
veille et distribué les derniers médicaments qui me restaient, M. le capi- 
taine Devaux donne le signal du départ. Nous arrivons près du village 
d’Aith-Ali-Ouarsoun ; là, M. Marès, notre excellent compagnon, devait 
nous quitter, suivi d’un guide, pour prendre le chemin de Dra-el-Mizan 
et d'Alger. Pour la deuxième fois, depuis deux ans, je réitère mes adieux 
de bon voyage à M. Marès, que j'avais déjà vu à Boghar en juin 1856, 
et nous reprenons , M. Devaux et moi, la route de Fort-Napoléon, à 
travers les tribus des Beni-Yenni et Beni-Aïssi. Nous rentrons vers 
trois heures du soir, après quatre jours d'absence, mais bien agréable- 
ment employés , au lieu de notre résidence. 


( 229) 

Notre rupestre excursion n'a d'autre importance aujourd’hui que de 
faire connaitre la végétation des parties les plus élevées, comme des 
parties les plus basses du massif du Djurjura. Cette végétation, comparée 
à celle des points occidentaux extrêmes de la même chaîne, le pic Tizi- 
Tzennen au-dessus de Bordj-Bochni et des Beni Bou-Abdou, déjà explo- 
rés en 1854 par M. Cosson, comparée de plus à celle de la région des 
cèdres de la province de Constantine , donne les résultats suivants : 

4° Le massif du Djurjura offre la même végétation à l'Est comme à 
l'Ouest, sur les deux versants , et à la même altitude. 

20 Dans les parties inférieures du Djurjura, et dans l’intérieur des 
vallées qui séparent les deux chaînes parallèles de montagnes qui s’éten- 
dent de l'Est à l'Ouest, la végétation est caractéristique de la région 
méditerranéenne littorale, et identique dans toute la Kabylie inférieure 
montagneuse, 

3 Les parties élevées du Djurjura, c’est-à-dire la région des cèdres 
depuis 1300 à 2200 mètres d'altitude, ont une végétation semblable à 
celle des mêmes régions de la province de Constantine et principalement 
du Djebel-Tougour, près de Batna. 

Je désire vivement que ces faits, nouveaux pour la botanique de l’AI- 
gérie, puissent vous intéresser. Je saisirai toutes les occasions favorables 
pour explorer une contrée aussi curieuse que la Kabylie, et vous com- 
muniquerai les résultats de mes excursions à venir dans notre belle 
Algérie. 

O. DEBEAUX, 


Pharm. aide-major, chef de l'ambulanee 
du Fort-Napoléon ( Kabylie ). 


Fort-Napoléon, le 45 Juillet 1858. 


"ms QC 0 


NOTE SUR DEUX HÉLICES ET DEUX ANCYLES DU BJURJURA . 


Par FE. J.-E5. GASSIES, Trésorier. 


Mon ami et compatriote M. Odon Debeaux, pharmacien aide-major, 
chef de l’ambulance à Fort-Napoléon, m’a envoyé deux espèces d'Hélices 
vivantes, recueillies, pendant son excursion de Juillet 1858, sur le 
sommet du Djurjura, me priant de les publier, si elles me paraissaient 
nouvelles. 


(230 ) . 

N'ayant pas le temps de vérifier sur des échantillons nombreux des 
collections de Paris, et pressé par la publication prochaine du récit de 
M. O. Debeaux, je livre à la publicité les deux diagnoses suivantes, sous 
les noms que mon ami désire leur voir donner. 

Deux Ancyles ont été recueillies pendant l’excursion, et, quoiqu’elles 
soient connues, je donne ici leur station, qui devra s’ajouter à celles 
déjà indiquées dans les diverses publications anciennes ou récentes sur 
la malacologie algérienne. 


1° ANCYLE FLUVIATILE, Ancylus fluviatilis Lamk. 


L'Oued Chebat-Régab, chaîne du Djebel-Dirah (Aumale), versant N., 
altitude 1,500 mètres (M. Henri Aucapitaine). 


2° ANCYLE COTELÉE, Ancylus costatus Villa. 


Les sources vives, eaux courantes, froides (température + 8, 2%) 
sur le plateau d’Agouni-Aïmedt, tribu des Aiït-Illiten (Djurjura), altitude 
1,600 mètres. 


3° Hérice pes cèpres, Helix cedretorum Debeaux. 


ANIMAL timide, noirâtre, tentacules supérieurs peu allongés, forte- 
ment renflés au sommet; les inférieurs courts et sbtus. S’accouple en 
Août et Septembre, reste trois heures et pond immédiatement une tren- 
taine d'œufs opalins retenus par un gluten d’une grande ténuité, incolore 
ou un peu irisé. Mucus peu abondant, diaphane. 

Coquicce déprimée, discoïde, carénée, hispide, ressemblant, au pre- 
nier aspect, à l’H. villosa Studer ; striée irrégulièrement, lames épider- 
miques nombreuses, courtes et caduques , disséminées en quinconce sur 
toute la partie supérieure du têt, moins épaisses en dessous. Couleur 
jaune de corne plus ou moins foncée. Ouverture semi-lunaire, surbaissée, 
arrondie en dessous, péristome simple, tranchant, avec un léger bour- 
relet blanc intérieur. Six tours de spire convexes , grossissant régulière- 
ment, le dernier à peine évasé; suture profonde, sommet jaune-clair 
luisant, ombilic peu ouvert. 

Hauteur 7 mill. Diamètre 13 mill. 

Has. Le pic du Tamgouth (Djurjura), à la limite supérieure des cèdres, 
2,200 mètres d’allitude. Sous les pierres, à l’ombre des cèdres Cedrus 
Atlantica. (O. Debeaux , Juillet 1858). 

Obs. Cette espèce est voisine de l’J. villosa Studer, et non de PA. Lanugi- 
nosa, comme M. Debeaux le croit. Elle diffère de la première : 4° par ses 


{ 231 ) 
tours plus convexes et moins nombreux, son dernier plus évasé; 2° par son 
sommet plus élevé; 30 ses stries moins régulières; 4° son ombilic moins 
ouvert; bo et enfin par ses poils plus courts et plus régulièrement disposés. 
4° Héuce pe Kapvue, Helix Kabyliana Debeaux. 

ANIMAL timide, gris-pâle , tentacules jaunâtres effilés. 

CoquiLce du groupe des variables, déprimée, sub-carénée fortement 
et régulièrement striée ; couleur blanchâtre , ornée de sept à huit bandes 
brunes; la plus large parcourt la convexité du dernier tour, quatre autres 
la suivent à un léger intervalle et forment un groupe descendant vers la 
base ; vers l’ombilic se voit une autre bande plus fine qui vient plonger 
dans l’ouverture avec les quatre autres; le dessus de la suture est par- 
couru par une bande brune interrompue par des taches décurrentes 
fauves, plus ou moins foncées, qui lui donnent un aspect doré très- 
agréable. Ouverture arrondie , péristome simple, avec un bourrelet blanc 
peu épais, intérieur blanchâtre sur lequel se détachent vivement les 
bandes du dernier tour; 5-6 tours de spire peu convexes, le dernier un 
peu plus grand; suture linéaire; sommet brun luisant; ombilic évasé, 
laissant voir tous les tours. 

Hauteur 6 mill. Diamètre 11 mill. 

Has. Toute la Kabylie montagneuse, depuis 1,000 mètres jusqu'aux 
sommets les plus élevés du Djurjura : Lalla-Kredidja, sous les cèdres, à 
2,200 mètres d’altitude. 

Obs. Cette espèce ressemble un peu à l’H. oranensis Morellet, surtout par 


les lignes interrompues de la suture; mais elle en diffère : 40 par la dilatation 
de Pombilic; 2° la dépression du sommet; 3° enfin, par son ouverture ronde. 


J.-B. GAssiEs. 
3 Septembre 1858. 


DESCRIPTION D’'UNE LIMACE NOUVELLE. 


L'étude des Limaciens, dont je m'occupe depuis plusieurs années, m'a 
payé déjà des soins et des recherches que j’y ai consacrées par la décou- 
verte d’une foule de détails obtenus par la dissection des organes ou 
par des expériences sur leurs mœurs et leur reproduction. 

J’ai trouvé, en Mai 1857, sur le plateau de Lormont, près de Bordeaux, 
une Limace qu’au premier aspect, je confondis avec le Limax margi- 
natus Dr. Depuis cette époque, j'ai pu l’élever en captivité , la faire re- 
produire et étudier toutes les phases de son accroissement. 


( 232: ) 
Soumise aux yeux exercés de nos maitres, elle leur a paru nouvelle, 
et ce n’est qu'après les avis de plusieurs, que je me décide aujourd’hui 
à en donner la diagnose sous le nom de : 


LIMACE ARGILEUSE , LIMAX ARGILACEUS. 


ANIMAL allongé, caréné ; tentacules supérieurs noirâtres ou violâtres, 
point oculiforme très-noir, peu visible, tentacules inférieurs courts, gris 
foncé, un peu noirs vers le sommet; cuirasse double, séparée en deux par- 
ties inégales par l’orifice respiratoire qui se trouve placé très en arrière. 

Carène jaune de chrôme partant brusquement de la cuirasse et se ter- 
minant en arrière, en se relevant un peu. 

Peau chagrinée assez fortement de noir sur un fond brun bien obscur, 
bords du manteau et du pied jaunâtres; plan locomoteur, légèrement zébré 
à sa marge, dessous jaune pâle; mucus jaune rouge épais, peu abondant. 

Mächoire cornée à bec central, bombé et aigu : langue spiriforme 
garnie de spinules espacées en fer de lance recourbé à la pointe. 

Osselet ovale inégal, un peu abattu à droite ; nucléus bombé, chagriné 
sans apparence de spire. 

Longueur en marche : 90 mill., haut. 17 mull. 

Longueur en contraction : 25 mill., haut. 24 mil. 

Has. , les terrains argileux des plateaux élevés, à Lormont, où elle est 
difficile à trouver cause de sa coloration presque identique avec celle du 
terrain. 

Son aspect général ne peut la faire rapprocher des autres limaces du 
pays; elle a quelque ressemblance avec le Limax gagates, par son double 
manteau et sa carène à vive arète ; avec le Limax agrestis, par sa con- 
traction anguleuse. Sa coloration ressemble dans la majeure partie du 
corps à ce sable cuivré dont on se sert pour sécher l’encre. Comme lui, 
elle a des reflets métalliques, tantôt ternes, tantôt brillants. 

Les individus obtenus en captivité se sont accouplés , ont pondu une 
quarantaine d’œufs opalins, réunis en pyramide par une mucosité blan- 
châtre , légèrement irisée, qui ont éclos un mois et demi après, et sont 
actuellement dans la période du tiers de leur croissance. 

Dans la contraction, cette Limace rentre son mufñle, ferme l’orifice res- 
piratoire; sa double cuirasse forme une tête obtuse comme le crâne des- 
séché des tortues ; sa carène s’élève à l’arrière de la cuirasse postérieure, 
en angle droit, et se renverse en décrivant une courbe gracieuse à vive 
arète. Se nourrit de plantes fraîches ou en décomposition aussi bien que 
des matières animales ; s’introduit dans la coquille des Hélices malades 
et les dévore. 

1er Novembre 1858. 


J.-B. GASSIES. 


14 NRovesmbre 18559. 


CATALOGUE RAISONNÉ 


DES 


MOLLUSQUES TERRESTRES ET D'EAU DOUCE 


DE LA GIRONDE : 


Par M. J.-B. GASSIES, Trésorier. 


INTRODUCTION. 


Il s’est écoulé trente-deux ans depuis que M. Charles Des Moulins fit 
paraître le Catalogue des Mollusques terrestres et fluviatiles de la 
Gironde. 

Depuis cette époque, les recherches se sont multipliées et la somme 
des espèces s’est accrue considérablement, au moyen des découvertes 
nombreuses faites par quelques naturalistes et surtout par les membres 
de la Société Linnéenne (1). 

Ces divers addenda ont été l’objet de notes insérées aux Actes, dans 
leur ordre chronologique avec les noms des explorateurs. 

Il sera facile de constater cet accroissement en mettant en regard 
l’œuvre de mon prédécesseur, qui contient quatre-vingt-onze espèces (2) 
et la mienne qui en compte 138. 

La nomenclature ne pouvant rester stationnaire au milieu du progrès 
général , j’ai dû me pénétrer des nouvelles divisions faites par familles, 
genres et sections; plusieurs ont été réunies, d’autres complètement 
abrogées ; car l’étude de l’animal , la malacologie en un mot, a jeté un 
jour tout nouveau dans les études de cette science. 


(1) Voir Progrès de la malacologie en France et parliculièrement dans le Sud- 
Ouest, depuis moins d'un siècle, par J.-B. Gassies, dans l’Ami des Champs, 
Juillet 1858, et Annuaire de l’Instilut des Provinces, 1859. 


(2) Je ne compte pas les Palud. murialica et acula qui sont des espèces marines. 


Tome XXII. 18 


( 234 ) 


Les dissections anatomiques , les observations de mœurs, le secours 
si puissant du microscope perfectionné , tout m’a fait une loi de ramener 
chaque groupe et chaque espèce au type similaire, sans me préoccuper 
des variations de l’individu. 

Aussi, est-ce pénétré de ces idées, de mes recherches de dix années, 
et de l'appui de M. Des Moulins, que je livre aujourd’hui le Catalogue 
raisonné des Mollusques terrestres et d’eau douce de la Gironde. 

Ce Catalogue peut être considéré comme la deuxième édition de celui 
de mon savant devancier dont les collections et les conseils ont été pour 
moi d’un immense secours. Je n’ai pas voulu faire de l’érudition ; je me 
suis contenté de donner les synonymes types et puis ceux des auteurs 
français, afin de ne pas surcharger un travail destiné aux Actes de la 
Société Linnéenne dont les pages sont comptées. 

J’ai dû , à l'exemple général, ramener la synonymie à sa source, en 
prenant les noms primitifs, au moins ceux dont la diagnose avait été 
décrite scientifiquement. 

Je me suis attaché à donner l’habilat exact des espèces que je signale 
et surtout la nature des terrains ou des eaux qu’elles préfèrent. 

J'aurais pu m’étendre sur les altitudes, mais j'ai été arrêté aussitôt 
dans ce projet, lorsque j’ai vu l’uniformité de nos côteaux presque tous 
d’égale hauteur. 

J’ai divisé mon catalogue en deux classes : 

4° Les Gastéropodes. 
2 Les Acéphales. 
En huit familles : 

4° Les Limaciens. 

2 Les Colimacés. 

3° Les Cyclostomacés. 
4 Les Limnéens. 

9° Les Péristomiens. 
G° Les Néritacés. 

7° Les Nayades. 

8° Les Cardiacés. 

Ces huit familles sont divisées elles-mêmes en vingt-deux genres : 
pour la première classe, contenant 116 espèces et de nombreuses 
variétés ; pour la deuxième, en quatre genres , 22 espèces et quelques 
variétés. 


Plusieurs naturalistes m’ont prêté leur bienveillant concours en me 


( 235 ) 

communiquant les espèces qu'ils avaient trouvées ou en me signalant 
des habilats plus nombreux ; aussi me fais-je un devoir de les citer 
avec reconnaissance. Parmi les plus zélés , on trouvera des noms depuis 
longtemps célèbres, et d’autres qui commencent à se faire remarquer 
par leur ardeur à recueillir nos espèces indigènes et les belles coquilles 
exotiques : ce sont MM. Bareyre, de Cadillac; Cabrit, de Caudéran ; 
Coudert, Durieu, Fischer, de Grateloup, D. Guestier, Jaudouin, 
Laporte père et fils, Des Moulins et Souverbie, de Bordeaux, et 
Paquerée , de Castillon. Je les prie d’agréer l'expression sincère de mes 
remerciments. 

J’aurais désiré voir prendre plus d'extension à mon travail, le faire 
précéder des éléments terminologiques et donner des figures de toutes 
nos espèces , comme me le demandaient plusieurs de mes amis; mais, 
outre que les frais eussent été énormes , j’ai dû céder devant le double 
emploi de ces descriptions qui existent dans presque tous les ouvrages 
récemment publiés et surtout dans mon Tableau des Mollusques terres- 
tres et d’eau douce de l’Agenais, auquel je renvoie mes lecteurs (1). 

Puisse ce Catalogue stimuler le goût de nos jeunes étudiants! Ils 
trouveront, dans la recherche et les mœurs des Mollusques, un attrait 
dont ils ne se doutent pas et qui les paiera au centuple de leurs soins et 
de leurs peines. Pour moi, mon but sera atteint et je m’applaudirai 
de Pavoir publié s’il a pu leur être utile (2). 


Bordeaux, 5 Janvier 4859. 


(1) Tabl. des Moll. lerr., et d'eau douce de l’Agenais, grand in-80, 212 pages, 
4 planches gravées et coloriées , Paris, Baillière , rue Hautefeuille , 19. 


(2) M. le docteur De Grateloup vient de commencer la publication d’une Faune de 
la Gironde. Ce travail , très-distinct du mien qui est purement zoologique , offre des 
notes très-variées sur la distribution géographique des mollusques terrestres et d’eau 
douce, sous le rapport botanique et orographique. Je crois que cette faune complè- 
tera, avec avantage, celle que j’offre aujourd’hui aux malacologistes. 


( 236) 


PRÉLIMINAIRES. 


$ Er, — ALIMENTATION. 


Les animaux dont nous avons à nous occuper, vivent la plupart tout 
près de nous, à notre portée, et sont assez faciles à recueillir; néan- 
moins, il faut une certaine habitude pour trouver ceux de certains gen- 
res et espèces, et ce n’est guère qu'après quelques excursions que la 
vue s’habitue à pénétrer dans les retraites où ils se cachent. 

Leur nourriture n’est que rarement spéciale; car, dans la majorité 
des individus, j'ai constalé une grande propension à se nourrir indiffé- 
remment de matières végétales ou animales, fraiches ou putréfiées. 

Dans certain cas, et pour les espèces rupestres, je les ai vues s’ali- 
menter avec les mucédinées et les petits cryptogames qui tapissent les 
parois des rochers; mais ces animaux , élevés en captivité, et, quoique 
ayant à leur portée ces mêmes plantes, dévoraient avec avidité les débris 
divers amoncelés dans les caisses et semblaient dédaigner celles destinées 
à leur nutrition, à l’état libre et normal. 

Parmi les nombreux genres et espèces que j'ai pu acclimater et faire 
reproduire, j'ai toujours pu constater le fait, que les mollusques sont 
omnivores et ne vivent exclusivement d'aucun aliment qui leur soit 
spécial. 

Si, quelquefois, on en trouve qui affectionnent plus particulièrement 
telle plante, je crois que c’est plutôt comme abri et non comme nourri- 
ture , car les feuilles intactes ne portent nullement la trace des mâchoires 
des animaux dont les morsures sont pourtant si reconnaissables. 


$ IT. — RECHERCHES. 


Les mollusques habitent de préférence les terrains calcaires, et ceux 
qui vivent autour des habitations rustiques, ou auprès de nos jardins, 
s’empressent de s'emparer de nos murailles neuves ou lavées à la chaux. 
D’autres s’amoncèlent autour des piquets et échalas des vignes, des tu- 
teurs des plantes et paraissent ronger les débris d’écorce que le fer a res- 
pectés. De nombreuses tribus se groupent après les tiges mortes des char- 


(:231)) 
dons et semblent vouloir, par leur présence, souvent très-variée , faire 
oublier les fleurs desséchées et jonchant le sol. 

Il faut donc rechercher les mollusques, terrestres et d’eau douce, 
dans les plaines et sur les côteaux, dans les lieux exposés au soleil 
comme dans les bois ombragés et humides. 

Pour les terrestres, il faut autant que possible que ce soit après les 
pluies tièdes; il est alors facile de les recueillir sur les mousses, les 
troncs d’arbres ; sous les pierres, les parois des rochers et sur les 
plantes. 

Quelques espèces sont fort difficiles à trouver, à cause de leurs habi- 
tudes souterraines : il faut alors , lorsqu'on aura constaté leur présence 
par quelque individu mort à la surface, arroser la terre à grande eau et 
jusqu’à ce qu’elle soit imprégnée d’une forte humidité, à une profondeur 
de 10 à 40 centimètres ; on peut être certain alors de voir surgir, pendant 
la nuit ou le matin de bonne heure, les individus vivants identiques à 
ceux dont on avait signalé la dépouille gisant sur le sol. 

C’est ainsi que je me suis procuré plusieurs fois des Bulimes et des 
Maillots, notamment le Bulimus tridens, les Testacella haliotidea et 
Maugei, etc., etc. 

Pour. la recherche des espèces fluviatiles, toutes les époques sont 
bonnes; j'en ai recueilli dans toutes les saisons, aussi bien l’hiver que l'été. 

Il faut se munir d’un petit filet nommé troubleau, de forme trigone et 
* dont la base est droite ; par ce moyen, on peut racler les parois des fon- 
taines , le fond vaseux et herbeux des marais, et recueillir ainsi tout ce 
qui s’y trouve après avoir épuré l’intérieur du canevas ou de la toile mé- 
tallique de toutes les matières étrangères. 

Alors, avec des bruxelles un peu longues, on vérifie le fond du trou- 
bleau ét on met les coquilles dans une boîte avec le nom de la localité et 
la nature des eaux. 

Les grandes bivalves sont plus difficiles à trouver à ‘eause de laprofon- 
deur où elles parquent. 

C’est ordinairement dans la vase tranquille des fleuves et des grands 
cours d’eau qu’elles habitent et où on les voit parfois, par transparence, 
tracer des sillons au bout desquels on est certain de les prendre. Plu- 
sieurs personnes se servent d’une drague attachée à l’arrière d’un bateau; 
mais le moyen qui m’a le mieux réussi, c’est celui qui consiste à faire 
glisser un pêcheur sur la vase, où, avec les mains el les pieds, il peut 
les saisir facilement et en faire de grandes provisions. 


( 238 ) 
Ÿ DEL. — CONSERVATION. 


Pour les mollusques que l’on veut conserver dans l’alcoo! , il faut les 
bien séparer des mucus qu’ils sécrètent, puis les enfermer dans un flacon 
plein d’eau salée, dont on a soin de clore l’orifice , de façon à compri- 
mer l'air, et, par là, déterminer l’asphyxie de l’animal, qui prend alors 
toute son extension. 

Une fois mort, on le presse un peu pour le dégager de l’eau qu'il a dû 
absorber , ainsi que du restant des mucosités qui le souillent encore; 
et puis on le met dans un flacon à demi-plein d'alcool, rectifié à 
22 degrés (1). 

Pour les mollusques dont on ne veut conserver que l'enveloppe, il 
suffit, pour les bivalves, de les jeter dans l’eau bouillante, les retirer de 
suite pour les bien nettoyer à l’eau fraîche et les entourer d’un fil afin 
de réunir les charnières et les bords qui, sans cela, se sépareraient par 
la rupture du ligament. 

Pour les coquilles univalves, il est bien plus difficile de les vider de 
leur habitant, et certaines pelites espèces même sont tellement sca- 
breuses que l’on doit y renoncer par crainte de les voir se briser dans 
les doigts. 

Il faut donc, lorsqu'on aura plusieurs coquilles à nettoyer et vider, les 
jeter à l’avance dans l’eau un peu tiède ; le mollusque, excité par la cha- 
leur humide du liquide, s’allongera beaucoup hors de sa spire, et aussi-® 
tôt qu’on le trouvera suffisamment en dehors, on le précipitera dans l’eau 
bien bouillante, où on le laissera à peu près deux minutes. 

On retirera le vase dù foyer, et avec des bruxelles on mettra la co- 
quille dans l’eau fraiche; la main gauche la tiendra, tandis que la 
droite, au moyen d’un instrument spiral, et autant que possible de la 
forme de la colonne où s’enroule le ligament , armé d’un petit crochet 
en hameçon à son extrémité, on introduira cet instrument aussi en 
avant que possible , et au moyen d’une secousse on opérera une révolu- 
tion vive, en suivant le sens spiral de la coquille. 

L’extraction de l'animal opérée, on fera passer l’eau fraîche dans l’in- 
térieur, en secouant et la faisant tomber; ensuite on la mettra sur de 
vieux linges pour qu’elle se dégage de toute humidité, ayant le soin de 


(1) Si le corps devient flasque , il suffit d’insuffler de l'alcool par la bouche jus- 
qu'à ce qu'il redevienne rigide. 


(2239: ) 
la poser du côté de l’ouverture , afin que de toutes les mucosités et de 
l’eau il ne reste nulle trace. 

Il arrive quelquefois que, vers le lortillon, le mollusque se brise et 
laisse le foie vers le sommet ; il faut alors confier cette coquille aux zo- 
nites qui, étant essentiellement carnassières , s’introduisent dans l’inté- 
rieur lorsqu'il est assez grand, et dévorent tout ce qui reste, à moins 
qu'elles ne puissent aller au fond; alors on doit laisser aux petits vers, 
aux Acarus et aux Podures le soin de nettoyer complètement cette co- 
quille hasardée. 

J'avoue que je ne me suis servi de ces derniers moyens que lorsqu'une 
coquille me présentait un intérêt assez grand, car le séjour sur la terre 
humide des caisses influe beaucoup sur l’épiderme et ternit le têt (1). 


$ IV. — CAPTIVITÉ. 


Terrestres. 


J'arrive à un point des plus essentiels pour l’étude des mollusques : 
c'est de pouvoir les élever en captivité, les observer sur place, loin des 
milieux où ils vivent d'habitude. 

J'ai déjà parlé de mes caisses dans deux ouvrages précédents (2), et 
les résultats que j'ai obtenus me font un devoir d’en reparler encore. 

Ces caisses en bois de pin, recouvertes de gaze métallique, ont la 
profondeur de 50 à 60 centimètres. Elles sont remplies par deux tiers de 
terre, sur laquelle j’ai ménagé des abris avec des fragments de calcaire, 
de silice, de schiste, de gypse et de briques. 

Dans les temps secs, j’arrose fréquemment la partie la plus exposée 
au nord, laissant celle qui confronte au sud dans un état de sécheresse 
relative. 

Je distribue mes caisses en compartiments irréguliers, dans lesquels je 
dispose les aliments et les roches qui conviennent le mieux aux espèces 
que je veux étudier. 

Voici à peu prèsles résultats que j’ai obtenus pour la reproduction des 
mollusques, sur lesquels j’ai pu expérimenter. 


(1) On peut également confier les coquilles mal vidées aux larves des anthrènes qui 
vivent dans toutes les collections. 

(2) Essai sur le Bul. tronqué. ( Act. Soc. Linnéenne, Bordeaux. {1847 ). 

Monographie, G'e Testacelle. Gass. ct Fisch., loc. cit. 1856. 


( 240 ) 


Se sont acclimatées et ont reproduit, les espèces suivantes : 


Arion rufus. 


Helix nemoralis. 


—  subfuscus. —  aspersa. 

—  fuscus. — limbata. 
Limax agrestis. — revelata. 

—  gagates. —  hispida. 

— argillaceus. —  intersecta. 

—  variegatus. Bulimus tridens. 

—  maximus. —  acutus (on développé). 
Testacella haliotidea. —  decollatus. 

— Maugei. Clausilia parvula. 
Vitrina major. —  perversa. 
Zonites cellarius. —  Rolphii. 

—  nitidus. Balæa perversa. 
—  nitens. Pupa cylindracea. 
—  olivetorum. Vertigo pygmæa,. 
Helix rotundata. Carychium minimum. 
—  obvoluta. Cyclostoma elegans. 
—  cornea. Pomatias septemspirale. 


J’ai vainement essayé d’acclimater le Testacella bisulcata de Grasse : 
il s’est accouplé, a pondu ; mais ses petits sont morts presque de suite 
après leur naissance. 

J’ai éprouvé le même désappointement avec les espèces suivantes : 


Vitrina semilimax. Helix carthusiana. 
Succinea putris. . —  pisana. 
—  Pfeifferi. —  ericetorum. 
Helix lapicida. —  variabilis. 
—  terrestris. Bulimus obscurus, etc., elc. 


Les accouplements se font généralement de nuit ou pendant les jours 
pluvieux , et tout aussi bien en hiver que pendant les autres saisons de 
l’année , pourvu que le temps soit humide et qu’il ne gèle pas. 

Les individus fécondés enfoncent leur mufle dans la terre, y déposent 
leurs œufs qui éclosent habituellement au bout de trente à cinquante 
jours, selon l’époque et l’état atmosphérique. 

Les œufs des Zonites et de certains Bulimes sont calcaires et résistants. 
Ceux des autres Mollusques terrestres sont généralement gélatineux, 
élastiques et réunis, ou agglomérés par une mucosité incolore ou légè- 
rement irisée. 

La coquille est formée déjà pendant l’incubation; mais elle n’a pas 


( 244) 

encore le faciès qu’elle devra avoir à l’état parfait. Elle est plus ou moins 
courte, conique et avec une columelle droite et les tours carénés. 

L’accroissement des individus, ainsi élevés, est des plus rapides , à 
cause des effets produits par une humidité permanente et une nourriture 
très-substantielle qui ne manque jamais. 

Aussi, ai-je obtenu des individus de Limaces adultes, éclos en novem- 
bre, et qui avaient atteint leur développement au mois de juin suivant. 

Tous les aliments leurs sont bons : j’en ai nourri exclusivement avec 
de la carotte, d’autres avec des viandes corrompues , des fruits, de la 
soupe, du son, de la farine, etc., etc. Tous les Zonites et quelques 
Bulimes lèchent avec plaisir le sang frais des animaux supérieurs. 


$ V. — AQUATIQUES. 


Univalves. 


Pour élever les Mollusques aquatiques , il faut se procurer un vase en 
verre, comme ceux où l’on renferme des poissons du genre Cyprin, ou 
même un peu plus évasé (1). 

On y mettra un peu de sable pur, quelques débris de briques et de 
calcaire , et, une fois ces objets immergés , on y posera des plantes flot- 
tantes , telles que des Lemna, des Conferves , des Hypnum, etc., etc. 

Ces plantes, destinées à l’épuration de l’eau, servent aussi de nourri- 
ture; elles ont donc un double but, celui de dégager le carbone qui 
corromprait le liquide, et celui de sustenter l'animal (2); les pierres 
entretiennent aussi la pureté, en condensant les matières qui se préci- 
pitent. 

La plupart des Mollusques d’eau douce ne résistent pas à la captivité, 
et quoique beaucoup s’accouplent, les jeunes et les vieux arrivent rare- 
ment à un développement normal. Je n’ai guère pu observer que quelques 
Bithinies qui se soient maintenues plus d’une année dans mes petits et 
grands aquariums. 


(1) M. le professeur Rossmassler de Leipzig recommande beaucoup ces aquaries 
dans la préface de son dernier Fascicule sur les espèces européennes. 

(2) C’est à ces plantes que les marais doivent leur état de limpidité, sans laquelle 
la corruption des matières animales et végétales empesteraient l’air pendant toute 
l’année, et quoique déjà ces eaux soient nuisibles à l’homme, elles seraient cent 
fois pires sans ces agents d'épuration. 


$ VE. — BIVALVES. 


Les Mollusques bivalves possèdent les deux sexes réunis et se fécon- 
dent par approche. M. Isaac Lea, le célèbre monographe des Nayades , 
a constaté qu'il y avait des mäles et des femelles; mais nous ne possé- 
dons pas encore d'observations qui aient confirmé ce fait. Cependant j'ai 
pu remarquer chez quelques Anodontes une plus grande convexité des 
valves et partant du manteau, des branchies et du corps, et une plus 
grande quantité de petites coquilles entre les feuillets branchiaux. 

C’est vers l’automne que les petits sont expulsés et commencent à vivre 
dans le sable, la vase et parmi les plantes aquatiques : leur développe- 
ment est généralement plus lent que chez les Mollusques terrestres; mais 
s’ils sont dans un milieu tranquille, ils accroissent très-régulièrement. 

Il en était surtout ainsi à l’époque où les clayonnages de la Garonne 
laissaient les nasses encore immergées, et avant que les atterrissements 
du fleuve les eussent comblées. 

Cest dans ces nasses que j'ai trouvé les plus beaux individus d'Ano- 
donta Gratelupeana, piscinalis et des Unio sinuatus et Requienti. 

Élevées en captivité, les espèces bivalves des genres Cyclas et Pisi- 
dium n’ont pas résisté plus de trois à quatre mois en hiver, un ou deux 
mois en été. 

Les Mulettes et les Anodontes, placées dans un cuvier avec du sable, 
du gravier et des plantes, n’ont pas vécu plus de trois mois, quoique le 


liquide fut fréquemment renouvelé avec l’eau de pluie ou de fontaine. 


Je me fie maintenant au bon sens des personnes qui s’adonnent à 
la recherche de nos Mollusques ; elles acquerront promptement l’expé- 
rience nécessaire, et pourront plus tard enrichir encore notre Faune de 
quelques espèces ignorées et qui se sont dérobées jusqu’à ce jour aux 
regards des explorateurs. 


$ VIT. — ENNEMIS DES MOLLUSQUES. 


Les Mollusques sont des animaux à sang froid, incolore ou à peine 
azuré, sans charpente osseuse, possédant tout au plus une enveloppe 
testacée, quelquefois seulement des granulations calcaires, intérieures. 

Leur organisation est fort simple : le système nerveux est composé 
d’une masse ganglionnaire qu’entoure le collier; ces ganglions partent 
du centre et sont à peine visibles ; ils vont en grossissant et se terminent 
par des renflements très-marqués. 


( 243 ) 


Leur peau est visqueuse, celluleuse et chagrinée, la sécrétion du 
mucus a lieu par ses pores ouverts. Aussi la sécheresse et le hâle 
ont-ils un effet mortel sur eux ; la dessiccation opérée par une transsu- 
dation forcée les racornit vite et les tue. 

Le manteau, composé d’un tissu plus épais et moins accessible aux 
influences de l'air extérieur, sert à les protéger contre leurs ennemis qui 
sont très-nombreux, mais dont ils deviennent cependant la proie, n'ayant 
à leur opposer que la force d'inertie. 

Parmi les ennemis des Mollusques, il faut mettre en première ligne 
l’homme, surtout l’agriculteur qui, confondant les espèces utiles avec 
celles nuisibles, détruit tout sans piété. Je ne saurais trop recommander 
pourtant un peu de protection pour les Testacelles qui, loin de détruire 
nos récoltes , protègent nos vergers et nos fleurs contre l'invasion du 
Lombric terrestre. 

Le Hérisson se nourrit avidement d’Hélices et de Bulimes ; tous les 
“oiseaux du genre Canard pêchent les Anodontes et les Mulettes; le Cor- 
beau s’en nourrit aussi quelquefois, et la Loutre dévore le Mollusque 
après avoir brisé les bords de la coquille avec sa puissante mâchoire. 

Les insectes attaquent les espèces terrestres et viennent déposer leurs 
œufs dans les parties charnues du corps ; l’éclosion de la larve tue néces- 
sairement l’arimal. Les plus acharnés sont les Drylus, les Lampyris, les 
Staphylinus et les Sylpha. 

Enfin, une foule de parasites vivent sur la peau des Mollusques ter- 
restres et aquatiques; les uns se collent au collier, d’autres se logent 
sous le manteau; enfin, d’autres dans les intestins et le foie. Je citerai 
surtout le Naïs vermicularis, les Vorticella, les Acarus, les Podurus et 
plusieurs vers. 


$ VIIT. — UTILITÉ DES MOLLUSQUES. 


L’utilité des Mollusques est généralement contestée; cependant je 
crois qu’on est loin d’en avoir tiré tout le parti possible. 

En théraupeutique, on s’est servi du suc des limaçons, et. sous les 
noms de sirop, de pommade et d’hélicine, on l’a fait entrer dans le trai- 
tement de la phthisie pulmonaire. 

M. le docteur Delamarre a lu à la séance de l’Académie des Sciences 
de Paris, le lundi 28 décembre 1857, une note très-intéressante sur ce 
sujet, et où il constate la diminution de la sécrétion de la muqueuse 
malade des bronches opérée par l’empoi de l’hélicine. 


( 244) 

Plusieurs médecins distingués preserivent le limaçon cru pour cer- 
taines affections de poitrine ; enfin, la pommade et le sirop sont ordonnés 
presque par tous. 

Comme alimentation, plusieurs espèces d’Hélices sont préconisées par 
beaucoup de gens ; dans ce nombre sont les suivantes : 

Pomatia, aspersa, nemoralis, pisana. 

Dans les Bivalves, nous avons vu manger les Unio sinuatus et Requienti, 
et les Anodonta Gratelupeana , piscinalis et cygnea. 

Je ne dissimulerai point qu'ayant essayé de ces divers mets, j’en ai 
conclu que la sauce faisait passer le poisson, et que ce régal, déjà lourd 
et indigeste, ne se pouvait manger qu’assaisonné avec les épices, l’ail et 
les forts condiments qui font la base de sa préparation culinaire. 

Dans les arts, on a essayé d’utiliser la nacre des grands Unio sinuatus. 
Récemment , à Paris, on a monté un atelier pour l’exploitation de ce 
produit et des perles que recèle souvent la coquille; j'ai déposé au 
Musée un morceau ciselé dans la nacre d’un Unio sinuatus de Cauderot : 
on pourra voir par là combien la nacre peut être exploitable, ne le 
cédant en rien pour le brillant et l’irisation ; seulement son épaisseur 
n'étant pas aussi forte que celle de la Pintadine perlière, et le prix de 
cette dernière ayant décrü , il est possible qu’on ne puisse employer les 
Mulettes indigènes à tous les ouvrages d’art, d’incrustation, d’ébénis- 
terie , de tableterie et de coutellerie, comme cela a lieu pour les coquilles 
exotiques. 

J’ai possédé et je possède encore quelques perles d’Anodonte et de 
Mulette dont l’orient est aussi beau que celui des perles de Ceylan, et, 
dans l'atelier dont j'ai parlé plus haut, j’en ai vu de fort belles prove- 
nant des Unio sinuatus de la Charente. D’ailleurs, du temps de Linné, 
en Suède , il se faisait un commerce assez étendu sur cette industrie ; 
mais le procédé de parcage ayant été perdu, il ne reste plus un vestige 
d’un commerce qu’aura sans doute détrôné celui des Antilles, des mers 
de l’Inde et du Pacifique. 

Plusieurs peuplades de la Polynésie travaillent les coquilles et les 
érigent en instruments de ménage , de pêche, de chasse et de guerre; la 
plupart peuvent fournir de bonne chaux à bâtir. 

En admettant d’ailleurs que les Mollusques ne soient pas, dans l’éco- 
nomie naturelle, aussi utiles que certains genres d'animaux , leur étude 
seule amène à connaître les grands secrets de la création. Les comparai- 
sons utiles et nécessaires font découvrir à l'observateur de nouveaux 


( 245 ) 
arcanes qui l’aident à relier ces animaux aux classes plus élevées; l’es- 
prit sérieux et dégagé de toute idée de système est obligé de s’incliner 
devant ces règles de la philosophie de l'organisme où rien ne manque et 
où tout a sa place, sa corrélation intime avec les bases primordiales des- 
quelles tout découle et vient fortifier le cœur des vrais amis de l'Histoire 
naturelle, ceux qui cherchent et veulent avant tout la vérité. 


Première Crasse. — GASTÉROPODES. 
Famille EL. — LINACEENS. 


LimaciENs (excl. Vitrina) Lamk., Philos. zool. 1809. —- Limaces Cuv., 
Règn. anim. 1817. — LimaciNés (partim ) Blainv. Malac. 1825. — 
Nupicimaces Latr. Fam. nat. 1895. 


ANIMAL nu sans coquille extérieure , avec ou sans coquille intérieure, 
allongé , cylindriforme ou ovale, muni d’une cuirasse partielle; conjoint 
avec le plan locomoteur, quatre tentacules contractiles, les grands oculés 
au sommet. Cavité pulmonaire en avant ou en arrière du manteau. Géné- 
ration androgyne. 


Genre L. — ARION, ARION. 
Arion Fér. Hist. Moll. 1819. — Zimax mult. auct. 


Cavité pulmonaire antérieure ; orifice au bord droit de la cuirasse an- 
térieurement. Orifice du rectum, près celui de la respiration. Un pore 
muqueux terminal. Organes de la génération réunis; orifice sous celui 
de la respiration. Mâchoire arquée et pectinée ; quelques grains calcaires 
sous la cuirasse. 


1. 1. À. DES CraRLaTans, À. rufus (1). 


Limax rufus Linn., Syst. nat. Édit. X, 1158. — Arion, rufus 
Fér. Hist. Moll. 1819, p. 60, pl. 1, fig. 3. 


(1) Tous les types de cette faune , recueillis par mes amis ou par moi dans le dépar- 
tement de la Gironde, font aujourd’hui partie du Musée d’Hist. Nat. de Bordeaux. 
Tous sont collés sur des cartons étiquetés (ne varietur) au dos, de ma main ; de plus, 
afin de faciliter les recherches ou vérifications à ceux qui voudraient les consulter, 
chaque carton esf porteur d’un numéro d'ordre, correspondant à ceux du présent 
Catalogue. 


( 246 ) 
Nom vulgaire : LOCHE ROUGE. 
Var. B. Brun brûlé. 
GC. Noirâtre. Lim. ater Linn. 

HABITE : les grands bois élevés ou de la plaine, les vergers, les vignes, 
etc., dans les endroits humides ; le type est remarquable de taille et de 
beauté dans les bois de Mérignac. 

Tout le département ; très-commun. 


2. 2. À. BRUNATRE, À. subfuscus. 


Limax subfuscus Drap. Hist. Moll. 4805. , p. 125, pl. IX, fig. 8. 
Arion subfuscus Fér. Hist. Moll. Suppl. p. 96, z. 


Var. B. Jaunâtre, avec des linéoles rouges. 
C. Bronze noirûtre. 
HaBrre : les jardins, sous les touffes des plantes, généralement dans 
la plaine. — Commun. 


3. 3. À. pes JarDiNs , À. fuscus. 


Limazx fuscus Mull. Verm. Hist. II, 17174, p. 11. 
Arion hortensis Fér. Hist. Moll. 1819, p. 65, pl. IF, fig. 4-6. 


Var. B. Violacé grisâtre, pied td. 
C Noir, avec des bandes grises , pied td. 
D. Gris lilas, pied jaune pâle. 
E. Verdâtre ou bronzé, id. 
F. Blanc, pied orangé. 
Hagire : les jardins , en ville et à la compagne; se tapit sous les vases 
à fleurs, sous les débris de poterie, de planches et de plantes humides. 
Commun à Bordeaux et dans tout le département. 


Genre Il. — LIMACE, LIMAX. 


Limax (partim ) Linn. Syst. nat. Édit. Xe. 1758. 
Limacella, Brard. Hist. Coq. Paris. 1815. 
Nom vulgaire : LIMACE, LocHe. 

Cavité pulmonaire antérieure; orifice au bord droit de la cuirasse, pos- 
térieurement; orifice du rectum, près celui de la respiration. Pore mus- 
queux terminal nul; organes de la génération réunis; orifice derrière le 
tentacule droit; mâchoire arquée en bec sans stries pectinées; coquille 
rudimentaire, sous la cuirasse ( Limacella Brard. Coq. Paris. p. 107- 
109. 1845. ). 


( 247 ) 
%. 1. L. Acresre, L. agrestis. 


Limax agrestis Linn. Syst. nat. Édit 10°. 1758. 1. p. 652. Luma- 
cella obliqua. Brard. Coq. Paris. 1815. p. 118. pl. 4. fig. 5-14. 


Var. B. Violûtre. 
C. Noirâtre. 

Hapire. Très-commune partout, dans les jardins et autour des habi- 
tations rustiques, moins dans les landes que dans les terrains cal- 
caires. 

Obs C’est l’espèce la-plus nuisible. Elle se nourrit des jeunes pousses des 
plantes et cause de grands ravages à l’agriculture. Nous avons trouvé, à 
Gradignan, la var. B. d’une taille très-forte. 


5. 9. L. Javer, L. Gagates. 


Limax gagates Drap. Tabl. Moll. 1801. p. 100; et Hist. pl. 14. 
fig. 12. Limacella, concava , Brard. Coq. Paris, 4815, p. 121, 
pl. IV, fig. 7-8 et 16 à 18. 
Var. B. Olivatre. | 
C. Grisâtre. 
HABiTe : les jardins cultivés, s’abrite de la même manière que l’Arion 
fuscus. — Commune à Bordeaux, Gradignan , Talence, etc. 


6. 5. L. arcneuse, L. argillaceus. 


Syn. Limaz argillaceus (1), Gass. Act. Soc. Linn. t. 22. 4° novem- 
bre 1858. 

Animal allongé , caréné ; tentacules supérieurs , noirâtres ou violâtres, 
point oculiforme très-noir, peu visible ; tentacules inférieurs courts, gris 
foncé, un peu noirs vers le sommet; cuirasse double, séparée en deux 
parties inégales par l’orifice respiratoire qui se trouve placé en arrière. 

Carène jaune de chrôme, partant brusquement de la cuirasse et se ter- 
minant en arrière, en se relevant un peu. 

Peau chagrinée assez fortement de noir sur un fond brun bien obscur ; 
bords du manteau et du pied jaunâtre; plan locomoteur, légèrement 
zébré à sa marge, dessous jaune päle; mucus jaune rouge épais, peu 
abondant. 

Mâchoire cornée, à bec central, bombé et aigu; langue piriforme 
garnie de spinules espacées en fer de lance, recourhbé à la pointe; osse- 


(4) Non argilaceus, err. typ. 


( 248 ) 

let ovale inégal, un peu abattu à droite; nucléus bombé, chagriné sans 
apparence de spire. 

Longueur en marche . ... 90 mil. Hauteur... ..... 47 mil. 

Longueur en contraction. . 25 mil. Hauteur........ 24 mil. 

HaBrre : les terrains argileux des plateaux élevés, à Lormont, où elle 
est difficile à trouver à cause de sa coloration presque identique avec celle 
du terrain. 


7.4. L. variée, L. variegatus. 


Limax variegatus Drap. Tab. Moll. 1801. p. 103. Limacella ungui- 
cula. Brard. Coq. Paris. 1815. p. 415. pl. 4. fig. 3-4-11. 


Nom vulgaire, LIMACE BLONDE, LOCHE DES ÉVIERS, DES CAVES. 


Var. B. Jaune très-pâle. 
C. Brunâtre , taches brun clair. 
D. Major. 
HaBITE : les caves, les trous des éviers, les tuyaux d'écoulement, l’in- 
térieur des puits et des fontaines , etc. 
Répandue mais moins commune que les précédentes. Trouvée à Bor- 
deaux, Lormont, Plassac, Cambes, etc.; Talence, le Bouscat, Caudéran, 
Saint-Médard, etc. 


8. 5. L. ceNDRÉE, L. maximus. 


Limax maximus Linn. Syst. nat. Édit. 40°. 1758. 

Lim. cinereus Mull. Verm. Hist. 41. 1774. 

Limacella parma Brard. Coq. Paris, 4815. p. 110. pl. 4. fig. 1-2- 
9-10. 

Lim. antiquorum Fér. Hist Moll. 1819. p. 68. pl. 4. 


Var. B. punctala. Bronze avec des bandes noires interrompues. 
Hagire : Le type, un peu partout : dans les cours humides, les jar- 
dins cultivés; les bois, dans les troncs creux des vieux arbres; Bor- 
deaux, Libourne, etc. 
La variété, sur la route de Paris, à Cenon, dans le petit vallon qui la 
borde (M. Des Moulins.) 


Genre IIT. — TESTACELLE, TESTACELLA. 


Testacella Cuv. Tabl. 5. 4800, in Anat., comp. 4, 1805, ad calcem. 
Testacellus Faure-Big., Bull. Soc. Philom. , n° 61, 4802;, p. 98. 


( 249 ) 

ANIMAL : allongé, cylindriforme, acuminé à chaque extrémité ; cui- 
rasse nulle; tête assez distincte, sans mâchoire, munie de quatre tenta- 
cules rétractiles, dont les postérieurs, qui sont les plus longs, ont des 
boutons oculiformes ; pied long et peu distinct; cavité pulmonaire située 
au quart postérieur de la longueur ; son orifice tout-à-fait en arrière, sous 
le côté droit de la coquille; celui de l’anus en est très-voisin; les orga- 
nes de la génération réunis montrant leur orifice, près et en arrière du 
grand tentacule droit. 

Coquizce : extérieure, solide, auriforme, déprimée ou convexe, à spire 
plus ou moins saillante, ayant une ouverture très-grande et ovale; le bord 
droit simple et tranchant, le gauche renflé et réfléchi ; elle recouvre la 
partie postérieure de la cavité pulmonaire. 

Les Testacelles vivent dans la terre, où elles poursuivent les lombries. 


9.1. T. ormER, T. haliotidea. 


Testacella haliotidea Drap., Tabl. Moll., p. 99. 1801. 

T. europæu de Roissy, t. 5. p. 252. 1805. 

Helix subterranea Lafon du Cujula. Statist. de Lot-et-Garonne, 
p. 443. 1806. ; 

Testacella Galliæ Oken. Lehrb. Nat. IT. p. 212. 1815. 

Testacellus haliotideus Fér. Hist. gén. p. 94, 1819. 

Var. B. elongata Gass. et Fisch. 

Var. C. sulfurea Nob., jaune de soufre. 

Hagire : les jardins cultivés, les champs, les bordures des bois, les 
vignes, extrêmement répandue et commune dans toute la Gironde. Le 
type à Cambes, Créon, la Bénauge, La Réole, etc. La var. B. à Cau- 
déran , Bordeaux, le Bouscat, etc. La var. C. à Cadillac (M. Bareyre). 


- 10. 2. T. pe Maucé, T. Maugei. 


Testacella haliotoides Lamk. Syst. anim. sans vert. p. 96. 1801. 
T. haliotidea Ledru. (Voy. à Ténérif. 1810) 
Testacellus Maugei Fér. Hist. Nat. gén. p. 94. pl. 8. fig. 10-12. 
Testacella Maugei Desh. Dict. class. nat. t. 16 p. 179. 1830. 
Var. B. griseo-nigrescens Gass. et Fisch. 

C. roseo-fulvescens id. 

D. griseo-fulvescens id. 

E. griseo-rubescens Fér. 

F. albina Gass. et Fisch. 


Tome XXI. 19 


( 250 ) 


Hagire : dans les vieux jardins potagers de Bordeaux ; commune aux 
allées des Noyers; à Blanquefort; à Gradignan, à Pessac, à Saint-Médard, 
dans les terrains siliceux (1). 


Famille EL — COLIMACÉS. 
Cozrmacés (excel. Helicina) Lamk., Phil. zool. 1809. t. 4. p. 320. 


AnImaL à tortillon spiral, manteau large, entourant le cou, pouvant 
contenir dans la coquille; quatre tentacules rétractiles ; mâchoire pecti- 
née ou en bec; pied distinct du corps; orifice anal au côté droit du cou, 
rarement à gauche; orifice respiratoire tout près; organes reproduc- 
teurs à orifice commun, au côté droit, rarement à gauche. 


CoquiLce spirale, affectant toutes les formes, recouvrant en entier le 
corps de l’animal. 


Genre IV. — VITRINE, VITRINA. 


Helix (partim). Mull. Verm. Hist. t. 2. 1774. p. 15. 

Vitrina Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 33. 

Helico-Limax (partim ) Fér. père. Exp. Syst. conch. in Mém. Soc. 
émul. Paris 1801. p. 390. 

Vitrinus Montf. Conch. syst. t. 2. 1810. p. 239. 


ANIMAL : allongé, demi-cylindrique, ayant un petit tortillon, un col- 
lier charnu cernant le cou et fournissant en avant une sorte d’appen- 
dice qui s’étend sur lui en forme de cuirasse, et quelques autres appen- 
dices linguiformes rétractiles, capables de recouvrir presque toute la 
coquille; quatre tentacules cylindriques et rétractiles; les deux supé- 
rieurs oculés au sommet; pied séparé du corps par un petit sillon ; ori- 
fice de la cavité pulmonaire à droite sur le collier, à la naissance de la 
cuirasse; organes de la génération réunis, ayant leur orifice près du 
tentacule droit, quelquefois un pore muqueux à la partie postérieure. 

Coquizee : dextre très-petite, spirale, mince, transparente et fragile, 
croissant rapidement dans le sens horizontal ; spire courte, le dernier 
tour très-grand; ouverture ample avec une columelle solide, spirale, se 


(1) Voir, pour les détails des mœurs, de l'anatomie, etc. , notre Monographie du 
genre Testacelle, par 3.-B. Gassies et P. Fischer , dans les Actes de la Société Lin- 
néenne de Bordetux, 5me série, 21 vol p. 195-248, pl. 2-5, 1856, et à part, chez 
Baillière, rue Hautefeuille, 19 , à Paris. 


( 257 } 
confondant presque toujours avec le tour de l'ouverture. Épiphragme 


mince, vitreux. Les vitrines habitent les fourrés épais, à l’abri de la grande 
lumière , sous les feuilles humides. 


41.4. V. ne DraparNauD, V. major. 


Vitrina pellucida Drap. Tabl. Moll. 1801, non Mull. Gml. 
Helicolimax Fér. père, Ess. Méth. conch. 1807. p. 43. 
Vitrina Draparnaldi Cuv. Règn. anim. 1817. t. 2. p. 405. 
V. major CG. Pfeiff. Deutschl. t. 1. 1821. p. 47. 

La TRANSPARENTE Geoff. Coq. Paris. 


HABITE : les vieilles haies, sous les feuilles mortes, au Bouscat, Gra- 
dignan , Talence, etc. ; très-belle au Bouscat. 


12.2. V. anNuLARE, V. annularis. 
Hyalina annularis Stud. syst. Verz. p. 2. 1820. 
Helicolimax annularis Fér. Tabl. syst. p. 21, n° 8, Tabl. 9. fig. 7. 
1821. 
Vit. subglobosa Mich. compt. 1831. p. 10. pl. 15. fig. 18-20. 
Hapite : Caudéran, le Bouscat, Eyzines, Saint-Médard, près de Bor- 
deaux, dans les haies, sous les feuilles mortes ; peu commune. 


43. 3. V. ALLONGÉE, V. semilimax. 


Helix semilimax Daudebard de Férussac père, in Naturforsch., 29. 
st. 4802. p. 236. pl. 1. fig. A-D. 
Vitrina elongata Drap. Hist. Moll. 1805. p. 120. pl. 7. fig. 40-49. 
Helicolimax elongata Fér. Tabl. syst 1822, p. 25 et Hist. pl. 9. 
fig. 1. 
HaBiTe : les bois montueux exposés au Nord et à l’Est. Cenon, Lor- 
mont, Floirac, Cambes , Camblanes, Castets, etc. — Assez commune. 


Genre V. — AMBRETTE, SUCCINEA. 


Succinea Drap. Tabl. Moll. 1801. p. 32-55. 
Amphibulima Lamk. in Ann. Mus. 4. 1805 p. 256. 


ANIMAL : gastéropode pulmobranche, ovale allongé, paucispiré, por- 
tant sur la tête deux paires de tentacules ; les supérieurs oculés au som- 
met, les inférieurs très-courts ; pied large à bords minces; organes gé- 
nérateurs réunis ; leur orifice en arrière du tentacule inférieur droit ; 
mâchoire cornée en fer de cheval, sans côtes. 


( 252 ) 

CoquicLe : dextre, ovale, oblongue , très-mince, transparente, ouver- 
ture ample, entière sans dents ni plis, bord latéral non réfléchi, tran- 
chant et fragile; columelle lisse, évasée ; un épiphragme papyracé. 

Les Ambrettes habitent les endroits humides, le long des eaux, sur les 
plantes aquatiques, les saules, les saliquaires. ete., etc. L'animal ne 
rentre dans sa coquille que difficilement, et seulement pour hiverner. 

C’est à tort qu’on leur a donné le nom d’amphibies, leurs habitudes 
sont essentiellement terrestres : elles périssent dans l’eau, et, si, parfois 
on les y trouve, ce n’est qu’accidentellement. — Herbivores 


14. 1. À. AMPHIBIE, S. putris. 


Helix putris Linn. Syst. nat. Édit. X. 4758 p. 714. 
Succinea amphibia Drap. Tabl. Moll. 1801. 
Hagire : les lieux humides, le long des ruisseaux, des fleuves, sur les 
oseraies, les vimières, etc., etc. Très-commune le long de la Garonne, 
dans les palus de La Souys, Beychevelle (M.-D. Guestier ). 


15. 2. À. DE Preirrer, S. Pfeifferi. 


Succinea Pfeifferi Rossm. Iconog. t. 1. 1835. p. 96. fig. 46. 
Var. B. major. 
C. muralis. 
D. ochracea, Suc. ochracea, Betta. 
HABITE : le bord des ruisseaux. 
La var. B, Cadillac, Cambes, Langon, etc. ; commune. 
La var. C, au Bouscat (M. Jaudouin }) (1). 
La var. D, tous les terrains humides de l’Entre-deux-Mers; 
les marais de Marcamps, à Fargues, etc. ; commune. 


Genre VI. — ZONITE, ZONITES. 


Zonites Montf. Conch. syst. t. 2. 1810. p. 283. 


Helix. Sous-genre : Zonites Gray. Nat. arrang. Moll. in Méd. Repos. 
t. 20. 1821. p. 239. 


(1) Cette variété a été recueillie fréquemment et toujours à une distance très- 
grande de lieux humides, contre des murailles nouvellement recrépies. 

Le Suc. oblonga m'a été donné comme venant de la Réole, mais mort et parmi 
des espèces du Haut-Languedoc ; j'ai cru devoir le laisser dans les espèces douteuses, 


( 253 ) 
ANIMAL : allongé, pouvant être contenu en entier dans sa coquille. 


Mâchoire arquée sans côtes, ni dents, à bords plus ou moins rostri- 
formes. 


Coquice : dextre, subdéprimée, rarement globuleuse ou conique, très- 
mince, plus ou moins transparente, à spire courte et à dernier tour plus 
ou moins grand; ombilic plus ou moins ouvert, fermé quelquefois ; ou- 
verture oblique, semi-lunaire presque toujours échancrée par l’avant- 
dernier tour, point de dents; péristome mince, ni bordé, ni réfléchi, 
tranchant, discontinu. Épiphragme excessivement mince; manquant 
chez la plupart. 

Les Zonites habitent les endroits très-humides, loin de la lumière, dans 
la terre, sous l’humus des bois, etc., etc. Omnivores, mais surtout car- 
nassières , vivant de matières fraîches et putréfiées, attaquant les autres 
mollusques. 

Leur peau dégage une odeur alliacée très nauséabonde. 


16. 1. Z. CELLERIÈRE, Z. cellarius. 


Helix cellaria Mull. Verm. Hist. t. 2. 1774. 
Var. B. pallida, blond pâle. 

Var. C. planorbis, monst. 

Var. D. sylvestris, Gass. 


HaBire : les caves, les éviers rustiques, les jardins, sous tous les dé- 
bris, vit de matières en putréfaction ; commune dans toute la Gironde. 


Obs. La var. D. est celle que nous avons donnée comme var. sylves{ris 
Moll. de l’Agenais, p. 437 Est-ce l’Alliaria. Mill. ? Elle habite les bois mon- 
tueux, situés au Nord et à l'Est, sous les mousses, au pied des arbres; Cambes, 
Floirac, La Souys, Castets, St-Émilion ; n’est pas commune. 


47.3. Z. LUISANTE, Z. mtidus. 


Heliz nitida Mull. Verm. Hist. t. 2. 1774. p. 32. non Gmel. nec. 
Drap. Hist. 
H. lucida Drap. Hist. Moll. 1805. p. 103. non Drap. Tabl. 


Hapire : les oseraies des palus, le long des fleuves, des rivières, sous 
les feuilles de saule et l'herbe humide ; très-commune en Queyries, près 
Bordeaux , à Cadillac, Langoiran ; à Libourne , sur la Dordogne, Saint- 
André, etc., etc. 


(254 ) 
18. 4 Z. BRILLANTE, Z. nitens. 


Helix nitens ? Gmel. Syst. nat 1788. p. 36-33. 
Helix nitens Mich. Comp. p. 44. pl. 15, fig. 1-3. 1831. 
Var. B. albina, presque blanche. 

Hagire : les bois montueux et humides sous les feuilles de chêne 
tombées, dans la terre où elle est presque toujours enfoncée ; sous les 
débris calcaires, etc., à Lamothe, près Latresne, à Fargues , à la Réole, 
Cenon, Floirac. — Rare. 


49.5. Z. niribuze , Z. mitidulus. 


Helix nitidula Drap. Hist. Moll. 1805. p. 117. 
HaBiTE : trouvée vivante à Camblanes dans un bois très-élevé; à 
Cenon, chez M. Coupat; Lestonnac, Saint-Caprais (M Des Moulins ); 
morte , à Saint-Émilion; les alluvions de la Garonne. — Rare. 


20. 6. Z. crisrazune, Z. crystallinus. 


Helix crystallina Mull. Verm. Hist. t. 2. 1744. p. 23. 
HABiTe : les oseraies humides, les berges des ruisseaux sous les touffes 
d'herbes, loin de la grande lumière ; Cadillac, Ile Saint-Georges, Bègles, 
Saint-André, ete. — Commune dans les alluvions des divers cours d’eau. 


21 7. Z. HYDATINE, Z. hydatinus. 
Helix hydatina Rossm. Iconog. VII. 1838. p. 36 fig. 929. 


HaBire : les alluvions de la Garonne, à Bègles, Langon, La Réole. 
— Rare. 


29, 8. Z. STRIÉE, Z. striatulus. 
Helix striatula Gray. in Med. Repos. XV. 1821. 
H. nitidula, var. B. Drap. Hist. Moll. 1805. p. 117. pl. 8. fig. 19-21. 
H. radiatula Ald. Cat. 1830. p. 12. 


Hagire : sous les touffes des mousses à Arcachon (M. Souverbie), à 
La Teste (M. Durieu ). — Rare. 


23. 9. Z. FAUVE, Z. fuluus. 


Helix fuloa Mull. Verm. Hist. t. 2. 1774. p. 50. 
Hagrre : sous les pierres, les feuilles et les débris humides voisins des 
ruisseaux, des rivières et des marais. Au Chantier du Roi, en Paludate, 
(M. Jaudouin); à Bègles, en Queyries, la Souys, près Bordeaux; les bords 


( 259 ) 
de l'Isle, au bas de Saint-Émilion ; à Cadillac, Langoiran, Langon, Cas- 
tets, La Réole, à La Teste, Arcachon (M. Souverbie), à Factures. — Peu 
commune. 


2%. 10. Z. DES OLIVETTES, Z. olivetorum. 


Helix olivetorum Gmel. Syst. nat. 1788 p. 36-39. 
H. incerta Drap. Hist, Moll. 1805. p. 109, pl. 13, fig. 8-9. 
HABITE : les bois, au Nord et à l’Est, au pied des vieux arbres, pres- 
que toujours dans la terre; La Réole, la Bénauge, Brannes. — Assez 
rare ; ses œufs sont plus gros que ceux de ses congénères de la Gironde. 


Genre VII. — HELIX. 


Helix ( partim) Linn. Syst. nat. Édit. X. t. 1. p. 7168. 1758. 
Helix et carocolla Lam. Anim, sans vest. VI, t. 2. 1822. p. 62-94. 
Helix et Zonites Gray. in Turt. Shells. Brit. 1840. p. 110-125-164. 

ANIMAL : de forme variable, demi-cylindrique, muni d’un tortillon 
très-grand; collier charnu , fermant exactement la coquille, et portant 
quelques appendices courts ; tête assez distincte ; bouche fendue en long, 
pourvue de chaque côté d’un lobe charnu, et en dehors d’une masse lin- 
guale et d’une pièce supérieure, dentée et propre à la mastication ; qua- 
ire tentacules rétractiles, renflés en bouton à leur sommet, les supérieurs 
étant les plus longs et oculés; pied grand et oblong allongé; orifice de 
la cavité pulmonaire à droite, sur le collier ; anus tout à côté et un peu 
plus à droite; organes de la génération réunis et ayant leur orifice près 
du tentacule doit postérieur. 

Coquizce : dextre, quelquefois sénestre, très-variable dans sa forme et 
ses couleurs, orbiculaire, globuleuse, conique ou carénée , quelquefois 
planorbique et discoïde, à sommet arrondi, comprimé en mamelon ou 
semi-lunaire; péristome discontinu, échancré par l’avant-dernier tour, 
rarement continu, quelquefois denté. 

Les Hélices habitent les bois, les champs, les plaines et les côteaux, 
principalement les terrains calcaires. — Omnivores. 


[4 


25. 1. H. Lame, HI. lapicida. 
Helix lapicida Linn. Syst. nat. Édit. X. 1758. €. 1. p. 768. 
Carocolla lapicida Lamk. an. sans vert. VE £. 2. 1822, p. 69. 
La Lampe Geoffr. Coq. Paris. 
Var, B. minor. 


( 256 ) 
Hagire : les endroits ombragés, se cache sous les pierres, monte sur 
les arbres pendant la nuit. — Très-commune au Bouscat, Caudéran, 


Talence, Gradignan, La Souys, les côteaux entourant Bordeaux et tout le 
département. 


26. 2. H. ÉLÉGANTE, H. terrestris. 


Trochus lerrestris Penn. Brit. zool. 1744. p. 127. pl. 80. fig. 108. 
Helix elegans Drap. Tabl. Moll. 1801. p. 70. 
Carocolla elegans Lamk. An. sans vert. VI. 2e part. p. 400. 
I. terrestris. 
Hagrre : Lescure, près la Chartreuse ( MM. Souverbie, Fischer et 
Guestier ), Floirac et Mérignac (M. Des Moulins ). 


27. . H. pycmée, H. pygmeæa. 


Helix pygmæa Drap. Tabl. Moll. p. 93. et Hist. pl. VIIL. fig. 8-10. 
HaBire : les terrains siliceux des Landes dans les vieilles haies , sous 
les feuilles pourries des chênes et des platanes, à Caudéran , le Bouscat, 
Mérignac, Saint-Médard-en-Jalle , Facture, le Teich , Arcachon. — Trou- 
vée également à Saint-Émilion et à Plassac dans des bois assez élevés et 
calcaires. 


28. 4. H. souron, H. rotundatn. 


Helix rotundata Mull. Verm. Hist. IL. p. 20. 
LE Bouton , Geoffroy. Hist. Coq. Paris. 
HABiTE : très-commune partout et à toutes les expositions, sous Îles 
débris de pierrailles ; tout le département. 


29. 5. PLanorse, H. obvoluta. 


Helix obvoluta Mull. Verm. Hist. IT. 1774. p. 3641. 
H. trigonophora Lamk. in Journ. Hist. nat. 1792. IL. p. 349. pl. 
42. fig. 27-28. 
La VeLouTéE à bouche triangulaire Geoffr. Hist. Coq. Paris. 
HaBire : les bois humides et calcaires, Sainte-Croix-du-Mont (MM. Du- 

rieu et Jouannet), Verdelais, Cambes , Camblanes, Langoiran , Cenon, 
Floirac, près Bordeaux, Saint-Émilion, Fargues , etc. — Répandue, 
commune nulle part. 


30. 6. H. cornée, H. corneu. 
Helix cornea Drap. Tabl. Moll. 1804. p. 89 et Hist. pl. 8. fig. 1-3. 


ITU) 
Var. B. squammatina Mar. de Serres ; à tèt brun sans fascies. 
Var. C. albolabris. Nob. 
Var. D. scalaris. Nob. 
HAB1TE : Les côteaux élevés, dans les bois, les vieux murs, au pied des 
rochers , etc. — Commune à Cambes, Baurech, Langoiran, Verdelais, 
Sainte-Croix-du-Mont, Cenon , etc., Blaye , Saint-Caprais. 


31.7. H. mGnonne, H. pulchella. 


Helix pulchella Mull. Verm. Hist. II. 1774. p. 31. 
Var. À. lævigata, Hel. pulchella Mull. 
Var. B. costata, H. costata Mull. loc. cit. p. 30. 
HABITE : sous les pierres dans les endroits voisins des cours d’eau, 
à la Bastide, à Bègles, Paludate, Gradignan, Caudéran, ete. — Très- 
commune. 


32. 8. H. NEMORALE, H. nemoralis. 


H. nemoralis Linn. Syst. nat. Édit. Xe. 1758. 4. p. 113. 
H. hortensis Mull. Verm. Hist. II. 1774. p. 52. 


Nom vulgaire : DEMOISELLE. 


Var. À. quinquefasciata. 
Var. B. quadrifasciata. 
Var. C. trifasciata. 
Var. D. bifasciata. 
Var. E. unifasciata. 
Var. F. luteola. 

Var. G. rufa. 

Var. H. olivacea. 

Var. I. castanea. 
Var. J. translucida. 
Var. K. sinistrorsa. 


Var. L. scalaris. 


Je n'indique que les variétés principales , car ces Mollusques forment 
des séries nombreuses de variations sans importance, depuis le blanc pur 
de porcelaine jusqu’au marron très-foncé, avec bandes nombreuses, 
avec une seule, unicolore, bandes continues ou interrompues, etc. 


Il en est de la taille comme de la couleur , tantôt l’Helix nemoralis à 
péristome noir est fort petit, tandis que l’H. nemoralis à péristome 


( 258 ) 
blanc est très-grand. Il ÿ en a de coniques, globuleuses et déprimées; 
les unes ont un péristome très-blanc, d’autres très-noir et d’autres 
roussätre ou à peine coloré de rose. 

L’accouplement a lieu de la façon la plus naturelle; la reproduc- 
tion est exactement la même pour les deux variétés principales nemora- 
lis et hortensis, et je suis à me demander comment, à notre époque, 
des esprits sérieux ont pu les séparer encore. 


HABITE : les jardins, les bois, les prairies presque partout, la variété 
nemoralis plus commune dans les terrains calcaires de la rive droite 
de la Garonne, la var. hortensis sur la rive gauche dans les terrains 
siliceux. — Très-communes toutes deux. Édules. 

Je connais quatre individus d’H. nemoralis sénestre : 

1 chez M. Lambertye, à Caudéran, 

4 chez M. Coudert , — trouvé au Bouscat, 

1 chez M. D. Guestier, — trouvé à Floirac , 
1 chez M. Des Moulins, — trouvé à Bouliac. 


La var. scalaris a été trouvée à Langoiran, par M. Jaudouin. 


33. 9. H. cHacrinée, H. aspersa. 


Hel. aspersa Mull. Verm. Hist. IT. 1774. p. 59. 
LE JarninieR, Geoffr. Hist. Coq. Paris. 


Nom vulgaire : CAGOUILLE. 
Var. B. grisea. 
Var. C. lutea. 
Var. D. translucida. 
Var. E. conica. 
Var. F. subscalaris. 
Var. G. scalaris. 
Var. H. sinistrorsa. 
Var. I. corniformis. 


HAB1TE : partout et dans tous les terrains; la var. grisea, à Gaudé- 
ran, chez M. Cabrit, rare. — La var. lutea commune à Mérignac, sous 
les lierres. La var. translucida, à Arcachon; la var. conica , à Fargues, 
Sainte-Croix-du-Mont, etc. La var. subscalaris, au Bouscat, à Plassac. 
La var. scalaris, à Caudéran, au Bouscat. La var. corniformis , chez 
M. de Blavignac, chemin de Pessac (communiq. M. Laporte fils.) La 
var. sinistrorsa , à Vimeney, près Floirac (M. Des Moulins). Édule. 


( 259 ) 
J'ai obtenu plusieurs individus scalaires dans une ponte de deux Héli- 


ces chagrinées ; j’en conserve un parfaitement adulte de la var. lutea 
dans ma collection. 


Obs. Cette espèce, lorsqu’elle naît au printemps, cause de grands ravages 
aux jeunes bourgeons des vignes. L'animal est d’autant plus vorace qu’il est 
plus jeune. 

On occupe un nombre considérable de femmes pour détruire ces Mollus— 
ques que l’on écrase sur les routes après en avoir donné à dévorer aux 
canards. Les navires en partance pour les voyages au long-cours chargent 
jusqu’à 7 et 8 mille el. aspersa, venant presque tous de la commune de 
Caudéran, qui en est infestée. 

Le jour des Cendres, on fait, dans ce bourg, une grande consommation de 
cette Hélice qui semble par cela inaugurer le Carème par sa chair maigre, peu 
substantielle et très-indigeste. Des marchandes stationnent sur les marchés 
avec de grands mannequins remplis d'A. nemoralis et aspersa, mais en don- 
nant la préférence à cette dernière; le cent vaut en moyenne 25 c. 


34. 10. H. HÉRISSÉE , H. aculeata. 


Helix aculeata Mull. Verm. Hist. IT. 1774. p. 81. 
HAB1TE : les bois élevés, humides, sous les mousses, les feuilles mor- 
tes, etc. — Rare et difficile à trouver. 
Lormont, dans les vallées étroites appelées garosses, Cenon, Floirac, 
Cambes , Sainte-Croix-du-Mont, Arcachon (M. Souverbie). 


35. 11. H. RUPESTRE, M. rupestris. 


Hagire : Camblanes, sous les débris de pierrailles d’un mur de 
clôture au nord. Rare; Saint-Emilion , rare. 


36. 12. H. MARGE, H. limbata. 


Helix limbata Drap. Hist. Moll. 1805. p. 100. pl. VI. fig. 29. 

Var. B. brunea. 

Var. C. carinata, H. cinctella (Des Moulins in Cat. p. 47. n° 6.) 

Hagire : les coteaux, les plaines, dans les haïes d’aubépine, les bois. 

Très-commune. La var. curinata se trouve dans la plupart des jardins, 
des allées des noyers à Bordeaux. Sa carène aigue et son péristome moins 
épais l’avaient fait prendre pour l’Hel. cinctella, espèce du Midi de la 
France et de l'Italie méditerranéenne. 


37. 13. H. DOUTEUSE, H. incarnatu. 
Syn. Helix incarnata Mull. Verm. Hist. IE. 1774. p. 63. 


(260 ) 
Hagrre : sur les frènes qui bordent la Dordogne, à Saint-André-de- 
Cubzac, (M. Des Moulins), Sainte-Foy, Bazas. — Rare. 


38. 14. El. CHARTREUSE, H. carthusiana. 


Helix carthusiana Mull. Verm. Hist. 11. 1775. p. 15. 
H. carthusianella Drap. Tabl. Moll. 1801. p. 86. et Hist. pl. 6. 
fig. 31-32. 

Var. B. major. 
C. minor, H. Olivieri, minor Fér. tabl. syst. 1822. pl. 47. 
D, rufilabris, H. rufilabris Jeffr. in trans. Linn. XVI. 1820. 

pl. XIV. fig. 25-26. 
E. sinistrorsa. 
HABire : Le type, les champs calcaires, à Fargues, Créon , Castillon, 
Saint-Émilion, Cambes, Sainte-Croix-du-Mont, etc. 


La var. B., Caudéran, Talence, Gradignan. 

La var. C., Plassac, Blaye, Étauliers. 

La var. D., les landes de Pessac, Factures, la Mothe. 

La var. E., trouvée deux fois : la première au Bouscat, ouest, nord- 
ouest de Bordeaux ; la deuxième à Talence, au sud , par M. Jaudouin. 


39. 15. H. PURESCENTE , A. sericea. 


Syn. Helix sericea Drap. tabl. Moll. p. 85. et Hist. 1801. pl. 7. 
fig. 16-17. 
Hapite : Vimeney, près Floirac, Carbonnieux (M. Des Moulins in 
coll.) — Rare. | 


40. 16. H. RÉvÉLÉE, H, revelata. 


Syn. Helix revelata Fér. Prod. p. 44 , n° 273, 1822. 
H, revelata Mich. Comp. 1831. p. 27. pl. 15. fig. 6-8. 
H. ponentina Morel. Moll. Port. 1845. p. 65. pl. VL fig. 4. 
H. occidentalis Recluz in Rev. Zool. 1845. p. 311. Rossm. Icon. 
fig. 827. 
H. lisbonensis L. Pfeiff. Symb. IT. 1846. p. 68. 

Hamire : Les terrains siliceux des environs de Bordeaux, au pied des 
vieux murs, dans les herbes, la mousse; sort le soir ou pendant les 
jours pluvieux ; assez commune à Léognan (Fischer), Mérignac, Fac- 
tures, la Teste; moins abondante à Caudéran, le Bouscat, etc. ; manque 
complétement sur la rive droite de la Garonne. 


( 261 ) 

Cette espèce est bien le véritable H. revelata de Férussac. Je Pai 
comparé dans la collection de M. de Trenquelléon et sur les cartons du 
Muséum de Paris. Ce Mollusque a souvent été pris pour l’espèce précé- 
dente, avec laquelle il a quelques légers rapports. 

M. l'abbé Dupuy, d’après l’opinion même de M. Morelet, avait 
reconnu dans l'A. revelata, de Mont-de-Marsan, l’H. ponentina de cet 
auteur, qui vit en Portugal. Moi-même, ayant trouvé cette espèce dans 
les landes de l’Agenais, à Saint-Julien-de-Fargues, je la décrivis, 
pages 91-92, sous la même appellation; mais plus tard, ayant trouvé 
ce Mollusque en assez grande quantité , à Mérignac, je pus mieux l’étu- 
dier et je reconnus alors que c’était bien le type de Férussac. 

Lorsque les individus du Portugal sont adultes, ils acquièrent plus de 
poids , et leur péristome est très-épais ; il n’en est pas ainsi des nôtres 
qui sont toujours minces et avec un péristome à peine bordé. Ils res- 
semblent alors beaucoup aux jeunes ponentina du Portugal. 


1. 17. H. mspme, H. hispida. 


Linn. Syst. nat. Édit. Xe, 1158, I. p. 771. 
LA VELOUTÉE, Geoff. 
Var. B., minor 
C., depressa. 
Hagire : Très-commune dans tout le bordelais, dans les jardins, les 
bords des ruisseaux, les oseraies , etc. 


La var. B, à Gradignan. 
La var. C, Bègles, Paludate, etc. 


42. 18. H. unrascée, H. unifascriata. 


H. unifasciata Poiret. Prodr. 1801. Avril. p. 81. 
H. bidentata Drap. Tab. Moll. 1801. Juillet. p. 85. 
H. striata var. Drap. Hist. Moll. 1805. p. 106. pl. VE. fig. 21. 
H. candidula Stud. Kurz. Verzeich. 1820. p. 87. 
H. rugosiuscula Mich. Compl. 1831. p. 14. pli. 15. fig. 11-14. 
Var. B., fasciata, H. candidula. 
C., grisea, H. rugosiuscula. 
D., vinosa. Nob. 
HABITE : la var. B, à Pauillac (M. Des Moulins, in Sched), les var. C 


et D dans les prairies des bords de la Garonne , à Portets, Preignac, 
Langon, Cambes, Cadillac, etc., les bords de la Dordogne et de l'Isle, etc. 


( 262 ) 
43. 19. H. srriée, A. fasciolata. 


H. fasciolata Poir. Prodr. 1801. Avril. p. 79. 
H. striata Drap. Tab. Moll. 1801. Juillet. p. 91. 
H. caperata Mont. Test. Brit. 1803. p. 433. pl. 2. fig. 2. 
Var. B. fasciata. 
C. unicolor. 
D. Gigaxi, H. Gigaxiü, Charp. 
Hagrre : les rochers calcaires, les friches, à Créon , Brannes, Far- 
gues, Saint-Émilion, Blaye, Floirac, Langoiran, la Réole. Manque sur 
la rive gauche de la Garonne. 


k%. 20. H. INTERROMPUE , H. intersecta. 


H. intersecia Poiret, Prodr. 1801, Avril p. 81, Mich. Compt. 
pl. 14. fig. 33-34. 
H. striata var. B Drap. Hist. Moll. 1805. p. 106. 
Var. B. violaceu. 
C. zonata Nob. 

HaBiTe : la rive gauche de la Garonne, où elle remplace l’H. fascio- 
lata ; elle est surtout très-belle et très-conique à Caudéran et à Saint- 
Médard. C’est dans ces localités que se trouve la var. zonala, qui a une 
ou deux bandes non interrompues, noires sur un fond blanc. — Très- 
commune , à Mérignac, au Bouscat, au Vigean, etc., etc. 

Je ne m’étendrai pas sur les différences spécifiques que présentent les 
deux espèces, fasciolala, intersecta que quelques auteurs réunissent ; 
des essais d’accouplement ont toujours échoué. 


45. 21. H. RUBAN, H. ericetorum. 


Helix ericetorum Mull. Verm. Hist. II. 1774. p. 33. ( excl. «). 
LE GRAND RuBaw, Geoff. Coq. Paris. 
Var. B. minor. 

Hagrre : Les pelouses et les friches des côteaux élevés, le type à 
Cambes, Langoiran, Sainte-Croix-du-Mont, Cauderot, Gironde, la 
Réole; commun. — La var. B. à Cenon , Lormont, Floirac, Bassens, 
Blaye, Fargues, etc., etc., très-commune. 


46. 22. H. pes Gazons, H. cespitum. 


H. cespitum Drap. Tabl. Moll. 1801. p. 92 et Hist. pl. VI. fig. 14-19. 
I. ericetorum , &, Mull. Verm. Hist. Il. 1774. p. 33. 


( 263 ) 

Hamrre : Les friches arides , dans les touffes de bruyères et d’espar- 
cette. — À Créon, Marcamps, Cubzac, Saint-Émilion. 

Les différences spécifiques entre ces deux espèces résultent chez la 
première dans un ombilic très-ouvert, une spire très-plane; tandis que 
chez la deuxième, l’ouverture est ronde, la spire élevée et l’ombilic 
plus étroit. 


KT. 95. H. pe Pise, A. pisana. 


H. pisana Mull. Verm. Hist. IT. 1774. p. 60. 
H. rhodostoma Drap. Tabl. Moll. 1801. p. 74. 


Var. B. fasciata interrupta. 
C. fasciata translucida. 
D. unicolor. 
E. carinata. 


Hapire : Tous les terrains de la Gironde, dans les jardins, les haies, 
les vignes , les bois, les plaines et les côteaux. 
Le type partout. 
La var. B. id. 
La var. C. Arcachon, la Teste. 
La var. D. Caudéran, Mérignac, le Bouscat, etc., etc., une sous 
variété plus épaisse , à Marcamps. 
La var. E. à Floirac, Fargues etc. Edule. 


48. 24. H. VARIABLE. H. variabilis. 


H. variabilis Drap. Tabl. Moll. 1801. p. 73. — Var. e. submari- 
timam , Des Moul. Suppl. 1829. p. 216. 
Var. B. discus. 
C. conica 
D. depressa. 


E. submaritimam. 
F. picturata. 


G. alba. 
H. nigru. 
I. cinerea. 
J. scalaris. 
HABITE : indifféremment tous les terrains élevés ou bas , calcaires ou 
siliceux. Quelquefois très-petite , d’autres fois acquérant un grand déve- 
loppement , enfin comme son nom l'indique extrêmement variable. 


( 264 ) 

Des individus de la var. B. forment le passage de cette espèce à 
l'A. ericetorum, tandis que la var. C ressemble à l'A. maritima Drap. 

Comme coloration , cette espèce varie beaucoup; j’en ai d’un blanc 
pur et d’autres toutes noires ; mais la variété la plus belle est celle qui 
se trouve aux environs de Caudéran , Mérignac, etc., la var. picturata. 
Certains individus sont zébrés de blanc et de brun, d’autres sont poin- 
tilles de rougeâtre sur blanc ; enfin il en est qui sont entourés de bandes 
chocolat interrompues de blanc comme des coquilles marines du genre 
Cadran (solarium). Les var. C, G, partout; B, D, dans les jardins, 
contre les vieux murs; F, G, H, Mérignac, Caudéran, le Bouscat, 
St-Médard-en-Jalle; Æ, Pauillac, Royan; Z, Caudéran; J, Arcachon 
(Fischer). 


Genre 8. — BULIME, BULIMUS. 


Bulimus , Scopoli, Intr. ad. hist. nat. 1771, p. 392. 
Bulimus, Stud. Kurz. Verzeinch., 1820 , p. 88 ; non Adans. 

AnImaAL limaciforme , rampant sur un pied elliptique allongé; collier 
charnu entourant le cou, tête en forme de muffle; quatre tentacules 
dont les deux supérieurs plus grands et oculés au sommet. — Généra- 
tion androgyne. 

Coquille turriculée, lisse ou légèrement striée, épidermée ; ouverture 
plus haute que large, ovale, entière, lisse, avec ou sans plis; columelle 
entière ou tronquée , un épiphragme calcaire, papyracé ou vitreux. 

HABrTenT : les lieux ombragés , humides , élévés et bas; quelquefois 
les bordures des plateaux sous la terre friable. 


Are SECTION. — BULIMUS. 


49. 1. B. orscur , B. obscurus. 


Helix obscura Mull. Verm. hist. 1774, II, p. 103. 
Bulimus obscurus Drap. Tabl. Moll. 1801 , p. 65; non Poir. 
HaBire : sous les gazons pierreux et siliceux, plus commune sous les 
premiers ; répandue partout, jamais abondante aux mêmes lieux; Cau- 
déran, Eyzines, St-Médard-en-Jalle, Mérignac, Gradignan, Talence, 
Bègles, Bouscat, Floirac, Cambes, Blaye, Fargues, Beychevelle, 
Pauillac. 


50. 2. B. TRIDENTÉ, B. tridens. 
HT. tridens Mull. Verm. hist. 4774, I, p. 106. 


( 265) 

Bulimus tridens Brug. Encycl. vers 1792, If, p. 350. 

Pupa tridens Drap. Tabl. Moll. 1801 , p. 60. 

Pupa tridentata Brard. Coq. Paris, 1815, p. 88, pl. 3, fig. 2. 

Hapire : les terrains plutôt siliceux que calcaires de la plaine; com- 

mune sous les haies d’aubépine, au chemin de la Vache, près du 
Bouscat; à Blanquefort sur les talus des Jardins; au Vigean, sous les 
feuilles de platanes , des haies. Je n’ai jamais rencontré cette espèce sur 
les hauteurs , mais toujours dans les basses plaines; elle est difficile à 
trouver à cause de ses habitudes souterraines; mais après une pluie 
chaude du printemps, elle fourmille sous les plantes et les feuilles. 


51.5. B. quaprDEeNTÉ, B. quadridens. 


Helix quadridens Mull. Verm. Hist. 1774, IL, p. 107. 
Bulimus quadridens Brug. Encyel. 1792 , vers. p. 3680. 
Pupa quadridens Drap. Tabl. Moll. 14891, p. 60. 

Var. B. minor. 

HAB1re : les rochers calcaires, au Sud et Sud-Ouest, sous les débris 
de pierres, paraît vivre de mousses et de lichens; le type à la Réole, 
la Bénauge , rare; les alluvions de la Garonne, à Bordeaux; la var. B. 
à Créon , à Pompignac, rare. | 


52. 4. B. ventTru, P. ventricosus. 


Bul. ventricosus Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 68 et Hist. pl. 4, 
fig. 31-32. 
Helix ventrosus, Fér. Tabl. Syst. 1822, p. 56. 
HABiTeE : trouvé en 1853, à Abzac, près Coutras, par M. Souverbie, 
directeur du Musée d'Histoire naturelle de Bordeaux. — Assez abondant. 


53. 5. B. aicu, Bul. acutus. 


Helix acuta Mall. Verm. Hisit. 1774, p. 100. 
Bulimus acutus Brug. Encycl. VI, 1, 1789, p. 323. 
Bul. articulatus Lamk. An. sans vert. 1822. 

Var. B. fasciata. 

C. articulata, B. articulatus Lamk. marilima M. Des Moulins. 
HaBitE : les terrains siliceux des environs de Bordeaux, où il est 
excessivement commun; Caudéran , Bouscat, Vigean, Eysines, le Thil, 
Saint-Médard-en-Jalle, ete., etc. La var. C. Pauillac et tout le littoral 
CrAyeUx. 


Tome XXII. 20 


( 266 ) 


Ces deux derniers Bulimes ont été dénombrés de ce genre et ajoutés 
aux Hélices par M. Moquin-Tandon, à cause de leur mâchoire pectinée. 


54. 6. B. TRONQUÉ, B. decollatus. 


Helix decollata Linn. Syst. nat. Xe éd. 1758 , I, p. 71173. 
Bulimus decollatus Brug. Encycel. vers. 1789, I, p. 326. 

HABITE : sous la bordure des pentes des rochers calcaires de la rive 
droite de la Garonne, à Paillet, (feu M. Larrouy) ; à Cadillac, (M. Bareyre); 
à la Réole, la Bénauge, moins abondant et de moindre taille que dans 
lAgenais. 

Cette espèce qui vient du Midi, sa véritable patrie, paraît s’arrêter aux 
roches calcaires de Paillet, car personne ne l’a signalée plus près de Bor- 
deaux. Les individus de la Gironde sont petits, de couleur pâle et tronqués 
au 3e ou 4e tour de spire. J’en ai élevé et les ai fait reproduire; les petits, 
nourris exclusivement avec des carottes sont devenus aussi grands que ceux 
de l’Agenais et ont pris une couleur roussâtre brillante très-agréable. 

L'animal est omnivore et ne dédaigne nullement les corps morts des Hélices 
et des autres Mollusques; sa mächoire, semblable à celle des Limaces et des 
Zonites, indique assez ses habitudes; aussi tout lui est bon : plantes fraiches, 
putréfiées ; fruits, viande, soupe, farine, son, fromage, etc. (1). 


2e SECTION. — ZUE, ZUA. 


Leach. British. Moll. 1831 , p. 114 ex Turt. 
Animal ovovivipare, différant peu des Bulimes ; coquille ovale, allon- 
gée, subcylindracée, imperforée ; ouverture sans dents, ovale pyriforme, 
bords unis entr’eux par une lame calleuse ; têt lisse et brillant. 


55.7. B. BriLLANT, B. subcylindricus. 


Helix subcylindrica Linn. Syst. nat. éd. XIT, 2, 1767. 
H. lubrica Mull. Verm. Hist. 1774, IT, p. 104. 
Bullimus lubrica Brug. Encycl. 1789, vers. 1, p. 311. 
Zua lubrica Leach, Brit. Moll. p. 114 ex Turt. 1831. 


Var. B. minor. 
HaBire : dans les lieux ombragés , humides, sous les débris de feuilles 


pourries; le type dans les oseraies, les vimières des bords de la Ga- 
ronne, de la Dordogne et de l'Isle; très-commun; la var. B. sous les 


(1) Voir mon Essai sur le Bul. tronqué, Actes Soc. Linn. de Bordeaux, id. Tabi. 
des Moll. terr. et d’eau douce de l’Agenais, p. 114-121. 


( 267 ) 
haies, les feuilles de platane, d’aubépine, ete., Caudéran, Mérignac , 
Gradignan , etc. moins commun que le précédent. 


3e SECTION. — AZÈQUE, AZECA. 


Leach. Brit. Moll. 1820. 

Animal semblable au précédent : coquille fusiforme, obtuse à ses deux 
extrémités, imperforée, plissée; ouverture dentée et lamellée , arquée ; 
bords réunis par une mince callosité ; sur la paroi aperturale se voit une 
lame exserte, mince et semi-élastique, qui s’enfonce dans l’intérieur et 
suit l’enroulement de la spire. 


55. 8. B. DE MENKE, B. Menkeanus. 


Carychium Menkeanum, c. Pfeiff. Deutsch]. Moll. 4824 , I, p. 70, 
pl.3,fe. 17 

Papa tridens Gray. in Ann. phil. 1820, IX. p. 413. 

Helix Goodalli Fér. Tabl. Syst. 1822, p. 75. 

Azeca tridens Leach , Brit. Moll. p. 122 ex Turt. 1831. 

Pupa Goodallii Mich. compt. 1831, p. 67, pl. 15, fig. 39-40. 

Achatina Goodallii Rossm. Icon. 1839, IX-X, p. 33, fig. 654. 

Azeca Nouleliana Dup. Cat. extramar. 1849, n° 31, et Hist. p. 358, 
pl. 15, fig. 12. 

Var. B. Nouletianus Moq.-Tand. 

HABITE : trouvé en 48956 pendant les inondations de Mai, dans les 
alluvions de la Garonne, à Lormont; très-rare. 


Obs. Cette espèce qui se trouve dans les Pyrénées, le Gers et l’Agenais, aura 
probablement été entraînée par les eaux. Quoique la dent inférieure de la 
columelle ne soit pas aussi forte que dans le type du Nord, elle existe néan- 
moins, et c’est à tort qu’on les sépare; l’influence du climat doit seule avoir 
causé cette légère différence. 


4e SECTION. — AGATINE, ACHATINA. 


Achatina Lamk. Syst. anim. sans vert. 1801. 
AnIMAL : semblable à celui des Bulimes ; coquille ne différant de celle 
des Bulimes que par une troncature à la base de la columelle. 


57. 9. B. AIGuILLETTE, B. acicula. 


Buccinum acicula Mull. Verm. Hist. 1774, IT, p. 150. 
Bulinus acicula Brug. Eneyel. vers 1789, IT, p. 311. 


( 268 ) 
Achatina acicula Lamk. An. sans vert. 1822, VI, p. 433. 
Cecilioïdes acicula Beck. Ind. Moll. 1837, p. 79. 
Cecilianella Bourgt. Amén. Malac. 

HABiTE : les vieilles haies d’aubépines, sous les feuilles mortes et 
humides, à l’exposition Nord, Nord-Est des terrains calcaires, s'enfonce 
dans la terre meuble, au pied des arbres, dans les creux des vieux 
troncs des saules, etc. Lormont, Cenon, Plassac, Blaye, Beychevelle; 
Cenon, Lassouys, la Tresne, etc., sur la rive droite de la Garonne; Lan- 
gon, Saint-Selve, Castres, Saint-Médard-d’Eyran, Gradignan, Arca- 
chon, etc., rive gauche; très-commun dans les alluvions de tous nos 
cours d’eau. 


Genre IX. — CLAUSILIE, CLAUSILIA. 


Clausilia Drap. Hist. Moll. 1805 , p. 24-29-68. 

ANIMAL : grêle, tortillon très-allongé , trachée saillante en tube coni- 
que et court qui est reçu dans la gouttière de la columelle. 

CoQuILLE : sénestre, rarement dextre ; sommet grêle et obtus; péris- 
tome continu; osselet élastique (clausilium) en gouttière, attaché par 
un pédicule sur la columelle et situé dans l’intérieur de la cavité du 
dernier tour. Vivant dans les crevasses des arbres, sous les pierres, sous 
les feuilles, les vieux murs; épiphragme mince, membraneux , irisé. 


58. 1. CL. uisse, Cl. bidens. 


Helix bidens Mull. Verm. Hist. 1774, IT, p. 116. 

Bulimus bidens Burg. Encycl. 1792, vers. IT, p. 352. 

Pupa bidens Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 61. 

Clausilia bidens Drap. Hist. Moll. 1805, p. 68, pl. #4, fig. 5-7. 
Claus. laminata Turt. Brit. Moll. 4851 , p. 70. 

HABITE : dans le tronc pourri des vieux saules, vit de mousse et de 
petites mucédinées ; commune à Cadillac, Beaurech, Quinsac, Cambes, 
Langoiran , Langon, la Réole , Lassouys , la Tresne , Floirac, les Quey- 
ries, Bassens, elc., etc. 

59. 2. CL. NAINE, Cl. parvula. 
Clausilia parvula Stud. Faunul. Helvét. in Coxe, Trav. Switz. 1789, 
TITI, p. 431 (sans caract.) 
Claus. rugosa var. G. Drap. Hist. Moll. p. 73, 1805. 
Claus. parvula Stud. Rurz. Verzeinch, 1820, p. 89. 
Stomodonta paroula Merm. Moll. Pyr. occe. 1843, p. 47. 


SES 


( 269 ) 
Var. B. major. 

HABITE : les rochers calcaires , les vieux murs sous les mousses et les 
pierrailles. Tous les rochers de la rive droite de la Garonne, Cenon, 
Floirac, la Tresne , Cambes, Camblanes, etc., Saint-Émilion, Pompi- 
gnac , Fronsac , etc., etc.; très-commune. 


66. 5. CL. RUGUEUSE, Cl. perversa. 


Helix perversa Mull. Verm. Hist. 1774, IL, p. 118. 
Bulimus perversus Brug. Encyel. vers 1789, IT, p. 351. 
Clausilia rugosa Drap. Hist. Moll, 1805, p. 73, pl. 4, fig. 19-20. 
Stomodonta rugosa Merm. Moll. Pyr. occid. 1843, p. 147. 

La Nonpareizze, Geoffr. Coq. Paris. 


Var. B. nigricans, Cl. nigricans Jeftr. 


HABITE : sous les pierres, les feuilles mortes des haies, au pied des 
arbres, des vieilles murailles ; très-commune dans toute la Gironde et 
dans tous les-terrains; Cenon , Lormont , Floirac jusqu’à la Réole; Bas- 
sens, la Roque, Plassac, Blaye, Beychevelle, Pauillac, Caudéran, le 
Bouscat, Bègles , etc., etc. 


61. 4. CL. ne Rorru. CZ. Rolphü. 
Clausilia Rolphii Gray , nat. Arrang. Moll. in Med. repos. XV, 1821, 


p. 239, 

Clausilia ventricosa, var. À minor Noulet:; Moll. sous. Pyr. 1834, 
p. 91. 

Cl. dubia , var. B. inflata Goup. Moll. Sarthe. 1835, p. 34, pl. 2, 
fig. 4-6. 


Stomodonta plicata Merm. Moll. Pyr. occid. 1843, p. 47. 
CL. Rolphii Gray, Gass. in Act. Soc. Linn. Bord. XVI, p. 436, 1851. 
HABire : les bois calcaires et humides, à l'exposition Nord et Nord- 
Est , sous les feuilles mortes des chênes, sous les mousses, à la Mothe, 
près de la Tresne, à Quinsac, Cambes, Sainte-Croix-du-Mont , Fargues, 
Pompignac; Cenon : assez rare. 


Genre X. — BALÉE, BALÆA. 


Balea Leach, Brit. Moll. 1820. 
Puga (pars) Drap. Tabl. Moll. 1801. 
AnImAL : semblable à celui des Clausilies. 


( 270 ) 
CoquiLce : sénestre, fusiforme, comme les Clausilies, mais sans lame 
élastique ou clausilium. 


62. 1. BALÉE PERVERSE, B. perversa. 


Turbo perversus Linn. Syst. nat. édit. Xe, 1758, I, p. 767. 

Pupa fragilis Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 64, et Hist. pl. 4, fig. 4. 

Balæa fragilis Prideaux, in Gray, zoo. Journ. 1, 1828, p. 61, 
pl. 4-6. 

Stomodonta fragilis Merm. Moll. Pyr. occid. 1843, p. 48. 

HABrTe : les vieilles murailles , les creux des arbres moussus et les 
rochers, au Nord, Nord-Est, rarement à l’Ouest. Vit de petites mucé- 
dinées; les arbres du Jardin-Public, sur l'écorce des ormes et des tilleuls 
après la pluie; à Caudéran, Floirac, Mérignac, Castres, Sainte-Croix- 
du-Mont , Plassac , Blaye, Beychevelle, etc.; commune. 


Obs. Le genre Balæa a été érigé aux dépens du genre Pwpa d’après la 
forme de la coquille qui la fait ressembler aux Clausilies et par l’ouver- 
ture qui la rapproche des Bulimes (section des Macroceramus |. 


Genre XI. — MAILLOT, PUPA. 


Pupa Lamk , Syst. Anim. sans vert. 1801, p. 88. 

AnIMAL : semblable à celui des Hélices et des Clausilies ; les tentacules 
plus gros et plus courts; les inférieurs à peine visibles. 

Coquizce : dextre ou sénestre, selon les espèces , cylindracée, fusi- 
forme ou conique, pupiforme, épaisse, sommet obtus, ouverture 
demi-ovale, dentée ou plissée, ordinairement droite, sub-anguleuse 
inférieurement, épiphragme membraneux irisé. Même habitat que les 
Clausilies. 


63. 1. M. oumciqué, P. cylindracea 


Turbo cyladraceus Da Costa, Test. Brit. 1773 , p. 89, pl. 5. 
Pupa umbilicata Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 98 et Hist. pl. TT, 
fig. 39-40. 

Stomodonta umbilicata Merm. Moll. Pyr. occid. 1843, p. 53. 

Pupa cytlindracea Moq.-Tand. in Act. Soc. Linn. Bord. IV, 1849. 

Var B. major. : 

Hagire : tout le Bordelais, sous les pierres, les feuilles mortes, dans 

les terrains calcaires et siliceux ; très-commun partout : les environs de 
Bordeaux, Caudéran , Gradignan, Langon, Sainte-Croix-du-Mont, jus- 
qu'en Médoc. 


(271 ) 
64. 2. M. mousseroN, P. muscorum. 
Turbo muscorum Linn. Syst. nat. Xe édit, 1758, [, p. 767. 
Pupa marginata Drap. Tabl. 1801 , p. 58 et Hist pl. IT, fig. 36-38. 
Stomondata marginata Merm. Moll. Pyr. occid. 1843, p. 55. 

Le perir BaRiLzer Geoff. Coq. Paris. 

HaBire : les vieux murs de clôture, sur les hauteurs et dans la plaine, 
sous les pierrailles mousseuses des rochers calcaires; à Plassac, la Roque, 
le Rigalet, Pauillac, Saint-Émilion, Libourne, Fargues, Floirac, Gi- 
ronde, Saint-Macaire; moins commun que le précédent. 


65. 3. M. parier, P. doholum. 
Bulimus doliolum Brug. Encycl, vers 1792, II, p. 351. 
Pupa doliolum Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 58 et Hist. pl. HI, 
fig. 41-42. 
LE GRAND BARILLET Geoff. Coq. Paris. 
Var. B. major. 

Hagire : les roches calcaires, dans les trous, sous les touffes des 
plantes et les débris pierreux, Lassouys, la Réole, Saint-Macaire, 
Camblanes, etc.; assez rare, les alluvions de la Garonne et de la Dor- 
dogne. Commun. 


66. 4. M. cran, P. granum. 
Pupa granum Drap. Tabl. Moll. p. 50 et Hist. pl. IT, fig. 45-46. 
Stomondata granum Merm. Moll. Pyr. occid. 1843, p. 52. 
HABire : les rochers secs et pierreux, sous les débris, dans la terre, 
sous les lichens et les mousses; commun à Saint-Émilion, Floirac, 
Camblanes, Cambes , Sainte-Croix-du-Mont, la Réole, etc. 


67. 5. M. avoIxe, P. avenacea. 
Bulimus avenaceus Brug. Encyel. VI-IT, 1792, p. 355. 
Pupa avena Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 59 et Hist. p. LT, fig. 47-48. 
Stomodonta avena Merm. Moll. Pyr. occid. 1843, p. 52. 
LE GRAIN D’AVOINE Geoff. Coq. Paris. 
HABirE : les vieux murs rustiques en pierres sèches servant de limite 
aux propriétés ; les fentes et les trous des rochers à Camblanes , Sainte- 
Croix-du-Mont , Verdelais , etc., etc.; commun. 


68.6 M. selcze, P. secale. 


Pupa secale Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 59 et Hist. pl. 3, fig. 49-50. 
Stomodonta secale Merm. Moll. Pyr. occid. 1843, p. 01. 


(27 ) 
Hagire : les terrains calcaires , à Lassouys , près de Bordeaux ( M. Des 
Moulins), la Bénauge , Pompignac : rare. 


69. 7. M. varaBLe, P. multidentata. 


Pupa multidentata Oliv. zool. Adriat. 1792, p. 17, pl. 5, fig. 42. 
Pupa variabilis Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 60 et Hist. pl. III, 
fig. 55-56. 
HaBire : les rochers de Floirac (M. Des Moulins), à Fargues, à Créon : 
iare. 


Genre XII. — VERTIGO, VERTIGO. 


Vertigo Mull. Verm. Hist. Il, 1714, p. 24. 

ANIMAL : allongé, demi-cylindrique, ayant un tortillon assez grand et 
un collier fermant la coquille; deux tentacules seulement, longs, obconi- 
ques , rétractiles, arrondis à leur extrémité ; l’orifice pulmonaire sur le 
collier et à droite, avoisiné par celui de l’anus ; organes de la généra- 
tion réunis et montrant leur orifice près du tentacule droit. 

Coquiee : cylindrique, très-spirale ; volute croissant lentement; cône 
spiral incomplet; ouverture droite dans la direction de l’axe, courte, 
souvent dentée; péristome souvent sinueux et réfléchi, dextre ou sé- 
nesire. 


70.1. V. DES Mousses, V. muscorum. 


Pupa muscorum Drap. Tabl. Moll. 4801, p. 65. 

Pupa minutissima Hartm. in Neue. Alp. 1821, p. 220, pl. 2, fig. 5. 

Vertigo cylindrica Fér. Tabl. Syst. 1822, p. 68. 

Vertigo muscorum Mich. compt. 1831, p. 70. 

Stomodonta muscorum Merm. Moll. Pyr. occid. 1843, p. 59. 

HABITE : au pied des vieux arbres, sous la mousse ou dans les troncs, 

sous la terre friable et composée d’humus. Commun; au Bouscat, Cau- 
déran, Saint-Médard-en-Jalle, Gradignan, Talence, etc., difficile à 
trouver; les alluvions. 


74.2. V. ÉDENTÉ, V. edentulu. 


Pupa edentula Drap. Hist. Moll. 1805, p. 52, pl. 3, fig. 28-29. 
Vertigo edentula Stud. Kurz. Verzeichn , 1820, p. 89. 

Vertigo nitida Fér. Tabl. Syst. 1822, p. 68. 

Stomodonta edentula Merm. Moll. Pyr. occid. 1843. n. 54. 


(2139 
HaBire : les dunes d'Arcachon et la Teste, sous les débris des écorces 
de pins , sous la mousse; rare. 


72. 3. V. pe Des Mouuns, V. Moulinsiana. 


Pupa Moulinsiana Dup. Cat. extramar. test. 1849 , n° 284. 
HaB1Te : le Bouscat, chez M. Coudert (Ht*), sous les feuilles mortes 
des platanes, sous les pierres ; Caudéran, Gradignan, assez commun, 
vivant en société. 


73. 4. V. pyGMÉE, V. pygmeæa. 


Pupa pygmæa Drap. Tabl. Moll. 1801 , p. 57 et Hist. pl. 3, fig. 30-31. 
Vertigo pygmæa Fér. père , Méth. Conch. 1897, p. 124. 
Stomodonta pygmæa Merm. Moll. Pyr. occid. 1843, p. 55. 
HABITE : les vieux saules, dans les creux remplis d’humus, sous les 
pierrailles des haies, terrains humides, commun en Queyries, Cadil- 
lac, Lassouys, etc., les alluvions. 


74.5. V. PUSILLE, V. pusilla. 


Vertigo pusilla Mull. Verm. Hist. Il, 17174, 124. 
Pupa vertigo Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 54. 
HABITE : les garennes, au pied et dans les troncs des charmes et des 
chênes, sous la mousse et l’humus, les feuilles mortes; au Bouscat, 
maison des Aliénés ; à Caudéran, à Gradignan : rare. 


Genre XIII. — CARVYCHIE, CARYCHIUM. 


Carychium Mull. Verm. Hist. Il, 1714, p. 125. 
Auricula Drap. Tabl. Moll. 1801 , p. 31. 

AnImaAL : semblable à celui des Hélices, s’en distinguant par l'absence 
des deux tentacules inférieurs; les deux supérieurs rétractiles, cylindri- 
ques, arrondis, sans renflement au sommet; yeux situés derrière les 
tentacules , près de leur base, sur la tête. 


Coquize : ovale, oblongue ou cylindrique, ouverture entière, droite, 


_ courte, avec ou sans dents; cône spiral, incomplet; quatre à six tours : 


point d’opercule. 
Terrestres vivant sous les feuilles humides, les mousses, les vieux 
bois, elc. 


( 274 ) 
78.1. C. NAINE, GC. minimum. 


Carychium minimum Mall. Verm. Hist. 1774, IT, p. 195. 

Bulimus minima Brug. Encycl. vers 1789, I, p. 310. 

Auricula minima Drap. Tabl. Moll. 1801 , p. 54. 

Carichium minimum Fér. père, Ess. Méth. Conch. 1807, p. 54. 

Hagrre : les lieux humides , près des ruisseaux, sous les écorces des 

arbres, les mousses, les pierres, etc.; Gradignan, Talence, Bègles, 
Queyries , etc., etc., très-commune; les alluvions de tous les cours 
d’eau. 


Famille EIE — CYCLOSTOMACÉS. 


Cyczostromacés Menk. 
Genre XIV. — CYCLOSTOME, CYCLOSTOMA. 


Cyclostoma Drap (excl. spec. aquat.) Tabl. Moll. 1801 , p. 30-37. 
Pomatias Stud. Faunul. Helvet. in Coxe, Trav. Switz. 1789, IT, 
p. 433. 

ANIMAL : trachélipode très-spiral, sans collier ni cuirasse, tête pro- 
boscidiforme ou en trompe; deux tentacules cylindriques, rétractiles, 
renflés à l’extrémité, oculés à leur base externe; pied petit placé sous 
le col; cavité cervicale largement ouverte au-dessus de la tête, ayant 
sur ses parois un réseau vasculaire branchial et à droite l’anus et les 
organes de la génération. Il y a des individus mâles et des individus 
femelles ; point de mâchoire. 

Coquicce : turbinée, ovale ou allongée, à spire médiocre ; les tours 
arrondis, vuverture ronde, entière, les bords réunis circulairément; 
péristome continu; opercule calcaire ou corné, sub:céntriqué, spiral. 
Terrestres, vivant à toutes les expositions. Reptation particulière par le 
bord du mufle et l'extrémité caudale. 


Are SECTION. — CYCLOSTOMES. 


76. 4. C. ÉLÉGANT, C. elegans. 


Nerita elegans Mull. Verm. Hist. 1774, p. 171. 
Cyclostoma elegans Drap. Tabl. Moll. 1801 , p. 58. 
L'ÉLÉGANTE STRIÉE Geoff. Coq. Paris. 


Var. B. Albine. 
C. Jaunûtre. 
D. Violûtre. 

HABiTe : les plaines siliceuses et des terrains argileux; les côteaux 
élevés, partout; très-commun dans les jardins , les bois, les vignes, 
etcr,.etc. 

2e SECTION. — POMATIAS. 


Pomatias Stud. in Coxe, Trav., Switz 1789. 
AnImAL : à tortillon plus allongé que le précédent. 
Coquizce : turriculée, conique; ouverture arrondie, mais un peu 
échancrée à la base de la columelle; opercule corné, aplati, à peine 
spiral. 


77.2. C. poxnizzé, C. septemspirale , 


Helix septemspirale Razoum. Hist. nat. Jor. 1789, I, p. 39. 
Cyclostoma maculatum Drap. Hist. Moll. 1805, p. 39, pl. 1, fig. 12. 
Pomatias maculatum Crist. et Jan, Cat. 1832, XV, p. 40, n° 1. 
HABITE : les côteaux boisés, Cenon, Lormont, Bassens, Floirac, 
Fargues, Pompignac, Saint-Émilion , Castets, Cadillac, etc. : commun. 


Genre XV. — ACMÉE. ACME. 


Acme Harmann , Syst. Gastérop. 1821, p. 37. 

Auricula Drap. Hist. Moll. 1805, p. 57. 

Carychium Stud. Kurz. Verzeichn. Conch. 1820, p. 89. 
Cyclostoma Fér. Dict. class. Hist. nat. 1822, IT, p. 90. 
Pupula Agassiz, in Charp. Moll. suiss. 1837, p. 22. 

ANIMAL : voisin de celui des Cyclostomes, effilé, muni de deux ten- 
tacules coniques, contractiles avec deux lignes en croissant à la base; 
derrière ces deux lignes, se trouvent les deux yeux qui sont sessiles; le 
mufle est avancé comme dans les Cyclostomes; l’animal est muni d’un 
opercule très-mince , diaphane, corné, à peine visible. 

Coquizce : sub-cylindrique , luisante, lisse ou striée, à ouverture 
semi-ovale, simple et sans dents; le bord extérieur est lisse, épaissi et 
non continu. Vit sous la mousse , au pied des chênes. 


78. 1. À. BRUNE, À. fusca. 


Turbo fuscus Walk. et Boys, Test. min. rar. 1784, p. 112, pl. 2, 
fig. 42. 


( 276 ) 
Auricula lineata Drap. Hist, Moli. p. 57. Tab. HT, f. 20-21. 1805. 
Carychium lineatum Rossm. Iconogr. 1837, V, VIT, p.54, fig. 408. 
Acme fusca Beck. Ind. Moll. 1838, p. 101. 
Cyclostoma fuscum Moq. Moll. Toulouse , 1843, p. 14. 
HaBrre : les bois rocailleux des côteaux calcaires, au Nord; très-rare ; 


trouvée en Mai 1856 dans les alluvions de la Garonne, en Queyries 
(Gassies ). 


79. 2. À. SIMONIENNE, À. simoniana. 


Paludina simoniana Charpent. In. S. Simon Miscel. malac. 1848, 
17D258. 
Bithinia simoniana Dup. Cat. extramar. test. 1849 , n° 49. 
Hydrobia id. Dup. Hist. Moll. 1851, V, p. 574, pl. 28, fig. 11. 
HABire : les alluvions de la Garonne, où elle est fort rare ; trouvée en 
Mai 1856 (Gassies). 


Obs. Cette coquille avait été classée parmi les Acme dans mon manuscrit 
sur les Mollusques de l’Agenais; les observations de M. Moquin-Tandon, qui 
en avait vu une plus grande quantité, me la firent publier sous le nom que 
M. de Charpentier lui avait imposé parmi les Paludines; mais le savant pro- 
fesseur est revenu depuis à ma première opinion , et dans son Histoire natu- 
relle des Mollusques terrestres et fluviatiles de France, il la restitue au genre 
Acme, auquel la connaissance seule de l’animal pourra définitivement assigner 
la véritable place. 


TRACHÉLIPODES AQUATIQUES. 
PULMONÉS AQUATIQUES, Cuw. 


TRACHÉLIPODES NAGEURS. 


Famille LV. — LIMINÉENS. 


Limnéens Lamk. extr. cours. Anim. sans vert. 1812, p. 116. 
Limnostreæ Fér. Tabl. Syst. 1822, p. 35. 
Limnacés Blainv. Malac. 1825, p. 448. 

TRACHÉLIPODES amphibiens, vivant dans l’eau douce, mais respirant 
à la surface ; corps allongé, distinct du pied et contourné en spirale; 
cuirasse nulle , un collier autour du cou, formé par le bord du manteau ; 
deux tentacules contractiles, oculés à leur base et non au sommet; cavité 
respiratoire sur le collier ; sexes séparés. 


( 214.) 
COQUILLE : enroulée , discoïde ou turbinée , mince; bord latéral pres- 
que toujours tranchant. 


Genre XVI. — PLANORBE , PLANORBIS. 


Planorbis Guettard , in Mém. Acad. Scien. Paris, 1756 , p. 151. 

ANIMAL : enroulé ; grêle, tête munie de tentacules contractiles , séta- 
cés , fort longs et oculés à leur base interne ; bouche munie d’une dent 
en croissant et inférieurement d’une masse linguale armée de petits cro- 
chets , surmontée d’une sorte de voile court et échancré; pied ovale et 
assez court ; orifice de la respiration à gauche, sur le collier et avoisiné 
par celui de l’anus ; organes de la génération séparés de ce même côté ; 
celui de l’organe mäle près du tentacule et celui des œufs à la base du 
collier. 

COQUILLE : assez mince, dextre , fortement enroulée dans le même 
plan ; concave des deux côtés, à bord tranchant et interrompu par la 
convexité du tour qui précède. 


80. 1. P. Luisanr, P. mitidus. 


Planorbis nitidus Mull. Verm. 1774, IT, p. 163. 
Planorbis complanatus Poir. Prodr. 4801 , p. 93. 
PI. clausulatus Fér. concord. Moll. Brit. in Journ. phys. 1820, 
p. 240. 
PI. nautileus Sturm., Deutschl. Faun. 1823, VI, pl. 15. 
LE PLANORBE à trois spirales à arêtes, Geoff. Coq. Paris. 


Hagire : les marais, parmi les Lemna , les Potamogeton, etc.; à la 
Mothe , à Arlac, Fargues , Marcamps , etc., eic. Assez commun. 


84. 2. PL. DES FONTAINES, PI. fontanus. 


Helix fontana Lightf. in philos. trans. 1786, LXXVI, n° 164, 
pl. 2, fig. 4. 
Planorbis complanatus Drap. Hist. Moll. 1805, p. 47, pl. 2, 
fig. 20-22. 
Plan. fontanus Flemm. in Edinb. Encycl. 1814, VIT, 1, p. 69. 
Hapire : les bassins des fontaines tranquilles et les fossés qui en 
dépendent, parmi les Chara, les Lemna, etc.; à la Réole, Caudrot, 
Quinsac, Cambes, Lassouys, etc., Seige, près Gradignan, Blaye, 
Étauliers , etc., eic. : commun. 


( 218) 
82. 5. PL. cARÉNÉ , PL. carinatus. 


Planorbis carinatus Mull. Verm. Hist. 4774, Il, p. 175. 
LE PLANORBE à quatre spirales à arêtes, Geoff. Coq. Paris. 
HaBiTEe : les marais, aux allées de Boutaut , Bruges , Blanquefort et 
toutes les eaux tranquilles : très-commun. 


83. 3. PL. MarGiné, Pl. complanatus. 


Helix complanatu Linné , Syst. nat. édit. Xe, 1758 , I, p. 769. 
Planorbis marginatus Drap. Hist. Moll. 1805, p. 45, pl. 2, 
fig. 11-12-15. 
HABITE : avec le précédent dont on l’a toujours considéré comme une 
variété, car il y en a d’intermédiaires qui les relient par la carène plus 
ou moins médiocre. 


84. 5. PL. TourBILLON. PL. vortex. 


Helix vortex Linn. Syst. nat. édit. X°, 1758, I, p. 772. 
Planorbis vortex Mull. Verm. Hist. 1774, Il, p. 158. 
PI. compressus Mich. compl. 1831 , p. 81 , pl. 16, fig. 6-8. 

LE PLANORBE à six spirales à arêtes , Geoff. Coq. Paris. 

HapirE : toutes les eaux stagnantes, à Bègles, Mérignac, Saint- 
Médard-en-Jalle, le Bouscat, Pauillac, Beychevelle, Etauliers , Blaye, 
Bourg, Cubzac, Marcamps, etc., etc.; allées de Boutaut , Bruges : très- 
commun. 


85. 6. PL. LEucosTroME, P/. leucostomu. 


Planorbis rotundatus Poiret. Prodr. 1801 , p. 93 non Al. Brong. 
PI. vortex var. B. Drap. Hist. Moll. 1805, p. 45, pl. 2, fig. 6-7. 
PI. leucostoma Millet, Moll. Maine-et-Loire, 1813, p. 16 (1). 
Var. B. Perezü. — PI. Pereziü Graëlls, Molluscos de España. 
Plus petit que le type, ouverture moins épaissie, bourrelet mince. 
Harire : les fossés remplis d’eau pluviale et peu fournis de plantes : 
ces fossés se dessèchent une partie de l’année; le Mollusque s’enfonce 
dans la vase, clôt son ouverture avec un épiphragme composé de plu- 
sieurs couches superposées d'apparence crétacée, et attend qu’un orage 


(1) M. Brongniart ayant décrit un Planorbe fossile sous le vocable de rotundalus , 
je crois prudent de conserver à l'espèce de la Gironde le nom imposé par M. Millet et 
sous lequel il est plus connu. 


( 2179 ) 
vienne inonder sa demeure, qui, le lendemain, se trouve remplie de 
ces animaux flottants à la surface. 

La var. B. se trouve dans les fossés qui avoisinent le bassin d’Arca- 
chon au Teich, où elle est très-commune. Le type préfère les terrains 
calcaires et argileux; aussi, le trouve-t-on dans tous les fossés de la 
Réole, la Bénauge , Gironde, Caudrot, Langon, Quinsac, Cambes, 
Floirac, Fargues , Marcamps, Blaye, etc., etc. 


86. 7. PL. spmorge, PI. spirorbis. 
Helix spirorbis Linn. Syst. nat. édit. Xe, 1758, L. p. 770. 
Planorbis spirorbis Mull. Verm. Hist. Il, 1774, p. 161. 
Le PETIT PLANORBE à cinq spirales rondes , Geoff. Coq. Paris. 


HABITE : les fossés de certaines fontaines ferrugineuses, sous les feuil- 
les de chêne pourries, sur les fragments de bois, de pierres, de galets; 
rare partout où il se trouve : à Castets, Artigues, Pompignac. 


87. 8 PL. nauTILE, PI. nautileus. 


Turbo nautileus Linn. Syst. nat. édit. XIT°, 1767, IT, p. 1241. 
Planorbis cristatus Drap. Hist. Moll. 1805, pl. 2, fig. 1-3. 
HaBire : les fontaines , abondantes parmi les conferves, les fontinalis 
amti-pyretica, etc.; Mérignac, dans la propriété de Mer Donnet, à la 
Ferme expérimentale; à Cambes, Paillet, Langoiran, Blaye, Bègles, 
Langon, Castets, etc. 


88. 9. PL. TuILÉ, PL. imbricatus. 
PI. imbricatus Mull. Verm. Hist. 1774, Il, p. 165. 


HABITE : les marais, parmi les plantes aquatiques, à Bruges, allées 
Boutaut ; à Cambes, la Réole, Gironde, Caudrot, etc.; peu commun. 


89. 10. PL. BLANC, PI. albus. 


Planorbis albus Mull. Verm. Hist. 1774, Il, p. 164. 
PI. villosus Poir. Prodr. Avril 4801, p. 95. 
PI. hispidus Vall. Exerc. d'Hist. nat. Août 1801, p. 5. 
LE PLANORBE VELOUTÉ Geoff. Coq. Paris. 
_ HaBire : les eaux stagnantes ou peu courantes, les réservoirs des 
moulins contre les parois, sur les mousses; Pont-de-la-Maye ; Gradi- 
gnan , Talence, Bègles, allées de Boutaut, Castets, Langon , Verdelais, 
etc., etc. : commun. 


( 280 ) 
90. 11. PL. controurNé, PI. contortus. 
Helix contorta Linn. Syst. nat. édit. Xe, p. 7170. 1758. 
Planorbis contortus Mull. Verm. Hist. 1774, IT, p. 162. 
LE PETIT PLANORBE à dix spirales rondes, Geoff. Coq. Paris. 
HABITE : presque tous les marais de la Gironde; très-commun à 
Bègles, Mérignac, le Bouscat, la Vache, Talence, Gradignan, allées 
Boutaut, Bruges , Macau , Beychevelle, Étauliers , etc., etc. 


91. 12. PL. corNé, PI. corneus. 
Helix cornea Linn. Syst. nat. édit. X°, 1758, 1, p. 770. 
Planorbis corneus Poir. Prodr. 1801 , p. 87. 
LE GRAND PLANORBE à spirales rondes, Geoff. Coq. Paris. 
Var. B. radiata. 
C. alba. 
D. minor. 

HaBire : tous les marais, les ruisseaux, les jalles, les esteys de la 
Gironde , de la rive droite et de la rive gauche de la Garonne, à Bruges, 
Mérignac, Blanquefort, Bègles, les fossés et marais de la Bastide, etc. 

La var. B. la Ferme expérimentale. 
La var. C. Belleville (M. Jaudouin.) R 
La var. D. Mérignac. 


Genre XVII. — PHYSE, PHYSA. 


Physa Drap. Tabl. Moll. 1801 , p. 31-32. 

ANIMAL : ovoide , plus ou moins spiral; tête munie de deux tentacules 
longs , sétacés et oculés à leur base interne ; manteau offrant deux lobes 
digités sur ses bords qui peuvent se recourber et recouvrir en grande 
partie la coquille; le pied long, arrondi antérieurement, aigu posté- 
rieurement; le reste de l’organisation comme dans les Limnées, à 
l'exception que les orifices sont généralement à gauche. 

CoQuILLE : généralement sénestre , ovale, allongée ou presque globu- 
leuse, lisse, mince et très-fragile ; ouverture ovale, un peu rétrécie en 
arrière, bord gauche tranchant ; quelquefois avec un bourrelet interne ; 
la columelle un peu torse, mais sans pli; la spire plus ou moins aigue 
et allongée, le dernier tour plus grand que les autres réunis. 

Œufs nombreux , réunis par une masse albumineuse. | 

Vit dans les eaux douces et tranquilles parmi les plantes aquatiques; 
se nourrit également d’autres Mollusques qu’il attaque par succion, ron- 
geant le têt et avalant la portion mise à nu. 


( 2810) 
92. 1. Pr. DES FONTAINES, Ph. fontinalis. 
Bulla fontinalis Linn. Syst. nat. édit. X°, 1758 , I, p. 727. 
Bulimus fontinalis Brug. Encycl. vers 1789, p. 96, pl. 5, fig. 6-6. 
Physa fontinalis Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 92 et Hist. pl. 3, 
fig. 8-9. 
LA BULLE AQUATIQUE , Geoff. Coq. Paris. 
HABiTe : les eaux limpides, flotte souvent à la surface ; à Bègles, 


Mérignac, le Peugue à Arlac (M. Des Moulins), le pont de la Maye; 
peu commune. 


93. 2. Pavse aicue, Physa acuta. 


Physa acuta Drap. Hist. Moll. 4805, p. 59, pl. 8, fig. 40-11. 
Var. B. globosa. 
C. minor. 
D. acutior. 
E. pelluscens. 
F solida |? castenea Lk.) 

HABITE : tous les grands et petits cours d’eau, la Garonne , la Dordo- 
yne, l'Isle , la Leyre, le Peugue, les jalles, ete., etc.; les moindres ruis- 
seaux, fossés , fontaines, nourrissent des variétés de ce Mollusque qui 
semble se contenter de toutes les eaux, de leurs principes calcaires, 
siliceux , crayeux ou ferrugineux. 

La var. B. Rions (M. Jaudouin). 
C. Cambes, Beychevelle. 
D. Mérignac, Arlac, Talence. 
E. Mérignac, Gradignan. 
F. La Garonne, sur les perrés d'embarquement; Bègles , la 
Garonnelle, île Saint-Georges, etc. 

Obs. M. Hte Coudert, membre de la Société Linnéenne, avait renfermé dans 
le même bocal des Limnea slagnalis et des Physa acula. Ces dernières détrui- 
sirent complètement leurs voisines en rongeant leur coquille et en pénétrant 
ainsi jusqu’au Mollusque qu’elles suçaient jusqu’à épuisement. 


94. 3. Payse pes mousses, Physa hypnorum. 
Bulla hypnorum Linn. Syst. nat. édit. X°, 1758, I, p. 727. 
Bulimus hypnorum Brug. Encyel. vers 1789, I, 301. 
Physa hypnorum Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 52 et Hist. pl. 8, 
fig. 12-15. 
Hagire : fossé près Libourne, route de Paris; rare. (M, Des Moul.) 
Tome XXII. 21 


( 282 ) 
Genre XVIII. — LIMNÉE , LIMNÆA. 


Limnœa Brug. Encycl. 1791 , p. 459. 
Limneus Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 30-47. 
Amphipeplea et Lymnæa Nilss. Mol. Suee. 1822, p. 17, 58, 60. 

AxtmaL : de forme ovale, plus ou moins spiral; tête munie de deux 
tentacules applatis, triangulaires , portant les yeux à leur base interne; 
bouche munie d’une pièce supérieure pour la mastication, surmontée 
d’une sorte de voile assez court; pied ovale, bilobé antérieurement, 
rétréci postérieurement; orifice de la cavité pulmonaire au côté droit, 
sur le collier, en forme de sillon, et pouvant être recouvert par un 
appendice charnu qui le borde inférieurement; anus tout à côté; orga- 
nes de la génération distants; l’orifice de la verge étant sous le tentacule 
droit et celui de la vulve à l’entrée de la cavité pulmonaire; génération 
androgyne. 

Coquizze : mince, fragile, ovale-oblongue plus ou moins aiguë et 
allongée, à ouverture plus haute que large, ovale, quelquefois très- 
grande, à bord tranchant non continu par l’effet de la convexité du tour 
précédent; un pl oblique à la columelle. 

Les Limnées habitent les rivières, les canaux, les étangs, les fon- 
taines , les mares et les moindres ruisseaux et fossés ; rampent renver- 
sées à la surface de l’eau et se précipitent au fond en dégageant l’oxigène. 
Comme les Planorbes et les Physes, les Limnées sont omnivores, se 
nourrissent indifféremment de plantes ou de matières animales en putré- 
faction. 


95. 1. Lune czurmeuse, Lunnæa glutinosa. 


Buccinum glulinosum Mall. Verm. Hist. 4774, IE, p. 129. 
Bulimus glutinosus Brug. Encyel. vers 1789, p. 306. 
Limneus glutinosus Drap. Hist. Moll. 1805, p. 50. 
Amphipepleu glutinosa Nilss. Moll. Suec. 1822, p. 58. 

HAB1TE : le Peugue à Arlac (M. Des Moulins) , le pont de la Maye, le 
Thil près des sources de la ville, et probablement plusieurs cours d’eau 
des Landes. 

Cette espèce est essentiellement voyageuse; car , rencontrée en grande 
quantité dans la retenue des eaux du moulin au pont de la Maye, pendant 
l'automne de 1854, je ne l’y ai point retrouvée depuis. 


( 283 ) 


L'animal recouvre sa coquille avec les lobes du manteau et la polit 
sans cesse; c’est l'espèce française dont le têt est le plus fragile. 


96. 2. L. AuRIcULARE , L. auricularix. 


Helix auricularia Linn. Syst. nat. édit. X°, 1758, T. p. 7174. 
Bulimus auricularius Brug. Encycel. vers 1789, p. 304. 
Limneus auricularius Drap. Tabl. Moll. 1801 , p. 48. 
Le Rapis ou Bucain vENTRu Geoff. Coq. Paris. 
HaBite : Mérignac, la Ferme-expérimentale, le Peugue, les allées 
de Boutaut ; peu répandue, appartenant aux variétés non au type. 


97. 5. L. ovaze , L. limosa. 


Helix limosa Linn. Sys. nat. édit. X°, 1758, I, p. 714. 
H. teres Gmel. Syst. nat. 1788, p. 3667. 
Bulimus limosus Poir. Prodr. 1801, p. 30. 
Limneus ovatus Drap. Hist. Mol. 1805, p. 50, pl. 2, fig. 30-31. 
Limnæa ovata Lamk. An. sans vert. 1822, VI-IF, p. 161. 
Var. B. intermedia Lim. iniermedia Fér. 
C. pellucida Gass. Moll. Agen., p. 165, pl. 2, fig. 5. 
D. crassa Gass. loc. cit. pl. 2, fig. 4. 
E. Nouletiana Lim. Nouletiana Gass. loc. cit. p. 166, pl. 2, 
fig. 3. 
F. trencaleonis Lim. trencaleonis Gass. loc. cit. p. 163, 
pl. 2, fig. 1. 
G. vulgaris Lim. vulgaris C. Pfeiffer Deutschl. Moll. 1821, 
1°p-890 plis 129; 
H. gigantea Nob. 


Hagire : tous les terrains et toutes les eaux; c’est l'espèce la plus 


commune et la plus répandue : lui assigner un habitat, serait superflu ; 
je donnerai ceux des principales variétés énoncées plus haut. 

La var. B. les terrains calcaires, les ruisseaux de la rive droite, Mar- 
camps, Gubzac , Libourne, Sainte-Foy, Saint-Émilion , Floirac, etc. 

La var. C. Cambes, Quinsac, Camblanes. 

La var. D. l’'Eau-Bourde (M. Des Moulins), la Garonne, la Dordogne 
à Libourne ; l’'Œil, à Cadillac. 

La var. E. les allées de Boutaut, le pont de la Maye ; les marais de 
Bruges. 


La var F. Mérignac, Castets, Lassouys. 5 


( 284 ) 

La var. G. Les marais de Bruges, de Blanquefort, de la Jalle, etc. 

La var. A. Kions. 

Obs. Cette espèce est sujette aux variations les plus extrêmes; j'ai des 
individus très-petits, et d’autres cinq fois plus grands. Les uns à têt mince, 
pellucide; les autres à coquille épaisse et calcaire. La coloration dépendant 
beaucoup du milieu qu’ils habitent, ils sont brillants dans les eaux des Lan- 
des, où les sols calcaires et ferrugineux précipitent peu; dans les ruisseaux 
et fossés de la plaine et des côteaux, ils sont fréquemment imprégnés et 
recouverts d’encroütements noirs, verts ou marrons. La forme de la coquille 
varie également de la forme spirale à la courte et obèse, après avoir passé 
par tous les intermédiaires. 


98. 4. L. voyaceuse, L. peregra. 


Buccinum peregrum Mull. Verm. Hist. 1774, IT, p. 130. 
Bulimus peregrus Brug. Encyel. vers 1189, p. 301. 
Limneus pereger Drap. Tabl. Moll. 1801 , p. 48. 
Limnæa peregra Lamk. anim. sans vert. 1822, VI-IT, p. 164. 
Var. B. marginata Lim. marginata Mich. compl. p. 88, pl. 16, 
fig. 15-16. 
C. bilabiata Lim. bilabiata Hartm. 
D. pellucida Nob. 
E. gibba Nob. 
HABITE : les sources, les fontaines et les fossés des côteaux calcaires; 
le type à Lassouys, Floirac, Camblanes, etc. 
La var. B. à Marcamps, Saint-André-de-Cubzac, Blaye, Bourg, la 
Roque. 
La var. C. à Rions (M. Jaudouin). 
La var. D. à Cambes; rare. 
La var. E. à l'Estrille, commune d’Artigues (M. Jaudouin ). 
Cette dernière variété est fort singulière par Les gibbosités ou varices 
qui la déforment vers l’époque de son dernier accroissement. 


99. 5. L. sracnare, L. stagnalis. 


Helix stagnalis Linn. Syst. nat. édit. X°, 1758, I, p. 174. 
Bulimus stagnalis Brug. Encycel. vers 1788, I, p. 303. 
Limnæa stagnalis Lam. anim. sans vert. 4801 , p. 94. 
Limneus stagnalis Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 51. 

Le Granp Buccin, Geoff. Coq. Paris. 
Var. B. minor. 


( 285 ) 
» ’ ’ La . 
HaBire : tous les marais, fossés, étangs des environs de Bordeaux; 
moins répandue dans les arrondissements de la Réole et Libourne. 


100. 6. L. rruncaruzée, L. truncatula. 


Buccinum truncatulum Mull. Verm. Hist. 1774, Il, p. 150. 

Bulimus truncatus Brug. Encyel. vers 1789, I, p. 310. 

Bul. obscurus Poir. Prodr. Avril 1801, p. 35. 

Limneus minutus Drap. Tabl. Moll. Juillet 1801, p. 51. 

Limnæa minuta Lamk. anim. sans vert. 1822, VI-IT, p. 162. 
Le periT Bucain, Geoff. Coq. Paris. 

Var. B. major. 

HaBire : tous les cours d’eau du département, la Garonne, l'Isle, la 
Dordogne , les jalles , les esteys, etc.; très-commune. 

Obs. Cette espèce vit très-bien dans les fossés bourbeux qui se dessèchent 
facilement; elle s’enfonce dans la vase pendant la chaleur et reparaît aux 
premières pluies. 

La var. B. est commune dans la Gironde, à Pauillac (M. Des Moulins.) 


401 7. L. pes marais, L. palustris. 


Buccinum palustre Mull. Verm. Hist. 1774, Il, p. 131. 
Bulimus palustris Brug. Encycl. 1789, Vers, I, p. 302. 
Limneus palustris Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 90. 
Var. B. minor. 
Hagire : tout le Bordelais; la var. B. sur les perrés de la Garonne, à 
Bègles, Langoiran, etc., etc. 


102. 8 L. azLoncée, L. glabra. 


Buccinum glabrum Mull. Verm. Hist. 4774, Il, p. 135. 

Bulimus glaber Brug. Encycl. 1789 , Vers, I, p. 312. 

B. leucosioma Poir. Prodr. 1801, p. 37. 

Limneus elongatus Drap. Hist. Moll. 1805, p. 92, pl. 3, fig. 3-4. 

Linnœu leucostoma Lam. Anim. sans vert. 1822, 6, p. 62. 

Var. B. subulata, Limneus subulatus Kikx , Syn. Moll. Brab. p. 60, 
fig. 13-14. 

C. gingivata, Limn. gingivata Goup. Moll. Sarth. p. 63, pl. 1, 

fig. 8-10 , 1835. 

HaBire : les fossés et les marais de la plaine en compagnie, le plus 
souvent, du Planorbis leucostoma ; Mérignac, Gradignan, Saint-Médard, 
etc., etc. 

La var. B. dans les fossés du Teich. 


Genre XIX. — ANCYLE, ANCYLUS. 


Ancylus Geoff. Coq. Paris, 1767, p. 122. 

ANIMAL : ovale, en cône, légèrement recourbé en arrière, ayant le 
manteau peu ample, ne recouvrant point la tête et mince sur les bords; 
tête très-grosse, munie de deux tentacules gros, cylindriques, contrac- 
üiles, oculés à leur base interne et avoisinés au côté externe par un 
appendice foliacé; bouche inférieure, avec quelques apparences d’ap- 
pendices labiaux de chaque côté; pied elliptique, grand; branchies dans 
une sorte de cavité, au milieu du côté gauche entre le pied et le man- 
teau ; anus au côté gauche. 

Coquice : Dextre ou sénestre, mince, recouvrante, presque symé- 
irique , en cône oblique, en arrière ; à base ovale plus ou moins allongée, 
à sommet pointu, non marginal, un peu incliné à droite. 

Les animaux de ce genre vivent dans les eaux vives, sur les pierres, 
les bois, etc.; sous les feuilles des grandes plantes aquatiques. 


Are SECTION. — Coquille dextre, animal sénestre. 


103. 1. ANCYLE FLUVIATILE , Ancylus fluviatihs. 


Ancylus fluviatilis Mull. Verm. Hist. 1774, IT, p. 201. 
Patella cornea Poir. Prodr. 1801 , p. 101. 
L’ANCYLE , Geoff. Coq. Paris. 
Var B. minor. 
HABITE : tous nos cours d’eau, la Garonne, la Dordogne, l'Isle , les 
jalles et les esteys, Les fontaines, etc., etc.; très-commune. 
La var. B. au bas de Cenon. 


2e SECTION. — Coquille sénestre, animal dextre. 
10%. 2. ANGYLE LACUSTRE, Ancylus lacustris. 


Patella lacustris Linn. Syst. nat. édit. Xe, 1758, I, p. 183. 
Ancylus lacustris Mull. Verm. Hist. 1774, IT, p. 199. 
Velletia lacustris Gray, in Turt. Shells Brit. 1840, p. 50, fig. 226. 
Hapire : les marais tranquilles, s’abrite sous les feuilles de nymphæa, 
de potamogeton , etc.; l’Eau-Bourde, la grande Jalle, les marais de 
la Bastide, de Bruges, des allées de Boutaut, etc.; moins commune 
que la précédente. 
C’est le type du genre velletia de Gray. 


Famille VW. — PÉRISTOMIENS. 


PÉRISTOMIENS Lamk, extr. cours anim, sans vert. 1812, p. 117. 
ANIMAL : muni de deux tentacules, subulés, contractiles ; les yeux à 
leur base. 
CoquiLLe : variant dans sa forme, à ouverture arrondie ou ovale, à 
bords peu ou point désunis, sans canal ni échancrure ; opercule corné 
ou vitreux. 


Genre XX. — PALUDINE, PALUDINA. 


Bulimus (partim) Poir. Coq. Paris, 1801, p. 60. 

Cyclostoma (partim) Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 30-40. 

Natica (partim), Fér. père, Syst. conch. in Mém. Soc. Méd. ému. 
1801, p. 395. 

Vivipare Lamk. Phil. zool. 1809, TI, p. 520. 

Paludina Lamk. Extr. cours anim. sans vert. p. 117. 

ANIMAL : muni d’une tête proboscidiforme, tentacules coniques , allon- 
gés, quelquefois distants, portant les yeux à leur base extérieure, ceux- 
ei sur de petites éminences plus ou moins saillantes ; houche munie d’une 
masse ou d’un ruban lingual, hérissé; pied oblong ou ovale, plus ou 
moins allongé et portant généralement un sillon marginal en avant; or- 
gane mâle au côté droit antérieur, ayant son orifice à la base du tenta- 
cule ou dans le voisinage de cet organe ; anus du même côté. 

Coquice : Dextre, épidermée, conoïde à tours de spire arrondis, 
sommet mamelonné , ouverture arrondie , ovale, anguleuse au sommet, 
les deux bords réunis tranchants, jamais recourbés; péristome continu ; 
un opercule orbiculaire , corné , strié. 

Les paludines vivent dans les marais, les fleuves , les canaux, les fos- 
sés. Quelques espèces se plaisent dans les eaux saumâtres. 


105. 1. P. commune, P. contecta. 


Cyclostoma contectum Mit. Moll. Maine-et-Loire, 4813, p. 9. 
Vivipara communis Dup. Hist. Moll. 14851, V, p. 537, pl. 28, 
fig. 9. 
Hagire : le canal latéral à la Garonne, les marais des environs de 
Bordeaux (M. Des Moulins). 


( 288 ) 
Genre XXI. — BYTHINIE , BYTHINIA. 


Hydrobia (partim) Hartm. Syst. Gastér. 1821, p. 31. 
Bythinia Gray, in Turt. Shells. Brit. 1840, p. 90-92, 

ANIMAL : ovale ou ovale allongé, tortillon spiral contenu dans la 
coquille ; tentacules cylindriques pointus, yeux situés à la base posté- 
rieure externe; point de mâchoire. 

COQUILLE : dextre conoïde , ventrue ou cylindracée; suture profonde, 
tours convexes ; ouverture ovale , arrondie; péristome sub-continu , un 
peu épais ; opercule mince, corné ou subtestacé à spire concentrique. 

Ce genre vit plus particulièrement dans les endroits où l’eau est vive 
et courante, dans les sources, les fontaines, etc.; rampe dans les bas- 
fonds, sur les pierres, les rochers, les cailloux, les feuilles et le bois 
mort. 


106. 1. B. pe Férussac, PB. Ferussina. 


Paludina Ferussina Des Moul. in Bull. Soc. Linn. Bord. 1827, If, 
p. 65, fig. 

Bythinia et Hyrobia Ferussina Dup. Cat. exitramar. test. 1849, 
n° 3 et Hist Moll. 1851, VI, 569, pl. 18, fig. 9. 

Var. B. cebennensis Bith. cebennensis , Dup. Cat. n° 37; plus allon- 
gée que le type. 

HABITE : Saint-Médard-d’Eyran, dans la fontaine, au milieu du fonti- 
nalis antypiretica (M. Des Moul.), le pont de la Maye, l’estey de Bègles, 
les ruisseaux de la Ferme expérimentale, à Mérignac, les sources de la 
ville au Thil; commune. 

La var. B. l’estey de Bègles , à la Moulinasse. 


107. 2. B. vrrrée, B. vitrea. 


Cyclostoma vitreum Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 4 et Hist. pl. 4°, 
fig. 21-29, 
Hydrobia vitrea Hartm. Syst. Gast. 1821 , p. 58. 
Paludina vitrea Menke , Syn. Moll. 1830 , p. 40. 
Pal. diaphana Mich. Compl. 1831, p. 97, pl. 15, fig. 50-51. 
Hamire : les fontaines courantes, sur les cailloux , sous les amas de 
feuilles mortes , à Camblanes , Quinsac , Cambes; peu commune. 


( 289 ) 
108. 3. B. raccourctE , B. abbreuiata. 
Paludina abbreviata Mich. Compl. 1831, p. 98, pl. 15, fig. 52-53. 


HaBrTe : les fontaines et les cours d’eau qui en dépendent; à Eysines, 
Blanquefort , Saint-Médard-en-Jalle, la Tresne , etc.; commune. 


109. 4. B. courte, B. brevis. 


Cyclostoma breve Drap. Hist. Moll. 1805, p. 37, pl. 13, fig. 2-3. 
Paludina brevis Mich. Compl. 1831, p. 97. 
Hagite : Marcamps, dans une source ; peu commune. 


110. 5. B. verte, B. viridis. 


Bulimus viridis Poir. Prodr. Avril 1801 , p. 45. 
Turbo griseus Vall. exerc. d'Hist. nat. Août 1801, p. 6. 
Cyclostoma viride Drap. Hist. Moll. 1805, p. 37, pl. 1°, fig. 26-27. 


Hapire : les fontaines, sous les rochers calcaires, à l'Ouest; Saint- 
Emilion, Pompignac , Sainte-Croix-du-Mont, etc.; peu commune. 
Obs. C’est le manque de lumière qui cause l’encroûtement verdâtre dont elle 


est recouverte et auquel elle doit son nom. Une fois brossée, elle est couleur 
de corne pâle. 


441.6. B. ne Leacn, B. Leachu. 


Paludina ventricosa Gray , Nat. arrang. Moll. in Med. repos. 1821, 
XV, p. 239 (sans caract.) 

Turbo Leachii Shepp. Descr. Brit. Shells, in Trans. Linn. 1823, 
XIV, p. 152. 

Paludina similis Des Moul. Moll. Girond. in Bull. Soc. Linn. Bord. 
1827, IL, p. 65. 

P. Kickexii Vestend. Instit. in Bull. Acad. Brux. 1835, IT, p. 375. 

P. decipiens Mill. in Magaz. z0ol. 1843, p. 2, pl. 64, fig. 2. 

P. Michaudii Duv. Descr. Coq. in Rev. z0ol. Juin 1845, p. 211. 

HaBitE : les ruisseaux et les fossés, sur les plantes aquatiques; très- 
commune à la Tresne, à Plassac, la Seige (M. Des Moul.) 


412. 7. B. ne Baupown, B. Baudoniana. 


Bithinia Baudoniana, Gassies. 


ANIMAL : gris enfumé , presque noir sous le pied dont les bords sont 
plus pâles; tentacules filiformes, blanchâtres, gélatineux ; veux très- 


( 290 ) 


noirs situés à la base postérieure, mufle proboscidiforme, noir, ridé 
transversalement en dessus; mâchoire, cornée, rougeâtre, arquée légè- 
rement. 


Coquizce : conoïde, ventrue vers la base, peu aiguë au sommet, 
mince, fragile, finement striée en long, couleur de corne rousse à 
peine transparente, souvent encroûtée de limon ferrugineux ; spire de 
4 à 5 tours très-convexes, suture profonde, le dernier tour formant le 
tiers de la coquille, sommet mousse; ombilic étroit et profond, non 
recouvert par la columelle ; ouverture ovale, arrondie, obtusément an- 
guleuse au sommet; péristome continu, assez épais; columelle calleuse, 
à bord un peu réfléchi, bord latéral tranchant , un léger bourrelet blan- 
châtre ; opercule corné, mince, d’un beau rouge orange, à spire com- 
plète. 

Haut. 8-12milt, Diamètre 6-7mitt, 

HapiTE : les fossés de la grande Lande voisine des prés salés, au 
Teich, en compagnie du Limnæa glabra, var. subulata et du Planorbis 
leucostoma , var. Perezi; commune. 


Obs. Cette Bithinie, voisine de la précédente, en diffère par ses tours plus 
distincts, plus élancés et plus nombreux; par la fragilité de son têt, sa colo- 
ration, son péristome plus épais, son ombilic plus ouvert, et enfin par son 
remarquable opercule. Les animaux ont des habitudes et un facies très-diffé - 
rents. 

Mon ami, M. le docteur Baudon, qui s’occupe d’une monographie des Péris- 
tomiens, a comparé mon espèce avec toutes celles qu’il a pu recueillir, il n’a 
. pu lassimiler à aucune; je me fais un plaisir de la lui dédier. 


113. 8. B. mmpure, B. tentaculata. 


Helix tentaculala Linn. Syst. nat. édit. X°, 1758, I, p. 714. 
Bulimus tentaculatus Poir. Prodr. Avril 1801 , p. 61. 
Cyciostoma impurum Drap. Tabl. Moll. Juillet 1801 , p. 41. 
Turbo janilor Vall. exerc. d’'Hist. nat. Août 1801 , p. 6. 
Cyclostomu jaculator Fér. père, ess. Méth. conch. 1807, p. 66. 
Paludina impura Brard , Coq. Paris , 1815, p. 183, pl. T, fig. 2. 
LA PETITE OPERCULÉE AQUATIQUE , Geoff. Coq. Paris. 

Var. B. globosa. 

C. truncata. 

D. minor. 


Hagire : toutes les eaux de la Gironde; très-commune partout. 


a |: 


(298) 
La var. B. l’estey de Bègles; elle est globuleuse, à spire courte et 
aiguë; le têt est presque toujours d’un jaune luisant. 
La var. C. les marais au bas de Cenon; elle est plus turriculée que la 
précédente et corrodée au sommet. 
La var. D. très-petite dans la Garonne. 


Genre XXII. — VALVÉE, VALVATA, Mur. 


Valvata et Nerita (partim), Mull. Verm. Hist. 1774, II, p. 172. 


ANIMAL : muni d’une tête très-distincte, prolongée en une sorte de 
trompe; tentacules fort longs, cylindracés, obtus, très-rapprochés ; 
yeux sessiles au côté postérieur de leur base; pied bilobé en avant; 
branchies longues, pectiniformes, plus ou moins extensibles hors de la 
cavité, celle-ci largement ouverte et pourvue à droite de son bord infé- 
rieur, d’un long appendice simulant un troisième tentacule; organe 
mâle se retirant dans la cavité respiratoire. ; mächoire latérale. 

Coquizce : discoïde ou conoïde, ombiliquée, à tours de spire cylin- 
dracés, à sommet mamelonné ; ouverture ronde ou presque ronde, 
à bords réunis, tranchants; opercule corné à éléments concentriques 
et circulaires. 

Les Valvées vivent dans les eaux douces, tranquilles, à fond herbeux 
ou vaseux. 

Elles ressemblent aux Planorbes par la forme discoïde du têt; aux 
jeunes Paludines par leur spire conoïde. Elles diffèrent des premiers par 
leur péristome continu et par la présence de branchies et d’un opercule. 


A1%. 1. V. pISCINALE, V. piscinalis. 


Nerita piscinalis Mull. Verm. Hist. 1774, II, p. 172. 
Turbo cristata Poir. Prod. Avril 1801, p. 29. 
Cyclostoma obtusum Drap. Tabl. Moll. Juillet 1801 , p. 39. 
Valvata piscinalis Fér. père , Ess. Syst. conch. 1807, p. 75. 
Valvata obtusa Brard, Coq. Paris, 1815, p. 190, pl. 6, fig. 17. 
Le PorrTe-PLumer, Geoffr. Coq. Paris. 

Var. B. major. 

C. mediana. 

D. suturalis. 


HABITE : presque tous les cours d’eau du département , rivières, jal- 
les, esteys, simples ruisseaux ; irès-commune partout. 


( 292) 
La var. B. major dans les marais de Rivière et des Chartrons. 


La var. C. l’estey de Bègles. 
La var. D. Marcamps. 


415. 2. V. MENT, V. manuta. 


Valvata minuta Drap. Hist. Moll. 1805, p. 42, pl. 1°, fig. 36-38. 
HaBire : l’estey de Bègles, le ruisseau de la Maye, une fontaine à 
Saint-Émilion, à Cambes ; rare partout. 


116. 3. V. PLANORBE, V. cristata. 


Valvata cristata Mull. Verm. Hist. 1774, Il, p. 198. 
Valvata planorbis Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 42. 
HaBire : les marais et les fontaines; commune aux allées de Boutaut, 
à Bruges, aux Chartrons, à Mérignac, Bègles, etc. 


Famille VE. — NÉRITACÉS. 


LAMK. 


Genre XXIIT. — NÉRITINE , NERITINA. 


MNerita (partim) Linné, Syst. nat. édit. Xe, 1798 , I, p. 7176. 
Neritina Lamk. Phil. zool. 1809. 

ANIMAL : globuleux, pied circulaire, court, épais, sans sillon anté- 
rieur ni lobe operculaire; muscle columellaire partagé en deux ; deux 
tentacules filiformes oculés à leur base externe; yeux subpédonculés; 
langue denticulée; une grande branchie pectiniforme; sexes séparés, 
organe mâle , auriforme. 


Coquirce : semi-globuleuse , mince, aplatie, operculée, non ombili- 
quée; ouverture semi-lunaire, bord columellaire, aplati, tranchant; 
bord latéral sans dents; opercule demi-rond, muni d’une apophyse 
latérale ; spire peu ou point saillante. 

Les Néritines habitent les eaux courantes, froides , chaudes et tempé- 
rées ; elles rampent sur les pierres, les bois immergés, sur les plantes 
aquatiques. 

Les femelles déposent leurs œufs sur tous les corps solides et même 
sur le têt de leurs congénères et des autres Mollusques; l’éclosion déter- 
mine l’affaissement du centre et tout le tour reste adhérent comme la 
circonférence d’un anneau. 


( 293 ) 
147. 1. N. FLUVATLE , N. fluviatilis. 
Nerita fluviatilis Linn. Syst. nat. édit. Xe, 1758, [, p. 771. 
Theodoxus lutetianus Montf. conch. Syst. 1810, Il, p. 351. 
Neritina fluviatilis Lamk. Anim. sans vert. 1822, VI, 2, p. 188. 
N. vuriabilis Hécart, Moll. Valenc. in Mém. Soc. Agric. Valence. 
1833, I, p. 146. 
La NÉRITE DES RIVIÈRES , Geoff. Coq. Paris. 
Var. B. viridana Gass. Moll. terr. d’eau douce Agen. p.186. ° 
C. nigricans Gass. loco cit. 
D. vinosa Nobis. 
E. punctata. 
HABITE : tous nos cours d’eau, la Garonne, la Dordogne, l'Isle, les 
jalles , les esteys , etc., etc.; très-commune partout. 
La var. B. à Castets, dans la Garonne. 
La var. C. aux sources qui alimentent Bordeaux. 
La var. D. à Bellefond, commune de Saint-Selve; fontaine chaude en 
hiver. 
La var. E. dans ie Moron, près Marcamps. 


Deuxième CLasse. — ACÉPHALES, Cuv. 
Famille VEEK. — NAYADES. 


Nayades Lamk. extr. cours, Anim. sans vert. 4812, p. 106. 
Mytilacés Cuv. Règn. Anim. 1817, I, p. 469. 

Sub mytilacés Blainv. Malac. 1825, p. 537. 

Anodontidiens Maud. Moll. Vienn. 1839, p. 5. 

ANIMAL : sans tête distincte, avec une bouche sans dents, cachée dans 
le fond ou entre les replis du manteau, souvent munie de chaque côté 
d’une paire d’appendices, point d’yeux ; des organes respiratoires bran- 
chiaux , peu variables dans leur forme et leur position; tous se fécon- 
dant eux-mêmes; un cerveau imparfait, joint à un système nerveux 
ganglionnaire ; deux cordons nerveux remplacent le collier médullaire ; 
circulation simple; cœur situé sur le dos, petit, ovale, gélatineux, 
presque transparent, à un seul ventricule et à deux oreillettes, doué 
d’un mouvement ondulatoire ; système artériel et veineux ; respiration 
par des branchies extérieures ; foie très-volumineux , enveloppant pres- 
que en entier l’appareil digestif; un pied ahdominal, vertical. Ovo-vivi- 
pares. 


( 294 ) 


CoquicLe : de deux pièces, jointes ensemble par un ligament corné. 
BIVALYES. 


Genre XXIV. — ANODONTE , ANODONTA. 


Mytilus (partim) Linn. Syst. nat. édit. X°, 1758, I, p. 704. 

Mytilus (partim) Geoff. Coq. Paris, 1767, p. 137. 

Anodontiles Brug. Encycl. illust. 1791, pl. 201, 205, et Journ. 
Hist. nat. 1792, p. 184. 

Anodonta Lamk. Mém. Soc. Hist. nat. Paris 1799, p. 87. 

AnImAL : ovale, oblong plus ou moins allongé et épais, ayant le man- 
teau ouvert dans toute sa moitié inférieure et en avant, adhérent, à 
bords épais, souvent frangés; muni d’un orifice particulier pour l’anus 
et d’un tube incomplet, court, postérieur, garni de deux rangées de 
papilles tentaculaires et servant à la respiration ; appendices labiaux 
triangulaires, branchies assez longues, inégales sur un même côté; pied 
très-grand , épais, comprimé , de forme quadrangulaire. 

CoqQuiLe : ovale ou arrondie, généralement assez mince et auriculée, 
régulière, équivalve, inéquilatérale , quelquefois baïllante;, sommet 
antéro-dorsal, écorché ; charnière sans dent, mais présentant une lame; 
ligament linéaire, extérieur, très-allongé ; impressions musculaires 
écartées , très-distinctes. 

Les Anodontes vivent dans les rivières, les étangs, les mares et les 
fossés au milieu des fonds vaseux, se nourrissent de matières diverses 
en suspension dans l’eau. 

Je n’ai pas appris que les Mollusques servissent d’aliment dans la 
Gironde, comme cela a lieu dans quelques localités de l’Agenais. 


118. 1. À. pes CYGNES, À. cygnea. 


Mytilus cygneus Linn. Syst. nat. édit. Xe, 1758, [, p. 706. 
Anodontiles cygnæa Poir. Prodr. Avril 1801 , p. 109. 
Anodonta variabilis Drap. Tabl. Moll. Juillet 1801 , p. 108. 
A. cygnea Drap. Hist. Moll. 1805, p. 134. 
La GRANDE MouLE DES ÉTANGS , Geoff. Coq. Paris. 
Var. B. cellensis, Anod. cellensis, G. Pfeiff. Deutsch. Moll. 4821, 
Lop:1410ÿpl. G.,ifig 41: 
Anod. sinuosa Maud. Moll. Vienn. 1839, p. 15. 
HaBire : le type, à Mérignac, dans la propriété de M. Ducasse 
(M. Jaudouin ); à Lagrange, chez M. le comte Duchâtel (M. D. Guestier). 


( 295 ) 

La var. B. presque tous les étangs, à Castres, dans le ruisseau et les 
viviers de Poitevin; les fossés et les marais de la Bastide, les étangs du 
littoral à Hourtins (M. Des Moulins); dans la Dordogne, à Castillon 
(M. Paquerée), l'Isle, à Coutras (M. P. Fischer), à Beychevelle 
(M. D. Guestier). 


119. 2. À. ne Des Mouus, À. Moulinsiana. 
Anodonta Moulinsiana Dup. Moll. terr. et fluv. de la France, p. 616, 
Fab XXe fig. 19° 
Hagire : les étangs du littoral, Cazaux, Gastes, Biscarrosse; parait 
très-commune. Cette espèce est-elle assez typique pour être maintenue? 


120. 3. À. ne GraTeLoup , À. Gratelupeana. 


Anodonta Gratelupeana Gass. Tabl. Moll. terr. et d’eau douce de 
l’Agen. 1849, p. 193, pl. 3, fig. 4, 2, 8 et pl. #, fig. 2. 

HABITE : la Garonne, à Paillet, (feu Larrouy) Cadillac , (M. Bareyre) 
Cambes, la Garonnelle, la Réole ; assez abondante. C’est à la variété 
minima de mon Tableau de l’Agenais, que se rapportent les individus 
de la Gironde. 

Je me suis procuré des types de l’A. complanata, avec lequel plusieurs 
auteurs le réunissent ; il est voisin de cette espèce, mais plusieurs carac- 
tères l’en séparent. 


121. 4. À. DES PISCINES, À. piscinulis. 


Anodonta piscinalis Nilsson, Hist. Moll. suec. p. 116. 
A. analina Drap. Hist. Moll. 1805, p. 133, pl. 12, fig. 2, non 
Linn. 
Var. B. complanata. 
C. elongata. 
D. anatina. 
E. palustris. 
F. rostrata. 
G. minima. 
H, solida. 
Hagire : tous les cours d’eau grands et petits. 
_ La var. B. la Garonne, à la Réole, Langon, la Garonnelle, etc., 
etc.; commune. 
La var. C. les jalles de Blanquefort, de Saint-Médard, Gradignan. 
La var. D. Etauliers. 


( 2967 ) 

La var. Æ. la Garonne à Langoiran, les marais et les fossés de la 
la Bastide, de Bruges, etc. 

La var. F. l’eau blanche à Léognan (M. P. Fischer), à Salles. 

La var. G. dans l’Isle (M. Paquerée). 

La var. H. Beychevelle (M. D. Guestier). 

Cette espèce, que j'ai recueillie en individus innombrables et variés , 
m'a toujours offert le même caractère typique; ses nombreuses variétés 
ont été érigées en espèces par la plupart des auteurs ; ainsi, le type de 
Nilsson, la var. À. lorsqu'elle est âgée et qu’elle vit dans des eaux 
fortement calcaires, devient épaisse et très-lourde et a paru alors à plu- 
sieurs devoir être l'An. ponderosa de C. Pfeiff, ce qui a induit en erreur 
M. Moquin-Tandon;, car ma planche 4 des Mollusques de l’Agenais 
figure, en effet, un très-vieux individu. 

La var. B. est le type des Allemands. 

La var. E. est l’An. Rossmassleriana Dup. Moll. Gers, p. 74. 

La var. D. est l’An. anatina Drap. non Linné. 

La var. E. est l’An. palustris D’Orb. ? 

La var. F. est l’An. rostrata Kokeïl in Rossm. Icon. 14836, IV, pl. 25, 
fig. 284. 

J'ai reçu l’Anodonte des piscines de Suède, d'Angleterre et d’Allema- 
gne, et je n’ai plus un seul doute sur la valeur spécifique et l’identité de 
celles de l’Agenais et de la Gironde. 


Genre XXV. — MULETTE, UNIO. 


Mya (partim) Linn. Syst. nat. édit. X°, 1758, I, p. 670. 
Mytulus (partim) Geoff. Coq. Paris, 1767, p. 131. 
Unio Philipps Nov. Test. Gen. 1788, p. 16. 


AnImaL : semblable à celui des Anodontes, plus épais et nerveux. 


Coquice : de forme variable, équivalve, inéquilatérale, assez bom- 
bée , quelquefois un peu baillante , auriculée ou non; valves épaisses, 
rongées aux sommets; ceux-ci plus ou moins antérieurs; charnière 
formée d’une dent lamellaire sous le ligament et d’une double dent; 
comprimée, dentelée irrégulièrement sur la valve gauche, et simple sur 
la valve droite ; ligament extérieur et allongé ; impressions musculaires 
très-écartées et peu distinctes. 

Les Unios vivent avec les Anodontes, mais préfèrent cependant les 
grands cours d’eau. 


( 297) 
122. 1. M. sxuée, U. sinuatus. 
Unio rugosa Poir. Prodr. 1801, p. 105. 
U. margaritifera Drap. Hist. Moll. 1805, p. 132, pl. 10, fig. 8-16. 
U. sinuata Lamk. Anim. sans vert. 1819, VI, p. 70. 
U. margaritiferus Nilss. Moll. Suec. 1822, p. 103. 
U. crassissima Fér. ex. des Moul. Moll. Gironde 1827, p. 42. 
Var. B. minima. 


HABire : la Garonne, à Paillet, à Cadillac, Langon, etc.; peu com- 
mune et toujours petite. C’est la var. Garumnaæ de M. de Grateloup. 


493. 2. M. irrorare. U. littoralis. 


Mya rhomboïdea Schrot Fluss-Conch. 17179, p. 186, pl. 2, fig. 3. 
Unio littoralis Cuv. Tabl. élém. 1798, p. 495. 
Mya crassa Vall. exerc. Hist. nat. 1801, p. 7. 
Var B. elata Nob. 
C. sericea Nob. 


HaBrte : les rivières et les grandes jalles; très-commune dans la 
Garonne, à Langoiran, Quinsac, Cambes, Cadillac, Langon, la Réole, 
etc. Dans l’Isle, à Coutras (M. P. Fischer), la Dordogne, à Castillon 
(M. Paquerée). 

La var. B. dans la jalle à Saint-Médard. 

La var. C. l’étang de Saint-Michel-de-Castelnau, sur le Ciron. 
(M. D. Guestier ). 

Cette dernière variété est fort remarquable par l’épiderme soyeux de 
couleur ferrugineuse qui recouvre le têt. 


124. 5. M. ne Requen, U. Requenn 


Unio Requienii Mich. Compl. 1831, p. 106, pl. 16, fig. 24. 
Unio pictorum (partim) Drap. 
Var. B. elongata. 

C. arenosa Nob. 

D. ovata. 

E. purpureu. 


HagitE : la Garonne, la Dordogne, l'Isle, la Leyre, les jalles de 
Saint-Médard, Blanquefort, etc., etc. 
La var. B. la Garonne, à Cadillac (M. Bareyre), Paillet {feu Larrouy), 
la Réole , Langon, etc. 
La var. C. les ruisseaux et les viviers de Poitevin, à Castres. 
Tome XXII. 32 


( 298 | 
La var. D. la Jalle de Blanquefort. 
La var. E. la Dordogne, Castillon, Libourne, l'Isle à Coutras, la 
Garonne à Paillet, Cadillac (MM. Bareyre et Laporte). 


125. 4. M. ne Desmaves, U. Deshayesü. 


Unio Deshayesii Mich. Compl. 1831 , p. 107, pl. 16, fig. 30. 
U. Platyrinchoideus Dup. Hist. Moll. VI, p. 649, pl. 28, fig. 46. 
Le type est fragile, à têt très-mince et toujours excorié, à rostre élargi 
et droit; U. Deshayesii Mich. loco cit. 
Var. B. Plutyrinchoideus , U. Platyrinchoideus Dup. loc. cit. 
De moindre taille, plus solide, un peu arquée, à rostre aigu ou peu 
élargi; à reflets métalliques , sans ou peu d’excoriations. 
Var. C. minor. 
Hapire : les étangs du littoral aquitanique. Le type, dans l’étang de 
Biscarosse (M. Perris), d'Hourtins et de Gastes ( M. Des Moulins). 
La variété B. dans l’étang de Cazeaux. 
La var. C. la Leyre. 
Cette espèce se rapproche beaucoup de l’Un. Requienit, Mich. Cepen- 
dant les caractères que lui attribue M. Michaud sont constants; c’est ce 
qui me décide à la maintenir. 


Famille VEILLE. — CARDIACÉS. 


Carpracés , Cuv. Règn. Anim. 1817, Il, p. 476. 
CarpiAcÉEs , Lamk. Anim. sans vert. 1819, VI, 1, p. 1. 
Pediferia cycladia, Rafin. Monogr. Coq. biv. 1820, p. 348. 
Cyczapes , Fér. Tabl. Syst. 1822, p. 39. 

ConcHacÉs, Blainv. Malac. 1825, p. 546. 

Cycladiens, Maud. Moll. Vienne , 1839, p. 2. 


Genre XXVI. — CYCLADE, CYCLAS. 


Tellina (partim ) Linn. Syst. nat. édit. Xe, 1758, I, p. 674. 
Chama Geoff. Coq. Paris, 1767, p. 133. 
Sphærium Scop. Intr. Hist. nat. 1777, p. 397. 
Cyclas (partim) Brug. Encycl. illustr. 1791 , pl. 301-302. 
ANIMAL : épais, ayant un manteau à bords simples; muni de tubes 
courts et réunis; pied large, comprimé à sa base et terminé par une 
sorte d’appendice. 


( 299 
CoquiLe : épidermée, mince , quelquefois demi-transparente , ovale, 
très-bombée , équivalve , inéquilatérale; sommets très-rapprochés et un 
peu tournés en avant; charnière composée de dents cardinales très- 
petites, quelquefois presque nulles ; tantôt deux sur chaque valve, dont 
une pliée ou lobée sur une valve et deux sur l’autre; deux dents latéra- 
les écartées, lamelliformes, avec une fossette à la base; ligament exté- 
rieur, postérieur et bombé ; deux impressions musculaires réunies par 
une impression palléale non excavée. 
Les Cyclades habitent les eaux douces des grands cours d’eau, des 
ruisseaux, des fontaines et des marais. 


126. 1. C. rivicoLE , C. rivicola. 
Cyclas rivicola Leach, in Lamk. Anim. sans vert. 1818, V, p. 558. 
Cyclas cornea Drap. Tabl. Moll. 1801 , p. 105, non Linné. 


HAB1TE : la Dordogne (M. Bourguignat), la Garonne près de Bordeaux 
et à l'embouchure de la Jalle de Blanquefort (M. Laporte). 

Je n’ai jamais trouvé cette espèce, mais la certitude que m’a donnée 
M. Laporte, notre collègue, de l’avoir recueillie dans la jalle de Blan- 
quefort et l’habitat signalé dans la Dordogne à Libourne, par M. Bour- 
guignat, me font un devoir de la signaler dans ce Catalogue. 


197. 2. C. coRNéE , CG. cornea (1). 


Tellina cornea Linn. Syst. nat. édit. Xe, 1758, I, p. 678. 
Tellina r'ivalis Mull. Verm. Hist. 1774, IL, p. 202. 
Cyclas cornea Lamk. Anim. sans vert. 1818, V, p. 558, non Drap. 
Var. B. umbonafa, bords très-arrondis. 
Var. C. isocardioïides , Normd. excessivement bombée. 
Var. D. rivalis, Cyclas rivalis Drap. Hist. Moll. 1805, p. 129. 
HaBire : tous les ruisseaux d’eau courante, même les marais 
stagnants ; très-commune. 
La var. E. à été trouvée , remarquablement belle, dans les fossés qui 
bordent la route de Paris à la Bastide , par M. Jaudouin. 


(4) M. Paquerée , de Castillon , m’a envoyé un fragment de roche calcaire, des endi- 
guements de la Dordogne, dont les vacuoles sont habitées par le Cyclas corneu ! Fai 
eu à peine le temps d'observer ce fait, sans me rendre bien compte de la présence 
de ce Mollusque; mais les expériences de M. Cailliaud , sur les roches perforées du 
littoral océanien, par l’Echinus lividus , me font un devoir d’étudicr, pendant la belle 
saison , ce que peut avoir d’anormal un fait de cette nature. Je dépose, au Musée de 
Bordeaux , un échantillon de ce calcaire, habité par le Cyclas cornea ! 


( 300 | 


128. 5. C. LACUSTRE. C. lacustris. 


Tellina lacustris Mull. Verm. Hist. 1774, IL, p. 204. 
Cyclas caliculata Drap. Hist. Moll. 1805, p. 130, pl. 10, fig. 14-15 
(13-14). 
Var. B. tenuis Nobis, très-mince et à bords tranchants. 
C. cinerea , d'un gris bleu luisant. 

HABITE : les eaux tranquilles, les réservoirs d’eau pluviale, sur les 
côteaux, à Floirac, Cambes , Quinsac, la Réole, Blaye, Beychevelle, 
Pauillac, Libourne, etc.; commune. 

La var. B. tenuis, dans les marais de Belleville et de Mérignac, à 
l’Hippodrome , à la Ferme-expérimentale. 

La var. C. cinerea , à Bègles (M. Jaudouin). 


129. 4. C. ovare, C. ovalis. 
Cyclas ovalis Fér. In. Ess. Méth. 1807, p. 128-136. 

HABire : l’Estey de Bëgles , à la Moulinasse ; commune. 

Obs. Cette espèce n’est autre chose que le Cyclas lacustris Drap. et de la 
plupart des auteurs. Férussac avait parfaitement saisi ses caractères différen— 
tiels, et la distinguant du véritable /acustris de Muller, il lui imposa le nom 
d’ovalis. Cette coquille a le têt très-mince, fragile, sans élévations caliculées 
aux sommets; le corselet et le cûté opposé sont arrondis; les bords libres 
sont mousses et point tranchants, sa coloration est le gris verdâtre. 


Genre XXVII. — PISIDIE, PISIDIUM. 


Pisidium C. Pfeiff. nat. Deutschl. Moll. 1821, I, p. 17-123. 
Cyclas (partim) Muller, Drap. etc. 
Cardium (partim ) Poli. Test. Sic. p. 65. 


ANIMAL : muni d’un manteau ouvert en avant pour laisser passer un 
pied linguiforme et fort extensible. Ce manteau est fait de manière à 
former un seul tube qui présente l’aspect d’un siphon court et contractile. 

Coquizce . épidermée, sub-ovalaire ou sub-arrondie, obliquement 
cunéïforme, inéquilatérale; sommets recourbés en avant, charnière 
dentée présentant sur la valve droite une seule dent cardinale, quelque- 
fois complexe, reçue dans la gauche entre deux dents obliques; dents 
latérales étroites, allongées, lamelliformes sur les deux valves ; ligament 
extérieur et postérieur ; deux impressions musculaires sur chaque valve, 
réunies par une impression palléale, non excavée postérieurement. 

Les Pisidies habitent avec les Cyclades; seulement quelques espèces 
vivent dans les fontaines d’eau pure , mais à fond vaseux. 


( 301 ) 


130. 1. P. pes riIvIÈRES, P. ammicum. 

Tellina amnica Mull. Verm. Hist. 1774, Il, p. 205. 

Cyclas palustris Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 106. 

Cyclas obliqua Lamk. Hist. Anim. sans vert. 1818, V, p. 559. 

Pisidium obliquum G. Pfeiff. Deutsckl. Moll. 1821, [, p. 124, pl. 5, 
fig. 19-20. 

Pisidium amnicum Jenyns, Monogr. Cycl. and Pisid. in Trans. 
Cambridg. Soc. 1833, IV, p. 309, pl. 19, fig. 2. 

Var. B. sulcata. 

HABite : la Garonne et ses affluents, à la Réole, Saint-Macaire, la 
Garonnelle, Cambes, Paillet, etc., à Castillon dans la Dordogne; l'Isle 
à Coutras; la Jalle de Blanquefort, de Saint-Médard, etc.; répandue, 
mais peu commune. 

La var. B. sulcata, les esteys des Landes, de la Gironde ; rare. 


134. 2. P. INTERMÉDIAIRE, P. intermedium. 
P. intermedium Gass. Desc. Pis. du Sud-Ouest , in Act. Soc. Linn, 
Bord. t. XX°, p. 338, pl. 4, fig. 4. | 
HABITE : dans les fontaines herbeuses; à Marcamps, Bassens , Créon: 
peu commune. 


132. 5. P. cASERTANE, P. casertanum. 
Cardium casertanum Poli, Test. Sic. 1794, E, p. 65, pl. 16, fig. 1. 
Cyclas fontinalis auct. mult. 
Var. B. limosum, Pis. limosum Gass. Tabl. Moll. Agen. 1849, 
D206, pl. 2, fig. 10. 
Var. C. cinereum , P. cinereum , Alder. Cat. 1837. 

HaBite : les fossés, les flaques des prairies, les réservoirs et les lavoirs; 
à Libourne, Saint-Émilion , Blaye, Étauliers, etc., etc.; très-commune. 
133. 2. P. mcexoxe, P. pulchellum. 

Pisidium pulchelluim Jennyns, Monog. Cyel. and, Pisid. 1833, 
p. 306, pl. 21, fig. 1-5. 

HaBire : les eaux vives et Les marais ferrugineux, à Bruges, les allées 
de Boutaut, à Mérignac, la Ferme-expérimentale ; la Jalle de Blanquefort, 
etc., etc.; commune. 

434.5. P. ne Henxscow, P. Henslowianum. 


Tellina Henslowana Shepp. Descr. Brit. Shells, in Trans. Linn. XIV, 
1893, p. 149. 


( 302) 
Cyclas appendiculata Leach, in Turt. Shells Brit. 1831, p. 15, 
fig. 6. 
Pisidium acutum L. Pfeiff. in Wiegm. Arch. 1831, I, p. 230. 
Pisidium Henslowianum Jen. Monogr. Cycl. Pisid. loc. cit. 1833, 
IV, p. 308, pl. 21, fig. 6-9. 
Var. C. non appendiculée. 


HaBiTe : la Garonne à Paillet, la Garonnelle , Langon. La var. C. à 
Langoiran; rare. 


135. 6. P. opTuse, P. obtusale. 


Cyclas obtusalis Lamk. Anim. sans vert. V, 1818 , 559. 

C. minima Stud. Kurg. Verzeinch. 1820 , p. 93. 

Pisidium obtusale G. Pfeiff. Deutsch. Moll. 1821 , 1, p. 125, pl. V, 
fig. 21-22. 

Cyclas gibba Alder , Cat. Shells, in Trans. North. 1830, I, p. 41. 

Pisidium fontinale, var. obtusale , Held. in Isis, 1837, p. 306. 


HABire : les fossés alimentés par l’eau des fontaines; à Libourne, Paillet, 
Sainte-Croix-du-Mont. le Teich, sur la route de la Teste ; assez rare. 


136. 7. P. pe GassEs, P. Gassiesianum. 


Pisidium Gassiesianum Dup. in litt. 1849. 

P. Gassiesianum Dup. Moll. France, Janvier 1849-1852. 

P. Gassiesianum Dup. in Gass. Moll. de l’Agenais, Mars 1849, 
p. 207, pl. 2; fig 42. 

P. tetragonum Norm. coup-d’œil sur les Gyclades du département 
du Nord, 1854. 


HaBire : les eaux vives et courantes, l’Estey de Bègles, la Jalle de 
Blanquefort, au Taillan, au Thil: commune et très-belle dans toute la 
Gironde. 


137. 8 P. LuisanTe , L. nitidum. 


Pisidium nitidum Jen. Monog. Cycl. and Pisid. in Trans. Cam- 
bridge , 1833 , IV, p. 304, pl. 20, fig. 7-8. 
Cyclas nitida Hanley, spec. Shells, 1843, I, p. 90 et Suppl. 
pl. 14, fig. 46. 
HaBire : les ruisseaux herbeux; aux environs de Bordeaux, l’Estey de 
Bègles, de la Tresne ; à Camblanes, Cambes, à Coutras, Marcamps ; 
assez commune. 


( 303 ) 
138. 9. P. rene, P. pusillum. 
Tellina pusilla Gmel. Syst. nat. 11788, p. 3231. 
Cyclas fontinalis (partim) Drap. Tabl. Moll. 1801, p. 105. 
Pisidium fontinale CG. Pfeiff. Deutschl. Moll, 1821, I, p. 125, 
pl. 5, fig. 15-16. 
Cyclas pusilla Turt. Conch. Brit. 1822, p. 251, pl. 2, fig. 16-17. 
Pisidium pusillum Jen. Monog. Cyel. and Pisid. in Trans. Cam- 
bridge, 1833, p. 302, pl. 20, fig. 4-6. 
HABITE : les fontaines, les ruisseaux, l’Estey de Bègles, Camblanes, 
Cambes, Paillet, Marcamps, Saint-André-de-Cubzac, Blaye, Beyche- 
velle, Pauillac, Mérignac ; les eaux de la Lande au Teich : commune. 


RÉSUMÉ. 


Catalogue de M. Des Moulins (1827-29). 


ENVIES en à 2 : 4 HSCNTES MP EIN.lS à 9 espèces. 
lERFESITES EE TORdR RAT Ce DOI: 
UNIVALVES ue 3 
(aquatiques. . . . . 1 -1d.p#592 sul. n90 >urafé 31 id. 
22 genres. 90 espèces. 


Mon Catalogue (1859). 


BivAE Vase, AuoMpatoqurs , » A GENRTESET MARIE 21 espèces. 
dose FOREST CEE LAN ES ES PRE 80 id. 
ra AUHAUQUES NE ES Aide RAR ER de. I HS 

26 genres. 138 espèces. 


DIFFÉRENCE EN PLUS : 


Genres! . .—: 4 
Espèces : . . . 48 


Sans compter les genres : Zua Leach, Azeca Leach, Achatina Lamk. 
et Pomatias Studer. 


( 304 ) 

Les espèces : Arion ater Fér.; Testacella scutulum ? Sow.; Succinea 
oblonga Drap.; Helix hortensis Mull.; Clausilia nigricans Jeff.; Physa 
castanea Lamk.; Limnea intermedia Fér., Nouletiana Gass., Trencaleonis 
Gass., vulgaris C. Pfr., marginata Mich., bilabiata Hartm., gingivata 
Goup., subulata Kikx.; Anodonta cellensis G. Pfr., anatina Drap. , ros- 
trata Kokeil., palustris d’Orb., minima Mill., Rossmassleriana Dup. ; 
Unio platyrinchoideus Dup.; Cyclas rivalis Drap.; Pisidium limosum 
Gass., cinereum Ald. 

Ces genres et espèces ont été abrogés après mûr examen des animaux 
et des coquilles. Les premiers ont été réduits à l’état de simple section, 
les deuxièmes à celui de variétés. 

Ainsi, en ajoutant ces genres et espèces apocryphes, nous aurions le 
résultat suivant : 

4 genres. 25 espèces. 


Dot PURE 


TABLE DES MATIÈRES. 


Nota. — La première colonne de ces chiffres indique la pagination d’un tirage à 
part, et la deuxième, celle des ACTES. 


Achatina 35 267 Bulimus Menkeanus (Cary) C. 
Acme fusca (Turbo) Walk. 43 275 Pfr. 35 267 
— simoniana (Pal.) Charp. 44 276 —  obscurus (Hel.) Mull. 32 264 
Ancylus fluviatilis Mull. 54 286 —  quadridens (id.) (id.) 33 265 

—  lacustris(Patella) Lin. 62 294 —  subcylindricus (Helix) 
Anodonta cygnea (mytilus) Lin. id. id. Lin. 34 266 
—  Gratelupeana Gass. 63 295 —  tridens (Helix) Mull. 32 264 
—  Moulinsiana Dup. id. id. —  ventricosus Drap. 33 265 
—  piscinalis Nils. id, id, Bythinia abbreviata (Pal.) Mich. 57 289 
Arion fuscus (Limax) Mull. 14 246 — . Baudoniana Gass. id. id. 
— rufus (id.) Lin. 13 245 —  brevis (Cycl.) Drap. id. id. 
—  subfuscus (id.) Drap. 44 246 —  Ferussina (Pal.)Des M. 56 288 
Azeca 35 267 —  Leachii(Turbo) Shepp.57 289 
Balæa perversa (Turbo) Lin. 38 270 —  tentaculata (Hel.) Lin. 58 290 
Bulimus acicula (Buc.) Mull. 35 267 —  viridis (Bul.) Poir. 57 289 
—  acutus (Helix) Mull. 33 265 —  vitrea (Cycl.) Drap. 56 288 


—  decollatus (id.) Lin. 34 266 CanpiAGés (Famille 8.) 66 298 


0 


(305) 


LiMAGIENS (Famille 4.) 


245 Limax agrestis Linn. 


Caryehium minimum Mull. 42 274 

Classe 4re GASTÉROPODES. 43 
Classe 2e ACÉPTIALES. 61 293 
Causilia bidens (Hel.) Mull. 36 268 
—  parvula Stud. id'id: 
—  perversa (Hel.) Mull. 37 269 
—  Rolphii Gray. id, id. 
CouimAcés (Famille 2.) 18 251 
Cyclas cornea (Tellina)-Linn. 67 299 
— lacustris (id.) Mull. id. id. 
— ovalis Fér. 68 300 
— rivicola Leach. 67 299 
CYGLOSTOMAGÉS (Famille 3.). 42 274 

Cyclostoma elegans (Nerita) 
Mull. id. id 
— septemspirale (Hel.) 

Razoum. 43 275 
Helix aculeata Mull. 97 259 
— aspersa (id.) 26 258 
— cCarthusiana (id.) 28 260 
— cespitum Drap. 30 262 
— cornea.Drap. 24 256 
— ericetorum Mull. 30 262 
— fasciolata Poir. id. id. 
— hispida Drap. 29 261 
— incarnata Mull. 21 259 
— intersecta Poir. 30 262 
— Japicida Lin. 23 9255 
— limbata Drap. 27 259 
— nemoralis Lin. 25 257 
— obvoluta Mull. 24 256 
— pisana  (id.) 31 263 
—  pulchella (id.) 25 257 
— pygmæa Drap. 24 256 
— revelata Fér. 28 260 
— rotundata Mull. 24 256 
— rupesiris Drap. 21 259 
— sericea  (id.) 28 260 
— terrestris Pent. 24 256 
— unifasciala Poir. 29 261 
— variabilis Drap. 31 263 
Introduction, 1 933 


— argillaceus Gass. 

—  gagates Drap. 

—  maximus Linn. 

— variegatus Drap. 
LIMNÉENS (Famille 4.) 
Limnæa auricularia (Hel.) Lin. 

—  glabra (Buc.) Mull. 
—  glutinosa (id.) (id.) 
—  limosa (Hel.) Lin. 
—  palustris (Buc.) Mull. 
—  peregra (id.) (id.) 
—  stagnalis (Hel.) Linn. 


—  truncatula (Buc.) Mull. 


NaAyADES (Famille 7.) 
NÉrirACÉS (Famille 6.) 


Neritina fluviatilis (Nerita) Lin. 
Paludina contecta (Cyel.) Mull. 


PÉRISTOMIENS (Famille 5.) 
Physa acuta Drap. 
—  fontinalis (Bulla) Linn. 
— hypnorum (id) (id.) 


Pisidium amnicum (Tel.) Mull. 
(Card.) 


— casertanum 
Poli. 
— Gassiesianum Dup. 


id. 
68 


GE) 6 


70 


—  Henslowianum Tell.) 


Shep. 


— intermedium Gass. 
— nitidum Jenn. 


—  obtusale (Cycl.)Lam. 


— pulchellum Jenn. 


—  pusillum (Tel.) Gmel. 


Planorbis albus Mull. 
— carinatus (id.) 
— complanatus (Helix) 
Lin. 
— corneus (Hel.) (id.) 
— contortus{id.) (id.) 


—  fontanus (id.) Light. 


— imbricatus Mull. 


69 3 


id. 
70 
id. 
69 
70 
47 
46 


id. 


18 2 


id. 
45 
47 


Z 
CS 


0 oo C2. 00 
x LONCT CC 


, DD 29 29 19 2 19 
ea 
rs co 


Plano 


rbis leucostoma Mill. 


nautileus (Turb.) Lin. 


nitidus Mull. 


spirorbis (Hel.) Lin. 


vortex  (id.) (id.) 


Pomatias. 
Préliminaires. 


Pupa 


— 
— 


avenacea (Bul.) Brug. 


cylindracea (Turbo) Dac. 


doliolum (Bul.) Brug. 
granum Drap. 
multidentata Oliv. 


muscorum (Turbo.) Lin. 


secale Drap. 


Résumé. 
Succinea Pfeifferi, Rossm. 


putris (Hel.) Lin. 


Table. 
Testacella haliotidea Drap. 


Maugei Fér. 


Ünio Deshayesii Mich. 
— littoralis Drap. 
— Requienii Mich. 


47 
45 


47 


46 
43 


( 306 ) 
46 278 


279 
277 
279 
278 
275 


4 236 


66 


271 
270 
271 


298 


65 297 


id. 


id. 


Unio sinuatus Lam. 
Valvata cristata Mull. 


minuta Drap. 
piscinalis (Ner.) Mull. 


Vertigo edentula (Pup.) Drap. 


Moulinsiana (Pup.) Dup. 
muscorum (Pup.) Drap. 


pusilla Mull. 


Vertigo pygmæa (Pup.) Drap, 
Vitrina annularis Stud. 


Zonites cellarius (Hel.) Mull. 


major. Pfr. 
semilimax Fér. père. 


crystallinus (id.) (id.) 


fulvus (id.) -(id.) id. 
hydatinus (id.) Rossm. id. 


) 

nitens (id.) Mich. 
nitidulus  (id.) Drap. 
nitidus (id.) Mull. 
olivetorum (id.) Gmel. 


striatulus (id.) Gray. 


( 307 } 


DESCRIPTION PHYSIQUE DE L'ILE DE CRÈTE. 


( Suite.) 


59 VOYAGES EN MESSARA ET DANS LES EPARKIIES DE MALEVISI ET TEMENOS. 


Voyage dans leparkhie de Kastel-Priotissa, 14 août. — La plaine de 
Messara est formée dans les environs de Dhibaki, à 50" d'altitude, par 
des terres blanches calcaires; le Hiero-Potamos est large, et, près de son 
embouchure, se trouvait le Castel-Priotissa des Vénitiens, donné par 
Boschini (1); une partie des eaux, toujours courantes, sert, à l’aide de 
dérivations sur la rive gauche, à l’arrosement de nombreux jardinages 
produisant des concombres et des pastèques qui commençaient à mürir ; 
les premiers forment, dans cette saison, un article important d’alimen- 
tation : un Crétois faisant un repas complet avec un peu de pain et un 
ou deux petits concombres pelés. 

Enavançant au S., je traversai des collines arrondies de marnes, 
de calcaires grossiers, puis de molasse, dans la partie inférieure de 
laquelle il y a de grandes huîtres, au-delà de Khamelari et de Siva. Listaro, 
plus élevé, est sur le macigno qui porte les derniers lambeaux ter- 
tiairés, près de l’église, à 230", et qui forme, avec les calcaires infé- 
rieurs, la chaîne côtière du Kophinos; les deux sommités qui sont au 
S.-E. ét au S-0 du village sont, en grande partie, de calcaires gris, 
et la dernière atteint 500. En les gravissant, entre midi et deux heures, 
par un temps clair, j’éprouvai une chaleur telle que je n’en avais pas 
encore ressentie, quoique la température fut seulement de 3% 6 ; mon 
pantalon était tout mouillé par l’eau qui dégouttait de mon gilet de 
flanelle, et la sueur ruisselait si fort sur mon front que les sourcils 
étaient impuissants à protéger mes yeux contre les atteintes si cuisantes 
du liquide salé. J’atteignis enfin les sommets, d’où j’aperçus l'espèce de 
cirque qui termine la chaîne et qui porte sur son bord O., Hodheghetria, 
le monastère Pesonesso des Vénitiens , où se récoltait, à la fin du XVIe 
siècle, le meilleur vin de l’île, au dire d’Onorio Belli; c’est à quelque 
distance, vers l’E., que se trouvait l’un des deux ports de Gortyne, 


(1) Zl Regno lullo da Candia, pl L. 
Tome XXII. 3 


CO 


( 308 ) 


Lebena, où ce médecin vit les ruines d’un édifice à colonnes de granite, 
qu’il considéra avec doute comme le temple d’'Esculape, et dont le plan 
vient d’être publié d’après ses dessins, ainsi que plusieurs autres, par 
M. Falkener (1). Du côté opposé, je vis la plaine de Messara qui 
s'étend à perte de vue vers l’E., qui est fort nue, les oliviers y étant peu 
nombreux, et dont le nom pourrait bien venir de sa position dans ou 
entre des chaînes de montagnes (mesa ori); au-delà, s'élevait comme 
une immense muraille, le massif du Psiloriti, si élevé, que Solinus en 
disait : Præler cœteros Ida est, qui ante solis ortum, solem videl ; il est 
flanqué de basses collines de macigno et de calcaire tertiaire. 

Après m'être un peu remis avec de bon lait et d’excellent miel, je 
quittai Listaro et descendis sur le macigno au bord de la plaine, en 
laissant au-dessous de moi, sur la droite, Vodia et Ahthinié. Derrière 
ce dernier village, se trouve une crète assez élevée de calcaire ancien 
blanchätre, à partir de laquelle je me dirigeai au N.-N.-E., dans la plaine 
formée par des argiles sableuses rouges, avec galets de calcaire gris. 
Le lit du ruisseau, fort large, à sec, rempli de Tamarix, était à plus 
de 100" d'altitude, J’apercevais devant moi Kasteli et Ampelousa, en- 
tourés d’oliviers. Je me rendis’au dernier lieu, où se trouve un ancien 
château vénitien et des dattiers, et j’allai loger chez les Arnaoutes; le 
ruisseau, au bas, est à 210® d’altitude. 

Visite au labyrinthe et aux ruines de Gortyne, 15 août. — Le lende- 
main matin, je partis avec un guide et quelques habitants pour le sou- 
terrain qui est situé au N.-0. d’Ampelousa et à une demi-heure au N. 
de Kasteli, dans une colline tertiaire de 500" d’altitude, à 70 seulement 
au-dessous du sommet. On monte d’abord sur des marnes grisâtres qui 
renferment un grand amas de gypse, minéral peu fréquent dans l’île; 
puis on arrive sur des bancs de calcaire grossier jaunâtre, au milieu 
desquels se trouve l’entrée. Celle-ci, que l’on n’aperçoit pas de bien loin, 
n’est pas très-grande et fait face au S., comme l’a figuré Cockerell (2). 
Je connaissais les diverses opinions émises par les voyageurs ; mais à 
peine l’avais-je atteinte, que déjà j'avais l’intime conviction qu'il ne 
s'agissait que d'anciennes carrières souterraines qui, bien longtemps 
après, sans doute, avaient été décorées du nom de labyrinthe (Lavirto). 


(1) À descriplion of theatres in Crete, p. 18. 
2) Rob. Walpole : Memoirs relating lo European and Asialic Turkey, 1. I, 
p. 402, et Magasin Pilloresque, janvier 1854, p. 16. 


( 309 ) 
Je fus fort tenté de passer outre et d'aller explorer la surface du petit 
plateau qui les recélait, car leur visite ne pouvait m’apprendre que fort 
peu de chose. Pourtant je me décidai à y pénétrer, ne voulant pas qu’il 
pût être dit qu’étant d’une opinion différente de celle de Tournefort, 
j'avais poussé la légèreté et le dédain jusqu’à ne pas vouloir passer une 
ou deux heures à examiner la valeur de la sienne. Le guide, voyant mon 
peu d'enthousiasme , comprit très-vite qu’il devait faire son métier au- 
trement qu'avec un Englèzos où des dames ; aussi, déposant dans un 
coin le paquet de ficelle qui avait dû être pour moi le fil d’Ariane, il 
alluma les grossières chandelles qu’il avait apportées et m’engagea d’un 
air fort assuré à le suivre, ce que je fis sans la moindre hésitation. Dans 
les parties élargies qui sont près de l’entrée, les chauve-souris sont 
souvent assez nombreuses pour recouvrir entièrement le plafond et le 
tapisser ainsi d’un véritable enduit vivant dont on peut détacher des 
portions avec la plus grande facilité, car la lumière rend ces animaux 
complètement immobiles ; au-dessous, 1l y a, sur bon nombre de points, 
des monceaux de 1 de hauteur d’un terreau noir formé par leurs excré- 
ments (1). Les chauves-souris sont principalement amoncelées dans les 
environs de l’entrée, mais elles circulent partout, et jen ai aperçu 
presque aux points extrêmes où je suis parvenu. Je rencontrai un des 
chiffres de Tournefort, de 1700, et, dans la grande salle terminale, un 
grand nombre d’autres signatures plus récentes , notamment celles rap- 
portées par M. Scott : il paraît que les plus anciennes ne remontent pas 
au-delà du XIV: siècle. Je trouvai parfaitement inutile d'inscrire un nom 
de plus, le mien, dans ces excavations. Adoptant entièrement l’opinion 
de Belon et de Sonnini, je ne puis résister au plaisir de citer Les passages 
dans lesquels ces deux naturalistes s'expriment si nettement (2), le pre- 
mier surtout, dans ce langage naïf du XVI® siècle : « Le Labyrinthe qui 
dure pour le iourd’huy en Crète, dit Belon, n’est pas celuy duquel les 
autheurs anciens ont faict mention; car celui qu’on monstre maintenant 
est situé aux racines de la montaigne Ida, vulgairement nommée Psilo- 
riti. Ce Labyrinthe n’est autre chose qu’vne pierrerie : et toutesfois tous 


(1) On lit dans Le Pelerin verilable de la Terre Suincle (Paris, Feburier 1615), 
que les habitants des environs les recueillaient et les portaient à Candia, où ils 
étaient employés à la fabrication de la poudre. 

(2) Les observations de plusieurs singularilés, fol. 9. Voyage en Grèce el en 
Turquie, t. I, p. 448. 


( 510 ) 


les habitants de Crète la sçauent enseigner souz ce faux nom de Laby- 
rinthe. C’estoit une quarrière de pierre dure et bien belle, que l’on 
tiroit anciennement par quartiers, du temps qu’on fabriquoit les édifices 
de la ville de Gortina et Gnosos, qui anciennement estoyent les princi- 
pales villes de toute l’isle, comme il appert par ses ruines. Il est bien 
vray qu’il y a leans plusieurs destours çà et là, de costé et d’autre, 
comme il pourroit auoir eu vn Labyrinthe artificiel ; mais cestuy ne pro- 
uient sinon de là où ont esté entaillées les pierres. Laquelle chose 
l’on peut prouuer par les vestiges et ornières des roues de charrette, et 
par les petites pierres murées çà et là au costé du chemin. » « Le laby- 
rinthe de Gortyne, dit Sonnini, n’est, suivant toute apparence, que 
d'immenses carrières, telles qu’il s’en trouve à la proximité des grandes 
villes. C’est l’opinion d’observateurs judicieux... Dans le vrai, ce laby- 
rinthe, ou plutôt ces carrières de Gortyne, n’ont rien de surprenant , et 
elles ne peuvent être comparées aux nombreuses et immenses galeries 
d’où l’on a tiré les pierres des édifices et des maisons de Paris » 

La description de ce souterrain se trouvera plus loin dans la descrip- 
tion des terrains tertiaires dans lesquels il est excavé. Je dirai seulement 
ici qu’à partir de l’entrée, les bancs calcaires plongent régulièrement de 
10° vers le N. 10° 0. ; ces excavations vont donc en s’enfonçant de plus 
en plus dans le sol à partir de l'entrée. Elles sont assez sèches dans les 
parties profondes; sur un point seulement, des infiltrations, qui tombent 
goutte à goutte du plafond dans une terrine, donnent une bonne eau dont 
la température était de 17°2. Les choses ont peu changé en 400 ans; car 
Buondelmonti disait en 1422 (1) : In viam principalem per M. C. passus 
fons cernitur juxta quem palus paroula harundinibus cooperta reperitur 
cum lapide pleno aquarum. Au bout d’une heure et demie, je sortis; je 
vis au-dessus de l’entrée un banc de calcaire grossier blanchätre, avec 
empreintes de coquilles marines; la colline est formée par d’autres cal- 
caires grossiers plus ou moins durs, et, de son sommet, on voit qu’elle 
fait partie de la terrasse tertiaire placée au devant des basses pentes du 
Psiloriti, dont elle est souvent séparée par des vallons. 

Dans l'après-midi, en longeant le pied des côteaux calcaires vers l’E., 
je fis une excursion aux ruines de Gortyne ; cette ville était au bord de 
la plaine, au débouché d’une gorge profonde, entaillée dans un massif de 


(1) Coruelius. Crela Sacra, p. 14 


( 509 

macigno gris à veines calcaires, et renfermant un gros ruisseau. Les 
ruines se composent principalement d’un amphithéâtre assez bien con- 
servé, situé au-dessous de la citadelle, sur la rive droite; d’un pont, 
de restes d’aquéduc et de divers bâtiments et surtout d’un grand temple 
dont la partie postérieure est encore assez bien conservée ; près du pont, 
des colonnes de marbre de diverses couleurs gisent sur le sol ; sur di- 
vers points aussi, il y a de nombreux débris de marbres. Le temple, d’ar- 
chitecture simple, sans colonnade, était peut-être, dit Savary, la cathé- 
drale de Saint-Titus ; il porte le nom de Haghios Joannes , et est orienté 
à l'E. 20° $., à peu près comme les mosquées ; il a évidemment servi au 
culte chrétien, car on voit à l’intérieur des restes de peintures de saints 
grecs. Les murailles sont formées par un calcaire grossier, blanchâtre, 
avec quelques grains oolithiques, dont je n’ai pas vu l’analogue au 
labyrinthe; celles qui sont exposées à l'E. présentent de beaux exemples 
de corrosions vermiculaires qui atteignent jusqu’à 0",1. de profondeur. 
Des restes d'anciennes murailles se poursuivent dans la plaine jusqu’à 
Haghious Dheka et Metropolis, dont le nom indique assez que là se trouvait 
la capitale spirituelle de l’île ; le premier rappelle les dix martyrs déca- 
pités sous Decius. Un pin Pignon et surtout des dattiers qui y sont entre- 
mêlés, contribuent à donner à la localité un faciès oriental qui me fit 
le plus grand plaisir. La planche de Tournefort (1) donne encore au- 
jourd’hui une assez bonne idée de ces ruines. Les plans de deux amphi- 
théâtres bâtis en pierre fort tendre, tirée probablement du labyrinthe, 
ont été publiés récemment par M. Falkener (2), d’après les dessins de 
Belli. | 

Arrivée de Gortyne et séjour à Megalo-Kastron, 16-20 Août. — En 
quittant Ampelousa, je repris le chemin de Gortyne, et, arrivé devant les 
ruines , je remontai la gorge profonde ouverte dans le macigno; j’arri- 
vai dans une petite plaine où se trouve le terrain tertiaire qui commence 
par des argiles grises, renfermant une immense quantité d’huitres assez 
grandes. En montant, dans le grand demi-cirque de Moulia, on traverse 
des marnes jaunâtres couronnées par des assises calcaires qui, dans 
une colline située à l'O. 35° $S. du village, atteignent jusqu’à 750" d’al- 
titude. C’est ici, sur ce point situé à peu près à égale distance des deux 
extrémités orientale et occidentale de l’île, et de ses côtes septentrivnale 


(1) Voyage au Ecvant, t I, p. 69; et Cornelius, Crela Sacra, 1. 1, p. 125. 
(2) A descriplion of theatres in Crele, p. 20. 


(312) 
el méridionale, que j'ai observé la plus grande altitude du terrain tertiaire. 
Après avoir traversé la ligne de partage des eaux, je redescendis un peu 
pour aller à Haghia-Varvara; puis tournant à l’O., je pris un autre grand 
vallon occupé par un ruisseau qui fait presque la limite entre les collines 
tertiaires à l’E., et les derniers contreforts de macigno du Psiloriti. De 
là, on voit bien toute la pente orientale du massif qui est semblable à 
une muraille et qui porte de petits arbres jusqu’au sommet. Le chemin 
prend par une crète étroite, et, après la traversée du vallon de Kerasia, 
élevé d’environ 300», il remonte devant Venerato où se trouvent de gran- 
des huîtres plissées, et où les musulmans massacrèrent, en 1821, un 
grand nombre de chrétiens par mesure d’intimidation. Je passai la nuit 
au khan de Dhaphnès, qui est sur un col. 

Le lendemain, par un vallon latéral, je rejoignis à Sale à 140® 
d'altitude, la allée de Haghio Myro, renommée dans toute l’île par la 
qualité de son vin. C’est non loin de là que se trouve Sarko: et sa grotte 
située dans un vallon à un quart-d’heure à l’O., et dans laquelle les 
habitants se réfugiaient au commencement de la révolution, pendant 
qu'ils yétaient en Novembre 1822, un corps de musulmans voulant les en 
faire sortir, l’un d’eux s’approcha trop et fut emmené dans l'mtérieur ; 
l'entrée ne pouvant être obstruée comme à Melidhoni, on inventa comme 
punition, de décapiter treize hommes du village et d'emmener provisoi- 
rement en esclavage quatre-vingt-dix femmes et enfants, tous parfaite- 
ment inoffensifs. 

Le chemin suit toujours la vallée, au milieu des marnes tertiaires, 
jusqu'à peu de distance de la côte où elle se transforme en une gorge 
profonde ouverte dans un petit îlot de calcaire crétacé; on la quitte alors 
pour monter sur un bas plateau, où l’on rejoint la route de Rhethymnon 
et où l’on a la vue représentée par Tournefort (1); après la vallée du Djio- 
firo, on monte à Megalo-Kastron, qui est sur le bord du plateau tertiaire 
lui-même, à 40" d’altitude moyenne. Depuis la ligne de partage des 
eaux, à Haghia-Varvara, la pente du fond des vallées est assez forte; 
mais comme la pente de la surface supérieure du terrain tertiaire est 
plus grande, les vallons sont, au voisinage de la côte, moins profonds 
que partout ailleurs. À mon arrivée, M. Corpi, neveu de M. Caporal, me 
reçut et m'installa dans la maison du vice-consul de France, feu Gode- 


(1) Voyage au Levant, t. 1, p. 45 et Cornelius, Crela Sacra, 1. H, p. 2: 


( 318 ) 

bout. Je mis en ordre les objets que j'avais recueillis, en attendant 
M. Hitier qui arriva le lendemain, en compagnie de Moustapha-Pacha et 
de M. Charpin jeune médecin francais, gouverneur de ses enfants et en 
particulier de Vély-Pacha son fils aîné, que j'avais vu plusieurs fois à 
Khania. Le lendemain, je fis connaissance avec M. Ittard, négociant et 
agent consulaire anglais, et le D' Idoménée, médecin grec, qui, en 
dépit de son nom, portait l’habit européen et la canne à pomme d’or. 

Megalo-Kastron, Heraklion des Hellènes actuels, Candia des Véni- 
tiens, et Rhabdh-el-Khandak des Arabes, paraît occuper l'emplacement 
de l’antique Matium. La ville considérablement agrandie et fortifiée par 
les Vénitiens a, à peu près, la forme d’un triangle rectangle dont l’hypo- 
thénuse est adossée à la mer, l’angle droit s’avançant vers le S. Elle est 
entourée de fortifications plus compliquées que celles de Khania, les 
deux côtés étant défendus par un bon nombre de demi-lunes dont la 
principale occupe l’angle méridional ; la partie orientale est surtout pro- 
tégée par le fort Haghios-Dhimitri en saillie hors de la place ; du côté de 
la mer, il n’y a pas de véritables fortifications, mais les vaisseaux ne 
peuvent en approcher. Les bouches à feu qui étaient au nombre 300, ont 
été réduites des deux tiers par Méhémet-Ali, et l’état de celles qui res- 
tent est le même qu’à Khania. Trois portes s’ouvrent sur la campagne et 
une quatrième établit la communication avec le port. A l’intérieur, la 
ville est grande, belle, les rues sont droites et bien percées, les places 
sont régulières et la principale dont M. Pashley a donné une belle litho- 
graphie (1), présente une fontaine (2) dont la statue apportée de Gortyne 
par les Vénitiens a été décapitée par les Turcs; les maisons qui ont rem- 
placé toutes celles des Vénitiens sont mieux bâties que dans les autres 
villes , et en raison du petit nombre d'habitants, beaucoup sont accom- 
pagnées de jardins dans lesquels il y a quelques palmiers ; il y a même 
des massifs d'arbres isolés, surtout dans la partie orientale qui est assez 
déserte, et présente des ruines qui n’ont pas été relevées depuis la prise, 
en 1669 (3). C’est dans cette même partie que se trouvent les murailles 
de la cathédrale de Saint-Titus , entièrement abandonnée , tandis que les 


(1) Travels tn Crele, t. 1, p. 194. 
(2) id. p. 186. 

(3) Plusieurs auteurs ont donné des vues de la ville pendant le siége. Boschini : 
Il Régno tutlo da Candiu, pl. XXIV. Candie assiégée, par Hubert Jaillot en 1669, 
Duval en 1669 et 1677, et Vischer vers la même époque. 


19 


(314) 


autres églises latines ont été converties en mosquées. On peut presque 
dire encore aujourd’hui comme Tournefort il y a un siècle et demi (1) : 
« Gandie est la carcasse d’une grande ville , bien peuplée du temps des 
Vénitiens, marchande, riche et très-forte : aujourd’hui, ce ne serait qu'un 
désert, si ce n’était le quartier du marché, où les meilleurs habitants 
se sont retirez ; tout le reste n’est que masures, depuis le dernier siège ; 
ses murailles ne laissent pas d’être bonnes et bien terrassées : c’est en- 
core l’ouvrage des Vénitiens : à peine les Tures ont-ils réparé les brèches 
du dernier siège. » Chaque maison possède un puits, mais l’eau est de 
mauvaise qualité; la ville est alimentée par deux aquéducs, dont l’un 
qui amène un fort courant d’eau de la base du Karadaghi, avait été cons- 
truit et terminé en 1627, par Francesco Morosini; il a été réparé complè- 
tement par Méhémet-Ali : ce qui a coûté environ 125,000 fr. Pendant la 
plus grande partie de la domination vénitienne, on employa l’eau de 
sources abondantes, situées à l’E., près du lazaret, au lieu dit Cazzabano; 
des porteurs d’ean la transportaient avec des bêtes de somme et la ven- 
daient dans chaque quartier. Le chiffre de la population paraît à peu 
près stationnaire depuis la conquête turque, c’est-à-dire près de deux 
siècles; la plupart des voyageurs l’évaluent à 12,000 âmes, vouées, pour 
plus des trois quarts, au culte mahométan. 


Le port, fort petit, dont MM. Scott et Pashley ont donné des vues (2), 
est en saillie sur la mer dans la partie orientale; il est formé à l'E. par 
une jetée terminée par un phare, et au N. par un môle terminé par le 
château qui commande l’entrée. Dans le fond, sur le côté méridional, se 
trouvent les dix chantiers voûtés vénitiens portant la date de 1552, et dont 
plusieurs sont écroulés , puis la haute muraille qui supporte la terrasse 
qui est de plain-pied avec la ville. Aujourd’hui, tout ce qu'Olivier avait 
vu en 14794 est encore presque exact : « Le port de Candie, dit-il (3), 
est défendu du vent de nord par des rochers sur lesquels on a bâti une 
forte jetée parallèle à la côte ; il est très-sûr, et pourrait contenir de 
trente à quarante navires marchands s’il était creusé et entretenu. Il ne 
peut en recevoir aujourd’hui que huit à dix, encore faut-il qu’ils soient 
allégés ou déchargés; car il n’y a plus que huit ou neuf pieds d’eau dans 


(4) Voyage au Levant, t. 1, p. 39. 
2) Rambles in Egypt and Candia, t. H, p. {. Travels. in Crele, tt. A, p.172. 


[= 


(5) Voyage duns l'Empire Olhoman , 1. 1, p. 307. 


(315) 
l'intérieur du port, et environ quinze à l’entrée. Les Tures, qui jouis- 
sent partout avec l’insouciance d’un locataire; les Tures, qui détériorent 
tout et ne réparent jamais rien, le laissent combler de jour en jour sans 
s'occuper des moyens de le creuser : ce qui serait cependant très-facile, 
le fond étant de sable et de vase. « Aussi, comme l’avait également vu 
Sonnini (4), «les vaisseaux marchands n’y peuvent plus entrer que sur 
leur lest ou avec le quart de leur chargement ; et s’ils doivent y prendre 
leur cargaison, il faut qu'ils aillent, de même que les vaisseaux de 
guerre , à Standié, petite île à quatre lieues et en face de Candie. Une 
gêne aussi grande a réduit à peu de chose le commerce de Candie. » Sous 
l'administration égyptienne, on avait commencé le curage et une somme 
de plus de 160,000 fr. a été dépensée; mais les travaux n’ont pas été 
poussés assez loin pour avoir une véritable efficacité. Le port ne peut 
contenir que 60 bâtiments de 100 tonneaux, et ceux-ci doivent toujours 
aller terminer leur chargement à Dhia. 

En dehors du port, les bâtiments mouillent au N.-0. en un point 
appelé par les marins fosso da Candia et d’une excellente tenue. C’est 
de là que fut prise la première vue de la ville et des environs donnée 
en 1488 par Le Huen, et reproduite plus ou moins bien par d’autres 
auteurs (2). Sur cette partie de la côte de l’île, il règne, dit M. Scott, 
un courant de l’E. favorisé par le vent de N.-E. qui domine pendant la 
plus grande partie de l’année ; il est assez fort pour qu’un bâtiment , qui 
asmanqué l’entrée du port, risque d'aller naufrager sur les rochers qui 
sont au-delà, ou soit obligé de passer un temps considérable à le re- 
monter. 

Megalo-Kastron, capitale de l’Eyalet ou pachalik, est la résidence 
effective du Moufti et du Métropolitis, chefs religieux des habitants. Elle 
est le siége d’un des trois gouverneurs ou caïmacam, et Conseils ou 
medijlis, dans les attributions desquels se trouve la peine de mort, sous 
le contrôle de la Porte; celle-ci est maintenant infligée aux Grecs 
par la pendaison ou la strangulation ; quant aux Musulmans, ils sont ou 
étranglés ou décapités , et dans le dernier cas, la peine est au plus haut 


(1) Voyage en Grèce el en Turquie, t. 1, p. 445 

(2) Le Huen : Peregrination de oullre mer en Terre Saincle; Braunio ou Bruin : 
Civilales orbis lerrarum, &. H, pl. LIT; Boschini : IL Regno lullo da Candia, 
pl. XXIIT; Jaillot : Candia de la mer, 1695; Mancsson-Mallet : Descriplion de 
l'Univers, (. IV, p. 205, et Myller : Peregrinus in Jerusalem, t. H, pl. XLHI. 


( 316 ) 
degré infamante lorsque la tête est ensuite placée entre les jambes. Les 
derviches y sont assez nombreux, ils appartiennent notamment aux hur- 
leurs et aux tourneurs. 

20 août. — J'allai seul faire une excursion en passant par les deux 
mamelons rocheux de calcaire gris qui sont au S.-E. de la ville et qui 
s'élèvent à 120%. De là, traversant plusieurs vallons dans les marnes et 
les calcaires tertiaires , j’arrivai au pied d’une haute colline formée par 
ces derniers qui renferment de nombreuses empreintes de coquilles ; 
elle est située au N. de la plaine d’Arkhanès, et de son sommet qui 
atteint 490», je descendis dans le vallon étroit et profond de 440», où 
passe l’aquéduc de la ville, avant de monter sur le Karadagh. Celui-ci 
est une crète assez étroite allongée du N. au S, à pente orientale assez 
rapide et à pente occidentale souvent en escarpements verticaux; elle 
est formée par les calcaires noirâtres qui s'élèvent à 850" et ses pentes 
inférieures portent presque partout des protubérences de calcaires ter- 
tiaires. Sa grande pyramide noire sert de point de reconnaissance, ainsi 
que Dhia, aux navigateurs qui veulent attérir à Megalo-Kastron. 

C’est le mont Jouktas célèbre par les amours et le tombeau de Jupiter. 
On trouve dans les auteurs Vénitiens que sur le côté N., il y avait une 
grotte sépulcrale , travaillée dans le roc , d’une largeur de 2», et d’une 
profondeur de 20"; l’entrée étroite portait une inscription. Aujourd’hui, 
il y a au sommet, à l’extrémité N., des restes de murailles cyclopéennes 
représentées par M. Pashley (1), qui a constaté à leur intérieur l’exis- 
tence d’une ouverture obstruée par des pierres. Le même voyageur a 
encore observé sur la pente de la montagne une galerie de 4" de diamètre 
et de 30 à 35" de profondeur, qui mène à une caverne qu’il suppose 
remplie de stalactites. 

De son sommet, on peut parfaitement apprécier la structure orogra- 
phique du grand plateau de la capitale de l’île; à V’E., celui-ci ren- 
ferme quelques vallées, des villages et des arbres, et se relève assez 
brusquement non loin de la plaine de Messara; il est limité à l’Est par les 
montagnes de Lassiti qui présentent une zône un peu boisée à une grande 
hauteur, et dont les deux cîimes sont à la limite méridionale; au S. 
s'élèvent des sommités très-séparées de la chaîne côtière de Messara 
dominée par les massifs plus élevés de Mesokhorio et du Kophinos ; dans 


(1) Travels in Crele,, L 1, p 210. 


({3418) 

l'angle S.-E., on aperçoit la mer par la vallée de l’Anapodhari. La partie 
occidentale qui va en se relevant uniformément jusqu’à Moulia , présente 
de grands vallons courant du N. au $S. et dont les ilancs renferment de 
nombreux ravins marneux à pentes rapides ; en arrière est le massif du 
Psiloriti découpé en quatre ou cinq autres dont la hauteur va en décrois- 
sant jusqu’au Strombolo derrière lequel on aperçoit le Kouloukouna ; 
Rhogdhia est un peu plus loin à moitié de la hauteur de pentes ver- 
doyantes fort élevées. Au N., on voit la plage et la mer de laquelle sor- 
tent les ilots de Dhia, Paximadhi et Aughon. Je retournai par le grand 
chemin d’Arkhanès , sur le plateau tertiaire; mais la nuit me surprit et 
à mon arrivée à Megalo-Kastron, la porte était fermée. Je me mis à frap- 
per avec mon marteau , et lorsque le factionnaire arabe s’approcha pour 
savoir la cause de ce bruit, je lui passai par dessous la porte qui joi- 
gnait fort mal, un morceau de papier sur lequel, sans y voir, j'avais 
écrit quelques mots pour prier Vély-Pacha de ne pas me laisser coucher 
à la belle étoile. Comme il avait été prévenu de mon absence par 
M. Hitier , je n’eus à attendre que le temps nécessaire pour qu’un soldat 
allât au seraï et en revint. 

Mes divers séjours à Megalo-Kastron ont toujours été si courts, que le 
temps m’a manqué complètement pour aller visiter près de Phourtetza, 
à égale distance de la ville et du Karadagh, le lieu dit Makro-Teikho, 
où se trouvent les ruines de Cnosse : celles-ci consistent en quelques 
murailles romaines en brique, en grottes naturelles et excavations sépul- 
crales sur la pente rocheuse d’une colline. Au XVI siècle, on voyait 
encore les restes d’un grand monument dont le plan a été récemment 
publié par M. Falkener (1). 

Excursion dans la partie médiane de Messara et au Kophinos, 
22-26 août. — Pendant que M. Charpin achevait de couper la mauvaise 
fièvre de Michiele, je me mis en route avec un Juif pour guide. D’Ar- 
khanès, qui est déjà à 400" d'altitude , et dont la richesse consiste dans 
des oliviers et surtout dans ses excellents vins , je m’engageai à Peza dans 
une large dépression du sol renfermant beaucoup d’oliviers et de jardins, 
et des cultures de maïs et de sorgho. Autour des grands villages de Skylous 
et de Haghio-Vasili, le sol est formé par des marnes tertiaires avec des 
calcaires par-dessus; en continuant à remonter, j'arrivai à un col large, 


(1) 4 description of (heatres in Crete, p. 24. 


( 318 ) 

atteignant près de 600", et ouvert dans les calcaires qui sont coquilliers, 
et y présentent une véritable selle, les couches plongeant d’un côté vers 
le N., et de l’autre vers le S. De l’arête, le chemin redescend vers la plaine 
de Messara, en rencontrant Skyro, où une fontaine marquait 17° ; à partir 
de ce village, je me trouvai dans un grand système de marnes et de 
molasses grises, dont on voit bien les alternances dans une multitude de 
ravins, surtout en approchant de Pyrathi. Près de ce village, ily a un 
lieu nommé Tourloté, où se trouvent, dit-on, des ruines, que je n’eus 
pas le temps d’aller voir, probablement celles de l’antique Pyranthos. 

En descendant le lendemain du village, je recueillis des huîtres et des 
astrées, provenant des molasses, dans le lit du torrent à sec; puis, je 
traversai de basses collines couvertes de fragments de macigno et de 
jaspe , ainsi que le fond de la plaine de Messara, qui est fort étroite sur 
ce point. À l’E., se trouve la colline isolée, avec les ruines du Castel- 
Belvedere des Vénitiens, représentée par Boschini, Goronelli et Dapper (1). 
Je traversai le lit à sec de l’Anapodhari, qui est à l’altitude de 230, et qui 
se rend vers l’E.; puis le sol va en s’élevant doucement vers Mesokhorio, 
où le macigno se montre en place, ainsi que sur la pente de la montagne 
qui est au $. du village, et qui est la plus élevée de cette partie de la chaîne 
côtière de Messara. Au-dessus, viennent de grandes assises de schistes 
argileux ; puis, sur une assez grande hauteur, les calcaires gris avec 
rognons siliceux, qui forment le sommet arrondi, peu rocheux, élevé 
de 1,000"; en parcourant celui-ci, je fis partir un blaireau qui s’était 
laissé tellement approcher que, si je l’avais préalablement aperçu, je lui 
aurais infailliblement asséné un coup de mon marteau. De là, on a une 
belle vue sur la chaîne plus basse qui présente beaucoup de cultures, 
et même un village intérieur ; on a devant soi, à l’O., le massif du 
Kophinos qui s'élève directement de la mer et de la plaine, et qui est 
surmonté par le grand cône calcaire de ce nom. Au N., et s'étendant au 
loin de chaque côté, est la plaine de Messara, représentée par Bos- 
chini (2), avec son sillon blanc caillouteux, elle remonte fort haut en 
formant à l'E. une vaste plaine , au-dessus de laquelle s’élèvent les mon- 
tagnes de Lassiti, dont la pente méridionale est beaucoup plus rapide 
que les autres. De Mesokhorio à la mosquée de Rotakhi, je suis passé 


(1) I Regno tutllo da Candia, pl. LI, Isolario, p. 221. Descriplion exacle des 
îles de l'Archipel, p 414. 
(2) I Rrgno Lullo da Candia, pl. XLIX, 


( 319) 
sur le macigno, au bord de la plaine qui est fort peu cultivée ; tandis 
qu’au-delà , elle paraît l’être presque partout, sans doute à cause de la 
meilleure qualité du sol qui est argilo-sableux rougeàtre , avec nombreux 
débris de macigno. 

24 août. — Je continuai à longer le pied de la chaîne en passant à 
Pyrgo, Voraki et Kharaka, où il y a des peupliers , des saules pleureurs 
et un daittier ; au-dessus, s’élève un gros rocher calcaire isolé couronné 
par les ruines d’un monastère probablement vénitien. À mesure que 
l’on avance vers l’O., jusqu’à Sternes , la plaine se rétrécit, et j’aperçus 
distinctement, sur le flanc opposé, le village de Sokara, au-devant d’un 
plateau limité à l'E. et à l’O. par des vallons, où naissent des affluents de 
lAnapodhari d’un côté, et du Hiero-Potamos de l’autre. C’est ici que se 
trouve dans la plaine le point de partage des eaux. Sternes, au bord de 
la plaine , à 360" d'altitude, est sur un sol de terrain talqueux qui s’élève 
à 150" plus haut. Par-dessus repose un immense système de macigno et 
de schistes, alternant ensemble en couches peu épaisses, et renfermant 
quelques bancs de calcaire compacte noirâtre; il se termine, au- 
dessus du village de Haghio-Nikolaos, par d'immenses assises de pou- 
dingue quartzeux et talqueux alternant avec des calcaires phylladifères, 
et formant le plateau qui a 1,100" d'altitude. Par-dessus s’élève le cône 
du Kophinos, crête escarpée , d’un accès difficile, atteignant 1,270; 
elle est dirigée, à peu près, de VE. à l'O. et formée par les calcaires 
compactes gris. Quoique fort élevée, sa végétation est celle des basses 
plaines, à l'exception de quelques espèces de la région subalpine des 
montagnes de Sphakia. J’y trouvai aussi en abondance le précieux dic- 
tame, que je n'avais encore rencontré qu’une seule fois dans une station 
bien différente, presque au bord de la mer. Du sommet, on à une vue 
magnifique sur toute la chaîne formée dans cette partie par des monta- 
gnes arrondies, non rocheuses , peu calcaires ; sa pente est très-rapide 
du côté de la mer, et vers l’O., on y aperçoit six caps et la grande 
montagne du cap Limiones. La plaine de Messara montre dans toute sa 
longueur ses deux fleuves de pierres dirigés en sens inverse. J’aperçus 
successivement le Vouvala de Melabes, le Kedros, le massif du Psiloriti, 
puis les plateaux tertiaires, avec leurs crêtes pointues de terrains plus 
anciens, qui se continuent jusqu’à Pyrathi. En redescendant, j'entrai 
pour me rafraichir à Haghio-Nikolaos, chez un habitant où l’on faisait 
de la farine ; l'orge était placé sur une large pierre, et la femme faisait 
tourner dessus une meule ronde , assez plate et rugueuse, de Om" 40 de 


( 320 ) 
diamètre : elle obtenait péniblement de la sorte une farine grossière et 
fort inégale. 

De Sternes, où j'avais été parfaitement accueilli par un paysan chré- 
tien, je traversai, le lendemain matin, la plaine, en grande partie 
cultivée, sans rencontrer le moindre lit de ruisseau; là, au point de 
partage, à 300" d'altitude, elle a environ 5 kil. de largeur. Au-dessus 
d'Asimi, je retrouvai les molasses tertiaires, et par-dessus, dans le 
vallon, à l'E. de la mosquée d’Akria, des marnes blanchâtres qui ren- 
ferment un amas gypseux de 20 à 30 d'épaisseur. Le chemin traverse, 
au milieu de calcaires grossiers , un col où il y a trois moulins à vent; 
en redescendant dans la plaine de Voréa, on retrouve les molasses et les 
marnes qui renferment des huîtres; dans le fond, de petits ravins, non 
loin du chemin, laissent voir des argiles gris-bleuâtres contenant beau- 
coup de turritelles et.d'autres coquilles fossiles à test assez bien conservé, 
que je jugeai avec raison appartenir à l’étage subapennin. En suivant la 
plaine de molasse, j’arrivai à Dhamania d'assez bonne heure. Après 
m'être installé sous des figuiers, près de la maison d’un cultivateur 
musulman, je montai sur la haute colline de talschistes qui est au N; 
elle atteint 850" et sépare cette plaine des bas plateaux tertiaires qui 
vont entourer le Karadagh et se terminer à Megalo-Kastron. J’aperçus 
beaucoup au-dessous de moi le bourg de Kani-Kasteli, et au-dessus l’an- 
cien Castel-Temenos de la prise de possession vénitienne (4). À mon 
retour, je trouvai le maître de la maison, qui avait, chose peu commune, 
pris des dispositions pour me faire passer la nuit dans sa maison : il 
avait partagé en deux la principale pièce, à l’aide d’une grande toile; 
moi et mon conducteur, nous nous installâmes du côté de la porte d’en- 
trée, lui et sa femme restèrent dans la partie profonde; il disposa lui- 
même les aliments que sa femme lui passait par-dessous la toile, et 
nous nous rangeâmes tous trois autour de la basse table crétoise sur de 
mauvaises couvertures ; en se retirant, après le souper, il nous laissa la 
lampe de rigueur. La curiosité me sollicitait bien à soulever furtivement 
le bord de la toile pour voir cet intérieur musulman; mais mon respect 
pour une hospitalité aussi confiante qu'inusitée l’emporta, joint peut-être 
bien aussi à la crainte de m'attirer quelque mauvaise affaire si j'étais 
aperçu. Je dormis profondément jusqu’au jour. 


(1) Boschini : 1! Regno lulto da Candia, pl. LIX. 


(321 )) 

En suivant, le 26 août, le pied du chaînon talqueux, à la limite des 
molasses, je passai sans m’arrêler devant le grand monastère de Haghios- 
Gheorghiou-Epanosiphes, de l’intérieur duquel M. Pashley a donné une 
vue (1); il y a de nombreux cyprès et un dattier, et, devant l’entrée, je 
vis quelques talschistes rouges et verts. Non loin, j’arrivai à un Jarge 
col tertiaire qui sépare ce chaînon primitif du massif de macigno et de 
calcaire , à l’E. duquel j'étais passé le 22. Là, débouchant à 460", je 
tournai au N., et, après plusieurs vallons excavés dans les alternances 
d’argiles et de molasses, j'arrivai aux escarpements occidentaux du 
Karadagh; à leur pied, le terrain tertiaire reprend sa nature calcaire 
ordinaire et atteint 450" d'altitude. Je rejoignis le chemin d’Arkhanès, 
à 3 kil. avant Megalo-Kastron. La pente générale du plateau est forte, 
car, un peu avant le cimetière, il est abaissé à 95®. 


Après deux journées passées à mettre en ordre mes notes et les objets 
recueillis depuis mon départ d’Arkadhi, j’allai, le 28, dîner avec M. Hitier 
et M. Caligari, futur vice-consul, chez Vély-Pacha. Le dîner à la turque, 
préparé et servi par un cuisinier français, était composé, après le potage, 
d’un assez grand nombre de plats, les uns salés et épicés, de viande et 
de légumes, les autres sucrés, de fruits ou de pâtisseries ; je les trouvai 
servis avec une alternance trop régulière, pour l'agrément d’un palais 
d'Occident; le pilav et un dessert assez varié suivirent; le vin ne man- 
quait pas, mais Vély s’en abstint. Nous avions argenterie, verres, por- 
celaine, table haute et chaises; la forme ne dût pas être différente de 
celle adoptée huit ou dix ans plus tard, lorsque Vély était ambassadeur 
en France, après avoir été pacha de la Bosnie. Il était alors âgé de vingt 
et quelques années, avait reçu une éducation soignée et parlait bien le 
français. Quoique né d’une mère chrétienne, il était ottoman dans l’âme ; 
il n’aurait pas mangé d’un plat renfermant du cochon; il n'aurait pas 
souffert que l’on fit seulement une simple allusion à sa femme en sa 
présence. Il admettait la nécessité d’adoucissements dans le régime turc 
vis-à-vis des rayas, et je ne suis pas trop disposé à croire qu'il ait commis 
le crime d’empoisonnement de l’évêque de Khania, que lui reprochent 
les correspondances d'Athènes. Quoi qu’il en soit, Stamboul vient d’or- 
donner sa destitution du pachalik de la Crète, dont il était en possession 
depuis quelques années. 


Clifravelin COrele; it 1, p.299; 


(32 ) 


Go VOYAGE A HIERAPETRA, PAR LES EPARKHIES DE PEDHIADHA, MIRABELLO 
ET LA PLAINE DE LASSITI. 


Voyage à Kastel-Pedhiadha , Malia et Kritsa, 29 août-2 septembre. 
— En suivant le chemin de Spina-Longa, on passe sur un plateau 
de calcaire tertiaire à terres rouges, des plus détestables à parcourir en 
raison des inégalités des roches en saillie; mais en allant à Vathia et 
Episkopi , on rencontre de grandes assises marneuses remplies d’Ostrea 
mavicularis et de divers autres fossiles. Au-delà , des couches calcaires 
les recouvrent, atteignent 400% d’altitude, et sont vite remplacées par 
les calcaires gris qui forment les basses montagnes avec des schistes et 
macigno sur quelques points, notamment à Apostolous. À ce village, les 
murailles des vignes sont faites avec des calcaires noirâtres qui viennent 
sans doute des collines situées au N. et qui sont pétris de plusieurs 
espèces de nummulites dont certains individus atteignent jusqu’à Ov 1 
de diamètre. Je fus transporté de joie en apercevant ces fossiles qui 
assignaient un âge certain à une partie, au moins, des calcaires gris de 
la Crète; mais ma joie ne se renouvela pas, je n’en rencontrai sur 
nul autre point de l’île. Après la plaine unie d’Apostolous et un seuil 
de quelques mètres d’élévation, je me trouvai dans la grande plaine de 
Kastel-Pedhiadha élevé de 370" et qui se rattache directement à celle de 
Messara. Le bourg, situé sur une petite éminence de quartzite, et repré- 
senté par Boschini (1), n’est plus qu'un monceau de ruines; car c’est à 
peine si un quart des habitations a été relevé : il y a cependant un assez 
beau palmier. Les Arnaoutes ayant, par exception, refusé de me rece- 
voir , j’allai coucher à la maison d'école. 

Le lendemain, le temps couvert me permit de monter fort peu vers 
la plaine de Lassiti : assez cependant pour rencontrer les talschistes. Au 
bas de Peghaïdhouri, et sans doute partout, la plaine est formée par 
une argile rougeâtre avec cailloux et graviers quartzeux ; à peu de dis- 
tance, au N., elle se termine, et je passai dans un vallon sur le contact 
des talschistes et des calcaires. Après un col, je descendis dans une 
gorge profonde où deux sources marquaient 18° 8 et 19° 3. Le petit 
ruisseau qui en naît était bordé de lauriers-roses malades, qui laissaient 
dégoutter à terre une abondante liqueur sucrée, et dont les jeunes ra- 
meaux étaient couverts d’une sorte de cochenille; un peu plus bas, 1l 


1) ZL Regno tulto da Candit, pl LVHI. 


se perd près d’un ancien pont-aquéduc ; celui-ci, bâti sur les calcaires 
inférieurs , à 190% d’altitude , est large de 2 à 3; la voûte est écroulée 
et les murs qui restent sont en pierres brutes avec des lits, de deux en 
deux mètres , soit en pierres laillées , soit quelquefois en briques ; il en 
part un canal que je vis sur une longueur de plus d’un kil., sur le flanc 
droit du vallon. Après un ravin et un chemin qui descendent de Lassiti, 
je quittai le vallon qui tourne à l’O., pour monter sur un plateau cal- 
caire. Après un petit col, je me trouvai, à 250", au bord d’un plateau 
incliné de calcaire grossier blanchâtre, tertiaire , qui porte sur son bord 
opposé les ruines de l'antique Khersonesos dont je venais de suivre 
l’aquéduc. Le plan du théâtre vient d’être donné par M. Falkener (1). 
Je descendis vers l’E., où il y a des marnes, et je rejoignis bientôt le 
chemin de Spina-Longa, à l'endroit où il est rendu abominable par 
un contrefort de calcaire gris qui atteint la mer. Peu avant Stalidha, 
commencent des calcaires grossiers très-récents, avec quelques bancs 
de poudingues, qui forment une plaine qui n’a guère qu’un kil. de 
largeur , et qui, de 4 à 5" d'altitude au bord de la mer, va atteindre 
20 à 30" au pied des pentes rapides des calcaires gris. Au khan de 
Malia , je rencontrai M. Ittard, qui faisait embarquer des caroubes ; il 
m'emmena passer la nuit au village, chez un de ses vendeurs. 

Après avoir suivi la plaine assez longtemps, je remontai une gorge 
dans les montagnes de calcaire gris, et je finis par atteindre un col élevé 
de 375%, où pour la seconde fois, je vis en Crète des moulins à vent. 
Sur seize , neuf en activité avaient leurs huit aîles garnies de nattes, en 
guise de toiles. C’est là que l’on entre dans la plaine de Mirabello, dont 
le fond est occupé par les talschistes et où la vue s’étend au loin vers 
VE. 35° $S. Le bourg principal, Kænourio-Khorio , est à 300% d'altitude; 
j'y fus bien accueilli par le dhaskalos. Après avoir traversé la plaine 
d’oliviers , presque sans caroubiers, qui est au N.-0., je montai sur 
l’Aphendi-Stavro qui atteint 850" et qui est formé par les calcaires gris. 
Dans la partie orientale de l’île, les principales sommités qui dominent 
le pays ont fréquemment leur rom précédé du mot Aphendi (maitre). 
De là, on aomine le plateau élevé, mamelonné et en partie cultivé, qui 
fait suite vers l’E. ; du côté opposé est le plateau et la psinte de Kherso- 
nesos. Au S.-E. on voit six grands villages au bord de la plaine, puis au- 


(1) À descriplion of theatres in Crete, p. 16. 
Tome XXII. 34 


( 324 ) 
dessus, le chainon calcaire qui limite celle-ci et, enfin, deux massifs 
élevés des montagnes de Lassiti; j’apercevais encore un massif conique 
près de Kritsa, l’isthme plus bas de Hierapetra , l'Aphendi-Kavousi, et 
enfin , le cap Phaneromani qui se perdait dans les brouillards. 

4 septembre. — Un col qui est près de Kænourio-Khorio, et à 20" 
plus bas, porte une trentaine de moulins, dont dix-huit étaient munis 
d'ailes comme les précédents. La pente est rapide, et assez près, au 
bas, commence une longue plaine remplie d’oliviers ; je passai sur la 
pente supérieure en voyant dix autres moulins devant Kommeriako, et, 
entrant dans les montagnes , je traversai une petite plaine , avant d’ar- 
river à celle de Phourné, où il y a beaucoup de vignes et pas un seul 
arbre. À 340" d’altitude, je vis en Crète, pour la première fois, des 
cultures de coton herbacé qui n’atteint que 0® 30° de hauteur. En passant 
dans plusieurs vallons calcaires , j’aperçus encore deux ou trois groupes 
de moulins, et j’arrivai enfin, à 430%, à un col, à l'E. duquel le vallon 
se transforme en un défilé à pic et d’où l’on découvre l’ilot de Spina- 
Longa, la presqu’ile beaucoup plus élevée, verdoyante, qui forme la 
baie, et le cap Haghios-Joannes , qui est assez élevé , escarpé dans les 
parties supérieures, avec des talus d’éboulements qui se terminent à la 
mer par une plaine inclinée; de l’autre côté du golfe de Mirabello, 
j'aperçus la presqu'’ile de Sitia, qui paraît très-escarpée et dominée par 
l’Aphendi-Kavousi. Au-dessus de Psyra, il ÿ a des taches blanches gyp- 
seuses, et le cap Phaneromani paraît également blanchâtre. Quant au 
cap Sidhero, il est bas, ainsi que les Dhionysiadhes. 

ilot de Spina-Longa, tout rocheux, plat et bas, est entièrement 
occupé par la forteresse qui possède une quarantaine de bouches à feu, 
et n’est alimentée que par des citernes ; la baie, dont l’entrée est sujette à 
de soudaines bourrasques , forme un bon port à l’abri de tous les vents, 
mais dont la profondeur n’est pas très-grande, surtout dans la moitié 
septentrionale que l’on rencontre la première. 

De la plage où j'étais descendu, je remontai, en admirant la beauté de 
la baie, pendant une heure sur les talcaires gris qui renferment de 
fréquents lits et nodules de silex à aiguiser. Le cirque de Spinès, qui 
renferme deux grands puits, est plus bas et séparé, par une crète de 20" 
d’élévation, de la vallée par laquelle, dans un chemin affreux, on des- 
cend à Aloudha situé sur une petite éminence dans la plaine. Ce ne fut 
qu'après beaucoup d’instances que je parvins à y trouver un gîte et des 
provisions chez un habitant. 


( 325) 

Le lendemain matin, j’allai voir les exploitations de silex à aiguiser 
qui donnent la renommée pierre du Levant ; elles sont sur le flanc 
oriental d’une montagne située au S. du village, présentant des talus 
d’éboulements rapides couronnés par des escarpements verticaux, au pied 
desquels se trouvent çà et là les excavations sur une grande longueur et 
à des hauteurs différentes, ce qui indique plusieurs groupes de couches 
exploitables. La roche est un calcaire noirâtre à grains très-fins ou la- 
mellaire, à odeur sulfureuse, dans laquelle se trouvent des lits d’une 
grande continuité, de 0® 15 d'épaisseur, d’une sorte de silex terreux 
blanchâtre, tantôt un peu friable et tantôt assez solide; les couches 
plongent d'environ 10° au N.-E. Au sommet se trouvent, suivant les 
voyageurs, 29 à 90 citernes dont la construction pourrait remonter au 
Bas-Empire. 

En prenant le chemin de Kritsa, je passai dans la plaine des salines, 
près de la partie basse sableuse qui rattache la presqu'île à la côte ; puis 
je montai dans une petite plaine, avec une ferme ou metokhi, dominée 
par de grands escarpements calcaires à couches peu inclinées , et d’où 
l’on voit bien l’Aphendi-Kavousi, l’isthme de Hierapetra , bombé dans 
son milieu, les montagnes de Lassiti qui y descendent uniformément ; 
au-devant d'elles se trouve un pays de basses collines , rendu verdoyant 
par les pistachiers, et traversé par le Mirabello-Potamos, qui atteint 
la mer au S. du port de Haghio-Nikolaos , le meilleur de l’île après celui 
de Soudha, il est fort éloigné de tout village, mais il y a quatre chapelles 
en ruines, qui servent de magasins pour les caroubes avant leur embar- 
quement. Après le ruisseau, qui présente des poudingues d’alluvion sur 
ses bords, j’arrivai dans un petit bassin tertiaire , renfermant une colline 
élevée d'environ 60" au-dessus de la mer et surmontée par le metokhi 
d’Anestazana. La presqu'île qui porta successivement des constructions 
antiques, puis le Castel-Mirabello des Vénitiens, est formée sans doute, 
ainsi que l’ilot blanchâtre de Haghio-Nikolaos , qui concourt à former le 
port, par les calcaires marneux plus ou moins durs. Les calcaires com- 
pactes et bréchoïdes, gris ou noirâtres, présentant de belles corrosions 
pluviales superficielles, forment ensuite le massif que l’on contourne 
pour atteindre la plaine de Kritsa; celle-ci qui est assez accidentée, 
présente des poudingues tertiares, des molasses verdâtres et des argi- 
les qui rendent le sol assez glissant par la pluie; celle assez forte que 
j'éprouvai et qui me retarda de quelques heures, tomba aussi dans la 
haute plaine de Lassiti, mais elle ne se propagea pas à Hierapetra, sur 


( 390 } 
le versant méridional de l’île, comme j'eus occasion de le vérifier 
quelques jours plus tard. 

Kritsa est un gros bourg situé au fond de la plaine , au pied de grands 
escarpements de calcaires gris que l’on croirait prêts à l’ensevelir sous 
leurs débris ; il est à 300" environ d’altitude sur les calschistes rouges 
qui accompagnent toujours le macigno et qui occasionnent, un peu au- 
dessus, une source très-abondante qui marquait 16° 8. La partie basse 
est, ainsi que les restes informes des beaux jardins des Vénitiens , portée 
par des diorites en décomposition qui forment une partie de la plaine; 
celle-ci est occupée par des oliviers, et les caroubiers sont bien loin 
d'y être aussi nombreux que dans tout le pays que je venais de parcourir 
depuis Megalo-Kastron. Je fus bien accueilli par un cultivateur, Stavraki 
Pangholos , chez lequel je mangeai pour la première fois le bamia, fruit 
de l’Hibisceus esculentus, charnu dans sa jeunesse et d’un goût que je ne 
trouvai pas désagréable ; les Crétois le font cuire avec du mouton et en 
font uné très-grande consommation en automne. 

Excursion dans la plaine de Lassiti, 3-9 septembre. — En montant 
au-dessus de la fontaine, j’eus une belle vue sur la plaine qui est ouverte 
à l'E. 20° $., ce qui permet de voir la mer en deux endroits et l’Aphendi- 
Kavousi. Par une gorge entamée dans les escarpements calcaires, j’at- 
teignis un petit plateau de terres argileuses très-rouges, d’où l’on voit 
toutes les sinuosités du golfe de Mirabello, et, au nord, un chaïnon tout 
couvert d'arbres, qui se rattache à une sommité dénudée, et qui est limité 
au Sud par la vallée de Potamiès. En m’élevant davantage, je rencontrai 
successivement des schistes noirâtres, des calcaires gris, des brèches cal- 
caires très-développées sur les pentes douces, et enfin des calcaires gre- 
nus blanchâtres dans la région des chênes épineux; c’est là que se 
trouve à 1,250" d'altitude, une très-petite plaine de macigno et de schistes, 
dominée par des montagnes calcaires. C’est le col par lequel on pénètre 
dans une première plaine de 1 kil. de largeur, sur 3 à 4 de longueur, le 
Katharo, qui est à environ 200" au-dessous de la zone boisée des mon- 
tagnes qui la limitent au sud ; sa surface formée par les schistes d’abord 
et par le macigno ensuite, est assez fortement inclinée vers l'Ouest; 
elle présente dans le centre plusieurs vallons ouverts dans des sables 
argileux, brunâtres, dans lesquels les paysans ont trouvé des débris 
d’un petit hippopotame, qui me furent vendus à Kritsa. Sur plusieurs 
points du pourtour, il y a des groupes de petites fermes habitées seule- 
ment dans la saison des cultures par les habitants de Kritsa, qui en sont 


(1321 :) 

les possesseurs; à l’une des premières et près d’une chapelle neuve, une 
source marquait 15°2. Je remontai sur les basses pentes du Selena, au 
nord de la profonde crevasse par laquelle les eaux du Katharo viennent 
déboucher dans la plaine proprement dite de Lassiti el, par un chemin 
des plus raboteux, j’arrivai au haut de la grande descente rapide, de 300" 
d’élévation, par laquelle, sur des calcaires compactes gris, on arrive 
dans la plaine. De ce point élevé, celle-ci entièrement cultivée apparaît 
comme un lac, mais avec une traînée blanche qui se rapproche davan- 
tage de la rive septentrionale et qui n’est autre que le lit à sec d’un tor- 
rent d'hiver; au tiers apparent de la longueur, s’élève en forme W’ile, 
la colline calcaire du monastère de la Panaghia-Kristallenia, entouré 
d’yeuses , d’érables et de lierre ; je n’y fus pas trop mal accueilli, malgré 
lextrème pauvreté ou plutôt l’avarice de l’heghoumenos et de quelques 
vieilles femmes, ses ménagères. 

Le sol uni de la plaine a 8 à 10 kil. de longueur, de V'E.-S.-E,. à PO. 
N.-0. kil. sur 4 à 5 de largeur moyenne; son altitude un peu inférieure à 
900%, au point d'arrivée du torrent du Katharo, est de 40" moins 
élevée à l'extrémité opposée, où le ruisseau se perd dans le sol et où se 
trouve la seconde entrée principale. Un seul village Haghio-Kostantinos 
se trouve dans l’intérieur, au pied méridional de la colline de la Pana- 
ghia; tous les autres, au nombre de 17, sont sur les bords au pied des 
basses pentes des montagnes, tant au nord qu’au sud. En amont de la 
colline , les terres formées par un sable grossier, argileux, produisent 
principalement de l’orge d'excellente qualité; en aval, les terres plus 
argileuses , sont coupées de grands fossés et produisent surtout du fro- 
ment. Autour des villages, il y a des vignes qui donnent un vin peu 
alcoolique; « c’est, dit Tournefort (1), le voisinage de cette neige qui rend 
si plat le vin de Plati; le raisin n’y meurit presque jamais, et le vin 
qu'on nous présenta nous parut du vin de Brie. » Les müriers, les pru- 
mers , les poiriers, sont fréquents et ces derniers fournissent des fruits 
à toute l’ile et même pour Alexandrie. Les caroubiers s’y trouvent encore, 
mais les oliviers font complètement défaut par suite de la rigueur du 
climat. 

« La plaine est, dit M. Fabreguettes (2), toute entourée de montagnes 
qui ne permettent pas aux eaux du ciel de s’écouler ; aussi à la suite des 


(1) Voyage au Levant, T. I. p. 46. 
(2) Bull. de la Soc. de géogr. 2 série. T. IE. p. 120-122 


——————————— ————— —— 


—— 


( 328 ) 

grandes pluies d'automne offre-t-elle l’aspect d’un étang, et ce n’est que 
par des gouffres situés vers la partie Nord que, les eaux se perdent lente- 
ment. (En Morée, le lac Stymphali, aujourd’hui Zaraca, a été une plaine 
semblable à celle de Lassiti et dont les trous, qui servaient à l’écoulement 
des eaux, se sont comblés : la plaine de Lassiti pourrait bien, un jour, 
être changée en lac par le même motif, quoique les habitants aient grand 
soin de nettoyer les trous). L’inondation périodique de la plaine n’est 
pas le seul inconvénient que les habitants éprouvent : tous les ans, aux 
pluies succèdent les neiges, et dès Le mois de novembre jusqu’au milieu 
de janvier, les villageois sont enfermés dans leurs demeures , ne vivant 
que, des! provisions qu’ils ont pu faire et n’ayant pour boisson que de la 
neige fondue. Ils envoient ordinairement leurs moutons dans les plaines 
des environs de Candie et ils ne gardent que les bœufs et les ânes. L’hi- 
ver se prolonge-t-il ?.. ils perdent souvent ces animaux faute d’avoir pu 
les nourrir. Une cause qui ajoute au malheur des habitants de Lassiti, est 
l’aridité des montagnes qui entourent leur canton ; elles ne produisent 
point de bois. La neige isolant pendant l’hiver les villages les uns des 
autres , et souvent dans les villages les maisons entr’elles, chaque village 
a une ou plusieurs chapelles; on m'a donné la note de quarante-deux 
de ces petits temples ayant chacun son papa, ce qui, avec deux pau- 
vres caloyers , porte à quarante-quatre le nombre des prêtres de ce can- 
ton pour deux mille habitants environ. » On peut encore ajouter qu’en 
été, le sol s’assèche tellement que les puits et les citernes tarissent entiè- 
rement comme pendant le court séjour que j'y fis. » 

Le lendemain prenant un grand chemin qui conduit dans la vallée de 
Mirabello, je montai sur les calcaires compactes ou grenus grisâtres , au 
coi plus élevé de 200" qui porte 23 moulins presque tous en activité, et 
qui sépare la plaine de la vallée de Potamiés; celle-ci est entièrement 
ouverte dans des talschistes verdàtres , renfermant de grands bancs de 
calcaire grenu talcifère; dans le fond, au-dessous du village qui est 
perdu dans les oliviers, 1l y a, à 950 d'altitude, une source qui marquait 
4193; à 100 au-dessus en montant sur le Tsileno , on voit les talschis- 
tes remplacés subitement par des calcaires compactes et grenus de cou- 
leur rose, en très-grandes assises. Le sommet qui atteint 1,600 est 
formé par des calcaires grenus gris très-fragiles qui plongent de 400 au 
S. 15° O. et sur lesquels on trouve les Berberis cretica, Helichrysum 
Mmicrophyllum, et d’autres plantes subalpines ; j’y jouis d’une vue magni- 
fique au $., sur la plaine de Lassiti et les hautes montagnes qui la limi- 


( 329) 
tent de ce côté, telle que l’a donnée Boschini (1); du côté opposé s’aper- 
çoivent la vallée de Potamiès et les chaînons qui la séparent de celle 
de Mirabello, puis le bas plateau montagneux, situé entre la plaine 
côtière de Malia etla plaine de Kastel-Pedhiadha , et dans lequel se trou- 
vent les petites plaines de Krasi et de Mokho et la vallée de l’Aposelemi. 
L'ile Dhia apparaissait bien aussi avec ses cinq caps méridionaux. 

o septembre. — Pour abréger un peu les fatigues de l’excursion aux 
hautes cimes méridionales, j’allai coucher la veille au soir chez le Xape- 
tania de Haghios-Gheorghiou où les argiles de la plaine sont employées 
à faire de grandes jarres. Aussi, dès quatre heures étais-je en route avec 
Michiele et un guide; l'air était alors à 95 ; je traversai un côteau de 
calcaire gris, et j’arrivai dans la plaine de Limnokharo inclinée au N.-E. 
et au milieu de laquelle se trouve, à l’altitude de 1,130, une petite cha- 
pelle et une source qui marquait 12°8. Nous dirigeant obliquement vers 
le grand mur vertical du Spathi qui la limite à l’E., nous montâmes sur 
des sables grossiers d’abord , puis sur des cailloux avec des poudingues 
et enfin sur une grande pente pierreuse qui remonte fort haut dans un 
vallon. J’arrivai sur une petite terrasse de calcaire gris, et de là, par une 
longue ascension plus où moins pénible sur les mêmes roches, j'attei- 
gnis enfin. le col qui sépare le Spathi de la plus haute sommité des mon- 
tagnes de Lassiti. Celui-ci est formé par le macigno qui occasionne, un 
peu au-dessous, à environ 1,800" d'altitude, une petite source dont 
l’eau qui ne coulait pas, était à 10°. L’Aphendi-Khristo qui atteint près de 
2,200 est formé par des calcaires compactes grisätres ordinairement très- 
fragiles. Il faut d’abord passer sur une crête très-étroite et très-acciden- 
tée, limitée à l'O. par un immense ravin à pic, de 500® de profondeur 
au moins; un des affluents de l’Anapodhari y prend naissance et nous y 
aperçûmes un bouquetin : ces animaux étant, à ce qu'il paraît, plus 
nombreux dans ces montagnes que dans celles de Sphakia. Le sommet 
auquel je parvins non sans peine à 9 heures, est un mamelon dans 
lequel les calcaires gris plongent de 45° au S.-0. Le ciel était clair et un 
vent léger du N.-0. marquait 15° 2; la vue planait au N. sur la plaine de 
Lassiti, dont les larges rigoles de dessèchement s’apercevaient très- 
distinctement, et sur sa ceinture montagneuse abaissée vers Potamiès et 
au N.-0. Au S. est un contrefort calcaire presque aussi élevé , le Psari, 
dont la pente rapide, découpée par des vallons assez profonds, habités, 


(1) I Regno lullo da Candia, pl. LVIN. 


( 330 ) 
parait tomber directement dans la mer sansplaine intermédiaire, à 
l'exception de celle de Viano. J’aperçus distinctement, dans la plaine 
maritime qui est au S. de l’isthme montagneux de Hierapetra, une tache 
blanche que je sus une semaine après, être le port comblé et couvert 
d’efflorescences salines, de l'antique Hierapytna. Dans la presqu'île de 
Sitia, les montagnes , à partir de l’Aphendi-Kavousi , vont en s’abaissant 
vers le cap Sidhero, d’une part, et vers le cap Kalonoros de l’autre. Les 
deux Ghaïdhouronisi paraissent entièrement plates et les Kouphonisi assez : 
peu élevées. Vers l’O., je dominais la vallée de l’Anapodhari et sa plaine 
qui fait partie de celle de Messara, limitée au Sud par la chaîne du Kophi- 
nos , et par derrière, le plateau de Megalo-Kastron duquel sortent sur- 
tout le Karadagh et les deux mamelons de Dhamania. L’horizon était 
limitée par le massif conique du Psiloriti qui a l'air de s’étendre du cap 
Akhino (la Fraschia) au cap Kephala et des bords duquel sortent, d’un 
côté , le Kouloukouna et de l’autre, le Vouvala. Dhia et Aughon s’aper- 
cevaient aussi fort bien. À 6 heures du soir, j'étais de retour au monas- 
tère, le ciel était couvert de gros nuages et le thermomètre accusait 19°. 

Le lendemain, je partis par un brouillard très-épais pour visiter 
l’Aphendi-Sarakeno, situé à l'angle S.-0. de la plaine; je longeai d’abord 
celle-ci qui ne présente de pierres que près du lit du ruisseau et, en 
allant à Gherodomouri, je rencontrai une source abondante à 13°8, occa- 
sionnée par des talschistes noirâtres à filons de quartz. Je remontai un 
vallon, au milieu de calcaires souvent phylladifères , jusqu’à un col 
formé par le macigno. Le cône terminal qui atteint 1,500" est formé 
par des calcaires grenus gris, cellulaires ; les nuages s’étaient dissipés et 
j'eus une vue superbe jusque sur la plaine du Katharo, sur les plaines 
de l’Anapodhari et de Messara, et sur le plateau de Megalo-Kastron, dont 
la partie N.-E, renferme les petites plaines de Mathia, Xydha, Mokho, 
etc. Je descendis au gouffre où se perd le ruisseau dela plaine, et, de là, 
je revins en droite ligne au monastère en 1 h.20 m.; comme je ne m’ar- 
rêlai pas, on peut admeitre une distance de 8 kilomètres. 

La matinée du lendemain ayant été fort pluvieuse, je rédigeai mes 
notes de voyage. Dans l'après-midi, je visitai la petite plaine de Nisimo, 
située en-dessus de Dermiadho à environ 100" au-dessus de celle de 
Lassiti, mais séparée par un seuil de 3 à 4" seulement; puis j'allai voir 
en détail le gouffre ou khonos. Celui-ci est situé au pied d’escarpements 
calcaires dans l’angle S.-0. d’une petite plaine communiquant large- 
ment avec celle de Lassiti; c’est une large excavation d'environ 10" de 


( 331 ) 

profondeur, dans une argile sableuse brunâtre, offrant plusieurs trous 
remplis de terre et de blocs calcaires par lesquels se perd lentement, 
pendant l’hiver et le printemps, la partie des eaux pluviales qui n’est ni 
absorbée par le sol ni reportée dans l'air par l’évaporation, et qui vient 
alors s’accumuler dans la partie occidentale de la plaine. Les habitants 
croient qu’elles vont former au-dessus d’Avdhou, et à 2 ou 3 kil. au des- 
sous de Kastamonitza, les grandes sources qui en hiver alimentent l’Apo- 
selemi. Dans l’angle N.-0. de la petite plaine, il y a au milieu des rochers, 
un défilé conduisant à une autre plaine de moins d’un kilomètre de lon- 
gueur. En remontant encore pendant 1/4 d'heure, le chemin conduit au 
col, formé par des calcaires grenus gris, qui fait la ligne de partage des 
eaux de Kastel-Pedhiadha; celui-ci n’atteint pas 1,000" et se trouve à 
peine à 150 au-dessus du khonos; la pluie et surtout le brouillard 
étaient si épais, que je ne pus avoir la certitude absolue que le point où 
je me trouvais était véritablement le plus bas. Il paraît que, de là, on 
arrive en une heure et demie aux ruines de Lyttus et en une demi-heure 
de plus, à Kastamonitza , situés dans les basses montagnes, à l’O.-N.-0. 
M. Falkener (1) a publié, d’après le mémoire de Belli, deux inscrip- 
tions et le plan du théâtre de Lyttus. 

La journée du lendemain fut si pluvieuse que je ne nus partir pour 
retourner à Kritsa; malgré la mauvaise humeur de l’heghoumenos 
qui craignait sans doute que je ne l’indemnisasse pas suffisamment, je 
ne regrettai pas mon séjour au monastère; car en profitant d’une éclair- 
cie pour faire une promenade sur la colline, je découvris, à ma grande 
satisfaction , dans les murailles qui descendent à Haghio-Kostantinos, 
des calcaires compactes noirâtres, fétides, qui renfermaient des Rudistes 
en saillie par suite des corrosions atmosphériques. Ces roches que je re- 
trouvai en place au sommet, où elles plongent de 60° au N. 30° E., éta- 
blissent de la manière la plus péremptoire que si une partie des calcai- 
res gris de la Crète, par les Nummulites d’Apostolous, se rattachent au 
terrain éocène, une autre, par les Rudistes, probablement la plus consi- 
dérable , dépend du terrain crétacé. 

9 septembre. — Le temps s'étant remis, je repris à 7 h. du matin le 
chemin de Kritsa. La sécheresse du printemps et de l’été avait été si grande 
et l’eau, par suite, était si rare dans les environs du couvent, que je ne pus 
en obtenir, même à prix d'argent, pour les mules, avant le départ; aussi 


—__ ———. ————]———_—————————— A 


(1) 4 description of (healres in Crele, p. 18 et 19. 


( 332 ) 

les pauvres bêtes, peu rafraichies par l’orge qu’elles venaient de manger, 
ne voulurent-elles pas quitter, après l’avoir flairé, l’orifice d’une citerne 
presque à sec, devant laquelle nous passämes à Mesa-Lassiti. Heureuse- 
ment, je trouvai un paysan muni d'un pot et d’une corde, qui voulut bien, 
moyennant une piastre, tirer quelque peu d’une eau bourheuse et fétide 
qui étancha tant bien que mal la soif des animaux. L’un d’eux, moins 
satisfait sans doute, celui qui avait déjà fait une fugue au mois de mai 
en Selino, profitant d’un instant de surveillance moins active, au moment 
où nous allions quitter la plaine, se retourna et prit sa course vers le 
monastère où Michiele le rattrapa seulement. 

Nous pûmes enfin gravir la pente et atteindre la plaine du Katharo ; 
arrivé à la chapelle, j’allai reconnaître un col que j’apercevais au Sud. 
La plaine, dans son tiers supérieur est formée par le macigno qui est 
assez développé; mais dans un petit vallon, il y avait une grande tache 
d’un vert bleuâtre que je trouvai occasionnée par des serpentines. Une 
question importante se présentait là : ces roches étaient-elles postérieu- 
res au macigno, comme le veulent la plupart des géologues, ou anté- 
rieures comme le croit M. Cordier ? je la résolus immédiatement dans 
ce dernier sens, car je trouvai d’abord , un beau caillou de serpentine 
dans le macigno et ensuite un second plus petit enclavé dans les calcaires 
compactes grisâtres. Le col dont l’altitude dépasse 1,100" est situé dans 
la zône des yeuses et des pins d'Alep qui couvrent les collines voisines ; on 
y a une belle vue sur la vallée de Myrto qui descend droit à la mer, au 
S. un peu E., et sur le haut vallon, boisé dans la partie inférieure de 
ses pentes, qui remonte à l'Ouest entré le Lazaro et le Psari. C’est près 
de là sans doute, que se trouvent le metokhi d’Angladhès et la montagne 
de Skylo-Syrli, couverte de beaux pins, sur le chemin qui conduit à 
Kalamavka et Hierapetra. Mes observations terminées, je redescendis à 
Kritsa où je fus de nouveau bien accueilli par mon hôte précédent. 

Voyage de Kritsa à Hierapetra, 10-12 septembre.— En quittant Kritsa 
je pris au N.-E. à travers la plaine et j’arrivai au bas des grands escar- 
pements calcaires du Thilaka ; le sommet qui atteint 560% est formé par 
des poudingues calcaires semblables à ceux que j'avais rencontrés en 
montant au Katharo ; les pentes ainsi que les basses montagnes qui sy 
rattachent, sont couvertes de petits pistachiers. On y a une fort belle vue 
sur tout le golfe de Mirabello, et sur deux plaines intérieures qui commu- 
niquent par des défilés avec la vallée de Mirabello. C’est au passage de la 
plaine de Kritsa, dans la plus rapprochée de celles-ci, que se trouvent 


(333) 


les belles ruines, considérées par M. Fabreguettes comme l’acropole de 
Lyctium et par d’autres comme Olerus 

En retournant à la chapelle, qui est à l’entrée de la plaine, je retrouvai 
dans le fond , le macigno et les diorites vert-noirâtres en décomposition; 
un peu avant le ruisseau, ces derniers enclavent une petite colline de 
calcaire lamellaire blanc qui pourrait, je crois, donner un assez beau 
marbre; un peu plus loin, ils renferment de petites veines feldspathi- 
ques blanchâtres et, près d’une ferme, une sorte de granite qui y forme 
sans doute un grand filon. Ce fut la seule fois que j'aperçus, en Crète, 
des roches de cette nature. En sortant de la plaine , le chemin passe sur 
des plateaux de poudingues calcaires très-durs , tandis que le ruisseau 
s'enfonce dans des gorges étroites qui s’élargissent seulement au voisi- 
nage de la vallée de Kalokhorio qui est ouverte dans des molasses grisà- 
tres. Du moulin d’Istronas où le Kalopotamos assez gros renferme une 
très-grande quantité de mélanopsides , j’allai loger chez le boulakbakhi 
de Kalokhorio; je n’eus pas le temps de vérifier si, comme en 1422 , les 
eaux sortent toujours en très-grande abondance d’une caverne; dans les 
jardins de ce village, se trouvent des colonnes qui ont appartenu à un 
petit temple. 

Des alternances de poudingues et de calcaires compactes jaunâtres, qui 
plongent de 30° au N. 35° E., portent le village et se montrent au-dessus 
dans le chemin rapide qui conduit à Meseleros, au milieu des pislachiers, 
et des genévriers. On arrive dans une petite plaine qui renferme des 
tragments de grandes huîtres , et de suite , au col, élevé d'environ 500" 
d’où l’on voit les deux mers, mais non Hierapetra, masqué par les mon- 
tagnes ; on y passe sur des alternances de calcaires compactes et gros- 
siers, et de poudingues calcaires. Meseleros plus bas est sur des bancs 
puissants de calcaire compacte et, dans le vallon, il y a une source à 18°. 
Je quittai le grand chemin et, remontant le vallon, je passai devant le 
monastère Vriosmeni entièrement abandonné ; le terrain tertiaire formé 
de marnes, de calcaires et de poudingues , en puissants banes inclinés de 
15° au N. 10° O., atteint 550% d’altitude, mais la partie centrale et la plus 
élevée de l’isthme, est une crête rocheuse déchiquetée, de calcaire com- 
pacte et de poudingues gris très-durs, qui atteint 200% de plus. À midi, 
le vent du N. y soufflait avec une telle furie que j’eus beaucoup de peine 
à observer mon baromètre, et qu'en me retournant entre deux rochers je 
faillis être emporté et perdis divers objets légers qui étaient dans mes 
poches; la température était de 18°2, 


( 334 ) 

La vue est fort belle tant sur l’isthme lui-même, le golfe de Mirabello 
et la baie de Hierapetra, que sur les montagnes de Lassiti à l'Ouest, et 
la grande muraille calcaire qui s’étend à l'Est, de l’île de Psyra jusqu’au 
cap Peristera, et par-dessus laquelle s’élève la masse conique de l’Aphendi 
Kavousi. Je repris le grand chemin et laissant à droite et à gauche de 
grands escarpements de calcaires anciens ; je descendis sur des marnes, 
des molasses et des poudingues qui reposent sur de puissantes marnes 
blanchâtres et des calcaires grossiers avec peignes ; j’atteignis enfin, à 75" 
d'altitude, le bord de la plaine de Hierapetra. A la ville, je fus bien reçu 
par le kapetania Perakakhi pour lequel j'avais une lettre de recomman- 
dation d’un négociant de Megalo-Kastron , M. Morari. Nous étions en 
temps de Ramadan; au coucher du soleil, un coup de canon avertit les 
fidèles que le jeûne de la journée avait pris fin; les maisons s’illuminè- 
rent, et chacun se mit à table. Le mois du carême musulman est celui 
où les sectateurs de cette religion festinent et s’amusent le plus au jeu; 
car, plus ou moins endormis pendant le jour, ils veillent la plus grande 
partie de la nuit. Comme j’habitais le quartier grec je pus dormir, la 
fatigue aidant. 

La plaine de 2 kil. de largeur, que je visitai le lendemain, s’étend 
beaucoup vers l'O. en s’abaissant doucement à la côte, elle est formée 
par des sables caïllouteux qui deviennent beaucoup plus fins, brunâtres 
et s'élèvent en petites dunes au bord de la mer, où il se forme des bancs 
irréguliers de poudingues gris-verdâtre. L’antique Hierapytna, située à 
l'O. de la ville moderne et beaucoup plus étendue, est recouverte par 
les sables, et en partie occupée par des champs entourés de murailles ; 
j'y vis de nombreux réservoirs d’eau et citernes, beaucoup de colonnes 
de cipolin, de syénite , etc., et de grands blocs de marbre blanc portant 
encore des lettres sculptées de grande dimension, et qui avaient appar- 
tenu sans doute à l’un des deux théâtres dont les plans ont été donnés 
par M. Falkener (1). Son port fermé par de basses dunes, et en partie 
comblé, ne présente plus qu’une grande dépression desséchée et blan- 
chie en été par des incrustations salines. Au commencement du XVI: 
siècle, on voyait encore au-dessous de l’eau (2), les quais, en grandes 
pierres, de trois bassins communiquant l’un dans l’autre et dont l’en- 
trée était défendue par une chaîne. 


(1) À description of theatres in Crele, p. 12. Dans cet opuscule se trouvent aussi 
deux inscriptions découvertes dans les mêmes ruines, p. 12 et 15. 
(2) Falkener, The Museum of classical antiquilies, Vol. IL. p. 272. 


( 359 ) 

La ville nouvelle qui avait été ruinée par un grand tremblement 
dé terre en 1508, est bâtie sur les sables qui ferment cet ancien 
port ; elle est entourée d’une muraille crénelée, entretenue comme 
toujours en parfait état. de blancheur. Près de la porte d'entrée s’élè- 
vent deux palmiers; les fenêtres des maisons tant musulmanes que 
chrétiennes , sont seulement pourvues de treillages en bois et de volets, 
en raison de la douceur de l’hiver. En saillie, au bord de la mer, s’élève 
le château assez petit, occupé par une garnison arabe; il en part une 
jetée en pierre formant , vers l’E., une sorte de port qui est à peine 
abrité des vagues et qui s’ensable journellement. De là, on n’aperçoit 
que la petite Ghaïdhouronisi et le mamelon oriental de la grande; le 
reste, trop bàs pour être aperçu , était encore occupé cinq ou six ans 
auparavant par des salines. La ville est dans le même état qu’en 1675, 
lorsque six années après la prise de Candia, M. Crevellier, débarqué à 
Spina-Longa avec 500 hommes, s’en empara par surprise, espérant 
ainsi commencer la reprise de l’île sur les Turcs. 


7° VOYAGE DANS L’EPARKHIE DE SITIA. 


Ascension de l’Aphendi-Kavousi, 13 septembre. — Pour pouvoir faire 
cette ascension en une journée, j'étais venu coucher la veille à Episkopi, 
à deux heures de distance, au N.-0. Du village, j’arrivai vite sur les 
calcaires compactes et plus haut, par suite de l’inclinaison des assises 
vers le S., sur les calchistes et les phyllades qui occasionnent à 430" 
d'altitude , une source à 15°5; je pénétrai de là dans un vallon inté- 
rieur dont les eaux s’écoulaient au-dessous de moi au fond d’une gorge 
à pic qui débouche par une véritable fente dans la vallée de Vasiliki; les 
phyllades, avec des amandes calcaires seulement, cecasionnent de nom- 
breuses sources et ruisseaux ombragés par de beaux platanes comme 
partout en Crète; quant aux pentes des montagnes, elles sont couvertes 
de pins d’Alep auxquels, beaucoup plus haut, s’adjoignent quelques 
chênes-verts. Par un chemin très-sinueux, j’arrivai enfin à une plaine 
inclinée à l’'O.-S.-0., dans laquelle se trouve le village d’été de Kre- 
phti. Le sol, formé principalement par des talschistes grisâtres, estentiè- 
rement occupé par des vignes qui s'élèvent jusqu’à 980; plus haut que 
partout ailleurs en Crète et à la même hauteur que sur les flancs de 
l’Etna , où A. de Jussieu en 1834 en constata l’existence jusqu’à 960". 
(M. Gemellaro admet cependant que sur cette montagne elles peuvent 
atteindre 1,300® sur les versants oriental et méridional). Ces vignes 


( 336 ) 
appartiennent aux habitants de la plaine de Hierapetra et la vendange 
élait faite depuis plusieurs jours. Une source qui sortait à la partie 
supérieure, accusait une température de 1%, probablement supérieure 
de 2 à 3° à la température moyenne du lieu. 

Au-dessus je m’élevai sur des éboulements des calcaires gris, sur- 
montés d’escarpements dont les surfaces usées ont l’air de présenter des 
traces de fossiles ; après une petite plaine circulaire, je montai sur la par- 
tie culminante de la crète de PAphendi-Kavousi, formée par des calcaires 
compactes et grenus plongeant de 30 à 40° au S.-0. ; à 10 h. 1/2, un 
vent d’O. léger marquait 155, et je trouvai_une altitude de très-peu 
inférieure à 1,500", On y a une belle vue sur toutela presqu'île de Sitia; 
le groupe, dont il est le point saillant , forme un triangle compris entre 
Hierapetra, Kavousi et Piskokephalo ; à l'E. se voit, de la baie de Sitia 
au cap Kalonoros, un plateau assez élevé qui ne paraît pas entamé par 
de grands vallons; une partie plus basse, comprise entre les deux, donne 
sur la mer de Libye , entre ce dernier cap et Hierapetra ; au N.-E. est le 
cap Sidhero très-découpé; sur tout le pourtour de la presqu'île , on voit 
les Ghaïdhouronisi et les Kouphonisi basses et blanches, les Dhionysia- 
dhes, qui sont des crêtes rocheuses, noirâtres, et Psyra. Vers l’'O., 
j'apercevais l’isthme et la plaine de Hierapetra, et, par derrière, les 
montagnes de Lassiti qui semblent former une muraille qui se poursuit 
jusqu’au cap Haghios-Joannes, malgré l’échancrure de la vallée de 
Mirabello ; au-devant était la plaine de Kritsa et celle toute blanche 
tertiaire, d’Anestazana. 

Voyage de Hierapetra à Piskokephalo par le nord, 14-15 septembre. 
— La plaine sableuse et nue à Hierapetra devient assez vite calcaire et 
marneuse ; à partir de Kendhri on entre dans ce long vallon abondant 
en oliviers qui forme un passage si facile et si direct, de Hierapetra au 
golfe de Mirabello et dont Boschini a donné une vue ( 1 );, par une pente 
très-douce on arrive à Episkopi, peu après lequel se trouve , au milieu 
de la vallée, un monticule tertiaire dans lequel les couches forment une 
véritable selle , par suite de leur inclinaison au N. d’un côté et au S. de 
l’autre. On y a une belle vue à l'O. sur les montagnes de l’isthme abais- 
sées et découpées par de petits vallons et à l’E. sur le haut rempart 
formé par le massif de l'Aphendi-Kavousi qui s'étend presque en ligne 
droite de la pointe Psyra, vers le S. 350 O., au cap Peristera, n'étant 


(1) 14 Regno tutto da Candia, pl. XXXIV. 


(337) 

interrompu que par les {rois grands vallons ou gorges d’Episkopi, de Vasi- 
liki et de Kavousi; le haut présente des escarpements verticaux au-des- 
sous desquels sont des talus d’éboulement plus ou moins longs. Au N.-0. 
du monticule se trouve un large col, élevé seulement de 140" au-dessus 
de la mer, à partir duquel je redescendis doucement vers le golfe de 
Mirabello. Je traversai les deux ravins qui descendent de la plaine de 
Krephti et qui sont excavés dans des bancs de poudingue de calcaire gris, 
puis j'entrai dans un prolongement du vallon qui longe le golfe et qui 
en est séparé par des collines à pic du côté de la mer, en grande partie 
tertiaires, et dans le prolongement desquelles se trouve l’ilot rocheux de 
Psyra. Il y a une petite plaine garnie d’oliviers, devant Kavousi qui 
est bâti au débouché d'un vallon profond par lequel passe le chemin le 
plus fréquenté de Sitia , par Roukaka. 

Je préférai le chemin de Sphaka plus rapproché de la côte et plus acci- 
denté, quime permettait de mieux apprécier la structure de cette partie de 
la presqu'ile, et je montai sur les talus d’éboulement de calcaire gris. Au 
sommet, à la limite de l’éparkhie de Sitia, des schistes, à 400 d’alti- 
tude , occasionnent une source dont l’eau était à 18°7. J’arrivai bientôt 
à une montagne blanche constituée par un grand amas de gypse blanc 
laminaire, formé aux dépens des calcaires gris. En effet, au contact, les 
uns sont altérés et pénétrés de veines de gypse , et l’autre est grenu gris 
avec des fragments de calcaire. Les calcaires gris reparaissent sans alté- 
rations dans la descente à la plaine de Sphaka qui est triangulaire, 
inclinée au N. et sillonnée par quatre ravins dont l’un vient de Lastro 
que l’on aperçoit au $., au pied d’assez hautes montagnes ; jy rencontrai 
un Arnaoute, qui faisait à genoux la prière de midi , le visage tourné 
vers la Mecque; je passai devant lui à deux mètres de distance sans qu'il 
parût m'apercevoir, et comme j'étais déjà éloigné quand il se releva, 
je n’eus pas à lui montrer le teskéré du pacha. Plus d’une fois par la 
suite, pendant mes excursions géologiques dans le S.-0. de la France, 
j'ai pu m'apercevoir que nos gendarmes n’entendent pas ainsi leur 
service, vis-à-vis des régnicoles, pendant la messe et autres oflices 
religieux. Le village est du côté opposé, sur une colline de talschistes 
offrant des sources. Tourloti plus élevé est bâti sur les calcaires gris, 
mais la profonde vallée qui suit est ouverte dans les talschistes avec 
grands bancs de calcaire brunâtre, à veines de quartz, qui forment 
également le col, de 560" d'altitude , que l’on traverse avant de descen- 
dre à Mesa-Mouliana. Dans ce gros village qui est à plus de 400", ilya 


es. 


(1358) 
une source abondante à 17°4 et les talschistes y plongent de 50% au 
N.-0. ; je logeai au konaki ou corps de garde arnaoute. 

Dans la vallée de Pera-Mouliana, entièrement ouverte dans les tals- 
chistes, le ruisseau n’était pas à sec. Ceux-ci, autour des moulins de 
Kamezi, renferment de grands bancs de calcaire grenu blanchâtre à 
grosses amandes entremêlées de talschiste verdätre. Du haut du col, on 
domine le plateau tertiaire terminé par le cap Sitia et on découvre la 
baie de Sitia, avec les Dhionysiadhes très-escarpées au S. puis l’Akroteri 
peu élevé du cap Sidhero, par derrière Kaso et Skarpanto, et enfin le haut 
plateau assez uni situé au-delà de la vallée du Stomio. En descendant, 
j'arrivai sur les poudingues et les molasses tertiaires qui sont remplacés 
près de Skopi, par des calcaires grossiers etdes marnes avec peignes ethui- 
tres; en approchant de Piskokephalo, des calcaires blancs coquilliers, soit 
grossiers soit compactes , forment un plateau très-inégal à la surface du- 
quel il y a de grandes huîtres plissées. De ce bourg, je suivis sur son bord 
gauche , la vallée assez large, occupée par des champs de maïs et des 
jardinages , comme pour me rendre à Maghasia, son port; mais avant de 
l’atteindre, j’allai traverser les deux bras du Stomio dont l’oriental, le 
plus fort, avait ses eaux à 21°. Le fond de la baie est une plage sableuse 
où se forment, au niveau de la mer, des bancs irréguliers de grès et 
de poudingue. Les galets de ponce blanche y sont assez nombreux. 

Excursions au monastère Toplou et dans les environs, 16-18 sep- 
tembre.— Le chemin passe tantôt sur la plage ettantôt entre des collines , les 
unes de calcaire grossier, de marnes , ou de molasses, avec des lits ren- 
fermant des Clypéastres, des Pecten latissimus, des huîtres et surtout des 
Cristellaires, et les autres formées par les talschistes sous-jacents. En 
quittant définitivement la côte, je remontai la pente d’un vallon sur des 
poudingues puis des calcaires grossiers dans lesquels il y a un banc 
d’astrées de 1" d'épaisseur. Au-dessus, viennent de puissantes molasses, 
puis des poudingues calcaires en bancs énormes, alternant avec quel- 
ques autres de calcaire grossier jaunâtre et formant les bords supérieurs 
du vallon. 

Le monastère Toplou ou Panaghia Akroteriani est entouré de hautes 
murailles et ressemble à une forteresse plutôt qu’à un asile consacré à la 
piété (1); il est bâti sur un dernier banc de poudingue d’une aridité 


(4) M. Pashley, Travels in Crete, T.I. p. 290, a donné une inscription qu'il y 
avait copiée. 


( 339 ) 

qui dépasse tout ce qu’on peut imaginer ; mais dans le petit vallon 
qui est derrière, au N., le terrain talqueux reparaît de suite et avec lui 
quelques oliviers et même un palmier. Il est à 190" d'altitude, et, dans 
la cour, se trouve un puits dont l’eau était alors à 19°5. Non loin, il y 
a un moulin à vent dont les ailes sont orientées d’une manière fixe, 
comme dans tous ceux que j'avais vus jusqu’à présent en Crète, ce qui 
indique bien la prédominance très-marquée d’un certain vent. Je fus 
parfaitement accueilli par l’heghoumenos et jy couchai quatre nuits, 
employant les journées à parcourir les environs. Je n’aperçus ici aucune 
de ces religieuses, d’un âge plus ou moins avancé, désignées sous le 
nom de kaloghria, qui maintenant en Crète ne forment pas d’associa- 
tions séparées, mais se tiennent dans des bâtiments dépendant des 
monastères d'hommes, pour aider ceux-ci dans leurs travaux. Les repas 
consistaient principalement en pain et bamia cuits avec du mouton; le 
vin était assez bon. Ce fut là surtout, qu’un mercredi, jour d’abstinence 
pour les Grecs, j'entendis un kaloghero dire derrière moi, dhen einai 
khristianos (il n’est pas chrétien), pendant que je mangeais une déli- 
cieuse omelette au beurre, qu’à défaut d’autres mets les religieux 
venaient de me faire servir, après l’avoir préparée de leurs propres mains. 
Je souris en pensant que puisque ce péché, si léger en apparence, avaif 
une telle conséquence ; les bons pères auraient dû se faire un cas de 
conscience de me le faire commettre; mais le souci qu'ils avaient du 
salut de mon âme n’était pas allé jusqu’à leur faire prendre un peu plus 
de peine, en préparant un autre plat. 

16 septembre. — Du vallon qui est derrière le monastère, les tals- 
chistes forment une surface qui, s’abaissant au N.-E., va former une 
plaine séparée de la mer par des collines; dans celle-ci se trouvent le 
principal metokhi et les jardins potagers arrosés par un petit ruisseau, 
sur le bord duquel il y a quelques palmiers ; trois de ces arbres se trou- 
vent près de la ferme qui en a pris son nom : Is fo vai (aux palmiers). 
En allant à l'extrémité du cap Sidhero, je retrouvai les calcaires gris 
sur les plateaux de 100% d'altitude, séparés par le premier isthme et 
desquels celui-ci, qui a 60 de largeur et 5 à 6" d’élévation, paraît comme 
une simple langue sableuse, quoiqu'il soit formé par un calcaire gros- 
sier tertiaire; une barrière en clayonnages y est établie pour empêcher 
les troupeaux qu'on met paître à l’extrémité de l’Akroteri, de rentrer 
dans l'ile. Le deuxième isthme’ qui a 40" de largeur et 10 de hauteur, 


est formé par des brèches de calcaire gris. Le dernier plateau de la pres- 
Tome XXII. 095 


( 340 ) 

qu'ile, enfin, formé par les lalschistes qui plongent de 85° au S. 5 O., 
porte une colline conique de calcaire gris, à peine revêtue de quelques 
broussailles , qui atteint 225" d'altitude et qui s’aperçoit de fort loin. J'y 
arrivai en quatre heures, à 1 heure 1/2, par un ciel pur, un vent léger 
d’O. et une température de 254. Au N.-E., sur le bord de la mer, se 
trouve la chapelle de Haghio-Sidhero et près d’elle une source où j’en- 
voyai Michiele, soi-disant pour chercher un peu d’eau, mais en réalité 
pour être seul. Je m’assis sur le point culminant, mon cœur se serra et 
les larmes me vinrent aux yeux, en songeant à la patrie, à ma famille 
et à mes espérances déçues : je me sentais si seul sur ce rocher perdu 
au milieu de la mer, aux limites extrêmes de l’Europe! 

Au retour de Michiele, je repris mes observations. J'avais une belle 
vue sur les trois collines transversales et le plateau incliné de Toplou 
que je venais de parcourir et sur le plateau du Modhi terminé, derrière 
la baie de Palæokastron, par le cap Plako assez élevé, avec sa longue 
pointe tertiaire assez basse; du côté opposé, le plateau tertiaire du cap 
Sitia paraît se relever vers le massif de l’Aphendi-Kavousi, «et laisse 
apercevoir derrière lui le golfe de Mirabello et les hautes montagnes de 
Lassiti. Au dehors de l’île, se trouvent, immédiatement autour du cap, six 
petits îlots ou rochers à fleur d’eau, parmi lesquels pêchaït la barque d’un 
bâtiment de commerce, mouillé dans ces parages. Plus loin, entourant 
la presqu’ile entière étaient : Grades extrêmement basse; Elasa, plateau 
de calcaire gris de 100" d'altitude ; les Dhionysiadhes, qui sont des pla- 
teaux de calcaire gris, très-escarpés au S. Beaucoup plus loin, je dis- 
tinguais bien vers le N.-E. Kaso, qui n’est qu’une montagne allongée, et 
Skarpanto qui présente dans son centre une haute chaîne, avec des pro- 
longements plus bas aux deux extrémités. Aux limites extrêmes de la 
vue, vers le N., élaient Nisiko, Dhio-Adhelphi et un autre groupe de 
trois petites îles. 

Le lendemain, j’allai visiter les collines qui sont au N. du monastère, 
sur la côte occidentale; les premières sont formées par des talschistes 
violâtres ou verts, qui plongent de 45° au S. 15° E. et qui alternent avec 
des porphyres verts à cristaux de feldspath ; les dernières le sont par 
des molasses et des calcaires tertiaires, couronnés par de grands bancs de 
poudingues. 

18 septembre. — J'allai faire une excursion sur les montagnes qui sont 
au $S.-E. En descendant au milieu des bancs rocheux tertiaires, j'arri- 
vai dans une plaine d’oliviers qui s'ouvre à la mer et qui renferme le 


sen ce 2 à 


(34 ) 

petit hameau de Palæokastron ; la plage est séparée en deux par un mon- 
ticule très-escarpé, élevé d'environ 50, qui porte les ruines de lan- 
cienne ville et qui est tertiaire ainsi que l’île Grades, qui a 15 à 20 à 
peine, et l’extrémité horizontale du cap Plako. Je montai sur le plateau en 
partie cultivé de celui-ci, et sur la crête rocheuse qui le domine; de 
celle-ci, par une petite vallée, on aperçoit à l’O.-N.-0. le cap Haghios- 
Joannes de Spina-Longa. Après un vallon dans lequel je trouvai les tals- 
chistes, je remontai sur les calcaires compactes gris du plateau et d’un 
cône qui atteint 450" et duquel on peut bien apprécier la structure de 
l’Akroteri et celle du pays situé au S., le long de la côte orientale de l'ile ; 
ce dernier est formé par le haut plateau où j'étais, puis par celui du 
cap Traostalo qui tombe rapidement dans la mer ; en arrière est le haut 
vallon sans arbres de Karoubès, dirigé au S. 5° E. et qui s’ouvre en 
plusieurs endroits à la mer de Lybie; il est borné à l'O. par le haut pla- 
teau calcaire qui s’étend jusqu’à la vallée du Stomio. En descendant, 
j'arrivai sur de grands bancs de calcaire grisätre et de poudingues tal- 
queux tertiaires; le fond de la plaine de Karoubès est formé par des argi- 
les sableuses et des molasses rouge-violet, qui remontent au col de 200% 
d'altitude qui conduit à la vallée de Palæokastron. Le plateau de calcaire 
grenu gris quis’étend jusqu’à la vallée du Stomio, atteint 400% d'altitude et 
porte Le cône du Modhi plus élevé de 60", qui s’aperçoit de la vallée de Mira- 
bello et qui sert de Vardia, c’est-à-dire de point où l’on fait des feux de 
garde au coucher du soleil. La vue y est fort belle surtout sur les par- 
ties occidentales de la presquile de Sitia et le golfe de Mirabello ; Kaso se 
perdait dans les nuages. Je retournai en ligne droite à Toplou en pas- 
sant sur une crête de molasse et de poudingues qui atteint 160% d’alti- 
tude et qui sépare les eaux qui se rendent d’un côté dans la baie de 
Sitia et de l’autre dans celle de Palæokastron. Dans celle-ci, au-devant 
des anciennes ruines, est un port vaste et profond, mais imparfaitement 
abrité du vent de N.-E.; il n’est visité que par les bâtiments qui ont 
trop à craindre des gros temps, en passant dans ces parages. 

Voyage de Piskokephalo à Hierapetra par le Sud, 19-25 septembre. 
— En quittant le monastère, je retournai par le même chemin à Pisko- 
kephalo qui est sur un petit monticule à l’O. du Stomio, dont le lit était 
complètement à sec sur ce point. Après m'être reposé chez M. Nikolaïdhi 
en mangeant une excellente pastèque , provenant de jardinages situés au 
bas et arrosés par un petit ruisseau , je me décidai à ne pas m'arrêter par 
crainte des fièvres intermittentes qui sévissaient fortement alors et que 


LA 


rm re 


( 342 ) 

Michiele n'aurait pas manqué de prendre ; je traversai la vallée et, de 
Piskopi, je montai sur des alternances de marnes et de calcaires grossiers 
à Arnikou , où je déposai mes bagages. Ce hameau, situé à 450% d’alti- 
tude, est sur le terrain talqueux qui forme, au-dessus, des pentes assez rapi- 
des souvent en cultures. Les talschistes quartzifères, noirâtres ou lie de vin, 
yrenferment de grands banes de quartzite gris-verdâtre, et tous sont tra- 
versés par de nombreux filons de quartz hyalin blanchâtre qui contient 
de Pamphibole verte fibreuse , minéral que je n'avais encore aperçu 
en Crète que dans les diorites. Le bord supérieur du plateau enfin, est 
formé par de grands escarpements de calcaires noirs dont une crête 
forme le Dhrisès qui atteint 850". De là, la vue s’étend sur l’Akroteri et le 
plateau calcaire ondulé, aux extrémités duquel s’aperçoivent la montagne 
du cap Traostalo et le Modhi. Du côté opposé, on domine toute la vallée 
du Stomio jusqu’au col d’Iskhia; par derrière, se perdaient dans les 
nuages le Romanati, l’Aphendi-Kavousi et surtout la côte de Spina- 
Longa. Je fus parfaitement aceueilli pour la nuit à Arnikou, où je ren- 
contrai un grec et un matelot vénitien, qui s’y était marié, avec lesquels 
je pus tant bien que mal converser en italien ; il y avait si longtemps que 
cela ne m'élait arrivé et je me ressentais encore tellement de l’accès de 
tristesse qui s'était emparé de moi au cap Sidhero, que j’en éprouvai un 
aussi grand plaisir que si je m'étais trouvé tout-à-coup au milieu de 
parents et d'amis. Le souper se composa d’épis de maïs, cuits à l’eau, 
de bamia au mouton et d'excellentes grenades. 

Le lendemain , en descendant à Sphakia , je traversai un contrefort de 
calcaire gris, auquel viennent s’adosser les sables et calcaires jaunâtres 
tertiaires qui portent le village. Mais les talschistes gris ou verdâtres 
réparaissent de suite et, au ruisseau qui coule au bas de Sandali, je 
retrouvai des filons de quartz avec amphibole. Un peu au-dessous de 
Vavelous qui est à plus de 400" d’altitude, commence le terrain tertiaire 
composé de marnes blanches etde calcaires grossiers avec quelques poudin- 
gues ; une source qui en découlait à 30" au-dessous , marquait 16°6. On voit 
fort bien, de là, la vallée du Stomio qui est profonde, escarpée quoique 
marneuse, et impraticable. Au-dessus du village s'élèvent des monta- 
gnes calcaires et, du côté opposé, celles qui sont au-dessus de Tourtou- 
lous et d'Episkopi. Après avoir traversé Kanenès et plusieurs vallons 
ouverts dans les couches tertiaires , inclinées de 20° au N., j’arrivai au 
col d'Iskhia, élevé de 375" et formé par de grands bancs de poudingues 
et de molasses, alternant avec quelques calcaires marneux jaunâtres qui 


(38 ) 
les recouvrent aussi, avec quelques calcaires grossiers. Le village situé un 
peu au-dessous, sur la pente méridionale, est divisé en deux parties, dont 
Fune renferme un palmier qui est certainement encore bien moins dis- 
posé à fructifier, que ceux qui sont situés près des côtes et peu au-dessus 
dy niveau de la mer. 

21 Septembre. En allant visiter une assez haute sommité à l'O., j'arri- 
vai viie sur les calcaires gris et sur les talschistes, qui renferment de 
grandes assises de quartzite et des bancs de talschistes , et dans lesquels 
est excavée la profonde vallée du Pilialimata ; ils remontent fort haut sur 
les pentes du Romanati et y occasionnent beaucoup de sources, « 101 » 
disent les habitans, comme pour tout ce qui est nombreux en Crète. À 
l'O. du point culminant, je trouvai encore des filons de quartz avec am- 
phibole verte radiée. Les calcaires compactes gris forment la partie 
supérieure qui est un plateau très-rocheux, auquel on arrive difficilement 
de l’E., et où je retrouvai l’Euphorbia dendroides au milieu des Quer- 
cus eretica. Du sommet qui atteint 960, j’eus une belle vue sur les 
pentes occidentales du massif de l’Aphendi-Kavousi, qui portent Stavro- 
dhoxari à 500%, et sur le chaînon à contours arrondis derrière lequel est 
Mouliana ; au-dessous de soi, on a le pays bas de Roukaka et de Dhaph- 
nès, ouvert à l'O. au col de Kavousi, par lequel on aperçoit les monta- 
gnes de Lassiti, et à l'E. au col de Krya par lequel passe le chemin 
de Piskokephalo. Au-dessus, se voient les caps $Sitia et Sidhera. 
Du côté opposé, on domine la vallée du Pilialimata et la plage limitée à 
l'E. par le cap Trakhyla ; par derrière est le haut plateau qui commence 
au cap Kalonoros , renferme les hautes plaines de Khandhra et de Thiro 
et va porter au N.-E. le Dhrisès et le Modhi. 

Je venais de terminer mes observations et je me disposais à partir, 
lorsque tout-à-coup je vis s’avancer de derrière un rocher, quatre Musul- 
mans àcheval, armés de fusils, qui m'intimèrent l’ordre de les suivre pour 
vérifier qui j'étais ; le bruit courait qu’un bâtiment venait de débarquer 
dans la presqu’ile des étrangers armés qui occupaient déjà la montagne. 
Toute explication sur place aurait été inutile, car ils prenaient mon 
baromètre pour une carabine, d’un nouveau modèle sans doute, et j'avais 
laissé tous mes papiers à Iskhia (1); aussi, ne fis-je aucune difficulté de 


(1) Semblable aventure arriva en France à M. Boué vers la fin de la Restauration. 
« En Vivarais, dit-il (Guide du géologque-voyageur T. 1. p. 85) le maire de Mont- 
pezat me fit arrêter, prenant mon baromètre pour un fusil , mes échantillons pour 
des cartouches et mon livre de notes pour des proclamations incendiaires, » 


(344) 


descendre avec eux à Dhaphnès, dont j'aurais ainsi l’occasion de pren- 
dre l’altitude. Devant la mosquée, j’eus une explication un peu orageuse 
par suite de la colère de Michiele que je ne pouvais contenir dans son 
rôle d'interprète passif, cependant, on finit par me laisser retourner sans 
escorte à [Iskhia sur l’assurance que j'y montrerais le soir mon teskéré à 
un délégué. Cette grande défiance n’était pas partagée par la popula- 
tion chrétienne; car elle nous témoignait toutes ses sympathies et elle ne 
nous aurait certainement pas laissé maltraiter ; je me rappelle avec plaï- 
sir une Grecque dans l’âge mür et aux vêtements délabrés, qui ne voulut 
jamais rien accepter pour des grenades et des raisins dont elle venait de 
remplir nos poches. | 

Dhaphnès est à plus de 500" d’altitude au milieu des oliviers; et les 
talschistes y donnent des sources dont l’une était à 15°8 ; au N.-0., non 
loin de Roukaka, les pentes de calcaires gris renferment quatre amas de 
gypse, semblables à ceux de Sphaka, et qui forment de grandes taches 
blanches que j'avais aperçues du haut de l’Aphendi-Kavousi. Je passai 
devant Krya et son col; et, rejoignant le chemin du matin, je remontai 
à [skhia. 

Le lendemain, je contournai un grand cirque ouvert dans un terrain 
tertiaire qui descend encore plus bas que Lithines, et après avoir vu au- 
dessus de Papadhiana de grands bancs de poudingue qui plongent de 50 
à 40° vers l’O., j’entrai dans le haut vallon, avec ruisseau ferrugineux, 
qui conduit à Nethia. Ce village, où se trouve un grand palais vénitien, est 
situé sur une petite colline qui fait partie de la bordure d’une haute plaine. 
Celle-ci, qui est formée par des molasses tendres et caillouteuses , est 
occupée par des bruyères, des cultures et quelques vignes, et renferme 
quelques vallons et trois villages. L’un d’eux, Khandhra, où je fus bien 
accueilli par un cordonnier, est à 600" d’altitude, et l’eau d’une fontaine 
était à 2102, ù | 

Le 23, après avoir traversé la plaine et deux autres petites, un peu 
plus élevées, séparées par des collines de calcaire gris, je redescendis 
dans celle du grand village de Thiro qui est à la même altitude et for- 
mée par des argiles sableuses rougeâtres avec quelques bancs irrégu- 
liers de calcaire grossier; elle est en forme de croissant, très-unie, sans 
arbres, avec de bons puits. L’excédant des eaux pluviales en hiver, se 
perd dans un Æhonos situé près de l’extrémité occidentale. Elle est limi- 
tée par une crête de calcaire gris qui atteint près de 850w; de celle-ci et 
d'un autre sommet aussi élevé, situé à V’E., on a une belle vue sur toute 


( 345 ) 

celte partie de la presqu’ile de Sitia : au N. sur le plateau accidenté sur 
lequel, séparé par un long vallon, s’élève un chainon talqueux dépassé 
par le Dhrisès; à l'E. sur le grand vallon de Karoubès qui offre, là, un 
fond de calcaire gris sillonné par des gorges profondes, qui débouchent 
dans la plaine qui descend au port de Kato-Zakro. Au $., le plateau 
ondulé va en s’abaissant; un vallon escarpé descend aux Kouphonisi et 
un chaînon élevé va se terminer au cap Kakialitkhi : autour de la pres- 
qu'ile on aperçoit le cap Sidhero, Elasa, les ilots Kavalous qui sont 
des rochers à pic, et les Kouphonisi dont la plus grande est un plateau 
bas, escarpé seulement à son extrémité orientale. Vers l'O., on découvre 
la plaine de Thiro , le plateau avec de petites plaines, qui est derrière, 
puis le massif de l’Aphendi-Kavousi très-escarpé au $. et enfin un petit 
coin des montagnes de Lassiti. Je revins par la plaine de Lamnoni, 
élevée de 680%, dans celle de Thiro et de là à Khandhra. 

Le lendemain , je suivis la plaine dans sa plus grande longueur pour 
monter sur une montagne arrondie, située au S. de Nethia et dont le 
sommet, qui atteint 750%, est formé par des calcaires compactes blancs 
_ Lithographiques, inclinés de 40° au N. 35° 0. De là, on voit les principales 
sommités de la presqu'’ile, la vallée du Stomio, la baie de Sitia et les 
Dhionysiadhes, et aussi la côte qui va presque en ligne droite du Piliali- 
mata au cap Peristera, près de Hierapetra, sans oublier les Kouphonisi et 
les Ghaïdhouronisi. En traversant un vallon profond et la petite plaine 
tertiaire d'Apano-Pervolakia, j’arrivai sur les collines côtières qui por- 
tent une Vardia; elles sont formées par des bancs de poudingues qui 
renferment une caverne; on domine au S.-E. une plaine inclinée, en 
partie cultivée, qui est limitée par le cap Kakialitkhi, le plus saillant de 
cette partie de la côte; vers l'O, on voit s’aligner les caps Peristera, 
Stomio et dans l'extrême lointain , le cap Alitkhevra au pied du Kophinos. 
Je descendis d’abord sur des poudingnes et molasses tertiaires et ensuite 
sur le macigno et les schistes , dans la vallée du Pilialimata vis-à-vis de 
la pente méridionale du Romanati, formée par de grands escarpements 
calcaires ; au bas est le plateau de poudingues tertiaires, découpé par des 
vallons, qui porte Pevkos et Ghraës, et au bas duquel se voient les mar- 
nes blanchâtres de la plaine. Pilialimata, où je m’arrêtai pour la nuit, est 
un metokhi en mauvais état, situé sur le bord de la vallée à sec et près 
duquel se trouve un grand dattier. C’est dans ces environs que doit se 
trouver la caverne des montagnes d’Iro dans laquelle Randolph vit, à la 
fin du XVII: siécle, une chapelle avec douze colonnes taillées dans le 
roc et la grande fontaine d'Haghios-Paulos. 


( 346 ) 


Derrière la ferme, des marnes jaunâtres dans lesquelles je vis pour la 
première fois en Crète des empreintes végétales, alternent avec les pou- 
dingues quartzeux et calcaires, sur lesquels passe le chemin de Hiera- 
petra. Sur la plage du vallon du Ghoudhsero , dont l’eau était à 4903, il 
se forme des poudingues quartzeux dont les couches plongent de 15° vers 
la pleine mer ; par la vallée, on aperçoit le chaînon de Mouliana et la 
grande plaine de Stavrodhoxari, limitée par les pentes abruptes et peu 
boisées du massif de l’Aphendi-Kavousi; plus bas, il y a des terrasses de 
300 à 400% d'altitude, formées par des poudingues quartzeux et calcaires 
avec quelques couches marneuses , dont les pentes présentent des pins 
d'Alep assez clair-semés. Le ruisseau d’Haghia-Photia, naît dans une 
vallée profonde, à 1 h. de la mer, et ses eaux abondantes, à 21°‘8, font 
tourner six moulins et renferment beaucoup de mélanopsides. En remon- 
tant les molasses, renfermant des empreintes végétales, alternent avec les 
poudingues , ainsi que des marnes et des calcaires. Peu après la baie 
Kakiskala les montagnes s’éloignent, on descend dans une plaine basse ; 
le terrain tertiaire y est formé, comme à l’ordinaire, de marnes blanches 
avec des couches.de calcaire compacte qui deviennent de moins en moins 
irrégulières ; celle-ci est bordée par une plage sableuse contenant 
des ponces , comme celle qui est au bas du ruisseau de Pevkos. Dans 
une petite éminence marneuse, je trouvai du gypse laminaire blanc. Au 
cap Peristera les bancs calcaires sont plus réguliers et recouverts par des 
calcaires grossiers avec pétoncles, de l’époque actuelle. De là, à Hierape- 
tra, la plaine sableuse avec bancs de poudingues, est sillonnée par trois 
TuISseaux. 
8° VOYAGE DANS LES ÉPARKHIES DE RHIZO-KASTRON ET KASTEL-PEDHIADHA , ET 

DANS LES ENVIRONS DE MEGALO-KASTRON. 

Retour à Megalo-Kastron, par Viano et Kastel-Pedhiadha , 26-29 sep- 
tembre.— J'avais compté passer la journée à Hierapetra pour voir les fêtes 
du Beiram ; mais n’ayant pas été accueilli par le kapetania comme la pre- 
mière fois, je me décidai à partir immédiatement. Je traversai près du 
cap Stomio, un ruisseau de ce nom, qui coule dans un vallon renfer- 
mant quelques agaves et trois palmiers; sur le flanc droit de celui-ci, 
est Kalamavka (1), et beaucoup plus haut, on aperçoit Anatole. Les sables 


(4) M. Fabreguettes, Bulletin de lu Sociélé de géographie , 2e série, 1. IL. p. 119, 
dit que le 9 juin 1834, « le village de Calamasca , malgré le resserrement du vallon, 
est d’un aspect des plus agréables ; avant d’y arriver, on passe à la vue d’une cascade 
fort pittoresque. » 


( 347 ) 

cessent, et le chemin passe sur un bas plateau et entre des collines de cal- 
caire et de marnes, dans lesquelles il y a une grande abondance d’Ostrea 
navicularis, et plusieurs amas de gypse laminaire blanchâtre, surtout vi- 
sibles sur les deux flancs d’un grand vallon. Par derrière se trouvent des 
assises de poudingue qui paraissent s'élever fort haut sur le flanc des 
montagnes. La vallée du Myrto fort large, permet de voir les hautes mon- 
tagnes de Lassiti; dans le lit à sec du ruisseau, était, non loin de la mer, 
une source abondante à 17°4. C’est là qu’on entre dans l’éparkhie de 
Rhizo-Kastron, dont le sol, très-accidenté et formé par les basses pentes 
méridionales des montagnes de Lassiti, présente beaucoup de sources et 
de ruisseaux. Avant d'arriver au cap Myrto, formé par des roches jau- 
nâtres tertiaires, on monte sur de grands bancs de calcaire grossier avec 
clypéastres, surmontés par un grand cône de molasses dont les pentes sont 
couvertes de pins; la surface ondulée qu’on traverse ensuite, est formée 
par les molasses, avec Ostrea navicularis, qui acquièrent un énorme 
développement jusqu’au cap Myrto. À Aghdhokhia, il y a des blocs ébou- 
lés de serpentine et de calcaire gris ; au-dessus, la molasse est recouverte 
par un calcaire tufacé, et on a une belle vue sur toute la côte, du cap 
Myrto au-delà de Hierapetra, sur la vallée du Myrto et les pentes infé- 
rieures du Psari, occupées par des bois. Plus haut, se trouvent en place 
les calcaires compactes et, à un premier col , un petit amas de serpentine 
et une source à 1%; le chemin, jusque vis-à-vis de Kalami, passe à la 
jonction des calcaires et des talschistes gris ou verts, au milieu desquels 
percent, sur un grand nombre de points, des amas de serpentine, de dio- 
rite et d’autres roches ignées analogues , avec petites amandes calcaires. 
A la nuit, j’arrivai à Kalami, village au milieu de myrtes et de platanes , 
dans un vallon où coule un ruisseau qui marquait 17°2; je fus très-bien 
accueilli par un cultivateur chrétien, chez lequel je fus obligé de passer 
la matinée du lendemain à rédiger mes notes, car Michiele en s’éveillant, 
avait trouvé l’un des mulets avec une jambe complètement engourdie et 
comme paralysée. Au-dessus de Kalami, le haut vallon forme d’abord 
un pharangha profond et étroit, que l’on dit très-sauvage et pittoresque, 
puis il s’élargit en une plaine qui renferme les hameaux d’été de Simi. 

Le chemin de Viano remonte sur les talschistes, au-dessus desquels 
. s'élèvent de grands escarpemñents calcaires, et passe ensuite à peu près à 
la limite des deux terrains ; je rencontrai un ruisseau à 18°5, et à un col 
des serpentines noires amygdalaires, au milieu de talschistes. Après 
le peut village de Pevkos, où se trouvent de magnifiques platanes, je 


( 348 ) 
montai sur les calcaires compactes jusqu'au dessus de Kephalovrysis, 
où il y a une source très-abonäante et froide. qui ne marquait que 11°2, 
quoique à 850" d'altitude seulement; elle est occasionnée par les tals- 
chistes qui se poursuivent au-dessus de Kamira, dont le vallon est rempli 
d’oliviers, ainsi que celui de Haghio-Vasili. C’est bien au-dessous de la 
réunion de ces divers ruisseaux, que leurs eaux traversent le défilé repré- 
senté par M. Pashley (1); il est situé à l'entrée de la petite plaine littorale 
d’Arvi, cultivée en blé, où cet auteur a découvert le magnifique sarco- 
phage en marbre, qu’il a emporté en Angleterre et figuré (2). Le der- 
nier col, formé par les macignos et calcaires gris, sépare des mon- 
tagnes de Lassiti, au S., un gros pâté montagneux qui porte non loin de 
la mer un grand pic calcaire, sans doute celui de Castel-Keraton des Véni- 
tiens, dans le flanc oriental duquel M. Pashley constata l’existence 
d’une grande et belle caverne. La descente cependant ne montre que des 


talschistes gris, jusqu’à Viano où je pris gîte dans un café ; une fontaine 


donnait en abondance une eau à 16°1. 

Viano est un gros bourg, qui renferme presqu'autant de Musulmans 
que de Chrétiens; il se trouve presque au bas d’une petite colline, por- 
tant les ruines de l’antique Biennos, et au bord d’une plaine en partie 
sans écoulement, occupée d’abord par des oliviers et, plus loin, par des 
cultures ; il y avait des fossés remplis d’eau. En sortant, je traversai des 

oliviers et des plantations de mäûriers avec des grenadiers, et je passai 
devant de grands escarpements de calcaires gris, au bas desquels se trouve 
un grand amas irrégulier de gypse blanc, à 500" d'altitude, et un khonos 
auquel pourtant ne se rend aucun ruisseau. Puis, quittant la plaine, dont 
les eaux de la partie S.-0. s’échappent par une crévasse perpendiculaire, 
profonde, je montai sur un macigno grisâtre, alternant avec d’autres très- 
argileux, noirâtres; il y a aussi des schistes, avec bancs de calcaire 
siliceux , ou de calcaire gris avec lits de jaspe rouge. Aux approches du 
col, ces roches sont remplacées par des molasses, des poudingues et des 
marnes , en couches inclinées de 30° dans diverses directions, qui aftei- 
gnent plus de 790", et qui appartiennent sans doute au terrain tertiaire; 
mais elles reparaissent bien vite de l’autre côté, et renferment un petit 
amas de gypse au-dessus de Martha. La vallée d'Embaro ne présentait 
que le lit à sec et caillouteux du torrent qui descend de l’Aphendi-Lassiti, 


(1) Travels in Crele, 1. X. p. 285. 
(2) id. t IL p. 7,18 et 19. 


| 


(349) 


qui s'aperçoit très-bien. Je remontai sur les alternances de molasses et 
de marnes , ayant à l’E., les montagnes çalcaires, et à l’O., des collines 
assez élevées de macigno, et j’arrivai à un gros chêne Velani, au pied du- 
quel est une source à 1702, et d’où l’on aperçoit Panaghia. D’après Corne- 
lius, les Vénitiens croyaient que les eaux de cette partie, descendaient par 
des conduits souterrains , et venaient au jour, à Kardhiotissa. On est là 
sur le bord de la grande plaine de sable rouge, à débris primitifs, de Pe- 
dhiadha ; dans les vallons, se montrent des marnes, des molasses et des 
poudingues calcaires ; çà et là, il y a de petits monticules de calcaires 
compactes, comme en avant de Niplito. Ce fut là que, le temps étant 
devenu orageux , les hippobosques ou d’autres insectes, pénétrant dans 
les naseaux des mulets, ce qui ne s’était pas encore produit, les mirent 
dans un véritable état de fureur, que je craignis un instant, de ne pou- 
voir maitriser. Nous parvinmes cependant, Michiele et moi, à nous en 
emparer successivement, quoiqu’ils se fussent débarrassés de leurs char- 
ges, et lorsque nous leur eûmes entouré les narines et même la bouche 
de mouchoirs, ils reprirent peu à peu leur tranquillité habituelle, et nous 
pûmes continuer notre marche. Je n’eus à traverser qu’un seul ruisseau, 
celui qui descend des montagnes de Plati, avant d’arriver à Kastel- 
Pedhiadha, où je logeai à la maison d'école, comme la première fois. 
29 septembre. — Yenvoyai Michiele et les deux mulets directement à 
Megalo-Kastron, voulant redescendre de nouveau à Khersonesos, pour 
m'y rendre par la côte. Le temps était très-couvert, et le vent du N.-N.-0., 
assez fort, peu après mon départ, je fus assailli par une pluie torren- 
tielle, accompagnée de tonnerre, dont je m’abritai tant bien que mal 
sous un gros platane : ce qui ne m’empêcha pas d’être finalement percé 
jusqu'aux os ; mais le ciel s’éclaircit à moitié , le vent tourna au S.-0., la 
température dépassa 25°, et au bout de quelques heures, j'étais à peu 
près sec. La pluie était abondamment tombée aussi sur la pente occiden- 
tale des montagnes de Lassiti, de sorte qu’en arrivant à l’ancien aquéduc, 
je me trouvai arrêté par le torrent très-sonflé et boueux qui sortait du 
ravin, situé un peu plus haut; en montant sur la pente, j’aperçus, à 
VE., Potamiëès, et la large vallée dont les calcaires rétrécissent ainsi 
le débouché, et qui est sillonnée par le Xerokamarès qui descendait 
d’Avdhou. Un peu plus bas pourtant, je parvins à passer, et j’arrivai sur 
le plateau incliné de calcaire blanchâtre de Khersonesos, que je traversai 
obliquement pour rejoindre le grand chemin qui vient de Mirabello. Le 
terrain terliaire s’abaisse , et porte Ghouvès à l'O. de montagnes calcaires 


( 390 ) 

très-escarpées. Au-delà, la plaine plus basse encore , de sable argileux 
rouge, présente sur plusieurs points, des calcaires coquilliers récents , 
dans lesquels sans doute se trouve la caverne citée par M. Pashley. Je 
traversai sur la barre sableuse de l'embouchure, l’Aposelemi dont les eaux 
vaseuses, très-sales , ainsi que celles de plusieurs autres torrents , salis- 
saient la mer, jusqu’à une distance de 2 kilom. à l’E. du point de déver- 
sement, en y occasionnant toutes les teintes intermédiares, entre le 
jaune-rougeûtre et le bleu. Un massif de calcaire compacte gris, forme le 
Kakonoros, à l'E. duquel il y a une petite plage de sable jaunätre, avec 
fragments de pierre ponce. La plaine du Kartero est ouverte dans des 
marnes jaunâtres, avec grandes huîtres. À 5 heures, j'arrivai à Megalo- 
Kastron, où j’eus le plaisir de retrouver M. Hitier, qui avait été retenu 
par les affaires de la succession Godebout. 

Excursion à l'ile Dhia, 1-2 octobre. — Après deux jours pluvieux 
employés à rédiger mes notes, je m’embarquai à 3 h. de l’après-midi 
« en la ciptè de Candie, devant lequel , à X milles, ha une ylle appélée 
l'Escandeye où demeurent äuquns hermiteus » disait le seigneur de Cau- 
mont en 1418 (1). En trois heures j’atteignis cetle petite île, entière- 
ment déserte aujourd’hui, où je passai la nuit sur un navire de com- 
merce de Gênes, la Concezione, qui était mouillé dans le fond du port, 
de Panaghia et sur lequel M. Iitard achevait de charger ses caroubes. 

« L’ile de Dia ou de Standie, dit Olivier (2), est située à trois lieues 
au nord quart de nord-est de Candie. Elle à environ quatre milles de 
long sur deux de large : son contour est irrégulier : l’on voit à sa partie 
méridionale , trois ports naturels, où les navires un peu gros, destinés 
pour Candie, vont mouiller et décharger une partie de leurs marchan- 
dises, parce que le port de cette ville n’est pas assez profond pour les 
recevoir lorsqu'ils sont chargés. À leur départ, ils vont de même atten- 
dre à Dia que des bateaux leur apportent de quoi compléter leur charge- 
ment.— Un vaisseau de guerre qu’un vent de nord trop violent pousserait 
sur Crète, et qui ne pourrait gagner le golfe de la Sude ou Spina-Longa, 
trouverait un asyle à Dia. Le port du milieu, nommé Port de la Madona, 
est le meilleur des trois : on peut y jeter l'ancre depuis six et huit brasses, 
jusqu’à une assez grande profondeur. — En doublant la pointe orientale, 
on trouve un quatrième port peu sûr, peu profond , ouvert au vent d'est, 


(1) Voyaige d’oultremer en Jherusalem,, p. 42. 
(2) Voyage dans l'Empire Olhoman, {. Y, p. 407. 


( 351 ) 
mais à l'abri du sud , de l’ouest et du nord-ouest. Un navire marchand, 
surpris par un coup de vent, pourrait également s’y sauver. » 

Le lendemain, je mis pied à terre sur la petite plage qui est au fond 
du port, et j’allai faire une tournée sur le plateau de calcaire compacte 
gris, qui se relève vers le N., où ilse termine par des escarpements verti- 
caux de plus de 200" d’élévation , où les couches plongent de 35° au S. 
200 O. Au S.-E. de l’ilot bas Petalidha, il y a un banc de plusieurs mètres 
d'épaisseur, d’un caleaire compacte rosâtre qui est sans doute celui dési- 
gné sous le nom de marbre par Olivier. L'ile présente la végétation ordi- 
naire des plateaux et plaines de la Crèle, mais il n’y a pas un seul 
arbuste ; j’aperçus quelques chèvres à demi-sauvages, et les lapins y sont, 
dit-on, fort communs ; les mouches y sont en plus grande quantité qu’en 
aucun autre lieu. Du sommet, qui atteint 240", on aperçoit à peine Au- 
ghon ; mais on jouit d’une assez belle vue sur la Crète. À partir de l'E. 
se dessinent le cap Haghios-Joannes peu élevé, le cône du cap Sidhero, les 
deux échancrures dela vallée de Mirabello qui permettent de voir l'Aphendi 
Kavousi et une partie de ses dépendances, le Tsileno et les hautes mon- 
tagnés de Lassiti, masquées par des nuages, et par-devant le bas plateau 
calcaire de Pedhiadha avec le cap Khersonesos. À partir de celui-ci jus- 
qu’à Rhogdhia, des montagnes de Lassiti à celles du Psiloriti, on voit la 
côte basse se relever pour former le plateau de Megalo-Kastron du milieu 
duquel sort le Karadagh; par derrière saillent quelques points de la 
chaîne côtière de Messara, comme le Kophinos et les montagnes 
de Mesokhorio. Dans l’O., le massif du Strombolo vient en s’abaissant 
porter Rhogdhia à mi-côle et se terminer d’une part au cap Fraschia 
blanc, sans doute tertiaire, et de l’autre, par le cap Stavro qui se 
prolonge en une pointe basse; par derrière se voient le massif du 
Kouloukouna, le cap de Rhethymnon et les montagnes de Sphakia; 
les caps Dhrapano et Meleka se perdaient dans les brumes. 

Après avoir dîné à bord, je me rembarquai pour Megalo-Kastron où 
j'arrivai en une heure et demie non sans avoir passablement souffert du 
mal de mer, quoique nous eussions le vent en poupe; la veille, par le 
même vent, alors contraire, j'en avais été quitte pour un mal de tête. À 
mesure qu’on se rapproche de la côte, on voit le Karadagh se dessiner , 
mieux et devenir plus saillant au-dessus du plateau. 

Excursion à l’Almyros, 3 octobre. — A la sortie de la ville par la 
porte de Spina-Longa , la plage présente des sables jaunâtres , avec frag- 
ments de ponce, formant quelques petites dunes; le village des lépreux 


( 352 ) 

est sur les marnes jaunâtres avec Ostrea navicularis, qui constituent Le sol 
à deux lieues à la ronde, et sont recouvertes par des bancs puissants de 
calcaire grossier, avec peignes, huîtres, etc. Après le pont du Ghiofro, 
je passai dans la plaine sableuse au pied des côteaux tertiaires, dans 
lesquels est ouverte la gorge étroite du Xeropotamos ; un peu plus loin 
était le Ghazano, dont Veau courante, à la température ‘de 2305, 
renferme des mélanopsides. La plaine, au voisinage de lAlmyros est 
formée par le terrain tertiaire qui porte une grande quantité de dattiers 
nains, à l'exception de quelques-uns assez élevés; l'aspect du lieu 
était encore ce qu’il était trois cents ans auparavant, sous la domination 
vénitienne; car, dit Belon : (1) « Il y a quelques endroicts en Crète, 
où croissent les palmiers, tant grands que petits; et principalement le 
long d’vn riuage ou ruisseau, qui sort d’vne fontaine en abisme d’eau 
salée, que les Cretes nomment en leur vulguaire Almiro. Mais ilz ne por- 
tent aucun fruict : Car le climat de Crete est trop froid pour les pal- 
miers.» La source, dans une excavation à la base d’une haute montagne de 
calcaire noirâtre, dont une vue est donnée par M. Pashley (2), offre un 
bassin de 80" environ de diamètre, très-profond , car le centre est dé- 
pourvu d'herbes aquatiques ; il en sort une véritable rivière qui fait tour- 
ner quelques misérables moulins , situés sur un barrage. L’eau qui était 
assez salée abaissa mon thermomètre à 16°; les meuniers nous dirent 
qu’en hiver elle devient potable par suite d’une diminution de salure, ce 
qui était confirmé par l’observation que fit M. Pashley, le 10 mars 1834, 
qu’elle était fort bonne à boire. Je n’y vis aucun poisson ou anguille ; 
mais ils étaient, ainsi que les crustacés, si abondants autrefois, que les 
auteurs vénitiens du XVI®e siècle disent que la pêche s’affermait à l’encan. 
D’après M. Pashley, les habitants croient que les eaux viennent de 
25 kilomètres, des montagnes de Mylopotamo; déjà en 1422 Buondel- 
monti disait que c'était celles des montagnes des alentours de Haghios- 
Gheorghiou-Kamariotis, qui se perdent dans un gouffre situé à ’E. de ce 
monastère. Une source d’eau douce située sur le bord de la petite 
rivière, marquait 2003. 

Le chemin de Rhoghdhia passe au-dessus, avant de traverser un ravin 
qui sillonne le flanc calcaire du Strombolo ; après celui-ci, j’arrivai vite 
sur les talschistes gris-verdâtres qui plongent de 40° à l'O. 15° 8. et qui 


(1) Observalions de plusieurs singularilés, p. T, verso. 
(2) Travels in Crete, T1. p. 258. 


( 353 
renferment sur quelques points des filons de quartz blanc et de fer car- 
bonaté spathique jaune. Au-delà, non loin sans doute du Paleocastro des 
Vénitiens, l'antique Cyttæon, se trouve le palais bâti pour Méhémet-Ali, 
pendant que la Crète lui appartenait. En rentrant, je vis près de la porte 
de la ville des poudingues quartzo-calcaires récents , qui s'élèvent de 15 à 
20% au-dessus du niveau de la mer. 


90 NOUVEAUX VOYAGES DANS LES ÉPARKHIES-DE MYLOPOTAMO, D’AMARI ET LE 
RHETHYMNIOTIKA. 


Retour à Rhethymnon par Dhamasta, 5-6 octobre. — Après avoir 
achevé l’emballage des collections recueillies pendant les deux 
mois précédents, et pris congé de MM. Hitier, Charpin et de 
Vély-Pacha, je quittai définitivement Megalo-Kastron. Après le Ghazano, 
le chemin s’élève sur un sol ondulé , formé d’abord par des calcaires 
marneux, dans lesquels je recueillis une énorme huître plissée, puis par 
le macigno et des grès ;, on entre ensuite au-dessus de Tylisso, dans 
un vallon rapide ouvert dans les calcaires compactes noirs ou gris; au 
haut on arrive dans une petite plaine fermée, élevée de près de 500% 
sur le bord septentrional de laquelle s’élève le cône du Strombolo, très- 
escarpé à l'E. Celui-ci qui atteint 800» d’altitude est formé par des cal- 
caires magnésiens, noirs, qui plongent de 50° vers le S.-S.-E. Le som- 
met est occupé par une chapelle blanche qui était en réparation. On ya 
une assez belle vue sur Dhia et toute la côte jusqu’au cap Haghios-Joan- 
nes, sur les montagnes de Lassiti et le plateau de Megalo-Kastron qui se 
transforme en plateau déchiqueté par des vallons, dans la partie méri- 
dionale. Vers V0. le Strombolo d’une part se rattache au Kouloukouna 
par d’autres crètes et cônes calcaires, et d’autre part, il est séparé des 
trois grands massifs du Psiloriti, par des dépressions où passe le chemin 
de Rhethymnon. En reprenant ce dernier, je passai dans deux ou trois 
plaines très-petites, puis dans deux autres plus grandes, également 
fermées et cultivées en partie ou en totalité. Après un vallon dirigé 
au N., où apparaissent les sables argileux rouges avec des blocs de 
quartzite, comme à l'O. de Dhamasta, j’entrai dans une longue plaine 
accidentée, à l’extrémité de laquelle se trouve ce village où m’attendait 
au khan, Michiele, avec un souper beaucoup moins succulent que celui 
que j'y avais pris le 5 août. 

Le lendemain matin, je repris tout seul le chemin que j'avais parcouru 
deux mois auparavant ; la sécheresse avait donné au pays une physiono- 


( 354) 

mie vraiment bien différente. Les fontaines de Kania-Oglou et de Papate- 
vrysis donnaient moins abondamment, el leurs eaux étaient à 16°6 et 20°4; 
le Mylopotamos qui coulait cependant encore à Perama avait une tempéra- 
ture de 222. Je quittai alors le grand chemin et je montai sur les cal- 
caires tertiaires en couches horizontales, aux metokhi qui sont au-dessus 
d’Aghiliana. Après un vallon profond , je remontai au sommet du terrain 
tertiaire qui atteint 150, et duquel on voit bien l'embouchure du Mylo- 
potamos , qui a lieu dans une plaine basse à l’extrémité d’un contrefort 
primitif rouge qui porte les ruines de l’ancien Castel-Milopotamo , et qui 
va se rattacher aux bases du Kouloukouna. Après avoir longé le bord du 
plateau tertiaire dont les escarpements sont battus par la mer, je des- 
cendis à la vallée du Hiasmata, où les sables de la plage renferment du 
fer oxydulé sableux qui ne peut guère venir que du terrain primitif. 
De là, prenant dans la plaine sableuse, j’arrivai assez tard à Perivolia; 
je trouvai à m’installer dans l’arrière-boutique en planches d’un mar- 
chand grec , où je passai la journée du lendemain à rédiger mes notes. 

Excursion en Amari et à Melabès, 8-11 octobre. — Le chemin d’Arka- 
dhi passe sur le terrain tertiaire, sillonné de vallons, dont l’un est rempli 
d'oliviers , au-dessus d'Hadelé ; après Pighi et Loutra, où il y a des aga- 
ves, on traverse un vallon assez profond et un ruisseau, à 16°2, qui con- 
tient des mélanopsides. Une crête un peu large vient ensuite se termi- 
ner à Amnato, où de puissants bancs calcaires, occasionnant un dallage 
naturel, renferment de gros clypéastres ; là, se trouvent les ruines d’un 
collége vénitien, dont le portail encore debout, est surmonté de cette 
inscription : Initium sapientie, timor Domin. Les mêmes bancs calcaires 
forment l’entrée et le flanc occidental de la gorge, par laquelle on monte 
à Arkadhi, les calcaires compactes gris se montrant surtout dans le flane 
opposé; une source à 16°2 exisle à sa parlie supérieure, peu au-dessous 
du monastère. L’heghoumenos me reçut de nouveau fort bien, et me fit 
diner avec lui, moins somptueusement, toutefois, que le 8 août (peut- 
être avait-il trouvé que le cadeau que j'avais fait alors aux jeunes frères 
servants, n'avait pas une valeur comparable à celle du bon vin qu’il m’a- 
vait fait servir.) En poursuivant mon chemin, je revis la fontaine qui est 
avant le col de Thronos , et qui ne marquait plus que 15°5 ; et plus bas, 
celle dite, fis petras 10 nerou, dont l’eau en très-grande réputation, est 
recherchée de Stamboul pour les malades, auxquels, dit M. Pashley, 
elle est très-fortement salutaire. À Asomatos , je fus mieux accueilli que 
la première fois. Ce fut en 1821, au commencement de l'insurrection, 


( 399 ) 

que les autorités turques mandèrent l’heghoumenos et les kalogheri, sous 
prétexte de leur communiquer un document écrit, et les mirent lâche” 
ment à mort, dans l’espérance d’arriver par la terreur, à contenir les 
habitants de l’éparkhie. Dans la cour, se trouve un énorme laurier d’en- 
viron 70 ans, dont le tronc, qui n’a pas loin d’un demi-mètre de dia- 
mètre , est haut de 3" et porte une tête arrondie de plus de 20" de cir- 
conférence. Le puits accusait 17°2, et une fontaine , sur le chemin de 
Visari, marquait 18°8. 

Je comptais revoir en passant, M. Phranghopoulo, mais il était retenu 
par la fièvre, à Amari ; je traversai la plaine et, continuant sur le maci- 
gno de la base du Kedros, j’arrivai à Khordhaki, village musulman pres- 
que ruiné, puis enfin, au col de calcaire gris, élevé de 550", qu’il faut 
franchir pour entrer dans le vallon de Melabès ; on trouve le macigno 
avant d'atteindre le fond, qui est occupé par des argiles tertiaires ; du 
côté opposé, les calcaires gris font vite place à un grand massif d’amphi- 
bolites, accompagné de quelques talschistes, qui porte le petit monas- 
tère de Vourgari. Au-dessus, le macigno reprend, occasionne à Melabès 
une fontaine abondante , à 16° , et forme le Vouvala, qui atteint 975, 
et que je visitai dans l’après-midi. Vers l’O., cependant les talschistes 
s’élèvent fort haut, jusqu’au col de Saktouria, et forment les pentes vers 
Krya-Vrysis. Quoique le ciel fût couvert de gros nuages, je pus, à l’aide 
d’éclaircies successives, prendre la direction de tous les points culmi- 
nants environnants , et vérifier l’état de la côte qui est escarpée , depuis 
Haghio-Ghalini jusqu’à l'embouchure du Megapotamos ; du côté opposé, 
le Kedros se présente comme un mur vertical gris, avec des taches rou- 
geûtres assez fréquentes. À mon retour à Melabès, je descendis chez le 
maître d'école, où j'avais déposé mon bagage en arrivant ; il avait engagé 
le kapetania à souper et, dans la soirée, vinrent le papas et plusieurs 
des notables de la localité ; mon court séjour dans ce village tout chré- 
tien et si peu fréquenté , fut une véritable fête pour ses habitants. 

10 octobre. — En descendant de Melabès, j’arrivai bientôt sur des 
micaschistes noirâtres, qui renferment de grands bancs calcaires, incli- 
nés de 45° à VE. 25 N., et qui occasionnent à 400" d’altitude une 
source à 1602. À 370 est le col qui sépare le Kedros du Vouvala, et le 
vallon de Melabès, de celui de Krya-Vrysis tout voisin ; il est formé par 
des argiles et des molasses tertiaires à coquilles marines, couronnées par 
quelques bancs de poudingues. Entre le Kedros et le Siderota, le ter- 
rain tertiaire disparaît presque, par suite du rétrécissement de la val- 


ToME XXII. 939 


( 356 ) 


lée ; au-dessous d’Akoumia, le macigno et les calcaires gris du Siderota 
se prolongent, ainsi que ceux du Kedros, et occasionnent un défilé, peu 
après lequel j’arrivai dans un petit bassin tertiaire assez uni qui s’étend 
jusqu’au col de Kissos, et qui est formé par des marnes vertes alternant 
avec des molasses, et contenant un lit de calcaire d’eau douce, avec 
Unio, Néritines, etc. Au-delà du col, ce dépôt se termine à Spele, rétréci 
qu’il est par de bas contreforts de la chaîne côtière, formés par un mas- 
sif de serpentine vert-foncé et de diorite vert-noirâtre, surgissant du 
terrain primitif, dont on peut le distinguer très-nettement, même de loin, 
aux teintes bleu-verdâtre du sol. Au pied de grands escarpements cal- 
caires des montagnes situées à l'O. du Kedros, se trouve Spele, ainsi 
nommé de grandes cavernes situées , dit-on, dans le voisinage; au de- 
vint, une plaine ondulée, formée par les talschistes, est couverte d’o- 
liviers. 

Pour aller à Karé, le lendemain, on monte, en contournant plusieurs 
vallons, sur les talschistes qui présentent une source marquant 18°, à près 
de 600" d'altitude, et non loin d’un col; en débouchant de celui-ci, on 
a devant soi, au N., la crète calcaire du Vrisinas et, au-devant, de grandes 
pentes formées par le terrain tertiaire qui pénètre ainsi au S. de ce massif, 
el dont les bancs, en apparence horizontaux, plongent cependant de 15 à 
20° vers le N. En descendant sur les talschistes , j’arrivai à un col élevé 
seulement de 400, qui sépare le bassin du Platania de celui du Petrez, 
el qui est occupé par les marnes inférieures du terrain tertiaire; au-des- 
sus, il y a de nombreux bancs de poudingues et des lits de grandes hui- 
tres, el on finit par atteindre les grands bancs calcaires qui portent Karé; 
une fontaine au-devant, à 440" d'altitude, émettait des eaux à 1824. Le 
village est séparé, par un profond vallon, du Vrisinas dont le plateau de 
calcaire compacte gris présente une multitude de mamelons rocheux, sé- 
parés par des dépressions cultivées. Le point culminant qui atteint 875", 
est situé au-dessus de Rhethymnon; on y a une très-belle vue sur tout 
le plateau , dont les limites sont formées au S. par le cordon montagneux 
littoral , à VE. et à PO. , par le Psiloriti et les montagnes de Sphakia ; sur 
la côte septentrionale, la vue s’étend du Strombolo et du Kouloukouna , 
aux caps Dhrapano, Meleka, Spadha, et même aux sommités du cap Gra- 
bousa. En descendant, j’atteignis de nouveau devant Kapediana les tals- 
chistes et quartziles, couverts de bruyères, qui donnent une source 
ferrugineuse dans un vallon; un peu plus bas, les marnes et calcaires 
tertiaires renferment le vallon de Rousospili, que je suivis jusqu’à la 


(8970) 
plaine côtière. À Rhethymnon, je fus derechef accueilli avec beaucoup 
d'empressement, par M. Barbieri, chez lequel je passai la nuit et la ma- 
tinée du lendemain. L’eau des puits est légèrement saumatre. 

Retour à Khania, 12-13 octobre. — Après le déjeûner, je repris le 
grand chemin jusqu’au-delà du Petrea; puis, tournant au S., je montai 
sur les marnes blanches et les calcaires à Episkopi, où je m'installai au 
Khan arnaoute , afin d'éviter de passer la nuit au milieu des émanations 
fiévreuses de l’Almyros. | 

Le lendemain, je traversai le Muzla assez large, qui sépare les épar- 
khies de Rhethymnon et d’Apokorona et, peu après, le pelit village en 
grande partie ruiné de Dhramia, dont le sol marneux est couvert de sable 
argileux rouge, avec cailloux primitifs. C’est à quelque distance au S., 
que se trouve Lappa , dont une inscription et le plan d’un ancien temple, 
viennent d’être publiés par M. Falkener (1). Au bas du côteau, je me retrou- 
vai dans la plaine marécageuse puis sableuse de la côte, et je rejoignis 
l’Almyros. Les eaux aussi abondantes que le 4 juin, n’abaissèrent mon 
thermomètre qu’à 15°6 ; une digue en pierre forme , à 17" au-dessus du ni- 
veau de la mer, un bassin envahi par les herbes aquatiques , et peu profond 
sans doute ; le gros ruisseau qui s’en échappe, met en mouvement des 
moulins sur deux points au moins, avant d’atteindre la mer. Traversant 
ensuite , le plus rapidement qu’il me fut possible, le plateau ondulé de 
calcaire tertiaire de l’Apokorona, j’arrivai aux sources de Stylo. Leurs 
eaux , beaucoup moins abondantes que le 12 mai et le 3 juin, avaient la 
température de 13°, supérieure de 1°9 à celle qu’elles m'offrirent à mon 
premier passage. Avec le coucher du soleil, j’atteignis le col par lequel 
on arrive à la baie de Soudha ; et dans ma traversée de la plaine, je fus 
assailli par une pluie, accompagnée de tonnerre : aussi, ce ne fut pas 
sans une vive satisfaction, qu’à neuf heures du soir, je pus serrer la main 
de M. Hitier, et me retrouver dans un bon lit, après deux mois et demi 
d'absence. 


400 — NOUVEAU VOYAGE DANS LES ÉPARKHIES D’APOKORONA , DE SPHAKIA 
ET À GAUDHOS. 


Voyage à Sphakia, 16-18 octobre. — Après deux jours de repos, 
employés surtout à mettre au net mes notes de voyage, je m’empressai 
de profiter des dernières belles journées, pour achever mon exploration 


(1) À descriplion of theatres in Crete, p. 18 et 25. 


(358 ) 


des Aspra-Vouna ; et bien m’en prit de m'être ainsi hâté, car lorsque 
j'arrivai au pied de leurs plus hautes sommités, un jour, que dis-je, 
une heure de retard, la neige m’aurait empêché d’en gravir la cîme. Je 
repris dans l’après-midi le chemin de Malaxa et j’allai coucher chez le 
dhaskalos. 

Le pyrgo et le village sont sur les calcaires compactes, mais dans la 
légère dépression qui les sépare, les talschistes forment un petit affleu- 
rement. Au S.-0., les calcaires forment une plaine un peu plus basse, 
couverte d’oliviers, puis une surface très-rocheuse, entrecoupée de cultu- 
res, de laquelle il est très-difficile de descendre. Dans le fond de la 
vallée, au ruisseau seulement, mais remontant sur la pente opposée, je 
retrouvai les talschistes toujours, comme de coutume, recouverts de 
bruyères verdoyantes. Au-dessus, viennent les calcaires dans lesquels 
est ouverte la crevasse, à parois souvent verticales, par laquelle les eaux 
descendent à Stylo, à 200 plus bas; ils forment le plateau de Kambous 
qui atteint près de 600" et dans les petites dépressions fermées duquel, 
végètent parfaitement les oliviers et les agaves. De là, suivant les derniè- 
res bases du Mavri et du Soro, je descendis après un hameau sur les tals- 
chistes à Rhamni et, bien avant Melidhoni, sur les argiles.sableuses et 
les bancs de poudingues tertiaires ; au sortir de ce village, ces roches 
sont remplacées par des calcaires grossiers qui forment les parties plus 
centrales de l’Apokorona et se poursuivent à Pemonia et Phré où l’on 
commençait la récolte des olives. D’Ipos, où je rejoignis le grand che- 
min , je montai passer la nuit au café de Prosnero, 

Le lendemain, la pluie tombait et le tonnerre grondait lorsque je partis ; 
en quatre heures cependant, j’atteignis la plaine d’Askypho; les champs 
et les vignes sont situés sur le pourtour, le centre, où les eaux se ras- 
semblent en hiver, étant occupé par des pâturages; les villages , où je 
ne m’arrêtai que quelques instants, sont dans la partie N.-0. et leur alti- 
tude de 700% ne permet pas aux oliviers de s’y développer : j'y aperçus 
seulement quelques figuiers. Par un vallon boisé, on s’élève doucement 
jusqu’à un col élevé de 830% d’où l’on descend de 40" seulement pour 
entrer dans la plaine inclinée de Nipros; celle-ci également dépourvue 
d’oliviers, n’est que la partie supérieure du grand couloir par lequel on 
peut descendre à la côte méridionale près de Komitadhès. Ce pharan- 
gha, ouvert dans des calcaires grenus grisâtres d’abord, puis compactes 
tabulaires gris, avec nombreux lits et rognons de silex noir, présente de 
grandes parois escarpées souvent verticales, parfois même en surplomb ; 


( 359 ) 

dans plusieurs endroits elles se rapprochent, sur des hauteurs de 20 à 
30", au point de laisser à peine entr’elles un sillon de 2% de largeur sur 
20% de longueur, dont les inégalités rendent le passage très-difficile 
pour les mulets, même médiocrement chargés ; les eaux qui descendent 
en hiver les ont usées et polies, sur quelques points seulement. Les pentes 
des montagnes couvertes d’yeuses , auxquelles se mêlent quelques érables 
et cyprès, s’abaissent à mesure que l’on approche de la côte, le couloir 
s’élargit et les brèches et poudingues récents du fond acquièrent plus 
d'importance. À une trentaine de mètres au-dessus de Komitadhès, qui 
est à 200" d'altitude , sa largeur devient très-grande dans les poudingues 
calcaires tertiaires, au-dessous desquels on aperçoit dans son lit quel- 
ques pointements talqueux. La pente, jusqu’à Sphakia, est formée par 
les grands bancs de poudingues qui, sur certains points, offrent à leur 
surface une immense quantité de cailloux calcaires provenant de leur 
désagrégation. Le terrain tertiaire forme là, au pied des monta- 
gnes, de Sphakia jusqu’à Selia, par Franco-Castello, une terrasse 
inclinée, calcaire et marneuse , sans apparence d'arbres, qui se termine 
à la mer par des escarpements, et qui porte de nombreux villages. 

Je rencontrai les talschistes gris , plongeant de 45° au S. 10° O., en 
descendant à Sphakia, dont la partie inférieure cependant, est sur le cal- 
caire compacte gris; le port, situé au bas, est une simple plage sa- 
bleuse , fort petite et sans abri ; au pied des rochers à pic qui la imitent au 
N. sort, au niveau de la mer, une source abondante, à la température 
de 18°. 

Je savais bien qu’à la suite de l'insurrection de 1821, les Sphakiotes 
avaient été obligés de faire leur soumission à Méhémet-Ali; mais n'ayant 
rencontré aucun Musulman dans mon premier voyage au mois de mai, et 
ayant vu le peu de respect des habitants pour l’officier du pacha qui ac- 
compagnait M. Hitier, j'avais cru qu’il existait encore, une certaine indé- 
pendance sur le revers méridional des Aspra-Vouna. Aussi ce fut pour 
moi un véritable coup de poignard dans le cœur, lorsque dans un de ces 
étroits couloirs du pharangha de Komitadhès, je me sentis coudoyé par un 
Arnaoute qui , seul à pied et le fusil sur l'épaule, se rendait de Sphakia 
à Prosnero. Si après cette rencontre j'avais pu douter encore que toule 
apparence de liberté eût disparu de la Crète, j’aurais été désabusé en voyant 
le foyer de l'antique indépendance crétoise envahi par un bey avec 30 
Arnaoutes, el son pyrgo et son port gardés par un lieutenant et 50 Ara- 
brs. Je remis au bey une lettre de recommandation de Kerim-bey, second 


( 360 ) 


fils de Moustapha-Pacha, et, après m'être installé dans une maison fort 
délabrée , je dinai avec le lieutenant qui savait assez d’italien pour moi. 
J'avais le cœur bien serré à la vue des changements qui s’étaient produits 
en quelques années : Sphakia était un assez gros bourg, mais qui 
avait alors toute l’apparence de ceux de la côte septentrionale, 
soumis aux étrangers, et fréquentés par eux depuis des mil- 
liers d'années; la présence des bayonnettes étrangères et des lon- 
gues vracca des Grecs avilis qui les avaient suivi, faisait dispa- 
raître en moi toute poésie, tout sentiment élevé et généreux. 

Excursion à l’ile Gaudhos, 19-21 octobre. — Je fis prix à 100 pias- 
tres avec le patron d’une barque non pontée, et nous partimes à 6 h. du 
malin. Après une navigation passablement pénible pour moi, je pus en- 
fin mettre pied à terre sur la plage de Lavraka à 5 h. du soir. Un habi- 
tant que j'avais ramené dans son île, m’emmena passer la nuit dans sa 
maison, quiétait bâtie presque à pierres sèches et peu différente de celles 
des paysans crétois. Ampelos se trouve sur la pente occidentale du pla- 
teau , élevé de 400*, qui forme la partie méridionale de l’île, tandis que 
deux des trois autres villages, Xenakis et Vathiana, sont vers l'extrémité 
opposée. 

La côte septentrionale qui est très-déchiquetée, beaucoup moins haute, 
présente les différents ports auxquels aboutissent plusieurs vallons ; celle 
qui regarde le S. est courbe, sans sinuosités et très-escarpée. La partie 
haute est formée par des calcaires compactes blanchâtres, avec petits lits 
et nodules de silex, qui appartiennent à la partie inférieure du‘terrain 
crétacé, car il y a quelques bancs de macigno; au milieu ils plon- 
gent de 30° au N. 20° E. La partie septentrionale basse, est formée 
par des marnes grises tertiaires avec cristellaires, surmontées par des 
calcaires grossiers blanchâtres qui , au-dessous de Kastri, renferment des 
Ostrea Boblayei, des clypéastres et des astrées. L’île paraît dépourvue 
de sources, el il n’y a que des citernes. Par suite des vents qui s’y font 
constamment sentir, et sans doute aussi de l’incurie des habitants, il n’y 
a d’autres arbres que quelques caroubiers et figuiers rabougris ; mais 
certainement 1] pourrait en venir de plus beaux dans les parties abritées 
des vallons. Dans les sables voisins de la mer, il y a une grande quantité 
de genévriers d’une espèce particulière, dont on mange les fruits qui 
n’ont pas une saveur désagréable. Les habitants, au nombre d’un millier 
dit-on (chiffre que je suis disposé à croire porté au double de la 
réalité), et pour la plupart Sphakiotes, sont répartis dans les quatre 


(201) 
villages et dans des metokhi épars sur un grand nombre de points. Non 
loin de Kastri il y a une Panaghia, desservie par un papas. Un Arnaoule 
réside dans l’île pour empêcher la contrebande, et surtout les infractions 
aux règlements sanitaires que pourraient commeltre les bâtiments 
étrangers. 

Après avoir fait le tour de l’île, j'arrivai le soir au port, croyant repas- 
ser immédiatement à Sphakia, mais le vent était contraire et je dus pas- 
ser la nuit dans une cabane de branchages. Le lendemain, il n’avait pas 
changé et je dus encore me résigner à y rester la journée, car je ne 
pouvais m’éloigner crainte de manquer un moment favorable pour 
parti, j’employai celle-ci à rédiger mes notes et à transcrire mes 
observations hypsométriques. Je m’élais endormi avec la crainte 
d’y séjourner plusieurs jours encore peut-être, lorsque vers minuit 
un vent demi-favorable s’éleva; nous partimes immédiatement, et, 
moitié à la voile, moitié à la rame, nous atteignimes Sphakia à 9 h. du 
matin, sans que j’eusse ressenti la moindre incommodité de la mer. 

L’ilot Gaudhopoula, qu’on aperçoit bien des hauteurs d’Ampelos , est 
un petit plateau de 150 environ d’aliitude, tombant doucement à la 
mer, excepté au S.-0. où il est limité par une falaise verticale. Il est 
inhabité. 

Des hauteurs d’Ampelos , comme de la plage de Lavraka, la vue s’étend 
sur la côte méridionale de plus de la moitié occidentale de la Crète, du 
cap Krio, bien*au-delà du cap Matala; comme le temps était en partie 
couvert, ce ne fut que successivement que j’aperçus la chaine côtière 
de Messara avec le Kophinos, la plaine de Messara et les Paximadhi qui 
sont au devant, le Psiloriti qui se lie au Kedros, les quatre chaînons 
montagneux qui limitent le plateau de Rhethymnon. Vis-à-vis, au N., 
est le grand massif des Aspra-Vouna divisé en trois parties par le pharan- 
cha de Komitadhès et la vallée d'Haghia-Roumeli ; le massif oriental n’a 
pas une grande hauteur; celui du milieu, le plus élevé, est à peu près 
horizontal ; celui de l’O., se compose seulement du Volakia et de la pente 
occidentale, qui est un peu élargie. Le col du passage de Komitadhès a 
une altitude moindre que celui d'Haghia-Roumeli, mais il ne paraît pas 
pour cela plus profond , les montagnes étant moins élevées. À l'O. enfin, 
la Crète est terminée par le plateau de Selino, qui s’abaisse légèrement à 
l’O., et plus rapidement au voisinage du cap Krio. 

Retour à Khania par Haghia-Roumeli et Lakous, 22-28 octobre. — A 
mon arrivée à Sphakia , je trouvai mes mulets dans le plus pitoyable état ; 


(362) 


l’un deux , pendant ces trois jours d'absence était devenu si maigre, qu'il 
semblait une carcasse plantée sur quatre échalas ; le Grec qui devait les 
garder, ne leur avait donné aucune nourriture pendant deux jours, 
crainte, me fit-il dire, de n’être pas remboursé de ses avances. Je me 
hâtai de leur faire prendre une ration modérée, et à midi, je remontai 
par Komitadhès, le chemin d’Askypho; le kapetania me reçut assez 
bien , d’après une recommandation de M. Andhrouli, représentant de 
l’éparkhie , à Khania. 

Le lendemain à deux heures du matin, j'étais en marche avec Michiele 
et un bon guide, Khristodhoulos, pour les hautes cimes de Sphakia. Par 
un beau clair de lune, sans le moindre nuage, nous montâmes d’abord sur 
une pente couverte d'arbres clair-semés; puis, après une plaine assez unie 
en pâturages , nous arrivàmes , par un contrefort dépourvu de végétation 
et formé de calcaire grenu blanchâtre, au haut d’une première sommité, 
le Kastro ; il était 7 heures ; le soleil se levait, quelques nuages parais- 
saient au-dessus des montagnes; un vent du $., assez fort, abaissa mon 
thermomètre à 4°5 et, d’après le baromètre, j'étais à environ 2150 d’al- 
titude. Au S., se trouvait un autre pic plus élevé; parmi les montagnes 
voisines , je vis le grand cône du Soro, et plus bas, séparé par un profond 
vallon, le chaïinon qui borde la plaine de l’Apokorona. Dans le lointain 
se dessinait bien, la plaine et la côte de Khania, l’Akroteri du cap Meleka, 
le cap Dhrapano, le plateau et la côte de Rhethymnon, et enfin les massifs 
du Psiloriti et du Kouloukouna. A l’O., étaient les plus hautes cîmes des 
Aspra-Vouna que j'avais aperçues lors de mon ascension au Soro, le 
15 juillet, en descendant pour y aller, j’aperçus plusieurs immenses 
vallons, dont le fond très-large présente beaucoup de grandes fosses, en 
général circulaires, creusées dans les calcaires magnésiens noirâtres. Le 
vent avait changé et, à 9 heures, la pluie étant assez forte, nous fûmes 
obligés de prendre un refuge à l’entrée d’une caverne, située à 1700" 
d'altitude, dans le fond d’un grand vallon qui débouche à Mouri. Une 
recrudescence de pluie nous força derechef à nous abriter dans une 
caverne du fond d’une des fosses du vallon d’Anopolis ; près d’elle, se 
trouvait un gâteau de neige de l’hiver précédent, qui n'avait plus que 
Ow 50 de largeur, sur 015 d’épaisseur. La pluie ne cessant pas, je me 
décidai à terminer mon exploration, et, montant sur les pentes rapides 
des calcaires noirs, mais bientôt blanchâtres, nous arrivàmes au pied 
d'un grand cône que le guide m’assura être le plus élevé, le Theodhori. 
La pluie tombait en abondance à sa base ; à 200 ou 300v du sommet, elle 


(363) 


commença à être mêlée de neige fondante;, sur celui-ci il ne tom- 
bait que de la neige entièrement sèche, et seulement depuis peu de 
temps, car il n’y en avait pas 3 centimètres d'épaisseur. Il était 1 heure 1/4, 
un vent de N.-0. soufflait fortement, la neige ne permettait pas de voir à 
dix pas; Khristodhoulos craignant de ne pouvoir retrouver le chemin si 
on tardait, je ne restai sur la petite plate-forme que le temps nécessaire 
pour observer le baromètre; je ne l'avais jamais vu aussi bas, il était à 
574nm 9, ce qui comparé à la hauteur de celui de Khania au même moment, 
me donna par la suite une altitude de près de 2,400, la plus haute que 
j'eusse atteinte dans l’île, après celle du Psiloriti. Nous rejoignimes la 
vieille neige ; puis, suivant le large vallon presque horizontal qui aboutit 
à une sorte de terrasse, élevée de 1,600", nous atteignimes la zone des 
yeuses et des pins d'Alep; nous la traversämes dans le fond d’un vallon 
étroit, à pente rapide, entaillé dans les calcaires grenus noirâtres et 
blanchâtres , qui nous amena à la partie supérieure de la plaine d’Ano- 
polis. La pluie avait cessé, le ciel était à demi-découvert, et grâce à mon 
manteau de caoutchouc, j'étais presque séché, lorsqu'un peu avant 6 heu- 
res nous entrimes chez la sœur de Khristodhoulos , qui nous fit grande 
fête ; la température était de 14° sur ce plateau de 600" d’élévation au- 
dessus de la mer. 

Le lendemain je renvoyai Michiele, qui devait reprendre les mulets à 
Askypho, pour les conduire directement à Khania, et je repris seul le 
chemin d'Haghia-Roumeli, car j'avais encore à visiter la partie supérieure 
de la vallée de Samaria et Omalos. Il avait plu le matin et, à 9 heures, 
la température n’était que de 16°; les nuages diminuërent, et lorsque 
j'atteignis la mer à Haghios-Paulos, où malgré le peu d’agitation de la 
mer, je ne pus trouver le moindre indice de la source, le ciel était pres- 
que clair, tandis qu’il pleuvait de nouveau dans les montagnes ; le ther- 
momèêtre à l'ombre, marquait 22°. Le ciel était déjà à demi-couvert à 
Haghia-Poumeli, où je dinai chez le papas qui n'avait reconnu ; sur son 
conseil, je m'empressai de remonter la gorge où la pluie me prit presque 
aussitôt. Le torrent assez volumineux en mai, l’était si peu, que nulle 
part je ne fus obligé de me déchausser ; le Kephalovrysis moins abon- 
dant aussi, marquait 130. Il y avait à peine cinq minutes que je venais 
de quitter le lit à sec du torrent supérieur, pour entrer dans la plaine 
ravinée de Samaria, lorsque j’entendis un bruit sourd considérable; 
quelques secondes après, je vis venir un torrent boueux jaune, qui rem- 
plissait le lit du torrent, et qui se précipita avec fracas dans la gorge. Si 


( 364 ) 

j'étais resté un quart d'heure de plus dans celle-ci, j'aurais été obligé de 
im’arrêter dans un de ses élargissements, et d’y séjourner deux jours, et 
peut-être même trois, sans abri contre la pluie et le froid, et avec fort 
peu de nourriture, avant de pouvoir gagner Samaria ou même Haghia- 
Roumeli. Comme le chemin habituel du village traverse plusieurs fois le 
lit du torrent, j'étais encore assez inquiet ; par des sentiers détournés 
sur des pentes escarpées , je parvins cependant à un hameau inférieur, 
où après quelques pourparlers, rendus difficiles par le peu que j'avais pu 
apprendre de la langue grecque, je fus accueilli par une veuve et ses 
deux grands garçons. 

La pluie cessa le lendemain, mais le chemin d’Omalos empruntant 
très-souvent le lit du torrent, ses eaux hautes et bourbeuses ne me per- 
mirent pas de partir; le jour suivant je fus encore retenu, car si elles 
s’étaient éclaircies, elles étaient encore bien grosses. Je passai ces deux 
journées fort tristement à rédiger quelques notes , n’ayant qu’une plan- 
che et une peau de mouton pour lit, table et siége et, pour toute nourri- 
ture, que du pain d’orge noir et bien dur, et du fromage blanc passable- 
ment aigri. Je craignais aussi que M. Hitier ne pensât qu’il m'était arrivé 
quelqu’accident dans ces sauvages montagnes. 

Pendant ce séjour, la température ne varia , d’une journée à une autre, 
que de 11° à 13°; la neige qui était tombée pendant que j'étais au Theo- 
dhori, avait entièrement disparu; des cascades , qui par la pluie se pré- 
cipilaient du haut des rochers sur plusieurs points, donnaient à la haute 
vallée une physionomie différente de celle que je lui connaissais et qui 
n’était pas sans quelque charme dans un pays aussi sec que la Crète. Je 
me procurai une peau, un crâne en mauvais état et plusieurs paires de 
cornes de bouquetin , ou agrimi, qui ont été déposées avec toutes mes au- 
tres collections, au Muséum de Paris. 

27 octobre. — Les eaux étant suffisamment basses, je partis de grand 
matin avec un de mes jeunes hôtes pour guide. Le chemin traverse une 
dizaine de fois le ruisseau qui, sur plusieurs points, baigne le pied de 
rochers verticaux de calcaire grenu gris; dans un petit élargissement se 
trouve la petite chapelle d'Haghio-Nikolaos, entourée d'énormes cyprès 
très-vieux , mais en parfaite végétation. Au-dessus, la pente du vallon 
devient plus rapide dans les bois clair-semés et l’on a au-dessus de soi les 
immenses escarpements presque verticaux du Volakia, dont le sommet 
était déjà couronné de neige; la partie supérieure du vallon, tellement 
rapide que les hommes seuls peuvent y passer, est désignée sous le nom 


(( 3650) 

de Xyloskalo ; je renvoyai mon guide avant le col large, allongé et légè- 
rement incliné au N., par lequei on arrive à Omalos. Dans cette haute 
plaine, je me trompai de chemin et j’arrivai aux mares qui sont dans la 
partie centrale et dans lesquelles, vu l’état avancé de la saison, je ne 
trouvai aucune plante à récolter, non plus que dans les parties incultes 
ou cultivées. Je repris au N.-E. etje sortis par un col, élevé de 50" au-des- 
sus des bas-fonds de la plaine. Le chemin de Lakous praticable, non pour 
les mulets, mais seulement pour les bœufs, comme le témoignaient les 
nombreuses empreintes de leurs pas, sillonne une série de petites plai- 
nes circulaires, puis un grand vallon, également dans les calcaires com- 
pactes, qui va déboucher à Meskla. Il remonte par un large vallon sur les 
contreforts de taischistes et de quartzites gris ou rougeûtres, couverts 
d’oliviers, dans lesquels se perdent les nombreux hameaux de Lakous ; 
l’église est à 530" d'altitude ; on a une belle vue sur les pentes talqueu- 
ses inférieures du plateau opposé de Thériso, sur cette partie supérieure 
de la plaine de Khania et sur ses nombreuses ramifications dans les 
calcaires compactes, au-dessus de Meskla. 

Je descendis sur une arête de talschistes très-décomposés, couverte 
d’arbousiers dont les fruits, à peu près mürs, me firent grand plaisir ; 
peu après mon entrée dans la plaine, je traversai le ruisseau fort et trou- 
ble qui descendait alors à Platania et, à la chute du jour, j'arrivai à Phour- 
né, grand metokhi du Pacha. Je frappai longtemps à la porte ; enfin, grâce 
à une lettre de Kerim-Bey, dont j'étais porteur, elle s’ouvrit et je fus par- 
faitement reçu. 4 

Le lendemain matin je traversai la plaine de Laghia, dans laquelle le 
ruisseau occasionnait de grandes îles, et, à 11 heures, j'arrivai chez 
M. Hitier, qui fut même surpris de me voir aussitôt, pensant bien que les 
pluies avaient dû entraver ma marche en plus d’un endroit. 

Dernièreexcursion à Malaxa (14-15 novembre), et départ de la Crète. — 
Je passai encore six semaines en Crète, M. Hitier n’ayant pas voulu que 
je partisse avant d’être complètement remis des fatigues d’une explora- 
tion qui avait été si active depuis le commencement de juin, c’est-à-dire 
pendant cinq mois. Je continuai les observations météorologiques qui 
avaient été commencées le 4e juin, par M. et Mwe Gaspary; je fis un cro- 
quis de carte géologique de la Crète, je mis en ordre mes nombreuses 
collections géologiques et botaniques , et souvent j’allai compléter mes 
observations dans les alentours de Khania. 

Les 14 et 15 novembre , M. Ilitier allant chasser le lièvre et la perdrix 


( 366 }) 
à Malaxa avec M. Gaspary, je les accompagnai; nous montâmes par le che- 
min ordinaire , dont les buissons montraient çà et là le Clematis cirrhosa 
tout couvert de fleurs , et nous allâmes coucher chez le dhaskalos, qui 
nous fit un parfait accueil dû , en partie peut-être, aux excellentes provi- 
sions que le consul avait apportées. Pendant la chasse, j’allai revoir le pla- 
teau que j'avais exploré trop imparfaitement le 8 mai, et dont j'avais à 
prendre l’altitude. Du sommet, qui est un petit mamelon de calcaire grisä- 
tre, par un ciel presque exempt de nuages et un vent d’O. à 12, je pas- 
sai en revue tout ce qui se montrait au-dessus de l’horizon : au-dessous 
de. moi l’Akroteri, terminé par le chaînon du cap Meleka ; dans l’0., le 
Khaniotika et le golfe de Khania, limité par le cap Spadha, et l’Apopi- 
ghari, derrière lesquels pointaient le cap Grabousa et l'Haghios-Elias ; 
la masse du Volakia se séparait peu de la multitude de cônes des Aspra- 
Vouna, sur lesquels s’étendait un manteau de neigé dont les bords se 
relevaient graduellement depuis une quinzaine de jours. À l’E., la phy- 
sionomie de l’île était bien différente : une épaisse couverture de nuages 
d’un blanc mat, dérobait toutes les parties basses à la vue; de l’Apo- 
korona, je n’apercevais que le plateau de Kambous, la ceinture de mon- 
tagnes qui vient se terminer à l’Almyros, et le plateau de Kephala; au-delà, 
perçaient comme des îlots montueux, illuminés par le soleil, le Kou- 
loukouna , le Psiloriti , le Kedros et quelques-uns des chainons de la côte 
méridionale. Restait encore la mer, que je contemplai dans son immen- 
sité. En me retournant, j'éprouvai un bonheur indicible , en jetant un 
dernier regard sur ces plaines et ces plateaux que j'avais parcourus, 
sur ces cimes escarpées que j'avais péniblement gravies ; sur ce pays 
enfin, dont j'avais acquis la connaissance au prix de tant de fatigues, 
et qui était dès ce moment un domaine scientifique véritable, pour 
moi seul. 
Ce devait être le regard sauvage de l’aigle sur sa proie expirante ! 


Le 17 décembre à midi, j'avais embrassé MM. Hitier et Gaspary; le 
Kirit avait le cap sur Syra. 


( 301) 
CHAPITRE IV. 
POPULATION, AGRICULTURE, INDUSTRIE ET COMMERCE. 
19 POPULATION. 


Caractères particuliers des habitants.—En Crète, la population actuelle 
possède des caractères généraux assez semblables ; ceci devait inévitable- 
ment arriver, les Musulmans de l’île étant, soit les descendants des 
Chrétiens convertis dans les premiers temps de la conquête, soit ceux 
des Tures conquérants qui se sont presque constamment alliés aux plus 
belles Chrétiennes, comme leurs pères, et ont ainsi fini par prendre tous 
les caractères physiques de ces dernières, et ne plus conserver du turc que 
les croyances religieuses : « Ce qui porterait à croire que la beauté plus 
générale des femmes, en Turquie, dit Olivier (1), contribue beaucoup à la 
beauté des hommes, c’est que les Turcs de Crète, qui sont dans l’usage, 
depuis qu’ils occupent l’île, d’épouser au capin les plus jolies Grecques 
du pays, sont encore plus beaux que ceux du reste de la Turquie. Ils sont 
aussi, bien plus intelligents : on croirait, à les voir et à les entendre, 
qu’ils ont reçu de leur mère quelques étincelles de cet esprit brillant, 
de cette sagacité vive dont les Grecs sont doués, et qu’ils ont conservé 
dans l’esclavage même. » 

Les Musulmans, en effet, ont une haute stature, des muscles forte- 
ment accusés, la poitrine élevée, les épaules larges, toutes les proportions, 
enfin, qui caractérisent la force, la santé et la beauté. Leur tête régu- 
lière , offre des traits agréables bien prononcés, mais une expression de 
gravité et de dureté en rapport avec le rôle qu'ils jouaient dans l’île jus- 
qu’à la révolte de 1821. Les femmes sont généralement plus belles que 
dans les autres parties de l'Orient. 

Les Chrétiens un peu plus petits, moins beaux, quoique un peu plus 
gracieux, n’ont pas l'intelligence aussi développée, la même activité 
corporelle que les autres Grecs de l’Archipel; ils ont certainement 
dégénéré par suite de l’asservissement, qui dégrade également les formes 
du corps et les qualités de l’âme; ils sont arrivés à un état de démorali- 
sation plus avancé encore que celui dés Musulmans, surtout pour ceux 
qui ont reçu une légère teinte d'instruction. Je n’ai rien à ajouter à ce 
que j'ai dit, page 161, à l’occasion de mes préparatifs de voyage. 


(1) Voyage dans l'Empire Olhoman, T. I. p. 421. 
Tome XXIT. 90 


( 368 ) 

Les femmes ont généralement moins de charmes que dans les autres 
parties de l'Orient; leur gorge fort belle se déforme de très-bonne heure ; 
leur figure , avec un ovale différent de celui des Européennes , présente des 
traits nobles ; elles ont des yeux superbes et une chevelure d’un noir 
brillant, formant le plus souvent de longues tresses. 

Les Sphakiotes toutefois font exception ; à la faveur de leur constante 
indépendance, ils ont conservé leurs belles proportions et un esprit indus- 
irieux, nécessité par leur isolement. Aujourd’hui, comme en 1422, on peut 
dire d’eux avec Buondelmonti (1), sunt asperi in bello, magni, velocis- 
siümi in montibus, usque ad centum annos vivunt sine infirmitatibus. 

Les Juifs se trouvent en Crète comme partout ; ils ont presque toujours 
un faciès particulier, comme leurs co-religionnaires de Smyrne, de Stam- 
boul et souvent même de France; un nez fortement aquilin est leur carac- 
ière distinctif le plus prononcé. Savary en portait le nombre à 200 en 
1780 ; Tancoigne, en 1814, l’estimait de 400 à 500; d’après M. Charpin, il 
serait actuellement de 1,000. Dans les villes, ils sont marchands ou pré- 
teurs d’argent à gros intérêt ; dans les campagnes, ils se livrent exclusi- 
vement au colportage. 

Pendant mon séjour, les riches Musulmans possédaient un certain 
nombre d'esclaves africains : domestiques et cullivateurs dans les campa- 
gnes ; domestiques, jardiniers, ou travaillant au dehors pour le compte 
du maître, dans les villes. Dans celles-ci, il y en avait aussi de libres, 
formant des sortes de corporations : les femmes étaient blanchisseuses, 
et les hommes, possesseurs d’ânes, exerçaient les métiers pénibles et 
rebutants. 


I y avait en outre dans les villes, des Hellènes, des Tsérigotes et des 


Maltais, portefaix et bateliers pour la plupart. Je n’ai rien à ajouter à ce 
que j'ai dit des Arnaoutes et de la garnison arabe. 

Maladies. — Le climat de la Crète est très-sain, tout aussi bien dans 
les plaines que dans les montagnes. Aussi, les maladies sont peu fré- 
quentes. Cependant en été et en automne, de juin à la fin de septembre, 
dans les parties basses et humides , surtout dans‘celles qui sont arrosées 
par des eaux même vives et pures, les fièvres intermittentes ou gastri- 
ques sont assez fréquentes ; mais heureusement elles sont peu dangereu- 


ses. Les habitants sont sujets à un bubon qui ressemble au bouton 
d'Alep. Les villes sont salubres, surtout Rhethymnon et Khania. 


(1) Cornelius, Creta sacra T. 1. p. 4. 


( 369 ) 

Pour remédier aux ravages de la petite vérole , Méhémet-Ali avait or- 
donné des vaccinations gratuites; mais elles ne purent guère être prati- 
quées que dans les villes, les campagnes étant dépourvues de médecins. 

La population musulmane indigène est fort saine en général; mais il 
n’en est pas de même de la population chrétienne; les maladies de la peau 
sont fréquentes, ce qui est attribué par les personnes éclairées du pays, 
à la nourriture beaucoup moins bonne dont elle fait usage : car, aujour- 
d’hui comme à la fin du siècle dernier, pendant la servitude, les culti- 
vateurs se nourrissent toute l’année de pain d’orge, d'olives salées et de 
plantes sauvages; mais c’est surtout aux fréquentes abstinences (1) pen- 
dant lesquelles elle se nourrit de poisson, et surtout de morue qui n’est 
guère apportée dans l’île que lorsque sa mauvaise qualité n’en permet 
plus la vente sur les marchés occidentaux ou en Grèce. 

Jusqu'en 1856, il n’y eut que des hôpitaux militaires dans les villes ; 
mais après le tremblement de terre du mois d'octobre, Vély-Pacha en 
créa deux pour les habitants. Celui de Megalo-Kastron fut improvisé 
dans le palais de son père, sous la direction d’un médecin français, 
M. Vaume; du 17 octobre au 22 juin 1858, il y avait déjà eu 16,512 
journées de malade. L’hôpital de Khania a été doté par Saïd-Pacha, vice- 
roi d'Egypte, et par Vély qui y affecta ce que la loi lui attribuait pour 
les affaires qu’il jugeait. C’est à l’aide de ces ressources et de taxes mu- 
nicipales , que les médecins sont rétribués et les médicaments payés. 

Une affection plus grave est la lèpre, qui consiste en une tuméfaction 
rouge et écailleuse de la peau , accompagnée de déformation et d’endur- 
cissement empêchant plus ou moins les mouvements des différentes par- 
ties du corps. Elle est héréditaire et même, dit-on, contagieuse; aussi 


(1) Pendant toute l’année, les Grecs orthodoxes doivent s'abstenir le mercredi et le 
vendredi, non-seulement de viande , mais même d'œufs. Dans les jours, et souvent 
même la semaine, qui précèdent les fêtes religieuses et celles d’un grand nombre de 
saints, le poisson est même défendu. Pâques, Haghion-Paskha ou Lampré, est pré- 
cédé d’un grand carème de 48 jours, Meghali-Sarakosti, pendant lequel la viande, le 
lait, le fromage, le poisson à sang et même les œufs, excepté pendant la première 
semaine, sont défendus ; de nouvelles sévérités sont ajoutées pendant la semaine sainte. 
Un second carème précède la fète des apôtres saint Pierre et saint Paul H. Petrou 
kai Paulou (on Apostolon; il commence à la première semaine de la Pentekostis 
et dure 12 à 15 jours; le poisson est permis, mais non les laitages. Le troisième, de 
15 jours, précède la fête de la Panaghia, l'Assomption; le poisson n’est permis que 
le 6e jour. Enfin, un quatrième carème de 40 jours précède Noël, Khristou-Ghennesis; 
le poisson n'y est interdit que le mercredi et le vendredi. 


( 310 ) 

n'est-il pas permis aux familles pauvres qui en sont atteintes, à quel- 
que religion qu’elles appartiennent, de résider isolément dans l’intérieur 
de l’île. Elles doivent forcément se fixer dans chaque misérable village, 
situé près de la principale porte de chacune des trois villes, dont il ne 
leur est permis de franchir le seuil sous aucun prétexte. Toute espèce 
de commerce leur est interdit, même celui des œufs de leurs poules, par 
crainte de la transmission. Ils sont alors réduits à vivre de la culiure 
de leurs jardins et d’aumônes qui sont leur principale ressource ; aussi 
sont-ils toujours aux portes des villes à obséder les passants de leurs 
sollicitations. Leur nombre, qui était estimé de 300 à 400 en 1838, 
allait croissant par suite de la liberté qui leur était laissée de se marier 
entr’eux. | \ 


La peste est un autre fléau de l’Orient, dont les Vénitiens s'étaient à 


peu près préservés en Crète, en établissant des lazarets et des règle- 
ments sanitaires sévères. Sous les Turcs fatalistes, tout fut immédiate- 
ment abandonné; aussi les habitants furent-ils souvent décimés par 
cette maladie qui leur était apportée de Constantinople, de Smyrne et 
d’autres lieux moins importants. Ils se ravisèrent cependant dans la suite, 
et dit Olivier (1), « ces Turcs sont les seuls dans l’Empire, qui aient osé, 
malgré les préjugés de leur nation, soumettre à une sorte de quaran- 
taine tous les étrangers qui viennent d’un pays infesté de la peste. Ils 
portent même la précaution jusqu’à interdire leurs ports aux navires qui 
ont des malades suspects. — Mais comme ils ne peuvent empêcher l’a- 
bord d’un vaisseau de guerre turc ni le soumettre aux réglements sani- 
taires de l’île, les précautions qu’ils prennent à l’égard des autres, sont 
très-souvent insuffisantes. — C’est ainsi qu’un kerlanguisch de la Porte, 
arrivé à la Canée en l’an 4, y apporta une peste des plus contagieuses et 
des plus meurtrières, qui dans moins de deux ans a parcouru toute l’île 
et enlevé au-delà du quart de la population. Elle n’avait pas encore cessé 
lorsque nous sommes partis de Constantinople en l’an 6, quoiqu’elle eût, 
depuis plusieurs mois, beaucoup perdu de sa malignité. » En 1821 et1822 
pendant l'insurrection, la peste sévit fortement dans les villes, notam- 
ment à Khania, où la population musulmane s’était entassée, et n’avait 
à boire que de l’eau saumâtre des puits, par suite de la rupture des 
aquéducs. 

En mai 1831, le système des quarantaines sérieuses, fut établi par 


(1) Voyage dans l'Empire Olthoman , t. 1, p. 422. 


(900) 

Méhémet Ali, qui fit élever un lazaret contigu à la forteresse de Soudha, 
à 9 milles de Khania ; il coûta environ 46,000 fr., et fut desservi presque 
exclusivement par des Tsérigotes ; les recettes excédaient chaque année 
les dépenses. Les consuls européens furent réunis en comité à Khania , 
sous la présidence du D' Caporal; mais par défaut d'entente, celui-ci 
demeura seul au bout de œuelques années. Le service sanitaire fut mis 
sur le pied de ceux du reste de l’Europe; la patente fut rigoureusement 
exigée de tout navire abordant l’île; des Arnaoutes, chargés de faire exé- 
cuter les réglements, furent postés sur toutes les côtes, et jusque dans 
la petite île de Gaudhos. Les marchandises suspectes devaient être dé- 
barquées au lazaret; mais les bâtiments qui n’en avaient pas, pouvaient 
purger leur quarantaine, soit dans la baie, soit à l’île Dhia, pour ceux 
qui étaient à destination de Megalo-Kastron. Il avait été question d’a- 
grandir le lazaret, en le transportant au fond de Ja baie; mais par suite 
de la difficulté de trouver un emplacement salubre et commode, il n’é- 
tait plus question de ce projet en 1845. À Khania, il y avait pour les 
passagers un petit lazaret bien tenu, où les dépenses étaient fort modé- 
rées. Jusqu'en 1839, la peste avait été à plusieurs reprises au lazaret de 
Soudha, ou à bord de la flotte égyptienne mouillée dans la baie, mais 
elle ne s’était pas une seule fois répandue dans l’île. En 1845, le même 
système se continuait sous le nouveau directeur, le docteur Mongieri. 
Toutefois, les navires venant de la Crète, comme des autres parties de 
l’Empire Ottoman, n'étaient admis à la libre pratique avec patente nette, 
même à Syra, qu'après une quarantaine de huit jours. 

Chiffres successifs de la population. — Celle-ci a éprouvé des fluc- 
tuations très-considérables pendant la succession des temps. Les auteurs 
anciens l’évaluaient à 1,000,000 ou 1,200,000 âmes. « Mais depuis ces 
temps fortunés, dit Savary (1), elle a perdu ses lois sous le joug de 
Romains ; elle a gémi sous les règnes malheureux des Princes corrompus 
du Bas-Empire ; elle a été ravagée cent vingt ans par les Arabes; elle à 
passé sous la domination de Venise; enfin, elle a été soumise au despo- 
tisme des Ottomans, qui ont causé, dans toutes les contrées qu'ils ont 
conquises, une dépopulation effrayante. » 

Le chiffre d’un million, répété par tous les auteurs modernes, me 
semble très-exagéré, je dirai même impossible. En effet, la surface de la 
Crète étant d'environ 7,800 kil. carrés, il y aurait eu 128 à 154 habitants 


— — 12 — 


(1) Lettres sur la Grèce, p. 554. 


Tome XXII. ol 


( 312 ) 
par chacun d'eux, chiffre qui n’est atteint et dépassé en France, que dans 
les deux départements du Nord et du Rhône, où se trouvent des villes de 
71,000 (Lille) et de 256,000 âmes (Lyon). En admettant que la Crète, 
formée, pour près des deux tiers, par des montagnes extrêmement arides, 
et qui n’a jamais renfermé de villes très-considérables , ait eu une popu- 
lation égale, pour une moitié en plaines et plateaux, à celle du départe- 
ment du Nord, et pour une moitié en montagnes, à celle des Basses- 
Alpes, sa population totale n’aurait pas atteint 913,000 habitants; en 
effet : 

Nord, 5,681ke : 1,249,353h :: 1/2 Crète, 3,900kc : 828,758h 


912,697 
Basses-Alpes, 6,954kc : 149,670h :: 1/2 Crète, 3,900kc : 83,939h 


Certainement, la Crète n’a jamais été aussi peuplée. Elle a dû possé- 
der un nombre d'habitants supérieur à celui de 260 à 280,000 qu’elle 
paraît avoir eu, en moyenne, sous les Vénitiens et les Turcs; mais c’est 
à mon avis lui faire la part bien belle, que d’admettre qu’elle ait eu une 
population égale à celle que possèdent aujourd’hui, soit les six départe- 
ments pyrénéens (Basses-Pyrénées, Hautes-Pyrénées, Haute-Garonne, 
Ariège, Aude et Pyrénées-Orientales), soit les sept départements Alpins, 
(Isère, Hautes-Alpes, Drôme, Basses-Alpes, Vaucluse, Bouches-du- 


Rhône et Var), dans lesquels se trouvent des villes de 92,000 ({Tou- 


louse) et 215,000 âmes, (Marseille) ; ou bien encore ceux au nombre 
de six qui bordent la Méditerranée (Var, Bouches-du-Rhône, Gard, 
Hérault, Aude et Pyrénées-Orientales), dont le sol est beaucoup moins 
montagneux et aride, et dans lesquels on compte une ville de 215,00) 
âmes (Marseille) et trois de 41 à 49,000 (Toulon, Nîmes et Montpellier). 
D’après la population spécifique , par kilomètre carré, des trois groupes 
de départements précités, en 1856, voici celles que la Crète aurait dû 
avoir, si elle avait été aussi pleine que ces diverses parties de la France : 
6 Départements pyrénéens, 57,6 Crète, 449,000 
7 Départements alpins, 53,3 — 416,000 
6 Départements méditerranéens, 58,3 — 455,000 
On pourrait essayer de comparer la Crète à la Corse; mais dans cetie 
île, beaucoup plus montagneuse et moins cultivée , les habitants ne dé- 
passent pas 27,46 par kilom. carré; la Crète n'aurait proportionnelle- 
ment qu’une population de 203,000 âmes , évidemment inférieure à celle 
qu'elle a possédé à diverses reprises ; en effet : 


Corse, 9,244ke : 240,183h :: Crète, 7,800 : 202,730b 


(373) 


Je ne pense pas finalement que la population de la Crète ait jamais 
atteint et à plus forte raison dépassé 500,000 âmes, dans les temps les 
plus prospères. Lorsque les auteurs disent que, lors de l’achat des Véni- 
tiens, elle était réduite à moitié et atteignait ce chiffre, je crois bien 
qu’elle était en effet réduite à moitié ; mais c’est le chiffre de 200 à 250,000 
que l’on doit, je crois, adopter, celui des meilleurs jours des domina- 
tions véuitienne et turque. 

Quoi qu’il en soit, sous la domination vénitienne les provéditeurs ne 
cessèrent d'appeler l’attention sur la dépopulation incessamment crois- 
sante de l’île. En effet, le recensement fait sous Foscarini en 1577, et 
rapporté par Barozzi (1), accusa seulement 183,198 habitants dans les 
campagnes, non compris les familles nobles. À cette époque, le Regno 
di Candia était divisé et la population répartie de la manière suivante : 


& |[3:|avomm TOTALE 
DISTRETTI. CASTELLI Casa. |=|=2 FEMINE. | PUTTI. | VECCHI. |(sunza no- 
2 £| ve parmi. BILI). 


Castel-Chissamo.. 92 


Castel-Selino..……. 63 
CANEA.…. 1 " o7| 961152|13,908 | 26,220 | 16,657 | 1,850 | 55,655 
Castel della Sfachia. 8 
Castel-Franco.…. 92 
{San-Basilio .….… 70 
\Retio RE One 92 û | 7 : ; 5 
RErTINO 289) 64) 50) 11,194 | 21,748 | 10,777) 1,605 | 45,524 
Milopotamo..… . 66 
We see : 
Castel-Malevisi.. 36 
Castel-Temenos.. 42 
Castel-Priotissa.. 25 
Cana [CSI Novo.… 59! 6). 1200! 19,478 | 37,607 | 18,977 | 2,090 | 78,152 
Castel-Bonifacio.. 98 
Castel-Pediada.. 94 
Castel-Belvedere. 65 254 
Castel-Mirabello.. 16 
Sr NGirapetra SÉPARER L : 69/....| 25] 3,562| 7,100! 3,600 195 | 14,687 
ISithiate at 52 | | 


| 
1,066 3941407) 48,142 | 92,675 | 47,011 | 5,970 |185,198 


(t) Descriltione dell'Isola di Creta , manuscrit. (Bibliothèque du Roi, à Paris), 
feuillets 30 et 51, 


[® 


( 374 ) 

Avec les nobles et la population des villes, les habitants étaient au 
nombre de 219,000, comprenant 55,645 Huomini da fattione, ou en 
état de porter les armes, dont 29,218 dans les cités et 26,427 dans les 
campagnes ; soit une moyenne de 28,08 habitants par kilomètre carré, à 
peu près comme actuellement en Corse. En temps de guerre, l’île devait 
fournir les hommes nécessaires à l’armement de 10 des 85 galères de la 
République. 

Des améliorations apportées par le ‘provéditeur, arrêtèrent les progrès 
du mal et amenèrent un résultat inverse, puisque l’on admet que trois 
quarts de siècle plus tard, au milieu du XVI, la population était remon- 
tée à 260,000 âmes environ; ce qui donnait 33,33 habitants par kilo- 
mètre carré, moitié de la population moyenne de la France ou de celle 
du département des Vosges. D’après Coronelli qui écrivait après la con- 
quête turque , en 1696, et dont les données doivent se rapporter aux 
dernières années de la domination vénitienne, le nombre des Casali et 
des Nobili était le suivant : 


CARE AMENER DOG'CAS NT ET TETE 177 Nob. 
ReTIIMO CLEMAEMENr 28. MN EME NERTENENS 66 
CenAia RP PPT Vel DU AD DR ie 202 
SeIUANERT DEAR: 83 

1,152 1 545 


La conquête turque que les Crétois avaient d’abord favorisée, amena 
avec elle de tels maux et de tels outrages, que la population diminua 
beaucoup. D’après le récit sans doute fort exagéré de Randolph, en 1687, 
il n’y aurait eu dans l’ile que 50,000 Chrétiens et 30,000 Tures, en tout 
80,000 habitants. 

Parmi les voyageurs de la fin du XVIII: siècle , Olivier est celui dont 
les évaluations semblent le plus vraisemblables; il s’exprimait ainsi 
en 1795 (1) : « Suivant les registres du percepteur du Karatch, la popu- 
lation des Grecs doit être évaluée à cent-vingt mille, car on compte en- 
viron quarante mille hommes payant cet impôt. Si l’on considère ensuite 
le grand nombre de janissaires inscrits dans les villes, et si l’on 
fait attention que quelques villages sont presqu’entièrement peuplés 
de Turcs ou mi-partis de Turcs et de Grecs, on sera porté à croire 
qu'il y a à peu près, dans l’île, autant des uns que des autres, et que le 
total de la population est de deux cent quarante mille habitans. 


(1) Voyage dans l'Empire Olhoman, T. 1, p. 400. 


(315 ) 

« S'il faut en croire les négocians qui ont vieilli dans leurs comptoirs, 
et qui ont porté dans leur commerce un œil observateur, le nombre des 
Grecs diminue insensiblement par l'effet de la servitude, par les émigra- 
tions , par le découragement du cultivateur, par les avanies continuelles 
qu’ils éprouvent. La misère en fait périr d’épuisement ; elle tue surtout 
beaucoup d’enfans ; elle s’oppose à l’union des sexes. On peut présumer 
que si la Porte ne change pas de système à l’égard des non-musulmans, 
si elle ne se décide promptement à les protéger contre ses agens, la 
population des Grecs disparaîtra des lieux occupés par les Turcs; ou 
ceux-ci seront chassés du continent européen à la première occasion qui 
se présentera. » 

Pour le XIX: siècle, deux voyageurs anglais ont admis, après rensei- 
gnements pris dans le pays, qu’il y avait de 260 à 280,000 habitants à 
peu près également partagés entre les deux religions, en 1821, à la nais- 
sance de l'insurrection grecque. C’était surtout l'accroissement de la 
portion musulmane, qui fit dépasser un peu le chiffre atteint, lorsque 
les Vénitiens perdirent l'ile. 

L'un des deux voyageurs, M. Pashley, prit sur les populations chré- 
tienne et musulmane, pendant son séjour en 1834, des renseignements 
fort détaillés desquels il résulte qu’à cette époque la population, qui avait 
déjà repris une marche ascendante depuis quelques années, était seule- 
ment de 129,000 âmes dont 40,000 Musulmans tout au plus. Les deux 
tiers de la population avaient disparu par les massacres , la misère et 
l’émigration; et, chose inattendue, les oppresseurs avaient diminué 
dans une proportion bien autrement considérable que les opprimés. 

Sa distribution des populations dans chaque éparkhie est donnée dans 
le tableau suivant, auquel j'ajoute les noms extraits du tableau officiel de 
la division administrative , publiée dans l'Annuaire de l'empire ottoman 
pour 1855, d’après la traduction insérée par M. Viquesnel dans son 
ouvrage (1). La Crète qui compose l’Eyalet de Kirit ou Krid, y est 
divisée en 3 Livas, puis en 22 Kazas correspondant aux 19 éparkhies, à 
2 des grandes villes et à la plaine de Lassiti. Les populations des villes 
sont portées seulement dans la dernière colonne. 

L'ile possédait alors une population spécifique de 16,34 habitants par 
kilomètre carré, à peine un peu plus des deux tiers de celle de la Corse 
à la même époque (22,50). 


(1) Voyage dans la Turquie d'Europe, T. I. p. !17. 


FAMILLES HABIT ans! 


n 
D] 
| } k ee nr — TAL. 
LIVAS. EPARKHIES (KAZAS) E Re TOTAL. | à % par 
| 


| tiennes.| manes. FAMILLE. 
EEE EE 
| 
[Kisamos ( (Kiçamo). . - - . .. 48 | 1,458 551| 1,795 | 
Selino (Selino).. ...... 61 500! 451 951 
KHANIA.. 5 
#Khanotikail} 00 ait einer 75 | 1,655] 252| 1,907 36,300 
(Hania).\ (Khania) ne Haas. sorere acces IE 5,800 
Apokorona (Difroun)... .. .| 55 | 1,562] 197] 1,759 
Sphakia (Sfakia).. . . . . .. 19 848 0 848 
Haghio-Vasili - 9 ; 
re (Joasil).. . ..| 45 | 818] 208| 1,026 
eurrav. /Rhethymniotika (Retimo) . . .| 30 652] 552] 1,204, ot 
(Retimo). (Rhethymnon) (Refimo). ... |... |...) 3,200 
Mylopotamo ( Mylapotamo). . 920 310| 1,230 
AMATI (AMATE).- eme 39 497| 246 743 
(Megalo-Kastron) (Æandia). .|......| 1.1... | 12,000 
Malevisi (Malviso)....... 25 901 94 995 
Temienos ((Temnes) NC EUR 13 289 118 407 
Kastel-Priotissa (Priolidjé) . .[ 16 268 91 359 
Kænourio-Kasteli ( Kenourio ).| 48 406] 278 684 
Les Ionophatsi (WMenakoudja). . .| 70 238| 589] 8923 
. \Pedhiadha ( Bezié). . . . . . . 172 | 1,530] 396| 1,726\ 50,560 
(Kandia) |. 2 
Rhizo-Kastron ( Rhizo).. . . .| 60 665] 443] 1,10 
: Mirabela. . . . .. 
Mirabello } T ide. .:1.40 1,390] 235} 1,625 
Hierapetra ( Yéra Pétra).. . .| 19 840| 285] 1,125 
SITAN (CSL) rar 77 898 324| 1,222 
EE Familles. . . . . . .|16,133| 5,402| 21,535 
(AL) Habitants. . . . . . .| 80,665] 27,010| 107,675 /128,675 


D’après M. Hitier, consul de France à Khania, la population , treize 
années après, en 1847, pouvait être évaluée à 160,000 à âmes, dont 40,000 
Musulmans. 

A la suite d’un recensement fait en 1858 par les ordres de Vély- 
Pacha, on a publié les résultats partiels suivants , pour le liva de 
Khania (1) : ÿ 


(1) La Vérilé sur les événements de Candie ; 1858. Dans le chiffre de la population 
de Khania ne sont pas comptés les étrangers protégés par les consuls , et la garnison 
composée tant de troupes régulières, {opdjis, formant une fraction du régiment commis 
a la garde de l'ile, que de milices arnaoutes ou zapliès. 


(87) 


Chrétiens. Musulmans. Total. 


Kisamos (en nombres ronds). . . . . 5,000 3,400 8,400 
SONO RME ARE TOR IT 4,016 9 147 6,763 
KDANIOUK AS MEL LEE ARENA 13,469 3,158 16,627 
Khania (avec 217 juifs, 5 arméniens). 4,309 6,124 7,655 
DDR ONARA EEE Ze Le aus c20 ee 11,729 582 12,341 
Sie s MN At US ES 4, 429 » 4,429 

Total (en nombres ronds). . . . . 40,000 16,000 56,000 

Rhethymnon, population totale. . . . . . . . .. eee 4,503 


En admettant que dans les autres livas et éparkhies , l’accroissement 
de la population ait eu lieu dans la même proportion, celle de l’île en- 
_tière auraitété, avec les étrangers, de 172,000 âmes, dix ans après l’éva- 
luation approximative de M. Hitier, en effet : 


49,000 : 56,000 :: 129,000 : 171,429 


Soit une population spécifique de 21,98, les quatre cinquièmes de 
celle de la Corse à la même époque (27,46). 

En supposant dans les deux autres livas de l’ile la même différence 
numérique relative, entre les populations chrétienne et musulmane, il y 
aurait dans l’île 123,000 Chrétiens, en effet : 


56,000 : 40,000 :: 112,000 : 122,857. 


Ainsi, suivant les prévisions d'Olivier, le régime oppressif turc com- 
mencé en 1646, après une durée de 175 ans, en 1821, avait abouti au 
remplacement de la moitié des Chrétiens par des Musulmans, soit par 
conversion , soit autrement. 

Sous le régime supportable établi par Méhémet-Ali, et qui a survécu à 
sa domination, l'inverse s’est produit. En vingt-trois années la population 
chrétienne soumise , est arrivée de 90,000 à 123,000 âmes; elle a aug- 
menté de plus d’un tiers , tandis que les Musulmans dominateurs , n’ont 
pas augmenté seulement d’un quart, de 40,000 à 49,000. Dans le Pélo- 
ponnèse et la Grèce continentale, où les Chrétiens plus heureux ont pu 
recouvrer l’antique liberté de leurs pères, les sectateurs de Mahomet 
ont disparu jusqu’au dernier, de la terre de Miltiade, de Léonidas et de 
Thémistocle. 

Jusqu'en 1856, les Chrétiens avaient seuls à payer le Karatch ou impôt 
de capitation, considéré comme extrêmement humiliant; en 1836 il rap- 
portait 900,000 piastres (198,000), et comme il atteignait 28,000 hom- 


(3178 ) 
mes, c’élait 32 piastres (7°) en moyenne, par tête; mais chaque homme 
qui y élait soumis, à partir de l’âge de treize ans, avait à payer, en 
raison de sa fortune ou de celle de sa famille, 16, 30 ou 60 piastres. 
À la fin du siècle précédent, c'était 4, 8 et 12, alors que la piastre 
valait 3 fr. 

Le Khatty-Humaïoun du 18 février l’a aboli avec l’esclavage ; mais il a 
soumis tous les sujets non-musulmans au recrutement militaire , avec 
faculté d'exonération pour un certain nombre. Leur contingent a été fixé 
à 16,000 hommes, et les habitants de cette catégorie en Crète, ont été 
estimés à un neuvième de la population grecque de l’Empire. La part de 
l'île, d’après les évaluations des évêques et du patriarche de Stamboul, a 
été fixée à 178 hommes, dont 39 au minimum ne peuvent être exemptés 
du service militaire. C’est donc au maximum 139 exonérations que les 
habitants doivent payer annuellement ou, d’après le taux fixé à 5,000 
piastres, une somme de 695,000 p. (152,900°), car les habitants ne sont 
nullement désireux de s’enrôler. La répartition de ce nouvel impôt, 
appelé Bédälat , fut faite entre les éparkhies dans le sein des medjlis, et 
la sous-répartition entre les habitants leur fut abandonnée avec le conseil 
de la rendre proportionnelle à la fortune de chaque famille. L'ordre de 
percevoir dans la première année, 1858, les deux années écoulées 
depuis la suppression du Karatch, fut l’une des principales causes des 
troubles du milieu de l’année. 


20 AGRICULTURE. 


Sol. — La Crète renferme une chaîne de montagnes élevées et arides 
qui, avec quelques ramifications, la partage en deux versants d’abord, 
puis en un certain nombre de petits bassins orographiques formant , pour 
la plupart, chacun une division particulière, une éparkhie; la partie cen- 
trale de chacun d’eux, est habitée et cultivée, tandis que les bordures 
formées par les pentes des montagnes, ont toujours été abandonnées à 
la vaine pâlure. 

Dans l’état actuel, le tiers au moins de l’ile est formé par les pen- 
tes rocheuses et pierreuses des montagnes sans terre arable, capables 
seulement de fournir de bien maigres pâturages aux chèvres et aux mou- 
tons; un autre tiers, meilleur et susceptible de culture, est en friche 
faute de bras; le dernier enfin, le meilleur, n’est qu'imparfaitement cul- 
tivé par la même cause. Les villages et hameaux, les fermes ou metokhi, 
les couvents, ont un aspect désolé et sont aux trois quarts en ruines. 


( 319 ) 

Pourtant, malgré la rareté de la population, le sol de bonne qualité n’est 
abandonné nulle part, excepté en partie dans les vallées ; souvent on ren- 
contre des champs, même fort petits, sur des pentes de montagnes où l’on 
ne serait pas tenté d’en chercher. Cela tient surtout à ce que les vallées 
ou plaines, qui renferment des ruisseaux, sont fiévreuses de juin à la fin 
de septembre; aussi, quoique fort productives et offrant des facilités pour 
le transport des produits, jusque sur les marchés des villes, sont-elles, 
en partie négligées par le cultivateur qui préfère résider sur les collines 
où le sol est moins fertile, mais où il a la certitude de jouir d’une meil- 
leure santé. 

La terre végétale, dans laquelle s’enracinent les végétaux herbacés et 
frutescents, repose sur le sous-sol formé habituellement par les roches 
qui n’ont éprouvé aucun remaniement postérieur à leur formation , et 
dans lequel pénètrent les racines de la plupart des végétaux arborescents. 
Les éléments qui la composent ont souvent deux natures, deux origines 
très-différentes. Lorsque le sous-sol est formé de matériaux meubles ou 
facilement désagrégeables, ce qui est le cas le moins fréquent en Crète, le 
sol végétal est habituellement formé aux dépens du sous-sol et participe 
presqu’exclusivement de sa nature. Lorsque, au contraire, le sous-sol est 
formé de matériaux durs, non désagrégeables, mais seulement suscepti- 
bles de se réduire en fragments, la terre végétale est ordinairement for- 
mée par des argiles, mélangées d’une quantité plus ou moins grande de 
sable, dans lesquelles se trouvent, en proportions très-diverses, des frag- 
ments du sous-sol. Le carbonate de chaux, l'argile et le sable sont, 
comme partout, les éléments essentiels des terres; il s’y adjoint ordinai- 
rement une petite quantité d’oxyde de fer, qui donne la coloration, et une 
proportion variable d’humus, ou détritus végétaux et animaux. Quant 
aux phosphates ils doivent avoir à peu près disparu du sol, dans un pays 
qui produisait autrefois de grandes quantités de blé, et où l’usage des 
amendements et surtout des engrais est encore inconnu. 

La Crète est un pays dont le sol habituellement formé par des calcai- 
res compactes el fendillés, est perméable, très-sec, et par conséquent peu 
pourvu de sources. Ce n’est que dans l’éparkhie de Selino et divers val- 
lons et vallées, que le sol talqueux et imperméable, retient en partie 
les eaux pluviales et conserve une certaine fraicheur, jusqu’en été, et 
des sources pendant une grande partie de l’année. Les eaux tiennent 
presque toutes du calcaire en dissolution, car 1l y a des bancs de cette 
nature jusque dans le terrain talqueux ; aussi, la plupart des cultures 


Towe XXII. 98 


( 380 ) 
peuvent-elles réussir à peu près partout. Ces propriétés du sol ont une 
très-grande influence sur la végétation spontanée ; à l’exception des oli- 
viers et des bois, toujours fort clair-semés , qui prospèrent partout, les 
parties perméables présentent des buissons qui atteignent à peine un 
mètre de hauteur, et qui, de loin, apparaissent avec des teintes grises, 
tandis que les terrains imperméables sont recouverts de fougères, de 
hautes bruyères et d’arbousiers qui conservent de belles teintes vertes 
pendant toute l’année ; c’est aussi sur ces derniers que vient le châtai- 
gnier, à l'extrémité occidentale de l’île. 

Les terres occupées par les cultures herbacées et la vigne, peuvent se 
diviser en plusieurs catégories : les terres calcaires, marneuses, argi- 
leuses , argilo-sableusés et sableuses. 

Les terres calcaires, peu fréquentes, blanches ou grises, sont formées 
de petits fragments anguleux de calcaires compactes , très-rarement de 
calcaires friables; elles se trouvent en Kisamos, dans l’Apokorona et les 
environs de Megalo-Kastron, sur quelques points de Messara et de Sit ia 
et aussi dans les montagnes, comme à Askypho ét à Anopolis, sur la 
pente méridionale des Aspra-Vouna. 

Les terres marneuses moins fréquentes , blanchâtres ‘ou grisâtres , 
n'existent guère qu’en Kisamos et dans les environs de Rhethymnon , de 
Megalo-Kastron et de Hierapetra; ‘elles retiennent assez longtemps 
humidité. 

Les terres argileuses, habituellement rouges, sont également peu 
répandues; elles existent par décomposition, sur plusieurs points du 
terrain talqueux de Selino , et par transport, sur plusieurs points des 
plateaux calcaires, et dans la plaine, autour de Kastel-Pedhiadha; dans 
la partie occidentale de celle de Lassiti, elles sont grisätres et plus 
mélangées de sable. 

Les terres argilo-sableuses , le plus souvent légères et plus’ ou moins 
épaisses, forment la plus grande partie du sol arable de la Crète. Ordi- 
nairement de transport, sur un sous-sol calcaire, elles sont dépourvues 
de parties grossières, ou bien elles renferment des fragments plus ou 
moins nombreux, tantôt anguleux, de calcaire , de macigno, de tal- 
schistes et surlout de quartz, el tantôt arrondis, de ces trois dernières 
roches. Dans certaines localités, leurs éléments sont surtout empruntés 
aux roches sous-jacentes, les talschistes de Selino et le macigno d’Amari 
et de Rhizo-Kastron ; dans beaucoup d’autres, ils leur sont complète- 

ment étrangers, et, dans les montagnes, leur existence ne peut guère 


(sm): | 
être attribuée qu'à l’action prolongée des vents. Elles ne sont que les 
parties superficielles de dépôts diluviens, souvent fort épais, sur les 
plateaux à l’O. de Khania, de l’Akroteri, de Dhramia, d’Armenous et 
d’Amnato, près de Rhethymnon, et dans les basses plaines de Khania, de 
Malia ; dans celle de Messara, les cailloux sont de macigno. Dans les 
plaines élevées , dont les dépôts sont peut-être tertiaires, ces derniers 
sont de quartz, à Kadano, à Khandhra et à Thiro ; à Omalos, il n’y a pas 
de cailloux. Il en est de même au Katharos , et dans la partie orientale 
de Lassiti, mais les terres y sont grisâtres. Lorsque les terres argilo- 
sableuses sont sèches, elles ne produisent qu’une herbe rare, le long des 
chemins et fossés ; dans les parties humides, les roseaux se développent 
avec une vigueur souvent gêénante. 

Les terres sableuses, enfin, plus ou moins mélangées de cailloux, sont 
très-brülantes el ont besoin d’irrigations constantes ; elles se trouvent 
dans les plaines maritimes de Mesoghia, de Kisamos, de Gonia à Platania, 
de Rhethymnon, de l’Almyros de Megalo-Kastron, de Piskokephalo et 
de Hierapetra. 

Le sol accidenté de la Crète présente de grands rapports avec diverses 
parties de la France, et c’est évidemment dans le Midi, surtout dans la 
région méditerranéenne couverte d'oliviers , que les points de compa- 
raison se rencontrent. 

Pour les surfaces étendues formées par les talschistes , surtout en 
Selino et Kisamos , la ressemblance est assez grande avec les parties 
accidentées et peu boisées du Limousin ; la présence des châtaigniers 
dans la partie occidentale vient compléter cette analogie. D’après les 
descriptions de M. Elie de Beaumont, celle-ci serait presque complète 
avec la chaîne des Maures (Var). — Dans les montagnes, formées par les 
calcaires compactes gris, soit à Hippurites, soit à Nummulites, les 
pentes rapides couronnées par des escarpements verticaux ressemblent 
entièrement à celles que l’on voit en descendant le Rhône, de Valence à 
Avignon, au-dessus de Toulon , et problablement dans toutes les parties 
montagneuses de la Provence et du versant limitrophe des Alpes. Les 
profonds et étroits ravins ou pharanghi, qui sillonnent le sol sur quel- 
ques points, à Theriso, Haghia-Roumeli, Komitadhès , Kalami, sont 
identiques , mais en petit, à la gorge profonde par laquelle, dans les 
Pyrénées , on remonte des Eaux-Bonnes aux Eaux-Chaudes. Pour les 
petits accidents des surfaces, il y a similitude complète avec le chaînon 
de la Clape, près de Narbonne, formé par des calcaires gris, à peu près 


( 382 ) 

du même âge. — Les plateaux et plaines tertiaires , soit marneux et aré- 
nacés à contours arrondis, soit caleaires et rocheux, sont parfaitement 
représentés par la zone qui longe la Montagne-Noire , de Carcassonne à 
Béziers et Montpellier , et aussi par les alentours d’Aix-en-Provence. — 
Enfin, les plaines de Khania et de Hierapetra ressemblent, moins les eaux, 
à celles de Narbonne et d'Avignon, également couvertes d’oliviers. Celle 
de Messara qui est dépourvue de ces derniers , n’a de caractère particu- 
lier qu’à la faveur des hautes chaînes escarpées qui la limitent sur beau- 
coup de points de son contour. 

Climat. — « De tous les pays que j'ai habités, dit Savary (1), il n’en est 
point dont la température soit aussi saine, aussi agréable que celle de 
Crète. Les chaleurs n’y sont jamais excessives, et les froids violens ne 
se font point sentir dans la plaine. D'ailleurs, dans les jours les plus 
chauds de l'été, l’atmosphère étoit rafraichie par les vents de mer. L’hi- 
ver proprement dit ne commence qu’en décembre, et finit en janvier. 
Le plus souvent on y jouit d'un temps aussi beau qu’en France au com- 
mencement de juin. On a donné le nom d’hiver à ces deux mois, parce 
qu'alors il tombe des pluies abondantes , que le ciel se couvre de nua- 
ges, et qu'on y éprouve des vents du Nord très-violens; mais ces pluies 
sont utiles à l’agriculture, les vents chassent les nuages vers les hautes 
montagnes , où se forme le dépôt des eaux qui fertiliseront les campa- 
gnes, et l'habitant des plaines ne souffre point de ces intempéries pas- 
sagères. — Dès le mois de février, la terre se pare de fleurs et de mois- 
sons. Le reste de l’année n’est presque qu’un beau jour. On n’éprouve 
jamais, comme en France, ces retours cruels d’un froid piquant, qui, 
se faisant sentir tout-à-coup après les chaleurs, gèle la fleur qui venoit 
d’éclore, dessèche le bouton qui s’entr'ouvroit, dévore une partie des 
fruits de l’année, et détruit les santés délicates. » « Quoique le froid se 
fasse sentir vivement en hiver, dit Olivier (1), sur l’Ida et au sommet des 
monts Blancs , et qu’ils soient couverts de neige dès la fin de brumaire 
(20 novembre), la température est cependant très-douce dans les plaines 
et vers les côtes. Il n’y gèle point; les pluies y sont assez fréquentes, 
mais de peu de durée. Le soleil se montre presqu’immédiatement après 
la pluie, et le ciel est souvent pur et serein. Il ne pleut jamais en été, 
ni en Crète, ni dans les îles de la mer Egée. La rosée suffit alors pour 


(1) Lettres sur la Grèce, p. 2717-79. 


( 383) 
entretenir la végétation des plantes qui croissent spontanément dans ces 
climats. Presque toutes les autres doivent être arrosées si l’on veut les y 
cultiver avec quelque succès. » 

Il résulte de cette absence de pluie pendant toute la partie chaude de 
l’année, un dessèchement très-considérable du sol. À partir de la mois- 
son, celui-ci ne présente plus aucune trace de végétation herbacée excepté 
dans les montagnes ; 1l n’y a plus de vivant, à la surface des plaines, 
que les broussailles épineuses et les végétaux arborescents. 

La température à l’ombre ne dépasse pas 33°, ou, du moins, je n’ai 
jamais vu le mercure s’élever davantage, soit pendant les nombreuses 
excursions que j'ai faites, des premiers jours de mai 1845 jusqu’à l’en- 
trée de l'hiver, soit pendant l’année d'observations commencée à la 
même époque à Khania, par M. et Mre Gaspary. Au soleil, elle est bien 
plus intense, car mon thermomètre, placé dans le sable blanchâtre brü- 
lant des plages de Khania , le 25 mai, marquait jusqu’à 56°, lorsque , à 
l'ombre , 1l ne venait de monter qu'à 23°. Aussi, tous les hommes des 
campagnes ont-ils le teint fortement hälé, et à la fin de mes excursions, 
la peau de mon visage et de mes mains était-elle beaucoup plus brune 
que je ne l’ai jamais vue. Dans les plaines voisines de la mer, l'air ne 
S'abaisse que bien rarement au-dessous de 8, pendant les journées 
d'hiver. La température moyenne de ces mêmes parties est dévoilée par 
les grandes sources qui varient de 18 à 19. 

La Crète est une véritable arête montagneuse dont les pentes septen- 
trionales, surtout, s’étalent en plateaux et plaines, sur lesquels, à partir 
du niveau de la mer, on voit les cultures diverses et les plantes impor- 
tées par l’homme, s’échelonner et s’élever d'autant moins haut qu'elles 
appartiennent à des climats plus méridionaux; elles perdent ainsi par Palti- 
tude, les possibilités d'existence que leur donnait la latitude. — L’opun- 
tia et l’aloès ne se trouvent naturalisés que très-peu au-dessus du niveau 
de la mer. — L’oranger et le coton herbacé sont cultivés à 350", où l’on 
rencontre aussi le dattier, stérile déjà au niveau de la mer. — Le grena- 
dier, l’agave et surtout l'olivier, avec son fidèle compagnon le caroubier, 
atteignent et dépassent même 600 mètres sur l’un et l’autre versants. — 
Quelques figuiers résistent à 100" dans les plaines des montagnes. — Les 
müriers et caroubiers vivent encore à 900", à côté des poiriers qui s’ac- 
commodent très-peu de la chaleur des parties basses. — Les vignobles, 
qui donnaient des produits si renommés dans ces dernières, existent dans 
les hautes plaines, jusqu'à 700 à Askypho, 900 à Lassiti et même 980" 


( 384) 
à l’Aphendi-Kavousi. — Quant aux céréales (seigle, orge), elles sont 
encore cultivées en grand , par les habitants des parties basses , dans les 
plaines des montagnes, à Omalos à 1,100" et au Katharos à 4,150n. 

Sur les plateaux élevés de 500 à 600" du versant septentrional, comme 
à Malaxa, la végétation est habituellement en retard d’une quinzaine de 
jours sur les plaines basses ; sur ceux du versant méridional, comme à 
Anopolis, Aradhena, cette différence n’existe pas, et peut-être même y 
a-t-il un peu d'avance. Dans les hautes plaines situées dans les monta- 
gnes, à 1,100" d’altitude, le retard est beaucoup plus grand; en effet, 
ainsi que je l’ai déjà dit, la moisson était presque terminée dans les 
plaines , lorsque je montai à Omalos, le 20 juin , et il fallait encore plus 
d’un mois pour que les céréales y fussent arrivées à maturité. 

État agricole avant et pendant la domination vénitienne. — La 
Crète, fertile, bien cultivée et riche jusqu’à la perte de son indépen- 
dance, ne dégénéra pas sous les Romains qui ne troublèrent pas les 
habitants dans la jouissance de leurs propriétés, et qui s’efforçaient de 
faire aimer leur domination ; bien administrée et bien cultivée, elle pro- 
duisait en abondance du blé, surtout dans la plaine de Messara; elle 
était, avec la Sicile, un des greniers de Rome. Sur un sol d’une fertilité 
merveilleuse , ses vignes et ses arbres donnaient du fruit en abondance; 
les auteurs de l'Antiquité parlent souvent des vins de Thenæ (Haghio- 
Myro) ; ses fromages étaient aussi en grande réputation. 

« Les anciens Crétains, dit Dapper (1), prénnoient pour serviteurs ou 
esclaves, des gens qui étoient en la fleur de leur âge, qui étoient pro- 
prement apellez Aphamiotes et Perieces. Ils les emploioient communé- 
ment à la campagne , où ils se tenoient pour avoir soin de l’agriculture. 
Les bourgeois étoient obligez de porter la dime de leurs fruits, et les 
magistrats y distribuoient les charges et les revenus publics entre les 
familles. Aristote en parle en cette manière : Une partie des fruits, du 
bétail, de l'argent commun et du tribut que les Perieces paioient en l'ile 
de Crète éloit destinée pour les Dieux et les emplois publics, et l'autre 
pour les communautez ; de sorte qu'ils y éloient lous entrelenus aux 
dépens du public, tant hommes que femmes et enfans. » 

Le pitoyable état de la Société sous le Bas-Empire, et l'invasion sar- 
razine, occasionnèrent certainement un temps d'arrêt dans la prospérité 


(1) Descriplion exacte des îles de l’Archipel, p. 451-2. 


RÉ ten dis 


( 989 ) 
de l’île ; la production des vins en souffrit probablement, mais ils repri- 
rent vite leur ancienne célébrité. Edrisi , dans le milieu du XIT: siècle, 
ne parle que des excellents fromages qu’on y fabriquait et qu’on expé- 
diait dans les autres pays; Aboul-Féda, au commencement du XIV: siè- 
ele, ajoute que du miel et d’autres choses s’exportaient pour Alexan- 
drie. 

Dès les premières années de la possession vénitienne, des révoltes se 
produisirent. « Il importait d’accoutumer les Candiotes, dit Daru (4), à 
ne plus considérer la nation vénitienne comme une nation étrangère ; 
dans cette vue, on délibéra d’engager les citadins de Venise à former 
des établissements dans cette île, à y transporter leur résidence, et, pour 
les y déterminer, on confisqua la moitié des terres des révoltés et on les 
distribua aux nouveaux colons : singulier moyen de s’attacher un peu- 
ple , que de le dépouiller, et de vouloir qu’il reconnaisse des concitoyens 
dans ceux qui ont envahi son héritage. À Venise, on vit partir cinq ou 
six cents familles, pour aller fonder la nouvelle colonie, » 

La révolte de 1366 fut le dernier soupir de la liberté dans cette île 
dont les habitants s’élaient débattus pendant cent soixante ans, sous le 
joug que leur imposait un peuple séparé d’eux par de vastes mers. 
Celle-ci, cependant, fut principalement l’œuvre des colons vénitiens 
eux-mêmes, mécontents de voir réduite à fort peu de chose, l'influence 
dont ils jouissaient à Venise, avant leur émigration. 

Les Vénitiens continuèrent leurs exactions tyranniques et portèrent à 
l’agriculture un coup funeste dont elle ne s’est jamais relevée. En effet, 
les documents précis qui se sont accumulés successivement, depuis la 
découverte de l'imprimerie, accusent des alternatives de fertilité et de 
stérilité assez grandes , dues , sans doute, aux circonstances politiques 
extérieures et à l’administration intérieure, plus ou moins défectueuse 
pendant les cinq siècles qui viennent presque de s’écouler. 

Les Vénitiens tentaient cependant des améliorations dans les parties 
qu'ils s'étaient attribuées, ils avaient introduit de Sicile, la culture de la 
canne à sucre, et dès le XIV: siècle ils embarquaient à Candia du sucre 
qui était un des produits de l’île, ainsi qu'il résulte du texte suivant 
transerit par Daru (2) : Quod zuccarum natum et factum et quod nasce- 


(1) Histoire de Venise, T. I. p. 525. 
(2) Histoire de Venise, T. WI, p. 46. — Pendant longtemps cette culture fleurit dans 
le Levant. M. A. Gaudry, dans ses Recherches scientifiques en Orient, dit p. 156-8 : «L’ile 


( 386 ) 
tur et fiel in insula nostra Crelæ possit conduci Veneliis cum navigiis 
disermatis solvendo quinque pro centenurio. I parait toutefois que cette 
culture ne prospéra pas et fut bientôt abandonnée, car aucun des voya- 
seurs du XV: siècle et des suivants n’en fait mention. Lors de l’insurrec- 
tion de 1363, les vins étaient un des principaux articles d’exportation 
de l’île. 

Buondelmonti, l’un des plus anciens auteurs, parle encore d’exporta- 
tions de froment; mais dans son écrit on peut voir déjà le découragement 
du travailleur agricole. En effet, il dit (1) : « Veniunt ex omnibus mundi 
partibus huc naves, quæ XX millia ad minûs onerantur vegetibus optimi 
vini, et pinguis casei copia, ac frumenti, propter tamen rusticorum iner- 
tiam olivas non habent. Unde bene Apostolus Paulus de eis dixit : Falla- 
ces Cretici, malæ bestiæ, et ventres pigri. » 

Vient ensuite Le Huen, qui aborda en Crète en 1487 et qui, copiant 
en partie Solinus, s'exprime en ces termes (2) : « Bon vin propice de Mal 
uaisie à tout le peuple et à toute regions : chieures oueilles avec grans 
moutons. De cerfs et biches na pas grant quantité, et loups renars et aul- 
tres bestes sauluaiges rauissantes en suiuant leurs couraiges nul ne nour- 
rist : ne aulcuns Spens produit ou beste venimeuse. Terre fertille de 
vignes : amiable; aux arbres abille : herbes medicinables, gêmes et 
pierres villes proffitable en son croissent. Les arbres principaulx de 
Crète sont de cyprès... Les turcs y apportent marchandises et moult 
de blés; car en lisle nia pas quantité grande por leur prouision. Les 
tures en reportent de leurs vins. La se trêuent oiseaux de proie, sa- 
cres; faulcons et aultres et des perdris rouges en grande quantité. 
Grande quantité de fruicts poupons melons cohordes pesches, nois fran- 
ches amandres pomes petites et doulces. » 

Au milieu du XVI: siècle, la production en céréales ne suffisait pas 
davantage à la consommation, car Theuet dit qu’on tirait le blé d’Asie et 
d'Egypte. « Le Coton et la Sézame, dit Belon (3), y sont de grand revenu : 


(de Chypre) ne possède plus de cannes à sucre. Du temps des Lusignans et des Véni- 
tiens il en existait de vastes plantations. Elles réussissaient aussi bien qu’en Egypte... 
Le sucre était un des principaux revenus et un des grands articles d’exportation de 
l'ile. Il est à regretter que l’on ne rétablisse pas les anciennes cultures de cannes à 
sucre. Près de Saïda, en Syrie, j'ai vu des champs de cannes prospérer dans des condi- 
tions parfaitement semblables à celles que l’on retrouverait en plusieurs lieux de l'ile. 

(1) Cornelius Crea sacra , t. 1, p. 9. 

(2) Peregrinalion de Oullre mer en terre Saincte (sans pagin.), feuille G, 1 verso. 

(5) Les Observations de plusieurs singulariléz, fol. 20. 


( 387) 

on les seme en terre au mois d'Auril. L’on y fait du Catran, et de la 
poix et principalement sur les montagnes de Leuci, autrement nom- 
mez de la Sphachie , ou il croist grand nombre de pins sauuages, autre- 
ment nommez Piceæ. » Il n’est presque pas de voyageur qui ne men- 
tionne le vin de Malvoisie comme le plus important objet d'exportation, 
et Meggen, en abordant en 1542, disait (1) : Nam quid de vino discere 
altinet, cum vina cretica toto orbe celebrentur. 

Porcacchi, quelques années après (2), écrivait que cette île abonde ue 
vignes, oliviers, orangers et citronniers : mais on y fait surtout des vins 
excellentissimes et en très-grande quantité qui sont appelés Malvoisie ; 
de manière qu’il sort certaines années de Candia, pour la consommation 
des autres pays, et principalement de Venise et de l’Angleterre, jusqu’à 
douze mille tonneaux de vin. Le terrain est tellement bon que presque 
toutes les autres choses que l’on veut, croissent; il en sort des choses 
bonnes et de prix, comme le sont la cochenille pour teindre les étolfes , 
la cire, le miel et le fromage; ces marchandises dans leur genre sont 
estimées les meilleures de celles qui se trouvent ailleurs. L’ile est abon- 
dante en grains et en pâturages. — En 1516, les vins étaient transpor- 
tés par les Portugais jusque dans les Indes, et à Alexandrie on n’en 
consommait pas d’autres : la production annuelle était estimée à 60,000 
tonneaux. L'huile ne paraît pas avoir été assez abondamment produite 
à cette époque, pour être envoyée au dehors. 

Cest dans une copie d’un manuscrit de Boschini (3), écrit pendant le 
siége de Candia, et dans quelques ouvrages publiés à cette époque ou au 
commencement du siècle suivant (4), que se trouvent le plus de rensei- 
gnements sur les productions de l’île, pendant les derniers temps de la 
domination vénitienne. La plaine de Messara, partout très-fertile, four- 
nissait de grains , blé et orge, tout le distretto de Candia; on faisait, 
dit-on, deux récoltes de blé dans l’année. La vigne, partout cultivée, 
donnait des vins blancs et rouges, exquis dans la fertile plaine de Kisa- 
mos ; les vins de Malvoisie allaient, par le Bosphore, en Valachie et en 
Pologne; par Hambourg, Lubeck et Dantzig et quelquefois par Venise, 
ils se répandaient par toute l’Allemagne. Le port seul de Retimo en 
exportait annuellement 12,000 pipes. Le vinaigre était aussi un objet de 


(1) Peregrinalio hierosolymilana, p. 57. 

) L’Isole piv famose del Mondo, p. 109. 

) Isola el regno di Candia (Bibl. royale. suppl. franc. n° 1765 ). 
) 


(2 
(5 
(4) Géographie Blaviane : Grèce, p. 85-90. 1667. 


\ 


( 388 ) 


commerce; l’olivier donnait en abondance des huiles, expédiées par 
tous les ports et qui entraient en concurrence avec celles de l'Espagne, 
sur les divers marchés de l'Europe. Les jardins, surtout ceux de Kisa- 
mos , donnaient des oranges, limons , pommes d'Adam, cédrats incom- 
parables, des grenades, des abricots les plus beaux et les meilleurs 
du monde, des amandes, des pistaches et des pignons. Les cerisiers et 
les noyers prospéraient à Retimo. Ailleurs, c'était le fenouil et les 
ognons. Le lin était cultivé. Des forêts de cyprès fournissaient des bois 
pour les habitations et la marine ; les arbres y étaient si grands et si ser- 
rés que, d’après Cornélius, le feu s’étant déclaré dans celles de la Fras- 
chia , à l'O. de la baie de Candia, on fut trois ans avant d'arriver à son 
extinction complète. On recueillait le ladanum et le dictame. Les müriers 
noirs et blancs étaient nombreux; et on exportait beaucoup de soie, 
surtout du distretto de Retimo , et aussi de Kisamos. Le miel, la cire, la 
cochenille , étaient portés au-dehors. De Sphakia, principalement , sor- 
taient d'excellents fromages, pour Zante, l'Italie et la France. Les val- 
lées en prairies et pâturages , nourrissaient beaucoup de bœufs et de 
vaches, et on fabriquait des cuirs. 

Etat agricole sous la domination turque, jusqu'en 1828. — Lors de la 
conquête, les plaines etles vallées furent distribuées aux chefs ou aghas, 
soit en toute propriété , soit à litre de fiefs qu’ils devaient protéger, faire 
cultiver, et pour lesquels ils avaient à payer des redevances et des impôts. 
Ils gardèrent les soldats à leur solde et ils prirent pour cultiver, à titre 
de serviteurs souvent, soit les anciens propriétaires qui étaient restés, 
soit les Chrétiens qui après s’être réfugiés dans les montagnes , en reve- 
naient chassés par la misère. Un certain nombre de ces derniers, cepen- 
dant, s’approprièrent et défrichèrent des parties incultes situées à la 
limite des montagnes; mais lorsquelles étaient en plein rapport, tous les 
prétextes étaient bons pour les en chasser et, après des vexations, celui 
d’une révolte manquait rarement. Les esclaves ne tardèrent pas non plus 
à être introduits du dehors, comme dans tous les pays relevant de 
Stamboul. 

Peu à peu cependant cet état de choses se modifia ; les grandes pro- 
priétés devinrent moins nombreuses, soit par la vente en détail de celles 
des aghas qui se ruinaient, soit parce qu’elles étaient partagées égale- 
ment entre leurs enfants qui parfois aussi les vendaient. Des Tures, des 
Chrétiens convertis ou non à l’islamisme, les achetérent et en devinrent 
possesseurs. 


( 389 ) 

Tournefort s'exprimait ainsi après avoir parcouru l’île en 1700, alors 
que le régime turc était établi depuis plus de 50 ans (1). « Quoique la 
Candie soit un riche pays, cependant les meilleures terres de l'Isle ne 
sont guères bien cultivées, et même les deux tiers de ce royaume ne sont 
que montagnes sèches, pelées, désagréables, escarpées, taillées à plomb 
et plus propres pour des chèvres que pour des hommes. Quoiqu'il n’y 
ait pas dans cette Isle la moitié du monde qu'il faudrait pour la cultiver, 
elle produit néanmoins plus de grains que ses habitants n’en consom- 
ment. Non seulement elle abonde en vins ; mais elle fournit aux étran- 
gers , des huiles, de la laine, de la soye, du miel, de la cire, des fro- 
mages, du Ladanum. On y cultive peu de Coton et de Sésame ; le Froment 
y est excellent, sur tout aux environs de Gandie et dans la plaine de la 
Messaria. — Les environs de la ville de Candie, sont de grandes et fer- 
tiles plaines , enrichies de toute sorte de grains. Il est deffendu de lais- 
ser sortir le froment de l’Isle sans la permission du Viceroy. 


En l’année 1699 on avait recueilli dans l'Isle trois cens mille mesures 
d'huile. Que les François en avoient acheté près de deux cens mille à la 
Canée, à Retimo, à Candie et à Girapetra où se font tous les chargemens. 
La récolte des huiles avait manqué cette année en Provence, et l’on ne 
voyait arriver en Candie que des bâtimens de Marseille, pour fournir aux 
savonneries du pays. — Les meilleures huiles de l’Isle sont celles de 
Retimo et de la Ganée : celles de Girapetca sont noires et bourbeuses . 
parce qu'avant de vuider leurs cruches, ils brouillent avec un bâton 
l’huile et la lie, et vendent le tout ensemble. 

Moins d’un demi-siècle après, Pococke ajoutait (2) : « à la Canée, il 
y à beaucoup de marchands français. Leur principal commerce consiste 
à envoyer à Marseille des huiles pour les savonneries du pays. Cette ville 
fournit aussi de la soye, de la cire et du miel aux îles de l’Archipel, et 
du vin à toutes les contrées du levant ; il est fort et à très-bon marché. 
Cest la ville de Candie qui en fournit le plus; il est rouge pour l’ordi- 
naire , mais on fait de l’excellent vin muscat dans les environs de Retimo. 
Les raisins , les figues et les amandes font une autre branche de com- 
merce. Les Anglois y chargent quelquefois des huiles pour Londres et 
Hambourg. » 


(1) Voyage au Levan', t. 1, p.23 à 47 et 89 à 91. 
(2) Descrilion of {he East. trad. franc. T. IV, p. 225. 


( 390 ) 

L'état de l’agriculture et du commerce en Crète, à la fin du dernier 
siècle , a été donné par plusieurs voyageurs. 

« La population peu nombreuse de l’île, dit Savary (1), ne peut culti- 
ver toutes les terres. On parcourt, avec douleur, des plaines de trois et 
quaire lieues , arrosées par des ruisseaux, où l’on ne rencontre pas la 
moindre trace d'agriculture. Des vallées superbes, où la terre pousse une 
foule d’arbrisseaux et de plantes sauvages, demeurent en friche, faute 
de bras , d'encouragement et d'industrie. Le Ture indolent vit au milieu 
de ses possessions , sans songer à les étendre ». 


Mais c’est surtout Olivier qu’il faut consulter si l’on veut avoir des dé- 


tails : « Exposés sans cesse à se voir enlever leurs récoltes par l’aga (2), à 
se voir dépouiller de leurs propriétés par le pacha, à se voir insulter, bâton- 
ner et voler par chaque janissaire , les cultivateurs grecs ne sont jamais 
portés à arracher de la terre, par un surcroît de travail, un produit qu'ils 
verraient passer entre les mains de ceux qu’ils ont tant de raison de 
hair Tes champs qu'ils cultivent, plantés par leurs ancêtres, lors- 
qu'un peuple civilisé, industrieux et commerçant gouvernait l’île et favo- 
risait l’agriculture, se détériorent de jour en jour : l'olivier périt, la 
vigne disparaît, les terres sont emportées par les pluies sans que ces 
malheureux Grecs, découragés, songent à réparer les dommages que le 
temps leur occasionne sans cesse. Il n’y a que le pressant besoin de vivre 
et d’acquitter les impôts qui puisse les porter à recueillir leurs olives, 
ensemencer leurs terres et donner leurs soins à quelques abeilles. 

« L'industrie est presque nulle dans les villages grecs soumis aux 
agas. Ce n’est qu’en tremblant qu’on y fait quelques étoffes grossières et 
les instruments peu compliqués du labourage. Les femmes n’y sont pres- 
que jamais occupées qu’à raccomoder les vieux haïllons qu’elles et leurs 
maris portent tant qu’ils peuvent. 

« Les cultivateurs sont libres et indépendans, moyennant la redevance 
à laquelle ils sont soumis ; ils peuvent établir telle culture qu'ils jugent 
la plus convenable à leurs intérêts, sans que l’aga ait le droit de les 
inquiéter ; mais trop souvent celui-ci abuse de son crédit, de ses richesses 
et surtout de la police qu'il exerce dans son village. Il exige, la verge à la 
main, pour les terrains particuliers qu’il possède, le travail gratuit des 
cullivateurs : il se fait vendre les denrées, le vin excepté, au prix qu'il 


(1) Leltres sur la Grèce, p. 560. 
(2) Voyage dans l'Empire Olhoman, T. 1, p. 168, 4 


; er a 
ns mt à 


(18411) 
détermine lui-même ; il fait les avances du Karateh à un intérêt extrème- 
ment usuraire. — [Il n’en est pas de même à la Sphachie (comme je lai 
rapporté p. 73.) 

« Les villages turcs ne présentent pas autant de misère que ceux des 
Grecs , parce que le cultivateur est bien plus assuré de sa propriété, et 
qu'il peut sans crainte l’améliorer par tous les moyens qui sont en son 
pouvoir. Outre que les taxes qu’il paye sont en général moins fortes, 
outre qu'il est exempt de l'imposition personnelle, il est rare qu’on se 
permette une injustice trop révoltante à son égard, attendu que les 
habitants sont toujours prêts à se soulever et à défendre celui d’entr’eux 
qui serait opprimé. — Malgré tant d'avantages, ni l’agriculture ni l’in- 
dustrie ne sont en vigueur chez eux. 

« Les Sphachiotes sont dans l’usage d’envoyer pendant l’hiver leurs trou- 
peaux vers le bord de la mer, parce que dans cette saison douce et plu- 
vieuse l’herbe y est abondante; mais aux premières chaleurs de l’été, ils 
les font revenir brouter chez eux les pâturages savoureux que la tempé- 
rature plus douce et la fonte graduelle des neiges entretiennent toujours 
verts; et quoique le terrain paraisse presque nu, le bétail y trouve une 
nourriture, sinon abondante, du moins très-savoureuse et très-propre 
à donner à son lait et à sa chair une qualité à laquelle ne peut attein- 
dre celui qu’on élève dans les lieux les plus fertiles. — La laine est 
courte, grossière et semblable à celle des îles de l’Archipel. Elle se 
consomme toute dans le pays. 

Etat actuel de la propriété agricole. — Pendant mon séjour en Crète, 
le temps m’a souvent manqué pour examiner l’état de l’agriculture, cette 
branche si importante de la richesse du pays; d’ailleurs l’été et l’au- 
tomne que j y ai passés, étaient cerlainement les deux saisons les moins 
favorables pour ce genre d’études. Je n’aurais donc eu que des renseigne- 
ments fort incomplets à donner, si M. Hitier, consul de France à Khania, 
dont j'ai si souvent parlé, n’eût entrepris, peu après mon départ, un tra- 
vail considérable sur l’administration, l’agriculture, l’industrie et le 
commerce de la Crète; son rappel en France ne lui a permis d’achever 
et d'adresser à M. le Ministre des affaires étrangères que deux parties : 
l’une agricole et l’autre relative à l’industrie textile. Ayant eu la bonne 
fortune d’en obtenir la communication, ce que je vais dire ici ne sera 
que le résumé de la Notice sur l’état de l'agriculture en Crète, de 
M. Hitier, auquel je n'aurai fait que de légères additions (1). 


(1) Une analyse sommaire en a été publiée en décembre 1852, dans les Annales 
du Commerce extérieur ; Turquie : Fails commerciaux, n° 6, p 28-55. 


(392) 

Pendant l'insurrection de 1821 , les deux tiers des habitants ont péri 
ou émigré, et cinquante années de prospérité seront certainement insuffi - 
santes pour réparer le mal. Depuis sa fin complète en 1830, c’est-à- 
dire du jour où la domination égyptienne a été bien assise et respec- 
tée, et l'égalité de protection et de charges établie entre tous les habitants, 
la Crète est entrée dans une ère de rénovation; la condition des habitants 
des campagnes s’est améliorée et l’agriculture a pris du développement; 
les anciens champs ont été remis en culture ; des plantations d’oliviers, 
de vignes et de müriers, ont été faites. La population chrétienne s’est 
beaucoup accrue, d’abord par le retour des émigrés, puis, à la suite des 
mariages , par l’excès des naissances sur les décès. A la fin de 1847, sur 
une population de 160,000 habitants, dont 40,000 musulmans, les 7/8 
étaient adonnés aux travaux agricoles ; la production annuelle était esti- 
mée 15 millions de francs, en moyenne, le produit de la dime, qui est 
net d’un dixième, étant de 1,450,000 francs. 


Dans les premières années, les réparations et les reconstructions 
avaient mis à sec la bourse du cultivateur, que l’état pitoyable des récol- 
tes d'huile en 1836 et 1837 ne lui permirent pas de remplir; mais depuis, 
des années plus prospères se sont succédé et une sorte d’aisance est 
venue (2). Presque chaque cultivateur a sa propre métairie ou metokhi, et 


(2) En Crète, il n’y avait pas en 1847, six personnes possédant 1 million de pias- 
tres (220,000 fr.); on était riche avec 200,000 p. en terres et en argent ; car l’argent 
produit 18 0/0 et les maisons dans les villes 8 à 10; les terres donnent 10 à 42:au cul- 
tivateur et 5 à 6 au propriétaire qui a un métayer. 

Les fortunes les plus considérables étaient toujours'entre les mains des Musulmans, 
ainsi que le montre l’indication suivante des plus riches habitants des deux religions , 
en 1847, dans chacun des:trois livas : 


MEGALO-KASTRON. RHETHYMNON. KHANIA. 
1,6. AE ONU pue. 7 PEINE" RU p. { de... 1,200,000 p. 
| 1 de... 1,000,000 2 de... 1,000,000 4 de... 1,000,900 


4 de...8 à 600,000 3 de.. 8 à 600,000 6 de.. 8 à 500,000 


Musulmans 
> de.. 5 à 200,000 4 de.. 5 à 200,000 8 de. 4 à 200,000 


1 de .…. 500,000 1 de... 400,000 
Chrétiens. ) 2 de.. 3 à 250,000 1 de... 300,000 3 de. 4 à 300,000 
É ANerE 150,000 2 de.. 2 à 150,000 


I ya en outre dans l'île 50 à 40 Chrétiens qui possèdent de 150 à 100,000 p. 


ceux en petit nombre qui n’en ont pas, cultivent celles des aghas. Le sol 
est maintenant morcelé plus qu’en aucun autre pays peut-être, et chaque 
propriétaire a des champs sur un grand nombre de points. Le cultiva- 
teur chrétien achète continuellement des terres et, pour parfaire le prix 
d'achat de certaines pièces qui arrondissent sa propriété, il va jusqu'à 
faire des emprunts très-onéreux ; « quand le Turc de son voisinage, dit 
M. Hitier, ruiné par l'usure, est réduit à abandonner sa propriété à ses 
créanciers, il n’est pas de sacrifices que le paysan grec ne fasse pour 
en joindre un lambeau à la sienne. Le désir, cette àpre convoitise de la 
terre, qui stimule les Grecs au travail, qui leur inspire le goût de l’épar- 
gne, a aussi de funestes effets. Rarement le Grec possède en propre 
l'argent suffisant au payement de ses acquisitions ; il est forcé alors de 
recourir à l'emprunt, et comme le taux de l'intérêt n’est jamais guère 
au-dessous de 20 0/0 , cette terrible usure le condamne à de longues 
gênes dont plusieurs ne parviennent même pas à jamais se débarrasser. 
Quoi qu’il en soit, les champs qu’il cultive maintenant sont les siens, il 
s’yattache, leur amélioration fait l’objet de ses soins et encourage son 
ardeur. » 

Les petits propriétaires cultivent avec une routine sans égale, soit par 
eux-mêmes, soit avec des aides qui partagent la récolte, et qui sont ad- 
mis à leur table. Celle-ci est des plus frugales, l’ordinaire se composant 
de biscuit d'orge avec le son, de fromage et d’olives, de fèves, de quel- 
ques légumes et d'herbes cuites avec force huile; la viande y est fort rare, 
et le poisson, pendant les carêmes , n’y est pas très-fréquent ; tant que 
durent les récoltes de chaque famille, le vin et l’eau-de-vie y parais- 
sent; après, il n’y a plus que de l’eau. Les cultivateurs conduisent 
eux-mêmes leurs récoltes sur les marchés, ce qui, grâce aux mauvais 
chemins, leur prend deux et trois jours dans les livas de Khania et 
de Rhethymnon. 

Les monastères grecs possèdent, de longue date, des étendues consi- 
dérables de terrains, et des meilleurs; les kalogheri exploitent, soit eux- 
mêmes avec des domestiques à gages, soit en louant à des métayers. 

L’impossibilité où sont aujourd’hui les aghas des campagnes, soit de 
faire cultiver gratuitement leurs terres par les rayas chrétiens, soit de 
prendre celles de ces derniers, lorsqu'ils se sont eux-mêmes ruinés, a 
pour effet de les appauvrir et de les dégoûter de la Crète. Aussi un cer- 
tain nombre vendent peu à peu leurs propriétés, et se retirent à Stamboul 
ou dans les parties de la Turquie plus exclusivement musulmanes. Ceux 


( 394) 
qui possèdent moins, vont en partie grossir la population des villes, où ils 
se livrent au commerce. 

C’est dans le voisinage des villes seulement et dans certaines plaines, 
que l’on rencontre encore les grandes propriétés rurales, désignées sous le 
nom turc de Tchifflick, qui appartiennent à des Musulmans, et qui pro- 
duisent en grand les différentes denrées du pays. Les bâtiments qui en- 
tourent en partie la cour, se composent : 1° de la maison du maître avec 
les jardins ; 2° de celle des travailleurs avec les écuries, qui ne sont que 
des hangards avec des auges, les citernes, les fumiers, et quelquefois 
des jardins; 3° des celliers à huile et à vin, avec pressoirs et cuves, gre- 
niers et magasins. Habituellement, le tout est sale et mal entretenu, et 
des parties de bâtiments tombent toujours en ruine. 

Le sol est divisé en terres à céréales, vignes et oliviers, mais sans 
intelligence agricole; la terre, faute de soins , ne donnant qu’une année 
sur deux, de bonnes récoltes, celles-ci ne sont nullement aménagées de 
manière à être suppléées l’une par l’autre. Les propriétaires s’occupent 
peu de ces grandes fermes qui sont administrées par un Soubachi, dont le 
salaire consiste en une dime qu’il prélève. Le fermage en argent étant 
inconnu , la culture est dévolue à un métayer, à qui revient la moitié des 
produits, ceux des oliviers exceptés, après que le fisc a pris le septième 
de la récolte, et que le propriétaire a retiré la semence. Les gages des 
‘travailleurs , sont à la charge du maître qui fournit aussi les instruments 
de culture ; quand les bœufs lui appartiennent, toute la paille lui revient. 
Les travailleurs sont logés et plus mal nourris encore que chez les petits 
propriétaires, car ils n’ont ni viande ni vin. Tantôt ce sont des serviteurs 
à gages, auxquels on donne 40 à 60 piastres par mois, ou seulement 25 à 
30 , lorsqu'ils sont nourris et même vêtus, ce qui est plus rare; tantôt ce 
sont des esclaves noirs que l’on achète en moyenne 2,000 piastres , et que 
l’on garde une dizaine d’années (jusqu’à un mariage ou au décès du mai- 
tre); avec la nourriture, ils reviennent à 600 piastres par an, ce qui est 
beaucoup, eu égard à leur peu d'intelligence, et à la médiocrité de leur 
travail (1). Dans le moment des grands travaux, des journaliers se louent 


(1) L’abolition de l’esclavage en Turquie a été décrétée par le Khatty-Humaïoun du 
18 février 1856. Pendant mon séjour en Crète , il était en pleine pratique, et des chan- 
celiers de consulats européens possédaient mème des esclaves ; chez les Musulmans , 
ces Orientaux barbares du XIVe siècle, comme les appelle M. Boué, ceux-ci étaient te- 
nus pour membres de la domesticité, de la maison, en un mot; chez nous autres, Chré- 


( 395 ) 
à raison de 5 piastres par jour, et moitié seulement s’ils sont nourris. La 
récolte des olives est faite par des femmes qui ne sont pas nourries, et 
auxquelles on abandonne, pour tout salaire, les 2/7° de l’huile produite 
par les olives ramassées par chacune d'elles. 


Jilisalion du règne veéyelal. 


Céréales. — Leur culture est aujourd’hui encore, en Crète, dans l’en- 
fance la plus complète. Aucune amélioration n’a été faite depuis des siè- 
cles; aucun amendement, aucun engrais, on pourrait dire, n’est em- 
ployé. Il n’existe pas un seul chariot, charrette ou brouette, dans l’île ; 
l’état des chemins n’en permettrait d’ailleurs pas l’emploi. La terre est 
cultivée avec un simple araire et toutes les récoltes et denrées sont 
transportées à dos d’ânes et de mulets. Aussi, l’île ne produit-elle que les 
deux tiers environ des récoltes nécessaires à la consommation, et faut-il 
tirer le reste du dehors. 

Quant aux instruments, ils sont tous informes et grossiers; les prin- 
cipaux sont: l’Alletri, araire à deux oreilles, sans versoir ni coutre, à un 
seul mancheron ; le timon est suspendu par deux anneaux de fer au joug 
qui est une pièce de bois posée sur le cou de l’animal, avec des chevil- 
les emboîtantes fermées par-dessous à l’aide d’une baguette pliante Le 
Volossiri est une planche épaisse avec des entailles, que le laboureur 
attache en travers au joug et sur laquelle il monte ; il remplace la herse 
et le rouleau; garni de pierres tranchantes et promené dans l’aire il 
coupe le blé et facilite la séparation du grain. Le Skapeti est une houe 
rectangulaire ; le Lissiko, une bèche triangulaire; le Trinakhi, une four- 
che à trois dents en bois, et le Voluii, un tamis de peau à grands trous, 
remplaçant le van; les faucilles et les pelles en bois sont également em- 
ployées. Le Trava et le Kladhitheros sont des serpes et serpettes à bois 
et broussailles. 

Dans les champs, Kampos, les labours n’ont que 10 à 12 centimètres 
de profondeur ; les sillons sont courts, irréguliers et mal espacés. En 


tiens civilisés du XIXe, on en trafiquait, on en usait, à la manière des bêtes de travail, 
jusqu’au dernier jour; comme les bæufs et Les chevaux, on les énumérait officiellement 
par féle sur les habitations. Un Français même, M. Granier de Cassagnac, jadis partisan 
de l'abolition et désintéressé dans la question, s’était laissé convaincre aux Antilles, 
par des raisons d’un grand poids sans doute , que cet état de chozes devait être con- 
tinué et, peut-être bien mème, était conforme aux préceptes les plus purs du Chris- 
tianisme. 


Tome XXII. 39 


(3%) 


terre franche ou légère, un attelage peut travailler un tiers d’hectare par 
jour; en terre dure, c’est moitié seulement. Les travaux se font aujourd’hui 
comme il y a 80 ans dans l’Akroteri. « Un seul coup de charrue, dit Son- 
nini (1), précédoit les semailles du blé; et pour l'orge, l’on se contentoit 
de la répandre sur le chaume, et d’y passer ensuite la charrue, ainsi que 
je l’ai vu pratiquer dans ma patrie, pour le blé même, par des cultiva- 
teurs négligens et tardifs. Les sillons n’étaient point tracés profondé- 
ment : l’on se contentoit de déchirer la surface du sol, et cette culture 
légère que suivent des récoltes abondantes, est un indice certain de la 
fertilité de la terre. En l’examinant , on découvroit en effet, qu’elle est 
de la meilleure qualité, rougeûtre, et d’une bonne consistance, sans être 
trop compacte. — Cette terre légère, mais substantielle, convient aussi 
beaucoup à la culture des lupins ; on en ensemence des champs entiers. 
— Les semailles ne se font en Candie, qu’avec les premières pluies, qui 
commencent ordinairement en octobre. » Le semeur porte les semences 
dans un sac lié à la ceinture. 


On cultive d’abord l’avoine , puis l’orge; le froment ne vient qu’en 
troisième lieu , et on a soin de le houer une ou deux fois. Cette rotation 
se poursuit jusqu’à ce que le sol ne rende plus que deux fois la semence, 
ordinairement pendant trois ou quatre années. Après une ou deux années 
de jachère, on brüle les grandes éteules et les broussailles, et on donne un 
premier labour en octobre ou novembre, puis un second en travers au 
printemps; un dernier précède les semailles qui sont ordinairement en 
coton ou en sésame. L’usage du fumier n’existe pas, les animaux, 
tenus sans litière, n’en produisant que très-peu, et les immondices des 
villes étant à peine employées. 


La faux étant inconnue, les moissons se font à la faucille; les chau- 
mes sont coupés bas, quelquefois à moitié hauteur; la maturité étant 
toujours fort avancée , les grains se perdent en partie pendant les trans- 
ports à l’aire ; celle-ci, de 10 à 15" de diamètre, en plein champ, a son 
sol uni , un peu enfoncé , formé d’argile bien battue : on la couvre de grain 
sur une épaisseur de 30 à 70° et on y fait passer les bestiaux avec le 
Volossiri; lorsque le dépiquage est opéré, on jette le grain d’un bout 
de l'aire à l’autre, si le vent est assez fort; sinon on tamise à l’aide du 
Voluti. 


(1) Voyage en Grèce el en Turquie, T. I. p. 367, 


(391) 


Le froment, Sitari (1), est semé après les premières pluies de novem- 
bre; dans les plaines, c’est le blé d'hiver barbu, tendre, blanc ; et sur 
les montagnes, le blé d'hiver barbu, dur, corné, jaune-rougeûtre ; quel- 
quefois après le 15 février, c’est le blé de mars à barbes, dur et gris. 
La rouille est fréquente et la carie rare. On emploie habituellement 
{ hect. 5 par hectare, et on récolte au moins 6 à 7 fois la semence. Lors- 
qu’on n'obtient plus que 2 ou 3, on laisse reposer le sol; on remet du 
coton ou du sésame après lesquels on obtient 10 à 12. Le grain donne 
les 3/4 de son poids de farine, Allevri. Dans la plaine de Messara, sur- 
tout, les blés sont de première qualité. Ils ont obtenu à l'Exposition uni- 
verselle de 1855, à Paris, une mention honorable , seule récompense 
accordée aux produits de la Crète. 

L’orge, Kretari, forme la culture la plus répandue ; celui d'hiver se 
trouve partout, celui de mars est rare; on emploie 2 hect. 25 par hec- 
tare et on obtient 8 à 10 fois, quelquefois jusqu’à 15 fois la semence. 
L’orge forme la nourriture habituelle des habitants des campagnes et, 
mêlé avec de la paille hachée, celle des chevaux, mulets et ânes. L’orge 
de Messara est le meilleur de l’île. — L’avoine commune, Vromi, se sème 
aux premières pluies, avant le froment ; la semence employée et son ren- 
dement sont les mêmes que pour l’orge. — Le seigle, Sikali, est très-peu 
cultivé; celui d'automne l’est sur les montagnes schisteuses de Selino. 
— La moisson de ces diverses céréales est terminée en juin , etles récol- 
tes sont suffisantes pour la’ nourriture des habitants des campagnes, 
pendant les deux tiers ou les trois-quarts de l’année au plus. 

Elles ont été ainsi évaluées pour quelques-unes des quinze dernières 
années : 


1841, 30,000bet 4844, 80,000 4886,  300,000hect 
1842, 40,000 4845, 400,000 
1843, 60,000 1846, 125,000 


J’ai déjà dit que la production des céréales était de beaucoup insuffi- 
sante pour la consommation annuelle des habitants ; les quantités sui- 
vantes ont été importées pendant certaines années : 


(1) Je donne les noms usités en Crète, maïs en faisant remarquer qu'ayant eu par- 
fois de la peine à saisir la prononciation, je ne les crois pas exempts d’erreurs. 
Quelques-unes de celles-ci, cependant, ont été rectifiées par M. L. Thenon, élève 
de l’École française d'Athènes, qui, à deux reprises, en 1857 et 1858, a exploré l’île 
au point de vue archéologique. 


( 398 ) 


Froment et Orge. Kiz. 
1841, 69, 8kGhect, ....,....1. ENT Éocrc ue qu rene fr, 
AS ED ABS BAL Vi sucscrnceree Un ONE 
1845, 137,000 1,355,009 10,130 363,000 
RATE 0 NRA 12120:000" . FONAEESES 266,000 
ASS N LIPRNRIEE 1200940 00 NME 396,000 
4855, DOLLARS 10939 PME TN 
1856, 216,875 5,143,000 7,600 368,500 


Le maïs de Grèce, Kalampoki, à grain jaune et à un épi, rarement 
deux, est cultivé dans les champs irrigables de quelques éparkhies du 
liva de Megalo-Kastron où il entre dans les assolements. Ailleurs on le cul- 
tive pour servir de tuteur aux haricots. L’épi est mangé bouilli ou grillé, 
avant la maturité complète, en septembre. — Le riz, Rizi, ne peut être 
cultivé faute d’eau. — Le sorgho, le millet et le sarrasin sont inconnus. 

Malgré les procédés si imparfaits de la culture, le froment rend en 
général 6 à 12 fois la semence, et l’orge et l’avoine un peu plus; le sol 
donne un produit net de 8 à 10 pour cent de sa valeur vénale , qui est à 
la vérité peu élevée; l'argent, ainsi immobilisé, est considéré comme 
avantageusement placé, puisqu'il procure moitié de l'intérêt qu'on en 
obtient par le prêt. 

Plantes alimentaires diverses.— Les féverolles, Koukkia, sont fréquem- 
ment cultivées ; on les houe une ou deux fois, mais elles ne réussissent 
pas bien, faute de fumier; les orobanches leur font aussi beaucoup de 
tort. — Les pois-chiches ou ciceroles, Pobythia, sont cultivés en grand 
dans le liva de Megalo-Kastron ; on les sème en mars et on obtient 7 ou 
8 fois la semence. 

Dans les jardins, Perivolia, on laboure jusqu’à 6 fois, à 020 de pro- 
fondeur, et les menus graines sont ordinairement recouvertes à la houe. 
Les haricots, Phasoulya, sont consommés verts.— La fève n’est pas cul- 
tivée en grand.— Les pois, Pizeli, ne l’ont encore été qu’à titre d’essai, 


car dès la deuxième année ils perdent tout leur sucre. — Les lentilles 
sont inconnues. — Le topinambour abonde sur les marchés des villes ; 


mais je n'ai pas entendu parler, non plus qu'Olivier, de la Colocasse 
d'Egypte dont parlent les auteurs plus anciens. 

Les concombres, Anghouria, et les tomates, Tomata, cultivés dans les 
jardins, sont consommés en immense quantité à la fin de l'été et en 
automne. — Des melons, Peponi, assez médiocres, viennent dans les 
champs. — Les pastèques, Karpouzi, sont très-bonnes et se conservent 


( 399 ) 

plusieurs mois. — Les courges et citrouilles, Kolokynthia, les aubergi- 
nes, Meitzanes, viennent aussi. — Enfin, comme dans tout l'Orient, les 
Crétois estiment beaucoup et mangent de juin en octobre le gombo, 
Bamia ( Hibiscus esculentus ), fruit mucilagineux et peu savoureux, cuit 
avec de la viande de mouton. — Les artichauts, Anghinaru, poussent 
en plein champ ou en bordures, au voisinage des habitations. Les carot- 
tes, Khavoutsi, sont très-bonnes seulement à Megalo-Kastron. L’ognon, 
Kromidli, etl’'ail, Skordhon, viennentpartout. Les choux, Lakhana, choux- 
navets, choux-fleurs, Kounoupidhi, raves, Ghonghylia, épinard, Spanalki, 
cerfeuil, Kantsika, pourpier, Andhrakla, poireau, Praso, sont cultivés 
autour des villes. La chicorée, Endhivi, et la laïtue, Maroulion, sont 
préférées vertes. 

La pomme de terre, Ghaiomilo, a été importée récemment par les Euro- 
péens ; les essais ont été heureux en plantant en octobre pour récolter 
en avril ou mai. Si on plantait en février, il faudrait arracher au mois de 
juin avant la floraison, à cause de la sécheresse et de la chaleur, à moins 
cependant que le sol n’eût élé préparé par de profonds labours. — La 
betterave, Seutlou , réussit mal. Tous les légumes en Crète sont fort mé- 
diocres faute de soins ; mais les habitants les préfèrent ainsi. Aujourd’hui 
comme à la fin du siècle dernier, ceux des campagnes mangent une foule 
d'herbes cuites et frites dans l'huile, ou assaisonnées en salade, ou con- 
fites dans le vinaigre, dont Olivier a donné l’énumération (p. 412). 

Autrefois, la fertilité était entretenue sur beaucoup de points à l’aide 
d'irrigalions faites avec soin ; aujourd'hui celles-ci n’ont plus guère lieu 
que dans les jardins, au voisinage des villes ; parmi les moins mal entre- 
tenues on peut citer celles de Mourniès, près de Khania. Les sources, 
et les canaux qui en dérivent, appartiennent à des propriétaires qui 
peuvent seuls en user; il y a à cet égard des usages qui remontent, dit- 
on, au-delà de la domination vénitienne, et chacun des ayants-droit pos- 
sède une jouissance, massoura, de tant d'heures par semaine. L'usage 
des rivières pour dérivations et moulins est complètement libre. 

Le lupin, Louthounaria, et la vesce, Aphkos, mêlés d’un quart d'orge 
et semés très-dru, forment les seules prairies artificielles de la Crète; ils 
sont donnés en vert aux animaux parqués dans les étables, pendant les 
mois d'avril et de mai. 

Herbes oléagineuses et textiles. — Les Crétois, dont le climat est si 
favorable pour lolivier, répugnent à l’introduction des premières. — Le 
sésame, Sisamn, est la seule cultivée ; après plusieurs labours en avril, on 


( 400 ) 

sème le 1 mai, à raison de deux kilogrammes par hectare, et on recou- 
vre avec le Volossiri ; plus tard on sarcle et on houe. Lorsque la graine a 
bien levé, et lorsque les insectes n’ont pas dévoré les pousses à la flo- 
raison , on en obtient 10 à 12 hectolitres par hectare ; on en saupoudre 
les petits pains, pour leur donner plus de goût, ou bien on en fait une 
huile, employée dans certaines pâtisseries. — Le ricin vient naturelle- 
ment, mais il n’est pas utilisé. — Le pavot n’est pas cultivé. 

Un lin, Linari, assez dégénéré, est cultivé dans l’île. Après deux ou trois 
Jlabours, on met en terre, en octobre, 4 hectolitres de graine par hectare. 
Malgré l’engrais, on n’obtient qu’une filasse courte et grossière, et de la 
graine, en quantité triple de celle employée. Celle-ci est envoyée à Syra 
d’où elle passe en Italie et en Autriche ; quelquefois on en transporte des 
quantités notables à Marseille. — Le chanvre est inconnu. 

Le coton herbacé, Bambaki, est cultivé dans les plaines qui avoisinent 
la mer; cette culture est pen productive faute d’engrais, et par suite de 
l’abâtardissement de l'espèce, qui ne dépasse pas 0" 50 de hauteur; elle 
est surtout considérée comme une préparation à la culture des céréales, 
à la suite de la jachère. Après un labour superficiel, on sème dans la 
première quinzaine de mai, souvent avec des pastèques, des melons ou 
du maïs, pour éviter le sarclage et le binage. La récolte, qui se fait en 
septembre, donne rarement jusqu’à 250 kil. par hectare. Les bœufs man- 
gent la graine germée. | 

Plantes herbacées diverses. — La garance, Kermezi, qui donne de si 
riches produits dans l’Asie-Mineure, a été essayée avec succès par plu- 
sieurs propriétaires, dans le liva de Megalo-Kastron. — M. Hitier ne dit 
rien des vastes champs de safran, Krokati, que Savary disait exister dans 
Ja plaine de Rhethymnon; mais la plante est cependant encore cultivée, 
car les produits ont figuré à l'Exposition universelle de 1855.—La nico- 
tiane qui ne donne que du tabac à fumer, Kapno, de qualité inférieure, 
excepté à Rhethymnon, n’est guère cultivée qu’autour des habitations. 
On sème sur planche en janvier, et on plante en avril dans un sol pré- 
paré par cinq labours; on sarcle et on houe avec le Skapeti. La récolte 
qui se fait feuille par feuille, peut donner 18 à 20 kilogrammes par 
are. — À Khalepa près de Khania, il y a des haies d’Opuntia, dont les 
fruits mürissent en automne. — Pour teindre les laines et cotons, les 
habitants se servent de plantes spontanées, douées de propriétés üncto- 
riales. 

« Entre autres plantes de Crète, dit Belon , le Dictannum est insigne, 


( 401 ) 
qui à peine peut croistre sur terre : aussi vient-il tousiours es en- 
tre-deux et fentes des rochers, et non autre part, et n’est trouué ailleurs 
qu’en Crète. Il est vulgairement nommé Cromido filo. » Si aujourd’hui l’u- 
sage du précieux dictame n’est plus répandu hors de l’île, comme dans 
l’antiquité, celui-ci, n’en est pas moins encore souvent recueilli par les 
habitants, principalement à Sphakia; 1l se vend 4 fr. le kilogramme. 

Le ladanum, Aladanon, dont parlent surtout Belon, Tournefort et Son- 
nini, est une matière visqueuse et odorante, qui est sécrétée par les jeu- 
nes tiges et les feuilles du Cistus ladaniferus, Kisto, « qui, dit Belon (1), 
s’engressent à la chaleur du Soleil, d’vne vligineuse rosée par-dessus 
et d’autant que le chauld est plus violent que l’esté, d'autant plus croist 
la susdite rosée dessus ces feuilles. Les Grecs recueillans ledit Lada- 
non, ont la manière de préparer vn instrument qu’ils nomment en leur 
vulgaire Ergastiri. Cest instrument à le fust quasi comme celui d’vn ras- 
teau sans dents , lequel ils garnissent de plusieurs conroyes de cuir qui 
n’est pas conroyé, qui sont pendantes audit instrument (2). Ils frottent 
lesdites conroyes doucement contre lesdicts arbrisseaux : lors la susdite 
rosée s'attache contre les conroyes, lesquelles il faut tenir au Soleil 
ardent, quand l’on en veut oster le Ladanon, qu’on rascle avec un cous- 
teau. Faire le Ladanon est vn labeur quasi intoierable : Car il faut estre 
tout le iour au Soleil par les montaignes, ès plus chauds iours canicu- 
laires de tout l’esté. Et l’endroit en Crète, où l’on en face plus grande 
quantité est vers le pied du mont Ida, au village nommé Cigualinus, et 
auprès de Milopotamo. » Un homme en amasse habituellement 1 kil. 5 
par jour ; le ladanum est un parfum recherché par les Turcs du con- 
tinent. 

Une broussaille sèche et épineuse, le Poterium spinosum, qui couvre 
les plaines et les plateaux, est mise partout dans les campagnes sur les 
cruches à eau. Cet usage ne date pas d'hier, car Onorio Belli écrivait à 
Lécluse en 1594 (3) : Vocatur vulgo stamnaghati, hoc est, Hydriæ spina, 
quia vulgariter in tota Cretà, fictilibus hydrijs utuntur ad hauriendam 
aquam è fontibus, quas hac herba obturant, ne mures aliudve animal 
intus penetrare possit, videtur enim ad hoc munus ista planta à natura 
formata ; nam semper rotundä figuré cernitur. 


(1) Les Observations de plusieurs singularitez , fol. 8. 
(2) Tournefort l’a figuré, t. I, p. 73. 
(3) C. Clusi rariorum plantarum historia, t Il, p. CCCvIn. 


( 402 ) 

Vigne, Klimata. — Si elle ne tient pas après l'olivier, le second rang 
dans les produits de la Crète, il ne dépendrait que de ses habitants de l’y 
placer, car dans toutes les parties de l’île, le sol lui est merveilleusement 
propre. Elle réussit partout et porte des fruits excellents ; dans certains 
cantons , elle en donne d’une qualité vraiment remarquable. Cependant 
elle exige pour prospérer, des soins multipliés et intelligents ; la fabri- 
cation du vin, Krasi, fort simple en elle-même, devient un art chez les 
peuples industrieux. En Crète, la culture de la vigne est à peu près aban- 
donnée à elle-même, si on la compare à celle de beaucoup d’autres pays; 
les procédés de la fabrication du vin surtout, y sont grossiers, tels qu'on 
doit les attendre d'hommes à qui toute science est étrangère, et qu’au- 
cune émulation ne stimule. 

‘Pendant l'insurrection de 1821, les vignes, Ampeli, ont été en grande 
parte détruites (1), mais depuis le retour de la tranquillité, il en a été 
beaucoup planté; et, en 1836, la quantité accusée par l'impôt, auquel 
elles sont soumises, était de 12,000 deunum, environ 4,600 hectares. 
Déjà en 1838, l’ile produisait des vins en quantité à peu près suffisante 
pour sa consommation. Pour établir une vigne, on laboure plusieurs fois 
le sol peu profondément, puis on plante les ceps à Or 50 les uns des au- 
tres, en lignes espacées de 1"; on tient ceux-ci ordinairement très-bas et 
rampants à Megalo-Kastron ; d’autres fois, on les élève en treilles, mais 
moins hautes qu'en Italie. Parfois, les ceps grimpent jusqu’à 10" de hau- 
teur sur les platanes, et acquièrent 0 50 de tour. En mars seulement , 
on donne deux façons très-superficielles avec le Skalidha, sorte de houe 
triangulaire ; aussi faut-il 7 ou 8 années avant qu’une vigne soit en plein 


(1) Lorsque Sieber habitait l'ile, en 1817, on distinguait une soixantaine de cépages 
à raisins, soit blancs, soit noirs ; dans son Reise nach der Inseln Krela, t. I, p. 60 
et 61, il donne les noms des 57 suivants : 


Cépages blancs : Adani. Diri ou Dfri. Rasacly mavro. 
Liatico aspro. Rasacly aspro. Kariduto. Vuidomato. 
Moscado. Daphni. Cépages noirs :  Achladia. 
Vidiano. Aïtanischi ou Liatico mavro. Sarracino. 
Vablaitis. Dactylatho. Cocciphali. Kurutachta. 
Frapsatiri. Gaïdurades, galano.  Mavro Romeiko. Melissa. 

Lagortbi. Andoni. Ladicino. Gaïdurates mavro. 
Aspro Romeiko. Cuminato aspro. Archondissa. Cuminato mayro. 
Plitho. Evnzagarina. Siritschi. Zardani. 


Xerotrapsa. Dermatades. Heptacylon. 


( 403 ) 
rapport. À proximité des villes où l’on consomme beaucoup de raisins, 
Staphyli, une mesure qui contient un 36° d’hectare environ, se vend 
125 fr. en moyenne. Lorsqu'un petit insecte, appelé Kampia, mange les 
jeunes pousses en mai, la récolte peut être réduite au huitième. 
Pendant mon séjour, en 1845, les raisins étaient mangeables le 5 août, 
et la vendange était faite le 10 septembre, même dans les vignes situées 
à près de 1,000% d'altitude. En général, on coupe les raisins lorsqu'ils 
sont arrivés à maturité; on les dépose ensuite dans des cuves en maçon- 
nerie, de 2 à 3" de profondeur, sur 5 à 6" de largeur, construites dans 
les vignes, et exposées à l’air et au soleil; la fermentation s’y opère pen- 
dant 10 à 12 jours, quelquefois avec du plâtre et de la résine; puis on 
foule, le jus s'écoule, et celui qui reste dans les mares est exprimé à 
l’aide de presses portatives ; Le tout est mis dans des tonneaux, et le sou- 
tirage se fait au bout de 40 jours. Les vins, dont il y avait plus de 20 
crûs recherchés autrefois, sont très-spiritueux et chargés en couleur; 
tantôt secs et tantôt doux. Ils gagnent en vieillissant, mais ils restent 
dépourvus de bouquet; bien soignés, ils feraient des vins de dessert 
analogues à ceux d’Espagne. Les meilleurs se font dans les éparkhies de 
Temenos, de Malevisi et au monastère d’Arkadhi; dans celle de Kisamos, 
on fait également de grandes quantités de vins; mais ils sont moins esti- 
més, peut-être bien par suite de la nature marneuse du sol et de l’usage 
établi d’y mettre du plâtre, ce qui leur donne de la fadeur. Les Juifs font 
pour leur usage, des vins blancs ou rouges, dits Krasi tis nomou (vin 
de la loi), passablement doux; ils sont préférés, en général, par les 
Occidentaux, quoique véritablement peu agréables à boire dans un cli- 
mat aussi chaud, où l’on ne pourrait obtenir d’eau fraîche qu’à l’aide 
d’alcarazas qui sont inconnus. Partout où la production est grande, la 
consommation l’est beaucoup. 
En général, les mares sont distillés ; mais par suite de l’imperfection 
des procédés, on n’obtient que de l’eau-de-vie, Raki, de médiocre qualité. 
On en fait aussi avec des raisins secs que l’on fait fermenter pendant 10 à 
15 jours, et que l’on distille ensuite; on fait aussi du vinaigre, Xydhi. 
Dans l’éparkhie de Malevisi, et aussi dans celle de Temenos, on fait 
toujours une grande quantité de raisins secs ; ils sont petits, peu char- 
nus, trop secs et inférieurs à ceux de Smyrne; aussi, sont-ils exportés en 
Syrie, à Alexandrie et à Tunis pour les sorbets des Musulmans. Des 
quantités considérables passent cependant à Trieste, et de là, en Alle- 
magne. Des raisins noirs de qualité inférieure, sont cependant exportés 


( 404 ) 
pour la distillation. La production des raisins secs a été ainsi évaluée pour 
quelques-unes des dernières années : 


1841, 4,450 qt. mt. 1844, 6,400 qt. mt. 1856, 7,900 qt. mt. 
1842, 7,100 1845, 6,600 
1843, 5,400 1846, 4,010 


La quantité consommée dans l’île était estimée pour 1856, à 300 quin- 
taux métriques. 

Olivier, Elaïa.— Cet arbre couvre les campagnes de la Crète, dont il fait 
la véritable richesse et aussi l’ornement. Grâce à lui, l’œil trouve à se 
reposer sur des masses de verdure, dans un pays qui, sans cela, ne pré- 
senterait pendant la plus grande partie de l’année, quand les récoltes ont 
été enlevées, que des aspects d’une désolante aridité; mais partout et à 
chaque changement d'horizon, on découvre des bois d’oliviers, Elaïonas, 
dont quelques-uns s'étendent sur une espace de plusieurs kilomètres. 

Les plus beaux de ces arbres ont un tronc d'environ 5", que deux hom- 
mes peuvent à peine embrasser, etleur cime s'élève jusqu’à 8 à 10», et 
parfois 15". Beaucoup qui avaient été détruits pendant l’insurrection, ont 
été remplacés ; mais il a fallu 15 à 20 ans avant qu’ils fussent en plein 
rapport, et seulement 10 à 12 ans lorsqu'on les avait greffés. Les seuls 
soins qu’on leur donne consistent, faute de bras, en deux ou trois labours, 
de février en avril, après lesquels on passe le Volossiri ; on se contente 
d'enlever les branches mortes et celles qui poussent au pied ; on les 


fume, soit trop peu, soit sans mesure, avec le marc d’olives ; aussi n’a-t-on : 
y 2 2 ? 


des produits abondants qu’une année sur deux. D’après leur rapport, les 
oliviers valent de 50 à 500 piastres chacun. 

La récolte des olives, Elaïa, commence au mois de novembre et ne 
finit qu'en mars, le plus souvent lorsqu'elles tombent d’elles-mêmes ; il 
en résulte un grand déchet et des huiles, Ladhi, épaisses, rances et âcres. 
Ce sont les femmes et les enfants qui opèrent le ramassage et le trans- 
port dans des magasins, où chacun fait son tas. Quand ceux-ci doivent 
attendre de quatre à six mois, avant d’être mis au moulin, on les recou- 
vre de sel qui n’empêche la fermentation, à coup sûr , que lorsque les 
planchers sont percés de trous. Une bonne ouvrière peut ramasser, pen- 
dant la saison, du fruit pour faire 330 kil. d'huile, valant en moyenne 70° 
l’un. Mais elles doivent se nourrir et aussi celui qui broie les olives et 
qui conduit leur part à la ville. Comme on leur abandonne 2/7 ou 1/3 
dans les bonnes années, elles gagnent de 280 à 320 piastres, 60 à 70 fr. 


1 
| 


( 405°) 


En 1857, on a même été obligé de leur donner les 2/5. Dans celles où la 


. récolte est complète, un quart est habituellement perdu faute de bras. — 


Dans l’Apokorona, on gaule les olives généralement, et quelques habi- 
tants des villes font faire cette opération au-dessus de draps ; l’huile est 
meilleure, mais les arbres en souffrent certainement, car ils sont plus 
petits que partout ailleurs. 

Lorsque les olives sont ramassées en quantité suffisante, on les con- 
duit à des moulins, Ladourghi, de la plus grossière et de la plus simple 
construction, où elles sont écrasées à l’aide de meules verticales müûes par 
un cheval ou un mulet; la pâte, mise ensuite dans des sacs de crin, est 
placée dans une presse en bois à vis, manœuvrée par deux à quatre hom- 
mes ; l'huile s’écoule dans une jarre fixe où on la puise pour la mettre 
dans des outres en peau de chèvre, dont le poil est par dedans. L'huile de 
première pression appartient au propriétaire des olives et aux ramasseu- 
ses. Les marcs, fort riches encore, sont mis en tas et s’échauffent ; au 
bout de 20 jours , on les broie et on les presse de nouveau. On obtient 
une huile inférieure, âcre, qui forme le tiers de la première. Le pro- 
priétaire du moulin en prend les 2/3, et le reste est pour le salaire des 
ouvriers, qui gagnent ainsi 4 à 9 piastres par jour. Quelquefois, par une 
troisième pression, on extrait une huile qui est partagée également entre 
le maître et les ouvriers. Le gouvernement retient 1/7 de chacune d’elles. 
Les propriétaires d’oliviers qui n’ont pas de moulin, portent leurs olives 
à ceux du gouvernement, car il n’est permis ni d’en élever de nou- 
veaux , ni de réparer ceux qui n’auraient pas fonctionné dans les années 
qui avaient suivi l'insurrection. Il y en a en tout dans l’île 3,000, qui 
fonctionnent moyennement pendant deux mois et demi de l’année, avec 
9,000 ouvriers. La fabrication de l’huile coûte donc, de main-d'œuvre 
seule , 2,100,000 piastres (594,000 fr.). Un excellent olivier en plein 
rapport, peut donner, année commune, 2 à 3 mistata d'huile (22 à 33 
kilog.); mais habituellement, 100 mistata sont le produit de 450 à 200 
arbres. Les olives, dans les bonnes années, rendent moitié de leur poids 
en huile; dans les médiocres, c’est seulement un tiers et même un 
quart. 

Un moulin hydraulique avait été élevé près de Khania, à la naissance 
du Platania, par MM. Caporal et Agnew pour soumettre les marcs à une 
troisième et puissante pression. Mais l'attente ayant été trompée, on 
n'y dépassa pas bientôt la seconde pression. 

Plusieurs causes contribuent à rendre l’huile de Crète peu propre à 


( 406 ) 

alimentation : récolte des olives lorsqu'elles sont déjà détériorées , in- 
suffisance des moyens de conservation en attendant qu’elles soient por- 
tées au moulin, et enfin grossièreté des procédés d’extraction ; aussi, 
hors de Crète, n’est-elle propre qu’à la fabrication du savon. Les habi- 
tants de l’île cependant, chrétiens comme musulmans, s’en servent telle 
quelle sans avoir jamais songé à améliorer la partie qu'ils réservent à 
leurs usages domestiques, et surtout pour l’alimentation. La consomma- 
tion en est plus grande que dans aucun autre pays grec, même dans les 
plus pauvres familles qui ne possèdent pas d’oliviers ; il leur en faut 10 à 
12 mistata par an, (139 à 168 kil.), tant parce qu’elle entre dans cha- 
que mets, qu’à cause de l’observance stricte des carêmes et abstinences, 
pendant lesquels la consommation est presque doublée. Chez les proprié- 
taires, la quantité employée est ordinairement de 20 mistata (225 kilog.) 
D’après M. Pashley, la quantité consommée en 1834 par les 26,000 
familles pouvait être évaluée à 3,328,800 kilog.; mais avec une popula- 
tion d’un tiers en sus, le consul de France ne la portait pour 1856, qu’à 
2,000,000 de kilogrammes. 

Les habitants des campagnes conservent dans le sel une grande quan- 
tité d'olives d’une variété particulière ; c’est, surtout pendant les carêmes 
des Chrétiens , un article important d'alimentation auquel sont attribuées 
plusieurs de leurs maladies. 

Les cultivateurs transportent leurs huïles dans des outres, Aski, du 
moulin à la ville; là, en remboursement d’avances en argent, faites sou- 
vent plusieurs mois avant la récolte, ils les livrent à des gens qui les 
emmagasinent dans de grandes cuves en bois. C’est à ceux-ci que les 
négociants doivent le plus souvent s’adresser pour l’exportation. En 1837, 
une récolle moyenne était évaluée à 91,000 quintaux métriques et une 
abondante, à 136,000. La production a été ainsi évaluée en quintaux 
métriques, pour quelques-unes des dernières années : 


1841, 73,000 qt. m. 1844, 67,330 qt. m. 1855, 130,351 qt. m. 


1842, 51,000 1845, 77,610 1856, 99,021 
1843, 65,500 1846, 60,250 | 


Arbres à fruits. — Le figuier, Sykea, est très-répandu auteur des habi- 
tations. Les figues , Syka, sont très-usitées ; mais les habitants croient 
qu’elles donnent la fièvre lorsqu'elles sont mangées en trop grande quan- 
üité.— L’oranger, Nerantzia, et le citronnier, Lemonia, qui se rencontrent 
partout dans les jardins, sont devenus , depuis 50 à 60 ans, dans les alen- 


( 407.) 

tours dé Khania et de Megalo.Kastron, l’objet d’une culture importante, 
la seule à laquelle on apporte des soins en Crète. Les arbres croissent 
très-vite et portent des fruits dès la cinquième année, lorsqu'ils sont 
ereffés , taillés et irrigués comme à Mourniès; on cultive surtout les 
oranges de Portugal, Portokalia, et les oranges turques ; un arbre, en 
plein rapport, donne jusqu’à 2 et 3,000 oranges, aussi délicieuses que 
belles. Il n’est pas rare que deux ou trois oranges suffisent à former le 
poids d’un kilogramme. Il y a quelques orangers bergamoltes, mais en 
petite quantité. Les divers citrons, Lemoni, sontle cédrat , le poncire, le 
calotin et le limon doux. Dès le mois de décembre, on commence à les 
expédier à Athènes et à Stamboul. — L’amandier , Amyghdhalea , vient 
partout, mais surtout en Kisamos et Selino , et dans la moitié orientale 
de l'ile où il donne un produit assez important ; la meilleure amande, 
Amyghdhalo, est à écorce tendre ou même presque sans écorce. La plus 
grande partie passe, par Syra, dans l’Europe occidentale. — Le grenadier, 
Rhodhia, donne des fruits, Rhodhi, assez bons dans les jardins. 

Le pommier, Milea, le poirier, Apidhia, et le néflier, Mespilia, existent à 
l'état sauvage. Des pommes, Milon, et des poires douces, Apidhi, assez mé- 
diocres, mais estimées dans l’île, se récoltent en grande abondance dans 
la plaine de Lassiti et en Pedhiadha et Temenos, d’où on les exporte jus- 
qu’à Alexandrie. — Le prunier, Damaskinia, et le merisier, Kerasia, se 
trouvent sauvages. Les prunes, Damaskina, les abricots, Verikouka, les 
pêches, Rodhakini, les cerises et les bigarreaux, Kerasi, les coings, 
Kydhoni, et les jujubes , Tsüsiphi, des jardins, n’ont ni saveur ni goût 
aujourd'hui. — Les noyers, Karidhia, que l’on rencontre er un certain 
nombre de points, produisent une assez grande quantité de noix, Karidhi, 
en Sphakia. — Les éparkhies de Selino et Kisamos nourrissent dans leurs 
parties occidentales surtout, sur le terrain talqueux , une grande quan- 
tilé de châtaigniers, Kastania ; ces arbres, souvent d'énormes dimen- 
sions , comme à Enneakhoria , forment les plus beaux bois de la Crète, 
par la grandeur et le vert vif de leur feuillage; ils donnent en quan- 
tité des châtaignes, Kastana, grosses et bonnes, qui sont consommées 
dans les villes et exportées en Grèce, dans les îles avoisinantes , à Stam- 
boul et en Syrie. — Çà et là, surtout dans la partie orientale , 1l y a des 
pins-Pignon, Koukounaria ; les fruits de l’arbousier, Koumaré, sont fré- 
quemment mangés en novembre. 

Caroubier, mürier, etc. — Le premier, Keratia, fréquent en Chypre 
et rare en Grèce, vient spontanément dans les parties pierreuses et les 


( 408 ) 


rochers qui avoisinent principalement la mer, dans les livas de Rhethym- 
non et de Megalo-Kastron ; il est clair-semé et pousse lentement, sans soins 
aucuns. On ne s’en occupe que pour cueillir les caroubes , Xylokeraton , 
qui sont ordinairement mürs au commencement d'août, et dont un arbre 
en plein rapport donne, année moyenne, 60 kilog. Ils sont exportés soit 
en Syrie, en Egypte et en Turquie pour la nourriture et les sorbets des 
pauvres , soit en [talie pour celle des chevaux et mulets. La production, 
en 1856, a été évaluée à 15,182 quintaux métriques et la consommation 
dans l’île , seulement à 650 quintaux métriques. 

Le mürier blanc, Sykaminia, est beaucoup plus répandu que le noir, 
qui ne se trouve que dans deux ou trois éparkhies. Ce sont des arbres 
de haute tige, disséminés autour des habitations , et formant très-rare- 
ment des bordures le long des champs. Il en à été beaucoup planté 
récemment; mais les arrosages sont nécessaires dans les premiers 
temps ; les vents d’O. qui règnent une grande partie de l’année et qui 
sont surtout violents au printemps, ont empêché la réussite du mürier 
multicaule, dont la feuille est trop délicate. Chaque propriétaire pos- 
sède deux ou trois müriers, quelquefois davantage; mais il n’y à nulle 
part de magnaneries. La mûre, Sykaminon, réputée fiévreuse, n’est guère 
mangée par les habitants. 

Le chêne Velani, Valanidhia, est un bel arbre qui vient sans aucune 
espèce de soins et dont le bois est très-bon. Il ne se trouve cependant 
que dans les environs de Rhethymnon, où il croît au milieu des oliviers 
sauvages et des platanes. Un arbre vigoureux donne annuellement, d'août 
en septembre, 250 à 300, et quelquefois 800 à 1,000 kilog. de glands 
ou vallonée, Valoniu; celle-ci est employée au tannage des peaux, soit 
dans l’île, soit au dehors par voie de Trieste. 

Le laurier, Dhaphni, très-commun dans les lieux secs et pierreux, atteint 
ordinairement 6" de hauteur. On en obtient par la distillation une 
huile essentielle très-odorante, employée par les habitants des campa- 
gnes et exportée à Benghasi, Tripoli et Tunis. 

Le dattier, Vaï, existe dans les jardins des villes, à l’Almyros de 
Megalo-Kastron , et surtout au metokhi du cap Sidhero; mais nulle part 
ii ne fructifie. 

Bois. — Dans les parties basses du versant septentrional, il y a sur 
plusieurs points, de petits bois, Dhasos, très-disséminés, de chêne ordi- 
naire, Valania, de pistachier, Pistakia, et d’arbousier, Koumaré, avec 
de grandes bruyères, Rikia; le pin d'Alep, Pevkos, est plus fréquent sur 


( 409 ) 

le versant méridional. Le platane, Platano , le laurier-rose, Rodho- 
dhaphni, sont fréquents partout dans les vallons et sur le bord des ruis- 
seaux ; le tamarix, Myriki, l’agnus-castus , se trouvent dans les plaines 
maritimes. L’yeuse, Prinos, l’érable, Sphendhamno, forment, sur les 
pentes des montagnes, des bois rabougris qui disparaissent chaque jour 
davantage ; mêlé avec eux et s’élevant beaucoup plus haut, se trouve le 
cyprès horizontal, Kypresso, qui est très-clairsemé et toujours très-rabou- 
gri sur les côteaux très-exposés aux vents ; il fournit, presque à lui seul, 
les poutres et solives des habitations des campagnes. Le cyprès pyrami- 
dal, l’arbre des cimetières musulmans , est assez commun dans les jar- 
dins. Le myrte, Mirsini, forme aussi des bosquets dans les endroits 
humides. Ses feuilles sont employées au tannage et dans la préparation 
des peaux destinées aux chaussures. 


Avec de si faibles ressources , la Crète est obligée de s’approvisionner 
au dehors pour les deux tiers des bois de construction et de chauffage. 
Chaque année, il arrive de petits bâtiments chargés de planches de chêne 
et de sapin, ou de bois de chauffage, pour les villes et leurs savonneries. 
Au Sud de Rhethymnon cependant, le plateau est assez couvert et fournit 
à peu près le bois nécessaire. 


Dans quelques parties cependant, on fait du charbon, Karvouna, pour 
les villes, avec l’yeuse, comme dans les montagnes de Lassiti et aussi 
dans les montagnes d'Omalos d’où l’on retirait, à la fin du dernier siècle, 
la majeure partie du bois et du charbon consommés à Khania. Ailleurs, 
c’est avec l’arbousier et le laurier-rose ; ce dernier, qui est mis en coupe 
réglée dans quelques localités, donne un charbon très-léger. Les quan- 
tités de charbon produites sont les suivantes : 


Khaniotika..…. 5,000 quint. mét.} 
Mylopotamo.. 41,120 — 26,120 quint. mét. valant 130,600 fr. 
Lassiti... ...... 20,000 — ) 


Résumé de la production végétale. — M. J. Bowring a donné, de celle 
des principaux. produits , l'aperçu suivant, qui se rapporte à peu près à 
l’année 1836 : 


Hectol. Quint. mét. 
Froment..…...… 1230000 Bihan 770 Graine de lin. 4,090 hectol. 
(OITE PRESSE 217,800 Coton... 15020%4 Huile: 73,000 — 
JU TD SEE 1108 900MiInEe 32,000  Caroubes...... 19,700 qt. mt. 


Fèves, vesces. 72,600  Eau-de-vie. 3,200  Vallonée.....… 2,800 — 


( 410 ) 

Le tableau suivant donne l’évaluation des produits du règne végétal, 
pendant une année moyenne vers 1847; il est la reproduction exacte de 
la plus grande partie de celui dressé par M. Hilier; il n’en diffère que 
par la classification, et la suppression de quelques produits très-localisés 
dont la quantité et la valeur sont indiquées ici, et qu’il faut ajouter pour 
avoir la totalité de la production agricole et de sa valeur. 


Partie occidentale de l'ile : 


, Selin. Kisam. Khan. Sph. Rheth. Toraz. Valeur. 
Sésame... quint. m. 45f » SIM OU » 55 2,475 
Nolxee re quint. m. 30f » Dre El) » 50 1,500 
Châtaignes.. quint. m. A0f 4,000 5,000 »  » » 9,600  96,000f 
Vallonnée….. quint. m. 24 » » »  » 5,000 5,000 4120,000f 


Partie orientale de l’île : 


Maley. Tem. Pedh.Mess. Lass. Sit. 


Maïs rare quint. m. 20f »  » 25 600 » 400 141,025  20,500f 
Garance... quint. m. 200f lou ae D Dal 2 re iO 2,000f 
Raisins secs. quint. m. 46f 44,000 500 »  » » » 44,500 232,000 
Pommes....,.quint. m.  5f » 30 400  » 4,000 » 4,130 5,650f 
Poires... quint. m.  bf » 450 450 Oo» 200 » 500 2,500f 


« Les chiffres de ce tableau, dit M. Hitier, n’ont pas été pris dans des 
documents officiels; on sait qu’il n’existe pas de documents de celte 
nature en Turquie. Ils ont été recueillis canton par canton (éparkhie), 
auprès des personnes les plus compétentes, et en ayant soin de contrôler 
les informations des unes par celles des autres. — Pour s’assurer ensuite 
de leur exactitude , autant du moins qu’il était possible de le faire en 
pareille matière, on a recherché si les chiffres donnés s’accordaient avec 
les besoins présumés de la consommation du pays et le montant des 
importations, pour les denrées dont la production est insuffisante, et 
avec ces mêmes besoins et le montant des exportations, pour les denrées 
qui surabondent. Comme dernière preuve enfin, et celle-là parait con- 
cluante, on a vérifié que l'évaluation en argent des produits de chaque 
province (liva), donnait, à de très-légères différences près, le chiffre 
même que les fermiers de l’impôt foncier prenaient pour base du montant 
de leurs enchères, quand ils contractaient avec le gouvernement. Les 
enchères ont lieu chaque deux années. » 


TABLEAU DE LA PRODUCTION MOYENNE ANNUELLE D'UNE GRANDE PARTIE DU RÈGNE VÉGÉTAL VERS 1847. 


a 
 . D Ne 
EPARKHIES. ER | ee 
nn SE. | <£Æ 
l'Kisamos. . . . .| 8,000! 15,000! 6,250 
ä | Selino. . . : . .| 5,500! 8,000! 3,200 
= )Khaniotika. . . .| 5,500! 5,750 850 
5 | Apokorona. . . .| 10,000! 16,000! 8,000 
# | Sphakia.. . . . .| 6,000] 900| — 
ToTaL. . . .| 35,500! 45,650/18,500 
& | Haghio-Vasili.. .| 1,850] 5,000! 530 
= | Rhethymniotika..| 3,000! 7,200 70 
> ( Mylopotamo. . .| 1,600! 12,500! 1,400 
=) AMATI 700! 3,900 180 
= ToTaL. . . .| 7,150] 28,600! 2,200 
| 
Malevisi. . . . .| 1.400] 2,750| 1,000 
= | Temenos.. . . .| 1,600 990! 2,500 
& | 5 Messara. . . .| 12,000! 22,000/20,000 
= | Pedhiadha. . . .| 6,000! 16,000! 5,200 
& | Mirabello. . . . .| 92,250] 5,200| 4,600 
k Lassiti. . . . . .| 35,400! 5,800! 4,600 
£© JRhizo-Kastron. .| 1,400! 1,500! 1,750 
& 'Hierapetra. . . .| 2,800| 1,000! 5,000 
D | Sitia. . . . . . .| 7,250] 16,000! 7,250 
# ToraL. . . .| 58,100! 68,800 | 49,900 
. (Quant. totale.| 78,250/143,050 70,400 
CRÈTE :., J'TE 
A! aleur. . fr.|1,291,125 1,573,550 ! 704,000 


10.900 


200 
120 
480 
100! 
900! 


110 
90 
5,500 
1,150 
990 
110 
170 
110 
1,100 


8,560 


20,560 


546,126 


40 
2,250 
4,500 
1,400 

140 

80 

10 

140 
1,400 


10,020 


10,020 


212,925 


ETS. | 
aleur en fr. 


t 


Légumes div 


V 


18,000 
90,000 
175,000 


285,000 


1,200 
40,000 
8,000 
1,800 


51,000 


15,000 
1,000 
6.000 

40,000 
9,000 


1 500 
6,000 
10,000 
81,500 


415,500 


= um 

0 (= 
E S = 
SE © 
Er, = ES 
à = |» © 
ENNEE 
D 
33,000! 6,500 
18,500! 4,500 


15,500! 2,000 
38,000 18,000 
6,000 


111,000 40,500 


8,500! 600 
19,500/18,000 
19,000! 5,300 
5,300! 1,200 
48,500! 25,500 
6,400! 5,000 
9,500! 1,000 
75,000! 9,000 
15,000! 10,000 
11,730! 5,000 
16,000! — 

6,000! 1,500 
9,000! 4,000 
57,000! 5,000 


185,650 \58,500 


340,150 
680,300 | 102,500 


He æl € 
= & 3lLE= 
EN NSEE 
É:l"2)8s 
= 5 
= Ex = 
36 18 18 
16 8 À 
15 8 S 
90 45 À 

9 4 18 
167 85 d2 
50 25 59 
56 D —— 
120 60 A0 
56 28 40 
282| 441| 155 
36 18 8 

9 5 12 
600! 5300! 280 
36 18 20 

9 5 50 

9 4 50 

16 8 45 
16 S 45 
26 13 90 
757| 579| 600 
1,206| 603! 787 


24,120 | 48,240| 86,57011,627,920| 289,900 |7,403,170 


VINS. 
hectol. 19 fr. 


18,000 
2,150 
3,000 
3,200 
1,250 


28,200 


1,500 
8,100 
9,700 
5,400 


15,500 


20,000 
5,350 
900 
14,000 
9,500 
150 
300 
1,200 
3,500 
41,980 


85,680 


PSE S = ne s GI ZA :n 
He te Ciollo nr NE 
RÉ AMETEANIRESS 2 ARS 
DES RCD SEEN AE 
cnrs n 72) 
1500 RSA) T0 0 | 
180| 9,850] — SD 
430| 12,000! 2,600| — 3 
O0 4 00 || Le 
55 80-22 FA 
2,865| 54,770] 2,600! 150| — 
DID 0 RES ee. 
540 13,500 | .— — |. 9,200 
270! 6,600! — | _- | 9,200 
10012500 00e A 
1,410| 25,100! — | — | 74,400 
== 5,000! 50! — | 1,250 
100 800! 40! 9 16 
_ 8,500! 160! 30 120 
900! 12,500! 20] 55| 2,250 
190! 5,000! — | 950| 8,500 
(RES NES = 
181000 |e | 200 
100! 10,000! — 55 200 
200] 1,600! 80! 100 210 
44,400| 550| 580| 12,746 
5,198,104,270| 9,950] 710! 24,546 
26,500! 85,200| 122,750 


40 


Tome XXII. 


( 412) 
Utilisalion du règne végétal. 


Montures, bêtes de somme et de labour. — Les chevaux, Aloghon, 
de Crète étaient en grande réputation chez les Anciens, pour leur vitesse 
et leur agilité ; il en nait maintenant assez peu dans l’île, qui en reçoit 
annuellement 600 à 800 de l’Asie-Mineure. Ceux-ci, de médiocre hauteur, 
sont un peu ramassés , de construction solide, avec des muscles pronon- 
cés ; quand ils sont de bonne race, ils ont de la franchise et de la liberté 
dans les allures , et une grande force dans le jarret, comme dit Tourne- 
fort (1). « Ils sont entiers et se cramponnent si adroitement dans les 
rochers, qu'ils grimpent d’une vitesse admirable dans les lieux les plus 
escarpez : on n’a qu’à les prendre d’une main par le crin, et tenir la 
bride de l’autre; dans les descentes les plus horribles , qui sont assez 
fréquentes dans cette Isle, ils ont le pas ferme et asseuré, mais il faut les 
laisser faire, et marcher sur leur bonne foy; ils ne s’abbatent jamais 
quand on s’abandonne à leur conduite. » Pour les essayer, les Musulmans 
les lancent et les arrêtent court. Les chevaux de luxe ne trottent ni ne 
galoppent; ils vont l’amble en portant le pied de derrière au point 
même où celui de devant est tombé ; lorsqu'ils n’ont pas cette allure de 
naissance , ce qui est très-estimé , on les dresse tout jeunes en les faisant 
marcher avec des entraves. Chaque année, on en envoie un certain nombre 
à Stamboul; certaines irrégularités de coloration sont regardées comme 
de mauvais augure et déprécient beaucoup les individus qui les portent. 
Le prix d’un bon cheval est de 300 à 400 fr.; ceux qui marchent l’amble, 
valent un tiers en sus et parfois jusqu’à 1,000 fr. 

À cause des difficultés du terrain, on leur préfère les mulets, Mouluri, 
ainsi que le remarquait déjà Buffon. Ceux-ci, dont on importe chaque 
année 300 à 400 individus de l’Asie-Mineure, sont beaux et bons, ils ont 
la tête sèche, petite, le col long et voûté , la poitrine ample, le corsage 
oros et rond, la croupe pleine et large, pendante vers la queue, avec 
des jambes menues et sèches ; leur pas est doux, aisé et rapide; les plus 
beaux proviennent de l’âne et de la jument. Ils servent à la selle et aux 
transports, et les riches Musulmans ne voyagent guère qu'avec eux; on 
les habitue aussi à aller l’amble. II y a des mulets qui valent de 1,000 à 
1,200 fr. Pendant mes explorations, j'en avais deux fort différents : l’un, 


re 


(1) Voyage dans le Levant, t. 1, p. 93. 


( 413 ) 
possédait presque l'allure et la fierté du cheval; l’autre, beaucoup plus 
docile, aimait comme l’âne, à se rouler dans la poussière. 

L’âne, Ghaïdhouri, est la monture, la bête de somme du cultivateur 
et même la bête de culture du plus pauvre; dans les terres légères, il est 
assez pelit et d’une sobriété qui dépasse tout ce qu’on saurait imaginer. 

Les bœufs, Voïdhi, appartiennent à une race petite et faible de l’Asie- 
Mineure ; ceux qui naissent dans l’île dégénèrent vite par suite du défaut 
de pâturages. On les emploie au labourage, à deux par charrue, attelés 
au joug par le cou; on les nourrit de paille de blé vu d'orge bachée, de 
lupin, de graine de coton et surtout de céréales, macérées pendant dix 
jours, lors des travaux des champs. Par suite de préjugés ,‘le lait des 
vaches , Agheladha, n’est pas utilisé pour les fromages. [ls ne sont sou- 
mis-à aucune taxe non plus que les chevaux, mulets ou ânes. En 1837, 
leur nombre était évalué à 50,000. 

Les chameaux sont complètement étrangers à l’île. 

Troupeaux et autres vertébrés utiles. — Les moutons et brebis, Pro- 
vala, et le bélier, Kriari, sont communs, petits et à laine grossière, en 
hiver, ils paissent dans les plaines sur Les terrains pierreux, en broutant 
l’herbe et les feuilles des arbrisseaux, et, pendant quatre mois, ils fournis- 
sent les villes de lait excellent; leur chair devient grasse et bonne. En 
été, pour les empêcher de pâtir, on les conduit dans les parties monta- 
sneuses , jusqu'aux premières pluies de novembre. En raison de la dou- 
ceur du climat, ils restent dehors nuit et jour : aussi, les étables sont-elles 
inconnues, ainsi que la nourriture à l’intérieur. Pendant les fortes pluies 
ils se réfugient près des rochers ou dans les grottes. Aux approches du rut, 
on dédouble généralement les troupeaux, et quand les agneaux, Arni, sont 
sevrés, on en forme un troisième troupeau pendant un ou deux mois; 
lorsqu'une partie est vendue, on réunit ensemble tous ceux qui restent. 

Les moutons sont aussi élevés en vue de la consommation journalière 
des villes, dont ils forment l’aliment principal, comme dans les pays 
chauds, leur chair est fade et sans goût, on en importe en outre à cet 
effet, chaque année, 12 à 15,000 d’Asie-Mineure et de Barbarie. La 
laine est employée à la confection de draps grossiers, et de sacs pour les 
usages domestiques et l'exportation du savon. 

Les chèvres, Katsika, petites et dégénérées, et le bouc, Tragho, 
forment le plus souvent des troupeaux distincts qui portent grand préju- 
dice aux arbres. Avec leur peau on fait des outres, Aski, pour l'huile 


(414) 
et le vin; c’est avec leur poil que se font des sacs et la plus grande 
partie des cordes employées par les cultivateurs. 

L'élève des troupeaux est fort productif, indépendamment du lait, 
Ghala, et du caillé, Ghioghourti, qui est fort recherché dans les villes et 
même à Stamboul , on fait partout des fromages, Tiri, qui, surtout ceux 
de Sphakia et d'Haghio-Vasili, sont assez estimés et recherchés en Orient. 
Les peaux sont corroyées et consommées dans le pays, à l'exception de 
celles d’agneaux et de chevreaux, qui, simplement séchées, sont envoyées 
au nombre de 25 à 30,000 par an, à Trieste, pour les 4/5, et à Smyrne 
pour le reste. Cent têtes d'animaux coûtant 650 fr., rapportent par an, 
en lait, fromage, laine, peaux et agneaux , 450 à 500 fr., qui se parta- 
gent, par moitié, entre le propriétaire et le berger. Chaque bête donne 
annuellement un demi-kilogramme de laine, et chaque femelle plus d’un 
kilog. de fromage. En moins de trois ans, le propriétaire rentre dans 
ses frais d’achat. En 1837, le nombre des moutons et chèvres était estimé 
à 600,000. La laine est en partie employée dans le pays; on en exporte 
cependant en Autriche et à Syra. 

Les pores, Ghourouni, sont élevés par les Chrétiens sans aucun espèce 
de soins, et vaguent autour des habitations et dans la campagne où ils 
ramassent toutes les ordures ; leur chair est flasque , sans goût et dépour- 
vue de graisse. La ladrerie dont ils sont souvent atteints, n'empêche pas 
les Chrétiens de les faire servir à la consommation. Leur peau est quel- 
quefois employée dans la confection des chaussures. 

Aujourd’hui, comme du temps de Tournefort (4), « Tous les chiens, 
Skilo, de Candie, sont des levriers bâtards, mal faits, fort élancez, et 
qui paroissent tous de même race; leur poil est assez vilain, et par leur 
air il semble qu'ils tiennent quelque chose du loup et du renard ». 

Les poules, Ornilha, et coq, Peteino, sont assez petits, ainsi que les 
poulets, Orrithopouli ; les œufs, Aughon, sont très-bons ; les dindons 
deviennent fort gros et sont excellents, quoiqu’élevés sans le moindre 
soin. Les oïes et les canards font défaut par suite de la sécheresse 
du sol. 

Gibier, animaux nuisibles, etc. — L’Agrimi des Crétois est le Bouc 
eslain de Belon, d’après lequel les naturalistes modernes en ont parlé, 
Il est rapporté par les auteurs au Bouquetin du Caucase, et avec plus de 
raison peut-être à l’Ægagre par un auteur anglais, ce qu’au surplus 


(A) Voyage au Levant, T.I p, 95. 


nous examinerons plus tard. Get animal est fréquemment chassé par les 
Sphakiotes dans leurs montagnes ; je l’ai aperçu dans les montagnes de 
Lassiti, et il doit se trouver dans les autres parties élevées de Pile. 

Le loup et le renard paraissent manquer complètement. Le hérisson, 
Andkatholkhoïros, est très-commun dans Les jardins de Khalepa, et la fouine, 
Zouridha, n’est pas très-rare, non plus que la belette. Le blaireau, Aka- 
los, existe dans l’Akroteri de Khania, et je l’ai rencontré sur la chaîne 
côtière de Messara , au-dessus de Mesokhorio; j'ai rapporté une peau de 
chat sauvage, Ghala , qui avait été lué dans les bois de Meskla. 

N’étant pas chasseur, je n’ai fait aucune observation sur les oiseaux; 
aussi, me bornerai-je à reproduire le passage suivant d'Olivier qui est 
certainement aussi exact aujourd’hui qu’en 1794 (1). « On voit venir en 
abondance, dès la fin de l'été, la caille, la tourterelle, le ramier, Poriol, 
le rollier, la grive et un grand nombre de bec-figues très-délicats. La 
bécasse vient un peu plus tard et y passe l'hiver. Le merle y reste toute 
l’année; il est très-gras en hiver et d’un très-bon goût. Les alouettes, 
les ortolans et beaucoup de petits oiseaux remplacent, en printems 
et en été, les oiseaux de passage. Le lièvre, Laghos, et la perdrix, 
sont partout fort communs : le francolin et la bartavelle sont plus rares. 
Nous n’avons vu le lapin, Kounéli, très-multiplié que sur les petites 
îles voisines de Crète ». J’ai rapporté un émouchet qui avait été tué à 
Khalepa, près de Khania, et lors de mon ascension au Soro, dans les 
montagnes de Sphakia, j'ai aperçu, planant au-dessus de moi, un grand 
Aétos qui m'a semblé être le vautour fauve des Pyrénées et d'Algérie. 
Comme dit Sonnini (2), « les oiseaux de rapine, et même ceux dont l'œil 
trop sensible ne peut soutenir l’éclat du jour, et qui ne s’adonnent qu’à 
des chasses nocturnes, s’y trouvent assez fréquemment, quoique les 
Anciens les en eussent exclus fort gratuitement. » 

Malgré l’opinion de Pline et d'auteurs plus récents, les couleuvres, 
Ophidhi, ne sont pas rares dans les buissons, el j’en ai rapporté trois 
espèces. Le grand lézard vert, Ghousteritza, est très-commun dans les 
murailles des jardins, et une petite tortue , Akhelona , dans les mares. 

Je ne sais si les poissons de mer abondent sur les côtes de la Grète; 
mas 1l est probable qu’il en est ainsi, puisque un droit sur le poisson 
est affermé annuellement. 


(1) Voyage dans l’Empire Olhoman, T. I. p. 414. 
(2) Voyage en Grèce el en Turquie, T. I, p. 438. 


/ 


( 416 ) 

insectes domestiques. — L'élève des vers à soie, Skouliki slo metaxiou 
ou #elaxari, égal à celui d’Andrinople en 1838 , est très-peu important 
encore, eu égard à ce qu'il pourrait être ; il ne prend même pas chaque 
année un grand accroissement, quoiqu'il tienne une place notable dans 
les travaux intérieurs des ménages en Crète. Les mœurs du pays astréi- 
gnant les femmes musulmanes à une réclusion absolue , et les femmes 
chrétiennes étant soumises, elles-mêmes, à une vie sédentaire et retirée, 
les unes et les autres trouvent dans l’élève du ver à soie et dans la pré- 
paration de la soie, une occupation lucrative et appropriée à leurs habi- 
tudes. Aussi, est-il peu de familles de cultivateurs d’où il ne sorte pas 
chaque année, quelques écheveaux de soie, Metaxi. 

L’incubation commence le 20 mars dans les plaines et, 15 à 20 jours 
plus tard, sur les pentes des montagnes ; les femmes, comme dans tout 
le Levant, portent la graine entre leurs seins nuit et jour, pendant une 
quinzaine, jusqu’à l’éclosion. Dans les deux premiers âges, les jeunes 
vers sont nourris avec les feuilles les plus tendres. Au troisième, on les 
distribue sur des canettes d’un demi-mèêtre de surface, formées de roseaux 
recouverts de bouse de vache , comme en Grèce, et disposées quelque- 
lois en deux ou trois étages dans une partie d’une chambre , séparée par 
une cloison de roseaux et de broussailles ; de la sorte, les vers sont à 
l’abri de l’air et de la lumière, et surtout du mauvais œil des curieux 
auquel sont attribuées toutes les maladies qu’engendre fréquemment l'air 
vicié et la malpropteté ; car les femmes, qui entrent seules pour donner 
la nourriture deux fois par jour, se gardent bien d’enlever les débris 
avant qu’ils ne tombent en putréfaction. Le plus ordinairement, la moitié 
des vers meurent en deux ou trois jours en entrant dans le cinquième 
àge; lorsqu'ils commencent à monter, on garnit les canettes de bran- 
ches de bruyère. Les cocons bien séchés au soleil, donnent un sixième 
de leur poids de soie (1); on les porte à un moulin établi sous un arbre, 
comme je l'ai vu à Kadano, le 18 juin; on met dans la bassine une assez 
grande quantité de cocons et le fileur prend avec une baguette le brin de 
20 à 25, pour en former le fil; les frais de filage reviennent de 1f 50 à 
2 fr. le kilogramme. Les plus beaux cocons sont mis à part pour la 


(1). D'après M. À, Gaudry (Recherches scientifiques en Orient, t. 1, p. 253), 5 ocques 
de cocons frais équivalent à 1 ocque de cocons secs et 3 ocques 1/4 ou 4 ocques de 
cocons secs donnent Î ocque de soie filée selon l’ancien usage du pays. L'ocque vaut 
1,283 grammes. 


(O3 )) 

graine, que l’on reçoit sur des feuilles de laurier-rose. La quantité de 
soie, melaxi, récoltée est de 2 à 4, rarement 6 kilogrammes par ménage ; 
chez quelques riches aghas, il s’en produit de 15 à 20 kilog. partagés 
par moilié entre lui et les femmes qui ne donnent que leur temps. 
Jusqu'à ces dernières années, cette soie exclusivement filée dans les mé- 
nages , l’était si mal, qu’elle ne pouvait être employée en Europe à la 
conféction des étoffes; sur une partie de la production qui était expor- 
tée, les 5/6 se plaçaient à Trieste et le reste en Grèce. En 1856, on « 
pour la première fois exporté des cocons à Marseille; la quantité s’est 
élevée à 7,500 kil. 

La production de la soie, qui aurait pu augmenter si facilement dans 
des proportions considérables, est cependant restée presque stationnaire 
ainsi que le montrent les évaluations faites pendant deux périodes de six 
années, se correspondant à dix années d’intervalle : 


1841, 5,160 kilogr. 1851, 410,666? kilogr. 
4842, 20,000 — 1852, 20,000? — 
1843, 24,000 — NES SEA SUR 
1844, 30,000  — 1854, 31,500 — 
1845, 24,000 — 1855, 98,495  — 
1846, 30,000 — 1856, 28,250 — 


Les abeilles, Melisa, sont habituellement placées dans les enclos des 
metokhi ou dans les champs voisins abrités des vents; elles sont logées 
dans des paniers ou des vases en terre cuite renversés, avec un orifice 
à la base. Le miel, Mek, était estimé dès les temps les plus anciens, et 
ses qualités actuelles, sont encore celles qui lui ont valu sa grande 
réputation d'autrefois. La nourriture des abeilles se composant exclusi- 
vement de sucs des plantes aromatiques, si abondamment répandues dans 
le pays, le miel en acquiert un goût très-parfumé, peut-être un peu 
trop prononcé; celui de quelques parties montagneuses est particulière- 
ment réputé ; on en fait des envois considérables à Stamboul. La produc- 
tion de la cire, Ayokeri, n’est que le dixième en poids de celle du miel; 
elle est emportée à Syra ou directement à Trieste. 

Autres animaux invertébrés. — Les limaçons, Koklia , sont mangés 
en grande quantité, pendant les plus rigoureuses abstinences, par les 
villageois , et même dans les monastères : ils sont en outre un objet de 
commerce dans le liva de Megalo-Kastron. On les ramasse en quantités 
assez considérables; on les met dans de vastes paniers et on en envoie 
plusieurs barques dans les îles de l’Archipel , pour les carèmes grecs et 


( 418) 

même aussi à Stamboul, Smyrne et Alexandrie. La quantité exportée était 
estimée à 25,000 kilog. en 1834. Avant de les manger, on les engraisse 
pendant une ou deux semaines avec de la farine et du son ; lorsqu'ils sont 
dégorgés ils acquièrent un goût, dit-on, agréable. Il y en a trois espè- 
ces de grosseurs différentes ; la plus commune est l’Helix vermiculata ; 
la plus grosse est l'A. aspersa ; une plus petite , l'. aperta, est la plus 
estimée. 

Les oursins, Ekhinou (Echinus lividus), sont très-communs à la sur- 
face des dépressions des rochers calcaires submergés. « Sur les côtes de 
cette partie l’île de Candie (baie de Soudha) dit Sonnini, ils sont plus 
délicats qu'ailleurs , y sont tellement multipliés, que l’on en conduit à 
la Canée des bateaux chargés. » 

La pêche du corail, Merdzani, est pratiquée, à ce qu’il paraît, sur les 
côtes de Crète; car, pendant mon séjour, j'en entendis parler plusieurs 
fois , et il figurait à l'Exposition universelle de 1855; mais je n’ai pu 
obtenir de renseignements précis. 

La pêche des éponges, Sphounghari, qui est affermée En one par 
le Gouvernement, est effectuée surtout par des pêcheurs des côtes et des 
iles de l’Asie-Mineure qui explorent l’Archipel et les côtes de Crète, de 
Syrie et de Barbarie. En 1851, 500 barques recueillirent pour 1,400,000 
fr. d’éponges. Mais la Crète n’y entre que pour une très-petite partie. 
Comme l’Archipel , elle fournit au commerce peu d’éponges fines, mais 
des éponges communes dont le tissu est charnu et excellent; toutefois la 
forme en est trop souvent défectueuse. En 1851, la valeur moyenne des 
éponges communes était de 9 fr. 05 le kilogramme, et celle des épon- 
ges fines, vierges, de 45 fr. 67. En 1856, 5110 kilog. estimés 40,000 fr. 
passèrent directement pour 1/4 à Trieste ; le reste s’écoula par Smyrne. 

Résumé de la valeur des animaux et de leur production. — 
M. J. Bowring, donne sur la quantité de plusieurs produits , les rensei- 
gnements suivants : 


Quint. mét, Kilogr. Kilogr. 
Laine... 2,560 Soie... 9,000 Miel... 77,000 
Fromage. 5,120 Cire. 19,000 


Le tableau suivant, établi d’après les mêmes bases que celui du règne 
végétal , donne la quantité et la valeur des êtres et des produits utilisés 
principaux du règne animal : 


À 


( 


TÊTES 


D’ ANIMAUX : 


nm = : ss ER Se 

EPARKIHES HR 8) te . £ PR a e 2 

+. ee - 

Se 2 co é 8 2 Z 

on Le F2. 

SE œ 
5 Ramos RL T 500 1,500 2,000 6,000! 15,000! 55,000! 53.090 
= |Selino.r ‘#2 . 100 1,500 4,000 4,000! 10,000! 40,000! 3,000 
= «Khaniotika. . . .| 1,000 500 9,500 6,500! 10,000! 20,000! 2,000 
= }Apokorona. . . . 400 800 5,000 6,000 5,900! 40,000! 3,000 
ETES Da IdEe . — 1,000 500 2,000 2,500! 60,000! 2,000 
d ToTaL. . . .| 2,000 5,800| 12,000! 24,500|  42,800| 195,000! 13,000 
£ Haghio-Vasili.. . 50 200 5,000 1,600 7,000! 15,000 900 
= | Rhethymniotika.…. 60 800 1,600 2,500 6,500 213,000 700 
# ( Mylopotamo. . . 150 700 4,500 5,800 10,000! 32,000! 4,000 
= AA. 80 500 4,000 1,000! 15,000! . 30,000! 6,000 
= TOTAL. 0... 320 1,500 15,100 8,900 58,509|  97,000| 11,600 

Le | 

. I Malevisi. . . . . 150 100 500 600 5,000 10,000 00 
= Temenos, . . .. 150 250 500 1,000! 20,000 4,000 400 
= |5 Messara.. . . .| 1,500 500 6,000 8,000! 29,000! 74,000! 2,500 
2 |Pedhiadha. . . . 500 500 5,400 4,000! 40,000! 30,000! 2,00! 
% , Mirabello.. , , .| 1,000 2,000 2,500 5,000! 10,000! 20,000! 5,000 
a) Last 100 500 1,500 9.000 20,000! 49,000! 1,50! 
= fRhizo-Kastron. . 150 500 2,000 2,500! 10,000! 35,000! 1,500 
| Hierapetra. . . . 150 200 500 3,000 8,000 15,000! 2,000 
= SIA. 2: Em 500 4,060 5,900 6,000 25,000 150,000! 5,00ù 
TOTAL. 418 7000 5,900| 20,400 50,100! 158,000! 574,000! 18,400 
ee quant.totale.| 6,320! 12,150| 45,300| 63,500! 239,000! 666,000! 43,000 
| valeur. . . f.1790,000/2,426,250 1,365,00015,715,000!1,195,000 4,329,000 645,000 


PRODUITS : 

ES SC 

NE = S È 
Sas sé Si) ie 
SAS En le Free 
> | & = = < | 
500| 1,250] 900! 4,000! 9,000. 
540| 1,500| 1,800! 9200! 92,000 | 
170 300| 2,500! 600! 4,500 | 
540 700! 900! 250! 2,500! 
600! 1,800! 275] 1,000! 9,000! 
1,750 5,350| 6,875| 6,050] 27,000 } 
170 660! 1,300! 1,100! 11,000 | 
200 330| 800! 500! 5,000 | 
550] 1,260] 1,006! 2,000! 20,000 À 
350| 1,330] 2,000! 1,200! 12,000 | 
1,0801  3,800| 53,100) 4,800] 48,000 | 
120 200! 800! 550! 5,500 | 
45 600! 9275] 900! 9,000 | 
800! 92,700! 5,006|  700| 7,000 | 
540| 1,250| 2,200! 1,000! 10,000 
220 730| 900! 550] 5,500 | 
450!  1,500| 900! — + | 
580] 1,100! 800! 1,000! 10,000 
170 530] 1,400! 900! 9,000! 
1,80! 5,250! 53,300! 1,000! 10,000 
4,525| 44,100! 15,775| 6,600| 66,000 
7,135) 25,250! 27,250| 1 4,450|141,000 


498,100 11,595,000! 708,550 


50,020| 98,700 


41 


Tome XXII. 


(420 ) 


Pour avoir la totalité de la production agricole et de sa valeur, 1l faut 
ajouter le produit localisé suivant : 


Mess. Pedh. Hier. SiL. Totaz. Valeur, 
Beurre. kilog. 4 fr. 40 c. 900 500 500 2,000 3,900 5,460f 


Résumé général des valeurs agricoles. — En condensant les données 
relatives aux végétaux et aux animaux, comprises dans les deux tableaux, 
et les additions qui les accompagnent, on trouve les résultats suivants 
pour la valeur moyenne annuelle des productions retirées des deux 
règnes par l’agriculture, ainsi que pour celle des animaux employés 
ou utilisés par elle : 


Règne végétal. 


Céréales (froment, orge, avoine, maïs et paille)... 4,269,775f 
Légumes (fèves, ciceroles, légumes divers et four- 

TADOS ESS A TU ES TT AN TE SC EE 1,076,851 
Herbes oléagineuses et textiles (sésame, lin, coton). 164,405 
Plantes tinctoriales, etc. (garance, vallonée). . .. 122,000 
Vigne (raisins secs, vins et eau-de-vie). . . . . . 2,149,820 
Ovier (Huile) MR EE ARE RE 7,403,170 
Arbres à fruits frais (oranges, citrons, pommes et 

DOITOS EUR CPS CRT NEO PER 34,650 
Arbres à fruits secs (amandes, noix et châtaignes). 482,700 
Caroubier (coupés 22 re UE 122,730 
Chatbonss .14 art ne ANR RC PIE 130,600 : 

HOTALZ SE ete 15,653,701f 


Règne animal. 


Matières-textilest{lainemel suie) ERP RE 1,136,650 
Matières comestibles (fromage et miel). . . . . . . 1,493,700 
Ces on. RE ar 6e 28 NAS ENT LE DURE 50,020 
TOTAL) Red tee 2,680,370f 
MORAL GÉNÉRALES. . 1e _48,334,071f 


Quant à la valeur des animaux, elle est la suivante : 


Montures et bêtes de somme(chevaux, mulets, ànes). 4,281,250 
Bêtes de labour et troupeaux (bœufs, chèvres, 
HIGUIONS?, POFBSL SE à 222 0H. Dee 11,884,000 


MORAL EURE ET 16,465,250, 


(421 ) 

Ces chiffres, toutefois, ne représentent qu’assez imparfaitement la 
capacité agricole de la Crète; car, d’une part, tous les produits n’y sont 
pas compris, et de l’autre, les valeurs qui leur sont attribuées éprou- 
vent des changements fort sensibles, même à dix années d'intervalle, 
ainsi qu’on pourra le voir, surtout pour l’huile, en comparant les prix 
du kilogramme de plusieurs des trente-cinq dernières années : 


1820, 35e 1841, 78 1853, 1f 06e 
1831, 60 1845, 77 1854-55, 41 02 
! 1836, 86 1847, 88 1856, NT 


Pour d’autres denrées, les prix sont donnés dans la première colonne 
pour 1836, dans la seconde pour 1846 et dans la troisième pour 1856. 


Graine de lin. Of 0e O0f20c Of 32e Fromage... Of 52e Of 60e Af 58c 
RSS CCS NOM O OMIS OMS GES OI ANS NDS (86) € 
GaTOHDES A OI0IENOM OS OM IIMRC ire MIE NT DICO COS 70 
D 0000 0 4 12 Miel.se. 0 52 0 T0 1 K6 
(pièce). . ... 

Laine. . . .. 034 0 60 0 89 


Impôts agricoles. — Pendant la domination turque, jusqu’en 1830, 
la plupart des villages formaient les moukattas concédés à vie aux aghas, 
ou attribués à l'entretien des mosquées ; quelques-uns étaient dévolus à 
des mosquées impériales , et d’autres à la Sultane-mère. Les cultivateurs 
propriétaires livraient le septième des produits au soubachi de lagha, 
qui les rançonnait le plus qu’il lui était possible, et une partie seulement 
arrivait au Gouvernement. Il était également remis à l’agent de la Sultane 
ou au moutevelli de la mosquée. Les aghas devaient aussi le septième 
des produits de leurs propriétés particulières et de l'huile qu’ils faisaient 
dans les moulins, qu’ils avaient seuls le droit de posséder. 

Méhémet-Ali reprit pour le compte du Gouvernement les moukattas, 
dont les propriétaires étaient morts depuis le commencement de la révo- 
lution, et fit examiner trop sévèrement, dit-on, les droits des survivants, 
dont un certain nombre fut réduit à une modique pension; aussi, en 
1837, plus des trois-quarts étaient-ils en sa possession. L'écrivain, 
Ghramatikos, de chaque village était chargé de la collection des dîmes, 
sous la surveillance d’un Arnaoute; et comme ils n’avaient tous deux 
qu’une faible rémunération, ils s’indemnisaient eux-mêmes en retenant 
une porlion de ce qu'ils percevaient. Quand le Pacha trouvait avanta- 
geux de recevoir en nature, le septième des grains était pris après le 
battage ; mais, après 1837, se croyant exposé à être trompé, le septième 


( 422) 

des gerbes fut prélevé sur les champs, et le propriétaire obligé de le 
battre et de transporter le grain et la paille aux dépôts du Gouvernement, 
avant de pouvoir s'occuper de ce qui lui restait. Fréquemment le septième 
élait exigé en argent, à un taux excédant la valeur de la denrée, sur le 
lieu de production. | 

Les vignes et produits agricoles fournis par le règne végétal, sont 
soumis à des redevances qui, en 1836, rendaient les sommes suivantes : 


ErOmMeEnt RE e A/TPNOE 420,000 PVR UE 4 pa l’oka. 250,000 p. 
OPERA D ] (ac Een 686,000 Eau-de-vie. .. 8 pa l’oka. 50,000 
ANCIENNE PEN 5,65 RURE 491,000 Huile . . : . . 117,.22%1:3,250, 000 
Féverolles,vesces. Id. . . .. 286,000  Orang., citr., ete, 2 p2 larbr. 1,000 
ÉMHER EE NERRENETTTE DEC 0 00 É at. 
COR ROIS F LATE 80,000 OR 0e. if 1/19 sie 01 088,000 
VIEN ESPN RUE 35 par. le) 10.500 CarouDes et MEET 40,000 
deunum) £ Vallon ete ED Er 28.500 


Ce qui aurait produit 5,355,000 piastres, si un quart environ n'avait 
été encore sous le régime des moukattas, pour lesquels les aghas ne ren- 
daient que 500,000 piastres. Le total était seulement évalué à 4,555,000 
piastres (1,002,000 fr.) 

Il est facile d'apprécier l'importance de l'olivier pour la Crète, puis- 
qu'il fournit à lui seul les 3/5 de la valeur des dîmes produites par le 
règne végétal. 

La graine de lin n'avait rien à payer. Sous le régime turc antérieur, 
chaque village payait une petite somme pour le vin et l’eau-de-vie; les 
amandiers , châtaigniers et noyers, devaient 2 paras par pied, comme 
les autres arbres fruitiers. La vallonée ne devait rien. 

Très-peu de produits animaux ont à subir des taxes chez le proprié- 
taire : la laine , le fromage, la cire et le miel, en étant exempts. Sous 
l’ancien régime turc, les troupeaux payaient seulement trois paras par 
tête, et le 7° de la soie n’était pris que dans quelques éparkhies, les 
mûriers payent une faible redevance dans les autres. Pendant quelques 
années, sous Méhémet-Ali, les deux taxes furent régularisées et leur 
fermage rapporla : 


Moutons et chèvres. . . 9 à 49 paras par tête. . . 200,000 piastres. 
Soie Lost UA de Meme a st ae 120,000 — 
TOTAL henri 320,000 (70,400 fr.) 


À partir de la fin de 1836, la taxe des troupeaux a été entièrement 
abolie 


( 423 ) 

Aujourd'hui, les propriétaires musulmans ou chréliens, grands ou 
petits, le sont au même titre, et paient directement l'impôt du 7° et un 
autre en argent sur les pailles. Les moukattas sont concédés pour deux 
années aux enchères, et le plus offrant devient chargé de percevoir l’impôt 
et de le verser à des époques fixes. Ceux qui n’ont pas élé loués sont 
de droit affermés par le gouverneur ; les villages eux-mêmes peuvent 
devenir les fermiers de leurs impôts. C’est l'application en détail du 
système de nos anciens fermiers-généraux. Le produit général pour les 
dernières années a été le suivant, dont il faut prendre la moitié pour 
avoir le revenu annuel : 


1854 et 1855, 16,381,205 piastres (3,603,865 francs) 
1856 et 1857, 22,489,170 — (4,947,617 — ) 


Vers 1830, le gouvernement égyptien s’est fait une nouvelle branche de 
revenus , en établissant des droits d'octroi, qui frappent à leur entrée 
dans les villes, et diversement dans chacune d'elles , soit un grand nom- 
bre de produits agricoles, soit les besliaux. En 1836, des réductions 
avaient déjà été opérées , et, d’après M. J. Bowring, ces droits d'octroi 
étaient les suivants : 


nas DU PETER 4 paras l’oka. 

COLOR  dANE £ paras l’oka. 

RAISINS APCE. 2 piastres le mulet, 4 l’homme, 1/2 l'âne chargés. 
Amandes "11 10 paras la misouri de 8 oka. 

Am. écaillées . .. 4 paras l’oka. 

NOÏXAA ENS ee: 10 paras la misouri de 8 oka. 
Caroubes . .... À piastre le mulet, 4/2 l’âne chargés. 
Vallonée....... 1 piastre par charge. 

BOIS ae date ana e 5 paras la charge. 

CHATONS 16-25 paras la charge. 

Peaux vertes. ... 4 piastre les grandes, 1/2 les petites. 
PAIN EEE enr 4-25 paras l’oka. 

Poil de chèvre. .. 5 paras l’oka. 

SACS miÉuure Vete 10 paras pièce. 

Hramase ef... 1 à 3 paras l’oka. 

SIDE eue PA PE 3 piastres l’oka. 

Miche ee 2-4 paras l’oka. 

CB ae ea ser 1/2 piastre l’oka. 

CHAUX M5 paras la charge: 

Pots arres ee 2 paras les grands, 1 les petits. 


Barils vides à vin. | piastre à la sortie de Khania seulement. 


( 424 ) 
Ces droits étaient affermés pour 49,000 piastres à Khania, 32,500 à 
Rhethymnon, et 75,000 à Megalo-Kastron. 
Ceux sur les bestiaux , étaient : 


Bœufs et vaches... ... 21/2 à 9 pi. Agneaux et chevreaux. 4/2 à 4 4/2 pi. 
Moutons et chèvres. . . .:4 à 7 pi. Coehénis os PO À à 4 3/4 pi. 


Ils étaient affermés pour 45,000 piastres à Khania, 10,250 à Rhe- 
thymnon et 119,000 à Megalo-Kastron. — Ces droits d'octroi rappor- 
taient donc 326,790 piastres ou 71,885 fr. 

Exposition universelle de 1835. — Enfin, comme dernier renseigne- 
ment agricole sur la Crète, je donne, d’après M. Viquesnel (1), qui en 
a fait le relevé sur les registres de M. Caranza, commissaire ottoman, 
la liste des produits agricoles de l’île de Crète, réunis et envoyés par le 
Gouvernement , à l'Exposition universelle de 1855. Ceux-ci, après avoir 
été payés aux agriculteurs, ont été donnés pour les veuves et orphelins 
des soldats français morts en Crimée. 


Matières apparlenant au règne végélal. 


Blé blanc de Messara. (Il a obtenu une mention honorable). 
Pois verts et pois secs, 38c le kilog. 

Salep. 

Vins, 19, 56, 75 et 94e le kilog. 

Vin fin, 1f 40 le kilog. — Vin de 10 ans, 1! 87 le kilog. 
Raki, 4f 30 le kilog. 

Olives, 19c à 4f 07 le kilog. 

Huiles, 97c à 1f 46 le kilog. 

Huiles sans sel, 2! 95 le kilog. 

Càpres au vinaigre, 58c le kilog. 

Safran , 4461 80 le kilog. 

Vallonée 1f le kilog. 

Racine pour teinture jaune. 

Teinture verte. 

Saponaire et Rue. 


Matières appartenant au règne animal. 


Beurre, 4f 56 le kilog. 

Miel, 84%c à A 46 le kilog. 

Cire jaune, 4! 40 à 4f 67 le kilog. 
Corail brut, 78! le kilog. 
Éponges, 19 à 58c le kilog. 


(1) Voyage dans la Turquic d'Europe, T. I. p. 502-153. 


( 425 ) 

Appendice : utilisation du règne minéral. — Celle-ci se réduit à fort 
peu de chose; partout on extrait, à la surface du sol, le moellon et le 
mortier tels quels, pour les habitations des campagnes ; les bancs de 
calcaire grossier jaunâtre tertiaire, analogue à celui de Malte, qui 
avoisinent les villes, donnent lieu à quelques extractions de pierre de 
taille de petite dimension ; sur le plateau de Khalepa près de Khania, on 
y taille même de petites pierres à eau. Les calcaires compactes gris 
donnent de la chaux pour les constructions moins grossières, et surtout 
pour le blanchissage des constructions. Quelquefois, comme à Haghia- 
[rini (Selino), des talschistes feuilletés sont employés à couvrir les égli- 
ses grecques. 

« Tout le monde, dit Olivier (1), connaît la pierre à aiguiser que le 
commerce retire de Crète et de Stancho. La première , moins bonne et 
moins fine que l’autre, se trouve au sud-ouest de Réthymo , dans le ter- 
ritoire des Sphachiotes. On l’apporte ordinairement dans le port de la 
Canée, d’où elle passe à Marseille et dans quelques villes de l'Italie. » 
Elle provenait, sans doute, des anciennes exploitations que je visitai au- 
dessus de Samaria, le 15 mai. En 1845, cette même pierre, d'excellente 
qualité, était exploitée activement à l’autre extrémité de l’île, à Aloudha, 
sur la baie de Spina-Longa, comme je le vis le 2 septembre; elle est ex- 
portée en assez grande quantité chaque année. 

La pierre à plâtre existe dans les calcaires compactes secondaires et 
dans les marnes tertiaires, tout aussi bien sur le versant septentrional 
que sur le versant méridional de l’île; elle n’est cependant exploitée que 
dans les environs de Kisamos, où l’on a l'habitude d’en mettre dans 
le vin. 

Je n’ai ni trouvé la mine d’or qu’Edrisi disait exister dans les environs 
de Khania, ni rien vu à Malaxa, l'antique Bérécynthe, qui aurait pu 
servir d'indice aux Dactyles Idéens pour trouver l’usage du feu, du fer et 
du cuivre. Mais à Aghriviliana, à la naissance du cap Spadha, les champs 
et les pentes talqueuses présentent du fer oligiste écailleux que Méhé- 
met-Ali fit, dit-on, ramasser pendant que la Crète était sous sa dépen- 
dance. Près de l’Almyros de Megalo-Kastron, le même terrain renferme 
des filons de fer carbonaté spathique. À Spaniako, les schistes noirs ren- 
_ ferment des rognons de pyrite. 

J'ai parlé dans l'itinéraire , des petits gîtes de lignite que j’allai visiter 


(1) Voyage dans l'Empire Othoman, 1. 1, p. 427. 


( 426 ) 
le 30 juin et le 1“ juillet à Palæoloutra et à Myrthio, dans l’éparkhie 
d'Haghio-Vasili. [ls ne m’ont pas paru susceptibles d’être exploités. 

Les argiles tertiaires sont employées sur plusieurs points à la confec- 
tion de poteries. En 1699 , Tournefort était allé coucher à 18 milles de 
Megalo-Kastron et à 10 de la plaine de Lassiti, à Trapsano, gros village 
où il y avait une grande fabrique de marmites de terre, de pots et de 
grandes cruches (Jarros) à huile. Un demi-siècle après, Pococke disait 
que, dans une vallée au S. de Margarites (Mylopotamo), on fabriquait 
une vaisselle de terre rougeàtre, approchant de celle dont se servaient les 
anciens. À Mesoghia à la naissance du cap Grabousa, des argiles grises 
sont exploitées pour faire des pots ; dans l’Akroteri, sur le bord de la baie 
de Soudha , il y a des fabriques de poteries grossières , poreuses, non- 
vernissées, de qualilé très-inférieure ; enfin je vis les argiles de la plaine 
de Lassiti employées à la fabrication de grandes jarres, à Haghios-Gheor- 
ghiou. 

Des salines, dites Touzla, existent sur plusieurs points des plages de 
la côte septentrionale. Au fond de la baie de Soudha, il y en a d’impor- 
tantes dans lesquelles, au dire de Querini en 1583, on faisait déjà du 
sel en grande abondance pour Canea, Rettimo et leurs territoires, et 
aussi pour Venise. Buondelmonti parlait en 1422 de celles du Quartero, 
à VE. de Candia, mais elles n’ont laissé aucune trace. Au bas d’Aloudha, 
au fond de la baie de Spina-Longa, il y en a d’assez considérables qui, 
du temps de Querini, fournissaient de sel, Candia et son territoire, Sethia 
et quelques vaisseaux pour Venise. Enfin j'ai dit qu'avant 1840, il y avait 
des salines sur la grande Ghaïdhouronisi, au $. de Hierapetra. Sur divers 
points de la côte, les paysans recueillent du sel dans les creux des 
rochers. 

La neige des montagnes de Sphakia est descendue en été à Khania, 
pour faire des boissons rafraîchissantes et des glaces. Des barques en 
portent pour le même usage à Alexandrie. 

A l'Exposition universelle de 1855, figuraient les produits suivants ; 
parmi lesquels se trouve le pétrole dont je ne connaissais pas l'existence 
en Crète. 


Talc rouge en decomposition. Sulfure de fer. 


Argile ronge à potier. Fer carbonaté et quartz. 
Ocre rouge très-argileuse. Lignite. 


Craie pour épurer le sucre de raisin Huile de pétrole, 4 fr. 58 c. le kil. (1). 
Gypse. 


(1) La fin da chapitre , étrangère à l’histoire naturelle, n’est pas insérée ici. 


DÉVELOPPEMENT DU QUESTIONNAIRE 
RÉLATIF AUX GÉTACÉS, 


Par M. LE PROFESSEUR ESCHRICHT, DE L'UNIVERSITÉ DE COPENHAGUE. 


(Imprimé par décision de la Société Linnéenne , en date du {er juin 1859.) 


On sait que l'Atlantique septentrional (limité au N. par le cercle po- 
laire arctique) était peuplé jadis par des baleines qui, chaque hiver, 
fréquentaient par troupes considérables le golfe Biscayen. Il est bien 
avéré aussi que l’application du harpon à la pêche des grands cétacés en 
pleine mer, a pris son origine dans ce golfe. Il reste à savoir de quelle 
espèce furent ces grands cétacés du golfe Biscayen et de l'Atlantique 
septentrional. 

La pêche des grands cétacés à l’aide du harpon n’est guère applicable 
en pleine mer, qu'aux cachalots et aux baleines franches, et il est plus 
que probable que les anciens Basques ont profité de chaque occasion 
pour pêcher les uns et les autres. Ce n’était pas cependant vers les tro- 
piques, mais au contraire vers l'Islande et Terre-Neuve qu’ils poursui- 
vaient leurs courses, et c’étaient des baleines franches qui faisaient 
l’objet principal de cette chasse sanglante. 

Ces baleines franches, si abondantes alors dans l’Atlantique septen- 
trional , étaient-elles de la même espèce que le Mysticetus, ce colosse 
qu'on ne trouve plus aujourd’hui qu'entre les glaces flottantes des mers 
boréales ? Telle est la question qui nous a paru digne d’être traitée de 
nouveau. : 

Sur l’autorité de Cuvier, qui fut à la vérité le grand réformateur de la 
cétologie comme de la zoologie en général, les zoologistes modernes y 
ont répondu affirmativement. Oui, disent-ils, la baleine franche qui 
peuplait jadis en grand nombre l'Atlantique septentrional et qui se mon- 
trait, chaque hiver, dans le golfe de Biscaye; celle que les courageux 
Basques ont pêchée d’abord sur leurs côtes, puis, jusque dans les eaux 
de Terre-Neuve, était la même que le Mysticetus actuel des mers glaciales. 


Tome XXII. 49 


( 428 ) 

Nous sommes arrivés à un résultat tout différent, M. le professeur 
Reinhardt, de Copenhague , et moi. 

À la suite de recherches extrêmement détaillées sur l’anatomie et l’ex- 
térieur, sur les mœurs et les migrations du Mysticetus ; après l’examen 
comparé de toutes les relations parvenues jusqu’à nous sur ces baleines 
de l'Atlantique septentrional, qu’elles vinssent des [Islandais du Moyen- 
Age ou des anciens baleiniers hollandais ou enfin des Basques, nous 
avons élé conduits à penser que cette ancienne baleine franche de l’At- 
lantique septentrional appelée Sletbak par les Islandais, Nordkaper par 
les Hollandais, Sarde par les Basques, bien loin d’avoir été identique 
avec le Mysticetus, aurait appartenu plutôt à cette espèce de baleines fran- 
ches qu’on pêche à-présent au-delà des Tropiques et dans tout le Paci- 
fique. Si l’on ne voulait absolument admettre qu’une seule espèce de ces 
baleines des mers tempérées, il serait raisonnable de supposer que le 
Nordkaper ou Surde ou Slelbak appartenait à cette même espèce. Mais, 
puisqu'il paraît bien évident, d’après les observations des baleiniers 
modernes, qu’il y a plusieurs espèces de ces baleines australes, et que, 
notamment dans le Pacifique, celles du Nord de l’Equateur diffèrent de 
celles du Sud, à peine peut-on douter que cette baleine franche, si 
abondante jadis dans l’Atlantique septentrional, n’ait constitué aussi une 
espèce à part dans le grand groupe des baleines franches des mers tem- 
pérées. | 

Voilà un des principaux résultats des recherches que j’ai faites con- 
jointement avec M. Reinhardt sur les baleines franches ; mais combien ne 
serions-nous pas désireux de pouvoir le soumettre à de rigoureuses 
épreuves par un examen direct ! Tel est le but de l’enquête pour laquelle 
nous sommes si heureux d'obtenir le bienveillant concours de la Société 
Linnéenne de Bordeaux et de ses correspondants. 

L'examen direct que nous invoquons est-il encore possible? Les 
baleines franches, si abondantes jadis dans l’Atlantique septentrional, 
en seraient-elles en effet absolument disparues ? 

En février 4680, il en échoua une sur les côtes de l’île de Ré. En 
1783, une autre fut harponnée par un baleinier danois, entre Terre- 
Neuve et l'Islande. En 1852, le cadavre d’une baleine décapitée (sans 
doute par un baleinier qui s’était emparé des fanons) fut jeté sur la côte 
entre la Pointe-de-Grave et le vieux Soulac et brülé par ordre, sans que 
l’Académie ni la Faculté des Sciences de Bordeaux eussent été averties. 
Cette dernière occasion fut donc perdue pour la science; mais les deux 
autres cas avaient été assez bien examinés pour qu’on y reconnût incon- 


( 429 ) 

testablement des baleines du groupe austral. Mais enfin et surtout, je 
fus averti par une lettre de M. le professeur Geffroy, de Bordeaux, 
qu’au 14 janvier 1854, une baleine s’était montrée en avant du port de 
Saint-Sébastien avec son baleineau, que la mère s'était sauvée, mais 
que le baleineau avait été pris et son squelette transporté à Pampelune. 
M. Geffroy m'avait de plus envoyé scrupuleusement le dessin du balei- 
neau , exécuté avec soin par M. le docteur Monedero, et je fus convaincu, 
d’une part, qu'il restait encore dans l'Océan Atlantique septentrional 
des baleines en certain nombre; d'autre part, que cette baleine de 1854, 
toute franche qu’elle était, appartenait, cependant, à une espèce plus 
éloignée encore du Mysticetus qu'aucune autre du groupe austral. Nous 
tenions en mains la confirmation la plus complète de toutes nos conclu- 
sions sur la baleine biscayenne. 

Mais c’est principalement du squelette que sont tirés les caractères des 
différentes espèces des cétacés. Je résolus donc de me rendre à Pampe- 
lune pour examiner le squelette qui y était conservé et rechercher 
s’il resterait sur les côtes occidentales de la France des débris ou des tra- 
ces quelconques des cétacés qui avaient peuplé anciennement ces mers. 
C’est pendant ce voyage, lors de mon passage à Bordeaux, que je déposai 
entre les mains de M. le Président de la Société Linnéenne, le question- 
naire que la Société a bien voulu insérer dans ses Actes. 

J'étais sûr alors que des baleines franches peuvent encore de nos jours 
venir échouer sur les côtes de France, et les deux premiers articles de 
mon questionnaire avaient pour but de recueillir les souvenirs ou les 
traces que leurs passages accidentels auraient pu laisser (1° Y a-t-l des 
personnes qui se rappellent avoir vu dans le golfe de Biscaye de grandes 
et grosses baleines à tête immense et sans nageoire au dos (vraies 
baleines ou baleines franches? — 2° Ne reste-t-il pas, conservés dans 
les musées ou chez des particuliers , provenant de l’ancienne pêche à la 
baleine sur les côtes du golfe, quelques os, par exemple des mâchoires 
inférieures, vulgairement appelées côtes, montées en forme de portes 
cochères ? N’en trouverait-on pas enfouis en terre ?). 

En opposition au Mysticetus, les baleines australes portent toujours 
des Coronula et des Tubicinella attachés à leur peau. Ces genres de cir- 
ripèdes parasites caractérisent les baleines australes comme le genre des 
Diadema caractérise les baleines à bosse ou Humpbacks des baleiniers 
américains. Bien qu’il ne soit pas prouvé que ces Coronula et ces Tubi- 
cinella différent sur les différentes espèces des baleines australes, on 


( 430 ) 


peut le soupçonner cependant, et voilà pourquoi chaque échantillon de 
ces cirripèdes parasites, dérivant d’une baleine biscayenne, serait pré- 
cieux pour la cétologie. C’est l’objet de ma troisième question (Ne trouve- 
t-on pas, enfouis en terre ou gardés par les paysans, des coquillages 
appartenant à des cirripèdes parasites des baleines? Chaque pièce de 
cette sorte, même un fragment, serait importante, puisqu'on en pour- 
rait induire l’espèce de baleine. Ces coquillages s’appellent Tubicinella , 
Diadema balænaris, Coronula balænaris ). 

Ma quatrième question enfin est celle-ci : Trouve-t-on dans le golfe 
de Biscaye, en certaines saisons, de petits mollusques ptéropodes nageant 
librement ou des crevettes en grande quantité pouvant servir de nourri- 
ture aux baleines , ou enfin de ces amas d’animalcules que les baleiniers 
appellent à juste titre manger de baleine et qu'ils regardent comme des 
indices de leurs stations ? — Les réponses à celte question sont impor- 
tantes, car on trouve indiqué dans quelques-unes des anciennes rela- 
tions hollandaises que le Nordkaper, contre la règle générale des balei- 
nes franches, est ichthyophage. 

D’après les réponses déjà obtenues de quelques-uns des membres 
correspondants de la Société, l’absence de ces petits animaux dans les 
anciennes stations de cette espèce confirmerait singulièrement ces indi- 
cations; et si cette baleine biscayenne s’est éloignée plus qu'aucune 
autre baleine australe du Mysticetus par son extérieur selon les recher- 
ches de M. Monedero , et par son squelette d’après mon propre examen , 
elle s’en serait éloignée encore davantage par sa nourriture. Il est im- 
possible toutefois de se prononcer absolument avant d’avoir eu l’occa- 
sion de disséquer un exemplaire pour examiner les contenus de ses 
estomacs. 

‘Aux questions sur les baleines franches, j'ai joint cinq questions sur 
les Dauphins en général et sur les Marsouins en particulier (1). J'avais 


(1) 1° Sont-ce de véritables Marsouins ( Phocæna ) ou des Dauphins ( Delphis) qu'on 
rencontre dans le bassin d'Arcachon ? Un crâne, mème mutilé , ou seulement une dent 
suffirait pour en juger. 

20 Les Marsouins sont-ils plus abondants à Arcachon dans une saison que dans 
une autre ? Peut-on fixer l’époque de leur arrivée et celle de leur départ ? ? 

3° Leur apparition ne correspond-elle pas avec celle du Royan ? 

4 Y a-t-il des documents historiques sur une pêche régulière des Marsouins ou 
Dauphins , quand leur chair servait de nourriture ? 

50 Un squelette (la tête, la queue, les ailerons du dos et les nagcoires pectorales 
laissés intacts ) serait très-précieux. 


( 431 ) 

conservé quelque espoir qu’il resterait encore sur les côtes françaises 
quelques-unes de ces anciennes pêcheries de dauphins dirigées au 
Moyen-Age par des Corporationes Walmannorum , ainsi qu’il en reste de 
notre temps en quelques endroits des côtes danoises, sans parler des pé- 
cheries côtières des Doegling (Hyperoodon) et des Grind (Delph. globiceps 
Cuv.) aux îles Féroé, des baleines naines en Norvége, des Mysticetus , 
des baleines à bosse et des Beluga (D. albicans), ete., au Groenland. 
Sur les côtes du Groenland et des îles Féroé, qui font partie de l’Atlan- 
tique septentrional, il y a un Dauphin commun, comme sur les côtes 
françaises de l’Atlantique et de la Méditerranée. Partout ce Dauphin 
commun a été nommé par les faunistes Delphinus Delphis. Mais il parait 
que cette espèce n'existe pas du tout dans les mers du Nord. Le Dauphin 
des faunes du Groenland est le Laghenorhynchus albifrons Gray , très- 
facile à distinguer par l’immense nombre de ses vertèbres, 92 à 94; celui 
des faunes des îles Féroé est le Laghenorhynchus Eschrichtii Schlegel 
(leucopleurus Rasch}, qui en a 72 à 74. Reste à s'assurer si les Dau- 
phins communs des côtes de France sont identiques, et, bien que le 
vrai Delphis soit très-commun dans les musées, je serais enchanté d’en 
avoir une série complète des deux sexes de tout âge à ma disposition, 
comme j'en ai de toutes les espèces qui se pêchent régulièrement sur les 
côtes du Danemarck et de ses colonies boréales. 

On regarde en France la pêche des Dauphins et des Marsouins comme 
ne payant pas les frais. Nous ne sommes pas du même avis en Dane- 
marck. Les chairs servent à la nourriture des porcs, et la graisse de 
chaque individu est évaluée à dix francs environ. La pêche est sur nos 
côtes le plus souvent abondante, et par conséquent réellement profitable. 

Un dernier mot. Si j’ai demandé des renseignements sur l'apparition 
des Marsouins et des autres espèces les plus communes, c’est que, sur 
les côtes du Danemarck et de ses colonies boréales (Islande, Groen- 
land , etc.), toutes les espèces de cétacés sont de passage, de sorte que 
nulle espèce ne reste toute l’année. Dans le Sirai-Davis, les espèces 
d'hiver alternent avec celles d’été; et, sur les côtes de Danemarck, les 
Marsouins arrivent d’abord au printemps pour entrer dans la Baltique, 
ensuite en hiver pour en sortir. 

Il y aurait un grand intérêt pour la science à connaître exactement 
toute la route annuelle que parcourent ces animaux voyageurs, et un tel 
but ne pourra être atteint que par le concours fraternel et zélé des natu- 
ralisies de tous les pays. 


Copenhague, 10 mai 1859. 
, | D: Escuricar. 


RÉPONSE AUX DIVERSES QUESTIONS 
Posées par M. ESCHRICHT, de Copenhague, 


RELATIVES A L'ANCIENNE 


PÈCHE DE LA BALEINE 


DANS LE GOLFE DE GASCOGNE, 


AINSI QU'A LA 


PRÉSENCE DES MARSOUINS DANS CE MÊME GOLFE ; 


Par M. ULz. DARRACO. 


—"-8-— 


La pêche de la Baleine, dans le golfe de Gascogne ou de Biscaye, est 
un fait avéré, authentique et qui ne peut être mis en doute que par 
des personnes ignorantes ou d’un ridicule scepticisme. C’est parmi les 
populations des côtes du Labourd qu’elle a pris naissance; avant et 
depuis le X[° siècle, elle fut alors pour elles une source de richesse et de 
prospérité; mais l’époque de sa plus grande splendeur fut du XIIe au 
XIITe siècle , comme l’attestent une foule de titres anciens. (Voir Catalo- 
gue des Rôles gascons et normands, p. 12, n° 30, sous l’an 1281, et 
p. 89, n° 26, sous la date 1338. Voyez, en outre, les vieux titres du 
Chapitre de Bayonne, relatifs à la pêche des Baleines et Balénas, dont 
les habitants de Biarritz devaient dîime à l’église de Sainte-Marie-de- 
Bayonne ; dans lesquels on voit qu’on vendait la chair et surtout la 
langue de ce cétacé, dans les marchés de Bayonne, de Sibourre et de 
Saint-Jean-de-Luz, où on la regardait comme un mets très-délicieux, 
puisqu'on était dans l’usage de les donner par dévotion à l’église comme 
la meilleure partie de ces animaux. Il fallait même que la capture annuelle 
en fut bien considérable pour que les droits seigneuriaux s’élevassent à 
une somme telle, qu'Édouard III, Roi d'Angleterre, et alors duc de 
Guienne, l’affecta, en 1338 , aux dépenses et à l’équipement d’une 
flotte, dont Pierre de Poyanne était amiral; voyez Rimer, Acte Pub. 
514 et 515, et ce pour l’indemniser et le dédommager des frais qu'il 
avait faits. D'autre part, on voit Édouard IT passer un acte avec Rolland 
de Solier, dame de Belin, relativement au jet et échouement des Balei- 


(433) 
nes sur les côtes maritimes de Biscarrosse, de Saint-Julien , on de Sart. 
Voyez Catalogue des rôles gascons et normands, tome 1, p. 46, n° 40, 
année 1315. Nec non super naufragium Balænam et aliu emergentia ad 
costas maris de Biscarossa et de S. Juliano). 

C’est notamment à Biarritz que cette pêche se faisait sur une grande 
échelle et où elle était la plus abondante, comme le prouve un acte de 
* l’abbaye de la Honce, village distant de 6 kilomètres de Bayonne. On 
voit par cet écrit qu’il fut pendant quelque temps d’usage, aux environs 
de Bayonne, de payer les redevances en Baleines. Les os et les vertèbres 
de ces monstrueux cétacés y servaient de pieux ou de siéges. Presque tous 
les habitants se livraient à ce genre d’industrie; ils allaient harponner les 
Baleines au loin, les menaient à terre, où elles étaient dépecées ou 
vendues. 

« La saison du passage des Baleines, sur les côtes de la Guienne et de 
» Biarritz, lesquelles s’attouchent ces angles droits ou quart de rond au 
» lieu nommé Chambre d'Amour , proche les masures de l’ancien chà- 
» teau de Ferragus , en la paroisse d’Anglet, distant d'environ une lieue 
» de Bayonne, commence, dit Cleirac (Coutumes de la mer), après l’équi- 
» n0xe de septembre et dure presque tout l'hiver. » 

À partir de la fin du XI: siècle, la pêche fut constamment en décrois- 
sant sur les côtes du Labourd , car un Guillaume Lavielle donna à l’évé- 
que et au chapitre de Bayonne la dîme des Baleines et Baleinaux pêchés 
en la mer Océane par les habitants du port de Biarritz. Dès 4281, on 
éprouva déjà quelques difficultés dans le recouvrement de cette presta- 
tion. Elle fut d’un commun accord réduite à la moitié en 1498 , à cause 
des grandes peines que donnait la pêche. 

Mais ce qui atteste mieux que toutes les chartes et documents écrits la 
présence des Baleines dans notre golfe aux époques citées, ce sont les 
nombreux débris osseux dont naguère on rencontrait partout des traces. 
Ils suppléaient au bois toujours rare sur le littoral pour la fermeture 
des enclos, la construction des ponts et autres usages. Maintenant encore 
dans la transformation que subit Biarritz, on rencontre fréquemment 
dans la terre des ossements de ces animaux. Quant à l’espèce, je suis 
porté à croire qu’il en existait de plusieurs , telles que la Baleine fran- 
che, Balæna mysticetus Linn.; le Gibbar, Balæna Physalus Lin.; la 
Jubarte, Balæna boops Lin. 

Les derniers armements de cette pêche datent de 1741. À cette épo- 
que , elle était complètement en décadence, et quelques navires basques 


( 434 } 
capturés par les Anglais furent le coup de grâce porté à cette pêche 
née dans nos contrées, et dont nous eûmes le monopole pendant long- 
temps. Cependant en 1782, M. de Laborde, banquier de la cour, forma 
le dessein de rendre à Bayonne cette branche d’industrie. Il arma, à ses 
frais, deux navires qui firent deux campagnes, dont l’une fut absolu- 
ment infructueuse ; la seconde , y compris une prime de quarante francs 


par barrique d'huile, produisit seulement les trois-quarts des frais de 
l'armement d’un seul des navires. 


RÉSUMÉ DES QUESTIONS RELATIVES AUX BALEINES ET AUX MARSOUINS. 


1° Personne ne se rappelle avoir vu dans le golfe de Gascogne des 
baleines franches Balæna mysticelus. Seulement, en 1823, une Baleine 
jubarte, Balæna boops Linn., échoua sur la côte de la commune de la 
Benne; elle fut fondue sur place, et la charpente osseuse envoyée à 
Paris. Depuis cette époque, plusieurs autres grands cétacés se sont 
montrés dans nos mers, mais dont il serait difficile de déterminer le 
genre, n'ayant pu être observés qu’à des grandes distances. 

20 Il existe chez MM. Silhouette et Moulis, à Biarritz, des fragments 
osseux de Baleine, tels que branche de mâchoire, improprement 
nommée côte, une vertèbre, ainsi qu’un autre morceau d’os. 

3° Les pêcheurs, les marins, ni moi n’avons jamais remarqué dans le 
golfe, des mollusques ptéropodes, nageant librement, ni de crevettes en 
grande et petite quantité pouvant servir de nourriture aux Baleines. 

4° Les Marsouins sont très-répandus dans notre golfe , notamment le 
Marsouin commun, Delphinus phæcena Linn.; il s’y montre en grand nom- 
bre à toutes les époques de l’année, mais plus particulièrement lors de 
l'apparition des bancs de sardines et d’anchois. Sa chair réputée mau- 
vaise, le peu d'huile qu’elle fournit, l’ont fait dédaigner de nos pêcheurs, 
Les autres Dauphins, tels que le Delphinus delphis, Tursio, Gladiator, 
Globiceps , s'y rencontrent aussi, mais plus rarement. 

En clôturant ces notes, je sens le besoin de témoigner à M. Eschricht, 
à qui elles étaient destinées, mes remerciments pour la gracieuseté qu'il 
a mise à en autoriser l'insertion dans les Actes de la Société Linnéenne. 


Bayonne, le 4 août 1859. 
Ur. DaRRAcQ. 


17 Août 1859. 


SÉANCE PUBLIQUE 


CAC D0—= 


OUVERTURE DE LA SÉANCE 


Par M. Ch. DES MOULINS, Présidest 


ÉMINENCE 0), 
MESSIEURS, 


Une année entière s’est écoulée sans que nous ayions invité à nous 
honorer de son assistance l’auditoire dont la bienveillance ne nous a 
jamais fait défaut. Vous savez tous , Messieurs , la cause de cette inter- 
ruption dans nos usages : notre Compagnie a élé frappée au cœur ; elle 
a perdu son Fondateur et son Chef. Ce deuil lui a imposé le silence 
qu’elle a gardé. Aujourd’hui, et avant de s’occuper des moyens de rem- 
plir le vide que la mort a fait dans ses rangs, elle a pourvu à ce qu’un 
hommage solennel soit rendu , dans quelques instants, à la mémoire 
vénérée de J.-F. LATERRADE qui, après lui avoir donné l'existence, l’a 
honorée, pendant plus de quarante ans, par ses talents et par ses 
incomparables vertus. | 

Un autre évènement, — mais celui-ci ajoute aux jours heureux de la 
Société Linnéenne, — un autre évènement s’est produit dans le cours de 
l’année qui s’achève : la Société Botanique de France est venue tenir à 
Bordeaux sa quatrième session extraordinaire. Notre Compagnie a fait 
tous ses efforts pour préparer à sa jeune et brillante sœur une réception 
digne d’elle, et trois de nos collègues résidants, MM. Du Rieu de 
Maisonneuve, Lespinasse et Cuigneau ont fait partie, conjointement 
avec des Membres parisiens , du Comité d'organisation de cette session. 
Mais une fois en fonctions , les commissaires bordelais cessaient , pour 


(1) Mer le Cardinal DONNET, Archevèque de Bordeaux, occupant le fanteuil comme 
Président d'Honneur. 


Tome XXII. 43 


(436) 


ainsi dire, de nous appartenir, et ils agissaient nécessairement comme 
Membres de la Société Botanique de France. La Société Linnéenne 
devait donc se faire représenter spécialement dans le Congrès Botanique, 
et son Président se trouvant, par un deuil de famille, empêché de 
prendre part à la solennité scientifique, y fut remplacé par deux de nos 
plus zélés Collègues , M. le Cte de Kercado et M. le D' Eugène Lafargue, 
Secrétaire-général. 

Nous avons eu la satisfaction de voir que les savants venus de la 
capitale et des départements les plus éloignés de la France, ont été vive- 
ment intéressés par les richesses que renferme notre Gironde, et l’un de 
nes Collègues, ici-même, va vous en donner la preuve en vous présen- 
tant un aperçu de cette Session extraordinaire. La Société Botanique de 
France a parfaitement compris les avantages immenses que l'institution 
des Congrès offre aux progrès incessants et depuis longtemps rapides des 
sciences d'observation, et je reproduis avec bonheur les termes de la 
profession de foi qu’elle a insérée, à cet égard, dans une lettre que 
nous avons reçue d'elle, depuis la session du mois d’Août dernier : 

« L'institution de nos sessions départementales, » dit cette lettre, « a 
» surtout l'avantage d'établir et de resserrer, entre les Sociétés comme 
» entre les hommes, des relations le plus souvent pleines de charme et 
» toujours profitables à la science, de stimuler une noble émulation 
» tout en effaçant des rivalités mesquines. Cette institution est toute 
» récente » (pour la Société Botanique, s’entend, qui ne compte que 
six années d'existence ; mais elle remonte à une trentaine d'années, en 
France, pour l’ensemble des connaissances humaines) : — « nous espé- 
» rons pouvoir la maintenir et la développer d’année en année. S'il en 
» est ainsi, nous devrons surtout son succès aux excellents Confrères 
» qui ont soutenu nos premiers pas dans une voie qui n’est pas sans 
» écueils. La Société Linnéenne de Bordeaux y aura notablement contri- 
» bué pour sa part. » 

Vous me pardonnerez , Messieurs , d’être heureux et fier de vous faire 
connaître cet honorable témoignage. 

Nous allons aujourd’hui , selon notre usage déjà ancien , donner une 
marque de sympathie à un naturaliste que de grands et utiles travaux ont 
rendu justement célèbre. Ce n’est pas cette fois parmi nos compatriotes 
que brille le nom que nous avons choisi. Voltaire, dans un accès de 
flatterie intéressée, s’écriait : 


« C’est du Nord, aujourd’hui, que nous vient la lumière ! » 


( 437 ) 

Nous pouvons , nous, dire avec vérité la même chose pour la spécia- 
lité des travaux de cétologie dûs à M. le Professeur Eschricht , directeur 
du Muséum de physiologie et d'anatomie comparée de Copenhague. 
Cette collection royale , la plus riche de l’Europe en ce qui concerne les 
Baleines, Cachalots, Dauphins, etc., le doit d’abord aux avantages de 
la position géographique du Danemarck; mais elle Le doit aussi, en très- 
grande partie , aux savants et laborieux efforts du naturaliste illustre qui 
la dirige , et à qui notre Compagnie décerne aujourd’hui un hommage 
que décore l’efligie de Buffon. 

Et maintenant, avant de céder la parole à M. le Secrétaire-général pour 
son Compte-rendu des travaux de l’année , grâces vous soient rendues, 
Messieurs : 

À Vous, d’abord, Monseigneur, qui honorez notre Société de Votre 
bienveillance, parce que Vous aimez les champs; Vous en encouragez 
et conseillez la culture comme Vous pratiquez celle de nos âmes; 

A vous, Monsieur le Préfet, qui avez autant à cœur les intérêts intel- 
lectuels que les nécessités positives et pressantes dont le soin semble- 
rait suffire à occuper toutes vos sollicitudes ; 

À vous , Monsieur le Recteur, qui résumez dans vos hautes fonctions 
et qui représentez personnellement au milieu de nous toutes les connais- 
sances qui perfectionnent l’esprit de l’homme : — la Science qui l’ins- 
truit , les Lettres qui le charment ; 

À vous, vénérables Membres du Clergé, Magistrats, Administrateurs, 
Membres des Corps savants, Notables de notre cité, Hommes d’étude et 
de travail, — à vous tous enfin, Messieurs, grâces vous soient rendues 
pour l'honneur que vous venez rendre vous-mêmes à la mémoire de 
notre vénéré Fondateur ! 


COMPTE-RENDU 


DES 


TRAVAUX DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE 


DE BORDEAUX 


PENDANT L'ANNÉE ACADÉEMIQUE 1858-59 
Par M. le Dr Bug. LAFARGUE , Secrétaire-général 


"0 <=—— 


MESSIEURS , 


D’après votre règlement et conformément aux usages des Sociétés 
savantes, le Secrétaire-général doit, à la fin de chaque année, vous 
présenter le sommaire de vos travaux. C’est pour obéir à la lettre et à 
l’esprit des lois qui vous régissent que je viens vous demander quelques 
instants d’attention. 

Grouper en faisceaux distincts les communications diverses que vous 
avez présentées dans vos séances générales; résumer les nombreux tra- 
vaux de vos correspondants , telle est la mission qui m’est dévolue et 
que je vais m’efforcer de remplir le mieux qu’il me sera possible. 

Point de science plus utile, plus admirable, je dirai même plus 
sublime que celle de la nature. Elle embrasse tout; et les phénomènes 
sans nombre qui se passent ici-bas, appartiennent tous à cette science 
infinie : l’histoire naturelle. 

Depuis la plante la plus ténue et la plus frêle jusqu'aux arbres les 
plus élevés et les plus vigoureux, depuis l’animalcule microscopique 
jusqu'aux animaux les mieux constitués, tous sont du domaine des 
études du naturaliste. 

Buffon et Linné, par leur impérissable méthode et leurs immortels ou- 
vrages , ébranlèrent l’état incertain et latent où se trouvait celte science ; 
plus tard, des hommes dévoués, mettant à profit l'héritage précieux de 
leurs devanciers, donnèrent une vive impulsion aux diverses branches de 
l’histoire naturelle et propagèrent partout le goût de cette science. 

La France peut compter avec orgueil parmi ces hommes éminents, 


( 439 ) 
Lamarck, Jussieu, Cuvier, Geoffroy-Saint-Hilaire, et tant d’autres qu'il 
serait trop long d’énumérer ici. 

L'étude des végétaux est si séduisante , elle rémunère si précieuse- 
ment par de pures et douces jouissances celui qui s’y livre, que vous ne 
pouviez la délaisser et ne pas apporter, cette année, comme les précé- 
dentes, votre tribut d'observations sur ces êtres les plus variés et les plus 
nombreux. 

M. Du Rieu de Maisonneuve vous a souvent entretenu des plantes 
remarquables qu’il avait recueillies dans ses excursions. 

Ce savant professeur a attiré spécialement votre attention sur une 
charmante petite plante (Sphæria mililaris), qui croît abondamment 
dans les forêts de pins qui bordent le bassin d'Arcachon. 

Cet élégant champignon, ressemblant assez bien par sa forme et par 
sa belle couleur rouge à une frêle branche de corail, se développe sur 
la Processionnaire des pins (Bombix pithyocampa), chenille malheu- 
reusement si commune dans nos landes. 

En vous montrant plusieurs échantillons du Sphæria militaris déve- 
loppé sur la chrysalide du pithyocampa, votre collègue vous a fait 
remarquer que les sporules du champignon , n’ayant aucune action pri- 
mitive sur la Processionnaire, celle-ci continuait à vivre et à se déve- 
lopper et ne périssait que lorsqu'elle avait filé son cocon. 

Faisant ensuite application de ce fait si singulier et si important à la 
fois, M. Du Rieu se demande si en propageant le plus possible le 
Sphæria militaris dans nos forêts de pin maritime, on ne détruirait pas 
ainsi considérablement de ces chenilles qui infestent nos bois ! 

Nous faisons des vœux les plus ardents pour que la voix de notre 
honorable collègue trouve de l’écho chez les habitants de nos landes, et 
nous serons satisfaits d'apprendre, tout en sacrifiant un sujet curieux 
d'observations pour le naturaliste, qu’on a détruit, en grande partie, un 
des animaux les plus repoussants , les plus destructeurs et pour lesquels 
l’'économiste agriculteur conserve une aversion profonde. 

M. Aymen, votre correspondant à Castillon, vous a offert un pieux 
hommage bien cher à son cœur. Il vous a fait l’envoi d’un volumineux 
herbier ayant appartenu à son aïeul. Vous vous êtes empressés de le 
déposer soigneusement dans vos archives , à côté d’un livre bien pré- 
cieux pour vous ef que vous devez à la générosité de votre collègue, 
M. Ch. Laterrade : je veux dire le manuscrit de la première édition de la 
Flore bordelaise , écrit en entier de la main de votre vénéré Directeur. 


( 440 ) 


M. le Préfet de la Gironde , toujours si bien disposé en votre faveur, 
vous annonça, en Janvier dernier, que le chef de l'État venait de lui 
faire parvenir des graines de plusieurs plantes cultivées en Chine et 
servant à l'alimentation de la population de cette contrée. 

M. le Ministre de l'Agriculture ayant envoyé ces graines à Bordeaux 
pour y être cultivées au Jardin des Plantes, M. le Préfet voulut bien 
nous faire l'honneur de désigner notre honorable Président pour obser- 
ver, avec M. le Maire et M. le Professeur de Botanique de la Ville, la 
germination et le développement de ces diverses graines étrangères. 

Notre Président envoya plus tard à l’autorité départementale un 
rapport sur les résultats de ses observations. 

De charmantes et délicieuses lectures , des communications intéres- 
santes et des rapports nombreux ont tour à tour rempli vos séances de 
cette année. 

Ainsi, M. Raulin vous a lu un mémoire sur la géographie physique 
du département de la Gironde. 

M. Laporte fils vous a donné lecture d’une excursion faite, en 1856, 
dans l’Oyapook (Guyane française), et a ainsi captivé agréablement votre 
attention. 1 

M. Manès vous a entretenu d’un sujet dont il connaît tous les secrets : 
Considérations sur l'art des Mines. 

M. Jacquot, à propos d’un Mémoire de M. Ch. des Moulins sur la 
station exclusive des plantes , vous a fait une très-intéressante disserta- 
tion sur la nature , la composition , ou mieux encore , là provenance de 
la terre végétale. 

Votre correspondant, M. Debaux, vous a fait parvenir un mémoire 
manuscrit intitulé : Catalogue des plantes observées dans le territoire de 
Boghar (Algérie ). 

M. l'abbé Revel vous a parlé de plusieurs plantes curieuses qu’il avait 
recueillies dans des excursions faites sur plusieurs points de la France. 

M. Eschricht vous a envoyé un Questionnaire relatif aux cétacés du 
Golfe de Gascogne que vous vous êtes empressé de publier dans vos Actes. 

Ce savant Professeur de l’Université de Copenhague, préparant un 
nouveau travail sur ces animaux, la Société Linnéenne a été heureuse 
de lui être à la fois utile et agréable par la publication qu’elle a donnée 
à ses Questions. | 

Votre Compagnie voulant honorer à la fois et tout le zèle de 
M. Eschricht pour les sciences naturelles et tout le savoir dont il a 


(AM ) 


donné tant de preuves dans ses importants travaux , lui décerne aujour- 
d’hui une Médaille d'argent. 

Je saisis le moment où nous donnons cette récompense, pour vous 
rappeler que par suite de la mort du Directeur de la Société , le Pro- 
gramme des prix, n’ayant été publié que vers la fin du mois de mai der- 
uier, aura cours jusqu’à la Séance publique de 1860. 

Déjà, et en réponse au Questionnaire du savant Cétologue de Copenha- 
eue, vous avez reçu de M. Ul. Darracq une très-intéressante communica- 
tion relative à l’ancienne pêche de la baleine dans le Golfe de Gascogne. 

« C’est notamment à Biarritz, » dit votre correspondant, « que cetle 
pêche se faisait sur une grande échelle et où elle était le plus abondante, 
comme le prouve un acte de l’abbaye de la Honce, village près de 
Bayonne. On voit par cet écrit, » ajoute l’auteur, « qu’il fut pendant quel- 
que temps d'usage , aux environs de cette ville, de payer les redevances 
en baleines. Mais ce qui atteste encore mieux la présence de ces animaux 
dans ce golfe, ce sont les nombreux débris osseux dont on rencontrait 
partout les traces, au point qu’ils suppléaient au bois, toujours rare sur 
le littoral, pour la fermeture des enclos et la construction des ponts.» 

M. Ch. Des Moulins a publié cette année, dans vos Actes, la fin du 
Catalogue raisonné des Phanérogames de la Dordogne qu’il avait com- 
mencé en 1835 et qu'il avait continué en 1846 et 1849. 

Votre Président, aussi savant que modeste, termine ainsi la préface 
de son remarquable ouvrage : 

« Ce n’est qu'au moment où l’année 1858 approche de sa fin que je 
termine ce triple travail. Il m’aura occupé (non sans interruptions) 
pendant vingt-trois ans, et je n’ai pas la folle outrecuidance d’espérer 
qu’il soit complet. 

» Pour moi, ajoute l’auteur, ma tâche est achevée; je dégage aujour- 
d'hui, bien tardivement sans doute, la parole que j’ai donnée à mes 
honorables collaborateurs, et je suis heureux de m’efforcer ainsi de 
payer ma dette de reconnaissance à cette province aimée où J'ai passé 
les plus belles, les plus studieuses et les plus douces des soixante années 
que Dieu m’a permis jusqu'ici de passer sur la terre. » 

Et nous, cher et honoré collègue, nous vous remercions aussi, c’est 
justice, de la faveur que vous nous avez faite d'enrichir nos publications 
d’un travail aussi vaste que consciencieux. 

Pénétré de vos propres observations, aidé des scrupuleuses investi- 
gations de vos correspondants, vous avez accompli une tâche difficile 
qui porte le cachet de vos longues et profondes études botaniques. 


( 442 ) 

Le R. P. Montrouzier, ce missionnaire apostolique, modèle par ses 
vertus et par son amour pour les sciences naturelles ; ce chercheur in- 
fatigable qui a si bien compris qu’il fallait observer la nature pour mieux 
apprécier l’œuvre du Créateur, vous a envoyé de la Nouvelle-Calédonie, 
cent-cinquante espèces de coquilles à étudier, parmi lesquelles vous en 
avez reconnu plusieurs qui n’avaient jamais été décrites, et que MM. Sou- 
verbie et Gassies ont publiées. 


La Société Linnéenne remercie sincèrement son vénérable correspon- 
dant, non-seulement pour le dévouement qui l’anime à porter la lumière 
évangélique dans les pays lointains et sauvages, mais encore pour le 
zèle ardent qu’il déploie dans l’étude des êtres qu’il rencontre sous ses 
pas, lorsque dans sa sainte et généreuse abnégation, il traverse ces 
contrées incultes et encore presque vierges de toute exploration. 


En 1817, M. Ch. Des Moulins publiait dans le Bulletin de votre Société, 
le Cutalogue des Mollusques terrestres et fluviatiles du département de 
la Gironde. « Je n’ai point la prétention, disait-il alors , de n’en omettre 
aucune espèce; je désire seulement appeler sur cette branche intéres- 
sante de la zoologie, l’attention des naturalistes qui habitent ce dépar- 
tement et fournir, en même temps, quelques renseignements certains, 
pour la distribution géographique de ces animaux. » 


Ces quelques mots, mis en têle du catalogue de votre Président, 
altirèrent l’attention des naturalistes de la Gironde; chacun se mit à 
l’œuvre et depuis bientôt trente-deux ans, vos Actes ont annoncé au 
monde savant, les découvertes nombreuses que vous aviez faites en 
conchyliologie. 

Mais depuis celte époque, personne n'avait osé entreprendre le tra- 
vail vaste et difficile de compléter l’œuvre si bien commencée par M. Ch. 
Des Moulins. 


Parcourir minutieusement le département de la Gironde, y explorer 
les cours d’eau qui le traversent et le sillonnent; réunir et classer les 
espèces nombreuses que des recherches multipliées et fructueuses avaient 
fait découvrir; puis former un faisceau complet de tous ces êtres, en 
indiquant leur kabitat, leurs mœurs et leur distribution géographique 
sous le rapport botanique et orographique, telle est la tâche laborieuse 
et ardue que deux de nos collègues ont entreprise et exécutée séparé- 
ment cette année, MM. de Grateloup et Gassies. 


M. Raulin continue dans vos Actes la publication de son intéressant 
voyage en Crète. 


Ÿ 
| 


( 443 ) 

Parti le 4 Avril 1845, votre honorable Vice-Président ne quitta l'ile 
de Crète que le 17 Décembre suivant. 

Vous dire que votre collègue a passé huit mois dans cette île de la 
Méditerranée , c’est vous faire connaître la scrupuleuse attention qu’il 
apporta dans la mission qui lui avait été confiée, c’est encore vous 
faire apprécier l’exactitude minutieuse avec laquelle il accomplit ce 
voyage scientifique. 

Comme moi, vous avez lu avec intérêt ces pages si concises el si 
colorées, écrites avec autant de justesse que de savoir ; inutile donc de 
nous y arrêter plus longtemps. 

Cependant notre ingratitude serait grande, si aujourd’hui nous n’adres- 
sions pas nos remerciments à M. le Ministre de l’Instruction publique, 
pour l'allocation importante qu’il vous a fait parvenir pour vous secon- 
der dans la publication de la carte de l’ile de Crète, qui doit terminer le 
travail de M. Raulin. 

Je m'arrête, Messieurs, car si je voulais faire passer sous vos yeux 
tous vos travaux de cette année, je fatiguerais peut-être votre attention. 

Permettez-moi, cependant, avant de finir, de remercier M. le Préfet, 
de la bienveillante bonté qu’il a toujours bien voulu accorder à la Société 
Linnéenne. 

Notre reconnaissance envers ce Magistrat doit être vive et sincère ; 
car jamais, nous devons le proclamer ici publiquement, l’autorité dé- 
partementale de la Gironde ne se montra pour vous, plus bienveillante. 

Que Messieurs les Membres du Conseil général et du Corps municipal 
veuillent bien aussi recevoir l'expression de tous nos sentiments de gra- 
titude, pour les preuves d'intérêt qu’ils accordent tous les ans à votre 
Compagnie. 

Un mot encore, ce sera le dernier, sur le personnel de la Société. 

Vous avez admis cette année, au nombre de vos titulaires, M. Jacquot, 
ingénieur en chef des mines, connu du monde scientifique par ses im- 
portants travaux. 

Vous avez aussi inscrit au tableau de vos membres correspondants, 
MM. Clos, professeur de botanique et directeur du Jardin des Plantes de 
Toulouse; de Pommaret, d'Agen, les abbés Lambert et Caudéran, et 
M. Eschricht, cétologue danois. 

Si votre Compagnie a été orgueilleuse et fière d'ajouter de nouveaux 
noms à la liste des Membres qui la composent, elle a eu aussi la douleur 
d’en effacer quelques-uns que la mort vous avait cruellement enlevés. 


Tome XXII. 44 


( 444 ) 

L'abbé Mitraud est décédé, cette année , emportant avec lui les regrets 
de ses collègues. 

J.-F. Laterrade est mort le 30 Octobre 1858. Mon intention n’est pas 
de faire l’éloge de notre regretté collègue. Une voix plus éloquente que 
la mienne va, chargée de ce soin, vous retracer la douleur profonde 
que nous ressentimes tous lorsque, réunis en séance, nous apprimes 
que cette existence si noble et si chère venait de cesser. 

Permettez cependant, comme organe de vos sentiments, d'exprimer 
ici publiquement vos regrets. 

J.-F. Laterrade s’attacha, d’esprit et de cœur, à votre Compagnie, 
depuis le jour où elle prit naissance sous le Saule d’Arlac, près du ruis- 
sean qui arrose cette plaine si fertille pour le botaniste. Pour lui, la 
Société Linnéenne devint une seconde famille ; il nous plaçait dans son 
cœur à côté de ses propres enfants qu’il chérissait en père bon et ver- 
tueux. Et vous, vous êtiez heureux de savoir qu’une âme aussi pure et 
aussi élevée que modeste, vous accordait toute son affection. 

Lorsque Dieu brisa les liens qui nous unissaient ici-bas depuis long- 
temps, votre douleur fut bien amère ! Vous perdites un collègue, c’est- 
à-dire un ami bien sincère, toujours dévoué ; vous perdites un Direc- 
teur, c’est-à-dire un père affectueux dont le bonheur était de se trouver 
au milieu de vous. j 

Homme juste et probe, jamais il ne s’écarta de la ligne du devoir et 
du bien : digne exemple pour ses deux fils, vos collègues, que nous 
sommes certains de trouver toujours dans la voie que leur père a si 
fidèlement et si religieusement suivie. 

Naturaliste savant, il vécut au milieu des plantes des champs qu'il 
étudia et avec lesquelles il sut, pour ainsi dire, s’identifier. 

Comme elles , il voulait être ignoré , comme elles, il cachait sous des 
dehors simples des vertus rares qu’il fallait deviner. Comme elles, il 
avait les mœurs douces et paisibles ; se contentait de peu, et si, isolées 
et comme perdues au milieu des champs ou des forêts, les premières 
reçoivent quelques rayons de soleil nécessaires à leur existence, lui 
aussi jouissait , sans les avoir recherchées, des quelques faveurs que le 
hasard ou la bonté lui apportaient dans son isolement. 

Vénérable Directeur, reçois ici les hommages sincères de tes collègues. 
Nos regrets seront éternels; nos larmes rappelleront toujours ta mé- 
moire ; tu seras toujours pouf nous le modèle des vertus : excellent père, 


ami dévoué , collègue affectueux. 
Euc. LArARGUE, d.-m. 


ÉLOGE HISTORIQUE 


DE 


JEAN-FRANÇOIS LATERRADE 


FONDATEUR ET DIRECTEUR DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE DE BORDEAUX 
PROFESSEUR-DIRECTEUR DU JARDIN DES PLANTES DE LA VILLE 


Membre de l’Institut des Provinces de France , des Académies Impériale des Sciences de Bordeaux ef 
de Médecine de Madrid; de la Société Impériale et centrale d’Horticulture de France; de la Société 
d’Horticulture de la Gironde ; des Sociétés d'Agriculture de la Gironde et de la Haute-Garonne , et 
de la Société Philomathique de Bordeaux ; 


Par M. Charles DES MOULINS 


PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE 


(Lu dans la Séance publique du 11 Novembre 1859) 


In medio fratrum rector illorum in honore. 
Celui qui dirige une Société de frères, 
est en honneur parmi eux. 
ECCLI. X, 24. 


EMINENCE , 


MESSIEURS , 


On parle beaucoup de gloire ici-bas, et l’on a raison, car l’homme 
passe bien peu de jours sur la terre, et la gloire est la prolongation indé- 
finie de sa vie morale. 

Mais, dès qu’on prononce ce mot, les hommes ont coutume de regar- 
der en haut ; ils semblent ne chercher les glorieux que dans ces régions 
inaccessibles à presque tous, où l’on porte le sceptre, où l’on régle le 
sort des empires, où l’on fonde et détruit les cités. La gloire! on la 
cherche encore, et souvent en vain, là où l’or ruisselle; mais on la 


voit réelle et rayonnante sur le front des législateurs , des auteurs de ces 


grandes découvertes qui changent la face des sciences et de l’industrie , 
sur le front des orateurs et des poëtes qui passionnent et maîtrisent les 
esprits et les cœurs. Enfin, les vertus éclatantes sont un titre auquel la 
gloire ne fait jamais défaut. 


( 446 ) 


Mais est-ce là toute la gloire? Non! et nous nous convaincrons 
bientôt de cette vérité, si nous considérons ce qu'est essentiellement 
la gloire, ce qui la constitue d’une manière fondamentale, absolue, 
exclusive. 

Eh bien! Messieurs , si nous la dépouillons de tous ses contingents, il 
ne restera que ceci comme définition nue, abstraite mais universelle, 
et tous les contingents s’y viendront ranger sans peine , Chacun selon sa 
valeur : 

La gloire de l'homme consiste à faire bien tout ce qu’il doit faire. 

Une telle définition semble d’abord bien simple, bien humble, bien 
vulgaire ; mais c’est celle que Dieu a employée pour se louer lui-même, 
et la Vérité infinie a fait l'éloge de la Perfection infinie, — l’Esprit- 
Saint a caractérisé le divin Maître des hommes par ces simples paroles : 
I! a bien fait toutes choses , BENÈ OMNIA FECIT. 

Il existe un corollaire de cette définition de la gloire, ou plutôt une 
forme explicative, une traduction pratique; c’est comme le dernier coup 
de scalpel qui met à nu la nature intime de la gloire : 

La gloire de l'homme consiste à mériter d'étre imité par ses sem- 
blables. 

Cette idée est large, elle embrasse toutes choses et tous les cas d’ap- 
plication possibles , tous les degrés imaginables d'éclat ou d’obscurité , 
toutes les chances de la réussite ou de l’insuccès. 

Car, — remarquez-le bien, — il y a deux parts distinctes dans l’œu- 
vre de l’homme : les efforts, — c’est la part de l’homme et la seule à 
laquelle il puisse atteindre , la source de son mérite, l’élément de sa 
gloire; — et puis le succès, — c’est la part de Dieu : et elle demeure 
hors de la portée de l’homme; si Dieu juge à propos de la retenir, le 
monde ne verra que difficilement le mérite des efforts, et leur refusera 
le laurier dont ils étaient dignes. 

Voilà tout le secret de la gloire obtenue et de sa non-obtention qui 
ressemble fort, aux yeux du monde, à son absence; mais elle peut 
exister inaperçue, comme la planète Neptune avant l’illustre Leverrier, 
et le langage humain constate, lui-même, cette existence par une 
expression profondément philosophique, quand il parle d’une gloûre 
méconnue. 

Concluons donc que l'honneur de l’homme, c’est de mériter.la gloire, 
non de l'obtenir ici-bas : la justice et la bonté de Dieu se chargent du 
reliquat des dettes du monde. 


( 447) 

Concluons aussi que la gloire de l’homme consistant à faire de son 
mieux tout ce qu’il a le devoir de faire, il y a des gloires de divers gen- 
res et d'éclat plus divers encore. Il faut bien forcément les mesurer à 
la sphère dans laquelle elles peuvent s’obtenir, et celle-ci a pour rayon 
nécessaire celui de la position où nous place la Providence. 

Ainsi, gloire éblouissante, mais formidable du conquérant, — gloire 
immortelle du guerrier qui meurt au champ d'honneur, — gloire plus 
tempérée et plus solide du pacificateur, du législateur, du magistrat, 
— gloire retentissante du poète, de l'artiste, de l’orateur, — gloire 
ignorée du missionnaire martyr, — gloire humble et voilée de la sœur 
de Charité, — gloire obscure et si digne d’estime du cultivateur intelli- 
gent, de l’ouvrier probe et rangé, — gloire modeste et silencieuse de 
l’homme de science, — gloire laborieuse et trop souvent oubliée de 
l’instituteur et de la mère de famille,.....….. tout cela, ce sont vrai- 
ment des gloires, et les hommes leur doivent le respect, l'honneur, 
et chacun dans sa sphère, Pimitation. 

Me voici, Messieurs, en pleine possession de mon sujet, car je viens 
exposer devant vous les droits acquis sur nous tous, aux trois points de 
vue que je viens d’énumérer, par le vénérable fondateur et directeur de 
la Société Linnéenne de Bordeaux, JEAN-FRancois LATERRADE, mort à 
l’ancien Jardin des Plantes de notre ville, dont il était professeur-direc- 
teur, le 30 octobre 1858, dans sa 75° année. 

Quelques jours sont à peine écoulés depuis le premier anniversaire de 
notre deuil, depuis ce jour où la piété filiale trouvait, dans la force 
même de son amour, une force surnaturelle pour suivre au bord de sa 
tombe un homme si digne d’être imité, un père si digne d’être chéri. 
Nous étions là, nous aussi, — son autre famille, — et la sainteté du 
lieu , la douleur commune et les exigences académiques n’interdirent 
tout hommage étranger aux qualités privées du père de famille, aux 
sublimes vertus du chrétien. 

Aujourd’hui, c’est une autre face de sa vie que je dois vous montrer, 
c’est, — s’il m'est permis ici de parler en naturaliste, — c’est celle qui 
reproduira ses rapports avec le monde extérieur. Mais parmi les person- 
nes qui m'écoutent, parmi celles qui rencontreront ce discours dans le 
Recueil publié par notre Compagnie, il s’en trouvera un grand nombre 
qui n'auront que peu ou point connu M. Laterrace. J'aurais eu besoin, 
pour concilier d'avance leur intérêt au récit d’une existence si modeste 
et si peu accidentée, de faire entrevoir à quel point l’homme fut riche de 


( 448 ) 
ces dons qui commandent l'estime; alors on eût désiré savoir quels 
travaux remplirent la vie du professeur, de l’académicien. 

Qu'il me soit donc permis de suppléer à ce que je dois taire aujour- 
d’hui, en rappelant que cette dernière et plus haute partie de la biogra- 
phie de M. Laterrade est consignée déjà dans nos Actes (1), où le 
discours auquel je viens de faire allusion a été reproduit. Je n’y ajoute- 
rai en ce moment que le souvenir des honneurs académiques accordés à 
l’homme de science, et dont la mention ne se placerait que difficilement 
dans le cadre exclusivement linnéen qui me reste à remplir. 

Tous les Corps savants de notre cité ont voulu s’associer un travail- 
leur si longtemps infatigable. Il avait pour ainsi dire assisté à la fon- 
dation de l’un des plus anciens parmi ces Corps, — de la Société 
Philomathique, qui joue maintenant à Bordeaux un rôle si utile et si 
brillant : il y avait professé avec succès des cours d'Histoire naturelle et 
plus spécialement de Botanique. Cette Compagnie lui témoigna sa 
reconnaissance en lui confiant les fonctions importantes du secrétariat- 
général, et plus tard, lorsque sa santé le contraignit à s’en démettre, 
en l’appelant au fauteuil de la présidence. 

Les Sociétés impériale et centrale d’'Horticulture de Paris, et d’Agri- 
culture de la Haute-Garonne, ainsi que l’Académie royale de Médecine 
de Madrid , l’inscrivirent sur la liste de leurs correspondants. 

Les Sociétés d'Agriculture et d’'Horticulture de la Gironde, auxquelles 
il avait utilement préparé les voies par la fondation, en 1823, de l'Ami 
des Champs (recueil qu’il a rédigé ou dirigé presque jusqu’à son dernier 
jour), — ces deux Sociétés, dis-je, lui conférèrent le titre de membre 
honoraire. 

L'Académie impériale des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Bor- 
deaux, qui l’avait admis dans son sein dès 1821, conservait son nom 
avec affection et respect, en tête de la liste de ses membres titulaires 
dont il était devenu, depuis plusieurs années, le doyen d'admission. Il 
y avait été pendant trente ans, peut-on dire, le modèle le plus constant 
d’exactitude et de zèle; mais ses infirmités avaient trahi son courage; il 
ne paraissait plus aux séances, et il se serait cru coupable d’orgueil s’il 
eût sollicité le titre d’honoraire qu’il avait si laborieusement gagné. 

Une autre Compagnie, l’Institut des Provinces de France, tint à hon- 
neur de lui donner place dans son sein, sur la présentation de la Société 


EEE 


1) T, XX, 2e séric, Mélanges. 


( 449 ) 


Linnéenne qui avait reçu mission d’élire un candidat. Il n’était plus au 
pouvoir du nôtre de contribuer activement à de nouveaux travaux ; mais 
les Sociétés, comme les individus, s’honorent elles-mêmes en honorant 
des cheveux blancs noblement portés. 

Je ne parle pas des honneurs d'apparence militaire qui accompagnè- 
rent quelques années de l'existence du professeur. Ils ne pouvaient 
entrer qu'un peu fictivement dans la vie d’un homme de cabinet, d’un 
homme surtout à qui les infirmités avaient fermé d'avance la carrière du 
soldat; mais il y avait du bien à faire sous des insignes qui contrastaient 
avec la simplicité d’allure et de vêtements habituelle à M. Laterrade, 
et il ne manqua pas de se mettre à la disposition de l'Autorité qui fit de 
lui, dans la garde nationale, un sous-lieutenant d'état-major attaché 
exclusivement, comme de juste, aux travaux administratifs. M. Later- 
rade s’acquitta de ses fonctions avec le zèle et l’exactitude qu’il apportait 
à tout ce qui est d'intérêt public; et c’est ainsi, pour le dire en passant, 
que, le jour comme la nuit, s’il entendait le toscin , on le vit, tant qu’il 
put marcher, arriver l’un des premiers sur le théâtre de l’incendie. 

Vous le voyez, Messieurs ; je suis en ce moment semblable au servi- 
teur fidèle qui, marchant derrière un cercueil, porte entre ses mains ce 
que l’on nomme le coussin des honneurs... et j'y cherche vainement 
un insigne que la voix publique y appelait, impuissante qu’elle était à 
l'y placer. A diverses époques et sous des régimes divers, la Société 
Linnéenne et quelques hommes en position d'apprécier les mérites de 
M. Laterrade, ont tenté des démarches qui n’ont pas abouti. Je veux le 
dire; mais je le dis sans amertume, car, après tout, les hommes ne 
sont que des instruments , et Dieu se montre parfois jaloux d’être seul à 
récompenser !..…. Je le dis sans ainertume , encore une fois , car je suis 
ici pour honorer la mémoire d’un homme qui n’en ressentit jamais au- 
cune, mais dont la pacifique apparence n’était qu’un voile jeté sur le 
courage et l’honneur d’un digne enfant de la France : « Sois prudent, 
« mais toujours brave, » écrivait-il à son fils aîné Théophile qui s’em- 
barquait pour la guerre d'Alger; « Je prie Dieu qu’il te conserve , mais 
« s’il survient de ces circonstances où l’on doit généreusement exposer 
« et sacrifier sa vie, n'oublie pas que ton père lui-même t'invite à ne pas 
« chanceler. » 

Après avoir jeté ce coup-d’œil d'ensemble sur la vie du vénéré défunt, 
je passe à quelques détails sur ses premières années; puis je dirai quels 
furent ses travaux scientifiques et j’essaierai de les apprécier. 


( 450 ) 


Jean-François LATERRADE est né à Bordeaux le 23 Janvier 1784. Son 
père, professeur d'écriture, avait fait construire, aux abords de la Char- 
treuse, quelques échoppes qui devinrent le noyau d’une petite rue dans 
ce quartier alors presque désert. Ainsi qu’il arrive d'ordinaire en pareil 
cas, le nom du premier propriétaire-bâtisseur fut donné à cette voie : 
mais plus tard, lors du renouvellement de la nomenclature dans notre 
ville, on abrégea, sans doute par mégarde, le nom primitif, et son 
abbréviation seule (rue Terrade) subsiste aujourd’hui entre la rue Lam- 
bert et la place Mériadeck. 

Devenu directeur du Jardin des Plantes, le respect que lui inspirait 
la mémoire de son père suggéra quelquefois à Jean-François la pensée 
de demander une rectification évidemment juste; mais la répugnance 
qu’il éprouvait à appeler l’attention sur lui-même, l’humble modestie 
qui fut toujours un des traits dominants de son caractère, furent plus 
fortes sans doute que ce premier mouvement de piété filiale, et le désir 
qu'il ressentait resta enseveli dans l'intimité de la famille. Me sera-t-il 
permis, à moi qui suis appelé à remplir au nom de mes collègues les 
devoirs d’une piété pour ainsi dire filiale, — me sera-t-il permis de dire 
aujourd’hui que le nom de notre vénérable botaniste mériterait bien 
d’être conservé dans la topographie de la cité où ses leçons ont été sui- 
vies pendant plus d’un demi-siècle? C’est au Corps de Ville à prononcer, 
et j'aime à espérer qu’une si modeste couronne ne sera pas refusée à la 
mémoire d’un citoyen utile. 

Pardonnez, Messieurs, cette digression : je reviens à l’enfance qui 
précéda cette laborieuse carrière. La famille de Jean-François lui fit 
essayer de quelques professions manuelles, et son application réfléchie 
garantissait la réussite des premiers essais; mais une vocation qui ten- 
dait plus haut se fit écouter, et satisfaction fut donnée aux besoins d’une 
intelligence précoce : il entra, bien jeune encore, à l'École centrale. 
La connaissance du maniement des métaux, qu’il avait acquise pendant 
ses premiers travaux, contribua sans doute à développer son goût pour 
l’histoire naturelle , et ne fut pas perdue pour son professorat à venir : 
celle position honorable était déjà bien proche pour lui. 

Sa faible constitution, des infirmités très-prématurées et une brülure 
à la main, dont la cicatrice, visible jusqu’à la fin de sa vie, attestait 
pour lui l’impossibilité de manier le fusil, le firent exempter sans con- 
teste de la conscription. C'était l'an x1n (1805), et il avait à peine 
accompli sa vingtième année. Mais déjà ses qualités avaient été distin- 


( 451 ) 
euées ; car, à peine sorti de l’École centrale, il s’était vu appeler comme 
professeur de latin dans une pension de Libourne, et même, depuis 
plusieurs mois, on l'avait rapproché des fonctions de l’enseignement 
dans un établissement public. M. de Champeaux, proviseur du Lycée de 
Bordeaux, l’y avait appelé, le 16 Floréal an x11, en qualité de maitre 
d'études. 

Jean-François ne quitla pas tout-à-fait pour cela les bancs de l’école. 
De même qu’il s’y était assis avec zèle, avec bonheur, avec une assiduité 
exemplaire, pour suivre tes cours d'histoire naturelle du professeur 
Villers, de même aussi, — je crois pouvoir tirer cette conclusion du certi- 
ficat infiniment honorable que lui donna ce maître quelques années plus 
tard (1810), — de même aussi, dis-je, il dut continuer ses persévérantes 
études en suivant les cours, pour mieux se préparer à enseigner à son 
tour la même science. Ce certificat de Villers témoigne d’une application 
hors ligne et presque passionnée, de succès constants et sans rivaux 
dans l’École centrale , et laisse entrevoir la vocation spéciale de M. Later- 
rade pour la botanique, bien que les leçons qu’il essayait dès-lors à 
donner eussent pour objet les diverses branches des sciences naturelles. 
Il professait en même temps la littérature et les mathématiques. 

Les succès prédits par le maître ne firent pas faute au zélé disciple. 
IL avait déjà marqué sa place à la tête des hommes bien peu nombreux, 
il faut l'avouer ! qui s’occupaient de Botanique à Bordeaux. Il la garda 
et en conslata la possession en écrivant, le premier, dès l’année 1811, 
une Flore Bordelaise. Cette première édition fut dédiée au comte Lyc, 
maire de Bordeaux, et la manière dont le respectable magistrat accepta 
la proposition de cette dédicace, mérite d’être conservée : « Ne pouvant 
« considérer l'intention que vous me manifestez de me dédier l'ouvrage 
« utile que vous avez entrepris, que comme un hommage à l’Adminis- 
&tration qui doit aux sciences tout son appui, et des témoignages 
« publics de sa protection à ceux qui les professent, je ne puis me refuser 
« à ce tribut, et je le recevrai, Monsieur, avec sensibilité. » 

Dans ce premier jet de sa Flore, de même que dans la deuxième 
édition , publiée en 1821 , toutes les plantes indiquées pour la banlieue 
de Bordeaux, pour Blaye, Cubzac, Libourne et la Teste, ont été 
recueillies par l’auteur lui-même. Il n’avait encore ni élèves en position 
de faire des herborisations lointaines ou capables d’herboriser fructueuse- 
ment, ni collègues aux indications de qui il pût avoir confiance , — et 
il n’est pas superflu de remarquer que ce labeur tout personnel avait un 


( 452 ) 
mérite de plus à l’époque où les bateaux à vapeur et les chemins de fer 
n'étaient pas inventés. 

A mesure que ses forces déclinantes paralysèrent de plus en plus un 
zèle jadis si actif, les secours dont je viens de parler se multiplièrent 
autour du Floriste de la Gironde, et il en dut profiter pour ses 3° et 
4° éditions, qui parurent en 1829 et 1846. Son dernier ouvrage, publié 
en avril 1857, le Supplément à la 4° édition , ne précéda que de dix-huit 
mois la fin de sa vie (1). 

Peu de Flores départementales ont eu autant d'éditions, et la persé- 
vérance que mit l’auteur à perfectionner autant qu’il en avait les moyens 
cette œuvre modeste, eut sa récompense. M. Laterrade la recueillit avec 
bonheur, non-seulement dans l’estime profonde qu’inspiraient ses qua- 
lités personnelles, mais encore dans le témoignage solennel qui lui en 
fut donné, en 1847, par la Société royale d'Horticulture de Paris. Cette 
Compagnie, chargée par le Ministre de l’agriculture et du commerce 
« de décerner une médaille d’or à la personne qui lui paraïîtrait y avoir 
» le plus de droit par l’importance de ses travaux, jugea le professeur 
» Laterrade digne de cette flatteuse distinction, pour la publication de sa 
» Flore Bordelaise, » Ce fut en ces termes que M. le baron Sers, préfet 
de la Gironde, lui annonça l’honneur qu’il venait de recevoir. 

C’est ici le lieu, je pense, de parler de cette Flore, qui, peut-on 
dire, occupa de compte à demi avec notre Compagnie la vie entière de 
M. Laterrade. Le livre fut écrit pour rendre possible la création d’une 
société d'histoire naturelle ; la Société Linnéenne fut créée pour tra- 
vailler au perfectionnement du livre , et cette mission, qui ne sera pas 
accomplie avant un siècle peut-être, est le legs principal que nous te- 
nons de la main de notre vénéré fondateur. 

J’écrivais, il y a peu de mois, dans une occasion solennelle, à l'il- 
lustre académicien qui devait présider à Bordeaux la session extraordi- 
naire de la Société Botanique de France , et ma lettre contenait ces 
paroles, qui me semblent caractériser à la fois le professeur Laterrade 
et son livre : « Il ne faut pas qu’une solennité botanique ait jamais lieu 
» à Bordeaux sans que ce nom respecté y soit prononcé avec honneur, 


(1) Cette publication n’est pas le dernier écrit de M. Laterrade. Six mois ayant 
qu'il nous fût enlevé, j'obtins de lui, pour la session des Assises scientifiques de la 
Guienne, un Précis de l'Histoire de la Botanique à Bordeaux. Ce morceau, écrit 
avec la simplicité élégante qui lui était familière , n’a été imprimé qu'après sa mort, 
dans l'Annuaire de l'Institut des Provinces et des Congrès scientifiques pour l’année 
1559 (T. XI de la collection , p. 556). 


(453 ) 


» sans qu’un hommage de reconnaissance y soit rendu à l’homme qui a 
» su entretenir, dans un bien petit troupeau il est vrai, l’amour des 
» sciences naturelles, et grâce à qui la Société Botanique , en arrivant 
» dans notre ville , y trouve non-seulement les fondements, mais les as- 
ÿ sises déjà multipliées d’une Flore locale, et des auditeurs empressés, 
» pris ailleurs que dans les cours de la Faculté des Sciences. » 

Ces paroles, je le répète, caractérisent l’œuvre de Jean-François 
Laterrade. Tous, tant que nous sommes, antérieurs à l'institution des 
Facultés, nous devons à son zèle ce que nous sommes comme natura- 
listes; et quant à son livre, s’il n’a pas doté la Gironde d’une Flore lo- 
cale qui soit au niveau actuel de la science, c’est qu’il faut qu’un tel 
édifice soit élevé sur de robustes fondements, et qu’il est de l’essence 
des fondements de demeurer ensevelis sous les assises plus ornées qui 
couronneront un jour le monument. Rendons cet honneur, ou plutôt 
cette justice à l’auteur de la Flore Bordelaise : il a fait tout ce qu’il a 
pu, et tout s’opposait à ce qu'il püt faire davantage. Père et soutien, dès 
sa jeunesse, d’une famille nombreuse , Laterrade adjoignit bientôt à ses 
huit enfants et à leur mère , sa propre mère qu’il entoura de tant d’a- 
mour et de vénération, et une autre parente , l’un des anges terrestres 
qui entourèrent à leur tour sa vie défaillante de tant de soins et de dou- 
ceurs ! Il eut, — et je le dis à sa gloire, — il eut à lutter corps à corps 
et chaque jour contre les souffrances physiques et les rigueurs de la for- 
tune, pour remplir le premier des devoirs de l’homme, celui du père de 
famille. Les voyages lointains, les grands établissements scientifiques, 
les collections classiques, lui demeurèrent toujours interdits. Les livres, 
qui, jusqu’à un certain point, peuvent remplacer tout cela, — les livres, 
qu’il aimait tant, ne pouvaient entrer que rares et après de tristes ex- 
clusions , dans cet humble laboratoire où leur séjour eût été si cordiale- 
ment fêté et si consciencieusement utilisé. À ces difficultés il en faut 
ajouter une autre : sa vue, fatiguée par un travail incessant de jour et 
de nuit, s’émoussa de bonne heure ; elle ne permit plus à sa sagacité de 
suivre, par des observations délicates, les rapides progrès d’une science 
dont son intelligence avait très-bien saisi l’ensemble , et dont son esprit 
réfléchi n’eût pas laissé perdre les acquisitions successives. « Quand on 
» cause un peu de temps avec lui, » me disait un illustre botaniste an- 
glais, le regrettable et généreux Webb, « on voit qu’il est bien plus bo- 
» taniste qu’on ne le croirait au premier abord. » Et en effet, bien loin 
de faire — comme nous tous, hélas ! — quelque parade de sa science en 


( 454 ) 
présence d’un maître , il ne pensait qu’à ne pas perdre l’occasion d’ap- 
prendre quelque chose, et sa modestie sincère et candide regagnait à 
toutes jambes le banc des écoliers, pour qu'on ne se souvint pas qu’il 
professait tout-à-l’heure et professerait encore un instant après. 

De cette combinaison du caractère personnel, de la position, de la 
santé et des devoirs multipliés du professeur, il résulta ceci, qu’il n’eüt 
jamais rien fait s’il n’y eût été invinciblement poussé par cette sorte de 
noble passion dont parlait son maître Villers dans le certificat que j'ai 
cité. IL obéit à cette passion, mais son œuvre garda l'empreinte néces- 
saire des contingents dont sa production fut entourée. La Flore Borde- 
laise avait été conçue comme une œuvre d'utilité locale ; elle remplit le 
but de son auteur. Celui-ci l’écrivit, non pour de riches amateurs, — il 
n’y en avait point dans notre pays, — non pour une jeunesse brillam- 
ment élevée et suffisamment allaitée de grec et de latin, — elle s’amuse 
ici à tout autre chose qu’à collecter l’herbe des champs ; — mais pour 
de pauvres jeunes gens qui cherchent à se faire un état comme herbo- 
ristes, pharmaciens, pépiniéristes, officiers de santé ; tout au plus pour- 
ront-ils , si la fortune leur sourit, aller chercher quelque jour à Paris, 
avec une instruction plus étendue, le bonnet de docteur en médecine. 
Dans cette sphère modeste, la seule qu’il fût alors raisonnable d’em- 
brasser à Bordeaux, les diagnostiques latines, la taxonomie brodée d’hel- 
lénisme, les fines observations d'organisme comparé eussent fort mal 
fait leur chemin du cabinet de l’auteur aux presses de l'éditeur, plus mal 
encore de là à la bibliothèque de l'acheteur. 

Les descriptions furent donc écrites tout simplement en français, et 
détaillées tout juste à ce point de servir à distinguer le nombre d'espèces 
de chaque genre alors connues dans la circonscription. S'il en eût été 
autrement, je ne crains pas de dire que la première édition n’eût pas été 
épuisée..., et la Flore Bordelaise en a eu quatre, du vivant de l’auteur. 

Chacune d’elles augmenta notablement le nombre des espèces obser- 
vées, comme le prouvent surabondamment les quatre chiffres tolaux 
qui les résument : 800 pour la première édition et son supplément de 
1817 dans un rayon de 15 kilomètres, 4611 pour la deuxième qui fut 
départementale, 2,065 pour la troisième, et enfin 2,411 pour la qua- 
trième, y compris son supplément. 

Certes, et quel que soit le nombre des découvertes spécifiques que 
nous réserve encore l’étude de la Cryptogamie qui n’a jamais dit son 
dernier mot dans aucun pays, j'ai bien eu raison de dire que l’ouvrage 


( 455 ) 
de M. Laterrade renferme non-seulement les fondements, mais les assi- 
ses déjà mullipliées d’une Flore locale, telle qu’on l’entendrait aujour- 
d’hui ! 

Les deux premières éditions furent rédigées d’après la méthode 
sexuelle, que l’auteur conserva encore dans la troisième, mais de 
manière à former des groupes de familles qui préparaient insensible- 
ment les élèves à l’adoption de la méthode naturelle. Celle-ci fut 
employée uniquement dans la rédaction de la quatrième édition ; mais, 
pour venir en aide à la faiblesse traditionnelle des conscrits de la science 
dans notre Sud-Ouest, le bon professeur voulut leur permettre de se 
raltacher encore par quelque fil à la facilité souvent plus apparente que 
réelle de la méthode linnéenne. Il divisa, selon le nombre des étamines, 
chacune des sous-classes phanérogamiques de Candolle en trois groupes 
(Polyanthérées, Métrianthérées, Oliganthérées), selon qu’elles ont plus 
de dix, plus de six ou un nombre plus faible de ces organes floraux. 
Puis, les familles ici peu nombreuses de chaque sous-classe se trouvant 
facilement différenciées par d’autres caractères de l’inflorescence, l'élève 
pouvait arriver assez sûrement à déterminer le genre. 

Ces groupements partiels ne sont pas la seule preuve de la tendance 
qui portait Laterrade à s’élever jusqu'aux labeurs de la Botanique systé- 
matique. Pendant dix ans au moins, il s’est occupé avec suite de la 
charpente d’une classification générale des végétaux, fondée sur les 
enveloppes extérieures des organes de la reproduction, et il en a laissé le 
manuscrit presque achevé. Il en développa les bases dans le Mémoire qu’il 
présenta pour son admission au sein de l’Académie royale des sciences, 
belles-lettres et arts de Bordeaux en 1821. Mais l’exquise délicatesse de 
sa conscience scientifique ne lui permettait dès-lors d'accorder à cet 
arrangement artificiel que le nom peu rassurant de système. Elle lui 
faisait en même temps reconnaître que s’il est permis au savant de 
caresser un rève et de prouver, par son adresse à manier le sujet qu’il 
y trouve, que ses connaissances sont à la fois étendues, variées et soli- 
des, il ne doit pas céder à la tentation de divulguer un travail qui ne 
satisferait peut-être que la curiosité sans atteindre à une utilité réelle. 
Le système périanthiel ne fut donc jamais pubtié. Le but de l’auteur se 
trouvait d’ailleurs rempli sans qu’il en vint là, puisqu'il avait montré à 
l'Académie qu’en le faisant asseoir parmi ses membres, elle s’adjoin- 
drait un homme véritablement versé dans la science des végétaux. 

Un des manuscrits les plus pratiquement utiles que nous ait laissés 


( 456 ) 

M. Laterrade, est le relevé exact, écrit jour par jour, de ses herborisa- 
tions depuis 1813 jusqu’en 1856. Hormis le nom des élèves qui sui- 
vaient régulièrement son cours, on y trouve mentionnée, pour chacune 
d'elles , le désignation des personnes avec lesquelles il avait fait l’excur- 
sion. On peut retrouver dans ces notes sommaires la date première de 
l'observation de bien des plantes rares de notre circonscription. L’épo- 
que oubliée du passage à Bordeaux de quelques savants célèbres s’y 
trouve aussi tout naturellement consignée d’une manière authentique, 
et j'ai pu dater ainsi la récolte d’un bon nombre d'échantillons d’her- 
bier qui, dépourvus de cette indication, étaient loin d'offrir le même 
intérêt. 

Jusqu’en 1844, le zélé professeur fit des excursions dans tous les mois 
de l’année. Seulement , leur rayon se raccourcissait peu à peu. En 1855 
et 1856, il fallut non-seulement les borner à la belle saison, mais 
encore les réduire à de lentes et pénibles promenades dans le Jardin 
des Plantes. C’était du moins encore professer sur le terrain et d’après 
des plantes vivantes et en place. On le conçoit facilement, c'était beau- 
coup encore ; c'était une partie essentielle de la vie pour un homme qui 
depuis plus d’un demi-siècle, n’avait pour ainsi dire pas passé un jour 
sans donner des enseignements sur une science qu’il aimait si passion- 
nément. Il y avait près de trente ans qu’il faisait ces cours d’une 
manière scrupuleusement régulière, chez lui depuis 1818 jusqu’en 
1842 , à ütre de cours particulier, et au Jardin des Plantes depuis qu’il 
en fut directeur , à titre de cours municipal, — jusqu’au moment où fut 
commencée la translation du Jardin des Plantes à l’ancien Jardin Public. 

C'était en 1855, et nul n’a pu mesurer ce qu’endura de douleurs inti- 
mes et scrupuleusement concentrées cet homme vénérable , quand il vit 
démolir pièce à pièce le Jardin qu'il avait tant aimé et qui, sur le point 
de reprendre, en changeant de local, une nouvelle jeunesse, une nouvelle 
vigueur , semblait — pour lui seul — quitter sa demeure afin de le 
précéder dans la tombe! Ah! certes, Autorité municipale avait apporté 
les ménagements les plus délicats, les plus timorés peut-on dire, dans 
la préparation d’un remplacement que rendaient inévitable les infirmités 
toujours croissantes du professeur, — et rien n’est touchant, par l’in- 
tention qui les a dictées, comme les lettres qui lui venaient de l’Hôtel- 
de-Ville ! Elles le rassuraient sur la conservation intégrale d’un traite- 
ment qui lui était si nécessaire, sur la continuation d’un professorat qui 
lui était devenu si cher, et d’un titre qu’il avait si noblement mérité en 


( 457 ) 
refusant de l’accepter du vivant d’un prédécesseur qui n’était pas démis- 
sionnaire. 

Je ne reproduis pas ici cette admirable page de la vie de M. Later- 
rade : elle est au-dessus de la sphère de la science ; elle appartient à la 
gloire du chrétien. J’ai eu le douloureux honneur de la proclamer là où 
son souvenir était le mieux à sa place, au pied de la Croix, au bord de 
la tombe béante, en face de l’immense assistance qui venait honorer le 
cercueil d’un savant si digne du titre d'homme de bien. Il y avait là des 
membres de cette Administration municipale qui, depuis trois ans, 
avait tant fait pour ménager la douleur au noble vieillard , etils pouvaient 
s’y montrer sans regret! Mais enfin, il leur avait fallu assurer l’avenir 
de l'établissement et de l'enseignement scientifique. Ils avaient appelé 
de la capitale un botaniste dont le nom, déjà, était entouré d’une juste 
célébrité (1); et, d'accord avec sa vieille et délicate affection pour 
M. Laterrade , ils ne le lui avaient présenté que sous les titres modestes 
de Directeur-udjoint, de professeur-adjoint, chargé de l’enseignement 
pendant les excursions, chargé aussi d'opérer la translation du Jardin 
sans interruplion des cours et de la surveillance du directeur dans l'an- 
cien local, et sans préoccupation, pour lui, de l’installation nouvelle. 

Sensible comme il le fut toujours aux moindres prévenances de l’es- 
time et de l'affection qu'il méritait si bien, M. Laterrade n’eut pas la 
pensée de se plaindre d’une mesure dont l’Espérance, — charmeresse si 
souvent trompeuse des défaillances de notre vie, — ne pouvait cacher 
tout-à-fait à son austère raison l’impérieuse nécessité. Cette nécessité 
même causait sa douleur, car l’idée de ne pas remplir complètement les 
devoirs de sa charge aurait été pour lui, s’il avait pu la concevoir tout en- 
tière, incompatible avec la jouissance de leur rémunération. Aussi disait- 
il, dans les très-rares effusions de l’intimité le plus étroite : « Je souffre 
« bien, je souffre plus qu’on ne pense! Voilà qu’on détruit ce jardin. Je 
« continue d’y travailler encore, cependant »..... — Oh! oui, il y tra- 
vaillait dans la mesure et même au-delà de la mesure de ses forces, car 
la devise des Saints et des vaillants était sa règle pratique : Vivons tou- 
jours comme si nous devions mourir bientôt, et travaillons toujours 
comme si nous devions vivre longtemps! 

« J'avais si bien rangé le jardin officinal ! »— il avait établi ce compar- 
timent spécial à l’extrémité Ouest du local en 1843, et c’était une des 


(1) M. Durieu de Maisonneuve , membre de la Commission scientifique de l'Algérie. 


( 458 ) 


parties les plus utiles et les plus fréquentées de l'établissement ; — « je 
« l’avais si bien soigné! » continuait-il. € Et maintenant on ne s'occupe 
« plus des améliorations d’ici; les arbres sont abattus ; les plantes viva- 
« ces emportées..… [rai-je au Jardin-Public, moi? On ne m’en parle 
« point... Si je continue à être dans l’état où je suis, il est évident 
« qu'on ne m'y enverra pas... Je n’ai pas le temps de service requis 
« pour espérer une retraite... En vérité, si cet état de choses devait 
« durer longtemps encore, je n’y tiendrais pas,... j'aimerais mieux 
« donner ma démission ! ... » 

Sa démission! Il ne songeait pas, le bon vieillard, que l'Administration 
municipale ne l'aurait jamais acceptée !.… Il la voyait isolée, forcée par 
les exigences de sa délicatesse, et la démission avec les infirmités, 
c'était le dénüment ! 

J’ai voulu consigner ici ces tristes paroles et le souvenir des angoisses 
intérieures d’un cœur si doux pourtant et si résigné. Je l’ai fait, parce 
qu’au milieu de ces attendrissements paternels pour l’objet d’une longue 
sollicitude, au milieu de ces aveuglements jetés par la vie qui s’en va sur 
ce qui nous resle d’aptitudes et de forces , l’expression d’une telle dou- 
leur est à la fois à l’honneur de celui qui la ressentit, à l'honneur de 
l'Administration qui la respecta et l’endormit pieusement jusqu’à la 
dernière heure; à l’honneur enfin de celui qui sut ne se montrer que 
comme ami dévoué, collègue empressé et plein de déférence, sans 
jamais laisser entrevoir au vieillard mourant la présence d’un successeur. 

Après vous avoir entretenus, Messieurs, de la fidélité de notre bon 
Directeur à remplir les devoirs commandés par sa position, je dois rap- 
peler aussi celle avec laquelle il a rempli les devoirs qu’il s'était imposés 
dans l’intérêt de la fondation qui lui fut si chère, de celle à laquelle il 
dut la meilleure partie des jouissances que la Providence lui accorda 
comme adoucissement à ses peines. Ce n’est pas pour vous, Messieurs 
et chers collègues, que je dois dire ici que M. Laterrade fonda la Société 
Linnéenne de Bordeaux, le 25 juin 1818, conjointement avec le pro- 
fesseur Dargelas qui la présida le premier, avec le docteur Teulère qui 
obtint plus tard le même honneur, avec quelques-uns, enfin, des élèves 
les plus avancés de son Cours. Ce n’est pas pour vous que je dois rappe- 
ler le règlement sobre et sage qu’il lui donna et qui, depuis, a servi de 
modèle à ceux de bien des Sociétés aujourd’hui florissantes. Cette sagesse 
porta ses fruits, et au bout de peu d'années, grâce au zèle infatigable du 
Directeur, grâce à la persévérance inouïe avec laquelle il entretenait une 


( 459 ) 


correspondance très-étendue , la Société Linnéenne avait établi douze 
sections, non-seulement en France, mais à l'étranger cet jusqu’au-delà 
des mers qui baignent les autres parties du monde. Pendant ce temps, 
la Société était autorisée par ordonnance royale du 15 juin 1828; le 
Recueil de nos Actes, aujourd’hui parvenu à son vingt-deuxième volume, 
était fondé; le Préfet de la Gironde, baron d’Haussez, obtenait pour 
nous les premières allocations du Conseil général ; la Mairie acceptait de 
nos mains et mettait en vigueur le règlement constitutif d’un Marché aux 
Fleurs : elle construisaït ainsi non-seulement le berceau de la Société 
d'Horticulture, mais encore le berceau de cette honnête et utile indus- 
trie qui donne aujourd’hui l’aisance à six cents familles de jardiniers, de 
maraîchers et de pépiniéristes. | 

Tous ces résultats, obtenus par la fondation de la Société Linnéenne et 
dûs à la confiante estime qu’inspirait son Directeur, étaient autant de 
sujets de joie et d’orgueil paternel pour ce cœur si dévoué au bien. Mais 
aussi et par la même raison, grande fut sa douleur lorsqu’en 1828 , un 
ministère qui s’inquiétait de détails sans importance et sans danger, tan- 
dis qu’il laissait s’accroître et grandir chaque jour les causes actives et 
trop efficaces d’une ruine dès-lors bien prochaine, supprima d’un trait 
de plume les sections alors existantes de la Société Linnéenne et nous 
défendit de nous attacher désormais des collègues par des liens aussi di- 
rects. Malgré son affliction, M. Laterrade ne se permit pas la moindre 
plainte, parce que le respect de l'autorité, respect profond et sincère 
comme toutes ses convictions, formait l’un des traits principaux et, — 
je ne le crierai jamais assez haut dans le siècle d’insoumission et de ré- 
volte où nous vivons, — l’un des traits les plus estimables de son beau 
caractère. 

Il en est un autre que je veux louer : c’est la constance et l’uniformité 
qu’il portait dans la poursuite de ses résolutions mürement réfléchies : 
c’est là l’un des grands éléments de réussite dans les entreprises hu- 
maines, et je ne crains pas de dire que la fidélité aux petites choses y 
entre pour beaucoup. Vous savez, Messieurs , quelle fut la sienne pour 
l’observance des détails du règlement, pour la régularité des séances, 
celles du Conseil surtout, auxquelles nous trouvions parfois qu'il atta- 
chait une importance trop grande; mais c’était là une partie, une grande 
partie des jouissances que ses infirmités lui permettaient dans ses der- 
nières années, et votre pieuse assiduité, Messieurs et chers Collègues , 
les a prolongées autant qu’il a été possible. On trouvait d’ailleurs une 

Tome XXII. 45 


( 460 ) 


sorte de plaisir douloureux à semer de quelques distractions des soirées 
que suivaient des nuits si pénibles, et ces distractions, il s’y livrait avec 
la candeur et la simplicité d’un enfant. On eût dit, à le voir sourire, que 
l'avenir sur la terre comptait encore pour quelque chose dans ses pen- 
sées, car il fut doux envers la mort qui venait à lui lente mais inexo- 
rable, comme il avait toujours été doux envers les rigueurs de la vie. On 
n’a jamais su ce qu’il éprouva de peine quand il lui devint impossible, à 
lui qui ne pouvait plus monter en voiture, d'assister à la Fête Linnéenne; 
ce fut en 1853 qu’il y dut renoncer, et depuis trente-cinq ans il n’en 
avait manqué qu’une... un de ses fils venait de mourir ! Chaque fois 
qu’il était contraint de resserrer le cercle de son activité, ce devait être 
pour lui une douleur nouvelle. Il ne put plus se rendre à pied aux 
séances, et la Société ne pouvait toujours se rendre auprès de lui. Après 
la privation des séances, vint celle des promenades au Jardin avec ses 
élèves, puis celle de son Cours que l’autorité crut devoir interdire avant 
les vacances et en supprimant la distribution des prix, à cause des tra- 
vaux de la translation... Autant de coups lentement mortels, qui re- 
tranchaient sa vie par parcelles, multipliant ses douleurs sans faire 
vaciller sa constance ou lui suggérer la pensée d’un murmure ! 

Enfin , Dieu eut pitié de tant de souffrances ; il vit (nous pouvons du 
moins l’espérer) que la mesure des mérites était comble ; il ouvrit sa 
main divine, et la couronne du prédestiné de sa miséricorde déscendit 
sur l’âme qui s’envolait ! 

La Compagnie qui doit son existence au chef dont la mémoire lui sera 
toujours chère, a obtenu de ses enfants l’autorisation de déposer sur le 
tombeau de famille un hommage solennel et durable. L'inscription sui- 
vante y est gravée en noir sur une table de marbre blanc : 


LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE DE BORDEAUX 
A J.-F. LATERRADE, 
SON FONDATEUR EN 1818, 
SON DIRECTEUR PENDANT 40 ANS ET © MOIS. 
ELLE DÉPOSE SUR SON TOMBEAU 
CET HOMMAGE DE PROFONDE DOULEUR, DE RECONNAISSANCE 
ET DE VÉNÉRATION FILIALE. 
1858. 


In memorid ælernà erit juslus. 
Ps. #11, v. 6, 


OBSERVATIONS 


SUR 


LA PISCICOULTURE 


LT SUR LES 


RÉGLEMENTS QUI RÉGISSENT LA PÊCHE 


Par M. ze Dr A. BAZIN, PRÉSIDENT HONORAIRE 


Professeur à la Faculté des Sciences, etc. 


—— 2025 — 


Notre dernière exposition a prouvé que l’industrie et lés arts sont en 
progrès à Bordeaux; que cette population toujours spirituelle et, quand 
elle le veut, si intelligente, ne se borne plus à faire produire à la vigne 
ce nectar que nous eussent envié les anciens habitants de l’Olympe; et 
notre exposition horticole, non moins riche que variée, a fait voir que 
nos horticulteurs , placés sous le patronage des grâces et de la beauté, 
savent mériter les plus riches couronnes de Flore et de Pomone. 

Améliorer notre existence , l’adoucir, l’embellir par l’industrie, les 
arts et surtout par l’agriculture et l’horticulture, en forçant la terre à se 
couvrir d’abondantes récoltes, en transformant l'arbre et le fruit, en 
métamorphosant la fleur sauvage au point d’en faire l’orgueil de nos 
parterres , c’est beaucoup : cela nous prouve que l'esprit qui opère ces 
merveilles est loin de connaître les limites de sa puissance. Mais se bor- 
nerait-il à l'exercer sur la terre ? L'homme se contenterait-il de voguer à 
la surface des eaux et d’en capturer au hasard les habitants? — La ques- 
tion posée a été aussitôt résolue. En vain les habitants des eaux nous ont- 
ils demandé grâce, en vain nous ont-ils crié : 


« Jusqu’en nos grottes profondes 
» Pourquoi venir nous troubler ? 
» Sur la terre et sur les ondes 
» Contentez-vous de régner ; » 


filets , engins , appâts de tout genre et de toute forme ont été bientôt in- 
ventés ; et, depuis longtemps, poissons, crustacés, coquillages , tout , 
jusqu’au léviathan des mers, est devenu pour l’homme une facile proie. 

Pendant longtemps le pêcheur n’a su que détruire; pendant longtemps 
la remontrance du pauvre carpillon , qui promet de devenir grand, a été 


( 462 ) 
vaine et malheureusement l’est encore. Pourtant les leçons du passé ne. 
nous ont pas manqué : les Grecs et les Romains , si savants dans l’art 
d’exciter leurs appétits et si habiles à les satisfaire, tenaient en grande 
estime un certain nombre de poissons, de crustacés et de coquillages. 

Les Romains avaient des réservoirs , des piscines , où ils réunissaient 
à grands frais les poissons les plus recherchés, et les y nourrissaient avec 
un luxe qui allait, dit-on, jusqu’à leur faire commettre des actes de 
cruauté. Les pares à huîtres du lac Lucrin ont immortalisé Sergius Orata. 
Le mulle (mullus barbatus), que nous nommons rouget à Bordeaux, 
quand il atteignait de grandes dimensions, n’avait plus de prix; à un 
pied de longueur, il valait son poids d’argent et plus. L’esturgeon rece- 
vait les honneurs d’une espèce de triomphe des riches habitants de la 
ville éternelle : les descendarits de Romulus, pour le transporter dans la 
salle du festin, se couronnaient de fleurs et se faisaient précéder de 
joueurs de flûte. Apicius affrontait les dangers de la mer et visitait les pla- 
ges de l’Afrique pour se procurer des écrevisses d’une grande réputation. 

On le voit, la pisciculture pourrait avoir ses historiens, comme elle a 
eu ses poètes à Athènes et à Rome. Malheureusement, au lieu de faire 
des progrès, comme la plupart des autres branches de la science antique, 
à partir de l’époque de la Renaissance , l’art de cultiver les poissons, de 
multiplier les bonnes espèces, de les perfectionner en volume et en qua- 
lité, a été oublié ou négligé pendant longtemps encore, 

Cependant, le Lucrin se trouve remplacé par le lac de Fusaro (l’an- 
cien Achéron), dont les huîtres sont si recherchées ; et l’étang ou plutôt 
la lagune de Comacchio devient par ses muges, et surtout par ses an- 
guilles, une source de bien-être et de fortune pour les habitants de la 
ville, que l’industrie de la pêche y a fait naître et prospérer au point de 
compter aujourd’hui plus de 7,000 habitants jouissant d’une santé telle- 
ment superbe, que l’on a pensé que l’influence d’Amphitrite n’y était pas 
étrangère. Nous pensons comme M. le professeur Coste, à qui nous de- 
vons la connaissance de l’industrie de Comacchio, que cet état doit être 
attribué non pas à un régime prétendu aphrodisiaque, « mais à une 
» vigueur normale qui n’a, pour se partager, ni les inquiétudes des 
» transactions commerciales, ni la concurrence de l’ambition, ni les 
x agitations de la politique, etc, » 

Cette lagune, divisée en champs ensemencés tous les ans avec le fretin 
des muges et la montée d’anguilles, que nous détruisons si stupidement 
jusqu’à ce jour, entretient dans un état de vigueur, de bien-être et d’ai- 


( 463 ) 
sance non-seulement la ville de Comacchio, mais verse encore annuelle- 
ment un demi-million dans le trésor du Saint-Père. 

Il y a donc là, exposé aux regards de tous, depuis de nombreuses an- 
nées, un exemple à suivre... Il a été suivi, au moins en partie, par 
un certain nombre de propriétaires riverains du bassin d'Arcachon : 
MM. Boissière , Douillard , Javal , Festugière , etc., ont reçu dans leurs 
réservoirs le fretin des muges, qui s’y développe; la partie basse du 
bassin se couvre de ces excellentes huîtres de gravelte qui surpasseront 
bientôt en qualité, sinon en quantité, les meilleures huîtres connues. 
Nous pouvons donc espérer de voir sous peu à nos portes, réunis, Co- 
macchio et Fusaro. 

Mais, pour cela, il faut de la persévérance , afin de vaincre les ob- 
stacles d’une rivalité inintelligente ; il faut surtout l’appui du gouverne- 
ment qui est le propriétaire des eaux qu’il s’agit de rendre fertiles de 
stériles qu’elles sont ou tendant à le devenir. Cet appui ne peut manquer 
aux industries qui ont pour but l'amélioration progressive de l’homme 
au physique et au moral, par la vie à bon marché, par le développe- 
ment et l'élévation de l’intelligence qui en est la conséquence. 

Au reste, cet appui ne s’est pas fait attendre ; sans cela, les industries 
naissantes du bassin d'Arcachon n’existeraient plus. 

La pisciculture , nous ne l’avons pas dit, mais tout le monde le com- 
prend , considère les plages de la mer, les lacs , les étangs, les fleuves, 
en un mot les eaux, comme de vastes champs à ensemencer, et qui 
donneront des récoltes d'autant plus riches et plus abondantes que la 
semence aura été mieux choisie, se sera développée sous des influences 
plus ou moins favorables, et que la moisson aura été faite en temps op- 
portun. Tout est là. Ainsi : 

4° Préparation et aménagement des eaux et des plantes qui y végètent ; 

2° Choix des semences ou plutôt des espèces qui conviennent à telles 
eaux et non à d’autres ; td 

3e Époques des semailles ou de l’empoissonnement soit par du fretin, 
comme la montée d’anguille ou de lamproie, de muge ou de turbot, soit 
par le produit de l’incubation artificielle des œufs de différentes espèces, 
comme le saumon , la truite saumonée, etc. 

Je ne puis ici, on le comprend, entrer dans tous les détails que 
comporte un sujet d’un si haut intérêt et, nous l’espérons , d’un si grand 
avenir. Nous sommes convaincu que notre savant ami, M. le professeur 
Coste , se tenait en-deçà des limites du possible lorsqu'il nous affirmait 


( 464 ) 

l’autre jour, après avoir consacré plusieurs jours à étudier le, bassin 
. d'Arcachon , que, rien qu'avec l’industrie des huîtres, on pourrait en 
retirer près de 3 millions de revenu, en vendant les gravettes 25 francs 
le mille. | | 

Jusqu'à ce jour, la pisciculture est à peine un mot en France. Il n’en 
est pas ainsi chez nos voisins : en Angleterre, mais surtout en Écosse et 
en Irlande, la somme des impôts prélevés sur les établissements de 
pêche destinés exclusivement au saumon et à la truite saumonée ; s’é- 
lève à 18 millions, et cet impôt sert presque uniquement à rémunérer les 
fonctionnaires chargés de faire exécuter les lois qui régissent les pêches. 

Peut-être que si l’on consultait les actes de nos rois, on y trouverait 
aussi des ordonnances protectrices ; mais aujourd’hui, et depuis Colbert, 
la destruction du saumon et de la truite saumonéeé èst permise pendant 
toute l’année. Chez nos voisins, au contraire, nous voyons la loi, d’ac- 
cord avec l’intérêt bien entendu de tous, ne cesser de prohiber la pêche 
des salmonidés pendant une grande partie de l’époque de la fraye : en 
4424, le parlement d'Écosse défend la pêche du saumon et de la truite 
saumonée du 15 août au 30 novembre ; en 1696, cette pêche est prohi- 
bée à partir du 15 septembre jusqu’au 15 février. Les délinquants; outre 
la confiscation des instruments et engins de pêche, sont condamnés à 
une amende qui ne peut être moindre qu’une livre sterling ou 25 francs, 
ni excéder 40 livres sterling ou 250 francs. Et ce n’est pas seulement la 
capture du saumon qui est défendue pendant l’époque de la fraye ,1c’est 
la capture des œufs, de l’alevin, du fretin et enfin du saumoneau , connu 
de nos pêcheurs sous le nom de accon. Il est également défendu de 
troubler les fonds où le saumon se trouve à l’époque de la fraye, et d’é- 
tablir dans les eaux des barrages ou obstacles quelconques capables d’em- 
pêcher les saumons ou truites de remonter les fleuves ou rivières à la 
même époque. ; xioi 

Nous devons à la bienveillance de M. Scott, consul de S..M: B. ; les 
documents que nous venons de faire connaître ; et, parmi ces docu- 
ments, il y a quatre actes de S. M. régnante : 1° pour modifier l’époque à 
laquelle la pêche du saumon et de la truite saumonée est défendue (1843); 
29 pour la protection des pêcheries de saumon en Écosse (1844) ; 3° pour 
améliorer, en vue de la conservation du poisson, les instruments de 
pêche dans les rivières et sur les côtes d'Irlande (4856). Dans cette der- 
nière loi, on trouve des réserves en faveur de la liberté de se mouvoir 
pour les salmonidés ; on exige l’établissement d’escaliers qui leur per- 


(465 ) 


mettent de franchir les barrages; les conditions à remplir pour établir 
des bancs d’huitres sur les plages de la mer y sont indiquées, etc. 
4° Enfin, l’article 45 est ainsi formulé : 

« Et qu’il soit décrété que personne ne tuera, ne prendra ni ne dé- 
» truira , dans aucun lac ou rivière , aucune espèce de truite ou de sau- 
» mon entre le vingt-neuvième jour de septembre et le dernier jour de 
» février de l’année suivante ; qu'aucun treillage, trappe ou engin quel- 
» conque, filet de fond , filet à traîner ou d’une forme quelcoñque propre 
» à capturer saumons ou truites, ne sera mis en usage, dans aucun 
» lac ou rivière fréquentés par les salmonidés, à partir du vingt-neu- 
» vième jour de septembre jusqu’au vingt-huitième jour de février de 
» l’année suivante, ou pendant telles autres époques particulières qui 
» peuvent être ou avoir été fixées pour certains lacs ou rivières , par les 
» syndics des pêcheries, en ce qui concerne la pêche des salmonidés, » 

On comprend maintenant que la pêche , et surtout celle du saumon, 
soit pour les riverains une source de richesses’; on conçoit que, grâce à 
de pareilles lois, ces excellents poissons abondent dans le royaume de la 
Grande-Bretagne, et surtout en Écosse, au point d’y être aussi com- 
muns que la merluche à Bordeaux. 

Mais, me dira-t-on, les lois que vous vénez de citer sont excellentes 
en Angleterre, tandis qu’elles sont inapplicables chez nous qui vivons 
sous le régime de l'inscription maritime. La pêche, qui appartient aux 
propriétaires riverains en Angleterre, a été abandonnée chez nous aux 
marins, et sans doute vous ne pouvez avoir l'intention de dépouiller ces 
hommes d’une propriété, ou du moins d’un revenu difficile à obtenir, 
qu’ils payent à l’État par de rudes travaux, en s’exposant à toute espèce 
de dangers ; souvent de leur sang? — Non, sans doute. Mais, de ce que 
les plages de la mer et les eaux de nos fleuves, jusqu’au point où la 
marée monie, sont, au point de vue de la pisciculture, le domaine des 
hommes de mer, s’ensuit-il qu’ils aient le droit dé les dépeupler ? s’en- 
suit-il qu’ils aient le droit, en s’appauvrissant , de faire régner la disette 
là où il serait si facile de faire régner l'abondance ? Évidemment non. 
Les marins, tous ceux qui font partie de l'inscription maritime, ne sont 
qu’usufruitiers ; l’État a non-seulement le droit ; mais le devoir de dé- 
terminer et de leur imposer les règles qu’ils doivent suivre dans l’exploi- 
tation de ses domaines. Aussi le pêcheur, qui ne trouve plus rien de 
bon à prendre ni à vendre, n'est-il pas seul à plaindre et à blâmer. La 
loi, en lui permettant de capturer pendant toute l’année tous les pois- 


( 466 ) 


sons qui se trouvent dans la mer, les fleuves et rivières et leurs affluents 
jusqu’au point où la marée se fait sentir, à l’exception de la sardine , de 
l’éperlan et du trogue (1); en lui permettant de capturer l’esturgeon, le 
saumon et la maigre dès qu’ils ont atteint 27 centimètres ou 9 pouces de 
longueur de l’œil à la naissance de la queue, et le turbot à 29 centi- 
mètres (2), la loi, dis-je, qui a permis au pêcheur de détruire les pois- 
sons presque à l’état de fretin , a autorisé par cela même la destruction 
de ces excellentes espèces. 

Nous ne songeons donc pas à diminuer les ressources des pêcheurs, 
qui sont presque toute leur vie au service de l’État; au contraire, nous 
pensons qu’en entrant dans ces vues, qui sont aussi celles du savant 
M. Coste, et qui trouveront peut-être bientôt un puissant appui, nos 
pêcheurs pourront un jour voir régner le bien-être chez eux et autour 
d'eux, en transformant leur misérable profession en une grande indus- 
trie. Alors on ne donnera plus la montée ou fretin d’anguille, ni celui 
de la lamproïe, aux poules, aux canards, aux porcs. Ces actes d’une 
stupide sauvagerie seront défendus et punis ; les salmonidés et les bonnes 
espèces de poissons ne pourront être mis en vente que lorsqu'ils seront 
adultes ou en âge de se reproduire. 

Un seul mot de plus sur la pisciculture au moyen de la fécondation 
artificielle, et surtout de l’incubation artificielle. C’est du nouveau, 
dit-on, c’est de la théorie; on voudrait voir pour croire. Rien de mieux; 
le doute est le commencement de la sagesse. Je ne parle pas des Chi- 
nois ; c’est trop loin ! Mais tout près de nous, à Pépoque où le célèbre 
abbé Spallanzani faisait ses intéressantes expériences, un habitant du 
Hanovre parvint à faire éclore, dans son cabinet, des œufs de poissons; 
le gouvernement d'Angleterre le récompensa et lui fit une pension. Notre 
grande révolution, qui fut pour l’Europe un catackysme social, et qui 
emporta tant de grandes choses, emporta cette petite chose. Et voila 
qu'hier un pêcheur des Vosges, ennuyé de n'avoir plus de truites 4 
prendre ni à vendre, s’est avisé de tirer parti de celles dont la rave et la 
laitance étaient mûres au moment où il les capturait; et mettant sous 
l’eau ces deux éléments en contact, puis plaçant ces œufs hors de l’in- 
fluence de la lumière , dans de l’eau courante, il en vit sortir de petites 
truites. 


= ——— -- — Dit Lis 


(1) Voir l’Appendice à la fin du discours. 
(2) Art. 116 du Règlement de la Pêche côtière et maritime. 


(467) 


M. le professeur Coste, qui depuis bien des années, s’est consacré à 
l'étude des lois sous l’influence desquelles se continuent les différentes 
espèces d'animaux, a obtenu du gouvernement la création d’un grand 
établissement de pisciculture à Huningue, afin de propager en France 
la culture du saumon et de la truite saumonée. 

M. Coumes , ingénieur des travaux hydrauliques du Rhin, à qui j'ai 
demandé des œufs, m'a répondu qu’il tenait à ma disposition : 1° des 
œufs de saumon ; 2° des œufs de truite saumonée; 3° des œufs prove- 
nant d’un croisement du saumon et de la truite ; 4° des œufs de la truite 
des Grands Lacs ; 5° des œufs de Féra. Les envois se feront de décembre 
au mois de mai. | 

On sait que M. Coste est parvenu à obtenir le développement de Ja 
truite saumonée dans l'aquarium qui fait partie de son laboratoire au 
collége de France, on sait encore que de jeunes saumons , provenant 
d'une incubation artificielle, ayant été mis dans un étang qui se trouve 
à Enghien, dans une propriété de S. M. [., y ont grandi au point de 
s'être trouvés adultes au bout de deux ans. L’eau de cet étang se renou- 
velle à l’aide d’un trop-plein. Ce fait démontre que le saumon n’a pas 
absolument besoin d’aller à la mer pour se développer et se reproduire. 
Enfin, le turbot peut être en quelque sorte réduit à l’état de stabu- 
lation, puisqu'on peut l’emprisonner dans un aquarium , l’y nourrir, le 
voir grandir et s’y engraisser. Ce sont là des faits qui ne permettent plus 
de douter. Quand vous le voudrez, il n’y aura plus d’eaux stériles ; quand 
vous le voudrez, les eaux deviendront aussi et plus productives que vos 
plus riches prairies , et cela grâce à la pisciculture ! 


APPENDICE. 


La rareté des meilleures espèces doit être attribuée à la destruction pré- 
maturée des poissons. Ainsi l’article 116 du Règlement sur la police de la 
pêche maritime et côtière, du 4 juillet 4853, permet de recueillir la merlue, 
Pesturgeon, le saumon, l’alose et la maigre dès qu’ils ont atteint 27 centimètres 
(environ 10 pouces) de longueur de l’œil à la naissance de la queue ; le turbot 
peut être capturé à 20 centimètres (7 pouces 4 lignes). 

Le titre 117 du même décret a pour objet de régler « les époques d’ouver- 
» ture et de clôture des différentes pêches; l'indication de celles qui sont 
» libres pendant toute l’année; les heures pendant lesquelles les pêches peu- 
» vent être pratiquées. » 


( 468 ) 

Or, les restrictions contenues dans les dix articles dont le ütre 3 du décret 
du 4 juillet 4853 se compose, sont faites exclusivement en faveur de trois es- 
pèces de poissons : 4e la sardine ; 2 l’éperlan , et 3 le trogue (1), et de quelques 
crustacés et testacés. } 

En vertu de Particle 49, « la pèche des poissons d’eau douce qui peuvent se 
trouver momentanément en aval du point de cessation de la salure des eaux 
dans les fleuves, rivières et canaux affluant à la mer, ouvre et ferme aux 
époques prescrites par les règlements rendus en vertu dé la loi du 15 avril 
1829 ; et d’après l’article 50, la péche de tous les poissons non mentionnés ci- 
dessus, esl permise toule l'année , en se conformant aux dispositions dudit 
décret. » 


Or, la loi invoquée par le décret de 1853 dit, art. 26 : « Des'ordonnances 
» royales détermineront : 4° les temps, saisons et heures pendant lesquels la 
» pêche sera interdite dans les rivières et cours d’eau quelconques. etc. » Et 
comme il a été reconnu, lors de la révision de cette loi du 15 avril 4829, que 
les époques. pendant lesquelles il serait utile de prohiber la pêche de certaines 
espèces, soit pendant une partie de l’époque de la fraye, variaient, pour les 
mêmes espèces du nord au midi, il en est résulté que, faute de connaissances 
et de renseignements positifs, les ordonnances qui devaient les déterminer 
n’ont pu être formulées, et que l’autorité préfectorale a dû intervenir. D’où il 
résulte nécessairement encore que si cétte autorité n’est pas intervenue, la 
destruction de tous les poissons, excepté la sardine, l’éperlän et le trogue, a 
été et est permise pendant toute l’année. 


Grâce aux travaux de M. le professeur Coste , attention du gouvernement 
est éveillée sur cette importante question : l’établissement de Huningue , qui 
distribue annuellement, du mois de décembre au mois de mai, des myriades 
d’œufs fécondés de saumon, de truite saumonée, d'ombre, de Féra et même 
de truite des Grands Lacs, repeuplera nos cours d’eau, nos lacs et nos étangs; 
les dispositions protectrices et conservatrices de nos anciennes lois, un peu 
modifiées, seront remises en vigueur ; la pêche des bonnes espèces de pois- 


(1) Le mot {roque ne se trouve dans aucun traité d’ichtyologie. Nous avons con- 
sulté Rondelet, Belon, Gesner, Aldrovande, etc., parmi les anciens, et tous les 
auteurs modernes dont nous avons pu disposer, sans pouvoir savoir au juste quelle 
pouvait être l'espèce, sans doute, très-digne d'intérêt, à laquelle le législateur avait 
accordé une protection toute particulière , après la sardine et l’éperlan. Les livres 
nous faisant défaut , nous nous sommes adressé à une marchande de poisson qui s’est 
émerveillée de notre ignorance : Le trogue ? — c’est le goujon! — Je lui ai demandé 
des goujons ; — elle m’a apporté des ablètes. D'où je conclus que le trogue est un 
poisson protéiforme, qui se présente avec tous les caractères : 

1° De l’ablète (Cyprinus alburnus); 2° du véron (Cypr. phoæinus), et 5° d’un 
goujon ( Gobio). 


( 469.) 


sons sera défendue pendant la fraye (1), et l’on ne verra plus, il faut l’espé- 
rer, le fretin de ces mêmes espèces donné en pâture à la volaille, aux porcs, 
et même converti en fumier, comme cela se faisait avant le EE el 


du XVIIIe siècle (2) et depuis. 


(4) Les art. XII et. XIV du liv. V, titr. II, de l’Ordonnance de la Marine, du mois 
d'Août 1681, commentée par Valin, sont ainsi conçus : 

« ART. XIII, — Défendons de faire la pêche du gangui et du bregin, et celle du mar- 
» quesèque ou du nonnat, pendant les mois de Mars, Avril et Mai, à peine de confis- 
» cation des filets et bateaux, et de cinquante livres d'amende. » — Commentaire : 
« Si cette pêche est détéhdte en Mars, Avril et sig c’est que le poisson fraie dans 
» temps-là. » 

« ART. XIV.— Défendons aussi, sous les mêmes peines, de pêcher pendant les mêmes 
» mois, avec bouliers, à deux cents brasses près des embouchures des étangs et des 
» rivières. » — Commentaire : « Par la mème raison que le poisson fraie ordinaire- 
» ment dans ces mêmes mois, il n’est pas permis de le prendre dans ce temps-là , ni 
» de pêcher de manière que le frai du poisson puisse être enlevé ou détruit, etc. » 

(2) Déclaration du Roi qui défend la pêche du poisson nommée Blanche ou Blac- 
quet. Donnée à Fontainebleau, le 2 septembre 1726. — Cette déclaration défend la 
capture du frétin de poisson de mer « à peine de confiscation, contre les contreve- 
» nants, des rets, filets et poissons et de cent livres d'amende pour la première fois, 
» et en cas de récidive, de trois ans de galères. » (P. 748.) 

La déclaration du Roi qui défend la pèche, le transport et la vente du poisson 
nommé Blanche ou Blacquet, et du frai de poisson de mer, donnée à Versailles, 
le 24 décembre 1726, est bien plus explicite et s’étend bien évidemment au.frétin 
de toute espèce de poisson.— Nous ne pouvons citer, comme nous voudrions le faire, 
cette ordonnance en entier ; mais nous appelons l'attention sur les articles suivants : 

« ART. V, — Faisons défense à toutes personnes, de quelque qualité et condition 
» qu’elles puissent être, d'enlever ou faire enlever le poisson nommé Blanche ou. Blac- 
» quet, ni aucun frai de poisson, soit pour nourrir les porcs, volailles et 
» autres animaux, fumer el engraisser les lerres et le pied des arbres, el pour tout 
» autre usage que ce puisse élre, à peine de confiscation des chevaux et harnais, 
» et de CINQ CENTS livres d'amende, pour la ReDIÈR fois , et de punition corporelle 
» en cas de récidive. » # 

L'article VI défend la vente et le colportage de ce fretin , à peine de 50 livres 
d’amende pour la première fois, et de punition corporelle en cas de récidive. 

ART. VII. — Les pères. et mères répondent des amendes encourues par leurs en— 
fants et les maîtres de celles auxquelles leurs valets et domestiques auront été 
condamnés. 

« ART. IX. — Déclarons comprendre sous le nom de frai de poisson, {ous les 
» pelils poissons nouvellement éclos , et qui n'auront pas trois pouces de longueur, 
» au moins, entre l'œil el la queue. Permettons néanmoins aux pêcheurs et à tous 
» autres de défouir des sables qui restent à sec à basse-mer, les poissons qui s’ensa- 
» blent, pour servir d’appas à leur pêche, etc. » 

Il est inutile de faire ressortir la différence qui existe entre ces ordonnances si 


sévères et les lois et décrets qui régissent actuellement la pêche. 


D Quelle honte pour l'humanité, que l’avarice des hommes donne occasion de 
» porter contre eux de pareilles lois ! » (Comment. sur l’Ord. de la Mar., t. I, 


p. 715.) | 
À. Bazin, d.-m. 


EXCURSION 


GROTTES D'ARCY-SUR-CURE 


Par M. A. PAQUERÉE, Correspondant. 


Si les hommes de notre siècle ont des défauts , et ils en ont, beaucoup 
même, on ne peut pas du moins les soupconner de s’être laissés gagner 
par la flatterie, et d’avoir été gâtés par elle. Ils sont, au contraire, ha- 
bitués à s’entendre dire des vérités assez dures , et la main qui jette le 
blâme s’ouvre pour eux plus souvent, et plus libéralement, que celle 
qui sème l’éloge. On les accuse d’aimer trop l’argent, de s’occuper uni- 
quement des moyens d’en acquérir, d’être peu difficiles dans le choix de 
ces moyens, de négliger les sciences, ou bien de ne s'attacher qu'à 
l'étude de celles qui rapportent. Un mot, auquel on donne une signifi- 
cation presque flétrissante, celui de positivisme, a même été créé, tout 
exprès, pour désigner cette fâcheuse tendance de notre époque. 

Ces accusations si fréquentes nous semblent quelque peu exagérées, 
et l’on trouve dans leur fréquence mème une preuve qu’il est de nom- 
breuses exceptions à cette règle, que l’on voudrait donner comme géné- 
rale. Comment, en effet, soupçonner de positivisme ceux-là même qui 
se plaignent si hautement du tort causé par ce vice à notre société mo- 
derne ?.…. Il est d’autres faits indiquant bien plus sûrement encore que 
le mal est moins grand qu’on veut bien le dire. Parmi ces faits, nous 
n’en citerons qu'un, le plus convainquant peut-être, c’est qu’à aucune 
époque les sciences purement spéculatives n’ont été plus généralement 
cultivées qu'aujourd'hui. 

Les travailleurs dont la modeste ambition se borne à l'honneur d’a- 
jouter une plante nouvelle à une flore départementale, à celui de décou- 
vrir une coquille, un insecte, ou de reconnaître l’âge d’un monument, 


(41 ) 

la date d’une médaille, le sens d’une inscription, ces travailleurs, di- 
sons-nous , se rencontrent aujourd’hui par centaines. On les trouve sur 
tous les degrés de l'échelle sociale, et il est peu d’arrondissements en 
France, peu de cantons qui ne comptent quelques hommes attentivement 
occupés à la recherche des matériaux d’un mémoire, d’une monogra- 
phie, contenant souvent des trésors d'observation dont un savant de 
profession fera peut-être un jour son profit et retirera toute la gloire. 

Parcourez la France à la suite des corps savants réunis en congrès 
scientifiques, archéologiques, botaniques, etc., partout vous rencon- 
trerez quelques-uns de ces pionniers de l'intelligence ; accompagnez-les 
dans quelque excursion dont la science sera le but, vous verrez avec 
quel soin, avec quel amour ils ont étudié les richesses de leur pays. 
Pour nous, qui avons plusieurs fois joui de cette bonne fortune, cela 
nous est toujours une chose bien agréable de retrouver dans notre mé- 
moire les heureux souvenirs qu’elle en a conservés ; aussi avons-nous 
accepté bien volontiers l’occasion. qui s’offrait à nous de rappeler les 
détails d’une excursion faite aux grottes d’Arcy-sur-Gure et à l’abbaye 
de Vézelay, le 9 septembre 1858, pendant la session tenue à Auxerre 
par le Congrès scientifique. Bien avant le lever du soleil, nous avions 
quitté Auxerre, entassés, au nombre de près de quatre-vingt, dans 
plusieurs énormes diligences qui remontaient à la file la riche vallée de 
l'Yonne. | | 

Les naturalistes avaient à leur tête M: Cotteau , auteur de travaux re- 
marquables sur la géologie de la Bourgogne; ils avaient aussi, pour se 
guider, la magnifique carte géologique du département de l’Yonne dres- 
sée par notre savant collègue M. Raulin. 

Les archéologues étaient dirigés par M. Victor Petit, un habile et savant 
artiste, qui connaît Vézelay aussi bien, mieux peut-être, que le célèbre 
architecte (1) qui, par la restauration de son église, vient d'acquérir un 
nouveau titre de gloire. 

Les archéologues et les géologues ont eu souvent des affaires à dé- 
mêler entre eux, au sujet d’empiètements tentés de part et d'autre sur 
leurs propriétés réciproques. Que de galets les premiers se sont appro- 
priés, sous le prétexte de haches celtiques! Que de pointes de flèches, 
que de tombelles , que de rocs branlants, les géologues pourraient leur 
faire restituer comme bien mal acquis !.… 


(1) M. Viollet le Duc. 


( 472 ) 

Les archéologues, de leur côté, accusent un géologue d’avoir voulu 
leur ravir les pyramides d'Égypte, prétendant qu’elles ne sont autre 
chose que de gros cristaux de chaux carbonatée. Si cette accusation est 
fondée, disons du moins, à la louange des naturalistes, que pas un 
d’eux n’a soutenu le coupable dans sa tentative contre le bien d’autrui. 

Si nous avons parlé de’ces questions d'intérêt, c’est afin deconstater 
que, nonobstant, les géologues et les archéologues n’ont jamais cessé de 
vivre en bonne intelligence. Aussi, comme plusieurs d’entre nous avaient 
un pied dans chacun des deux camps, il avait été convenu que nous ver- 
rions d’abord les grottes d’Arcy ensemble, et qu’ensemble aussi nous 
irions ensuite visiter l’abbaye de Vézelay. 

Le fond de la vallée de Yonne, que nous suivions, est presque exclu- 
sivement occupé par des prairies naturelles coupées par de nombreuses 
rangées de peupliers, et couvertes alors des fleurs de la colchique au- 
tomnale. Dans ces prairies paissaient des troupeaux de vaches, largement 
tachées de noir, de rouge et de blanc. Ces animaux, par leur bariolage, 
peuvent produire un très-joli effet dans un paysage; mais ils nous ont 
semblé manquer des qualités essentielles que devraient surtout s’attacher 
à obtenir les agriculteurs, plus appréciateurs, en général, de la forme 
que de la couleur. 

Sur lés flancs des côteaux, alternant avec des champs de vignes , on 
rencontre fréquemment des plantations de cerisiers cultivés à basse tige, 
nous pourrions même dire en buissons, car leurs branches se divisent 
au niveau du sol : leur fruit, très-renommé , est l’objet d’un commerce 
important avec Paris et l'Angleterre. | 

La vigne, aux environs d'Auxerre, est cultivée avec tant de soins- 
qu'on serait plutôt tenté de la considérer comme une plante de luxe 
que comme une source de revenus. Il faut surtout visiter les crûs renom 
més, dont les deux principaux portent des noms de mauvais augure : 
Migraine et Judas. Nos jardins potagers sont rarement aussi bien tenus. 
La terre en est remuée à la bêche jusqu’à sept fois par an. Les ceps, 
plantés à 60 centimètres de distance environ, sont si bien alignés, les 
sarments si bien relevés, que pas une feuille ne dépasse ses voisines, et 
ne vient rompre la rectitude de la ligne. Disons, enfin, que quelques 
vignerons poussent l’excès de précaution jusqu’à couvrir, au printemps, 
leurs ceps avec des nattes ou des planchettes, afin de les préserver de la 
grêle ou de la gelée. 

On se figurerait difficilement à quel point la propriété est divisée dans 


( 473 ) 

arrondissement d'Auxerre. On a dù renoncer aux haies et aux fossés 
de clôture, qui absorberaient la majeure partie du sol. Chacun de ces 
champs lilliputiens est parfaitement cultivé ; mais Dieu sait avec quelle 
énorme dépense de main-d'œuvre ! Toute amélioration agricole est im- 
possible avéc un tel morcellement. Aussi pensions-nous avec peine qu’une 
heureuse découverte, faite auprès d'Auxerre par un de nos collègues du 
Congrès, profiterait bien peu au département de l’Yonne. La veille, en 
effet, M. Guéranger, du Mans, avait reconnu à Seignelay, dans l’étage 
aptien de la craie; l’existence d’un dépôt considérable de phosphate de 
chaux. Nous pouvons malheureusement ajouter qu’alors même que cette 
constatation eût été faite dans un pays de grande culture, ce gisement 
aurait couru grand risque de ne pas être exploité. Nos agriculteurs, en 
effet, semblent peu disposés à recourir à ce puissant agent fertilisateur ; 
et lorsque, en Angleterre, nous voyons de nombreuses usines, dans les- 
quelles on convertit les phosphates neutres en biphosphates au moyen 
de l’acide sulfurique , ne pouvoir suffire aux besoins d’une consommation 
chaque jour croissante, en France, au contraire, une seule fabrique, 
croyons-nous , celle de M. de Molon, à la Vilette , peut bien facilement 
répondre à toutes les demandes qui lui sont adressées. Aussi nous atten- 
dons-nous à voir un jour les Anglais venir exploiter cette richesse de 
notre sol au profit de leur agriculture, comme nous les voyons, sur tous 
les lieux de production, enlever nos tourteaux, malgré les frais dont ils 
se trouvent grevés par le transport et par les droits considérables dont 
le gouvernement, dans sa sollicitude, en a frappé l'exportation. 

En sortant d'Auxerre, M. Cotteau nous avait montré les roches de 
l'étage portlandien , peu fossilifères , mais dans lesquelles on trouve ce- 
pendant assez fréquemment l’Ammonites gigas. Plus loin, il nous mon- 
trait les argiles grises du Kimmeridge, dans lesquelles on rencontre 
parfois , mêlés aux coquilles d’Ostrea virgula, dont elles semblent pé- 
tries , des débris de Plesiosaures et d’Icthyosaures. Les ossements de ces 
sauriens se trouvent aussi dans les roches du coral-rag supérieur, que 
l’on nous montrait un peu plus loin; ils y sont mêlés à des encrinites, à 
des débris de poissons et à d’autres fossiles. Cette roche est largement 
exploitée à Bailly. La couche supérieure, pétrie de grosses oolites, donne 
un marbre jaunâtre veiné de bleu ; la couche inférieure fournit la magni- 
fique pierre blanche connue à Paris sous le nom de pierre de tonnerre. 

Nous arrivämes à Cravant. Une bataille livrée en 1423, sous les murs 


« 


de cette ville, a donné à son nom une célébrité historique. Cravant 


(ATA ) 


appartenait au Chapitre d'Auxerre. Pendant la longue guerre entre les 
Armagnacs et les Bourguignons, ces derniers avaient mis dans cette ville 
une garnison importante, que commandait Claude de Beauvoir de Chas- 
tellux. L’armée française essaya de s'en emparer par surprise ; mais les 
Anglais, alliés des Bourguignons, tombèrent sur elle au moment où 
Chastellux faisait une sortie , et les troupes de Charles VIT furent taillées 
en pièces. Le maréchal de Ghastellux remit ensuite Cravant entre les 
mains des chanoines d'Auxerre, et ne demanda rien pour leur avoir 
conservé cette place. Le Chapitre lui prouva sa reconnaissance en confé- 
rant le titre de premier chanoine de la cathédrale à lui et à l'aîné de ses 
descendants. Ge titre et les prérogatives yattachées se sont perpétués dans 
celte famille, et l’on a vu, en 1819, le marquis de Chastellux prendre 
possession de sa stalle, revêtu du costume traditionnel. M. Adolphe 
Joanne donne, d’après Millin, de curieux détails sur ce costume. « Le 
chanoïne-soldat, dit-il, entrait dans le chœur en habit militaire : il 
était botté et éperonné ; un surplis blanc et bien plissé couvrait son ha- 
bit ; un large baudrier passait sur ce surplis , et son épée y était suspen- 
due. Le brave chanoine avait les deux mains gantées, un faucon sur le 
poing, une aumusse sur le bras gauche , et il tenait de la main droite un 
chapeau orné de plumes blanches. 

Dans la cathédrale d'Auxerre est la tombeau du maréchal de (Chastel- 
lux, avec une épitaphe moderne, qui fait plus honneur au patriotisme 
de son auteur qu’à ses connaissances historiques. Elle porte en, effet, 
sommairement, qu’à la bataille de Cravant, Chastellux commandait les 
Français qui remportèrent sur les Anglais une victoire signalée. 

Après Cravant, nous quittûmes la vallée de l'Yonne et nous suivimes 
celle de la Cure, l’un de ces affluents. Cette vallée est non moins belle, 
non moinsriche que celle que nous venions d'abandonner. La Cure était 
couverte de trains de bois, que l’on forme en cet endroit pour les ache- 
miner ensuite sur Paris, par l'Yonne et la Seine. Cette industrie enrichit 
les habitants d’Acolay, de Lucy, de Bessy, de Vermenton, d’Arcy et de plu- 
sieurs autres localités importantes , situées sur lesbords de cette rivière. 
Les bois arrivent principalement de: Morvant, soit par la voie.de 'terre, 
soit surtout par le flottage à büches perdues. 

Avant d'arriver à Vermenton, le côteau de la rive droite se rapproche 
tellement de la Cure qu’on a dû l’entamer jusqu’à une grande hauteur 
pour y tailler la route. La roche, ainsi coupée , est formée d’un calcaire 
Hthographique d’un blanc jaunâtre, que l’on considérait commetappar- 


(415 ) 


tenant à l’Oxford-Clay, avant que M. Cotteau n’eût reconnu sa relation 
avec le Coral-rag, dont il forme, d’après lui, la partie moyenne. 
Des Pholadomies, des Myes, des Anatines, des Cardium forment la 
majeure partie des fossiles qu'il y a rencontrés. Cette roche attire l’at- 
tention par la régularité de ses assises, d’une épaisseur à-peu-près 
égale. Les lignes parallèles qui les séparent, sont coupées à angles 
droits par des cassures divisant la masse en cubes réguliers, qui four- 
nissent aux habitants du pays des matériaux tout taillés pour la con- 
struction de leurs maisons. 

À quelques kilomètres au-dessus de Vermenton, la vallée de la Cure 
semble complètement fermée par un côteau, coupant à angle droit la 
ligne du Talweg. Un joli château, ombragé par de beaux arbres, est sur 
ce côteau, que la rivière entoure de trois côtés; elle fait d’abord un 
long détour, puis un étroit crochet, qui la fait brusquement changer de 
direction et couler parallèlement à elle-même, sur une longueur de 
plusieurs centaines de mètres. Ce côteau forme donc ainsi comme un 
long promontoire ; il est percé perpendiculairement à sa ligne de faite 
par de nombreuses cavités, dont trois seulement sont assez considé- 
rables pour mériter le nom de grottes. 

Les principales entrées des grottes d’Arcy sont au sud du côteau, en 
amont. Celle de la plus grande s’ouvre dans la partie supérieure d’un 
talus d’éboulement. Dans l’intérieur, le terrain s’abaisse, par une pente 
assez rapide, et le sol du souterrain est à peu-près de niveau avec les 
eaux de la Cure. Comme l’on a tout lieu de croire qu’autrefois cette 
rivière s’est frayé un passage à travers ces grottes, il est naturel de 
penser que cette ouverture, très-vaste alors, se prolongeait, par en bas, 
jusque dans son lit; que des éboulements du rocher qui la domine l’ont 
obstruée, en ne laissant de libre , dans sa partie supérieure, que l’étroit 
espace par lequel on y pénètre aujourd'hui. 

Les grottes d’Arcy appartiennent à M. le comte d’Assay, propriétaire 
du château d’Arcy; une porte fermée à clé constate son droit de pro- 
priété. Cette porte nous fut gracieusement ouverte, et nous péné- 
irâmes dans l’intérieur au nombre de près de cent; car, à nous s’étaient 
joints plusieurs habitants du pays. Chacun s’était muni d’un bâton, afin 
d'assurer sa marche dans la boue et sur les pierres humides et glissantes, 
et d’une chandelle dont la clarté, jointe à celle de toutes les autres, 
était bien loin de produire une brillante illumination dans ce souterrain 


immense. Chacune d'elle formait un point lumineux éclairant à peine les 
Tome XXII. À6 


( 416 ) 

objets environnants. Une partie des groupes de stalactites restait donc 
noyée dans l’ombre. Aussi, notre imagination aidant, si nous avions bien 
voulu, nous aurions pu voir, comme {ant d’autres avant nous, toutes 
sortes de belles choses : des vierges , des rois sur leurs trônes, des pal- 
miers, des vases, des draperies, etc. Ces stalactites sont nombreuses, 
mais peu brillantes. Buffon, qui fit plusieurs voyages à Arcy, affirme 
qu’elles augmentent si rapidement de volume que dans un avenir rappro- 
ché, elles auront complètement cbstrué la grotte. Le grand naturaliste 
s’est bien trompé, car les stalactites brisées depuis longtemps, celles 
entr'autres qu'il fit emporter en grande quantité à Trianon, ne se sont 
pas encore reformées. Quelques-unes même montrent une cassure aussi 
fraiche que le premier jour; il se trompa non moins sur l’origine des 
grottes elles-mêmes, qu’il disait être des carrières abandonnées. Dau- 
benton allait plus loin; il affirmait que les pierres de la cathédrale 
d'Auxerre en avaient été extraites. Nous n’avons pas, dans un simple 
rapport d’excursion, à nous occuper de la question si importante de la 
formation des cavernes; mais nous devons dire qu’on a constaté de la 
manière la plus positive, que Buffon et Daubenton se sont trompés. 
On a reconnu aussi, avec toutes les preuves de la certitude, que les eaux, 
probablement celles de la Cure, ‘se sont autrefois frayées un passage à 
travers ces grottes. Ces preuves, on les trouve dans les amas de sable et 
dans les trainées de cailioux roulés qu’on y rencontre à chaque pas. On 
nous fit remarquer que ces cailloux sont identiques avec ceux que la Cure 
roule encore dans son lit. 

Vers le fond de la grotte, les stalagmites se montrent sous un aspect 
assez extraordinaire. Elles forment des sillons ondulés, dont quelques- 
uns ont plus d’un demi-mètre de hauteur. On pense pouvoir expliquer 
cette forme étrange, par la supposition qu’elles se sont déposées au 
fond d’une eau courante. 

On nous fit remarquer une stalagmite, jointe à la stalactite supé- 
rieure , qui se trouve aujourd’hui suspendue à plus d’un mètre du sol. 
La base de cette stalagmite que l’on nomme la coquille de Saint-Jac- 
ques, est évasée et montre, empâtés dans sa masse , de nombreux galets, 
semblables à ceux que l’on rencontre fréquemment sur divers points 
de la grotte. De ces trois choses l’une; ou le sol s’est affaissé, ou la 
voûte s’est relevée, ou un phénomène d’érosion a eu lieu. Gette der- 
nière supposition est seule admissible; l’on doit penser que la Cure 
s'était retirée après le dépôt des galets, et qu'après la formation des 


(471) 


stalagmites , elle envahit de nouveau la grotte et entraîna la terre et les 
cailloux sur lesquels reposait celle dont nous parlons. 

À une centaine de mètres de l’entrée, est un tas de boue noire, sale, 
puante, que Buffon avait remarqué, et dont il avait reconnu la nature 
et l’origine. C’est un amas de guano formé par les chauves-souris qui 
habitent en grand nombre cette partie de la grotte. 

Dans la grotte d’Arcy est une flaque d’eau, décorée du nom pom- 
peux de lac. On prétend qu’elle communique avec la Cure. Un habitant 
du pays nous racon{a une histoire de poissons borgnes que l’on y pêche. 
Cette même histoire, depuis Hérodote, est racontée au sujet des lacs 
souterrains de tous les pays. 

Les grottes d’Arcy sont creusées dans la grande oolite : elle est repré- 
sentée là par un calcaire siliceux peu fossilifère, qui semble répondre 
au Forest-marble des géologues anglais. Cette roche est recouverte par 
le calcaire, à Chaille, que M. Cotteau rapporte au Coral-rag, infé- 
rieur ; contrairement à l'opinion de notre honorable collègue, M. Rau- 
lin, qui le classe au contraire dans l’Oxford-clay moyen. En outre des 
rognons calcaréo-siliceux, appelés chailles, qu’on y trouve en grande 
quantité , M. Cotteau y signale trois cent vingt-cinq espèces de fossiles; 
parmi ceux-là , il reconnaît que quelques-uns, lAmmonites plicatilis, 
et l’Osirea dilatata, entre autres, sont bien évidemment oxfordiens; 
mais comme on les rencontre, surtout dans les couches inférieures, il 
pense que les animaux dont ils sont la dépouille, ont pu passer d’un 
étage à l’autre. 

À peu de distance de la grande grotte, s’ouvre au niveau de la riviére, 
celle de la Goulette qu’on ne peut parcourir, à cause des eaux qui s’y 
engouffrent , et que l’on voit ressortir de l’autre côté du rocher, dans 
le lit même de la Cure. 

Une autre grotte, la plus remarquable peut-être, est à deux cents 
mètres environ de la grande; elle est connue sous le nom de Groile des 
Fées et ne contient pas de stalactites. Le sol en est formé d’un limon 
noirâtre , contenant, en grande quantité, des matières organiques. On 
avait commencé à l’exploiter afin de l’employer comme engrais. On le 
trouva rempli d’ossements, dont beaucoup furent détruits. On voit encore 
leurs débris près de l’entrée. D’autres furent recueillis avec soin, et 
l’on reconnut qu’ils avaient appartenu à des ours, des chiens, des 
chevaux, des éléphants, des bœufs, des rhinocéros, etc. On avait déjà 
trouvé, dans la grande grotte, des ossements d’éléphant et une mâchoire 
d'hippopotame. 


(478 ) 

On a cessé d’exploiter , dans la Grotte des Fées , le limon fossilifère, 
formé, sans doute en majeure partie, par la chair décomposée des 
quadrupèdes dont il empâte les ossements. Espérons , que, si à l’avenir 
on reprend cette exploitation, ce sera uniquement au profit de la 
science. 

On comprend que les géologues ont dû se préoccuper de la solution 
du grand problème posé à la science par l’accumulation d’ossements 
fossiles observée dans plusieurs grottes. Cuvier, en 1812, lors de la pu- 
blication de ses recherches sur ces fossiles, ne connaissait qu’un petit 
nombre de cavernes à ossements , qu’on lui avait signalées en Allemagne. 
Il n’en avait reçu que des débris de carnassiers ; aussi pensa-t-il que ces 
animaux étaient morts où ils avaient vécu et s’étaient propagés, et que 
leurs générations successives avaient formé ces amas d’ossements dans 
les cavernes qu’ils avaient habitées pendant leur vie. Il serait difficile, 
cependant, de comprendre comment ils auraient pu vivre dans toute 
l’étendue des cavernes de la Franconie, par exemple, dont le grand 
naturaliste donne, d’après Esper, la description dans l’ouvrage cité 
(T. IV, 4° partie, page 5 et suivantes). Dans ces grottes, en effet, en 
outre de passages tellement étroits qu'un homme peut à peine y péné- 
trer, on rencontre des différences de niveau considérables, qui nécessi- 
tent, pour les visiter, l'emploi d’une échelle. 

Plus tard, quand on eut trouvé des ossements d’herbivores mélés à 
ceux des carnassiers, on fut obligé de modifier l'hypothèse de Cuvier. 
On supposa alors que les carnassiers avaient emporté les herbivores dans 
leurs cavernes, afin de les dévorer tout.à leur aise, et que les os que 
l'on trouvait ainsi réunis étaient ceux des mangeurs et des mangés. 

Mais comment admettre qu’un ours , une hyène aient pu emporter le 
cadavre d’un éléphant, ou même le dépecer, si l’on veut supposer qu’ils 
n'aient porté qu’un membre après l’autre? Du reste, les habitudes des 
carnassiers fossiles devaient peu différer de celles des animaux qui les 
représentent dans le monde actuel. Or, les hommes qui ont étudié les 
mœurs de ces derniers, affirment que jamais les grands carnassiers n’em- 
portent leur proie dans leurs cavernes, mais qu'ils l’entraînent dans les 
broussailles , et alors seulement que la crainte les empêche de la dévorer 
sur place. Ces suppositions ont donc été généralement abandonnées pour 
une autre qui se présente avec toutes les apparences de la certitude. 

On pense que le remplissage des cavernes à ossements s’est fait, le 
plus ordinairement, par des crevasses formant à la surface du sol des 


( 419 ) 


puits naturels, des entonnoirs, dans lesquels, à l’époque diluvienne, 
les eaux ont entrainé des cadavres d’animaux qui se sont amoncelés dans 
leurs profondeurs ; on suppose qu'ensuite ces crevasses ont été com- 
blées , soit par des éboulements , soit par des dépôts de stalactites. 

Dans les grottes d’Arcy, les choses ont pu se passer un peu différem- 
ment : les eaux ont dû se frayer un passage à travers les entrées ac- 
tuelles. On peut supposer que des issues étroites , des étranglements , ne 
leur permettaient de s’écouler que lentement; que leur surface restait 
ainsi parfaitement calme; que les cadavres d'animaux et les autres objets 
légers entraînés par elles s’arrêtaient dans ces cavernes, et flottaient im- 
mobiles à leur surface jusqu’au moment où les gaz qui distendaient leurs 
tissus s’étant dégagés par le fait d’une décomposition avancée, ils tom- 
baient au fond, en vertu de leur densité plus grande. Ce qui vient à 
l'appui de cette supposition, c’est que dans la grande grotte, où les 
courants étaient très-rapides, ainsi que nous en trouvons la preuve dans 
les galets qu’ils y ont entraînés, les ossements fossiles sont très-rares ; 
et si l’on en rencontre quelques-uns d’éléphant ou d’hippopotame, c’est 
sans doute parce qu’en vertu de leurs énormes proportions, leurs ca- 
davres se sont échoués dans les endroits où la profondeur de l’eau n’était 
pas suffisante. 

Il y a quelques années, on découvrit dans la Grotte des Fées, très- 
près de la surface du sol, des fragments de silex taillé, de charbon de 
bois et de poterie grossière. Quelques personnes crurent voir là des 
preuves suffisantes de la contemporanéité de l’homme et des animaux 
dont on trouve les ossements dans cette caverne. Pour nous, nous pen- 
sons que l’auteur de cette découverte ne pouvait en tirer qu’une conclu- 
sion : c’est qu'avant lui d’autres hommes avaient pénétré dans la Grotte 
des Fées. 

Après notre visite à Arcy, nous continuâmes notre voyage vers Vézelay. 
Vis-à-vis les grottes , à quelques centaines de mètres, nous traversâmes 
un magnifique tunnel, creusé, il y a péu d’années, pour donner passage 
à la route d'Auxerre à Lyon. Nous admirâmes, en sortant, les beaux 
escarpements formés par la grande oolite. Quinze kilomètres nous sépa- 
raient encore de Vézelay, dont nous apercevions déjà, au sommet d'un 
côteau élevé, l’église aux vastes proportions. Nous passämes au-dessous 
de Saint-Moré, que signale de loin, debout sur une pointe de rocher, 
une grande statue de la Sainte Vierge. Plus loin, nous traversions Saint- 
Remisel , où une autre statue de la Vierge avait été érigée la veille de 


( 480 ) 

notre passage, au sommet d’une tour crénelée élevée à cet effet par la 
piété des habitants du pays, qui lui avaient donné le nom de Tour de 
Malakoff, et qui, pour l’inaugurer, avaient choisi le jour anniversaire 
de la prise de la célèbre forteresse russe. À Aquin, nous descendimes de 
voiture, afin de gravir à pied le côteau de Vézelay. Là, nous rencon- 
trâmes une roche composée d’un calcaire marneux, s’enlevant par plaques 
minces, et contenant de nombreuses pholadomyes , parmi lesquelles la 
Pholadomya Vezelayi, qui a emprunté son nom à ce gisement. La dispo- 
sition feuilletée de ce calcaire a permis aux habitants d'Aquin de con- 
struire leurs maisons avec ses fragments plats, depuis la base jusqu’au 
faîte , c’est-à-dire, y compris la toiture. Cette roche, que plusieurs géo- 
logues réunissent à l’oolite inférieure , appartient, d’après M. Cotteau, à 
la grande oolite, dont elle forme la base ; elle semble répondre au fuller- 
sort des géologues anglais. 

La ville de Vézelay a conservé une partie de ses fortifications; nous 
entrâämes par la Porte-Sainte. La tradition du pays veut que ce soit près 
de cette porte, qu’en 1146 ait été dressée la tribune du haut de laquelle 
saint Bernard d’abord, et Louis VII ensuite, appelèrent la chrétienté à 
prendre part à la seconde croisade. On sait que l’empressement fut si 
grand , que les femmes elles-mêmes se croisèrent, et que les croix ayant 
manqué, le saint abbé et le roi déchirèrent leurs vêtements pour en faire 
de nouvelles. On sait aussi que cette croisade, commencée avec tant 
d'enthousiasme, finit par des revers, que l’abbé Suger avait prévus. 

La tradition que nous venons de rapporter n’est pas d’accord avec l’his- 
toire, qui affirme que la tribune de saint Bernard fut élevée dans la plaine 
que domine Vézelay, et le bon sens nous dit que l’histoire a raison; 
car, autour de la Porte-Sainte, l’espace est trop restreint pour avoir pu 
contenir la foule accourue de toute part à l’appel du saint abbé de 
Clairvaux. | 

Dans la ville, tout près du lieu où tant de Prélats, où des Papes même 
sont venus s’agenouiller, on nous montra une maison où naquit, en 1519, 
un de leurs plus infatigables ennemis, Théodore de Bèze, l'ami et le 
disciple de Calvin. 

Les archéologues nous firent les honneurs de la magnifique basilique 
que nous étions venus visiter avec eux. Nous admiràmes ensemble les 
belles sculptures des chapiteaux, celles du tympan du grand portail, qui 
sont répétées sur celui d’un portail intérieur ; les eryptes, la salle capi- 
tulaire, que le voisinage de l'immense nef rapetisse, par comparaison, 


( 481 ) 

au point de lui donner les dimensions apparentes d’une sacristie ordi- 
naire, alors qu’elle suffit depuis longtemps, comme église, aux besoins 
religieux d’une population de près de deux mille âmes. Nous admirâmes 
aussi les voûtes si élevées , les tribunes si vastes, et surtout l’église des 
catéchumènes ou des pénitents, immense Narthex, servant comme de 
vestibule à l’église principale. Nous laissämes nos archéologues étudier 
ce beau monument, que M. Viollet-le-Duc vient de restaurer d’une ma- 
nière si remarquable, et nous montâmes au clocher. Un magnifique pa- 
norama s’offrit alors à nos yeux: c'était, au-dessous de nous, la vallée 
de la Cure, avec ses prairies, sa forêt de noyers et de peupliers, au- 
dessus de laquelle pointe le joli clocher roman de Saint-Père. C'était les 
côteaux couverts de vignes, et plus loin, d’autres côteaux encore, dont 
la couleur rouge attire les regards. Au sud, notre vue s’étendait sur les 
terrains granitiques du Morvant, qui empruntent une teinte sombre aux 
forêts dont ils sont couverts. 

Le soleil baissait, il fallut songer au retour; nous dinâmes à la hâte; 
nous remontämes en voiture, et nous reprimes la route d'Auxerre. La 
nuit était venue, et plus de quarante kilomètres nous séparaient de cette 
ville; un seul évènement signala, cependant, ce voyage nocturne. Votre 

rapporteur aperçut le premier, et fit remarquer à ses collègues, une co- 

mête, bien petite alors, mais dont nous avons tous, depuis , admiré l’é- 
clat et la grandeur. Le lendemain matin, il fit de cette observation l’objet 
d'un rapport au congrès scientifique. Les Auxerrois virent dans cette 
comète un astre de bon augure, et un journaliste, après avoir fait 
connaître à ses lecteurs cette communication, s’écriait, dans un accès 
d'enthousiasme prophétique : « Bourguignons , réjouissons-nous ! nous 
aurons de bon vin!... » 


PAQUERÉE. 


LA SOCIÉTÉ BOTANIQUE 
DE FRANCE 


EN SESSION EXTRAORDINAIRE A BORDEAUX 


(loût 1859) 


Par M. le Dr CUIGNEAU . membre du Conseil. 


La plupart des Sociétés savantes ont, chaque année, un jour solen- 
nel , où, plus que dans toute autre circonstance , elles se reconnaissent, 
— dans de certaines limites, — justiciables de l’opinion publique , en 
exposant devant un auditoire, toujours bienveillant, le compte-rendu 
des travaux accomplis ; — en lui soumettant parfois des études inédites 
sur des points difficiles, nouveaux ou intéressants de la seience; — en 
lui retraçant enfin (comme notre Président le faisait il y a quelques ins- 
tants avec le cœur plus encore qu'avec les lèvres) , la vie de quelques- 
uns de ses membres, de ceux surtout qui, comme notre vénérable et 
regretté Directeur (1), savent imprimer à la Société qu’ils fondent ou 
qu'ils conduisent les qualités qui les distingnent eux-mêmes, c’est-à- 
dire , le savoir modeste, l'amour persévérant du bien et du vrai. 

Dérogeant aujourd’hui quelque peu à ces habitudes consacrées par 
un long et ancien usage, la Société Linnéenne m’a donné la mission de 
parler devant vous d’une autre Société, sa sœur de beaucoup plus 
jeune, plus hardie et plus brillante, et dont les succès croissants et 
l'estime des autres corps savants, justifient facilement l’organisation 
puissante et les saines tendances scientifiques. 

Je viens de désigner la SOGIÉTÉ BOTANIQUE DE FRANCE, à propos de 
Ja session extraordinaire qu’elle a tenue à Bordeaux, en août 1859. 

Depuis quelques années, on parle tellement de comités, d’associa- 
tions, d’assemblées , de congrès régionaux ou universels , on aime tant 


(1) M. J.-F. Laterrade, Directeur-Fondateur de la Société Linnéenne, mort à Bor- 
deaux, le 50 octobre 1858. 


(483) 


aujourd’hui à se voir, à se réunir en nombre plus ou moins considérable, 
sous toutes les formes, sous toutes les appellations , et pour quelque 
branche que ce soit de la science et de l’industrie, — pour tout dire en un 
seul mot, — il y a un tel besoin d'expansion et d’épanchement industriel 
et scientifique, qu’il ne sera peut-être pas sans intérêt de connaître par 
quelques détails spéciaux, comment les sessions extraordinaires de la 
Société Botanique se rapprochent et diffèrent des autres réunions ana- 
logues. 

Fondée en 1854, sur les mêmes bases principales que la Société Géo- 
logique de France, la Société Botanique comprit, dès son début, qu’elle 
devait annuellement transporter le siége de quelques réunions dites ex- 
traordinaires dans des points divers plus ou moins éloignés de la capi- 
tale , ainsi que depuis vingt-huit ans l’accomplit la Société Géologique 
de tous les côtés de la France. Si les sociétés, qu'on peut appeler 
essentiellement locales, doivent, comme la Société Linnéenne, diriger 
surtout leurs études dans le cercle restreint qu’elles se sont assigné, 
de manière à en avoir la connaissance la plus complète ; — si elles ne 
peuvent pas, si elles ne doivent pas se livrer à de lointaines pérégrina- 
tions , il n’en est plus de même pour ces grandes associations, qui, plus 
libérales quant aux conditions d'admission de leurs membres ont, des 
représentants titulaires au-delà même des frontières du territoire, et 
dont le cercle d’études pratiques embrasse, comme le nom de la Société 
l'indique lui-même, la France entière. 

Ces longs pélerinages scientifiques ont pour ces dernières, et en par- 
ticulier pour la Société Botanique, une double utilité : — Utilité morale, 
par la liaison étroite, je dirai presque l'intimité, qui s'établit instanta- 
nément entre des collègues primitivement éloignés Les uns des autres et 
réunis pour quelques jours , utilité morale aboutissant à la création et à 
la conservation d’une même famille scientifique; — utilité pour la science, 
par la facilité qu’on a d’étudier sur le vivant in loco natali les flores ré- 
gionales de la France, d'apprécier de visu les influences géologiques sur 
les diverses végétations ; — et si, dans ces grandes explorations, on ne 
peut se bercer de l’espoir incertain de faire de nouvelles découvertes, 
on a du moins la presque certitude d’arriver à la connaissance plus 
complète d’une science qui n’atteindra probablement jamais une perfec- 
tion absolue, et qui réclame des voyages encore plus que des relations, 
des spécimens ou des mémoires, — la géographie botanique. 

L’Exposition universelle de 1855 réunissait à Paris un concours inu- 


(484 ) 

sité de savants de tous les pays, une collection rare et réalisable seule- 
ment à de trop longs intervalles des productions végétales du monde 
entier. Ces circonstances exceptionnelles firent adopter Paris pour pre- 
mier lieu de session extraordinaire, et, sous la présidence de l’habile 
botaniste italien, M. Parlatore, la Société n’eut pas à se repentir de son 
début. Une particularité qui a signalé cette réunion doit nous y attacher : 
c’est la mention qui fut faite pour la première fois d’une découverte due 
à notre cher collègue, M. Durieu de Maisonneuve. L’Helæwocharis, qu’il 
avait trouvée dans les vases de la Garonne, y fut présentée avec l’épi- 
thète d'oxyneura, qu’elle ne garda presque que quelques jours pour 
prendre celle plus caractéristique d’amphibia, sous laquelle elle est défi- 
nitivement inscrite dans la science. 

Dans une séance analogue à celle-ci (1), j’ai eu l’occasion de vous 
entretenir longuement de cette curieuse cypéracée; je n’y reviens aujour- 
d’hui que pour appeler sur elle votre attention sérieuse, en demandant 
surtout à ceux d’entre vous qui aiment les applications utiles, qu'ils 
veuillent bien étudier le parti que l’on pourrait tirer de la multiplication 
rapide et abondante des rhizômes de cette plante pour la fixation des 
vases, la consolidation des terrains, et, par suite, la rectification de 
certaines portions du cours de quelques fleuves. 

Revenons aux sessions extraordinaires de la Société Botanique. Je ne 
puis que mentionner en courant celle de 1856, à Clermont-Ferrand et 
en Auvergne, où, comme le disait un an plus tard M. le comte Jaubert, 
dans son style aussi pittoresque que fidèle expression de la vérité, — où 
on voyait (2) « la troupe de M. Lecoq, tantôt s’avançant dans la Limagne 
» comme une troupe de moissonneurs diligents , qui ne laissaient rien à 
» glaner derrière elle , tantôt lancée par son chef sur les flanes des mon- 
» tagnes ; le Puy-de-Dôme et le Mont-Dore étaient pris d’assaut, et notre 
» drapeau était arboré par le D' W. Nylander, » — un lauréat et savant 
correspondant des Linnéens de la Gironde, — « au plus haut des roches 
» dénudées par les vents qui dominent le val d’Enfer, station favorite des 
» lichens. » 

En juin 1857, le rendez-vous fut donné à Montpellier. La session fut 
abondamment fournie ; de nombreuses excursions furent entreprises , et 
ceux d’entre vous qui eurent le bonheur d’y prendre part se rappelleront 


(1) 5 nov. 1856. — Comple-rendu des trav. de la Soc. Linn. 
(2) Bull. de la Soc. Bot., 1857, p. 549. 


( 485 ) 

longtemps avec plaisir le voyage de Saint-Guilhem du Désert. Notre col- 
lègue, dont le nom se retrouve partout où parle la science, et qui avait 
eu l’honneur d’être un des vice-présidents de cette réunion, lut dans une 
des séances trois notes pleines d’intérêt : l’une était consacrée à un 
champignon nouveau appartenant au genre Cenococcum, parasite dévo- 
rant des racines des jeunes pins de nos landes; une autre traitait du 
parasitisme du gui sur lui-même, et la troisième avait pour objet l’Ophio- 
glossum de Lardy et du cap Ferret. 

L'année dernière, Strasbourg eut l'honneur de recevoir la Société 
Botanique, et celui qui alors était le doyen des botanistes français , le 
D: Mougeot (de Bruyères), put venir présider à Girardmer, au milieu des 
Vosges , une des séances de la Société. 

Voyez, Messieurs , en trois étapes, que de chemin parcouru ! quelle 
diversité de fleres ! Ici, l'Auvergne avec ses montagnes volcaniques , la 
Limagne et ses plaines ; là, les Basses-Cévennes et une portion du bassin 
de la Méditerranée; plus tard, les Vosges alsaciennes et les bords du 
Rhin. 

Mais ce ne sont que les premières stations d’une longue route et à 
laquelle, chaque année, s’ajoute un nouvel embranchement. Aussi, 
ne nous étonnons pas si dans la séance du 25 février dernier, à la suite 
d’un travail d'une commission spéciale composée de MM. Bois-Duval, 
Jacques Gay, C'e Jaubert, Puel et A. Passy, la Société fixait Bordeaux 
et la Gironde pour sa session extraordinaire de 1859. Ne devait-on 
pas y faire connaissance avec la végétation curieuse et caractéristique 
des dunes, des marécages et des étangs du bassin d'Arcachon, des forêts 
de la Teste? N’avait-on pas à parcourir les marais de La Canau, où 
Dunal avait autrefois découvert l’Aldrovanda vesiculosa et où M. Durieu 
de Maisonneuve venait de retrouver, après 47 ans, cette petite mer- 
veille ? N’était-on pas enfin assuré de trouver à Bordeaux une Société 
amie, versée depuis longtemps dans la connaïssance approfondie des 
productions de tout genre de notre beau département : Société que deux 
de ses membres les plus zélés, MM. de Kercado, vice-président et Dr Eu- 
gène Lafargue, secrétaire-général, devaient représenter auprès de sa 
sœur de Paris ? Quelques autres membres de cette Société, dont il est 
inutile de dire les noms parce que vous en connaissez tous et appréciez 
le haut savoir et l’expérience, n’avaient-ils pas à l’avance préparé un 
programme des plus séduisants auquel, du reste, ni la Société ni la 
session n’ont rien changé ? 


( 486 ) 

Le huit août dernier, jour fixé pour l’ouverture des travaux de la ses- 
sion bordelaise, une soixantaine de membres de la Société venus de 
tous les points de la France, étaient réunis en séance provisoire dans la 
vaste salle que la municipalité de Bordeaux avait eu la bienveillance de 
mettre à la disposition de la Société. Conformément à son règlement, un 
bureau spécial fut nommé; et le doyen de la science dans le sud-ouest 
de la France, le D: Léon Dufour, fut appelé aux honneurs de la prési- 
dence. Hommage sincère rendu à la vaste intelligence et à la longue 
science du noble vieillard, honneur légitimement dû aux rares qualités 
de son cœur, prélude favorable d’honneurs, également mérités que le 
gouvernement allait rendre à notre bon et illustre chef et qui devaient 
clore d’une manière si heureuse la session de 1859. 

Il ne m’appartient pas, il ne peut m’appartenir de vous rendre un 
compte même succinct des divers travaux auxquels furent consacrés 
les huit jours de la session extraordinaire. C’est dans un bulletin de la 
Société que seront réunis tous les documents qui formeront l’histoire 
de cette fête. Procès-verbaux des séances, communications diverses, 
discussions, rapports, viendront y prendre place en même temps que 
ce que l’on peut appeler la partie pittoresque de l’exploration; le récit 
des excursions diverses exécutées par la Société. C’est ainsi qu’à propos 
de la visite à l’ancien Jardin des Plantes et de toutes les belles et curieu- 
ses rarelés qui y sont amoncelées, le Dr E. Cosson ne manquera pas de 
faire ressortir l’habileté proverbiale de son colloborateur, M. Durrieu; 
comme dans un autre lieu, il nous racontera les richesses de l’herbier- 
modèle et de la bibliothèque botanique de notre ami M. G. Lespinasse. 
Le nouveau Jardin des Plantes avait droit à un examen tout particulier, 
et en attendant Le rapport de MM. Decaisne et Jaubert, je ne puis pas- 
ser sous silence qu'avant de quitter Bordeaux, une commission de la- 
quelle faisaient partie trois membres de l’Institut de France , présenta à 
la sanction de la Société, qui l’accepta, une adresse à la municipalité 
bordelaise, pour « rendre hommage à la munificence éclairée qui a créé 
ce bel établissement. » 

Le spirituel et aimable collègue qui, il y a quelque temps, nous 
racontait si agréablement les impressions d’un voyage en Belgique et sur 
les bords du Rhin, nous redira avec le même charme les péripéties du 


voyage d'Arcachon. — M. G. Lespinasse nous décrira les laites de la 
Teste, l’hospitalité si bienveillante de la municipalité d'Arcachon, et 


après nous avoir conduits joyeusement , avec la Société, au cap Ferret, 


( 48T ) 
il nous fera reposer, le lendemain, au centre de la nouvelle cité lan- 
daise, célébrant le même jour la fête de la divine patronne des mers. Il 
nous promènera sous ces arcs de triomphes, élevés par une population 
nombreuse, en même temps qu’en prêtant l'oreille aux accents des 
chœurs religieux des jeunes filles, nous suivrons avec amour et respect 
cette longue flotille toute parée de fleurs et de banderolles, portant en 
triomphe la statue vénérée de Notre-Dame d'Arcachon et bénie par un 
prince de l’Église: cérémonie touchante qui réunissait ainsi dans ce qui 
n’était, il y a quelques jours, qu’un désert, la solennité des fêtes chré- 
tiennes à la grâce des théories antiques. 

Nous relirons, après le voyage d'Arcachon, la relation pleine de 
grâce et de charme qu’un de nos jeunes amis, M. Elly Durieu, improvisa 
en quelque sorte après la longue excursion de La Canau; le départ acci- 
denté de toute la colonie et l’ébahissement d’une population peu accou- 
tumée à voir des magistrats, des ministres, des professeurs, revêtus du 
burnous africain, de la blouse grise du touriste et le dos chargé de la 
longue boite de fer-blanc destinée à recéler les échantillons précieux 
d’une petite characée ou d’une mousse microscopique. Et puis l’accueil 
plein de cordiale aménité du maire de La Canau, les nuits passées pres- 
que à la belle étoile et enfin l’enthousiasme indescriptible que tout le 
monde ressentit à la vue de ce panorama magnifique qui fait de La Canau 
un véritable oasis des landes. Après ces récits, où Elly Durrieu 
nous à prouvé une fois de plus que bon sang ne peut mentir, et aux- 
quels M. Claveau , notre nouveau collègue en Société Botanique, joindra 
sa relation, pleine de gaïté méridionale, de la promenade à Lormont 
et à l’allée Boutant, notre ami, le savant directeur du Jardin Botanique 
de Toulouse, M. le professeur Clos, appréciera scientifiquement et in- 
dustriellement la grande École forestière que vous connaissez tous, Mes- 
sieurs, et dans laquelle le vénérable propriétaire, M. Ivoy, reçoit ses 
visiteurs avec tant de cordialité. 

J'aurais voulu passer en revue, devant vous, les principaux mémoires 
lus dans nos séances : mais je ne puis que mentionner la notice inté- 
ressante présentée par le D' Cosson sur E. Desvaux et les Cypéracées 
Chiliennes ; — le travail long et peut-être un peu trop consciencieux de 

M. l'abbé De La Croix sur quelques plantes de la Vienne ; — le mémoire 
de M. Durieu sur l’organographie des Carex ;—la description d’une nou- 
velle espèce de Malva découverte par notre collègue, M. G. Lespinasse, 
au Port Juvénal, lors de la grande excursion à Montpellier en 1857. 


( 458 ) 

Mais s’il ne m'est pas permis de m’appesantir sur les choses, pas 
même sur tous les discours que d’ailleurs quelques journaux de Bor- 
deaux ont reproduits dans leurs colonnes, 1l ne m’est pas du moins 
défendu de donner un souvenir à ces quelques hommes pleins de savoir 
et de cœur, que leur dévouement à la science avait conduits vers nous. 

Ne devons-nous pas un mot de remerciement à M. le docteur Menière, 
vice-président de la Société Botanique, et délégué pour installer le Bu- 
reau de la session, qui, pendant plus de demi-heure, tint son au- 
ditoire vivement impressionné par un discours où le savant auteur des 
Études médicales sur les poètes latins avait su revêtir les pensées les plus 
élevées, du style le plus brillant, et reproduit avec un art charmant, à 
côté de l’histoire de la botanique à Bordeaux, quelques souvenirs de ses 
voyages en Îtalie, en rappelant les circonstances douloureuses qui lui 
avaient fourni l’occasion de récolter un herbier dans les environs de 
Blaye. 

Que dirai-je de la réponse si touchante de notre Président, M. Léon 
Dufour ? des accents pathétiques avec lesquels, nous expliquant la valeur 
sentimentale d'un herbier, il nous montrait chaque échantillon recueilli 
depuis longues années, comme une carte de visite laissée par un de ces 
vieux amis avec lesquels on est heureux d’avoir passé des jours nom- 
breux, et qui est parti pour un long congé ? 

Vous signalerai-je le membre de l’Institut, l’ancien ministre des tra- 
vaux publics, M. le comte Jaubert, qui n'a point oublié que Bordeaux 
fut presque une patrie pour lui, et qu’au commencement de ce siècle il 
devenait le fils adoptif de l’ancien professeur de droit à la Faculté de 
Bordeaux, François Jaubert, depuis comte et Sénateur de l’Empire ? 

Et ces deux autres membres de l’Institut de France, M. le professeur 
Decaisne, qu’on pourrait à juste titre proclamer une des premières intel- 
ligences botaniques de l’Europe et du monde, et le professeur M. H. Le- 
coq (de Clermont-Ferrand), auteur profond, sagace et consciencieux des 
éludes de géographie botanique, digne conservateur de l'héritage de Ra- 
mond en Auvergne; professeur aussi érudit qu'aimable et spirituel 
causeur. 

Avec MM. de Kralik et de la Perraudière, ces infatigables explorateurs 
de l'Algérie, zélés continuateurs de l’œuvre de MM. Durieu et Cosson, 
la Société vous avait envoyé deux de ses Secrétaires, MM. Eug. Fournier 
et W. de Schœnefeld ; ce dernier, qui a eu l’inestimable bonheur de con- 
naitre d’assez près l’éminent savant entre tous les savants, le grand 


( 489 ) 


Alexandre de Humbold, auquel, dans la séance du 43 mai dernier, il 
rendait un hommage pieux, aussi honorable pour le caractère de celui 
qui le prononçait que reconnaissant pour la mémoire du maître vénéré 
auquel il était dû. 

Je ne puis oublier encore MM. de Pommaret ( de Cognac ), Thévéneau 
(d'Arles), Sahut ( de Montpellier) , Doumet (de Cette ), Ducoudray (de 
Nantes), Lamotte, collaborateur du professeur Lecoq, de Rochebrune 
(de la Charente), et nos collègues Paquerée (de Castillon}, Gassies, 
qui appartient également à Agen et à Bordeaux, Réveil, notre compa- 
triote, déjà professeur dans deux Facultés parisiennes , et qui porte si 
bien le nom que le Vice-Président du Corps législatif devait soutenir 
avec tant d'éclat dans la salle de la Renaissance, en dirigeant les travaux 
du Congrès pomologique. 

Tels furent, Messieurs (j'en oublie, et des meilleurs), les principaux 
des hommes dévoués à la science qui, les uns déjà retirés des hautes 
fonctions gouvernementales , les autres, ayant laissé pour un moment les 
chaires professorales , les fauteuils académiques, les clientèles pénibles 
et soucieuses, ont pris part à la grande fête botanique de la Gironde, et 
sont devenus pendant huit jours les frères des Linnéens de Bordeaux. 
Cest à eux, comme à ces quelques amis que nous regrettions de ne pas 
voir avec nous, J. Gay, Montagne, Naudin (de Paris), À. Braun (de 
Berlin}, c’est à eux , qu’au nom de la Société Linéenne, un compliment 
de bienvenue devait être adressé par notre Président, M. Charles Des 
Moulins, quand un malheur irréparable vint frapper sa noble famille d’un 
coup inattendu , et le força de consigner dans une lettre les paroles que 
nous aurions tant aimé à entendre à la place que ses collègues lui avaient 
désignée dans le Bureau (1), mais où , du moins, il eut le soin de se faire 
représenter par l’hommage plein de délicatesse qu’il fit à la Société Bota- 
nique , du Supplément final au Catalogue des Plantes de la Dordogne, 
publié le jour même de l'ouverture de la session. 

C’est à eux aussi qu’à mon tour j’adresseles remerciements de la Société 
Linnéenne, pour cette belle fête de famille scientifique , riche d’entrain, 
d'animation, de gaîté, et dont on a oublié depuis longtemps les fatigues 
et les marches, pour ne se souvenir que de ces relations charmantes qui 
se sont établies entre les membres de l’une et de l’autre compagnie, et 
des liens nouveaux et plus étroits qui doivent les attacher l’une à l’autre. 

Telle fut, Messieurs, la session extraordinaire, à Bordeaux, de la 
Société Botanique de France. Honorée, dès son début, comme nous le 
sommes encore aujourd’hui de la présence de S. Ém. Mer le Cardinal, et 
du premier Magistrat du département, elle a clos ses travaux en accla- 


(1; Vice-Président de la session, 


( 490 ) 


mant avec enthousiasme la croix d’officier de la Légion d'Honneur, qui 
venait, comme le disait si modestement celui qui était l’objet de cette 
insigne distinction, — notre président, M. le Dr Léon Dufour, — trans- 
former un crucifère à fleur simple en crucifère à rosette orbiculaire. 

Mais, pendant toute la durée de cette session, la Société Botanique n’a 
changé ni de nom, ni d’allures ; elle fut à Bordeaux, comme à Stras- 
bourg, comme à Montpellier, ce qu’elle est à Paris, — toujours une, 
toujours la même; — ne cessant pas un seul instant de poursuivre 
régulièrement ses séances comme Société Botanique ; et même, dans la 
composition des bureaux exceptionnels qui dirigent les sessions extraor- 
dinaires , n’admettant que des membres pris dans son sein. 

C’est en cette dernière qualité, Messieurs, que j'ai été appelé à prendre 
une faible part aux travaux dont je ne vous ai donné qu’un bien léger 
aperçu. Mais laissez-moi ajouter que je n’oublie pas qu'avant d’être de la 
Société Botanique de France, j’ai été et suis toujours Linnéen de Bor- 
deaux; et je tiens à ce que mes amis et mes collègues, qui m’écoutent, 
sachent bien que si j'ai été convié à enregistrer les actes de la session, 
c’est la Société Linnéenne surtout que l’on a voulu honorer en me con- 
fiant des fonctions auxquelles je ne pouvais avoir personnellement aucun 
droit légitime. 

Et maintenant, Messieurs, que les Assises scientifiques de l’année 
dernière ont donné à-peu-près la mesure du mouvement scientifique et 
et littéraire de la Gironde, et en ont montré les aspirations et les ten- 
dances; — maintenant que, cette année, la Session de la Société Bota- 
nique de France, et la tenue du Congrès Pomologique ont fait voir, en 
deux ordres bien différents, combien il est facile d'attirer, d'accueillir et 
de garder à Bordeaux , un nombre considérable d'hommes éminents dans 
tous les genres, — maintenant que les portes viennent de se fermer 
sur la plus belle Exposition industrielle que jamais la province ait pro- 
duite ; — maintenant, enfin, que de toutes les manières et sous toutes 
les formes, en littérature, en sciences, en industrie, Bordeaux, notre 
patrie bien-aimée, tend à s'élever et à sortir de la sphère commerciale et 
mercantile à laquelle on paraissait la condamner, faisons des vœux, —plus 
que cela, Messieurs, travaillons, pour que tous ces travaux, toutes ces as- 
semblées, toutes ces fêtes soient couronnées par une solennité qui les 
comprenne tous. De quelque part qu’il vienne, un Congrès sera bien reçu; 
et, nous en sommes sûrs d'avance, les Linnéens ne seront pas les der- 
niers rendus à -ces fêtes, que nos successeurs pourront appeler avec 
raison les GRaNDs Jours scientifiques de l’Aquitaine. 


Dr Ta. CUIGNEAU. 
Bordeaux, 9 Novembre 1859. 


>» Janvier 1860. 


( 491 ) 


DESCRIPTION PHYSIQUE DE L'ILE DE CRÊTE. 
( Suite.) 


LIVRE IL 


GÉOGRAPHIE. — PHYSIQUE DU SOL. — MÉTÉOROLOGIE. 


CHAPITRE L. 


GÉOGRAPHIE MATHÉMATIQUE ET PHYSIQUE. 


CONNAISSANCES GÉOGRAPHIQUES DES ANCIENS. 


Strabon , Pline et Ptolémée, dans leurs écrits succincts, ont donné 
des notions précises et exactes, reproduites tantôt en abrégé par Pom- 
ponius Mela, Solinus, etc., et tantôt avec des développements par les 
commentateurs de la Renaissance, dont il sera dit quelques mots en 
traitant des cartes successives de l'île. Tandis que les deux premiers 
donnèrent de véritables descriptions, Ptolémée se borna à une énumé- 
ration des positions géographiques de 63 localités situées surtout près 
des côtes. 

« La Crète, dit Strabon, est située entre la Cyrénaïque et la Grèce 
prise depuis le Sunium jusqu’à la Laconie; l’île s'étend, de l'Est à 
l'Ouest, en longueur, parallèlement à ces contrées; elle est baignée, au 
Nord, par la mer Ægée et la mer de Crète; comme au Sud par cette 
portion de la mer Lybienne qui touche à la mer d'Égypte. — Le côté 
occidental de la Crète est celui où se trouve située la ville de Phalarna : 
il a de longueur environ 200 stades et se termine par deux pointes, dont 
la plus méridionale s'appelle Griu-Metopon ; et la plus septentrionale, 
Cimarus. Du côté du levant, ce qui forme l’extrémité de l’ile, est le cap 
Samonium , lequel ne se trouve guère plus oriental que le Suinum. Vers 
le tiers de la longueur se trouve, du côté (de l'Occident) , un isthme 
d'à peu près 100 stades, aux extrémités duquel sont situés, d’une 
part, sur la mer septentrionale, l’habitation dite Amphimalla, et, de 
- Pautre part, Phœnix (port) des Lampenses. — C’est à partir de là, 
et en avançant dans le milieu de la longueur, que l'ile prend sa plus 
grande largeur. (Au dernier tiers de la longueur), les deux rivages for- 


Tome XXI. (3° SERie : T. I. — G° Livraison). 47 


( 492 ) 
ment d’abord, en se rapprochant, un second isthme, plus méridional 
que le premier, et dont la mesure est de 60 stades, prise entre la 
Minoa, du district des Lyctiens, et la ville d’'Hierapytna, qui se voit au 
fond d’un golfe sur la mer Lybique ; puis ils se réunissent au Samonium, 
pointe aiguë tournée vers l'Égypte et les îles des Rhodiens (1). » 

Les caps principaux au nombre de 11 sont énumérés avec soin par 
Ptolémée, qui place sur la côte septentrionale les caps Korykos, Psakon, 
Kyamon, Drepanon, Dion, Zephyrion et Samonium ; en continuant, se 
trouvent sur la côte méridionale, les caps Erythraion (Ilanum de Pline), 
Leon, Hermaia et Kriou-Metopon. Tous peuvent être facilement recon- 
nus ; cependant je ne suis pas d'accord avec les auteurs modernes pour 
les Zephyrion et Leon ; ces noms, à mon avis, devaient se rapporter 
aux caps les plus remarquables des parties de l’île où ils sont indiqués : 
les caps Haghios-Joannes et Matala. D’autres auteurs mentionnent les 
caps Kelia, sans doute de Sitia, Ampelos près des îlots Kavallous et 
Treton au pied de l’'Haghios-Elias , sur la côte occidentale. 

Un seul golfe est indiqué par Strabon et Ptolémée : l’Amphimalis sinus 
occasionné par l’isthme occidental; c’est, sans nul doute, le golfe de 
l’Almyros. 

Les quatre grands massifs montagneux, si remarquables et si dis- 
tincts, surtout pour les navigateurs, sont, sinon dénommés, au moins 
toujours énumérés par les auteurs. « La Crête est montueuse, dit Stra- 
bon, hérissée de forêts, mais coupée de vallons fertiles. De ses monta- 
gnes, celles qui se trouvent dans la partie occidentale de l’île s’appellent 
Leucé et ne le cèdent point au Taygete pour la hauteur : elles se prolon- 
gent l’espace d'environ 800 stades, et forment une chaîne qui se termine à 
l'isthme (occidental). Au centre, dans la partie où l’île est le plus large, 
se voit le mont Zda surpassant toutes les autres montagnes en élévation, 
et dont la base, qui a 600 stades de circonférence, est entourée des prin- 
cipales villes de la Crète; d'autres montagnes aussi considérables que les 
monts Leucé s'étendent au Midi ou aboutissent à l’extrémité occidentale 
de l'ile. » Pline traduit le nom de Levka-ora par celui d’Albi-montes; 


(1) Géographie de Strabon , traduction française. T. IV. p. 115 à 121. — Himaros 
doit être une altération, par les copistes du Moyen-Age, de Korykos mentionné plus 
loin, comme Amphipalian un autre d'Amphimallan. — L’indication que l’isthme 
oriental est plus méridional que le premier, montre clairement que Strabon savait que 
la Crète n’est pas dirigée le l’'E.-N.-E, à l’O.-S.-0., comme le dénotent les posi- 
tions de Ptolémée, mais bien de l'E. un peu S. à l'O. un peu N. 


(493) 

Ptolémée donne le nom de Hieron-oros au massif compris entre Lyktos, 
Hierapetra et Inatos; et, dit Strabon « le mont Dicié est à 1,000 stades au 
levant de l’Ida, 400 stades en deçà du cap Samonium. » Quelques autres 
monts de second orûre sont encore dénommés : « Le mont qui appartient 
au territoire de Gydonia , dit Strabon, est le Tytirus au sommet duquel 
est bâti un temple appelé, non Diciœum, mais Dictynnæum; » Pline dé- 
signe ce chaînon du cap Spadha sous le nom de Cadiscus. On trouve 
encore le Berekynthos ou Malaxa au S.-E. de Khania; le Kedrison-oros 
ou Kedros au S.-0., le Tallaion-oros ou Kouloukouna au N. et le Stron- 
gylos ou Strombolo au N.-E. de l’'Ida; l’karos ou Jouktas au S. de 
Mega-Kastron,; l’Asterousia ou chaîne côtière de Messara ; l’Argaion-oros 
au-dessus de Lyktos, partie N.-0. des montagnes de Lassiti, et enfin 
l'Arbion-oros sur leur côte méridionale, au S.-E. de Viano. 

Quant aux cours d’eau, ils sont énumérés bien incomplètement. Sur 
la côte septentrionale Ptolémée ne donne que la position de l’embou- 
chure du Pyknos qui est peut-être le Khilia de Stylo. D’autres auteurs 
citent les Jardanos et Oaxos qui sont considérés comme le Platania de 
Khania et le Stavromeno d’Arkadhi; on rapporte leurs Triton et Pothe- 
reus au Gheophiro. Les noms de Teren et d’Amnisos sont assignés au 
Kartero ou quelquefois à l’Aposelemi, car Strabon dit que « Cnossos 
s'appelait jadis Cœratos comme le fleuve qui coule sous ses murs » : le 
ruisseau de Kassaban. Sur la côte méridionale, Ptolémée place les embou- 
chures des Masalia, Elektra, Katarraktes, Lethaios ; les trois premiers 
sont considérés comme les Mega-Potamos, Platy et Soudsouro, car 
Strabon , en parlant de Gortyna, dit que « le fleuve Lethæus la traverse 
tout entière. » Enfin, on rapporte à l’Anapodhari le nom d’Inatos. 

Strabon n’a pas fait la moindre mention des îlots qui avoisinent la 
Crète; mais la position de chacun des groupes qu’ils forment a été pré- 
cisée par Pline d’une manière concise et claire : « Reliqua circa eam 
(Cretam, dit-il), ante Peloponnensum duæ Corycæ, totidem Myle : et 
latere septentrionali, dextera Crelam habenti, contra Cydoniam, Leuce, 
et duæ Budoræ. Contra Matium, Dia. Contra Tianum promontorium , 
Onisa, Leuce. Contra Hierapytnam, Chrysa, Gaudos. Eodem tractu, 
Ophiussa, Butoa, Aradus, circumvectisque Criu-Melopon, tres Musa- 
gores appellatæ. Ante Samonium promontorium, Phocæ, Platiæ, Sirni- 
des, Naulochos, Armedon, Zephyre. » Il n’est pas aussi facile d'appliquer 
les noms aux îlots qui composent les groupes; aussi les auteurs moder- 
nes ne sont-ils pas toujours d'accord ; quant à moi, pour ne parler que 


( 494 ) 

de ceux qui sont incertains, je verrais volontiers Mylæ dans Petalidha et 
Megalonisi, Leuce dans Soudha qui est blanc et les duæ Budoræ dans 
Haghios-Theodhoros et le rocher voisin. Elaphonisi et quelques rochers 
de la côte occidentale me sembleraient Ophiussa, Butloa et Aradus. 
Enfin , pour ceux qui sont devant le cap Samonium ou Sidhero, je les 
supposerais énumérés de l'E. à l'O. et je traduirais les noms anciens de 
la manière suivante : Phocæ en Gradès, Platiæ en Elasa, Sirnides et 
Naulochos en Dhionysiadhes, Armedon en Psyra et Zephyre en Spina- 
Longa, situé à la base du Zephyrinum promontorium de Piolémée.— Ce 
dernier auteur donne les positions des deux principaux îlots, Dia et Gau- 
dos , appelé par lui Claudus, et d’un troisième situé sur la côte méri- 
dionale au-devant du cap Léon; celui-ci appelé Letoa ne peut guère 
être rapporté qu'aux Paximadhia du golfe de Messara ou peut-être aux 
ilots qui abritent Kaloimnionous , port près du cap Kephala. 


19 GÉODÉSIE. 


Posilion, limites et super ficie de la Crète. — La Crète est l’une des cinq 
grandes îles de la Méditerranée, cette mer intérieure qui, malgré son exi- 
guité, baigne les côtes de l’Europe, de l’Asie et de l'Afrique, et établit des 
communications qui, de tout temps, ont été si favorables au développe- 
ment et à la diffusion de la civilisation. — Elle est située vers le milieu 
de la longueur du bassin oriental qui s’étend de la Syrie à la régence de 
Tunis , et à peu près sur le méridien moyen de l’Europe ; celui sur le- 
quel se trouve son centre n’est qu’à 4° 30° à l’Est de celui du cap Nord, 
et traverse l’extrémité australe de l'Afrique. — Elle forme la partie 
la plus méridionale de l’Europe; son parallèle moyen passe par l'ile 
de Chypre et au $. de l’île de Malte, pénètre en Afrique près de Sfax 
et en sort au S. du détroit de Gibraltar. Son antipode est dans le cen- 
tre de l’Océan Pacifique, par 20° au $. de Taiti. 

La Crète, à l'exception de la Sardaigne, est plus éloignée de la terre- 
ferme qu'aucune autre des grandes îles méditerranéennes; elle est, ce- 
pendant, moins isolée que celle+ci, car elle fait partie d’une série d’iles 
disposées en arc de cercle, entre la Morée et l’Anatolie, et qui ferme au 
S. l’Archipel grec et le sépare de la Méditerranée proprement dite. Elle 
appartient bien à l'Europe; car, d’une part, elle est placée à l'O. de toutes 
les îles qui dépendent de l'Asie, au $. et à une distance peu considérable 
de ces séries d'îles, dirigées du N.-0. au S.-E. qui ne sont autre chose 
que les sommités des prolongements sous-marins des chaînes monta- 


( 495 ) 


eneuses continentales, dirigées dans le même sens, de l'Eubée, de PAtti- 
que et de l’Argolide ; et d’autre part, elle est située à une grande distance 
de la côte africaine, sans îles intermédiaires. 

La Crète est allongée à peu près de l'E. à l’O., avec deux étranglements 
qui læ divisent en trois parties : une centrale et deux presqu’iles."Aîses 
extrémités , elle est reliée à l’Europe et à l’Asie par des îles ; à la Morée 
par une série d’îles dirigées du S.-E. au N.-0., qui forment le prolongement 
de la chaîne de la Laconie et dont font partie Æghilia et Tserigo; à l’Asie- 
Mineure par une série d'îles dirigées du S.-0. au N.-E. et qui comprend 
Kaso, Skarpanto et Rhodes. — Par sa direction et sa distance des chaînes 
srecques, elle se sépare nettement de l’Archipel ; elle est bien véritable- 
ment dans une sorte d'isolement , et se détache de tout ce qui l'entoure. 
Il ne s’y rattache que des îlots situés dans son voisinage immédiat, et trois 
autres, Aughon, Gaudhos et Gaudhopoula, un peu plus éloignés, mais 
beaucoup plus rapprochés encore qu'aucune des îles de l’Archipel. 

Quant à l’allongement de la Crète, on pourrait être incertain sur sa 
direction véritable; car auquel des deux accorder la prééminence ? de 
l'élément hydrographique ( ligne des côtes ), ou de l'élément orographi- 
que ( alignement des massifs montagneux }. 

Relativement au premier, il y a trois lignes qui concordent d’une 
manière bien remarquable : {° celle qui passe par les deux grands caps 
ou akroteri des extrémités (caps Spadha et Sidhero); 2 celle qui passe 
par les deux golfes les plus profonds (golfe de l'Almyros et de Mirabello); 
3 celle qui passe par les deux golfes situés à l’extérieur de ceux-ci 
(golfe de Khania et baie de Sitia). La direction de la moitié occidentale 
de la côte méridionale ( du cap Krio au cap du Vouvala), concorde éga- 
lement avec les trois lignes précédentes comme le montre la liste sui- 
vante : 

Caps Spadha et Sidhero . . . . .. O. 90 20° N. à E. de 20° S. 
Golfes de l’Almyros et de Mirabello. ©. 90 25° N. à E. 90 255. 


Golfes de Khania (Gonia) et de Sitia. O. 9o 25° N. à E. 90 25 S. 
Côte S. (Krio — Vouvala).... .. 0. 80 50° N. à E. 80 50°S. 


Relativement à l'élément orographique, la Crète se compose d’un 
massif montagneux central, séparé à l'E. et à l’O., par un plateau acci- 
denté, d’un double massif montagneux; en tout cinq massifs monta- 
gneux qui se trouvent placés sur une ligne droite. On peut alors prendre 
soit une ligne passant par la partie centrale des massifs, soit celle qui 
passe par les plus hautes sommités. — Pour la première, on doit évi- 


( 496 ) 

demment faire abstraction des appendices qui ont des directions diffé- 
rentes, et qui ne se rattachent à l’île que par des parties plus basses ; 
tels sont : sur la côte N. les quatre caps ou akroteri, dont les deux occi- 
dentaux , sont dirigés S.-N., et dont les deux autres le sont du S.-0. au 
N.-E.; et sur la côte méridionale, la chaîne côtière du Kophinos qui, tout 
en faisant corps avec l’île, puisque la plaine de Messara n’est pas recou- 
verte par la mer comme la baie de Soudha, ne doit pas être prise en 
considération pour la direction de l’île; en effet, ce n’est qu'une longue 
arête dirigée différemment, et ne se rattachant à l’un des groupes monta- 
gneux que par son extrémité orientale. 

La ligne coupant le méridien de lApopighari, à égale distance de Go- 
nia et du cap Phlomi, et celui de l’Aphendi-Stavro, à égale distance de 
la première pointe, au N.-E. de Milato et de l'embouchure du Myrto, 
va du port Sphinari au cap Avlaki. — Une ligne droite passe également 
par les plus hautes sommités des cinq massifs montagneux. Elle part du 
cap au S. du port Stavro, passe à l’Haghios Dhikios, à 50” au N. du Vo- 
lakia, 3 30” au N. du Theodhori, par le Psiloriti, à 50” au N. du Spathi 
de Lassiti, par l’Aphendi-Kavousi, à 30” au S. du Thiro, et sort par 
la plus orientale des îles Kavallous. — Ces deux lignes ont des directions 
absolument semblables ; elles courent de l'O. 7° 20° N. à l'E. 7: 207$. 

Si l’île de Crète était un plateau ou une plaine à couches horizontales, 
on pourrait peut-être choisir de préférence l’élément hydrographique ; 
mais comme elle est formée de massifs de montagnes à couches très- 
bouleversées, disposés en ligne droite, nous pensons que l’on doit 
accorder la prééminence à l’élément orographique et admettre cette 
dernière direction comme la véritable. 

La Crète a une longueur presque octuple de sa largeur moyenne; elle 
est divisée en trois parties par deux étranglements. Ses limites, extrêmes 
non compris les petits îlots qui en dépendent, sont : 


En longitude orientale du méridien de Paris : 


Presqu’ile d’Elaphonisi. . . . . . . . 210 9? 307 
Cap Plako ( Salomone }).. . . . . .. 24 -- —- 


En latitude boréale : 


Cap, Spadharoit re METTRE 350 41? 30” 
Can MAtala en eee A PE LOT AT UE 


Ses dimensions ont été appréciées très-diversement par les auteurs : 
Vosgien lui aftribue 80 lieues de longueur et 20 de largeur, avec une 


( 497 ) 
circonférence de 200 lieues; Norie ne lui donne que 46 lieues de lon- 


gueur, et 11 et 2 lieues de largeur. 
D’après nos déterminations , ses dimensions sont les suivantes : 


( Elaphonisi.— Psiloriti. . . . . . . . . . . AAA D 
LONGUEUR. dut 240% 
DEAN AR Ta RTE + Psiloriti.— Cap Plako. . . . 4134 
(Celle des Pyrénées françaises, de Hendaye au cap Cervera estde,  415k) 
| Cap Stavro. — Cap Kephala. . . . . . .. 52k 
LARGEURS............ Jsthme de Rhethymnon. . . . . . . . . ë 18 
| Isthme-derHierapetra.. 7. 40.12% 2, A2 


Superficie. 7,735 À : 
LARGEUR novexye, | PRE entre Gonia et Souia. . 32k,6 


CIRCONFÉRENCE (1rès-petites sinuosilés négligées) : 


Côte septentrionale, du cap Grabousa au cap Sidhero . . . 487k 
Côte orientale, du cap Sidhero au cap Kakialitkhi. . . . . 50 


888k 
Côte méridionale, du cap Kakialitkhi au cap Krio. . . . . 285 
Côte occidentale, du cap Krio au Cap Grabousa . . . . . . 66 
MDENARCrElC SCIE EAN EN 7,735 kil. carrés. 
SUPERFICIE. : : à , ; 
| Des petites îles qui en dépendent . 65 — 


ToraL. . . . ‘7,800 k. c. ou 780,000h 


Cette superficie est inférieure de 1/9° environ à celle de la Corse, qui 
est de 874,141 hectares. La Crète est ainsi la plus petite des cinq 
grandes îles de la Méditerranée. 

Délerminations successives de positions géographiques. — Strabon et 
Pline n’y font pas la moindre allusion. Dans la Géographie de Ptolémée, 
qui est regardée par quelques savants comme une œuvre multiple expri- 
mant la somme des connaissances géographiques jusqu’au XV: siècle, 
le chapitre XVIT du troisième livre leur est entièrement consacré ; on y 
trouve la longitude, à partir des îles Fortunées, et la latitude de 47 caps, 
embouchures de cours d’eau, ports et villes des côtes, puis de 3 hautes 
montagnes , de 10 villes de l’intérieur et enfin de 3 petites îles adjacen- 
tes, non compris Cimolis et Melos. Je reproduis seulement les six sui- 
vantes qui se rapportent aux points principaux : 

Longitude. Latitude. 


Criu-Metopon, prom... ... 52036 340140? 
DC tan AE Det 52 26 34 50 
CGYdonis.:4.1.1.... dar o0 35 00 
HORAIRE ANR EE 54 30 35 20 
Samonium, promont. . . . . 55 50 35 26 


LAN E hade SN EN nd te 9h 54 20 34 30 


( 498 ) 

L'état des connaissances géographiques était alors si imparfait, que 
sur toutes les cartes construites d’après ces données, la Crète présente 
une orientalion inverse de celle qu’elle a, la partie orientale étant rele- 
vée vers le N. au lieu d’être abaissée vers le S. Ces déterminations furent 
copiées par tous les auteurs subséquents qui les appliquèrent aux 
localités modernes, d’une manière plus ou moins inexacte, comme 
Apianus et Gemma dans le XVI: siècle. 

En 1672 le P. Riccioli (1) donna cinq déterminations, dues probable- 
ment à des observateurs vénitiens, d’après lesquelles on peut voir qu’à 
cette époque l'orientation de l’île était à peu près exactement connue. Ce 
sont les suivantes : 

Longitude, Latitude. 


Capo Arietino di Candia (Hernicum prom.) . . . 490414 330 40? 
Capo Spada in Candia. . . . . . .. AA. RQ NA 49 24 34 50 
Canéa/im Candia (CydOon)-2 #0 ICE 49 51 34 34 
Candia, Citta (Creta et Cyteum) . . . . . . . . 51 32 34 40 
Capo Salomone CAN EEE TE 53 12 34 10 


En 1694, de Chazelle parcourut la Méditerranée pour le relevé des 
cartes du 2° volume du Neptune français; mais les observations qu’il dût 
faire en Crète, n’ont pas été publiées. 

En juin et juillet 1701, pendant son voyage au Levant, le P. Feuillée 
détermina astronomiquement les deux positions suivantes qui furent 
publiées plus tard (2) et rapportées au Méridien de Paris. 


Longitude. Latitude, 
La Canée, . 4 tenace OO IE 
CARE MENT RE EC 22 58 0 35 18 39 


En 1788, l'Encyclopédie (3) les reproduisit et donna en outre les qua- 
tre suivantes comme résultant aussi d'observations astronomiques : 


CapaBuse HR te ir, el PAPA 21e 28 30° 350 41? 0” 
CAD DATA PR  URTE 21 40 6 35 45 0 
RETOMME RER à ie dede Me ARE LtOt (1) 35 24 0 
Cap Sidera ..: Æ . 2'AUROQBUIG 27410 24 35 30 35 20 6 


(1) Geographia el Hydrographia reformatæ, L. IX, Chap. IV, p. 592-96. 

(2) Connaissance des Temps, à partir de 1718; et Mémoires de l’Académie des 
Sciences , pour 1702. 

(3) Géographie moderne, T. I; et seconde partie de l'Analyse des Cartes, p. 6. 


( 499 ) 


En 1816 et 1817, le capitaine Ganttier exécula les travaux hydrogra- 
phiques nécessaires pour une carte de l’Archipel, et publia un mémoire 
(1), dans lequel il donna les positions de douze points des côtes de la 
Crète; en 1823, il détermina celles des deux grandes villes; enfin 
dans la carte publiée en 1827, se trouvent signalées trois des hautes 


A 


sommités de l’île, qui ont sans doute servi dans la triangulation de l’Ar- 
chipel. La position de chacun des dix-sept points suivants a donc été 


déterminée rigoureusement : 


Longitude. 

SOU TEA CAD en tale Le 240 40° 15” 
Sordi (milieu de Pilot). . . . . .. 21 6 48 
Garabusa (ile). . . - . . 4 af cohrrair 43 420 
RUSON (CAD) PEN EN NA MEN MERS TRETSNEAS 
SATA CAD) AMEN et Ge. 21 23 40 
Pa Cancerile chalet)": 5.142.1 .5 MAL AOA 
MontiMelessa. #9. CRUE...» .  - ON IPÆT LAN 
METONTE nou OEM MR En 
Candie (princip. minaret). . . , .. 22 471 45 
(Montagne de Lassiti). . . . . . . . 23 10 0 
Stlomon:(cap}: 29%n:0:, petr-lacis 23 59 10 
Christianes (iles), la plus S. .. .. 923 47 95 
Calderonis (îles), pointe N. E. de 

AHAMDIUSOCCIAEN AI EN PET 2 M2 TN 0 
Mat (ea pi) MM ANOIENR ASIN NOM orES0 
Paximadie (île), la grande. . . .. 22 14 35 
Pointe O. du Gi Gozze. . .. . .. . . 91 41 45 
MINCHdUIP CG O7 CN RC CET 21 39 40 


En 1828, Coulier donna (2) comme empruntées au 


positions des cinq autres points suivants : 


Longitude. 
Retimo (ville }bhienas anosmouseslo 28b 171 #72 
Retio (CAD) en 22 20 55 
SAR JEAIE (CAP) ce ce. ee 0e 23 26 30 
Sidera (sommet du cap}. . .... .. 23 58 25 
Yala (cap). .'. : .”. NME AE UE MO 


Latitude. 
350 45° 35” 
35 34 20 
35035040 
35 36 38 
35 40 30 
35 28 40 
25 23 410 
35 13 10 
321000 
35, 7 0 
35 9 45 
34 5305 


34 52 35 
34 55 5 
34 59 40 
34 52 0 
34 56 15 


même auteur les 


Latitude. 
350 22 17” 
30 2D 102 
35 19 140 
35 17 40 
SMS 0 


Dans la même année, Batten modifia légèrement d’après le capitaine 
Smyth la position du Castro de Grabusa, dont la longitude devint 21° 13° 


3” et la latitude 35° 35° 37”. 


(1) Positions géographiques dans la Médilerranée; et Connaissance des Temps, 
pour 1825. Quatre sont, en outre, indiquées chaque année dans ce Recueil. 


(2) Tables des principales posilions géographiques du globe. 


( 500 ) 


En 1848, M. Baudin (1), d'après des travaux hydrographiques , sans 
doute plus récents, avait modifié légèrement les quatre positions de 
Spada, Candie, Sidera et Salomon , et ajouté les quatre suivantes : 


Longitude. Latitude. 
Meleka (mont). . :.....:.... 210 48 0” 350 52 30” 
Stan-Dia (milieu). : .. . . . . .. 22 54 0 35 927 15 
BOvostsetis here Mans . ue M£sB 001430878235 
CaplGouderon EME ER OEE 23 48 15 34 56 45 


En 1843, enfin, le capitaine Graves, commandant du Beacon, a 
déterminé de nouveau la position des deux grandes villes et il leur a 
trouvé, réduction faite au méridien de Paris, les positions suivantes : 


Longitude. Latitude. 
Khania (phare) ne 4. 0 210 417 6? 350 30? 49? 
Megalo-Kastron (phare). . . . .. 22 47 45 35 21 0 


Relevé des éléments d'un réseau trigonométrique intérieur. — Lors- 
qu'avant mon départ pour l’île de Crète, j’étudiai les différentes cartes 
qui avaient été publiées depuis vingt-cinq années ; celles de Sieber, de 
Lapie, de Pashley, de Kutscheit et Mahlmann , je vis de suite que celle 
de Lapie avait été reproduite presque trait pour trait par les trois 
auteurs suivants, à l'exception toutefois des lieux habités de l’intérieur 
qui avaient souvent subi de grands déplacements par suite des recon- 
naissances de M. Pashley. Je pensais, en outre, que si la carte-mère de 
Lapie devait être exacte ou à peu près pour tout ce qui se rattache au 
contour extérieur de l’île, il était fort probable que pour tout ce qui 
était indiqué à l’intérieur, relief du sol, cours d’eau, lieux habités, il 
devait y avoir de grandes erreurs, puisque M. Pashley et, après lui, 
M. Mahlmann avaient fait des changements considérables. Je puis dire 
par avance que sous ces deux rapports mes prévisions se sont largement 
vérifiées, 

Il me semblait donc indispensable de me livrer à des recherches de 
géographie proprement dite. Mais, d’une part, la somme que le Muséum 
pouvait mettre à ma disposition ne me permettait pas d'acquérir un 
théodolite, dont j'aurais bien pu apprendre assez vite l’usage, et de faire 
les frais nécessaires pour mesurer une base et établir sur les points 
culminants des mires qui auraient été bien vite détruites par les habi- 


(1) Manuel du Pilote de la mer Méditerranée, me partie, p. 386-408, 


( 501 ) 
tants ignorants et superstitieux, si je n'avais commis à leur garde quel- 
qu’un d’entre eux moyennant finance. Mais, d’autre part, la durée du 
séjour que je devais faire dans l’île, pour son exploration surtout géolo- 
gique, ne devait pas me laisser le temps nécessaire pour une triangu- 
lation un peu précise et, à plus forte raison, pour un relevé topogra- 
phique assez détaillé. | 

J’arrêtai de faire seulement une triangulation rapide, suffisante pour 
déterminer d’une manière approchée la position des points culminants, 
soit relativement à la côte, soit par rapport les uns aux autres , et pour 
pouvoir coordonner les croquis du relief du sol que je prendrais de 
chacun de ceux-ci. Mon principal but était de préciser le mieux possible 
le point où mes observations géologiques seraient faites. Ayant publié 
deux années auparavant ma Carte géognostique du plateau terliaire 
parisien à 1/300,000 , je jugeai cette échelle suffisante, quoiqu’appli- 
quée à un pays montagneux, à sol très-accidenté, puisque le kilomètre 
est représenté par 3 mill. 42. 

Pour donner à mes observations une précision en rapport avec l’échelle 
adoptée, je vis qu’il suffisait de prendre les angles horizontaux, servant 
à déterminer la position de la plupart des points, à un demi-degré et 
même à un degré près. Pour les angles verticaux, — qui devaient être pris 
en vue de déterminer la hauteur de quelques points que je n’aurais pu 
visiter, ou bien des distances à la côte, — une approximation plus grande 
était nécessaire. Cependant, je ne pouvais espérer non plus d’atteindre une 
très-grande précision, puisque le court côté vertical du triangle rectangle 
devait être une altitude déterminée à l’aide du baromètre dont l'emploi 
laisse toujours une certaine incertitude sur le résultat obtenu, surtout 
lorsqu'on ne peut faire qu’une seule observation sur le même point, et 
que le lieu où se font les observations correspondantes est placé à quel- 
que distance. 

Je me bornai donc à emporter un petit sextant de poche de construc- 
tion anglaise donnant les minutes, et un horizon artificiel à mercure 
pour les angles verticaux. Pour les angles horizontaux , je devais me 
servir de ma boussole de géologue dont l'aiguille avait 49 mill. de lon- 
gueur ; elle était munie d’un petit miroir placé au point S. et perpen- 
diculaire à la ligne N.-S., qui devait servir à la fois de niveau Burel, 
dont l’exactitude est supérieure à celle du niveau d’eau, et de point de 
mire , lorsque la boussole est placée sur une plate-forme spéciale à pivot 
du trépied du baromètre; chaque degré ayant sur le cercle 0 mill. 43, 


( 502 ) 
il m'était facile d'apprécier un demi-degré (1). J’avais deux baromètres 
d’Ernst vérifiés par M. Delcros; l’un neuf, devait me suivre; l’autre, qui 
m'avait déjà servi dans plusieurs voyages en France, devait rester pour 
les observalions correspondantes que je supposais pouvoir être faites sur 
quelque point du littoral. 

Pendant tout le cours de mes explorations, sur chaque point élevé où 
j'ai pu aller (il en est peu de culminants sur lesquels je ne sois monté), 
j'ai recueilli une série de matériaux pour ma description de Pile; ils 
comprennent, au point de vue de la géographie physique : 4° une déter- 
mination de l'altitude à l’aide d’une observation barométrique; 2° un 
relevé à la boussole des angles horizontaux passant par tous les points 
visibles dont la détermination pouvait avoir quelque utilité : montagnes, 
côtes, lieux habités, etc.; 3° un relevé au sextant de tous les angles 
verticaux également intéressants à connaître; 4° des croquis représen- 
tant aussi approximativement que possible, pour toutes les parties visibles, 
les formes apparentes du sol, le cours des ruisseaux et la position des 
lieux habités ainsi que quelques profils de montagnes; 5° enfin, sur 
l'aspect du pays, vu de ces hautes sommités, quelques notes qui, pour 
la plupart, ont été employées dans l'itinéraire. 


(1) Pour les observations faites avec le sextant , l’angle vertical mesuré directement 
est celui que fait avec la verticale de la station la ligne qui passe par le point visé. 
Cet angle est supérieur ou inférieur à 90°, suivant que ce dernier est plus haut ou 
plus bas que la station; la différence est l’angle que fait la ligne qui passe par les 
deux points , soit au-dessus soit au-dessous de l’horizontale de la station où l’on est 
placé. 

Pour les observations avec la boussole donnant les angles horizontaux , on com- 
mence par installer celle-ci sur le pivot que porte le plateau du trépied, et sur lequel 
elle est mobile pour pouvoir être placée horizontalement, et, en la faisant tourner, 
on amène le zéro du cadran à l'extrémité N. de l'aiguille. Ensuite, en faisant tourner 
la boussole sur son pivot, de gauche à droite, on vise successivement, à l’aide du 
miroir placé au point S. tous les points remarquables situés autour, en partant du S: 
et en y revenant, après avoir passé par l'E. le N, et l'O. Les quatre points cardinaux 
correspondent alors aux angles suivants : 


S. magnétique. 00 ou 3600 N. magnétique. 1800 
E. -- 900 0. — 2700 


Pour trouver la direction d’une des lignes de mire par rapport à l’un des quatre 
points cardinaux, on prend l’angle obtenu et on y ajoute celui de la déclinaison 
(11° 1/2 dans la partie orientale de l'ile et 12° dans la partie occidentale ) ; si le nom- 


( 503 ) 

Mes observations ont eu lieu sur soixante-quinze points différents, 
savoir : vingt-cinq dans la région centrale, douze dans la presqu'île 
orientale de Sitia et trente-huit dans la presqu’ile occidentale de Sphakia 
et Selino , celle que je parcourus le plus, en raison de sa proximité du 
lieu le plus ordinaire de ma résidence, Khania. Sur ce nombre, trente- 
six sont de première importance pour la triangulation de l'ile; les 
autres ont été faites seulement pour déterminer la position d’un plus 
grand nombre de points. 


Dans la liste suivante, ces soixante-quinze stations sont réparties en 
trois groupes correspondant aux grandes subdivisions que je viens de 
rappeler; dans chacune de celles-ci elles sont rangées du N. au S. en 
séries méridiennes qui se succèdent de l'O. à l’E. En premier lieu, se 
trouvent les noms des stations avec leur altitude déduite des observations 
barométriques (celles qui servent à la triangulation générale sont en 
capitale); puis, viennent les points mirés de chacune des stations 
(ceux qui se rapportent aux triangles fondamentaux sont en italique); 
en troisième lieu, enfin, sont inscrits les angles horizontaux que font ces 
derniers à partir du S. magnétique , pris avec la boussole, et les angles 
verticaux de quelques-uns, par rapport à la verticale, pris avec le 
sextant (1). 


bre obtenu correspond exactement à celui d'un des quatre points cardinaux, la ligne 
de mire est dans la même direction. Si le nombre est différent ( ce qui arrive presque 
toujours ), la différence qui existe entre ce nombre et celui du point cardinal le plus 
rapproché, ajoutée ou retranchée deux fois, suivant que ce dernier est plus fort ou 
moins fort, donne le nombre qui correspond sur le cadran à la direction de la ligne. 
Toutefois, si le nombre est un de ceux qui correspondent aux rhombes intermédiaires 
N. E. — 450 S. E. == 1350 
S. 0. — 2250 N. O0. 
la direction de la ligne fera un angle droit avec l’un de ces nombres, et, pour l’ob- 
tenir, il faudra ajouter 90 aux deux premiers et retrancher 90 aux deux derniers. 
Dans les observations faites successivement de deux stations l’une sur l’autre, 
les deux mires ont la mème direction et sont par conséquent exactes, lorsqu’après 
avoir retranché le plus petit angle du plus grand, il reste exactement 180. 


(1) Sur la petite carte des triangles, les mires qui partent seulement d’une station 
sont représentées par des lignes interrompues ; les mires doubles par réciprocité, le 
sont par des lignes pleines; de la sorte, on peut se faire une idée du degré d’exac- 
titude de la position des diverses stations. 


( 904 ) 
lo Presqu'île occidentale. 


*GrABousA (sommet sept. del’Akroteri). Golfe de Kisamos(S-0). 460 


Alt. 694m. Grabousa (mont). . . . 470 
Fin des Aspro-Vouna. 54° Prasonisi. .« . . . . .. 4190 
Malaæa (mont). .... 65 Petalidha. . . . 201 à 203 83 14 
Kouloukouna. . . .. 68 Ennea-Khoria (mont). 356 
SKIOK ASE EE ce AT E Haghios-Dhikios. . . . 360 
Spadha (mont). . . . 126 *Ennea-Khoria (sommet au N.). Alt. 
Cap Grabousa. . . . . 168 830 56? 1155. 
lot Aghria-Grabousa Haghios-Dhikios. . . . 4130 910 30? 
(O6. FE 2958 179 Apopighari. . . . ... 73 
Fort Grabousa. . . . . 190 81 31 SKloka:2. an VS pete 101 


Ilot Petalidha. . 246 à 250 86 19  Grabousa (mont). . . . 472 
*Lousakiès (sommet au N-O). Alt. 473m.  Port-de Stomio (Lapie). 208 79 57 


Nolakias ét usdte. no Anse de Priniaco (Lap.). 244 79 44 

Palæokastron. . . . . 65 Elaphonisi (N. O.). . .. 306 85 22 

Golfede Kisamos(S-E). 104 *HaAGnios-Duixios (à l’O. d’Ennea-Kho- 

Cap Spadha (0.). . . . 147 ria). Alt. 1190m. 

Haghios-Elias. . . . . 324 Gaudhos (base). . 25 à 28° 880 37 
*Haghios-Polykarpos (au N. E. de Lou-  Rhoïhovani(mont). . . 46 88 A 

sakiès). Alt. 304m. NO ARE ER » 194: 30 
Palæokastron. . . . . 80 NTAMATENES ER » 91 45 
KISAMOS EE EEE CE 160 APOPIS NAT ESP 
Haghios-Elias. . . . . 290 SKIOK AN EC RES UNE" DID BON 3 

*HaGnios-ELrAs (au S. de Mesoghia).  Meleka (Vardia). . . .. 412 

Alt. 918». Haghios-Theodhoros. . 118 
Apopighariet Volakia. 5e Spelæa (mont) EST ME 4135 
Triamati.. . . . . . . 57 90 53” Golfe de Kisamos (S-E.). 445 
Fin des Aspro-Vouna. 72 Haghios-Elias. . . . . 181 
Kouloukouna. . . . . 75 Ennea-Khoria (mont). 491 
Lousakiès (mont). . . 81 Ilot Petalidha. . . . . 192 
Malaxa (mont). . .. 83 Sklavopoula (mont). . 327 
Rhaniar wrote s092 Pelekano (mont). . . . 351 
Sklokae LI ne NE "1108 “Haghios-Dhikios (sommet au S. O.). 
Meleka et Haghios- Alt. 1158. 

Theodhoros (N.) . . 100 R. d’Ennea-Khe. (emb.). » 80° 6 
Golfede Kisamos(S-E). 143 Elaphonisi (N.'0.).4. . >) 83030 
Kisamos.0 1200: 129 83 48 ‘Sklavopoula (sommetau N.) Alt.1016m. 
Cap Spadha (mont). . 136 Pelekano (mont). . . . 220 
Cap Spadha (0.). . . . 447 Cap'Matala.0 PEN 


Pointe Kasteli, . . . . 147 ADOPIShATI COMORES 


( 505 ) 


Haghios-Dhikios. . . . 147 
Pointe au S. du port de 
Stomio (Lapie) . . . 218 
Elaphonisi (N. O.). . . 287 
* Col de Pelekano (au N. E.). Alt. 705m, 
Apopighari. . + 402 
Sklavopoula (mont). . 254 
* P£ELEKANO (sommet à l’O.). Alt. 750m, 
Gaudhos (base) . . . . 


Cap Matala. . . . . . . 58 

Cap Trapezia. . . . . . 68 
Spaniako (mosquée). . 70 
MNolakia en... AU 

ADOPIS HAN... 22.00 107 91 58 
Haghios-Dhikios. . . . 173 
Sklavopoula (mont). . . 204 
dapiKrio!s.. .. …. {ysao)nti83 1419 
Selino-Kasteli. . . . . » 84 7 


*Selino-Kasteli (ruin. vénit.) Alt. 20m. 


Cap Trapezia. . . . . ea 
CapBriMiIdhi.",... 5.010 
Cap Phlomi. . . . . .. 78 
Cap Kri0. :.::.:.,..02010266 
Pointe-Nisi. . . . . . . 259 


*‘Palæokastron (ruines helléniques ). 
Alt. 423m. 
Ennea-Khoria (défilé) . 200 
Drakona (mont). . . . . 85 
Golfe de Kisamos (S-E). 123 
Cap Spadha (0.). . . . 157 
Kamara (embouch.). . 458 840 43’ 
Cap Grabousa. . . . .. 184 
Haghios-Elias. .°. *. 277 


*Kalathenes (col de Rhogdhia). Alt. 582m 


Apopighari. . . . . . . 480 
SI OIRE EPA RERRr À 99 
Meleka (Vardia). . . . 408 
Drakona (mont). . . . 129 
Cap Spadha (0.). . . . 466 


*Phloria ( plateau au S.). Alt. 689m. 
Apopighari. . . . . .. 700 
Vallon de Phloria. . 


Haghios-Dhikios. . . . 274 
Col de Pelekano. . .. . 310 
Vallon de Spaniako. . . 330 


*Kadano (mont entre Sarakena). Alt. 


632n. 
NOIR IAA. 0 CRE 690 
Apopighari . . .…. . 94 
Col de Pelekano. . . .. 300 
»o 880 55 *Kadano (col d’Epanokhorio). Alt. 979m 
Cap Grabousa. . . . . . À 450 
Haghios-Elias. . 160 
Sklavopoula (mont).. . 285 


83 92 59 “*SpADHA (sommet au centre de lakro- 


teri). Alt. 774m, 


Malaxa (mont). . 5lo 
Meleka (Vardia). . 75 
Jlot Aghria — Grabousa 
(NO te 239 à 243 
Cap Grabousa. . . . . 247 
Fort Grabousa. . 257 
Ilot Petalidha. . . . . 264 
Grabousa (mont). . . 277 
Haghios-Elias. . . . . 316 
* Spelæa (sommet à lO.). Alt. 2150. 
Aspro-Vouna. . . . 9 à 50o 
SOU Le do fo, abiute 60 
Malaxa (mont), . . .. 69 
Skloka, . . RUES 
Meleka (Vardia). . . .. 95 
Grabousa (mont). . .. 234 
Haghios-Elias. . . . . 286 


*Dhrakona (sommet au S-O). Alt. 41 4m. 


Apopighari. . . . . .. 80 
Platania (mont). . . . . 86 
Meleka (Vardia). . . . . 402 
Haghios-Elias. . . . . 269 


*Roumata (sommet au N. E.). Alt. 803m, 


Fin des Aspro-Vouna. . 74v 
Meleka (Vardia).. . ... 116 
Cap Spadha (E.) . .. . 172 
GONNA NE E TC . 174 
Grabousa (mont), . .. 244 


( 906 ) 


Haghios-Elias. . ... . 24 


1 
Apopighari.. . . . ..4. 352 


*ApopiGHARI (au N.-0. d'Haghia-lrini). 


Alt. 1388m. 
Aspro-Vouna. . .. 9 à 44 


Malaxa (mont). .. .... 105 
Skloka. . . Sir e 
Meleka (Vardia).. ... . 123 
Meleka {cap N.-0.).. . » 870 41? 
Ilot Haghios-Theodh.{S). 139 86 36 
Cap Spadha (E.). . . . 172 
Gonia. 26e. fo: 173 
Cap Grabousa . . . . . 198 87. 51 
Haghios-Elias. . . . : 229 
Souia (plage). . . . .. 359 83 15 
*Raopnovani(sommet au S-0).A1L.952m 
Gaudhos. . . . .. 17 à 240 
Aspro-Vouna (5.).. . . 60 
Kroustogherako . . . . 80 
NoRhkiatee.: 02 89 940 58? 
Vallon d’Omalos.. . . . 108 
Aspro-Vouna (N.)... 122 
ADOPISRATIE. 0-00" 142 92 38 
Spadha (mont). . . . . 171 
Grabousa (mont). . . . 491 
Haghios-Dhikios. . . . 224 
Sklavopoula (mont). . . 244 
Pelekano (mont). . . . 258 
Cap'KTINB 2-0 271 86 26 
Selino-Kasteli. . . . . . 297.84 32 
* Platania (sommet au S.). Alt. 239m. 
Maiaxa (mont)... . . . . 710 
SRIGRA DE 96 
Hot H.-Theodhor. 164 à 179 
Haghios-Elias.. . . . . 270 


* Skinès (sommet à l'O. sur le chemin de 


Nea-Roumata). Alt. 470m. 


Col d’Omalos. . . . .. 139 
Cap Meleka (0.). . . . ..128 
Cap Spadha (E.). . . : . 189 
ADOPISNATI 1... 2e. 303 


“KnaAnIA (angle S.-E. du rempart). 


NerTOKOUTOU. 0 fo 
Pyrgo de Malaxa. : …. 23 930 39 
KhalepañM Cm 75 


Chapelle de l’Akroteri. 99 92 91 
Meleka (sommet médian) 119 91 47 
Pointe S. Kiriaki (Lap.). 137 
Pointe des sables (Lap.). 440 


Cap Spadha? Pi E Hume 21 
Cap Spadha (sommet). . 223 90 28 
Spadha (mont). . . .. 239 91 49 


Hot H. Theodhor. 240 à 248 90 47 
Pointe de Lazarete. . . 253 
Pointe de Platania.. . . 254 
Haghios-Elias. . . . . 9270 94 5 
Platania (mont). . . .. 278 91 45 
Mourniès (village). . . 345 
Keramia (sommet). . . 318 93 37 
Vallon de Keramia. . . 333 
Mourniès (somm. au S.) 354 94 10 


‘ Mourniès (sommet au S.). Alt. 524m. 
PSIIOTITREN EE REC 590 
Dhrapano (mont)... ... 74 
Pyrgo de Malaxa.. . . . 92 
Skloka. Dé... RE 
Khaniar:00104l 280: 174 

* Theriso (sommet au S.). Alt. 759m, 
SKkloOKas@e IE N-0E 1230 


Pyrgo de Malaxa. . :1:424 
Spadha (mont). . . . . 215 


Grabousa (mont). . . . 232 
*Drakona (plaine au-dessus). Alt. 9511, 
Khania.s@t... .. .nantiéie 
Grabousa (mont). *. . . 230 
Haghios-Elias. . . . .. 251 
*MELEKA (Vardia). Alt. 307m. 
Haghia-Triadha. . ... . 280 
Skloka.89t 4210. tar 
Cap Spadha.. …. .:1.1240 
Spadha (mont). . . . . 257 
lot Haghios-Theodhor. 278 
KhaniaN® 020080 309 
Keramiais .. 01092 


«31894 
. 346 


Pyrgo de Malaxa . 
Malaxa (mont) . . 


: 907 ) 


*Khalepa (chap. de l’Akroteri). Alt. 162m. 


Ste 


84 93 
83 34 


SHIOKAN LE (OR nSne 950 
Meleka (Vardia). .. .. 141 
*MaLaxaA (sommet à l’E.). Alt. 615m. 
ee Libre 450 
ESNODIENEN 168 UE 
Dhrapano (mont). . . 68 !/, 
Kouloukouna. . . 691} 
Cap Dhrapano. . . .. 83 
llot Soudha. . . 100 à 404 
SCANNER EE TE 
Haghia-Triadha. . . 150 
Meleka (Vardia).. . . 166 


Pointe S. Kiriaki (Lap) 180 


RANIA "5. . 218 à 223 

CapiSpadha 1. 1. . 221 

llot Haghios-Theo- 
dhoros. . . . 230 à 234 


Rade de Gonia... .. 243 
Ruiss.de Soudha(emb.) » 
Grabousa (mont). . . 245 
Haghios-Elias. . . . 262 
* Pyrgo de Malaxa. Alt. 484. 
Ruiss. de Soudha (emb.) » 
LLC RENE » 


85 0 


SI 


810 21° 
86 A4 


*Soro (grand cône au S. de Malaxa). 


Alt. 2370m, 


INEUTOS RENDENT NDS 0 
JEIDIEULENEER 75 
Dhrapano (mont). . . 428 
SDK APE. AVES 149 
Meleka (Vardia) . . 163 
Pyrgo de Malaxa . . . 466 


MAVILLE UT » 
Sommet à 3 kil... . 253 
Sommet à 4kil. . . . 289 


890 45? 
85 


86 59 
90 47 
CL RE * 


* SxrokA (à l'E. d'Haghia-Triadha). Alt. 


550m. 
Dhrapanc (mont). .. 
Cap Dhrapano . … . … 27 


> Tome XXII. 


KeATOS een 
Psion 
Kouloukouna. . . . .. 
Meleka (Vardia). . 
Haghia-Triadha. .. .,. 
Spadha (mont). . . .. 
Jot Haghios-Theodho- 
YOSUINT ES) fe in: 
Haghios-Elias.. . . . . 
Korakes:ŒM-m0 
Nerokourou.. . . . .. 
Pyrgo de Malaxa. . . 
Malaxa (mont). . . . . 
SONO Eee Pere 1 
HORSOUARA EEE 


33 

45 91; 23 
60 90 45 

224 

240 

2500047 

261 

272 

280 

293 

304 89 43 

311 90 19 
» 19390 

332 


*DarAPANO (sommet à l'E. de Kokkino- 


Khorio). Alt. 519m, 


Kedros. . . A0 
PSHOLLEP SAME e 52 9lo 497 
KoulouKouna. "#0 )M9002£ 
Cap Khodhro. . . . .. ‘76 
Cap Stavro. . . . . .. 77 
Dhia (sommet). . . .. 81 
Cap Dhrapano. . . . . 160 80 57 
SHLO RER PNNRAR LE SES 196 89 55 
Haghia-Triadha . . . . 206 
Meleka (Vardia). . . . . 207 
Ilot Soudha, c. Spadha. 227 
Cap Spadha (cône). . . 237 90 1 
Pointe Grilla (Lapie). . . 239 
Malaxa (mont)... ... 248 90 18 
Côte avant Kalyvès. .. 255 
Haghios-Elias. 29990 
SOON: te Se DM) te OA CO, 
KeDhald Mt ME 003306 


*Prosnero (au-dess. du vill). Alt. 357m. 


Dhrapano (mont). . .. 
Skloka (cap au N. E.). . 
Ipos et cap Meleka. . . 
Malaxa (mont). . . =... 


pho). Alt. 47m. 


1650 90° 55 
183 
200 
216 90 59 


46° 890 54 *Prosnero (entrée de la gorge d’Asky- 


48 


( 508 ) 


Dhrapano (mont). ... » 890 497 
Akroteri » 89 45 
Malaxa ( mont). . . . . » 90 6 
*“Kourna (au-dessus du lac). Alt. 933m, 
KeATOS RENE RU D60 
Psiloriti. . . 69 91° 36? 
WIVSINAS REPARER 82 
Kouloukouna. . . . . . 89 


Cap Khodhro. . . . . . 400 
Rhethymnon. . . . : , 402 87 14 
Pointe Kharakia. . . : 143 
Golfe del’Almyros(S-0). 178 71 58 
Dhrapano (mont). . .. 480 
SKIOKAa ME CLR UNE 188 
Meleka (Vardia). . . . . 495 


20 Partie centrale. 


* VRysiNAS (au S.-S.-E. de Rhethym- 


non). Ali. 860. 


Thronos el Psilorili. . 
Gap IaANO A PRESE 
Pointe Scaletta (Lapie). 
Platania (embouch.) . . 
Rhethymnon (phare E.). 
Skloka (cap au N.-E.). . 


Cap Dhrapano.. . . . . 
Golfedel’Almyros (S-0). 


IKTRONEMUT MEN 
Somm. près du Mega-Pot 


So 


26 

98 
120 
121 
148 
184 
213 
217 
221 
245 
264 
320 
341 


920 39? 
93 46 


82 36 


94 57 


*KrionNeriTi (au N. de Preveli). Alt. 


1,027n, 


Paximadhia (base). 47 à 230 870 37 


Cap. Matalar rer 
Cap Haghios-Paulos . . 
VoOuvalat. 2.0. 20 
KGDIOS RARE NRC 
PSTOMERAMN, 20e 
Kouloukouna. . 

VAS RE 
Vallée d’Armenous. . . 
Palæoloutra 2. 
Ruisseau de Gherani. . 
Petrea (embouch.). . . 
CapSKIORA 27 PU. 
Cap Dhrapano . . . .. 


29 
30 
50 
63 


88 24 


SKIGKAS ER 202 
Dhrapano (mont). . .. 204 
Golfe de PAlmyros(S-0). 212 87 24 
SONO NET CNET 247 92 3 
Gaudhapoula. . . 293 à 298 
Gaudhos (base). . 306 à 317 88 40 


*Kepros (au S.-E. d’Asomatos). Alt. 


1,801m. 
VNouvalas eee mt » 830 29 
CAD AMAR EEE 9o 
Golfe de Messara (fond). 36 
KOPRIN OS EME 50 
PSUOTU EURE 98 92 31 
Kouloukouna. . . . .. 132 
Asomatos (monastère). 138 
RE YONNE 201 


Krionerili el Soro . . . 2487 90 26 
Siderota (mont). . . . 289 84 4 
Gaudhos. . . .. 294 à 302 

Paximadhia (base).337 à 346 84 42 


86 28 * VouvaLa (au-dessus de Melabès). Alt. 


93 37 
93 37 


89 45 


967n. 
Cap-Matala 400 
Hiero-Potamos (emb.) . 47 
Haghio-Ghalini. . . . . 540 790 40? 


PSAQnIti NRA :: » 94 58 
KCTTROS A ESENEERP . 185 96 18 
| NLVSINAS SEE 200 
Dhrapano (mont). . . . 214 
SICFO ER 228 91 53 
Cap Plakias. 01707 
Hot Paximadhi (E.). . . 335 


* KouLoukouna (à l'E. de Melidhoni.) 


Alt. 1,093m, 


Karadagh.. .. 560 
HSUER OM NON OU 65 
SÉNOMODIO EU 67 
Dhia (pointe N.)..... 95 
(OEU UNS EN A NOEL TENEMENTANRE 103 
Cäp Ghalinos. . . . ,. . 118 
Cap Haghia-Pori. . . . 441 
Cap Khodhro. . . . .. 229 
CIN EC EE UE 239 
Dhrapano (mont). . . . 247 
Melidhoni. . . . . . .. 202 
Rhethymnon (citadelle). 259 
Chemin à l’O.dePerama. 260 
Golfe de Almyros(S-0) 2641 
SERIE 54 SPRINT PRES 267 


890 
88 
86 
82 
78 


87 


90 


( 509 ) 


»? 


7 
10 
59 
46 


43 


47 


Pointe au S.-0. de Lis- 


Lislaro (mont) 358 


cts etoile 


* Listaro (sommet au S-E.). Alt. 480m. 


SUOMI, UNE 1790 940 8? 
NOUVAlAMAE 0 eo... 219 
Cap Haghios-Paulos . . 231 


Ilots Paximadhia. 253 à 267 
Cap Matala (sommet). . 310 89 28 


* Dhamasta (sommet au S.). Alt. 712n. 


Psiloriti (pente orient.). 260 
Dhamastas mme 461 
Kouloukouna. . . . . . 238 


Somm, inf. du Psiloriti. 303 
PSHloritie 2. 324 


Somm. inf. du massif du 
Psiloriti. . . . 340 et 352 


340 94 27 * Labyrinthe (sommet au N-0 d’Ampe- 


lousa). Alt. 479n. 
Kophinos. . . . . . ,. 380 
Psiloriti (bord du massif) 454 


PSiloritise mn tite 212 
KeÏrOSESSPACMEN: Le 241 
Ilots Paximadhia. . . . 274 
Alithinié (sommet). . . 325 


- &* STROMBOLO (à l'O. de Megalo-Kastron). 


BSUOrUPR EME AN, 

*PsizoriTi (mont Ida). Alt. 2,498m. 
Kophinos. Luis ltts |. 350 880 9? 
Aphendi-Khrisio . . . . 67 89 21 
Spathie Pet hante phil 70 
ESTenvME. RE 81 89 14 
Pointe Morete (Lapie). . 90 
SITOMDOIO. Ne 109 85 55 
Kouloukouna. . . . . . 161 85 
Skloka (cap au N.-E.). 223 
SHIOÉGUE Sn. 1 Te 225 
Rhethymnon. . . . .. 227 85 A6 
Cap Dhrapano.. . . . . 228 871 10 
PTS UITSENS LT UN 239 
Golfe de l’'Almyros (S-0). 241 
ÉCTRNEMER NRRERE"" 254 89 35 
Capa Vatalo..... . crue 267 86 33 
MCAHOSEX. pl later à 278 87 93 
Gaudhapoula. . . 284 à 286 
Gaudhos. . . . . 291 à 298 87 45 
Vouvala et cap Haghio- 

GAMES SCT 300 84 A 
Jlots Paximadhia. 313 à 318 84 51 
Port Haghio-Ghalini.,. . » 81 6 
Cap Matalan 2 0" 343 85 35 


Alt. 802m., 
Dhamania (mont)... . A4 
Mesokhorio (mont). . . 16 
KATATAYGR NN 39 
Aphendi-Khristo. . . . y» 9lo44 
BSHENOASe  t- 00e 66 
Cap Kakonoros. . . . . 80 
Cap Khersonesos. . . . 81 
Megalo-Kastron (fond du 

100)n) RES NTSC 85 86 5 
Cap Aspra-Kharakia. 85 
DEA RUN SENTE » 87 35 
Palæokastron {Kytiæon) 136 
Kouloukouna . . . . . 247 
SORO SC 203 


PICTURES OR OS 0 


(510) 


8e 


3 


KONRIMOS MEME QE Ve 358 
‘Korxinos (au S. de Sternes). Alt. 
4250n, 
LäSSitS) ARE AL A 920 
Aphendi-Khristo. . . . 102 9lo 
SALE Re a enter 104 
Aphendi-Sarakeno. . , A18 
Lassiti (N.-0.). .. .. 122 
KATCURGNT MIE 159 
Sirombolo.{t. Eu MAMA T9 
Psiloriti ee ve" MERENES » 91 
Cap Haghios-Paulos.. . 240 
Listaro (mont.). . . .. 249 
Ilots Paximadhia. 252 à 252 1/2 
Cap Matala "mur 268 
Lacôteaus. duKophinos  » 65 
Daia (sommet de l'ile). Alt. 239m 
Cap Khersonesos. . . . >» 89 
Col de Mirabello . . 48 
Cap Haghios-Joannes . . 66 
SKIOKa: ve ES N101026% 
Dhrapano (mont). ... 261 
Cap Khodhro. ...... 265 
Cap SIAVrO :..7."MEMARE 273 89 
Kouloukouna. . ..... 276 
Cap 'AKDINO MN RE PES 283 88 
PSilOr. 0,4. 020 » 92 
Megalo-Kastron (E) port. 321 88 
KONG NORME 333 91 
KOPhInDS +0 336 
Pointe Kakonoros. . . . ..349 


lot Aughon.. ...... 135 

lots Paximadhia. . . . . 141 87 53 
Dit MERE 147 à 160 87 40 
Megalo-Kastron, . 471 à 180 85 41 
Cap Akhino. ....... 197 

Golfe de l’Almyros(S-0). 207 
Rhogdhia (sommet au- 

GROS 2 AR 212 
SITOMbOIO.. RE 220 89 49 
Kouloukouna. . . .... 235 
PSIlOr ITR SR 266 92 31 
Kophinos.......... 340 


*‘Dhamania (sommet au N). Alt. 834m. 


Mesokhorio (mont)... AT 
Aphendi-Khrislo. .... 68 
Spathi 10 FR PAU EME 74 
Karadagh® +... 158 
Strombolo.. . . .…. ... 194 


*MesokHorio (sommet au S). Alt. 995®. 


Anapodhari (embouch.) ‘73° 840 49 
Cap Theophilo ...... 78 
Rade de Keraton (fond) . 82 


KarADAGuH (au S. de Megalo-Kastron). *APHENDI-SARAKENO ( O. de Lassiti. ) 


Alt. 8370. 
MesOR NOTION 4 
Arkhanès (sommet)... 41 
Anapodhari (vall. inf.). 23 
Aphendi-Khrislo. . ... 51 92 
TEMPO TR. 77 


Aphendi-Khristo. .…. .. 105 92 18? 
Spathi. #5 . «PER 108 
Lassiti {fin}. : -...... . 487 
Arkhanes(sommet})... 177 89 43 
Karadagh ......... » 89 27 
Strombolo. . . : . . .. + A95 
Psiloritis#. 4 + 1.4 2ROMODMONNSS 
Listaro (mont). ..... 9 
KOPRINOS NN, 275 91 6 
Alt. 1,592n. 
Aphendi-Khristo. ..., 280 920 41? 
Spathi in» 104 0,08 48 
Thilakate er ‘, 84 
Panaghia-Kristallenia(1) 86 85 28 
TSTenC RARE EERT » 89 47 


(1) Je réunis ici, en une note spéciale, les diverses mires qui concourent unique- 
ment à déterminer la position des principaux points de la plaine de Lassiti : 


APHENDI-SARAKENO, 
Bord de la plaine. 


silo lie re in 


Ruisseau du Katharos . . . 78 860 18 


(511) 


Plaine de Mokho. . 443 à 160 PSC ME ne . 259 90. 28 
DATA en. 6 193 à 202 Aphendi-Sarakeno . .. 299790 
Megalo-Kastron. ..... 221 87 #4  Aphendi-Khrislo. . ... 335 92 2 
Kastel-Pedhiadha.. . . . 222 79 55 SPAS. Ce. Me 343 921 37 
Strombolo, . . 21 232 *APHENDI-KHRisTo de Lassiti (S. de 
Kouloukouna. . ..... 237 Lassiti). Alt. 2154m, 
Karadäteh. ay 1. 239 Ghaïdhouronisi (0.).. . 29° 85e 45 
ESNOMUNR Rie) 20 r161aN » 90 33 Ghaïdhouronisipoulo(E.) 36 
HODRIMOS NII. Pl 298 PSATI APR fete » 88 6 
“Viano (col à l’O ). Alt. 759m Hierapetra. . . . 87 
Haradaghan tt. (80 2160 Cap Peristera. . . . . . 517 85 6 
STONE. 1 . - 242 Cap Kakialitchi. . . 70 
*TsiLeno (N. de Lassiti). Alt. 1,585, Aphendi-Kavousi. . . , 78 88 A1 
Selendeer. A: (2070 390 800 40° Pointe Psyra (Lapie). . 96 
Aphendi-Kavousi. . . .. o4 Cap Phaneromani, . . 97 
Cap Sidhero. . . . .. 11:24 88 Cap Sidhero. . . . 98 
Dhionysiadhès (N).... 97 Lazaron ee de OMR 108 89 45 
Aphendi-Stavro...... 107 DDASS MEURT 129 90 
Pointe Cariarea (Lapie). 139 83 1 Panaghia-Kristallenia. . 152 82 30 
AUCNON: CENT, 461 TSTOERO NN 155 87 35 
Cap Khersonesos. . . .. 212 84 31 AuThONE 01.720088 159 
Pointedlrapant. PI 213 Plaine deMokho (cent.). 480 
SPÉOMD OO 02.) ERON 245 ilot Paximadhi.. . . . . 494 
Kouloukouna. . ..... 245 1/2 Dhia.. .. . « 197 à 203 
RONAOHORE NE, ANR 251 Aphendi-Sarakeno. . . 207 86 51 
Sommet du monticule.. .« . 83 Mesa-Lassiti. . . . . . . 86. 
Panaghia-Krislallenia . . 86 85 28 2 Mesa-Lassiti . . . 95 et 113 87 5 
Mesa-Lassiti.. . . . . . . . 88 Panaghia-Kristallenia . . . 120 85 21 
Dhermiadho . . . . . . . + 104 Marmaketo . . . . . . . . 152 86 10 
Khonos terminal. . .. .. 114 82 56  Dhermiadho . ... . . .. 178 87 25 
APHENDI-KHRISTO. Ravin du Nisimo.. . . . . 191 
Bord de la plaine. . . . . . 14530 Pinakiano . . . . . . . . . 201 87. 55 
Panaghia-Kristallenia . . 152 8230’  Khonos. .. . . . . . . . 255 88 43 
Milieu du Nisimo. . . . . . 165 Gherodomouri. . . 955 88, 24 
Khonos et fin de la plaine. 187, 83 26  Platy.. ... . . . . .. 263 
“Haghio-Kostantinos (colline dans la plaine). JÉINRO O COMM IUE a cle 268 
Alt. 8750. MASDOUR EE EEE 275 
Vallon du Limnokharo. . . 19e VUE oo ao 5 281 
Ruisseau du Katharos.. . . 63 880 55°  Kaminaki. . . .. . . .. 294 
Fond de la plaine avant Haghios-Gheorghiou. ., . 298 84 9 


(512) 


Megalo-Kastron. . . .. 217 
Cap: Akhino.:.0,/.#111 7. 218 
Golfedel’Almyros(fond) 223 
Kara. nn nn, 231 
Psiloritir. 9, OTEMIR 246 1/2 89 56 
Dramania (mont). . .. 248 
KedrOS. 12. 100MNIRE 253 
Vouvala.\:1} DENON 257 
Iots Paximadhia. . . . 266 
KOPRIROS EE ANS RE 282 83 24 


Mesokhorio (mont)... 285 

Cap Alitkhevra. . . .. 297 
Anapodhari (embouc.). 303 82 57 
*APHENDI-STAVRO (au N. de Kænourio- 
Khorio). Alt. 839n. 


Aphendi-Kavousi. . .. 390 
Pointe Haghia-Pori (L.) 63 
Cap Phaneromani. . .. 74 
Spina-Longa (sommet 
au-dessus). . . 89 
Cap Khersonesos. . . . 239 
SRI ue LIRE 317 


*Katharos (sommet entre Myrto). Alt. 
1258n, 


Ghaïdhouronisi. . . . . » 87 8 
Aphendi-Khristo..,... 2669 95° 34 
Myrto (embouch.). ... 355 83 41 


*Spina-Longa (sommet au S. O.) Alt. 
44m, 

Cap Phaneromani. . . . 

Cap Sidhero. . ... 


700 
84 


Dhionysiadhes (N.). . . 96 
*Thilaka (à l'E. de Kritsa). Alt. 558n. 


Anse d’Istronas. . . 340 
Anse de Kavousi(E.). . 50 
Aphendi-Kavousi. ... &1 
Cap Phaneromani. . 92 


Pointe de C.-Mirabello. 107 
Mirabello-Potamos(em.) 407 
Pointe Hagh.-Pori (Lap.) 131 
Spinalonga (pointe S. de 
la presqu'ile), . . . 481 
280 
*ISTHME DE HIERAPETRA (sommet à l'E. 
de Meseleros). Alt. 734m, 
Aphendi-Kavousi. . .. 840 920 44 
Pointe Psyra (Lapie). . 422 
Cap Haghios-Joannes.. 164 
Pointe Haghia-Pori (L.). 473 
Salines de Spina-Longa. 173 
Pointe de Castel-Mira- 


30 Presqu'ile orientale. 


* APHENDI-KA vousi (à l'E. de Kavousi). 
Alt. 4,479m. 


Kouphonisi..... 41 à 500 860 41? 
Cap Kalonoros. ..... ol 
Cap Kakialitchi . . ... 55 85 58 
ROMANE TIRE UN 9987 8 
Cap Sidhero (mont). . . 114 
Dhionysiadhes. . .... DORA 


HOLPENTAT Te de 170 à 484 82 25 


belloig,ri nc 181 
Pointe S. Nicolas (Lap.). 181 
Anse d’Istronas. . . ... 188 83 29 
Anse de Kolaki (Lap.) . 188 
Aphendi-Stavro. . . .. 497 
Thiaka EL AMARENAER 201 
Apbendi-Khristo. . ... » 93 14 
l'ointe Stomio. . . . . .30£ 
Ghaïdhouronisi. . 332 à 343 
HiCTADEUMA PE EEE 341 85 2 
Ghaïdhouronisipoulo E.)349 
Cap Haghios-Joannes. . 188 86 54 
llot Aughon.1.5..." 194 
Presqu’ile . de  Spina- 

Longa (Na), 01.00 nf 194 
Fondde la baie de Spina- 

LONSA SE CAE 203 
P. Haghia-Pori (Lap.). . » 85 43 


Aphendi-Slavro 219 
Golfe de Mirabello (3 p.). 232 


FR CULO v0 


(513) 


237 
237 84 3 


SBIeNAELE CICR INTER. 
Anse d’Istronas . . . .. 
Aphendi-Khrislo.. .. 


Isihme de JIlierapetra 
(Sommet)... LME » 85 36 
Cap Theophilo...... 218 
PointetStomio.. . . ..« 283 
Hierapetra.f. 601... .20€ 294 84 15 


* Haghia-Photia (à l'O. du Ghoudhsero). 
Alt. 20m, 


Kouphonisi. . ... 50 à 570 
Cap Kakialitchi . . . .. 67 
Pointe Trakhyla . .... 70 
Can Kalonoros. ..... 73 


* RomanaTI (au S. de Dhaphnès). Alt. 
948, 


Kouphonisi (grande)... » 87012 
Miitines" EME 450 
Col d’Iskhia. . . . . . .. 83 83 27 
DYLLÈLE LRO SUR 1030 890 42, 
Pointe de Toplou.... 419 87 47 
Cap Sidhero (mont). . . 120 
NAT Mec ne ch eue 130 
Dhionysiadhes ...... » 87 54 
Code Krya NA EMRIE 20 151 
Col de Kavousi. . . . . . 230 
Aphendi-Kavousi. ... 271 92 33 


Ghaïdhouronisi. . 300 à 306 
Pointe Trakhyla. . . .. 350 
* Nethia (sommet au S.). Alt. 733. 


KOUPRONMISI ETES » 860 58? 
Thiro (mont au S-E.)... 75° 
AEMENOUS EE EE CU 92 

RAD ANT RE AT A11 
Dhionysiadhes . . 449 à 154 
GADISITIAN. De ee 
Aphendi-Kavousi .... » 92 17 
Cap'Peristera. . ::. . 278 
Ghaïdhouronisi. . 290 à 295 88 6 
Pervolakia.:= 1, 2. 360 87 35 


 Pervolakia (Vardia au S.). Alt. 607m, 
Cap, Stomio. ....... 266 


Cap Theophilo . ..... 267 
Hierapetra 2h70 #1et01e 269 

. 257 90 44 * Dunisèës (au S-E. de Piskokephalo.). 

Alt. 831m, 

Traostalo (mont). . ... 69 880 31? 
Modif 111 87 58 
POploteM ect eunhe 125 86 39 
Cap Sidhero (mont)... 128 


Dhionysiadhes . . 154 à 163 


CaprSitiag hr Et 00e 178 84 25 
Piskokephalo. . . . ... 213 
ROMANDU IE NACErE; 284 

* Tairo (sommet au S-E.). Alt. 826m. 
MrAOSAIOL TEL 0.0 41130 
DhrisSes te te 1e 184 : 
TITOBREAS SL NES 210 
KhandNrA 0, 7 231 
Romana 0e. V0 € 242 


Apbendi-Kavousi.. . .. 254 91o 418? 
Ghaïdhouronisi. . 284 à 288 
Kouphonisi. . . . 339 à 350 86 2 


* Mopui (au S. de Toplou). Alt. 558. 


DrAOSTAIONNE 390 890 37? 
Karoubès. . . . . . .. 59 
Cap Plako. . . . . . . . 88 86 41 
Jlot Grades’ =... 92 2007 
Palæokastron. . . . . . 445 
lot Elasa. . . . . 115 à 120 
Cap Sidhero (mont). . . 130 
Cap Sidhero. .. . . . . 138 
DOIOUS SE ee tete 158 84 30 
CAPES IUT PAC 252 
Cap Haghios-Joannes. . 235 
Baie de Sitia (fond). . . 245 
Aphendi-Stavro. . . . . 251 


156 87 30 “ Kavalous (sommet au N-0. des ilots)' 


Alt. 812m, 
HOT AVAIQUS ARC 400 
Cap 'Avlaki.. 101 
Sarakenovighla. . . . . 118 
Cap Sidhero (mont). . . 148 
Thiro (mont au S-E.).. . 259 js 


(514) 


* CAP SipnEro (sommet seplentr. de Jlot Grades. . .. 345 à 351 
l’Akroteri). Alt. 225%. Cap’PRKo... 2 0e 356 
Jlot Elasa.. . . . . 20 à 36° 870 0” ‘ Sarakenovighla (au S. de Palæokas- 
Dhionysiadhes (ilot Paxi- tron). Alt. 274n, 
madhi). . 225 à 230 Cap Sidhero (E.).. . . . 4310 
— (ilot au N. de Dhra- Cap Sidhero (mont). . . 160 
ghonara). . ... 234 Pointe Trapezi. . . . . . 191 
— (Dhraghonara S.). 248 Dhionysiadhes. . 492 à 205 
— (Yanisadhes) 246 à 253 Palæokastron (village).. 218 
Dia (Nr sir 2 » . 250 Karoubès (mont). . . . 305 
Cap Shwvro:.:.1 5: 0 255 Cap Traôslalot.. . - | 356 
Cap Haghios-Joannes. . 256 * Karoubès (sommet à l’E.). Alt. 439, 
Selenai!: 14276 Un 1810! 272 Cap PlaKo 02e . 11920 850 37° 
Hot Psyra..: - . 271-à 219 Sarakenovighla. . . . . 124 
Aphendi-Khristo . .. . 278 Jot Grades (N.). . . . . 126 
Cap Phaneromani. . . . 279 Jlot Elasa- 132 à 141 
Cap Sitia 2.2... 4 12 re 287 Cap Sidhero (mont). . . 455 
Aphendi-Kavousi. . . . 293 91 20 Cap Sidhero (pointe E.. » 88 17 
Modhi. . . …. TOME NT Dhionysiadhes. . 186 à 198 88 3 
Karoubès (mont). . . . 335 MORE Ne SLR 240 91 48 
Sarakenovighlæ. . . . . 341 Traostalo (mont).. . . . 358 90 57 


Pour n’omettre aucune des données susceptibles de rendre ma carte 
plus exacte, je donne encore quelques indications isolées d’orientations 
de divers points qui ne se rapportent à aucune des stations précédentes : 


Du col de Mesoghia, l’espace entre le fond du golfe et le terrain tertiaire à 
PO., est de 30° vers le N. 

Au S. du col de Kalathenes, la crête court à lO. 25° S. au mont d’'Ennea- 
Khoria, et la vallée étroite inférieure au N. 20 E. 

Montagne d’anagènite à 4/2 lieue au S. 200 E. de l’Haghios-Elias. 

Du col entre Sklavopoula et Pelekano, vallon à l'O. 30° S. vers Elaphonisi, 

Au S. O. de la station de Pelekano, village d’Haghios-Theodhoros. 

Pelekano (mont) est à l’0. 15° S. de Pelekano et à l’O. 150 N. de Spanioko. 

Les vallons de Pelekano, de Sarakena à Stavro et du Vlithias courent au N.; 
le premier tourne ensuite au S. 200 O. 

La mosquée de Kadano est à l'O. S. O. de l’Apopighari. 

Kouphalatos, au pied de Ja montagne, est au S.-E. de la mosquée de 
Kadano. 

Moni est au S. 150 E, d’Ergasteri. 

Aghrilès est au S. 400 O. d’Ergasteri et à l'E. 45° N. de Rhodhovani. 

Rhodhovani est au N. 35° O. de Souia. 

Une crête est dirigée à l’E., de l'Apopighari à Khosti près Néa-Roumata. 


( 515) 

Une crête est dirigée à l'E. 15° S., de l’Apopighari au N. d'Haghia-frini. 

Le vallon qui conduit d’Haghia-Irini à Omalos court à VE. 200 N. 

Le vallon inférieur étroit du Platania est au N. 25° O. de Meskla. 

D'un hameau au S. de Kambous, on voit l’Almyros à l'E. 45° 8. 

Dhrakona est au N. 45° E. de Meleka (mont) et au N. 300 E. du Pyrgo de 
Malaxa, 

De la colline du col entre la baie de Soudha et l’Apokorona, le mont Dhra- 
pano est à l'E. 100S., et la plaine de Stylo au S. 10° E. 

De Babali-Khan, Païdo-Khori est à l'O. 50 N. 

Ipos est au N. 200 0. de Prosnero. 

Du fort ruiné de l’Almyros, Xopolis est au N. 200 0; les montagnes au- 
dessus de ce village courent à VO. 20° N. et portent Salia et Souri à l’O. 

Du chemin de Kalasikia, Roustika et la crevasse du Petrea sont au N. 10° 0. 

La vallée supérieure du Muzla court au N. 25° O. 

D’Amnato, Maroulas est à l’O. 200 N. 

De l’entrée de la gorge d’Arkadhi, le Hiasmata est au N. 40° 0. 

Mournia est à l’0. 35° S. de Spele. 

Du col de Labini, la montagne à l'E. du Mega-Potamos est au S. 450 O. 

Haghios-Joannes est au S. 15° O. du Kouloukouna. 

Tripodho, près Magharites, est à l’E. 30° N. du Kouloukouna. 

La plaine de Dhamasta, d’une lieue de longueur, court à VE. 26 N. 

Du col de Klima, Dhibaki est au S. 15° E., et la colline de Khamelari au 

S. 40° E. 

De Voréa, la montagne de Mesokhorio est au S. 35° E. 

De Sternes, Tsiparè est au N. 209 O., et Asemi au N. 10 E. 

De Kharaka, Asemi est au N. 15° O. 

De Pyrathi, le Kophinos est au S 350 O., et la montagne de Mesokhorio au 
S..459 E. 

Montagnes de Kartero au $S. 150 E. de l’embouchure du ruisseau. 

D’Episkopi, le vallon va droit au N. 

D’Elia, Vathia est au S. 20° E. 

De Kastel-Pedhiadha, le mont de Mesokhorio est au S. 200 O. 

La grande muraille orientale de la vallée qui va de Hierapetra à Kavousi 
court au N. 35° E. 

De Kavousi, Haghio-Nikolaos est à l'O. 


Comme complément, j'ajoute les mires que j’ai prises sur les îles 
extérieures situées aux deux extrémités; elle serviront à relier la Crète 
au continent, soit par le Péloponèse, soit par l’Asie-Mineure. 


Grabousa : Pori.}. 4.42, 2030 Æghilia. . . ... 496 à 499 030 
Æghilia (Cerigotto) 204à 210 88°41  Tserigo (O.). . . . . . . 205 
Haghios-Elias: Tserigo (E.) 495° H.-Dhikios : Æghilia 192 à 4930 


( 516 ) 
Msénigo.tirts 12 192 à 204 Skarpanto (N.). . .. .. 143 0 44 
Tsileno: IlotDhio-Adelphi? 413° Iot Stasida. . . .. . .. 1431 
Cap Sidhero : Kaso (S.)". 83° Hots Dhio-Adelphi. . . 156 


Kaso(N)etSkarpanto(S) 93 0029 Trois ilots Plaka?. . . . 176 


Construction du réseau trigonométrique et de la carte. — Dès mon 
retour à Paris, je m’empressai d’utiliser les nombreux matériaux que 
j'avais recueillis en Crète, et la première chose à laquelle je songeai fut 
la construction de ma carte, qui était évidemment le point de départ de 
tout ce que j'avais à faire. En y travaillant, je m’aperçus bientôt que 
mes nombreux relèvements et croquis me mettaient à même de faire 
quelque chose de plus complet et de plus satisfaisant que je ne l’avais 
espéré en partant, et que je pourrais donner de l’île entière une carte 
qui, sans être d’une exactitude parfaite, serait cependant de beaucoup 
supérieure à toutes celles qui avaient été publiées jusqu'alors ; une carte 
qui permettrait aux géographes de se faire une idée suffisamment exacte 
de la constitution orographique de cette grande île, puisque ce que je 
pourrais appeler la charge de la nature, remplaceraït une œuvre de pure 
fantaisie. 

Mon premier soin fut de dresser un réseau de triangles s’étendant 
d’une extrémité de l’île à l’autre, non pas en calculant les côtés d’après 
les angles, mais en rapportant simplement sur le papier mes mires 
d’après leur orientation. La carte de Lapie étant à 1/400,000, je dressai 
mon premier réseau à peu près à la même échelle, me réservant de le 
ramener à 4/300,000 lorsqu'il serait achevé. Je construisis un premier 
triangle (no 3 Meleka, Skloka, Malaxa), à l'E. de Khania, dans l’Akroteri, 
et de son côté Skloka-Malaxa, je fis le point de départ de deux séries, 
l'une vers l'O. et l’autre vers l'E. Je parvins à avoir une chaîne de 
41 triangles , dont les côtés sont formés de mires doubles , à l’exception 
de quatre appartenant à des triangles différents. Vers le milieu du côté 
N. de la chaîne, enfin, j’en construisis un dernier sur le n° 6, et j'eus 
ainsi les douze triangles suivants, qui sont désignés par les stations de 
leurs angles : 


1 Haghios-Elias, Spadha, Skloka. 8 Karadagh , Kophinos, Aphendi- 
2 Haghios-Elias, Malaxa, Skloka. Khristo. 

3 Meleka, Skloka, Malaxa. 9 Karadagh, Aphendi-Khristo, Tsileno. 
4 Malaxa, Skloka, Psiloriti. 10 Aphendi-Khristo, Tsileno, Aphendi- 
5 Skloka, Psiloriti, Kouloukouna. Kavousi. 


6 Psiloriti, Kouloukouna, Karadagh. 44 Tsileno, Aphendi-Kavousi, Sidhero. 
T Psiloriti, Karadagh, Kophinos. 12 Kouloukouna, Karadagh, Dhia. 


(917) 

Comme d’une part, de l’angle Dhia du dernier, ma grande mire 254 
allait droit sur l’angle Skloka du triangle 5 , tandis que d’autre part, ce 
même angle Dhia se trouvait à la terminaison de la grande mire 250" 
venant de l’angle'Sidhero du triangle 11, j’en conclus, d’un côté, que ma 
chaîne était bonne, bien que quatre des triangles eussent un côté formé 
d’une mire simple, et de l’autre, que ma chaîne avait une exactitude 
suffisante pour l’échelle que je voulais donner à ma carte. 

Ce premier grand réseau trigonométrique établi, et orienté à très-peu 
de chose près comme il devait l’être, d’après la direction de chacun des 
côtés de mes douze triangles et des deux grandes mires simples qui se 
joignaient à Dhia, il ne restait plus qu’à le ramener à l'échelle de 
de 1/300,000 et à lui assigner sa position en longitude et latitude. 
Comme je manquais complètement d’observations personnelles par 
rapport à ces deux points importants , je dus utiliser les travaux déjà 
publiés. 

Pour la réduction à l’échelle que je voulais obtenir, il me suffisait de 
connaître la longitude assignée à quelques points de l’île qu’il me serait 
possible de rattacher à ma triangulation ; aucune difficulté ne se présen- 
tait que l'embarras du choix, car la Crète possède dans son intérieur 
trois sommets qui ont dû servir à la triangulation de l’Archipel et qui 
sont indiqués sur la carte de Gauttier, et, d'autre part, dans son 
Mémoire, se trouve la détermination de quatorze points de la côte faite, 
sans doute, par les procédés en usage dans le corps des Ingénieurs- 
hydrographes de la marine. Pour arriver à la plus grande exactitude 
possible, je devais prendre plusieurs points éloignés l’un de l’autre; 
aussi me décidai-je pour Khania, le principal port de l’île, situé dans 
la partie occidentale, pour Megalo-Kastron, capitale de l’île, dans la 
partie centrale, et pour le cap Sidhero, à l'extrémité orientale, dont la 
position devait aussi avoir été déterminée avec soin. 

Ces trois points arrêtés, je dressai des méridiens à l'échelle de 
1/300,000 pour le 35° 20° de latitude, position moyenne de la Crète sur 
la carte de Gauttier, et au moyen de petits triangles, j’établis la position 
de Khania dans le grand triangle n° 3 et aussi par rapport au triangle 
fondamental n° 4, et celle de Megalo-Kastron dans le triangle n° 12. Je 
reproduisis ensuite ma triangulation en l’amplifiant de manière à ce que 
Khania, Megalo-Kastron et le cap Sidhero vinssent prendre place sur 
les méridiens qui leur avaient été assignés par Gauttier. 

L’échelle de ma carte et la longitude se trouvant ainsi déterminées avec 


(518) 


toute l'exactitude qu’il n’était possible d'obtenir, j’achevai mon réseau 
trigonométrique en construisant tous les triangles dont j'avais les côtés, 
et en déterminant la position de divers points d’après une seule mire 
horizontale ou bien un angle vertical ; j’employai, en un mot, tous les 
éléments que j'avais recueillis. Enfin, je traçai le contour de l’île d’après 
les détails de la carte de Lapie, dont l’exactitude est très-grande pour 
beaucoup, tout en faisant pour d’autres points les rectifications qui me 
semblaient nécessaires (1). Je vis alors avec plaisir que les longitudes 
qu'assignait, à plusieurs des points importants de la côte, ma triangula- 
tion intérieure, étaient les mêmes, à une demi-minute près, que celles que 
Gauttier leur avait données; c’est ce qui avait lieu (indépendamment de 
Khania, Megalo-Kastron et le cap Sidhero, pris pour point de départ) 
pour les caps Grabousa, Spadha , Haghios-Joannes , l’ilot Kouphonisi 
(Christiane) du sud et le cap Matala. Le même accord régnait encore 
pour les deux de ses trois points trigonométriques sur lesquels j'étais 
allé , le Psiloriti (Ida) et le Spathi, l’une des deux hautes cimes des 
montagnes de Lassiti. 

Il ne restait plus que la détermination plus difficile de la latitude ; 
car le périmètre de l’île, tel qu’il résultait de ma triangulation inté- 
rieure, ne pouvait coïncider qu'avec un petit nombre des points déter- 
minés par Gauttier, soit sur la côte, soit dans l’intérieur. En ordonnant 

‘île par rapport aux latitudes qu’il avait établies pour Khania et le cap 

Sidero, Megalo-Kastron se trouvait à 4 38” plus au N. que la position 
que lui assignait ma triangulation, et il n’y avait de coïncidence qu'avec 
le fort Grabousa et les caps Haghios-Joannes (Saint-Jean), et Plako 
(Salomone). 

Une nouvelle détermination de Khania avait été faite, en 1843, par 
M. Graves, capitaine du Beacon , et cette ville avait été reportée un peu 
au N. En admettant que l’île tout entière doive être rapprochée du N. 
d’un bout à l’autre, de la différence trouvée, mon contour coïncide d’a- 


a ———— 


(1) Une nouvelle carte hydrographique anglaise de la Crète, sous la direction du 
capitaine Spratt, et à une échelle double de la mienne, devant, m’assure-t-on, 
paraître dans les premiers mois de 1860, je retarde un peu la gravure de la mienne, 
afin de pouvoir en adopter les contours et l'orientation qui seront sans doute d’une 
grande exactitude, Quant à la topographie intérieure, il est probable que je n'aurai 
rien à changer à la mienne, établie sur une triangulation intérieure qui n'aura pas 
été faite par les officiers de la marine anglaise. 


( 519) 

bord avec un point de plus de ceux déterminés par Gauttier sur la 
côle, puisqu’au lieu des six précédemment énumérés, on trouve les sept 
suivants : Ilot Petalidha, cap Meleka, îlots Paximadhia, Aughon, Ghaïdhou- 
ronisi et cap Matala; ensuite de deux de ses trois points de l’intérieur 
que j'ai visités, l’oriental, de Lassili coïncide exactement, et celui du 
milieu, le Psiloriti, ne se trouve qu’à 45” au N. de la position que lui 
assigne ma triangulation. Cette dernière circonstance m’a engagé à don- 
ner la préférence à la détermination faite par le capitaine Graves, et à 
reporter alors toute l’île à 2° 9” au N. de la position qui est assignée par 
Gauttier à deux de ses points principaux, Khania et le cap Sidhero, que 
j'avais pris comme point de départ pour la longitude. 

Il résulte de là que les quatorze positions maritimes, déterminées par 
Gauttier, et deux des trois sommets de l’intérieur, dont il a assigné la 
position, sont modifiées dans ma carte sous le rapport de la latitude. 
Quant à son troisième point trigonométrique , je n’en puis rien dire, car 
l'éloignement auquel il place son mont Mélessa de la baie de Soudha ne 
permet pas de le confondre, malgré la grande analogie du nom, avec le 
mont Malaxa que j'ai visité. Il est probable qu'il aura appliqué en le 
dénaturant le nom de cette montagne de la côte à quelqu’autre située à 
4 15” plus au $. et que je n’ai point remarquée. 

Ces premiers travaux fondamentaux pour la carte achevés, j’ai cons- 
truit, à l’aide de mes relèvements, tous les autres triangles, et j’ai assigné 
la position du plus grand nombre de points de la côte et de l’intérieur 
qu’il m’a été possible. Donnant une petite carte spéciale de la triangula- 
tion, je n'entre ici dans aucun détail sur les triangles dont les côtés 
résultent de mires, simples ou doubles par réciprocité; je ne vois d’utile 
à indiquer, pour faciliter les recherches , que les points où le plus sou- 
vent je ne suis pas allé, et dont la position a été déterminée simplement 
par la convergence de plusieurs mires. Dans la liste suivante, les noms 
de tous ces points situés sur la côte, en italique ou en MINUSCULES suivant 
leur importance, sont suivis de ceux des stations d’où partent les mires, 
sans que j'aie reproduit les angles de celles-ci : 


Côte septentrionale. 


Ilot et Fort Grabousa. — Grabousa, Spadha. 

Ilot Aghria-Grabousa. — Grabousa, Spadha. 

CAP GRABOUSA. — Grabousa, Palæokastron, Apopighari, Spadha. 
Golfe de Kisamos S.-E. — Haghios-Elias. 

Kisamos et Kamara. — Haghios-Elias, Palæokastron. 


( 520 ) 
Golfe de Kisamos, S.-0.—Lousakiès, Haghios-Elias, Palæokastron, Haghios— 
Dhikios. 
Cap Spadha, N.-0.— Haghios-Elias, Lousakiès, Palæokastron, Kalathènes. 
Cap SPADHA. — Grabousa, Khania, Dhrapano, Meleka. 
Cap Spadha, N.-E. — Apopighari, Roumata, Skinès. 
Golfe de Khania, S.-0. — Apopighari, Roumata. 
Pointe de Plalania. — Khania. 
llot Haghios-Theodhoros, S.-0. — Platania, Khania. 
Id. N.-E. — —  Skloka, Meleka. 
Pointe Lazarele. — Khania. 
Pointe Haghia-Kiriaki. — Khania, Malaxa. 
Pointe des Sables. — Khania. 
CAP MELEKA, N-0. — Apopighari, Prosnero. 
Cap du Skloka. — Prosnero , Krioneriti, Vrysinas, Psiloriti. 
Ilot Soudha. — Malaxa, Dhrapano, Skloka. 
Baie de Soudha, O. — Pyrgo de Malaxa, Malaxa. 
Pointe Grilla. — Dhrapano. 
Kalyves. — Dhrapano. 
Cap DHRAPANO. — Skioka, Malaxa, Dhrapano, Krioneriti, Vrysinas, Psiloriti. 
Golfe de l'Almyros. — Kourna, Krioneriti, Psiloriti, Vrysinas, Kouloukouna. 
Embouchure du Petrea. — Krioneriti. 
Pointe Kharakia. — Kourna. 
Plage de Gherani. — Krioneriti. 
RHETHYMNON. — Kourna, Vrysinas, Kedros, Psiloriti, Kouloukouna. 
Embouchure du Platania. — Vrysinas. 
Pointe Scaletta. — Vrysinas. 
Pointe Liano. — Vrysinas. 
Cap KHoDHRO. — Dhrapano, Kourna, Kouloukouna, Dhia. 
Pointe Haghia-Pori. — Kouloukouna. 
Pointe Ghalinous. — Kouloukouna. 
CAP STAVRO. — Dhrapano, Kouloukouna, Sidhero, Dhia. 
Cap Akhino. — Karadagh, Aphendi-Khristo. 
Palæokastron. — Strombolo. 
Embouchure de l'Almyros. — Karadagh, Aphendi-Khristo. 
MEGALO—-KASTRON. — Sirombolo, Karadagh, Aphendi-Khristo, Aphendi-Sara- 
keno, Dhia. 
Pointe Aspra-Kharakia. — Strombolo. 
Pointe Kakonoros. — Strombolo, Dhia. 
CAP KHERSONESOS. — Strombolo, Tsileno, Aphendi-Stavro. 
Pointe Trapani. — Tsileno. 
Pointe Cariarea. — Tsileno. 
Pointe Morète. — Psiloriti. 


(521 ) 


Cap HAGHIOS—-JOANNES. — Dhia, Hierapetra (Isthme), Aphendi-Kavousi, Modhi, 
Sidhero. 
Presqu'ile de Spina-Longa, N.-E. — Aphendi-Kavousi. 
Id. S.-E. — Thilaka. 
Salines de Spina-Longa. — Hierapetra (Isthme), Aphendi-Kavousi. 
Pointe Haghia-Pori. — Aphendi-Stavro, Thilaka, Hierapetra (Isthme). 
Pointe Haghio-Nikolaos. — Hierapetra (Isthme). 
Castel-Mirabello — Thilaka, Hierapetra (Isthme). 
Anse de Kolaki. — Hierapetra (Isthme). 
Golfe de Mirabello, S.-0. — Thilaka, Hierapetra (Isthme). 
Id. S.-E. — Aphendi-Kavousi. 
Ilot Psyra, S.-0. et N.-E. — Aphendi-Kavousi, Sidhero. 
Pointe Psyra. — Aphendi-Khristo, Hierapetra (Isthme). 
CAP PHANEROMANI. — Aphendi-Stavro, Thilaka, Aphendi-Khristo, Sidhero. 
Cap Silia. — Aphendi-Stavro, Nethia, Dhrisès, Modhi, Sidhero. 
Baie de Sitia, S. — Modhi. 
Pointe de Toplou. — Romanati. 
Pointe Trapezi. — Sarakenovighla. 


Côte orientale, 


CAP SIDHERO, E. — Modhi, Sarakenovighla. 
lot Elasa. — Sidhero, Modhi, Karoubès. 
Palæokasiron. — Modhi. 

Ilot Grades. — Sidhero, Modhi. Karoubès. 
CAP PLAKO. — Id. 1. Id. 

Cap Traoslalo. — Sarakenovighla. 

Cap Avlaki. — Kavalous. 


Côte méridionale. 


CAP KAKIALITKHI. — Aphendi-Kavousi, Haghia-Photia, Aphendi-Khristo. 

Cap Kalonoros. — Haghia-Photia. 

Pointe Trakhyla. — Romanati, Haghia-Photia. 

Cap Perislera. — Nethia, Aphendi-Khristo. 

HIERAPETRA. — Aphendi-Kavousi, Hierapetra (Isthme), Aphendi-Khristo. 

Pointe Slomio. — Pervolakia, Aphendi-Kavousi, Hierapetra (Isthme). 

Embouchure du Myrto. — Katharos. 

Car THEOPHILO. — Pervolakia, Aphendi-Kavousi, Mesokhorio. 

Rade de Keraton. — Mesokhorio. 

Embouchure de l'Anapodhari. — Mesokhorio. 

CAP ALITKHEVRA. — Aphendi-Khristo. 

Côte au S. du Kophinos. — Kophinos. 

CAP MATALA. — Kophinos, Psiloriti, Kedros, Vouvala, Krioneriti, Sklavo- 
poula, Pelekano. 


(52) 
Port Malala. — Psiloriti. 3 der, 
Embouchure du Hiero-Polamos. — Vouvala. bte 
Golfe de Messara, N.-E. — Kedros. 
Embouchure du Platy el Haghio-Ghalini. — Vouvala. 
Cap Haghios-Paulos. — Listaro, Kophinos, Krioneriti. 
Cap Plakias. — Vouvala. 
Cap Valalo. — Psiloriti. 
Cap Trapezia. — Pelekano, Selino-Kasteli. 
Cap Trividhi. — Selino-Kasteli. 
Rade de Souia. — Apopighari. 
Cap Phlomi. — Selino-Kasteli. 
Pointe Nisi. — Selino-Kasteli. 
Cap Kkrio. — Selino-Kasteli, Rhodhovani, Pelekano. 


Côte occidentale, 


lot Elaphonisi, N.-0. — Sklavopoula, Ennea-Khoria. 

Ruisseau d'Ennea-Khoria. — Haghios-Dhikios. 

Pointe au S. du port de Slomio. — Sklavopoula. 

Port de Slomio. — Ennea-Khoria. 

Anse de Priniaco. — Id 

Ilot Haghios-Kirghani. — Haghios-Elias. 

Ilot Petalidha. — Haghios-Dhikios, Haghios-Elias, Grabousa, Spadha. 


J'ajoute six points de l’intérieur, dont quatre somimités, déterminées 
de la même manière : 


VoLAKkIA. — Rhodhovani, Pelekano, Kadano, Apopighari, Lousakiès. 

Kastel-Pedhiadha. — Aphendi-Sarakeno. 

SPATHI. — Aphendi-Sarakeno, Psiloriti, Dhamania, Kophinos, Mesokhorio, 
Aphendi-Khristo. 

SELENA. — Tsileno, Aphendi-Stavro, Sidhero, Aphendi-Kavousi. 

Toplou. — Dhrisès, Modhi. 

TRAOSTALO, — Thiro, Dhrisès, Modhi, Karoubès, Sarakenovighla. 


Je termine en donnant les mêmes renseignements relativement aux 
îles et îlots situés à quelque distance de la côte : 


ILE Dia. 
Cap Rodhara. — Karadagh, Aphendi-Sarakeno, Aphendi-Khristo. 
Cap Apiri. — Karadagh. 
Ilot Paximadhi. — Karadagh, Aphendi-Khristo. 
AUGHON. : 
L'ilot. — Karadagh, Aphendi-Khristo, Tsileno, Aphendi-Kavousi. 


DHIONYSIADIIES. 
Paximadhi N. — Tsileno, Spina-Longa, Karoubès, Sarakenovighla, 
Sidhero. 
2e ilot N. — Sidhero. 
Dhraghonara S. — Nethia, Dhrisès, Sidhero. 
Yanisadhes O. — Karoubès, Sarakenovighla. 
14. E. — Nethia, Dhrisès, Sidhero. 
KOUPHONISI. 
Slrongylo N. — Aphendi-Kavousi. 
Kouphonisi. — Thiro, Haghia-Photia. 
Trakhylo. — Aphendi-Kavousi. 
GHAIDHOURONISI. 


Ghaïdhouronisi E. et O. — Thiro, Nethia, Romanati, Hierapetra 
(Isthme), Aphendi-Khristo. 
Ghaïdhouronisipoulo. — Iierapetra (Isthme), Aphendi-Khristo. 
ILors PAxXIMADHIA. — Kophinos, Listaro, Vouvala, Kedros. Krioneriti. 
GAUDHOS. 


Caps Kamarela et Aspripounta. — Psiloriti, Kedros, Krioneriti. 
Caps Tsounos et Ponduré. — Rhodhovani, Haghios-Dhikios. 
Gaudhopoula. — Psiloriti et Krioneriti. 

Posilion des points de la côte et de l’intérieur. — Pour compléter ce 
qui est relatif à la géodésie de la Crète, je donne deux listes des princi- 
pales positions géographiques, déterminées par ma triangulation qui me 
permet, je crois, de dresser une carte qui ne présente plus, sous ce 
rapport, les inexactitudes de toutes les cartes antérieures. Toutes les 
positions , je le rappelle, sont coordonnées à celles de Khania et du cap 
Sidhero, telles qu’elles ont été fixées par les Ingénieurs hydrographes. 

La première liste relative aux côtes, comprend les principaux caps, 
embouchures de cours d’eau, ports etîles; les positions s’y succèdent 
sur la côte septentrionale, à partir de l’extrémité N.-0. de l’île jusqu’à 
l'extrémité orientale, d’où elles se suivent en sens inverse sur les côtes 
S.-E. et méridionale, puis enfin , du S. au N., sur la côte occidentale. 
Le nombre des points déterminés est plus nombreux sur la côte septen- 
trionale , ce qui tient à ce que les autres sont plus abruptes, d’un accès 
plus difficile, et, souvent, moins visibles des points culminants de l'in- 
térieur, puisqu’un petit monticule peut les masquer facilement. 


Côte septentrionale (de l'O. à V'E.). 


Longitude. Latitude. 
{ot Aghria-Grabousa (centre). . . 2lo 14 507 350 26° 25” 
CAPAGR AB OUS AE PPT M UE 15 30 31 40 


Tome XXII. 49 


Kisamos (font) 4e: age fupireut 
CRPRSBADHAS ERREUR) NON Ce 
Hot Haghios-Theodhoros (centre). . 
Kbania“{chäteau) m4 Late 
CARIMELERAN MEN MIE NE Ee 
Baie de Soudha (fond). . . . . .. 
SoupaAt forteresse) /-L:9-1: 0408 Ee 
CAPDHRAPANOD- 14-0770.) . |: Se 
Almyros (angle S.-0. du golfe) . . 
RHETHYMNON (phare). . . . . . .. 
Cap KhOdATO MR TEEN 
CAP/STAVRONE TS ROUEN MAR 
MEGALO-KASTRON (phare) . . . .. 
ILE Duia (Extrémité E.) . . .:. 
Ilot Paximadhi (sommet). .. . .. 
CADIKNeErSONESOS PMR TE 
HOPAUSRONT PER ERA Tee 
CAP HAGHIOS-JOANNES. . . - 
SPINA-LONGA (pointe E. de la presq.). 
Golfe de Mirabello (angle S.-0.). . 
HotPsyrat(centre )EUEMRI UE Heu 
Cap/PhaneromaAnIe ENONCE 
CAPISIDIAS 2 ETC AN EMA Le 
Stomio ou Sklavotia (embouch.). . 
Dhionysiadhes (la plus N.).. ... 
CAP SIDRERO Che h Ce Re es 


Longitude. 


210 19 20” 


23 
34 
21 40 
45 


Côte orientale (du N. au S.). 


Ilot Elasa (extrémité E) "0000 
TO /GTAUESNCENRILIE EME PEN MEMRNE 
CAP PLAKo (Salomon). . . . . . .. 
Cap Mra0stalo LME MEUTE ALAN Ten 2 


Longitude. 


240 1? 257? 


23 58 
24 00 
23 52 


20 
00 
39 


Côte méridionale (de l'E. à l'O.). 


CAPIRAERTALITENL 0.0 NE 
KOAPHDRIS (BRAUN 
Pointe Frachyla: ,- ris ee Au 
CADET, ie Matt Dave 
MIRRADETRA PT MU AE RÉ a TUE 


Longitude. 


230 47’ 


47 
40 
26 


24 


07? 


40 


Latitude. 
292 50? 
A1 30 


oo 20 50 


Latitude. 
350 46? 40” 
13 925 

35 A1 50 
7 40 


Latitude. 
350 10/1407 
34 56 40 
39, 11825 
34 59 40 
3 0 20 


(525 ) 


Longitude. -atitude. 
Ghaïdhouronisi (ext. N.-E. del’occ.) 23° 23? 45” 340 53 10” 


Myrto (embouchure). . . . . . .. 16 15 59 45 
Soudhsouro (embouchure). . . . .. 0 35 58 30 
GADIMARAE MEET SEEN. Le 22 24 30 54 40 
Ilot Paximadhi (milieu de l’occ.). . 15 30 59 50 
Cap'Haghios-Paulos. . . : . . ... 120203 0 NGC 45 
Ie GAupnos (pointe O.)... .... 21 43 20 34 49 45 
Gaudhopoula (milieu) . . .. . ... 40 35 54 30 
MO (Dlace). EAN. Le DUO UE BEL 0 
SONO RASE ln. 0 19 35 12 20 
CAPARRTOE LOU LU ee enene 15 0 12 50 


Côte occidentale (du S. au N.) 


Longitude. Latitude. 
ELAPpHonist (extrémité O.).. . . . . 210. 9 30” 350 45 0” 
DOS ENTREE MEME RER 12 0 22 10 
lot Petalidha (milieu). . . . à . : . 8 20 35 0 
ILOT ET FORT GRABOUSA. . . . . . . 1% 10 36 25 


La seconde liste, qui a trait à l’intérieur, renferme les principales 
sommités et quelques lieux habités; les positions y sont disposées du 
N. au S. par files méridiennes qui se succèdent de l'O. à l’E. comme 
pour les stations de relèvement. 


Presqu'ile occidentale. 


Longitude. Latitude. 
Cap Grabousa (mont). . . . . . .. 210 45? 207 35° 33? 55” 
HASMIOS EAST UNS TOME 45 30 25 55 
Haghios-Dhikios.. . . . . . . . . . 17 O0 20 0 
ROJERANON IT ONL) RCE STE 17 45 45 45 
Rae ORAStEONERRNENE NES SENS 18 59 26 55 
Kalathenes (col au S.). . . . . .. 20 40 23 50 
Kadano (mosquée). . . : . . . . . 21 45 19 40 
Cap Spadha (mont du milieu). . . 23 45 35 45 
Noopihanie pe EU 000 28 0 20 30 
Rhodhovani (mont au S.-0.). . . . 25 15 15 40 
Platania (mont au4S:). 1... 0.0. 34 0 28 35 
NOTA RER RS Te o 35 15 47 40 
Cap Meleka (mont 0.) . . . . . . . 45 40 35 00 
MÉETEMNCIN)  ME EEE En? 45 10 21 25 


SONDE 


Longitude. Latitude. 
SE rare te rec er A Eu LS 210 50 457? 350 32? 407 
Cap Dhrapano (mont). . . . . . .. 54 920 25 55 
Prosnero (au-dessus du village). . 52 40 19 30 
Massif central. 
Longitude: Latitude. 
MENSINASIPA AMENER. CERN 220 40° 30? 350 417 25” 
KniONErIDIE Pere GEL NE RPEMENE 71120 A4 40 
KEGPOS PRE ORNE RIT ONE ER 17 25 9 35 
NOUVALA RS MARIE AE 2 18 35 6 20 
Kouloukouna PATES ATEN 28 40 24 30 
PSNOMUEN re RL) Ur 26 45 12 25 
Listaro (mont) CAPE RASE 29-45. 3459"30 
Lavirto (labyrinthe de Gortyne). . 25 M0 SMS 
SITOMDOION CARAMEL DEN ENS 41 40 49 35 
KOPHINOS MSIE TER AAC 45 35 | 3 5TA5 
Karadagh:. «6% 2. 5 Re 49 10 35 M4 35 
Dhamania (mont au N.). ..... ET 35 8 45 
Mesokhorio (mont au S.). . . . . . 54 5 34 59 25 
Kastel-Pedhiadha:. 0000). # 23 0 55 35 42 10 
Aphendi-Sarakeno. . . . . . . . . 4 40 10 0 
Nianp (col OS) TRE ISSEN re 15 0 3 10 
TSHEDO; LAS RER EEE A1 30 43 55 
Panaghia Krystallenia . . . . . . . 10 50 10 40 
Aphendi-Khristo. . . . . . . . . Le (D 5 30 
APhENTSSIAYTO.- FR Ne 17 30 16 35 
Katharos (col au S.-E.) . . . . .. 15 30 6 10 
DANARA RE EN LOMME 20 40 10 50 
Isthme de Hierapetra (sommet). . 25 20 D'AD 


Presqu'île orientale. 


Longitude. Latitude. 
Aphendi-Kavousi. . . . . . . . .. 230 33° 35” 850 5 207 
ROnTaANALI Me Prend lobe Lee 39 45 6 35 
Neltia (mombAt IS) NME LUN 43 35 4 30 
LOUER … RNA #7 20 9 25 
Thiro (mont au S.-E.) . . .*.... 48 45 4 A5 
Toplon (mopastÈre) "2010: 20 53 0 13 140 
GLS ‘gr 2 AOF CCE) 52 - 15 42 5 
Cap Sidhero (mont). . . . . - . . : 58 25 19° 50 
SATA ENONIPIIASE-0e ee  AUeUe 59 : 30 11 0 


LPAOBIALO (ADN) 7-0 56 10 8 40 


(521) 
20 OROGRAPHIE. 


Aperçu général. — La Crète, étroite et allongée de l'E. Te S$,. à l'O. 
1° N., forme un petit système montagneux que tous les orographes 
s’accordent à considérer comme un appendice du grand massif de la 
Turquie d'Europe établi par L. Bruguière en 1826, comme groupe 
oriental du Système alpique; celui-ci a été adopté et désigné sous les 
noms de Système hellénique par Olsen en 1833, de Montagnes slavo- 
grecques par M. d’Omalius d'Halloy en 1835, et de Sistema slavo-elle- 
nico par M. Balbi en 1845. 

Cette île n’est cependant pas une simple chaîne de montagnes comme 
on serait tenté de le croire ; elle renferme, ainsi que je l’ai dit, p. 440, 
cinq massifs montagneux disposés sur une ligne droite qui court suivant 
sa plus grande longueur. Le massif central du Psiloriti est séparé des 
autres, à l’E., par le plateau accidenté de Megalo-Kastron, et, à l’O., 
par celui de Rhethymnon. Vers l’E., les massifs de Lassiti et de Sitia 
sont seulement séparés entr’eux par une vallée; il en est de même vers 
l’O., quoique moins distinctement, entre ceux des Aspro-Vouna et de 
Kisamos et Selino (1). 

Les points culminants sont plus rapprochés de la côte qui fait face à 
V’Afrique; aussi le versant méridional est-il presque partout court et 
rapide, tandis que le versant septentrional est prolongé par des parties 
plus basses , qui renferment presque toujours de petits chaînons mon- 
tueux et quelquefois des plaines. Les deux plateaux sont limités sur la 
côte méridionale par deux grands chaînons partant, l’un du S.-E. des 
Aspro-Vouna, et l’autre du S.-0. des montagnes de Lassiti. 

Le massif du Psiloriti, au centre de l’ile, s’abaisse au N.-N.-0.; à son 
angle N.-E. se rattache le chaïnon côtier du Kouloukouna qui court à 
l'O. où les bas plateaux de Mylopotamo viennent s’interposer. La ligne 
de séparation des versants, peu sinueuse, passe par le point culminant, 
et celui qui est au N. a une surface triple de celle de l’autre. En outre 
d’un grand nombre de vallons, il y a les deux bassins principaux du 
Mylopotamos au N. et du Platy au Sud. 


(1) En Crète, comme dans les autres pays grecs, sans doute, les plaines sont appe- 
lées Hampous ou Pedhiadha et les montagnes Ori ou Vouna. Les diverses parties 
de ces dernières sont ainsi désignées : les hautes sommités Madarès, un pic Koriphi, 
une crète Armi, une crète aiguë Rakhis, la pente Plevra, la montée Rhizoma , la 
descente Hhyma , les gorges profondes Pharanghi, les vallées Zangali, 


( 528 ) 

Du côté de l’E., le plateau de Megalo-Kastron est formé par le chai- 
non montagneux du Kophinos qui borde la côte méridionale, par la 
plaine de Messara, et enfin par un plateau accidenté par de hautes 
collines et incliné au Nord. La ligne de séparation des versants est peu 
sinueuse ; au N. il y a cinq vallons principaux; le versant méridional, qui 
forme les trois-cinquièmes de la surface, est partagé entre les bassins du 
Hiero-Potamos et de l’Anapodhari. — Les montagnes de Lassiti se com- 
posent du massif principal, dans lequel se trouve enclavée la plaine du 
même nom ; il se prolonge à l'E. pour former l’isthme de Hierapetra. 
Au N.-E. est le petit massif de l’'Aphendi-Stavro, séparé par la vallée de 
Mirabello. La ligne de séparation des versants est assez-sinueuse, et 
celui du S. n’offre que deux bassins; celui du N. qui forme les trois- 
cinquièmes de la surface totale, renferme ceux de l’Aposelemi, du 
Mirabello-Potamos et un autre. — Le pays de Sitia est divisé par de 
grands vallons en deux groupes de massifs, dont l’occidental porte le 
point culminant; un prolongement de l’oriental forme l’Akroteri du cap 
Sidhero. La ligne de séparation des versants, fort sinueuse, laisse au 
N. le bassin du Stomio ou Sklavotia, et au S. celui du Ghoudhsero et un 
autre ; elle est à-peu-près médiane. 

Du côté de l’O., le plateau de Rhethymnon, d’abord, est formé par le 
chaînon montagneux du Krioneriti qui borde la côte au $. et qui est 
séparé, par la plaine d'Haghio-Vasili, d’un plateau montueux qui 
s’abaisse au N. La ligne séparative des versants, peu sinueuse, suit la 
ligne médiane en laissant au N. quatre grands vallons et au S. le bassin 
du Mega-Potamos. — Le massif des Aspro-Vouna proprement dits, est 
bordé au N. par un plateau montueux qui renferme les plaines de l’Apo- 
korona et de Khania; un prolongement forme l’Akroteri du cap Meleka. 
La ligne séparative , assez sinueuse, passe par les plus hauts sommets; 
le versant septentrional dont la surface est au moins triple de celle de 
l’autre, se divise en quatre bassins principaux, ceux du Boutaka, de 
Stylo, du Kladiso et du Platania, et renferme celui d'Omalos ; le versant 
méridional renferme la plupart de ces gorges étroites et si profondes 
dites Pharangha. — Le pays de Kisamos et Selino se compose d’une 
partie montueuse au S., séparée par un arête, d’un plateau qui s’abaisse 
à la côte septentrionale et qui porte à ses extrémités les deux Akroteri 
montagneux des caps Spadha et Grabousa. La ligne de séparation, assez 
sinueuse, quille souvent les sommilés et passe dans la plaine de Kadano; 
le versant septentrional, un peu plus étendu, renferme quatre vallons 
principaux, l’autre en renferme cinq. 


(1529:)) 

Les deux principales plaines de l’île sont donc situées : celle de Khania, 
la plus petite, près de la côte septentrionale; et celle de Messara, la 
plus grande, sur la côte méridionale. C’est surtout dans un des massifs 
montagneux, les Aspro-Vouna, qu’existent les Pharangha. Quant aux 
plaines fermées , avec leurs gouffres ou Khonos, elles se trouvent aussi 
dans les autres. 

Dans l’examen détaillé de chacun des sept massifs de la Crète, je 
commencerai par le plus occidental, pour terminer par le plus oriental, 
surtout parce que le tiers occidental de l’ile est plus fréquenté par les 
voyageurs , quoique dans l’aperçu précédent j'aie préféré partir de celui 
qui est au centre, et qui domine tous les autres , pour atteindre succes- 
sivement les deux extrémités. — Je donne ici les sept massifs de la Crète 
avec l’altitude du point culminant de chacun d’eux, et celles des cols 
qui séparent les massifs montagneux ; les chaïînons accessoires sont 
en 2{alique. 


Spdaha É Meleka & . Koulou- & = Sidhero 
Grabousa © Dhrapano = : kouna S Aph. Stavro & Dhrisès 
Selino. É Aspro-Vouna £ Rhethymnon © Psinorrri £ Meg.KastronZ  Lassti x  Sita 
(Apopighari)  (Theodhori) £ Hrionerili  (Psiloriti) £ Kophinos 5 (A. Kbristo) % (A. Kavousi) 
1,388m, À 92,575m, Æ 1,027m.  9,498m 1,2500 & 2,155. À  4{,472n. 


Hypsométrie. — Strabon regardait l’Ida comme plus élevé que les 
monts Leuka (Aspro-Vouna) ; il ne croyait pas l'altitude de ces derniers 
inférieure à celle du Taygète , fixée à 2,409" il y a trente années à peine. 
Le jour où je mis le pied sur le sol de la Crète, son hypsométrie était 
encore presque inconnue ; en effet, il y avait les sept altitudes recueil- 
lies et publiées par Sieber en 1821, et reproduites par L. Bruguière en 
1826, dans son Orographie de l'Europe (1). Bory de Saint-Vincent, en 
1827, avait cependant changé le chiffre de l’Ida (2). Enfin, MM. Kuts- 
cheit et Mahlmann, dans une petite carte publiée à Berlin en 1842, 
avaient ajouté deux altitudes nouvelles aux trois qu’ils empruntèrent à 
Sieber. En 1845, on ne possédait donc que neuf altitudes ainsi distri- 
buées : 


(4) Reise nach der Inseln Krela. — Recueil de Voy. et de HMém. de la Soc de 
Géographie , t. NI, p. 325. 


(2) Encyclopédie ; Géographie physique. Alas : Analyse des eartes, p. 76. 


( 530 ) 
Sieb. Brag. B.S.V. Kut. et Mahl. 


MhErISO, sie pere: un cute ele CIC EE RENNEIESFui) 
(HETESIOSOTO).,: ne er ste ee 11841 2308 
Aspro- Vouna. . Ligrestosowo ou Mont Blanc. . ...... 2307m 
| MadaDE he”. 50e OO 7100 (2306) 
AMONULE V2 ete a 0 eo et M PR 1200 ( 390) 
Rhethymnon. . . Mont près Retimo (Vrisina). .. 450 862 859 
AGREE Es AUS EEE 11) RARORETIUE 1200 ( 390) 
KentEDS ra AMENER UN 575 1120 4121 
Psilont RCE Idate 0e araR EE 1200 
Mont Ida, aujourd. Pristorit. . . . 2339 2378 
PSDNIS EPP CEE 2 in jee use de CRD 7200 (2339 
Megalo-Kastron. Plateau au pied du Jouktas. . .. 4155 
ASSIS EEE L'ASSHOSE e e arctet Ce 2212 2272 


La triangulation de l’Archipel par le capitaine Gauttier, en 1818 et 
1819, avait sans doute fourni l'altitude de plusieurs autres sommités ; 
mais elles étaient restées inédites, et inconnues par conséquent. 

Pendant les sept mois et demi que j’ai passés dans l’île, j’ai pris l’al- 
titude d’un grand nombre de points à l’aide de deux baromètres d’Ernst. 
L'un avait été installé à Khania, chez M. Gaspary, qui voulut bien faire 
les observations sédentaires, trois fois par jour. J’emportai l’autre dans 
toutes mes excursions, et chaque fois que je montai sur un point culmi- 
nant ou que je rencontrai un col, une source, une localité intéressante, 
je ne manquai pas d’y observer la hauteur de la colonne mercurielle. I 
en était de même, presque toujours , en arrivant le soir au gîte et le 
matin en le quittant , comme aussi lorsque je passais sur le même point 
à plusieurs reprises. De la sorte, je suis parvenu à déterminer la hau- 
teur de la plupart des points culminants ou intéressants de l’île de Crète, 
et à obtenir quelques observations multiples qui m'ont permis d’appré- 
cier les erreurs auxquelles on est exposé, dans cette partie de la Médi- 
terranée , en prenant des altitudes à l’aide du baromètre. 

Dans ces parages, où les variations barométriques ne sont guère que 
le tiers de celles qui se produisent en France, à 40° plus au N., les dif- 
férences dans les altitudes, déduites de diverses observations, varient 
généralement de 5 à 15"; dans quelques cas fort rares, j'ai observé jus- 
qu’à 25, 31 et même 39 de différence. 

Les allitudes que j'ai prises ont été calculées par moi définitivement, 
à l’aide des tables insérées par M. Mathieu dans l'Annuaire du Bureau 
des Longitudes pour 1859, Je donne seulement ici, comme spécimen , 


( 531 ) 
les éléments qui m'ont servi à établir celles des points culminants de 
chacun des massifs et de quelques-uns des principaux cols qui les sépa- 
rent; pour la station inférieure de Khania, qui forme la seconde ligne, 
les observations ont été réduites à 0°, et rapportées au niveau de la mer 
à l’aide d’une petite addition. 


Dates. Barom. T.bar, t.air. altitudes, 
Pays DE KISAMOS ET SELINO. . . .. A1 juin h° 653,3 1405 1205 1,388,3 
Apopighari....... 6h mat. H 764,7 0 34,5 


Col d'Epanokhorio.. 20 juin bh°707,4 30, 98, 648,2 
bison ETS 0 uns 


ASPRO—-VOUNA OU SPHAKIA. . . . .. 23 octob. h?,571,9 40 » 2,374,5 
Phecdhorns-PUMNE : Ah soir H 762,0 0 16,5 
PLATEAU DE RHETHYMNON. . .... 30 juillet h° 678,1 924, 20,3 1,026,5 
KTIGNETIUI EME Us SPmat MH) NN 0030 
COURTERKOTERMEN 11 octob. h° 734,1 95 22 384,0 
9h mat. H 764,1 O0 24, 
MONTAGNES DU PSILORITI. . . . . .. 12taoût  h21572,30 1335 11,5 "2/97, 7 
BSIIONIUIPeR eme TNA CH TC 30 
PLATEAU DE MEGALO-KASTRON. .. 24 août h’ 661,3 97,2 22, 1,249,6 
KODRMMOSE MEN LA ASIA 7592000007 
Kastel-Pedhiadha. . . 29 août h’ 735,6 23,5 22 348,6 
6h soir 1022100 23 
MONTAGNES DE LASSITI. . ...... 5 sept. h’ 593,7 923,7 15,2 2,154,6 
Aphendi-Khristo.... 9b mat. H 760, DAME: 
Col d'Episkopi. . . . . 14 sept. bh 753,7 26,5 24 128,6 
Fbémat- MHe761,3 00 24 
DANSPIDENSLNTAESAMRPENR CRUE TE. 13 sept. h° 643,7 24,5 145,5 14,471,7 


Aphendi-Kavousi. . . 10h mat. H 760,4 © 26 


Les altitudes que j’ai prises et calculées sont au nombre de 457; je 
les donne à la suite de la description de chacun des sept massifs auquel 
elles appartiennent; celles des petites îles sont indiquées séparément; 
elles se répartissent de Ia manière suivante : 


KRISAMOS CISCO PAS TMPSTIOLITEENENCE EE ETOPANS TENSION MMM 
Aspro-Vouna . . ... 91 Pl.deMegalo-Kastron 49 Petites iles. . . .... 41 
Plat. de Rhethymnon 38 Mont. de Lassiti. . . 56 


( 532 ) 
Pays montagneux de Kisamos et Selino. 


Parties saillantes du sol. — Ce pays montagneux a son point culmi- 
nant, l’Apopighari, assez rapproché de sa limite orientale. La partie 
méridionale est un pays montueux, se terminant au N. par une longue 
crête montagneuse, qui part de l’Apopighari et va droit à lO.-N.-0. 
joindre un autre sommet situé près de la côte, l’Haghios-Elias; cette 
partie montueuse se prolonge au N. de l’Apopighari. La partie septen- 
trionale est un plateau qui va en s’abaissant vers le N. à la côte; à ses 
deux extrémités se trouvent deux chaînons montagneux élevés, dirigés 
au N., les Akroteri des caps Grabousa et Spadha. 

La partie montueuse méridionale, qui occupe près des deux liers de 
la surface, est formée vers l’O. par de grandes crêtes séparées par de 
profonds vallons, dirigés au N.-E. et au S.-0. dans le N., et du N. au $. 
dans le S. Les points culminants sont : l’Haghios-Elias au N. et l’'Ha- 
ghios-Dhikios dans la partie moyenne. Dans la partie médiane, se trouve 
une grande dépression ovalaire , la plaine de Kadano, qui est sillonnée 
par des vallons qui ont de 30 à 50 mètres de profondeur aux alentours 
de Phloria, et dont le principal commence à l’Apopighari par Spina; elle 
communique à la côte méridionale par la vallée du Vlithias. La partie 
orientale , également formée de grandes erêtes séparées par de pro- 
fonds vallons, porte dans son milieu l’Apcpighari, au N. duquel les 
crêtes courent du S. au N., tandis qu’au S., elles vont au S. pour tourner 
ensuite au S.-0. Un vallon profond en sépare le petit plateau de Pro- 
dormi, qui se termine à la mer par des pentes très-abruptes. 

Le plateau septentrional est partagé en bandes étroites par plusieurs 
vallons qui descendent à-peu-près directement au N. L'une des crêtes, 
plus élevée que les autres, part du pied de l’Haghios-Elias et, se diri- 
geant au N.-N.-E., va atteindre la côte; elle se lie à VO. au petit plateau 
de Mesoghia qui est séparé de la côte occidentale par une plaine basse, 
étroite. Des monticules plus élevés se trouvent dans la partie médiane; 
l’une porte l'antique ville, dite Palæokastron ; les autres sont au S.-0. de 
Spelæa. 

L’Akroteri du cap Grabousa commence par un haut chaïinon monta- 
gneux, divisé en deux par un vallon longitudinal, et se termine par un 
plateau bas assez uni; vers l'O., il est limité par des falaises verticales 
souvent élevées. L’Akroteri du cap Spadha, appelé Rhodhopou, commence 
par trois chaîinons montagneux qui se réunissent en un seul plus élevé; 


( 588) 
les deux flancs, surtout celui qui donne sur le golfe de Kisamos, sont 
très-abruptes. Le point culminant est dans la partie médiane, comme 
pour le précédent. 

En avant du plateau septentrional, entre les deux Akroteri, se trou- 
vent deux plaines maritimes séparées par la crête plus élevée qui part 
de l’'Haghios-Elias : l’une est la plaine de Mesoghia qui s’avance au S.-0. 
dans l’intérieur, et l’autre, celle de Kisamos, qui borde seulement la 
côte. Il y a aussi une petite plaine maritime, celle de Koutri, sur la côte 
occidentale, entre l’Akroteri du cap Grabousa et la base de l'Haghios- 
Elias. 

Bassins et vallons. — La ligne de séparation des versants est assez 
sinueuse et ne coïncide pas toujours avec celle qui passerait par les 
hauts sommets; de l’Haghios-Elias elle vient au S., à l’Haghios-Dhikios, 
et rejoint l’Apopighari, non en suivant la haute crête qui limite les 
dèux parties, mais en passant dans la partie septentrionale de la plaine 
de Kadano. Les deux versants auraient une surface à-peu-près égale sans 
la présence des deux Akroteri, qui viennent donner une étendue plus 
grande à celui du N. Ce dernier renferme quatre grands vallons ou 
bassins principaux, et celui du S. cinq; leurs noms sont en italique 
dans la liste générale suivante, à laquelle sont ajoutées les plaines tant 
littorales qu’intérieures : 


Versant méridional. Versant septentrional. 
V. de Kamposelorakho. VERTE MES CSI EN ENEEE PI. de Mesoghia. 
V. d’Ennéa-Khoria (S.-0.) S Bu PIFIANOS 24 ET 
V. d’'Haghios-Theodhoros. Æ B. du Kamara . ........ 
V. de Pelekano. #4 V. du Kakoperatos. . . . . .. PI. de Kisamos. 
V. de Sarakena. = V. du Keramari où T'yplhlos. 
B. du Vlilhias. Ê B. du Nopiano-Polamos . . . 
As re S 
Ve HAQUES Mb de SReRar a np te 5 de pile 
B. de Souia. BAT UNTTE TON UNS EE \ 


Sur le versant septentrional, aboutissant au golfe de Kisamos entre 
les deux Akroteri, le petit vallon de Mesoghia se continue largement 
avec la plaine maritime. Le bassin du Pirianos ensuite se compose de 
deux vallons qui naissent à la base de l’Haghios-Elias, et se réunissent 
à leur entrée dans la plaine maritime à l'O. de Kisamos. Celui du 
Kamara est formé par deux vallons qui naissent au pied de la grande 
crête qui va de l'Haghios-Elias à lApopighari, et se réunissent après 
avoir entouré la haute colline de Palæokastron; il s'ouvre à la plaine 


(534) 

maritime à l’O. de Kisamos. Le grand vallon du Kakoperatos commence 
au col de Kalathenes ; celui du Typhlos s'étend au $. de la grande crête; 
il commence par celui d'Ennea-Khoria et de Rhogdhia, dont le ruisseau 
porie le nom de Keramari, qui est en communication, par une gorge 
profonde et impraticable, avec la vallée inférieure qui vient s'ouvrir à 
la plaine maritime dans la partie occidentale. Le bassin du Nopiano- 
Potamos dépasse la grande crête comme le précédent; il comprend la 
partie septentrionale de la grande dépression de Kadano, qui commu- 
nique, par deux gorges profondes et étroites, au N. d’Hydris et de 
Phloria, avec la vallée inférieure; celle-ci passe au milieu des hautes 
collines qui sont au S.-0. de Spelæa, et va s’ouvrir à la plaine maritime, 
à la base occidentale de l’Akroteri du cap Spadha. A l'E. de ce dernier, 
sur le golfe de Khania, le bassin de Spelæa se compose de plusieurs 
grands vallons qui naissent dans la crête et se réunissent avant le village ; 
il va s’ouvrir à la mer à la base orientale de l’Akroteri. Celui du Tavro- 
witi comprend un premier vallon qui commence par le cirque de Rou- 
mata et va droit à la plaine maritime ; un second commence par la plaine 
de Sevronas et rejoint le précédent au-dessus de Voukoniès; un troi- 
sième, qui naît au pied des montagnes bordant la plaine d’Omalos, 
renferme Nea-Roumata et Dhéré; il n’est séparé que par un seuil peu 
élevé de la plaine de Sevronas, et rejoint le premier au-dessous de 
Voukoniès; celui de Sevronas peut être consideré comme formant la 
limite du pays vers l’Est. 

Sur le versant méridional aboutissent un grand nombre de vallons 
qui sillonnent le flanc des montagnes et atteignent la côte occidentale ; 
les deux principaux sont celui de Kamposelorakho, et celui qui va du col 
d'Ennea-Khoria à la baie qui est au N. d'Elaphonisi. 

À la côte méridionale, entre le cap Krio et la presqu’ile de Selino- 
Kasteli aboutissent successivement les vallons d’'Haghios-Theodhoros, 
de Pelekano et de Sarakena, dirigés au $., de l’Haghios-Dhikios ou des 
crêtes qui s’y rattachent. Le bassin du Vlithias comprend la plus grande 
partie de la dépression de Kadano et la plaine entière de ce nom; il se 
termine par un vallon profond qui part de l’angle S.-0. de celle-ci et va 
s’ouvrir à la mer, à l'E. de la presqu’ile de Selino-Kasteli, où aboutit 
aussi le profond vallon de Temenia et d’Azohidès. Enfin, à l'extrémité , 
se trouve le vallon qui commence au S. de l’Apopighari et s’ouvre à la 
mer à Souia; il comprend le profond vallon de Rhodhovani, celui 
d’Ergasteri, celui d'Epanokhorio, qui limite la région à l'E, et la plaine 


(535) 


de la partie supérieure de celui d’Haghia-Trini avant son entrée dans 
les Aspro- Vouna dont il ressort au-dessous de Livadha. 


Hypsométrie. — Conformément aux divisions précédentes, je répartis 
les 87 altitudes dans les deux catégories suivantes, en commençant par 
celle qui renferme les plus hautes sommités (1). 


A. PARTIE MONTUEUSE MÉRIDIONALE (Selino) 


A l’O. de la plaine de Kadano. 


Sommet à 3 kil. au S.-E. de 
PHaghios-Elias. . . . . . . . 
Haghios-Elias au S. de Mesoghia 
Kanavas, hameau. . . . . . . 
Sommet au N. d’Ennea-Khoria. 
Colde ce sommet à l’H.-Dhikios. 
Haghios-Dhikios-Koriphi . 
Sommet à lO. de l’H.-Dhikios. 
Le Keramari au bas de la plaine 
d’Ennéa-Khoria. . . . . . . 
Rhosdhia  égise: PAM. EN. 
SommetauN.-0.deSklavopoula 
Col de ce sommet à celui de 
PEIEKANO M REMAME NI ONAPMRSE 
Sommet au-dessus de Pelekano 
Fontaine au-dessus de la mos- 
quée de Pelekano. . . . . . 
Ruisseau en amont de Pelekano 
Pelekano, maison de Vilal- 
L'AMATNES T) ee Et 
Col de Pelekano à Sarakena. . 
Crête entre Sarakena et Kadano 
Ruisseau oriental de Sarakena, 
entre Pelekano et Kadano. . 
Ruisseau de Sarakena, à Stavro 


Plaine de KHadano et Vlilhias. 


Vallon AS DIn A EEE 
Apano-Phlori, maison de Soli- 


Ruisseau au-dessus de Kato- 
PINORPA MEN PE REC OR 
Plateau entre Kato-Phlori et la 
plaine de Kadano. . . . .. 
Hydris, dépression entre le No- 
piano-Potamos et le Vlithias. 
Kadano MMOSQUEE M CEE 
Plaine à l'E. de la mosquée de 
KAGANON ENS EMULE. Are 
Colline au N. du chemin de 
Plemmeniana à Pelekano. . 
Le Vlithias au bas de cette 


Selino-Kasteli, ruines . . . . 


A V’E. de la plaine de Kadano. 


Apopighari, au N.-0. d’'H-Irini. 1,388m 
Col au N. entre H.-IrinietSpina. 4,224 


Col entre Haghia-Ilrini et Néa— 
Roumata. .. 


897 


(1) Dans toutes les listes partielles, les altitudes se succèdent du N. au S. et de l'O. 
vers l'E ; par suite de corrections, celles-ci sont généralement inférieures de 15m à 
celles qui ont été données en chiffres ronds dans l’Iinéraire p. 144 à 366. Le chiffre 
placé quelquefois à la suite du nom de la station, entre parenthèses , indique le nom- 
bre d'observations dont {a cote d'altitude est alors une moyenne. 


Bas de la plaine au-dessus 
d’Haghia-Irini. . ... , . . .. 
Vallon au bas d’Haghia-Irini.. 
Col entre Haghia-Irini et Epa- 
nOkKhorio M (2) 0e, RD 
Epanokhorio, maison des Pa- 
pas (3). . « 
Colline au S. d’Epanokhorio. . 


B. PLATEAU 


A l’O. du Typhlos. 


Plateau à l’0. de Mesoghia- 

Pouvanan Cr te 
Chemin de Mesoghia à Kisamos 
Crête entre Mesoghia et Lousa— 


Col entre Koutri et Lousakiès. 
Lousakiès-Zakhariana, terr.ter. 
Vallon oriental du Pirianos, au 

bas de Lousakiès . ...... 
Colline entre ce vallon et Palæo- 

KAS(TON re Er 
Eglise d’Haghios-Polykarpos . 
Colline tertiaire au S.-S.-0 . . 
Kisamo-Kasteli, le faubourg (4) 
Le Kamara, au N.-E. de Palæo- 

KAS TON MMM EPA 


Terr. tert. sur la pente S.—0. . 
Plaine à PE. de Kisamo-Kasteli. 
Kaleriana, centre du village. . 
Crête de PO. du Typhlos, som- 


Chapelle au-dessus de Topolia 
Crête de Kalathenès à Rhogdhia 


(536 ) 


697m 
577 


648 


617 
624 


Ergasteri, centre du hameau. . 
Col entre Ergasteri et Koupha- 


Spaniako, mosquée (2). .... 
Sommet auS.-0. de Rhodhovani 
Rhodhovani, haut du village (2) 
Vallon de Souia, au bas de Moni 


SEPTENTRIONAL (Kisamos). 


297m 
92 


4T3 
309 
262 


118 


205 


304 
305 


Entre le Typhlos el le Tavroniti. 


Vallon de Spelæa au N-E. . .. 
Id. au S-E,...... 


10 


Spelæa, cour de l’église (2).. 
Ter. tertiaire au N.-E. de Spelæa 
Colline au N.-0. de Spelæa . . 
Col de Spelæa à Kisamos . . . 
Colline talqueuse près du col . 
Sommité de Topoliaà Dhrakona 
Terrain tertiaire sur la pente . 
Le Tavroniti à Voukoniès (2). 
Le Tavroniti à l’éboulement en 

aval de Roumata. . . . . .. 
Le Tavronitià Roumata, école(2) 
sommet au N.-E. de Roumata. 
Col de Phloria à Roumata . . . 
Sevronas, bas de la plaine (2). 
Col de Sevronas à Nea-Roumata, 


Akroteri du cap Grabousa. 


Sommité septentrionale. . . .. 
Terrain tertiaire au S.-E. du fort 
Fontaine sur le chemin. . . .. 


Akroteri du cap Spadha. 


Sommité centrale. . . . . .. .. 
Plateau au bas decette sommité 
Terrain tertiaireau N. d’Aphrata 
Sommet talqueux entre Aghri- 

viliana et Gonia... "1... 
Col tertiaire de Kamara à Veni. 
Monastère de Gonia (3). . «+ .. 


672m 


979 
355 
952 
536 
100 


G4m 
149 
215 
233 
258 
414 
324 
400 


240 
365 
803 
775 
598 
648 


G94m 


285 
170 


(531) 
Aspro-Vouna ou montagnes de Sphakia, 


Parties saillantes du sol. — Cette division de la Crète, largement 
unie au pays précédent, se compose du massif montagneux proprement 
dit, Ori-tis-Sphakias, bordé au N. par un plateau montueux assez large. 
Dans la partie orientale , il y a la plaine intérieure, accidentée, de l’Apo- 
korona , limitée au N. par le plateau du cap Dhrapano. Dans la partie 
occidentale se trouve la plaine longitudinale, unie, de Khania, qui s’ou- 
vre à la mer, à l'E. et à l'O. de l’isthme de l’Akroteri, qui limite au N. 
la baie de Soudha. Celui-ci est un plateau entièrement isolé, peu élevé, 
terminé par le chaînon montueux du cap Meleka. 

Le massif montagneux est ovalaire, allongé de l’O.-N.-0. à l’E.-S.-E., plus 
élargi dans sa partie occidentale, et terminé à l'Est par un prolongement 
étroit qui s’avance dans cette direction jusqu’à la base du massif du 
Psiloriti, en bordant la côte méridionale et séparant ainsi de la mer de 
Lybie la partie plus basse de la région de Rhethymnon. C’est une sorte 
de haut plateau portant à sa surface de grands monts, allongés dans l’O., 
en cône assez régulier dans l’E., dont l’ensemble occupe une assez grande 
surface. Une petite portion est isolée, par la fente d’'Haghia-[rini , de 
V'Aghatopi, première sommité, encore dans l’éparkhie de Selino, qui 
est moins élevé de 100 que le Volakia, dont il est séparé par le col de 
Trypeté ; à l'E. de la vallée de Samaria et du Xyloskalo sont les masses 
du Triamati et du Stravopodia au-dessus du village, qui paraissent les 
plus élevés de tout le massif et que je n’ai point visités ; les vallons, 
ici, sont multipliés , excessivement profonds et passablement boisés. 
Plus à l'E est l'immense cône blanchâtre du Soro, que l’on aperçoit bien 
d’un si grand nombre de points entre Khania et le Psiloriti, puis le 
Theodhori droit au-dessus d’Anopolis; au N.-0. et au N. sont le Mavri et 
l’Haghio-Pneuma réuni par de hautes sommités, dites Madarès , au Kori- 
phi-tou-Kastro , dont les pentes descendent à Askypho ; un petit plateau 
situé à 1,500» d'altitude porte le nom de Niato. Les vallons, là, sont 
larges , moins profonds et fréquemment sans issue. À l'E. du col d’Asky- 
pho reprennent de hautes sommités dont une ramification, sous le nom 
d’Arkoudha, s’avance vers l’Almyros en portant Alikampos sur son 
revers septentrional. — Assez près de la limite occidentale se trouve un 
petit bassin intérieur fermé , dit Omalos (la plaine); dans la partie orien- 
tale , 1l y en a un autre beaucoup plus petit qui renferme Askypho. 

Ce massif est ainsi séparé en trois et même quatre autres par des dé- 


( 538 ) 

pressions étroites et profondes, transversales, courant à-peu-près du N. 
au S. La plus occidentale, située très-près du bord, n’est qu’une crevasse 
profonde, impraticable, par laquelle s'échappe le ruisseau d'Haghia-[rini 
et qui rejoint au bas de Livadha le vallon d'Epanokhorio, avant le port 
de Souia. La seconde, sur laquelle se trouve Omalos, est formée au N. de 
cette plaine par le vallon qui descend à Meskla et qui aboutit à la partie 
supérieure de la plaine de Khania, au-delà de laquelle elle semble se 
prolonger encore par la vallée étroite du Platania; au S. d’Omalos, après 
avoir passé le col du Xyloskalo, on entre dans le grand et profond vallon 
de Samaria , parfois si étroit, qui vient déboucher à la mer au-dessous 
d'Haghia-Roumeli. La troisième , qui renferme la plaine d’Askypho, est 
formée au N. par le valion-défilé qui conduit à Prosnero dans lApoko- 
rona, et au S. par un vallon qui conduit à la petite plaine de Nipros, de 
laquelle descend le ravin profond et élroit qui va s’ouvrir à la mer près 
de Komitadhès. Les deux dernières dépressions sont les seules voies de 
communication qui existent entre les deux versants des Aspro-Vouna; la 
première est accessible seulement pour les piétons, les bêtes de somme 
ne pouvant franchir le Xyloskalo ; quand à la seconde, elle est pratica- 
ble pour ces dernières ; aussi est-ce le seul passage fréquenté pour aller 
de Khania chez les Sphakiotes. La partie située entre Prosnero et Askypho 
quoique d’un accès infiniment plus facile que l'autre est cependant assez 
facile à défendre pour que les Vénitiens et les Tures, jusqu’à la guerre 
de indépendance en 1825 , n’aient osé forcer ce passage pour ravir leur 
indépendance aux habitants du versant méridional des montagnes. 

Le plateau septentrional est divisé en plusieurs parties par la plaine 
de Khania. La partie occidentale est séparée à l'O. du massif de Kisamos 
et Selino par le grand vallon qui, du pied des montagnes d'Omalos, à Nea- 
Roumata, va rejoindre celui du Tavroniti au-dessous de Dhéré; c'est 
une arête montueuse qui part des montagnes et se dirige d’abord vers le 
N. et ensuite à l'E. de Dhéré jusque près de Khania ; un vallon peu large 
elassez profond donne passage au Platania ; elle est bordée par une plaine 
maritime de À à 2 kilom. de largeur. Une partie moyenne, située entre 
les plaines de Khania et de l’Apokorona, borde les montagnes; elle est 
traversée par un grand nombre de vallons, et le mont Malaxa est la prin- 
cipale sommité. La partie orientale comprend d’abord l’Apokorona, 
plaine assez accidentée , divisée en trois plus petites : celle de Stylo sur 
la baie de Soudha, celle de Babali-khan au milieu et celle du Boutaka 
sur Je golfe de l’Almyros; à l'exception de celle du milieu, les deux 


( 539 ) 
autres sont traversées chacune par des torrens descendant des monta- 
gnes et traversant le plateau médian. Vient enfin le plateau de Kephala, 
entre la baie de Soudha et le golfe de l’Almyros, dont les pentes sont très- 
abruptes à l'E. sur ce dernier; son point culminant est la montagne du 
cap Dhrapano. 

Là plaine de Khania, au N; de la partie moyenne du plateau, s'étend 
principalement au S.-0. de la ville, sur une longueur de près de vingt 
kilomètres de PO.-S.-0, à V’'E.-N.-E. ; elle commence par la plaine de 
Skenès séparée seulement par de basses collines, et elle se poursuit jus- 
qu'à la baie de Soudha en prenant successivement les noms des prin- 
cipaux lieux habités : Alykianou , Laghia et Khania; plusieurs torrents 
la traversent du S. au N. et, à Khania, elle s’ouvre largement au golfe 
du même nom. 

Au N. de la baie de Soudha se détache l’Akroteri du cap Meleka, 
complètement isolé par la bifurcation de la plaine de Khania; c’est un 
bas plateau incliné vers le N., présentant quelques vallons dans la partie 
occidentale; il est terminé par un chaïînon montueux beaucoup plus 
élevé, dirigé du N.-0. au S.-E., et renfermant des vallons transversaux 
et longitudinaux souvent profonds et escarpés. 

Bassins et vallons. — La ligne de séparation des versants est assez 
sinueuse et coïncide avec celle des plus hauts sommets. Comme ceux-ci 
se trouvent très-rapprochés de la côte méridionale, le versant septen- 
trional a une largeur et une surface au moins triples de celles de l’autre; 
il se divise en trois bassins principaux, et c’est encore à lui, plutôt qu’au 
suivant, qu'appartient le bassin fermé d’Omalos. Le versant méridiona 
renferme quatre de ces grands vallons excessivement profonds et étroits 
désignés sous le nom de Pharanghi. Noici ces différents bassins et 
vallons : 


Versant méridional: Versant seplentrional, 
V. de Trypeié. | B. du Plalania.... PL de Platania: 
V. de l'Haghia-Roumeli-Potamos: = B. du Kladiso. . . .. PI. de Khania. 
V. d’Aradhena. £ IBACEISTIIOP EEE 
V. de Mouri. 5 B. du Boutaka. . . . PI. de l'Almyros. 
ei 


V. de Komitadhès. 


Sur le versant septentrional , le bassin du Platania s'ouvre au golfe de 
Khania, vis-à-vis de l’ilot d'Haghios-Theodhoros ; il commence dans 
les hautes montagnes entre le Mavri et le Stravopodia ; à Meskla, il naît 
plusieurs vallons dont le principal vient du col d’Omalos. Il se confond 


Tome XXIL 90 


( 540 ) 

ensuite avec la plaine de Skenès et celle d’Alykianou , dans la partie N. 
de laquelle se rend un torrent qui descend des contre-forts septentrio- 
naux du Mavri en suivant les gorges profondes du plateau, à Theriso. La 
vallée est ensuite fort étroite en traversant la portion du plateau orienta! 
dirigée de Dhéré à Khania. Le bassin du Kladiso qui débouche à V0. de 
Khania, se compose de plusieurs vallons qui sillonnent le plateau au S. 
de Mourniès et de la plaine de Laghia et de Khania. 

La plaine de Stylo qui a deux ouvertures dans le golfe de Soudha, à 
l'O. et à l'E. de la colline de Kalyves, reçoit plusieurs vallons ; celui du 
Katokhori de Dhrakona à plusieurs ramifications dans les contre-forts 
septentrionaux du Mavri; celui de Rhamni vient de ses pentes orientales ; 
celui de Melidhoni a de nombreuses ramifications dans les montagnes 
depuis l’Haghion-Pneuma jusqu’à la plaine d’Askypho. 

Le bassin du Boutaka, qui s'ouvre au golfe de l’Almyros , se compose 
d’une multitude de vallons qui sillonnent les montagnes qui entourent 
Prosnero , et d’un grand vallon qui se trouve à l'O. de ces dernières et 
qui commence près de la plaine d’Askypho. 

Sur le versant méridional, après la grande crevasse d'Haghia-frini à 
Livadha, vient le vallon de Trypété qui commence à l’O0. du Volakia. 
Le vallon de l’'Haghia-Roumeli-Potamos naît au Xyloskalo, qui le sépare 
d'Omalos , et reçoit à Samaria plusieurs vallons du Triamati et du Stra- 
vopodia; entre Samaria et Haghia-Roumeli, c’est une gorge profonde 
présentant çà et là plusieurs élargissements, et dont les défilés, de 
quelques mètres de largeur seulement, sont occupés entièrement par le 
lit du ruisseau. 

A l'E. d’Aradhena, il y a une gorge profonde qui vient du bord orien- 
tal de la plaine d’Anopolis. Le vallon de Mouri commence dans les hautes 
montagnes non loin du Theodhori et atteint la mer à VO. de Sphakia; 
sur le chemin d’Askypho à Anopolis, il est peu profond, mais au voisi- 
nage de la mer, c’est une énorme crevasse. Le vallon de Komitadhès qui 
commence par la petite plaine de Nipros, se transforme vite en une 
gorge profonde qui, sur quelques points, n’a que 2 ou 3" de largeur; à 
sa sorlie des montagnes, au-dessus du village, ce n’est plus qu’un ravin 
assez profond , sillonnant la plaine inclinée vers la mer. 

L’extrémité orientale des montagnes, enfin, présente quelques grands 
vallons qui s’ouvrent dans la plaine d’'Haghio-Vasili. 

Hypsométrie. — D'après les divisions précédemment indiquées, les 91 
altitudes sont réparties dans les deux catégories suivantes : 


A. MASSIF MONTAGNEUX MÉRIDIONAL | Aspro-Vouna ). 


Partie occidentale des Aspro- Vouna. 


Sommet à l’O0. de la crevasse 
d’Haghia-Irini (niveau) . . . 
Sommet à 400% au-dessous du 


NONARELEe PRE 2 MENT 1,996 
COMNdAe PrVPDÉLÉE. ei + 1-0. 1,717 
Source dite Hellinoseli . ... 4,471 


Passage de Lakous à Omalos et Samaria. 


Omalos, col d’Haghia-Irini... 4,126m 
Omalos, col de Lakous.... 4,087 
Omalos, partie la plus basse. 1,043 
Omalos, cabanes au bord S.-0.(2) 1,067 
Omalos, col de Samaria (Xy- 


(ESR AID) ERA EME RUES 2 1,227 
Chapelle d’Haghios-Nikolaos.. 641 
Samaria, hameau inférieur (7). 340 
Kephalovrysis, entre Samaria 

et Haghia-Roumeli. . . . .. 246 
Débouché de la gorge dans la 

plaine d’Haghia-Roumeli. . 418 


Partie centrale des Aspro- Voun«a. 


Petite plaine au-dessus de 
DATA RONA EMEA EC ECE 


Rome dire dc te 2,104 
Vallon au S. du Mavri. . ... 1,819 
Fontaine dite Lakkos-tou-Ne-— 

HORS Ce CAN ES AE SENS EG 2,030 
Soro (grand cône blanc). .. 2,370 


Theodhori(peut-êtrele Soro, 4) 2,375m 
Caverne dans le haut vallon 

AE MOUERS Se eue eee tete 1,685 
Kastro, au-dessus d’Askypho. 2,131 
Plateau au-dessus d’Anopolis 4,613 
Plateau d’Aradhena à Haghios- 

BAUIOS MM RE VALRREtE 631 
Ara@hena, centre du village. . 589 
Pharanghi à l'E. d’Aradhena. 516 
Bord E. du pharanghi. . ... 614 
Anopolis, khonos (2). ..... 584 


Passage de Prosnero & Askypho et 


Komiladhès. 

Aer col au-dessus de Prosnero. 546m 
Plaineavantledéfiléd’Askypho 512 
Plaineaprèsle défiléd’Askypho 674 
Col au-dessus d’Askypho. .. 798 
Plaine d’Askypho, partie basse 668 
Colde Nipras (2) 7,157 817 
Plaine de Nipros--PYEw EN 778 
Terrain tertiaire au-dessus de 

Komitadhès . . .. .... : HO 
Komitadhès, partie basse... 490 
Plateau au-dessus de Sphakia. 97 


Partie orientale des Aspro- Vouna. 


Limite de mon ascension au-— 
dessus du lac de Kourna. . . 
Terr. t2rt. au-dessus du lac . 


933m 
331 


(1) Cette identité d’altitudes, que je n’avais pas encore remarquée, me porte à 
croire maintenant que le Soro, sur lequel je m’élevai de Dhrakona , par le versant 
septentrional, le 15 juillet, est le mème que le Theodhori sur lequel je parvins 
d’Askypho, par le versant méridional, le 25 octobre. En effet , le Soro , ainsi que je 
le vis par un temps clair, n’est entouré que de sommités moins élevées vers l’E., ct 
la neige qui tomba seulement lorsque j’escaladai le Theodhori, ne m’empêcha pas de 
voir qu'en y arrivant de l’E., je ne laissais derrière moi aucune cime aussi élevée. 


B. PLATEAUX ET PLAINES SEPTENTRIONAUX ( Khaniotika , Apokorona ). 


À l'O.el au N. de la plaine de Khania. 


Plateau de Voukoniès à Ghe-— 


Kaphouros, hameau. . .... 
Ruisseau au pont de Néa-Rou- 


Col de Néa-Roumata à Skenès 
Sommet au-dessus de la plaine 

HéSKCNÈS TER RU LE 
Lakous, église supérieure. . . 
sommet de Platania à Laghia. 


Plaine de Khania. 


Ruiss. au {cr moulin de Meskla. 
Ruisseau à l’entrée de la plaine 
de Skenès . - 
Plaine de Skenès, centre... 
Ruisseau à l'entrée de la plaine 
de Phourné:= 21202 
Plaine d’Alykianou. ...... 
Partage des eaux du Platania 
eHAUu KlAlISO. 26-77 RIENNE 


150m 
97 
381 


306 
405 


195 
522 
260 


Au S. de la plaine de Khania. 


Sommet au $.-E. de Theriso . 
Theriso, res maisons au N. (2). 
Petite plaine sur le chemin de 
MOuUTÉS Es 
Col avant le vallon de Mourniès 
Sommet au S.-E. de Mourniès 
Col et Pyrgo de Malaxa (6). . . 
Sommet à l'E. de Malaxa. . 
Le Katokhori, de Dhrakona à 
MONT DIBRN SL ARE ON 
Le Katokhori, de Kambous à 
MAalax ae Ce ER de: ; 
Dhrakona, maisons supérieures 


759m 
572 


313 
421 
523 
481 
614 


302 


230 
459 


Kambous, col au haut du vil- 


Ruisseau au bas de Rhamni. . 
Terr. tert. devant Rhamni. . 


Plaine et plateau de l’Apokorona. 


Col de Soudha à Stylo.. .. 
Sommet tertiaire à l’E. du col 
Sources de Stylo. (2). «444 Le 
Plateau de Stylo à Babali-Khan 
Plaine à Babali-Khan (2). . . 
Col de Babali-Khan au Boutaka 
Phré, centre du village. . . .. 
Ipos, centre du village. . . .. 
Plaine au bas d’Ipos. . . . .. 
Prosnero, café au centre (2). . 
Terrain tertiaire au-dessus de 
PrOSReLOe ee EE 


100m 
204 
22 
203 
154 
166 
233 
176 
87 
267 


357 


Akroteri du cap Meleka, plateau. 


Khalepa, salon de M. Caporal 
(obs. nombr.) 
Chapelle au bord du plateau. . 
Sommet du plateau, à l'E. .. 
Aroni, centre du village. . . 
Plaine de Sternes à Khoridhaki 
Plaine à Haghia-Triadha (4). . 


DMOMOMOMRCRSOMONO 


Akroteri, chaîinon côlier. 


Terrasse au bas du sommet O. 

diCap Mel RASE 
Petit sommet le plus occid. . 
Sommet du cap Meleka (Vardia) 
Haghios-Joannes, monastère. . 
Grotte d’Arkoudhia, entrée. . 
Grotte de Katholiko, entrée. . 
Skloka, sommité orientale. . . 
Terrasse de Khoridhaki, au S-0. 

AU SRIOKA.. NP ERRERE 


Plateau accidenté de Rhethymnon. 


Parties saillantes du sol, — Le plateau de Rhethymnon, assez bien 
séparé des montagnes de Sphakia, est largement uni, à l’'E., aux mon- 
tagnes du Psiloriti, et s’en sépare assez difficilement. Il se compose, 
dans la partie méridionale, d’un chaïnon montagneux qui borde la côte ; 
au N., se trouve la plaine longitudinale d'Haghio-Vasili. Au N., vient une 
partie montueuse, assez large dans l’E., qui est bordée d’un plateau qui 
va en s’abaissant vers la côte septentrionale. 

Le chaînon montagneux qui borde la côte méridionale est ce prolonge- 
ment des Aspro-Vouna qui s’avance jusqu’au golfe de Messara et que l’on 
peut désigner sous le nom de chaînon du Krioneriti et du Vouvala, de ceux 
des sommets principaux. Ce chainon n’est pas continu; il présente sur plu- 
sieurs points des dépressions, des coupures, qui permettent même aux 
ruisseaux de la plaine d'Haghio-Vasili de se rendfe à la côte, Les princi- 
pales, praticables pour les chevaux, sont celles de Myrthio, du Mega- 
Potamos et de Kria-Vrysis. Au S. du Krioneriti, entre le col de Myrthio 
et le Mega-Potamos, il y a sur la côte un petit chainon parallèle, séparé 
par la plaine de Preveli qui s'ouvre à la mer à ses deux extrémités. 

La plaine d'Haghio-Vasili s'étend au N. du chaïnon précédent sur une 
longueur de 12 kilom., d'Haghios-Joannes à Spele. Elle se prolonge à l'O. 
par un profond vallon dans la partie orientale des Aspro-Vouna, et à 
VE. par un large vallon accidenté qui, au S. du Kedros, se rattache à 
celui d’Amari par un col bas. 

La partie montueuse est peu large dans l'Ouest; mais dans l'Est, 
elle occupe une assez grande surface; elle y est formée de plusieurs 
petits plateaux qui sont des contre-forts de l’Ida et de son annexe, le 
Kedros; des vallons profonds les séparent. L’un des plus élevés et des 
plus occidentaux est au $S. de Rhethymnon; c’est le Vrysinas, ainsi 
nommé du grand nombre de sources qui existent sur sa pente septen- 
trionale. 

En avant, vers le N., se trouve le plateau qui va en s’abaissant à la 
mer et qui est sillonné par un grand nombre de vallons qui courent 
presque tous au N. un peu 0. Une portion située entre le Vrysinas et 
d’autres collines à l’0. forme la plaine d’Armenous. Il est séparé de la 
mer en partie par deux plaines maritimes, celle de l’Almyros qui s’étend 
du Boutaka au Petrea et celle de Rhethymnon qui s’étend de cette ville 
au Hiasmata, 


( 544) 

Bassins et vallons. — La ligne de séparation des versants n’est pas 
très-sinueuse ; elle suit à-peu-près la ligne médiane, laissant ainsi les 
points culminants de la région, soit au S., soit au N, Il y a les quatre 
grands vallons dont les noms sont en italique, au N. Le versant méri- 
dional est en grande partie occupé par le bassin du Mega-Potamos. 


Versant méridional, Versant <eptentrional. 
du Muzlqi nr. 
MO LA NLATANELE CNE 
. du Platania . . . 
. d’Amnalo . . . .. 
. du Stavromenos. 
. du Hiasmata. . . 


PI. de l’Almvros. 


PI. de Preveli. B. du Mega-Potamos. 


B. de Kria-Vrysis. 
PI. de Rhethymn. 


CREME NT ES 


Sur le versant septentrional, le bassin du Muzla commence par une 
large dépression, à plusieurs vallons, de la pente orientale des Aspro- 
Vouna, et se termine à la plaine maritime par un vallon entamé dans le 
plateau septentrional. Le bassin du Petrea, presque tout entier dans ce 
dernier , se compose d’un vallon étroit, assez profond et sinueux, qui 
commence à un col bas, au S. du Vrysinas, et qui reçoit divers vallons 
sur chacun de ses flancs avant de s’ouvrir à la mer par une crevasse 
très-étroite et profonde. Le bassin du Platania se compose de deux pro- 
fonds vallons qui naissent au col de Thronos, au pied occidental du 
Psiloriti, et se réunissent avant de recevoir un autre large vallon qui 
descend du bas col qui sépare ce vallon de celui du Petrea; ce dernier, 
ainsi que la partie inférieure de la vallée, sépare le Vrysinas des autres 
plateaux qui sont vers l’Est. 

Le vallon du Stavromenos commence au pied des contre-forts de l’Ida; 
il s’élargit beaucoup pour former la plaine d’Arkadhi qui est peu 
profonde et assez peu accidentée; il se transforme ensuite en une gorge 
profonde qui s’élargit plus bas, et vient, sous forme de vallée peu pro- 
fonde, atteindre la plaine maritime. En outre de ces grands vallons, le 
plateau septentrional est sillonné par une quinzaine de vallons presque 
tous simples, qui vont s’ouvrir directement à la côte; le plus oriental , 
plus grand que les autres, est celui du Hiasmata qui sépare cette partie 
de la Crète du massif du Psiloriti. 

Sur le versant méridional, le bassin du Mega-Potamos comprend la 
plaine d'Haghio-Vasili, le profond vallon et la large vallée qui en sont 
les prolongements à l'O. et à l'E; de nombreux vallons de la partie 
montueuse médiane et du versant N. de la chaîne côtière s’y rendent. Il 


deux catégories : 


( 545 ) 
communique à la mer par une crevasse profonde de la chaîne côtière, 
située à l'E. du Krioneriti et de la plaine et du petit chainon de Preveli. 

Le vallon de Kria-Vrysis qui commence par un ravin sur la pente du 
Kedros, sépare les vallées d'Haghio-Vasili et d’Amari et va atteindre la 
mer au cap Haghios-Paulos. À part cette exception, le versant méri- 
dional de la chaîne côtière ne présente que des rayins qui se rendent 
directement à la mer africaine. 

Hypsométrie. — Les altitudes , au nombre de 38, sont distribuées en 


A. PARTIE MONTAGNEUSE MÉRIDIONALE. ( Haghio-Vasili }. 


Chainon du Krionerili el du Vouvala. 


Col de Myrthio à Haghios- 
entité ME re 
Myrthio, église (2) 
Asomaios, église du village. . 
Krioneriti, au S. de Palæo- 
AL OEUE MATIN PENSE 
Vouvala, au-dessus de Melabès 
Melabès, centre du village. . 
Fontaine en descendant. . .. 
Monastère de Vourgari, . ... 


Bassin d’'Haghio- Vasili. 


Col au N. de Palæoloutra. . .. 
Lignite au niveau et au $. de 

PaeDloutra Deere 
Lignite à 3 kilomètres à l'E. de 


467m 
218 
247 


1,027 
967 
543 
300 
274 


06m 


PalÆ0l 0 CE 
Ruisseau entre Palæoloutra et 

TALSIPATÉ MN PLATE CIN 
Le Mega-Potamos à son entrée 

ANS TANSONSE I CEE 
Terr. tert. du plateau de Karé. 
Fontaine devant Karé. . . .. 
CORAN SATCNRARE PERMET 
Ruisseau au S.-E. de Karé .. 
Source du col de Karé à Spele 
Spele, centre du village bas (2) 
Colidevant Kissos... . Mur 
Bassin tertiaire de Kissos à 

KTTENINVSISR ER CE APE 
Terr. {ertiaire à Kria-Vrysis. 
Col devant Kria-Vrysis.... 
Ruisseau au bas de Vourgari. 


B. PLATEAUX SEPTENTRIONAUX (Rhethymniotika). 


Plaleau à l'O. de Rhethymnon. 


Almyros de Rhethymnon . . . 
pacede KROUrIA n 
Collines tert. devant les mont. 
Dhramia, centre du village. . 
FISKOBI RAD ES ERSREE | 
Plateau au N.-E. d’Haïdhoura. 
Terrain tertiaire au S. d’Haï- 

dhOUTA. FH TN EN. ASE Te 


13m 


Plateau à lO. de Rhethymnon 
Plaine devant Kato-Armenous 


307 
105 


7 3 
368 


Plateau à l'E. de Rhelhymnon. 


Vrysinas, au-dessus de Rhe- 
thymnon..., AE 
Vrysinas, au-dessus de Karé. 
Plateau à l'E. de Loutra. . .. 
Amnato, centre du village. . 
Plateau à l’E. du Stayromenos. 


860 
840 
154 
345 
110 


(546) 
Montagnes du Psiloriti. 


Parties saillantes du sol, — Les montagnes du Psiloriti, qui occupent 
la partie médiane de l’île, sont formées, dans la partie S., du massif du 
Psiloriti, qui va en s’abaissant vers le N.-N.-0.; de l’angle N.-E., s’en 
détache la chaîne du Kouloukouna, dirigée de l'E. à l’O.; entre les deux 
se trouvent, dans la partie occidentale , les bas plateaux de Mylopotamo. 
À l'angle S,-0. il yale petit massif du Kedros, séparé par la vallée 
d’Amari. 

Le massif du Psiloriti, de forme trapézoïdale, est partout moins élevé 
que les Aspro-Vouna, à l’exception du cône du Psiloriti proprement 
dit (1); c’est un grand plateau très-compacte qui porte ce dernier dans la 
partie occidentale, et qui se termine au S. et à l'E. par des pentes très- 
rapides qui semblent former de véritables murailles. Vers le N. et surtout 
le N.-E., les pentes générales sont moins fortes; vu du Kouloukouna et 
aussi de Dhamasta , il apparaît, dans ses deux tiers orientaux, comme 
une plate-forme assez unie, à l'altitude de 1,400®, au devant de laquelle 
existe, d’un bout à l’autre, une terrasse moins élevée de 250». Lors- 
qu'on examine plus intimément, on voit que le massif est généralement 
formé de hautes crêtes séparées par de profonds vallons, et se ratta- 
chant soit au point le plus élevé, soit à d'autres centres secondaires. La 
partie orientale, qui ne m'est pas très-bien connue, présente un grand 
plateau, dit Nida, de 1,600" à 1,700" d'altitude , couvert d'excellents 
pâturages , et dont les flancs sont boisés. Sur les pentes méridionales se 
trouve, à la même hauteur, le plateau dit Kokita, séjour des bergers de 
Voriza. La partie N. est principalement formée de hautes collines coni- 
ques, séparées par quelques grands vallons. Le point culminant, dans 
cette partie, est le Strombolo , qui appartient déjà à la chaîne côtière, 
qui est dirigée de VE. à l’O.; celle-ci, double ou triple dans sa partie 
orientale, est simple, ou à-peu-près, dans sa partie occidentale , où la 
partie élevée et large se termine par la haute cime du Kouloukouna; 


(1) A moins que certaines cimes des Aspro-Vouna , que je n'ai pu visiter, le Tria 
mati et le Stravopodia, ne soient plus élevées, l’Ida ou Psiloriti paraît toujours le 
point culminant de la Crète, comme le croyaient les anciens, et comme l’admettent 
aujourd’hui encore les habitants; il atteint, ainsi qu'il est dit précédemment , 2,498", 
hauteur bien supérieure à celle de l’Ida phrygien, trouvée de 1,760m par les ofliciers 
de la marine anglaise. 


{ 547 ) 
mais il y à une crête basse côtière qui se poursuit jusqu’à l'embouchure 
du Mylopotamos. 

Au S.-0 se trouve le petit massif du Kedros, qui en est entièrement 
séparé par la grande vallée d’Amari ou du Platy, et auquel se rattachent, 
au N.-0., les hauts contre-forts qui appartiennent véritablement à la ré- 
gion précédente, ou qu'il est du moins bien difficile d’en séparer. 

Entre la partie occidentale du Psiloriti et le chaïînon côtier du Kou- 
loukouna, se trouve les bas plateaux de Mylopotamo, allongés de l'E. à 
l'O., et renfermant la vallée du même nom; la partie septentrionale 
présente peu de vallons, et renferme quelques collines plus élevées à 
Melidhoni. La partie au S. du Mylopotamos est sillonnée par une multi- 
tude de vallons profonds dirigés au N.-N.-0.; elle renferme aussi une 
colline un peu plus élevée à l'O. de Perama. À Perama, la vallée est 
assez large; mais, vers l’O., en se rapprochant davantage de ta mer, 
elle se rétrécit beaucoup. 

Le massif du Psiloriti est limité par la mer au N., de l'embouchure 
du Hiasmata au fond du golfe de Megalo-Kastron ; au S., il ne confine à la 
mer d'Afrique que sur une très-petite longueur, de l’embouchure du 
Platy à la plaine de Messara. 

Bassins et vallons.— La ligne de séparation des versants septentrional 
et méridional, est peu sinueuse et passe par le Psiloriti et les hautes som- 
mités qui sont à l'E. Celles-ci étant plus rapprochées de la limite méri- 
dionale , le versant septentrional à une surface au moins triple de celle 
dé l’autre versant. Indépendamment d’un grand nombre de vallons, il 
n’y a que les deux bassins principaux suivants : 


© 
Versant méridional. = E Versant septentrional. 
ca 
B. du Plaly. à 3 B. du Mylopolamos. 
= 
un 


Sur le versant septentrional, le bassin du Mylopotamos a une grande 
étendue, car il comprend la pente N.-0. des montagnes du Psiloriti, les 
plateaux de Mylopotamo et la pente S. de la chaîne côtière. La vallée 
propre du Mylopotamos, assez large, court de l'E. un peu S. à l’O. un peu 
N. dans la partie inférieure, et du S.-E. au N.-0. dans la partie supé- 

_rieure, où elle n’est qu’une gorge profonde avec quelques élargissements 
çà el là. Sur son flanc droit débouchent la plaine de Dhamasta et les petits 
vallons de la pente méridionale du Kouloukouna et de ses contre-forts, 


( 548 ) 

puis un grand vallon de la partie septentrionale du plateau de Melidhoni. 
Sur le flanc gauche elle reçoit une douzaine de vallons, les uns petits 
naissant dans le plateau , et les autres assez grands, très-profonds, com- 
mençant dans les hautes montagnes. Le plus occidental qui vient de la 
base même du Psiloriti, forme à-peu-près la limite de la région dans sa 
partie inférieure, où il court à-peu-près du N. au $S. sur une assez 
grande longueur. 

La pente N. des montagnes côtières présente de nombreux vallons 
profonds qui descendent directement à la mer. Un vallon avec plusieurs 
ramifications commence à Dhamasta et débouche à la mer à VE. du cap 
Stavro. À l'O. de Rhogdhia se trouve un petit bassin comprenant plu- 
sieurs vallons , qui vient déboucher à la côte près de l’Almyros dans le 
fond du golfe de Megalo-Kastron. 

Dans la partie N.-E. du massif qui ne m'est pas très-bien connue, il y 
a au moins trois profonds vallons, à plusieurs ramifications, qui débou- 
chent à l'E. dans la plaine de Megalo-Kastron, et qui seraient des rami- 
fications supérieures de la vallée du Ghazano-Potamos. Plusieurs vallons 
de la partie orientale des montagnes dépendent de la ramification orien- 
tale du vallon. 

Sur le versant méridional, le grand vallon d’Amari ou du Platy, au S.-0., 
commence au col de Thronos, se continue par la plaine d’Asomatos, qui 
est fort étranglée au-dessous de Visari; il s’élargit pour former le bas- 
sin d'Apodhoulo , et il est étranglé de nouveau avant d’alteindre le golfe 
de Messara. Ce vallon ne reçoit sur sa rive orientale que des allons sil- 
lonnant la pente du plateau; sur la rive droite y débouchent à Visari, 
les vallons de Vrysæs qui est au N. de Kedros , et dans le bassin d’Apo- 
dhoulo, la plaine de Melabès au S. Ces deux vallons appartiennent en 
partie à la région précédente. 

Sur le versant S. du plateau, deux vallons au moins naïssent dans les 
montagnes au pied du Psiloriti et aboutissent à la plaine de Dhibaki qui 
fait partie de celle de Messara, dans laquelle soit par de simples ravins, 
soit par le lit du Hiero-Potamos, ils se continuent au golfe. À l’angle 
S.-E., plusieurs vallons débouchent à cette même plaine soit directement 
soit par le vallon d'Haghious-Dheka. 

Les deux grands chemins, Dhromos vasilikos, les plus fréquentés de 
Khania et de Rhethymnon vers la partie orientale de la Crète, suivent les 
dépressions du massif qui nous occupe. Celui de Megalo-Kastron passe 
par la vallée du Mylopotamos et Dhamasta , au S. du Kouloukouna et au 


( 549 ) 


pied du Strombolo ; celui de Messara passe entre Arkadhi et Asomatos, par 
le col de Thronos qui isole le Kedros. 
Hypsométrie. — J'ai déterminé 4 altitudes ainsi réparties : 


A. MASSIF MONTAGNEUX 


Psilorili. 
Psion chapelle... . 2,498m 
Plateau supérieur, bergerie. . 4,472 
Source entre ce plateau et 
PROHFphoUTASt UN. 993 
Vallon d’'Amari. 
Col de Thronos, d’Arkadhi à 
Asomatosh (2) En. Flux 51m 
Terrain tertiaire au-dessus 
déAsomatos:ns M el Le 416 
Monast. d’Asomatos, église (3) 329 


Terrain tertiaire au-dessus de 


ÉHOUTDROUFAS.. . .. . 577 
PB. CHAÎNE CÔTIÈRE ET PLATEAUX 


Chaine du Kouloukouna. 


Melidhoni, église (2). . ..... 103m 
MOlonKOUNA 4 25.04. 1,092 
Montagne au S.-E. de Dha- 

RS RS 2 dns ee 0 719 
Dhamasta, khan (3).. ..... 42% 
Plaine talqueuse au S.-0. de 

DS SEC LEGO... 357 


Strombolo, chapelle. . ....,. 802 
Plaine au pied S. du cône du 
SILOMbOlO EE le d'or 


2e plaine à l'O. de la précédente 444 


Plateaux au S. du Mylopotamos. 


Bas plateau tertiaire, au N. du 


LUAS MAPS EN UE NN RAR 1 63m 
Bas plateau talqueux voisin. . 79 
Col au N.-E. d’Aghiliana. . .. 424 


Plateau tertiaire sur le grand 


MÉRIDIONAL (Psiloriti). 


Visari, partie basse (2). . ... 357m 
Réunion des ruisseaux de Vry- 

sæs et d’Asomalos...... 243 
Col au-dessous de Nithavri.. 416 
Apodhoulo, église. . ...... 440 
Col entre Sahta et Klima. . . 404 
KHAN ISERE TUE 174 

Kedros. 

Kedros, sommet. . . .. 1,802 
Source sur la pente. ...... 1,131 
VEVS ESS NÉSIISC Re Ca 583 
Ruisseau de Vrysæs. . . .... 502 
Col entre Khordhaki et Me- 

PADES MR RES Cod Lee te 543 


SEPTENTRIONAUX (Mylopotamo). 


chemin, entre le Hiasmata et 


PErANTA MP ET EU 194% 
Fontaine au-dessous d’Arkadhi 444 
Monastère d’Arkadhi, église (4) 498 
Col entre Arkadhi et Tripodho. 652 
Terr. tert. au S.-0. de Tripodho 548 
Plateau a Orthez eu. 2 321 
Fontaine dans un vallon pro- 

fond à lO. de Melisourghaki 238 
Calcaire tertiaire au-dessus 

d'Avdhela 0 em rte 483 
Haghios-Joannes, église. ... 433 
Calcaire tertiaire au — dessus 

d’'Haghios-Joannes. . .... 507 
Axos, ancienne tour au-dessus 554 
Fontaine de Kania-Oglou, entre 

Perama et Dhamasta (2). . 285 
Mylopotamos, à la fontaine de 

Papa-i-Vrysis, entre Perama 

et Dhamasta (2). ....... 141 


tre 
( 090 ) 
Plateau accidenté de Megalo-Kastron. 


Parties saillantes du sol. — Le plateau accidenté de Megalo-Kastron 
est largement uni aux deux massifs qui l’avoisinent et possède un assez 
grand développement de côtes. Il se compose, dans la partie méridio- 
nale, du long chaïînon montueux du Kophinos, qui borde la côte, et au 
N. duquel se trouve la plaine longitudinale de Messara, laquelle se 
poursuit jusqu’à Kastel-Pedhiadha, en se recourbant vers le N. La partie 
septentrionale est un plateau accidenté s’abaissant au N. et présentant 
de hautes collines isolées ou en chaînons, dans la partie centrale. 
L’angle N.-E. est un plateau assez haut qui se continue vers l'E. avec 
celui du massif de Lassiti. 

La chaîne montagneuse qui borde la côte méridionale est un prolon- 
gement de l’angle S.-0. des montagnes de Lassiti, qui s’avance jusqu’au 
golfe de Messara , et que l’on peut désigner sous le nom de chaîne cotière 
de Messara ou du Kophinos, du nom de la sommité principale. Elle est 
cependant nettement séparée des montagnes de Lassiti par le profond 
vallon de l’Anapodhari, par lequel se rendent à la mer d'Afrique les 
eaux de la moitié orientale de la grande dépression située au N. Cette 
chaîne est double à son extrémité orientale, où elle présente un grand 
vallon longitudinal ; dans sa partie médiane elle est simple; dans l'O. 
elle est double et renferme le petit bassin intérieur de Hodheghetria, 
qui va s'ouvrir à un port voisin de celui appelé Kalo-Limnionous. Aucun 
vallon ne coupe entièrement cette chaîne à l'exception de la dépression 
de Kapetaniana , au S.-S.-E. d'Haghious-Dheka , l’ancienne Gortyne. Le 
Kophinos est un sommet très-escarpé, en cône tronqué, très-comprimé du 
N. au S., qui est situé aux trois-cinquièmes de la longueur, à partir de l'E. 

La plaine de Messara, allongée de l'E. à l’O., constitue une vaste dépres- 
sion longitudinale, parallèle à la chaîne précédente, à fond très-uni; 
elle présente cependant une double pente à partir d’une ligne qui, par- 
tant du Kophinos, irait atteindre le Karadagh et la pointe occidentale 
de Dhia. De ce point vers l’O., à l'embouchure du Hiero-Potamos, lu 
pente, sur une longueur de 29 kilomètres, est de 35’; vers V’E., la pente 
est à peu près la même. Le sol de cette plaine est partagé entre les deux 
bassins du Hiero-Potamos et de l’Anapodhari. Près de son extrémité occi- 
dentale , il y a un barrage formé par des collines qui sont au pied du 
chaïînon côtier et par une arêle qui se projelte au-devant de la base du 
Psiloriti, lesquelles ne laissent qu’un passage assez étroit entr'elles. A 


(: 554) 

son extrémité orientale, elle est également rétrécie subitement par un 
épatement de l’extrémité du chaînon côtier. Dans l’E., c’est la grande 
plaine de l’Anapodhari, qui se continue avec celle un peu plus acci- 
dentée qui s’étend le long du massif du Psiloriti, jusqu’à Kastel-Pedhiadha, 
et qui renferme çà et là des collines allongées qui en isolent certaines 
parties, et en font même de petites plaines presque séparées, comme celle 
d’Apostolous, à l’0. de Kastel-Pedhiadha. 

Au N. de ces plaines, s'élève le grand plateau qui va en s’inclinant au 
N. vers la mer et qui présente, dans la partie centrale, de hautes collines 
soit isolées, soit groupées ; plusieurs de ces collines élargies forment un 
chaïînon dirigé à-peu-près du N.-N.-0. au S.-S.-E. Le Karadagh qui 
forme l'extrémité N. est très-étroit et allongé du N.-N.-E. au S.-S.-0. 
A l’O., et presque à angle droit, part un autre chaînon de collines très- 
étroites dirigé à l’O.-S.-0. et dont celui de Dhamania fait partie; cette 
ligne forme la ligne de partage des eaux. Au S$S., le plateau est formé 
d’une multitude de petits plateaux et de collines isolées, séparés çà et 
là par des plaines, et qui se poursuivent au pied du massif du Psiloriti. 
L’angle S.-E. présente plusieurs grands chaïînons parallèles allongés du 
N.-N.-0. au S.-S.-E. Au N., et de chaque côté du chaïinon qui se ter- 
mine par le Karadagh, le plateau est beaucoup plus uniforme; il est 
découpé par de grands vallons courant assez généralement du S. au N.; 
la partie N.-E. est assez élevée et découpée par de nombreux vallons pro- 
fonds. Une série de collines s’avance de là presque jusqu’à Megalo-Kas- 
iron. Presque partout le plateau est bordé de petites plaines maritimes : 
la première et aussi la plus considérable, est celle qui s’étend de l’Al- 
myros à Megalo-Kastron, au débouché des trois grands vallons; puis 
viennent la petite à l'E. de la ville et celles du Kartero, d’Anopoli, 
de Goùrnès et de l’Aposelemi qui, en se relevant insensiblement, va 
former le petit plateau bas de Khersonesos. 

Bassins et vallons. — La ligne de séparation des versants est très-peu 
sinueuse, et coïncide avec quelques-unes des hautes collines du plateau 
du N.; elle est un peu plus rapprochée de la côte septentrionale : aussi 
le versant méridional occupe-t-il environ les trois-cinquièmes de la sur- 
face. Il ÿ a sur le versant N. cinq vallons ou bassins principaux; le 
versant opposé, c’est-à-dire la plaine de Messara, est partagé entre les 
bassins du Hiero-Potamos et de l’Anapodhari, à l’exception du revers 
maritime de la chaîne du Kophinos, à l'extrémité orientale duquel se 
trouve le vallon du Soudhsouro. Ils se suivent dans l’ordre suivant : 


( 552 ) 
Versant méridional. Versant septentrional. 
B. du Ghazano-Potamos 
V. du Xeropolamos. . . 


B. du Plalyperama ou PI. de Meg.-Kast. 


Gheophiro. .... 
PI. de Messara. B. du Hiero-Polamos. V. de Cazaban . . . . .. 
V. du Soudhsouro. B. du Karlero . . . . . . 


B. de l'Anapodhari. V. de Gournès....... 
B. du Xerokamarès ouPl. de l'Aposelemi. 
Aposelemi. . . 


Sur le versant septentrional, le bassin du Ghazano-Potamos, comprend 
le vallon qui court du S. un peu 0. et qui reçoit, ainsi que je l’ai dit, 
trois vallons très-profonds de la partie orientale du massif du Psiloriti ; 
une grande ramification orientale, à l'E. d'Haghio-Myro, commence 
aussi sur ses pentes. Le vallon du Xeropotamos, beaucoup moins long, 
vient aussi du S. un peu 0. ; comme le précédent, il est partout un peu 
large , excepté près de sa fin où se trouve un défilé étroit dans des roches 
plus dures. Le bassin du Gheophiro a une forme triangulaire et occupe une ; 
assez grande surface; le vallon principal occupe le bord occidental étant 
dirigé d’abord au N.-E. et ensuite au N. Dans la partie supérieure , il 
reçoit sur la gauche plusieurs grands vallons qui sillonnent la pente du 
Psiloriti, et sur la droite une dizaine de profonds vallons qui descendent 
de la crête de Dhamania. De l’autre crête, qui se termine par le Kara- 
dagh, descendent aussi plusieurs petits vallons, mais le vallon, très- 
large dans cette partie, renferme plusieurs collines isolées près de son 
flanc oriental. Avant le point où le bassin s’ouvre à la plaine, il reçoit 
un autre grand vallon qui descend de l’extrémité N. du Karadagh. 

Le vallon de Cazaban commence par de petits vallons, qui s’ouvrent 
dans la plaine où se trouve Arkhanès, et de celle-ci part un vallon 
étroit le long du Karadagh, mais qui s’élargit plus bas. Le bassin du 
Kartero se compose d’un grand vallon dirigé du S. au N. dans sa partie 
inférieure et venant du S.-E. dans la partie supérieure. Quelques-unes 
des petites plaines qui sont à l’E. de celle de Kastel-Pedhiadha s’y 
rattachent. Quelques grands vallons rejoignent chacune de ses rives. 

Vient ensuite le vallon de Gournès et le bassin assez considérable de 
l’'Aposelemi, qui atteint la mer au-dessous de Gouvès, mais dont une 
bonne partie appartient à la région de Lassiti. Un premier vallon com- 
mence à Episkopi et reçoit plusieurs vallons du plateau qui est à l'E. 
L’autre versant de celui-ci présente également de nombreux vallons, 


( 553 ) 
qui se rendent dans le vallon qui commence à la plaine de Kastel- 
Pedhiadha et sépare la région de celle qui est à l'E. 

Sur le versant méridional, le bassin du Hiero-Potamos comprend 
plus des deux tiers de la largeur de la plaine de Messara. Sur le flanc 
N., il y a quelques petits vallons à l’O. d’Asemi, puis le vallon d’Haghious- 
Dheka qui est étroit, profond en approchant de la plaine. Dans la partie 
de celle-ci, qui renferme Dhibaki, se rendent, comme je l’ai dit, quelques 
vallons du versant méridional du Psiloriti. Sur le flanc méridional, il n’y 
a que les vallons profonds plus ou moins grands qui sillonnent le flanc 
de la chaîne du Kophinos. Le versant méridional de cette chaîne est 
sillonné d’un grand nombre de vallons perpendiculaires, qui aboutissent 
presque tous directement à la mer, excepté aux deux extrémités, où 
plusieurs, en se réunissant, forment deux petits bassins. L’occidental, 
où se trouve Hodheghetria, composé de deux petits vallons, s’ouvre près 
du port de Kalo-Limnionous. Le second, formé du seul vallon du Soudh- 
souro, s’ouvre à une petite plaine maritime. 

Le bassin de l’Anapodhari est aussi fort étendu; il se compose de la 
- partie orientale de la plaine de Messara, de celle fort grande aussi, qui 
commence à Kastel-Pedhiadha et des différents vallons qui y débouchent. 
Sur la rive occidentale, il y a d’abord trois vallons parallèles, courant du 
N. au S., qui aboutissent à la plaine ainsi que le vallon à l’E. de Pyrathi 
qui commence par la plaine à colline conique qui est au $. du col 
d'Haghios-Gheorghiou-Epanosiphes ; puis , dans la plaine de Messara, 
indépendamment de plusieurs petits vallons , celui qui commence par la 
plaine qui est au S. de Dhamania et qui renferme également une colline 
conique. Les grands et profonds vallons qui sillonnent la chaîne côtière 
aboutissent au bord méridional de ces deux plaines. Le bord oriental des 
plaines qui s'étendent de Kastel-Pedhiadha vers le $S. reçoit enfin des 
vallons qui descendent du flanc oriental des montagnes de Lassiti. 

Hypsométrie.— Les 49 altitudes que j'ai déterminées sont les suivantes : 


A. CHAÎNE CÔTIÈRE ET PLAINE DE MESSARA. 


Chaine du Kophinos. MontEKOpPhinOS ee CN 1,250m 
Montagne au S.-E. de Listaro.  480m Source au pied du cône cal- 
Montagne au S.-0. de Listaro. 403 caire. ... ........... 1,077 
Listaro/réglise. sr901424, ea. 913  Haghios-Nikolaos, hameau. . 788 
Colline tertiaire au S. de Kha- Sternès, près de la plaine de 


ROUE SN Re 170 Messarat(o). sa PAU 344 


(554) 


Plaine de Messara et Pedhiadha. 


Plateau entre Klima et Dhibaki 121m 
Dhibaki, partie S. du village (2) 37 
Hiero-Potamos entre Alithinié 

et AMPElOUSAE ES en 92 
Ampelousa, ruisseau au bas(2) 197 
Point de partage entre Asémi 

et” Siérhès 21389 2.95 
Anapodbari, entre Pyrathi et 


MesokKhoOrio eee 
Mésokhorio, église. . . . . . .. 
Ruisseau au-dessous d’Embaro 
Arsokhorio, au S.-0. de Kastel- 

PEdMAURAT EL 
Kastel-Pedhiadha, plaine au 

bäsi (4) MEME LRRMEEN CREER 
Apostolous, plaine au bas, à 

l'O. de Kastel-Pedhiadha. . 


B. PLATEAUX SEPTENTRIONAUX DE MEGALO-KASTRON. 


Partie accidentée méridionale. 


Collineau-dessus du labyrinthe 
d'A DElDUSA ER EEE 
Entrée du labyrinthe. . .... 


479m 
413 


Colline tert. au S.-0. de Moulia. 6410 
Montagne au N. de Dhamania. 833 
Dhamania, village. . . . . ... 433 
Col au N.-E. d'Haghios-Gheor- 
ghiou-Epanosiphes. . .... 447 
Ruisseau au N. de ce col. ... 328 
Voréa , au S. de Dhamanhia... 354 
Pyrathi, au S.-E. de Dhamania 353 
. Col à Skyro, à ’E. d’'Haghios- 
Gheorghiou-Epanosiphes.. 577 
Partie basse septentrionale 
Plateau tertiaire au N.-E. de 
DEVICE EE 70m 
Xero potamos au bas de Sta- 
vrakia . . .. ORNE TT NNTDS 
Vallon au bas de Kerasia, près 
Venerato. ur 100 CPE 291 
Megalo-Kastron, salon Gode- 
bout, au-dessus des chan- 
tiers vénitiens (6). . . . . .. 13 


Terr. tert. au S. du cimetière. 
Terrain tertiaire sur le chemin 
d’Arkhanès tte eee 
Terrain tertiaire au pied N.—0. 
du Karadagh.......... 
Karadagh ou Jouktas. . .... 
Vallon au pied E. du Karadagh 
Plateau entre Megalo-Kastron 
Gt KATÉETO. EU CNE 
Collines calcaires sur ce plateau 
Colline tertiaire au S. . .. .. 
Colline tertiaire au N. d’Ar- 
khanès: li. 6e 
Arkhanès, église centrale. . 
Fontaine au S. de Pezé. . . .. 
Episkopi, église, au S.-0. de 
Megalo-Kastron. . . . .... 
Plateau à VE. du ruisseau de 
GOUVES. ER EN 
Plaine tertiaire de Khersonesos 
Terrain tertiaire; sommet au 
S. de Khersonesos. . .... 
Vallon de Khersonesosà Kaäs- 
tel-Pedhiadha, sous le pont 
de l’aquédue eee 


Montagnes de Lassiti, 


91 Om 
317 
426 


386 


349 


Parties suillantes du sol. — Les montagnes de Lassiti, on Ori-tou- 
Lassitiou, de forme rectangulaire, ne forment pas encore un tout très- 
compacte : elles se composent, dans la partie méridionale, d’un massif 


( 599 ) 

qui porte les plus hautes sommités et qui occupe près de la moitié de 
la surface ; il se prolonge un peu à l'E. et forme l’isthme de Hierapetra; 
au N. se trouve un petit massif moins élevé, qui en est séparé par une 
série de plaines intérieures, allongées de l'E-.S.-E. à l’O.-N.-0., dont celle 
de Lassiti est la principale. La pointe N.-E. est formée par un petit mas- 
sif séparé du précédent par la vallée de Mirabello ; l'extrémité N.-0. est 
un plateau accidenté. 

Le massif montagneux du $S. est allongé de l'E. à l’O., un peu plus 
élargi dans sa partie occidentale; lextrémité opposée un peu rétrécie, 
forme l’isthme de Hierapetra, limité au N. et au $. par des plaines ma- 
ritimes assez étroites, et à l'E. par la longue et étroite plaine d'Episkopi 
qui le sépare du massif suivant. À son angle S.-0 se trouve le prolonge- 
ment qui s’avance fort loin vers l’O. en constituant, comme on l’a vu, la 
chaîne côtière de Messara. Les points culminants , également ceux de la 
région entière, sont le Spathi et surtout l’Aphendi-Khristo, qui se 
trouvent dans la partie occidentale et qui paraissent de loin comme deux 
frères jumeaux ; ils sont prolongés au S.-E., le premier par le Lazaro et 
le second par le Psari. Son angle N.-0. est occupé par l’Aphendi-Sara- 
keno beaucoup plus bas ; la portion qui va vers l’E. jusqu’au grand vallon 
de Myrto, est moins élevée, et au-delà, elle s’abaisse beaucoup vers 
Hierapetra. Au N. se trouve un autre massif allongé de l’E.-S.-E. à l’O.- 
N.-0., moins élevé, dont les points culminants sont le Tsileno et le 
Selena. Entr’eux se trouvent plusieurs plaines; l’une des plus importan- 
tes est le bassin intérieur et fermé de Lassiti, allongé de l’'E.-S.-E. à 
V'O.-N.-0. et sur lequel j'aurai à revenir; il est composé de la plaine 
proprement dite de Lassiti, située dans la partie occidentale et communi- 
quant par une gorge profonde avec une annexe orientale plus élevée, le 
Katharos. C’est aux deux extrémités que se trouvent les passages les 
moins difficiles pour pénétrer dans le bassin. En dehors des deux massifs 
montagneux précédents se trouvent quelques autres plaines plus petites. 
Au S. vers le haut du grand vallon d’Embaro , dépendant du bassin de 
l’Anapodhari, et au S. de la plaine de Lassiti, il y a une surface fermée 
dite Omalos située à la même hauteur que celle de Sphakia. Attenant à 
celle-ci, à l’E., il y a une surface plus accidentée, reliée par une gorge 
profonde au vallon de Kalami et dans laquelle se trouvent les villages 
d'été de Simi. Vers l’E., un peu au N. du prolongement du Katharos, se 
trouve la plaine basse de Kritsa assez petite, peu accidentée et reliée 


par un vallon étroit à l'extrémité du golfe de Mirabello. Au N. de celle- 
Tome XXII. o1 


( 9556 ) 

là , il y a encore une petite plaine dite Lakonia. La partie N.-0. est un 
plateau limité à VE. par les vallons qui vont de la plaine de Kastel- 
Pedhiadha à la rade de Khersonesos. Ce plateau, très-accidenté, fait suite 
à celui qui est à l’O. de cette même vallée, et il est séparé de la mer, au 
N., par la plaine maritime un peu large de Malia; il renferme au N. de la 
plaine de Lassiti, celles plus petites, intérieures, de Krasi et de Mokho, 
qui sont des dépendances du bassin de l’Aposelemi, à ce que je crois. 

Un troisième massif montagneux occupe l’angle N.-E. de la région; 
c’est celui de l’Aphendi-Stavro beaucoup moins élevé, assez petit, 
duquel dépend la presqu'île de Spina-Longa ; il est séparé par le grand 
vallon de Mirabello qui court de l’O.-N.-0. à l'E.-S.-E. Dans son inté- 
rieur se trouve les petites plaines de Kasteli et de Phourné. 

Le massif entier de Lassiti est très-nettement séparé de celui de Sitia 
par la plaine longue et étroite d'Episkopi, où passe le chemin de Hiera- 
petra au golfe de Mirabello; c’est seulement à 126" d’altitude que se 
trouve le point de partage, à partir duquel le sol s’abaisse vers les deux 
mers. 

Bassins et vallons. — La ligne de séparation des versants septen- 
trional et méridional est assez sinueuse, et elle passe par un seul des 
deux sommets principaux le Spathi. Aussi le versant méridional, en 
n’y comprenant pas le bassin intérieur fermé de Lassiti, ne forme-t-il 
guère que les deux-cinquièmes de la surface totale. En outre d’une 
grande partie du bassin de l’Aposelemi sur le versant septentrional et de 
celui de l’Anapodhari sur le versant méridional , 1l y en a deux princi- 
paux sur le premier et un sur le second, dont les noms sont en itali- 
que : 

Versant méridional. Versant septentrional. 

B. de l'Anapodhari. (En partie.) 

V. de Viano. 

V. d’Arvi. 

V. de Kalami. 

B. du Myrlo-Potamos. 

. ..V. de Kalamavka. 

PI. de ae ...V. de Meseleros. 
V. de Kendhri. 


B. de l'Aposelemi. (En partie.) 
(Plaine de Malia.) 


V. de Milato. 
. du Mirabello-Poltamos. 
B. du Kalo-Potamos. (PI. d'Istronas.) 


B. de Lassili, etc. 
œ 


sd are) 


Sur le versant septentrional, le bassin de l’Aposelemi, qui se termine 
dans la région précédente, se compose de deux vallons venant l’un du 
Tsileno, par la plaine de Krasi, et l’autre de l’Aphendi-Sarakeno; ils se 


(ta510) 

réunissent à Kastamonitza et reçoivent plus bas le vallon profond qui vient 
de la plaine de Mokho et, à sa sortie de la région, le vallon de Kastel- 
Pedhiadha qui limite celle-ci. Un- vallon descend des montagnes, dans 
une petite plaine à l'E. de celle de Malia. Un vallon, profond, double, des- 
dend du col de Latsida, avant la plaine de Mirabello. De Kænourio-Kho- 
rio qui est au centre de cette plaine, on voit un petit vallon qui, devant 
le col de Latsida, pénètre dans le massif septentrional de l'Aphendi-Stavro 
et s’y transforme en une gorge profonde qui va à Milato. La côte présente 
elle-même un grand nombre de vallons profonds, ainsi que sur le golfe 
de Mirabello où il y a quelques parties planes autour d’Aloudha. 

Le bassin du Mirabello-Potamos se termine par une plaine un peu 
accidentée, au golfe de Mirabello. La plaine de Mirabello, qui commence 
assez brusquement au col de Kænourio-Khorio, court de V’O.-N.-0. à l’E- 
S.-E.; puis, en se rétrécissant, elle tourne au $., puis au S.-E. Avant le 
coude, elle reçoit du N. la plaine de Kasteli et Phournè ; au coude, elle 
reçoit de l’E. le profond bassin de Potamiès , qui vient du Tsileno et du 
versant N. du Selena, et auquel se rattache au grand vallon qui est au N. 
d’un contre-fort du Tsileno. Les plaines de Lakonia, qui sont au N. du 
Thilaka, se rattachent encore au coude précédent. Le bassin du Kalo- 
Potamos comprend au N., la plaine de Kritsa et les différents vallons qui 
s’y rattachent et au $., de grands vallons qui sillonnent la pente des mon- 
tagnes. L’isthme de Hierapetra présente aussi quelques vallons qui 
débouchent dans le golfe de Mirabello. 

Sur le versant méridional, la plaine qui s’étend au $S. de Kastel- 
Pedhiadha reçoit plusieurs vallons du flanc occidental des montagnes 
de Lassiti; le premier descend de l’Aphendi-Sarakeno et comprend une 
petite plaine ; après une autre, vient le grand vallon d'Embaro qui com- 
mence au pied de l’Aphendi-Khristo , au bas d’un escarpement vertical de 
plusieurs centaines de mètres ; il s’élargit graduellement jusqu’à la vallée 
de l’Anapodhari, qui ne reçoit plus guère qu’un grand vallon jusqu’à la 
mer. 

La pente méridionale des montagnes présente de nombreux grands 
vallons dont les principaux sont : celui de la plaine de Viano, celui de 
Kephalovrysis ou d’Arvi, celui de Kalami et quatre ou cinq autres plus 
à VE. Le bassin du Myrto-Potamos comprend le grand vallon de Myrto 
qui descend en ligne droite, du col du Katharos presqu’au S.; il recoit à l'O. 
deux profonds vallons qui naissent au pied du Spathi et de l’Aphendi- 
Khristo, et plus bas, d’autres plus petits ainsi que sur le flanc oriental. 


(558) 


Dans la plaine maritime de l’isthme de Hierapetra débouchent le val- 
lon de Kalamavka, et celui qui commence à Meseleros et dont le ruisseau 
vient aboutir très-près de Hierapetra, à l'O. Quelques vallons descendent 
aussi de la pente S.-E. de l’isthme, et leurs torrents aboutissent à la mer, 


à l'E. de Hierapetra. 


Hypsométrie. — Les altitudes , au nombre de 56, sont les suivantes : 


A. MASSiF MONTAGNEUX MÉRIDIONAL | Aphendi-Khristo). 


Montagnes méridionales (Aphendi- 


Khristo), 
Aphendi-Khristo. . ... ... 2,155m 
Col entre l’Aphendi-Khristo 

eble Spa MP PER AEMSbS 
SOUTCEIDLESIdUNCOl RER 1,819 
Aphendi-Sarakeno. . ..... 1,592 


Versant méridional ( Rhizo-Kastron). 


Montagne au N.-0. d’Embaro. 


(niveau) FPE MN ERA 683m 
Col entre Embaro et Viano.. 759 
Plaine au bas de Viano. ... 501 
Viano, fontaine centrale (2). 551 
Kephalovrysis, source au-— 

PSSUSL EC EC 839 
DÉTRON A AIREERe N a ot 705 


Col entre Pevkos et Kalami. 707 


Kalamie QUISSCANPEREN NN 
Col au N.-E. de Kalami. . 

Col du cap Theophilo . .... 
Cap Theophilo (niveau). . . . 


Isthme de Hierapetr a. 


Col de Kalokhorio à Meseleros. 
Plaine de Meseleros, bas vill. 
Point culminant de l’Isthme. 
Colline tertiaire au S: ... .…. . 
Collines au N.-0. de Hierapetra 


Plaine d'Episkopi. 


Plaine devant Kavousi. . . . . 
Col E. de Kavousi à Episkopi. 
Col O0. de Vasiliki à Episkopi. 
Episkopi, partie moyenne (4). 
Plaine de Hierapetra, bord N. 
Plateau tert. du cap Peristera. 


B. MAssiF MONTAGNEUX SEPTENTRIONAL ( Tsileno, etc. ). 


Plaines de Lassili, etc. 


Col au S.-E. de l’Aph. Sara- 


KeDOLPE SNMP REENPANRAR 1,333m 


Col de Lassiti à Kastel- 
PedhiAdNAs et 1 NACRE 963 

Petite plaine au-dess. du col. 807 

Plaine de Lassiti, gouffre (2). 832 


Plaine de Nisimo 7. 07. 1. 964 
Col entre Haghios-Gheorghiou 

et le Limnokharo . . .... 1,179 
Plaine du Limnokharo, église. 4,130 
Colline d’Haghio-Kostantinos. 942 


Panaghia-Kristallenia (44)... 870 


P'ANENAUNDAS PERRET 
Débouché du torrent du Ka- 

thArOS T2) PEER 
Col entre Mesa-Lassiti et Po- 

TMIÈS 1 USOROPIRERENAE 
Chemin de Lassiti au Katharos 
Katharos, partie inférieure. . 
Katharos, église au bord orient 
Col du Katharos à Myrto . .. 
sommet au-dessus. ...... 
Col du Katharos à Kritsa (2) . 
Calcaire bréchoïde, descente 

de KTILSAL NS LS ON 


KT 4 
572 
139 
293 


482 
384 
734 
530 
341 


407m 
4147 
126 
106 


1,065 
1,214 
1,135 
1,450 
1,216 
1,258 
1,239 


( 599 ) 
Kritsa, église isolée, à 2 kilom. Aphendi-Stavro. . ....... 39m 
À 101 0BPIEA PME PA AE AOPEPS 246m Plaine de Mirabello, jonction 
du ruisseau de Latsida ... 227 
Kænourio-Khorio, église bass. 287 
Col de Kænourio-Khorio, 


Montagnes médianes (Tsileno). 


HSUENOR AE EME 1,58om 
Source au-dessus de Potamiès. 954 


s x : MOULINS EE RME TENNIS 266 
Thilaka, au N.-E. de Kritsa.. 558 CPAM AE dl sue te de nie 
Chainon de l'Aphendi-Slavro. Col de Phourné à Spina-Longa. 441 

Col de Malia à Latsida, mou-— Presqu’ile de Spina-Longa, 
INSET A PSN ON D RICE OYQRE 308 HIMCAUEMER AN RATER 123 


Pays montagneux de Sitia. 


Parties saillantes du sol. — Le pays montagneux de Sitia, obscuré- 
ment triangulaire, est très-nettement séparé des montagnes de Lassiti 
par la longue et large dépression d’Episkopi, qui s'étend du golfe de 
Mirabello à Hierapetra ; il ne présente pas la compacité et l’homogé- 
néité des autres massifs montagneux ; il est divisé par de grands vallons 
en plusieurs massifs, dont la hauteur va en augmentant à mesure qu’on 
s’avance de l'E. vers l’0., où se trouve le point culminant. Les massifs 
se réunissent en deux groupes : l’occidental se compose des massifs de 
VAphendi-Kavousi et du Romanati au S. et de Mouliana au N. ; l’oriental 
comprend le plateau du Dhrisès et de Khandhra, le massif du cap Traos- 
talo et de celui de l’Akroteri du cap Sidhero. 

Le massif de l’Aphendi-Kavousi s’étend d’une mer à l’autre, c’est un 
plateau terminé sur son bord O-.N.-0. par une pente très-rapide avec de 
fréquents escarpements. De la plaine de Hierapetra et du vallon d'Epis- 
kopi, on croit voir une muraille surmontée d’une plate-forme sur 
laquelle, dans la partie orientale, s’élève le cône de Kavousi; de celui- 
ci partent, en rayonnant, un grand nombre de vallons dont le principal, 
sur le flanc O., commence par le Krephti-Aori, haute plaine inclinée et 
cullivée en vignes ; il se termine par une erevasse impraticable qui s’ou- 
vre en face de Vasiliki. Le vallon d'Haghia-Photia, au S., est assez consi- 
dérable. 

Le massif de Mouliana est séparé du précédent par le col de Kavousi 
par lequel passe le chemin le plus fréquenté de Hierapetra à Piskoke- 
phalo ; il s’étend jusqu’à la baie de Sitia ; il présente une pente rapide, 
courte au S.; au N., la pente est beaucoup plus longue et sillonnée par un 
grand nombre de vallons dont les principaux sont ceux de Lastro, de 
Tourloté et de Mouliana qui vont tous directement vers le N. à la mer; 


( 560 ) 
l'extrémité orientale est formée par un plateau beaucoup plus bas. Le 
massif quadrangulaire du Romanati qui se trouve à l'E. et au S. des deux 
précédents, est rattaché au précédent par le col de Dhaphnes ; il ren- 
ferme plusieurs vallons au S. et à l’E., etil est séparé de la mer par une 
petite plaine. 

Le haut plateau du Dhrisès et de Khandhra s’étend de la baïe de Sitia 
à la mer d'Afrique, du N.-N.-E. au S.-S.-0.; la partie méridionale, assez 
ondulée, renferme les plaines cultivées de Kataleone, Khandhra et 
Thiro; la partie septentrionale plus unie, est inculte et entrecoupée de 
ravins. Le plateau des caps Plako et Traostalo en est séparé par la lon- 
gue plaine de Karoubès et Zakro ; il est divisé en trois parties par des 
vallons profonds qui aboutissent aux ports de Samoni et de Karoubès. 

L’Akroteri du cap Sidhero se trouve au N. des deux précédents pla- 
teaux et s’y relie par le col de Palæokastron. C’est, lui-même, un pla- 
teau dirigé au N.-N.-E., avec une petite plaine intérieure, et terminé par 
deux crêtes successives courant de l’O.-N.-0. à l’'E.-S.-E. etrattachées par 
des isthmes bas et étroits. 

Bassins et vallons. — La ligne de séparation des versants, quoique 
fort sinueuse, passe généralement par la partie médiane, lé versant 
septentrional renferme le grand vallon du Stomio , et le versant opposé 
ceux du Ghoudhsero et du Pilialimata. 


Versant méridional. Versant septentrional. 

PI. de Hierapetra. . . V. de Papadhiana. S V. de Vasiliki. 

V. de l’Haghia-Photia-Potamos. ‘. V. de Kavousi. 
[+] 

.r… (..B. du Ghoudhsero. à  V- de Lastro. 
P]. de Pilialimata. | E :V:-dé(Mouliäinä 
CN PP at ee NERO EEE 
Y. de Sakro. 2% 2. du Siomio ou Sklavotia. PI, de Sitia. 
Y. de Käroubès. 3  V- de Palæokastron. 

pe) 


Sur le versant septentrional , en outre des vallons du Krephti-Aori et 
du massif de Mouliana , il y a le bassin du Stomio ou Sklavotia, dont le 
principal vallon court du S.-0. au N.-E. en séparant le massif de Mou- 
liana de celui du Dhrisès ; il vient en s’élargissant déboucher à la baie de 
Sitia. Sur le versant méridional, après le vallon d’Haghia-Photia, vient 
le bassin du Ghoudhsero qui sépare d’abord le massif du Kavousi de celui 
du Romanati et qui, avant la réunion de ses deux branches, séparait ce 
dernier de celui de Mouliana. Entre le Romanati et le plateau de Khan- 
dhra, vient le vallon du Pilialimata qui reçoit à l'O. un grand vallon qui 


se rend le large vallon, qui limite au S. l’Akroteri du cap Sidhero. 


("96:12) 
vient du col de Dhaphnes , en longeant le Romanati. Entre le plateau du 
Dbrisès et de Khandhra et celui des caps Plako et Traostalo se trouve la 
longue plaine de Karoubès et Zakro dirigée du N. au S.; elle reçoit plu- 
sieurs grands ravins du plateau oriental et communique avec la mer, aux 
ports de Karoubès et de Kato-Zakro. Dans la baie de Palæokastron enfin, 


Hypsométrie.—Les 64 altitudes que j’ai déterminées sont Les suivantes : 


À. PARTIE MONTAGNEUSE OCCIDENTALE DE SITIA. 


Massif de l'Aphendi-Kavousi. 


Apbhendi-Kavousi. . ...... 
Krephti-Aori, limite supérieure 
HS VIENES. +. ARMUTAN 
Krephti-Aori, partie inférieure 
Col au-dessus du pharanghi 
GE N'ÉCU SE RRRRONEEES 
Source au-dessus d’Épiskopi. 
Col de Kavousi (niveau). . . 
Stavrodhoxari (niveau). : .. 


Chaînon de Moulian«a. 


Montagnes au N. de Kavousi 
(VE) A RM NE. EE 

Colline côtière à l’0. de Ka- 
vousi (niveau)... 

Source au haut du chemin de 
Kavousi à Sphaka. . .... 

Sphaka , plaine au bas et à l’O. 


381 
167 


Col de Tourloté à Mouliana. . 
Mesa—-Mouliana, centre. .. .. 
Pera-Mouliana, ruiss. au bas. 
Terrain tertiaire au-dessus de 


Plateau à l’0. de Piskokephalo 
Piskokephalo, plaine. . . . .. 
Plaine de Piskokephalo à Pis- 

kopi 


Romanatii tata Hate 
Hauteur talqueuse à PO. 
ROMANAL EME EEE 


Dhaphnès et col de Roukaka. 
Terrain tert. blanc au-dessus 
de Pilialimata (niveau). . 


Pilialimata (Metokhi). . .... 


PB. PLATEAUX MONTUEUX ORIENTAUX DE SITIA. 


Akroteri du cap Sidhero. 


Colline du cap Sidhero. . . .. 
Colline entre les deux isthmes 


Collineà 5 kil. au N.de Toplou. 
Terrain talq. au N. de Toplou 
Toplou-Monasteri (cour.) (4). 
Is-to-Vai, plaine au S.-0. . . 
Plateau au S.-E. de Toplou. . 
Col de Toplou à Palæokastron 


225 


47m 
403 
253 


300 
166 


Massif des caps Plako el Traoslaio. 


Plateau du cap Plako. . . .. 
Sarekenovighla . . . . . . . .. 
Terrain tertiaire au-dessus de: 


Karoubès, plaine au bas. . .. 
Col de Toplou à Karoubès (ni- 


275 
439 


308 


466 
126 


189 


( 562 ) 


Plateau du Dhrisès et de Khandhra Nethia, sommet du terrain 
Plateau à l’0. de Karoubès. .. 466m tertiaire au S.-0....... 625% 
Plateau au bas du Modhi.... 392  Khandhra, fontaine (2)... 588 
Modhie a ee AE 558 Col éntre Khandhra et Lam- 
Dhrisès..... 931 DONNE, ee CTI 716 
Arnikou, hameau supérieur. 426  Lamnone. ............. 670 
Arnikou, sommet du terrain Petite plaine à PE. dans le 

tértiairer MAUR SAINS 232 VaNON MEN EENRS 640 
Sphakia, sommet du terr. tert. 382 Sommet au N.-E. du mont de 
Ruisseau au bas de Kalamarki 207 TRICOT SRE EE 813 
NAVElIONS ESA ANR TES SL 405 Mont au S.-E, dé Thiro. . 826 
Ruisseau entre Kanene et Is-— MRINOS Se RER CE ENCE 975 

RTE ee SE ES he 224 Petite plaine à l’O. de Thiro. . 750 
Col à l’O. d’Iskhia et niveau Mont au S.-E. de Nethia. . 733 

deRanene 2) ER ESPN 353 Apano-Pervolakia. .....,. 509 
Jskhia, haut du village. . . .. 348 Tour ou Vardia de Pervolakia 608 
Col à VE. d’Iskhia. . 371  Kato-Pervolakia. . . . . . . .. 366 


L'gne de faîte, défilés, bassins fermés et grottes. 


Ligne de séparation des versants hydrographiques N. ei S. — Après 
avoir souvent mentionné les deux grands versants septentrional et méri- 
dional dans la description précédente de chacune des sept parties de 
l'ile, il me reste à jeter un coup-d’œil sur la configuration de leur 
ligne de séparation, et à donner les altitudes des points les plus élevés 
et les plus bas de celle-ci. 

Elle commence sur la côte occidentale au pied de l’Haghios-Elias et 
se termine à la côte orientale, à l’extrémité du cap Sidhero. Après avoir 
élé un peu sinueuse dans les massifs de Selino et Kisamos et de l’Aspro- 
Vouna, elle ne présente que quelques légères courbures dans ceux de 
Rhethymnon, du Psiloriti et de Megalo-Kastron, pour devenir plus 
sinueuse dans ceux de Lassiti et de Sitia. Elle ne partage pas la Crète 
en deux versants d’égale superficie, celui du N. étant souvent plus 
étendu; en effet, si elle est à-peu-près médiane dans le premier mas- 
sif et ceux de Rhethymnon et de Sitia, elle laisse au N. trois-cinquièmes 
de ceux de Megalo-Kastron et de Lassiti, et trois-quarts de ceux des 
Aspro-Vouna et du Psiloriti. C’est sur son parcours que se trouvent, 
dans les Aspro-Vouna, les bassins fermés d’Omalos et d’Askypho ; dans 
les montagnes de Lassiti, celui de Lassiti et Katharos; et en Sitia, celui 
de Khandhra et Kataleone. 


( 563 ) 


Cette ligne de partage éprouve de grandes ondulations dans son par- 
cours, car dans les cinq massifs montagneux et montueux, elle passe par 
les points culminants ; dans les deux plateaux accidentés de Rhethym- 
non et de Megalo-Kastron, il n’en est pas de même: les deux chaînons 
côliers du Krioneriti et du Kophinos étant entièrement compris dans le 
versant méridional. La liste suivante offre les altitudes des points succes- 
sivement les plus élevés et les plus bas de l’arête de partage des eaux, 
qui me sont connus dans chacune des sept parties de l’île. L’inspection 
de la carte permettra de reconnaître où j'ai pu porter le baromètre ; 


les cols sont une première colonne et les sommités sur une seconde : 


Localités. Dépress. Élévations. 


HAS AIOS=PITAS MES EN EN TANRANATENMEMEUIENRURE 
Ennea-Khoria, sommet au N. . . . . .. 


Col" d’Ennea-Khoria ... 592m 


PAYS MONTUEUX HacNios=DRIRICSPEN EN  CC que 
DE KISAMOS ET SELINO | J . Le 
©] Dépression au S. d’Iydhris. . . . . . . 563 


ADO DIS NATIN RME EURE NUS EUR Se TE 
Col de Nea-Roumata à Haghia-Irini. . . 898 


ASPRO=vVOuNA où | Col d’Omalos à Samaria. . .….. . . . . . . 


Volikraglenvirons) #11" L'ÉRNE 
MONTAGNES DE + og x 
CONAASIYDHONAENIDEO SEEN ON 817 


COMAUESAHAIAINONTAREERE EEE AA 4 
COMMUNAUTES PAlÆOIONTAMERMEE 506 
CORAUENAEAITERS DEC EE Let 00 


PLATEAU ACCIDENTÉ 
DE RHETHYMNON. 


MONTAGNES 
DU PSILORITI. 


Col d’Haghios-Gheorghiou-Epanosiphes. 447 


Montagne de Dhamania. . . . . . . . . . 
PLATEAU ACCIDENTÉ DE 


MEGATOSRESTRONE COL de SEVTO 5 MOMIE MATIN Eur, 577 
Plaine au bas de Kastel-Pedhiadha. . . 349 

Aphendi-Sarakenos. MMM RE 12 

Col au S. de l’Aphendi-Sarakeno . . . 41383 
Aphendi=Khristo.…" "1"... ARLES UE 

MONTAGNES DE LASSiTI! Col du Katharos à Myrto . . . . . . . . 1216 
ColidemMeselenos EME NIRCNE 4182 


Isthme de Hierapetra . . . . . . . SA 
| NATONOEDISKODIEAERNERERC EE 126 


91 8m 
1455 


1190 


1388 


2108 
1927 
2375 


(564) 


Localités. Dépress. Élévations. 
Aphendi-Kavousi: 4e OP ER TER A472m 
Col dISKh ia TAN ARR 353m 
Mont'au S'=E. deMThiro EN RREP EE ne 826 
PAYS MONTUEUX DATISES EN NS et ce 831 
LE MAT AS eee: : 
Col de Toplou à Palæokastron . . . . . 448 
Patcasau'S. Ede TOILE RE 246 
ISth met du porte na MERE 6) 
Collinerdu ep Sidhero 101000 CRI: { 225 


Un autre point de partage intéressant à connaître est celui des bassins 
de l’Hiero-Potamos et de l’Anapodhari dans la grande plaine de Messara; 
il est à 290" entre Asemi et Sternes. 

Défilés et gorges profondes. — Ces accidents du sol, nommés Pha- 
rangha, ne se trouvent guère hors des calcaires secondaires ; aussi n’en 
existe-t-il dans la première région que dans la crête qui va de l’'Haghios- 
Elias à l’Apopighari, au bas du vallon d'Ennea-Khoria et au-dessous 
d’'Hydhris et de Kato-Phlori, à l’entrée des ruisseaux en Kisamos. 

C’est particulièrement dans les montagnes de Sphakia, si accidentées 
et déchiquetées, qu’ils sont fréquents; sur le revers septentrional, il y 
en a trois principaux : celui qui est au bas de la plaine de Theriso, et dans 
le haut duquel on passe en venant de Khania et Mourniès, est assez 
large et profond ; le Megalo-Pharanghi de Stylo par lequel les eaux du 
Mavri peuvent descendre dans l’Apokorona est très-étroit, bien plus 
profond et impraticable ; à côté , au bas des pentes de l’Haghion-Pneuma 
se trouve celui de Rhamni à Makerous. Sur le revers méridional, je ne 
puis énumérer que les plus remarquables. Le premier à l'E. est cette 
véritable crevasse en laquelle se transforme le vallon entre Haghia-frini 
et Kroustogherako, etmême Livadha beaucoup plus bas; il est absolument 
impraticable en raison de la pente très-accidentée de son fond qui est 
de 450 mètres sur une longueur de 8 kilomètres, et de sa profondeur 
qui atteint 500 mètres vers le milieu ; le ruisseau s’y perd entièrement. 
Celui de Samaria et d'Haghia-Roumeli a été suffisamment décrit, p. 156 
et 363, pour que je me dispense d'y revenir autrement que pour dire 
que, pendant toute la durée des pluies, les habitants de Samaria ne 
peuvent communiquer avec le reste de l’île, et à pied seulement, que par 
le Xyloskalo et Omalos recouvert de neige. Ayant déjà décrit, p. 155 et 
157, celui qui est entre Aradhena et Anopolis, j’ai seulement à ajouter 
qu'il commence par les hauts vallons qui sont à la base du Theodhori, 
et qu'au-dessous d’Aradhena son thalweg présente jusqu’à la mer une 


( 565 ) 

pente très-rapide, et sans doute de grands chutes. Au-dessous de la 
fontaine indiquée p. 154, se trouve, à l'E. de Mouri , une gorge qui s’ap- 
profondit énormément en approchant de la mer, où elle s'ouvre au milieu 
des grands escarpements verticaux qui forment la côte, de Loutro à 
Sphakia ; c’est peut-être celle où se trouve le hameau de cinq maisons 
de Kalous-Lakous, et un grand rocher perpendiculaire blanchätre dit 
Aspros-Kremnos. Je ne reviendrai pas sur le grand pharanghi ouvert 
de Nipros à Komitadhès et qui est le seul chemin muletier par lequel on 
peut pénétrer sur le revers africain des Aspro-Vouna; je l'ai décrit suffi- 
samment p. 308. — Les dangers auxquels on est exposé, comme je lai 
dit, en parcourant la gorge d'Haghia-Roumeli et aussi celle de Komita- 
dhès pendant la saison des pluies, sont beaucoup moins grands dans 
celles de Theriso et d’Aradhena, les chemins ne faisant que les traverser 
dans des endroits un peu larges. 

Dans le plateau de Rhethymnon, Le Petrea arrive à la côte par une véri- 
table fente du plateau. Sur le versant méridional, le petit massif du 
Krioneriti est limité à l’O. par le défilé indiqué p. 192, entre Myrthio et 
Haghios-Joannes, et à l’E. par le Kordhaliotikon-Pharanghi, traversé 
comme je l’ai dit, p. 191, par le Mega-Potamos ; les courants d’air, qui 
y sont toujours très-violents, produisent un bruit semblable à celui du 
tonnerre dont on parle beaucoup dans le pays. 

Le massif du Psiloriti offre certainement des gorges profondes dans 
les parties élevées et centrales, ou bien dans la pente maritime du 
chaînon du Kouloukouna; mais je ne connais que celle par laquelle Île 
ruisseau, qui est au N. d’Axos, rejoint la plaine du Mylopotamos. On en 
cite une, traversée par le ruisseau d’Asomatos , vers Nithavri. 

Le plateau de Megalo-Kastron ne paraît pas en renfermer. 

Dans les montagnes de Lassiti, je ne connais que celui qui permet aux 
eaux du Katharos de s’écouler dans la plaine de Lassiti, et celui de 
Simi , qui ont été indiqués p. 327 et 347; mais il y en a certainement 
plusieurs autres au voisinage des côtes, tant au N. qu’au S.; témoin ceux 
de Viano et d’Arvi, cités et figurés par M. Pashley, et celui de Spina- 
Longa. 

Le massif de Sitia en renferme aussi plusieurs, mais je ne connais que 
celui qui de Krephti, sur la pente occidentale de l’'Aphendi-Kavousi, 
débouche vis-à-vis de Vasiliki, et celui par lequel les eaux de Kato- 
Pervolakia atteignent la rade de Makri-Hyalo. 

La plupart de ces gorges, si profondes et si étroites, doivent certai- 


( 066 ) 

nement leur origine à de grandes fentes ou crevasses, produites dans le 
sol lors de l'élévation des montagnes et du redressement des assises qui 
les composent, et élargies postérieurement par l’action des eaux super- 
ficielles ; mais les dépôts caillouteux qui occupent le fond de ceux que 
l’on peut parcourir, ne permettent pas de vérifier si elles se prolongent 
dans le sol par dessous. Dans de rares cas, sur deux points du pharanghi 
de Komitadhès, dans des couloirs de 2 mètres de largeur sur 20 de 
longueur et 20 à 30 de profondeur, on marche sur le roc vif, et j’ai pu 
m'assurer qu’il n’y avait pas trace de crevasse dans le sol; le ravin sur 
ces points, préparé tout au plus par une simple fissure, devait avoir été 
entièrement creusé par l’action des eaux et des matières sableuses et 
caillouteuses qu’elles entraînent. | 

Les parois de ces pharangha ne présentent que très-peu de végétation 
dans les parties verticales ou fortement inclinées, et l’on n’y constate 
que les effets des agents atmosphériques ou des eaux qui suintent par 
les fissures. Le passage des eaux chargées de limon, de sable et de cail- 
loux, pendant la saison des pluies, a produit une sorte de poli, un 
douci très-parfait, surtout dans les parties inférieures, qui s’élève par- 
fois assez haut. Dans les étroits couloirs , entre Samaria et Haghia-Rou- 
meli, on peut en constater l’existence jusqu’à une dizaine de mètres au- 
dessus du fond; dans ceux de Komitadhès, où le volume des eaux est 
beaucoup moins considérable, les surfaces polies s'élèvent peu; enfin, 
je n’en ai pas aperçu dans le passage de Myrthio à Haghios-Joannes, au- 
dessus duquel il n’y a qu’un très-pelit bassin. 

Bussins intérieurs fermés. — En Crète, comme en Morée, il existe, 
au milieu des massifs montagneux de calcaire secondaire, un certain 
nombre de bassins fermés, de dimensions fort variables, pourvus géné- 
ralement de ces gouffres ou grands perdoirs d’eau, désignés en Grèce 
sous le nom katavothron et dans l’île sous celui de Xhonos. Les deux 
principaux bassins sont Omalos dans les Aspro-Vouna et la plaine de 
Lassiti dans les montagnes de ce nom; ils sont accompagnés d’autres 
plus petits. Le pays montagneux de Sitia en renferme aussi plusieurs 
moins remarquables sur son plateau oriental. Dans les autres parties de 
la Crète, ils paraissent faire défaut. 

Le bassin d'Omalos est situé sur le revers septentrional des Aspro- 
Vouna, au N. 0. du Volakia qui est le point culminant de sa bordure, et 
qui atteint environ 2,100 mètres; il a la forme d’un losange un peu 
irrégulier dont les angles répondent aux quatre points cardinaux, et sa 


( 961 ) 

superficie est d'environ 20 à 25 kilom. carrés; il est limité au N.-E. et au 
N.-0. par des chaînons qui s’élèvent d'environ 200 mètres au-dessus de 
la partie centrale; mais sur trois points, à l'O. au N.-E. et au S.-E., il 
\ a trois vallons qui sont autant de cols bas par lesquels on y pénètre 
facilement d'Haghia-[rini, de Lakous et de Samaria; les deux derniers 
font partie de la grande coupure occidentale des Aspro-Vouna, formée 
par les grands vallons du Platania et de l’'Haghia-Roumeli-Potamos. Il 
est formé par les pentes rapides et ravinées seulement des montagnes, qui 
circonserivent une plaine présentant de très-légers vallons, et dans sa 
partie centrale plusieurs mares qui se dessèchent en été, à l’exception 
d'une seule. Pendant les grandes pluies et les fontes de neiges, les eaux 
se perdent par un Æhonos situé au pied du chaînon N.-0., vers son milieu. 
Ayant déjà parlé longuement de cette plaine aux pages 173 et 365, je 
termine en donnant les altitudes des cols et de la partie centrale : 


Col d’'Haghia-Irini . . . . .. 1,127  Cabanes sur le bord S.-0. (2) 1,068m 
CORAN PAROI Se OST Centre dé la plaine 22 1,043 
CORNE SaMaArA: 00. 2. 1,227 


Le bassin d’Askypho , beaucoup plus petit, appartient aussi au versant 
septentrional des Aspro-Vouna, il est au pied oriental du Koriphi-tou- 
Kastro et limité à VO. par le prolongement de l’Arkoudha ; il est irrégu- 
lièrement circulaire et possède une superficie d'environ 6 à 7 kil. car.; 
deux dépressions ou cols par lesquels'on y pénètre, sont, ainsi que lui, 
sur la grande coupure orientale des Aspro-Vouna, formée par le vallon 
de Prosnero et le pharanghi de Komitadhès, et qui donne le passage de 
l’'Apokorona à Sphakia, le seul chemin muletier de Khania dans cette 
éparkhie ; une troisième dépression, moins profonde, conduit à Anopolis 
et Hagbia-Roumeli. Ainsi que je l'ai dit, c’est dans les pâturages bas de 
la partie centrale que se réunissent les eaux en hiver. Les altitudes des 
deux principaux cols et de la plaine sont les suivantes : 


CoNdeProsnmeron., MN 799m Centre de la plaine. . . . . . … G69m 
COMME SNINTOS. Li UE. 817 


Le massif du Psilorili n’êst pas dépourvu de bassins fermés; je n’y 
connais toutefois que les petites plaines situées au pied méridional du 
Strombolo et que l’on traverse en allant de Dhamasta à Megalo-Kastron. 

Le bassin de Lassiti est situé dans le centre des montagnes de Lassiti, 
sur le versant septentrional cependant des plus hautes sommités; car il 


( 568 ) 

est limité au S. par les Aphendi-Khristo et Sarakeno, de 2,155 et 1,599" 
et au N. seulement par le Selena, moins élevé que le premier et le Tsileno, 
de 1,585". Il est obscurément triangulaire, allongé de VE. à l'O., et sa 
surface est d’environ 110 à 120 kilomètres carrés. Il est partagé en 
deux parties bien distinctes par deux contre-forts qui viennent l’un au 
devant de l’autre, du Selena et de l’Aphendi-Khristo, et qui ne sont sé- 
parés que par un profond pharanghi entièrement impraticable excepté 
pour les eaux. À l’E., c’est le Katharos élevé, dont le fond inégal est 
sillonné de ravins d'autant plus profonds qu’on se rapproche davantage 
de la digue ; à l’O., c’est la grande plaine unie de Lassiti qui a 9 kilom. 
de longueur de l'E. 417$. à l'O. 17° N. et qui est légèrement inclinée 
dans cette direction ; sa plus grande largeur est de 3 kilom. 5; sa super- 
ficie est de 25 à 30 kilom. carrés. Près de son angle N.-0., il y a une 
petite plaine unie, dite Nisimo, qui est à environ 130 au-dessus 
et séparée par un seuil de quelques mètres seulement. Des cols àssez 
élevés , surtout dans la partie orientale , permettent l'entrée de ce bassin. 
Les principaux sont ceux de Kritsa et de Myrto à l’E., de Potamiès au N. 
et de Kastel-Pedhiadha à l’O.; ces deux derniers plus bas donnent direc- 
tement dans la plaine inférieure. Tous sont praticables pour les mulets, 
et il y a encore d’autres sentiers pour les piétons. 

Sur son pourtour, le bassin est limité par les pentes courtes et ravinées 
des montagnes, excepté au S. de la plaine de Lassiti, où trois vallons 
descendent du Spathi, de l’'Aphendi-Khristo et de l’Aphendi-Sarakeno ; 
un élargissement incliné du premier, porte le nom de Limnokharo. En 
hiver et au printemps, les ravins du Katharos sont parcourus par des 
ruisseaux qui se réunissent en un torrent assez considérable qui débou- 
che du pharanghi vers le milieu de la largeur de la plaine de Lassiti ; 
dans celle-ci, le lit, presque de niveau, est un peu plus rapproché du 
côté septentrional. Le Khonos est au milieu du côté occidental au pied 
d’escarpements verticaux calcaires, très-près et au S. du col de Kastel- 
Pedbiadha; les eaux y arrivent par le ruisseau et par les rigoles d’assai- 
nissement perpendiculaires à celui-ci, qui sillennent la moitié occidentale 
de la plaine. D’après les habitants et comme MM. Kutscheit et Mahl- 
mann le marquent sur leur carte , il y aurait une sorte de conduit sou- 
terrain qui amène les eaux encore troubles à Kastamonitza. Pour les 
autres détails, je renvoie à ce que j'ai dit dans l'Itinéraire, p. 326-332, 
et je termine par l’indication des altitudes des cols et des parties cen- 
trales : 


( 269 ) 

CORTE EMRNENENENON MÈRE 1,239 Chapelle du Katharos. . . . . 4,150m 
Gobde Myrto :.. LE. 1,216 Bord N.-0. du Katharos . . . 4,135 
Chemin entre le Katharos et Lassili. . . . . . . . . . 1,21 4m 
COMME APOTAMIES . . . . + 1,065m Entrée du torrentet Panaghia. 870m 
ColdeKastel=Redhiadha MOIS IKNONTOS PNR Se UN, 832 


Le massif de Lassiti renferme quelques autres petits vallons fermés ; 
l'un d’eux, dit Omalos, est au S. de l’Aphendi-Khristo, entre le grand 
vallon d'Embaro et celui de Simi. Il est à la même altitude que l’'Omalos 
de Sphakia, plus petit , en partie cultivé et présente des eaux stagnantes 
dans sa partie centrale. Dans le massif de l’Aphendi-Stavro, entre 
Kænourio-Khorio et Spina-Longa, se trouve au bout d’une plaine et 
séparée par un seuil de 20 mètres, à 318 mètres d'altitude, la petite 
plaine de Kasteli qui est séparée par un nouveau seuil de 20 mètres de 
celle de Phourné , plus élevée et allongée de l'E. 15° N. à l'O. 158 .; 
celle-ci est séparée du vallon profond qui descend à Spina-Longa par un 
col qui atteint 411 mètres. Enfin, quelques auteurs regardent comme 
des bassins fermés la plaine de Mokho, qui du Tsileno m’a paru s'ouvrir 
au S.-0. au bassin de l’Aposelemi , et la plaine de Lakonia qui est basse 
et inondée en hiver, mais qui du Thilaka me paraissait communiquer 
au N. avec le bassin du Mirabello-Potamos. 

Le pays montagneux de Sitia présente aussi quelques dépressions dans 
son plateau oriental, mais elles sont très-peu excavées et séparées les 
unes des autres par des seuils peu élevés. La première est celle de Khan- 
dhra qui n’est séparée, à l’O., du vallon du Pilialimata, que par la basse 
colline qui porte les ruines vénitiennes de Nethia; c’est une plaine à 
590 mètres d'altitude qui renferme de légers vallons et quelques sources. 
Elle n’est séparée, sans doute, au N. E. que par un seuil bas de celles de 
Kataleone et de Sitano que je n’ai pu visiter. À V'E., par un col à 716 
mètres et un vallon, elle se rattache à celle de Lamnoni à 670 mètres, 
qui est la partie supérieure de profonds vallons qui aboutissent à la côte 
orientale. Au S.-E., par deux petites dépressions séparées par des bar- 
rages calcaires, et dont la seconde, avec de petites habitations, est à 
190 mètres, on arrive dans celle de Thiro; celle-ci, qui est très-unie, 
avec de bons puits, est en forme de croissant, à 575 mètres d’altitude, et 
les eaux qui y tombent en hiver se perdent dans un khonos, situé près 
de l'extrémité occidentale. 

En outre de ces véritables plaines intérieures , il y a fréquemment en 


((510°) 

Crète, dans les parties formées par les calcaires secondaires, des cavités 
allongées ou en entonnoir, sans fond plat , qui atteignent quelquefois 25 à 
50 mètres de profondeur et une longueur d’un kilomètre. C’est surtout 
entre les hautes sommités de la partie orientale des montagnes de Sphakia 
qu’elles sont le plus développées; on en rencontre aussi, de moindres 
dimensions, sur les hauts plateaux du Psiloriti et des montagnes de 
Lassiti. Beaucoup plus bas , à 300 mètres d’altitude comme sur le pla- 
teau calcaire de Dhrapano , à 600 mètres comme sur celui de Malaxa, il 
y à assez fréquemment, comme dans le Quercy, des cavités circulaires 
de 100 à 200 mètres de diamètre et de 10 a 15 mètres de profondeur, 
dont le fond est très-bien cultivé. — Quelques cavités de forme analogue 
existent aussi dans les terrains talqueux de Selino ; en outre des deux 
grands entonnoirs d’effondrement d’Ennea-Khoria, que j'ai décrits p.177, 
j'en ai rencontré un autre, de 40 à 50 mètres de diamètre et de 20 mètres 
environ de profondeur, à l’O. d’Apano-Phlori. 

Grottes. — Comme tous les pays formés par les roches calcaires, sur- 
tout en assises bouleversées, la Crète renferme une grande quantité de 
cavités dont plusieurs ont déjà été visitées et décrites par les voyageurs. 
Je renverrai à la description du terrain tertiaire, dans lequel elles sont : 
excavées , la description des anciennes carrières d’Ampelousa désignées 
partout sous le nom de labyrinthe, pour ne m'occuper ici que des grottes 
ou cavernes naturelles. Leur position, souvent à une certaine élévation 
au-dessus du fond des vallons, et l’épaisse couche de stalagmites qui 
recouvre leur fond, rendent fort douteuse ou fort difficile l'existence ou 
la recherche d’ossements fossiles; aussi ai-je visité seulement, et très- 
rapidement encore, celles qui se trouvaient sur mon chemin, je serai 
donc obligé d'emprunter souvent ce que je vais rapporter, aux auteurs 
qui m'ont précédé. 

Sur divers points des côtes , les roches calcaires présentent des exca- 
vations qui s’agrandissent par l’action des vagues, et quelques auteurs 
ont indiqué celles qui existent autour de l’akroteri du cap Grabousa; 
mais il n’y a pas à s'occuper ici de ces simples dégradations de l’époque 
actuelle. 

Les cavernes habitées d’Omalos, figurées sur les cartes du XVI: siècle, 
n'étaient, sans doute, que des celliers analogues à ceux qui y existent 
aujourd’hui. Mais à l'angle S.-0. du golfe de Khania, à Spelæa , il ya 
dans le haut des montagnes une caverne que je n’ai pas visitée et qui, au 
dire des habitants, est assez vaste pour contenir 4,000 personnes. Dans 


(51) 


le même golfe, l’îilot d'Haghios-Theodhoros renferme à son extrémité 
méridionale des grottes que l’on aperçoit bien de la plage de Platania. 


Le chaïînon du cap Meleka renferme, dans le vallon de Katholiko , au 
N. du monastère d'Haghios-Joannes ou Gouverneto , trois grottes que je 
visitai, le 31 mai, en compagnie de M. Gaspary, ainsi que je l'ai dit 
p. 159. Celle de Katholiko, surtout décrite par Sonnini (1), pénètre 
horizontalement au S. dans la montagne; elle a plus de 450 mûtres de 
longueur sur 3 à 15 et même 20 mètres de hauteur ; ses parois présen- 
tent de très-belles stalactites pyramidales ou cylindriques, jaunâtres, qui 
pendent de tous côtés, et des colonnes de diverses grosseurs , transpa- 
rentes ou blanches ; le sol est accidenté par des blocs et des stalagmites 
qui s’élèvent plus ou moins. Pococke (2), qui la visita en 1744, s’expri- 
mait ainsi : « On trouve dans ce même endroit, une grotte d'environ un 
quart de mille d’étendue, remplie de pétrifications que l’eau a formées. 
Il y a au fond une table taillée dans le roc, sur la surface de laquelle 
l’eau a formé une espèce de rocaille qui produit un très-bel effet. Elle 
l'emporte sur toutes celles que jai vues pour la beauté, la délicatesse, et 
la transparence des colonnes, dont une a près de vingt pieds de hauteur. 
J’appris , après avoir quitté cet endroit, qu'il y avoit plus bas une autre 
grotte, qui s’étendoit encore plus loin. Métant avancé deux milles au 
couchant dans ces montagnes, je vis un village ruiné appelé Saint- 
George , et une église dans une grotte, dans laquelle il y en a une autre, 
où l’on me dit qu’on trouvoit des os pétrifiés plus gros qu’à l’ordinaire, 
et en effet, j'en vis quelques-uns dans la partie la plus tendre du rocher, 
mais qui n’étoient point pétrifiés. » 

M. Pashley cite dans l’Apokorona, à Haghios-Mamas , entre Neokhorio 
et Rhamni, une caverne au-dessous de laquelle il y a une source. Au 
S.-E. de Rhethymnon, au-delà de Khamalevri, près du monastère d’Ar- 
sani, se trouve aussi une caverne dans laquelle, au dire du Sphakiote 
qui le conduisait, on peut marcher pendant deux heures. 

Je n’ai rien à ajouter au peu que j'ai dit, p. 188 et 356, de l’exis- 
tence d’une grotte et de grandes cavernes à Ghaïdhouropolis et à Spele. 

Mais je reviens sur la grotte de Melidhoni, de si funèbre mémoire 
(voir p. 193), dont je n’ai parcouru que deux salles, à l’aide d’une 


(1) Voyage en Grèce et en Turquie, t. Ier, p. 282-87. 
(2) Descriplion of the East , traduction française , t, IV. p. 302-5. 


Tome XXII. | 52 


(572) 
traduction concise de la description qu’en a donnée M. Pashley (1), après 
l'avoir visitée le premier, après l'évènement , avec une douzaine d’habi- 
tants, le 23 février 1834. 

L'entrée, située au-dessous de pentes verticales, a été considéra- 
blement diminuée par le remblai des musulmans qui a masqué l’anti- 
que inscription et produit un grand talus d’éboulement, qui s’avance de 
47 mètres à l’intérieur de la première salle. Celle-ci de 45 mètres envi- 
ron, de l'E. à l’O., et presque aussi large, a son sol incliné à l’E.; ses 
parois sont couvertes de stalactites et de stalagmites dont quelques- 
unes fort hautes se dressent sur diverses parties du sol. — Au milieu de 
son côté S., un large et bas passage de 10 mètres de longueur, dont les 
stalactites atteignent quelquefois le sol, conduit à une chambre de 
7 mètres de long, 4 de large et 3 à 7 de haut, remplie de stalactites. — 
Sur le côté N., il y a un grand passage de 7 mètres de large sur quelque- 
fois plus de 20 mètres de hauteur, qui est bientôt réduit à 2 mètres de 
largeur par un massif de stalactites; au-delà, il reprend sa largeur et 
30 mètres de hauteur, et présente , sur la gauche, des stalactites simu- 
lant une fenêtre gothique d'église, un peu au-dessus de l’entrée d’une 
excavation; on aboutit à une descente verticale de 6 mètres et la caverne 
a l’air de s’étendre encore à quelque distance; un peu en ayant, des 
stalactites forment une sorte d’énorme grappe qui pend de 10 mètres au- 
dessous du niveau de l’observateur. — Enfin, à l'extrémité N.-E. de la 
première salle, un autre passage de 3 mêtres s’élargit en une sorte de 
chambre de 9 mètres de longueur, au bout de laquelle est, un étroit 
passage de 4 mètres de longueur, dont on sort difficilement en gravissant 
et en descendant au milieu de roches éboulées ; on se trouve alors dans 
une autre salle, magnifique lorsqu'elle est bien éclairée, de 45 mètres 
de longueur, de largeur très-variable, et d’une hauteur presque uniforme 
et considérable ; à 8 ou 10 mètres de l’entrée, il y a une grande stalag- 
mite colonnaire qui atteint le plafond, tandis que des stalactites pendent 
de chaque côté. — Sur le côté S.-0., un rang de stalactites sépare d’un 
couloir auquel fait suite un beaucoup plus petit, de 2 mètres 50 de lon- 
gueur, qui mène dans une fort petite salle où il y a de l’eau et beaucoup 
de vases de terre fixés au sol par les concrétions qui, au bout d’un siècle, 


(1) Travels in Crete, t. 1, p.135-138. — Il en existe une longue description faite 
en 1583 par Lunardo Querini, dans sa Discrillione di lulla l’Isola di Candia ( ss. 
de la bibl. du Roi. Missions étrangères, n° 221, fol. 80 et 81). 


(573) 

suivant M. Pashley, les auraient entièrement enfouis, si les habitants ne 
les avaient enlevés lors de sa visite. Par un passage si étroit et si bas 
qu’il faut ramper sur les genoux et les mains, on descend dans une petite 
salle dont le milieu est occupé par plusieurs stalagmites considérables, 
dont une colonnaire atteint le plafond à 6 mètres. Un passage étroit et 
très-rapide mène à une dernière petite chambre située presque au- 
dessous, dans laquelle, comme dans toutes les précédentes , abondaient 
les ossements des victimes de septembre 1822. 

C’est également à M. Pashley que j’emprunte la description de la grotte 
de Sarko, au S.-0. de Megalo-Kastron, qu’il a visitée huit jours après, et 
que j'ai signalée, p. 312. (1) Elle est à un quart-d’heure à l'O. du village 
et a son entrée sur le flanc d’un vallon. — La première salle, dont l’ouver- 
ture est flanquée d’un grand nombre de petites maisons, a environ 10" de 
diamètre et ses parois vont en s’évasant à partir du sol; on y monie de 6" 
sur des roches raboteuses où une seule personne peut passer à la fois, et 
on arrive dans un passage de 17" de longueur, du fond duquel on aperçoit 
encore l’extérieur ; en changeant de direction, on entre dans une salle 
spacieuse , d’une si grande hauteur, que la lueur des flambeaux est in- 
suffisante pour l’apprécier ; on y marche au S.-0. pendant 10 à 12", au 
milieu de blocs de roches qui ne laissent qu’un étroit sentier, et on 
entre dans un passage dont la largeur est de 6" et la hauteur de 2 à 6», 
dans lequel est une descente considérable de plus de 50%; le sol n’y 
présente que des roches, et les parois de simples essais de stalactites et 
de stalagmites. On remonte ensuite dans un long couloir, qui, malgré 
plusieurs détours et élargissements, court d’une manière générale vers 
l'O. (2) et débouche dans une petite salle de 6" de long, 3" de large 
et 5® de haut, dans laquelle on descend sur des roches à pic mais assez 
raboteuses pour que l’on puisse se passer d'échelle : on se trouve alors 
à l'angle N.-E. d’une salle de 9 de long et 3" de large, dont le sol de 
gravier montre bien qu’en hiver, un courant d’eau descend dans ces pro- 
fondeurs. Par un étroit passage, on s’engage dans un couloir de 15" de 
long , 3% de large et 2 à 5" de haut, qui s’abaisse rapidement et débou- 


(1) Travels in Crete, T. I. p. 236 à 241. 

(2) En remontant des parties profondes, M. Pashley y trouva après un détour, à 
44m avant sa sortie, une bifurcation dans laquelle il remonta d'environ 40m sur la 
gauche , dans une partie fort étroite qui lui était inconnue et où il était fort incom- 
moulé par la fumée résineuse des torches. 


(574) 


che à l’extrémité N.-E. d’une salle de 25" de long , 4 de large et 2 à 
Gr de haut , allongée du N.-E. au S.-0.; de celle-là, on arrive à l’extré- 
mité N.-E. d’une salle plus grande que la suivante, allongée du N.-E. 
au S.-0., mais n’ayant que 5" de haut, et, par une nouvelle brèche du 
roc, dans une salle de 7" de large. Un couloir de 15" de long, si étroit 
qu'une seule personne peut passer, si bas qu'en beaucoup d’endroits il 
n’a que 0" 60 de haut, et de la partie supérieure duquel l’eau dégoutte 
en abondance, conduit dans une salle presque circulaire de 9" de diamèé- 
tre ; dans celle-ci, l’eau qui couvrait en partie le sol empêcha M. Pashley 
d'explorer des ouvertures latérales et de pénétrer plus avant, ce qu’on 
doit pouvoir faire en juillet ou août. Il est facile de conclure de cette 
description que la grotte de Sarko n’est pas en partie encombrée de sta- 
lactites, comme celles de Katholiko et de Melidhoni. 

M. Pashley indique des cavernes dans les rochers tertiaires d’une col- 
line près des ruines de Cnosse , et d’autres à Gouvès, près de la mer et 
de l’Aposelemi. 

Dans le milieu du XVII siècle, Boschini parlait, sans indiquer sa 
localité précise, d’une grotte considérable des montagnes de Lassiti, 
dont l’entrée était très-difficile, et qui renfermait des stalactites et de 
l’eau. 

Pour terminer ce que je sais relativement aux cavernes de la Crète, il 
ne me reste plus qu’à rappeler les mentions que j'ai faites de celles du 
Jouktas, de Castel-Keraton et des montagnes d’Iro, aux pages 316, 348 
et 345. 


30 HYDROGRAPHIE INTÉRIEURE. 


Sources ordinaires. — Le terrain talqueux, en raison de son imper- 
méabilité et de la nature argileuse et sableuse de ses parties superfi- 
cielles, possède un grand nombre de petiles sources qui donnent un 
aspect particulier, verdoyant, à l’éparkhie de Selino et aux autres parties 
de l’île qui en sont composées. 

Dans les calcaires secondaires, les fentes nombreuses, qui les traver- 
sent en tous sens , en font un véritable crible au travers duquel s’écou- 
lent rapidement dans les profondeurs, les eaux pluviales qui sont ainsi 
perdues pour la surface. Elles reparaissent en sources dans les points 
où percent les parties inférieures schisteuses ou de macigno ou le terrain 
talqueux ; et dans ces cas, c’est à toutes altitudes, même à 2,033" comme 
à Lakkos-tou-Nerou, à la base du Soro. Habituellement c’est seulement 


(‘5175 } 

dans le fond des vallons, et à une faible hauteur au-dessus de la mer, 
les eaux finissant par glisser dans les terrains d’alluvion jusqu’à ce 
qu’elles soient arrêtées par l'influence du niveau de celle-ci ; aussi est-il 
souvent impossible de les utiliser pour des irrigalions; je puis citer 
comme exemple de rivières des différentes parties de la Crète, dont les 
sources permanentes inférieures sont peu distantes de la mer, le Plata- 
nia de Khania, le Khilia de l’Apokorona, le Hiero-Potamos de Messara, 
le Sklavotia de Sitia, etc. Toutes ces eaux sont de bonne qualité à leur 
sortie, et c’est seulement après avoir coulé sur un sol marécageux qu’elles 
deviennent malsaines, vers la fin de la saison chaude. 

En raison du peu de continuité des couches argileuses ou marneuses 
entrant dans la composition des terrains tertiaires, et de la petitesse des 
bassins qu’ils ont rempli, ils ne renferment pas plus que les terrains 
précédents, de nappes d’eau régulières; les sources s’en échappent gé- 
néralement dans le fond des vallons , ou même au voisinage de la mer. 

En Crète, comme en Morée, on donne souvent le nom de Kephalo- 
vrysis aux sources considérables qui semblent être la venue au jour de 
cours d’eau souterrains. Ordinairement elles sont à une assez faible éléva- 
tion au-dessus du niveau de la mer; mais il y en a au niveau même de la 
mer comme celle d'Haghios-Paulos, que l’on ne voit que par les temps 
très-calmes, et à des hauteurs assez considérables, comme celles du 
pharanghi d'Haghia-Roumeli, à 246", et du village de Kephalovrysis, à 
l'E. de Viano, à 885". On peut surtout citer sur le revers S. de l’Aphendi- 
Kavousi, au lieu dit Psykhro, dans un bois de Pinus Laricio, de 1,000 à 
1,200» d'altitude, une source donnant un ruisseau qui fait tourner 
immédiatement un moulin. Comme les eaux qui les alimentent descen- 
dent des parties élevées et proviennent même souvent de la fonte des 
neiges , elles sont froides , anormales , leur température étant inférieure 
à la température moyenne de leur zone de sortie et offrant des variations 
suivant les saisons ; il en est de même pour leur débit qui devient sou- 
vent très-faible et presque nul après le mois de juillet, tout aussi bien 
pour celles qui sont peu élevées, comme à Stylo, que pour celles qui le 
sont davantage comme à Haghia-Roumeli. Buondelmonti avait surtout 
remarqué, en 4422, celui d’Istronas, situé près de l'angle S.-0. du 
golfe de Mirabello, qui sortait d’une caverne et donnait immédiatement 
une grande masse d’eau qui arrosait le village et faisait tourner quatre 
moulins, 

Les sources présentent peu de particularités dans la composition de leurs 


(516 ) 


eaux ; celles-ci n’ont aucun goût particulier et ne renferment probable- 
ment en dissolution que les substances habituelles. Le carbonate de chaux 
doit s’y trouver souvent en proportion notable; car dans beaucoup de 
torrents des montagnes calcaires les fragments roulés du fond sont réunis 
en poudingues par un ciment parfois très-dur, ainsi que cela s’observe 
bien surtout dans les pharangha d’Haghia-Roumeli et de Komitadhès. 
Pourtant je n’ai rencontré nulle part de tufs calcaires extérieurs, et dans 
les excavations même, les stalactites ne semblent pas s’accroître très- 
rapidement, excepté dans la grotte de Melidhoni et dans quelques parties 
des anciennes carrières dites labyrinthe, près de l’antique Gortyne. 

Dans l’éparkhie de Kisamos, les eaux sont douceâtres et de mauvaise 
qualité; leur saveur, analogue à celle des eaux séléniteuses, est proba- 
blement due à la présence du gypse qui existe dans quelques-unes des 
marnes qui leur donnent naissance ou sur lesquelles elles coulent. Les 
eaux des puits de Dhibaki dans la plaine de Messara sont également dou- 
ceûtres. 

Sources minérales. — Je n’ai rencontré de sources ferrugineuses que 
sur un seul point de Selino , dans un vallon ouvert dans les talschistes, 
sur le chemin de Pelekano à Sarakena et Kadano ; ces sources , fort pe- 
ttes , étaient dans un endroit marécageux et déposaient un peu d’ocre 
jaune. Au-dessous de Nethia, dans la partie orientale de Sitia, un petit 
ruisseau ferrugineux est sans doute occasionné par des sources de même 
nature, au milieu du terrain tertiaire. 

Les puits situés au bord de la mer et à son niveau , comme à Khania, 
Rhethymnon, etc., sont saumâtres, comme on pouvait le prévoir. J'ai 
eu occasion d’en voir encore deux autres dans ce cas, auprès de Kalyvès 
( Apokorona) et à Loutro ( Sphakia). . 

Mais un phénomène très-remarquable est celui des immenses sources 
saumâtres, désignées sous le nom d’Almyros, qui existent à plus d’un 
kilomètre de la plage, et à une faible hauteur au-dessus du niveau de la 
mer. Elles sortent des calcaires compactes crétacés, non loin des terrains 
talqueux , et leur température est de 15 à 16° en été et en automne, 
2 à 3° au-dessous de la température moyenne du sol. Elles rentrent 
ainsi dans la catégorie des sources froides anormales. Les pluies et les 
fontes de neige les font considérablement grossir; aussi, leur salure, 
forte en été, diminue-t-elle assez pour que l’eau devienne potable en 
hiver et au printemps. L’une d’elles , située à 13" d’altitude , est à l’an- 
gle S.-0. du golfe de l’Almyros , à l'O de Rhethymnon ; elle donne nais- 


(571) 


sance à un gros ruisseau de 1 à 2 kilomètres de longueur, qui traverse 
une plaine marécageuse et atteint la mer au voisinage de petits îlots ; je 
l'ai visitée les 4 juin, 27 juillet et 13 octobre, et je renvoie à ce que 
j'en ai dit dans l’Itinéraire, surtout aux pages 165 et 357. Une seconde est 
placée à une allitude analogue, dans l’angle S.-0. du golfe de Megalo- 
Kastron; je l’ai visitée le 3 octobre et décrite p. 352. Enfin , Sieber (1) 
parle d’une troisième qui existerait sur le golfe de Mirabello, vers Kritsa; 
elle jaillit en bouillonnant de trois orifices, et forme une rivière qui 
atteint la mer après un cours de 80 pas ; l’eau est salée, amère et on 
l'emploie comme purgatif; je ne l’ai pas vue et je n’en ai même pas 
entendu parler sur les lieux. 

Relativement à leur origine, Buondelmonti, en 1422, admettait que 
l’'Almyros de Candia n’était que la venue au jour d’eaux qui se perdaient 
dans un gouffre à l’E. du monastère d'Haghios-Gheorghiou-Kamariotis, 
au pied septentrional du massif du Psiloriti. Vers le milieu du XVI: siè- 
cle, Boschini, plus frappé sans doute de la salure, les considérait comme 
formés tous deux par la mer, qui, par des canaux souterrains, venait 
sortir un peu au-dessus de son niveau. D’après M. Pashley, la première 
opinion est encore celle des habitants à l’égard de la source de Megalo- 
Kastron , qui est à 22 kilom. en ligne droite d'Haghios-Gheorghiou-Ka- 
mariotis. 


La température basse des eaux des deux Almyros démontre bien clai- 
rement qu'ils appartiennent à la catégorie des sources froides anormales, 
et que leurs réservoirs sont situés au moins, pour celui de Rhethymnon, 
à 600 d’altitude, et pour celui de Megalo-Kastron, à 400. Il m’est 
donc impossible d'admettre pour la Crète, comme M. Virlet pour la 
Morée (2) : « entre le phénomène des eaux thermales et minérales, et 
les phénomènes volcaniques proprement dits (de l’Archipel), des rap- 
ports tels qu’on ne peut les séparer les uns des autres, et qui prouvent 
que la cause qui produit les uns produit aussi les autres ». Le seul 
doute possible est relatif à la salure, qui est due soit à des masses de sel 
gemme renfermées dans le sol, soit aux eaux de la mer, dont quelques 
portions, par suite de circonstances particulières, seraient amenées à une 
douzaine de mètres au-dessus du niveau ordinaire. 


(4) Reise nach der inseln Krela, t. 1, p. 297. 
(2) Expédilion scientifique de Morée. Géologie, p. 5315-14. 


( 5178 ) 


Les essais que je viens de faire avec M. Baudrimont, sur les eaux que 
j'ai rapportées des deux Almyros, infirment la dernière hypothèse au 
profit de la première ; en effet, la proportion relative beaucoup moins 
considérable des sulfates et l’absence de la magnésie, établissent qu’elles 
ne sont pas celles de la mer étendues d’une plus ou moins grande quan- 
tité d’eau pluviale, suivant les saisons. La salure de ces sources me 
paraît évidemment due à des masses de sel gemme situées dans le sol, 
sur le trajet des courants souterrains dont elles sont les Kephalovrysis ; 
la présence des sulfates de chaux et de soude dans les mêmes rapports que 
dans la glaubérite, qui se trouve toujours dans les gîtes salifères , vient 
confirmer cette opinion, et appuyer celle qu’il ne serait pas impossible 


que l’on pût exploiter quelque jour du sel gemme dans les montagnes 
de la Crète (1). 


Cours d'eau. — La Crète est une région très-sèche dans laquelle, 
comme dit Olivier, « les rivières ne sont pour ainsi dire que des torrents 


(1) L'eau de Rhethymnon a été recueillie le 4 juin , à la fin de la saison pluvieuse , 
alors que théoriquement elle devait renfermer le moins de matières salines ; celle de 
Megalo-Kastron l’a été le 3 octobre dans les conditions opposées. 

La densité a été déterminée à l’aide d’un flacon à densité qui a été successivement 
rempli d’eau distillée et de chacune des eaux à 160 5; les poids et les densités déduits 
ont été les suivants : 


Hauidist{iée sb IAE LOMME M en nee . . 24,9765 — 1,00000 
Eau de l’Almyros de Rhethymnon (4juin). . . . . . 25,0182 — 1,00167 
Eau de l’Almyros de Megalo-Kastron (3 octobre). . 25,1463 — 1,00681 
L'eau de la Méditerranée à 21° (d’après M. Usiglio). — 1,02580 


Pour la teneur en matières salines, 50 grammes de chacune des deux eaux, évapo- 
rés à siccité dans des capsules de platine, ont donné les résultats suivants : 


Almyros de Rhethymnon. . . 08 085, soit pour 1008. . . 08 170 
Almyros de Megalo-Kastron. 0, 495, id, f4 0 CRD RO OU 
L'eau de la Médilerranée. . 1, 885, ide: CENT 0 


Quant à la proportion relative des divers sels, comparativement à la composition 
de l’eau de la Méditerranée au-devant de Cette , voici les résultats offerts par les 
réactifs sur ces eaux qui ont une saveur salée très-prononcée, surtout celle de 
Megalo-Kastron : 

Le papier de curcuma n’y décèle pas l’existence des carbonates alcalins. Par l’'éva- 
poration, on obtient une matière saline , légèrement grisâtre’, qui se redissout en 
grande partie dans l’eau distillée; le résidu , qui est insoluble dans l’eau et l'acide 
azolique, ne peut être que de Ja silice, malgré son infusibilité au chalumeau avec le 
carbonate de soude. 


(519 ) 


grossis en hiver par les pluies, et au printemps par la fonte des nei- 
ges : peu d’entr'elles conservent toute l’année une partie de leurs 
eaux. » En effet, le sol est formé par des calcaires en couches boule- 
versées remplies de fissures et de crevasses, et c’est seulement pendant 
quelques mois de l’année qu’il tombe de la pluie et aussi de la neige sur 
les montagnes. Il résulte de là que les cours d’eau sont presque toujours 
interrompus sur une très-grande partie de la longueur du thalweg ; ils 
n'existent à l’état de nappe continue superficielle, que dans les parties su- 
périeure et inférieure, le plus souvent au voisinage de la côte ; la partie 
moyenne n’est qu’un ruisseau de pierres roulées , présque toujours cal- 
caires, un Xeropotamos (rivière sèche), comme disent les habitants. 
Pendant la saison sèche et chaude qui dure environ sept mois, de mai à 
novembre , leur lit présente fréquemment des lauriers-roses et aussi de 
petits platanes qui, çà et là, grandissent et forment des bosquets; dans 
les parties basses littorales , il y a souvent des trous pleins d’eau au mi- 
lieu des Agnus-castus. 

La portion la plus occidentale de l’île fait exception, par suite de l’im- 
perméabilité de son sol; les ruisseaux et petites rivières y coulent à- 


‘Méditerranée. ALMYROS DE RHETHYMNON ET MÉGALO-KASTRON. 
Bromure de sodium. . « 0,0556 Chlore et amidon. — Absence de brome et d’iode. 
Chlorure de sodium... 2,9424 Azotate d'argent — Chlore en abondance. 
Chlorure de potassium.. 0,0505 Chbl. de plat. et ac. perchlor.— Absence de potasse. 
Chlorure de magnésium. 0,3219 Phosph. de soude et amm.— Absence de magnésie. 
Sulfate de magnésie. . . 0,2477 Azotate de baryte. — Acide sulfurique, pet. quant. 
Sulfate de chaux. . . . . 0,1557 Oxalate d’ammoniaque. — Chaux, en pet. quant. 
Carbonate de chaux. . . 0,0114 Pendant l’évaporation. — Absence de trouble. 
Sesquioxyde de fer . . . 0,0003 Traces pendant diverses réactions. 


D’après le résidu insoluble obtenu de l’évaporation de 50 gr. et les précipités, à l’aide 
de l’azotate de baryte et de l’oxalate d’ammoniaque dans 20 gr., tous chauffés au 
rouge et pesés , l’eau de l’Almyros de Megalo-Kastron paraît ainsi composée (la seconde 
colonne donne les quantités relatives à 1,000 gr. de matières salines ) : 


Sierre paies te OO2AD SN Sn NO DE 
Sulfate de chaux anhydre.  0,0625. . . . . . . . .. 63,13 
Sulfate de soude anhydre. . 0,0650, . . . . . . . .. 65,65 
Chlorure de sodium. . . .  0,8385. .. ... . . . .. 846,98 
ANR ES Mo tr ahe oo is 99,0100 

FORAL ANUS 160,0000. TOTAL. . . 1000,00 


L'eau de l’Almyros de Rhethymnon paraît contenir un peu plus de chaux. 


( 580 ) 


peu-près constamment depuis les sources jusqu’à l'embouchure, au mi- 
lieu des lauriers-roses et des myrtes. En effet, en Selino, formé par les 
talschistes , il n’y a guère que le ruisseau d’Haghia-[rini qui cesse de 
couler, et c’est lorsqu'il arrive sur les roches calcaires dans lesquelles 
est ouverte la grande crevasse qu’il suit dans la partie moyenne de son 
cours. Dans le pays de Kisamos, formé par un terrain marneux tertiaire, 
le fond des vallons n’est souvent qu’un étroit ravin, recouvert de vigne 
sauvage et de ronces formant un fourré impénétrable, où coule un petit 
ruisseau pendant toute l’année. — Les mêmes caractères se reproduisent 
à l'extrémité orientale de la Crète : cependant, le Sklavotia s’interrompt 
et ne reprend guère qu’à Piskokephalo. 

Dans la saison pluvieuse , au contraire, de décembre à avril , presque 
chaque grand vallon renferme un torrent, en général rapide, souvent 
furieux, par suite de la grande inclinaison du fond et du volume de la 
masse d’eau; il ravage alors les parties basses, et emporte les ponts 
ei leurs arches ne sont suffisamment hautes et ouvertes. Âssez souvent 
même , il suffit d’une grande averse pour qu’il se forme de suite dans le 
fond des vallons des torrents d’abord fort troubles et même boueux, qui 
ne s’éclaircissent qu’au bout d’un à deux jours, si la pluie continue. 
Ainsi, le 29 septembre, il tomba une pluie torrentielle, de six à huit 
heures du matin, à Kastel-Pedhiadha, et lorsque je traversai le vallon 
de l’Aposelemi près de la côte, à midi, depuis quelque temps déjà la 
mer recevait un torrent jaune qui avait eu à parcourir environ 45 kilom. 

J’ai raconté, p. 363, la rencontre que je fis d’un torrent boueux au 
sortir du pharanghi d’Haghia-Roumeli, le 24 octobre, après deux jours 
de pluie; lorsque j'arrivai, le 27, à Skenès, sur le versant opposé des 
montagnes, la pluie ne tombait que depuis cinq jours , et d’une manière 
très-discontinue ; la plaine, qui était déjà à sec avant le mois de juin, 
était alors parcourue par un torrent rapide et jaune, de 6 à 7" de lar- 
geur et de 30 à 40° de profondeur, qui formait de grandes îles dans la 
plaine, avant d'aller troubler la limpidité habituelle de la petite rivière 
de Platania. | 

Presque toujours les thalwegs des principaux cours d’eau de la Crète 
présentent, dans les parties supérieures, des pentes rapides qui s’adou- 
cissent et finissent par devenir faibles dans les parties inférieures. Pour 
quelques-uns , il en est autrement; après avoir suivi des plaines peu 
accidentées , assez élevées, ils n’atteignent la mer qu’en traversant des 
chaînons montagneux dans des crevasses où leur cours devient torren- 


(581) 


tiel; c’est ce qui arrive pour un certain nombre de ceux qui aboutissent 
à la côte méridionale, surtout le Mega-Potamos et l’Anapodhari. Sur le 
versant opposé, le Mylopotamos présente aussi quelque chose d’analogue. 

Il est inutile de donner ici l’'énumération des cours d’eau, qui serait la 
même que celle des vallons précédemment indiqués pour chacun des 
sept massifs. Il n’y a guère dans toute la Crète, en fait de petites rivières, 
méritant véritablement ce nom, comme ne tarissant jamais en été dans 
la partie inférieure de leur cours, que les Platania, Kladiso, Mylopo- 
tamos, Gheophiro et Sklavotia sur la côte septentrionalé, et les Mega- 
Potamos (le plus considérable) et Hiero-Potamos sur la côte méridionale. 

Lits des cours d’eau. — Tous les cours d’eau sont assez généralement 
encaissés , tant dans les petits et grands vallons que dans les plaines. Il 
en est peu dont le lit soit large et de niveau avec le sol avoisinant. 
Les ruisseaux qui traversent la plaine de Skenès, d’Alykianou et de Kha- 
nia sont assez souvent, cependant, dans ce cas, ainsi que celui de la 
plaine intérieure de Lassiti. Il en est de même, à-peu-près aussi, dans 
les plaines littorales. 

Ainsi que j'ai eu occasion de le dire, il y a de nombreuses pertes d’eau 
dans les lits des cours d’eau ; mais elles ne présentent rien de particu- 
lier, les eaux ne faisant le plus souvent que s’infiltrer au milieu des 
cailloux qui forment le fond. 

En raison de la nature calcaire de la plus grande partie de l’île, et de 
l’absence presque complète de pluie pendant plus de la moitié de l’an- 
née, il n’y a guère de cascades permanentes. Jai indiqué, page 172, 
celles que M. Pashley vit à la fin d'avril en Selino, et page 346 celle 
devant laquelle, au commencement de juin, passa M. Fabreguettes, 
près de Hierapetra. On en cite aussi de remarquables sur la côte méri- 
dionale entre les caps Martello et Alitkhevra. Plusieurs cours d’eau, 
comme l’Anapodhari, le Platy, etc., forment des rapides ou des cata- 
ractes en atteignent la côte méridionale , au dire des anciens voyageurs. 
M. Pashley a représenté celle que forme le ruisseau de Kephalovrysis en 
arrivant dans la petite plaine littorale d’Arvi. 

En hiver, dans les montagnes, il y en a de temporaires ; à Samaria en 
Sphakia, du 23 au 27 octobre, à la chute des premières neiges et après 
des averses torrentielles qui s'étaient succédé pendant deux à trois 
jours, je vis sur plusieurs points des filets d’eau, quelquefois même 
considérables, qui du haut des escarpements des montagnes , se préci- 
pitaient dans les vallons, formant ainsi de véritables cascades qui avaient 


(58) 


quelquefois plus de 100" de hauteur, et qui donnaient au paysage une 
physionomie toute particulière. 

Un mode de terminaison très-remarquable de quelques cours d’eau, 
est le Khonos ou gouffre, en tout identique au Katavothron du Pélopon- 
nêse, par lequel les eaux des plaines fermées s’engouffrent dans le sol, 
pour aller ressortir à des distances plus ou moins considérables , sous 
forme de Kephalovrysis, après avoir parcouru des fentes et des crevasses ; 
on ne peut toutefois préciser d’une manière certaine si tel Kephalovrysis 
est le point de sortie du cours d’eau qui s’est perdu dans tel Khonos. Les 
principaux sont ceux de Lassiti, d’'Omalos et de Thiro, situés sur les 
bords de ces bassins, au pied des pentes rapides qui les limitent; ceux 
d'Askypho et d’Aradhena , peu prononcés, sont dans les parties centrales. 

Eaux stagnantes. — Il y a assez souvent des endroits marécageux 
dans les parties inférieures des grands vallons, près de l'embouchure des 
cours d’eau ; les principaux sont ceux du Tavroniti, de la partie orien- 
tale de la plaine de Khania, de Stylo, de l’Almyros de Rhethymnon, de la 
partie occidentale de la plaine de Messara, et du Sklavotia au-dessous 
de Piskokephalo. En été, et surtout en automne, par les grandes cha- 
leurs , il s’y développe des miasmes fiévreux qui agissent pendant les 
nuits particulièrement sur les étrangers. Les mêmes effets sont produits 
par les salines de Soudha et de Spina-Longa. En Selino , le défaut d’é- 
coulement des eaux des nombreuses sources, occasionne de petits ma- 
récages ; mais ils sont pour la plupart entièrement desséchés à la fin de 
l'été. R 

La Crète ne possède que de très-petits lacs. Le principal, dont j'ai 
déjà parlé, page 188, est situé à trois kilomètres environ du fond du 
golfe de l’Almyros de Rhethymnon; c’est un entonnoir vaste et profond, 
sans issue, dans lequel les eaux atteignent 23" d'altitude; l'ayant visité 
le 28 juillet, par une température de 30° à l’ombre, j'ai négligé de pren- 
dre celle de l’eau du bord qui m'était seule accessible. Je n’ai rien à 
ajouter sur les cinq mares de l’Omalos de Sphakia, à 1,050 et 1,060m, 
qui s’assèchent en été, à l'exception d’une seule, non plus que sur celle 
de l’Omalos de Lassiti. Je ne fais aussi que rappeler le profond bassin de 
J’Almyros de Megalo-Kastron. Du temps des Vénitiens, il y avait au 
pied du rocher qui portait le Castel-Mirabello, un petit lac presque au 
niveau de la mer, qui existe encore; son eau , salée, était supposée par 
quelques-uns venir de la mer peu éloignée, ainsi que, dit Boschini, 
cela à lieu pour l’'Almyros. Le port de l'antique Hierapytna, aujourd’hui 


(583) 


séparé de la mer par des accumulations de sable, ne forme plus qu’une 
dépression saline blanche, que j'avais aperçue de l’Aphendi-Khristo, de 
vingt-cinq kilomètres de distance. Je termine par la mention du petit 
étang occasionné par un éboulement, entre Roumata et Voukoniès, dont 
j'ai dit quelques mots page 167. 


4° HYDROGRAPHIE CÔTIÈRE. 


Littoral — La Crète peut être considérée comme circonscrite par 
quatre grandes lignes distinctes et deux petites. Deux grandes sur la côte 
septentrionale font suite l’une à l’autre ; deux grandes sur la côte méri- 
dionale ne sont pas dans le même cas, celle de l'O. étant rejetée au S. 
La petite de l’O. est droite, tandis que celle de l'E. forme un arc de 
cercle, passant par les caps Plako et Avlaki, et dont la direction indiquée 
est la corde. Les directions de ces six lignes sont les suivantes : 


Côre Cap Spadha. — Cap Stavro. . . . O. 140 55 N. — E. 440 55 S. 
septentrionale. | Cap Stavro. — Cap Sidhero. . .. O. 3° 40° N. — E. 30 40° S. 
Côre Cap Krio. — Cap du Vouvala.. O0. 8050 N. —E. 80 505. 
méridionale. | Cap Matala. — Cap Kakialitkhi. . O. 5o..S. —E#E. 5o..N. 


| Cap Grabousa. — Elaphonisi. . . N. 110 35 E. — S. 110 35 O. 


Côre 
occidentale. 
Côre 

orientale. 


| Cap Sidhero. — Cap Kakialitkhi. N. 260 . . E. — S. 26. . O. 


La côte septentrionale présente de grandes sinuosités , formant des 
caps avancés et des golfes ou baies. Lorsque les premiers sont allongés 
et étroits , ils forment de véritables petites presqu’iles désignées sous le 
nom d’Akroteri. Trois se trouvent dans la partie occidentale ; ceux de 
Grabousa, de Spadha, dirigés au N., et de Meleka, allongé au N.-E.; 
ils séparent la baie de Kisamos, le golfe de Khania et la baie de Soudha. 
Celui du cap Sidhero , qui prolonge au N.-N.-E. la presqu’ile orientale 
de la Crète, sépare les baies de Sitia et de Palæokastron. — Les golfes et 
baies, à l’exception de celle de Kisamos, la plus occidentale, possèdent 
ce caractère commun d’avoir un côté occidental court dirigé au N., et 
un côté long méridional dirigé à l'E. ou à l’'E.-N.-E. Il y a ainsi, à 
VE. de la baie de Kisamos , une suite remarquable de golfes et de baies 
présentant la même forme générale : le golfe de Khania ; celui de VAI- 
myros, précédé par son annexe, la baie de Soudha ; le golfe de Megalo- 
Kastron, avec la rade de Khersonesos; le golfe de Mirabello, avec la 
baie de Sitia. 


(584) 


La côte méridionale n’offre qu’un seul golfe vers son milieu, au point 
de jonction des deux lignes, celui de Messara dont la côte orientale, de 
l'embouchure du Hiero-Potamos au cap Matala, est dirigée au $S. 10o 0. 

Lorsque j'arrivai en Crète, au mois de mai, Moustapha-Pacha atten- 
dait d'Angleterre le petit bateau à vapeur Kirit, qu’une petite associa- 
tion d’aghas, dirigée par lui, avait fait construire pour un service régu- 
lier sur Syra et Smyrne. La première sortie devait être une excursion au- 
tour de l’île avec les consuls ; mais elle manqua par suite d’une maladie 
du Pacha et de l’arrivée tardive du navire qui n’eut lieu qu’à la fin de 
l’automne. Je perdis ainsi une occasion unique de faire, en quelques 
jours, une étude extérieure de toutes les côtes de la Crète. Je n’y ai sup- 
pléé que bien imparfaitement par les observations que j’ai pu faire des 
points élevés voisins des côtes, et aussi des petites îles Dhia et Gaudhos, 
où je suis allé. De la première, on peut prendre une bonne idée de la 
structure du golfe de Megalo-Kastron. Gaudhos, qui atteint 385" d’alti- 
tude, est un véritable observatoire, duquel on aperçoit toute la moitié 
occidentale de la côte méridionale, du cap Krio au cap Matala ; mais la 
distance de 35 kilomètres du point le plus rapproché de la côte, ne permet 
pas de saisir les détails de celle-ci. Les Ghaïdhouronisi sont également 
bien placées au-devant de Hierapetra; mais je ne les ai point visitées. 

Vue à distance, la Crète, qui s’élève d’une mer profonde, se présente 
comme une arête de montagnes à pic, tant sur la plus grande partie de 
la côte septentrionale que sur toute la côte méridionale. Aussi, en pas- 
sant par l’Archipel pour aller en Syrie, ou en revenant par la mer d’A- 
frique, peut-on dire avec M. De Lamartine (1) : « Voici les sommets 
lointains de l’île de Crète qui s’élèvent à notre droite, voici l’Ida cou- 
vert de neiges qui paraît d’ici comme les hautes voiles d’un vaisseau sur 
la mer. » 


(1) Voyage en Orient, t. 1, p. 124, 


(La suile au prochain volume.) 


TABLEAU 


DES 


MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE DE BORDEAUX, 


AU 4° AvRIL 1860. 


NÉCROLOGE 


Depuis l'impression de la liste qui termine le Tome XIX,. 


J.-F. LATERRADE, directeur de la Société depuis 1818, mort le 30 octobre 
1858. — La Société a décidé qu’elle laisserait s’écouler une année 
entière avant d'aborder la question du remplacement de son vénérable 
Fondateur. 


VIRAMOND père, médecin-vétérinaire à Sallelles (Aude), mort en 1853. 
F.-G. HOENINGHAUS, paléontologiste, à Crefeld (Prusse Rhénane), mort le 
13 juillet 1854. 

Le Baron D’HAUSSEZ, ancien ministre, ancien préfet de la Gironde, au chà- 
teau de Saint-Saens (Seine-Inférieure), mort le 10 novembre 1854. 

Le Baron DE VALLIER, ancien lieutenant de Roi, à Cosledaà (Basses-Pyré- 
nées), mort le 45 juin 4855. 

CLAVÉ, ancien vice-président de la Société, à Hydra (Algérie), m. le... 
1855. 

Juces THURMANN, ancien directeur de l’École normale du Jura Bernois, à 
Porrentruy (Suisse), mort le 25 juillet 1855. 

JEAN DUMOULIN, archiviste de la Société, à Bordeaux, mort le 10 septembre 
1855. 

COLLARD DES CHERRES, chef de bataillon en retraite, à Brest, mort le 
16 décembre 1855. 

MACQUART, entomologiste, à Lille, mort le ...…...… 1858. 

A.-E. CHANTELAT, pharmacien à Gujan (Gironde), mort le 22 octobre 1856. 


(586 ) 


CONILH, D.-M., membre honoraire de la Société, à Bordeaux, mort le 44 jan- 
vier 1857. 

Le Baron Louis-AuGusriN D'HOMBRES-FIRMAS, correspondant de lInstitut, 
à Alais (Gard), mort le 5 mars 1857. 

GRAVES, directeur général des forêts, à Paris, mort le 5 juin 1857. 

Le Docteur BArroLomEo BIASOLETTO, directeur du Jardin botanique de 
Trieste (Empire d'Autriche), mort le 43 janvier 1858. 

L'abbé CARROS, chanoine-honoraire, ancien curé-doyen de Langon, mort 
le der août 4858. 

BLUTEL, président de l'Académie de La Rochelle, mort le … septembre 4858. 

L'abbé MITRAUD, ancien archiprètre de Rochechouart, curé du Tourne (Gi- 
ronde), mort le … novembre 1858. 


DUNAL, doyen de la Faculté des sciences de Montpellier, mort le... 

LABARRÈRE (J.), à Pau (Basses-Pyrénées), mort le …. 

MERCIER DE BOISSY, paléontologiste, à Paris, mort le ...…. 

Le Docteur BERGERET, auteur de la Flore des Basses-Pyrénées, à Morlaas, 
mort le ..……. 

Le Docteur LOREY, auteur de la Flore de la Côte-d'Or, à Dijon, mort le... 


L. DE BRONDEAU, à Moirax près Agen, mort en janvier 4860. 
DUFFOUR - DUBERGIER, membre du Conseil général, ancien Maire de 
Bordeaux, mort le 7 avril 1860. 


MEMBRES ACTUELS. 


HONORAIRES, 


Son Éminence le Cardinal DONNET, Archevêque de Bordeaux. 

MM. pe MENTQUE, Préfet de la Gironde. 
CASTÉJA, Maire de Bordeaux. 
GAUTIER aîné, ancien Maire de Bordeaux. 
GusrAvE CURÉ, membre du Conseil général, ancien Maire de Bordeaux 
E. GINTRAC père, directeur de l'École préparatoire de Médecine. 
DE GRATELOUP, D.-M., ancien Président de la Société. 
R. PÉRY père. 
L’abbé BLATAIROU, Chanoine honoraire, 
HALLIÉ, fabricant de machines agricoles, 
MONTEAUD, ancien Pharmacien-Major, 
J.-L. LAPORTE ainé, fondateur de l’École 

des Mousses, 


anciens Officiers de la Socicté. 


W. MANES, ancien Ingénieur en chef des minc®. 
S. G. Msr. DE LANGALERIE, Évêque de Belley, ancien membre résidant. 
MAYRAND, Capitaine d'infanterie , à lParmée d'Afrique. 


( 581 ) 
MEMBRES RÉSIDANTS, 


J.-F. LATERRADE, fondateur de la Société, son Directeur pendant quarante 
ans et cinq mois, #ort le 30 octobre 1858, sera maintenu à perpé- 
tuilé en tête de la liste des membres résidants. (Décision de la Société, 
en date du 30 novembre 1859 ). 


BUREAU. 


MM. CHaRLes DEs MOULINS, Président, rue et hôtel de Gourgues. 

Vicror RAULIN, Professeur à la Faculté des Sciences, Vice-Président, 
rue Croix-de-Seguey, 87. 

EUGÈNE LAFARGUE, D.-M., Secrelaire-Général, rue des Ayres, 83. 

HENRI TRIMOULET, négociant, Secrétaire du Conseil, rue du Pas-Saint- 
Georges, 27. 

BERNARD CAZENAVETTE, Directeur de l’École communale supérieure, 
Archivisle, rue Pélegrin. 

J.-B. GASSIES, Trésorier, chaussée de Tourny, 24. 


CONSEIL D'ADMINISTRATION. 


MM. Le Comte De KERCADO, % % ancien Vice-Président de la Société, 
place Dauphine, 30. 
TH, CUIGNEAU, D.-M., ancien Secrétaire-Général de la Société, allées 
Damour, 46. 
GusTAvE MÉRAN, D.-M., rue Saint-Dominique, 44. 


MEMBRES TITULAIRES. 


MM. A. BAZIN, D.-M., Président honoraire, cours Saint-Jean, 445. 

CHARLES LATERRADE, Professeur, allées Damour, 27. 

GusTAVE LESPINASSE , rue du Wauxhall, 1. 

Du RIEU pE MAISONNEUVE %, Directeur du Jardin des Plantes, place 
Bardineau. 

SOUVERBIE , D.-M., Conservateur du Cabinet d'Histoire naturelle de la 
Ville, rue du Champ-de-Mars, 17. 

J. COMME fils, attaché au Jardin des Plantes, chemin d’Arès, 4. 

HippoLyTE COUDERT, rue Porte-Dijeaux, 43. 

Ep. LEGRAND %, ancien Commissaire de la Marine, rue des Faussets, 42. 

ArM. BORCHARD fils, rue du Temple, 43. 

ERNEST BARBET fils, cours de Tourny, 23. 

E. JACQUOT %, Ingénieur en chef des Mines, cours du XXX Juillet, 44. 


Tome XXII. 99 


( 588 ) 


MEMBRES AUDITEURS. 


MEMBRES CORRESPONDANTS. 


MM. AMI BOUÉ, géologue, à Vienne (Autriche). 

ARDUSSET, D.-M., à Bazas (Gironde). 

ARNAUT (Marc), avocat et banquier, à Saintes (Charente-Inférieure). 

ARRONDEAU, inspecteur de l’Académie d’Ille-et-Vilaine, à Rennes. 

ASTIER (Jos.-EMMAN.), professeur d’histoire au collége de Grasse (Var). 

AUCAPITAINE (Le Baron HENRI), naturaliste, à Paris. 

AYMARD (AuGusre), bibliothécaire au Puy (Haute-Loire). 

AYMEN, D.-M., à Castillon-sur-Dordogne (Gironde). 

BACCA-NÉRAC (L’abbé), aumônier des Dames Ursulines de Bordeaux. 

BAUDON, D.-M., à Mouy-de-l’Oise (Oise). 

BEAUDOUIN (Juzes), suppléant du juge de paix à Châtillon-sur-Seine 
(Côte-d’Or). 

BÉLANGÉ, D.-M., directeur du Jardin des Plantes, à la Martinique. 

BELLARDI (Louis), membre de l’Académie Royale des Sciences de Turin 
(Piémont). 

BERNARDI (le Cher), l’un des directeurs du Journal de Conchyliologie, à 
Paris. 

BERTOLA, D.-M., membre de l’Académie Royale des Sciences de Turin | 
(Piémont). 

BERTRAND-GESLIN (le baron), géologue, à Nantes (Loire-Inférieure). | 

BOREAU, directeur du Jardin des Plantes d’Angers (Maine-et-Loire). 

BOUCHARD-CHANTEREAUX, pharmacien, à Boulogne-sur-Mer (Pas-de- 
Calais). 

BOUCHEREAU, ancien conseiller de préfecture de la Gironde, au château 
de Carbonnieux (Gironde). 

BOUTIN , pharmacien, à Libourne (Gironde). 

CAILLIAUD (FRÉDÉRIC), conservateur du Musée à Nantes ( Loire-Inf.). 

CAPGRAND, pharmacien, à Sos (Lot-et-Garonne). | 

CASTELBAJAC (le général Marquis de), ancien ambassadeur de France 
en Russie. 

CAUDERAN (l’abbé HippoLyre), professeur au collége catholique de 
Sainte-Foy-la-Grande (Gironde). ; 

CAUMONT (le Vte A. de), correspondant de l’Institut de France, à Caen 

(Calvados). | 


Le PE ET 


(589) 


MM. CAZALIS-ALLUT, à Montpellier (Hérault). 

CAZALIS (Frépéric), D.-M., à Montpellier (Hérault). 

CESSAC (le Comte PreRRE de), au château du Mouchetard, près Guéret 
(Creuse). 

CLOS (Dominique), directeur du Jardin des Plantes de Toulouse ( Haute- 

Garonne ). 

COSSON (ErNesr), D.-M., l’un des auteurs de la Flore de l’Algérie, à Paris. 

COTTEAU (GUSsTAVE), juge au tribunal civil de Coulommiers (Seine-et- 
Marne). 

DALMAS, à Nice (États Sardes ). 

DARRACQ, pharmacien à Bayonne (Basses-Pyrénées ). 

DEBEAUX père, conservateur du Cabinet d’histoire naturelle d’Agen (Lot- 
et-Garonne ). 

DEBEAUX fils (OpoN), pharmacien, aide-major à l’armée d’Afrique. 

DELBOS (Josepx), professeur à l’École supérieure des sciences appiiquées, 
à Mulhouse (Haut-Rhin ). 

DÉSÉGLISE (Arrrep), botaniste, à Graire, par Mehun-sur- Yèvre (Cher). 

DIVES (A. pe GUEYDON pe), à Manzac près Saint-Astier (Dordogne). 

DOUHET, propriétaire à Saint-Émilion ( Gironde). 

DROUET (Henri), naturaliste à Troyes ( Aube ). 

DUBY (le pasteur), à Genève. 

DUFOUR (Léon), D.-M., correspondant de l’Institut de France, à Saint- 
Sever (Landes). 

DUMAS, professeur à la Faculté de médecine à Montpellier (Hérault ). 

DU MOLIN (J.-B.), botaniste, à Saint-Maurin, par Puymirol ( Lot-et-Ga- 
ronne). 

DUPUY (ABBÉ), professeur au Petit- Séminaire d’Auch (Gers). 

ESCHRICHT, Professeur de zoologie à l’Université royale de Copenhague 
{Danemarck). 

FÉE (A.-L.—A.), membre de l’Académie Impériale de Médecine, Professeur 
à la Faculté de Médecine à Strasbourg (Bas-Rhin ). 

FISCHER (Paul), l’un des directeurs du Journal de Conchyliologie, à Paris. 

GAY (Jacques), Botaniste, à Paris. 

GAY (L.), Avocat, à Toulon (Var). 

GRAELLS, Professeur d’histoire naturelle, à Madrid. 

GRENIER (CHARLES), Professeur à la Faculté des Sciences de Besancon 
( Doubs ). 

GUILLORY aïné, Président de la Société Industrielle d’Angers (Maine-et- 
Loire ). 

HENRY (Jos.), Secrétaire général de l’Institut Smithsonien, à Washington 
(États-Unis). 

HOMBRES (le baron CHARLES D’), à Alais (Gard). 


( 590 ) 


MM. HUGUES (le Pasteur ), Président du Consistoire, à Bergerac (Dordogne ). 


IRAT (ALBERT), Procureur Impérial à Figeac (Lot). 
IVOY père, Président honoraire de la Société d'Agriculture de la Gironde, 
au Pian, canton de Blanquefort (Gironde ). 
JOUVIN, D. M., Directeur du Jardin des Plantes de la Marine, à Rochefort- 
sur-Mer (Charente-Inférieure ). 
JULLIEN-CROSNIER (Alexandre), Vice-Président de la Société d’Horti- 
culture d'Orléans (Loiret). 
LAGANE (l’abbé), Curé de Saint-Savin (Gironde). 
LAGARDE, Instituteur à Martignas (Gironde). 
LAGRÈZE-FOSSAT, Avocat, à Moissac (Tarn-et-Garonne ). 
LALANNE (l’abbé), chef d'institution, à Paris. 
LAMBERT (l’abbé Épouanp), Professeur d'Histoire naturelle à Pinstitution 
Saint-Charles, à Chauny ( Aisne ). 
LAPORTE fils (Ernest), Officier d’administration de la Marine Impériale. 
LARRIEU (labbé), l’un des Directeurs du Grand-Séminaire de Bor- 
deaux. 
LATERRADE ( Ta£opiLe), ancien Officier de marine, à Cuba. 
LEA (Isaac), Conchyliologiste, à Philadelphie ( États-Unis ). 
LEA (L.), Commissaire des affaires de l’Inde aux États-Unis (Philadelphie). 
LEBEL (E), D.-M. à Valognes (Manche ). 
LE GALL, Conseilier honoraire à la Cour Impériale de Rennes (Ile-et- 
Vilaine). 
LE JOLIS (AuGusre), membre de plusieurs Sociétés savantes, à Cher- 
bourg (Manche). L 
LESPIAULT , Dessinateur, à Nérac (Lot-et-Garonne). 
LEYMERIE, Professeur à la Faculté des Sciences, à Toulouse (H.-Garonne). 
LOCHE, Chef de bataillon, Directeur de l’exposition permanente et du 
Musée d'Histoire naturelle d’Alger. 
MAIRAND, membre de l’Académie de La Rochelle. 
MALHERBE / Arreb), Président de l’Académie de Metz (Moselle ). 
MARCEL DE SERRES, Professeur à la Faculté de Médecine de Montpellier 
(Hérault). 
MARCHAND (E.), D.-M. à Sainte-Foy-la-Grande ( Gironde). 
MARISSAL, Administrateur du Jardin des Plantes de Tournay (Belgique). 
MAUDUYT, Conservateur du Cabinet d’'Hist. naturelle à Poitiers (Vienne). 
MEISNER, Directeur du Jardin des Plantes de Bâle (Suisse). 
MICHAUD, Capitaine d'infanterie en retraite, à Lyon (Rhône). 
MICHÉLOTTI (L.) membre de l’Académie Royale des Sciences de Turin 
(Piémont), 
MILLET pe LA TURTEAUDIÈRE , naturaliste à Angers ( Maine-et-Loire ). 
MONTAGNE (CamiLce), D.-M., membre de l’Institut de France, à Paris. 


(59) ) 


MM. MONTROUZIER ({ le Rév. Père), Missionnaire Apostolique à la Nouvelle- 


Calédonie. 

MOQUIN-TANDON (A. ), membre de l’Institut de France, à Paris. 

NARCILLAC (le vicomte pe), Sous-Préfet à Marvéjols ( Lozère }. 

NOGUËS, Professeur à l’École de Sorrèze (Aude). 

NORDLINGER, Professeur en Wurtemberg. 

NORMAND (N. A. J. ), Directeur de l'École communale mutuelle à Valen- 
ciennes (Nord). 

NYLANDER ( W.), D.-M , Lichénographe, attaché à l’Université d’Helsing- 
fors (Finlande russe ). 

ODART (le comte), au château de la Dorée , près Tours (Indre-et-Loire). 

PAPETAUD (l’abbé), Curé de Beychac ( Gironde). 

PAQUERÉE (A.), Géologue, à Castillon-sur-Dordogne (Gironde). 

PERRIS, ancien Secrétaire-général de la Préfecture, à Mont-de-Marsan 
(Landes ). 

PHILIPPE, Conservateur du Musée, à Bagnères-de-Bigorre (H.-Pyrénées). 

PIÉTRY, Pharmacien, à Paris. 

PLÉE (François), Naturaliste, à Paris. 

POMMARET {ÉpouaAnD DE), au château de Pommaret, près Agen (Lot- 
et-Garonne ). 

PONZI, Professeur à la Sapience, à Rome. 

PUEL (Timornée), D. M., à Paris. 

RÉCLUZ, pharmacien à Vaugirard, près Paris. 

REVEL (LABBÉ Josern), chanoine honoraire, curé de Mondalazac près 
Rodez (Aveyron ). 

ROLLAND DU ROQUAN (0.), paléontologiste, à Carcassonne (Aude). 

ROUX , D.-M., à Marseille (Bouches-du-Rhône). 

ROZAN, D.-M., archiviste de la ville de Tonneins (Lot-et-Garonne). 

SACAZE (P. GASTON, dit le Berger des Eaux-Bonnes), à Bagès-Béost, 
par Laruns (Basses-Pyrénées). 

SAGRA (Don RAMON DE LA), auteur de l’hist. nat., pol., etc., de l’île de 
Cuba, à Paris. 

SAUVÉ, D.-M., secrétaire de la Société des sciences naturelles, à La 
Rochelle (Charente-Inférieure ). 

SCHULTZ (F.), docteur en philosophie, botaniste, à Wissembourg (Bas- 
Rhin). 

SISMONDA (EuGÈène), membre de l’Académie royale des sciences de Turin 
(Piémont). 

SOYER-WILLEMET, bibliothécaire à Nancy (Meurthe ). 

SPADA-MEDICI (S. E. LE CARDINAL), à Rome. 

TIMBAL-LAGRAVE, membre de l’Académie des sciences de Toulouse 
(Haute-Garonne). 


j | 
ne... 


( 592 ) 


MM. TREMEAU DE ROCHEBRUNE, conservateur du Musée, à 'Angoulème 

(Charente). 

TREMEAU DE ROCHEBRUNE fils (ALPHONSE), D.-M., à Angoulême 
(Charente ). 

TRENQUELLÉON (le Barou de), à Lavardac (Lot-et-Garonne ). 

TRISTAN (le Marquis de ), à Orléans (Loiret). 

VALLOT, D.-M., à Dijon (Côte-d’Or). 

WALLAYS, vétérinaire du gouvernement , à Courtrai (Belgique). 

WESTENDORP, professeur de botanique, à Courtrai (Belgique). 

ZANTEDESCHI (l’abbé), professeur de physique à l’Université de Padoue 
(Italie). 


135 Avril 1860. 


TABLE DES ARTICLES 


CONTENUS DANS CE VOLUME. 


HISTOIRE NATURELLE GÉNÉRALE. 


Description physique de l’île de Crète; par M. V. RAULIN. (Itinéraires, popu- 
lation, agricullure el géographie.) .. . . . . . . . . . .. .. 109, 307 et 


GÉOLOGIE. 


Mémoire sur les Dépôts littoraux observés de Nantes à Bordeaux; par 
MÉAMAIRAND ICOPéSDONGANEe 0e cecile ee Ne ee VO 
Excursion aux grottes d’Arcy-sur-Gure (Yonne); par M. A. PAQUERÉE, cor- 
RES UTC EN Soc oto GS de OPEN ONE ONCE ST Te 


PALÉONTOLOGIE. 


Note sur une Tortue fossile trouvée à Moissac, et sur la constitution et l’âge 
des Terrains tertiaires des environs de cette ville; par M. LAGRÈZE-FOSSAT, 
CHELESDONTANLE EE CR CU UC 


BOTANIQUE. 


Notes sur le Scirpus Duvalii, Hopp., à Vayres (Gironde); par M. Ch. DEs 
MOLTINS ARR Us er PME Ce 0 cie Oo a 

La Société Botanique de France en session extraordinaire à Bordeaux (août 1859); 
DALEMPAGUIGNEAUEA SSL RER PERS TEST EE PER Ere 

Une Excursion botanique dans la Haute-Kabylie; par M. O. DEBEAUX, 
correspondant. . , . . DIMDN Eve à TR TS ARTE LS. à VRTAR 


Page. 


491 


76 


470 


71 


(594 ) 


ZOOLOGIE. 


Note sur le genre Sphenia, Turton; par M. C. RECLUZ, correspondant. . . . . 


Note sur une jeune Notice; par le même. . .. .............. Où 
Catalogue raisonné des Molluques terrestres et d’eau douce de la Gironde; 
Pan MOMIE BAIGASSIES AR ELEC TEE PAUSE 

Description d’une Limace nouvelle; par M. J.-B. GASSIES. . . . . . . . : 


Note sur deux Hélices et deux Ancyles du Djurdjura; par M. J.-B. Glekiek. 
Catalogue des Lépidoptères du département de la Gironde; par M. H. TRIMOULET. 
Observations sur la Pisciculture et sur les Règlements qui régissent la pêche ; 


par M. A. BAZINS ose (arte 
Questionnaire relatif aux Cétacés du golfe de Gascogne; par M. ESCHRICHT, 
corréspondant et CU CLIC RU © © , 
Développement du même Questionnaire; par le même... .. . ... . . . .. 
Réponse aux diverses questions relatives à l’ancienne pêche de la Baleine dans 
le golfe de Gascogne , etc.; par M. Ul. DURRACQ, correspondant. . . . . . . 


SUJETS DIVERS. 


Programme des récompenses académiques proposées pour les années 1859 et 
suivantes. 

Séance publique du 11 novembre 1859. — Ouverture de la séance par M. Ch. DES 
Mouuins , président... 50, 2: 0. ee 2 ET 

Compte-Rendu des travaux de la Société pendant l’année académique 1858-59 ; 


par M. E. LAFARGUE, secrétaire-général,. . 2. 2 RC DE 
Éloge historique de J.-F. LATERRADE, fondateur et directeur de la Société ; 
par M. Ch. Des Mouuns , président. . . . . . . . . . . . . .. une des ; 
Liste générale. des Membres. . .". : CR MONO ER ET TRES 


FIN DE LA TABLE. 


Bordeaux. — Imprimerie de F, DEGRÉTEAU et Cie, 


432 


435 


458 


ACTES 


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LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE 


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Troisième Série : TOME II 


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MÊME MAISON (Maison LAFARGUE ), 
À LONDNES, MADRID ET NEW - YORK. Rne du Pas Saint-Georges , 2%. 
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