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PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DE.
M. J. COSTANTIN
TOME II. — N°1
MASSON ET € Cr, ÉDITEURS
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BRAIRES DE L° AGADÉMIE DE MÉDECINE
120, Boulevard Saint-Germain
pi. 1921
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: BOTANIQUE
Publiée sous la direction de M. J. CoSTANTIN.
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L’ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION
ET L’HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX
PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DE
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DIXIÈME SÉRIE
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PARIS
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LIBRAIRES DE L’ACADÉMIE DE MÉDECINE
120. Boulevard Saint-Germain
1924
y
f EAN
ot Tous droits de traduction et
Frs
Ar alu,
© RECHERCHES
DÉVELOPPEMENT DE LA FEUILLE
| DES MOUSSES
M. POTTIER
Recherches sur le développement
de la feuille des Mousses
Avant d'exposer mes recherches personnelles, il me semble
indispensable de faire un résumé complet des travaux déjà
parus sur le développement de la feuille des Mousses.
Le premier botaniste, à ma connaissance, qui s’occupa de
cette question fut le Belge Charles Morren en 1840 (1).
Il choisit pour objet l’Aypnum lucens L. plus connu aujour-
d’hui sous le nom de Pterygophyllum lucens (L.) Bridel.
Il se représentait le cloisonnement d’une feuille de cette
espèce comme celui d’un sac embryonnaire de Phanérogame
angiosperme, c’est-à-dire allant des bords vers le centre. Son
erreur provient de ce qu'il n’employait aucun réactif: ni colo-
rant, ni fixateur, ni même d’éclaircissants. Il prit pour une
simple cellule ce qui, en réalité, constituait déjà une feuille
très jeune. Les cloisons cellulaires n'étaient visibles pour lui
qu'au moment ou elles commencaient à changer de nature
chimique ; ce qui est le premier signe de leur différenciation.
Le plus ancien auteur qui ait étudié cette embryogénie a
donc fait des constations complètement en accord avec mes
conclusions : à savoir, que ce sont les bords de la feuille et la
pointe qui se différencient en premier lieu.
I] observa que, dans une feuille de 1 millimètre de longueur,
les cellules sont presque toutes carrées et plus petites au mi-
lieu que sur les bords ; et même que le contenu de ces cel-
lules marginales est moins dense que celui des cellules mé-
dianes. À un stade plus avancé ce serait l'inverse qui aurait
lieu. Ce dernier processus doit être du à ce que la forme défi-
nitive de la feuille de l’Æypnum lucens L. est très élargie. Nous
I
— 7 —
verrons en étudiant le Mnèum punctatum (L., Schreb.) Hedw.,
dont la feuille est également très arrondie, qu’à la fin du déve-
loppement la croissance est maxima à la périphérie. Cependant —
la marge elle-méme et la cellule initiale, qui n’est autre qu’une
cellule de marge située 4 la pointe, cessent leur développe-
ment de tres bonne heure. Ce dernier exemple a permis néan-
moins a Nageli de donner une apparence de vraisemblance a
ses vues erronées. |
Schleiden en 1845 avoue dans sa Morphologie que les cor
naissances de son temps sur cette question laissent beaucoup
a désirer.
C’est à cette époque que Carl Nägeli (2), dans une revue pu
bliée en collaboration avec M. J. Schleiden, attaque les théo
ries de ce dernier sur le développement de la feuille des
Mousses.
Schleiden prétendait que la pointe serait toujours la partie la
plus âgée d’une feuille et que cet organe serait poussé hors
de la tige.
Pour Nigeli la feuille serait formée à l’origine d’une seule
cellule placée sur le côté de la pointe de la tige. Il aurait
observé celle cellule chez Sphagnum (Dill.) Ehrh., Hypnum
lycopodioides Sanio, Phascum cuspidatum Schreb., Leskea com-
planata Hedw. Il décrit (/oc. cit, p. 178 à 181) et figure (Loc.
cit., pl. Il, fig. 15 à 20) le développement de la feuille chez
Phascum cuspidatum Schreb. et Leskea complanata Hedw. —
Les figures 15 a 20 de son travail représentent des jeunes
feuilles de Phascum cuspidatum Schreb. vues de face. Il ressort
de leur inspection que la cellule initiale a 2 pans de la feuille
émet 2 files de segments séparés par une ligne en zig-zag déli-
imitant la file de segments de droite de celle de gauche. En exa-
minant ces segments des plus jeunes aux plus agés on peut se
rendre compte de la manière dont se produit le développement
de chacun d’eux. La premiere cloison qui se forme dans un
segment est parallèle au bord libre de la feuille et divise done
le segment en deux cellules : l’une marginale et l’autre interne.
Dans un segment plus âgé on voit la cellule marginale divisée
par une cloison perpendiculaire au bord de la feuille, alors
que la cellule interne est restée indivise.
(4
abe 34s
Dans un segment encore plus agé la cellule interne est
toujours indivise, alors que les 2 cellules issues de la cellule
marginale se sont chacune divisées en 2 cellules par des cloi
sons parallèles au bord de la feuille. J’ai décrit ce développe-
ment d’après les figures 15, 16 et 17 de la planche II de ce
travail. Les figures 18, 19 et 20 représentent des pointes de
feuilles plus âgées montrant un deuxième type de développe-
ment. Il ressort de ces dessins que la première cloison qui
apparait dans la cellule appelée par moi interne est parallèle
au bord de la feuille et apparait d’une facon plus précoce que
dans le premier type. Je n’insisterai pas davantage sur ces
2 modes de développement que Nageli exprime par des for-
mules. On retrouverait toujours chez les Mousses soit l’un
soit l’autre et ils alterneraient entre eux suivant les parties
de la feuille, les individus, les especes et les genres. On ren-
contrerait surtout le premier type lorsque l’initiale de la feuille
est allongée dans le sens du plan de symétrie de celle-ci. J’ai
remarqué dans les dessins de Nägeli l’asymétrie des 2 côtés
de la feuille, mais il n’en parle pas.
Il fait plus loin une très juste critique du travail de Morren
et remarque que des feuilles de Mousses ayant 1/4 ou 1/3 d
millimètre sont déjà formées de nombreuses cellules et non
d’une seule comme le prétendait l’auteur belge. Nägeli a entre-
pris de vérifier ces résultats chez Hypnum lycopodioides Sanio Il
a constaté que des feuilles longues de 1/9 à 1/13 de millimètre
ont déjà formé toutes leurs cellules et possèdent l’aspect de
feuilles adultes. I] a vu au début la croissance progresser
suivant le mode centripète à partir de la pointe et des bords
de la feuille. Ceci expliquerait pourquoi les cellules internes
auraient déjà un contenu vert alors que les cellules externes
seraient encore remplies d’une substance mucoide incolore.
Mais à ce premier stade en succéderait un autre (décrit page
184 et 185 de son travail) pendant lequel les cellules devien-
draient plus grandes, les membranes plus épaisses ; de la
substance extracellulaire serait sécrétée et donnerait aux
parois leur double contour. Le contenu cellulaire deviendrait
nettement granuleux, les plastides chlorophylliens apparai-
traient et s’appliqueraient contre les parois cellulaires dont le
~
ge cel
contenu muqueux se transformerait en un liquide clair comme
de l’eau. Ce que je retiens surtout dans la description de
Nägeli c’est que ce seraient les cellules supérieures qui s’étire- _
raient et transformeraient leur contenu tout d’abord. Cette.
métamorphose progresserait de cellule en cellule vers la base
de la feuille. Les cellules inférieures seraient encore petites
et munies de membranes délicates avec un contenu muqueux
peu coloré alors que les cellules supérieures seraient beau-
coup plus grandes, contiendraient un liquide clair comme de
l’eau et des grains de chlorophylle contre les parois. Nägeli
conclut que la multiplication cellulaire progresse de la base
vers la pointe tandis que la croissance des cellules se produit
d’abord à la pointe et se transmet ensuite a la base. Il prétend
que Schleiden a tort de soutenir que les cellules inférieures de
la base d’une jeune feuille, qui sont encore petites et à plasma
homogène, soient susceptibles de se multiplier.
Dans la deuxième édition de ses Grundzüge (3) Schleiden
en 1846 n’avait pas encore composé sa réplique. Il dit simple-
ment (page 66 de la 2° partie) que ses recherches sur l’origine:
des feuilles sont encore très fragmentaires, mais montreraient,
tout au moins d’une facon certaine chez Sphagnum (Dill.) Ehrh.,
que la feuille des Mousses est poussée hors de l’axe, ce qui
serait aussi le cas chez les Phanérogames.
En 1849 (4) il écrivit une thèse en latin ou il décrivit le
développement de la feuille du Sphagnum squarrosum Pers. in
Schrad.. Il recommenca cette description en allemand dans la
troisième édition de ses Grundzuge (3) (pages 56 à 58) et en 1861
dans la quatrième édition (identique à la précédente).
Schleiden aurait choisi le Sphagnum (Dill.) Ehrh. comme
matériel d’études à cause de la disposition spéciale des cellu-
les de la feuille adulte. Cette particularité permettrait de faire:
des observations plus sûres que dans les feuilles à cellules à
peu près toutes semblables entre elles.
Il distingue trois stades dans le développement de la feuille :
le premier processus de multiplication cellulaire se produirait
à la pointe de la tige, d’ou les cellules nouvellement formées
seraient repoussées (hervorgeschoben). Puis vient un processus
de formation de cellules-filles de premier ordre, commençant
D PAR
par la cellule terminale et gagnant la base de la feuille. Enfin
il se produirait dans ces dernières cellules une nouvelle for
mation de cellules-filles de deuxième degré, qui se distingue-
raient facilement des premières par leur disposition particu-
lière. Cette deuxième multiplication n’affecterait aucune des
cellules du bord de la feuille (la cellule terminale de la feuille
étant comprise dans celles-ci), mais elle commencerait dans la
cellule située immédiatement sous la cellule terminale et se
propagerait de là peu à peu vers la base et en même temps du
bord vers le milieu; de telle sorte que le groupe de cellules
en état de multiplication formerait un triangle dont la base
coïnciderait avec la base de la feuille et qui irait toujours en
diminuant. Ayant ainsi tracé les grandes lignes il reprend
chaque phase en détail.
La feuille naitrait sous forme d’une seule cellule, à côté
de la cellule initiale de la tige. Bientôt apparaitraient deux
autres cellules, de chaque côté de cette initiale de la feuille.
Schleiden soutient l’idée quelque peu étrange que ces deux
cellules seraient expulsées hors de la tige. Il l’appuie sur le
fait qu'il n’a jamais pu observer un stade ou ces deux cellu-
les auraient été plus petites que l’initiale de la feuille et ou les
cloisons qui les séparent de celle-ci auraient été plus minces
que les autres. Nous verrons plus loin la réponse de Nägeli
à ces assertions.
Au deuxième stade les cellules se multiplieraient si rapide-
ment que Schleiden crut voir souvent des cellules se diviser
simultanément en quatre.
Aussitôt que ce deuxième processus de formation cellulaire
aurait cessé à la pointe de la feuille, et avant même qu'il n’ait
abandonné la base, commencerait le dernier stade de multipli-
cation. Il se distinguerait des précédents en ce qu’il n’affecte-
rait pour ainsi dire pas la cellule terminale et les cellules
marginales. Ces dernières ne feraient que s’allonger. Chaque
cellule subissant ce dernier mode de division donnerait trois
cellules-filles, placées de telle sorte que l’une d’elles confondrait
un de ses côtés avec celui de la cellule-mère, les deux autres
étant placées l’une à côté de l’autre, perpendiculairement
à cette longue cellule. De ces trois cellules-filles l’une devien-
poe Ogle lan
drait une cellule vide tandis que les deux autres s’allonge-
raient et donneraient les cellules chlorophylliennes qui par-
courent la feuille en forme de réseau. Ce dernier processus,
comme tous les autres, commencerait a la pointe de la feuille
et se propagerait vers la base. Les cellules les plus agées de
la feuille seraient toujours a la pointe (sauf évidemment
quand un nouveau processus de division commence à la
pointe, ce qu'il omet de faire remarquer).
Schleiden apporte enfin un dernier argument à sa concep-
tion par l’emploi de réactifs chimiques. Il remarque qu’en
faisant agir sur différents tissus cellulaires de l’iode dissous
dans l’iodure de potassium, et en traitant ensuite par l’acide
sulfurique moyennement concentré, les jeunes cloisons.
conservent une couleur jaune, même après des heures,
tandis que les vieilles parois se colorent en un beau
bleu de violette (Veilchenblau). Les membranes d’âge moyen
prennent par ce réactif toutes les teintes intermédiaires, telles
que le rouge vin. En faisant agir ce colorant sur des feuilles de
Sphagnum (Dill.) Ehrh., Schleiden constate que, sans exception,
la pointe de la feuille se colore dés sa formation en rouge vin
tirant sur le bleu, tandis que les cellules de la base apparaissent
toujours colorées en jaune jusqu’à la fin du développement de la
feuille. Ces dernières seraient donc toujours les plus jeunes.
Je dirai maintenant un mot de la thèse de Schimper (5)
soutenue en 1848. Elle n’apporta guère de résultats nouveaux.
Il a étudié principalement les Sphagnum(Düill.) Ehrh. parce que
les jeunes bourgeons en sont plus faciles à isoler et qu'il
espérait expliquer la structure anormale de leurs feuilles
(Les derniers travaux de Schleiden ne devaient paraître en
effet que l’année suivante. J’en ai parlé précédemment pour
ne pas trop séparer son travail de celui de Nägeli). Schimper
a étendu ses recherches à quelques autres Mousses: le Poly
trichum formosum Hedw., le Diphyscium folosum Mohr. et le
Fontinalis antipyretica L. Mais il ne dit rien qui mérite d’être
signalé.
Il écrit cependant page 84 de son travail à propos desfigures
7 et 8: « Jeunes feuilles dont une partie des cellules s’est déjà
constituée en dents; pour montrer que la partie supérieure
ee
des feuilles acquiert son développement complet avant que la
partie inférieure soit formée. » Mais ce qu'il entend par déve-
loppement est sans doute la différenciation.
En 1851 parut le fameux travail d'Hofmeister (6) dans Biel
il étudia encore le Sphagnum (Dill.) Ehrh. puis la curieuse
feuille du Fissidens Hedw.
La feuille de Sphagnum (Dill.) Ehrh. (loc. ct., p. 62) se for-
merait au moyen d’une initiale à 2 pans perpendiculaires l’un
sur l’autre. Hofmeister place la fin de l’activité fonctionnelle de
cette initiale juste au moment où commencent à se produire les
divisions des cellules mères qui donneront chacune 2 cellules
chlorophylliennes et une cellule vide. Ce dernier processus
commencerait à la pointe de la feuille et gagnerait rapidement
la base en épargnant les bords. L’allongement des cellules a
chlorophylle se propagerait de même de la pointe à la base.
Les cellules du bord de la feuille se diviseraient une seule
fois et seulement en partie au moyen de cloisons perpendicu-
laires au bord de la feuille. Toutes les cellules auraient, au
début, possédé de la chlorophylle, mais celle-ci disparaitrait
bientôt dans les futures cellules vides tandis qu’elle se multi-
plierait dans les autres. La feuille prendrait de plus en plus
une forme concave. Les fibres et cercles spiraux apparaitraient
enfin dans les cellules qui ont perdu leur chlorophylle. Il se
produirait quelquefois une division supplémentaire de ces
cellules vides avant l’apparition des ornementations. Il arrive-
rait aussi que de nombreuses cellules chlorophylliennes se
fragmentent par des cloisons transversales.
Hofmeister fait une intéressante comparaison entre ce mode
de développement et la formation des feuilles de la plupart des
autres Mousses telles que: Phascum Schreb., Bryum Dill.,
Hypnum Will., Polytrichum Dill. décrites par Nägeli. D’après
Hofmeister il y aurait entre le développement de la feuille de
Sphagnum (Dill.) Ehrh. et celui de ces dernières une impor-
tante différence. On ne pourrait en effet constater chez
Sphagnum (Dill.) Ehrh. de divisions cellulaires dans la base
foliaire après que l’initiale de la feuille aurait cessé son fonc-
tionnement; ala dernière division de Vinitiale, le bord de la
feuille aurait un nombre presque constant de cellules (très
ee Ae
régulièrement 18 à 20 chez Sphagnum acutifolium Ehrh.) qui
serait plus tard doublé par division transversale des cellules
marginales. Chez les autres Mousses, au contraire, le nombre
des cellules dela base augmenterait encore considérablement
lorsque la cellule initiale aurait fini son fonctionnement, qu’elle
se serait énormément allongée ainsi que les cellules voisines,
dont le contenu serait devenu transparent et dont les parois
se seraient fortement épaissies. Ce dernier type de dévelop-
pement serait spécialement net chez Polytrichum Dill. et Fis-
sidens Hedw.. |
Chez le Fissidens Dill., Hofmeister remarque que les très jeu-
nes feuilles ressemblent aux ébauches foliaires de Sphagnum
(Dill.) Ehrh.. Mais lorsque la feuille aurait déjà 5 cellules de hau-
teur le processus de multiplication cellulaire se modifierait de
telle sorte que les 2 files de cellules placées de chaque côté de
la ligne médiane seraient 2 fois plus longues que les voisines. La
feuille continuerait à s’élargir par les divisions ultérieures des
cellules de son bord. La formation de la poche à la base dela
feuille commencerait lorsque celle-ci aurait une largeur de
8 cellules; puis, lorsque la feuille aurait atteint environ
0"",27 de longueur, sa cellule initiale cesserait de fonctionner.
La multiplication ultérieure serait uniquement basilaire ; etson
intensité serait prouvée par le fait que le nombre des cellules
de la feuille à son insertion pourrait être égal à 30.
_ Hofmeister explique ensuite la formation de la nervure au
moyen de cloisons parallèles à la surface foliaire.
I] donne aussi son opinion sur la polémique entre Nägeli et
Schleiden. Il trouve plaisant que ces deux auteurs aient
étendu a priort les résultats obtenus sur les Mousses à tout le
règne végétal et spécialement aux Hépatiques. Pour lui, il s’est
efforcé de montrer que chez les Mousses la vérité est entre les
deux extrêmes: que la première ébauche de la feuille se
formerait par des divisions renouvelées de la cellule initiale,
(Ainsi, dans un rudiment de feuille de Polytrichum Dill. pré-
sentant 24 cellules de longueur, la pointe serait la partie
la plus jeune); mais les cellules de la base du rudiment
foliaire commenceraient alors, dans la plupart des cas, une
active multiplication, qui donnerait à la feuille le nombre
ee
lotal de ses cellules. C’est a cette théorie que je me rallie en
lui apportant des arguments d’ordre cytologique.
Ici se place historiquement la réplique définitive de Nageli à
Schleiden(7) parue en 1855. Il reprend Vétude du Sphagnum
squarrosum Pers. et y ajoute celle du Sphagnum cymbifolium
Ehrh.. Il fait remarquer que, si la cellule initiale de la feuille
était repoussée hors de la tige comme le prétend Schleiden,
elle conserverait une forme en demi-cercle et ne prendrait
pas la forme en coin, explicable seulement, par son mode de
cloisonnement. Il a fait de plus des mesures de l’initiale de la
feuille. Il aurait constaté que cette cellule au début de
A 420 micromillimètres, mais qu'elle diminue de surface et
de volume. Ainsi la cellule initiale d’une feuille formée de {00
à boo cellules présenterait seulement en surface le 1/10 de la
cellule primordiale. Le rapetissement progressif de l’initiale
proviendrait de ce qu’elle perd plus dans ses divisions qu’elle
ne gagne par sa croissance. La dernière mesure indiquée plus
haut se rapporterait au moment où la cellule terminale se serait
divisée pour la dernière fois; à partir de ce moment elle devien-
drait de plus en plus grande jusqu’à la fin du développement.
A l'argument présenté par Schleiden, que les premières
cloisons ne sont pas particulièrement délicates, Nageli
répond que dans une feuille de 10 à 20 cellules on ne peut voir
aucune différence entre les parois d’âges divers. Schleiden
prétendait aussi qu'au stade de 3 cellules les 2 cellules
de base n'étaient pas plus petites que la cellule originelle.
Nageli lui oppose ses propres observations, d’après lesquelles
chacune de ces cellules serait à peine le tiers de la cellule
terminale et toutes trois ensemble n’occuperaient guère un
volume plus grand que celui de la cellule originelle mesuré
Juste au moment qui précède sa division.
Pour la suite du développement il n’ajoute guère que
des détails. C’est ainsi qu’au moment où les cellules-mères
losangiques se divisent deux fois pour donner 2 cellules
chlorophylliennes et 1 cellule hyaline, la première division
serait inégale et la plus petite cellule serait toujours du
côté du bord de la feuille; de plus cette petite cellule
serait plus large en haut qu’en bas. Ce serait le plus grand
côté de la cellule mère qui serait coupé par la cloison de
division.
Nägeli déclare que ses observations concordent avec celles.
d'Hofmeister!. |
En 1857 W.-P. Schimper publia son grand ouvrage sur les
Sphaignes (8) et l’année suivante il en fit en allemand une édi-
tion remaniée (9). Je retiens seulement ceci : « Nulle part mieux
que dans les Sphaignes on ne peut voir que la multiplication
des cellules continue vers la base, quand elle a cessé au som-
met et à la base même. Les cellules apicales et basilaires sont
les plus anciennes ; elles sont le résultat immédiat de la seg-
mentation de la première cellule génératrice. Presque toutes
les jeunes feuilles des Sphagnum (Dill.) Ehrh. sont cuculli-
formes, parce que les cellules du sommet et de la partie supé-
rieure du bord ont cessé de se multiplier quand les cellules au-
dessous du sommet continuent encore leur multiplication... »
Dans l’édition allemande (9) (page 41) il insiste longuement
sur les cellules oreillettes de la base des feuilles, qui au lieu
de s’allonger se gonfleraient vers |’extérieur, seraient commu-
nément colorées en rouge ou en jaune et contiendraient de la
chlorophylle. Ces oreillettes seraient très belles chez le Sphag-
num auriculatum Schimper. Contrairement a ce qu’avait décrit
Hofmeister il assure que chaque cellule hyaline est réguliè-
rement entourée de 6 cellules vertes et que par suite la divi-
sion de ces derniéres est un fait constant.
En 1863 Lorentz (10) publie un travail important dans lequel
on voit étudié pour la première fois le développement des nervu-
res foliaires des Mousses au moyen de coupes transversales. Il
étudie 2 types de Mousses très spéciaux : le Fissidens Hedw. et
le Polytrichum (Dill.) L. puis très rapidement le Fontinals Dill.
Dans le genre Fissidens Hedw. il prend comme matériel le
Fissidens taxifolius (L.) Hedw. et le Fssedens adianthordes (L.)
Hedw.. Il se range à l’opinion de Robert Brown, adoptée par
Schimper, selon laquelle la vraie feuille est constituée par la
partie engainante entourant la tige, tandis que la grande lame
. Il a étudié aussi le développement de la feuille du Mnium punctatum. Je décrirai
ses ns à ce sujet lorsque je reprendrai l’étude de cette mousse.
qui se développe sur le dos de la nervure n’est autre qu'une
aile dorsale. D’après lui cette feuille étrange proviendrait d’une
initiale à 2 pans comme toutes les autres feuilles de Mousses.
La cellule primordiale de la jeune feuille se diviserait une fois
d’un côté puis une fois de l’autre, donnant ainsi naissance à
2 cellules, qui engendreront respectivement les parties droite
et gauche de la lame foliaire. La troisième division de l’initiale
produirait une cloison qui ne serait pas parallèle à la première.
Et, à partir de la quatrième, les cloisons seraient orientés de
telle sorte qu’elles donneraient naissance à une lame située,
non plus tangentiellement, mais radialement par rapport à la
tige. Cette lame dorsale pousserait un certain temps au moyen
d’une initiale à 2 pans (La figure 3 de la planche I de ce tra-
vail montre fort bien cette rotation de l’initiale foliaire).
En examinant des tiges de Fssidens Hedw. jusqu’à la base on
trouve des feuilles présentant une lame dorsale de plus en plus
réduite. Certaines en sont complètement dépourvues et enfin
il n'y a même plus trace de nervure.
Lorentz explique ainsi le développement de cet organe :
il serait formé à l’origine de 2 cellules qui se diviseraient par
une cloison parallèle à la lame foliaire, donnant 2 cellules
ventrales qui resteront à large lumen, tandis que les 2 cel-
lules dorsales se subdiviseront. La cellule d’attache de la
lame foliaire apparait de bonne heure par division d’une des
2 cellules dorsales. Elle se subdiviserait dans le Frssidens
adianthoides (L.) Hedw.. Dans la nervure adulte il y a de
grandes cellules qui réunissent la lame dorsale au côté ven-
tral de la nervure.
Lorentz a remarqué une asymétrie dans la nervure foliaire
dont tantôt un côté tantôt l’autre serait plus développé.
Pour le Polytrichum Dill. il a remarqué également une asy-
métrie dans la coupe dela feuille et l’explique, comme plus tard
Lorch, par le fonctionnement de la cellule initiale de la tige.
I] prétend que cette asymétrie disparait au cours du dévelop-
pement. Ses sujets d’étude sont: Polytrichum formosum Hedw.
et sérictum Banks.. Il décrit au début un stade que l’on retrouve
chez toutes les Mousses, ainsi qu'il l’a constaté lui-même, et
que j appellerai le « stade en éventail » (ce mot m'a été sug-
géré par le terme allemand de Fächerung). C’est lui qui, le
premier, a expliqué la formation de ce qu'il appelle les groupes
centraux (Zentralgruppen) chez le Polytrichum Dill., ainsi que
l’évolution ultérieure des segments de la nervure qui dérivent
chacun d’une cellule du stade en éventail. Je n’insiste pas sur
ces faits, car je décrirai chez l’Atrichum undulatum P. Beauv.
un cloisonnement tout à fait semblable. Il a remarqué aussi
qu'à la pointe de la feuille du Polytrichum Dill. on ne pouvait
plus distinguer que des cellules à parois très épaissies et
toutes semblables entre elles. Cette homogénéité de la pointe
foliaire existe plus ou moins chez toutes les Mousses.
En 1867 Lorentz publia un travail (11) fondamental pour l’ana-
tomie comparée de la feuille et de la tige des Mousses. C'est
lui qui a créé les premiers termes techniques servant à dési-
gner les éléments histologiques de la nervure foliaire de ces
végétaux. Dans la partie générale de son travail il commence
par décrire le fonctionnement de Vinitiale à 2 pans, puis le
développement de la nervure foliaire qui est précoce. Dans son
schéma (fig. 2, page 369 de son travail) c’est dans le quatrième
segment détaché par l’initiale qu’elle commence à se mani-
fester. Sa figure 3 en montre une coupe. On voit, d’après cette
figure, que la cellule-mère de la nervure se divise d’abord par
une cloison dorso-ventrale (dite cloison anticline); puis cha-
cune des cellules-filles se divise par une cloison parallèle aux
lames foliaires et perpendiculaire à la première (dite cloison
péricline), Les 2 cellules dorsales se divisent à nouveau par
une cloison anticline. On a ainsi une nervure formée de 4 cellules
dorsales et de 2 ventrales. C’est une structure que Lorentz au-
rait observée encore a l’état adulte chez l’Amblysteqium tenuis-
simum Br. Eur.. Il pense que souventles nervures de Mousses au-
raient non 1 cellule-mère mais 2 au moins. Celles-ci pourraient
se diviser de suite par des cloisons périclines ou bien le cloi-
sonnement par anticlines se continuerait, amenant au stade en
éventail. Chacune des cellules formant cet éventail est appe-
lée cellule fondamentale (Grundzelle) par Lorentz. Le nombre
de ces cellules fondamentales se reconnaitrait dans les nervu-
res bien développées au nombre des cellules basales ou des
cellules dites « deutern » par Lorentz. Ce nombre serait con-
A SE
stant pour chaque espèce lorsqu'il serait petit (2, 4 ou 6). Je
montrerai qu'il n’en est pas toujours ainsi. Le développement
ultérieur de ces cellules fondamentales ne se produirait pas
en méme temps sur toute la largeur de la feuille mais d’une
facon centrifuge : allant du milieu vers les 2 bords. On pour-
rait rencontrer des inégalités dans tous ces processus. Lorentz
donne la définition suivante de la nervure (page 372 en note) :
la nervure est une partie du tissu foliaire présentant une exten-
sion longitudinale prédominante (ayant ainsi la forme d’une
ligne dans la plupart des cas ou d’une bande comme chez le
Dicranum albicans Br. Eur.) qui s’étendrait a la méme place
d’une manière constante dans une même espèce, de la base
à une distance plus ou moins considérable de la pointe et qui
compterait un plus grand nombre de couches cellulaires que
le tissu foliaire l’entourant.
Le cas le plus simple de nervure rencontré par Lorentz
serait réalisé dans les feuilles périchétiales de l’Amblysteqium
tenuissimum Br. Eur. (2 cellules ventrales et 2 cellules dorsales).
Un cas plus compliqué serait celui ou une cellule dorsale se
diviserait par une cloison péricline donnant ainsi 3 couches à
la feuille. Lorentz l’a observé dans quelques Orthotrichum Hedw.
à l’état de développement. D’après lui chez beaucoup de Pleuro-
carpes la nervure aurait 2 cellules basales ; tout le reste serait
formé d’un massif de cellules se différenciant en couche péri
phérique et en cellules moyennes.
Passant ensuite à des nervures plus complexes, Lorentz dé-
finit leurs principaux éléments :
Il décrit tout d’abord les cellules qu'il appelle en allemand
« deutern » (au singulier « deuter ») en latin « cellulae duces »
(au singulier « cellula dux ») et que l’abbé F. Morin! appellera
« eurycystes ». Ces cellules frappent aussitôt les yeux dans la
coupe de la plupart des nervures de Mousses et nous incitent
tout d’abord à étudier leur structure et à l’interpréter (en al-
lemand : « deuten »). Leur nombre, comme celui des cellules
1. Voir la thèse de l’abbé F. Morin: « Anatomie comparée et expérimentale de la
feuille des Muscinées. Anatomie de la nervure appliquée à la classification » — Ren-
nes — 1893 — 4° 139 pages avec 24 planches. C’est un FREE de pure anatomic
comparée dont } Je ne parlerai donc pas.
ne ie
basales, est constant s’il est faible. Quant à leur origine, il
rappelle ce qu'il a dit plus haut: les 2 cellules-mères de la
nervure se diviseraient par une cloison péricline. Les cellules
ventrales resteraient indivises et à large lumen. S'il apparais-
sait des cellules centrales, elles seraient dues à la division des
cellules dorsales. Chez un Mnium undulatum (L.) Weis j'ai
cependant observé une cinèse dans une cellule ventrale de
feuille, avant que la cellule dorsale ne se soit divisée (voir la
feuille F,, dans ma figure 190). Dans les nervures plus déve-
loppées les cellules ventrales se diviseraient aussi tangentiel-
lement pour donner 2 couches (Par exemple chez Funaria
hygrometrica (L.) Sibth.. Enfin, dans d’autres cas, les cellules
ventrales peuvent continuer leur multiplication. Les deutern
forment alors une rangée de cellules qui traversent la nervure
et forment des deutern médians. Il cite le cas du Bryum turbr-
natum (HedWw.) Br. Eur. où le nombre des deutern serait double
de celui des cellules ventrales à large lumen. Il signale que
dans les Mnium affine (L.) Weis et undulatum Bland. il y a
une double couche de deutern. Dans certains cas les cellules
ventrales existeraient seulement au milieu de la face ventrale,
alors que sur les bords les deutern seraient basaux. I] a remar-
qué aussi que, dans maintes espèces, sur les bords de la ner-
vure, au contact de la lame foliaire, il est difficile de distin-
guer les différents tissus.
Il traite ensuite des cellules qu'il appelle en allemand
«begleitern » (au singulier begleiter) c’est-à-dire « accompa-
gnatrices » car elles accompagneraient souvent les deutern et
il ne les aurait jamais rencontrées sans elles. En latin il les
appelle « cellulae comites » (au singulier « cellula comes »).
Ce sont ces cellules que l'abbé Morin appellera «sténocystes ».
Lorentz les définit ainsi: cellules délicates, à parois minces,
qui sont placées du côté ventral des deutern, entre celles-ci et
les autres cellules dorsales ; embryologiquement elles appar-
tiendraient à ces dernières. Il fait remarquer que, dans eer-
taines nervures de Mousses ou l’on rencontre en général un
groupe de comites, on ne trouve plus à sa place qu'une cavité.
Il se demande alors si les minces cloisons auraient été détruites
par le rasoir faisant la coupe, ou se seraient précédemment
BE RA
résorbées. Il a étudié le développement de ces cellules dans un
seul cas: celui du Timmia austriaca Hedw. etil aurait constaté
qu’elles proviendraient d’une cellule mère appartenant au côté
dorsal. Dans les cas que j'ai étudiés j'ai toujours trouvé
2 cellules-mères. L'aspect irrégulier qu’affecte souvent le
groupe de begleitern serait du à ce qu'il succombe dans la
lutte pour l'existence avec les tissus environnants. Ces comites
se rencontreraient, soit en un groupe unique situé toujours
au centre de la nervure dans l’angle dorsal des 2 deutern
médians, soit en plusieurs groupes dans l’angle dorsal d’un
certain nombre de couples de deutern. Il appelle . « comi-
tes heterogenei» ou « mnioidei» ceux qui sont entourés de
stéréides. Les stéréides sont des cellules a parois tres épais-
sies, a lumen presque nul et qui sont trés allongées suivant
la direction de la base à la pointe de la feuille. Ces cellules
correspondent aux fibres des Phanérogames. Lorsque les
begleitern sont en plusieurs groupes ils peuvent être homo-
gènes ou présenter la structure particulière qu'on rencontre
chez les Polytrichacées. Dans ce dernier cas, on trouve dans
l’angle dorsal de 2 deutern voisins une petite cellule que
Lorentz appelle cellule centrale (Centralzelle). Elle est limitée
du côté dorsal par de grandes cellules qu'il appelle les « socii ».
Il appelle groupes centraux ces complexes formés d’une cel-
lule centrale, entouré de 2 deutern et de 3 socil. J’explique-
rai cette structure en décrivant le développement de lAri-
chum undulatum P. Beauy.. Nous avons vu que Lorentz l’a
décrite pour Polytrichum Dill. dans ses Moosstudien.
Lorentz traite enfin des cellules ventrales et dorsales qui se
subdivisent en épidermiques et intercalaires. Il décrit égale-
ment les marges foliaires, les papilles et les mamilles. Mais
ceci n'intéresse pas les grandes lignes du développement
et je n'en parlerai donc pas. |
Je signalerai seulement que, dans la partie spéciale de sa
publication (pages 405 à 4ro), il étudie le développement de
la feuille des Campylopodées. C'est assez semblable à ce que
je décrirai chez le vulgaire Decranum scoparium (L.) Hedw..
Lorentz ne fait guère la qu'un résumé de recherches effec
tuées à cette époque par S. Berggren sur les Campylopodées et
— 16 — | 4
Dicranodontiées européennes. Je ne sais si cet ouvrage a paru,
car je n'en ai jamais vu de traces.
La même année Lorentz fit une publication (12) sur le déve-
loppement de la feuille du Timmia austriaca Hedw.. Il a observé
très peu de jeunes stades. Sa description est donc presque
uniquement fondée sur l’étude de feuilles à peu près adultes
dont il examine les coupes faites de la pointe à la base. Il aurait
remarqué en effet que l’on pourrait en déduire les lois du
développement aussi bien que par l’étude de jeunes feuilles.
Lorentz appelle « Depauperation » la réduction de tous les
éléments de la nervure et sa transformation en une masse de
_cellules semblables, à la pointe de la feuille. |
J'ai déjà dit que c'est dans cette seule espèce qu'il a suivi
l’évolution d’un faisceau de begleitern ordinaires. Il a remar-
qué que la différenciation des massifs de stéréides du côté
dorsal se produit d’abord sur les bords de la nervure, pour
gagner ensuite le centre. Ceci ne m'étonne d’ailleurs nulle-
ment, car J'ai toujours observé que la différenciation des
cellules en général commencait par les bords et la pointe de
la feuille.
Lorentz publia (13) aussi en 1867, un travail sur l’anatomie
et le développement de l Orthotrichum Schubartianum Lorentz
et du Campylopus Mülleri Jur. ainsi que d’une autre Mousse
à laquelle il ne sait quel nom attribuer. Il ne signale rien
qu'il n’ait résumé dans ses « Grundlinien ».
Le long travail, qu'il fit encore paraitre cette année-là dans
Flora, (1h) n’est autre chose qu’une publication préparatoire
à ses « Grundlinien ». Ce bryologue a publié un certain nom-
bre d’autres travaux, mais 1ls sont de nature purement anato-
mique. |
Je ne parlerai pas ici des recherches faites sur le dévelop-
pement de la feuille des Andréales. J'en dirai quelques mots en
étudiant ces Mousses.
Leitgeb fit plusieurs publications, et entre autres une très
remarquable sur Fontinalis(Dill.)L., traitant du développement
de la tige et du fonctionnement de sa cellule initiale. Mais en ce.
qui concerne la feuille iln’a guère étudié que Fssidens Dill. (15).
Il prétend, contrairement à Lorentz, que le côté le moins déve-
seta
loppé de la duplicature foliaire n'est pas toujours celui qui est.
à l'ombre. Il pense que cette inégalité serait due a la position
relative des feuilles dans le bourgeon. Au début le dévelop-
pement de la duplicature (qui est la véritable feuille) resterait
très en retard sur celui de la lame dorsale ; la lame dorsale
d’une feuille, en se développant, viendrait gèner une partie de
la feuille immédiatement plus âgée. Leitgeb n’a guère ajouté
de résultats nouveaux aux recherches de Lorentz sur cette
question.
Je ne signale ici que pour mémoire la courte publication de
Debat (16) sur le développement de la feuille de Fissidens Dill..
Cet auteur semble ignorer les travaux précédents de Lorentz
et de Leitgeb. Il décrit le développement d’une manière
étrange et pense que l’on pourrait considérer les feuilles de
Fissidens Dill. comme des folioles florales ! Il dit avoir observé
des feuilles, depuis la taille de 2 à 3 centièmes de millimètre et
composées de 12 à 15 cellules, jusqu’à l’état adulte. Il a bien
constaté que c'est la lame dorsale qui se développe le plus
rapidement: l'indice d’une duplicature ne se rencontreraitque
dans des feuilles ayant atteint une longueur de 25 à 30 cen-
tièmes de millimètre. |
En 1877, le même auteur publia un travail (17) sur le dévelop-
pement des filaments et des lamelles chez les Barbula Hedw.
les Pottia Ehrh. et les Polytrichacées. I étudia Barbula mem-
branifolia Schultz, chloronotos Bridel et ambiqua (Br. Eur.).
Pour Barbula membranifoha Schultz on ne verrait guère à
l’origine que le poil de la feuille. Au stade de 1/2 millimètre
de longueur il n'y aurait pas encore de limbe proprement dit.
Celui-ci n’apparaitrait que plus tard « sous forme d’un petit
renflement ovalaire à la base de l’appendice pileux ». Lorsque
j'étudierai le Barbula ruralis (L.) Ehrh. je montrerai égale-
ment le développement tres précoce du poil terminal de la
feuille. Dans les Barbula Hedw. la continuation du dévelop-
pement basal est donc très nette. Debat a vu aussi que la feuille
de cette plante se différenciait d’abord par la pointe. Il a décrit
avec soin l’épaississement des parois cellulaires, la réduction
du lumen, la disparition presque totale du plasma dans la
partie supérieure du limbe, alors que la partie basilaire est
2
ET a
encore en état de multiplication active en tous sens. Il est
frappé par l’abondance du plasma, la petitesse des cellules,
la délicatesse des parois cellulaires et le peu de contenu
chlorophyllien de cette partie basilaire de la feuille. La plage
de la nervure ou se forment les filaments, placée au début vers
le milieu de la feuille, est repoussée vers la pointe par suite
de Vallongement basilaire.
Chez Pottea cavifoha Ehrh. il prétend qu’on voit à un certain
moment une masse de tissu sur la face ventrale de la ner-
vure. Elle se scinderait en deux, suivant le plan de symétrie
de la feuille, puis chacune des masses se diviserait à nouveau
en deux suivant des plans parallèles au premier. On aurait
ainsi 4 bandes longitudinales de tissu qui finiraient par n’étre
plus que 4 lames par résorption des autres cellules. Ce pro-
cessus, s’il est exact, ressemblerait tout à fait à la formation
d’un péristome. |
Pour les Polytrichacées, la production des lamelles se pro-
duirait sans résorption, par bourgeonnement des cellules ven-
trales, comme les poils des Barbula Hedw..
Karl Geebel (18) a décrit la feuille si curieuse des plantules
du Buxbaumia Haller.. Cette feuille, composée seulement de
quelques cellules, n’a pas d’initiale et ne possède même pas de
chlorophylle. Il signale avec Robert Brown" que ce mode de
croissance rapprocherait cette plante des Hépatiques acro-
gynes. 3
Citons enfin les travaux de Lorch qui fit paraitre une thèse(38),
dont je dirai un mot a propos de l’asymétrie foliaire du Leu-
cobryum Hampe, et une monographie des Polytrichacées (19)
dans laquelle il reprend avec soin l'étude du développement
de la feuille du Polytrichum Dill.. IT a vu, comme Lorentz, l’asy-
métrie foliaire, non seulement dans Ia forme extérieure des
coupes transversales, mais Jusque dans le détail de l’ordre
d'apparition des cloisons cellulaires.
Je signalerai seulement que Lorch donne au terme de
« cellule centrale » un sens tout différent de celui de Lorentz.
Pour Lorch la cellule centrale estla cellule eurycyste médiane
1. Miscellaneus botanical Works. Vol. Il, p. 351.
qe
de la nervure. Nous avons vu au contraire que Lorentz donne
le nom de cellules centrales aux petites cellules qui se trou-
vent dans l’angle dorsal de 2 eurycystes consécutifs. Lorentz
avait observé chez certains individus que les cellules cen-
trales étaient divisées et pensait que les systématiciens futurs
utiliseraient ce caractère pour la distinction des espèces.
Lorch, qui ne conçoit pas la cellule centrale de la même
facon, accuse Lorentz d’avoir pris les divisions de la cellule
centrale pour les cloisons périclines qui donneront naissance
au faisceau de stéréides ventrales ! Or justement les cellules
centrales de Lorentz sont du côté dorsal.
Je parlerai du travail de Jongmans (33) dans l'exposé de
mes recherches sur le Mnium punctatum (L., Schreb.) Hedw..
En terminant ce résumé historique de la question, disons
enfin que l’on trouvera des exposés généraux du dévelop-
pement de la feuille des Mousses dans Hofmeister (20), Carl
Muller (21) et surtout Gebel (22).
PROCÉDÉS TECHNIQUES EMPLOYÉS
Tous les objets que j'ai étudiés ont été fixés au liquide de
Kaiser [Ce fixateur est formé de goo parties de la solution de
Kaiser (10 grammes de sublimé, 3 grammes d’acide acétique,
300 centimètres cubes d’eau) et de 100 parties de formol à
ho pour 100[. Ce mélange m’a toujours donné d’excellents.
résultats.
Il est très difficile de savoir si une pointe de tige de Mousse
est bonne à fixer, c’est-à-dire si l’on a affaire à des tissus
jeunes en voie de division, comme il est nécessaire pour une
étude embryogénique, car la turgescence dans les Mousses
est due, non pas comme chez les plantes supérieures à la pres-
sion du plasma vivant sur les parois cellulaires, mais à ces
parois elles-mêmes. Une Mousse qui aura séjourné des années.
en herbier et aura conservé une belle couleur verte (ce qui
arrive souvent si elle a été convenablement séchée), venant à
être plongée dans l’eau, reprendra plus ou moins rapidement
sa forme et semblera être en état de vie active. Il arrive fré-
quemment qu'après une période de sécheresse ayant arrêté
toute végétation des Mousses il survienne une pluie qui rende
à ces végétaux toute leur fraicheur apparente. Si l’on vient
alors, trompé par cet aspect, à fixer une pointe de tige, on est
très étonné de trouver les cellules à peu près vides. En
admettant que la période d'humidité se soit prolongée plus.
longtemps, tout au moins quelques cellules de ces végétaux
reviviscents auraient sans doute repris leur état normal, sur-
tout vers le point végétatif de la tige. On doit donc cher-
cher à fixer les Mousses lorsqu'une certaine humidité règne
DT —
depuis quelques semaines. Il faut de plus que la température ne
soit pas trop basse, les Mousses étant sujettes à la gelée, et
principalement les jeunes sporogones. Ces conditions sont en
général réalisées au début du printemps, avant même que les
végétaux à feuilles caduques aient manifesté leur retour à
la vie active.
J'ai fixé mon matériel à diverses heures, spécialement le
matin, au printemps, par des temps humides. J'ai mis cer-
tains fragments dans l’eau pendant quelques instants avant
de les plonger dans le fixateur, lorsque je craignais que
leur plasma ne fut pas assez turgescent. J’ai été surpris de
ne presque jamais rencontrer de divisions cellulaires dans
des tissus paraissant néanmoins à l’état méristématique. Ceci
est sans doute du à ce que les divisions ne se produisent
que la nuit et peut-être même seulement à certaines
heures dans les organes végétatifs chlorophylliens. On a
constaté des faits de ce genre même pour des végétaux non
verts. C’est ce qu'a trouvé par exemple M. de Buren (de Berne,
en Suisse) pour des Protomycétacées.
Après avoir laissé séjourner mes objets pendant un temps
variable dans le fixateur, je les lavais à l’eau et les faisais pas-
ser dans la série des alcools à 30°, 50°, 70°, 85° (2 heures dans
chaque), puis (de 12 à 24 heures à peu près dans chaque) dans
Valcool a 96°, l'alcool pur (2 fois), le mélange mi-partie alcool
pur et mi-partie chloroforme, enfin dans le chloroforme pur,
que je renouvelais au moment de mettre a l’étuve en l’addition-
nant de parafline coupée en petits morceaux: ceux-ci se dissol-
vaient lentement dans le chloroforme. Ce dernier s’évaporait
complètement au bout de 3 à 4 jours dans l’étuve à air chaud.
Le temps pendant lequel je laissais mon matériel dans les
différents liquides a varié beaucoup suivant les cas. Je
découpais ensuite les objets en série au moyen du microtome
à glissières de Thomas Yung de Heidelberg. Ce microtome
permet de recueillir les coupes sur le rasoir au moyen d’une
aiguille emmanchée.Il m’estarrivé souvent de les prendre une
A
à une. J'ai apporté le plus grand soin a ce qu'aucune coupe
ne soit ni supprimée, ni retournée ou déplacée. Lorsque des
coupes étaient inutilisables je laissais généralement leur place
— 99 —
vide. J’obtenais ainsi des séries bien complètes ; ce qui est
indispensable pour des études de développement.
Je n'ai coloré que rarement mes préparations à l’héma-
toxyline ferrique après mordancage à l’alun de fer, car mon but
n'était pas de faire de la cytologie pure et d'observer les phé-
nomènes intimes de la division nucléaire de ces végétaux,
mais bien de reconnaitre suffisamment l’état de la membrane
cellulaire, du noyau, du protoplasma et de ses inclusions pour
en tirer des conclusions sur l’âge des cellules formant les.
ébauches des feuilles dont j’étudiais le développement. La
coloration à l’hématoxyline est excellente pour un tissu à l’état
méristématique, à parois cellulaires très minces. Mais je débi-
tais surtout au microtome des pointes de tiges de Mousses
dont j’enlevais seulement les feuilles les plus vieilles, trop cas-
santes pour être. coupées avec cet instrument. J’avais ainsi
dans une même coupe des parties très jeunes et d’autres âgées.
L’hématoxyline se fixe sur ces dernières avec force et noircit
toute la préparation. On ne peut avoir de différenciation au
point de vue de la coloration par ce procédé brutal. J’ai em-
ployé au contraire des colorants rouges tels que : congoco-
rinte, fuchsine, safranine. C’est du congocorinthe que j'ai fait
le plus fréquent usage. Il s'emploie en solution dans l'alcool
pur, d’ou la nécessité de déshydrater les préparations avant
de les tremper dans ce réactif. On obtient de très belles colo-
rations du noyau, du plasma et dela membrane cellulaire. J'ai
souvent employé aussi un mélange de fuchsine et de vert d’iode
avec un peu de bleu de méthylène, le tout dissous dans l’eau.
On obtient une très belle différenciation lorsque l’on colore
ensuite les préparations ainsi traitées par le congocorinthe : les.
jeunes parois apparaissent colorées en rose par le congoco-
rinthe, celles plus âgées en rose violacé par le mélange de
fuchsine-vert d’iode. Cette coloration violette se manifeste
d’abord sous forme de points dans l'angle des cellules, chez les.
Andréales, par exemple ; elle gagne ensuite les lamelles
moyennes, puis toutes les membranes. Les jeunes stéréides de
VAtrichum undulatum P. Beauv. montrent aussi très nettement
cette teinte violette. Enfin le vert d’iode se fixe spécialement
sur la chromatine du noyau cellulaire et en rend la teinte très
yg 2
foncée. Il colore très souvent en vert vif les éléments âgés lors-
que ceux-ci n’ont pas déjà de coloration naturelle trop vive ;
je Pai très bien observé chez le Diphyscium foliosum Mohr par
exemple. Vaizey (23) avait déjà attiré l’attention sur le fait que
les parois des cellules extérieures des tiges et des feuilles de
Mousses présenteraient des réactions comparables à celles du
bois, mais n'auraient pas de cutine comme le sporogone et la
capsule. Je n’ai pas étudié ces questions, mais, autant que je
sache, on n’a pas encore mis en évidence de lignine dans les
Mousses. D'ailleurs, d’après une récente note de R. Mirande (24),
le vert diode serait un colorant de la pectoseetnon de la lignine.
Je laissais en général les préparations dans le congocorinthe
d’une demi-heure à 2 heures. J’enlevais l’excès de colorant
par Valcool. Je régressais rapidement les colorations obtenues
par le mélange fuchsine-vert d’iode au moyen de l’alcool a 96°.
J’ai employé aussi quelquefois la safranine : on colore pendant
un jour environ et l’on régresse a l’alcool-alcool chlorhy-
drique. C’est un colorant nucléaire bien connu. C’est celui qui
m’a servi, par exemple, a colorer mes coupes de Leucobryum
glaucum (L.) Schimp..
Je nettoyais presque toujours mes préparations, apres les
avoir débarrassées de la paraffine au sortir du four par le
xylol, au moyen d’un séjour de 1 heure dans l'alcool iodé et
de 1 heure dans l’eau oxygénée.
Après coloration j'éclaircissais par passage ou séjour pro-
longé (ce qui régresse beaucoup) dans l'essence de girofle.
Ce produit donne une clarté très grande aux préparations
mais les décolore souvent un peu trop. Je montais enfin au
baume du canada dissous dans le xylol.
Ce en cm
RECONSTITUTIONS DE FEUILLES
AU MOYEN DE PLASTILINE
Pour me rendre mieux compte du développement de la
feuille des Mousses et pour simplifier |’exposé de mes recherches
jai employé un procédé usité des zoologistes dans les études
d’embryogénie : c’est celui des reconstitutions de la forme
extérieure d’objets microscopiques coupés en série. Pour des
reconstitutions très exactes, par exemple pour des systèmes |
circulatoires d’embryons humains (j’eus l’occasion d’en voir
au laboratoire d’embryologie de l’École de médecine de Berne)
on emploie des lames de carton; on peut utiliser également
la cire. Je me suis servi de plastiline. Mes premières reconsti-
tutions ont été faites a Berne.
Je me fis confectionner un plateau en bois de tilleul(On m'avait
assuré que ce bois ne se déformait pas. En réalité il a joué,
probablement sous l’action de l'huile, puis de la glycérine que
jai employés pour empécher la plastiline de coller sur la
planche). Je fis visser 2 réglettes de cuivre d’une épaisseur de
2 millimètres le long des deux bords parallèles du plateau en
bois. Je fis faire également un rouleau en bois, semblable a
ceux dont on se sert pour malaxer la pate a patisserie. Tout
ce dispositif me servit à obtenir des lames de plastiline d’une
épaisseur de 2 millimètres.
Pour ce faire : je placai d’abord un bloc de cette substance,
écrasé grossièrement à la main, sur le plateau de bois enduit
d'huile de lin. Mais ce produit a l'inconvénient de laisser un
dépôt. C’est pourquoi je le remplacai par la glycérine, qui ne
nécessite pas un nettoyage de la planche après usage. Je n'ai
lee te eles
pas essayé de me servir d’une poudre de talc ou de quelque
autre, a exemple des pâtissiers qui emploient la farine:
les coupes de plastiline n’auraient pas adhéré ensuite les unes
aux autres lorsque je les aurais superposées ; tandis que la
glycérine n’empéche les coupes d’adhérer à l’objet sur lequel
elles reposent que pendant le temps ou elle n'a pas encore été
absorbée par la plastiline.
Je faisais ensuite glisser le rouleau sur les 2 lames de
cuivre qui le maintenaient à une distance constante de 2 mil-
limètres de la surface du plateau. La plastiline était ainsi éten-
due en une couche uniforme de 2 millimètres d'épaisseur. Or,
presque toutes mes coupes au microtome étant distantes de
15 micra, en représentant celles-ci par des lames de 2 milli
.mètres = 2000 y je devais obtenir des reconstitutions gros-
2 000
15
tourextérieur de mes coupes en série de feuilles de Mnium undu-
sies = 133,33... fois. En conséquence je dessinais le con-
latum (L.) Weis. au grossissement de 133 fois. Je découpais
ces coupes avec des ciseaux et je les appliquais sur la lame
de plastiline de 2 000 y d'épaisseur. En suivant avec le couteau
le contour de ces patrons de papier j’obtenais des lames de
plastiline représentant grosso modo toutes les coupes d’une
méme feuille. Je les superposais et les collais les unes aux
autres par une légère pression. J’ai employé plus tard de petits
morceaux de bois (tels que des allumettes) pour augmenter la
solidité des modèles ainsi obtenus. Les diverses coupes super-
posées formaient une sorte d'escalier. Je comblais les marches
avec de la plastiline et je polissais l’ensemble avec la lame du
couteau et le pouce.
Cette méthode présente l’inconvénient de donner de grands
modèles assez fragiles, car la plastiline se ramollit sous l’action
de la chaleur. Mais au bout d’un certain temps cette substance
devient assez consistante ; c’est ainsi que mes reconstitutions
de feuilles de Mnium undulatum (L.) Weis., faites en Suisse il
y a quelques années, sont aujourd’hui assez maniables.
RECHERCHES PERSONNELLES
SUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA FEUILLE
DES MOUSSES |
L'originalité de mes recherches réside principalement dans
la technique employée, qui m'a permis d'observer des faits
nouveaux et de contrôler avec une grande certitude ceux
entrevus par mes devanciers.
Les remarquables travaux de Leitgeb et de Lorentz ont été
faits au moyen de coupes a la main.
Lorentz décrit dans ses « Moostudien » (10)(page 6 en note)
sa manière de procéder : Il place les fragments de Mousses à
couper dans une solution très concentrée de gomme arabique
contenant 1/3 de son poids de sucre, pour rendre la masse
moins cassante, lorsque l’eau se sera évaporée au bout d’une
huitaine de jours. Il débite ensuite le bloc de gomme renfer-
mant les Mousses avec un rasoir et les coupes sont mises dans
l’eau, qui dissout lentement la gomme. Ce procédé a l’avan-
tage de ne pas perdre de coupes, même les plus minces.
De plus les coupes de feuilles restent groupées pendant un
certain temps dans l’ordre normal autour de la tige (comme
dans un ruban fait au microtome et collé sur lame), Jusqu'à
ce que la gomme se soit dissoute dans l’eau de la préparation,
et même plus longtemps encore si l’on ne déplace pas le
couvre-objet et qu'aucun courant ne se produise.
J'ai décrit (25) dans mon travail sur l’asymétrie foliaire du
Mnium spinosum (Voit) Schwägr. un procédé de mon inven-
tion qui a l’avantage d’être bien plus rapide: c’est de cou-
per les Mousses incluses dans une couche de paraffine entre
2 demi-cylindres de moelle de sureau. Mais il faut ensuite
127 ee
dissoudre la parafline par le xylol. On perd ainsiles meilleures
coupes, qui sont entrainées à cause de leur légèreté extrème,
et les autres restent rarement groupées.
L’emploi du microtome présente au contraire de nombreux
avantages sur le procédé à la main. Dans ce dernier cas on
n’observe que des coupes isolées dont on ne connaît pas exac-
tement la position dans la feuille. Les coupes en série dans un
point végétégatif permettent au contraire de faire des reconstitu-
tions de tous les stades du développement et de comparer la
structure de feuilles dont on connait exactement l’ordre d’ap-
parition. En effet, la coupe qui passe par la cellule initiale de
la tige montre les sections de toutes les feuilles entourant le
point végétatif disposées sur une ligne spirale aboutissant a
cette initiale. Lorsque l’on parcourt en partant de l’initiale de la
tige on rencontre les coupes de feuilles de plus en plus âgées.
De plus les objets étudiés par moi avaient été fixés avant
d’être coupés. Ceci m’a permis d’en étudier la structure cyto-
logique et de déterminer l’âge des cellules par l'examen de
leur noyau, de la vacuolisation de leur plasma, des réactions
chimiques de leurs membranes cellulaires ; enfin, j'ai pu sur-
tout m’assurer, par l’abondance relative de la chromatine, si
les noyaux des cellules terminales des feuilles étaient en état
de division active. |
Les auteurs anciens, et Lorentz en particulier, n’ont guère
étudié que des feuilles assez évoluées, car les très jeunes feuilles
ont des membranes d’une délicatesse extrême; celles-ci se
déchirent facilement et ne se voient guère sans coloration
chez les cellules très jeunes, bourrées d’un plasma dont l’in-
dice de réfraction est sensiblement le même que celui de la
membrane. Lorentz n’a pas employé de colorants et a fort peu
étudié les très jeunes stades.
Les coupes au microtome ont enfin l’avantage de montrer
les diverses asymétries foliaires, car on peut examiner les sec-
tions d’une même feuille depuis la pointe jusqu’à la base et
toujours avec la même orientation.
Je ne décrirai qu'un petit nombre de types. J’ai en effet
cherché surtout à établir les grandes lignes du développement
de la feuille et spécialement de la nervure.
— 320 —
J'ai montré, dans l’exposé des travaux effectués sur ce sujet,
que certains objets ont été étudiés à plusieurs reprises. Or ce
sont justement les types les plus particuliers tels que :. Fussz-
dens Hedw., Leucobryum Mampe, Polytrichum (Dill.) L.. Le
développement de la généralité des feuilles de Mousses n’a ati
contraire été envisagé que superficiellement.
On sait que les Mousses comprennent trois grandes subdi-
visions, souvent désignées du nom de classes: les Sphagnales,
les Andréales et les Bryales.
Au sujet des Sphagnales, groupe très homogène, j'ai exposé
les recherches d’Hofmeister, Leitgeb, Nägeli, Schleiden,
Schimper sur le développement de leurs feuilles qui me semble
ainsi suffisamment étudié. Il est d’ailleurs assez simple, puis-
qu'elles sont dépourvues de nervure et présentent pour
toute complication la différenciation en cellules chlorophyl-
liennes et en cellules hyalines. Je n’en parlerai donc pas.
Chez les Andréales, Kühn a étudié le développement des
feuilles dépourvues de nervure en les examinant à plat. Berg-
gren (26) a décrit l’anatomie et un peu le développement des
Andreaea costata, mais à une époque déjà lointaine (1867) ou
la technique moderne était inconnue. Je reprendrai l'étude de
2 Andréales de ce type: l’Andreaea crassinervia Bruch et
VAndreaea augustata Lindberg. Ces Mousses archaiques ont
généralement leurs cellules alignées en rangées ; ce qui per-
met de suivre assez facilement la cloison médiane de la feuille
(celle que je considère comme la première apparue) et par
suite de voir si l’un des côtés l'emporte sur l’autre quant à
son développement. |
J'étudierai enfin un certain nombre de types de Bryales :
d’abord le Mnium punctatum (L., Schreb.) Hedw., dont je criti-
querai l’étude faite par Nägeli. Puis, comme ce genre possède
le véritable type de la nervure des Mousses, j'en étudierai
“encore une autre espèce : le Mnium undulatum (L.) Weis, dont
jai reconstitué les premierss tades de l’évolution foliaire à l’aide
de mes modeles en plastiline.
Je ne parlerai pas du Polytrichum (Dill.) L., qui représente
un type encore plus évolué que celui des Mnium Dill., et qui
a déjà fait l’objet de plusieurs recherches. Mais j’étudierai
VAtrichum undulatum P. Beauv., car mon travail serait incom-
plet s’il ne traitait pas d’un membre de la famille des Polytre-
_chacées, la plus développée au point de vue de l’organisation
et de la taille de ses représentants.
Le Dicranum scoparium (L.) Hedw. me permettra d'exposer
le développement d’un type dépourvu de sténocystes.
Le Barbula muralis Timm, pourva d’un poil foliaire consi-:
dérable, sera un excellent exemple du développement de cet
organe.
La Funaria hygrometrica (L.) Sibth., qui appartient encore
au type Mnium, en diffère légèrement car elle présente
des cellules ventrales à large lumen et pas d’intercalaire ven-
trale.
Enfin je considérerai le Leucobryum glaucum (L.) Schimp.,
si étudié déjà, aux seuls points de vue de son asymétrie et de
ses initiales foliaires.
Avant de commencer la description de ces développements
je ferai encore une remarque :
Dans ma publication sur l’asymétrie de structure de la ner-
vure foliaire du Mniwm spinosum (Voit) Schwägr. j'avais
employé l'expression de « plan de symétrie morphologique ».
En réalité il peut sembler singulier de parler de symétrie
pour une formation profondément asymétrique. Je remplace
ce concept par celui de « cloison médiane de la feuille » :
c'est celle que je considère comme ayant été la premiere
formée au cours de la segmentation de la nervure. On la
trouvera indiquée presque toujours dans mes dessins par un
trait renforcé.
J’appellerai dans la description de mes coupes transversales :
cloison anticline, toute cloison perpendiculaire aux faces dor-
sales et ventrales des feuilles considérées, ou faisant avec elles
un angle assez voisin de l’angle droit. Une cloison péricline
sera toute cloison parallèle aux lames foliaires et par suite à
peu près perpendiculaire à une cloison anticline quelconque.
Lorsque je décrirai des feuilles vues à plat, le terme de cloi-
son anticline désignera une cloison perpendiculaire au plan
de symétrie de la feuille et le terme de cloison péricline une
cloison parallèle à la nervure et par suite au bord de la feuille.
RE PE
Je marquerai aussi d’un trait de force sur les coupes trans-
versales les cloisons anticlines qui limitent les cellules fon-
damentales (Grundzelle de Lorentz) des nervures. Ces traits en
marqueront encore les limites primitives lorsqu'elles se seront
subdivisées.
Jindiquerai souvent aussi d’un trait de force la limite dor-
sale du faisceau de sténocystes, les limites des eurycystes, et
pour les Andréales le contour des 4 cellules centrales situées
vers la pointe de la feuille.
ÉTUDE DES ANDRÉALES
Je chargeai M. Frey, qui préparait une thèse sur la géo-
graphie botanique du Grimsel de récolter mon matériel
d’Andréales'. Ce col est justement une des rares localités
européennes où l’on trouve, sur des rochers siliceux polis par
les glaciers, de vastes champs de ces curieuses Mousses noi-
râtres et minuscules. Je lui remis quelques petits tubes remplis
de fixateur de Kaiser, en lui recommandant de recueillir le
matériel à l’état humide. C’est ainsi qu’il récolta le 4 août 1917
à Stocksteg (entre Handegg et le col du Grimsel), vers 1700
mètres d’altitude, des plantules d’Andreaea crassinervia Bruch..
Deux jours après, non loin delà, au lieu dit Spitallamme, à
2830 mètres d'altitude, il récolta une espèce plus gracile,
reconnue plus tard par M. Pierre Culmann? comme étant
VAndreaea augustata Lindberg. Cette dernière espèce, qui
appartient comme l’Andreaea crassinervia Bruch au groupe des
Andréales à nervure dites « costatae », a été découverte sui-
vant Limpricht® par J. Breidler le 19 juillet 1884 en Styrie,
au Hohensee, proche du Schwarzsee, près de Saint-Nikolai in
der Sülk, à 1650 mètres d’altitude. Limpricht n’en signale pas
d’autres localités. M. Culmann m'a dit l'avoir rencontrée en
divers points de la Suisse et du Tyrol et a eu l’amabilité de
me communiquer des fragments d’un échantillon de Breidler
lui-même, provenant de la localité où il a découvert cette
espéce. J’ai fait des coupes a la main dans ces fragments et
59
jai trouvé un aspect tout à fait identique à celui de mon maté-
1. Je travaillais alors au laboratoire de l’Institut botanique de Berne et étant
interné militaire français il m’était interdit d'approcher de la région du Grimsel où
se trouvent des fortifications suisses à quelque distance.
2. Ce savant bryologue a eu également l’amabilité de vérifier la détermination de
mon matériel d’Andreaea crassinervia.
3. Dans Rabenhorst, Kryptogamenflora(27), page 145. Vierter Band-Erste Abteilung.
MODE
riel. Cette espèce a une nervure bien moins forte que celle de
l’Andreaea crassinervia Bruch et est aplatie jusqu’à l’extrême
pointe. La pointe de la feuille de l’Andreaea crassinervia Bruch
est au contraire cylindro-conique et sa coupe a un contour
nettement circulaire.
Le matériel d’Andréales, récolté les 4 et 6 aout 1917 à l’état
humide, me fut rapporté le 22 août 1917 ayant été conservé
jusque-là dans le fixateur. Je le lavai à l’eau et le fis passer
dans la série des alcools comme je l’ai déjà décrit. Mais, ne
voulant pas couper ce matériel de suite, je le fis repasser
par toute la série des alcools, depuis l’alcool pur jusqu’à
Palcool à 70°. Je ne pouvais en effet laisser dès le début mes
Andréales dans l’alcool à 70°, car les alcools faibles contractent
trop, ni dans l’alcool absolu, car celui-ci les aurait rendues trop
friables. Les feuilles âgées de Mousses sont toujours difficiles
à couper au microtome et Justement ces espèces d’Andréales
présentent des feuilles particulièrement fragiles. C’est pourquoi
je les ai conservées dans l'alcool à 70° qui ne les a pas con-
tractées, car le plasma avait été suffisamment durci par passage
préalable dans l'alcool absolu.
J'ai inclus à la paraffine, au mois de décembre de la même
année, un certain nombre de tiges. Je trouvai le sommet de
la plupart de celles que je coupai occupé par des archégones.
Je ne pus observer l’initiale d’une tige principale que dans un
seul cas. Je dus couper en mai 1918 un certain nombre
d’autres tiges. Je constatai que le séjour prolongé dans
l'alcool à 70° n’avait pas nui à mon matériel. Je colorai en géné-
)
ral au congocorinthe et à la fuchsine-vert d’iode, ce qui m’a
donné d’excellents résultats. Le protoplasma des Andréales.
est chargé de granulations prenant les colorants, fait que je
n’ai pas observé dans les autres Mousses étudiées. La chroma-
tine est rassemblée en une seule masse dans le noyau, comme
chez presque toutes les Mousses. Les noyaux occupent chez les.
Andréales une grande partie des cellules qui sont très petites.
4
eS as
Description du développement de la feuille
de l’'Andreaea Crassinervia Bruch',
Je décrirai tout d’abord laspect d’une coupe (fig. 1) passant
par la cellule initiale d’une tige et ou l’on voit la base de feuilles
d’âges très différents. J’attire ici l'attention sur la netteté avec
laquelle se manifeste l’asymétrie foliaire due au recouvrement
des feuilles l’une par l’autre. Le noyau n de la cellule initiale de
la tige est bien plus gros que tous les autres noyaux de la coupe
et cependant la cellule qui le contient n’est pas plus grande
que beaucoup d’autres. La forme de ce noyau est légèrement
elliptique (le grand axe qui a 6*,r est dirigé vers le pre-
mier segment s, détaché par linitiale. Le plus petit axe n’a
qu'une dimension très légèrement inférieure de 5*,5). Toute
la chromatine du noyau est rassemblée en une seule masse
d'un peu moins de 2p de diamètre. En général la masse
chromatique est plus importante par rapport au caryo-
plasme dans l'initiale d'une tige de Mousse. La cellule
initiale, d’un aspect nettement triangulaire, comme chez
la plupart des Mousses, est presque entièrement remplie par
le noyau. Les 3 côtés de l’initiale ne sont pas des lignes
droites mais des arcs de circonférence de plus ou moins
grand diamètre. Les cordes de ces arcs ont a peu près 104.
soit 1/100 de millimètre de longueur. Les segments ont leur
côté droit le plus large (ceci se constate très nettement dans
le »° segment s,). C’est d’ailleurs de ce côté que la feuille f
apparait détachée du segment par la paroi foliaire c. L’ébauche
de la première jeune feuille /, est bien symétrique. Nous la
voyons formée de quatre cellules séparées par des cloisons
anticlines. C'est le premier stade de division (Fächerung)
1. Lorsque je parlerai du côté droit ou du côté gauche d’une coupe de feuille je
supposerai toujours l’observateur placé suivant l’axe de la tige, la tête du côté de
Vinitiale de celle-ci et regardant le côté ventral de la feuille.
Pour les coupes des segments détachés par linitiale de la tige, je parlerai de leurs
côtés droit et gauche en supposant l’observateur placé comme dans le cas précédent.
OÙ
re)
de
d'une jeune feuille, tel qu’on le retrouve chez toutes les
Mousses. Mais déja dans la 2° feuille /, nous voyons une
inégalité dans le développement des deux côtés. C’est du
côté droit de la première cloison, marquée par un trait
de force, qu’une cellule s’est divisée pour donner deux
couches à la lame foliaire. La nervure apparait donc asymé-
triquement. On peut m’objecter que j'ai placé ce trait de force
pour les besoins de la cause et que j'aurais pu tout aussi bien
le placer de l’autre côté de cet embryon de nervure. Mais il
faut remarquer qu’a partir de la feuille 4 nous pouvons en
général déterminer la place de cette première cloison sans
ambiguïté et que nous constaterons toujours que le côté
droit est le plus allongé et le plus développé. D'ailleurs
nous voyons que ce côté droit de la feuille /, a toute la place
nécessaire pour se développer entre les feuilles 7, et /; alors
que le côté droit est resserré entre le segment s, et un poil p
qui se trouve sur la face ventrale de la feuille f,. La feuille 7,
ne nous montre pas grand’chose d’intéressant, car elle a
été rencontrée par la coupe dans une région si proche de
sa base, quelle se trouve encore au stade « en éventail »,
début du cloisonnement. La coupe de la feuille /, a le
côté droit plus allongé que le gauche et plus différencié. ©
Dans la feuille /; la lame foliaire s’est dédoublée en 2 cel-
lules d à droite pour venir élargir la nervure. Celle-ci peut
ètre considérée comme provenant de 4 cellules fondamen-
tales (grundzelle au sens de Lorentz), 2 à droite et 2 à gau-
che du trait de force ; on voit que les 2 cellules fondamen-
tales de gauche se sont simplement dédoublées par des
cloisons périclines e pour donner chacune 2 cellules : l’une
ventrale et l’autre dorsale, tandis que la cellule fondamentale
située immédiatement à droite de la cloison médiane s’est
divisée en 4 cellules superposées donnant ainsi 4 couches
à la nervure en cet endroit. La cellule fondamentale
extrême de droite de la nervure primitive s’est divisée d’abord,
par une cloison péricline, en une cellule ventrale subdivisée
ultérieurement en 2 cellules v et une cellule dorsale, subdi-
visée en une cellule externe x et une cellule interne 7. La
feuille 6 présente une lame foliaire formée de 6 cellules à
Se RE
droite et de 5 cellules seulement à gauche. La nervure pro-
vient originairement à ce niveau comme dans la feuille /,, de
2 cellules fondamentales de chaque coté. Elles se diviserent
d’abord chacune par une cloison péricline comme toujours.
Mais le cloisonnement ne se poursuivit pas de méme dans les
cellules issues des 2 cellules fondamentales centrales. Dans
celle de gauche la cellule ventrale v, resta indivise alors que
dans celle de droite la cellule ventrale primitive subit une
division au moyen d’une cloison anticline et donna ainsi
2 cellules ventrales v,. Mais d’autre part on peut remarquer
que la cellule dorsale d, correspond à 2 cellules d,. La
cloison péricline qui a donné naissance à ces 2 cellules d,
doit être due à la pression exercée par le poil p,. Je ferai
souvent remarquer au cours de ce travail qu’une pression
exercée sur un tissu provoque en général l'apparition de
cloisons perpendiculaires à la direction de cette force. Les
forces d'extension produisent le même effet. La coupe de la
feuille f, nous en offre un assez bel exemple. La feuille /, exerce
une pression sur le côté gauche de la feuille 7; et l’applique
contre la feuille /f;. La feuille /, fait de même pour le côté
droit de la feuille /; qu’elle applique contre les feuilles /,
4
et
fs. Par suite la feuille /;, comme toutes les feuilles en général,
est convexe du côté dorsal et concave du côté ventral. Le
côté ventral est donc comprimé et le côté dorsal dilaté. Cette
contraction amène, du côté ventral, la formation de cloisons
telles que €, et ¢, perpendiculaires à la direction de la com-
pression. Du côté dorsal, la dilatation a amené la formation
d’une sorte de tissu palissadique, formé de cellules très
allongées dans la direction perpendiculaire à la face dorsale.
La feuille /, nous montre en d, un fort bel exemple du même
fait. Je ferai remarquer que plus les cellules épidermiques
dorsales sont rapprochées de la cloison médiane, c’est-à-dire
de l'endroit ou la concavité de la feuille est la plus forte et où
par suite la force d'extension est la plus grande, plus elles
sont hautes (voir les cellules épidermiques dorsales des feuilles
f; et fo); c’est de plus du côté droit des feuilles (côté qui est le
plus long qui est le plus recourbé et, soumis à une force de
traction) que les cellules dorsales sont les plus hautes. Dans
— 40 —
la feuille /, ces cellules dorsales ont pris un si grand accrois-
sement qu'elles ont donné naissance à 5 cellules qui forment
une couche interne. Sous l’action d’une compression, due au
poil p; et au bord de la feuille /;, il s’est produit une cloison
péricline c,. Lorsqu'on regarde la coupe de f; on voit que le
côté droit est nettement plus effilé que le côté gauche, plus
épais et plus court; pourtant la position de la cloison médiane,
là où je l’ai placée, n’est pas douteuse. 3
On peut remarquer encore dans cette coupe (fig. 1) les
nombreux poils qui se trouvent entre les feuilles du point
végétatif. On en voit ainsi vers tous les sommets de tiges
de Mousses. Chez les Andréales ils sont trés particuliers :
formés d’une grande cellule en massue, a parois fortement
épaissies à l’état adulte, portée par 2 ou 3 petites cellules
courtes à parois bien moins épaissies. Ils sont d’ailleurs
figurés dans des traités généraux, comme dans les Pflanzen-
familien de Engler et Prantl.
Je vais maintenant décrire une série de feuilles appartenant.
à une pointe de tige que j'ai découpée au microtome en série
régulière de coupes d’une épaisseur uniforme de 15 micra.
Ceci m’a permis de reconstituer en plastiline les feuilles qui
entouraient la pointe de cette tige, depuis les stades les plus
jeunes jusqu’à un stade très proche de l’état adulte. La planche
photographique double n° I présente ces reconstitutions pho-
tographiées par M. Cintract. Les figures I à VIII de cette
planche montrent la série complète des feuilles depuis la
plus jeune (fig. 1) jusqu’à la 8° (fig. VIID, qui est presque
arrivée à l’état adulte. On remarque de suite que la
feuille VIII, qui devrait être la plus grande, étant la plus
âgée, est bien moins longue. que ‘la. feuillé Wieser
une irrégularité comme on en rencontre à chaque instant
dans la nature et ceci montre bien que mes reconstitutions
ont été faites le plus fidèlement possible et ont par suite
une valeur documentaire.
J'ai indiqué sur les photographies : par un trait plein
les coupes que jai figurées, et par un trait en pointillé
celles qui ne l’ont pas été. Je les ai numérotées depuis la
pointe jusqu’à la base dans chaque feuille. La distance
à
sù is
Ru Ed dr À
Le. Pro
2
;
,
+
a ees
comprise entre 2 de ces lignes représente 15 micra. On
constate du premier coup d’eil, que la feuille de lAn-
dreaea crassinervia Bruch possède une croissance interca-
laire et surtout une croissance basilaire très intenses. Exa-
minons spécialement la partie basilaire engainante de la
feuille. Elle ne commence a faire son apparition que dans
la feuille II] et seulement dans la coupe inférieure. Les
feuilles I et II en sont totalement dépourvues. On la trouve
dans 2 ou 3 coupes de la feuille IV, 3 ou 4 de la feuille V,
et à peu près 5 coupes de la feuille VI. Mais brusquement,
dans la feuille VII, les ailes de la gaine remontent de la
coupe basilaire, qui porte le numéro 54, jusqu’à la coupe 38,
par conséquent sur une hauteur de 16 coupes. La gaine de
cette feuille atteint donc 3 fois la hauteur de celle de la
feuille précédente, alors que la longueur de la feuille elle-
même est à peine supérieure. La gaine de la feuille VIII
ne remonte pas plus haut que celle de la feuille VIT, mais
elle est bien plus large. Si nous comparions d’autres seg-
ments des feuilles, nous constaterions un fait analogue. L’in-
tensité de l’accroissement se déplace donc, au cours du déve-
loppement, de la pointe vers la base de la feuille.
La figure 2 montre l’aspect de la coupe passant par l’ini-
tiale de la tige. L’asymétrie foliaire est bien moins nette que
dans la figure 1. Cette coupe (fig. 2) permet de reconnaitre
Page réel des diverses feuilles, car on voit non seulement les
dimensions de leurs contours et la différenciation de leurs
tissus, mais encore la position qu’elles occupent les unes
par rapport aux autres. Ceci fait mieux comprendre l’asy-
métrie de la base foliaire due au recouvrementdes feuilles les
unes par les autres. L’initiale de la feuille étant a un seul pan,
sauf dans de rares exceptions, il ne peut exister d’asymétrie
due au fonctionnement de cette initiale et c’est ce que nous
constaterons.
Je décrirai la structure de chaque feuille l’une après l’autre
en la comparant a celle de la feuille immédiatement plus
Jeune. Ceci me permettra de suivre tous les détails du “déve-
Joppement de chacune des parties essentielles.
Re
Feuille I.
Cette très jeune feuille ne se voit que dans 2 coupes.
Elle a par suite 30 micra ou 1/33 de millimètre de hauteur.
Il faudra done qu’elle effectue une longue croissance pour
arriver a la taille adulte, qui dépasse souvent 1 millimetre
de longueur. Je ne parlerai pas de la coloration des mem-
branes cellulaires qui est nulle ou légèrement rose (colo
ration due au congocorinthe) ni de leur épaisseur très faible.
La pointe de cette jeune feuille nous apparait formée par
une cellule remplie d'un plasma bien dense, à contour
elliptique ayant 16 p» sur 13, en coupe transversale. Cette
cellule contient un noyau bien formé d’un diamètre de 5*,6
et possédant une masse chromatique de 1*,6 de diamètre.
En abaissant la mise au point du microscope, j'ai observé un
autre noyau indiquant une autre cellule. Ce noyau n’a plus
qu'un diamètre de 4*,8 et son nucléole n’a plus guère qu'un
micron. La cellule initiale, à en juger par son noyau, doit donc
jouer réellement encore le role d’initiale. Néanmoins, si l’on
mesure le noyau de la cellule initiale de la tige sur laquelle
est fixée cette feuille I (qui est représentée au centre de la
figure 2) on constate que sa masse est sensiblement égale à
celle du noyau'de Vinitiale de la feuille 1, mais le diamètre en
est de 5 y seulement. Le rapport de la quantité de chromatine
à la masse du noyau est done déjà plus faible dans Vinitiale
de cette très jeune feuille, que dans l’initiale de la tige qui la
porte. Nous avons indiqué plus haut les dimensions du noyau
de la cellule initiale d’une autre tige de cette espèce (repré-
senté au milieu de la figure 1). Je rappelle ici que ces dimen
sions étaient de près de 2 micra pour la masse chromatique
et variaient entre 6*,1 et 5*,5 pour le noyau entier. Les rap-
ports nucléaires sont donc comparables à ceux trouvés dans
l'initiale de l’autre tige.
J'ai dit que la feuille I présentait une pointe formée de
2 cellules placées l’une sur l’autre. Nous retrouverons cette
structure même dans les feuilles adultes. Plus bas, et toujours
dans la première coupe, nous voyons apparaître la première
sa tissée
Leg 064
5 Le et
— 39 —
cloison de la jeune feuille. Elle est placée dans la direction
dorso-ventrale. C’est donc une anticline quise produit d’abord,
comme chez toutes les Mousses étudiées jusqu'ici. Chacune
des 2 cellules ainsi formées possede un noyau d’environ
3,5 de diamètre, pourvu d’un nucléole de grandeur voi-
sine du micron. Ces noyaux ont donc des dimensions 2 fois
moindres que celles du noyau de la cellule initiale. Il est vrai
qu'ils sont dans des cellules de volume également 2 fois
moindre. Dans la 2° coupe de cette jeune feuille (/;, fig. 2) nous
voyons le nombre des cellules porté à 4 par l’addition de
2 cloisons anticlines placées parallèlement à droite et à gauche
de la première cloison, ce qui donne à la coupe de cette
jeune feuille l’aspect «en éventail » bien connu et dont j'ai
déjà parlé plusieurs fois ».
Feuille IT.
Cette feuille se rencontre dans 4 coupes. Elle a donc à peu
près 4><15=45 micra, soit 1/20 de millimètre de longueur.
Le premier noyau cellulaire, que l’on aperçoit (fig. 3) à la
pointe de cette feuille, possède des dimensions sensible-
ment égales à celles des noyaux du stade en éventail de la
feuille I, c’est dire qu'il ne diffère en rien de tous les autres
noyaux des feuilles. On n’a donc déjà plus, dans une feuille
ayant à peine atteint le vingtième de sa grandeur définitive,
de cellule initiale ayant des caractères cytologiques qui per-
mettent de la distinguer. Plus bas on trouve un noyau de taille
également très comparable à celui de l’initiale. On a donc
encore ici une pointe de feuille formée de 2 cellules superpo-
sées. Dans la coupe 2 (fig. 4) on voit 4 cellules disposées en
quadrant, mais on reconnait parfaitement que la première
cloison est apparue dans le sens dorso-ventral de la feuille :
cest la cloison anticline a (fig. 4). Les 2 autres cloisons
formées, qui sont périclines, ne sont pas exactement placées
dans le prolongement l’une de l’autre et ne forment donc cer
tainement pas une même cloison. Leur apparition est par con
sequent postérieure à celle de la cloison a (fig. 4). Nous avons
affaire ici à un mode de cloisonnement tout particulier qui dis-
— ho —
tingue nettement l’Andreaea crassinervia Bruch de l’Andreaea
angustata Lindberg. C’est ce qui donne un aspect cylindro-
conique à l'extrémité des feuilles de cette première espèce.
A l’état adulte il n’y a guère que 2 étages de cellules, qui
restent ainsi sous forme. de pur quadrant indivis. Dans la
3° coupe (fig. 5) nous voyons les 2 cellules médianes de la
feuille divisées chacune par une cloison péricline ; c’est la
première ébauche de la nervure remplissant toute la pointe
de la feuille. On peut remarquer qu’elle est bien symétrique.
La partie de feuille intéressée par cette coupe possédera à
l’état adulte le plus grand nombre de couches cellulaires.
C’est à cet endroit qu’on rencontre généralement chez toutes
les Mousses la plus haute différenciation, mais on ne peut
guère employer ce terme ici, car les cellules des feuilles de
ce groupe sont assez semblables.
Dans la coupe basilaire f, (fig. 2) nous trouvons le stade en
éventail. Cependant la forme générale de la coupe n’est plus
une ellipse conime précédemment, mais un croissant de lune à
côté ventral concave. La partie correspondante de la feuille
donnera en se développant la gaine, munie d’un limbe à une
seule couche cellulaire, alors que teut le reste n’est formé
que de la nervure.
Cette tres jeune feuille contient donc les premiers rudi-
ments des 4 parties principales que je distingue dans une
feuille adulte. |
On peut remarquer dès maintenant combien est fausse la
méthode consistant à déduire le développement de l’aspect
des coupes faites de la pointe à la base d’une feuille à l’état
adulte. Lorentz (12) a pu soutenir cette méthode dans l'étude
du Timmia austriaca Hedw., et pour beaucoup de Mousses elle
peut en effet suflire. Mais je montrerai que, par suite de
cloisonnements, une portion de feuille ayant pour origine le
stade en quadrant peut fort bien ressembler à une zone qui
dérive du stade en éventail.
Feuille LIT.
Cette feuille a été débitée en 9 coupes de 15 micra chacune.
Elle avait donc 135 y de hauteur ou 0"",135. Nous voyons ici
PROS ee PP ne
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an
la pointe de la feuille occupée par une cellule qui n’était
certainement plus une initiale. En effet, la première coupe
nous apparaît (fig. 6) comme un petit cercle de 12 y de dia-
mètre limité par une circonférence de coloration violacée.
Cette coloration est la marque d’une transformation de la
- membrane cellulaire qui, au lieu de se colorer en rose par le
congocorinthe, fixe le mélange fuchsine-vert diode. De plus,
à l’intérieur de la cellule initiale, j'ai bien vu une masse
plasmatique mais je n'ai pu y distinguer nettement de
noyau. I] doit exister encore mais sans pouvoir se diviser.
L'activité de l’initiale foliaire est donc très éphémère chez
les Andréales. _
Dans la 2° coupe de la feuille 3, nous voyons le stade en
quadrant (fig. 7). Chaque cellule est munie d’un noyau. Il n’y
a qu'un très faible début de coloration violette dans les
parois cellulaires. Tout le reste de la feuille possède au
contraire des membranes se colorant en rose par le congo-
corinthe. C’est donc la pointe de la feuille qui perd tout d’abord
son caractère méristématique.
La figure 8 représente la mise au point supérieure et la
figure 9 la mise au point inférieure de la coupe 2 de la
feuille 3. Nous voyons ici le début du cloisonnement des
quadrants. La partie cylindro-conique, dont les coupes appa-
raissent sous forme de quadrants subdivisés, n’a donc qu’une
hauteur de 15 micra, comme celle dont les coupes sont for-
mées d’un quadrant indivis. La partie à section transversale
elliptique a pris au contraire ici un accroissement énorme.
Elle s'étend sur 5 coupes (fig. 10 à 14), alors que la partie
engainante ne comprend encore qu'une coupe (}f;, fig. 2). Ce
qui caractérise la structure de cette partie à coupe transversale
elliptique c’est l'existence de 4 cellules zau centre. Le développe-
mentestcomplètement différent de celui de lazone précédente:
il apparaît ici 3 cloisons anticlines (11, 22, 2’2’) avant qu'il ne
se produise aucune cloison péricline. La nervure a donc pour
origine 4 cellules fondamentales (Grundzellen au sens de
Lorentz) dans toute la partie de coupe elliptique. Puis appa-
raissent 4 cloisons périclines, deux à deux, à peu pres dans le
prolongement l’une de l’autre, et qui achèvent la délimitation
— 42 —
des 4 cellules internes 2, des dorsales d et des ventrale sv
(fig. 10 à 14). La partie de la feuille dont les coupes sont à
contour circulaire avait a l’origine 2 cellules fondamentales
seulement. Le nombre des cellules fondamentales qui donnent
naissance à la nervure augmente donc vers le bas. C’est ainsi
que tout près de la base (fig. 14), dans la 8 coupe, la nervure
est formée de 6 cellules fondamentales.
La partie engainante, dont la coupe est en forme de crois-
sant de lune (f;, fig. 2), présente une structure très simplifiée :
des cloisons anticlines telles que @ apparaissent dans les
cellules dorsales primitives, formées par la première division
de chaque cellule fondamentale au moyen d’une cloison péri-
cline.
Feuille IV.
Cette feuille a 255 micra, soit 1/4 de millimètre de lon-
gueur. Sa pointe nous montre tout d’abord une différenciation
bien plus avancée. Dans la premiere coupe (fig. 15), on voit un
cercle de 11*,6 de diamètre avec un plasma assez clair à l’inté-
rieur. Dans la 2° coupe (fg. 16) apparaît une cloison orientée
dans le sens dorso-ventral. Dans ces 2 premières coupes
toutes les membranes, même la cloison anticline de la 2° coupe,
présentent la teinte brune caractéristique des Andréales.
Cette coloration naturelle apparait donc elle aussi à la pointe |
de la feuille, qui ne se développera certainement plus.
La coupe 2 (fg. 16) montre qu'on peut donc avoir un stade
intermédiaire durable entre la cellule unique et le quadrant
indivis. La 3° coupe (fig. 17) présente le stade du quadrant
indivis : les parois cellulaires sont ici colorées en violet, les
noyaux cellulaires se voient nettement. La 4° coupe (non
figurée) et la 5° (fig. 18) présentent un mode de cloisonnement
comparable à celui de la figure 9 : dans chaque quadrant il
apparait d’abord une cloison telle que c (fig. 18), parallèle à
l’un des diamètres (ici dd) qui délimitent les quadrants ; puis
il se produit une cloison e perpendiculaire a la première (ici c)
et parallèle à l’autre diamètre (ici ff).
Cette structure, comprenant 4 cellules internes entourées
extérienrement de 8 cellules, peut se compliquer par l’adjonc-
|
*
4
PTS ee
7. “rs!
ce pee
tion dans les cellules externes de cloisons qui augmentent
leur nombre en se placant perpendiculairement a la surface
extérieure du corps (Voir les cloisons a, 6, c des figures 19
et 20). La coupe 3 (fig. 8 et 9) de la feuille III forme donc
une zone qui correspond a la zone des coupes 4 a 7 (fig. 18
à 20) de la feuille IV. Dans les figures 18 à 21 on est frappé
par la hauteur des cellules périphériques formant une sorte
de tissu én palissade (encore plus apparent dans les feuilles
plus âgées). Ceci est probablementen rapport avec l’assimi-
lation chlorophyllienne, qui doit se produire surtout à ce
niveau comme l’a déjà fait remarquer l’abbé Morin [page 14 de
sa these (30)|. Ce dernier a observé également que les cellules
du limbe deviennent 2 à 3 fois plus hautes que larges. Cet auteur
semble avoir étudié Andreaea rupestris ? perichaetialis Zett.,
Blythii Br. Eur. et falcata?. La lame foliaire, à laquelle est
généralement dévolue la fonction chlorophyllienne, est réduite,
en effet, chez Andreaea crassinervia Bruch, à une gaine basi-
laire recouverte en partie par les feuilles voisines. La feuille
IV bis de la planche photographique I, qui représente la
feuille IV vue de profil, montre fort bien ce renflement de la
feuille à la base de son tiers supérieur, là où se trouve ce
tissu palissadique.
I] peut y avoir plus de 4 cellules internes, même au stade
ayant pour origine des quadrants: ainsi, dans la 8° coupe, la
cellule €, (fig. 21).
Les coupes 9 à 11 (fig. 22 à 24) sont les homologues des
coupes 4 à 7 (fig. 10 à 13) de la feuille III, car elles ont pour
origine 4 cellules fondamentales seulement et leur contour
est elliptique. Nous y constatons l’apparition des cellules ¢,,
CS CCE C;.
La coupe 11 (fig. 24) présente en un point 5 couches cellu-
laires, par suite de la formation d’une cloison péricline dans
la cellule épidermique ventrale de gauche. C’est donc a la
base de la zone à coupe elliptique, à l’instant où la coupe va
devenir plane du côté ventral, que la nervure présente le
maximum de couches cellulaires. Ici, comme dans la majo-
rité des Mousses, c’est au-dessous du milieu de la feuille
que se trouve le plus grand développement (Au niveau de:
PEON Lu
la 11° coupe à partir de la pointe dans cette feuille débitée
en 17 coupes). |
Dans la feuille IV chacune des cellules dorsales provenant
des 2 cellules fondamentales médianes s’est divisée en deux
au moyen d’une cloison anticline, donnant ainsi 4 cellules
dorsales d dans les coupes 9 à 14 (fig. 22 à 27) au lieu de
2 cellules dorsales d (fig. 10 à 12) dans la feuille III.
Nous avons enfin dans la coupe 10 (fig. 23) un mode de divi-
sion très spécial de la cellule fondamentale médiane de gauche :
la première cloison formée dans cette cellule fondamentale
est bien, comme c’est la règle, une cloison péricline p (fig. 23)
qui amène la formation d’une cellule dorsale et d’une cellule
ventrale. Mais la cellule dorsale au lieu de se subdiviser au
moyen d’une cloison péricline, comme dans les figures 22 à 28
(sauf dans la fig. 23), se divise par une cloison anticline a
(Ag. 23).
Les figures 25 et 26, qui représentent les 12° et 13° coupes de
la feuille IV, nous montrent une zone dérivant non plus de
4 cellules fondamentales mais de 7 ; soient 4 à gauche et 3 à
droite. La coupe de la feuille est sensiblement ovoide dans
cette zone. Ces coupes 12 et 13 (fig. 25 et 26) correspondent
donc à la seule coupe 8 (fig. 14) de la feuille III. Il y a encore
dans cette zone, comme dans la précédente, 4 cellules dor-
sales d. |
Dans les coupes 14 et 15 (fig. 27 et 28) il y a autant de
cellules fondamentales d’un côté que de l’autre. Mais dans
la coupe 16 (fig. 29) il ya 5 cellules fondamentales à gauche
contre 4 à droite (fig. 29) à la mise au point supérieure et 6 a
gauche contre 5 à droite à la mise au point inférieure (en /,,
fig. 2). Ceci est la marque de l’asymétrie due au chevau-
chement des feuilles l’une sur l’autre. Celle-ci n’apparaît pas
tout au début, car dans les feuilles I, II et III on ne trouvait
pas trace de cette asymétrie. La feuille ici est donc bien symé-
trique au début, comme l’affirmait Hofmeister pourles Mousses
en général. Les coupes 12, 13 et 14(/ig.25 à27)correspondent à la
seule 8° coupe (fig. 14) de la feuille III.
La coupe 14 (fig. 27) est le début d’une zone intermédiaire
entre la gaine etla partie moyenne de la feuille. Dans cette zone
fale Lain
eG —
\ .
le côté ventral est a peu près plan alors que le côté dorsal est
bien plus fortement bombé que dans la zone précédente dite
« à coupe biconvexe ». Le processus que nous avons décrit
pour la coupe 10 (fig. 23), dans le cloisonnement d’une des
cellules fondamentales médianes, se reproduitici a la base de
la feuille et marque la simplification de structure et la diminu-
tion d’épaisseur qu’on retrouve généralement chez toutes les
Mousses. On constate que cette réduction se produit asymé-
triquement : elle commence, d’abord par le côté droit. A ce
point de vue, comme en ce qui concerne le nombre de cellules
fondamentales, c’est toujours le côté gauche qui est prédo-
minant. Dans les coupes 15 et 16 (fig. 28 et 29) une cloison
péricline a apparaît tout d’abord dans la cellule dorsale prove-
nant de la cellule fondamentale médiane de droite, comme dans
la coupe 10 (fig. 23) ena. Dans la coupe 16 (fig. 29) on constate
le même fait dans la cellule dorsale provenant de la cellule
fondamentale médiane de gauche (voir 6, fig. 29). On perce-
vait déjà l'indication de ce mode de cloisonnement dans la
coupe 14, où une cloison anticline a (fig. 27) apparait en pre-
mier lieu dans la cellule dorsale provenant de la 2° cellule
fondamentale de droite. Il n’y a plus que trois cellules internes ?
dans la coupe 15 (fig. 28) et une seule dans la mise au point
supérieure de la coupe 16 2 (fig. 29). À la mise au point inférieure
de cette même coupe (/,, fig. 2) nous voyons encore 2 cellules
dorsales et 1 ventrale issues de chaque cellule fondamentale
centrale. Dans la coupe suivante, que je n’ai pas figurée, l’as-
pect est semblable. La structure est donc devenue sensiblement
symétrique à l’extrème base de la feuille : ce qui peut s’ex-
pliquer par la faible épaisseur de cette partie encore méris-
tématique, qui n a pas encore rencontré l'obstacle qu’opposent
les autres feuilles à son accroissement régulier en épaisseur.
Feuille V.
Cette feuille a 390 micra, soit 2/5 de millimètre de longueur.
On peut être étonné de voir sur la planche photographique |
la feuille V terminée par une pointe obtuse. En réalité il n'en
est certainement pas ainsi et j'ai retrouvé dans mes coupes la
EN AG a
pointe de cette feuille (indiquée en pointillé dans la planche
photographique) sous forme d’une initiale nettement à un
pan. Dans la 2* coupe on voit à la mise au point supérieure
une cellule divisée en deux (fig. 30). C’est le stade analogue
à celui de la figure 16. A la mise au point inférieure de cette
coupe j'ai observé le stade en quadrants (fig. 31) ainsi que
dans la coupe 3 (fig. 32). On aperçoit déjà dans cette coupe, a
une mise au point inférieure, une subdivision des quadrants,
ainsi que dans la coupe suivante (fig. 33). Dans ces premières
coupes les parois cellulaires sont brunes et l’on ne voit même
pas la coloration rosée indiquant le cytoplasma. Ce n’est
que dans la 5° coupe (fig. 34) que l’on perçoit nettement le
contenu plasmatique qui ne prend encore qué peu la coloration,
contrairement à ce que l’on observe dans les zones en activité
végétative intense. Ainsi donc, dans cette feuille découpée en
26 tranches égales, les 5 plus proches de la pointe sont formées
de cellules qui, non seulement ne se diviseront plus, mais ont
cessé toute croissance. Ce n’est que dans la coupe 6 (fig. 35),
où le stade à 4 cellules centrales z est réalisé, que l’on voit le
plasma coloré en beau rose par le congocorinthe dans ces 4
cellules centrales ainsi que dans les 2 cellules ventrales v.
Dans la 7° coupe (fig. 36) toutes les cellules ont un plasma
d’un beau rose et l’on distingue même quelques noyaux cellu-
aires. Dans la 8° coupe (fig. 37) il n’y a plus que les parois
périphériques colorées en brun; les parois des cellules inter-
nes ont une coloration franchement violette. La coloration du
plasma est bien plus vive dans cette 8° coupe. En résumé tout
le tiers supérieur de la feuille a donc ses parois brunies.
Les coupes 6 à 19 (fig. 35 à 45) représentent dans cette feuille
la zone dite « à coupe biconvexe » dont chacune des cellules
fondamentales médianes s’est subdivisée typiquement en 2
cellules dorsales d, 2 cellules internes 2 et une cellule ven-
trale v. Naturellement aux 2 extrémités de cette zone la struc-
ture ne correspond pas à cette description. C’est ainsi que
vers la pointe de la feuille (coupes 6 et 7) il n’y a encore que
2 cellules dorsales d (fig. 35 et 36). Il y en a 3 dans la coupe 8
(fig. 37). En ce qui concerne les cellules ventrales c’est à l’autre
extrémité de cette zone que nous trouvons des exceptions :
fig =
ainsi dans les coupes 10 et 11 (fig. 39 et 40) la cellule ventrale
provenant de la cellule fondamentale médiane de gauche s’est
dédoublée donnant ainsi 1 cellule interne supplémentaire v’
(Ag. ho).
On voit sur la planche photographique I que la feuille V,
représentée de profil en V des, présente son maximum d’épais-
seur à la hauteur de la coupe 13. La coupe 14 (fig. 41) montre
très nettement que cette épaisseur remarquable est due surtout
à l’allongement des cellules périphériques formant un véri-
table tissu en palissade, déjà signalé plus haut pour la feuille
précédente.
Immédiatement après ce lieu de plus grande épaisseur la
coupe de la feuille présente un aspect aplati qu'elle conserve
jusqu’à la base de cette zone.
I] n’y a aucune raison de penser que le développement de
la zone a coupe biconvexe se soit produit autrement que celui
des zones comparables des feuilles plus jeunes. Je décrirai
celui-ci d’après la figure 41. La cloison 11 a du se former la
premiere, puis les cloisons 2g2g et 2d2d, limitant ainsi 4 cellules
fondamentales. Chacune de ces cellules fondamentales s’est
divisée par une première cloison péricline m. Dans les
> cellules fondamentales médianes il s’est produit ensuite
d’autres cloisons périclines p isolant 4 cellules internes 2,
> cellules ventrales v et 2 cellules dorsales qui, par 2 cloisons
anticlines, donneront 4 cellules dorsales d. Dans les 2 cellules
fondamentales ne touchant pas la cloison médiane 1r il
apparait en général, après la cloison péricline m, des cloi-
sons anticlines telles que a, plus ou moins inclinées sur la
cloison m, auxquelles succèdent des cloisons périclines telles
que 6 qui augmentent ainsi le nombre des cellules internes en
donnant des cellules homologues des cellules e,c,ese, de la
feuille IV (fig. 23 à 26). Dans la cellule fondamentale qui est
le plus à droite il se produit en général 1 ou 2 cloisons péri-
clines e (fig. 34 à 42), parallèles à la cloison m, avant qu'il
n’apparaisse des cloisons anticlines telles que f (fig. 38 à ha).
Les coupes 17 à 19 nous montrent l’une des 4 cellules dorsales
qui s’est divisée par une cloison péricline pour donner une
petite cellule interne g (fig. 43 à 45). Remarquons que c’est à
— 48 — 7
gauche de la médiane de la feuille que cette cellule g apparait.
L’asymétrie se manifeste donc ici nettement: le côté gauche
étant plus épais que le droit. Plus près de la pointe nous
avons vu que l'inverse avait lieu. Dans la coupe 17 (fig. 43) il y
a2 cellules internes de plus ¢, et €, qui se correspondent symé-
triquement. Cette cellule ¢, se voit encore dans la coupe 19
(fig. 45). On rencontre donc le plus grand nombre de cellules
internes au-dessous de cet endroit où les cellules périphé-
riques forment un tissu palissadique. Be |
Les figures 46 à 48 correspondent respectivement aux coupes
20 à 22 (zone de coupes à contour plan du côté ventral et
très convexe du côté dorsal). Il y a à la base du développement
de cette zone 8 cellules fondamentales, et non plus 4 comme
précédemment ; les 4 médianes se cloisonnent d’abord chacune
au moyen de 3 parois périclines en 1 cellule dorsale, 1
interne et 1 ventrale. Les cellules dorsales se subdivisent
ensuite en général chacune en 2 par une cloison anticline
pour donner 8 cellules dorsales (fig. 46) ou 6 (fig. 47).
La coupe 22-(fig. 48) nous présente une toute autre struc-
ture. Elle a un aspect presque triangulaire, du a l’amincis-
sement brusque des 2 bords de la feuille, et montre l’ébauche
d’une lame foliaire à une couche, sous forme de 2 cellules f
de chaque côté (fig. 48). Il n’y a plus que 4 cellules centrales
correspondant aux cellules que nous avons appelées à dans
les dessins précédents. En effet la cellule fondamentale de
droite s’est divisée par une cloison péricline en 1 cellule
ventrale et 1 dorsale, mais la cellule dorsale au lieu de se
diviser par 1 cloison péricline s’est divisée par 1 anticline
a (fig. 48). Le segment de nervure provenant de la cellule
fondamentale médiane de droite (située entre les parois 11 et
2d2d) (fig. 48) est donc bien moins différencié que celui pro-
venant de la cellule fondamentale médiane de gauche (située
entre 11 et 2929) (fig. 48) d’autant plus que dans ce segment
une des cellules dorsales a donné 1 cellule correspondant a
la cellule g de la figure 43.
Dans les.2 coupes suivantes (les 23 et 24) (fig. 49 et 50) on
constate encore plus nettement cette réduction dans le déve-
loppement des segments du côté droit par rapport à ceux qui
= Hg
leur sont homologues du côté gauche. Le nombre des cellules
internes z est réduit a1 dans les figures 49 et 5o.
Le processus signalé pour le cloisonnement de la cellule
fondamentale médiane de droite dans la figure 48 (production
d’une eloison a) se rencontre dans la figure 46 pour la cellule
fondamentale médiane de gauche et dans la figure 50 dans les
cellules fondamentales médianes de droite et de gauche.
Dans la figure 50 la cellule dorsale d ne s’est pas encore
subdivisée par une cloison péricline. Ceci montre que, dans
ce mode de cloisonnement, c’est bien la cloison @ qui appa-
rait la première et non les cloisons périclines telles que 4
qui viennent subdiviser les cellules dorsales. Comme ces
cloisons 6 se placent en effet souvent dans le prolongement
l’une de l’autre elles pourraient faire croire à l'existence d’une
cloison péricline unique (voir fig. 4g et 50).
Le côté droit de la lame foliaire possède 5 cellules sur la
coupe alors que la partie gauche n’en possède que 4 (fig. 50).
L’allongement de la partie droite est done aussi manifeste
que la simplification de son développement et la réduction de
son épaisseur.
Feuille VI.
Cette feuille a 660 micra ou 0"",66 de longueur. J’ai décrit
les premières feuilles avec un assez grand détail, coupe par
coupe, car elles étaient encore en plein développement. Les
parois cellulaires de leur segmentation primitive et spéciale-
ment celles de leurs cellules fondamentales étaient encore
reconnaissables. Ce n’est plus maintenant que la partie basi-
laire qui présente ces caractères méristématiques. C’est pour-
quoi j'étudierai peu la région dela pointe, qui est restée sem-
blable ace qu’elle était dans les stades précédents. L'étude de
la base foliaire nous montrera le développement de la zone
formant gaine, qui n'avait encore que 3 coupes de hauteur
dans la feuille V.
J’étudierai plus complètement la feuille VIT (la plus longue
de celles décrites ici).
En regardant la planche photographique I on est frappé du
4
= 50, —
fait que dans cette feuille VI, presque aussi grande que la
‘euille VIT, la gaine n’est guère plus développée que dans la
feuille V, notablement plus courte. Ceci nous montre bien
que le lieu du maximum de croissance se déplace de la pointe
à la base de la feuille comme dans une coupe du centre à la
périphérie (fait déjà signalé).
Au point de vue de la coloration des membranes cellulaires,
on ne trouve que la coloration brune de la pointe jusqu’a la
34° coupe. Dans la 35° la coloration violette apparait au centre
et ventralement; on la rencontre Jusque vers la coupe, 42
dans les cloisons du centre de la nervure. Dans cette feuille,
comme dans la précédente, la coloration brune s’étend sur
toute la zone à coupe circulaire et la coloration violette sur
la zone à coupe biconvexe. Dans les feuilles suivantes il n’en
sera plus ainsi, la coloration brune gagnant rapidement la
base de la feuille, précédée de la coloration violette.
Les figures 51 à 53 représentent des coupes de l’extréme
pointe et nous offrent une structure identique à celle déjà
observée chez les feuilles précédentes (fig. 6 à 8, 15 à 17, 30
à 32) sauf l’épaissement un peu plus grand des parois cellu-
laires externes, qui commence par la pointe de la feuille comme
tous les autres processus de différenciation.
Les figures 54 à 58 représentent des coupes dans la zone
ayant pour origine 4 cellules fondamentales. La g° coupe
(fig. 54) montre un aspect très semblable à celui des coupes
7 et 8 (fig. 36 et 37) de la feuille V. L’effilure plus prononcée
du côté gauche vers la pointe est done assez générale puisque
nous la retrouvons dans les feuilles VII (Ag. 65 et 66) et IX
(fig: 103).
A la base de la zone biconvexe on constate une certaine
tendance à la multiplication des cellules ventrales, fait déjà
indiqué dans une zone comparable de la feuille V (fig. 45). Du
côté dorsal il en est de même. Nous voyons dans la zone à
coupe plan convexe un grand nombre de cellules g (fig. 55
à 60), formées par division des cellules dorsales au moyen de
cloisons périclines et qui correspondent exactement aux
cellules g (fig. 43 à 45) de la même zone de la feuille V.
Dans la zone basilaire les coupes 29 à 42 (fig. 60 à 62) ont
Regie 2
du passer à l’origine par un stade analogue à celui représenté
par la coupe 23 de la feuille V (fig. 49). Une seule coupe de la
partie engainante de la feuille V correspond donc a peu près
à 2 coupes de la même zone de la feuille VI. L’accroissement
commence par conséquent à devenir assez intense à la base.
L’asymétrie foliaire est moins marquée dans cette région de
la feuille VI que dans les 2 feuilles précédentes, mais décelable
cependant: en comptant par exemple le nombre des cellules
dela lame foliaire de chaque côté et en comparantles segments
homologues de la nervure issus de cellules fondamentales
symétriques.
Feuille VIT.
Cette feuille a 810 micra soit o"",8 de longueur, c’est-à-dire
quelle a atteint la grandeur de nombreuses feuilles adultes.
En effet la feuille VIII, plus âgée qu’elle mais plus petite, est
presque complètement développée. La feuille VIT n’a plus
guère qu'à acquérir une gaine d'une plus grande largeur.
Dans la première coupe ou l’on aperçoit cette feuille elle
apparait sous forme de 2 cellules, puis, à la mise au point
inférieure, sous forme de quadrants indivis. Dans la coupe
suivante on voit une cellule centrale. Enfin dans la 3° coupe
(fig. 64) nous voyons 3 cellules fondamentales a Vorigine
du cloisonnement et une centrale. La coupe 4 montre 2 cel-
lules centrales et la coupe 5 en montre 4. La pointe de
cette feuille ne semble différer des précédentes que par
Vapparition très précoce de 4 cellules fondamentales à la
nervure : c’est sans doute pourquoi elle est bien moins effilée.
Les coupes 6 et 7 (fig. 65 et 66) nous montrent cette atrophie de
la nervure du côté gauche que nous avions déjà mentionnée
pour la feuille V (fig. 35 à 37) et la feuille VI (fig. 54). Mais
bientôt c’est le côté droit qui s’allonge nettement et c’est de ce
côté qu’apparaissent les cellules internes. C’est ainsi que dans
la coupe 6 (fig. 65) la première cellule interne €, qui se forme
après les 4 cellules internes fondamentales 2 est du côté droit.
Dans la 7° coupe (fig. 66) la cellule ce, est encore du côté droit.
Dans la 20° coupe (fig. 71) c est toujours du côté droit qu’appa-
be =
rait la cellule c,, début du stade à 12 cellules internes. Lorsque
ce stade est complètement réalisé ilse forme encore une cellule
interne de plus c, du côté droit (fig. 76). C’est dans cette
coupe 25 (fig. 76), qui se trouve vers le bas de la zone elliptique,
que se rencontre le plus grand nombre de cellules internes.
En examinant d’ailleurs tous les dessins on constate facilement
qu'il y a toujours beaucoup plus de cellules internes à droite
qu’à gauche. ;
Dès le début de la zone à coupe plan convexe nous voyons
se produire une réduction du cloisonnement, analogue à celle
décrite dans la même zone des feuilles précédentes (voir par
exemple a, fig. 48 pour la feuille V). J'avais alors fait remar-
quer que la cellule fondamentale médiane de droite s'était
divisée par une cloison péricline en une cellule ventrale et
une cellule dorsale, comme toutes les cellules fondamentales :
suis que la cellule dorsale ainsi formée, au lieu de se diviser
] ,
par une cloison péricline pour donner une cellule interne fon-
damentale, s'était divisée au contraire d’abord par une cloison
anticline a. Dans la feuille VIT ce processus se produit dans
la cellule fondamentale de gauche (voir a, fig. 77 à 80). Il
s'étend ensuite également à l’autre côté, dans toute la zone à
coupe concave qui n'a pas encore développé de lame foliaire
formant gaine (voir a et 6, fig. 81 à 86). Je ferai remarquer
que toute cette région intermédiaire n’était même pas indiquée
par une coupe dans la feuille V et dans la feuille VI, car cette
régression n'avait commencé à se produire dans ces feuilles
que dans la zone formant la gaine (voir a, fig. 61 à 63).
Lorsque la face ventrale cesse d’être plane et juste avant
qu'elle ne devienne concave, on constate un allongement et
an amincissement du côté gauche [voir surtout coupe 31
(fig. 80)|. La feuille VI montrait à l'endroit correspondant
une structure analogue (voir la figure 59 qui représente la
coupe 36 de la feuille VI.) Cette irrégularité doit être due à
des pressions exercées par les feuilles adjacentes au même
stade du développement.
La gaine présente ici une grande hauteur et l’on peut.
constater combien son accroissement a été rapide quand on la
compare à celle de la feuille VIT. Dans les feuilles VI et VII
Ce pee
elle apparait à la 42° coupe a partir de la pointe (fig. 62
et 63 pour la feuille VI, fig. 87 pour la feuille VII). Ceci
prouve que la feuille VIT, quia du passer évidemment par un
Stade analogue à celui de la feuille VI, n'a développé récem-
ment que sa gaine foliaire ; celle-ci atteint une hauteur de
_12 coupes, alors qu’elle avait une hauteur de 3 coupes seule-
ment dans la feuille VI. : la gaine a donc quadruple.
Nous voyons, comme pour les feuilles précédentes, que la
zone d’accroissement maxima se rapproche de plus en
plus de la base. En regardant en effet les coupes 42, 44
et 47 (fig. 87 à 89) on voit aisément qu'elles correspondent
a la coupe 23 (fig: 4g) de la feuille V. La division en
4 cellules h (fig. 49) de la cellule dorsale primaire, pro-
venant de la cellule fondamentale médiane de gauche chez
la feuille V, se retrouve intacte dans les coupes 42 et 47
(fig. 87 et 89) de la feuille VII (Dans les figures 49 et 87 les
> cellules À externes sont seules indiquées). Dans la coupe
h4 (fig. 88) les 2 cellules extérieures À se sont subdivisées
chacune par une cloison anticline donnant 4 cellules A’ Il est
frappant de remarquer que c’est la cloison péricline a (fig. 87)
qui s’est d’abord formée et que les 2 cellules ainsi séparées par
cette cloison @ se sont subdivisées chacune par une cloison
péricline p (fig. 87); ces 2 cloisons périclines p se trouvent à
peu près exactement dans le prolongement l’une de l’autre.
La cloison anticline 6 (fig. 87 à 89) n'existait pas encore dans
la figure h9. La première cellule ventrale de droite de la
figurs 47 a donné 2 cellules vd’ (fig. 87 à 89). La 2° cellule fon-
damentale de droite à partir de la cloison médiane, qui n’était
encore divisée que par une cloison péricline dans la figure 5o,
donnant ainsi une cellule dorsale et une ventrale /, montre un
développement bien plus grand dans les figures 87 et 88. La
cellule ventrale donna 2 cellules ve dans la coupe 44 (fig. 88).
La cellule dorsale se divisa d’abord en 2 par une cloison
anticline 7 (coupes 42 et 44, fig. 87 et 88), les 2 cellules ainsi
formées se divisèrent ensuite chacune par une cloison péricline
_ dans la figure 87 (coupe 42) alors que la cellule de droite restait
ndivise # dans la coupe 44 (fig. 88). Dans la coupe 47 (fig. 89)
a 2° cellule fondamentale de droite a donné seulement 3 cel-
gee
lules superposées au moyen de 2 cloisons périclines (fig. 89).
D’ailleurs cette coupe 47 (fig. 89) de la feuille VII ne peut dé-
river directement ni du stade représenté par la coupe 23 (fig.
4g) ni de celui que montre la coupe 24 (fig. 50) de la feuille
V. Car s'il peut provenir d’un stade analogue à la figure Ag.
en ce qui concerne le cloisonnement de la 2° cellule fonda-
mentale de droite, il ne le peut pour la 2° cellule fondamen-
tale de gauche qui se rattache au contraire au type de la
coupe 24 (fig. 50). En effet, la cellule dorsale primaire provenant
de cette cellule fondamentale s’est divisée par une cloison
anticline m (fig. 50) comme dans les coupes 47, 48, 5o et 51
(voir m, fig. 89 à 92). Il est également curieux de constater la
facon dont se divise en 4 cellules, par une cloison péricline
suivie de 2 anticlines, la cellule de la nervure qui avoisine
immédiatement la lame foliaire dans ces coupes de base (voir
les cellules marquées n dans les figures 87 à 92). On voit qu'il
y a en général un groupe de 4 cellules nm de chaque côté de
la nervure. Dans la formation d’un tel groupe la cloison péri-
cline apparaît la première, car nous observons dans les coupes
he et 50 (fig. 87 et g1) une cellule fondamentale qui a donné
4 cellules n en se cloisonnant d’abord au moyen de la mem-
brane o (fig.'87 et 91). La cellule dorsale ainsi formée s’est
divisée par une anticline m (fig. 87 et gt) alors que la cellule
ventrale n’a pas changée. Les coupes 48, 5o et 51 (fig. go à 92)
de la feuille VIT dérivent visiblement d’un stade très comparable
à celui représenté par la coupe 24 (fig. 50) de la feuille V.
Au sujet du développement de la lame foliaire on voit,
d’après les figures 90 à 92, que les divisions se produisent
n'importe ou et non pas uniquement pres de la nervure ou
du bord de la feuille. (On reconnait qu’une cellule vient de
se diviser lorsque les noyaux des 2 cellules-filles sont en face
l’un de l’autre et assez rapprochés de la jeune paroi qui vient
de se former, la ligne qui joint leurs centres étant perpendi-
culaire à la paroi de séparation qui est naturellement très
mince. Les insertions d’une telle paroi ne correspondent pas
encore à un enfoncement de la surface externe, comme cela a
lieu pour les membranes plus âgées). On voit ainsi des parois
venant de se former en r (fig. 90 à 92). Les jeunes cellules
..
:
|
-
É:
À
aes
oor
FR ER
se reconnaissent également à ce que leur volume est de moitié
moindre que celui des autres cellules.
Feuille VIII.
En regardant la planche photographique I on est frappé par
le fait que cette feuille est plus courte quela précédente, ce qui
doit être une simple particularité individuelle. Cette feuille
est nettement plus large que la feuille VII, dans toutes ses
parties et spécialement vers sa pointe. Je dois dire que les
coupes du sommet ayant été un peu écrasées il se peut qu'il
-y ait quelques inexactitudes dans la reconstitution. Il n'y a
plus que la partie engainante de la feuille qui mérite une
description, puisque c’est la seule qui se soit accrue nota-
blement et distingue cette feuille de la précédente.
Cette feuille VIII a complètement terminé ses divisions
- cellulaires car la coloration violette des parois, qui montrele
début de la différenciation de la membrane, se voit encore
dans la nervure a l’endroit où celle-ci va se fusionner
avec la tige. La coloration brune des membranes, qui était
devenue moins intense du côté ventral et au centre de la
nervure vers la coupe 35, commence à faire place vers la
coupe 39 à la coloration violette, qui se manifeste comme tou-
jours d’abord au centre et du côté ventral de la nervure. Ce
nest qu'à partir de la coupe 41 que la coloration violette
s'est généralisée et se voit nettement, alors que les cellules
marginales de la lame foliaire et les cellules épidermiques
dorsales de la nervure possedent seules des traces de la colo-
ration brune. Quelques coupes, dans la zone de pointe de la
feuille VIII, nous montreront que cette feuille s’est développée
d’une facon tout a fait identique à celle des feuilles précé-
dentes. C'est ainsi que la coupe 16 (/ig. 93) possède sensible-
ment le même aspect que la coupe 18 (fig. 70) de la feuille
VII: la partie gauche de ces » coupes est large et trapue
alors que la partie droite s’effile. Il est cependant très inté-
ressant de constater que dans la feuille VIII le mode de cloi-
‘sonnement trouvé seulement à la base dans les autres
feuilles se rencontre ici très haut vers la pointe. Dans les
ae
figures 93 a 97 nous ne voyons en effet que trois cellules
internes correspondant aux cellules désignées par la lettre 2
dans les coupes des autres feuilles; car la cellule dorsale
primaire, issue de la cellule fondamentale médiane de droite,
s’est divisée par une cloison 6 (fig. 93 à 97) analogue à la
cloison 6 des figures 81 à 86 (feuille VII). Mais ici c’est bien
du côté droit comme dans la feuille V (voir cloison a, fig. 48)
et non du côté gauche que ce mode de cloisonnement s’est
d’abord manifesté. C’est ce cas qui doit être normal, car c’est
ce côté qui s’amincit et s’allonge chez toutes les feuilles de
cette espèce dans les coupes proches de la base foliaire.
Les coupes 27, 29 et 31 (fig. 94 à 96) correspondent à cette
zone de la feuille VII à coupe en forme de croissant et sans
lame foliaire, intermédiaire entre la gaine et la partie plan
convexe [voir coupes 33 à 38 (fig. 81 à 86) de la feuille VII].
Je ne parlerai pas des cloisonnements de cette zone décrits
chez la feuille précédente.
Les coupes fo et 42 (fig. 98 et 99) de la feuille VIII sonttrès
comparables aux coupes 5o et 51 (fig. 91 et g2) de la feuille
VII. On y voit, comme dans celles-ci, les quatre cellules n mais
seulement du côté droit de la nervure (fig.98 à 100). La
cellule épidermique ventrale, issue de la cellule fondamentale
médiane de droite, s’est divisée en deux par une-cloison anti-
cline donnant 2 cellules ve (fig. 98 à 101). Ceci n’est d’ailleurs
qu'une conséquence de l’aplatissement de toute la nervure et
spécialement des cellules ventrales et internes de celle-ci, que
l’on constate à son plus haut degré dans les coupes 42 et 44
(fig. 99 et 100). Les coupes 44 et 45 (fig. 100 et 101) montrent
une réduction encore plus grande, car il n’y a plus qu’une
cellule interne 2.
Dans la lame foliaire on peut considérer que les divisions
ont complètement cessé. :
Feuille 1X.
Je vais enfin parler très succinctement de la feuille IX.
Elle doit avoir à peu près o™",8 de longueur, car je l’ai ren-
contrée dans 53 coupes. Ses parois cellulaires sont entièrement
OPUS POUR DR eee tN
FR
iy
brunies, sauf al’endroit de linsertion, dans les 2 coupes inlé
rieures, ot elles sont violettes.
Je comparerai les coupes de la feuille IX à celles de la
_ feuille VII, décrite avec détails.
La coupe 4 (fig. 102) n’est pas autre chose que la coupe 3
(fig. 64) de la feuille VII, mais bien plus évoluée. Nous retrou-
vons jusque dans cette feuille IX (coupe 6, fig. 103) l’allon-
gement du côté gauche constaté déjà dans la feuille V
(coupes 6 à 8, fig. 35 a 37), la feuille VI (6° coupe, fig. 54) et la
feuille VII (coupes 6 et 7, fig. 65 et 66). Cette asymétrie doit
étre due aux pressions des feuilles adjacentes lors du déve-
loppement. ©
Toute la zone ayant pour origine 4 cellules fondamentales
narien de bien particulier. La ressemblance de la coupe 28
(fig. 107) de la feuille IX avec la coupe 29 (fig. 95) de la
feuille VIII est tres grande. La coupe 34 (fig. 108) de la
feuille IX peut être comparée à la coupe 33 (fig. 97) de la
feuille VIII. On est frappé, en regardant ces coupes, de la
grandeur des cellules comparées à celles dela coupe 4o de la
feuille VIII (fig. 98) et particulièrement en ce qui concerne la
lame fohaire. On peut faire la même remarque en comparant
toutes les coupes faites dans la gaine de cette feuille avec
celles faites dans la même zone de la feuille VIII. Ceci n’a
rien de surprenant, car dans la feuille VIII la gaine venait de
terminer ses divisions, tandis que dans la feuille VIII l’état
adulte est complètement atteint, sauf pour les deux ou trois
coupes de base.
Malgré le nombre très restreint de couches cellulaires il est
très difficile de suivre le cloisonnement dans cette feuille, dont
les cellules se sont déplacées et ont exercé des pressions les
unes sur les autres. C’est pourquoi, dans plusieurs de mes
dessins (fig. 108 à 111) je n’ai pas indiqué les cloisons fonda-
mentales par des traits renforcés.
La figure 113 montre la feuille IX se fusionnant avec la tige
par son côté gauche. La partie encore libre de la lame foliaire
4 (fig. 113) présente deux couches sur une grande partie de
son étendue, ce qu’on constate souvent à l’endroit de l’inser-
tion des feuilles de Mousses sur la tige.
De
Description de jeunes feuilles d’Andreaea crassinervia Bruch
vues en entier, à plat.
J'ai disséqué quelques points végétatifs d'Andreaea crassiner-
via Bruch, extraits toujours du même matériel, fixé et conservé
comme je l’ai dit plus haut. J’ai pu observer directement, sans —
aucune coloration, les noyaux et leurs masses chromatiques.
En faisant la moyenne d’un certain nombre de mesures, j’ai
trouvé que les feuilles adultes avaient à peu près 1"",1 de lon-
gueur. Limpricht (27) (page 143) indique comme longueurdes
leutiles : 0,9 40,22 el jusqu'a 155 20m
La figure 114 représente une très jeune feuille à peu près
entière et mesurant 1/33 de millimètre de hauteur, donc très
sensiblement égale à la feuille | décrite par moi plus haut. Si
l’on se reporte à la description de cette feuille I, on constate
qu'elles ont sensiblement la même structure. La figure 114
possède à sa pointe une cellule qui a bien les caractères
d’une initiale, vu la grandeur de son noyau & (fig. 114) d’un
diamètre de 6,4, et possédant une masse chromatique de
2,4 de largeur. La cellule sous-jacente a un noyau aplati 6
(fig. 114) dont le plus grand axe a 6,8 et le petit 3*,2 avec une
masse chromatique de 1*,6. Cette cellule sera probablement
l’origine de la partie à coupe circulaire. Les deux échelons
inférieurs donneront la portion a coupe elliptique et la gaine.
Les dimensions du noyau e( fig. 114) sont 4,4 pourl’ensemble
du noyau et 1*,6 pour la masse chromatique. Pour le noyau /
(fig. 114) le diamètre du noyau est de 3,2 et ‘celui de la
masse chromatique de 1*,2. Les dimensions de ces noyaux
sont sensiblement celles qu’on rencontre dans toute la partie
méristématique de feuilles même bien plus âgées.
On constate déjà dans cette très jeune feuille une asymétrie
visible, car aux deux cellules cilne correspond qu’une cellule d
de l’autre côté de la cloison médiane de la feuille.
Une feuille un peu plus âgée (fig. 115) ne présente déjà plus
à son sommet de cellule spéciale. L’initiale a du être remplacée
par les deux cellules à, et a, qui formerontsans doute l’extrème
pointe constituée, jusqu’à l’état adulte, par deux cellules empi-
RS pe
-— 99 —
lées l’une sur l’autre. La cellule 6 (fig. 115) est encore indi-
vise, mais elle s’est allongée, ce qui a permis à son noyau de
prendre un contour circulaire normal, au lieu d’être aplati
comme celui de la cellule 6 (fig. 114).
Nous voyons dans cette jeune feuille (fg. 115) les cellules
de la périphérie se diviser plus activement que celles du
centre. C’est ainsi que les 2 cellules ce sont placées en face
d’une seule cellule interne d (fig. 115). Ce fait se rencontre
d’ailleurs généralement chez les Mousses (voir les travaux de
Nageli, que j’ai résumés plus haut) et est en rapport avec la
_ formation de la nervure.
La figure 116 représente une feuille un peu plus agée et
d'une forme triangulaire, la base étant assez élargie. J’ai mar-
qué par des traits renforcés ce qui correspond à la limite des
segments détachés par l’initiale, ou simplement aux principales
divisions de ceux-ci, ainsi que la cloison médiane. On voit
aisément que du côté gauche, entre aa et dd, il y a 3 rangées
de cellules, alors qu'il n’y en a que deux du côté droit.
Le fait le plus intéressant consiste en la présence des cloisons
eet f, qui semblent marquer le début du fonctionnement d’une
initiale à 2 pans. Mais, tout de suite après, la cloison gg vient
rétablir le cloisonnement au moyen d’un seul pan. Il peut donc
exister, même dans cette espèce, une initiale à 2 pans.
La figure 117 montre la pointe d’une feuille atteignant
o"",17 de longueur. On remarquera la grandeur des cellules
de la pointe et l'épaisseur de leurs parois: ceci indique qu’elles
ont perdu leur faculté de multiplication.
La figure 118, qui représente une feuille de 1/4 de millimètre
de longueur, montre une coloration brune des parois de sa
cellule de pointe. La cellule située au dessous a encore des
parois jaune brun. Cette feuille est done très semblable à la
feuille IV décrite plus haut. En la faisant rouler entre le porte-
objet et le couvre-objet elle s’est présentée à moi sous
différents aspects; ainsi la figure 119 montre sa pointe vue
de face. J’ai figuré quelques noyaux, ce qui permettra de se
rendre compte de leur grandeur relative par rapport aux cel-
lules qui les contiennent.
Les figures 120, 121,.123 à 128 représentent le contour géné-
2s BBO a
ral de jeunes feuilles de plus en plus âgées. Ceci nous mon
tre d’abord leurs changements de formes, ce dontnous avions
déjà pu nous rendre compte au moyen des reconstitutions en —
plastiline. De plus on peut voir la progression de la coloration M
brune sur la surface foliaire; j'en ai marqué la limite approxi- |
mative par un trait. J'ai indiqué de même la limite de la colo-
ration jaune brun, qui la précède dans sa marche vers la base de
la feuille. Naturellement ces zones ont des limités peu précises.
La figure 120 indique le contour d’une feuille ayant 1/10 de
millimètre de longueur (c'est-à-dire à peu près la taille de la
feuille III). La forme en est semblable et aucune partie n’est
colorée
La figure 121 est une feuille de 1/4 de millimetre (dimension
de la feuille IV). La figure 122 représente la pointe de cette —
même feuille plus grossie. Les 2 premières cellules ont des
parois à coloration jaune et qui sont très épaissies, comme on
le constate d’après la figure 122.
La figure 123 montre une feuille intermédiaire comme lon-
gueur entre les feuilles V et VI décrites plus haut.
Jusqu'ici la séparation, entre les zones de couleurs diffé
rentes, était marquée par une ligne perpendiculaire à la plus
grande dimension de la feuille. Dans les feuilles plus âgées,
au contraire, cette ligne est courbe, car les colorations gagnent
‘d’abord les bords de la feuille. C’est ce que l’on constate dans
la figure 124 (feuille de o™",66 de longueur), la figure 125
(feuille de 0"",70 de longueur) et la figure 126 (feuille de 0"",95
de longueur). Enfin dans les feuilles ayant atteint la taille
adulte, les colorations gagnent également plus vite le long de
la nervure. Ce dernier processus est spécialement net sur la
figure 127 pour la coloration brune. La figure 128 montre
la progression plus rapide de celle-ci le long des bords de la
feuille et le long de la nervure.
Développement de la feuille d’Andreaea angustata Lindberg.
Limpricht (27) (dans le « Rabenhorsts Kryptogamen Flora »
page 144) indique une longueur de 1™,4 et une largeur de
o™",35 pour la feuille de cette espèce.
eee ee ee UN CT TN OT 0
- CNT
fart J DE
La feuille représentée par la figure 129 a 1™",7 de longueur.
Les feuilles sont nettement en forme de faux, à pointes diri-
_gées d’un même côté, comme dans l'espèce précédente. La
_ figure 129 a été faite, comme tous mes dessins, à la chambre
_ claire. On peut donc se rendre compte d’un coup d'œil de la
forme et de la disposition des cellules : vers la base on voit
celles de la nervure très allongées dans la direction de la base
à la pointe, alors que celles des bords sont allongées perpen-
diculairement à cette direction à l'endroit ou la feuille est la
plus large (fig. 129). Tout a fait à la base ces dernières s’al-
longent au contraire comme les cellules de la nervure.
- D'ailleurs, dans la région basilaire, toutes les cellules sont
allongées dans ce sens. Dans le reste de la feuille, elles ont
des dimensions sensiblement égales dans toutes les directions
et presentent un contour arrondi.
En coupe, la feuille n’a guère plus de 3 couches de cellules.
comme Limpricht (27) l’avait déjà remarqué. La nervure est
donc bien moins épaisse que chez l’Andreaea crassinervia Bruch
et d’ailleurs l’aspect d’une coupe transversale de feuille distin-
gue facilement ces 2 espèces; celle d’Andreaea angustata Lind-
berg étant toujours aplatie dorso-ventralement jusqu’à l’ex-
tréme pointe et ne présentant jamais un contour circulaire.
Dans la partie la plus épaisse, la coupe de la feuille a un aspect
losangique, les 2 diagonales se coupant à angle droit et la plus
petite marquant la direction dorso-ventrale.
C'est dans cette espèce que j'ai observé une feuille à 2 lobes,
montrant ainsi une grande ressemblance avec la feuille de
nombreuses Hépatiques dans sa forme extérieure. J’ai publié
sur ce sujet une note (31) où l’on voit un certain nombre de
coupes transversales à différents niveaux de cette feuille anor-
male. J’en ai profité pour citer tous les autres traits de ressem-
blance déjà remarqués par les auteurs entre Hépatiques et
Andréacées, aux points de vue de l’anatomie et du dévelop-
pement de ces végétaux.
Kuhn (28), qui n'a guère étudié dans sa thèse que le déve-
loppement de l’Andreaea petrophila Ehrh., espèce énerve, et
rapidement celui de l’Andreaea rupestris?, pourvue d’une faible
nervure, considère que les Andréales s’éloignent des autres
Go ie
Mousses, car dans ces espèces le développement de la feuille,
qui a lieu en général au moyen d’une initiale à un pan, les
rapproche au contraire des Hépatiques. Cet auteur (28) a
signalé, au sujet du fonctionnement de l’initiale des feuilles,
un fait unique dans le règne végétal: c’est que l’on peut ren-
contrer, non seulement dans une même espèce, mais chez un
même individu, et, ce qu'il y a de plus inattendu, dans une
mème feuille, tantôt une initiale à un pan et tantôt une initiale
à 2 pans. C’est ainsi que la figure 34 de la planche V de sa
thèse nous montre la pointe d’une feuille assez large dont le
cloisonnement a dû s'effectuer tout d’abord au moyen d’une ini-
tiale à 2 pans, puis finalement par une initiale à un seul pan.
C’est un cas assez fréquent d’après Kühn (28) dans l’Andreaea
petrophila Ehrh..
Berggren (29), analysant le travail de Kuhn, résume en
même temps le résultat de ses recherches personnelles. Il pré-
tend avoir rencontré une initiale à un seul pan chez toutes les
Andréales possédant une nervure, sauf chez l’Andreaea nwa-
lis Hook.. Les espèces sans nervure posséderaient au contraire
toutes une initiale à 2 pans, sauf l’Andreaea alpina Hedw. et
l'Andreaea petrophila Ehrh. à feuilles étroites.
Goebel dans son Organographie (22) nous dit qu'il n’a pas
étudié les débuts du développement de la feuille d’Andreaea ru-
pestris?, mais il pense qu’une cloison oblique se forme d’abord,
comme pour donner une initiale à 2 pans, et que les parois
transversales apparaissent ensuite. Il aurait observé un proces-
sus de ce genre dans les feuilles primordiales de Schostostega
Mohr, formées quelquefois d’une simple rangée de cellules.
Ce pourrait être aussi selon lui le cas chez Ephemerum Hampe.
IL croit que la croissance de la feuille au moyen d'une initiale à
un seul pan est un mode primitif rappelant les Hépatiques. On
trouveraitchez Diphyscium (Ehrh.) Mohr, comme chez Andreaea
Ehrh., le passage du mode de cloisonnement à 1 pan à celui
à 2 pans. Geebel remarque enfin que les Mousses ne sont pas
seules à présenter des faits de ce genre: les feuilles de Sal
vinia (Micheli) All. auraient des initiales a 2 pans alors que
celles de VAzol/a Lam. n’en posséderaient jamais.
J'ai dit plus haut, à propos de PAndreaea crassinervia Bruch,
FA US pre Se ins as dis À eee eee st tdi usé
RE ee n
ait a ee
Ag, Rea
¢
À
(To ee
qui est le type des Andréales à nervure, avoir trouve une
feuille qui avait du présenter un instant une initiale à 2 pans
- (voir fig. 116). J'ai découvert chez Andreaea angustata Lindberg
des cas encore plus nets. Dans cette espèce les feuilles géné-
ralement aciculaires présentent normalement une initiale à un
seul pan (voir fig. 129 à 132, pour des pointes de feuilles ayant
achevé leur différenciation, et fig. 133 à 136, pour de très jeunes
feuilles). En disséquant un bourgeon terminal, je trouvai 3 jeu-
nes feuilles d’âges divers (/i7. 137 à 139) qui me présenterent des
cas très nets de ces 2 modes de cloisonnements. La figure 137
montre une très jeune feuille qui s’est cloisonnée d’abord au
moyen d'une initiale à 1 pan. Ensuite apparurent 2 cloisons,
a puis 6 (fig. 137), qui donnèrent naissance à une initiale à
2 pans. Cette initiale ? n’a encore détaché qu'une cellule. La
figure 138 montre une feuille un peu plus âgée, qui grandis-
sait certainement au début par le moyen d’une initiale à
i pan à laquelle a succédé bientôt une initiale à 2 pans par
suite dela production des cloisons a, puis 6. Mais ici l’initiale
à 2 pans a déjà donné 4 segments (1, 2, 3, 4, fig. 138).
Dans la figure 139, qui représente une feuille plus âgée, il y
a eu un instant une initiale à 2 pans provenant des cloisons a
et à (fig. 139), mais elle a cessé de fonctionner immédiatement
apres avoir été formée. I] est à remarquer que la production
de Vinitiale à 2 pans est souvent indiquée par la courbure de
Ja cloison qui précède a. C’est ainsi que dans les figures 138
et 139 la cloison ¢ est fortement courbe alors cue les cloisons
précédentes d, e, f, ete., sont à peu près planes. Au point de
vue du cloisonnement des segments, lorsqu'il y aune initiale a
un seul pan, on constate que la première cloison apparaissant
dans le jeune segment est dirigée suivant le plan de symétrie.
Elle délimite la partie droite et la partie gauche de la feuille.
Les 2 cellules ainsi formées, d'et g par exemple pour la figure
136, évolueront chacune comme un segment devant son origine
à une initiale à 2 pans, tel que ret2 (fig. 138), c’est-à-dire qu’il
apparait dans chacune une cloison péricline, telle que p
(fig. 136). Les cellules extérieures se divisent ensuite par une
cloison anticline, telle que a (fig. 136); celles situées contre
Ja ligne médiane restent au contraire encore indivises à ce
Bi :
stade. Vers la base de Ja feuille (fig. 136) on a oh autre type -
de cloisonnement. Les cellules externes se divisent par des
cloisons périclines 6 (fig. 136) et les internes par des cloisons
anticlines ce. Dans la figure 135 on voit nettement que les cloisons
anticlines progressent vers le centre en partant des bords. II
semble bien que presque toujours la cellule interne se divise
d’abord par une cloison péricline, telle que p(#g. 135). La plus
externe des 2 cellules ainsi formées se divise à son tour par une
cloison anticline, telle que 6 (fig. 135) placée dans le prolonge-
ment d’une cloison anticline, telle que a (fig. 135), qui a divisé
la cellule externe du segment. Après qu'une cloison, telle quec
(fig. 135), se plaçant dans la continuation de a et de 6 vient divi-
ser la cellule la plus interne, le cloisonnement se poursuit par
la formation de cloisons anticlines, le plus généralement dans
les cellules externes, telles que g (fig. 139). Ce nouveau système
de parois anticlines se propage vers l’intérieur et les nouvelles
_cloisons anticlines se placent les unes dans le prolongement
des autres. On a ainsi des cloisons, telles que g, h, 2 (fig. 139),
qui semblent n’en former qu'une seule.
En examinant les diverses figures, faites comme toujours ri-
goureusement d’après nature, on constatera de nombreuses
exceptions au schéma de développement que je viens d’ex-
poser. La figure 134 nous en offre un exemple: la cellule e
y est restée indivise. Cette figure nous montre encore un
point très intéressant, car ony voit l’évolution ultérieure du
segment basal limité par ee et //, correspondant au segment
basal de la figure 136 (ee, ff) dont j'ai parlé plus haut. Les
A cellules À, (fig. 134) correspondent à la cellule h (fig. 136) et
les a, 71, À 4, mu, ™% (fig. 134) respectivement a 2, 7, k, 1, m, n
de la figure 136. Les cloisons anticlines et périclines se placant
toujours à peu près dans le prolongement l’une de l’autre, il
est à peu près impossible de savoir combien de fois l’initiale
d’une feuille a fonctionné. Les traits renforcés, que j’ai mar-
qué comme étant la limite des segments, afin de faciliter l’ex-
plication du processus de cloisonnement, ne séparent donc
certainement pas tous des segments successifs détachés par
Vinitiale, mais indiquent peut-être simplement les premières.
séries de cloisons anticlines qui se sont formées dans ceux-ci.
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La coloration brune avance ici comme chez Andreaea cras-
sinervia Bruch, plus rapidement le long des bords de la feuille.
Dans les feuilles presque adultes j'ai constaté, comme chez
l'espèce précédemment décrite, que la coloration progressait
également plus vite le long de la nervure.
Les figures données par Kühn (28) dans sa thèse et par
Berggren (26) en 1867, représentant des pointes de jeunes feuil-
les d’Andreaea petrophila Ehrh., permettent de conclure à un
développement analogue à celui que je viens de décrire dans
l’Andreaea crassinervia Bruch et angustata Lindberg. Je citerai
encore, comme remarque intéressante de Kühn (28), que les
feuilles d’Andreaea petrophila Ehrh. seraient à l’origine d’un
vert émeraude et qu'elles prennent ensuite une couleur de
bronze, passant enfin au brun sombre presque noir. J’ai bien
observé aussi une coloration verte dans la pointe des feuilles,
mais comme j'avais coloré mes préparations au vert d’iode, je
ne sais pas si j'ai eu affaire à une coloration artificielle ou
naturelle. D’après Kuhn lorsque le temps reste sec longtemps
les initiales des feuilles cessent leur activité plus tot. Cet auteur
a remarqué également que le processus d’épaississement com-
mence dans les membranes de la pointe de la feuille et s’étend
de la peu a peu vers la base; mais a partir de ce moment la
croissance en épaisseur de la feuille est encore possible, car,
si un changement de temps survient, il se produit non seule-
ment un allongement important des cellules inférieures non
encore €paissies, mais une croissance intercalaire trés vive au
moyen de cloisons transversales et a la suite de laquelle les
cellules inférieures deviennent trés petites et quadratiques. Le
processus d’épaississement se produit dans les cellules voisi-
nes de la base d’une facon bien plus inégale que vers la pointe
et les cloisons auraient une épaisseur si faible que, sur les cou-
pes longitudinales, on pourrait croire les lumens des cellules
en communication entre eux. Kühn a donc vu que c'était
la pointe de la feuille qui se différenciait et cessait son déve-
loppement bien avant la base. Dans mes dessins de coupes
transversales je n'ai pas figuré l’épaississement exact des
membranes cellulaires, car il est assez faible. Pour les feuilles
vues à plat. je les ai figurées comme je les ai vues. L'espace
D
NÉE 2
entre les cellules n'indique pas forcément la membrane, sou-
vent difficile à voir, mais l’espace compris entre les plasmas,
qui se sont peut-être rétractés un peu. |
Berggren (26) a bien étudié les Andréales à nervure en 1867,
mais d’après cé que je comprends de sa publication (celle-ci
étant écrite en langue suédoise ne m'est accessible que par
les figures), il ne s occupe guère du développement, et presque
8 , Gate »
uniquement d’anatomie. Il figure 10 coupes transversales
de feuilles d’Andreaea crassinervia Bruch, mais qui appar-
tiennent certainement toutes a des feuilles adultes. Il repré-
sente également 8 coupes transversales de feuilles d’Andreaea
rupestris ? à divers niveaux. La figure 19, de contour
losangique, ressemble assez à une coupe de feuille d’An-
dreaea angustata Lindberg, mais les autres coupes différent
notablement de cette dernière espèce, spécialement en ce que
la nervure semble un peu plus épaisse et plus nettement sépa-
rée de la lame foliaire. La lame foliaire à une seule couche
monte également plus haut vers la pointe que chez Andreaea
angustata Lindberg. Pour Andreaea Blytta Br. Eur., Berg-
gren (26) figure: 10 coupes transversales de feuilles, une de
tige et une vue à plat d’une pointe de feuille adulte; puis une
pointe de feuille jeune montrant l'initiale à un seul pan et le
cloisonnement qui en résulte. Chez Andreaea petrophila Ehrh.,
il représente 2 pointes de feuilles vues à plat pour montrer le
cloisonnement. Dans l’une d'elles il y a une initiale à 2 pans à
la pointe, mais il semble d’après le cloisonnement que cette
feuille ait da posséder au début une initiale à un pan. Berg-
gren (26) figure encore une coupe transversale dans la tige
d’Andreaea obovata Theden. et une pointe de feuille vue à plat
d’Andreaea Hartmani Theden., espèce sans nervure. On voit
Vinitiale à 2 pans à la pointe. Enfin pour Andreaea nivals
Hook. il montre l’initiale à 2 pans de cette espèce; mais, à voir
le cloisonnement sous-jacent, il semble qu'il y ait eu précé-
demment une initiale à un pan. Je fais la même remarque pour
sa figure d’Andreaea Hartmani Theden.. C'est uniquement chez
cette dernière espèce qu'il a figuré des coupes faites vraisem-
blablement dans de jeunes feuilles. Sa figure 36 montre une
coupe dans une trés jeune feuille ne possédant que 3 cellules
Re,
ba
et correspondant au stade que j'ai appellé « en éventail ».
Dans son analyse du travail de Kühn, Berggren (29) dit avoir
trouvé toujours ce stade au début. Lorentz affirme la même
chose pour les Mousses en général et je pense qu'il a raison.
Dans ses figures 37, 58 et 39, Berggren montre la suite du
cloisonnement dans des coupes transversales. Enfin il figure 4
coupes de feuilles adultes de cette espéce. On y remarque les
papilles caractéristiques. Je citerai encore de Berggren (29)
ce qu'il dit dans son analyse du travail de Kuhn sur l’Andreaea
crassinervia Bruch : la feuille de celle-ci, qui se développerait
avec beaucoupderégularité, présenterait selon lui de nombreux
points communs avec la croissance de l’embryon telle que le
décrit Kuhn. Pour la partie basilaire je ne vois pas bien la
justesse de cette comparaison, qui ne peut avoir quelque valeur
que pour la région d’extréme pointe à coupe circulaire. Berg-
gren (29) ajouteen outre que, par opposition avec les autres
Mousses, on ne trouverait pas de différences entre les cellules
de la nervure, toutes de la méme grandeur et possédant des
parois aussi épaisses, mais qui seraient plus étroites et 4 à 5 fois
plus longues que celles du parenchyme foliaire. Il a remarqué
la grande régularité des divisions, qui permettrait de retrou-
ver dans une feuille adulte la ligne médiane de la pointe à la
base. Il prétend même que l’on aurait des deux côtés de la
feuille 2 séries de cellules semblables en nombre et en
longueur. Ceci est évidemment exact grosso modo, mais, ainsi
que j'ai pu le montrer déjà dans Andreaea crassinervia Bruch,
il y a une asymétrie très nette dans le développement à la base
de la feuille. De plus, en étudiant avec soin les coupes succes-
sives d’une même feuille d’Andreaea angustata Lindberg, j'ai
constaté dans la structure anatomique une légère différence
entre les 2 côtés de la feuille. C’est ainsi qu’on trouve en
épaisseur 1 couche cellulaire de plus, alternativement à
droite et à gauche de la cloison médiane. Je pense que les
feuilles présentant cette asymétrie possèdaient peut-être une
initiale à 2 pans qui l’aura causée.
Comme travail purement anatomique sur ces questions, je
citerai celui de l’abbé Morin (30). Cet auteur représente (dans
la planche I de sa thèse) 2 coupes transversales de feuilles d’An-
OS
dréales à nervure: sa figure 6 est une coupe au sommet d’An-
dreaea perichetiahs (Hook.) récoltée a Vile de l’Ermite. Les cel-
lules épidermiques sont à lumen assez large tandis que les.
internes ont un lumen très étroit et rappellent les stéréides.
La figure 9 de cet ouvrage montre une coupe pratiquée au-
dessus du milieu d’une feuille d’Andreaea rupestris Hedwig,
récoltée sur les rochers de Saint-Herbot dans le Finistère. On
y voit une courte lame foliaire, des cellules épidermiques a
large lumen et des cellules internes ressemblant à des stéréi-
des. Dans son texte (page 15) il rapproche les Andreaea Ehrh.
des Grimmia Ehrh. il assure que les Andréales n’ont jamais
d’eurycystes et qu'il serait prématuré de considérer comme
telles les cellules ventrales.
Description d’une série de feuilles d’Andreaea angustata
Lindberg.
Le développement de la feuille de cette plante est bien plus.
simple que celui de l’Andreaea crassinervia Bruch. Je décrirai
comme pour cette espèce quelques jeunes feuilles. Celles-ci
appartenaient à une tige terminée par un archégone. J'ai
numéroté les feuilles en commencant, comme toujours, par la
plus jeune.
Feuille I.
Cette feuille a 45 y de longueur. Dès la pointe nous consta-
tons qu'elle est aplatie dans le sens dorso-ventral. Il y a tout
lieu de penser que nous avons affaire ici à une feuille poussantau
moyen d’une initiale à 2 pans, car nous ne voyons pas, comme
dans l’Andreaea crassinervia Bruch, apparaître à la pointe un
noyau situé vers le centre d’une cellule, puis un autre au-
dessous. Ici c’est du côté gauche que le premier noyau &
(fig. 140) apparaît. En abaissant la mise au point on voit le
2°noyau n(fig. tho). La cloison de séparation entre ces deux
noyaux semble se déplacer lorsqu’on fait varier la mise au
point du microscope et reste toujours peu nette, ce qui
montre son obliquité. Enfin, ce qui confirme l’existence d’une
initiale à deux pans, c’est que dans la coupe suivante (fig. 141).
le côté gauche est formé de deux cellules g (fig. 141). Il est le
plus développé, car à droite il n’y a qu’une cellule d(fig. 141).
Or, dans la figure 140, c’est le côté gauche, formé d’une cellule
plus grande que celle située à droite, qui était le plus déve-
loppé. Ce déplacement de droite à gauche et vice versa du
côté le plus développé indique une initiale à deux pans: car
une telle initiale en fonctionnant donne deux séries de
segments; une même coupe transversale rencontre forcément
deux segments d’age différent et par suite de développement
différent. Cette asymétrie s’égalise évidemment très vite a
mesure qu'on s'éloigne de l’initiale.
La figure 142 nous montre un stade en éventail parfaitement
régulier. Dans cette espèce toutes les parties de, la nervure
dérivent du stade en éventail; c’est ce qui ressort d’une
manière évidente lorsqu'on regarde les coupes de la base au
sommet de cette feuille (Ag. 140 à 146). On ne peut donc dis-
tinguer dans celle-ci des régions aussi différentes dans leur
développement que chez Andreaea crassinervia Bruch. Comme
chez toutes les Mousses, c’est vers le milieu de la feuille que
se rencontre le maximum d’épaisseur et de complication de
structure. C’est ainsi que nous voyons dans les figures 143 et
144 les deux cellules fondamentales médianes divisées chacune
par une cloison péricline et donnant ainsi une ébauche de
nervure. Plus près de la base il y a, comme toujours, une
simplification de la structure. Mais dans cette très jeune
feuille l’épaisseur est maxima à la base (fig. 146).
L’asymétrie due au recouvrement des feuilles l’une par
l’autre se manifeste dans la région basilaire ; en effet, le côté
gauche ne possède que deux cellules alors que le côté droit en
a trois (fig. 146). à
Feuille IT.
Cette feuille 460 micra de hauteur et a dû grandir également
au moyen d'une initiale à deux pans, pour les mêmes raisons
que la feuille n° 1. Icic’est du côté droit qu’apparait le premier
noyau 2 (fig. 147). C'est probablement celui de l’initiale. Puis
vient le noyau n (fig. 147). Tous deux sont séparés par une
paroi peu nette. Le contour est presque circulaire à la mise
au point supérieure de la 1 coupe (fig. 147); tandis qu'à la
mise au point inférieure on distingue déjà nettement un côté
dorsal et un ventral (fig. 148) et l’on voit deux autres noyaux
séparés par une paroi bien nette. Cet aplatissement dorso-
ventral se manifestant dès l’extrême pointe, est un caractère de
l’Andreaea angustata Lindberg qui la distingue de lAndreaea
crassinervia Bruch.
Dans cette feuille de o"",06, comme dans celle de o"",045,
nous avons à la pointe une cellule bien vivante, mais le noyau
de celle-ci ne se distingue nullement par sa taille et ses
caractères des autres noyaux de la feuille.
Dans la 2° coupe (fig. 149 et 150) nous avons un aspect très.
différent suivant la mise au point. D'abord un stade en éven-
tail typique (fig. 149) et plus bas (fig. 150) l'apparition d’une
nervure qui s’est produite d’une facon assez irrégulière. Nous
voyons ensuite la partie de la nervure ayant atteint son maxi-
mum de différenciation (fig. 151 à 153) avec les 4 cellules.
médianes; enfin la zone de base formée d’une seule couche
cellulaire. Cette partie basilaire, qui forme un peu gaine, s’est
beaucoup allongée par rapport au stade précédent représenté
par la feuille n° 1 (comparez la figure 146 de la base de la feuille
n 1 à la figure 155 de la base de la feuille n° 2). Il y a dans
la figure 155 quatre cellules de chaque côté de la cloison
médiane, au lieu de deux d’un côté et de trois de l’autre dans
la figure 146. La forme en croissant de la coupe dans cette
zone basilaire s’est également fortement accentuée (comparez
encore la figure 155 à la figure 146). On peut constater qu'ici,
comme chez Andreaea crassinervia Bruch, la partie basilaire
engainante ne se développe qu’en dernier lieu. Comparons.
en effet la feuille n° 2 et la feuille .n° 1. La zone de pointe
formée de 1 couche de cellules se rencontre dans la 1” coupe
des 2 feuilles et à la mise au point supérieure de la seconde.
Au contraire la zone la plus différenciée de la feuille, celle
qui présente une nervure formée de 4 cellules (fig. 143, 144
pour la feuille n° 1 et fig. 151 à 153 pour la feuille n° 2) ne se
voit qu'à la mise au point inférieure de la 2° coupe et à la
mise au point supérieure de la 3° coupe pour la feuille n° r,
tandis qu’on l’apercoit dans toute une coupe (fig. 151 et 152)
a
de la feuille n° 2, ainsi que dans la coupe suivante (fig. 153) à
la mise au point supérieure. La zone formant gaine, située
au-dessous de celle-ci, est sensiblement aussi longue dans les 2
feuilles. Elle s’est élargie seulement dans la feuille n° 2 en
devenant plus engainante.
Feuille II.
Cette feuille a 1/10 de millimètre de hauteur. Elle appa-
rait, dans la 1 coupe où on l’aperçoit, comme une cellule de
contour circulaire, mais on n’y voit pas de noyau; ceci ne
veut pas dire qu’il n’existe pas, car ce doit être le noyau / de
la figure 157 : il se voit dans une cellule, flanquée à droite
et à gauche de 2 autres cellules. En abaissant la mise au
point dans cette 2° coupe on a successivement les aspects
représentés par les figures 157 à 159. On se rend compte que
cette feuille vue à plat devait présenter une pointe peu fine, car
il y a une grande différence de largeur entre la figure 157 et la
figure 159. Ce fait, joint al’enfoncement en coin de la cellule
initiale entre 2 autres cellules, montre, encore plus nettement
que pour les feuilles précédentes, la croissance au moyen
d’une initiale à 2 pans. Dans cette feuille, comme dans la pré-
cédente, ce n’est qu'au bas de la 2° coupe à partir de la pointe
qu'apparaît la nervure. La zone de pointe s’est donc peu
divisée et nous y observons toujours le stade en éventail.
Dans cette seconde coupe les noyaux cellulaires dessinés dans
les figures 158 et 159 ne sont pas apparus exactement en
même temps, comme cela aurait eulieu si les cellules les con-
tenant avaient été exactement à la même hauteur, ce qui
serait le cas si l’initiale de la feuille avait été à un seul pan.
Nous voyons dans cette figure 160 le côté droit avoir la
prédominance sur le côté gauche, car c’est de ce côté qu’il y
a le plus de cellules fondamentales et que la nervure apparait.
Dans la 3° coupe (fig. 161 et 162) il se produit un phénomène
inverse : c'est le côté gauche qui est le plus grand à la mise au
point supérieure. L'équilibre se rétablit à la mise au point
inférieure. Dans la 4° coupe (fig. 163 et 164) c’est à nouveau le
côté droit qui prédomine, car on voit à la mise au point supé-
=
rieur (fig 163) 2 cellules n, du côté droit, ne correspondant qu’à
une cellule n du côté gauche. Dans la même coupe, à une mise
au point inférieure (fig. 164), c'est le côté gauche qui prédo-
mine, car la nervure comprend 6 cellules de ce côté et 4
seulement du côté droit (fig. 164). Dans la figure 163
la formation d’une 3° couche à la nervure s’est produite
par la division d’une cellule ventrale, au lieu qu’en géné-
ral c'est par la division d’une cellule dorsale (ainsi dans
les figures 165 et 166) que se produit l’accroissement en
épaisseur de la nervure foliaire. Ce processus ne se produit
donc pas toujours d’une manière identique. Dans la 5° coupe
(fig. 165 et 166) on voit tout d’abord (fig. 165) le côté gauche
prédominant, car la nervure est formée de 7 cellules de ce
côté alors qu'elle en possède 4 seulement de l’autre. La figure —
166 montre un rapport inverse : 6 cellules à gauche contre 7
à droite. La 6° coupe (fig. 167 et 168) présente une asymétrie
très nette, qui est certainement due au recouvrement des
feuilles l’une par l’autre, car elle se manifeste dans le contour
externe : le côté droit étant long et mince tandis que le côté
gauche est court et épais.
C’est dans la figure 168 que l’on constate une épaisseur de
4 cellules à la nervure (maximum pour cette feuille et pour
les feuilles de cette espèce en général).
Nous remarquons par comparaison avec la feuille précédente
(représentant le stade moins évolué), que la zone possédant
une nervure s’est considérablement allongée. La zone de
base engainante, au contraire, ne s’est guère étendue, car on
ne la trouve que dans une coupe.
La figure 169 doit correspondre à la figure 154 et la
figure 170 à la figure 155. En comparant ces dernières figures,
on voit combien la feuille est devenue engainante à la base et
que la nervure s’étend maintenant dans cette partie. Dans la
figure 170, lanervure est toute entière du côté droit dela feuille.
La figure 171 montre en /; la base de la feuille au moment
où elle est déjà soudéee à la tige. Cette base présente 2 couches
cellulaires dans sa lame foliaire, fait qui se rencontre dans
de nombreuses Mousses au moment de leur fusion avec la tige.
La figure 171, comme la figure 172 (extraite dela coupe immé-
24
1%
ra"
ae
re
DE:
des
diatement inférieure) montrent la base des diverses feuilles
de 1 à 4 (fi af, dans les figures 171 et 172) et même l’initiale 7
d’une jeune ramification (fig. 171).
Feuille IV.
Je me contenterai pour cette feuille de renvoyer aux figures
173 à 189 qui montrent l’aspect de coupes transversales depuis
une région proche du sommet de la feuille (fig. 173) jusqu à
la base (fig. 189). Le maximum de couches cellulaires que l’on
rencontre dans cette feuille est de 4. Alors que ce maximum
est réalisé à droite dans les figures 180 et 181, il l’est à gauche
dans les figures 183 à 185, marquant ainsi un changement de
sens dans l’asymétrie foliaire.
Les coupes vers la pointe sont elliptiques (fig. 173 à 178),
puis, vers la base, elles deviennent losangiques (fig. 182 et 186).
Enfin il y a une partie à face ventrale plane et à face dorsale
convexe où la gaine commence à se développer. Tout à la
base on trouve la nervure très aplatie de la gaine (fig. 189)
qui n’a que 2 couches cellulaires tandis que la lame foliaire
est très développée.
Dans les feuilles plus âgées, que je ne décrirai pas, c’est cette
gaine quise développe le plus. On peut voir dans ma note (31)
parue au bulletin du Muséum, des aspects de cette partie basi-
laire dans une feuille adulte. |
L’Andreaea angustata Lindberg nous a donc montré comme
l’Andreaea crassinervia Bruch une existence éphémère de la
cellule initiale et le déplacement du maximum de croissance
de la pointe à la base de la feuille au cours du développement.
ETUDE DES BRYALES
Mnium undulatum (L.) Weis.
Je commencerai l’étude des Bryales par le Mnium undu-
latum* (L.) Weis.
Parmi toutes les Mousses de nos pays c’est cette espece dont
la feuille atteint de beaucoup la plus grande longueur. A
l’état adulte, cet organe se présente sous la forme d’un ruban
d’une largeur assez constante de 2 millimètres et dont la lon-
gueur varie généralement entre 10 et 15 millimètres. Les plus.
grandes dimensions sont atteintes ici, comme dans beaucoup
de Mousses, par les feuilles du haut de la tige. Il va sans dire
que certains échantillons peuvent posséder des feuilles beau-
coup plus longues. Or j'ai pu constater que dans cette espèce,
comme dans les autres Mousses, la cellule de pointe perd
d’une manière très précoce les caractères cytologiques d’une
initiale. C’est ainsi que dans un échantillon, dont j'ai reconstitué
les feuilles embryonnaires au moyen de plastiline, j'ai constaté
que les cellules terminales de feuilles d’une longueur comprise
entre 3/10 et 4/10 de millimètre possédaient un contenu tres
vacuolaire. Les noyaux d’un faible volume et le peu de plasma
qui restait autour fixaient si fortement et uniformément les
matières colorantes que j’ai cru longtemps avoir affaire a des
stades de dégénérescence nucléaire. C’est seulement lorsque
1. Mon matériel a été récolté le 2 juillet 1917 sur une pelouse du jardin botanique
de l'Université de Berne (Suisse). Il a été mis de suite dans le fixateur de Flemming.
J’ai coloré les préparations avec le mélange fuschine-vert d’iode, le bleu de méthyle et
le congocorinthe.
TD
j'eus constaté que les cellules terminales des feuilles, ayant une
douzaine de millimètres de longueur, possédaient encore de
la chlorophylle (ce qui rendait fort improbable une dégéné-
rescence si précoce des noyaux), que je repris mes prépara-
tions et constatai effectivement l'existence de petits noyaux.
D'ailleurs la cellule terminale s’allonge énormément et épaissit
beaucoup ses parois après le stade de 4/10 de millimètre.
Je n’étudierai pas la croissance intercalaire qui amène la
feuille du Mnium undulatum (L.) Weis à son état définitif,
car ceci ne nous apprendrait que des détails d’un caractère
purement spécifique. Or ce sont les grandes lignes du déve-
loppement de la feuille des Mousses en général que je me suis
proposé d'étudier dans ce travail.
La planche photographique II représente de I à XIII la série
des feuilles, depuis la plus jeune, qui entourait le point végé-
tatif d’une tige de Mnium undulatum (L.) Weis. Ces feuilles sont
vues du côté ventral. Les modèles ayant été faits en plastiline,
matière très malléable, peut-être un peu rétractile à la dessic-
cation, et maintes fois transportés et manipulés, ont pu être
quelque peu déformés. La pointe de toute la feuille XII fait
défaut car je n’ai pu en trouver les coupes dans ma prépara-
tion. Il est également probable que la feuille XIII et la
feuille IX devaient posséder une pointe plus fine qu’elle n’est
figurée. Les feuilles de cette espèce ont en effet, à l’état adulte,
des pointes très fines, car la cellule terminale s’allonge énor-
mément.
Malgré les nombreuses causes qui ont pu en modifier
l'exactitude, ces modèles sont très utiles pour permettre de se
rendre compte d’un coup d’œil des transformations amenant
une feuille de Mousse, de l’état de petit monticule informe
creusé seulement d’une menue cavité indiquant sa face ven-
trale (voir I, Planche photographique II), jusqu’à un stade
(voir XIII, Planche photographique ID) où l’on reconnait par-
faitement la feuille.
_ On remarquera tout d’abord que la nervure foliaire n’est
pas le produit d’un épaississement tardif suivant la trace
du plan de symétrie, comme on pourrait le croire. C’est au
. contraire la nervure qui semble apparaitre tout d’abord
Le ne
et la lame foliaire ne se développer que plus tard, naissant
sous forme de petites ailes à la base de la nervure (voir
spécialement VII, Planche photographique IT). En réalité ner-
vure et lame foliaire progressent simultanément, mais cette
dernière garde un développement très réduit pendant les
premiers stades de l’embryogenèse foliaire
Pour bien faire voir l’épaisseur considérable prise par la
nervure à des stades très primitifs, j'ai fait photographier les
reconstitutions des feuilles VI, IX et XI de facon qu'on aper-
coive leur coupe transversale au niveau où elles s’insèrent sur
la tige (voir figures VI dvs, IX Bis et XI bts). La figure XI &s,
qui représente une feuille déjà très reconnaissable, ne présente
encore qu'une lame foliaire réduite. La feuille XIII montre
déjà un peu la forme de la feuille adulte, car toute sa partie
inférieure (située entre la base et la ligne xx) présente des
bords sensiblement parallèles.
Pour comprendre le développement de la filé non plus
dans sa forme extérieure, mais dans l’évolution de ses élé-
ments anatomiques, je prie le lecteur de bien vouloir se
reporter à ma figure 190. Cette coupe, qui passe par l’initiale
d’une tige de Mnium undulatum (L.) Weis, coupée après avoir
été inclue à la paraffine est entourée de ses feuilles. ce qui a
l’avantage de montrer la manière dont celles-ci se recouvrent
Pune l’autre et la valeur de leur angle d'écart. On remarquera
l’aspect nettement triangulaire de la coupe de l’initiale I de
la tige. Son noyau se distingue immédiatement de tous ceux
de cette coupe par la grosseur de sa masse chromatique,
fortement supérieure à celle du noyau de la dernière cellule
détachée par lui, et ébauche d’un segment foliaire. La
masse chromatique du noyau de l’initiale de la tige a une
forme elliptique (grand axe 4", petit axe 3“) ainsi que le noyau
entier (grand axe 4", petit axe) 6"). F,, Fs, Fy, Fs et oF, me
sont que les coupes transversales dans les trés jeunes segments
ou la partie basilaire, enfoncée dans la tige, des jeunes feuilles.
Ce n’est qu’à partir de F, que nous avons des coupes dans des
feuilles proprement dites et méme F, n’est encore qu'une coupe
dans la partie basiliaire d’une feuille. Les cloisons dans Fy,
sont plus ou moins déchirées. Je ne parlerai pas de cette
à
À
4
es me eget er ee En
ah SE |
feuille. Dans toutes les autres coupes j’ai fait remplir de griséles
cellules eurycystes. J’ai renforcé les traits indiquant les cloi-
sons que je considère comme les premières apparues dans la
nervure (limitant les cellules fondamentales ou Grundzellen de
Lorentz et les eurycystes). J'ai renforcé également les traits
des cloisons périclines limitant dorsalement les groupes de
sténocystes.
Je vais tout d’abord parler du développement des lames
foliaires.
En examinant les coupes de celles-ci (fg. 190) on constate
qu'il n'y a pas de zone de multiplication exclusive, mais
que les cellules se divisent dans toute l’étendue de la lame
foliaire. Il y a pourtant une prolifération plus active en 2
endroits, comme nous le verrons plus loin (J'ai déjà dit à
propos des Andréales comment on reconnait qu'une cellule
vient de se diviser. J’ajouterai seulement ceci: il peut arriver
que la cloison de séparation entre les 2 noyaux-filles ne soit pas
encore complète, ainsi l’une des cloisons ec dans la lame
foliaire de droite de la feuille F,,.) On voit ici également d’une
facon très nette que les très jeunes cloisons ne marquent pas
leur insertion par un sillon sur la surface externe. Ainsi la
jeune paroi €, qui sépare les 2 cellules a et 6 de la lame foliaire
de droite de la feuille F,,, ne traduit son insertion sur les faces
dorsale et ventrale de la lame foliaire par aucun sillon; alors
que la cloison /, qui sépare les 2 cellules det e, produit un
sillon g sur la face ventrale et un sillon 2 sur la face dorsale
de la feuille. En effet toute cellule a tendance à prendre une
forme sphérique (Les Allemands ont même inventéle terme de
« Abrundungsbestreben » pour désigner ce fait très général.)
On sait que tous les êtres unicellulaires ont une forme sensi-
blement sphérique et c’est uniquement par suite de l’associa-
tion des cellules en tissus que la forme polygonale est appa-
rue comme conséquence de la pression réciproque des cellules
les unes sur les autres. Lors donc qu'une cellule présente une
surface libre elle prend presque toujours une forme bombée
vers l'extérieur (voir par exemple d et e).
Nous pouvons constater ici, comme nous l'avons déjà fait en
examinant les reconstitutions en plastiline, que la lame foliaire
=
ne présente au début qu'un faible développement. C’est ainsi
que dans F;, les cellules qui constituent les ames foliaires sont
assez grandes et que l’on ne voit pas trace de division cellulaire
récente, alors que dans F,, les jeunes cellules sont nombreu-
ses. Dans F,, les cellules du milieu des lames foliaires se sont
seules divisées récemment : à gauche 4 cellules viennent de se
diviser donnant 8 jeunes cellules et à droite il y a 4 jeunes
cellules. Dans la feuille F,; les divisions paraissent avoir été
plus actives, non plus au milieu pour la lame foliaire de droite,
mais de chaque côté de ce milieu marqué par la cellule 4
(dans F,,). On voit en effet trois jeunes cloisons €, à gauche
de la cellule d, donnant 6 jeunes cellules, alors qu'il n’y a qu’une
seule cloison e à droite de cette cellule d. La lame foliaire de
gauche de cette feuille F,, montre un fait du même genre: la
cellule d’ ne s’est pas divisée, alors qu'il y a du côté de la ner-
vure 2 jeunes cloisons €” et du côté de la marge une jeune
cloisone’. Dans F,; la lame foliaire gauche présente le même fait.
(Il y a de jeunes cloisons ¢ et e de chaque côté des cellules
centrales d.) Du côté droit il n'y a eu de multiplication que
contre la nervure (voir les deux jeunes cloisons c’). Dans la
feuille F,, on ne voit guère de jeunes cloisons que tout contre
la marge de la lame foliaire de droite. Dans F,, c’est encore
vers la marge et la nervure que se trouvent les divisions ré-
centes (voir €, €, c’, e” dans F,,). Il en est de même pour F;,
(voir les cloisons e’, d’, e et 2).
Nous constatons donc, en résumé, que la lame foliaire s’ac-
croit principalement par division des cellules situées tout
contre la nervure et tout prés de la marge.
Les bords de la feuille se différencient d’une facon précoce
en marge foliaire. Les cellules qui formeront cette marge se
remarquent dés les trés jeunes stades par leurs grandes di-
mensions (voir par exemple m dans F,,). Leur noyau cellulaire
prend un accroissement en rapport avec la dimension de la
cellule, mais la masse chromatique reste petite, ce qui indique
la cessation de toute cinése. Bientôt le contenu de ces cellules
marginales devient extrêmement vacuolaire et leurs noyaux
fixent presque uniformément les matières colorantes ainsi que
le plasma avoisinant; ce qui m'a fait croire longtemps, comme ~
a.
pour la cellule initiale, a des formes de dégénérescence du
noyau. Ces cellules, a l’état adulte, ont encore en général leur
contenu chlorophyllien et certaines d’entre elles s’allongent
en dents, ce qui montre qu'elles ne sont pas mortes. Mais elles
ne se divisent plus et s’agrandissent démesurément pour suivre
l’accroissement des cellules du reste du limbe. Les cellules de
marge arrivent ainsi à être une dizaine de fois plus longues
que les cellules du parenchyme foliaire avoisinant et leurs
parois longitudinales atteignent à la fin 2 fois l’épaisseur de
celles des cellules à peu près isodiamétriques du reste de la
lame foliaire.
La marge est formée de 4 à 5 rangées de cellules. Celles-ci,
comme on le voit par la figure 190, sont bien plus épaisses que
le reste de la lame foliaire et forment un bourrelet saillant.
L’asymétrie foliaire due au recouvrement des feuilles l’une
par l’autre se constate assez bien dans la lame foliaire
de cette espece, alors que pour la nervure elle est presque
insensible (voir fig. 190). C’est la partie droite de la lame
foliaire qui a généralement la plus grande longueur et le
plus grand nombre de cellules: ainsi dans la feuille K,, il
y a 26 cellules à droite contre 23 à gauche. Pourtant de ce
dernier côté les cloisons d’ toutes récentes tendaient à rétablir
l'équilibre. Dans la feuille F,; il y a 23 cellules à droite contre
19 à gauche, dans F,, ily en a 18 à droite contre 14a gauche,
dans F,, 7 à droite contre 6 à gauche et dans toutes ces feuil-
les le côté droit est plus long que le gauche. Mais dans cer-
tains cas, comme dans la feuille F,,, il y aa peu près égalité.
Quelquefois c'est le côté gauche qui est nettement le plus
grand et qui compte le plus grand nombre de cellules: ainsi F,,
a 15 cellules à gauche contre 12 a droite et le côté gauche est
un peu plus long. La feuille F;, est encore plus nette en ce
sens, car son coté gauche posséde 12 cellules alors qu’a droite
il n y en aque 7. Nous voyons que la feuille F,, libère son
côté droit le premier tandis que pour la feuille F, c’est le côté
gauche qui adhère à la tige en dernier lieu. Ces perturbations
dans le recouvrement des feuilles l’une par l’autre sont peut-
être dues à la sortie du rameau latéral R dans la base de la
feuille F,. En résumé, nous constatons donc que c’est le côté
Se te
droit dela lame foliaire qui est généralement le plus développé.
Pour faire comprendre le développement de la nervure
j'aurai recours à un certain nombre de schémas. La figure 191
est le schéma du premier stade de développement tel qu’on le
rencontre chez toutes les Mousses: c’est le stade en éventail.
J'ai indiqué par des traits renforcés la cloison médiane de la
feuille et les cloisons qui limitent la nervure à droite et à
gauche. Je suppose que celle-ci est formée de 8 cellules fon-
damentales : 4 à droite et 4 à gauche. Je les ai indiquées sur
mon schéma (fig. 191) par des chiffres romains. La nervure
ira en s’épaississant de plus en plus et sa coupe, qui avait
l’aspect d’un croissant (fig. 191), ressemblera ensuite a
une lentille plan convexe (fig. 192) et finalement à une len-
tille biconvexe. Les premières cloisons qui apparaissent après
le stade en éventail sont périclines. Elles divisent chacune des
cellules fondamentales en une moitié dorsale et une ventrale.
Ce processus débute naturellement à l’endroit le plus épais
de la nervure, c’est-à-dire dans les cellules fondamentales I.
I] se produit à peu près symétriquement. Dans mon 2° schéma
(fig. 192) je représente 4 cellules fondamentales ainsi divi-
sées. Les parties ventrales et dorsales délimitées de la sorte se
divisent bientôt à leur tour chacune en deux par une cloison
péricline. La figure 193 indique ces 3 séries de cloisons péri-
clines dans les cellules fondamentales I et Il. J’ai marqué la
première série de cloisons périclines dans toute la nervure.
J'ai indiqué par du grisé les > cellules-mères qui donneront
naissance ultérieurement par leurs divisions au groupe des
_sténocystes. On voit que ces 2 cellules-mères sont des cellules
dorsales dont l’origine est très précoce, puisqu'elles provien-
nent de la 1” division de la partie dorsale des 2 cellules fon-
damentales médianes. Les eurycystes apparaissent vers la
même époque du côté ventral. Dans les 3 ou 4 cellules fonda-
mentales de chaque côté du plan médian ces eurycystes se
dédoublent en général par une cloison péricline et donnent
ainsi 2 couches d’eurycystes. Toutes les cellules situées ven-
tralement par rapport aux eurycystes sont l’origine des cellules
ventrales et toutes celles qui sont situées dorsalement par
rapport à elles sont des cellules dorsales. La première cloison
— BI —
qui apparaît ensuite dans les cellules dorsales, dans les ven-
trales, comme dans les eurycystes et les sténocystes est en
général une cloison péricline. J’ai indiqué par des lignes en
pointillé quelques-unes de ces cloisons. Il se produit ensuite
dans chacune, sauf dans les eurycystes, des cloisons anti-
clines. Les. cellules ainsi délimitées se divisent encore quel-
quefois par des cloisons périclines. Les cellules marquées
A dans mon schéma 3 (fig. 193) et qui sont les homologues
des cellules-mères de sténocystes restent longtemps indi-
vises. Le développement que je viens de décrire s'applique
aux cellules fondamentales situées vers le centre de la ner-
vure. Celles qui se trouvent au contraire près du point
d'attache des lames foliaires présentent un développement
bien moins complet, d’un type aberrant et variable.
Je prie maintenant le lecteur de se reporter à la figure
190 où il verra des coupes réelles de nervures dans les-
quelles j'ai marqué d’un trait renforcé les cloisons que je
crois correspondre aux limites des cellules fondamentales.
J'ai indiqué également par un trait de force les limites des
massifs d’eurycystes et de sténocystes. Les eurycystes sont
marqués en grisé. J'ai indiqué les noyaux cellulaires, ce qui
donnera une idée de leurs dimensions par rapport à celles des
cellules qui les contiennent. Dans les marges des feuilles j'ai
figuré souvent les noyaux tels que je les voyais, c’est-à-dire
par une simple granulation. En réalité on pourrait y retrouver
une structure normale mais, comme je l'ai déjà dit, ces
noyaux et le plasma qui les entoure directement fixent à peu
près uniformément la matière colorante et on ne distingue
que difficilement leur structure.
Onsera certainement frappé de n’apercevoirqu'’une seule divi-
sion cellulaire (voir feuille F,,)et encore à un stade très avancé.
alors qu’il y a un nombre considérable de cellules figurées. Ceci
paraîtra d'autant plus singulierque la coupe estpratiquée dans la
région basilaire de très jeunes feuilles, ce qui estle lieu de leurs
plus actives divisions. Ceci doit être dû à l’époque et surtout
à l'heure de la fixation. Les Mousses atteignent en effet leur
maximum de vie végétative dans les saisons humides : en
automne et surtout au premier printemps. Or, c’estle 2 juillet,
6
“DE
dans la matinée, que mon matériel a été fixé. Il est probable
que les divisions cellulaires se produisent la nuit ou très tôt
le matin, car les seules que j'ai pu observer touchaient à leur
fin. |
On voit comme toujours autour des points végétatifs des poils
muqueux entre les très Jeunes feuilles (voir P, fig. 190). Mais
ceux-ci dégénèrent bientôt (voir L, fig. 190).
Je vais montrer maintenant la justesse de ma description
schématique du développement en étudiant des coupes de
feuilles d’âges très différents. |
La feuille F, présente un développement très aberrant, car
ici Veurycyste de gauche semble bien avoirune origine dorsale
et les 2 cellules situées dorsalement par rapport aux eury-
cystes se sont divisées tout d’abord par une cloison anticline
au lieu d’une péricline, comme dans le cas ordinaire. La
feuille F, au contraire présente un développement typique.
On voit 4 eurycystes. Les 2 cellules-mères primordiales des
sténocystes se sont divisées chacune par une cloison péri-
cline. Enfin, parmi les cellules dérivant de la 1” cellule fonda-
mentale de droite, la cellule située ventralement par rapport
à l’eurycyste s’est divisée en deux par une cloison péricline,
formant ainsi l’ébauche d’une 2° couche de cellules ventrales. La
cellule interne est une cellule intercalaire ventrale 2.11 n’y a ici
qu'une irrégularité : c’est que la cloison anticline qui limite a
droite le 2° eurycyste de droite ne se continue pas jusqu’à la
face ventrale. Dans la coupe de la feuille F,, nous trouvons
une complication anatomique beaucoup plus grande: 3 eury-
cystes se sont dédoublés par une cloison péricline. En ce qui
concerne les sténocystes, nous constatons l'apparition d’une
1 cloison anticline, qui vient subdiviser la plus dorsale des
2 cellules provenant de la division, au moyen d’une cloison péri-
cline, dela cellule-mère primordiale de droite du groupe de sté-
nocystes. La premiére cloison qui se forme dans chaque
cellule située dorsalement par rapport a un eurycyste est péri-
cline, comme je l’ai décrit dans mes schémas. La cellule dorsale
primitive provenant de la cellule fondamentale IT de droite a
même donné 4 cellules, car après la cloison péricline qui l’a
d’abord divisée il est apparu dans chaque cellule-fille ainsi
LEE pity ii d i
— 83 —
formée une cloison anticline. Dans les cellules ventrales il
s’est produit d’abord des cloisons anticlines, ce qui n’est pas
le cas le plus fréquent. Enfin je signalerai dans cette feuille F,,
la présence d’une division cellulaire parvenue au dernier stade
de sa télophase : les noyaux-filles sont déjà reconstitués, mais
le fuseau achromatique se voit encore nettement et la nou-
velle membrane cellulaire n’existe encore que sous forme de
dermatosomes dans le fuseau. Les 2 cellules qui provien-
dront de cette division seront : l’une un eurycyste et l’autre
une cellule ventrale. Nous voyons done ici nettement que les
eurycystes ont une origine ventrale.
Je ne continuerai pas à décrire ainsi toutes les coupes de
feuilles, car nous ne trouverions que des détails sans intérêt
général. Je me contenterai de faire remarquer (ce qui a déjà
été signalé dans mes schémas) qu'à des stades très avancés,
comme celui représenté en F,,, les cellules homologues des
cellules-mères primordiales des eurycystes ne se sont pas
encore divisées dans plusieurs cas(voirles cellules A dans F,
qui sont homologues des cellules À de mon schéma, fig. 193).
D'un côté de la feuille, le développement des tissus peut être
assez en retard: ainsi dans F,; le groupe de sténocystes ne
comprend que 5 cellules à droite contre 15 cellules à gauche
du plan de symétrie. Pour les cellules dorsales il en est de
même : c'est ainsi qu'il y a 6 cellules dorsales provenant de la
cellule primordiale I de droite, contre 9 provenant de la cellule
primordiale de même rang à gauche.
Pour compléter ma description je prie le lecteur de regarder
la figure 194. Elle représente une coupe faite dans la tige
dont Vinitiale occupe le centre de la figure 193, mais elle
oO 5)
a été pratiquée 60 micra plus bas. Cette figure permet de
se rendre compte de la structure de la jeune tige, dont on
voit nettement le cylindre central, et surtout de la maniére
dont les feuilles se recouvrent l’une l’autre et se soudent
à la tige. C’est ainsi que la feuille F,, fait déjà complètement
partie de la tige et n’est plus reconnaissable qu’à son faisceau
de 6 sténocystes ; ceux-ci sont passés au grisé, ainsi que les
sténocystes de la feuille F,,, qui est moins soudée à la tige
et dont on reconnait encore assez bien les eurycystes ainsi
PR ei
que le bord de la lame foliaire gauche B. On constate ici le
fait général: qu’à la base de toutes les feuilles les éléments
cellulaires sont bien plus grands et les parois anticlines plus -
nettement perpendiculaires à la surface extérieure du côté
ventral que du côté dorsal (Remarquez surtout les feuilles F,,
et F,,). On voit d’ailleurs souvent vers la base des feuilles des
couches de cellules ventrales très régulièrement disposées.
Cette structure est probablement due à l'effet de la pression de
la feuille contre la tige.
On remarque encore dans cette figure 194 la sortie de la tige
de rameaux latéraux qui ne naissent pas, comme chez les Pha-
nérogames, à l’aisselle des feuilles, mais en dessous de celles-ci
(d’après les travaux de Leitgeb). Cest ainsi que le rameau R,
situé à l’insertion sur la tige de la feuille F,, (fig. 194), n’appar-
tient pas au même segment que celle-ci, mais à celui d’une
feuille située au-dessus de cette coupe. Les noyaux cellulaires
que l’on apercoit sur cette coupe marqués par une simple
tache noire ne sont pas forcément des noyaux dégénérés, mais
des noyaux chez lesquels la masse chromatique se colore de
même que le caryoplasme.
Je crois être le premier à avoir étudié le développement de
la feuille de ce Mnium Dill. Au point de vue anatomique,
Lorentz (11) (pages 427 et 428) considère qu'il y a 2 couches.
d’eurycystes. Il indique que la marge foliaire est formée
d’une couche de cellules épaissies. L'abbé Morin dans sa thèse
figure au contraire une coupe de marge de cette plante où
l’on voit jusqu'à 4 couches cellulaires (voir planche 17,
figure 9 de sa thèse). Il doit y avoir confusion avec l’Atrichum
undulatum P. Beauv.. Cet auteur signale aussi les 2 couches
d’eurycystes. Il cite l’épithète de « pulchrae gentis pulcherri-
mum » appliquée à cette mousse et dit qu’elle le mérite bien au
point de vue anatomique.
Étude du Mnium punctatum (L. Schreber) Hedwig.
Le développement de la feuille du Mnium punctatum
(L. Schreb.) Hedw. a été étudié par Nageli en 1855 [voir (7)
pages 84 et 85]. Selon cet auteur la feuille se développerait, |
Se Ak FUE Re
i"
aaa) ars
— le
Pin Ses gee
comme celle des autres Mousses, par des divisions de la cellule
initiale et des cellules marginales. Les cellules internes conti-
mueraient à se diviser et ce seraient d’abord les cellules de la
base qui cesseraient leur multiplication et s’allongeraient en
transformant leur contenu et leurs parois. La formation des cel-
lules progresserait alors de la base à la pointe et de la ligne ©
médiane versles deux bords. La croissance en épaisseur dans
la nervure médiane et les marges (ce qu'il appelle les nervures
marginales) se produirait de bonne heure: elle commencerait
à la base et se continuerait vers le haut, de telle sorte que les
nervures seraient formées déjà de nombreuses couches à la
base alors que vers la pointe elles n’en posséderaient qu’une
seule. D’après cette description il semble qu'il considère la
nervure et les marges comme des épaississements de la lame
foliaire, qui en est d’abord dépourvue. En réalité, comme dans
toutes les Mousses, le développement est simultané et la nervure
apparaît dans des stades très jeunes. D’après Nageli la crois-
sance en épaisseur de la nervure serait terminée, dans chaque
région de la feuille, avant celle de la lame foliaire. Il recon-
nait néanmoins que la formation des cellules s'éteint plus
tot dans l’extréme pointe et les marges que dans les por-
tions du parenchyme foliaire situées dans le voisinage. Les
dernières cellules qui se diviseraient, selon lui, seraient les
3 ou 4 cellules du parenchyme situées à droite et à gauche, à
l'intérieur de la marge, tout contre la pointe. Il base cette
description sur des mesures: dans une feuille ayant 1"",6 de
longueur et o™,8 de largeur les cellules de parenchyme
de la base auraient une grandeur moyenne de 45 micromilli-
mètres et des parois d’une épaisseur de 1,3 micromillimètre.
Le contenu et la forme des cellules seraient déjà les mêmes
que dans la feuille développée et l’on verrait entre elles de
petits espaces intercellulaires. Ceci prouverait que la crois-
sance serait depuis longtemps achevée en cet endroit. Les
cellules situées à la pointe auraient au contraire une forme
losangique, elles seraient placées suivant des rangées se
croisant et présenteraient un contenu différencié et des
parois d’une épaisseur si faible qu’on ne pourrait la mesurer.
Elles seraient encore en état de division et leur diamètre,
op
peu constant, aurait de 10 à 14 micromillimètres. Dans
une feuille de 2™,3 de longueur et de r'#1 de layccur am
les cellules du parenchyme de la base auraient 60 micro- L
millimètres de longueur et des parois de 1,8 micromillimètre
d'épaisseur, tandis que les cellules du sommet auraient
18 micromillimètres, une forme losangique, des parois très
minces sans espaces intercellulaires ; quelques-unes seule-
ment, parmi les plus externes, se diviseraient encore. Une
feuille de 3"",4 de longueur et de 1"",8 de largeur possé-
derait à la base des cellules complètement développées de
70 micromillimètres de longueur avec des parois de 4,5 micro-
millimètres d'épaisseur ; les cellules du sommet auraient
27 micromillimetres de grandeur et 0,9 micromillimétres
d’épaisseur de parois, une forme polyédrique et pas d’espaces
intercellulaires nets. La formation des cellules y serait
achevée, mais dans 3 ou 4 cellules tout prés du sommet on
aurait encore reconnu la formation récente d’une cloison.
Enfin dans une feuille développée, de 4 millimètres de lon-
gueur et de 2"",3 de largeur, les cellules de la base auraient
70 micromillimètres de long, leurs parois 5,4 micromilli-
mètres d'épaisseur; les cellules du sommet 4o micromilli-
mètres et leurs parois 3 micromillimètres d'épaisseur.
Nägeli, comme nous l’avons vu, était le défenseur systéma-
tique de la théorie selon laquelle une feuille de Mousse
pousserait uniquement par sa pointe. Or il se trouve que le
Mnium punctatum(L. Schreb.) Hedw. lui donne justementraison
en partie. Ceci est dt a la forme toute particulière qu’affecte la
feuille de cette plante. La grande majorité des Mousses pos-
sède en effet des feuilles terminées par une pointe fine qui se
différencie rapidement, épaissit ses parois cellulaires et se
desséche, tandis que la base foliaire, protégée par les bases des
autres feuilles, continue souvent son développement pendant
longtemps. Le Mnium punctatum (L. Schreb.) Hedw. au con-
traire possède des feuilles arrondies (fig. 195). Il n’y a que
quelques espèces voisines telles que le Mnium subglobosum
Br. Eur. ‘et le Mniwm affine Bland. qui aient des feuilles de
cette forme, ainsi que quelques espèces arctiques de Bryum
Dill. et des Hygrohypnum Lindb.. Pour réaliser une semblable
iy F
as 5 side ra
, sb
og =
forme on comprend qu’une croissance intercalaire intense soit
nécessaire.
Lorsqu'on regarde une feuille adulte on ne voit pas, comme
dans les autres Mousses, la pointe de la feuille formée par une
cellule qui fut jadis l’initiale. Ici la fine pointe qui se dresse
sur le contour arrondi de la feuille est formée par la juxtapo-
sition de 4 cellules (voir fig. 195). La figure 195 représente une
feuille de 3™,6 de longueur et de 2"",5 de largeur. Cette feuille
‘était adulte. Dans les montagnes on rencontre souvent dans
les ruisseaux une forme appelée « elatum » par Schimper, dont
les feuilles sont énormes et dépassent bien ces dimensions.
Si l’on examine des feuilles beaucoup plus jeunes, telle que
celle dont la figure 197 représente la pointe, on ne voit pas
non plus de cellule initiale. Et pourtant cette feuille qui n’a
que 07,46 de longueur ét ont p8#de-larveurrestbren loir
d’avoir atteint sa différenciation définitive, car les cellules de
marge (fig. 197) ont une forme losangique et leur longueur
de 15 micra est sensiblement égale à leur largeur; tandis que
dans la feuille adulte (fig. 195) une cellule de marge a une lon-
gueur voisine de 200 micra etune largeur 10 fois moindre. Une
feuille de o"",8 de long ne m’a pas montré non plus trace d’ini-
tiale. J’ai enfin trouvé une cellule initiale sous forme d’un
triangle équilatéral de 8 micra de côté dans une feuille de
1/40 de millimètre de longueur, dont la figure 196 montre la
pointe.
Le Mnium punctatum (L. Schreb.) Hedw. possède done bien
au début une initiale à 2 pans de forme normale, mais qui dis-
parait de très bonne heure pour faire place à une croissance
intercalaire. Contrairement à l'opinion de Nägeli, cet exemple
est donc excellent pour montrer la disparition précoce de la
croissance au moyen d’une initiale, puisque celle-ci perd non
seulement son activité fonctionnelle de très bonne heure, mais
même sa forme d'initiale.
On connait un certain nombre de cas où Vinitiale à 2 pans
n'existe pas ou disparait d’une facon précoce chez les Mousses
et c'est toujours dans des feuilles arrondies comme celle du
Mnium punctatum (L. Schreb.) Hedw. ou en forme de bande.
Crest ainsi que d’après Goebel (32) les minuscules feuilles
ee Tas
en forme de disque et dépourvues dechlorophylle du Buxbau-
mia Haller ne présenteraient jamais d’initiale.
On trouve la description d’un certain nombre d’autres cas
dans le travail de Jongmans (33) sur les Mousses productrices
de propagules. Pour les feuilles protonématiques de l'Ædipo-
dium Griffithianum (Dicks.) Schwägr. l’initiale à 2 pans dispa-
rait, en se segmentant irrégulièrement, d’une facon plus ou
moins précoce. Cette transformation se produit plus tot chez les
exemplaires poussant vigoureusement. Il lui succède une crois-
sance marginale, comme chez les Fougères. Les feuilles pro-
tonématiques seraient en forme de bandes. Les premières
feuilles des jeunes bourgeons de l'ŒÆdipodium Schwägr. per-
draient également de très bonne heure leur croissance apicale.
Dans les feuilles ordinaires, l’initiale disparaitrait aussi bien-
tot par divisions irrégulières et l’on n'aurait plus ensuite
qu'une croissance marginale.
Parmi les Splachnacées l'ŒÆdipodium Schwägr. ne serait pas
seul à présenter un semblable cas. C’estainsi que chez le Taylo-
ria Dubyi(Duby) Brotherus, de la Patagonie, les feuilles pousse-
raient assez longtemps au moyen d’une initiale ; mais celle-ci
se diviserait à un certain moment d’une facon irrégulière et une
croissance uniquement marginale lui succéderait. La figure 6
de la page 79 de ce travail montre la pointe d’une feuille de
cette espèce ou il n’y a plus trace d’initiale.
Chez le Splachnobryum aquaticum C. M., forme aquatique
du pays des Somalis (page 80 et figure 7 de son travail), la
croissance apicale disparait dès le très jeune age.
Dans les feuilles protonématiques d’'ŒÆdipodium Schwagr.
provenant de propagules, la cellule initiale cesserait égale-
ment tres tot de fonctionner en se cloisonnant irrégulièrement.
Jongmans décrit et figure (/oc. czt., pages 131 et 132) le déve-
loppement des feuilles involucrales des propagules du Georgia
pellucida (L.) Rabenh.. Elles ne présenteraient d’initiale qu’à
des stades très jeunes du développement. Leur initiale à 2
pans disparaitrait par la production d’une cloison perpendi-
culaire au sens de la longueur de la feuille. Puis une cloison
longitudinale se produirait dans la cellule supérieure et une
transversale dans la cellule inférieure. A l’état adulte, ces
Pee vie a et
PAT AU ease JAY PRR Ga
A
Ce,
LE
sers Ans Mig ig a + ME
<
Bo her tly:
OR
feuilles sont en forme de cœur et la place qu’occupait l’ini-
tiale se trouve au fond d’une dépression du contour externe.
Les feuilles protonématiques du Georgia Ehrh. pousseraient
d’abord par une initiale à un pan, puis par une initiale à 2 pans
qui cesserait de fonctionner plus ou moins tôt alors que la
croissance marginale persisterait.
On voit donc, par tous ces exemples, que le cas du Hnium
punctatum (L. Schreb.) Hedw. n’est pas isolé.
Ce qui frappe tout d’abord, dans la description du dévelop-
pement de la feuille du Mnèum punctatum (L. Schreb.) Hedw.
jaite par Nägeli, c’est que la plus jeune feuille dont il donne les
mesures ait 1"",6 de longueur. C'était par conséquentune feuille
ayant déjà atteint un développement très notable. Nägeli ne
semble donc pas s'être occupé des premiers stades, qui sont de
beaucoup les plus intéressants dans une embryogenèse quel-
conque, car c’est la que l’on reconnait les grandes lignes du
développement d’un groupe, alors que les stades ultérieurs
montrent simplement des particularités propres à une espèce.
J'ai étudié, comme je lai déjà dit plus haut, des stades beau-
coup plus jeunes. La feuille la plus petite que j’ai observée avait
1/40 de millimètre de longueur et 1/50 de largeur. Sa forme
était ovale et rappelait déjà beaucoup celle d’une feuille
adulte. La figure 196, qui représente la pointe de cette feuille
munie d’une cellule initiale équilatérale de 8 micra de côté,
montre bien le début de l’évolution des segments. J’ai indi-
qué ceux-ci par des chiffres romains et marqué leurs contours
par un trait renforcé.
La première cloison que nous voyons apparaitre dans un
segment détaché par l’initiale est une cloison péricline p
(dans le segment II, fig. 196). Le segment III possède 2 cloi-
sons périclines. La plus nouvellement formée doit étre la plus
externe. Le segment IV nous montre l’apparition d’une nou-
velle cloison péricline, qui vient diviser la cellule correspon-
dant a la plus interne des cellules des segments précédents.
Il est apparu 2 cloisons anticlines a dans les 2 cellules exter-
nes. Nous voyons donc que les cloisons anticlines, comme les
périclines, apparaissent en premier lieu sur le bord de la
feuille et progressent vers le centre. Mais bientot les cellules
— go —
situées sur la ligne médiane de la feuille ralentissent leurs
divisions et s’allongent seulement pour suivre l’accroisse-
ment des cellules plus périphériques. Elles donneront la
nervure dont la cellule nm du segment VI forme une pre-
mière ébauche. Cette jeune feuille ne présente donc, en fait
de différenciation qu’un début de nervure. Dans une feuille
de o"",18 de longueur et de o"™",11 de larceun om me die
tinguait déja plus du tout Vinitiale de la feuille. Tout le
pourtour de celle-ci était formé de cellules beaucoup plus
grandes que les cellules internes et dont les parois anti-
clines étaient encore bien perpendiculaires au contour
externe. Leurs dimensions étaient de 14 micra dans la direc-
tion perpendiculaire au contour de la feuille et de 7 à 17 micra
dans l’autre direction, alors que les cellules immédiatement
sous-jacentes, de forme carrée ou un peu rectangulaire,
n'avaient guère plus de 7 micra de côté. La marge foliaire et
l’initiale qui se confond avec elle, ne jouent donc certaine-
ment plus de rôle dans la croissance de la feuille dès ce très
jeune stade. Je signalerai également que la base de la feuille
s’est légèrement effilée. EG
Ce fait se constate encore mieux au stade suivant, dans une
“teuille de 07,16 de longueur et de‘o™™/28:de largeur, dont la
figure 197 représente la pointe. Iciles cellules de la marge
n’ont plus leurs parois anticlines exactement perpendiculaires
au contour externe, mais elles s’éloignent de plus en plus de
cette position à mesure que la distance qui les sépare du som-
met de la feuille augmente. On reconnait nettement la nature
méristématique du tissu sous-jacent aux nombreux cloisonne-
ments récents tels que € (fig. 197). Toutes les parois cellulaires
n'ontencore qu'une épaisseur voisine du micron. Les cellules
de marge ont environ 15 micra de côté et celles de l’intérieur
7 micra. On voit done que leurs dimensions ont sensiblement
augmenté depuis le stade précédent, surtout en ce qui con-
cerne la largeur des cellules marginales qui, au lieu de for-
mer palissade le long du bord de la feuille, (leur plus grande
dimension étant perpendiculaire au contour externe) sont
maintenant sensiblement équilatérales, plus régulières et
de forme losangique. Les cellules qui composent la nervure
Bes, apes
ont une dizaine de micra de largeur et une longueur 4 fois plus
grande.
Dans une feuille de 1™",6 de long les cellules du parenchyme
avaient à peu près : vers la pointe 274 delong sur 18 de large,
au milieu pres de la nervure 46 y de long sur 18 de large,
enfin a la base jusqu'à 5oy, de long et 3o0y de large.
Dans une feuille de plus de 2 millimètres de long et de
1"",25 environ de large, les parois des cellules marginales
n'avaient encore guère qu'un micron d’épaisseur, mais ces
cellules étaient déjà nettement allongées parallèlement au
bord de la feuille (4 fois plus longues que larges). J'ai constaté
aussi d’une facon très nette, dans cette feuille, que le paren-
chyme de la pointe foliaire était formé de petites cellules, ainsi
que le parenchyme situé le long des nervures. Je pense donc,
comme Nägeli, que les dernières cellules formées sont en effet
situées vers la pointe de la feuille. Les cellules de la base
étaient au contraire déjà grandes et avaient dù cesser leurs
divisions depuis longtemps.
La figure 195 montre une feuille encore plus âgée ayant
3",6 de long et 2"",5 de large. On se rend tres bien compte
que le centre et la base de cette feuille, ainsi que les marges, ont
cessé depuis longtemps leurs divisions. Je vais indiquer quel-
ques mesures de cellules et de membranes pour une feuille de
2"",6 de long et de 4 millimetres de large. Juste au dessous
de la pointe, la où Nägeli décrit les dernières divisions cellu-
laires, j'ai remarqué les plus petites cellules. Jen ai mesuré
une deity sur 14 y; une autre avait 37 y sur 18. Leur forme est
souvent pentagonale. Vers le milieu de la feuille. près de la
nervure, les cellules atteignent leurs dimensions maxima.
Elles sont régulièrement pentagonales ayant 1114 soit plus
de 1/10 de millimètre de longueur, et moitié moins de lar-
geur. Ce sont ces énormes cellules qui firent donner à ce
Mnium le nom de punctatum (L. Schreb.) Hedw. par les
anciens auteurs, car ceux-ci, qui ne se servaient guère que de
la loupe, apercevaient ces cellules sous forme de petits points.
Vers la base de la feuille les cellules à contour plutôt rectan-
gulaire ont en moyenne 83y de long sur 46% de large.
L’épaisseur des parois cellulaires est encore un très bon
— 92 —
caractère pouvant servir à fixer l’âge des cellules. Les petites
cellules du parenchyme, sous la pointe, présentent des parois
d’une épaisseur voisine du micron ; ce qui montre leur jeune
âge. Les cellules des marges possédent au contraire vers
Pextréme pointe jusqu’à 6 d'épaisseur, alors que vers la base
de la feuille elles n’ont pas plus de 4,5.
On a donc, pour la marge, un phénomène inverse de celui
que présente le parenchyme: c’est vers la pointe que les cel-
lules de marge sont les plus différenciées, ce qui montre
bien que c'est la qu'elles ont perdu le plus tôt leur faculté
reproductrice. Les grandes cellules du milieu de la feuille
ont des parois de 4*,5, ce qui est également |’épaisseur des
parois cellulaires de Pun des côtés de la base, tandis que de
l’autre elle atteint seulement 3 y.
J'ai examiné et dessiné de nombreuses coupes transver-
sales faites au microtome, d’abord dans une feuille âgée, puis
dans 6 jeunes feuilles qui se trouvaient autour d’archégones.
La figure 198 représente une coupe dans la nervure d’une
feuille âgée. On est frappé de suite par la grande dimension
du faisceau de sténocystes, le grand nombre de ces éléments
2 REISS SSNS NE a Bie A A pee pend aes ial ee gre
ee Le
(une trentaine), la grande dimension des lumens de la couche
dorsale d’eurycystes, |’épaisseur des parois cellulaires.
Les figures 199 et 200 sont des coupes : l’une (fig. 200)
vers la base et l’autre (fig. 199) faite beaucoup plus haut, dans
la plus âgée des 6 feuilles que j'ai étudié. Cette feuille est
encore assez jeune, car les parois cellulaires sont peu épais-
sies, sauf à la base (fig. 200). J’ai pu confirmer ainsi en partie
les opinions de Nägeli par mes coupes transversales. Je signa-
lerai également que les épaississements collenchymateux
apparaissent aux angles des sténocystes d’abord à la base de À
la feuille. L’épaississement des parois cellulaires progresse
dela périphérie vers le centre. C’est ainsi que, dans la figure
199, il n'y a que les parois externes et celles de quelques &
cellules dorsales qui présentent des épaississements ; tandis 4
. que, dans la figure 200 ces épaississements ont gagné toute ;
la nervure, à l’exception des sténocystes et des parois anti-
clines des cellules qui les entourent. On remarquera enfin
les renforcements très caractéristiques que l’on trouve dans
ed 5
Ma,
i œ
| eee
“nh
mee A7
-
tie
cette espèce au point d'insertion des cloisons cellulaires du
parenchyme foliaire sur les surfaces externes (voir e, fig. 199).
En examinant les très nombreux dessins (au nombre de 126)
des coupes de 6 jeunes feuilles périchétiales dont j'ai parlé
plus haut, j'ai pu tirer quelques règles générales de dévelop-
pement que j’exposerai au moyen de schémas (fig. 201 et 202)
comme pour le Mnewm undulatum (L.) Weis. Je ne prétends
pas que ces schémas de développement coincident toujours
avec la réalité, car on observe de nombreuses exceptions.
La nervure proprement dite est ici généralement formée
de 2 cellules fondamentales seulement. J’ai épaissi fortement
leurs parois anticlines dans ma figure 201, ainsi que la pre-
miére cloison péricline qui sépare chacune de celles-ci en une
cellule ventrale et une dorsale. La nervure primitive est done
formée de 4 cellules: 2 dorsales et 2 ventrales. Les 2 cellules
dorsales se divisent chacune par une cloison anticline. Des
4 cellules ainsi formées, les 2 cellules situées de chaque côté
du plan de symétrie se divisent par une cloison péricline,
isolant ainsi 2 cellules E (fig. 201) qui seront les cellules-
mères primordiales des sténocystes. Ces cellules-mères de sté-
nocystes se divisent d’abord chacune par une cloison péricline,
indiquée en pointillé dans la figure 202, donnant ainsi 4 cel-
lules E(fig. 202). Souvent apparaissent encore 2 autres cloisons
périclines amenant la formation de 6 cellules E (3 de chaque
côté du plan de symétrie) avant qu'il n’apparaisse des cloisons
anticlines dans ce faisceau d’euryeystes. Les cellules marquées
par À dans la figure 202, et qui sont homologues des cellules-
mères primordiales des sténocystes, restent souvent indivises
ou se divisent peu (voir cellules A dans la figure 198). Les
cellules dorsales indifférenciées se divisent en général, d’abord
par des cloisons périclines, auxquelles succèdent encore quel-
ques anticlines, derrière le faisceau de sténocystes. Il n’y a
guère plus de 3 couches de cellules dorsales à l’état adulte
(voir figures 198, 199 et 200).
Passons au cloisonnement de la partie ventrale : la pre-
mière division se fait au moyen de cloisons périclines, qui
isolent ainsi dorsalement 2 cellules mères d’eurycystes D
(fig. 201). Les cellules ventrales se divisent d’abord chacune
par une cloison anticline donnant 4 cellules V (fig. 201). Puis
apparaissent des cloisons périclines, marquées en pointillé
dans la figure 202, ce qui porte à 2 le nombre des couches de
cellules ventrales ; ce chiffre est rarement dépassé. |
Les eurycystes se dédoublent d’abord chacun par une cloi-
son anticline et les 4 cellules ainsi formées se divisent à leur
tour par une cloison péricline donnant 2 couches d’enrycystes :
h erands Det 4 petits d'placés ventralement par rapport aux pre-
miers. Lorentz prétend que l’on peut reconnaitre le nombre de
cellules fondamentales dont une nervure est formée au nombre
de ses eurycystes. Nous avons vu qu'il ne cite comme exCep-
tion qu'un Bryum Dill. ; mais cependant il a constaté aussi
chez Funaria Schreb. des cas où il y avait 4 eurycystes sur
2 cellules ventrales, d’ou nécessité du dédoublement secon-
daire des eurycystes par des cloisons anticlines. Il n’a pas
cependant tiré cette conclusion. L’abbé Morin (30) pour le
Mnium hornum L. dit que les eurycystes se dédoublent tan-
gentiellement et radialement). Nous voyons dans ce Mniwm
Dill. une exception de plus à la règle de Lorentz.
Enfin des cellules de la lame foliaire, voisines de la nervure,
peuvent se diviser également et donner de grandes cellules
qui s'ajoutent à la nervure, telles que celles marquées par B
dans mon schéma (fig. 202) et dans la figure 198.
On a pu remarquer une différence importante entre ce
développement et celui du Mniumundulatum(L.) Weis, en ce qui
concerne les cellules-méres des sténocystes. Leur production
est ici moins directe, car elles ne sont pas délimitées comme
chez le Mnium undulatum(L.) Weis par la première cloison péri-
cline apparaissant dans les 2 cellules dorsales médianes primiti-
ves (voir fig. 193). Nous avons vu en effet que ces 2 cellules
dorsales primitives se divisent d’abord, non par une cloison
péricline, mais par une anticline à laquelle succède une
péricline ; ce sontles cellules les plus internes E (fig. 201) qui
sont les cellules-mères des sténocystes.
Je signalerai encore que, vers la base de la feuille, le côté
dorsal des cellules fondamentales reste longtemps indivis,
formant des grandes cellules palissadiques très hautes, alors
que du côté ventral les cloisons périclines limitant les cellules
a
24
=
M
=
2
DU
eurycystes des cellules ventrales sont apparues déjà. C’est
ainsi que l’on observe de jeunes feuilles où les coupes
transversales de la base présentent : 4 hautes cellules dorsales _
palissadiques, 4 eurycystes et 4 cellules ventrales.
Vers la base des feuilles adultes les cellules ventrales
possèdent des anneaux d’épaississement très spéciaux qui se
rencontrent dans d’autres Mousses, par exemple chez le Hnium
spinosum (Voit) Schwägr..
Dans la lame foliaire de feuilles assez développées, j'ai con-
staté aussi, sur les coupes transversales, une multiplication
très active, se traduisant par l’étroitesse des cellules dans le
sens parallèle aux lames foliaires et le grand nombre de noyaux
qu'on y voit, alors que dans ces mêmes feuilles les cellules
sont bien plus larges vers la base. J’ai donc confirmé encore
en cela les données de Nägeli.
Le développement de la marge, sous forme de nervure mar-
ginale a plusieurs couches, ne commence qu’assez tardivement
et débute en général par la formation d’une cloison parallèle
aux lames foliaires, rarement dans la cellule qui borde la
feuille, mais plutôt dans celle qui la précède ou encore quel-
quefois dans la 3° cellule à partir du bord. Cette apparition
se fait à peu près simultanément, depuis la pointe jusqu’à la
base de la feuille, lorsque celle-ci a atteint un certain stade de
son développement. C'est ainsi que dans la 3° feuille (en
comptant à parur de la plus jeune) que j'ai étudié et qui avait
o™™.6 de longueur, il n y avait pas trace de cloisonnement dans
les cellules marginales; tandis que dans la ‘feuille, un peu plus
âgée et mesurant 0"",675, c'est-à-dire n'ayant que les 3/4 d'un
dizième de millimètre de plus que la précédente, on observait
la formation d’une 2° couche cellulaire dans la région margi-
nale, depuis la 3° coupe à partir de la pointe jusqu’à la base
de cette feuille. Certaines coupes en étaient dépourvues com-
plètement ou simplement d’un côté. Dans. la 10° coupe,
qui ne possédait pas même indication d’une marge
du côté gauche, la 2° et la 3° cellule à partir du bord droit
s'étaient divisées chacune par une cloison parallèle aux lames
foliaires. La production de ces cloisons est précédée d’un
gonflement des cellules dans lesquelles elles apparaissent
3 mu ates
Dans la partie la plus différenciée de la marge, c’est-a-dire
vers la base de la feuille, on voit encore dans ces 2° et
3° cellules (comptées à partir du bord de la feuille) 2 autres.
cloisons parallèles à la première cloison formée. La cellule du
bord de la feuille et La 4° à partir du bord se divisent aussi cha-
cune par une cloison parallèle aux surfaces foliaires, si bien
que la nervure est formée typiquement de 4 cellules centrales
entourées de 8 cellules périphériques [ce que j'ai figuré dans.
un schéma (fig. 203)|. Naturellement, il peut se produire encore
d’autres cloisons. C'est ce que l’on constate dans les figures 199.
et 200.
Au point de vue anatomique, l’abbé Morin (30) représente
une coupe transversale de nervure (figure 8 de sa planche 17)
et dit que Schleiden avait déjà figuré la nervure marginale de
cette Mousse.
Etude de Funaria hygrometrica (L.) Sibth.
Nous avons vu, par l’étude de 2 espèces de Mnium, que dans.
un même genre on peut rencontrer des types de développement
légèrement différents et cependant des formes assez éloignés,
d’autre part, peuvent montrer un développement très sem-
blable. C’est ainsi que la Funaire hygrométrique, que je vais.
étudier maintenant, offre dans le développement de sa feuille
un type très comparable à celui du Mnium punctatum
(L. Schreb.) Hedw. Pourtant la famille qui renferme les Mnium
Dill. et les Bryum Dill. compte parmi les plus élevées dans la
classe des Mousses , par la présence de traces foliaires incom-
plètes, d’un cylindre central bien délimité dans la tige, par la
haute différenciation des nervures et l'existence de marges
foliaires. La famille des Funariacées est au contraire bien
inférieure. ; elle présente néanmoins une différenciation très.
caractéristique de ses cellules épidermiques ventrales, qui
restent à large lumen et accolées directement aux eurycystes.
sans interposition d’intercalaires ventrales.
Les Funariacées ont fait l’objet, de la part de Lorentz, d’études.
anatomiques publiées dans le journal #/ora en 1867(14). Chez
Funaria hygrometrica (L.) Sibth. (14) (pages 552 à 553 de son.
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RER Dep RTS dns A"
aga. a
mémoire, dans le n°35 du 14 décembre 1867) il dit que le nombre
des eurycystes et des cellules ventrales est bien plus constam-
ment de 2 que dans les autres espéces. I] a remarqué le cloison-
nement de certaines eurycystes, qui donnent de petits groupes
de cellules. Il a observé aussi des cas où il y avait plus
de. 2 eurycystes, mais très rarement un nombre de cellules
ventrales différent de 2. Il a même vu 4 eurycystes dans une
nervure ou il n’y avait que 2 cellules ventrales. Il devait en
conclure à la division des eurycystes par des cloisons anticlines,
mais il ne fait la aucune remarque à ce sujet. L’abbé Morin,
au contraire, dans sa thèse (page 88), attire l’attention sur la
production de 3 à 4 eurycystes issues du cloisonnement radial
de 1 ou 2 d’entre elles. Il a même observé 5 eurycystes, la
transformation d’eurycystes en groupes de 2 à 4 stéréides ;
rarement le nombre des cellules ventrales s'élevait à 3 ou 4.
Mon matériel’, formé de fleurs mâles, présentait régulière-
ment la monoecie, car dans mes coupes en série je rencontrai
juste au-dessous de la fleur mâle terminant la tige, une fleur
femelle formée d’un archégone. On sait que cette monoecie a
été étudiée par Marchal, Boodle et plus de 60 ans avant ces
auteurs Mitten et ses contemporains l'avaient signalée.
J'ai constaté toujours que le jaunissement et l’épaississe-
ment des parois cellulaires, signe de vieillesse, commencaient
par la pointe de la feuille, alors que la base restait long-
temps méristématique.
J étudierai une série de feuilles, de plus en plus âgées, de
fleur femelle. Les figures 204 à 208 montrent quelques coupes,
de la pointe à la base d’une très Jeune feuille. Les coupes
successives nous ferons fort bien suivre le développement, car
dans une feuille si jeune la pointe n'a pas encore acquis une
différenciation spéciale.
La figure 204 nous offre le stade en éventail, bien connu,
compliqué seulement par l'apparition de la nervure, formée
de 2 cellules fondamentales seulement comme chez le Mnium
1. Ce matériel a été récolté à Berne dans le jardin de la maison du 39 Hallerstrasse
et mis dans l’eau de 13 h. 20 à 15 heures (soit pendant 1 h. 40) avant d’être fixé au
liquide de Kaiser le 13 février 1918. Les préparations ont été colorées au mélange
fuchsine-vert d’iode, puis congocorinthe.
= 98 pes
punctatum (L. Schreb.) Hedw.. La figure 205 montre un stade
beaucoup plus évolué : du côté ventral, des cloisons péri-
clines se sont produites, séparant les eurycystes D et d des
cellules ventrales V. I] est même apparu une cloison anticline
dans l’eurycyste primordiale de droite, qui a donné ainsi nais-
sance à 2 eurycystes d. Du côté dorsal, la première cloison qui
apparaît dans chaque cellule dorsale primordiale est anticline
(voir a, fig. 205). Du côté droit la segmentation s’est pour-
suivie au moyen d’une cloison péricline, donnant ainsi nais-
sance à une cellule-mère de sténocystes E (fig. 205). Nous voyons
donc que la cellule-mère de sténocystes a une origine sem-
blable à celle de la nervure du Mniwm punctatum (L. Schreb.)
Hedw..
Dans la figure 206 la cellule-mère de sténocystes s’est divisée
par une cloison anticline a (fig. 206), ce qui n’était le cas pour
aucun des 2 Mnium Dill. étudiés. Nous voyons également dans
cette figure 4 cellules eurycystes, mais les cellules ventrales
sont restées indivises. Elles le resteraient même a l’état adulte,
a cet endroit de la feuille qui est le plus hautement diffé-
rencié. C'est seulement vers la base que ces cellules ventrales
se divisent par des cloisons anticlines. C’est ainsi qu’on trouve
4 cellules ventrales dans la figure 207, mais seulement 3 dans
la figure 208.
La figure 207 nous montre la continuation du cloisonne-
ment du côté dorsal : une cloison péricline p et 2 cloisons anti-
clines a, qui n’existaient pas dans la figure 206, sont apparues.
La figure 208 représente la coupe située juste à l'insertion
de la feuille sur la tige. Les cloisonnements offrent, comme
tonjours dans cette région, un type très simplifié.
Dans toutes ces coupes de nervures on a pu constater que
le côté droit a eu un développement bien plus rapide et plus
complet que le côté gauche: c'est du côté droit qu’apparait la
première cloison anticline, qui dédouble une eurycyste pri-
mordiale en 2 eurycystes d (fig. 205). C’est encore de ce côté
droit qu’on voit la première cellule-mère de sténocystes E
(fig. 205). On en trouve déjà 2 séparées par la cloison a dans
la figure 206, alors que du côté gauche il n’y en a encore
aucune ; ce n'est que dans la figure 207 qu’il en apparait
9G, =
enfin une (F, fig. 207) de ce coté, mais elle est bien petite
comparativement aux 2 cellules sténocystes E (fig. 207) situées
du côté droit. En ce qui concerne la lame foliaire, c’est éga-
lement le côté droit qui compte toujours le plus grand nombre
de cellules (sauf dans la figure 204 ou la lame foliaire n'existe
pour ainsi dire pas). C'est d’ailleurs ce côté qui se soude en
dernier lieu à la tige. L’extrémité du limbe du côté gauche
commence à se fusionner avec celle-ci en T (fig. 208).
Les divisions cellulaires se produisent un peu n'importe où
dans la jeune lame foliaire (voir les membranes, probable- :
ment toutes récentes, marquées 7 dans les figures 205 à 208).
Dans la figure 206 on voit une division N arrivée au stade
final de l’ascension polaire.
Dans une feuille plus jeune (fig. 209) le côté droit prend net-
tement la prédominance : la cellule fondamentale de gauche €
(fig. 209) de la nervure est encore indivise, alors que celle de
droite s’est divisée par une cloison péricline p et que, dans la
cellule dorsale ainsi formée, il est déjà apparu une cloison anti-
cline a.
Les figures 210 a 218 montrent des coupes de la pointe a la
base dans une feuille plus âgée que la première décrite.
Dans les figures 216 a 218 je n’ai pas représenté la lame
foliaire. La figure 210 montre une coupe à travers l’initiale
de la feuille : son noyau n'a pas de plus grandes dimensions
que représente celui de toute autre cellule. La figure 211 la
coupe placée 15 » plus bas. Elle montre bien que la feuille
poussait par une initiale à 2 pans, car, s’il y avait eu une
initiale à 1 seul pan il y aurait eu‘une cloison située suivant
le plan de symétrie de la coupe. La figure 212 fait voir
la prédominance du côté droit de la lame foliaire. Dans les
figures suivantes nous constatons que cette prédominance
reste toujours nettement accentuée. La figure 213 nous mon-
tre un fait du même genre pour la nervure: en effet, alors que
la cellule fondamentale de gauche de la nervure ne s’est en-
core divisée que par uue cloison péricline p, en une cellule
ventrale et une dorsale, à droite la cellule dorsale s’est déjà
divisée successivement par une cloison péricline m et 2 cloi-
sons anticlines a et /, donnant ainsi naissance à une cellule-
= hOO
mère de sténocytes E. La figure 214 présente un développement.
à peu près semblable, mais certaines cloisons dessinées du
côté dorsal gauche sont peut sures. La formation d’une seule
cellule ventrale V estun fait tres particulier. La nervure provient
donc ici d’une seule cellule fondamentale. C’est une structure
réduite que l’on peut rencontrer vers la pointe des feuilles.
Les figures 210 à 214 représentent la région de pointe dont
le développement est à peu près achevé. En effet, la coupe de la
figure 214 est restée à un stade bien moins évolué que celui
représenté par la figure 205 et pourtant la lame foliaire est bien
plus développée, les cellules sont beaucoup plus grandes dans
la figure 214 que dans la figure 205. L'activité multiplicatrice
des cellules a du déjà se ralentir dans toute cette région
de pointe. Tandis que, de la figure 215 à la figure 218, on
voit de nombreuses petites cellules dans la nervure, et que la
lame foliaire présente beaucoup de jeunes membranes (voir 7
fig. 215), au contraire, dans les figures 212 à 214 les cellules
de la lame foliaire sont larges : donc il y a longtemps qu’une
division cellulaire ne les a pas affectées. Je signalerai dans.
la figure 215 le fait que les cellules-mères d’eurycystes,
aussi bien a droite qu’a gauche, se sont divisées d’abord
par une cloison péricline (p fig. 215). Il en est de même dans.
la figure 216 (voir p). A gauche 2 parois anticlines lui ont suc-
cédé, ce qui a amené la formation de 6 cellules sténocystes.
Du côté ventral il y a 2 cellules ventrales et 5 eurycystes, car
2 eurycystes se sont divisées par une cloison péricline, donnant.
2 couches d’eurycystes, fait très rare dans cette espèce. La
figure 217 représente une structure sensiblement semblable,
sauf qu'il n’y a plus que 4 eurycystes, mais le nombre des
cellules épidermiques dorsales s’est augmenté par l’adjonction
de 2 parois anticlines a. La figure 218 présente une structure
plus simple et la nervure est moins bombée du côté dorsal.
Ceci montre le voisinage de la base. Ici c’est par des cloisons.
anticlines a que la segmentation a débuté. C’est seulement
dans la figure 218 que l’on voit le nombre des cellules épider-
miques ventrales se monter a plus de 2. On peut remarquer
la grande taille des cellules ventrales dans toutes les figures.
210 VA 218%
— 10F —
Les figures 219 à 230 représentent des coupes de l’extrème
pointe (fig. 219), jusqu’au fusionnement avec la tige (fig. 230)
d’une feuille plus âgée. Je n’ai plus représenté la lame foliaire
à partir de la figure 224 jusqu'à la figure 230. Nous pouvons
constater la grandeur des cellules et leur irrégularité depuis
Pextréme pointe(fig. 219). Il semble qu'il y ait des noyaux cel-
lulaires jusque dans la figure 224. Dans ces coupes il estimpos-
sible de distinguer les eurycystes des sténocystes. Les cellules
ventrales seules se distinguent toujours très nettement. Dans
les figures 225 et 226 nous voyons se produire le même fait
que dans la figure 216, c’est-à-dire un cloisonnement des eury-
cystes au moyen de périclines m (fig. 216, 225 et 226). Il
y a même, dans la figure 226, l'apparition d’une cloison
péricline n, ce qui donne jusqu’à 3 couches d’eurycystes à cet
endroit. En réalité ces eurycystes médianes ainsi, fragmen-
tées, formeront des cellules tout à fait semblables aux sténo-
cystes et je les considère comme telles malgré leur origine.
Dans les 2 feuilles plus évoluées que j'étudierai, on voit en
effet à ce niveau la ou les eurycystes médianes ainsi transfor-
mées en sténocystes secondaires (voir les eurycystes D dans
les figures 232 à 236 représentant les coupes d’une feuille du
même pied que celles étudiées précédemment et les figu-
res 244, 245 et surtout 246 qui sont les coupes d’une feuille
située dans une fleur mâle). Dans la figure 227 nous voyons
nettement les eurycystes. Celle de droite s’est divisée en 2
eurycystes d. Dans les figures 228 et 229 les 2 grandes eury-
cystes sont restés indivises et confinent directement aux
cellules épidermiques ventrales. Les cellules sténocystes
se divisent souvent d’abord par des cloisons anticlines
a (voir figures 226 à 229). Dans la figure 230 on voit la
feuille se souder a la tige et la sortie d’un rameau latéral R.
Les eurycystes D et les cellules ventrales V (fig. 230) s’allon-
gent, comme attirées par la tige. La lame foliaire possède là
2 couches de chaque côté. Ces caractères se retrouvent à l’in-
sertion des feuilles de presque toutes les Mousses.
Les figures 23r à 242 présentent des coupes de la pointe à
la base de la nervure dans une feuille encore plus âgée, appar-
tenant toujours au même pied femelle que celles précédem-
Ie
mentétudiées. On peut constater ici un fait très curieux: l’épais-
sissement de membranes cellulaires se produit beaucoup plus
dans les membranes situées à l’extérieur de la nervure, telles,
que celles des sténocystes, que dans celles qui sont en contact
avec l'air extérieur. Cet épaississement se constate dans la
pointe de la feuille, alors que la base (fig. 241 et 242) présente
des cellules à parois minces pourvues de très beaux noyaux.
Je signalerai d’ailleurs ici, à propos de ces derniers, que
la chromatine ne s’y trouve pas condensée en une seule masse,
comme cela se voit souvent chez les Mousses, mais qu'en
dehors d’un caryosome principal, il y a en général de nom-
breuses granulations chromatiques dans le caryoplasma. Nous
trouvons dans cette feuille âgée les mêmes parties que dans les
plus jeunes: vers la pointe (fig. 231) on trouve une seule cellule
ventrale comme dans la figure 214 ; plus bas le stade avec cel-
lules ventrales toujours très grandes, 2 eurycystes assezpetites,
séparées par la prolongation du faisceau de sténocystes issu de
la transformation du ou des eurycystes médianes (voir figures
232 à 236). Nous trouvons ensuite la partie vraiment caractéris-
tique, (fig. 237 et 238) où la nervure est formée de 2 cellules
ventrales accolées directement à 2 eurycystes, sans interposition
d’intercalaires ventrales, et dorsalement d’un faisceau de sténo-
cystes, limité directement du côté dorsal par les cellules épi-
dermiques dorsales à large lumen, sans intercalaires dorsales.
A celle-ci succède une quatrième partie, où la nervure affecte
un contour plus aplatiet élargi, ce qui amène les.eurycystes et
les cellules ventrales à augmenter de nombre (fig. 239). Nous
avons dans cette dernière figure, 3 cellules ventrales, 4 eury-
cystes assez petites, un faisceau de 5 sténocystes surmontées
dorsalement de cellules épidermiques plus petites.
Enfin une cinquième partie forme la base, dont la structure
interne est très régulière : on y trouve 2 eurycystes et 2 cel-
lules ventrales. La figure 242 montre la base de la feuille acco-
lée à la tige. A cet endroit la lame foliaire a des cellules
énormes, comme d’ailleurs toutes les parties de la nervure.
Je dirai finalement quelques mots d’une assez vieille feuille
se trouvant dans une fleur mâle. Les figures 243 à 248 en mon-
trent les coupes, de la partie basilaire jusque vers la pointe. Je
io xt) a Oa TER 0
RTS A ESR es Pare
Hé eue tt ea
25
— 103 —
représente ces coupes pour donner un exemple de feuille de
cette espèce beaucoup plus développée et présentant une dif-
férenciation toute spéciale de certains sténocystes. Les cel-
lules sténocystes n’épaississent pas ici uniformément leurs
parois ; ainsi, dans la figure 246, nous voyons que les sténo-
cystes du pourtour ont seules épaissi leurs parois, sauf du côté
de l’eurycyste de gauche.
Dans les figures 247 et 248, qui représentent des coupes
plus voisines de la base, certaines sténocystes ont épaissi
tellement leurs parois que le lumen cellulaire s’est réduit
à Pextréme, alors que les cellules s’arrondissent. On a ici
de véritables stéréides, du côté dorsal du faisceau de sténo-
cystes. Lorentz (11) a qualifié de « comites mnioidei » de sem-
blables faisceaux de sténocystes entourés de stéréides, car ce
sont surtout les Mnèum Dill. qui présentent cette structure. On
remarquera les dimensions considérables des cellules de lalame
foliaire, spécialement dans la figure 248 qui est la plus basilaire.
Chez une feuille âgée, c’est donc à la base que les cellules de la
lame foliaire atteignent les plus grandes dimensions: constata-
tion inverse de celle faite précédemment sur des feuilles plus
Jeunes. Il estutile de remarquer que nous avons ici une feuille
dont la croissance est totalement achevée et dont la base elle-
même a cessé toute croissance. Cette feuille nous présente les
mêmes parties que les autres : l’extrème pointe (fig. 243) à
nne seule cellule ventrale, une partie à 2 eurycystes séparées
par des sténocystes (fig. 244 à 246), enfin une partie où les
eurycystes et les cellules ventrales augmentent de nombre, ces
dernières étant les plus lentes à opérer cette transformation.
Étude du développement de la feuille du Dicranum scoparium
(L.) Hedwig!.
Je vais comparer rapidement une série de feuilles de plus
1. Mon matériel a été récolté aux environs de Berne (Suisse) dans la forêt de
Bremgarten, au versant d’une colline, près d’une carrière proche de la route menant
au Neubrücke. Il a été fixé le 4 avril 1918 à 11 h. 35 au liquide de Kaiser, après
passage de 5 minutes dans l’eau. Malgré l’heure assez tardive de la fixation J'ai ob-
servé un certain nombre de divisions cellulaires à des stades pas trop avancés. C’est
ainsi que dans mes dessins on peut voir 2 fins et un début d’ascension polaire. Mais
les chromosomes sont ponctiformes.
“— 104° —
en plus âgées. Les figures 249 à 251 montrent 3 coupes, faites
à 15 micra d'intervalle dans une très jeune feuille : les
figures 249 et 250 présentent le stade en éventail, compliqué ca
et la de quelques cloisons périclines, premières ébauches de
nervure. Ces premières cloisons périclines sont situées bien
plus près du côté dorsal que du côté ventral de la feuille. Nous
voyons dans la figure 251 un développement beaucoup plus
avancé : on trouve 2 cellules ventrales V, 2 eurycystes D et
dans la première cellule fondamentale de gauche s’est formée
une cloison anticline a. Nous voyons donc, dans cette première
feuille, le côté gauche de la nervure apparaître d’abord
(fig. 249 et 250). Il se développe ensuite plus rapidement que
le droit. C’est ce que nous constaterons également dans toutes
les autres feuilles.
Les figures 252 a 261 montrent les coupes de la pointe a la
base d’une feuille plus âgée. Ces coupes ont été faites régu-
lièrement à 15 micra de distance l’une de l’autre (une seule
manque entre les figures 256 et 257). Nous pouvons constater
que, dans cette espèce, le développement de la feuille est remar-
quablement régulier. Ce n’est que dans les feuilles plus âgées
que quelques inégalités se manifesteront, dues, sans doute aux
compressions exercées par les autres feuilles au cours de l’on-
togenèse. Les figures 255 et 256 sont d’une régularité absolue:
la nervure y est formée de 2 cellules épidermiques ventrales V,
de 2 eurycystes D, surmontées chacune de 2 cellules épider-
miques dorsales, qui en sontissues au moyen d’une anticline a.
La figure 257 offre la même structure, mais la nervure s’est aug-
mentée à droite d’une cellule fondamentale supplémentaire, qui
s’est divisée assez irrégulièrement, car il est apparu une cloison
péricline p dans une eurycyste, ce qui est un fait très rare.
La lame foliaire prend un plus grand développement à gauche
qu’à droite; ce qui se voit encore dans les 2 figures suivantes.
La figure 258 montre une nervure issue de 4 cellules fonda-
mentales qui se sont divisées très régulièrement, La figure 259
fait voir un grand développement des cellules issues de la
première cellule fondamentale de gauche. La cellule ventrale
de ce segment s’est divisée par une cloison anticline, ce qui est
le mode de cloisonnement régulier des cellules épidermiques
” p hi +
Est re PR TT Ot UN
$
x
— 109 — |
ventrales primitives. Le premier segment à droite de la cloison
médiane est au contraire très peu développé : 1 cellule dor-
sale, 1 eurycyste, 1 cellule ventrale. Le deuxième segment
de gauche nous montre du coté dorsal la continuation régu-
lière du cloisonnement: il apparaît une cloison péricline p
dans la cellule de droite, issue de la cellule dorsale primitive
de ce 2° segment au moyen de l’anticline 6. Dans la figure 260
Je signale la formation de la cloison anticline @ dans la cellule
dorsale de gauche issue, au moyen de la cloison anticline 6 de
la cellule dorsale primitive du premier segment de gauche.
Ceci est un cloisonnement exceptionnel. En général, dans cha-
que segment situé à gauche du plan de symétrie de la feuille,
la cellule dorsale primitive se divise par une cloison anticline ;
des 2 cellules formées, celle de droite se divise d’abord par
une cloison péricline en 2 cellules B et ¢ (fig. 260), tandis que
celle de gauche A reste indivise. De l’autre côté du plan de
symétrie c'est l'inverse qui a lieu : dans chaque cellule dorsale
primitive, qui se divise d’abord par une cloison anticline, c’est
la cellule de gauche qui se divise la première par une cloi-
son péricline et la cellule de droite reste indivise. Dans la
feuille adulte (fig. 288) les cellules A et B correspondant
aux cellules A et B de la figure 260 sont restées indivises, tan-
dis qu’à ¢ (fig. 260), correspondent des groupes de stéréides st
dans la figure 288. Dans la figure 260 j’ai pu observer la divi-
sion d’une des cellules dorsales secondaires d; la division
était au stade de ascension polaire. Dans une cellule c de la lame
foliaire de cette même coupe j'ai pu observer la cinèse arrivée
à sa fin. Dans la figure 261, qui représente une coupe pratiquée
dans la partie basilaire, on voit dans la lame foliaire de gauche
l’apparition de 2 cloisons périclines p. Ceci est le premier
indice d’une différenciation spéciale des cellules des oreillettes,
fréquente chez les Dicranacées. A l’état adulte (fig. 290), la
feuille du Dicranum scoparium (L.) Hedw. présente de très
grandes cellules à parois minces à l'endroit de son insertion
avec la tige. Ces grandes cellules envahissent toute la feuille
des Dicranum Hedw. de la section Paraleucobryum Lindb., qui
forment transition avec les Leucobryacées.
Les figures 262 à 271 montrent quelques coupes dans une
— 106 —
feuille plus âgée. Nous pouvons remarquer la formation
(fig. 266 à 268) de protubérances dorsales sur la nervure, qui
peuvent atteindre, dans la partie médiane de la feuille à l’état
adulte, de 2 à 3 cellules de hauteur (fig. 289). Nous pouvons
également constater une multiplication cellulaire peu intense
dans la lame foliaire, jusqu’à une certaine distance de la pointe
de la feuille. Ainsi, dans la figure 268, qui représente une coupe
située à près de 1/10 de millimètre de la pointe de la feuille,
on ne voit pas trace de division récente dans la lame foliaire
Dans la figure 266 nous voyons la cellule de gauche a, issue de
la division de la cellule dorsale primordiale du 1° segment
de gauche de la nervure, qui s’est renflée au-dessus de la sur-
face externe. La figure 267 présente un stade ultérieur de la
formation de semblables dents (ce ne sont pas en effet des
James dorsales continues); il s’est produit une cloison p, située
à peu près au ras de l’ancienne surface dorsale de la feuille.
Dans la figure 268 nous avons même une cloison anticline a,
qui divise la cellule de pied de cette dent. Cette division se
produit d’ailleurs rarement: c’est ainsi que nous n’en voyons
pas trace dans la figure 289, à la base des 4 grandes dents, ni
dans les figures 280 à 285, représentant d’autres coupes passant
par des dents dorsales.
Je ne m/attarderai pas à décrire plus longuement les cloi-
sonnements de cette feuille ; on s’en rendra compte par mes.
dessins. On voit, dans la figure 271, une division cellulaire
dans la lame foliaire. J’attire l’attention sur le fait que les
divisions que j’ai observées (fig. 260 et 271) étaient Justement
à la base des feuilles ; ce qui est un argument en faveur de la
croissance des feuilles par la base, au moins à partir de ce
stade. Les figures 272 à 287 nous montrent des coupes dans une
feuille encore plus âgée. Du premier coup d’œil on se rend
compte que la pointe (fig. 272 à 282) possède des parois épaissies
considérablement, alors que la base a encore des parois tres.
minces. De plus, en examinant les préparations colorées par
le vert d’iode, la fuchsine et le congocorinthe, j'ai constaté que
les membranes cellulaires de la région de pointe prenaient une
coloration violette, qui se paolonge assez bas dans les lames
moyennes de la feuille. Voici donc d’autres arguments mon-
A
a
trant nettement que la pointe de la feuille est bien différen-
ciée alors que la base est encore méristématique et se colore en
rose par le congocorinthe.
J’ai observé la coloration verte, due au vert d’iode, dans des
fragments de vieille feuille, tels que celui représenté par la
figure 288. Cette figure montre que, vers la base, toutes les
cellules se sont transformées en stéréides dont le lumen a
presque disparu, alors que du côté dorsal il y a des massifs
de stéréides s{ dans l’angle des eurycystes D. J'ai dit plus haut
d’ou ces cellules sont dérivées. ;
Au point de vue cytologique, j'ai mesuré le noyau de l'ini-
tiale d’une tige. Il avait un diamètre variant entre 10*,8 et
11,1 et sa masse chromatique énorme avait un diamètre
variant entre 4*,1 et 4,4.
Dans une feuille ayant de 15 à 30 4 de haut, le noyau de
l’initiale n’avait que 8:,3 de diamètre et sa masse chromatique
JA LOU
Dans une feuille ayant à peu près 60 de haut, le noyau de l’ini-
tiale n'avait que 7*,7 de diamètre et la masse chromatique 2#,2.
Nous voyons donc que les grandeurs absolues du noyau et
de la masse chromatique sont bien plus faibles dans les cel-
lules initiales des feuilles que dans le noyau d’une tige et que
plus la feuille s’allonge, plus celles-ci diminuent.
volume du noyau
volume de la masse chromatique
Si l’on calcule le rapport
on obtient respectivement 17,1 pour le noyau de l’initiale de
la tige, 25,1 pour celui de l’initiale de la feuille, de 15 à 30 y
et 42,8 pour l’initiale de la feuille de 60 micra. L’initiale de
cette dernière feuille avait sans doute conservé plus longtemps
son activité caryocinétique. On voit néanmoins que ces noyaux
d'initiales de feuilles diffèrent profondément du noyau de
Vinitiale de la tige qui les portait.
Lorentz (11) ne parle pas du développement du Dicranum
scoparium (L.) Hedw. ni même de son anatomie foliaire. Mais
il a décrit dans ses Grundlinien, avec d’assez grands détails
(surtout d’après les travaux de S. Berggren), le développement
de la nervure des Campylopodées, qui appartiennent à un type
très comparable.
— 108 —
L'abbé Morin (30) (page 39 de sa thèse) place le Decranum
scopartum(L.) Hedw. dans le type moyen des Dicranum Hedw. et
signale seulement que chez cette espece, comme chez quelques-
unes, qui lui sont voisines, il y a8 à 9 eurycystes dans la ner-
vure foliaire. Les figures 4, a et 6 de sa planche 6, montrent des
coupes transversales au milieu et vers le sommet de la feuille.
Étude @Atrichum undulatum Palisot de Beanies
Une étude sur le développement de la feuille des Mousses,
serait incomplete si elle n’envisageait aucun membre de la
famille des Polytrichacées, qui possède le gamétophyte le plus
différenciée de tout l’embranchement des Muscinées: traces
foliaires, cylindre central trés complexe et surtout différencia-
tion toute particuliére des feuilles. Lorentz (10) a étudié avec
détails le développement de la feuille de Polytrichum Dill..
Lorch (19), beaucoup plus tard, a repris cette étude et a décrit,
avec beaucoup de soin, l’asymétrie qui se constate dès les pre-
miers cloisonnements de la nervure foliaire. Je ne m'occuperai
donc pas de ce genre mais je parlerai d’une autre Mousse
bien connue de cette famille: l'Atréchum undulatumP. Beauv.,
que l’on appelle souvent aussi Catharinea undulata (L.) Web.
et Mohr (ce dernier nom a la priorité, mais le premier est plus.
connu). — |
La figure 291 montre l’aspect d’une feuille de 3"",4 de lon-
gueur et de o"",9 de largeur. Les feuilles ondulées de cette
espèce atteignent généralement une longueur double. Ce
dessin (fig. 291) a été fait aussi exactement que possible à la
chambre claire. On peut remarquer que les cellules de la
base foliaire sont légèrement allongées. J’ai figuré également
les lamelles ventrales qui parcourent longitudinalement la
nervure. Il y en a généralement quatre. C’est vers la base du
ters supérieur de la feuille que les lamelles atteignent, en
même temps que ce nombre de 4, leur plus grande hauteur.
Les marges foliaires sont formées de cellules allongées, à parois
épaisses et munies de dents. Vers la base de la feuille, elles
apparaissent en coupe sous forme de 4 cellules à lumen pres-
que nul (fig. 324). A d’autres niveaux, on voit une seule cellule
à
de marge ou 2 cellules : l’une située du côté dorsal et l’autre
du côté ventral. La première cloison qui apparaît dans les cel-
lules dela marge est donc parallèle aux surfaces foliaires. Pour
parvenir au stade de 4 cellules (fig. 324), la cellule dorsale et
la cellule ventrale se divisent chacune par une cloison perpen-
diculaire aux lames foliaires et parallèle au plan de symétrie
de la feuille. Le brunissement et l’épaississement des parois
commence dans la marge, avant de se manifester dans la lame
foliaire comme chez les autres Mousses.
Avant de décrire le développement de la feuille, considérons
une coupe (/ig. 323), faite dans la partie basilaire d’une feuille
adulte. Nous remarquons que les cellules de la lame foliaire ont
leurs parois très épaisses (d'environ 3 micra) et brunes. Les
cellules épidermiques ventrales V ont également leurs parois.
très épaisses et brunies, ainsi que les cellules épidermiques dor-
sales où l’épaississement des parois externes atteint son maxi-
mum. La cellule marquée E a une paroi dorsale de plus de
6 y d'épaisseur. Les cellules intercalaires dorsales et ventrales
sont transformées en une masse de stéréides dont les parois
apparaissent d’une couleur violacée (due au mélange fuchsine-
vert diode avec lequel j'ai coloré mes préparations) qui tran-
che nettement sur la coloration rose, due au congorinthe, des
parois des cellules caractéristiques : eurycystes et sténocystes
. situées au milieu dela coupe. Les eurycystes D n’offrent rien de
particulier. Les sténocystes, au contraire, sont différenciées en
grandes cellules S, situées dorsalement par rapport aux eury-
cystes et en petits massifs s, situés dans l’angle dorsal des eury-
cystes. Cette structure se rencontre seulement versle centre de
la nervure, car sur les côtés toutes ces cellulesse transforment
uniformément en stéréides. Lorentz appelle cellule centrale,
la cellule qui se trouve dans l'angle dorsal des eurycystes,
et « socii », les cellules à large lumen qui l'entourent des
autres côtés. Ici la cellule centrale se subdivise et forme les
groupes s. Au contraire, dans le Polytrichum Dill., elle serait
toujours indivise d’après Lorentz (10). Il les aurait cependant
trouvé toujours divisées dans un individu qu'il a étudié. Il
exprime l'opinion que les systématiciens futurs baseront peut-
être des espèces sur ce fait.
oo tat Oe
J'ai remarqué, sur les surfaces externes des feuilles âgées, de
petites granulations g (fig. 318 à 321 et fig. 323) que je ne crois
pas avoir Jamais été signalées. |
Les figures 292 à 294 montrent 3 coupes faites à 15 micra de
distance dans une très jeune feuille. La figure 292 présente
le stade en éventail dans toute sa pureté. Dans la figure 293
nous voyons la nervure formée de 4 cellules fondamentales. Les
2 cellules extrémes n'ont encore été divisées que par une
cloison péricline p en.une cellule dorsale et une ventrale. Les
> cellules fondamentales médianes ont chacune 2 cloisons
périclines supplémentaires : l’une du côté ventral, séparant
les eurycystes D des cellules ventrales V, et l’autre du côté
dorsal, séparant les cellules-mères d’eurycystes E des cellules
dorsales d, La cellule-mère d’eurycyste de droite s’est même
subdivisée en 2 cellules e, au moyen d’une cloison anticline.
La figure 294 plus aplatie dans sa forme générale, car elle est
plus près de la base, présente la même structure, mais encore
plus régulière, car la cellule-mère d’eurycyste de gauche s’est
également divisée par une cloison anticline. On a donc 4 cel-
lules e.
Les figures 295 à 300 montrent également des coupes faites
à 15 micra de distanceles unes des autres, dans une feuille un
peu plus âgée, depuis une région voisine de l’extrème pointe
jusque près de la base. Les cellules dorsales secondaires cor-
respondent aux cellules d des figures 293 et 294 et se divisent
en général par une cloison anticline a, doublant ainsi leur
nombre, puis chacune des cellules-filles se divise, à son tour,
par une cloison péricline (fg. 295 à 300) donnant ainsi nais-
sance à des cellules épidermiques dorsales epd (fig. 297 à
300) et à des cellules-mères des groupes de stéréides dorsales
std (fig. 297 à 300). Il peut arriver quelquefois que cette cellule
épidermique dorsale secondaire, se divise de suite par une
cloison péricline p (voir fig. 299), avant de se diviser par une
anticline. Du côté ventral, les cellules ventrales correspon-
dant à V, des figures 293 à 294, se divisent par des cloisons
périclines (en commencant naturellement près du plan de
symétrie) en une couche de cellules épidermiques ventrales
epv (fig. 298 et 299) et une couche de cellules-mères des
ONE
massifs de stéréides ventrales st (fig. 298 et 299). Il est à
remarquer que ce clivage du côté ventral se produit (fig. 298
à 300) après celui du côté dorsal (fig. 297). En ce qui concerue
le groupe de sténocystes, nous voyons que l’une des 2 cellules
correspondant à e, des figures 293 et 294, s’est divisée par
une cloison péricline (fig. 296). Le groupe de sténocystes est
alors formé de 3 cellules: deux S et une s (fig. 296) qui cor-
respondent aux cellules désignées par les mêmes lettres dans
la figure 323. Ces groupes formés de 2 cellules S, appelés
socii par Lorentz, et d’une cellule s appelée cellule centrale par
le même auteur, se reproduisent naturellement d’une façon
symétrique par rapport au plan de symétrie de Ia nervure.
C’est ce que nous constatons dans les figures 297 à 300. Dans
cette dernière figure, si l’on examine le groupe de sténocystes
provenant de la première cellule fondamentale de gauche,
l’on voit nettement que les 2 socii S sont bien plus grands
que la cellule centrale s ; ce qui est le rapport normal. Le
groupe de sténocystes provenant de la première cellule fon-
damentale de droite est en partie atrophié.
Les figures 301 à 312 représentent des coupes dans une
feuille plus âgée. On remarque, comme toujours, dans les
coupes de la pointe, des cellules plus grandes et un dévelop-
pement assez irrégulier, surtout du côté dorsal. Ceci est dû
principalement à la formation de dents sur le dos de la ner-
vure, comme dans le Dicranum scoparium (L.) Hedwig. Je ne
m'attarderai pas à signaler ces cloisonnements irréguliers.
On observe encore dans cette feuille un cloisonnement très
régulier des massifs de stéréides ventrales : chacune des cel-
lules-mères de ces stéréides se divise d’abord par une cloison
anticline a (fig. 309). Le cloisonnementse continue par des cloi-
sons périclines, telles que p (fig. 310). Dans la figure 311, il ya
trois cloisons p, ce qui donne 7 cellules-mères de stéréides ven-
trales dans cette coupe. La figure 312 présente des cellules ven-
trales très régulièrement disposées, comme il arrive toujours à
la base des feuilles de Mousses. Nous voyons, dans la figure 309,
l’'ébauche de la formation des lamelles ventrales : du côté droit
la cellule épidermique ventrale A (fig. 309) s’est fortement
bombée à l'extérieur et du côté gauche il est même apparu
aa Re
une cloison péricline p (fig. 309) dans la cellule épidermique :
ventrale qui faisait une grande saillie hors de la nervure.
Pour la formation des groupes de stéréides dorsales c’est
également par la formation d’anticlines telles que 6 (fig. 307
à 312) qu'ils débutent. Puis viennent des cloisons périclines
telles que c (fig. 310 et 312).
Les figures 313 à 322 représentent des coupes d’une
feuille beaucoup plus âgée. On voit du premier coup d’œil
que, dans les figures 313 à 317, l'épaisseur des membranes
cellulaires est tres notable et qu'elle va en diminuant à partir
des coupes de pointes, telles que celles représentées par les
figures 313 et 314. Toute l'extrémité de la feuille présente une
coloration violette des membranes cellulaires, due au mélange
fuchsine-vert d’iode. Cette coloration s’étendait même jusque
dans les coupes à parois minces situées assez bas dans la
feuille, telle que celle représentée par la figure 321. On voit les
dents dorsales, dans les figures 313 et 314, avec beaucoup de
netteté. La figure 315 présente un début de lamelle ventrale.
La figure 316 montre une lamelle ventrale, les figures 317 et
318 une 2°, la figure 319 le début d’une troisième, la figure 320
en a trois et la figure 321 quatre, ce qui représente le plein
épanouissement de la nervure. |
La figure 322 est une coupe faite dans la région basale,
encore méristématique, à parois minces et colorées en rose
par le congocorinthe dans ma préparation. La disposition régu-
lière des cellules ventrales et leur subdivision -en 2 couches
indiquent tout de suite que c’est une coupe basale. On peut
suivre également ici l’évolution : ainsi, dans la figure 322 on
reconnaît nettement les cellules socii S, devenues bien plus
grandes que les cellules centrales s, dont l’une s'est divisée
par une cloison péricline p. Ceci est le cas normal, à l’état
adulte, à la base dela feuille, ainsi que nous l’avons vu dans
la figure 323. |
Ici donc, comme dans la majorité des Mousses, c’est par la
pointe et les bords de la feuille que commence la différen-
ciation. |
On peut constater, en examinant les coupes successives et
spécialement les coupes de jeunes feuilles (fig. 292 à 312), que
— 113 —
le développement des 2 côtés de la nervure est souvent très
inégal et que dans une même feuille c'est, tantôt un côté, tantôt
l’autre, qui est avantagé. Ceci est peut-être du au fonctionne-
ment de l’initiale à 2 pans.
Au point de vue anatomique, la feuille d’Atrzchum P. Beauy. a
été longuement étudiée par Lorentz dans ses Grundlinien(11).
Ilen figure de nombreuses coupes (planche XXVI, fig. 83 a à n de
son travail) et en donne page 432 une description. Il dit que
Schleiden considérait les éléments à large lumen comme des
vaisseaux, mais que quant à lui, il ne veut nullement préjuger
de leur rôle physiologique.
L'abbé Morin (30) fait une longue étude anatomo-phy-
siologique de cette espèce (page 103 à 117) et donne quelques
figures de coupes longitudinales et transversales.
Étude de Barbula ruralis Hedwig.
J'ai fait pourle Barbularurahs Hedwig quelques mesures cyto-
logiques. J’ai mesuré le noyau de l'initiale d'une tige. Son dia-
mètre était de 8,3 et celui de sa masse chromatique trilobée
était au maximum de 4*,4. Le noyau de la celluleinitiale d’une
jeune feuille de cette tige, n'ayant que de 15 à 30 micra de
hauteur, avait 6*,1 et sa masse chromatique 2*,7 de diamètre.
On voit done qu'une feuille, même extrèmementjeune, ne pos-
sède jamais une initiale ayant un noyau aussi volumineux et
chromatique que celui de la tige.
Je décrirai spécialement le développement du poil termi-
nal. C’est en effet la particularité la plus saillante de la feuille
de cette espèce. Cet appendice, qui prolonge la nervure, est
en général très long, hyalin et fortement denté.
La figure 325 représente une coupe transversale dans une
feuille de Barbula aciphylla (Br. Eur.) Hartm., qui n’est peut-
être qu'une forme montagnarde du Barbula rurahs Hedwig.
On est frappé de suite par les mamilles m qui recouvrent
les lames foliaires et se transforment souvent en papilles p
(fig. 325) par occlusion de leur lumen, dans les cellules dor-
sales de la nervure, a parois considérablement épaissies. Ces
mamilles foliaires sont fréquentes dans le groupe des
8
SINE 114 —
Trichostomées. Nous voyons 2 eurycystes D, 2 cellules épi-
dermiques ventrales epv et 2 intercalaires ventrales zw. Du
côté dorsal on rencontre souvent une cellule a lumen assez
large E, s’enfoncant dorsalement entre les 2 eurycystes
et qui tient lieu des sténocystes absents. Il y a généra-
lement de grandes cellules S placées immédiatement contre les
eurycystes du côté ventral et qui rappellent les cellules «socii »
des Polytrichacées, alors que la cellule Æ£ rappelle la cellule
centrale de celles-ci. L’abbé Morin (30) a remarqué qu’en s’éle-
vant dans la nervure ce massif de grandes cellules, que j'ai
désignées par S'et /, se réduit Jusqu'à ne plus ressembler
qu’à un petit faisceau de sténocystes. Toute la partie dorsale
de la nervure : cellules épidermiques dorsales et couches
sous-jacentes, sont formées à l’état adulte de cellules à parois
extrêmement épaissies et fortement colorées en jaune.
Pour décrire le développement j’étudierai des feuilles appar-
tenant à 2 tiges différentes.
Les figures 326 à 330 nous montrent des coupes transver-
sales faites dans une feuille haute d’un vingtième de milli-
mètre. Les figures 326 et 327 sont les aspects, aux mises au
point inférieure et supérieure, de la 1" coupe ; la figure 328 est
l’aspect de la seconde et les figures 329 et 330 sont les 2 mises
au point de la troisième coupe. Il est bien évidentque le stade
représenté par la figure 328 ne pourra Jamais donner en se déve-
loppant une partie de la feuille proprement dite, mais seulement
le poil. D'ailleurs nous retrouverons dans toutes les autres
feuilles un stade plus ou moins en quadrant à la base du poil
(Voir fig. 334, 341 et surtout 348 et 354). On arrive donc à
cette conclusion que, dans une feuille de 1/20 de millimètre,
le poil occupe les 2/3 de la hauteur de la feuille. Cet appen-
dice prend donc son origine avec la feuille elle-même et c’est
lui qui présente au début le plus grand développement. Le
poil terminal n’est donc pas, comme on pourrait le croire,
une excroissance tardive, comme les dents marginales du
Mnium punctatum (L. Schreb.) Hedw. par exemple. Ceci est un
excellent argument de plus pour montrer qu’en général, dans
une feuille de Mousse, le développement le plus actif est d’abord
à la pointe, puis se déplace progressivement vers la base.
ER mg tre
— 115 —
Dans la feuille immédiatement plus âgée que celle décrite
précédemment (fig. 331 à 336), on constate déjà dans le poil
quelques signes de différenciation. Dans les coupes repré-
sentées par les figures 331 à 333 les cloisons cellulaires com-
mencent à s’épaissir et les noyaux sont très clairs ainsi que le
plasma. Les figures 335 et 336 représentent des coupes dans
la feuille proprement dite. La première de ces figures dérive
certainement d’un stade correspondant à celui dela figure 329.
Dans la figure 329 la cellule médiane N, d’où proviendra cer-
tainement la nervure, est extrêmement évasée du côté dorsal,
alors qu'elle finit presque en pointe du côté ventral. La pre-
mière cloison qui vient diviser la Jeune nervure est en général
une cloison oblique 0 (fig. 335). Ce mode de cloisonnement se
retrouve constamment dans le haut de la nervure, ainsi que
je l’ai constaté dans les 2 dernières feuilles que je décrirai,
(voir 0, fig. 349 et 355) et à cette cloison en succède une autre 4
(fig. 335, 349 et 355). Un peu plus bas (fig. 336) les 2 cloisons
qui ont donné naissance à la nervure se coupent. La
figure 350, qui appartient à une autre feuille, montre un pro-
cessus du même genre. Je ne parlerai pas du cloisonnement de
la base de cette feuille, ni de celui des 2 suivantes, car je dé-
crirai ce processus très simple pourla dernière feuille étudiée.
Les figures 337 à 342 montrent des coupes dans le poil et la
pointe d’une feuille immédiatement plus âgée. Un noyau existe
encore dans la cellule de pointe (fig. 337) et il est même très
gros, comme ceux des cellules sous-jacentes (fig. 338 et 339)
mais ceux-ci sont en rapport avec la grandeur des cellules
qu'ils occupent. La faible importance de leur masse chroma-
tique montre nettement que leur activité multiplicatrice a cessé
depuis longtemps. Les figures 339 et 340 indiquent le début
des dents d du poil. L’épaisseur des parois cellulaires com-
mence a étre assez importante.
Les figures 345 et 350 montrent des coupes dans le poil et
la pointe d’une feuille appartenant à une autre tige. On peut
constater ici, dans les figures 343 à 345. l’épaississement consi-
dérable des parois cellulaires, qui ne laissent souvent subsister
les lumens qu'à peine, ainsi en / (fig. 343 à 345). Très rapide-
ment les parois s’amincissent vers la base du poil. J’ai déjà
= 716 —
décrit plus haut le stade en quadrant, qu’on trouve à la base
du poil (fig. 348) et les premières divisions dans le haut de la
feuille (fig. 349 et 350).
Les figures 351 à 358 montrent des coupes dans la feuille
immédiatement plus jeune, prise sur la même tige. Pour ce
qui est du poil, iln’y a rien à signaler qui n'ait été dit au sujet
des autres feuilles. Les figures 356 et 357 offrent une structure
qui est du même type que celle de la figure 358, mais la cel-
lule fondamentale de droite de la nervure s’y est beaucoup
plus développée que celle de gauche. La figure 358 montre
de suite que le développement ne diffère pas sensiblement de
ceux que nous avons vu Jusqu'ici : une première cloison a
divisé chaque cellule fondamentale en une partie ventrale et
une dorsale. La partie ventrale s’est subdivisée, par une cloison
péricline. en donnant une cellule eurycyste D et une cellule
ventrale V. La partie dorsale s’est divisée d’abord par une
cloison anticline a, puis la cellule la plus proche du plan de
symétrie s’est subdivisée par une cloison p (fig. 358). Il y a
ainsi formation d’une cellule S, qui correspond aux cellules S’
de la figure 325. Pour arriver à l'état adulte il suffit de sup-
poser que les 2 cellules ventrales se divisent chacune par une
cloison péricline, donnant ainsi 2 cellules intercalaires ven-
trales et 2 cellules épidermiques ventrales. Du côté dorsal les
cellulesépidermiques dorsalesse diviserontencore par quelques
cloisons anticlines et périclines, de position variable, et épais-
siront leurs parois pour atteindre l’état adulte.
Au point de vue anatomique, l'abbé Morin a fait une assez
longue description (page 65 de sa thèse) de la feuille de cette
espèce et en figure la coupe transversale ({g. 12, planche XI
de sa thèse).
Quant à Lorentz il ne parle que de la tige et ne dit rien
de la feuille du Barbula rurahs Hedw. dans ses Grundlinien
(page 420).
Étude de Leucobryum glaucum (L.) Schimper.
Je n’a pas la pr étention de décrire le développement complet
de la feuille de Leucobryum glaucum (L.) Schimper, car cette
— JI L7 —
Mousse a fait l’objet de recherches détaillées, depuis des temps
déjà anciens, et récemment Lorch, dans sa thèse, en a remar-
quablement élucidé le singulier développement. Je vais indiquer
rapidement l'historique de cette question, puis je parlerai de
l’asymétrie de sa feuille que j'ai découverte, et enfin des
maxima de croissance marginale et dorsale dans la jeune
feuille. | |
Hugo Mohl(de Tübingen) publia (34) en 1838 dans le journa
Flora une étude historique sur les Sphagnum (Dill.) Ehrh. avec
en appendice quelques remarques sur la structure du Leuco-
bryum glaucum (L.) Schimper (qu’il appelle Decranum glaucum
Hedw.) et de l’Octoblepharum albidum (Hedw.). Il a reconnu
que la feuille du Leucobryum glaucum (L.) Schimper possédait
3 à 4 couches cellulaires et que le bord était formé d’une seule
couche. Ce qui le préoccupe surtout, comme tous les anato-
mistes qui étudièrent cette Mousse vers cette époque, ce sont
les pores dont les cellules vides ou leucocystes (terme employé
plus tard par l’abbé F. Morin) sont pourvus. Mohl a reconnu
que ce sont bien des perforations et les met en évidence en
colorant les membranes par l’iode. Dans certains cas les cer-
cles d’épaississement des membranes cellulaires entourant
les pores sont indiqués plus faiblement et ils n’entourent
pas alors de vraie perforation des membranes cellulaires. Il a
observé aussi que les parois séparant les tissus de la feuille
du monde extérieur ne présentent jamais d’ouverture. Les
parois perpendiculaires aux surfaces foliaires en posséderaient
sans exception et en plus grand nombre que les parois hori-
zontales dont les pores sont souvent fermés. Il décrit aussi le
réseau des cellules chlorophylliennes qu’on trouve dans la
feuille et leurs anastomoses.
En 1841, l'étude de Treviranus (35) marque un recul car
il n'a pas vu les pores sur les cloisons parallèles aux surfaces
de la feuille. Il ne pense d’ailleurs pas que ceux-ei soient
percés. |
En 1842 Schleiden (3) (page 213 de la 1” partie, 1" édition
de ses Grundzüge) signale que les observations sur les perfo-
rations des membranes cellulaires se multiplient.
En 1843 vint le travail étrange de Karl Müller (36). Cet
| CHR 1.
Ses)
auteur, 5 ans après les observations si précises de Mohl, ne vit
dans les cellules chlorophylliennes que des méats intercellu-
laires remplis de chlorophylle !
En 1845 Hugo von Mohl (37) dans ses Vermischte Schriften
ne dit rien de nouveau sur ce sujet.
Le Leucobryum Hampe paraissait si bien étudié que Lo-
rentz (11) en 1867 renvoie pour la feuille (page 412) au travail
de Karl Müller. Il se récuse pour traiter un pareil sujet, étant
donné que l’anatomie des feuilles de ces plantes est trop diffé-
rente de celle des autres Mousses et demanderait la création
d’une terminologie spéciale. De plus il ne sait s’il faut consi-
dérer la partie de la feuille qui présente plusieurs couches
cellulaires comme une lame foliaire ou comme une nervure.
En 1893 parut la thèse de l’abbé F. Morin (30). Il traite des
Leucophanées ou Leucobryacées de la page 24 à la page 28 et
les figure dans les planches 3 et 4. Il remarque que ces plantes
sont didyctiées comme les Sphagnacées, c’est-à-dire que leurs
feuilles sont formées d'éléments cellulaires de 2 sortes, mais
que chez les Leucobryacées on ne trouve pas de fausses cloi-
sons annelées. En ce qui concerne spécialement le Leucobryum
glaucum (L.) Schimper, il prétend que l’assise ventrale multi-
plie d’abord le nombre de ses couches cellulaires, lorsqu'on
a un nombre de couches de leucocystes supérieur à deux. Le
nombre normal de couches cellulaires s’élèverait de 4 à 6.
Il faut arriver en 1894 à la thèse de Lorch (38) pour trouver
une étude du développement de la feuille des Leucobryacées.
Chez le Leucobryum glaucum(L.) Schimper (qu'il appelle Leu-
cobryum vulgare Hampe) il décrit d’abord la structure ana-
tomique, disant qu’à la base les feuilles sont à 3 couches
cellulaires, que ce nombre s'élève vers le milieu jusqu’à 8 et
diminue de nouveau vers la pointe. Il signale qu'il peut y avoir
plusieurs couches de cellules chlorophylliennes (fait mentionné
déjà par Schimper dans la Bryologie Européenne mais contesté
depuis par Limpricht dans sa flore). Lorch en a observé
jusqu’à 3. La bordure, formée d’une seule couche de cellules
hyalines, s’étend depuis la base jusque vers le milieu de la
feuille. Les cellules vertes se toucheraient, en formantune lame
continue à la sortie de la feuille de la tige, puis elle s’écarte-
raient les unes des autres dans la partie basilaire et moyenne
d’une distance égale a peu près à leur largeur et convergeraient
finalement vers la cellule terminale de la feuille. Ces cellules
vertes seraient seulement un peu plus longues que larges vers
la pointe de la feuille ; elles atteindraient leur plus grande
longueur vers le milieu et se raccourciraient notablement vers
la base. Pour voir les anastomoses entre les rangées de cel-
lules chlorophylliennes il conseille de tremper la feuille dans
une solution alcoolique de rouge congo; on doit chauffer la
feuille dans le colorant, puis la laver avant l’examen microsco-
pique. Ces anastomoses se rencontreraient surtout entre les
cellules vertes courtes de la base et du sommet qui posséde-
raient 3, 4 et méme 5 anastomoses sur une méme cellule.
Lorch décrivit la formation des divers tissus de la feuille.
Pour comprendre cette description je prie de se reporter a
ma figure 359. C'est une coupe passant par le point végé-
tatif d’une jeune tige. Si l’on regarde la partie gauche de la
feuille 5, par exemple, on constate que chaque cellule de la
lame foliaire à une seule couche s’est divisée généralement
par 2 cloisons, qui ne sont pas tout à fait parallèles aux
surfaces foliaires. La feuille présente alors 3 couches cellu-
laires en épaisseur. C’est la couche médiane qui donnera les
cellules chlorophylliennes. Les cellules externes ou futures cel-
lules hyalines grandissant beaucoup plus que les futures cellules
chlorophylliennes, viennent s’insinuer entre ces dernières et
les séparent complètement dans la partie médiane de la feuille
adulte. Ma figure 368 montre une coupe dans une feuille très
développée. Les cellules vertes sont les petits losanges noirs.
La cellule verte médiane m; qui estlégèrement en arrière des
autres, présente également une forme spéciale. Les bords 6
sont formés d’une seule couche de petites cellules hyalines. Ce
bord représente la lame foliaire d’après Cardot. Les figures 359
et 560 montrent un certain nombre de stades jeunes du déve-
loppement. C'est ainsi que, dans la feuille 5, les cellules cd
marquent pour les cellules vertes le stade que Lorch a qua-
lifié d’hexagonal, car ces cellules se présentent en coupe sous
la forme d’un hexagone. D’après Lorch, lorsque les cellules
hyalines se multiplient pour donner plus de 3 couches cellu-
Oy
laires, c’est du côté dorsal que se produirait cette multi-
plication. Ceci est en contradiction avec les assertions de
l’abbé Morin. Les divisions dans les cellules hyalines appa-
raitraient ensuite alternativement sur les faces ventrale et
dorsale de la feuille.
Je souligne ici la constatation de Lorch : que la poussée des
cellules hyalines écartant les cellules vertes commence par la
pointe dela feuille. Ici donc, comme dans toutes les Mousses,
c’est encore de la pointe de la feuille que part la différen-
ciation.
En 1899 Correns (39), dans son énorme travail sur la repro-
duction asexuée des Mousses, étudie aussi le Leucobryum
glaucum (L.) Schimper. Les cellules vertes qui affleurent à la
surface (voir n dans ma figure 360), surtout vers la pointe de
la feuille, constitueraient des nématogones: il appelle ainsi les
cellules qui peuvent bourgeonner en donnant un filament pro-
tonématique ou des rhizoides. Il cite une phrase de Lorch (/oc. |
cit., page 447) où cet auteur prétend que les cellules vertes
sont toujours séparées du monde extérieur par des cellules
hyalines. Correns a constaté que, dans les feuilles périchétiales
du Leucobryum Hampe, c’est du dos de la feuille, à mi-hauteur,
que sortent les rhizoïdes. En ce qui concerne les feuilles-pro-
pagules (Brutblätter) elles posséderaient des nématogones
placées vers la pointe à l’intérieur et vers la base à l'extérieur.
En 1900 J. Cardot (40) publia un remarquable travail sur
l'anatomie comparée des Leucobryacées. Il y étudie les 5/6 des
176 espèces connues alors. Il considère la partie de la feuille
formée de plusieurs couches comme la nervure, tandis que
le limbe à une seule couche forme une lame foliaire très
réduite. Nous avons vu que c'était également l'opinion de
Lorentz. Cardot signale que De Notaris l’avait émise en 1869
(Epilogo, p. 285) puis qu'elle avait été soutenue par Lindberg
et adoptée par Braitwaite (Britisch Moos-Flora), par Dixon
(Handbook of britisch Mooses) et par Husnot (Muscologia gal-
lica). Je n’analyserai pas plus longuement ce travail qui ne traite
pas d’embryologie. Je signalerai seulement qu’on y trouve un
exposé tres clair de l’anatomie comparée si spéciale de ce
groupe singulier de Mousses, qui a obligé l’auteur à créer quel-
— 121 —
ques termes techniques nouveaux, dont il donne l'explication.
Je dirai enfin que le Leucobryum glaucum (L.) Schimper
est une espèce assez polymorphe. C’est pourquoi Burrel (41)
et Ljubitzkaia (42) ont publié des recherches sur ses formes
et leur répartition géographique.
Malgré les nombreux travaux anatomiques et embryolo-
giques dont je viens de parler J'ai trouvé encore une par-
ticularité importante du développement qui, non seulement
n'avait pas encore été signalée dans cette espèce, mais dont
existence avait même été niée par Lorch. Je veux parler de
l’asymétrie foliaire qui, bien que difficile a voir, amène une
torsion tres nette des feuilles; j’ai écrit sur ce sujet une note a
l’Académie des Sciences (43). Or, ce qwily ade plus curieux,
c'est que Lorch avait étudié avec de grands détails ce genre
d’asymétrie foliaire chez le Polytrichum Dill. Dans sa Monogra-
phie biologique des Polytrichacées (19) Lorch exprime son éton-
nement de rencontrer une apparition asymétrique des cloisons
cellulaires dans la feuille de Polytrichum Dill., alors que dans
les Leucophanées, dontil avait fait l’objet de sa thèse, la symétrie
la plus rigoureuse présiderait à l'apparition des cloisons. Je
reconnais que, si l’on n’y regarde pas de très près, les feuilles
du Leucobryum Hampe paraissent bien symétriques. Mais j'ai
constaté cette asymétrie de 3 manières différentes.
J'ai tout d’abord effectué sur les coupes transversales
successives d’un certain nombre de feuilles des numérations
des cellules chlorophylliennes des parties droite et gauche.
Cette opération est rendue facile par le fait suivant: si
l’on examine la figure 368, par exemple, on constate que,
vers le milieu de la feuille, il y a une cellule verte m, de
coupe rectangulaire et située un peu plus près du côté dorsal
de la feuille que les autres cellules chlorophylliennes. On
retrouve une cellule semblable dans presque toutes les coupes
de feuilles adultes. Cette cellule m, qui marque le plan de
symétrie de la feuille, sépare nettement la partie droite de
la partie gauche. J’ai donc compté, dans chaque coupe
dune même feuille, le nombre de cellules vertes à droite
et le nombre de cellules vertes à gauche de la cellule cen-
trale m. J'ai obtenu ainsi des séries de chiffres. J’ai alors
S122 -=——
compté le nombre de coupes d’une méme feuille qui possé-
daient autant de cellules chlorophylliennes a droite qu’à
gauche, puis celles qui en possédaient plus a droite qu'à
gauche et enfin celles qui en possédaient plus à gauche qu’à
droite. J’ai numéroté comme toujours mes feuilles en com-
mencant par la plus jeune. J’ai trouvé, par exemple, pour la
feuille 12, dont j’ai pu examiner a peu pres toutes les coupes
jusqu'à la base, que dans 189 coupes le nombre des cellules
chlorophylliennes était plus élevé à droite, dans 7o il l’était
plus à gauche et dans 151 il y avait égalité. Pour la feuille 8,
dont je n’ai examiné que la pointe, il y avait dans 107 coupes
prédominance du côté droit, dans 15 du côté gauche et
dans 21 égalité. Je n’ai pu faire des calculs complets, car
dans mes coupes les feuilles étaient souvent détériorées à la
base.
Un second procédé m’a permis de constater l’asymétrie: c’est
d'examiner simplement au faible grossissement du micro-
scope la coupe d’un bourgeon entier de Leucobryum Hampe.
Les figures 362 à 365 montrent des coupes d’une même pointe
de tige faites à quelque distance les unes des autres et orien-
tées de même. La figure 362 montre la coupe de la tige au
milieu des coupes de feuilles. Les coupes 363, 364 et 365
ont été faites de plus en plus près du sommet. Nous consta-
tons, en suivant les coupes successives d’une feuille quel-
conque, que chaque feuille subit une torsion qui amène
sa pointe à présenter sa face dorsale du côté de la tige au
lieu de sa face ventrale. La feuille la plus typique à cet égard
est la feuille 13. Cette torsion est due simplement à un déve-
loppement plus intense du côté droit de la feuille. Mais ces
contours de coupes (fig. 362 à 365) ne nous indiquent pas
si cet accroissement plus grand du côté droit est du à la
simple croissance des cellules ou à leur multiplication.
Ma troisième méthode d’investigations nous montrera qu'il
yaune multiplication plus active et une différenciation plus
précoce des cellules du côté droit. Elle consiste à examiner
des coupes de jeunes feuilles, faites vers leur base, à un assez
fort grossissement. Lafigure 359, qui passe par la cellule initiale
d’une tige de Leucobryum Hampe entourée de ses feuilles,
oe
nous montre un certain nombre de telles coupes. J’ai marqué
par un trait renforcé la cloison médiane dans les feuilles 3,
4 et 5. Considérons la feuille 5. Nous voyons de suite que le côté
droit est bien pluslong quele gauche. De plus celui-ci est bien
plus différencié. Nous voyons en effet 10 futures cellules chlo-
rophylliennes cd a droite, contre 6 futures cellules chlorophyl-
liennes dg à gauche, arrivées au stade dit hexagonal par Lorch.
Si l’on examine la coupe de la même feuille pratiquée
15 micra plus haut (A, fig. 360), on voit qu'il y a 14 cellules
chlorophylliennes à droite, contre 12 à gauche et que, de plus,
le nombre des cellules indivises qui forment la lame foliaire est
de. 8 du’ côté droit d (fig. 360) et de 4 du côté gauche g
(fig. 360). La multiplication cellulaire est donc bien plus
active du coté droit. La figure 360 montre en B une coupe
dans la méme feuille faite 90 micra plus haut que celle repré-
sentée en A. On constate quily a 9 cellules chlorophyllien-
nes a droite et 8 seulement a gauche, en comptant le némato-
gone n. La feuille 4 montre que le côté droit est bien pluslong
que le gauche, mais les cloisonnements sont peu réguliers.
Dans la feuille 3 au contraire, nous voyons à droite de la
nervure 4:futures cellules chlorophylliennes au stade hexa-
gonal, tandis qu'il n’y en a que 2 à gauche.
Au sujet du développement de la feuille du Leucobryum
je ferai encore quelques remarques. La première, c’est que
l’on constate sur le bord de chaque jeune feuille une
grande cellule pourvue d’un gros noyau (voir feuille 5 à ses
2 extrémités, feuille 4 de même et feuille 3 surtout à droite).
Ce noyau possède souvent aussi une grosse masse chroma-
tique (voir feuille 3 à droite) et ces grandes cellules sont en
général précédées de cloisons cellulaires très rapprochées
(voir surtout d dans A de la figure 360). La feuille de Leuco-
bryum Hampe présente done une croissance marginale très
nette au début de son développement.
Les coupes longitudinales de feuilles ont l’avantage de nous
montrer que le côté dorsal des très jeunes feuilles présente
un développement plus rapide que le côté ventral, ce qui
amène les feuilles à se recourber de ce côté et à protéger
le point végétatif. C’est ainsi que la figure 361, qui repré-
sea en
sente une coupe longitudinale de feuille, présente 15 cellules
formant le côté dorsal contre 10 du côté ventral. La couche
moyenne est formée de 10 cellules dont 2 sont en voie de
division, ce qui fera 12 cellules. Les figures 366 et 367 nous
montrent bien ce recourbement des feuilles sur leur coté
ventral (surtout en F, fig. 367).
Ces figures 366 et 367 représentent des coupes longitudi-
nales passant par les cellules initiales de 2 tiges. La figure 367
nous montre une jeune feuille f vue de face, munie au sommet
de son initiale à 2 pans. On voit que, dans les jeunes segments,
ce sont les cloisons périclines, telles que p, qui apparaissent
en premier lieu. Le noyau de l’initiaqle N de la tige de la
figure 367 a un diamètre de g micra et une masse chro-
matique de 3#,7. Le noyau n de l’initiale de la feuille f
(fig. 367) a une forme d’ellipse, allongée suivant le plan de
symétrie de la feuille, et dont le grand axe a 6",1 le petit axe 5", 2.
La masse chromatique a 3*,3. Les dimensions de ce noyau
sont donc bien plus faibles que celles du noyau de la tige. Les
noyaux des jeunes segments détachés par l’initiale sont nette-
ment plus petits, ainsi celui de la première cellule à gauche
ga un diamètre de 3,8 et une masse chromatique de 1*,6.
Le noyau de l'initiale N de la tige, représenté dans la
figure 366, a des diamètres de 10 y et 8:,3, sa masse chroma-
tique a 3*,3. Le noyau de la cellule terminale de la feuille /;
(fig. 366) a 8*,8 sur 6*,6 et une masse chromatique sensible-
ment égale a celle de la tige. Le noyau de l’initiale de la
feuille f, a un contour sphérique de 7*,2 de diamètre et sa
masse chromatique a encore 3,3 de diamètre.
volume du noyau
volume de la masse chromatique
Si l’on calule le rapport
on obtient pour linitiale de la tige 20,96, pour l’initiale de la
feuille /f, 10,38, pour celle de la feuille fo 12,70. Les noyaux
des initiales des trés jeunes feuilles ont donc relativement plus
de chromatine que le noyau de la cellule initiale de la tige, ce
qui serait un signe de plus grande activité fonctionnelle.
RÉSUME ET CONCLUSIONS
Avant que j'aie entrepris des recherches sur le développe-
ment de la feuille des Mousses, l’état de la question était le
suivant:
De 1845 à 1855 une vive polémique [(2) (3) (4) (7)| s'engagea
entre Schleidenet Nägeli sur la question de savoir si la feuille
des Mousses présentait une croissance apicale ou basilaire.
Schleiden soutint que la pointe de la feuille est toujours la
_ partie la plus agée et que cet organe serait en quelque sorte
comme poussé (hervorgeschoben) hors de la tige. L’un de ses
meilleurs arguments fut l'emploi du réactif iodo-ioduré sur
les jeunes feuilles du Sphagnum (Dill.) Ehrh.. Il prétendit que
les membranes cellulaires de la pointe des feuilles, méme
trés jeunes, de cette plante présentent toujours des réactions
de membranes âgées.
Nageli au contraire explique la formation de toute la feuille
par le moyen du fonctionnement d’une cellule initiale a
2 pans placée a la pointe de lorgane.
Hofmeister (6) en 1851 considéra, avec juste raison, que la
feuille pousse d’abord au moyen de son initiale, puis par crois-
sance intercalaire (Pour les Sphagnum (Dill.) Ehrh. il ne croit
pas néanmoins a une croissance basilaire après extinction de
l’activité de l’initiale).
En 1863 Lorentz (10) étudia Fissidens Hedw., Polytrichum Dill.
et Fontinals (Dill.) L. et en 1867 Zemmia austriaca Hedw. Ces
travaux sont fondamentaux pour l’étude du développement de
la nervure.
En 1867 Berggren (26) publia une description anatomique et
embryologique du développement de la feuille des Andréales
et Kühn (28) en 1870 étudia Andreaea petrophila Ehrh.. Berg-
— 126 —
gren (29) en 1872 analysa la thèse de Kühn et résuma ainsi les
connaissances de son temps sur ce sujet: chez toutes les An-
dréales à nervure, sauf chez Andreaea nivalis Hook. la feuille
posséderait une initiale à un seul pan. Les espèces dépourvues
de nervure auraient, au contraire, toujours une initiale à 2 pans
sauf l’Andreaea alpina Hedw. et les formes à feuilles étroites
de l’Andreaea petrophila Ehrh. (Cette dernière découverte a
été faite par Kühn).
_ En 1892 Gebel (32) étudia la curieuse feuille de Buxbaumia
Haller qui ne présente jamais de cellule initiale. |
Lorch (38), en 1894, élucida magistralementle développement
de la feuille si particulière du Leucobryum Hampe, dans sa
thèse sur les Leucophanées; maisil ne vit pas dans ces plantes
l’asymétrie foliaire qu'il décrivit si bien plus tard, en 1908,
chez Polytrichum Dill.
Enfin Jongmans (33), en 1907, cita quelques cas où l’ini-
tiale de la feuille des Mousses a une existence éphémère.
Goebel (22) en 1915 exprima dans son Organographie l’idée
fort juste, trouvée déjà par Hofmeister, que la feuille des
Mousses possède d’abord une croissance due à une initiale
puis qu’à celle-ci succède une croissance intercalaire.
C'est à cette opinion que je me rallie. J’estime que la
cellule initiale d’une feuille ne fonctionne que très peu de
temps. Les arguments nouveaux que j’apporte sont d’abord
de nature cytologique. La substance chromatique des noyaux
des initiales de Mousses se rassemblant en généralen une seule
masse sphérique, il m’a été facile d’en estimer l'importance.
C’est ainsi que chez le Mnium undulatum (L.) Weis le diamètre
du noyau de la cellule initiale d’une tige était de 7,7 et le
diamètre de sa masse chromatique de 4,4. J'ai étudié aussi
3 jeunes feuilles de cette même tige dont les longueurs étaient
à peu près de 20, 30 et 60 micra. Le diamètre des initiales de
leurs noyaux étaient respectivement de 74,7 — 7*,2 — 4*,4 —
3+,8 à 4r,4 et pour les masses chromatiques 4*,4 — 3,8 —
28,9 — 14,3 à 2,2. On voit donc que les dimensions absolues
des noyaux diminuent. J'ai calculé pour chaque noyau le
volume du noyau ap br
- J'ai obtenu ainsi
Tav pO. oes À
PP volume de la masse chromatique
NOT
5,3 pour le noyau de l’initiale de la tige, 6,8 pour celui de
Vinitiale de la feuille de 20 micra de long, 8 pour celui de la
feuille de 30 micra et 12,9 pour celui de la feuille de 604. J'ai
cité plus haut les mesures du même genre que j'ai faites
pour Dicranum scoparium (L.) Hedw. et Barbula ruralis Hedwig.
Dans mon étude d’Andreaea crassinervia Bruch, on se rappelle
que, dès la seconde feuille (d’une longueur de 1/20 de milli-
mètre), le noyau de l'initiale foliaire ne se distinguait déjà plus
des autres noyaux de ce Jeune organe. Or l’on sait qu’une
cellule dont le noyau se divise souvent possède une masse
chromatique considérable. La réduction rapide de la sub-
stance chromatique dans le noyau des initiales de feuilles
indique donc la disparition de leur faculté reproductrice.
J'ai montré au cours de ce travail, dans toutes les espèces
que j'ai étudiées, que les cellules de la pointe de la feuille
présentaient de bonne heure des signes de différenciation
coïncidant avec un appauvrissement de leur contenu cellulaire
et une transformation de leur membrane, qui s’épaissit et
change de composition chimique. C’est surtout dans mon
étude de Dicranum scoparium (L.) Hedw., Atrichum undulatum
P. Beauv. et Barbula rurahs Hedwig que l’on a vu un épais-
sissement considérable empâter les membranes de la pointe
foliaire (Chez Barbula rurahs Hedwig cette pointe est un poil).
Dans les Andréales une coloration brune apparait a la
pointe des feuilles; puis elle gagne la base en se propageant
plus vite le long de la nervure et des bords. Sur les coupes
transversales c’est le centre et la face ventrale de la nervure
quien restent le plus longtemps indemnes. Dans les prépara-
tions traitées par le mélange vert diode, fuchsine, bleu de
méthyle et congocorinthe, j'ai observé toujours le premier signe
de la différenciation des membranes sous forme d’une colo-
ration violette. Celle-ci apparait d’abord, chez les Andréales
par exemple, sous forme de points a Dangle des cellules,
a l’endroit où se rencontrent les lamelles moyennes, puis
elle gagne les lamelles moyennes et enfin toute la mem-
brane. Cette coloration se produit, comme toutes les différen-
ciations, d’abord à la pointe des feuilles. J’ai rarement
pu observer la coloration verte, car je ne coupais pas
— 128 —
de feuilles très âgées. Je l’ai pourtant examinée spécialement
dans le Diphyscium foliosum Mohr, que je n’ai pas décrit dans
ce travail. Les vieilles membranes ayant en général une colo-
ration naturelle, on voit mal la coloration verte.
_ J'ai constaté aussi la continuation du développement dans
la base de la feuille, alors qu'il avait cessé depuis longtemps
dans la pointe. On peut se rendre compte de ce fait en regar-
dant la planche photographique I qui figure les stades du
développement de la feuille de l’Andreaea crassinervia Bruch :
dans les plus petites feuilles on ne voit pas encore la gaine
qui formera la région basilaire. Il faut arriver aux feuilles VII
et VIII pour voir le développement de cette partie. L'étude
du Barbula rurahs Hedwig m'a montré que l’ébauche du
poil existe dès la naissance de la feuille et que celui-ci
prend d’abord un plus grand développement que celle-là :
conclusion en accord avec la description de Debat s’appli-
quant à d’autres Barbula Hedwig pilifères. Cet auteur a été
frappé du fait que les jeunes feuilles apparaissent sous forme
de poil avant que la lame foliaire ait atteint un dévelop-
pement appréciable. Le poil terminal des feuilles n’est donc
pas, comme les dents des marges, une différenciation ultime
et d’ordre secondaire, mais cet appendice n’est autre chose
que l'extrémité de la feuille très amincie.
J'ai repris l’étude du Mnium punctatum (L. Schreb) Hedw.
cité par Nägeli comme exemple de Mousse dont la crois-
sance apicale persiste alors que la croissance basilaire s’est
éteinte. En réalité l’initiale de cette feuille disparaît de très
bonne heure et devient même impossible à retrouver dans
des stades encore très jeunes, ainsi que je l’ai montré. Il
est vrai que les dernières cellules qui doivent se diviser se
trouvent vers la pointe et les marges, mais ceci est une simple
particularité spécifique, due à ce que la feuille de cette espèce
doit atteindre une forme arrondie à l’état adulte.
J'ai fait voir qu'au début la lame foliaire reste assez en
retard dans son développement. C’est ainsi que les jeunes
feuilles du Mnewm undulatum (L.) Weis (voir planche pho-
tographique n° II) apparaissent d’abord sous forme de
masses, constituées presque uniquement par la nervure, tandis.
\
Er, 129 ne
que la lame foliaire ne prend un développement important
qu’assez tard. La planche photographique I, qui représente
des feuilles d’Andreaea crassinervia Bruch, démontre le même
fait. La nervure n’est donc pas, comme on pourrait le
peñser à priori, un épaississement de la lame foliaire sui-
vant sa ligne médiane ; c'est bien plutôt la lame foliaire qui
n'apparait que comme un appendice de la nervure, se mani-
festant d’abord à sa base et gagnant la pointe.
Au sujet du développement de la nervure, J'ai étudié avec
erand détail l’Andreaea crassinervia Bruch. J'ai montré par
là l'utilité des coupes en série, qui permettent de comparer
les parties homologues de feuilles à divers stades de leur
développement. J’ai fait voir ainsi que la pointe de la feuille,
dont la coupe transversale est circulaire, dérive d’un stade
dit en quadrants, foncièrement différent du stade dit en éven-
tail, d’où dérive le reste de la feuille de cette Andreaea, et la
plus grande partie des feuilles de Mousse en général.
Le développement de la nervure des Bryales avait été décrit
dans ses grandes lignes par Lorentz. Cet auteur dit que le
nombre de cellules fondamentales d’une nervure adulte est
égal au nombre des eurycystes, car il n'aurait observé que
très rarement la division de ceux-ci par des cloisons radia-
les [Il ne cite comme exemple que le Bryum turbinatum
(Hedw.) Br. Eur. dans ses Grundlinien. Il avait pourtant
figuré et remarqué chez Funaria hygrometrica (L.) Sibth.
un fait semblable.] J'ai pu observer chez Munaria hygrome-
trica (L:) Sibth. et Mnium punctatum (L. Schreb) Hedw. de
telles divisions.
Lorentz n’a étudié que le Timmia austriaca Hedwig etle Poly-
trichum Will. au sujet de l’origine des sténocystes(mais dans ce
dernier cas les sténocystes sont très particulières). Elles provien-
draient, chez 7ymmia Hedwig, d’une cellule-mére dérivée, selon
lui, par division d’une cellule de la couche la plus interne des
cellules dorsales au moyen d’une cloison péricline. J’ai observé
dans les 2 Mneum Dill. étudiées et dans Funaria hygrometrica
(L.) Sibth. que les sténocystes proviennent de 2 cellules-mères
appartenant a 2 cellules fondamentales différentes. Dans le
Mnium undulatum (L.)Weis, ce sont les 2 premières cloisons péri-
9
SE OO! ==
clines, apparaissant dans les 2 cellules dorsales primordiales
médianes, qui délimitent dorsalement le groupe de sténocystes, |
alors que les cloisons des cellules fondamentales en marquent
les limites latérales (voir cellules en grisé dans la figure 193).
Dans le Mnium punctatum (L. Schreb.) Hedw. et la Funaria
hygrometrica (L.) Sibth. les cellules correspondant aux cel-
lules-mères des sténocystes du Mnium undulatum (L.) Weis se
divisent encore par une cloison anticline et ce sont seulement
les 2 cellules placées contre le plan médian qui seront les
cellules-mères des sténocystes (voir E, figure 201). Les cellules
correspondant auxcellules-mères des sténocystes dans lesautres
cellules fondamentales voisines, et que j’ai désigné par A dans
mes dessins et schémas (fig. 191, 202 et dans /4, fig. 190)
restent longtemps indivises.
Pour le Dicranum scoparium (L.)Hedw. j'ai trouvé un dévelop-
pement ressemblant à celui des Campylopodées décrites par
Lorentz, en partie d’après Sven Berggren. Quand à l’Awaichum
undulatum P. Beauv. il rappelle naturellement le Polytrichum
Dill. |
J'ai étudiéle développement du poil terminal des feuilles dans
le Barbularurahs Hedwig. J’ai montré la formation d’un stade
en quadrants, qu'on trouve constamment à la base du poil.
C'est dans le Mnium punctatum (L. Schreb.) Hedw. que j'ai
pu observer le développement des marges foliaires à plusieurs
couches. J'ai montré que l'apparition de cette formation se fait
d’une facon discontinue, à peu près simultanément de la base
à la pointe de la feuille et ne se produit qu’au moment où cet
organe a déjà un certain développement : c’est un simple
épaississement de la lame foliaire. Ces formations n’ont donc
aucun rapport avec la nervure médiane, quant à leur embryo-
génie, et c'est à tort que Nägeli les désigne sous le nom de
nervures marginales. se,
J'ai découvert dans |’Andreaea crassinervia Bruch et dans
PAndreaea anqustata Lindberg des initiales à 2 pans chez
certaines jeunes feuilles (Voir figure 116 pour Andreaea cras-
smervia Bruch et figures 137 à 139 pour Andreaea angustata
Lindberg) alors que toutes les feuilles de ces espéces ont en
général une initiale aun seul pan. Ce fait est à rapprocher de
RO ee
celui trouvé par Kuhn dans l’Andreaea petrophila Ehrh., espèce
sans nervure qui présenterait des initiales à un seul pan dans
ses feuilles étroites, alors que les feuilles larges posséderaient
des initiales à 2 pans comme la majorité des Andréales éner-
ves. Dansles Andréales à nervure que j’ai étudiées ce sont les
feuilles qui deviendront larges et engainantes, comme les péri-
chétiales ou les périgoniales, qui doivent posséder une initiale
à 2 pans à certains moments de leur développement. On com-
prend en effet qu'uneinitiale à 2 pans donne une lame large en
forme de coin tandis que les initiales à un pan donnent plutôt
des formations aciculaires, telles que les feuilles normales des
Andréales à nervure. C'est pourquoi je n'ai trouvé qu’une fois
Vindication d’une initiale à 2 pans chez Andreaea crassinervia
Bruch, à feuilles épaissies vers le haut, tandis que j’en ai trouvé
plusieurs chez Andreaea angustata Lindberg, à feuilles toujours
plus aplaties. |
Enfin j'ai observé, dans toutes les espèces que j'ai étu-
diées, une asymétrie foliaire se manifestant surtout à la
base de la feuille (48). Cette asymétrie est due au recou-
vrement des feuilles les unes par les autres. Le côté recouvert,
étant géné dans son développement, atteint une évolution
moins avancée. Lorch avait fort bien décrit cette asymétrie
dans la feuille de Polytrichum Dull. et Vattribuait à « l'empié-
tement de la paroi segmentaire en direction anodique » ; en
d’autres termes à ce que la cloison qui apparaît dans l’initiale
de la tige pour détacher un jeune segment n’est pas parallèle
à une face de l’initiale, ce qui fait que les jeunes segments ont
un côté plus épais que l’autre. Mais, ainsi que l’a fait remar-
quer Hofmeister, la paroi qui apparait dans le jeune segment
pour en détacher la cellule initiale d’une feuille compense, par
son orientation, l’asymétrie du segment et l’ébauche de la jeune
feuille est souvent symétrique. La feuille ne deviendra asy-
métrique que plus tard, par suite du recouvrement des feuilles
Pune par l’autre. Mais comme ce recouvrement est, en somme,
une conséquence de l’empiétement dela paroisegmentaire appa-
raissant dans l’initiale, l’asymétrie foliaire dépend indirecte-
ment de cet empiétement. Toutes les Mousses dont les feuilles
ne sont pas disposées sur 3 rangs doivent donc présenter cette
DL rao iy NS RÉ de SA leet
asymétrie. I] est par conséquent remarquable que Lorch ne
soit pas surpris de ne pas l’avoir rencontrée dans le Leuco-
bryum glaucum (L.) Schimper. J’ai pu montrer cette asymé-
trie par 3 procédés différents. J’ai fait voir également que,
dans les très jeunes feuilles de cette espèce, la croissance est
surtout dorsale et marginale. |
En résumé les résultats principaux de ce travail sont les
suivants :
1° La feuille des Mousses n'effectue sa croissance au moyen
d’une cellule initiale que tout au début de son développement
2° L'activité multiplicatrice se déplace, au cours de l’onto-
oénese foliaire des Mousses, de la pointe ala base de la feuille
3° La pointe de la feuille se différencie de très bonne heure.
4° Certaines Andréales à nervure comme l’Andreaea crassi-
nervia Bruch et l’Andreaea angustata Lindberg peuvent pos-
séder quelquefois une initiale à 2 pans dans leur feuille. Ces
faits, ajoutés aux observations de Kühn (28) et de Berggren
[(26) et (29)] à ce sujet, montrent chez ces végétaux archaïques
une tendance très nette vers le mode de croissance foliaire
des Mousses plus évoluées.
5° J’ai prouvé par l’embryogénèse du Mnium punctatum
(L. Schreber) Hedwig que les marges foliaires ne sont nulle-
ment comparables aux nervures.
6° J'ai étudié l’origine du groupe des cellules piney
chez diverses Mousses et ai constaté qu'elle n’était pas tou-
jours la même.
7° Enfin j'ai découvert |’ asymétrie foliaire chez Leucobryum
Suen (L.) Schimper, qui avait été niée par Lorch (38), et
ai ainsi apporté un nouvel argument a sa généralité chez les
Mousses.
Fait au laboratoire de Botanique de l’Université de Berne (années 1916
à 1918);
Et au laboratoire de Botanique (Or benne et Physiologie) du Muséum
d'Histoire Naturelle de Paris.
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lung, 1858 (Il traite du développement de la feuille de la page 39 à 41).
10. Paur-Günrner Lorentz, Studien über Bau und Entwicklungsgeschichte
der Laubmoose, avec planches I a IV, 1863. C’est la premiere partie
d'un ouvrage formé de 3 parties reliées ensemble en 1864 sous le titre
de Moostudien à Leipzig.
11. P.-G. Lorentz, Grundlinien zu einer vergleichenden Anatomie der
Laubmoose, publié dans le volume VI des Jahrbücher für wissenschaft-
liche Botanik herausgegeben von Dr. N. Pringsheim. Leipzig, 1867-
1868.
12. P.-G. Lorentz, Zur Anatomie und Entwickelungsgeschichte von
Timmia austriaca avec la planche X dans le Botanische Zeitung, année ~
1867, n° 47 du 22 novembre 1867, pages 369 à 374.
13. P. G. Lorentz, Studien zur Naturgeschichte einiger Laubmoose
(Vorgelegt in der Sitzung vom 5 Juni 1867) (Mit 6 Tafeln 17-22),
publié de la page 657 à 686 dans les Verhandlungen der Kaiserlich-
Küniglichen zoologisch-botanischen Gesellschaft in Wien, 1867.
14. P.-G. Lorentz, Studien zur vergleichende Anatomie der Laubmoose,
publié dans le journal Flora appelé encore Allgemeine botanische Zei-
tung, Regensburg, 1867, n° 16, pages 241 à 248, n° 17, pages 257 à
264, n° 19, page 289 à 297, n° 20, pages 300 à 313. Dans une seconde
série il étudie l’anatomie comparée de quelques Funariacées et Splach-
nacées dans n° 33, pages 526 à 528, n° 34, pages 529 à 540, n° 55,
pages 545 à 558.
-15. Husert Lerrers, Zur Kenntniss des Wachsthums von Fissidens
(Mit 2 Tafeln), publié dans les Sitzungsberichte der mathematisch-natur- -
wissenschafllichen Classe der Kaiserlichen Akademie der Wissenschaften,
LXIX Band. I Abtheilung. Jahrgang, 1874, pages 47 à 69. V Sitzung
vom 12 Februar, 1874.
16. L. Dear, De l’évolution des organes appendiculaires chez les Fis-
sidentiacées, publié de la page 13 à la page 15, avec 1 planche dans
les Annales de la Société botanique de Lyon, 5° année (1876- 1877); séance
du 16 novembre 1876. Paru a Lyon en 1878.
17. L. Derpar, Recherches sur le développement des filaments et des
lamelles chez les feuilles des « Barbula », des « Pottia » et des « Poly-
trichacées », publié de la page 151 à la page 169 avec 2 planches
dans les des de la Sociélé botanique de Lyon, 5° année (1876- 1897);
séance du 3 mai 1877. Paru a Lyon en 1878.
0 3 1 =
18. Kart Gorset, Archegoniatenstudien. 1. Die einfachste Form der
Moose. Publié de la page 92 à la page 104 dans le volume 76 (Ergin -
zungsband zum Jahrgang, 1892) de Flora oder allgemeine botanische Zei-
lung, Marburg.
19. Dr. Witietm Lorcu, Die Polytrichaceen. Eine biologische Mono-
graphie (Abhandlungen der Kénigliche bayerische Akademie der Wis-
senschaften, 2'° Klasse XXIII, 1908, p. 445-446 avec 65 figures).
20. Wicaezm Hormetster, Allgemeine Morphologie der Gewdchse (page 529
pour le développement de la feuille de Sphagnum et page 530 pour
celui de Mnium punctatum qu'il appelle undulatum par erreur). Cet
ouvrage est la première partie, 2° section, du Handbuch der Physiolo-
gischen Botanik fait en collaboration avec A. de Bary, Th. Irmisch et
J. Sachs. Publié par W. Hofmeister.
21. Cart Minter, « Musci » dans Die naturlichen Pflanzenfamilien nebst
thren Gattungen und wichtigeren Arten..., begründet von A. Engler
und K. Prantl. I Teil-Abteilung 3. I Halfte. Leipzig, 1909 (pages 187
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und Samenpflanzen, Zweite Auflage. Zweiter Teil. Heft I, Bryophyten.
lena, 1915.
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constitution of the cell wall in Mosses (Annals of Botany, vol. 1, 1887-
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7
De
À
4
£ »
PE ee TE eee NE
TRES Burret, Notes on a form ai Leucobryum glancum
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d à bmp Bulletin du Jardin rl de nt Pierre le Grand,
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A
EXPLICATION DES FIGURES
Tous les dessins (sauf les schémas) ont été faits à la chambre claire, le plus exaclement
possible, cellule par cellule, même les figures 129, 195 et 291, ainsi que les ptanches
doubles XIII et XV.
PLANCHE I.
Fig. 1 et 2. — Coupes transversales passant par les cellules initiales de 2 tiges,
entourées de leurs feuilles, d’Andreaea crassinervia Bruch, grossies 600 fois.
Puancue Il.
Coupes transversales de feuilles d’Andreaea crassinervia Bruch, grossies 300 fois.
— Fig. 3 à 5 (feuille II). — Fig. 6 à 14 (feuille ID). — Fig. 15 à 29 (feuille IV).
Prancue III.
Coupes transversales de feuilles d’Andreaea crassinervia Bruch, grossies 300 fois. —
Fig. 30 à 50 (feuille V). — Fig. 51 à 53 (Pointe de la feuille VI).
Prancue IV.
Coupes transversales de feuilles d’Andreaea crassinervia Bruch, grossies 300 fois. —
Fig. 54 à 63 (Bas de la feuille VI). — Fig. 64 à 71 (Pointe de la feuille VIT).
2 Prancue V.
Coupes transversales de feuilles d’Andreaea crassinervia Bruch, grossies 300 fois. —
Fig. 72 à 89 (Suite de la feuille VIT).
Prancue VI.
Coupes transversales de feuilles d’Andreaea crassinervia Bruch, grossies 300 fois. —
Fig. 90 à 92 (Base de la feuille VII). — Fig. 93 à 101 (feuille VIT.
PLancue VII.
Fig. 102 à 113. — Coupes transversales dans la feuille IX d’Andreaea crassinervia
Bruch, grossies 300 fois. La figure 113 montre la base de la feuille IX se soudant à
la tige.
Fig. 114 et 115. — Très jeunes feuilles d’Andreaea crassinervia Bruch, vues à plat,
grossies 620 fois.
Prancue VIII.
Fig. 116 à 11g. — Jeunes feuilles d’Andreaea crassinervia Bruch, vues à plat,
grossies 620 fois.
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Fig. 120, 121 et 123 à 428. — Contours de jeunes feuilles d’Andreaea crassinervia
Brant vues à plat, grossies 54 fois.
La Gus 122 représente, au grossissement de 620 fois, la pointe de la feuille
d’Andreaea crassinervia Bruch, dont la figure 121 indique le contour.
Prancue IX.
Fig. 129. + Feuille adulte d’Andreaea angustata Lindberg, vue à plat, grossie 118
fois. :
Fig. 130 4 132. — Pointes de feuilles adultes d’Andreaea angustata Pinar es vues
à plat, grossies 620 fois.
Fig. 133 à 1836. — Très jeunes feuilles d’Andreaea angustata Lindberg, vues à plat,
erossies 620 fois.
Prancue X.
Fig 137 à 139. — Très jeunes feuilles d’Andreaea angustala Lindberg, vues à plat,
grossies 620 fois.
Fig. 140 à 156. — Coupes transversales de feuilles d’Andreaea anguslata Lindberg,
grossies 600 fois. — Feuille I (Fig. 140 à 146). — Feuille IT (Fig. 147 à 155). —
Cellule initiale de la feuille IT (Fig. 156).
Prancue XI.
Fig. 157 à 170. — Coupes transversales de la feuille III d’ Andreaea angustata
Lindberg, grossies 600 fois. Les figures 171 et 172 montrent l’insertion des feuilles
ip et f, sur la tige.
Prancue XII.
Fig. 173 à 189. — Coupes transversales de la feuille IV d’Andreaea angustata
Lindberg, grossies 600 fois.
Prancue XIII.
Fig. 190. — Coupe transversale passant par la cellule initiale d’une tige entourée
de ses feuilles de Mnium undulatum (L.) Weiss, grossie 450 fois.
PLiaxcur XIV. :
Fig. 191 à 192. — Schémas pour expliquer le développement de la nervure du
Mnium undulatum (L.) Weiss.
PLancue XV.
Fig. 194. — Coupe transversale de tige de Mnium punctatum (L.) Weiss, pratiquée
à 60 micra de distance de la coupe représentée par la figure 190.
Praxcue XVI.
Fig. 195. — Feuille adulte de Mnium punctatum (L. Schreber) Hedwig, grossie 50
fois (Elle avait 3™™,6 de long et 2"M,5 de large).
Prancne XVII.
Fig. 196. — Pointe et cellule initiale d’une jeune feuille de Mnium punctalum (L.
Schreber) Hedwig, de 1/40 de millimètre de longueur, grossie 300 fois.
Fig. 197. — Pointe d’une jeune feuille de Mnium punctalum (L. Schreber) Hedwig.
Cette feuille avait o™™,46 de longueur et 0"",28 de largeur.
Fig. 198. — Gauge transversale d’une feuille adulte de Mnium panctatum (L.
Schreber) Hedwig, grossie 50 fois.
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PLranxcue XVIII.
Fig. 199, coupe (vers le milieu) et fig. 200, coupe (vers la base) d’une assez jeune
feuille de Mnium punctatum (L. Schreber) Hedwig, grossies 300 fois.
Prancue XIX.
Fig. 20r et 202. — Schémas pour expliquer le développement de la nervure foliaire
- chez le Mnium punctatum (L. Schreber) Hedwig.
Fig. 203. — Schéma d’une coupe transversale de marge foliaire bien développée
Piancue XX.
Fig. 204 à 205. — Coupes transversales de feuilles ou de nervures foliaires de
Funaria hygrometica (L.) Sibth, grossies 300 fois.
Piaxcue XXI.
Fig. 225 à 246. — Coupes transversales de feuilles ou de nervures foliaires de
Funaria hygrometica (L.) Sibth, grossies 300 fois.
La figure 230 montre la fusion d’une nervure foliaire avec la tige et la sortie d’un
rameau latéral.
PLancue XXII.
Fig. 247 et 248. — Coupes transversales de nervures foliaires de Funaria hygrome-
trica (L.). Sibth, grossies 300 fois.
Fig. 249 à 265. — Coupes transversales de feuilles de Dicranum scoparium (L.)
Hedwig, grossies 300 fois.
Prancne XXIII.
Fig. 266 & 282. — Coupes transversales de feuilles et de nervures foliaires de
Dicranum scoparium (L.) Hedwig, grossies 300 fois.
Prancue XXIV.
Fig. 283 à 289. — Coupes transversales dans les feuilles ou les nervures foliaires
de Dicranum scoparium (L.) Hedwig, grossies 300 fois.
® Fig. 290. — Coupe transversale dans une oreillette de la base foliaire de Dicranum
scoparium (L.) Hedwig, grossie 300 fois.
Praxcue XXV.
Fig. 291. — Feuille d’Atrichum undulatum P. Beauv., vue à plat, grossie 50 fois.
Prancue XXVI.
Fig. 292 à 312. — Coupes transversales de feuilles et de nervures foliaires d’Atri-
chum undulatum P. Beauv., grossies 300 fois.
Prancue XXVII.
Fig. 313 à ones. Coupes transversales de feuilles et de nervures foliaires d’Atri
chum undulatum P. Beauv., grossies 300 fois.
Fig. 324. — Coupe transversale dans la marge foliaire d’Atrichum undulatum P.
Beauv., grossie 300 fois.
PLancue XXVIII.
Fig. 325. — Coupe transversale de nervure foliaire de Barbula aciphylla Br. Eur.,
erossie 450 fois.
Fig. 326 à 350. — Coupes transversales dans le poil terminal ou la partie supé-
rieure de la feuille de Barbula ruralis Hedwig, grossie 620 fois.
Prancue XXIX.
Fig. 351 à 358. — Coupes transversales dans le poil terminal ou la feuille de Bar-
bula ruralis Hedwig, grossies 620 fois.
Fig. 359. — Coupe transversale de bourgeon de Leucobryum glancum (L.) Schim-
- per, passant par l’initiale de la tige, grossie 300 fois.
Fig. 360. — Coupes de la feuille 5 de Leucobryum glancum (L.) Schimper, plus
près de la pointe de celle-ci que la coupe de cette feuille se trouvant dans la figure
359.
Fig. 361. — Coupe longitudinale d’une jeune feuille de Leucobryum glancum (L.)
Schimper, grossie 300 fois.
PLaxcue XXX.
Fig. 362 à 365. — Contours de coupes en série faites de la pointe à la base d’un
jeune bourgeon de Leucobryum glancum (L.) Schimper, grossies 52 fois. —
Fig. 366 et 367. — Coupes longitudinales de 2 sommets de tiges de Leucobryum
glancum (L.) Schimper, grossies 300 fois.
Fig. 368. — Coupe transversale de feuille adulte de Leucobryum glancum (L. ) Schim-
per, grossie 54 fois.
PLANCHE PHOTOGRAPHIQUE I,
Série de feuilles d’Andreaea crassinervia Bruch, reconstituées en plastiline et vues
par la face ventrale.
Fig. I à VIII grossies 200 fois.
Fig. IV bis et V bis grossies 240 fois.
Les figures IV's et V's représentent les feuilles IV et V vues de profil.
La figure VIII's montre la feuille VIII sous une autre orientation.
PLANCHE PHOTOGRAPHIQUE II.
Série de feuilles de Mnium undulatum (L.) Weiss reconstituées en plastiline et vues
par la face ventrale.
Fig. I à XII grossies vers 108 fois.
Les modèles Vi»'s, [X>is et XIPÏS sont les modèles VI, IX et XI vus sous une autre
orientation.
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LIBRAIRES DE L’ACADÉMIE DE MÉDECINE
120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 120 — PARIS — VI® ARR;
' COLLECTION
_“ LES LEÇONS DE LA GUERRE ”
D Les ouvrages de cette Collection ne sont pas des « Livres
de Guerre ». Consacrés à l’étude de la situation actuelle, ils
ont pour but essentiel de présenter au grand public cultivé les
données générales qui doivent guider notre effort de restauration
_ nationale.
La guerre pèse trop lourdement sur nous pour que, par
… lassitude, nous puissions en oublier les lecons; la situation du
_ monde entier est trop incertaine pour que, par légèreté, nous
négligions les conseils d’une formidable expérience. Le retour
| au passé nonchalant est impossible, et nous ne recueillerons les
fruits de la victoire que si nous savons comprendreles situations
nouvelles, agir selon les directives exactes et des méthodes
rigoureuses. |
par le commandant
Les Leçons militaires. de la Guerre, Fe BOUVARD, _
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de l'Académie de médecine, professeur au collège da France. — 1 volume
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TABLE DES MATIÈRES —
CONTENUES DANS CE CAHIER
Recherches sur le développement de la feuille des Mousses,
parti M Bonrinn: 204i 960200. eRe ee ae LUE
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3547-21. — Corsi. Imprimerie Crért.
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Conditions de la or des A nnales des s
| BOTANIQUE LA
Publiée sous Ja direétion de M. J. Cosrantin. 43 os
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Ce. volume paraît en plusieurs. fascieules. Le ;
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Publiée sous la deco de M. Bouvier. : ee
hi L'abonnement est fait pour 4 volume grand in-8, avec planches os
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Ar Periubee SÉRIE (Zoologie et Botanique réunies), 30 nee Ore ples
ae DEUXIÈME SÉRIE (1834-4843). Chaque partie, 20 vol. cr Chara Vek.
eae TROISIÈME SÉRIE (1844-1853). Chaqve partie, 20 vol. 750 tre \ :
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FA \Les À Ae et 1853 sont épucsées.) Ps ANA al £
j Quarrrime Séme (1854-1863). Chaque partie, 20 ae : ay 25m aa
: (Les années es et 1863 sont épuisées, partie Botanique. RS telah hice,
Pat ye eae
|| Cinquitme Série (1864-1874). Chaque partie, 20 vol.
| Sixrime SÉRIE (1875-1884). Chaque partie, 20 vol.
|
| Sepritue SÉRIE (1885- 1894). - Chaque partie, 20 vol.
die Hürrième SÉRIE (1895-1904. Chaque partie, 20 vol.
LS Neuvièue SÉRIE (1905- A945). Chaque parley: 20 vol.
tn Dixième SÉRIE (4916-1920). … Tomes I et II.
ANNALES DES SCIENCES GÉOLOGIQUES |
TO oe ok aie par MM. Hégerr et A. Mune-i {DWARDS.
V2 . Tomes I à XXII (1879-1891). Ne se vend qu ‘en collection. ; a) ee ee
; 4 à Cette publication a ele remplacée par LOS A heey De ee A
op ANNALES DE PALÉONTOLOGIE
Nee Gace: publiées sous la direction de M. M. Bowe. ns HN
: Abonnement annuel : | HE SR
boot Paris ¢t Départements. ie DO MPG eS ene = ane a ale a 60
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PREMIÈRE CONTRIBUTION A L'ÉTUDE
DE L’'EMBRYON ET DE LA GERMINATION
DES ARACÉES
Par C.-L. GATIN
(Travail posthume publié par Mme V. GATIN)
Se ne
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; AVANT-PROPOS he. ms
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Le présent Mémoire devait constituer un des chapitres
d’un travail très étendu sur l'embryon et la germination
- des Monocotylédones. |
La guerre, en emportant mon mari, est venue arrêter ce
labeur de plus de dix années et dont l’achèvement était un
des désirs du disparu. Je me propose donc de le continuer
mais c’est une œuvre de si longue haleine qu’il me semble
nécessaire d’en faire paraître les parties presque terminées. ;
Le chapitre qui traite de ’embryon et de la germination des
ARACEES, malgré quelques lacunes que je compte combler
plus tard, renfermé assez de faits nouveaux pour être publié
sous le titre de premières contributions,
Je suis heureuse de remercier ici M. CosTANTIN de
vouloir bien m’offrir l'hospitalité dans les Annales des Sciences
Naturelles.
bi et
VALENTINE GATIN.
SEA bi” ps iron ÈS, Sd FESSES
LES 5h ae ora,
ANN. DES SC. NAT. BOT., 40e série. 1921, m1, 10
B
mi
Sih
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Bs
Es E
_ GÉNÉRALITÉS | Mee
Jusqu’a présent, aucun travail d’ensemble n’a été entrepris
sur ’embryon et la germination des Aracées. Les renseigne-
ments que nous possédons sur l’embryologie de cette famille
sont épars dans les travaux d’ensemble ou ne se trouvent
que dans quelques mémoires consacrés à une seule plante
comme ceux de Scott et SARGANT (1), Mac Doueat (2), REN-
NERT (3) et MicKE (4). } =
Nous mentionnerons les résultats de ces divers auteurs
lorsque nous passerons en revue les genres qu'ils ont eu l’occa-
sion d'étudier.
Enfin il serait injuste de ne pas citer, au cours de ce résumé.
biblidgraphique, les importants travaux de M. CAMPBELL.
Cet auteur a publié sur le sac embryonnaire et l’embryo- >
génie des Aracées une série de travaux (5) dont un certain.
nombre de résultats sont à retenir au point de vue qui nous
occupe. | ee
Genre POTHOS L.
MirBEL (6) a donné autrefois des figures de l'embryon du.
Pothos crassinervia; plus récemment, M. Tscxircx (7) a eu
l’occasion d’étudier celui du P. insignis (PI. IV, fig. 12 et 13).
(1) Scort and SarcanT, On the nn of Arum maculatum from the
seed (Ann. of Bot. XII, 400-413, 1 pl., sept. 1908).
(2) Mac Doucai, D. T. , Seedlings of Aeon tee Ï, 2-5, 1901 ;
(3) RENNERT, R. J., Seeds and Seedlings of Arisæma Bull. Torrey bot.
Club, XXIX, 1902).
(4 ) Micke, Ueber die Bau und. Entwickeiung der Früchte von Acorus Cale.
mus, Bot. Zetune, LXVI, 1-23, 3 fig., 1 1., 1908).
(5 ) CAMPBELL DOUGLAS HOoUGHTON Theembryosac of A glaonema eee Bo'.
Rev. Edinburgh, 1, 1912).
(6) MrrBEL, Examen de la division des végétaux en endorhizes et exorhizes
… Annales du Muséum d'Histoire naturelle, 419-458, 6 pl., 1810).
(7) Tscxircx, A., Physiologische Studien über die Samen, insbesondere
die Saugorgane derselben (Annales du Jardin bot. de Buitenzorg, X, 143-180,
6 pl., 1891). eee
L’EMBRYON ET LA GERMINATION DES ARACÉES 147
‘Ces embryons sont volumineux; la graine, comme cela se
produit chez nombre d’Aracées, ne présentant Bas d’al-
bumen.
GENRE ANTHURIUM L. ;
Anthurium Scherzerianum Schott.
Un certain nombre d’espèces d’ Anthurium, de provenances
variées, ont été étudiées au cours de ce travail. Nous pren-
drons comme type l’A. Scherzerianum Schott, originaire du
Guatémala, et que l’on trouve dans toutes les serres chaudes,
et notamment dans celles du Muséum.
Empryon. — La graine de ces plantes est petite et pourvue
d’un albumen charnu, qui contient un très petit embryon
étroitement inclus dans l’albumen et que sa consistance, sem-
blable à celle de la masse qui l’entoure, et sa petite taille
rendent difficile à extraire.
Il est possible d’en obtenir de bonnes préparations, en effec-
tuant une inclusion de la graine entière. Ajoutons encore que
l’albumen contient de nombreux grains d’amidon et des cel-
lules à raphides.
L’embryon présente une forme générale conique (PI. I,
fig. 1). Il est constitué par un grand nombre de cellules nobe.
driques, isodiamétriques, laissant entre elles des méats, et
pourvues de gros noyaux. Ces cellules sont plus ou moins
régulièrement orientées en files longitudinales, et un assez
grand nombre d’entre elles, de taille un peu supérieure a
celle de leurs voisines, renferment des raphides d’oxalate de
calcium. Ces cellules à oxalate sont particulièrement nom-
breuses vers la partie radiculaire de l’embryon. Leur nombre
diminue à mesure que l’on s’éloigne de la partie radiculaire
de l'embryon. ~ |
L’embryon contient un plantule dont l’axe est courbe et
qui se compose d’une gemmule, non encore différenciée en
plusieurs feuilles et située au fond d’une cavité qui est reliée
à l'extérieur par une fente limitée par deux lèvres imbriquées
formées par le tissu cotylédonaire (PI. I, fig. 2). La cavité
148 C.-L. GATIN.
gemmulaire et l’ensemble de l'embryon sont recouverts par
un épiderme continu, peu allongé dans le sens radial.
La radicule embryonnaire se compose d’un cylindre central
assez nettement différencié. L’écorce est limitée par le
cylindre central d’une part et, d’autre part, par une assise
pilifère assez nettement différenciée, laquelle vient se rac-
_corder avec l’épiderme général de l’embryon (PI. IT, fig. 1).
Le système vasculaire de l’embryon est assez peu déve- |
loppé. [Il est réduit à un cordon de procambium, qui parcourt
l'embryon dans toute sa longueur et se raccorde avec le
cylindre central de la radicule. Il se ramifie à la base de la
gemmule (PI. I, fig. 2), dans laquelle il envoie également un
cordon de cu |
L’embryon, vers sa partie supérieure, est très aplati. Le
faisceau qui le parcourt et qui,en cet endroit, se compose
d’un nombre plus grand d'éléments, présente un aplatisse-
ment concomitant. et
On remarquera encore que les cellules 4 oxalate de calcium
sont groupées, surtout à la périphérie de l’embryon, généra-
lement au-dessous de l’assise sous-épidermique, bien qu'il
en existe quelques-unes plus internes. Ce groupement est parti-
culièrement régulier dans la région qui avoisine la radicule.
MORPHOLOGIE DE LA GERMINATION. — Au début de la
germination, on observe une augmentation de volume de
V’embryon, qui ne tarde pas à faire saillie à l’extérieur (PL I,
fig. 4, 5, 6) sous l’aspect d’un bourrelet, d’où s’échappent la
ra oo. et la gemmule, cette dernière étant entourée, à sa
base, d’une sorte de gaine ascendante.
La première feuille est peu développée, à limbe très ee
La seconde présente un limbe lancéolé (PL I, fig. 8).
M La partie incluse dans la graine grossit également et se
transforme en un sucoir (S), de forme conique (PI. I, fig. 7), qui
dissout petit a petit la réserve contenue dans la graine. Le
suçoir tombe, entraînant la graine vide; lorsque la seconde
feuille est déjà développée, la racine s’épaissit beaucoup.
= ANATOMIE DE LA GERMINATION. —Leschémadela planchel,
figure 3, met en évidence les premiers stades de la germi-
nation, qui se traduisent par un allongement de l’ensemble
me
L’EMBRYON ET LA GERMINATION DES ARACEES 149
de ’embryon, qui fait saillir à l’extérieur de la graine son
extrémité radiculaire, en méme temps que sa pointe s’en-
fonce dans l’albumen.
Cet accroissement de volume est dû uniquement à l’augmen-
tation de volume des cellules qui composent l'embryon ; il ne
se produit pas de cloisonnements dans ces éléments.
Quoi qu'il en soit, il se forme, tout contre la graine, une sorte
de bourrelet dans lequel se développent la gemmule et la
radicule.
La gemmule est entourée par une sorte de ligule, qui s’élève
autour de sa base. La gemmule finit par s'échapper par la
fente cotylédonaire. La radicule achéve son développement ;
l’assise pilifére reste en continuité avec l’épiderme général
de l’embryon, et les quelques assises de cellules qui séparent
son point végétatif de l’extérieur sont rapidement exfoliées.
_ C’est ce que l’on peut voir sur la figure 1 de la planche IT.
Anthurium longifolium G. Don.
J'ai obtenu des graines de cette plante des serres du
Muséum.
EmMBrRYON. — Cet embryon, cylindrique vers sa partie
radiculaire, est aplati vers sa partie supérieure.
Il est formé de cellules isodiamétriques, polygonales, lais-
sant entre elles des méats et contenant des grains d’amidon.
Cet embryon est parcouru, dans toute sa longueur, par un
faisceau libéro-ligneux (fx, Pl. III, fig. 4), qui est aplati en
lame à la partie supérieure. La radicule est constituée par les
rudiments du cylindre central, de l’écorce, et par une assise
pilifère qui se raccorde avec l’épiderme général de l’embryon.
Celui-ci est très régulier, sauf vis-à-vis de la pointe de la
radicule, où il présente la trace nette du suspenseur. La
gemmule est située dans une cavité qui se ferme en se recou-
vrant par les bords de la fente cotylédonaire (PI. III, fig. 4).
Celle-ci est très allongée dans le sens longitudinal.
On trouve dans la région radiculaire de nombreuses grandes
cellules à mucilage contenant aussi des raphides (PI. III
150 C.-L. GATIN
fig. 5 et 6). Ces cellules présentent une disposition particu-
lièrement régulière dans la partie radiculaire de l'embryon.
Dans cette région, en outre, au-dessous de l’épiderme, on
rencontre une assise de cellules très régulière, formée d’élé-
ments alternant régulièrement avec les cellules épidermiques.
La germination de cette espèce n’a pas été observée.
Anthurium acaule Schott.
Les graines de cette espèce ont été obtenues du commerce.
EmBryon. — Les caractères généraux de la graine et de
embryon sont les mêmes que dans les espèces précédentes.
Nous les résumerons donc très rapidement.
L’embryon, cylindrique à son extrémité radiculaire, est
très aplati à sa partie supérieure. Il est parcouru par un
cordon vasculaire fortement aplati à la partie supérieure de
l'embryon. Ce cordon envoie une ramification à la base de la
gemmule (PI. III, fig. 7,et Pl. IV, fig. 16). Gomme chez les
autres espéces, on retrouvera de nombreuses cellules 4 muci-
lage disposées régulièrement à la périphérie de l’embryon,
surtout dans la région radiculaire. La plantule est courbe; la
radicule présente son cylindre central bien marqué. L’assise
pilifére vient se raccorder avec l’épiderme général de l’em-
bryon. La fente cotylédonaire présente parfois des ni qui
ne se recouvrent pas.
La germination de cette espèce n’a pas été observée.
Anthurium robustum Hort.
Des graines de cette espèce ont été obtenues du commerce.
EmMBrYon. — L’embryon ressemble beaucoup à celui de
VA. longifolium. La masse contient moins de cellules à muci-
lage, et la fente cotylédonaire est, de même, très allongée
dans le sens longitudinal. Les bords de cette fente sont late
ment imbriqués; la plantule est courbe.
La radicule est construite comme dans les autres Anthu-
rium. ,
L’ embryon est très aplati à sa partie supérieure.
L’EMBRYON ET LA GERMINATION DES ARACEES 151
Il est parcouru dans toute sa longueur par un cordon vas-
culaire, qui s’aplatit à la partie supérieure de l'embryon.
- La germination n’en a pas été observée. -
Anthurium Bakeri Hook. f.
Des graines de cette plante ont été reçues des Jardins de
: Peradenyia. :
EmBryon. — L’embryon est très aplati à sa partie supé-
= rieure, comme chez la plupart des espéces que nous venons de
passer en revue.
Il ne se distingue d’ailleurs pas par des caractères parti-
culiers, si ce n’est par l'abondance plus grande des cellules à
mucilage et à raphides et par son cordon vasculaire, qui ne
s'élève pas jusqu’à son extrémité,
Anthurium regale Linden.
. Cette espèce, dont les graines ont été reçues de Peradenyia,
ne se distingue des précédentes par aucun caractère parti-
culier.
La germination n’a pas été observée.
Anthurium coriaceum G. Don.
Les graines ayant servi aux observations provenaient du
commerce.
_ [n'ya rien de particulier à dire de ces embryons, qui ne
se distinguent des espèces précédentes par aucun caractère
essentiel.
La germination n’a pas été observée.
Anthurium pedato-radiatum Schott.
J'ai obtenu des plantules de cette espèce, à partir de graines
venues de Buitenzorg. La germination est admotive ; l’em-
bryon produit tout de suite une très grosse radicule et une
gemmule qui s’échappe par la fente cotylédonaire, et qui s’en-
192 | | C.-L. GATIN
toure, à sa base, d’une gaine ascendante peu développée. La
radicule est recouverte de nombreux poils absorbants (PI. IV,
fig. 13). Le suçoir qui reste inclus dans la graine garde une
forme cylindro-conique et se développe lentement en prenant
petit à petit la forme de l’albumen, qu'il digére. Ce sucoir
ainsi que la première feuille, réduite à une gaine, tombe de
bonne heure, et leur cicatrice reste visible à la partie supé-
rieure de la radicule (Pl. I, fig. 9 et 10).
GENRE ACORUS L.
Aucune recherche personnelle n’a été faite sur ce genre.
Micke (1) a décrit superficiellement l'embryon et la plan-
tule de l’Acorus gramineus. Nous avons reproduit (fig. À et 2,
PL IV) les figures de cet auteur. L’embryon est pourvu d’une
fente cotylédonaire, et la germination est remotive.
L’assise pilifère est également mal différenciée, et elle
semble êtreen continuité avec l’épiderme général de l'embryon.
La gemmule est réduite à un cône de cellules toutes sem-
blables, inclus dans une cavité qui, par une fente à bords jux-
taposés, communique avec l'extérieur. Cette fente peut être
mise en évidence sur une coupe transversale (PI. V, fig. 3).
L’embryon est parcouru par un cordon vasculaire composé
de quelques éléments qui ne paraissent pas offrir de différen-
ciation nette. Ce cordon parcourt l’embryon dans toute sa
longueur (PI. V, fig. 2).
La germination n’a pas été observée.
GENRE SPATHIPHYLLUM Schott.
Plusieurs espèces de ce genre ont pu être étudiées. Nous
prendrons comme type le Spathiphyllum candicans, dont les
graines nous avaient été envoyées des jardins botaniques de
Peradeniya.
(4) Miicke, loc, cit.
Ie Ne ee ee on ee ee pété nd
L'EMBRYON ET LA GERMINATION DES ARACÉES 153
Spathiphyllum candicans Poep. et End.
EmpBryon. — La graine de cette plante ressemble beaucoup
à celle des Anthurium. Elle contient un albumen charnu,
formé de cellules polyédriques, laissant entre elles des méats,
et contenant de nombreux grains d’amidon.
L’embryon est étroitement inclus dans l’albumen, et il se
distingue surtout par son état de différenciation peu avancé
CPV, fig. 1). |
Il présente la forme d’un cône très allongé (PL. Nero 2)
entouré d’un épiderme continu, lequel perd cependant un
peu de sa régularité au voisinage de l’extrémité radiculaire.
Sa masse est formée de cellules polyédriques, laissant entre
elles des méats ; on n'y rencontre pas de cellules à mucilages
ou à raphides. L’axe de la plantule est courbe.
La radicule est, d’ailleurs, presque indifférenciée. A peine
devine-t-on dans l'embryon mur l’ébauche de son cylindre
central.
L’assise pilifère est également mal différenciée, et elle semble
être en continuité avec l’épiderme général de l'embryon.
La gemmule est réduite à un cône de cellules toutes sem-
blables, inclus dans une cavité qui, par une fente à bords jux-
taposés, communique avec l’extérieur. Cette fente peut être
mise en évidence sur une coupe transversale (PI. V, fig. 3).
L’embryon est parcouru par un cordon vasculaire com-
posé de quelques éléments qui ne paraissent pas offrir de
différenciation nette. Ce cordon parcourt l’embryon dans
toute sa longueur (PI. V, fig. 2).
La germination n’a pas été observée.
GENRE AGLAONEMA Schott.
L'étude a porté sur les espèces suivantes, provenant du
Jardin botanique de Buitenzorg.
A. oblongifolium Kunth, A. Robellenit Lind., A. simplex
BI., A. novoguineense Engl., A. oblongifolium var. Kurtisii
Ridleg.
194 | : 7c. -L. ee
A tous les points de vue que nous avons eu l’occasion nd’en-
visager, ces espéces sont tellement voisines les unes des autres
qu'il est inutile de décrire, à part, ce qui concerne chacune
d'elles. Ce que nous dirons du genre s’applique à toutes les
espèces étudiées.
Empryron. — Le fruit des Aglaonema est une baie, géné-
ralement colorée en rouge (PI. VI, fig. 1). Le péricarpe charnu
renferme la graine, entourée par Jae téguments. Le raphé est
nettement marqué par un sillon longitudinal (Pl. VI, fig. 2),
surtout dans lA. oblongifolium. A l’intérieur des deux tégu-
ments, on trouve une masse verte et_volumineuse qui est
iE en Il n’y a done pas d’albumen. |
L’embryon a une forme générale ovoide allongée. Du côté
opposé au hile, sa surface est tout à fait lisse et arrondie, lors-
qu'on l’a bien débarrassée des téguments. Au contraire,
l’autre extrémité est terminée par une petite protubérance
conique, qui, examinée avec soin, se montre formée de deux
petites écailles, laissant entre te une fente. A l'intérieur de
cette fente, se trouve la gemmule.
L’ Sale est formé de grandes cellules polyédriques ou
arrondies, bourrées de grain d’amidon et laissant fréquemment
entre elles des méats.
Certaines de ces cellules contiennent des raphides d’oxa-
late de calcium. L’amidon en est alors absent. .
D’autres (C. S, fig. 6, Pl. VIT) se colorent légèrement par
le soudan III au chloral : ce sont des cellules sécrétrices.
Enfin, sur toute la périphérie, ’embryon est pourvu d’une
assise de liège, de formation secondaire, qui est d’autant plus
épaisse que l’on s’éloigne de la gemmule. Les cellules à chlo-
rophylle sont situées immédiatement au-dessous de cette —
assise de liège.
Une série de coupes transversales (PL. VII, fig. 1 à 4), pra-
tiquées dans l'embryon en partant de son extrémité micro-
pylaire pour se porter vers l’extrémité opposée, nous montre
la gemmule entourée par les deux écailles dont il a été ques-
tion plus haut, et qui ne sont autre chose que les deux bords —
de la fente bi.
C'est ce que l’on constate avec pli de facilité encore sur
_
L'EMRRYON ET LA GERMINATION DES ARACEES 153
une coupe longitudinale (fig. 5, Pl. VIT). Chez certaines
espèces, même, on retrouve à la surface de ces écailles les
_ mêmes formations subéreuses que sur le reste de la surface de
l'embryon. Plus loin, se trouve une région dans laquelle nais-
sent les racines. Il n’y a pas, en effet, de racine principale,
mais une série de racines latérales qui se développent de la
manière que nous allons indiquer.
Passons maintenant à l’étude du tissu conducteur.
I] est constitué par des faisceaux libéro-ligneux de struc-
ture très simple et offrant déjà des cloisonnements de nature
secondaire (PI. VIT, fig. 7).
Ces faisceaux se Len fréquemment. Is forment, dans
le corps embryonnaire, deux cercles irréguliers. Dans les
écailles recouvrant la gemmule, ils forment un seul cercle.
Enfin, dans la région où se produisent les racines, ils consti-
tuent un anneau presque continu sur lequel se produisent les
racines latérales, qui s’échapperont au dehors en digérant le
tissu de l'embryon.
Germination. — Le début de la germination est marqué
par le développement de la gemmule, qui, en grandissant,
écarte les deux écailles, lesquelles sont déchirées et prennent
une coloration brunâtre, en même temps qu’elles acquièrent
parfois un certain développement. Les premières feuilles de la
gemmule demeurent à l’état de gaines. La série des figures de
la planche VI met en évidence, mieux que toutes les descrip-
tions, le développement de cette gemmule.
Quant aux racines, elles forment une couronne qui se déve-
loppe tout autour de la gemmule. Cela s'explique très bien, si
l'on se reporte à ce qui! a été dit un peu plus haut de la for-
mation des racines latérales, sur un anneau vasculaire.
Dans cette germination, il se produit fréquemment l’ano-
malie suivante : il se développe deux gemmules au lieu d’une
seule. Ce cas de polyembryonie me parait devoir être rap-
proché de ceux que j’ai signalés déjà chez les Palmiers (1), et
dans lesquels deux plantules se développant dans une gaine
unique sont réunies par un même cotylédon.
(1) C.-L. Garix, Quelques cas de polyembryonie chez plusieurs espèces de
Palmiers (Revue générale de botanique, XVII, 60-65, 11 fig., 1905).
156 | C.-L. GATIN
GENRE NEPHTYTIS. Schott.
Une seule espèce de ce genre a été étudiée, le Nephiytis
liberica, provenant des serres du Muséum.
Nephtytis liberica N. E. Br.
EmBrYon. —Le fruit des Nephtytis est une baie, de cou-
leur rouge orangé pâle, contenant une graine. La graine, qui
ne contient pas d’albumen, est recouverte. par des téguments
très minces et entièrement remplie par un gros corps ovoide,
de couleur verte, qui est l'embryon.
Cet embryon présente un sillon assez marqué à l'endroit
du raphe.
La gemmule est assez saillante et apparaît sous la forme
d’un petit cône entouré par un bourrelet qui représente les
rebords de la fente cotylédonaire (PI. III, fig. 2 et 3).
La structure de cet embryon le rapproche beaucoup de celui
des Aglaonema, que nous étudierons plus loin. Il est constitué
par des cellules polygonales, isodiamétriques, et bourrées de
nombreux grains d’amidon. |
A sa périphérie, au-dessous de son épiderme, se forme une
assise génératrice qui donne naissance à du liège. Plus à l’in-
térieur, on rencontre une ou deux assises de cellules contenant
des grains de chlorophylle et enfin les cellules bourrées de
grains d’amidon, qui constituent la masse de l’embryon
(Pl. IIT, fig. 1). On y trouve également des cellules à raphides
et des cellules sécrétrices, et aussi des cristaux en oursin
d’oxalate de calcium. | ESS
La gemmule présente une constitution un peu différente
de celle des À glaonema.
Tout d’abord, ainsi que nous l’avons vu, les bords de la
fente cotylédonaire ne sont pas constitués par deux lèvres,
mais par un bourrelet circulaire. De plus, les embryons pré-
sentent le plus souvent deux gemmules, l’une étant beaucoup
plus développée que l’autre (Pl. IX, fig. 3). |
Le système vasculaire est encore moins développé que chez
3
:
“=
g
+
1
À
2
oo
PRE TEA TEL TA
= L'EMBRYON ET LA GERMINATION DES ARACEES 157
les Aglaonema. Il ne forme pas, au-dessous de la gemmule, un
anneau complet, mais il se compose de quelques cordons
isolés qui se ramifient et donnent des branches qui se rendent
dans les racines.
Ces dernières sont nombreuses, mais aucune d'elles ne
présente les caractères d’une radicule. Ce sont des racines
latérales qui naissent profondément à l’intérieur du tissu
embryonnaire et qui, complètement formées, ont déjà
commencé, dans l'embryon mir, à digérer les tissus qui les
séparent de l'extérieur.
GERMINATION. — Le début de la germination est marqué
par le développement des plumules, qui écartent et amènent
souvent le fendillement du bourrelet qui les entoure (PI. IV,
fig. 11). En même temps, lés racines pointent en divers points
de la partie antérieure de l'embryon (PI VIII, fig. 5.) La
partie postérieure, en effet, n’en produit pas. La sortie de ces
racines se fait par de
Dans chaque gemmule, la première feuille est réduite à
une gaine (PI. VIII, fig. 4); la seconde possède un limbe
sagitté bien de Lppe (Pie Vili: fie. 6),
La germination se poursuivant, la plante continue à se
développer sur l'embryon comme sur un tubercule.
GENRE DIEFFENBACHIA Schott.
Trois espéces de ce genre, dont des graines avaient été
recues des Jardins de Peradenyai, ont fait l’objet d’obser-
vations.
Ce sont les espèces suivantes : Dieffenbachia Seguine
Schott, D. Haneckii, D°Sp.
De même que pour le genre précédent, il n’y a pas lieu, en
raison de la similitude offerte par les diverses espèces en
de les séparer dans la onu qui sera faite pour l’ensemble
du genre. |
Empryon. — La graine des eae est dépourvue
dalbumen. L’embryon ressemble heaucoup à celui des
Aglaonema, qui vient d’être décrit. Il présente le même aspect
158 Loon NET RC LCA
et les mêmes caractères anatomiques : présence d’une assise
subéreuse au-dessous de l’épiderme, de deux couches de
cellules assimilatrices et d’une masse centrale formée de cel-
lules bourrées de grains d’amidon et contenant, çà et là, des
cellules sécrétrices et des cellules à raphides.
La gemmule est cependant plus complètement développée
que chez les A glaonema (PI. VII, fig. 8); mais elle est, comme
dans ce dernier genre, entourée par deux écailles qui sont les
bords de la fente cotylédonaire (Pl. VII, fig. 1, 2, 3).
Le tissu conducteur, comme chez les A glaonema, forme au-
dessous de la gemmule un anneau vasculaire sur lequel se
produisent des racines latérales. Il n’y a pas de radicule
différenciée.
GERMINATION. — Elle s'effectue de la même manière que
chez les A glaonema. Ainsi que dans ce dernier genre, on trouve
fréquemment des embryons qui, à la germination, (onRenE
naissance à deux plantules (PI. VIII, fig. 2s
Genre ZANTEDESCHI A Spreng.
De ce genre, une seule espèce a été étudiée, le Zantedeschia
æthiopica (L.) Spreng. (Calla æthiopica L.), dont les ee
avaient été obtenues du commerce.
Empryon. — La graine de ces plantes est pourvue d’un
albumen amylacé, dont il est facile d’extraire l’embryon ;
celui-ci est allongé et de forme générale conique.
Cet embryon est formé par une masse de cellules polygo-
nales, allongées et laissant entre elles des méats, le tout
entouré par un épiderme continu et régulier, qui perd un peu
de sa régularité, vis-à-vis de la pointe de la radicule.
La plantule présente un axe courbe ; elle est encore assez
peu différenciée. La radicule D mprond un cylindre central
assez nettement différencié. L’écorce est limitée par ce
cylindre central et par une assise pilifère qui va se raccorder
avec l’épiderme général de l’embryon. La plumule est cons-
tituée par une feuille enroulée sur elle-même. Elle se trouve
dans une cavité reliée à l’extérieur par une fente fermée par
__ L'EMBRYON ET LA GERMINATION DES ARACÉES 159
les bords imbriqués de deux replis du cotylédon (Pl 2X, fie. 1
et 2), et tapissée par un épiderme qui continue l'épiderme
général de l’embryon.
ÆL’ensemble de l’embryon est parcouru par des cordons
vasculaires. Ceux-ci suivent une course que nous allons décrire
et se raccordent avec le cylindre central de la radicule, aprés
avoir envoyé un prolongement qui pénétre dans la gemmule,
_ à la base de celle-ci.
A la partie supérieure de l’embryon, on trouve un faisceau
libéro-ligneux assez large, présentant quelques cloisonnements.
secondaires. 3
Plus bas, à hauteur de la gemmule, ce faisceau se divise en
trois. Plus bas encore, a hauteur de la fente cotylédonaire, on
trouve cing faisceaux, par division des trois précédents. Il y
a done toujours un faisceau médian.
La germination n’a pas été observée.
GENRE CALADIUM Vent.
_ La seule espèce étudiée a été le Caladium Agrippine, pro-
venant du commerce.
L’embryon n’est aucunement différencié. C’est un massif
de cellules toutes semblables. Il est simplement entouré d’un
épiderme et se trouve réduit ainsi à l’état de proembryon
(DIX fig. 3).
GENRE ARUM L.
De ce genre important, les espéces suivantes ont été étu-
diées : |
Arum maculatum L.,récolté en herborisant; Arum ttalicum
Mill, cultivé en pleine terre; Arum palestinum Boiss, Damm.
provenantducommerce; Arum Dioscoridis Sibth. et Sm., ces
deux derniéres espéces provenant du commerce.
Ces diverses espéces ne se distinguent pas tellement les
unes des autres qu'il soit nécessaire de les décrire séparément ;
il ny a donc pas lieu de les séparer dans l’exposé ci va
suivre.
160 ae C.-L. GATIN |
Empryon. — L’embryon, placé dans un albumen amylacé,
est un cylindre allongé, terminé plus ou moins en cône à ses
deux extrémités.
Il est formé de cellules polygonales, ne de gros
noyaux et d’un protoplasma granuleux et vacuolisé. Ces
cellules laissent entre elles des méats, surtout vers la partie
supérieure de l’embryon, où elles sont, de plus, particuliére-
ment allongées dans le sens de la longueur de l’organe.
L’embryon est recouvert par un épiderme continu, un peu
palissadique, et qui est trés régulier, sauf vis-a-vis de la pointe
de la radicule, où l’on retrouve nettement la tnave du sus-
penseur (s, Pl. VIII, fig. 7). |
A l’intérieur de ne on: se trouve une plantule courbe.
La radicule présente un cylindre central net qui limite la partie
interne de l’écorce; la partie externe est elle-même délimitée
par l’assise pilifère qui va se raccorder avec l’épiderme général
de l’embryon (Pl. I, fig. 2).
La gemmule secompose d’une seule feuille, entourant le cône
végétatif. Elle est située au-dessus de la radicule, et dans une
cavité communiquant avec l’extérieur par une fente fermée
par deux replis, à bords imbriqués,.du cotylédon (Pl. IX,
fig. 1). Cette cavité est tapissée à l’intérieur par un épiderme
qui se trouve en continuité avec l’épiderme général de lem-
bryon.
Le reste de l’embryon, constituant la feuille led.
naire, est parcouru par des faisceaux libéro-ligneux qui
viennent, à la base dela gemmule, se raccorder avec le cylindre
central de la radicule. Là, ils donnent également des ra-
meaux qui se rendent dans la feuille externe de la gemmule
(PE Vil fie).
Ces ae sont au nombre de cing et, ainsi que l’ont
remarqué Scott et SARGANT (1), leur dispose rend la
feuille cotylédonaire distique par rapport à la PAS feuille
gemmulaire.
Ces cing faisceaux s’élévent dans Vembryon. A une cer-
taine hauteur, deux d’entre eux se réunissent, de sorte qu'il
(1) Scorr and SARGANT, loc. cit.
Se ee ee Ee ee ee ee Fe ea PT NE D I eee SOUS VOIRE
L'EMBRYON ET LA GERMINATION DES ARACEES 161
n’en reste que quatre. Plus haut encore, il n’y en a plus que
trois, puis deux qui disparaissent l’un après l’autre.
Ces faisceaux sont encore assez peu différenciés, mais ils
présentent, cependant, quelques cloisonnements de nature
secondaire.
GERMINATION. — La germination est marquée, au début,
par l'allongement de l’ensemble de l'embryon, qui apparaît
au dehors par son extrémité radiculaire.
Chez l’A. italicum (Pl. IV, fig. 5, 6, 7), cet allongement se
poursuit pendant quelque temps, puis la partie radiculaire de
la jeune plantule grossit, et gemmule et radicule s’en échap-
pent bientôt.
De chaque côté de la plumule, les bords de la fente cotylé-
donaire, entre lesquels elle s’échappe, prolifèrent un peu en
une ligule peu développée. La radicule devient contractile et,
au-dessus, la plantule se renfle pour concourir à la formation
du jeune tubercule. D’après Scott et SARGANT, ce renflement
est encore plus marqué chez l’Arum maculatum (PI. IV, fig. 3
et 4). La première feuille est différenciée en un pétiole et
en limbe ovale aigu de forme différente du limbe des feuilles
adultes, qui est sagitté.
La partie de l'embryon restée dans la gaine s’accroît en
digérant la réserve amylacée, dont elle prend la place. Elle
constitue le suçoir. C’est ce qu’on observe par exemple chez
Arum palæstinum (PI. IV, fig. 10).
ANATOMIE DE LA GERMINATION. — L’allongement général
de l’ensemble de l’embryon se produit grâce à l’allongement
de chacune des cellules qui le composaient. Celles-ci, en effet,
s’accroissent beaucoup dans le sens de la longueur, et cet
accroissement est accompagné d’une disparition presque com-
pléte du protoplasma, qui se réduit à une mince pellicule
collée contre la paroi cellulaire. |
L’allongement des cellules est accompagné d’un accroisse-
ment de leur diamètre transversal. L’extrémité radiculaire
s’accroît aussi beaucoup en diamètre, pendant que la radicule
et la gemmule achèvent leur différenciation. Cet allongement
général étant terminé, la gemmule et la radicule s’accroissent
à leur tour. |
ANN. DES SC. NAT. BOT., 40e série. 1921, 11, 11
162 | RL CANIN en
Le début de l’accroissement de la radicule est marqué par
l’exfoliation des quelques assises de cellules embryonnaires,
qui, du côté du suspenseur, séparent de l'extérieur la pointe
de la radicule. aoe
L’assise pilifére, ainsi qu’il a été dit plus haut, se raccorde
latéralement avec l’épiderme général de l’embryon.
La gemmule s’échappe par la fente cotylédonaire, dont les
bords prolifèrent légèrement autour de sa base, formant une
ligule à peine marquée.
Le suçoir s’accroit également par suite de l'augmentation
de volume des cellules qui le composent, sans qu'il se pro-
duise de néoformations. Les faisceaux libéro-ligneux qui se
trouvaient dans l’embryon entourant la gemmule achèvent
leur développement. Il s’y produit des cloisonnements secon-
daires, et ils s’accompagnent bientôt d’un cordon de collen-
_chyme (PI. IX, fig. 2), disposé au-dessous de l’épiderme et à
hauteur du faisceau. Ce collenchyme se retrouve dans le
pétiole et la gaine de la feuille cotylédonaire.
Py
t
Pes
7
ES
CONCLUSIONS
EMBRYON.
1. Rarement réduit à l’état de proembryon (Caladium), l’em-
bryon peut être peu différencié (Spatiphyllum). Dans les
_ autres genres étudiés, il présente un degré de différenciation
plus élevé. |
2. La graine est pourvue d’albumen chez les Anthurium,
Spatiphyllum, Zantedeschia, Arum. Les genres Aglaonema,
_ Nephtytis, Dieffenbachia n’en possèdent pas.
3. I] existe typiquement un faisceau central chez les Anthu-
rium et Spathiphyllum. Le nombre des faisceaux est variable
selon le niveau chez Zantedeschia (1, 3,5) et Arum (1, 2, 3, 4, 5).
Les faisceaux sont isolés (Vephtytis) ou disposés en cercle
(A glaonema). .
Beaucoup de ces faisceaux présentent des cloisonnements
de nature secondaire.
4. Il y a deux types de protection périphérique de l’em-
bryon :
a. Formations secondaires subéreuses (Aglaonema, Neph-
tytis, Dieffenbachia) ;
b. Epiderme dans les autres genres étudiés.
GERMINATION.
Les détails particuliers de la germination sont exposés a
propos de chaque genre.
D’une manière générale, la plantule est courbe.
Il se développe un suçoir qui digére l’albumen au cours du
développement.
_ Dans certains cas, il n’existe pas de racine principale; elle
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164 Lt Op Ee GATIN Re
est remplacée par ae racines latérales (A glaonema, Nephtytis\. À
qui sont quelquefois déjà formées dans la graine (Nephtytis).3 oa
La tuberculisation de la plantule chez les Arum mérite :
d’être signalée. A
Des cas de polyembryonie (Aglaonema, Diefovbarn se. 4
rapprochent de ceux que l’auteur a observés chez quelques 4
Palmiers. |
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EXPLICATION DES PLANCHES
PLANCHE I
4
Anthurium Scherzerianum Schott.
1. Coupe longitudinale de la graine.
2. Coupe transversale de l’embryon.
3. Coupe longitudinale de la graine en germination.
4 à 7. Début de la germination. Gr. : 2 fois.
8. Plantule développée, grandeur naturelle,
Anthurium pedato-radiatum Schott.
9 et 10. Développement de la plantule, grandeur naturelle.
t, tégument de la graine.
e, embryon.
o, raphides.
€, cylindre central de la radicule.
ap, assise pilifère de la radicule.
fx, faisceaux de l'embryon.
p, gemmule dans sa fente.
g, graine.
r, radicule.
Ss, sucoir.
PLANCHE II
Anthurium Scherzerianum Schott.
4. Coupe longitudinale dans la partie radiculaire de l'embryon.
Arum palæstinum Boiss. Damm.
2. Coupe longitudinale dans l’extrémité radiculaire de l’embryon.
cc, cylindre central de la radicule.
ap, assise pilifère de la radicule.
gr, gaine radiculaire.
ec, écorce de la radicule.
ep, épiderme de l'embryon.
PLANCHE III
Nephtytis liberica N. E. Br.
1. Coupe transversale à la périphérie de l'embryon.
2. L’embryon, grandeur naturelle.
3. Le même, vu du côté de la plumule et plus grossi.
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166 C.-L. GATIN 3 Bees.
Anthurium longifollum G. Don.
4. Schéma d’une coupe transversale de l’embryon au niveau de la gemmule.
5. Schéma d’une coupe transversale de l’embryon au niveau de la radicule.
6. Coupe transversale dans la région radiculaire.
Anthurium acaule Schott.
7. Coupe longitudinale schématique de l’embryon.
ep, épiderme.
s, liège.
a, parenchyme assimilateur.
p, plumule.
l, cellules à mucilage.
h, assise sous-épidermique.
fx, faisceaux libéro-ligneux.
cc, cylindre central de la radicule.
ap, assise pilifère.
o, cellules à raphides.
PLANCHE IV
Acorus gramineus Ait.
1. Embryon, grossi 60 fois, d’après Mücke.
2. Plantule, grossie 5 fois et demie, d’après Mücke.
| Arum maculatum L.
3 et 4. Trois états successifs de la germination, d’après Scott et Sargant,
grandeur naturelle.
Arum italicum Mill.
5, 6 et 7. Trois états successifs de la germination.
Arum palestinum Boiss. Damm.
8. Début de la germination, grandeur naturelle.
Nephtytis liberica N. E. Br.
9. Début de la germination, grossi d’un tiers.
Pothos insignis, Engl., d’après Tschirch.
10. Coupe longitudinale de l’embryon. |
11. Partie radiculaire du même, plus grossi.
Anthurium Scherzerianum Schott.
12. Coupe longitudinale dans le bourrelet d’une graine en germination,
Anthurium pedato-radiatum Schott.
-
13. Détail d’une jeune plantule montrant la gaine ascendante, grandeur
naturelle. LS £
EXPLICATION DES. PLANCHES ae LOT
Anthurium acaule Schott.
14. Coupe transversale schématique dans la partie supérieure de l’em-
bryon.
p, plumule.
g, graine.
c, pétiole ou gaine du cotylédon.
t, tubercule.
r, radicule.
f, f', f?, feuilles successives.
s, sucoir. |
se, scutellum (Tschirch).
w, radicule (Tschirch).
cc, cylindre central de la radicule.
fx, faisceaux libéro-ligneux du cotylédon.
ap, assise pilifère.
I, cellules à mucilage.
PLANCHE V
Spathiphyllum Schott.
4. Coupe transversale schématique de la graine.
2. Coupe longitudinale schématique de la graine, un peu moins grossie.
3. Coupe longitudinale de l’extrémité radiculaire de l'embryon.
g, graine.
p, gemmule.
e, embryon.
fx, faisceaux libéro-ligneux de l'embryon.
ep, épiderme de l'embryon.
r, cylindre central de la radicule.
PLANCHE VI
Aglaonema oblongifolium Kunth.
4. Fruit, vu de profil, grandeur naturelle.
2. Embryon, vu du côté du raphé, un peu grossi.
3, 4, 5, 6, 7, 8. Embryon trés grossi, montrant les divers stades du déve-
loppement de la gemmule au cours de la germination.
9. Plantule développée, grandeur naturelle.
10. Plantule à deux gemmules, grandeur naturelle.
P, plumule.
r, racines.
f, les deux petits lobes foliacés enveloppant la gemmule.
PLANCHE VII
Aglaonema oblongifolium Kunth.
1 à 4. Coupes transversales schématiques dans l’embryon en s’éloignan’.
de la gemmule.
5. Coupe longitudinale, schématique, de la gemmule.
168 C.-L. GATIN
6. Coupe longitudinale dans l’embryon, montrant le périderme L.
7. Faisceaux libéro-ligneux de l’embryon, en coupe transversale.
Dieffenbachia sp. |
8. Coupe longitudinale, schématique, dans le région micropylaire de l’em-
bryon.
1, liège.
cs, cellules sécrétrices.
o, cellules à raphides.
f, écailles enveloppant la gemmule.
r, racine.
PLANCHE VIII
Dieffenbachia sp.
1. Plantule développée, grandeur naturelle.
2. Plantule 4 deux gemmules, grandeur naturelle.
3. Début de la germination, un peu grossi.
Nephtytis liberica N. E. Br.
4 et 5. Début du développement, très grossi.
6. Jeune plantule, grandeur naturelle.
Arum maculatum L.
7. Coupe longitudinale, schématique de res
j. c., faisceau cotylédonaire.
P; plumule.
ce, cylindre central.
ap, assise pilifère.
s,Suspenseur.
PLANCHE IX
Arum maculatum L.
4. Coupe longitudinale schématique dans la partie radiculaire d’un em-
bryon en germination.
2. Coupe transversale dans la gaine cotylédonaire d’une plantule déve-
loppée.
Nephtytis liberica N. E. Br.
3. Coupe longitudinale schématique de l’embryon montrant la disposition
de la plumule.
ap, assise pilifére.
cc, cylindre central de la radicule.
cp, épiderme de embryon.
fe, faisceaux du cotylédon.
k, cordon de collenchyme.
l, ‘liber.
bs bois.
s, suspenseur.
ps toi à arts tr TS ee eee ee ee eee
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| EXPLICATION DES PLANCHES —
PLANCHE X
Calla Æthiopica L.
; ae dupe transversale, schématique, del’ embryon.
2 Goupe longitudinale schématique, Celebi Me radioulaire de l’embryon.
Caladium A grippine.
nes 5. Le longitudinale de l’embryon.
_, bords de la fente cotylédonaire. _
fx, faisceaux libéro-ligneux.
p, plumule.
+, cylindre central de la radicule.
ep, épiderme.
yg ap, assise pilifére de la radicule.
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PLANCHE VIII.
C.-L. GATIN
PLANCHE IX,
C.-L. GATIN
PLANCHE x,
SYMBIOSE ET TUBERISATION
Par M. Joseph MAGROU
INTRODUCTION (1)
1. Cycle évolutif des plantes à tubercules. — Un granu
nombre de plantes, au lieu d’atteindre par une évolution
sraduelle leur forme adulte, ont un cycle évolutif comportant
la succession de deux formes différentes ; on distingue alors,
en général, une forme juvénile, prédominante ou exclusive
au début, et une forme adulte, prédominante ou exclusive
à la fin du développement.
Un exemple classique de ce mode de développement
« hétéroblastique » est fourni par les plantes à tubercules.
Deux phases alternent dans l’évolution de ‘ces plantes :
une phase de différenciation, caractérisée par le développe-
ment de tiges feuillées et de racines de structure normale ;
une phase de tubérisation, caractérisée par « un retard dans
la différenciation histologique et morphologique des points
végétatifs ou des bourgeons, coincidant avec la mise en
réserve des aliments non utilisés pour la différenciation ».
Cette définition dela tubérisation, due à Noël BERNARD [1],
est largement compréhensive : elle englobe non seulement le
cas des plantes à tiges ou à racines renflées, mais encore le
cas des plantes à bulbes ou à rhizomes, ou, plus généralement,
des végétaux pourvus d'organes pérennants. Ainsi comprise,
la tubérisation apparaît comme un phénomène d’une grande
généralité, et l’on peut se demander si son existence chez les
(1) Les numéros entre [ ] renvoient à l’Index bibliographique.
182 J. MAGROU |
espéces les plus diverses n’est pas le résultat d’une conver-
gence, due à quelque condition de vie qui leur serait commune. —
2. Facteurs physiques de la tubérisation. — En fait, la
propriété de produire des tubercules est au nombre des
caractères dont l’apparition peut dépendre de l’action de
facteurs externes. Il est facile, dans des conditions de culture
bien définies, de provoquer a eae la tubérisa-
tion d’un grand nombre d’espèces en les soumettant à l’in-
fluence de facteurs physico-chimiques simples, notamment
en élevant artificiellement la concentration de leur sève.
De telles expériences renseignent sur le mécanisme physique
de la tubérisation ; elles peuvent, dans une certaine mesure,
expliquer la formation de tubercules chez des plantes cul-
tivées, soumises à des soins culturaux qui ont pour effet
d'augmenter la concentration du milieu nutritif. Mais les
conditions ou elles sont réalisées (cultures dans des solu-
tions concentrées de glucose ou d’autres produits chimiques)
sont trop particulières pour rendre compte de la tubéri-
sation des plantes sauvages, qui vivent communément aux
dépens de milieux nutritifs pauvres. S'il est vrai que, dans
les conditions naturelles de vie, la production des tubercules
soit sous la dépendance d’un facteur externe, ce facteur doit
être d’ordre aussi universel que la tubérisation même.
3. La symbiose, — Dès le début de ses recherches sur
la symbiose, Noël BERNARD a suggéré que la tubérisation
était une conséquence et un symptôme de l’infestation des
racines par des Champignons filamenteux endophytes. La
vie en commun des plantes supérieures avec des Champignons
est un phénomène très répandu ; or il est remarquable que
ces cas de symbiose, dont on a reconnu l’existence chez la
presque totalité des plantes vivaces sauvages, font défaut
chez les plantes annuelles. Il n’était done pas invraisemblable
de penser, a priori, qu’une infestation parasitaire ait pu être
cette circonstance naturelle amenant à l’état vivace les plantes
arrivées aujourd’ hui à se reproduire Uo par tuber-
cules.
ee a a, ee ee pin
3
4
SYMBIOSE ET TUBERISATION ~ 183:
4. Cas des Ophrydées. — Noël BERNARD a réussi à démontrer
cette hypothèse dans le cas des Orchidées. On sait que les
plantes de cette famille hébergent régulièrement des Cham-
pignons dans les cellules de leurs racines. Or, ce sont toutes
des plantes vivaces, à tubercules ou à rhizomes, et, chez la
plupart d’entre elles, l’alternance des phases de différen-
ciation et de tubérisation est particulièrement marquée.
Par une étude attentive du cycle évolutif, portant surtout
sur des représentants de la tribu des Ophrydées, Noël BE-
NARD [4] a d’abord reconnu l'existence d’une corrélation :
étroite entre la symbiose et la tubérisation.
Une Ophrydée adulte produit, tous les ans, au moins un
tubercule qui s’isole au cours du printemps, entraînant le
bourgeon qui l’a formé. Ce bourgeon se développe activement
à la fin de l'été; il différencie une tige feuillée et souvent une
hampe florifère ; à l’aisselle des feuilles inférieures apparais-
sent des bourgeons qui ont d’abord un aspect normal et
forment leurs premières feuilles. Cette période de différen-
ciation est en même temps une période d'autonomie ; le tuber-
cule est, en effet, indemne d’infestation, et les racines absor-
bantes éphémères qui, chez les Ophrydées, sont seules
envahies par le Champignon, n’ont pas encore fait leur appa-
rition. Ces racines sortent de la base de la tige à la fin de
septembre et, dès qu’elles ont atteint quelques centimètres
de long, elles sont pénétrées par les endophytes venus du sol.
Dès lors, le mode de développement change brusquement.
Les bourgeons axillaires cessent de produire de nouvelles
feuilles, et, dès le mois d’octobre, l’un d’eux au moins se
renfle en un tubercule qui grossit rapidement. Quant aux
autres, 1ls meurent souvent sans s’être différenciés davantage:
mais, s’il arrive qu'ils se développent, c’est toujours en se
tubérisant. Au cours de cette seconde période, qui s’étend
d'octobre à juin, la plante ne différencie plus de parties
nouvelles ; elle se borne à déployer au printemps les feuilles
et les fleurs qu’elle avait formées à l’automne, mais tous ses
Jeunes bourgeons se montrent incapables de produire des
rameaux : ils meurent ou se tubérisent. Pendant toute la
durée de la phase de tubérisation, les racines de la plante
184 J. MAGROU
sont largement envahies par les Champignons. Le mode
particulier de croissance qui a pour résultat la formation des
tubercules apparaît donc lié a l’infest:tion des racines. Chez
les nombreuses Orchidées qui ont, à l’état adulte, un cycle
évolutif comparable à celui des Ophrydées, on retrouve
la même relation entre l’infestation et la tubérisation; les
périodes de différenciation sont toujours des périodes d’au-
tonomie, et, par contre, les tubercules ou articles de rhizomes
ne se forment jamais qu'après l'invasion des racines par les
Champignons.
>. Tubérisation précoce des Orchidées. — L'influence de la
symbiose sur le développement a pu être démontrée par
des expériences décisives, du jour où Noël BERNARD [4, 5]
a réussi à isoler en cultures pures les endophytes des Orchidées.
Ces Champignons, rapportés par Noël BERNARD au genre
Rhizoctonia, se groupent en trois espèces, dont l’une (R. repens)
est commune à un grand nombre de genres d’Orchidées,
tandis que les deux autres (A. lanuginosa et R. mucoroides)
sont spéciales 4 un petit nombre de genres hautement diffe-
renciés. Les graines rudimentaires des Orchidées, à embryon
indifférencié et dépourvues de réserves, sont incapables de
germination autonome. Prélevées aseptiquement dans fe
fruit mdr, et semées sur des milieux nutritifs convenables,
dans des tubes stérilisés et maintenus à l’abri de l’invasion
des microorganismes, elles restent indéfiniment inertes, —
ou tout au plus arrivent à gonfler légèrement et à verdir.
Mais, dès que l’on introduit dans le tube de culture le Rhi-
zoctonia convenable, les filaments de ce Champignon pénètrent
les embryons, et la germination commence aussitôt. Or ces
graines, qui ne sont capables de germer qu'après l’invasion
de leurs cellules par le mycélium symbiotique, ont un mode
de développement aberrant par rapport à celui des autres
végétaux ; au lieu de produire, comme les graines qui ger-
ment sans le concours de Champignons, des plantules gréles,
enracinées dans le sol et pourvues d’une tige a feuilles espacées,
elles se renflent, dès le début de leur développement, en un
petit tubercule bientôt surmonté d’un bouquet de feuilles.
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 185
Chez de rares Orchidées, telles que le Bletilla hyacinthina, la
germination peut se faire avec ou sans Champignons ; en
l’absence de Rhizoctones, les graines de Pletilla donnent
des plantules élancées et grêles, analogues aux formes juvé-
niles de la plupart des végétaux; associées aux Champignons,
elles germent au contraire, comme les autres Orchidées, en
un tubercule embryonnaire. |
6. La théorie de Noël Bernard. — Ces expériences montrent
d’une façon décisive que la tubérisation précoce des plan-
tules d’Orchidées est liée à la haute adaptation de ces plantes
à la symbiose, qui, pour la plupart d’entre elles, est obli-
gatoire dès le début de la vie. Des formes juvéniles tubérisées
très comparables à celles des Orchidées existent d’ailleurs
chez les Lycopodiacées, les Ophioglossées et les Psilotacées ;
chez ces Cryptogames vasculaires inférieures, le prothalle,
aussi bien que l’embryon, ne peut se développer qu'avec le
concours de Champignons symbiotiques, et l’un et l’autre
ont la forme et la structure des plantules tubérisées d’Or-
chidées. Il ne saurait s’agir en pareil cas d’une ressemblance
phylogénétique ; seule la symbiose, qui réalise pour ces deux
oroupes de plantes une condition de vie commune, peut
rendre compte d’une si parfaite analogie entre des êtres aussi
distants. :
S'appuyant sur ces phénomènes remarquables de conver-
gence, et d'autre part sur les études statistiques qui révèlent
l’existence à peu près constante de mycorhizes chez les plantes
sauvages pourvues d'organes pérennants, Noël BERNARD
a proposé d'envisager l’apparition defl’état vivace comme une
conséquence de la haute adaptation des plantes à la vie
commune avec des Champignons ; il a déduit de cette concep-
tion une théorie générale de l’évolution du règne végétal
sous l'influence de la symbiose [5]. Cette manière nouvelle
d'envisager le problème de l’origine des espèces ouvre à la
recherche expérimentale de vastes domaines. En faisant
entrevoir le déterminisme de l’apparition de l’état vivace
chez le sporophyte des plantes supérieures, elle pose, entre
autres, le problème de l’origine des plantes vasculaires.
186 “sy MAGROU
7. Objet du travail. — Avant d'aborder l’étude expéri-
mentale de questions aussi générales et, sans doute, aussi
ardues, il est utile de rechercher au préalable si l'hypothèse
de l’origine parasitaire des organes pérennants, démontrée
dans le cas des Orchidées, peut être vérifiée directement
dans d’autres groupes de végétaux.
C'est à de tels essais de vérification expérimentale que
sera consacré le présent travail. J'espère montrer, par l’his-
toire de la Pomme de terre, de l’Orobus tuberosus et des —
Mercuriales, que, chez des plantes fort éloignées des Orchidées,
la symbiose agit sur le développement dans le sens prévu
par Noël Bernarp. S'il en est ainsi, un nouvel argument sera
fourni à l’appui de la doctrine qu'il a formulée. Ainsi étayée
par des faits nouveaux se rapportant à des cas variés, cette
doctrine pourra paraître un guide plus sûr pour l'étude des -
problèmes les plus élevés de la biologie générale.
En terminant cet exposé historique, il importe de bien
préciser la signification à attribuer au mot de symbiose. Ce
terme est communément dévié de son sens étymologique et
implique, pour beaucoup de naturalistes, la croyance à une
association mutualistique à bénéfices réciproques pour les
deux êtres associés. En fait, comme l’observe Noël BERNARD,
dans la plupart des cas de symbiose, on sait seulement que
l’association des microorganismes et des plantes est intime
et habituelle. C’est dans ce sens purement objectif d'union
intime et durable, et sans aucune arrière-pensée finaliste,
que la symbiose sera envisagée dans ce qui va suivre. Ainsi
compris, les phénomènes groupés sous ce vocable rentrent
dans le cas général des associations entre microbes et êtres
supérieurs dont les maladies infectieuses représentent une
modalité fréquente.
Partant de la; j’examinerai, du point de vue de la patho-
logie comparée, les lois qui, dans la symbiose, règlent les
rapports réciproques du parasite et de l’hôte.
Je me suis placé, dans tout le cours de ce travail, au point —
de vue évolutionniste qui a dominé les recherches de-Noél |
BERNARD. L’étude histologique des mycorhizes des plantes
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 187
adultes, telle qu’elle a été souvent pratiquée, offre, en effet,
peu de ressources pour comprendre les origines de la symbiose
- et son retentissement sur l’évolution des êtres qui s’y trou-
| vent soumis. Pour chacun des cas étudiés ci-dessous, l’his-
toire du développement sera retracée, autant que possible,
à partir de la germination de la graine, et des cultures com-
paratives en présence et en l’absence du Champignon sym-
biotique permettront d’apprécier l'influence de la symbiose
sur le cycle évolutif.
CHAPITRE PREMIER
SYMBIOSEET TUBÉRISATION CHEZ LA POMME DE TERRE
8. Comparaison de la Pomme de terre et des Ophrydées. —
Si la relation entre la tubérisation et la symbiose, découverte
par Noël Bernarp chez les Orchidées, offre quelque degré
de généralité, la Pomme de terre est une des plantes chez
lesquelles on devait être d’abord tenté d’en vérifier l’exis-
tence. Le cycle évolutif de la Pomme de terre, à l’état adulte,
est, en effet, exactement superposable à celui des Ophrydées
venues de tubercules. Un tubercule de Pomme de terre,
planté dans le sol, commence par différencier ses bourgeons
en tiges feuillées portant ou non des ébauches florales ; des
bourgeons de second ordre situés à la partie inférieure des
tiges évoluent en stolons grèles souterrains, qui souvent
se redressent à leur extrémité et sortent du sol en donnant
des rameaux feuillés aériens. Cette période de différenciation
active a une durée variable suivant la variété considérée ;
puis, brusquement, le mode de développement change : les
bourgeons terminaux des jeunes stolons souterrains cessent
de se différencier en tiges grèles ; ils se renflent en tubercules,
où s’accumulent d’abondantes réserves amylacées. En même
temps, les bourgeons aériens sont complètement arrêtés
dans leur développement; ils déploient encore les feuilles et les
fleurs qu’ils avaient déjà formées, mais ne différencient plus
de parties nouvelles, et tout l’appareil aérien de la plante ne
tarde pas à se faner, le plus souvent sans avoir mari ses fruits.
L’alternance des phases de différenciation et de tubérisa-
tion est donc ici aussi nettement marquée que chez les Ophry-
s pi,
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 189
dées, et il était naturel de penser qu’elle était sous la dépen-
dance du même déterminisme. Aussi, dès ses premiers tra-
vaux, Noël BERNARD [1] a-t-il tenté de pousser plus loin la
comparaison entre les Orchidées à tubercules et la Pomme de
terre, en recherchant s’il y avait chez cette dernière plante
une infestation cryptogamique des racines coincidant avec la
tubérisation. Mais, tandis que des recherches de cet ordre,
poursuivies parallèlement chez les Orchidées, aboutissaient
très vite aux plus brillants résultats, elles se heurtaient dans
le cas de la Pomme de terre à de sérieuses difficultés.
Dans les racinés de la Pomme de terre cultivée, on trouve
bien, çà et là, quelques Champignons filamenteux, mais leur
présence est irrégulière et leur développement faible. D’autre
part, ces Champignons n’ont ni la localisation précise, ni
l’aspect très particulier qui caractérisent les endophytes
des plantes à mycorhizes. Noël BERNARD [1] a étudié expé-
rimentalement l’action d’un Fusarium isolé des racines ainsi
infestées ; en le répandant dans le sol, au pied de Pommes
de terre en voie de développement, il a bien provoqué une
apparition plus précoce des tubercules, mais non les résul-
tats décisifs qu'il escomptait. Après une longue étude, il
était arrivé à se convaincre que les infestations constatées
chez la Pomme de terre cultivée n'étaient que des « associa-
tions banales, sans permanence, sans fixité, sans effet no-
table », et qu’elles n’avaient rien de commun avec les myco-
rhizes proprement dites qu’il espérait découvrir dans ce cas.
Devant cette constatation, fallait-1l abandonner une hypo-
thèse qui Se montrait féconde dans l'étude des Orchidées
et qui peimettait de coordonner d’une manière satisfaisante
_ de nombreux faits relatifs aux plantes les plus variées ? Noël
BERNARD ne l’a pas pensé, et, confiant dans la valeur desinduc-
tions qui l’avaient guidé, il reprenait l’étude du problème
d’un point de vue nouveau.
9.. Les mycorhizes des « Solanum ». — Chez la plupart des
plantes à mycorhizes, les endophytes sont strictement
localisés dans les racines absorbantes et n’envahissent ni
les tubercules ni les rhizomes. Si, dans des conditions nor-
190 J. MAGROU
males de vie, la Pomme de terre hébergeait des Champignons
symbiotiques, il n’est donc pas étonnant que, propagée depuis
des siècles par la culture au moyen de tubercules dépourvus
de Champignons, et transplantée sans cesse dans des terrains
nouveaux, fort éloignés de son habitat naturel, elle se soit
à la longue affranchie de son commensal. Ce n’était donc pas
chez nos Pommes de terre cultivées et transplantées, mais bien
chez leurs ancêtres sauvages, prélevés dans leurs stations
naturelles sud-américaines, que l’on pouvait espérer découvrir
le Champignon prévu par l'hypothèse. “
N’ayant pu tout d’abord se procurer les matériaux néces-
saires pour cette étude, et s’appuyant sur ce fait, constaté
chez les Orchidées, qu'un même endophyte peut être com-
mun à un grand nombre d’espèces de la même famille, Noël
BERNARD eut l’idée de rechercher si la symbiose qu'il pré-
voyait ne se retrouverait pas chez les congénères vivaces
de la Pomme de terre qui n’ont pas été soumis à la culture.
Déjà M. Janse [18] avait décrit chez le Solanum verbascifolium
des forêts vierges de Java des mycornizes parfaitement
caractérisées. Noël BERNARD [7, 9] a entrepris à ce point de
vue une étude de nos Douces-Amères indigènes, et, confor-
mément à ses prévisions, il a retrouvé dans leurs racines une
large infestation par un Champignon de même type, dont
il a donné une description histologique détaillée.
10. Le «Solanum Maglia ». — Avec Me Noël BERNARD [10],
nous avons pu vérifier directement l'hypothèse de l’infesta-
tion de la Pomme de terre sauvage, en étudiant un pied de
Solanum Maglia, récolté au Chili dans une station naturelle
éloignée de toute culture. Parmi les nombreuses espèces de —
Solanum tubérifères sauvages originaires de l’Amérique,
le Solanum Maglia est celle qui se rapproche le plus du
Solanum tuberosum cultivé. Il n’en diffère guère que par son
port, et par ses tubercules, qui, portés à l'extrémité de longs
stolons, sont petits, à peau lisse, rougeâtres, à chair aqueuse.
Mais ses fleurs à sépales prolongés par une pointe et à corolle
rotacée, ses fruits sphériques, sont identiques aux fleurs et
aux fruits du Solanum tuberosum. Aussi DARWIN considé-
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SYMBIOSE ET TUBERISATION ~ 191
rait-il cette plante comme le type sauvage de nos Pommes
de terre comestibles. À l’époque de la découverte de l’Amé-
rique, la Pomme de terre était cultivée depuis un temps
immémorial dans les régions montagneuses du Chili et du
Pérou; il est vraisemblable qu’elle dérivait de l’adaptation à
la culture, réalisée à une époque lointaine, d’un type spontané
identique ou analogue au Solanum Maglia. —
Or, chez cette dernière espèce, nous avons constaté l’exis-
tence d’une infestation par un endophyte du type décrit
par Noël Bernarp chez le Solanum Dulcamara et par
M. Janse chez le Solanum verbascifolium. Le Champignon
envahit largement les fines radicelles ; 1l forme dans les assises
moyennes de l’écorce des plages infestées étendues, où l’on
retrouve, avec toute la netteté désirable, les pelotons, les
arbuscules et les sporangioles caractéristiques des Champi-
gnons de mycorhizes. Cette observation démontre que, con-
formément aux prévisions de Noël BERNARD, la Pomme de
terre dérive d’ancétres normalement soumis à la symbiose
avec des Champignons endophytes. La disparition du micro-
organisme commensal chez le Solanum tuberosum cultivé
nest qu'un accident, dû à la mise en culture de la plante et
à sa transplantation constante dans des terrains nouveaux.
Toutefois,.s1, dans ce cas encore, il y a relation de cause à
effet entre la symbiose et la tubérisation, il peut paraître
étonnant que les Pommes de terre aient continué à produire
des tubercules après s’étre affranchies de leurs hôtes. Il est
probable quwilintervient ici quelqu’une de ces actions physico-
chimiques que l’on sait capables de suppléer à la symbiose
et de provoquer la tubérisation en l’absence de microor-
ganismes. Chez les Orchidées même, Noël BERNARD a réussi
à substituer à la symbiose, pourtant obligatoire dans les
conditions naturelles de vie, l’action de milieux de cultures
concentrés, et a obtenu par ce moyen la germination des
graines et la tubérisation des embryons. Les soins agricoles,
tels que la fumure du sol, auxquels les Pommes de terre sont
soumises dans la culture, ont précisément pour effet d’aug-
menter la concentration du milieu nutritif où elles végètent,
tandis que la sélection rigoureuse des semences ne laisse sub-
192 J. MAGROU
sister, à chaque génération, que les individus les plus sensibles
à l’action des conditions artificielles de vie réalisées par les
agriculteurs. Il est vraisemblable qu’en l’absence de sélec-
tion et de soins culturaux, les Pommes de terre cesseraient
à la longue de tubériser. En fait, des exemples de semblables
dégénérescences sont bien connus et montrent que la pro-
priété de produire des tubercules ne s’est pas maintenue sans
peine chez ces plantes. Au xvirre siècle, au moment où, grace
aux efforts de PARMENTIER, la culture de la Pomme de terre
commençait à se propager largement en France, il était fré-
quent d'observer des champs entiers ou tous les pieds pro-
duisaient en abondance des tiges feuillées, des fleurs et des
fruits, mais ne formaient pas de tubercules.
DE L’ESCLUSE, qui, le premier, cultiva la Pomme de terre
en Europe, à la fin du xvi® siècle, signale que les plantes issues
de graines évoluaient de même sans tubériser. (C’est, dit
Noël BERNARD [7], grâce à des efforts méthodiques ou incon-
scients de sélection et de culture que les agriculteurs ont pu
conserver à la plante sa propriété la plus utile, et 1l est fort
probable qu'ici, comme en d’autres cas, les hommes ont sub-
stituéà des circonstances naturelles des conditions tout autres,
bien que capables d'entraîner des effets équivalents.
11. Infestation expérimentale du « Solanum tuberosum ». —
D'ailleurs, le Champignon capable de vivre en symbiose avec
les Solanum étant découvert, il devenait possible de véri-
fier expérimentalement son influence sur le développement
de la Pomme de terre. A cet effet, j’ai semé des graines de
Solanum tuberosum, appartenant pour la plupart a la variété
«Jaune de Norvège», dans un sol prélevé à la campagne, dans —
une lande inculte, au pied de Douces-Amères chez lesquelles
l'existence de mycorhizes avait été préalablement constatée.
Dans ce sol argileux pauvre, non additionné d’engrais, le
développement s’est fait avec lenteur, et les plantes sont
longtemps demeurées naines. Plusieurs d’entre elles ont été
prélevées quelques semaines après le semis; elles avaient,
au bout de ce temps, déployé leurs cotylédons; detre premières
feuilles étaient différenciées, et leurs racines commençaient
eel Aa = <i ré
SYMBIOSE ET TUBERISATION 193
à se ramifier. L’examen histologique a montré, chez la plu-
part de ces plantules, un envahissement des racines par un
Champignon identique à celui qui, normalement, infeste la
Douce-Amère et le Solanum Maglia. Le mycélium traverse
sans difficulté l’assise pilifére;il est arrèté plus longtemps
par l’assise subéreuse, qu'il arrive à pénétrer par un processus
très particulier qui sera décrit plus loin (chap. IV, $ 27);
après quoi, il se localise dans l’assise moyenne de l’écorce,
ou il commence à se pelotonner.
Dans les stades qui suivent la germination, les jeunes
Pommes de terre se laissent donc pénétrer assez régulièrement
par le Champignon et, jusque-là, les phénomènes du dévelop-
pement sont les mêmes pour toutes, mais, par la suite, le
sort de l’association ainsi ébauchée varie suivant les indi-
-vidus ; aux différences que l’on constate dans la modalité de
l'infection correspondent des différences dans le mode de
développement de la plante.
12. Influence de la symbiose sur le développement. — Des
échantillons soumis à l'expérience ont été prélevés au bout
de temps qui ont varié de quatre mois et demi à six mois et
demi après le semis. À chaque prélèvement ainsi effectué,
j'ai noté l'existence de deux types bien distincts de plantes.
Chez les plantes du premier type, les bourgeons axillaires du
nœud cotylédonaire et les autres bourgeons de la base de la
tige s'étaient différenciés en rameaux grèles ; tantôt toutes
les ramifications ainsi formées se dressaient hors du sol sous
forme de tiges feuillées aussi développées que la tige princi-
pale ; la plante prenait en pareil cas l’aspect d’un buisson
touffu, abondamment ramifié dès la base (pl. I, fig. 1 et 2).
Tantôt, quelques-uns seulement des rameaux nés de la base
de la tige avaient évolué en branches aériennes; les autres
s’ étaient développés en stolons souterrains ; mais ces stolons,
trés allongés, terminés par un bouquet de petites feuilles et
souvent redressés 4 leur extrémité, ne portaient en aucun cas
trace de tubercules (PI. II et III, fig. 1).
Chez les plantes du secondtype, au contraire, les bourgeons
de la base de la tige, aprés une courte période d’élongation,
ANN. DES SC. NAT. BOT., 40° série, 192111, 13
194 J. MAGROU
avaient cessé de se différencier et s’étaient renflés en tuber-
cules en arrière du bourgeon terminal. Les échantillons de
cette catégorie, très différents des premiers, étaient done
formés par un axe feuillé aérien unique, portant à sa base une
touffe de courts stolons souterrains, renflés en tubercules
à leur extrémité (Pl. I, fig. 3 et 4; Pl. IT et III, fig. 2).
L’examen de coupes en série pratiquées dans les racines
chez des échantillons de Pun et de l’autre type a montré
qu’a chacun des deux modes de végétation correspondait
une réaction différente de la plante vis-à-vis du microorga-
nisme envahisseur. Chez les plantes tubérisées, les racines
sont largement envahies par le Champignon, qui forme, dans
l’assise moyenne de l’écorce, des plages infestées vastes et
nombreuses. Les troncs mycéliens principaux sont de calibre
irrégulier ; ils ne sont pas cloisonnés, ou du moins ne pré-
sentent que des cloisons rares et disposées sans ordre ; 1ls
renferment un protoplasma réticulé et de nombreux noyaux
(Pl. VI, fig. 2). Ils forment dans les cellules des pelotons
moins serrés que ceux des Orchidées, d’où naissent des rameaux
secondaires, qui se ramifient dichotomiquement en ramus-
cules de plus en plus ténus. Ces fins rameaux dichotomes
s’enchevêtrent d’une manière complexe, formant des buissons
touffus qui remplissent la cavité des cellules (PL VI, fig. 3).
De telles formations, connues sous le nom d’arbuscules, sont
caractéristiques des Champignons de mycorhizes,
A un stade ultérieur, les arbuscules s’altèrent et se trans-
forment en corps de dégénérescence multilobés, réfringents
et surcolorables, décrits par M. Janse chez d’autres plantes
à mycorhizes, sous le nom de sporangioles (pl. VI: fig. 4
et 5). Mais, dans les plages même où les arbuscules sont
totalement détruits et transformés en corps de dégéné-
rescence volumineux, les troncs mycéliens principaux restent
bien vivants et continuent à propager l’infestation dans les
cellules voisines. Chez les plantes tubérisées, une symbiose
durable s’est donc établie entre l’endophyte et l'hôte qui
l’héberge. |
Il n’en est pas de même chez les Pommes de terre qui
évoluent sans produire de tubercules : ici, le Champignon
+4
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D inst mn) Mars >
au ED se ins 5 5
ee ee PO CO ee ee ee POP TT AR DER ES EE
SYMBIOSE ET TUBERISATION © 195
pénètre bien çà et là quelques cellules des racines, mais il
est rapidement digéré par ces cellules et ne produit ainsi
qu’une infestation très restreinte. Les plages infestées,
rares et peu étendues, passeraient inaperçues sans un examen
minutieux de coupes en séries, pratiquées dans la totalité
des racines de la plante. Les Champignons qui les forment
sont complètement détruits (Pl. VI, fig. 6) : les troncs mycé-
liens sont surcolorables, rétractés, vidés de leur contenu
protoplasmique ; les sporangioles manquent ou sont de petite
taille, ce qui indique que les arbuscules ne se sont pas diffé-
renciés, ou du moins n’ont pas eu le temps d’atteindre leur
complet développement. Les plantes de cette catégorie, par
une réaction d’immunité précoce et brutale (1), se sont
affranchies de leurs hôtes dès leurs premières tentatives de
pénétration ; elles ont ensuite parcouru tout le cours de leur
évolution à l’état de vie autonome. |
En résumé, parmi les plantes exposées à la pénétration de
l’endophyte, celles qui se sont adaptées à la symbiose ont
tubérisé les bourgeons terminaux de leurs rameaux secon-
daires ; celles qui se sont affranchies du Champignon et ont
mené une existence autonome ont différencié en rameaux
feuillés les bourgeons de la base de la tige et n’ont pas pro-
duit de tubercules (2). Or, chaque série d'expériences a porté
sur des plantes appartenant à la même variété et cultivées
dans des conditions identiques de terrain, d’aération et d’éclai-
rement ; des échantillons de l’un et de l’autre type se rencon:
traient communément dans le même pot ; la symbiose est
donc le seul facteur qui ait varié chez les plantes en expé-
rience, le seul par conséquent dont on puisse invoquer l’ac-
tion pour expliquer les différences constatées dans le mode
de végétation. |
7 13. Culture aseptique de la Pomme de terre. — J’ai néan-
moins, à titre de contrôle, tenté d’obtenir le développement
(1) Les mécanismes d’immunité par lesquels les plantes détruisent leurs
hôtes ou limitent leur progression sont étudiés dans le chapitre IV.
(2) Les statistiques sur lesquelles se fondent ces conclusions sont résumées
dans l’appendice, sous forme de tableaux.
196 J. MAGROU
de la Pomme de terre dans des conditions d’asepsie rigou-
reuse. A cet effet, des graines ont été semées, après stérili-
sation par l’eau oxygénée, sur un milieu nutritif gélosé (1}
renfermé dans des tubes bouchés au coton et stérilisés.
Malheureusement, ces conditions de culture se sont montrées
très défavorables à l’élevage des plantules de Pomme de
terre, qui, après plusieurs mois de végétation, étaient encore
réduites à une tige feuillée grêle, filiforme, à feuilles espacées
et complètement atrophiées. A la vérité, ces plantes aseptiques
n'ont pas produit de tubercules, mais leur développement
était trop anormal pour fournir un terme de comparaison
utile avec les plantes infestées. Par contre, dans un essai du
même genre, M. MorrrarDp [1] a réussi à obtenir des plan-
tules de Pomme de terre bien développées sur des milieux
minéraux additionnés ou non de glucose. Après cinq mois,
les plantes cultivées dans ces conditions avaient développé
une tige principale pourvue de feuilles de dimensions nor-
males, et en aucun cas les rameaux secondaires de la partie
inférieure de la plante n’avaient produit de tubercules.
Ce n’est qu’en favorisant, au moyen d’un artifice particulier,
l’absorption des sucres par les racines que M. MoLuiarD a
pu obtenir des plantes aseptiques à tiges aériennes épaisses,
chargées d’amidon, qu’il considère comme homologues de
tubercules.
Les conclusions que M. MozrrARrD tire de ces constatations
seront rapportées avec plus de détails dans un chapitre
ultérieur (chap. V, $ 38). Je ne retiens pour le moment de son
expérience que ce fait, concordant avec les résultats exposés
ci-dessus, que la Pomme de terre issue de graine, cultivée
à l’abri de tout microorganisme, et en l’absence de tout artifice
ayant pour effet d'augmenter la concentration de la sève,
évolue sans produire de tubercules. |
Les expériences qui font l’objet du présent chapitre n’im-
pliquent pas que la symbiose soit le seul facteur capable d’en-
trainer la tubérisation de la Pomme de terre. Il est vraisem- _
(14) Le milieu employé est le méme qui a servi pour les cultures aseptiques
ad’ Orobus tuberosus, Sa composition est donnée ci-dessous (§ 15).
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 197
blable que les agriculteurs qui propagent la plante par voie
de semis réalisent empiriquement des conditions artificielles
équivalentes et capables d’entrainer les mêmes effets. Les
faits que j'ai rapportés indiquent tout au moins que, dans des
sols pauvres, comparables aux milieux de culture que les
plantes rencontrent communément dans la nature, la symbiose
peut exercer une influence décisive sur la production des
tubercules. [ls confirment par là, dans le cas particulier de
la Pomme de terre, les vues générales de Noël BERNARD sur
le déterminisme de la tubérisation.
CHAPITRE II
HISTOIRE DE L’ « OROBUS TUBEROSUS »
14. Mode de végétation de la plante adulte. — L'Orobus
tuberosus L. (1) est une Légumineuse printanière que l’on
trouve localisée dans des stations bien limitées, générale-
ment dans les sous-bois sablonneux. A l’état adulte, la plante
est pourvue d’un abondant système de longues tiges souter-
raines portant de place en place des renflements tubéreux.
L’un de ces tubercules, vraisemblablement le plus ancien-
nement formé, est plus volumineux que les autres ; de forme
irrégulière, bosselé, il paraît résulter de la coalescence de
plusieurs tubérosités élémentaires ; la surface en est rugueuse
et la couleur noire (fig. 1, T). Tout le système souterrain de
la plante rayonne autour de cette souche tubérisée primaire,
qui donne naissance à un abondant chevelu de racines et à
des tiges souterraines de deux sortes : les unes, les plus
anciennes, sont colorées en noir; les autres, d'apparition plus
récente, sont dépourvues de pigments. La plupart de ces
rameaux portent, à plus ou moins de distance du gros tuber-
cule d’où ils sont issus, des renflements en forme de toupie
d’où naissent, au nombre de deux ou trois en moyenne, des
rejets souterrains eux-mêmes tubérisés aux nœuds (fig. 1,
t,, t,, t,). Les stolons se terminent dans le sol par un bourgeon
non renflé, ou, aprés un trajet souterrain souvent fort long,
Se redressent en tiges feuillées aériennes (fig. 41, /).
L’étude anatomique des tubercules montre qu’ils ont une
structure de tige typique ; on y trouve des faisceaux libéro-
ligneux, au nombre de quatre en moyenne, disposés en croix
(1) Syn.: Lathyrus montanus Bernh. = Lathyrus macrorhyzus Wimmer.
dial yy Ola Eo hh + à
à
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SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 199
et se rejoignant au centre du tubercule. Chacun des faisceaux
ligneux apparaît, en coupe transversale, extrêmement étroit
Fig. 1. — Orobus tuberosus adulte, en octobre. — T, tubercule primaire ; s, tiges sou-
terraines ; £,, t3, ta, tubercules de deuxième, troisième et quatrième ordres ; f, tige
feuillée aérienne. Réduit aux 2/3 de la grandeur naturelle.
par rapport à sa longueur ; il est formé de deux à quatre files
de vaisseaux disposés en rangées radiales, entremélés de
quelques faisceaux fibreux. Il existe une assise génératrice
200 J. MAGROU
\
”
libéro-ligneuse qui fonctionne au niveau des faisceaux et
dans leur intervalle. Les rayons médullaires ont la forme de
quadrants circonscrits par les faisceaux ; ils sont formés de
grandes cellules parenchymateuses isodiamétriques, dis-
posées en files radiales, et remplies de grains d’amidon.
L’écorce, mince relativement aux dimensions du cylindre
central, est formée de même d’un parenthyme amylacé,
à l’exception de ses assises les plus externes, qui sont subé-
rifiées. | |
L'examen des coupes pratiquées à travers le gros tuber-
cule bosselé que l’on trouve à la base de la plante montre
qu'il renferme plusieurs systèmes vasculaires libéro-ligneux,
affectant chacun la disposition qui vient d’être décrite, et
réunis par des faisceaux anastomotiques. Ce tubercule a done
bien la structure complexe que révélait son aspect extérieur :
il est formé par la coalescence de plusieurs tubercules élé-
mentaires.
Les racines des plantes récoltées dans les stations naturelles
hébergent constamment un endophyte, décrit pour la pre-
mière fois par M. GALLAUD [17] (1). Cet endophyte présente
tous les caractères des Champignons de mycorhizes; il a des
troncs mycéliens volumineux, intercellulaires, qui rampent
dans les méats suivant l’axe de la racine et donnent nais- :
sance à des rameaux latéraux qui pénètrent dans les cellules
corticales et s’y résolvent en arbuscules à ramifications
dichotomiques d’une admirable netteté (Pl. VII, fig. 1).
L’état de l’endophyte varie d’ailleurs, comme on le verra
plus loin, avec la saison, et avec l’âge de la racine qui le
ue
L’Orobus tuberosus, en dépit de son infestation constante,
a des graines capables de germination autonome, qui se déve-
(1) Les individus soumis à la culture peuvent éventuellement s’affranchir
de la symbiose. J’ei cherché les Champignons en vain dans un pied d’Orobus
tuberosus provenant du jardin botanique de la Faculté de Pharmacie, que je
dois à l’obligeance de M. Guignard. Dans la lettre jointe à l'envoi de cet échan-
tillon, M. Guignard me signale que la culture de la plante est d’ailleurs assez
aléatoire ; cela tient vraisemblablement à l’absence de lendophyte dans les sols
où elle est bouturée. Ce retour à la vie autonome consécutif à la mise en cure
est à rapprocher des faits observés chez la Pomme de terre.
+
i
“a Le tO
SYMBIOSE ET TUBERISATION 201
loppent bien en milieu stérilisé. L’étude des cultures aseptiques
permettra de préciser les homologies et le mode de formation
des tubercules et fournira le moyen d’apprécier l’influence
de l’endophyte sur le développement de la plante.
15. Développement en milieu aseptique. — Des graines
d’Orobus tuberosus, stérilisées par une immersion de six heures
dans l’eau oxygénée, sont transportées aseptiquement sur
des plaques de coton imbibées d’eau de source, préalable-
ment stérilisées et renfermées dans des fioles de culture
triangulaires. Les premières germinations apparaissent peu
de jours après le semis, mais d’autres ne se produisent qu’au
bout de plusieurs mois. Toute graine qui germe est aussitôt
transportée, au moyen d’une anse de platine flambée, dans
un large tube de culture renfermant le milieu nutritif
suivant, stérilisé à l’autoclave :
Snleteide MAGNESIUM . ns. ese ures ed ne Or, 5
te des UN 4. 1. use Ron Ost 5
DRAC CesPOCASSTUIN™. si. 505 oe 2 se clade 0. Ost 5
Enospiate bipotassique.</. 2.4.0 6A see ees O8r,5
nommé decalciums.....4....11..4.... os O8r,5
HÉRUUMANE dé pOLASSIU, 2,520. ein 08st 5
arolole FELTICOsPOLASSIQUG...-..ca%.« 42 08r,01
Gélose à 8,7 p. 1 000 dans l’eau distillée ...... 41 000 cent.cubes (1).
Les nombreuses graines qui ont été semées dans de telles
conditions ont donné des plantules qui, cultivées aseptique-
ment sur le milieu ci-dessus, ont évolué suivant un type
uniforme. Les cotylédons, au moins au début et parfois
pendant toute la durée du développement, restent inclus
dans le tégument de la graine,et l’axe hypocotylé demeure
court ; la germination se manifeste d’abord par l’apparition
d’une radicule bientôt ramifiée et d’une tigelle qui se diffé-
rencie en une haute tige feuillée, atteignant rapidement une
hauteur de 10 centimètres en moyenne, à entre-nœuds al-
longés, à feuilles bien développées et pourvues de deux fo-
lioles ; cette tige primaire se bifurque souvent au niveau de
(1) L’abaissement du point de congélation de cette solution minérale est
égal à 00,09. La technique de la préparation de la gélose nutritive est donnée
en appendice.
1, Nie Aa
SA 2" SN
202 | | J. MAGROU
son premier nœud et se ramifie en outre à des hauteurs
diverses. Dès qu’elle a atteint ce degré de développement.
(quatre-vingts jours en moyenne après la germination),
on voit apparaître à la base de la plante deux bourgeons,
situés chacun à l’aisselle de l’une des feuilles cotylédonaires.
(fig. 2); ces bourgeons se différencient rapidement en hautes
tiges feuillées, qui ne tardent pas à atteindre l’état de déve-
loppement de la tige principale. Des bourgeons adventifs
Fig. 2. — Base de la tige de deux plantules aseptiques d’Orobus tuberosus, en gélose,.
cent dix-huit jours après la germination: — ¢, tégument de la graine ; ¢, c’, cotylédons ;
b, 6’, bourgeons axillaires du nœud cotylédonaire, en voie de développement.
Gr. = 4.
continuent ensuite d’apparaitre successivement et en nombre
indéfini à l’aisselle des cotylédons et se développent à leur
tour en tiges feuillées (fig. 3). L'apparition et l’élongation des
bourgeons axillaires du nœud cotylédonaire se produisent
ainsi sans interruption jusqu’à la mort de la plante, qui finit
par se dessécher après neuf ou dix mois de végétation (1).
Ce mode de développement, caractérisé par la différen-
ciation rapide des bourgeons adventifs de labase de latige,
donne à la plante un port particulier : tous les pieds d’Orobus
(1) On peut retarder de quelques mois la dessiccation totale en FT de
femps en temps les cultures avec de l’eau stérilisée.
203
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION
à tuberosus cultivés aseptiquement sont, en effet, très rameux
dès la base et ont un aspect buissonnant caractéristique
(IP. IV, fig. 1 et 2), rappelant celui des Pommes de terre
he
Fig. 3. — Parties basilaires d’Orobus tuberosus cultivés aseptiquement en gélose, mon-
trant de nombreux rameaux aériens développés aux dépens des bourgeons du nœud
cotylédonaire. — #, tégument de la graine ; c, cotylédons ; b, bourgeons en voie de
différenciation. — Les plantules A, B, C et D sont âgées respectivement de quatre
mois et demi, huit mois, neuf mois et un an. Gr. = 3,5.
étudiées plus haut, qui, aprés destruction totale de leurs.
endophytes, ont différencié leurs bourgeons adventifs en tiges
_ feuillées non tubérisées.
2014 ‘J. MAGROU
16. Développement en présence de l’endophyte. — Le déve-
loppement se fait selon un mode différent chez les plantes
qui vivent en symbiose avec leur endophyte spécifique. I
est facile de réaliser l’infestation expérimentale des plantules :
il suffit pour cela de semer des graines dans un sol prélevé
dans une station naturelle, au pied d’Orobus tuberosus
infestés. Chez les jeunes pieds cultivés ainsi, la pénétration
du Champignon s’effectue dans les stades qui suivent la
Fig. 4. — A, plantule d’Orobus tuberosus, âgée de cing mois, développée en présence de
Vendophyte : ¢, tubercule basilaire ; 7, racines. Réduit aux 2/3 de la grandeur natu-
relle. — B, le tubercule de la même plante, grossi trois fois : r, racines.
germination, aprés la différenciation des premiéres racines ;
mais ici toutes les plantes envahies contractent avec l’endo-
phyte une association durable ; on n’observe pas chez l’Orobe,
comme chez la Pomme de terre, de cas d’immunité précoce,
où la plante détruit d’embleée, et en totalité, les microor-
ganismes envahisseurs.
Chez ces plantes régulièrement infestées, les premiers
stades du développement sont les mêmes que chez les plan-
tules aseptiques ; la tigelle se différencie rapidement en une
tige feuillée, puis un, ou rarement deux rameaux secondaires
se développent à partir de bourgeons situés à l’aisselle des
cotylédons. Après quoi, la différenciation des rameaux feuillés
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SYMBIOSE ET TUBERISATION 205
basilaires s’interrompt, et la base de la tige, en une zone
correspondant à l'insertion des cotylédons, se renfle en un
petit tubercule en forme de toupie, de coloration brunâtre,
semblable, toutes proportions gardées, aux tubercules de
la plante adulte (fig. 4 et 5; Pl. V, fig. 1). Ce n’est qu’ultérieu-
rement, après une période de repos plus ou moins prolongée,
que ce tubercule peut « germer » en donnant une poussée de
tiges feuillées aériennes (PL V, fig. 2). Après plusieurs mois
de végétation, les plantes ainsi développées, avec leur appa-
Fig. 5. — Tubercule basilaire d’une plantule d’Orobus tuberosus développée en présence
de l’endophyte. Reconstitution d’après des coupes en série. — b, bourgeons avortés ;
r, racines ; t, tige secondaire. Le trait pointillé indique le niveau de la coupe repré-
sentée dans la planche V (fig. 3). Gr. = 17.
reil aérien réduit à deux tiges feuillées et leur tubercule basi-
laire, diffèrent profondément, par leur port, des plantes
aseptiques de même âge, qui ont l'aspect de buissons touffus,
abondamment ramifiés dès la base.
La structure du tubercule basilaire des jeunes plantes
issues de graines est essentiellement la même que celle des
tubercules plus volumineux des plantes adultes (PL V, fig. 3).
Le système vasculaire, très réduit, se compose de quatre
faisceaux libéro-ligneux étroits, disposés en croix et confluents
au centre du tubercule; entre les faisceaux, les rayons
médullaires, qui représentent la plus grande partie de la
masse du tubercule, sont formés par un parenchyme amy-
206 J'MAGROU
lacé, à grandes cellules isodiamétriques disposées en files
radiales. Il existe une assise génératrice libéro-ligneuse.
L’écorce, subérifiée sans ses couches superficielles, est amyli-
fère dans la plus grande partie de son épaisseur. De plus,
l’examen de coupes en série pratiquées au travers de tels
tubereules montre qu’ils portent à leur surface, à des
hauteurs diverses, des bourgeons rudimentaires, réduits à
un méristème terminal et à quelques ébauches foliaires (fig. 5,
et Pl. V, fig. 3). Les cellules de ces bourgeons ne manifestent :
aucune tendance à la différenciation ni à l’élongation; les
divisions de leurs méristèmes aboutissent seulement à la
formation de cellules isodiamétriques amyliféres, qui con-
tribuent à accroître l’épaisseur de l’écorce du tubercule.
Chez les plantes aseptiques, la structure de la base de la tige
est différente; on n’observe plus là, comme chez les plantes
infestées, de retard dans la différenciation histologique et
morphologique des points végétatifs ; les bourgeons adventifs
de l’aisselle des cotylédons s’allongent dès leur apparition
en pousses feuillées, dont il est aisé de suivre le développe-
ment sur des coupes en série. De plus, l'écorce est 161 moins
épaisse, les faisceaux libéro-ligneux sont plus nombreux et
plus développés que chez les plantes tubérisées; enfin le
dépôt de grains d’amidon dans les cellules des rayons médul-
laires est irrégulier et faible. Seule, l'existence de formations
secondaires libéro-ligneuses, qui est un trait de structure
commun aux deux cas, rappelle les homologies de cette partie
de la tige chez les plantes de l’un et de l’autre type.
17. Expériences complémentaires. — Les pieds d’Orobus
tuberosus diffèrent donc par leur forme et par leur structure
selon qu’ils sont ou non infestés. Toutefois, on peut objecter
à l'expérience précédente que la symbiose n’est pas le seul
facteur qui ait varié dans les deux lots de plantes. Le renou-
vellement de l'atmosphère est moins parfait dans les tubes
bouchés au coton, où ont végété les plantules aseptiques,
que dans les pots largement exposés à l’air, où les plantes
infestées ont été cultivées; d’autre part, le milieu nutritif
diffère dans les deux cas. Ces deux conditions peuvent n’avoir
Sa cb curés dde ee ee ee es jee
PURE ETES
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si à
4 =
oh ee
SYMBIOSE ET TUBERISATION 207
pas été sans influence sur le mode du développement. Pour
parer à cette objection, des graines en germination ont été
transportées sur de la terre infestée placée au fond de tubes
de mémes dimensions que ceux ou ont été faites les cultures
aseptiques, et pareillement bouchés au coton. Le dévelop-
pement a été dans ces conditions moins exubérant que dans
les pots, mais il s’est fait suivant le méme type: la différen-
A NV Te
f
| | ‘
XY 4
4
Fig. 6. — Parties basilaires d’Orobus tuberosus, cultivés en tubes en présence de l’endo-
phyte. — g, graine ; ¢, tubercule. — A, plantule de huit mois ; B, plantule de neuf
mois. Gr. = 3,5.
ciation des bourgeons de l’aisselle des cotylédons ne s’est
pas produite, ou s’est interrompue après la formation d’un
ou de deux rameaux secondaires, et un petit tubercule ayant
Ja forme et la structure précédemment décrites s’est développé
à la base de la tige (fig. 6,et PI. IV, fig. 3). Une autre série
de cultures a été faite dans des tubes renfermant de la terre
de même provenance, mais stérilisée par chauffage à 1200.
Ce milieu s’est montré très peu favorable aux jeunes plantes,
qui n’y ont développé que des tiges naines, à feuilles réduites
(Pl. IV, fig. 4); toutefois, chez les échantillons qui ont sur-
vécu, l’évolution, au point de vue qui nous occupe, a été la
208 | | J. MAGROU
même que chez les plantes cultivées aseptiquement en gélose :
des tiges feuillées se sont développées successivement et em
nombre indéfini à partir des bourgeons adventifs du nœud
cotylédonaire, et aucun tubercule ne s’est formé à la base.
Après ces vérifications complémentaires, l’existence d’une
corrélation entre la symbiose et la tubérisation apparaît
hautement vraisemblable.
18. Comparaison de 1’ « Orobus tuberosus» et de la Pomme de
terre. — Le cycle évolutif de l’Orobus tuberosus est super-
posable, dans ses traits essentiels, à celui de la Pomme de
terre. A une phase juvénile, caractérisée par le développe- —
ment d’une tige feuillée (ou d’un petit nombre de tiges) de
structure normale, succéde dans les deux cas, chez les plantes
infestées, une phase caractérisée par la tubérisation des
bourgeons de la partie inférieure dela plante. Chez les plantes
soustraites à l’action de l’endophyte, la phase de tubérisa-
tion n’existe pas ; les bourgeons adventifs basilaires dévelop-
pent des rameaux feuillés semblables à la tige principale.
L'évolution des deux espèces diffère pourtant par deux traits
importants. Chez la Pomme de terre, la tubérisation des
rameaux basilaires se produit après une période d’élongation
plus ou moins prolongée ; il en résulte que les tubercules
sont portés à l’extrémité de stolons grêles plus ou moins
longs. Chez l’Orobus, la tubérisation des bourgeons adventifs,
plus précoce, n’est précédée d'aucune phase d’élongation,
et les bourgeons tubérisés restent coalescents en une masse
indivise, de telle sorte que le tubercule basilaire unique d’un
Orobus issu de graine est homologue de la touffe de stolons
tubérisés d’une Pomme de terre de même origine.
D’autre part, chez la Pomme de terre, dès que la tubéri-
sation commence, les bourgeons aériens, déjà hautement
différenciés, sont complètement arrêtés dans leur dévelop-
pement ; ils déploient encore les feuilles qu'ils avaient
formées, et l’appareil aérien ne s’accroit plus notablement
ensuite ; il ne tarde pas à se faner et à disparaître, ainsi que
les racines. La plante reste alors réduite à ses bourgeons
tubérisés, qui s’isolent dans le sol, et qui, à la saison suivante,
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 209
donnent une nouvelle poussée de tiges et de racines différen-
ciées. Cette différenciation s'accompagne de la digestion
des réserves accumulées dans le tubercule, qui dès lors com-
mence à se flétrir et ne tarde pas à être complètement
détruit. Les deux phases de différenciation et de tubérisa-
tion sont donc ici parfaitement distinctes, et la végétation
est du type sympodial.
Chez l’Orobe, au contraire, le développement du tubercule
ne s'accompagne pas de la destruction des tiges feuillées
déja développées, dont certaines peuvent persister encore
lorsque commence, a la saison suivante, une nouvelle période
de différenciation. Cette différenciation méme n’entraine pas
la destruction du tubercule déja formé ; ce dernier, en méme
temps qu'il développe ses bourgeons oes il à continue
à s’accroitre par le jeu deses formations secondaires. Les deux
phases alternantes de différenciation et de tubérisation,
au lieu d’être nettement séparées comme chez la Pomme de
terre, empiètent l’une sur l’autre. Le cycle évolutif est carac-
térisé ici par la croissance indéfinie d’une partie de la tige
principale, et ce n’est que tardivement, au moment de la
tubérisation des stolons, qu’il s’établit un mode de végéta-
tion conforme au type sympodial.: ‘
Il reste à examiner si, à ces différences dans le cycle évolu-
tif des deux plantes, correspondent des différences dans la
modalité de la symbiose chez l’une et l’autre espèce.
19. Symbiose périodique et symbiose continue. — A de
rares exceptions près, chez les plantes à mycorhizes, les endo-
phytes restent strictement localisés dans les racines; les
tubercules, les tiges souterraines et aériennes sont constam-
ment indemnes d’infestation. Il en résulte qu’une Pomme de
terre, pendant la période de sa vie où elle est réduite à un
tubercule isolé dans le sol, et dépourvu de racines, n’héberge
pas de Champignons. C’est à la fin de cette phase de vie
autonome que se différencie l’appareil aérien ; en même
temps, les racines poussent et s’accroissent, et l’infestation
peut se produire. Dès que, par suite du développement
des racines, elle a atteint un certain degré, le mode de
ANN. DES SC. NAT. BOT., 10e série. 1921, 111, 14
210 2 J. MAGROU
végétation change, et les tubercules commencent à se
former. Il y a donc ici symbiose intermittente, et à l’alter-
nance des phases d'autonomie et d’infestation correspond
une alternance non moins marquée de phases de différen-
ciation et de tubérisation.
Chez l’Orobus tuberosus, au contraire, le système radical,
-au lieu de disparaître périodiquement tous les ans, persiste:
d’une année à l’autre. Si l’on déterre un pied d’Orobe au
cours ou à la fin de l'hiver, en février ou mars, avant la poussée
des jeunes racines du printemps, on le trouve porteur d’un
chevelu de racines noires, relativement épaisses, pourvues
de quelques nodosités bactériennes vidées ; ce sont là mani-
festement, comme l’indiquent au surplus leur différencia-
tion ligneuse prononcée et l’exfoliation partielle de leur
écorce, des racines de l’année précédente qui ont persisté
dans le sol. Dans ces racines, l’endophyte est abondamment.
représenté par d'énormes filaments mycéliens, de calibre
irrégulier, enkystés dans d’épaisses membranes à double
contour, surcolorables (Pl. VII, fig. 2, &). Ces filaments
-enkystés sont bien des formes vivantes du Champignon,
car ils sont pourvus, le plus souvent, d’un protoplasma
réticulé et de noyaux. [ls représentent des formes de résis-
tance, capables d’hiverner dans les racines et, le printemps
venu, de servir de point de départ a une invasion nouvelle,
ainsi qu'en témoigne la présence, à leur voisinage immé-
diat, de mycélium jeune, à membrane mince, aux dépens
duquel des arbuscules commencent à se former (PI. VIT, fig. 2,
m. à).
Il résulte de ces constatations que l’Orobus tuberosus, une
fois infesté dans les premiers stades de son développement,
héberge des Champignons vivants pendant tout le cours de
sa vie. L’état de symbiose devient pour lui une condition
de vie continue au lieu de n'être, comme chez la Pomme de
terre, qu'une condition périodique. Cette continuité de la
symbiose s'accompagne, chez l’Orobe, d’un mode de végéta-
tion particulier, caractérisé par la persistance des tubercules,
qui, au lieu de disparaître au moment de la poussée des tiges
différenciées, continuent à s’accroître indéfiniment.
SYMBIOSE ET TUBERISATION DIT
_La relation qui existe chez l’Orobus tuberosus entre la
symbiose continue et le développement indéfini d’une partie
de la tige primitive vérifie, dans un cas particulier, une loi
générale, que Noël BERNARD a déduite de ses recherches sur
les Orchidées. Chez la plupart des plantes de cette famille,
la symbiose est intermittente, et elle a pour corollaire une
végétation de type sympodial. Mais chez certaines Orchidées
hautement différenciées, qu’il s’agisse de plantes épiphytes
comme les Sarcanthinées, ou terrestres comme le Neoitia
Nidus-avis, la symbiose, par suite de la croissance prolongée
et de la persistance des racines, devient continue. « La conti-
nuité de l’état de symbiose, dit Noël Bernarp [5], s’accom-
pagne chez ces plantes d'un mode de végétation exceptionnel
chez les Orchidées, mais manifestement secondaire et non
primitif, puisqu'on le rencontre chez les plantes les plus évo-
luées de la famille. Au lieu qu'il pousse des tiges aériennes
successives, enchainées en sympode par l'intermédiaire de
portions de rhizomes, il y a ici une tige unique à croissance
indéfinie, qui nait du premier bourgeon différencié sur le
protocorme et qui produit seulement des inflorescences laté-
rales. La végétation est, comme on dit, devenue monopodiale. »
20. Précocité de la tubérisation. — Les cas de symbiose
continue, où les deux organismes commensaux évoluent
dans un état d'union intime et ininterrompue, représentent,
sur les cas de symbiose intermittente, un progrès dans l’adap-
tation réciproque du Champignon et de la plante à la vie
commune. En fait, chez l’endophyte de l’Orobe, la propriété
de végéter dans les cellules vivantes de l’hote, ou, si l’on veut,
la « virulence », est un caractère plus constant que chez l’en-
dophyte des Solanum : ce dernier, comme on l’a vu, ne par-
vient pas dans tous les cas à surmonter les difficultés de la
vie commune et est parfois détruit dès ses premières tentatives
de pénétration; au contraire, tous les pieds d’Orobus tuberosus
exposés à l’attemte de l’endophyte spécifique contractent
avec lui une symbiose durable. Or Noël BERNARD [5] a
montré, par de belles expériences sur le Bletilla hyacinthina,
que l'accroissement de la virulence des Champignons en-
212 - .. J. MAGROU -
trainait une formation de plus en plus précoce des tubercules.
Partant de là, il est naturel de supposer que, chez l’Orobe,
la tubérisation précoce des bourgeons de la base de la tige
peut être liée au degré de virulence du Champignon.
Ainsi la théorie de Noël BERNARD permet de rendre compte
des divergences relevées dans le cycle évolutif de deux plantes
à tubercules telles que la Pomme de terre et l’Orobus tuberosus.
21. Immunité de 1’ « Orobus coccineus ». — On sait qu’en
règle générale les plantes annuelles, dépourvues de tuber-
cules, sont également dépourvues de mycorhizes, tandis que
les plantes vivaces en présentent régulièrement, au moins
à l’état sauvage. D’autre part, la spécificité des Champignons
n’est généralement pas rigoureuse; l'exemple des Solanées
et celui des Orchidées montrent qu’un même endophyte
peut être commun à plusieurs espèces d’un même genre,
ou même à plusieurs genres d’une même famille. Il était
donc intéressant, au point de vue des rapports de la symbiose
et de la tubérisation, de rechercher comment un congénère
annuel de l’Orobus tuberosus réagirait en présence de l’endo-
phyte de cette dernière espèce.
A cet effet, des graines d’un Orobe annuel (Orobus coccineus
Mill. = Lathyrus sphericus Retz) ont été semées dans des
pots renfermant de la terre prélevée dans les bois de Chaville,
au pied d’Orobus tuberosus abondamment infestés. Compara-
tivement, des semis aseptiques de la méme espéce ont été
faits dans des tubes renfermant le milieu nutritif gélosé
qui avait servi pour la culture d’Orobus tuberosus. Les graines
ont germé rapidement, et les plantes des deux lots sont rapi-
dement devenues très rameuses dès la base ; elles ont donc
adopté un mode de végétation comparable à celui de l’Orobus
tuberosus aseptique, à cela près que les rameaux secondaires,
au lieu de naître de l’aisselle des cotylédons, provenaient de
bourgeons situés au niveau du premier nœud foliaire de la
tige. | :
Des plantes du lot infesté ont été récoltées, en vue de l'étude
des racines, au bout de temps qui ont varié de quarante à
cent trente et un jours après le semis. Passé ce dernier délai,
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION DES
les Orobes avaient muri leurs fruits. L’examen de coupes en
séries pratiquées dans les racines des plantes soumises à
l'expérience montre qu’au début (plante de quarante jours)
l’Orobus coccineus se laisse largement envahir par le Champi-
enon endophyte, qui se présente dans l’écorce des racines sous
le même aspect que chez l’Orobus tuberosus : troncs mycéliens
intercellulaires à protoplasma réticulé, arbuscules intracel-
lulaires à fines ramifications dichotomiques. Mais, à cette phase
d’invasion étendue succède rapidement une réaction pha-
gocytaire brutale de la plante, qui a pour effet de détruire
la totalité du Champignon. Chez des échantillons prélevés
soixante-dix jours après le semis, la plupart des racines se
montrent envahies, mais partout les Champignons ont atteint
le stade ultime de la destruction : ils sont réduits à de petits
corps de dégénérescence surcolorables, n’occupant plus
qu'une portion minime des cellules qui les renferment
(PI. VIT, fig. 3). Les troncs mycéliens ne sont généralement
plus reconnaissables ; parfois, pourtant, il en subsiste des
vestiges, sous forme de filaments rétractés, surcolorables,
vidés de leur contenu protoplasmique (PI. VII, fig. 4).
Chez l’Orobe annuel, l’invasion de l’endophyte n’aboutit
done qua la production d’une association instable et fugace,
tandis que, chez l’Orobe à tubercules, l’infestation des racines
réalisée au début du développement se maintient pendant
toute la durée de l’évolution de la plante (1).
Le cas de l’Orobus coccineus complète le parallélisme entre
l'histoire des Pommes de terre et celle des Orobes. Chez
l’Orobus annuel, comme chez les Pommes de terre qui ne don-
nent pas de tubercules, l’endophyte est bien capable de péné
trer dans les racines, mais il y est aussitôt détruit en totalité
par une réaction phagocytaire brutale de la plante. Chez
l’Orobus tuberosus, comme chezles Pommes de terre tubérisées,
la réaction phagocytaire n’atteint que les arbuscules ; elle
respecte les troncs mycéliens principaux, qui continuent a
propager l’infestation, et la symbiose peut s’établir. Une
différence est pourtant à noter entre les deux cas : chez les
(1) Les tableaux résumant les examens microsco piques de racines d’Orobus
sont donnés en appendice.
J. MAGROU
Pommes de terre douées d’immunité précoce, Pinvasion da.
Champignon qui précéde la guérison est toujours extréme-
ment limitée ; elle est au contraire généralisée chez l’Orobus
coccineus. L’ étude comparée des mécanismes de l’immunité |
chez les plantes à mycorhizes fera l’objet du chapitre IV ;
on y retrouvera, chez des plantes diverses, des exemples en
valents de guérisons radicales He à des invasions |
plus ou moins étendues.
CHAPITRE III
RELATION ENTRE LA SYMBIOSE
ET LE MODE DE VÉGÉTATION. — CAS DES MERCURIALES
22. Dimorphisme et symbiose. — Les deux plantes vivaces
étudiées dans les chapitres précédents (Solanum tuberosum,
Orobus tuberosus) sont capables, comme on l’a vu, d'adopter
deux modes de végétations différents, que l’on peut sché-
matiser comme il suit :
Ou bien il se développe une tige feuillée aérienne unique ;
les bourgeons situés à la base de cette tige cessent plus ou
moins précocement de se différencier et se renflent en tuber-
cules ;
Ou bien les bourgeons de la base de la tige se différencient
en rameaux feuillés ; la plante est rameuse dès la base et
n’a pas de tubercules.
Il y a coincidence, tout au moins à l’état de vie sauvage,
entre le premier type de végétation et la présence dans les
racines de Champignons endophytes ; entre le second type
et l’absence (ou la destruction totale) de ces mêmes Cham-
pignons.
Des exemples d’un semblable dimorphisme ont été signalés
chez les Ophrydées. En règle générale, une Ophrydée déve-
loppe chaque année une tige aérienne unique : les bourgeons
axillaires de la base de cette tige ne se différencient pas, et
l'un d’eux au moins se renfle en tubercule. Mais il peut arriver
exceptionnellement que l’un des bourgeons basilaires, ou plu-
sieurs d'entre eux, se différencient en rameaux feuillés ; la
plante est alors ramifiée dès sa base et ne produit pas de tuber-
cules. J.-H. FABRE [16] a décrit un pied d’Himantoglossum
. |
216 J. MAGROU
hircinum (= Loroglossum hircinum), dont trois bourgeons
axillaires s’étaient ainsi développés en rameaux. Noël BER-
NARD [1] a étudié un échantillon d’Orchis maculata, qui, en.
outre de sa tige principale, présentait un rameau de second
ordre provenant du développement d’un bourgeon axillaire ;
ce dernier, au lieu d'évoluer en tubercule, s’était différencié
en tige feuillée aérienne. Or les deux Orchidées ramifiées
et non tubérisées dont il s’agit étaient dépourvues de racines
absorbantes et, par conséquent, n'étaient pas infestées.
Il apparaît donc que, chez les Oprhydées comme chez les
deux espèces précédentes, il y a une relation entre la sym-
biose et le port de la plante.
23. Les Mercuriales. — II existe dans la nature des
exemples d’espéces voisines mais distinctes, qui ne diffèrent
guère entre elles que par des caractères végétatifs de même
ordre. Telles sont les deux Mercuriales communes dans nos
contrées : le Mercurialis perennis et le Mercurialis annua.
L'organisation de la fleur, le type de l’inflorescence sont les
mêmes chez l’une et l’autre espèce ; les caractères différen-
tiels des deux plantes (différences dans la longueur du pédon-
cule des fleurs femelles, dans les dimensions des graines,
dans la nuance du feuillage) sont des plus minimes. Aussi
les flores distinguent-elles les deux espèces essentiellement
par leur port: le Mercurialis perennis a des rhizomes sou-
terrains épais et une tige florifére non ramifiée dès la base ;
le Mercurialis annua n’a pas de rhizome, et sa tige florifére
est ramifiée dés la base. La premiére, avec sa tige feuillée
unique et les rhizomes pérennants, homologues de tuber-
cules, qui dérivent de ses bourgeons basilaires, est comparable
aux Orobes, aux Pommes de terre et aux Ophrydées tubérisées
qui vivent en symbiose avec leurs endophytes spécifiques.
La seconde, avec ses bourgeons basilaires différenciés en
tiges feuillées aériennes, correspond, par son mode de végé-
tation, aux mêmes plantes soustraites artificiellement à
l’action des Champignons (fig. 7).
il était intéressant de vérifier si, dans le cas des Mercu-
riales, qui représente en quelque sorte une expérience réalisée
5
: À: j NET Faye eS
Ee cee caer See Bt eRe
CSS Bae
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION _ 217
par la nature, on retrouverait la méme relaticn entre le type
de végétation et l’infestation.
Fig. 7. — Dimorphisme et symbiose. — A à D, plantes soumises à la symbiose ; A’ à D’,
plantes soustraites à la symbiose. — A, A’, Solanum tuberosum ; B, B’, Orobus tube-
rosus ; C, G’, Orchis maculata ; D, Mercurialis perennis ; D’, Mercurialis annua. —
t, tubercules ; rh, rhizomes ; b (fig. C’), tige principale d’Orchis maculata ; b’, bourgeon
de second ordre développé en rameau. C et C’ d’après Noël BERNARD.
24. La symbiose chez le « Mercurialis perennis ». — A cet
effet, des pieds de Mercurialis perennis et de Mercurtalis
annua ont été récoltés dans des stations variées et a des
-
:
218 J. MAGROU
époques diverses, et des coupes en série ont été pratiquées
dans les racines des deux espèces. La Mercuriale vivace
a des racines de deux sortes : les unes païsses, de 2 milli-
mètres de diamétre environ; les autres fines, abondamment
ramifiées. Les grosses racines ne sont pas infestées ; les fines
le sont au contraire régulièrement et abondamment, par un
endophyte de même type que celui des Solanum. Les fila-
ments mycéliens principaux de ce Champignon envahissent
largement les cellules de l’assise moyenne de l'écorce ; ils
y forment des pelotons, ou rampent en ligne droite le long
des membranes cellulaires. Ils ne sont pas cloisonnés et ont
un protoplasma réticulé, souvent semé de nombreux noyaux.
Parmi ces filaments, les uns sont à paroi mince ; les autres
sont enkystés dans d’épaisses membranes à double contour
(Pl. VIII, fig. 1). Ces derniers se renflent souvent de manière
à constituer des vésicules volumineuses, qui arrivent à rem-
plir la cavité des cellules qu’elles occupent. Ces vésicules,
de forme généralement irrégulière, bourgeonnantes ou bilo-
culaires, sont, comme les filaments dont elles dérivent,
enkystées dans des membranes à double contour et pourvues
d'un protoplasma réticulé multinucléé (Pl. VIII, fig. 2). De
semblables formations sont communes dans les mycorhizes,
et leur signification a été longtemps discutée. Noël BEr-
NARD [9] ayant réussi à en isoler de racines de Solanum dul-
camara et ayant obtenu leur germination en goutte pen-
dante, a démontré par là que ces vésicules étaient des
organes multiplicateurs des endophytes.
Les gros troncs mycéliens se ramifient à l’intérieur des
cellules pour constituer des arbuscules très touffus, que l’on
peut observer chez une même plante aux divers stades de
leur évolution. Les uns sont formés de ramuscules parfai-
tement distincts ; d’autres, plus ou moins altérés, sont d’as-
pect nuageux, ou sont transformés plus ou moins complete-
ment en sporangioles ou en corps de dégénérescence. Mais,
quel que soit l’état de destruction des arbuscules, les hyphes
principales, restées bien vivantes et trés abondantes, conti-
nuent à propager [infestation (Pl. VIII, fig. 3), tandis
que les filaments enkystés et les vésicules assurent la péren-
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 219
nance du Champignon. Chez le Mercurialis perennis, une
symbiose bien établie existe donc entre Vendophyte et la
plante.
25. Immunité du « Mercurialis annua ». — [Il n’en est pas de
même chez le Mercurialis annua. Ici encore, on retrouve
bien, dans les racines, des Champignons, plus ou moins abon-
dants suivant les pieds considérés, mais, contrairement a
ce que l’on observe chez le Mercurialis perennis, les formes
vivantes de l’endophyte, et notamment les gros troncs mycé-
liens, sont extrêmement rares ; on observe surtout des arbus-
cules en voie de destruction avancée, complètement trans-
formés en corps de dégénérescence, ou réduits à l’état de
vestiges profondément altérés (Pl. VIII, fig. 4). Les filaments
enkystés et les vésicules font totalement défaut (1). Au lieu
qu'un équilibre compatible avec la symbiose s’établisse,
comme chez l'espèce vivace, entre l’endophyte et son hôte,
il se produit dans ce cas une destruction brutale et complète
du Champignon, succédant à une invasion plus ou moins
étendue. Le cas est exactement superposable à celui de
l’Orobus coccineus, ou à celui de Pommes de terre douées
dimmunité précoce, qui, après destruction totale des Cham-
pignons envahisseurs, évoluent sans produire de tubercules.
Ainsi on retrouve chez les Mercuriales qui croissent spon-
tanément dans la nature la même relation entre la symbiose
et le type de développement, que l’expérience a permis de
déceler chez la Pomme de terre, chez l’Orobus tuberosus et
chez les Ophrydées. Ce fait suggère que des espèces distinctes
ont pu, au cours des âges, dériver d’ancétres communs, dont
certaines races se seraient adaptées à la symbiose avec des
Champignons endophytes, tandis que d’autres auraient joui
d’une immunité complète vis-à-vis des mêmes microorga-
nismes.
ae ) Voir en appendice les tableaux résumant les observations micros-
copiques.
CHAPITRE IV
L'IMMUNITÉ DANS LA SYMBIOSE
26. Virulence et résistance. — Les exemples qui précèdent
montrent que les rapports entre les endophytes et les plantes
qui les hébergent peuvent être de diverses sortes. Les Cham-
pignons de mycorhizes sont capables de se développer dans
l’organisme de leurs hôtes : cette « végétabilité in vivo » est
la propriété que l’on désigne chez les microbes sous le nom
de « virulence ». D'autre part, les plantes attaquées résistent
à l'invasion des Champigons ; les moyens de résistance, plus
ou moins efficaces, par lesquels l’organisme s’oppose à la
pénétration des envahisseurs ou limite leurs progrès, consti-
tuent les réactions d’immunité. C’est du rapport, variable
selon les cas, entre la virulence et la résistance, que dépend
en définitive le sort de l’association des deux commensaux.
Si la résistance est la plus forte, le Champignon est détruit
en totalité aprés une invasion plus ou moins étendue. Si la
virulence l’emporte, le Champignon pénètre indistinctement
tous les tissus de la plante, sans respecter ses organes essen-
tiels, et finit par la détruire. Si enfin résistance et virulence
s’équilibrent, la plante tolère le Champignon, l’association
se prolonge indéfiniment et la symbiose s’établit. La sym-
biose apparaît donc comme un état, d'équilibre entre la mala-
die curable, où la plante guérit après une réaction d’immunité
efficace, et la maladie mortelle, où elle succombe sans avoir
opposé au microorganisme envahisseur une résistance suf-
fisante.
J’étudierai dans ce chapitre les réactions d’immunité
par lesquelles les plantes résistent aux Champignons sym-
biotiques. Chez les espèces qui font l’objet du présent tra-
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 991
vail, ces réactions sont essentiellement celles que Noël Brr-
NARD a décrites chez les Orchidées. Des mécanismes équiva-
lents sont mis en œuvre, comme il ressort de travaux récents,
dans la symbiose lichénique. Enfin, des processus de résis-
tance comparables se retrouvent chez les animaux, au cours
des maladies infectieuses. L’étude de la symbiose permet
done, comme l'avait prévu Noël BERNARD, de dégager des
lois de pathologie générale communes aux animaux et aux
plantes.
27. Résistance mécanique. — La résistance des parois
cellulaires des racines oppose à la pénétration des Champignons
de mycorhizes un premier obstacle, qui réalise une immunité
en quelque sorte mécanique. Cette protection mécanique
suffit à mettre les racines à l’abri de l'invasion de la plupart
des microorganismes qui pullulent dans le sol; mais elle est
sans effet durable contre les attaques des endophytes spé-
xfiques. |
La phase de pénétration du Champignon est d’ailleurs
malaisée à observer ; je n’ai réussi à l’apercevoir que très
rarement, bien qu'ayant examiné un très grand nombre de
coupes de mycorhizes. Ce fait indique que les Champignons
peuvent envahir largement les racines d’une plante, après les
avoir pénétrées en un nombre de points relativement restreint.
C’est chez les Solanum que les figures de pénétration de
Vendophyte ont pu être observées avec le plus de précision.
Noël BERNARD [9] les a décrites chez la Douce-Amère, et je
les ai retrouvées, avec des caractères identiques, chez la
Pomme de terre. Chez l’une et l’autre de ces plantes, le Cham-
pignon aborde les jeunes racines dans leurs portions déjà
accrues et différenciées, au niveau de Ja zone des poils absor-
bants. La paroi cellulosique mince de l’assise pilifere est
traversée sans difficulté, mais l’assise subéreuse sous-jacente
oppose au mycélium une résistance plus sérieuse, que ce
dernier parvient à surmonter par un processus très singulier.
Parvenu dans les cellules de l’assise pilifére, le Champignon
y forme des dilatations vésiculeuses, qui se découpent par
des incisures en digitations orientées vers l’assise subéreuse.
222 J. MAGROU
Ces digitations se développent en disques adhésifs appliqués
contre la paroi cellulaire et émettent des bourgeons qui pé-
nétrent en coin dans la membrane subérifiée, l’invaginent et
finalement la digèrent (Pl. VI, fig. 1). Par la brèche ainsi
produite, le mycélium s’introduit dans les cellules de l’assise
subéreuse ; il les traverse en ligne droite, après avoir repris
son calibre normal, et atteint l’assise corticale sous-jacente.
28. La phagocytose. — La résistance passive opposée par
les membranes cellulaires étant ainsi surmontée, la plante
commence à réagir activement à la présence du Champignon.
Le cas où cette réaction s'exerce avec le maximum d’effi-
cacité est représenté par les Pommes de terre sans tubercules,
qui détruisent complètement les Champignons dès leurs pre-
mières tentatives d’invasion.
Dans ce cas, le mycélium, parvenu dans l’assise moyenne
de l’écorce, commence, comme à l’ordinaire, à s’y pelotonner.
Mais les pelotons, à peine constitués, sont digérés par les
céllules qui les renferment et dégénèrent complètement. Les
troncs mycéliens qui les forment, après avoir subi la diges-.
tion intracellulaire, restent reconnaissables par leur forme
générale, mais ont perdu tous les traits de structure qui carac-
térisent le mycélium vivant : leur contenu protoplasmique
a disparu ; leurs membranes sont rétractées et surcolorables
(Pl. VI, fig, 6). Grâce à la réaction énergique des éléments
envahis, la progression du Champignon est rapidement
enrayée : à peine les filaments ont-ils pénétré quelques
cellules qu’ils sont mis hors d’état de se propager plus loin;
aussi ne peuvent-ils donner lieu qu’à des infestations insi-
gnifiantes et fugaces.
Le processus de digestion intracellulaire auquel succombent
en pareil cas les Champignons est à rapprocher de la phago-
cytose, qui, chez les animaux, détruit les microbes qui tentent
de pulluler dans l’organisme. Assurément, on ne peut s’at-
tendre à observer chez les végétaux, formés de cellules fixes
et rigides, la capture des microorganismes par des éléments
mobiles, qui, chez les animaux, représente le premier acte
de la phagocytose. Mais l’essentiel du phénomène, qui est
SYMBIOSE ET TUBERISATION | 922%:
la digestion des parasites par les cellules où1ls ont pénétré,
se retrouve ici avec assez de netteté pour rendre le rapproche-
_ ment légitime. Ce rapprochement avait été fait par M. GaL-
LAUD [47], qui a étudié la diges-
tion intracellulaire chez un grand
nombre de plantes à mycorhizes.
Il aété précisé par Noël BERNARD
[5, 6], dont les travaux sur les
Orchidées fournissent des exem-
i À L TRS
ples de « guérison » par phago F ee ae;
cytose, succédant à des atteintes CRETE TT
légères, exactement équivalents
à ce que l’on observe chez le So-
lanum tuberosum.
Lorsqu’on inocule, en effet, des
semis de Bletilla hyacinthina ou
de Cattleyées avec l’endophyte
habituel de ces plantes (Rhizoc- .
tonia repens), dont l’activité a
été atténuée par un séjour suffi-
samment prolongé en culture
pure (1), le mycélium pénétre
bien quelques cellules des em-
bryons, mais 1 ¥ est rapidement Fig. 8. — Coupe longitudinale dans
détruit par phagocytose et ne une plantule de Bletillahyacinthina
= a eee : Be âgée d’un mois, inoculée avec un
produit ainsi qu'une infestation mycélium atténué de Rhizoctonia
me ec tremte. Dans les coupes 77995 dans quelques cellules de
: é : la région inférieure,on voit du my-
de tels embryons, aulieu de voir, célium digéré à côté dunoyau. D’a-
‘ près Noël BERNARD.
comme dans la symbiose nor-
male, une zone infestée vaste et formée de pelotons
vivants, on aperçoit seulement un petit nombre de cellules
(1) On sait que l’activité des Rhizoctones, autrement dit leur pouvoir de
faire germer les graines, s’atténue quand ces Champignons sont conservés
‘depuis un certain temps en culture pure; l’activité perdue peut, d’autre part,
être récupérée par passages successifs chez des embryons d’Orchidées. Ces faits,
découverts par Noël BERNARD [5], sont à mettre en parallèle avec les phéno-
mènes d'atténuation et d’exaltation de virulence observés chez les Bactéries
par PASTEUR, CHAMBERLAND et Roux [36]. Un tel rapprochement complète
l’analogie entre la symbiose et les infections animales,
294 J. MAGROU
occupées par des pelotons complètement digérés, accolés
aux noyaux cellulaires (fig. 8). Le groupe des Solanum, en
dehors du cas des Pommes de terre sans tubercules, fournit
un autre exemple d’une immunité de même ordre : tandis
que les Solanum vivaces vivent communément en symbiose
avec des Champignons de mycorhizes, le Solanum nigrum,
comme il est de règle chez les plantes annuelles, résiste à
ces mêmes Champignons ; chez des pieds de Solanum ni-
grum récoltés dans des stations naturelles variées, je n’ai pu
trouver, après un examen minutieux, que des plages infestées
rares et restreintes, formées de Champignons dégénérés.
Tous ces cas, où, grâce à une phagocytose précoce, les
plantes s’affranchissent des Champignons dès leurs premières
tentatives d’invasion, sont à mettre en parallèle avec les
cas d’immunité observés chez les animaux, qui guérissent
de maladies accidentelles bénignes après destruction des
microbes par les phagocytes. : 3
Lors méme que la plante se laisse d’abord largement enva-
hir par le Champignon, la phagocytose peut encore s’exercer
de manière efficace. L’Orobus coccineus fournit un exemple
de ce nouveau mode d’immunité cellulaire, secondaire à une
infestation étendue.
Les échantillons de cette espéce, mis en contact avec
Vendophyte de l’Orobus tuberosus, sont précocement envahis
par le Champignon, qui prend dans l’écorce des racines un
développement exubérant et forme de nombreux arbuscules
intracellulaires. Il semble donc qu’une symbiose bien carac-
térisée va s'établir, quand, brusquement, il se produit une
réaction phagocytaire brutale ; tous les arbuscules sont
digérés et réduits à l’état de corps de dégénérescence ré-
tractés ; les troncs mycéliens principaux eux-mêmes dispa-
raissent, ou ne subsistent qu'à l’état de rares vestiges com-
pléetement dégénérés (PI. VIT, fig. 3 et 4). L’infestation est dès
lors définitivement enrayée, et la plante achève son dévelop-
pement à l’état de vie autonome. Les choses se passent de
même chez le Mercurialis annua; ici encore, la croissance
intracellulaire de l’endophyte est au début rapide, et les
arbuscules caractéristiques de la symbiose se développent en
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION Je
2
A)
grand nombre, mais une phagocytose énergique ne tarde pas
à intervenir, qui réduit à l’état de vestiges méconnaissables
tous les pelotons et arbuscules formés (PI. VIII, fig. 4).
Ce type d’immunité a encore son équivalent dans les expé-
riences de Noël Brernarp sur les Orchidées [5]. Si l’on
tente d'associer des embryons de Cattléyées avec le
Rhizoctonia mucoroides, endophyte des Phalænopsis et des
Vanda, on constate au début une progression anormalement
rapide de l’endophyte, qui occupe dans la plantule une zone
étendue. Mais, après cette invasion trop rapide, il se produit
une réaction phagocytaire qui détruit tous les pelotons ;
les plantules ne renferment dès lors plus de mycélium vivant,
et elles poursuivent quelque one leur développement à
l’état autonome.
Dans ces divers cas d'associations anormales, les choses
se passent au début comme si la vie commune devait se
prolonger. Mais, par la suite, les conditions d'équilibre compa- |
tibles avec la symbiose ne parviennent pas à s’établir ; quelle
que soit l'importance que prend Don Een le Hele
pement de l’endophyte, la plante réussit à s’en sut
par la seule action de la phagocytose.
29. Insuffisance de la phagocytose. — I] n’en est pas de
même dans les cas de symbiose proprement dite ; ici encore,
la phagocytose s'exerce, mais elle ne suffit plus à enrayer
Vinfestation, et c’est par d’autres processus d’immunité
que la plante limite en définitive l’extension du Champi-
enon. C'est ce qui arrive chez la Pomme de terre, lorsque cette
plante tolère la vie commune prolongée avec ses hôtes.
Dans ce cas, le mycélium, au lieu d’être précocement
détruit par phagocytose, continue à progresser, en se pelo-
tonnant, dans les cellules de l’assise moyenne de l’écorce
(Pl. VI, fig. 2), où il forme des plages infestées étendues,
entourant comme d’un manchon les parties plus profondes
de la racine. Des arbuscules complexes se constituent ensuite
dans chaque cellule, par divisions dichotomiques répétées
des rameaux secondaires du mycélium (PI. VI, fig. 3). Ce n’est
que tardivement, et après que les arbuscules ont atteint
ANN. DES SC. NAT. BOT., 10e série. 1924, 11, 15
226 J. MAGROU
leur complet développement, que la phagocytose commence
à intervenir. Elle s’attaque d’abord aux extrémités des fins
rameaux dichotomes, qui, subissant la digestion intracel-
lulaire, se rétractent, s’agglutinent et finalement se transfor-
ment en sporangioles, petites masses multilobées, réfringentes
et surcolorables, appendues aux rameaux des arbuscules
(Pl. VI, fig. 4). La phagocytose poursuivant son œuvre, les
sporangioles augmentent de volume, deviennent confluents
et arrivent à former des corps de dégénérescence volumi-
neux, mamelonnés, qui occupent toute la cavité des cellules.
Mais, dans le cas même où la digestion des arbuscules atteint
cette phase ultime, les troncs mycéliens principaux ne sont
pas détruits ; ils restent bien vivants, et l’on distingue, aussi
nettement qu'aux premiers stades de linfestation, leur
protoplasma réticulé et même leurs noyaux (PI. VI, fig. 5, n’).
Or la progression du Champignon s'effectue non par les
arbuscules, dont les fines ramifications sont incapables
de traverser les cloisons cellulosiques, mais par les gros troncs
mycéliens. La phagocytose respectant ici les organes qui
servent à la propagation du Champignon, on conçoit qu’elle
soit impuissante à enrayer sa marche; à partir de cellules ou
les arbuscules sont totalement dégénérés, on peut voir les
filaments principaux restés intacts, propager l’infestation
dans les cellules voisines (PI. VI, fig. 5). |
C’est encore la résistance des troncs mycéliens à la pha-
gocytose qui permet à la symbiose de s'établir chez l’Orobus
tuberosus et le Mercurialis perennis. Chez l’Orobus tuberosus,
les gros filaments, au lieu de pénétrer d’emblée dans les cel-
lules et de s’y pelotonner, commencent par cheminer en droite
ligne dans les méats intercellulaires ; ils émettent de là des
ramifications à angle droit, qui fear ae les cellules-corti-
cales et y forment des ae et des arbuscules (PI. VIT,
fig. 1). C’est alors seulement que la phagocytose entre en
scène ; comme dans le cas précédent, elle se limite élective-
ment aux arbuscules, et, grâce aux hyphes principales restées
intactes, l’infection continue à s’étendre. Mais ici, en outre
du mycélium à paroi mince par lequel l’endophyte se pro-
page, il se différencie des filaments enkystés, plus résistants
i
al En TE US a Nea a Rr nd
ni. Joe ae. ‘24 ee ee ts de
SYMBIOSE ET TOBERISATION 2927
encore, qui assurent la pérennance du Champignon (PI. VIT,
fig. 2). |
Chez le Mercurialis perennis, les troncs mycéliens princi-
paux forment, comme chez le Solanum tuberosum, des pelotons
_intracellulaires peu serrés ; ils résistent à la phagocytose et se
\
différencient, comme chez l’Orobus tuberosus, en filaments à
membrane mince, qui assurent l’extension de l’endophyte, et
en organes de pérennance enkystés (PI VIII, fig. 4 à 3).
Dans ces trois cas, si une association stable parvient à se
réaliser, c’est grâce à l’insuffisance de la phagocytose, qui,
s’exerçant de façon tardive et partielle, ne s'attaque pas aux
organes qui permettent au Champignon de progresser dans
les racines. Chez les Orchidées, l’établissement de la sym-
biose est de même lié à une réaction phagocytaire tardive
et lente, qui laisse au mycélium le temps de poursuivre ses
progrès. Si l’on inocule des semis de Phalænopsis avec le
Rhizoctonia. murcoroides [5, 6], le Champignon pénètre les
embryons, qui commencent dès lors à se développer ; il se
forme au pôle postérieur de la plantule une plage infestée où
les pelotons ne subissent aucune dégénérescence. La fonction
phagocytaire est ici dévolue à des cellules spécialisées, recon-
naissables à leur noyau multilobé,. qui se différencient en
arrière du méristème terminal. Dès que le Champignon
atteint cette zone de phagocytes, il subit la digestion intra-
cellulaire, mais cette digestion n’est pas assez rapide pour
protéger la partie antérieure de l’embryon ; quelques fila-
ments, échappés à la destruction, pénètrent les cellules situées
plus avant et poursuivent leur progression jusqu’au moment
où une nouvelle barrière de phagocytes ralentit à nouveau
leur marche, sans parvenir à l’enrayer (1).
30. L'’immunité humorale. — De la comparaison des
divers cas qui viennent d’être rapportés, il résulte que la
(1) Il n’en va pas de même lorsque, dans cette expérience, on substitue au
Rhizoctonia mucoroides le Rhizoctonia lanuginosa, endophyte des Odontoglos-
sum, incapable de s’adapter à la symbiose avec le Phalenopsis. Ce Ghampi-
gnon, comme le précédent, forme au pôle postérieur de l’embryon une plage
infestée ou les pelotons restent vivants, mais, dès qu’il envahit les phagocytes
situés en avant de cette zone, il y est rapidement digéré, et sa prose ae
est enrayée définitivement [5, 6].
©
228 J. MAGROU —
phagocytose, lorsqu'elle s’exerce de façon suffisamment
rapide et énergique, suffit à protéger les plantes contre l’in-
vasion des Champignons. Mais, si elle s’exerce de façon
tardive, partielle et lente, si elle respecte les organes qui
servent à la progression de l’endophyte, elle est impuissante
à enrayer sa marche, et une association stable peut s'établir.
Pourtant, dans ce cas même, le Champignon reste stricte-
ment localisé dans des tissus bien déterminés des plantes :
les méristèmes, en particulier, ne sont jamais atteints ; le
cylindre central des racines, les tubercules, les tiges aériennes
et (sauf exception) les tiges souterraines restent toujours
indemnes d’infestation. Il persiste donc, dans la symbiose
la mieux établie, un certain degré d’immunité, qui a pour
effet d'imposer des limites à l'extension du Champignon et
de protéger les tissus essentiels de la plante. La phagocytose
n'étant plus en pareil cas un moyen de protection efficace,
il faut chercher une autre cause à cette immunité.
Noël Bernarp [5, 6] l’attribue aux modes de végétation
très particuliers que les Champignons symbiotiques adoptent
dans la vie commune et qui ont pour effet de ralentir leur
marche. Le pelotonnement empêche le mycélium de progresser
par le plus court chemin et le contraint de rester longtemps
localisé dans chacune des cellules qu’il envahit. La formation
des arbuscules retarde plus sûrement encore la progression
de l’endophyte, puisque les rameaux grêles qui les constituent
sont incapables de franchir les cloisons cellulosiques et de
passer dans les cellules voisines de celles qu'ils occupent.
Ralentis par ce mécanisme, les progrès de l’infestation se
règlent, en quelque sorte, sur le développement de la plante
et ne peuvent s'étendre au delà de certaines limites ; la pro-
tection de la majeure partie des tissus de l'hôte = trouve
de la sorte assurée.
Or les pelotons et les arbuscules, formations constantes
dans les mycorhizes, ne se rencontrent qu’exceptionnelle-
ment chez les Champignons qui ménent une existence auto-
nome. Il est vraisemblable qu'il s’agit là de modes de végé-
tation anormaux, résultant d’une adaptation étroite à la vie
parasitaire, liés par conséquent à la nature physico- chimique
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ee SYMBIOSE ET TUBERISATION AA |
de la sève intracellulaire des plantes, autrement dit à une
propriété humorale. L’immunité dans la symbiose serait
dès lors comparable à l’immunité acquise des animaux
vaccinés ; on sait, en effet, que, dans le mécanisme de cette
immunité, les propriétés défensives des humeurs entrent en
ligne de compte et acquièrent une importance prépondérante.
En fait, les microbes, dans les humeurs des animaux vaccinés
contre eux, adoptent des modes de végétation anormaux,
qui ont pour effet d’entraver leur développement. Telle est,
par exemple, l’agglutination des Bactéries, qui se présente
dans l’immunité acquise comme un épisode à peu près cons-
tant, et que l’on peut rapprocher du pelotonnement intra-
cellulaire des Champignons symbiotiques.
31. Infections mortelles. — Il est d’ailleurs des cas où
les plantes, au lieu de détruire leurs hôtes par phagocytose,
ou de les tolérer en mettant en œuvre des réactions d’immu-
nité humorale, ne leur opposent aucune résistance et, se
laissant envahir en totalité, succombent à une maladie
infectieuse rapidement mortelle. C’est ce qui arrive notam-
ment lorsqu'on inocule des semis de Phalænopsis avec le
Rhizoctonia repens [5]: les embryons de Phalænopsis exposés
à l’action de ce Champignon sont envahis tardivement
par le mycélium, qui forme des pelotons dans les premières
cellules qu'il pénètre. Mais il ne se produit qu’une phago-
cytose insignifiante et, au bout d’un certain temps, les pelo-
tons eux-mêmes cessent de se former; dès lors, le Champi-
gnon progresse en droite ligne et en tous sens à travers les
cellules et envahit le corps entier de l'embryon, qui ne tarde
pas à succomber à cette infection généralisée. De même, les
embryons de Cattléyées qui ont enrayé par phagocytose
une première invasion du Rhizoctonia mucoroides se laissent
secondairement envahir en totalité par ce méme Champignon,
qui traverse les cellules en droite ligne, sans rencontrer aucune
résistance. Le fait que, dans ces infections mortelles, les
pelotons ne se forment pas montre bien que le pelotonnement
du mycélium, lorsqu'il se produit, est lié à une réaction
defensive des humeurs de la plante.
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250 J. MAGROU
J'ai observé un cas analogue chez un Solanum nigrum
qui s'était développé accidentellement dans une culture de
Solanum tuberosum en sol infesté. Les racines de cette plante
étaient assez largement envahies par un Champignon, qui
pénétrait indistinctement tous les éléments de la racine, sans
en excepter les vaisseaux libériens et ligneux. Le mycélium
cheminait en ligne droite à travers les cellules, sans y former
ni pelotons, ni arbuscules, ni sporangioles. Ici encore, l’absence
de réaction phagocytaire et d’immunité humorale permet-
tait au Champignon de franchir les limites qui, dans la sym-
biose, sont imposées aux endophytes. Au moment où la plante
a été prélevée, elle n’accusait encore aucun symptôme de
souffrance, mais il est vraisemblable qu’elle n’eût pas sur-
vécu longtemps à l’oblitération de ses vaisseaux (1).
32. Fonction fungicide des tubercules. — La réalité de
l’immunité humorale, que des faits de cet ordre laissaient.
prévoir, a pu être mise directement en évidence par l’expé-
rience suivante, due à Noël BERNARD [8]: on place au fond
d’un tube contenant une certaine quantité de gélose nutri-
tive un fragment découpé aseptiquement dans le tubercule
d’un Orchis ou d’un Loroglossum. Le fragment de tubercule
ainsi disposé laisse diffuser dans la gélose les produits solubles
qu'il renferme. Le Rhizoctonia repens, endophyte des Ophry- —
dées, est semé sur la gélose à quelque distance ; il commence
à s’accroître comme à l’ordinaire, mais bientôt sa croissance
s’arrête et, avant qu'ils aient atteint le fragment de tuber-
cule, les filaments du Champignon dépérissent à mesure que
les substances diffusées se répandent dans la culture ; en
quelques semaines, le Champignon est définitivement tué.
Cette action nocive des tubercules d’Ophrydées est spéci-
fique : elle s’exerce bien sur le commensal des Ophrydées,
mais non sur le Rhizoctonia mucoroides, commensal des
(1) Ce cas, en s’opposant à ceux où le Solanum nigrum met en œuvre une
phagocytose énergique, achève de faire ressortir l’instabilité de l’association
entre cette plante annuelle et les endophytes. L’association instable des
Cattléyées et du Rhizoctonia mucoroides offre, comme on vient de le voir,
de semblables alternatives entre une phagocytose efficace et l’absence totale
de réactions d’immunité.
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SYMBIOSE ET TUBERISATION 231
D npss et des Vanda : d'autre part, elle disparait
_ chez les tubercules chauffés à 55°. Il y a donc bien là un phé-
nomène de tout point comparable à la formation des anti-
corps qui se développent chez les animaux immunisés et qui
sont de même, comme l’on sait, spécifiques et peu résistants
à la chaleur. L'existence d’un anticorps fungicide localisé
dans les tubercules explique, par ailleurs, que ces organes
restent constamment indemnes de Champignons.
Chez les plantes 4 tubercules étudiées dans ce travail,
la difficulté de la culture des endophytes a été un obstacle
à la réalisation d’expériences du même type. Mais, si l’on
remarque que, chez la Pomme de terre et l’Orobe aussi bien
que chez les Orchidées, la tubérisation est liée à la symbiose,
on est conduit à supposer qu'iei encore les tubercules repré-
sentent des organes de défense, capables d’assurer la pro-
tection des plantes contre leurs envahisseurs.
33. Réactions de défense dans la symbiose lichénique. —
Les expériences de Noël BERNARD sur les Orchidées amènent
à considérer la symbiose comme le cas limite vers lequel tend
l’association de deux organismes antagonistes lorsque leurs.
forces s’équilibrent. Les faits qui viennent d’être décrits
chez les Solanum, les Orobus et les Mercurialis conduisent.
à la même conception, pour ces plantes appartenant à des
familles très diverses de Dicotylédones. Enfin des obser-
vations récentes de M. F. Moreau [35] montrent que cette
manière de voir est applicable au groupe des Lichens, chez
lequel pourtant la symbiose offre, a priori, touteslesapparences
de la plus parfaite harmonie. R
Chez le Ricasolia herbacea, Lichen de la famille des Se
tacées, quand des Cyanophycées viennent au contact de la
face inférieure du Lichen, il arrive que les cellules du Cham-
pignon se développent autour d'elles, formant avec les Algues
des tubercules, connus sous le nom de céphalodies, qui font
saillie à la face inférieure du thalle. Dans d’autres cas, les
Cyanophycees sont entrainées par les hyphes dans la pro-
fondeur du Lichen, et la céphalodie qui se développe, au
lieu de faire saillie à la surface, est profondément immergée
239 J. MAGROU
dans le thalle. Qu'il s’agisse de céphalodies externes ou
internes, il est fréquent que l’Algue ne soit pas tolérée par le.
Champignon ; une lutte s’engage entre les deux composants
du complexe, et elle se termine souvent par la dégénérescence
et la mort de l’Algue. « La symbiose limitée, éphémère et
facultative que l’on observe dans les céphalodies, s'oppose,
selon les termes mêmes de M. F. Moreau, à la symbiose
étendue, durable et apparemment nécessaire offerte par le
thalle ordinaire. » Elle est à mettre en parallèle avec l’asso-
ciation instable dont la Pomme de terre, l’Orobus coccineus,
le Mercurialis annua nous offrent des exemples, et qui, de
même, s'opposent à la symbiose durable observée chez
l’Orobus tuberosus, chez le Mercurialis perennis et, dans cer-.
tains cas, chez la Pomme de terre. D'ailleurs, d’après le
même auteur, dans la symbiose lichénique normale, on trouve,
limités à des plages restreintes, les phénomènes de mort et
de dégénérescence des Algues offerts par les céphalodies
immergées, de même que, chez les plantes à mycorhizes, on
observe, dans les cas de symbiose les mieux caractérisés,
une destruction partielle du Champignon par phagocytose.
34. Généralité des lois de l’immunité. — En résumé, les
Champignons symbiotiques rencontrent, lorsqu'ils tentent
d’envahir leurs hôtes, des obstacles de trois sortes. [ls sont en
premier lieu arrêtés par la résistance mécanique de la paroi
cellulaire des organes qu'ils attaquent. Ce premier obstacle
franchi, ils sont détruits plus ou moins précocement par pha-
gocytose. Enfin, dans les cas où l’adaptation réciproque des
deux organismes à la vie commune permet l'établissement de
la symbiose, leurs progrès sont limités par l'intervention de
propriétés humorales agglutinatives et fungicides.
Ce sont essentiellement les mêmes moyens de défense qui
sont mis en œuvre dans la lutte des animaux contre les micro-
organismes. Le tégumert externe et la muqueuse intestinale
représentent une barrière infranchissable pour la plupart
des microbes qui pullulent à la surface du corps ou dans le
tube digestif des animaux. Si, en dépit de cet obstacle méca-
nique, des microbes parviennent à s’introduire dans l’écono-
t SYMBIOSE ET TUBERISATION 235
mie, ils sont, le plus souvent, détruits par une réaction pha-
gocytaire précoce et rapide. S'il s’agit de microbes mieux
adaptés, ou, en d’autres termes, plus virulents, la guérison
par phagocytose peut être précédée d’une pullulation plus
ou moins importante des germes infectieux dans l'organisme.
Si la virulence, plus grande encore, l'emporte sur la résistance,
la phagocytose est impuissante à enrayer la marche de l’in-
fection, et l’animal succombe à l'invasion généralisée de
ses tissus. _ ¥
Mais si, au moyen de la vaccination, on accoutume l’ani-
mal à tolérer des microbes de plus en plus virulents, on voit
apparaître des processus nouveaux d’immunité, plus efficaces
que la phagocytose. Les humeurs acquièrent en pareil cas
des propriétés défensives, qui se répartissent en deux
grands groupes: propriétés agglutinatives ou précipitantes
d’une part et, d’autre part, propriétés bactéricides. Grace a
la mise en œuvre de ces moyens de défense, la marche de l’in-
fection peut étre enrayée efficacement.
Le parallélisme est donc frappant et se poursuit Jusque
dans les détails, entre l’immunité des plantes adaptées à la
symbiose et l’immunité des animaux acquise par vaccination.
Il n’y a rien là qui puisse surprendre si l’on observe, avec
Noël BERNARD [8], que l’immunité qui s’exerce dans la
symbiose est la forme la plus parfaite d’immunité acquise
que l’on puisse imaginer, puisque l’adaptation de la plante
à son commensal a été réalisée par des périodes géologiques
de vie commune.
L'étude de la symbiose montre que les lois de la patholo-
gie générale, telles qu’elles ont été déduites de longues recher-
ches sur les infections animales, permettent de coordonner,
chez les plantes aussi bien que chez les animaux, les phé-
nomèênes d'adaptation des microorganismes aux hôtes ca-
pables de les héberger. Elle permet, en les étendant au règne
végétal, de donner toute leur ampleur aux théories de l’im-
munité.
CHAPITRE V
MÉCANISME PHYSIQUE DE LA TUBÉRISATION
La relation entre la symbiose et la tubérisation étant
établie pour des plantes appartenant aux groupes les plus
variés, il reste à expliquer par quel mécanisme les Champi-
gnons symbiotiques peuvent modifier le mode de croissance
des tissus de leurs hôtes au point de provoquer la formation
de tubercules.
35. Action à distance des Champignons. — Il convient
de remarquer d’abord que l’action des Champignons s'exerce
à distance des cellules qu'ils envahissent. Les endophytes,
comme on l’a vu, ne pénètrent Jamais que des cellules accrues
et différenciées ; on ne saurait s’attendre à voir des tubercules
se former aux dépens de telles cellules, incapables de multi-
plication et de croissance. La tubérisation ne peut évidem-
ment se produire qu’au contact des zones méristématiques,
où les cellules, restées embryonnaires, gardent le pouvoir
de se diviser. Or les méristèmes ne sont jamais atteints par
les Champignons symbiotiques et sont souvent situés à de
grandes distances des régions infestées. Il faut donc admettre
que les endophytes localisés en certaines régions des plantes
interviennent en provoquant une modification générale de
l'équilibre physico-chimique de la sève, capable de retentir
sur les cellules méristématiques et d’entrainer des anomalies
de croissance. Des exemples de semblables actions à distance
sont d’ailleurs communs dans les infections animales: il est
fréquent que des Bactéries, localisées dans une région limitée
de l’organisme d’un animal, sécrètent des toxines qui dif-
fusent dans les humeurs et agissent électivement sur des
4
À
3
4
3
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 935
tissus souvent fort éloignés de la zone envahie, sur les centres
nerveux par exemple.
36. Mode de formation des tubercules. — Ceci posé, quelles
sont essentiellement les anomalies de croissance des méris-
tèmes qui ont pour conséquence la formation de tubercules ?
Lorsque le fonctionnement d’un méristème aboutit au
développement d’un organe de structure normale, d’une tige
feuillée, par exemple, les cellules qui proviennent de la divi-
sion des initiales s’accroissent en longueur sans s’épaissir
notablement. Il se constitue ainsi, immédiatement en arrière
du bourgeon terminal, une zone d’élongation, où la crois-
sance se fait dans le sens longitudinal. Ce mode de croissance
des cellules a pour conséquence la production d’une tige
orele, à entre-noeuds allongés. Il n’en est pas de même lors-
qu'un tubercule se forme aux dépens du-bourgeon. En pareil
cas, les cellules issues des cloisonnements du méristème
restent relativement courtes, mais s’accroissent notable-
ment dans le sens transversal, si bien que, tout en augmentant
leur volume, elles restent isodiamétriques, comme les cellules
embryonnaires d’où elles dérivent. L’ensemble de ces cellules
accrues en épaisseur constitue non un organe grèle, comme
dans le cas précédent, mais un tubercule épais dont les entre-
nœuds, sil s’agit d’une tige, restent courts. La forme de la
plante résulte donc, en dernière analyse, du mode de crois-
sance de ses cellules ; la tubérisation se produit lorsque la
croissance par épaississement se substitue à la croissance
normale par élongation.
Le problème se réduit, par conséquent, à rechercher les
modifications physico-chimiques du suc cellulaire capables
d'entraîner la croissance transversale des cellules, et à exa-
miner si des modifications de cet ordre peuvent être engen-
drées par les Champignons symbiotiques.
37. Croissance transversale chez les Thallophytes. — Le
mécanisme de la croissance par épaississement se présente
avec le maximum de simplicité et, en quelque sorte, sous sa
forme élémentaire chez les organismes unicellulaires, ou
236 À - J. MAGROU : »
tout au moins chez les Thallophytes inférieurs, formés de
cellules peu différenciées. C’est le cas des Algues filamenteuses
telles que les Stugeoclonium, généralement constituées par
des files de cellules allongées, mais qui peuvent, dans certaines
circonstances, former des masses palmelloïdes épaissies, à
cellules isodiamétriques. M. Livineston [20] a étudié le
déterminisme de la croissance palmelloïde de ces Algues ;
cultivant des Stigeoclonium dans des solutions de même
composition chimique, mais de concentration variable, il a
constaté que le passage de la forme filamenteuse à la forme
massive pouvait être obtenu par un simple aceroissement de
la concentration. Le phénomène est d’ailleurs réversible, et
l’on peut inversement passer de la forme palmelloïde à la
forme filamenteuse, en diminuant la concentration. Dans
une autre série d’expériences, M. Livineston [21, 22] a fait
varier, en outre, la composition chimique du liquide nutritif ;
il a observé que la concentration critique pour laquelle le
passage d’une forme à l’autre est réalisé différait suivant la
nature chimique des substances dissoutes.
J’ai observé une action de même sens de la concentration
sur le mode de croissance des cellules chez une Bactérie
(Bacillus Diphteriæ). Le Bacille diphtérique, cultivé sur les
milieux nutritiis usuels, se développe sous forme de batonnets
grêles. Immergé dans les mêmes milieux additionnés d’une
certaine proportion de glucose, il donne naissance à des
cellules fortement renflées en fuseau, ayant l’aspect de
Radis microscopiques.
38, Influence de la concentration. — Chez les plantes supé-
rieures, de très nombreuses expériences montrent que la
croissance transversale des cellules et la tubérisation qui
en découle peuvent dépendre de même de la concentration
des substances dissoutes dans le suc cellulaire. M. E. Lau-
RENT [19] a montré que l’on peut obtenir des tubercules sur
des tiges aériennes de Pomme de terre coupées et plongées
dans une solution de saccharose suffisamment concentrée.
Noël BERNARD [2,3] a repris ces expériences et en a précisé
l'interprétation : des tiges de Pommes de terre coupées sont
BND
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 237
plongées dans des solutions de glucose, de saccharose, de gly-
cérine ou de chlorure de potassium diversement concentrées.
Les bourgeons axillaires de ces boutures se développent soit
en tubercules, soit en rameaux feuillés, suivant la concen-
tration de la solution. Au-dessus d’une concentration molé-
culaire, ou plutôt d’une pression osmotique critique, toujours
la même, quelle que soit la substance dissoute, il se forme des
tubercules, tandis que, pour les concentrations plus faibles,
il se développe régulièrement des rameaux. Des solutions
très différentes au point de vue chimique donnent donc
des résultats comparables, pourvu qu’elles soient isotoniques.
Cette expérience montre que la tubérisation dépend moins
de la nature chimique des substances dissoutes et de leur
valeur nutritive que des propriétés physiques que les solu-
tions tiennent de leur concentration moléculaire.
Dans une série d'expériences fort suggestives, portant sur
des espèces variées, M. MozLrarp [29, 33] a montré que
l’on pouvait provoquer la tubérisation en l’absence de tout
microorganisme, en élevant, par un artifice convenable, la
teneur en sucres de la sève des plantes. Des graines de Radis,
semées aseptiquement sur des solutions salines glucosées,
développent des racines grêles. Semées sur les mêmes solu-
tions additionnées d’une certaine proportion de glucose ou de
saccharose, elles donnent des plantules à racine principale
tubérisée. Des expériences comparables, à quelques variantes
près, ont été réalisées pour des plantes diverses, telles que
J’Oignon, la Carotte, le Dahlia (1). |
Par contre, à partir de graines de Pomme de terre semées
dans les mêmes conditions, le même auteur [31] a constam-
ment obtenu des plantules dépourvues de tubercules, que le
milieu nutritif minéral fût ou non additionné de 5 à 10
(1) La Carotte et le Dahlia, à la différence du Radis et de l’Oignon, se sont
montrés incapables d'utiliser les sucres de la solution nutritive. C’est en faisant
circuler dans les tubes de culture de l’air chargé de gaz carbonique, de manière
à assurer une assimilation chlorophyllienne intense, que M. MozLrARD a pu
obtenir la tubérisation aseptique de ces deux espèces. Chez l’Oignon, dans des.
conditions d’éclairement convenables, la tubérisation aseptique a pu être
obtenue sur des milieux très dilués (eau de source stérilisée). Les substances.
dissoutes nécessaires à la tubérisation sont dans ces cas fournies par la photo-
synthése.
238 7 J. MAGROU
p. 100 de glucose. Attribuant dans ce cas l’absence de
tubérisation à une utilisation insuffisante des sucres de la
solution, il a augmenté l’absorption du glucose par les
racines en supprimant les échanges gazeux des tubes de
culture avec l’air extérieur. Dans des tubes où, à cet effet,
le bouchon d’ouate avait été remplacé par un bouchon de
caoutchouc, les graines ont donné des plantules formées d’une
tige épaisse et courte, à entre-nœuds raccourcis, à feuilles
réduites à des écailles atrophiées, présentant en un mot les
traits essentiels de la tubérisation ; les cellules parenchy- :
mateuses de ces plantules anormales renfermaient d’ailleurs
de nombreux grains d’amidon, qui font défaut dans les tiges
ordinaires de Pomme de terre.
39. Tubérisation aseptique des Orchidées. — D’après ces
expériences, le passage de la croissance par élongation à la
croissance par épaississement parait dépendre, dans la plupart
des cas, d’une élévation de la pression osmotique du liquide
qui baigne les cellules. Chez les Orchidées même, où le rôle
du Champignon dans la germination des graines et la tubé-
risation des embryons a été vérifié de la façon la plus décisive,
Noël BERNARD a montré, par une série de belles expériences,
que l’action du parasite pouvait se ramener à un mécanisme
physico-chimique de même type. Les recherches de cet ordre
ont porté sur le Bletilla hyacinthina et sur les Cattléyées [5].
La première de ces Orchidées représente l’un des types
les plus primitifs de la famille ; on sait qu’elle peut germer
avec ou sans le concours de Champignons. Semées sans
Champignons sur des milieux nutritifs dilués, où Vabais-
sement du point de congélation A est de 00,01, elles se
développent lentement en plantules grêles, à entre-nœuds
allongés. Associées, sur les mêmes milieux, à des Champi-
gnons d'activité croissante, elles ont un développement plus
rapide et produisent un tubercule embryonnaire d’autant
plus précoce et d’autant plus volumineux que le mycélium
employé est plus virulent. Si, d’autre part, on augmente la
concentration, sans faire intervenir les Champignons, on
constate que, pour des concentrations encore relativement
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 239
_ faibles (A = 09,02), la croissance devient plus rapide, mais
se fait encore par élongation, tandis que, pour des concentra-
tions fortes (A = 00,04 et mieux encore A = 00,06), le mode
_de croissance change :. la plupart des plantules présentent
un tubercule embryonnaire et des entre-nœuds courts. Si l’on
compare les plantules obtenues sans Champignons à des con-
centrations de plus en plus élevées, à celles qui se sont
développées à une même concentration avec des Champi-
enons de plus en plus actifs, on constate un parallélisme
étroit entre les deux séries de cultures. L’accroissement de
concentration des solutions, conclut Noël BERNARD, pour les
plantules élevées sans Champignons, entraine les mêmes résul-
tats que l'accroissement d'activité des Champignons pour les
plantules soumises à la symbiose. |
Les expériences sur les Cattléyées ont donné des résultats
de même ordre. Semées sans Champignons sur des milieux
dilués, les graines de Cattléyées ne germent pas. Sur des
milieux plus concentrés, elles sont au contraire capables
de germination autonome et se développent en donnant des
plantules tubérisées conformes au type habituel. Adaptées
enfin à vivre sans Champignons sur des milieux très forte-
ment concentrés, elles développent des tubercules embryon-
naires volumineux et présentant des anomalies comparables
à celles que Noël BERNARD a obtenues dans certains cas
d'associations anormales.
40. Mécanisme de l’action des Champignons. — Ces résul-
tats amènent logiquement à conclure que les Champignons
agissent sur la croissance en produisant dans les cellules de
leurs hôtes, grâce aux diastases qu'ils sécrétent, des dislo-
cations moléculaires qui ont pour effet d'élever la concentra-
tion de la sève. Cette augmentation de la concentration ne
se limitant évidemment pas aux régions envahies par les
parasites, on conçoit que ses effets puissent se faire sentir
‘à distance.
Noël BERNARD a vérifié cette vue théorique en constatant
que les Rhizoctones d’Orchidées sont capables d'augmenter
la concentration des solutions où on les cultive. Des tubes |
240 | J. MAGROU
de culture contenant une décoction de salep additionnée de
saccharose sont stérilisés, puis placés à l’étuve à 279, les uns
sans Champignons, les autres après ensemencement de divers
Rhizoctones. Après vingt-cinq jours, tandis que l’abaisse-
ment du point de congélation était de 00,38 dans les solutions
stériles, il atteignait 00,64 dans les solutions ensemencées
de Rhizoctonia mucoroides. La présence des Rhizoctones
entrainant une augmentation trés notable de concentration
de la solution employée (1), il est naturel de penser que ces
Champignons agissent de méme dans les cellules qu’ils en-
vahissent.Cette action in vivo est d’ailleurs prouvée directement
par le fait observé par Macnus [23], par Noël BERNARD et
par moi-même, de la disparition de l’amidon dans les cellules
infestées ; la dislocation d’un composé colloidal tel que
l’amidon est parmi celles qui peuvent au mieux entrainer
une augmentation de la pression osmotique du suc cellulaire.
Ainsi les Champignons symbiotiques engendrent préci-
sément, dans les milieux où ils végètent, les modifications
physico-chimiques par lesquelles on a pu provoquer arti-
ficiellement la croissance par épaississement. Le mécanisme
de l’action de la symbiose sur la tubérisation se trouve de la
sorte éclairé. Au reste, le cas des plantes à tubercules n’est
pas le seul où les actions complexes exercées dans la nature
par des parasites spécifiques ont pu être ramenées à des
mécanismes physico-chimiques plus simples. |
41. Mécanisme des actions cécidogènes. — En semant
aseptiquement des graines de Pois sur des filtrats de culture
de Rhizobium radicicola Beyer., M. MorzraRD [30] a obtenu
des plantules à racines courtes et fortement épaissies, pré-
sentant des phénomènes d’hyperplasie et d’hypertrophie
comparables à ceux qui caractérisent les nodosités radicales
produites dans la nature par le Rhizobium lui-même. Le même
auteur [32], en inoculant dans le pistil du Papaver Rhæas
un extrait aqueux de larves de l’Aulax Papaveris, aobtenu
(1) Cette augmentation ne tient pas à l’évaporation, qui est sensiblement
la même pour tous les tubes, mais sans doute à une inversion partielle du
saccharose. : |
#4
SYMBIOSE ET TUBERISATION | 244
une hypertrophie des lames placentaires semblable à celle
que provoque la piqûre de ce parasite. Ces deux exemples
montrent que l’hypertrophie réalisée dans certaines cécidies
peut être obtenue artificiellement en dehors de l'intervention.
des parasites. | |
Mais il s’agit la encore d’actions spécifiques, provoquées
par des substances chimiques complexes élaborées par les
parasites eux-mêmes. Dans d’autres cas, des hyperplasies,
qui dans les conditions naturelles relèvent d’actions parasi-
taires, ont pu être réalisées sous l’action de facteurs phy-
siques simples, sans qu’aucune substance spécifique soit mise
en jeu. Etudiant le mécanisme d’action du Bacterium tume-
faciens, qui provoque chez diverses plantes des tumeurs
comparables par leur structure et leur mode d'extension —
au cancer des animaux, M. Erwin Sutra [41] a inoculé dans
des tiges de Ricin des substances chimiques définies, trouvées
dans les cultures de cette Bactérie et résultant de son méta-
bolisme. I] a obtenu, par ce moyen, la production d’excrois-
sances présentant quelques-uns des traits de structure qui
caractérisent les galles dues au Bacterium tumefaciens même.
Les substances capables de produire de tels effets sont très
variées, puisqu'elles comprennent des sels ammoniacaux, des
amines, des aldéhydes, des acides tels que l’acide acétique
et l’acide formique. Ce n’est donc pas par leur nature chi-
mique qu'elles agissent, mais bien par un mécanisme phy-
sique qui doit être le même dans tous les cas, et qui, selon
M. SuiTx, consiste vraisemblablement en une modification
de la pression osmotique.
Les faits rapportés dans ce chapitre montrent que les
actions parasitaires spécifiques, qui, dans la nature, abou-
tissent à la production d'anomalies de croissance et de struc-
ture, peuvent souvent être ramenées à des mécanismes
physico-chimiques d’ordre banal, parmi lesquels les varia-
tions de la concentration moléculaire jouent un rôle fonda-
mental. Ils sont à rapprocher de la parthénogenèse expéri-
mentale, où des facteurs physiques de même nature se substi-
tuent efficacement à l’action spécifique des spermatozoïdes.
ANN. DES SG. NAT. BOT., 40e série. 49215 1 16
242 J. MAGROU
Les expériences de tubérisation aseptique sous l'influence
de solution concentrées, en rendant compte du mode d’action |
des parasites, complètent heureusement la théorie qui attri--
bue à la symbiose un rôle prépondérant dans la production
normale des tubercules. Mais elles n’infirment pas plus cette
théorie que les expériences de parthénogenèse ne diminuent
l'importance de la fécondation comme facteur de la segmen-
tation des œufs. En transportant dans le domaine de la chimie.
physique quelques-uns des problèmes complexes et obscurs.
de la biologie, elles permettent de pénétrer plus profondément.
le mystère des phénomènes vitaux.
?
CHAPITRE VI
ESSAIS DE CULTURE DES CHAMPIGNONS ENDOPHYTES
Il serait d’un grand intérêt, pour le sujet qui nous occupe,
d'isoler en culture pure les Champignons de mycorhizes
et d'appliquer dans toute leur rigueur, à l’étude expéri-
mentale de la symbiose, les techniques pasteuriennes,
ainsique Noël BERNARD a pu le faire dans le cas des Orchidées.
Malheureusement la culture des endophytes se heurte à des
difficultés considérables. Après avoir rappelé brièvement
quelques-unes des tentatives des auteurs qui ont abordé
ce problème et insisté sur les résultats positifs obtenus par Noël
BERNARD pour les Champignons des Orchidées et, plus récem-
ment, par M. Rayner pour celui des Calluna, j'exposerai
dans ce chapitre les essais de culture de l’endophyte des
Solanum que j'ai été amené à tenter.
42. Premières tentatives. — La méthode primitivement
employée dans les recherches de cet ordre consistait à aban-
donner en milieu humide, ou sur des substratums nutritifs
variés, des fragments ou des coupes de racines infestées,
préalablement lavées à l’eau stérile. Les auteurs qui, à
l'exemple de WaxrLicx [42], ont eu recours à cette technique
ont obtenu, avec une certaine constance, des Fusarium repré-
sentant les formes conidiennes de diverses espèces de Nectria ;
ils ont généralement conclu de ces résultats que les Cham-
pignons de mycorhizes étaient des Fusarium.
M. GazLaup [17] a fait une critique serrée de ces expé-
riences. Ila montré, d’une part, que les techniques employées
étaient défectueuses et n’assuraient pas l’asepsie de la surface
extérieure des racines; il a, d’autre part, obtenu des Fusarium
244 J, MAGROU
a partir de racines ou d’organes divers non infestés, avec la
même constance que lorsqu'il s’agissait de mycorhizes. Il
a enfin tenté d’inoculer ces Champignons à des plantules |
aseptiques d’espéces variées et a constaté qu'ils ne péné-
traient jamais les racines des plantules vigoureuses ; seules
les plantules moribondes étaient envahies par le mycélium,
qui pénétrait indistinctement tous les tissus, sans y donner
aucune des formes caractéristiques des endophytes. Il con-
clut de ces résultats négatifs que les Fusarium ne sont pas
les formes libres des endophytes.
Le même auteur a tenté l'emploi de méthodes d'isolement
plus parfaites ; ayant semé en cellules de Van Tieghem, sur
des milieux nutritifs variés, des coupes fines de racines infes-
tées, il a constaté, par des examens microscopiques répétés,
que le mycélium interne n’y subissait aucun changement ;
les moisissures qui se développaient dans certains cas par-
taient toujours de la surface et n’étaient que des impuretés
banales. Dans une autre série d'expériences, il a tenté l’ino-
culation à des plantules aseptiques des divers Champignons
obtenus par les méthodes d'extraction directe. Il a pu ainsi
obtenir des infestations artificielles de thalles d’Hépatiques
ou de voiles d’Orchidées, mais, dans tous ces cas, le mycélium
pénétrait les cellules en droite ligne, sans former les pelotons,
les vésicules et les arbuscules caractéristiques des Champi-
gnons de mycorhizes. En l’absence du critérium de l'inocu-
lation, qui autorise seul a conclure à la spécificité des germes
isolés, M. GALLAUD admet que les divers Champignons qu'il
a expérimentés n’ont rien de commun avec les endophytes.
43. Les endophytes des Orchidées. — Noël BERNARD a
résolu le problème en réalisant la culture pure des Champi-
gnons des Orchidées. Ayant semé sur de la gélose au salep
des plantules provenant de semis faits en serre, ou des frag-
ments découpés dans des racines contaminées, 1l obtint le
développement de Champignons variés et constata que l’un
d’eux, introduit dans des semis aseptiques de graines d’Or-
chidées, les faisait germer régulièrement [4]. Les plantules
provenant de la germination de ces graines présentaient
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 245
d’ailleurs le mode d’infestation caractéristique. La preuve
était ainsi faite de l'identité de ce mycélium avec l’endophyte.
Par la suite, Noël BERNARD perfectionna ses méthodes d’iso-
lement [5]; il réussit à extraire sous le microscope, au
moyen d’une fine aiguille de platine stérilisée, les pelotons
intra cellulaires qui infestent les racines et les embryons
d’Orchidées, et à les transporter aseptiquement sur les
milieux de culture appropriés. Dans ces conditions, les pelo-
tons se développent et donnent d'emblée une culture pure de
l’endophyte.
Les Champignons ainsi obtenus, caractérisés par leurs
hyphes cloisonnées, rarement pelotonnées dans les cultures;
et par le développement tardif de filaments moniliformes
ramifiés, à articles courts et renflés, ressemblent étroitement
au Rhizoctonia Solani Khün (= Rhizoctonia violacea Tulasne).
Cette ressemblance a permis 4 Noél BERNARD de les rapporter
au genre Rhizoctonia. Il en a décrit trois espèces : l’une, le
Rhizoctonia repens, très répandue, est commune à un grand
nombre d’Orchidées ; les deux autres, qui se distinguent
essentiellement de la première par la production de sclérotes,
sont spéciales à un petit nombre de genres : ce sont le Rhi-
zoctonia mucoroides, commensal des Phalænopsis et des Vanda,
et le Rhizoctonia lanuginosa, commensal des Odontoglossum.
Ces résultats ont été pleinement confirmés par les recherches
de M. Burcerr [11, 12], qui a isolé les mêmes Champi-
gnons d’un grand nombre d’Orchidées tropicales et indigènes.
Mais, à la différence de Noël BERNARD, M. BURGEFF ne se
préoccupe pas de leurs affinités ; il les décrit sous le nom
générique d’Orcheomyces et adopte, comme nom spécifique.
de chacun des types isolés, le nom d’espèce de l’Orchidée qui
Vhébergeait.
_ Tout récemment, MM. Costantin et Durour [14] ont
apporté une confirmation nouvelle des travaux de Noël BEr-
NARD enisolant le Champignon encore inconnu d’une Orchidée
acclimatée dans nos contrées, le Goodyera repens. En semant
les pelotons extraits des racines de cette plante sur des milieux
nutritifs variés, ces auteurs ont obtenu une grande propor-
tion de cultures pures d’un Rhizoctonia appartenant à une
RD US ASS DE PR EE CS 2 re CNT a
CNRS + à TR A EM AP ce RTS
LE 4 ste
246 J. MAGROU
espèce nouvelle, qu’ils décrivent sous le nom de Rhizoctonia
Goodyeræ repentis.
La découverte de Noël BERNARD a été féconde en Ti à :
elle a fourni le moyen d’appliquer à l’étude de la bit
chez les Orchidées les méthodes les plus précises et de varier
largement les conditions expérimentales. En révélant chez
les Rhizoctones des variations d’activité comparables aux
variations de virulence des Bactéries, elle a permis de répéter,
dans le cas des Orchidées, les expériences classiques par les-
quelles PASTEUR a ph les lois de:l’infection bactérienne
chez les animaux.
44, L’endophyte du « Calluna vulgaris ». — Les endophytes
d’Orchidées sont restés les seuls que l’on sit obtenir en cul-
tures pures, Jusqu'au jour où M. Rayner [38, 39] réussit à
cultiver le Champignon symbiotique du Calluna voul-
garis. On sait que la symbiose n’est pas moins constante
dans le groupe des Éricacées que dans celui des Orchidées.
M. Rayner essaya d’abord d'isoler le Champignon des
Bruyères en semant sur des milieux nutritifs convenables
des fragments de racines infestées ; il ne réussit par ce moyen
qu'à cultiver les moisissures banales que ces racines portent
à leur surface. Mais, par une circonstance heureuse, le com-
mensal du Calluna ne reste pas strictement localisé dus les
racines ; il envahit les tiges et pénètre jusque dans les car-
pelles, si bien qu’on le retrouve à l’état de pureté dans la
cavité des fruits mûrs et dans le tégument des graines. On
peut de là le transporter aseptiquement sur des milieux gélo-
sés additionnés d’extrait de Calluna et obtenir son dévelop-
pement en culture pure. Le Champignon ainsi isolé est un
Phoma ; M. Rayner a vérifié qu'il s’agissait bien de
Yendophyte spécifique en l’inoculant à des semis aseptiques
de graines de Calluna vulgaris et en reproduisant ainsi
l'infestation caractéristique.
45. L’endophyte des « Solanum». —Si la question de l’isole-
ment et de l’identification des Champignons de mycorhizes
était résolue pour les Orchidées et les Bruyères, elle restait
entière pour les autres groupes de végétaux, qui, en
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 247
nombre immense, sont soumis à la symbiose. Aussi, lorsque
Noël BERNARD, à la suite de ses recherches sur les Orchidées,
“reprenait l'étude de la symbiose chez les Solanum, son pre-
mier souci fut-il de tenter l'isolement de l’endophyte de ces
plantes [9].
Les semis, sur gélose au salep ou au jus de Pomme de terre,
de fragments infestés de racines de Douce-Amère, lui ont
fourni, à plusieurs reprises, parmi des moisissures sans
intérêt, une Mucorinée qui a retenu son attention par ses
caractères morphologiques et par l’action favorisante qu’elle
exerçait sur la germination des graines de Solanum Dulcamara.
Le Champignon dont il s’agit est constitué par des filaments
rampants, vésiculeux, formant un voile épais ; plus tard, il
développe des sporanges, qui parfois avortent, formant
alors de véritables vésicules qui germent en donnant direc-
tement du mycélium. Enfin, les filaments aériens qui
retombent sur le verre humide ou la gélose donnent en abon-
dance des rameaux ramifiés, grêles, rappelant les arbuscules.
L'étude de ce Champignon a été interrompue avant que’
l'auteur en ait pu tenter l’inoculation à des plantules de
Solanum. Aussi, en l’absence du critérium fourni par l’infes-
tation expérimentale, Noël BERNARD s’abstient-il de conclure
à son identité avec l’endophyte.
46. Le « Mucor Solani». — J’ai tenté d'isoler à nouveau cette
Mucorinée à partir de racines infestées de Solanum. Malheu-
reusement la technique élégante employée par Noël BERNARD
pour l'isolement des Rhizoctones s’est montrée inapplicable
ici. Si l’on peut, au prix d’une certaine dextérité, extraire
sous le microscope les pelotons bien distincts qui occupent
les cellules des volumineuses racines d’Orchidées, il n’en est
pas de même des arbuscules, qui forment dans les plus fines
radicelles de la Douce-Amère et de la Pomme de terre un
chevelu inextricable. Il est possible, néanmoins, d'éliminer
les saprophytes superficiels au moyen d’un brossage méca-
nique des racines dans du sable humide stérilisé. Des coupes,
pratiquées avec des instruments flambés dans des racines
infestées ainsi traitées, ont été transportées sur des milieux
248 | ._ J. MAGROU
nutritifs gélosés (1). Elles y sont restées indéfiniment sté-
riles, et le mycélium spécifique qu’elles renfermaient ne s’est
pas plus développé que les moisissures banales (2). -
Ces essais infructueux suggéraient que les arbuscules,
ainsi que l’avait prévu Noël BERNARD, représentaient des
formes beaucoup plus étroitement adaptées à la vie para-
sitaire que les pelotons des Orchidées, et qu'ils étaient
sans doute incapables de se développer à l’état autonome.
Mieux valait donc, malgré les risques de contamination par
la flore saprophyte superficielle, tenter de bouturer le mycé-
ium extérieur pris au moment de sa pénétration dans les
racines.
A cet effet, des racines infestées de plantules de Solanum
Dulcarama ont été lavées au pinceau dans plusieurs bains
successifs d’acide tartrique à 0,5 p. 100, puis découpées en
menus fragments qui ont été transportés sur des tranches de
Pommes de terre stérilisées, enfermées dans des tubes de
Roux. Les fragments semés ne tardent pas être envahis par
une multitude de Bactéries et de moisissures. Au cours de
très nombreux essais, j’ai isolé, à trois reprises, parmi ces
impuretés banales, un Mucor présentant le caractère du Cham-
pignon décrit par Noël BERNARD. Transporté sur des mi-
lieux gélosés, ce Mucor donne d’abord des cultures incluses
dans la gélose (3), puis développe des filaments aériens,
dressés, portant des sporanges. Les gros trones mycéliens
inclus dans le substratum donnent naissance à des arbuscules
et à des vésicules semblables à ceux que l’on observe dans les
mycorhizes. Les arbuscules, portés latéralement par les
(1) Le milieu employé pour cet essai était une gélose additionnée d’un extrait
obtenu par macération dans l’eau à 80° de fragments de tubercules de Pomme
de terre. Avant la répartition dans les tubes de gélose, l’extrait était stérilisé
par filtration sur porcelaine.
(2) J’ai pu m’assurer de l’inertie complète des endophytes intracellulaires
en res en cellule de Van Tieghem de petits groupes de cellules infestées
découpées aseptiquement, sous le microscope, dans des thalles de Fegatella
conica. Les fragments semés ont été dessinés à la chambre claire, et des examens
répétés chaque jour pendant un mois ont montré que les pie mycéliens
ne subissaient pas le moindre changement.
(8) La gélose additionnée d’une décoction de tubercules a’ Oran tuberosus
permet au mieux de mettre en évidence les caractères morpbolega les
plus intéressants de ce Champignon,
M,
74
D.
ie
x
à.
5
we
a
¥
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 249
filaments principaux, sont formés de rameaux d’une ténuité
extrême, ramifiés dichotomiquement et formant des enche-
vétrements complexes (Pl. IX, fig. 1). Les vésicules sont des
sporanges avortés, capables de germer en filaments mycéliens.
Ce Champignon, qui paraît appartenir à une espèce nouvelle et que je dési-
gnerai sous le nom de Mucor Solani, répond à la diagnose suivante :
Mucor Solani. — Sporangiophores dressés, le plus souvent non ramifiés
(exceptionnellement ramifiés près du sommet). Gazon de 2 à 4 centimètres
de haut, serré et fin, blanc cotonneux. Sporanges sphériques de 36 uv de dia-
mètre moyen (dimensions extrêmes : 30 à 57 u), ou subsphériques (25 x 244
à 45 x 42u), gris ou brun jaunâtre. Membrane laissant une collerette. Colu-
melles sus-jacentes, sphériques ou légèrement aplaties à la base, de 16 u, 5 de
diamètre. Spores lisses ellipsoïdes, rarement rondes, ordinairement de 46,5
xX 3 u (dimensions extrêmes : 3 xX 3u à 7 X 5 u).
Zygospores inconnues. :
Le Mucor Solani est une espèce voisine du Mucor hiemalis Wehmer ; il en
diffère par ses columelles sus-jacentes et par la forme de ses spores, qui sont
moins allongées. .
47. Inoculations expérimentales. — Dans les mois qui ont
suivi son isolement, ce Mucor a été inoculé par piqûre au
voisinage de plantules aseptiques de Pomme de terre, déve-
loppées soit dans de la terre stérilisée, sort dans des solutions
nutritives gélosées. Les radicelles exercent une attraction
manifeste sur le Champignon qui, alors qu'il croît faiblement
dans la profondeur du milieu environnant, prend autour
d'elles un développement exubérant. Elles apparaissent en
coupe entourée d'un épais réseau mycélien qui forme une
sorte de mycorhize ectotrophe. Au contact de la racine, le
mycélium différencie d'énormes dilatations vésiculeuses en-
kystées, qui rappellent de très près les formes de pénétration
de l’endophyte. Ces vésicules sont découpées par des inci-
sures en digitations dirigées vers la racine (Pl. IX, fig. 2);
plus tard, il se développe des disques adhésifs appliqués
contre la paroi de l’assise subéreuse, qu'ils invaginent au
moyen de bourgeons en forme de coin (PI. IX, fig. 3).
A un stade ultérieur, le mycélium pénètre dans la racine,
et, au lieu de croître en droite ligne à travers tous les tissus,
à la manière des impuretés banales, il se localise dans les
cellules corticales, où 1l forme des pelotons très comparables
à ceux de l’endophyte (Pl. IX, fig. 4). Il développe même des
28 FL MAGROU > ee
ébauches war buaeulost (PL. IX, fig. 5) et donne naissance à
des vésicules intracellulaires parfaitement caractérisées —
(PI. IX, fig. 6). Par ses figures de pénétration très particu-
lières et par son mode de développement intracellulaire, ce
Champignon ressemble donc à l’endophyte des Solanum ; des
expériences plus complètes sont encore nécessaires pour a
der s’il doit lui étre identifié; mais il existe déjà de fortes
présomptions en faveur de cette identité.
CHAPITRE VII
SYMBIOSE ET ÉVOLUTION
48, Résumé général. — Les principaux résultats établis
dans ce qui précède peuvent être résumés comme il suit :
19 Chez la Pomme de terre et l’Orobus tuberosus issus de
graines, l'établissement de la symbiose entraîne la tubé-
risation des bourgeons de la base de la tige. Si l’on sous-
trait ces plantes à l’action des Champignons symbiotiques,
sans faire varier les autres conditions de leur vie, ces
mêmes bourgeons se différencient en tiges grêles et ne pro-
duisent pas de tubercules.
20 Tandis que le cycle évolutif de la Pomme de terre est
caractérisé par une alternance bien marquée des phases de
différenciation et de tubérisation, chez l’Orobus tuberosus,
les tubercules une fois formés continuent à s’accroitre indé-
finiment. Le premier de ces types de développement est lié
à une symbiose intermittente, le second à une symbiose
continue.
3° Diverses plantes (Pomme de terre, Orobus tuberosus,
Ophrydées) peuvent, commeil résulte de ce qui précède, adopter
deux modes de développement, selon qu’elles sont soumises ou
non à la symbiose ; dans le premier cas, elles sont réduites
à une tige aérienne unique et produisent des organes péren- |
nants aux dépens de leurs bourgeons basilaires ; — dans le
second cas, elles sont rameuses dès la base et dépourvues
d'organes pérennants. Il existe des exemples d’espèces d’un
même genre, telles que le Mercurialis perennis et le Mercu-
rialis annua, qui se distinguent essentiellement par des
caractères végétatifs de même ordre; dans ce cas encore,
on retrouve la même relation que précédemment entre la
symbiose et le port de la plante.
252 ‘J. MAGROU
40 II résulte des statistiques relatives à la répartition des
mycorhizes que, en règle générale, les plantes vivaces sauvages
hébergent des Champignons, tandis que les plantes annuelles
en sont dépourvues. L'étude de trois plantes annuelles (Orobus
coccineus, Mercurialis annua, Solanum nigrum) montre que
ces végétaux peuvent, comme leurs congénères vivaces, se
laisser pénétrer par les endophytes, mais qu'ils s’en affran-
chissent totalement, à brève échéance, par une phagocytose
énergique.
59 Dans tous les cas étudiés, la symbiose peut être définie
comme la limite vers laquelle tend l'association de deux com-
mensaux quand leurs actions réciproques s’équilibrent. Les
plantes résistent, avec des succès divers, à l’attaque des Cham-
pignons, en mettant en ceuvre successivement des processus
d’immunité mécanique, cellulaire et humorale. On reconnait
la les réactions essentielles qui caractérisent l’immunité
dans les maladies animales. |
Tous ces faits sont rigoureusement RE ene à ceux
que Noël BERNARD a mis en évidence chez les Orchidées ;
ils sont conformes aux prévisions de la théorie qu’il a déduite
de l’étude de ces plantes et, par la, en confirment la valeur.
& Le moment est donc venu de rappeler la portée générale
de cette doctrine et de passer en revue les faits récemment
établis qu’elle permet de coordonner.
_ 49. Hérédité et variation. — L'existence de tubercules,
leur forme et leur structure, représentent chez une plante
donnée des caractères stables et héréditaires, que les systé-
maticiens font figurer dans la diagnose de l’espèce, et qui sont
généralement d’un bon usage pour sa détermination. Or
nous venons de voir que ces caractères sont sous la dépen-
dance étroite du parasitisme de Champignons. À côté des
caractères spécifiques qui tiennent à la nature des germes de
l’espèce, ou, plus précisément, à la nature des chromosomes,
il en existe donc d’autres, apparemment aussi stables,
qui dépendent de facteurs externes. On conçoit que ces der-
niers caractères, au cas où les facteurs qui les déterminent
restent ignorés, puissent être confondus parmi les premiers.
À i
Le
ÿ
5
Ÿ
#
Lane
SE Te À pe qe
SR À =
PRE
Ca
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 253.
Quoi qu'il en soit, leur fixité est liée à la permanence des con-
ditions de vie dont ils dépendent, au maintien constant de
ces conditions de génération en génération. Si l’on découvre
ces conditions particulières et si l’on parvient à les modifier
ou à les supprimer, on doit s'attendre à voir les caractères
correspondants varier ou dégénérer.
C’est, en fait, ce que nous avons vu se produire lorsque nous
avons fait varier les conditions de la symbiose chez des plantes
soumises à ce mode de vie : une Pomme de terre, un Orobus
tuberosus, soustraits à l’action de leurs Champignons sym-
biotiques, cessent de former des tubercules, perdent par consé-
quent l’un de leurs caractères spécifiques les plus saillants.
Il y a done là un facteur indéniable de variation. Noël
BERNARD prétend, et c’est l'essentiel de sa théorie, que ce
facteur a pu jouer un rôle fondamental dans la formation
des espèces végétales.
90. L'évolution des Orchidées. — Cette manière de voir
se fonde essentiellement sur une étude précise de la symbiose
dans les diverses séries phylétiques des Orchidées. Ce groupe
se prête mieux que tout autre à une étude de ce genre. « La
famille des Orchidées, remarque Noël BErNarp [5], est l’une
des plus riches en espèces de tout le règne végétal ; la confor-
mation complexe des fleurs y offre beaucoup de variété, et
l’organographie florale comparée rend moins illusoire dans
ce cas que dans d’autres la tentative de reconstituer un arbre
généalogique... On a donc un moyen indépendant de toute
considération relative à la symbiose pour apprécier le degré
d'évolution des espèces actuelles. » Partant de là, Noël BER-
NARD s'est proposé d'examiner comment l’état de symbiose
se modifie quand on passe d’Orchidées simples et primitives
à d’autres qui atteignent un plus haut degré de complexité.
Cette enquête l’a conduit à reconnaître que l’évolution des
Orchidées a concordé avec une adaptation de plus en plus
parfaite de ces plantes à la symbiose. Au rang le plus infé-
rieur, représenté par le Bletilla hyacinthina, la symbiose est,
comme on l’a vu, facultative au début de la vie, et l’appari-
tion du premier tubercule est tardive. Chez le Bletilla adulte,
254 J. MAGROU
la symbiose est la règle, mais elle reste intermittente : chaque
année des racines poussent et s’infestent, en même temps que
se développent des tiges aériennes ; l’organisme réagit à
l’infestation en produisant un tubercule ; puis les racines
meurent, comme les tiges, laissant la plante réduite à un rhi-
zome indemne de Champignons. Il s’agit la d’une forme pri-
mitive de symbiose, et, selon la remarque de Noël BERNARD,
l’état d’un Bletilla est en réalité bien proche de celui d’une
plante sujette à une maladie cryptogamique bénigne, capable
de récidiver.
Chez des Orchidées plus évoluées, telles que les Cattléyées,
la symbiose est devenue nécessaire au début de la vie, et le
tubercule embryonnaire se forme dès la germination ; mais,
à l’état adulte, l’infestation est, comme dans le cas précé-
dent, intermittente, et le mode de végétation reste conforme
au type sympodial. :
C’est seulement chez les Orchidées les plus évoluées, telles
que les Phalænopsis, les Vanda ou le Neottia N duce que
la symbiose atteint sa forme la plus parfaite ; non seulement
elle est, 1c1 encore, nécessaire dès le début de la vie, mais elle
cesse d’étre intermittente pour devenir continue: la plante
une fois infestée héberge des Champignons pendant tout le
cours de sa vie, et sa végétation devient monopodiale. ©
Certaines de ces Orchidées à végétation monopodiale, consti-
tuées par une tige dressée ligneuse surmontée d’un bouquet
de feuilles, sont de véritables arbres, ayant le port des
Palmiers.
Une telle concordance entre l’évolution et l’adaptation de
plus en plus parfaite a la symbiose, qui se retrouve dans les
diverses séries phylétiques des Orchidées, rend hautement
vraisemblable que -les deux phénomènes sont corrélatifs
et que l’action continue des Champignons a eu un rôle essen-
tiel pour la formation des espèces de cette famille. Mais une
symbiose de plus en plus parfaite se caractérise, comme on
vient de le voir, par un séjour de plus en plus prolongé des
Champignons dans les cellules de leurs hôtes. Or, on sait que
l’activité, ou, si l’on veut, la virulence des endophytes, qui
s’atténue lorsque ces organismes ménent la vie autonome,
\
ee Les 02 Pe ce ee
itt Rabbi
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 255
s’exalte au contraire lorsqu'ils vivent continiment à l’état
de symbiose. On est conduit par là à se demander si l’évolu-
tion des Orchidées n’a pas été entraînée par une exaltation
progressive d'activité de leurs Champignons commensaux.
S'il en est ainsi, cette évolution doit pouvoir être reproduite
expérimentalement ; Noël Bernarp [5] l’a Mrs en
effet chez le Bletilla hyacinthina.
Si on inocule des semis de graines de cette espéce avec un
Champignon d’activité moyenne, le mycélium pénétre les
cellules de ’embryon, mais y est rapidement détruit par pha-
gocytose ; les graines donnent des plantules gréles, à entre-
nœuds espacés, analogues aux formes juvéniles de la plupart
des végétaux. Mais, après plusieurs tentatives de pénétration
du Champignon, la symbiose finit par s’établir ; il se forme
dès lors un tubercule à la partie supérieure de la tige : à la
symbiose tardive correspond ici une tubérisation tardive.
Si on inocule le semis avec un Champignon rendu très actif
par un séjour dans des plantules, la symbiose s’établit
d'emblée, et il se forme, dès la germination, conformément à
la loi générale du développement des Orchidées, un tubercule
embryonnaire. Sous l'influence de Champignons d’activité
exagérée,le Bletilla abandonne donc son mode de germination
normal pour donner des plantules analogues à celles des Orchi-
dées plus évoluées.
De même un Cymbidium, inoculé avec le Rhizoctonia muco-
roides, Champignon des Phalænopsis et des Vanda, qui sont
parmi les plus évoluées des Orchidées, a abandonné son mode
de germination habituel pour donner une plantule analogue
a celle de l’Eulophidium maculatum. Des mutations plus.
remarquables encore se sont produites dans les cas, d’ail-
leurs assez rares, où une association anormale a pu être
réalisée entre des embryons de Vanda et le Rhizoctonia lanu-
ginosa, commensal des Odontoglossum ; un certain nombre
de graines soumises à l’action de ce Champignon ont donné
des tubercules embryonnaires ramifiés, ou plus exactement
fasciés, fort différents des plantules normales de Vanda.
Les progrès de la symbiose ayant entraîné la formation de
plus en plus précoce des tubercules, il est naturel de penser
256 J. MAGROU |
que les ancêtres directs des Orchidées étaient des plantes
ou la tubérisation devait se produire plus tardivement encore
que chez le Bletilla. Cette hypothèse conduit à admettre que
«des plantes annuelles atteintes, d’abord accidentellement,
par des Champignons ont cessé de fleurir dans leur première
année et que, par compensation, des bourgeons latéraux de
leurs tiges ont donné naissance à des organes pérennants,
bulbes ou branches de rhizome (1). La formation de ces organes
serait ensuite devenue de plus en plus précoce, enméme temps
que l'association avec les Champignons devenait a chaque
génération plus prolongée et plus intime ».
51. Les étapes de l’évolution. — La vérification de cette:
hypothèse exigerait une étude comparée de la symbiose dans
des familles telles que les Liliacées ou les Amaryllidées, que
l’on peut considérer comme vraisemblablement voisines de
la souche ancestrale des Orchidées. A défaut d’une telle
étude, les exemples étudiés dans le présent travail offrent
l’image des étapes que ces plantes ont dû parcourir pour
atteindre à l’état de haute différenciation TR, par les
Orchidées.
Le degré le plus inférieur de cette évolution est occupé par
la Pomme de terre. Non seulement, chez cette espèce, les
graines germent sans Champignon, mais encore la symbiose
ne s'établit qu'irrégulièrement. Beaucoup d'individus s’af-
franchissent des endophytes et évoluent sans produire de
tubercules, se comportant comme des plantes annuelles.
D’autres tolèrent leurs hôtes, mais dans ce cas la symbiose
s établit tardivement, et la tubérisation qui en est la consé-
quence est de même tardive : les bourgeons latéraux de la
tige ne forment des tubercules qu'après avoir différencié
des stolons gréles plus ou moins allongés (fig. 9, A). Par la
suite, la symbiose est intermittente, et la plante se développe
selon le mode sympodial.
(1) Le phénomène inverse a pu d’ailleurs se produire ; des plantes vivaces,
en s’affranchissant des Champignons, auraient alors donné naissance à des
espèces annuelles, L'histoire des Mercuriales suggère comment deux espèces,
l’une annuelle et l’autre vivace, ont pu se différencier, par un processus de ce
genre, aux dépens d’une souche ancestrale commune.
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION sa DUT
L'adaptation à la symbiose est déjà moins imparfaite
chez l’Orobus tuberosus. Ici encore, la germination est auto-
nome, et la plante développe d’abord une ou deux tiges feuil-
lées bien différenciées. Mais la virulence du Champignon a
_ plus de fixité que dans le cas précédent, et tous les individus
exposés à la pénétration des endophytes contractent la sym-
biose avec eux. La tubérisation est moins tardive que chez
Fig. 9. — Schéma des étapes de l’évolution, montrant la tubérisation d’autant plus
précoce que l’adaptation à la symbiose est plus parfaite. — A, Solanum tuberosum :
B, Orobus tuberosus ; CG, Ficaria ranunculoides ; D, plantule de Bletilla hyacinthina
inoculée avec un Rhizoctonia repens atténué ; E, plantule de Bletilla hyacinthina ino-
culée avec un Rhizoctonia repens actif; F, tubercule embryonnaire de Cattleya.
—t,tubercules. En D et F,les régions infestées, vues partransparence, sont ombrées.—
C à F d’après Noël BERNARD.
la Pomme de terre : les bourgeons latéraux de la tige prin-
cipale cessent de se différencier sans avoir passé par aucune
phase d’élongation, et ces bourgeons avortés restent confondus
dans le tubersule unique qui se développe à la base de la
plante (fig. 9, B). Enfin, la symbiose une fois établie reste
continue, et les tubercules, au lieu de disparaître chaque année,
continuent à s’accroitre indéfiniment. |
Le cas de la Ficaire, étudié par Noël BERNARD [1], repré-
sente un progrès vers la symbiose et la tubérisation précoces,
telles qu’elles sont réalisées chez les Orchidées. Les graines
de Ficaire ont un embryon rudimentaire, qui se diffé-
rencie pendant la digestion de l’albumen; mais la phase
ANN. DES SC, NAT. BOT., 108 série. 1921; m7
258 J. MAGROU
juvénile de différenciation est ici beaucoup plus courte que
chez les deux plantes précédentes ; elle ne va pas au delà du
déploiement du cotylédon unique de la plantule. Les racines
s’infestent en effet dès leur formation, et aussitôt le bour-
geon terminal cesse d'évoluer en rameau et produit un tu-
bercule (fig. 9, C).
ec une nous amène à celui du Bletilla inoculé avec
des Champignons atténués, qui, après une courte phase d’élon- |
gation, produit un tubercule aux dépens de son bourgeon
terminal (fig. 9, D). On passe de là au cas du Bletilla inoculé
avec un mycélium actif, qui germe directement en [un tuber-
cule embryonnaire (fig. 9, E), et, enfin, au cas des Orchidées
plus évoluées, où la symbiose est nécessaire à la germination,
et où la phase initiale du développement est une phase de
tubérisation (fig. 9, F).
52. L'origine des plantes vasculaires. — Ces exemples
montrent comment la symbiose, après avoir provoqué l’éta-
blissement de l’état vivace, a pu entraîner une évolution
progressive de l’appareil végétatif des plantes qui lui étaient
soumises de plus en plus étroitement. Mais on est souvent
porté à attribuer moins d'importance, en systématique, aux
_ caractères végétatifs qu’aux particularités de la reproduction,
et à fonder de préférence sur les homologies de l’appareil
reproducteur les hypothèses relatives à la filiation des groupes.
Cette manière de voir ne saurait pourtant être exclusive, et
il est permis de se demander si, dans certains cas, des varia-
tions de l’appareil végétatif, et notamment l'apparition de
l’état vivace, n’ont pas été à la base de la formation de grands
groupes de végétaux. : ;
La série des Archégoniates est remarquable par Finite
mité du cycle sexuel des plantes par ailleurs fort disparates
qu’elle rassemble. Mais les deux grands groupes qui la com-
posent se distinguent par des différences telles dans la forme
et l’évolution de l’appareil végétatif qu’elles ont frappé
d’abord les naturalistes, au point de justifier la répartition
de ces végétaux en deux embranchements distincts. Les
Muscinées ont un gamétophyte plus ou moins complexe, sou-
SYMBIOSE ET TUBÉRISATION 259
vent vivace, et un sporophyte toujours monopodial et annuel.
Chez les Cryptogames vasculaires les plus inférieures, telles
que les Lycopodiacées, le sporophyte est toujours vivace,
aussi bien que le prothalle. On est porté a situer la souche
ancestrale des Lycopodiacées, et, par leur intermédiaire,
des plantes vasculaires, au voisinage des Muscinées à gamé-
tophyte peu élevé en organisation, telles que certaines Hépa-
_ tiques à thalle. |
Or, le thalle des Hépatiques est souvent vivace, et, dans
ce cas, il héberge des Champignons symbiotiques ayant tous
les caractères des Champignons de mycorhizes ; par contre,
le sporophyte annuel de ces plantes est toujours indemne
d infestation. Chez les Lycopodiacées, les prothalles vivaces
sont infestés, et la symbiose atteint chez eux un haut degré
de perfection, puisque les spores dont ils dérivent ne peuvent
germer qu’avec le concours de Champignons ; ces gaméto-
phytes, infestés dès l’origine, sont d’ailleurs tubérisés et pren-
nent au début de leur développement des formes en toupies
comparables aux formes juvéniles des Orchidées. Mais,
au contraire de ce qui arrive chez les Hépatiques, l’infesta-
tion se propage ici au sporophyte dès la germination de l’œuf :
chez le Lycopodium cernuum ou le Phylloglossum Drummondit, —
par exemple, la jeune plantule issue de l’œuf forme préco-
cement un petit tubercule infesté, appliqué sur le sol. Par la
suite, le sporophyte reste soumis à la symbiose et prend
l'état vivace.
Partant de ces données, Noël BERNARD suggère que les
plantes vasculaires primitives dérivent, par une adaptation
parfaite à la symbiose, de quelque forme disparue d’Hépatique
ou d’Anthocérotale à gamétophyte infesté et vivace. Le
sporophyte monopodial et annuel de cette forme ancestrale
supposée, envahi par les (Champignons commensaux du
gamétophyte, a réagi en produisant un tubercule et s’est
affranchi en prenant l’état vivace. Ainsi, l'apparition des
plantes vasculaires aurait été la conséquence d’une haute
adaptation de certaines Muscinées à la vie en symbiose avec
des Champignons. |
I] serait important, pour contrôler cette hypothèse, d’étu-
260 J. MAGROU
dier l’influence dela symbiose sur le développement du gamé- —
tophyte chez les Hépatiques. Des observations récentes de
M. Marcel Denis fournissent à cet égard des suggestions inté-
ressantes[15]. Dans les thalles d’un Aneura sp., M. DENIS a
découvert une infestation particulièrement importante, due
à un Champignon filamenteux qui forme des pelotons intra-
cellulaires ; la zone envahie, qui comprend plusieurs. assises
de cellules, est beaucoup plus étendue que chez les Aneura
normaux. Or cette plante très largement infestée présentait,
par rapport au type de végétation habituel des Hépatiques
à thalle, des caractères aberrants ; le thalle était très charnu,
avait l’aspect coralloide qu’offrent les racines de certains
saprophytes et était dépourvu de chlorophylle ; il se rappro-
chait par là du prothalle tubérisé et souvent sans chlorophylle
des Lycopodes. On a donc là l'exemple d’un gamétophyte
d’Hépatique, qui, par suite d’une -adaptation plus étroite
à la symbiose, a acquis quelques-uns des caractères les plus
saillants du gamétophyte des Lycopodiacées.
Les remarquables expériences de M. RAYNER sur le Calluna
vulgaris [38, 39] montrent, d’autre part, comment l’appa-
rition des racines, qui est l’un des traits distinctifs essentiels
des plantes vasculaires, peut dépendre, dans certains cas, de
l’action de Champignons symbiotiques. Des graines de Calluna,
semées aseptiquement, après désinfection de leur tégument,sur
des milieux gélosés stérilisés, germent en donnant des plan-
tules rabougries, dépourvues de racines. Semées, toutes choses
égales d’ailleurs, au contact du Phoma qui est l’endophyte
de cette espèce, elles développent des plantules d'aspect.
normal, abondamment pourvues de racines.
53. Symbiose et évolution chez les Lichens. — Les exemples.
précédents laissent entrevoir le rôle essentiel que la symbiose
a pu jouer dans l’évolution des plantes supérieures. Le cas
des Lichens suggère que le même facteur a pu agir aussi Sur
l’évolution de Thallophytes. M. et Mme Fernand Moreau
ont entrepris, du point de vue où s’était placé Noël BERNARD
pour ses recherches, une étude de la symbiose lichénique, qui,
pour en être à ses débuts, n’en a pas moins fourni des résultats
SYMBIOSE ET TUBERISATION 261
suggestifs [34]. Partant de ce fait que les hyphes des
Lichens, lorsqu'une Algue est introduite dans une région du
thalle où elle ne pénètre généralement pas, réagissent à son
contact en produisant un plectenchyme cortical, ces auteurs
en viennent à considérer le thalle aérien du Lichen comme
l'équivalent d’un organe déformé par un parasite; les Lichens
seraient ainsi des Champignons malades, atteints d’une
maladie dont l’agent infectieux est une Algue. Il y aurait
donc à distinguer chez ces végétaux deux groupes de carac-
tères : les uns en rapport immédiat avec la symbiose et
récemment acquis, les autres indépendants de la symbiose
et remontant à un passé lointain.
Dans une note ultérieure [35], à laquelle il a été fait
allusion plus haut (Voir chap. IV, $ 33), M. F. Moreau
signale que les associations instables qui résultent chez les
Lichens de l’invasion d’Algues étrangères peuvent, en certains
cas, acquérir les caractères de stabilité de la symbiose
lichénique habituelle ; or le complexe qui résulte de cette
symbiose anormale diffère profondément du thalle primitif
et mérite d’être décrit comme une espèce nouvelle. C’est
ce qui arrive chez une Stictacée, le Ricasolia amplissima.
Chez ce Lichen, il est fréquent que des céphalodies externes
ou internes se forment sous l’influence d’une Cyanophycée.
L'évolution de ces céphalodies peut être arrêtée par la dégé-
nérescence et la mort des Algues, mais souvent elles s'élèvent
vers le cortex, dont elles écartent les éléments, et, faisant
éruption à la face supérieure du Lichen, se ramifient de manière
à constituer des arbuscules qui couvrent d’une végétation
grisâtre la surface du thalle et méritent par leur fréquence
de figurer dans la diagnose de l’espèce. Certains lichéno-
logues considèrent ces formations comme des Lichens adven-
tifs, auxquels ils donnent le nom de Dendriscocaulon bola-
cynum. Ces faits, caractérisés par l’apparition brusque d’un
être nouveau, né d’une association anormale, sont à mettre
en parallèle avecles mutations que Noël BERNARD a observées
chez les Vanda et les Cymbidium, dans les cas où il a réussi
à adapter ces Orchidées à la symbiose avec des CHAMPS
distincts de leurs hôtes normaux.
262 J. MAGROU
54. La symbiose chez les Bactéries. — D’autres expériences:
suggèrent que, chez des Thallophytes d'organisation beau-
coup plus rudimentaire, tels que les Bactériacées, la symbiose
peut encore agir comme facteur d'évolution. M. Prnoy [37] a
montré que les Myxobactéries adoptent deux modes de végé-
tation différents, selon qu’elles sont associées ou non à une
Bactérie symbiotique. Un Chondromyces crocatus, cultivé
en culture pure, se développe indéfiniment à la manière des
Bactéries ordinaires, en donnant des colonies indifférenciées.
Associé à une Bactérie voisine du Micrococcus luteus, ce
même germe édifie des appareils d’une haute complexité,
comprenant un pied souvent ramifié, supportant une tête
arrondie sur laquelle sont insérés des kystes cylindriques.
Pied, tête et kystes sont formés de Bactéries disposées sui-
vant des alignements réguliers et cimentées par une gangue
cornée.
La symbiose étant définie comme une association durable
entre deux organismes antagonistes dont les forces s équili-
brent, on pouvait espérer la réaliser en partant d’une Bactérie
capable de produire chez un animal soit des infections mor-
telles, soit des infections bénignes. Il suffisait pour cela de
chercher la condition où les deux organismes en présence
arriveraient à tolérer la vie commune prolongée. C’est ce que
jai tenté de réaliser avec une Bactérie pyogène, le Staphylo-
coccus aureus [25]. Inoculé à dose convenable au Cobaye, ce
germe provoque une réaction inflammatoire locale, caractérisée
par un afflux de leucocytes polynucléaires, se produisant
au point envahi par les Bactéries. Les leucocytes et les mi-
crobes ainsi mis en présence peuvent subir des sorts divers :
tantôt les Staphylocoques, au moyen des toxines qu'ils
sécrètent, détruisent en masse les leucocytes qui les envi-
ronnent ; tantôt, au contraire, ces derniers éléments triom-
phent de l'invasion et demeurent vivants, après avoir
détruit les Bactéries. Mais, si la dose de germes injectés est
bien choisie, microbes et leucocytes restent vivants au contact
les uns des autres, réalisant une sorte de symbiose. En
pareil cas, les colonies de Staphylocoques qui occupent le
centre des nodules leucocytaires adoptent un mode de
PER ars. ag
SYMBIOSE ET TUBERISATION 263
végétation particulier ; leurs cellules périphériques se diffé-
rencient en éléments claviformes à membrane épaisse et
stratifiée, qui se groupent suivant une disposition rayonnée
autour de l’amas central de Coccus. Des organismes très
différents du Staphylocoque, tels que le Bacille tuberculeux,
certaines Streptothricées et même des Champignons (Wo-
nilia albicans [24], peuvent adopter un type de végétation
identique, lorsqu'ils s'adaptent à la symbiose avec des leuco-
cytes de Mammifères. Ces exemples de convergence mon-
trent qu'ici encore la forme d’un être peut dépendre non
seulement de la nature de ses germes, mais encore des circon-
stances qui entourent son développement.
55. Symbiose et évolution chez les animaux. — Les faits
qui viennent d’être énumérés montrent que la doctrine de
l’évolution dans la symbiose, que Noël BERNARD avait fondée
sur l’étude comparée de divers groupes de plantes supérieures,
peut être sans invraisemblance généralisée à l’ensemble de
la série végétale, sans en excepter les Thallophytes les plus
inférieurs. Est-il possible de donner à cette doctrine toute
son ampleur en l’étendant au règne animal? Nos connaissances
sur la symbiose chez les animaux sont trop fragmentaires
pour qu'une telle généralisation ne soit encore prématurée.
Pourtant certains groupes, les Insectes notamment offrent
des exemples nombreux d'associations héréditaires avec des
microorganismes qui paraissent Jouer un rôle dans leur vie.
Les études publiées par M. Rousaup sur la symbiose chez
les Mouches tsetsés sont à ce point de vue parmi les plus
suggestives [40]. Les tsetsés ou Glossines se distinguent des
autres Mouches par des caractères aberrants, dont les prin-
cipaux sont leur régime hémophagestrict et leur reproduction
pupipare. Par une série d'observations et de raisonnements
fort ingénieux, M. Rougaup établit que ces deux caractères
sont corrélatifs et sont sous la dépendance de la symbiose
vraisemblablement héréditaire que les Glossines contractent
obligatoirement avec des Levures. En fait, les Mouches
piqueuses, telles que les Stomoxes, chez lesquelles le régime
“hémophage n’est pas exclusif, sont ovipares et ne sont pas
264 J. MAGROU
soumises ala symbiose. Par contre, tous les Diptéres pu-
pipares sont, comme les Glossines, des hémophages stricts et,
comme elles, hébergent des Levures symbiotiques dans des
cellules spécialisées de leur intestin. Ainsi a pu se réaliser
« cette remarquable série adaptative que nous offre, dans le
sens de l’ectoparasitisme, l’ensembe des Diptéres pupipares,
chez lesquels on peut suivre de façon si complète, avec l’atro-
phie progressive des ailes et la dégradation parasitaire crois-
sante, une modification si complète du type de la Mouche »
[Rougaup]. Nous avons bien là l’exemple d’une évolution
progressive réalisée par tout un groupe d’animaux et dont la
cause déterminante première est la symbiose avec des
microorganismes. À ce point de vue, les observations de
M. Rougaup sur les Mouches sont à mettre en parallèle avec
les expériences de Noël BERNARD sur les Orchidées.
Des faits de même ordre se retrouvent-ils à d’autres degrés
de l'échelle animale? Des recherches récentes tendent à
montrer que, chez les Mammifères même, des associations
symbiotiques ont pu n'être pas sans influence sur le dévelop-
pement. MM. Masson et Recaup [26 à 28] ont, en effet,
signalé la présence constante et normale; dans le tissu lym-
phoide de l’intestin du Lapin, de nombreuses Bactéries, et ils
suggèrent que la structure très particulière des organes lym-
phoides intestinaux chez cette espèce est liée à la symbiose.
Ainsi la théorie de l’évolution par la symbiose permet de
coordonner des faits nombreux se rapportant aux groupes les
plus variés d’être vivants. Elle apparaît par là comme un
instrument de travail de valeur éprouvée. Les découvertes
de Pasteur ont montré le rôle fondamental que les micro-
organismes jouent dans la nature. Si l’on adopte l’hypothèse
générale qui vient d’être esquissée, il convient de faire figurer
la genèse et l’évolution des espèces parmi les phénomènes
qui relèvent de leur action. Le domaine de la microbiologie
se trouve dès lors immensément accru, et, grâce aux méthodes
créées par PASTEUR, on peut avoir l’espoir d’arriver à une
connaissance précise du déterminisme de l’évolution, qui
fournira sans doute le moyen de la diriger.
APPENDICE
—_—————
I. — STATISTIQUES.
Pour apprécier le degré d’infestation des plantes étudiées, j’ai
eu recours à la méthode statistique suivante : pour chaque plante,
les racines ont été coupées en menus fragments, qui ont été rassem-
blés en faisceau; après inclusion à la paraffine, le faisceau de racines
a été débité en coupes de 1/150€ de millimètre. Des coupes ont été
prélevées de quinze en quinze dans la série obtenue et examinées ;
ces examens, portant sur des coupes distantes de 0™™,1, ne pou-
vaient laisser échapper aucune infestation importante.
Cela fait, j’ai compté, pour chacune des plantes étudiées, le
nombre total de racines ainsi examinées et le nombre de racines
infestées ; pour chacune de ces dernières, l’état du Champignon et
l'étendue de l’infestation ont été notés.
Les résultats de ces statistiques sont résumés dans les tableaux
suivants. J’y ai noté (dans la colonne de droite) le rapport (appelé
5 eee 0
par abréviation rapport -) du nombre de racines renfermant du
l
mycélium vivant au nombre total de racines infestées. Les nombres
de cette colonne sont les plus importants à considérer, puisqu'ils
donnent en quelque sorte la mesure de l’adaptation du Champignon
à la vie symbiotique. Le rapport qu’ils expriment tend vers l’unité
dans les cas où la symbiose est réalisée, vers zéro dans le cas con-
traire : on verra, par la lecture des tableaux, que la symbiose, ainsi
exprimée numériquement, coïncide toujours avec la tubérisation
et l’absence de symbiose avec l’absence d’organes pérennants.
A. — « Solanum tuberosum ».
Plantes issues de graines cultivées dans de la terre prélevée au
pied de Douces-Amères infestées. Les échantillons de la première
série d'expériences proviennent de graines achetées dans le com-
merce ; — ceux de la deuxième série appartiennent à la variété
« Jaune de Norvège » ; — ceux de la troisième série proviennent
de graines prises dans des fruits récoltés sur une même plante, de
variété indéterminée.
266
mW
ce A
SERIES | 4 &
D’EXPÉ-| © S
A À
RIENCES. m WM
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4
2
17e série. :
|
A
418]
C
D
2e série.
F
II
of série
III
TV
(1) La plante «, bien que pourvue de queiques tubercules, se distinguait des autres plantes
tubérisées par le développement exubérant de son appareil aérien ; elle représente donc un
type intermédiaire entre les deux cas extrêmes caractéristiques. On remarquera que, chez
cette plante à caractères mixtes, l’infestation est relativement restreinte, bien que le rap-
port ~ reste élevé, comme il est de régle chez les plantes tubérisées.
DURÉE
de la
CULTURE.
5 mois
10 jours.
4 mois
et
17 jours.
17 jours.
4 mois
et
17 jours.
5 inois.
5 mois.
6 mois.
6 mois.
5 mois.
5 mois.
5 mois.
5 mois.
SAN Te SE ENG TE ns je
© 2 2%
RON
mn
_ = .
aioe el
te.
APPENDICE
DESCRIPTION
DES PLANTES.
Une tige aérienne uni-
que. Nomb. stolons
tubérisés (pl.IT, fig.2).
Une tige aérienne uni-
que. Nombreux sto-
lons tubérisés (PL. I,
fig. 3).
& tiges aériennes. Ni
stolons nitubercules
(PE I, figs 4):
Une tige aérienne uni-
que. Plusieurs sto-
lons tubérisés (PI.
I, fig. 4).
4 tigesaériennes; sto-
lons souter. non tu-
bérisés (PL.IT, fig. 1).
3 tiges aériennes; sto-
lons souter. non tu-
bérisés(PI.ITT, fig.1).
Nombreuses tiges aé-
riennes ; ni stolons
ni tubercules (PL. I,
De. 2h
Une haute tige aé-
rienne ; trois autres
très peu dévelop-
pées ; nombreux sto-
lons tubérisés (PI.
IL fie, 2);
3 hautes tiges aérien-
nes ; stolons
risés.
3 hautes tiges aérien-
nes ; nombreux sto-
lons non tubérisés.
Une tige aérienne uni-
que ; 2 stolons tubé-
risés.
6 tiges aériennes ; ni
stolons ni tubercules.
4 tiges aériennes ; ni
stolons, nz iuber-
cules.
Une tige aérienn? uni-
que; 2 stolons tubé-
risés.
tu bé-
RACINES
4
3
1
RACINES
2 RACINES cna PORT
= hnresréss.| mycélium| @ |
i vivant. L
266 70 37
(26,3 %) | 100
209 101 94
| (48,3 %) | 100
868
680
390
080
255
398
909 16
(4,796) ied %) 100
851| 42 0 0
(4,9 %)
480 59 AD 79
| (82,8°/o)| (26 %)° | 100
604| 108 30 | 27.
_[(17,8 %) | (4,8 %) | 100
227| 36 12 | 83
| (45%) | (5%) | Too
455| 34 28 | 90
(20% )} (18 %) | 100
Rap- :
pe ET ae ee
“APPENDICE 267
B. — Orobes.
Plantes issues de graines, cultivées dans de la terre prélevée au
pied d’Orobus tuberosus infestés.
Nos
NATURE
des
DES PLANTES,
Orobus tuberosus. 45
Orobus coccineus.
D'ORDRE
échantil-
lons.
DURÉE
_. de la
CULTURE,
6 mois.
9 mois
2 mois
et
9 jours,
2 mois
et
10 jours.
2 mois
et
10 jours.
2 mois
et
10 jours.
RACINES
EXAMINÉES.
C. — Mercuriales.
RACINES | Rap. ||
RACINES |renfermant PORT
| LA
INFESTÉES.
Plantes récoltées dans des stations naturelles.
du
mycélium
vivant.
26
Nos | RACINES|_ RACINES | Rar-
NATURE D’ ORDRE RACINES |renfermant | porrl
des . EXA- du :
DES PLANTES. échantil- ; INFESTÉES.| mycélium #3
lons. INES vivant. L
Mercurialis perennis. 8 244 24 24 100
(9,8 %) | (9,8 %) | 100
ac 39 86 62 62 100
(72 %) | 172 %) | 100
Mercurialis annua. 33 526 79 4 210
: (15 9/0) | (0,76 ©) | 100
= 35 909 147 16 10
(41 9) | (4,5 %o) | 100
268 APPENDICE
Il. — TECHNIQUES.
Préparation des milieux de culture. — Pour préparer le milieu
nutritif destiné aux cultures aseptiques de plantes, il importe de ne
pas stériliser en mélange les divers sels minéraux qui entrent dans
sa composition. Cette pratique entrainerait.la formation de préci-
pités. Je me suis arrété a la technique suivante, qui permet d'obtenir
des gelées parfaitement limpides.
Préparer les quatre solutions suivantes ; les stériliser à l’auto-
clave. |
Solution A:
Sulfate de mem Conmiy ee tre CRAN 1 gramme.
sulfate de sodium. St CAS RE ce 1 —
Nitrate de potassium......... Ae ice D ee are il —
Tartrate:de potassim.: 5.270.342 er ee? 1 —
au dis FRE: Es RSR NIMES Fe 100 cent. cubes.
Solution B :
Phosphate bipotassique nes re FN 1 gramme.
au Gistilee: PT PO Ra de nee 50 cent. cubes.
Solution C :
Chlorure deCalcium Les rc Res ae on ere ees 1 gramme.
Pau Gistilees Le AT ee ee ER PR 50 cent. cubes.
Solution D :
Tartrate ferrico-potassique ........ SN OS re 08r,02
Bau distillée. ree M ek pee ee ee enr, 50 cent. “cubes:
Dissoudre dans de l’eau distillée de la gélose préalablement
lavée à l’eau courante pendant vingt-quatre heures (10 grammes de
gélose p. 1000 d’eau distillée) ; filtrer et répartir cette gélose dans de
larges tubes de culture, à raison de 35 centimètres cubes par tube.
Stériliser à l’autoclave. |
Avant la prise en gelée, ajouter à
pipettes graduées stérilisées :
chaque tube, au moyen de
2 cent. cubes de la solution A
4 cent. cube —
1 Le trs RL
4 —
—
——
alee: ee
APPENDICE 269
On obtient ainsi une gélose nutritive ayant la composition men-
tionnée ci-dessus (§ 15).
Techniques histologiques. — Les racines et tubercules destinés
aux examens histologiques ont été fixés dans le liquide suivant :
RE RO RE LU Gt oaks «we he tee SR à de 16 cent. cubes,
PIQUE Msn nee Ulis en 5 +
PO Rd COMMERCE". 0.4 ES ve ores dede ete 5 =
Acide picrique à 1 p.100 dans l’alcoolà 959........ 80 —
_ Pour la coloration des coupes, en outre des méthodes de double
coloration employées par Noël BERNARD [5], j'ai employé cou-
ramment la thionine phéniquée, qui donne de bonnes différen-
ciations cytologiques des Champignons, malheureusement très
fugaces. |
La méthode suivante, empruntée à M. Lecroux (1), donne une
bonne coloration des membranes de l’endophyte :
Après dissolution de la paraffine, la lame est lavée à l'alcool
méthylique, puis transportée face en dessus dans une boîte Laveran-
Mesnil, et recouverte avec 1 centimètre cube du mélange colorant
suivant :
Éoswate de bleu deméthylène..............:%, 7 grammes.
Hosimate de bleu de ioluidine .....:...{........ 180 5
eS HO MATTER 55 ory calle aso ohh aes bli aes ee 08st 5
Mlcdonréthy tique 490057, bev. We eee en, mo 490 cent. cubes.
Après une minute, verser 4 centimètres cubes d’eau distillée
neutralisée au rouge neutre; retourner la lame après mélange ;
au bout de dix à quinze minutes, laver à l’eau ordinaire, diffé-
rencier avec une solution de tanin orange au quart dans l’eau dis-
tillée neutralisée. Déshydrater à l’alcool éthylique, passer au to-
luéne, monter à l’huile de cèdre.
Ce travail a été fait à l’Institut Pasteur et, en partie, au labo-
ratoire de Botanique du Muséum d'Histoire naturelle, dirigé par
M. J. CosTaAnTIN. J’adresse mes plus sincères remerciments à
M. Costantin pour l’accueil que j’ai trouvé dans son laboratoire
et pour les nombreux encouragements qu’il m’a donnés.
(1) Voir Lecroux (R.) et Macrou (J.), Ann. Institut Pasteur, t. XXXIV, |
1920.
4
LR à ee APRENDIGE 0, = à ae
Je dois à M. Pinoy, de l'Institut Pasteur, dinsiouge suggestions
fort utiles, dont je le remercie ; c’est sur son conseil notamment que
j'ai choisi comme objet d'étude l Orobus tuberosus.
M. GuicnarpD a bien voulu s'intéresser à ces recherches et me
fournir divers matériaux d’étude ; je lui en exprime toute ma
reconnaissance. Le = |
Je remercie enfin les personnes qui ont bien voulu faciliter ma
tâche en me procurant des graines ou autres échantillons nécessaires
pour ces recherches.
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE
fe Blinn (Noër). Études sur la tubérisation (Revue gén. de Bot., XIV, 1902).
2. Ip., Conditions physiques de la tubérisation chez les végétaux (G.HRe
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1904). |
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ge série, XIV, 1944, p. 223).
9 lu, ues mycorhizes des Solanum (Ibid., p. . 235).
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24, Macrou (J.), Sur un cas de blastomycose pulmonaire bia aeveuies eee
XXXIX, 1916).
21 H
ay,
272 INDEX BIBLIOGRAPHIQUE
25.
26.
27:
28.
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Ip., Apparition et pullulation des microbes dans le tissu lymphoide de
l’appendice cecal du Lapin (C. R. Soc. de Biol., LXXXII, 1919).
Ip., Sur la manière dont pénètrent les microbes ‘de la cavité intestinale
dans Pépithélium de revêtement des follicules lymphoides chez le
Lapin (fbid.).
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le Ricasolia herbacea D. N. et le Ricasolia amplissima Leigt. (C. R,
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retour à la virulence (C. R. Acad. des Sc., XCII, 1881).
. Pinoy (E.), Sur la nécessité d’une association bactérienne pour le déve-
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chez les Mouches tsetsés (Ann. Institut Pasteur, XX XIII, 1919).
SMITH (Erwin), Mechanism of overgrowth in plants (Proc. Amer. philos.
Soc., DVI, 1917):
WauruicH, Beitrage zur Kenntniss der Orchideenwurzelpilze (Bot. Zez-
tung, XLIV, 1886).
oe EST NS PONT MT
EXPLICATION DES PLANCHES
PLANCHES I A III
Solanum tuberosum,
Plantules cultivées en sol infesté.
PLANCHE I,
Fig. 1. — Plantule de cing mois et demi, affranchie de la symbiose, non tubé-
risée. Grandeur naturelle.
Fig. 2. — Plantule de cing mois, affranchie de la symbiose, non tubérisée.
Grandeur naturelle.
Fig. 3. — Plantule de cing mois et demi, soumise 4la symbiose, tubérisée.
Grandeur naturelle.
Fig. 4. --- Plantule de quatre mois et demi, soumise à la symbiose, tubérisée.
Grandeur naturelle.
PLANCHE II,
Fig. 1. — Plantule de quatre mois et demi, affranchie de la symbiose, non
tubérisée. Légérement réduit.
Fig. 2. — Plantule de cing mois et demi, soumise à la symbiose, tubérisée
Grandeur naturelle.
PLANCHE III.
Fig. 4. — Plantule de quatre mois et demi, affranchie de la symbiose, non
tubérisée. Réduit aux 2/3 de la grandeur naturelle.
Fig. 2.— Plantule de cinq mois, soumise à la symbiose, tubérisée. Réduit de1 /2.
PLANCHE IV
Orobus tuberosus.
Fig. 1 et 2. — Plantules de neuf mois (fig. 1) et de sept mois et demi (fig. 2),
cultivées aseptiquement en gélose. Les deux plantules sont abondamment
ramifiées dès leur base et n’ont pas de tubercules. (On voit, à la partie
inférieure de la tige, les cotylédons, encore inclus dans le tégument de la
graine.) Légèrement réduit.
Fig. 3. — Plantule de neuf mois, cultivéeen tube, dans de la terre infestée. La
plantule n’a que deux tiges aériennes nées de l’aisselle des cotylédons ; le
tubercule basilaire est masqué par la terre. Légèrement réduit.
Fig. 4. —- Plantule de huit mois, cultivée en tube, dans de la terre stérilisée,
Légèrement réduit.
ANN. DES SC. NAT. BOT., 10e série. OZR. tithes
274 EXPLICATION DES PLANCHES
PLANCHE V
Orobus tuberosus.
Fig. 1 et 2. — Plantules cultivées en terre infestée, montrant le développement
du tubercule basilaire. Légèrement réduit.
Fig. 3. — Coupe transversale dans le tubercule basilaire d’une plantule de
huit mois, cultivée en terre infestée. On voit les quatre faisceaux libéro-
ligneux disposés en croix et le parenchyme amylifère (les amas de grains
d’amidon, colorés par l’iode, apparaissent en noir). A la partie supérieure
de la figure se trouve un bourgeon avorté. Gr. = 43.
PLANCHE VI
Solanum tuberosum.
Fig. 1. — Coupe longitudinale d’une racine chez une jeune plantule de Pomme
de terre, montrant la pénétration du Champignon; ap, assise pilifère ; p,
poils absorbants ; as, assise subéreuse. On voit dans l’assise pilifère un
filament mycélien vésiculeux, avec disques adhésifs d,, d,, d,, d,, aux stades
successifs de leur pénétration; m, peloton mycélien dans l’assise moyenne
de l’écorce ; n, noyau cellulaire.
Fig. 2. —- Coupe longitudinale dans une racine de Pomme de terre, montrant
un stade précoce de l’infestation: m, mycélium pelotonné ; n, noyaux cellu-
laires ; n’, noyaux du Champignon.
Fig. 3. — Un arbuscule dans une cellule corticale d’une racine de Pomme de
terre, coupée longitudinalement.
Fig. 4. — Coupe longitudinale dans une racine de Pomme de terre, montrant
le début de la dégénérescence du Champignon : s, sporangioles se formant aux
dépens des rameaux d’un arbuscule ; s’, sporangioles plus développés.
Fig. 5. — Deux cellules infestées dans une racine de Pomme de terre. On voit
en c, dans la cellule inférieure, des corps de dégénérescence volumineux,
résultant de la destruction d’un arbuscule par phagocytose. Mais les gros
troncs mycéliens restés indemnes ont envahi la cellule supérieure, où ils ont
produit un arbuscule (a); n, noyau cellulaire ; n’ noyaux du Champignon.
Fig. 6. — Deux pelotons mycéliens phagocytés en totalité, chez une Pomme
de terre douée d’immunité précoce. Remarquer l'absence de sporangioles.
La Pomme de terre dont une racine est figurée en 6 a évolué sans produire
de tubercules, les racines figurées en 2, 3, 4 et 5 appartiennent à des plantes ©
précocement et abondamment tubérisées. Il s’agit dans tous les cas de plantes
issues de graines.
(Gr. = 640 pour toutes les figures.)
PLANCHE VII
Fig. 4 et 2. — Orobus tuberosus.
Fig. 1. — Coupe longitudinale d’une racine, chez une plantule de cing mois
cultivée en terre infestée, montrant le mycélium intercellulaire et les arbus-
cules. Gr. = 434.
Fig. 2. — Coupe longitudinale dans une racine chez une plantule récoltée a la
fin de l'hiver : k, mycélium enkysté ;m, mycélium à paroi mince ; a, arbus-
cules. Gr. = 600. .
Fig. 3 et 4. — Orobus coccineus.
Fig. 3. — Coupe longitudinale d’une racine chez une plantule de soixante-dix
jours cultivée au contact de l’endophyte de l’Orobus tuberosus. Le Champi-
EXPLICATION DES PLANCHES AE
gnon est détruit en totalité et réduit à l’état de corps de dégénérescence
rétractés et surcolorables. Gr. = 434.
Fig. 4. — Coupe longitudinale d’une racine chez une plantule de quatre mois
cultivée dans les mêmes conditions. On voit, à côté des corps de dégéné-
rescence, des fragments de mycélium dégénéré (m). Gr. = 434.
PLANCHE VIII
Fig. 4 à 3. — Mercurialis perennis.
Fig. 1. — Coupe longitudinale d’une racine, montrant le pelotonnement et
Penkystement du mycélium : k, filaments enkystés ; m, filament à paroi
mince ; n, noyaux du Champignon. Gr. = 600.
Fig. 2. — Une vésicule enkystée, multinucléée et bourgeonnante, dans une
racine coupée longitudinalement : ¢, vésicule; c, corps de dégénérescence ;
n, noyau cellulaire. Gr. = 600.
Fig. 3. — Coupe longitudinale d’une racine, montrant la résistance des hyphes
principales à la phagocytose: c, corps de dégénérescence résultant de la
digestion des arbuscules ; m, mycélium vivant. Gr. = 600.
Fig. 4. — Mercurialis annua.
Coupe longitudinale dans une racine, montrant la destruction totale du Cham-
pignon : c, corps de dégénérescence résultant de la digestion des arbuscules ;
m, fragment de mycélium dégénéré, Gr. = 600,
PLANCHE IX
Mucor Solani.
Fig. 1. — Arbuscule développé dans une culture sur gélose.
Fig. 2 à 6. — Racines de plantulesde Pomme de terre inoculées avec le Mucor
Solant.
Fig. 2. — Phase de pénétration du Champignon: 9, vésicule découpée en
digitations dirigées vers la racine. Gr. = 534.
Fig. 3. — Phase de pénétration (suite) : p, assise pilifère ; s, assise subéreuse ;
d, disques adhésifs, dont l’un dirige des bourgeons cunéiformes vers l’assise
subéreuse. Gr. = 600.
Fig. 4. — Coupe longitudinale d’une racine, montrant un peloton mycélien
intracellulaire, p. Gr. = 534.
Fig. 5. — Coupe longitudinale d’une racine; p, peloton mycélien; a, arbuscule;
m, mycélium vésiculeux. Gr. = 534.
Fig. 6. — Une vésicule intracellulaire. Gr. — 600,
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Orobus tuberosus (1, 2).
Orobus coccineus (3, 4).
ANN. DES SC. NAT. BOT., 10e série. 1924, 11. 19
J. MAGROU Pl. VII
2
Mercurialis perennis (1 à 3).
Mercurialis annua (4).
J. Magrou, del. 3
J. Magrow del. |
: Mucor Solani.
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION
1. Cycle évolutif des plantes à tubercules, — 2. Facteurs physiques de la
tubérisation. — 3. La symbiose. — 4, Cas des Ophrydées. —5. Tubérisation
précoce des Orchidées. — 6, La théorie de Noël Bernard. — 7. Objet du
hs nn goer grain Mae ane kN dote ets dec a aie à ocbce 614 181 à 186
CHAPITRE PREMIER
Symbiose et tubérisation chez la Pomme de terre.
8. Comparaison de la Pomme de terre et des Ophrydées. — 9. Les mycorhizes
des Solanum. — 10, Le Solanum Maglia. — 11. Infestation expérimentale
du Solanum tuberosum. — 12. Influence de la symbiose sur le développe-
ment. — 13. Culture aseptique de la Pomme de terre.......... 188 a 195
CHAPITRE II
Histoire de l’« Orobus tuberosus )).
14. Mode de végétation de la plante adulte. — 15. Développement en milieu
aseptique. — 16. Développement en présence de l’endophyte. — 17. Expé-
riences complémentaires. — 18. Comparaison de l’Orobus tuberosus et de
la Pomme de terre. — 19. Symbiose périodique et symbiose continue. —
20 Précocité de la tubérisation, — 21. Immunité de l’Orobus cocci-
198 à 212
CHAPITRE III
Relation entre la symbiose et le mode de végétation.
Cas des Mercuriales.
22, Dimorphisme et symbiose. — 23. Les Mercuriales. — 24. La symbiose chez
le Mercurialis perennis. — 25. Immuntité du Mercurialis annua. 215 à 219
CHAPITRE IV
L’immunité dans la symbiose.
26. Virulence et résistance. — 27. Résistance mécanique. — 28. La phagocy-
tose. — 29. Insuffisance de la phagocytose. — 30. L’immunité humorale. —
31. Infections mortelles. — 32. Fonction fungicide des tubercules. — 33.
Réactions de défense dans la symbiose lichénique. — 34. Généralité des lois
CRT VOS Penn Se, i à ee don es ave ea Gee eas 0220040292
LEE
D Eee,
TABLE DES MATIÈRES -
CHAPITRE V
Mécanisme physique de la tubérisation.
35. Action à distance des Champignons. — 36. Mode de formation des tuber-
AAA cules. — 37. Croissance transversale chez les Thallophytes. — 38. Influence
= _ de la concentration. — 39. Tubérisation aseptique des Orchidées. —
. 40. Mécanisme de l’action des Champignons. — 41. Mécanisme des actions
cécidogéness Five den eee s'en Cr op ese ieee eae ee ee
CHAPITRE VI
Essais de culture des Champignons endophytes.
a 42. Premières tentatives. — 43. Les endophytes des Orchidées. — 44. L’endo-
phe _phyte du Calluna vulgaris. — 45. L’endophyte des Solanum. — 46. Le —
| Mucor Solani. — 47. Inoculations Se ss... 243 à 249
CHAPITRE VII
Symbiose et évolution.
48. Résumé général. — 49. Hérédité et variation. — 50. L'évolution des
Orchidées. — 51. Les étapes de l’évolution. — 52. L'origine des plantes
. vasculaires. — 53. Symbiose et évolution chez les Lichens. — 54. La sym-
biose chez les Bactéries. — 55. Symbiose et évolution chez les ani-
MAUX. esse sssoeossspeseesesssenesereessrcs.sse..s 201 à 208
APPENDICE |
Lestitishaques sue D ee : "965
IL Techniques, 8 es) MES sek SO a Re Be ee +. °208
INDEX BIOGRAPHIQUE. 4 is Re ok Vale wo pea eee ee re 271.
EXPLICATION DES PLANCHES..¢,, 04-70). Sse aioe eas ere eon opera: ree ee
MASSON ET CIE, EDITEURS
Mao BOULEVARD SAINT- GERMAIN, b20 = PARIS + VEO ARR.
des Vertébrés
| A. BRACHET:: à
: Professeur à l'Université de Bruxelles,
a nt à Te - Correspondant, de LES
ep 1 ' \ re id,
Aa semblé au professeur Brachet que l’'Ontogenèse
des Vertébrés étant, à l'heure actuelle, une science avancée
i comme définitivement : acquis, Ja publication: dé cet impor-
1 tant traité: comblérait ‘tine laetne ét sérait’ utile à ceux
: a
he
bi; qu intéressent les questions de Morphogenèse.
LE
La partie générale est consacrée aux premières phases
| de Pévolution ontogénétique des Vertébrés et à l’établis-
es : . . sement des grandes lois eats dont elles sont ~
| | Ja conséquence.
i. 4 + Dans la partie a les dote qui ont un intérêt
ee eee ata embryologique sont exposés avec ampleur.
Dé très nombreuses figures illustrent ce livre. A la
en nombre ‘de Lite et Widées® peuvént êtré considérés k
ne”
“a de chaque chapitre, Pauteur a placé un index biblio-
graphique des ouvrages les plus spécialement utilisés
pet 166 plus récents. Le lecteur y trouvera un expose
‘1 historique des questions traitées.
Ë ie ae mee pol. de 602 pages avec 867 Meares hs as 60 fr. net
EE ee eee Sine Ge Ee en ne
see en À Berea eS SAT ES
| ‘raité Re.
TABLE DES MATIÈRES
CONTENUES DANS CE CAHIER
Première contribution à l’étude de l'embryon et de la germi-
nation des Aracées, par M. C.-L. Gatin......... sites OUR
Symbiose et Tubérisation, par M. Josepx MaGron. 0 181
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3547-21. — Conprit.. Imprimerie Créré. _
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Publiée sous la direction de M. J. Cost :
5 abonnement est ae pour 1 volume gr. “in Fs Vv
figures dans lestexte.* (0% es
A
Ce volume parait en plusieurs fascicules.
TE
ZOOLOGIE
Publiée sous a direction de M. Bouvier. ae
£ et pede: dans le texte.
. Ce volume parait en plusieurs fascieules.
LR
Prix des collections : à.
. PREMIÈRE SÉRIE (Zoologie et Botanique réunies), 30 vol.
Deuxième Série (1834-1843). = Chaque partie, 20 vol
TROISIEME SÉRIE (1844-1853). Chaque pates 20. vol
(Les années 1844 et 1853 sont épuisées. } Soe
Quarmbur SÉRIE (1854-1863). Chaque. partie, 20 vol.
“1 {Les années 1854 et 1863 sont épuisées, partie Botanique.
CINQUIÈME SÉRIE (1864-1874). Chaque partie, 20 vol.
‘Sixtime Série (1875-1884). Chaque partie, 20 vol.
SEPTIÈME SÉRIE (1885- a ae sae 20 v
Hurritme Série (1895- 1904).
_ NEuvIÈNE Série (1905-19151.
+ DixiiMis Série ee 1920),
PAS eee as Abonnement annals a |
Paris at Départements. a BO dr, = = Grant SS.
Le Fascicule : 15 me É
4 A ti Rs is Tea 4 een ENTS AL Aah rt ANIME A Pt a ONE ea ve
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fe Gare RR NE ac cod Sails Ae eth:
ÿ Mdr 4 Ur \ }
‘ RECHERCHES
“LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES
Par M. Fernand MOREAU
INTRODUCTION
Dans un mémoire antérieur (F. Moreau et Mme F. Moreau,
1919), nous avons exposé les résultats des recherches que
nous avons faites, en collaboration avec Mme Moreau, sur les
Lichens de la famille des Peltigéracées. Le travail que nous
présentons 1c1, relatif aux Lichens de la famille des Sticta-
cées, est la suite naturelle du précédent, non pas tant parce
que les Stictacées reçoivent dans la classification actuelle des
Lichens une place voisine de celle des Peltigéracées que parce
que les mêmes questions qui s étaient posées à nous dans
l'étude des Peltigéracées se sont à nouveau imposées à notre
attention. En particulier trois problèmes : l’étude du déve-
loppement des apothécies, la comparaison de la structure
des éléments des Lichens et de celle des Champignons et des
Algues autonomes, les phénomènes de biomorphogénèse,
vont à nouveau faire l’objet essentiel de ce travail.
Nous avons reconnu, chez les Peltigéracées, l’absence de
fécondation à l’origine des apothécies, la présence d’ascogones
multinucléés que ne fécondent ni anthéridies ni spermaties,
l'existence dune dikaryophase étendue qui débute dans les
hyphes ascogènes sans copulation préalable et qui se termine
dans les asques par une karyogamie qui reste la seule fusion
de noyaux que présente le développement. A ce type, nouveau
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298 FERNAND MOREAU
pour les Lichens, nous comparerons celui offert par les .
Stictacées ; nous avons le regret de ne pouvoir apporter dés
maintenant une étude aussi compléte du développement de
leurs apothécies que celle que nous avons fournie pour les Pel-
tigéracées ; toutefois les premiers développements de l’ascogone
des Stictacées nous sont bien connus, et nous indiquerons
tout l'intérêt de leur étude en disant que cet ascogone est
du type de ceux auxquels les auteurs ont attribué une
fécondation par des spermaties par l’intermédiaire de tricho-
gynes. | 7
Nous avons étudié chez les Peltigéracées la structure des
hyphes et des gonidies avec le souci de la comparer à celle des
Champignons et des Algues autonomes. L’intérét de cette
comparaison est évident depuis longtemps, puisque c’est sur
elle qu'est fondée la théorie schwend enérienne de la nature
double des Lichens, et on peut croire que le soin que nous
avons pris de la faire à nouveau était superflu. Qu’on se
détrompe ! Des recherches récentes d’Elfving (1913), minu-
tieuses, conduites d’après les procédés de la technique
moderne, sont venues rendre à l’actualité une vieille querelle :
il ne s’agit rien moins que de remettre en honneur l’opinion
ancienne qui faisait des gonidies des organes produits par les
hyphes. Nos observations sur les Stictacées confirment les
conclusions de nos recherches sur les Peltigéracées : confor-
mément à la théorie de Schwendener (1868) et de Bornet
(1873), les hyphes des Lichens ne different par rien d’essentiel
dans leur structure cytologique de ceux des Champignons;
quant aux gonidies, elles offrent, soit avec les Chlorophycées,
soit avec les Cyanophycées, une complète identité de structure.
Qu'on ne croie pas cependant la question tranchée ! Cette
organisation commune ne désarmera pas les partisans fidèles
de l’autonomie des Lichens ; ainsi que l’a écrit Bornet (1873,
p. 51), «démontrer l'identité des gonidies et des Algues est
le premier point, mais il n’est pas décisif ». Aussi Bornet s'est-il
attaché à rechercher quels sont les rapports de continuité ou
de contiguité des hyphes et des gonidies ; i! conclut que ces
rapports sont tels que l’exige la théorie du dualisme des
Lichens, les hyphes enserrant les gonidies, ou les pénétrant,
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 299
comme feraient les filaments d’un parasite vis-à-vis d’une
cellule parasitée. L’argument nouveau que nous avons fait
valoir procède de celui de Bornet : nous avons montré que les
rapports entre les hyphes et les gonidies des Lichens sont de
l’ordre de ceux qui se contractent quand un être vivant
réagit à l’action d’un parasite par des phénomènes de biomor-
phogénèse. Nous avons jeté en même temps un jour nouveau
sur la nature des rapports qui s’établissent entre les hyphes
et les gonidies des Lichens et sur la nature même de la sym-
biose lichénique: la partie la plus apparente des Lichens
constitue une biomorphose, un Lichen est un Champignon
atteint d’une maladie dont l'agent infectieux est une Algue,
tels étaient les résultats de notre étude de la biomorpho-
génèse des Peltigéracées. Pour appuyer sur des faits nouveaux
cette conception de la symbiose lichénique, nous avons
recherché chez les Stictacées des phénomènes de biomorpho-
génèse comparables à ceux que nous avaient fournis les
Peltigéracées. Nos espérances ont été dépassées ; nous pensons
que, si des doutes ont pu rester dans l'esprit du lecteur de
notre premier mémoire sur le caractère pathologique du
thalle aérien des Lichens, ils seront dissipés par l’étude des
cas de biomorphogénèse que nous ont offerts les Stictacées.
Le présent mémoire comprendra un exposé de la structure
du thalle de diverses espèces de Stictacées (chap. I),
l'étude du développement de leurs appareils reproducteurs
(chap. IT), enfin celle des phénomènes de biomorpho-
génése que ces Lichens présentent (chap. III). Un résumé
en réunira les résultats essentiels et marquera à la fois le
terme des recherches actuelles et un point de départ pour les
recherches futures.
La majeure partie de ce travail a été faite, comme notre
étude sur les Peltigéracées, avec les moyens de recherche mis
4 notre disposition par M. Dangeard dans son service de la
Faculté des Sciences de Paris ; nous le prions de recevoir nos
plus vifs remerciments. Appelé 4 la Faculté des Sciences de
Nancy, nous avons retardé l’achèvement définitif de ce
mémoire pour nous livrer 4 de nouvelles recherches sur les
matériaux nouveaux qui allaient nous être offerts par la flore
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300 FERNAND MOREAU
lichénique lorraine ; cette partie de notre travail, qui nous a
permis de compléter quelques points de détail et de vérifier
une fois de plus les principaux résultats déjà obtenus, a été
faite dans le laboratoire de Botanique de la Faculté des
Sciences de Nancy. |
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CHAPITRE PREMIER
APPAREIL VÉGÉTATIF
Les Stictacées (1) sont des Lichens de grande taille,
communs surtout sur les arbres. des régions montagneuses.
(1) Nous indiquons ci-après la liste des espèces étudiées plus loin, avec leur
origine : à
1. Stictina silvatica Nylander. — Chemin de la Source des Vachères, à Châtel-
Guyon (Puy-de-Dôme).
2. Stictina Dufourei Nylander. — Forêt de Savigny (Normandie), n° 221 de
l'Exsiccata de Malbranche.
3. Stictina fuliginosa Nylander. — Cascade du Saut-du-Loup, au Mont-Dore
(Puy-de-Dôme) ; Chaunac, près Tulle (Corrèze).
3 bis. Id., formes à isidies très développées ou foliolées. — Gimel et chemin de
Gimel à Saint-Priest (Corrèze) ; le Saint-Mont, près Remiremont
(Vosges).
4. Stictina limbata Nylander. — Saint-Étienne-de-Mer-Morte (Loire-Inférieure) ;
Gimel (Corréze) ; Bois de Boulogne, prés Dax (Landes).
5. Stictina crocata Acharius. — Taiti, Collections du Muséum d’ Histoire Natu-
relle de Paris.
6. Stictina intricata Nylander. — Antioquia in Nova Granata (Amérique du
Sud), Collections du Muséum d’ Histoire Naturelle de Paris.
7. Sticta aurata Acharius. — Origine inconnue, trouvé sur bois transporté a
Saint-Etienne-de-Mer-Morte (Loire-Inférieure).
8. Lobarina scrobiculata Nylander. — Bois du Capucin, au Mont-Dore (Puy-
de-Dôme) ; Gimel et chemin de Gimel à Saint-Priest (Corrèze) ; le
Saint-Mont, pres Remiremont (Vosges).
. Lobaria pulmonacea Nylander. — Bois du Capucin, au Mont-Dore (Puy-de-
Dôme) ; Chaunac, près Tulle (Corrèze) ; Bois de Boulogne, près Dax
(Landes) ; le Saint-Mont, pres Remiremont (Vosges).
9 bis. Id., forme papilleuse. — Chaunac, près Tulle (Corrèze) ; Bois de Boulogne,
pres Dax (Landes). :
9 ter. Id., parasité par le Celidium Stictarum (de Notaris) Tulasne. — Chaunac,
près Tulle (Corrèze). |
10. Ricasolia herbacea de Notaris. — Saint-Étienne-de-Mer-Morte (Loire-
Inférieure) : Bois de Boulogne, près Dax (Landes).
11. Ricasolia amplissima Leighton. — Plateau de Charlannes, à La Bourboule
(Puy-de-Dôme) ; Chaunac, près Tulle (Corrèze) ; le Saint-Mont, près
Remiremont (Vosges).
Il nous est agréable de remercier ici les personnes qui ont bien voulu nous pro-
curer des échantillons ou faciliter nos récoltes : M. Pelé, instituteur à Saint-
Étienne-de-Mer-Morte (Loire-Inférieure), pour l'envoi renouvelé d'échantillons
de Ricasolia herbacea, de Stictina limbata et de Sticta aurata ; M. F. Camus,
qui nous a communiqué des échantillons de Stictina iniricata et de Stictina
de)
302 FERNAND MOREAU
Ce sont des Lichens foliacés, ressemblant assez à des Pelti-
géracées ; leur thalle est, comme celui de ces derniers, fixé
par places au substratum; mais chez beaucoup d’entre eux
la face inférieure montre des taches claires, auxquelles la
famille doit son nom (57254, tache) et dont nous parlerons
plus loin sous les noms de cyphelles et de pseudocyphelles.
De plus, leurs apothécies sont, au contraire de celles des
Peltigéracées, saillantes à la face supérieure du thalle ; elles
ont la forme d’une coupe, d’undisque pédicellé et ressemblent
aux fructifications des Discomyétes. Les gonidies des Sticta- —
cées se laissent rattacher aux Chlorophycées ou aux Cyano-
phycées. La présence ou l’absence de taches ala face inférieure,
la nature des gonidies, ainsi que le caractère saillant ou non
saillant des spermogonies permettent de classer les Stictacées
en un certain nombre de groupes auxquels on donne le plus
souvent la valeur de groupements génériques :
GONIDIES GONIDIES
CHLOROPHYCEES. CYANOPHY CEES.
Thalle Spermogonies
sans non saillantes. Lobaria. Lobarina.
cyphelles
ni
pseudo- Spermogonies bee
cyphelles. saillantes. Ricasolia.
Thalle pourvu de cyphelles ou de
pseudocyphelles. Sticta. Stictina.
Il nous suffira d’avoir rappelé ces notions sur la morpho-
logie du thalle des Stictacées pour pouvoir aborder He
de ses caractères histologiques et cytologiques.
On décrit dans le thalle des Stictacées une stratification en
quatre couches : une couche supérieure ou cortex supérieur ;
crocata des collections du Muséum d’ Histoire Naturelle, espèces que ne possède
pas la flore française ; M. Rémy Perrier, professeur à la Faculté des Sciences de _
Paris, qui nous a fait connaître la belle localité à Stictacées de ses propriétés de
Chaunac, près Tulle (Corrèze). |
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 303
une couche sous-jacente, formée d’hyphes et de gonidies, ou
couche gonidiale ; sous cette dernière, une médulle ; enfin une
couche inférieure, ou cortex inférieur, qui repose sur le sub-
stratum, dans lequel elle envoie des filaments mycéliens. Cette
organisation, qui rappelle, en raison de l’existence d’une
double couche corticale, celle des Nephromium que nous
avons précédemment étudiée (F. Moreau et Mme F. Moreau,
1919), se retrouve chez toutes les Stictacées. Le thalle offre
toutefois chez beaucoup d’entre elles des variations qui affec-
tent particulièrement la face supérieure et la face inférieure.
La première présente souvent des côtes que séparent des
fosses ou scrobicules; par places plusou moins limitées, elle se
recouvre de formations pulvérulentes ou sorédies; elle s’orne
de papilles ou isidies et de folioles ; dans une espéce(Aicasolia
amplissima), les accidents de la surface revêtent des dimen-
sions inusitées ; ils constituent des arbuscules atteignant
1 à 2 centimètres de hauteur ou davantage et dont la nature
a mis à l'épreuve la sagacité des lichénologues. La face infé-
rieure offre des poils isolés ou réunis en pinceaux, parfois des
crampons massifs ; on peut y voir de petits tubercules ou
céphalodies’; enfin, elle montre dans beaucoup d’espèces
des taches claires, cyphelles ou pseudocyphelles.
Ces diverses formations, bien connues tant qu’on reste
dans les limites d’un examen macroscopique, ont été moins
étudiées au point de vue histologique et surtout cytologique.
En particulier sous le nom de papilles se rangent des pro-
ductions d’origines différentes ; nous n’avons pas rencontré
d’exposé détaillé de la structure des isidies, des cyphelles,
des pseudocyphelles ; nous ne possédons pas de dessins à
grande échelle montrant la structure du thalle des diverses
espèces de Stictacées. Aussi avons-nous entrepris l’étude fine
du thalle des Stictacées avec le souci de rechercher quelle est
l'expression histologique des caractères visibles macroscopi-
quement et de séparer les espèces étudiées, déjà isolées par
l'examen à l'œil nu, par les caractères microscopiques de
chacune d’elles. Pour faciliter notre exposé et éviter des
redites, nous trouvons commode de réunir autour d’un petit
nombre de types les espèces présentant une même structure ;
304 FERNAND MOREAU
quelques-uns des groupes ainsi constitués n’auront peut-être
que la valeur de groupes artificiels ; d’autres, nous aurons à
rechercher lesquels, constitueront des groupements naturels
que nous définirons par un ensemble étendu de caractères.
Nous distinguerons ainsi les types suivants :
1° Stictina silvatica;
2° Stictina crocata ;
3° Stictina intricata ;
40 Sticta aurata ;
00 Lobarina scrobiculata ;
6° Lobaria pulmonacea ;
7° Ricasolia herbacea.
PREMIER TYPE : Siictina silvatica.
Le thalle du Stictina silvatica (fig. 1) constitue une lame
mince dont les différentes parties possédent les caractéres
suivants :
Le cortex supérieur est composé de quelques couches
de cellules seulement (1) ; la plus superficielle comprend des
cellules isodiamétriques ou un peu aplaties. dont la paroi
externe est un peu épaissie en un épithalle lisse ; au-dessous
(1) Pour soulager les descriptions qui vont suivre, nous indiquons dans le
tableau ci-dessous les dimensions de divers éléments duthalle des Stictacées :
EPAISSEUR CORTEX COUCHE
TOTALE. | SUPERIEUR.| GONIDIALE.| GONIDIES. | MEDULLE.
a be Ve U. U-
Stictina siulvatica....| 130-250 20-25 |20-60 4,5-63 50-140
Stictina Dufouret...| 100-230 15-20 |20-60 4-5 X 3 50-150
Stictina fuliginosa..| 130-240 20-25 |20-40 (-90)14-6 x 3-4 | 60-150
Stictina limbata....| 180-200 20-30 30-60 5-7 X 3-5 | 70-100
Stictina crocata ....| 180-250 20-40 , 20-40 5-6 X 3-4 | 60-150
Stictina intricata...| 170-210 20-40 |20-30 5 xX 3-4 60-120
Sticta aurata...... 160-200 25-30 20-30 3-4 _ 90-130
Lobarina scrobicu-
lat} NS 200-230 30-50 |50-90 9 X 3-5 100-180
Lobariapulmonacea.| 170-340 30-10 |30-60 3-9: 100-200
Ricasolia herbacea..| 200-280 30-40 |25-50 3-7 (-9) 100-250
Ricasolia amplissi-
TIC it ote Vevey stones 480-700 50-100 150-100 3-6 (-10) | 350-550
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 309
d’elle viennent quelques couches de cellules anguleuses plus
grandes que les précédentes ; l’ensemble constitue un plecten-
chyme aux parois minces, un paraplectenchyme typique. La
face inférieure de ce plecten-
chyme est sensiblement paral-
lèle à sa face externe. Le proto-
plasme (1) des cellules du cor-
tex supérieur, ni trés pauvre, ni
trés riche, forme des trabécules
rayonnant autour d’un noyau
unique dont la position est cen-
trale ou latérale. Les noyaux
du cortex supérieur sont assez
grands ; ils se montrent pour-
vus d’une membrane nucléaire,
d’un nucléole et d’éléments chro-
matiques plongés dans le nu-
cléoplasme.
Au-dessous vient la couche
gonidiale. Les hyphes y forment
des filaments assez gros, cloi-
sonnés, ramifiés, aux cellules
uninucléées et qui, circulant
parmi les gonidies, relient le
cortex à la médulle.
Les gonidies forment un mas-
sil dense, surtout à la partie
supérieure de la couche goni-
diale ; elles deviennent graduel-
lement moins nombreuses dans
sa région inférieure. Ce sont
des gonimies, c’est-à-dire des
cellules d’un bleu verdâtre pré-
Fig. 14. — Stictina silvatica, — Thalle
Gross. : 600.
sentant les caractères de cellules d’Algues Cyanophycées.
Fünistück (1907, p. 14) les désigne sous le nom de Polycoccas
(1) La technique cytologique employée dans cette étude des Stictacées
comporte en général une fixation par un fixateur à base de formol et d’acide
picrique et une coloration à ’hématoxyline ferrique. ;
306 on FERNAND MOREAU
punctiformis ; Bornet (1873), Zahlbruckner (1907) les attri-
buent au genre /Vostoc. Ces désignations, comme celles des
Algues des Lichens dues à tous les auteurs un peu anciens,
sont justiciables des observations que nous avons présentées
à l’occasion de la détérmination des gonidies des Peltigé-
racées (F. Moreau et Mme F. Moreau, 1919, p. 81-86). Il nous
suffira de dire que nous rapportons celles du Stictina silvatica
à la famille des Nostocacées. Ce sont des cellules oblongues,
de 4,52 6» de longueur sur 3 v de largeur ; elles comprennent
un protoplasme périphérique, qui ne nous a pas montré de
granulations, et présentent au centre un chromidium pourvu
de granulations de petite taille. Dans les préparations où les
gonimies sont très décolorées, elles ne laissent plus voir leur
chromidium ni les granules qui l’accompagnent, mais un
grain unique, assez gros, entouré d’une auréole claire. Les
granules du chromidium répondent sans doute aux corpus-
cules métachromatiques, le grain unique des gonimies très
décolorées, au corps nucléoliforme des Cyanophycées auto-
nomes. De tels aspects se sont fréquemment offerts à nous
chez les gonimies des Peltigéracées (F. Moreau et Mme F.
Moreau, 1919, p. 85).
Les dernières gonimies de la partie inférieure de la couche
gonidiale nous conduisent à la médulle. Sous ce nom se place
une formation de filaments qui circulent plus ou moins paral-
lèlement à la surface du thalle, parallèlement les uns aux
autres ou lâchement enchevêtrés. Ce sont des hyphes assez
gros, aux parois plus épaisses que ceux de la couche goni-
diale, cloisonnés, aux cellules plus larges que celles de la
couche précédente ; leur protoplasme renferme un noyau par
cellule; les plus gros d’entre eux cheminent, rectilignes,
sur de grandes longueurs et renferment un contenu souvent.
plus chromatique que ceux dont le calibre est plus petit.
Le cortex inférieur du Stictina silvatica est un paraplecten-
chyme, comme le cortex supérieur. Il est formé par deux ou
trois couches de cellules de grande taille, aux parois minces.
Ces cellules renferment un protoplasme assez pauvre, for-
mant de fins trabécules, et un noyau central ou latéral; ce
dernier est lui-même pourvu d’une membrane nucléaire
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 307
entourant un nucléoplasme où se montrent des granulations
chromatiques et un nucléole assez gros, placé sur le côté du
noyau. Assez souvent, on voit au travers des grandes cellules
du cortex une paroi fine, perpendiculaire à la surface du thalle;
elle témoigne de l’allongement intercalaire de ce dernier.
Le cortex inférieur se met en relation avec la médulle par
oa
oo
COS led
©
Ts 60 ©
602
—/
Fig. 2. — Stictina silvatica — Cyphelle. Gross. : 800.
a
CE Je
quelques cellules encore plectenchymateuses, mais de petite
taille. La face inférieure présente des poils, sous la forme
d'éléments allongés, non ramifiés, cloisonnés, à paroi latérale
assez épaisse, à cloisons transversales minces. Les poils sont
ordinairement isolés, mais parfois, nés de cellules contigués,
ils se réunissent et forment de petits pinceaux de quatre
éléments ou davantage. Leur protoplasme est réticulé, et
chacune de leurs cellules renferme un noyau central.
C’est ici le moment de décrire les formations spéciales
connues sous le nom de cyphelles (fig. 2). A l’œil nu, on voit
308 FERNAND MOREAU
a la face inférieure du thalle du Stictina silvatica de petites
taches blanches, nombreuses, au contour bien délimité: ce
sont des cyphelles. A ces taches correspondent des dépres-
sions de la face inférieure du thalle, de forme urcéolée,
parfois allongée. Les parois de la cyphelle ne sont pas consti-
tuées par un plectenchyme semblable 4 celui qui forme les
régions planes du cortex inférieur ; les bords et le fond de
excavation qui constitue la cyphelle sont recouverts de
cellules petites, arrondies, presque dissociées. A la marge de
la cyphelle, elles font rapidement place aux cellules polye-
driques ordinaires du cortex. Le protoplasme des cellules
arrondies d’une cyphelle n’est pas très abondant, surtout
dans les cellules les plus éloignées de la médulle ; elles sont.
toutes uninucléées.
Le thalle du Stictina silvatica est donc constitué essentielle-
ment par un cortex supérieur paraplectenchymateux recou-
vert d’un épithalle, une couche gonidiale à gonimies et une
médulle sans caractères spéciaux, un cortex inférieur para-
plectenchymateux, pourvu de poils généralement isolés et
présentant des cyphelles que revétent des cellules arrondies.
Au point de vue cytologique, les cellules incolores sont uni-
nucléées ; les gonimies ont une structure de Cyanophycées.
A ce type de thalle, nous rattacherons des Stictacées très
voisines du Stictina silvatica: ce sont le Stictina fuliginosa
(Pl. I, fig. 1), le Stictina Dufourei et, à quelque distance deces
derniéres, le Stictina limbata.
Tous sont des Lichens au thalle peu épais ; tous ont en
commun la présence d’un cortex supérieur paraplectenchy-
mateux, auquel la paroi externe un peu épaissie des cellules
superficielles constitue un épithalle; chez tous, la couche
gonidiale renferme des gonidies Nostocacées; la médulle y
est peu épaisse ; le cortex inférieur est paraplectenchyma-
teux et porte des poils isolés, unisériés ; enfin leur face infé-
rieure possède des cyphelles semblables à celle que nous
venons de décrire. De plus, la face supérieure de la plupart
d’entre eux supporte des productions connues sous le nom
d’isidies. Décrivons-les chez le Stictina fuliginosa, où elles
sont abondamment répandues. |
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 309
Le thalle du Stictina fuliginosa porte sur sa face supé-
rieure des granulations fuligineuses très nombreuses qui
valent à ce Lichen son nom spécifique ; chacuñe est une
isidie (fig. 3, et Pl. I, fig. 1).
Elles offrent le plus souvent la structure suivante. A un
grossissement moyen, une isidie se présente comme une excrois-
gares
oo DE,
TAA ee 9°, as Spee
Sag tte AL: RC Dee à
ane
iar ~ oo
® GA / me ’
SAY
Fig. 3. — Stictina fuliginosa — Isidie. Gross. : 666.
sance du thalle a laquelle prennent part le cortex et la couche
gonidiale. Sa forme est variable; simple mamelon lors-
qu'elle est jeune, elle peut se ramifier et prendre descontours
compliqués. Elle est limitée par un cortex qui prolonge
directement le cortex ordinaire ; celui-ci conserve ses carac-
tères sur les flancs de l’isidie, mais il se réduit à une couche
unique de cellules au sommet des mamelons isidiaux. Le
centre des isidies est occupé par un tissu mixte d’hyphes et de
gonidies reposant largement à la base de l’isidie sur la couche
gonidiale du thalle. Sous le cortex, ce tissu mixte a exacte-
ment les mêmes caractères que la couche gonidiale ordinaire
310 FERNAND MOREAU
dans sa région voisine du cortex supérieur. Au centre des
ramifications isidiales, les gonimies deviennent moins nom-
breuses qu’à la périphérie ; les hyphes eux-mêmes changent
de caractère : ce sont des hyphes lâches, aux cellules courtes,
renflées. Toutes les cellules fongiques de l’isidie, cellules corti-
cales et cellules des hyphes intergonidiaux, sont uninucléées;
les gonidies de l’isidie ont un chromidium aux caractères ordi-
naires des gonimies du thalle.
Tels sont les caractéres généraux des isidies, ceux qui sont
le plus fréquemment réalisés dans ces formations. Mais, à côté
des isidies ayant la structure que nous venons de décrire,
il n’est pas très rare de trouver des productions qui selaissent
rattacher aux précédentes, bien qu’à première vue elles s’en
distinguent parfois beaucoup.
C’est ainsi qu’assez souvent certains échantillons de Stictina
fuliginosa présentent à leur face supérieure, parmi des isidies
du type précédent, des isidies plus grandes, plus longues, et
d’autres, dilatées à leur sommet en forme de spatule, assez
développée parfois pour mériter le nom de foliole et consti-
tuer une lame étendue comparable au thalle lui-même. Ces
folioles se présentent sous forme de lames de la couleur du
thalle, larges de plusieurs millimètres, atténuées en un pédi-
cule étroit, long d’un JA ou nite qui les rattache au
thalle.
La structure des folioles isidiales, — tel est le-nom qui
convient à ces productions, — est, dans leur région foliacée,
essentiellement celle du thalle: c’est une structure dorsi-ven-
trale, que caractérise la présence de deux cortex, d’une couche
gonidiale, d’une médulle. Le cortex inférieur peut présenter
des cyphelles comme celui du thalle ordinaire ; sous la couche
gonidiale on peut trouver des ascogones, ébauches d’apo-
thécies, dans la même position qu'ils occupent, ainsi a
nous le verrons, dans le thalle ordinaire.
Parfois, Visidie du Stictina fuliginosa se dresse au-dessus du
thalle qui la produit et, sans se développer en une lame
étendue, elle se ramifie à quelque hauteur au-dessus du thalle,
affectant la forme d’un petit arbre, au tronc dressé et sun |
portant vers le haut des branches ee
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 311
La structure de ces formations est intéressante à observer.
Le tronc comprend un cortex, suite du cortex supérieur du
thalle, qui en fait tout le tour ; en dedans, ce cortex est tapissé
par une couche gonidiale ; le centre est occupé par des hyphes
médullaires en large communication avec ceux de la médulle.
Les mêmes parties, semblablement disposées, se retrouvent
dans la plupart des rameaux. C’est là une structure radiée.
Le Stictina fuliginosa se montre donc capable de perdre la
symétrie dorsi-ventrale et la structure des Lichens foliacés
pour acquérir la symétrie radiale des Lichens fruticuleux. Il
se comporte à ce point de vue comme les Lichens stratifiés-
radiés, comme les Cladonia, chez lesquels des écailles à struc-
ture dorsi-ventrale précèdent des podétions à symétrie axiale.
Toutefois, chez la plupart des Cladonia, la forme foliacée,
qui constitue le thalle primaire, est réduite et fugace, alors
qu'ici elle est prépondérante ; mais on sait aussi que, chez
d’autres Cladonia,le thalle primaire est étendu et durable,
les appareils dressés peu développés. C’est le cas offert par
nos Stctina fuliginosa aux isidies arbusculeuses.
La structure dorsi-ventrale, perdue chez le Stictina fuligi-
nosa dans les troncs et la plupart des rameaux des isidies
dendroïdes que nous venons de décrire, peut être à nouveau
réalisée dans certaines de leurs ramifications, où les gonidies
cessent de se distribuer suivant un manchon autour des
hyphes médullaires et se disposent en une couche qui s’étend
d’un seul côté des hyphes médullaires, tapissant le cortex
sous la face supérieure du rameau.
L'apparition de formations à symétrie dorsi-ventrale au
sommet des rameaux de structure radiée n’est pas sans
rappeler les phénomènes de fasciation ou la formation de
cladodes des végétaux supérieurs.
On soupçonne le rôle que peuvent jouer la lumière ou le
géotropisme dans la détermination de la structure dorsi-
ventrale. La plasticité des isidies, capables de former de
simples mamelons, des productions aplaties, des folioles à
structure dorsi-ventrale évidente, des mamelons obscurément
ramifiés, des productions dendroïdes à symétrie axiale, aux
rameaux parfois aplatis, méritera d’être mise à profit dans
312 FERNAND MOREAU
la recherche expérimentale des facteurs de la morphogenèse
des Lichens.
Des productions semblables aux isidies du Stictina fuliginosa,
moins nombreuses chez le Stictina Dufouret, moins nom-
breuses encore chez le Stictina silvatica, présentent chez tous
les mêmes caractères essentiels. En particulier, nous avons
pu trouver chez le Stictina silvatica des isidies aplaties,
offrant une face supérieure et une face inférieure.
Nous connaissons maintenant les caractéres généraux des
Stictacées qui se groupent autour du Stictina silvatica. Re-
cherchons quels sont leurs caractéres différentiels.
Le Stictina fuliginosa ne diffère pas sensiblement du Siictina
silvatica dans la structure de ses diverses parties. Harmand
(1909, p. 721) lui attribue une couche gonidiale «à hyphes en
plectenchyme »; cette structure n’a pas été observée dans
nos échantillons ; les gonidies s’y sont montrées moins nom-
breuses dans la région inférieure que sous le cortex, et grou-
pées souvent en paquets, disposition surtout visible vers le
bas ; ces gonidies, rapportées par Fünfstück (1907, p. 9) à des
Chroococcus, ressemblent à celles du Stictina silvatica. Le
cortex inférieur du Stictina fuliginosa est plus abondamment
pourvu de poils que dans le Stictina silvatica ; le cortex supé-
rieur est recouvert en grande partie et obscurci par des isidies ;
ces formations sont ici très nombreuses et sont parfois très
développées.
Au point de vue du développement des isidies, le Stictina
Dufourei est intermédiaire entre le Stictina fuliginosa et le
Stictina silvatica; les isidies, sans être aussi abondantes que
chez la premiére espèce, y sont plus nombreuses que chez le
Stictina sulvatica. La structure générale de son thalle est
celle des espèces précédentes ; notons toutefois que le cortex
supérieur n’a généralement que deux couches, rarement trois
couches de cellules, et que les gonidies y sont groupées en
paquets dans l'intervalle desquels le cortex est au contact de
la médulle.
Du Stictina fuliginosa au Stictina silvatica par l'intermé-
diaire du Stictina Dufouret, nous parcouronsunesérie d'espèces
où les isidies sont de moins en moins nombreuses ; le dernier
~ So
ood
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACEES 313
terme de la série serait représenté par le Stictina silvatica
var. peruviana, une forme de Quito qui, d’après Delise (1822),
ne différerait du type que par l’absence totale de granula-
tions isidiennes.
Tel est également le cas du Stictina limbata, que nous
rattachons au type de structure offert par le Stictina silvatica.
Les gonidies du Stictina limbata, que Bornet (1873) rapporte
au genre /Vostoc, nous ont offert toute la série des éléments
figurés que nous avaient présentés les gonimies des Peltigé-
racées et qu’on a l’habitude de rencontrer chez les Cyano-
phycées autonomes. Ce sont des cellules oblongues, de 5 à 7 »
sur 3 à 5 v ; elles montrent un protoplasme périphérique qui
paraît homogène, sauf la présence de grains faiblement
colorables par l’hématoxyline et disposés souvent en un
cercle : ce sont des grains de cyanophycine. Le centre de la
cellule est occupé par un chromidium formé d’un réticulum
chromatique avec grains chromatiques sensiblement de même
taille, répondant aux corpuscules métachromatiques, et
un autre plus gros, le corps nucléoliforme. C’est, on le voit,
exactement la structure réalisée chez les Cyanophycées qui
vivent hors de l’état de symbiose (Guilliermond, 1906).
La structure du thalle du Stictina limbata (PI. I, fig. 2)
est celle des Stictacées précédemment étudiées. Ajoutons à
la différence que crée avec elles l’absence d’isidies la présence
de très nombreuses sorédies, le plus souvent marginales.
Grâce à la similitude des traits les plus importants de la
structure du thalle des Stictacées que nous venons d'étudier,
nous pouvons les réunir en un ensemble où les Stictina silva-
tica, Dufouret, fuliginosa se placeront tout près les uns des
autres, le Stictina limbata à quelque distance des précédents.
Ces constatations confirment les rapprochements déja faits
par les lichénographes: c’est ainsi que Harmand (1909,
p. 720) réunit ces quatre espèces dans le groupe des Cyphel-
late du genre Stictina; le même auteur dit encore (p. 723)
en varlant des Stictina silvatica et Stictina fuliginosa: «Il
nest pas rare de rencontrer des échantillons douteux qu’on
hésite à joindre à l’une ou l’autre espèce ; il est possible que
la deuxième ne soit qu’une variété de la première. » De même,
ANN. DES SC. NAT. BOT., 10¢ série . 101% inet
D14 FERNAND MOREAU
le Stictina Dufouret a été considéré comme une variété du
Stictina silvatica (Le Jolis. Catal., p.31, cité d’après Harmand,
1909, p. 723). Nous pouvons donc considérer les Séictina
fuliginosa, Dufourei, silvatica, limbata comme constituant
un groupe naturel dont l’homogénéité nous est attestée tant —
par l'étude macroscopique que par l’étude fine de leurs
tissus.
DEUXIÈME TYPE : Stictina crocata.
Cette Stictacée, pourvue de gonidies Nostocacées comme
les précédentes, s’en éloigne par la structure de son cortex
inférieur et par la présence de pseudocyphelles (PI. I, fig. 3).
Le cortex supérieur, plus épais que chez les Stictacées du
type sulvatica, est constitué par un plectenchyme aux parois
épaissies, donc par un prosoplectenchyme. Les cellules
superficielles sont aplaties et, grâce à un épaississement
important de leurs parois, leurs cavités sont presque totale-
ment oblitérées. Il se fait ainsi à la surface du cortex une
couche assez épaisse, qu'on peut considérer Gomme un épi-
thalle, mais qui n’a pas, au point de vue de son origine, la
même valeur que l’épithalle des espèces précédentes. Sous
ces couches aux parois notablement épaissies, le cortex du
Stictina crocata en présente d’autres où l’épaississement est
moins considérable, mais reste suffisant pour que la cavité
de ses cellules présente des angles arrondis. Les cellules les
plus profondes du cortex sont plus grandes que les autres.
La couche gonidiale est discontinue; elle renferme des
gonimies, que Zahlbruckner (1907) rapporte au genre iVostoc.
La médulle offre deux sortes d'éléments : des hyphes aux
cellules allongées, souvent d’assez grand diamètre, et, parmi
eux, des cellules assez grandes, isodiamétriques, que les
coupes montrent le plus souvent isolées, ou en courtes
chaînes.
Le cortex “inférieur est un paraplectenchyme pourvu de
poils unisériés ; il répond aux cortex paraplectenchymateux
déjà étudiés; cependant les parois de ses cellules sont un peu
épaissies, ce qui marque une tendance vers un prosoplec-
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 319
tenchyme ; de plus, le cortex inférieur présente des pseudo-
cyphelles (fig. 4, et Pl. I, fig. 3). |
A l’œil nu, une pseudocyphelle se distingue assez difficile-
ment d’une vraie cyphelle : c’est une tache claire de la face
inférieure du thalle ; elle n’est généralement pas aussi nette-
Fig. 4. — Stictina crocata. — Pseudocyphelle. Gross. : 666.
ment circonscrite qu'une cyphelle, et elle ne répond jamais
à une dépression aussi profonde que cette dernière ; parfois
même, elle est portée par une légère éminence de la face
inférieure.
Le thalle conserve jusqu'aux bords de la pseudocyphelle
ses caractères ordinaires ; puis, brusquement, le parenchyme
cortical inférieur s’interrompt, mettant les filaments médul-
laires directement à nu. Ces filaments ne changent guère de
caractères ; toutefois ils cessent de cheminer parallèlement ©
à la surface et se dirigent vers la fenêtre ouverte dans le
cortex inférieur. Ils ne la franchissent pas, s’arrêtant assez
nettement au niveau de la surface de ce cortex.
Par ces caractères, prosoplectenchyme de la face supé-
rieure, pseudocyphelles de la face inférieure, le Stictina crocata
doit être éloigné des Stictina étudiés ci-dessus.
7 TROISIÈME TYPE: Stictina intricata.
Dans cette espéce, le cortex supérieur est un prosoplecten-
chyme qui rappelle celui du Stictina crocata ; les cellules pro-
fondes arrondissent les angles de leur cavité en épaississant
leurs parois; vers la surface, elles s’aplatissent, tandis qu’un
316 | FERNAND MOREAU
épaississement plus considérable de on paroi tend al’ oblité-
ration de leur lumière. ic
Le cortex inférieur lui aussi est oros6 plectencliy mia =e
mais, en même temps que ses cellules épaississent leurs parois,
elles s’arrondissent, laissant entre elles des méats qui se sont
montrés remplis d’une substance amorphe dans les échan-
tillons conservés en herbier que nous avons étudiés. Ce cortex
porte de rares poils semblables à ceux des espèces ci-dessus.
Il est interrompu par des pseudocyphelles denne: a celles
du Stictina crocata.
Les gonidies du Stictina intricata se rapportent à des Gye.
nophycées.
Le caractère prosoplectenchymateux des deux cortex
écarte cette Stictacée de celles déjà étudiées.
QUATRIÈME TYPE: Stictina aurata.
Les deux cortex du Stictina aurata sont aussi prosoplec-
tenchymateux : le cortex supérieur possède dans sa partie
supérieure des cellules à cavité arrondie, aux parois épaisses, et
dans sa moitié ou dans son tiers inférieurs des cellules plus
petites, aux parois moins épaisses, rondes ou un peu angu-
leuses ; le cortex inférieur ressemble au cortex supérieur,
autant que l’état de nos échantillons nous a permis d’en juger ;
il porte des poils rares, isolés, du type unisérié, et présente
des pseudocyphelles.
Cette Stictacée se rapproche de la précédente par le carac-
tére prosoplectenchymateux de ses deux cortex et la pré-
sence de pseudocyphelles ; elle s’en éloigne par la structure
fine de ses prosoplectenchymes et aussi par la nature de
l’Algue de la couche gonidiale : ici, c’est une algue Chloro-
phycée.
CINQUIÈME TYPE : Lobarina scrobiculata.
Avec le Lobarina scrobiculata (PI. I, fig. 6), nous abordons
une série de Lichens dont le thalle, souvent très développé,
généralement épais, s'oppose à l’ensemble des précédents par
MR ie
LICHENS DH LA FAMILLE DES STICTACÉES ST
l’absence de cyphelles et de pseudocyphelles ; ces caractères
sont communs aux Lobarina scrobiculata, Lobaria pulmo-
nacea, Ricasolia herbacea et Ricasolia pis qui vont
nous occuper maintenant.
Le nom de scrobiculata rappelle la présence, à la face
supérieure du thalle, de scrobicules, excavations de grande
taille, larges fosses plus ou moins polygonales, que séparent
des côtes ; celles-ci correspondent à une plus grande épais-
seur de la médulle.
Le cortex supérieur du Lobarina scrobiculata (fig. 5) est
un prosoplectenchyme aux parois assez épaisses pour que
toutes ses cellules, même les plus profondes, aient une cavité
arrondie. Les cellules superficielles, comprenant jusqu'aux
deux tiers supérieurs de la formation, sont des cellules mortes ;
elles peuvent rester accolées les unes aux autres, formant au
thalle un revêtement continu ; le plus souvent, elles se déta-
chent en paquets constituant des lambeaux dont les débris sont
la proie des bactéries ; leur ensemble vaut à la surface du
Lobarina scrobiculata un aspect mat particulier. Les cellules
profondes du cortex restées vivantes ont un protoplasme
pauvre et un noyau unique.
La couche gonidiale, mince, renferme des gonimies grou-
pées par paquets, que Bornet (1873) rapporte à un ÂVostoc.
Elles forment des cellules plus ou moins arrondies, plus ou
moins anguleuses ou piriformes, plongées par petits groupes
dans une enveloppe mucilagineuse commune. Leur longueur
atteint 9 y, leur largeur est de 3 à 5 u. On y trouve une couche
périphérique de protoplasma et un corps central ; la première
offre fréquemment de petites vacuoles ; le corps central pré-
sente un réticulum aisément décolorable et des grains de
taille variable ; le bleu polychrome teint ces derniers en
rouge vif : ce sont des corpuscules métachromatiques.
Le cortex inférieur, moins épais que le cortex supérieur, est
comme lui un prosoplectenchyme, mais un prosoplectenchyme
d'un type différent : les cellules arrondies, à parois épaisses,
laissent souvent entre elles des méats. On y trouve deux
couches de cellules vivantes renfermant chacune un proto-
plasme non très pauvre et un noyau. Les cellules superficielles
318 FERNAND MOREAU
constituent une ou deux couches de cellules mortes, plus ou
moins détachées. Les cellules restées vivantes peuvent
donner naissance à des poils cloisonnés, isolés ; ce n’est que
rarement que ces poils se groupent pour nt des sortes de
pinceaux aux cellules allongées, pourvues d’un noyau médian.
SIXIÈME TYPE: Lobaria pulmonacea.
x
Le Lobaria pulmonacea (fig. 6, et PI. I, fig. 5) offre, a
l'examen macroscopique, un certain nombre de caractères
communs avec l’espéce précédente: présence de serobicules
à la face supérieure, absence de cyphelles et de pseudocy-
phelles à la face inférieure. La structure fine des deux espèces
présente cependant des différences notables.
D'abord, au contraire de celles du Lobarina scrobiculata,
les gonidies du Lobaria pulmonacea (fig. 6) se rapportent à des
Chlorophycées ; Bornet (1873), Zahlbruckner (1907) en fai-
saient des Protococcus.
Ce sont des Algues unicellulaires, presque sphériques, de
3 à 9u de diamètre. On trouve dans chacune d’elles un chro-
matophore étendu, et son centre, qu’occupe un protoplasme
incolore, renferme un noyau de petite taille, à nucléole central.
Ces iene sont dépourvues de Reese
Lors de leur multiplication, leur noyau se divise un petit .
nombre de fois, et des cloisons radiales séparent la cellule-
mère en petites cellules anguleuses au nombre de 4, 6 ou
davantage ; chacune a la forme d’une petite pyramide, dont
la base s’appuie sur la paroi de la cellule mére et qui tourne sa
pointe vers le centre de cette dernière ; dans cette région
prennent place le noyau et la majeure partie du protoplasme
incolore, tandis que la région périphérique est occupée par à
chromatophore.
D’une manière générale, les Algues de la partie supérieure
de la couche gonidiale sont souvent en voie de division; c’est
dans cette région qu'on trouve les Algues anguleuses et de
petite taille; plus bas sont des Algues de très grande taille,
non encore en division ; enfin, la région inférieure présente
des Algues arrondies, de taille moyenne. Toutefois, cette répar-
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 319
tition des Algues en profondeur subit de nombreuses excep-
tions.
Le cortex supérieur constitue un plectenchyme dont la face
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Fig. 5 et 6.
Fig. 5 (à gauche). — Lobarina scrobiculata. — Thalle. Gross. : 800.
Fig. 6 (à droite). — Lobaria pulmonacea. — Thalle. Gross. : 800.
supérieure est plane alors que la face inférieure, en contact
avec la couche gonidiale, est au contraire accidentée. C’est
un prosoplectenchyme : on trouve à sa surface une couche
amorphe formée par l’épaississement des parois des cellules
320 FERNAND MOREAU
superficielles et l’oblitération de leurs cavités, puis une région
aux parois encore très épaissies, avec des cavités cellulaires
aplaties parallèlement à la surface du thalle et passant aux
filaments de la couche gonidiale. Toutes ces cellules, sauf les
cellules mortes de la région tout 4 fait superficielle, ont un
protoplasme pauvre, avec un noyau relativement gros,
auquel on reconnaît une membrane; un nucléole latéral, un
nucléoplasme pourvu d’éléments chromatiques. Entre les
cellules du cortex, particulièrement dans la région profonde,
se laissent voir de fins trabécules constituant des plasmo-.
desmes.
Le cortex inférieur est aussi un prosoplectenchyme, mais
ses parois sont moins épaisses que celles du cortex supé-
rieur ; les cellules pourvues de communications protoplas-
miques renferment un protoplasme non très pauvre, avec
un noyau assez gros. Plusieurs d’entre ses cellules superficielles
se prolongent en poils isolés, du type unisérié, aux cellules
uninucléées.
Les divers caractères histologiques du Lobaria pulmonacea,
assez différents de ceux du Lobarina scrobiculata, éloignent
ces deux Stictacées plus que l'examen de la morphologie
extérieure pourrait le faire penser.
SEPTIÈME TYPE: RAicasolia herbacea.
Nous rapportons à ce type deux Stictacées que le seul
examen de leurs plectenchymes corticaux pourrait parfois
faire éloigner l’une de l’autre, mais qui sont fort voisines par
l’ensemble de leurs autres caractères.
Le Ricasolia herbacea (PL: I, fig. 4; Pll, fig, AG
PI. III) a un cortex supérieur mince, souvent paraplecten-
tenchymateux ; les parois de ses cellules sont peu épaisses,
mais non très minces ; les parois de la couche superficielle sont
plus épaisses que celles des autres couches, particulièrement
la paroi externe, qui constitue un épithalle. Les cellules sont
polyédriques ; alignées souvent perpendiculairement à la
surface, elles constituent des files parallèles se prolongeant
parfois en bas par un hyphe de grand diamètre qui s'enfonce
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 321
dans la couche gonidiale. Leur contenu est pauvre, renferme
un noyau central que de fins trabécules relient aux parois.
Au contraire, le thalle du Ricasolia amplissima (PI. IT,
fig. 12; Pl. IV), plus épais que celui du Ricasolia herbacea,
a un cortex épais, au caractére mixte, paraplectenchyma-
teux en profondeur, prosoplectenchymateux a la surface. Les
cellules des quelques couches (souvent trois) superficielles ont
une paroi très épaisse, une cavité aplatie ; les deux couches qui
suivent ont une paroi moins épaisse et forment le passage
aux cellules des couches inférieures aux parois minces, plus
grandes, isodiamétriques, au contour polyédrique ; celles qui
forment les couches les plus inférieures du cortex s’enfoncent
entre les paquets de gonidies de la couche sous-jacente sous
la forme de cellules allongées perpendiculairement à la sur-
face. Les cellules des couches superficielles montrent quelques
fins plasmodesmes ; leur contenu est assez dense, assez colo-
rable; il renferme un protoplasme réticulé avec un noyau. Dans
les autres cellules du cortex, le contenu est pauvre, parfois
pourvu de grains chromatiques ; il est réduit souvent a une
couche pariétale et à de rares trabécules ; leur noyau est
petit, rejeté sur le côté, et renferme un tout petit nucléole.
Malgré les différences qu’offrent les deux cortex que nous
venons de décrire, les deux Stictacées qui les présentent
méritent d'être placées tout près l’une de l’autre : il arrive
en effet que les cellules superficielles du cortex de certains
échantillons du Ricasolia herbacea présentent un épaississe-
ment de leurs parois qui, sans être aussi important que chez
le Ricasolia amplissima, écarte cependant le cortex de ces
exemplaires du type strictement paraplectenchymateux ;
c'est le cas des thalles de Ricasolia herbacea des figures 14 et
16, où, à l’épaisseur près, le cortex a essentiellement la struc-
ture de celui du Ricasolia amplissima.
L'étude des autres caractères des deux Ricasolia justifie
leur rapprochement.
La couche gonidiale n’est, ni chez l’un, ni chez l’autre,
nettement séparée des cellules du cortex. Chez le Ricasolia
_herbacea, on trouve des gonidies entourées complètement par
des cellules de plectenchyme et, de même, chez le Ricasolia
322 FERNAND MOREAU pes
amplissima, les gonidies font des paquets entre lesquels
s’avancent des cellules du plectenchyme cortical.’
Les gonidies ont, chez les deux Stictacées qui nous occu-
pent, les mémes caractéres : ce sont des gonidies vertes,
| 3 semblables 4 celles du
Lobaria pulmonacea ;
elles ont même struc-
ture, méme mode de
reproduction que ces
3 à 7 et {9 de diamètre
chez le Aicasolia herba-
cea, la plupart ne dé-
passant pas 7 »; celles
du Ricasolia amplissi-
ma, que Bornet (1873)
et Sturgis (1890) rap-
portent à un Protococ-
cus, ont de 3 à 6 et jus-
qu'à 10» de diamètre,
la plupart ne dépassant
Fig. 7: — a. Ricasoiia herbacea ; b. Ricasolia pas 6. Ces dimensions
Ra — Cortex inférieur et poils. Sci également celles
| (3 à 9u) que nous
avons notées pour les gonidies du Lobaria pulmonacea.
Le cortex inférieur présente chez le Ricasolia herbacea et
chez le Ricasolia amplissima des structures voisines. Celui de
la première espèce (fig. 7, a) est formé par un paraplecten-
chyme de deux épaisseurs de cellules, au protoplasme
pauvre pariétal, avec un’ noyau latéral ; celui du Ricasolia
amplissima (fig. 7, b) est un plectenchyme aux parois légère-
ment épaissies ; il partage donc la tendance au type proso-
plectenchymateux réalisé pleinement dans le cortex supérieur
de la même espèce. |
Lun et l’autre cortex possèdent des poils différents de ceux
que nous ont offerts les autres Stictacées : celles-ci avaient
des poils longs, à longues cellules ; les poils des Aicasolia
sont des poils courts, formés de cellules courtes, presque
dernières ; elles ont de.
un peu épaisses; leurs
comme constitué par un
poils nés côte à côte et
donnent insertion à des
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES | 323
isodiamétriques ; ceux du Ricasolia herbacea (fig. 7, a) sont à
parois minces ; la forme de leurs cellules est un peu irrégu-
lière ; ceux du Ricasolia amplissima (fig. 7, 6) sont à parois
cellules sont un peu ren-
flées, ce qui vaut au
poil un aspect monili-
forme.
En outre, le cortex in-
férieur des Ricasolia
porte des crampons. On
peut considérer un cram-
pon de Ricasolia herba-
cea (fig. 8, et PI. I, fig. 4)
pinceau de nombreux
coalescents. (Ceux du
centre ont leurs parois
minces ; ceux de la pé-
riphérie, au diamètre un
peu plus grand, ont des
parois plus épaisses. Leur
protoplasme est riche,
renferme un noyau par
cellule. Sur le côté et
surtout à l'extrémité, ils
filaments mycéliens cloi-
sonnés, aux cellules al-
longées et uninucléées ;
en particulier, on voit à l’extrémité des hyphes des crampons
se dissocier, pénétrer dans le substratum et envahir par
exemple les cellules des écorces sous-jacentes.
Les crampons du Ricasolia amplissima (fig. 9) sont essen-
tiellement constitués comme les précédents, mais avec une
modification plus profonde de leurs cellules périphériques ;
leur centre est occupé par dés filaments fins, leur périphérie
Fig. 8. — Ricasolia herbacea. —
Crampon. Gross. : 666.
39% : FERNAND MOREAU
par un cortex épais de deux couches de cellules de grande
taille, appartenant à des hyphes qui cheminent parallèle-
ment à la surface du crampon; les parois latérales de ces
hyphes sont assez épaisses; leurs parois transversales sont
plus minces. Le cortex porte de nombreux poils à la base du |
crampon. Le contenu des cellules du crampon et des poils
est constitué par un protoplasme trabéculaire, avec des gra-
Fig. 9. — Ricasolia amplissima. — Crampon. Gross. : 666.
nules sur les trabécules et un noyau ; les filaments du centre
renferment également des granules chromatiques et un très
petit noyau.
Enfin, la face inférieure du Ricasolia herbacea et celle du
Ricasolia amplissima ont encore comme caractère commun
d'être dépourvues de cyphelles et de pseudocyphelles.
On le voit, les différences entre ces deux Ricasolia sont
plus apparentes que profondes ; ils se laissent aisément ratta-
cher à un même type de structure. | !
Nous avons, au cours de cette étude de l'appareil végétatif
des Stictacées, distingué un certain nombre de types d’orga-
nisation. Tous se laissent rapporter à un schéma commun,
et ils ne différent que par des caractères en somme secon
daires. | |
L'importance des traits communs à tous atteste l’homo-
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 325
généité de la famille des Stictacées. Toutefois, il est facile d’y
reconnaître un certain nombre de groupes correspondant
précisément aux types que nous venons de décrire. |
Auprès du Siéictina silvatica se rangeront les Stictina fuli-
ginosa et Dufourei, et, à quelque distance, le Stictina limbata.
On peut caractériser histologiquement ce groupe par la
nature paraplectenchymateuse des deux cortex, par la pré-
sence de cyphelles au cortex inférieur et, au moins dans les
trois premières espèces, par l'existence d’isidies à la face
supérieure ; ainsi défini, il paraît avoir la valeur d’un groupe
naturel.
A quelque distance de la, nous A les Stictina crocata
et intricata, tous deux pourvus, comme les précédents, de
gonidies bleues, mais où les cyphelles font place à des pseudo-
cyphelles. Le cortex supérieur chez le Stictina crocata, les
deux cortex chez le Stictina intricata sont du type prosoplec-
tenchymateux.
Également pourvu de pseudocyphelles et de deux cortex
prosoplectenchymateux comme le Stictina intricata, mais —
porteur d’algues Chlorophycées, le Siicia aurata prendra place
à son voisinage.
L'absence de toute cyphelle ou pseudocyphelle caractérise
les groupes suivants, formés de Stictacées de grande taille.
Le Lobarina scrobiculata et le Lobaria pulmonacea, tous
deux à surface bosselée, se placent non loin l’un de l’autre,
sans que pourtant la structure de leurs cortex permette de
les confondre dans un même groupe: les deux cortex sont
prosoplectenchymateux et perdent par desquamation leurs
cellules mortes superficielles chez le Lobarina scrobiculata ;
ils le sont également chez le Lobaria pulmonacea, mais avec
d’autres caractères. De plus, le premier héberge une Algue _
bleue, le second une Algue verte.
: : Enfin un dernier groupe comprendra les ho herbacea
et amplissima ; ils méritent de constituer un groupe naturel
par l’ensemble de leurs caractères ; rappelons l’existence de
poils spéciaux courts, aux cellules isodiamétriques et de
crampons cortiqués que ne présente aucune des autres Stic-
tacées que nous avons étudiées. |
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326 | FERNAND MOREAU
Le tableau suivant résume les résultats de cette étude en
mettant en évidence la fagon dont se groupent les différentes
Stictacées qui font son objet et les caractéres qui justifient
leur groupement. Il convient de faire remarquer que les
différences qui séparent les divers groupements sont légères
et qu’on pourrait considérer l’ensemble des Stictacées comme
un grand genre, le genre Sticta, les noms de (£u-)Sticta,
Stictina, Lobaria, Lobarina, Ricasolia servant à désigner des
groupements subgénériques ou même des sections de moindre
importance. Nous retrouverons dans l’étude des appareils
reproducteurs la même homogénéité. eo
Gonidies “yanophycées. Gonidies Chlorophycées,
ou gonimus.
PT LE ee
Vv \ e
WwW
eo
[=
Stictina silvatica. vat
Stictina fuliginosa. ‘Si
Stictina Dufouret. :
Stictina limbata. &
\ ©
| =
a,
>>
Bes =
Stictina crocata . | > we
Sar M ne Sticta aurata. =
Stictina intricata. À
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Pas de crampons cortiqués. Poils spéciaux, crampons cortiqués.
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LES APPAREILS REPRODUCTEURS
Le mode de reproduction le plus répandu chez les Sticta-
cées est sans doute la formation de sorédies. On sait qu’on
désigne sous ce nom des productions pulvérulentes, où le
microscope révèle l’existence d’hyphes et de gonidies, et qui
constituent de minuscules Lichens formés en grand nombre
ca et 1a à la surface du thalle. Peu d’espèces de Stictacées en
sont dépourvues ; cependant les sorédies font défaut chez
les Ricasolia herbacea et amplissima, les Stictina fuliginosa,
silvatica, Dufourei ; elles sont abondantes sur le thalle chez
_ le Stictina limbata, où elles ont une couleur cendré bleuâtre;
elles ornent d’une belle poussiére d’un jaune citrin les bords
du thalle du Sticta aurata; chez le Lobarina scrobiculata
(Pl. I, fig. 6), elles sont nombreuses, soit sur le thalle, soit sur
ses bords, soit encore le long des côtes qui séparent les scro-
bicules ; c’est aussi dans cette même situation qu'on les
trouve le plus souvent chezle Lobaria pulmonacea (PI. I, fig. 5).
Chez le Lobarina scrobiculata, les sorédies se présentent
exactement sous l’aspect qu'elles offrent chez les Nephro-
mium et les Peltigera également pourvus d’Algues bleues
(F. Moreau et Mme F. Moreau, 1919, p. 93, et Pl. XIII, fig. 6).
Sans revenir longuement sur les détails de leur formation et
de leur structure, rappelons qu'elles sont caractérisées par
la multiplication des éléments de la couche gonidiale qui font
hernie au dehors en une masse divisée en glomérules de petite
taille, ’éruption étant précédée d’une brisure du cortex. Ainsi
en est-il chez le Lobarina scrobiculata (PI. I, fig. 6).
Chaque sorédie forme un petit corpuscule constitué par
plusieurs colonies de gonimies entre lesquelles circulent
quelques hyphes, le tout étant entouré d’un cortex d’une
seule couche de cellules. La formation de ce dernier commence
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328 | FERNAND MOREAU
avant l’individualisation de la sorédie et débute par la surface
libre de celle-ci ; tant que la sorédie n’est pas individualisée,
la partie par laquelle elle s'attache encore à la masse soré-
diale ne constitue pas un cortex continu. Les hyphes du
centre de la sorédie sont cloisonnés, et leurs cellules, courtes,
renferment un protoplasme assez abondant et un noyau.
Dans les cellules corticales, le protoplasme est pauvre ou a
complètement disparu.
Les sorédies du Stictina limbata, également pourvu de
gonimies, sont semblables aux précédentes.
Chez le Lobaria pulmonacea (PI. I, fig. 5), lors de la formation
des sorédies, on assiste d’abord à la multiplication des hyphes
de la partie supérieure de la couche gonidiale ; ils s’allongent,
se cloisonnent, deviennent plus étroits, tandis que les goni-
dies sont à peu près inactives ; quelques-unes seulement
entrent en division ; leur nombre n’augmentant guère tandis
que les filaments deviennent plus nombreux, elles s’éloignent
les unes des autres.
En même temps, le cortex subit des transformations
importantes (fig. 10) ; ses cellules profondes cessent de former
un plectenchyme; les hyphes reprennent leur mdividualité
et constituent un tissu lâchement feutré, formé de filaments
ramifiés, cloisonnés, aux cellules courtes, uninucléées ; le
phénomène débute dans les régions voisines de la couche
gonidiale. gagne de proche en proche vers les couches supé-
rieures Jusqu'à l’épithalle.
Au stade ultérieur (fig. 11), le cortex a perdu totalement
ses caractères plectenchymateux. Les glomérules sorédiaux
se forment alors, s’ils ne l’ont dejà fait, dans la partie supé-
rieure de la couche gonidiale, modifiée comme il a été dit
plus haut, mais restée en place sous le cortex altéré: pour
former un glomérule, les hyphes s’enroulent autour des
gonidies.
Jusqu'ici, toutes les cellules du cortex sont restées vivantes ;
elles meurent bientôt, et on trouve leurs membranes flétries
sous la couche amorphe (fig. 12) ; les glomérules sorédiaux
rompent et écartent les débris du cortex ; ils sont mis à jour,
encore attachés au Lichen, dont ils ne tardent pas à se libérer.
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Fig. 10, 11,12, 13. — Lobaria pulmonacea. — Formation des sorédies.
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330 FERNAND MOREAU
Dans le glomérule encore recouvert des débris du cortex,
les cellules superficielles se transforment en un cortex, cette
modification débutant dans la région supérieure de la sorédie :
lPAlgue ou les Algues que la sorédie renferme se divisent acti-
vement et des hyphes s’insinuent entre leurs cellules filles.
La sorédie agée (fig. 13) constitue un tubercule arrondi,
de près de 150u.de diamètre, parfois allongé et long de 200 ;
c'est une masse plus volumineuse que la sorédie du Lobarina
scrobiculata. On y distingue deux régions. La partie externe
est un cortex de plusieurs épaisseurs de cellules à cavité plus
ou moins arrondie ; ses caractères sont ceux du cortex supé-
rieur du thalle ; ses cellules ont des parois un peu épaisses,
un contenu assez riche, un noyau unique ; il est recouvert par
une couche amorphe qui s'accroît par l’adjonction à sa partie
inférieure des parois épaissies des cellules superficielles aux
cavités d’abord aplaties, puis totalement oblitérées. Au
centre de la sorédie. on trouve des hyphes et des algues ; les
algues sont en voie de division, les hyphes s’insinuent entre les
cellules nouvellement formées et les écartent ; les caractères
des gonidies sont les caractères ordinaires des gonidies du
thalle ; quelques-unes atteignent une assez grande taille ;
les hyphes sont des filaments lâches, aux cellules courtes,
larges, presque isodiamétriques ; leur taille est de l’ordre de
celle des cellules du cortex ; elles renferment un noyau et de
nombreuses granulations dome paraissant sur les
mailles d’un réseau protoplasmique.
Il arrive souvent, chez les Stictacées comme chez les
Peltigéracées, que le processus qui donne naissance aux
sorédies commence, puis se termine autrement que par l'indi-
vidualisation des sorédies.
C’est ainsi que, chezle Lobarina scrobiculaia, autour d’une
masse sorédiale qui parait devoir donner plusieurs sorédies,
un cortex commun se forme, constituant des festons sem-
blables à ceux décrits chez le Nephromium parile (F. Moreau
et Mme F. Moreau, 1919, p. 100).
Chez le Lobaria pulmonacea, il arrive que la sorédie, née
comme il a été dit plus haut, ne se détache pas ; le cortex qui
la recouvre se relie au cortex thallin, et on a l’apparence d'une
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LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACEES 331
isidie. La ressemblance entre les deux formations est parfois
assez grande pour qu’il soit nécessaire de suivre le début du
phénomène pour savoir si on a affaire à une production
sorédiale ou à une production d’origine isidienne. Le nom de
papille peut étre employé pour désigner les ornements de la
surface du thalle, dont la nature isidienne ou sorédiale est
indéterminée ; lorsque le doute sera levé, on distinguera des
papilles isidiales comme celles offertes par le Stictina fuli-
ginosa et des papilles sorédiales comme celles du Lobaria
pulmonacea.
Certains échantillons du Lobaria pulmonacea aux papilles
sorédiales bien développées voient ces dernières s’aplatir,
manifester une structure dorsi-ventrale ; la papille devient
une foliole où les gonidies sont plus nombreuses vers la face
supérieure par un phénomène analogue à celui qui donne
naissance aux folioles dont nous avons décrit la formation
chez les Peltigéracées (F. Moreau et Mme F. Moreau, 1919,
p. 102) et à celui que nous ont fourni les exemplaires à isidies
foliolées du Siictina fuliginosa.
Nous avons parfois observé, chez le Lobaria pulmonacea, la
formation de sorédies à la face inférieure du thalle, dans des
cas où des gonidies étaient amenées vers le cortex inférieur ;
la naissance et l’aspect de ces sorédies étaient les mêmes que
ceux des sorédies nées à la face supérieure du thalle.
La sorédie mise en liberté peut, sur l’une de ses faces,
produire des filaments mycéliens; ceux-ci naissent des
cellules de son cortex situées immédiatement au-dessous de
celles qui sont très aplaties et se présentent sous la forme
d'hyphes étroits cloisonnés en cellules uninucléées. Leur for-
mation est sans doute le prélude du développement d’un nou-
veau thalle. La connaissance précise de ce dernier phénomène
est un sujet de recherches qui n’a pas encore été abordé et dont
nous nous proposons d'entreprendre l’étude avec les ressources
de la technique moderne des cultures pures sur milieu
défini. |
Nous ne sommes pas mieux renseigné sur la formation et le
développement d’un thalle nouveau par les autres organes de
332 FERNAND MOREAU
reproduction des Stictacées, ceux que constituent les sper-
mogonies, productrices de spermaties, et les apothécies, pro-
ductrices d’ascospores. Ils ont été et ils sont encore le plus
souvent considérés comme étroitement liés les uns aux autres,
les apothécies résultant, dans les idées en cours, de la fécon-
dation par les spermaties d’un organe qui les précède et pré-
lude a leur développement, l’ascogone. Dans l’état actuel
de nos connaissances sur le développement des appareils
ascosporés des Champignons, les formations désignées sous
le nom d’ascogones se laissent rapporter, d’une manière
générale, à deux structures différentes, auxquelles corres-
pondraient des phénomènes sexuels distincts.
Un premier type est réalisé chez le Pyronema confluens et
de nombreux autres Ascomycétes : l’ascogone y est une vési-
cule plurinucléée ; on en fait un organe femelle ; à son voisi-
nage, une autre vésicule plurinucléée représente un organe
mâle, une anthéridie. Les deux organes se mettent en rapport
par un tube émis par l’ascogone et qu’on appelle un tricho-
gyne. Il est hors de notre sujet de discuter, avec Harper (1900),
Dangeard (1907), Claussen (1912), la question de savoir si un
passage effectif de protoplasme et de noyaux a lieu, par le
trichogyne, de l’anthéridie dans l’ascogone ; il nous suffit de
savoir que le Pyronema confluens réalise un cas où l’ascogone
plurinucléé est accompagné d’une anthéridie qui ébauche,
et suivant certains auteurs accomplit, une plus ou moins
complète copulation avec lui. |
A ce premier type d’ascogone, nous opposerons celui qu'on
attribue au Collema (Stahl, 1874; Baur, 1898), ainsi qu’a
de très nombreux Lichens et à quelques Ascomycétes auto-
nomes. Chez le Collema, ce n’est plus une vésicule cénocy-
tique qui reçoit le nom d’ascogone ; on donne ce nom à un
filament cloisonné aux cellules uninucléées, plusieurs fois
enroulé sur lui-méme, et dont une extrémité se prolonge par
un hyphe rectiligne, également formé de cellules uninucléées,
dont la dernière fait saillie au-dessus de la surface du thalle ;
au filament cloisonné, rectiligne, dressé vers la surface, on
donne encore le nom de trichogyne. Ascogone et trichogyne
constituent ensemble le carpogone. Aucune anthéridie n’ac-
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 999
compagne le carpogone, mais le Collema possède des spermo-
gonies où naissent des spermaties ; on attribue à celles-ci
le rôle de gamètes mâles ; l'extrémité saillante du trichogyne
recevrait la copulation d’une spermatie, après quoi l’apo-
thécie se développerait ; on admet que l’ascogone a été fécon-
dé par la spermatie, sans que d’ailleurs on sache rien du
voyage dans le trichogyne des éléments fécondants de la sper-
matie, sans qu’on sache rien des détails de la fécondation
elle-même. |
C'est à ce type de développement de l’apothécie que doit
être rapporté le cas des Stictacées, si on en croit les recherches
de Borzi (1878). Celles-ci ont porté sur le Sticta pulmonaria
(Lobaria pulmonacea) et sur le Ricasolia herbacea. Dans ces
espèces, dit-il (p. 71), «il carpogono é pure constituito dalle
tre tipiche regioni: l’ascogono, l’ipo-ascogono e il tricogino.
Le prime duo sono egualmente formate di serie di cellule piu
grosse ed abbondati di protoplasma, il loro numero é variabile,
talore se ne contano poche. La compattezza del tessuto non
lascia con sicurezza decidere di molte altre particolarita.
Tuttavia si pio precisare il punto di nascita dell’ascogono,
essendo indicato da un piccolo glomerulo di ifi, situati poco
al di sotto della zona gonidiale e quasi al livello di questa. La
lunghezza del trichogino éassai variabile;... cotesta lunghezza
non é tuttavia costante per la stessa specie e nello stesso indi-
viduo ». Borzi note encore que, chez le Lobaria pulmonacea,
certains thalles, riches en trichogynes, sont au contraire dé-
pourvus de spermogonies ; il interprète ce fait comme l’indi-
cation d'une tendance à la dicecie.
Plus tard, l’étude du développement des apothécies des
Stictacées fut reprise par Sturgis (1890) chez le Sticta an-
thraspis et le Ricasolia amplissima. Cet auteur ne fut pas
assez heureux pour retrouver les stades initiaux de l’apo-
thécie décrits par Borzi; le développement de l'appareil
ascosporé est pour lui un phénomène purement végétatif.
Toutefois, en raison de la fréquence des carpogones chez les
Lichens, la description donnée par Borzi prévaut ordinaire-
ment.
Rémarquons cependant qu’à l’époque déjà reculée où
1
334 FERNAND MOREAU
Borzi étudiait les Stictacées, les connaissances sur la cytologie
des Champignons et sur les phénomènes généraux de la sexua-
lité étaient trop imparfaites pour qu'il ait pu donner du déve-
loppement de l’apothécie des Stictacées une description qui
nous satisfasse aujourd'hui. Il y a donc lieu de reprendre la
question et de l’étudier à l’aide des procédés dont disposent
les recherches modernes d’histologie et de cytologie des
Champignons. Il nous paraît d'autant plus nécessaire de
livrer à de nouvelles investigations la question des origines
des apothécies des Lichens que notre précédente étude des
Peltigéracées (F. Moreau et Mme F. Moreau, 1909) nous a
montré, dans les ascogones deces derniéres, non des organes
du type attribué au Collema, mais des ampoules cénocytiques,
comparables aux ascogones du Pyronema ; aucune antheridie,
il est vrai, ne les accompagnait, mais non plus aucune sper-
matie n’intervenait dans le développement de l’apothécie.
Une nouvelle étude des formes de Lichens 4 spermaties et
trichogynes s’impose, concluions-nous: cette partie de nos
recherches sur les Stictacées répond à cette nécessité.
On trouve, dans le thalle de nombreuses Stictacées, des
organes globuleux pouvant dépasser un demi-millimètre de
diamètre, et qui, s’ouvrant sur la face supérieure du thalle,
laissent se répandre une multitude de corpuscules en forme
de bâtonnets ; les corps globuleux sont des spermogonies : :
les bâtonnets sont des spermaties.
Presque toutes les espèces en possèdent. En général, on
reconnaît leur existence à la présence à la surface du thalle
d’une petite ponctuation. Dans certains cas, celle-ci est
portée au sommet d’une éminence ; c’est sur ce caractère que
repose en partie la séparation des Ricasolia et des Lobaria ;
les spermogonies des premiers sont saillantes, verruciformes
(PI. II, fig. 8); celles des Lobaria ne le sont pas (PI. IT, fig. 7).
Toutetiags il arrive que des spermogonies de Rickeotee ne
déforment nullement Ja face supérieure et, par contre, on
trouve parfois des spermogonies de Lobaria pulmonacea
s’ouvrant au sommet d’une éminence.
C’est dans la médulle que se loge la majeure partie de la
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 3939
spermogonie ; c’est là qu’elle naît, au contact de la couche
gonidiale, sous la forme d’un peloton de filaments aux cellules
plus courtes que celles de la médulle environnante, au proto-
plasme plus riche, plus chromatique que celui de ces dernières,
uninucléées comme elles. Au-dessus d’elle se forment souvent
des sorédies selon le mode ordinaire (PI. IT, fig. 9). Au fur et
à mesure quil allonge ses filaments, le peloton accroît son
diamètre, écarte les éléments de la couche gonidiale, devient
contigu au cortex. En même temps qu'il s'accroît, ses élé-
ments subissent une différenciation dans deux sens.
Les filaments superficiels courent parallèlement à la surface
générale du peloton; ils épaississent leur paroi, puis, s’acco-
lant les uns aux autres, ils constituent un plectenchyme
qui forme autour de la spermogonie une enveloppe continue
d’un petit nombre de couches de cellules. Vers le haut, ce
plectenchyme se raccorde au plectenchyme cortical, et c’est
l’ensemble des deux plectenchymes qui, plus tard, se brisera
à la partie supérieure de la spermogonie, permettant la sortie
des spermaties.
Celles-ci prennent naissance dans la spermogonie encore
close aux dépens des filaments centraux du peloton sper-
mogonial. Ces derniers sont disposés de bonne heure suivant
une direction radiale et convergent vers le centre de la sper-
-mogonie; leurs cellules sont isodiamétriques, à contenu
riche, à gros noyau; elles donnent naissance sur le côté et
a fe extrémité la abe proche du centre a un prolongement
fin qui se termine par une spermatie.
La description précédente, faite d’aprés nos préparations
du Lobaria pulmonacea, convient d’une maniére générale a
toutes les Stictacées ; c’est également celle que nous (F. Mo-
reau et Mme F. Moreau, 1919, p. 51) avons donnée des sper-
mogonies des Nephromium.
Nous avons vu, chez le Stictina silvatica, la spermogonié
naître, non sous la couche gonidiale, mais dans cette couche
elle-méme. Chez le Lobarina scrobiculata, elle peut également
prendre naissance dans le cortex, aux dépens de sa partie
inférieure.
De plus, nous avons pu observer chez le Lobaria pulmo-
BOO 111 FERNAND MOREAU
nacea de nombreuses spermogonies, vieilles et vidées, et
aussi des spermogonies avortées.
Quand une spermogonie a fonctionné pendant aucune
temps et a abandonné au dehors la majeure partie de ses
spermaties, ses cellules, jusque-la actives, voient leur contenu
s’appauvrir, elles constituent| bientôt un massif de cellules
mortes, d'apparence plectenchymateuse; le centre en est
occupé par une cavité irrégulière où persistent quelques sper-
maties ; la spermogonie tout entière constitue une grosse
masse d'aspect plectenchymateux, un bloc caverneux d’as-
pect très particulier, reconnaissable même à un faible grossisse-
ment.
Dans quelques cas, la dégénérescence des cellules de la
spermogonie commence de bonne heure ; on la trouve réalisée
dans des régions à l’aspect plectenchymateux de spermogonies
encore jeunes, auprès de régions en pleine activité productrice
de spermaties. Parfois le phénomène atteint des spermogo-
nies toutes jeunes n'ayant pas encore produit de spermaties.
Ces cas d’avortement partiel ou total des spermogonies sont
rares.
Chaque spermatie a la forme d’un batonnet de 4 v de lon-
gueur, étroit de 0,5 à 1 v, légèrement renflé aux deux extrémi-
tés ; l’une d’elles renferme un noyau de petite taille. Ces corps
ul formés par centaines, peut-être pee milliers, dans chaque
spermogonie.
Telle est l’histoire de ces éléments énigmatiques, tour a
tour considérés comme des gamétes males oucomme des spores
agames,sans qu’aucun des arguments fournis en faveur de
l’une ou l’autre opinion ait été décisif. Pour trancher la ques-
tion dela fonction actuelle des spermaties chez les Lichens, il
faudra élucider complètement le rôle qui leur est attribué
pendant la fécondation de l’ascogone ou suivre, en leur
absence, le développement de l’apothécie. Nous sommes
ainsi amené à étudier les apothécies des Stictacées. |
Il nous est cependant impossible de décrire dès mainte-
nant toutes les phases du développement de l’apothécie ; nous
en connaissons bien les stades extrêmes, mais les états inter-
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES Dal
médiaires n’ont été que trop rarement rencontrés par nous
pour que nous ayons pu tirer de leur examen des conclusions
fermes. Ainsi que nous le verrons bientôt, le thalle des Sticta-
cées renferme en général de nombreuses ébauches d’apothé-
cies, mas la plupart sont de bonne heure frappées de stérilité.
Aussi, malgré des recherches opiniâtres, poursuivies pendant
plusieurs années, sur des matériaux différents, recueillis dans
des stations variées et à des époques diverses, bien qu'ayant
étudié plusieurs milliers de préparations, nous ne sommes pas
encore en mesure d'exposer le développement complet des
apothécies des Stictacées.
Les apothécies des Stictacées se présentent sous la forme de
cupules, de disques pédicellés, portés à la face supérieure du
thalle. Leur production est assez capricieuse. Certains thalles
en sont richement pourvus, alors que des thalles de la même
espèce, dans la même localité, en manquent totalement. Le
Lobaria pulmonacea, le Ricasolia herbacea, le Ricasolia amplis-
sima en portent communément ; toutefois ces mêmes espèces,
dans certaines localités, restent stériles ; les apothécies du
Lobaria pulmonacea étaient rares ou absentes au Bois de Bou-
logne, près de Dax (Landes), lorsque Hue (1908) visita cette
localité, où nous les avons trouvées assez nombreuses en 1919 ;
nos échantillons de Ricasolia amplissima d'Auvergne, au
contraire de ceux des Vosges, sont sans apothécies ; le Loba-
rina scrobiculata s’est montré stérile au Mont-Dore, à La
Bourboule (Puy-de-Dôme), au Bois de Boulogne près de Dax
(Landes), à Chaunac près de Tulle (Corrèze), au Saint-Mont
près de Remiremont (Vosges); nous ne l’avons trouvé fructifié
que dans une seule localité, sur un arbre unique de la rive
gauche de la Montane, un peu en aval des cascades de Gimel
(Corrèze), puis sur plusieurs arbres du chemin de Gimel au
château de Saint-Priest (Corrèze) ; indication précise de ces
stations est utile, les fructifications du Lobarina scrobiculata,
pourtant si répandu, n’ayant été rencontrées, à notre con-
naissance, que deux fois en France: par Rupin, également
dans le département de la Corréze (Lamy de la Chapelle, 1878)
et par Nylander (1896), dans la Forêt de Fontainebleau. »
La première indication de la naissance d’une apothécie est
338 FERNAND MOREAU
dans la formation au sein des hyphes médullaires, souvent au
contact de la couche gonidiale, empiétant parfois sur la partie
inférieure de celle-ci, de filaments aux caractères spéciaux
(fig. 14). Ils forment un peloton serré, et leur ensemble se pré-
sente comme un massif généralement arrondi. aisément recon-
naissable, même à un faible grossissement (Pl. I, fig. 4;
PL IT, fig. 10 et 11). Les hyphes qui le constituent sont formés
de cellules isodiamétriques, au diamètre plus grand que celui
des hyphes de la médulle, au contenu plus riche, plus colo-
rable ; elles renferment au centre un noyau plus gros que les
noyaux ordinaires et de la même structure qu'eux. Grâce a
l'accroissement de la taille des cellules et à l'allongement des
hyphes du peloton, celui-ci grandit, en restant sensiblement
arrondi, écartant parfois les éléments de la couche gonidiale ;
il peut atteindre 70» de diamètre. Autour de lui, des hyphes
à cellules moins grandes, au contenu moins riche, forment le
passage aux hyphes ordinaires. Ce peloton, c’est le peloton
ascogonial.
L’ascogone n'offre pas, chez les Stictacées, l’aspect simple,
schématique, qu’on est habitué a lui voir dans les figures clas-
siques de l’ascogone du Collema : un hyphe unique enroulé un
petit nombre de fois sur lui-même ; c’est un peloton compli-
qué qui ne se laisse pas suivre dans toute sa longueur.
Bientôt s’élève au-dessus de lui un. filament qui se dresse
vers la face supérieure du thalle: c’est le trichogyne ; il est
parfois possible de reconnaître qu’il est le prolongement des
éléments du peloton. Il traverse la couche gonidiale, puis,
s’insinuant entre les cellules du cortex, il circule dans leurs
parois, en épousant leurs contours; lorsqu'il bute contre une
cellule du plectenchyme cortical, il se divise en deux branches
qui passent de part et d’autre de celle-ci. Se ramifiant ainsi
plusieurs fois, il atteint la face supérieure du thalle, au-
dessus de laquelle il fait légèrement saillie. Il se comporte
comme le feraient les filaments d’un parasite intercellulaire.
Ses cellules ont le diamètre des cellules ascogoniales, mais
leur longueur est plus grande; la cellule terminale, dont
l'extrémité fait saillie au-dessus du cortex, alors que sa base
est plongée entre les cellules corticales, est parfois très allon-
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 339
gée. Le contenu des cellules du trichogyne est formé d’un
protoplasme riche, particulièrement chromatique pendant
la traversée du cortex et dans la cellule terminale. Chacune
renferme un noyau. L’extrémité saillante a une paroi épaisse
qui se raccorde à celle des cellules superficielles du cortex.
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Fig. 14.— Ricasolia herbacea — Ascogone. Gross. : 800.
Le trichogyne est une formation éphémère ; bientôt 1l se
flétrit à partir de son extrémité ; le contenu de ses cellules
devient uniformément chromatique ; au bout de quelque
temps, on n'en trouve plus que des débris, bientôt disparus.
À ce moment, l’ascogone possède encore sa structure pri-
mitive. |
Ultérieurement les cellules ascogoniales se transforment,
et lors de la production des asques il n’en reste plus aucune
trace. La formation des asques est précédée par celle des
paraphyses ; ce sont des filaments allongés, aux cellules uni-
340 FERNAND MOREAU
nucléées, et qui, dressés vers la face supérieure du thalle,
viennent buter contre le parenchyme cortical. Les asques
sont formés successivement et écartent les paraphyses ; une
même apothécie peut en renfermer à divers âges. Dans
chaque asque, avant la formation des spores, on trouve un gros
noyau ; puis, plus tard, huit ascospores, unicellulaires d’abord,
et uninucléées, bientôt pourvues d’une cloison transversale,
rarement de deux ou trois, séparant des cellules à un noyau
(fig. 15, 1 à 3). Entre temps, le cortex susapothécial a
disparu, et l’apothécie a acquis sa forme définitive; d’abord
concaves, le thalamium et le thécium se sont étalés, et l’apo-
thécie est devenue saillante sur le thalle.
Tels sont les faits connus de l’histoire du développement
des apothécies chez le Ricasolia herbacea ; celles du Ricasolia
amplissima (Pl. IT, fig. 12), du Lobarina scrobiculata et du
Lobaria pulmonacea se forment essentiellement de la même
façon.
Chez le Lobaria pulmonacea, nous avons vu disparaître le
cortex susapothécial par un procédé particulier : il se fait une
célification des parois du cortex au-dessus des paraphyses ;
l’altération des membranes précède celle du contenu cellu-
laire ; bientôt le protoplasme est lui-même altéré, et il ne reste
plus, au-dessus de l’apothécie, qu’une gelée amorphe, que les
paraphyses repoussent et traversent quelquefois.
Dans la même espèce, les ascospores nées uninucléées
deviennent bicellulaires avec un noyau dans chaque loge
(fig. 15, 4 et 5).
Chez le Ricasolia amplissima, les ascospores deviennent
tétracellulaires, chaque loge renfermant un noyau.
Les faits qui précèdent sont relatifs à l’histoire des asco- 2
gones qui évoluent en apothécies fertiles; mais bien souvent
ce développement, aprés avoir produit les stades de jeunesse
des apothécies, s’arréte; ainsi s’expliquent le caractère capri-
cieux de la production des apothécies, la stérilité, limitée &
certaines stations, de diverses espéces, fertiles ailleurs, et la
stérilité générale de certaines autres dont les apothécies sont
totalement inconnues.
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 341
Les ascogones des Stictacées sont en effet beaucoup plus
répandus que les apothécies. Les jeunes thalles des Sticta-
cées en renferment souvent de trés nombreux, dont une faible
partie fait place à des apothécies. Il est, d’autre part, frequent
©
Fig. 15.— Asques et ascospores du Rica- Fig. 16, — Ricasolia herbacea — Ascogne
solia herbacea (1 à 3) et du Ricasolia pul- avorté, Gross. : 800.
monacea (4 et 5). Gross. : 800.
de trouver des ascogones dans les thalles stériles de Stictacées.
Ainsi,nos Ricasolia amplissima du MassifCentral, nos Lobarina
scrobiculata dont une seule localité nous a fourni des apothé-
cies, nos Stictina limbata, dont les apothécies, jamais obser-
vées par nous, sont ég:lement une rareté, renferment dans
leurs thalles, pourtant stériles, de nombreux ascogones.
342 _ FERNAND MOREAU
Ces ascogones ne différent pas, au début; des ascogones qui
évolueront en apothécies : rien ne permet de présager leur
stérilité. Plus tard ils dégénèrent : ils forment des massifs
plectenchymateux arrondis. aux cellules à protoplasme
pauvre ou dépourvues de protoplasme, parfois surmontés de
trichogynes en dégénérescence (fig. 16). On trouve tous les inter-
médiaires entre les ascogones sains et les ascogones avortés.
La stérilité des Stictacées est due plus souvent à l'arrêt
de développement qui frappe les ascogones qu’à l’absence de
ces derniers, si même celle-ci se réalise jamais totalement.
Nous avons donc observé les premiers débuts du dévelop-
pement des apothécies sous la forme d’ascogones, hyphes
enroulés en peloton, aux cellules unimucléées ; ces hyphes
sont en rapport avec des trichogynes, hyphes cloisonnés, aux
cellules uninucléées, ramifiés, bientôt flétris, et dont l’extré-
mité fait saillie au-dessus de la surface du thalle. Rien ne
nous autorise à penser que les trichogynes reçoivent la fécon-
dation des spermaties et que ces dernières interviennent
d’une manière quelconque dans le développement des apo-
thécies. Celles-ci, au terme de leur histoire, possèdent la struc-
ture générale des apothécies des Discomycètes.
Cette identité dans la structure des fructifications des
Stictacées et de celles des Ascomycètes autonomes permet
de penser que la partie incolore des Lichens n’est autre chose
que le thalle d’un Champignon modifié par la symbiose.
Nous sommes ainsi conduit à aborder la troisième partie de
cette étude, qui, en nous faisant connaître des phénomènes
actuels de biomorphogenèse chez les Stictacées, nous aidera à
concevoir les modifications qu'ont dû subir dans le passé les
ancêtres des Lichens modernes pour passer de l’état de Cham-
pignons autonomes à la forme sous laquelle on les connaît
aujourd'hui.
CHAPITRE III
PHÉNOMÈNES DE BIOMORPHOGÉNÈSE
L’étude des phénomènes de biomorphogénèse chez les
Peltigéracées (F. Moreau et Mme F. Moreau, 1918 ; 1919, p. 91)
nous a conduit à proposer la théorie suivante de la nature
des Lichens : un Lichen est, dans la partie la plus importante
_ de son thalle, une biomorphose ; il doit ses caractères spéciaux
à l’action morphogène d’une Algue sur un Champignon; les
algues qui constituent les gonidies des Lichens s’y comportent
comme le ferait un agent infectieux y provoquant une affec-
tion déformante ; elles jouent dans la morphogénèse d’un
Lichen le rôle que remplissent les agents cécidogènes dans la
formation des galles et, d’une manière générale, les agents
morphogènes dans les phénomènes auxquels sont attri-
buables les crown-galls, les cancers, les tumeurs, en un mot
les néoplasmes animaux ou végétaux d’origine parasitaire.
Cette théorie se fonde sur l'observation de la production de
tissus nouveaux par les hyphes des Peltigéracées sous l’action
d’Algues étrangères à la couche gonidiale ou de gonidies arra-
chées a cette derniére par la croissance des hyphes, et entrai-
nées par eux dans des régions du thalle où on ne les trouve
pas ordinairement. Ces observations, qui ont la valeur d’inocu-
lations expérimentales, nous ont appris, en particulier, que,
chez le Peltidea aphthosa, des Algues Cyanophycées, retenues
par les poils de la face supérieure du thalle, provoquent la
croissance de ces derniers, réveillent l’activité du cortex et
déterminent la formation des tubercules désignés par les
Tichénographes sous le nom de céphalodies; une réaction
analogue provoque la formation de céphalodies chez le Peilii-
dea venosa et le Solorina saccata. De méme, chez le Peltidea
aphthosa, le Peltigera horizontalis, le Peltigera rufescens, nous
avons étudié la formation de tubercules à la face inférieure
YP te TRE ARENA
ir QE Fo is oe bi LA l'E
344 FERNAND MOREAU
du thalle sous l’action des gonidies elles-mêmes, accidentelle-
ment apportées dans cette région. Dans les deux dernières
espèces, les mêmes gonidies provoquent aussi la production
d'une structure identique, sauf par son orientation, à celle
de la face supérieure du thalle : entre les gonidies, les hyphes
prennent les caractères de ceux d’une couche gonidiale; un
tissu plectenchymateux, identique au cortex normal, borde
cette couche gonidiale du côté de la face inférieure du thalle.
Notre élève, Mile Devitch (1921), a décrit de semblables for-
mations sous les apothécies du Peltigera polydactyla. L'identité
des nouveaux tissus avec le cortex et la couche gonidiale
ordinaire de la face supérieure conduit à rendre, dans tous
ces cas, les gonidies responsables de leur formation. ie
L'étude des phénomènes de biomorphogénése chez les
Stictacées va nous offrir des faits semblables aux précédents ;
en outre, leur étude détaillée dans deux espèces voisines, du
genre Ricasolia, nous fera connaître quelques épisodes de la
lutte que se livrent l’Algue et le Champignon mis en présence ;
dans un cas, l’issue de la lutte sera marquée par la victoire
du Champignon; dans l’autre, nous verrons s’établir un état
de paix instable où les deux adversaires, se supportant mu-
tuellement, réaliseront l’état de symbiose durable. A la notion
usuelle de la symbiose lichénique, considérée comme une
entente parfaite, une collaboration paisible de deux associés,
nous serons amenés a substituer la notion d’une tolérance
mutuelle de deux adversaires toujours prêts à de nouveaux:
combats (F. Moreau, 1920).
FORMATION D'UN PLECTENCHYME ET D UNE COUCHE GONI-
DIALE A CHLOROPHYCEES A LA FACE INFERIEURE DU
THALLE DU Lobaria pulmonacea.
Nous avons observé sous le thalle du Lobaria pulmonacea
des productions qui rappellent d’assez prés les tubercules et
les plectenchymes supplémentaires que Fünfstück (1884),
Bitter (1904), MUe Devitch (1921) et nous-méme (1915, 1919)
avons décrits sous les apothécies de diverses Peltigéracées
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 34)
pour qu'il soit inutile que nous nous étendions longuement à
leur sujet.
Au-dessus du cortex inférieur plus ou moins désorganisé,
mais ici sans relation avec les apothécies, on trouve, dans
une région limitée, un plectenchyme du type prosoplecten-
chymateux de plusieurs épaisseurs de cellules ; au-dessus
s’étend une couche épaisse d’Algues vertes identiques à celles
de la couche gonidiale ; au-dessus encore vient la médulle et
enfin la couche gonidiale ordinaire et le cortex supérieur.
Dans les deux couches à gonidies, on trouve, près du plecten-
chyme le plus voisin, des gonidies de grande taille en voie de
division; plus loin, des gonidies de grande taille ne se divi-
sant pas; enfin, près de la médulle, des gonidies de taille
moyenne ; les deux couches à gonidies sont donc identiques,
sauf par l'orientation ; les phénomènes de croissance et de
division des Algues qu’on pouvait, dans la couche gonidiale
ordinaire, croire soumis à l’action prépondérante de la lumière
en raison de la position superficielle des Algues qui les pré-
sentent, se montrent donc liés à l’action prépondérante
d’autres facteurs et peut-être placés sous la dépendance du
voisinage des tissus plectenchymateux. L’action sur le Cham-
pignon de l’Algue amenée à la face supérieure du thalle est
évidente, et la biomorphogénéseest ici aussi marquée que dans
les Peltigéracées qui nous ont offert des cas analogues.
CÉPHALODIES DU Lobaria pulmonacea ET AUTRES STICTACÉES.
Le Lobaria pulmonacea nous a également offert des exemples
variés d'associations de ses hyphes avec une Alguedifférentede
celles de la couche gonidiale, avec une algue Cyanophycée; de
telles associations sont connues sous le nom de céphalodies.
Les divers types connus de céphalodies y sont presque
tous représentés.
Le plus répandu est le nee immergé hypogéne ou de cépha-
lodie interne d'origine infrathalline. Les céphalodies de cette
espèce sont placées dans la médulle, où elles occupent une
place assez considérable pour produire une large gibbosité
de la face inférieure du thalle. Les Algues bleues, on Nostoca-
ANN. DES SC. NAT. BOT., 40e série. 1924, ase
946 FERNAND MOREAU
cées, y forment une vaste colonie très lobée. Entre les Algues
circulent des hyphes de faible diamètre. Les petits lobes sont
étroitement enveloppés par des hyphes de faible calibre, aux
cellules longues, qui courent parallèlement à leur surface.
A la périphérie de la céphalodie des hyphes grossièrement
parallèles à son contour général font le passage entre les
hyphes précédents et les hyphes ordinaires de la médulle.
Avec ces caractères, les céphalodies internes du Lobaria
pulmonacea ressemblent beaucoup aux céphalodies immer- ©
gées que nous (F. Moreau et Mme F. Moreau, 1920) avons
décrites chez les Solorina saccaia et crocea et à celles que nous
figurons plus loin chez les Ricasolia (PI. III, fig. 14; Pl. IV,
fig. 21). Notons cependant que les colonies d’Algues bleues
occupent dans ces dernières espèces presque toute l’étendue
de la céphalodie, les hyphes enveloppants ne constituant
qu'une marge étroite autour d’elles, alors que chez le Lobaria
pulmonacea les Algues bleues étendent leur action bien plus
Join et souvent n’occupent au centre de la céphalodie qu’une
place relativement restreinte. Appliquant aux céphalodies la
notion de rayon d'activité cécidogénétique, introduite par
Houard (1904) à l’occasion des galles dues aux insectes, nous
dirons que, chez le Lobaria pulmonacea, les Cyanophycées qui
causent les céphalodies immergées dans la médulle ont un
rayon d'action cécidogène plus étendu que celui des Cyano-
phycées des céphalodies immergées des Solorina et Ricasolia.
Les céphalodies immergées dans la médulle du type des
précédentes reçoivent parfois le nom de céphalodies endo-
gènes ; c’est une désignation incorrecte; en fait, de telles
céphalodies se développent au sein du Lichen; elles naissent
à sa face inférieure. |
On voit se faire à la face inférieure du thalle, sous l’action
d’Algues bleues, une croissance des hyphes qui conduit à la
formation d’une légère éminence. Les hyphes entourent les
gonidies ; celles-ci, se multipliant, sont conduites par la crois-
sance des hyphes jusqu’au sein de la médulle, et la céphalodie
acquiert ses dimensions et ses caractères définitifs. Ces phé-
nomèênes sont essentiellement les mêmes que ceux qui con-
duisent à la formation des céphalodies immergées dela médulle
. pe aes rn a NUES
\ ALES re Rae ee
LICHENS DE LA FAMÉELE DES STICTACEES 347
chez les Ricasolia et que nous décrivons et figurons plus loin
een fic. 13,44: PL IV, fig. 20, 21).
Dans certains cas, l’action des Algues à la face inférieure du
thalle conduit à la production d’une céphalodie différente des
précédentes ; 1l se fait une céphalodie hypogène comme elles,
mais une céphalodie externe, une céphalodie mfrathalline.
Dans de telles céphalodies, les Algues entrent en dégénéres-
cence et meurent. Ici encore, nous renvoyons a la descrip-
tion détaillée et aux figures (Pl. III, fig. 15; Pl. IV, fig. 19)
des céphalodies du méme type que nous ont offertes les
Ricasolia. | ;
Il est une autre moe de céphalodie qui ne paraît pas avoir
été rencontrée jusqu'ici. L’Algue pénètre dans le thalle par
la face supérieure ; sans provoquer de déformation sensible
de la surface, elle modifie le cortex, refoule les éléments de la
couche gonidiale. Elle réalise un cas de céphalodie immergée,
mais d’origine épigène. Elle est assez voisine de la céphalodie
épithalline, déformante, observée par Winter (1877) chez le
_Stita linita; mais c’est une céphalodie immergée épigène.
Chez le Siicta aurata, nous avons aussi rencontré des cépha-
lodies semblables aux céphalodies immergées d’origine hypo-
gène du Lobaria pulmonacea.
Rappelons que de nombreuses Stictacées offrent des
exemples de céphalodies. Forssell (1884) en signale dans
34 espèces de Stictacées. Chacune résulte d’un phénomène
de biomorphogénèse, d’une réaction morphologique des
hyphes à l'influence exercée par une algue Cyanophycée,
Des céphalodies immergées semblables à celles que nous
avons décrites plus haut ont été rencontrées par nous chez le
Ricasolia herbacea et le Ricasolia amplissima ; dans cette
dernière espèce, elles se développent, ainsi que l’a signalé
Forssell (1884), en formant à la face supérieure du thalle des
arbuscules souvent désignés sous le nom de Dendriscocaulon.
L'importance que nous avons donnée à l’étude des céphalo-
dies de ces deux espèces leur vaudra, dans cet exposé, à
chacune un paragraphe spécial.
348 FERNAND MOREAU
CEPHALODIES DU Ricasolia herbacea.
Les Algues qui causent la formation des céphalodies du
Ricasolia herbacea sont des Cyanophycées, des Nostocacées.
Leurs cellules offrent dans leur structure cytologique les :
caractères des Algues autonomes de ce groupe.
Elles pénètrent dans le thalle du Ricasolia herbacea par sa
face inférieure ; retenues par les poils du cortex inférieur,
elles provoquent leur croissance et sont bientôt entourées par
eux. Il peut ainsi se former des protubérances, parfois rela-
tivement volumineuses, des céphalodies externes (PI. III,
fig. 15). La périphérie en est occupée par un plectenchyme
qui se raccorde avec le plectenchyme cortical, dont il partage
les caractères ; leur centre est formé d’un complexe d’hyphes
et de gonidies.
Le plus souvent, les Algues sont repoussées dans la médulle
(Pl. ITI, fig. 1) et une saillie peu importante, qui ordinai-
rement disparaît bientôt, marque seule leur point d’entrée ;
ce n’est qu'assez rarement qu'elles provoquent la formation
d’une protubérance importante avant de pénétrer dans la
médulle. En d’autres termes, les céphalodies du Ricasolia
herbacea sont hypogènes ; le plus souvent, elles deviennent
immergées ; elles sont rarement hypothallines ; plus rarement
encore, elles ont un caractère mixte, présentant à la fois un
tubercule infrathallin et un développement intramédullaire.
Cette description soulève dès maintenant la question de
savoir comment progressent les Algues dans la médulle. Fors-
sell (1884), à qui elle s’est posée au cours de l’étude étendue
qu'il a faite des céphalodies, admet, sans l’affirmer nettement,
que les Algues meurent dans la partie inférieure des colonies,
ne se développant que dans la région opposée, la partie du
thalle traversée par l’Algue reprenant son aspect primitif.
Nous verrons bientôt des Algues des céphalodies frappées de
mort, mais ce phénoménen’est pas en rapport avec la progres-
sion des colonies d’Algues dansla médulle ; elles subissent une
progression passive, du fait des tractions et des pressions
qu’elles reçoivent des hyphes qui s’accroissent autour d’elles ;
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G_ = es rf @ @>
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— Ricasolia herbacea. — Jeune céphalodie immergée.
je
— Ricasolia herbacea. — Céphalodie immergée. Gross. : 800.
f
Fig. 17 (en haut
g. 18 (en bas
350 FERNAND MOREAU
leurs colonies sont étirées, comprimées, repoussées, divisées
en lobes que de nouvelles tractions ou de nouvelles poussées
peuvent individualiser.
Au voisinage immédiat des quelques Algues qui constituent
la jeune colonie qui vient d’envahir la médulle, les hyphes
médullaires prennent un aspect particulier (fig. 17); leur
contenu s’enrichit, leur diamètre diminue, leurs cellules se
divisent et restent plus courtes ; ils cessent de décrire les
grandes ondulations propres aux hyphes de cette région du
thalle pour suivre un trajet plus sinueux, plus contourné ; ils
épousent ainsi le contour général du massif d’Algues, auquel
ils constituent bientôt une sorte d’enveloppe de forme arron-
die ou ovoide aplatie. Les cellules ainsi modifiées sont sem-
blables à celles de la couche gonidiale.
Autour de ces hyphes, d’autres au diamètre plus large
passent progressivement aux hyphes ordinaires de la médulle.
Du côté de la face inférieure du thalle, les plus extérieurs des
hyphes qui entourent les Algues changent leur orientation et
se dirigent tous vers le bas. Ils deviennent bientôt des hyphes
larges, au protoplasme riche, pourvus dans chaque cellule
d’un gros noyau central renfermant un matériel chromatique
abondant. Pressés les uns contre les autres, ils se dirigent,
paralléles les uns aux autres, perpendiculairement a la sur-
face du thalle et prennent part à la formation d’une légère
saillie qui révèle à l’extérieur la présence de la jeune céphalo-
die. Les cellules les plus périphériques du massif constituent
un tissu au caractère plectenchymateux qui, comme le cortex
inférieur du thalle, peut former des poils courts. Toutes les
cellules fongiques ainsi modifiées sont uninucléées (fig. 17).
A un état plus âgé (PI. III, fig. 14), la céphalodie se pré-
sente sous l’aspect général d’un complexe de gonidies et
d’hyphes plongés au sein de la médulle sans jaisser voir le plus
souvent aucune particularité qui le relie à la face supérieure du
thalle.
Les Algues se sont multipliées beaucoup et forment des
_ colonies étendues, lobées, parfois richement lobées, de sorte
qu’une coupe d’une colonie unique peut montrer plusieurs
territoires gonidiaux séparés les uns des autres par des hyphes.
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 391
La céphalodie prend souvent l’aspect général d’un éventail
dont les divers rayons marquent l'orientation des lobes les
plus importants.
Entre les gonidies d’un même lobe se trouvent des hyphes
aux cellules courtes, aux parois minces, au protoplasme
riche, pourvues chacune d’un noyau. Les lobes sont séparés
les uns des autres par des hyphes appliqués contre eux, épou-
sant leurs contours, aux cellules plus longues que les précé-
dentes, étroites encore, et, comme les précédentes, aux parois
minces, au protoplasme riche, et uninucléées (fig. 18).
Tout autour de cette formation s’étend la médulle aux
caractères ordinaires, que ses filaments assez larges, au
protoplasme assez pauvre et leur orientation générale, paral-
lèle à la surface du thalle, distinguent aisément des hyphes
de,la céphalodie. Toutefois, du côté du cortex inférieur, il
arrive que subsistent des filaments aux caractères déjà
médullaire, au protoplasme non riche, mais disposés en files
non régulières, perpendiculaires au cortex.
Telles sont dans leurs grandes lignes l’histoire et la struc-
ture d’une céphalodie du Aicasolia herbacea, au moins dans
un certain nombre de cas: il se forme un complexe d’Algues
et d’hyphes, plongé dans le sein de la médulle ; il en occupe
fréquemment une grande partie, et il est ordinairement assez
volumineux pour qu’une large gibbosité de la face inférieure
du thalle en marque l’existence.
Mais le plus souvent les phénomènes de dégénérescence qui
frappent les Algues viennent altérer la structure que nous
avons décrite et mettre un terme à l’évolution que nous avons
suivie.
Le phénomène le plus apparent, dans un examen au faible
grossissement, est la mort de l’Algue. La dégénérescence ne
frappe généralement pas d’emblée les Algues de la céphalodie
tout entière ; c’est lobe par lobe qu’elle exerce son action ;
certains lobes restent sains alors que la dégénérescence a déjà
éprouvé les voisins. |
Dans un même lobe en voie de dégénérescence, on observe
la coexistence d'éléments sains et d’autres déjà frappés de
mort.
392,2 _ FERNAND MOREAU
L’Algue diminue de taille, son contenu disparaît; son
enveloppe vidée se flétrit, se colore d’une manière uniforme ;
au terme de la dégénérescence, elle se présente comme un‘
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débris colorable sous la forme d’un résidu linéaire ; il nen
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Fig. 19.— Ricasolia herbacea.— Céphalodie hypothalline avec Algues mortes. Gross.: 666.
subsiste bientôt que des traces à peine reconnaissables qui
disparaissent enfin. | |
_ En même temps que les Algues dégénérent et meurent, les
hyphes avoisinants se transforment : leur protoplasme s’ap-
pauvrit ; les hyphes les plus proches des gonidies frappées de
mort se pressent les uns contre les autres, prennent l'aspect
d’un plectenchyme aux cellules de petite taille, les hyphes
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 299
plus éloignés affectant celui d’un plectenchyme aux cellules
assez grandes. |
Ainsi, dégénérescence et disparition des Algues, transforma-
tion des éléments les plus proches de ces derniers en un tissu
d’aspect plectenchymateux aux cellules de petite taille,
transformation des hyphes qui entourent les précédents en
Fig. 20.—Ricasolia herbacea.— Jeune apothécieimmergée avec Algues mortes. Gross.: 800.
un tissu d'apparence plectenchymateuse aux cellules assez
grandes dont le protoplasme s’appauvrit beaucoup, telles
sont les modifications que subit dans ses diverses parties une
céphalodie frappée de dégénérescence.
Ces divers phénomènes ont lieu dans des céphalodies à
tous les stades de leur développement.
Ils sont d'existence générale dans les céphalodies infra-
thallines (fig. 19, et PI. II, fig. 15), à tel point que nous avons
rarement observé de telles céphalodies qui n'en soient pas
atteintes plus ou moins profondément.
394 FERNAND MOREAU
Fréquemment ils se produisent dans la céphalodie encore —
jeune (fig. 20, et Pl. III, fig. 16). Celles qui ont échappé à ces
phénomènes de dégénérescence pendant leur jeunesse en sont
souvent atteintes. lorsqu'elles sont parvenues à un état de
développement plus ou moins avancé (PI. III, fig. 17). La
dégénérescence frappe souvent la face inférieure d’abord et
gagne les divers lobes les uns après les autres (PI. III, fig. 18).
Il peut se faire cependant que certaines céphalodies
échappent à ces phénomènes de dégénérescence ou au moins
que ceux-ci ne les atteignent que très tardivement.
Nous avons, dans les pages qui précèdent, exposé l’histoire
du développement des céphalodies du Ricasolia herbacea en
nous servant du langage couramment usité pour parler de ces
formations ; implicitement, nous avons considéré une cépha-
lodie comme un tout, soit vis-à-vis du Lichen qui la renferme,
soit vis-à-vis des hyphes et des Algues qui la constituent. Il
peut être suggestif de restituer aux éléments de la céphalodie
leur valeur propre ; nous nous proposons de reprendre briè-
vement l'histoire des céphalodies du Ricasolia herbacea en
nous servant d’un langage qui mette en lumière l’antagonisme
qui s'exerce au sein du complexe céphalodial entre l’Algue
et le Champignon et que le langage précédemment employé
n’a pas suffisamment exprimé. Ce langage nouveau, la théorie
dont nous avons indiqué les grandes lignes au début de ce
chapitre va nous le fournir.
Nous avons en présence un Champignon, celui du Ricasolia
herbacea, etune Algue infectieuse, une Nostocacée. C’est a la
face inférieure du Aicasolia que se fait l’infection. La Nosto-
cacée provoque parfois à son entrée dans le Ricasolia une
réaction qui se traduit par la formation de tissus nouveaux
constituant un tubercule infrathallin. Lorsque le Lichen ne
localise pas dès le début l’agent infectieux dans un tubercule,
l’Algue pénètre dans la médulle et s’y développe ; elle pro-
voque autour d’elle la formation de tissus spéciaux, de bio-
morphoses, et peut séjourner plus ou moins longtemps, peut-
être très longtemps, dans le thalle du Ricasolia; mais souvent,
plus ou moins rapidement, les tissus ainsi formés entrent en
dégénérescence, et celle-ci s’accompagne de la mort. de la
PEND ye
? "Tv
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 355
disparition totale del’ Algue infectieuse. Sans vouloir pousser
jusqu’à ses limites extrêmes la comparaison de l’infection du
Ricasolia par la Nostocacée et de l'infection d’un être supé-
rieur par une bactérie, on peut toutefois penser que la pro-
duction de tissus nouveaux a pour le Ricasolia la valeur
d’une réaction de défense ; on ne niera pas en tout cas que la
formation de tubercules infrathallins arrête en général dès le
début les progrès de l’invasion de la Nostocacée ; quant à la
mort des Algues dans les céphalodies âgées, elle paraît bien
en rapport avec les transformations subies par les hyphes de
nouvelle formation qui les environnent.
L'intérêt de cette nouvelle manière d'exposer I’ histoire des
céphalodies du Ricasolia herbacea est de nous montrer aux
prises l’un avec l’autre une Algue et un Champignon ; elle
met en évidence le caractère pathologique de l’association
qu’ils contractent ; elle exprime dans un langage adéquat
aux faits les différentes phases d’une maladie causée à un
Champignon par une Algue. Ses débuts sont ceux d’une
infection ; ses progrès sont marqués par l'invasion des tissus
du Champignon par les cellules de l’Algue ; les réactions mor-
phologiques du Champignon mettent parfois un frein 4 cette
invasion ; la mort de l’Algue, sa résorption marquent pour le
Champignon la guérison complète, sauf la présence d’un massif
plectenchymateux, qui indique, comme une cicatrice, le
théâtre de la lutte des deux organismes. Sila mort de l’Algue
a lieu de bonne heure, la guérison est rapide, l’infection revêt
un caractère aigu ; dans le cas contraire, la guérison est
ajournée, on a affaire à une maladie chronique.
Le Ricasolia amplissima va maintenant nous offrir un
exemple de maladie dont les. prémices sont exactement les
mêmes que dans l’espèce précédente, mais dont l’issue sera, en
général, totalement différente.
CÉPHALODIES ET FORMATIONS DENDRISCOCAULÉENNES
DU Ricasolia amplissima.
On trouve a la surface du thalle du Ricasolia amplissima
des formations spéciales, des arbuscules touffus, aux rami-
396 FERNAND MOREAU
fications nombreuses, et qui atteignent une hauteur de 1,
2 centimètres et davantage. Elles ne manquent presque
jamais, au moins sur les thalles de nos régions ; toutefois nos
échantillons récoltés dans les Vosges (au Saint-Mont, près de
Remiremont) n'en présentaient pas. Ces productions ont
attiré de bonne heure l’attention des lichénologues. « De nom-
breux paquets d’un vert noirâtre sont épars sur ses frondes,
surtout au centre, dit Delise (1822) en parlant du Aicasolia
amplissima ; ce sont des pulvinules qui se développent extra-
ordinairement et prennent la forme de petites arborisations
dont les extrémités deviennent obscures... Ces pulvinules
ont quelque ressemblance avec plusieurs Lichens du genre
Stereocaulon. » La ressemblance de ces formations avec des
Lichens s’est imposée aux lichénologues plusrécents, et Nylan-
der a accrédité l'opinion qu'elles ne sont autre chose que les
thalles d’un Lichen parasite, d’ailleurs susceptible de mener
une vie autonome. Nylander (1876) le rapporte à une Collé-
macée voisine du Leptogium lacerum ; il a été désigné sous
les noms de Cornicularia umhauensis ou encore de Dendrisco-
caulon bolacinum, etc’estce dernier nom qui lui est ordinaire-
ment attribué. | |
Cependant Forssell (1884) vit dans les formations fruticu-
leuses du thalle du Ricasolia amplissima des céphalodies nées
en position hypothalline et devenues épithallines. Toutefois,
il suffit de lire ce qu’en dit un des auteurs qui en ont le plus
récemment parlé (Harmand, 1909, p. 714) pour se rendre
compte qu’un trouble persiste dans l’esprit des lichénologues
sur la nature ou l’origine de ces formations.
Leur histoire est intimement liée, ainsi que l’avait bien vu
Forssell, à celle des céphalodies du Ricasolia amplissima.
C’est encore une Cyanophycée de la famille des Nostoca-
cées qui pénètre dans le thalle du Ricasolia amplissima et y
prend part à la formation de céphalodies. Sa taille est un
peu supérieure à celle des Nostocacées des céphalodies du
Ricasolia amplissima ; ses caractères généraux sont les
leurs. |
C’est encore par la face inférieure que la pénétration de la
Nostocacée a lieu, et les premiers phénomènes de morpho-
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES ood
génése qu’elle provoque dans le thalle sont les mémes que chez
le Ricasolia herbacea.
Parfois une protubérance importante se fait à la face infé-
rieure du thalle; elle constitue une céphalodie infrathalline
(Pl. IV, fig. 19).
Plus souvent l’Algue pénètre dans la médulle: la jeune
colonie s entoure d’hyphes au calibre étroit, au protoplasme
riche, tandis que, sous elle, des hyphes paralléles se dirigent
vers le cortex inférieur, où leurs extrémités prennent part à la
formation d’une légère protubérance (PI. IV, fig. 20). L’aspect
est exactement le même que celui offert var le Ricasolia
herbacea au stade correspondant de l’histoire de ses cépha-
lodies. |
Plus tard (Pl. IV, fig. 21), les Algues, se multipliant beau-
coup, formentune colonie volumineuse et bientôt lobée ; des
hyphes de petit calibre circulent entre les gonidies ; d’autres
cheminent à la surface des lobes, en épousant assez étroite-
ment les contours ; la structure est encore celle d’une céphalo-
die de Ricasolia herbacea à un état déjà avancé de développe-
ment.Comme chez le Aicasolia herbacea, des phénomènes
de dégénérescence peuvent venir interrompre l’évolution des
_ céphalodies. Ils frappent de la même façon que chez le Rica-
_ solia herbacea les Algues et les hyphes environnants. Les
Algues meurent comme dans l'espèce précédente, et les
hyphes présentent exactement les mêmes aspects plectenchy-
mateux que chez cette dernière.
Cependant, le plus souvent, la céphalodie ae Ricasolia
amplissima connaît une autre ins
Tout d’abord elle s’accroit et acquiert des dimensions que
natteignaient pas celles du Aicasolia herbacea.
En même temps, elle s’éléve dans la médulle et atteint la
couche gonidiale ; elle provoque à son voisinage une croissance
du thalle qui se traduit par une légére protubérance de la face
supérieure et par l’appauvrissement de la couche gonidiale
en gonidies. Puis, rompant la couche gonidiale et le cortex, elle
fait irruption au-dessus de ce dernier, se développe beaucoup,
se ramifie et fournit là les formations dont nous avons parlé
au début de ce paragraphe (PI. IV, fig. 22, 23, 24).
358 FERNAND MOREAU tie
On peut distinguer dans chacune des arborisations den-
driscocauléennes un tronc, des rameaux de gros diamètre, des
ramifications plus petites.
La base du tronc est constituée à la périphérie par le cortex
primitif du thalle du Ricasolia amplissima soulevé lors de
l’éruption de la masse céphalodiale ; sa surface est lisse; sa
structure est celle d’un paraplectenchyme qui devient prosen-
chymateux dans les couches superficielles. Sous lui viennent
des gonidies vertes qui prennent part à la formation d’une
couche gonidiale qui continue celle du thalle. Au centre, on —
trouve des hyphes aux parois épaisses, au calibre interne
étroit, aux cellules allongées ; ils cheminent serrés, parallèles
au tronc, et vont en ondulant se perdre, d’une part, dans la
médulle, d’autre part, dans les grosses ramifications des
arbuscules. |
Plus haut, le tronc change de caractère ; sa surface cesse
d’être lisse et des gonimies se substituent aux gonidies. Son
cortex rappelle celui du thalle, mais sa surface est irrégulière;
ses cellules se prolongent en poils nombreux, formés chacun
d’une file de cellules isodiamétriques, uninucléées et rami-
fiées. Sous le cortex, on trouve des hyphes divers, des hyphes
étroits, serrés, parallèles à l’axe du tronc, qui réunissent la
médulle du Ricasolia aux rameaux de l’arbuscule, des hyphes
plus larges, laches, au caractère arachnoide, qui aecom-
pagnent les colonies d’Algues bleues. Celles-ci ne forment pas
une couche gonidiale continue, mais sont éparses, pourtant
plus nombreuses vers la périphérie du tronc.
Plus haut encore, le tronc se ramifie, généralement en
grosses branches très divergentes ou se retrouve la structure
que nous venons de décrire et qui se divisent bientôt en
ramuscules eux-mêmes plusieurs fois ramifiés.
Les petites ramifications, nées parfois du tronc lui-même,
souvent dichotomes, présentent à la périphérie un cortex
plectenchymateux pourvu de poils; il entoure un axe formé
de gonimies, souvent en files disposées en éventail, et séparées
par des hyphes parallèles, à gros calibre, et par de rares hyphes
à calibre interne petit ; le tout constitue une formation pleine.
Enfin, les toutes dernières ramifications sont formées
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 359
exclusivement de filaments paralléles ou en éventail séparant
des files d’Algues bleues ; elles ne présentent pas de cortex.
Les cellules fongiques sont uninucléées, à protoplasme riche,
pourvu de nombreux grains chromatiques. Les filaments de
la périphérie sont à parois un peu plus épaissies que les
autres.
Les formations dendriscocauléennes du Ricasolia amplis-
sima se présentent donc comme un complexe d’hyphes et
d’Algues affectantla forme d’arbuscules et offrent un aspect
général qui rappelle celui de plusieurs Lichens fruticuleux.
Leur structure n’est pas celle des Leptogium, ainsi que Har-
mand (1909, p. 715) l’a déjà indiqué. L’erreur commise par les
auteurs anciens est cependant très instructive ; elle nous
montre que l’action d’une Algue sur un Champignon peut
provoquer la formation de biomorphoses assez semblables à un
Lichen pour que des lichénologues exercés puissent s’y être
mépris.
À un certain point de vue, d’ailleurs, on peut dire que
c'est un nouveau Lichen qui prend naissance, résultant de
l’union des hyphes du Ricasolia amplissima et d’une Nosto-
cacée. Le Champignon du Ricasolia, celui dont nous connais-
sons les spermogonies, les ascogones, les apothécies, les asco-
spores, que nous savons caractériser indépendamment des
Algues auxquelles il s’unit et des biomorphoses qu’elles y
déterminent, est susceptible, en présence dedeux Algues diffé-
rentes, de fournir deux Lichens d'aspect très dissemblable :
avec une Chlorophycée, 1l forme un Lichen foliacé, dont la
structure est stratifiée ; avec une Nostocacée, il fournit un
Lichen fruticuleux, de structure tout à fait différente.
On peut certes hésiter à reconnaitre une Stictacée dans
les arbuscules du Dendriscocaulon : cependant leurs branches
ultimes, quand on les examine à un fort grossissement, ne
sont pas sans rappeler les ramifications offertes par les isidies,
Cette ressemblance a sans doute frappé Krempelhuber (cité
par Harmand, 1919, p. 715), qui attribue les Dendriscocaulon
a des formes anormales du Stictina fuliginosa. Un arbuscule
dendriscocauléen, si on considère sastructure, est assez com-
parable à une isidie géante ; si on considère son origine, la
360 FERNAND MOREAU
comparaison avec une isidie ne se poursuit pas ; il y a effrac-
tion du cortex supérieur par un complexe algofongique com-
parable à une couche gonidiale, puis, plus tard, formation à sa
surface d’un cortex qui se relie au cortex ordinaire ; un corpus-
cule dendriscocauléen se présente donc comme une gigan-
tesque papille semblable à l’origine à une papille sorédiale.
Pour appuyer cette comparaison entre les papilles sorédiales
et les formations dendriscocauléennes, nous dirons que nous
avons rencontré une formation d’origine sorédiale et ana-
logue à un tronc dendriscocauléen chez le Lobarina scrobi-
culata : la surface du thalle montrait un gros tronc, occupé
à la périphérie par un cortex tapissé par une couche gonidiale,
au centre par des filaments médullaires ; le tout se terminait
à la partie supérieure par un bouquet de sorédies. Les Algues
de cette grosse papille sorédiale étaient les mêmes que celles
de la couche gonidiale ; on peut la considérer comme un
Dendriscocaulon homosymbiotique.
À un autre point de vue, mettant en évidence le caractère
infectieux de la Nostocacée vis-à-vis du Ricasolia amplissima,
et considérant les nouveaux tissus dont elle provoque la for-
mation comme des biomorphoses, nous exprimerons de la
façon suivante, dans le langage de la pathologie, l'histoire des
formations dendriscocauléennes de ce ARicasolia.
L’Algue infectieuse, une Nostocacée, provoque chez le
Ricasolia amplissima une maladie dont les premiers
symptômes sont exactementles mêmes que ceux de la maladie
du Ricasolia herbacea précédemment étudiée; un pathologiste
qui ne connaitrait que cette dernière annoncerait pour l’un
et pour l’autre cas une même issue: la transformation plus
ou moins proche des hyphes les plus voisins des Algues en un
tissu d’aspect plectenchymateux, la mort et la disparition
totale des gonidies, la guérison du Champignon qui ne conser-
verait comme seul indice morphologique de la maladie qu’une
cicatrice plectenchymateuse. Il en est bien ainsi chez le
Ricasolia herbacea; c’est quelquefois le cas chez le Ricasolia
amplissima ; mais la maladie qu’on eût dit parvenue près du
terme de son évolution se prolonge. L’Algue se développe
beaucoup, détermine autour d’elle de nouvelles biomor-
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 301
phoses et en particulier des formations richement ramifiées qui
épanouissent leurs rameaux à la face supérieure du thalle.
La maladie ne se termine plus, comme chez le Ricasolia her-
bacea, par la suppression de l’Algue infectieuse, mais elle se
poursuit par la formation d’un complexe de forme particulière
où coexistent le Champignon et l’Aloue.
Comparant, toujours avec le langage qu’emploierait un
pathologiste, les deux cas offerts par le Ricasolia herbacea et
par le Ricasolia amplissima, on peut dire que les Champignons
de l’un et l’autre Lichen sont atteints par la même maladie,
qui se termine par la guérison dans le premier cas et devient
une maladie chronique dans le second. Nous sommes ainsi
amenés à dire que la même maladie atteint deux organismes
inégalement résistants et que, suivant l’immunité plus ou
moins grande des Champignons, la virulence plus ou moins
grande des Algues infectieuses, la maladie évolue de l’une ou
l’autre façon; introduisant dans l’étude des rapports des
Algues et des Champignons ces notions nouvelles d’immunité
et de virulence, nous voyons s'ouvrir devant nous un champ
de recherches nouveau.
Dès maintenant, nous pouvons nous demander si des
Ricasolia amplissima mieux armés contre des Algues infec-
tieuses que le sont la plupart des Ricasolia de cette espèce ou
attaqués par des Algues de faible virulence ne sauraient pas
s opposer à l’établissement d’une maladie chronique et lutter
avec succés contre les gonimies, comme le fait le Ricasolia
herbacea. Nous avons effectivement observé ce cas ; il se pro-
duit, rarement il est vrai, dans les Ricasolia amplissima ordi-
naires, porteurs de Dendriscocaulon, où nous avons vu excep-
tionnellement des céphalodies immergées arrétées dans leur
développement, ainsique nous l’avons dit plus haut ; mais il
devient la régle dans les thallesde Ricasolia amplissima, qui
sont exempts de Dendriscocaulon ; nous avons étudié à ce
point de vue les Ricasolia amplissima que nous avons récoltés
au Saint-Mont, près de Remiremont, et où nous n’avons pas
constaté la présence du Dendriscocaulon ; les phénomènes
sont identiques à ce qu’ils sont chez le Ricasolia herbacea.
Inversement, n'est-il pas possible que se rencontrent un
ANN, DES SC. NAT. BOT., 406 série. 1921, 111, 24
362 | - FERNAND MOREAU
Ricasolia herbacea au Champignon peu résistant etune Algue
assez virulente pour provoquer chez ce Lichen des formations
dendriscocauléennes semblables à celles du Ricasolia amplissi-
ma? Ces formations n’ont jamais été rencontrées à la surface
du thalle du Ricasolia herbacea. On peut prévoir qu’on les y
rencontrera. En effet, le thalle du Ricasolia herbacea renferme
parfois des céphalodies immergées de taille assez considérable
et qu'aucun phénomène de dégénérescence n’attemt ; on peut —
croire que la guérison est dans ce cas ajournée à une date
lointame et que l’état de maladie chronique est réalisé; ce cas
ne comporte cependant pas les biomorphoses si remarquables
que provoque lamaladiechronique chezle Ricasolia amplissima,
mais nous avons vu une fois chez le Ricassolia herbacea une
céphalodie immergée écarter les éléments de la couche goni-
diale et ceux du cortex, comme le font les céphalodies du
Ricasolia amplissima, mais sans cependant qu'il y ait eu érup-
tion du complexe céphalodial ; il y a eu seulement une ébauche
du phénomène qui, chez le Ricasolia amplissima, donne nais-
sance au Dendriscocaulon, une ébauche dendriscocauléenne.
La présence de céphalodies immergées aux Algues frappées
de mort chez certains Ricasolia amplissima, la tentative
d’éruption du complexe céphalodial chez un Ricasolia herbacea
constituent des termes de passage entre l’état que réalise
ordinairement le Ricasolia herbacea, aux céphalodies jamais
érumpantes et à évolution bientôt arrêtée, et celui offert par
le Ricasolia amplissima, aux céphalodies durables épanouies
en arbuscules éruptifs. Le langage des pathologistes exprime
commodément les nuances qui séparent les différentes ma-
nières dont se comportent les uns vis-à-vis des autres les
Champignons des Ricasolia et les Algues de leurs cépha-
lodies. |
L'état de maladie chronique réalisé dans le Dendriscocaulon
est un état de lutte permanente ; au sein du complexe dendris-
_cocauléen, la victoire est indécise : parfois lAlgue se déve-
loppe et, provoquant la croissance des hyphes voisins aux-
quels elle imprime des caractères spéciaux, elle détermine la
poussée de nouvelles ramifications: parfois, par places limi-
tées, on observe dans les formations dendriscocauléennes des —
2
À
P
4
;
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 303
Algues mortes, marquant le lieu d’un succès limité du Cham-
pignon.
I] arrive qu’au cours d’une bataille, lorsque ee deux armées
en présence ont mis aux prises toutes leurs réserves, aucune
d'elles n’emporte plus d’avantages marqués, aucune ne
réussit à affirmer sa supériorité ; sur quelques points étroite-
ment limités, des escarmouches se livrent, mais, à part ces
engagements de détail, l’action générale s'arrête, la ligne de
front se stabilise. Cette situation reste inchangée jusqu’à ce
que de nouveaux éléments. de lutte interviennent de l’un ou
l’autre côté. C’est à cette situation d'attente, qui n’a ni le
calme serein dela paix ni la fièvre des combats, que nous
comparerons volontiers la lutte que se livrent dans le com-
plexe dendriscocauléen les hyphes et les gonidies. C’est elle
également qui nous paraît réaliséé dans le complexe qui
forme le thalle ordinaire des Lichens et où des Algues et des
Champignons sont unis dans un état de tolérance mutuelle qui
constitue la symbiose lichénique.
LA SYMBIOSE LICHÉNIQUE,
Nous avons, dans les pages qui précèdent, étudié différents
aspects offerts par la symbiose lichénique. On considère
généralement l’état de symbiose comme une heureuse condi-
tion, où deux organismes tirent d’une association fructueuse
des avantages multiples ; on décrit avec complaisance, pour ce
qui est des Lichens, les avantages nutritifs réciproques obte-
nus par les hyphes et par les gonidies du fait de leur associa-
tion ; ce bilan est prématuré ; une connaissance plus parfaite
de la physiologie des Algues et des Champignons engagés dans
l’union lichénique en renversera peut-être les termes. Les
pages précédentes ont fait, tout au contraire, ressortir l’an-
tagonisme des deux constituants du complexe lichénique et
nous ont offert tous les passages entre le cas où une incom-
patibilité absolue a leu entre une Algue et un Champignon
et celui ou une tolérance mutuelle donne l'illusion d’une
symbiose harmonieuse.
Les céphalodies où la dégénérescence et la mort de l’Algue
304 FERNAND MOREAU
sont immédiates ou au moins précoces sont des associations
éphémères ; le complexe algofongique n’occupe jamais dans
ces cas qu une étendue limitée; sa formation pps comme
un phénomène exceptionnel.
Dans les céphalodies où la dégénérescence n’atteint que
tardivement les gonidies, le complexe céphalodial s'étend
davantage dans l’espace comme dans le temps. :
Lorsque la mort des Algues est ajournée 4 une époque loin-
taine, l’affection devient durable, chronique. Elle revêt en
particulier ce caractére dans les céphalodies de grande taille
immergées dans la médulle du Ricasolia herbacea, et il est
pleinement réalisé dans les céphalodies arbusculeuses du
Ricasolia amplissima ; 18, c’est au contraire la mort des Algues
qui apparaît accidentelle, l’association est durable. S'il est vrai,
comme I’affirment les lichénologues, que le Dendriscocaulon
puisse mener une vie indépendante du Ricasolia amplissima,
les caractères de l'association qu'il constitue sont identiques
à ceux d’un Lichen quelconque.
Nous passons ainsi du cas d’une symbiose éphémère, limitée,
facultative, à celui d’une symbiose durable, étendue, et à
certain point de vue nécessaire.
Nous avons décrit ailleurs (F. Moreau et Mme F. Moreau,
1921) comment, chez les Solorina saccata et crocea, ces deux
mêmes types de symbiose se relient l’un à l’autre.
La série offerte par les Stictacées, comme celle que nous
avons suivie chez les Solorina, nous conduit à voir dans la
symbiose lichénique une association qui ne diffère pas essen-
tiellement d’une association antagonistique, celle que lient
un organisme et l’agent d'une maladie infectieuse qui le
frappe; mais, grâce à la tolérance des deux organismes, aucun
ne réussissant à affirmer sa supériorité, la maladie devient
chronique, et la symbiose paraît harmonieuse. Ce n’est sans
doute qu'à la suite d’une évolution peut-être longue que les
Algues et les Champignons qui constituent un Lichen déter-
miné sont parvenus à la condition qui permet leur vie com-
mune.
On se tromperait d’ailleurs en croyant que l’adaptation des
deux associés l’un à l’autre est parfaite. Il arrive en effet que
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 309
la lutte que se livrent les deux organismes, accidentellement
et dans des régions limitées du thalle, se termine par la mort
des Algues; 1l en est ainsi assez fréquemment chez le Lobarina
scrobiculata, le Ricasolia herbacea, le Stictina limbata, et aussi
lors de la formation des sorédies dans cette dernière espèce.
A ce point de vue, les phénomènes offerts par le thalle ordi-
naire d’un Lichen sont identiques à ceux que nous avons ren-
contrés chez le Dendriscocaulon.
La présente étude, en précisant les caractères des rapports
que contractent les hyphes et les gonidies des Lichens, con-
firme la théorie à laquelle nous avait conduit l'étude des
biomorphoses des Peltigéracées : le Champignon d’un Lichen
se présente avec les caractères d’un organisme affecté dans sa
morphologie par un agent infectieux déformant, une Algue.
L'histoire d’une association lichénique se laisse décrire comme
celle d’une maladie contagieuse, marquée par l'invasion, les
progrès, les échecs, la mort de l’agent infectieux, les réactions
. morphologiques, lesrispostes défensives del’organisme attaqué.
Suivant la virulence et l’immunité relatives des deux adver-
saires, la lutte est de courte durée, et l’association est éphé-
mére — ou le conflit s’éternise, et l’association, maintenant
durable, offre les apparences d’une harmonieuse symbiose.
RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS
Nous nous proposons de réunir ici les principaux résultats
des recherches que nous venons d’exposer et de présenter
les principales conclusions auxquelles l'étude des Stictacées
nous a conduit. : |
Le présent mémoire renferme tout d’abord l’étude détaillée
de la structure histologique du thalle de 11 espèces de Sticta-
cées. Une remarquable uniformité de structure se manifeste
chez toutes, à tel point que la famille entière pourrait être
considérée comme un grand genre dans lequel les groupements
ordinairement admis n'auraient qu'une valeur subgénérique.
Nous avons consacré une longue étude aux caractères histolo-
giques qui séparent les espèces ; elle nous a conduit à dresser le
tableau qui termine le chapitre premier et qui indique com-
ment se groupent les différentes espèces les unes par rapport
aux autres. Parmi les points que nous avons spécialement exa-
minés, citons les diverses manières d’être des plectenchymes
corticaux, la valeur différente des formations désignées sous
le nom d’épithalle, la structure des isidies et des folioles
isidiales, celle des cyphelles et des pseudocyphelles, la forme
et la structure des poils et des crampons.
L'étude cytologique des cellules qui constituent le thalle
des Stictacées nous a fourni les résultats suivants: Les élé-
ments incolores des Stictacées, qu'ils forment des filaments
distincts, ou qu'ils soient organisés en tissus massifs, ont la
structure des éléments des Champignons ; leurs cellules sont,
d’une manière générale, uninucléées ; dans les tissus massifs,
des plasmodesmes peuvent se mone entre les proidpla ne
des cellules contigués. Les éléments colorés en vert ont, les uns —
la structure des algues Chlorophycées, les autres la structure des
algues Cyanophycées. Les premiers ont des cellules arrondies,
>
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 367
au chromatophore étendu, pourvues d’un noyau; pour se
reproduire, elles se divisent en 4 à 8 cellules filles de forme
pyramidale; elles manquent de pyrénoide. Les éléments
semblables à des Cyanophycées ont des caractères de Nos-
tocacées ; ils sont dépourvus de chromatophore; ils pos-
sèdent dans leur protoplasme périphérique des grains de
cyanophycine,au centre, un corpscentral avec un chromidium,
des corpuscules métachromatiques, un corps nucléoliforme.
Un second chapitre de ce travail a été consacré aux appa-
reils reproducteurs des Stictacées. Ils comprennent des sorédies,
des spermogonies et des apothéctes.
Nous avons reconnu chez le Lobaria pulmonacea un mode de
formation in situ des sorédies, dans la partie supérieure de la
couche gonidiale encore recouverte par le plectenchyme corti-
cal ; à la formation des sorédies, nous avons rattaché celle des
folioles sorédiales et celle des papilles sorédiales.
Nous avons étudié la structure des spermogonies et réuni
des documents sur la structure de l’apothécie âgée et sur les
états initiaux de son développement. L’apothécie débute par un
ascogone, qui se présente sous la forme d’un peloton aux cellules
uninucléées, duquel s'élève vers le cortex un trichogyne aux
cellules uninucléées; ce dernier chemine en se ramifiant entre
les cellules du parenchyme cortical et fait saillie à la surface
du thalle. Le trichogyne dégénère bientôt sans que nous ayons
jamais observé sa copulation avec des spermaties. Souvent,
l’'ascogone avorte, se transforme en un plectenchyme. Cet
avortement de l’ascogone, très fréquent chez les espèces pour-
vues d'apothécies, est général dans les thalles stériles des
espèces capables de fructifier et dans les thalles toujours sté-
riles des espèces dont on ne connaît pas les apothécies ; il
explique la stérilité ordinaire ou totale des thalles de maintes
Stictacées. |
Enfin, dans un dernier chapitre, nous avons étudié le déve-
loppement et la structure des céphalodies de diverses Sticta-
cées. Nous avons en particulier décrit, chez le Lobaria pulmo-
nacea, une forme nouvelle de céphalodie, épigène et immergée. En
outre, comparant la formation des céphalodies à un phéno-
mène infectieux, nous avons suivi l’évolution d’une même
368 FERNAND MOREAU
maladie dans deux Lichens voisins. C’est une Algue, une Nos-
tocacée qui la cause; elle s’introduit dans la médulle par la
face inférieure du thalle, y provoque des biomorphoses que
nous avons décrites en détail : elles se présentent comme le
résultat d’une réaction morphologique des hyphes, qui offre
parfois un évident caractère de réaction défensive. Dans l’une
des espèces étudiées, tôt ou tard, apparaissent, en général,
dans les tissus nouvellement formés, des phénomènes de
dégénérescence qui s accompagnent de la mort et de la résorp-
tion totale de l’Algue infectieuse. Chez l’autre, les mêmes phéno-
mènes ont lieu parfois, et la lutte entre l’Algue et le Champignon
se termine comme précédemment par la victoire de ce dernier.
Mais, en général, ils font défaut ou n’ont lieu qu’en des régions
limitées. Les tissus dont l’Algue a provoqué la formation et
l’Algue elle-même rompent le cortex supérieur du Lichen,
font éruption à sa face supérieure et s’y développent en un
arbuscule abondamment ramifié ; son aspect est celui d’un
Lichen fruticuleux, à tel point que des Lichénologues exercés,
méconnaissant son origine, l’ont rapporté à un groupe de
Lichens tout à fait différent des Stictacées ; ils en ont fait une
Collémacée voisine des Leptogium et l’ont désigné sous le
nom de Dendriscocaulon bolacinum. La formation du com-
plexe dendriscocauléen vaut à la maladie que nous étudions :
une issue qu’elle ne connaissait pas dans la première espèce :
au lieu de la victoire du Champignon sur l’Algue, nous voyons
s’établir un régime d’hostilité contenue qui réalise un état de
maladie durable.
Pour la.commodité de l’exposition, nous avons réparti dans
trois chapitres distincts les faits précédents. Toutefois, il est
aisé de voir que ces trois chapitres ne sont pas indépendants
les uns des autres, et nous nous proposons de mettre en lumière
les idées générales qui se dégagent des faits qui y sont consi-
gnés.
Au-dessus des questions particulières, spéciales aux Stic-
tacées, propres à tel ou tel détail de leur organisation, un
grand problème domine l’ensemble de notre sujet ; 1l s’est
posé à nous avec toute son ampleur, dans toute sa généralité,
au début de nos recherches sur les Lichens; il a toujours été
LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACÉES 369
présent à notre pensée au cours de notre travail, c’est celui
de la nature des Lichens. Qu'est-ce qu'un Lichen? Est-ce un
organisme autonome, suivant une opinion ancienne que les
lichénologues récents n’ont abandonnée qu’à regret et qu’on
cherche à faire revivreaujourd’hui? Faut-ily voiravec Schwen-
dener, Bornet, pour ne citer que les plus célèbres des fonda-
teurs de la nouvelle doctrine, des organismes doubles, résul-
tant de l’union, de la symbiose d’une Algue et d’un Champi-
enon? Nos observations sont en faveur de cette dernière opi-
nion ; l'étude histologique et l’étude cytologique des éléments
incolores et des gonidies de nos Lichens assurent l’identité des
premiers avec des Champignons, celle des secondes avec des
Algues; c’est l’argument de Schwendener fortifié par le secours
des techniques et des acquisitions modernes de l’histologie
et de la cytologie. Quant à l’argument de Bornet : les rapports
morphologiques entre les hyphes et les gonidies sont ceux
qu'on attribuerait a priori à deux organismes vivant en sym-
biose, nous le complétons en disant : leurs rapports morpho-
géniques sont ceux que présentent deux organismes dont
l’un provoque chez l’autre des réactions morphologiques con-
duisant à la formation de biomorphoses.
Un Lichen résultant de la symbiose de deux organismes,
la question se pose: quels sont les constituants du complexe
lichénique? L’un d’eux est une Algue, semblable par la struc-
ture aux Algues Chlorophycées ou aux Algues Cyanophycées.
Les Algues des Lichens présentent avec celles qui vivent
en liberté une si parfaite identité morphologique qu'on est
tenté de croire qu’elles ne sont que momentanément engagées
dans lassociation lichénique ; on sait qu’elles peuvent la
quitter et mener une vie autonome; on pense qu’elles peuvent
contracter à nouveau une union symbiotique, mais on ne
sait pas si elles ne perdent pas, au bout de quelque temps,
la possibilité de le faire, comme les bactéries pathcgènes,cul-
tivées dans un milieu banal, perdent leur virulence et cessent
de pouvoir infecter les animaux dont on les a séparées.
L'autre élément du complexe algofongique est un Cham-
pignon. Nous ne le connaissons pas hors de l’état de symbiose ;
nous admettons qu'il a perdu la possibilité de mener, dans les
310 3 FERNAND MOREAU
conditions ordinaires, une vie ue et nous sommes:
réduits à des conjectures sur ce qu'il était dans ce dernier état.
Ses caractères les plus aisément visibles permettent difficile-
ment de le comparer à tel.ou tel champignon autonome ; ses
tissus, modifiés par l’action de l’Algue symbiote, ont acquis
des caractères spéciaux et la position des Champignons des
Lichens dans l’ensemble des Champignons serait bien difficile
à préciser si l’action de l’Algue n’avait respecté certaines de
leurs parties, qui, reliques du passé, nous permettent de
reconstituer la physionomie de leurs ancêtres autonomes. Leur
mycélium cloisonné fixe leur place parmr les Septomycètes; la
constitution générale deleurs apothécieset lastructure de leurs
asques — nous parlons seulement des Ascolichens — précisent
leur position dans le groupe des Ascomycètes. Les caractères
de leurs ascogones, qui paraissent également exempts des
déformations infligées par lasymbiose, seront d’un utile secours
quand on connaîtra mieux ces organes, d’une part chez les
Lichens, d’autre part chez les Ascomycètes autonomes. Déjà,
on peut dire que, si les Peltigéracées, avec leurs ascogones _
multinucléés, rappellent les Pyronema, Humaria, etc., aux
ascogones également cénocytiques, les Stictacées, pourvues
d’un ascogone enroulé et septé, prolongé par un trichogyne
cloisonné, réalisent un cas très différent du précédent. Peut-
être serons-nous conduits à admettre une origine polyphylé-
tique des Ascolichens, plusieurs rameaux de l’arbre généalc-
gique des one ayant pu donner lieu à des os
lichéniques.
La nature et Pinion des éléments du oe algo-
fongique étant ainsi fixées, dans la mesure où nos connais-
sances actuelles permettent de le faire, nous nous sommes
demandé quels sont les rapports des deux composants du Lichen.
On a surtout traité cette question en envisageant les rap-
ports d'ordre nutritif, les échanges alimentaires qui s éta-
blissent entre les deux organismes en présence ; une connais-
sance plus approfondie de la physiologie des Algues et des
Champignons sera nécessaire, pensons-nous, pour résoudre la
question ainsi posée. Nous nous sommes placé à un tout —
autre point de vue. Lorsque deux organismes sont mis en
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LICHENS DE LA FAMILLE DES STICTACEES 31
présence, il est fréquent que l’action que l’un d’eux exerce sur
l’autre détermine chez ce dernier des réactions morpholo-
giques, des phénomènes de biomorphogénèse, la production de
biomorphoses. C’est ainsi que maint Champignon déforme la
plante qu'il infecte, ainsi naissent les galles, les tumeurs, etc.
Nos recherches nous amènent à conclure que de tels phéno-
ménes ont lieu chez les Lichens, que c’est l’Algue qui intervient
comme agent déformant, que c’est le Champignon qui présente
des réactions morphologiques ; le thalle aérien d’un Lichen est
une biomorphose ; c’est l’équivalent d’une galle, une algocé-
cidie. Cette conclusion se fonde sur l’étude des biomorphoses
offertes par le Champignon d’un Lichen sous l’action des
Algues de la couche gonidiale, et aussi sur l’étude de celles
qu'il présente sous l’action d’Algues étrangères et qu’on dé-
signe sous le nom de céphalodies. L’union que réalisent les
Algues et les hyphes dans les céphalodies est de même nature
que celle que contractent les gonidies et les hyphes. L'étude
des rapports entre les constituants des céphalodies est donc
susceptible d’éclairer le probléme des relations entre les consti-
tuants des Lichens.
Précisément, l’étude des céphalodies des Ricasolia est
particulièrement instructive à ce point de vue; l’Algue qui
provoque leur formation se présente avec les caractères d’un
agent infectieux ; la maladie qu’elle cause prend fin dans un
cas par la destruction de l’Algue et la guérison du Champignon ;
dans l’autre, elle devient chronique; les deux organismes
prennent part à la formation d’un complexe, semblable à un
- Lichen fruticuleux, au sein duquel ils vivent dans un état de
paix apparente que menacent de troubler d’incessants con-
flits.
C'est un état analogue que réalisent, pensons-nous, les
Algues et les Champignons engagés dans la symbiose liché-
nique.
Quand une Algue et un Champignon sont mis en présence,
plusieurs cas peuvent se présenter : ou bien ils restent indif-
férents, c’est le cas le plus fréquent, ou bien ils entrent en
conflit. Si l’un des belligérants succombe dans la lutte, leur
union est éphémère, c’est le cas des céphalodies dont les
312 FERNAND MOREAU
Algues dégénèrent et meurent ; si aucun d’eux n’impose sa
supériorité à l’autre, ils forment un complexe durable; ce
paraît être le cas de maintes céphalodies, c’est celui des for-
mations dendriscocauléennes du Ricasolia amplissima; c’est
encore celui des Lichens en général. Ce sera un sujet de
recherches que la question de savoir si c’est d’emblée qu’ont
pris naissance les complexes que forment les Lichens, ou si
c’est par une adaptation progressive que les Algues et les
Champignons quiles constituent sont parvenus a un état de
tolérance mutuelle qui, en écartant les conflits les plus meur-
triers, donne à l’association un caractère durable. Ce sera un
autre sujet de recherches que de savoir si les complexes liché-
niques nous sont connus sous la forme méme ou ils ont pris
naissance, ou si les Algues et les Champignons des Lichens
actuels ont évolué depuis l’établissement du régime de la
symbiose. Nous sommes au seuil de ces problèmes. Puissent
de nouvelles recherches nous en donner la solution !
ea
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208, 1877) :
ZAWLBRUCKNER. — Lichenes !Spezieller Teil), in Engler u. Prantl, Pflanzen-
familien, Leipzig, 1907). :
Fig. 19.
— 20.
— 21.
— 22,
— 23.
— 24,
EXPLICATION DES PLANCHES (1)
PLANCHE I
. — Stictina fuliginosa. — Thalle, isidie, cyphelle.
. — Stictina limbata. — Thalle, cyphelle.
. — Stictina crocata. — Thalle, pseudocyphelle.
. — Ricasolia herbacea. — Thalle, crampon.
— Lobaria pulmonacea. — Thalle, sorédies.
— Lobarina scrobiculata. — Thalle, sorédies.
PLANCHE II
— Lobaria pulmonacea. — Spermogonie.
— Ricasolia herbacea. — Spermogonie.
— Lobaria pulmonacea. — Spermogonie sous sorédies.
. — Ricasolia herbacea. — Ascogones, trichogynes.
= — = — Les mêmes, plus grossis.
_— — amplissima. — Thalle, ascogone, trichogyne.
PLANCHE III
. — Ricasolia herbacea. — Jeune céphalodie immergée.
— — Céphalodie plus âgée.
— — Céphalodie hypothalline.
— — Mort des Algues dans une céphalodie
immergée.
=== — Le même phénomène plus accusé.
= — Le même phénomène atteignant presque
toutes les Algues d’une céphalodie
immergée. |
PLANCHE IV
— Ricasolia amplissima. — Céphalodie hypothalline, avec Algues
mortes.
— — Jeune céphalodie immergée.
— — Céphalodie plus agée.
— — Progression des Algues vers la face
supérieure du thalle.
= = Eruption de la céphalodie au-dessus du
cortex supérieur.
== — Le Dendriscocaulon bolacinum.
(1) Le grossissement des microphotographies est de 50/1, sauf la figure 11
(Pl. IT), dont le grossissement est de 200/1.
LISTE DES FIGURES DANS LE TEXTE
Fig: 4. Thalle du Stictina siloatica. — _
— 2. Cyphelle du Stictina silvatica.
— 38. Isidie du Stictina fuliginosa.
— A, Pseudocyphelle du Stictina crocata.
en Thalle du Lobarina scrobiculata. ©
— 6, Thalle du Lobaria pulmonacea. |
— 7, Cortex inférieur et poils du Ricasolia herbacea (a) et R. amplissi-
ma (b).
— 8. Crampon du Ricasolia herbacea. ï
— 49, Crampon du Ricasolia amplissima.
— 10. Formation des sorédies du Lobaria pulmonacea ; premier stade.
— 41. Id. ; second stade.
— 12. Id. ; troisième stade.
— 13. Portion de sorédie du Lobaria pulmonacea.
— 14, Ascogone du Ricasolia herbacea.
— 15. Asques et ascospores du Ricasolia herbacea (1 à 3) et du Lobarina
pulmonacea (4 et 5).
— 16. Ascogone avorté du Ricasolia herbacea.
— 47. Jeune céphalodie immergée du Ricasolia herbacea.
— 18. — Céphalodie immergée du Ricasolia herbacea.
— 19. Céphalodie hypothalline, avec Algues mortes, chez le Ricasolia
herbacea.
— 20. Jeune céphalodie immergée, avec Algues mortes, chez le Ricasolia
_herbacea.
TABLE DES MATIÈRES
LNTRODUCTION icin Cees Me cae. Se Pee an de es ce a pee) TE
Cuapirre t, — Appareil vegetal. 0 à. NON 301
CHAPITRE Il. — Appareils reproducteurs. . 2-0. oy vie 2 24e 327
CHAPITRE III. —- Phénomènes de biomorphogénèse eu 343
RÉSUMÉ. BT: GON CLU SIONS. ¢ ciliates sess ote vero ch oc SS ae en tea 366
ENDEX BIBLIO GRA PUIQUM, aes rene 95 ste pe den hear 2 TOR 373
EXPLICATION: DES” PRAIN GDS 2 cysts ee etats DU ee re rs >. 979
LISTE DÉS-FIGURES DANS LE-TEXTEU scr oko Sees ees OU PR Ch
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LES CHENES D’INDO-CHINE
Par Hickel et A. Camus
Le travail d’ensemble concernant les Chénes, le plus impor-
tant et le plus consciencieux est certainement le mémoire
d'Œrsted, publié à Copenhague, en 1871 (1). La méconnais-
sance,. par le plus grand nombre des auteurs, des grandes
lignes de la classification d'ŒÆrsted, au plus tard, singulièrement
compliqué l’étude des Chênes. Ainsi, pour ne citer que lui,
comment King (2) a-t-1l pu écrire : « Entre les genres Quercus
et Castanopsis les différences me semblent non seulement
légères, mais plutôt arbitraires, et je ne vois pas de bonnes
raisons pour que les Castanopsis décrits ne soient pas placés
dans la section Chlamydobalanus du genre Quercus. » Il n’y
a, au contraire, aucune raison de ne pas classer dans le genre
Castanopsis, certaines espèces, ordinairement, et notamment
par King, considérées comme des Quercus. Du reste, la divi-
sion du genre Quercus par King en six sections est très con-
testable en raison de l'extension abusive qu'il donne à ces
sections. C’est ainsi qu'il range dans les Chlamydobalanus
non seulement le Q. lanceæfolia, mais le Q. encleisocarpa et
même le Q. Junghuhnii Miq., qui est certainement un Casta-
nopsis. Sa sixième section Lithocarpus est peut-être la plus
hétéroclite, renfermant non seulement l’espèce pour laquelle
Blume avait créé le genre Lithocarpus, mais d’autres qui sont
simplement des Eupasania.
Certes l’ancien genre Quercus nécessiterait une étude
d'ensemble approfondie en raison de nombreuses espèces
nouvelles décrites et dont on pourrait dire que leurs auteurs,
(4) Girstep, Contribution à la connaissance de la famille des Chênes dans
le passé et le présent (avec unrésumé français) (Extrait du Bull. des Soc. scientif.,
Sect. des Sc. nat. et math., t. V, IX, p. 6, Copenhague).
| (2) Kine, The Indo-malayan species of Quercus and Castanopsis, in Ann.
Roy. bot. Garden, Calcutta, vol. II.
ANN. DES SG. NAT. BOT., 40e série. 10217 25
3780 5 HICKEL ET A. CAMUS
lorsqu'ils ont indiqué le groupe auquel elles appartenaient,
les ont colloquées au petit bonheur dans telle ou tellesection;
mais il faut bien se convaincre qu’un pareil travail ne saurait
aboutir qu’en se pénétrant des bases jetées par le grand bota-
niste danois.
Dans le travail d'Œrsted, le second sur la matière, l’auteur
établit de façon irréfutable et, pourrait-on dire, définitive,
que le genre Quercus des anciens auteurs ne saurait être main-
tenu, un grand nombre des espèces qu'il renfermait présentant
des caractères bien plus voisins de ceux des Châtaigniers que
de ceux des Chênes. Partant de ces caractères, surtout de la
forme des styles, Œrsted a divisé ce qu’on s’accorde actuelle-
ment à désigner sous le nom de Fagacées en trois tribus : :
Fagineæ, Quercinex, Castaninæ. Le groupe des Quercineæ
a été réparti à son tour par cet auteur en deux genres : le
genre Quercus à écailles des cupules imbriquées et le genre
Cyclobalanopsis à écailles soudées en lamelles concentriques.
Dans le groupe des Castaninæ, en outre des Castanea et
Castanopsis, Œrsted a adopté une division, parallèle à celle
des Quercus, en deux genres : Pasania (nom créé par Miquel
pour une section du genre Quercus) et Cyclobalanus Œrsted.
La symétrie recherchée par Œrsted entre les Quercus et les
Pasania, d’une part, les Cyclobalanopsis et les Cyclobalanus,
de l’autre, est plus théorique que réelle et, pour nombre
d'espèces, on a peine à les rattacher avec certitude aux
Pasania ou aux Cyclobalanus.
~ Comme, d’autre part, la seule difference essentielle entre les
de et les Cyclobalanopsis réside dans les caractères de la
cupule, nous avons cru, à l'exemple d’un certain nombre
d’auteurs récents (Prantl, Gamble), ne devoir conserver que
la division en Quercus et Pasania, les Cyclobalanopsis ne
constituant pour nous qu'un sous-genre du genre Quercus
A. Epis pendants ; étamines ordinairement 6 ; stigmates larges, cou-
vrant la surface interne de la partie supérieure des styles ou capités
SUT CUM Pane RES ea Se red Quercus.
B. Epis à dressés, le plus souvent en panicule ; étamines ordinairement
42; stigmates petits formant un pore sur les styles a peine
courbés Ses a abe Len lie SRE eon ree 2. Pasania. Sey,
LES CHENES D INDO-CHINE 379
Genre I. — QUERCUS L.
A. Cupules munies d’écailles.............. . Section Euquercus.
B. Cupules à bractées involucrales con- ,
crescentes en lamelles concentriques entiéres
Ie Gen tICUleeS.. i o.5 ac. iene eee eee Section Cyclobalanopsis.
La section Euquercus n’est représentée en Indo-Chine que
par cinq espèces. Le Q. serrata, le Q. Griffithit, le Q. incana et
le Q. lanata se rencontrent aussi dans l’Inde; le premier monte
. au nord jusqu’au Japon.
Les Cyclobalanopsis sont beaucoup plus nombreux ne
espèces), surtout dans les régions du Haut-Laos et du Tonkin.
_ Le Lang-bian offre une espèce endémique, le Q. lang-bianensis.
Les espèces propres à l’Indo-Chine sont au nombre de huit.
Les autres sont communes à l’Inde et à la Chine, une seule,
le Q. bambusifolia, se rattachant à la flore du Japon, et une
autre, le Q. semiserrata, à la flore de Malaisie.
. Section I. — Euquercus. |
1. Q. serrata Thunb., Fl. Jap., p. 176; Q. serrata var.
Roxburghit DC. ; Q. polyantha Lindl. ; Q. Roxburghii Endl. ;
Q. Ushiyamana Nakai.
Laos: Muong sam, assez commun ; altitude 1 300 ere
(cap. Perrot); ‘Teannmli (Magnein, Pussaud: n° 8); Tha dua,
route d’Hatrai à Kham keut (Dussaud, n° 16); Sou lo, en
peuplements (Dussaud, n° 155). — Inde, Chine, Japon, etc.
p. 14.
Laos: Attopeu; altitude 900 mètres (Harmand, n°1164);
Tranninh, Muong tan, Binh thuan, Col meo à M. than (Ma-
gnein). — Inde. —
3. Q. incana Roxb., For Beng., p. 104 (1814) : 0. lanata
Smith ; Q. lanata Don var. incana Wenzig.
Doi djieng dao; altitude 2000-2200 mètres (Hosseus,
n° 390) ; Doi sootep (Hosseus, n° 300). — Inde. ;
4. Q. lanata Smith, in Wall. Cat., 2772, A. et B. ; Rees,
-Encycl., 29 ; Q. lanuginosa Don, non Thuill.
2. Q. Griffithit Hook. f. et Th., in D.C., Prodr., XVI, II,
380 | _‘HICKEL ET A. CAMUS
Annam : Lang-bian, Dalat (Lecomte et Finet, n° 1546;
A. Chevalier, n° 36022); Grand Piton, près du village de
Beneur; altitude, 1500-2 000 mètres (A. Chevalier, n° 30842).
— Inde.
5. Q. Kingiana Craib, in Kew Bull (1911), p. 472 ; Conir.
FT. Stam, p. 100.
Siam : Chieng mai, Doi sootep, altitude ; 750-900 métres;
(Kerr). | :
Section IT. — Cyclobalanopsis (Œrst.).
6. Q. platycalyx Hickel et A. Camus, nov. sp.
Fructus sessilis. Cupula planiuscula, late pateriformis,
~ &mm.longa, 28 mm. lata, intus dense sericea, extus glabrescens,
zonis 8 concentricis margine subintegris ornata, fundo pla-
niusculo glandem basi solum retinens. Glans obovoidea, apicu-
lata, promaxima parte exserta, 3,5.cm.longa, 1,7 cm. lata, subti-
liter adpresse sericea, demum glabrescens; cicatrix subconvexa,
13 mm. diam. |
Tonkin: vallée de Lankok, mont Bavi; altitude, 400 mètres
(Balansa).
Espèce très bien caractérisée par sa cupule presque plane,
à bords très écartés du gland à la maturité, celui-ci à cicatrice
légèrement convexe. Les glands que nous avons observés
étaient tous nettement asymétriques. :
7. Q. semiserrata Roxb., Fl. Ind., III, p. 461 ; non Balansa;
Q. Horsfieldit Miquel.
Siam : Chieng mai, Doi sootep ; altitude, 900 mètres (Kerr),
Koh chang, Klong munsé, Klong son (Schmidt). — Inde,
Malaisie. |
8. Q. xanthoclada Drake del Castillo, in Journ. de Bot.,
1890,-p..149 Pl. TL hot. 7%,
Tonkin : vallée de Langkok, mont Bavi (Balansa, n° 2377,
2378, 2379). — Laos : col de Tram nua, sur la route de Hatraï
à Kham keut (Dussaud). — Inde.
9. Q. Chevalier: Hickel et A. Camus, nog. sp.
Rami glabri, lenticellosi. Folia coriacea, ovato-oblonga vel
obovato-oblonga, apice subobtusa vel acuta, basi cuneata,
11-12 cm. longa, 3,5-4,5 cm. lata, glabra, utrinque viridia,
ie |
Pa © ASE!
TT RE ET Te
LES CHENES D'INDO-CHINE 381
margine undulata; nerve laterales utrinque 8-11, supra im-
pressæ, subtus elevatæ. Petioli 2,5-3 cm. longi. Cupula hemi-
Fig. 1. — Quercus Chevalieri: 1, feuille, gr. nat. ; 2, gland entouré de sa cupule, gr. nat. ;
3, gland, gr. nat. — Q. platycalyx : 4, gland et sa cupule, gr. nat. ; 5, cupule vue inté-
rieurement, gr. nat. — Q. lang-bianensis : 6, gland et sa cupule, gr. nat. ; 7, gland,
gr. nat. ; 8, cupules, gr. nat. — Q. macrocalyx : 9, gland et sa cupule, gr. nat. ; 10,
paroi de la cupule montrant le bord supérieur récurvé ; 11, gland, gr. nat.
sphærica, sericea, zonis 8-9 concentricis margine subintegris
ornata. Glans ellipsoidea vel ovato-oblonga, apice subattenuata,
382 ) _ HICKEL ET A. CAMUS
valde exserta, 15 mm. longa, 10 mm. lata, glabrescens ; cicatrix
valde convexa, 4,5 mm. diam. =
Tonkin: prés i Lao kay, Cha pa; altitude, 1 400-1500 metres
(A. Chevalier, n° 29488). |
_ Cette espèce présente quelques anilomae avec le Q. Bene
Th., dont elle diffère par ses feuilles entières, à bords ondulés-
sinués et non dentés, glabres, les cupules à zones 3 plus nom-
breuses.
10. Q. tranninhensis Hickel et A. ae nov. Sp.
Arbor 15-16 m. alta; ramuli nt glabri. Folia
lanceolata, apice acuminata, rigida, 9-10 cm. longa, 3 cm. lata,
supra glabra, lucida, subtus sparse pilosula, bast integra, 3
superne dentata, margine crassa, nervis lateralibus utringue
12-13 parum distinctis, transversis tenuibus ; petiolus elongatus,
2-3 cm. longus. Cupula solitaria, sessilis, 11 mm. alta, 15-17mm.
diam., extus puberula, intus sericea, lamellis concentricis 8 denti-
culatis supremis subintegris ornata. Glans pro maxima parte
exserta, subovoidea, apice mucronata, basi subtruncata, glabra,
22 mm. alta, 17-18 mm. diam.; cicatrix subconvexa, 8-9 mm.
diam. 3 eee |
Laos: Xieng khuang, pr. Tranninh (Poilane, n° 2356).
Cette espèce se rapproche du Q. glauca Th., mais ses feuilles
ne sont pas cireuses en dessous; elles sont peu discolores, sur
le sec, un peu jaunâtres à la partie inférieure; ses glands sont
bien plus gros. Elle diffère du Q. Chevalieri Hick. et A. Cam.
par ses feuilles plus petites, ses fruits plus gros, glabres, à
cicatrice plus grande et presque plane ou à peine convexe.
11. Q. lang-bianensis Hickel et A. Camus, nov. sp.
Rami glabri, novelli tomentosi. Folia oblongo-lanceolata,
utrinque attenuata, 11-15 cm. longa, 2,5-4,5 cm. lata, glabra, à
integra vel undulata, superne obtuse dentata; nerve primariæ :
laterales utrinque 10-12 in serraturas excurrentes, subtus ele-
vate. Petiolus 1-1,8 cm. longus. Fructus sessilis. Cupula 10 mm.
longa, 18 mm. lata, zonis 6-9 concentricis laciniatis ornata.
Glans obovoideo-oblonga, valde exserta, 30 mm. longa, 18 mm.
_ diam. ; cicatrix convexa.
Annam : massif du Lang-bian, Grand Piton, près du village de
Beneur; altitude, 1500-2 000 mètres (A. Chevalier, n° 30029).
PN ca Pe PRA Ae ONE Oe
LES CHENES D INDO-CHINE 383
Espèce Poche de Q. xanthoclada Drake del Castillo mais bien
distincte par sa cupule couvrant à peine un tiers du gland, à
zones laciniées, mais non presque entières, son gland moins
Fig. 2. — Quercus austrocochinchinensis :1, feuille, face inf., gr. nat. ; 2, gland entouré
~ de sa cupule, gr. nat ; 3, gland, gr. nat. — Q. Dussaudii: 4, gland et sa cupule, gr.
nat. ; 5, gland, gr. nat. ; 6, cupule vue intérieurement ; 7, feuille, — Q. chrysocalyx :
8,gland entouré de sa cupule, gr. nat. ; 9, cupule vue intérieurement, gr. nat. ; 10,gland
gr. nat.
gros, ses feuilles plus allongées, paraissant dépourvues de cire
en dessous.
- 42. Q. macrocalyx Hickel et A. Conus: nov. Sp. :
Cupula ovoideo-globosa, basi attenuata, 40° mm. longa,
48 mm. lata, demum glabra, intus sericea, crassa, margine
384 HICKEL ET A. CAMUS
incurvata, zonis 10-12 subintegris notata. Glans apice easerta, —
ovoidea, mucronata, 35-37 mm. longa, 25-37 mm. diam., luteo-
sericea, demum glabra; cicatrix convexa, 14 mm. diam.
Laos: Tranninh ; altitude, 1 000-1 500 mètres (Magnein).
_ Cette espèce est très bien caractérisée par sa cupule et son
gland. La paroi de la cupule est épaisse de 3 millimètres et
munie à l’intérieur de poils soyeux serrés les uns contre les
autres, formant un revêtement aussi épais que la parol.
13. 0. oidocarpa Korth., in Verh. Nat. Ges. Bot., p. 216, A;
1 140;
Sir : Doi sootep; altitude, 1000 mètres (Hosseus,
n° 458). — Inde.
14. Q. Poilanei Hickel et A. Camus, nov. sp.
Arbor 8-16 m. alta. Ramuli jJuniores aureo-velutint. Folia
rigida, ovata vel oblonga, apice abrupte attenuata, subobtusa
4-8 cm. longa, 3-5,5 cm. lata, supra glabra, subtus luteo-tomen-
tosa, margine integra vel apice sinuata, nervis lateralibus
utrinque 13-14 subtus elevatis, tertiaris perspicuts transversts :
petiolus 8-10 mm. longus. Spice nunc androgynæ, nunc femi-
nee, simplices, 4-6 cm. longæ, in axillis foliorum superiorum
dispositæ; rachis aureo-tomentosa. Spica fructifera elongata.
Cupula junior aureo-velutina, solitaria, lamellis 3 concentricis
denticulatis ornata. Glans junior aureo-sericea, exserta.
Annam : Bana, très abondant (Poilane, n° 1517).
Cette espèce est bien caractérisée par son tomentum Jaune.
Sur le frais, la face supérieure des feuilles est, d’après M. Poi-
lane, vert fonce l'inférieure jaune: sur le sec, les deux faces
sont jaunes.
15. Q. bambusifolia Hance, in Journ. de Bot., XIII, p. 364 ;
Q. salicina Seem. ; Cyelobalanopsis neglecta Schottky Quercus
neglecta Rides
Tonkin : Tien yen (Bonnet, n° 14). — Hong leone Chine,
Japon.
16. Q. Dussaudii Hickel et A. Camus, nov. sp.
Arbor 6-8 mm. alta..Rami brunnet, glabri. Folia lanceolata,
utrinque attenuata, 12-15 cm. longa, 4-5 cm. longa, viridia,
subtus pallidiora, integra, nervis secundarits utringue 10 elevatis, —
tertiarits vix distinctis. Petiolt 5-10 mm. longi. Cupula cyathi-
Sara
Vv
LES CHENES D INDO-CHINE 385
_formis, bast truncata, 8-9 mm. alta, 33-35 mm. diam., crassa,
extus aureo-sericea, intus luteo-sericea, zonis _concentricis
8-10 undulato-denticulatis ornata. Glans longe exserta, sub-
hemisphærica, bast truncata, apice mucronata, 12 mm. longa,
25 mm. diam., pubescens ; cicatrix concava, 15 mm. diam.
Laos : Ban pac sanane, route de Ven tiane 4 Luang-prabang
(Dussaud, n° 62). — Eni peuplements étendus dans les ter-
rains gréseux et schisteux.
17. Q. chrysocalyx Hickel et A. Camus, nog. sp.
Ramuli juniores tomentosi, rami adulti glabri. Folia lanceo-
lata, utrinque attenuata, 12-15 cm. longa, 4-7 cm. lata, glabra,
bast integra, apice dentata, nervis lateralibus utrinque 8-10 pro-
minulis, tertiarits parum distinctis; petiolt 10-12 mm. longi,
fulvo-tomentosi. Fructus subsessiles. Cupula cyathiformis,
7-10 mm. longa, 25-28 mm. diam., aureo-sericea, zonis 6-8 con-
ceniricis pubescentibus subintegris, mediis crenatis ornata.
Glans longe exserta, turbinata, basi truncata, apice mucronata,
19-24 mm. longa, 23-25 mm. lata, luteo-sericea, demum glabra:
cicairix concava, 10 mm. diam.
Tonkin : Tien yen (Bonnet), Quang yen (Chateau, n° 108),
Khé va, Hai ninh (Casabianca). — Laos : Attopeu (Harmand,
n° 1398). — Cambodge : environs de Selam phao (Harmand,
n° 206).
Cette espéce est trés bien caractérisée par ses cupules a
zones moyennes crénelées, le tomentum fauve du pétiole, des
stipules et des écailles du bourgeon.
Le Q. chrysocalyx paraît assez répandu en Indo-Chine; il
fournit un bois assez dense, résistant, employé peur la shee
pente, la menuiserie, Vohcmstarie, etc.
18. Q. lineata BI. Bijdr.., p. 523 ; Q. polyneura Miq. ; Q. oxy-
rhyncha Miq.
Siam : Doi sootep, altitude 700-1500 métres (Hosseus). —
Inde.
1950: Rex ne in Hook. Icon., PI. 2663.
Laos : Tranninh (Magnein). — Chine.
20. Q. Kerrii Craib, in Kew Bull. (1911), p. 471.
Siam : Chien gmai, Doi sootep ; altitude, 300-600 mètres
(Kerr) ; altitude, 1 000 métres (Hosseus).
386 | _ HICKEL ET A. CAMUS
21. Q. Helferiana D:C., Prodr., XNI, Hp. 1062
Annam : Lang bian, Dalat (Lecomte et Finet, n° 1529;
A. Chevalier, n° 30023). — Laos: Ban pac sanane, route de
Ven tiane à Luang-prabang, en peuplements étendus sur les
terrains gréseux et schisteux (Dussaud, n° 63). — Inde.
22. Q. mespilifolia Wall., Cat. n° 2766. | | |
Tonkin : au sud de la ligne Son laa Mai ton (Lemarié, n° 152).
— Laos : (Massie), Mékong, Kemmarath (Thorel), environs de
Luang-prabang, où 1l forme des peuplements étendus sur les
terrains de roches éruptives (Dussaud, n° 65). — Inde.
23. Q. austrocochinchinensis Hickel et A. Camus, nop. sp. ;
Q. semiserrata Balansa, in Journ. de Bot. (1890), p. 149, p. p.
Arbor 15 m. alta; rami fulvo-velutini, demum glabri, lenti-
cellost. Folia coriacea, lanceolata, utrinque attenuata, 10-15 cm.
longa, 3-4 cm. lata, rufa, juniora utraque facie fulvo-tomentella,
adulta glabra, lucida, superne obtuse dentata, nervis secundariis
utringue 10-12, tertiarus transversis parum distinctis. Petioli
1-1,5 cm. longi, fulvo-tomentosi, demum glabri. Spica Q pauct-
flora, rufo-tomentosa. Cupula imperfecta subglobosa, 10 mm.
longa, 16-18 mm. lata, zonis 7-9 concentricis denticulatis luteo-
pubescentibus ornata. Glans imperfecta subsphærica, apice |
mucronata, sericea, 10-12 mm. longa et alta, cupulam vix supe- à
rans; cicatrix convexa. |
Tonkin: Ouonbi (Balansa, n° 566). — Laos: Attopeu À
(Harmand). — Cochinchine : Mu xuoai, vers Baria (Pierre, — i
mo MOT | a
Genre Il. — PASANIA Miquel (1).
La plupart des Pasania peuvent, comme l’a fait Œrsted,
être groupés sous le nom d’Eupasania; mais déjà certaines |
espèces s’y distinguent des autres par l’étendue considérable ‘4
de la cicatrice, la dureté et souvent l’épaisseur du péricarpe. |
(1) Nous n’avons pas cru devoir, ainsi que l’on fait récemment plusieurs auteurs,
remplacer ce nom de genre par celui de Lithocarpus. En effet, nous estimons
que l’espèce pour laquelle Blume avait créé ce dernier genre (L. javensis) présente des
particularités suffisantes pour le maintien du genre Lithocarpus, à moins qu'une étude
plus approfondie n’arrive à la rattacher au genre Castanopsis.
LES CHÈNES D'INDO-CHINE Se eo HOOT
Par : ces espèces (P. dealbata, tephrocar pa, triquetra, truncata,
baviensis et Capusit), le groupe des Eupasania se relie, au Bite
sonnement près (absent ou rudimentaire dans P. triquetra),
à celui des Synædrys. Nous plaçons dans le groupe des Synæ-
drys, outre le P.cornea, qui en est le type, le P. hemispherica,
très voisin, et aussi le P. cyrtocarpa, dont le glandaexactement
la structure si particulière du P. cornea.
Ainsi qu'il a été dit en traitant des Quercus, nous n’avons
retenu le genre Cyclobalanus d'Œrsted que comme sous-genre.
Les seules espéces qui puissent étre rattachées au groupe
Cyclobalanus sont le P. Reinwardtiu et Magneinu, avec leurs
cupules à écailles en zones concentriques.
La structure absolument aberrante du P. Balansæ nous
incite à créer pour cette espèce un groupe spécial sous le nom
d’'Œrstedia: De même nous proposons de grouper les P. tubu-
losa et nhatrangensis sous le vocable de Corylopasania.
Enfin les caractères communs aux P. cerebrina, calathiformis
et fissa (cotylédons ruminés, écailles de la cupule intimement
soudées sur leur plus grande longueur et disposées en zones
concentriques irrégulières) semblent autoriser leur groupe-
ment sous le nom de Pseudocastanopsis. Ces espèces forment
manifestement la transition avec le genre Castanopsis, parmi
lequel on serait fondé à ranger, comme l’ont fait certains
auteurs, le P. fissa, si les deux autres espèces ne le reliaient
aux Pasania.
Les espèces indo-chinoises du genre Pasania, beaucoup
plus nombreuses (45) et plus répandues que celles du genre
Quercus, ne comprennent pas moins de 23 espéces, qui
n'avaient été rencontrées nulle part ailleurs.
Les Pasania d’Indo-Chine sont généralement, comme les
Quercus, cantonnés dans les régions montagneuses, sauf
quelques-uns, comme les P. Harmandii, sabulicola, farinu-
lenta, cerifera et Pierrei. Les deux régions les plus riches en
especes sont nettement le Haut-Tonkin (surtout la région
du mont Bavi), où on n’en compte pas moins de 14, et le
Haut-Laos (région de Tranninh surtout) avec 8. Peu d’espéces
(P. Garrettiana, fissa, hemisphærica) leur sont communes
et la plupart n’atteignent pas au sud la région d’Attopeu.
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Wye a get A ER See, me v SATA
388 HICKEL ET A. CAMUS.
Cette flore tonkino-laotienne se relie, d’une part, par
quelques espèces (P. dealbata, cornea, fissa), à celle de la
Chine orientale (Kouang-si, Kouang-toung); de l’autre, par
un nombre d’espèces un peu plus grand (P. Thomsonit, poly-
stachya, Lindleyana, truncata, dealbata, Reinwardtii) à celle du
Siam et de l’Inde orientale Biron A
L'espèce qui semble avoir l’aire de dispersion la plus
étendue est le P. dealbata, qui, de l’Inde orientale et du
Yun-nan, s'étend jusqu’au Langbian, peu riche en espèces de
Pasania (P. vestita, nhatrangensis).
Nous avons enfin, avec Drake del Castillo, rapporté au
P. Reinwardtii des spécimens récoltés par Balansa sur le mont
Bavi. Si cette manière de voir se trouvait confirmée, cette
espèce aurait une aire de dispersion encore plus étendue que
P. dealbata, puisqu'elle irait jusqu’en Malaisie (Sumatra,
Bornéo).
Il faut remarquer aussi que, parmi les espèces d’Indo-Chine,
deux au moins, les P. Balansæ et tubulosa, présentent des
formes de fruits absolument aberrantes.
A. Cotylédons non ruminés, parfois lobés par des cloisons incomplètes
ou dures, dans ce dernier cas à cupule épaisse.
a. Gland sans cloisons ou à cloisons minces plus ou moins incom-
pletes.
4. Cupule ne dépassant pas le
gland, mais Tlentourant
parfois complètement.
— Cupule formée d’écailles
plus ou moins visibles dis-
posées en zones concen-
triques ou spiralées...... Sous-genre 1: Eupasania Prantl.
— Cupule dépourvue d’écailles
visibles, marquées de zones
parallèles ou spiralées.
: Cupules distinctes, ne cou-
vrant pas complètement
le gland, à paroi assez
ligneuse, à zones con-
centriques ; gland a pa- 3
TOLASSeA MINCE. gk. Sous-genre 2: Cyclobalanus Endl.
Cupules complètement
soudées par 3, un peu
LES CHÊNES D INDO-CHINE 389
spongieuses, munies de
zones spiralées très
obscures, enveloppant
3 glands plus ou moins
développés, à paroi li- un
gneuse et rugueuse..... Sous-genre 3: Œrstedia Hickel
et A. Camus.
8. Cupule dépassant le gland. Sous-genre 4 : Corylopasania.
Hickel et Camus.
b. Gland à cloisons dures ; paroi
de la cupule très épaisse, li-
eneuse; écailles très visibles,
épaissies, carénées ; cicatrice du
eland trés grande. +: 2... Sous-genre 5: Synzdrys (Lindl.).
B. Cotylédons ruminés; paroi de la
cupule mince, cassante ; écailles lon-
guement soudées, puis libres au som-
met, disposées en cercles concen-
triques irréguliers, ondulés, rappe-
lant les écailles de la cupule de cer-
tains Castanopsis ; cicatrice petite.. Sous-genre 6: Pseudocastanopsis
| Hickel et A. Camus.
. Sous-genre 1.— Eupasania Prantl.
1. P. sabulicola Hickel et A. Camus, nov. sp.
Ramuli juniores tenues. glabri. Folia coriacea, crassa, rigida,
plicata, arcuata, ovata, basi attenuata, apice cuspidata, glabra
vel glabrescentia, supra nitida, 6-8 cm. longa, 3,5-5 cm. lata,
margine integra, crassa, nervis lateralibus utrinque 8-10, trans-
versis parum distinctis; petioli 1 cm. longi. Pedicellus 2-3 mm.
longus. Cupula solitaria cyathiformis, 5-6 mm. alta, 15-16 mm.
diametro. Cupulæ squame adpressæ, ovate, acute. Glans valde
exserta, ovata, apiculata, bast truncata, 15-18 mm. longa,
15 mm. diametro, subloculata, pericarpio lacunis perforato;
cotyledones dorso sinuoso-lobatæ; cicatrix concava, 6 mm.
diametro. |
Annam : Hué (Harmand).
Cette espèce, qui, d’après Harmand, croît dans les lieux
sablonneux, est assez distincte des espèces voisines d’Indo-
Chine que nous avons étudiées par ses feuilles concolores,
roussâtres, sur le sec au moins, pliées et courbées le long de la
nervure médiane. Ces caractères rapprochent beaucoup ce
390 HICKEL ET A. CAMUS
Pasania du P. Chittagonga Hick. et A. Cam.; mais la forme
des feuilles est différente; les fruits sont imparfaitement tri-
loculaires, et la cicatrice du gland est plus petite dans le
P. sabulicola. Les écailles bien distinctes de la cupule le
séparent du P. cerifera. -
222. Chiltagonga Hickel et A. Camus : .. Quercus spicata var.
Chittagonga King, in Hook., Fl. Brit. Ind., V, p. 610.
Cette espéce, assez manifestement distincte du P. spicata
Œrsted, n’a pas encore été signalée en Indo-Chine, mais
pourrait fort bien se trouver dans la région montagneuse.
3. P. Harmandii Hickel et A. Camus, nov. sp.
Arbor 12-30 m. alta. Ramult juniores Aas: tomentosi. Folia
ovato-lanceolata, apice subobtusa vel rotundata, basi attenuata
vel obtusa, supra glabra, subtus pilosa, 12-25 cm. longa, -
10-13 cm. lata, marginecrassiuscula; nerve laterales utrinque8-12,
supra impressæ, subtus elevate. Petioli 1,5-4 cm. longt, flavo-
tomentosi. Amenta cf simplicia vel ramosa, in axillis foliorum
superiorum disposita; rachis flavo-tomentosa, 10- -20 cm. longa.
Spice © fasciculatæ (2-5), 10-25 cm. longæ. Spice fructiferee
15-30 cm. longe. Cupule ternæ interse connate, squamis imbri-
catis subverticillatis. Glans semiexserta, Pouce vel obovot-
dea, 16-17 mm. longa, 15-16 mm. diametro, pericarpio lacunis
non perforato ; cicatrix concava, 6-7 mm. diametro.
Cambodge : mont Chereer (Pierre, n° 4966), Compong xoal
(Harmand, n° 400). — Cochinchine : Cai cong, pr. Tay ninh
(Pierre) ; Ti tinh (Thorel), pr. Thu dzau môt vers Ben cat
(Pierre). - |
Cette espèce rappelle un peu le P. Thomsonii, mais sa cupule
est plus développée, son gland est moins renflé vers le haut
et à paroi non lacuneuse.
4. P. Thomsonii Hickel et A. Camus ; Quercus Thomson
Miq., in Ann. Mus. Lugd. Bat., 1, p. 109; Q. turbinata Ho
non. Blume ; Q. leucocarpa HO [. et. Th.
Siam : Chieng mai, Doi sootep; altitude, 800 mètres
(Kerr, n° 1261). cr.
5. P. cerifera Hickel et A. Camus, nov. Sp.
Arbor mediocris, 5-15 m. alta. dni striati, cerifert. Folia
ovato-acuminata, 8- 17 cm. longa, 4-6 cm. lata, Site subtus
LES CHENES D'INDO-CHINE 391
albida, margine integra, venis lateralibus utrinque 9-12 elevatis,
tertiariis inconspicuis. Petiolt 5-10 mm. longi. Amenta pani-
an :
VE co.
Re
Lui
KH
Fig. 3. — Pasania Harmandii: 1 “brie et cupules, gr. nae. ; 2, gland, gr. nat. ; 3, parti
d’épi fructifére jeune, gr. nat. — P. dinhensis: 4, partie d’épi fructifere jeune, gr
nat. ; 5, feuille, gr. nat. — P. cerifera; 6, partie d’épi fructifère jeune, gr. nat. ; 7, cu-
pule et ‘gland, gr. nat.; 8, cupule vue extérieurement, gr. nat. — P. mucronata:
9, groupe de 3 cupules et glands, er. nat. ;10, gland vu du dessous, gr, nat. — P. sabu-
licola : 41, gland, gr. nat. ; 12, feuille, gr. nat. : 13, sommet d'épi fructifère, gr. nat.
— P, annamensis : 14, épi fructifére, gr. nat. : 15, cupule vue de profil, gr. nat. ;
16, gland, gr. nat. ; 17, "section longitudinale du gland.— P. Pierret; 18, partie d’épi
fructifère jeune, gr. nat.; 19, partie d’épi fructifére-adulte, gr. pats ; 20, section
transversale d’un gland, gr. nat.
392 . | _ HICKEL ET A. CAMUS
culata, androgyna, floribus masculis superne confertis, femineis
inferne laxius dispositis. Flores © plerumque ternati. Spica
fructifera 4-8 cm. longa Cupulæ subsessiles, coalitæ, depressæ,
12-13 mm. diametro; squamæ adpressæ, parvæ, subverticillatæ.
Glans ovoidea, mucronata, pro maxima parte exserta, glauca,
15-18 mm. longa, 8-10 mm. diametro; cicatrix valde depressa,
concava, 5 mm. diametro. Cotyledones dorso sinuoso-lobatæ.
Cochinchine: mont Dinh vers Baria (Pierre, n° 4970);
mont Mu xoai près Baria (Pierre, n° 4970); Ben cat pr. Thu
dzau mot (Pierre, n° 4970*); Point A (Thorel, n° 357) ; route
de Saigon à Bien hoa (Lefèvre, n°$ 119 et 529); Tay ninh
(Lefèvre, n° 355). — Laos: pr. Dek, près Bassac (Harmand).
Cette espéce est bien caractérisée par la présence de cire
sur presque toute la plante, par ses cupules subsessiles, le
plus souvent soudées par trois, dont une seule, plus rarement
deux, contiennent des glands développés, enfin par les cupules
en coupe très évasée, ne couvrant pas plus d’un cinquième du
fruit. Dans les échantillons que nousavons observés, beaucoup
de glands étaient comme étranglés au-dessus du milieu.
Dans les très jeunes fruits, les écailles sont bien visibles et
disposées en zones régulières.
Cette espèce est proche du P. farinulenta Hick. et A. Cam.,
qui s’en distingue par ses fruits à pédicelles épais, ses cupules
plus grandes.
6. P. farinulenta Hickel et A. Camus ; Quercus farinulenta
Hance, in Journ. of Bot. (1875), p. 365.
Annam : Hué (Harmand). — Cambodge : mont Kamchai
pr. Kampot (Pierre, n° 4970, p. p.), Phu quoc (Hance,
n° 17514). — Cochinchine: Bien hoa (Thorel).
Les cupules des jeunes glands n'ont pas les écailles dis-
posées en zones réguliéres comme chez le P. cerifera.
7. P. polystachya Schottky, in Bot. Jarb., XLVI, p. 667
(1912) ; Quercus polystachya Wall. ; Q. ogee Kure non
Sch. ; Synædrys polystachya ou
ne Chieng mai, Doi sootep ; altitude, 300 mètres (Kerr
n° 796). — Inde, Chine.
Brae: elephantum Hickel et A. Camus ; : Quercus elephantum
Hance, in Journ. of Bot. (1875), p. 365.
LES CHENES D'INDO-CHINE. 393
. Cambodge : mont Kamchai (mont des Éléphants), près
Kampot ; altitude, 900 mètres (Pierre, n° 4985). — Cochin-
chine: (Talmy). — Chine.
9. P. mucronata Hickel et A. Camus, nov. sp.
Folia ovato-lanceolata, apice abrupte acuminata, basi atte-
nuata, 14-16 cm. longa, 5-6 cm. lata, margine integra, leviter
revoluta, supra glabra, subtus glabrescentia, nervis lateralibus
utrinque 8-9, tertiariis inconspicuis. Petiolt glabri, 2 cm. longi.
Spica fructifera densa, 8-10 cm. longa, rachis glabrescentia.
Cupule ternæ, basi adnatæ, subsessiles, planiusculæ, 10-12 mm.
diametro, squamis adpressis ovatis. Glans longe exserta, turbt-
nata, basi trancata, aptice attenuata, apiculata, glabra, 15-16 mm.
alta, 15-16 mm. diametro, subloculata; cicatrix cencava, 7 mm.
diametro. Cotyledones sulcatæ.
Laos : Tranninh (Dussaud, n° 150).
La face inférieure de la feuille, un peu blanchatre, paraît
glabre à un faible grossissement. Elle est en réalité munie de
poils peu nombreux, longs de 40 environ. La cupule, très
petite, presque plane, couvrant à peine un cinquième du
gland est formée de zones assez nettes d’écailles peu dis-
tinctes. Le nombre de fruits développés dans chaque groupe
de trois est variable.
Cette espèce rappellele P. Wallichiana Gamble, dont elle se
distingue par son fruit glabre à l’état adulte, sa cupule encore
plus plane, à écailles moins distinctes, les nervures de ses
feuilles moins nombreuses.
10. P. vestita Hickel et A. Camus, nov. sp.
Folia ovato-lanceolata, acuminata, bast cuneata, supra glabra,
subtus puberula, margine integra, nervis lateralibus 14-15 ele-
vatis, venulis inconspicuis. Petiolus 7 mm. longus. Spica
fructifera 9-10 cm. longa, rachis crassa. Cupule subsessiles,
terne, bast connate, 3 mm. alte, 13 mm. diametro, extus seri-
cee, squamis adpressis inconspicuis. Glans longe exserta, tur-
binata, apiculata, 14-15 mm. longa, 15 mm. diametro, dense
sericea, argentea, subloculosa ; cicatrix convexa, 7 mm. diame-
tro. Cotyledones sulcate.
Laos: Nha trang (Krempf, n° 1913).
_ ANN. DES SC. NAT., BOT., 10¢ série. 1921, Tir, 20
394 ss HICKEL ET A. CAMUS
Cette espéce est trés proche de la précédente, mais elle s’en
distingue très facilement par ses glands blancs, argentés,
soyeux et non glabres et chatains. Les poils des fruits sont
tout a fait persistants.
11. P. annamensis Hickel et A. Camus, noe. sp.
Ramuli albido-puberuli. Folia nitida, crassa, rigida, obovato-
lanceolata, bast cuneata, 13-15 cm. longa, 4,5-5,5 cm. lata,
supra glabrescentia, subtus albida, puberula, margine integra ;
nerve. laterales utrinque 11-12 subtus elevate. Petioli 5-15 cm.
longi. Spica fructifera densa, 5-10 cm. longa, rachis crassa.
Cupulæ terne, bast connate, parve, planiusculæ, 14-15 mm.
diametro, squamis parvis inconspicuis. Glans longe exserta,
depressa, apice mucronata, 10-13 mm. longa, 17-22 mm. dia-
metro, tenuiter sericea, demum glabrescentia, pericarpio crasso
lacunis non perforato ; cicatrix concava, 7 mm. diametro.
Laos: Tranninh (Pierre, n° 10). — Annam: Hué re ee
— Cochinchine: Bao chiang (Pierre). |
Cette espèce est proche du P. spicata Œrst., mais ses feuilles
sont pubescentes-blanchatres en dessous, ses cupules bien
plus plates, couvrant environ un cinquième du fruit.
12. P. pseudosundaica Hickel et A. Camus ; Quercus sun-
daica Drake del Castillo, in Morot, Journ. de Bot. (1890),
p: 150 >= non BL
Arbor 5-6 m. alta, ramis junioribus dense fulvo-velutinis.
Folia ovato-lanceolata, utrinque attenuata, 8-18 cm. longa,
3,5-7,5 cm. lata, puberula, margine crassa, integra, nervis
lateralibus utrinque 10-12 subtus elevatis, transversis parum
distinctis tenuibus. Petioli tomentosi, 5-10 mm. longt. Flores 9
_ 8-fasciculatt. Spica fructifera 5-15 cm. longa, laxiuscula, rachis
pulverulenta. Cupulæ subsessiles, terne, basi connate, cyathi-
formes, 18 mm. diametro, extus puberulæ ; squamæ adpressæ,
subverticillate, superiores abrupte acuminate. Glans brunnea,
exserta, turbinata, brevissime mucronata, 13-15 mm. longa,
16-17 diametro, glabra, subloculata, pericarpio crasso ; cicatrix
concava, 10 mm. diametro. Cotyledones sulcate.
Tonkin : rive gauche de la Riviére Noire, en face de Tuphap
(Balansa, n°5 2365, 2366); mont Bavi, vers 1 000 mètres
d’altitude (Balansa, n° 2381) ; Pho vy, peu commun (Gabai) ;
LES CHENES D INDO-CHINE | 395
~ Haut-Tonkin, altitude 1 400 mètres (Capus). — Laos: région
de Banlé (Dussaud, n° 157).
Fig. 4. — Pasania bacgiangensis : 1, partie d’épi fructifère, gr. nat. ; 2, gland vu du
dessous, gr. nat. — P. Garrettiana : 3, partie d’épi fructifère, gr. nat. ; 4, gland, gr.
nat. : 5, section longitudinale du gland, gr. nat. — P. Bonnetii: 6, épi fructifère,
gr. nat. ; 7, gland, gr. nat. — P. Bonnetii var. tienyenensis : 8, cupules et glands, gr.
nat. ; 9, gland, gr. nat. ; 10, cupule vue intérieurement, gr. nat.— P. Areca: 11, feuille,
gr. nat. ; 12, cupules vides, gr. nat. — P. cerebrina : 13, cupules et glands, gr. nat. ;
14, gland, gr. nat. ; 15, section transversale de la graine, gr. nat. — P. gigantophylla :
16, partie d’épi fructifére, gr. nat. ; 17, gland, gr. nat. ; 18, gland vu du dessous,
396 | HICKEL ET A, CAMUS
Cette espèce est bien caractérisée par ses feuilles un peu
roussâtres en dessous, munies de poils courts sur les deux
faces, ses cupules à écailles régulièrement disposées et assez
longuement acuminées dans les rangs internes. Ordinaire-
ment deux glands avortent sur trois. Le P. pseudosundaica
est proche du P. spicata Œrsted, mais ses feuilles sont moins
épaisses, pubérulentes, ses cupules ont des écailles bien plus
acuminées et ses fruits ont de très courtes cloisons. Cette
espèce se distingue du P. sundaica Œrsted (Quercus sundaica
Blume) par les écailles de la cupule bien moins nombreuses,
les glands plus brunâtres, moins rougeâtres. Ceux-ci, très
serrés, sont souvent Rent déformés par la pression |
des voisins.
13.2 Re Teer Hickel et A. Camus, nov. sp.
Folia oblongo-lanceolata, bast attenuata, apice acuminata,
subtus puberula, 20-25 cm. longa, 6-7 cm. lata, margine integra,
nervis lateralibus utrinque 13-14 subtus elevatis, transversis
tenuibus. Petiolt 1 cm. longi. Spica fructifera 10-12 cm. longa.
Cupulæ solitarie vel terne, paulo connate, crassæ, late cyathi-
formes, 20-25 mm. diameiro, 4-5 mm. altæ, squamis adpressis
ovato-acutis. Glans depressa, apice rotundata, breve mucronata,
glabra, 17 mm. alta, 25-26 mm. diametro ; cicatrix valde concava,
15 mm. diametro.
Tonkin : Phu to à Phu doan (Lecomte 2 Finet).
Espèce bien distincte, proche de P. pseudosundaica Hick et
A. Cam., mais cupule bien plus épaisse, trés dure, feuilles
plus minces, bien plus allongées, vert cendré en dessous et
non roussâtres, gland moins atténué au sommet, bien plus
arrondi. Dans le P. Fineti: le pads a des cloisons extrémement
rudimentaires.
14. P. spicata Œrst., in Kjæb. Vidensk. Medd., p. 83 (4866);
Quercus spicata Smith - ; Craib, Contr. F1. Siam p. 201;
Synædrys spicata Koidzumi; Lithocarpus spicata Rehder et
Wilson.
Craib signale cette espéce au Siam sans indication de variété
(Luang Vanpruk, n° 164). — Inde, Chine, Malaisie. |
15. P. bacgiangensis Hickel et A. Camus, nov. sp.
Rami glabri. Folia lanceolata, basi attenuata, apice acumi-
Lund
- LES CHENES D INDO-CHINE 397
nata, 14-15 cm. longa, 5 cm. lata, supra nitida, subtus glabra,
pallidior, margine undulata, costa et venis lateralibus utrinque
14-15 distincte elevatis.. Petioli 5-7 mm. longi. Amenta 10-20 cm.
longa, androgyna, floribus masculis superne confertis, femineis
inferne laxius dispositis. Perianthium florum masculinorum
6-lobatum, lobis patentibus. Stamina longe exserta. Ovarit
rudimentam conspicuum. Cupulæ ternæ, inter se coalitæ, sub-
sessiles, cyathiformes, 5 mm. altæ, 15 mm. diametro ; squame
parvæ. Glans depressa, mucronata, 11-12 mm. alta, 17-18 mm.
diametro, longe exserta, apice pubescens, subioculata ; cicatrix
concava, 10-12 mm. lata. Cotyledones sulcatæ.
Tonkin : prov. de Bac giang, forêt de Phôvi (A. Chevalier,
n° 29659).
Cette espèce se rapproche du P. spicata Œrst., mais ses
feuilles sont bien moins épaisses, elles ne sont pas arquées et
_ne deviennent pas roussâtres en séchant. Le P. bacgiangensis
‘Hick. et A. Camus rappelle aussi le P. annamensis Hick. et
A. Cam.,mais la cupule de ce dernier est bien plus petite, le
gland est plus déprimé, moins mucroné, sans cloisons ; les
cotylédons sont entiers.
16. P. tenuinervis Hickel et A. Camus, nov. sp.
Folia lanceolata, bast cuneata, 18-20 cm. longa, 6 cm. lata,
glabra, margine undulata, nervis lateralibus utrinque 12-14
paulo elevatis : petiolt 0,8-1 cm. longi. Spica fructifera 11-12 cm.
longa. Fructus secus pedunculum crassum ternatt. Pedicellt
3-5 mm. longi, squamost. Cupule pedicellate, cyathiformes,
18-20 mm. diametro; squamæ inferiores elongate, superiores
confertæ. Glans exserta, depressa, basi truncata, apice mucro-
nata, pallida, 10 mm. alta, 16-17 mm. diametro, glabra, sublo-
culosa ; cicatrix depressa, 13-14 mm. diametro. :
Laos : Tranninh (Dussaud, n° 158).
Ressemble au P. sootepensis Hick. et A. Cam., mais à cica-
trice un peu déprimée sur les bords, puis un peu convexe vers
_ le milieu, à cupule égalant un tiers du gland, à pédicelle plus
gros, couvert d’écailles, soudé aux deux cupules des glands
avortés du groupe (non isolé, nu, gréle et renflé au sommet),
a gland bien plus déprimé, complétement glabre.
17. P. auriculata Hickel et A. Camus, nov. sp.
398 | HICKEL ET A. CAMUS
Arbor 8-10 m. alta. Rami crassi globri. Folia coriacea, obo-
vata, bast auriculata,apice abrupte acuminata, 25-30 cm. longa,
7-10 cm. lata, glabra, margine subintegra, nervis lateralibus
utrinque 25-27 elevatis; petiolus 3-5 mm. longus. Spica fructifera
20-27 cm. longa, densa, basi nuda ; rachis crassa, 12-15 mm.
diam. Cupule plerumque 6-næ inter se connate, cyathiformes,
subsessiles, crassæ, squamis subverticillatis adpressis ovato-
acutis obtectæ. Glans turbinata, apice apiculata, glabra,
18-20 mm. alta, 24-29 mm. diametro; cicatrix concava.
Laos: entre M. lap et Tam la; altitude 700-800 mètres
(Poilane, n° 2113). |
Cette espèce est très bien caractérisée par ses très grandes
feuilles, à oreillettes développées à la base, presque lyrées,
bien plus larges dans la moitié inférieure que dans la moitié
supérieure, par ses gros épis fructifères à cupules épaisses.
18. P. gigantophylla Hickel et A. Camus, noe. sp.
Ramult puberult. Folia rigida, lanceolata vel ovato-lanceolata,
bast attenuata, apice acuminata, 35 cm. longa, 9-11 cm. lata,
margine integra, supra glabrescentia vel puberula, sublus pube-
rula ; venæ laterales utrinque 15-16 supra impressæ, subtus
elevate. Petioli 1,5-5 cm. longi. Spica fructifera 12-16 cm.
longa. Cupule terne, basi connate, pedicellatæ, 20-25 mm. dia-
metro, intus sericeæ, squamis distinctis ovatis longe acuminatis
adpressis tomentosis obtectæ, inferne et in stipite squamis ovatis
instructæ. Glans subhemispherica, apice mucronata, basi
truncata, dimidio e cupula exserta, subglabra, 13-14 mm. alta,
22 mm. diametro ; cicatrix concava, 12 mm. diametro.
Tonkin : Quang yen (de Beauchaine, n° 126). — Cam-
bodge: mont Knang repœu; altitude, 700 et 1 500 mètres,
prov. Thepong (Pierre, n° 667).
Cette espéce est trés bien caractérisée par ses feuilles et la
forme des nombreuses écailles de la cupule très visibles, même
dans la jeunesse. Le gland est très étroitement enveloppé dans
la cupule. Peu de ces glands se développent.
19. P. Pierre: Hickel et A. Camus, nog. sp.
Ramuli striati, lenticellosi, glabri. Folia lanceolata, acumi-
nata, 25-30 cm. longa, 6-8 cm. lata, supra glabra, subius pilo-
sula vel glabrescentia, margine integra, apice subundulata,
LES CHENES D'INDO-CHINE 399.
nervis lateralibus utrinque 15-16. Petioli 1,5 cm. longi. Amenta &
simplicia, fasciculata, usque 8-14 cm. longa. Amenta © 10-
20 cm. longa ; flores 2 3-fasciculati. Cupule terne, basi sub-
connate, hemisphæricæ, 15-17 mm. diametro, tomentose;
squame inf. remote, adpresse, sup. acute. Glans (perfecta ?)
subglobosa, mucronata, 12 mm. longa, 13 mm. diametro, sublocu-
losa, cupulam vix superans, pericar pio crasso lacunis perforato ;
cicairix subconcava. Cotyledones subtrilobæ.
Cochinchine: prés Bien hoa, vers Tou man (Pierre, n° 4979).
20. P. Lindleyana Hickel et A. Camus ; Quercus Lindleyana
Walle Cat n°02782; b.G., Prodr.; XVI; TE p. 108.
Siam : Doi sootep; altitude, 900-1 500 mètres (Hosseus) ;
Chieng maï (Kerr).
21. P. kemmaratensis Hickel et A. Camus, noe. sp. ;
Spica fructifera 10-11 cm. longa, rachis glabra. Cupulæ
terne, connate, subsessiles, intus sericeæ, extus puberulæ,
10-12 mm. altæ, 11-13 mm. diametro, squamis crassis distinctis
oblusis obtectæ. Glans semiexserta, subovoidea, apice rotundata,
mucronata, 18 mm. alta, 10 mm. diametro, glabra; cicatrix
subconvexa, 8-9 mm. diametro.
Laos: au-dessus de Kemmarat (Counillon).
Proche de P. fenestrata Œrst., mais cupule plus épaisse,
ne se déchirant pas, à écailles bien plus obtuses, couvrant
moins le gland plus arrondi au sommet.
22. P. fenestrata Œrsted, in Nat. For. Vidensk. Medd.,
XVIII, p. 84 (1866) ; Quercus fenestrata Roxb.; Synædrys
fenestrata Koidzumi; Quercus callicarptfolia Griffith.
Laos: Tranninh (Magnein). — Siam : Chieng mai, Doi
sootep ; altitude, 1560 métres (Kerr, n° 1320); altitude,
1 350 mètres (Kerr, n° 708). — Inde.
23. P. sootepensis Hickel et A. Camus ; Quercus sootepensis
Craib, in Kew Bull. (1911), p. 472.
Siam : Chieng mai, Doi sootep (Kerr, n°5 780 et 1312).
24. P. Krempfu Hickel et A. Camus, nov. sp.
Spica fructifera 9-12 cm. longa. Fructus secus pedunculum
crassum ternalt; unicus tantum maturans, 2 ali steriles parvt
vel minuti, ad cupule mature basin. Cupula sessilis sub-
hemispherica, 12 mm. alta, 23 mm. diametro, squamis imbri-
400 ‘ __ HICKEL ET A. CAMUS
catis apice subobtusis obtecta. Glans semiexserta, subglobosa,
apice mucronata, brunneo-lutea, 18-22 mm. diametro, sublocu-
losa : cicatrix rugosa, subconvexa, 15 mm. diametro.
Laos : Nha trang (Krempf).
Espèce bien caractérisée par ses gros fruits arrondis, très
fortement fixés à la cupule très embrassante par la cicatrice
très grande, peu convexe et très rugueuse. Les glands sont
d’un brun bien plus jaune que dans l’espèce suivante.
25. P. elata Hickel et A. Camus, nov. sp. :
Arbor elata. Spica fructifera 5 cm. longa. Cupulæ sessiles,
ternæ, connate, subhemisphæricæ, 13-14 mm. aliæ, 24-25 mm.
diametro,squamis distinctis ovatis acutis subverticillatis obtectæ.
Glans exserta, subovoidea, 21-23 mm. alta, 18-21 mm. dia-
metro, subsericea, subloculosa; cicatrix valde convexa, rugosa,
17-19 mm. diametro. |
Haut-Tonkin; altitude, 1400 mèêtres (Capus, n° 3).
Proche de P. Krempfii Hick. et A. Cam., mais cupuledépas-
sant la moitié de la hauteur du gland, à écailles plus nom-
breuses, plus nettement marquées, plus aiguës, gland à cica-
trice plus convexe, égalant en hauteur du tiers au quart de la
hauteur totale du fruit. Ressemble au 2. Harlandii Hick. et
A. Cam. (Quercus Harlandi Hance), mais cicatrice convexe et
non concave. |
26. P. dealbata Œrsted, in Nat. For. Vid. Med., XVIII,
p. 84 (1866) ; Quercus dealbata Hook. f. et Th. ; Q. fenestrata
Roxb. var. dealbata Wenzig ; Q. callicarpifolia Griff. ; Synæ-
drys dealbata Koidzumi.
Annam : massif du Lang bian, Dalat; altitude, 1 400 métres
(Lecomte et Finet, n° 1500, A. Chevalier, n° 30026). — Laos:
Tranninh (Dussaud, n° 153). — Siam : Doi sootep, altitude,
300 métres (Hosseus, n° 446). — Inde. |
27. P. tephrocarpa Hickel et A. Camus; Quercus tephro-
carpa Drake del Castillo, in Morot, Journ. de Bot. (1890),
p.151;
Tonkin: mont Bavi; altitude, 600 mètres (Balansa,
n° 2362). |
28. P. triquetra Hickel et A. Camus, nov. sp.
Arbor elata. Spica fructifera 8-9 cm. longa; rachis crassa,
a ur
‘te
LES CHENES D’INDO-CHINE | 401
2 cm. diametro. Cupulæ coaltæ, sessiles, crassæ, tomenielle,
julvæ; squamæ confertæ, erectæ, acute, plus minus adpresse.
Glans subinclusa, subglobosa, apice depressa, 20-30 mm. alta,
21 mm. diametro, fulvo-sericea, subloculosa, pericarpio lacunis
perforato; cicatrix subhemisphærica. Pars inferne glandis
impolita, pars,superior levis. Cotyledones lobatæ.
Tonkin: mont Bavi; altitude, 1100 métres (Balansa,
n° 2374). |
Nous n’avons pu observer de feuilles de cette curieuse
espèce. Les jeunes fruits rappellent ceux du P. tephrocarpa,
mais les fruits plus âgés sont bien caractérisés par la cicatrice
du gland très haute, très irrégulière, par endroit occupant la .
moitié de la hauteur totale du gland et à côté n’en occupant
que le quart, par ses fruits déprimés au sommet et munis de
trois bosses légères, par le péricarpe lacuneux et les cotylédons
un peu lobés.
29. P. megastachya Hickel et A. Camus, nov. sp.
. Arbor 15 m. alta. Rami glabri, lenticellost. Folia longe petio-
lata, crassa, rigida, ovato-lanceolata, abrupte acuminata,
12-18 cm. longa, 4,5-7,5 cm. lata, supra glabra, nitida, subtus
breve puberula, margine integra, nervis secundarits utrinque 8-9,
terliartis transversis parum distinctis; petiolt 1,8-3 cm. longi,
glabri. Stigmata 3, crassa. Spica fructifera densissima, 7-14 cm.
longa, 4,5-5 cm. diam.; rachis crassa, rugosa, basi inflata,
1-1,5 cm. diam. Cupule ternæ, connate, sessiles, subglobosæ
vel subovoideæ, apice umbilicate, 17 mm. diam., 3 mm. crassæ,
zonis 7-8 undulato-sinuatis obsoletis ornate. Glans globosa,
arcte inclusa, fere ad apicem adnata, 1 mm. crassa.
Laos : Na ham, pr. San meua, commun (Poilane, n° 1853).
Cette espéce est trés bien caractérisée par ses épis fructi-
fères à très gros rachis, ses cupules très soudées, sphériques,
mais un peu déprimées et ombiliquées au sommet, dans la
jeunesse, munies d’écailles assez marquées, épaisses, tubercu-
liformes, serrées et à l’état adulte, portant des zones très
effacées, par le gland à cicatrice s'étendant à presque toute
la surface, parfois à toute la surface, la partie lisse, un peu
soyeuse manquant. La face inférieure des feuilles, à l’état
adulte, paraît glabre, à l'œil nu ou à un faible grossissement;
402 HICKEL ET A. CAMUS :
elle est en réalité pourvue de poils très ténus et très courts.
30. P. laotica Hickel et A. Camus, noe. sp.
Arbor 15 m. alta, ramis et ramulis glabris. Folia oblongo-
lanceolaia, 10-16 cm. longa, 3-6 cm. lata, rigidula, glabra, supra
nitida, nervis lateralibus utrinque 10-12 distinctis, tertiariis
parum distinctis; petiolus 1,5-2 cm. longus. Spica fructifera
10-12 cm. longa. Flores 2 3-fasciculatt. Cupula sessilis, globosa,
apice subtruncata, 25-27 mm. diam., 1,5 mm. crassa, pilosula,
glandem ad maturitatem usque includens, squamis demum
obliteratis. Glans inclusa, globosa, apice subdepressa, brevissime
umbonata, 13-14 mm. diam. :
Laos : entre Wam dinh et Muong pun, abondant ; altitude,
500-600 métres (Poilane, n° 1922).
Cette espèce est très bien caractérisée par sa cupule terne,
munie d’écailles nombreuses, serrées, assez épaisses dans la
jeunesse, espacées, peu distinctes à l’état adulte, sauf celles
des rangs supérieurs, qui sont ovales aiguës, plus visibles.
Les cupules sont ordinairement soudées par trois à la base,
mais un seul gland, au plus, se développe par groupe.
St. P. truncata Hickel et A. Camus; Quercus truncata
King, in Ann. Roy. Bot. Gard. Calc., IT, p. 84, t. LX XX.
Siam : Chieng mai, Doi sootep ; altitude, 900 mètres (Kerr,
n° 1285). — Laos (Dussaud, n° 129) ; Tranninh (Magnein) ;
Xieng kouang (Spire, n° 495). — Inde.
Il est à noter, ce qui n’est pas indiqué dans la figure de
King, que les écailles inférieures de la cupule sont longuement
adnées et espacées.
32. P. baviensis Hickel et A. Camus; Quercus baviensis
Drake del Castillo, in Journ. de Bot. (1890), p. 150.
Tonkin: mont Bavi; altitude, 1 000 mètres (Balansa,
n° 2375). |
33. P. Bonnet Hickel et A. Camus, nov. sp.
Arbor 18-20 m. alta. Ramuli ferrugineo-velutini. Folia
crassa, rigida, obovato-oblonga, apice acuminata, basi atte-
nuata, margine integra, subtus sparse pilosa, nervis lateralibus
utrinque 14-15 supra impressis subtus elevatis pube persistente.
Petioli 12-15 mm. longi, fulvo-velutini. Inflorescentia & pani-
culata; rachis villosissima. Bracteæ elongate ; fl. à remote,
LES CHENES D INDO-CHINE 403
2,5-3 mm. longæ, fulvo-velutinæ. Spica fructifera densissima,
8-10 cm. longa. Cupulæ subsessiles, ternæ, coalite, subhemi-
sphæricæ, 12 mm. alte, 16-17 mm. diametro, puberulæ;
squamæ mediæ 2-3 mm. longæ, patentes, recurvatæ. Glans
paulo exserta, subglobosa, bast truncata, apice apiculata,
13 mm. alta, 15 mm. diametro, levis, subloculosa; cicatrix
concava, 9 mm. diametro.
Tonkin : commun un peu Parte Tuyen-quang, Chiém-
hoa (Pierre).
Proche du P. lappacea Cable mais à fruits plus petits,
plus rapprochés, à cupules légèrement soudées à la base,
formant des épis plus denses, à feuilles bien plus épaisses.
Les feuilles du P. Bonnetii rappellent celles du P. giganto-
phylla Hickel et A. Cam.;mais les glands de ces deux espèces
sont très différents.
_ Cette espèce, à feuilles caduques, fournit un bois cendré,
noir ou rouge brun, serré, assez réfractaire à la pourriture
et aux fourmis blanches, estimé comme bois de charpente
et employé pour la menuiserie, l’ébénisterie, ete.
P. Bonnetii Hickel et A. Camus var. tienyenensis Hickel et
A. Camus, nog. var.
Cupulæ 18-20 mm. diametro; glans depressa, 8-10 mm. alta,
18 mm. diametro.
Tonkin : Tien yen (Bonnet, n° 9).
Les cupules paraissent plus longuement soudées dans cette
variété que dans le type.
34. P. Garrettiana Hickel et A. Camus : ; Quercus Garrettiana
Craib, in Kew Bull. (1911), p. 471.
Nous avons cru utile de figurer cette espèce très peu
connue Jusqu'ici. Nous avons pu examiner des échantillons
en excellent état et des fruits âgés. Nous ajouterons les
caractères suivants à la description princeps : Arbor 15-18 m.
alta. Spice simplices, 17-20 cm. longæ, androgynæ, floribus S
superne confertis, floribus © inferne laxius dispositis ; rachis
fulvo-tomentosa. Bractee ovate, acutæ, pubescentes. Peri-
anthium florum S 6-lobatum, lobis tomentosis. Stamina exserta ;
pistills rudimentum globosum, tomentosum. Spica fructifera
8-10 cm. longa. Cupule ternæ, coalite, 1,5 mm. altæ, 20 mm.
he NET CNE EDG, Ve Aah EE ET RER PERS RE ER
M ; ae DES = x SF oor DA 1 bare ca
404 HICKEL ET A. CAMUS
diametro. Glans 8-12 mm. longa, 10-16 mm. diametro, sublocu-
losa, cupulam paulo superans, pericarpio lacunis perforato:
cicatrix concava, 14-15 mm. diametro. Cotyledones dorso si-
_nuoso-lobatæ.
Tonkin: Thai-nguyen (Thiriot). — Laos: Attopeu, près
Bassac, altitude, 700-800 mètres (Harmand); Tranninh ~
(Dussaud, n° 151). — Siam: Chieng mai, Doi sootep; alti-
tude, 600-750 métres (Kerr, n°5 1185 et 1185 a).
Cette espéce est employée pour la chape la construc- 7
tion, l’ébénisterie.
35, P. Capusii Hickel et A. Camus, nov. sp.
Spica fructifera, 5-6 cm. longa. Cupule ternæ, inter se coalite,
hemisphæricæ, 25-27 mm. diametro, fere tota altitudine connate,
squamis linearibus 5-8 mm. longis patenti-reflexis pubescen-
tous. Glans globosa, 20 mm. alta et lata, involucro arcte amplexa,
subinclusa, apice puberula; glandis pars involucro adnata
major quam supera libera; cicatrix hemispherica. Cotyledones
integre.
Annam : Haut Song tya (Capus). :
Espèce très nettement caractérisée, se rapprochant des
P. triquetra et tephrocarpa, dont elle se distingue surtout par
la forme très allongée des écailles de l’involucre.
36. P. Areca Hickel et A. Camus, nop. sp.
Rami glabri, lenticellosi. Squamæ geminarum acute. Folia
lanceolata, apice acuminata, basi cuneata, 12-20 cm. longa,
2,5-4,5 cm. lata, nitida, glabra, margine dentata : nerve laterales
utrinque 10-11, supra impresse, subtus elevate. Petioli 12 mm.
longi. Spice nunc androgynæ, folio circiter æquales, nunc
masculæ, simplices, erectæ, 5-6 cm. longer. Antheræ exserte,
minime. Cupulæ terne, subscutellatæ, inter se coalitæ, 26 mm.
diametro, echinat#, squamis elongatis, lanceolatis, acutis,
patenti-reflexis ; cicatrix convexa, 6 mm. diametro. Glans deest.
Tonkin : mont Ban phét (Bon, n° 2316).
Les feuilles de cette espéce brunissent en herbier comme
celles du P. cornea.
LES CHENES D INDO-CHINE 405
Sous-genre 2. — Cyclobanus Endl.
37. P. Reinwardti Prantl, in Engler et Prantl, Pflanzenf.,
III, 4, p. 51 ; Quercus Reinwardti Korth; Cyclobalanus Rein-
wardtit Œrsted.
Tonkin: mont Bavi (Balansa, n° 2376). — Siam : Koh
chang (Schmidt)? — Inde, Sumatra.
38. P. Magneinit Hickel et A. Camus, nov sp.
Ramuli juniores puberult, lenticellost. Folia obovato-lan-
ceolata, utrinque attenuata, apice acuminata, breviter cuspidata,
13-14 cm. longa, 4-5 cm. lata, supra puberula, subtus albo-
pubescentia, nervis lateralibus utrinque circiter 12 curvatis ;
petioli 1,2-1,6 cm. longi. Fructus solitarii vel approximati.
Pedicellus 9-12 mm. longus. Cupulæ plerumque ternæ, basi
connate, lamellis 7-9 concentricis integris pubescentibus ornate.
Glans hemispherica, bast truncata, apice mucronata, exserta,
13-15 mm. alta, 22-25 mm. diametro, subsericea; cicatrix
concava, 9 mm. diametro.
Tonkin : Cha pa a Mouong xen conte et Finet, n° 426).
— Laos: Tranninh (Magnein). — Inde.
Proche du P. Cantleyana Gamble (Quercus Cantleyana King),
mais gland plus large que haut, cupules plus souvent soudées,
à zones plus rapprochées. Les feuilles diffèrent de celles du
P. Reinwardtit par leurs nervures nettement saillantes.
Sous-genre 3. — Œrstedia Hickel et A. Camus.
_ 39. P. Balansæ Hickel et A. Camus; Quercus Balansæ
Drake del Castillo, in Journ. de Bot. (1890), p. 152, PI. IV,
fig. 6-7.
Tonkin : Tu phap (Balansa, n° 2359, 2360, 2361).
Sous-genre 4. — Corylopasania Hickel et A. Camus.
40. P. tubulosa Hickel et A. Camus, nov. sp.
Arbor 16-18 m. alta. Ramuli juniores luteo-tomentosi. Folia
lanceolata, oblique acuminata, valde cuspidata, 20-25 cm.
longa, 6-8 cm. lata, supra puberula, subius pilosa, margine
406 _ HICKEL ET A. CAMUS
tniegra, nercis lateralibus utrinque 12-13 subtus elevatis superne
arcualis, tertiartts perspieuis transversis. Petiolt 5-7 mm.
longi, tomentosi. Amenta & paniculata. Bracteæ lanceolate,
elongate. Spica fructifera 6-7 cm. longa, rachis tomentosa.
Cupule elongate, subherbaceæ, 35 mm. longe, 22 mm. dia-
metro, puberulæ, molle echinatæ, squamis linearibus patenti-
reflexis laxissimis. Glans inclusa, depressa, apice mucronata,
basi truncata, 15 mm. longa, 20 mm. diameiro, inclusa, sericea;
cicatrix concava. Cotyledones integre. i
Tonkin : Tuyen quang ; commun à Chiém hoa (Pierre). —
Laos (Pavie).
La cupule à parois minces, prolongée en un long tube au-
dessus du gland, rappelle beaucoup l’involucre de certains
Corylus : ses écailles molles sont espacées, courtes, les infé-
rieures, plus longues, atteignent 6-9 millimètres.
Cette espèce donne un bois employé en menuiserie, pour
la charpente, la construction, la carrosserie, etc.
41. P. nhatrangensis Hickel et A. Camus, nog. sp.
Cupula pedicellata, crassiuscula, oa bast attenuata,
apice subrotundata, 20 mm. longa, 18-20 mm. ise extus tomen-
tosa, intus sericea; squame inferiores remote, suberecte,
supertores elongate, 2-4 mm. longæ, subincurve. Glans (per-
fecta?) inclusa, depressa, apice mucronata, 8-9 mm. alta, 12 mm.
diametro ; cicatrix convexa.
Laos : Nha trang, massif du Tan ha (Krempf, n° 1592).
Sous-genre 5. — Syneedrys (Lindl).
42. P. cornea Œrst., L c., p. 88 ; Quercus. cornea Loureiro,
fl. cochinch.,. p. 100; Sia ys cornea Lindl.
Annam (Lourcivo: Eberhardt). — Cochinchine (d’après
de Candolle).
42. P. hemispherica Hickel et A. Camus; Quercus hemisphæ-
rica Drake del Castillo,in Journ. de Bot. (1890), p. 151, et
PLA a & |
Cette espèce se distingue du P. cornea par la paroi du gland
bien plus épaisse au milieu de la cicatrice, à anfractuosités
très développées, la graine peu haute. Dans le P. cornea, la
LES €HENES D 'INDO-CHINE 407
est presque de même épaisseur dans la con-
Fig. 5. — Pasania pseudosundaica : 1, partie d’épi fructifère, gr. nat. — P. tubulosa :
2, épi fructifère, gr, nat. ; 3, gland, gr. nat. ; 4, section transversale du gland, gr. nat,
— P. calathiformis : 5, partie d’épi fructifére, gr. nat. —P. Magneinu: 7, partie
d’épi fructifère, gr. nat. — P. Capusii: 8, gland, gr, nat. ; 9, épi fructifére, gr. nat.
— P, triquetra : 10 épi fructifère, gr. nat. — P. truncata: 11, partie d’épi fructifère,
gr, nat.; 12, gland, gr. nat.
vexité de la cicatrice, les anfractuosités sont nulles ou réduites,
la graine développée en hauteur.
408 ee HICKEL ET A. CAMUS
Tonkin (Lemarié) ; Yenlang (Balansa, n° 2364) : TU st
près-de la Rivière Noire (Balansa, n° 2369); Dong tung
(Bon, n° 5091) ; Chiem hoa, Tuyen quang (Pierre) ; pr. de Bac
_ giang, forêt de Pho vi (A. Chevalier, n° 29658). — Laos:
Luang prabang (Dupuy). — Annam (Rigal). |
43. P. cyrtocarpa Hickel et A. Camus ; Quercus cyrtocarpa
Drake del Castillo, in Journ. de Bot. (1890), p- 150; et PE Te
fig. 3.
Tonkin : Ouenbi (Balansa, n° 567) ; mont Bavi (Balansa,
n° 2383) ; Quang yen (Château, n° 107).
Sous-genre 6. —_ Pseudocastanopsis Hickel et A. Camus.
44. P. cerebrina Hickel et A. Camus, nov. sp.
Arbor 15 m. alta. Ramuli puberult. Folia obovato-oblonga,
basi cuneata, apice breve acuminata, subtus puberula, rufa
vel brunnea, supra viridia, margine serrata, nervis lateralibus
uirinque 15-20 subtus elevatis, transversis inconspicuts. Petioli
1,5-2 cm. longt, pulost. Spica fructifera 5-6 cm. longa. Pedicellus
4 mm. longus. Cupula fragilis, solitaria, pedicellata, sub-
campanulata, 10-12 mm. alta, 17-18 mm. diumetro, intus
sericea, extus tomentosa, squamis elongatis acutis adpressis
apice. excepto connaits obtecta. Glans castanea, longe exserta,
subcylindracea, apice mucronata, basi truncata, 25 mm. longa,
15 mm. diametro ; cotyledones intricato-rimosæ.
Tonkin : près de Phu to, réserve forestière de Chanmong
(Fleury, coll. A. Chevalier, n° 30117) ; plateau de Than mai
à l’est de Hong hoa (Balansa, n° 2380).
Cette espéce, par ses cotylédons cérébriformes, les écailles
de la cupule longuement soudées à la base en verticilles peu
paralléles, par la fragilité de cette cupule, méme par ses
feuilles, rappelle beaucoup le P. calathiformis Hick. et A. Cam.
et le P. fissa Œrsted. Elle se distingue par ses fruits bien plus
eros, à cicatrice concave.
45. P. calathiformis Hickel et A. Camus ; Quercus calathi-
formis Skan, in Journ. Linn. Soc., XVI, p. 508 (1888) ;
Castanopsis calathiformis Rehder et Wilson ; Synædrus :
calathiformis Koidjzumi. |
LES CHENES D'INDO-CHINE 409
Nous ajouterons comme complément à la diagnose de
Skan :
Glans 12-14 mm. longa, 7 mm. diametro ; cicatrix convexa ;
cotyledones intricato-rimosæ.
Laos : très disséminé au sud de la ligne Sonla à Maison
(Dussaud, n° 152). — Inde, Yun-nan.
46. P. fissa Œrsted, in Kjoeb, Vidensk. Meddel. XVIII,
p. 76 (1886) ; Quercus fissa Champion ; Q. tunkinensis Drake
del Castillo, in Journ. de Bot. (1890), p. 153, PL IV, fig. 8-10 ;
Castanopsis fissa Rehder et Wilson; Castanea regia Hance ;
Synædrys fissa Koidzumi.
Tonkin: mont Bavi; altitude 900 mètres (Balansa
n° 2363); pr. Lao kay, Cha pa; altitude 1 400-1 500 mètres
(A. Chevalier, n° 29487). — Laos: Tranninh, région de
Xiengk houang (Dussaud, n° 6). — Hong-kong, Hainan,
Chine.
Espèce incomplètement connue.
P. dinhensis Hickel et A. Camus, nog. sp.
Arbor 10-15 m. alta, ramis junioribus dense puberulis. Folia
coriacea, oblongo-lanceolata, apice acuminata, basi cuneata,
10-14 cm. longa, 2-5 cm. lata, supra glabrescentia, virentia,
subtus dense cano-tomentosa, pilis brevibus, margine integra,
nervis lateralibus utrinque 12-14 elevatis. Petioli 5 mm. longi.
Flores 3-fasciculati. Cupulæ ternæ, bast connate, subsessiles,
squamis imbricatis. Glans mucronata, imperfecta.
Cochinchine : mont Dinh vers Baria, mont Mu xoai, Binh
dinh ; altitude, 300 mètres (Pierre, n° 4969). — Cambodge:
Monts Schrall (Pierre, n° 4975).
Les jeunes glands paraissent avoir des cloisons incomplètes.
ANN. DES SC, NAT. BOT., 10€ série. 1921027
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INTRODUCTION .
GENRE I
Genre Il. Pasania Miquel....
L’essor, plein de promesses, des recherches expérimentales
sur la variation et l’hérédité qui caractérise le début du
xx siècle est pour une bonne part la conséquence de l’anta-
gonisme de trois théories qui sont proposées pour expliquer
l’origine des espèces. Laissant pour une autre occasion l’ana-
lyse des travaux récents concernant l’hérédité acquise au
sens adopté par M. CosTANTIN (7), je me propose d'examiner
brièvement les résultats, les contradictions et les oppositions
qui apparaissent dans les mémoires des savants qui attribuent
aux variations brusques et spontanées des germes (mutatio-
nistes), d'une part, aux mélanges sexuels plus ou moins équi-
librés (néo-mendéliens), d’autre part, l'influence prépondé-
rante dans le mécanisme des changements spécifiques.
Mutations et fluctuations.
Plus que jamais, il est nécessaire de rappeler les principes
des diverses théories; car souvent ceux qui se réclament
d’une école ou d’une technique négligent précisément d’en
prendre une connaissance approfondie. La Bible des muta-
tionistes est et restera l'ouvrage remarquable Die Mutations
theorie (2 vol., 1900 et 1903), de Huco pE VRies (2). C’est
plutôt un traité général des variations héréditaires et de
Vhybridation qu'un exposé condensé d’une théorie dégagée
des hypothèses suggérées ou défendues par les prédécesseurs.
Un tiers de l’ouvrage consacré à l’exposé des variations
stables, durant dix années de culture, de l'espèce critique
ANN. DES SC. NAT. BOT., 10e série, 192 Peur
IT ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
Œnothera Lamarckiana Ser. est la véritable nouveauté, et
il faut réserver à cette partie le titre de Théorie de la mutation ~
de Hugo de Vries, si l’on veut éviter des confusions stériles ;
se est 2A exporé de faits avec coordination des événements,
mais sans proposition précise pouvant servir d'explication
aux phénomènes observés: il en résulte des règles qui sont
mieux dégagées encore dans le Species and Varieties (3) du
même savant. L’adhésion qu'il a donnée à une application
que J'en ai faite en 1907 dans ma thèse Mutation et trauma-
tismes (4) et dans un petit volume de la Bibliothèque de
Philosophie scientifique en 1912 (5) m’autorise à présenter
sous la forme condensée de Régles les données essentielles
de la théorie du savant hollandais :
1° Les nouvelles espèces élémentaires naissent tout à coup,
sans termes de passage ;
2° Elles sont, pour la plupart, complètement stables dès leur
naissance ;
3° Les types nouveaux sont souvent des espèces élémen-
taires nouvelles, non des variétés ;
40 Ils apparaissent en nombre déterminé d'individus simul-
tanément ; :
5° Les propriétés nouvelles n’ont aucune relation particu-
lière avec les fluctuations ;
6° Elles ne peuvent se grouper dans une suite définie ;
les mutations affectent tous les organes et les font varier dans
tous les sens.
DE VRIES se proposait, avant tout, de prouver la transmis-
sion hé:éditaire des changements brusques; il a réussi a
imposer son point de vue, surtout si l’on part des définitions
plus exactes des deux mcdes de variations constatées dans
Vespéce. Je soutiens qu'il est indispensable d’edopter des
définitions plus rigoureuses (6, p. 58), calquées en quelque
sorte sur celles qui sont employées dans to sciences mathé-
matiques et physiques. ,
La variation fluctuante est continue, c’est-à-dire qu’on
pourra toujours trouver entre deux étapes aussi rapprochées
que l’on voudra une étape intermédiaire. Elle est réversible
et suit dans son ensemble les règles des phénomènes physiques ;
MUTANTES ET HYBRIDES III
La mutation est discontinue et irréversible. Elle offre tous
les caractères des mcdifications et transformations (addition,
substitution, combinaison, dissociation) étudiées en Chimie.
Il y a des états physiques et des espèces chimiques ; ce qui
veut dire que la mutabilité est le processus probable et pré-
pondérant de la ségrégation dans l’espéce vivante des discon-
tinuités qui sont les espèces é'émentaires ; le milieu détermine
leur état.
DE VRIES a signalé de nombreux exemples de mutations.
Les variations à fleurs blanches des espèces à fleurs colorées,
à feuilles découpées ou laciniées d'espèces à feuilles simples
ou à feuilles simples d’espéces à feuilles découpées, les varia-
tions parallèles de nombreuses espèces animales, albinos,
à membres tordus, à tête de Bouledogue, à toison ou à plu-
mage frisé sont des exemples classiques que DE VRIES réunit
sous le nom de variétés (3). A leur sujet, il n’y a pas de dis-
cussion, à la condition toutefois qu’on puisse leur appliquer
avec rigueur le critérium mendélien sur lequel je reviendrai.
KorscHINSKY (7), irdépendamment de DE VRIES, en a réuni
un très grand nombre sous le titre Hétérogenése ; son mémoire
fournit une multitude de cas qui devraient être étudiés avec
les nouvelles méthcdes d'analyse. L'ouvrage fondamental de
Darwin (8) sur la Variation des animaux et des plantes en
renferme beaucoup d’autres. Il y a des chances pour qu’une
faible partie puisse être classée dans la catégorie des variétés
régressives; la plupart, comme la Digitale campanulée (9)
et Capsella Viguiert (10), sont complexes, le changement
stable étant lié à un état anormal (fascie), dont on ne peut le
débarrasser. Ces derniers sont évidemment les plus intéres-
sants, car ils fournissent des aperçus sur l’origine et l’enchai-
nement des caractères nouveaux. J’ai fait une étude détaillée
de cas analogües provoqués expérimentalement chez le
Mais (4).
Souvent, d’ailleurs, ’équilibre nouveau ne parvient pas a
s’établir ; il subsiste une série faible ou abondante de termes
de passage entre la forme initiale et la nouveauté définie.
Les Tréfles à quatre feuilles, les Cardéres tordues (2), le Mais
à grains doubles (//) rentrent dans cette catégorie ; un exa-
IV ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
men superficiel de ces derniers exemples pourrait faire croire
à une confusion entre les deux modes de variation distingués
plus haut ; il n’en est rien. En fait, la lignée qui présente ces
variations discontinues se distingue toujours très facilement
de la lignée ancienne ; dans celle-ci, les caractères nouveaux
-n’apparaissent jamais, ou seulement dans une proportion —
infime, 1 à 2 p. 1000; dans la lignée nouvelle, les caractères
nouveaux se présentent toujours si les conditions favorables
sont fournies pour leur manifestation. À la mutation propre-
ment dite se superpose la fluctuation qui accentue l’anomalie
ou la réduit, au point de la rendre invisible. Les preuves
fournies par DE VRIES relatives à la polycéphalie du Papaver
somniferum peuvent être invoquées dans tous les exemples
précédents. L’excés de nutrition ne détermine pas la méta-
morphose d’une lignée normale en lignée à étamines carpel-
laires ; mais certains modes de nutrition réduisent à zéro
les étamines métamorphosées ; d’autres provoquent la méta-
morphose de toutes les étamines de la ligrée polycéphale, et
à la série graduée et continue des valeurs nutritives correspond:
une série greduée et continue des étapes qu’on peut arbitrai-
rement fixer dans l'épanouissement du caractère nouveau.
Les mutations compliquées de fluctuations sont certaine-
ment les plus fréquemment observées ; l'étudiant qui suivrait
pendant dix années une vingtaine de lignées prises au hasard
en obtiendrait sans doute plusieurs. Mais il ne faut pas
tirer de ce fait un argument contre la distinction entre les
deux phénomènes. Pour en décider, je me reporte aux phé-
nomenes chimiques ; les réactions de substitution complete
sont rares, mais bien connues parce que exposées en détail
dans les traités élémentaires ; les équilibres entre différents
corps distincts susceptibles de se transformer les uns dans les
autres selon les conditions ambiantes sont de-beaucoup les
plus nombreux, et ils sont régis par une loi générale (Loi des
phases de GiBBs), qui s applique sans aucun doute à la
matière vivante. Peut-on exiger des phénomènes biologiques
une simplicité et une clarté plus démonstrative que celle dont
les chimistes se déclarent satisfaits pour définir leurs types
spécifiques ?
MUTANTES ET HYBRIDES V
DE Vries a d'abord désigné les lignées modifiées ne four-
_nissant ni variétés, ni espèces stables, sous le nom de demi-
races (2); il a adopté ensuite (3) le terme eversporting varie-
es (3), que J'ai traduit (4) par variétés instables. Les sélec-
tionneurs utilisent avec succès ces variétés instables pour leurs
pedigree, et ils arrivent, en fournissant des indications précises
sur leur traitement, à provoquer des succès constants (Choux-
Fleurs, Laitues, etc.); la plupart des exemples rapportés par
Darwin ($) appartiennent à cette catégorie de phénomènes.
|
Toutefois, il n’est pas démontré que les fluctuations, qui
accentuent souvent la nouveauté, ne peuvent intervenir
pour provoquer la mutation. I] y a des exemples où les pre-
mières semblent préparer la seconde, comme DE VRIES lui-
même (/) l’a signalé à propos de la duplicature du Chry-
santhemum segetum ; l'augmentation régulière et progressive,
à chaque génération nouvelle, du nombre des ligules rayon-
nantes est certainement du domaine de la fluctuation ;
l'apparition consécutive d’un fleuron ligulé, dans le disque,
résultat de la métamorphose d’un fleuron tubulé, est une
mutation. Il y a un lien entre les deux faits et, sans doute,
nous touchons de près ici à l’hérédité acquise.
La sixième règle donnée par DE VRIES ne vise pas l’assc-
ciation fréquente des deux principaux modes de variation,
mais bien l’indécision apparente des caractères modifiés par
la mutabilité qui affecte tous les organes et les fait varier
dans plusieurs directions. A vrai dire, cette règle distingue
clairement les variétés régressives des mutations spécifiques
si nombreuses présentées par les Œnothera et par le Capsella
Viguiert. Dans la grande majorité des exemples où la muta-
tion affecte une disposition organique, et non un caractère
superficiel ornemental, il apparaît des anomalies de constitu-
tion accessoires, feuilles doubles, ascidies, fascies, torsions,
. métamorphoses, proliférations ou virescences qui coexistent
assez longtemps, méme lorsque le type parait tout a fait fixé.
J'ai insisté (JO) sur la persistance de l’état de fascie à la
dixiéme génération chez le Capsella Viguiert, nouvelle espéce
définie par le nombre double des carpelles, la condensation
extréme des grappes florales, la longue période végétative,
VI ACTUALITES BIOLOGIQUES
absence ou l’apparition tardive des échancrures des limbes
foliacés, variations parallèles et simultanées que je n'ai pu
dissocier jusqu'à présent.
En résumé, mutation signifie changement brusque des
caractères visibles de l'espèce, suivi de la persistance indéfinie
du nouvel état, après isolement des lignées. Le changement
est discontinu et irréversible, quoique souvent atténué,
parfois caché par des phénomènes accessoires où la fluctua-
tion continue et réversible joue un rôle très apparent. Muta-
tion n’entraine pas d’ailleurs changement de spéciétté,
c’est-à dire changement profond et fondamental dans le
protoplasme de l’œuf fécondé. A mon avis, c’est plutôt un
changement d'équilibre des parties constituantes, une modi-
fication dans l'attraction réciproque et le groupement des
éléments fondamentaux. Beaucoup de mutations s’esquissent,
au cours de la vie individuelle, qui ne résistent pas à la réno-
vation protoplasmique sexuelle ; elles restent des anomalies ;
elles ne deviennent pas des mutations.
Variétés régressives et mendélisme.
Les variétés régressives sont les cas les plus simples de
mutations ; l’étude de leurs propriétés va faciliter l’exposi-
tion de ma pensée concernant la nature intime des variations
brusques.
Par définition sont appelées variétés régressives (3, p. 77,
et 6, p. 229) les lignées différant de l'espèce par une parti-
cularité qui suit dans les croisements les règles numériques
de MENDEL (72). On sait que DE Vriks (15) les mit en valeur
le premier (mars 1900) et en fournit plusieurs applications
remarquables au Maïs, au Pavot, à l’Œnothère. CORRENS,
puis TSCHERMAK, d’une manière indépendante, confirmèrent
et complétèrent les travaux de leurs devanciers ct, durant
une décade,imposérentla notion de latence, qui est, quoi qu'on
en ait dit, très logique.
La variété régressive, dit DE VRIES, est « un groupe d'imdi-
vidus dans l’espèce, caractérisé par l’atténuation extrême,
ou latence, d’une particularité secondaire », accident qui
MUTANTES ET HYBRIDES VII
naltére en rien les fonctions essentielles. La couleur blanche
28 fleurs, le nanisme, le mode de dépôt des réserves dans
l’albumen des graines n’entrainent pas de changements, ni
dans la germination, ni dans l’assimilation, ni dans la repro-
duction. De plus, ce sont des qualités d'ordre général, non
spécifiques, puisqu'on peut imaginer la possession, dans un
temps limité, de lignées à fleurs blanches, de lignées naines,
de ligaées à réserves hydrolysées chez la grande majorité
d2s espèces communes ou cultivées. De ces deux propriétés
résultent les lois numériques de MENDEL, qui régissent la
répartition en espèce type, ou en variété régressive, des des-
_ cendants croisés d2 ces deux groupes.
Appelant A le caractère de l’espéce, a le caractère de la
variété, MENDEL découvrit que le croisem2nt donne en pre-
miére génération tous individus A, en second? génération
75 p. 100 d2 d2scendants A et 25 p. 100 de descendants a.
En fait, le croisement est équilibré, comme le montre l'épreuve
ds descendances en troisième génération ; les descendants
de deuxième génération a sont purs ; parmi les 75 A, 25 sont
purs A et 50 se comportent comme les descendants de la
première génération. MENDEL est donc conduit à représenter
le mécanisme de la transmission par les symboles A pour
l'espèce pure, a pour la variété, (Aa) pour la première géné-
ration hybride, À + (2 Aa) + a pour la deuxième génération,
et il en déduit facilement la composition numérique d’une
population dérivée de cette association à une génération
quelconque. |
Ce faisant, 1l agit comme un mathématicien, qu'il fut,
puisque ses fonctions à l’Abbaye de Brtinn étaient l’ensei-
gnement de la météorologie et de la physique. Il raisonne
comme si les caractères A et a étaient totalement indépendants
d2 l’ensemble des propriétés des individus étudiés ; et, lors-
qu'il analyse un autre couple de caractères des mêmes indi-
vidus, B et b, il s'assure qu'ils sont eux aussi indépendants
des caractères A et a et de l’ensemble des autres caractères
en vérifiant que la descendance peut être représentée par le
produit algébrique :
[A + 2 (Aa) + a] [B + 2 (BB) + 0}.
VIII : | ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
La vérification réussit avec les sortes de Pisum étudiées
par MENDEL, et par là même les hypothèses faites sont jus-
tifiées. |
Avec des Phaseolus, la cerihontion Dear. MENDEL ne
veut pas abandonner les lois numériques qu'il a trouvées
dans le Pisum; il superpose aux hypothèses précédentes
deux, trois ou autant d'hypothèses qu'il sera nécessaire
pour que les chiffres donnés par l'expérience s'accordent
avec les lois numériques. C’est un artifice de calcul et non
une preuve, et d’ailleurs MENDEL ne s‘illusionne pas à ce
sujet ; il abandonne ses lois pour se cantonner dans l'étude
de la descendance des hybrides mixtes entre espèces d’Hiera*
cum, entre espèces de Geum, etc. Sa correspondance avec
NOE CREE rééditée par ON Ge (14), en fournit des preuves
décisives et, sans doute, la négligence ou l’oubli des lois de
MENDEL par ses contemporains n’a pas d'autre cause que
l'indifférence de l’auteur lui-même pour les résultats obtenus.
Néanmoins, les néo-mendeliens, avec BATESON (15) à
leur tête, n'ont pas hésité à généraliser l’œuvre de MENDEL
et à l'appliquer à quantité de faits plus ou moins clairs. Ils
ont réussi en un nombre limité d'exemples à vérifier les lois
numériques, et j'ai moi-même donné quelques exemples
probants. Mais ils n’ont pas démontré que tous les cas de
disjonction pouvaient se ramener à la proportion 3:1 ou à
des proportions dérivées 9:3: 3:1 ou 15: 1, etc.; les cas
douteux sont en majorité. Dans ces derniers, les formes
croisées ne peuvent être traitées comme des variétés régres-
sives ; il y a liaison des caractères.
Mort, a énoncé et vérifié, avec un véritable ne des
lois numériques de la disjonction de la descendance dans les
croisements de l’espèce avec ses variétés régressives. Il a
démontré que certaines particularités ou marques de lignées
se comportaient selon un schéma théorique et indépendam-
ment de tous les autres attributs de l’espéce. La découverte
est, en elle-même, assez belle pour qu’on la laisse intacte sans
la déformer par des applications discutables et surtout pour
D RAA
qu'on ne la discrédite pas par un ajustement qui, dans la.
plupart des cas, est un non-sens. D’après MENDEL (12), en
str. Rad
MUTANTES ET HYBRIDES IX
effet, «les plantes d'expérience doivent absolument satisfaire
à certaines conditions», dont les plus importantes sont d’être
auto-fertiles et isolées, de posséder des caractères différentiels
constants et bien accusés ; surtout les hybrides et leurs descen-
dants ne doivent éprouver aucune altération notable de fertilité
dans la suite des générations.
_ D'ailleurs, lorsqu'on passe en revue les caractères qui
suivent les lois de MENDEL dans toute leur rigueur, on cons-
tate qu'ils sont des attributs superficiels, produits le plus
souvent par l'arrêt de développement d'une particularité
secondaire. Je cite volontiers l’exemple du Maïs à grains
sucrés, caractère récessif par rapport au Maïs à grains amy-
lacés ; le faux embryon de la variété sucrée ne possède pas
l’enzyme ou plutôt le coagulant qui fait déposer les réserves
sucrées sous la forme d’amidon solide. Je dis ne possède pas,
alors que le terme ne possède pas en quantité suffisante serait
plus exact. Il n’y a aucune raison de penser que le dépôt des
réserves sucrées se passe autrement dans les solutions orga-
niques que dans les fioles du laboratoire ; tout se passe comme
si la réserve restait en état de sursaturation et qu’il manque
le cristal germe, on dit en botanique «le chondrioconte», qui
sert de noyau de condensation aux solutions sucrées pour
fournir l’amidon. L’embryon vrai ne souffre pas de cet état
particulier des réserves, puisqu'il est obligé de dissoudre
l’amidon, lorsque l’albumen est déposé sous cette forme.
Tout le monde est d'accord pour admettre que la variété à
grains sucrés du Maïs dérive par une mutation simple du
. Maïs à grains sucrés. C’est une variation brusque, et, entre la
phase variété et la phase espèce, on n’a trouvé jusqu’à présent
qu'une ou deux phases d’équilibre intermédiaires (Maïs à
grains dextrinés). Il y a donc des mutations simples qui
suivent les lois numériques de Mendel, mais il n’en résulte
pas du tout que les mutations en général soient astreintes à
ces lois. Et surtout, il ne peut être question de les appliquer
lorsque la fertilité de la mutante ou de l’espèce souche laisse
à désirer. La vérification est impossible et l'hypothèse dan-
gereuse, puisqu'elle se superpose à d’autres hypothèses
\ qu'elle ne peut consolider.
ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
A
Au contraire, on conserve à MENDEL tout son mérite et
on est en droit de pénétrer plus intimement dans la notion
de changement spécifique, si l’on prend soin de se débarrasser
de ces phénomènes accessoires. Avant de le faire, je signalerai
quelques points sur lesquels les preuves expérimentales
laissent beaucoup à désirer. Elles touchent de très près à la
cause des mutations. On constate que les variétés régressives
ne sont Jamais tout à fait épurées du caractère dominant ou
spécifique ; il reste des traces très légères de violet sur les
éperons des Violettes à fleurs blanches,et souvent une légère
pigmentation des pattes ou des oreilles sur les Cobayes et les
Souris blanches. Le caractère ne fait pas défaut ; il est latent
et ne trouve pas les circonstances favorables pour s’accentuer.
Les individus récessifs sont, d’autre part, considérés comme
offrant les plus grandes garanties de pureté,et la question se
pose de savoir si l’on ne se trouve pas en présence d’un phé-
noméne analogue à celui que RAuLIN (16) a mis en évidence
dans ses expériences classiques sur la nutrition et le dévelop-
pement des moisissures ; une trace de zinc ajoutée au bouillon
de culture accélère l’assimilation dans des proportions énor-
mes ; son absence totale réduit énormément la croissance.
L’expérience suggérée par ce rapprochement n'a pas,a ma
connaissance, été réalisée jusqu'à présent. Elle consisterait
à compléter l’organisme récessif par l’apport extérieur de
l'élément banal et indépendant qui déterminera le virage,
l’accélération de croissance, ou le dépôt des réserves sous
une forme déterminée. Les expériences contestées d’ailleurs
de Mac DoucaL (17), qui injecte des solutions dans les ovaires
et croit obtenir des mutations de Raimannia odorata, sont des
tentatives vouées à l’insuccés, semble-t-il. Je n’ai rien obtenu
jusqu’à présent au cours des dizaines d'essais tentés sur des
lignées bien définies. Les parasites et les tubes polliniques
paraissent être les moyens naturels qui facilitent la pénetra-
tion de corps nouveaux dans le protoplasma. Il n'est pas
impossible, d’après les travaux de Noëz BERNARD (18) et de
J. Macrou (19), que des parasites nécessaires à la tubéri-
sation déterminent par contact la filtration des éléments
excitateurs du dépôt d’amidon, et MoLiiarp (20) montre que
LA
Ne
V4
MUTANTES ET HYBRIDES XI
des solutions plasmolysantes conduisent à des résultats
analogues.
Les tubes polliniques offrent sur ces moyens accidentels
de meilleures chances de réussite. On connaît un bon nombre
d’espéces typiques qui ont été reconstituées par la combinai-
son heureuse de deux variétés. Bateson (21), croisant
ensemble deux variétés de Lathyrus à fleurs blanches, obtient
des lignées à fleurs rouges indéfiniment stables ; l’apport
qu'une quantité de matière impondérable, inutile à la pro-
pagation parfaite de la variété, détermine pour une durée
indéfinie le virage au rouge des cellules des pétales de toutes
les fleurs. De même, dans mes croisements de l’Orge, j'ai
constaté que la combinaison de Hordeum nudum à grains
nus, mais à rachis solide, avec une Orge à deux rangs à rachis
solide, donne toujours un haut pourcentage de rachis fragiles
et que certains hybrides à grains enveloppés conservent
pendant six générations cette fragilité, caractère nouveau ou
hybridmutation au sens propre du mot. Recombinant par le
croisement deux lignées d’Orges à épis fragiles j'obtiens,
en plus de descendants à épis fragiles, des Orges à grains nus
dont les rachis sont solides. Or les rachis ne sont fragiles
que si les plantes sont récoltées bien mûres; et, dans les étés
secs, les épis prématurément jaunis conservent un rachis
solide, et leurs grains germent. Il y a, dans le premier cas,
latence de la fragilité du rachis par constitution génétique ;
dans le second cas, latence de la fragilité du rachis par action
du milieu. Tower (22) a observé des faits analogues dans
ses croisements de Leptinotarsa decemlineata; une atmo-
sphere saturée d’humidité modifie dans des proportions
inaccoutumées les prévisions mendéliennes et la dominance.
J'ai étudié (23) un très bel exemple de l’action du milieu
sur la disjonction inattendue d’hybrides récessifs. I] s’agit
de l’Orge à deux rangs à épis dressés (Hordeum distichum.
erectum) à grains lisses ; les lignées stables et contrôlées avec
une méthode rigoureuse pendant une dizaine d’années
donnent lieu à des retours, qui paraitraient de véritables
mutations si l’on n’en connaissait pas l’origine ; la sécheresse
des terrains calcaires du centre de la France et certaines
XII ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
conditions climatériques favorables sont la cause immédiate
de cette variation; il n’est pas douteux, d’autre part, que le
caractère est latent dans la lignée, c’est-à-dire imprimé dans
les cellules reproductrices.
Toutefois, nous sortons ici du cadre des croisements entre
l'espèce et ses variétés régressives ; lOrge à épis dressés
dérive de la combinaison de H. Zeocriton et de H. distichum
nutans, qui sont deux bonnes espèces élémentaires. distinctes
par de nombreux caractères divergents et non accouplés.
Hérédité liée au sexe et mutations.
J'ai rappelé à dessein que MENDEL avait posé comme con-
ditions fondamentales pour l’application de ses lois l’auto-
fécondité absolue et continue et la parfaite fertilité des des-.
cendants. Sous l'impulsion de To. H. Morcan (24) et de son
assistant C.-B. BRIDGES, une importante série de recherches
ont été poursuivies aux Etats-Unis sur la descendance d’une
petite Mouche, Drosophila ampelophila, dont ces savants ont
obtenu des dizaines de mutations très curieuses en moins de
dix années. Il est vrai que cette Mouche s’éléve commodé-
ment en vase clos et qu'il est facile d’en obtenir plusieurs
générations par année. Mais je soupçonne fort que les condi-
tions d'élevage ne sont pas tout à fait étrangères aux résultats
obtenus, surtout en ce qui concerne les malformations et les
mortalités, parfois excessives. Les données expérimentales
en cultures aseptiques de DELGOURT et GUYÉNOT (23) four-
nissent des preuves évidentes de mon assertion.
Quoi qu’il en soit, Morcan et Brinces se réclament de
l’autorité de MENDEL (26, 47) et affirment que leurs résultats
sont une application remarquable des lois numériques de la
ségrégation dans la descendance. Mais ils ajoutent aussitôt
que ces lois ne s'appliquent qu'avec des tempéraments, en
ce sens que bon nombre des caractères étudiés sont liés au
sexe et qu'ils sont si intimement fixés dans la matière héré-
ditaire qu’on peut être assuré que les causes déterminantes
des caractères en question, ou gênes, sont matériellement
situées en des points définis de chromosomes particuliers.
“
MUTANTES ET HYBRIDES à XIII
Enfin la plupart des caractères distingués sont liés les uns
aux autres. |
Avant de faire un exposé, nécessairement bref, de leurs
preuves, je constate : 1° que Drosophila ampelophila est un
matériel médiocre pour perfectionner les lois numériques
de Mendel. En moins de dix années, cette espèce aurait
fourni des milliers de mutantes avec changement brusque
de centaines de particularités. Dans le tableau publié par
T. H. Moraan, en 1916, on constate que les mots manquent
pour les désigner et qu'il serait nécessaire d'ajuster à la
nomenclature usuelle une table analogue à celle que Broca
a proposée pour sérier la couleur des yeux (Éosine, Vermillon,
Pink, Peach, Cherry, Sepia, Purple, etc.). Les races humaines
avec leur diversité paraissent simples à côté des lignées cul-
tivées de cette petite Mouche.
20 La mortalité, effrayante, serait due à des facteurs
mendéliens. Jusqu’a 1916, il fallait 8 lethals particuliers pour
justifier les résultats ; mais on a constaté des cancers héré-
ditaires (M.-B. Starx, 29) et d’autres phénomènes analogues
qui complètent les accidents d'élevage. Il est curieux qu’on
ait pu affecter un coefficient d'activité à toutes ces causes
d'erreurs ; le degré de certitude est d’ailleurs précisé avec des
décimales ajoutées aux pourcentages.
30 Certains caractères anormaux, tels que des membres
complémentaires avec des articles en ncmbre variable,
dépendent manifestement de la température. D’après
M. A. HocEe (28), le caractère nouveau serait lié au sexe,
tantôt dominant, tantôt récessif et serait du type de ceux
qui définissent les variétés instables, très rare dans les lignées
sauvages (moins de 1 p. 100), atteignant jusqu'à 13,9 p. 100
des individus sélectionnés. Le facteur déterminant serait
étroitement lié à la couleur vermillon de l'œil.
Comme plus de trente mémoires renfermant des dizaines de
pages de données numériques ont été publiés sur ce sujet,
faire d’autres extraits provoquerait la rédaction d’un volume
copieux. Je n’ai pas eu l’occasion, d’ailleurs, d’en lire un
résumé d'ensemble suffisamment clair pour le comparer,
ligne par ligne, au si remarquable mémoire de MENDEL.
XLV ACTUALITES BIOLOGIQUES
A mon avis, Morcan étudie des phénomènes compliqués,
qui n'ont qu'accidentellement et exceptionnellement des.
points de contact avec l’hérédité alternante ou mendélienne.
Les lignées en culture sont variables, mal fixées ; les caractères ©
mis en opposition sont peu précis et variables, au moins en
partie, avec le milieu; la fertilité des parents et de leurs
combinaisons laisse tellement a désirer qu’on est en droit de
soupçonner qu il y a eu hybridation préalable entre espèces
divergentes [Voir la notion des spéciéités de Nauprn (30)].
Mais il subsiste de cet énorme effort des faits remarquables
dont le plus saillant est l’inégale valeur des éléments mâles
et des éléments femelles au point de vue de la transmission
des caractères. La découverte de l’hérédité liée au sexe n’est
pas due à MorGan [Voir M. CAULLERY (31)|, mais ses travaux
donnent un relief considérable à un mode d’hérédité, que je
qualifie d’exceptionnel, en ce sens que le père et la mère,
quoique identiques ou classés dans la même espèce, se com-
portent en quelque sorte comme s'ils appartenaient à des
espèces différentes. Au lieu de lignées pures, ou d'épuration
des ascendants, il y aurait, à chaque combinaison sexuelle,
superposition d’hybrides.
Les théories développées par T. H. Morcan-et par BRIDGES
mettent clairement ce fait en évidence (17). La femelle de
Drosophila ampelophila possède quatre paires de chromo-
somes, dont une spéciale (liée au sexe XX) et distincte de la
paire équivalente du mâle. Chez ce dernier, les chromosomes
liés au sexe sont de deux types ; l’un d’eux est droit, identique
aux X de la femelle; l’autre est arqué Y. De nombreuses
mensurations montrent que X étant évalué à 100 comme
longueur, Y donne pour la longue branche 71, pour la courte
branche 41, au total 112. Drosophila ampelophila est donc un
Insecte dont le mâle a deux sortes de spermatozoïdes, X et
Y : la fécondation d'œufs par le sperme X donne les femelles ;
la fécondation d'œufs par le sperme Y donne les mâles. Jusqu’a
présent, le schéma général suit assez exactement celui des
autres exemples déjà cités par CAULLERY (31, chap. XIV).
Mais il y a une nouveauté.
Drosophila est en crise de mutation; de 1913 à 1916,
w
rs 7
a RE
Been 3
MUTANTES ET HYBRIDES XV
Moraan et ses collaborateurs ont découvert environ une
cinquantaine de mutations liées au sexe. Grâce à cette cir-
constance, ils ont pu déterminer la position, dans le chromo-
some X ou Y, de l’élément figuratif de chacune des mutations
envisagées. Les auteurs supposent, en effet, que les chromo-
somes X ou Y, ou l’un et l’autre, peuvent s’enrouler (crossing-
over) au cours de la reconstitution nucléaire qui suit la fécon-
dation, et cet enroulement, lorsqu'il se produit au point précis
ou se trouve le géne, ou élément représentatif du caractére
étudié, modifie le pourcentage des descendants offrant la
corrélation des caractéres liés au sexe. Pour certains carac-
téres de la couleur des yeux, par exemple pour les couleurs
white, éosine, cherry, les pourcentages de déviations sont
équivalents ; il en résulte que ces différentes particularités,
combinées entre elles par le croisement, se comportent comme
des caractères mendéliens vrais, qu’elles sont allélomorphes
entre elles. Si la théorie est exacte, leurs gènes doivent se
trouver au même point matériel du chromosome X. Mais le
plus souvent les déviations sont divergentes, et, comme le
crossing-over s est produit en un point déterminé, les auteurs
admettent que les divergences évaluées en pour cent défi-
nissent la position sur le chromosome X des gènes qui cor-
respondent à chacun des caractères dont la transmission
mendélienne est imprévue.
Grâce a cette analyse, dont il faut contrôler les données
par de multiples croisements, MoRGAN réussit à situer les
divers gènes tout le long d’un trait qui est l’image fortement
erossie de leur distribution sur le chromosome X. Dans la
distribution donnée par BRibGES (27), la couleur du corps
yellow se trouve à 0,0 de l’origine, tan à 27,5, sable à 43 divi-
sions ; les couleurs des yeux white, éosine, cherry à 1,1 de
l'origine, vermillon à 33,0, et ainsi de suite. Des expériences
complémentaires ont, d’autre part, permis de situer sur les
chromosomes non liés au sexe les positions respectives des
gènes correspondant à divers caractères qui se comportent
d’une manière identique, que l’on ait affaire comme porteur
au père ou à la mère ; la couleur des yeux sepia est à 0,0 du
chromosome; pink et peach occupent la position 25;
i i " = ee à = ; 2 4 SR Lab ae : Sy SDA PE ATS : 7 ewes ae DS sean 1s Pe aah 35 38 Lege
5 ee k Bo cee SE pe
Fe om
sae
i
Mes -
te
XVI | ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
purple est à 40,6 de l’origine d’un autre chromosome.
Plus les données numériques sont nombreuses, plus est
orande la précision avec laquelle la position respective des
différents gènes est définie. Ces nombres dépassent la plupart
de ceux qu'on a coutume de donner dans les expériences de
croisement ; en 1916 on avait noté 81 299 individus à corps
jaune et à yeux blanes ; 110 701 individus à ailes miniature.
Sans doute, 1l subsistera des indications intéressantes de
ce formidable travail qui correspond assez bien aux données —
astronomiques de repérage des étoiles. Mais nous sommes
dans une étude qui diffère, à tous points de vue, de la théorie
mendélienne.
Le schéma géographique imaginé par MorGAN s applique
exclusivement au matériel étudié dans son laboratoire, à
savoir quelques lignées aberrantes du Drosophila ampelophila.
Ine peut servir de guide pour l’analyse de la constitution héré-
ditaire d’autres lignées de Drosophila, précisément parce qu'il
repose sur des liaisons spéciales constatées dans certaines
lignées. Il n’a de commun avec le procédé mendélien que les
dénombrements et les symboles ; ici, les symboles n’expliquent
rien ; ils sont des commodités d'écriture comme les numéros
d'ordre des catalogues d'importantes maisons de commerce.
Dans la théorie mendélienne, les symboles correspondent à
une infinité de cas répartis sur une infinité de lignées. Il y
a donc des lois numériques mendéliennes et il existe une carte
de la distribution des gènes du Drosophila étudié par MorGAN.
De plus, le lecteur est effrayé par la complexité croissante
du phénomène au fur et à mesure que les épreuves se pro-
longent. Sans doute, il accepte qu’on poursuive l’expérience
pour atteindre à une précision plus grande, mais il constate
avec effroi que chaque publication nouvelle introduit de nou-
veaux gènes; c'est un procédé commode, pour éviter les
contradictions, de glisser des inconnues nouvelles dans les
équations insolubles ou aboutissant à des conclusions diffé-
rentes des épreuves antérieures ; mais il est difficile d'accorder
une attention sérieuse à pareille méthode de travail. Les
auteurs répondront que l'être vivant est complexe et qu'ils
ne concoivent pas d'exemples dont le schéma géographique
A
MUTANTES ET HYBRIDES XVIT
des gènes soit simple. Ils ont probablement raison, mais je
leur répondrai que la traduction, avec des symboles de con-
vention, de séries d'expériences, n’est pas une œuvre scienti-
fique au sens propre du mot et que les titres mêmes des jour-
naux scientifiques encombrés par cette profusion de sym-
boles (Journal of experimental Zoology, — Genetics) donnent
au lecteur l'espoir qu'il y trouvera davantage.
Néanmoins, je constate en faveur de ma thèse que, parmi
la centaine de mutations découvertes chez Drosophila,
quelques-unes, moins d’une dizaine, sont des allélomorphes
entre elles et avec le caractère accouplé du type sauvage.
J'ai déjà cité la couleur des yeux white, éosine et cherry.
En conséquence, parmi les multiples possibilités d'équilibre
d’une espèce systématique Drosophila ampelophila, ily a de très
rares variétés régressives au sens adopté dans ce mémoire
et une centaine de formes à caractères liés qui sont des
espèces élémentaires. Que donneraient, après des études
génétiques analogues, les Eperviéres (Hieracium), les Rubus
et les Rosa? |
Mutations des OEnothères.
Les mutations de VGinothera Lamarckiana étudiées par
DE VRIES (2, 32) sont rarement des variétés régressives
(Œ. brevistylis, Zt. gigas nanella) et très souvent de nouvelles
espèces élémentaires. Bien qu’elles soient étudiées depuis 1894
par de nombreux savants distingués, tant en Europe qu'aux
États-Unis [Cu. BaAILEY, BARTLETT, BOULENGER, E. J. Hitt,
HERIBERT-NiLsson, HONING, SHULL, SMALL, THOMPSON,
Vai et surtout inlassablement par DE VrirEs (Voir Biblio-
graphie jusqu'en 1913, au n° 32)], on est loin d’entrevoir
clairement une ou plusieurs causes définies à l’état de muta-
bilité de cette espèce (1).
(1) Je laisse de côté la suggestion donnée par ZEYLISTRA (36), concernant
la possibilité d’une mutation nanella a la suite de linfection des graines ou
des plantes par un Micrococcus. On obtient des naines saines en améliorant
la culture et en augmentant la dose de phosphate de chaux. Il est fort curieux
que la mutation @. biennis nanella, naine dérivée du croisement biennis
cruciata X biennis (Stomps, 37), ait donné lieu aux mêmes observations.
ANN. DES SC. NAT. BOT., 10e série. 192400
XVIII ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
Actuellement, les avis sont partagés. Les uns, avec
DE VRiEs, prétendent que les mutations sont des variations
discontinues qui naissent dans les cultures a la fois dans les
lignées pures et dans les hybrides ou figure un ascendant en
mutation, d’où le polymorphisme complexe observé; d’autres,
avec Bateson, RENNER et surtout HÉRIBERT-NILSON, sou-
tiennent que ce sont des cas particuliers de combinaisons
mendéliennes, très complexes en raison du nombre des fac-
teurs disloqués ; pour Lorsy, elles constituent simplement
des lignées ‘hybrides au sens de Naupin et se rapprocheraient
sensiblement de la variation désordonnée décrite par cet
auteur. Malheureusement, la preuve essentielle manque.
Dans aucun des groupes on n’a réussi à isoler de dominant
homozygote, c’est-à-dire de type défini absolument stable ;
on manque de l’espèce dépourvue d’hybridations récentes
ou de mutations, indispensable pour apporter un éclaircis-
. sement.
Tl subsiste en effet des doutes, qu’on n’a pu lever malgré
des recherches multiples sur l’origine sauvage ou horticole
de l'Œ. Lamarckiana. La plante étudiée par DE VRIES (33)
est identique jusqu'aux plus infimes détails aux échantillons
secs des herbiers de MicHaux, de Lamarck, de POURRET.
Depuis plus d’un siècle, l'espèce elle-même ne s’est donc
pas modifiée, et, comme elle est répandue en Europe depuis
le milieu du siècle dernier par les marchands grainiers,
l'intervention du climat ne paraît pas être prépondérante.
Actuellement l’espèce est commune à l’état sauvage en Angle-
terre, et il est probable que les graines du commerce pro-
viennent de ces lignées introduites depuis longtemps par
MicHAUx ; DE VRIES l’a trouvée spontanée en Hollande sur
les confins de la forêt d’Hilversum; depuis 1909, elle se
multiplie à Bellevue (Seine-et-Oise), dans les pelouses, sans
soins particuliers, et je viens d’en recevoir des échantillons
récoltés dans la dune de Paris-Plage (Pas-de-Calais), par
M. THUILLIER, en octobre 1921.
La station sauvage américaine reste introuvable.
Davis (34) a obtenu une plante très voisine sinon identique
à Lamarckiana à la suite de croisements entre espèces améri-
MUTANTES ET HYBRIDES XIX
caines sauvages Ch. grandiflora Ait. et Œ. biennis L. I arrive
précisément que certains de ces hybrides présentent la muta-
bilité du Lamarckiana, et on pourrait supposer que Vhybri-
dation en est la cause essentielle. DE VRies (33) répond que
bon nombre d’espéces sauvages bien définies du genre
Œnothera présentent, elles aussi, la mutabilité et que cette
tendance est transmise dans les croisements interspécifiques.
Davis n’a fourni aucune preuve que les espèces souches de
ses expériences fussent dépourvues de cette qualité hérédi-
taire ; tout indique le contraire.
C’ et en effet une découverte essentielle des derniéres
années que plusieurs des espèces d'Œnothères les mieux
définies présentent la mutabilité avec les caractères de
Lamarckiana. DE VRIES (35) en a donné des preuves pour la
vulgaire Œ. biennis, si commune en Europe. En 1900, Ernst
DE VriEs découvrit dans les dunes de Sandport, Hollande,
un seul exemplaire d’'Œ. biennis avec pétales linéaires nommée
depuis Œ. cruciata ; elle est stable et encore actuellement
suivie ; en 1903, parmi 600 plantules cultivées, H. DE VRIES
y découvrit une Gi. biennis nanella. Plus tard, Stomps (37)
obtint la même brennis nanella du croisement cruciata x
biennis et en plus une forme Œ. biennis semigigas. Enfin, d’un
seul individu biennis, prélevé dans un lot fort homogène des
dunes de Beverwyk, Hollande, i] obtint 900 individus nor-
maux et 1 biennis nanella, 1 biennis semigigas et 4 individus
biennis sulfurea à fleurs jaune pâle. Enfin GATES nomme une
forme Gh. biennis lata par analogie avec la forme lata de
Lamarckiana.
Les mêmes résultats ont été obtenus avec l'Œ. suaveolens
Desf., si commune à Samois (forêt de Fontainebleau). En 1912,
des graines ont été prélevées par DE VRIES lui-même, que j’ac-
compagnai à la station sur laquelle j'avais fait de nombreuses
observations dix années auparavant. En 1916, pe Vries (39)
avait obtenu six mutantes, après quatre générations de
plantes isolées et dans les proportions habituelles de
4 à 3 p. 100, à savoir Œ. suaveolens apetala, demi-race donnant
des pourcentages variables de plantes à fleurs dépourvues de
pétales ; Œ. s. lata, variation parallèle à Lamarckiana lata ;
XX ACTUALITÉS BIOLOGIQUES —
Œ,. s. sulfurea, variation parallèle à Lamarckiana lata; Œ.s.
sulfurea, variation parallèle à Œ. biennis sulfurea et Œ. s.
lutescens, variation parallèle à une mutation présentée par
l'Œ. grandiflora Ait., plante sauvage de Alabama.
Les plantes américaines produisent, en effet, des mutations
identiques pour partie, différentes le plus souvent des muta-
tions obtenues dans la descendance des espèces acclimatées
en Europe depuis plusieurs siècles. Ainsi, d’une Œ, biennis
Chicago, récoltée par DE VriEs, en 1904, sur les bords du
Missouri, près de Courtney, on obtint deux mutantes à carac-
téres nouveaux Œ. b. salicastrum à feuilles étroites et attei-
onant Jusqu'à 3 mêtres de haut, très élancée mais peu rami-
fiée, et Gf. salicifolia, très ramifiée au contraire dès la base,
ne dépassant guère 1 métre et portant des feuilles presque
linéaires, de petites fleurs dressées et de longs fruits minces.
Davis (38), qui soutient que la mutabilité de l'Œ. Lamarc-
kiana est le résultat d’hybridations méconnues, avoue cepen-
dant que, parmi les Œnothères américains, il n’y a sans doute
pas d’espéce linnéenne mieux définie que Œ. biennis, et cet
avis pourrait être confirmé pour 1G. biennis d'Europe, qui
n’a Jamais été considérée par quiconque comme une espèce
douteuse ou critique. Ses études sur la mutabilité de l'Œ. bien-
nis, où il constate lui aussi des mutations parallèles à celles
de l'Œ. Lamarckiana, sont convaincantes ; il a des présomp-
tions, mais non des preuves.
On pourrait présenter de même les mutations parallèles
ou nouvelles reconnues aux Etats-Unis par R. Gates (40)
sur Œ. muricata, par BARTLETT (41), sur Œ. grandiflora et
Œ. stenomeres. Copp et BARTLETT (42), étudiant une autre
espèce sauvage américaine Œ. pratincola, attirent lattention
sur un fait singulier: des lignées en apparence identiques,
récoltées à l’état sauvage à Lexington en 1912, donnent
naissance à des mutations très apparentes dès le jeune âge:
les unes sont nummularia, dont les plantules ne portent que
des feuilles orbiculaires plates, et les autres sont formosa,
dont les plantules ont les feuilles roulées. La manière de se
comporter des diverses lignées, tant au point de vue des
mutantes elles-mêmes qu’au point de vue des formes qui
MUTANTES ET HYBRIDES XXI
dérivent de leur croisement, dépend essentiellement du point
de départ. Autrement dit des plantes identiques à tous les
points de vue se comportent très différemment en ce qui
concerne leur constitution génétique. J’ai donné (39) un
exemple analogue très frappant étudié sur la descendance
du Geum intermedium, hybride stable réalisé artificiellement
à partir d’espéce bien définies et très homogènes G. urbanum L.
et G. rivale L. La grande homogénéité des caractères
végétatifs n’est pas l’indice d’une constitution sexuelle et héré-
ditaire homogène, comme j’ai pu m’en rendre compte depuis
chez de nombreuses formes sauvages ou cultivées (Primula,
Centaurea, Salvia, Triticum, Linum, etc.).
BARTLETT explique les résultats de ses épreuves en faisant
un timide appel aux théories de MorGax. Dans la ségrégation
des caractères qui se produit au moment de la différenciation
des éléments sexuels, les gamétes d’Œ. pratincola ne sont pas
équivalents ; certaines mutations, qui se transmettent uni-
quement par les éléments femelles, sont dues à des facteurs
absents dans les éléments mâles. Il y aurait donc hétéroga-
mélisme partiel. Dans la reconstitution des œufs à partir
des gamétes non identiques, il resterait des résidus non équi-
librés donnant naissance à des caractères ne suivant pas les
règles de la ségrégation mendélienne. Nous allons en retrouver
d’autres cas.
Mutations en masse et stérilité.
BARTLETT (43) a dénommé massmutation les cas où le
changement brusque affecte simultanément un haut pour-
centage d’une lignée supposée pure. Dans la majorité des
cas, même dans le Drosophila étudié par MorGan, la mutation
est toujours un phénomène rare, la proportion des individus
aberrants dépassant peu 1 p. 100. Or, dans quelques lignées
d’'Œnothères américains suivies par BARTLETT, les pourcen-
tages sont très élevés et se rapprochent des proportions
numériques prévues selon la ségrégation mendélienne. Ainsi
CE. pratincola a donné quatre masses mutantes : formosa,
albicans, revoluta, setacea. DE VRIES nota le même phénomène
XXII ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
dans la descendance de certaines Œ. grandiflora Aït. (44),
récoltées en 1912, en Alabama, qui donnèrent quelques rares
mutantes lorea et gigas (2 à 4 p. 100) et une masse d’ochracea
(15, 20 et 44 p. 100). Cette dernière mutation serait due,
d’après DE VRIES, à une disjonction d’hybride selon le schéma
mendélien, avec les conceptions de caractère lié au sexe et de
l’activité de facteurs lethals.
Imaginons Œ. grandiflora pur, débarrassé de ses mutations
secondaires et, d’autre part, une mutation ochracea limitée
à l’un des éléments sexuels; le produit de la fécondation,
présumée monohybride, se résolvera à la seconde génération
en trois groupes : l’un sera la mutation ochracea apparaissant
dans la proportion voisine de 25 p. 100 ; la seconde sera une
mutante hybride analogue à celle de la génération précédente
et précisément du type de l'Œ. grandiflora rencontrée a l’état
sauvage ; le troisième devrait être un grandiflora épuré et
sans mutations ochracea. Or, jamais on ne rencontre ce der-
nier type; sa formation est, selon la terminologie adoptée
par MorGAN, annihilée par un facteur lethal agissant avant
ou après les fusions nucléaires. Beaucoup d’exemples d’héré-
dité liée au sexe s'expliquent sans difficultés avec cette der-
niere hypothèse, qu’on doit admettre provisoirement.
Le même mécanisme expliquerait, d’après DE VRIES (4),
la fréquence des demi-races ou variétés eversporting qui sont
les mutations les plus communes, comme je l’ai dit plus haut.
Les lignées aberrantes de Mais stérile (DE Vriks), la fréquence
des plantules albines et incapables de croître de Linaria
vulgaris (25 p. 100), Papaver Rheeas (15 à 30 p. 100), Clarkia
pulchella (9 à 13 p. 100), en sont d’autres cas où le lethal agit
au cours de la vie végétative. J’ai observé des aberrations du
même ordre dans les lignées de Maïs mutantes après trauma-
tisme (4, p. 166), et, à différentes reprises, j'ai isolé des lignées
dOrges (Hordeum distichum) qui fournissaient d'importants
pourcentages de plantules albinos ou panachées, et cela pen-
dant trois ou quatre générations successives. Les plantes
auto-stériles (Tréfles, Salvia, Linaria vulgaris peloria),
rentrent sans doute dans la même catégorie de faits. D’après
cette hypothèse, les variétés instables pourraient être rat-
bo tea)
“e
MUTANTES ET HYBRIDES XXIII
tachées à des schéma mendéliens plus ou moins précis; les
_ proportions numériques prévues seraient troublées ou rendues
méconnaissables par la fréquence des mortalités, fréquence sans
doute très sensible à l’action du milieu, puisque, en général,
celui-ci modifie les proportions des anomalies partiellement
héréditaires et leur intensité.
Depuis que l’attention de DE VRIES a été attirée sur ce côté
particulier de la mutation, il semble qu'il penche de plus en
plus vers l'adhésion aux principes de l’École de Moraay.
Dans un autre mémoire très documenté (46), qui d’ailleurs
ne fournit pas de preuve décisive, DE VRIES insiste sur le
très haut pourcentage des déchets à la germination de
quelques espèces d'ŒEnothères, précisément chez celles dont
il a étudié les mutations avec le plus de soin ; Gt. Lamarckiana
donne rarement plus de 50 p. 100 de bonnes graines et
Œ. suaveolens rarement plus de 30 p. 100, alors que, chez les
autres espèces d’'Œnothères, 85 à 95 p. 100 évoluent en plan-
tules. Chez ces dernières, d’ailleurs, la mutabilité restreinte
est encore très sensible. Il y aurait donc lieu de distinguer
désormais les mutations en masse et les mutations rares ;
mais les traits de ces deux catégories de phénomènes ne se
dégagent pas facilement les uns des autres.
Hybrides mixtes. — Hybrides jumeaux et demi-mutantes.
La recherche de lignées pures, qui a échoué avec les plantes
sauvages, et même avec les dérivées des masses mutantes
qui devraient être des récessifs purs, a conduit DE VRIES à
faire de nombreuses hypothèses qui se superposent sans
fournir l'explication correcte du phénomène. !] semble que
les phénomènes héréditaires des (Œnothères peuvent se
classer dans tous les modes d’hérédité connus (6).
En fait, DE Vries a obtenu des hybrides tout à fait stables,
sans disjonctions ultérieures, du type du Geum intermedium
ou de l’Ægilops speltæformis (6, hérédité mixte), en croisant
entre elles des espèces divergentes et distinguées par LINNE,
telles que Œ. muricata x Œ. biennis, ou Œ. Sellowit x Œ. bien-
nis, ou Œ. muricata x Gt. Lamarckiana. Pour ces deux der-
XXIV ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
niers exemples, les hybrides figurés et leurs réciproques sont
identiques. Il n’en est pas de même pour le premier.
A la vérité, à un examen superficiel, Œ. muricata x CE. bien-
nis se classe bien près de Œ. biennis x Œ. muricata, les formes
étant intermédiaires entre les deux parents ; elles offrent une
analogie de traits qui force a les réunir, mais un examen
attentif montre que la première ressemble plus a biennis
qu'à muricata par ses larges feuilles et ses fleurs grosses, que
la seconde par ses feuilles étroites et ses petites feuilles est
plus voisine de muricata ; autrement dit, ’hybride mixte est
double et ressemble davantage au pére; la combinaison
ordinaire et la réciproque donnent donc des familles stables,
mais distinctes.
Les twins-hybrids (48) ou les zwillingsbastarde (32) sont
des formes stables elles aussi, obtenues par des croisements
entre espèces définies et assez divergentes, mais qui four-
nissent deux types au lieu d’un seul. Le croisement Œ. Lamarc-
kiana x Œ. biennis donne un type unique dont la stabilité fut
vérifiée jusqu’à la quatrième génération ; mais le croisement
Œ. biennis x Œ. Lamarckiana donne deux types assez diffé-
rents du précédent et entre eux. De même Œ. Lamarckiana x
muricata existe, mais si peu fertile qu’on ne peut en suivre
la descendance ; par contre, Œ. muricata x Lamarckiana
est fertile et donne deux types intermédiaires entre les parents
et stables. L’une des formes est, dans la plupart des cas, à
feuilles larges, plates, d’un vert clair et à fleurs grandes ; par
analogie avec la mutante du Lamarckiana, DE VriEs l'appelle
f. leta; l’autre, à feuilles étroites, plus ou moins ondulées,
d’un vert grisâtre et plus ou moins velues, à fleurs petites, est
désignée f. velutina. Or, ces deux formes apparaissent simul-
tanément, en proportions équivalentes, dans un grand nombre
de croisements (Zt. biennis x Ch. brevistylis, Œ. biennis x
rubrinervis, ZZ. muricata X nanella, etc.). D’ou l'importance
accordée dans les exposés aux hybrides jumeaux.
La combinaison muricaia x Lamarckiana au cours de
cinq expériences a donné 50, 66, 61, 47, 38 f. læta, en moyenne
50 p. 100 et, en général, les formes peuvent être distinguées
par un ceil exercé à l’état de rosette. DE VRIES recommande
MUTANTES ET HYBRIDES XXV
cependant de pousser la culture des hybrides jumeaux jusqu’à
l’état adulte, car il arrive que 2 à 3 p. 100 des plantules dé-
sionées comme /æta donnent des petites fleurs, que 2 ou
3 p. 100 de plantules velutina donnent de grandes fleurs (1).
Quoi qu'il en soit, les hybrides jumeaux sont des formations
fréquentes, reconnues dans presque toutes les combinaisons
hybrides entre espèces d'Œnothères. Leur étude a conduit
DE VRIES (49) à l'isolement d’une mutante simplex qui paraît
devoir jouer dans l’avenir un rôle important. Apparue en 1906,
dans la descendance de Lamarckiana pur, elle présente la
plus grande analogie avec la forme velutina, mais en diffère
par sa grande fécondité. Alors que toutes ou presque toutes
les graines de velutina avortent, que Lamarckiana ne donne
que 50 p. 100 de bonnes graines, simplex donne presque exclu-
sivement des graines de bonne qualité. Au point de vue des
caractères végétatifs et surtout des feuilles, les trois formes
sont aussi étroitement alliées et sériées dans le même ordre ;
velutina à feuilles étroites d’un vert rougeâtre et simplex à
feuilles larges d’un vert clair sont les extrêmes d’une série
dont Lamarckiana formerait le type moyen. De plus, les
croisements (i. simplex x CH. velutina et Œ. velutina x Œ. sim-
plex fournissent des lignées de plantes presque identiques a
Lamarckiana, sauf en ce qui concerne les ondulations des
feuilles et aussi la haute fécondité, car les hybrides, de même
que 4. simplex, donnent plus de 90 p. 100 de bonnes graines.
D'où la conception nouvelle de pE VRIES relative à l’origine
de l'Œ. Lamarckiana.
Imaginons un Lamarckiana dépourvu, par mutation, des
gametes (portant le facteur lethal) du type velutina; on
obtient ainsi une forme qui ne donne pas d’hybrides jumeaux
(1) Les formes jumelles sont presque toujours auto-stériles. Dans le croisement
muricata X Lamarckiana de 1901, tous les leta furent entièrement stériles ;
les velutina ont été très peu fertiles, maintenues difficilement durant quatre
générations avec autofécondation ; mais les plantes observées portaient toutes
les traits velutina. Cette faible fécondité a été observée dans mes croisements
de Blés très divergents (Triticum monococum X durum), et le type que j’ai
obtenu (6, p. 188) a repris sa fertilité première en conservant les caractères
accusés de durum. J’ai noté que la stérilité était en rapport avec la persistance
marquée de caractères juvéniles, de collenchyme dans les tiges adultes ; c’est
sans doute cette persistance de l’état juvénile qui est regardée comme un des
facteurs lethal dans les conceptions de pe VRiEs et de MoRGaAN.
XXVI ACTUALITES BIOLOGIQUES
et qui se reproduit identique à elle-même, c’est-à-dire un
groupe de plantes qui a toutes les propriétés et caractéristiques
de l'Œ. simplex. Désormais GZ. simplex sera donc en quelque
sorte le Lamarckiana épuré sur lequel on cherchera l’origine
et la cause des mutations peu nombreuses, car il en donne
exactement comme le Lamarckiana. En raison de sa haute
fertilité, les pourcentages obtenus dans les disjonetions seront
plus corrects, et par suite les lois numériques mendéliennes
pourront mieux se dégager, si toutefois elles s'appliquent.
Le comportement des hybrides jumeaux a conduit RENNER
(50) à une conception plus simple, qui toutefois, d’après
DE VRIES, ne paraît pas justifiée par les faits. Cet auteur a
étudié avec méthode la formation et les causes d’avortement
des embryons dans les graines des Gi. Lamarckiana; sur
66 embryons étudiés, 25 étaient bien formés, 21 étaient petits
et ronds, 20 étaient avortés. S'appuyant, d’autre part, sur les
qualités exceptionnelles des lignées stériles ou presque,
f. læta et f. velutina, il fait le raisonnement suivant : en sup-
posant ces deux dernières formes viables et isolées, le croise-
ment f. læta x f. velutina donnerait en première génération
Lamarckiana se comportant comme monohybride et en
seconde génération 25 p. 100 lxeta x læta, 50 leita x velu-
tina et 25 velutina x velutina ; les deux types purs ne donnent
que des graines vides, tandis que l’hybride mixte persistant
seul paraitrait un Œ. Lamarckiana stable.
Mais DE VRIES (46) s’est assuré que l’étude de RENNER
n’était pas probante ; les graines à embryons petits et ronds
sont d’autant plus abondantes que les conditions de crois-
sance des fruits sont plus favorables. Les nombreux prélé-
vements et essais de graines donnent bien une moyenne de
50 p. 100 de graines incapables de germer, tant chez Œ. Lamarc-
kiana que chez Œ. suaveolens ; de plus, dans les croisements
avec les deux espèces, la forte mortalité se comporte comme
un caractère récessif, tandis que le croisement Lamarckiana X
suaveolens élève le pourcentage des bonnes graines au taux
normal, c’est-à-dire à 80-95 p. 100. Parmi les mutantes,
certaines (lata, scintillans) se comportent comme Lamarckiana,
d’autres (gigas, rubrinervis), comme les types anciens d’Cino-
MUTANTES ET HYBRIDES XXVII
théres. Enfin l’objection la plus grave à la conception de
RENNER, c’est qu’il fait dériver Lamarckiana du croisement
de deux types purs, incapables d'exister comme tels.
La découverte d’une demi-mutante Œ. rubrinervis (51),
qui serait d'après DE VRIES le résultat de la fusion d’un
gaméte mutant avec un gaméte normal velutina d'Œ. Lamarc-
kiana, a provoqué une conception nouvelle, qui est décalquée
en quelque sorte sur la théorie de T.-H. MorGan. En fait,
Œ. rubrinervis autofécondé donne un quart de graines vides,
un quart d'individus deserens, très voisin de rubrinervis, mais
à bractées et à fleurs plus larges et tout à fait fertiles, enfin
50 p. 100 d'individus rubrinervis. L'hypothèse a été con-
trôlée par le croisement de la forme deserens avec les muta-
tions velutina. En dehors de la mutation en masse deserens,
Œ. rubrinervis ne donne guère d’autres mutantes.
D'où l’hypothèse donnée en janvier 1919, concernant la
nature de la mutabilité de l'Œnothera Lamarckiana (51, p. 2).
L'espèce en question produit à chaque génération deux
sortes de gametes déterminant une mutabilité secondaire
en velutina. Ces velutina sont liées & un facteur lethal qui les
tue à l’état de jeunes embryons. La mutation en masse
deserens de la mutante ordinaire rubrinervis se comporte
au point de vue de la perte du lethal velutina comme l'Œ. stm-
plex se comporte vis-à-vis d'Œ. Lamarckiana.
ConcLusions. — Les mutations vraies (variations brusques
avec pourcentages très faibles, 0,1 à 2 p. 100) de l'Œnothera
Lamarckiana se retrouvent chez la plupart des autres espèces
sauvages d'Œnothères, soit aux Etats-Unis dans leurs sta-
tions naturelles, soit en Europe, où elles ont été introduites
depuis deux à trois siècles et où elles sont multipliées et
naturalisées sans changement apparent considérable. Dans
ces conditions, et en raison du fait que les croisements de
lignées mutantes avec des lignées fixes donnent des lignées
mutantes, il y a des chances de croire que la mutabilité
proprement dite est antérieure à la différenciation des espèces
Œ. Lamarckiana, Œ. biennis, Œ.suaveolens, Œ. grandiflora, ete.
L'étude des croisements des mutantes avec les espèces
XXVIII ACTUALITES BIOLOGIQUES
origines, et aussi des espèces anciennement différenciées
entre elles ou avec leurs mutantes, fait reconnaître un nou-
veau mode de mutabilité ou mutation en masse qui s’interprète
commodément selon le schéma des disjonctions mendéliennes.
Mais, pour fournir une explication satisfaisante des nom-
breux cas offerts, les conventions de MENDEL ne suffisent pas ;
il faut adopter pour partie les conceptions et le langage con-
ventionnels de T.-H. Morcax relatifs, d’une part, à la liaison
des caractères entre eux et à la liaison de certains caractères
au sexe, d’autre part et pour ainsi dire par voie de consé-
quence, imaginer des facteurs lethals agissant de façons diffé-
rentes dans les divers cas particuliers envisagés.
Un gros effort a été fait pour épurer, en quelque sorte, les
formes encombrées de lethals pour en obtenir des types plus
uniformes. Ainsi la lignée Œ. Lamarckiana mut. simplex est un
Œ. Lamarckiana épuré, à caractères mieux définis et plus
accusés ; de même Œ. rubrinervis mut. deserens est un CE.
rubrinervis épuré. Les types épurés sont autofertiles et leurs
graines presque complètement fécondes ; les types non épurés
sont stériles pour partie, suivant des proportions qui suivent
les lois numériques de MENDEL dans leurs grands traits.
Mais il arrive que le milieu ambiant active, ou réduit
fortement les mortalités, si bien qu’à l’aide de cet artifice
tous les faits peuvent être commodément expliqués. En défi-
nitive, les lois numériques de MENDEL ne seraient plus qu'un
cadre commode fournissant des abréviations de langage
pratiques pour l'exposé des résultats; mais les individus
mêmes ne seraient jamais l'expression de la nature réelle des
entités spécifiques ; l'influence du milieu s’y ferait fréquem-
ment sentir. Par cette explication, la notion même de mutation
ou de variation brusque des qualités héréditaires perd une
grande partie son originalité et ne s'oppose plus, comme
je Vai fait au début de cet article, aux variations continues
et réversibles. J'aime mieux croire pour le moment que
Drosophila ampelophila et Œnothera Lamarckiana, lignées à
demi stériles, sont des exemples mal choisis pour l’étude
des lois de la mutabilité. |
Dans une prochaine revue, j’examinerai les recherches
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE XXIX
très importantes concernant la mutation et la sexualité,
relatives à la distinction, à l’individualité des chromosomes
et de leurs éléments ou gènes. Il est indispensable de les
A
connaître pour apprécier à leur juste valeur les multiples
travaux relatifs à l’origine brusque des espèces.
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\
IL
SEXUALITÉ EXPÉRIMENTALE
DES BASIDIOMYCÈTES
Les recherches sur le cycle évolutif et la sexualité chez les
Basidiomycètes ont été poursuivies par Mle Bensaude, au
Laboratoire de Botanique de l'École normale supérieure,
sous la direction attentive de notre regretté maître, le pro-
fesseur L. Matruchot. La pensée qui avait guidé l’éminent
professeur en conseillant à son élève le choix de ce sujet,
l'importance des résultats cbtenus malgré les difficultés que
présentait une étude souvent abordée déjà, en font une
œuvre qui prend rang parmi les travaux biologiques les plus
marquants de ces dernières années. M. Matruchot devait
en exposer à cette place les points essentiels : faits nouveaux
désormais acquis à la science, clartés jetées sur d’autres faits
connus, mais demeurés jusqu'alors énigmatiques ou contra-
dictoires. C’est le sentiment de profonde gratitude que
j'éprouve à son égard qui m’encourage à tenter de me faire
ici l'interprète de sa pensée (1).
La première partie du travail est consacrée à une étude
morphologique et cytologique des diverses sortes de mycé-:
lium présentées en culture pure par le Coprinus fimetarius L.
(qui constitue le principal matériel) et deux autres Agari-
cinées dont le mycélium adulte porte également les anses
d’anastomose si fréquentes chez les Basidiomycetes.
La germination de la spore donne naissance au mycélium
primaire, constitué par un thalle filamenteux irrégulier,
(1) La mort qui vient d’enlever si brutalement Matruchot à la science Pa
empêché de rédiger cet article, qu’il avait promis aux Annales. M. Plantefol,
son élève, a bien voulu se charger d’exposer les idées de son maitre qu’il con-
naissait très bien: (Note de la Direction.)
SEXUALITÉ EXPERIMENTALE DES BASIDIOMYCÈTES xXXXIII
où le noyau unique de la spore se divise un certain nombre de
fois. Des cloisons séparent bientôt ce thalle en articles : tantôt
ce sont des cloisons à épaississements basidophiles qui se
produisent à la suite de mitoses, tantôt de fausses cloisons
qui ne sont que des épaississements centripétes de la mem-
brane cellulaire, et qu’on rencontre surtout dans les régions
vieillies. Le thalle, d’abord continu, devient subcontinu,
apocytique, c’est-a-dire a articles plurinucléés. Aucune des
cloisons de ce mycélium ne présente d’anses d’anastomose.
On assiste à un bouturage du thalle par des propagules nom-
mées oïdies, formées sur des branches courtes du mycélium,
s’isolant en cellules uninucléées et susceptibles, pendant un
temps d’ailleurs court, de germer en poussant un tube mycé-
lien et de se fusionner avec les cellules voisines, au même
titre que toutes les cellules du thalle, où les anastomoses sont
fréquentes.
On voit bientôt paraître dans la culture, à la suite de ce
mycélium primaire, un mycélium secondaire très différent
d'aspect : le fait morphologique essentiel, c’est la présence
d’une anse anastomotique accompagnant chaque cloison.
La cytologie en est plus différentielle encore : chaque cellule
présente deux noyaux. Le mycélium primaire montrait
quelques cellules binucléées, mais d’une façon indifférente,
au milieu de cellules à un ou plusieurs noyaux. Ici, rigoureu-
sement, toutes les cellules sont binucléées.
Enfin l’étude de la dynamique cytologique de ce mycélium
secondaire apporte des faits nouveaux et fort suggestifs,
La division cellulaire normale s’y fait par la formation de
cloison avec anse anastomotique. C’est vers le milieu des
cellules terminales des hyphes, points de croissance des
filaments jeunes, que s observe le phénomène (fig. 1). Les
noyaux, encore au repos, s y trouvent généralement dans le
voisinage l’un de l’autre. La division cellulaire s’annonce par
la formation sur le flanc de la cellule d’un petit bourgeon
recourbé vers l'arrière, l’un des noyaux (que nous appel-
lerons a) s’y engage, tandis que l’autre (b) demeure au centre
du filament, au voisinage de a. Puis tous deux se divisent, a
ans le bourgeon, 6 dans la cellule. Les phases de la division
ANN. DES SC. NAT. BOT., 40e séric. ee le ithe
XXXIV ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
de chaque noyau vérifient les données classiques sur la
division mitotique ; la destinée des quatre noyaux fils
constituait, au contraire, une étude absolument neuve. Le
fuseau mitotique de b s’allonge suivant l’axe même de
Vhyphe; les deux noyaux fils b, et 6,, qui se reconstituent
en s éloignant l’un de l’autre, se trouvent dans l’hyphe, b, à
sa partie proximale, b, à sa partie distale. Le fuseau mitotique
de a que nous avons vu pénétrer dans le bourgeon s’étend
forcément un peu obliquement par rapport au fuseau de b;
l’un de ses noyaux fils (a) pénètre jusqu'à l’extrémité
du bec du bourgeon qui se recourbe en crochet vers la
partie proximale de l’hyphe, tandis que le second noyau
fils (a) rentre dans l’intérieur de Vhyphe, se déplaçant
vers sa partie distale. En même temps à peu près, apparaît
une cloison dans la région équatoriale de chaque fuseau, de
sorte qu'un moment la cellule en division se trouve partagée
en trois : une cellule distale contenant deux noyaux fils
(a, 6,) d’origine différente; une cellule proximale avec b,
pour noyau; une petite cellule constituée par le bourgeon
et contenant le noyau a,. Puis la croissance du bourgeon
en amène le bec recourbé à se fusionner avec la cellule proxi-
male où pénètre le noyau a,. Il ne reste donc plus que deux
cellules également binucléées ; l’anse qui persiste n’est que le
témoignage du chemin suivi par le noyau a,; la cloison qui
l'a séparée de la cellule distale, presqu’a la base du bourgeon
primitif, témoigne du point où s’est placé l'équateur du fuseau
dy, de même que la cloison principale pour le fuseau b, b..
Ainsi comprend-on parfaitement les caractères morpholo-
giques et cytologiques du mycélium secondaire : présence
d’anses d’anastomose aux cloisons et cellules binucléées.
Ainsi la division cellulaire est caractérisée par l'existence
d’une mitose conjuguée de deux noyaux intimement liés
entre eux. Il y a là analogie parfaite, avec les mitoses conju-
ouées des Urédinées d’abord, avec celles décrites par Maire
dans ses recherches cytologiques sur les Autobasidiomycètes
ensuite. Les deux noyaux d’une même cellule sont des noyaux
conjugués ; leur ensemble constitue un dicaryon, ce terme
impliquant division simultanée et parallèle de ses deux
SEXUALITÉ EXPÉRIMENTALE DES BASIDIOMYCÈTES XXXV
éléments. Mais une particularité nouvelle se trouve ajoutée
au fait général par suite de la formation et du rôle spécial
de l’anse anastomotique. D'ailleurs, la présence de celle-ci,
constante au début du mycélium secondaire, cesse sur le
tard d'en être une caractéristique ; les anses d’anastomose
ne se forment plus ; on en revient à la division conjuguée
définie précédemment par Maire. D’autre part, l’analogie
4
1 g 3
6
Fig. 1. — Figure schématique représentant les phases de la division conjuguée et mon-
trant le rôle que joue l’anse d’anastomose dans cette division (d’après Mile Bensaude).
entre le phénomène cytologique qui vient d’être étudié et la
division conjuguée dans l’hyphe ascogène de Pyronema
confluens décrite par Claussen est d’autant plus frappante
que le caractère morphologique fourni par l’anse anastomo-
tique peut être retrouvé la aussi par un esprit averti (fig. 2).
Il sera intéressant de comparer dans le cycle de ces deux
Champignons les moments où se produit ce singulier phé-
nomène (1).
(1) Lors de l’apparition du travail de MUe Bensaude, une partie des faits
que nous venons de résumer avaient fait l’objet d’une étude dont les résultats
furent identiques, notamment en ce qui concerne la mitose conjuguée et le
rôle des anses d’anastomose. Paru en 1915 seulement, dans les Zeitschrift für
Botanik (p. 369), le travail de Kniep était ignoré en 1917 de M!!¢ Bensaude et de
notre maitre, M. Matruchot, les ouvrages et périodiques allemands ne parve-
nant pas à cette date à la bibliothèque de l’École Normale. Il y a donc là plus.
qu’une simple confirmation de faits déjà observés, et l’intérêt est grand de:
XXXVI __ ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
Mais les résultats acquis dès maintenant sont mis en relief
par les hypothèses qu'ils suggèrent et qui nous conduisent
à une seconde partie du travail où l’auteur s’élève des données
purement cytologiques aux idées sur l’alternance des géné-
rations et sur la sexualité et institue dans ce domaine une
expérimentation fécorde.
C’est des travaux d’Hofmeister que datent les premières
notions sur l'alternance des générations chez les végétaux,
chacun comprenant dans son évolution deux tronçons suc-
cessifs tout à fait différents dans leur forme, leur structure et
leur développement : l’un, le gamétophyte, issu de la spore et
produisant des gamétes dont la fusion donne un œuf, l’autre,
le sporophyte issu de l’œuf et produisant des spores identiques
à celle où le cycle a son point de départ. Deux temps sont
particulièrement importants et limitent les deux tronçons :
la fécondation caractérisée par la fusion des gamètes, et la
formation des spores. Une part des efforts des botanistes,
dans ces cinquante dernières années, a été de rechercher
dans les divers groupes du règne végétal les variations de
ce schéma.
Pour les Basidiomycétes, les organes sexuels devaient
être non sur le chapeau (sporophyte, puisque producteur des
spores), mais à l’origine de celui-ci. Van Tieghem, en 1875,
croit trouver des organes mâles et femelles sur les thalles
nés de spores de Coprinus. Leur fécondation donnerait nais-
sance au chapeau sporifère. Revenant sur son interprétation,
Van Tieghem s'efforce ensuite de démontrer que les Basi-
diomycétes, comme d’ailleurs tous les Champignons supé-
rieurs, ne présentent aucune trace de sexualité. Ce mot
implique alors l’existence d'organes sexuels morphologiques
différenciés du reste du végétal, et généralement aussi
voir deux chercheurs parvenir, indépendamment l’un de l’autre, à propos
d'espèces et de genres différents, à une même découverte. Son caractère de
généralité en est d’autant moins discutable.
On aura l’occasion de voir, dans la suite de cette analyse, quelle part d’ori-
ginalité comportait par ailleurs le travail de Mlle Bensaude. Elle s’est trouvée
en avance sur Kniep dans la partie expérimentale de ses recherches. On verra
avec quelle clarté y sont élucidés les faits relatifs à la sexualité des Basidio-
mycètes. Ils constituent d’ailleurs la partie la plus suggestive de ces remar-
quables recherches.
SEXUALITÉ EXPÉRIMENTALE DES BASIDIOMYCÈTES XXXVII
s’opposant entre eux par des caractères sexuels plus ou moins
apparents. Mais les progrès de la cytologie fournissent des
méthodes nouvelles : la fécondation se caractérise surtout
par les phénomènes de fusion des gamétes, la formation des
spores par ceux de la réduction chromatique. Pour les divers
groupes de Basidiomycétes, ce sont d’abord les faits relatifs |
à la formation des spores au sein de la baside que la cytologie
met en lumière. Du côté de la fécondation, les faits semblent
a priori, très simples, et la fusion nucléaire qui se produit à
l'origine de la baside peut paraître longtemps satisfaire à sa
4)
À g 3
Fig. 2. — Figure schématique montrant les phases de la division conjuguée précédant
la fusion caryogamique dans. l’hyphe ascogène de Pyronema confluens. Elle met en
évidence la similitude des divers stades de cette division avec les stades 1, 3 et 4 de
la figure 1, et l’analogie que présentent dans leur rôle le bec de ’hyphe ascogène chez
Pyronema confluens, et l’anse anastomotique des hyphes végétatives secondaires chez
Coprinus fimetarius (figure schématique d’après Claussen).
définition : le tronçon sporophytique se limite aux deux
divisions qui succèdent à cette fusion et qui aboutissent à la
production de quatre basidiospores.
Cependant la notion de fécondation se complique : sa défi-
nition logique avait semblé : fusion des deux gamètes, proto-
plasme à protoplasme et noyau à noyau. Déduire qu’elle a
été réalisée de ce que l’on a constaté la fusion de deux noyaux,
c’est seulement négliger ce qui se passe du côté des proto-
plasmes, à peine différenciables cytologiquement. Mais on
sait que, dans le règne animal, chez les Copépodes, la fécon-
dation se produit sans fusion des noyaux des gamétes qui
se rapprochent seulement; pendant de longues séries de
divisions, dans l’embryon, les noyaux mâles et femelles
XXXVIII ACTUALITES BIOLOGIQUES
restent côte à côte, distincts. Fécondation n'implique donc
pointcaryogamie. Dans le règne végétal, les faits peuvent être
analogues : les deux noyaux qui se fusionnent au cours du
développement de la baside sont comparables a ceux des
cellules somatiques des embryons de Copépodes, où la fusion
nucléaire ne se réalise qu’aprés de nombreuses divisions
parallèles des noyaux rapprochés par la fécondation. I faut
donc, comme dans ce cas, rechercher avant la caryogamie
le moment où se produit la fécondation, c’est-à-dire où se
forme par plasmogamie la première cellule binucléée.
Dans le groupe des Urédinées, où les progrès des recherches
sur les Basidiomycétes sont le plus rapides, on distingue ainsi
une longue phase sporophytique, où les noyaux sont associés
en dicaryons. Chez le Puccinia graminis, au début de la for-
mation des écidies, il y a fécondation par fusion de deux
cellules végétatives, sans aucune différenciation sexuelle.
Les deux noyaux de la cellule-œuf demeurent côte à côte,
constituant un dicaryon. La séparation de leurs deux lignées
persiste Jusqu'au moment où les phénomènes de la méiose,
précédant la formation des spores, s’accompagnent d’une
fusion intime des deux noyaux.
Pour les Autobasidiomycétes, on connaissait bien, lors des
recherches de Mlle Bensaude, l'existence d’un tronçon bmu-
cléé analogue au tronçon sporophytique des Urédinées, et
celle d’un tronçon uninucléé ou plutôt apocytique, issu de la
germination de la spore. Le passage de celui-ci à celui-là
n'était pas suffisamment connu, malgré les recherches anté-
rieures. Les hyphes secondaires naissent dans l’enchevêtre-
ment du mycélium primaire ; voir directement où et comment
était à peu près impossible. Mais les caractères morpholo-
giques et cytologiques lui servant de guides, Mile Bensaude
put vérifier que l’apparition des dicaryons et celle des anses
sont toujours deux phénomènes concomitants. Restait
à voir si, comme Maire l’avait prétendu, les deux noyaux
du premier dicaryon provenaient bien, par division, d’un seul
noyau du tronçon primaire.
Des cultures faites à partir d’une seule spore amenèrent
Mlle Bensaude à constater la stérilité indéfinie d’un mycélium
SEXUALITÉ EXPERIMENTALE DES BASIDIOMYCETES XXXIX
primaire isolé : il garde ses caractères morphologiques et
-cytologiques et ne produit point de chapeaux sporiféres. Les
thalles sont généralement polyspermes, puisque nous avons
vu sanastomoser fréquemment les hyphes issues de spores
voisines. Étudiant attentivement les thalles monospermes,
Mie Bensaude distingue par des caractères morphologiques
différents deux sortes de mycéliums primaires (+ et @). L’un
surtout (8), produit des oïdies très abondantes. Enfin une
culture mixte des deux thalles montre dans la zone où ils se
rejoignent l'apparition de longues hyphes de mycélium
secondaire : elles naissent chacune de l’anastomose de deux
filaments appartenant nécessairement l’un au thalle «, l’autre
au thalle @; les dicaryons apparaissent à la suite d’une
plasmogamie entre une cellule du thalle £ et une cellnle du
thalle «; le cycle des Autobasidiomycètes est conforme à
celui des Urédinées ; la fécondation y apparaît comme la
fusion des protoplasmes de deux cellules végétatives, accom-
pagnée d’un simple rapprochement des noyaux. Il y a, par
rapport a la fécondation des Phanérogames, par exemple,
. retard de la caryogamie, quise produit seulement immédiate-
ment avant la méiose. Est-ce à dire, d’ailleurs, quele processus
de la fécondation et l’évolution cytologique y soient fonciére-
ment différents? Ne pourrait-on trouver l’équivalent de ce
retard de la caryogamie dans les nombreux faits qui, parlant
en faveur de l’individualité des chromosomes, tendent a
établir l’autonomie persistante des substances nucléaires
. paternelle et maternelle jusqu’à une fusion complète des
chromatines, réalisée au moment de la méiose seulement?
La fécondation se produit donc par fusion de cellules
végétatives sans aucune différenciation sexuelle. Tel est
encore le cas, lorsque ce ne sont point deux hyphes de thalle
‘différents qui s’anastomosent, mais bien une oïdie d’un thalle
qui vient à germer près d’une hyphe appartenant à un thalles
complémentaire et à s’anastomoser avec elle. Étant donné
le caractère végétatif des oïdies, il y a la encore pseudogamie,
pour employer la terminologie de Hartmann. Cette notion
_ particulière de la fécondation prend d’ailleurs toute sa valeur
lorsqu'on oppose les phénomènes cytologiques qui accom-
XL ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
pagnent l’anastomose de deux cellules de thalles complémen-
taires (c’est-à-dire la fécondation) à ceux qui se produisent
lors d’anastomoses entre deux filaments de thalles de même
signe. Dans ce cas, les noyaux réunis ne persistent pas tous;
s’agit-1l d’anastomoses entre deux filaments du mycélium
secondaire, l’article anastomotique ne comporte bientôt
plus quatre noyaux ; il semble que la matière nucléaire de deux -
d’entre eux soit en quelque sorte digérée et que le thalle
rétablisse sa forme normale, puisqu'il ne renferme plus qu’un _
dicaryon.
Il y a donc, chez le Coprinus fimetarius, des thalles primaires
de deux sortes, complémentaires. C’est la première fois que
l'hétérothallie est signalée chez les Basidiomycétes. Elle
n’y est d’ailleurs point générale, puisque Brefeld a obtenu
la fructification de certaines espèces de ce même genre
Coprinus à partir de cultures monospermes. La spécialisation
sexuelle est donc plus ou moins précoce chez les Basidiomy-
cétes. Ici elle existe dès la spore, et déjà, pendant ses premiers
stades, le jeune thalle montre des caractéres sexuels secon-
daires. Remarquons, d’ailleurs, l’espèce de compensation qui
se trouve réalisée entre la précocité de la spécialisation
sexuelle et l’aptitude a la fécondation qui semble dévolue à
toute cellule du mycélium primaire.
On voit assez les mérités du travail de Mie Bensaude :
il met de l’ordre dans des faits précédemment connus; 1
établit des faits nouveaux : en le lisant, on éprouve une satis-
faction intellectuelle à sentir les choses sortir de la confusion
pour devenir claires et simples. Les idées y foisonnent : ce
sont des analogies établies entre des groupes divers, Basi-
diomycètes et Ascomycétes, Champignons et Végétaux supé-
rieurs ; ce sont des suggestions sur maintes questions de la
biologie. C’est donc l’œuvre d’un esprit éminemment scien-
tifique, formé un peu à l’image de celui du maître que nous
venons de perdre et pour qui, dans la science, l'Unité possédait
un tel attrait.
PLANTEFOL.
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE XLI
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE
Mie M. Bensaupe, Recherches sur le cycle évolutif et la sexualité chez les
Basidiomycètes, Nemours, 1918.
(Nota. — Il reste encore quelques exemplaires de la thèse de Mle Bensaude.
La vente en est confiée à la librairie Lhomme.) :
Kniep, Beiträge zur Kenntniss der Hymenomyceten (Zeitschrift f. Bot., Bd. V,
1913 : Rel Aoi NIT 1916 1X, 1947).
= Ueber morphologische und physiologische Geschlichtsdifferenzierungen
(Untersuchungen an Re RE en) (Verh. d. Physikal. med. Gesellschaft
zu Wurzburg, 1919, p.18). |
_— Urocystis Anemones (Zeitschrift f. Bot., Bd. XIII, 1921, p. 290).
Hirmer (Max.), Zur Kenntniss der Vielkernigkeit der Autobasidiomyceten
(Zeitschrift f. Bot., Ed. XII, 1920, p. 657).
TIT
LA © FLAGELLOSE ”’
OU “LEPTOMONIASE’” DES EUPHORBES
ET DES ASCLÉPIADACÉES
1. Historique. — Lorsque le médecin major des troupes
coloniales A. LAFONT, alors directeur du Laboratoire de micro-
biologie de l’île Maurice, annonça, en 1909, qu'il avait,
avec le concours de son «attendant » Davin, trouvé un orga-
nisme de la classe des Flagellés et voisin des Trypanosomes,
qu'il nomma Leptomonas Davidi, dans le latex d’Euphorbes,
cette découverte fit de suite sensation dans le monde des
protistologistes et des pathologistes tropicaux. On ne con-
naissait alors les Trypanosomides que comme parasites
. d'animaux, capables de déterminer, par leurs représentants
les plus élevés, les Trypanosoma, des maladies redoutables
des Mammifères et de l'Homme. Leur parasitisme et leur
action pathogène chez les plantes étaient done imprévus.
L’éminent directeur de ces Annales a jugé que l’attention
des botanistes devait être appelée sur ces infections et a bien
voulu me demander de résumer à leur intention l’état actuel
de nos connaissances.
La découverte de Laront fut vite confirmée en de nom-
breux points du globe, et déja, en 1912, nous pouvions,
M..LAvVERAN et moi, dans la seconde édition de notre Traité
des Trypanosomes et Trypanosomiases, consacrer quelques
pages à cette flagellose (c’est le nom adopté par Laront) des
Euphorbes, relatant en particulier quelques résultats de
transmission de l’infection par le moyen d’Insectes hémiptères: —
Nous ferons des emprunts a ce chapitre.
Depuis lors, la maladie, qui n’avait été encore rencontrée en .
- LA € FLAGELLOSE » OU € LEPTOMONIASE » XLII
Europe que par C. Franca au Portugal, était découverte
en Italie et en Sardaigne par VisENnTINI, Monti, LAVERAN et
_ Francuint. Tout récemment, à mon laboratoire de l’Institut
Pasteur, un savant roumain, Zorra, l’observait chez des
Euphorbes recueillies en France dans le département de
Maine-et-Loire.
FRANCA qui, en 1914, avait déjà consacré un important
mémoire à la flagellose des Euphorbes, complétait ses re-
cherches en 1920 et décrivait en particulier l’évolution com-
plète du Leptomonas Davidi chez un Insecte hémiptère,
Stenocephalus agilis.
On ne peut douter que d’innombrables examens aient été
pratiqués pour étendre à d’autres plantes à latex la découverte
de LaAronT. Jusqu'ici, on n’a trouvé de Leptomonas que chez
des Asclépiadacées du Paraguay : MIGONE a signalé en 1916
une première espèce parasitée ; Franca vient d'en décrire
une seconde. Nous traiterons de ces parasites des Asclépia-
dacées à la fin de notre Revue.
2. Espèces d’Euphorbes parasités. Distribution géo-
graphique. — Presque toutes les espèces d’Euphorbes
reconnues parasitées sont des herbes annuelles; c’est exception-
nellement que des espéces vivaces ou arborescentes ont
montré des Leptomonas dans leur latex.
L'espèce trouvée la plus communément infectée est
Euphorbia pilulifera, nommée vulgairement Jean Robert à
l’île Maurice. Son parasitisme aétéreconnu à Maurice (LAFONT),
à la Réunion (VINCENT), à Madagascar et à Mayotte (Carovu-
GEAU, LAFONT), à Madras (Donovan), à Zanzibar (LAFONT),
au Dahomey (Bover et Rousaup), à Bamako, chef-lieu du
Haut-Sénégal et Niger (A. LEGER), à la Martinique (Noc et
STÉVENEL), au Venezuela (TEJERA).
Euphorbia thymifolia, rougette de Maurice, a été reconnue
infectée aux îles Maurice, de la Réunion, Madagascar et
Mayotte; Euphorbia hypericifolia à Maurice, à la Réunion,
à la Martinique et au Venezuela.
Dans ce dernier pays, TEJERA a encore observé des Lepto-
monas chez deux autres espèces, dont Euphorbia prostata,
XLIV ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
ce qui porte à quatre le nombre total des espèces infectées du
Vénézuela.
Euphorbia indica a été rencontrée infectée par RODHAIN
et BEQUAERT au Katanga (Congo belge, Afrique centrale).
En Algérie, Er. SERGENT a trouvé Leptomonas Davidi dans
le latex d’Euphorbia peploides. :
LEBœur et JAVELLY ont reconnu l'existence de la flagellose
des Euphorbes (£. pilulifera ) à la Nouvelle-Calédonie.
En Europe, ce sont d’autres espèces qui sont atteintes :
Euphorbia peplus (non parasitée à Maurice) et Euphorbia
segetalis au Portugal ; les mêmes espèces et aussi Euphorbia
dulcis, falcata, nereifolia, virosa (1), à Bologne, en Italie —
(VISENTINI pour Euphorbia segetalis, LAVERAN et FRANCHINI
pour les autres espèces); Huphorbia humifera à Florence
(LAVERAN et Francuini) ; Euphorbia grandis à Catane, Sicile
(id.); Euphorbia Schimperiana et capronien Sardaigne (Mon 1).
En France, Vinfection a été observée par G. ZoTTA chez
des Euphorbia esula var. mosana et Euphorbia helioscopia,
recueillies 4 Ponligné (Maine-et-Loire).
3. Action sur les Euphorbes. — Comme nous l'avons
dit, les Euphorbes herbacées sont surtout atteintes. Il y a
quelques divergences de vues concernant les conséquences
de cette infection pour la plante. Laront, dès le début,
a affirmé qu’il y avait maladie de la plante, qui s’étiolait, puis
flétrissait. FRANÇA a confirmé ces vues. Si d’autres auteurs
n’ont pas décrit de phénomènes morbides, cela tient proba- |
blement au peu d'intensité des infections qu'ils ont observées.
Le parasitisme n’est pas seulement localisé aux rameaux
de la tige, d’où l’on retire généralement le latex destiné à
l'examen. RopHain et BEQUAERT ont rencontré le Flagellé
dans la racine, la tige, la feuille, le pédoncule floral et même
la paroi on des Jeunes fe
LAFONT a fait remarquer le premier qu'une branche pet
être parasitée et la branche voisine ne pas l'être. FRANGA a
insisté sur la localisation très étroite du parasite chez une |
(1) Les pieds parasités de ces deux dernières espèces étaient représentés
par de forts arbustes d’une soixantaine d’années.
\
LA « FLAGELLOSE » OU « LEPTOMONIASE » XLV
plante ; il peut n’exister que dans quelques rameaux et
_même quelques feuilles ; de plus, l’infection n’a pas toujours
le même caractère dans un même rameau, ce qui indique
encore des localisations.
FRANGA a vu, en effet, que, quand on suit l’évolution des
parasites au cours de l'infection d’un rameau, on observe des
formes de dégénérescence, sans doute en raison de l’appau-
vrissement du milieu en
latex. Parfois le parasite
disparait ; mais, d’ordi-
naire, c’est la partie at-
teinte de la plante qui
succombe. Franca a ob-
servé Vatrophie des ra-
meaux fortement infectés
et ila pu, en infectant ex-
périmentalement un ra-
meau, déterminer son
atrophie. I] n’est pas rare,
avait observé précédem-
ment LAFONT, de voir des
plantes conserver une
branche ou deux en pleine
végétation, à côté des |
autres tiges desséchées, Ft, Agsushe, un example sie @ Buri
C’est précisément en (d'après Lafont)
comparant des rameaux
infectés et des rameaux indemnes qu’on se rend bien compte du
pouvoir pathogène du Flagellé. D'abord les feuilles deviennent
jaunatres et se détachent facilement ; les rameaux qui les
portent se dessèchent et s’atrophient (Voir fig. 1). On peut
aussi, par cet examen comparatif, déceler les cas où l’infection
est inapparente : elle ne porte parfois, en effet, que sur la
croissance du rameau qui est arrêtée, alors que celle du rameau
voisin et indemne continue normalement.
LAFONT avait comparé l’appauvrissement du milieu inté-
rieur de la plante à l’anémie que cause la présence des Trypa-
nosomes pathogènes dans le sang des animaux. Nous devons
XLVI ACTUALITES BIOLOGIQUES
à FRANCA une étude attentive de lhistologie pathologique de
la flagellose des Euphorbes. Le savant portugais fait remarquer
que les tubes laticifères vont d’un bout à l’autre de la plante
sans se cloisonner ni s’anastomoser. I] explique la localisation
de l'infection, d’une part par les embolies dues à l’accumula-
tion des Flagellés, d’autre part par l’indépendance des lati-
ciières (?). Bien que les parasites soient limités à l’appareil
laticifère, ils n’en exercent pas moins une action sur le tissu
cellulaire, et en particulier ils déterminent son appauvrisse-
ment en amidon, puis la disparition de la chlorophylle. Il
peut y avoir guérison quand la mort des Leptomonas, dont
nous avons parlé, survient avant la disparition complète de
Vamidon et de la chlorophylle.
La flagellose est done une maladie de nutrition, FRANGA
insiste encore sur un certain nombre de lésions cellulaires à
partir du point d’inoculation ; nous aurons à y revenir.
L’infection expérimentale fee Euphorbes a été obtenue
pour la première fois par Noc et STEVENEL à la Martinique;
les inoculations étaient faites à la pipette Pasteur : les
infections réalisées ainsi ont été particuliérement invenens
Des résultats positifs ont été obtenus depuis par divers
auteurs, mais Franca fait remarquer qu'il n’a eu que deux
succès, le premier avec un tube capillaire laissé en place
vingt- quatre heures, le second en traversant un rameau avec
un fil imbibé de eee parasite.
Nous devons citer a cette place les intéressants résultats
obtenus par LAVERAN et FRANCHINI en injectant à des
Euphorbia Sauliana et pilosa de Paris des cultures d’une
leptomonade, Herpetomonas (ou Leptomonas) ctenocephali var.
Chattoni, isolée de la Puce du Chien en Tunisie par CHATTON.
Non seulement l’infection a réussi, mais les pieds infectés
d’ Euphorbia Sauliana ont eu un arrêt de développement, et
les pousses se sont flétries ; le pied parasité d’Euphorbia
pilosa était beaucoup moins vigoureux que le témoin.
4. Morphologie du «Leptomonas Davidi» chez l'Euphorbe.
— On observe généralement le parasite en écrasant entre lame
et lamelle une goutte de latex recueillie en brisant un rameau
LA © FLAGELLOSE » OU « LEPTOMONIASE » XLVII
d’Euphorbe ; il faut employer un fort objectif a sec, puisquil
s’agit d'un microorganisme d’une vingtaine de p, et dia-
phragmer convenablement.
A l’état frais, le Leptomonas ondule sur lui-même et ne se
déplace pas très vite ; rarement il se tortille comme un ver.
La lenteur de ces mouvements paraît tenir à la viscosité
du latex, lequel, comme on le sait, montre à l'examen micro-
scopique une infinité de petites grains de moins de | # de dia-
Fig. 2. — Leptomonas Davidi (figure tirée de LAveraAN et Mesnit: Trypanosomes et
trypanosomiases, d’après LAronr). — Formes diverses ; en a, grains d’amidon
normaux du latex des Euphorbes.
mêtre, animés d’un mouvement brownien, et aussi de gros
grains d’amidon en forme d’osselets (a, fig. 2).
_ Avec un peu d'attention, et surtout quand, au bout d’un
certain temps, les mouvements se sont ralentis, on arrive
à distinguer un corps allongé qui paraît porter un fouet à
chaque extrémité ; mais un examen plus attentif (complété
par l’étude de préparations colorées) montre qu’une seule
extrémité porte un véritable fouet ou flagelle ; l’autre extré-
mité va en satténuant régulièrement et a la forme d’un
ruban qui a tendance à se tordre en hélice.
Pour une étude cytologique, des préparations colorées sont
XLVIII ACTUALITES BIOLOGIQUES
~
nécessaires. On les obtient facilement en étalant le latex à
la surface de lames bien propres, de la même façon qu’on
étale du sang pour établir une formule leucocytaire ou pour
rechercher des hématozoaires. On desséche rapidement à l’air,
puis on fixe à l’alcool absolu pendant cinq minutes (on peut
aussi fixer aux vapeurs osmiques avant étalement du latex).
On colore par une des nombreuses méthodes, devenues cou-
rantes, dérivées de la méthode initiale de Romanovsky, et
dans laquelle une combinaison d’azur de méthylène (dérivé
par oxydation du bleu de méthylène) et d’éosine agit sur les
éléments et y différencie en rose-lilas la chromatine, en bleu
violacé le cytoplasme. Cn se sert habituellement des méthodes
de GiEMSA et de LEISHMAN (avec cette dernière, il n’est pas
utile de fixer préalablement à l’alcool, car le colorant, en solu-
tion dans l’alcool méthylique pur, fait aussi office de fixateur).
Sur des préparations ainsi traitées et examinées à l’im-
mersion en déposant simplement une goutte d'huile de cèdre
sur la lame, on peut étudier la morphologie et la ee
du Flagellé (Voir fig. 2 et 4).
La longueur du corps proprement dit est de 18 à 20 y, la
largeur maxima de 2 y. Le protoplasme est pâle et on distingue
nettement le noyau situé assez en avant et le blépharoplaste
(ou centrosome) encore plus près de l'extrémité antérieure
qui porte le flagelle. Celui-ci, qui mesure 11 à 15 », part
nettement du blépharoplaste et se détache immédiatement
du corps ; il n’y a aucune trace de membrane ondulante qui,
chez les trypanosomes, est toujours bordée par le flagelle.
La partie postérieure du corps va graduellement en s’atté-
nuant ; elle a une structure rubanée qui lui donne l’appa-
rence d’une membrane ondulante ; mais c’est une fausse
apparence, car il est impossible de mettre en évidence un
filament bordant.
La multiplication des Leptomonas se fait par division
binaire longitudinale (Voir en particulier la fig. 4). Elle
commence régulièrement par le blépharoplaste, qui se divise
en deux; l’un de ceux-ci entraîne l’ancien flagelle ; l’autre
flagelle se forme de novo. Le noyau se divise ensuite; l’axe
de division n’est pas longitudinal, mais oblique, avec
LA « FLAGELLOSE » OU « LEPTOMONIASE » XLIX
inclinaison vers le blépharoplaste, d’où part le flagelle de
nouvelle formation. La division du cytoplasme commence
toujours par le pôle antérieur; FRANÇA signale, comme
anomalie, un dédoublement de la partie postérieure sur une
certaine longueur. :
Les essais de culture sur milieux divers, en particulier sur
de la gélose à laquelle a été incorporée du sang (milieu Novy-
Mac Neal pour les trypanosomides), ou de la gélose amidonnée
(LAFONT) n’ont pas donné de résultats. |
Entre les mains de divers expérimentateurs (LAFONT,
_ FRANÇA), les essais d’inoculation aux animaux tels que la
Souris n’ont rien donné. Seuls, LAVERAN et FRANCHINI ont
obtenu des infections légères en inoculant des Souris avec les
parasites trouvés dans le latex d’Euphorbia nereifalia.
C’est seulement quand nous aurons fait connaître l’évolu-
tion du Flagellé des Euphorbes chez les Hémiptères trans-
metteurs que nous pourrons examiner la question de ses
affinités zoologiques et du nom générique à lui attribuer.
5. Modes de transmission. Évolution du « Leptomonas »
chez les Hémiptères du genre « Stenocephalus » (fig. 3). —
Dès ses premières constatations, LAFONT a soupconné un ou
plusieurs Hémiptères (vulgairement Punaises de plantes),
vivant sur les Euphorbes, de transmettre l'infection. Partout
où la flagellose des Euphorbes a été observée, des Hémiptères
ont été rencontrés. Le fait suivant est suggestif à cet égard : à
la Nouvelle-Calédonie, l'infection a été observée dans plusieurs
_Jocalités; dans une seule, où les Euphorbes n'étaient pas
couvertes d'insectes, elle manquait (LEBŒUF,1n LAVERAN et
MESNIL).
En examinant le contenu intestinal de ces Hémiptères des
Euphorbes, LAFONT a trouvé des Leptomonas chez une espèce,
que Hovarrx (de Budapest) a considérée comme nouvelle
Euphorbiæ, du genre Nysius (famille des Lygéides). En se
servant de cet Hémiptère, LAFONT a réussi à transporter,
chez un plant d’Euphorbia hypericifolia déjà infecté, la
maladie dans les branches encore indemnes et à infecter une
plante saine. |
ANN. DES SC. NAT. BOT., 10€ série. £O24— 115, &
L ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
L’ Euphorbia peplus, qui n’a jamais été trouvée infectée
spontanément à Maurice et qui ne porte que de très rares
accident
primaire @Q
forme
Sgliveire,
Stenocephalus.
Fig. 3. — Cycle évolutif complet de L. Davidi évoluant chez l’euphorbe et chez le
sténocéphale (d’aprés Franca, Ann. Inst. Pasteur, t. XXXIV).
Hémiptères, n’a jamais pu, au moyen des {Vysius, être
infectée expérimentalement.
Bouvet et Rovusaup, au même moment, obtenaient expe-
Pe es
|
LA « FLAGELLOSE » OU « LEPTOMONIASE » LI
rimentalement l'infection des Euphorbes au Dahomey, en
se servant du plus exclusif parmi les Hémiptères qui vivent
sur les Euphorbes de cette contrée, le Dieuches humilis, ega-
lement de la famille des Lygéides. Ils ont réussi, en nourris-
sant des Hémiptères sur des plantes fortement infectées, puis
les portant sur des plantes saines, à infecter une de ces der-
nières. —
Dès 1914, Franca avait pensé que les Insectes incriminés
par -Laront, Bover et RouBaup n'étaient que des con-
voyeurs mécaniques. Mais il n’avait pu déterminer quel est
Vinsecte hôte au Portugal. La difficulté tenait à ce que cet
insecte, encore un hémiptère, Stenocephalus agilis, ne pique
que le soir. Franca a pu depuis étudier toute l’évolution du
Leptomonas chez cet Insecte, et son mémoire de 1920 est
principalement consacré a cette question.
Le Stenocephalus appartient à la famille des Coreidæ.
Franca a donné quelques précisions sur son appareil
digestif, qui se compose d’un long cesophage, d'un mésenteron
très développé, d’un intestin postérieur mince et tortllé,
d’une dilatation cæcale et enfin du rectum; les glandes
salivaires sont très longues et très gréles.
Franca a d’abord vu qu’il y avait concordance, pour les
Euphorbia segetalis, qui vivent dans les landes, entre l’in-
fection de ’Euphorbe et celle de l'Hémiptère. Les Euphorbia
peplus, qui vivent dans les jardins, sont très rarement infecteées ;
elles portent des Stenocephalus indemnes. Le savant portugais
a étudié l’infection naturelle des Insectes, puis leur infection
expérimentale, réalisée dans les conditions suivantes : des |
Stenocephalus indemnes étaient placés dans une cage en tulle
par l’ouverture de laquelle passaient des branches infectées
d’ Euphorbia segetalis ; on pouvait ainsi avoir des infections,
déterminées par l’insecte, de date certaine.
FRANCA a reconnu qu'il y a, dans l'intestin de linsecte,
d’abord multiplication active par division binaire ou multiple ;
cette multiplication présente quelques caractères qui la
distinguent des divisions. dans le latex de Il’Euphorhe;
par exemple, allongement du noyau perpendiculairement à
l’axe du parasite et non obliquement. Entre le troisième et le
LII ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
quatrième jour, FRANÇA a vu des formes, sans flagelle, avec
noyau et blépharoplaste uniques, bifurquées en arrière, et
qu'il pense provenir d’une conjugaison isogamique (Cf. le
Flagellé Copromonas subtilis, étudié par Do8eLL). Ce serait le
premier exemple authentique d’une conjugaison chez les
Trypanosomides.
A partir du quatrième jour, sans doute à la suite de cette
conjugaison, les Leptomonades augmentent de dimensions ;
on a des formes de 50 vu de long. Entre le quatrième et le
huitième jour, apparaissent des formes très petites, qu'on
trouve vers le huitième jour dans toute l'étendue du
tube digestif, particulièrement dans le mésentéron, et qui
envahissent plus tard les glandes salivaires, où elles par-
viennent vraisemblablement en remontant les canaux des
glandes et où elles forment des amas énormes. Ces parasites
mesurent 4,5 à 7 px Ou,8 à 1u5; leur cytoplasme est très
pâle ; les noyaux et blépharoplastes tranchent bien; il n'y a
généralement pas de flagelle. On les retrouve sous la même
forme dans la trompe. | “
Le Flagellé présenterait aussi des kystes ; mais ils sont
rares. FRANCA en a vu une fois dans la trompe. Il semble
bien que, d’ordinaire, le cycle évolutif de Leptomonas David se
passe entre l’hémiptère et la plante et que la contamination
d’Hémiptére a Hémiptère doive être plutôt rare.
FRANGA a retrouvé, au point d’inoculation de l’Euphorbe
dans ce qu'il a appelé les accidents primaires (petites taches
noirâtres centrales entourées d’une zone rouge vif), avant
toute invasion du latex, des petites formes qui rappellent les
formes infectantes (métacycliques) : 64,7 à 10u,5 x 1,5,
avec flagelles de 7 »,5 à 102,9; il y a aussi des formes sans
flagelles de 10,5 de long, des formes arrondies de 3» de
diamètre et d’autres de 1,5 seulement.
Chez les Euphorbes, les enveloppes des fruits présentent
des formes ordinaires du latex ; mais les fruits eux-mêmes
renferment des formes plus petites, dont certaines dépourvues
de flagelle ; on y trouve aussi quelques petits kystes uni-
nucléés, d'attribution génétique incertaine. Ils ne seraient
pas indispensables pour la perpétuation de l’infection d’une
LA « FLAGELLOSE » OU « LEPTOMONIASE » LIII
année à l’autre, car Franca a vu des Euphorbia segetalis
conserver des Leptomonades dans leur latex pendant l’hiver ;
de plus, les Stenocephalus, qui hivernent, transmettent au
printemps leur infection aux Euphorbes.
Ces constatations fort intéressantes de FRANCA ne nous
paraissent nullement exclusives de celles de ses prédécesseurs,
et il faut noter a cet égard que LAVERAN et FRANCHINI, qui
ont recherché d’une façon spéciale des Stenocephalus sur des
pieds d’Euphorbes parasités, n’ont jamais pu en capturer. En
revanche, ils ont capturé des Vysius renfermant des Flagellés
dans leur tube digestif, ce qui les a amenés à soupconner ces
Insectes, déjà incriminés par Laronr à l’île Maurice, de jouer
le rôle de vecteurs. |
Cette question dela diversité desInsectes vecteurs est peut-être
liée à celle de la diversité d'espèces de Leptomonas parasites
des Euphorbes. LAFONT avait déjà entrevu cette possibilité ;
mais les résultats acquis à ce jour ne permettent pas encore
_ d’envisager la solution de cette question. Notons pourtant que
- LAVERAN et FRANCHINI viennent de signaler, chez des
Euphorbia nereifolia et virosa de Bologne, représentées par des
arbustes âgés, des parasites d’un type inhabituel : éléments
sphériques ou ovalaires avec noyau seul ou bien avec noyau
et centrosome, mais sans flagelle. VISENTINI en avait signalé
précédemment de semblables chez une Euphorbia segetalis.
Il résulte encore des dernières recherches de LAVERAN et
- FRANCHINI que les Leptomonas ne sont pas les seuls protistes
parasites du latex des Euphorbes : ils ont en effet rencontré
chez deux Euphorbia peplus des environs de Syracuse des
Spirochètes assez nombreux de 6v,5 x Ou,5. Ils seraient
aussi transmis par les Punaises des plantes.
6. Leptomonades des Asclépiadacées. —-MIGonE a décou-
vert,en 1916, dans lesuc lactescent d’une Asclépiadacée, Araujia
angustifolia (= Funastrum boneriensis var. riparium et typi-
cum), croissant dans les marécages du Rio Salado, au Para-
ouay, un Trypanosomide, voisin de Leptomonas Davidt.
Toutes les parties de la plante sont envahies par le parasite;
il persiste même en hiver quand la plante est réduite à son
LIV ; ACTUALITES BIOLOGIQUES
tronc et à ses fines tiges. La transplantation fait disparaître
les flagellés ; les plantes nées de graines infectées ne sont ee
parasitées. |
Ce flagellé de l’Araujia, nommé par Micone Leptomonas
Elmassiant, est plus petit que le Leptomonas Davidi; comme
lui, il a Je corps tordu sur lui-même en arrière. |
Il a été retrouvé depuis par E. CorpEero en Uruguay.
MiconE, d’abord, n'avait trouvé aucun Insecte sur la plante
(qui couvre de ses branches excessivement délicates et de son
Fig. 4. — Schéma mettant en évidence les caractères principaux des Leptomonas
au sens de Franca et leur division longitudinale.
épais feuillage les arbres qui se trouvent à proximité). Il y a
recueilli depuis un Hémiptère, Oncopelius lactuosus, dont
l'intestin renferme de nombreuses formes leihsmaniennes de
3-3.u,7 x 2u,2-2u,9 p, avec noyau et blépharoplaste volu-
mineux.
MIGONE a encore trouvé au En une autre Asclépia-
dacée, le Worrenia odorata. L’étude du Flagellé vient d'être
faite par Franga, qui le nomme Leptomonas Bordasi.
Ce Leptomonas est plus long que Leptomonas Davidi, dont
les dimensions se trouvent ainsi intermédiaires entre celles des
deux parasites des Asclépiadacées. Voici les dimensions com-
parées, d’après FRANGA:
ane
LA « FLAGELLOSE » OU « LEPTOMONIASE » LV
Corps proprement dit. Flagelle.
MR AMASSTANL A, SS ee ek te 12-15 u. 4,5-7,5u.
OA ed sin ee 16,5-19,5 u 10,5-16 v.
DS ROLO OS eds sins es 24-27 u. 0-94
Chez Leptomonas Elmassiani comme chez Leptomonas
Davidi, au cours de la division longitudinale, le blépharoplaste
se divise toujours avant le noyau, qui a un axe de division
oblique. Chez Leptomonas Bordast, la division du novau pré-
céde celle du blépharoplaste, et elle se fait suivant une ligne
parallèle à l'axe du parasite. Fait curieux, lapparition du
nouveau flagelle coincide avec la division du noyau et non
avec celle du blépharoplaste.
Les plantes infectées par les Lepiomonas Elmassiani et
Bordasi ne paraissent pas malades.
_L'infection n’a pu être reproduite expérimentalement ni
le parasite cultivé. Micone,‘en revanche, avait obtenu une
première culture de Leptomonas Elmassiani sur gélose au san
humain. |
7. Affinités des Leptomonades végétales. — Par tous
leurs caractères chez les plantes parasitées, les Flagellés que
nous venons de passer en revue appartiennent indubitable-
ment à la famille des Trypanosomides, qui comprend les
Euflagellata monadina, dont le corps, plus ou moins allongé,
renferme, en plus du noyau, une autre masse chromatique, de
plus petite taille et de structure homogène, d’où part un
flagelle unique. Ce flagelle borde ou non une membrane ondu-
lante ; le premier cas est celui des trypanosomes proprement
dits ; le second est celui d’un grand nombre de parasites qui
paraissent propres aux Insectes, et pour lesquels on discute
si leur nom générique doit être Leptomonas ou Herpetomonas.
Nous n’entrerons pas dans cette discussion, qui nous entrai-
nerait trop loin et n’aurait qu’un intérét restreint pour les
lecteurs de ces Annales, et nous adopterons le nom Leptomonas
employé par LAFONT et dont Franca a précisé la définition :
le flagelle prend directement naissance a un petit blépharoplaste
situé en avant du noyau ; au moment de la division, il y a un
flagelle de nouvelle formation (Voir fig. 4).
Mais une question plus intéressante se pose, celle de savoir
LVI ACTUALITÉS BIOLOGIQUES
s’il ne faut pas user d’un nom spécial en raison du parasitisme —
végétal du Flagellé, de même qu’on maintient le nom Leish- —
mania pour divers parasites humains, qui sont de véritables
Leptomonas sous leur forme flagellée. Donovan, dès 1909, a
proposé le mot Phytomonas, Pour l'instant et malgré les
progrès que Franca, dans son mémoire de 1920, a fait faire
au cycle évolutif de Leptomonas David, il ne nous paraît pas
encore possible de décider si ce Flagellé doit être maintenu dans
le genre Leptomonas (avec Leptomonas drosophilæ CHATTON
comme espèce type), ou doit passer dans un autre genre qui
serait Phytomonas (1).
I] serait plus intéressant encorede savoir si ces Flagellés des
plantes ne sont pas tout simplement des flagellés d’insectes
«égarés » chez ces plantes, où ils auraient trouvé un bon
milieu de culture. S’il en est ainsi, — ce qui est loin d’étre
démontré, — 1l faut convenir qu'ils ont déjà acquis un certain
nombre de caractères particuliers, par exemple cette extrémité
postérieure rubanée et tordue sur elle-même.
FÉzix MESNIL,
Professeur à l’Institut Pasteur.
(1) Helen Adie (Indian J. of med. Res., t. IX, f. 2, oct. 1921) vient de décrire,
pour la Leishmania du kala azar humain, une évolution chez la Punaise des
lits avec stades intracellulaires aflagellés qui rappellent les stades semblables
des glandes salivaires des Stenocephalus. Il serait curieux que les Leptomonades
végétales fussent des Leishmania !
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE
4. Bouvet et Rousaup, C.R. Soc. Biologie, t. LXX, janv. 1911, p. 55.
2. CAROUGEAU, in LAFONT.
2 bis. E. CORDERO, in FRANGA, 1921.
3. G. Donovan, Lancet, 20 nov. 1909, p. 1495.
4. C. Franca, Bull. Soc. Path. exot., t. IV, oct. et déc. 1911, p. 532 et 669. —
Arch. f. Protistenk., t. XXXIV, 1914, p. 108; — Ann. Inst. Pasteur,
t. XX XIV, juill. 1920, p. 432; — Ann. Soc. belge méd. trop.,t. I, £. 2,
mai 1921.
5. A. Laront, C. R. Soc. Biologie t. LXVI, 19 juin 1909; — Ann= Inst.
Pasteur,t. XXIV, 1910, p. 205 ; — C.R. Soc. Biologie, t. LX X, janv. 1911,
p. 55; — Bull. Soc. path. exot., t. IV, 1911, p. 464.
6. A. Laveran et G. Francuini, Bull. Soc. path. exot., t. XIII, déc. 1920,
p. 796; t. XIV, mars et avril 1921, p. 148 et 205. :
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE LVII
7. A. LAvERAN et F. Mesnit, Trypanosomes et Trypanosomiases, 2° édit.,
D. 997;
8. LeBœur et JAVELLY, voir MESNIL, Bull. Soc. path. exot., L. IV, 1911, p. 46%.
9. À. LEGER, rbid., nov. 1911, p. 625.
10, Micone, ibid., t. IX, 1916, p. 356.
41. Mont, in VISENTINI.
42. F. Noc et L. Srévenez, Bull. Soc. path. exot., t. IV, 1911, p. 461.
13. J. Ropwain et J. BEQUAERT, ibid., p. 198.
14. SERGENT (Ër.), Arch. Inst. Pasteur ce du Nord,t.1, mars 1921, p. 58.
15. E. TEJERA, Public. Acad. méd. Caracas, Venezuela, 1918.
16. VINCENT, Bull. Soc. Path-exot.,t.. +1], juil-1920, ét in LAFONT.
17 VisENTINI, Rendiconti d. R. Anca d. Teer, t. XX oc edits, £-12, 2914.
as
a 18. Zorra, C. R. Soc. Biologie, t. LXX XV, 2 juil. 1921, p. 226.
BS . P.-S. — Dans le latex des troncs, rameaux et feuilles d’arbustes assez
âgés des jardins botaniques de Bologne et de Fiorence, appartenant à la
famille des Apocynées et aux espèces Acokanthera spectabilis et venenata,
FRANCHINI vient de trouver (Voir Pathologica, 1° octobre 1921! des Flagellé
| _ qui paraissent devoir être classés dans le même genre Leptomonas que ceux
PERS des Euphorbes et des Asclépiadacées. Francuini les nomme Herpetomonas
(Leptomonas) apocyne.
Sur les frottis, les individus sont plus ou moins repliés sur eux-mémes. Le
a _flagelle, qui part d’un blépharoplaste antérieur, est court et paraît manquer
| parfois. La partie postérieure du corps n’est pas rubanée. I] 5 aurait non
seulement division longitudinale, mais encore division transversale.
LIVRES ET OUVRAGES NOUVEAUX
ANASTASIA (EmiLio) : I. Le Nicotianæ (Le forme elementari della composi-
zione dei vegetali o l’origine della specie. Filogenese delle Nicotianæ)
(Bolletino tecnico, n. 4, anno 1920. Ministerio delle Finanze. Direzione generale
dei Monopoli industriali, 1920, Scafati). |
ANASTASIA (EmiLio), Araldica Nicotianæ, 2 vol., un de planches (Direzione.
generale privative Ministero Finanze, Scafati, 1914).
BERNARD (Nof), Principes de biologie végétale, Alcan, 1921.
CAULLERŸ, Le parasitisme et la symbiose, Doin, 1921.
CHAUVEAUD (GUSTAVE), La constitution des plantes vasculaires révélée par
leur ontogénie (avec 54 figures, 155 pages).
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Scientific Society, XX XV, fév. 1921, 2 photogravures). |
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JANET (CHARLES), Considération sur l’être vivant. II. L’individu, la Sexua-
lité, la Parthénogenèse et la Mort, au point de vue orthobiontique, Beauvais,
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MagQueEnne, Précis de physiologie végétale, collect. Payot, 1921.
MozzriarD, Nutrition de la plante. I: Échanges d’eau et de substances miné-
rales. II: Formation des substances ternaires, Doin, 1921.
SÉE (Prerre), Louis Matruchot, 5 p. Maretheux, imp., rue Cassette.
Serin, Une visite aux pays grands producteurs de blé, Public. agricoles de
la Comp. chemins de fer du Midi.
TABLE DES MATIÈRES
DU TOME III DE LA 10° SÉRIE
Recherches sur le développement de la feuille des Mousses, par
ASP EN M ER EE NE Ry SN Sa a
Première contribution à l’étude de l'embryon et de la germination
des races pall: Ce Li GATIN. . 252.07. Oe er ens ee oa
Symbiose et Tubérisation, par M. Josepu Macrov ..............
Recherches sur les Lichens de la famille des Stictacées, par M. FrEr-
TG BUS SUT Ph Cc CORSE ay cp eS ste bai aE aol aan ae ee rh de
Les Chênes d’Indo-Chine, par HickeL et A. CAMUS..............
ACTUALITES BIOLOGIQUES :
Muiantes el Hybrides, par L.\ BLARINGHEM......:.............
Sexualité expérimentale des Basidiomycètes, par PLANTEFOL......
La Flagellose ou Leptomoniase des Euphorbes et des Asclépiadacées,
PA Lrxe WEESNIE® 4.1.0. , 5 Sie a bie dee COS PR Ae acing RE eer te
(Ens ET OUVRACES- NOUVEAUX gon Ges ta burs do die vit ee sie ula do
PEC ES MATE RDS ml es oe, Ra Re RS Ant
L'ACADÉMIE DE. MÉDECINE
WARD, “SAINT- GERMAIN, + 20 aes PARIS — vie ARR.
4
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Nod De + Fa
des Vertébrés
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© Professeur à. VUniversité. de les
_ Correspondant de l'Institut.
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ies ie de Mnbesen ss
générale est consacrée aux premières phases —
ne . Vertebres et ¢ à ee
TABLE DES MATIÈRES
CONTENUES DANS CE CAHIER
Recherches sur les lichens de la famille des Stictacées, par
M. FERNAND MOREAU ...
ACTUALITÉS BIOLOGIQUES :
Mutantes-et Hybrides, par L. BLARINGHEM
Sexualité expérimentale des basidiomycètes, par
PLANTEFOL
ka Flagellose ou Leptomoniase des Euphorbes et des As-
clépiadacées, par FéLix MEsnin. .. |
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