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(o . {5 h(^jvu ajourna cLe lAA- cJU CoçJubvtl .^a^'t ^7^ i
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7^j
0[C>1\
a décrété & décrète, que, toute motion
relative à la Conftitution des Colonies,
feroit fufpendue 6c renvoyée à l'époque
cil elle recevra , du fein même de fes
onies, leurs vœux légalement ma^
nifeftés dans un Plan de Conftitution
qui fera foumis à un férieux examen
de rAffemblée Nationale, avant d'être,
décrété.
f
A Paris , de l'Imprimerie de Clousier,
Imprimeur du ROI , rue de Sorbonne.
APPROVISI
DE St. DOMINGUE.
\'
c-
^db^càçi^^^siââââ^
REPONSE
.. D E s D É P U T E s
DES MANUFACTURÉS ET DU COMMERCE
DEFRANCE,
Aux Motions de MM. de CôCHÉREL &
de Ray N AU D ) Députés de Vlfle de.
St. Domingue h VAjfembléc Nationale.
", i
ESSiEURS les députés de St. Ëfomîngue
à rAfifembîée Nationale ont remis le 1 3 de ce
mois , à Meilleurs les (îx commirfaires dii Corriité
d'agriculture & de commerce , neuf pièces fïgnées
d*eux.
La première eft une Motion dô M, dé Co'che-
rel du 29 août , au pied de laquelle efi: une note
dont nous ne ferons pas mention , parce que les
■A *
«I
[2 3
fignatures de Mefîleurs les députés font au defius
de cette note. Nous obferverons feulement qu elle
auroit dû être biffée ou fignée.
La féconde eft une Motion de M. le Comte
de Reynaud du 3 1 août 5 au pied de laquelle font
des obfervations non fignées. Nous en ferons men-
tion malgré nous , parce qu elks ont un rapport
trop dire6l à la queftion , pour les négliger.
La troiileme eft une brochure portant pour ti-
tre , Réplique de M de Cocherd. Cette Réplique
fignée eft fuivie d*une lettre non fignée de M. le
M'' du Chilleau à MM. les députés de St. Do-
mingue, en date du 29 août 1789.
La quatrième & la cinquième font des ta-
bleaux de l'importation des farines Françoifes , Se
des procès-verbaux de Tapprovifionnement des
principales villes de St. Domingue.
La fixieme eft l'Ordonnance de M. le M" du
Chilleau & de M. de Marbois , du premier avril
1789, portant permiffion d'introduire les farines
étrangères dans les trois ports d'entrepôt de St.
Domingue, pendant trois mois.
La feptieme eft l'Ordonnance de M. le M'^ du
Chilleau, du 17 mai 1787 , enregiftrée le 29 du
même mois , portant permiffion d'introduire les
farines étrangères dans tous les ports d'Amirauté
de St. Domingue , jufqa au premier odobre , Ôc
Â'extciire les denrées coloniales.
t
C 3 3
Cetre Ordonnance rendue au nom du Général
& de l'Intendant, n'a été fîgnée que par le Gé-
néral , l'Intendant l'ayant refufé.
La huitième eft l'Arrêt du Confeil du Roi , qui
cafTe l'Ordonnance ci-deiTus , en ce qu elle permet
l'introdudion des farines étrangères dans tous les
ports d'Amirauté , & l'extracflion des denrées colo-
niales 5 & la confirme quant à fes autres difpofîtions.
La neuvième enfin efl un réfumé Aes demandes
de Mefîîeurs les députés de St. Domingue , portant
le titre de Précis, --
Toutes ces pièces nous ont été remifes , le 1 7 de
ce mois au foir , par M M« les fix commiifaires du
Comité d'agriculture & de commerce , fous notre
récépiffé.
De toutes les parties de la mKlion qui nous a été
confiée , la plus pénible & la plus trifte fans doute
eft celle que MM. les députés de St. Domingue
nous forcent de remplir. Ils of&enta la Nation aîTem-
blée le tableau de 400 mille individus livrés aux
horreurs d'une famine continuelle ^ entretenue foi-
gneufementparles Marchanda (i) àzs Ports d€mer>
(l) Nous remercions MM. les Députés de St. Domingue
de nous avoir rendu notre véritable titre , le feul (Merckànt)
que les Anglois , nos refpcdables rivaux, cmploycnt* Il yafî
peu de tems qu'il étolt encore le fîgne du mépris de notre
profeffion, que nous n'ofîons pas nous en parer. Nous le por-
terons déformais avec une noble affurance.
Al
m
m
ît.f:.
[4]
t:fh$ MARCHANDS des farines, pour faire mourir
de faim lO à 12 mille Nègres par an^pourôter aux
Colons leurs forces exploitantes^ pour tenir, par le
plus criminel de tous les monopoles, dans roppreffion
Se dans la mifere , la plus belle & la plus produ/live
de nos Colonies.
Ilspeignent cette famine, qui dure depuis plus d'un
fiecle , arrivée dans ce moment au plus affreux degré.
Le fujet que nous allons traiter eft grave : il ne
■ nous permet pas de négliger aucune des aiîertions
<le MM. les Députés. ïl eft queilion de la vie des
hommes , & d'une portion d'hommes que l'humanité
Se l'intérêt ont rendu extrêmement précieufe.
D'un coté , on préfente au Tribunal de la Nation,
la plus fenfible 4u Monde , 400 mille inftrumens
du luxe de l'Europe , n'obtenant pas pour prix de
' îabaridqn abfolu de leur exiftence , le? iiioyen? ri-
goureux delà foutenlr. De l'autre, on dénonce à cet
Imposant ^Tribunal la confpiration générale de
' -tous les aî^ens du commerce contre ces infortunées
Tiâ;im_es.
''**^^i les accufatipns de MM. les Députés de St. Do-
"Tningue 'étolem éclairées , non de la vive lumière
- !"lle1i'!^£riré , mais de la lueur pâle & incertaine des
: ^.»l:us fpibles vrâifemblances , nous frémirions .4'eiî
•être les objets ^ & la providence éternelle , qiii>tôt
• èù' tard révèle les crimes des peuples & des par-
îiculiçrs , nous cteroit tout moyen de dcfenfe.
[ ; ]
L*honneur ( i ) des Marchands François , fi cmd-
lemenr oifenfé^ ne peut admettre aucun mena-
o-ement. Nous dirons, en leur nom,, à rAifembiée
Nationale, que le tableau qui lui a été préfente
par MM. les Députés de St. Domingue , efc faux.
Nous dirons que la difette qui peut-être règne
aduellement dans la Colonie de St. Domingue , ne
frappe que les habitans Blancs, & que les Nègres
n en peu^^ent être atteints. Nous avons acquis le
droit de dire ce que nous avons la certitude de-
prouver.
Nous allons démontrer ces deux proportions t
nous expoferons enfuite nos vues fur les moyens
de fecourir la Colonie dans la difette qui rafflige.-
(i ) Si nous avions befoin de témoignages contre nos
accufateurs,nous invoquerions celai de tous les Commerçans
de l'Europe , qui ont un refpeâ: religieux pour la loyauté &
la franchife des Commcrçans irançois.Nous irions demander
à MM. les Colons rcfidans à Paris ou dans les provinces,
lequel d'entr'eux qui confiant fans détour & fans réfervc à
fon Correfpondant fa fuuation maîheureufé, n'en a pas reçu
des recours prompts & fouvent défmtérefîcsî Queleil celui qui
a manqué d'avances pour des entreprifes raifoianabîes î A qui
on a refufé toute l'indulgence qu'il defiroit pour fes créances
échues, quand fon impuiilance étoit couverte par une bonne
conduite î Et ce font de tels hommes qu'on ofe traduire:
devant la Nation, comme dts fpéculateui-s en alTaffinats L
PREMIERE PROPOSITION
Ilneji pas vrai que la fourniture des fariner
FrançoifeSy dans la Colonie de St, Do-
mingue^foït infuffifame ^ Ù qu elle [oit la
caufe que lo à 12 mille Nègres meurent
de faim tous les ans.
Il importe d'abord de donner une idée rapide
de la Colonie de St. Domingiie.
La Colonie de St. Domingue éroit habitée en
1787, par 24,192 Blancs^ p^r i9,<?32 gens de
couleur libres ^ & par 3 (54519 <î Noirs. Depuis
cette époque , la population des Noirs s'eft accrue.
Et nous penfons , que dans le moment où nous
écrivons , elle peut être portée à 400,000.
De ces 400,000 Noirs , 140,000 à peu
près exploitent les fucreries que nous croyons être
au nombre d*environ 700.
Nous eftimonsa 150,000, ceux qui font em-
ployés dans les montagnes a la culture du café
& des vivres : le refte appartient aux cotonneries,
indigotteries , enfin aux villes & aux bourgs j &
nous croyons , avec quelque fondement , que ceux
[ 7 ]
qoï habitent les villes & bourgs , font au nombre
de 30,000 à 3 5,000. N'ayant pas les récenfe-
mens détaillés fou^ les yeux , nous ne pouvons
donner que des approximations; mais nous peri-
fons qu elles avoifinent de très-près la vérité.
Les 150,000 Noirs qui cultivent le café &
les vivres dans les montagnes , jouifTent d'une
abondance exce(Iîve en vivres. Cette abondance,
efi; telle que la plus petite partie de leur fuperflu
fert à garnir les marches des villes , des bourgs ,
Se à établir un commerce d'échange très-adif avec
les Nègres de la plaine , qui leur procure une aî-
fance inconnue dans nos campagnes. La difette
ne fe fait jamais fentir dans les montagnes , par-
ce que la fraîcheur du climat , la fréquence des
pluies , la fertilité d'un fol qui donne 5 à (? ré-
coltes par an , âîTurent la fubfiftance de ce peuple.
Les féchereffes courtes & rares qui paffent fur
ces montagnes , n'y laiifent que des traces légè-
res , parce que plufîeurs efpeces de vivres réiîftent
à l'adion de cette fécherelTe , ôc fe confervent
en terre. Tels font le manioc 8c le tayau , ou
chou Caraïbe , qui peuvent fc garder en terre plus
d'un an, l'igname créolejquife confervefixmoiS hors
de terre , le riz , le maïs , les pois dont on peut
former des magazins. La banane fe cultive dans
des ravines profondes & fraîches , elle produit
A 4
i
moins dans les fécherefTes , mais il n'y a que di-
minution de produit.
Le pain ne paroît dans les montagnes , que
fur les tables des Blancs ; il y eft toujours accom-
pagné d'une grande quantité de vivres du pays ,
que les Créoles préfèrent fouvent au pain d'Europe,
Il paroît quelquefois dans les fêtes des Nègres j
mais on ne l'y voit que comme ces oifeaux rares
Se fans goût 5 que les riches de notre Europe fer*
vent fur leurs tables , en figne de leur opulence
Se de leur vanité. Les maîtres en diftribuent dans
les hôpitaux j mais cette quantité eft fi peu con-
fidérable , parce qu elle ed peu néceflàire , qu'une
habitation de deux cents Nègres ne confomme
guère plus de cpatre barils de farine par an. En
effet la Nature a tellement diverfifié la nourriture
clans cette riche contrée , qu'elle Fa appropriée
a tous les âges , à tous les fexes & a toutes les
maladies. Elle a donné le manioc , la patate ,
Fisname , k racine du chou Caraïbe aux hom-
nies fains & robudes ; la banane aux individus
plus délicats ; le riz , la farine de Maïs , mille
efpeces de pois Se de légumes, à ceux que des ma-
ladies ont épuifés. Enfin le pain fe mêlant à tou-
tes ces produdions , offre un dernier moyen de
nuancer la nourriture 5 fuivant les diverfes nuan-
ces de la maladie Se des forces du fujet.
On peut voir par ce récit vrai , Se en témol-
gnage duquel nous invoquons ceux de nos Juges
qui ont habité la Colonie de St. Domingue ,
que les 150,000 Nègres qui* habitent les mon-
taî^nes, n'ont pas befoin de confammer, & ne con-
fomment prefque pas de farines d'Europe. En
admettant quatre barils pour 200 Nègres, la con-
fommation annuelle feroit de 3000 barils de fa-
rine. .
Il xefte 250,000 Nègres,, dont 30 à 35,000
habitent les villes & bourgs. Ceux-ci , comme
nous l'avons déjà obfervé , font approviiionnés par
Iqs Neeres des montagnes ; mais comme dans
toutes les fociétés , les clafTes inférieures tendent
à s'approcher des claffes fupérieuxes , au moins
par l'imitation , les Nègres domeftiques & ouvriers
ont cherché à imiter les goûts des Blancs ; Se nous
avouons que la confom.mation du pain eft plus
coniidérable que dans les montagnes. Nous fuppofe-
rons que cette confommation peut être équiva-
lente à celle de 4,000 Blancs qui ne vivroient
que de pain.
Les 215,000 Nègres qui exploitent les fucre-
ries , les indigotteries & les cotonneries , ont, com-
me ceux des montagnes , des moyens de fubhf-
tance tirés des productions du fol j mais la terre
infiniment précieufe dans quelques bonnes fucre--
ries , a amené les propriétaires à reiTerrer la por-
tion de terre confacrée à la culture d^s vivres.
J«
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Néanmoins dans ces terres privilégiées & rares ^
où tout fe mefure > où tout fe calcule , le Nègre
y jouir encore, en toute propriété, d'un terrein fuf-
fifant pour fa nourriture , il on confîdere fur-tout
que ce terrein, d'une fertilité auprès de laquelle
nos meilleures terres font ftériles , produit en tout
tems , en peu de rems , fans fumier , fans labour
êc prefque fans travail. On fiit une réferve d'un
grand terrein deftiné aux malades , aux vieillards ,
aux enfans , aux nourrices. On diftribue du fîrop ,
qui eft un objet d'échange ave: les vivres Aqs
Nègres de la montagne. Dans les fécherefïes ,
beaucoup d'habîrations peuvent fe garantir de leurs
effets par l'arrofage. Celles qui font privées de
cette refTource , multiplient les échanges avec les
Nègres des montagnes qui ont toujours un fonds
inépuifable dé fubfiftance. Il en réfulre à la vé-
rité une augmentation dans le prix des vivres ;
mais cette augmentation qui par-tout eft de ni-
veau avec l'augiuentation des demandes , n'eft
jamais hors des moyens de l'habitant.
On prévient encore les difettes par les achats de
riz des États-Unis, qui eil toujours abondant dans
les villes , par les fèves & pois d'Europe. Enfin
prefque toutes les habitations de la plaine ont de
/ petites habitations dans les montagnes > unique-
ment deftinées au foulagement des Nègres de la
plaine.
On ne confomme donc de pain , que dans les
hôpitaux. Cet aliment y eft adminîftré à ceux qui
font véritablement malades , ou convalefcens. Les
Nègres qui n'ont befoin que de repos , ou qui y font
retenus par des plaies aux jambes ( maladie extrê-
mement commune dans les pays chauds ) ne font
nourris qu avec les vivres du pays , & avec le riz des
États-Unis. Il réfulte de cet apperçu qu'en portant
laconfommation moyenne des farines dans la plaine,
à un baril par 1 5 Nègres chaque année , nous l'éva-
luons audeflus de la confommation réelle. Nous
invoquons encore ici le témoignage de ceux de nos
Juges qui ont cultivé les Colonies. Il ne feroit pas
aifé d'en confommer davantage. Dans les belles
fucreries qui en font le plus grand ufage , le bois
manque abfolumenr: tout le fervice de la manufac-
mre & des cuiiines fe fait avec la canne à fucre ,
quand elle a été preiTée au moulin ; le four à pain ne
peut être échauffé que fort diflicilem.ent avec cette
canne à fucre , & on y employé du bois qu'on fe
procure avec des peines infinies. D'ailleurs l'embarras
de la fabrication rendroir Tufage de cette nourriture
impoffible pour tout l'attelier. Le riz dont la cuifTon
eft fimple ôc aifée , eft la nourriture la plus conve-
nable & la plus ufitéc. Les États-Unis le portent à
St. Domingue en fi grande quantité , qu on l'acheté
prefque toujours au même prix qu'en France. Il vaut
dans nos ports de mer dQio à 14 liv. qui équivalent
lî!
xm
[ " ] ^ _
àj o on 3 ^ %. 4^ l'Amérique. Ceft le prix ordinarte
qu'il fe Vendcïans les ports de St. Doniingue.
Ainfî la nourriture dont la préparation eft la plus ^
fîmple 5 qui doit être. la plus faine & la plus conve--
nable 5puifque la Nature , cette bonne confeillere ^
Ta donnée aux pays chauds ( i) , eft prefque en tout
tems au même prix qu'en France.
Les 2î 5,000 Nègres qui exploitent les fucreries,
cotonneries & indigotteries , à la moyenne exagérée
d'un baril de farine par 1 5 Nègres , confommenc
par an 1 4, 3 3 3 barils de farine.
Il refte ic),6^i (1) gens de couleur libres.
Ces gens de couleur , à la réferve d'un petit nom-
bre qui eft aifé & qui demeure dans les villes , fe
nourriflent tous de vivres du pays. Leurs goûts, leurs
habitudes les attachent à cette nourriture faine qu'on,
ne pourroit pas aifément leur faire quitter. Ces habi-
tudes font un des regrets qu'ils éprouvent quand ils-
font hors de leur patrie. Néanmoins nous voulons
forcer les élémens de nos calculs, & nous eftimerons.
(i) Les Nègres de la Côte-d'Or, qui {ont les plus robufîes
^e l'Afrique, fe nourriflent principalement de riz.
(t) L'État de la population de St. Domingue en 178^ , ne
donne que 16,99% gens de couleur libres. Nous avons pré-
féré TÊtatde l'année 1787 ^ui donne 19,63 2 gens de couleur
libres , parce que nous voulons éviter le reproche d'avoir at-
ténué les bafcs de nos calculs.
11; I
[15]
que la confommatlon des farines faite par les genâ
de couleur libres, peut être repréfentée par 4,000
Blancs ne vivant que de pain.
(i) Enfin 5 Ôc pour achever le tableau des confom-
mateurs de St. Damingue , nous trouvons 14, 1 9 2
habitans Blancs. Beaucoup de ces habitans Blancs
vivant dans les montagnes , confoniment autant de
vivres du pays , que de farines ; mais nous n'aurons
aucun égard à cette confîdération , êc nous les fup-
poferons tous vivant de pain.
La nourriture d*un homme dans nos climats tem-
pérés eft évaluée à une livre & demie. Dans ce calcul
moyen, on comprend l'homme de, travail qui ne
vit guère que de pain , Se qui consomme beaucoup
plus d'une livre ôc demie par Jour. Dans nos Mes ,
l'homme de travail ne mange pas de pain ^ il n'y a
que les gens aifés. Ces gens aifés habitent un climat
brûlant qui exige une nourriture fucculente. La
confommation du pain à St. Domingue ne devroit
donc pas être évaluée à une livre & demie par
homme. Elle ne s'élève pas non plus à cette quan-
tité j mais ayant commencé à forcer nos données ,
( I ) L'État de 1786 ne donne que 1^,133 habitans
Blancs 1 mais pat la raifon de la note précédente , nous avons
choifie l'année 17S7 , qui élève la population des habitans
Blancsà Z4, i^i.
,11
I ''Ni
|ff1" i
! . I
[ M ] ^
nous continmerons dans le même principe. Nous
dîfonsqueles Z4ftî92' Blancs confommant chacun
une livre & demie de pain par jour, confomment
cous enfemble 3 ^, i 8 8 liv. de pain par jour, Ôc par an
13,^^5,120 liv. de pain , ci. .
Les Nègres qui habitent les villes ,
repréfentant 4,000 Blancs qui
ne vivent que de pain , conlom -
ment par jour 6^ooo\ïv, de pain ,
& par an 1,1 90,000 liv. ci. . . ."
Les gens de couleur repréfentant
4,000 Blancs qui ne vivent que
de pain , confomment par jour
6,000 liv. de pain , & par an
23190,000 , ci. . ;
Les 150,000 Nègres qui habitent
les montagnes , doivent confom-
mer , fuivant nos eftimations ,
3,000 barils de farine par an, qui
équivalent à (375,000 liv. de
pain , ci • •
Les 21 5, 00 G Nègres qui exploitent
les fucreries , cotonneries êc m^
digotteries, confommant 14,333
barils de farines, repréfentent
une eonfommation annuelle de
3,224,925 liv. de pain, ci ....
1 3,245,110.1.
2,190,0004
2,190,00:
(jy 5,000^
3,224,925
Confommation annuelle des habi-
tans Blancs, gens de couleur libres
& Nègres de St. Domingue. . . . • 2 1 , 5 2 5 ,045.
[M ].
Meilleurs les Députés conviennent que les navires
François portent annuellement 150,000 barils de
farine dans la Colonie de St. Domingue ^ cet
aveu eft d'accord avec l'État ci-delTous de cinq
années :
Barils de Farine
En 1784 on a importé. ...... îoy^idS.
En 1785 1505186^.
En 178^ 151,047.
En 1787 . . 19^,23^.
En 1788. ......... . . 142,388.
Total en 5 ans 750,025.
Ann^e commune... . 150,005,
Sur la quantité de 750,025 barils de farine, le
port de Bordeaux en a introduit ^58,413 barils ;
& tous les autres ports réunis ont introduit 91,^12
barils.
Chaque baril de farine pefe 180 liv. net; il
donne , en ne mettant qu un quart (i) en fus , 225
liv. de pain. Ainfî les 1 50,000 barils de farine in-
troduits annuellement a St. Domingue , ont produit
Cs) On évalue en France le rapport de la farine au pain ,
dans la proportion de 5 à 4 j & nous ne l'évaluons pour no»
calculs ^ue dans celle de 4 à j.
4
'!•* . ■ iii
"À
M
un approvidonnement de 333750,0001 depaiiLLa,
confommation totale ne s'élevant qu!â z i , 5 i 5,04 5 L
il refte d'excédant 1 2,124595 5 liv. de pain.
Cet excédant de 12,224,5)55 1. de pain, ceft-
à-dire, de 5 7, ^(^^ barils de farine, fert à la nourriture
des équipages des navires , aux caboteurs fur les
cotes j aux achats que les Efpagnols viennent
faite , & qu'ils introduifent chez eux en contre-
bande (i).
Enfin le refte de cet excédant eft mis en magasin
par des fpéculateurs qui Tont acheté à vil prix , foie
dans des ventes à l'encan qui font très-fréquentes ,
foit chez les Capitaines qui , fur leur retour pour
France , fe débarafTent à tout prix d'une marchan-
dife qui ne peut fe,conferver (2). S'il ne furvient pas
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1
■1 i 1
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: !
t
il
(
(i) Un Colon Efpagnol ne peut manger d'autre pain que
celui qui lifi eft fourni par une Compagnie exclufive 5 & ,
comme on le peiife aiféraent , il cft mauvais Se cher.
(%) Ce font ces approviiionneurs qu'on appelle fi injuf-
temeiit des accapareurs , qui veillent fans cq-{[c fur les ftib-
fiftances. Ils forment des magazins dans le tems de l'abondance,
ils les ouvrent dans le tems de la difette.Ils font les gardiens &
les fauveurs de la vie des peuples : (ans eux , fans l'efpoir du
profit qui détermine leurs opérations, on pafTeroît rapide-
ment de l'abondance à la famine. La denrée avilie fcroit né-
dic;cc & perdue. Ce font eux qui en arrêtent TaviliiTement: ce
ipnt les dépôts remplis par leurs prévoyans calculs, & ouverts
de
<ie rivolarioii îiîcerieure , ou n le ùômxr\QfCe de k
Loiiifianne ne fiurnit pas de cl%onch.é à ces amas ^
ils périiTent en peu de tems , & il faut lès jetter.
Si n^iis avions pu prévoir les demandes ^ ies ao»
cufari^ns de Meffieuîs les d'^'uités , nous aurions
fait venir de nos porrs de m.er d-çs états de ces
veîites, & nous aurions prouvé ave- évidence ce que
nous avançons. Nous andons démontré que fonvent
la farine fe vend à 24 & 30 liv. le baril , argent de
r Amérique , qui font i<^ liv. & 20 liv. atç^ent de
France. Mais ici , comme dans tout notre récit , le
témoignage de Meilleurs les Colons , qui fe font
eux-mêmes quelquefois approvi(ionnés de cette ma-*
mère , nous tiendra lieu de preuve.
Les commerçans ne demandent point de dédom-
magement quand leurs fpéculations ont été ruinées.
Ils fupportent leur perte en filence , ils attendent
qu'une révolution dans le cours des marcliandifes
répare le dommage qu une trop grande abondance
a caufé. Si des défaftres trop répétés , ii une longue
cîiaine d'événemens ruineux renverfe leurs projets ,
&détruifent toutes leurs efpérances , alors feulement
fuccefîlvementàmefureque la rareté fe faicreiitir;,qui nuancent
les intervalles entre la richeife & la pauvreté , & qui donnent
le tems de venir au fccours de la Nation. Ces vérités , neuves
encore peut-être en France pour bien du monde, feront bientôt
des idées communes.
[ I« ]
ïeïirs regîîlres s'ouvrent, ils expofent aux avides re-
gards des hommes 11. perte de leurs biens & de leur
Honneur. L'opinion quifouvenr réfifte aux loix Ôc les
enfreint , fe réunit à elles pour profcrire & dévouer
^ l'opp'obre & a la mifere un citoyen honnête , un
père de famille vertueux & irréprochable à qui on
ne peut imputer que de n'avoir pas maîtnfé les
liazards, La fituation d'un Colon dans nos îfles eft
différente , il faut en convenir : il peut tout à la fois
devoir le double de fon bien , ne pas payer ,
voir les loix fans adion dans les mains de fes
créanciers , vivre dans l'opulence & jouir de la
confîdération qui l'accompagne. Loin de nous toute
application. Nous comparons la fituation de deux
grands corps , & nous ne voulons que montrer com-
bien celle des marchands dl défavorable.
Après avoir prouvé notre première proportion
par le calcul des confommateurs , & leurs rapports
^vec Tapprovilionnement; nous allons la prouver par
le calcul du prix des farines.
Nous avons fous les yeux le prix des farines à S.
Domingue en 1 7 8 7 & 1788. Ci-contre eft celui de
1788 : nous le donnons de préférence , parce que
c'eft dans cette année qu'un ouragan a ravagé la
partie de i'Oueft de St. Domingue , ôc que nous
parlerons de ce fléau.
"^b •.
[ in
Tableau de l'Année 1788.
*^^HM^-''i/ihiia(tfa>'ifli iiBjijjiifîMiiracaMiiinpEcitnEancTa
1788, Janvier. ... le Baril
Février. .
Mars. . .
Avril. . . ,
Mai. . . .
Juin. . . .
Juiller. . ,
Août. . . .
Septembre.
Oaobre. .
Novembre.
Décembre.
Somme Totale, .
FARINES.
■j^^'
.^A^.
Fines*
liv.
78.
72.
66.
66.
66.
66.
8c).
103.
104.
90.
75'
Communes.
liv.
61.
47-
43.
45-
4(5.
4(j.
50.
61.
71*
6i.
941,
^ Le prix moyen de la farine fine que les Kabitans
aifés confomment , fat de 78 liv. 8 fols 4 deniers
le baril, pour Z25 liy. de pain. La livre de pain coûta
B 2
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1 [ lo ] .
ë fols 1 1 deniers , argent cle l'Amérique , qui répon-
dent â 4 fols 7 deniers & demi tournois. '
Le plus haut prix de la farine fine , durant cette
année , fut au mois d'Odobre. Elle coûta 104 liv.
le baril de 1 2 5 liv. de pain : le pain revint à 9 fols
3 den. d'Amérique, qui valent 6 fol$ 2 den. tournois.
Le prix moyen de la farine comimune c|ui eft celle
que les pauvres Blancs & les Nègres malades fur les
habitations confomment ^ fut de 5 5 liv. ii fols^
8 deniers le baril de 225 liv. de pain : la livre de
pain coûta 4 fols 9 deniers d'Amérique , qui répon-
dent à 3 fols 2 deniers tournois.
Le plus haut prix de cette farine commune fut de
71 liv. lé baril de 225 liv. de pain : le pain revint
^ 6 fols 3 deniers d'Amérique , qui valent 4 fols 2
deniers tournois.
Il convient de faire ici pluileurs réflexions.
. I '\ En établifïant le prix du pain fur celui des fa-
rines 5 annoncé dans les gazettes , nous l'avons porté
à la plus haute valeur. Tous ceux qui connoiCent les
Colonies , favent que le prix des gazettes eft celui
des plus hautes ventes chez les Capitaines , & qu'on
l'obtient toujours au deiTous de ce tarif qui n'eft
iqu'une indication exagérée.
2°. La faxine . comm.e routes les autres denrées
d'Europe , ne fe yen<^ pas cpmptant : il y a toujours
un terme de trois mois pour la payer.
f, La farine qu'on appelle farine fine eft fupé-
rieureen beauté aux plus belles farines dont oa
Ipprovifîonne la Capitale ; ôc celle qu'on appelle com-
mune, eft celle quife confomme dans les provinces
de France. Le pain bis efl: inconnu dans nos Ifles.
4 . Et celle-ci eft très-importante. Les denrées
comme l'argent n'ont point de valeur réelle & dé-
terminée ; elles ne peuvent avoir que' ûes valeurs re-
latives. C'eft au prix de la journée d'un homme qu'il
faut les rapporter toutes. La journée de l'homme de
travail eft donc la mefure commune des denrées de
première nécellité. En France , le pain eft ordinaire-
ment à deux fols 3 deniers ou 1 fols 6 deniers la
livre , Sz la journée d'un ouvrier eft à 25 ou 30 fols.
Dans les provinces où la journée eft à meilleur mar-
ché, le pain diminue dans la même raifon. A St. Do-
niingue , la journée d'un ouvrier eft à 6 llv. qui font
4 liv. de France. Si la valeur du pain dans nos Co^
lonies étoit tracée fiu- la même échelle qu'en France ,
il devroit y valoir dans les tems d'abondance , trois^^
fois plus qu'en France , c'eft-à-dire ,10 fols i den.
ou 1 1 fols 3 den. qui répondent à ^fols 9 den. ou 7
fols 6 den. tournois , valeur triple de 2 fols 3 den.
a 2. fols 6 den. ^ & cependant noiis avons vu que
dans le moment de la plus grande valeur ,' au m.ois
d'Octobre 1788 , le pain n'a valu que 6 fols 3 d^n.
d'Amérique, qui répondentà 4 fols 2 den. tournois,
& que le prix moyen , durant toute Tannée 1788 ,
zctédc 4 fols 5) den. d'Amérique 5 qui répondent
A 3 fols 2 den. tournois. Ainfî dans les tems de la
i. ;!!'
[ 11 ]
plus grande rareté , dans les tems qu*on appelle
difette , famine , Se qui éveiilent la foliicitude des
adminiftrateurs , le pain a été comparativement
prefqu'à moitié du prix qu'il vaut dans les tems
d'abondance en Fraiice. Q^ moment de cherté étoit
l'époque de l'ouragan qui ravagea la récolte du
fucre oc du café , au Port-au-Prince. Jlcaufaj cette
augmentation paiTagere qui cependant ne porta
le prix du pain qu'à moitié de ce qu'il auroit dû va-
loir 5 pour être dans un rapport exad avec la journée
de l'ouvrier.
5°. Enfin nous connoîtrons encore mieux les
rapports entre la France & St. Domingue , par la
divifion de la monnoie dans les deux contrées.
Dans la Métropole où le Peuple eft nombreux,
où prefque tous vivent de leur travail journalier,
la monnoie a été fubdivifée prefqu à l'infini , afin
de donner à la clafTe indigente & labotieufe , les
moyens de poilrvoir à fes modiques befoins. A St.
Domingue au contraire où la nourriture pliyfi-
que eft la moindre dépenfe ; où tout eft luxe,
fafte &. richeffe ; où les habitations de i à
300,000 -liv..'.de revenu , font communes^ où
celles quî"n en donnent que 40 à 50 mille, font
mifes au dernier rang ; où enfin il n'y a pas de
peuple , la monnoie s'eft élevée à ce niveau , & la
plus petite pièce eft de 7 fols 6 den. du pays , qui
valent 5 fols de France. Ainfi le pain eft pref-
<qu*en tout tems , au dciïous de la plus petite piecst
de monnoie. '
Le tableau de la valeur des farines dans les
Colonies pour l'année 1787 eft à peu près fem-
blable à celui de 1788 ^& le momenr du plus
haut prix fat au mois de Mars ^ la farine fin^ va-
lut 103 liv. le baril, & la farine commune 75
iiv.
Nous favons que MM. les députés de St. Do-
mingue pourront nous objecter que nous avons
établi le prix du pain fur le prix du baril de fa-
rine 5 ôc que nous aurions dû l'établir fur ce qu'il
a valu réellement chez les boulangers dans les.
villes.
Si nous avions eu à répondre aux habitans des
villes 3 nous aurions raifonné fur cette donnée ,,
ôc nous leurs aurions démontré que le prix était,
encore comparativement beaucoup au delTous de
celui de France ^ mais c^eft à MM. les Colons
propriétaires que nous répondons. Ils s'approvi don-
nent directement de farines chez le Capitaine qui les;
a apportées de France , ôc le pain eft fabriqué chez^
eux. Le prix du pain dans les villes étant étran-
ger aux Colons , nous n'avons pas dû , en leur
répondant , avoir égard au prix du pain dans k&
villes. ^
Si le court délai qu'on nous a donné pour notse
juftification^ nous avoit permis de faire des reckes^
B 4.
V >
[ i'4 1
ches, nous nous ferions procuré le prix de la fa,-
rine ,, durant la longue paix qui a'^ccédé la der-
nière guerre ; & on auroit vu qu'il a été conftam-
ment au aefTous du prix des années 1787 5c 1788,
à la réferve de deux inftans très-courts : l'un en
1771 , îorfqu'on croyoit une rupture prochaine
entre la France & l'Angleterre , l'autre au com-
mencement de la féchereilè de 1776" , qui dura dix
mois. Nous parlerons plus loin de ceue calamité.
Nous demandons maintenant à MM. les députés
de St. Domingue , où eft cette difette perpétuelle
entretenue G. foigneufement par les marchands ,
qui (au innurir de fcim îo à î j. iiuiU Ne^rcs p.ir
ûii? Quand on veut jouer le célèbre & dange-
reux rôle d'accufateur , il faut accumuler les faits.
Il faut fe faire un rempart de preuves que l'accufé
ne puilTe pas ruiner.
Nous délirerions bien ne pas dire que dans les
premiers tems de ce fiecle , les Nègres furent traites
avec peu d*humanité 5 que cette dureté qui en
faifoit périr lui grand nombre tous les ans , étoic
un refle de la barbarie àts conquérans du nouveau
Monde, & de la valeur féroce à^s flibuftiers qui
ont fondé les premie^'s établiflfemens a St. Domin-
gue. Cette, barbarie s*eft adoucie peu à peu par
les fréquentes communications des Européens ; &r
nous faififTons avec emprcifement cette occafion
de rendre à MM. les Colons le tribut d'éloges qui.
[ 15»]
leur eft ciû pour le gouvernement doux- & humain
doni lU ufenc^nain tenant envers leurs efclaves.
Ce gouvernement eft le thermomètre de la popu-
lation. Nous avons fous les yeux un état des naif-
fances & des mortalit s en 178(5 ôc 1787, qui
prouve qu'on n'eft pas éloigné à St. Domingue
d'atteindre le dernier degré d'une adminiflration
paternelle;
(i) En 178^^, fur 332,847- Nègres 5 11 y eut
45217 naifTances 5& 55o6'7 morts.
En 1787 , fur 3 <^4, 1 9 (î Nègres , il y eut 3, $'5 S'
naiifances , & 6^116 morts.
Dans la première année , les mortalités furpaf-
ferent les nailTances de Î5850, &dans la féconde ,
de 1,^60.
Cl) Nous cirons les récenfemcns qui font dans les bu-
reaux. Nous ne les croyons pas jufles; mais ce font les
feuls documensquon puiiTe. fe procurer' Et l'cxaditude cjui
manque aux mortalités doit suiîî manquer aux naifTanccs.
Ainfi notre preuve n'efi: point afFoiblie. Pour qu'il fut mort
10 à Ti mille Nègres par an, de faim feulement, il fau-
droit qu'il en fur mort au moins ^.o mille par an. A la fin
àc la guerre de 1755, il n'en feroit pas refcé un feul. On
n'en a introduit que t i mille, année commune, depuis 763
jufqu'en 1778. Il y a eu enfuite une guerre de cinq ans j
& à la paix de 178^ , on en comptoit 300 mille à
St. Domîno;uc. Ces réfultats prouvent, fans réplique, que la
mortalité eft très- modérée à St.. Dorainffue.
V Jî^'
r* ]
La raifon de la différence de ces deux années ^
eft qu'en 1787 on importa d'Afriqiie 50,000 Nè-
gres , & que la morralitc dut être plus conlidéra-
ble fur àes Nègres non acclimatés que fur les
autres.
On ne voit point ici cette mortalité effra)rante ,.
ces I o à î z mille Nègres que la cupide avarice
des marchand, égorge tous les ans ^ on voit au
contraire qu en perfedionnant le fyftême d'admi-
îiiftration qui a commencé dans la partie du Cap
& qui peu à peu gagne toute la Colonie , on pourra
dans quelques années établir le niveau entre les
naiffances & les mortalités , & qu'on n'aura plus
befoin de Nègres d'Afrique , que pour les nouveaux
défrichemens.
Voili , pour le dire en paiTant , à quoi doit fe
réduire la grande quedion de la fuppreffion de la
traite des Neç^res & de leur affranchKTement. L'ad-
o
miniilration douce & fage qui s'étend dans toutes
nos Colonies, prépare de loin l'abolition de la traite
Se une condition aux Nègres qui fera cent fois
préférable à la malheureufe liberté dont jouit l'hom-
me de travail dans la plupart de nos campagnes.
MM. les députés de St. Domingue prétendent
qu'il ne faut pas moins de 1 5 0,000 barils de fa-
rine pour nourrir les Blancs de la Colonie , ôc de
400,000 pour les Nègres. Nous avons prouvé que
les Ï5O2O00 barils qui y étoient importés annuel-
_ r if 1
îemenr , pourvoyoient abondamment à tous lésbe-
foins. Si on accordoir à MM. les députés leur
demande indifcrete , ils prendroient affurément
l'engagement d'acheter Se de payer cet énorme
approvifionnement. II arriveroit que la Colonie de
St. Domingue feroit débitrice annuellement de
150,000 barils de farine fine pour les Blancs,
qui , au prix moyen de 70 liv. le baril , coûte-
liv.
roient
IO,<OQ,0OO
Et de 40O5O00 barils de farine
commune pour les Nègres ,
qui 5 au prix moyen de 5 o liv.
le baril, çoùteroient, ci. . . . 20,000,000.
Dette annuelle de la Colonie de
St. Domingue envers la Mé-
tropole. ... . . . ,\ . . 30,500,000. liv.
C'eft alors qu'on verroit accourir Meflîeurs les
députés de St. Domingue , qu'ils s'éleveroient avec
force contre l'impôt abominable de 30,500,0003
dont leurs cultures feroient accablées, contre ce
monopole atroce des Marchands , contre cette gabelle
d'un nouveau genre ^ & il faut convenir que cette
fois ils auroient raifon.
MM. les députés de St. Domingue difent que
les pluyes , les ouragans y les fécherejfcs détruifent
annuellement pendant ^ à ^ mois leurs efpérances^
ù'quun habitant dont toute la terre feroit en vivres^
m
^
^
[ tî]
if en ferait pas mains dans le cas cVcn manquer pour
Jes Nègres.
Sur un fol excellent , écliauffé par un Gel bi'iilant,
il ne faut que de la pluye pour le féconder. Aulli
la pliiye eft-elle appellée le fumier de Sa Domingue.
Avec la mefure de la pluye qui tombe dans une
année , on a facilement celle des récoltes en tout
genre. Ecartons donc cette caufe de difette invoquée
par MM. les députés , qui peut tout au plus , dans
quelques rares ôr petites portions de terre trop hu-
jmides & trop baffes , retarder momentanément
îe développement des germes.
On comnte deux ouragans dans la partie du
Nord Se de FOuefl. Ils ont accompli une période
de plus de 40 années. Le premier qu'on ne devroit
pas qualifier du nom d'ouragan , & qui n'étoit
qu'un fort coup de vent , caufa,en 1772., quelques
donimap^es aux cannes a fucre & aux caflers dans la
partie du Nord ; mais les vivres foufftirent fort peu ,
& il n'y eut pas d'augmentation dans le prix des
farines. Le fécond a dévaflé , l'année dernière , les
cultures de la partie ce l'Oued, s'eil même étendu
jufqu'à la partie du Sud ; & nous avons vu, qu'a
cette époque , l'augmentation que ce fléau caufa
dans le prix des farines , no put élever celui du
pain à la moitié de ce qu'il coûte en France dans
îes temps ordinaires.
^ La partie du Sud , nous en conviendrons , e(t.
MM
I ^9 ]
plus expofée à ces grandes cpnvulfiohs de la Nature*
mais aucune n'a caufé de difette, ni même d'aug-
mentation remarquable dans le prix des farines.
Les féchereiles font alfez ordinaires auCap, pendant
les mois de Février , de Mars ôc quelquefois Avril.
Elles font en quelque forte périodiques , Ôc ne font
aucun tort ni aux cultures ni aux vivres qui ont été
refroidies par les longues pluyes de l'hiver. Dans
d'autres parties , cette périodicité eft rrès-réguliere ,
ôc dure 5 mois tous les ans. C'eft dans ce rems que
les travaux des manufadures s'exécutent, &ils font
interrompus dans la faifon des pluyes. Sans ces fé-
chereiles fur îef quelles on compte, les manufadures
ne pourroient pas être mifes en mouvement ; elles
font donc néceffaires Se n'occafîonnent aucune difette.
Quand des caufes extraordinaires prolongent ces
fécherelfes, alors, comme nous l'avons dit plus haut,
les échanges fe multiplient dans les montagnes ^ alors
même les adminiilrateurs , en vertu des inftrudions
qu'ils ont toujours eues, ouvrent les ports aux farines'
étrangères.. Cette marche inv^.riable de l'adminiflra-
tion a toujours arrêté les effets des grandes fécheref-
fes , ôc empêché qu'aucune ait produit une véritable
difette. La plus longue &la plus défaflreufe dont on
conferve la mémoire à S. Domingue , e(t celle de
1776" , elle dura près de dix mois. Il y eut un inHant
où les vivres montèrent à haut prix ; mais le com-r
merce national &: les Etrangers accoururent de taures
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parts • 5c au plus haut degré d'une calamité qui
tuina toutes les récoltes , les vivres furent à iî bas
prix qu'un navire (i) expédié de Nantes > & entière-
ment chargé de toutes fortes de vivres , perdit fon
capital entier. La vente de fa cargaifon fuffit à peine
à payer les frais de fon féjour ôc de fon voyage. Plu-
iîeurs navires emportèrent du riz en FMnce , au lieu
des denrées coloniales , parce qu'ils Fachetoient à
; 8 liv. le quintal , argent de l'Amérique , faifanc
iz liv. tournois 3 ôc qu'il en valoir 23 & 24 en
France.
Meilleurs* les Députés de S. Domingue avancent
que Cl le commerce national leur fournifToit des
farines a aufii bon marché que les Etrangers , il en
réfulteroit accroiifement de forces exploitantes qui
tourneroit au profit de la Métropole. Ce n eft pas ici
le lieu de développer cette queftion qui tient a ce-
qu'on a fi improprement appelle jufqa'a préfent le
régime prohibitij , & qui n'eft autre chofe que le
réslme national, La néceiîité de nous défendre ,
nous a entraîné dans des calculs qui ont rendu ce
Mémoire déjà long : prelTés d'ailleurs par Meflieurs
les CommifTaires de fournir notre défenfe , lorfque
Meilleurs les Députés ont préparé leur attaque à
loifir 5 nous renverrons cette difculîîon a un autre
tems. Nous obferverons feiilement ici qu'un habitant
(î) Le Breton,
[ 31 1
fucrier qui a loo Nègres , doit confom mer environ
1 4 barils de farine commune pour fes Nègres ; nous
l'avons déjà démontré. En recevant ces 14 barils de
farine du commerce national , il les payera i peu
près 50 liv. ôc tous enfemble lui coûteront 700 liv.
En les recevant du commerce étranger , il les ob-
tiendra peut^tre à 40 liv. ôc tous enfemble lui
coûteront 5 60 liv. Il en coûte donc à œt habitant
propriétaire de zoo Nègres, qui fait 140 ài 5 0,000 L
de revenu , 1 40 liv. pour avoir nourri fes Nègres
malades , avec la farine nationale.
Il faut remarquer que la propriété de cet habitant
n eft grevée d'aucun impôt dired , & que le projet
du commerce national eft Hen folliciter i'af&an-
chiffement pour fes denrées. On ne voit pas com-
ment un facriôce de 1 40 livres , fuppofons le double
&mème le triple , peut diminuer les forces exploi-
tantes de cet habitant. Tout le monde fait, ôc Mef-
fieurs les Députés en conviendront, que ce n'eft
point à St. Domingue que les Colons perdent leurs
forces exploitantes ^ mais a Paris.
Toute adion en commerce a une réadion fou-
vent plus forte que l'adion même. L'approvifion-
nement de nos Colonies eft la caufe d'un grand
travail & de la plus belle des manufactures , la
conftrudion ôc l'équipem.ent des vaifTeaux. Les
150,000 barils de farine importés annuellement
â St. Domingue par le commerce national , font
11:1
t.
le charp'ement de 6 y navires de 300 ronneaiDC
chacun. Si cette fource de riclieîTes Se de travail
étoit inconnue , il faudroit la chercher avec em-
preffement : fi nous l'avions perdue , il faudroit la
reeapner au prix des phis grands f^crifices : nous
la poifcdons , nous en jouidons.
MM. les Députés de Sr. Doming|p, Membres
de rAlTemblée Nationale , François eux-mêmes ,
voudroient- ils diminuer la fortune d'une Nation
dont ils font une (î belle partie?
DEUXIEME PROPOSITION.
La difetie qui règne acluelltmcnt dans la
Colonie^ ne frappe qve les habit ans Blancs,
& les Nègres nen peuvent être atteints.
Cette propofition rentre dans la première : en
développant celle-ci ^ on a pu s'appercevôir qu'il
nous reilolt peu de chofes à dire pour démontrer
la féconde.
En effet , il n'y a que les Nègres malades fur \e^
habitations qui confomment de la farine, & dans
la difette , le pain offre beaucoup de moyens de
fuppléer cet aliment ^ le riz , la farine de Maïs , de
Mil, font auffi fains , auîTi légers que le pain.
Les Nègres des villes ne mangent du pain que
par imitation : en les remettant, ainfi que les gens
de
^fc »
[ J5 ]
de couleur libres , 8c une partie même des hibitans
Blancs , à leur nourriture naturelle 3 on ne leur
caufe aucune privation.
C'eft ce qui arrive dans les guerresiDans celle de
1755, la farine valut jufquà 400 liv» le baril : il
hY eut pas d'augm.entation de mortalité parmi les
Nègres. Durant la première année de la dernière
guerre, la farine valut au Cap 300 liv. le baril;
&:elle s'eft fouténue toute la guerre de 150^200!,
On n'a pas remarqué de mortalité extraordinaire.
La partie du Sud de St. Domingue en a été prefoue
totalement privée pendant toute la guerre; & cette
partie de l'Me n'a pas éprouvé de plus grandes
pertes parmi fes Nègres,, que dans le temsde paix.
Nous oppofons toujours des faits connus Se vrais
aux aiTertions vagues & indéterminées de MM. les
Députés.
Sans doute que, dans les tems malheureux, les
habitans Blancs payent le pain cher; mais l'aifance
dont ils jouiiTent, les met au defTus de cette dépenfe
pafifagere. Enfin ils ont pour dernière relTource
les vivres du pays qui , fans avoir la même faveur
pour un Européen que ceux d'Europe, n'en font pas
moins bons «Se fains. C'eft dans notre Europe que,
fans aucune des reiTources dont on abonde dans
nos liles, les difettes exercent les plus affreux
ravages. C'eft ici que, fans autre moyen de fubiif-
ftance, le malheureux cultivateur , l'homme de
Q
11
r.
V
i 34 3
travail expire de faim & de mifere , lorfque le pain
lui manque , Se que fon prix eft au-defTus de fes
modiques facultés. La pitié des villes ne pénètre
cruere dans les chaumières où habitent le défef-
noir & la mort. Tant d'objets frappent nos regards
dans la Capitale & dans les grandes villsf, que notre
.Compaiïion eftépuifée avant d'en franchir l'enceinte.
MM. les Députés préfentent des calculs d'appro-
vlfionnement , dont les réfultats femblent faits pour
montrer que M. le M du Chilleau a développé la
conduite d'un fage & grand Adminiftrateur. Ce
n eft pas ici le lieu d'examiner l'adminiftration de
M. le M' du Chilleau j & l'Ordonnance qu'il a
rendue le 9 Mai , contre l'avis & malgré les re-
préfentations (i) de fon co- Adminiftrateur M. de
Marbois, portant permiiTion aux Étrangers de com-
mercer librement , & d'introduire des Nègres dans.
les trois Ports de la partie du Sud de St. Domingue
pendant cinq années, eft trop étrangère à l'objet
particulier de l'approvifionnement des farines, pour
que nous nous y arrêtions (t).
,....,.;T .i,V
(i) Les repr-efentations , fous le tirrc de Réclamations
de'jVf.rintendam de St. Dom'ingue , onc déjà été rcmifes
à chacun des .^Icmbres de rAffemblée Nationale.
(t) Nous nous réfervons de prouver dans un autre tems ,
jeomment M. le Marquis du Chilleau , en violation de tous
■rcspouvoirs& de tous Icsprincipes, a,durigne d'une puiiTancc
^*> *
T 55 1
. LorfqueM. le M''MuChiiIeau ouvrit, te 3 1 Mars,-
les trois Porcs d'entrepôts de St. DoniJn<?ue aux
farines étrangères , la farine fine valait à St. Do-
niingue 9 5 liv> ôc la commune 72 liv. A ce prix, le
pain des blancs aifés conçoit 5 fols 7 chn» Se celui
des pauvres Blancs ôc des Nègres malades, 4 fols
-5 den. & demi, argent de France. On a déjà vu
que la journée d'un homme en Amérique valoit
4 liv. de France: le prix de la farine n'étoit pas
au taux où il devroic être , pour avoir une propor-
tion exade avec le prix du ^ain en France. Néan-
moins, l'inquiétude de l'Europe pour fa fubfif-
tance , devoir en infpirer aux Gouverneurs de nos
Colonies j ôc nous rendons librement hommage
qu'onrie peut corr.parer qu'à celle des Beys d'Egypte , arrêté
le mouvement du Commerce national, & livré le patrimoine
de la Nation Françoife aux Etrangers & à Tes ennemis na-
turels. Nous prouverons cjue c'eft pour cette Ordonnance
du p Mai feulement , qu'il a été rappelle , & non pour fe's
Ordonnances du 3 i Mars & z^ Mai , concernant rintroduc-
tion des farines.
On a ofé accufer les Bretons d'avoir eu le projet d attenter
à la vie de M. le Marquis du Chiîleau, à fon débarquement
a Nantes. On a allarmé leMiniftere auquel ils reprocheroiic
d'avoir cru les Brecons capables d'une lâcheté , & d'avoir
négocié Ton pafTagc par Nantes, commedans un paysennemi.
Quand les Commerçans attaqueront M. le Marquis dû
Chilleau, ils l'attaqueront au Tribunal de la Nadon,
fil
^
[ 3n ^
à la fac^e prévoyance clé cet a de d'adminiftratioii ^
fait de concert entre M. le M'' du Chilleau , Gou-
Yerneur , & M. de Marbois , Intendant. Ils fe con-
formoient a leurs inftrudions qui leur enjoignent
de veiller fur les fubfiftances.
Le 29 Mai, M. le M'^duChilleau, contre l'avis
de fon co-Adminiftrateur M, de Marbois , &
fans fa participation , fit enregiftrer une féconde
Ordonnance, fur le fondement que la première Or-
donnance n avoir attiré qu'une très-petite quantité
de farines étrangères. MM. les Députés de St.Do-
rhingue déclarent eux-mêmes, dans la neuvième
pièce intitulée , Précis , remife à MM. les Com-
miffaires, qu'il en entra durant ces trois mois
27,098 barils, & que l'approvifionnement total
ne fut diminué que de 3,070 barils. Ils en con-
cluent fur le champ, que la Colonie a manqué
de pain pendant fept jour^ &> phs. Conçoit-on ua
pays qui manque de pain pendant fept jours Gr
plus, cpi ne reçoit pas defecours , & qui cepen-
dant conferve tous fes habitans ? Si on veut bien
fe rappeler ce cpe nous avons dit de l'approvifîon-
nement de St. Domingue , de la répartition exade
Ôc vraie que nous en avons faite , du fuperflu
prodigieux qiie laiffent les 1 50,060 barils de farine
que le Commerce national y porte tous les ans ,
des reiTources infinies qu'offrent les vivres du pays,
on demeurera convaincu que cette prétendue fa-
[ 57 1^
mine de Jept jours &* plus, n'a été qu'une dimi-
nution de fuperflu.
' Cette féconde Ordonnance , irréguliere dans là-
forme, en ce qu'elle avoit été rendue fans la par-
ticipation de l'Intendant , contenant au fond plu-
fieurs difpofitions attentatoires au Commerce na-
tional , telles que radmiflion des farines dans tous
les ports d'Amirautés, & l'extraâiion des denrées
coloniales, a été reétifiée par un Arrêt du Confeil
du 15 Juillet. Nous difons reêiifiée ^ parce que le
Confeil du Roi n a calïe que les difpofitions
contraires au Commerce national , ôc a maintenu
ce qui concernoit l'approvilionnement par les ports^
d'entrepôt.
Cet Arrêt rendu dans la vue de témoip-ner a
M. le M'^ du Cliilleau qu'il avoit violé fes pouvoirs,.
ôc non dans celle d'arrêter l'approvifionnement de
St. Domingue, n'a été envoyé à St. Domincrue
que le i'^'. Septembre 5 ainfi il n'a pu détruire l'effet
de rOrdonnance de M. du Cliilleau, dont le terme
expiroît le i ". Odobre.
Ce n'efl pas à nous de juftifier le Confeil da
Roi & le Miniflre de la Nation. Notre refped:
pour l'AfTemblée Nationale nous interdit route
réflexion. Il n'appartient qu'à elle de défendre fort
ouvrage , Se de maintenir des aâ:es qui n'oiît eu
d*autre but que de préferver le Commerce natio-
nal , qui eil la propriété de i<j millions d'hommes
C 3
1
Itlnliii'.
m ■
■¥
S!
[38]
Se dont nous ne fommes que les inOirumens ,
des atteinres que lui portoit M. le M-^ du Chil-
leau.
La féconde Ordonnance n'a pas pourvu aux
befoins (le la Colonie , Se n'a pas dû y pourvoir.
Dès le mois de Mars , époque de la première Or-
donnance 5 la cherté devenant générale en Eu-
rope , le Gouvernement attiroit en France par des
fortes primes y les grains étrangers : les Marchands.
de Nantes foufcrivoient eux-mêmes , de leur pro-
pres deniers, une augmentation de prime (i).
Les États-Unis faifant des envois confidérables
en EfpagUe , en Portugal , en France , dans le Nord
de TEurope 5 vuiderent peu à peu leurs magazins
& diminuèrent la fourniture de nos Colonies. C'eft
ainfi qu'elles ont été admifes à partager la famine
qui règne encore fur la moitié du Globe.
Vues fur ks moyens de fecourir la Colonie
dans la difcttc qui l'afflige.
Nous ne chercherons pas à diminuer les juftes
allarmes que doit infpirer la fubfiftance des habi-
rans Blancs de nos Colonies. La Nature leur a donné
abondamment des vivres, qui croiiTent fur le fol
(i) Nous ne citons cet ade de patriotifme, que parce
qu'il cft nécefiaîrc à la trifte généalogie de la famine.
_ [ 59 1 _ _ -
A^uils habiteiiL ^ mais la Mere-patrie ne(ï pas pour
cela difpenfée de tâcher de leur en procurer qui
foient plus appropriés à leurs goûts ôc à leurs habi*
tudes. La Nation qui a fait de fi prodigieux facri-* .
fices pour approviflonner fes Citoyens d'Europe 5
en doit également à fes Citoyens d'Amérique*
Ils ont le même droit à fes fqllicitudes Se a fa^
protedion.
Nous fommes inftruits que toutes les NationS
fe difputent le refte des magaiins des Etats-Unis.
Les Anprlois , les Efpagnols , les Hollandois croifent
en mer. Ils arrêtent les bâtimens Anglo- Amé-
ricains qui ont des commeflibles , ils les conduifent
dans leurs ports refpeâiifs , & s'approprient leurs
cargaifons en les payant. Nos vaiiTeaux ftationnés
au Gap 5 croifent également pour le ' même objets
3c prennent pour cette ville une fubfîftance dont:
la partie du Sud fe trouve privée. Ainii la famine.
a mis les habitans de l'Amérique dans un vérita-
ble état de guerre.
Nous propoferons plufîeurs moyens , entre lef-
quels la fagelTe de l'AfiTemblée Nationale détermi-^
nera celui qu'elle croira atteindre de plus près^
le but de l'approvidonnement des «Colonies , dans
cette difette dont la durée ne peut plus être
longue*
^:'M
c
^
! ' iii!J
Premier Moyen,
ÎL conafre a prêter aux Commerçans des ports
de mer , plufieurs Flûtes du Roi, qui feront armées
par eux. Ces Flûtes iront cliercher des farines aux
États-Unis , les porteront dans nos Colonies , Se
en rapporteront le produit en France. L'avance de
l'armement Ôc de l'achat des farines , fera fait par
les Places de Commerce , pour le compte de la
Nation, & elles feront rembourfées, au retour des
Flûtes, par le Tréfor national, fans intérêt, fans
com
mifîi
ions
lans
Kon
oraires.
Deuxième Moyen.
Il conviendroit de permettre à nos navires ex-
pédiés pour nos Colonies dé toucher dans les ports
des Etats-Unis ^ mais corntne cette échelle occa*
fionneroit un furcroît de dépenfe , on les en dé-
dommageroit par une prime de 5 liv. par baril de
farine , du poids ordinaire, acheté dans les ports des
États-Unis , êc importés dans nos Colonies. Cette
prime feroit payée fur les certificats d'embarque-
ment, des Confuls François dans l'Amérique Sep-
tentrionale , ôc fur ceux de débarquement, des Ad-
miniflrateurs de nos Colonies.
Les Armateurs de ces navires s'obligeroient, fous
les peines du cautionnement ordinaire, de faire
^.
revenir leurs navires diredement dans les ports de
France , afin d'éviter l'extradion étrangère des den-
rées de nos Colonies. On peut tout d'un coup cal-
culer la grandeur du facrifice que la Nation feroit
pour le foulagement de fes Colonies. En fuppofant
que l'importation nécefTaire des farines étrangères,
s'élève à (?o , ooo barils , la gratification de 5 liv.
par baril , coûteroit ^00 , 000 liv. Nous croyons le;
facrifice bien léger , en le comparant à celui que la
Nation a fait & continue de faire pour fes citoyens
d'Europe.
Troisième Moyen.
On admettroit les bâtimens étrangers dans les
ports d'entrepôt de nos Colonies , ainfi qu'on l'a
toujours pratiqué. Ils y vendroient leurs farines , ôc
û les firops Se taffias n'étoient pas fuffifans pour les
folder , les Adminiftrateurs leur donneroient des
lettres de change mï Londres ou Paris (fous le
cautionnement, s'il le falloit, des Commerçans
nationaux) à un an de vue ( i ). La valeur de ces
lettres de change feroit remife en France en den-
(ï) Les Aiiglois en agiffent ainfi dans leur Commerce avec
les États-Unis. Ce moyen eft d'autant plus convenable , qu'il
fournit celui d'acquitter la dette ancienne que les États-Unis
ont contrariée envers l'Angleterre, & qu'ils augmentent par
de nouvelles tranfiidions.
. M i !»
[ 40 ^
rees coloniales par des navires nariotiaux. La vente
en feroit faite & le produit cont^erti en efpeces ,
avant que les lettres de change fuffent arrivées
'au terme de leur paiement. ,
Qu'atrieme Môyek.
Les trois moyens que nous venons de propofer,
fuppofent que les États-Unis peuvent fuffire a
rapprovifionnement aduel de nos Colonies ^ mais
nous avons lieu de craindre que leurs magafins ne
£okm épuifés , ou du moins confidérablement di-
minués. Il conviendroit donc peut-être mieux d'en-
voyer diredement de France une fubfiftance qui
devient fort incertaine , fi on la tire de l'Etranger y
; &: ici tout retard eft dangereux. Le Parlement de
Bordeaux avoit levé la défenfe de fortir des
farines pour les Colonies ; mais le peuple en mou-
vement dont les inquiétudes paffées s'étendent fur
' l'avenir, a fait craindre au Parlement & à la Com-
mune, que cette exportation ne fut troublée , Se a
porté ces deux Corps â reftreindre la fortie à un baril de
farine par tonneau ( i ). Les navires qui fortent de
(f) Durant le cours de IMmpreffion de ce Mémoire, nous
apprenons que ce Règlement eft déjà en pleme exécurion.
Le navire le Név^Ile , de Bordeaux , aaueUement expédie^ ,
du port de 800 tonneaux, porte à St. Domlngue 800 barils
de farine pour fa cargaifon, & en outre iico autres barils
pour la nourriture des Troupes,
[43]
Bordeaux annuellement pour nos Colonies, jaugent
enfemble environ 80 mille tonneaux. La confom-
mntion annuelle des Colonies , s'cleve à 140
mille barils de farine. Aiiid Bordeaux ne pourroic
fournir que le tiers de la confommation annuelle.
En adoptant pour les autres pqrts de France le
moyen que Bordeaux vient d'employer , on portera
dans nos Colonies 250 mille barils de farine , car
c'eft à peu près à 250 mille tonneaux qu'on doit
évaluer le tonnelage général des navires nationaux
qui font le Commerce de nos Colonies. Mais il
eft abfolument indifpenfable que les Municipalités
employent toute leur vigilance & la force co-a<ftive
qui eft en leur pouvoir, pour préferver les armateurs
des infultes du Peuple.
Il ne peut y avoir de diferte de grains après
une récolte abondante dans prefque toutes les
provinces ^ & la libre circulation rétablira le niveau
dans les provinces qui n'ont pas été aulîi bien
traitées ^ mais il y a difette de fureté pour ceux qui
ont coutume de garnir les marchés , de former les
magafins des villes , Se de pourvoir aux befoins des
provinces. Le terrible mot à' Accapareur eft devenu
un fîgnal de profcription & de maffacre.
Au défaut du pouvoir exécutif, dont la force
détruite ne peut être récréée tout-à-coup, rAfTemblée
Nationale jugera dans fa fagelTe , fi elle ne pourroit
pas employer les exhortations de MM, les Curés.
lit
[ 44 1
des minières de paix , les confidens du pauvre
peuple , en prêtant à la raifon Fattrayant langage
de la charité qui leur eft fî naturelle , prépareroient
peut-être le retour de Tordre êc de la tranquillité.
Les 240 mille barils que les Colonies confom-
ment annuellement , ne font pas un jour & demi
de la fubdftance do i6 millions d'hommes. Ces 16
millions d'hommes confomment en un jour ôc demi
58550O5O00 livres de pain^ Se les 240 mille barils
de farine , à 225 livres chacun , ne donnent que
55,000,000 livres de pain.
Ils ne repréfentent que la nourriture annuelle
de 100 mille hommes qui confommeroient
54,750,000 livres de pain.
Suppofons 100 mille Juifs Polonais fuyant une
perfécution fanglante , ou 100 mille Hollandais
fe dérobant à la tyrannie des Stathoudériens , Ôc
cherchant un azile chez la Nation la plus douce
êc la plus hofpitaliere de l'Europe. Les premiers
font un horde profcrite , difTéminée chez toutes
les Nations, qui la couvrent, peut-être trop injuf-
tement , de mépris. Les autres ont été long-tems
nos ennemis , font encore nos rivaux, ôc leurs
opinions religieufes différent des nôtres. Semblables
aux ennemis des anciens peuples, qui devenoient
facrés dès qu'ils étoient admis à toucher leurs Dieux
domeftiques , ces deux peuples feroient nos frères
ôc nos ainis , dès qu'ils auroient mis un pied fur
[45]
le territoire François; 16 millions d'Kommes ne fe
réuniroient pas pour chafïer des Étrangers qui de-
m-andent rhofpitalité à la liberté naiffante. Si
quelqu'un élevoit fa voix contr'eux , l'indignation
publique l'étoufiferoit bientôt. La Nation ceindroit
avec gloire cette première couronne décernée à {qs
travaux & à fon courage. On ne calculeroit pas
ce que leur fubfiftance pourroit coûter ; & (î des
inquiétudes vagues naiiïoient , une comparaifon
bien fîmple calmeroit toutes les alkrmes ; on verroic
que 100 mille hommes d'augmentation en France
ne prennent pas un jour & demi de la fubUllanœ
de 2(5 millions d'hommes.
Ici 5 ce ne font point Aqs Étrangers , ce n'efl
point un excédent de population qui demande du
pain ; ce font nos frères, nos amis, à^s François;
c'eft une partie intégrante de la Nation ; ce font
ioo mille riches manufaduriers qui n'ont bas de
territoire , mais qui verfent dans le tréfor na-
tional 240 millions ; c'eft enfin , comme iî une
de nos villes de province, de loo mille habitans,
manquoit abfolument de pain : aucun motif rai-
fonnable ne pourroit nous empêcher de la fecourir.
Il refte à juftifier notre oppofîtion à la prétention
de MM. les Députés d'ouvrir tous les ports d'Ami-
rauté aux farines étrangères. Nous ne la difcute-
rons pas férieufement , parce que comme nous
avons d« MM. ies Députés Topinion qu'ils ont
ê
la concrebande en horreur , nous penfons qu ils
n iîidileront pas fur un projet qui lui donneroit
la plus grande adivité. En effet on ne peut fur-
veiller les Étrangers , & même très-imparfaitement
que dans les trois grands ports d'entrepôt : Il les
autres ports étoient ouverts , la multiplicité & en
quelque forte l'obfcurité des lieux du débarque^
ment, rendroientlafurveillance impoiîible. D'ailleurs
ces trois grands ports font en tout tems les chef-
lieux où fe tiennent les navires nationaux ; Se de
ces ports part tous les jours fans exception une
foule de caboteurs & de bateaux de paifage , dont
la fondion eft de diflribuer dans toutes les par^
ties de la côte les approviiionnemens , & de fe
charger des denrées coloniales en retour. Les na*
vires nationaux r^e fréquentent même habituel-
lement que ces trois ports : nous en excepterons
cependant St. Marc ôc Leogane où ils abordent ;
mais le premier port eft à 1 1 lieues du Port-au-
Piince , ôc le fécond à fept lieues. Les verfemens
font faits dans une journée , ôc la nature des
^rifes réglées n'y apporte jamais de retard.
A VerfdiUes y le 2^ Sepumhn 178p.
Signé ,
Ab "11 f ^^P^^^^^ ^^ AJarfeillc,
■ t'
Boyetet , . .~ ydç Bayonnçp
f 4- ]
Corhuii 5 "^
Becbi?,de , . * > . . . . de Bordeaux^
Marchand , 3
Nairac , de la Rochelle,
Alofîieron aîné , .... 7 j t^^t
xVxofneron de l'Aunay, | " de Nantes.
Puchelberg, de VOrknu
Bodinier , . 7 j c^ -
Quefnel, • -S ' ' '^^ Saint-Malo.
Blanche , 7 » rr
Legrand, ...... .S '" ' ''^^^^^'''^
Defchamps, ...... ^
De Montmeau , . . . > . ^ . . . * à.e Rouen,
Dnponc 5 .3
Niel , de Dieppe,
I^e Eray, \
GolTelin^ de Dunkerque &•
de Lille,
Après avoir fini ce Mémoire , Se fur le point de
le remettre à MM. les CommifTaires , noas avons
reçu plufieurs lettres de St. Domingue qui nous ap-
^ prennent qu'au 3 i Juillet , la plus belle farine n'y
valoir que 131 liv. le baril, argent de l'Amérique.
Ce prix , ordinaire pour peu qu'il y ait rareté ^
prouve d'abord , qu'on eft bien loin d'y craindre
la difette-, car le moment du 3 1 Juillet oiï on nous
écrivoit, doit être celui de la plus grande rareté.
m
[48]
La récolte des États-Unis pourvoira abondamment
aux befoins ultérieurs. Ce prix nous prouve encore
que nous avions été mal informés , lorfque nous
avons écrit dans ce Mémoire que toutes les Nations
fe difoutoient les approvifionnemens , & étoient
dans un véiitable état de guerre. Enfin ce prix de
131 liv. prouve fans réplique que les états fournis
par MM. les Députés , fignés par M. du Cliilleau,
de Tapprovifionnemenr de la Colonie- de St. Do-
mingue à fon départ pour France , ne font pas
exads. M. du Chiileau n a obfervé aucune des formes
qui lui étoient piefcrites pour conftater k difette
Se, en dreffer les procès - verbaux. H devoir les
faire dreifer concurremment & en^ préfence de
M. l'Intendant ou des CommiiTaires qui le repré-
fentent. Il devoit prendre l'avis des Chambres
«îe commerce. Nous tranfcrirons ici un extrait de
la lettre de M. le M^K de Caftries aux Adminiftra-
teurs des Colonies , en date du 1 5 Novembre 1784.
ce II y a fans doute quelques circonftances , dans
3t> lefquelles ils ( les Adminijîrateurs ) doivent venir
3î aux fecours des Colonies confiées à leurs foins ,
sî en permettant l'introdudion étrangère d'objets de
5s première néceffité 5 dont on pourroit craindre une
» trop grande difette , mais ils ne peuvent ufer de
55 cette relTource avec trop de circonfpe6lion. Le
35 haut prix d'une denrée, neit pas un motif i!ïf-
55; fifantpour en tirer de l'Étranger: les habitans à^s
» Colonies
»
5>
t 49 3^
h Colonies doivent s'attendre a piyèr quelquefois
i> trèé-chérenlèht des objets ^que le commerce à
»' fon tour eft forcé de leur céder à très'-bàs prix
3»' & ^ perte. Vous jugerez vous-même que 4fts^e«
.> dédommageiîiens, la balance né ferGkpaâ-%ale.
s> Vous n'accorderez au furplus que des pé!:tniffioii$
^ générales 8^ jaTïiais de particulières^^ avim
» d'en venir là , vous en conftaterez h niceffité
par des procès-verbaux de .vifite / ainfi que pat
des avis des Chambres du commerce. »
Si M. le M'^ duChilleau s'étoit conformé à cette
Jgttre & à fes inilruaions particulières , ces procèl-
verbaux faits légalement auroient donné une
véritable connoiffailcè de l'état de St* Domingue^
au lieu que les états quil fournit n'ont ni l'auf
thenticité , ni le èaradere légal qûlfeuls peuvelit
leur donner force de preuves. Ils font dreffés ôc (Ignés
par des officiers militaires ou deîinance, qui n avoiexij:
aucune qualité , Se les Chambres de commerc©
npnt pas été confultées. Il ne paroît pas mem^
q\xon ait fait aucune recherche dans les magâfms
ni chez les fpéôukteurs y^ ces ét^ts ont l'aLr d'un
ouvrage d'imagination. Nous fommes donc fon-
dés a croire que les Colonies n'éprouvent dans cl
moment qu'un renchériiTement fart ordinaire fiif
le prix des farines ; &par' conféqueiit que l'Affem-^
4lée Nationale peut, fans 'craindre de eorfîpromettre
hi fiibfiftance desCoIonies , déclar&r -qu'il nya Iku
à délibérer. ^
■Vi'
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1
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V i
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II
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i!i
ïndép^Jamment du motif que nous venons %,■
£l*ofFnr poui: appuyer ce décret, nous ajouterons
celui dune Lettre que le Roi vient de faire écrire^
aux Adminiftrateiirs de nos Colonies pour leur en-
joindre d'ouvrir les ports d'entrepôt aux farines
étrangères jufqu'au premier Février prochain , ôc
de l'expédition d'un avlfo aux États-Unis pour les
en informer.
Verfailïes , le 1^ Septemhn 178p.
Signé,
R^ftagny , . : . . . ; . 7 p^^^^^.^ ^^ Marfeilk.
Abeille ,•••••»••- 3
Boyetet, ............. de Bayonne*
Gorbun , ....... .*^ i
Bechade , .......>.... de Bordeaux,
Marchand ....... 3
Nairac, . ........... ^e la Rochelle,
•xjrr A / W . '.dît;
Mofneron ame , .-.7 de Nantes:
olneron de 1 Aunay ,3
Puchelberg , . . . ' de VOrient.
Bbdinier ,,......")_ ^ ^^ Saint-Malo;
Queinei ........ 3
?^^'^^^^, ' • 1 ; . , . ., ^a H^w.
Legrand , 3
Defchamps, ...... ^
De MontmeaU , :_. . . >- . . . '. ^ de Rouen*
Dupont, ....... 3 ^
f^iel ,.....•....;; v.^ de Dieppe,
4
[ 50
De Bray ; ! t : r . . . | . - ^
Du Rica , I . . * . . .
GolTeKn, : deDunkerque^deLilk,
L*un de nous y M. Corhun ,, a'e Bordeaux , reçoit
dans le moment une lettre de Bordeaux que nous
joignons à ce Mémoire en original. Cette lettre
décide abfolument la queftion, & déterminera sûre-
ment TAfTemblée Nationale à prononcer fans héfl-
tation , qu'il ny a lieu à délibérer. Elle eft extrê-
mement intérelTante dans la circonftance préfente,
en donnant les plus grandes efpérances d'appro^vi-
fionnement , non-feulement pour nos Colonies ^
mais même pour la France.
Lettre de M. Barboutin a M. Corhun^
député du Commerce de Bordeaux auprès
de rAjJembléc Nationale.
Bordeaux y U z% Septembre 1 7 8^
M.
Pour avoir l'honneur de répondre à la demande
que vous m'avez fait faire par M. votre Neveu.
Le port de la nouvelle Angleterre , où la farine
eft la plus belle & la plus abondante, eft Phik'-
delphie, où tout fe traite en grand.
Mais la faifon eft bien avancée pour rifquer à
y aller , & fe propofer d'en reffbrtir pour nos Co-
lonies , avant le mois de Février. Quelquefois
Dz
1a Dekware ed gelée ôc n eft point navigable 4
caufe des ghces depuis ia fin de Novembre |uf-
qu'à la fin de Février; & j'ai été témoin quil y
a des années que la Delaware ou la Deloire eft
navigable fans interruption, du i^^' Janvier au dernier
de Décembre, Se d'autres années où elle a été inna-
vigable 3 mois de fuite , fans un jour d'intervalle.
A Baltimore on y trouve beaucoup de farine^
de toutes les qualités^ & l'on peut mieux en fortir
de plus aifément l'hiver , parce que comme l'eau y
eft fâlée, elle n'eft pas auflî fujette aux glaces , que
Teau douce.
A Alexandrie & à Georgetown , tout-à-fait
dftns le haut de la rivière de Patowmack, on y
trouve de fuperbes farines en- abondance, & à
meilleur marché , parce qu'il n^ a pas autant de
concurrens.
Mais commme il faut monter dans une rivière
fort longue ^ difficile, on eft fujet à y être rete-
nu dans l'hiver fort long-tems parles glaces 3c par
les vents d'Eft , c'eft-à-dire , depuis le Nord - Eft,
qui font droit debout , qui y régnent fouvent dans
cette faifon. ^
On peut aufTî aller h Edevelek qui eft à la tête
de la baye de Chemeck, qui n'eft qu'à li ou 1 5
milles de Philadelphie , où l'on peut fe procurer
de la farine par la voie de Philadelphie & par
terre ; mais à caufe de l'exportation , ellç devient
m i u l ^
beaucoup plus chère : Teau y eft falée , 3c moins
fujette aux glaces j mais je n'ai vu ce cas qu'en
tems de guerre.
Il faut obferver qu'il s y paiTe des deux ou trois
années de fuite où tous les ports de ces pays*U font
navigables , toute l'année fans interruption ^ mai$
j'en ai vu plufieurs bien mauvaifes & bien con-
traires à la navigation.
Le iz Juillet dernier, le barlj de farine pefanc
1^6 livres, valoir 57 fchelings Se demi Suivant le
prix courant de ce pays-lâ , que Meilleurs Frencîi Se
Neveu m'ont fait voir dans une lettre de la Maifon
de MM. Willin^ , Morrife & Souwick de Phila-
delphie 5 avec efpoir de bailîer à 31 fchelings (>
l^ends , à caufe de la belle récolte à moifïonner.
Le boiffeau de bled pefant 5 S livres, valoir a la
même époque un dollar ou 7 fchelings 6 pends, avec
l'efpoir de baiffer à 6 fchelings.
Le dollar ed chez nous la piaftre gourde : elle
vaut à Alexandrie qui eft en Virginie, 6 fchelings ;
êc 6e l'autre côté de la rivière , qui eft dans le Ma-
ryland , elle y vaut 7 fchelings & demi, comme I
Philadelphie.
New-Yorck eft le port le moins fuj et aux glaces;
ôc j'ai toujours oui dire que l'on entroit Ôc fortoic
du port , toute l'année, fans interruption. Il y a des
farines ; mais je n'en connois point la qualité ni
le prix courant, ni perfonne ici dans cemomeni^.
m
lut III» n' '' itc# to •If*
^
s
[ 54 ] #
Je me fuis Informé à plufieurs Capitaines Amc-
rîcains, arrivés ici depuis fept à huit jours, qui
m'ont dit, de même que MM. French, que la ré-
colte promettoit beaucoup de bled , ôc qu'il pourroic
baifTcr à 6 fchelings le boifTeau, de 5 8 à ^o livres
pefant. Vous aurez la bonté d*obferver que le
fcheling vaut 1 1 fols par tout le Continent , qui
veut dire en Anglois 1 1 pends.
'<iiD@ptii»yotre départ , il y a plu de trois jours
deux : je ne puis pasiinir de doubler a caufe de cela»
Je ne puis , pour le préfent , vous donner d'au-
tres inftrudions fur la farine & fon prix dans le
Continent de l'Amérique feptentrionale.
Je me trouverai toujours bienheureux quandj
vous voudrez m'employer en tout ce qui dépendra-
de moi, Ôc en tout ce que vous voudrez, avec bieiir
du plaifir.
J'ai l'honneur d'être , ôcc,
N. B. A New-Yorck, le dollar y vaut 8 fchelings;
& toujours 1 2 fols le fcheling ou 1 2 pends.
Après ma lettre fignée , ôc l'apoilille ci - defîîis
écrite, j'ai trouvé M. Linch neveu de M Frenchji
qui m'a dit que la lettre du 2 3 Juillet dernier de
MM. Willîng , Morrife Ôc Souwick leur difojt: «c La,
y> récolte ejî Jî abondante qu'il y a apparence que
ï> vous recevrez beaucoup de bkds G* de farines du
[ 55 3
%« Continent chei vous, cette prochaine /lutomnen,
A Ferf ailles, le 2^ Septembre 178^.
Signé,
Roftagny, ....... 7' _. , , , ,,
Abeille, S '^"^'' deMarfeille.
Boyetec, , .' de Bayonne^,
Corbun , . . ^
Bechade , ..>..... ^e Bordeaux^
Marchand , ^
Nairac, • .^. delà Rochelle.
Mofneron aîné ,....") j -kt
Mofneron de l'Aunay, | "^^ iV^/zrei.
Puchelberg , _ . . Je Z'OneTi^
Bodinier , 7 jo.
Quefnel, ....... j ' * * * ^^ •^^^«^•^^Z^.
Blanche , 1
Legrand ........ J ^" ^^^'•^•
Defchamps 5 ...... )
DeMontmeau, .... V ...... Je iî^we/?.
Dupont 5 .£.,... S
^^^^ ) Je Dieppe.
De Bray , 7
Du Rieu, I ..... . dAmiens.
GofTelin, deDunkerqueOrdeLille^,
A VERSAILLES,
De rimpnmerîe de Ph.-D. PIERRES, Premier
Imprimeur Ordinaire du Roi, rue S..Honoré. n\ 23.
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R Ë P L I Q U
Des Députés des Manufaiîureî
ô du Commerce de France a MM, les
Députés de S, Domingue^ concernant
V approvïfionnement de cettt Colonie ,
2.0^
ÈssîEURS les Députas dé Su Domin-
gue trouvent extraordinaire que nous
ayions répondu par un Mémoire de qua^
rante-huit pages > à neuf Pi<sces ou Mé-
moires qu'ils, avoient produits à MM. les
Commiffaires , & qui réunis formoient
enfemble foixante-dix à quatre^vingt pa-
ges. Il eût été plus commode fans doute ^
pour MM* le^ Députés de S. Domingue ,
qu'ils euffent pu attaquer , fans qu'il eût
été permis de fe défendre.
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