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Full text of "Archives néerlandaises des sciences exactes et naturelles"

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ARCHIVES  NEERLANDAISES 


DES 

« 

SCIENCES 

EXACTES  ET  EATERELLES 

publiées  par 

LA  SOCIÉTÉ  HOLLANDAISE  DE  SCIENCES  A HARLEM, 

ET  REDIGEES  PAR 

E.  H.  VON  BAUMHAUER 

Secrétaire  de  la  Société, 


AVEC  LA  COLLABORATION  DE 

MM.  D.  Bierens  de  Haan,  C.  A.  J.  A.  Oudemans,  W.  Koster, 
C.  H.  D.  Buijs  Ballot  et  S.  C.  Snellen  van  Vollenhoven. 


TOME  IX. 


LA  HAYE, 

MARTINIIS  NIJHOFF, 
1874. 


TABLE  DES  MATIÈRES. 


Programme  de  la  Société  Hollandaise  des  Sciences  à Harlem  pour 
l’année  1874 Pag.  i -vii. 

M.  J.  L.  Hoorweg,  Sur  la  théorie  de  Doppler Pag.  1. 

V.  S.  M.  VAN  DEB,  WiLLiGEN  , Sur  la  fausseté  de  la  proposition  que 
que  la  réfraction  des  rayons  lumineux  est  modifiée  par  le  mouvement 
de  la  source  lumineuse  et  du  prisme " 41. 

C.  K.  Hoffmann,  Sur  l’anatomie  des  astérides //  131. 

A.  W.  M.  VAN  Hasselt,  Seconde  communication  sur  les  poisons 

à flèche  Africains " 164. 

C.  H.  D.  Büys-Ballot,  Sur  la  signification  du  Congrès  météorolo- 
gique de  Vienne  pour  l’avenir  de  la  météorologie //  171. 

P.  J.  VAN  Kerckhoff  , Sur  la  constance  ou  la  variabilité  de  la  valeur 

de  combinaison  des  éléments //  178. 

J.  A.  Groshans,  Sur  la  nature  des  éléments  (corps  non-décomposés) 
de  la  chimie //  193. 

E.  H.  VON  Baümhaüer  , Sur  un  météorographe  universel  destiné  aux 

observatoires  solitaires //  230. 

T.  Zaaijer  , Sur  la  scaphocéphalie u 259 . 

A.  C.  OüDEMANS , Sur  les  combinaisons  de  la  quinine  avec  le  benzol , 

le  toluol  et  autres  hydrocarbures //  285. 

P.  Bleeker,  Esquise  d’un  système  naturel  des  gobioïdes //  289. 

Th.  W.  Engelmann,  Sur  l’influenèe  que  la  nature  de  la  membrane 

exerce  sur  l’osmose  électrique • //  332. 

H.  C.  Dibbits,  Sur  la  solubilité  et.  la  dissociation  des  bicarbonates 

de  soude,  de  potasse  et  d’ammoniaque h 348. 

Laiblaw  Purves,  Endothélium  et  émigration //  374. 


II 


TABLE  DES  MATIERES. 


J.  J.  VAN  Renesse,  Sur  les  acides  octylique  et  caprylique Pag.  381. 

M.  Hoek,  Sur  les  comètes  1860  III,  1863  I et  1863  VI //  385. 

^ Sur  les  comètes  de  1677  et  1683;  1860  III,  1863  1 et  1863  VI  it  396. 

J.  DE  JoNG,  Sur  l’intégration  de  l’équation  différentielle  linéaire  du 

second  ordre u 411. 

P.  Seelheim,  Sur  la  salure  des  eaux  de  la  Zélande n 433. 

J,  A.  VAN  ’tHoff,  Sur  les  formules  de  structure  dans  l’espace....  n 445. 

P.  Bleeker  , Sur  les  espèces  insulindiennes  de  la  famille  des  Nandoïdes  //  455 . 

Sur  les  espèces  insulindiennes  de  la  famille  des  Opis- 

tliognathoïdes u 466. 

Maurits  Snellen,  Sur  un  hygromètre  à balance n 477. 

E.  H.  VON  Baumhauer,'  Remarques  au  sujet  de  cette  dernière  com- 
munication  " 4:79. 


I 


Toi?ii:  IX. 


1ère  et  2«ie  iJvraisoii, 


ARCHIVES  NÉERLANDAISES 

DES 

'■  SCIENCES 

EXACTES  ET  NATURELLES 

PUBLIÉES  PAR 

LA  SOCIÉTÉ  HOLLANDAISE  DES  SCIENCES  À HAKLEM, 

Eï  RÉDIGÉES  PAR 

E.  H.  VON  BAIIMHAEEK 

Secrétaire  de  la  Société , 


AVEC  La  collaboration  DE 

MM.  D.  Bierens  de  Haan,  C.  A.  J.  A.  Oudemans,  W.  Koster, 
C.  H.  T>.  Buijs  Ballot  et  S.  C.  Snellon  van  Vollenhoven. 


BRUXELLES 
c.  MUQUARDT. 


LA  HAYE 

MARTINUS  NIJHOFF. 

PARIS  LEIPZIG 

AUG.  DURAND.  T.  O.  WEIGEL. 


LONDRES  NEVV-YORW 

TRÜBNER.&  C". WILLIAMS  & NORGATE.  B.  WESTERMANN  &C°.—  F.  W.  CHRISTERN. 


1874. 


m 


ARCHIVES  NÉERLANDAISES 

DES 

Sciences  exactes  et  naturelles. 


SUR  LA 

THÉORIE  DE  DOPPLER, 

PAR 

M.  J.  L.,HOORWEG, 


1.  En  1842,  le  professeur  Chr.  Doppler  publia  une  brochure 
„ Ueber  das farbige  Licht  der  Doppelsterne y Prag,  Borrisch  u.  André”, 
qui,  en  dépit  de  la  modestie  de  son  titre , attira  l’attention  générale. 

Il  y déduisait  très  simplement  de  la  théorie  des  ondulations 
une  nouvelle  conclusion , applicable  au  son  et  à la  lumière , savoir , 
que  lorsque  la  source  de  vibration  ou  l’observateur  se  meuvent, 
les  tons  et  les  couleurs  doivent  se  présenter  autrement  que  dans 
l’état  de  repos  relatif. 

C’est  cette  conclusion  générale,  désignée  sous  le  nom  de  théorie 
de  Doppler,  que  je  désire  soumettre  à un  examen  plus  détaillé, 
en  faisant  totalement  abstraction  des  conséquences  ultérieures  con- 
cernlîit  la  couleur  des  étoiles  doubles,  etc. 

2.  Lorsqu’un  corps  engendre  de  la  lumière  ou  du  son , il  émet 
une  série  d’ondes.  Si  celles  ci  rencontrent  un  œil  ou  une  oreille, 
elles  y produisent  chacune  un  ébranlement , et  la  succession  régu- 
lière de  ces  ébranlements  excite  la  sensation  d’une  couleur  ou  d’un 
ton.  Suivant  que  le  nombre  des  ébranlements  est  plus  grand  ou 
plus  petit  par  seconde,  la  couleur  ou  le  ton  montent  ou  s’abaissent. 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  1 

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2 


M.  J.  L.  IIOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


Si  maintenant  l'oreille  ou  l’œil  se  meut,  par  exemple  vers  la 
source  de  vibrations,  elle  rencontrera  nécessairement  par  seconde 
un  nombre  d’ondes  plus  grand  que  lorsqu’elle  était  au  repos;  le 
ton  devra  donc  être  plus  élevé.  La  même  chose  arrivera  si  c’est 
la  source  vibratoire  qui  se  meut  vers  l’observateur.  Pour  se  repré- 
senter le  phénomène  plus  clairement,  on  peut  recourir  à quelques 
comparaisons  vulgaires. 

Dans  une  cuve  pleine  d’eau  on  excite  des  ondulations , qui  plus 
loin  vont  frapper  la  main  d’une  personne.  Si  celle-ci  fait  avancer 
sa  main  avec  plus  ou  moins  de  vitesse  dans  la  direction  de  la 
source  des  ondulations,  elle  recevra,  dans  le  même  temps,  plus 
de  chocs  que  lorsqu’elle  la  tient  immobile. 

Quelqu’un  (l’oreille)  se  promène  dans  la  rue  et  y rencontre, 
à des  intervalles  réguliers , un  grand  nombre  de  ses  connaissances 
(les  ondes j ; tous  le  saluent  en  ôtant  leur  chapeau , et  à chacun 
il  rend  son  salut  en  se  découvrant  lui-même.  N’est-il  pas  clair 
que  ce  quelqu’un  devra  donner  des  coups  de  chapeau  plus  mul- 
tipliés (un  ton  plus  élevé)  lorsqu’il  marche  à la  rencontre  de  ses 
connaissances  que  lorsqu’il  les  laisse  défiler  devant  lui  ou  qu’il  suit 
la  même  direction  qu’elles? 

Voyons  maintenant  la  suite  du  raisonnement  de  Doppler  (/.  c.) 

Soit  O un  observateur  O ' A Q'  Q 

• • • 

au  repos , Q une  source  de  vibrations  qui  se  meut  avec  la  vitesse 
a vers  l’observateur;  représentons  par  v la  vitesse  avec  laquelle 
les  ondes  se  propagent,  et  par  t le  nombre  de  secondes  dont 
l’onde  a besoin  pour  parcourir  une  longueur  d’onde  Q A (^  est 
la  durée  de  vibration).  Il  n’y  a à considérer  que  l’influence  du 
mouvement  sur  l’onde  la  plus  rapprochée  de  la  source , parce^ue , 
une  fois  constituées , les  ondes  se  propagent  sans  la  moindre  alté- 
ration jusqu’à  l’observateur. 

Or,  pendant  que  la  première  onde  s’est  portée  de  Q en  A et  a 
parcouru  le  chemin  v la  source  Q est  elle-même  arrivée  en 
Q' , à une  distance  Q Q'  = a La  deuxième  onde  n’a  donc  plus 
besoin  que  du  temps  Xy  nécessaire  pour  parcourir  la  nouvelle 
longueur  d’onde  Q'  A.  On  a par  conséquent: 


il  ) y 


M.  J.  L.  IIOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER.  3 


V t a t=ZV  X J 


et 


V 

où  / est  la  durée  de  vibration  primitive, 
X „ „ „ „ nouvelle. 


Lorsque , au  lieu  de  la  source , c’est  Tobservateur  qui  se  déplace , 
on  considère  la  dernière  onde,  et  on  trouve  ainsi: 

vx-\-ax'=zvt 


M.  Buys-Ballot  présente  la  chose  de  la  manière  suivante. 

Les  vibrations  isochrones  d’un  corps  sonore  parviennent  après 
des  intervalles  égaux  à l’oreille  de  l’observateur,  et  y donnent 
par  conséquent  l’impression  du  ton  même  qui  a été  produit.  Le 
ton  subjectif  est  égal  au  ton  objectif,  dans  le  cas  où  l’instrument 
et  l’observateur  ne  changent  pas  de  place  l’un  par  rapport  à 
l’autre.  Mais  s’ils  sont  en  mouvement  relatif,  le  résultat  sera  dif- 
férent. En  supposant  que  ce  soit  l’instrument  qui  se  meuve , chaque 
vibration  partira  d’un  autre  point  que  la  précédente;  elle  aura 
donc  besoin  d’un  temps  plus  long  ou  plus  court  pour  atteindre  l’obser- 
vateur. La  grandeur  du  changement  que  subit  ainsi  chaque  vibration 
sera , en  donnant  aux  lettres  la  même  signification  que  ci-dessus , 


Les  vibrations  successives  d’un  ton  de  n vibrations  par  seconde 


i 


V -i-  a 


a 


V 


ne  seront  maintenant  plus  séparées  par  un  intervalle  de  - de  se- 

71 


conde,  mais  par  un  intervalle 


Le  ton  perçu 


• 71 

paraîtra  donc  faire  7i'  vibrations  par  seconde  ; 


V 


c’est  là  la  hauteur  subjective. 


■)  Pogg.  Annalen,  t.  LX^I,  p.  321. 


1* 


4 


M.  J.  L.  IIOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


Dans  rhypothèse  où  ce  n’est  pas  la  source  sonore  qui  se  meut , 
mais  Tobservateur,  on  trouve  de  la  même  manière  pour  la  hauteur 
subjective  : 


n'  z=i  n 


Comme  n et  n'  ont  ici  la  même  signification  que  - et  - chez 

t X 

Doppler , les  deux  façons  de  présenter  la  question  conduisent  au 
même  résultat. 

M.  J.  C.  Maxwell  raisonne  de  la  manière  suivante: 

Soit  une  source  lumineuse  exécutant  n vibrations  par  seconde , 
et  éloignée  de  la  Terre  à une  distance  telle  que  la  lumière  ait 
besoin  de  T secondes  pour  arriver  jusqu’à  nous. 

Supposons  maintenant  que  la  distance  de  la  source  lumineuse 
à la  Terre  change , soit  par  le  mouvement  de  la  source  soit  par 
celui  de  la  Terre , de  telle  sorte  que  la  lumière , émise  t secondes 
plus  tard,  atteigne  la  Terre  en  un  temps  T,  Pendant  la  durée  t 
la  source  lumineuse  a exécuté  n t vibrations , lesquelles  ont  atteint 
la  Terre  entre  le  temps  T et  le  temps  / + T' , par  conséquent  en 
^ _l_  J''  — T secondes.  Le  nombre  des  vibrations  qui  atteignent  la 
Terre  par  seconde  est  donc: 


n'  = 

t T ^ T 

Mais , en  nommant  a la  vitesse  avec  laquelle  la  source  lumineuse 
et  la  Terre  s’éloignent  l’une  de  l’autre , et  t;  la  vitesse  de  la  lu- 
mière, on  a: 

atz=v{T'—T), 

par  conséquent 


n t 


t H 


a l 

V 


— n. 


V a 


Les  raisonnements  des  autres  partisans  de  la  théorie  de  Doppler 
se  laissent  tous  ramener  à l’un  des  trois  que  je  viens  d’exposer. 
On  peut  remarquer  que , tandis  que  Doppler  parle  de  raccourcisse- 


*)  Fhil.  Transact.,  1868,  p.  532. 


M.  J.  L.  IIOOKWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER.  5 

ment  des  ondes,  MM.  Buys-Ballot  et  Maxwell  s’attachent  à 
l’augmentation  de  fréquence  des  vibrations. 

3.  Lorsqu’on  considère  les  aspects  divers  sous  lesquels  la  théorie 
de  Doppler  a été  présentée,  et  qu’on  songe  que  tous  ces  points 
de  vue,  si  différents  qu’ils  soient,  ont  conduit  au  même  résultat , 
il  est  difficile  de  croire  qu’une  doctrine  si  claire  et  si  simple  puisse 
encore  être  sujette  aux  objections'. 

Pourtant,  dès  l’année  1852,  elle  eut  à subir  une  attaque  très 
vive  de  la  part  d’un  mathématicien  éminent,  M.  Jos.  PetzvaP), 
et  la  manière  dont  celui-ci  traita  la  théorie , alors  déjà  en  possession 
de  la  faveur  générale , est  telle , qu’on  se  sent  porté  à prendre  en 
pitié  les  savants  qui  se  sont  laissé  abuser  si  déplorablement. 

A l’aide  de  développements  analytiques  compliqués,  il  com- 
mence par  étendre  les  formules  de  Cauchy,  relatives  à la  propa- 
gation du  mouvement  ondulatoire  dans  un  milieu  en  repos,  au 
cas  où  le  milieu  lui-même  se  trouve  à l’état  de  courant  permanent. 

Il  montre  alors  que  la  longueur  d’onde  et  l’amplitude  peuvent 
changer,  mais  non  la  durée  de  vibration,  et  en  conséquence  il 
pose  comme  „ fanal  sur  la  route  de  la  science  à l’usage  de  ceux 
qui  risqueraient  de  s’égarer”  (ce  sont  ses  propres  expressions), 
le  principe  de  constance  de  la  durée  de  vibratM\  principe 
aussi  sûr  et  aussi  inébranlable  que  celui  de  la  conservation  de 
l’énergie. 

Plus  loin , il  dit  à peu  près  ce  qui  suit  : Une  onde  n’est  qu’un 
lieu  géométrique , où  un  certain  cosinus  prend  la  valeur  1 ; toute 
existence  réelle,  toute  matérialité  lui  fait  défaut.  On  n’a  donc 
pas  à s’occuper  de  la  longueur  de  l’onde;  la  seule  chose  dont  il 
faille  tenir  compte,  c’est  la  durée  de  vibration,  et  comme  celle-ci 
n’éprouve  aucun  changement  par  le  mouvement  progressif  du  milieu , 
il  ne  saurait  y avoir  non  plus  un  changement  de  la  couleur  ou 
de  la  hauteur  du  son.  Ce  qui  est  vrai  du  mouvement  progressif 
du  milieu  sera  d’ailleurs  vrai  aussi  de  la  source  lumineuse  ou  de 
l’observateur.  Du  moins  les  raisonnements  de  Doppler  etc.  s’y 
appliquent  de  tout  point. 


*)  Sitz.-ber.  der  K.  Wiener  Acad.  1852,  Bd.  8. 


6 M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER.  , 

Après  avoir  ainsi  réfuté  la  théorie  par  une  démonstration  scienti- 
fique, M.Petzvals’en  moque  agréablement.  A l’argument  du  chapeau, 
rappelé  ci-dessus , il  répond  en  demandant  ce  qui  arriverait  si  entre 
les  passants  et  le  quelqu’un  saluant  il  existait  une  sympathie  plus 
grande  que  celle  qui  se  manifeste  par  un  coup  de  chapeau  ? Si , 
par  exemple,  ils  se  rassemblaient  tous  autour  de  lui,  et  occasi- 
onnaient ainsi  une  presse  par  laquelle  quelques-uns  d’entre  eux 
se  trouveraient  refoulés  latéralement  ? Dans  quel  ton  ce  quelqu’un 
devrait-il  alors  agiter  son  chapeau? 

Au  calcul  de  Doppler  il  oppose  ceci.  Dans  ce  calcul , la  source 
de  vibration  Q rattrape  l’onde  Q A ; mais  pour  deux  raisons  cela 
est  de  toute  impossibilité,  d’abord  pour  la  même  raison  qui  fait 
qu’un  ouvrier  ne  saurait  rattraper  la  brouette  qu’il  pousse  devant 
lui,,  et  en  second  lieu  parce  qu’il  se  produit  en  avant  de  la  source 
sonore  une  compression , qui  a pour  effet  d’accroître  la  vitesse  de 
propagation  de  la  vibration. 

Enfin , M.  Petzval  signale  trois  erreurs  cachées  dans  la  théorie  ' 
de  Doppler. 

V.  Elle  représente  les  ondes  comme  se  produisant  à la  façon 
d’explosions  ; le  corps  sonore , qui  exécute  n vibrations  par  seconde, 
donnerait  naissance  à une  onde  en  un  instant  indivisible,  se  reposerait 

alors  - de  seconde , puis  émettrait  de  nouveau  une  onde , et  ainsi 

n 

de  suite. 

2°.  Elle  attribue  à chacune  de  ces  ondes  une  existence  indé- 
pendante , matérielle. 

3°.  Elle  suppose  que  le  milieu  ne  participe  pas  au  mouvement 
progressif  de  l’instrument,  mais  qu’il  recueille  bien  le  mouve- 
ment vibratoire. 

M.  van  der  Willigen,  de  Harlem,  dans  des  communications 
faites  cette  année  à la  Société  des  arts  et  des  sciences  d’Utrecht 
et  à l’Académie  des  sciences  d’Amsterdam,  s’est  rallié  aux  vues 
de  M.  Petzval.  Cette  adhésion  a d’autant  plus  d’importance  que , 
nonobstant  les  attaques  de  M.  Petzval,  la  théorie  de  Doppler  s’était 
maintenue  jusqu’ici  et  avait  même  trouvé,  par  suite  du  développe- 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THÉORIE  DE  DOPPLER. 


7 


ment  de  Tanalyse  spectrale,  une  intéressante  application  à la 
détermination  du  mouvement  propre  des  étoiles. 

Les  objections  de  M.  van  der  Willigen  n’ont  pas  encore  été 
publiées  par  la  voie  de  l’impression,  mais,  autant  que  je  me  le 
rappelle , elles  sont  tout  à fait  les  mêmes  que  celles  de  M.  Petzval. 

Son  raisonnement  m’a  paru  revenir  au  fond  à cette  phrase  fami- 
lière: „la  pluie  mouille  partout  de  même.” 

Ce  ne  sont  pas,  en  effet,  les  ondes,  mais  bien  les  particules 
d’air  en  contact  avec  l’oreille,  qui  affectent  l’organe  auditif.  Si 
nous  avons  quelque  part  un  diapason  faisant  512  vibrations  par 
seconde,  toutes  les  particules  d’air  qui  l’entourent  finiront  par 
exécuter  aussi  512  oscillations  par  seconde,  aussi  bien  celles  qui 
touchent  l’oreille  que  celles  qui  en  sont  éloignées.  Si  maintenant 
nous  nous  mettons  en  mouvement , l’oreille  viendra  bien  en  contact 
avec  d’autres  particules,  mais  celles-ci  vibrent  de  la  même  manière 
que  les  précédentes,  et  la  membrane  du  tympan  recevra  de 
nouveau  512  chocs  par  seconde.  Tout  reste  donc  précisément  dans 
le  même  état. 

M.  van  der  Willigen  a en  outre  fait  opposition  à la  thèse  exprimée 
par  ces  paroles  de  M.  Maxwell  ^)  : „If  therefore  the  light  of  the  star 
is  due  to  the  combustion  of  sodium  or  any  other  élément  wbich  gives 
rise  to  vibrations  of  definite  period,  or  if  the  light  of  the  star  is 
absorbed  by  sodium  vapour  so  as  to  be  déficient  in  vibrations  of  a 
definite  period,  then  the  light,  when  it  reaches  the  earth,  will  hâve 
an  excess  or  defect  of  rays  whose  period  of  vibration  is  to  that  of 
the  sodium  period  as  v a is  to  v”. 

Cette  opposition,  j’avoue  ne  pas  en  avoir  très  bien  saisi  le 
sens.  La  conclusion  de  M.  Maxwell  me  paraît  être  parfaitement 
exacte,  si  la  théorie  de  Doppler  est  elle-même  fondée. 

4.  Après  avoir  résumé  le  pour  et  le  contre  de  cette  théorie , il 
nous  sera  maintenant  peut-être  possible  de  prononcer  un  jugement. 
Pour  cela , nous  devons  examiner  de  plus  près  les  erreurs  indiquées 
par  M.  Petzval. 

a.  Une  onde  prend-elle  naissance  en  un  instant  indivisible? 


Phil.  Transact.,  1868,  p.  532. 


8 


xM.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


Il  n'y  a personne  qui  à cette  question  ne  fasse  immédiatement 
une  réponse  négative,  car  on  sait  que  pour  la  production  d’une 
onde  une  vibration  entière  est  nécessaire.  Le  temps  dans  lequel 
une  onde  se  constitue  est  donc  la  durée  d’une  vibration.  La  source 
sonore,  supposée  animée  d’un  mouvement  de  translation,  ne  se 
déplace  pas  seulement  après  chaque  onde,  mais  aussi  durant  la 
production  de  cette  onde.  L’instrument  vient  en  contact  avec  de 
nouvelles  particules  du  milieu,  non  pas  après  chaque  vibration, 
considérée  comme  instantanée,  mais  à chaque  phase  de  la  vibration. 
Or,  si  l’on  analyse  le  raisonnement  de  Doppler , on  voit  qu’il  sup- 
pose aux  vibrations  ce  caractère  explosif.  11  y a donc  ici  réellement 
une  erreur,  qui  toutefois  n’a  pas  été  commise  par  M.  Buys-Ballot 
ni  par  M.  Maxvs^ell. 

Mais  il  est  encore  possible  que  le  résultat  reste  le  même,  soit 
que  le  corps , qui  émet  un  son  de  n vibrations  par  seconde , vibre 

en  un  instant  indivisible,  puis  se  déplace  pendant  1 de  seconde, 

n 

puis  vibre  de  nouveau  instantanément,  etc.,  — soit  que  cha- 
que vibration,  comme  c’est  en  réalité  le  cas,,  se  distribue 

sur  - de  seconde,  et  que  par  conséquent  le  mouvement  de  pro- 
n 

gression  s’exécute  en  même  temps  que  le  mouvement  vibratoire. 
Au  point  de  vue  mécanique , rien  ne  s’oppose  à cette  possibilité , 
et  M.  Petzval  lui-même  a montré  qu’en  adoptant  la  seconde 
hypothèse,  la  seule  conforme  à la  vérité,  on  arrive  au  même 
résultat  qu’en  suivant  le  raisonnement  simple  de  Doppler,  à la 
seule  condition  d’admettre  que  le  milieu  ne  participe  pas  au  mou- 
vement progressif  de  la  source  sonore. 

Voici  comment  M.  Petzval  présente  la  chose. 

Lorsque  des  particules,  situées  dans  un  même  plan  ou  à une 
très  petite  distance  de  ce  plan,  sont  écartées  de  leur  position  de 
repos  ou  mises  en  mouvement  de  quelque  autre  manière,  l’onde 


*)  Sitz.-ber.  der  K.  Wiener  Acad.,  t,  VIII,  p.  552, 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


9 


plane  se  partage  immédiatement , à Torigine  de  Taccroissement  de 
temps  en  au  moins  deux  ondes  différentes,  qui  se  propagent 
dans  Tespace,  chacune  avec  la  moitié  de  la  quantité  de  mouve- 
ment , avec  la  même  vitesse  et  en  sens  opposé.  Si  le  déplacement 
primitif  des  particules  est  | = 2 / {x) , où  par  f {x)  on  doit  se 
représenter  une  fonction  qui  ne  diffère  sensiblement  de  0 qu’au 
voisinage  de  a?  =:  0 , on  a donc  après  le  temps  t 

^ Z=lf  {x  — vi)  + f {x  + V t). 

Si  maintenant,  outre  l’excitation  vibratoire  qui  a agi  au  moment 
t z=z  0 , il  s’en  produit  encore  une  nouvelle  au  moment  t-=zâ  ^ 
dans  un  plan  parallèle  au  premier  et  situé  à une  distance  6,  le 
déplacement  à la  distance  x de  l’origine,  sera  devenu  par 
suite  de  l’excitation  postérieure: 

5'  =f{x  — h — v (/  — — (A), 


I Mais  il  y a un  nombre  indéfini  d’excitations  très  petites , agis- 
sant à des  intervalles  infiniment  courts  d et  de  nature  péri- 
odique , excitations  dont  la  source  se  meut  à travers  l’espace  avec 
la  vitesse  a;  le  déplacement  total  à la  distance  x de  l’origine 
sera  donc: 


Ç /{x  — ad  — V {t  — d)  sin  kd.dd 
J O 

rt 

I f{x  — ad  V [t  — d)  sin  kd.dd  j 
J O 


attendu  qu’on  a:  b = ad. 

Posant  dans  la  première  intégrale 

X — ad  — V {t  — d)-=zuj 

elle  devient: 


/ 


/ («) 


sin  k 


V t 


d U. 


V — a V — a 

De  la  nature  même  de  /{ti)  il  suit  d’ailleurs  que  dans  l’ex- 


pression sin  k 


U — X 


V t 


on  peut  omettre  la  terme  Uj  ce  qui 


10 


M.  J.  L.  HOORWEG,  SUR  LA  THEORIE  DE  DOITLER. 


en  posant  en  outre 


donne  à Tintégrale  la  forme 


C 

sin 

V — a 


(v  l — x). 


La  seconde  intégrale  peut  être  trouvéé  de  la  même  manière, 
de  sorte  que  la  valeur  de  § devient: 


sin 


{v  t — x) 


sin 


{v  l ->r  x)  J 


expression  qui  marque  deux  mouvements  ondulatoires  en  sens 
opposé,  et  dont  les  durées  de  vibration  sont: 


2 71  [v  — a)  ^^2  71  [v  + a) 
k V V k 

Lorsque  o izz  0 , c’est-à-dire , lorsque  la  source  de  vibration  ne 
se  déplace  pas,  la  durée  de  vibration  est 


d’où  résulte  pour  les  autres  durées  de  vibration: 


ce  qui  est  tout  à fait  conforme  au  résultat  du  calcul  de  Doppler. 

Ce  calcul  convient  aussi  bien  pour  lés  vibrations  transversales 
que  pour  les  vibrations  longitudinales. 

Comme  beaucoup  d’auteurs,  et  entre  autres  Doppler  lui-même , 
ont  prétendu  que  la  théorie  ne  saurait  s’appliquer  aux  vibrations 
transversales , je  donnerai  encore  un  exemple  pour  ce  dernier  cas. 

Représentons-nous  une  source  lumineuse  0,  qui  excite  des 
vibrations  transversales  dans  l’éther  ambiant*,  et  se  déplace  avec 
une  vitesse  égale  à la  moitié  de  la  vitesse  de  la  lumière;  cher- 
chons le  mode  de  vibration  d’une  particule  d’éther  A,  située  par 
ex.  à 1j  = t2  longueurs  d’onde  du  lieu  initial  de  la  source  lu- 
mineuse ’O,  du  côté  vers  lequel  0 se  meut.  Construisons  de  la 


M.  J.  L.  IIOORWEG.  SUR  LA  THÉORIE  DE  DOPPLER. 


11 


manière  ordinaire  les  points  de  la  ligne  de 
vibration  C D y où  O se  trouve  après  A? 
etc.  de  la  durée  de  vibration , sous  Tinfluence 
seule  du  mouvement  vibratoire , et  indiquons 
ces  positions  par  les  chiffres  (0),  (1),  (2), 
etc.  Comptons  en  outre  le  temps  à partir  du 
moment  où  O occupe  la  position  (0). 


A ne  commencera  alors  à vibrer  qu’après  de  la  durée  de 
vibration,  et  se  trouvera  donc  à ce  moment  dans  la  position  (0). 

La  particule  lumineuse  0 étant  arrivée  dans  la  position  (2), 
cette  même  phase  se  retrouverait  à l’endroit  A après  de  durée 
de  vibration , si  0 ne  s’était  pas  déplacée  ; mais  comme , pendant 
ce  temps,  la  particule  lumineuse  s’est  avancée  vers  A de 
longueur  d’onde,  cette  même  phase  (2)  parvient  déjà  en  A après 
If  de  durée  de  vibration. 

De  la  même  manière,  après  |f  de  durée  de  vibration,  A ne 
se  trouvera  pas  dans  la  position  (3) , mais  déjà  dans  la  position 
(4) , et  par  conséquent,  après  ||  de  durée  de  vibration , c’est-à-dire 
y\  de  durée  de  vibration  après  l’ébranlement  initial  de  A,  cette 
particule  aura  accompli  une  vibration  entière. 

A vibre  donc  deux  fois  plus  vite  que  0,  résultat  entièrement 
conforme  à la  formule: 


Enfin,  je  mentionnerai  encore  que  M.  Klinkerfuss  ^),  par  une 
tout  autre  voie  que  M.  Petzval , mais  en  partant  aussi  de  l’équation 
aux  différentielles  partielles. 


est  arrivé  au  même  résultat. 

On  voit  donc  que  la  réponse  négative , qui  doit  être  faite  à la 
question  posée  en  a,  n’entraîne  nullement  la  chute  de  la  théorie 
dont  nous  nous  occupons. 


V 


d‘^y ^ d^y 


■)  Gôtt.  Nadir.  1868. 


12  M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  ÏIlÉORlE  1)E  DOPPLER. 

b.  Une  onde  est*elle  un  individu  matériel,  progressant  d'une 
façon  indépendante  et  capable  de  produire  des  chocs? 

Lorsqu'on  donne  à cettè  question  une  solution  affirmative,  on 
fait  songer,  selon  M.  Petzval,  à l'homme  qui,  un  jour  de  grand 
vent,  alarmait  ses  voisins  en  criant:  „le  blé  décampe".  C'est  pour- 
tant là  une  faute  que  Doppler,  M.  Buys  Ballot  et  M.  Maxwell 
ont  commise  tous  les  trois , car , bien  que  les  deux  derniers  parlent 
toujours  de  vibrations,  ce  sont  au  fond  les  ondes  qu’ils  ont  en  vue. 

Or , une  onde  n'est  qu'une  fiction , le  lieu  géométrique  des  par 
ticules  qui  ont  été  mises  en  branle  pendant  la  durée  d'une  vibra- 
tion. La  seule  chose  matérielle,  ce  sont  les  particules  d'air  ou 
d’éther,  et  celles-ci  ne  changent  pas  de  place. 

Mais  lorsque  l’observateur  se  déplace,  il  vient  successivement 
en  rapport  avec  toutes  les  parties  de  l’onde,  et  chacune  de  ces 
particules  est  dans  une  phase  difiérente.  Ne  serait-il  pas  possible 
que  la  membrane  du  tympan  vibre  alors  autrement  que  lorsqu’elle 
est  en  repos?  L'exemple  suivant  rendra  probable,  je  crois,  que 
la  vibration  de  la  membrane  du  tympan  est  dans  ce  cas  efifçc- 
tivement  différente  de  celle  des  particules  avec  lesquelles  elle  entre 
successivement  en  contact,  et  que  par  conséquent  l’argument  „la 
pluie  mouille  partout  de  même",  n’est  ici  pas  applicable. 

Figurons-nous  une  nappe  d'eau  agitée  d'un  mouvement  ondu- 
latoire. La  source  des  ondulations  se  trouve  du  côté  A , et  exécute , 
par  exemple,  2 vibrations  par  seconde;  il  en  sera  de  même  pour 
toutes  les  particules  d'eau  sur  la  ligne  d'onde  A 5.  Supposons  en 
outre  deux  nacelles  A et  qui,  partant  des  deux  extrémités  d’une 
onde , se  meuvent  en  sens  opposé , de  telle  façon  qu'elles  arrivent 
l'une  et  l’autre  en  C après  I seconde,  et  que  leur  vitesse  soit  par 
conséquent  la  moitié  de  celle  avec  laquelle  se  propagent  les  ondes. 
Si  le  mouvement  commence  à l’instant  où  la  particule  liquide  A a 
accompli  une  demi-vibration,  l’état  de  l’eau  au  début , après  yV 
seconde , de  seconde , etc. , sera  tel  que  le  représente  la  figure 
ci-contre.  Aux  mêmes  instants , les  nacelles  se  trouveront  dans  les 
positions  indiquées  par  Aq,  A,,  A^  etc.  et  par  Bq,  B B ^ etc.  Si  nous 
considérons  maintenant  l’ondulation  imprimée  à ces  nacelles , nous 


13 


14  M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 

En  ce  qui  concerne  la  seconde  question , on  peut  donc  dire  : 
' Non  J Tonde  n’est  pas  un  individu  ayant  un  mouvement  progressif 
propre;  mais  la  composition  du  mouvement  ondulatoire  des  par- 
ticules d’air  et  du  mouvement  de  translation  de  l’oreille  produit 
dans  la  membrane  du  tympan  un  état  vibratoire  différent  de  celui 
des  particules  avec  lesquelles  elle  vient  en  contact.  Un  examen 
plus  ' spécial  prouve  que  cette  composition  fournit  le  même  résultat 
que  si  chaque  onde  s’avançait  d’un  mouvement  propre  et  impri- 
mait séparément  un  choc  à la  membrane  de  l’oreille. 

Bien  que  la  question  h doive  être  résolue  négativement,  la  théorie 
de  Doppler  ne  s’en  trouve  donc  pas  atteinte. 

c.  Est-il  possible  que  le  milieu  prenne  le  mouvement  vibratoire  de 
la  source,  sans  participer  en  même  temps  au  mouvement  progressif? 

Si  cette  question  devait  recevoir  une  réponse  négative , la  théorie 
que  nous  examinons  serait  irrévocablement  condamnée.  Chacun  voit, 
en  effet,  que  les  formes  différentes  sous  lesquelles  cette  théorie  a 
été  présentée , par  Doppler,  par  M.  Buys-Ballot  et  par  M.  Maxwell , 
reposent  entièrement,  toutes  les  trois,  sur  la  possibilité  en  ques- 
tion. En  outre , les  démonstrations  plus  rigoureuses  de  M.  Petzval 
et  de  M.  Klinkerfuss  ont  aussi  cette  même  hypothèse  pour  fondement. 

A première  vue,  il  semble  étrange  que  le  milieu  prenne  l’un 
des  Wuvements  plus  facilement  que  l’autre  ; mais , en  y regardant 
de  plus  près,  on  aperçoit  entre  eux  tant  de  différence,  que  la 
possibilité  du  fait  peut  bien  être  admise. 

Ce  fait  devient  même  probable,  lorsqu’on  prend  en  considération 
les  arguments  donnés  en  sa  faveur  par  M.  Mach  *). 

Quiconque  a fait  attention  au  mouvement  que  le  passage  rapide 
d’un  bateau  détermine  dans  une  eau  tranquille,  sait  aussi  qu’il 
se  produit  bien  de  l’agitation  en  avant  de  la  proue  et  en  arrière 
de  la  quille , mais  que  ce  mouvement  ne  s'étend  que  sur  un  court 
trajet,  tandis  que  le  moindre  caillou,  jeté  dans  l’eau , y provoque 
des  rides  qui  se  propagent  au  loin. 

Dans  le  cas  où  la  vitesse  progressive  ne  dépasse  pas  certaines 
limites , il  est  donc  probable  que  la  rupture  d’équilibre  du  milieu 


Sitz.  ber.  d.  K.  Wiener  Acad.,  t.  XLI,  p.  546. 


M.  J.  L.  IIOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


15 


ne  sera  appréciable  qu’au  voisinage  immédiat  du  corps  en  mouvement. 

Pour  ce  qui  concerne  ensuite  la  lumière,  les  expériences  de 
M.  Fizeau  ^),  relatives  à la  vitesse  de  la  lumière  dans  une  eau 
courante , ont  confirmé  Fhypothèse  de  Fresnel , suivant  laquelle  les 
corps  en  mouvement  emportent  seulement  la  portion  de  Téther 
inclus  qu’ils  ont  condensée  autour  de  leurs  molécules. 

Or  si,  conformément  à cette  hypothèse,  les  corps  n’entraînent 
même  pas  tout  l’éther  qu’ils  renferment,  il  devient  probable  qu’ils 
ne  chassent  pas  non  plus  devant  eux  l’éther  qui  les  environne. 
On  peut  donc  admettre  hardiment,’  tant  pour  le  son  que  pour  la 
lumière,  que  le  mouvement  progressif  apportera  bien  un  certain 
trouble  au  voisinage  immédiat  de  la  source,  mais  n’exercera  pas 
d’influence  plus  générale. 

C’est  là,  du  reste,  un  point  sur  lequel  l’expérience  doit  prononcer. 

Or , de  pareilles  expériences  existent  effectivement , pour  ce  qui 
regarde  la  lumière.  Elles  reposent  sur  la  circonstance  suivante. 
Si  le  mouvement  de  la  Terre  autour  du  Soleil  se  communique  à 
l’éther  ambiant,  l’indice  de  réfraction  d’une  substance,  pour  un 
rayon  lumineux  donné,  restera  le  même,  que  le  rayon  la  traverse 
dans  la  direction  de  l’est  à l’ouest,  ou  dans  la  direction  opposée. 
Si  au  contraire  l’éther  ambiant  ne  participe  pas  au  mouvement 
de  la  Terre,  l’indice 'devra  éprouver,  à raison  de  la  différence 
dé  direction  susdite , un  changement , de  faible  valeur  sans  doute , 
mais  pourtant  appréciable.  Pour  élucider  ce  point,  nous  suivrons 
M.  Maxwell  dans  les  considérations  qu’il  a présentées  à ce  sujet  ^). 

L’indice  de  réfraction  est  déterminé  par  le  ralentissement  que 
subit  le  rayon  lumineux  lorsqu’il  doit  traverser  un  milieu  autre 
que  le  vide.  Supposons  un  milieu  transparent , d’une  épaisseur  d. 
Soient:  v la  vitesse  de  l’éther  dans  l’air,  v'  cette  même  vitesse 
dans  le  milieu,  V la  vitesse  de  la  lumière  dans  l’air,  V'  cette 
vitesse  dans  le  corps;  la  vitesse  absolue  est  alors  v + V dans 
l’air  et  u'  + V'  dans  le  milieu,  et  le  retard  en  temps  est: 


Comptes  rendus,  1851. 

»)  PM.  Trans.,  1868,  p.  334. 


16 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


tandis  que  le  retard  en  distance,  par  rapport  à la  vitesse  F,  sera 
exprimé  par: 


fl-l 

\ V'  / V \ 

V 2 

1 

\n 

\F' 

)~T\v7~v) 

' y2 

\ V,^ 

’ 

Si  maintenant  Téther  est  réellement  entraîné  par  la  Terre , il  faut , 
d’après  Fresnel,  pour  la  conservation  de  la  continuité  de  l’éther, 
qu’on  ait  la  relation 

V 

— = (fl  = indice  de  réfraction); 


on  a d’ailleurs  aussi,  comme  on  sait,  — z=z  u. 

7 7 y/  r 


Le  second  terme  de  l’expression  ci-dessus  devient  alors 

^ V \ 

— 1 = 0,  et  le  retard  ne  renferme  plus , sauf  la 


|/2 


quantité  d (i^  — 1),  que  des  termes  en  qui  disparaissent. 


parce  que  V est  au  moins  10000  plus  grand  que  V. 

Si  au  contraire  l’éther  ambiant  ne  prend  aucune  part  au  mou- 
vement de  la  Terre,  on  a u = 0;  en  nommant  a la  vitesse  du 
corps  transparent,  on  a d’autre  part , d’après  l’hypothèse  ci-dessus 
rappelée  de  Fresnel, 


d'  = - a,  (/?  un  nombre  variable). 
P 

Le  retard  sera  donc  alors: 


1 ^-\=d 

P ) 


P vy 


expression  dont  le  dernier  terme  sera  très  petit,  sans  être  pour- 
tant négligeable. 

Dans  l’un  des  deux  cas,  le  mouvement  de  la  Terre  n’exercerait 
donc  absolument  aucune  influence  sur  l’indice  de  réfraction  des 
matières  transparentes , dans  l’autre  il  aurait  une  influence  réelle , 
mais  très  petite. 

Par  la  nature  même  des  choses , les  expériences  sont  donc  très 
difficiles.  Aussi  Arago  et  M.  Maxwell  ont-ils  obtenu  des  résultats 
négatifs,  M.  Fizeau  et  M.  Angstrom  des  résultats  positifs. 


M.  .1.  L.  IIOORWIîCr.  SUR  LA  TUÉüRIE  DE  DOPPLER. 


17 


Les  deux  premiers  ont  déterminé  la  déviation  qu’un  rayon 
lumineux  éprouve  en  traversant  un  prisme  de  verre  ; d’abord  dans 
la  direction  de  l’est  à l’ouest,  ensuite  dans  la  direction  opposée. 
Ils  n’ont  ni  l’un  ni  l’autre  pu  observer  quelque  différence,  bien 
que  M.  Maxwell  ait  fait  passer  le  rayon  deux  fois  par  3 prismes 
de  60°,  de  sorte  qu’une  déviation  de  de  la  distance  des  deux 
coniposantes  de  la  raie  D aurait  été  nettement  appréciable. 

M.  Fizeau  a suivi  une  marche  toute  différente. 

On  sait  que  lorsqu’un  rayon  lumineux  polarisé  traverse  oblique- 
ment une  plaque  de  verre , le  plan  de  polarisation , après  le  passage , 
n’est,  en  général,  plus  le  même  qu’avant;  il  a subi  une  certaine 
déviation,  dont  la  valeur  dépend: 

1”.  de  l’inelinaison  du  rayon  sur  la  plaque  de  verre; 

2°.  de  l’angle  que  fait  le  plan  de  polarisation  avec  le  plan 
d’incidence  ; 

3®.  de  l’indice  de  réfraction  du  verre. 

Si  donc  les  deux  premières  conditions  restent  les  mêmes,  une 
variation  de  l’indice , occasionnée  par  le  mouvement  de  la  Terre , 
aura  pour  conséquence  une  variation  correspondante  de  la  déviation 
du  plan  de  polarisation. 

C’est  sur  cette  relation  qu’est  fondée  l’expérience  de  M.  Fizeau. 

Une  pile  de  28 — 40  petites  lames  de  verre  se  trouvait  disposée 
dans  un  polariscope,  qui  était  mobile  autour  d’un  axe  vertical, 
de  manière  à pouvoir  être  facilement  placé  dans  la  direction 
E ~ O et  ensuite  tourné  de  180°.  La  déviation  était  mesurée 
alternativement  dans  les  deux  positions  opposées  de  l’instrument , 
et  toujours  on  la  trouvait  plus  grande  dans  la  direction  de  l’ouest 
que  dans  4a  direction  inverse.  Avec  des  piles  de  glaces  différentes , 
M.  Fizeau  a fait  de  cette  manière  environ  2000  observations  ; 
qui  toutes  ont  donné  le  même  résultat.  On  peut  donc  concéder, 
ce  me  semble,  que  le  mouvement  progressif  ne  se  communique 
pas  à l’éther. 

M.  Angstrom^),  au  moyen  d’observations  sur  des  spectres  fournis 

Ann.  de  Chim.  et  de  Phys.,  1860,  p.  129. 

0 Pogg.  Annalen,  t.  CXXIII,  p.  489. 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  - 2 


18 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


par  des  réseaux,  a également  constaté  une  influence  du  mouve- 
ment annuel  de  la  Terre. 

L’explication  du  fait  qu’Arago  et  M.  Maxwell  n’ont  obtenu 
aucune  différence,  peut  être  déduite  de  la  comparaison  du  degré 
d’exactitude  des  méthodes  suivies.  On  trouve  qu’un  prisme  de 
60'^,  tel  que  ceux  employés  par  M.  Maxwell  au  nombre  de  3, 
fournit,  pour  une  variation  de  l’indice  égale  à l’unité,  un  chan- 
gement de  1,3  dans  la  déflexion  du  rayon;  tandis  que  chacune 
des  28 — 40  lames  de  verre  employées  par  M.  Fizeau  donne , pour 
la  même  variation  de  l’indice,  un  changement  de  4,7  dans  l’angle 
du  plan  de  polarisation. 

La  troisième  question  c peut  donc  être  résolue  affirmativement  ; 
pour  la  lumière,  en  particulier,  nous  ♦avons  signalé  une  série 
d’expériences  qui  rendent  le  fait,  sinon  absolument  certain,  du 
moins  hautement  probable. 

5.  Une  objection  à la  théorie  pourrait  encore  être  tirée  de  la 
circonstance  que  les  formules  de  M.  Petzval  n’indiquent  pas  de 
changement  de  la  durée  de  vibration  dans  l’hypothèse  d’un  milieu 
entraîné  par  un  courant. 

Pour  décider  s’il  y a là  réellement  matière  à difficulté,  nous 
devons  examiner  auquel  des  deux  cas,  distingués  par  nous,  cor- 
respond l’hypothèse  en  question.  On  aura  remarqué,  en  effet,  que 
nous  avons  établi  la  théorie  d’une  manière  toute  différente , selon 
que  c’est  l’observateur  qui  se  déplace,  ou  bien  la  source  sonore. 
Dans  le  premier  cas,  les  particules  d’air  vibrent  comme  à l’or- 
dinaire , mais  l’état  de  vibration  de  la  membrane  du  tympan  change 
par  l’effet  du  mouvement  ; dans  le  second  cas , les  particules  d’air 
acquièrent  véritablement  une  autre  durée  de  vibration,  qui  est 
transmise  sans  modification  à l’oreille.  Si  le  cas  du  milieu  entraîné 
par  un  courant  rentre  dans  notre  première  catégorie,  toute  difficulté 
disparaît.  Si  au  contraire  il  correspondait  à la  seconde , la  formule 
de  M.  Petzval  serait  en  opposition  avec  la  théorie  dopplerienne. 

Or,  en  suivant  avec  attention  le  raisonnement  de  M.  Petzval, 
rapporté  ci-dessus  (4,a)  et  relatif  au  déplacement  de  la  source 
sonore,  et  cherchant  quelle  modification  il  doit  subir  pour  le  cas 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


19 


d’un  milieu  entraîné  par  un  courant,  on  reconnaît  que,  dans  la 
formule  (A),  la  quantité  b ne  doit  alors  plus  se  trouver  sous  le 
signe  de  la  fonction,  mais  à part,  de  la  manière  suivante, 

5 = /’  — V {t  — â)^  f ^oc  V {t  — â)^  + b , 

et,  sous  cette  forme,  b ne  saurait  jamais  rien  changer  au  mode 
de  vibration. 

Le  cas  d’un  milieu  entraîné  par  un  courant  correspond  donc 
au  premier  des  nos  deux  exemples.  Bien  que  la  durée  de  vibration 
des  particules  reste  la  même,  la  membrane  du  tympan  vibrera, 
par  l’éffet  du  mouvement  de  l’oreille,  d’une  manière  différente, 
ce  qui  aura  pour  résultat  un  changement  du  ton  ou , respectivement , 
de  la  couleur. 

En  résumé,  je  ne  vois  aucune  raison  pour  ne  pas  adopter  la 
théorie  de  Doppler , comme  une  conséquence  nécessaire  de  la  doc- 
trine universellement  reçue  des  ondulations. 

6.  Nous  passerons  maintenant  en  revue  les  tentatives  qui  ont 
été  faites  pour  soumettre  cette  théorie  au  contrôle  de  l’expérience. 

Ces  tentavives  sont  assez  nombreuses  pour  ce  qui  regarde  le 
son,  mais  beaucoup  moins  en  ce  qui  concerne  la  lumière. 

Pour  le  son , nous  pouvons  citer  les  expériences  de  MM.  Buys- 
Ballot,  Scot-Russell , E.  Mach,  Beetz  et  Konig;  pour  la  lumière, 
celles  de  MM.  Sestini,  Angstrom  et  Vogel. 

Les  expériences  de  M.  Buys -Ballot  ont  été  exécutées  en  1845, 

sur  le  chemin  de  fer  d’Utrecht  à Maarsen.  Le  trajet  entre  ces  deux 
points  était  parcouru,  alternativement  dans  les  deux  sens,  par 
une  locomotive , sur  laquelle  avaient  pris  place  plusieurs  musiciens , 
dont  un  sonnait  de  la  trompette.  Au  bord  de  la  voie,  en  trois 
stations  différentes , étaient  postés  d’autres  musiciens , chaque  groupe 
comptant  aussi  un  sonneur  de  trompette.  Tantôt  les  musiciens 
établis  sur  l’accotement  de  la  voie  écoutaient  le  ton  donné  sur  la 
locomotive,  tantôt  les  personnes  portées  par  le  train  s’appliquaient 
à saisir  le  ton  émis  aux  stations.  Les  résultats  sont  répartis  en 

')  Pogg.  Annalen,  t.  LXVI,  p.  321. 

2^ 


20  M.  L.  J.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 

7 groupes,  dont  chacun  contient- 12  observations,  savoir,  6 pour 
le  rapprochement,  6 pour  la  fuite. 

Il  a été  rèconnu,  à chaque  passage,  que  le  tou  arrivant  était 
toujours  plus  haut,  le  ton  partant  toujours  plus  bas.  L’intervalle 
était  aussi,  à peu  de  chose  près,  en  accord  avec  les  formules 
rapportées  ci-dessus. 

Ces  expériences , faites  avec  le  plus  grand  soin  et  avec  un  nom- 
breux personnel  (il  y avait  14  personnes  constamment  occupées) , 
sont  une  confirmation  sérieuse  et  importante  de  la  théorie  de 
Doppler.  A ce  titre,  elles  ont  toujours  été  Fancre  de  salut  à 
laquelle  se  raccrochaient  les  partisans  de  cette  théorie,  lorsque 
M.  Petzval  les  serrait  de  trop  près. 

Au  sujet  des  expériences  de  M.  Russell,  en  Ecosse,  je  n’ai  nulle 
part  pu  trouver  des  détails  ; elles  paraissent  toutefois  avoir  été  de 
la  même  nature  que  celles  dont  il  vient  d’être  question. 

Il  a aussi  été  fait  des  expériences  avec  locomotives  en  France, 
mais  on  s’y  proposait  uniquement  de  rechercher  quels  sont , parmi 
les  tons  émis  sur  un  train , ceux  que  le  bruit  des  wagons  étouffe 
le  plus  facilement. 

Les  expériences  de  M.  Mach  sont  d’un  autre  genre. 

Outre  quelques  observations  sur  l’effet  perçu  au  passage  de  balles 
de  fusil  perforées , observations  que  lui-même  regarde  comme  incer- 
taines, il  a fait  des  expériences  avec  un  appareil  de  son  invention , 
et  qui  figure  aussi  sous  le  nom  de  „ appareil  de  Mach”  sur  le  cata- 
logue de  M.  Konig,  à Paris. 

Il  se  compose  d’une  longue  tige  creuse,  qui  peut  tourner  rapi- 
dement autour  de  son  milieu.  Dans  l’axe  de  rotation,  qui  est 
également  creux,  une  soufflerie  envoie  de  l’air,  qui  pénètre  dans 
la  cavité  de  la  tige  et  s’écoule  à l’extrémité,  par  uue  espèce 
d’anche,  en  produisant  un  ton. 

Si  maintenant,  l’appareil  étant  en  marche,  on  se  place  à une 
certaine  distance  dans  le  plan  de  la  tige  tournante,  on  entend  à chaque 
révolution , suivant  M.  Mach , 2 battements  ; lorsqu’on  se  place  sur  le 
prolongement  de  l’axe,  on  n’entend  au  contraire  qu’un  son  uniforme. 


*)  Sitz.  ber.  der  Wiener  Acad.,  t.  XLI,  p.  543. 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER.  21 

Cette  expérience  est  facile  à répéter  sans  appareil.  On  n’a  qu’à 
prendre  à la  main  un  corps  quelconque  émettant  un  son , et  à le 
faire  tourner  avec  rapidité.  On  se  convainc  alors  très  bien  qu’il 
ne  se  produit  qu’une  variation  alternative  de  l’intensité  du  son, 
mais  pas  de  battements  véritables.  Ceux-ci  d’ailleurs  ne  pourraient 
être  obtenus  avec  un  seul  corps  sonore,  puisque  leur  formation 
exige  sans  doute  toujours  deux  tons  émis  simultanément. 

A mon  avis,  l’expérience  de  M.  Mach  n’a  donc  aucune  valeur 
pour  la  question  en  litige. 

M.  Beetz  0 s’est  aussi  livré  à des  expériences  analogues , où  il 
employait  des  diapasons  tournants.  Il  a remarqué  que , dans  ce  cas , 
le  changement  de  vibration  était  le  résultat  de  la  différence  des 
positions  que  les  bras  du  diapason  prenaient  pendant  la  rotation , 
différence  combinée  avec  la  constance  du  plan  de  vibration.  Il 
explique  donc  les  battements,  qui  du  reste  s’entendaient  aussi 
quand  on  appliquait  l’oreille  aux  parties  fixes  du  tour,  par  des 
considérations  analogues  à celles  qui  rendent  compte  de  l’expérience 
du  pendule  de  Foucault. 

Les  expériences  de  M.  Beetz  ne  touchent  donc  en  rien  la  théorie 
qui  nous  occupe. 

Il  en  est  de  même  des  expériences  que  M.  Kônig  a mentionnées 
dans  son  catalogue.  Il  s’agit  de  ' deux  diapasons,  dont  l’un 
(ut^)  fait  512  et  l’autre  508  vibrations  entières,  et  qui  donnent 
par  conséquent  4 battements  par  seconde.  La  longueur  d’onde  de 
ces  tons,  dans  l’air,  est  d’environ  65  centimètres.  Si  donc  on  tient 
le  diapason  le  plus  aigu  tout  près  d’une  des  oreilles,  et  le  plus 
grave  à 65  centimètres  de  l’autre,  et  qu’on  fasse  alors  mouvoir 
ce  dernier  en  1 seconde  jusqu’à  l’oreille,  un  des  4 battements 
disparaîtra.  J’ai  souvent  répété  cette  expérience , mais , tout  comme 
plus  haut,  sans  pouvoir  constater  autre  chose  qu’un  renforcement 
ou  un  affaiblissement  du  sou.  J’ai  aussi  fait  l’expérience  avec 
deux  diapasons  à l’unisson  ut.^ , successivement  à la  distance  de 
65  et  de  130  centimètres.  A l’une  comme  à l’autre  de  ces  distances, 
on  n’entendait  alors  qu’un  seul  battement,  bien  que,  dans  le  second 


’)  Pogg.  Annalen,  t.  CXXVIII,  p.  490. 


22 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


cas,  d’après  la  théorie,  il  aurait  dû  y en  avoir  deux.  Si  Ton  tient 
un  des  diapasons  devant  T oreille , tandis  qu’un  aide  s’éloigne  avec 
l’autre  en  courant,  on  entend  de  forts  battements,  mais  tou- 
jours en  nombre  précisément  égal  à celui  des  pas  faits  sur  le  sol.  Le 
bruit  de  ces  pas  occasionne  un  affaiblissement  momentané  du  son. 

Dans  tous  les  cas  analogues,  que  j’ai  variés  de  bien  des  manières, 
les  alternatives  périodiques  de  force  et  de  faiblesse  du  son  ont 
une  influence  beaucoup  plus  grande  que  la  petite  variation  de  la 
hauteur  du  ton.  Comme  preuve  surabondante , on  peut  encore  citer 
le  fait  que,  lorsqu’on  ne  tient  pas  l’un  des  diapasons  devant 
l’oreille,  c’est-à-dire  lorsqu’on  expérimente  avec  un  seul  instrument, 
les  battements  continuent  à se  faire  entendre  tout  aussi  distinctement. 

L’examen  des  différentes  recbercbes  expérimentales , entreprises 
pour  résoudre  la  question  par  rapport  au  son,  nous  conduit  donc 
à conclure  que  les  expériences  de  M.  Buy  s Ballot  sont  les  seules 
qui  possèdent  une  valeur  positive.  Cette  conclusion  augmente  sans 
doute  l’intérêt  qui  s’attache  à ces  expériences,  mais  elle  nous 
oblige  aussi  de  les  soumettre  à une  critique  sévère  et  à une  véri- 
fication soignée. 

Cette  critique,  elles  pourraient  la  soutenir  avec  éclat  sur  tous 
les  points,  si  l’estimation  de  l’intervalle  n’avait  été  rendue  extrê- 
mement difficile  par  le  bruit  de  la  locomotive , et  si  plusieurs  des 
observateurs  musiciens  n’avaient  prétendu,  contrairement  à la 
théorie , que  le  ton  arrivant  était  seulement  plus  aigu  un  instant 
avant  le  passage , mais  avait  à une  distance  plus  grande  la  même 
hauteur  que  le  ton  objectif. 

Une  confirmation  du  résultat  obtenu  paraissant  ainsi  très  dési- 
rable, j’ai  essayé,  malgré  les  embarras  et  les  difficultés  qui  en- 
tourent ces  expériences,  de  les  répéter,  et  cela  en  faisant  usage 
de  deux  locomotives,  qui  passeraient  l’une  devant  l’autre  à toute 
vapeur.  Grâce  à l’obligeance  de  M.  Verloop,  ingénieur  en  chef  du 
Chemin  de  fer  rhénan,  ces  locomotives  furent  mises  à ma  dispo- 
sition , mais  seulement  pour  l’espace  de  trois  quarts  d’heure,  après 
quoi  la  voie  devait  de  nouveau  rester  libre  pour  le  service. 

J’eus  en  outre  l’avantage  d’obtenir  le  précieux  concours  de 


M.  J.  L.  IIOORWKG.  SUR  LA  THEORIE  DE  ÜOPPLER. 


23 


plusieurs  habiles  musiciens , MM.  R.  Hol , Haak , Witte  et  quelques 
autres,  parmi  lesquels  deux  hautbois. 

Mon  plan  était  de  faire  jouer  le  sifflet  d’une  des  locomotives 
tout  le  long  du  trajet,  et  d’en  laisser  apprécier  le  ton  aussi  bien 
par  les  observateurs  qui  se  trouvaient  sur  ce  même  train,  que 
par  ceux  qui  occupaient  l’autre  train.  La  comparaison  ultérieure 
devait  alors  m’affranchir  de  la  variabilité  de  ton  du  sifflet , condition 
nécessaire  pour  que  cet  instrument  énergique  pût  être  employé  à 
la  place  de  la  trompette. 

Dans  chaque  train  devaient  prendre  place  4 personnes , un  haut- 
bois pour  donner  des  tons  de  comparaison  fixes,  deux  musiciens 
pour  observer  la  différence , et  une  personne  chargée  de  déterminer 
la  vitesse  du  train. 

Deux  expériences  eurent  effectivement  lieu  d’après  ce  programme, 
au  jour  qui  nous  avait  été  fixé.  Malheureusement,  il  faisait  ce 
jour-là  un  vent  si  effroyable , que  la  première  fois  le  sifflet  ne  fut 
pas  entendu  du  tout,  et  la  seconde  fois  seulement  à l’instant  du 
passage.  Néanmoins,  il  fut  reconnu  avec  certitude  que  dans  ce 
passage  le  son  baissait  de  un  ton  et  demi,  variation  qui  corres- 
pond parfaitement  à la  vitesse  de  15  mètres,  que  les  deux  loco- 
motives possédaient  à ce  moment. 

Il  nous  parut , toutefois , que  le  peu  de  temps  qui  restait  après 
ces  deux  épreuves  serait  mieux  employé  si  la  moitié  des  obser- 
vateurs se  plaçaient  au  bord  de  la  voie,  pendant  qu’une  seule  des 
locomotives  continuerait  à marcher,  en  sifflant  sans  interruption. 

Trois  fois  on  put  ainsi  constater  que,  tandis  que  le  sifflet  ne 
faisait  pas  entendre  aux  observateurs  du  train  un  ton  supérieur 
à mi^ , ceux  postés  sur  la  voie  percevaient  à l’approche  du  train  un 
ton  un  peu  plus  élevé  que  le  fa  suivant  ; il  y avait  donc  un  intervalle 
d’un  peu  plus  de  % ton,  en  accord  avec  la  vitesse  de  la  marche 
à ce  moment , savoir  14  mètres.  Après  le  passage , le  ton  s’abais- 
sait au-dessous  de  mi^  mais  d’une  quantité  qu’il  fut  impossible  de 
déterminer  exactement , à cause  de  la  violence  des  rafales  du  vent. 

Après  ces  trois  passages,  le  temps  convenu  était  écoulé,  de 
sorte  qu’il  fallut  cesser  les  expériences.  Je  compte  toutefois  les 
reprendre  dès  qu’il  se  présentera  une  occasion  favorable. 


24  M.  J.  L.  IlOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 

Les  observations  dont  il  vient  d’être  question  sont  peu  nom- 
breuses; néanmoins,  si  Ton  considère  que  les  personnes  qui  y ont 
pris  part,  artistes  connus,  avaient  acquis  une  grande  sûreté  de 
jugement  dans  rappréciation  des  intervalles  musicaux,  et  si  Ton 
tient  compte  en  outre  du  mode  de  contrôle , on  ne  pourra  se  refuser 
à regarder  ces  observations  comme  une  confirmation  réelle  de 
celles  de  M.  Buys-Ballot. 

J’ai  même  trouvé  confirmé  un  résultat  qui  plaide  moins  en  faveur 
de  la  théorie,  savoir,  que  c’est  seulement  à proximité  que  le  ton 
arrivant  possède  un  excès  de  hauteur,  tandis  qu’à  une  distance 
plus  grande  il  est  égal  au  ton  objectif. 

Je  m’explique  ce  fait  de  la  manière  suivante.  Dans  des  con- 
ditions aussi  difficiles  que  celles  ou  se  font  ces  expériences,  il 
ne  saurait  être  question  d’estimer  des  intervalles  plus  petits  qu’un 
demi-ton.  A chaque  observation  on  disait:  ceci  est  le  ton  mi, /h, 
ré  J mais  jamais:  ceci  est  un  ton  situé  entre  mi  et/h , ni  quelque 
chose  d’analogue. 

Pendant  l’accroissement  graduel  de  la  vitesse,  on  ne  percevait 
donc  pas  , les  variations  successives  du  ton,  mais  on  remarquait 
seulement  la  différence  lorsque,  par  l’accélération  du  mouvement, 
le  ton  était  monté  de  mi  à fa.  Il  en  résultait  naturellement  qu’on 
devait  entendre  d’abord  pendant  quelque  temps  mi,  puis  brusquement 
fa'^  et  c’est  effectivement  ce  qui  eut  lieu. 

Si  nous  considérons  maintenant  les  expériences  qui  ont  été  faites 
au  sujet  de  la  théorie  de  Doppler  dans  son  application  à la  lumière , 
nous  devrons  écarter  celles  de  M.  Sestini  et  de  M.  Angstrôm, 
comme  n’ayant  aucune  valeur  pour  l’objet  en  question. 

M.  Sestini  ^ ) a exécuté  des  recherches  très  laborieuses , et 
sous  d’autres  rapports  fort  utiles,  concernant  la  couleur  des  étoiles, 
et  il  a cru  remarquer  que  les  étoiles  violettes  se  trouvent  en  plus 
grand  nombre  dans  la  région  du  ciel  vers  laquelle,  suivant  les 
astronomes,  se  dirige  notre  système  solaire. 

Mais  ce  fait  ne  prouve  rien,  parce  que  la  conclusion  qu’on 

*)  Mem.  sojjr  a i colori  delle  stelle  del  caialogo  di  Baiîy , 1845. 


M.  J.  L.  IIOOP.WEG.  SUR  LA  THEORIE  UE  DOPPLER.  25 

veut  en  tirer  part  de  l’idée  inadmissible  que , dans  un  monde  stel- 
laire en  repos , toutes  les  étoiles  auraient  la  même  couleur.  Cela 
a été  montré  si  clairement  par  M.  Buys-Ballot  (/.  c.) , que  le 
travail  de  M.  Sestini  perd  tout  intérêt  pour  nous. 

M.  Angstrom  1)  a calculé  que  dans  l’étincelle  électrique  les  par- 
ticules incandescentes  se  meuvent,  en  sens  opposé,  avec  une 
vitesse  de  80 — 90  milles  géographiques  par  seconde. 

Il  en  a conclu  que,  si  l’on  observait  au  spectroscope  une  étin- 
celle jaillissant  obliquement,  les  raies  brillantes  produites  par  ces 
particules  devaient  se  déplacer  sensiblement  dans  le  spectre,  et 
cela  suivant  les  deux  directions  opposées.  On  comprend  aisément 
que  M.  Angstrom  n’ait  rien  vu  de  semblable,  attendu  que,  par 
suite  de  la  succession  rapide  et  continue  des  particules,  il  y en 
avait  toujours  de  nouvelles  à la  place  des  précédentes,  de  sorte 
que  le  spectre  restait  le  même. 

Après  le  travail  de  MM.  Kirchhoff  et  Bunsen,  et  le  rapide 
développement  des  recherches  spectroscopiques , on  ne  pouvait  man- 
quer de  faire  promptement  la  remarque  que,  si  la  théorie  de 
Doppler  est  vraie,  les  raies  produites  par  une  substance  donnée , 
dans  le  spectre  d’une  source  lumineuse  en  mouvement,  doivent 
se  montrer  à une  autre  place  que  celles  de  la  meme  substance 
dans  une  source  en  repos. 

A ma  connaissance,  cette  remarque  a été  faite  pour  la  première 
fois  par  M.  Fizeau,  en  1848,  mais  elle  est  restée  sans  applica- 
tion jusqu’en  1869,  époque  où  M.  Zollner  conçut  la  même 
idée , d’une  façon  indépendante , et  en  tira  immédiatement  des 
conséquences  pratiques. 

M.  Zollner  a même  imaginé  pour  cet  objet  un  spectroscope  spécial , 
aujourd’hui  déjà  bien  connu , le  ,, spectroscope  à réversion”,  qui  pour 
une  même  lumière  donne  deux  spectres  superposés,  dans  l’un 
desquels,  à l’aide  de  la  réflexion,  les  couleurs  se  succèdent  pré- 
cisément en  sens  inverse.  Le  changement  de  place  d’une  raie  paraît 
donc  doublé  dans  cet  .instrument. 

l^etensk.  Akademie  Handlingar , 1853. 

D Pogg.  Annalen,  t.  CXXXVIIl,  p.  32. 


26  M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 

M.  Zôllner  a en  outre  appelé  l’attention  sur  la  circonstance  que 
la  rotation  du  Soleil  fournit  un  excellent  moyen  pour  mettre  la 
théorie  de  Doppler  à l’épreuve.  Il  est  clair,  en  effet,  que  si  on 
dirige  le  spectroscope  d’abord  sur  les  pôles  du  Soleil,  et  ensuite 
sur  le  bord  de  l’équateur,  on  devra,  d’après  cette  théorie,  ne  pas 
observer  de  déplacement  des  raies  dans  le  premier  cas , mais  bien 
dans  le  second. 

Cette  vue  ingénieuse  a conduit  M.  Vogel,  directeur  de  l’obser- 
vatoire de  M.  Bulow,  à entreprendre  des  recherches,  qui  effec- 
tivement, en  1871,  ont  entièrement  confirmé  les  prévisions  de 
M.  Zôllner.  Du  déplacement  mesuré  il  a en  outre  déduit,  pour 
la  vitesse  à l’équateur,  une  valeur  qui  s’accorde  à peu  près  avec 
celle  trouvée  par  une  autre  voie  ^). 

Ces  observations  de  M.  Vogel  ont,  pour  la  théorie  de  la  lumière, 
la  même  importance  que  celles  de  M.  Buys-Ballot  pour  la  théorie 
du  son. 

Arrivé  à la  fin  de  ma  tâche , je  résùmerai  en  peu  de  mots  les 
résultats  obtenus: 

1®.  La  théorie  de  Doppler  est  une  conséquence  nécessaire  de 
la  théorie  des  ondulations. 

2^  Les  objections  théoriques  qu’on  y a faites  ne  tiennent  pas 
devant  un  examen  attentif. 

8®.  Les  expériences  et  les  observations  la  confirment  d’une 
manière  satisfaisante.  , 

4°.  Il  convient  de  suivre  la  voie  ouverte  par  MM.  Zôllner, 
Huggins,  Secchi  et  Lockyer,  pour  arriver,  par  l’observation  du 
déplacement  des  raies  spectrales,  à la  détermination  du  mouve- 
ment propre  des  étoiles. 

*)  Sitz.  her.  der  K.  Sachs.  Gesellsch..  1871. 


Utrechï,  18  Septembre  1873. 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


27 


Kemarques  additionnelles. 

Quelque  temps  après  que  j’eus  envoyé  le  travail  qui  précède  à 
la  Kédaction  des  Archives  néerlandaises  j je  reçus  communication , 
par  une  entremise  bienveillante,  du  Mémoire  longtemps  attendu 
de  M.  van  der  Willigen  sur  le  même  sujet  ^). 

Je  dois  dire  que  la  première  lecture  me  convertit  presque  en- 
tièrement , et  que  ma  propre  défense  de  la  théorie  de  Doppler  me 
parut  insuffisante. 

Les  objections  adressées  à cette  théorie  par  M.  van  der  Willigen 
sont,  en  effet,  tout  autres  que  je  ne  me  Tétais  figuré  d’après  la 
Communication  sommaire  faite  devant  la  Société  des  arts  et  des 
sciences  d’Utrecht. 

Dans  le  Mémoire  en  question,  le  reproche  capital  n’est  plus, 
comme  chez  M.  Petzval,  que  le  mouvement  progressif  n’est  pas 
également  communiqué  à Téther;  au  contraire,  l’hypothèse  de 
Fresnel  est  admise  sans  difficulté. 

Non,  l’objection  a une  portée  plus  grande , elle  est  fondamentale. 
M.  van  der  Willigen  s’accorderait  encore  mieux  avec  l’explication 
élémentaire  de  Doppler  lui-même  qu’avec  les  développements  plus 
savants  de  ses  successeurs,  — si,  pour  lui,  la  chose  entière  n’était 
pas  tout  simplement  impossible. 

La  théorie,  aussi  bien  que  l’expérience,  prouvent,  dit-il,  qu’une 
impulsion  isolée,  qùi  n’est  pas  soutenue  par  d’autres,  parties  du 
même  centre,  ne  se  communique  pas,  comme  telle , aux  molécules 
du  milieu.  Cette  impulsion  est  déclarée  instable,  et  une  série  de 
pareilles  impulsions  instables  ne  peuvent  être  conçues  réunies  en 
un  même  point,  mais  elles  se  dispersent,  chacune  à part,  sous 
forme  de  courants,  ou  bien  elles  se  désagrègent  en  vibrations. 


")  Over  de  onhoudhaarheid  der  stelling  dat  de  hreking  der  lichtstralen  wordt 
geicijzigd  door  de  beweging  van  lichtbron  en  prisma.  {Ver si.  en  Meded.  der  K. 
Akad.  van  Wetensch.  2e  sér.,  t.  VII). 

On  trouvera  plus  loin  la  traduction  française  de  ce  Mémoire  de  M.  van  der 
Willigen.  ■ (Note  de  la  Réd.) 


28 


M.  J.  L.  UOORWEG.  SUR  LA  TÜEORIE  ÜE  DOPPLER. 


dont  les  périodes  ne  sont  dans  aucun  rapport  avec  la  période  de 
vibration  de  la  source  primaire. 

Lors  donc  qu’on  intègre  une  suite  d’impulsions  différentielles 
reçues  par  une  certaine  molécule  d’éther,  on  fait  une  opération 
qui  peut  être  praticable  analytiquement,  mais  qui  ne  saurait  jamais 
se  réaliser  dans  la  nature,  à moins  que  toutes  ces  impulsions 
différentielles  ne  proviennent  d’une  seule  et  même  source  en  repos. 
Tout  le  labeur  des  partisans  de  Dopplér,  pour  établir  sa  théorie 
sur  une  base  purement  mathématique,  est  donc  un  véritable  nonsens, 
et  pourrait  être  comparé  à l’addition  de  3}  pommes  et  7 J poires. 

Indépendamment  de  cela,  il  a été  commis,  par  M.  Petzval, 
M.  Klinkerfuss  et  autres,  des  erreurs  de  tout  genre,  qui  à elles 
seules  suffiraient  pour  faire  rejeter  leurs  résultats. 

Quant  aux  expériences,  celles  qui  concernent  le  son  n’ont  rien 
de  commun  avec  la  question  en  litige.  En  mesure  rhytbmique, 
marquée  par  le  ton  de  l’instrument , sont  expulsés  de  grands  volumes 
d’air.  Portées  par  les  vibrations,  ces  impulsions  de  condensation 
arrivent  à l’oreille  de  l’observateur , où  elles  excitent  d’une  manière 
mécanique , par  une  action  qui  leur  est  exclusivement  propre , des 
vibrations  fixes , que  le  rbythme  de  l’émission  rattache  seul  encore 
au  ton  fondamental -de  l’instrument.  Il  n’y  a là  rien  qui  ressemble 
à une  onde  raccourcie  ou  à une  vibration  raccourcie. 

Pour  ce  qui  regarde  la  lumière,  les  résultats  expérimentaux 
qu’on  invoque  à l’appui  de  la  théorie,  savoir,  ceux  de  M.  Huggins, 
de  M.  Secchi  et  de  M.  Vogel,  sont  attribués  simplement  à des 
influences  perturbatrices,  telles  que:  l’aberration  de  sphéricité  des 
lentilles,  des  défauts  dans  l’incidence  des  rayons  sur  le  prisme, 
des  changements  de  température,  etc. 

On  le  voit,  de  toute  la  théorie  il  ne  reste  qu’un  tissu  d’er- 
reurs et  d’abSurdités.  Allant  plus  loin  encore  que  M.  Petzval,  M. 
van  der  Willigen  renverse  non-seulement  les  considérations  thé- 
oriques, mais  aussi  les  expériences,  et  ces  dernières  il  les  traite 
même  le  plus  impitoyablement.  Il  n’est  donc  pas  étonnant  qu’après 
la  lecture  d’un  pareil  réquisitoire  on  se  sente  ébranlé  dans  sa 
conviction , au  moins  pour  un  instant.  Car  je  dois  ajouter  qu’une 


M.  J.  L.  HOORWECx.  SUR  LA  THÉORIE  DE  DOPPLER. 


29 


étude  nouvelle  et  attentive  ne  m’a  pas  satisfait,  et  m’a  ramené 
à l’opinion  exprimée  dans  l’article  qu’on  a lu  plus  haut.  Je  serai 
donc  forcé  de  contredire  M.  van  der  Willigen. 

Cela , toutefois  , n’est  pas  facile  , car  dans  un  passage  il  nous 
dit:  „ Puissent  ces  simples  remarques  contribuer  à dissiper  les 
illusions  des  partisans  de  Doppler,  et  à les  détourner  de  renou- 
veler sans  cesse,  toujours  armés  de  ces  mêmes  expériences  (celles 
de  M.  Buys-Ballot)  leurs  incursions  sur  le  domaine  de  la  catop- 
trique”;  et  à la  fin  de  son  Mémoire  nous  lisons:  „A  ceux  qui 
s’appuieraient  sur  des  considérations  analytiques,  je  dirai  d’avance 
que  je  ne  suis  pas  disposé  d’accepter  une  onde  sans  dépression 
et  qu’un  amas  de  pierres,  même  précédé  d’un  signe  d’intégration, 
n’est  pas  encore  un  édifice.” 

Il  ne  nous  reste  donc  guère  de  ressources,  puisqu’on  repousse 
dédaigneusement  et  les  expériences  et  les  considérations  mathé- 
mathiques.  Mais , n’insistons  pas  sur  ce  point  ; ce  qui  nous  importe , 
ce  n’est  pas  la  forme  que  l’auteur  a donnée  à sa  pensée,  c’est 
le  fond  même  de  la  question.  Celle-ci  a,  en  effet,  un  intérêt  con- 
sidérable, car,  si  la  théorie  de  Doppler  est  vraie,  elle  pourra 
rendre  plus  tard,  avec  des  moyens  perfectionnés , d’inappréciables 
services  à l’astronomie. 

En  premier  lieu  donc:  Quelle  théorie  parle  d’impulsions  insta- 
bles , qui  se  désagrègent  en  vibrations  de  périodes  inconnues  ? 

A ce  qu’il  me  semble,  tout  le  premier  paragraphe  du  Mémoire 
est  consacré  à l’exposition  d’une  idée  toute  nouvelle  concernant  la 
propagation  des  vibrations,  idée  qu’on  ne  rencontre  dans  aucune  théorie 
antérieure , et  qui  certainement  n’est  pas  confirmée  par  l’expérience. 

A cette  idée  nouvelle  s’applique  exactement  l’observation  que 
M.  van  der  Willigen  adresse  aux  partisans  de  Doppler:  „Non, 
je  ne  crois  pas  qu’on  puisse  ....  donner  d’un  phénomène  aisé- 
ment explicable  une  interprétation  arbitraire , ériger  ensuite  celle- 
ci  en  loi  naturelle  inattaquable,  etc.” 

Lorsque  M.  Petzval  posa  son  ^principe  de  la  conservation  de 
la  durée  de  vibration” , il  eut  la  bonté  d’en  donner  en  même  temps 
une  démonstration  en  règle.  ^ 


30 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


M.  van  der  Willigen  parle  à chaque  instant  de  Timpossibilité 
qu’une  molécule  isolée,  dans  un  état  de  vibration  fixe (?),  puisse 
transmettre  intégralement  sa  vibration  au  milieu  lorsqu’elle  est  en 
mouvement;  mais  toujours  il  néglige  d’appuyer  son  assertion  des 
preuves  nécessaires. 

Si  la  théorie  et  l’expérience  établissent  le  fait  avec  tant  de  clarté, 
pourquoi  alors  ne  pas  rendre  claire  pour  tout  le  monde  une  notion 
si  caractéristique? 

Il  est  très  possible  que  la  théorie  de  M.  van  der  Willigen  soit, 
avec  le  temps,  reconnue  exacte;  mais  je  constate  que,  dans  le 
Mémoire  où  il  l’expose,  on  en  cherche  en  vain  une  apparence 
de  démonstration. 

Nous  pouvons  donc  nous  contenter  d’examiner  les  objections  que 
M.  van  der  Willigen  fait  aux  vues  des  partisans  de  Doppler. 

Un  assez  grand  nombre  de  ces  objections  out  également  été 
présentées  dans  mon  propre  travail.  Il  n’est  donc  pas  nécessaire 
de  les  passer  ici  toutes  en  revue. 

Ce  que  j’ai  soutenu,  et  ce  que  je  soutiens  encore,  revient  à ceci: 

Si  l’on  suppose  que  le  mouvement  progressif  de  la  source  lumi- 
neuse ne  se  communiqne  pas  à l’éther,  alors,  comme  l’a  montré 
M.  Petzval,  la  durée  de  vibration  des  molécules  de  l’éther  est 
bien  réellement  changée , de  la  manière  qui  avait  été  admise  par 
Doppler  sur  des  fondements  moins  exacts. 

Comme  d’ailleurs,  suivant  Cauchy,  la  déflexion  produite  par 
un  prisme  dépend  de  cette  durée  de  vibration , un  rayon  lumineux 
émanant  d’une  source  en  mouvement  sera  aussi  réfracté  autrement 
qu’un  rayon  originaire  d’une  source  en  repos. 

Mais  M.  van  der  Willigen  a découvert  une  erreur  dans  le  raison- 
nement de  M.  Petzval,  et  l’importance  qu’il  y attache  se  laisse 
voir  à la  fin  de  son  Mémoire , où  il  est  fait  encore  une  fois  allusion 
à cette  onde  sans  dépression,  que  M.  Petzval  aurait  introduite 
clandestinement. 

M.  van  der  Willigen  dit,  en  effet:  „M.  Petzval  admet  que 
f (m)  et  F {u)  s’annulent  chacune  séparément,  aussitôt  que  u 
prend  une  valeur  sensible , positive  ou  négative  ; or  cet  état  initial 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


.31 


Tautorise  seulement  à admettre  une  pareille  annulation  pour  la 
somme  f (u)  + F (i<).  Il  fait  de  ce  déplacement  une  onde  sans 
dépression”. 

Ce  n’est,  toutefois,  pas  M.  Petzval  qui  se  trompe  ici,  mais 
M.  van  der  Willigen. 

M.  Petzval  avait  bien  certainement  raison  de  faire  chacune  de 
ces  fonctions  séparément  égale  à zéro,  car  cela  doit  être  ainsi. 
L’équation  en  question, 

^ = f {cc  — St)  -{-F  {x  St), 

provient , en  effet , de  l’équation  aux  différentielles  partielles  connue 

où  (p  est  une  fonction  dont  la  dérivée  par  rapport  à x représente 
la  vitesse,  et  celle  par  rapport  à t la  condensation. 

En  représentant  donc  par  ip  (x)  la  vitesse , et  par  (x)  la  con- 
densation initiale , on  doit  avoir , pour  t z=zO, 

(iç)  et  — — s-  X (x) 

dx  d t 

Mais,  en  dehors  des  limites  — e et  + e pour  x , il  n’y  a au  com- 
mencement ni  vitesse,  ni  condensation;  par  conséquent,  en  dehors  de 
ces  limites,  ip  [x)  et  x {x)  doivent  être  nulles  chacune  sépa- 
rément, et  par  suite,  aussi  chacune  séparément, 

f{u)  = 0 et  F (w)  = 0. 

(Voir,  à ce  sujet:  Duhamel,  Cours  de  Mécanique ,i.  11,^.^!^). 
Le  raisonnement  de  M.  Petzval  me  semble  donc  inattaquable 
sous  ce  rapport.  Il  n’est  pas  atteint  non  plus  par  l’observation 
de  MM.  Klinkerfuss  et  Ketteler. 

Ceux-ci  disent:  l’équation  finale  de  M.  Petzval  est: 

^ z=z sin (st  — x)  — sin  {st  + x) , 

s C s C s C A’  + C 

et  en  y faisant  a?  = 0,  elle  devient 

t C . kst  C kst 

S = sin sin 

s — c s — c s -h  c s — c? 


32 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


c’est-à-dire,  tout  autre  chose  que  le  déplacement  de  la  particule 
primaire. 

Mais  ils  oublient  que  lorsque,  dans  l’expression 

. h lu  — X si) 

■ sin  — : , 

s — c 

M.  Petzval  omet  u , cela  ne  peut  avoir  lieu  que  pour  des  valeurs 
de  a;  > s on  — s. 

Quant  à l’onde  sans  dépression-,  le  reproche  ne  serait  justifié 
que  si  M.  Petzval  avait  pris  J f {u)  du  entre  les  limites  -f-  e et  0 , 
au  lieu  de  + e et  — s. 

* f 

D’ailleurs,  quand  même  il  aurait  procédé  ainsi,  quelle  différence 
notable  en  serait-il  résulté?  Aucune , car  cette  intégrale  détermine 
seulement  la  constante  C. 

Jusqu’à  nouvel  ordre,  je  continue  donc  à regarder  le  calcul  de 
M.  Petzval  comme  la  vraie  base  de  la  théorie  de  Doppler. 

Mais,  dit  M.  van  der  Willigen,  ce  calcul  vous  laisse  dans  l’em- 
barras aussitôt  que  la  direction  dans  laquelle  la  source  se  meut 
ne  passe  pas  par  l’observateur. 

Ceci,  toutefois,  demande  à être  examiné. 

Il  faut  alors  opérer  dans  l’espace,  et  on  a l’équation 

_1_ 

dt  \dx^  dtj‘^  ^ dz^)  ‘ 

Introduisons-y , comme  nouvelle  variable, 
r—V  x^  y Z J 

on  obtient  facilement 

d^  d^  (ry), 

dp  dr^ 

d’où  résulte 

__/(r  + al)  +/'  (r  — al) 

cp 


r 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THÉORIE  DE  DOPPLER. 


33 


La  composante  de  la  vitesse , suivant  la  direction  de  x , est  alors 

“ “ ^ “ “'l  ~ ^ I ('■  ~ \ 

et  le  déplacement  dans  la  même  direction, 

§ z=z(udlz=z  (r  + at — f (r  — al){ ^F(r-\-a() — F'{r — al)\ 

3 ar‘^1  ) ar^  ( ) 

où 

/,  et  f/  sont  les  dérivées  de  f et  f' 

F et  F/  les  intégrales  de  f et  f . 

I 

En  conformité  complète  avec  le  résultat  obtenu  par  M.  Petzval , 
le  déplacement  total  suivant  x est  maintenant: 

X = /■'  \f(r  — c,e  + a [1  — 6))  sin  k o d 6 

— /''  (f  — c^d  — a (/  — e)^  sin  k d dd~^ 

— f — — - j"/^  (^r  — d -j-  a (t  — sin  kd  dd  — 

3 (3  a (r  — ^4  L 

— F'  (r  ~ d — ct{t  — sin  A:  0 (/  0 J 

où  Cj  et  sont  les  composantes  suivant  a;  et  r de  la  vitesse  du 
mouvement  de  la  source. 

Ici  se  fait  valoir  réellement  l’objection  de  M.  van  der  Willigen. 
Comme,  dans  l’expression  de  X,  entrent  aussi  les  expressions 

î — , etc.,  sa  valeur  ne  changera  pas  d’une-manière  périodique. 

r — c^d 

En  outre,  composée  avec  les  expressions  de  Y et  Z,  qui 
renfermeront  aussi  des  termes  analogues  , elle  donnera  chaque  fois 
une  autre  résultante. 

Il  semble  donc,  effectivement,  que  dans  ce  cas  il  ne  soit  pas 
permis  d’intégrer.  Mais,  si  l’on  fait  attention  au  dénominateur 

et  à la  faible  valeur  de  — et  de  -1,  on  poura  sans  doute  négliger 

a a 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX. 


3 


34 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


Q 

etc. , et  alors  rexpression  devient , en  opérant  comme  M.  Petzval  : 

V ^ k {si  — ^)  , rk  ■ k {si  r) 

X = Pæ;  sin  — ' + Q a;  sin  -1 i . 

s C4  5 + C4 

Des  formes  analogues  seront  trouvées  pour  Y et  Z , et  par  con- 
séquent le  déplacement  réel  sera: 


où 

et 


V =:  Pr  sin 


k {si  — r) 
s — C4 


-P  Qr  sin 


k {si  H-  r)  ^ 
s -h  ’ 


Q = - 


C, 

^2  — C4  l)‘^ 


+ 


S^ 


C/ 

{>•  — 64  ty 


L’influence  du  mouvement  de  la  source  lumineuse  provient  donc 
uniquement  de  la  composante  de  la  vitesse  de  la  source  suivant 
la  droite  qui  joint  l’origine  à l’observateur. 

Dans  l’exposé  qui  précède , nous  avons  laissé  l’origine  se  déplacer 
avec  la  particule  lumineuse , de  telle  sorte  que  les  plans  des  coor- 
données restent  parallèles  à leurs  positions  antérieures. 

La  direction  de  vibration  change  donc  lentement , mais  cela  ne 
constituerait  une  difficulté  que  si  la  source  avait  opéré  un  déplace- 
ment sensible  dans  l’intervalle  d’une  seule  vibration. 

Or,  si  nous  mettons  le  nombre  des  vibrations  à 500  billions 
par  seconde , et  la  vitesse  de  la  source  lumineuse  à 35000  mètres , 

elle  parcourra  seulement,  en de  seconde, 

500.10“ 


1 

mm. , 

7,000,000 

c’est-à-dire  un  chemin  encore  au  moins  4000  fois  plus  petit  que 
la  longueur  d’onde  de  D. 

Dans  les  développements  donnés  plus  haut , je  le  répète , on  n’a 
pas  négligé,  comnie  le  fait  croire  M.  van  der  Willigen , le  carré  de  la 
vitesse  de  la  source  lumineuse  en  regard  de  la  première  puissance 
de  celle  de  la  lumière,  mais  seulement  les  expressions 


M.  J.  L.  HOORWICG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


35 


Je  ne  vois  donc  pas  pourquoi  la  formule  (pour  V)  ne  représenterait 
pas  ce  qui  a réellement  lieu  dans  le  cas  considéré. 

La  durée  de  vibration  ainsi  obtenue  s’accorde  en  outre  exacte- 
ment avec  celle  que  M.  Ketteler  ^ ) a trouvée  par  une  voie  toute 
différente. 

M.  van  der  Willigen  voudrait  savoir  en  quel  point , lorsque  la 
source  se  meut  dans  une  direction  oblique , nous  devons  proprement 
nous  la  représenter. 

Il  me  semble  j en  aucun  point  spécial  ; mais  en  des  points  diffé- 
rents, tout  juste  comme  se  fait  le  mouvement. 

Peu  importe  d’ailleurs,  pourvu  seulement  que  toutes  les  impul- 
sions différentielles  se  soutiennent  convenablement  les  unes  les 
autres.  Or  cela  est  effectivement  le  cas,  ainsi  qu’il  résulte  de  la 
nature  même  de  l’équation  (pour  V) , qui  prend  une  forme  périodique 
pure,  à la  seule  condition  que  la  vitesse  de  la  source  lumineuse 
n’atteigne  pas  une  valeur  trop  considérable,  et  que  l’observateur 
n’en  soit  pas  trop  rapproché.  On  ne  tombe  dans  des  difficultés  que 
si  l’on  veut  admettre , avec  M.  van  der  Willigen , que  la  vibration 
doit  retourner  vers  la  source.  Alors , dans  l’entre-temps , la  source 
s’est  déplacée,  et  la  vibration  ne  pourrait  plus  savoir,  à moins 
que  ce  ne  fût  par  instinct,  vers  où  se  diriger. 

Cette  objection  contre  le  mouvement  oblique,  M.  van  der  Willigen 
se  l’est  réellement  créée  lui-même. 

A la  page  50  de  son  Mémoire,  je  lis  „ qu’il  n’est  pas  permis  de 
faire  concourir  des  surfaces  d’onde  dont  les  normales  ont  des  di- 
rections différentes.” 

La  question  de  savoir  si  cela  est  permis  ou  non,  doit  être 
tranchée  par  le  calcul , et  on  a trouvé  ainsi  que  la  chose  peut  très 
bien  se  faire. 

En  outre,  immédiatement  après,  M.  van  der  Willigen  convient  que 
dans  les  interférences  et  dans  l’application  du  principe  de  Huyghens 
on  emploie  effectivement  des  surfaces  d’ondes  à normales  différentes  ; 
mais  il  éclaircit  ce  point  en  disant:  oui,  mais  alors  on  reçoit 

')  Dr.  E.  Ketteler,  Astronomische  Undulations-théorie , Bonn.  P.  Neusser, 
1873,  p.  141. 


36  , M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 

rimage  sur  un  écran,  et  ou  l’observe  dans  la  lumière  diffuse. 

J’en  conclus  que  M.  van  der  Willigen  ne  ferait  pas  difficulté 
de  reconnaître  que , si  l’on  parvenait  à rendre  visible  sur  un  écran 
le  spectre  de  Sirius,  et  dans  ce  spectre  la  raie  F de  l’hydrogène, 
cette  raie  ne  coïnciderait  réellement  plus  avec  sa  position  ordinaire. 

Mais  alors,  la  théorie  de  Doppler  n’est  donc  pas  encore  si 
déraisonnable  ! 

J’arrive  enfin  à une  objection  capitale  de  M.  van  der  Willigen , 
savoir,  l’absorption.  Nous  nous  trouvons  ici  sur  un  terrain  peu 
exploré  et  difficile,  et  ce  ne  peut  être  qu’une  ironie  de  la  part 
de  M.  van  der  Willigen,  lorsqu’il  met  les  partisans  de  Doppler 
en  demeure  de  nous  donner  une  notion  bien  claire  de  l’action 
absorbante. 

Quoi  qu’il  eu  soit,  on  ne  peut  pas  se  représenter  l’absorption 
sans  admettre  une  action  des  molécules  de  la  vapeur  sur  les  par- 
ticules de  l’éther , et  est-il  alors  si  étrange  de  croire  que  pendant 
le  mouvement  de  ces  molécules  l’action  soit  autre  que  dans  l’état  de 
repos  ? 

En  tout  cas , pour  une  direction  oblique  de  la  source , les  choses 
ne  se  passeront  pas  autrement  que  lorsque  la  source  marche  droit 
vers  l’observateur,  attendu  qu’on  n’aura  toujours  affaire  qu’à 
la  composante  de  la  vitesse  prise  suivant  la  direction  de  l’obser- 
vateur. 

Pourquoi  on  traite  de  singulière  la  conclusion  que,  dans  cette 
hypothèse , la  lumière  de  la  vapeur  de  sodium  incandescente  serait 
transmise  par  la  vapeur  de  sodium  refroidie  et  en  mouvement, 
c’est  ce  que  je  ne  comprends  pas.  Cette  vapeur  refroidie  ne  peut 
pourtant  pas  savoir  que  les  rayons  en  question  proviennent  de  sa 
sœur  plus  chaude,  et  que  c’est  par  conséquent  son  devoir  de  les 
arrêter!  Non,  cette  vapeur  absorbe  tous  les  rayons  pour  l’ex- 
tinction desquels  elle  présente  les  conditions  nécessaires,  quelle 
que  soit  d’ailleurs  l’origine  de  ces  rayons. 

Quant  à la  nature  de  ces  conditions , elle  est  encore  totalement 
inconnue;  il  n’y  a donc  pas  à en  raisonner.  Des  'expériences 
seules  pourront  ici  prononcer,  expériences  analogues  à celles 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER.  3V 

de  M.  Klinkerfuss  ^ ) sur  la  vapeur  de  brome , mais  qui  devront  être 
encore  plus  délicates. 

Il  ne  faut  pas  oublier , en  outre , que  tout  ce  que  nous  savons 
de  l’absorption  a été  obtenu  par  des  expériences  faites  dans  les 
conditions  mêmes  dont  il  s’agit  ici , savoir , dans  l’atmosphère  en 
mouvement  de  la  Terre. 

En  résumant  brièvement  tout  ce  qui  précède , je  conclus  ainsi  : 

Je  n’ai  aucune  raison  spéciale  de  repousser  la  théorie  de  M. 
van  der  Willigen,  mais,  jusqu’à  présent,  elle  est  entièrement 
dénuée  de  preuves. 

Aux  développements  de  M.  Petzval , rappelés  ci-dessus , M.  van 
der  Willigen , M.  Klinkerfuss  et  M.  Ketteler  n’ont  opposé  que  des 
considérations  inexactes.  La  démonstration  de  la  théorie  de  Doppler, 
telle  qu’elle  résulte  de  ces  développements,  demeure  donc  tout  à 
fait  intacte , et , étendue  au  cas  de  la  direction  oblique  de  la  source 
lumineuse , elle  donne  encore  des  résultats  acceptables.  Des  autres 
objections  de  M.  van  der  Willigen , aucune  ne  soutient  l’examen , 
sauf  peut-être  celle  qui  concerne  l’absorption,  phénomène  dont 
personne  ne  connaît  encore  le  fin  mot. 

Aucune  raison  ne  nous  oblige  donc  jusqu’  ici  à abandonner  la 
théorie  de  Doppler  ; il  y a , au  contraire , des  motifs  suffisants  pour 
la  maintenir  encore  debout. 

Examinons  maintenant  les  critiques  que  M.  van  der  Willigen 
adresse  aux  expériences , et  en  premier  lieu  celles  qui  concernent 
les  expériences  avec  locomotives. 

Plus  haut,  j’ai  tâché  de  montrer  que  ces  expériences  sont  les 
seules  qui  aient  une  valeur  incontestable.  M.  van  der  Willigen, 
toutefois,  les  récuse  formellement,  pour  les  raisons  que  j’ai  déjà 
exposées.  Ce  ne  sont  pas,  selon  lui,  des  tons  qui  parviennent  à 
l’oreille,  mais  des  volumes  d’air  expulsés,  qui  produisent  dans  le 
milieu  atmosphérique  des  condensations  et  des  dilatations,  ne  se 
rattachant  que  par  un  faible  lien  au  ton  fondamental  de  l’instru- 


) GUt.  Nachr.,  1870,  p.  226. 


38  M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 

ment.  Pourtant , un  peu  plus  haut , il  est  dit  que  ces  condensations 
et  ces  dilatations  progressent  selon  un  rhythme  marqué  par  le  ton 
de  l’instrument.  Leur  période  sera  donc  apparemment  encore  la 
même  que  celle  du  ton  fondamental.  Mais  alors  ce  n’est  autre 
chose  que  l’onde  courante  ordinaire , que  tout  le  monde  admet  et 
dans  laquelle  chaque  particule  d’air  vibre  d’une  manière  spéciale. 
Si  donc  la  durée  de  cette  vibration  n’est  pas  changée,  le  ton 
entendu  ne  sera  sans  doute  pas  changé  non  plus. 

Qu’on  lise  le  § VI,  N®.  24,  du  Mémoire  de  M.  van  der 
Willigen,  et  on  reconnaîtra  avec  moi  qu’il  est  impossible  de 
saisir  en  quoi  ces  impulsions  de  condensation  et  de  dilatation 
différeraient  des  condensations  et  des  dilatations  ordinairement 
admises. 

Si  le  raisonnement  de  M.  van  der  Willigen  avait  quelque  fon- 
dement, il  en  résulterait  que  lorsqu’on  se  trouve  droit  devant 
l’ouverture  de  l’instrument  à vent,  on  devrait  entendre  un  autre 
ton  que  lorsqu'on  est  placé  dans  une  direction  oblique. 

Non,  des  arguments  pareils  ne  suffisent  pas  pour  enlever  d’un 
coup  toute  importance  aux  expériences  de  M.  Buys-Ballot. 

En  passant  à'  la  critique  à laquelle  M.  van  der  Willigen  a 
soumis  les  observations  de  déplacement  des  raies  spectrales , nous 
nous  trouvons  subitement  transportés  sur  un  terrain  plus  solide 
et  plus  agréable. 

Cette  critique  est  au-dessus  de  mes  éloges , et  donnera  certaine- 
ment à réfléchir  aux  spectroscopistes. 

Différentes  sources  d’erreur  y sont  successivement  signalées  avec 
une  admirable  sagacité,  et  l’auteur  nous  montre  comment  le  rap- 
prochement ou  l’éloignement  des  étoiles , le  singulier  élargissement 
de  la  raie  F dans  les  taches  solaires,  etc.  peuvent  facilement 
s’expliquer  à l’aide  de  ces  erreurs. 

Lorsqu’on  a lu  avec  attention  le  § 12  du  Mémoire,  on  ne  sait 
vraiment  plus  ce  qui  reste  de  toutes  ces  belles  découvertes. 

Peu  de  chose,  ce  me  semble. 

Si  l’on  ne  tient  pas  compte  de  toutes  les  circonstances  indiquées 
par  M.  van  der  Willigen,  et  qu’on  ne  détermine  pas  d’avance. 


M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 


39 


à la  manière  des  astronomes,  Tinfluence  qu’elles  peuvent  avoir, 
les  résultats  n’ont  aucune  valeur. 

Sur  un  point  je  ne  me  trouve  ici  pas  d’accord  avec  M.  van  der 
Willigen,  savoir,  au  sujet  de  l’importance  du  spectroscope  à réver- 
sion de  M.  Zollner. 

Le  principe  sur  lequel  cet  instrument  est  fondé  a déjà  rendu 
de  si  bons  services  dans  l’héliomètre  et  l’opthalmomètre , que  très 
certainement  il  montrera  aussi,  plus  tard,  la  même  valeur  dans 
sa  nouvelle  application.  Jusqu’à  présent,  je  dois  le  reconnaître, 
l’instrument  n’a  pas  encore  fourni  grand’chose. 

Je  ferai  remarquer , toutefois , que  le  déplacement  des  raies  dans 
le  spectre  des  bords  du  Soleil,  s’il  n’a  pas  été  mesuré,  a au 
moins  été  vu  à différentes  reprises  au  moyen  de  cet  instrument; 
et  c’est  une  circonstance  assez  importante,  que  ces  observations, 
concernent  le  déplacement  de  la  raie  D , qui  est  beaucoup 
moins  réfrangible  que  la  raie  F. 

A cette  observation  de  M.  Vogel,^les  remarques  de  M.  van  der 
Willigen,  touchant  l’influenee  de  la  température,  ne  paraissent 
guère  applicables. 

Dans  les  Archives  du  Musée  Teyler  ^ vol.  I,  table  IV,  p.  230, 
je  vois  que,  pour  la  déviation  de  la  raie  />,  M.  van  der  Wil- 
ligen a trouvé , avec  le  prisme  Merz  II , les  valeurs  suivantes  : 

à 18°,5  C 62°,8’30",1 

et  à 12°,7  C 62°,8’30',5. 

En  considérant  que  M.  van  der  Willigen  n’obtenait  la  seconde 
entière  que  par  estime,  on  peut  bien  négliger  une  différence  de 
0",4 , et  dire  que  pour  un  changement  de  température  de  4*^  la 
déviation  n’a  pas  varié  d’une  manière  appréciable. 

Or,  comme  personne  ne  pensera  qu’un  aussi  notable  change- 
ment de  température  puisse  avoir  lieu  dans  le  temps  assez  court 
que  le  Soleil  met  à passer  devant  l’instrument , l’observation  faite 
avec  le  spectroscope  à réversion,  par  M.  Vogel,  serait  tout  en 
faveur  de  la  théorie  de  Doppler. 


40  M.  J.  L.  HOORWEG.  SUR  LA  THEORIE  DE  DOPPLER. 

Finalement,  je  ne  dois  pas  omettre  de  mentionner  les  belles 
expériences  qui  ont  été  faites  par  M.  Mayer  ^ ) , avec  des  diapasons 
à Tunisson. 

Lorsque  deux  pareils  diapasons  sont  placés  sur  leurs  caisses 
de  résonnance,  les  vibrations  de  F un  se  communiquent  à Tautre 
à de  grandes  distances. 

Mais  cela  n’a  pas  lieu , si  Ton  se  met  à courir  avec  le  diapason 
vibrant,  en  le  posant  seulement  sur  la  caisse  après  qu’on  a 
commencé  de  courir  et  en  l’enlevant  aussi  avant  de  s’arrêter. 

Prend-on  au  contraire  un  diapason  faisant  deux  vibrations  de 
moins  que  l’autre,  et  le  porte-t-on  vers  celui-ci  avec  une  rapidité 
suffisante,  en  observant  les  prescriptions  indiquées,  alors  le  ton 
remonte  de  deux  vibrations , et  le  second  diapason  se  met  à résonner. 

J’ai  répété  ces  deux  expériences  avec  des  diapasons  à 512 
vibrations,  de  M.  Konig',  de  Paris.  Ces  instruments , placés  à une 
grande  distance,  par  exemple,  à 12  mètres,  résonnaient  fortement. 
Mais  si  l’on  cherchait  à produire  cette  résonnance  tout  en  courant 
avec  l’un  des  diapasons  vers  l’autre,  on  n’y  parvenait  pas. 

Il  est  intéressant  de  voir  comment , dans  ces  expériences , chaque 
faute  d’exécution  se  trahit  immédiatement  par  une  résonnance 
bien  distincte. 

- Soit  qu’on  applique  le  diapason  sur  la  caisse  avant  de  s’être 
mis  en  mouvement,  soit  qu’on  s’arrête  un  instant  en  chemin, 
soit  que , à la  fin  de  la  course , on  sépare  trop  tard  le  diapason 
de  la  caisse,  toujours  la  résonnançe  de  l’autre  diapason  avertit 
sans  retard  de  l’erreur  commise. 

La  méthode  optique  de  M.  Mayer  m’a  paru  beaucoup  moins 
sensible  que  celle  qui  fait  simplement  appel  à l’ouïe. 

expériences  me  semblent  venir'  entièrement  à l’appui  de 
la  théorie  de  Doppler,  et  je  suis  curieux  de  voir  quelles  objections 
elles  soulèveront  de  la  part  de  M.  van  der  Willigen. 


*)  Phil.  May.,  avril  1873. 


SUK  LA 


FAUSSETÉ  1)Ë  LA  PROPOSITION 

QUE  LA 

RÉFRACTION  DES  RAYONS  LUMINEUX  EST  MODIFIEE  PAR  LE  MOUVEMENT 
DE  LA  SOURCE  LUMINEUSE  ET  DU  PRISME, 

PAR 

V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN  •). 


§ I- 

1.  Une  impulsion,  un  choc,  ou  quel  que  soit  le  nom  qu’on 
veuille  lui  donner,  — celui  de  déplacement  moléculaire,  par 
exemple,  — n’est  jamais  propagée  comme  telle  dans  un  milieu 
absolument  élastique  et  indéfini. 

Comme  résultat  ou  bien  comme  partie  intégrante  d’une  vibration 
qui,  partant  d’un  centre  fixe  et  se  transmettant  dans  toutes  les 
directions  au  sein  du  milieu  supposé  en  repos,  est  exécutée  suc- 
cessivement par  les  molécules  de  ce  milieu , uné  pareille  impulsion 
tombe  très  certainement  sous  la  loi  générale  qui  règle  la  propagation 
de  cette  vibration. 

D’un  autre  côté,  l’observation  et  la  théorie  indiquent  toutes 
les  deux  que , lorsqu’une  impulsion  ou  un  déplacement  moléculaire 
est  communiquée  à un  point  quelconque  du  milieu,  il  en  résulte 
des  vibrations,  dont  la  période  et  l’amplitude  sont  fréquemment 
bien  au-dessus  de  la  portée  de  nos  ressources  expérimentales  ou 


Extrait  de  Archives  Musée  Teyler,  vol.  III,  fasc.  4. 


42 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


théoriques.  Chacune  de  ces  vibrations  se  propage,  à partir  du 
point  ébranlé  comme  centre,  dans  toutes  les  directions.  La  force 
vive  qui  avait  été  communiquée  s’est  alors  épanchée  dans  ces 
vibrations,  et  on  ne  peut  plus  se  la  représenter  de  nouveau 
comme  réunie  sous  la  forme  d’une  impulsion  ou  d’un  déplace- 
ment intégral. 

Comment , de  quelle  manière , ces  vibrations  prennent  naissance 
dans  un  milieu  indéfini,  voilà  cc  qu’il  n’est  pas  facile  de  dire. 
Il  est  probable  que  leur  formation  doit  être  attribuée  à ce  que 
l’impulsion,  lorsque,  immédiatement  après  avoir  passé  du  centre 
aux  molécules  circonvoisines , elle  abandonne  de  nouveau  celles-ci, 
non-seulement  se  propage  à l’extérieur,  mais  revient  aussi  en 
partie  vers  le  point  de  départ , pour  retourner  ensuite  au  dehors , 
et  continuer  de  la  sorte  jusqu’à  ce  que  la  fraction  de  la  force 
vive  qui  revient  au  centre  soit  finalement  devenue  égale  à zéro. 
Nous  obtenons  ainsi  autour  du  centre  un  va-et-vient  de  quantités 
toujours  plus  petites  de  force  vive,  va-et-vient  qui  cesse  par 
épuisement  et  qui  peut  très  bien  aboutir  à une  vibration  des 
molécules,  transmettant  l’impulsion  à des  points  de  plus  en  plus 
éloignés  de  l’origine. 

2.  Partout  où  une  pareille  impulsion  est  exercée  sur  l’air  ou 
sur  l’eau,  se  trouvent  d’ailleurs  les  conditions  nécessaires  à la 
production  d’une  vibration  à nœuds  et  à ventres  fixes.  Les 
vibrations  spontanées  qui  s’établissent  sont  donc  indubitablement 
des  vibrations  fixes  des  premières  molécules  du  milieu , qui  ensuite 
se  propagent  au  loin.  — La  transmission  régulière  de  la  vibration, 
d’une  source  proprement  dite,  animée  de  vibrations  fixes,  au 
milieu  ambiant,  l’un  et  l’autre  supposés  en  repos,  me  paraît 
devenir  plus  intelligible  par  ce  qui  précède.  En  effet,  lorsque 
la  première  impulsion  moléculaire,  émanée  du  centre  et  répartie 
sur  une  première  surface  sphérique,  opère  immédiatement  après 
un  retour  partiel  vers  le  centre,  elle  y trouve  déjà  une  seconde 
impulsion,  avec  laquelle  elle  est  de  nouveau  chassée  au  dehors 
eu  accord  rhythmique.  De  cette  manière , une  première  impulsion 
est  réglée  et  soutenue  par  la  suivante.  Par  la  répétition  continuelle 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  RÉFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  43 

de  la  même  action , s’appliquant  au  nombre  infini  des  impulsions 
ditférentielles  dans  lesquelles  on  peut  diviser  par  la  pensée  une 
vibration  de  la  molécule  primitivement  ébranlée , la  force  vive  qui 
réside  dans  celle-ci  est  transmise,  sous  la  forme  de  vibration 
courante  de  la  même  période,  au  milieu  ambiant;  la  propagation 
a naturellement  lieu  suivant  des  surfaces  sphériques. 

A ce  point  de  vue,  je  regarderais  volontiers  une  impulsion 
unique  et  indépendante  comme  instable,  comparée  à la  série  infinie 
de  pareilles  impulsions  qui,  partant  successivement  d’un  même 
centre,  où  elles  sont  communiquées  par  une  source  de  vibrations 
fixes , se  soutiennent  mutuellement  et  forment  une  vibration 
entière. 

3.  Si  cette  source  de  vibrations  fixes  est  en  mouvement  par 
rapport  au  milieu,  et  si  en  outre  elle  est  d’assez  petites  dimensions 
pour  qu’une  première  impulsion  ne  soit  plus  suivie  d’une  seconde , 
partie  du  même  point  du  milieu,  et  ainsi  de  suite,  alors  toutes 
ces  impulsions  différentielles,  qui  sont  communiquées  au  milieu 
ambiant  par  une  seule  vibration  fixe,  doivent  être  regardées  comme 
autant  d’impulsions  instables,  qui  se  perdent  en  courants  isolés, 
ou  s’éparpillent  en  vibrations  dont  les  périodes  n’ont  aucune  relation 
avec  la  période  de  vibration  de  la  source  primaire. 

La  source  de  vibrations , — que  nous  nous  représentons  comme 
une  réunion  de  molécules  qui  exécutent  des  vibrations  isochrones 
dans  des  orbites  semblables , et  qui  en  outre  se  trouvent  toujours 
toutes  dans  la  même  phase , — a-t-elle  au  contraire  des  dimensions 
telles  que,  nonobstant  son  mouvement  progressif,  les  impulsions 
élémentaires  en  nombre  infini  puissent  encore  être  regardées , pour 
au  moins  une  vibration  entière,  comme  partant  d’un  même  point 
du  milieu,  parce  que  chaque  molécule  de  la  source,  à mesure 
qu’elle  avance,  est  immédiatement  remplacée  par  une  autre  à vibration 
identique;  ou  bien,  d’une  manière  encore  plus  générale,  la  molé- 
cule du  milieu,  qui  est  située  en  ce  point,  reste-t-elle  pendant 
une  vibration  entière  sous  l’influence  directe  de  la  source , — dans 
ce  cas,  la  transmission  de  la  vibration,  de  la  source  au  milieu 
ambiant,  continue  à s’opérer  d’une  façon  régulière,  peut-être  avec 


44 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


changement  de  l’amplitude,  mais  très  certainement  sans  alté- 
ration de  la  période. 

On  le  voit:  d’après  cette  manière  de  considérer  les  choses,  il 
n’y  a pas  place  ici  pour  la  transmission  de  la  vibration  primaire 
avec  une  période  raccourcie  ou  allongée  suivant  l’une  ou  l’autre 
règle;  et  cela  pour  la  raison  très  simple  que,  lorsque  le  mouve- 
ment relatif  de  la  source  est  trop  grand  par  rapport  à ses  dimen- 
sions ou  au  rayon  de  sa  sphère  d’action  directe , elle  cesse  aussi 
de  pouvoir  imposer  une  période  assignable  d’avance  aux  vibrations 
spontanées  qui  pourraient  naître  des  pulsations  ou  déplacements 
différentiels  successifs. 

Plus  clairement  encore:  pour  avoir  un  raccourcissement  ou  un 
allongement  de  la  période,  qui  fût  d’accord  avec  les  idées  émises , 
comme  nous  allons  le  voir,  concernant  une  accélération  ou  un 
retard  de  la  poussée  de  l’onde,  il  faudrait  pouvoir  admettre  que 
chaque  pulsation  élémentaire  émanée  de  la  source  vibratoire  déplacée, 
en  tant  qu’elle  se  rapporte  à ce  point  de  départ  et  y retourne, 
cherche  maintenant  comme  par  instinct  à se  diriger,  non  vers  le 
point  de  départ  effectif,  mais  vers  un  autre  point  dans  lequel 
la  source  primaire  se  trouve  transportée  au  moment  où  elle  émet 
l’impulsion  suivante;  or  ceci  serait  par  trop  arbitraire.  En  consé- 
quence , si  la  vibration  de  la  source  primaire  ne  peut  être  trans- 
mise au  milieu  ambiant  d’une  manière  intégrale,  avec  sa  période 
propre,  elle  ne  peut  pas  être  transmise  du  tout  ; elle  se  dissipera 
alors  probablement  en  vibrations  courantes,  dont  le  résultat  final 
échappe  complètement  au  pouvoir  de  l’analyse,  au  moins  dans 
son  état  actuel. 

§ n. 

4.  Les  considérations  qui  précèdent  seront  acceptées,  je  crois, 
par  tous  ceux  qui  chercheront  à se  faire  une  idée  nette  de  la 
manière  dont  s’opère  la  transmission  d’une  vibration  fixe  au  milieu 
ambiant;  aussi  longtemps  que  ce  milieu  reste  homogène  et  indé- 
fini, il  n’y  a,  ce  me  semble,  rien  à en  rabattre.  J’ai  jugé  utile 
d’appeler  l’attention  sur  ce  point  de  vue,  qui  est  peut-être  propre 


DE.  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  45 


à épargner  des  déceptions  et  à empêcher  la  science  de  s’engager 
dans  une  voie  fausse. 

En  ce  qui  concerne  l’influence  du  mouvement  du  prisme  sur  la 
direction  du  rayon  réfriicté , je  puis  me  borner  à rappeler  qu’Arago 
a démontré  par  l’expérience , il  y a longtemps,  qu’un  effet  de  ce  genre 
n’existe  pas , et  que  Fresnel  ^ ) a donné  l’explication  théorique  de  ce 
résultat  négatif,  en  montrant  que  l’influence  du  mouvement  sur  la 
direction  du  rayon  réfracté  est  compensée  par  un  changement  de  la 
valeur  de  l’aberration.  Personne,  jusqu’ici,  n’a  fourni  la  preuve 
expérimentale  que  cette  résultante  du  changement  de  la  réfraction 
et  du  changement  de  l’aberration  n’est  pas  égale  à zéro.  Par 
contre,  M.  Fizeau  a fait  voir  que  dans  le  mouvement  de  l’eau , 
tel  qu’il  l’a  soumis  à ses  éxpériences,  l’hypothèse  d’où  Fresnel 
était  parti  se  vérifie  également;  et  d’un  autre  côté,  on  sait  que 
la  supposition  de  l’éther  laissé  en  repos  dans  l’espace  est  seule 
en  état,  jusqu’à  présent,  de  donner  une  explication  satisfaisante , 
dans  la  théorie  des  ondulations , du  phénomène  de  l’aberration  des 
étoiles.  On  peut  conclure  de  là , réciproquement , que  ce  serait  une 
recherche  mal  fondée  de  vouloir  déterminer  l’influence  du  mouvement 
du  prisme  sur  la  direction  du  rayon  lumineux,  et  que  ce  serait 
une  tentative  encore  beaucoup  moins  motivée,  et  même  un  véri- 
table recul  de  la  science,  d’admettre  aujourd’hui  une  pareille 
influence  pour  l’explication  partielle  d’un  déplacement  des  raies 
du  spectre. 

L’hypothèse  de  Fresnel,  dont  la  fécondité  a été  constatée, 
indique  donc  aussi  à quel  point  de  vue  doit  être  considérée  l’in- 
fluence du  mouvement  de  la  source  lumineuse  sur  la  réfraction. 
Suivant  cette  hypothèse  bien  connue , l’éther  qui  propage  les  vibra^ 
tiens  lumineuses  est  en  repos  dans  l’espace  illimité;  les  corps 
matériels  n’entraînent  dans  leur  mouvement  que  la  partie  de  l’éther 
inclus  qui  forme  l’excès  de  densité  de  cet  éther  sur  celui  de  l’espace. 

5.  Un  milieu  indéfini,  restant  en  repos  malgré  le  déplacement 


Annales  de  Chimie  et  de  Physique,  t.  IX,  p.  56  et  286.  1818. 
*)  Comptes  rendus,  t.  XXXIIl , p.  319.  1851. 


46 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


des  corps  qui  y sont  plongés , et  doué  de  la  propriété  addition- 
nelle admise  par  Fresnel,  nous  tire  donc  facilement  d’affaire 
quant  à l’influence  du  mouvement  du  prisme  sur  la  direction  du 
rayon;  mais,  si  l’on  se  rapporte  à ce  qui  a été  dit  plus  haut^ 
il  rend  plus  compliquée  l’étude  de  la  transmission  de  la  vibration 
entre  la  source  en  mouvement  et  le  milieu  ambiant.  Néanmoins, 
avec  ce  point  de  départ  du  milieu  en  repos,  on  arrive  encore 
sans  trop  de  peine , comme  on  le  verra  plus  loin , à la  conclusion 
que  le  mouvement  de  la  source  est  également  sans  influence  sur 
la  réfraction.  Cela  n’implique  pas,  toutefois,  que,  si  au  contraire 
l’étber  ambiant  était  bien  entraîné  dans  le  mouvement , la  direction 
du  rayon  réfracté  devrait  être  aussitôt  regardée  comme  dépendant 
à la  fois  du  déplacement  du  prisme  et  de  celui  de  la  source. 
Quant  au  prisme , du  moins  si  lui  et  le  milieu  ambiant  se  meuvent 
avec  des  vitesses  parfaitement  égales,  il  ne  saurait  être  question 
d’une  altération  apportée  par  ce  mouvement  à la  direction  du 
rayon  réfracté.  Et  pour  ce  qui  concerne  la  source,  M.  Petzval 
a très  bien  reconnu,  dans  les  Mémoires  dont  nous  parlerons  plus 
loin,  que  l’entraînement  complet  du  milieu  ambiant  par  la  source 
devait  donner  le  coup  de  mort  à toute  théorie  qui  là,  près  de 
la  source,  exigeait  une  modification  de  la  durée  de  vibratiofl  ou 
de  la  longueur  d’onde  de  la  vibration  propagée. 

D’ailleurs,  quand  même  les  corps  en  mouvement  entraîneraient 
entièrement  l’éther  ambiant,  il  y aurait  bien,  sur  la  distance 
immense  qui  sépare  par  exemple  la  terre  du  soleil,  quelque  point 
intermédiaire  où  cet  éther,  tout  à fait  insensible  aux  deux  mou- 
vements, resterait  en  repos  complet;  et  ainsi,  dans  l’hypothèse 
de  l’entraînement,  la  question  serait  au  fond  transportée  à un 
autre  point  de  l’espace,  où  sa  solution  présenterait,  il  est  vrai, 
d’après  ce  que  nous  pouvons  maintenant  pressentir,  de  plus  grandes 
difficultés',  mais  sans  être  pour  cela  absolument  désespérée. 

Dans  l’état  actuel  de  la  science,  toutefois,  le  passage  de  la 
vibration  d’une  source  en  mouvement  à un  éther  en  repos,  ou 
d’un  éther  en  repos  dans  une  matière  réfringente  en  mouvement, 
est  encore  la  seule  question  à l’ordre  du  jour. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS^  ETC.  47 

Le  point  de  vue  auquel  je  considère  Tinfluence  du  mouvement 
de  la  source  lumineuse  et  du  prisme  sur  la  direction  du  rayon 
réfracté  se  trouve  maintenant,  je  pense,  assez  bien  caractérisé. 
Je  laisse  de  côté  la  conception  ^secondaire  d’onde,  et  beaucoup 
plus  encore  celle  de  poussée  de  Tonde  ; je  m’en  tiens  à la  notion 
fondamentale  de  vibration  courante , qui  seule  possède  de  la  réalité 
dans  la  nature  des  choses,  et  dont  Tonde  ou  la  poussée  de  Tonde 
ne  sont  qu’un  résultat. 

Si,  dans  ce  qui  va  suivre,  je  montre  quelque  sévérité  pour 
les  observations  de  savants  distingués,  je  n’y  suis  poussé  que 
par  l’intérêt  de  la  science,  et  par  la  pleine  conviction  qu’il  faut 
chercher  dans  ces  observations  elles-mêmes  la  cause  des  déplace- 
ments trouvés  dans  le  spectre.  Je  crois  être,  d’ailleurs,  d’autant 
mieux  justifié  sous  ce  rapport,  que  jamais  non  plus  je  n’ai 
épargné  mes  propres  observations. 

§ III. 

, 6.  En  1842,  Chr.  Doppler  *)  avança  sommairement  que,  par 
le  mouvement  relatif  de  la  source  vibratoire  primaire  et  de  Tob- 
servateur,  la  couleur  de  la  lumière  observée  ou  la  hauteur  du 
son  perçu  est  modifiée  suivant  une  loi  très  simple.  Il  prend  le 
rayon  lumineux  ou  sonore  qui  coïncide  avec  la  direction  du  mou- 
vement et  il  le  distrait  de  la  sphère  entière  à laquelle  il  ap- 
partient, sans  tenir  compte  de  la  relation  nécessaire  qui  existe 
entre  ce  rayon  et  le  nombre  infini  des  autres  rayons  qui  partent 
avec  lui  du  même  point  dans  toutes  les  directions.  Ce  rayon , le 
seul  qu’il  considère,  est  pour  lui  une  ligne  droite , suivant  laquelle 
le  son  ou  la  lumière  se  propagent  en  autant  d’ondes  ou  de  poussées 
jusqu’à  l’observateur,  lui-même  en  mouvement  (se  figurer  un 
navire  qui  fend  une  eau  onduleuse);  et  parce  que  la  source 
vibratoire  ou  l’observateur  se  meuvent  maintenant  juste  dans  la 
direction  de  ce  rayon , la  vitesse  avec  laquelle  les  ondes  courent 
vers  l’observateur  est  augmentée  ou  diminuée  de  la  vitesse  relative 
de  celui-ci  par  rapport  à la  source. 


’)  Dus  farhige  Licht  der  Dopj)elsterne , Prag,  1842. 


48 


V.  s.  M.  VAN  UER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETE 


7.  Mais  Doppler  oublie  de  nous  dire  ce  qu’il  faut  entendre,  quand 
il  s’agit  de  son  ou  de  lumière , par  une  poussée  d’onde  ; quelque 
'chose  d’autre,  à coup  sûr,  que  le  choc  tumultueux  des  vagues 
contre  l’avant  d’un  bateau  qui  remonte  le  courant  d’une  rivière 
agitée;  ce  parallèle  serait  par  trop  primitif.  Doppler  confond  la 
poussée  de  Fonde  avec  Fonde  entièrement  déroulée , et  cette  onde 
entièrement  déroulée , ou  plutôt  la  cause  qui  la  produit  et  qui  va 
se  distribuer  sur  la  longueur  totale  de  Fonde,  il  la  fait  commu- 
niquer par  la 'source  primaire  au  milieu  en  un  seul  élément  de 
temps  infiniment  court.  En  douant  de  la  vitesse  de  propagation 
ordinaire  ces  ondes  ou  poussées  d’onde  du  son  et  de  la  lumière , 
dont  l’origine  change  de  place  à chaque  instant,  il  néglige  de 
nous  apprendre  ce  qui  détermine  en  réalité  leur  progression , quelle 
liaison  existe  encore  ici  entre  les  différentes  parties  de  la  surface 
sphérique  d’une  même  onde  et  entre  Fonde  et  la  vibration.  Il 
nous  laisse  à découvrir  comment  les  choses  doivent  se  passer, 
maintenant  que  la  source  primaire  émet  Fonde,  ou  plutôt  transmet 
au  milieu  la  cause  qui  lui  donne  naissance,  en  une  fraction  de 
temps  infiniment  petite.  Il  ne  se  forme  pas  une  idée  nette  de  la 
nature  et  de  la  cause  des  ondulations  qui  s’avancent  à la  surface 
de  l’eau.  Il  oublie  que  ces  ondulations  sont  le  résultat  com- 
posé des  vibrations  courantes  microscopiques  de  milliers  et  de 
milliers  de  molécules  d’eau  accumulées  les  unes  sur  les  autres; 
vibrations  qui  sont  excitées  par  un  choc  ou  une  impulsion  mé- 
canique, venue  du  dehors  et  souvent  instantanée,  nullement  par 
Faction  d’une  source  de  vibrations  fixes;  tandis  qu’ici,  pour  le 
son  et  la  lumière,  il  s’agit  d’une  vibration  courante  moléculaire 
qui  procède  d’une  pareille  source,  et  qui,  soit  que  cette  source 
se  meuve  ou  non,  doit  être  transmise  régulièrement  dans  son 
ensemble,  avant  que  nous  puissions  parler  de  poussée  d’onde  ou 
de  quelque  chose  d’analogue.  Il  ne  nous  dit  pas,  enfin,  ce  que 
nous  avons  à démêler  avec  cette  poussée  d’onde  dans  l’étude  de 
la  nature  et  des  propriétés  d’un  pareil  rayon  lumineux  ou  sonore, 
non-seulement  en  ce  qui  concerne  la  perception,  mais  aussi  par 
rapport  à la  foule  des  autres  phénomènes. 


DE  LA  PROPOSITION  OUK  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  49 

8.  Dans  Fétat  présent  de  la  science,  nous  sommes  autorisés  à 
remonter  jusqu'aux  vibrations  dès  molécules  du  milieu,  et  à parler 
de  la  propagation,  de  ces  vibrations,  au  lieu  de  nous  absorber 
dans  ce  qu'il  faut  entendre  par  une  poussée  d'onde  ou  par  une 
onde  ainsi  communiquée  instantanément.  Cet  ébranlement  successif 
du  milieu  vient-il  à agir  sur  un  corps  matériel  en  mouvement, 
ou  à s'y  transmettre,  c'est  encore  à la  vibration  que  nous  avons 
affaire  en  premier  lieu.  La  théorie  de  Doppler  devrait  pouvoir  se 
maintenir  ici  ; mais , tout  d'abord , elle  reste  en  défaut  de  prouver , 
par  exemple,  que,  lorsque  le  corps  se  met  en  mouvement,  la 
molécule  du  milieu  située  directement  devant  lui  fait  aussitôt 
place,  avec  la  rapidité  nécessaire,  à la  molécule  suivante,  de 
façon  que  celle-ci,  juste  au  moment  anticipé  que  la  théorie  exige , 
soit  surprise  par  le  corps  en  mouvement  dans  la  phase  suivante 
de  vibration.  Après  cela  seulement  il  serait  permis  de  parler , pour 
le  son  par  exemple , de  l'effet  mécanique  que  la  combinaison  des 
poussées  d'onde  de  milliers  de  molécules,  — combinaison  ana- 
logue à ce  qui  a lieu  dans  les  ondes  liquides , — pourrait  exercer 
sur  un  système  limité  et  présentant  les  conditions  voulues , pour  y 
exciter  des  vibrations  fixes  déterminées. 

9.  Doppler  traite  d'abord  le  cas  où  l'observateur  se  meut  dans 
la  direction  de  la  propagation  des  ondes  et  de  leurs  poussées, 
ou , plus  exactement , dans  la  direction  de  la  vibration  courante  ; 
et  ensuite  l'aiître  cas,  où  la  source  primaire  de  vibration  avance 
seule  dans  cette  direction.  Sa  formule  très  simple  est  un  peu  diffé- 
rente pour  chacun  de  ces  deux  cas,  mais  cette  différence  s'ex- 
plique aisément.  Elle  provient  de  ce  que  dans  le  premier  cas , — 
en  nous  bornant , pour  plus  de  simplicité , au  rapprochement  mutuel 
de  la  source  vibratoire  et  de  l'observateur, — l'observateur  marche 
d'une  manière  continue  à la  rencontre  de  la  vibration  ou  de  la 
poussée  d'onde  développée  par  la  source,  et  que  par  conséquent 
il  la  recueille  dans  un  temps  dont  la  durée  est  diminuée  dans  le 
même  rapport  qu'est  diminuée,  par  le  déplacement  de  l'observa- 
teur, la  longueur  d'une  vibration  entièrement  déroulée  ou,  pour 
parler  comme  Doppler,  la  distance  entre  deux  poussées  d'onde; 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  4 


50 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


dans  le  second  cas , au  contraire , la  vibration  ou  la  poussée  d'onde 
devient  indépendante  du  mouvement  de  la  source  aussitôt  qu'elle 
est  passée  dans  le  milieu  ambiant,  et  alors,  à compter  de  ce 
point  de  départ,  elle  a encore  à parcourir  toute  la  longueur  de 
l'onde.  Tant  que  les  vitesses  a et  cc'  de  la  source  vibratoire  et  de 
l'observateur  restent  petites  par  rapport  à la  vitesse  a de  la  vi- 
bration courante  ou  de  la  poussée  d'onde,  on  s'en  tient  aujourd'hui 
pour  les  deux  cas  à la  même  formule , et  la  conclusion  s'énonce 
simplement  ainsi:  le  nombre  des  ondes,  des  poussées  d’onde,  ou 
plutôt  des  vibrations  déroulées , que  l'observateur  recueille  en  un 

même  temps , est  augmenté  dans  le  rapport ^ , où  « et 

a 

doivent  naturellement  être  pris  positifs  dans  un  sens  opposé. 
Lorsque  les  valeurs  précises  de  « et  «'  sont  connues , le  déplace- 
ment de  la  couleur  vers  le  violet  et  l'exhaussement  du  ton  peu- 
vent donc  être  calculés  d'une  manière  tout  à fait  exacte,  en 
mesure  et  en  nombre. 

10.  Tel  est,  dans  sa  forme  systématique,  le  raisonnement  auquel 
s’est  laissé  prendre  le  monde  savant,  et  qni,  étendu  beaucoup 
au-delà  des  bornes  où  s’était  renfermé  l'auteur,  constitue  ce  qu'on 
décore  aujourd'hui  du  titre  de  théorie  de  Doppler,  et  dont  l’ap- 
plication à l'analyse  spectrale  du  ciel  est  saluée  comme  un  progrès 
considérable  de  la  science. 

Les  objections  que  cette  théorie  soulève  se  laissent  résumer  en 
peu  de  mots.  J'ai  déjà  fait  remarquer  que  Doppler  ne  se  rend 
pas  clairement  compte  de  la  manière  dont  une  onde  ou  une  poussée 
d'onde  naît  d’une  vibration  courante.  Chaque  vibration  qui  se 
propage  le  long  du  rayon  sonore  ou  lumineux  développe  sa  propre 
onde , dont  la  longueur  est  déterminée  par  la  durée  de  la  vibra- 
tion et  sa  vitesse  de  transmission,  qui  est  aussi  la  vitesse  de 
transmission  de  l’onde.  Une  vibration  est  un  tout  qui  s’achève 
régulièrement  ; il  ne  peut  donc  être  question  de  moitiés  ou  de  quarts 
de  vibration,  ni  par  conséquent  de  moitiés  ou  de  quarts  d’onde. 
L’onde  se  compose  d'une  croupe  et  d'une  dépression;  une  molé- 
cule du  milieu , qui  est  arrivée  au  maximum  positif  de  l'écart  de 


DE  LA  PROPOSITIOIV  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS^  ETC.  5l 

sa  vibration , se  trouve  au  sommet  de  la  croupe  de  Tonde  courante. 
Conservons  pour  les  ondes  sonores  et  lumineuses  cette  termino- 
logie empruntée  aux  ondes  liquides.  Lorsque  d’un  même  point 
partent,  d’une  manière  continue  et  régulière,  des  vibrations  d’une 
durée  toujours  égale , le  rayon  sonore  ou  lumineux  est  occupé 
par  une  suite  non  interrompue  de  croupes  et  de  dépressions  al- 
ternatives, qui  se  joignent  exactement;  la  distance  de  deux  croupes 
successives  est  alors  toujours  égale  à la  vraie  longueur  d’onde 
de  la  vibration.  Mais  si,  comme  le  suppose  Doppler,  le  centre 
d’ébranlement  se  déplace  le  long  du  rayon  après  chaque  vibration  , 
et  de  chaque  point  d’arrivée  lance,  au  repos,  une  nouvelle  vi- 
bration, alors  la  connexion  régulière  des  ondes  successives  est 
immédiatement  rompue;  les  vibrations  courantes  s’exécutent  bien 
encore  dans  le  même  temps,  et  la  longueur  des  ondes  respectives 
est  restée  exactement  la  même;  mais  les  ondes  des  vibrations 
successives  ont  empiété  plus  ou  moins  les  unes  sur  les  autres, 
et  la  distance  entre  deux  croupes  ou  deux  dépressions  consécu- 
tives est  diminuée  de  la  longueur  du  chemin  que  la  source  par- 
court entre  l’émission  de  deux  vibrations.  Voilà,  en  termes  clairs 
et  nets,  ce  que  veut  Doppler;  rien  de  plus  et  rien  de  moins. 
Quant  à un  raccourcissement  de  la  durée  de  la  vibration  ou  de 
la  longueur  de  Tonde,  réglé  de  façon  que  les  ondes  successives 
n’empiètent  plus  les  unes  sur  les  autres,  c’est  une  idée  dont  on 
ne  trouve  pas  trace  chez  lui.  Pour  plus  de  simplicité,  je  m’en 
tiens  ici  au  mouvement  de  la  source  en  avant  ; le  mouvement  en 
arrière  donnerait  lieu  à un  effet  opposé , celui  d’écarter  les  croupes 
et  les  dépressions  des  ondes  successives. 

Lorsque  des  milliers  de  molécules  liquides  superposées  vibrent 
d’une  manière  simultanée  et  concordante,  et  atteignent  par  con- 
séquent toutes  à la  fois  leur  maximum  d’écart , elles  forment  cette 
haute  intumescence , de  30 . pieds  parfois , qui  s’élève  comme  onde 
composée  au-dessus  du  niveau  de  Teau.  L’origine  d’où  naissent 
ces  vibrations  vient-elle  maintenant  à se  déplacer,  ce  qu’il  est  si 
facile  de  concevoir  pour  l’action  d’un  coup  de  vent  instantané  sur 
la  surface  de  Teau,  et  le  déplacement  s’opère-t-il  de  telle  sorte 


52 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


que  les  points  d’où  partent  les  première,  deuxième,  troisième, 
etc.  vibrations,  — auxquelles  nous  attribuons  bien  entendu  une 
durée  périodique  égale , ’ — soient  avancés  dans  la  direction  que 
suivent  les  ondes;  alors  les  croupes,  appelées  vagues  dans  le 
langage  ordinaire,  c’est-à  dire  les  poussées  d’onde  des  centres 
successifs,  se  suivront  à des  distances  plus  courtes  que  lorsque 
l’origine  reste  fixe.  C’est  là  le  phénomène  que  Doppler  avait  en 
vue,  et  que  persouue  ne  lui  contestera.  Si  l’on  suppose  la  pré- 
sence d’un  observateur,  celui-ci  recevra,  dans  le  même  temps, 
un  nombre  de  poussées  d’onde  plus  grand  que  celui  qui  corres- 
pond à la  durée  de  la  vibration  et  à la  vitesse  de  propagation; 
cela  aussi  est  parfaitement  exact.  Si  en  outre  l’observateur  lui- 
même  se  meut  à l’encontre  des  ondes,  il  recevra  dans  le  même 
temps  des  poussées  encore  plus  nombreuses  ; cela  non  plus  ne  fait 
pas  l’ombre  d’un  doute:  le  déplacement  de  l’observateur  ne  change 
naturellement  rien  à la  durée  de  vibration  des  molécules  du  milieu, 
mais  fait  que  les  croupes  successives  sont  atteintes  par  lui  à des 
intervalles  plus  petits  ou  plus  grands  que  lorsqu’il  reste  en  repos. 

Encore  une  fois;  à Doppler  maintenant  de  montrer  comment 
une  source  de  vibrations  fixes  peut,  à l’instar^  des  coups  de  vent 
dont  il  vient  d’être  question , transmettre  ses  vibrations  au  milieu 
à des  intervalles  successifs  et  d’une  manière  instantanée;  à lui 
de  prouver  que  la  perception  de  la  couleur , — pour  le  son , dont 
les  ondes  composées,  tant  condensées  que  dilatées,  exercent  un 
effet  mécanique,  nous  voulons  admettre  provisoirement  que  les 
choses  peuvent  se  passer  ainsi , — est  déterminée  par  le  nombre 
des  poussées  d’onde  reçues  dans  un  certain  temps,  et  non  par  la 
durée  de  la  vibration  des  molécules  d’éther.  Ce  sont  là,  en  effet, 
deux  éléments  qu’il  faut  ici  nettement  distinguer:  le  nombre  des 
poussées  d’onde  recueillies  et  le  nombre  des  vibrations  exécutées 
par  les  molécules  du  milieu  dans  un  temps  donné;  le  premier 
est  changé,  le  second  ne  l’est  pas. 

Le  lecteur  n’a  sans  doute  pas  attendu  jusqu’ici  pour  remonter , 
de  ces  ondes  composées,  liquides  ou  aériennes,  dans  lesquelles 
une  infinité  de  molécules  superposées  vibrent  à l’unisson  et  passent 


ÜE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  53 

simultanément  par  leur  maximum , à ce  rayon  sonore  ou  lumineux 
idéal,  sur  lequel  est  étendue  une  série  unique  de  molécules  juxta- 
posées, et  le  long  duquel  se  meut  la  particule  d’où  le  son  ou  la 
lumière  émanent.  Il  est  alors  arrivé  par  la  pensée  à des  ondula- 
tions élémentaires  qui,  d’après  Doppler,  sont  parties  de  points 
avancés  chaque  fois  d’un  petit  espace,  et  il  a fini  par  se  repré- 
senter une  série  de  molécules  qui  exécutent  successivement  toutes 
ces  vibrations  d’une  durée  parfaitement  égale,  et  en  commencent 
déjà  une  nouvelle  avant  que  la  précédente  soit  achevée  ; ceci , en 
effet,  conformément  à la  théorie  de  la  superposition  des  petits 
mouvements,  ne  constitue  pas  une  difficulté.  Enfin,  pour  le  cas 
où  l’observateur  lui-même  se  déplace,  par  exemple  vers  la  source , 
on  aura  trouvé,  dans  ce  cours  d’idées,  que  l’onde,  la  vibration 
déroulée , est  de  nouveau  enroulée  par  l’observateur  en  un  temps 
raccourci  de  la  même  quantité  dont  est  raccourcie , par  le  dépla- 
cement, la  longueur  d’onde;  toujours  en  supposant  (voir  art.  8) 
que  les  molécules  d’éther  ou  d’air  situées  en  contact  avec  l’œil 
ou  l’oreille  se  sont  écartées  ou  ont  été  enlevées  avec  la  rapidité 
voulue. 

11.  Doppler  pensait  effectivement  en  émissionniste,  tout  en  s’ex- 
primant dans  les  termes  de  la  théorie  des  ondulations.  Il  avait 
analysé  le  mode  d’excitation  et  de  progression  des  ondes  liquides , 
et  il  ne  voyait  pas  quelles  conditions  il  imposait  maintenant  à sa 
source  sonore  ou  lumineuse  en  mouvement;  ses  poussées  d’onde 
n’étaient  pas  autre  chose  que  des  particules  lumineuses  émises  à 
des  intervalles  déterminés  et  avec  une  vitesse  donnée.  Il  ne  paraît 
même  pas  avoir  remarqué  que  ces  poussées  d’onde  sont  complè- 
tement éteintes  par  interférence , dès  que  la  vitesse  de  rapprochement 
de  la  source  devient  égale  à la  moitié  de  la  vitesse  de  propagation 
des  ondes.  Tout  ce  qui  manquait  encore;  c’était  de  doter  ces 
poussées  d’ondes  ou  vibrations  courantes,  dans  leur  marche  ulté- 
rieure , de  la  vitesse  de  progression  de  la  source  ; ce  pas , les  suc- 
cesseurs de  Doppler  l’ont  fait  pour  lui,  en  réunissant  ses  deux 
formules,  comme  je  l’ai  dit  plus  haut,  en  une  seule. 


54 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETE 


§ IV. 

12.  Les  trente  années  qui  se  sont  écoulées  depuis  la  publication 
du  Mémoire  de  Doppler  forment  une  période  instructive  dans 
rhistoire  de  la  science  ; elles  montrent  comment  une  théorie  émise 
à la  légère , et  s'appuyant  sur  l'analogie  avec  des  phénomènes  qui 
se  manifestent  dans  des  conditions  toutes  spéciales , peut  susciter 
les  plus  graves  embarras  à la  science  et  même  la  fourvoyer  com- 
plètement. La  comparaison  avec  les  ondes  liquides , dont  les  poussées 
exercent  un  choc  mécanique,  et  dont  le  mode  de  production, 
ainsi  que  je  l'ai  rappelé  ci-dessus,  diffère  considérablement  de  la 
transmission  d'une  vibration  à un  milieu  ambiant  indéfini  par  une 
source  animée  de  vibrations  fixes , — cette  comparaison , suggérée 
par  Doppler,  fut  le  premier  pas  dans  la  voie  de  l'erreur.  Une 
seconde  induction,  non  moins  hasardée  que  la  première , fut  sug- 
gérée* par  les  recherches  de  M.  Buys  Ballot  et  autres,  et  par 
les  résultats  ainsi  obtenus  pour  la  hauteur  du  ton  à des  distances 
relativement  petites  de  la  source  et  dans  la  direction  précise  du 
mouvement , résultats  où  l'effet  mécanique  exercé  sur  un  ensemble 
circonscrit  et  capable  d'entrer  en  vibration  fixes , par  une  poussée 
d'onde  ou  pulsation  de  nature  spéciale,  jouait  le  rôle  principal. 

On  établit  ainsi  une  similitude  entre  des  phénomènes  essen- 
tiellement dissemblables , ou  on  conclut  du  particulier  au  général , 
sans  tenir  compte  des  circonstances  caractéristiques  qui  interviennent 
dans  la  production  du  particulier.  On  décida  catégoriquement:  que, 
par  le  mouvement  de  la  source  vibratoire , la  couleur  de  la  lumière 
et  la  hauteur  du  son  sont  changées,  conformément  à la  formule 
de  Doppler;  et  tandis  que  Doppler  s'était  contenté  de  compter 
des  poussées  d'onde  ou  pulsations,  sans  approfondir  la  question 
de  savoir  jusqu'à  quel  point  cela  était  permis,  ses  partisans  aussi  bien 
que  ses  adversaires  mirent  maintenant  à l'ordre  du  jour  le  problème 
du  changement  de  période  de  la  vibration  lors  de  sa  transmission. 


‘ ) Akîistische  Versuche  auf  der  niederlàudischen  Eisenhahn , nebst  gelegentlichen 
Bemerkungen  zur  Théorie  des  Herrn  Prof.  Doppler.  (Poggend.  Annalen  B.  LXVI, 
p.  321;  1845). 


DE  LA  TROPOSITION  QUE  LA  RÉFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  55 

On  comprit  que  la  transmission  instanstanée  de  la  vibration  de 
la  source  au  milieu  ambiant , telle  que  la  supposait  Doppler , 
n’était  pds  admissible.  Pour  éclaircir  ses  idées  d’ondes  et  de  poussées 
d’onde,  on  voulut  savoir  si,  par  l’efîet  du  mouvement  progressif  de  la 
source,  la  période  de  la  vibration  courante  du  milieu  différerait, 
conformément  à la  formule  de  Doppler,  de  celle  de  la  vibration 
primaire  de  la  sonrce.  Dans  ce  but,  pour  mieux  rester  d’accord 
avec  la  marche  naturelle  du  phénomène,  on  partagea  cette  vi- 
bration primaire  en  un  nombre  infini  d’impulsions  différentielles, 
que  la  source  devait  communiquer  au  milieu  une  à une , en  chaque 
point  de  sa  route.  La  réunion  de  toutes  ces  impulsions,  ainsi 
transmises  successivement,  prit  la  place  de  l’impulsion  unique  et 
instantanée  de  Doppler.  De  cette  façon , la  théorie , présentée  sous 
une  forme  populaire  par  Doppler,  reçut  une  couleur  et  une  sub- 
stance scientifiques.  La  vibration  de  la  source  en  mouvement  fut , 
pour  ainsi  dire , déroulée  en  un  nombre  infini  de  phases , et  il  ne 
s’agissait  plus  que  de  savoir  si  ces  phases  se  laisseraient  de  nou- 
veau enrouler  de  bon  gré  en  une  vibration  courante,  à période 
allongée  ou  raccourcie,  conformément  à la  formule  de  Doppler. 
Comparées  à ce  qui  allait  maintenant  suivre,  les  spéculations  et 
les  erreurs  de  Doppler  n’avaient  été  qu’un  jeu  d’enfant. 

13.  En  ce  qui  concerne  le  changement  de  couleur  d’une  source 
lumineuse  en  mouvement , les  physiciens  étaient  rassurés , et  une 
trêve  avait  en  quelque  sorte  été  conclue  entre  les  combattants. 
M.  Buys  Ballot  avait  déjà  fait  remarquer  que,  vu  la  quantité 
infinie  de  vibrations  de  durée  ou  de  longueur  d’onde  graduellement 
croissante,  les  retards  et  les  accélérations  exigés  par  la  formule 
de  Doppler , devant  naturellement  atteindre  toutes  les  couleurs  à 
la  fois,  ne  pouvaient  guère  donner  lieu  à un  changement  de  la 
lumière  composée.  En  effet,  pour  chaque  rayon  qui,  par  le  rac- 
courcissement éventuel  de  la  distance  de  ses  poussées  d’onde,  ou 
mieux  encore  ^ par  leur  succession  plus  rapide  dans  l’œil , passerait 
à l’extrémité  violette  du  spectre  dans  le  domaine  des  rayons  in- 
visibles, il  devrait  y avoir  à l’extrémité  rouge  un  autre  rayon 
passant  de  la  partie  obscure  dans  la  partie  éclairée.  De  même. 


56  V.  s.  M.  VAN  ÜER  WILLEGEN.  SUR  LA  FAUSSETE 

à chaque  rayon  qui,  en  vertu  d’un  allongement  de  la  distance 
considérée , ou  en  vertu  d’une  succession  plus  lente  des  pulsations 
dans  l’œil , serait  transporté  à l’extrémité  rouge  dans  le  domaine 
des  rayons  invisibles,  devrait  correspondre  à l’extrémité  violette 
un  rayon  transporté  de  la  partie  obscure  dans  la  partie  éclairée 
du  spectre.  Dans  les  deux  cas , par  conséquent , la  couleur  de  la 
lumière  composée  resterait  la  même  pour  l’observateur. 

Mais  bientôt  s’éleva  à l’Académie  de  Vienne  une  discussion  entre 
Petzval  d’un  côté  et  von  Ettingsbausen  et  Doppler  de 
l’autre,  discussion  dans  laquelle  la  question  de  la  transmission 
de  la  vibration  au  milieu  ambiant  par  une  source  en  mouvement 
fut  posée  dans  toute  sa  simplicité,  débarrassée  de  la  considération 
accessoire  de  l’observateur.  La  question  concernant  l’influence  du 
mouvement  de  l’observateur  fut  écartée  par  Petzval , comme  n’ap- 
partenant pas  au  domaine  de  la  mécanique.  Au  point  de  vue  où 
je  traite  ici  le  problème,  je  n’ai  pas  affaire  non  plus  avec  cet 
observateur  en  mouvement. 

Voyons  mantenant  ce  que  cette  discussion,  qui  ne  se  termina 
qu’à  la  mort  de  Doppler,  a mis  en  lumière.^ 

Von  Ettingsbausen^)  pose  en  principe,  comme  je  l’ai  fait  moi- 
même  au  § I , que  chaque  impulsion  momentanée  excite  dans  un 


i)  Petzval,  Ueber  ein  allgemeines  Princip  der  Undulationslehre ; Gesetz  der 
Erhaltung  der  Schwingungsdauer . Sitzungsberichte  der  K.  K Akademie  der  Wis- 
senschaften.  B.  VIII,  p.  131.  1852. 

Petzval,  Veher  die  Unzukommlichkeiten  gewisser  populârer  Anschauungsiceisen  in  ^ 
der  JJndîdationstheorie.  Ibid.  B,  VIII,  p.  567.  1852. 

Petzval , Ueber  die  UnzukbmmlicJikeiten  gewisser  populdrer  Anscliammgsweisen  m 
der  Undulalionstheorie . Ibid.  B.  IX,  p.  699.  1852. 

Von  Ettingsbausen,  Benierkung  zu,  dem  Aufsatze:  Ueber  ein  allgemeines 
Princip  etc.  Ibid.  B.  VIII,  p.  593.  1852. 

Von  Ettingsbausen,  IPeitere  Bemerkungen  zu  dem  Vortrage  des  Herrn  Prof. 
Petzval,  vom  15  Jànner.  Ibid.  B.  IX,  p.  27.  1852. 

Doppler,  Bemerkungen  zu  dem  Aufsatze:  Ueber  ein  allgemeines  P rincip  etc . 
Ibid.  B.  VIII,  p.  587.  1852. 

Doppler,  Bemerkungen  über  dié  von  Herrn  Prof.  Petzval  gegen  die  Richtigkeit 
meiner  Théorie  vorgebrachten  Binwendungen . Ibid.  B.  IX,  p.  237.  1852. 

Voir  son  second  Mémoire,  p.  29, 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  57 

milieu  élastique  indéfini  une  foule  de  vibrations  spontanées.  Ces 
vibrations  se  combinent,  d’après  lui,  en  formes  de  mouvement 
auxquelles  ne  convient  plus  la  notion  de  vibration,  et  qui  par 
conséquent  ne  donnent  pas  lieu  de  parler  encore  de  durée  de  vi- 
bration. Il  s’appuie  sur  le  cas  de  la  propagation  linéaire  d’un 
mouvement,  et  sur  les  intégrales  trouvées  par  Poisson  et  par' 
Ostrogradsky  pour  les  milieux  élastiques  homogènes , dans  lesquels 
la  progagation  du  mouvement  s’opère  en  ondes  sphériques.  Dans 
le  cas  le  plus  général , dit-il , la  sommation  ne  se  laisse  pas  achever, 
et  tout  ce  qu’on  peut  faire,  c’est  de  montrer  que  les  ondes  sont 
limitées. 

14.  Si  d’un  même  point  partent  simultanément  différentes  ondes 
de  longueurs  régulièrement  croissantes , la  superposition  de  toutes 
ces  ondes  formera  une  ligne , qui  très  certainement  sera  développée 
suivant  une  période  déterminée;  c’est  là,  je  pense,  ce  qu’entend 
M.  von  Ettingshausen , lorsqu’il  veut  combiner  en  un  tout  une 
série  de  vibrations  de  périodes  régulièrement  croissantes. 

Mais  il  commet  une  erreur  manifeste  lorsqu’il  croit  pouvoir 
sommer  purement  des  ondes  de  longueurs  différentes.  L’application 
qu’il  fait  au  cas  actuel  des  conditions  simples  du  mouvement  li- 
néaire est  aussi  sujette  à bien  des  objections  ; il  se  figure  ici , *à 
ce  qiPil  me  semble,  un  courant  du  milieu  en  masse , auquel  toutes 
les  molécules  prennent  sans  doute  part , mais  sans  se  déplacer  les 
unes  par  rapport  aux  autres , si  ce  n’est  aux  surfaces  limites  de 
la  masse  en  mouvement,  où  évidemment  l’état  n’est  plus  aussi 
simple.  Or,  quand  il  s’agit  de  vibrations,  nous  avons  affaire  à 
des  mouvements  des  molécules , dans  lesquels  le  déplacement  relatif 
de 'deux  molécules  voisines  est  précisément  le  point  essentiel. 

Le  principe  de  la  superposition  des  petits  mouvements  est  quelque 
chose  de  plus  qu’un  artifice  destiné  à simplifier  les  calculs;  on  le 
retrouve  dans  la  nature.  Toutes  les  vibrations,  représentées  par 
leurs  sinusoïdes  propres,  conservent  une  existence  indépendante 
ou , ce  qui  revient  au  même  pour  nous , elles  se  séparent  entre 
elles  dans  leur  passage  d’une  matière  dans  une  autre.  S’il  n’en 
était  pas  ainsi,  il  serait  impossible,  en  effet,  de  décomposer  la 


58 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


lumière  solaire  par  la  réfraction  en  ses  différentes  couleurs  simples  ; 
et,  d’un  autre  côté,  rien  ne  nous  empêcherait,  étant  donné  un 
rayon  lumineux  homogène , de  le  résoudre  en  une  série  complète 
de  couleurs. 

15.  Ce  qui,  de  l’aveu  de  M.  von  Ettingshausen , s’applique  à 
une  impulsion  initiale  unique,  sera  évidemment  encore  vrai  pour 
chacune  des  impulsions  élémentaires , en  nombre  infini , dans  les- 
quelles M.  von  Ettingshausen  et  M.  Petzval  se  figurent  décomposée 
l’action  de  la  source  vibratoire  en  mouvement  sur  le  milieu  am- 
biant. Chacune  de  ces  impulsions  différentielles  peut  donner  nais- 
sance à une  ou  plusieurs  vibrations,  nécessairement  de  petite 
amplitude , qui  se  propagent  en  restant  tout  à fait  indépendantes 
l’une  de  l’autre.  11  n’y  a aucune  raison  de  ne  pas  admettre  pour 
cette. série  de  petites  impulsions  ce  que  l’on  pose  en  principe  pour 
une  impulsion  initiale  unique;  or  c’est  pourtant  là,  en  réalité, 
l’erreur  dans  laquelle  sont  tombés  et  M.  Petzval  et  M.  von  Ettings- 
hausen. 

Les  deux  savants  ont  très  bien  compris^  ainsi  que  je  l’ai  fait 
remarquer  plus  haut,  qu’il  n’y  avait  pas  moyen  de  s’en  tenir  à 
la  transmission  instantanée  de  la  vibration , imaginée  par  Doppler. 
La  première  difficulté  opposée  par  M.  Petzval  au  raisonnement 
de  Doppler  concernait,  en  effet,  la  communication  subite  au  milieu 
ambiant  d’un  mouvement  ondulatoire  en  accord  avec  la  vibration 
fixe.  A cette  hypothèse  il  substitua  la  théorie , dite  par  Ini  ennoblie , 
dans  laquelle  chaque  vibration  de  la  source  primaire  est  divisée , 
en  vue  de  sa  transmission  au  milieu,  en  autant  d’impulsions  qu’il 
y a de  phases,  c’est-à-dire  en  un  nombre  infini;  à ceci,  M.  von 
Ettingshausen  acquiesça  pleinement.  Mais , par  une  bizarre  inad- 
vertance , M.  Petzval  laissa  maintenant  ces  impulsions  élémentaires 
se  propager  dans  leur  intégrité  au  sein  du  milieu , au  lieu  de  les 
laisser  se  morceler  en  vibrations.  Le  résultat  de  ses  formules  était , 
par  suite,  facile  à prévoir;  en  attribuant  à la  source  vibratoire 
un  mouvement  de  progression,  il  devait  retrouverNiuelque  part,  sur 
une  molécule  située  dans  la  direction  de  ce  mouvement,  les  im- 
pulsions primitives,  simplement  resserrées  dans  une  période  plus 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  RÉFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  59 

courte.  Il  obtient  pour  une  pareille  molécule  une  durée  de  vibration 
raccourcie  exactement  d’autant  que  le  voulait  Doppler,  résultat 
bien  naturel , puisqu’il  en  avait  introduit  d’avance  les  conditions. 
Pour  une  molécule  située  de  l’autre  côté,  c’est-à-dire  derrière  la 
source  vibratoire,  le  succès  est  le  même:  il  trouve  la  vibration 
transmise  intégralement,  et  sa  période  allongée  de  la  quantité 
précise  qu’avait  assignée  Doppler.  — M.  von  Ettingsbausen  ne 
pouvait  pas  désirer  mieux;  aussi  s’empressa-t-il  d’adopter  les 
heureuses  conclusions  de  M.  Petzval , et  de  renoncer  à toutes  ces 
vibrations  de  longueurs  d’onde  différentes , qui  naissent  d’une  im- 
pulsion unique  et  ont,  comme  nous  l’avons  vu,  un  si  singulier 
résultat  sommatoire. 

16.  La  seconde  objection  de  M.  Petzval  était  que  Doppler  admet 
tacitement  que  le  milieu  est  incapable  de  participer  au  mouvement 
de  la  source.  Comme  M.  Petzval  prend  généralement  pour  source 
de  vibrations  une  source  sonore,  c’est  aussi  spécialement  d’une 
pareille  source  qu’il  parle  ici.  Quant  au  son,  on  doit  bien  cer- 
tainement admettre  que  l’air,  du  moins  au  voisinage  de  la  source, 
est  entraîné  totalement  ou  partiellement  dans  le  mouvement  de 
progression.  Mais  pour  ce  qui  regarde  la  lumière,  on  est  aujourd’hui 
autorisé  et  même  tenu  à croire  que  le  milieu  qui  entoure  la  source , 
et  qui  reçoit  les  vibrations  et  les  propage,  reste  en  repos. 

Dans  son  premier  Mémoire,  M.  Petzval  a maintenant  montré, 
par  la  voie  de  l’analyse , qu’un  mouvement  ondulatoire  peut  être 
superposé  à un  mouvement  de  progression,  c’est-à-dire,  que  les 
ondulations,  excitées  par  la  source  vibrante  dans  un  milieu  qui 
chemine  uniformément  avec  elle,  ont  la  même  longueur  que  si 
tous  les  deux,  source  et  milieu,  demeuraient  au  repos;  c’est  ce 
qu’il  appelle,  d’une  manière  générale,  le  principe  de  la  conser- 
vation de  la  durée  de  vibration.  Ce  résultat  a encore  reçu  l’assen- 
timent complet  de  M.  von  Ettingsbausen.  Mais  la  démonstration 
et  l’objection  de  M.  Petzval  manquaient  leur  but,  parce  que  l’en- 
traînement du  milieu  faisait  précisément  esquiver  la  grande  difficulté 
de  la  communication  de  la  vibration  par  une  source  animée  d’un 
mouvement  relatif,  et  parce  que,  d’un  autre  côté,  soit  que  le  milieu 


60  V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETE 

participe  au  mouvement  soit  qu’il  n’y  participe  pas,  le  nombre 
des  ■ poussées  d’onde  qui  arrivent  dans  un  même  temps  à l’ob- 
servateur de  Doppler,  c’est-à-dire  au  terme  final,  sera  toujours 
augmenté  ou  diminué  conformément  à la  formule  posée  par  Doppler. 
Une  longueur  d’onde  inaltérée,  dans  un  milieu  entraîné  avec  la 
source  vers  l’observateur,  rendra  à Doppler  les  mêmes  services 
que  la  longueur  d’onde  raccourcie  dans  un  milieu  au  repos,  que 
lui  fournit  M.  Petzval , ou  que  la  source  émettant  ses  ondulations 
non  raccourcies  en  des  points  de  plus  en  plus  rapprochés  du  terme 
final,  qu’il  s’était  créé  à lui-même. 

17.  Dans  son  troisième  Mémoire,  M.  Petzval  traita  enfin  de  la 
distinction  que  ses  adversaires  avaient  faite  entre  l’objectif  et  le 
subjectif,  par  l’introduction  de  l’observateur.  Mais,  ici  encore,  il 
fit  malheureusement  fausse  route , car  le  sens  qu’il  attache  à cette 
distinction  diffère  de  celui  qu’elle  avait  dans  l’esprit  des  deux  autres 
savants.  Il  prend  le  mot  „subjectif”  dans  son  acception  ordinaire  : 
un  observateur  qui,  par  suite  d’un  état  particulier  de  son  cerveau 
ou  de  son  organe  de  perception , donne  aux  phénomènes  une  autre 
interprétation  que  celle  qui  leur  convient,  fournit  des  résultats 
jjSubjectifs” , dépourvus  de  valeur  vraie  ou  objective.  Or,  .en  ce 
qui  concerne  le  raisonnement  de  Doppler,  on  peut  y mettre  une 
borne  à la  place  de  l’observateur,  sans  qu’il  s’en  trouve  atteint  ; 
pour  Doppler,  le  sujet  observant  n’est  que  le  point  de  mire,  le 
terme  vers  lequel  ses  poussées  d’onde  avancent  d’un  pas  accéléré 
ou  retardé  ; son  raisonnement  a donc  un  sens  parfaitement  objectif. 

L’analyse  de  M.  Petzval,  je  le  répète,  avait  manqué  son  but  : 
les  résultats  de  la  théorie  ennoblie  par  lui  concordent  entièrement, 
si  je  les  comprends  bien,  avec  les  vues  originales  de  Doppler; 
les  divergences  que  M.  Petzval  signale  encore  sont,  en  effet, 
d’importance  secondaire  dans  les  conditions  ordinaires,  et  leur 
existence  est  plutôt  nominale  que  réelle.  Du  moment  que  M.  Petzval 
laisse  subsister  comme  telles  les  impulsions  élémentaires  commu- 
niquées au  milieu  par  la  source  ën  mouvement , du  moment  qu’il 
les  laisse  se  propager  sans  altération  et  les  considère  seulement 
dans  leur  mouvement  en  arrière  ou  en  avant , au  lieu  de  les  ré- 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  RÉFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  61 

soudre  toutes  individuellement  en  vibrations , il  est  sur  une  fausse 
voie  et  perdu  sans  ressource.  S’il  s’était  hasardé  pour  un  instant , 
avec  son  rayon  lumineux , en  dehors  de  la  direction  du  mouvement 
de  la  source , ou  s’il  avait  réfléchi  à la  cause  qui  devait  pousser 
en  avant  ces  impulsions  devenues  en  quelque  sorte  flottantes, 
peut-être  aurait-il  encore  reconnu  son  erreur. 

Quant  à ses  deux  autres  objections , elles  n’atteignaient  en  rien 
la  théorie  de  Doppler.  Du  reste , M.  Petzval  lui-même  s’exprime , 
à la  fin  de  son  troisième  Mémoire , dans  les  termes  suivants , qui 
méritent  d’être  remarqués: 

„Si,  dans  l’état  actuel  de  la  question,  l’influence  que  le  mou- 
vement progressif  d’une  source  sonore  ou  lumineuse  exerce  sur  le 
mouvement  vibratoire  ne  peut  encore  être  considérée  comme  en- 
tièrement élucidée , il  est  pourtant  tout  à fait  certain  que , ni  dans 
son  degré,  ni  dans  l’ordre  d’action  auquel  elle  appartient cette 
influence  n’est  celle  que  la  théorie  de  Doppler  assigne.” 

De  ce  que  M.  Petzval  dit  dans  les  trois  dernières  de  ces  lignes , 
il  m’est  impossible  de  trouver  la  preuve  convaincante  dans  ses 
Mémoires;  c’est  donc  une  simple  assertion,  plutôt  qu’une  vérité 
démontrée.  Quant  à ce  qui  précède , c’est  l’aveu  complet  que , sur 
le  terrain  qu’il  avait  choisi,  il  n’avait  pas  été  en  état  de  combattre 
victorieusement  son  adversaire.  Sans  s’en  apercevoir,  il  s’était  placé 
au  même  point  de  vue  que’  Doppler,  et  voilà  pourquoi  il  avait 
échoué  dans  sa  réfutation.  Tandis  que  Doppler  s’en  était  tenu  à la 
notion  vague  des  poussées  d’onde,  et  avait  encore  laissé  la  pos- 
sibilité de  conserver  intacte  la  durée  de  la  vibration  des  molécules 
elles-mêmes,  M.  Petzval  était  arrivé,  par  la  voie  analytique,  à 
allonger  ou  à raccourcir  cette  durée  de  vibration , et  il  avait  ainsi 
considérablement,  aggravé  les  choses.  Le  passage  cité  trahit  un 
certain  désappointement , facile  à comprendre.  M.  von  Ettingshausen 
avait  eu  trop  beau  jeu  contre  son  adversaire  et  l’avait  en  quelque 
sorte  pris  au  piège  de  ses  propres  raisonnements  analytiques. 


62 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEIV.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


§ V. 

18.  L’erreur  de  l’analyse  de  M.  Petzval  (voir  son  second  Mé- 
moire, p.  583,  aux  alinéas  commençant  par  Erstens,  Zweitens 
et  Drittens,  et  le  troisième  Mémoire,  p.  712)  est  qu’il  ne  reconnaît 
pas  que  chaque  impulsion  ou  déplacement  communiqué  doit  se 
propager , en  chaque  point  de  son  parcours , aussi  bien  en  arrière 
qu’en  avant,  mais  qu’il  conclut  au  contraire  que  cela  s’applique 
seulement  au  point  de  départ.  Chaque  fois  que  l’impulsion  aban- 
donne les  molécules  dans  lesquelles  elle  réside  pour  le  moment, 
elle  se  transmet  en  arrière  et  en  avant,  tout  comme  à l’origine  ; 
car  elle  se  trouve  alors  exactement  dans  les  mêmes  conditions  que 
lorsqu’elle  animait  la  molécule  frappée  initialement. 

M.  Petzval  commence  par  parler  d’un  déplacement  pur  et  simple 
que  viennent  à subir  les  molécules  situées  dans  un  même  plan  ou 
dans  son  voisinage  ; puis  il  y substitue  tout  d’un  coup  une  onde 
plane , qui  ne  paraît  pas  présenter  de  dépression , et  plus  tard  il 
attribue  au  déplacement,  d’une  manière  tout  à fait  arbitraire , la 
vitesse  de  propagation  de  l’onde.  Dans  son  troisième  Mémoire , 
il  trouve  ainsi,  par  exemple,  que , si  le  déplacement  se  propage  en 
partant  d’une  seule  molécule,  il  sera,  dans  la  direction  de  l’axe  des  ^r, 
après  le  temps  ^ et  à la  distance  r de  cette  première  molécule: 

?=i/-(r  — «0  + -F(r  + s<); 

r r 

où  s est  la  vitesse  de  propagation  des  ondes , tandis  que  f {u)  et 
F {u)  sont  deux  fonctions  qu’on  suppose  n’avoir  une  valeur  appré- 
ciable qu’entre  des  limites  très  étroites,  s et  — e,  de  w;  en 
effet , le  déplacement  primitif,  pour  le  temps  / O , n’avait  une 
grandeur  sensible  que  pour  des  valeurs  de  r qui  différaient  très 
peu  de  zéro,  c’est-à-dire  pour  des  points  très  rapprochés  du  centre. 

De  même , dans  le  cas  où  l’impulsion  émane  d’un  plan , il  trouve 
pour  le  déplacement  transmis  dans  la  direction  de  la  perpendi- 
culaire à ce  plan: 

^=/  (x  — St)  ’-h  F (a:  H-  St)  ; 

où  il  n’est  de  nouveau  attribué  une  valeur  appréciable  aux  deux 
fondons  f {u)  et  F (w)  que  pour  des  valeurs  très  petites,  posi 
tives  ou  négatives,  de  u. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  RÉFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  63 

Ici  nous  touchons  du  doigt  la  source  de  la  méprise  de  M.  Petzval  : 
il  admet  que , à . raison  des  limites  étroites  entre  lesquelles  est 
borné  le  déplacement  original , / (u)  et  F (w)  s’annulent  chacune 
séparément,  aussitôt  que  u prend  une  valeur  sensible,  positive 
ou  négative;  or  cet  état  initial  l’autorise  seulement  à admettre 
une  pareille  annulation  pour  la  somme  f{u)  H-  F [u).  Il  fait  de  ce 
déplacement  une  onde  sans  dépression.  De  ces  prémisses  il  est  donc 
impossible  de  tirer  une  conclusion  qui  soit  d’accord  avec  la  nature. 
Si  l’on  posait  / (i/)  + F (w)  = 0,  toujours  pour  de  petites  valeurs 
de  u,  on  trouverait  sur  la  normale  un  état  de  déplacement  tout 
autre  que  celui  obtenu  par  M.  Petzval. 

' 19.  Suivons-le  maintenant  encore  pour  ce  qui  concerne  l’onde 

plane  proprement  dite , c’est-à-dire , pour  le  cas  où  la  source  vibra- 
toire peut  être  représentée  par  un  plan  de  molécules  vibrantes, 
qui  se  meut  avec  la  vitesse  c dans  la  direction  de  sa  perpendi- 
culaire; soit  d le  temps  courant. 

En  chaque  point  de  son  parcours,  la  source  communique  aux 
molécules  du  milieu  de  nouveaux  écarts  ou  déplacements , qui  se 
propagent  ensuite  sans  altération.  Pour  une  molécule  du  milieu, 
placée  sur  la  perpendiculaire  à la  distance  x de  la  position  initiale 
du  plan , le  déplacement  résultant  § à l’instant  t peut  être  trouvé 
par  les  intégrales: 

f — s(t  — d)^dd-i-f  F(^x  — ed -h  s(t  — d))  dô. 

Mais  la  source  elle-même,  ou  plutôt  ses  molécules,  qui  com- 
muniquent les  déplacements,  sont  en  vibration;  les  impulsions 
excercées,  à l’instant  d et  pendant  le  temps  dQ , par  ces  molé- 
cules vibrantes  primaires  sont  donc  représentées  par  sin  kd  do , et 
par  conséquent  les  déplacements  ou  écarts  sont  aussi  proportion- 
nels à cette  quantité. 

On  a donc: 

/*  fÇoc — cO — s{t — 0Ÿ)sinkddd-j-  j F (a? — cO-\-s{t — oŸ)sinkddd. 

J 0 J Q 

Maintenant,  tout  est  trouvé;  on  change  la  variable  dans  ces 


64  V.  s.  M.  VAiN  DER  WlLLlGEiV.  SUR  LA  FAUSSETÉ 

intégrales,  par  exemple  dans  la  première,  en  posant 
X — cd  — s {i  — 0)  z=  w ; • 

il  vient  alors  : 

U — X si  J du  U — X -i-  si  du 

0 z=r , dd  — et  si7i  kd  de  = sin  k 

s — c s — c s — c s — c 


Or,  selon  M.  Petzval,  f (it)  n’a  une  valeur  appréciable  qu’entre 
les  limites  -h  £ et  — s\  par  conséquent,  dans  l’expression  affectée 
du  sinus,  on  peut  négliger  au  numérateur  u vis-à-vis  de  5/  — 

St  — X 


et  alors  sin  k 


vient  en  dehors  du  signe  d’intégration.  La 


s — c 

première  des  deux  intégrales  devient  donc: 


sm 


C— 1~  6 

-{st  — x)  I f {u)  du  ; 
c J — R 


s — c s — c 

la  valeur  de  l’intégrale  définie  est  une  grandeur  constante  C , et 
par  conséquent  on  a finalement: 

— ^ sin  — - — (st—rx), 
s — c s — c ’ 

De  la  même  manière , on  trouve  pour  la  valeur  de  la  seconde 
intégrale  : 

C . k 


sin 


{st  + x)  ; 


de  sorte  qu’il  vient: 

e C . ^/,'n  O . 

g = sin {st  — x)  — sin {st  + x), 

s — c s — c s -\-  c s c 

Voici  donc  le  résultat:  deux  vibrations  communiquées  au  milieu , 
l’une  avec  une  période  raccourcie,  l’autre  avec  une  période 
allongée,  — tout  juste  comme  le  réclamait  la  théorie  de  Doppler 
pour  avoir  un  vêtement  scientifique,  — et  dont  la  première  se 
propage  convenablement  en  avant , la  seconde  en  arrière.  De  cette 
façon,  en  effet,  la  périodicité  de  la  vibration  de  la  source  est 
transmise  très  ingénieusement,  et  avec  les  modifications  néces- 
saires, au  milieu  ambiant. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  65 

Mais,  pour  les  raisons  dites  ci-dessus,  ce  résultat  n’a  pour  moi 
aucune  valeur  démonstrative. 


§ VI. 

20.  La  discussion  dont  je  viens  de  rendre  compte  paraît  avoir 
passé,  au  premier  abord,  inaperçue  pour  beaucoup  de  physiciens. 
Grâce  à la  remarque  mentionnéè  à l’art.  13,  ils  étaient  tran- 
quillisés au  sujet  du  changement  de  couleur  des  étoiles  ; en  ce  qui 
concerne  le  son , ils  invoquaient  les  expériences  de  M.  Buys  Ballot 
et  autres  comme  preuve  à l’appui  de  la  conception  de  Doppler; 
à ces  expériences  on  en  ajoutait  d’autres,  et,  sans  souci  de  l’étrange 
confusion  qu’on  faisait  entre  les  idées  de  vibration,  d’onde  et  de 
poussée  d’onde,  on  se  trouvait  heureux  de  la  vérité  nouvelle.  Tel 
était  l’état  des  esprits;  la  grande  majorité,  à coup  sûr,  tenaient 
la  théorie  de  Doppler  pour  chose  démontrée,  et  la  science,  une 
fois  engagée  dans  une  voie  fausse , était  toute  préparée  à accepter 
l’équivalence  des  notions  de  pulsation  d’onde  et  de  distance  appa- 
rente ou  réelle  des  pulsations  d’ondes  à celles  de  vibrations  et  de 
longueur  d’onde  normale.  A cette  heure  néfaste,  l’analyse  spectrale 
vint  faire  son  apparition , et  aussitôt  on  décida  que , même  en 
laissant  inaltérée  la  couleur  de  la  lumière  composée  ou  résultante , 
le  mouvement  de  la  source  ou  du  prisme  pouvait  au  moins  déplacer 
dans  le  spectre  les  raies  de  Fraunhofer  ou  leun  phénomène  paral- 
lèle, les  raies  brillantes.  En  effet,  si  Doppler  avait  touché  juste, 
la  raie  jaune  D,  par  exemple,  devait  se  montrer  ’ à l’observateur 
un  peu  plus  verte  ou  un  peu  plus  rouge,  et  par  conséquent  lui 
paraître  déplacée  vers  le  rouge  ou  vers  le  vert.  Ceci,  avec  l’idée 
des  poussées  d’onde  accélérées  ou  retardées , avait  encore  un  sens , 
tant  qu’on  s’en  tenait  à la  perception  de  la  couleur,  et  qu’on 
faisait  dépendre  celle-ci  de  la  fréquence  des  pulsations  qui  frap- 
pent l’œil.  Mais,  sans  y songer,  on  franchit  maintenant  ce  pas: 
à l’observateur,  ou  plutôt  à l’œil,  on  substitua  le  prisme.  Au 
mouvement  de  la  source , pour  nous  borner  à celle-ci , on  attribua 
le  pouvoir  de  changer  la  réfraction  du  rayon  lumineux.  Ce  chan- 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  5 


66 


V.  s.  M.  VAN  ÜER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


gement  exige  une  modification  de  la  durée  de  vibration  des  molé- 
cules dans  le  rayon  incident  et  de  la  longueur  d’onde  normale 
qui  y correspond , — c’est  là  un  point  sur  lequel  tout  le  monde 
est  sans  doute  d’accord.  Or,  ces  deux  éléments,  je  prétends  que 
Doppler  lui* *même  les  avait  laissés  intacts,  et  le  lecteur  peut  juger, 
d’après  cela,  jusqu’à  quel  point  la  discussion  entre  M.  Petzval 
et  M.  von  Ettingshausen  a contribué  à donner  naissance  à l’erreur 
dont  il  s’agit. 

Exprimons-nous  encore  plus  clairement,  de  crainte  d’être  mal 
compris.  Admettons  qu’à  raison  du  retard  des  poussées  d’onde, 
occasionné  par  le  mouvement  rétrograde  de  la  source,  un  rayon 
lumineux  jaune  vire  au  rouge  pour  l’œil;  il  n’en  continuera  pas 
moins , avec  le  même  prisme , à avoir  comme  rayon  rouge  le  même 
indice  de  réfraction , par  conséquent  la  même  déflexion , qu’il  avait 
comme  rayon  jaune  lorsque  la  source  était  immobile , — à condition 
que  la  durée  de  vibration  de  ces  molécules  et  la  longueur  d’onde 
proprement  dite  n’aient  subi  aucune  altération;  à cet  égard,  il 
ne  peut  y avoir  l’ombre  d’un  doute.  Doppler  lui-même,  bien  que 
placé  à un  point  de  vue  tout  différent  du  mien,  aurait  encore  jugé 
comme  moi  en  ce  qui  concerne  l’invariabilité  de  la  réfraction  ; ce  sont 
ses  successeurs  qui  ont  introduit  l’idée  nouvelle  de  la  mutabilité. 
Plus  loin,  quand  j’aurai  terminé  mon  résumé  historique,  je  mon- 
trerai comment  la  condition  nécessaire  pour  cette  invariabilité  de 
la  réfraction  me  paraît  devoir  être  maintenue. 

21.  Il  ne  servit  de  rien  que  M.  Angstrom  fît  connaître  le 
résultat  négatif  de  ses  expériences  concernant  le  spectre  de  l’étin- 
celle électrique,  dans  lequel  les  lignes  brillantes  se  montraient 
toujours  à la  même  place,  malgré  la  grande  vitesse  avec  laquelle 
les  particules  sont  projetées  dans  des  direction  opposées  à partir 
des  deux  pôles.  Il  ne  servit  de  rien  que  M.  Petzval,  dans  une 
Communication  où  perce  encore  le  même  sentiment  de  contra- 

»)  Optische  üntersuchmgen.  Poggend.  Ann.,  B.  XCIV,  p.  14-1.  1855. 

*)  Angstrôm’s  üntersuchungen  über  das  Spectrum  des  electriscJien  Fmkens  in 
Beziehung  auf  die  Farbe  der  Doppelsterne.  Sitzungsberichte  der  K.  K.  Akad.  d. 
Wissensch.,  B.  XVI,  p.  521.  1860. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  67 

riété  que  dénotait  la  conclusion  de  son  troisième  Mémoire , fît  part 
à l'Académie  de  Vienne  de  ce  résultat  négatif  de  M.  Angstrom, 
en  le  présentant  comme  une  preuve  expérimentale  contre  la  théorie 
de  Doppler , ou  plutôt'  contre  le  changement  de  la  durée  de  vibra- 
tion. Le  peu  de  succès  de  leur  opposition  tenait  à ce  qu’eux-mêmes , 
ce  me  semble,  n’avaient  pas  nettement  conscience  du  désaccord 
qui  pouvait  exister  entre  le  changement  de  couleur  pour  l’œil , tel 
que  le  voulait  Doppler , et  le  changement  de  déflexion  par  le  prisme, 
dont  il  était  maintenant  question.  Ils  ne  voyaient  plus  de  diffé- 
rence spécifique  entre  l’accélération  ou  le  retard  de  la  poussée 
d’onde , qui  était  peut-être  capable  de  produire  le  premier  de  ces 
changements,  et  la  modification  de  la  durée  de  vibration  de  la  lumière 
incidente , qui  constituait  une  condition  essentielle  pour  le  second  ; 
ces  deux  notions , en  effet , avaient  été  identifiées  par  M.  Petzval 
et  M.  von  Ettingshausen.  M.  Petzval  était  allé  trop  loin  et  s’était 
vu  impuissant  à établir  analytiquement  que  la  durée  de  vibration 
des  molécules  de  l’éther  reste  inaltérée  dans  le  cas  du  déplacement 
de  la  source.  D’un  autre  côté,  le  raisonnement  si  simple  de 
Doppler  était  à la  portée  de  tout  le  monde.  On  continua  donc , en 
quelque  sorte,  à prendre  pour  base  unique  les  phénomènes  du 
son , qu’on  regardait  comme  suffisamment  démontrés  et  qui  s’ex- 
pliquaient d’une  manière  satisfaisante,  suivant  les  idées  de  Doppler, 
par  une  accélération  de  la  poussée  d’onde;  et  on  conclut  de  là 
à des  phénomènes  concernant  la  réfraction  de  la  lumière , qui  dépen- 
dent exclusivement  de  la  durée  de  vibration  des  molécules  de 
l’éther.  Je  serais  même  tenté  de  croire,  quelque  paradoxal  que 
cela-  paraisse,  que  les  expériences  de  M.  Angstrôm  ont  juste- 
ment été,  pour  beaucoup  de  partisans  de  Doppler,  la  circon- 
stance première  qui  les  a déterminés  à proclamer,  dans  leur  foi 
inébranlable  à la  théorie  du  maître,  le  déplacement  des  raies 
du  spectre. 

22.  En  M.  Mach  ^ ) nous  trouvons  un  de  ces  partisans  déclarés 
de  Doppler.  Chez  lui  ce  sont  de  nouveau  les  explosions  auxquelles 


Poggend.  A7in.,  B.  CXII,  p.  58.  1861. 


5* 


68  V.  s.  M.  VAW  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 

on  s’attache  de  préférence,  et  l’analyse  de  M.  Petzval  est  con- 
sidérée comme  un  mode  de  déduction  plus  rigoureux  et  plus  élé- 
gant, qui  a d’ailleurs  conduit,  en  ce  qui  concerne  la  longueur 
d’onde,  au  même  résultat  ^).  M.  Mach  défend  les  vues  de  Doppler 
relativement  au  son;  il  peut  y avoir,  dit-il,  des  tons  d’explosion, 
comme  dans  une  sirène  à trous  très  'éloignés  les  uns  des  autrqs 
et  dans  la  roue  dentée  de  Savart.  Plus  loin , je  reviendrai  sur  la 
sirène;  il  est  parfaitement  vrai  qu’ici,  avec  les  explosions,  des 
vibrations  courantes  sont  excitées  dans  l’air , mais  les  périodes  de 
ces  vibrations  n’ont  peut-être,  au  moins  dans  la  sirène  de  Seebeck , 
aucun  rapport  avec  la  hauteur  du  ton  perçu  ; et  une  source  sonore 
ou  lumineuse  à vibration  fixes  ne  détermine  pas , en  général , de 
pareilles  explosions.  On  le  voit,  M.  Mach  reste  fidèle  à l’idée 
fondamentale  de  Doppler,  celle  de  pulsations  communiquées  au 
milieu  par  la  source  en  des  points  successifs;  c’est  toujours  la 
poussée  accélérée  d’ondes  qui  peuvent  très  bien  se  superposer  l’une 
à l’autre. 

C’est  ensuite  le  même  passage,  aussi  en  ce  qui  touche  les  for- 
mules, des  explosions  aux  phases  et  à la  vibration  courante, 
comme  le  montre  la  citation  suivante:  „Mais  si  les  ondulations 
élémentaires  qui  composent  une  onde  se  propagent  avec  une  même 
vitesse  et  sans  dérangement  mutuel,  ainsi  qu’on  l’admet  sans  doute , 
ces  formules  (de  Doppler)  sont  applicables  à toutes  les  formes 
d’ondes,  puisque  la  hauteur  du  ton  n’est  déterminée  que  par  la 
distance  de  deux  phases  correspondantes  et  d’ailleurs  quelcon- 
ques, phases  qu’on  peut  alors  toujours  regarder  comme  instan- 
tanées ou  comme  constituant  des  explosions”  ^).  Par  onde,  on 
entend  ici  évidemment  le  résultat  composé  des  vibrations  élémen- 
taires de  milliers  de  molécules , ce  que  nous  aimons  mieux  appeler 
poussée  d’onde.  — Personne  ne  contestera  à M.  Mach  que  cette 
poussée  d’onde,  née  d’une  source  procédant  par  explosions  et 
animée  d’un  mouvement  de  progression , participe  à cette  progres- 


»)  1.  c.,  p.  59. 
*)  1.  O.  p.  60. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  69 

sion  ; les  ondulations  de  Teau , sous  l’action  progressive  d’un  coup 
'de  vent,  nous  le  montrent  clairement. 

Donnons  à cette  poussée  d’onde,  dans  le  cas  du  son,  le  nom 
d’impulsion  de  condensation  ou  de  dilatation  ; ces  impulsions  pour- 
ront donc,  portées  par  les  vibrations  des  molécules,  se  propager 
dans  leur  intégrité,  et  leur  vitesse  de  propagation  deviendra  égale 
à la  vitesse  de  l’onde  augmentée  de  celle  de  la  source.  S’il  se 
trouve  alors  sur  leur  parcours  un  ensemble  circonscrit  et  approprié,  — 
et  c’est  ainsi  que  nous  nous  représentons  l’oreille,  — les  impul- 
sions successives  y exciteront  une  vibration , dont  la  hauteur  sera 
réglée  par  leur  fréquence.  Toutes  les  expériences  sur  lesquelles 
M.  Mach  et  autres  s’appuient  pour  défendre  la  manière  de  voir 
de  Doppler,  et  dont  une  sera  examinée  tout  à l’heure  en  détail, 
rentrent  dans  la  même  catégorie,  celle  de  l’action  exercée  par 
des  impulsions  de  condensation  ou  de  dilatation , qui  ont  été  com- 
muniquées à l’air  le  plus  souvent  sous  forme  d’explosions , et  qui 
sont  transmises  pendant  quelque  temps  sans  division , comme 
phénomène  sommatoire,  par  des  vibrations  d’une  durée  souvent 
inconnue.  — Le  ton  perçu  change  alors  avec  le  déplacement  de 
la  source  d’explosions,  mais  pour  cela  ce  déplacement  n’a  pas 
encore  raccourci,  selon  la  loi  de  Doppler,  la  longueur  d’onde  des 
vibrations  élémentaires  courantes,  qui  peut-être  même  n’ont  pas 
de  rapport  du  tout  avec  les  vibrations  de  l’instrument  sonore  ; les 
impulsions  de  condensation  et  de  dilatation  ont  simplement  excité 
dans  l’oreille , par  le  seul  effet  de  l’accélération  de  leur  succession , 
une  vibration  plus  élevée  que  celle  donnée  par  l’instrument.  On 
voit  quel  abîme  il  y a entre  la  signification  des  expériences  invo- 
quées et  la  transmission  régulière,  de  molécule  en  molécule,  d’une 
vibration  dont  la  période  serait  modifiée  par  le  mouvement  de 
la  source. 

Plus  haut,  à l’art.  11,  j’ai  déjà  dit  que  les  successeurs  de 
Doppler  ont  encore  doué  la  vibration,  une  fois  émise,  sur  toute 
sa  route  ultérieure,  de  la  vitesse  de  la  source,  idée  qui  ne  trou- 
vera guère  d’appui  dans  les  vues  plus  saines  que  je  viens  d’ex- 


70 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


poser.  M.  Mach  ^ , voulant  mettre  en  formule  la  durée  apparente 

y Je  * 

de  la  vibration , commet  la  même  erreur.  Il  pose  t'  = ^ , où 

c 

T et  T'  représentent  la  durée  vraie  et  la  durée  apparente,  et  /, 
k et  c les  vitesses  du  son,  de  la  source  et  de  l'observateur,  comp- 
tées toutes  les  trois  dans  le  même  sens. 

Nous  laissons  à M.  Mach  la  possibilité  d'exciter  dans  un  appa- 
reil approprié,  — l'oreille  ou  un  résonnateur  quelconque,  — une 
vibration  fixe  plus  élevée  que  celle  qu'exécute  son  anche,  sa 
sirène  ou  un  instrument  analogue,  par  le  simple  effet  mécanique 
d'impulsions  de  condensation  ou  de  dilatation,  arrivant  en  suc- 
cession plus  rapide,  sur  la  membrane  du  tympan,  par  exemple. 
Mais , entre  ce  résultat  et  la  durée  de  vibration  de  la  source , le 
seul  rapport  que  nous  admettions,  c'est  que  cette  dernière  règle 
le  rhythme  des  condensations  et  des  dilatations  successivement 
propagées.  Nous  ne  voyons  même  plus  de  lien  nécessaire  entre 
la  longueur  d’onde  de  la  vibration  fixe  de  la  source  et  celle  des 
vibrations  qui,  dans  les  expériences^  de  M.  Mach,  transportent 
sans  morcellement  les  impulsions  jusqu'à  l’oreille.  Nous  ne  nous 
astreignons  pas  à déterminer  dans  tous  les  cas  la  longueur  d’onde 
d’une  vibration  courante  par  la  distance,  sur  le  rayon,  de  deux 
phases  correspondantes  successives , mais  nous  nous  en  tenons  pour 
cela  à la  définition  simple  de  l'ensemble  de  la  croupe  et  de  la 
dépression  qui  se  déroulent  d’une  vibration  complète.  Nous  posons 
en  principe  la  conversion  de  chaque  explosion  en  une  vibration, 
et  à la  place  d’une  vibration  unique  nous  en  mettons  un  grand 
nombre,  de  périodes  différentes.  Enfin  nous  nions  la  stabilité  d'im- 
pulsions , de  déplacements  ou  de  phases  élémentaires  isolées , émises 
dans  un  milieu  indéfini , et  la  résumption  de  ces  dernières  en  une 
vibration  modifiée. 

Les  expériences  de  M.  Mach  n'ont,  en  effet,  pas  d'autre  portée 
que  celle  qui  vient  de  leur  être  attribuée  : son  petit  tuyau  à anche 
expulse  ou  admet,  à des  distances  variables  de  l'oreille  et  à des 


‘)  1.  c.  p.  60. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  71 

instants  réglés  par  la  vibration  de  Tanche , des  masses  d’air  rela- 
tivement considérables,  dans  lesquelles  sont  excitées,  en  partie 
par  le  concours  de  Tanche,  toutes  sortes  de  vibrations;  de  là 
des  condensations  et  des  dilatations  successives,  qui,  au  moyen 
de  ces  vibrations,  sont  encore  transportées  dans  leur  ensemble 
jusqu’à  l’oreille , où  elles  donnent  naissance  par  leur  effet  méca- 
nique à une  vibration  fixe , dont  la  période  est  déterminée  par  ces 
intervalles  de  plus  grande  expulsion  et  de  plus  grande  admission 
et  par  les  distances  variables  du  tuyau  à l’oreille.  On  voit  claire- 
ment qu’ici , aussi  longtemps  du  moins  que  l’interférence  ne  dérange 
rien , les  périodes  des  vibrations  qui  transmettent  les  condensations 
et  les  dilatations  jusqu’à  l’oreille,  sont  tout  à fait  indifférentes 
pour  le  résultat , puisque  pour  chaque  mélange  de  vibrations  la 
pulsation  sommatoire  non  encore  désagrégée  est  tout  ce  dont  il  y 
a lieu  de  tenir  compte.  Pour  le  changement  de  la  longueur  d’onde 
de  la  vibration  primaire  de  la  source,  dans  sa  transmission  au 
milieu,  ces  expériences  ne  prouvent  absolument  rien.  Elles  n’ont 
donc  rien  à démêler  non  plus  avec  les  recherches  analytiques  de 
MM.  Petzval  et  von  Ettingshausen. 

M.  Mach  dit  ^):  „I1  convient  de  remarquer,  en  outre,  que  le 
principe  de  Petzval  (celui  de  la  conservation  de  la  durée  de 
vibration)  parle  de  la  durée  de  la  vibration  d’une  seule  et  même 
molécule,  tandis  que  Tœil  et  Toreille,  dans  T état  de  mouvement, 
reçoivent  leurs  phases  à chaque  instant  d’une  molécule  différente.” 
Avant  d’émettre  une  pareille  assertion,  j’y  aurais  réfléchi  long- 
temps, car  je  doute  si,  pour  Toreille  par  exemple,  les  choses 
se  'passent  bien  ainsi. 

Les  recherches  de  M.  Angstrbm,  dont  il  a été  question  plus 
haut,  tombent  en  dehors  des  limites  de  la  théorie  explosive  de 
Doppler , puisqu’elles  ont  rapport  à la  transmission  régulière  d’une 
vibration  fixe.  M.  Mach  aurait  pu  s’abstenir  d’en  parler;  car  ses 
expériences,  qui  concernent  uniquement  un  mode  spécial  d’excitation 
de  vibrations  fixes  dans  un  ensemble  circonscrit , n’ont  évidemment 


O 1.  c.,  p.  61. 


72 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


rien  à faire  avec  la  transmission  d’une  vibration  à un  milieu 
indéfini.  La  distinction  qu’il  établit  entre  la  progression  des  par- 
ticules incandescentes  et  la  progression  de  l’incandescence  me 
paraît  dénuée  de  valeur,  et  quant  à l’argument  contre  la  grande 
vitesse  des  particules  ^ ) , tiré  de  leur  entraînement  supposé  par 
l’air,  il  tombe  de  lui-même,  attendu  que  M.  Angstrom  dit 
explicitement  que  les  particules  sont  lancées  dans  la  direction 
verticale,  ce  qui  est  tout  autre  chose  que  que  d’être  emportées 
par  un  courant  ascendant  d’air  échauffé. 

Au  sujet  des  l’application  de  vues  de  Doppler  à l’analyse  spectrale 
du  ciel,  M.  Mach  partage  les  opinions  ordinaires. 

Je  lis  encore  dans  le  même  Mémoire  : „Dans  un  travail  ulté- 
rieur nous  étudierons  plus  à fond  l’influence  que  la  vitesse  du 
mouvement  progressif  et  le  changement  de  densité  du  milieu 
exercent  sur  la  hauteur  du  ton.”  Et  plus  loin  : „Pour  cette 
raison,  le  résultat  du  calcul  précédent”  — la  formule  communiquée 
ci-dessus  — „ne  sera  probablement  pas  affecté  d’une  manière  notable 
par  l’influence  du  mouvement  progressif  dans  le  cas  d’une  faible 
vitesse  (il  n’en  serait  plus  ainsi,  naturellement,  pour  un  mouve- 
ment très  rapide).  Cette  déduction,  que  nous  avons  simplement 
indiquée  et  qui  dépend  en  réalité  de  l’intégration  d’une  équation 
différentielle  partielle , nous  nous  proposons  d’ailleurs  de  la  déve- 
lopper prochainement  par  l’analyse,  en  faisant  les  hypothèses 
nécessaires  pour  la  simplification  du  problème , qui , dans  sa  forme 
la  plus  générale,  offrirait  de  très  sérieuses  difficultés.” 

Tout  cela  à propos  des  vues  de  Doppler  et  d’une  excitation 
spéciale,  très  facilement  explicable,  de  vibrations  sonores  fixes 
dans  un  ensemble  circonscrit.  On  serait  presque  tenté  de  demander 
si  la  chose  en  valait  bien  la  peine.  A ma  connaissance , le  travail 
annoncé  dans  le  passage  cité  n’a  pas  encore  vu  le  jour;  mais 


D 1.  c.,  p.  64. 

D Poggênd.  Anmlen,  B.  XCIV,  p.  188,  art.  14. 
D 1.  c.,  p.  59. 

'*)  1.  c. , p.  63. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  73 

j’ai  trouvé  un  autre  Mémoire  de  M.  Mach *  *),  dans  lequel  il  se 
rallié  évidemment  à la  théorie  ennoblie  de  M.  Petzval , et  renonce 
par  conséquent  à la  communication  instantanée  de  la  vibration 
admise  par  Doppler.^  Les  raisons  qui  me  font  rejeter  cette  théorie 
ennoblie  ont  été  développées  plus  haut. 

23.  Un  dernier  Mémoire  de  M.  Mach  dont  je  veux  encore 
dire  quelques  mots,  est  dirigé  contre  le  travail  de  M.  Petzval; 
on  y retrouve  les  mêmes  idées,  appuyées  des  mêmes  arguments. 

Mais,  en  outre,  nous  rencontrons  ici  une  singulière  erreur, 
que  M.  Mach  commet  en  appliquant  sa  formule,  que  j’ai  donnée 
plus  haut.  A l’art.  2,  il  écrit  ^):  „M.  Petzval,  dans  sa  déduction 
mathématique,  croit  pouvoir  remplacer  le  mouvement  relatif  de 
la  source  vibrante  et  de  l’observateur  par  un  courant  du  milieu, 
ce  qui  est  inadmissible.”  Et  plus  loin  : „I1  revient  évidemment 
au  même , que  de  la  source  A à l’observateur  B procède  un  courant 
de  la  vitesse  c,  ou  que  A et  B se  meuvent  ensemble  avec  la 
vitesse  c dans  la  direction  opposée,  tandis  que  le  milieu  reste 
en  repos.”  Il  pose  maintenant  kzzzc  dans  la  formule,  et  trouve 
naturellement  t'  rzi  t.  U poursuit  alors:  „Nous  trouvons  ainsi 
tz=t',  c’est-à-dire,  que  la  hauteur  du  ton  ne  change  pas  lorsque 
la  source  et  l’observateur  se  meuvent  avec  une  même  vitesse  dans 
une  même  direction , ou  lorsque  le  milieu  est  affecté  d’un  courant 
dans  la  direction  opposée.”  Ici  se  manifeste  d’une  façon  carac- 
téristique la  différence  des  points  de  vue  de  M.  Mach  et  de  Doppler. 
M.  Mach  par  sa  formule  donne  en  surcroît , à la  pulsation  ou  à la 
vibration  une  fois  émise,  la  vitesse  de  la  source,  ce  qui  revient 
au  même  que  s’il  attribuait  la  vitesse  de  A au  milieu  interposé 
entre  A et  B ; c’est  ce  que  Doppler  n’avait  pas  fait  ; et , malgré 
cela,  leurs  résultats  coïncident  pour  une  vitesse  égale  de  A et 
de  B,  parce  qu’alors  la  divergence  se  résout  en  une  différence 
de  longueur  d’onde  et  non  en  une  différence  de  durée  apparente 


D Schlômilch,  Zeitschrift  fur  Mathematik  und  Physik,  1861. 

*)  Poggend.  Amalen,  B.  CXVI,  p.  333.  1862. 

1.  c.,  p.  334. 


74 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


de  la  vibration.  Mais,  précisément  pour  cette  raison,  M.  Mach, 
avec  sa  formule , ne  peut  pas  substituer  à un  mouvement  de  niême 
vitesse  de  A et  de  B un  courant  en  sens  opposé  ; A et  B restant 
en  repos,  un  simple  courant,  ainsi  que  je  Tai  déjà  fait  remarquer 
à Tart.  16,  transportera  bien  certainement  avec  plus  de  rapidité 
les  ondes  dont  il  s’est  chargé,  et  les  fera  se  succéder  pour  l’obser- 
vateur suivant  un  rhythme  accéléré.  M.  Mach  a pris  trop  de  liberté 
avec  les  formules  de  Doppler , et , dans  son  désir  de  réfuter  M.  Petz- 
val,  il  est  allé  plus  loin  que  son  maître. 

M.  Mach  invoque  dans  ce  Mémoire  les  expériences  de  M. 
Fizeau^),  qui  ont  montré  que  le  mouvement  dans  lequel  des 
prismes  de  verre  sont  entraînés  avec  la  Terre  augmente  la  déviation 
du  plan  de  polarisation  du  rayon  réfracté  par  ces  prismes. 

Ces  expériences  forment  le  complément  de  celles  que  l'auteur 
avait  déjà  faites  sur  l’eau  en  mouvement  et  que  nous  avons 
citées  plus  haut  ; elles  prouvent  pour  les  corps  solides  ce  que  les 
précédentes  avaient  établi  pour  les  liquides,  savoir,  que  l’éther 
est  entraîné  par  les  corps  matériels  conformément  à l’hypothèse 
de  Fresnel.  Or,  quelles  que  soient  ks  conséquences  qui  découlent 
de  là,  bien  certainement  on  n’en  conclura  pas  que  la  direction  du 
rayon  transmis  est  changée  par  le  mouvement  de  la  Terre. 

Quant  à l’expérience  avec  les  miroirs  à interférence  de  Fresnel, 
que  M.  Mach  propose  ensuite,  il  n’y  a,  ce  me  semble,  d’après 
la  propre  théorie  de  Doppler , rien  à en  attendre , puisque  l’obser- 
vateur et  les  miroirs  possèdent  des  vitesses  égales,  et  que  par 
conséquent  l’un  des  mouvements  est  compensé  par  l’autre.  Si 
l’expérience  ne  donne  aucun  résultat,  cela  importera  donc  peu 
pour  la  question  en  litige. 

Enfin,  je  ne  puis  laisser  passer  sans  protestation  l’assertion 

')  1.  c. , p.  336. 

*)  Comptes  rendus,  T.  XLIX,  p.  717.  1859.  Voir  Faye,  C.R.,  T.  XLI^, 
p.  870  et  993,  et  T.  L,  p.  121,  1860.  Voir  aussi:  V Ânnalen , B.  CIX, 

p.  162,  et  Tessan,  C.  R.,  T.  XLIX,  p.  980,  et  T.  L,  p.  78. 

Comptes  rendus,  T.  XXXIII,  p.  319.  1851.  Poggend.  Annaleti,  Brgàn- 
zungsband  III,  p.  457.  1853. 


DE  LA  PROrOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  75 

suivante  ^ ) : „Pour  un  corps  en  mouvement , non -seulement  la  di- 
rection de  la  réflexion  devient  autre,  mais  la  longueur  d’onde  est 
également  changée,  comme  on  Ta  constaté  dans  les  expériences 
bien  connues  faites  sur  les  chemins  de  fer.”  Evidemment  il  s’agit 
ici  des  expériences  de  MM.  Buys  Ballot  et  Scott  Bussel,  que  j’ai 
déjà  rappelées  précédemment;  mais,  s’il  en  est  ainsi,  je  dois 
déclarer  ne  pas  comprendre  comment , de  la  surélévation  du  ton , 
constatée  par  l’observateur  au  repos  ou  en  mouvement,  on  peut 
conclure  à un  raccourcissement  de  la  longueur  d’onde  dans  l’air. 
Rien  n’autorise  à attribuer  à ce  phénomène,  qui  s’explique  si 
aisément  par  l’arrivée  accélérée  d’impulsions  de  condensation 
successives  sur  un  ensemble  circonscrit , la  valeur  d’un  argument 
péremptoire  dans  une  question  aussi  importante  de  la  théorie 
des  ondes. 

Dans  une  dernière  Notice^),  M.  Mach  décrit  un  appareil  à 
cylindres  métalliques,  qui  doit  donner  une  représentation  de  la 
manière  dont  une  impulsion  se  propage.  Cela  semble  indiquer 
que  l’auteur  part  encore  de  l’idée  qu’une  impulsion  peut  cheminer 
comme  telle  dans  un  milieu  élastique  indéfini  ; or,  l’impulsion  de 
condensation  ou  de  dilatation  dans  l’air , dont  on  parle  si  volontiers , 
n’est  partout  et  toujours  qu’une  expression  abrégée  pour  un  phé- 
nomène sommatoire,  — la  poussée  d’onde,  — qui  naît  des  vibra- 
tions de  milliers  de  molécules,  lesquelles  vibrations  n’ont  même 
pas  besoin  de  correspondre  toutes  à une  même  longueur  d’onde  ; 
si  effectivement  les  longueurs  d’onde  diffèrent,  ou  si  les  molécules 
sont  assujetties  simultanément  à des  vibrations  de  durées  diffé- 
rentes, l’impulsion  sommatoire  se  désagrège  -dès  la  vibration 
suivante,  preuve  de  son  instabilité  propre. 

Ni  Doppler,  ni  aucun  de  ses  partisans  ou  de  ses  adversaires  n’ a 
jusqu’ici  mis  bien  en  lumière  que  l’explosion  ou  l’impulsion  [conden- 
sation ou  dilatation  pour  le  son)  ^ dont  il  est  toujours  question  y ne 


D 1.  c.,  p.  336. 

Cari,  Repertorium  der  Phÿsik , B,  III,  p,  324,  et  Fortsçhritte  der  Phpik , 
B.  XXIV,  p.  237,  Berlin,  1872. 


76 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


peut  être  transportée  que  par  des  vibrations  ^ et  que  la  durée  de 
ces  vibratmis  est  tout  à fait  arbitraire  ^ sans  le  moindre  rapport 
nécessaire  avec  la  durée  de  la  vibration  fixe  de  la  source  sonore 
qui  fournit  éventuellement  V impulsion.  Et  la  structure  de  l’oreille, 
et  la  construction  des  instruments  musicaux  employés  dans  ces 
expériences  autorisent  cette  , interprétation , puisque  toutes  les  con- 
densations et  les  dilatations  émises  par  l’instrument,  et  dont  les 
temps  sont  réglés  par  les  maxima  d’écart  ou  de  vitesse  des  vibrations 
fixes  successives,  n’ont  besoin  d’agir  chacune  qu’une  seule  fois  sur 
l’oreille,  savoir,  par  la  première  poussée  sommatoire. 

Je  termine  ici  mes  remarqnes  sur  une  période  pendant  laquelle 
une  discussion  souvent  passionnée  a été  soutenue,  uniquement 
parce  qu'on  avait  attribué  à un  phénomène  très  simple  d'excitation 
de  vibrations  fixes  un  degré  d'importance  qu'il  ne  comportait  pas, 
et  qu'on  s'était  par  là  fourvoyé  dans  les  questions  fondamentales 
concernant  la  propagation  des  vibrations.  Dans  l'ardeur  de  la 
lutte,  on  ne  prit  pas  le  temps  d’appliquer  la  règle  d’or:  quibene 
distinguit  bene  docet , et  on  tomba  ainsi  dans  une  inextricable 
confusion  des  idées  d'impulsion,  d'onde,  de  poussée  d’onde,  de 
vibration,  etc.  Ce  n’est  pas  sans  raison  que  le  ton  satirique  fut 
plus  d’une  fois  employé  par  M.  Petzval;  mais  lui-même  ne  sut 
pas  échapper  au  courant  général  et  y fut  entraîné  malgré  tous 
ses  efforts.  Les  erreurs  qu'il  commit,  lui  et  l’analyse  elle-même 
ont  dû  les  expier  chèrement , par  le  persifflage  auquel  son  travail 
d’ailleurs  si  distiugné  fut  en  butte  de  la  part  de  ses  adversaires , 
persifflage  déplacé,  mais  que,  de  son  côté,  il  avait  provoqué 
trop  légèrement. 

Pour  montrer  à quel  point  la  conception  de  Doppler  avait  jeté 
des  racines  profondes,  je  citerai  encore  cette  seule  ligne  des 
Fortscliritte  der  Physilc  fur  1861  ^):  „ En  présence  de  la  simplicité 
et  de  l’évidence  de  la  théorie  de  Doppler,  nous  croyons  etc.” 
La  simplicité,  certes,  on  ne  saurait  la  refuser  à l'explication  à 
donner  des  expériences  de  Buys  Ballot,  Scott  Russel,  Mach  et 


D p.  147. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  77 

autres,  qu’on  apporte  à l’appui  des  vues  de  Doppler';  mais  ces 
expériences  n’ont  rien  à faire  avec  la  théorie  de  la  transmission 
instantanée  de  la  vibration  de  la  source  au  milieu  et  du  chan- 
gement de  longueur  de  l’onde , théorie  qui  est  encore  aussi  dépourvue 
de  preuves  et  de  fondement  que  le  jour  où  elle  a pris  naissance. 

24.  Après  les  développements  où  je  suis  déjà  entré,  on  prévoit 
facilement  quelle  doit  être  l’explication  vraie  de  ces  expériences 
sur  les  voies  ferrées.  Tout  comme  le  tuyau  à anche  de  M.  Mach , 
les  instruments  employés  pour  produire  le  ton , savoir  des  instru-, 
ments  à vent,  expulsent,  principalement  aux  instants  de  l’écart 
maximum  de  l’anche,  des  quantités  d’air  relativement  assez 
grandes , — à peu  près  de  la  même  manière  que , dans  la  sirène 
de  Seebeck,  on  lance  un  volume  d’air,  au  moyen  d’un  tuyau  de 
plume , à travers  la  petite  ouverture  qui  passe  devant  Jui  ; cette 
expulsion  d’air  est  d’autant  plus  considérable  que  la  vibration  de 
l’anche  a une  amplitude  plus  grande.  Les  particules  de  ces  volumes 
d’air  ont  des  vibrations  propres,  tout  à fait  arbitaires,  par  les- 
quelles la  poussée  sommatoire  ou  l’impulsion  de  condensation  pro- 
gresse , à la  façon  du  cercle  produit  à la  surface  de  l’eau  par  la 
chute  d’un  caillou.  Il  est  probable  que  les  vibrations  ainsi  excitées 
sont  très  diverses  et  de  durées  très  différentes,  comme  cela  est 
le  cas  partout  où  de  l’air  vient  se  briser  contre  un  bord  tranchant  ; 
ces  vibrations  peuvent  bien  persister  pendant  un  temps  fort  court , 
mais  très  certainement  elles  ne  fourniront  pas  à l’oreille  ou  à 
quelque  autre  objet  une  seconde  impulsion  intégrale  de  condensa- 
tion, parce  que  les  croupes  de  leurs  ondes  se  séparent  aussitôt 
entre  elles,  par  suite  de  la  différence  de  longueur  de  ces  ondes. 
L’anche , en  sa  qualité  de  bord  tranchant , contribue  ici  à exciter 
ces  vibrations;  elle  peut  même  très  bien  y faire  une  place  pré- 
pondérante au  ton  dans  lequel  elle  vibre , mais , pour  l’explication 
du  phénomène,  cela  est  entièrement  indifférent. 

Ces  expulsions  d’assez  grands  volumes  d’air  ont  lieu  suivant 
un  rhythme  marqué  par  le  ton  de  l’instrument,  et  les  points  de 
l’espace  d’où  elles  partent  sont  réglés  par  le  mouvement  de  la 
source.  Portées , pour  ainsi  dire,  par  les  vibrations , ces  impulsions 


78 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETE 


de  condensation  arrivent  à Tobservateur;  supposé  en  repos,  avec 
la  vitesse  composée  de  la  transmission  des  vibrations  et  du  mou- 
vement de  la  source.  Si  la  source  reste  au  contraire  immobile, 
et  que  Tobservateur  soit  en  mouvement,  les  impulsions  de  con- 
densation sont  encore  transportées  par  des  vibrations,  dont  il 
est  incertain  et  inutile  que  la  durée  corresponde  à celle  des 
vibrations  de  la  source  ; le  mouvement  de  Tobservateur  se  compose 
de  nouveau  avec  la  vitesse  de  propagation  de  ces  vibrations , et 
règle  par  conséquent  la  rapidité  avec  laquelle  les  impulsions 
atteignent  Toreille.  Tout  ce  qui  est  vrai  des  expulsions  d’air 
s’applique  aussi  aux  admissions  ; entre  les  impulsions  de  conden- 
sation on  peut  donc  admettre  des  impulsions  de  dilatation. 

Il  est  évident,  en  outre,  qu’on  ne  doit  s’attendre  à ce  que  les 
impulsions  successives  atteignent  l’oreille  à des  intervalles  par- 
faitement égaux , que  si  le  mouvement  de  l’instrument  ou  de  l’ob- 
servateur a lieu  précisément  dans  la  direction  de  la  droite  qui  les 
unit.  Lorsque  ces  directions  font  un  angle,  l’influence  du  mouve- 
ment est  moindre  ; l’accélération  des  impulsions , par  exemple  pour 
une  locomotive  arrivant  de  loin,  diminue  alors  de  plus  en  plus, 
et  passe  par  zéro  au  moment  où  le  véhicule  traverse  le  pied  de 
la  perpendiculaire  abaissée  de  l’observateur  sur  la  direction  du 
mouvement , pour  reparaître  immédiatement  après  avec  une  valeur 
négative,  c’est-à-dire  sous  forme  de  retard.  L’observateur  ne  doit 
pas  non  plus  se  trouver  trop  en  dehors  de  la  ligne  dans  laquelle 
la  locomotive  se  meut,  parce  qu’alors,  à de  grandes  distances, 
les  vibrations  moléculaires  qui  composaient  les  impulsions  s’écar- 
tent trop  les  unes  des  autres;  enfin,  cela  va  sans  dire,  il  faut 
que  la  distanee  de  la  source  et  de  l’observateur  soit  maintenue 
dans  les  limites  convenables,  pour  que  les  impulsions  n’arrivent 
pas  trop  affaiblies. 

Ces  impulsions , parvenues  à l’oreille  ou  à tout  autre  ensemble 
circonscrit,  y excitent  par  elles-mêmes,  d’une  manière  mécanique , 
des  vibrations  fixes,  qni  ne  se  rattachent  au  ton  fondamental  de 
l’instrument  par  aucun  autre  lien  que  le  rhythme  de  l’émission.  De 
la  formation  dans  l’air  indéfini  d’une  onde  courante  raccourcie 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  79 

OU  allongée , du  transport  de  phases  isolées , de  la  communication 
instantanée  de  la  vibration  ou  de  sa  propagation  accélérée,  de 
Télucidation  et  de  la  solution  d’un  des  problèmes  les  plus  difficiles 
de  la  théorie  des  ondes,  — de  rien  de  tout  cela  il  n’est  ici  ques- 
tion. Puissent  ces  simples  remarques  contribuer  à dissiper  les 
illusions  des  partisans  de  Doppler,  et  à les  détourner  de  renou-. 
veler  sans  cesse,  toujours  armés  de  ces  mêmes  expériences , leurs 
incursions  sur  le  domaine  de  la  dioptrique. 

§ VIL 

25.  C’est  aux  dernières  dix  années  qu’il  était  réservé  de  voir 
la  théorie  prendre  son  plein  essor,  comme  moyen  d’investigation 
des  mouvements  des  corps  célestes,  et  à la  suite  d’une  nouvelle 
étude  du  problème  de  l’aberration  des  étoiles,  provoquée  par  la 
différence  des  valeurs  assignées  à la  constante  de  cette  aberration 
par  Delambre  et  par  Struve.  Les  idées  les  plus  singulières  furent 
alors  émises  concernant  l’influence  sur  le  rayon  lumineux  du  mou- 
vement de  la  source  et  du  milieu  réfringent,  et  l’hypothèse  de 
Doppler,  dans  son  application  à la  réfraction  et  à d’autres  phé- 
nomènes mécaniques  de  la  lumière , fut  présentée , dans  les  termes 
les  plus  laconiques,  comme  une  vérité  démontrée.  Il  ne  manqua 
pourtant  pas  de  savants  qui  prirent  la  défense  de  la  théorie  si 
simple  et  si  claire  de  Fresnel;  on  peut  citer,  entre  autres,  M. 
Veltmann.  Beaucoup  de  ceux  qui  embrassèrent  les  opinions  nou- 
velles se  montrèrent  disciples  fidèles  de  Doppler  ; d’autres  ne  vou- 
lurent pas  se  contenter  de  son  raisonnement,  ou  comprirent  que 
la  réfraction  du  rayon  lumineux  devait  être  mise  en  rapport  avec 
la  durée  de  la  vibration,  mais  ils  arrivèrent  à des  résultats  tout 
aussi  erronés.  Personne  ne  songea  à l’impossibilité  de  la  propa- 
gation d’une  simple  impulsion,  privée  de  centre;  et  aux  conséquences 
que  cette  impossibilité  entraîne  nécessairement.  Le  plus  surprenant , 
dans  tout  cela,  c’est  que,  même  en  Allemagne,  on  semblait  ne 
plus  connaître  les  travaux  de  M.  Petzval,  et  pourtant,  à mon 
avis,  son  étude  analytique  du  problème  vaut  mieux  que  tout  ce 
qui  à été  écrit  postérieurement  sur  le  même  sujet. 


80 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


Dans  Tordre  historique,  je  citerai  ici  les  Mémoires  de  MM. 
Klinkerfues  ^ ),  Sohncke  - ),  Clerk  Maxwell  ^ ),  V eltmann  ^ ) et  Ketteler  ^ ) , 
pour  ne  pas  parler  des  remarques  faites  incidemment  par  d’autres. 

26.  Parmi  les  auteurs  que  je  viens  de  nommer , M.  Klinkerfues 
et  M.  Sohncke  se  sont  occupés  de  la  manière  dont  la  vibration 
fixe  de  la  source  lumineuse  en  mouvement  de  translation  est  trans- 
mise au  milieu.  M.  Klinkerfues  paraît  avoir  reconnu  que  les  impul- 
sions différentielles,  exercées  par  cette  vibration  primaire  sur  le 
milieu , doivent  y exciter , chacune  individuellement , une  vibration 
spontanée ; mais,  — chose  assez  inattendue,  — il  ajoute  que 

*)  Am  mehreren  Briefen  des  Kemn  Prof.  Dr.  W.  Klinkerfues  an  den  Heram- 
geber , Astron.  Nachr.,  B.  LXV,  p.  17.  1865. 

Untersuchmgen  ans  der  analytischen  Optilc , insbesondere  über  den  Einflms  der 
Bewegmg  der  Licht-Quelle  auf  die  BrecJmng.  Ibid.  B.  LXVI,  p,  337.  1866. 

Versuche  über  die  Bewegung  der  Erde  und  der  Sonne  im  Aether.  Ibid.  B. 

LXVII,  p.  33.  1870. 

Die  Aberration  der  Fixsterne  nach  der  Welleyitheorie.  Leipzig,  1867. 

C.  Briot,  Mathematische  Théorie  des  Lichtes.  Uebersetzt  und  mit  einem  Zusatz 
vermelirt.  Leipzig,  1867.  ■ \ 

Ergebnisse  der  Spectral- Analyse  in  Anwey^ung  a.uf  die  Rimmelskbrper , von 
W.  Huggins.  Deutseh  mit  Zusâtzen.  Leipzig,  1868. 

Dans  cette  énumération  manquent  quelques  Notices  insérées  aux  Gbtt.  getehrt . 
Anz.,  et  que,  pas  plus  que  la -traduction  de  Tonvrage  de  Briot,  je  n’ai  sous 
la  main. 

*)  Ueber  den  Einflms  der  Bewegmg  der  Licht-Quelle  auf  die  Brechung.'Kx\i\^c\iQ 
Bemerkungen  zu  der  Entdeckung  des  Herrn  Prof.  Klinkerfues.  Astron.  Nachr. 
B.  LXIX,  p.  209.  1867,  et  Poggend.  Annalen.  B.  CXXXII,  p.  279.  1867. 

*)  0%  the  influence  of  the  motion  of  the  heaventy  bolies  on  the  index  of  refrac- 
tion of  light.  Pkil.  Transaet.  for  1868,  [B.  CLVIII,  p.  532.  1869.  C’est  une 
Note  écrite  à la  prière  de  M.  Huggins  et  ajoutée  à un  Mémoire  de  ce  dernier, 
sur  lequel  nous  reviendrons  plus  tard. 

'•)  Eresnel’s  Hypothèse  zur  Erklàrung  der  Aberrations-Erscheinungen,  Astron. 
Nachr.  B.  LXX’V , p.  145.  1870. 

Ueber  die  Fortpflanzunq  des  Lichts  in  beweqten  Medien.  Ibid.  B.  LXX^VI, 

p.  129.  1870. 

Ueber  den  Einflms  der  astronomischen  Bewegungen  auf  die  optischen  Erschei- 
nungen.  Poggend.  Annalen,  B.  CXLIV,  p.  109,  287,  363  et  550.  1871.  B. 
CXLVI,  p.  406.  1872,  B.  CXLVII,  p.  404  et  478.  1872,  et  B.  CXLVIII, 
p.  435.  1873. 

®)  Astron.' Nachr . B.  LXVI,  p.  343,  note.  - 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  RÉFRACTION  DES  RAYONS^  ETC.  81 


chaque  impulsion  différentielle  imprime  au  mouvement  de  la  molé- 
cule d’éther  le  caractère  et  la  période  de  la  vibration  de  la  source 
primaire. 

Pour  transmettre  à l’éther  la  vibration  de  la  source  primaire 
en  repos,  voici  comment  il  s’y  prend  analytiquement.  Sur  chaque 
molécule  d’éther , qui  se  trouve  à l’intérieur  de  la  sphère  remplie 
de  vibrations  et  n’est  pas  au  voisinage  immédiat  de  la  surface  - 
(la  surface  générale  des  ondes),  agissent  après  le  temps  t un 
nombre  infini  d’ondes  d’une  amplitude  infiniment  petite.  Pour  l’élon- 
gation ou  l’écart  de  cette  molécule  d’éther,  après  le  temps  t,  il 
trouve  alors  une  somme  de  différentielles,  dont  la  forme  générale  est  : 

dy  = a sin  nd  T.  d T. 

ni  — nd  T 

Il  suppose,  en  effet,  que  ces  ondes  d’amplitude  infiniment 
petite,  partant,  par  exemple,  de  points  de  plus  en  plus  rap- 
prochés, — commencent  à agir  sur  la  molécule  d’éther  chacune 
à un  moment  différent.  C’est  ainsi  que  l’onde  commence  à 
agir  sur  la  molécule  à l’instant  t — T ; elle  a donc  maintenant , 
après  le  temps  i , pour  la  molécule  atteinte , la  phase  nd  T , et 
excite  avec  l’amplitude  a l’élongation  différentielle  dy  de  la 

t — ndT 

molécule. 

Pour  la  somme  de  ces  élongations  différentielles  de  la  molécule 
d’éther,  c’est-à-dire  pour  l’élongation  totale  après  le  temps  /,  on 
a alors  l’integrale: 

/2/r 

a sin  T d T. 

0 / — T 

A la  place  de  a M.  Klinkerfuss  substitue  maintenant  l’écart 

i-T 

OU  l’élongation  de  la  source  primaire  à l’instant  t — T , savoir 
c'  sin  (t  — T) , et  il  trouve  : • 

Ç27t 

I c'  sin  {t  — T)  sin  T dT  z=z  c'  7i  cos  t. 

0 

Il  obtient  donc  ainsi , sous  une  forme  convenable , pour  la  source 
en  repos , la  transmission  de  la  vibration  avec  sa  période  inaltérée. 
Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  6 


82 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


Pour  expliquer  ensuite  la  transmission  de  la  vibration  de  la 
source  en  mouvement;  il  dit:  le  mouvement  de  la  source  lumi- 
neuse  introduit  cette  modification;  que  les  impulsions  excercées 
par  elle  parviennent  à la  molécule  d'éther  après  des  intervalles 

qui  sont  raccourcis  dans  le  rapport , comme  il  est  facile 

V 

de  le  voir;  v est  ici  la  vitesse  de  propagation  de  la  vibration 
courante  et  g la  vitesse  de  translation  de  la  source. 

Au  lieu  de  a =:c'sin{t  — T)  il  prend  donc  a zzic'sm 

t — T t — T V — g 

{t  — T)  ; et  — tout  est  trouvé. 

Je  me  borne  à cette  courte  analyse  du  Mémoire  principal  de 
M.  Klinkerfues  ; je  l'ai  donnée  uniquement  parce  qu'il  m'a  semblé 
qu'on  trouvait  aussi  chez  lui  une  indication  de  ce  principe;  que 
chaque  impulsion  différientielle  se  traduit  toujours  par  des  vibrations. 

D'un  seul  coup;  „comme  il  est  facile  de  le  voir";  toutes  les 
difficultés  sont  écartées;  malheureusement;  l'impossibilité  de  la 
propagation  stable  d'une  impulsion  différentielle  qui  est  privée  de 
son  centre  par  le  déplacement  de  la  source  a été  complètement 
perdue  de  vue. 

27.  Les  singuliers  résultats  auxquels  parvient  M.  Klinkerfues 
se  trouvent  discutés  dans  le  Mémoire  de  M.  Sohncke  ^).  Ce  savant; 
dans  ses  efforts  pour  démontrer  clairement  ce  qui  d’après  M.  Klin- 
kerfues est  si  facile  à voir,  n’est  pas  plus  heureux.  Lui  non  plus 
ne  sent  pas  que  la  propagation  stable  d'une  phase , dont  le  centre 
se  déplace  dans  l'entre-temps , est  une  impossibilité  physique,  et 
conduirait  en  outre  aux  conséquences  les  plus  incongrues  pour 
tout  rayon  lumineux  autre  que  celui  qui  coïncide  avec  la  direction 
du  mouvement  de  la  source.  A M.  Sohncke  aussi  il  paraît  avoir 
échappé  que  l'idée  de  la  propagation  d'une  impulsion  ou  d'un 
déplacement  élémentaire  >a  pris  naissance  par  une  véritable  ignoralio 
elenchi:  on  s'est  représenté  l’impulsion  comme  une  onde  de  très 
petite  longueur,  et  on  a cru  que  cela  suffisait.  Mais  fine  onde  aune 


*)  Poggend.  Amalen^  B.  CXXXYII,  p.,  290. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  RÉFRACTION  UES  RAYONS;  ETC.  83 

croupe  et  une  dépression  ; il  pourrait  donc  très  bien  arriver,  abstrac- 
tion faite  de  Timpossibilité  susdite , que  la  dépression  d’une  impul- 
sion différentielle  courante  interfère  avec  la  croupe  d’une  impulsion 
suivante,  et  alors  toute  la  vibration  prétenduement  reconstruite, 
avec  son  onde  raccourcie  ou  allongée , s’écroule  comme  un  château 
de  cartes. 

En  résumé,  voici  ce  qui  ressort  clairement  de  la  lecture  des 
Mémoires  précités  : on  ne  doute  plus  de  la  propagation  des  impul- 
sions différentielles  privées  de  centre , et  en  ajoutant  à la  vitesse 
de  propagation  de  la  vibration,  qui  leur  est  attribuée  tout  à fait 
arbitrairement,  la  vitesse  de  translation  de  la  source,  on  obtient 
le  raccourcissement  ou  l’allongement  de  la  durée  périodique  de  la 
vibration  courante.  Sauf  M.  Veltmann , tous  les  auteurs  ont  admis 
cette  manière  de  voir  et  ont  ainsi  converti  les  poussées  d’onde 
accélérées  de  Doppler  en  vibrations  raccourcies.  Tel  a été  le  résultat 
de  trente  années  d’études  critiques;  la  balle  légère  lancée  par 
Doppler  est  retombée  avec  la  force  d’une  avalanche. 

28.  Mais  la  dernière  période  décennale  a enfin  aussi  fourni  des 
recherches  qui  confirment  entièrement  l’explication  simple  que  j’ai 
donnée  du  changement  observé  dans  le  ton.  M.  Alfred  Mayer  ^), 
aux  Etats-Unis,  a montré  qu’un  diapason  fixe , dont  la  tonalité  ne 
diffère  que  de  deux  ou  trois  vibrations  par  seconde  de  celle  d’un 
autre  diapason,  se  met  de  suite  à vibrer  avec  lui,  quand  ce 
dernier  se  rapproche  ou  s’éloigne  avec  une  vitesse  telle  que  le 
rhythme  des  condensations  et  dilatations  qu’il  envoie  au  diapason 
fixe  s’accorde  exactement  avec  la  tonalité  de  celui-ci.  Eécipro- 
quement,  si  deux  diapasons  ont  tout  à fait  la  même  tonalité, 
et  que  l’un  d’eux  soit  mis  en  mouvement,  celui-ci  perdra  par  là 
immédiatement  le  pouvoir  de  communiquer  son  état  de  vibration 
au  diapason  fixe,  parce  que  le  rhythme  des  condensations  et 
dilatations  qui  parviennent  à ce  dernier  ne  concorde  plus  avec 

^ ) Akustische  Versucîie  zum  Erweise , dass  die  Wellenlànge  eines  siah  forthe- 
•joegenden  schwingenden  K'ôrpers  verschieden  ist  von  derjenigen  welche  derselbe  vihrirende 
Kàr'per  ohne  Ortsverândermig  hervorbringt . Poggend.  Annalen,  B.  CXLYI, 

p.  110;  1872. 


6* 


84 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIREN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


celui  qu'il  produirait  lui-même  s’il  entrait  spontanément  en  vibration. 
Une  meilleure  preuve  expérimentale  en  faveur  de  mon  explication 
ne  saurait  guère  être  désirée.  En  effet,  l’ensemble  circonscrit  et 
capable  d’exécuter  des  vibrations  fixes,  sur  lequel  agissent  les 
impulsions  de  condensation  et  de  dilatation,  ou,  si  on  l’aime 
mieux , les  masses  d’air  au  moment  de  leur  plus  grande  vitesse,  — 
cet  ensemble,  que  chez  l’oreille  j’avais  pour  ainsi  dire  encore 
dû  chercher  dans  la  cavité  et  la  membrane  du  tympan , — il  se 
trouve  ici  complètement  réalisé  par  le  diapason,  qui  ne  peut 
vibrer  que  dans  son  ton  fondamental  ou  dans  des  tons  très  supé- 
rieurs. A coup  sûr,  on  ne  prétendra  pas  que  ces  expériences, 
d’une  exécution  si  soignée  et  de  résultats  si  clairs,  prouvent  le 
moins  du  monde  que  la  période  de  la  vibration  communiquée  à 
l’air  ambiant  par  le  diapason  en  mouvement  soit  altérée,  ou  que 
les  ondes  sinusoïdales  qui  en  résultent  soient  allongées  ou  rac- 
courcies, Et  pourtant,  voilà  ce  qui  devrait  arriver  pour  que  de 
ces  expériences  on  pût  conclure,  par  analogie,  que  les  raies  de 
Fraunhofer  se  déplacent  dans  le  sp.ectre  quand  la  source  lumineuse 
est  en  mouvement.  Si  donc  M.  Mayer  croit  avoir  rendu  ce 
déplacement  probable , je  réponds,  sans  hésitation  : non;  s’il  pense 
que  dans  ces  conditions  la  teinte  d’un  rayon  lumineux  homogène 
est  modifiée  pour  l’œil,  je  réponds,  sans  vouloir  trancher  la 
question,  que  cela  est  peu  probable  et  d’ailleurs  en  dehors  des 
limites  de  l’expérience. 

Ces  expériences  de  M.  Mayer  sont  une  extension  d’expériences 
antérieures  de  M.  Konig  ^),-  auxquelles  on  avait  attaché  une  grande 
importance  et  qui,  en  réalité,  mettent  de  nouveau  dans  le  jour 
le  plus  éclatant  l’exactitude  de  mon  explication. 

De  deux  diapasons  parfaitement  isochrones,  l’un  reçoit  un 


*)  1.  c. , p.  112. 

*)  Voir  Ketteler,  Astron.  TJndulationslehre , Bonn,  1873,  p.  24;  et  Mach, 
Beitràge  zur  Bopplerschen  Théorie,  Brag,  1874,  Zusatz,  p.  34. 

Je  n’ai  eu  eonnaissanee  de  ces  deux  écrits  que  lorsque  mon  Mémoire  avait 
déjà  paru , en  hollandais , dans  les  Z erslagen  en  Mededeelingen  der  Kon.  Akademie 
van  Wetenschappen,  Amsterdam. 


ÜE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  85 

mouvement  régulier  en  avant  ou  en  arrière  ; on  observe  alors 
des  battements , dont  le  nombre  dépend  de  la  vitesse  du  diapason 
déplacé,^ précisément  comme  Texige  le  raisonnement  de  Doppler. 
A cela  rien  d’étonnant,  car  nous  avons  ici  de  nouveau  des  con- 
densations et  des  dilatations  agissant  sur  l’oreille;  le  rhythme 
de  celles  qui  émanent  du  diapasoû  en  mouvement  étant  changé, 
les  condensations  de  l’un  des  diapasons  sont , par  rapport  à celles 
de  l’autre,  comme  les  divisions  du  vernier  par  rapport  à celles 
du  limbe  gradué;  il  n’y  a donc  aucun  doute  que  l’oreille,  où 
tantôt  elles  coïncident  et  tantôt  elles  sont  séparées  autant  que 
possible,  percevra  le  phénomène  bien  connu  des  battements. 

La  manière  la  plus  simple  d’exécuter  cette  expérience,  c’est 
de  mouvoir  l’oreille,  ou  un  résonnateur  auquel  elle  est  reliée  par 
un  tube  en  caoutchouc,  dans  la  ligne  qui  joint  les  deux  diapasons^ 
laissés  en  place  ^);  l’effet  du  mouvement  est  alors  doublé,  parce 
que,  en  même  temps  qu’on  se  rapproche  de  l’un  des  diapasons, 
on  s’éloigne  de  l’autre. 

29.  M.  Mach  fait  à cette  expérience  une  très  curieuse  addition  : 
„Si,”  dit-il,  „à  l’une  des  branches  d’un  grand  diapason  on  colle 
une  allumette,  qu’on  laisse  plonger  pendant  les  vibrations  dans 
une  cuve  à mercure  octogone,  au  voisinage  du  bord,  on  voit 
apparaître  à la  surface  du  mercure  une  belle  figure  d’interférence , 
composée  de  stries  hyperboliques,  et  due  aux  ondes  directes  et 
réfléchies.  Lorsqu’on  déplace  le  diapason,  la  figure  se  déforme 
et  se  déplace.”  Ceci  montre  de  nouveau  que  la  poussée  d’onde 
résultante  s’avance  avec  la  source  à la  surface  du  liquide,  fait 
que  personne  ne  révoque  plus  en  doute;  mais  il  ne  s’ensuit 
nullement  que  la  vibration  élémentaire,  exécutée  par  des  myriades 
de  particules  mercurielles,  ait  changé  de  période;  l’expérience 
n’a  pas  cette  portée;  au  contraire,  elle  prouve  que  la  vibration 
est  communiquée  sans  altération,  puisque,  sans  cela,  d’après  les 
lois  de  la  mécanique,  aucun  mouvement  ondulatoire  régulier  des 
particules  ne  pourrait  prendre  naissance. 

M.  Mach  dit  ensuite:  „L’ analogue  optique  de  l’expérience  de 

Ketteler,  p.  27. 


86 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


Konig  et  de  celle  que  je  viens  de  décrire  est  connu  depuis  long- 
temps. Si  devant  l’objectif  d’une  lunette  dirigée  sur  une  fente 
éclairée  on  place  une  fente  double,  et  devant  celle-ci  un  compen- 
sateur de  Jamin,  disposé  de  façon  que  la  ligne  de  séparation 
des  deux  plaques  tombe  sur  l’intervalle  de  la  fente  double,  on 
voit  les  minima  de  seconde  classe  se  déplacer  quand  on  tourne 
le  compensateur.  Les  deux  parties  de  la  fente  double  sont  ici 
deux  sources  lumineuses , qui  produisent  entre  elles  des  battements , 
parce  que  le  chemin  de  l’une  d’elles,  jusqu’à  un  point  du  plan  focal 
de  la  lunette,  est  continuellement  changé  par  l’introduction  con- 
tinuelle d’une  nouvelle  épaisseur  de  verre.  Le  phénomène  peut 
aussi  être  interprété  comme  un  simple  déplacement  d’une  figure 
d’interférence. 

Je  cite  cette  expérience  parce  qu’elle  montre  que  le  principe 
de  Doppler,  à proprement  parler,  n’est  pas  un  principe  nouveau. 

Cette  expérience  optique  est  en  elle-même  très  claire  ; mais  son 
analogie  avec  l’expérience  acoustique  n’est  pas  grande.  Celle-ci 
dépend  d’un  allongement  ou  d’un  raccourcissement  continuel  du 
chemin  de  la  source  vibrante  au  point  où  le  phénomène  se  produit  ; 
celle-là  dépend,  comme  beaucoup  d’autres  phénomènes  optiques, 
d’un  changement  dans  le  temps  mis  à parcourir  le  même  chemin  ; 
en  outre,  je  ne  comprends  pas  bien  comment,  dans  l’expérience 
optique , on  peut  parler  de  battements , qui  dénotent  une  divergence 
des  hauteurs  de  deux  tons,  tandis  qu’ici  les  ondulations  inter- 
férentes  ont  même  longueur.  Il  en  est  ici  comme  en  mainte 
autre  circonstance,  où  se  vérifie  l’aphorisme:  comparaison  iiest 
pas  raison. 

Qu’il  faille  tirer  de  cette  expérience  la  conclusion  que  le  principe 
de  Doppler  n’est  pas  un  principe  nouveau,  c’est  ce  qu’on  ne 
saurait  admettre.  Car  Doppler  veut  que  par  le  mouvement  de  la 
source  la  hauteur  du  ton  et  la  couleur  de  la  lumière  soient 
modifiées,  et  ses  successeurs  veulent  même  que  la  vibration  de 
la  source  soit  communiquée  au  milieu  ambiant  avec  une  période 
allongée  ou  raccourcie;  or  ni  l’une  ni  l’autre  de  ces  idées  ne 
viendra  sans  doute  à l’esprit  de  personne  en  analysant  l’expérience 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  87 

optique  dont  il  est  question.  Si  Ton  a en  vue  autre  chose,  on 
doit  indiquer  nettement  la  signification  qu’on  veut  attacher  à ces 
mots  ^principe  de  Doppler,”  et  s’en  tenir  à ce  qui  découle  direc- 
tement de  l’expérience.  On  en  viendra  alors  aux  limites  étroites 
dans  lesquelles  se  restreint  mon  explication  des  expériences  acou- 
stiques; je  n’aurai  plus  d’objections  à faire,  mais  alors  aussi  on 
devra  renoncer  à appliquer  le  principe  à l’analyse  spectrale  du  ciel. 

§ vm. 

30.  Je  prends  ici  congé  de  mes  prédécesseurs  et  vais  maintenant 
parler  en  mon  propre  nom. 

Antérieurement  j’ai  déjà  cherché  à maintenir  les  droits  et 
la  valeur  de  l’hypothèse  de  Fresnel  en  ce  qui  concerne  son  appli- 
cation aux  phénomènes  de  diffraction.  La  question  de  la  différence 
entre  les  constantes  de  l’aberration  données  par  Delambre  et  par 
Struve  est,  il  est  vrai,  encore  pendante;  mais  il  me  paraît 
certain  que  la  solution  sera  trouvée  dans  l’observation,  et  non 
dans  la  théorie. 

Essayons  maintenant  de  ramener  la  science  de  la  voie  fausse 
dans  laquelle,  à mon  avis,  elle  a été  engagée.  Conformément  à 
ce  qui  a été  dit  à l’art.  5,  je  suppose  ici  l’éther  de  la  densité 
normale  en  repos  dans  l’espace. 

L’hypothèse  de  Fresnel  contient  probablement  l’expression  de 
la  vérité;  elle  me  suffit  encore  pleinement,  en  tenant  compte  du 
dernier  travail  de  M.  Veltman,  pour  expliquer  comment  la  réfrac- 
tion ou,  pour  mieux  dire,  la  déflexion  que  le  rayon  lumineux 
éprouve  de  la  part  d’un  milieu  réfringent,  reste  tout  à fait  indé- 
pendante du  mouvement  de  ce  milieu.  Sans  doute , et  c’est  là  le 
I point  faible  de  l’hypothèse^),  elle  exigerait,  au  point  de  vue  de 


D Sur  Viniiuence  que  le  mouvement  de  la  Terre  exerce  sur  les  'phénomènes  de 
diffraction.  Archives  du  Musée  Teyler , Vol.  III,  p.  72. 

*)  aussi:  Hoek,  Recherchés  astronomiques  de  V Observatoire  d'TJtrecht, 

première  livraison.  De  V influence  des  mouvements  de  la  Terre  sur  les  phénomènes 
fondamentaux  de  V optique  dont  se  sert  l'astronomie.  1861. 

Asiron.  Nachr.,  B.  LXXV,  p.  160. 


88  V.  s.  31.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 

r interprétation  physique , que  Tentraînement  de  Téther  par  le  milieu 
réfringent  se  fît  dans  une  mesure  variable  suivant  la  période  de 
vibration  de  la  couleur;  mais  M.  Veltmann  lui-même  a déjà  mon- 
tré qu’à  l’entraînement  variable  de  l’éther  on  n’a  qu’à  substituer 
un  entraînement  variable  des  ondes  lumineuses , pour  que  l’expli- 
cation du  phénomène  soit  remise  dans  la  bonne  voie.  Pour  le  mo- 
ment , je  ne  m’occupe  pas  de  savoir  quel  est  le  sens  physique  de 
cette  explication  mathématique.  La  mécanique  nous  laisse  encore 
ici  dans  l’ignorance;  peut-être  prouvera- t-elle  un  jour  que  c’est 
la  pression  exercée  par  le  milieu  matériel  en  mouvement  sur  l’éther 
immobile  au  sein  de  l’espace  qui  produit  ce  déplacement  ou  en- 
traînement variable  des  ondes  lumineuses. 

Plus  haut,  à l’art.  5,  j’ai  déjà  noté  qu’un  entraînement  éven- 
tuel de  l’éther  ambiant  par  la  source  lumineuse  déplacée  ne 
faciliterait  pas,  dans  ma  manière  de  voir,  l’explication  de  la 
propagation  de  la  vibration  inaltérée.  En  effet,  le  cas  extrême, 
celui  où  la  source  et  l’éther  ambiant  se  déplacent  ensemble , serait 
sous  ce  rapport , conformément  au  résultat  obtenu  par  M.  Petzval 
dans  son  premier  Mémoire,  en  apparence  le  plus  favorable  de 
tous  ; mais  la  difficulté  consisterait  alors  à prouver  que  la  vibration 
courante  se  transmet,  sans  raccourcissement,  d’une  portion  déplacée 
du  milieu  à une  portion  en  repos. 

31.  Tout  ce  que  j’ai  à dire  se  résume,  en  effet,  dans  le 
principe  de  la  conservation  de  la  période  de  vibration  et  de  la 
longueur  d'onde  vraie  y lors  de  la  transmission  entre  la  source  déplacée 
et  l'éther  y et  dans  la  propagation  jusqu'au  milieu  réfringent; 
l’éther  étant,  je  le  répète,  supposé  en  repos. 

Je  prends  pour  base  de  mon  raisonnement  les  points  suivants , 
que  tous  les  physiciens  accorderont  sans  doute  volontiers:  1®.  la 
source  vibratoire  n’est  pas  un  point  mathématique,  mais  a indu- 
bitablement une  certaine  extension  physique  ; 2®.  cette  source  vibra- 
toire limitée  doit  être  conçue,  ainsi  que  l’ai  déjà  indiqué  à l’art. 
5 , et  d’après  tout  ce  que  nous  savons  des  corps  qui  émettent  des 


) Astrom.  Nachr.,  B.  LXXVI,  p.  143. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  RÉFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  89 

tons,  comme  composé  d’un  grand  nombre  de  molécules , qui  vibrent 
toutes  dans  des  orbites  semblables  et  parallèles , et  dont  des  masses 
entières  se  trouvent  au  même  instant  dans  la  meme  phase , c’est- 
à-dire,  ont  la  même  anomalie;  sur  les  lignes  ou  les  surfaces 
nodales  éventuelles , cette  vibration  devient  tout  à fait  nulle , pour 
reparaître  peu  à peu,  avec  un  saut  d’une  demi-circonférence  dans 
la  phase,  à l’autre  côté  du  nœud;  3®.  la  sphère  d’action  directe 
d’une  molécule  en  état  de  vibration  fixe  n’est  pas  bornée  aux 
molécules  du  milieu  immédiatement  voisines , mais  s’étend  bien  cer- 
tainement encore  un  peu  au-delà. 

Sauf  peut-être  M.  Klinkerfues,  tous  ceux  qui  se  sont  occupés 
de  la  question  l’ont  envisagée  trop  exclusivement  à un  point  de 
vue  abstrait;  ici,  au  contraire,  elle  sera  traitée  d’une  manière 
purement  concrète. 

32.  Une  molécule  animée  de  vibrations  fixes,  isolée*,  infinement 
petite  et  capable  d’action  directe  seulement  sur  les  molécules  du 
milieu  immédiatement  voisines,  ne  saurait,  si  elle  se  déplace, 
transmettre  sa  vibration  au  milieu  intégralement,  c’est-à  dire  comme 
un  tout,  ni  avec  conservation  de  la  période,  ni  avec  allongement 
ou  raccourcissement,  aussi  longtemps  que  le  milieu  ne  partage 
pas  complètement  son  mouvement  de  translation.  Il  ne  peut  être 
question,  comme  nous  l’avons  déjà  dit  au  § I,  d’admettre , comme 
effet  de  ce  mouvement,  un  simple  allongement  ou  raccourcisse- 
ment de  la  période  de'  la  vibration  transmise  ; toutes  les  impul- 
sions différentielles  doivent  s’éparpiller , — c’est  là  le  résultat  de 
l’abstraction  poussée  trop  loin,  — en  vibrations  spontanées  de 
périodes  inconnues.  Dans  le  cas  seulement  où  la  molécule  vibrante 
' primaire  et  le  milieu  se  déplacent  ensemble  avec  la  même  vitesse , 
ij  la  vibration  est  transmise  intégralement,  mais  alors  aussi  avec 
une  période  complètement  inaltérée  ; nous  rencontrons  ici  M.  Petzval , 
avec  sa  démonstration  de  la  conservation  de  la  durée  de  vibra- 
tion dans  un  milieu  entraîné  par  un  courant  uniforme. 

Supposons  maintenant , en  premier  lieu , que  la  sphère  d’action 
directe  de  la  molécule  vibrante  primaire  s’étende  plus  loin  que 
les  molécules  du  milieu  immédiatement  voisines,  — ce  qui  est 


90 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


entièrement  conforme  à ce  qu’on  admet  pour  toutes  les  autres 
manifestations  de  la  force;  — nous  pouvons  alors  très  bien  nous 
représenter,  pour  la  lumière  par  exemple,  une  sphère  d’action 
d’un  rayon  tel  que , pour  toutes  les  vitesses  connues  dè  translation 
de  la  source  et  pour  la  durée  connue  des  vibrations,  les  molé- 
cules du  milieu  qui  sont  influenceés  les  premières  restent  pendant 
une  ou  plusieurs  vibrations  complètes  sous  l’influence  directe  de 
la  molécule  vibrante  primaire,  malgré  le  déplacement  de  celle-ci , 
et  qu’en  conséquence  elles  recueillent  les  vibrations  directe- 
ment de  la  source,  pour  la  propager  en  tous  sens  dans  l’éther 
indéfini. 

La  vitesse  de  l’étincelle  électrique  entre  deux  fils  polaires  est, 
par  exemple , évaluée  à ^ / j o o o vitesse  de  propagation  de 

la  lumière,  et  la  vitesse  de  la  Terre  dans  son  orbite  est  environ 

1 0 ü 0 0 même  vitesse  de  propagation  ; la  longueur  d’onde 

de  la  raie  D est  0,000589537  mm.  Pendant  la  durée  d’une  vibra- 
tion entière , la  molécule  vibrante  primaire  se  déplace  donc , dans 
l’étincelle  électrique,  de  700000  nam.,  et  elle  se  déplacerait 
d’une  quantité  encore  dix  fois  moindre  si  elle  était  simplement 
entraînée  par  la  Terre.  Il  suffit  ainsi  d’attribuer  de  très  petites 
valeurs  au  rayon  de  la  sphère  d’action  directe , pour  faire  que  la 
molécule  vibrante  primaire  continue  pendant  dix  ou  cent  vibrations 
son  action  sur  un  grand  nombre  de  molécules  de  l’éther  ambiant 
qu’elle  laisse  successivement  derrière  elle,  et  pour  transformer 
toutes  ces  molécules  en  autant  de  centres  d’où  les  dix  ou  cent 
vibrations  se  propagent  dans  ce  milieu. 

En  résumé,  tout  autour  de  la  source  (la  molécule  vibrante 
primaire),  les  molécules  les  plus  rapprochées  de  l’éther  ambiant 
prennent,  sans  altération  de  la  période,  une  première  vibration, 
laquelle  est  encore  suivie,  en  enchaînement  parfait,  d’autant  d’autres 
vibrations  qu’il  peut  s’en  communiquer  durant  le  temps  que  les 
molécules  restent  sous  l’influence  directe  de  la  source  déplacée. 
A mesure  que  ce  déplacement  s’opère,  de  nouvelles  molécules 
de  l’éther  ambiant  reçoivent  successivement  le  mouvement  vibra- 
toire, qui  pour  elles,  toutefois,  commence  de  plus  en  plus  tard; 


DE  LA.  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  91 

pour  chaque  molécule  qui  est  ainsi  envahie  par  la  vibration , celle-ci 
abandonne , du  côté  opposé , une  autre  molécule , qui  tombe  en  dehors 
de  la  sphère  d’action  de  la  source  transportée  en  avant.  Chaque 
droite  qui  rayonne  de  cet  assemblage , n’importe  dans  quelle  direc- 
tion, se  charge  de  séries  plus  ou  moins  grandes  de  vibrations 
courantes  enchaînées,  séries  dans  lesquelles  le  point  de  départ 
change  de  l’une  à l’autre. 

33.  Mais  la  source  vibratoire  n’est  pas  un  simple  point.  Con- 
sidérons, pour  nous  en  tenir  au  cas  le  plus  défavorable,  la 
vapeur  métallique  lumineuse  lancée  par  les  électrodes;  prenons- 
en  une  masse  dans  des  limites  telles , que  soit  ses  propres  molécules 
soit  les  molécules  de  l’éther  renfermé  exécutent  des  vibrations  fixes 
concordantes , et  à la  source  lumineuse  ainsi  définie  donnons  une 
dimension  de  V i o o o direction  de  son  mouvement  de 

transport;  nous  avons  alors  la  possibilité  de  voir  émaner  d’une 
même  molécule  de  l’éther  en  repos  jusqu’à  1700  vibrations  courantes 
de  période  et  aussi  d’amplitude  inaltérée.  En  effet,  malgré  le 
déplacement  rapide  de  la  source,  un  même  point  fixe  de  l’éther 
ambiant  reste  maintenant  sous  son  influence  pendant  1700  vibra- 
tions, et  cela,  sans  qu’il  soit  même  question  du  rayon  de  la 
sphère  d’action  directe. 

Entendons-nous  bien:  les  molécules  lumineuses,  qui  forment 
p.  e.  une  particule  de  vapeur , doivent  vibrer  toutes  à la  fois , 
avec  la  même  période , dans  des  orbites  semblables  et  parallèles , 
et  en  outre  se  trouver  toutes  ensemble  dans  la  même  phase;  si 
ces  conditions , que  nous  admettons  pour  toute  source  animée  de 
vibrations  fixes,  n’étaient  pas  remplies,  l’action  exercée  sur  l’éther 
en  repos  par  la  molécule  primaire  qui  arrive  ne  pourrait  pas 
1 continuer,  sans  trouble,  l’action  de  la  molécule  qui  part.  Pour 
une  vitesse  plus  petite  de  la  source , telle  que  celle  de  la  Terre , 
le  nombre  de  ces  vibrations,  qui  émanent  absolument  du  même 
point  de  l’espace , deviendrait  encore  dix  fois  plus  grand.  Quant 
à l’amplitude  des  vibrations  des  molécules , dans  toutes  les  sources 
connues  de  vibrations  fixes  (savoir  pour  le  son),  elle  reste  sur 
des  étendues  relativement  grandes  assez  sensiblement  égale  pour 


92 


V.  s.  M.  VAN  DEU  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


que  nous  n’ayons  pas  à nous  occuper  ici  de  ses  variations. 

Peut-être  parviendra-t-on  plus  tard  à vérifier,  par  une  sorte 
à! experimentum  crucis , l’explication  que  je  viens  de  donner;  il 
suffirait,  pour  cela,  de  s’assurer  si  les  expériences  de  M.  Fizeau 
sur  l’interférence  avec  de  grandes  différences  de  chemin,  qui 
exigent  un  grand  nombre  de  vibrations  parties  successivement  du 
même  point  de  l’espace,  réussissent  aussi  bien  avec  la  lumière 
de  l’étincelle  électrique  qu’avec  la  lumière  émise  par  d’autres 
sources , spécialement  quand  le  rayon  suit  la  direction  du  mouve- 
ment de  la  source. 

34.  Pour  ce  qui  concerne  la  manière  dont  les  vibrations  de 
la  source  lumineuse  sont  transmises  à l’éther  ambiant , et  la  manière 
dont  les  choses  se  passent  aux  surfaces  limites,  voici  l’idée  que 
je  m’en  fais.  Chaque  molécule  lumineuse  de  la  source  lance  en 
tous  sens  dans  l’éther  ses  vibrations  courantes,  que  les  molécules 
de  l’éther  de  la  source  même , rangées  autour  d’elle  et  exécutant 
peut-être  les  vibrations  fixes , transmettent  sans  altération , d’après 
le  principe  de  la  superposition  des  petits  mouvements , jusqu’aux 
surfaces  limites,  où  elles  passent  à l’éther  libre.  La  similitude  et 
le  parallélisme  des  orbites  de  toutes  les  molécules  vibrantes  pri- 
maires contribuent  sans  doute  beaucoup  à rendre  la  superposition 
facile;  la  différence  de  phase  et  peut-être  aussi  la  différence 
d’amplitude,  entre  la  vibration  fixe  dont  une  molécule  est  déjà 
animée  et  la  vibration  courante  qui  s’y  superpose,  deviennent 
seules  plus  grandes  à mesure  que  la  molécule  considérée  est  située 
plus  près  des  surfaces  limites  et  nodales. 

Si  donc  la  particule  lumineuse,  foyer  circonscrit  de  vibrations, 
possède  un  mouvement  de  translation , alors , à raison  de  la  multitude 
des  molécules  dont  elle  se  compose , la  place  de  chaque  molécule 
emportée  est  immédiatement  prise  ' par  une  autre , qui  remplit 
exactement  le  rôle  de  centre  d’émission  joué  par  la  première. 
L’amplitude  seule  de  la  vibration  changera  graduellement  dans 
cette  source  d’une  molécule  à l’autre,  et  sera  par  conséquent 
aussi  sujette  à de  petites  variations  dans  la  vibration  courante. 
A l’endroit  précis  des  lignes  et  des  surfaces  nodales,  si  elles 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  93 

existent,  se  produirait  un  écart  de  phase  d’une  demi-circonférence , 
par  suite  duquel  une  seule  vibration  courante  deviendrait  impos- 
sible; mais  comme,  sur  ces  lignes  ou  ces  surfaces  et  dans  leur 
voisinage,  l’amplitude  de  la  vibration  est  égale  à zéro,  nous 
n’avons  pas  à en  tenir  compte  ici.  Peut-être  toutefois,  en  cas 
d’existence  de  pareils  nœuds , avons-nous  à attendre , après  chaque 
suite  de  milliers  de  vibrations  d’une  intensité  progressivement 
croissante  et  décroissante,  un  écart  de  phase  d’une  demi-circon- 
férence dans  le  rayon  lumineux. 

Selon  ma  manière  de  voir , malgré  le  déplacement  de  la  source , 
les  impulsions  différentielles  transmises  à l’éther  trouvent  donc 
toujours,  dans  le  point  même  d’où  elles  sont  parties,  l’appui 
continu  dont  elles  ont  besoin  pour  leur  propagation  -intégrale. 
Peu  importe  que  la  molécule  de  la  source,  qui  donne  cet  appui , 
change  d’instant  en  instant,  pourvu  seulement  qu’au  moment 
voulu  il  en  parte  Juste  la  phase  ou  l’impulsion  convenable.  Ne 
sommes-nous  pas  habitués , dans  la  théorie  des  ondes , à considérer 
séparément  le  mouvement  et  la  molécule  qui  en  est  le  support  ? 
L’onde  progresse  ; mais  les  molécules  qui  la  portent  ne  participent 
pas  à cette  progression. 

§ IX. 

35.  Comparons  maintenant  en  quelques  points  ces  vues  concrètes 
avec  celles  de  mes  prédécesseurs. 

Si  l’on  se  représente  la  constitution  d’une  source  lumineuse  et 
son  mode  d’action  comme  nous  venons  de  le  dire , il  n’est  nulle- 
ment nécessaire  de  donner  de  grandes  dimensions  à la  masse  des 
molécules  qui  vibrent  simultanément , avec  la  même  période , dans 
des  orbites  semblables  et  parallèles , ni  d’attribuer  un  rayon  appré- 
ciable à la  sphère  d’action  de  ces  molécules , pour  que , même  avec 
un  déplacement  assez  rapide  de  la  source , des  milliers  de  vibrations 
courantes,  d’intensité  presque  constante,  puissent  encore  être 
transmises  du  même  point  de  l’espace  à l’éther  indéfini.  En  outre , 
ce  n’est  alors  pas  un  point  unique  de  cet  éther,  ce  sont  des 
milliers  de  points  qui  constituent  simultanément  de  pareils  centres , 


94 


V.  s.  M.  VAN  ÜER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


d’où  partent,  exactement  au  même  instant,  ces  vibrations  con- 
cordantes en  phase  et  en  durée.  — Un  rayon  de  lumière  homogène 
est  pour  moi  un  ensemble  complexe;  à chaque  instant  arrivent 
en  chaque  point  une  multitude  de  vibrations  à phases  et  ampli- 
tudes diâerentes , qui , conformément  au  principe  de  la  superposition , 
conservent  toutes  une  existence  indépendante;  et  l’intensité  du 
rayon  est  l’intensité  totale  de  toutes  ces  vibrations , en  tant  qu’elles 
ne  se  contrecarrent  pas  par  interférence.  — A mesure  que  la  source 
avance , des  centres  de  vibrations  se  perdent  en  arrière  et  d’autres 
se  forment  en  avant.  Composons  par  la  pensée  toutes  ces  ondes 
ou  vibrations  en  une  seule;  nous  obtenons  alors  une  onde  ou 
poussée  d’onde  résultante,  qui,  si  la  source  restait  en  repos , avan- 
cerait avec  la  vitesse  de  propagation  ordinaire  et  aurait  ses  croupes 
à la  distance  normale,  mais  qui  maintenant  change  continuelle- 
ment d’anomalie , et  chemine  le  long  du  rayon  non-seulement  avec 
la  vitesse  normale  de  propagation , mais , de  plus , avec  la  vitesse 
de  la  source;  par  là,  ses  croupes  se  succéderont  plus  vite,  pré- 
cisément comme  les  poussées  d’onde  de  Doppler.  En  arrière,  par 
contre,  les  croupes  s’écarteront  davantage,  suivant  la  même  loi. 
Mais  toutes  ces  vibrations,  que  chaque  molécule  d’éther  située  sur 
le  rayon  exécute  à la  fois,  qui  se  traduisent  en  sinusoïdes,  et 
qui  sont  et  restent  tout  à fait  indépendantes  les  unes  des  autres, 
conservent  invariablement  la  même  longueur  d’onde  et  la  même 
période. , — Je  nie  formellement  qu’il  soit  permis  de  regarder  ces 
vibrations  comme  fondues  en  une  vibration  unique  résultante, 
parce  que  l’anomalie  et  l’amplitude  de  cette  vibra- 
tion résultante  changeraient  d’instant  eninstant. — 
Tout  ce  que  je  viens  de  dire  par  rapport  au  renouvellement  con- 
tinu des  centres  de  vibration , n’a  cependant  de  signification  absolue 
que  pour  le  rayon  visuel  qui  coïncide  avec  la  direction  de  trans- 
lation de  la  particule  lumineuse  ; pour  toutes  les  autres  directions , 
il  dépend  de  la  forme  de  cette  source  et  de  ses  dimensions  perpendi- 
culaires à la  direction  de  translation,  si  l’on  peut  encore  parler 
d’un  tel  renouvellement  continu. 

Une  partie  de  la  force  vive  de  la  source  s’éparpillera  probable- 


DE  LA.  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  95 

ment  en  vibrations  spontanées , et  se  dissipera  sous  forme  de  lueurs 
indéterminées.  On  peut  même  concevoir  un  déplacement  assez  rapide 
pour  que  toute  lumière  primaire  cesse  de  nous  arriver , non , comme 
le  dit  quelque  part  M.  Petzval,  parce  que  la  longueur  d’onde 
deviendrait  infiniment  petite,  mais  parce  qu’aucune  molécule  de 
l’éther  en  repos  ne  serait  plus  capable  de  recueillir  intégralement 
la  vibration  primaire  de  la  source.  Si  l’on  se  refusait  à admettre 
la' transmission  de  la  vibration  sans  changement  de  période , telle 
que  j’ai  essayé  de  l’établir,  je  contesterais  hardiment,  de  mon 
côté , qu’aucune  autre  vibration  d’une  durée  déterminable  d’avance , 
comme  le  veulent  MM.  Petzval , von  Ettingshausen , Klinkerfues , 
etc.,  puisse  être  transmise  à l’éther;  cette  opinion,  je  suis  per- 
suadé que  je  ne  serais  pas  seul  à la  soutenir. 

La  même  complexité  que  le  rayon  présente  dans  le  cas  du 
mouvement  de  la  source,  il  la  possède  aussi  déjà,  à certains 
points  de  vue , dans  le  cas  du  repos.  Avec  ces  rayons  lumineux 
composés,  tous  les.  phénomènes  qui  font  appel  à la  durée  des 
vibrations  élémentaires,  ceux  d’interférence,  de  diffraction,  de 
réflexion,  de  réfraction,  etc.,  resteront  d’ailleurs,  j’en  ai  la  certi- 
tude, également  faciles  à expliquer,  soit  que  la  source  demeure 
fixe,  soit  qu’elle  se  déplace. 

D’autres  causes  que  celles  signalées  jusqu’ici  peuvent  contribuer 
à donner  cette  complexité  au  rayon;  je  crois,  en  effet,  que  la 
matière  lumineuse  déplacée  laisse  encore , après  son  départ , l’éther 
dans  un  état  de  vibration  fixe  pendant  une  courte  durée.  La  pre- 
mière de  mes  raisons , c’est  qu’il  est  difficile  de  comprendre  comment 
cet  éther  abandonné,  qui,  d’après  Fresnel,  vient  de  sortir  de  la  source 
lumineuse , pourrait  retomber  instantanément , en  ce  qui  concerne 
sa  vibration,  dans  un  repos  absolu.  Ma  seconde  raison,  d’une 
nature  plus  expérimentale , c’est  que  l’œil  a indubitablement  besoin , 
pour  donner  naissance  à une  perception,  de  plusieurs  vibrations 
successives  parties  du  même  point;  or,  si  la  masse  animée  de 
vibrations  fixes  concordantes  se  meut,  par  exemple,  dans  une 
direction  perpendiculaire  au  rayon  visuel,  elle  change  à chaque 
instant  de  place  pour  l’œil , et  néanmoins  nous  la  voyons  en  chaque 


96 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETE 


point  de  sa  route.  Dans  le  cas  où  la  masse  a une  certaine 
étendue , cela  est  sans  doute  déjà  suffisant  pour  qu’une  multitude 
de  vibrations  émanent  d’un  même  point  mathématique  de  la  route 
parcourue  ; mais  si  ces  dimensions  étaient  très  petites , l’augmen- 
tation du  nombre  de  ces  vibrations,  par  l’espèce  d’action  consé- 
cutive que  je  viens  d’indiquer,  pourrait  devenir  nécessaire. 

36.  Grâce  à ces  vibrations  plus  ou  moins  nombreuses , qui  pour 
moi  peuvent  émaner  d’un  même  point  de  l’éther  en  repos  dans 
l’espace,  je  ne  suis  donc  arrêté  par  aucune  difficulté  dans  le  cas 
où  le  mouvement  de  la  source  lumineuse  est  perpendiculaire  au 
rayon  visuel  ou  fait  un  certain  angle  avec  lui;  précédemment 
j’avais  déjà  pu  conserver  à la  vibration  sa  même  période,  et 
maintenant  la  normale  de  la  surface  d’onde  conserve  aussi,  au 
moins  pour  un  instant,  une  direction  constante.  Voyons,  d’un 
autre  côté , comment  Doppler , Petzval  etc.  se  tireraient  d’affaire 
en  pareil  cas  ; n’oublions  pas  surtout  que  voir  est  tout  autre  chose 
qu’entendre,  et  que  dans  le  premier  de  ces  actes  il  y a encore 
à considérer,  outre  la.  vitesse  de  vibration,  un  autre  élément, 
à mon  avis  beaucoup  plus  important  , savoir , la  direction  sus-dite 
de  la  normale  à la  surface  d’onde,  qui  détermine  la  place  de 
l’image  sur  la  rétine.  En  admettant  même , pour  un  instant , que 
par  l’accélération  de  la  poussée  d’onde  la  couleur  puisse  s’élever , 
je  voudrais  savoir  comment  Doppler  définirait  la  direction  lorsque 
la  source,  qui  peut  d’ailleurs  comme  dans  le  cas  de  l’étincelle 
électrique  être  très  rapprochée , se  meut  par  exemple  sous  un  angle 
de  45°  par  rapport  à la  ligne  visuelle.  La  question  à résoudre 
est  celle-ci:  une  seule  poussée  d’onde  suffit-elle  pour  donner  la 
perception  de  lumière , de  façon  que  sa  normale  détermine  la  direc- 
tion de  la  source,  ou  bien  faut-il  pour  cela  plusieurs  vibrations 
parties  d’un  même  point?  A cette  question  Doppler  pourrait 
difficilement  répondre;  car  dans  la  première  hypothèse  il  se  met 
en  contradiction  avec  ce  que  l’expérience  rend  probable,  et  dans 
la  seconde  l’accélération  de  la  fréquence  des  poussées  d’onde  lui 
échappe  pour  l’élévation  de  la  couleur.  Pour  bien  juger  l’embarras 
que  cette  question  aurait  suscité  à Doppler,  on  doit  se  rappeler 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  97 

combien  Tceil  est  sensible  au  moindre  changement  dans  la  direc- 
tion relative  de  deux  sources  lumineuses  observées , qui  se  recou- 
vraient un  instant  auparavant.  Si,  au  même  point  de  Tespace, 
plusieurs  centaines  de  vibrations  ou  de  pousséeé  d^onde  doivent 
émaner  de  Tobjet  lumineux  pour  que  celui-ci  soit  perçu  à son 
passage' en  ce  point,  ou  bien  Doppler  ne  le  voit  pas  du  tout,  ou 
bien  son  changement  de  couleur  s’évanouit  ; tandis  que  moi  je  le 
verrai  peut-être  simultanément  en  quelques  points  situés  très  prés  T un 
de  l’autre,  ce  qui  ne  constitue  certainement  pas  une  difficulté. 

37.  Considérons  encore  une  pareille  source  lumineuse , et  plaçons 
l’observateur  de  façon  que  sa  ligne  visuelle  fasse  un  angle  de  45° 
avec  la  direction  du  mouvement.  Soient  A et  B les  deux  positions 
extrêmes  que  la  molécule  à l’état  de  vibration  fixe  occupe  sur  cette 
direction,  savoir,  A au  commencement  et  B à la  fin  d’une  seule 
et  même  vibration;  nous  demanderons  alors  à M.  Petzval  et  à* 
M.  von  Ettingshausen  de  quel  point  du  milieu,  de  quel  point  de 
l’espace , nous  devons  maintenant  faire  partir  la  vibration  courante 
raccourcie  au  moyen  de  laquelle  nous  voyons  ce  point  lumineux. 
A coup  sûr,  ce  ne  sera  pas  de  A;  de  B non  plus,  car  dans  ce 
cas  nous  aurions  le  même  raccourcissiment  de  la  durée  de  vibration 
que  sur  la  direction  même  du  mouvement.  Ce  sera  donc  de  quelque 
point  de  la  droite  qui  joint  l’œil  au  milieu  de  AB,  et,  si  nous 
poursuivons  d’une  manière  conséquente  le  raisonnement , du  point 
de  cette  droite  qui  est  situé  à la  distance  d’une  longueur  d’onde 
de  A ; tant  que  le  carré  de  la  vitesse  de  translation  du  point  lu- 
mineux peut  être  négligé  par  rapport  à la  vitesse  de  la  lumière , 
le  raccourcissement  de  la  longueur  d’onde  ou  de  la  durée  de 
vibration  restera  alors  encore  proportionnelle  au  cosinus  de  l’angle 
que  la  ligne  visuelle  fait  avec  la  direction  du  mouvement  de  la 
source.  Mais  M.  Petzval  et  M.  von  Ettingshausen  savaient  aussi 
bien  et  mieux  que  moi  qu’il  n’est  pas  permis , en  matière  de  vibra- 
tions courantes,  de  faire  concourir  des  surfaces  d’onde  dont  les 
normales  ont  des  directions  différentes  (autrement  il  faudrait  re- 
noncer au  principe  de  Huyghens),  ni  par  conséquent  de  combiner 
en  un  tout , dans  l’éther  indéfini , des  phases  qui  arrivent  de  direc- 
Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  7 


98 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


lions  différentes,  soit  que  Ton  dirige  la  ligne  visuelle  sur  le  milieu 
de  A B ou  sur*  quelque  autre  point.  Dans  nos  expériences  d’inter- 
férence, il  est  vrai,  nous  faisons  agir  de  concert  des  surfaces 
d’onde  dont  les  normales  divergent  entre  elles;  mais  alors,  ou 
bien  ces  normales  sont  ensuite  rendues  parallèles  par  la  réfraction , 
ou  bien  les  phénomènes  sont  observés  sur  un  écran , c’est-à-dire , 
dans  une  lumière  diffuse , qui  naît  en  quelque  sorte  de  vibrations 
fixes  des  particules  de  l’écran  et  où  les  rayons  interférents  dis- 
persés ont  de  nouveau  des  normales  parallèles.  En  outre  il  n’y  a 
absolument  rien  qui  nous  lie  au  point  ci-dessus  déterminé,  comme 
origine  de  la  vibration  enroulée;  nous  aurions  pu  prendre  tout 
autre  point  sur  la  ligne  A B ou  en  dehors  d’elle , ce  qui  aurait 
entraîné  une  autre  valeur  pour  le  changement  de  la  durée  de 
vibration.  Au  sujet  de  l’indétermination  de  la  direction  dans  laquelle 
la  source  lumineuse  sera  vue , ce  qui  a été  dit  pour  l’idée  primitive 
de  Doppler  s’appliquerait  encore  beaucoup  mieux  ici  ; il  est  inutile 
de  le  répéter.  En  résumé,  on  voit  donc  que  la  théorie  dite  , 

partie  d’une  abstraction  en  ce  qui  concerne  la  source  lumineuse , 
doit  maintenant  faire  encore  abstraction  de  toutes  les  directions 
autres  que  celle  dans  laquelle  la  source  se  meut. 

• § X. 

38.  Similitudo  clàudicat , dit-on  ; cet  adage  est  parfaitement  de 
saison , lorsque , pour  montrer  comment  des  chocs  ou  des  pulsations 
isolées  se  transmettent  dans  un  milieu  élastique,  homogène  et 
indéfini,  on  nous  cite  des  phénomènes  tels  que  ceux  offerts  par 
des  billes  élastiques  ou  par  les  cylindres  de  Mach.  Dans  ces  deux 
exemples,  en  premier  lieu,  il  n’est  question  que  de  transmission 
suivant  une  seule  ligne  droite  ; dans  un  milieu  homogène  indéfini , 
au  contraire,  la  transmission  se  fait  d’une  manière  égale  en  tous 
sens , et  toutes  ces  directions  sont  solidaires  entre  elles  ; en  d’autres 
termes,  les  impulsions  doivent  ici  se  distribuer  selon  des  enve- 
loppes sphériques.  Mais,  ce  qui  est  tout  à fait  décisif,  c’est  que 
l’impulsion,  en  quelque  point  du  milieu  qu’elle  se  trouve,  doit 
partout  se  propager  aussi  bien  en  arrière  qu’en  avant.  Si  en  ap- 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  RÉFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  99 

parence,  comme  partie  intégrante  d’une  vibration  qui  émane  d’un 
point  fixe,  elle  ne  rétrograde  pas,  cela  tient  à la  successsion  régu- 
lière des  autres  impulsions  difîerentielles  venues  du  même  point. 
Sans  doute , je  ne  puis  pas  en  appeler  ici  au  retour  du  choc  qui , 
dans  le  cas  de  la  série  de  billes,  a lieu  après  que  la  dernière  s’est 
soulevée  ; car  on  m’objecterait  que  c’est  là  une  conséquence  de  la 
limitation  du  système.  Mais  alors  aussi  il  faut  convenir  qu’une 
douzaine  de  billes  élastiques  pesantes,  suspendues  à des  cordes 
l’une  à côté  de  l’autre,  sont  une  bien  singulière  représentation 
d’un  milieu  élastique  indéfini. 

Si  l’on  avait  considéré  de  plus  près  cette  expérience  des  billes , 
on  aurait  remarqué,  en  second  lieu,  que  la  transmission  visible 
du  choc  repose  sur  une  vibration  courante  des  molécules  des  billes. 
Enfin,  à chaque  point  de  contact  entre  deux  billes  consécutives , 
il  s’opère,  au  moment  de  l’ébranlement,  un  partage  de  la  force 
vive  du  choc,  une  moitié  se  communiquant  en  arrière , l’autre  en 
avant;  la  première  des  deux  billes  reste  au  repos,  précisément 
parce  que  la  force  vive  en  recul  détruit  l’autre  moitié  de  la  quantité 
de  mouvement,  celle  que  la  bille  avait  conservée.  Ces  billes  ne 
prouvent  donc  nullement  qu’un  choc  isolé  puisse  se  transmettre , 
sans  division  et  suivant  une  seule  direction,  dans  un  milieu  in- 
défini. La  science  n’a  rien  à gagner  à des  comparaisons  aussi 
superficielles. 

39.  Similitudo  claudicat  ; cela  me  fait  hésiter  à produire , à l’appui 
de  mes  idées,  des  phénomènes  qui  ont  rapport  au  son.  Pourtant 
je  rappellerai,  en  premier  lieu,  les  expériences  mentionnées  par 
A.  Seebeck  ^),  où  des  tons  réguliers  se  détachent  du  bruit  que 
fait  le  papier  chiffonné  entre  les  doigts  ; le  froissement  du  papier 
imprime  à l’air  de  petits  chocs  ou  impulsions,  qui  se  résolvent 
en  vibrations  régulières.  Je  rappellerai  ensuite  l’effet  acoustique 
d’un  coup  de  fouet  rapide,  de  l’étincelle  électrique,  et  aussi  de 
la  foudre  et  de  la  sirène , qui  tous  communiquent  aux  molécules  de 
l’air  des  impulsions  instantanées , lesquelles  se  transforment  et  se 
propagent  en  vibrations  plus  ou  moins  régulières.  Je  rappellerai 


i)  Repertonum  der  Rhysik,'^  VI,  p,  26,  Berlin,  1842. 


7* 


100 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


encore  le  jouet  d’enfant  connu  sous  le  nom  de  loup-garou,  la  fronde 
musicale  de  Cagniard-Latour,  où  les  chocs  successifs  imprimés  à 
Fair  se  convertissent  très  certainement  en  vibrations.  Bref,  partout 
où  une  impulsion  est  donnée  aux  molécules  de  Fair,  celles-ci  se 
mettent  à .vibrer  ; et  la  hauteur  des  tons , qui  alors  prennent  souvent 
naissance  en  grand  nombre,  est  pour  sûr  très  difficile  à déter- 
miner d’avance,  et  dépendra  indubitablement  de  la  grandeur  de 
la  force  vive  qui  était  réunie  dans  l’impulsion,  du  volume  delà 
masse  d’air  qui  a été  ébranlée  du  coup,  et  de  la  vitesse  avec 
laquelle  ce  coup  a été  porté. 

Je  laisse  ici  indécise,  jusqu’à  un  certain  point,  la  question  de 
savoir  si  notre  perception  du  ton  est  déterminée  par  la  transmission 
régulière  de  la  vibration,  ou  bien,  comme  cela  est  très  proba- 
blement le  cas  pour  la  sirène  de  Seebeck , par  Faction  purement 
mécanique  qu’exercent  sur  notre  oreille  des  impulsions  de  con- 
densation ou  de  dilatation,  lesquelles,  tant  qu’on  s’en 'tient  au 
premier  choc  intégral  reçu  à la  suite  de  toute  condensation  ou 
dilatation  survenue  à une  certaine  distance,  peuvent  être  appor- 
tées par  un  système  quelconque  de  {vibrations  spontanées  tout  à 
fait  arbitraires. 

§ XL 

40.  Pour  résumer,  je  vais  maintenant  suivre,  en  m’appuyant 
sur  ce  qui  a été  dit  aux  § II  et  VIII , un  rayon  lumineux  depuis 
son  origine  dans  la  source  lumineuse  en  mouvement , à travers  un 
prisme  en  mouvement,  jusqu’à  l’observateur  en  mouvement.  Si 
Fon  compare  les  développements  du  § VIII  avec  le  résumé  de  la 
théorie  de  Doppler  présenté  à la  fin  de  Fart.  10,  on  reconnaîtra 
que  j’avais  raison  de  donner  provisoirement  à entendre,  à la  fin 
de  Fart.  20,  qu’entre  Doppler  et  moi,  malgré  la  différence  des 
points  de  vue,  il  y aurait  bien  encore  accommodement  sous  cer- 
tains rapports  ; dans  le  paragraphe  actuel , les  points  de  dissidence 
s’accuseront  d’une  manière  plus  claire. 

Je  ne  veux  pas  m’appesantir  en  ce  moment  sur  la  nature  propre 
de  l’absorption  que  la  lumière  éprouve  en  traversant  des  vapeurs 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  RÉFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  101 

placées  sur  son  trajet;  ce  qui  est  certain,  c’est  que  cette  action 
dépend  de  la  durée  de  vibration,' de  telle  sorte  que  les  vibrations 
absorbées  sont  précisément  celles  qui  ont  la  même  durée  que  les 
vibrations  émises  par  la  vapeur  au  moment  où  elle  devient  lu- 
mineuse. 

Nous  admettrons  d’un  autre  côté,  avec  M.  Veltmann,  que  la 
déflexion  d’un  rayon  luminenx  n’est  influencée  en  rien  par  le  mou- 
vement qui  entraîne  le  prisme  avec  la  Terre , et  que  par  conséquent 
elle  aussi  dépend  uniquement  de  la  durée  de  la  vibration. 

41.  Eeprésentons-nous  une  source  lumineuse  associée  à une  masse 
de  vapeurs  et  emportée  avec  elle  à travers  l’espace , par  exemple , 
une  étoile  avec  son  atmosphère,  qui  se  meuvent  ensemble  dans 
la  direction  de  l’observateur.  L’étoile , ou  plutôt  les  particules  de 
matière  ou  d’éther  qui  occupent  ou  avoisinent  la  -surface , exécu- 
tent des  vibrations  lumineuses  fixes , qui , d’après  les  considérations 
développées  aux  § I et  VIII,  se  transmettent  sans  altération  de 
période  à l’éther  en  repos;  chacune  des  molécules  vibrantes  pri- 
maires émet  incessamment  ses  vibrations  vers  le  dehors  et  tend 
à se  décharger  de  sa  force  vive  sur  l’éther  ambiant.  L’étoile, 
c’est-à-dire  la  masse  lumineuse , se  déplaçant  dans  l’espace , à une 
molécule  vibrante  primaire  qui  est  entraînée  vient  se  substituer  la 
molécule  suivante , qui  prend  pendant  un  instant  son  rôle  de  centre 
d’une  vibration  courante  déterminée,  pour  être  aussitôt  après  rem- 
placée par  une  molécule  nouvelle.  L’éther  qui  occupe  l’espace  reste 
en  repos , et  il  en  est  de  même  des  centres  des  séries  respectives 
de  vibrations  courantes , séries  qui  persistent  aussi  longtemps  que 
par  leurs  centres  continuent  à passer  des  molécules  de  la  source 
vibrant  toutes  dans  des  orbites  semblables  et  parallèles,  avec  la 
même  période  et  la  même  anomalie.  Mais  pourtant,  quand  tout 
est  en  marche,  le  système  entier  des  centres  d’où  les  vibrations 
émanent  change  peu  à peu,  et  le  résultat  est  le  même  que. si  ce 
système  se  déplaçait  avec  la  même  vitesse  que  l’étoile  ; car , bien 
que  chacun  de  ces  points  émette  successivement  des  milliers  de 
vibrations  complètes  avant  de  cesser  ses  fonctions , il  n’en  demeure 
pas  moins  vrai  qu’à  chaque  instant  un  de  ces  centres  est  retranché 


102 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


en  arrière  et  un  nouveau  ajouté  en  avant.  Nous  avons  donc  affaire , 
dans  notre  rayon  lumineux , à de  nombreuses  séries  de  vibrations , 
originaires  de  centres  qui  se  renouvellent  ou  en  apparence  se 
déplacent  lentement,  et  par  conséquent  à un  mouvement  com- 
plexe, — une  poussée  d'onde  composée,  pour  parler  avec  Dopp- 
ler, — qui  procède  vers  l'observateur  avec  la  vitesse  de  propagation 
de  la  lumière  augmentée  de  la  vitesse  de  translation  de  l'étoile. 
La  période  de  vibration  reste  la  même , malgré  le  mouvement  de 
l'étoile;  et  déjà  l'atmosphère  absorbante  entraînée  exige,  comme 
tout  autre  milieu  réfringent,  que  cette  poussée  d'onde,  ou  le  mou- 
vement complexe  des  molécules  d'éther , se  résolve  en  ses  éléments , 
c'est-à-dire  en  toutes  ces  vibrations  distinctes , de  même  durée  ou 
longueur  d'onde , qui  se  développent  suivant  des  sinusoïdes.  Cette 
durée  ou  longueur  d'onde  est-elle  égale  à celle  des  vibrations 
qu'émettrait  l'atmosphère,  alors  les  vibrations  émanées  de  la  source 
seront  absorbées  ; il  n’y  a pas  lieu  de  s’occuper  ici  du  mouvement 
de  l’atmosphère,  ne  fût-ce  que  par  cette  raison  que , ce  mouvement 
lui  étant  commun  avec  l'étoile,  les  temps  des  poussées  d'onde  ne 
subissent  pour  elle  aucun  changement.  Quant  aux  vibrations  qui 
ne  concordent  pas  avec  les  siennes,  la  masse  gazeuse  les  laisse 
passer  sans  obstacle. 

42.  Une  atmosphère  d’hydrogène  absorbe  les  vibrations  des  trois 
raies  de  l'hydrogène.  La  lumière  ainsi  tamisée  arrive  alors,  avec 
sa  poussée  d'onde  accélérée,  au  prisme  entraîné  dans  le  mouve- 
ment de  la  Terre.  Comme  nous  le  montre  si  clairement,  d’une 
autre  manière,  le  phénomène  de  la  dispersion  des  couleurs,  la 
matière  réfringente  exige  de  nouveau  la  décomposition  de  la  poussée 
d'onde  ou,  mieux  encore,  du  mouvement  complexe  de  la  molécule 
d'éther,  parce  qu'elle  ne  peut  avoir  égard  qu’à  des  vibrations  qui 
suivent  une  sinusoïde.  Le  mouvement  complexe  se  résout  juste  en 
autant  de  vibrations  à anomalie  différente  qu’il  y a de  séries 
superposées  dans  le  rayon.  La  réfraction  ou  déflexion  dépend  alors 
uniquement,  suivant  l'explication  de  Fresnel  amendée  par  M.  Velt- 
mann , de  la  durée  ou  de  la  longueur  d'onde  de  la  vibration  élé- 
mentaire, qui  est  restée  intacte  dans  toutes  les  composantes.  Les 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  RÉFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  103 

raies  obscures  de  l’hydrogène,  ou  plutôt  les  vibrations  lumineu- 
ses voisines,  sont  donc  encore  réfractées  exactement  comme  si 
tout  était  en  repos.  La  lumière  se  rend  ensuite  à l’œil  de  l’obser- 
vateur ; admettons  qu’ici  la  perception  de  la  couleur  soit  déterminée , 
comme  on  le  prétend,  par  la  fréquence  des  poussées  d’onde,  et 
non  par  la  période  ou  la  longueur  d’onde  des  vibrations  élémen- 
taires dont  cette  poussée  est  composée;  eh  bien,  la  lumière  au 
pourtour  des  raies  éteintes  pourra  alors  avoir,  par  l’effet  du  mou- 
vement de  l’étoile,  une  teinte  un  peu  modifiée,  un  peu  avancée  vers 
le  violet  ; mais , en  dépit  de  cela , la  déviation  mesurable  des  raies 
du  spectre  sera  inaltérée. 

43.  Si  la  source  lumineuse  en  mouvement  n’est  pas  entourée 
d’une  atmosphère  absorbante,  si  c’est  une  masse  émettant  des 
vapeurs  ou  des  gaz  lumineux , — par  exemple  le  soleil , qui  expulse 
avec  une  grande  vitesse  de  l’hydrogène  incandescent,  — les  phé- 
nomènes, à l’absorption  près,  restent  encore  les  mêmes. 

La  source  transmet  de  nouveau  ses  vibrations , sans  changement 
de  durée,  aux  molécules  de  l’éther  en  repos,  l’onde  composée 
s’élance  de  nouveau  d’un  pas  accéléré  à travers  l’espace  vers  l’ob- 
servateur; le  passage  dans  la  substance  réfringente  exige  de 
nouveau  la  résolution  du  mouvement  composé  en  ses  vibrations 
élémentaires,  les  seules  dont  il  tienne  compte;  la  réfraction  ou 
déflexion  de  ces  vibrations  par  le  prisme  interposé  reste  encore 
la  même,  et  les  raies  brillantes  ne  subissent  aucun  déplacement 
dans  le  spectre.  Les  partisans  de  Doppler  conservent  toutefois  le 
droit  de  rechercher  si  la  teinte  observée  n’aurait  pas  éprouvé  une 
très  légère  modification. 

Pour  simplifier,  je  m’en  suis  tenu  ici  à un  mouvement  dirigé 
directement  vers  l’observateur , et  à l’hydrogène  avec  ses  raies  peu 
nombreuses;  mais  il  va  sans  dire  que  le  raisonnement  est  tout  à 
fait  général. 

44.  Par  diverses  considérations,  et  indépendamment  de  ce  qui 
a été  dit  à l’art.  36,  la  modification  de  teinte,  à laquelle  je  viens 
de  faire  allusion , me  paraît  elle-même  encore  des  plus  douteuses. 
D’abord,  lorsque  deux  couleurs  agissent  simultanément  sur  l’œil. 


104  V.  s.  M.  VAN  DER  WILLI6EN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 

la  perception  de  la  couleur  composée  ne  saurait  être  ramenée  à 
des  pousées  d’onde  se  suivant  régulièrement  à des  intervalles 
égaux , et  par  conséquent , dans  ce  cas  au  moins , ce  n’est  pas  la 
poussée  d’onde  résultante  qui  détermine  la  couleur.  Deux  cou- 
leurs, en  éffet,  donnent  pour  résultante  une  couleur  d’une  longueur 
d’onde  intermédiaire  ; or , la  courbe  qui  résulte  de  la  composition  de 
leurs  deux  lignes  d’onde  est  très  loin  de  constituer  elle-même  une 
ligne  d’onde,  ayant  ses  croupes  à une  distance  toujours  la  même, 
qui  devrait  tenir  à peu  près  le  milieu  entre  les  distances  des  croupes 
sur  les  deux  lignes  composantes.  En  second  lieu,  je  présume  que 
l’œil  matériel,  à l’égal  de  toute  autre  matière  perméable  à la 
lumière  et  réfringente , exige  que  le  mouvement  complexe  des  molé- 
cules d’éther  se  résolve  en  vibrations  sinusoïdales,  et  alors  la 
poussée  d’onde  s’effondre  complètement.  Enfin , conformément  à la 
remarque  de  M.  von  Ettingshausen , rappelée  dans  l’art.  13,  et  à 
l’éclaircisssement  donné  dans  l’art.  14,  on  ne  doit  pas  se  former 
une  représentation  trop  caractérisée  de  cette  poussée  de  l’onde, 
qui  pourrait  bien,  à raison  de  la  multitude  des  séries  dont  elle 
se  compose,  avoir  un  contour  très  peu  accidenté. 

L’œil  de  l’observateur  étant  maintenant  supposé  lui-même  en 
mouvement  dans  l’éther  immobile,  cet  œil,  s’il  va  par  exemple 
à la  rencontre  de  la  lumière , recueillera  par  cela  seul  à des  inter- 
valles plus  courts  les  poussées  d’onde  et  même  les  croupes  et  les 
dépressions  des  vibrations  élémentaires  ; pour  cette  raison  la  couleur 
doit  se  déplacer,  suivant  Doppler,  vers  le  violet.  Mais  tout  dépend 
ici  de  la  preuve  que  cette  couleur  est  déterminée  par  la  poussée 
d’onde  et  non  par  la  durée  de  vibration  des  molécules  de  l’éther. 
Dans  le  cas  du  mélange  des  couleurs,  cité  ci-dessus,  on  peut  très 
bien  concevoir  que  les  vibrations  élémentaires  suscitent  directement 
des  perceptions,  d’où  naîtrait  ensuite  par  combinaison  une  autre 
perception,  celle  de  la  couleur  composée.  De  cette  manière,  la 
vibration  simple  se  trouverait  maintenue  dans  tous  ses  droits.  Mais 
de  ce  que , dans  les  conditions  du  mélange  des  couleurs , la  per- 
ception ne  serait  pas  déterminée  par  la  poussée  d’onde,  on  ne 
pourrait  pas  encore  conclure,  avec  une  certitude  absolue,  qu’ici. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  105 

dans  le  cas  spécial  qui  nous  occupe,  le  mouvement  n’influe  en 
rien  sur  la  perception  de  la  couleur.  On  doit  toutefois  remarquer 
que  l’œil  seul  est  en  mouvement  avec  une  certaine  quantité  d’éther 
adhérent  à sa  masse,  tandis  qu’une  autre  partie  de  l’éther,  celle 
qui  représente  sa  densité  normale  dans  l’espace,  reste,  suivant 
Fresnel,  toujours  en  repos.  En  admettant  maintenant  que  l’influ- 
ence directe  des  vibrations  courantes  ne  s’étende  qu’à  cet  éther 
de  densité  normale  contenu  dans  la  rétine,  et  qu’elle  y excite 
par  exemple  des  vibrations  fixes , dont  la  force  vive  serait  immé- 
diatement absorbée  par  la  matière  de  la  rétine  et  son  éther  adhé- 
rent, le  mouvement  de  l’œil  n’aurait  plus  aucun  effet,  puisque 
cette  dernière  communication,  pour  les  raisons  développées  en 
parlant  de  la  transmission  de  la  vibration  de  la  source  à l’éther 
ambiant,  peut  se  faire  sans  altération.  — Peut-être  la  seule  con- 
sidération de  la  normale  à la  surface  des  ondes  mettra-t  elle  déjà 
un  terme  à ces  discussions;  car  c’est  cette  normale  qui  détermine 
la  place  de  l’image  sur  la  rétine  ou,  en  d’autres  termes,  la 
direction  dans  laquelle  l’objet  est  vu  ; et  les  partisans  de  la  vision 
par  pulsations  auront  beaucoup  de  peine  à nous  donner  une  défi- 
nition de  ce  que  c’est  que  la  normale  à la  surface  des  pulsations. 
Mais  laissons  cette  digression,  car  personne  ne  nous  a encore 
dévoilé  la  nature  réelle  de  la  perception  visuelle. 

45.  Ceci  me  ramène  à une  question  que,  pour  simplifier,  j’avais 
écartée  jusqu’ici,  et  qu’on  pourrait  pourtant  facilement  s’adresser  : 
la  question  de  savoir  si  l’absorption  est  modifiée  par  le  mouve- 
ment de  l’atmosphère  absorbante.  Nous  nous  trouvons  ainsi  de 
nouveau,  malgré  notre  désir  de  l’éviter,  en  face  du  problème  de 
l’essence  de  cette  absorption.  I/idée  la  plus  simple  qu’on  puisse 
s’en  faire  est  peut-être  celle-ci:  l’éther  renfermé  dans  la  vapeur 
est  capable  seulement  d’exécuter  des  vibrations  d’une  ou  de  plu- 
sieurs périodes  déterminées,  et  il  absorbe  à leur  profit  la  force 
vive  des  vibrations  courantes  qui  l’atteignent,  en  tant  que  celles-ci 
suivent  la  même  période  ; les  vibrations  courantes  qui  ne  satisfont 
pas  à cette  condition  ne  peuvent  servir  à cet  usage,  parce  que, 
d’après  la  formule  de  Fourier,  qui  dans  son  application  à la 


106 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


théorie  des  ondes  exprime  une  vérité  physique,  il  est  impossible 
que  des  vibrations  de  durée  ditférente  se  fondent  en  une  seule; 
deux  sinusoïdes  dissemblables  par  leur  période  ne  peuvent,  en 
effet,  jamais  en  donner  une  troisième  par  leur  combinaison. 

Lorsque  la  masse  gazeuse,  par  exemple  notre  atmosphère  ter- 
restre, se  déplace,  Téther  renfermé,  ou  du  moins  la  partie  qui 
possède  la  densité  normale  de  T espace  vide,  reste  de  nouveau, 
suivant  Fresnel,  en  repos;  seul  le  léger  excédant  dû  à la  présence 
de  l’air  partage  le  mouvement  de  celui-ci.  Cet  éther  de  densité 
normale , à l’intérieur  de  la  masse  gazeuse , nous  voulons  le  sup- 
poser maintenant  dans  un  état  de  tension,  en  vertu  duquel  il 
puisse  exécuter  des  vibrations  fixes  déterminées.  Les  molécules 
gazeuses,  avec  l’éther  adhérent  additionnel,  sont  les  centres  d’où 
émane  l’influence  qui  produit  cette  tension  ; elles  forment  en  même 
temps,  pour  ainsi  dire,  les  points  d’appui  fixes  qui  absorbent  la 
force  vive  des  vibrations  de  l’éther  normal.  Quant  à la  manière 
dont  ce  dernier  prend  cet  état  de  tension , ou  à la  nature  de  l’ac- 
tion qu’exercent  sur  lui  les  molécules  gazeuses , c’est  un  point  que 
nous  n’essayons  pas  de  préciser. 

Ainsi,  l’éther  qui  apporte  les  vibrations  de  la  source  lumineuse , 
et  l’éther  qui  à l’intérieur  de  la  masse  gazeuse  doit  être  mis  par 
elles  dans  un  état  de  vibration  fixe,  restent  tous  les  deux  en 
repos  ; il  n’y  a donc  aucune  raison  pour  que  cette  vibration  cou- 
rante , en  se  transformant  en  vibration  fixe , allonge  ou  raccourcisse 
sa  période.  Le  principe  de  la  conservation  de  la  durée  de  vibration 
est  encore  pleinement  sauvegardé  dans  le  passage  dont  il  s’agit. 

Veut- on  voir  cette  vibration  fixe  se  transmettre  encore  plus  loin , 
aux  molécules  gazeuses  et  à l’éther  adhérent?  eh  bien,  à raison 
de  l’étendue  de  la  masse  d’éther  de  densité  normale  qui  se  trouve 
déjà  en  vibration  fixe,  cette  transmission  pourra  s’opérer  tout  aussi 
bien  sans  changement  de  période  que  la  communication , traitée  en 
détail  aux  art.  31,  32  et  33,  de  la  vibration  fixe  d’une  source 
en  mouvement  à un  milieu  en  repos.  Quant  à ce  que  cette  force 
vive  devient  ultérieurement,  lorsqu’elle  est  passée  dans  la  matière , 
nous  ne  le  savons  pas  et,  pour  le  moment,  cela  importe  peu. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  RÉFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  107 

Ce  qui  est  vrai  de  notre  atmosphère  s’applique  aussi  à une 
couche  quelconque  de  vapeur , à un  milieu  absorbant  quelconque. 
La  comparaison  avec  le  phénomène  connu  du  son,  où  un  tout 
limité,  capable  d’exécuter  des  vibrations,  est  mis  en  branle  par 
la  succession  accélérée  ou  retardée  de  poussées  d’onde  proprement 
dites , — d’impulsions  de  condensation  ou  de  dilatation , — cette 
comparaison  serait  ici  tout  à fait  déplacée. 

En  parlant  de  la  source  lumineuse,  j’ai,  dans  un  passage  pré- 
cédent, pour  simplifier,  laissé  l’éther  inclus  exécuter  les  vibrations 
fixes  et  se  déplacer  avec  la  vitesse  de  la  source.  Cette  vue  n’est , 
il  est  vrai,  pas  d’accord  avec  l’hypothèse  de  Fresnel,  qui  vient 
d’être  appliquée  ici  ; mais  cela  ne  touche  pas  le  point  en  question. 
En  tout  état  de  cause , c’est  la  translation  de  la  matière  qui  donne 
lieu  à un  renouvellement  incessant  des  molécules  d’éther  mises 
en  vibration , et  on  doit  laisser  progresser  avec  la  source  les  points 
mathématiques  d’où  la  vibration  fixe  émane. 

46.  La  reconnaissance  comme  vérité  physique , dans  son  appli- 
cation à la  doctrine  des  ondes,  de  la  formule  de  Fourier  forme 
évidemment  la  base  sur  laquelle  je  fais  reposer  la  persistance 
individuelle  de  vibrations  élémentaires  de  même  période  dans  mon 
rayon  lumineux  incessamment  renouvelé , ou  du  moins  leur  appa- 
rition séparée  lors  du  passage  dans  une  autre  matière.  Il  va  sans 
dire  que,  parmi  ces  vibrations,  je  me  figure  réunies  en  un  seul 
tout  celles  dont  l’anomalie  et  l’amplitude  restent  constantes  dans 
le  cours  d’une  vibration  entière;  je  laisse  aussi  à l’interférence 
sa  juste  part  d’influence.  Le  mouvement  résultant  d’une  molécule 
d’éther  est  une  sinusoïde,  qui  change  à chaque  instant  d’anomalie 
'et  d’amplitude;  et  précisément  à cause  de  cela,  il  se  décompose , 
au  moment  même  du  passage,  en  sinusoïdes  élémentaires  à ano- 
malie et  amplitude  constantes,  malgré  l’égalité  de  période  de 
toutes  ces  sinusoïdes.  Le  théorème  de  Fourier , élevé  au  rang  de 
vérité  physique  aussitôt  que  la  force  développée  par  le  déplacement 
de  la  molécule  vibrante  est  prise  proportionnelle  à la  première 
puissance  de  ce  déplacement , jette , par  le  fait  même  de  ce  dédou- 
blement du  mouvement  composé  en  sinusoïdes  indépendantes , un 


108 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETE 


jour  nouveau  sur  plusieurs  phénomènes  de  la  doctrine  des  ondes. 
Il  rendrait  peut-être  encore  de  grands  services , si  le  milieu  con- 
ducteur devait  être  regardé  comme  dans  un  état  de  mouvement 
jusqu’à  une  certaine  distance  de  la  source. 

§ XII. 

47.  Mais,  dira-t-on,  des  observateurs  tels  que  Huggins  i), 
Lockyer  et  Vogel  ont  vu  les  raies  spectrales , et  en  particulier 
la  raie  F de  Thydrogène,  déplacées,  soit  comme  raies  d’absorp- 
tion dans  les  spectres  des  étoiles , soit  comme  raies  brillantes  dans 
les  spectres  des  émanations  gazeuses  qui  se  produisent  subitement 
à la  surface  du  soleil.  Je  ne  doute  nullement  qu’ils  aient  en  effet 
observé  ces  déplacements,  seulement,  qu’on  ne  me  demande  pas 
de  les  attribuer  au  mouvement  de  la  source  lumineuse  ou  du  prisme. 
Faisons-nous  une  idée  nette  de  ce  qui  a été  observé,  et  examinons 
alors  si  la  méthode  d’observation,  les  instruments  employés  ou 
d’autres  causes  physiques  peuvent  en  donner  une  explication  satis- 
faisante. 

Le  déplacement  dont  il  est  ici  principalement  question  concerne 
la  partie  bleue  du  spectre , car  c’est  là  que  se  trouve  la  raie  F. 
Dans  toutes  les  observations  il  a été  fait  usage  de  lunettes.  Or  on 
sait  que  même  les  meilleurs  de  ces  instruments  sont  encore  toujours 
affectés  d’un  défaut  d’achromatisme,  et  qu’on  y laisse  le  bleuet 
le  violet,  comme  rayons  les  moins  intenses , aller , pour  ainsi  dire , 
leur  train  ; en  outre , le  foyer  des  rayons  marginaux  est  naturelle- 
ment encore  diffèrent  de  celui  des  rayons  centraux.  J’ai  exécuté 


' ) Furtîier  observations  on  the  spedra  of  some  stars  and  nehulae  witJi  an  attempt 
io  détermine  therefrom  wether  the  hodies  are  moving  toicards  or  from  the  earth, 
also  observations  on  the  spedfa  of  the  Sun  and  of  Cometli.\^^%.  Phil.  Transad  .y 
1868,  vol.  CLVIII,  p.  549.  1869. 

Û7i  the  spedrjim  of  the  great  nebula  of  Or  ion  and  on  the  motions  of  some  stars 
towards  or  fro7n  the  earth.  Phil.  Magaz.  4e  Sér.,  vol.  XLV , p.  133.  1873. 

*)  On  recent  discoveries  in  solar  physics  made  by  mea?is  of  the  spectroscope . 
Phil.  Magaz.  4e  Sér.  vol.  XXX VIII,  p.  342.  1869. 

*)  B eobachtmigen  auf  der  Sternwarte  zu  Bothkamp.  Heft  I,  p.  38.  1872. • 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  109 

trop  de  mesures  de  réfraction  et  de  diffraction  avec  le  spectro- 
mètre , par  conséquent  à Taide  d’une  lunette , pour  ne  pas  savoir 
que  ce  sont  précisément  les  mesures  effectuées  dans  la  partie  la 
plus  réfrangible  du  spectre  qui  souffrent  le  plus  du  défaut  d’achro- 
matisme , c’est-à-dire  du  défaut  de  précision  dans  la  mise  au  point , 
et  de  l’aberration  de  sphéricité.  Il  n’est  donc  pas  étonnant  que 
j’aie  cherché  en  partie  dans  l’usage  des  lunettes  et  des  lentilles 
l’explication  des  déplacements  des  raies  qui  viennent  d’être  rappelés. 

48.  Il  suffit  de  lire  le  Mémoire  de  M.  Huggins  et  de  voir  avec 
quel  soin  il  procède  à l’ajustement  de  l’étincelle  électrique  et  de 
l’image  de  l’étoile , pour  être  convaincu  qu’il  a très  bien  reconnu 
la  nécessité  de  les  centrer  parfaitement  l’une  et  l’autre  sur  l’axe 
de  son  spectromètre , pour  pouvoir  comparer  les  raies  des  deux 
spectres.  Et  pourtant  il  ne  paraît  pas  avoir  songé  au  défaut  d’achro- 
matisme et  à l’aberration  sphérique  des  verres  de  son  spectromètre  , 
car  autrement  il  aurait  senti  que  les  deux  cônes  de  rayons  inci- 
dents devaient,  à la  rigueur,  avoir  aussi  le  même  angle  au 
sommet,  c’est-à-dire,  qu’ils  devaient  partir  absolument  du  même 
point  de  l’axe. 

lorsque  les  spectres  de  deux  sources  lumineuses  sont  comparés 
entre  eux,  ou  bien  V les  deux  faisceaux  peuvent  tomber  sur  les 
prismes  en  venant  d’une  distance  infinie  ou  de  distances  finies 
égales , et  en  même  temps  leurs  axes  peuvent  coïncider  ou  ne  pas 
coïncider;  ou  bien  2®  les  deux  faisceaux  peuvent  tomber  sur  les 
prismes  de  distances  différentes,  et  alors  encore  les  axes  peuvent 
ou  non  coïncider  entre  eux.  Toutes  les  raies  homologues  des  deux 
spectres  ne  se  correspondront  exactement,  cela  est  indubitable, 
que  si  les  deux  sources  peuvent  être  regardées  comme  placées  à 
/ des  distances  rigoureusement  égales  des  prismes , ou  plutôt  de  la 
lentille  du  collimateur,  et  si  de  plus  les  axes  des  deux  faisceaux 
coïncident.  Si  les  axes  continuent  à coïncider , mais  que  les  sources 
se  trouvent  à des  distances  différentes , les  raies  des  deux  spectres 
peuvent  se  séparer;  c’est  sous  cette  rubrique  que  tombent  les 
observations  de  M.  Huggins,  quand  l’ajustement  est  parfait. 

Dans  tout  spectromètre  il  y a un  collimateur  > qui  rend  les  rayons 


110 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETE 


de  la  source  parallèles  entre  eux  ; dans  l’appareil  de  M.  Huggins , 
ce  collimateur  est  représenté  par  la  lentille  achromatique  qui  est 
placée  en  avant  des  prismes  et  au  foyer  de  laquelle  se  trouve 
la  fente.  Si  j’ai  bien  compris,  l’image  de  l’étoile , formée  par  l’ob- 
jectif du  réfracteur,  tombe  exactement  sur  la  fente,  tandis  que 
l’étincelle  électrique  ou  le  tube  à hydrogène  est  placé  à une  assez 
grande  distance  en  avant  ; les  deux  sources  lumineuses  sont  ame- 
nées dans  l’axe  de  la  lunette  ; je  suppose  le  spectromètre  dans  la 
position  du  minimum  de  déflexion,  et  la  lunette  d’observation  ajustée 
avec  soin  sur  la  fente. 

Nous  avons  maintenant  affaire  en  premier  lieu  au  cône  de  rayons 
de  l’étoile,  qui  a la  fente  pour  sommet  et  la  surface  de  l’objectif 
du  réfracteur  pour  base  ; lorsque  la  distance  de  la  fente  à la  lentille 
du  collimateur  est  connue,  on  peut  assigner  la  base  du  cône  de 
rayons  stellaires  qui  tombe  sur  cette  lentille.  La  fente  occupant 
le  foyer  du  collimateur , nous  admettons  que  la  masse  des  rayons 
tombe  parallèlement  sur  les  prismes,  où  elle  subit  le  minimum 
de  déflexion;  la  lunette  du  spectromètre,  pointée  sur  la  fente, 
réunit  aussi  bien  que  possible,  en  un  spectre  stellaire  net,  les 
couleurs  les  mieux  acbromatisées  ; la  raie  F de  l’hydrogène  est 
un  peu  moins  nette , parce  qu’elle  se  trouve  à une  petite  distance 
en  avant  du  foyer  de  l’oculaire. 

Le  cône  de  rayons  qui  vient  de  l’étincelle  électrique,  ou  du 
tube  à hydrogène,  a cette  étincelle  pour  sommet  et  la  largeur 
de  la  fente  pour  section,  de  sorte  que,  sur  la  lentille  du  colli- 
mateur, sa  base  a probablement,  dans  le  sens  perpendiculaire  à 
la  fente,  une  dimension  très  petite,  et  d’autant  plus  petite  que 
l’étincelle  est  plus  éloignée  de  la  fente.  Les  rayons  de  l’étincelle 
ne  sont  donc  guère  que  des  rayons  centraux  pour  la  lentille  du 
collimateur,  et  par  suite  ils  éprouveront,  de  la  part  de  cette  len- 
tille , une  réfraction  moins  forte  que  les  rayons  marginaux  de  la 
lumière  stellaire,  laquelle  possède,  si  je  ne  me  trompe , une  base 
beaucoup  plus  grande.  Comparés  à cette  lumière  de  l’étoile,  que 
nous  nous  figurons  sous  une  incidence  parallèle , ces  rayons  tom- 
beront donc  sur  les  prismes  en  divergeant  ; la  distance  plus  grande 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  111 

de  Tétincelle  ne  corrige  rien  sous  ce  rapport , parce  que  la  lunette 
est  pointée  sur  la  fente  et  non  sur  rétincelle.  Lorsque  les  rayons 
de  l’étoile , émergés  parallèlement  à l’axe , éprouvent  la  réfraction 
minima,  les  rayons  de  l’étincelle,  qui  tombent  sur  le  prisme  en 
divergeant,  subiront  en  partie  une  réfraction  plus  forte,  parce 
que  leur  direction  s’écarte  à droite  ou  à gauche  de  celle  des 
premiers.  — Même  lorsque  tout  est  convenablement  ajusté,  la  raie 
pourra  donc  de  cette  manière , dans  le  spectre  de  l’étincelle , être 
un  peu  dilatée  à son  côté  le  plus  réfrangible  ; par  suite  du  défaut 
d’achromatisme,  elle  ne  sera  d’ailleurs,  pas  plus  que  dans  le 
spectre  de  l’étoile,  vue  avec  netteté. 

On  comprendra  maintenant  comment,  dans  les  circonstances 
ordinaires,  avec  le  meilleur  ajustement,  la  raie  F de  l’étoile  peut 
paraître  un  peu  moins  réfrangible  que  celle  de  la  source  terrestre , 
de  sorte  que,  suivant  Doppler,  l’étoile  semble  s’éloigner  de  la 
Terre.  Ce  sont  les  raies  les  plus  réfrangibles  qui  auront  le  plus 
à souffrir  de  l’influence  indiquée,  parce  qu’un  même  écart  entre 
le  rayon  incident  et  la  direction  de  déflexion  minima  donne  lieu, 
pour  un  plus  grand  indice,  à un  plus  grand  écart  dans  la  direction 
du  rayon  réfracté.  En  outre,  comme  ils  tombent  pour  les  deux 
spectres  en  dehors  du  foyer  de  l’oculaire,  et  peut-être  même  à 
des  distances  différentes  de  ce  point,  une  comparaison  exacte 
deviendra  de  nouveau  plus  difficile. 

49.  Laissons  maintenant  encore  la  source  de  comparaison  et 
l’image  de  l’étoile  à leur  place;  mais  supposons  l’axe  du  spec- 
tromètre  légèrement  déjeté,  ce  qui  peut  facilement  arriver,  de  sorte 
que  cet  axe , — qui  est  en  même  temps  l’axe  du  collimateur , — 
ne  coïncide  plus  avec  l’axe  du  réfracteur,  sur  lequel  se  trouvent 
' les  deux  sources  lumineuses  ; l’appareil  est  d’ailleurs  supposé  mis 
convenablement  au  point.  Une  des  deux  sources  lumineuses , cela 
est  certain,  tombe  alors  un  peu  en  dehors  de  l’axe  du  collima- 
teur; mais  ce  qui  est  le  point  essentiel,  c’est  que  l’axe  du  cône 
lumineux  de  l’étoile  cesse  nécessairement  de  coïncider  avec  cet 
axe  du  collimateur  ; l’axe  du  cône  lumineux  de  l’autre  source  peut 
d’ailleurs  s’en  écarter  tout  autant.  A cause  de  la  différence  entre 


112 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


les  rayons  du  bord  et  ceux  du  centre,  la  lumière  d’un  des  cônes 
peut,  après  réfraction  par  la  lentille,  tomber  sur  le  prisme  en 
convergeant  ou  en  divergeant,  tandis  que  celle  de  l’autre  cône 
se  présente  dans  l’état  de  parallélisme  ; si  le  faisceau  parallèle  est 
alors  dans  la  direction  précise  du  minimum  de  déflexion,  l’autre 
pourra  fournir  des  raies  montrant,  surtout  celles  de  l’indice  le 
plus  fort,  un  élargissement  au-  côté  le  plus  réfrangible.  Mais,  à 
part  cela , la  non -coïncidence  des  axes  des  deux  cônes , sur  laquelle 
je  voulais  ici  attirer  spécialement  l’attention,  aura  toujours  pour 
effet  un  écart  entre  les  raies  des  deux  spectres. 

L’article  précédent  a expliqué  pourquoi , dans  les  circonstances 
•ordinaires,  les  étoiles  peuvent  paraître  s’éloigner  de  la  Terre; 
celui-ci  met  en  lumière  la  circonstance  extraordinaire  qui,  en 
admettant  les  idées  de  Doppler,  semblera  éventuellement  commu- 
niquer aux  étoiles,  par  rapport  à la  Terre,  soit  un  mouvement 
de  rapprochement,  soit  un  mouvement  d’éloignement.  Il  est  clair 
que  toutes  les  raies , quelle  que  soit  leur  réfrangibilité , seront  rela- 
tivement déplacées  de  la  même  manière , mais  que  ce  déplacement 
sera  de  nouveau  plus  considérable  pour  celles  dont  l’indice  de 
réfraction  est  ’ plus  élevé  ; le  défaut  d’achromatisme  rendra  aussi 
ces  dernières  moins  distinctes,  et  par  suite  leur  comparaison 
rigoureuse  plus  difficile. 

Qu’on  ne  se  méprenne  pas  sur  ma  pensée.  Je  n’affirme  nulle- 
ment que  dans  les  observations  de  M.  Huggins  ou  de  M.  Vogel  les 
choses  se  sont  passées  de  telle  ou  de  telle  manière;  mais  j’indique 
des  causes  dans  lesquelles  de  petits  déplacements  constatés  pour- 
raient trouver  une  explication  plausible.  Il  est  singulier  que  l’inter- 
prétation acceptée  n’ait  encore  soulevé  aucun  doute,  alors  que, 
après  correction  pour  le  mouvement  de  la  Terre , M.  Huggins  était 
conduit  à assigner  aux  étoiles  qui  se  rapprochent  du  Soleil  un 
déplacement  2 ou  3 fois  plus  rapide  que”  celui  des  étoiles  qui  s’en 
éloignent  i).  Le  même  observateur  trouve  le  mouvement  deSirius 

D Phil.  Magaz.  4e  Sér. , Vol.  XLV,  p.  133  (la  liste),  et  Proceedings  of 
the  royal  Society , Vol.  XX,  p.  393. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  RÉFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  113 


uu  des  plus  grands,  tandis  que  le  mauvais  temps  le  forçait  de 
se  contenter  de  la  probabilité  que  Procyon  et  Capella  se  meuvent 
dans  la  même  direction  que  Sirius.  Les  résultats  obtenus  par  M. 
Vogel,  dans  une  même  soirée,  pour  Sirius,  Procyon  et  Capella, 
tombent,  comme  ceux  de  M.  Huggins,  tous  dans  le  même  sens, 
et  pour  Procyon  le  résultat  est  même  plus  grand  que  pour  Sirius  ; 
un  autre  soir  le  mauvais  temps  ne  lui  laissait  retrouver  le  résultat 
que  pour  Sirius  seul  *).  Ceci  n’exclut  pas  encore  l’action  d’une 
cause  constante,  qui  pourrait  être  cherchée  dans  une  non- coinci- 
dence des  axes  des  deux  faisceaux  lumineux  réfractés  : les  obser- 
vations, spécialement  celles  de  M.  Vogel,  sont  trop  peu  nombreu- 
ses , pour  autoriser  à assigner  des  valeurs  incontestables  aux 
déplacements  des  centres  des  raies. 

J’aurais  encore  à appeler  l’attention  sur  la  possibilité  qu’une 
raie  éprouve  une  dilatation  physique,  à l’un  ou  à l’autre  côté, 
par  l’apparition  de  raies  d’absorption  voisines,  appartenant  aune 
autre  matière  contenue  dans  la  couche  de  vapeurs;  mais  je  ne 
crois  pas  avoir  besoin  d’invoquer  cette  nouvelle  influence , d’ailleurs 
peu  probable. 

50.  Dans  les  observations  de  M.  Lockyer  et  aussi  dans  celles 
de  M.  Vogel,  en  tant  qu’il  s’y  agit  du  disque  solaire,  ou  d’une 
partie  de  ce  disque , et  d’une  émission  de  gaz  lumineux , — presque 
toujours  de  l’hydrogène,  — il  y a constamment  deux  sources 
lumineuses,  qui  envoient  simultanément  de  la  lumière  à travers 
la  fente  du  collimateur. 

Pour  ce  qui  est  des  recherches  concernant  les  courants  gyra- 
toires  de  la  chromosphère,  ou  le  phénomène  des  protubérances, 
on  peut  de  nouveau  y supposer  une  divergence  entre  les  axes  des 
deux  faisceaux  incidents^,  laquelle  aurait  pour  effet  de  déplacer 
les  raies  d’un  des  spectres  par  rapport  à celles  de  l’autre.  Dans 
les  tourbillons  de  la  chromosphère  il  peut  exister  deux  ou  plu- 
sieurs maxima  de  lumière;  et  à coup  sûr,  lorsqu’on  vise  succès- 


0 1.  c.,  p.  34. 

H.  E.  Roscoe,  Die  Spedralanalyse ^ uehersetzt  von  Schorlemmer , 1870 , p.  225 . 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  8 


114 


V.  s.  iM.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETE 


sivement  chacun  des  deux  bords  d'un  pareil  tourbillon,  on  porte 
Taxe  de  toute  cette  masse  lumineuse  une  fois  à gauche  et  une 
fois  à droite  de  Taxe  du  spectromètre.  Quant  aux  protubérances , par 
leur  forme  ramifiée  et  capricieuse  elles  occasionnent  peut-être  sur 
une  grande  surface  une  distribution  sporadique  de  la  matière  lumi- 
neuse , ee  qui  ne  saurait  rester  sans  influence  sur  la  position  relative 
des  raies  peu  nombreuses , dans  lesquelles  cette  lumière  se  résout , 
par  rapport  aux  raies  correspondantes  du  spectre  solaire. 

Pour  les  dessins  que  M.  Lockyer  (Roscoe,  fig.  76)etM.  Vogel 
(p.  40)  donnent  des  spectres  pris  au  voisinage  d’une  facule  ou 
sur  une  tache  avec  pont- transversal , nous  pouvons  faire  d’autres 
remarques,  qui  toutefois  sont  encore  fondées  sur  la  présence  de 
deux  sources  lumineuses.  Faisons  d’abord  observer  que  le  processus 
entier  à la  surface  du  Soleil,  aussi  bien  dans  les  protubérances 
et  les  tourbillons  qu’ici,  paraît  se  borner  à une  simple  émission 
de  vapeur  incandescente;  je  ne  vois  aucune  nécessité  d’admettre 
en  outre  une  ascension  ou  une  chute  rapides  de  gaz  refroidi, 
comme  semblent  le  vouloir  MM.  Roscoe  et  Vogel. 

Le  dessin  de  M.  Lockyer , tel  qu’il  nous  est  donné  par  M.  Roscoe , 
s’explique,  à mon  avis,  d’une  manière  satisfaisante  par  l’élargis- 
sement, à droite  et  à gauche,  de  la  raie  brillante  F,  à côté  de 
laquelle , vers  le  milieu  du  dessin,  se  distingue  encore^ la  raie 
obscure  F,  en  quelque  sorte  refoulée;  j'y  vois  donc  en  deux  points, 
savoir  au  milieu  et  plus  vers  le  haut,  de  simples  renflements  de 
cette  raie  brillante,  pour  lesquels  j’admets  deux  centres  d’émission 
d’hydrogène  incandescent. 

Pour  ce  qui  concerne  les  observations  de  M.  Vogel,  j’ai  de  la 
peine  à croire  que  son  spectre  fût  tel  qu’il  est  dessiné  dans  son 
travail,  c’est-à-dire  avec  des  raies  obscures  b qui  d’un  côté  du 
pont  étaient  déplacées  à gauche,  et  de  l’autre  à droite;  cela  me 
semble  un  peu  trop  symétrique.  L’ondulation  et  le  mouvement  de 
l’air,  devant  le  disque  du  Soleil,  doivent  nécessairement  rendre 
peu  net  un  pareil  spectre,  de  si  petite  hauteur;  tout  ce  que  je 
conclus  de  ce  dessin,  c’est  la  présence  de  la  vapeur  incandescente 
du  magnésium,  qui  donne  des  raies  brillantes  dilatées  à droite  et 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  115 

à gauche,  à côté  desquelles,  tout  comme  chez  M.  Lockyer , s’aper- 
çoivent encore  les  raies  obscures,  courbées  de  dedans  en  dehors. 

Comment  il  serait  maintenant  possible , dans  le  cas  d’un  dépla- 
cement éventuel  des  raies,  d’en  déduire  sans  aucune  peine,  con- 
formément à la  théorie  de  Doppler,  la  vitesse  avec  laquelle  les 
gaz  sont  émis,  c’est  ce  que  je  ne  comprends  guère.  En  effet,  les 
parties  de  ces  gaz  qui  sont  les  plus  éloignées  du  Soleil,  et  par 
conséquent  les  plus  rapprochées  de  nous , n’ont  certainement  plus 
de  vitesse  ascendante , mais  probablement , à la  place , une  vitesse 
latérale  ; en  outre , leur  température  ne  peut  pas  différer  beaucoup 
de  celle  de  l’atmosphère  lumineuse  ou  absorbante  qui  les  entoure 
immédiatement.  La  vitesse  réelle,  supposé  qu’on  pût  la  déduire 
du  déplacement  des  raies,  devrait  donc  être  trouvée  par  l’inté- 
gration d’une  fonction  du  pouvoir  lumineux  et  de  la  vitesse  d’as- 
cension des  couches  gazeuses;  or  cela  ne  laisserait  pas  d’offrir 
des  difficultés. 

Mais  d’ailleurs,  et  en  laissant  cette  question  de  côté,  je  crois 
pouvoir  donner  une  explication  beaucoup  plus  simple  des  deux 
dessins  cités.  Elle  est  fondée'  sur  la  circonstance  que,  si  le  plan 
d’incidence  et  de  réfraction  d’un  rayon  lumineux  n’est  plus  per- 
pendiculaire à l’arête  réfringente  du  prisme , l’angle  réfringent  est 
ou  plus  petit  ou  plus  grand  que  l’angle  caractéristique  du  prisme  ; 
je\appellerai  en  outre  que,  par  exemple,  pour  un  prisme  de  flint 
pesant,  d’un  angle  réfringent  de  60°,  chaque  changement  dans 
cet  angle  se  traduit  par  un  changement  d’une  valeur  à peu  près 
double  dans  la  déflexion  minima. 

Donnons  donc  au  collimateur,  pour  simplifier,  une  lentille  cylin- 
drique ; s’il  arrive  alors  que  la  source  lumineuse  perde  justement 
la  pièce  qui  se  trouve  dans  l’axe  du  collimateur,  la  partie  du 
spectre , qui  à travers  la  lunette  est  encore  vue  à la  place  de  la 
pièce  supprimée,  sera  certainement  produite  par  dé  la  lumière 
diffuse  provenant  des  portions  conservées  de  la  source,  situées 
plus  haut  et  plus  bas,  laquelle  lumière  aura  nécessairement  tra- 
versé les  prismes  suivant  d’autres  plans  de  réfraction  et  avec  un 
autre  angle  réfringent;  les  raies  que  cette  lumière  fournit  encore 

8* 


116 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


en  ce  point  du  spectre  seront  alors  déplacées  à droite  ou  à gauche , 
selon  que  T angle  réfringent  idéal  résultant  est  devenu  plus  grand 
ou  plus  petit.  Avec  un  assemblage  de  cinq  prismes , combinés  en 
un  spectromètre  ordinaire  ou  en  un  spectromètre  à vision  directe , 
cette  petite  déviation  peut  très  facilement  prendre  par  sommation 
une  valeur  appréciable , tout  aussi  bien  que  celle  qui  résulte  d'un 
déplacement  de  la  source  à droite  ou  à gauche.  Avec  un  seul 
prisme , il  serait  évidemment  impossible  de  fournir  encore  un  rayon 
réfracté  coïncidant  avec  Taxe. 

Les  incurvations  des  raies  d'absorption  au  devant  d’une  émission 
gazeuse,  qui  seules  sont  ici  en  question,  sont  alors  dues  à ce 
que  la  lumière  qui  les  fournit  doit  provenir  des  parties  du  disque 
solaire  situées  plus  haut  ou  plus  bas.  Quant  aux  raies  brillantes , 
d'après  les  dessins,  je  ne  puis  pas  y voir  des  incurvations , mais 
seulement  une  dilatation  simultanée  à droite  et  à gauche  ; or  cette 
dilatation  ne  donne  lieu  à aucune  difficulté,  puisque  l'intensité  supé- 
rieure et  la  nature  de  la  source  suffisent  à l'expliquer. 

Plus  on  emploie  de  prismes , plus  devient  grande  la  complication 
qui  résulte  de  la  suppression  d'une  partie  de  la  source.  Un  pont 
de  vapeur  incandescente  de  magnésium  produit  un  effet  équivalent 
à l'extinction  partielle,  en  cet  endroit,  de  la  lumière  solaire 
ordinaire.  Comme  on  l'a  vu , les  déviations  observées  par  M.  Loc- 
kyer  concernent  ici  de  nouveau  la  raie  F,  ainsi  toujours. des 
rayons  très  réfrangibles , pour  lesquels,  en  outre,  l'achromatisme 
laisse  beaucoup  à désirer.  Les  déviations  trouvées  par  M.  Vogel 
ont  rapport  aux  raies  b de  Fraunhofer. 

51.  J’aurais  beaucoup  désiré  voir  moi-même  les  appareils 
employés,  pour  pouvoir  mieux  juger  du  fondement  de  mon  inter- 
prétation des  phénomènes;  avec  cette  connaissance  et  celle  des 
journaux  d’observation,  on  pourrait  décider  s’il  y a lieu  de  soup- 
çonner des  causes  constantes,  qui,  p.  e.  pour  toute  une  soirée, 
auraient  simulé  une  même  direction  pour  le  mouvement  des  étoiles 
observées. 

En  général , on  doit  considérer  que  la  raréfaction  des  gaz  incan- 
descents a une  influence  très  appréciable  sur  la  largeur  des  raies , 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  117 

surtout  dans  la  partie  la  plus  réfrangible  du  spectre  ; cela  indique 
que,  dans  certains  cas,  il  y a émission  de  vibrations  supplémen- 
taires, dont  la  longueur  d’onde  s’écarte  un  peu  de  la  longueur 
normale.  De  la  même  manière , un  gaz  dont  la  densité  est  modifiée 
absorbera  encore  des  vibrations  d’une  longueur  d’onde  un  peu 
difiérente.  Un  allongement  du  chemin  de  la  lumière  à travers 
l’atmosphère  du  corps  céleste,  et  aussi  à travers  la  nôtre,  peut 
donner  lieu  à un  élargissement  unilatéral  des  raies  d’absorption 
et  à un  déplacement  de  leur  milieu  ^ ; on  n’a  qu’à  se  rappeler 
la  nature  de  l’élargissement  des  raies  atmosphériques  du  spectre 
solaire  vers  le  coucher  du  Soleil.  En  outre , le  point  le  plus  obscur 
d’une  raie  nébuleuse  d’absorption  est  très  difficile  à calculer  ; il 
est  fonction  de  la  distribution  de  la  lumière  dans  cette  région  du 
spectre  et  de  l’absorption. 

La  seule  chose  que  je  relèverai  encore,  c’est  que  tous  ces  savants 
doivent  admettre  que  la  longueur  d’onde  de  la  vibration  absorbée 
varie,  aussi  suivant  la  loi  de  Doppler,  avec  la  vitesse  de  rap- 
prochement ou  d’éloignement  de  l’atmosphère  absorbante,  et  que 
par  là  ils  se  créent  des  difficultés  inextricables  dès  que  la  direction 
du  rayon  diffère  de  la  direction  du  mouvement  de  l’atmosphère. 

52.  Je  n’ai  pas  encore  parlé  de  l’influence  que  les  changements 
de  température  exercent  sur  la  réfraction.  A raison  d’une  remarque 
de  M.  Vogel  ^) , je  rappellerai  ici  qu’il  résulte  de  mes  mesures  ^), 
qu’avec  un  prisme  de  flint  pesant,  soit  de  Merz  soit  de  Hofmann , 
d’un  angle  réfringent  de  60°,  l’indice  de  réfraction  augmente  de 
une  à deux  unités  de  la  cinquième  décimale  pour  chaque  degré 
dont  la  température  s’élève  sur  l’échelle  centigrade  ; que  pour  une 
espèce  de  crown  de  Merz  cet  indice  croît  d’une  demi-unité  de 
cette  même  décimale , et  que  pour  un  autre  crown  de  Merz , ainsi 
que  pour  un  crown  de  Steinheil,  il  décroît  d’environ  une  demi- 
unité.  Avec  un  ou  plusieurs  prismes  du  flint  en  question , une  raie 
donnée  avancera  donc  vers  le  violet  quand  la  température  s’élève , 

O Voyez.  Vogel,  1.  c. , p.  35,  la  note,  et  Huggins,  1.  c.,  p.  147. 

O 1.  c.,  p.  42. 

*)  Archives  du  Musée  Teyler , Vol.  I,  p.  225,  et  Vol.  II,  p.  189  et  192 — 198. 


118  V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 

et  avec  un  spectromètre  a vision  directe,  composé  de  prismes 
alternatifs  de  flint  et  de  crown,  la  chance  d’un  pareil  déplace- 
ment sera  encore  plus  grande,  si  Ton  suppose  que  le  crown  soit 
de  la  seconde  espèce.  Postérieurement,  M.  Blaserna  a aussi 
déterminé  pour  du  flint-glass  cette  variation  de  l’indice  avec  la 
température.  Par  une  singulière  méprise,  toutefois,  il  dit  que 
l’indice  décroît  quand  la  température  s’élève,  tandis  qu’il  a cer- 
tainement voulu  énoncer , conformément  au  résultat  de  mes  propres 
observations,  que  l’indice  et  la  température  croissent  ensemble. 

Considérons  maintenant  les  résultats  où,  par  le  déplacement 
des  raies,  la  rotation  du  Soleil  serait  mise,  dit-on,  en  évidence. 
En  tant  qu’il  y était  question' de  mesures,  ces  résultats  ont  été 
obtenus  avec  un  spectromètre  ordinaire  à vision  directe,  composé 
de  cinq  prismes.  Le  spectromètre  était  dirigé  sur  le  bord  occi- 
dental du  Soleil,  et  la  raie  F amenée  en  coïncidence  avec  une 
pointe  d’acier  placée  au  foyer  de  l’oculaire  ; le  Soleil  glissait  devant 
le  spectromètre,  par  l’effet  du  mouvement  diurne,  et  lorsque  son 
bord  oriental  se  présentait , la  raie  était  vue  déplacée  vers  le  côté 
réfrangible.  Le  changement  de  la  longueur  d’onde  de  F , en  pas- 
sant d’un  des  bords  solaires  à l’autre,  s’élevait  à un  peu  plus  de 
un  cent-millionième  de  millimètre,  valeur  d’où  l’on  déduisait  la 
vitesse  de  rotation  du  Soleil,  qui  toujours  fut  encore  trouvée  trop 
grande.  Si  je  comprends  bien  ce  dont  il  s’agit , une  augmentation 
de  température  de  0°,1  C de  mon  prisme  pesant  suffirait  déjà  à 
produire  le  déplacement  de  la  raie  .vers  l’extrémité  réfrangible , 
tel  qu’il  a été  observé.  Le  diamètre  du  Soleil  a besoin  de  quatre 
minutes  pour  passer  devant  le  spectromètre  ; or  il  est  très  possible 
que  dans  ces  quatre  minutes  la  température  de  l’appareil  s’élève 
légèrement,  d’autant  plus  que  cette  élévation  peut  être  occasionnée 
non-seulement  par  le  rayonnement  direct,  mais  aussi  et  surtout 
par  le  contact  d’un  air  échauffé.  Si  au  voisinage  du  pôle  nord  ou 
sud  du  Soleil  on  n’a  pas  observé  de  déplacement  de  la  raie , cela 
s’explique  par  la  durée  beaucoup  plus  courte  qui  s’est  écoulée 

*)  Pogg.  Annalen,  B.  CXLIII,  p.  655.  1871. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  119 

entre  le  passage  des  deux  bords.  Si , en  ramenant  le  spectromètre 
du  bord  oriental  au  bord  occidental,  on  a constaté  de  nouveau 
une  déviation  plus  faible,  on  peut  très  bien  en  trouver  la  raison 
dans  un  abaissement  de  température,  si  Ton  suppose  que,  par 
le  mouvement  rapide  imprimé  à la  lunette,  Tair  échauffé  à Tin- 
térieur  du  spectromètre  a été  remplacé  pâr  de  l’air  plus  froid.  Je 
présume  aussi  que  les  évaluations  ou  mesures  proprement  dites 
ont  eu  lieu  seulement  dans  le  passage  graduel  du  bord  occidental 
au  bord  oriental.  Quant  aux  dérangements  qu’un  assemblage  de 
prismes  peut  subir  par  une  petite  variation  de  température,  il 
est  impossible  de  rien  en  dire.  Le  plus  simple  est  d’exécuter  avec 
son  spectromètre  une  série  de  mesures  sur  une  autre  source  lumi- 
neuse , par  exemple  un  tube  à hydrogène  de  Geissler , à des  tem- 
pératures différentes,  mais  restées  longtemps  constantes,  de  l’air 
ambiant;  lorsque,  comme  c’est  ici  le  cas,  il  ne  s’agit  que  d’une 
différence  de  température  de  5°  C.  par  exemple,  la  condition  de 
constance  n’est  pas  difficile  à remplir. 

Comme  en  beaucoup  d’autres  circonstances  analogues,  j’ai  dû 
regretter  que  l’on  n’ait  pas  publié,  dans  sa  simplicité  primitive, 
le  journal  des  observations  ; une  pareille  publication  est  ordinaire- 
ment beaucoup  plus  instructive  que  le  résumé  fait  par  l’observa- 
teur, qui  se  place  presque  toujours  à un  point  de  vue  plus  ou 
moins  exclusif  et  est  si  facilement  entraîné  à séparer  d’une  manière 
arbitraire  le  bon  grain  et  l’ivraie. 

53.  Pour  ce  qui  regarde  le  spectroscope  à réversion  de  M. 
Zollner  ^),  je  crois  que  provisoirement  je  puis  me  dispenser  d’en 
parler , et  attendre  qu’il  ait  fourni  quelques  résultats  décisifs.  En 
effet,  on  ne  voudra  sans  doute  pas  faire  passer  comme  tels  les 
/ résultats  obtenus  par  M.  Vogel  dans  les  observations,  mentionnées 
ci-dessus,  sur  les  bords  solaires;  aucune  mesure  n’y  est  indiquée , 
parce  que  l’influence  de  l’élévation  de  température  n’a  pu  être 
évitée  ou  parce  que  l’air  était  trop  agité.  J’espère  qu’avant  de 

Pogg.  Annalen,  1869,  B.  CXXXVIII,  p.  32.  BericMe  über  die  Verhand- 
lungen  der  Kmiglich  Sdchsischen  Gesellschaft  der  Wissenschafien  zu  Lei]}zig , 
1869,  p.  70,  et  1871,  p.  300. 


120 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


produire  à Tappui  des  idées  que  je  combats  de  nouvelles  obser- 
vations faites  au  moyen  de  ce  spectroscope , on  voudra  bien  peser 
avec  soin  toutes  mes  objections;  à mesure  que  la  finesse  de  l’in- 
strument augmente,  des  sources  d’erreur  plus  faibles  doivent  se 
faire  sentir  dans  les  résultats,  et  une  étude  approfondie  de  l’in- 
fluence de  ces  erreurs  pourra  épargner  bien  des  peines. 

Quant  à moi,  lors  même  qu’on  parviendrait  à obtenir  avec  ce 
spectroscope  des  résultats  positifs  de  mesures,  je  suis  pleinement 
convaincu  que  ceux-ci  n’auront  aucune  valeur  démonstrative,  en 
ce  sens  qu’ils  seront  uniquement  dus  à des  causes  analogues  à 
celles  qus  j’ai  déjà  signalées,  causes  qui  seront  restées  inaperçues 
des  observateurs  ou  dont  on  n’aura  pas  tenu  compte. 

Dès  à présent  je  veux  faire  remarquer  que , même  dans  ce  cas , . 
où  on  n’emploie  pas  de  source  de  comparaison  au  moment  de 
l’observation,  une  pareille  source  n’en  a pas  moins  dû  être  mise 
en  œuvre  à un  moment  antérieur,  par  exemple,  pour  comparer 
la  position  du  micromètre  du  spectroscope  à réversion.  Tout  ce  que 
j’ai  dit  concernant  l’influence  de  l’angle  des  cônes  de  rayons  directs, 
qui  sont  projetés  sur  la  lentille  par  la  source  de  comparaison  et 
par  l’image  de  l’étoile,  trouve  donc  encore  ici  son  application. 

' Seulement , avec  le  spectroscope  à réversion  de  la  construction 
primitive , à deux  systèmes  de  prismes , on  est  atfranchi  des  con- 
séquences immédiates  d’un  changement  de  position  de  la  source; 
mais  pour  cela  on  ne  l’est  pas  encore  du  ejaangement  de  déflexion 
du  rayon  réfracté,  en  tant  que,  par  ce  déplacement  de  l’axe  du 
faisceau  incident,  les  rayons  directs  qui  tombent  sur  le  prisme 
sont  détournés  de  la  direction  exigée  pour  le  minimum  de  déflexion  ; 
en  effet,  soit  que  les  rayons  tombent  à droite  de  cette  direction 
précise , soit  qu’ils  tombent  à gauche,  dans  les  deux  cas  la  déflexion 
du  rayon  réfracté  est  augmentée.  — L’avantage  se  perd  toutefois , 
à mon  avis,  dans  les  dispositions  nouvelles  données  à l’instru- 
ment, avec  un  objectif  à réversion  ou  un  oculaire  à réversion. 

Je  ne  crois  pas  que  les  spectroscopes  à réversion  puissent  être 
recommandés  de  préférence  pour  les  déterminations  qu’on  a en 
vue,  et  les  systèmes  nouveaux  me  paraissent  moins  favorables 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  121 

que  raneien , parce  que  l’avantage  indiqué  leur  fait  défaut  et  parce 
que  les  lentilles  de  correction  les  rendent  plus  compliqués.  La 
raison  qui  me  les  fait  juger,  aussi  bien  dans  leur  forme  première 
que  dans  les  deux  formes  postérieures , peu  propres  à ces  recher- 
ches comparatives,  c’est  qu’on  y doit  supposer  qu’aucun  change- 
ment n’est  survenu  à l’appareil  et  que  la  température  est  restée 
parfaitement  constante  dans  le  cours  des  comparaisons.  Si  l’on 
réfléchit  qu’une  variation  de  température  de  0,1  C.  suffit  proba- 
blement pour  produire  un  changement  appréciable  dans  la  déviation 
des  raies  avec  un  prisme  unique,  on  comprendra  quelles  précau- 
tions la  température  seule  impose  déjà,  et  on  sentira  qu’il  faudrait 
proprement  commencer  par  dresser  une  table  des  positions  pour 
les  raies , mesurées  pour  des  températures  fixes  différentes.  Alors , 
mieux  vaut  encore  employer  un  spectroscope  ordinaire , en  obser- 
vant toutes  les  précautions  requises,  notamment  pour  la  coïncidence 
des  deux  sources  qui  fournissent  simultanément  leurs  spectres.  De 
cette  manière , on  est  tout  à fait  indépendant  des  changements  du 
spectroscope  et  des  variations  de  température  des  prismes  ; tandis 
qu’en  faisant  porter  l’observation  d’abord  sur  la  source  de  com- 
paraison et  ensuite  sur  la  source  à comparer,  outre  qu’on  n’échappe 
à aucune  des  précautions  ordinaires , on  reste  exposé  à toutes  les 
conséquences  du  moindre  petit  dérangement  dans  l’appareil  ou^ 
de  la  plus  légère  modification  des  prismes. 

54.  Daüs  l’intéressant  ouvrage  que  M.  Secchi  a publié  sur 
le  Soleil,  on  retrouve  les  dessins  de  raies  déplacées  ou  courbées, 
d’après  M.  Lockyer,  ainsi  que  d’autres  empruntés  à M.  Young. 
On  y trouve  aussi , de  nouveau , la  même  confiance  illimitée  dans 
le  raisonnement  de  Doppler , regardé  comme  applicable  à la  couleur 
et  à la  réfraction  du  rayon  ; le  même  appel  aux  observations  rela- 
tives au  son,  faites  au  moyen  de  locomotives,  observations  que 
j’ai  exposées  plus  haut  dans  toute  leur  simplicité  et  avec  leur  signi- 
fication réelle;  le  même  saut  périlleux,  de  l’impulsion  accélérée, 
qui  excite  un  ton  plus  aigu  dans  un  ensemble  circonscrit,  à la 


D Sonne,  herausgeg.  von  Schellen,  p.  488 — 501.  1872, 


122 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


durée  raccourcie  de  la  vibration  courante  dans  le  milieu  indéfini , 
qui  changerait  la  déviation  du  rayon  réfracté,  enfin,  pour  cou- 
ronnement, l’observateur  qui,  armé  de  son  spectroscope , déter- 
mine la  composante,  suivant  le  rayon  visuel , du  mouvement  relatif 
de  l’étoile  et  de  la  Terre.  L’écrit  de  M.  Secchi,  traduit  et  aug- 
menté par  M.  Schellen,  est  le  dernier  dont  j’aie  à' m’occuper;  la 
gradation  qui  nous  attendrait  partout  ailleurs  est  maintenant , pour 
ainsi  dire , connue  d’avance  : les  expériences  sur  le  chemin  de  fer 
ou  avec  l’appareil  à anche  de  M.  Mach,  la  couleur  de  la  lumière , 
la  réfraction  du  rayon , le  déplacement  des  raies , et  le  mouvement 
de  l’étoile  après  déduction  de  celui  de  la  Terre  ; le  tout  enveloppé' 
de  nuages  de  plus  en  plus  épais , sous  lesquels  l’idée  et  le  raison- 
nement finissent  par  disparaître. 

Les  causes  spéciales  que  j’ai  signalées,  comme  pouvant  rendre 
compte  des  phénomènes  observés,  sont  aussi  énumérées  en  partie 
par  M.  Schellen,  mais  rejetées  comme  insuffisantes.  Il  ne  dit  rien 
de  l’aberration  de  sphéricité  ni  du  défaut  d’achromatisme  des  len- 
tilles et  de  ses  conséquences,  sur  lesquelles  j’ai  appelé  l’attention; 
rien  de  l’influence  que  peut  avoir  un  petit  changement  de  l’angle 
réfringent  du  spectroscope,  dû  à l’incidence  oblique  des  rayons 
qui  viennent  du  haut  et  du  bas;  pas  un  mot  non  plus  de  la  dila- 
tation physique  que  les  raies  obscures  ou  brillantes,  surtout  les 
plus  réfrangiblcs , éprouvent  en  cas  de  changement  de  densité  du 
gaz  et  d’allongement  du  chemin  que  la  lumière  y parcourt. 

Les  observations  solaires  n’y  donnant  pas  spécialement  lieu, 
l’ouvrage  de  M.  Schellen  ne  s’occupe  pas  de  l’inégalité  entre  les 
distances  au  collimateur  de  l’image  de  l’étoile  et  de  la  source  de 
comparaison,  inégalité  à laquelle  j’ai  attaché  tant  d’importance; 
on  n’y  trouve  non  plus  aucune  mention  du  cas  où  l’image  solaire 
ne  tombe  pas  juste  dans  le  plan  et  sur  l’axe  de  la  fente , défaut 
qui  peut  changer  notablement  l’étendue  angulaire  de  la  source 
lumineuse  et  avoir  une  grande  influence  sur  la  situation  de  Taxe 
et  les  dimensions  du  faisceau  direct  incident  ; enfin  il  n’y  est  pas 
appuyé  suffisamment  sur  la  distribution  inégale  et  la  dispersion 
sporadique  de  la  matière  lumineuse  dans  les  protubérances  et  les 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  123 

ponts,  ni  sur  ses  déplacements  latéraux.  Or,  tous  ces  points  me 
paraissent  non  moins  dignes  d’attention  que  les  autres. 

Je  répète  ici  la  question  que  j’ai  faite  plus  haut:  comment 
faudra-t-il  évaluer  la  vitesse  verticale  des  gaz , vitesse  qui  est  néces- 
sairement nulle  au  point  le  plus  élevé,  où  néanmoins  les  gaz  ne 
peuvent  pas  encore  être  beaucoup  refroidies , puisque  autrement  ils 
absorberaient  de  nouveau  la  lumière  des  couches  inférieures? 

Je  dois  aussi  faire  remarquer  la  circonstance  assez  singulière 
qu’on  ne  trouve  ici  figurée  nulle  part  une  raie  brillante  régulière- 
ment courbée , mais  toujours  des  raies  élargies  à droite  et  à gauche , 
ou  des  raies  diffusées  tout  à fait  irrégulièrement;  ce  sont  seule- 
ment des  raies  d’absorption  que  les  dessins  nous  montrent  affec- 
tées, au  milieu  du  spectre,  d’une  courbure  régulière:  les  figures 
77  de  M.  Koscoe  et  162  de  Schellen  ne  concordent  guère  avec  les 
déplacements  ou  incurvations  symétriques  des  fig.  66  de  M.  Koscoe 
et  161  de  M.  Schellen.  Je  m’étonne  que  cette  différence  n’ait  jamais 
éveillé  de  doutes  au  sujet  de  la_  validité  de  l’explication. 

En  ce  qui  concerne  l’incurvation  ou  le  déplacement  des  raies 
dans  l’étincelle  électrique,  je  renvoie  aux  figures  du  Mémoire  de 
M.  Angstrom  ^ ) , cité  plus  haut  ; elles  nous  apprennent  ce  que  peut 
produire  un  déplacement  latéral  durable  de  la  source  ou  de  la 
matière  lumineuse. 

L’ouvrage  que  j’analyse  présente  à tort  les  résultats  de  M. 
Vogel,  dont  celui-ci  déduit  la  rotation  du  Soleil,  comme  obtenus 
avec  un  spectroscope  à réversion.  M.  Vogel  dit  bien  qu’il  a vu 
avec  cet  appareil  le  déplacement  des  raies,  mais  c’est  avec  son 
spectromètre  ordinaire  à vision  directe  qu’il  l’a  estimé  ; et  lors  de 
cette  estimation , si  je  ne  me  trompe , l’influence  de  réchauffement 
“/n’était  pas  directement  empêchée. 

L’ouvrage  traite  ensuite  des  spectres  des  taches  et  nous  les 
montre,  dans  une  couple  de  dessins,  tels  qu’ils  ont  été  observés 


i)  Poggend.  Annaleti , B.  CXIV,  pl.  IV,  fig.  et  1855, 
*)  1.  c.,  p.  500. 

1.  c.,  p.  589. 


I 


124  V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 

par  M.  Secchi  et  M.  Young;  la  fig.  167,  de  M.  Secchi , fait  voir 
comment,  au-dessus  du  noyau  de  la  tache,  quelques  raies  d’ab- 
sorption étaient  élargies  à droite  et  à gauche;  la  fig.  170,  em- 
pruntée à M.  Young,  représente  la  même  dilatation  des  raies 
obscures  du  sodium , ou  raies  D , avec  un  noyau  brillant , noyau 
qui  est  attribué  à des  vapeurs  incandescentes  de  sodium  flottantes 
au-dessus  de  la  tache.  Si  les  noyaux  des  taches  sont,  spectro- 
scopiquement  parlant,  des  ponts  obscurs,  le  spectre  que  nous 
voyons  devant  la  tache  doit  bien  être  formé  par  de  la  lumière 
partie  de  droite  et  de  gauche,  d’en  haut  et  d’en  bas,  et  sortant 
du  spectromètre  dans  la  même  direction  que  si  elle  venait  de  la 
tache  ; la  dilatation  de  quelques  raies  d’absorption  aux  deux  côtés 
n’aurait  alors,  comme  je  l’ai  montré  ci-dessus,  rien  d’extraordi- 
naire ; quant  au  noyau  brillant  des  raies , il  peut  très  bien  provenir 
de  vapeurs  incandescentes  de  sodium,  qui,  elles,  se  trouveraient 
précisément  au-dessus  de  la  tache.  Si  cette  explication  est  ad- 
missible ici , elle  s’applique  avec  le  même  droit  aux  ponts  brillants 
de  M.  Vogel.  La  seconde  figure  diffère  toutefois  notablement  de 
la  représentation  de  M.  Vogel  ^),  dont  j’ai  parlé  ci-dessus,  ainsi 
que  du  dessin  de  M.  Lockyer  ^),  pris  au-dessus  et  au  voisinage 
d’une  protubérance. 

Pour  ce  dernier,  il  vaut  donc  mieux  s’en  tenir  à l’explication 
qui  s’offre  le  plus  naturellement.  L’hydrogène  en  voie  de  refroi- 
dissement, je  me  le  figure  s’écoulant  du  côté  du  rouge,  où  il  finit 
par  être  suffisamment  refroidi  pour  exercer  de  nouveau  une  action 
absorbante  sur  la  lumière  émise  derrière  lui.  Par  ce  déplacement 
de  la  source  d’où  provient  la  raie  d’absorption  F,  cette  raie  sera 
elle-même  déplacée  vers  le  rouge.  La  forme  et  la  mobilité  des 
protubérances  rendent  un  pareil  écoulement  très  admissible.  Le 
dessin  où  M.  Lockyer  représente  des  raies  brillantes  déplacées 
se  concilie  parfaitement  avec  cette  manière  de  voir  ; ici , c’est  l’hy- 


ï)  Beobachtungen  zu  Bothkamp,  p.  40. 
*)  Schellen,  fig.  158.  Roscoe,  fig.  76. 
3)  Roscoe,  fig.  77. 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS;  ETC.  125 

drogène  encore  lumineux , là,  Thydrogène  déjà  absorbant  qui  s’est 
écoulé.  Il  me  semble  que  cette  explication  n’a  rien  que  de  plausible  ‘ ). 

§ XIII. 

55.  Lorsque  le  mouvement  de  la  source  lumineuse  et  de  l’at- 
mospbère  absorbante  coïncide  en  direction  avec  la  ligne  visuelle , 
on  peut  encore,  à l’aide  de  certaines  conditions  et  d’bypotbèses 
singulières,  se  tirer  d’affaire  avec  les  raisonnements  de  Doppler 
et  de  ses  successeurs.  Doppler  doit  admettre,  dans  ce  cas,  que 
l’absorption  est  réglée  par  le  nombre  des  poussées  d’onde  qui, 
en  un  temps  déterminé,  frappent  la  vapeur  interposée;  à cette 
condition,  la  lumière  jaune,  par  exemple,  émise  à la  surface  du 
Soleil  par  la  vapeur  incandescente  du  sodium,  continuera  à être 
interceptée  par  la  vapeur  sodique  plus  froide  placée  sur  son  trajet. 
Quant  à ceux  qui  croient  la  durée  de  vibration  et  la  longueur 
d’onde  changées  par  le  mouvement  de  la  source , ils  sont  obligés 
de  faire  absorber  par  l’atmospbère  froide,  à raison  de  son  mou- 
vement, une  vibration  d’une  durée  changée  dans  le  même  rapport , 
et  de  restituer  pour  ainsi  dire  à la  vibration  changée  sa  durée  et 
sa  longueur  d’onde  normales,  avant  de  la  transmettre  à la  vapeur 
froide.  Comment  ils  justifient  cette  hypothèse,  c’est  affaire  à eux; 
mais  s’ils  ne  s’y  résignent  pas , et  s’ils  laissent  la  vapeur  en  mou- 
vement absorber  une  vibration  de  la  même  longueur  d’onde  que  dans 
l’état  de  repos , ils  sont  amenés  nécessairement  à cette  conclusion 
étrange,  que  la  vapeur  refroidie  du  sodium,  lorsqu’elle  est  en 
mouvement,  livre  passage  à la  lumière  jaune  de  la  vapeur  sodique 
incandescente  ^). 

Pour  l’opinion  que  je  soutiens,  il  est  tout  à fait  indifférent  que 
le  mouvement  de  la  source  et  de  son  atmosphère  ait  lieu  dans 
telle  ou  telle  direction  par  rapport  à la  ligne  visuelle  ; car , dans 

*)  Le  grand  ouvrage  de  M.  Lockyer,  Contributions  to  solar  physics , London, 
1874,  ne  m’est  arrivé  qu’après  la  rédaction  de  mon  mémoire;  autrement  j’aurais 
indiqué  les  dessins  dans  cet  ouvrage  même,  où  ils  seront  d'ailleurs  facilement 
retrouvés. 

) Voyez,  Veltman,  Astron.  Nachr.,  B.  LXXV,  p.  155. 


126  V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSE.TÉ 

toutes  les  directions  autour  de  la  source;  on  a,  d’après  cette 
opinion,  la  même  période  et  la  même  longueur  d’onde  pour  la 
vibration  courante,  et  la  même  communication  de  celle-ci,  peut- 
être  sous  forme  de  vibration  fixe,  à l’éther  en  repos  relatif  et 
de  densité  normale,  qui  est  contenu  dans  la  vapeur. 

En  adoptant  au  contraire  les  vues  de  M.  von  Ettingshausen  et 
de  M.  Petzval,  on  est  assailli  de  difficultés,  ainsi  que  je  l’ai  déjà 
fait  voir  à l’art.  37,  dès  que,  avec  une  source  consistant  simple- 
ment en  un  point  abstrait  animé  de  vibrations  fixes , on  veut  tirer 
des  impulsions  différentielles  une  vibration  courante  convenable- 
ment raccourcie  ou  allongée,  pour  une  direction  autre  que  celle 
dans  laquelle  se  meut  la  source.  Si  l’on  veut  maintenir  la  loi  des 
cosinus,  on  ne  peut  laisser  ces  impulsions  se  composer  en  une 
vibration  qu’à  une  distance  infinie;  c’est  aussi  seulement  là  que 
les  surfaces  de  propagation  des  impulsions  à combiner,  si  l’on 
peut  encore  parler  de  surfaces,  deviennent  strictement  parallèles. 
A ces  premières  difficultés,  pour  les  directions  qui  s’écartent  de 
celle  du  mouvement,  l’absorption  vient  en  ajouter  de  nouvelles; 
non-seulement  la  source  doit  être  supposée  à une  distance  infinie , 
mais  il  faut  maintenant  faire  entrer  en  ligne  de  compte,  comme 
mesure  de  la  longueur  d’onde  de  la  lumière  absorbée , et  les  temps 
et  les  distances  des  surfaces  des  phases  correspondantes. 

Doppler  lui-même,  avec  ses  poussées  d’onde,  ne  rencontre  pas 
des  embarras  moindres,  aussitôt  qu’il  s’éloigne  de  la  direction  du 
mouvement;  j’y  ai  déjà  fait  allusion  à l’art  6,  en  faisant  remar- 
quer qu’il  ne  raisonne  que  pour  un  rayon  unique,  et  à l’art  36 
je  suis  entré  à ce  sujet  dans  plus  de  développements.  L’absorp- 
tion , dans  la  direction  oblique , vient  maintenant , pour  lui  aussi, 
aggraver  la  position;  s’il  veut  étendre  à l’atmosphère  absorbante 
ses  considérations  sur  la  rapidité  de  succession  des  pulsations , il 
devra  regarder  le  retard  ou  l’accélération  comme  ayant  une  valeur 
différente  aussi  pour  chaque  direction  du  rayon  émané  d’une  source 
en  repos  ; dans  des  directions  différentes , la  lumière  sortira  alors , 
après  l’absorption,  avec  des  couleurs  différentes. 

56.  Il  semblerait  presque  qu’on  ait  jusqu’ici  évité  à dessein  de 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  127 

parler,  soit  de  toutes  ces  directions  autres  que  celles  du  mouve- 
ment, soit  du  phénomène  de  l’absorption.  On  glisse  sur  la  ques- 
tion, en  se  bornant  à dire:  un  simple  examen  apprend  que  les 
actions,  que  deux  'corps  exercent  Tun  sur  l’autre  par  des  impul- 
sions périodiques  d’une  vitesse  finie  de  propagation,  doivent  être 
modifiées  par  un  changement  de  la  distance  entre  ces  deux  corps. 
Cette  assertion  est  évidemment  fondée  sur  la  considération  super- 
ficielle des  phénomènes  mécaniques  complexes  qui  se  produisent 
lorsque  les  ondulations  de  l’eau,  ou  les  vibrations  de  l’air,  viennent 
frapper  un  corps  placé  sur  leur  trajet;  mais  quand  il  s’agit  des 
vibrations  élémentaires  de  la  lumière  dans  l’éther  indéfini,  je  ne 
vois  pas  bien  ce  que  nous  avons  à faire  avec  une  impulsion  pé- 
riodique d’une  vitesse  finie  de  propagation,  ni  ce  que  devient  la 
théorie  des  surfaces  d’ondes  quand  nous  substituons  aux  vibrations 
des  impulsions  périodiques.  On  se  trompe  indubitablement  si  l’on 
croit  avoir  prouvé,  de  cette  manière,  que  la  direction  du  rayon 
réfracté  est  dépendante,  suivant  la  loi  voulue,  du  mouvement 
relatif  de  la  source  lumineuse  et  du  prisme. 

A la  proposition  énoncée  j’oppose  celle-ci:  un  examen  attentif 
apprend  V que  dans  un  milieu  élastique  indéfini  aucune  impulsion 
ou  choc  moléculaire,  aucune  phase,  ne  peut  être  transmise  comme 
telle,  mais  seulement  comme  partie  intégrante  d’une  vibration 
moléculaire  qui  émane  d’un  point  fixe , ou  — ce  qui  se  rapproche 
peut-être  davantage  de  ce  qu’on  a en  vue  — comme  poussée  d’onde 
ou  phénomène  sommatoire  des  vibrations  élémentaires  de  milliers 
de  molécules;  2®  qu’en  supposant  même  que  les  impulsions  diffé- 
rentielles, les  phases,  d’une  source  animée  d’une  vibration  fixe 
et  d’un  mouvement  de  translation,  puissent  cheminer  isolément 
'd’une  façon  stable,  leur  recombinaison  en  une  vibration  allongée 
ou  raccourcie  se  heurte  à des  difficultés  insurmontables  aussitôt 
qu’on  s’écarte  tant  soit  peu  de  la  direction  du  mouvement  de  la 
source;  et  3®  que  l’absorption,  par  une  atmosphère  interposée, 
ajoute  des  difficultés  encore  plus  graves  à celles  que  cette  théorie 
des  pulsations  rencontre  déjà  en  elle- même. 

Si  je  dois  suivre  le  cours  d’idées  de  Doppler  et  de  ses  parti- 


128 


V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETÉ 


sans , au  moindre  écart  entre  le  rayon  visuel  et  la  direction  du 
mouvement,  je  ne  sais  plus  ce  que  deviennent  la  durée  de  vibra-  ■ 

tion  -et  la  surface  d’onde  de  la  vibration  courante  , qni  déterminent  ^ 

la- réfraction  du  rayon  et  la  direction  de  Tobjet.  Je  ne  sais  plus 
ce  qu’absorbe  une  masse  de  vapeurs  : des  pulsations  et  des  déplace- 
ments instantanés  ou  élémentaires,  ou  bien  une  vibration  que  je  | 

ne  puis  laisser  se  former  ? Je  ne  sais  pas  davantage  sur  quoi  porte  ? 

la  réfraction  : sur  ces  vibrations  courantes  problématiques , accélé-  j 

rées  ou  retardées,  des  molécules  de  l’éther,  ou  sur  ces  impulsions  ^ 

différentielles  rapprochées  ou  écartées  l’une  de  l’autre?  S’il  faut  j 

s’en  tenir  à ces  dernières , il  ne  pourra  encore  être  question  d’un  J 

changement  de  la  direction  du  rayon  réfracté,  aussi  longtemps  | 

qu’on  n’aura  pas  fourni  la  preuve  mathématique  que  la  rapidité 
de  leur  succession  à la  surface  limite  ajustement  l’influence  voulue  , 
sur  leur  vitesse  de  propagation  dans  le  prisme  réfringent.  j 

Non,  dussé-je  être  seul  de  mon  avis,  je  ne  crois  pas  qu’on  ‘ 

puisse  passer  si  légèrement  sur  toutes  les  difficultés  énumérées,  | 

pour  donner  d’un  phénomène  aisément  explicable  une  interpréta-  | 
tion  arbitraire , ériger  ensuite  celle-ci  en  loi  naturelle  inattaquable , | 

et  finalement  en  déduire  les  conséquences  les  plus  importantes 
concernant  les  mouvements  des  corps  célestes. 

57.  Tout  ce  que  je  viens  de  dire  au  sujet  de  la  communication 
et  de  la  propagation  des  vibrations  lumineuses  s’applique  aussi 
parfaitement  aux  vibrations  du  son.  Ce  ne  sont  pas  des  phases  i 
indépendantes  qui  se  transmettent  en  vertu  d’une  force  occulte; 
ce  sont  des  vibrations,  de  durée  inaltérée,  qui  se  communiquent 
de  molécule  en  molécule.  Lorsque  le  rayon  d’action  directe  de  la 
matière  vibrante  ou  des  molécules  de  l’air  a une  valeur  finie , — i 
et  que  la  source  vibratoire  primaire  possède  des  dimensions  sen-  ^ 
sibles,  — cette  communication  et  cette  propagation  ont  très  certaine- 
ment lieu , en  dépit  du  mouvement  progressif  de  la  source  ; mais  : 
on  peut  se  figurer  ce  mouvement  assez  rapide  pour  qu’une  pareille 
communication  ne  puisse  plus  s’effectuer.  Je  fais  ici  entièrement  ab- 
straction de  la  question  de  savoir  si  la  trajectoire  de  la  vibration  trans-  ? 

mise  rentre  en  elle-même , ou  bien  si , par  suite  de  l’entraînement  I 


DE  LA  PROPOSITION  QUE  LA  REFRACTION  DES  RAYONS,  ETC.  129 

partiel  de  Tair,  ses  molécules  décrivent  des  courbes  plus  ou  moins 
analogues  à celles  qui  ont  été  remarquées , pour  les  molécules  de 
l’eau,  par  les  frères  Weber  ^). 

La  théorie  dite  ennoblie , à laquelle  s’en  tenait  M.  von  Ettings- 
hausen,  n’avait  pu  satisfaire  M.  Petzval,  à cause  qu’il  n’y  était 
pas  tenu  convenablement  compte  de  l’entraînement  du  milieu 
ambiant  par  la  source  vibrante  ^).  Moi,  je  rejette  cette  théorie 
pour  une  raison  différente  et  qui  touche  plus  au  fond  des  choses , 
savoir  : qu’une  impulsion  moléculaire , une  phase  isolée , ne  saurait 
se  propager  sans  se  résoudre  en  vibrations.  Jé  m’estimerais  heureux 
si  les  considérations,  que  j’ai  émises  à ce  sujet,  pouvaient  faire 
entrer  le  problème  dans  une  phase  nouvelle,  qui  aboutira,  j’en 
ai  la  conviction,  au  triomphe  définitif  de  la  conservation  de  la 
durée  de  vibration. 

58.  Avant  toute  discussion  ultérieure , je  mets  les  partisans  de 
la  théorie  de  Doppler,  n’importe  sous  laquelle  de  ses  deux  formes , 
en  demeure  de  nous  expliquer  clairement,  non-seulement  pour  le 
rayon  lumineux  dont  la  direction  coïncide  .avec  le  mouvement  de 
la  source,  mais  pour  toutes  les  directions  quelconques,  comment 
nous  devons  concevoir  le  phénomène  de  l’absorption , et  comment 
la  direction  du  rayon  réfracté  est  changée  par  le  mouvement  de 
la  source;  pour  cette  dernière  question,  je  les  invite  à traiter 
spécialement  le  cas  où  le  prisme  est  placé  très  près  de  la  source , 
qui  sera , par  exemple , une  étincelle  électrique.  Lorsqu’ils  auront 
satisfait  à cette  juste  exigence,  il  restera  encore  à prouver  qu’une 
impulsion  isolée  et  indépendante  peut  se  propager  comme  telle 
dans  un  milieu  élastique  indéfini , et  à désigner  les  points  de  l’es- 
pace , d’où  partent  soit  les  impulsions  périodiques , soit  les  vibra- 
tions courantes  successives,  qui  parviennent  à l’œil. 

Pour  la  réfraction , je  veux  bien  indiquer  la  voie  aux  partisans 
du  changement  de  la  durée  de  vibration.  Prenant  les  impulsions 
différentielles,  que  la  molécule  lumineuse  émet  des  divers  points 


»)  Wellenlehre,  Leipzig,  1825,  §'101,  fig.  22. 

Voir  son  second  Mémoire,  p 582 — 583 , et  la  fin  de  son  troisième  Mémoire. 
Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  9 


130  V.  s.  M.  VAN  DER  WILLIGEN.  SUR  LA  FAUSSETE,  ETC. 

de  son  trajet,  au  moment  où  elles  arrivent,  en  succession  plus 
rapide,  aux  dernières  molécules  de  Téther  libre,  à celles  qui  joig- 
nent le  prisme , ils  devront  les  y réunir  en  un  tout , en  une  vibration  , 
d’une  durée  modifiée.  Ceci  est  de  nouveau  une  conception  em- 
pruntée à l’excitation  de  vibrations  sonores  fixes , dans  un  ensemble 
circonscrit,  par  des  pulsations  venant  du  dehors,  mais  cette  con- 
ception , il  ne  faudra  pas  l’oublier , apporte  avec  elle  ses  conditions 

A ceux  qui  s’appuieraient  sur  des  considérations  analytiques, 
je  dirai  d’avance  que  je  ne  suis  pas  disposé  à identifier  une  im- 
pulsion avec  une  onde  de  petite  longueur  et  sans  dépression,  ni 
à attacher  à un  certain  état  initial  des  conditions  portant  atteinte 
au  caractère  qu’on  a commencé  par  lui  attribuer.  Finalement , j’invite 
la  partie  adverse  à ne  pas  perdre  de  vue  qu’un  amas  de  pierres , 
même  précédé  d’un  signe  d’intégration , n’est  pas  encore  un  édifice. 


Il  n’est  peut-être  pas  hors  de  propos  d’avertir  ici  que  le  Mémoire 
qu’on  vient  de  lire  n’est  pas  une  simple  traduction  de  celui  qui  a 
paru  il  y a quelque  temps  dans  les  Verslagen  en  Mededeelingen 
der  Koninklijke  Akademie  van  Wetenschappen.  J’ai  fait  à mon 
travail  des  additions  et  des  changements  assez  nombreux  pour  que 
sa  forme  présente  puisse  être  considérée  comme  une  édition  nou- 
velle, revue  et  augmentée. 


SUR 


L’ANATOMIE  DES  ASTÉRIDES, 

PAR 

C.  K.  HOFFMANN. 


Les  matériaux  de  ce  travail,  qui  fait  suite  à celui  que  j’ai 
publié  sur  les  Echinides  ont  été  fournis  principalement  par 
V Aster acanthmi  rubens  y si  commun  sur  nos  côtes.  Malheureuse- 
ment, l’occasion  m’a  manqué  d’étudier  sur  les  bords  de  la  Médi- 
terranée d’autres  genres  d’Astérides,  en  particulier  des  Bisériées, 
et  de  les  comparer  avec  les  Quadrisériées , de  sorte  que  tous  les 
détails,  là  où  le  contraire  n’est  pas  expressément  mentionné,  se 
rapportent  à cette  dernière  division.  Les  recherches  ont  été  faites 
en  partie  durant  un  séjour  de  plusieurs  semaines  à Zandvoort, 
station  balnéaire  sur  les  côtes  de  la  mer  du  Nord , près  de  Harlem , 
et  en  partie  sur  des  animaux  envoyés  successivement  à l’état  frais. 


La  Peau  et  ses  appendices. 

L’enveloppe  cutanée  extérieure  des  Astérides  est  recouverte  d’un 
épithélium , dont  la  surface  porte  une  cuticule  fine  mais  bien  dis- 
tincte (PL  I,  fig.  1).  Qà  et  là,  la  cuticule  est  chargée  de  cils 

C.  K.  Hoffmann,  Zur  Anatomie  der  Echinen  und  Spatangen,  dans  Niederl. 
Archiv  f.  Zool.,  t.  I,  1871,  p.  11. 


9* 


132  C.  K.  HOFFMANN.  SUR  L^ANATOMIE  UES  ASTERIDES. 

vibratiles  extrêmement  déliés  et  assez  longs.  A l’état  frais , Tépi- 
thélium  est  très  difficile  à isoler;  l’opération  réussit  au  contraire 
très  bien  après  2 ou  3 jours  de  macération  dans  le  bichromate  de 
potasse  à 3 — 4 pCt.  * On  reconnaît  alors  que  cet  épithélium  se 
compose  de  cellules  cylindriques  très  étroites , lougues  de  0,028 — 
0,036  mm.  (fig.  2).  A la  partie  périphérique  de  ces  cellules  sont 
déposées  des  granulations  pigmentaires  d’une  ténuité  excessive, 
diversement  colorées,  d’où  dérive  la  couleur  propre  de  la  peau. 
Vers  leur  milieu,  les  cellules  présentent  un  renflement,  dans 
lequel  se  trouve  un  noyau  à contours  très  pâles.  Leur  bout 

central  est  ordinairement  di-ou  trichotome.  Dans  les  couches  infé- 

\ 

rieures  on  remarque  quelques  cellules  i’ondes , qui  sont  également 
imprégnées  de  granulations  pigmentaires  très  Anes  (fig.  3).  L’épi- 
thélium à cils  vibratiles  s’étend  sur  tous  les  appendices  de  la  peau , 
tels  que  piquants , branchies  cutanées , pédicellaires , etc.  La  peau 
elle-même  est  formée  de  faisceaux  de  tissu  conjonctif,  onduleux , 
entrecroisés  en  un  lacis  dense,  et  qui  ressemblent  complètement 
à ceux  du  tissu  conjonctif  fibrillaire  des  animaux  supérieurs  (fig.  4). 
Des  éléments  celluleux  n’ont  toutefois  pas  été  rencontrés  entre 
les  fibrilles.  Même  après  le  traitement  par  le  chlorure  d’or  on  n’a 
rien  trouvé  de  semblable.  Quelques  recherches  faites  dans  le 
laboratoire  physiologique  de  Leyde,  grâce  à l’appui  bienveillant 
de  M.  le  professeur  Heynsius , m’ont  appris  que  ce  tissu  ne  donne 
pas  de  colle , et  ne  peut  par  conséquent  être  identifié  avec  le  vrai 
tissu  conjonctif  fibrillaire. 

A l’intérieur,  la  peau  est  tapissée  d’une  membrane  de  tissu 
conjonctif  entremêlé  de  fibres  musculaires,  laquelle  porte  égale- 
ment un  épithélium  vibratile.  C’est  surtout  au  côté  dorsal  que 
les  fibres  musculaires  atteignent  leur  plus  grand  développement. 
On  y trouve,  en  effet,  cinq  faisceaux  musculaires  rayonnants 
assez  forts  (PI.  II,  fig.  216),  qui  naissent  d’un  point  commun, 
au  centre  de  la  face  dorsale,  sur  les  trabécules  de  tissu  conjonctif 
qui  font  saillie  dans  la  cavité  du  corps , et  de  ce  point  s’étendent 
en  divergeant  dans  les  bras.  Au  commencement  de  leur  trajet,  les 
fibres  musculaires  sont  unies  en  faisceaux  assez  serrés , mais  vers 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES.  133 


le  bout  des  bras  elles  se  distribuent  d’une  manière  plus  uniforme 
dans  la  peau  dorsale.  Par  la  contraction  de  ces  faisceaux  muscu- 
laires rayonnants,  les  extrémités  des  bras  peuvent  se  recourber 
en  dessus. 

Sur  toute  l’étendue  des  faces  dorsale  et  latérales,  et  aussi  sur 
la  face  ventrale  au  pourtour  du  sillon  ambulacraire , on  remarque 
un  très  grand  nombre  d’appendices  creux , en  communication  avec 
la  cavité  du  corps,  qu’on  appelle  ordinairement  des  branchies 
cutanées  (PI.  I,  fig.  5).  Ces  branchies  cutanées  sont  des  expan- 
sions de  la  membrane  qui  tapisse  en  dedans  la  peau  générale  du 
corps.  Elles  se  composent  d’une  couche  externe  de  tissu  conjonctif 
et  d’une  couche  interne  de  fibres  musculaii-es  longitudinales,  et 
sont  revêtues  en  dedans  d’un  épithélium  à cils  vibratiles.  Grâce 
aux  fibres  musculaires,  les  branchies  cutanées  peuvent  alternati- 
vement saillir  ou  rentrer,  tandis  que  l’épithélium  vibratile  entre- 
tient un  mouvement  incessant  dans  l’eau  de  mer  qui,  par  la 
cavité  du  corps,  pénètre  à l’intérieur  de  ces  organes. 

Sur  toute  la  surface  du  corps , et  particulièrement  dans  la  région 
du  sillon  ambulacraire,  se  trouvent  des  pédicellaires.  Contraire- 
ment à ce  qui  a lieu  chez  les  Echinides,  les  pédicellaires  des 
Astérides  ne  sont  pas  trivalves,  mais  bivalves,  et,  au  lieu  d’être  portés 
sur  une  tige  musculeuse,  ils  sont  fixés  direetement  sur  la  peau 
extérieure.  Par  suite  de  l’absence  de  la  tige  musculeuse,  leur 
mouvement  doit  être  d’une  autre  nature  que  chez  les  Echinides. 
Vers  la  partie  médiane,  chacune  des  deux  mâchoires  de  la  pince 
présente  un  petit  tubercule  saillant,  servant  à l’insertion  des  fibres 
musculaires  qui  partent  de  la  pièce  basilaire  (fig.  6).  La  signifi- 
cation de  ces  pédicellaires  est , de  même  que  chez  les  Echinides , 
entièrement  inconnue. 

Les  fibres  musculaires  qui  existent  entre  les  plaques  ambula- 
craires  se  laissent  très  difficilement  isoler  à l’était  frais,  et  ordi- 
nairement on  n’en  obtient  que  des  fragments.  La  présence  d’un 
sarcolemme  n’a  jamais  pu  être  constatée. 

Avec  la  lentille  à immersion ^ (Hartnack  ^/jo);  la  substance 
contractile  se  montre  parfaitement  homogène.  Jamais  on  n’a  observé 


134  C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES. 

un  double  système  de  stries  obliques , tel  que  M.  Schwalbe  ‘ ) 
croit  l’avoir  vu  dans  ce  même  genre  Asteracanlhion  (Urasler)  et 
chez  les  Asleriscus.  Après  le  traitement  par  une  dissolution  de 
bichromate  de  potasse  à 3 pCt.,  la  séparation  des  fibres  se  fait 
avec  un  plein  succès.  On  obtient  alors  les  formes  hplaties  et  rami- 
fiées déjà  bien  décrites  par  M.  Schwalbe,  sur  les  côtés  desquelles 
s’insèrent,  par  une  base  triangulaire,  des  fibrilles  déliées  et  pour- 
vues çà  et  là  de  nodosités,  comme  chez  les  Oursins  (fig.  7).  Pas 
plus  que  M.  Schwalbe,  je  n’ai  pu  décider  s’il  s’agit  ici  de  pro- 
duits artificiels  ou  bien  de  formes  naturelles  (fibres  ramifiées  avec 
terminaisons  nerveuses?).  Les  solutions  de  chlorure  d’or  et  d’acide 
osmique  ont  également  laissé  la  question  indécise.  Des  formes 
analogues  ont  aussi  été  décrites  par  M.  Weissmann  dans  la 
paroi  des  vésicules  ambulacraires. 

La  structure  des  parties  calcaires  du  corps  des  Astérides  est 
tout  à fait  la  même  que  chez  les  Echinides. 

.. ^ 

Les  Organes  de  la  digestion. 

En  ce  qui  concerne  leurs  rapports  anatomiques  les  plus  appa- 
rents , les  organes  de  la  digestion  sont  suffisamment  connus  depuis 
les  recherches  de  Tiedemann  et  de  Joh.  Millier  ^).  La  membrane 
buccale  est  formée  d’une  couche  dense  de  tissu  conjonctif  entre- 
croisé de  fibres  musculaires  circulaires , laquelle  couche  est  garnie 
de  cils  vibratiles  sur  les  deux  faces.  Au  centre  de  cette  membrane 
se  trouve  la  bouche , qui  est  ronde , très  contractile , et  se  continue 


*)  G.  Schwalbe,  Ueber  den  feineren  Bau  der  Muskelfasmi  wirhelloser  Thiere , 
dans  M.  Schultze’s  Archiv , t.  V,  1869,  p.  205. 

*)  Weismann  , Zur  Histologie  der  Muskeln,  dans  Zeitschrift  f.  rat.  Medicin, 
t.  XXIII,  1865,  p.  26. 

E.  Tiedemann,  Anatomie  der  Kôhren-Holothurie , des j)omera7igfarb.  Seesterns , 
etc.,  1816,  p.  42. 

'* *)  Joh.  Müller,  Ueber  den  Bau  der  Bchmoderrnen,  dans  Abh.  der  Berliner 
Akademie^  1853,  et  dans  Muller’s  Archiv , 1853. 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTÉRIDES.  135 

sans  limites  déterminées  avec  un  œsophage  court,  qui  conduit 
dans  un  estomac  pourvu  de  5 paires  de  cæcums.  Le  canal  intes- 
tinal tout  entier  est  revêtu  extérieurement  d’une  mince  membrane 
mésentérique  (de  tissu  conjonctif) , chargée  de  cils  vibratiles.  Dans 
l’estomac  on  peut  distinguer  deux  couches  principales , une  couche 
musculeuse  et  une  couche  de  tissu  conjonctif.  La  première  est 
composée  de  fibres  longues  et  très  minces.  Ces  fibres  ne  montrent 
aucune  disposition  régulière,  mais  se  croisent  en  divers  sens. 
Après  quelques  jours  de  traitement  par  une  dissolution  étendue 
de  bichromate  de  potasse , elles  se  laissent  parfaitement  isoler.  La 
couche  de  tissu  Conjonctif  est  très  fortement  plissée  (fig.  7),  et 
peut  être  divisée  à son  tour  en  une  couche  conjonctive  proprement 
dite  et  une  couche  cellulaire. 

La  couche  conjonctive  proprement  dite  est  constituée  par  des 
fibrilles  de  tissu  'conjonctif  onduleuses  et  très  déliées , la  couche 
cellulaire  par  un  réticulum  délicat  (fig.  10),  dans  lequel  sont 
déposés  les  éléments  cellulaires.  Je  n’ai  jamais  réussi,  toutefois, 
à bien  isoler  ces  éléments  cellulaires.  En  dedans,  l’estomac  est 
entièrement  tapissé  d’un  épithélium  vibratile  (fig.  8).  Les  deux 
appendices  creux  et  un  peu  contournés  qui  se  trouvent  sur  la  face 
extérieure  de  l’estomac,  au  centre  de  sa  paroi  supérieure,  et  qui 
ont  déjà  été  décrits  par  Tiedemann  ^),  ont  tout  à fait  la  struc- 
ture de  la  paroi  stomacale.  Leur  contenu  constitue  un  liquide 
jaune,  qui  enveloppe  des  cellules  rondes , granuleuses , en  nombre 
plus  ou  moins  grand.  Les  cæcums  pairs  dont  l’estomac  est 
pourvu,  et  qui  naissent  d’une  tige  commune  (comme  chez  les 
Aster acanthion)  ou  bien  sont  déjà  séparés  dès  l’origine,  se  com- 
posent d’une  membrane  délicate  de  tissu  conjonctif  et  d’un  con- 
tenu celluleux. 

Les  éléments  celluleux  (fig.  9)  ont  un  diamètre  de  0,008 — 0,010 
mm.,  et  sont  les  uns  d’un  aspect  assez  homogène,  les  autres 
remplis  de  globules  brillants , semblables  à des  gouttelettes  hui- 
leuses. L’estomac  et  les  cæcums  sont  fixés  par  de  petits  ligaments 


Tiedemami,  l.  c. 


136  C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES. 

minces  à la  paroi  interne  du  corps.  Ces  petits  ligaments  mésen- 
tériques sont  constitués  également  par  du  tissu  conjonctif  couvert 
de  cils  vibratiles. 

Les  10  ligaments  plats  qui,  naissant  de  la  face  inférieure  de 
l’estomac , se  dirigent  par  paires  dans  les  bras  et  servent  à main- 
tenir l’estomac  dans  sa  position,  sont  composés  de  faisceaux  de 
tissu  conjonctif  entremêlés  de  fibres  musculaires. 

Aussi  bien  chez  V Asteracantliion  rubens  que  chez  V A.  violaceus , 
l’anus  manque,  comme  l’avait  déjà  constaté  Tiedemann  i). 

Par  l’ouverture  buccale  l’œsophage  et  la  partie  antérieure 
(inférieure)  de  l’estomac  sont  susceptibles  dé  se  renverser  au 
dehors , ce  qui  facilite  sans  doute  ’ beaucoup  l’introductiom  des 
matières  alimentaires.  Les  Etoiles  de  mer  sont  très  voraces,  et 
c’est  un  sujet  d’étonnement  de  voir  la  taille  relativement  colossale 
des  animaux  qu’elles  peuvent  engloutir. 


Organes  de  la  génération. 

La  situation  des  10  glandes  sexuelles  des  Astérides  est  suffi- 
samment connue.  Bien  que  Tiedemann  n’ait  pas  trouvé  d’organes 
mâles , on  a pourtant  constaté  postérieurement  que  chez  les  Asté- 
rides, aussi  bien  que  chez  les  Echinidcs,  les  sexes  sont  toujours 
séparés.  Les  organes  mâles  et  femelles  ont  une  structure  complètement 
analogue.  Jusqu’à  préseût  on  n’a  pas  découvert  de  conduits  excré- 
teurs bien  évidents;  plus  loin  nous  dirons  ce  qu’il  y a de  plus 
probable  à cet  égard. 

Les  glandes  sont  formées  de  tubes  en  cul-de-sac,  ramifiés  en 
grappe.  A l’état  de  non- maturité  sexuelle  elles  ne  pénètrent  que 
fort  peu  dans  les  bras,  à l’état  de  maturité  elles  s’y  étendent 
au  contraire  assez  loin.  Sur  nos  côtes , le  moment  de  la  maturité 
sexuelle,  chez  les  Astérides,  tombe  ordinairement  au  printemps 
et  en  automne  ; pendant  les  mois  chauds  de  l’été  je  n’ai  jamais 

^Tiedemann , l.  c.,  p.  46. 

Tiedemann,  l.  c.,  p.  62. 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’ ANATOMIE  DES  ASTERIDES.  137 

rencontré  d’Astérides  à produits  sexuels  mûrs.  Les  tubes  glandu- 
laires sont,  comme  tous  les  organes  internes,  recouverts  de  cils 
vibratiles.  Ces  cils  sont  portés  par  une  membrane  de  tissu  con- 
jonctif, homogène  et  très  délicate.  Vient  ensuite  une  mince  couche 
de  fibres  musculaires  transversales;  puis,  en  dedans,  de  nouveau 
une  couche  homogène  et  délicate,  qui  est  tapissée  d’un  épithélium 
à petites  cellules. 

Les  œufs  mûrs,  qui  sont  assez  grands  et  dont  la  forme  est 
arrondie  ou  en  poire,  se  composent  d’un  vitellus  à grosses  gra- 
nulations et  d’un  noyau  à granulations  fines,  lequel  contient  sou- 
vent 1 — 10  nucléoles.  Le  vitellus  est  en  outre  entouré  d’une 
membrane  homogène , épaisse  de  0,003  mm.  (membrane  vitelline) . 

Les  spermatozoïdes  sont  formés,  comme  chez  les  Echinides, 
d’un  corps  arrondi  très  petit,  et  d’une  queue  capillaire.  Ils  pos- 
sèdent un  mouvement  extrêmement  vif,  qui  peut  persister  pendant 
plus  de  24  heures  après  la  mort. 

De  même  que  chez  les  Echinides  et  les  Holothurides , les  cel- 
lules ovulaires  et  les  cellules  mères  des  spermatozoïdes  se  forment 
aux  dépens  de  l’épithélium  interne  des  follicules  de  la  glande 
sexuelle. 


Le  Système  nerveux  et  les  organes  des  sens. 

Les  premières  données  sur  le  système  nerveux  des  Astérides 
sont  dues  à Tiedemann^).  Chez  Y Astropecten  aurantiacus  <,i\à.QQ,Y\i 
un  vaisseau  orangé , entourant  circulairement  la  bouche  et  envoyant 
, dans  chaque  bras  une  branche,  qui  s’étend,  en  devenant  succes- 
sivement plus  étroite,  jusqu’à  la  pointe  du  bras.  Après  l’enlève- 
ment de  ce  vaisseau,  apparaît  un  second  anneau,  de  couleur 
blanche,  qui  entoure  également  la  bouche  et  émet  un  filament 
blanc  dans  chacun  des  rayons;  c’est  cet  anneau,  avec  les  filaments 
qui  en  naissent,  que  Tiedemann  décrit  comme  le  système  nerveux. 


D Tiedemann,  l.  c.,  p.  62. 


138  C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES. 

Joh.  Millier  1)  regarda  le  vaisseau  orangé  de  Tiedemann  comme 
l’anneau  nerveux , qui  enverrait  dans  les  sillons  ambulacraires  cinq 
branches  plates  et  larges.  Entre  les  fibres  longitudinales  qui  com- 
posent en  grande  partie  ces  cinq  feuilles  molles , se  trouverait  une 
lame  mince,  mais  fibreuse,  semblable  à une  cloison,  qui  serait, 
suivant  Millier,  le  nerf  de  Tiedemann. 

M.  Haeckel  a soumis  le  système  nerveux  à des  recherches 
histologiques  exactes. 

M.  Wilson^)  l’a  étudié  le  premier  sur  des  coupes  transversales. 
De  même  que  ses  prédécesseurs , il  décrit  les  troncs  nerveux  comme 
des  cordons  solides.  M.  Owsjannikow  ^) , au  contraire,  déclare 
que  ces  troncs  sont  des  canaux  creux.  A part  les  cellules  nerveuses 
et  les  fibres  nerveuses,  on  ne  trouve,  d’apres  lui,  aucun  autre 
élément  histologique  dans  le  système  nerveux.  M.  Greeff  décrit 
également , les  nerfs  comme  des  tubes  ou  canaux  s’anastomosant 
continuellement  les  uns  avec  les  autres,  et  dans  la  cavité  desquels 
circule  un  liquide  analogue  au  sang. 

Pour  se  faire  une  bonne  idée  du  système  nerveux , le  mieux 
est  de  pratiquer  des  coupes  transversales  à travers  toute  l’épais- 
seur d’un  bras. 

Les  fig.  11  et  12  représentent  une  pareille  coupe  transversale  ; 
a sont  les  petites  plaques  calcaires  spondyloïdes  du  sillon 
ambulacraire , h le  vaisseau  lymphatique  radial,  cc  les  vésicules 
ambulacraires,  dd  les  cirres  ambulacraires,  e le  tronc  nerveux, 
qui  présente  une  forme  triangulaire.  La  base  de  ce  triangle  est 


i)  Joh.  Müller,  Anatomisclie  Stulicd  über  die  Echmode'nnen,  dans  Müller’s 
ArcJiiv , 1850,  p.  117,  et  Abhandi.  der  K'ôrdgl.  Akad.  der  Wissclienschaften , 
Berlin,  1853,  p.  123. 

Haeckel,  Zeitschrift  f wiss.  Ztologie , t.  X,  1860,  p.  183. 

Henry  S.  Wilson,  The  nervouv  sgstem  of  the  Asteriden,  dans  Transactions 
of  the  Linnean  Society,  1862,  t.  XXIII,  p.  107. 

'*)  Ph.  Owsjannikow,  TJeber  das  Nervensystem  der  Seesterne,  dans  Mélanges 
biologiques  tirés  ■ du  Bulletin  de  V Ac  démie  de  St.  Pétersbourg , 18  Mars  1871. 
Bulletin  de  l'Académie  impériale  des  sciences  de  St.  Pétersbourg , t.  XV,  1870. 

R.  Greeff,  Ueber  den  Bau  i er  Bchinodermen,  dans  Sitzungsbericht  der 
Gesellschaft  zur  Bef  'ôrd.  der  gesammte.i  Naturw.  Marburg , N®.  8 , 1871 , N®  6, 1872 . 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES. 


139 


formée  par  une  lame  solide  de  tissu  conjonctif,  constituant  une 
cloison  longitudinale  g entre  le  canal  lymphatique  radial  et  le 
nerf,  tandis  que  les  côtés  latéraux  sont  formés  par  deux  liga- 
ments plats,  qui  renferment  les  éléments  nerveux  proprement 
dits,  et  qu’on  peut  appeler  les  ^feuillets  nerveux”  h h.  Les  nerfs 
ne  constituent  pas  des  cordons  solides,  mais  au  contraire  des 
canaux  creux.  La  cavité  de  ces  canaux  nerveux  n’est  toute- 
fois pas  simple.  A leur  intérieur,  on  remarque  d’abord  une  lame 
verticale  /,  qui  vers  le  bas  s’insère  au  sommet  du  triangle , tandis 
que  vers  le  haut  elle  se  divise  en  deux  moitiés  latérales.  De  cette 
manière,  la  cavité  simple  du  canal  nerveux  se  trouve  partagée 
en  trois  espaces , dont  deux  plus  petits , égaux  entre  eux  et  placés 
symétriquement,  et  un  plus  grande  situé  sur  la  ligne  médiane. 
Dans  la  cavité  du  canal  nerveux  circule , comme  on  le  verra  plus 
loin , du  liquide  sanguin.  La  lame  verticale , qui  représente , ainsi 
que  Joh.  Millier  l’avait  déjà  reconnu,  le  nerf  de  Tiedemann,  se 
continue  sur  le  disque  buccal , où  elle  forme  également  un  anneau 
pentagonal,  qui  constitue  la  paroi  de  séparation  entre  l’anneau 
oral  sanguin  et  l’anneau  lymphatique.  D’après  M.  Greeff  ^),  le 
tronc  nerveux  radial  ne  serait  pas  traversé  par  trois  mais  par 
quatre  canaux , la  lame  verticale  ne  se  partageant  pas , vers  le  haut , 
en  deux  mais  en  trois  feuillets,  d’où  résulteraient  deux  espaces 
plus  grands,  égaux  entre  eux  et  placés  symétriquement,  et  deux 
espaces  plus  petits. 

Les  feuillets  nerveux , toutefois , ne  se  terminent  pas  aux  deux 
côtés  du  sillon  ambulacraire  et  à la  base  des  cirres.  Si , en  effet , 
on  étudie  avec  soin  de  bonnes  coupes  transversales,  on  constate 
que  ces  feuillets , devenus  graduellement  plus  étroits , se  réfléchis- 
sent , se  continuent  directement  avec  la  peau  des  cirres , et  con- 
stituent celle-ci.  En  réalité,  ils  ne  doivent  être  regardés,  comme 
M.  Greeff^)  l’a  très  justement  fait  remarquer,  que  comme  un 
prolongement  ou  une  expansion  de  la  peau  externe,  à laquelle 
ils  se  lient  directement,  non-seulement  par  l’intermédiaire  des 

O U.  Greeff,  l.  c. , 6,  1872. 

R.  Greeff,  L c.,  N.  O.,  1871. 


140  C.  K.  HOFFMAÎNN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTÉRIDES. 

cirres,  mais  aussi  en  d’autres  points,  dans  les  intervalles  des  cirres. 
La  preuve  de  ce  qui  vient  d’être  avancé  ne  découle  pas  seule- 
ment de  la  structure  des  cirres,  telle  que  nous  la  ferons  connaître 
en  parlant  du  système  lymphatique , mais  aussi  de  la  petite  expé- 
rience que  voici.  Si  l’on  irrite  le  tronc  nerveux  en  un  point  quel- 
conque , les  cirres  placés  au  voisinage  du  point  irrité  se  contractent. 
Si  l’on  irrite  un  des  cirres,  l’effet  produit  est  exactement  le  même. 
Que  l’on  irrite  l’anneau  nerveux  ou  bien  les  troncs  nerveux  radi- 
aux, cela  ne  fait  aucune  différence.  L’influence  de  l’irritation  ne 
s’étend  pas  aux  cirres  situés  à une  distance  plus  grande  du 
point  irrité. 

La  substance  nerveuse  renfermée  dans  les  feuillets  nerveux  se 
continue  aussi,  en  partie,  de  l’autre  côté , sur  la  lame  verticale.  Il 
existe  par  conséquent  une  relation  intime  entre  les  canaux  sanguins  et 
nerveux  5 le  nerf  et  les  vaisseaux  sont  unis  de  manière  à ne  pouvoir 
être  séparés,  le  premier  formant,  pour  ainsi  dire,  la  paroi  des 
seconds.  La  lame  verticale , par  laquelle  la  cavité  du  canal  nerveux 
est  divisée  en  trois  parties,  se  compose  de  tissu  conjonctif  entre- 
mêlé de  fibres  musculaires.  Par  l’action  de  ces  fibres , le  nerf  peut 
être  retiré  plus  profondément  dans  le  sillon  ambulacraire , et  en 
même  temps  il  en  résulte  une  impulsion  pour  le  mouvement  pro- 
gressif du  sang.  Les  faces  externes  de  la  lame  verticale  sont  formées 
de  cellules , qui  par  leurs  caractères  essentiels  ressemblent  à celles 
des  feuillets  nerveux.  M.  Owsjannikow  décrit  la  lame  verticale 
comme  un  ligament  élastique. 

La  structure  histologique  des  troncs  nerveux  radiaux  est  exac- 
tement la  même  que  celle  de  l’anneau  nerveux  ; de  sorte  que  tout 
ce  qui  sera  dit  des  premiers  s’appliquera  aussi  au  second. 

A l’extérieur  les  troncs  nerveux  sont  revêtus  de  cils  vibratiles , 
au-dessous  desquels  se  trouve  une  cuticule  d’environ  0,002 — 0,003 
mm.  d’épaisseur,  et  ensuite  un  très  petit  épithélium  pavimenteux. 
Après  l’épithélium  pavimenteux , vient  la  substance  nerveuse  pro- 
prement dite.  La  structure  histologique  de  cette  substance  est  très 


) Owsjamiikow , l.  c. 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  OES  ASTÉRIDES.  141 


difficile  à étudier  à l’état  frais,  de  sorte  qu’on  est  obligé  d’avoir 
recours  aux  réactifs. 

Celui  qui  m’a  réussi  le  mieux  est  l’acide  osmique,  à 0,1  pour 
cent.  J’arrachai  d’abord  les  cirres  ambulacraires  d’un  des  bras, 
détachai  ensuite  par  deux,  incisions  longitudinales  le  nerf  du  sillon 
ambulacraire , et  le  portai  avec  précaution  dans  la  solution  osmique. 
En  opérant  ainsi , une  partie  de  la  lame  verticale  reste  ordinaire- 
ment adhérente  au  nerf.  Suivant  que  les  préparations  sont  destinées 
à montrer  simplement  le  nerf  isolé  ou  à fournir  des  coupes  trans- 
versales minces , on  les  laisse  dans  la  liqueur  pendant  8 — 24  heures. 

L’étude  microscopique  apprend  maintenant  que  les  feuillets 
nerveux  renferment  un  très  grand  nombre  de  cellules  ganglion- 
naires. Dans  chacune  de  ces  cellules  (tig.  14),  dont  le  diamètre 
varie  de  0,005  à 0,008  mm. , on  remarque  un  très  grand  noyau , 
qui  remplit  presque  entièrement  la  cavité  de  la  cellule.  A l’inté- 
rieur du  noyau  se  trouve  un  nucléole.  Le  protoplasme  des  cellules 
est  très  finement  granuleux.  De  chaque  cellule  naissent  ordinai- 
rement deux  prolongements  ou  fibres  (fibres  nerveuses) , l’une  cen- 
trale , l’autre  périphérique.  La  première  est  en  général  plus  courte 
que  la  seconde , qui  parfois  se  divise  dichotomiquement.  Les  fibres 
sont  d’une  finesse  qui  ne  permet  aucune  mesure , manquent  aussi 
bien  de  gaine  médullaire  que  de  paroi  propre , et  ne  se  composent 
que  de  cylindres-axes.  Les  prolongements  des  cellules  nerveuses, 
aussi  bien  les  centraux  que  les  périphériques,  peuvent  offrir  de 
très  belles  varicosités.  Lçs  fibres  se  croisent  dans  toutes  les  direc- 
tions. Les  cellules  et  les  fibres  sont  plongées  dans  une  substance 
fondamentale , qui  ressemble  un  peu  à la  substance  cérébrale  grise 
des  animaux  supérieurs  (fig.  13). 

Outre  ces  éléments , on  trouve  encore  dans  les  feuillets  nerveux  des 
fibres  bacillaires,  qui  suivent  généralement  une  direction  radiale. 
Leur  nature  m’est  restée  inconnue.  Elles  ne  sont  pas  en  connexion 
avec  les  cellules  nerveuses.  . 

Le  bout  périphérique  de  chaque  nerf  ambulacraire  porte  deux 
organes  sensitifs,  l’œil  et  le  palpe.  Si  l’on  suit  le  nerf  ambula- 
craire au  dehors,  chez  une  Etoile  de  mer  vivante,  on  trouve  en 


142  C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’ ANATOMIE  DES  ASTERIDES. 

effet  que^  arrivé  vers  Textrémité  du  bras,  il  ne  se  termine  pas 
à la  surface  interne  du  sillon , mais  se  sépare  d’elle  en  ce  point , 
et  se  bifurque  ensuite  en  deux  branches,  une  supérieure  et  une 
inférieure.  La  branche  inférieure,  plus  courte  et  en  forme  de  bouton, 
porte  l’œil,  qui  est  connu  depuis  longtemps;,  la  supérieure,  plus 
longue  et  plus  épaisse,  est  le  palpe. 

Il  y a déjà  environ  12  ans  que  le  palpe  a été  découvert  et 
décrit  par  M.  Wilson  ^ ) , mais  le  fait  a passé  presque  inaperçu , 
et  ce  n’est  que  tout  récemment  que  M,  Greeff^)  a de  nouveau 
attiré  l’attention  sur  lui.  Le  palpe  n’a  rien  de  commun  avec  les 
cirres  qui  l’entourent  ; il  s’en  laisse  distinguer  avec  certitude , ainsi 
que  M.  Greeff  l’a  déjà  remarqué,  par  son  origine  du  tronc  ner- 
veux radial,  par  sa  connexion  directe  avec  l’œil,  par  sa  situation 
et  sa  direction  impaires,  par  sa  forme  arrondie  en  avant  et  son 
épaisseur,  par  sa  couleur  jaune,  par  ses  phénomènes  de  mouve- 
ment différents,  etc. 

La  structure  histologique  du  palpe  s’accorde  en  général  avec 
celle  du  nerf.  La  face  inférieure  est  couverte  de  cils  vibratiles, 
mais  à la  pointe  et  à la  face  supérieure  ils  paraissent  manquer. 
Les  cils  vibratiles  sont  insérés  sur  une  cuticule  ; quant  à un  épithé- 
lium pavimenteux  faisant  suite  à celle-ci , comme  dans  les  feuillets 
nerveux,  je  n’ai  pu  le  découvrir. 

Lorsqu’on  veut  étudier  la  structure  histologique  du  palpe , c’est 
encore  de  l’emploi  de  l’acide  osmique  qu’on  se  trouve  le  mieux. 
Après  24  heures  de  séjour  dans  une  solution  à 0,1  pour  cent, 
le  durcissement  est  ordinairement  assez  avancé  pour  qu’on  puisse 
préparer  de  minces  coupes  transversales.  La  composition  anato- 
mique du  palpe  correspond  exactement  à celle  des  feuillets  nerveux. 
Il  ne  consiste  qu’en  cellules  nerveuses  et  en  fibres  nerveuses 
(fig.  15),  ces  dernières  offrant  de  très  belles  varicosités  ; les  fibres 
bacillaires,  que  nous  avons  signalées  dans  les  feuillets  nerveux, 
font  défaut  au  palpe.  Intérieurement  le  palpe  présente  une  cavité , 
qui  est  en  communication  avec  celle  des  troncs  nerveux  radiaux  ; 

ï)  Wilson,  TrmisactioM  of  the  Linnem  Society,  XXIIl,  p.  107,  1860. 

*)  R.  Greeff,  l.  c.  N°.  8.  p.  2,  1871. 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  UES  ASTERIDES. 


143 


la  lame  verticale  se  prolonge  dans  cette  cavité  et  s’insère  à la 
pointe  du  palpe.  Grâce  aux  fibres  musculaires  que  renferme  cette 
lame  verticale,  le  palpe  peut  passer  de  l’état  d’extension  à celui 
de  rétraction. 

L’œil  embrasse  à demi  le  palpe , qui  s’avance  au-dessus  de  lui 
en  s’y  soudant  par  sa  base.  Quand  l’Astérie  relève  la  pointe  de 
ses  rayons,  ce  qui  arrive  ordinairement  lorsque  l’animal  rampe, 
l’œil , qui  alors  est  tourné  en  haut  et  en  dehors , parfois  même  en 
haut  et  en  dedans,  se  trouve,  d’après  la  remarque  de  M.  Greeff , 
comme  à cheval  sur  le  palpe  long  et  cylindrique,  qui  fait  saillie 
au-dessous  de  lui.  La  base  du  palpe,  sur  laquelle  l’œil  repose, 
paraît  être  la  partie  décrite  par  MM.  Ehrenberg  et  Haeckel  comme 
le  support  de  l’œil. 

L’œil  des  Astéries  appartient  aux  yeux  composés  (Haeckel).  Sa 
surface  est  recouverte  d’une  cuticule  hyaline  homogène,  épaisse 
de  0,002  mm.,  après  laquelle  vient,  comme  dans  les  troncs  ner- 
veux, un  mince  épithélium  pavimenteux,  dont  les  cellules  poly- 
gonales, larges  de  0,005  mm.,  contiennent  un  noyau  d’un  diamètre 
de  0,002  mm.  Au-dessous  de  l’épithélium,  se  trouve  une  couche 
parenchymateuse  assez  épaisse  et  nettement  limitée  en  dedans, 
dans  laquelle  sont  plongés  les  organes  visuels  proprement  dits. 
Ceux-ci  consistent  en  un  nombre  plus  ou  moins  considérable, 
suivant  l’âge  et  la  grandeur,  de  cônes  pigmentaires  colorés  en 
rouge  clair,  éloignés  entre  eux  d’une  distance  égale  à leur  dia- 
mètre, et  ayant  leur  base  dirigée  en  dehors,  leur  pointe  tournée 
vers  la  ligne  longitudinale  médiane  de  l’œil.  Ces  cônes  pigmen- 
taires , qui  mesurent  0,06 — 0,08  mm.  de  longueur  et  0,025 — 0,028 
mm.  de  largeur  à la  base,  sont  placés  de  telle  sorte  que  les  plus 
longs  touchent  le  milieu,  les  plus  courts  les  bords. 

Les  cônes  pigmentaires,  ou  entonnoirs  pigmentaires,  sont  rem- 
plis d’une  substance  molle,  hyaline,  que  la  pression  fait  ordinaire- 
ment saillir  au  dehors,  et  qui  a été  décrite  par  M.  Haeckel  *) 
comme  une  lentille  sphérique. 

Pour  l’examen  de  la  structure  histologique  de  l’œil  des  Astéries , 

0 E.  Haeckel,  Zeitschrift  f.  wiss.  Zoologie,  t.  X,  1860,  p.  183. 


144  C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES. 

c’est  de  nouveau  la  solution  d’acide  osmique  qui  se  recommande 
spécialement.  Le  pigment  rouge  clair  se  change  alors  en  un  pig-  : 
ment  brun  foncé.  Le  pigment  est  déposé  dans  des  cellules,  dont  i 
la  forme  et  la  grandeur  varient  beaucoup,  selon  qu’elles  sont 
plus  rapprochées  du  centre  ou  des  faces  latérales  du  cône  pig-  \ 
mentaire  (fig.  18).  Vers  le  centre  elles  ont  une  forme  irrégulière , 
polygonale,  ver^  la  périphérie  une  forme  plus  cylindrique.  Dans 
la  plupart  on  distingue  très  nettement  un  noyau.  A son  bout 
extérieur  chaque  cellule  émet  un  long  appendice , simple  ou  ramifié , 
qui  présente  quelquefois , tout  comme  les  fibres  nerveuses , de  très  ^ 

.c 

belles  varicosités,  et  à l’intérieur  duquel  les  fines  granulations 
rouges  du  pigment  sont  alignées  en  chapelet.  D’autres  cellules, 
au  contraire , n’émettent  que  des  filaments  dépourvus  de  pigment. 

Des  dispositions  analogues  ont  déjà  été  observées  par  M.  Greeff  *). 

La  structure  de  la  substance  molle,  hyaline  et  en  apparence 
homogène , qui  occupe  le  centre  des  cônes  pigmentaires , est  extrê-  | 
mement  difficile  à étudier,  et  ne  m’a  pas  encore  conduit  à un 
résultat  satisfaisant.  Après  le  traitement  par  l’acide  osmique , cette 
substance  ne  se  montre  plus  homogène,  mais  composée  de  petits  , 
corpuscules  nucléifères  (fig.  19),  superposés  par  couches.  M.  Greeff  i 
décrit  également  cette  substance  comme  composée  d’un  grand 
nombre  de  petits  corpuscules  nucléifères,  tandis  que  M.  Metten-  ^ 
heimer  la  fait  consister  en  cellules  rondes , limpides , et  en  goût-  . 
telettes  de  myéline.  j 

Les  cellules  pigmentaires  situées  au  voisinage  immédiat  de  la 
masse  interne  molle  ne  présentent  qu’une  trace  du  pigment  rouge , ■ 

’ de  sorte  qu’il  paraît  y avoir  un  passage  graduel  des  cellules  pig-  . 
mentaires  aux  cellules  incolores  et  extrêmement  délicates  qui  sont  ] 
situées  à l’intérieur  du  cône  pigmentaire.  Ces  dernières  forment  , 
alors  la  masse  interne  molle  de  l’œil.  i 

L’espace  qui  reste  entre  les  cônes  pigmentaires  est  rempli  de  1 

O R.  Greeff,  l.  c.,  N°.  6,  1872.  J 

»)  R.  Greeff,  l.  c.  j 

®)  C.  Mettenheimer , Ueber  die  GesicMsorgane  des  violetten  Seesterns  der  Ostsee , \ 

dans  Muller ’s  Archiv,  p.  210,  1862.  » 


C.  K.  II0FF3IA^N.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIÜES.  145 


substance  nerveuse , qui  a la  même  structure  histologique  que  les 
feuillets  nerveux  (fig.  16  et  17),  sauf  toutefois  que  les  fibres 
bacillaires  manquent,  comme  cela  a lieu  également  dans  le  palpe. 


Les  systèmes  des  vaisseaux  sanguins  et  ly mpathiques. 

Le  système  sanguin. 

Le  système  des  vaisseaux  sanguins  des  Astérides  a été  décrit  pour 
la  première  fois  par  Tiedemann *  * ) , dont  les  observations  ont  été 
confirmées  par  Job.  Millier^).  Dans  ces  derniers  temps , Inexistence 
réelle  de  ce  système  vasculaire  sanguin  a été  plus  d’une  fois  révo- 
quée en  doute.  M.  Jourdain  ^ ) refuse  des  vaisseaux  sanguins  aux 
Astérides;  M.  Greeff^)  a partagé  d’abord  cette  opinion,  et  moi- 
même  je  n’avais  pu,  à l’origine  dé  mes  recherches  ^),  me  con- 
vaincre de  l’existence  de  ce  système.  Par  une  étude  nouvelle , M. 
Greeff  ® ) est  toutefois  arrivé  à un  résultat  contraire , et  après 
un  séjour  de  plusieurs  semaines  sur  les  côtes  de  la  Mer  du  Nord , 
où  je  pouvais  examiner  journellement  des  Astéries  fraîches,  j’ai 
également  acquis  la  conviction  que  la  description  du  système 
vasculaire  sanguin,  donnée  par  Tiedemann  et  Müller,  est,  en 
général,  parfaitement  exacte. 

Le  système  circulatoire  sanguin  des  Astérides  (PI.  II,  fig.  20) 
consiste  essentiellement  en  deux  anneaux  vasculaires,  un  anneau 
dorsal  et  un  anneau  oral , qui  communiquent  entre  eux  au  moyen 


*)  Tiedemann,  l.  c.,  p.  49. 

*)  Joh.  Müller,  /,  c.,  Archiv,  1850,  p.  117.  Berl.  Ahhmdl.,  1853,  p.  123. 
3)  Jourdain,  Recherches  sur  T af -pareil  circulatoire  etc.,  dans  Comptes  rendus. 
2e  Sér.,  t.  LXV,  p.  1002;  1867,  N®.  24. 

“)  R.  Greeff,  l.  c..  N«.  8,  1871. 

Niederl.  Archiv  /.  Zoologie,  t.  I,  2e  fasc. , p.  184. 

«)  R.  Greeff,  /.  c.,  6,  1872. 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX. 


10 


146  C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES.  i 

d'un  canal  en  forme  de  sac.  De  l’anneau  dorsal  naissent  10  vais- 
seaux pour  les  glandes  sexuelles,  tandis  que  de  l’anneau  oral 
partent  5 branches , qui  se  rendent  dans  les  sillons  ambulacraires , 
où  elles  se  divisent  ultérieurement.  A l’état  naturel , les  vaisseaux 
sont  presque  entièrement  invisibles,  et  ce  n’est  qu’après  un  certain 
exercice  qu’on  parvient  à découvrir  l’anneau  dorsal.  Si  l’on  veut 
se  former  une  idée  exacte  du  cours  des  vaisseaux,  il  est  abso- 
lument nécessaire  de  recourir  aux  injections.  J’ai  fait  usage  prin- 
cipalement des  matières  à injection  transparentes  et  fluides  à froid 
(carmin  de  Beale  et  bleu  de  Richardson).  Ce  qui  m’a  satisfait  le 
mieux,  c’est  injecter  d’abord  le  système  des  vaisseaux  lymphati- 
ques, et  ensuite  (avec  une  autre  couleur)  celui  des  vaisseaux 
sanguins.  A cet  effet,  je  coupais  un  des  bras  à une  Astérie  vivante , 
et  j’injectais  alors  le  système  lymphatique,  à partir  du  point 
sectionné , tandis  que  le  système  sanguin  était  ordinairement  injecté 
en  partant  de  l’anneau  vasculaire  dorsal. 

L’anneau  vasculaire  dorsal^  (PL  II,  fig.  21)  circonscrit  presque 
tout  le  disque,  en  englobant  l’anus  chez  les  Astérides  qui  pos- 
sèdent cette  ouverture , mais  non  la  plaque  madréporique.  A chacun 
des  cinq  angles  rentrants  des  bras , là  où  la  peau  du  dos  se  relie 
au  disque  buccal,  le  vaisseau  annulaire  fait  une  inflexion;  il  ne 
traverse  toutefois  pas  la  membrane  de  connexion , comme  l’indique 
M.  Greeff  ^ ) , mais  se  recourbe  simplement  autour  d’elle.  L’anneau 
dorsal  se  trouve  donc  interrompu  par  cinq  anses  dirigées  vers 
l’intérieur.  Aux  points  où  les  anses  s’infléchissent,  il  s’en  détache 
vers  l’extérieur  deux  vaisseaux , un  de  chaque  côté  de  la  membrane 
de  connexion , en  tout  par  conséquent  10  vaisseaux , qui  se  rendent 
aux  10  organes  de  la  génération.  Dans  l’espace  interbrachial  où 
se  trouve  la  plaque  madréporique,  le  vaisseau  annulaire  décrit 
une  inflexion  plus  profonde  et  contourne , au-dessous  de  la  plaque 
madréporique,  l^rigine  du  canal  pierreux,  de  sorte  que  ce  der- 
nier et  la  plaque  madréporique  (en  grande  partie)  sont  situés  en 
dehors  de  l’anneau  (fig.  21). 


‘)  R.  Greef,  /.  c.  No.  6,  1872,  p.  94. 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l'aNATOMIE  DES  ASTERIDES.  147 

Quand  on  injecte  en  un  point  quelconque  T anneau  vasculaire 
dorsal,  non-seulement  les  10  vaisseaux  des  glandes  sexuelles  se 
remplissent , mais  le  liquide  pénètre  aussi  dans  le  canal  sacciforme 
qui,  partant  de  tout  le  contour  de  la  plaque  madréporique,  enve- 
loppe le  canal  pierreux,  avec  lequel  il  est  en  partie  intimement 
soudé,  et  s’abouche  inférieurement  avec  l’anneau  sanguin  oral. 
Ce  canal  sacciforme,  que  Tiedemann  a nommé  le  „cœur”,  n’enve- 
loppe pas  seulement  le  canal  pierreux , dont  l’origine  ne  correspond 
qu’à  une  petite  partie  de  la  surface  de  la  plaque  madréporique, 
mais  aussi  un  corps  d’apparence  glanduleuse,  dont  la  signification, 
toutefois,  m’est  restée  absolument  inconnue. 

En  outre,  au  bord  intérieur  de  la  jonction  entre  la  plaque 
madréporique  et  l’origine  du  canal  sacciforme,  on  voit  encore, 
chez  Y Asteracanthion  rubens,  deux  autres  organes  d’apparence 
glanduleuse  (PI.  II,  fig.  21),  déjà  remarqués  par  M.  GreefiT^). 
Ces  deux  organes  pénétrent  par  leurs  extrémités  extérieures , qui 
convergent  vers  le  canal  pierreux, ^ dans  le  canal  sacciforme, 
tandis  que  les  extrémités  opposées  font  librement  saillie  dans  la 
cavité  du  corps. 

Existe-t-il,  comme  le  présume  M.  Greeff,  une  communication 
j entre  ces  deux  organes  et  le  corps  glanduliforme  dont  il  a été 
question  tout  à l’heure?  Je  n’ose  rien  décider  à cet  égard; 
toutefois , la  chose  me  paraît  peu  probable.  Quand  on  pousse  des 
injections  en  un  point  de  l’anneau  vasculaire  dorsal,  le  liquide 
coloré  remplit  bien  les  deux  organes  qui  s’étendent  librement  dans 
la  cavité  du  corps,  mais  non  le  corps  adénoïde  renfermé  dans 
le  canal  sacciforme. 

Du  canal  sacciforme,  la  masse  colorée  pénètre  dans  l’anneau 
vasculaire  oral,  en  même  temps  qu’elle  s’échappe  au  dehors  par 
la  plaque  madréporique.  Il  y a donc  une  communication  directe 
entre  l’appareil  circulatoire  sanguin  et  l’eau  de  mer.  L’eau  de  mer 
s’introduit  par  la  plaque  madréporique  dans  le  canal  pierreux  du 
système  vasculaire  lymphatique,  et  par  le  canal  sacciforme,  qui 


*)  R.  Greef,  l.  c. 


10* 


148  G.  K.  HOFFMANN.  SUR  l'aNATOMIE  DES  ASTER[DES. 

relie  entre  eux  les  anneaux  vasculaires  dorsal  et  oral,  dans  le 
système  des  vaisseaux  sanguins.  M.  Greeff constate  également, 
entre  Tanneau  dorsal  et  Tanneau  oral,  l’existence  d’une  commu- 
nication , s’établissant  par  la  dilatation  en  sac  du  canal  pierreux 
(canal  sacciforme).  Il  pense  toutefois  que  la  communication  n’oc- 
cupe pas  la  cavité  entière  de  cette  dilatation,  mais  se  fait  par 
deux  vaisseaux  particuliers,  situés  à côté  du  canal  pierreux  et 
enveloppés,  comme  lui,  par  le  sac  membfaneux  commun.  Mes 
propres  recherches  ne  m’ont  pas  montré  ces  deux  vaisseaux  par- 
ticuliers. 

Pour  arriver  dans  l’anneau  vasculaire  oral,  qui  est  situé  au- 
dessus  ou , pour  mieux  dire , au-dessous  de  la  membrane  buccale , 
et  par  conséquent  en  dehors  de  la  cavité  du  corps , le  canal  sac- 
ciforme doit  traverser  la  membrane  buccale.  L’anneau  oral  a une 
forme  pentagonale.  De  chacun  des  cinq  angles  de  ce  pentagone 
part  un  vaisseau , qui  se  rend  dans  le  sillon  ambulacraire  et  qu’on 
peut  suivre  jusqu’à  la  pointe  des  bras,  comme  Job.  Millier 
l’avait  déjà  indiqué  (PI.  II,  fig.  21).  Extérieurement  à l’anneau 
oral  se  trouve  l’anneau  vasculaire  lymphatique , qui  est  également 
de  forme  pentagonale.  L’anneau  oral  sanguin  et  l’anneau  oral 
lymphatique  sont  séparés  entre  eux  par  un  troisième  anneau  pen- 
tagonal. Celui-ci  est  la  continuation  de  la  lame  verticale  décrite 
à l’occasion  du  système  nerveux,  et  on  peut  l’appeler  l’anneau 
lamineux.  La  formation  de  cet  anneau  lamineux  n’est  toutefois  pas 
due  exclusivement  à la  lame  verticale , mais  aussi , pour  une  part , 
à la  forte  cloison  longitudinale  de  tissu  conjonctif,  qui , dans  le  sillon 
ambulacraire , sépare  entre  eux  le  nerf  et  le  vaisseau  lymphatique 
radial.  On  pourrait  aussi  exprimer  ces  rapports  én  disant  que 
l’anneau  lamineux  pentagonal,  à chacun  de  ses  angles,  envoie 
dans  le  sillon  ambulacraire  un  prolongement,  qui  s’étend  jusqu’au 
bout  du  bras  et  qui,  peu  après  s’étre  détaché  de  l’anneau,  se 
partage  en  deux  feuillets,  dont  l’un  forme  la  cloison  entre  le 
vaisseau  lymphatique  radial  et  le  canal  nerveux , tandis  que  l’autre 


*)  R.  Greelf,  /.  c.,  No.  6,  p.  96. 

*)  Joh.  Millier,  Archivy  1850,  p.  1. 


G.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES.  149 

constitue,  à rintérieur  du  canal  nerveux,  la  „lame  verticale’’. 
L’anneau  oral  sanguin,  l’anneau  lymphatique  et  l’anneau  lumi- 
neux sont  maintenant,  tous  ensemble,  recouverts  par  l’anneau 
pentagonal  nerveux.  Le  fait  que  l’anneau  sanguin  oral  est  recou- 
vert par  le  nerf,  était  déjà  connu  de  Tiedemann  ^),  car  il  dit  ^ 
„ Quand  on  a enlevé  le  vaisseau  orange  (le  nerf),  on  peut  recon- 
naître la  couronne  vasculaire  (orale)”. 

Les  vaisseaux  qui , naissant  des  angles  du  pentagone  vasculaire 
oral,  se  prolongent  dans  les  sillons  ambulacraires,  peuvent  être 
appelés  vaisseaux  radiaux  principaux.  Chacun  d’eux  pénètre  à 
l’intérieur  du  canal  nerveux  correspondant , dans  celle  de  ses  trois 
cavités  qui  occupe  la  ligne  médiane.  A peu  de  distance  du  point 
où  il  s’est  détaché  de  l’anneau  vasculaire,  le  vaisseau  radial 
principal  perd  ses  parois  propres;  le  sang  est  donc  en  contact 
immédiat  avec  la  substance  nerveuse;  celle-ci  forme  la  gaîne  du 
vaisseau  sanguin. 

A côté  du  tronc  radial  principal  on  trouve  encore  deux  autres 
vaisseaux,  qu’on  peut  nommer  les  troncs  radiaux  secondaires 
médians , et  qui  pénètrent  dans  les  deux  petites  cavités  du  canal 
nerveux,  symétriques  l’une  de  l’autre.  Il  existe  donc  à chaque 
sillon  ambulacraire,  renfermés  dans  la  cavité  du  nerf,  trois  vais- 
seaux sanguins  radiaux.  Joh.  Millier  avait  déjà  dit  que  l’anneau 
vasculaire  oral  envoie  dans  chaque  rayon  une  branche,  qui  émet 
à son  tour  deux  courts  rameaux  secondaires.  Il  s’agit  maintenant 
de  savoir  comment  se  forment  ces  deux  rameaux  radiaux  secon- 
daires. On  ne  peut  le  reconnaître  que  sur  des  préparations  injec- 
tées très  bien  réussies.  De  chaque  tronc  radial  principal  partent 
aux  deux  côtés  autant  de  branches  transversales  qu’il  y a de  cirres  ; 
ces  branches  ne  sont  pas  opposées  l’une  à l’autre,  mais,  comme 
les  cirres  eux-mêmes,  elles  alternent  entre  elles.  Chacune  de  ces 
branches  transversales  se  courbe  en  forme  de  boucle  autour  du 
cirre , puis  se  continue , tout  près  de  l’origine  de  la  branche  trans- 


*)  Tiedemann,  l.  c.,  p,  51. 

*)  Joh.  Millier,  ArcUv , 1850,  p.  117. 


150  C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES. 

versale  suivante , avec  le  tronc  radial  secondaire.  Du  sommet  des 
inflexions  en  forme  de  boucle  naissent,  en  grand  nombre , de  nou- 
velles ramifications  transversales,  qui  se  dirigent  entre  les  cirres 
de  la  seconde  rangée , puis  se  continuent  également , sur  les  deux 
côtés , avec  un  vaisseau  sanguin  radial , étendu  le  long  de  la  partie 
latérale  du  sillon  ambulacraire.  Ces  deux  vaisseaux  sanguins  peu- 
vent être  désignés  sous  le  nom  de  „ troncs  radiaux  secondaires 
latéraux’’.  Dans  le  sillon  ambulacraire  on  trouve  donc  en  réalité 
cinq  troncs  vasculaires  radiaux,  qui  s’anastomosent  entre  eux  au 
moyen  de  ramifications  transversales  placées  entre  les  cirres.  La 
description  qui  précède  ne  s’applique  toutefois  qu’aux  Astérides 
à deux  paires  de  cirres.  Un  examen  spécial  devra  nous  apprendre 
quelle  est  la  disposition  des  vaisseaux  sanguins  dans  le  sillon 
ambulacraire  chez  les  Astérides  qui  ne  possèdent  qu’une  seule 
paire  de  cirres. 

Les  troncs  radiaux  secondaires  latéraux  de  deux  rayons  voisins 
se  recourbent  et  s’abouchent  maintenant  au-dessous  de  la  pièce 
dure,  odontoïde,  fixée  dans  l’angle  que  ces  rayons  forment  par 
leur  rencontre  près  de  la  bouche.  Il  se  forme  ainsi , si  l’on  veut , 
un  second  anneau  vasculaire  oral,  qu’on  peut  appeler  l’anneau 
vasculaire  oral  latéral , et  qui  est  également  recouvert  par  l’anneau 
pentagonal  nerveux , là  où  il  se  recourbe  sous  les  pièces  odontoïdes. 

De  cet  anneau  vasculaire  oral  (latéral)  naissent  cinq  branches , 
qui,  par  de  très  petites  ouvertures  de  l’anneau  buccal  calcaire, 
pénètrent , au-dessus  des  pièces  odontoïdes , dans  la  cavité  du  corps, 
et  paraissent  se  ramifier  aux  deux  côtés  de  la  membrane  de  con- 
nexion qui  unit  la  peau  dorsale  au  disque  buccal  (par  conséquent 
à la  face  interne  de  la  cavité  du  corps).  La  manière  dont  ces 
petits  vaisseaux  se  comportent  ultérieurement  ne  m’est  pas  com- 
plètement connue.  Ils  paraissent  en  partie  se  rendre  aux  organes 
sexuels,  en  partie  former  un  réseau  vasculaire  lacuneux  sur  la 
face  interne  de  la  peau  du  corps.  Quant  à ce  second  point , tou- 
tefois, on  ne  peut  se  prononcer  qu’avec  beaucoup  de  circonspec- 
tion, attendu  qu’ici,  dans  le  tissu  conjonctif  lâche,  il  se  produit 
aisément  des  canaux  vasculaires  artificiels.  Tiedemann  ^ ) aussi 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’ ANATOMIE  DES  ASTERIDES.  151 

avait  déjà  vu  les  petits  vaisseaux  dont  il  vient  d^être  question, 
mais  il  les  fait  naître  de  Tanneau  vasculaire  oral  (principal)  et 
se  ramifier  dans  Testomac  et  les  caecums  (fig.  23). 

L’existence  d’un  système  spécial  de  vaisseaux  sanguins  pour 
les  viscères  n’a  pu  être  constatée  dans  mes  recherches. 

La  manière  dont  les  vaisseaux  sanguins  se  ramifient  dans  les 
organes  de  la  génération  est  très  caractéristique.  Si  l’on  regarde 
les  glandes  sexuelles  à l’œil  nu , on  les  voit  suspendues , pour  ainsi 
dire , aux  vaisseaux,  comme  les  glandes  en  général  sont  suspendues  à 
leurs  conduits  excréteurs.  Quand  les  organes  de  la  génération  sont 
injectés  et  qu’on  les  examine  au  microscope,  les  images  sont  exac- 
tement semblables  à celles  qu’on  obtient  en  injectant  une  glande 
par  son  conduit  excréteur.  Les  canaux  sanguins  ne  forment  pas 
des  réseaux  de  vaisseaux  capillaires , recouvrant  le  follicule , mais 
le  vaisseau  se  ramifie  dans  la  glande  elle-même.  Les  parois  du 
vaisseau  se  continuent  avec  celles  de  la  glande , le  sang  pénètre 
librement  dans  les  follicules  glandulaires  et  coule  autour  des  pro- 
duits sexuels.  Aussi  est-il  très  probable,  comme  on  le  verra'plus 
loin , que  les  vaisseaux  sanguins  se  chargent  du  rôle  de  conduits 
excréteurs. 

Les  vaisseaux  sanguins  (anneaux  dorsal  et  oral)  sont  revêtus 
extérieurement,  comme  tous  les  autres  organes,  d’une  membrane 
vibratile;  vient  ensuite  une  couche  de  fibres  musculaires  circu- 
laires ^ très  minces  et  très  serrées  les  unes  contre  les  autres , puis 
en  dedans,  si  je  ne  m’abuse,  de  nouveau  une  membrane  de  tissu 
conjonctif.  Quant  à savoir  si  les  vaisseaux  sont  en  outre  encore 
tapissés  d’un  épithélium  vibratile  interne,  c’est  un  point  que  je 
n’ose  décider.  Les  vaisseaux  sont  trop  étroits  pour  qu’on  puisse 
les  couper  dans  leur  longueur.  Je  n’ai  pas  réussi  non  plus  à 
en  faire  des  coupes  transversales. 

Le  canal  sacciforme,  qui  naît  de  la  plaque  madréporique  et 
unit  l’anneau  oral  à l’anneau  anal,  est  constitué  par  une  mem- 
brane formée  de  tissu  conjonctif  onduleux  et  recouverte  des  deux 
côtés  de  cils  vibratiles.  L’espace  qui  reste  entre  le  canal  pier- 
reux, le  corps  glanduliforme  et  cette  membrane,  est  remplie  d’un 


152  C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES. 

liquide  qui  renferme  les  mêmes  éléments  cellulaires  que  le  sang. 

Ces  éléments  cellulaires  (fig.  24)  ont  les  uns  des  formes  arron- 
dies , les  autres  des  formes  ramifiées.  Parmi  les  formes  arrondies , 
dont  le  diamètre  varie  de  0,003 — 0,010  mm.,  on  en  rencontre 
aussi  bien  avec  noyau  que  sans  noyau.  Leur  protoplasme  est  ordi- 
nairement finement  granuleux.  On  trouve,  en  outre,  des  sphères 
de  0,005 — 0,007  mm.  de  grosseur,  à éclat  mat,  qui  toutefois 
sont  assez  clair-semées.  Les  éléments  les  plus  nombreux  sont  ceux 
à forme  ramifiée , qui  nagent  dans  le  liquide  les  uns  à Tétât  isolé , 
les  autres  agglomérés  en  petites  masses.  Leurs  prolongements  varient 
beaucoup  quant  à la  forme  et  au  nombre,  et  ils  peuvent  pren- 
dre parfois  un  développement  très  considérable.  Plus  les  cellules 
sont  ramifiées,  plus  leurs  phénomènes  de  mouvement  sont  faibles. 

Il  nous  reste  maintenant  encore  à parler  des  corps  glanduli- 
formes.  En  ce  qui  concerne  les  deux  corps  qui  pénètrent  librement 
dans  la  cavité  du  corps,  ceux-ci  ont  une  structure  analogue  à 
celle  des  glandes  en  grappe.  Les  lobes  et  lobules  glandulaires  se 
composent  d’une  membrane  homogène , tapissée  de  cils  vibratiles , 
et  d’un  contenu  celluleux.  Lorsqu’on  examine  la  glande  à l’état 
frais  sous  le  microscope , on  voit  encore  pendant  assez  longtemps 
les  follicules  glandulaires  se  contracter  rhythmiquement.  Malgré 
de  nombreuses  recherches , et  bien  que  les  contractions  et  les  dila- 
tations alternent  régulièrement,  je  n’ai  pourtant  jamais  pu  décou- 
vrir de  fibres  musculaires.  Dans  les  parois  extrêmement  délicates  des 
follicules  glandulaires  on  remarque  seulement  des  cordons  épais, 
partout  anastomosés  entre  eux,  d’une  substance  finement  granu- 
leuse, qui  ont  l’aspect  des  cordons  sarcodiques  et  ressemblent 
à peu  près  (quoique  moins  fortement  développés)  à ceux  qu’on 
trouve  dans  la  masse  molle  du  corps  du  Noctiliica  miliaris.  Il  me 
semble  probable  que  le  pouvoir  de  se  contracter,  manifesté  par 
les  parois  des  follicules,  appartient  à ces  cordons. 

Près  de  la  plaque  madréporique , où  les  lobules  glandulaires 
sont  plus  ramassés  entre  eux  et  se  réunissent  en  un  large  conduit 
excréteur  commun , les  parois  deviennent  plus  épaisses , tandis  que 
dans  le  conduit  excréteur  lui-même  se  montrent  des  faisceaux 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES.  153 

de  tissu  conjonctif  fibrillaire.  Le  contenu  des  vésicules  glandulai-, 
res  se  compose  de  cellules,  qui  ressemblent  entièrement  à celles 
des  „ petits  corps  bruns”  (v.  Système  lymphatique). 

Le  corps  glanduleux  situé  à l’intérieur  du  canal  sacciforme  (le 
cœur  de  la  plupart  des  auteurs)  a une  forme  en  poire  allongée 
et  une  couleur  bleu-rougeâtre,  quelquefois  violette.  Sa  partie  supé- 
rieure, qui  est  la  plus  large,  se  trouve  presque  immédiatement 
au  dessous  de  la  plaque  madréporiqne ; l’inférieure,  beaucoup  plus 
étroite  (la  queue  de  la  poire),  est  étendue  tout  à côté  du  canal 
pierreux  et  paraît  déboucher  dans  l’anneau  vasculaire  oral.  Com- 
ment se  comporte  la  partie  supérieure,  si  elle  se  termine  en 
cul-de-sac,  ou  si  elle  s’enfonce  dans  le  canal  sacciforme  par  un 
orifice  ouvert,  c’est  ce  qu’il  m’est  impossible  de  dire.  L’organe, 
qui  est  pourvu  sur  toute  sa  longueur  d’appendices  lobuleux  rami- 
fiés, présente  à peu  près  la  même  structure  que  les  deux  autres 
glandes,  avec  cette  difierence  toutefois,  que  les  lobules  glandu- 
laires sont  unis  entre  eux  par  de  plus  forts  faisceaux  de  tissu 
conjonctif,  et  que  les  éléments  celluleux  sont  plus  ou  moins 
colorés.  Je  n’ai  pas  vu  la  cavité  vibratile  interne,  par  laquelle, 
suivant  M.  Greeff^),  les  canaux  ramifiés  et  également  vibratiles 
à l’intérieur  communiqueraient  entre  eux.  Par  contre,  j’ai  ici  de 
nouveau  observé  très  distinctement  des  phénomènes  de  contraction 
dans  la  glande , phénomènes  qui  avaient  d’ailleurs  déjà  été  si- 
gnalés par  Tiedemann,  et  qui  avaient  probablement  conduit  cet 
observateur  distingué  à décrire  cette  glande  comme  le  „cœur”  de 
l’animal.  Si  les  glandes  en  question  doivent  être  regardées  comme 
des  organes  d’excrétion  ou  de  respiration , ce  qui  est  assez  probable , 
la  faculté  de  se  contracter  ne  peut  que  leur  être  très  utile. 


Le  Système  lymphatique. 

Le  système  vasculaire  lymphatique  commence  à la  plaque  ma- 
dréporique,  qui  est  toujours  située  à la  face  dorsale,  entre  deux 


')  Greeff,  l.  c.  No.  6,  p.  99. 
*)  Tiedemann,  l.  c.,  p.  50. 


154  C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES. 

rayons,  et  qui  est  entièrement  analogue  à celle  des  Echinides  ; 

sous  le  rapport  de  la  structure  histologique.  Le  canal  pierreux, 
qui  naît  à la  face  inférieure  de  la  plaque  madréporique , décrit 
une  courbure  en  S et  doit  percer  la  membrane  buccale  avant  de 
pouvoir  se  relier  à Tanneau  vasculaire  lymphatique.  Le  système 
lymphatique  est  recouvert  de  cils  vibratiles  sur  toute  sa  surface  • 

interne.  Le  canal  pierreux  se  compose  de  50 — 60  anneaux  cal-  ‘ 

caires  très  délicats , rapprochés  les  uns  des  autres , unis  de  façon  : 

à conserver  une  certaine  mobilité,  et  présentant  tout  à fait,  dans  j 

leur  structure  histologique , le  caractère  bien  spécial  du  tissu  calcaire 
des  Echinodermes.  Ces  anneaux  calcaires  sont  revêtus  d'une  mem- 
brane de  tissu  conjonctif  à l’extérieur  et  d’une  autre  à l’intérieur, 
la  prèmière  plus  épaisse , la  seconde  plus  mince , et  sur  lesquelles 
s’insèrent  les  cils  vibratiles. 

L’anneau  vasculaire  lymphatique,  situé  au-dessus  de  la  mem- 
brane buccale,  au  côté  extérieur  de  l’anneau  sanguin,  dont  il  est 
séparé  par  l’anneau  lamineux,  est  recouvert,  de  même  que  ces 
anneaux  sanguin  et  lamineux,  par  le  pentagone  nerveux.  Avec 
l’anneau  lymphatique,  qui  est  très  mince,  très  délicat  et  à peine 
visible  chez  les  animaux  non  injectés , communiquent  les  vésicules 
de  Poli , dont  le  nombre  est  variable , et  qui  peuvent  même  manquer 
complètement  chez  quelques  espèces.  C’est  ainsi,  par  exemple, 
qu’on  ne  trouve  pas  les  vésicules  de  Poli  chez  V Asteracanthion 
ruhens.  Je  les  ai  observées,  au  contraire,  dans  les  genres 
Solasler  et  Astropecten,  où  Joh.  Millier  et  Tiedemann 
les  avaient  déjà  décrites.  A l’anneau  lymphatique  se  rattachent 
en  outre  les  10  petits  corps  bruns  qui  ont  également  déjà  été 
décrits  par  Tiedemann  ^).  Ces  corps  présentent  une  structure  glan- 
duleuse, et  sont  composés  d’une  grande  multitude  de  follicules. 

(PL  II,  fig.  25).  Ceux-ci  consistent  en  une  enveloppe  très  mince , 
formée  de  tissu  conjonctif  et  garnie  de  cils  vibratiles,  et  en  un 
contenu  qu’un  fort  grossissement  montre  composé  de  cellules  pour- 

i)  Joh.  Millier,  l.  c. 

*)  Tiedemanii , l.  c. 

*)  Tiedemann,  L c. 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’ ANATOMIE  UES  ASTËRIDES. 


155 


vues  de  nombreux  prolongements  et  ressemblant  tout  à fait , sous 
le  rapport  histologique , aux  éléments  figurés  qu’on  trouve  dans  le 
liquide  qui  circule  à l’intérieur  du  corps  et  dans  le  système  am- 
bulacraire  (fig.  26).  On  est  donc  naturellement  conduit  à regarder 
ces  petits  corps  glanduliformes  comme  les  centres  de  production 
des  éléments  celluleux  que  renferme  le  système  lymphatique.  Ce 
sont  peut-être  des  organes  homologues  au  cœur  lymphatique  des 
Oursins  et  des  Spatangues,  lequel,  d’après  ses  caractères  histo- 
logiques, doit  aussi  très  probablement  être  considéré  comme  le 
foyer  où  se  forment  les  éléments  celluleux  qui  circulent  dans  le 
réseau  des  vaisseaux  lymphatiques  ^).  M.  Semper^),  qui  les  a 
trouvés  très  grands  chez  le  Pteraster  des  Philippines,  dit  à leur 
sujet  : „Sie  sind  eine  in  einzelne  Theile  zerfallene  Schlundkrause , 
denn  ihre  Verbindung  mit  dcm  Blut-und  Wassergefassystem  ist 
hier  genau  die  gleiche,  wie  ich  sie  oben  flir  die  Holothurien 
angegeben  habe.  Durch  Injectionen  des  Herzens  bei  jenem  Seestern 
gelang  es  mir  leicht , einmal  den  Gef assring  und  von  ihm  aus  ein 
dichtes  Gefassnetz  in  jenem  braunen,  drüsigen  Korperchen  Tiede- 
mann’s-zu  füllen.  J.  Müller  hat  ihre  Homologie  erkannt.  Er  nennt 
sie  traubige  Anhange,  aber  er  sagt,  meines  Wissens,  nirgends 
etwas  über  ihre  Verbindung  mit  dem  Blutgefasssystem.” 

Les  5 canaux  lymphatiques  radiaux  qui,  naissant  de  l’anneau 
lymphatique,  suivent  le  fond  du  sillon  ambulacraire  jusqu’au  bout 
des  bras , où  ils  paraissent  se  terminer  en  cul-de-sac , sont  séparés 
du  nerf  sous-jacent  par  la  forte  cloison  longitudinale  formée  de 
tissu  conjonctif.  Leurs  parois  consistent  en  un  lacis  dense  de 
faisceaux  conjonctifs,  tapissé  intérieurement  d’une  membrane  homo- 
gène extrêmement  délicate. 

Les  vésicules  ambulacraires  sont  formées , de  dehors  en  dedans , 
1®  d’une  couche  longitudinale  et  2®  d’une  couche  transversale  de 

i)  C.  K.  Hoffmann,  Zur  Anatomie  cler  Echinen  und  Spatangeen,  N ederl . 

Achiv  f.  Zool.,  t.  I,  1871,  p.  85. 

*)  C.  Semper,  Reise  im  Archigel  der  Philippinen,  t.  II.  Wissenschaftl,  Reisen , 
t.  Bd.  Holothurien,  p.  118. 


156  C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES. 

tissu  conjonctif,  3®  d^une  couche  de  fibres  musculaires , et  4®  d’une 
membrane  homogène  mince.  Il  est  très  difficile  de  suivre  les  fibres 
musculaires  dans  leur  trajet  ; pourtant  il  m’a  paru  qu’elles  affectent 
principalement  une  direction  circulaire.  Les  vésicules  de  Poli  offrent 
la  même  structure  histologique  que  les  vésicules  ambulacraires. 
Les  unes  et  les  autres  sont  d’ailleurs,  encore  recouvertes  à l’ex- 
térieur d’une  membrane  vibra tile.  Les  cirres  ambulacraires  mon- 
trent , de  dehors  en  dedans , la  constitution  suivante  : 1 ® une  couche 
nerveuse,  continuation  du  tronc  nerveux  radial  étendu  au  fond 
du  sillon  ambulacraire , laquelle  enveloppe  tout  le  cirre  et  aussi 
la  ventouse  ; viennent  ensuite , comme  dans  les  vésicules  ambula- 
craires,  2®  une  couche  longitudinale  et  3®  une  couche  transversale 
de  tissu  conjonctif;  4®  une  forte  couche  de  fibres  musculaires  lon- 
gitudinales, 5®  de  nouveau  une  couche  solide  de  tissu  conjonctif , 
à fibres  principalement  radiales,  et  6®  une  couche  cellulaire  dessi- 
nant à l’intérieur  de  la  cavité  une  ligne  onduleuse , et  sur  laquelle 
est  étendu  l’épithélium  vibratile. 

La  couche  nerveuse  forme  une  membrane  dont  l’épaisseur  varie , 
suivant  le  volume  des  cirres,  de  0,06  à 0,014  mm.,  et  dont  la 
structure  histologique  est  une  répétition  exacte  de  celle  des  feuillets 
nerveux.  A l’extérieur  on  y trouve  une  cuticule  épaisse  de 
0,002 — 0,003  mm.,  qui  est  couverte  de  cils  vibratiles,  et  ensuite 
viennent  les  éléments  nerveux  proprement  dits , plongés  dans  une 
substance  fondamentale  très  finement  granuleuse.  Ces  éléments 
nerveux  (fig.  27,  28,  29)  consistent,  comme  dans  les  feuillets 
nerveux , en  cellules  et  en  fibres.  Les  premières  sont  ordinairement 
plus  petites,  les  secondes  plus  courtes  que  celles  des  troncs  ner- 
veux, auxquelles  elles  ressemblent  d’ailleurs  entièrement  par  la 
structure.  Pour  l’étude  de  la  couche  nerveuse  c’est  de  nouveau  la 
solution  d’acide  osmique  qui  convient  le  mieux.  Après  la  macération 
dans  des  solutions  faibles  d’acide  chromique  ou  de  bichromate  de 
-potasse , la  couche  nerveuse  entière  se  laisse  quelquefois  détacher 
des  cirres.  Les  fibres  musculaires  des  cirres  ambulacraires,  de 
même  que  celles  des  vésicules  ambulacraires,  ne  diffèrent  pas, 
en  structure  histologique , de  celles  de  la  peau  extérieure  du  corps. 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l'aNATOMIE  DES  ASTERIDES.  157 

Dans  les  cirres  je  n’ai  pu  découvrir  qu’une  couche  de  fibres  mus- 
culaires longitudinales,  contrairement  au  résultat  annoncé  par 
M.  Greeff  ' ) , qui  dit  positivement  qu’il  existe  aussi  une  couche 
(intérieure)  de  fibres  circulaires.  Les  fibres  musculaires  s’insèrent 
à la  ventouse,  dilatation  en  bourrelet,  qui  ne  paraît  formée  que 
de  tissu  conjonctif.  Aux  cirres  les  plus  petits,  qui  sont  situés 
à l’extrémité  des  bras;  les  ventouses  paraissent  manquer;  du 
moins,  il  m’a  été  impossible  de  les  y reconnaître. 

Les  éléments  celluleux  qui  nagent  dans  les  canaux  lymphatiques 
sont  tout  à fait  semblables  à ceux  qu’on  rencontre  dans  les  vais- 
seaux sanguins  et  dans  la  cavité  du  corps. 


Conclusion. 

Ainsi  qu’il  a été  dit  à l’occasion  de  la  description  du  système 
vasculaire  sanguin,  non-seulement  le  canal  pierreux,  mais  aussi 
le  vaisseau  sacciforme  qui  l’entoure  (le  cœur  des  auteurs)  sont  en 
communication  avec  la  plaque  madréporique.  L’eau  de  mer  peut 
donc  s’introduire  directement  tant  dans  le  système  sanguin  que 
dans  le  système  lymphatique.  Il  suit  déjà  de  là  qu’une  séparation 
tranchée  entre  les  deux  systèmes  n’est  ici  plus  admissible. 

En  outre,  ou  trouve  aussi  dans  les  deux  systèmes  les  mêmes 
éléments  celluleux.  Si  cette  circonstance  seule  parle  déjà  en  faveur 
d’une  liaison  entre  les  deux  systèmes,  il  y a encore  d’autres 
raisons  qui  me  font  regarder  celle-ci  comme  très  probable,  bien 
.que  je  doive  avouer  n’avoir  pu  découvrir,  malgré  de  nombreux 
essais  d’injection,  la  voie  précise  par  laquelle  la  communication 
s’établit.  Lorsqu’on  injecte  à partir  d’un  des  canaux  principaux 
du  système  lymphatique,  de  préférence  à la  base  d’un  bras  re- 
tranché à l’Astérie  vivante,  on  voit  se  remplir  (avec  la  plus 


) R.  GreefF,  /.  6,  1872,  p.  98. 


158  C.  K.  HOFFMANN.  SUR  lVnATOMIE  DES  ASTERIDES. 

grande  facilité)  non-seulement  toutes  les  parties  qui  communiquent 
avec  ce  système  de  canaux , mais  aussi  les  voies  sanguines  incluses 
dans  les  troncs  nerveux  radiaux. 

M.  Greeff  1)  a obtenu  un  résultat  analogue.  Les  injections  de 
matières  colorantes,  faites  par  lui  sur  un  des  canaux  principaux 
du  système  lymphatique,  n’ont  pas  seulemement  pénétré  dans  le 
canal  ambulacraire , mais  aussi  dans  le  conduit  nerveux  situé 
au-dessous  de  lui.  En  injectant  de  la  base  à la  périphérie  le  bras 
détaché  d’une  Astérie,  je  n’ai  jamais  trouvé  les  matières  colorantes 
dans  les  voies  sanguines  radiales;  je  les  y constatais,  au  con- 
traire, lorsque  je  pratiquais  sur  l’Astérie  une  injection  centripète. 
On  peut  en  conclure  avec  beaucoup  de  probabilité  que  la  communi- 
cation doit  se  faire  au  voisinage  des  anneaux  vasculaires. 

Cette  présomption  se  trouve  confirmée  par  une  observation  de 
M.  Semper  ^),  qui,  chez  le  P ter  aster  des  Philippines , a pu  remplir 
par  l’injection  du  cœur  l’anneau  vasculaire  et,  consécutivement, 
un  réseau  vasculaire  serré  dans  les  „ petits  corps  bruns,  glandu- 
leux,” qu’il  compare  à la  fraise  œsophagienne  des  Holothuries 
réduite  à des  parties  isolées  les  unes  des  autres.  Or  les  petits 
corps  bruns  sont  en  communication  avec  l’anneau  lymphatique, 
comme  l’a  déjà  montré  Tiedemann  et  comme  il  appert  de  chaque 
essai  d’injection.  Le  fait  que  les  petits  corps  bruns  se  remplissent 
quand  on  injecte  le  système  vasculaire  sanguin , fournit  donc  une 
nouvelle  preuve  de  la  liaison  des  deux  systèmes. 

On  sait  que  chez  les  Astérides,  comme  chez  tous  les  Echino- 
dermes , la  cavité  du  corps  est  remplie  d’un  liquide , qui  est  composé 
d’eau  de  mer  et  d’éléments  celluleux.  Ces  éléments  celluleux  sont 
entièrement  conformes  à ceux  des  systèmes  vasculaires  sanguin  et 
lymphatique.  Il  s’agit  de  savoir  d’où  ce  liquide  provient. 

Des  ouvertures  préformées , qui  conduiraient  l’eau  de  mer  dans 
l’intérieur  du  corps,  n’existent  pas.  Lorsqu’on  injecte  une  masse 
colorée  dans  la  cavité  du  corps , le  liquide  ne  s’échappe  nulle  part 


O R.  Greeff,  l c,,  No.  8,  1871,  p.  4. 
»)  C.  Semper,  l.  c.,  p.  118. 

3)  Tiedemann,  l.  c. 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATüMIE  DES  ASTERIDES.  159 

au  dehors,  si  Ton  n'exerce  qu’une  pression  modérée.  Quant  la 
pression  est  trop  forte , les  délicates  branchies  cutanées  se  déchirent. 
Des  ouvertures  préformées  ne  sont  d’ailleurs  nullement  nécessaires , 
puisque,  par  osmose,  l’eau  de  mer  peut  très  facilement  s’introduire, 
à travers  la  peau  extérieure,  dans  la  cavité  du  corps.  Pour  s’en 
convaincre,  on  n’a  qu’à  jeter  une  Astérie  vivante  dans  une  capsule 
remplie  d’eau  douce;  l’animal  se  gonfle  alors  et  prend  une  gros- 
seur tout  à fait  démesurée.  En  outre , une  diffusion  peut  encore  se 
faire  à travers  les  minces  parois  du  canal  sacciforme,  et  il  est 
possible  aussi  que  l’eau  de  mer  trouve  un  passage  vers  l’intérieur 
du  corps  aux  bords  de  la  plaque  madréporique.  Il  est  plus  difficile 
d’expliquer  l’origine  des  éléments  celluleux.  Une  connexion  déter- 
minée entre  les  systèmes  sanguin  et  lymphatique  et  le  liquide 
accumulé  dans  la  cavité  du  corps , n’a  pu  être  constatée  ; toute- 
fois, il  est  de  nouveau  très  probable  qu’une  pareille  connexion 
existe.  Jusqu’à  quel  point  les  organes  branchioïdes  sont  intéressés 
à une  communication  entre  les  deux  systèmes  vasculaires,  c’est 
ce  que  je  dois  laisser  indécis;  pour  la  solution  de  .cette  question , 
il  sera,  je  crois,  très  important  d’étudier  avec  soin  le  cours  des 
vaisseaux  sanguins  qui,  par  les  ouvertures  aux  angles  rentrants 
de  la  bouche,  se  rendent  dans  la  cavité  viscérale;  d’autant  plus 
que  ces  rameaux  sanguins  paraissent  former  de  riches  réseaux 
vasculaires  à la  face  interne  de  la  paroi  du  corps.  Des  individus 
grands  et  frais  sont  une  première  condition  pour  une  pareille  étude. 


Sauf  les  ouvertures  génitales  qu’on  trouve  chez  quelques  As- 
térides,  les  conduits  excréteurs  des  glandes  sexuelles,  et  par 
conséquent  aussi  le  mode  d’évacuation  des  produits  sexuels , sont 
jusqu’à  présent  inconnus.  J’ai  déjà  signalé,  dans  une  occasion 
antérieure  ^ ),  le  fait  extrêmement  remarquable  que , chez  les  Oursins 
mâles,  le  liquide  de  la  cavité  du  corps  est  mêlé,  à l’état  de  ma- 
turité sexuelle,  d’une  foule  de  spermatozoïdes,  et  j’ai  aussi  essayé 

D Zîir  Anat.  der  Echinen  md  Spatangen,  dans  Niederl.  ArcUv,f.  Zool.^ 

t.  I,  p.  94. 


160  C.  K.  HOFFMANN.  SUR  L^ANATOMIE  DES  ASTERIDES. 

de  montrer  que  très  probablement  ces  spermatozoïdes  doivent 
s’échapper  au  dehors  par  la  plaque  madréporique. 

Cette  conjecture  s’impose  avec  encore  plus  de  force  pour  les 
Astérides.  Le  liquide  renfermé  dans  la  cavité  interne  ne  contient 
ici  jamais  ni  œufs  ni  spermatozoïdes.  Si  ceux-ci  quittent  la  cavité 
par  la  plaque  madréporique,  la  chose  doit  donc  se  passer  d’une 
autre  manière  que  chez  les  Echinides,  car  on  sait  que  de  tout 
le  pourtour  de  la  plaque  madréporique  naît  le  canal  sacdlorme. 
Lorsqu’on  a devant  soi  une  glande  sexuelle  injectée  par  l’anneau 
vasculaire  anal , l’aspect  est  entièrement  le  même  que  celui  d’une 
glande  injectée  par  son  conduit  excréteur.  Le  liquide  sanguin 
pénètre  librement  dans  les  follicules  de  la  glande  et  circule  autour 
des  produits  sexuels.  On  est  donc  conduit  à supposer  que  les 
vaisseaux  sanguins  sont  les  voies  par  lesquelles  les  produits  sexuels 
quittent  la  glande.  Mais  l’anneau  vasculaire  anal , duquel  naissent 
les  canaux  sanguins  destinés  aux  glandes  sexuelles , est  en  con- 
nexion avec  le  canal  sacciforme.  Le  même  chemin  doit  donc  être 
suivi  par  les  .produits  sexuels.  Une  fois  parvenus  dans  le  canal 
sacciforme,  ils  peuvent  quitter  la  cavité  du  corps  à travers  la  plaque 
madréporique.  Cette  conjecture  trouve  un  appui  dans  le  fait  que 
les  Astérides,  à l’exception  de  celles  où  l’on  a constaté  la 
présence  de  fentes  sexuelles,  ne  montrent  aucune  espèce  d’ouver- 
ture par  laquelle  les  produits  sexuels  pourraient  sortir  de  la 
cavité  du  corps.  Les  fibres  musculaires  qui  existent  dans  les  vais- 
seaux et  dans  les  follicules  des  glandes  seront  d’un  grand  secours 
pour  la  progression  des  produits  sexuels , tandis  que  l’organe  glan- 
duleux inclus  dans  le  canal  sacciforme , et  qui  présente  également 
des  phénomènes  de  contraction,  n’est  sans  doute  pas  dépourvu 
non  plus  de  toute  utilité  pour  le  même  but.  Malheureusement  je 
n’ai  pas  été  à même  d’étudier  sous  ce  rapport  le  remarquable  Pteraster, 
Si  cette  hypothèse , concernant  le  mode  d’évacuation  des  produits 
sexuels,  venait  à se  confirmer,  l’affinité  entre  les  Astérides  et  les  Vers, 
signalée  par  M.  Hâckel  •),  se  trouverait  notablement  fortifiée. 

Leyde,  déc.  1872. 

*)  E.  Hâckel,  Gener.  Morphol.  der  Organismen,  1866,  t.  II,  p.  LXIII. 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  l’aNATOMIE  DES  ASTERIDES. 


161 


Explication  des  figures. 


PLANCHE  I. 


. 1.  Epithélium  de  la  peau  externe  de  V Aster acantJiion  ruhens  ; frais. 

2.  'Cellules  isolées  de  la  peau  QyiiQrïiQ  diQ  V Aster acanthion  ruhens 

après  le  traitement  par  le  bichrom.  de  pot.  à 4®/q. 

3.  Cellules  isolées  des  couches  inférieures  de  la  peau  externe  du 

A . 1 600 

meme  animal.  — . 

4.  Faisceau  de  tissu  conjonctif  de  la  peau  externe  de  V Aster a- 

canthion  ruhens. 


5.  Branchies  cutanées  de  V Aster acanthion  ruhens.  y. 

120 

6.  Pédicellaire  de  V Aster  acanthion  ruhens.  — . 

a.  Pièce  basilaire.  — h.  Pince. 

7.  Membrane  de  tissu  conjonctif,  fortement  plissée,  de  l’estomac 

de  V Asther acanthion  ruhens. 

^ 600 

8.  Couche  épithéliale  de  l’estomac  de  V Aster  acanthion  ruhens.  — . 

9.  Eléments  cellulaires  du  caecum,  y* 

10.  Eéticulum  dans  lequel  sont  déposés  les  éléments  cellulaires  de 

l’estomac. 

Les  fig.  9 et  10  sont  de  VA.  ruhens. 

11.  Coupe  transversale  d’un  bras  ^ç,V A.  ruhens.  Grrossissement  faible. 

12.  Coupe  transversale  demi-schématique  d’un  bras  d’une  Etoile 

de  mer. 

11 — 12.  a.  Petites  plaques  calcaires  spondyloïdes. 
h.  Canal  lymphatique  radial. 

c.  Vésicules  ambulacraires. 

d.  Cirres  ambulacraires. 

e.  Tronc  nerveux  radial. 

f.  Lame  verticale. 

' g.  Forte  cloison  longitudinale  de  tissu  conjonctif, 

séparant  le  canal  lymphatique  radial  du  nerf. 
h.  Feuillets  nerveux  proprement  dits , qui  se  réflé- 
chissent dans  la 
h.  Couche  nerveuse  des  cirres. 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX. 


11 


162 


C.  K.  HOFFMANN.  SUR  L^ANATOMIE  DES  ASTERIDES. 


Fig.  13.  Eléments  nerveux,  plongés  clans  une  substance  fondamentale 
finement  granuleuse,  des  feuillets  nerveux  de  VA.  ruhens 

après  le  traitement  par  l’acide  osmique. 

„ 14.  Cellules  nerveuses  isolées. 

„ 15.  Cellules  nerveuses  du  palpe. 

„ 16.  Cellules  nerveuses  de  l’œil,  après  le  traitement  par  l’acide 

660 

osmique.  — . 

„ 17.  Cellules  nerveuses  de  l’œil,  isolées.^. 

„ 18.  Cellules  pigmentaires  de  l’œil. 

„ 19.  Eléments  celluleux  situés  à l’intérieur  des  cônes  pigmentaires.  “ 

\ 

PLANCHE  II. 

„ 20.  Dessin  schématique  du  système  vasculaire  sanguin  des  Astérides. 

a.  Anneau  sanguin  anal. 

, h., b.  Vaisseaux  sanguins  pour  les  glandes  sexuelles. 

c.  Plaque  madréporique. 

d.  Canal  sacciforme. 

e.  Canal  pierreux. 

f.  Anneau  sanguin  oral  (médian), 

y.  Anneau  lymphatique. 

h.  h.  Vaisseaux  sanguins  radiaux  (tronc  principal). 

i.  i.  Vaisseaux  sanguins  radiaux  (troncs  secondaires.) 

h.  k.  Branches  transversales , qui  unissent  les  vaisseaux 
sanguins  radiaux  aux 

l.  l.  Troncs  secondaires  latéraux. 

m.  Anneau  sanguin  latéral. 

n.  Branches  qui  naissent  de  l’anneau  sanguin  latéral, 

percent  Panneau  buccal  calcaire  et  se  ramifient 
à la  face  interne  de  la  peau  dorsale  des  bras. 

„ 21.  Face  interne  de  la  peau  dorsale  de  VA.  rubens.  ‘/r 

a.  Bras  coupés. 

b.  b.  Les  cinq  gros  faisceaux  musculaires  radiaux. 

c.  c.  Les  membranes  par  lesquelles  le  disque  buccal  calcaire 

est  soudé  à la  peau  du  dos. 

d.  Anneau  sanguin  anal. 

e.  e.  Hameaux  naissant  de  cet  anneau  et  se  rendant  aux 

glandes  sexuelles. 

/.  /.  Les  deux  organes  glanduleux  qui  pénètrent  librement 
dans  la  cavité  du  corps. 

g.  Plaque  madréporique. 


C.  K.  HOFFMA.NN.  SUR  l'aNATOMIE  DES  ASTERIDES.  163 


t:: 


Fig.  22.  Face  inférieure  d’un  A.  rubens.  -f-.  Les  prolongements  odontoïdes 
du  disque  buccal  calcaire  ont  été  cassés  et  enlevés , pour 
mieux  laisser  voir  les  anneaux  vasculaires. 

a.  Ouverture  buccale. 

b.  Membrane  buccale. 

c.  Anneau  sanguin  oral  (médian). 

d.  Anneau  lamineux. 

€.  Anneau  lymphatique. 

/.  Anneau  sanguin  oral  (latéral), 
y.  Tronc  radial  principal. 

k.  Troncs  radiaux  secondaires. 

l.  Troncs  secondaires  latéraux. 

k.  Rameaux  transversaux,  qui  unissent  les  troncs  secon- 
daires radiaux  aux  troncs  secondaires  latéraux. 

„ 23.  Face  interne  du  côté  ventral  de  VA.  rubens.  -f. 

a.  Plaques  calcaires  spondjdoïdes. 

b.  Vésicules  ambulacraires. 

c.  Anneau  buccal  calcaire. 

d.  Rameaux  vasculaires  qui , à travers  les  très  petites  ouver- 

tures de  l’anneau  buccal  calcaire,  au-dessus  des  prolonge- 
ments odontoïdes,  pénètrent  dans  la  cavité  du  corps. 

e.  Ouverture  buccale. 

/.  Membrane  buccale. 

g.  Petits  corps  bruns  de  Tiedemann. 

‘ „ 24.  a. , (^. , c. , d..^  e. , /.  Eléments  cellulaires  du  liquide  sanguin. 

„ 25.  Les  petits  corps  bruns  de  Tiedemann;  de  VA.  rubeus.  y* 

„ 26.  Le  contenu  celluleux  de  ces  corps. 

„ 27  et  28.  Couche  nerveuse  des  cirres  de  VA.  rubeAis.,  après  le 

traitement  par  l’acide  osmique. 

„ 29.  Cellules  isolées  de  la  couche  nerveuse  de  VA.  rubens. 


Postscriplum.  ,x 

Ce  travail  était  déjà  sous  presse  lorsque,  grâce  à la  bienveillance 
/de  l’auteur,  j’eus  connaissance  de  la  dernière  communication  de  M.  R. 
GrreefiP  sur  l’anatomie  des  Echinodermes  [Sitzungsbericlite  der  GesellscJ/aft 
znr  Befôrderung  der  gesammten  Naturioissenscliafteîi  in  Mai'burg , 
Mittheilung  ISTo.  11,  1872).  Malheureusement  il  était  trop  tard  pour  que 
je  pusse  en  profiter. 


11* 


SECONDE  COMMUNICATION 


SUR  LES 

POISONS  À FLÈCHE  AFRICAINS, 

P4R 

A.  W.  M.  VAN  HASSELT. 

(Acad,  des  Scieac.  d’Amsterdam,  séance  du  25  Janvier  1873.) 


Au  mois  d’octobre  dernier,  J’eus  l’honneur  de  recevoir  de  M* 
le  Dr.  Thomas  K.  Fraser,  professeur  à l’université  d’Edimbourg',  une 
lettre  accompagnant  l’envoi  d’une  Notice  préliminaire  On  the  Kombi 
Arrow-poison  of  the  Manganja  district  of  Africa^  qu’il  avait  publiée  dans 
les  Proceedings  of  the  Royal  Society  of  Edinburgh  for  1862 — 70,  p.  99. 

M.  Fraser  me  demandait , de  la  façon  la  plus  courtoise , si  son 
hypothèse,  — que  le  poison  à flèche  Kombi j décrit  par  lui  en 
1870,  est  identique  avec  le  poison  à flèche  de  la  Guinée ^ men- 
tionné sub  a dans  mon  Mémoire  Sur  les  poisons  à flèche  africains , 
publié  en  mars  1871  J , — concordait  avec  mon  propre  sentiment.  Il 
déclarait  attacher  un  grand  intérêt  à cette  question , d’autant  plus 
qu’il  se  proposait  de  faire  paraître , sur  ce  même  poison  à flèche , 
un  travail  plus  étendu. 

Après  une  comparaison  soignée  des  observations  de  M.  Fraser 
et  des  miennes,  j’eus  la  satisfaction  de  pouvoir  lui  adresser  immé- 
diatement une  réponse  affirmative. 

Depuis  lors  j’ai  reçu,  grâce  à l’obligeance  de  mon  savant  cor- 
respondant, le  nouveau  travail  annoncé,  qui  a été  publié  récem- 
ment dans  le  Journal  of  Anatomy  and  Physiology , vol  VIL  Par 
cette  publication,  je  me  vois  à même  d’éclaircir  un  doute  que 
j’avais  dû  laisser  subsister  au  sujet  de  l’origine  botanique  d’un 
des  principaux  poisons  à flèche  africains , et  de  confirmer  ce  que 
j’avais  dit  de  la  nature  de  l’action  physiologique  du  poison  à flèche 

* ) M.  Fraser  ne  connaissait  cè  Mémoire  que  par  la  traduction  française  insérée 
dans  les  Archives  Néerlandaises , 1872,  p,  161. 


A.  W.  M.  VAN  HASSELT.  SECONDE  COMMUNICATION,  ETC.  165 

' À 

de  la  Guinée.  Comme  M.  Fraser  a décrit  ce  poison  quelques 
mois  avant  moi , je  me  servirai  dorénavant  de  la  dénomination  qu’il 
lui  a appliquée,  celle  de  poison  à flèche  Kombé  ^). 

1®.  Origine  botanique. 

Dans  les  conclusions  de  mon  Mémoire  précité,  j’avais  émis 
(5°)  la  conjecture: 

„Que  l’élément  essentiel  des  deux  poisons  à flèche  africains  est 
peut-être  fourni  par  une  espèce  à! EehitesJ^ 

M.  Fraser,  peu  de  temps  avant  la  publication  de  mon  travail , 
avait  traité  la  même  question  avec  plus  de  détails  et  en  meilleure 
connaissance  de  cause.  Il  disposait  de  tous  les  matériaux  néces- 
saires, grâce  à deux  envois:  l’un  du  prof.  Christison,  appartenant 
à la  collection  d’échantillons  de  poisons  à flèche  et  de  parties 
végétales  qui  avait  été  rassemblée  par  M.  Walker,  dans  l’expé- 
dition de  feu  l’Evêque  Mackenzie  à Kombé  y localité  située  sur  la 
côte  ouest  de  l’Afrique,  près  de  l’équateur;  — l’autre  du  prof. 
Sharpey,  faisant  partie  des  objets  recueillis  par  le  Dr.  Kirk,  consul 
anglais  à Zanzibar,  et  provenant  du  district  de  Manganja,  situé 
dans  le  sud-est  de  l’Afrique,  au  voisinage  des  Victoria-falls  du 
fleuve  Zambèse , où  le  Dr.  Livingstone  avait  également  eu  l’occa- 
sion de  faire  connaissance  avec  les  arcs  des  naturels  et  avec  les 
flèches  chargées  du  poison  en  question  ^). 

Le  Dr.  Kirk  écrit  que  la  plante  mère  de  ce  poison  à flèche  est 
une  grosse  liane  ligneuse , qui  grimpe  le  long  des  arbres  les  plus 
élevés  dans  les  bois  de  Manganja;  que  la  tige  atteint  un  diamètre 
de  plusieurs  pouces  anglais  et  offre  une  écorce  rude;  que  les 
fleurs  sont  d’une  couleur  jaune  clair  et  commencent  à se  développer 
au  mois  d’octobre;  que  le  fruit  ne  mûrit  qu’en  juin,  et  que  la 
partie  interne  du  péricarpe , avec  les  graines  qu’elle  contient , est 
seule  séchée  et  conservée  pour  l’usage. 


‘)  Dans  son  premier  Mémoire,  M.  Fraser  avait  écrit  le  nom  du  poison , aussi 
bien  que  celui  cUi  lieu  de  provenance,  avec  un  ^ „Kombi”  ; dans  le  nouveau 
travail;  l’un  et  l’autre  ont  pris  la  forme  „Kombé” 

D La  description  des  fièches  empoisonnées  en  usage  dans  ce  district  concorde 
en  grande  partie  avec  celle  que  j’ai  donnée  moi-même  des  flèches  des  Bosjesmans. 


166 


A.  W.  M.  VAN  HASSELT.  SECONDE  COMMUNICATION 


M.  Fraser  lui-même  décrit  les  fruits  qu’il  a reçus  {follicles)  * ) comme 
ayant  une  longueur  de  9 à 12  pouces  anglais,  une  largeur  ou  épaisseur 
maximum  d’environ  1 pouce,  et  un  poids  de  130  à 330  grains.  Ces 
fruits  renferment  de  100  à 200  petites  graines,  pesant  chacune  environ 
J-  grain,  et  pourvues  d’un  stylet  fragile,  à appendice  chevelu  très  élégant. 

• En  comparant  ces  descriptions  avec  les  indications  antérieures  don- 
nées par  Clapperton  et  M.  Griffon,  et  citées  dans  mon  Mémoire,  on  trou- 
vera entre  les  unes  et  les  autres,  quant  aux  points  essentiels,  un  accord 
très  satisfaisant  ; il  n’y  a de  divergence  un  peu  notable  que  pour  la  lon- 
gueur attribuée  aux  follicules,  mais  celle-ci,  de  même  que  dans  d’autres 
fruits,  peut  facilement  être  sujette  à quelques  variations  individuelles. 

En  tenant  compte  de  ces  données,  ainsi  que  d’autres  encore, 
et  surtout  en  s’appuyant  sur  l’examen  ultérieur  des  fleurs  com- 
muniquées, M.  le  prof.  Oliver,  de  Kew,  a reconnu  que  la  plante 
mère  du  poison  à flèche  Komhé  appartient  à la  famille  des  ApocynéeSj 
et  il  l’a  rapportée  au  genre  Strophanthus  de  De  Candolle.  Quant 
à la  détermination  spécifique,  il  avait  d’abord  identifié  la  plante 
avec  le  Str.  hispidus  D.  C. , mais , à la  suite  d’une  nouvelle  étude , il 
a rejeté  ce  nom,  et  a maintenant  décrit  définitivement  la  plante,  dans 
les  Icônes  Plantarurrij  No.  4,  sous  le  nom  nouveau  de  5/r. 

Ma  diagnose  se  trouve  donc  confirmée  dans  sa  partie  essentielle  , 
c’est-à-dire,  en  ce  qu’elle  rapportait  la  plante  à l’ordre  des  ilpo- 
cynaceae  d’Endlicher,  sous  ordre  des  tJuapocyneaej  tYihix  des  Echiteae'^ 
mais , au  lieu  d’appartenir  au  genre  Echites , la  plante  forme  une 
espèce  nouvelle  d’un  autre  genre  de  cette  tribu,  le  genre  Slro- 
phanthus;  ce  résultat  légitime  le  doute  qu’avait  déjà  émis,  au 
sujet  du  genre  EcliileSj  M.  C.  A.  J.  A.  Oudemans. 

2°.  Action  physiologique. 

Voici  comment  je  m’étais  exprimé  à cet  égard  dans  mes  Con- 
clusions ■ (n^  6)  : 

„Les  expériences  de  M.  Pelikan  et  les  nôtres  paraissent 

Bien  que  cela  ne  soit  pas  mentionné,  on  peut  inférer  de  la  description 
originale  que  ces  fruits  et  les  autres  parties  de  la  plante  possédaient  les  mêmes  carac- 
tères, soit  qu'ils  eussent  été  obtenus  de  l’Afrique  orientale  ou  de  l’Afrique  occidentale. 

*)  Je  dois  rappeler  ici  que  toutes  mes  expériences  à ce  sujet  ont  été  faites 
avec  le  concours  de  mon  ami  le  prof.  Kooyker. 


SUR  LES  POISONS  à FLECHE  AFRICAINS. 


167 


mettre  hors  de  doute  que  ces  poisons  à flèche  appartiennent  tous 
les  deux  aux  poisons  du  cœur  de  l’école  toxico-physiologique.” 

Si  dans  cet  énoncé  ^ de  même  que  dans  les  Conclusions  précé- 
dentes , j’ai  parlé  des  deux  poisons  à flèche  les  plus  connus  de 
l’Afrique , je  dois  maintenant  faire  remarquer  que  c’est  seulement 
sur  l’origine  du  poison  à flèche  Kombé  Fraser  (riz  mon  poison  à 
flèche  de  la  Guinée)  que  les  recherches  récentes  ont  jeté  un  nou- 
veau jour  ; quant  au  poison  à flèche  du  Cap,  faute  de  renseignements 
botaniques , nous  en  sommes  enpore  réduits  à la  simple  conjecture , — 
fondée  sur  l’analogie  d’action,  — qu’il  est  identique  au  précédent  ^). 

En  ce  qui  concerne  le  mode  d’action  du  poison  à flèche  Kombé, 
les  belles  recherches  de  M.  Fraser  ne  laissent  plus  place  au  doute. 
Il  a opéré,  en  effet,  non-seulement  avec  ce  poison  lui-même , mais 
aussi  et  surtout  avec  un  extrait  alcoolique  retiré  des  graines  du 
SlrophanthuH , et  fes  expériences  entièrement  semblables , exécutées 
avec  ces  deux  matières,  n’ont  pas  porté  exclusivement,  comme 
les  miennes,  sur  des  grenouilles,  mais  aussi  sur  des  lapins, 
des  chiens,  des  chats  et  des  pigeons  ^).  Il  a pu  établir  ainsi,  d’une 
façon  tout  à fait  certaine , et  indépendante  des  recherches  anté- 
rieures, la  vérité  du  résultat  provisoire  énoncé  par  M.  Pelikaü 
pour  le  poison  à flèche  du  Gabon  (très  probablement  identique 
avec  celui  de  Kombé) , savoir , que  ce  poison , de  même  que  sa  plante 
mère,  doit  être  rangé  parmi  les  poisons  du  cœur  de  Kolliker, 
Pelikan  et  autres.  L’extrait  dont  M.  Fraser  s’est  servi  dans  ses 
expériences  fut  préparé  en  traitant  les  graines  de  Slrophanthus  par 

*)  A propos  de  ce  poison  à flèche  du  Cap,  je  ne  puis  m’empêcher  de  marquer 
ma  surprise  de  ce  que  M.  Praser,  dans  son  second  Mémoire,  par  conséquent 
avec  connaissance  de  cause,  l’ait  passé  entièrement  sous  silence.  Il  cite  mon 
travail  une  seule  fois,  à la  page  141,  pour  dire  — pas  une  lettre  de  plus  — 
/ que  le  poison  à flèche  Kombé  „se  rencontre  également  en  Guinée.”  Il  ne  fait 
même  aucune  mention  des  titres  de  M.  Pelikan  à la  première  découverte  (1865) 
de  l’action  que  le  poison  à flèche  Kombé  exerce  sur  le  cœur.  Cette  réserve  s’ex- 
plique d’autant  moins  que , dans  une  Note  (p.  154),  se  trouvent  rappelées,  par  contre, 
quelques  expériences  non  publiées , què  M.  le  prof.  Sharpey  aurait  faites  sur  ce  même 
poison  dès  l’année  1862.  Pourquoi  soulever  ici  de  nouveau  une  question  de  priorité  ? 

-)  Chez  ces  animaux,  toutefois,  l’action  paralysante  sur  le  cœur  ne  peut  être 
constatée,  à beaucoup  près,  avec  le  même  degré  d’évidence  et  de  certitude  que 
chez  les  grenouilles. 


168  A.  W.  M.  VAN  HASSELT.  SECONDE  COMMUNICATION. 


de  Talcool  fort,  soumettant  la  teinture  vert-jaunâtre  fournie  par 
ce  traitement  à une  distillation  modérée , et  évaporant  doucement 
le  résidu  au  bain-marie  sous  la  pompe  pneumatique.  L’extrait 
excessivement  amer,  ainsi  obtenu,  consistait  encore  pour  moitié  en  une 
huile  fixe  inerte , et  montrait  au  microscope  une  multitude  de  petits 
cristaux  aciculaires , qui  paraissent  constituer  le  principe  actif,  auquel 
M.  Fraser  propose  de  donner  provisoirement  le  nomde  strophanthine. 

Avec  yV  de  grain  de  cet  extrait  alcoolique , introduit  par  diverses 
voies,  il  obtenait  déjà,  rapidement,,  des  effets  mortels  chez  les  gre- 
nouilles; avec  chez  les  pigeons;  avec  î chez  les  lapins;  etc. 

Kenvoyant  pour  plus  de  détails  au  Mémoire  original,  je  rap- 
porterai seulement  les  conclusions  que  l’auteur  tire  de  ses  recherches  : 
1®.  Le  Strophanthus  (=  poison  à flèche  Kombé)  2igit  primitive- 
ment sur  le  cœur  *),  et  finit  par  déterminer  la  paralysie  de  cet 
organe  en  état  de  systole  ventriculaire.  * 

2®.  La  respiration  J chez  les  animaux  à sang  froid,  persiste 
encore  pendant  quelques  minutes  après  l’arrêt  total  du  cœur. 

3®.  Les  muscles  volontaires  du  corps  sont  ensuite  atteints  à 
leur  tour  ; ils  sont  d’abord  agités  de  légères  convulsions , avec 
accroissement  de  tonicité , mais  bientôt  eux  aussi  sont  arrêtés  dans 
leur  fonctionnement  par  la  paralysie , et  alors  ils  deviennent  rapi- 
dement roides  et  montrent  une  réaction  acide.  Le  trouble  de  leurs 
fonctions  ne  se  produit  que  consécutivement ^ après  que  l’action  sur 
le  cœur  est  devenue  complète.  Toutefois,  il  est  indépendant  de 
cette  dernière , ainsi  que  de  l’action  sur  le  système  cérébro-spinal , 
^ ) Des  cœurs  de  grenouilles , entièrement  séparés  du  corps  et  divisés  en  mor- 
ceaux , n’ayant  donné , immédiatement  après  l’arrêt  produit  par  le  poison , qu’une 
réaction  négative  à la  suite  de  l’excitation  électrique,  l’auteur  incline  à admettre 
l’action  immédiate  et  directe  sur  le  tissu  musculaire  du  cœur,  sans  intervention 
des  nerfs  et  ganglions  intra-cardiaques.  Il  est  à regretter  que,  pour  résoudre 
cette  question , il  n’ait  pas  répété  l’expérience  comparative  de  M.  Pelikan , dans 
laquelle  un  cœur  excisé , mais  se  contractant  encore , et  un  nerf  musculaire  bien 
préparé  et  isolé  étant  plongés  conjointement  dans  une  dissolution  aqueuse  d’un 
poison  cardiaque,  déantiar  par  exemple,  le  premier  perdait  rapidement  la  pro- 
priété d’être  excité  par  le  courant  galvanique , tandis  que  le  second  la  conservait 
beaucoup  plus  longtemps.  — Comme  ma  petite  provision  de  poison  à flèche  du 
Cap  était  épuisée  et  que  je  ne  possédais  pas  de  poison  Komhé,  je  n’ai  pu  exé- 
cuter moi-même  cette  expérience  de  contrôle. 


SUR  LES  POISONS  à FLECHE  AFRICAINS. 


169 


et  doit  être  considéré  comme  la  conséquence  du  contact  direct  du 
principe  actif  avec  les  fibres  musculaires  elles-mêmes. 

4®.  Les  mouvements  réflexes,  qui  ont  leur  origine  dans  la  moe//e 
allongée  et  la  moelle  épinière,  sont  éteints  peu  de  temps  après  la 
paralysie  totale  du  cœur  ; mais  le  pouvoir  de  conduire  Tinfluence 
motrice  persiste , tant  dans  ces  centres  que  dans  les  grands  troncs  ner- 
veux, jusqu’après  la  paralysie  complète  des  fibres  musculaires  striées. 

En  comparant  les  résultats  de  ces  expériences  ^),  soit  d’une 
manière  générale,  soit  dans  les  particularités  résumées  de  1 — 4, 
avec  ceux  obtenus  pour  d’autres  bien  connus  du  cœur  et 

des  muscles  y je  crois  qu’aux  quatre  conclusions  de  M.  Fraser  on 
pourrait  en  ajouter  une  cinquième,  savoir: 

5®.  L’action  pbysio- toxicologique  de  l’extrait  alcoolique  du 
Strophanthus  Kombé  Oliv.  offre  une  analogie  frappante  avec  celle 
du  latex  desséché  de  VAntiaris  toxicaria  Lesch. ; ou,  en  d’autres 
termes,  la  sirophanthine  de  Fraser  agit,  sous  le  rapport  toxico- 
dynamique,  de  la  même  manière  que  V antiarme  de  Mulder. 


Parmi  les  poisons  à flèche  différents,  ou  du  moins  signalés 
jusqu’ici  sous  des  noms  différents,  qu’on  trouve  en  Afrique , il  en 
est  encore  un  dont  je  veux  dire  ici  quelques  mots  ; c’est  celui  des 
Somalis  ou  Somaulis , peuplade  nègre  qui  habite  la  partie  la  plus 
orientale  de  l’Afrique ,, près  du. golfe  d’Aden  (empire  d’Adsjan). 
Mon  ami,  le  Dr.  Dammann,  officier  de  santé  de  1ère  classe  de 
notre  Marine , a rapporté  d’Aden,  lors  de  son  dernier  voyage , un 
arc,  un  carquois  et  quelques  flèches  empoisonnées  provenant  de 
cette  peuplade.  Les  expériences  préliminaires  faites  par  lui  et 
M.  le  prof.  Place,  dans  le  Laboratoire  physiologique  d’Am- 
/ sterdam , ont  déjà  montré  que  l’indication  donnée  antérieure- 
ment par  M.  Arnott  au  sujet  de  ce  poison  à flèche  africain, 
savoir,  qu’il  contiendrait  de  la  strychnine  (voir  ma  commu- 

Les  procédés  nouveaux  de  la  physiologie  expérimentale  , — tels  que  la 
destruction  préalable  de  la  moelle  épinière,  ou  l’extinetion  du  mouvement  réflexe 
par  la  méthyl-strychnine,  la  section  des  nerfs  vagues,  l’isolement  du  nerf  ischia- 
tique  , la  ligature  des  muscles  des  membres , etc.  ont  été  appliqués  par  M.  Fraser 
avec  le  plus  grand  soin  et  la  plus  grande  habileté. 


170  A..  W.  M..VAN  HASSELT.  SECONDE  COMMUNICATION,  ETC. 

nication  précédente),  ne  saurait  être  admise,  attendu  que  le 
poison  ne  détermine  aucun  phénomène  tétanique.  Peut-être  est-il 
permis  de  supposer  que  M.  Arnott  s’est  égaré  sur  une  fausse  voie 
botanique , et  qu’il  n’a  pas  essayé  l’action  du  poison , mais  a vu  ou 
appris  qu’on  le  préparait  au  moyen  d’une  plante  grimpante,  regardée 
par  lui  à tort  comme  une  espèce  de  strychnos , parce  qu’à  cette 
époque  on  ignorait  encore  que  d’autres  plantes  grimpantes  (notam- 
ment le  strophanthus)  sont  également  employées , dans  cette  partie 
du  monde,  à la  préparation  des  poisons  à flèche.  Ce  qui  donne 
quelque  vraisemblance  à cette  hypothèse,  c’est  que  le  district 
Manganja,  où  le  poison  à flèche  Kombé  se  rencontre  aussi,  est 
situé  sur  la  même  partie  de  la  côte  orientale  d’Afrique,  quoique 
plus  au  sud.  Les  expériences  de  MM.  Place  et  Dammann  n’ont 
toutefois  pas  conduit,  jusqu’ici,  à la  découverte  de  l’identité  des 
poisons  a flèche  Somali  et  Kombé  sous  le  rapport  de  leur  action 
sur  le  cœur.  Les  résultats  ultérieurs  de  ces  recherches  seront 
accueillis  avec  intérêt,  car  ils  pourront  contribuer  à'  soulever 
le  voile  qui  a si  longtemps  caché  la  nature  des  poisons  à flèche 
' africains. 

Dès  à présent  se  dégage  ce  fait  extrêmement  remarquable , que 
sur  au  moins  deux  et  peut-être  (eu  égard  aux  districts  intérieurs 
du  Cap)  sur  trois  points  très  espacés  de  ce  vaste  continent,  et 
en  présence  de  l’inflnie  variété  de  la  végétation  tropicale,  des 
nègres  ignorants  choisissent , comme  par  instinct , une  seule  et 
même  plante  pour  préparer  leurs  poisons  à flèche  cardicides.  Du 
reste , le  même  phénomène  étrange  s’est  produit , avec  un  caractère 
encore  plus  fortement  accusé , dans  nos  possessions  des  Indes  orien- 
tales , où  le  fameux  Antiaris  toxicaria  a fourni  pendant  longtemps , 
non-seulement  à Java  et  à Célèbes,  mais  aussi  à Bornéo  et  dans 
le  groupe  d’îles  de  Sumatra,  un  des  ingrédients  essentiels  des 
poisons  à flèches  employés  par  les  indigènes. 


Amsterdam,  Janvier  1873. 


SUR  LA  SIGNIFICATION 


DU 

CONGIIÈS  MÉTÉÜHÜLOGiaUE  DE  VIENNE 

POUR  l’avenir  de  la  météorologie, 

PAR 

C.  H.  D.  BUYS-BALLOT. 


Enfin , le  premier  pas  a été  fait  ; un  Congrès  de  métérologistes 
s’est  réuni  à Vienne  au  mois  de  septembre  dernier.  Des  comptes- 
rendus  des  travaux  de  cette  Assemblée  ont  déjà  été  publiés , avec 
plus  ou  moins  d’extension,  dans  la  plupart  des  langues  et  des  pays 
de  l’Europe.  Il  convient  qu’un  récueil  scientifique  néerlandais  en 
dise  également  quelques  mots,  et  c’est  pourquoi  je  veux  résumer 
ici  les  principales  décisions  prises  par  le  Congrès,  de  même  que 
je  me  propose  de  revenir  de  temps  en  temps  sur  ce  sujet  dans 
les  Archives  néerlandaises , à mesure  que  nous  nous  rapprocherons 
du  but  poursuivi. 

Aussitôt  qu’on  eut  appris  que  MM.  Bruhns,  Jelinek  et  Wild 
I voulaient  bien  se  charger  de  dresser  un  programme  pour  une  première 
conférence,  à tenir  à Leipzig  en  août  1872,  et  qu’il  fut  connu 
que  notre  Nestor,  M.  le  professeur  Dove,  soutenait  ce  projet  de 
son  approbation,  beaucoup  de  météorologistes  s’empressèrent  de 
communiquer  leurs  idées  et  leurs  vues  aux  trois  savants  que  je  viens 
de  nommer.  Moi  aussi  je  tâchai  de  leur  apporter  ma  part  de  coopé- 
ration, soit  par  lettres,  soit  par  la  publication  d’une  Note  intitulée 


172 


C.  H.  D.  BUYS-BALLOT  SUR  LA  SIGNIFICATION 


Suggestions  on  a uniform  System  of  meteorological  observations  j et 
l’année  suivante,  après  la  réunion  de  la  Conférence  de  Leipzig, 
par  une  nouvelle  Note,  Seguel  to  the  Suggestions.  En  prenant  la 
peine  de  comparer  les  détails  dans  lesquels  je  vais  entrer  avec 
les  propositions  dont  on  avait  donné  connaissance  par  la  voie  de 
l’impression,  on  pourra  juger  jusqu’à  quel  point  celles-ci  ont  été 
adoptées  par  les  membres  du  Congrès. 

Ç’a  été  une  déception  pour  nous  de  voir  que  plusieurs  météo- 
rologistes éminents  manquaient  au  Congrès  de  Vienne,  et,  en 
particulier,  que  la  France  n’y  avait  envoyé  aucun  délégué.  Les 
représentants  des  autres  pays  de  l’Europe,  toutefois,  s’y  rencon- 
trèrent dans  les  dispositions  les  plus  bienveillantes , et  avec  le  vif 
désir  d’arriver,  en  sacrifiant  chacun  quelque  chose  de  leurs  vues 
individuelles,  à une  entente  commune.  De_ l’Amérique  même  nous 
était  venu  le  général  Myer,  Chief  signal  officer  à Washington, 
qui  par  ses  avis  contribua  beaucoup  à donner  convenablement 
satisfaction  aux  principaux  desiderata  de  la  Météorologie. 

Une  grande  partie  du  temps  fut  consacrée  à la  discussion  des 
divers  instruments  propres  à fournir  des  observations  exactes,  et 
au  sujet  desquels  chacun  apporta  le  résultat  de  son  expérience 
personnelle.  On  s’occupa  aussi  de  la  question  de  savoir  comment 
les  observations  devaient  être  communiquées.  Naturellement , chacun 
aura  à donner  l’ensemble  des  observations  qui  sont  désirées  par  la 
majorité  des  météorologistes.  Tout  le  monde  ne  se  propose  pas  les 
mêmes  recherches,  et  il  s’agissait  de  satisfaire,  autant  que  possible , 
à tous  les  vœux  légitimes.  Il  faut  qu’on  arrive  ainsi  à fixer  un 
minimum  d’informations.  Il  va  sans  dire,  d’ailleurs,  que  chacun 
reste  libre  dans  le  choix  de  ce  qu’il  croira  encore  devoir  calculer 
ou  faire  connaître  au-delà  du  contingent  commun. 

En  ce  qui  concerne  le  mode  d’expédition  des  ouvrages  et  autres 
documents,  il  fut  décidé  conforme  à la  proposition  de  M.  H.  Wild, 
Directeur  de  l’Observatoire  Physique  Central  de  St.  Pétersbourg, 
que  chaque  envoi  serait  accompagné  ou  précédé  d’un  billet 
imprimé,  dont  une  moitié  porterait  d’un  côté  le  titre  de  l’ouvrage 
et  de  l’autre  côté  l’adresse  de  l’expéditeur.  De  cette  manière, 


DU  CONGRÈS  MÉTÉOROLOGIQUE  DE  VIENNE,  ETC. 


173 


personne  n’aura  à prendre  la  peine  d’écrire  une  lettre  spéciale 
pour  accuser  la  réception  de  l’envoi;  il  suffira  d’arracher  la 
moitié  du  billet  dont  il  vient  d’être  question,  d’y  appliquer  son 
cachet,  de  la  plier  et  de  l’expédier  à titre  d’imprimé. 

Un  point  plus  important,  c’est  que  le  Congrès  est  tombé  d’ac- 
cord pour  recommander,  dans  chaque  pays,  l’établissement  d’un 
Bureau  central.  L’Institut  météorologique  néerlandais  adresse  ses 
publications  à deux  cents  correspondants  étrangers,  etje  sais  par 
expérience  combien  ces  envois  se  font  avec  moins  de  frais  et  par- 
viennent plus  sûrement  à leur  destination , depuis  que  M.  le  pro- 
fesseur von  Baumhauer,  Secrétaire  de  la  Société  Hollandaise  des 
Sciences  à Harlem , s’est  donné  la  peine  de  fonder  chez  nous  un  pareil 
Bureau  scientifique  central.  Pourtant , les  avantages  qui  en  résultent 
seraient  encore  beaucoup  plus  considérables  si,  d’abord,  toutes 
les  Institutions  scientifiques  du  pays  participaient  à l’œuvre,  et 
si,  surtout,  les  autres  Etats  de  l’Europe,  — car  en  Amérique  la 
Smithsonian  Institution  a depuis  longtemps  pris  à cœur  la  centrali- 
sation des  expéditions  scientifiques, — -se  décidaient  à créer  chez 
eux  des  établissements  analogues.  Aujourd’hui,  en  effet,  le  Bureau 
néerlandais  peut  bien  envoyer  les  livres  à l’agent  qu’il  a com- 
missionné pour  chaque  pays  ou  pour  chaque  groupe  de  pays , mais 
cet  agent  est  ensuite  obligé  de  suivre  la  longue  voie  ordinaire , 
et  de  faire  beaucoup  plus  de  frais  que  n’aurait  à en  supporter 
un  établissement  spécial , directement  érigé'  en  vue  des  échanges. 
Il  me  semble  que  les  Académies  des  sciences  des  divers  pays  sont 
les  centres  naturellement  indiqués  pour  la  réception  et  la  distri- 
bution des  ouvrages  scientifiques. 

Une  autre  question  importante , agitée  dans  le  Congrès , est  celle 
I des  unités  de  poids  et  mesures  qu’il  convient  d’employer.  Beaucoup 
de  membres  inclinaient  pour  le  système  métrique;  néanmoins,  en 
ce  qui  concerne  le  baromètre  et  le  thermomètre , l’échelle  anglaise 
et  l’échelle  de  Fahrenheit  trouvèrent  aussi  encore  des  partisans 
déclarés.  Ce  serait  déjà  un  progrès  si  les  lignes  de  Paris  et  l’échelle 
de  Réaumur  cessaient  d’être  en  usage , et  qu’on  se  restreignît  par 
conséquent  préalablement  à des  échelles  de  deux  espèces  diffé- 


174 


C.  H.  D.  BUYS-BALLOT.  SUR  LA  SIGNIFICATION 


rentes;  du  moins,  tant  qu’on  ne  peut  pas 'encore  se  résondre  à 
sacrifier  un  peu  de  son  amour  propre,  afin  d’économiser  des 
heures  de  travail  et  tarir  une  abondante  source  d’erreurs.  La 
méthode  adoptée  en  Néerlande  supprime  bien  en  grande  partie 
les  difficultés  pratiques,  mais  ce  n’est  pas  précisément  tendre 
à l’uniformité,  ce  grand  but  du  Congrès,  que  de  continuer  à se 
perdre  dans  la  dualité  et  la  pluralité. 

Il  fut  soutenu  par  un  assez  grand  nombre  de  membres  qu’il 
n’est  pas  nécessaire  de  faire  imprimer  tout  ce  qu’on  observe , qu’on 
imprime  déjà  beaucoup  trop,  qu’il  vaudrait  mieux  se  demander  mu- 
tuellement des  renseignements,  d’autant  plus  que,  malgré  l’étendue 
des  publications , il  n’en  reste  pas  moins  impossible  d’y  faire  entrer 
tout  ce  qui  pourrait  être  raisonnablement  désiré  dans  quelques 
cas,  par  exemple,  pour  certaines,  recherches  sur  le  magnétisme 
terrestre,  qui  exigent  la  connaissance  des  éléments  magnétiques 
pour  tous  les  instants  du  temps.  — Mais,  si  l’on  ne  publie  pas 
toutes  les  observations , il  faut  pourtant  qu’il  en  existe  des  copies , 
et  qu’on  sache  où  ces  copies  sont  conservées.  C’est  là,  à mon  avis, 
un  point  essentiel:  être  sobre  en  fait  de  publication  d’observations 
locales,  et  donner  plutôt  quelques  certaines  de  francs  pour  faire 
copier  une  série  en  détail , qu’en  dépenser  autant  de  milliers  pour 
des  recueils  imprimés,  qui  n’en  restent  pas  moins  incomplets,  et 
dont  une  grande  partie  ne  sera  jamais  consultée.  Mieux  vaudrait , 
à coup  sûr,  consacrer  cet  argent  à l’entretien  d’observatoires  dans 
les  parties  lointaines  de  la  surface  terrestre. 

Telle  a été  l’opinion  du  Congrès  en  général , bien  qu’il  n’en  ait 
pas  encore  fait  l’objet  d’une  recommandation  formelle,  comme  je 
l’eusse  souhaité.  L’examen  ultérieur  de  cette  question,  ainsi  que 
d’autres  points  d’une  nature  générale,  a été  confié  à un  Comité 
permanent,  élu  par  ’ le  Congrès.  Ce  Comité,  composé  de 
MM.  Wild,  Scott,  Mohn,  Jelinek,  Cantoni,  Bruhns  et  Buys-Ballot, 
fonctionnera  pendant  deux  années,  s’assemblera  à Utrecht  au 
mois  de  Septembre  prochain,  préparera  la  réunion  du  Congrès 
futur,  et  en  attendant  se  mettra  en  correspondance  avec  les 
Directeurs  des  Institutions  centrales  des  divers  pays.  En  réponse 


DU  CONGRÈS  MÉTÉOROLOGIQUE  DE  VIENNE,  ETC.  175 

à sa  première  circulaire,  très  libéralement  répandue,  le  Comité 
a déjà  recueilli  de  différents  côtés  des  assurances  précieuses 
de  concours.  N’est-il  pas,  en  effet,  du  plus  haut  intérêt  qu’il  puisse 
établir  un  échange  d’idées  avec  les  principaux  représentants  de 
la  science  météorologique  dans  chaque  pays,  recevoir  d’eux  des 
éclaircissements  au  sujet  des  particularités  ou  des  besoins  locaux , 
et  apprendre  quelles  sont , aux  yeux  de  la  majorité  des  observa- 
teurs , les  mesures  les  plus  utiles  ? Que  tous  ceux  qui  partageraient 
cette  manière  de  voir , et  qui  n’auraient  pas  reçu  la  circulaire  du 
Comité,  veuillent  bien  m’en  faire  la  demande  et  ensuite  la  pro- 
pager autant  que  possible.  ' A défaut  de  lettre , l’envoi  d’une  simple 
adresse  imprimée  suffira  pour  faire  connaître  au  Comité  qu’on  désire 
entrer  et  rester  en  relations  avec  lui.  Les  ouvrages  qu’on  voudra 
bien  m’adresser,  ouvrages  qui  seront  présentés  au  Comité  réuni, 
et  qu’il  conviendrait,  à mon  avis,  de  conserver  dans  une  Biblio- 
tèque  générale , seront  aussi  considérés  comme  la  preuve 
qu’on  souhaite  être  tenu  au  courant  de  ce  que  le  Comitéj  fait  ou 
propose. 

Ainsi  pourra  être  accompli  le  projet  formulé  et  chaleureusement 
développé  devant  le  Congrès  par  M.  Fradesso  da  Silveira,  Con- 
seiller du  Roi  de  Portugal  et  météorologue  éminent,  et  par  M. 
Plantamour,  de  Genève,  tenu  par  tous  en  si  haute  estime  comme 
astronome,  physicien  et  météorologue.  Ce  projet  tendait  à la  publi- 
cation d’un  ouvrage  universel , dans  lequel  serait  représenté  l’état 
du  monde  entier  au  même  instant.  M.  Plantamour  cita  les  Annuaires 
météorologiques  néerlandais  comme  réalisant  en  partie  cette  idée , 
quoique  leur  champ  s’étende  peu  au-delà  de  l’Europe,  et  que  toutes 
‘les  parties  de  cette  partie  du  monde  n’aient  pu  y être  traitées, 
à beaucoup  près,  d’une  manière  uniforme,  vu  que  l’auteur  ne 
put  utiliser  les  lieux  qu’il  eût  choisis  mais  qu’il  dût  prendre  ceux 
desquels  on  lui  envoyât  les  observations.  Il  est  permis  d’espérer 
que  le  Comité  pourra  obtenir  un  travail  analogue , sur  une  région 
déterminée,  de  chacun  des  Directeurs  d’institut,  qui  ainsi  se 
partageraient  l’étude  météorologique  de  la  surface  du  globe,  de 
la  même  manière  que  les  astronomes  distribuent  entre  eux  l’étude 


176 


C.  H.  D.  BÜYS'BALLOT.  SUR  LA  SIGNIFICATION 


des  différentes  parties  du  ciel  ou  celle  des  questions  particulières . 
Ces  travaux  devraient  être  exécutés  d’après  un  même  plan  général , 
fixé  d’avance , afin  de  pouvoir  être  comparés  l’un  avec  l’autre  et 
considérés  tous  ensemble.  C’est  pour  cette  espèce  de  publication 
qu’une  forme  commune  est  une  condition  de  rigueur. 

Je  signalerai  enfin  l'importante  proposition  du  général  Myer, 
qui  a été  adoptée  par  le  Congrès , et  qui  est  même  déjà  entrée  dans  la 
période  d’application,  grâce  à l’activité  de  son  auteur.  Il  s’agit 
de  réunir  des  observations  faites  au  même  instant  de  temps  absolu , 
savoir,  à 7 h.  35  m.  du  matin  pour  l’Amérique,  et  à 1 h.  4 m. 
de  l’après-midi,  temps  d’Utrecht,  pour  l’Europe.  C’est  là  une 
excellente  mesure,  qui  exercera  certainement  une  influence  favo- 
rable sur  le  concours  à établir  entre  tous  les  observateurs.  Sans 
doute , il  n’y  a pas  à en  attendre  une  utilité  pratique  immédiate , 
surtout  à cause  des  grandes  lacunes  qui  existent  encore  dans  le 
réseau  météorologique  ; mais  ce  n’en  est  pas  moins  le  seul  moyen 
qui  puisse  nous  conduire  un  jour  à la  connaissance  des  états  simul- 
tanés sur  toute  la  surface  terrestre,  et  par  conséquent  aussi  à celle 
de  leur  mode  de  propagation.  A ce  titre , je  vois  dans  la  mesure 
en  question  un  commencement  de  réalisation  du  vœu  que  j’ex- 
primais en  1850,  savoir,  que  le  ton  donné  par  la  Néerlande  pût 
trouver  de  l’écho  dans  le  monde. entier  ^). 

Le  côté  pratique,  celui  des  applications  dont  la  science  mété- 
orologique est  susceptible,  n’a  pas  non  plus  été  oublié  par  le 
Congrès.  Déjà  à Leipzig , l’année  précédente , une  sous-commission , 
composée  de  MM.  Scott,  Neumayer  et  Buys-Ballot,  avait  été 
chargée  de  faire  un  rapport  sur  la  question  de  savoir  s’il  existait 
des  raisons  suffisantes  pour  attendre , d’après  des  états  connus  de 


*)  ,,Car  la  Météorologie  deviendra  une  science  par  l’association  et  par  le  télé- 
graphe électrique Xa  vraie  méthode , celle  des  déviations  , est  maintenant 

mise  en  lumière  par  des  exemples.  Elle  portera  plus  de  fruits  à mesure  que 
l’observation  embrassera  un  terrain  plus  étendu , etc.”  ( Uitkomsten  der  waarnemingen 
te  JJtrecht  gedaan  in  1849  en  1850.)  Principalement  la  préface  du  Jaarboekde 
e,iPog g.  Annalen,  Ergânzungsband  IV,  p.  559.  Aulforderung  der  Beobachter 
das  Sammeln  am  vielen  Orten  zu  erleichtern. 


DU  CONGRÈS  MÉTÉOROLOGIQUE  DE  VIENNE,  ETC.  177 

l’atmosphère  et  surtout  d’après  les  hauteurs  barométriques  observées 
simultanément  en  des  points  différents,  l’arrivée  prochaine  des 
tempêtes , et  si  l’on  était  assez  avancé  pour  porter  ces  prévisions , 
par  des  signaux , à la  connaissance  du  public.  La  sous-commission 
s’est  acquittée  de  cette  tâche , en  s’aidant  des  nombreuses  infor 
mations  reçues , et  son  rapport , approuvé  par  le  Congrès  de  Vienne , 
verra  le  jour  sous  peu.  Dans  l’entretemps,  un  appareil  télégraphique 
pour  le  service  de  campagne  a été  imaginé  par  M.  Kromhout, 
major  du  genie  hollandais,  et  cet  appareil,  déjà  adopté  pour  sa 
destination  spéciale,  a aussi  été  approprié  à la  transmission  des 
signaux  relatifs  au  temps.  Il  permet  de  donner  54  signaux  diffé- 
rents, qui  sont  distinctement  visibles  à de  grandes  distances,  et 
qui  satisferont  par  conséquent  mieux  que  ceux  de  l’aéroclinoscope , 
aujourd’hui  en  usage  chez  nous. 

Le  Congrès  a apprécié  tout  particulièrement  les  recherches  de 
M.  le  professeur  Mohn , à Christiania , de  M.  Clement  Ley , en 
Angleterre,  et  du  capitaine  Hofmeyer,  directeur  de  l’Institut 
météorologique  de  Copenhague.  Ce  dernier  présenta  de  magnifiques 
cartes,  ayant  rapport  à .la  formation  et  â la  marche  progressive 
de  différentes  tempêtes.  Chacun  s’empresse  d’exprimer  le  voeu 
que  ce  beau  travail  pût  être  publié. 

On  a encore  reconnu  l’opportunité  de  réunir  bientôt  une  Confé- 
rence maritime , qui  aura  à s’occuper  des  observations  qu’il  convient 
de  faire  exécuter  à bord  des  navires , et  de  la  méthode  à suivre 
pour  déduire  de  ces  observations  les  routes  maritimes  les  plus 
rapides  et  les  plus  sûres.  Le  travail  préparatoire  à la  réunion  de 
cette  Conférence  a été  confié  à une  Commission , dont  les  membres 
sont:  MM.  Scott,  Neumayer,  Mohn,  Mouchez  et  Buys-Ballot. 
Il  est  clair  que  les  observations  systématiques  qu’on  a en  vue 
donneront  aussi  une  puissante  impulsion  à notre  connaissance  des 
phénomènes  qui  se  passent  au  sein  de  l’Océan  ou  au-dessus  de 
sa  surface. 


Archives  Néerlandaises,  T.  IX. 


12 


SUR 


LA  CONSTANCE  OU  LA  VARIABILITÉ 

DE  LA 

VALEUR  DE  COMBINAISON  DES  ÉLÉMENTS, 

PAR 

P.  J.  VAN  KERCKHOPF. 


La  chimie  des  dernières  années  s’est  enrichie  d’un  principe 
nouveau  et  important,  grâce  auquel  de  grands  progrès  ont  été 
réalisés  par  rapport  aux  idées  qu’on  se  forme  de  la  manière  dont 
les  éléments  sont  unis  l’un  à l’autre  dans  leurs  combinaisons.  Les 
vues  théoriques  dérivées  de  ce  principe  ont  en  même  temps  exercé 
une  influence  irrécusable  sur  l’accroissement  de  nos  connaissances 
en  ce  qui  concerne  les  faits.  Ce  principe,  qu’on  désigne  sous  le 
nom  de  principe  de  la  valence  ou  de  la  valeur  de  combinaison 
des  éléments , pose  en  règle  générale  que  les  atomes  des  éléments 
ne  sont  pas  tous  équivalents , mais  qu’il  existe  des  groupes  dif- 
férents, dont  les  atomes , bien  qu’équivalents  entre  eux , sont  égaux 
en  valeur  à deux  ou  un  plus  grand  nombre  d’atomes  d’un  élément 
donné,  pris  pour  mesure  commune.  A l’époque  où  il  n’était  pas 
question  d’atomes,  mais  d’équivalents,  on  admettait  simplement 
la  loi  démontrée  que  les  éléments  peuvent  se  remplacer  en  pro- 
portions définies , sans  toutefois  (pour  le  rappeler  en  passant)  rester 
entièrement  fidèle  aux  faits,  par  exemple  en  ce  qui  regarde  l’azote. 
On  n’avait  pas  tenu  compte  de  l’observation  que,  pour  beaucoup 
d’éléments,  les  plus  petites  quantités  possible,  qui  entrent  dans 
les  combinaisons  ou  qui  en  sortent,  ne  sont  pas  dans  le  rapport 
de  ces  équivalents. 

Mais,  s’il  règne  aujourd’hui  à peu  près  unanimité  au  sujet  du 


P.  J.  VAN  KERCKHOFF.  SUR  LA  CONSTANCE  OU  LA  VARIABILITE,  ETC.  179 

principe  de  la  valence  en  général,  il  existe  pourtant  encore  des 
divergences  d’opinion  en  ce  qui  touche  un  point  spécial.  Tandis 
que  quelques-uns  admettent  que  la  valence  de  chaque  atome  élé- 
mentaire est  une  grandeur  constante , aussi  invariable  que  le  poids 
atomique , d’autres  sont  d’avis  que  le  même  atome  se  présente  tantôt 
avec  une  valence  plus  grande,  tantôt  avec  une  valence  plus  petite. 
En  d’autres  termes , on  se  trouve  en  présence  de  deux  théories  oppo  • 
sées , celle  de  la  constance  de  la  valence  et  celle  de  sa  variabilité. 

Comme  en  beaucoup  d’autres  circonstances,  la  lutte  des  opinions 
ne  peut  ici  conduire  à aucune  solution  si  l’on  n’est  pas  d’accord  sur 
la  signification  des  mots  employés.  Si  par  valence  on  entend , avec 
quelques  chimistes,  l’indication  du  nombre  maximum  d’atomes  d’un 
certain  radical , pris  pour  unité , que  puisse  fixer  un  élément  donné , 
il  suit  de  cette  définition  même  que  la  valence  est  invariable  pour  cet 
élément  ; la  notion  de  variabilité  se  trouve  exclue  dès  l’origine.  Mais 
si  l’on  demande  avec  quel  nombre  de  radicaux  univalents  une  matière 
donnée  entre  réellement  en  combinaison , et  que,  laissant  à l’expé- 
rience le  soin  de  répondre , on  applique  le  nom  de  valence  au  nombre 
ainsi  obtenu,  on  trouve  que  celui-ci  n’est  pas  toujours  le  même. 
Il  en  résulte  nécessairement  que  la  valence  est  alors  dite  variable. 

Sans  éclaircissements  ultérieurs,  les  deux  manières  de  voir  semblent 
donc,  en  effet,  s’exclure  réciproquement.  Et  pourtant,  dans  maint  cas, 
l’opposition _ n’est  pas  aussi  tranchée  qu’on  serait  porté  à le  croire* 
Assez  souvent  la  différence  gît  plutôt  dans  les  termes  employés 
que  dans  la  chose  même.  Considérons  celle-ci  de  plus  près.  Il 
va  sans  dire  que  les  partisans  des  deux  opinions  s’appuient  sur 
les  mêmes  faits,  et  leur  but  est  aussi  le  même,  savoir,  déduire 
ces  faits  comme  conséquences  nécessaires  d’un  principe  simple. 

Voyons  donc  quelle  explication  les  deux  théories  donnent  d’un 
même  fait,  et  choisissons  pour  cela  un  des  nombreux  exemples  simples 
qui  se  présentent  d’eux-mêmes.  Un  atome  de  carbone  forme  avec  un 
atome  d’oxygène  l’oxyde  de  carbone,  avec  deux  atomes  d’oxygène 
l’anhydride  carbonique.  Ceux  qui  regardent  la  valence  comme  une 
grandeur  constante  nomment  l’atome  de  carbone , pour  des  raisons 
très  valables,  quadri valent , et  c’est  ainsi  qu’il  fonctionne  évidem- 

12* 


180 


P.  J.  VAN  KERCKHOFF  SUR  LA  CONSTANCE 


ment  dans  Tacide  carbonique;  ils  le  disent  d’ailleurs  aussi  quadri- 
valent  dans  l’oxyde  de  carbone , bien  que  là  il  ne  soit  uni  qu’à  un 
seul  atome  d’oxygène  bivalent;  mais,  ajoutent-ils,  dans  cette 
dernière  combinaison  l’atome  de  carbone  n’est  pas  saturé , il  possède 
encore  deux  valences  libres. 

Ceux  qui  admettent  la  variabilité  de  la  valence  soutiennent 
qu’elle  se  manifeste  clairement  dans  l’exemple  en  question.  Dans 
l’oxyde  de  carbone  l’atome  de  carbone  est  bivalent,  parce  qu’il 
n’est  uni  qu’à  un  seul  atome  bivalent  d’oxygène.  Avec  cette  valence , 
toutefois,  son  pouvoir  de  combinaison  avec  l’oxygène  n’est  pas  épuisé  ; 
dans  d’autres  conditions  il  peut  fixer  un  second  atome  d’oxygène 
et  fonctionner  alors  comme  quadrivalent.  Ce  fait , que  l’at.  C déjà 
uni  à 1 at.  O peut  en  prendre  encore  un  second , et  qu^il  est  par 
conséquent  capable,  dans  des  circonstances  déterminées,  de  jouer 
le  rôle  d’élément  quadrivalent , ce  fait , dis-je , n’est  pas  nié  par  les 
partisans  de  la  valence  variable.  Mais,  selon  eux,  aussi  longtemps 
que  la  molécule  d’oxyde  de  carbone  persiste  sans  altération,  la 
valence,  dans  cette  combinaison,  n’est  que  de  deux  unités. 

On  peut  maintenant  se  demander  si  toute  la  question  ne  se  réduit  à 
une  dispute  de  mots,  lorsque  l’un  dit  : l’at.  C est  toujours  quadriva- 
lent , mais , dans  certaines  substances , deux  seulement  de  ces  quatre 
valences  sont  utilisées  ; tandis  que  l’autre  déclare  que  dans  une  cer- 
taine combinaison  l’at.  C est  bivalent , dans  une  autre  quadrivalent. 
Cette  déclaration , en  effet , ne  contient-elle  pas  implicitement  l’aveu 
que  le  carbone  de  la  première  combinaison  possède  encore  deux 
valences  disponibles  pour  fixer  une  nouvelle  quantité  de  matière  ? 
La  différence  consiste  seulement  en  ceci , que  l’un  fait  spécialement 
attention  à la  valence  telle  qu’elle  apparaît  dans  la  combinaison  qui 
persiste  sans  altération , tandis  que  l’autre  s’attache  de  préférence 
au  maximum  de  valence  que,  selon  lui,  l’atome  peut  manisfester. 

Il  y a donc,  d’après  ce  qui  précède,  des  cas  où  les  deux  manières 
de  voir  concernant  la  valence  peuvent  être  mises  d’accord.  Mais, 
dans  beaucoup  d’autres  cas,  l’explication  qu’elles  donnent  de  la 
constitution  des  corps  est  tout  à fait  différente  de  l’une  à l’autre. 
Je  n’ai  pas  l’intention  d’entrer  ici  dans  beaucoup  de  détails  au  sujet 
de  ces  différences;  il  suffira  d’en  citer  un  petit  nombre  d’exemples. 


ou  LA  VARIABILITÉ  DE  LA  VALEUR  DE  C031BIINAIS01N , ETC.  181 

Afin  de  sauver  le  principe  de  la  valence  invariable , par  exemple 
pour  des  éléments  univalents  tels  que  Cl,  Br,  I,  etc.,  on  admet 
souvent  que  dans  les  combinaisons  de  ces  éléments , où  le  nombre 
des  atomes  d’oxygène  est  plus  grand  que  celui  des  atomes  d’hy- 
drogène , ces  atomes  d’oxygène  sont  en  partie  unis  entre  eux , au 
lieu  d’être  rattachés  par  leur  valence  entière  à l’atome  multivalent. 
Cette  opinion  trouve  peu  d’appui  dans  les  faits  connus.  En  effet, 
les  matières  où  l’existence  d’une  pareille  liaison  mutuelle  peut 
être  regardée  comme  à peu  près  certaine,  se  distinguent  par  la 
facilité  avec  laquelle  elles  se  décomposent  en  cédant  de  l’oxygène 
(p.  e.  les  peroxydes  H^O^,  BaO^,  etc.).  Or,  tel  n’est  pas  le  cas, 
par  exemple,  pour  les  acides  du  chlore,  qui  sont  d’autant  plus 
stables  qu’ils  renferment  plus  d’atomes  d’oxygène.  Le  mode  de 
décomposition  et  les  produits  des  combinaisons  sulfurées  H^SO% 

pourraient  éclaircir  la  dif- 
férence de  liaison  mutuelle.  Quelques  chimistes  admettent,  par 
exemple,  que  l’acide  perchlorique  a pour  formule  de  constitution 
Cl-0*0*0-0*H;  mais  que  penser  alors  des  combinaisons  H^IO^ 
et  H ^10®,  pour  lesquelles  une  pareille  interprétation  n’est  pas 
possible?  Si  l’on  procède  avec  celles-ci  de  la  même  manière, 
l’iode  doit  être  au  moins  trivalent  dans  la  première  et  au  moins 
quinquevalent  dans  la  seconde,  à moins  qu’on  ne  rapporte  ces 
substances  aux  combinaisons  dites  moléculaires,  supposition  qui 
cadrerait  mal  avec  leurs  propriétés  et  avec  celles  de  leurs  sels. 

Les  corps ,.  tels  que  ceux  de  l’exemple  cité , conduisent  donc 
nécessairement  à la  conclusion  que  si , par  exemple , I fonctionne 
comme  univalent  dans  la  plupart  de  ses  combinaisons , il  se  montre 
avec  une  valence  supérieure  dans  H ^10^  et 

Lorsqu’on  admet  l’invariabilité  de  la  valence,  et  qu’en  même 
temps  on  suppose  l’existence  de  liaisons  mutuelles  entre  les  atomes 
d’oxygène,  il  ne  reste  donc  autre  chose  à faire  qu’à  poser  la 
valence  de  l’iode  égale  à cinq  ; on  dira  alors  que  l’iode  est  quin- 
quevalenf , mais  que  dans  la  plupart  des  combinaisons  cet  élément 
possède  quatre  valences  libres. 

Il  me  semble  que  la  question  de  la  valence  constante  ou  variable 


182 


P.  J.  VAN  KERCKHOFF.  SUR  LA  CONSTANCE 


ne  peut  pas  être  tranchée  d’une  manière  abstraite;  dans  la 
discussion  de  cette  question  on  considère  toujours  trop  exclusive- 
ment l’atome  spécial  dont  on  veut  fixer  la  valeur  de  combinaison , 
en  admettant  tacitement  que  sa  valence  est  indépendante  de  la 
nature  des  atomes  auxquels  il  s’unit  et  des  circonstances  qui  pré- 
sident à cette  union. 

Je  me  propose  d’attirer  l’attention  sur  quelques-uns  de  ces  points 
qui , à mon  avis , sont  entièrement  perdus  de  vue  dans  la  recherche 
de  la  valence,  ou  dont  au  moins  on  ne  tient  pas  un  compte  suffisant. 

En  premier  lieu,  je  m’occuperai  de  la  nature  des  atopies  qui . 
se  trouvent  ou  vont  entrer  en  combinaison  avec  un  atome  déter- 
miné. Déjà  en  1865,  à l’occasion  de  quelques  remarques  sur  la 
confusion  alors  régnante  entre  les  idées  d’affinité  et  d’atomicité 
(valence),  j’ai  montré  brièvement  que  le  même  atome  peut 
posséder  deux  valences  différentes,  suivant  qu’il  s’unit  à des  atomes 
élémentaires  différents. 

Le  fait  qu’un  même  élément,  ainsi  que  l’exprime  la  loi  depuis 
longtemps  connue  des  proportions  multiples , prend  des  quantités 
différentes  d’un  seul  et  même  autre  élément , plaide  déjà  en  faveur 
de  la  valence  variable.  Mais  nous  trouvons  surtout  une  différence 
dans  la  valeur  de  combinaison , en  cherchant  quel  est  le  maximum 
de  divers  radicaux  qui  est  fixé  par  un  même  élément.  C’est  ce 
qu’éclairciront  les  exemples  suivants:  (pag.  183.) 

En  citant  ces  exemples,  on  a supposé  que,  dans  les  com- 
binaisons des  éléments  avec  l’hydrogène  et  l’oxygène , les  atomes  . 
d’hydrogène  sont  unis  à l’atome  multivalent  sous  la  forme  d’hy- 
droxyle,  et  que  le  surplus  des  atomes  d’oxygène  s’y  rattachent 
par  leur  valence  entière.  Cette  hypothèse  a déjà,  plus  haut,  été 
indiquée  en  passant,  et  elle  peut  être  légitimée,  je  crois,  parla 
considération  des  acides  hydratés  et  des  sels. 

Si  l’on  examine  attentivement  le  tableau  ci-dessus , qui  pourrait 
être  notablement  étendu,  on  arrive  aux  conclusions  suivantes: 

1 Que  la  valence  des  atomes  élémentaires  dépend  bien  réellement 
de  la  nature  des  autres  matières , radicaux  simples  ou  composés  ; 
qui  forment  des  combinaisons  avec  eux. 


ou  LA  VARIABILITÉ  DE  LA  VALEUR  DE  COMBINAISON,  ETC.  183 


Un  atome. 

avec 

avec 

avec 

avec 

Au 

I 

(OH), 

N 

H3 

CI3 

0(0H) 

H,C1 

(OH), 

0(OH), 

P 

H3 

CI3 

OU 

H.I 

0(0H)3 

As 

H3 

CI3 

(C^HJ.CI 

0(0H), 

Sb 

H3 

CI3 

CI3 

(C^HO.Cl 

0(OH), 

Bi 

CI3 

(C,H3)C1, 

0(0H) 

Os(OH) 

S 

H, 

Cl, 

K3 

eu 

(C,Hs)3l 

(OH)e 

(OH),Cl, 

(0H)3CU 

' 

Se 

Cl, 

K. 

OU 

0, 

0(0H), 

03(0H), 

Te 

H, 

Cl, 

K3 

OU 

0, 

0,(0H), 

Cl 

H 

(OH) 

K 

0(0H) 

0,(0H) 

0,(0H) 

Br 

H 

K 

0,(0H) 

03(0H) 

I 

H 

K 

Cl 

OU 

0,(0H) 

Oa/OH) 

Pb 

Cl, 

0, 

. Pe 

Cl, 

(OH), 

s, 

VI 

comme  (Pe,)CU 
" (OH)e 

//  O3 

0,(OK), 

s 

Mn 

Cl, 

(OH), 

OU 

0(0H), 

O3 

VI 

comme  (Mn,)03 

Pe 

0,(0H), 

comine{Mnj).0,(OH), 

Cr 

Cl, 

(OH), 

O3 

comme  (Cr,)Os 

Pe 

O3 

0,(OH), 

-/  (Cr.).0.(0H)“ 

Mo 

CI3 

1 eu 

Pe 

184 


P.  J.  VAN  KERCKHOFF.  SUR  LA  CONSTANCE 


Comme  exemples  propres  à mettre  cette  proposition  en  évidence , 
. je  citerai  Tazote , dont  Tatome  ne  prend  pas  plus  de  3 atomes  de  H ou 
de  Cl,  mais  par  contre  5 atomes  de  OH  ; le  phosphore  et  Tantimoine , 
qui  ne  peuvent  fixer  que  3 atomes  de  H,  tandis  qu’ils  en  fixent  5 de  Cl; 
l’or,  qui  ne  s’unit  qu’à  1 atome  de  I,  mais  à 3 atomes  de  OH. 

Nulle  part  le  fait  n’est  aussi  accusé  que  dans  le  groupe  du  soufre. 
Le  maximum  d’atomes  d’hydrogène  avec  lequel  un  atome  de  ces 
éléments  se  combine  n’est  que  de  deux.  Pour  le  chlore  il  s’élève 
à quatre,  et  pour  l’hydroxyle  il  va  jusqu’à  six.  Mais  la  différence 
se  laisse  aussi  constater  chez  les  halogènes.  Tandis  que  ceux-ci 
fonctionnent  comme  univalents  par  rapport  à l’hydrogène  et  aux 
métaux , les  mêmes  atomes  sont  tri-,  quinque-  et  même  septemva- 
lents  lorsque  l’oxygène  et  Thydroxyle  ensemble , ou  aussi  l’oxygène 
seul,  forment  les  autres  principes  constituants. 

2®.  Les  éléments  montrent  généralement  leur  valence  la  plus 
faible  vis  à vis  de  l’hydrogène.  Avec  le  chlore,  lors  même  que 
l’atome  en  question  fournit  une  combinaison  correspondante , il  y en 
a ordinairement  encore  une  autre , dans  laquelle  la  valence  s’élève 
plus  haut.  La  valence  la  plus  forte  se  rencontre  dans  les  composés 
qui  contiennent,  soit  de  l’oxygène  seul,  soit  de  l’oxygène  déjà 
uni  à de  l’hydrogène,  à un  métal,  ou  à un  radical  acide.  Dans 
quelques  cas , la  valence  est  aussi  très  élevée  par  rapport  au  fluor. 

3®*  Lorsqu’à  un  atome  élémentaire  s’unissent  à la  fois  plusieurs 
radicaux  différents , simples  ou  composés , sa  valeur  de  combinaison 
est  plus  élevée  que  lorsque  tous  les  radicaux  associés  sont  homogènes. 

Au  nombre  des  observations  les  plus  simples  et  les  plus  ordinaires 
de  la  science  est  à coup  sûr  celle-ci , qu’il  existe  une  grande  diffé- 
rence dans  la  facilité  avec  laquelle  des  radicaux  différents , de  la 
même  valence,  sont  admis  dans  une  molécule  déjà  formée  ou  y 
remplacent  d’autres  principes  constituants.  Pour  mettre  hors  de  doute 
l’influence  prépondérante  qu’exerce  sur  ce  phénomène  la  nature 
des  éléments , qui  dans  le  groupe  en  question  se  trouvent  combinés 
à l’atome  multivalent,  il  suffit  de  rappeler  que , dans  une  molécule 
qui  renferme  déjà  un  radical  dit  acide,  l’hydrogène  encore  existant 
est  remplacé  plus  facilement  par  un  radical  positif  que  par  un 


ou  LA  VARIABILITÉ  DE  LA  VALEUR  DE  COMBINAISON,  ETC.  185 

négatif  ; et  réciproquement.  Je  crois  superflu  de  citer  des  exemples 
à Tappui  de  cette  observation. 

Avec  le  fait  rappelé  se  trouve  maintenant  aussi  en  connexion 
la  valence  supérieure  qu’on  remarque  souvent , comme  il  a été  dit 
plus  haut,  dans  le  cas  où  les  radicaux  fixés  par  un  atome  mul- 
tivalent ne  sont  pas  homogènes,  mais  hétérogènes.  L’azote,  par 
exemple,  ne  peut  s’unir  à plus  de  trois  atomes  d’hydrogène  ou  de 
chlore,  chacun  séparément;  or,  si  à l’état  d’ammoniaque  il  est 
incapable  de  fixer  encore  deux  atomes  d’hydrogène , n’y  a-t-il  pas 
lieu  d’admettre  que  cela  tient  précisément  à ce  qu’il  est  déjà  uni 
à cet  élément  positif,  tandis  que  rien  ne  l’empêche  de  s’approprier 
deux  atomes  univalents  lorsqu’un  de  ceux-ci,  le  chlore  par  exemple, 
présente  un  caractère  opposé?  Chez  les  acides  et  les  hydrates 
d’acides  on  rencontre  de  nombreux  exemples  d’une  pareille  action  ; 
entre  1 atome  d’oxygène  bivalent  et  2 atomes  d’hydroxyle  univa- 
lent , on  trouve , malgré  la  parité  de  leur  valeur  de  combinaison , 
une  différence  dans  l’aptitude  à se  combiner  avec  un  atome  mul- 
tivalent; on  connaît  beaucoup  d’acides  dans  lesquels  on  n’a  pas 
réussi  à remplacer  1 atome  d’O  constituant  par  2 groupes  OH; 
tels  sont,  entre  autres:  HglOe,  H3PO4,  HSb02,  CO2,  etc. 

4°.  Dans  beaucoup  de  cas  on  remarque  que  la  valence  d’un 
élément  est  plus  faible  par  rapport  à un  élément  qui  diffère  de 
lui  par  sa  nature  et  ses  propriétés,  que  par  rapport  à un  autre 
ayant  avec  lui  une  analogie  pus  grande. 

. 5°.  Quand  une  molécule  peut  donner  naissance  à deux  autres 
(toutes  deux  saturées)  par  simple  dédoublement , celui-ci  s’effectue 
assez  souvent.  C’est  ce  qu’on  observe  surtout  chez  les  combinaisons 
hydroxylées  supérieures,  qui  se  décomposent  facilement  en  eau 
et  en  une  combinaison  dans  laquelle  les  atomes  d’oxygène  sont 
liés  par  leur  valence  entière  à l’atome  multivalent. 

Si  le  tableau  donné  ci-dessus,  qui  ne  renferme  que  dix-sept 
éléments  et  n’indique  que  quelques-uns  des  radicaux  avec  lesquels 
on  les  a obtenus  combinés , est  étendu  à tous  les  autres  éléments , 
on  reconnaît  que  la  plupart  des  atomes  élémentaires  possèdent  une 
valence  qui  dépend  de  la  nature  des  radicaux  simples  ou  corn- 


186 


P.  J.  VAN  KERCKHOFF.  SUR  LA  CONSTANCE 


posés.  Le  nombre  des  éléments  dont  les  atomes  ont  une  valeur  de 
combinaison  constante,  est  relativement  petit. 

Pour  rbydrogéne,  il  n’y  a absolument  aucun  motif  d’admettre 
qu’il  se  présente  jamais  avec  une  valence  autre  que  l’unité,  et 
c’est  là  précisément  la  raison  qui  fait  adopter  de  préférence  cet 
élément  comme  mesure  commune  de  la  valence.  Si  l’on  s’abstient  de 
groupements  forcés,  la  valence  de  l’oxygène  est  également  une 
grandeur  constante.  A part  ces  deux  éléments , il  n’y  a plus  que 
les  métaux  alcalins,  qui  fonctionnent  toujours  comme  univalents, 
le  bore,  qui  est  toujours  trivalent,  et  le  silicium,  qui  est  quadri- 
valent  ; quant  à l’argent , toute  incertitude  n’est  pas  encore  dissipée. 
Le  carbone,  enfin,  ne  se  montre  que  très  exceptionnellement  à 
l’état  d’atome  bivalent. 

L’existence  des  combinaisons  chimiques  est  liée  à une  limite  de 
température,  au-dessus  de  laquelle  les  combinaisons  se  défont, 
mais  qui  peut  être  très  variable  pour  des  matières  différentes. 
Est-il  maintenant  permis , sans  tenir  compte  de  cette  température , 
de  parler  de  la  valence  comme  d’une  grandeur  absolue  et  con- 
stante? N’est-il  pas  probable  que  la  valence  dépend  du  degré  de 
chaleur,  et  que  par  conséquent  un  atome  donné  peut  modifier  sa 
valeur  de  combinaison  vis-à-vis  d’autres  atomes  lorsque  la  tem- 
pérature s’élève  ou  s’abaisse? 

La  réponse  à cette  question  doit  être  cherchée  dans  l’expérience. 

Portons  notre  attention,  en  premier  lieu,  sur  les  combinaisons 
d’un  élément  avec  des  quantités  différentes  d’un  autre  élément. 
De  ces  combinaisons  très  nombreuses,  nous  n’avons  pas  besoin 
de  citer  beaucoup  d’exemples;  les  suivants  pourront  suffire: 


TlBrg 

— . Tl  Br 

Mn,CL 

— 

MnC4 

TICI3 

— . Tl  Cl 

T1,03 

— 

Tl^O  . 

Pt  Cl  4 

— PtCla 

PbOj 

— 

PbO 

Au  Cl  3 

— Au  Cl 

CuO 

— 

Cu2  0 

PCI5 

- PCI3 

CojOj 

— 

CoO 

Tous  les 

corps  notés  dans  la  première  colonne , 

et  qui , 

n’importe 

ï quelle 

manière  ils  aient  été 

produits,  sont  stables  à la  tem- 

pérature  ordinaire , se  transforment  par  la  chaleur  en  combinaisons 


ou  LA  VARIABILITÉ  DE  LA  VALEUR  DE  COMBINAISON,  ETC.  187 

de  la  seconde  colonne.  Or , dans  celles-ci , les  atomes  des  éléments 
multivalents  sont  unis  à un  nombre  moindre  des  autres  atomes 
que  dans  les  corps  de  la  première  colonne.  Les  nouvelles  matières 
ainsi  engendrées  sont  stables  aussi  à la  température  ordinaire; 
elles  subsistent  jusqu’à  ce  qu’il  se  produise  des  conditions  dans 
lesquelles , reprenant  ce  qui  avait  été  perdu , elles  récupèrent  leur 
composition  primitive.  Dans  tous  ces  exemples,  nous  voyons  la 
valence  s’abaisser  à une  température  plus  élevée. 

Sans  vouloir  affirmer  maintenant  que  par  l’accroissement  de  la 
chaleur  la  valence  doive  s’abaisser  toujours  et  chez  tous  les  éléments , 
on  peut  pourtant  établir,  sans  crainte,  que  dans  beaucoup  de  cas 
la  valence  dépend  de  la  température  et  baisse  quand  celle-ci  monte. 

Il  y a toutefois  encore  d’autres  circonstances  qui  exercent  sur 
la  valeur  de  combinaison  une  influence  plus  ou  moins  importante. 
Je  citerai , entre  autres , les  quantités  relatives  des  corps  qui  peuvent 
s’unir  pour  former  un  corps  plus  composé.  Les  cas  connus , où  deux 
mêmes  matières  sont  susceptibles  de  fournir  des  combinaisons  diffé- 
rentes , suivant  les  quantités  qui  entrent  en  contact , sont  en  nombre 
si  immense,  que  je  dois  me  borner  à en  rapporter  quelques-uns. 


à titre  d’exemple: 
PCI,  - 

PCI, 

SnCl, 

— S11CI4 

SbCl, 

— 

SbCl, 

ICI 

- ICI, 

FeCl, 

— 

Fe,Cl, 

P2  ^3 

- 

TeC4 

— 

TeCl^ 

CO 

- CO, 

Hg,Cl, 

— 

HgCl, 

Sn(OH), 

— Sn(OH) 

Il  serait  inexact  de  considérer  exclusivement  l’influence  d’une 
seule  des  circonstances,  telle  que  la  température,  les  quantités 
relatives , etc.  Leur  variation  simultanée  peut  favoriser  ou  contrarier 
le  changement  de  la  valence.  Nous  en  trouvons  un  exemple  frappant 
dans  la  détermination  de  la  densité  de  vapeur  de  PCI 5 , faite  récem- 
ment par  M.  Würtz,  où  l’on  voit  la  dissociation  de  cette  matière 
(c’est-à-dire , dans  le  cas  actuel , l’abaissement  de  la  valence  du  phos- 
phore) , qui  commence  déjà  à une  basse  température , être  empêchée 
par  l’excès  d’un  des  produits  de  la  décomposition,  savoir  PCI3. 

De  ce  qui  précède,  je  crois  pouvoir  conclure  que  la  valence  des 
atomes  est  dépendante: 


188 


P.  J.  VAN  KERCKHOFF.  SUR  LA  CONSTANCE 


1®.  de  la  nature  des  atomes  auxquels  ils  sont  unis; 

2®.  de  la  température; 

3®.  des  quantités  relatives. 

Je  n’examinerai  pas  en  ce  moment  s’il  y a encore  d’autres  cir- 
constances capables  d’influer  sur  la  valence.  De  différentes  actions, 
toutefois,  je  crois  pouvoir  inférer  qu’il  existe,  par  exemple,  une 
certaine  relation  entre  la  valence  et  l’énergie  chimique  potentielle. 
C’est  ainsi  que  les  trois  éléments  Cl,  BretI,  qui  ne  se  combinent 
avec  l’hydrogène  qu’en  une  seule  proportion,  savoir,  atome  à atome, 
peuvent,  comme  on  sait,  fixer  assez  d’oxygène  ou  d’hydroxyle 
pour  que  leurs  atomes  doivent  être  considérés  comme  quinque- 
valents  ou  même  d’une  valence  encore  plus  haute.  Mettons  en  regard 
de  ce  fait  le  travail  chimique  dont  ces  mêmes  éléments  sont  ca- 
pables en  présence  de  l’hydrogène  et  de  l’oxygène.  D’après  les 
expériences  de  M.  Thomsen,  on  a: 

ci.  Br.  I. 

(R,  H,  Aq)  39315  Cal.  28376  Cal.  13171  Cal. 

(R2,  O5,  Aq)  — 20477  „ — 57589  „ + 18717.  „ 

Les  derniers  de  ces  nombres  peuvent  être  regardés  (attendu  que 
les  dissolutions  de  M.  Thomsen  contenaient  200  molécules  d’eau) 
comme  s’appliquant  à des  combinaisons  atomiques, 

2 R (OH) 5 = R2  O5  +5  H^O  dans  un  excès  d’eau  1). 

On  voit  que  dans  ce  cas  le  travail  chimique  est  très  grand  pour 
la  valence  la  plus  faible , et  au  contraire  très  petit  pour  la  valence 
la  plus  haute,  et  même  négatif  pour  le  Cl  et  le  Br. 

Une  observation  qui  reste  jusqu’ici  inexpliquée,  c’est  que  la 
valence  des  éléments,  lorsqu’elle  s’élève  on  s’abaisse,  procède 
toujours  par  sauts  de  deux  unités.  On  ne  saurait,  en  effet,  con- 
sidérer comme  une  explication  ce  que  M.  Frankland  dit  à ce  sujet. 
Les  exceptions  à la  règle  dont  il  s’agit  sont  si  peu  nombreuses, 
qu’on  est  conduit  à rechercher  si  ces  anomalies  ne  seraient  pas 
purement  apparentes.  Parmi  ces  exceptions,  auxquelles  appartien- 
nent aussi  HgCl  et  Hg Br,  fixons  notre  attention  sur  l’oxyde  d’azote? 

0 Ber.  Ch.  Ges.,  1873,  p.  429. 


ou  LA  VARIABILITÉ  DE  LA  VALEUR  DE  COMBINAISON,  ETC.  189 

à titre  d’exemple.  Si,  d’après  la  densité  de  vapeur,  la  molécule 
de  ce  corps  doit  être  représentée  par  NO,  on  doit  y regarder  ou 
bien  l’azote  comme  bivalent,  ou  bien  l’oxygène  comme  uni-  ou 
trivalent.  Mais  on  peut  se  demander  si  le  groupe  NO  doit  réelle- 
ment être  considéré  comme  une  molécule,  et  s’il  ne  conviendrait 
pas  de  comparer  ce  corps , tel  que  nous  le  connaissons , aux  atomes 
libres , qui  apparaissent  lorsqu’une  température  très  élevée  agit  sur 
des  molécules  à atomes  homogènes  ou  hétérogènes.  Le  degré  de 
chaleur  auquel  cela  a lieu  varie  considérablement  avec  la  nature 
des  substances;  pour  le  peroxyde  d’azote  N2O4,  entre  autres , on 
sait  avec  certitude  qu’il  commence  déjà  à basse  température  à se 
scinder  en  atomes  NO 2-  Quelque  chose  d’analogue  arrive  peut-être 
pour  l’oxyde  d’azote , dont  la  température  de  décomposition  pourrait 
être  située  très  bas.  S’il  en  est  ainsi,  ce  groupe  atomique  doit  se 
distinguer  par  une  grande  facilité  à contracter  des  combinaisons, 
de  même  que,  par  exemple,  l’hydrogène,  le  chlore  et  autres  élé- 
ments possèdent  à l’état  naissant , c’est-à-dire  comme  atomes , une 
plus  grande  énergie  chimique  qu’à  l’état  de  molécules.  On  observe 
efiectivement  cette  propriété  dans  l’oxyde  d’azote,  ainsi  qu’il  résulte 
de  son  action  sur  l’oxygène,  le  chlore,  les  acides  et  les  sels  de 
protoxyde  de  fer.  Il  n’y  a pas  à dissimuler,  toutefois,  qu’on  peut 
opposer  à cette  manière  de  voir  des  raisons  très  fortes , et  en  premier 
lieu  la  circonstance  que  l’oxyde  d’azote  est  un  gaz  permanent. 

En  traitant  de  la  variabilité  de  la  valence  des  atomes  élémentaires, 
on  ne  doit  pas  négliger  de  tenir  encore  compte  d’un  autre  point. 

On  admet  assez  généralement  que,  dans  une  combinaison  d’un 
atome  multivalent  avec  des  atomes  univalents  de  la  même  espèce , 
tous  ces  atomes  univalents  sont  liés  de  la  même  manière , c’est-à-dire 
avec  une  force  égale;  de  sorte  que,  dans  CH 4 par  exemple , aucun 
des  atomes  d’hydrogène  ne  se  distinguerait  des  autres  par  rapport 
au  carbone. 

Ce  principe  semble  en  effet,  à raison  de  sa  simplicité,  être  le 
plus  probable,  et  on  peut  donc  bien  l’admettre  aussi  longtemps 
qu’il  n’y  a pas  de  faits  qui  le  contredisent.  Toutefois , il  convient 
de  préciser  la  signification  qui  doit  y être  attachée.  Si,  dans 


190 


P.  J.  VAN  KERCKHOFF.  SUR  LA  CONSTANCE 


Texemple  cité , on  désigne  les  atomes  d^hydrogène  successivement 
par  a y h y c et  dy  le  principe  en  question  doit  être  entendu  de  cette 
façon,  que,  lors  de  la  décomposition  de  la  matière,  il  n’existe 
aucune  raison  pour  que,  par  exemple,  a quitte  plutôt  que  h y 
ou  b plutôt  que  c ou  dy  ou  réciproquement,  la  combinaison 
avec  le  carbone.  En  supposant  donc  que,  par  exemple,  deux  atomes 
H soient  retirés  de  la  combinaison  (peu  importe  que  le  reste  con- 
serve ou  non  une  existence  indépendante) , nous  admettons  qu’il 
faudra  toujours  la  même  dépense  de  force,  quels  que  soient  les 
atomes,  a et  ô,  ou  b etc,  ou  c et  (/,  ou  a et  c/,  ou  a et  c,  ou  ô et 
qu’on  fait  sortir.  Mais  de  là  il  ne  suit  nullement  que  cette  force , 
nécessaire  pour  éliminer  deux  des  quatre  atomes  H , soit  la  même 
que  celle  qui  est  exigée  pour  enlever  les  deux  atomes  restants. 
Il  est  au  contraire  probable  que  la  force  avec  laquelle  les  deux 
derniers  atomes  univalents  restent  unis  à l’atome  multivalent,  a 
une  valeur  différente  (plus  grande?  ou  plus  petite?)  de  celle  qui 
suffit  pour  dégager  les  deux  premiers. 

Le  formène  CH 4 est  cité  ici  comme  seul  exemple , mais  on  pourrait 
ajouter  un  grand  nombre  de  matières  qui  pourraient  également 
servir  à éclaircir  ce  qui  vient  d’être  dit. 

Il  n’arrive  pas  toujours  que  la  force  avec  laquelle  les  atomes 
d’un  élément  s’unissent  à un  autre  décroisse  avec  le  nombre  de 
ces  atomes,  comme  cela  est  le  cas  pour  PCI  3 et  PCI  5,  As  ^ S 3 et 
As 2 S5,  etc.;  parfois  un  atome  multivalent,  qui  est  déjà  combiné 
à un  ou  plusieurs  atomes  d’une  autre  nature , en  prend  un  nombre 
plus  grand  avec  plus  de  facilité  qu’il  ne  s’était  attaché  les  premiers  ; 
c’est  ainsi,  par  exemple,  que  SnO,  SnC^,  FeO,  FeH2  02  se 
transforment  plus  facilement  en  Sn  O o , Sn  Cl  2 O,  Fe"^2  03etFe2H405, 
qu’ils  ne  prennent  eux-mêmes  naissance  par  la  réaction  des  éléments. 
Il  est  à présumer  que  la  cause  de  cette  différence  gît  dans  la 
difficulté  avec  laquelle  la  molécule  primitive  se  sépare  en  atomes. 
Pour  le  carbone,  du  moins,  la  probabilité  de  cette  explication  a 
été  établie  par  M.  Thomsen. 

Lorsque  les  atomes  univalents  attachés  à l’atome  multivalent 
sont  hétérogènes  entre  eux,  on  n’est  sans  doute  pas  disposé  à ad- 


ou  LA  VARIABILITÉ  DE  LA  VALEUR  DE  COMBINAISON,  ETC.  191 

mettre  que  deux  atomes  de  nature  différente  soient  retenus  avec 
la  même  force.  Quant  à savoir  lequel  de  ces  atomes  hétérogènes 
se  détachera  le  premier,  cela  dépend  naturellement  en  premier 
lieu  de  T inégalité  du  travail  qu’ils  sont  capables  d’accomplir 
avec  l’atome  multivalent,  et  ensuite  pour  une  bonne  part  aussi, 
dans  les  actions  chimiques  ordinaires , de  la  nature  de  la  matière 
qui  agit  sur  la  combinaison. 

Dans  les  considérations  qui  viennent  d’être  développées,  j’ai  admis 
la  grandeur  relative  des  molécules  telle  qu’elle  est  adoptée 
aujourd’hui  pour  les  molécules  chimiques , sans  me  préoccuper  de 
la  question  de  savoir  si , pour  les  matières  liquides  et  solides , cette 
grandeur  est  la  même  que  celle  qu’on  croirait  devoir  déduire  des 
propriétés  physiques. 

Lorsqu’on  regarde  la  loi  d’ Avogrado  comme  le  seul  principe  con- 
ducteur dans  l’établissement  de  la  grandeur  moléculaire,  il  est 
impossible  de  déterminer  celle-ci  pour  les  matières  solides  et  liquides 
auxquelles  on  ne  parvient  pas , même  sous  une  pression  diminuée , 
à faire  prendre  l’état  de  vapeur.  Pourtant , la  notion  de  molécules  , 
au  sens  purement  chimique,  est  également  applicable  à ces  ma- 
tières ; car  pour  elles , aussi  bien  que  pour  les  gaz , la  conception 
des  molécules , comme  quantités  relatives  les  plus  petites  qui  entrent 
en  jeu  dans  les  actions  chimiques,  est  parfaitement  légitime,  et 
même  nécessaire.  Mais  si,  en  ce  qui  concerne  les  gaz,  il  existe 
des  raisons  suffisantes  pour  regarder  la  molécule  chimique  comme 
identique  à la  molécule  physique,  un  pareil  critère  nous  fait  jus- 
qu'ici défaut  pour  les  corps  solides  et  liquides.  C’est  là  le  motif 
qui  doit  nous  engager  à admettre  provisoirement , comme  possible 
ou  comme  probable,  une  différence. entre  les  molécules  chimiques 
et  les  molécules  physiques. 

Quelques  savants  n’attribueraient-ils  pas  aujourd’hui,  dans  la 
détermination  des  poids  moléculaires  chimiques,  une  importance 
un  peu  trop  forte  à des  propriétés  physiques,  par  exemple,  à la 
volatilité  plus  ou  moins  grande?  Sans  diminuer  en  rien  l’intérêt 
de  cette  étude  comparative  des  données  physiques  et  chimiques, 
on  peut  bien  soutenir  que , là  où  il  s’agit  de  molécules  chimiques , 


192  P.  J.  VAN  KERCKHOFF.  SUR  LA  CONSTANCE  OU  LA  VARIABILITE,  ETC. 

les  réactions  purement  chimiques  des  matières  doivent  entrer  surtout 
en  ligne  de  compte  et  prendre  le  pas  sur  les  propriétés  physiques. 

Bien  que  beaucoup  de  corps , classés  autrefois  parmi  les  combi- 
naisons dites  moléculaires , puissent  être  ramenés  aux  combinaisons 
atomiques,  ainsi  qu’il  a été  montré  récemment  par  différents  chi- 
mistes , il  reste  pourtant  encore  un  très  grand  nombre  de  composés 
supérieurs,  qui  se  distinguent  trop  des  combinaisons  atomiques 
ordinaires  pour  pouvoir  être  rangés  dans  cette  catégorie.  Comment 
ces  composés  sont-ils  constitués?  Il  est  clair  que  la  cause,  en 
vertu  de  laquelle  des  molécules  s’unissent  ainsi  en  groupes 
supérieurs,  doit  se  trouver,,  ou  bien  dans  le  travail  que  un 
ou  plusieurs  des  atomes  élémentaires  d’une  des  molécules  sont 
susceptibles  de  fournir  avec  un  ou  plusieurs  atomes  de  l’autre, 
ou  bien  dans  le  travail  qui  peut  s’effectuer  entre  une  molécule 
(considérée  comme  un  tout)  et  une  ou  plusieurs  autres  molécules , 
envisagées  de  même.  Dans  l’un  des  cas  comme  dans  l’autre,  il 
est  à croire  que  cette  valeur  de  combinaison  résiduelle  des  molé- 
cules ne  peut  être  exprimée  dans  la  même  unité  que  celle  des 
combinaisons  atomiques,  et  qu’on  a affaire  ici  à des  valences  de 
molécules , ayant  un  rapport  défini , mais  encore  totalement  inconnu , 
avec  les  valences  des  atomes.  A l’égard  de  ces  matières,  nous  nous 
trouvons  à peu  près  dans  la  même  position  que  les  formules  dua- 
listiques  de  Berzélius  occupaient  par  rapport  aux  combinaisons 
atomiques f c’est-à-dire,  que  nous  sommes  encore  hors  d’état  de 
préciser  ce  qui  constitue  le  lien  entre  les  molécules.  Lorsque  nous 
écrivons  pour  le  chlorure  double  de  platine  et  de  potassium  2 K Cl , 
Pt  Cl  4,  cette  formule  indique  tout  aussi  peu  le  mode  de  liaison, 
que  la  formule  dualistique  K2  O,  SO3  ne  faisait  connaître  comment 
les  constituants  K^O  et  SO3  étaient  unis  en  un  seul  tout. 


Arciliv,  i^eerl.T.  IX 


Arcliiv.  Neerl.  T.  IX, 


rYn<!  Trap  imp" 


PL  IL 


ARCHIVES  NÉERLANDAISES 

DES 

Sciences  exactes  et  naturelles. 


SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS. 

(CORPS  NON-DÉCOMPOSÉS) 

DE  LA  CHIMIE, 


PAR 

J.  A.  GROSHANS. 


{Pour  faire  suite  au  Mémoire  inséré  au  T.  VIH,  1873,  pag.  41). 


245.  Il  résulte  des  observations  que  j’ai  présentées  antérieure- 
ment [Arch.  NéerLf  T.  VL,  1871,  pag.  1),  qu’on  peut,  dans 
un  très-grand  nombre  de  cas,  calculer  les  points  d’ébullition 
des  corps  par  une  formule  très-simple;  ces  points  d’ébullition 
calculés  concordent  en  général  avec  les  points  d’ébullition  obser- 
vés, dans  les  limites  des  erreurs  des' expériences. 

246.  Je  commencerai  par  appliquer  la  formule  à des  corps 
composés  uniquement  de  carbone,  d’hydrogène  et  d’oxygène. 

Voici  cette  formule: 

5 = — 273  + 27,8- 
^ n 

' s est  le  point  d’ébullition , a le  poids  atomique  ; n est  le  nombre 
total  des  atomes  de  C , de  H et  de  O ; pour  un  corps  O,.  7i  est 
donc  =/?  + ^ + r. 

247.  Quant  à x (qu’il  faut  concevoir  comme  un  nombre  entier) , 
je  n’ai  pas  réussi  à trouver  de  loi  générale,  d’après  laquelle 
on  pût  déterminer  sa  valeur  pour  tout  corps  donné;  mais  je  me 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  13 


194 


J.  A.  GROSHANS.  SUR  LA  NATURE  DES  ÉLÉMENTS 


propose  de  faire  connaître,  dans  ce' qui  va  suivre,  beaucoup  de 
cas  particuliers,  où  cette  valeur  peut  être  déterminée. 

248.  La  valeur  ix'T  répond  (sous  une  forme  plus  simple) 
à la  quantité  que  j'avais  appelée  précédemment  déviation j terme 
que  je  n'aurai  plus  occasion  d'employer;  la  formule  suivante 
exprime  la  relation  entre  les  deux  quantités,  la  nouvelle  et 
l'ancienne  : 

^ iz:  dév 

Quant  à la  constante  27,8,  il  résulte  de  la  formule 

5 zz  — 273  27,8  1/^  Xf 

’ n 


qu'on  a pour  tout  corps  quelconque: 

^ X 

et  la  valeur  précise  est  donnée  par  les  propriétés  de  l'eau: 

.3  (273  + 100) 


27,8  z= 


18 


100  est  le  point  d'ébullition  de  l'eau,  18  son  poids  atomique, 
et  3 le  nombre  de  ses  atomes  H et  O;  la  valeur  se 

déduit  des  propriétés  de  certaines  séries  homologues,  que  j'appel- 
lerai séries  régulières-^  ce  sont  celles  que  j'avais  mentionnées 
précédemment  sous  le  nom  de  séries  complètes, 

249.  Des  séries  pareilles  sont  entre  autres  les  éthers  C„  IÏ2n  O2  et 
les  carbures  d'hydrogène  C„H2„_6  (benzol  et  homologues)  ; une  de 
leurs  propriétés  consiste  en  ce  que  est  zz  1 pour  le  premier  corps 
de  la  série  ; zz  2 pour  le  second  ; zz  3 pour  le  troisième , et  ainsi 
de  suite;  les  valeurs  consécutives  de  x sont  donc  les  nombres 
1,  2,  3,  4 etc.,  c'est-à-dire  la  série  des  nombres  naturels,  que 
j'ai  déjà  appelés  les  nombres  m. 

250.  Par  conséquent,  pour  les  séries  régulières,  x est  — m. 

251.  J'ai  cru  que,  devant  employer  dans  ce  Mémoire  un  grand 
nombre  de  formules  chimiques,  il  serait  utile  de  faire  usage  d'une 
abréviation,  qui  semble  se  présenter  d'elle-même  comme  une 
simplification  commode  des  formules  empiriques  ; elle  consiste  à ne 
pas  écrire  les  lettres  C,  H et  O , mais  à les  sous-entendre  ; ainsi 


(conrs  non-décomposés)  de  la  chimie. 


195 


la  formule  CpH^O,.  devient  simplement  p.  q.  r,  et  de  même: 
C„H2„02  devient  n.  2n.  2, 

H(2n_  8)  O2  „ n (2w  — 8)  2 , 

et  ainsi  de  suite  ; je  pourrai  indiquer  Téther  C4  Hj  ^ O et  le  benzol 
CgHg  par  4.  10.  1 et  6.  6,  et  le  même  principe  pourra  servir 
pour  indiquer  les  différents  isomères. 

252.  Par  exemple,  Téther  4.  8.  2 pourra  être: 

(3.  5.  1)  (1.  3)  1 m propionate  de  méthyle 

(2.  3.  1)  (2.  5)  1 = acétate  d’éthyle 

(1.  1.  1)  (3.  7)  1 = formiate  de  propyle. 

TABLEAU  XXIV. 

Ethers  n.  2n,  2;  série  régulière;  x = m. 


Formules. 

a 

n 

m 

Points  d’ébullition, 
cale,  j obs. 

Observateurs. 

Désignation  des 
isomères. 

C 

H 

0 

.1 

2 

2 

46 

5 

1 

-17,2 

2 

4 

2 

60 

8 

2 

21,8 

32,7 

Kopp. 

(1 

1 

1) 

(1 

3) 

1 

3 

6 

2 

74 

11 

3 

51,0 

52,9 

Pierre . 

(1 

1 

1) 

(2 

5) 

1 

4 

8 

2 

88 

14 

4 

76,6 

77,0 

Linnemann . 

(2 

3 

.1) 

(2 

5) 

1 

5 

10 

2 

102 

17 

5 

100,0 

100,0 

Puchot . 

(3 

5 

1) 

(2 

5) 

1 

6 

12 

2 

116 

20 

6 

122,0 

122,4 

Linnemann . 

(3 

5 

1) 

(3 

7) 

1 

7 

14 

2 

130 

23 

7 

142,7 

143,4 

Linnemann . 

(4 

7 

1)(3 

7) 

1 

8 

16 

2 

144 

26 

8 

162,5 

162,0 

Pehling. 

(6 

11 

1) 

(2 

5) 

1 

9 

18 

2 

158 

29 

9 

181,5 

10 

20 

2 

172 

32 

10 

199,6 

200,0 

Schorlemmer . 

(2 

3 

1) 

(8  : 

U) 

1 

11 

22 

2 

186 

35 

11 

217,0 

217,0 

Cahours . 

,(9 

17 

1) 

(2 

5) 

1 

42 

24 

2 

200 

38 

12 

233,9 

13 

26 

2 

214 

41 

13 

250,3 

250,1 

Zincke . 

(5 

9 

1) 

(8  : 

m 

1 

14 

28 

2 

228 

44 

14 

266,1 

269,5 

Zincke . 

(6 

11 

1) 

(8  : 

17) 

1 

15 

30 

2 

242 

47 

15 

16 

32 

2 

256 

50 

J6 

296,7 

298,0 

Zincke. 

(8 

15 

1) 

(8  - 

17) 

1 

13* 


196 


J.  A.  GROSHANS.  SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 


253.  Pour  les  éthers  des  acides  gras  et  de  l’allyle , 3.  5 , qui 
ont  la  formule  n {2n  — 2)  2 , on  a les  mêmes  valeurs  de  ic  = m 
que  pour  les  éthers  n.  2 w.  2 ; quand  on  désigne  les  deux  espèces 
par  une  formule  générale , r , on  a pour  les  corps  de  chaque  série  : 


2_  ' Points  d’ébullition. 


G H 0 

a 

n 

m 

cale. 

obs. 

Acétate  d’allyle  . . . 

. . 5.  8.2 

100 

15 

4 

97,7 

98 

Butyrate  „ ... 

. . 7.12.2 

128 

21 

6 

142,1 

140 

Valérianate  „ ... 

. . 8.14.2 

142 

24 

7 

162,3 

162 

Les  points  d’ébullition  ont  été  observés  par  MM.  Cahours  et 
Hoffmann. 

254.  Le  corps  premier  de  la  série  des  éthers  n,  2 n.  2 serait 
(s’il  pouvait  exister)  CH2O2  ; ce  serait  un  gaz^  se  liquéfiant 
à — 17°, 2,  isomère  avec  l’acide  formique. 

255.  En  admettant,  pour  les  séries  régulières , que  correspond 
aux  nombres  m,  qui  désignent  les  rangs  des  corps  dans  leurs 
séries  homologues  respectives,  on  arrive  nécessairement  à l’idée 
de  corps  premiers  de  pareilles  séries  ; un  corps  premier  peut  être 
considéré  comme  une  espèce  de  noyau,  d’où  les  corps  suivants 
dérivent  par  l’accroissement  CH2 , 2 CH2 , 3 CH2  etc. 

256.  On  ne  saurait  donc  négliger  pour  le  calcul  de  x {=zm) 
les  corps  premiers  ; mais  il  ne  me  semble  pas  nécessaire  d’ailleurs 
de  se  préoccuper  de  la  question  de  savoir  s’ils  pourraient  avoir 
une  existence  réelle;  peut-être  qu’on  réussira  par  la  suite  à en 
découvrir  quelques-uns. 

257.  Quant  aux  points  d’ébullition  observés,  j’ai  cru  devoir 
choisir,  parmi  des  données  quelquefois  un  peu  discordantes,  les 
observations  qui  s’accordaient  le  mieux  avec  les  résultats  du 
calcul. 


(corps  non-üégomposés)  de  la  chimie.  197 


TABLEAU  XXV. 

Ethers  w(2w  + 2)l;  série  régulière;  xz=m. 


Formules. 

a 

U 

m 

Points  d’ébulHtion. 
cale,  j obs . 

1 . Observateurs. 

Désignation  des 
isomères. 

C HO 

2 1 

18 

3 

1 

-106,0 

1 4 J 

32 

6 

2 

—63,0 

2 6 1 

46 

9 

3 

—26,9 

—23,6 

Régnault . 

(1 

3),  1 

3 8 1 

60 

12 

4 

5,0 

11,0 

Williamson. 

(1 

3)  (2  5)1 

4 10  1 

74 

15 

5 

33,6 

34,9 

H.  Kopp. 

(2 

5),1 

5 12  1 

88 

18 

6 

59,9 

•54,5 

Markownikoff. 

C(1 

3).l 

6 14  1 

102 

21 

7 

84,4 

85,5 

Chancel . 

(3 

7).  1 

7 16  1 

116 

24 

8 

107,2 

112,0 

Williamson. 

(2 

5)  (5  11)  1 

8 18  1 

130 

27 

9 

128,5 

127,5 

Chancel . 

(3 

7)  (5  11)1 

9 20  1 

144 

30 

10 

149,0 

10  22  1 

158 

33 

11 

168,5 

170,0 

1 

Gaultier . 1 

(5  il),  1 

258.-  Le  corps  premier  de  cette  série  serait  un  gaz  isomère 
avec  l’eau. 


TABLEAU  XXVI. 

Ethers  n{2n  — 8)2;  série  régulière;  x=:m. 


Formules. 

a 

n 

m 

Points  d’ébullition, 
cale,  j obs. 

Observateurs. 

Désignation  des 
isomères. 

C HO 

4 — 2 

80 

6 

1 

97,7 

5 2 2 

94 

9 

2 

137,7 

6 4 2 

108 

12 

3 

160,4 

7 6 2 

122 

15 

4 

179,2 

8 8 2 

136 

18 

5 

196,7 

198,5 

Dumas  et  Peligot 

(7  5 1)  (1  3)  ^ 

9 10  2 

150 

21 

6 

213,4 

212,9 

Kopp. 

(7  5 1)  (2  5)  1 

10  12  2 

164 

24 

7 

229,6 

229,5 

Linnemann . 

(7  5 1)  (3  7)  1 

11  14  2 

178 

27 

8 

245,4 

247,0 

Erlenmeyer . 

(9  9 1)  (2  5)  1 

12  16  2 

192 

30 

9 

260,8 

260,7 

Kopp. 

(7  5 1)  (5  11)  1 

13  18  2 

206 

33 

10 

1 

275,8 

14  20  2 

220 

36 

11 

290,5 

15  22  2 

234 

39 

12 

304,9 

305,5 

Zincke . 

(7  5 1)  (8  17)  1 

198  J.  A.  GROSHANS.  SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 

259.  Comme  les  combinaisons  allyliques  ont  en  général  les 
mêmes  valeurs  de  x que  les  combinaisons  éthyliques  correspon- 
dantes, le  benzoate  d’allyle,  10.10.2,  a la  racine  de  6,  comme 
le  benzoate  d’éthyle,  9.10.2;  son  point  d’ébullition  se  calcule 
à 228°,5;  les  observations  donnent:  228°  Cahours  et  Hoffmann; 
226°  Berthelot  et  Luca;  242°  Zinin. 

260.  11  est  probable  que  les  éthers  n [2n  — 8)  3 ont  respective- 
ment les  mêmes  racines  (de  x)  que  les  éthers  n {2n  '■ — 8)2  ; ils 
ne  sont  pas  connus  aussi  bien;  j’en  citerai  un  seul: 

Salicylate  de  méthyle , 8.  8.  3 ; a = 152 ,»  = 19;ic  = m = 5; 
point  d’ébullition  calculé  222°,3  observé  223°,3  H.  Kopp. 

TABLEAU  XXVII. 


Benzol  et  corps  homologues  n(2n  — 6);  série 
régulière;  x = m. 


Noms. 

Formules . 

a 

n 

m 

Points  d’ébullition, 
cale,  j obs . 

Observateurs. 

C H 

3 

36 

3 

1 

60,7 

4 2 

50 

6 

2 

54,7 

Pentol 

5 4 

64 

9 

3 

69,8 

60 

Carius. 

Benzol 

6 6 

78 

12 

4 

88,5 

85 

L.  Henry. 

Toluol 

7 8 

92 

15 

5 

108,4 

108 

Noad. 

Xylol 

8 10 

1.06 

18 

6 

128,1 

129 

Cahours . 

Cumol 

9 12 

120 

21 

7- 

147,5 

152 

Gerhardt . 

Cymol 

10  14 

134 

24 

8 

166,2 

171 

! Noa'd. 

Laurol 

11  16 

148 

27 

9 

184,2 

188 

i Fittig. 

261.  L’observation  de  M.  L.  Henry  se  rapporte  au  dipropar- 
gyle,  nouveau  corps  découvert  par  lui,  isomère  avec  le  benzol. 

262.  Le  corps  premier  de  cette  série,  Cg,  aurait  (s’il  pouvait 
exister)  un  intérêt  particulier;  ce  serait  une  modification  allo- 
tropique du  carbone,  sous  la  forme  d’un  liquide  bouillant  à 60°, 7. 

263.  11  y a beaucoup  de  séries  régulières  parmi  les  corps  p.  r ; 
les  corps  du  tableau  suivant,  qui  ont  tous  10  atomes  de  H, 


(CORI'S  NON-ÜÉGOMI'OSÉS)  DE  LA  CHIMIE. 


199 


peuvent  être  considérés  comme  des  corps  cinquièmes  de  leurs 
séries  respectives;  on  voit  que  ces  corps  ont  la  même  racine  de 
iT  ( — 5)  que  Teau. 

TABLEAU  XXVIII. 


Corps  ayant  tous  la  racine  de  5. 


Noms. 

Formules . 

a 

n 

Points  d’ébullitiou. 
cale,  j ohs. 

Observateurs. 

Gaz  éthyle 

C H 0 
4 10 

58 

14 

—15,4 

1 rH 

i 

1 

Erankland . 

Ether 

4 10  1 

74 

15 

33,7 

34,9 

Kopp. 

Oxyde  éthyl-allylique  . 

5 10  1 

86 

16 

' 61,1 

64,0 

Hoffmann . 

Propionate  d’allyle  . . . 

5 10  2 

102 

17 

100,0 

100,0 

Puchot . 

Oxyde  d’allyle 

6 10  1 

98 

17 

85,4 

86,5 

Berthelol, . 

Oxalate  d’éthyle 

6 10  4 

146 

20 

180,8 

180,0 

Mitscherlich . 

Oxalate  d’allyle 

8 10'4 

170 

22 

207,4 

206,5 

Cahours . 

264.  Les  corps  premiers  sont  souvent  inconnus;  je  ferai  voir 
plus  loin  .que  le  chlore  peut  être  considéré  comme  le  corps  premier 
de  la  série  régulière  n.2n.Q\^\  et  de  même,  Tacide  hydrochlo- 
rique,  HCl,  comme  le  corps  premier  de  la  série  n(2n-\-  1)  Cl. 

265.  J’ai  fait  observer  {Archives  1871)  que  les  densités  des 
vapeurs  de  tous  les  corps,  mesurées  à 0”', 76  et  aux  points  d’ébul- 
lition, ^ et  s J peuvent  être  représentées  par  la  formule: 

d ü 273  s' 
l'~â‘  ^ 273  + « 

En  admettant,  en  outre,  que  pour  les  séries  régulières  les 
densités  des  vapeurs  (dans  les  mêmes  circonstances)  sont  propor- 
tionnelles aux  sommes  des  atomes  et  inversement  proportionnelles 
■aux  racines  carrées  des  nombres  m,  soit 

d n X^lrîi 

d'  Kl'  m 

on  trouve,  en  réunissant  les  deux  formules, 

s = — 273  + 27,8— 
n 


200 


J.  A.  GROSHANS.  SUR  I.A  NATURE  DES  ELEMENTS 


dans  laquelle  la  constante  est: 

27^8— . 

Cl  m 

266.  Je  crois  utile  de  rappeler  que  j’ai  démontré  {Archives  1873) , 
qu’en  général  les  densités  des  corps  liquides , mesurées  aux  points 
d’ébullition , sont  proportionnelles  aux  sommes  des  atomes  et 
inversement  proportionnelles  aux  nombres  m.  En  appelant  ces 
densités  Ds  et  Ds' , on  a : 

Ds  n ^ m' 

Ds'  n'  m 

C’est  seulement  pour  les  corps  des  séries  régulières  que  les 
nombres  x correspondent  avec  les  nombres  m;  de  cette  corres- 
pondance résulte  la  propriété  remarquable  que , pour  deux 
corps  pris  dans  des  séries  régulières  différentes,  on  a entre  les 
densités  liquides  Ds  et  Ds' ^ d’une  part,  et  les  densités  des 
vapeurs,  d et  d',  d’autre  part,  quand  m est  =:  m',  la  relation: 

Ds  _ d ^ n 
W ~ 1'""  iV' 

d’où,  en  supposant  Ds  et  d exprimées  dans  la  même  unité: 

— = Constante. 
d 


Des  volumes  réduits  égaux. 

267.  Une  conséquence  de  cette  propriété  est  le  phénomène  dont 
je  me  suis  déjà  occupé  en  1871  (Arcà.  pag.  29)  et  que  j’ai  appelé 
celui  des  volumes  réduits  égaux il  consiste  en  ce  que  les  volumes 
liquides  de  deux  corps , pris  dans  des  séries  régulières  différentes 
et  ayant  la  même  racine  (de  m),  sont,  aux  points  d’ébullition, 
exactement  proportionnels  à leurs  températures  respectives  d’ébul- 
lition augmentées  de  273: 

VS  273  -f-  s 

VS  273  H—  s . 

Quand  donc  on  multiplie  chacun  de  ces  volumes  par  la  fraction 

273 

— , les  produits  sont  égaux  pour  les  deux  corps. 

1 O -|-  S 


(corps  won-oécomposés)  de  la  chimie. 


201 


TABLEAU  XXIX. 


Volumes  réduits  de  quelques  corps  avec  10 
atomes  d’hydrogène. 


Noms. 

Formules . 

Points  d’ébull. 
cale. 

VS 

vr 

C H 0 

Ether 

4 10  1 

33,6 

106,0 

Kopp. 

94,4 

Sulfure  d’éthyle  . . . 

4 10  S 

76,7 

119,1 

Pierre . 

93,0 

Ether  propionique. . 

5 10  2 

100,0 

129,3 

Kopp. 

94,6 

// 

127,0 

Kopp. 

.92,9 

Chlorure  de  butylène 

4 8 Cl, 

121,7 

133,4 

Kolbe. 

92,3 

// 

129,3 

Kopp. 

89,4 

Ether  earbonique. . 

5 10  3 

134,5 

140,1 

Kopp . 

93,9 

Sulfite  d’oxyde 

/ 

d’éthyle 

4 10  3 S 

178,5 

152,9 

Pierre. 

92,4 

Ether  oxalique. . , . 

6 10  4 

180,8 

165,5 

Kopp. 

99,8 

268.  En  général,  tous  les  corps  ayant  la  racine  de  5 et  10 
atomes  d’hydrogène  ont  un  volume  réduit  = 94  environ;  pour 
les  produits  de  substitution,  il  faut  compléter  le  nombre  10  en 
ajoutant,  aux  atomes  d’hydrogène,  les  atomes  de  Cl,  Br,  I,qui 
se  trouvent  dans  la  formule. 

269.  Toutes  les  séries  régulières  ont,  respectivement  pour  des 
valeurs  égales  de  les  mêmes  volumes  réduits;  les  différences 
qu’on  observe  quelquefois  d’une  série  à l’autre  doivent  être  attri- 
buées à l’action  de  * forces  moléculaires  encore  inconnues. 

^ 270.  Pour  deux  corps,  pris  dans  la  même  série  ou  dans  des 

séries  différentes , les  volumes  réduits  sont  dans  le  rapport  suivant  : 

d’où  - = Const.  (environ 41). 

vr' 

271.  Le  tableau  suivant  contient  les  .volumes  réduits  de  5 corps 
de  la  série  des  éthers  n.  2n.  2. 


202 


J.  A.  GROSHANS.  SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 


TABLEAU  XXX. 


Volumes  réduits  de  quelques  corps  de  la  série  des 

éthers,  n.  2n.  2. 


Formules . 

VS 

Points  d’ébull . 
cale. 

vr 

m 

vr 

IX'TT 

C H ü 

2 12 

62,0 

21,8 

57,4 

2 

40,6 

3 6 2. 

83,2 

51,0 

70,1 

3 

40,5 

85,3 

71,8 

41,5 

4 8 2 

107,8 

76,6  ! 

! 84,2 

1 ^ 

42,1 

108,3 

84,6 

42,3 

5 10  2 

127,0 

100,0  1 

92,9 

5 

41,5 

129,3 

94,6 

42,3 

6 12  2 

151,0 

122,0  ! 

104,3 

6 

42,6 

152,3 

1 

105,3 

43,0 

272.  En  construisant  le  tableau  XXX  j’ai  choisi,  parmi  les 
nombreuses  données  rassemblées  par  M.  H.  Kopp,  les  valeurs  de 
VS  les  plus  élevées  et  les  plus  faibles. 

273.  En  prenant  de  deux  corps , par  ex.  des  éthers  4.  10.  1 
et  5.  10.  2,  qui  ont  10  atomes  d’hydrogène  et  la  même  racine 
(1^5),  des  volumes  liquides  égaux  (un  litre  par  exemple) , aux  ^ 
points  respectifs  d’ébullition,  33°,7  et  100'^,  on  obtiendra,  en  les 
vaporisant,  de  chaque  corps  un  volume  égal  de  vapeur  (environ 
240  litres)  à 0'",76  et  aux  températures  de  33°,  7 et  de  100°. 

274.  Supposons  les  deux  litres  de  liquide  renfermés  chacun 
dans  un  espace  clos  à parois  expansibles,  de  manière  que  la 
pression  extérieure  soit  toujours  égale  à la  pression  intérieure; 
si  alors  on  chauffe  les  deux,  liquides , de  manière  que  les  tensions 
(dans  chaque  espace)  aient  toujours  la  même  valeur  p,  les  deux 
volumes  de  liquide  resteront  égaux  l’un  à l’autre;  et  de  même 
il  y aura  toujours  égalité  entre  les  deux  volumes  de  vapeur 
engendrés  par  ces  liquides. 

275.  Lorsque,  pour  deux  corps'  appartenant  à la  même  série 
régulière  ou  à deux  séries  différentes,  les  nombres  diffèrent. 


(corps  non-üécomposés)  de  la  chimie. 


203 


les  volumes  de  vapeur,  engendrés  par  la  vaporisation  d’un  litre 
de  chaque  corps  pris  à l’état  liquide  et  aux  p*bints  respectifs 
d’ébullition,  seront  dans  le  rapport  suivant: 

— = d’où:  •=.  constante. 

li'  xy'm 

276.  Les  volumes  réduits  égaux  constituent  un  caractère  extérieur 
des  corps,  auquel  on  peut  reconnaître  la  valeur  de  la  racine  (de  m); 
ce  qui  a de  l’importance  quand  un  des  deux  corps  comparés  con- 
tient , outre  C , H et  O , encore  d’autres  éléments , par  ex.  le  chlore. 

277.  Lorsqu’un  corps  f,  q,  r et  son  produit  de  substitution 

Pi.9  — même  volume  réduit,  on  peut  conclure  que 

les  deux  corps  ont  la  même  racine  (de  m ou  en  général  de  a;), 
et  la  formule 

27,8  ü m 

n = 

273  + s - 

étant  appliquée  au  produit  de  substitution,  fait  connaître  l’équi- 
valent d’ébullition  du  chlore. 

278.  Si  je  reviens  ici  et  avec  plus  de  détails  sur  les  volumes 
réduits,  c’est  que  ce  phénomène  présentait  l’occasion  d’appeler 
l’attention  sur  la  parfaite  analogie  qui  existe  entre  la  loi  d’Avo- 
gadro  et  la  théorie  des  équivalents  d’ébullition  (nom  sous  lequel 
je  désignerai  provisoirement  la  manière  de  voir  que  j’ai  essayé 
d’esquisser  dans  ces  pages);  en  effet,  l’une  et  l’autre,  la  loi  et 
la  théorie'  nouvelle,  s’occupent  de  volumes  de  vapeur  égaux, 
produits  par  des  portions  données  (en  poids)  d’espèces  chimiques. 

279.  Ainsi,  pàr  rapport  aux  corps  du  tableau  XXVIII,  en  con- 
sidérant par  exemple: 


4. 10.  1 

a n 

74  15 

5.  10.  2 

102  17 

6.10.4 

146  20 

la  loi  d’Avogadro  prend  de  ces 

corps  respectivement  74,  102  et 

146  grammes  (poids  atomiques) , et  après  les  avoir  réduits  en 
vapeur,  à 0"%76  et  à 0^,  elle  constate  que  les  volumes  de 


204 


J.  A.  GROSHANS.  SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 


vapeur  produits  sont  égaux  (environ  22,4  litres)  ; la  théorie  nou- 
velle, de  son  côté,  prend  de  ces  mêmes  corps  15,  17  et  20  gram- 
mes (nombres  w = p + ^ -H-  r) , et  après  les  avoir  réduits  en 
vapeur,  à 0'“,76  et  aux  points  respectifs  d'ébullition , elle  constate 
de  même  que  les  volumes  de  vapeur,  produits  dans  ces  circon- 
stances, sont  égaux  (cette  fois  à 5,1  litres  environ). 

280.  On  voit  facilement  (à  l'aide  d'un  petit  calcul),  que  le 
nombre  des  litres  produits  (aux  points  d'ébullition)  par  n grammes 
d'un  corps  donné  {n  étant  la  somme  des  équivalents  d'ébullition 
du  corps)  est  exprimé  par  la  formule  : 

^ 22,4^y7,8  ^ 2^28 


Des  alcools  n{2n-{-2)i,  des  radicaux  alcooliques 
et  des  aldéhydes. 

281.  Je  passe  maintenant  à des  séries  homologues  qui  ne  sont 
pas  régulières  et  dans  lesquelles,  par  conséquent,  x n'est  pas  = m. 
Dans  de  pareilles  séries , on  peut  toutefois  encore  constater  pour  x 
des  régularités  d'une  autre  espèce. 

282.  Ainsi , par  rapport  à la  série  des  alcools  n (2n  + 2)  1 , 
on  a pour  le  premier  corps  de  la  série,  le  méthyle  1. 4. 1 , x = 5; 
pour  le  second , 2.6.1,  x = 6j  pour  le  troisième , ^ z=  7 , et  ainsi 
de  suite. 

TABLEAU  XXXI. 


Alcools  n(2n-h2)l. 


Noms . 

Formules . 

a 

n 

X 

Points  d’é 
cale. 

hullition . 
obs . 

Observateurs. 

Alcool 

C H 0 

«léthylique 

14  1 

32 

6 

5 

58^6 

65 

éthylique 

2 6 1 

46 

9 

6 

75,2 

78 

propylique 

3 8 1 

60 

12 

7 

94,8 

96  1 

1 Chancel . 

butylique 

4 10  1 

74 

15 

8 

115,0 

115 

Lieben. 

amylique 

5 12  1 

88 

18 

9 

134,8 

134 

Rieckher . 

caprylique 

6 14  1 

102 

21 

10 

154,2 

151 

Faget . 

heptylique 

7 16  1 

116 

24 

11 

172,8 

1 

octylique 

8 18  1 

130 

27 

12 

190,7 

191  1 

Ziucke 

(corps  non-décomposés)  de  la  chimie. 


205 


283.  On  distingue , comme  Ton  sait , plusieurs  espèces  d’alcools 
de  la  même  formule  n (2n  + 2)  1 , tels  que  alcools  normaux , 
alcools  primaires,  alcools  secondaires,  etc. 

Ainsi  MM.  Lieben  et  Rossi  énumèrent  870,  pag. 

495)  cinq  espèces  d’alcool  amylique  5. 12. 1,  bouillant  respectivement 
à 137";  119°  à 132°;  120°  à 123°;  104°  à 108°;  98°, 5 à 102°. 

En  supposant  que  les  points  d’ébullition  répondent  à des  valeurs 
différentes  de  Xy  on  trouve  pour  points  d’ébullition  calculés: 
134o,8;  111°,4;  86®, 6. 

284.  En  général,  les  alcools  isomères  bouillent  à des  tempé- 
ratures moins  élevées  que  les  alcools  normaux,  qui  font  le  sujet 
du  tableau  XXXI. 

285.  Je  crois  qu’on  peut  admettre  que  les  autres  alcools  (diffé- 
rents des  alcools  normaux)  forment  des  séries  homologues,  dont 
les  termes  correspondants  diffèrent  de  une  à deux  unités  dans  les 
valeurs  de  •«;  pour  les  corps  dont  les  points  d’ébullition  ne  corres- 
pondent pas  avec  une  valeur  entière  de  ic,  il  y a peut-être  lieu 
de  croire  qu’ils  ne  constituent  pas  une  substance  homogène , 
mais  qu’ils  sont  en  réalité  un  mélange  de  plusieurs  corps  isomères , 
bouillant  à des  températures  différentes. 

286.  Quant  aux  radicaux  alcooliques  n {2n  -+-  2)  (et  les  corps 
isomères  qui  ont  la  même  formule) , on  peut  distinguer  facilement 
deux  séries  distinctes,  dont  l’une  paraît  être  une  série  régulière , 
tandis  que  pour  l’autre  série  les  valeurs  de  x diffèrent  respecti- 
vement d’une  unité  (en  plus). 

TABLEAU  XXXII. 

Radicaux  alcooliques  n{2n-\-2)y  série  régulière; 


x — m. 


Points  d’ébullition. 

Formules. 

a 

n 

m 

cale. 

obs. 

Observateurs . 

C H 

4 10 

58 

14 

5 

— 15,4 

—14,0 

Faraday . 

5 12 

72 

17 

6 

+15,4 

9,5 

Low  pour  C (1.  3)** 

6 14 

86 

20 

7 

43,3 

45,0 

Goriainow . 

7 16 

100 

23 

8 

68,9 

8 18 

114 

26 

9 

92,7 

20Ô 


J.  A.  GROSHANS.  SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 


TABLEAU  XXXIII. 

Radicaux  alcooliques  n [2n  H-  2) ; x = m 


Formules . 

a 

n 

X 

Poil 

cale. 

its  d’ébullition 
observés . 

Wurtz  1 Pelouze 
letCahours. 

C H 

5 12 

72 

17 

7 

38,5 

30 

6 14 

86 

20 

8 

65,1 

62 

68 

7 16 

100 

23 

9 

89,6 

88 

93 

8 18 

114 

26 

10  . 

112,5 

106 

117 

, 9 20 

128 

29 

11 

134,0 

132 

137 

10  22 

142 

32 

12 

154,4 

158 

160 

11  24 

156 

35 

13 

173,8 

181 

12  26 

170 

38 

14 

192,4 

202 

• '199 

287.  Quant  aux  aldéhydes  et  aux  acétones,  n.  2n.  1 , je  me  con  ■ 
tenterai  d'en  mentionner  un  petit  nombre  dans  le  tableau  suivant , 
qui  pourra  être  complété  plus  tard  ; je  suppose  que  les  corps 
qui  appartiennent  à cette  formule  empirique  forment  plusieurs 
séries  distinctes. 


TABLEAU  XXXIV. 


Aldéhydes  et  acétones;  n.  2n.  1 


Points  d’ébullition. 

Noms. 

Formules. 

a 

n 

X 

cale. 

obs. 

Observateurs . 

Aldéhyde  : 
éthylique. . . . 

2 4 1 

44 

7 

3 

29,7 

22,0 

Pierre . 

propylique. . . 

3-6  1 

58 

10 

4 

49,5 

48,8 

Linnemann . 

butylique  . . . 

4 8 1 

72 

13 

5 

71,3 

70,5 

Guckelberger. 

amylique  . . . 

5 10  1 

86 

16 

6 

93,1 

92,5 

Puchot. 

288.  L’aldéhyde  propylique,  3.B.  1,  bouillant  à 49^  (calculé 
et  observé) , est  isomère  avec  l’acétone , bouillant , comme  l’on  sait , 
à 56®  ; l’expérience  seule  pourra  apprendre  la  cause  de  l’anomalie 
relative  à l’acétone,  et  décider  si  la  différence  de  7 degrés  est 
inhérente  à ce  corps,  ou  bien  si  elle  tient  à un  défaut  de  pureté. 


(corps  non-décomposés)  de  la  chimie. 


207 


Cette  observation  doit  naturellement  être  étendue  à un  grand 
nombre  d’autres  corps,  qui  montrent  des  différences  analogues 
I entre  leurs  points  d’ébullition  calculé  et  observé. 


Des  produits  de  substitution  par  le  Chlore, 
le  Brome  et  l’Iode. 


289.  Un  cas  particulier,  d’une  application  très-générale,  est 
que  a;  a la  même  valeur  pour  les  produits  de  substitution  (par 
Cl,  Br  et  I)  que  pour  les  corps  originaux;  il  est  seulement 
nécessaire  de  prendre  chaque  atome  de  chlore  = 4,. de  brome  zz:  9 
et  d’iode  = 14.  Pour  un  corps 


C^^  m O-  CP  Bra% 


on  a donc  : 

nz=p-\-q-\~r-\- 4s 14u, 


Le  premier  tableau  suivant  contient  (entre  autres)  un  grand 
nombre  de  produits  chlorés,  qui  donnent  en  général,  parmi  les 
produits  ' de  substitution , des  concordances  plus  précises. 

290.  Dans  ce  tableau  se  trouvent,  avec  beaucoup  de  produits 
de  substitution  véritable,  quelques  autres  corps,  qui  sont  repré- 
sentés comme  des  produits  de  substitution,  quoiqu’ils  n’en  aient 
proprement  que  l’apparence,  étant  isomères  avec  ces  produits; 
c’est  ainsi  que  le  point  d’ébullition  observé  pour  C7  H 4 Cl 4 
(représenté  comme  un  produit  de  substitution  du  toluol  C7  Hg) 
appartient  au  corps  appelé  en  allemand  (langue  qui  ne  répugne 
pas  aux  mots  un  peu  longs)  chlorbenzoesaure-trichlorid. 

291.  Il  me  semble  nécessaire  d’admettre,  au  moins  provisoire- 
ment, que  tous  les  corps  isomères,  ou  de  la  même  formule  em- 
pirique, dont  les  points  d’ébullition  observés  ne  diffèrent  entre 
eux  que  d’un  petit  nombre  de  degrés,  doivent  être  considérés  comme 
ayant  le  même  point  d’ébullition , calculé  d’après  la  même  valeur 
de  X,  Quand  les  valeurs  de  x diffèrent  pour  deux  pareils  corps , 
la  différence  entre  les  points  d’ébullition  observés  est  en  général 


208 


J.  A.  GROSHANS.  SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 


assez  grande  pour  qu’on  s’aperçoive  facilement  de  la  différence 
entre  les  deux  valeurs  de  supposons  qu’un  corps  bouille 
à 200°,  avec  la  racine  de  5;  alors  des  isomères,  qui  auraient 
respectivement  les  racines  de  4 et  de  6,  bouilliraient  à 150^,1 
et  à 245°,2. 

292.  J’ai  écrit  dans  les  formules  empiriques  du  tableau,  sous 
les  chiffres  des  atomes  de  H,  les  nombres  des  atomes  des  corps 
halogènes  substituants.  Cl,  Br,  I. 

TABLEAU  XXXV. 


Produits  de  substitution  par  Cl,  Br  et  I de  corps/?,  ç'.?’. 


Formules. 

a 

n 

X 

Points  d’él 
cale. 

bulb'tion . 
obs. 

Observateurs. 

G H 0 

7 8 
Toluol. 

92 

15 

5 

108,4 

108 

Noad. 

7 7 
Cl 

126,5 

18 

5 

163,9 

164 

Limpricht. 

7 6 

CL 

161 

21 

5 

203,6 

206  . 

Wicke. 

7 5 
CI3  ‘ 

195,5 

24 

5 

233,4 

237 

Limpricht . 

7 4 
CL 

230 

27 

5 

256,4 

255 

Limpricht. 

7 6 
Br, 

250 

31 

5 

228,4 

236 

Wroblevsky. 

7 6 
Cl 
I 

252,5 

31 

5 

233,4 

240 

Wroblevsky. 

8 10 
Xylol 

106 

18 

6 

128,1 

129 

Cahours. 

8 9 
Cl 

140,5 

21 

6 

182,6 

183,5 

Vollrath. 

8 8 
CL 

175 

24 

6 

223,6 

222 

A.  Kekulé. 

8 9 
Br 

185 

26 

6 

211,6 

212 

Wahlforss. 

(corps  NON-üÉCOMPOSÉvS)  DR  LA  CHIMIR 


209 


Formules. 

a 

71 

X 

Points  d’ébullition, 
cale . j obs . 

Observateurs . 

C H 0 

9 12 

120 

21 

7 

147,5 

152 

Gerhardt . 

Cumol 

9 11 

154,5 

24 

7 

200,5 

205 

Eittig  et  Hoogewerff. 

Cl 

9 10 

189 

27 

7 

241,9 

243,5 

Eittig  et  Hoogewerff. 

Cl, 

! 

10  14 

134 

24 

8 

166,2 

171 

Noad. 

Cymol 

10  13 

168,5 

27 

8 

217,1 

214 

Kekulé  et  Eleischer. 

Cl 

4 10 

58. 

14 

5 

—15,4 

—14 

Faraday . 

Gaz  éthyle- 

butane 

4 9 

92,5 

17 

5 

65,2 

66 

Pelouze . 

Cl 

4 8 

127 

20 

5 

121,8 

122,3 

H.  Kopp. 

Cl. 

4 10  J 

74 

15 

5 

33,6 

34,9 

H 

H.  Kopp. 

Ether 

4 9 1 

108,5 

18 

5 

101,7 

97,5 

Abeljanz. 

Cl 

4 8 1 

143 

21 

5 

150,3 

140  à 147 

Lieben . 

Cl, 

4 4 1 

281 

33 

5 

256,4 

250 

Paterno  et  Pisati. 

Cl. 

5 10  2 

102 

17 

5 

100,0 

100 

Puchot. 

Ether  propioni- 

que 

5 9 2 

136,5 

20 

5 

151,3 

150 

Wurtz. 

Cl 

5 8 2 

171 

23 

5 

189,3 

194,5 

L.  Henry. 

Cl, 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX. 


14 


210 


J.  A.  GROSHANS.  SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 


Formules . 

a 

n 

X 

Points  d’( 
cale. 

îbullition. 
obs . 

Observateurs. 

C H 0 

8 8 2 

136 

18 

5 

196,7 

198,5 

Tableau  XXVI. 

Acétate  de  phé- 

nyle 

oo 

-<{ 

170,5 

21 

5 

231,7 

230  à 235 

Prévost. 

Cl 

9 10  2 

150 

21 

6 

213,4 

212,9 

H.  Kopp. 

Ether  benzoïque 

9 9 2 

184,5 

24 

6 

250,5 

245 

Limpricht  et  Uslar. 

Cl 

5 8 2 

100 

15 

4* 

97,7 

98^ 

Cahours  et  Hoffmann. 

Acétate  d’allyle 

5 7 2 

179 

23 

4 

159,7 

163,5 

L.  Henry. 

Br 

3 6 1 

58 

10 

4 

49,5 

48,8 

Tableau  XXXIV. 

Acétone  = aldé- 

hyde propylique 

! 

3 5 1 

92,5 

13 

4 

122,6 

119 

Linnemann  (épichlor- 

Cl 

1 

hydrine)  . 

3 5 1 

137 

18 

4 

• 150,2 

140  à 145 

Riche . 

Br 

3 4 1 

171,5 

21 

4 

181,1 

176  à 188 

Theegarten . 

Cl 

Br 

6 6 1 

94 

13 

5 

176,5 

180 

Cal  vert . 

Phénol  (acide 

carbolique) 

6 5 1 

128,5 

16 

5 

226,3 

218 

Kekulé  {LehrhucJi). 

Cl 

6 5 1 

173 

21 

5 

239,1  " 

235,5 

Hubner  et  Brenken. 

Br 

(corps  non-décomposés)  de  la  chimie. 


211 


Formules . 

a 

n 

X 

Points  d’é 
cale. 

ibullition . 
obs . 

Observateurs. 

C H 0 

10  8 

Naphthaline 

128 

18 

6 

211,0 

212 

Dumas. 

10  7 
Cl 

162,5 

21 

6 

251,0 

251 

Faust . 

10  6 
Cl. 

197 

21 

6 

286,0 

281,5 

Faust . 

2 6 1 

Ether  méthylique 
2 11 
Cl. 

16 

115 

9 

15 

3 

3 

-26,9 

96,2 

—23,6 

105 

Régnault. 
Régnault . 

1 1 
Méthane 

16 

5 

2 

'-117 

1 3 
Cl 

Chlorure  de  mé- 
thyle 

50,5 

! 

1 

i 

i 

1 

1 

8 

1 

2 

—21,9 

—23,7 

Régnault . 

1 2 
Cl. 

85 

11 

2 

30,8 

30,5 

' Régnault . 

1 1 
Cl, 

Chloroforme 

119,5 

11 

2 

62,6 

63,5 

Pierre . 

1 — 
Cl. 

151 

17 

2 • 

80,6 

78,1 

Pierre. 

1 3 
Br 

Bromure  de  mé- 
thyle 

95 

13 

2 

11,3 

13 

Pierre . 

1 1 
Br, 

Bromoforme 

253 

29 

2 

117,1 

115 

Borodine . 

1 3 
I 

lodure  de  mé- 
thyle 

112 

18 

2 

37,2 

• 13,S 

Pierre. 

14* 


-212 


J.  A.  GROSHANS.  S(IR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 


Formules . 

a 

n 

X 

Points  d’é 
cale. 

bullition . 
obs. 

Observateurs . 

C H 0 

5 12 

Carbure  d’hydro- 
gène 

72 

17 

6 

15,4 

9,5 

Llow. 

5'10 

Cl. 

141 

23 

6 

144,5 

141  à 147 

Guthrie . 

4 8 1 
Aldéhyde' buty- 
lique 

72 

13 

5 

71,3 

70,5 

Guckelberger . 

4 7 1 
Cl 

106,5 

16 

5 

140,8 

141 

Chancel . 

4 7 
Cl 

90,5 

15 

5 

102,1 

100 

Chancel . 

Séries  régulières  chlorées. 

293.  Quand  le  chlore  forme  des  produits  de  substitution,  suc- 
cessivement avec  tous  les  corps  d’une  série  régulière, r,  il  en 
résulte  une  nouvelle  série  régulière  chlorée,  parce  que  la  valeur 
de  X est  la  même  pour  chaque  corps  de  la  série  originale  et  pour 
son  produit  de  substitution.  Etant  donnée  une  série  régulière 
n {^n  + 2) , il  pourra  en  dériver  par  substitution  des  séries  régu- 
lières n[2n  H-  1) Cl  et  n.2n.Q\^‘^  la  première  est  connue  comme 
celle  des  chlorures  de  méthyle,  d’éthyle,  de  propyle,  etc;  la 
seconde  comme  celle  des  chlorures  de  méthylène,  d’éthylène,  de 
propylène , etc. 

TABLEAU  XXXVI. 

?î(2wH-1)C1;  série  régulière;  x-=m. 


Formules, 


a 


n 


Points  d’ébullition, 
cale.  obs. 


Observateurs 


C 

H 

Cl 

1 

Cl 

36,5 

5 

1 

—70,1 

1 

3 

Cl 

50,5 

8 

2 

—24,9 

—24,8 

Régnault. 

2 

5 

Cl 

64,5 

11 

3 

9,4 

11 

Pierre. 

3 

7 

Cl 

78,5 

14 

4 

38,8 

36—38 

Linnemann. 

4 

9 

Cl 

92,5 

17 

5- 

65,2 

66 

Pelouze. 

5 

11 

Cl 

106,5 

20 

6 

89,6 

'90 

Wurtz. 

(coups  non-décomposés)  de  la  chimie.  213 

294.  Le  corps  5.  11.  Cl  a été  découvert  par  Wiirtz,  qui  l’appelle 
chlorhydrate  d’amylène  ; il  est  isomère  avec  le  chlorure  d’amyle  qui 
bout  à 101“  ; je  ne  crois  pas  encore  le  temps  arrivé  de  tenter  l’expli- 
cation de  pareilles  anomalies  dans  les  points  d’ébullition  observés. 


TABLEAU  XXXVII. 
w.  2/i.  CI2;  série  régulière;  x=:  m. 


•Formules. 

a 

1 

m 

^ Points  d’ébullition, 
j cale.  1 obs. 

! 

1 Observateurs. 

C H Cl 

1 

! 

1 

i 

! 

1 

CB 

n 

8 

1 

-26,2 

—33,6 

Régnault. 

1 2 CB 

85 

11 

2 

30,8 

30,5 

Régnault. 

2 4 CB 

99 

14 

3 

67,9 

64 

Régnault. 

3 6 CB 

llo 

17 

4 

96,6 

94—99 

Schorlemmer. 

4 8 CB 

127 

20 

5 

121,8 

122,3 

H.  Kopp. 

5 10  CB 

141 

23 

6 

144,5 

141-147 

Gutlirie. 

295.  Les  volumes  réduits  des  séries  n{2n  + 1)C1  et  w.  2w.  Cl^ 
sont  à peu  près  égaux  à ceux  de  la  série  n.  2n.  2 ; le  tableau  XXIX 
contient  le  volume  réduit  du  chlorure  de  butylène;  4.  8.  CI2. 


Des  acides  n.2n.2, 

des  anhydrides  n{2n — 2)3  et  des  éthers  n,{2n — 2),  4. 


TABLEAU  XXXVIII. 
Acides  n.  2n.  2.  • 


Noms. 

Formules. 

a 

n 

X 

Points  d’é 
cale. 

ibullition. 

obs. 

Observateurs , 

Acide: 

C 

H 

O 

1 

Formique .... 

1 

2 

2 

i 46 

5 

2 

88,7 

98,5 

Liebig. 

Acétique 

2 

4 

2 

; 60 

1 8 

3 

4 

88,2 

144,0 

116,9 

H.  Kopp. 

Propionique  . . 

i ^ 

6 

2 

74 

i 11 

5 

145,2 

141,6 

H.  Kopp. 

Butylique. ..  . 

8 

2 

88 

i 14 

6 

155,1 

155,5 

Puebot. 

Valériauique.  . 

5 

10 

2 

102 

17 

7 

168,3 

174  ; 

Delffs. 

Capronique . . . 

6 

12 

2 

116 

20 

9 

210,3 

205  i 

Lieben. 

Heptylique. .'. 

7 

14 

2 

130 

23 

10 

223,9 

223,5  j 

Francliimont. 

OctyÜque .... 

1 8 

16 

2 

144  i 

26 

11 

237,7 

233  i 

Ziiicke. 

Nonylique.  . . . 

i 9 

18 

2 

158  1 

29 

12 

251,7 

260  1 

Cahours. 

214 


J.  A.  GROSHANS.  SUR  LA  .NATURE  DES  ELE5IENTS 


296.  La  série  des  acides  w.  2n.  2 montre  plusieurs  anomalies  ; 
la  valeur  de  x change  subitement  de  7 à 9,  sans  valeur  inter- 
médiaire 8;  la  même  chose  a lieu  en  passant  de  1.  2.  2,  acide 
formique  {x  = 2) , à 3.  6.  2 , acide  propionique  (x  = 5)  ; Tacide 
intermédiaire  2.4.2,  acide  acétique , devrait  donc  avoir  x = 3 
ou  =4;  or  ni  Tun  ni  Vautre  n’est  le  cas;  avec  5 = 116°, 9 æ se 
calcule  à 3,50. 

297.  Le  point  d’ébullition  de  l’acide  acétique  est  donc  anormal, 
ce  qui  n’a  pas  lieu  de  surprendre,  quand  on  songe  à la  densité 
anormale  de  sa  vapeur;  la  formule  5 = — 273  + 27,8  etc. étant 
basée  sur  la  loi  d’Avogadro,  on  n’en  saurait  attendre  des  résul- 
tats exacts  dans  les  cas  où  cette  loi  semble  en  défaut. 

298.  Cependant  il  est  remarquable  que  la  même  anomalie , quant 
à «a?,  se  retrouve  chez  l’anhydride  de  l’acide  acétique , 4.  6.  3 ; ce 
corps  bout  à 137°,8  (H.  Kopp),  ce  qui  donne  pour  x la  valeur  de  3,54. 

299.  Enfin,  comme  j’en  ai  fait  plusieurs  fois  l’observation,  les 
corps  dont  les  formules  se  ressemblent  ont  des  ressemblances  dans 
leurs  propriétés  physiques;  c’est  ainsi  que  l’oxalate  de  méthyle, 
4.  6.  4 , dont  la  formule  ressemble  à 4.  6.  3 (l’anhydride) , présente 
encore  la  même  anomalie  relativement  à ic;  il  bout  à 161°  (Dumas 
et  Péligot) , ce  qui  donne  x = 3,42  ; on  sait  que  ce  corps  se  dis 
tingue  en  outre  de  son  homologue,  l’éther  oxalique  6.10.4,  en 
ce  qu’il  est  solide  à la  température  ordinaire  et  fond  à 50°,  tandis 
que  l’éther  oxalique  est  liquide  même  au-dessous  de  0°. 

TABLEAU  XXXIX. 


Produits  de  substitution  de  l’acide  acétique,  2.4. 2 


Formules. 

a 

.1 

1 

X 

1 

j 

Points  d’ébullition,  j 
cale.  j obs.  j 

Observateurs. 

C H 0 
2 4 2 

60 

8 

2 3 2 

Cl 

94,5 

1 

4 

194,6 

185-188 

Hoffmann. 

2 ] 2 
CP 

163,5 

1 17 

3 

190,1 

195—200 

1 Kekulé  {Lehrbuch). 

2 3 2 

Br 

139 

i 16 

4 

210,1 

208 

Kekulé. 

2 2 2 
Br" 

218 

' 24 

I 

4 

1 

232,1 

232—234 

de  Clermont. 

2 12 
Br" 

297 

1 

! "2 

1 ^ 

243,1 

250 

Gai. 

(coups  non-décomposés)  de  la  chimie. 


215 


300.  Tous  ces  produits  de  substitution  ont  = 4,  excepté 

Tacide  trichloracétique , 2.  1.  2,  pour  lequel  œ est  — 3. 

CP 

301.  L’acide  acétique,  2.4.2,  est  un  corps  plein  d’anomalies, 
qu’il  peut  être  utile  d’énumérer  ici  brièvement: 

1®.  Densité  anormale  de  vapeur. 

2“.  Point  d’ébullition  anormal. 

3°.  Sa  dissolution  aqueuse  donne  un  maximum  de  pesanteur 
spécifique,  qui  ne  correspond  pas  à la  plus  grande  quantité 
d’acide  dissous. 

4®.  Les  deux  produits  de  substitution  par  le  chlore  ont  des 
valeurs  différentes  de  a:,  respectivement  = 3 et  4. 

302.  Il  me  semble  probable,  d’après  ces  anomalies , que  l’acide 
ordinaire , 2.  4.  2 , n’est  pas  un  corps  homogène , mais  que  c’est 
un  mélange  de  deux  acides  isomères,  dont  l’un,  avec  x = 
bouillirait  à 88'’, 2 et  l’autre,  avec  ^c  = 4,  à 154°,0. 

303.  On  sait  que  de  jour  en  jour  s’accroît  le  nombre  de  ces 
corps , qui  constituent  des  mélanges  de  substances  isomères , ayant 
des  propriétés  physiques  différentes. 

304.  Il  est  peu  probable  qu’on  puisse  effectuer  la  séparation 
des  deux  acides  isomères , 2.  4.  2 , par  la  distillation  fractionnée  ; 
mais  on  réussirait  peut-être  à opérer  cette  séparation  au  moyen 
des  deux  produits  de  substitution  par  le  chlore. 

305.  En  exceptant  provisoirement  les  corps  4.  6.  3 et  4.  6.  4 , 
les  séries  n {2n  — 2)  3 , anhydrides , et  n (2n  — 2)  4 , éthers , 
paraissent  constituer  des  séries  régulières. 

TABLEAU  XXXX. 


Anhydrides  n (2n — 2)3;  série  régulière;  x-=:m. 


Noms. 

Formules . 

a 

n 

X 

Points  d’ébullition, 
cale.  j obs. 

Observateurs. 

Acide 

C 

H 

0 

Formique 

2 

2 

3 

74 

7 

1 

20®, 9 

Acétique 

4 

6 

3 

102 

13 

3 

104,8 

Propionique  . . 

6 

10 

3 

130 

19 

5 

152,2 

165 

Limpriclit. 

Butylique j 

î ^ 

14 

3 

158 

25 

7 

191.9 

190 

Gerhardt. 

Valérianique  . | 

1 10 

18 

3 

186 

31 

9 

227,4 

215 

Chiozza. 

216 


J.  A.  GROSHANS.  SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 


TABLEAU  XXXXI. 


Ethers  n (2n  — 2)  4;  série  régulière;  m. 


Formules. 

a 

n 

m 

Points  d’( 
cale. 

îbullition. 

obs. 

Observateurs. 

Désignation  des 
isomères. 

Dumas  et 

4 6 4 

118 

14 

3 

132,9 

161 

Peligot. 

(2  0 2)  (2  6)  2 

6 10  4 

146 

20 

5 

180,8 

180 

Mitscherlich. 

(2  0 2)  (4  10)  2 

8 14  4 

174 

26 

! 7 

219,3 

217 

Kopp. 

(4  4 2)  (4  10)  2 

10  18  4 

202 

32 

9 

253,5 

12  22  4 

230 

38 

11 

285,1 

285 

Carlet. 

(10  16  2)  (2  6)  2 

14  26  4 

258 

,44  , 

13 

314,8 

308 

Redtenbacher. 

(1016  2)  (4  10)  2 

306.  M.  Cahours  a trouvé  pour  Toxalate  de  butyle,  10.  18.  4, 
s = 224^  à 226°  ; ce  qui  correspond  à x = 8 , s calculé  = 222°, 4. 

D’après  le  tableau , on  devrait  avoir  x = m = ^ ^ d’où  s cal- 
culé = 253°, 5. 

Il  est  probable  qu’il  existe  ici  au  moins  deux  corps  isomères, 
avec  a;  8 et  ic  = 9.  On  est  conduit  à penser  que  ce  ne  sont 
pas  seulement  les  corps  isomères  à caractères  chimiques  très 
dissemblables,  comme  un  acide  n.2n.2  et  un  éther  de  cette  même 
formule,  qui  ont  des  valeurs  différentes  de  x et  bouillent  par 
conséquent  à des  températures  différentes;  mais  que  des  corps 
isomères , dont  les  caractères  chimiques  paraissent  être  les  mêmes , 
peuvent  cependant  présenter , dans  leurs  valeurs  respectives  de  x , 
des  différences  d’une  unité,  ou  peut-être  plus  grandes.  L’expérience 
seule  pourra  donner  des  lumières  à cet  égard. 

Du  carbone,  de  l’hydrogène  et  de  l’oxygène, 
comparés  aux  autres  éléments. 

307.  C , H et  0 paraissent  être  les  seuls  corps  simples  ; chaque 
atome  de  ces  corps  compte , dans  le  calcul  de  n , pour  une  seule 
unité;  tous  les  autres  éléments  comptent  plusieurs  unités  dans 
leur  atome.  J’ai  pu  étendre  mes  observations  et  mes  calculs 
à plus  d’une  vingtaine  d’éléments,  autres  que  C,  H et  0. 


(corps  NON-üÊCüMPOSÉs)  UE  LA  CHIMIE. 


217 


308.  Ceci  n’est  pas  le  seul  point  de  vue  sous  lequel  C , H et  O 
forment  un  groupe  distinct  des  autres  éléments;  on  les  appelle 
quelquefois,  conjointement  avec  Tazote,  les  éléments  organiques. 
M.  Littré,  dans  son  livre  La  Science,  observe  „qu’au  fond  la  vie 
n’appartient  pas  indifféremment  à toute  espèce  de  substance; 
qu’elle  a une  certaine  vertu  élective,  et  que  ses  rapports  essen- 
tiels sont  avec  le  carbone,  l’hydrogène,  l’oxygène  et  l’azote”. 

309.  Il  semblerait  donc  exister  quelque  lien  entre  l’azote  et 
C,  H et  O.  Sans  vouloir  en  tirer  aucune  conclusion  prématurée, 
il  est  peut-être  permis  d’observer  simplement  que  le  poids  atomique 
de  N est  14,  qu’il  correspond  à 3 atomes,  et  que  ces  mêmes 
attributs  sont  ceux  de  CH^. 

Du  nitrogène  et  de  son  équivalent  d’ébullition. 

310.  11  fut  un  temps,  on  le  sait,  où  des  chimistes  éminents 
croyaient  devoir  considérer  l’azote  comme  un  corps  composé,  et 
un  célèbre  romancier  français,  dont  1?.  talent  d’observation  ne 
s’exerçait  pas  seulement  sur  les  phénomènes  ordinaires  de  la 
société,  mais  aussi  sur  ce  qui  se  passait  dans  le  monde  scienti- 
fique, a consacré  une  fiction  attrayante  à peindre  la  vie  d’un 
chimiste  de  cette  époque , absorbé  dans  la  poursuite  du  rêve  qu’il 
pourrait  réussir  un  jour  à décomposer  le  nitrogène.  Aujourd’hui, 
et  depuis  de  longues  années , on  est  généralement  revenu  à l’opinion 
que  le  nitrogène  doit  être  regardé  comme  un  corps  simple  au 
même  titre  que  les  autres  éléments  ; seulement , comme  la  simpli- 
cité réelle  de  ces  derniers  est  maintenant  mise  elle-même  en  ques- 
tion, il  devient  nécessaire  de  reviser  le  cas  de  l’azote. 

311.  Or  il  résulte  de  mes  observations  et  de  mes  calculs , avec 
une  complète  évidence , que  le  nitrogène  ne  peut  pas  être  un  corps 
simple,  mais  qu’il  renferme  trois  atomes  de  corps  simples  incon- 
nus ; je  me  propose  de  démontrer  cette  double  assertion  par  plu- 
sieurs' méthodes  indépendantes  l’une  de  l’autre,  et  comme  cette 
démonstration  peut,  quant  à la  forme,  être  facilement  étendue 


218 


J.  A.  GROSHAiSS.  SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 


à d’autres  éléments,  je  me  permettrai  d’entrer  à cet  égard  dans 
quelques  développements. 

312.  La  détermination  de  l’équivalent  d’ébullition  du  chlore  est 
facile , parce  que  la  valeur  de  x des  produits  de  substitution  est 
presque  toujours  égale  à celle  des  corps  originaux;  il  n’y  a donc 
pas  lieu  de  deviner  et  la  connaissance  de  x donne  la  valeur  de  n, 

313.  Comme  on  ne  possède  pas  encore  de  règle  générale  pour 
déterminer  Xy  l’équation 

i = — 273  + 27,8  -1/— , 
n 

qu’il  s’agit  d’appliquer  aux  combinaisons  contenant  de  l’azote , 
renferme  deux  inconnues,  n et  x\  elle  n’est  donc  pas  susceptible 
de  résolution  directe. 

314.  Il  existe  cependant,  entre  ces  deux  inconnues,  des  rela- 
tions dont  je  vais  maintenant  m’occuper;  je  crois  être  arrivé  à 
des  résultats  certains  en  opérant  de  la  manière  suivante. 

J’ai  pris  un  certain  nombre  de  combinaisons  azotées,  dont  les 
points  d’ébullition  étaient  connus,  et  en  faisant  dans  la  formule, 

27,8  a 

n z= — 

273  -h 

X successivement  = 1 , 2,  3,  4 etc.,  j’ai  obtenu  pour  l’équivalent 
d’ébullition  de  N,  Æ’^.N  = n — (/?  H-  ^ H-  O?  valeurs  entre 
0 et  1 , entre  1 et  2 , entre  2 et  3 , entre  3 et  4 , et  entre  4 et  5. 
En  admettant , comme  hypothèse  provisoire , que  l’équivalent 
d’ébullition  était  plus  petit  que  5,  les  valeurs  trouvées,  quoique 
fausses  pour  la  plupart,  devaient  pourtant  renfermer  la  valeur 
véritable  inconnue , qu’il  s’agissait  dès  lors  de  dégager  des  autres. 

315.  Le  tableau  suivant  contient  les  résultats  de  cette  première 
opération. 


(corps  NON-DÉCOMPOSÉs)  1)E  la  chimie 


219 


TABLEAU  XXXXII. 


Combinaisons  contenant  de  Tazote. 


Nu- 

mé- 

ros. 

Noms, 

Formules. 

Formules 

abrégées. 

a 

X 

n 

n 

—ip+q+r) 

C H 0 N 

1 

! 

1 

Nitrobenzol. 

6 5 2 N 

13  + N 

123 

12,4 

5 = 205® 

14,31 

1,31 

Kekulé  {Leh'hucK). 

5 

16, — 

3,— 

6 

17,52 

4,52 

2 

Nitrate  de  butyle. 
5 = 123® 
Chapman. 

4 9 3 N 

16  +N 

,119 

3 

4 

5 

6 

14,5 

16,71 

18,68 

20,46 

0,71 

2,68 

4,46 

3 

Nitrine  du 

5 9 5 N 

19-1-N 

163 

3 

17,4 

lactate  d’éthyle. 

4 

20,10 

1,10 

- 5 = 178® 

5 

22,47 

3,47 

L,  Henry. 

1 

6 

24,61 

5,61 

4 

Nitrophénol. 

6 5 3 N 

144-N 

139 

î 

3 

1 

! 13,7 

5 = 216® 

4 

15,81 

1,81 

Hoffmann. 

5 

17,67 

3,67 

6 

19,36 

5,36 

5 

} 

Cyanure  de  phény le. 

5 = 160° 

Hoffmann. 

7 5 — N 

12-h  N 

1 

i 

j 

I 

103 

3 

4 

5 

6 

11,4 

13,23 

14,79 

16,22 

1,23 

2,79 

4,22 

6 

Cyanate  de  phényle. 

7 5 1 N 

13 -4- N 

119 

3 

12,7 

5 = 179® 

4 

14,64 

1,64 

Hoffmann. 

5 

16,36 

3,36 

6 

17,93 

4,93 

7 

Cyanure  de  benzoyle 

GO 

14  + N 

131 

3 

13,1 

5 = 207° 

4 

15,18 

1,18 

Kolbe. 

5 

16,96 

2,96 

' 

l 

6 

18,59 

4,59 

220  J.  A.  GROSUANS.  SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 


Nu- 

mé- 

ros. 

Noms. 

^Formules. 

Formules 

abrégées. 

a 

X 

n 

n — 

ip  + q-l-r) 

* G H 0 N 

8 

Pyi’idine. 

5 5 — N 

10  + N 

79 

3 

9,8 

s =116° 

4 

11,32 

1,32 

! 

Andersen. 

5 

12,66 

2,66 

î 

fi 

13,86 

3,86 

7 

14,98 

4,98 

9 

Nitro-étliane. 
i'  = 113®,5 
Hübner. 

2 5 2 N 

9 + N 

75 

3 

4 

5 

6 

9,34 

10,79 

12,06 

13,21 

0,34 

1,79 

3,06 

4,21 

10 

Cyanate  de  méthyle. 

2 3 1 N 

6+N 

.57 

2 

5,0 

^ = 40° 

3 

7,16 

1,16 

Wurtz. 

4 

8,77 

2,77 

5 

10,13 

4,13 

11 

! Cyanate  d’éthyle. 

3 5 1 N 

9 + N 

71 

2 ' 

8,3 

5 = 60° 

3 

10,27 

1,27 

Wurtz. 

4 

11,85 

2,85 

5 

13,25 

4,25 

12 

Produit  de  substitu- 

12; 

-a 

CO 

19  + N 

181 

4 

18,2 

j 1,38 

tion  par  N Oj  du 

! 

5 

20,38 

benzoate  de  méthyle. 

6 

22,33 

3,33 

s = 279°  Chancel. 

7 

24,12  , 

5,12 

1 

13  j 

Prod.  de  subst.  par 

9 9 4 N 

22  + N 

195 

5 

21,3 

i 

NO 2 du  benz.  d’é- 

6 

23,30 

1,30 

1 

thyle 

s = 2960  E.  Kopp. 

7 

25,17 

3,17 

1 

1 

s = 298®  Chancel. 

8 

26,90 

4,90 

14 

Cyanate  d’allyle. 

r— 1 

10  + N 

83 

2 

9,1 

3 

11,26 

1,26 

4 

13,— 

3,- 

1 

1 

i 

1 

1 

‘ 

5 

14,53 

4,53 

15 

Nitro-toluol. 

7 7.  2 N 

16  + N 

137 

4 

15,3 

5 = 220  à 225 

5 

17,19 

1,19 

Wilson, 

6 

18,83 

2,83 

7 

20,34 

4,34 

(corps  non-décomposés)  de  la  chimie. 


221 


316.  Ensuite  j’ai  inscrit  les  valeurs  résultantes  pour  N dans 
un  autre  tableau , de  la  manière  suivante  : 


TABLEAU  XXXXIII. 

Inscription  des  valeurs  trouvées  pour  Eq,^, 


Nu- 

mé- 

ros. 

Formules . 

0 

1 

2 

3 

4 

1 

6 

5 

2 

N 

1,31 

3,00 

4,52 

2 

4 

9 

3 

N 

0,71 

2,68 

4,46 

3 

5 

9 

5 

N 

1,10 

3,47 

4 

6 

5 

3 

N 

1,81 

3,67 

5 

7 

5 

N 

i,23 

2,79 

4,22 

6 

7 

5 

1 

N 

1,64 

3,36 

4,93 

7 

8 

5 

1 

N 

1,18 

2,96 

4,59 

8 

5 

5 

N 

1,32 

2,66 

3,86 

4,98 

9 

2 

5 

2 

N 

0,34 

1,79 

3,06 

4,21 

10 

2 

3 

1 

N 

1,16 

2,77 

4,13 

il 

3 

5 

1 

N 

1,27 

2,85 

4,25 

12 

8 

7 

4 

N 

1,38 

3,33 

13 

9 

9 

4 

N 

1,30 

3,17 

4,90 

14 

4 

5 

1 

N 

1,26 

3,00 

4,53 

15 

7 

7 

2 

N 

1 

1,19 

2,83 

4,34 

317.  L’étude  des  nombres  de  ce  tableau  fait  découvrir  facile- 
ment la  valeur  véritable  de  l’équivalent  d’ébullition  de  l’azote 
Æ'2-N. 

318.  Supposons  on  peut  s’attendre  alors  à trouver 

dans  deux  colonnes  voisines  15  valeurs,  dont  environ  la  moitié 
entre  q et  {g  — 1)  et  l’autre  moitié  entre  g et  {g  1)  ; la  moyenne 
de  ces  15  valeurs  s’approchera  d’un  nombre  entier,  qui  sera  g, 

319.  En  examinant  les  deux  colonnes  intitulées  O et  1,  on 
y voit  (en  supprimant  le  corps  n®  9,  qui  donne  une  valeur  entre 
O et  1 et  une  autre  entre  1 et  2)  14  valeurs,  dont  seulement 
une  entre  O et  1 , et  13  entre  1 et  2;  il  y a donc  absence  com- 
plète de  symétrie,  et  la  moyenne  de  ces  14  nombres  s’écarte  très 


222 


J.  A.  GROSIIANS.  SUR  LA  MATURE  DES  ELEMENTS 


notablement  de  1.  De  là  ressort,  comme  résultat  tout  à fait  cer- 
tain: que  V azote  ne  peut  pas  être  un  corps  simple, 

320.  En  passant  ensuite  aux  colonnes  marquées  let2,  il  con- 
vient de  ne  pas  prendre  en  considération  les  corps  n®.  5,  7,  8, 
10,  11  et  15,  comme  donnant  chacun  deux  valeurs,  dont  Tune 
entre  1 et  2 et  Tautre  entre  2 et  3*. 

321.  Il  reste  alors  9 valeurs,  dont  une  entre  2 et  3 et  huit 
entre  1 et  2 ; ici  encore , il  y a donc  m^anque  de  symétrie  et  une 
moyenne  très  différente  du  nombre  2.  Il  s’ensuit  : que  V azote  doit 
contenir  plus  de  deux  atomes. 

322.  Les  colonnes  désignées  ' par  2 et  3 donnent  (en  exceptant 
le  corps  n®.  8)  les  14  valeurs  suivantes: 


2,68 

3,00 

3,06 

2,77 

3,00 

3,17 

2,79 

3,29 

2,83 

3,36 

2,85 

3,47 

2,96 

3,67 

La  moyenne  de  ces  14  nombres  est  = 3,06,  résultat  qui  se 
rapproche  suffisamment  du  nombre  entier  3 , pour  pouvoir  admettre  , 
au  moins  provisoirement,  que  l’équivalent  d’ébullition  cherché  de 
l’azote  est  = 3.  Il  convient  d’ailleurs  d’observer  que  les  diverses 
valeurs  se  distribuent  symétriquement  autour  de  ce  nombre  ; comme 
les  deux  valeurs  3 doivent  être  considérées  comme  appartenant 
autant  à l’une  des  deux  colonnes  qu’à  l’autre,  on  peut  dire  que 
chaque  colonne  renferme  7 nombres,  ou  la  moitié  de  14. 

323.  En  appliquant  le  résultat  obtenu,  Fq.N  z=  3,  au  calcul 
des  points  d’ébullition  des  produits  de  substitution  par  N O2 , on 
pourra  observer  que,  en  général,  la  valeur  de  x augmente  d’une 
unité  par  l’effet  de  cette  substitution. 


(corps  non-décomposês)  de  la  chimie. 


223 


TABLEAU  XXXXIV. 


Produits  de  substitution  par  N02(avec  les  corps 

originaux). 


Nos, 

Noms. 

Formules . 

a 

n 

X 

Points  d’ébullition, 
cale,  j obs . 

Observateurs. 

C H 0 

1 

Benzoate 

8 8 2 

136 

18 

5 

196,7 

198,5 

Dumas  etPeli- 

de 

' 

got. 

méthyle. 

8 7 ' 2 

181 

22 

6 

287,3 

279 

Chancel . 

NO, 

2 

Benzoate 

9 10  2 

150 

21 

6 

213,4 

212,9 

H.  Kopp. 

d’éthyle. 

9 9 2 

195 

25 

7 

300,7 

298 

Chancel . 

NO, 

3 

Benzol. 

6 6 

78 

12 

4 

88,5 

85 

L.  Henry. 

6 5 

123 

16 

5 

204,9 

205 

Kekulé  {Lehr- 

NO, 

1 

hneh) . 

6 4 

157,5 

19 

5 

242,5 

235 

Sokoloff. 

Cl 

NO, 

6 3 

192 

22 

5 

269,6 

266 

Jungfleisch , 

Cl, 

NO, 

4 

Toluol. 

7 8 

92 

15 

5 

108,4 

108 

Noad. 

7 6 

Br 

216 

27 

6 

271,8 

269 

jWroblevsky . 

J->J 

NO, 

324.  J’appellerai  cette  (première)  manière  de  trouver  l’équiva- 
lent d’ébullition  d’un' élément,  la  méthode  des  densités  de  vapeur. 

325.  La  seconde  méthode  est  celle  des  densités  liquides , — aux 
points  d’ébullition  ou  à des  températures  correspondantes,  — de  com- 
binaisons dont  les  unes  renferment  N et  dont  les  autres  ne  le 
renferment  pas. 

326.  J’admettrai  (d’après  les  observations  communiquées  anté- 
rieurement) qu’on  peut  comparer  les  densités  liquides  des  corps 
dont  les  formules  se  ressemblent  ; on  a pour  de  pareils  corps  : 

Dt  n n 

d’où  3^=/f  = Const. 

327.  Le  benzol,  6.  6,  bout  (i^T)  à 88°, 5,  et  le  nitrobenzol , 

0 5 

* N O ^ ^ ^ ^ 204°,  9 ; les  valeurs  de  x sont  différentes  pour  les 


224 


J.  A.  GROSIIANS.  SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 


deux  corps,  mais  la  valeur  de  K est  indépendante  de  a;.  Je  pren- 
drai pour  températures  correspondantes  : 

t = — - (273  + «)  — 273. 

10  ^ ' 


t 

1)0 

m 

To 

Kt 

6.  6 

16,3 

0,8991  Kopp 

0,8814 

12 

13,61 

0,865  Faraday 

0,8484 

14,14 

6.  5 

109,4 

1,2002  Kopp 

1,0927 

16 

14,64 

NO, 

- 

1,2234  Mitscherlich 

1,1138 

14,36 

J’ai  calculé  Dt  d’après  les  expériences  de  M.  H.  Kopp. 

328.  On  peut  encore  considérer  l’alcool  amylique , 5.  12.  1 , et 
le  nitrate  d’amyle,  5.  11.  3.  N,  comme  ayant  des  formules  res- 
semblantes. 

5.  12.  1 bout  à 134'’, 8 1-^T  ; observé  134°  Rieckher;  Z)o  = 
'0,8248  H.  Kopp;  = 0,8193;  18;  = 21,98. 

5.  11.  3.  N bout  à 138°,7  T ; observé  137°  Rieckher;  Z>io°  = 
0,994  Hoffman;  n — 22  ‘ Â'io°  = 22,13. 

329.  Il  y a lieu  d’observer  que  la  méthode  des  densités  des 
vapeurs  nécessite  une  espèce  de  tâtonnement,  qui  cependant  con- 
duit au  but , pourvu  qu’il  existe  des  données  suffisantes  ; la  méthode 
des  densités  liquides,  au  contraire,  donne  un  résultat  direct;  en 
comparant  par  exemple  les  densités  des  deux  derniers  corps,  on  a : 

0,8193  : 0,994  18  : a;, 

d’où  X z=z  21,84  et  Eq.Ni=x  — 19  2,84. 

330.  La  troisième  méthode  est  celle  des  dissolutions  ; elle  donne 
aussi  un  résultat  direct. 

J’ai  déjà  traité  ce  sujet  ici-même,  en  1873,  mais  il  ne  sera 
pas  inutile,  je  pense,  de  montrer  comment  on  peut  déduire  d’un 
petit  nombre  d’expériences  le  résultât:  Eq.N^zS. 

331.  M.  Thomsen  a déterminé  pour  un  grand  nombre  de  corps 
divers  la  densité  de  leurs  dissolutions  aqueuses  à la  température 
de  18'’;  j’extrairai  de  ses  expériences  les  données  suivantes,  qui 
se  rapportent  toutes  à des  dissolutions  renfermant  pour  200  atomes 
d’eau  un  atome  du  corps  dissous: 


(corps  non-décomposés)  de  la  chimie. 


225 


D 

D 

KN03 

1,0173 

K Cl 

1,0136 

NaN03 

1,0160 

Na  Cl 

1,0118 

HNO3 

1,0094 

HCl 

1,0052 

1,0584 

Ba  Cl  2 

1,0502 

332.  Je  crois  utile  de  rappeler  ici  T opinion  émise  par  M.  Thomsen , 
que  les  corps  en  dissolution  aqueuse  très  étendue  sont  comparables 
entre  eux,  tout  comme  à Tétât  de  vapeur. 

333.  Les  densités  des  dissolutions , qui  précèdent , se  rapportent, 
comme  Ton  voit,  à trois  couples  de  corps  KNO3  etKCl,  et  à un 
couple  RN^Og  et  RCI2  ; si  Téquivalent  d’ébullition  de  N est  = 3 , 
celui  de  NO 3 sera  =:=:  6,  en  sorte  que,  Téquivalent  d’ébullition 
de  Cl  étant  zz:  4 , on  aura  les  relations  suivantes  : 

En  appelant  Eq^.  R Téquivalent  d’ébullition  de  R (qu’il  est  inutile 
de  prendre  en  considération) , les  équivalents  d’ébullition  des  corps 
dissous  seront: 

pour  RNO3  HZ  Eq.  R + 6 

„ RCl  = Eq.  R + 4 

„ RN^Oe  z=L  Eq.^-\- 12 
„ RCl 2 Eq.  R + 8 

On  a ensuite: 

Eq.  E + 6 — (Eq.  R H-  4)  = 2 

Eq.  R + 12  — [Eq.  R + 8)  z=  4. 

Or , ce  sont  ces  différences  2 et  4 qui  ressortent  clairement  des 
expériences  citées,  comme  je  vais  le  faire  voir,  et  «ainsi  sera 
confirmé  par  la  troisième  méthode  le  résultat  N =:  3. 

334.  J’ai  démontré  (en  1873)  la  formule  suivante: 

1 

, (X  (A  H-  ^)  ’ 

en  faisant  A =z:  oo  (c’est-à-dire  très  grand,  ou  au  moins  assez 
grand)  on  en  tire: 

~=  3 A (D-^1). 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX. 


15 


226 


J.  A.  GROSHANS.  SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 


Pour  deux  corps  (RNO3  et  RCl)  on  a,  eu  prenant  AzziA', 
3 3 

- — - — 3 A (D  — D'). 

J’ai  encore  (en  1873)  démontré  la  formule: 


je  rappellerai  ici  que  B est  l’équivalent  d’ébullition  du  corps  dis- 
sous, et  y une  constante,  trouvée  par  l’expérience  environ  = 1,23. 
On  aura  donc  pour  les  deux  corps  RNO3  et  RCl: 


3 

a 


3 

— z=By  — B'rz=2y, 
« 


et  par  conséquent,  en  réunissant  lès  formules  qui  contiennent  — — — : 
3 A(D  -D  ) = 27. 

De  même,  pour  les  deux  corps  RNaOg  et  RCl^  : 

3 A(D  — D')z=4/. 

335.  Le  tableau  suivant  donne  les  valeurs  de  2 y et  de  4 7 , 
telles  qu’elles  résultent  des  expériences  de  M.  Thomsen: 


TABLEAU  XXXXV. 


Corps  comparés 

D -D' 

3 A 

2 y 

KNO3 

et  KCl 

0,037 

600 

2,22 

Na  NO  3 

„ Na  Cl  . 

0,042 

}•) 

2,52 

HN03 

„ HCl 

0,042 

2,52 

4 7 

BaN20g 

„ BaCl2 

0,082 

57 

4,92 

107  = 

12,18 

7 zz: 

1,22 

336.  En  prenant  des  valeurs  de  A aussi  grandes  que  possible , 
les  valeurs  de  - s’approchent  très-près  d’une  constante,  qui  n’est 
pas  encore  connue  avec  la  précision  nécessaire;  mais  il  ne  peut 
rester  de  doute  que  les  valeurs  observées  ici  appartiennent 
à 2 7 et  à 4 y. 


(corps  non-décomposés)  oe  la  chimie.  227 

Sur  quelques  cas  particuliers  de  x.  • 

337.  En  général,  comme  Ton  sait,  les  points  d'ébullition  aug- 
mentent dans  une  série  homologue,  quand  les  poids  atomiques 
s'accroissent;  on  a cru  reconnaître,  dans  la  plupart  des  séries, 
une  augmentation  de  pour  chaque  groupe  additionnel  CH2. 

338.  Cependant,  il  existe  aussi  de  certaines  séries  où  le  contraire 
arrive,  c'est-à-dire,  où  les  points  d'ébullition  baissent  lorsque  les 
poids  atomiques  s'accroissent;  j’en  donnerai  ici  pour  exemple  la 
série  des  éthylines , ou  des  corps  qui  résultent  de  la  substitution , 
dans  la  glycérine  3.  8.  3,  de  1,  2,  3 groupes  d'éthyle  2.  5 à 1 , 
2,  3 atomes  de  H. 


TABLEAU  XXXXVI. 

Ethylines,  n (2n  + 2)  3;  x =z  9 pour  tous  les  corps 
de  la  série. 


Noms. 

formules . 

a 

n 

X 

Points 

cale. 

d’ébullition . 
obs. 

Glycérine. ....... 

3 8 3 

92 

14 

9 

275,1 

275  — 280 

Monétliyline 

5 12  3 

120 

20 

9 

227,4 

225  — 230 

Diéthyline 

7 16  3 

148 

26 

9 

201,8 

191 

Triéthyline 

9 20  3 

176 

32 

9 

185,8 

185 

Les  données  relatives  aux  points  d'ébullition  observés  sont  prises 
dans  le  Traité  de  M.  Kekulé. 


339.  On  voit  que  tous  les  corps  de  ce  tableau  ont  la  même 
valeur  de  x (=  9)  ; tandis  qu'en  général  la  valeur  de  x augmente , 
d'un  corps  à l'autre,  d'une  unité  pour  chaque  groupe  CH 2. 

Alcools  éthylique  et  ally.lique. 

340.  Ordinairement  les  combinaisons  éthyliques  ont  les  mêmes 
valeurs  de  x que  les  combinaisons  allyliques  correspondantes; 
cependant  cela  n'est  pas  le  cas  pour  les  deux  alcools  suivants  : 


* 

a 

n 

X 

s cale.  s obs 

alcool  éthylique  2.  6.  1 

46 

9 

6 

75,2 

alcool  allylique  3.  6.  1 

58 

10 

5 

87,5  90^ 

Il  existe  peut-être  un  alcool  2.  6.  1 , bouillant  à 44^,7  5'. 

15**^ 


228  J.  A.  GROSHANS.  SUR  LA  NATURE  DES  ELEMENTS 

Acides  divers. 

341.  L’acide  propionique , 3.  6.  2,  et  l’anhydride,  6.  10.  3, 
ont  tous  deux  x = Cette  coïncidence  n’est  sans  doute  pas 
purement  fortuite  ; toutefois , on  ne  la  retrouve  pas  chez  les  autres 
acides;  ainsi  pour  l’acide  butyrique,  4.  8.  2,  x est  = 6,  tandis 
que  pour  son  anhydride,  8.-  14.  3,  x est  zzi  7. 

342.  Les  acides  suivants  ont  tous  la  même  racine  (celle  de  5)  : 

Acides  : C H O a rt  x s cale.  s obs . 

propionique  3.  6.  2 74  11  5 145‘’,2  141°,6  Kopp. 

crotonique  4.  6.  2 86  12  5 172°,5  184°, 7 Kek.  (Lehrbuch) 

succinique  4.  6.  4 118  14  5 251°,0  245^^  Régnault. 

Ces  trois  corps  peuvent  être  considérés  comme  ayant  des  formules 
ressemblantes  ; la  ressemblance  des  formules , qui  paraît  liée  à la 
ressemblance  des  propriétés  physiques,  semble  résider  spécialement 
dans  l’égalité  numérique  des  atomes  de  l’hydrogène;  les  atomes 
de  carbone  ont  comparativement  peu  d’influence,  et  les  atomes 
d’oxygène  en  ont  encore  moins,  ou  peut-être  pas  du  tout. 

343.  Il  ne  me  paraît  pas  inutile  de  comparer  ensemble  deux 
corps  dont  les  formules  se  ressemblent: 

En  assimilant  l’acétone,  3.  6.  1,  à l’aldéhyde  propylique  (pour 
ce  qui  concerne  x et  le  point  d’ébullition  observé),  on  trouve 
(tableau  XXXIV)  : 

s cale.  s obs. 

3.  6.  1.  49,5  48,8  Linnemann; 

d’autre  part,  on  a pour  l’éther  méthylique  (tableau  XXV). 

s cale.  s obs. 

2.  6.  1 l/T  — 200,9  — 23,6  Régnault. 

Ces  deux  corps,  quoique  ayant  des  formules  ressemblantes,  pos- 
sèdent des  valeurs  de  x différentes;  mais,  parmi  leurs  produits 
de  substitution  respectifs  (par  le  chlore),  il  y en  a deux  qui 
montrent  une  grande  ressemblance  dans  leurs  propriétés  physiques. 


Ce  sont  les  produits  appelés  perchlorés. 

a n X s cale. 

s obs. 

2.  — . 1 
Cle 

253 

27  2 

95°,4 

O 

O 

O 

Régnault. 

3.  — . 1 
Cle 

265 

28  2 

99°,1 

100" 

Plantamour. 

(coups  non-décomposés)  de  la  chimie. 


229 


On  voit  que  les  valeurs  de  x sont  les  mêmes  ; les  points  d’ébulli- 
tion difîerent  peu. 

344.  Il  arrive  souvent  que  pour  des  produits  percblorés  la  valeur 
de  X change.  D’un  autre  côté,  on  a observé  que  ces  produits 
percblorés  donnent  quelquefois  4 volumes  de  vapeur,  au  lieu  de 
2 volumes  ; le  percborure  de  l’étber  méthylique  se  trouve  dans  ce 
cas , mais  j’ignore  s’il  en  est  de  même  pour  l’acétone  percblorée.  Il  ne 
serait  pas  impossible  qu’il  existât  quelque  relation  entre  le  dédou- 
blement du  volume  de  vapeur  et  le  changement  de  la  valeur  de  x. 


Cas  de  l’acide  carbonique. 

345.  Je  terminerai  ce  Mémoire  par  le  cas  particulier  (de  x)  que 
j’appellerai  celui  de  l’acide  carbonique  CO^  , quoiqu’on  puisse 
aussi  l’observer,  avec  quelques  modifications,  dans  les  corps  CS 2 , 


SO2,  SO3,  CO  et  O2. 

Si  nous  admettons  pour  CO2  le  point  d’ébullition  — 78°,2, 
trouvé  par  M.  Kegnault,  on  voit  que  la  formule 

5 = — 273  h-27,8— 

' n 

n’est  pas  applicable  à ce  corps;  car,  en  prenant  <xz=z\^  la  con- 
stante 27,8  (considérée  comme  n’étant  peut-être  pas  la  même  pour 
tous  les  corps)  devrait  être  remplacée  par  la  valeur  13,28;  en 
laissant  la  constante  = 27,8 , on  ne  trouve  pas  une  valeur  entière 


pour  x^  qui  devient  alors  = 


1 

4^^‘ 


346.  Pour  faire  voir  que  le  cas  de  CO  2 est  (avec  des  modifi- 
cations) applicable  aux  corps  CO  et  00,  dont  les  points  d’ébul- 
lition ne  sont  pas  connus,  j’ai  calculé  les  valeurs  de  la  constante 
(qui  pour  les  autres  corps  est  27,8)  dans  l’hypothèse  où  ces  deux 
corps  bouilliraient  au-dessous  de  — 100’  ; je  donnerai  les  résultats 
/ du  calcul  pour  C 0 : 

2 (273  — 100) 

valeur  de  la  constante  = =:  12,2  ; 

Zo  1/  1 


valeur  de  a?,  en  supposant  que  2^(273 — 100)^  ___  1 
la  constante  soit  27,8,  28^  27,8^  5,2 

Ce  phénomène  doit  rester  provisoirement  sans  explication. 


RoTTEiiDAM,  Mars  1874. 


SUR  UN 


MÉTÉOËÜGRAPIÏE  UNIVERSEL 


DESTINÉ  AUX 

OBSERVATOIRES  SOLITAIRES, 

PAR 

E.  H.  VON  BAUMHAUER. 

{Communiqué  dans  la  séance  de  l’Académie  Royal  d'Amsterdam  du  30i¥<3rn874.) 


Parmi  les  questions  que  la  Société  hollandaise  des  sciences  avait 
mises  au  concours  en  1870,  figuraient  les.  deux  suivantes,  pour 
lesquelles  le  terme  de  rigueur  était  fixé  au  Janvier  1872: 

„La  Société  offre  sa  médaille  d’or  et,  de  plus,  une  prime  de 
trois  cents  florins  à celui  qui  fera  connaître  un  moyen  satisfaisant , 
fondé  sur  l'emploi  de  cerfs-volants  ou  de  ballons  captifs,  pour 
élever  des  instruments  météorologiques  à une  hauteur  considérable 
dans  l'atmosphère-  et  les  y maintenir  pendant  au  moins  24  heures." 

„La  Société  récompensera  de  sa  médaille  d'or  la  présentation  d'un 
instrument  météorologique  à en  registration  automatique,  — soit 
thermomètre,  baromètre  ou  hygromètre,  — propre  à être  fixé  à 
un  cerf-volant  ou  à un  ballon,  et  à donner,  au  moins  pendant 
24  heures , des  indications  satisfaisantes  sur  l'état  de  l'atmosphère 
à de  grandes  hauteurs." 

Les  questions  ainsi  formulées  n'ayant  provoqué  aucune  réponse 
dans  les  limites  de  temps  assignées,  elles  furent  remises  au  con- 


E.  H.  VON  BAUMHAUER.  SUR  UN  MÉtÉOROGRAPHE  UNIVERSEL,  ETC.  231 

cours  en  1872,  mais,  cette  fois,  modifiées  dans  leur  forme  et 
fondues  en  une  seule,  dont  voici  Ténoncé: 

„ Trouver  un  moyen  satisfaisant  de  déterminer  la  température. 
Tétât  d'humidité  et  la  densité  de  Tair  atmosphérique  à une  hauteur 
considérable  au-dessus  de  la  surface  terrestre;  ce  moyen  devra 
permettre  l’enregistrement  automatique  des  observations,  ou  au 
moins  leur  répétition  fréquente.” 

Par  cet  appel,  la  Société  hollandaise  avait  témoigné  de  Tim- 
portance  qu'elle  attachait  à voir  la  Météorologie  s’enrichir  d’instru- 
ments enregistreurs,  thermomètres,  baromètres  et  hygromètres, 
propres  à faire  connaître  la  température,  la  pression  et  l'état 
hygrométrique  de  l’atmosphère  à des  altitudes  considérables  au- 
dessus  de  la  surface  du  sol , ou  en  des  lieux  qui  ne  sont  pas 
accessibles  à T homme  d’une  manière  permanente.  La  Société  mon- 
trait clairement  qu’elle  partageait  la  conviction  de  beaucoup  de 
personnes,  savoir,  que  la  Météorologie,  telle  qu’elle  est  encore 
partout  cultivée , ne  satisfait  pas  aux  exigences  qu’on  est  en  droit 
de  lui  poser,  eu  égard  aux  ressources  dont  la  science  dispose 
aujourd’hui. 

Si  Ton  considère,  en  effet,  que  la  presque  totalité  des  obser- 
vations se  fait,  non- seulement  à la  surface  même  du  sol,  mais 
dans  des  masses  d’air  situées  à l’intérieur  ou  à proximité  des 
villes,  entourées  de  bâtiments  et  placées  sous  l’influence  de  che- 
minées et  d’une  foule  d’autres  sources  d’échauffement , on  conviendra 
que  les  données  ainsi  obtenues,  surtout  en  ce  qui  concerne  la 
température  et  l’humidité  de  Tair,  sont  peu  propres  à nous  renseigner 
exactement  sur  l’état  de  l’atmosphère  et  sur  les  changements  qu’il 
subit , aux  diverses  heures  de  la  journée  et  aux  diverses  époques 
de  Tannée,  sous  l’action  des  causes  naturelles.  En  outre,  ces 
observations  nous  laissent  dans  une  une  ignorance  presque  absolue 
au  sujet  des  courants  qui  s’établissent  à une  certaine  hauteur  dans 
l’atmosphère  et  qui  se  meuvent  souvent  dans  une  direction  opposée 
à celle  des  courants  inférieurs. 

Le  sentiment  de  cette  insuffisance  des  observations  ordinaires 
a déjà  donné  naissance  à une  foule  de  projets  pour  la  construction 


232  E.  H. VON  BAUMHAUER. SUR  UN  MÉTÉOROGRAPHE  UNIVERSEL 

d’observatoires  météorologiques  sur  de  hautes  montagnes  (tels , par 
exemple,  que  celui  élevé  près  de  Berne,  par  un  savant  météoro- 
logiste, M.  Wild),  ou  sur  des  rochers  et  des  promontoires  s’avan- 
çant dans  la  mer.  C’est  à ce  même  sentiment  que  sont  dues  les 
tentatives  faites  dans  les  derniers  temps , surtout  en  France , pour 
organiser  des  voyages  aériens  en  ballon,  avec  le  but  spécial  de 
recueillir  des  observations  météorologiques. 

La  difficulté  toutefois  réside  en  ceci , que  les  observations  deman- 
dent l’intervention  de  l’homme , et  même  d’hommes  ayant  reçu 
une  certaine  éducation  scientifique.  Or  les  conditions  dans  lesquelles 
ces  observations  doivent  se  faire  n’ont,  en  général,  rien  de  bien 
attrayant.  Passer  un  hiver,  par  exemple,  au  sommet  ou  à mi- 
hauteur  du  Mont-Blanc,  dans  un  observatoire  qu’il  faut  approvi- 
sionner pour  au  moins  huit  ou  dix  mois  de  vivres  et  de  combustible , 
et  où  on  a la  perspective  de  rester  tout  ce  temps  complètement 
séparé  du  monde  et  exposé  à toutes  sortes  d’incommodités  et  de 
privations,  c’est  là,  certes,  un  sort  très  peu  enviable.  Les  ascensions 
aérostatiques,  d’un  autre  côté,  d’après  l’expérience  qui  en  a été 
faite  par  Gay-Lussac,  Barrai,  Bixio,  Glaisher,  Sivel,  Crocé 
Spinelli  et  tant  d’autres,  entraînent  des, inconvénients  non  moins 
graves.  Sans  parler  des  dangers  inséparables  de  ces  expéditions , 
on  a à lutter  contre  le  froid  intense  des  hautes  régions  (20° — 30° 
sous  zéro),  qui  rend  les  observations  presque  impossibles , et  contre 
les  effets  de  la  raréfaction  de  l’air,  qui  fait  perdre  connaissance 
à l’observateur,  s’il  n’a  pas  eu  la  précaution  d’emporter  un  mé- 
lange respiratoire  riche  en  oxygène.  Il  est  à craindre  qu’on  ne 
trouverait  pas  un  grand  nombre  de  savants  disposés  à affronter, 
pour  l’amour  de  la  Météorologie,  de  pareils  hasards. 

Le  résultat  désiré  serait  obtenu  avec  infiniment  moins  de  peines 
et  de  dépenses  si,  dans  ces  lieux  accessibles  seulement  à des 
époques  plus  ou  moins  éloignées , on  pouvait  ériger  des  observatoires 
météorologiques  spéciaux,  — que  nous  désignerons  brièvement, 
à cause  de  leur  position  isolée,  sous  le  nom  d’observatoires  soli- 
taires, — dont  les  instruments  seraient  construits  de  manière  à 
n’exiger  que  de  loin  en  loin,  et  même  une  seule  fois  par  année , 


DESTINÉ  AUX  OBSERVATOIRES  SOLITAIRES.  233 

la  visite  d’un  surveillant,  et  à transmettre  dans  l’intervalle , d’une 
façon  continue  et  régulière,  leurs  indications  à un  établissement 
principal,  situé  dans  une  région  habitée.  Le  matériel  d’un  pareil 
observatoire  solitaire,  s’il  occupait  peu  d’espace  et  était  suffisam- 
ment léger,  pourrait  encore  s’adapter  à un  ballon  captif,  dont  le 
câble  servirait  à établir  la  communication  nécessaire  entre  les 
instruments  et  le  sol. 

Le  problème  ainsi  posé  n’a,  évidemment,  rien  d’insoluble.  Il  a 
même  déjà  été  attaqué,  avec  plus  ou  moins  de  succès , par  divers 
inventeurs.  Toutefois,  les  dispositions  imaginées  jusqu’à  ce  jour 
sont  toutes,  à mon  avis,  trop  compliquées  et,  par  suite,  trop 
sujettes  aux  dérangements  et  trop  coûteuses;  aussi  y en  a-t-il 
fort  peu  qui  aient  obtenu  les  honneurs  de  l’application.  Tous  ceux 
qui  ont  visité  l’Exposition  de  Paris,  en  1867 , se  rappelleront  sans 
doute  le  météorographe  monumental  exposé  par  le  Père  Secchi, 
et  qui  valut  à ce  savant  la  plus  hante  récompense  dont  le  Jury 
disposait.  Malgré  son  mérite  éminent,  cet  appareil  avait  pourtant 
deux  grands  défauts:  il  était  trop  colossal  et,  surtout,  son  prix 
s’élevait  à 18000  francs,  ce  qui  le  mettait  hors  de  la  portée  de 
la  plupart  des  savants  et  même  de  beaucoup  d’établissements 
scientifiques. 

En  réfléchissant  sur  ce  sujet,  j’étais  arrivé,  il  y a un  an  déjà, 
à une  solution  très  simple,  me  semblait-il,  de  la  question  proposée 
par  la  Société  hollandaise.  Je  songeais  même  à soumettre  ma 
solution  au  jugement  de  la  Société,  lorsque  j’en  fus  empêché  par 
la  circonstance  que,  avant  l’expiration  du  terme  fixé  (1er  Janvier 
1874),  un  Mémoire  sur  cette  question,  écrit  en  italien , fut  envoyé 
comme  pièce  de  concours;  ma  qualité  de  secrétaire  de  la  Société 
m’interdisait , naturellement,  de  me  poser  en  coneurrent.  Maintenant , 
toutefois,  que  la  Société,  conformément  à l’avis  de  ses  Commis- 
saires, a jugé,  dans  la  séance  générale  du  16  Mai  1874,  que  le 
Mémoire  adressé  au  concours  n’était  pas  digne  du  prix,  je  me 
hasarde  à produire  mon  idée  et  à la  soumettre  à l’appréciation 
des  physiciens  et  des  météorologistes.  Je  dis  „mon  idée”,  car 
jusqu’à  présent,  et  faute  de  moyens,  l’appareil  n’a  pas  encore  été 


234  E.  H.  VON  BAUxMHAUER.  SUR  UN  MÉTÉOROGRAPHE  UNIVERSEL 

exécuté.  Mais,  vu  la  grande  simplicité  du  principe  adopté  pour 
Tenregistrement  autographique , je  crois  que  la  réalisation  pratique 
ne  rencontrerait  aucune  difficulté  sérieuse. 

La  question  proposée  par  la  Société  est  un  peu  vague  dans  son 
énoncé,  de  sorte  qu’il  faut  commencer  par  la  préciser  davantage , 
en  distinguant  différentes  conditions  qui  sont  de  nature  à influer 
beaucoup  sur  la  solution. 

1 Une  première  distinction , d’une  grande  importance , est  de 
savoir  si , par  ,, hauteur  considérable”,  on  doit  entendre  un  point  fixe 
accessible  , tel  que  le  sommet  d’une  montagne  ou  d’un  rocher  avancé 
. en  mer,  fournissant  aux  instruments  une  base  solide,  ou  bien  un 
point  élevé  de  l’atmosphère , où  ces  instruments  devraient  être  portés 
au  moyen  d’un  ballon  captif  ou  d’un  cerf-volant.  Dans  ce  dernier 
cas , en  effet , il  ne  saurait  être  question  d’employer  un  baromètre 
à mercure,  même  avec  une  suspension  à la  Cardan,  attendu  que 
les  oscillations,  sous,  l’influence  de  la  moindre  brise,  seraient 
beaucoup  trop  fortes.  En  outre,  les  observations  barométriques 
auront  alors  peu  de  valeur  pour  la  connaissance  des  variations  de 
la  pression  atmosphérique,  si  l’on  n’a  pas  la  certitude  que  l’in- 
strument est  resté  à la  même  hauteur  au-dessus  du  niveau  de  la 
mer,  ou  si  l’on  ne  sait  pas  avec  précision  de  combien  de  mètre® 
le  ballon  est  monté  ou  descendu.  Il  est  vrai  que  la  hauteur  d’un 
ballon  captif  se  déduit  de  la  longueur  déroulée  du  câble  et  de 
l’angle  qu’il  fait  avec  la  verticale  ; mais , à raison  des  oscillations 
possibles  et  de  la  courbure  que  le  câble  affectera  en  tout  état  de 
cause,  cette  détermination  restera  toujours  très  difficile  et  incer- 
taine; or  une  erreur  de  10  à 20 'mètres  sur  la  hauteur  du  ballon 
peut  correspondre  à une  différence  de  1 millimètre  dans  la  lon- 
gueur de  la  colonne  barométrique. 

2“.  Il  n’est  pas  indifférent  non  plus,  pour  la  solution  du  pro- 
blème , que  l’on  se  contente  d’observations  enregistrées  à l’endroit 
même  où  se  trouvent  les  instruments , et  dont  par  conséquent  on 
aura  connaissance  seulement  à la  fin  d’une  série  plus  ou  moins 
longue , ou  bien  que  l’on  demande  aux  instruments  de  l’observatoire 
solitaire  de  transmettre  à chaque  instant  leurs  indications  à l’ob- 


DESTINÉ  AUX  OBSERVATOIRES  SOLITAIRES.  235 

servatoire  principal,  pour  y être  comparées  avec  les  observations 
recueillies  dans  celui-ci.  Le  second  de  ces  systèmes,  auquel  les 
météorologistes  donneront  sans  doute  la  préférence,  exigera  natu- 
rellement une  communication  télégraphique,  dont  le  premier  peut 
se  passer. 

3®.  Enfin,  un  point  essentiel  est  de  savoir  pendant  combien  de 
temps  les  observations  devront  s’enregistrer  sans  qu’on  ait  besoin 
de  se  rendre  à l’observatoire  solitaire  pour  remonter  une  horloge 
ou  pour  exécuter  quelque  autre  manœuvre.  La  difficulté  ne  sera 
pas  la  même,  bien  entendu,  suivant  que  les  appareils  auront  à’ 
marcher  seuls  pendant  24  heures,  ou  pendant  un  mois,  ou  même 
pendant  une  année  entière,  comme  cela  serait  le  cas  si  l’obser- 
vatoire solitaire  était  établi  sur  une  haute  cime,  dont  T abord  serait 
rendu  impraticable  par  la  neige  durant  la  majeure  partie  de 
l’année,  ou  sur  un  rocher  isolé  au  milieu  de  la  mer,  et  auquel 
les  navires  n’aborderaient  qu’à  de  longs  intervalles. 

En  traitant  la  question  proposée  par  la  Société  hollandaise, 
nous  chercherons  à tenir  compte  des  conditions  que  nous  venons 
d’indiquer,  et  nous  distinguerons  en  conséquence  deux  espèces 
difierentes  d’observatoires  solitaires,  savoir: 

1 ^ Ceux  qui  sont  destinés  seulement  à recueillir  des  observaltions 
pendant  une  dizaine  de  jours  tout  au  plus,  et  auxquels  on  ne 
demande  de  faire  connaître  les  résultats  inscrits  qu’à  l’expiration 
de  ce  terme. 

2°.  Ceux  qui,  placés  en  un  point  fixe  très  élevé,  ne  peuvent 
être  visités  que  de  loin  en  loin , et  qui  doivent  transmettre  leurs 
observations,  immédiatement  et  régulièrement,  à l’observatoire 
principal. 

En  dernier  lieu,  nous  parlerons  encore  des  observatoires  soli- 
taires suspendus  à des  ballons  captifs , et  qui  se  laissent  ramener 
à l’une  ou  à l’autre  des  deux  catégories  précédentes,  suivant 
qu’on  exige  ou  qu’on  n’exige  pas  la  transmission  des  obser- 
vations. 

4 

Quelle  que  soit  la  disposition  adoptée,  pour  qu’elle  rende  des 
services  à la  Météorologie , elle  devra  satisfaire  à des^  conditions 


236  E.  H.  VON  BAUMHAUEB.  SUR  UN  MÉTÉOROGRAPHE  UNIVERSEL 

assez  nombreuses  et  assez  strictes,  dont  les  principales  sont  les 
suivantes  : 

1 Les  instruments  doivent  donner  des  indications  exactes.  Il  ne 
s’agit  pas  ici,  toutefois,  d’une  précision  poussée  à l’excès,  car  les 
météorologistes  sont  d’accord  pour  reconnaître  qu’ils  n’ont  pas  à se 
préoccuper,  dans  leurs  observations  thermométriques  ou  baromé- 
triques, d’une  différence  de  de  degré  centésimal  ou  de 

T O — ïo  millimètre  de  mercure. 

Une  précision  de  | degré  pour  les  indications  du  thermomètre 
et  de  I à | de  millimètre  pour  la  hauteur  barométrique  est  amplement 
suffisante;  l’essentiel  est  que  ces  indications  ne  puissent  jamais 
être  faussées. 

2®.  Les  instruments  doivent  être  aussi  simples  que  possible, 
atin  que  les  chances  de  dérangement  soient  réduites  à un  minimum. 

3®.  L’installation  ne  doit  pas  être  trop  coûteuse. 

4o.  Il  faut  que  le  travail  et  les  soins  de  l’homme  ne  jouent 
qu’un  rôle  très  subordonné;  autant  que  possible,  les  instruments 
doivent  fonctionner  et  l’enregistrement  se  faire  sans  que  le  météo- 
rologiste ait  à s’en  occuper. 

5®.  Les  moyens  d’enregistrement  doivent  être  tels,  que  toutes 
les  observations  soient  réunies  sur  un  tableau,  traduites  par  des 
courbes  permettant  de  constater  d’un  coup  d’œil  la  marche  des 
instruments. 

6®.  En  cas  de  communication  électrique  entre  l’observatoire 
solitaire  et  l’observatoire  principal , le  nombre  des  fils  conducteurs 
doit  être  aussi  petit  que  possible.  Cette  condition  s’impose  surtout 
si  l’on  opère  avec  un  ballon  captif,  car  il  faut  éviter  d’aug- 
menter outre  mesure  le  poids  du  câble  qui  doit  être  porté  par 
le  ballon. 

7®.  Lorsqu’on  emploie  un  courant  galvanique,  celui-ci  ne  doit 
pas  entrer  en  contact  immédiat  avec  les  instruments,  parce  que 
leur  marche  éprouverait  des  perturbations , surtout  sous  l’influence 
des  étincelles  qui  jaillissent  au  momeut  de  l’établissement  ou  de 
la  rupture  du  circuit;  en  outre,  ces  étincelles,  tombant  sur  des 
surfaces  métalliques,  y produisent  des  phénomènes  d’oxydation. 


DESTINÉ  AUX  OBSERVATOIRES  SOLITAIRES. 


237 


qui  sont  une  cause  de  détérioration  rapide  pour  les  instruments. 
Pour  cette  raison , remploi  de  baromètres  et  de  thermomètres  à 
mercure  munis  de  fils  de  platine  scellés  dans  le  verre,  comme 
ceux  des  appareils  de  Wheatstone  et  autres , me  paraît  devoir  être 
proscrit  absolument. 

Nous  n’avons  pas  à porter  ici  un  jugement  sur  les  instruments 
météorologiques  eux-mêmes , et  à décider  si  le  baromètre  à siphon 
ou  le  baromètre  à cuvette  doivent  obtenir  la  préférence  sur  le 
baromètre  à balance,  adopté  dans  le  météorographe  du  P.  Secchi, 
ou  sur  les  deux  espèces  de  baromètres  anéroïdes.  La  manière  dont 
les  indications  sont  transmises,  dans  le  système  que  je  propose, 
permet  l’emploi  de  tous  ces  instruments,  parce  que  chez  tous, 
même  chez  le  baromètre  à siphon,  le  mouvement  peut  être  com- 
muniqué à un  levier;  il  n’y  a,  pour  cela , qu’à  adapter  un  flotteur , 
à l’instrument  comme  on  le  fait  dans  le  baromètre  à cadran. 

En  ce'  qui  concerne  la  température , on  peut  se  -servir  de  tous 
les  instruments  qui , reposant  sur  la  dilatation  de  corps  solides,  don- 
nent le  moyen  de  faire  mouvoir  un  levier;  tels  sont  le  thermo- 
mètre de  Breguet,  le  thermographe  du  P.  Secchi,  fondé  sur  la 
dilatation  linéaire  d’un  fil  de  cuivre,  le  thermomètre  métallique 
du  Dr.  Krecke , fondé  sur  la  dilatation  différente  du  zinc  et  du  verre , 
et  qui  fonctionne  déjà  depuis  de  longues  années  à l’Observatoire 
d’Utrecht.  On  peut  aussi  utiliser  le  thermomètre  à air,  le  levier 
étant  alors  mis  en  mouvement  par  un  flotteur  placé  sur  le  mer- 
cure du  manomètre.  Seul,  le  thermomètre  ordinaire  à mercure 
reste  ici  sans  emploi  i). 

Pour  la  détermination  de  l’état  hygrométrique  de  l’air,  on  ne 
peut  s’adresser  qu’aux  instruments  qui  reposent  sur  l’allongement 
ou  le  raccourcissement  de  certaines  substances  animales  et  sur  la 
transmission  de  ces  mouvements  à une  aiguille;  tels  sont  l’hy^ 

O A ce  qu’on  m’a  dit,  à l’observatoire  de  Bruxelles  fonctionne  un  thermomètre 
à mercure , dont  le  tube  horizontal  repose  sur  un  couteau  de  balance , de  manière 
que  la  colonne  de  mercure,  en  s’allongeant  fait  incliner  de  plus  en  plus  l’ex- 
trémité du  tube;  l’indication  de  cet  instrument  peut  donc  être  enregistrée  comme 
celle  d’un  appareil  à cadran. 


238  E.  H.  VON  BAUMIIAUER.  SUR  UN  MÉTÉOROGRAPH E UNIVERSEL 

gromètre  à cheveu  et  Thygroraètre  à boyau.  Le  psychromètre 
d’August  et  rhygromètre  de  Daniell  ne  trouvent  ici  pas  d’appli- 
cation. Quant  à mon  aréomètre  hygrométrique  ^ que  je  persiste  à 
regarder  comme  Tinstrument  le  plus  convenable  et  le  seul  exact 
pour  la  détermination  de  l’état  hygrométrique  de  l’air,  nous  y 
reviendrons  plus  loin.  Il  sera  alors  question  aussi  de  l’enregistre- 
ment de  la  direction  du  vent  au  moyen  de  la  girouette , de  celui 
de  la  vitesse  du  vent  au  moyen  du  moulinet  de  Robinson , avec  ses 
quatre  cuillers  hémisphériques , et  enfin  de  l’enregistrement  de  la 
quantité  de  pluie,  mesurée  suivant  une  méthode  que  j’ai  indiquée 
il  y a une  vingtaine  d’années  pour  l’évaluation  du  débit  des 
conduites  d’eau.  Toutes  ces  déterminations  peuvent  s’inscrire 
simultanément,  à l’aide  de  la  disposition  que  je  ferai  connaître. 


I. 

Observatoires  solitaires  sans  transmission. 

Le.  peu  d’intérêt  que  présentent  au  météorologiste  des  observations 
dont  il  n’apprend  les  résultats  qu’au  bout  d’un  certain  temps , èst 
sans  doute  la  cause  pour  laquelle  on  n’a  pas  établi  déjà  depuis 
longtemps  des  observatoires  solitaires  du  genre  de  ceux  que  j’ai 
ici  en  vue.  Leur  installation , en  effet , n’offrirait  aucune  difficulté, 
et  ils  auraient  l’avantage  qu’on  en  pourrait  desservir  plusieurs  avec 
un  faible  personnel , • du  moins  s’ils  n’étaient  pas  trop  éloignés 
les  uns  des  autres.  A chacun  d’eux  il  ne  faudrait  qu’une  visite  tous 
les  10  ou  15  jours,  pour  remonter  l’horloge,  renouveler  la  feuille 
où  s’inscrivent  les  observations  et  inspecter  les  instruments.  Ces 
observatoires  pourraient  être  placés  partout , de  préférence  loin  des 
habitations;  les  frais  de  premier  établissement  seraient  peu  con- 
sidérables, et  les  seules  précautions  à prendre  auraient  pour  objet 
de  mettre  les  instruments  à l’abri  de  la  pluie  et  du  vent  et  hors 
de  l’atteinte  des  malfaiteurs.  Les  observations,  inscrites  automa- 
tiquement, d’une  façon  réglée  et  continue,  offriraient  au  météo- 
rologiste des  garanties  d’exactitude  que  ne  possèdent  pas  au  même 
degré  les  observations  recueillies  de  main  d’homme , auxquelles  on 
peut  toujours  objecter  le  humanum  est  errare. 


DESTINÉ  AUX  OBSERVATOIRES  SOLITAIRES. 


239 


La  disposition  suivante  me  paraît  répondre  complètement  au 
but  proposé. 

Un  baromètre  anéroïde,  un  thermomètre  métallique  et  un  hy- 
gromètre à cheveu  sont  montés  sur  une  planche  Tun  à côté  de  Tautre , 
de  manière  que  les  axes  autour  desquels  tournent  leurs  aiguilles 
se  trouvent  situés  en  ligne  droite  ; ces  aiguilles , de  longueur  égale , 
se  meuvent  en  outre  dans  le  même  plan , mais  de  façon  que  chacune 
d’elles,  dans  ses  plus  grands  écarts,  ne  puisse  décrire  qu’un  arc 
de  120°  tout  au  plus.  Plaçons  maintenant  à peu  de  distance  au- 
dessus  de  ces  aiguilles  une  feuille  de  papier , à laquelle  une  horloge 
imprimera  un  mouvement  de  translation  uniforme , et  sur  laquelle 
auront  été  marqués  d’avance  les  arcs  de  cercle  qui  correspondront, 
d’heure  en  heure,  à l’arc  décrit  par  l’extrémité  de  chaque  aiguille  ; 
en  supposant  alors  cette  extrémité  armée  d’un  crayon  de  plomba- 
gine, celui-ci  tracera  sur  le  papier  une  courbe,  qui  indiquera  à 
la  fois  les  positions  successives  de  l’instrument  et  l’heure  corres- 
pondante. 

Mais  le  frottement  d’un  crayon  sur  le  papier  serait  beaucoup 
trop  fort  pour  des  instruments  aussi  délicats  et  fausserait  néces- 
sairement leurs  indications.  Il  vaudra  donc  infiniment  mieux  avoir 
recours  à la  méthode  aujourd’hui  généralement  pratiquée  dans  les 
laboratoires  physiologiques  pour  l’enregistrement  des  mouvements 
délicats,  méthode  qui  repose  sur  l’emploi  de  papier  blanc  glacé, 
préalablement  noirci  au-dessus  d’une  flamme  fuligineuse;  à l’ex- 
trémité de  l’aiguille  sera  alors  attachée  perpendiculairement  une 
fine  barbe  de  plume,  qui,  glissant  presque  sans  frottement  sui- 
te papier  noirci , y tracera  une  ligne  blanche.  Ces  tracés  pourront 
ensuite  être  fixés  au  moyen  de  l’immersion  de  la  feuille  de  papier 
dans  une  solution  faible  de  gomme  ou  de  vernis. 

Il  sera  peut-être  encore  plus  avantageux  d’employer,  au  lieu 
de  papier  enduit  de  noir  de  fumée,  une  plaque  de  verre  traitée 
de  la  même  manière.  Les  observations  étant  terminées , on  posera 
la  plaque  sur  un  papier  imprégné  de  sel  d’argent , et  on  exposera 
le  tout  à la  lumière  ; les  lignes , . où  l’enduit  a été  enlevé  par  les 
barbes  de  plume,  s’imprimeront  alors  en  noir  sur  le  papier.  Si 


240  E.  H.  VON  BAUMIIAUER.  SUR  UN  MÉTÉOROGRAPHE  UNIVERSEL 

Ton  a en  outre  gravé  sur  la  plaque,  à l’aide  d’un  diamant,  les 
divisions  en  degrés  ou  eu  millimètres,  ainsi  que  les  marques  rela- 
tives au  temps , on  pourra  obtenir  très  simplement , sur  le  papier 
sensible,  toutes  les  indications  nécessaires.  La  première  exposition 
à la  lumière  a donné,  comme  nous  venons  de  le  dire,  la  repro- 
duction en  noir  des  courbes  tracées  par  les  barbes  de  plume; 
laissant  alors  le  papier  sensible  solidement  fixé  sous  la  plaque  de 
de  verre,  on  essuie  celle-ci  avec  un  linge,  de  manière  à enlever 
tout  le  noir  de  fumée,  sauf  celui  qui  s’est  logé  dans  les  traits 
creusés  par  le  diamant.  Si,  dans  cet  état , la  plaque  est  de  nouveau 
soumise  pendant  quelques  instants  à l’action  de  la  lumière,  la 
surface  entière  du  papier  prendra  une  teinte  grise,  sur  laquelle 
se  détacheront  en  noir  les  courbes  obtenues  antérieurement , et  en 
blanc  les  traits  dus  au  diamant.  Après  un  traitement  à l’hypo- 
sulfite  de  soude  et  un  lavage  à l’eau,  on  aura  donc,  de  cette 
manière,  un  schéma  durable  des  observations  ; celui-ci  pourra  être 
multiplié  par  la  lumière,  si,  au  lieu  de  papier  sensible , on  prend 
une  couche  de  collodion,  employée  ensuite  comme  négatif. 

Nous  verrons  tantôt  que  les  indications  de  la  direction  et  de  la 
vitesse  du  vent  et  celles  du  pluviomètre  se  laissent  représenter , avec 
une  extrême  simplicité,  par  des  lignes  droites,  de  sorte  que  leur 
transport  sur  la  plaque  de  verre  noircie,  au  moyen  d’une  barbe 
de  plume,  s’effectue  de  la  même  manière  que  ci-dessus. 

Ainsi  donc,  aucune  difficulté  tant  qu’il  ne  s’agit  que  d’un  ob- 
servatoire météorologique  solitaire  pouvant  être  visité , par  exemple , 
deux  fois  par  mois , et  où  une  horloge  ordinaire , marchant  pen- 
dant 15  jours  sans  être  remontée,  enregistre  les  observations, 
qui  n’ont  besoin  de  passer  sous  les  yeux  du  météorologiste  qu’à 
l’expiration  de  ce  terme.  La  difficulté  commence  seulement  lorsque 
le  météorologiste,  de  son  poste  à l’observatoire  principal,  veut 
connaître  à chaque  instant,  l’état  des  instruments  à l’observatoire 
solitaire  plus  ou  moins  éloigné,  pour  comparer  entre  eux  les 
phénomènes  observés  aux  deux  stations. 


DESTINÉ  AUX  OBSERVATOIRES  SOLITAIRES. 


241 


IL 

Observatoires  solitaires  avec  transmission. 

Prenons  un  baromètre  anéroïde  ordinaire , pourvu , comme  le  sont 
la  plupart  de  ces  instruments,  d’une  seconde  aiguille,  fixée  sur 
la  plaque  de  verre  et  servant  à comparer  la  position  du  baromètre 
à un  moment  donné  avec  celle  qu’on  observera  à un  instant  pos- 
térieur; supposons  ensuite  que  la  plaque  de  verre  soit  enlevée, 
mais  que  la  seconde  aiguille  soit  maintenue  de  l’une  ou  de  l’autre 
manière  dans  sa  position  au-dessus  du  cadran  de  l’anéroïde,  et 
qu’en  outre  elle  reçoive  d’une  horloge  un  mouvement  de  rotation 
uniforme  autour  de  son  axe.  En  d’autres  termes  ; représentons-nous 
un  baromètre  anéroïde  sans  plaque  de  verre,  et,  vis-à-vis  de  lui , 
une  horloge  placée  de  façon  que  l’axe  sur  lequel  tourne  l’aiguille 
des  minutes  se  trouve  dans  le  prolongement  de  l’axe  autour  duquel 
oscille  l’aiguille  du  baromètre.  Désignons  cette  dernière  aiguille 
par  la  lettre  A,  et  l’aiguille  des  minutes  par  la  lettre  B;  il  est 
clair  que  l’aiguille  B,  à chacune  de  ses  révolutions,  recouvrira 
une  fois  l’aiguille  A. 

Les  plans  dans  lesquels  se  meuvent  ces  deux  aiguilles  métalli- 
ques étant  supposés  à une  distance  de  quelques  millimètres  l’un 
de  l’autre , fixons  à l’extrémité  de  B une  fine  languette  de  métal , 
qui,  en  passant  sur  l’extrémité  de  A,  établira  entre  les  deux 
aiguilles  un  contact  métallique , sans  toptefois  exercer  un  frottement 
assez  fort  pour  dévier  l’aiguille  A de  sa  direction.  Faisons  en 
outre  communiquer  l’aiguille  A,  par  un  fil  conducteur,  avec  le 
pôle  positif  d’un  élément  galvanique  placé  loin  de  là,  dans  la 
station  centrale,  et  relions  de  même  l’aiguille  B au  pôle  négatif 
de  cet  élément;  à chaque  révolution  de  l’aiguille  B,  il  y aura 
alors  un  instant  où  le  circuit  se  trouvera  fermé. 

Introduisons  maintenant  dans  le  trajet  du  fil  positif,  au  voisinage 
de  l’élément  galvanique,  un  appareil  consistant  en  un  cylindre 
métallique  vertical,  qui,  sous  l’action  d’un  mouvement  d’horlo- 
gerie, tourne  sur  son  axe  de  manière  à accomplir  une  révolution 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  16 


242  E.  H.  VON  BAUMHAUER.  SUR  UN  MÉTÊOROGRAPHE  UNIVERSEL 

dans  le  même  temps  que  l’aiguille  des  minutes  B dont  il  a été 
question  plus  haut,  et  qui  en  outre,  à chacune  de  ces  révo- 
lutions, descend  d’une  petite  quantité.  Recouvrons  ce  cylindre 
métallique  d’une  feuille  de  papier  humide,  imprégnée  d’un  sel 
susceptible  d’éprouver  un  changement  de  couleur  sous  l’influence 
d’un  courant  galvanique  (p.ex.,  l’iodure  de  potassium  mêlé 
d’amidon).  Si  alors  on  laisse  s’appuyer  sur  le  papier  humide  une 
pointe  métallique  communiquant  avec  le  pôle  négatif,  il  est  évident 
qu’à  chaque  tour  du  cylindre  il  se  formera  sur  le  papier  une  petite 
tache  colorée,  au  moment  même  ou  les  aiguilles  A et  B viennent 
en  contact.  Comme  d’ailleurs  l’aiguille  B et  le  cylindre  ont  un 
mouvement  isochrone , il  suffira  que  le  papier  porte  des  divisions 
semblables  à celles  du  baromètre  anéroïde,  pour  que  l’indication 
de  ce  dernier,  au  moment  précis  dont  nous  venons  de  parler, 
s’inscrive  sur  le  papier  et  puisse  y être  relevée. 

En  réfléchissant,  toutefois,  que  l’aiguille  de  l’anéroïde,  dans 
ses  plus  fortes  oscillations,  décrit  tout  au  plus  un  arc  de  120°, 
on  comprendra  que  notre  appareil  peut  exécuter  plus  de  travail 
que  le  simple  enregistrement  des  indications  barométriques. 

Plaçons  en  face  de  l’anéroïde,  et  à une  petite  distance,  un 
thermomètre  métallique  circulaire,  dont  l’aiguille  C ait  la  même 
longueur  que  celle  de  l’anéroïde,  et  dont  l’axe  soit  situé  dans  le 
prolongement  de  l’axe  de  l’anéroïde.  Ces  conditions  restant  rem- 
plies, tournons  le  thermomètre  métallique  de  telle  façon  que  le 
point  de  l’arc  gradué,  répondant  à la  position  moyenne  de  l’aiguille 
(15°  C.),  soit  diamétralement  opposé  au  point  qu’occupe  en 
moyenne  l’aiguille  A du  baromètre  anéroïde  (760  mm.).  Quant  à 
l’horloge,  nous  la  supposons  reportée  ailleurs,  sauf  l’aiguille 
des  minutes  B,  qui  tourne  entre  les  deux  plans  des  aiguilles 
A et  C.  Si  à l’extrémité  de  cette  aiguille  B nous  adaptons,  au 
lieu  de  la  languette  simple  dont  nous  l’avions  armée  ci-dessus, 
une  languette  double  pliée  en  S , l’aiguille  B , dans  le  cas  où  les 
instruments  sont  bien  placés , entrera  à chaque  révolution  une 'fois 
en  contact  avec  l’aiguille  A et  une  fois  avec  l’aiguille  C.  Cette 
dernière  étant  reliée,  tout  comme  l’aiguille  A,  au  fil  polaire 


DESTINÉ  AUX  OBSERVATOIRES  SOLITAIRES. 


243 


positif,  OD  obtiendra  sur  le  papier  préparé , à chaque  révolution , 
deux  indications  différentes,  sur  la  signification  desquelles  il  ne 
pourra  subsister  de  doute,  attendu  que  les  places  où  elles  s’ins- 
crivent rendent  toute  confusion  impossible. 

Telle  a été  ma  première  idée,  et,  en  dépit  des  modifications 
que  j’y  ai  successivement  apportées,  elle  est  restée  le  fondement 
du  mécanisme  que  je  vais  maintenant  décrire  et  qui  me  semble 
résoudre,  d’une  manière  très  simple,  le  problème  de  la  con- 
struction d’un  météorographe  universel  pour  observatoires  solitaires. 

Dans  cette  description,  ainsi  que  dans  le  dessin  destiné  à en 
faciliter  l’intelligence,  je  négligerai  entièrement  les  instruments 
météorologiques  eux-mêmes,  parce  que,  comme  je  l’ai  déjà  fait 
remarquer  plus  haut , on  peut  employer  tous  les  instruments  dont 
les  mouvements  sont  susceptibles  d’être  transmis  à un  levier.  La 
figure  ne  montrera  donc  rien  que  ces  leviers,  terminés  par  des 
arcs  dentés  qui  engrènent  avec  les  roues  dentées  auxquelles  sont 
fixées  les  aiguilles. 

Chez  tous  ces  instruments , d’ailleurs , la  transmission  du  mou- 
vement au  levier  devra  être  calculée  de  manière  que  les  aiguilles, 
dans  leurs  plus  grand  écarts , ne  décrivent  qu’un  arc  déterminé , 
dont  le  nombre  de  degrés  dépendra  du  nombre  d’instruments  qu’on 
veut  combiner  dans  le  météorographe.  Dans  l’exemple  que  j’ai 
choisi,  les  aiguilles  ne  doivent  se  déplacer  que  de  90^^,  pour 
qu’elles  ne  viennent  jamais  en  contact  l’une  avec  l’autre , et  pour 
que  les  indications  d’un  des  instruments  ne  s’inscrivent  jamais  sur 
la  zone  du  cylindre  destinée  aux  indications  d’un  autre.  Le  système 
adopté  par  moi  repose , en  effet , sur  l’observation  successive  des 
divers  instruments. 

Pour  ce  qui  regarde  le  vent  et  la  pluie,  ils  demandent  une 
disposition  différente.  La  détermination  de  la  direction  du  vent 
exige  une  révolution  entière , et  il  en  est  de  même  de  la  mesure 
de  sa  vitesse  au  moyen  du  moulinet  de  Robinson.  Ainsi  qu’il  a 
déjà  été  fait  pour  d’autres  météorographes , j’ai  admis  que  dans 
le  moulinet  de  Robinson , pourvu  d’une  vis  sans  fin  et  du  nombre 
nécessaire  de  rouages  de  transmission , la  roue  destinée  à l’enre- 

16* 


244  E.  e*  VON  BAUMHAÜER. SUR  UN  MÉTÉOROGR APUE  UNIVERSEL 


gistrement  n’exécute  qu’une  seule  révolution  dans  le  temps  que 
le  courant  d’air  met  à parcourir  l’espace  de  20  kilomètres , temps 
qui  n’est  qu’ assez  rarement  inférieur  à une  heure. 

Quant  au  pluviomètre,  je  propose  une  disposition  que  j’ai  déjà 
recommandée , il  y a une  vingtaine  d’années , pour  la  mesure  des 
liquides  en  général , et  pour  celle  des  matières  solides  granuleuses 
ou  pulvérulentes,  disposition  que  la  figure  I fera  aisément  com- 
prendre sans  explication  détaillée. 

Soit  A un  réservoir  de  section  connue,  servant  à recueillir  la 
pluie , dont  la  quantité  doit  être  mesurée  par  l’hydromètre.  L’eau 
tombe  par  le  tube  a , — terminé  inférieurement  en  tuyau  d’arrosoir 
représenté  en  M,  afin  que  la  chute  de  l’eau  ne  produise  pas  de 
choc , — dans  l’auget  6 , 6 , 6 , 6 , qui  a la  forme  d’un  secteur  de  cylin- 
dre et  qui  peut  basculer  autour  de  l’axe  d.  Comme  le  montre  la  figure, 
il  y a deux  augets  égaux  accouplés,  dont  l’un  se  trouve  toujours 
sous  l’arrosoir,  tandis  que  l’autre  se  décharge  de  l’eau  qu’il  vient 
de  recueillir.  La  section  transversale  des  augets  est  un  triangle 
scalène,  de  sorte  que  le  plan  vertical  passant  par  l’axe  partage 
l’auget  en  deux  parties  de  capacité  inégale;  l’excès  du  poids  de 
l’eau  dans  la  partie  extérieure  fait  basculer  l’auget , et  pour  qu’on 
puisse  régler  avec  précision  la  quantité  d’eau  qui  déterminera  ce 
mouvement  de  bascule  (par  ex.  un  litre  ou  une  fraction  de  litre) , 
les  augets  tombent  avec  leurs  lèvres  m m sur  les  coussins  en 
caoutchouc  o o , dont  la  position  est  réglée  par  les  vis  R R. 
La  figure  montre  comment  le  mouvement  est  ensuite  transmis 
jusqu’à  une  dernière  roue,  dont  chaque  révolution  répond  à une 
quantité  d’eau  écoulée  égale  à 100  litres  (ou  divisions  déterminées 
du  litre). 

Nous  avons  donc  ici  trois  appareils  dont  la  marche  se  traduit , 
en  dernière  analyse,  par  un  mouvement  de  rotation,  qui,  pour 
la  facilité  de  l’enregistrement,  doit  être  transformé  en  un  mou- 
vement rectiligne.  Le  moyen  le  plus  simple  d’opérer  cétte  trans- 
formation me  paraît  être  celui  que  je  vais  décrire.  Il  ne  faut 
toutefois  pas  perdre  de  vue , à cette  occasion , que  la  construction 
de  mon  méréorographe  repose  sur  l’hypothèse  que  les  indications 


DESTINÉ  AUX  OBSERVATOIRES  SOLITAIRES. 


245 


A 


de  chaque  instrument  météorologique  seront  enregistrées  une  fois 
par  heure.  Les  instruments  pour  la  vitesse  du  vent  et  la 


246  E.  H. VON  BAUMHAUER. SUR  UN  MÉLÉOROGRAPBE  UNIVERSEL 

quantité  de  pluie  doivent  donc  être  disposés  de  manière  que 
la  roue,  chargée  de  donner  les  indications,  ne  fasse  jamais  une 
révolution  entière  dans  la  durée  d’une  heure  ; autrement , il  pourrait 
rester  douteux  si  le  courant  d’air  a parcouru,  par  exemple,  2 ou 
22  kilomètres  pendant  l’heure  écoulée,  ou  si  le  pluviomètre  a livré 
passage  à 5 ou  à 105  litres  d’eau. 

Soient  deux  roues  A 
et  B (fig.  II,)  de  même 
rayon , placées  dans  le 
même  plan  et  de  telle 
sorte  que  la  distance  de 
leurs  centres  soit  précisé- 
Eig.  II.  ment  égale  à la  circonfé- 

rence de  chacune  d’elles.  Une  courroie  ou  chaîne  sans  fin 
embrasse  les  roues  A et  B sur  la  moitié  de  leur  contour 
et  les  relie  l’une  à l’autre;  à cette  chaîne  sont  fixées  trois 
goupilles , 6 , b y 6 , à des  distances  égales  entre  elles  et 

par  suite  égales  à la  circonférence  des  roues.  Si  maintenant 
la  roue  A est  mise  en  mouvement  par  un  des  instruments  dont  il 
s’agit  d’enregistrer  les  indications,  ce  mouvement  se  transmettra 
à la  chaîne  sans  fin  et  à la  roue  B.  Dans  chaque  phase  du  mou- 
vement, il  y aura  toujours  une  des  trois  goupilles  qui  se  déplacera 
le  long  de  l’échelle  PP,  tracée  au-dessous  d’une  des  deux  parties 
rectilignes  de  la  chaîne;  pour  une  révolution  complète  de  A,  la 
goupille  parcourra  l’échelle  entière,  et  lorsque,  le  mouvement 
continuant,  elle  quittera  l’échelle  près  de  B,  la  goupille  sui- 
vante viendra  immédiatement,  près  de  A,  la  remplacer  sur 
l’échelle. 

Cette  disposition  si  simple  me  paraît  satisfaire  à toutes  les 
exigences,  tant  pour  T enregistrement  d’un  mouvement  circulaire 
continu , tel  que  celui  au  quel  conduit  la  mesured  e la  vitesse  du 
vent  ou  de  la  quantité  de  pluie,  que  pour  l’enregistrement  d’un 
mouvement  circulaire  plus  ou  moins  alternatif,  comme  est  celui 
de  la  girouette. 

Passons  maintenant  à la  description  de  l’appareil  d’enregistre- 


DESTINÉ  AUX  OBSERVATOIRES  SOLITAIRES. 


247 


ment , et  occupons-nous , en  premier  lieu , de  la  partie  de  cet  appareil 
qui  se  trouve  à l’observatoire  solitaire. 

Le  levier  A , fig.  III , est  mis  en  mouvement  par  un  baromètre , 
le  levier  B par  un  thermomètre  métallique,  le  levier  C par  un 

Fig.  III. 


Fig.  Illè. 

j hygromètre;  chacun  d’eux  transmet  son  mouvement  à une  roue 
spéciale,  A',  B',  C',  à laquelle  est  fixée  l’aiguille  de  l’instrument. 
Comme  le  montre  la  coupe,  fig.  III  6,  ces  leviers  et  ces  roues 
dentées  ne  sont  pas  situés  dans  le  même  plan,  mais  placés  l’un  au- 
dessus  de  l’autre  , de  façon  que  les  roues  tournent  autour  d’un 
axe  commun , tout  en  étant , du  reste , parfaitement  indépendantes 


248  E.  e.  VON  BAUMHAUER.  SUR  UN  MÉTÉOROGRAPHE  UNIVERSEL 

Tune  de  l’autre.  Les  extrémités  des  aiguilles,  toutefois,  doivent 
se  mouvoir  dans  un  seul  et  même  plan , en  rasant  de  très  près , 
bien  que  tout  à fait  libres , le  limbe  divisé  M M M M 5 pour  être 
amenées  dans  cette  position , les  aiguilles  de  deux  des  instruments 
reçoivent  une  forme  coudée.  Les  aiguilles,  ou  du  moins  leurs 
extrémités,  qui  se  terminent  par  une  petite  tige  mince,  sont  en 
ébonite,  substance  qui  ne  conduit  pas  l’électricité.  Chacune  des 
aiguilles , enfin , lors  de  ses  plus  grandes  excursions , se  meut  seule- 
ment dans  l’étendue  d’un  quart  de  cercle,  de  manière  à ne  jamais 
venir  en  contact  avec  une  des  autres  aiguilles.  Trois  des  quadrants 
étant  affectés  au  baromètre,  au  thermomètre  et  à l’hygromètre, 
j’emploie  le  quatrième  pour  les  indications,  transformées  comme 
il  a été  dit  ci-dessus,  de  la  girouette,  X,  de  l’anémomètre,  Y et  du 
pluviomètre,  Z.  Les  goupilles , qui  servent  à l’enregistrement  de  ces 
indications , sont  également  en  ébonite , et  peuvent  glisser  à frotte- 
ment dur  sur  leur  échelle , attendu  qu’il  y a , dans  les  trois  instru- 
ments en  question,  une  surabondance  de  force  motrice. 

Pour  la  girouette,  qui  par  ses  oscillations  brusques  et  étendues 
pourrait  parfois  mettre  en  danger  la  languette  d’or  dont  il  sera 
parlé  tout  à l’heure , je  propose  même  de  faire  passer  sur  les  deux 
roues,  au  lieu  d’une  chaîne  ou  courroie  ordinaire,  une  courroie 
en  caoutchouc  tendue,  afin  d’amortir  l’intensité  des  chocs. 

Le  limbe  divisé  M M M M peut  être  fait  de  métal  ou  de  toute 
autre  matière , mais  son  bord  extérieur  doit  être  en  platine  ou  en 
laiton  chargé  d’une  dorure  épaisse,  parce  que  sur  cette  partie  se  pro- 
duiront les  passages  et  les  ruptures  du  courant  galvanique,  et 
qu’il  faut  en  conséquence  la  préserver  de  l’oxydation. 

En  face  du  limbe  gradué  se  trouve  une  horloge,  dont  notre 
figure  III  b représente  seulement  l’aiguille  des  minutes , E R , qui 
a son  axe  sur  le  prolongement  de  l’axe  autour  duquel  tournent 
les  aiguilles  des  instruments.  Cette  aiguille  des  minutes  est  en 
métal  et  porte  à son  extrémité  une  languette  d’or  Xj  qui  glisse 
sur  le  bord  extérieur,  en  platine  ou  en  laiton  doré,  du  limbe 
divisé.  Ce  bord  étant  relié  par  un  fil  conducteur  au  pôle  positif 
d’une  pile,  dont  le  pôle  négatif  communique  de  la  même  manière 


DESTINÉ  AUX  OBSERVATOIRES  SOLITAIRES. 


249 


? 


avec  Taiguille  des  minutes,  le  courant  passera  aussi  longtemps 
que  la  languette  d’or  restera  en  contact  avec  le  limbe;  à la  ren- 
contre de  la  languette  avec  l’aiguille  d’un  des  instruments,  le 
courant  sera  momentanément  interrompu  par  l’interposition  de  la 
petite  tige  d’ébonite,  mais  il  se  rétablira  dès  que  la  languette 
aura  franchi  cet  obstacle. 

Lorsque  l’aiguille  des  minutes  aura  parcouru  le  limbe  entier, 
c’est-à-dire  , après  une  heure  de  temps , le  courant  aura  donc  subi , 
dans  l’exemple  que  nous  avons  choisi,  six  interruptions  momen- 
tanées. Ces  interruptions  peuvent  maintenant  être  utilisées  à l’ob- 
servatoire central,  qui  communique  par  un  fil  télégraphique  avec 
l’observatoire  solitaire , pour  inscrire  les  indications  des  instruments 
sur  un  cylindre  recouvert  d’une  feuille  de  papier , auquel  une  hor- 
loge fait  faire  un  tour  sur  son  axe  dans  l’espace  d’une  heure,  et 
dont  le  mouvement  de  rotation  est  par  conséquent  isochrone  avec 
celui  de  l’aiguille  des  minutes  de  l’observatoire  solitaire. 

Cet  isochronisme  des  deux  mouvements  est  la  condition  dont 
dépend  l’exactitude  de  mon  météorographe  ; pour  pouvoir  juger  si 
elle  est  remplie,  .on  fixe  sur  le  limbe  divisé,  en  quelques  points 
déterminés  e,  e,  e,  e,c,  c,  de  petites  plaques  d’ébonite;  nous 
verrons  plus  loin  comment  ces  plaques  donnent  les  informations 
voulues  sur  la  marche  de  l’horloge  de  l’observatoire  solitaire. 

Le  cylindre  enregistreur  de  la  station  centrale , fig.  IV , tourne , 
comme  il  a été  dit , autour  de  son  axe  ; mais  cet  axe  est  taillé  en 
vis  et  se  meut  dans  un  écrou  /?,  de  sorte  qu’à  chaque  révolution 
le  cylindre  descend  d’une  petite  quantité,  par  exemple  de  un 
millimètre. 

A côté  du  cylindre  se  trouve  une  bobine  A , dont  l’aimant  tem- 
poraire agit  sur  un  morceau  de  fer  doux  b b , mobile  autour  de 
l’axe  d et  muni  d’un  style  (crayon , pointe  en  acier  ou  en  diamant) 
qu’un  ressort  m tend  à appuyer  contre  le  cylindre.  Tant  que 
le  circuit  est  fermé , le  style  est  retenu  à distance  du  cylindre  ; 
mais  à chaque  interruption  du  courant  dans  l’observatoire  solitaire, 
le  style  vient  presser  sur  la  surface  du  cylindre  et  y marquer  un  point 
ou  un  trait;  l’instant  d’après,  quand  le  courant  est  rétabli , le  style 


250  E.  H.  VON  BAUMHAUER.  SUR  UN  MÉTÉOROGRAPHE  UNIVERSEL 


se  détache  de  nouveau  sous  Faction 
de  Taimant^). 

Un  coup  d’œil  sur  la  figure  IV, 
suffira  pour  la  parfaite  intelligence 
de  ce  système.  Les  lignes  droites 
O,  O , O J O,  fournissent  le  contrôle 
de  la  marche  isochrone  des  deux 
horloges,  et  sont  obtenus  en  joig- 
nant une  suite  de  points  ou  de 
traits,  produits  par  les  interrup- 
tions du  courant  sur  les  petites  pla- 
ques d’ébonite  incrustées  dans  le 
limbe  divisé  de  l’appareil  établi  à 
l’observatoire  solitaire.  Si  l’horloge 
de  cette  station  a une  marche  plus 
rapide  ou  plus  lente  que  l’horloge  de 
la  station  principale,  ces  lignes  ne 


* ) Au  moment  où  mon  travail  allait  être 
imprimé,  j’ai  reçu  une  brochure  de  M. 
F.  van  Rysselberghe , professeur  àTUcole 
navale  d’Ostende:  Notice  sur  un  sys- 
tème météoro graphique  'universel  (extrait 
des  Bulletins  de  V Académie  royale  de 
Belgique,  2e  Série,  t.  XXXVI,  nos  9 
Eig.  IV.  et  10 , 1873.)  Le  météorographe  décrit 

dans  ce  travail,  et  dont,  sous  beaucoup  de  rapports , les  combinaisons  me  semblent 
pratiques,  repose  sur  de  tout  autres  principes  que  le  mien;  le  courant  y passe, 
comme  dans  le  météorographe  de  M.  Wheatstone,  par  les  instruments  mêmes, 
disposition  que  je  regarde  comme  une  source  d’erreurs  , et  que  j’ai  par  conséquent 
entièrement  évitée  dans  mon  appareil.  Quant  à la  manière  de  faire  opérer  l’en- 
registrement , non  par  un  crayon  sur  une  feuille  de  papier , mais  par  une  aiguille 
d’acier  (mieux  encore  par  une  pointe  en  diamant)  sur  une  feuille  de  cuivre  cou- 
verte de  vernis  de  graveur,  je  la  trouve  très  ingénieuse,  parce  que  la  feuille  de 
cuivre , après  avoir  été  passée  à l’eau-forte , peut  servir  à tirer  un  nombre  indéfini 
d’épreuves,  propres  à être  communiquées  aux  autres  observatoires. 


DESTINE  AUX  OBSERVATOIRES  SOLITAIRES. 


251 


seront  plus  parallèles  à Taxe  du  cylindre , mais  obliques  ; en  cas 
de  marche  irrégulière , elles  pourront  même  se  présenter  avec  des 
sinuosités.  On  est  donc  continuellement  averti  de  Tétât  des  choses , 
et  s’il  n’y  a pas  moyen  d’atteindre  l’observatoire  solitaire , on  peut 
mettre  la  marche  de  l’horloge  principale  d’accord  avec  la  marche 
défectueuse  de  l’horloge  inaccessible,  en  tenant  compte,  bien 
entendu , des  corrections  que  cette  altération  rend  néces- 
saires. 

De  l’avis  de  notre  célèbre  fabricant  de  chronomètres,  M.  A. 
Hohwu,  que  j’ai  consulté  à ce  sujet,  la  construction  d’une  horloge 
pouvant  marcher  toute  une  année  sans  qu’on  ait  besoin  de  la  re- 
monter, n’offre  aucune  difficulté.  L’observatoire  solitaire,  dont  je 
viens  d’esquisser  les  dispositions  essentielles,  pourrait  donc  fonc- 
tionner d’une  manière  permanente  même  sur  ces  pics  escarpés  dont 
l’ascension  n’est  possible  que  pendant  une  couple  de  mois  d’été. 
Un  fil  télégraphique , reliant  le  poste  isolé  à la  station  principale , 
voilà  tout  ce  qui  est  nécessaire  pour  que  ces  observations  lointaines 
s’enregistrent  régulièrement. 

Nous  avons  parlé  jusqu’ici  de  deux  horloges  indépendantes  Tune 
de  l’autre,  placées  aux  deux  stations  et  dont  les  mouvements  doivent 
être  isochrones;  mais  quiconque  n’est  pas  étranger  aux  progrès 
réalisés  dans  la  construction  des  télégraphes  et  des  horloges  élec- 
triques, comprendra  que  l’aiguille  des  minutes  de  l’observatoire 
solitaire  pourrait  aussi  être  mue  télégraphiquement , son  mouvement 
étant  réglé  par  la  même  horloge  qui,  à la  station  principale,  fait 
tourner  le  cylindre.  Pour  cela , toutefois , un  second  fil  télégraphique 
serait  nécessaire,  ce  qui  augmenterait  inutilement  les  frais  d’éta- 
blissemeut  de  l’observatoire  solitaire. 

Mais,  en' adoptant  une  autre  disposition,  je  crois  que  le  même 
fil  pourrait  servir  aussi  bien  à mouvoir  l’aiguille  (que  nous  conti- 
nuerons d’appeler  ^aiguille  des  minutes”,  bien  que  dans  cette 
nouvelle  disposition  elle  ne  mérite  plus  ce  nom)  qu’à  transmettre 
les  indications  des  instruments.  Nous  avons  admis  jusqu’ici  que 
l’aiguille  des  minutes  accomplit  sa  révolution,  comme  dans  les 
horloges  ordinaires , en  une  heure  de  temps , de  sorte  que , suivant 


252  Ë.  H.  VON  BAUMHAUER.  SUR  UN  MÉTÉOROGRAPHE  UNIVERSEL 

Tétât  des  instruments,  Tindication  du  baromètre  est  inscrite,  par 
exemple,  à 12  h.  10  m. , celle  du  thermomètre,  qui  a lieu  dans 
le  quadrant  suivant,  à 12  h.  28  m.,  celle  de  T hygromètre  encore 
un  quart  d’heure  plus  tard , et  celles  de  la  direction  du  vent , de 
la  vitesse  du  vent  et  de  la  quantité  de  pluie  dans  le  quatrième  quart 
d’heure.  Or,  une  pareille  différence  ne  serait  pas  du  goût  des 
météorologistes , qui  préfèrent  l’observation  simultanée  de  tous  les 
instruments,  afin  d’avoir  ainsi,  à un  moment  donné,  le  tableau 
complet  de  l’état  de  l’atmosphère.  Au  congrès  météorologique  de 
Vienne,  en  1873,  on  a même  émis  le  vœu  que  les  observations 
eussent  lieu  au  même  instant  dans  les  observatoires  du  monde  entier. 

En  conséquence , au  lieu  de  faire  tourner  l’aiguille  des  minutes 
à l’observatoire  solitaire  et  le  cylindre  à la  station  centrale  dans 
l’espace  d’une  heure,  je  propose  de  leur  faire  exécuter  leur  révo- 
lution , — une  fois  par  heure  ou  par  fraction  d’heure , suivant  que  le 
météorologiste  demande  des  observations  plus  ou  moins  rappro- 
chées, — en  une  durée  très  courte , de  quelques  minutes  tout  au  plus , 
l’aiguille  et  le  cylindre  restant  au  repos  tout  le  reste  de  l’heure. 
Pendant  ce  repos,  le  courant  sera  employé,  à l’observatoire 
solitaire , à élever  un  poids  ou  à tendre  un  ressort , dont  la  force 
soit  simplement  suffisante  pour  faire  accomplir  une  rotation  à l’aiguille. 
Une  fois  par  heure,  l’horloge  de  la  station  principale  dégage  donc  à 
l’observatoire  solitaire,  au  moyen  du  courant  galvanique,  l’ancre 
ou  l’encliquetage  qui  retenait  l’aiguille  des  minutes  ; celle-ci , sous 
l’action  du  poids  ou  du  ressort  moteur , régularisée  à l’aide  d’un 
pendule,  se  met  alors  en  mouvement,  de  manière  à exécuter  une 
révolution  en  2 ou  3 minutes  ; et  en  même  temps , à la  station 
principale,  un  mouvement  isochrone  avec  celui  de  l’aiguille  est 
communiqué  au  cylindre.  Pendant  cette  révolution , le  courant  gal- 
vanique est  donc  employé  uniquement  à transmettre , de  la  façon 
décrite  ci-dessus,  les  indications  des  instruments.  La  révolution 
achevée,  l’aiguille  des  minutes  retombe  en  arrêt,  et  le  courant 
va  alors  agir  sur  une  ancre  et  mettre  en  mouvement  le  rouage 
destiné  à élever  le  poids  ou  à tendre  le  ressort,  pour  cesser  cette 
action  aussitôt  que  l’heure  est  écoulée  et  que  l’aiguille  doit  recom- 
mencer sa  révolution. 


IJESTINÉ  AUX  OBSERVATOIRES  SOLITAIRES. 


253 


Dans  quelques  essais  préliminaires , ayant  pour  but  de  contrôler 
jusqu’à  un  certain  point  la  valeur  du  principe  adopté,  j’ai  ren- 
contré une  difficulté  qui  m’a  obligé  à faire  une  petite  addition  à 
mon  appareil. 

L’aiguille  du  baromètre  anéroïde  ne  peut  vaincre  qu’un  frotte- 
ment très  faible,  et  un  attouchement  même  léger  suffit  pour  la 

déranger  de  sa  position  d’équi- 
libre. Il  en  est  de  même  de  l’hy- 
gromètre à cheveu;  quant  au 
thermomètre  métallique,  il  est 
beaucoup  moins  sensible  sous  ce 
rapport,  surtout  celui  - du  Dr. 
Krecke,  qui  depuis  longtemps 
fonctionne  avec  un  plein  succès 
à • l’observatoire  d’Utrecbt  et  y 
enregistre  automatiquement  les 
observations , au  moyen  d’un 
crayon,  sur  un  papier  mu  par 
un  mécanisme  d’horlogerie  *). 

*)  Comme,  à ma  connaissance,  le 
thermomètre  métallique  de  M.  Krecke 
n’a  pas  encore  été  décrit,  et  que,  tant 
par  sa  simplicité  et  son  exactitude  que 
par  la  facilité  avec  laquelle  il  se  prête 
à l’enregistrement  automatique,  il  mérite 
de  trouver  une  application  plus  générale 
dans  les  observatoires  météorologiques , 
je  crois  devoir  communiquer  ici  le  prin- 
cipe de  sa  construction. 

Deux  tubes  de  verre  o o (fig.  V),  longs 
d’environ  1 % mètres  et  larges  d’environ 
3 centimètres,  relient  deux  abouts  en 
fer  A et  B , dont  l’inférieur  B est  solide- 
ment fixé  à un  mur,  tandis  que  le 
supérieur  A y est  également  attaché,  mais 
de  manière  à permettre  un  léger  dépla- 
cement. A la  pièce  A est  fixée  une  lame 


Fig.  V. 


Fig.  VI. 


254  E.  H.  V0\  B4UM«\UER.  SUR  UN  MÉTÉOROG  R APHE  UNIVERSEL 

Ainsi  que  je  Tai  dit  plus  haut,  les  aiguilles  de  ces  instruments 
ne  doivent  pas  glisser  sur  la  surface  même  du  limbe  divisé , mais 
se  mouvoir  librement  à une  petite  distance.  Comme,  d’un  autre 
côté,  la  languette  de  l’aiguille  des  minutes,  — si  l’on  veut  qu’elle 
conserve  un  contact  parfait  avec  le  bord  métalliij^ue , pendant  plu- 
sieurs mois , sans  nettoyage  des  surfaces , — ne  doit  pas  être 
trop  faible;  elle  pourrait  facilement,  en  glissant  sur  l’extrémité 
des  aiguilles  du  baromètre  anéroïde  et  de  l’hygromètre , les  entraîner 
plus  ou  moins  loin,  d’où  résulterait  une  indication  fausse  de  ces 
instruments.  Pour  parer  à cette  cause  de  trouble,  le  même  mécanisme, 
qui  produit  l’échappement  de  l’aiguille  des -minutes , abaissera  douce- 
ment un  anneau  finement  cannelé  s s s,  fig.  III  et  fig.  IIIô.  qui  pressera 
sur  le  limbe  divisé  les  aiguiles  des  instruments  et  les  y maintiendra  im- 
mobiles  pendant  la  courte  durée  de  la  révolution  de  l’aiguille , de  ma- 
nière que  la  languette  d’or  pourra  glisser  sur  leurs  bouts  en  ébonite 
sans  risquer  de  les  déplacer.  En  même  temps  que  l’aiguille  des 

de  zinc  CC , et  à la  pièce  B pareillement  une  lame  de  zinc  DD'';  sur  le 
reste  de  leur  étendue  ces  deux  lames  sont  entièrement  libres,  mais,  pour  les 
empêcher  de  fléchir,  elles  sont  pourvues  près  de  leur  extrémité  libre  d’une 
couple  d’anneaux , qui  glissent , sans  frottement  sensible , sur  les  tubes  de 
verre  oo.  Pour  que  les  lames  de  zinc  prennent  rapidement  la  température  de 
l’air,  il  ne  faut  point  qu’elles  soient  trop  épaisses,  et  pourtant  elles  doivent 
présenter  une  rigidité  suffisante.  Ce  dernier  but* est  atteint  par  la  forme  donnée  aux 
lames,  qui  sont  pliées  en  gouttière  sur  toute  leur  longueur , comme  le  montre  la  fig. 
VI.  A l’extrémité  libre  de  la  lame  DD^  est  adapté  un  support  en  acier/?,  sur  lequel 
repose  le  levier  en  laiton  R M , à peu  près  comme  dans  une  balance;  les  bras  D^M  et 
D^R  de  ce  levier  sont  très  inégaux.  En  R le  levier  porte  un  contre-poids  mobile , dont 
la  distance  à D'  est  réglée  de  façon  que  le  bras  D'M  n’ait  qu’im  léger  excès  de 
pesanteur.  En  outre,  le  levier  est  traversé  en  s par  une  vis,  dont  la  pointe, 
dirigée  vers  le  haut,  appuie  contre  l’extrémité  inférieure  et  libre  de  la  lame  de 
zinc  CC';  à l’aide  de  cette  vis,  la  position  du  levier  peut  être  changée,  de 
)nanière  à placer  plus  haut  ou  plus  bas  le  crayon  dont  il  est  muni  à son  ex- 
trémité M. 

Le  fonctionnement  de  cet  appareil  est  facile  à comprendre.  Lorsque  la  tempé- 
rature monte,  les  lames  de  zinc  se  dilatent  d’une  quantité  qui  est  à peu  près 
égale  à 4 fois  la  dilatation  du  verre,  le  point  d’appui  D'  s’élève,  tandis  que  le 
point  .d’appui  C'  s’abaisse;  le  levier  tourne  donc  plus  ou  moins,  autour  d’un 
point  situé  entre  C"  et  D',  et  le  crayon  M est  entraîné  vers  le  haut.  Lorsque 
la  température  est  décroissante,  l’effet  contraire  se  produit. 


DESTINÉ  AUX  OBSERVATOIRES  SOLITAIRES. 


255 


minutes  est  arrêtée , Tanneau  sera  relevé  et  les  aiguilles  des  instru- 
ments recouvreront  la  liberté  de  leurs  mouvements. 

L’immobilisation  des  aiguilles  des  instruments,  pendant  une 
couple  de  minutes,  n’a  absolument  aucun  inconvénient,  attendu 
qu’en  une  durée  si  courte  les  instruments  ne  peuvent  éprouver  que 
des  variations  insensibles. 

Pour  les  aiguilles  qui  marquent  la  direction  du  vent , la  vitesse 
du  vent  et  la  quantité  de  pluie,  une  pareille  disposition  serait  sans 
objet , attendu  que  la  force  motrice  est  ici  très  grande  et  que  les 
tiges  d’ébonite,  ainsi  que  nous  l’avons  fait  remarquer,  peuvent 
frotter  sur  le  limbe. 

Le  problème  qui  consiste  à enregistrer  les  indications  d’instruments 
météorologiques  placés  à une  grande  distance  de  l’observateur  (ou 
à une  hauteur  considérable)  trouve  donc  dans  mon  appareil,  si 
je  ne  me  trompe , une  solution  très  complète.  Pour  ce  qui  regarde , 
toutefois , l’état  hygrométrique  de  l’air , je  crois  encore  aujourd’hui , 
comme  il  y a vingt  ans,  que  le  psychromètre  d’August,  l’hygro- 
mètre à cheveu  ou  à boyau  et  l’hygromètre  à point  de  rosée  de 
Daniell  peuvent  bien  fournir  à ce  sujet  des  indications  plus  ou 
moins  approchées,  mais  qu’une  détermination  en  poids  de  la  quantité 
d’eau  contenue  dans  un  volume  connu  d’air  est  le  seul  moyen 
d’obtenir  des  données  exactes.  Mon  aréomètre  hygrométrique, 
ainsi  que  je  l’ai  montré  ailleurs  *),  exécute  cette  détermination 
d’une  manière  très  simple,  et  en  permet  aussi  l’enregistrement 
autographique.  Rien  ne  s’oppose  à ce  que,  au  moyen  d’un  aspi- 
rateur et  d’un  tube  en  caoutchouc,  on  aille  chercher  l’air  d’un 
point  très  éloigné,  pour  le  faire  passer  par  l’aréomètre  établi  dans 
la  station  principale.  Comme  l’observatoire  solitaire  doit  déjà  com- 
muniquer avec  cette  station  par  un  fil  conducteur , celui-ci  pourra 
être  placé  à l’intérieur  du  tube  de  caoutchouc,  qui  lui  servira 
ainsi  d’enveloppe  isolante  et  protectrice.  L’observation  ne  se  trou- 
verait en  défaut  que  si  l’air  du  poste  éloigné  était  saturé  de  vapeur 
d’eau,  à une  température  plus  élevée  que  celle  qui  régnerait  en 


Archiva  Néerlandaises,  T.  VI,  p.  él9 , Ann.  d&  Poggend.  T.  XCIII,  p.  343. 


256  E.  H.  VON  B\UMHAUER.  SUR  UN  MÉTÉOROGR  APHE  UNIVERSEL 

Tun  OU  l’autre  point  du  trajet  parcouru  par  le  tube  de  caoutchouc , 
dans  ce  cas,  en  effet,  une  partie  de  la  vapeur  d’eau  se  conden- 
serait dans  le  tube  et  par  conséquent  n’atteindrait  pas  l’aréomètre* 
Mais,  en  général,  cela  sera  peu  à craindre,  parce  que  la  tempé- 
rature de  l’air  décroît  ordinairement  à mesure  qu’on  s’élève  au- 
dessus  de  la  surface  terrestre  ; l’existence  d’une  couche  humide  et 
chaude,  superposée  à une  couche  plus  froide,  ne  se  présentera 
sans  doute  qu’à  titre  exceptionnel. 


Avant  de  terminer,  je  dois  encore  dire  un  mot  touchant  le  cas 
où  l’on  voudrait  recourir  à un  ballon  captif  pour  porter  l’obser- 
vatoire solitaire  dans  les  couches  élevées  de  l’atmosphère  et  l’y 
maintenir  plus  ou  moins  longtemps. 

L’appareil  que  j’ai  proposé  est  parfaitement  approprié  à cette 
destination  et  n’exige  que  deux  fils  conducteurs  dans  le  câble  qui 
retient  le  ballon  captif. 

On  objectera  sans  doute  que  le  ballon,  perdant  rapidement  son 
gaz,  tant  par  des  fuites  que  par  la  diffusion,  ne  pourrait  pas  se  soutenir 
dans  l’atmosphère  pendant  plus  d’une  couple  de  jours;  mais  cette  diffi- 
culté me  paraît  susceptible  d’être  levée  d’une  manière  très  élémentaire. 
Les  deUx  fils  conducteurs,  qui  accompagnent  le  câble,  doivent 
rester  isolés  l’un  de  l’autre  ; or  quoi  de  plus  simple , — la  question 
de  l’augmentation  de  poids  du  câble  étant  réservée , que  de 
réaliser  cet  isolement  en  plaçant  chaque  fil  dans  un  tube  de  caout- 
chouc , auquel  il  serait  fixé  de  distance  en  distance  ? Un  de  ces  tubes 
pourrait  alors  servir  à envoyer  au  ballon  un  courant  continu  d’hy- 
drogène ou  de  gaz  d’éclairage,  pour  réparer  ses  pertes,  tandis 
que  Vautre  tube  livrerait  passage  à l’air  atmosphérique  qui,  à 
l’appel  d’un  aspirateur,  descendrait  des  hautes  régions  jusqu’à 
l’aréomètre  hygrométrique.  Ainsi  nourri,  le  ballon  pourrait  con- 
tinuer à planer  dans  l’air,  jusqu’à  ce  que  l’imminence  d’une  bour- 
rasque, annoncée  par  les  observations,  forcerait  à le  faire  des- 
cendre. 


DESTINÉ  AUX  OBSERVATOIRES  SOLITAIRES. 


257 


Mais  il  y a une  autre  objection,  à laquelle  je  ne  vois  jusqu'ici 
aucune  réponse  satisfaisante  à faire,  savoir,  l'impossibilité  de 
maintenir  le  ballon  captif  à une  même  hauteur  , surtout 
lorsqu'il  règne  un  vent  un  peu  fort , qui , chassant  le  ballon , tend 
à donner  au  câble  une  direction  de  plus  en  plus  oblique.  En  pareil 
cas,  l’indication  du  baromètre  n’a  d’autre  utilité  que  de  faire 
connaître  approximativement  la  hauteur  à laquelle  les  instruments 
se  trouvent  au-dessus  du  niveau  du  sol,  et  il  reste  entièrement 
, incertain  si  les  variations  barométriques  observées  proviennent 
de  différences  dans  la  hauteur  du  ballon , ou  de  différences  dans 
la  pression  de  l’air  à une  même  hauteur. 

Je  laisse  à d’autres  le  soin  de  décidet  si , en  donnant  au  ballon 
une  forme  spéciale,  on  ne  pourrait  pas  tirer  un  certain  parti 
du  principe  sur  lequel  repose  le  cerf-volant , savoir , l’ascension  de 
l’appareil  sous  l’impulsion  du  vent  agissant  sur  une  surface  oblique. 

L’emploi  des  ballons  captifs  offre  toutefois  un  défaut  grave: 
la  hauteur  à laquelle  ils  peuvent  être  élevés  est  très  res- 
treinte , de  1000  mètres  tout  au  plus,  parce  que,  sans 
parler  de  beaucoup  d’autres  difficultés , le  poids  du  cable  devient 
bientôt  si  grand,  que  l’aérostat,  pour  être  eu  état  de  le  porter, 
doit  recevoir  des  dimensions  trop  considérables.  Mais  on  pourrait 
se  procurer  des  observations  météorologiques  recueillies  à des  hau- 
teurs beaucoup  plus  grandes , de  5 à 10  mille  mètres  par  exemple , 
en  ayant  recours  à notre  observatoire  solitaire  sans  transmission. 
Par  son  prix  relativement  modéré  et  son  faible  poids , cet  appareil 
serait  en  effet  très  propre  à être  attaché  à un  ballon  de  petite 
dimension , qu’on  laisserait  monter  librement  dans  l’atmosphère.  En 
supposant  même  que,  sur  dix  ballons  ainsi  abandonnés  à eux-^ 
mêmes,  un  ou  deux  allassent  tomber  en  mer  ou  dans  des  lieux 
inhabités  et  fussent  ainsi  totalement  perdus,  les  frais  de  l’expé- 
rience n’en  seraient  pas  moins  très  inférieurs  à ceux  qu’entraîne 
l’ascension  d’un  grand  aérostat  monté  par  des  observateurs.  Le 
baromètre  enregistreur  donnerait  alors  les  hauteurs  auxquelles  ont 
eu  lieu,  aux  divers  instants  du  voyage,  les  indications  des  in- 
struments affectés  à la  température , à l’état  hygrométrique , etc. , 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  17 


258  E.  II.  VON  BAUMITAUER.  SUR  UN  MÉTÉOROTt  RAPHE  UNIVERSEL. 

tandis  qu'une  boussole,  dont  la  marche  s'inscrirait  automatiquement, 
de  la  manière  ci-dessus  décrite,  ferait  connaître  la  direction  suivie 
successivement  par  le  ballon  dans  les  différentes  couches  atmo- 
sphériques qu'il  aurait  parcourues.  Il  va  sans  dire  que , pour  cette 
destination,  l'observatoire  solitaire  devrait  être  protégé  par  une 
enveloppe  élastique,  capable  d'amortir  le  choc  au  moment  où  le 
ballon  viendrait  toucher  la  terre.  Un  écrit , fixé  sur  le  météorographe , 
contiendrait , traduite  en  plusieurs  langues,  la  recommandation  de  ne 
pas  ouvrir  l’appareil,  mais  de  l'expédier  intact  à une  adresse  déter- 
minée; en  outre,  par  des  avis  insérés  dans  les  journaux  étrangers 
les  plus  répandus , on  tâcherait  de  faire  comprendre  à tout  le  monde, 
autant  que  possible , la  nature  et  le  but  de  ces  objets  tombés  du 
ciel.  Cette  double  précaution  contribuerait  sans  doute  beaucoup  à 
dépouiller  l'idée  du  caractère  peu  pratique  qu'elle  semble  présenter 
au  premier  abord. 


SUK  LA  SCAPÏÏOCÉPHALIE, 


PAR 


T.  ZAAIJER. 


Le  nom  de  scaphocephalus  a été  donné  par  M.  K.  E.  von  Baer 
à une  anomalie  particulière  du  crâne,  dont  le  mode  de  production 
n est  pas  encore  complètement  expliqué.  Ce  qui  caractérise  essen- 
tiellement ces  crânes,  c’est  qu’ils  sont  très  étroits  et  comme  com- 
piimés  des  deux  côtés.  Vers  le  haut  ils  deviennent  de  plus  en 
plus  étroits,  de  sorte  que  le  sommet  ne  présente  pas  une  surface 
plus  ou  moins  voûtée,  mais  une  carène.  Ils  sont  en  même  temps 
considérablement  allongés , et  la  carène  se  prolonge  en  se  courbant 
vers  l’arrière  et  le  bas,  de  sorte  que  le  crâne  entier,  vu  d’en 
haut,  ressemble  beaucoup  à un  bateau  renversé , fortement  courbé. 
L’occiput  fait  toujours  saillie;  quelquefois  le  front  s’avance  plus 
que  la  face  ; il  est  alors , toutefois , moins  large  que  dans  les  cas 
d hydrocéphale.  La  suture  sagittale  et  les  bosses  pariétales  manquent 
ordinairement  tout  à fait. 

Blumenbach  est  le  premier  qui  a décrit  et  figuré  un  pareil 
crâne,  désigné  par  lui  sous  le  nom  de  Cranium  asialae  macro- 
‘cephali  1).  Ce  crâne  lui  avait  été  donné , en  1777,  par  le  baron  De 
Asch , chef  du  service  médical  de  l’armée  russe , et  il  était  pro- 
hablement  d’origine  tartare.  La  grande  longueur  de  cette  pièce  est 
sans  doute  ce  qui  a porté  Blumenbach  à lui  appliquer  l’épithète 

C Decas  collectioms  suae  craniorum  diversarmi  gentium,  1790 , p,  17 , tab.  III 

17* 


260 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SC APHOCÉPHALIE. 


de  macrocephalus  ; chez  différents  auteurs  anciens  on  trouve  déjà , 
en  effet,  le  nom  de  Makrokephaloi  (longues-têtes) *  *).  De  la  courte 
description , donnée  par  Blumenbach , il  résulte  que  ce  crâne  offre 
une  carène  bien  prononcée,  que  la  suture  sagittale  y fait  défaut, 
tandis  que  les  sutures  coronale  et  lambdoïde  y existent , et  qu’en 
outre  la  portion  occipitale  est  allongée  et  pendante.  L’état  des 
dents  montre  qu’il  provient  d’un  individu  jeune.  — Il  n’y  a pas 
de  doute  que  ce  crâne  ne  soit  scaphocéphale , ce  qui  a d’ailleurs  été 
confirmé  par  l’étude  directe  qu’en  ont  faite  d’abord  M.  von  Baer 
et  ensuite  M.  Welcker. 

Dans  la  collection  anatomique  de  l’université  de  Leide  se  trouve 
un  crâne  qui  figure  au  catalogue  sous  la  désignation  de  Cranium 
Persiani'^),  L’autorité  de  Blumenbach  a probablement  fait  tomber 
dans  une  grossière  erreur  le  propriétaire  antérieur  de  cette  pièce. 
Sur  l’os  frontal,  en  effet,  est  écrit:  Cranium  macrocephali  ut  vi- 
delur  asiataCj  et  sur  la  portion  écailleuse  du  temporal  gauche: 
Conf.  Blumenb.  Dec.  cran.  I,  tab.  3.  — La  suture  sagittale  y est 
visible  en  entier.  Le  crâne  montre  une  carène  bien  distincte , qui 
en  avant  se  prolonge  jusqu’un  peu  au-dessus  de  la  racine  du 
nez.  M.  Barnard  Davis,  qui  a examiné  cette  pièce  lors  d’une 
visite  qu’il  nous  a faite,  l’a  regardée  comme  le  crâne  d’un 
Esquimau;  je  me  range  volontiers  à l’avis  de  cet  habile  cranio- 
logue,  avis  qui  trouve  un  soutien  dans  les  observations  de  M. 
Morton  ^).  En  tout  cas,  ce  crâne  ne  présente  qu’une  analogie  très 
superficielle  avec  celui  de  Blumenbach. 

M.  Virchow  s’est  occupé  de  la  synostose  des  pariétaux  par 
l’ossification  de  la  suture  sagittale , et  à cette  occasion  il  a remarqué 
que  les  changements  de  forme  sont  surtout  prononcés  quand  la 


»)  Pour  plus  de  détails  à ce  sujet , je  renvoie  au  Mémoire  de  M.  von  Baer  (p,  19) 
dont  il  sera  question  plus  loin. 

*)  Muséum  anatomicum,  t.  III,  1827,  p.  37;  Brugmans,  no.  548. 

Crania  americana,  1839,  p.  247. 

“)  Ueber  den  Cretinismus  ^ namentlich  in  Franken,  und  über  pathologische 
Schàdelformen , dans  Verhandl.  der  phys-med.  Ges.  zu  Würzhurg , t.  II , p.  230 , et 
Gesammelte  Abhandlungen  zur  wissenschaftlichen  Medicin,  1856,  p.  891. 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOCÉPHALIE. 


261 


suture  est  complètement  oblitérée  et  que  Toblitération  a eu  lieu 
de  bonne  heure.  Sur  une  pièce  où  ces  conditions  étaient  réalisées  y 
il  trouva  la  voûte  du  crâne  entièrement  „ carénée , et  la  région  de  la 
suture  sagittale  offrant  à l’extérieur  une  crête  aiguë”.  A la  page 
907  ,est  représenté  (fig.  13)  un  crâne  vu  d’en  haut,  qui  montre 
une  carène  bien  accusée,  avec  ossification  de  la  suture  sagittale. 
M.  von  Baer  croit  devoir  rapporter  ce  crâne  aux  scaphocéphales  > 
et  je  pense  que  c’est  avec  raison.  Peut-être  que  le  crâne  figuré 
page  906  (fig.  12)  y appartient  également,  mais  celui-ci  ne  présente 
pas  de  carène. 

Les  communications  de  M.  Minchin  ^ ) sont  intéressantes  à plu- 
sieurs titres,  tant  parce  qu’elles  ont  rapport  à des  individus  très 
jeunes,  que  parce  que  l’auteur  a essayé  d’expliquer  la  production 
de  la  déformation  par  l’existence  d’un  seul  point  d’ossification  pour 
les  deux  pariétaux. 

La  première  observation  de  M.  Minchin  est  relative  à un  garçon 
de  neuf  ans , avec  scapbocéphalie  des  plus  apparentes  ; quatre  ans 
après,  ce  garçon  était  encore  bien  portant  et  vigoureux,  très  vif 
et  très  intelligent , sans  le  moindre  symptôme  pouvant  faire  soup- 
çonner une  affection  cérébrale.  Des  renseignements  obtenus  posté- 
rieurement apprirent  que  la  déformation  était  congénitale.  Un 
second  exemple  fut  fourni  à M.  Minchin  par  le  crâne  d’un  petit 
garçon  de  3i  à 4 ans , qui  mourut  de  la  phthisie  à la  suite  d’une 
rougeole.  Cet  enfant  était  d’humeur  gaie,  et  nullement  arriéré  en 
fait  de  développement  intellectuel.  Dans  le  Muséum  of  the  royal 
college  of  surgeons  of  Ireland^  M.  Minchin  a encore  trouvé  un 
crâne  scaphocéphale  adulte,  ainsi  qu’une  voûte  crânienne  de  la 
même  forme. 

M.  Lucae  ^ ) a décrit  et  figuré  un  crâne  scaphocéphale  qui  avait 
été  donné  par  Sommerring  au  cabinet  anatomique  de  Francfort, 
et  plus  tard  ^ ) il  a encore  mentionné  deux  personnes , à lui  con- 

‘)  Contributions  to  craniology  , Dublin  Quart.  Journ.of  medicine 
M,  Barnard  Davis  a eu  l’obligeance  de  m’envoyer  ce  Mémoire. 

*)  Z UT  Architectur  des  Menschenschadels , 1857,  p.  16,  pl.  111. 

Zur  Morphologie  der  Rassen-schàdel , 1861,  p.  53. 


262 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOCÉPHALIE. 


nues , dont  le  crâne  présentait  cette  même  anomalie.  La  première  ^ 
était  un  homme  de  plus  de  soixante  ans,  très  instruit  et  jouissant  | 
d’une  excellente  mémoire  et  d’une  santé  parfaite  ; la  seconde  était  | 
un  garçon  de  10 — 12  ans,  au  sujet  duquel  il  n’y  avait  rien  de  | 
particulier  à dire.  Quant  à la  manière  dont  l’anomalie  prend  nais- 
sance , M.  Lucae  se  déclare  ouvertement  en  faveur  de  l’explication 
proposée  par  M.  von  Baer. 

M.  Schade,  dans  sa  dissertation  inaugurale  Q,  a décrit  un  crâne 
scaphocéphale  possédant  au  plus  haut  degré  les  caractères  propres 
à cette  déviation.  Cette  pièce  avait  été  donnée  à la  collection  anato- 
mique de  Greifswald  par  M.  le  Dr.  Braumüller,  de  Stettin,  qui 
dans  une  lettre,  placée  en  tête  du  Mémoire  de  M.  Schade,  com- 
muniqua quelques  détails  sur  la  personne  dont  le  crâne  provenait. 

La  cause  de  cette  remarquable  difformité  est  cherchée  par  M. 
Schade  principalement  dans  l’oblitération  précoce  de  la  suture 
sagittale.  Plus  loin  je  reviendrai  sur  cette  pièce,  à propos  des 
observations  de  M.  Barnard  Davis,  qui  a traité  avec  détail  le 
crâne  de  Greifswald,  tandis  qu’il  n^en  a été  fait  mention  ni  par 
M.  von  Baer,  ni  par  M.  Welcker. 

M.  von  Baer  ^ ) a étudié  le  crâne  macrocéphale  de  Blumenbach , 
ainsi  qu’un  autre  scaphocéphale,  conservé  dans  la  collection  de 
Blumenbach,  avec  l’inscription  „Danus’’ ] ces  deux  crânes  ont  aussi 
été  vus  plus  tard  par  M.  Welcker.  Le  troisième  crâne , mentionné 
par  M.  von  Baer,  appartient  au  musée  de  Bonn  et  provient  d’un 
Zigueune  âgé  de  20  ans;  sur  ce  crâne,  outre  la  suture  sagittale , 
les  sutures  coronale  et  lambdoïde  étaient  aussi  soudées , de  sorte 
qu’il  me  reste  quelque  doute  s’il  peut  bien  être  ici  uniquement 
question  de  scaphocéphalie  ^). 


0 De  singulari  cranii  cujusdam  deformitate , Gryphiae,  1858. 

Die  Makrokephalen  im  Boden  der  Kryni  und  OesterreicM , verglichen  mit  der 
Bildungs-Abweichmig  welche  Blumenbach  Macrocephalus  genannt  hat,  dans  Mémoires 
de  V Acad.  imp.  des  Sciences  de  St.  Pétersbourg , Vile  série,  t.  11,1860,  p.  73. 

®)  Des  renseignements  ultérieurs  relatifs  à ce  crâne,  qui  m’ont  été  obligeamment 
fournis  par  M.  le  professeur  Schaaf  liausen , de  Bonn,  ont  confirme  ce  doute.  Le 
crâne  est,  en  effet,  légèrement  déprimé  dans  la  région  de  la  suture  sagittale, 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCArHOCÉPIlALIE. 


263 


L’opinion  de  M.  Minchin,  concernant  Tunité  primitive  du 
pariétal , fut  adoptée  et  fortement  appuyée  par  M.  von  Baer , grâce 
au  Mémoire  duquel  le  travail  de  M.  Mincliin  acquit  une  notoriété 
plus  générale. 

L’explication  à laquelle  ces  deux , savants  s’étaient  arrêtés  a 
été  au  contraire  combattue  par  M.  Welcker^);  celui-ci  soutient 
qu’il  existe  primitivement  deux  pariétaux  séparés , qui  se  soudent 
entre  eux  dès  avant  la  naissance.  Nous  reviendrons  plus  loin  sur 
les  raisons  qui  plaident  en  faveur  de  cette  opinion. 

M.  Welcker  n’avait  eu  d’abord  à sa  dispostion  que  3 crânes 
scaphocéphales , savoir,  les  deux  pièces  de  la  collection  de  Blu- 
•menbacli  et  une  de  la  collection  de  Halle  ; cette  dernière  prove- 
nait d’une  femme  à facultés  intellectuelles  normales,  qui  était 
morte  à l’âge  de  55  ans.  Il  cite  en  outre  le  fait  d’un  savant  de  sa 
.connaissance,  d’âge  moyen,  qui  possédait  un  crâne  de  cette  forme. 

Plus  tard  ^),  il  a encore  pu  étudier  un  crâne  allemand , parais- 
sant âgé  de  25 — 30  ans , dans  la  collection  de  Berlin , ainsi  que 
deux  autres  dans  celle  de  l’Académie  médico -chirurgicale  de  Dresde , 
l’un  d’un  Croate  âgé  d’au  moins  50  ans,  l’autre  d’un  Illyrien 
dont  l’âge  présumé  était  de  30 — 40  ans. 

Dans  une  première  Notice  ^),  M.  Turner  a cité  9 crânes  sca- 
phocéphales  de  différentes  collections,  et  postérieurement  il  a 
encore  fait  connaître  2 cas  nouveaux.  Le  premier  de  ces  cas 

et  ne  possède  par  conséquent  pas  de  carène.  Ce  que  M.  von  Baer  a dit  au  sujet 
des  sutures  n’est  pas  exact.  La  suture  sagittale  est  entièrement  disparue,  et  il 
en  est  de  même  de  la  suture  coronale,  à l’exception  d’une  partie  située  au-dessus 
de  l’aile  gauche  du  sphénoïde;  à gauche,  la  suture  mastoïde  est  presque  com- 
plètement oblitérée,  tandis  qu’à  droite  cette  suture  est  encore  entièrement  ouverte. 
Evidemment,  on  n’a  pas  affaire  ici  à un  cas  de  scaphocéphalie. 

* ) UntersucMngeii  über  Wachsihum  und  B au  des  menschlichen  Schàdels , 1ère  partie, 
Leipzig,  1802,  p.  118. 

2)  Veher  zwei  seltnere  Bifformitàten  des  menscMichen  Schàdels,  Scaphocephalus 
und  Trigonocephalus , dans  Abhandl.  der  îiahirf.  Gesellscli.  zu  Halle, . 

On  cranial  deformities , and  more  especialhj  on  the  scaphocéphalie  shull,^^v>s> 
Hatur.  Hist.  Review,  Janv.  1864. 

“)  On  some  congénital  deformities  of  the  human  cranium  , dans  Edinburgh  med. 
Journ. , Juin,  et  Août  1865. 


264 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOCÊPHALIE. 


concernait  un  jeune  Ecossais , à tête  longue  et  à forte  crête  os- 
seuse dans  la  région  sagittale;  aux  deux  côtés  de  cette  carène 
le  crâne  était  aplati.  L’occiput  était  très  saillant,  le  front  ne  se 
projetait  pas  en  avant.  L’anomalie  était  congénitale.  Le  jeune 
homme  étudiait  et  montrait  beaucoup  d’intelligence. 

Le  dernier  crâne  scaphocéphale,  examiné  par  M.  Turner,  provenait 
d’une  momie  égyptienne  appartenant  au  musée  d’histoire  naturelle 
d’Edimbourg. 

Ce  crâne  avait  déjà  été  décrit  antérieurement  par  M.  Andrew 
Fyfe  1),  qui  l’avait  considéré  à tort  comme  présentant  la  forme 
caractéristique  du  crâne  égyptien.  Sur  une  partie  de  la  région 
sagittale,  l’os  a un  aspect  plus  ou  moins  rayonné. 

M.  Thurnam  a mentionné  9 crânes  scaphocéphales , existant 
dans  diverses  collections  et  provenant  de  diverses  races.  Ces  crânes , 
dans  lesquels  les  caractères  propres  de  la  scaphocéphalie  sont 
moins  fortement  exprimés , et  où  la  soudure  des  pariétaux  ne  doit 
avoir  eu  lieu  qu’après  la  naissance,  sont  désignés  par  l'auteur 
sous  le  nom  de  crânes  sub-scaphocéphales. 

A M.  von  Düben  nous  devons  une  revue  détaillée  et  assez 
exacte  des  observations  connues  à cette  époque;  il  y a ajouté  la 
description  de  4 nouveaux  crânes  scaphocéphales,  et  a cité  3 
personnes  qui,  à sa  connaissance,  présentaient  cette  anomalie. 
Elles  la  possédaient  toutefois , d'après  les  figures , à un  degré 
moindre  que  le  jeune  garçon  dont  parle  M.  Minchin , et  que 
l’homme  mentionné  par  M.  Calori  et  dont  il  sera  question  plus  loin. 

M.  Fdrster  a décrit  le  crâne  d'un  enfant  de  13  jours,  qui 


*)  Illustrations  of  human  anatomy , Edinb.,  1814. 

On  synostosis  of  the  cranial  bones , especially  the  parietals  , regarded  as  a 
race-char  acier  in  one  class  of  ancient  hritish  and  in  african  skulls,  dans  Natur. 
Hist.  Revieîv,  no.  18,  1865,  p.  242. 

Kranier  med  tidig  fôrbening  af  pilsbnmen  {scaphocephali) , dans  Medicinskt 
Archiv  , Stockholm,  Vol.  II,  p.  1,  1864;  résumé  détaillé  de  deiu  conférences 
faites  à la  Société  médicale  suédoise,  le  2 Sept.  1862  et  le  29  Sept.  1863. 

■“)  Congénitale  Synostosis  mit  Dolichocephalus  als  selbststàndiges  Leiden , dans 
Jahrb.  für  Kinderheilk.  und  physische  Erziehung , t.  Vil,  1865,  p.*  66. 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SC APHOCÉPHALIE. 


265 


avait  succombé  en  présentant  des  phénomènes  de  catarrhe  intes- 
tinal et  de  consomption.  La  tête  était  longue  et  étroite  ; les  bosses 
pariétales  à peine  distinctes;  le  front  assez  fortement  bombé.  La 
partie  la  plus  élevée  de  la  tête  se  trouvait  immédiatement  en 
arrière  de  la  grande  fontanelle,  qui  était  située  un  peu  loin  en 
avant  et  pénétrait  assez  profondément  dans  le  frontal.  L’occiput 
faisait  une  saillie  très  forte.  Dans  leur  tiers  antérieur,  les  parié- 
taux , qui  du  côté  de  la  fontanelle  s’avançaient  en  un  bord  écailleux  ^ 
étaient  unis  par  synostose;  à 1 centim.  en  avant  de  l’extrémité 
postérieure  de  la  synostose  commençait  une  crête  osseuse,  qu’on 
pouvait  sentir  à travers  la  peau  et  qui  avait  déjà  attiré  l’atten- 
tion durant  la  vie.  Cette  crête  s’élevait  rapidement  et  atteignait 
bientôt  son  maximum  de  hauteur  et  de  largeur.  Sur  la  face  interne 
du  crâne  on  voyait,  à la  partie  postérieure  de  la  synostose,  un 
sillon  profond  ; les  bords  par  lesquels  les  pariétaux  se  correspon- 
daient étaient  épaissis  aux  deux  côtés.  La  suture  était  plus  large 
en  dedans  qu’en  dehors.  Dans  leurs  parties  inférieures  les  parié- 
taux étaient  plus  minces  et  plus  flexibles  ; ils  avaient  très  peu  de 
mobilité  l’un’  par  rapport  à l’autre  ; leur  substance  osseuse  était 
amplement  pourvue  de  sang.  Un  os  suturai,  long  de  15  mm.  et 
large  de  25  mm.,  se  trouvait  entre  l’occipital  et  les  deux  parié- 
taux, Au  sujet  du  cerveau,  des  méninges  et  des  sinus  veineux, 
il  est  dit  qu’ils  étaient  richement  dotés  de  sang,  mais  ne  présen.- 
taient  d’ailleurs  aucune  anomalie.  L’examen  anatomique  n’a  pas 
appris  si  la  dure-mère  avait  pu  exercer  une  influence  quelconque 
sur  la  production  de  la  synostose.  Les  autres  parties  du  cadavre 
n’offraient  rien  de  particulier. 

J’ai  exposé  un  peu  en  détail  les  caractères  de  ce  petit  crâne , 
parce  que  je  crois  que  nous  avons  affaire  ici  à une  scapbocéphalie 
en  voie  de  naissance,  et  parce  qu’il  n’a  été  publié  aucune  autre 
observation  de  la  difformité  à un  âge  aussi  peu  avancé. 

Une  riche  collection  crâniologique , qui  d’après  le  Thésaurus 
craniorum,  publié  en  1867,  comprend  1500  objets,  a mis  M.  Bar- 
nard  Davis  en  état  de  décrire  aussi  quelques  crânes  scaphocé- 


266 


T.  ZAAIJER,  SUR  LA  SCAPHOCÉPHALIE. 


phales  de  peuples  étrangers  à l’Europe  *).  Le  premier  est  origi- 
naire d’un  homme  de  la  Nouvelle-Galles  du  Sud , paraissant  âgé 
d’environ  50  ans.  Cet  individu  faisait  partie  d’une  tribu  de- 
meurant près  de  la  rivière  Mc-Leay , à environ  200  milles  (anglais) 
au  nord  de  Sydney.  M.  Davis  possède  aussi  un  crâne  normal, 
qui  provient  d’un  homme  ayant  à peu  près  le  même  âge  que  le 
précédent  et  appartenant  à la  même  tribu.  Ces  deux  crânes  ont 
donc  pu  être  comparés  entre  eux.  ^ 

Plus  tard  il  a reçu  un  second  crâne  scaphocéphale  d’Australien; 
ce  crâne , provenant  d’un  homme  d’environ  30  ans , de  la  colonie 
Victoria,  avait  été  trouvé,  en  1863,  dans  les  branches  d’un  arbre. 

Un  troisième  crâne  a appartenu  à un  jeune  Indien,  probablement 
esclave,  paraissant  avoir  de  10  à 11  ans,  et  natif  des  bords  de  la 
rivière  Columbia , dans  l’Amérique  N.  0.  — M.  Davis  possède  encore 
un  crâne  scaphocéphale  trouvé,  il  y a quelques  années , à une  profon- 
deur de  18  pieds,  dans  des  fouilles  faites  à Clothfair  (Londres).  Il 
mentionne  aussi,  parmi  les  pièces  de  sa  collection , le  crâne  d’un 
Lapon  d’environ  30  ans  (no.  1146),  dans  lequel  la  scaphocéphalie 
n’est  pas  fortement  accusée,  et  le  crâne  incomplet  d’un  Hindou 
(selon  toute  apparence  une  femme)  de  Gazepoor,  en  Bengale. 
Enfin,  il  a vu  quelques  exemples  de  scaphocéphalie  chez  des 
personnes  vivantes  ; l’une  de  celles-ci  était  un  enfant  de  7 mois , 
bien  portant,  robuste  et  intelligent. 

Le  crâne  de  Greifswald  a été  représenté  par  M.  Davis  dans 
trois  figures,  qui  en  font  nettement  ressortir  la  forme  remarquable. 
Ce  crâne  provient  d’un  tisserand  de  Stettin,  en  Poméranie,  qui 
était  mort  d’une  pleurésie  à l’âge  de  38  ans.  Le  front  de  cet  homme 
était  extrêmement  saillant , et  tout  son  aspect  inspirait  de 
la  répulsion.  „11  avait  de  gros  sourcils  noirs , confondus 
entre  eux , et  une  chevelure  noire , hérissée , inculte  ; il  ne 
pouvait  regarder  le  ciel,  son  occiput  venant  heurter  les  ver- 
tèbres du  cou  lorsqu’il  voulait  relever  la  tête”  (Dr.  Brau- 


1 ) On  synostic  crcmia  among  aboriginal  races  of  man , dans  y erhandelmgen  van 
de  Hollatidsche  Maatschappij  der  t^yetenschappen  te  üaarlen,  t.  XXII,  1865. 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOCÉrU ALIE. 


267 


millier).  Il  était  querelleur  et  difficile  à vivre  , en  partie 
à cause  des  taquineries  auxquelles  le  mettait  en  butte  sa  figure 
étrange.  „Personne  ne  voulait  s’asseoir  à côté  de  lui,  personne 
ne  voulait  avoir  le  moindre  commerce  ni  surtout  jouer  avec  lui. 
On  le  fuyait , on  l’excluait , et  il  se  repliait  sur  lui-même , chagrin 
et  méfiant.”.  Jamais,  toutefois,  il  ne  donna  de  signe  d’un  dérangement 
des  facultés  intellectuelles  ; dans  son  enfance , il  avait  appris  facile- 
ment à lire , écrire  et  calculer.  Les  os  du  crâne  étaient  minces  et 
légers,  les  sutures  presque  toutes  oblitérées,  la  carène  bien  distincte. 
Le  crâne  était  asymétrique,  le  côté  droit  convexe,  le  côté  gauche 
légèrement  concave. 

M.  Macalister  a observé  la , scaphocéphalie  chez  un  jeune 
homme  de  1 7 ans , qui  souffrait  continuellement  de  maux  de  tête, 
contre  lesquels  un  traitement  médical  fut  employé  avec  quelque 
succès  ; sa  mémoire  avait  toujours  été  faible.  Le  même  auteur  fait 
aussi  mention  d’un  homme  de  60  ans,  qui  pouvait  passer  pour 
scaphocéphale  et  qui  possédait  une  mémoire  excellente. 

M.  Calori  est  le  premier  qui  ait  décrit  le  cerveau  d’un  scapho- 
céphale; ce  cerveau  était  remarquablement  long,  étroit  et  élevé, 
et  présentait  dans  la  région  sagittale  des  bords  saillants  ; sa  forme  cor- 
respondait par  conséquent  à la  forme  du  crâne.  Le  sujet  de  l’obser- 
vation était  un  garçon  de  14  ans,  nommé  Antonio,  d,’ une  intelli- 
gence très  vive  et  d’un  caractère  doux  et  aimable.  Il  était  né 
dans  la  province  de  Côme,  près  du  Lac  Majeur.  Sa  taille  n’était 
pas  grande  pour  son  âge;  on  lui  avait  appliqué  le  sobriquet  de 
tête-longue.  Il  mourut  à l’hôpital  de  Bologne,  du  typhus  abdominal. 

Dans  un  écrit  postérieur  ^),  M.  Calori  a aussi  décrit  le  crâne 


BrUish  Medical  Journal,  3 Oct.  1868. 

■^)  Del  ceroello  nei  due  Tipi  Brachicefalo  e Dolicocefalo  Italiani , 1870.  Ce 
Mémoire  ne  m’est  eonnu  que  par  une  Notice  de  M.  Bariiard  Davis , dont  l’aut  eur 
a bien  voulu  m’envoyer  un  exemplaire  : Notice  of  some  recent  anatomical  writings 
hearing  upon  anthropology  by  Prof.  Luigi  Calori  ot"  Bologna,  read  before  the 
Antliropological  Institute,  April  3^  1871. 

3)  Sopra  un  cvanio  scafoideo  {scaphocephakis  Baerii),  dans  Mentor ie  delV  academia 
delle  scienze  delV  istituto  di  Bologna,  Série  II,  t.  X,  fasc.  3,  p.  435. 


268 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SC APHOCÉPHALIE . 


de  ce  garçon  et  en  a donné  quatre  figures.  Le  crâne  était  grand 
et  asymétrique;  vue  d’en  haut,  la  saillie  postérieure  était  plus 
forte  à droite  qu’à  gauche.  En  y comprenant  la  mâchoire  inférieure , 
le  poids  s’élevait  à 500  grammes.  La  carène  se  • prolongeait  en 
arrière  jusque  sur  la  moitié  supérieure  de  l’occipital.  Le  quart  antérieur 
de  la  suture  sagittale  était  ouvert , tandis  que  la  partie  postérieure 
paraissait  s’être  oblitérée  la  dernière.  Sur  le  tiers  moyen  de  la 
carène  il  y avait  une  légère  élévation;  en  cet  endroit  on  voyait, 
outre  les  petits  trous  pariétaux,  un  grand  nombre  de  canalicules 
vasculaires.  Cette  circonstance  pouvait  faire  naître  l’idée  qu’il 
n’avait  existé  ici  qu’un  seul  point  d’ossification  pour  les  deux 
pariétaux. 

M.  Calori  a encore  communiqué  un  cas  de  scaphocéphalie  offert 
par  un  homme  de  54  ans,  demeurant  à Bologne,  qui  était  de 
temps  en  temps  tourmenté  de  maux  de  tête  et  qui  avait  eu  autrefois 
des  accès  de  manie  religieuse.  Cet  homme  était  le  troisième  de 
13  enfants,  tous  bien  conformés  et  sans  aucune  anomalie  crânienne. 
A sa  naissance  il  était  fort  et  dispos,  et  on  avait  été  immédiate- 
ment frappé  de  sa  tête  longue  et  étroite.  On  trouve  noté,  au  sujet 
de  cet  homme,  qu’il  lui  était  possible  de  regarder  le  ciel.  En 
palpant  la  tête,  on  pouvait  sentir  les  sutures  coronale  et  lambdoïde, 
mais  non  la  suture  sagittale  ; le  long  de  cette  dernière  on  remar- 
quait la  carène , qui  toutefois  ne  s’étendait  pas  aussi  loin  en  avant 
que  chez  Antonio. 

La  relation  de  M.  Calori  est  accompagnée  d’un  portrait  en 
profil,  de  demi-grandeur  naturelle;  j’ai  fait  reproduire  ce  portrait 
sur  la  PI.  IV',  fig.  2,  à I de  la  grandeur  naturelle. 


Grâce  à M.  le  Dr.  A.  H.  van  Andel,  médecin  en  chef  de  la 
maison  d’aliénés  de  Zutfen,  auquel  je  témoigne  ici  toute  ma 
reconnaissance,  je  suis  à même  de  donner,  à la  suite  des  faits 
qui  viennent  d’être  rappelés,  la  description  d’un  crâne  scapho- 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SC APIIOCÉPIfALI E. 


269 


céphale  conservé  dans  la  collection  de  rétablissement  susdit  ^). 
Aucun  détail  n’a  pu  m’être  communiqué  au  sujet  de  l’individu  à 
qui  ce  crâne  a appartenu.  La  pièce  avait  été  cédée , il  y a déjà  long- 
temps, par  le  professeur  Miquel  au  Dr.  Ramaer,  alors  médecin  en  chef 
delà  maison  d’aliénés  de  Zutfen,  et  celui-ci  l’avait  placée  dans  la  col- 
lection confiée  à ses  soins.  La  mâchoire  inférieure  manque  à cette  pièce. 

Le  crâne  est  long  et  étroit  ; la  partie  inférieure  du  frontal 
présente  une  direction  presque  verticale.  L’occiput  est  refoulé  en 
bas  et  en  -arrière.  Il  y a un  léger  degré  d’asymétrie.  Le  pariétal 
gauche  fait  une  plus  forte  saillie  au-dessus  de  la  suture  écailleuse 
que  le  pariétal  droit  ; il  en  est  de  même  de  la  moitié  gauche  de 
la  lame  de  l’occipital. 

A l’exception  de  la  suture  sagittale,  sur  laquelle  nous  revien- 
drons' plus  loin,  aucune  des  sutures  du  crâne,  pas  plus  dans 
sa  partie  cérébrale  que  dans  sa  partie  faciale , n’est  oblitérée.  La 
suture  incisive  existe  distinctement  aux  deux  côtés  du  trou  incisif. 
La  suture  infra- orbitaire  étend  de  part  et  d’autre, son  cours  sinueux, 
depuis  l’extrémité  du  sillon  infra-orbitaire  jusqu’au  trou  infra- 
orbitaire  2).  Les  dernières  dents  molaires  n’ont  pas  encore  percé. 

Les  dents  incisives,  les  canines  et  les  premières  molaires  sont 
perdues  aux  deux  côtés.  Au  côté  externe  de  la  seconde  molaire 
gauche  se  trouve  un  alvéole  surnuméraire , qui  n’a  été  occupé  que 
par  une  seule  racine.  Je  crois  pouvoir  le  regarder  comme  l’alvéole 
de  la  canine  permanente,  attendu  que  la  cavité,  qui  correspond 
à cette  dent  dans  la  série  normale,  est  beaucoup  plus  étroite  et 
plus  courte  qu’à  l’autre  côté,  de  sorte  qu’elle  a très  probablement 
logé  la  canine  temporaire  ; de  pareils  déplacements  paraissent  d’ail - 


Toutes  les  peines  que  je  me  suis  données  pour  découvrir  d’autres  spécimens 
sont  restées  sans  résultat.  Aucune  des  collections  crâniologiques  de  notre  pays, 
soit  publiques  soit  privées  (pour  autant  que  ces  dernières  me  sont  connues)  , 
ne  possède  de  crâne  scaphocéphale.  Je  saisis  cette  occasion  de  remercier  les 
personnes  qui  ont  bien  voulu  m’aider  dans  mes  recherches. 

*)  Voir  : Halbertsma , De  Sutura  infra-orbitalis , dans  Verslagen  en  Mededeelingen 
der  Koninkligke  Akad.  van  Welenschappen  te  Amsterdam,  Afd.  Natmrk.,  t.  IX, 
p.  177. 


270 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SGAPHOG  É PllALIE. 


leurs  êtrè  beaucoup  plus  fréquents  pour  les  canines  permanentes 
que  pour  les  autres  dents.  C’est  du  moins  ce  qu’on  observe  dans 
les  pièces  de  ce  genre  qui  font  partie  de  la  collection  de  Leide. 

A chacun  des  deux  os  zygomatiques  se  voit  un  processus  mar- 
ginal M ; à droite  cette  apophyse  est  plus  longue  qu’à  gauche. 

Après  ces  détails  sur  la  portion  faciale  du  crâne,  je  passe  à 
ce  qui  concerne  la  portion  cérébrale. 

La  suture  lambdoïde  possède  des  dentelures  engrenées  profondé- 
ment les  unes  dans  les  autres  ; sa  partie  supérieure  ne  forme  pas  un 
angle  aigu , comme  dans  les  crânes  normaux , mais  est  à peu  près 
horizontale.  Aux  deux  côtés  se  trouve,  à 13  mm.  de  la  partie 
inférieure  de  la  suture,  un  os  suturai  (os  wormien).  Au  côté  droit 
cet  os  a une  longueur  de  11  mm.  et  une  largeur  de  5 mm.;. l’os 
de  gauche  est  long  de  18  mm.  et  large  de  10  mm.  ^). 

Un  autre  os  suturai  se  voit  à gauche  entre  la  portion  écailleuse 
du  temporal , l’angle  sphénoïdien  du  pariétal  et  la  grande  aile  du 
sphénoïde  ; sa  longueur  est  de  22  mm. , et  sa  plus  grande  largeur 
de  13  mm.  A droite,  à la  même  place,  il  y a un  os  semblable , 
long  de  31  mm.  et  large  de  12  mm.,  et  en  outre  toute  la  suture 
sphéno- frontale  est  occupée,  à ce  côté,  par  un  os  suturai  large  de 
3 — 5 mm. 

En  son  milieu , où  elle  montre  une  convexité  tournée  en  avant , 
la  suture  coronale  est  presque  dépourvue  de  dentelures  ; sur  les  côtés , 
elle  présente  les  dentelures  normales.  De  la  suture  frontale,  une 
petite  partie , au-dessus  de  la  racine  du  nez , est  restée  ouverte  sur 
une  longueur  de  5 mm. 

La  synchondrose  sphéno-occipitale  n’est  pas  ossifiée.  La  longueur 
des  apophyses  mastoïdes , au-dessous  de  la  rainure  mastoïdienne , 
est  peu  considérable  et  ne  s’élève  qu’à  7 mm. 

A chaque  côté  se  voient,  dans  la  portion  mastoïdienne  du 
temporal,  deux  trous  mastoïdiens  de  grandeur  inégale. 

^ ) Voir  : Luschska , Ber  Processus  marginalis  des  menschlichen  Jochheins , dans 
Archiv  von  Reichert  und  Du  Rois-Reymond , année  1869 , p.  326. 

*)  Le  crâne  adulte  décrit  par  M,  Minchin  possède  un  os  suturai  à la  même 
place;  il  en  est  de  même  du  crâne  d’ Antonio. 


T.  ZAAI.TER.  SUR  LA  SCAl'HOCÉPH ALIE. 


271 


De  quelques-unes  des  particularités  qui  viennent  d'être  com- 
muniquées, je  crois  pouvoir  conclure  que  le  crâne  provient  pro- 
bablement d'un  individu  âgé  d’environ  17  ans.  En  effet,  les 
secondes  molaires  apparaissent  généralement  de  la  13'ème  ^ la 
IGième  année,  et  il  n'y  pas  de  raison  d'admettre  que  la  modifi- 
cation subie  par  la  forme  du  crâne  ait  exercé  de  l'influence 
sur  la  sortie  des  dents.  L'état  de  la  synchondrose  spbéno-occipitale 
né  doit  toutefois  pas  être  perdue  de  vue  dans  la  détermination 
de  l'âge  du  crâne.  D’après  M.  Virchow  ^),  l’ossification  commence 
en  ce  point  à l’âge  de  13 — 14  ans,  et  c’est  ordinairement 
de  la  ISième  à la  20îème  année  que  paraît  avoir  lieu  la 
synostose  complète  entre  l'occipital  et  le  sphénoïde.  M.  Wel- 
cker  a déduit  de  ses  observations  que  cette  synostose  se  fait 
à l'âge  de  16 — 20  ans.  Si  ces  données  sont  exactes,  l'âge  de 
notre  crâne  devrait  donc  être  estimé  plus  bas,  puisqu'on  n'y 
remarque  pas  même  un  commencement  d'ossification.  Je  crois 
toutefois  devoir  admettre  ici  que  l’existence  prolongée  de  la  syn- 
chondrose en  question  est  liée  à l’accroissement  longitudinal 
excessif  du  crâne,  en  d’autres  termes,  que  la  production  de  la 
synostose  a été  retardée  par  cette  circonstance. 

Le  faible  développement  des  apophyses  mastoïdes  plaide  aussi 
en  faveur  de  l'âge  peu  avancé  du  crâne. 

Il  m’est  impossible  de  dire,  avec  quelque  probabilité,  si  nous 
avons  affaire  ici  a un  crâne  masculin  ou  féminin.  La  solution  de 
cette  question  est  toujours  extrêmement  difficile  lorsqu’il  s’agit 
de  pièces  jeunes.  La  grandeur  et  la  capacité  me  font , il  est  vrai, 
présumer  que  notre  crâne  provient  d’un  individu  mâle;  mais  ce 
n'est  là  qu’une  simple  conjecture. 

J’arrive  maintenant  aux  particularités  qu’on  peut  observer  à 
, la  voûte  du  crâne  et  que  je  décrirai  avec  quelque  détail. 

Les  bosses  pariétales  manquent.  La  suture  sagittale  est  entiè- 
rement ossifiée.  Il  y a toutefois  un  petit  sillon  superficiel  qui , 
à partir  du  milieu  de  la  suture  coronale,  s'étend  en  arrière  sur 


D Vntersuchungen  üher  die  Entwickelung  des  Schàdelgrmdes , 1857,  p.  17. 
*)  Wachsthwïïi  und  B au  des  menschlichen  Schadels,  p.  86; 


272 


T.  ZAAIJER.  SÜR  LA  SC APHOCÉ PHALI E. 


une  longueur  de  25  mm.  ; je  crois  devoir  le  regarder  comme  un 
reste  de  la  suture  sagittale.  La  partie  médiane  de  l’ensemble 
formé  par  les  deux  pariétaux  s’avance  plus  que  les  parties  laté- 
rales , d’où  résulte  la  forme  particulière  de  la  suture  coronale  , 
qui  a été  mentionnée  ci-dessus.  Presque  tout  le  domaine  de  la 
grande  fontanelle  paraît  avoir  été  annexé  par  les  pariétaux  {Schnebhe 
de  Virchow).  La  région  de  la  grande  fontanelle  et  la  partie  du 
frontal  qui  est  située  au-devant  d’elle  font  saillie  vers  le  haut. 

Il  y a une  carène  bien  distincte  ; elle  est  le  mieux  prononcée 
à environ  6 cm.  derrière  la  suture  coronale,  et  s’abaisse  en 
avant  et  en  arrière. 

La  surface  des  pariétaux  est  rugueuse  au  milieu;  cette  partie 
rugueuse  comprend  les  deux  tiers  postérieurs  des  os  en  question, 
et  s’étend  de  chaque  côté  jusqu’à  environ  5 cm.  du  plan  médian. 
Vers  le  milieu  de  la  suture  sagittale,  là  où  se  trouve  une  légère 
saillie , on  voit  un  grand  nombre  de  petites  ouvertures , dont  les 
plus  grandes  ont  un  diamètre  de  plus  de  1 mm.  Plus  en  arrière 
il  y a également  beaucoup  de  ces  trous.  Le  nombre  d’ouvertures 
de  la  dimension  indiquée  s’élève  à plus  de  40  ; la  plupart  pénètrent 
dans  l’os  suivant  une  direction  oblique.  On  voit  en  outre  une 
foule  de  trous  très  petits , surtout  plus  en  avant , à côté  de  la  carène. 

Les  trous  pariétaux  proprement  dits  n’ont  pu  être  découverts. 
Immédiatement  au-dessus  de  la  suture  lambdoïde  le  crâne  offre 
une  légère  dépression,  et  au-dessous  de  cette  suture  l’occipital 
montre  une  saillie. 

A la  face  interne  du  crâne  on  remarque  ce  qui  suit: 

Les  portions  orbitaires  du  frontal  et  les  portions  écailleuses 
des  temporaux  présentent,  fortement  accusés,  les  juga  cerebralia  et 
les  impressions  digitées. 

Le  sillon  transversal  droit  est  large  de  10  mm.  ; le  sillon  gauche 
n’a  que  7 mm.  de  largeur. 

Du  milieu  de  la  suture  coronale  part  un  petit  sillon  superficiel  ^ 
qui  se  dirige  en  arrière  sur  une  longueur  de  19  mm.;  il  faut  y 
voir  un  reste  de  la  suture  sagittale. 

Les  caractères  les  plus  saillants  sont  ceux  du  sillon  longitu- 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOCÉPHALIE. 


273 


' / 

dinal,  là  où  il  s’étend  sur  les  pariétaux.  Dans  cette  partie,  le 
sillon  a 9 mm.  de  largeur.  Il  est  très  profond , surtout  dans  sa  moitié 
postérieure;  à gauche  il  est  bordé  par  une  crête  osseuse  aiguë, 
qui  est  haute  de  7 mm.  et  qui  s’abaisse  graduellement  en  avant.  A 
droite,  le  bord  osseux  atteint  à peine  la  moitié  de  la  hauteur  qui 
vient  d’être  indiquée.  *). 

A une  distance  d’au  moins  50  mm.  en  arrière  de  la  suture 
coronale  commence  une  fosse  irrégulière,  large  de  17—26  mm., 
dans  laquelle  on  peut  encore  poursuivre  vaguement  la  trace  du 
sillon  longitudinal.  Au  bord  de  cette  fosse,  ainsi  que  sur  le  fron- 
tal, on  voit  en  quelques  points  des  signes  de  détrition,  dus 
probablement  à des  glandules  de  Pacehioni  agrandies. 

Tout  près  du  sillon  longitudinal,  surtout  à la  partie  antérieure, 
les  pariétaux  sont  plus  épais  (8  mm.)  que  dans  les  portions  qui 
occupent  une  position  plus  latérale  (tout  au  plus  5 mm.). 


Le  poids  du  erâne  s’élève  à 520  grammes;  sa  capacité  est  de 
1590  centim.  cubes. 

_ Voici,  exprimés  en  millimètres,  les  résultats  des  mesures  que 
]ai  pnses  sur  ce  crâne;  ils  s’accordent  presque  exactement  avec 
les  mesures  données  par  M.  Welcker. 

A.  Contour  horizontal,  mesuré  en  passant  sur  les  bosses 

frontales  et  sur  la  partie  la  plus  saillante  de  l’occipital.  565 

B.  Contour  horizontal  du  front 

C.  Arc  longitudinal,  de  la  suture  naso-frontale  jusqu’au 

bord  antérieur  du  trou  occipital . 460 

D.  Distance  de  la  racine  du  nez  au  milieu  de  la  suture 

i coronale 

E.  De  ce  dernier  point  jusqu’à  la  suture  lambdoïde  (lon- 

gueur  de  la  suture  sagittale) 

cThies  du  sillon  longitudinal  dans  les  crânes  scapho- 

£n  profon  T 1"  ^ déjà  nn 

sillon  profond  a la  partie  postérieure  de  la  synostose. 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  jo 


274 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOCÉPHALIE. 


F.  De  la  suture  lambdoïde  jusqu’au  bord  antérieur  du 


trou  occipital 165 

G.  Distance  entre  ce  dernier  point  et  la  racine  du  nez, 

(mesurée  au  compas) 97 

H.  Arc  transversal , depuis  le  point  situé  au-dessus  du  centre 

du  trou  auditif  externe , en  passant  par-dessus  le  crâne , 
jusqu’au  point  correspondant  de  l’autre  côté 290 

I.  Portion  basale  du  même  arc 116 


K.  Longueur  du  crâne , depuis  le  point  situé  entre  les  bosses 

frontales  jusqu’à  la  partie  la  plus  saillante  de  l’occiput.  212 

L.  Largeur  du  crâne , distance  entre  les  points  où  A et  H 


se  croisent' 135 

M.  Distance  des  bosses  frontales 67 

N.  Distance  des  apophyses  mastoïdes 95 


O.  Hauteur  du  crâne,  depuis  le  bord  antérieur  du  trou  ■ 

occipital  jusqu’au  point  ou  G et  H se  croisent  . . . 121  H 

P.  Distance  des  orbites,  mesurée  entre  les  pointes  des  I 

processus  naso-orbitaires  du  frontal,  sur  le  prolonge-  m 

ment  de  la  crête  de  l’os  lacrymal 24  ■ 

Q.  Distance  des  apophyses  zygomatiques  des  temporaux,  ■ 

mesurée  à l’extrémité  du  bord  supérieur  de  l’orbite . 94  H 

R.  Distance  de  la  racine  du  nez  au  bord  alvéolaire  delà  I 

mâchoire  supérieure,  entre  les  incisives  moyennes.  . 65  ■ 

S.  Distance  de  ce  dernier  point  au  bord  antérieur  du  trou  H 

occipital 99  ■' 

Je  terminerai  cette  communication  par  quelques  remarques  aux-  fl 
quelles  conduisent  le  cas  de  scaphocéphalie  que  je  viens  de  décrire  I 
et  ceux  qui  ont  été  observés  par  d’autres.  B 

En  premier  lieu , on  doit  reconnaître , — ce  qu’avait  déjà  soup-  I 
çonné  M.  Minchin , — que  l’anomalie  en  question  n’est  pas  rare.  B 
A ma  connaissance , le  nombre  des  observations  recueillies  s’élève  fl  ^ 
aujourd’hui  à 57,  savoir;  Blumenbach  1 *),  Virchow  2 , Minchin  4,  jW  ( 

*)  MM.  Minchin,  Turner,  von  Düben  et  Macalister  pensent  que  E.  Sandifort 
a été  le  premier  qui  ait  décrit  un  crâne  scaphocéphale.  {Exercitationes  acade- 


T.  ZAAUER.  SUR  LA  SCAPHOCÉPHALIE. 


275 


Lacae  3,  Schade  1,  von  Baer  1,  Welcker  5,  Turner  11,  Thur.- 
nam  9,  von  Düben  7,  Forster  1,  Davis  7,  Macalister2,  Calori 
2,  Zaaijer  1.  Dans  ce  nombre,  il  y a au  moins  12  cas  où  l’ano- 
mSilic  a été  observée  pendant  la  vie. 

Il  est  ensuite  hors  de  doute,  aujourd’hui,  que  la  dififormité  est 
congénitale. 

Relativement  au  garçon  de  13  ans,  observé  par  M.  Minchin 
on  trouve  noté  que:  „la  forme  de  la  tête  avait  été,  dés.  la  pre- 
mière période  de  la  vie,  un  sujet  d’étonnement  et  de  plaisan- 
teries  pour  les  voisins.’' 

Le  jeune  Ecossais,  cité  par  M.  Turner,  vint  au  monde  par  un 

accouchement  laborieux,  et  la  forme  étrange  de  sa  tête  attira  de 
suite  l’attention. 

Les  trois  personnes,  chez  qui  la  difformité  fut  constatée  par 
M.  von  Düben,  l’apportèrent  toutes  les  trois  en  naissant 

Chez  un  enfant  de  13  jours,  dont  le  crâne  a été  décrit  par 
M.  Forster,  la  carène,  — car  on  ne  peut  guère  interpréter  au- 
trement la  crête  osseuse  mentionnée  dans  la  description  — 
pouvait  être  sentie  à travers  la  peau. 

Un  enfant  de  7 mois  présentait  avec  tant  d’évidence  les  ca- 
ractères de  la  scaphocéphalie,  que  M.  Davis,  qui  l’examina, 
déclaré  que  la  mère  se  trompait  en  affirmant  que  les  sutures 
étaient  ouvertes  au  moment  de  la  naissance. 


L homme  à scaphocéphalie  très  accentuée,  cité  par  M.  Calori 
possédait!  déjà  a»  monde  une  tête  longue  et  étroite. 


micae.  Liber  II,  1785,  pag.  13  et  Muséum  anatomicum,  1,  1793,  no  XV  Ossa 
morbosa.  pag.  134).  Cette  opinion  est  toutefois  erronée,  comme  Ven  ai  IcqX 

eLorT^TLdl”’'/'*'  “question,  lequel  se  trouve 

decelleVè  ’ u “ anatomique.  La  forme  s eloivne  tout  àfait 

Îil  I distinctes, 

r ne  e la  vo"r^  ^ dé 

du  crâne  uni  sont 

crâne  qui  sont  très  minces  et  très  légers,  on  voit  des  signes  d’usure 
droc^ri  ® l’amphation  pathologique  du  contenu  du  crâne  (hy- 

pa  ticulante  que  cette  piece  ait  en  commun  avec  les  crânes  scaphocéphales. 

18* 


276 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOCÉPHALIE. 


Dans  tous  les  cas  où  Tobservation  a eu  lieu  à un  âge  très 
peu  avancé  ou  même  immédiatement  après  la  naissance,  Tano- 
malie  était  déjà  parfaitement  reconnaissable.  Pour  ces  cas-là  du 
moins,  la  conclusion  ci-dessus  énoncée  est  donc  à Tabri  de  toute 
contestation , et , en  tenant  compte  de  la  grande  analogie  qui 
existe  entre  ces  crânes  et  les  autres  crânes  scaphocéphales , on 
est  fondé  à Tadmettre  pour  tous  les  cas  indistinctement. 

La  question  du  mode  de  production  de  cette  forme  particulière 
du  crâne  a été  résolue  de  deux  manières  différentes. 

D'après  la  première  opinion,  émise  d'abord  par  M.  Minchin, 
défendue  par  M.  von  Baer  et  adoptée  par  M.  Lucae , il  n'y  aurait 
à l'origine  qu'un  seul  point  d'ossification  pour  les  deux  pariétaux. 

L’argument  essentiel  qu'on  donne  à l'appui  de  cette  manière 
de  voir,  c'est  qu'on  trouverait  des  lignes  d'ossification  allant  en 
rayonnant  à partir  de  la  suture  sagittale.  Les  figures  de  M.  Minchin 
sont  trop  incomplètes  pour  qu'on  puisse  se  former,  à cet  égard, 
une  opinion  précise.  M.  Macalister  toutefois,  en  examinant  un 
des  crânes  décrits  par  M.  Minchin,  s'est  assuré  de  la  réalité  du 
caractère  signalé.  Le  crâne  de  momie  égyptienne , mentionné  par 
M.  Turner,  a aussi  un  aspect  un  peu  rayonné  dans  la  région 
de  la  suture  sagittale.  M.  Davis  a vu  sur  le  crâne  de  Clothfair 
„ quelques  faibles  traces  d'une  apparence  de  radiation  autour  d'un 
point  central  mais  les  autres  crânes  à suture  sagittale  obli- 
térée, qu'il  a eu  l’occasion  d’examiner,  ne  montraient  aucun  ves- 
tige d'une  pareille  disposition.  Sur  le  crâne  étudié  par  moi  on 
n’en  découvre  rien  non  plus. 

M.  von  Baer  a encore  fait  valoir,  en  faveur  de  l'unité  origi- 
nelle des  pariétaux , la  circonstance  qu'ils  s’avancent  sur  le  domaine 
de  la  grande  fontanelle.  Mais  la  faiblesse  de  cet  argument  a déjà 
été  montrée  par  M.  Welcker.  Il  n'y  a,  en  effet,  aucune  raison 
pour  admettre  que  la  même  projection  en  avant  ne  pourrait  se 
produire  avec  deux  pariétaux  séparés  à l’origine  et  soudés  de 
bonne  heure. 

L’absence  des  bosses  pariétales  ne  saurait  pas  non  plus  être 
considérée  comme  une  preuve  de  l'existence  d’un  pariétal  unique , 


T,  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOCÉPHALIE. 


277 


car  elles  font  défaut  sur  une  foule  de  crânes  possédant  incontes 
tablement  deux  pariétaux  distincts.  Des  crânes  de  fœtus  de  6—7 
mois  m’ont  déjà  offert  de  grandes  différences  dans  le  degré  de  déve- 
loppement de  ces  bosses  ; chez  quelques-uns  elles  sont  très  proémi- 
nentes, presque  pointues,  chez  d’autres  elles  sont  beaucoup  moins 
prononcées.  Certains  crânes  seaphocéphales , en  outre,  montrent 
des  bosses  pariétales  (Davis,  Macalister).  M.  Macalister  a déter- 
miné pour 31  crânes  d’adultes  la  distance  des  deux  bosses,  ainsi 
que  leur  position  relative;  la  distance  variait  entre  178  et  38  mm. 
Le  crâne  dans  lequel  fut  rencontrée  cette  dernière  et  faible  valeur 
était  un  vrai  scaphocéphale.  La  bosse  pariétale  était  située  5 fois 
plus  près  du  bord  écailleux  que  du  bord  sagittal,  et  2 fois  plus 
près  du  bord  postérieur  que  du  bord  antérieur.  Il  résulte  donc 
de  ces  mesures,  que  la  distance  mutuelle  et  la  position  relative 
des  bosses  sont,  l’une  et  l’autre,  loin  d’être  constantes. 

Nous  avons  déjà  vu  ci-dessus  que  M.  Welcker  et,  avant  lui, 
M.  Virchow  ont  expliqué  la  production  de  la  difformité  par  la 
soudure  précoce  de  deux  pariétaux  primitivement  distincts. 

Sur  deux  des  crânes  examinés  par  M.  Welcker,  le  Danois  de 
la  collection  de  Gottingen  et  le  n».  515  de  la  collection  de  Dresde, 
existaient  encore  des  traces  de  la  suture  sagittale;  il  s’en  trouvé 
aussi  des  indications,  tant  à l’intérieur  qu’à  l’extérieur,  dans  le 
crâne  dont  j’ai  donné  la  description.  Ces  restes  de  suture  n’avai- 
ent pas  échappé  àM.  Minchin  ni  à M.  von  Baer,  mais  ces  deux 
savants  crurent  devoir  les  interpréter  comme  des  lacunes  dans 
l’ossification,  comme  des  suturae  mendosae,  telles  qu’on  en  voit 
dans  la  conque  de  l’occipital.  Des  observations  postérieures  ont 
rais  hors  de  doute  la  fausseté  de  cette  opinion.  Sous  ce  rapport 
les  crânes  décrits  par  M.  Fbrster  et  M.Calori  ont  une  grande  im- 
portance , attendu  qu’ils  fournissent  la  preuve  positive  de  l’existence 

de  la  suture  sagittale,  et  par  conséquent  de  l’existence  de  deux 
pariétaux. 

Dans  le  premier  de  ces  deux  cas,  en  effet,  le  tiers  antérieur 

e 1a  suture  sagittale  fut  trouvé  complètement  oblitéré,  tandis  que 
plus  en  arrière  la  suture  était  ouverte.  Sur  le  crâne  d’ Antonio , 


278 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOCÉPHALIE. 


le  quart  antérieur  de  la  suture  sagittale  était  entièrement  ouvert , 
et  dans  la  partie  postérieure  on  voyait  encore  des  traces  de  den- 
telures, ce  qui  semble  indiquer , conformément  à l’opinion  de  M. 
Calori,  qu’ici  la  soudure  ne  datait  pas  encore  de  longtemps.  Dans 
ce  cas,  l’oblitération  doit  donc  avoir  commencé  plus  près  du 
milieu,  à l’endroit  où  se  trouvent  l’éminence  et  les  petites  ouver- 
tures, qu’on  voit  également  sur  la  pièce  décrite  par  moi. 

Ces  deux  crânes  sont  encore  très  intéressants  comme  montrant 
que  la  synostose  ne  débute  pas  toujours  dans  la  même  partie  de 
la  suture  sagittale,  ce  qui  n’est  certainement  pas  sans  influence 
sur  la  forme  que  le  crâne  acquiert  plus  tard.  A cette  occasion, 
on  peut  rappeler  les  observations  de  M.  Welcker  concernant 
l’oblitération  de  la  suture  sagittale.  M.  Welcker  partage  cette  suture 
en  5 portions,  la  première  joignant  la  suture  coronale,  la  cin- 
quième la  suture  lambdoïde.  La  quatrième  portion , qui  montre  le 
moins  de  dentelures  et  se  trouve  entre  les  trous  pariétaux , est  un 
peu  plus  courte  que  les  autres.  Chez  les  crânes  normaux , c’est 
ordinairement  dans  cette  quatrième  portion  que  la  suture  sagittale 
s’oblitère  le  plus  et  le  plus  tôt  (chez  82  crânes  sur  100).  On  peut 
donc  admettre,  sans  trop  s’aventurer,  que  chez  les  crânes  sca- 
phocèphales  la  synostose  commencera  habituellement  dans  la  partie 
postérieure  de  la  suture  sagittale  ; cela  est  d’ailleurs  d’autant  plus 
probable  que  les  restes  de  la  suture  se  rencontrent  presque  ex- 
clusivement dans  la  partie  antérieure. 

Le  second  argument  en  faveur  de  l’opinion  de  M.  Welcker 
est  fourni  par  l’existence  des  trous  pariétaux  dans  certains  crânes 
scaphocéphales. 

M.  Welcker  a constaté,  sur  des  crânes  de  fœtus  de  7 — 9 mois, 
que  ces  trous  proviennent  de  fentes,  qui  restent  ouvertes  entre 
les  rayons  osseux  dirigés  des  bosses  pariétales  vers  l’angle  lamb- 
doïde. Plusieurs  crânes  de  ce  même  âge  m’ont  offert  la  confirma- 
tion de  cette  observation  ; chez  d’autres , et  même  chez  des  crânes 
de  nouveau-nés,  je  n’ai  trouvé  de  fente  qu’à  un  seul  côté,  ou 
bien  je  n’en  ai  pas  vu  du  tout,  ce  qui  est  d’accord  avec  le  fait 
que  les  trous  pariétaux  manquent  très  souvent  chez  les  adultes. 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOCÉPHALIE. 


279 


soit  d’un  côté,  soit  des  deux  côtés  à la  fois.  En  examinant  une 
série  de  crânes  d’enfants , d’âge  successivement  croissant , j’ai  vu 
la  fente , du  côté  tourné  vers  la  suture  sagittale , devenir  de  plus 
en  plus  étroite  et  enfin  se  fermer , de  sorte  qu’il  ne  restait  plus 
que  des  ouvertures  de  grandeur  très  diverse. 

La  présence  des  trous  pariétaux  est  donc  liée  à l’existence  d’un 
bord  osseux  libre , savoir  le  bord  sagittal  du  pariétal  ; si  dans  des 
crânes  scaphocéphales  on  rencontre  un  ou  deux  trous  pariétaux , 
ceux-ci  fournissent  la  preuve  qu’il  y a eu  à l’origine  deux  parié- 
taux distincts.  M.  Welcker , , M.  Davis  et  d’autres  observateurs 
ont  constaté  la  présence  d’une  ou  de  deux  de  ces  ouvertures 
dans  certains  crânes  scaphocéphales.  Dans  notre  exemplaire  elles 
font  défaut;  mais,  d’après  ce  qui  précède,  cela  ne  prouve  rien 
contre  la  séparation  originelle  des  pariétaux. 

Il  y a encore  un  point  qui  mérite  d’être  pris  ici  en  considé- 
ration. Les  sutures  sont  de  la  plus  grande  importance  pour  l’ac- 
croissement des  os  ; elles  remplissent  dans  ce  phénomène  le  même 
rôle  qui,  pour  d’autres  parties  du  squelette,  est  assigné  aux  carti- 
lages épiphysaires.  Si  donc  il  n’existait  primitivement  qu’un  seul- 
pariétal,  et  que  par  conséquent  il  n’y  eût  pas  de  suture  sagittale, 
la  croissance  en  largeur  devrait  se  faire  en  majeure  partie  2iVi\iOxà 
écailleux  des  pariétaux;  or  cela  est  contredit  par  les  mesures  de 
M.  Welcker.  D’après  ce  savant,  la  conclusion  précédente  devrait 
même  s’appliquer  à la  totalité  de  l’accroissement  en  largeur  ; mais , 
à mon  avis,  il  faut  admettre  aussi  pour  les  os  crâniens,  tout 
comme  pour  les  autres,  une  croissance  interstitielle. 

Je  fixerai  enfin  l’attention  sur  les  os  suturaux  qui,  dans  notre 
c'as  de  scaphocéphalie , se  trouvent  aux  bords  latéraux  des 
pariétaux.  Quelque  chose  d’analogue  se  voit  dans  une  des  figures 
de  M.  von  Dtiben , mais  les  os  suturaux  y sont  beaucoup  plus  grands 
et  occupent  tout  le  bord  écailleux.  Là  où  l’ostéogénie  marginale 
n’est  pas  sufiSsamment  active,  ces  os  suturaux  se  forment  quel- 
quefois en  très  grand  nombre,  par  exemple  dans  le  cas  d’hydro- 
céphale. Chez  notre  sujet,  les  os  suturaux  ne  peuvent  avoir  eu, 
vu  leurs  faibles  dimensions,  qu’une  influence  assez  bornée. 


280 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOCÉPHALIE. 


De  ce  qui  précède , il  résulte  donc  que  dans  les  crânes  scapho 
céphales  la  suture  sagittale  existe  à Torigine,  et  qu’elle  commence 
déjà  à s’oblitérer  avant  la  naissance.  Quant  à l’époque  de  la  vie 
fœtale  à laquelle  correspond  le  début  du  phénomène  d’oblitération, 
il  est  impossible  de  la  préciser;  on  ne  possède  pas  d’observation 
de  fœtus  avant  terme  montrant  les  caractères  de  la  scaphocéphalie. 
Je  regarde  comme  probable  que  là  soudure  totale  ou  partielle  des 
pariétaux  ne  peut  avoir  lieu  que  dans  les  derniers  mois  de  la 
grossesse.  M.  Welcker  a déjà  fait  remarquer  que  l’union  trop 
précoce  des  pariétaux  apporterait  un  trouble  profond  au  développe- 
ment du  cerveau;  or,  aucun  dérangement  de  ce  genre  n’a  été 
constaté  dans  les  cas  connus. 

La  synostose  précoce  de  la  suture  sagittale  permet  d’expliquer 
facilement  la  forme  des  crânes  scaphocéphales , à l’aide  de  la  loi 
énoncée  par  M.  Virchow  Q , suivant  laquelle , lorsqu’il  y a synostose 
d’une  suture,  le  développement  du  crâne  est  entravé  dans  la  direc- 
tion perpendiculaire  à la  suture  oblitérée.  Près  des  autres  sutures , 
il  s’opère  alors  un  accroissement  compensateur.  Cette  loi  ne  rend 
peut-être  pas  compte  de  chaque  cas  particulier,  mais , d’une  manière 
générale , elle  est  incontestablement  vraie. 

Si  nous  l’appliquons  à notre  exemple  de  scaphocéphalie,  nous 
comprenons  pourquoi  la  voûte  crânienne  est  si  étroite , et  comment , 
par  l’accroissement  compensateur  concentré  spécialement  sur  les 
sutures  coronale  et  lambdoïde , le  crâne  a pris  sa  forme  allongée. 
La  direction  de  cette  dernière  suture,  plus  horizontale  que  de 
coutume , a ici  son  importance.  Grâce  à elle , en  efiPet , cette  suture 
a perdu  presque  toute  influence  sur  l’accroissement  transversal , et  est 
devenue  à peu  près  exclusivement  une  suture  d’allongement  du  crâne. 

Le  fait,  que  la  difformité  en  question  dépend  de  l’oblitération 
de  la  suture  sagittale,  ne  constitue  pas  nécessairement  le  terme 
de  nos  investigations.  Nous  pouvons  faire  un  pas  de  plus  et  essayer 
de  découvrir  les  causes  capables  de  déterminer  cette  synostose 
précoce  de  la  suture  sagittale.  Pour  ce  qui  concerne  le  crâne  décrit 
par  moi , je  crois  devoir  admettre  que  des  phénomènes  inflamma- 


*)  Gesammelte  Ahhandlungen , p.  936. 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOCÉPHALIE. 


281 


toires , ayant  procédé  de  la  substance  de  Vos  ou  du  péricrâne , y 
ont  joué  un  rôle  important.  Comme  on  l’a  vu,  la  surface  de  la 
région  sagittale  et  des  parties  voisines  est  inégale  et  pourvue  d’un 
grand  nombre  d’ouvertures  de  dimensions  diverses;  les  pariétaux 
sont  notablement  plus  épais  auprès  du  sillon  longitudinal  que  dans 
les  points  plus  rapprochés  des  bords  latéraux.  Les  ouvertures  ne 
peuvent  guère  avoir  servi  à autre  chose  qu’à  livrer  passage  à 
des  vaisseaux  sanguins.  La  grande  vascularité  fait  présumer  des 
phénomènes  de  pblogose , et  ceux-ci , lorsqu’ils  attaquent  le  périoste 
ou  le  tissu  osseux  lui-même , sont  regardés  comme  très  favorables 
à l’oblitération  des  sutures.  L’épaisseur  plus  grande  de  l’os  vient 
à l’appui  de  la  conjecture  que  la  synostose  a été  précédée  ici  d’un 
procès  de  nature  inflammatoire. 

Dans  la  description  du  crâne  d’ Antonio,  M.  Calori  signale  égale- 
ment le  grand  nombre  des  vaisseaux  sanguins  qui  ont  dû  exister 
au  voisinage  de  la  suture  sagittale.  Les  pariétaux  du  crâne  d’en- 
fant décrit  par  M.  Fôrster  se  distinguaient,  comparés  aux  autres 
os  de  ce  crâne,  par  l’abondance  des  vaisseaux,  et  ils  étaient 
épaissis  à leur  bord  sagittal  ; dans  ce  cas  aussi , il  y a donc  lieu 
d’attribuer  un  rôle  à l’inflammation,  problablement  à celle  de  la 
substance  osseuse  elle-même,  car  il  n’est  rien  dit  des  enveloppes 
extérieures , et  l’examen  n’a  pas  montré  que  la  dure-mère  ait  eu 
de  l’influence  sur  la  production  de  la  synostose. 

Je  note,  à cette  occasion,  que  M.  Welckera  le  premier  décrit , 
sous  le  nom  de  trigonocéphales y quelques  crânes  qui,  dans  leur 
mode  de  formation,  ont  beaucoup  d’analogie  avec  les  scaphocé- 
phales.  Dans  cette  anomalie , qui  se  rencontre  rarement , les  deux 
moitiés  du  frontal  se  sont  soudées  trop  tôt  l’une  à l’autre.  Sur 
une  des  planches  que  M.  Welcker  y a consacrées,  je  vois,  à 
proximité  de  ces  bords  osseux  soudés , une  multitude  d’ouvertures , 
qui  ont  probablement  la  même  signification  que  dans  les  cas  de 
scaphocéphalie. 

M.  Calori  est  d’avis  que  la  synostose  de  la  suture  sagittale 
n’est  pas  la  vraie  cause  de  la  déformation,  ou  que,  du  moins. 


D WachstJmm  md  Bau,  PI.  XIV,  fig.  2 et  3. 


282 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOCÉPHALIE. 


il  n’est  pas  tout'  à fait  c'ertain  qu’elle  doive  être  considérée  comme 
telle  ; il  va  plus  loin  et  pense  que , indépendamment  de  toute  maladie 
des  os  du  crâne,  la  cause  doit  être  cherchée  pour  une  part  dans 
des  influences  mécaniques  (pression  sur  la  tête , par  suite  de  la 
fausse  position  du  fœtus  dans  la  matrice;  pression  sur  la  matrice 
elle-même,  imputable  à la  profession  de  la  mère,  à des  corsets 
trop  étroits  ou  trop  rigides,  à des  contractions  trop  fortes  des 
muscles  abdominaux , etc.),  et  pour  une  autre  part  dans  une  maladie 
du  cerveau  et  dans  la  manière  dont  celui-ci  se  développe  et  croît. 
A cet  égard , toutefois , les  observations  font  complètement  défaut , 
et  je  crois,  en  conséquence,  pouvoir  me  borner  à cette  simple 
mention. 

Plusieurs  auteurs , surtout  M.  Barnard  Davis , ont  fait  remarquer 
que  la  suture  sagittale,  et  celle-là  seule,  peut  être  entièrement 
oblitérée  sans  que  le  crâne  possède  la  forme  scaphocéphale ; et, 
en  second  lieu , qu’il  y a des  crânes  qui , dans  leur  développement 
normal , présentent  une  si  grande  analogie  avec  les  crânes  scapho- 
céphales,  qu’ils  doivent  presque  être  regardés  comme  des  scapho- 
céphales  naturels. 

Pour  ce  qui  touche  le  premier  point,  je  dois  admettre  que  la 
soudure  des  pariétaux  n’aura  eu  lieu , dans  ces  cas,  qu’à  une  époque 
plus  avancée.  Des  crânes  adultes  ne  peuvent  rien  nous  apprendre 
à ce  sujet,  car  chez  eux  la  synostose  peut  s’effectuer  sans 
modifier  la  forme.  Mais,  même  chez  les  crânes  jeunes,  la 
soudure  peut  se  produire  sans  entraîner  la  forme  scaphocéphale. 
J’ai  devant  moi  le  crâne  d’un  enfant  de  8 ans,  où  la  suture 
sagittale  est'  complètement  oblitérée,  tandis  que  toutes  les  autres 
sutures  sont  restées  ouvertes.  La  distance  entre  les  bosses  parié- 
tales fortement  proéminentes,  mesurée  par- dessus  le  crâne , s’élève 
à 130  mm.  11  y a deux  grands  trous  pariétaux;  aucune  trace  de 
carène.  Evidemment,  la  soudure  a commencé  ici  assez  longtemps 
après  la  naissance.  — L’existence  d’une  suture  sagittale  synos- 
totique  chez  des  crânes  non  scaphocéphales  ne  diminue  en  rien, 
selon  moi,  l’importance  de  cette  oblitération  pour  la  production 
de  l’anomalie  en  question. 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SCAPHOGEPHALIE.  283 

En  ce  qui  concerne  le  second  point',  M.  Welcker  avait  déjà 
mentionné  que  la  forme  du  crâne  des  Groënlandais  se  rapproche 
de  la  forme  scaphocéphale.  Un  crâne  de  femme  groënlandaise , 
âgée  par  estimation  d’au  moins  40  ans,  crâne  qui  fait  partie  de 
la  collection  anatomique  de  Leide , confirme  cette  opinion , pour 
ce  qui  regarde  l’existence  de  la  carène.  Cette  carène  est  large  et 
s’étend  jusque  sur  le  milieu  du  frontal  ; la  suture  sagittale  montre 
un  commencement  d’oblitération , mais  se  laisse  encore  facilement 
poursuivre  sur  toute  sa  longueur.  Il  y a des  bosses  pariétales 
bien  accusées  ; mesurée  par-dessus  le  crâne , leur  distance  est 
de  150  mm.  Le  front  est  plat.  Un  second  crâne  groënlandais 
offre,  en  ce  qu’elles  ont  d’essentiel,  les  mêmes  particularités.  Je 
trouve  aussi  une  carène  distincte  sur  le  crâne  d’Esquimau  dont 
il  a été  parlé  plus  haut,  sur  celui  d’un  habitant  delà  Californie 
septentrionale,  et  sur  un  crâne  provenant  d’Oqnalaschka  (îles 
Aleutiennes).  Dans  tous  ces  crânes , auxquels  je  pourrais  en  ajouter 
quelques  autres,  la  carène  est,  en  réalité,  le  seul  trait  qui  rap- 
proche leur  forme  de  celle  des  crânes  scaphocéphales  ; pour  tout 
le  reste , ils  s’en  éloignent  considérablement. 

M.  Davis  a fait  connaître  que  parmi  les  indigènes  de  la  Nou- 
velle-Calédonie, des  Nouvelles-Hébrides  et  des  Iles-Carolines , on 
trouve  des  crânes  qui,  par  leur  grande  longueur  et  leur  peu  de 
largeur , ainsi  que  par  leur  élévation  sur  l’axe  de  la  suture  sagit- 
tale, méritent  le  nom  de  scaphocéphales,  tout  en  ayant  ordinai- 
rement les  sutures  ouvertes.  Grâce  à la  générosité  de  M.  le  Dr. 
Swaving,  nous  possédons  ici  7 crânes  d’habitants  des  Iles-Caroli' 
nés  1).  Chez  six  d’entre  eux  il  existe  une  carène  plus  ou  moins 
apparente  ; tous  sont  longs  et  étroits  et  possèdent  de  fortes  bosses 
pariétales.  Par  ces  caractères , très  importants  au  point  de  vue 
ethnologique  et  crâniologique , les  crânes  en  question  se  distinguent 
donc  très  notablement  d’autres  formes  crâniennes , sans  pour  cela 
devenir  des  scaphocéphales  au  sens  de  M.  von  Baer. 

')  Voir:  J.  van  der  Hoeven,  Beschrijving  van  Schedels  van  inboorlingen  der 
Çarolina-eilanden , dans  Verslagen  en  Mededeelingen  der  Koninkl.  Akademie  van 
Weienschappen , Afd.  Natuurk.  2de  Reeks,  Dl.  I. 


284 


T.  ZAAIJER.  SUR  LA  SGAPHOCÉPHALIE. 


Pour  finir , encore  un  mot  sur  Tinfluence  que  la  scaphocéphalie 
exerce  sur  la  santé  et  sur  les  facultés  intellectuelles.  M.  von  Baer,  qui 
croyait  avoir  examiné  trois  crânes  scaphocéphales , provenant  tous  les 
trois  d’individus  jeunes,  en  avait  conclu  que  la  déformation  ne  sem- 
blait pas  permettre  une  longue  vie.  L’expérience  postérieure  est 
en  désaccord  avec  cette  opinion.  Des  personnes  chez  qui  l’ano- 
malie fut  constatée  au  cours  de  la  vie,  moururent  de  maladies 
n’ayant  évidemment  aucun  rapport  avec  la  forme  du  crâne,  par 
exemple,  de  pleurésie  ou  de  typhus;  d’autres  atteignirent  un  âge 
trop  avancé  pour  qu’on  puisse  admettre  une  influence  nuisible 
sur  la  durée  de  la  vie  ou  sur  la  santé. 

Le  nombre  des  observations  est  en  outre  assez  grand  pour 
permettre  de  constater  que  l’anomalie  en  question  de  la  boîte 
crânienne  ne  porte  aucun  préjudice  au  développement  intellectuel. 

Des  preuves  suffisantes  de  chacune  de  ces  deux  assertions  se 
trouvent  dans  la  première  partie  de  mon  travail. 


Explication  des  figures. 

PLANCHE  III. 

Fig.  1,  2 et  3.  Crâne  scaphocéphale , vu  du  côté  droit,  par 
devant  et  par  derrière. 

PLANCHE  IV. 

Fig.  1.  Le  même  crâne,  vu  par  en  haut. 

„ 2.  Portrait  en  profil  d’un  homme  de  54  ans,  à crâne 

scaphocéphale  (d’après  M.  Calori). 

Toutes  les  figures  sont  dessinées  à % de  la  grandeur  naturelle. 


SUR  LES  COMBINAISONS 


DE  LA 

QUININE  AVEC  LE  BENZOL, 

LE  TOLUOL  ET  AUTRES  HYDROCARBURES, 

PAR 

A.  C.  OUDEMANS. 


On  ne  possède  que  peu  de  données  certaines  sur  la  solubilité 
de  la  quinine  dans  le  benzol  et  autres  hydrocarbures  analogues. 
Selon  MM.  A.  et  Th.  Husemann  (voir  Touvrage  qu’ils  ont  publié 
sous  le  titre  : Die  Pffanzenstoffe)  la  quinine  se  dissout  facilement 
dans  le  benzol.  Il  est  probable  que  par  benzol  on  a entendu 
ici  le  produit  brut  de  la  distillation  du  goudron  de  houille , produit 
qui  consiste  en  un  mélange  de  différents  hydrocarbures  ; car , dans 
le  benzol  pur , la  quinine  ne  se  dissout , d’après  mes  expériences , 
qu’en  faible  proportion.  A une  température  d’environ  15°  C.  l’hy- 
drocarbure en  dissout  à peine  son  poids,  à la  chaleur  de 

l’ébullition  une  quantité  relativement  plus  grande  (comme  maximum 
peut-être  A)  5 par  le  refroidissement  le  liquide  abandonne  des 
cristaux , dont  l’aspect  est  très  différent  suivant  la  quantité  d’alca- 
loïde qui  avait  été  dissoute.  Lorsque  le  benzol  a été  saturé  de 
quinine  à la  température  de  l’ébullition , on  obtient  ordinairement 
par  le  refroidissement  des  aiguilles  très  déliées,  qui  ressemblent 
assez  au  sulfate  de  quinine  cristallisé  au  sein  d’une  dissolution 
aqueuse.  Si  la  solution  était  un  peu  plus  étendue , il  s’en  sépare , 
au  bout  de  quelques  heures  seulement , des  cristaux  très  brillants , 


286 


A.  C.  OUDEMANS.  SUR  LES  COMBINAISONS 


fragiles,  mais  nets,  qui,  d’après  la  diagnose  de  M.  H.  Vogelsang, 
sont  probablement  clinoédriques , et  qui  s’agrègent  ordinairement 
en  petits  groupes  cristallins  assez  volumineux.  l 

Les  cristaux  de  chacune  de  ces  deux  espèces  ne  sont  pas  uni-  î ^ 
quement  composés  de  quinine  pure,  mais  constituent  une  combi-  ! 

naison  de  1 molécule  de  quinine  avec  1 molécule  de  benzol,  comme  Ij 

le  prouvent  les  résultats  des  analyses  suivantes:  i| 

1®.  1,274  grammes  des  cristaux  séchés  à l’air  sur  du  papier  à v 
filtre  perdirent , par  réchauffement  à 100° , 0,231  gr.  de  leur  [• 
poids.  Le  résidu  consistait , ainsi  que  l’a  appris  la  déter-  1 i 
mination  du  pouvoir  rotatoire  spécifique , en  quinine  pure  ; I 
2®.  1,581  grammes  de  la  combinaison  fraîchement  cristallisée  f | 

furent  pressés  aussi  rapidement  que  possible  entre  du  papier  î 

à filtre,  jusqu’à  ce  que  les  cristaux  ne  cédassent  plus 
d’humidité.  La  poudre  encore  légèrement  cohérente  fut  j 
chauffée  à 100° , ce  qui  lui  fit  perdre  0,322  gr.  de  son  poids.  | 
Trouvé.  Calculé  d’après  ' 

CgHe  02  01124^2^2+^6116  J 

1.  2. 

18,0  20,3  19,4 

La  première  analyse  a donné  une  perte  trop  petite , la  seconde , 
au  contraire,  une  perte  trop  grande.  Cela  s’explique  par  la  cir- 
constance que  les  cristaux,  même  réduits  en  poudre  fine,  ne  se  i 
laissent  pas  facilement  débarrasser  de  tout  le  liquide  adhérent  par  î 
la  compression  entre  des  doubles  de  papier , tandis  que , d’un  autre 
côté , lorsqu’ils  ont  été  séchés  à l’air , ils  ont  manifestement  déjà  ’ 
perdu  un  peu  de  benzol. 

La  découverte  fortuite  de  cette  combinaison  m’a  conduit  à 
rechercher  si  des  corps  analogues  pouvaient  aussi  être  obtenus  avec 
la  quinine  et  d’autres  hydrocarbures  de  la  série  aromatique.  J’ai 
trouvé  qu’en  effet  les  dissolutions  de  la  quinine  dans  le  toluol  pur  (point 
d’ébullition  110°  C.),  l’isoxylol  pur  et  le  mésitylène  pur  laissaient 
déposer  peu  à peu  par  l’évaporation  ou,  dans  des  circonstances 
favorables,  par  le  refroidissement,  des  cristaux  qui  consistaient 
évidemment  eu  une  combinaison  de  la  quinine  avec  les  hydrocar- 


DE  LA  QUININE  AVEC  LE  BENZOL,  ETC. 


287 


bures  susdits.  La  combinaison  avec  le  toluol  ressemble  tout  à fait 
par  Taspect  extérieur  au  benzolate  de  quinine  ; celle  avec  Tisoxylol, 
au  contraire,  se  forme  difficilement  et  se  présente  à Tétât  de 
petites  verrues  cristallines  très  cohérentes.  Dans  le  mésitylène , la 
quinine  se  dissout  en  proportion  assez  forte , et  ce  n’est  qu’après 
avoir  été  longtemps  abandonnée  à elle-même  que  cette  dissolution , 
qui  à froid  offre  tous  les  caractères  de  la  sursaturation,  laisse 
déposer  une  masse  cristalline  rayonnée. 

Comme  la  combinaison  de  la  quinine  avec  le  toluol  était  très 
facile  à préparer,  je  la  soumis  aussi  à Tanalyse,  et  lui  trouvai 
une  composition  analogue  à la  précédente , savoir , 1 molécule  de 
quinine  et  1 molécule  de  toluol. 

1®.  1,399  gr.  de  la  combinaison  perdirent  par  la  dessiccation 
à 100°  C.  0,299  gr.  de  leur  poids; 

2®.  1,707  gr.  perdirent  par  la  dessiccation  à 100°  C.  0,380  gr. 
de  leur  poids. 


Les  combinaisons  de  la  quinine  avec  le  benzol  et  le  toluol , qui 
ont  été  étudiées  plus  particulièrement,  perdent  déjà  peu  à peu  à Tair 
leur  contenu  en  hydrocarbure  organique.  Les  cristaux  un  peu  volu- 
mineux se  décomposent  même  rapidement  à la  surface , et  devien- 
nent alors  blancs  et  mats , quelle  que  soit  leur  transparence  origi- 
nelle; mais  la  décomposition  ne  marche  ensuite  qu’avec  lenteur, 
et  n’est  complète  qu’après  un  temps  assez  long. 

Comme  surcroît  de  preuve,  je  me  suis  assuré  que  les  deux 
combinaisons,  chauffées  avec  précaution  dans  un  petit  appareil 
distillatoire , laissaient  effectivement  dégager  du  benzol  et  du  toluol , 
qui  se  condensaient  à l’état  liquide. 

La  possibilité  de  convertir  la  quinine,  par  l’association  au 
benzol  et  au  toluol,  en  une  combinaison  facilement  cristal lisable 
et  médiocrement  soluble,  m’a  fourni  un  excellent  moyen  d’obtenir 
de  la  quinine  tout  à fait  pure. 


C.H3 

1.  2. 

21,4  21,9 


Trouvé. 


Calculé  d’après 

^20^24^2^2  + 


22,6 


288 


A.  C.  OUDEMANS.  SUR  LES  COMBINAISONS  ETC. 


Dans  une  autre  occasion  je  ferai  connaître  en  détail  comment , 
à l’aide  des  produits  qu’on  trouve  dans  le  commerce,  on  peut 
préparer  de  la  quinine  amorphe  sèche  à peu  près  pure. 

Pour  débarrasser  celle-ci  des  dernières  traces  d’impureté , on  la 
dissout  dans  le  benzol  bouillant , ou , mieux  encore , dans  un 
mélange  de  benzol  et  de  toluol,  tel  qu’on  l’obtient  par  la  purifi- 
cation du  produit  brut  du  commerce  efla  distillation  fractionnée 
(un  liquide  dont  le  point  d’ébullition  est  à environ  100°  C.  con- 
vient parfaitement).  Les  cristaux  déposés  après  un  repos  de  vingt - 
quatre  heures  sont  lavés  avec  du  benzol  frais,  pressés  dans  du 
papier  à filtre,  puis  séchés  à 100°  C.,  jusqu’à  ce  que  la  poudre 
qui  reste  soit  devenue  complètement  inodore. 


Arrlii\-  Ai'i'i’i.'r.  IX 


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TROISIEME  LIVRAISON 


J.  A.  Groshans,  Sur  la  nature  des  éléments  (corps  non-décomposés)  de  la  chimie Pag.  193. 


E.  H.  von  Baurnhauer , Sur  un  météorographe  universel  destiné  aux  observatoires  solitaires,  » 230. 

T.  Zaaijer,  Sur  la  scaphocéphalie - " 259.  i 

A.  C.  Oudemans,  Sur  les  combinaisons  de  la  quinine  avec  le  benzol,  le  toluol  et  autres  .*■ 

hydrocarbures... » 285.'] 


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naturelles  paraissent  à des  époques  indéterminées,  en  livraisons 
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TOWE  IX. 


4me  Livraison. 


ARCHIVES  NÉERLANDAISES 

DES 


SCIENCES  , 

EXACTES  ET  NATURELLES 

PUBLIÉES  PAR 

* LA  SOCIÉTÉ  HOLLANDAISE  DES  SCIENCES  À HARLEM, 

ET  RÉDIGÉES  PAR 

E.  H.  VON  BAimHAlJER 

Secrétaire  de  la  Société , 

AVEC  LA  COLLABORATION  DE 

m 

MM.  D.  Bierens  de  Haan,  C.  A.  J.  A.  Oudemans,  W.  Koster, 

C.  H.  D.  Buijs  Ballot  et  S.  C.  Snellen  van  Vollenhoven.  • 


' LA  HAYE 

I MARTINÜS  NIJHOFF. 

BRUXELLES  PARIS  LEIPZIG 

C.  MUQUARDT.  AUG.  DURAND.  T.  O.  WEIGEL. 

; LONDRES  NEW-YORK 

TRÜBNER  & C". WILLIAMS  & NORGATE.  B.  WESTERMANN  &C°.—  F.  W.  CHRISTERN. 


1874. 


ARCHIVES  NÉERLANDAISES 

DES 

Sciences  exactes  et  naturelles. 


ESQUISSE  D’UN  SYSTÈME  NATUREL  DES 

GOBIOÏDBS. 

PAR 

P.  BLEEKER. 


Les  Gobioïdes  sont  des  poissons  osseux  acanthoptérygiens , à 
tronc  sans  ligne  latérale  tubuleuse,  à épines  dorsales  (sauf  très 
rarement  Tantérieure  seulement)  minces,  flexibles  et  non  poignantes, 
et  à ventrales  thoraciques  libres  ou  unies , à quatre  ou  cinq  rayons 
divisés , dont  les  deux  postérieurs  sont  plus  longs  que  les  autres. 

Ce  peu  de  mots  suffisent  à bien  caractériser  la  famille,  mais 
tous  ses  membres  ont  encore  en  commun  des  yeux  recouverts 
par  la  peau  générale,  des  narines  doubles  de  chaque  côté,  des 
dents  aux  deux  mâchoires , des  os  pharyngiens  inférieurs  non 
réunis  ensemble,  des  sousorbitaires  ne  s’unissant  pas  au  pré- 
opercule, des  branchies  simples  sans  appendice  labyrinthiforme , 
des  orifices  branchiaux  séparés  par  un  isthme , une  papille  anale , 
des  pectorales  à rayons  médians  divisés  plus  longs  que  les  autres , 
une  anale  sans  épines,  et  une  caudale  entière  ou  faiblement 
échancrée. 

La  diagnose  exclut  de  la  famille  les  Callionymus  et  les  Platy- 
ptera , qui , bien  que  rapportés  par  quelques  auteurs  modernes  aux 
Gobioïdes,  appartiennent  à deux  familles  différentes. 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  19 


290  P.  BLEEKER. -ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

Les  espèces  de  Gobioïdes  sont  fort  nombreuses.  Artédi  n’en 
énuméra  que  quatre  seulement  ^ mais  les  recherches  faites  depuis 
1738  en  ont  porté  le  nombre  à environ  480,  et  il  me  paraît 
probable  que  ce  nombre  ne  représente  pas  encore  la  moitié  des 
espèces  existantes.  Moi-même  j’ai  eu  l’avantage  de  découvrir  le 
quart  des  espèces  actuellement  connues,  et  on  peut  juger  par  là 
de  ce  qu’il  y a lieu  d’attendre  des  recherches  qui  restent  à faire 
dans  tant  de  régions  non  ou  fugitivement  explorées. 

Les  espèces  aujourd’hui  connues  se  laissent  rapporter  à quatre 
Sousfamilles , caractérisées  par  les  modifications  dans  le  système 
des  nageoires.  Les  E leotrif ormes  se  distinguent  par  des  ventrales 
libres  complètement  séparées  ; les  Gobiiformes  par  des  ventrales 
réunies  ensemble , soit  complètement  soit  à leur  moitié  basale , et 
par  deux  dorsales  séparées  ou  réunies  seulement  à leur  base  ; les 
Amhlyopi formes  par  la  réunion  des  nageoires  verticales,  dont  la 
dorsale  est  unique  et  occupe  toute  la  longueur  .du  dos  ; — et  les 
Luciogobiiformes  par  une  seule  dorsale  courte,  placée  sur  la  moitié 
postérieure  du  tronc. 

La  sous-famille  des  Luciogobiiformes  n’est  représentée , dans  la 
science,  que  par  une  seule  espèce,  et  des  Amblyopiformes  on  n’en 
connaît  jusqu’ici  qu’à  peu  près  une  vingtaine.  Celles  des  Éleotri- 
formes  «ont  déjà  beaucoup  plus  nombreuses  ; j’en  trouve  enregistrées 
environ  une  centaine.  Les  espèces  qui  restent , au  nombre  de  plus 
de  350,  sont  toutes  des  Gobiiformes. 

Les  Eleotriformes  se  divisent  en  trois.  Groupes:  les  Eleotrini, 
(avec  trois  sous-groupes , les  Philypni , Eleotrii  et  Butii) , les 
Hypseleotrini  et  les  Pareleotrini.  Les  Eleotrini  se  font  aisément 
reconnaître  par  leur  corps  cylindrique , à tête  large  et  déprimée , 
les  Hypseleotrini  par  leur  corps  élevé,  court  et  fort  comprimé  et 
couvert  de  larges  écailles,  et  les  Pareleotrini  par  leur  corps  allongé 
et  comprimé,  à tête  eonvexe  plus  haute  que  large. 

Chacun  de  ces  groupes  comprend  des  genres , dont  les  caractè- 
res sont  nettement  tranchés.  On  trouve  ces  caractères  surtout  dans 
les  modifications  du  système  dentaire,  du  système  tégumentaire 
et  des  nageoires  verticales.  Aux  genres  déjà  établis  ou  indiqués 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES.  291 

j’ajoute  ici  les  genres Philypnodon , Guaviua , Oxyeleotris,  Gymn- 
eleotris,  Odontobiitis  ; Gymnobutis,  Prionobutis,  Brachyeleotris 
et  Hetereleotris , ce  qui  fait  monter  leur  nombre  à 26. 

Les  groupes,  dans  la  sous-famille  des  Gobiiformes,  sont  plus 
nombreux.  J’y  distingue  les  Gohiodoniini , à corps  trapu  comprimé 
et  presque  ovalaire  ; — les  Gymnoqohiini , à corps  allongé  et 
complètement  dénué  d’écailles  ; — les  Latrunculini  y à dents  in- 
framaxillaires  unisériales,  à museau  et  joues  nus,  et  à corps 
couvert  de  grandes  écailles;  — les  Triaenophorichthyini y à ven- 
trale unie  au  ventre  par  la  base  seulement  ^ et  à dents  tricus- 
pides;  — les  Sicydiiniy  à ventrale  à large  disque  central  uni  au 
ventre  ; — les  Gohiini  (avec  les  sous-groupes  Brachygobii , Piaty- 
gobii,  Eugobii,  Chaeturichthyi  et  Gobionelli),  à corps  plus  ou 
moins  allongé,  à dents  inframaxillaires  disposées^  sur  deux  ou 
plusieurs  rangées,  et  à ventrale  unie  au  ventre  par  la  base  seu- 
lement ; — les  Periophlhalmini , à yeux  érectiles  protégés  par  une 
paupière  inférieure  libre , et  à dorsales  d’égale  longueur  ; — et  les 
Apocrypteini  y à dents  inframaxillaires  unisériales , et  à seconde  dor- 
sale allongée,  plus  de  deux  à plus  de  cinq  fois  plus  longue  que 
la  dorsale  antérieure. 

Les  nombreux  genres  appartenant  à ces  groupes  sont,  eux 
aussi,  en  grande  partie  caractérisés  par  des  détails  de  la*  denti- 
tion , et  lorsque  ces  détails  ne  suffisent  pas , on  trouve , ici  encore , 
d’excellents  caractères  pour  une  détermination  rigoureuse  dans 
l’organisation  épidermale,  dans  la  forme  et  l’extension  des  na- 
geoires , dans  les  proportions  du  corps , de  la  tête , des  mâchoires , 
des  orifices  branchiaux , etc.  — L’état  actuel  de  nos  connaissances , 
cependant,  ne  permet  pas  de  rapporter  bon  nombre  d’espèces  à 
leurs  véritables  genres.  Le  genre  Gobius,  tel  qu’il  est  présenté 
ci-dessous,  reste  manifestement  encore  au  rang  de  sous-groupe, 
mais  dont  les  genres  demandent  à être  déterminés  rigoureusement. 
Aussi  les  sous-genres  Gobius,  Deltentosteus , Coryphopterus  et 
Mesogobius  ne  sont  à considérer  que  comme  des  coupes  provisoires. 

Aux  genres  de  Gobiiformes  reconnus,  décrits  ou  indiqués  jus- 
qu’ici et  dont  l’exposition  des  caractères  va  suivre , j’ajoute  encore 

..  19* 


292  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

les  genres  Pseudogobiodon , Alepidogobius , Gobiopterus , Leptogo  - 
bius,  Triaenopogon , Microsicydium , Periopbthalmodon , Brachy- 
gobiuS;  Platygobius,  Stenogobius,  Callogobius,  Hypogymnogobins , 
Hemigobius,  Actinogobius , Heterogobius , Acentrogobius , Porogo- 
bius,  Amblygobius , Zonogobius,  Odontogobius , Stigmatogobius , 
Amblychaeturichthys , Parachaeturichthys , Apocryptodon , Parapo- 
cryptes  et  Pseudapocryptes. 

Dans  la  sous-famille  des  Amblyopiformes  les  types  génériques 
ne  sont  qu’au  nombre  de  six.  Je  n’avais  à ajouter  aux  genres 
adoptés  que  le  genre  Brachyamblyopus. 

Les  genres  de  l’aperçu  diagnostique  suivant  sont  au  nombre  de  cent. 

Quant  à la  validité  d’un  aussi  grand  nombre  de  types  généri- 
ques dans  une  famille  où  plusieurs  ichthyologistes  éminents  n’en 
admettent  guère  qu’une  vingtaine,  je  ne  nie  nullement  qu’elle  soit 
sujette  à être  contestée. 

Les  vues  par  rapport  à ce  que  c’est  qu’un  genre,  sont,  actuel- 
lement encore , fort  divergentes.  Depuis  longtemps  les  genres  Arté- 
diens  ont  pris,  presque  sans  exception,  rang  de  famille;  et  grand 
nombre  des  genres  Cuviériens  sont  devenus , eux  aussi , des  familles 
ou  des  groupes  de  genres  pour  les  naturalistes  modernes.  Mais  on 
finit  par  tomber  dans  l’exagération,  en  multipliant  outre  mesure 
les  typés  sur  des  caractères  purement  spécifiques , ou  sur  des  carac- 
tères de  sexe  et  même  d’âge.  La  réaction  ne  se  fit  pas  attendre , et 
l’intention  louable  de  simplifier  la  science,  poussée,  elle  aussi, 
trop  loin,  lui  nuisit  plus  qu’elle  ne  la  servit,  par  la  suppression 
ou  la  déformation  de  nombreux  genres  qui  avaient  été  bien  conçus 
et  bien  établis.  — Tant  que  cette  divergence  d’opinions  existe , la 
science  et  les  naturalistes  n’auront  qu’à  en  subir  les  conséquences* 

Les  genres  des  Gobioïdes  que  j’ai  cru  devoir  adopter  et  établir 
reposent  généralement  sur  des  modifications  dans  le  système  den- 
taire, de  sorte  qu’il  suffit  le  plus  souvent,  pour  reconnaître 
un  genre,  dans  les  limites  d’un  groupe  donné,  d’en  examiner 
la  dentition.  Pour  bien  faire  apprécier  l’utilité  de  l’application 
des  caractères  fournis  par  le  système  dentaire,  je  fais  précéder 
le  conspectus  à diagnoses  plus  étendues  par  un  exposé  des 


r.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’üN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES.  293 

genres  dont  le  système  dentaire  est  suffisamment  connu.  Pour 
la  plupart,  il  n’a  pas  été  nécessaire,  pour  la  détermination 
rigoureuse,  de  donner  d’autres  phrases  que  celle  ayant  rapport  à 
la  dentition.  On  verra  du  reste,  par  les  diagnoses  plus  étendues 
du  conspectus,  que  des  modifications  plus  ou  moins  importantes 
dans  le  système  d’écaillure,  dans  celui  des  nageoires , etc.,  se  com- 
binent presque  toujours  avec  celles  que  présente  le  système  dentaire. 

De  beaucoup  de  genres  on  ne  connaît  jusqu’ici  qu’une  seule 
espèce , mais  on  ne  saurait  y voir  une  objection  contre  la  validité 
du  genre  lui-même,  la  valeur  d’un  genre  ne  pouvant  pas  dépen- 
dre du  nombre  de  ses  espèces.  Si  un  tel  principe  était  admissible , 
on  aurait  à supprimer  bien  des  genres  dûment  établis  et  généra- 
lement reconnus,  et  même  des  sous-familles  et  des  familles.  Quant 
aux  autres  genres , il  y en  a qui  comptent  des  espèces  assez  nom- 
breuses. Le  genre  Gobius , même  avec  les  limites  proposées  dans 
cette  esquisse,  en  comprend  environ  une  centaine,  sans  compter 
les  espèces  qui  pourraient  bien  y appartenir  aussi , mais  dont  les 
affinités  restent  encore  plus  ou  moins  douteuses.  Le  recensement 
des  autres  espèces  y fait  reconnaître  environ  25  Acentfogobius , 
19  Cryptocentrus , 16  Ophiocara,  14  Glossogobius , 14  Awaous, 
12  Culius,  11  Sicyopterus,  10  Eleotris,  10  Valenciennesia , 9 
Oxyuricbthys  J 9 Ctenogobius,  7 Centrogobius,  6Butis,  6 Dormi- 
t^tor,  6 Asterropteryx,  6 Gobiodon , 5 Porogobius , 5 Oxyeleotris , 

5 Amblygobius,  les  autres  genres  n’étant  positivement  représen- 
tés jusqu’ici  que  par  une  jusqu’à  quatre  espèces. 

Le  système  proposé  dans  ces  pages  ne  peut  avoir  que  le  mérite 
d’être  l’expression  de  l’état  actuel  de  cette  partie  de  la  science. 
Des  notions  plus  précises  sur  tant  d’espèces  encore  très-imparfai-^ 
tement  connues,  et  la  découverte  d’un  grand  nombre  d’autres , qui 
probablement  ne  se  fera  pas  attendre , y nécessiteront  sans  doute 
des  modifications,  soit  dans  la  constitution  des  groupes,  soit  dans 
le  nombre  et  dans  la  diagnose  des  genres. 

Ce  sera  un  nouveau  pas  vers  la  connaissance  plus  exacte  d’une 
famille,  qui  comprend  tout  un  monde  de  formes  remarquables  et 
qu’on  croyait  composée,  il  n’y  a pas  encore  un  siècle,  d’un  seul 
genre  comptant  tout  au  plus  une  dizaine  d’espèces. 


294  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 


GOBIOIDEORUM  DENTITIO. 

ELEOÏRIEORMES. 

ELEOTRINI. 

Phîlypuî.  Dentes  maxillis  pluriseriati.  Dentes  vomerini. 

Philypnodon  Blkr . Dentes  palatin!  et  linguales  ; — intermaxillares 
inframaxillaribus  longiores. 

Bostrichthys  C.  Dum . Dentes  palatin!  et  linguales  nulli.  Squamae  cycloi- 
deae  100  cire,  in  sérié  longitudinal!. 

Philypnus  Val.  Dentes  palatin!  et  linguales  nulli.  Squamae  ctenoideae 
60  cire,  in  sérié  longitudinal!.  " 

Eleotrii,  Dentes  palato  linguaque  nulli. 

a.  Dentes  utraque  maxilla  pauci-  ad  multiseriati. 

Odonteleotris  Gill.  Dentes  utraque  maxilla  4 anteriores  canini,  cetcri 
intermaxillares  parvi  aequales , inframaxillares  posteriores  sérié  interna 
ceteris  longiores . 

Bleotris  Gron.  Dentes  utraque  maxilla  multiseriati  parvi  aequales, 
longiores  vel  canini  nulli. 

Guavina  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  multiseriati  sérié  externa  lon- 
giores, canini  nulli. 

Oxyeleotris  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  pauciseriati , intermaxillares 
sérié  externa  longiores , inframaxillares  anterioré*s  sérié  externa 
.posteriores  sérié  interna  conspicue  longiores , canini  veri  nulli.  Squamae 
60  ad  90.  Isthmus  mediocris. 

Oyhiocara  Gill.  Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati , intermaxillares  sérié 
externa  paulo  longiores , inframaxillares  anteriores  sérié  externa  paulo 
longiores  posteriores  aequales  vel  sérié  interna  paulo  longiores , canini 
nulli.  Squamae  28  ad  40.  Isthmus  angustus. 

Mogurnda  Gill.  Dentes  utraque  maxilla  pauciseriati  sérié  externa  con- 
spicue longiores  graciles  uncinati  subaequales,  canini  nulli. 

Cîdius  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati,  intermaxillares  sérié 
externa  longiores,  inframaxillares  anteriores  sérié  externa  posteriores 
sérié  interna  longiores , canini  nulli.  Spina  praeopercularis. 

GohiomorpJms  Gill.  Dentes  utraque  maxilla  multiseriati  graciles  subae- 
quales, canini  nulli.  Genae  alepidotae.  Caput  superne  squamatum. 

Belobranchus  Blkr.  Dentes  utraque  maxilia  pluriseriati  sérié  externa 
paulo  longiores,  canini  nulli.  Caput  alepidotum. 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES.  295 


h.  Dentes  intermax illares  pluriseriati,  inframaxillares  uniseriati. 
Gymneleotris  Blkr. 

ISiitiî.  Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati , palato  linguaque  nulli.  Canini  nulli. 
Butis  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  aequales  eonferti.  Caput  squamaturn. 
Squamae  30. 

Gymnobuiis  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  subaequales.  Caput  alepidotum. 
Squamae  40. 

Prionohutis  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  sérié  externa  longiores.  Caput 
eonvexum. 

Odontohutis  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  paueiseriati  graciles  non 
eonferti  sérié  externa  paulo  longiores.  Cristae  rostro  occipiteque  nullae. 

iiYrsELEOTRiNi.  Dcntcs  maxillis  pluriseriati  parvi  sérié  externa gracillimi 
mobiles . 

Bormitator  GilL  Dentes  pharyngeales  setacei,  inferiores  sérié  externa 
latae  flexiles  lamellaeformes. 

Asterropteryx  Büpp.  Dentes  pharyngeales  subulati,  lamellaeformes  nulli. 

PARELEOTRiNi.  Dentcs  maxülis  fixi,  palato  linguaque  nulli. 

a.  Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  sérié  externa  longiores,  infra- 

maxillaris  lateralis  posterior  caninus.  Squamae  magnae.  • ' 
Brachyeleofris  Blkr.  Squamae  ctenoideae.  Dentes  pharyngeales  subulati 
curvati. 

Hetereleotris  Blkr.  Squamae  cycloideae  (Genus  dubium).  a 

b.  Squamae  parvae  vel  minimae.  Dentes  pharyngeales  aciculares. 
Valendemesia  Blkr.  Dentes  intermax  illares  uniseriati  vel  pluriseriati 

seriebiis  internis  rudimentarii , inframaxillares  pluriseriati-serie  externa 
longiores  inaequales  , lateralis  posterior  caninus.  Dentes  pharyngeales 
rectiusculi  interdum  clavati. 

Eleotriodes  Blkr.  Dentes  intermaxillares  uniseriati,  inframaxillares 
pluriseriati  sérié  externa  longiores  inaequales  lateralis  subposticus 
caninus  curvatus  posterioribus  multo  longior. 

Ptereleotris  Gill.  Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  sérié  externa  lon- 
giores ex  parte  caninoidei.  Squamae  cycloideae. 

Orthostomzis  Kner.  Dentes  maxillis  parvi  graciles,  antici  4 canini. 
Squamae  ctenoideae. 

Oxymetopon  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  sérié  externa  lon- 
giores , antici  2 canini  praesymphysiales.  Canini  insuper  inframaxillares 
2 postsymphy siales. 


296  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

GOBIIFOllMES.  Dentes  vomerini  nulli. 

GOBIODONTINI.  Dentes  maxillis  pluriscriati , fixi,  intcrmaxillares  série 
externa  longiores. 

Gohiodon  K.  V.  H.  Deutes  inframaxillares  sérié  externa  longiores , canini 
iuframaxillares  postsympLysiaies.  Corpus  alepiclotum. 

Fseudogobiodon  Blkr.  Dentes  inframaxillares  aequales;  canini  nulli. 

Faragohiodon  Blkr.  Canini  inframaxillares  postsympliysiales.  Corpus 
squamatum. 

GYMNOGOBiiNi.  Dcntcs  maxilüs  fixi. 

Boreogobius  Gill.  Dentes  utraque  maxilla  parvi.  Spinae  dorsi  5. 

Corpus  laeve. 

Cristallogobins  Gill.  Dentes  intcrmaxillares  validi,  inframaxillares  uni- 
seriati  ex  parte  canini.  Spinae  dorsi  2. 

Benthophilus  Eichw . Dentes  parvi , canini  nulli.  Spinal  dorsi  3.  Corpus 
verrucosum. 

Gymnogobius  Gill.  Dentes  utraque  maxilla  pluriscriati  sérié  externa 
longiores,  canini  nulli.  Spinae  dorsi  6.  Caudalis  obtusa. 

Gobiosoma  Gir.  Dentes  maxillis  pauciseriati  sérié  externa  longiores, 
canini  nulli.  Spinae  dorsi  6 vel  7.  Caudalis  acuta. 

Ophiogobius  Gill.  Dentes  maxillis  sérié  externa  longiores,  canini  nulli. 
Spinae  dorsi  8.  Caudalis  obtusa. 

Alepidogohius  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  sérié  externa  longiores, 
inframaxillaris  lateralis  posterior  caninus.  Spinae  dorsi  6. 

LATR-UNCULiNi.  Dcntcs  inframaxillares  uniseriati. 

a.  Dentes  intermaxillareS' biseriati. 

Latrunculus  Günth.  Dentes  intermaxillares  ex  parte  canini,  inframaxil- 
lares horizontales  et  insuper  2 canini  postsymphysiales. 

b.  Dentes  intermaxillares  uniseriati. 

Gobiopterus  Blkr.  Dentes  magni  acuti  distantes , intermaxillares  aequales, 
inframaxillares  inaequales  et  insuper  canini  2 postsymphysiales. 

Leytogobius  Blkr.  Dentes  graciles  acuti  subaequales;  canini  nulli. 

Evorthodus  Gill.  Dentes  recti  truncato-emarginati , inframaxillares  sub- 
horizontales; canini  nulli. 

Sicyopus  Gill.  Dentes  gracillimi  uncinati  simplices  mobiles,  canini  nulli. 

TRiAENOPHOBiCHTHYiNi.  Dentcs  iiiaxillis  ex  parte  tricuspidati. 

Triaenoyliorkhtliys  Gill . Dentes  maxillis  sérié  externa  tricuspidati  mo- 
biles, sérié  interna  tricuspidati  et  simplices. 

Triaenopogon  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  pluriscriati  série  externa 
tricuspidati  mobiles , seriebus  iiiternis  lati  submolares  conferti, 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  ÜORIOÏÜES.  297 


siCYDiiNi.  Dciitcs  gingivales  vcl  labiales  mobiles. 

a.  Dentes  utraque  maxilla  biseriati. 

Tridentiger  Gill.  Dentes  sérié  externa  elongati  apiee  dilaiaii  tricus- 
pidati,  sérié  interna  simpliees  eurvati. 

b.  Dentes  intermaxillares  uniseriati  eonfertissimi , inframaxillares  biseriati 

sérié  externa  graeillimi  flexiles. 

Sicgdiim  Val.  Dentes  intermaxillares  simpliees  eurvati  aeutissimi , infra- 
maxilJares  sérié  interna  eoniei  validi  inaequales.  Cirri  inframaxillares. 

Siegopterus  Gill.  Dentes  inframaxillares  sérié  interna  validi  distantes 
simpliees  eurvati  aeuti.  Cirri  inframaxillares  nulli. 

Subg.  Siegopterus  Gill.  Dentes  intermaxillares  non  stipitati  aeuti. 

//  Cotglopus  Guieh.  Dentes  intermaxillares  apiee  dilatati  bilobi. 

//  Sicgdiops  Blkr.  Dentes  intermaxillares  stipitati  elavati  integri. 

Microsicgdium  Blkr.  Dentes  intermaxillares  stipitati  elavati  obtusi , infra- 
maxillares  sérié  interna  parvi  aequales. 

6*.  Dentes  utraque  maxilla  uniseriati. 

Leidipes  Günth.  Dentes  intermaxillares  anteriores  trieuspidati , latérales 
simpliees;  inframaxillares  omnes  simpliees. 

GOBiiNi.  Dentes  maxillis  simpliees  apiee  nec  elavati  nec  ineisi,  intermaxil- 
lares uni-  ad  multiseriati , inframaxillares  bi-  ad  multiseriati. 

Bracliygobii.  Canini  nulli. 

Lopliogohius  Gill.  Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  villiformes  sériés 
externa  longiores.  Corpus  eompressum.  Squamae  etenoideae. 

Brachggohius  Blkr.  (sériés  dentium  non  indieatae).  Caput  depressum. 
Squamae  eyeloideae. 

Platygobii.  Dentes  utraque  niaxilla  pluriseriati,  eanini  veri  nulli. 

GillioJdhgs  Coop.  Dentes  utraque  maxilla  villiformes.  Squamae  parvae 
eyeloideae. 

Gohiopsis  Steind.  Dentes  pluriseriati  sérié  externa  longiores.  Squamae 
magnae  etenoideae. 

Glossogobim  Gill.  Dentes  pluriseriati  sérié  externa  longiores  eurvati 
non  eonferti  inaequales.  Maxilla  superior  postiee  non  producta. 

. Flcdggobius  Blkr.  Dentes  multiseriati , intermaxillares  sérié  externa  vix 
longiores,  inframaxillares  sérié  externa  non  longiores. 

Eiigobiî,  Dentes  maxillis  fixi. 

a.  Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  aeuti , utraque  maxilla  sérié  externa 
longiores.  Canini  nulli. 

Gobius.  Art.  Dentes  sérié  externa  subaequales  eoniei.  Caudalis  obtusa, 
Squamae  etenoideae.  Venter  squamatus.  Rostrum  breve, 


298  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  UOBIOÏDES. 


Acanthogobius  Gill.  Dentes  sérié  externa  subaequales,  Caudalis  obtusa. 

Squamae  ctenoideae.  Rostruni  conieum. 
üypogymnogobius  Blkr,  Dentes  sérié  externa  subaequales.  Venter 
alepidotus . 

ÈucgdogoUus  Gill.  Dentes  sérié  externa  subaequales.  Squamae  eycloi- 
deae,  capite  nullae. 

Lepitlogohius  Gill . Dentes  sérié  externa  subaequales.  Squamae  cycloideae . 
Caput  squamatum. 

Callogohius  Blkr.  Dentes  sérié  externa  graciles  subaequales.  Caudalis 
lanceolata.  Caput  depressum  convexum. 

Stenogohius  Blkr.  Dentes  sérié  externa  conici  subaequales.  Caudalis  obtuse 
lanceolata  capite  longior. 

• Actinogohius  Blkr.  Dentes  sérié  externa  inaequales.  Caudalis  acuta  capite 
brevior , 

b.  Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  sérié  externa  longiores,  ex  parte 
truncati. 

Hemigobius  Blkr.  Dentes  sérié  externa  intermaxillares  medii  truncati, 
inframaxillares  jrecti. 

6*.  Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  conferti  cardilbrmes  sérié  externa 
breviores  distantes  introrsuni  directi;  canini  vel  caninoidei  inter- 
niaxillares  et^nframaxillares  postsymphy siales. 

Cephalogobius  Blkr. 

d.  Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  acuti  subaequales,  longiores  sérié 

externa  nulli. 

Aicaous  Val.  Squamae  50  ad  60. 

Rhinogobius  Gill.  Squamae  28. 

e.  Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  acuti  scrie  externa  longiores , infra- 

maxillaris  lateralis  posterior  caninus  curvatus. 

Ctenogobius  Gill.  Caput  alepidotum.  Squamae  14  ad  30. 

Centrogobius  Blkr.  Dorsales  radio  anteriore  osseo  pungentc. 
Acentrogobius  Blkr.  Caput  squamatum.  Dorsales  spina  nulla. 

Porogobius  Blkr.  Caudalis  lanceolata. 

Aïtibly goulus  Blkr.  Squamae  52  ad  56. 

Crgpiocentrus  Elir.  Squamae  85  ad  plus  quam  100. 

/.  Dentes  utraque  maxilla  biseriatti  acuti. 

Zotiogobius  Blkr,  Dentes  intermaxillares  série  externa,  inframâxillares 
* sérié  interna  longiores.' 

Odoniogobius  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  sérié  externa  longiores, 
intramaxillaris  lateralis  posterior  caninus. 
g.  Dentes  acuti,  intermaxillares  uniseriati  vel  subbiseriati , inframaxillares 
pluriseriati, 

Stigmatogobius  Blkr.  Dentes  intermaxillares  uniseriati,  inframaxillares 
sérié  externa  longiores  et  insuper  canini  2 postsymphysiales. 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’UiV  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES.  299 

Eudenogohius  Gill.  Dentes  intermaxillarcs  uniscriati,  inframaxillares 
pauciscriati , cauiiii  nulli. 

Oxfiirichthys  Blkr.  Dentes  intermaxillarcs  uniscriati  vcl  subbiseriati  scrie 
interna  ■ rudinientarii,  inframaxillares  pluriscriati  sérié  externa  lon- 
giores,  canini  nulli.  Caudalis  lanccolata. 

Cliîietiiriclithyi. 

ChaeturicMhys  Rich.  Dentes  utraque  maxilla  biseriati  sérié  externa 
ceteris  confertis  longiores  tixi  curvati  subulati  oblique  antrorsum 
spectantes. 

Amblychaeturichthys  Blkr.  Dentes  intermaxillarcs  pauciscriati  sérié  externa 
longiores  fixi  subulati  rectiusculi , inframaxillares  antici  triseriati 
latérales  biseriati  sérié  externa  longiores  rectiusculi  mobiles  oblique 
antrorsum  directi. 

Parachaeturichthys  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  pluriscriati  série  externa 
ceteris  confertis  longiores  fixi  rectiusculi. 

(xobioiielli.  Dentes  utraque  maxilla  pluriscriati. 

Syîiechogohius  Gill.  Dentes  acuti  fixi  utraque  maxilla  sérié  externa 
longiores. 

Gobionellus  Gir.  Dentes  minimi  série  externa  setacci  mobiles. 

PERioPHïHALMiNi.  Dcntcs  maxülis  uni-  vel  biseriati  fixi conici pharyn- 
geales  conici  et  aciculares. 

Periophthahms  Bl.Schn.  Dentes  utraque  maxilla  uniscriati  ex  parte 
canini,  pliaryngeales  multiseriati  plurimi  gracillimi  aciculares. 

Eudioristopus  Gill.  Dentes  utraque  maxilla  uniscriati,  canini  nulli; 
pharyngeales  pauciseriati  plurimi  conici. 

PeriopUlialmodon  Blkr,  Dentes  intermaxil lares  anteriores  biseriati  sérié 
externa  canini , inframaxillares  uniscriati  ex  parte  canini  ; pharyngeales 
pauciseriati  majore  parte  validi  conici. 

APOCEYPTEiNi.  Dcntcs  utraquc  maxilla  uniscriati,  inframaxillares  subhori- 
zontales et  insuper  canini  2 inframaxillares  postsymphysiales  erecti. 

Apocryptei. 

Apocryptoclon  Blkr.  Dentes  intermaxillarcs  ex  parte  integri  truncati  ex  parte 
canini  •acuti,  inframaxillares  truncati  incisura  profunda  bilobi. 

Paraprocryptes  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  acuti  subulati  mtegri , 
intermaxillarcs  ex  parte  canini. 

Apcicryptes  Val.  Dentes  utraque  maxilla  apice  incisi,  cauini  intermaxil- 
larcs nulli, 

Pseudapoeryptes  Blkr.  Dentes  utraque  maxilla  apice  tumidi  obtusi  uor 
incisi , canini  interniaxillares  nulli. 


300'P.  BLEEKER.  ESQUISSE  ü’UN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

Bolcophtlialmî. 

Scarielaos  Swns.  Dentes  iiitermaxillares  anteriores  canini  subulati  curvati 
inaequales,  infrâmaxillares  simplices  acuti  médiocres. 

Boleophthalmus  Val.  Dentes  interrnax illares  eoniei  acuti  simplices  ante- 
riores eanini  curvati,  inframaxil lares  apiee dilatati  truncati  vel oblique 
emarginati. 

AMBLYOPODlb'OilMES.  Dentes  vomero-palatini  nulli. 

AMBLYOPODINI. 

a.  Dentes  utraque  maxilla  uniseriati. 

Tyntlasies  Günth.  Dentes  parvi  subliorizontales  ; eanini  nulli. 

h.  Dentes  intermaxillares  biseriati,  inframaxillares  pluriseriati  acuti  sub- 
verticales. 

Brachyamblyopus  Blkr.  Dentes  sérié  externa  longiores  curvati  sat 
numerosi;  canini  nnlli. 

c.  Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati,  sérié  externa  longiores. 

Odontamhlyopus  Blkr.  Dentes  sérié  interna  obtusiusculi , sérié  externa 
acuti  curvati  canini.  Corpus  squamatum. 

Gohioides  Lac.  Dentes  seriebus  internis  acuti  sérié  externa  acuti  curvati 
canini.  Corpus  squamatum. 

Taenioides  Lac.  Dentes  seriebus  internis  obtusiusculi , sérié  externa  acuti 
curvati  canini.  Corpus  alepidotum. 

TüYPAUCHENiNi.  Dentcs  utraque  maxilla  pluriseriati  sérié  externa  longiores 
validi  acuti,  seriebus  internis  conico-graniformes. 

Trypauchen  Val.  Ventralis  integra. 

TrypauclienicMliys  Blkr.  Ventralis  bipartita. 

LUCIOGOBIIEORMES.  Dentes  maxillis  pluriseriati  sérié  externa  longiores. 

Luciogolius  Gill. 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES.  301 


CONSPECTUS  SYSTEMATIS  GOBIOIDEORUxM. 

Familia  GOBIOIDEI. 

Pisces  ossei  acanthopteiygii , linea  laterali  tubulosa  nulla , spinis 
(lorsalibus  omnibus  vel  tantum  excepta  gracilibus  flexilibus  non 
pungentibus,  pinnis  ventralibus  unitis  vel  liberis  thoracicis  radiis 
2 posterioribus  ceteris  longioribus. 

Subfamilia  ELEOTRIFORMES. 

Gobioidei  pinnis  dorsalibus  2 distan tibus  vel  basi  tantum  con- 
tinuis,  ventralibus  plane  disjunctis  lineae  ventral!  medianae  ap- 
proximatis. 

Phalanx  Eleotrini. 

Eleotriformes  corpore  subelongato  vel  elongato  antice  cylindra- 
ceo,  capite  depresso  latiore  quam  alto  vel  aeque  lato  ac  alto, 
dentibus  intermaxillaribus  pluriseriatis ; pinnis,  dorsal!  radiosa 
et  anali  non  elongatis  radiis  7 ad  15,  caudali  obtusa. 

S ubphalanx  P hi  l y pn  i. 

Eleotrini  dentibus  vomerinis;  dentibus  maxillis  pluriseriatis , 
caninis  nullis. 

Philypnodon  Blkr. 

Dentes  palatini  et  linguales.  Dentes  inframaxillares  intermaxil- 
laribus longiores.  Caput  alepidotura.  Nucba  squamata.  Squamae 
ctenoideae  47  cire,  in  sérié  longitudinal!.  D.  7 — 11.  A 11. 

Spec.  typ.  Eleotris  nudiceps  Cast. 

Bostrichthys  C.  Dum.,  Gill  =z=  Bostrychus  Lac.  z=  Bostrictis  ^ 
Ictiopogon  Raf. 

Dentes  palatini  et  linguales  nulli.  Caput  superne  lateribusque 
squamatum.  Squamae  cycloideae  plus  quam  100  in  sérié  lon- 
gitudinal!. Isthmus  latus.  D.  6 — 11  ad  13.  A.  10. 

Sp.  typ.  Bostrichthys  sinensis  C.  Dum. 


302  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

Philypnus  Val.  ==:  Lembus  Güntb. 

Dentes  palatin!  et  linguales  nulli.  Caput  superne  lateribusque 
squamatum.  Squaraae  ctenoideae  55  ad  66  in  sérié  longitudinal!. 
Isthmus  valde  angustus.  D.  6 — 10  vel  11.  A.  10  vel  11. 

Sp.  typ.  Philypnus  dormitator  Val. 

Subpbalanx  Eleotrii. 

Eleotrini  palato  edentulo,  capite  superne  cristis  osseis  nudis  nullis. 

1 Généra  dentibus  uiraque  maxilla  pauci-ad  multiseriatis. 

Odonteleotris  Gill. 

Dentes  utraque  maxilla  quatuor  anteriores  canini  ; ceteri , inter*- 
maxillares  parvi  aequales , inframaxillares  posteriores  sérié  interna 
ceteris  longiores.  Caput  superne  lateribusque  dense  squamatum, 
nullibi  spinigerum.  Squamae  cycloideae  80  ad  100  cire,  in  sérié 
longitudinal!.  Istbmus  latus.  D.  6 — 10  vel  11.  A.  9 vel  10. 

Sp.  typ.  Eleotris  macrodon  Blkr. 

Eleotris  Gron.  = Gobiomoroides  Lac.  =:  Erotelis  Poey? 

Dentes  utraque  maxilla  multiseriati  parvi  aequales,  longi- 
ores vel  canini  nulli.  Caput  superne  lateribusque  nullibi  spinigerum. 
Squamae  trunco  ctenoideae  60  cire,  in  sérié  longitudinal!.  Isth- 
mus mediocris.  D.  6 — 9.  A.  8 vel  9. 

Sp.  typ.  Eleotris  gyrinus  Val. 

Guavina  Blkr. 

Dentes  utraque  maxilla  multiseriati  sérié  externa  longiores, 
canini  nulli.  Caput  superne  lateribusque  dense  squamatum  nullibi 
spinigerum.  Squamae  100  ad  110  in  sérié  longitudinal!,  trunco 
antice  cycloideae  postice  ctenoideae.  Isthmus  latus.  D.  7 — 11  vel 
12.  A 11. 

Sp.  typ.  Eleotris  guavina  Val. 

OxYELEOTRis  Blkr. 

Dentes  utraque  maxilla  pauciseriati , inter  maxillares  sérié  ex- 
terna longiores , inframaxillares  anteriores  sérié  externa  posteriores 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  ü'uN  SYSTEME  NATUREL  UES  BOBIOÏDES.  303 

sérié  interna  conspicue  longiores,  canini  veri  nulli.  Caput  superne 
lateribusque  dense  squamatum  niillibi  spiniferum.  Squamae  trunco 
ctenoideae  60  ad  90  in  sérié  longitudinali.  Isthmus  mediocris.  D. 

6 vel  7 — 9 vel  10.  A.  9 vel  10. 

Sp.  typ.  Eleotris  marmorata  Blkr. 

Ophiocâra  Gill. 

Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati,  intermaxillares  sérié  externa 
paulo  longiores,  intramaxillares  anteriores  sérié  externa  longiores 
posteriores  aequales  vel  sérié  interna  paulo  longiores.  Caput 
superne  lateribusque  dense  squamatum,  nullibi  spiniferum.  Squa- 
mae trunco  ctenoideae  28  ad  40  in  sérié  longitudinali.  Isthmus 
angustus.  D.  6 ad  8 — 9 vel  10.  A.  8 ad  10. 

Sp.  typ.  Eleotris  ophiocephahis  K.  V.  H. 

Mogurnda  Gill. 

Dentes  utraque  maxilla  pauciseriati , sérié  externa  ceteris 
conspicue  longiores  graciles  uncinati  subaequales,  canini  nulli. 
Caput  superne  lateribusque  dense  squamatum,  nullibi  spinigerum. 
Squamae  trunco  ctenoideae  36  ad  50  in  sérié  longitudinali.  Isth- 
mus angustus.  D.  8— 12  ad  15  A.  12  ad  15. 

Sp.  typ.  Eleotris  mogurnda  Rich. 

CuLius  Blkr  = Cheilodipterus  Ham.  Buch. 

Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati , intermaxillares  sérié  ex- 
terna longiores , inframaxillares  anteriores  sérié  externa  posteriores 
sérié  interna  longiores , canini  vel  caninoidei  nulli.  Caput  superne 
dense,  lateribus  dense  vel  ex  parte  squamatum,  praeoperculo  postice. 
spina  deorsum  spectante.  Squamae  trunco  ctenoideae  50  ad  65  in 
. sérié  longitudinali.  Isthmus  latus.  D.  6 — 9 A.  9. 

Sp.  typ.  Culius  f usais  Blkr  = Eleotris  nigra  QG. 

Gobiomorphus  Gill. 

Dentes  utraque  maxilla  multiseriati  graciles  subaequales,  ca- 
nini nulli.  Caput  nullibi  spinigerum,  vertice  et  operculis  squa- 
matum , fronte , rostro  genisque  alepidotum.  Squamae  trunco 


304  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

ctenoideae  36  ad  43  in  sérié  longitudinali.  Isthmus  latus.  D.  6 
vel  7 — 9 ad  11.  A.  8 ad  12. 

Sp.  typ.  Eleotris  gobioïdes  Val. 

Belobranchus  Blkr. 

Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  sérié  externa  paulo  longio  • 
res,  canini  nulli.  Caput  ubique  alepidotum,  radio  branchiostego 
superiore  vel  subsuperiore  inferne  spina  antrorsum  spectante. 
Squamae  ctenoideae  70  cire,  in  sérié  longitudinali.  Isthmus  latus. 
D.  6 — 8 A.  8. 

Sp.  typ.  Belobranchus  Quoyi  Blkr. 

2.  Généra  dentibus  intermaxillaribus  pluriserialis , inframaxil- 
laribus  uniseriaüs. 

Gymneleotris  Blkr. 

Dentes  inframaxillares  antici  quatuor  longiores  curvati.  Caput 
alepidotum,  nullibi  spinigerum.  Squamae  parvae,  trunco  antice 
nullae.  D.  7 — 11.  A.  9. 

Sp.  typ.  Eleotris  seminudus  Günth. 

Subpbalanx  Buti i, 

Eleotrini  capite  superne  cristis  osseis  laevibus  vel  serratis , pa- 
lati  edentulo,  dentibus  utraque  maxilla  pluriseriatis,  fissuris  bran- 
chialibus  usque  sub  oculo  extensis  isthmo  angusto  separatis, 
squamis  trunco  ctenoideis. 

Butis  Blkr. 

Dentes  maxillis  pluriseriati  aequales  parvi  conferti , longiores 
nulli.  Caput  prismaticum  aeque  altum  cire,  ac  latum , valde  acutum , 
superne  planum  squamatum  , cristis  osseis  rostro  et  fronte  laevibus 
vel  vix  scabris.  Squamae  trunco  28  ad  30  in  sérié  longitudinali. 
D.  6 — 8 vel  9.  A.  8 vel  9. 

Sp.  typ.  Bulis  butis  Blkr. 

GYMNOBUTis  Blkr. 

Dentes  maxillis  pluriseriati  subaequales,  canini  nulli.  Caput 
prismaticum,  aeque  altum  cire,  ac  latum,  valde  acutum,  ubique 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  ü'UN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES.  305 

alepidotum.  Squamae  40  cire,  in  sérié  longitudinali.  D.  7 — 10.  A.  10. 

Sp.  typ.  Eleotris  gymnocephalus  Steind. 

Prionobutis  Blkr. 

Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  sérié  externa  longiores, 
canini  nulli.  Caput  convexum  obtusiusculum  sqiiamatum , cristis 
osseis  rostro,  supra-orbitalibus  et  fronto-occipitalibus  serratis. 
Squamae  30  cire,  in  sérié  longitudinali.  D.  6 — 9.  A.  8 vel  9 

Sp.  typ.  Eleotris  dasyrhynchus  Günth. 

Odontobutis  Blkr. 

Dentes  utraque  maxilla  pauciseriati  graciles  non  conferti 
sérié  externa  paulo  longiores,  canini  nulli.  Caput  depressum  acu- 
tum latius  quam  altum  cristis  interorbitalibus  tantum  evolutis 
laevibus,  superne  lateribusque  squamatum.  Squamae  40  cire,  in 
sérié  longitudinali.  D.  7 — 9 vel  10.  A.  8 vel  9. 

Sp.  typ.  Eleotris  ohsciira  Schl. 

Phalanx  Hypseleotrini. 

Eleotriformes  corpore  oblongo  brevi  compresse  ; capite  compresse 
altiore  quam  lato , squamato , superne  cristis  osseis  nullis , palato 
^deutuîo;  dentibus  maxillis  pluriseriatis  parvis,  caninis  nullis;  squamis 
trunco  uagnis  ; dorsali  radiosa  et  anali  non  elongatis,  caudali  obtusa. 

Dormit ATOR  GUI. 

Dentes  maxillis  minimi  multiseriati  sérié  externa  gracillimi 
mobiles , pharyngeales  minimi  setacei , inferiores  sérié  externa  la- 
minas verticales  confertas  oblongas  apice  rotundatas  horizon- 
taliter  extrorsum  directas  mobiles  efficientes.  Maxillae  aequales. 
Squamae  trunco  ctenoideae  30  ad  35  in  sérié  longitudinali. 
Papilla  analis  oblongo-ovalis.  Isthmus  angustus.  D.  7 vel  8 — 9 
ad  11.  A.  10  vel  11. 

Sp.  typ.  Dormilator  lineaius  GUI. 

Asterropteryx  Rüpp.  = Priolepis  Ehr.  = Hypseleotris  GUI. 

Dentes  maxillis  parvi  gracillimi  sérié  externa  ceteris  paulo 
ad  multo  longiores  mobiles  ; pharyngeales  graciles  subulati  subae- 

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306  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’un  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

quales,  compressi  laminaeformes  horizontales  nulli.  Maxilla  inferior 
prominens.  Isthmus  angustus.  Squamae  triinco  23  ad  28  in  sérié 
longitudinali.  Papilla  analis  oblongo-quadrata  compressa.  B.  6. 
D.  6 vel  7—10  ad  12.  A.  10  ad  12. 

Sp.  typ.  Asterroptenjx  semipunctatus  Küpp. 

Phalanx  Pareleotrini. 

Eleotriformes  corpore  subelongato  vel  elongato  compresse  ; 
capite  convexe  compresse  altiore  quam  lato,  cristis  osseis  nudis 
vel  spinis  nullis;  dentibiis  maxillis  fixis  immobilibus,  vomerinis 
nullis,  pharyngealibus  subulatis  acicularibus. 

1.  Généra  sqmrnis  magnis  pinnis  dorsali  2«  et  analinon  elonqalis. 

Brachyeleotris  Blkr. 

Dentes;  maxillis  pluriseriati  sérié  externa  ceteris  longiores, 
inframaxillaris  lateralis  posterior  caninus;  pharyngeales  subiüati 
curvati.  Corpus  oblongo-subelongatum , capite  obtuso  convexe 
squamato  vel  alepidoto,  maxillis  aequalibus.  Squamae  trunco 
ctenoideae  25  cire,  in  sérié  longitudinali.  Isthmus  latus.  Pinnae 
dorsales  contiguae  subaequilongae , caudalis  obtusa  rotundata. 
B.  6.  D.  6—10  ad  13.  A.  9 ad  12. 

Sp.  typ.  Eleolris  cyanostigma  Blkr. 

Hetereleotris  Blkr.  (Genus  dubium). 

Dentes  maxillis  pluriseriati  sérié  externa  longiores , inframaxil- 
laris lateralis  posterior  caninus.  Corpus  elongatum , capite  obtuso 
convexe  alepidoto.  Squamae  trunco  nullae  vel  cycloideae  30  in 
sérié  longitudinali.  D.  6 — 12  vel  13.  A.  11. 

Sp.  typ.  Gobius  diademalus  Rüpp.* 

2.  Généra  squamis  parvis  vel  mmimis  ^ pinnis  dorsali  2^  et  anali 
non  elongaiisj  corpore  mediocriter  compresse  el  elongato  ^ capite 
alepidoto,  dorsalibus  conlignis. 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES.  307 

Valenciennesia  Blkr  = Valenciennea  Blkrzz:  Calleleotris  Gill. 
Dentes  intermaxillares  nniseriati  vel  pluriseriati  seriebus  iu- 
ternis  rudimeutarüs , inframaxillares  pluriseriati  sérié  externa 
coDspicue  lougiores  inaequales,  lateralis  posterior  caninus.  Dentes 
pliaryngeales  aciciilares  rectiusculi  apice  subuncinati,  interdum 
clavati.  Caput  obtusum  vel  obtusiusculum.  Maxillae  subaequales. 
Squamae  sessiles,  ctenoideae,  70  ad  95  in  sérié  longitudinali. 
Istlimus  valde  latus.  Pinnae , dorsalis  radiosa  spinosa  multo  minus 
duplo  long’ior,  caudalis  obtusa  rotundata  vel  lanceolata.  B.  5. 
D.  6 — 13  ad  18.  A.  13  ad  18. 

Sp.  typ.  Eleoiris  slrigata  Val. 

Eleotriodes  Blkr. 

Dentes  intermaxillares  uniseriati;  inframaxillares  pluriseriati 
sérié  externa  longiores  inaequales,  lateralis  subposterior  caninus 
curvatus-  posterioribus  multo  longior.  Dentes  pharyngeales  acicu- 
lares  apice  subuncinati.  Caput  acutiusculum.  Maxillae  subaequales. 
Squamae  cycloideae  deciduae  minimae,  130  cire,  sérié  longitu- 
dinali.  Istlimus  latus.  Pinnae,  dorsales  basi  continuae  radiosa 
spinosa  multo  minus  duplo  longior,  caudalis  obtusa.  B.  5.  D.  6 — 12 
vel  13.  A.  12  vel  13.  □ 

Sp.  typ.  Eleotriodes  Helsdingenii  Blkr. 

3.  Généra  squamis  minimiSj  pinnis  dorsali  2«  et  anali  elongatis 
radiis  30  fere  ad  plus  guam  30,  corpore  elongato  valde 
compresse, 

Ptereleotris  Gill.  ' 

Dentes  maxillis  pluriseriati  sérié  externa  longiores  ex  parte 
caninoidei,  pharyngeales  aciculares  rectiusculi  apice  subuncinati. 
Caput  acutiusculum  alepidotum.  Kictus  obliquus.  Squamae  trunco 
cycloideae,  plus  quam  100  in  sérié  longitudinali.  Isthmus  latus. 
Dorsales  non  contiguae,  radiosa  spinosa  duplo  vel  plus  duplo 
longior.  Caudalis  truncato-emarginata.  B.  4.  D.  6 — 28  ad  31. 
A.  27  ad  31.  V.  1/5. 

Sp.  typ.  Eleotris  microlepis  Blkr. 


20* 


308  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

Orthostomus  Kner. 

Dentes  raaxillis  parvi  graciles,  antici  4 canini.  Caput  obtusum 
truncatum  superne  squamatum.  Rictus  subverticalis.  Squamae 
trunco  ctenoideae  parvae.  Isthmus  angustus.  Dorsales  subconti- 
guae , radiosa  spinosa  plus  duplo  longior.  Caudalis  obtusa  convexa. 
B.  6.  D.  6—30.  A.  30.  V.  1/4. 

Sp.  typ.  Orthostomus  amblyopinus  Kner. 

OxYMETOPON  Blkr. 

Dentes  maxillis  pluriseriati  sérié  externa  ceteris  longiores, 
antici  2 canini  praesymphysiales.  Canini  insuper  inframaxillares 
2 postsymphysiales.  Dentes  pharyngeales  aciculares  apice  vix 
curvati.  Corpus  maxime  compressum.  Caput  obtusum  vertice  ele- 
vato  carinaeformi'  squamato.  Rictus  valde  obliquus.  Squamae 
ctenoideae  deciduae,  100  cire,  in  sérié  longitudinali.  Isthmus 
angustus.  Dorsales  subcontiguae , radiosa  spinosa  plus  duplo 
longior.  Caudalis  lanceolata.  B.  5.  D.  6 — 32.  A.  32.  V,  1/4. 

Sp.  typ.  Oxymetopon  typus  Blkr. 

Subfamilia  GOBIIFORMES. 

Gobioidei  pinnis  dorsalibus  2 distantibus  vel  basi  tantum  con- 
tinuis,  ventralibus  in  pinnam  unicam  integram  vel  medio  postice 
plus  minusve  incisam  unitis,  dentibus  vomerinis  vel  palatinis 
nullis. 

Phalanx  Gobiodontini. 

Gobiiformes  corpore  oblongo-ovato  compresse  ; capite  valde  ob- 
tuso  alepidoto , rictu  brevi  curvato , dentibus  maxillis  pluriseriatis 
simplicibus  fixis;  aperturis  branchialibus  non  infra  basin  pectora- 
lium  extensis  ; pinnis , dorsalibus  contiguis  vel  basi  continuis , poste- 
riore  et  anali  brevibus , ventrali  integra  basi  tantum  ventri  adnata , 
caudali  obtusa.  B.  4.  D.  6 — 9 ad  11.  A.  9 vel  10. 

1.  Généra  corpore  alepidoto  j capite  valde  compressa  ^ plus  duplo 
altiore  quam  lato. 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES.  309 

Gobiodon  K.  V.  H. 

Dentes  utraque  maxilla  sérié  externa  ceteris  longiores,  in- 
framaxillares  canini  2 vel  4 postsyraphysiales.  Corpus  ovale. 

Sp.  typ.  Gobiodon  hislrio  K.  V.  H.  et  Gobiodon  heterospilus  Blkr. 

PsEUDOGOBiODON  Blkr. 

Dentes  intermaxillares  sérié  externa  ceteris  longiores,  infra- 
maxillares  aequales,  canini  postsymphysiales  nulli.  Corpus  ovale. 

Sp.  typ.  Gobius  citrinus  Rüpp. 

2.  Généra  corpore  squamato,  capite  crasso  minus  duplo  altiore 

quam  lato, 

Paragobiodon  Blkr. 

Dentes  utraque  maxilla  sérié  externa  ceteris  longiores , infra- 
maxillares  canini  2 postsymphysiales.  Corpus  oblongO'Ovale.  Squa- 
mae  ctënoideae  22  cire,  in  sérié  longitudinali. 

Sp.  typ.  Gobius  melanosoma  Blkr  = Gobius  gobiodon  Day  ? 

Phalanx  Gymnogobiini. 

Gobiiformes  corpore  elongato  alepidoto,  capite  depresso,  den- 
tibus  fixis,  ventrali  integra  basi  tantum  ventri  adnata,-  caudali 
obtusa. 

1.  Généra  pinnis  dorsalibus  valde  distantihus  j capite  acuto  lato 

depresso  y rictu  magnOy  caudali  obtusa  convexa,  isthmo  lato, 

Benthophilus  Eichw.  — Hexacantbus  Nordm. 

Dentes  parvi,  canini  nulli.  Corpus  capite  et  trunco  verrucis 
sparsis  scabris.  Maxilla  inferior  prominens.  Aperturae  branchiales 
valde  parvae  brèves.  D.  3 — 9.  A.  9. 

Sp.  typ.  Benthophilus  macrocephalus  Eichw. 

Gymnogobius  Gill. 

Dentes  maxillis  pluriseriati  sérié  externa  ceteris  longiores, 
canini  nulli.  Corpus  nullibi  verrucosum.  Maxilla  inferior  non 
prominens.  Aperturae  branchiales  amplae.  B.  5.  D.  6 — 13  vel  14. 
A.  11  vel  12. 

Sp.  typ.  Gobius  macrognathus  Blkr. 


310  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 


2.  Gênera  pinnis  dorsalihus  approximalis , capite  convexe,  riclu 
parvo,  caudali  convexa. 

Gobiosoma  Gir. 

Dentes  maxillis  pauciseriati  sérié  externa  longiores,  canini  nulli. 
Caudalis  acuta.  Caput  obtusum  convexum.  D.  6 vel  7 — 11  ad  14. 
A.  10  ad  12. 

Sp.  typ.  Gobiosoma  moleslum  Gir. 

Ophiogobius  Gill. 

Dentes  maxillis  sérié  externa  longiores,  canini  nulli.  Caput 
acutum  depressum  latius  quam  altum.  Caudalis  obtusa  rotundata. 
D.  8 — 17.  A.  14. 

Sp.  typ.  Gobius  ophicephahis  Jen. 

Alepidogobius  Blkr. 

Dentes  maxillis  sérié  externa  longiores , inframaxillares  late- 
ralis  posterior  caninus.  Caput  valde  obtusumj  D.  6 — 11.  A.  10. 
Sp.  typ.  Gobiosoma  fascialum  Plfr. 

3.  Généra  pinnis  dorsalibus  valde  dislanlibus , capile  acuto,  riclu 
valde  oblique , pinna  caudali  emarqinala , islhmo  gracili,  maxilla 
inferiore  prominente.  B.  5. 

Boreogobius  Gill. 

Dentes  utraque  maxilla  parvi.  Dorsalis  2»  et  analis  médiocres 
non  elongatae.  D.  5 — 12  vel  13.  A.  14  vel  15. 

Sp.  typ.  Gobius  Stuvitzii  Düb.  Kor. 

Cristallogobius  Gill. 

Dentes  intermaxillares  validi,  inframaxillares  uniseriati  ex 
parte  canini.  Dorsalis  2^  et  analis  elongatae.  D.  2 — 19  ad  21. 
A.  20  ad  22. 

Sp.  t.  Gobius  Nilssoni  Düb.  Kor. 

Phalanx  L a t r u n c u l i n i. 

Gobiiformes  corpore  subelongato  vel  elongato,  squamis  medio- 
cribus  vel  magnis , aperturis  branchialibus  mediocribus  isthmo  lato 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  ü’UN  SYSTEME  NATUREL  UES  GOBIOÏDES.  311 

separatis,  dentibus  maxilla  iiifeViore  uniseriatis;  pimiis,  dorsalibus  dis- 
tautibus  radiosa  elongata,  ventral!  integra  basi  tantum  ventri 
adnata,  caudali  obtusa. 

1.  Généra  dentibus  iitraque  maxilla  imiseriatisj  rictu  valde  obliqua. 

Gobiopterus  Blkr. 

Dentes  inaxillis  magni  acuti  distantes  intermaxillares  aequales , 
inframaxillares  inaequales.  Canini  insuper  inframaxillares  2 post- 
symphysiales.  Caput  alepidotum  compressum  rictu  subverticali. 
Squamae  25  ad  36  in  sérié- longitudinal!.  B.  4.  D.  5 vel  6 — 8 
vel  9.  A.  8 ad  14. 

Sp.  typ.  Apocryptes  brachyplerus  Blkr. 

Leptogobius  Blkr. 

Dentes  graciles  acuti  subaequales,  canini  nulli.  Caput  ale- 
pidotum compressiusculum , rictu  obliquo.  Squamae  ctenoideae 
25  cire,  in  sérié  longitudinal!.  Pinnae  dorsalis  2‘*  et  analis  acutae 
subtriangulares.  B.  4.  D.  5 — 8 vel  9.  A.  13  ad  15. 

Sp.  typ.  Gobius  oxyplerus  Blkr. 

SiCYOPus  Gill. 

Dentes  utraque  ^maxilla  uniseriati  gracillimi  uncinati  simplices 
mobiles,  canini  nulli.  Caput  obtusum  convexum  alepidotum.  Squamae 
ctenoideae  32  cire,  sérié  longitudinal!.  B.  4.  D.  6 — 10  vel  11. 
A.  10  vel  11. 

Sp.  typ.  Sicydium  zosierophorum  Blkr. 

Evorthodus  Gill. 

Dentes  utraque  maxilla  recti  apice  truncato-emarginati , 
inframaxillares  subhorizontales , canini  nulli.  Caput  crassum  trun- 
catum  superne  squamatum.  Squamae  trunco  ctenoideae,  32  cire, 
in  sérié  longitudinal!  D.  6 — 11  vel  12.  A.  11  vel  12. 

Sp.  typ.  Evorthodus  breviceps  Gill. 

2 Généra  dentibus  intermaxillaribus  biseriatis  y inframaxillaribus 

uniseriatis. 


312  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’üN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

Latrunculus  Günth.  =:  Aphya  Risso  ? = Brachyochirus  Nardo 

(nec  Brachirus  Swns.). 

Dentes  intermaxillares  ex  parte  canini  ; inframaxillares  hori- 
zontales, canini  insuper  2 postsymphysiales  erecti.  Caput  depres- 
sum  acutiusculum  alepidotum.  Squamae  cycloideae,  25  cire,  in 
sérié  longitudinali.  B.  5.  D.  5 — 12  vel  13.  A.  13  vel  14. 

Sp.  typ.  Latrunculus  alhus  Günth. 

Phalanx  Triaenophorichthyini. 

Gobiiformes  corpore  subelongato,  squamis  ctenoideis,  capite 
conico  -prismatico , dentibus  maxillis  ex  parte  tricuspidatis , isthmo 
interbranchiali  lato;  pinnis,  dorsalibus  distantibus,  posteriore  et 
analis  brevibus , ventral!  integra  basi  tantum  ventri  adnata , caudal! 
obtusa. 

Triaenophorichthys  Gill  = Triaenophorus  Gill. 

Dentes  maxillis  sérié  externa  tricuspidati  mobiles,  sérié  in- 
terna tricuspidati  et  simplices.  Praeoperculum  et  maxilla  inferior 
cirris  nullis.  Squamae  médiocres,  55  cire,  in  sérié  longitudinal!. 
D.  6 — 12  vel  13.  A.  12. 

Sp.  typ.  Triaenophorichthys  trigonocephalus  Gill. 

Triaenopogon  Blkr. 

Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  seriebus  internis  lati  obtusi 
conferti  submolares , sérié  externa  tricuspidati  mobiles  ; pharyngeales 
subulati  simplices.  Cirri  praeoperculo  maxillaque  inferiore  plures 
uniseriati.  Squamae  magnae , 35  cire,  in  sérié  longitudinali.  B.  4. 
D.  6 — 11.  A.  11. 

Sp.  typ.  Triaenophorichthys  harbatus  Günth. 

Phalanx  S i c y d 1 1 n i. 

Gobiiformes  corpore  subelongato  vel  elongato  antice  cylindraceo  ; 
capite  obtuso  convexo , dentibus  maxillis  ex  parte  gingivalibus  vel 
labialibus  mobilibus,  isthmo  interbranchiali  lato;  pinnis,  ventral! 
integra  orbiculari  disco  central!  lato  ventri  adnata  radiis  multiû- 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏÜES.  313 

dis  brevibus  circa  discum  radiantibus  , caudali  obtusa  ; sqiiamis 
ctenoideis  vel  nullis. 

1.  Généra  corpore  sfjuamatOj  denlibus  maxillis  biserialis. 

Tridentiger  Gill. 

Dentes  maxillis  sérié  externa  elongati  apice  dilatati  tricuspi- 
dati,  sérié  interna  simplices  curvati.  Squamae  médiocres.  D.  6 — 
11.  Ar.  10  vel  11. 

• Sp.  typ.  Sicydium  obseurum  Schl. 

2 Généra  corpore  sc^iiamato  ^ dentibus  intermaxillaribus  uniseria- 
tes  gracillimis  confertissimis,  inframaxillaribus  biserialisj  sérié  externa 
graci lliims  flexilibiis. 

Sicydium  Val. 

Dentes  intermaxillares  simplices  curvati  acutissimi , inframaxil- 
lares  sérié  interna  conici  validi  inaequales.  Caput  superne  squa- 
matum.  Maxilla  inferior  antice  lateribusque  cirris  carnosis.  Squamae 
parvae,  85  cire,  in  sérié  longitudinali.  B.  4.  D.  6 — 11  vel  12. 
A.  11  vel  12. 

Sp.  typ.  Sicydium  Plumieri  Val. 

D 

SiCYOPTERUS  Gill. 

Dentes  intermaxillares  simplices  acuti  vel  stipitati  apice  tumidi 
truncati  vel  bilobi,  inframaxillares  sérié  interna  validi  distantes 
inaequales  curvati  simplices  acuti,  sérié  externa  aciculares;  pha- 
ryngeales  aciculares.  Caput  non  vel  superne  tantum  squamatum. 
Maxilla  inferior  cirris  nullis.  Squamae  trunco  médiocres  vel 
parvae , 50  ad  80  in  sérié  longitudinali.  B.  4.  D.  6 vel  7 — 11 
vel  12.  A.  11. 

Sp.  typ.  Sicydium  Stimpsoni  Gill. 

Subgen.  Sicyopierus  Gill.  Dentes  intermaxillares  acuti  non  sti- 
pitati apice  nec  tumidi  nec  incisi.  Sp.  typ.  Sicydium 
Parvei  Blkr. 

//  Cotylopus  Guich.  Dentes  intermaxillares  stipitati  apice 
dilatati  incisura  profunda  bilobi.  Sp.  typ.  Cotylopus 
acutipinnis  Guich,  v 


314  1*.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

Subgeu.  Sicydiops  Blkr.  Dentes  iDtermaxillares  apice  dilatati 
clavati  integri.  Sp.  typ.  Sicydium  xanl/iurus  Blkr. 

Micuosicydium  Blkr. 

Dentes  intermaxillares  stipitati  apice  clavati  obtusi , infra- 
maxillares  sérié  interna  parvi  aequales,  sérié  externa  aciculares. 
Maxilla  inferior  cirris  nullis.  Squaniae  capite  et  trunco  antice 
nullae,  lateribus  40  cire,  in  sérié  longitudinali.  B.  4.  D.  5 — 10 
vel  11.  A.  11  vel  12. 

Sp.  typ.  Sicydium  gymnauchen  Blkr. 

3.  Généra  corpore  plane  alepidolOj  denlibus  ulraque  maxilla 

uniserialis. 

Lentipes  Günth.  Sicyogaster  GUI  (nec  Bris.) 

Dentes  intermaxillares  anteriores  tricuspidati , latérales  sim- 
plices,  inframaxillares  omnes  simplices.  D.  6 — 11.  A.  10. 

Sp.  typ.  Sicyogaster  concolor  Gill. 

Phalanx  g o b 1 1 n i. 

Gobiiformes  corpore  oblongo,  subelongato  vel  elongato,  capite 
inter  et  ante  oculos  alepidoto , dentibus  maxillis  simplicibus  apice 
nec  clavatis  nec  incisis,  intermaxillaribus  uni-ad  multiseriatis, 
inframaxillaribus  bi-ad  multiseriatis;  pinnis,  dorsali  spinosa  radiosa 
breviore,  ventrali  integra  basi  tantum  ventri  adnata;  aperturis' 
brancliialibus  mediocribus  vel  amplis. 

Subphalanx  a.  Brachygobii. 

Gobiini  corpore  brevi  oblongo  altitudine  4 cire,  in  ejus  longitu- 
dine , squamis  magnis , dentibus  caninis  nullis,  pinnis  dorsali  radiosa 
et  anali  brevibus,  caudali  obtusa  convexa,  dorsali  spinis  6. 

Lophogobius  . Gill. 

Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  villiforraes  sérié  externa 


P.  BLEEKEU.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES.  315 

longiores.  Corpus  compressum.  Caput  compressum  latins  quam 
altum.  Squamae  ctenoideae,  25  ad  30  in  sérié  longitudinali. 
Dorsales  contiguae.  B.  5.  D.  6 — 8 ad  10.  A.  8 ad  10. 

Sp.  typ.  Gobius  crisla  qalli  Val. 

Braciiygobius  Blkr. 

Dentes  (sériés  non  indicatae).  Caput  depressum  latins  quam 
altum,  crista  occipito-nucbali  nulla.  Squamae  cycloideae,  27  cire, 
in  sérié  longitudinali,  nucha  et  thorace  inferne  nullae.  Dorsales 
distantes.  D.  6 — 8.  A.  8. 

Sp.  typ.  Gobius  Doriae  Günth. 

Subphalanx  b.  Plalyq  obi i, 

Gobiini  corpore  elongato,  altitudine  6 ad  9 in  ejus  longitudine , 
antice  cylindraceo  ; capite  valde  depresso  latiore  quara  alto , acuto  ; 
dentibus  utraque  maxilla  pluriseriatis  ; rictu  magno  ; dorsali  radiosa 
et  anali  brevibus,  caudali  obtusa,  dorsali  anteriore  spinis  6. 

Gillichtiiys  Coop.  = Gillia  Günth. 

Dentes  utraque  maxilla  villiformes,  canini  nulli.  Maxillae 
antice  aequales , superior  usque  post  suboperculum  producta.  Squa- 
mae cycloideae  parvae  cute  quasi  immersae,  capite  ventreque 
nullae.  Aperturae  branchiales  brèves  isthmo  lato  separatae.  Oculi 
parvi.  D.  6 ~ 13.  A.  11. 

Sp.  typ.  Gillichlhys  mirabilis  Coop. 

Gobiopsis  Steind. 

Dentes  maxillis  pluriseriati  sérié  externa  longiores,  canini 
nulli.  Maxillae , superior  longe  post  oculum  desinens , inferior 
prominens.  Squamae  capite  superne  tantum , trunco  magnae  ctenoi- 
deae  33  cire,  in  sérié  longitudinali.  Aperturae  branchiales  sub 
gula  extensae.  Isthmus  angustus.  Oculi  parvi.  D.  6 — 11.  A.  10. 

Sp.  typ.  Gobiopsis  macroslonms  Steind. 

Glossogobius  Gill. 

Dentes  maxillis  pluriseriati,  sérié  externa  longiores  non  converti 
curvati,  canini  veri  nulli.  Denter  pharyngeales  pluriseriati  graciles  cur- 


" H . ^ 


316  P.  BLEKKER.  ESQUISSE  o’UM  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

vati  inaequales.  Maxillae,  inferior  prominens,  superior  non  pro- 
clucta.  Squamae  capite  superne  tantum,  trunco  magnae  ctenoideae,  20 
ad  plus  quam  40  in  sérié  longitudinali.  x\perturae  branchiales 
amplae.  Isthmiis  angustus.  Ocnli  médiocres.  B.  4.  D.  6 — 9 ad  11. 
A.  8 ad  10.  (charact.  ex  parte  e Goh.  giuris  Ham.  Buch.  aliisque 
sumpti.) 

Sp.  typ.  Gobius  platycephalus  Rich.  (nec  Peters  nec  Kessl.) 

Platygobius  Blkr. 

Dentes  maxillis  multiseriati,  intermaxillares  sérié  externa  vix- 
longiores  inframaxillares  sérié  externa  longiores  ; phar^mgeales  mul- 
tiseriati graciles  vix  curvati.  Maxillae , inferior  superiore  paulo  bre- 
vior , superior  non  producta.  Squamae  capite  occipite  tantum , trunco 
ctenoideae  vel  ctenoideae  et  cycloideae,  60  ad  65  in  sérié  longi- 
tudinali. Aperturae  branchiales  amplae.  Isthmus  latus.  Oculi 
médiocres.  B.  5.  D.  6 — 11  vel  12.  A.  11  vel  12. 

Sp.  typ.  Gobius  macrorrhijnchus  Blkr. 

Subphalanx  c.  Eiigobii. 

Gobiini  .corpore  elongato  altitudine  5 ad  9 cire,  in  ejus  longi- 
tudine , capite  obtuso  vel  obtusiusculo  altiore  quam  lato  ad  paulo 
latiore  quam  alto;  cirris  maxilla  inferiore  nullis;  rictu  mediocri 
vel  parvo;  caudali  integra  obtusa  vel  acuta;  dentibus  maxillis  fixis. 

1.  Généra  dentibus  utraque  maxilla  pluriseriatis  inlermaxillaribus 
sérié  externa  ceteris  longioribus y caninis  nullis. 

Gobius  Art.  = Pomatoschistus  Gill  = Deltentosteus  Gill  Cory- 
phopterus  Gill. 

Dentes  utraque  maxilla  sérié  externa  longiores  conici  acuti 
curvati  subaequales.  Corpus  antice  cylindraceum  capite  aeque  alto 
ac  lato  ad  latiore  quam  alto , convexo  vel  convexiusculo.  Squamae 
ctenoideae  magnae,  médiocres  vel  parvae.  Venter  ante  et  post 
pinnam  ventralem  squamatus.  Isthmus  latus.  Pinna  caudalis  obtusa 
capite  non  lougior. 

Sp.  typ.  Gobius  niger  L. 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES.  317 

Gémis  valde  complexum,  probabilité!*  compositum,  speciebus 

mimerosissimis  magna  parte  non  satis  cognitis  in  généra 

pluria  distribuendis. 

Subgenera  sequentia  pro visoria  proponuntur. 

Subgen.  gobius  Art.  Pomatoschistus  Gill. 

Caput  ubique  alepidotum.  Squaraae  40  ad  70  in  sérié  longi- 
tudinali.  Pinna  dorsalis  radiosa  spinosa  minus  duplo  longior.  D. 
6 vel  7 — 8 ad  14. 

Sp.  typ.  Gobius  niger  L.  *). 

Subgen.  Coryphopterus  Gill. 

Caput  ubique  alepidotum , obtusum , . convexum.  Squamae 
20  ad  35  in  sérié  longitudinali.  Pinnae  dorsales  non  contiguae, 
radiosa  spinosa  multo  minus  duplo  lougior.  D.  6 ad  8 — 8 ad  14. 

Sp.  typ.  Coryphopterus  glaucofrenum  Gill. 

Subgen.  Mesogobius  Blkr. 

Caput  superne  vel  superne  et  operculis  squamatum.  Squamae 
35.  ad  plus  quam  70  in  sérié  longitudinali.  Dorsales  basi  continuae 
vel  subcontiguae , radiosa  spinosa  multo  ad  plus  duplo  longior. 
D.  6—11  ad  21.  D 

Sp.  typ.  Gobius  batrachocephalus  Pall. 

Subgen.  Deltentosteus  Gill. 

Caput  superne  squamatum.  Squamae  20  ad  35  in  sérié  lon- 
gitudinali. Dorsales  distantes  vel  contiguae,  radiosa  spinosa  multo 
minus  duplo  longior.  D.  6 — 8 ad  12. 

Sp.  typ.  Gobius  quadrimaculatus  Val. 

Stenogobius  Blkr. 

Dentes  utraque  maxilla  sérié  externa  longiores  conici  acuti 


*)  Gobius  niger  L.  non  est  Gobius  niger  plurium  auctorum.  Species  cum 
diagnosi  Artediana  plane  congruens , maria  septentr;onalia  habitans , capite  aeque 
alto  ac  lato , rostro  convexo  obtuso , fronte , vertice  nucbaque  plane  alepidotis , 
sulco  mediano  fronto-dorsali  valde  conspicuo,  formula  pinnarum  = D.  0 — 1/13, 
A.  1/13.  P.  17 , coloribusque  variegatis  bene  a speciebus  affinibus  distincta. 


318  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’üN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

curvati  subaequales.  Corpus  corapressum , capite  compresso  altiore 
quam  lato,  obtuso,  convexo.  Squamae  ctenoideae  magnae  vel 
médiocres.  Venter  ante  et  post  pinnam  ventralem  squamatus. 
Isthmus  latus. . Pinna  caudalis  obtuse  vel  acutiuscule  lanceolata 
capite  longior.  B.  4.  D.  6 — 11  ad  13. 

Sp.  typ.  Gobitis  cjymnopomus  Blkr. 

Subgenus  Stenogobius  Blkr. 

Caput  superne  squamatum.  Squamae  trunco  45  ad  55  in  sérié 
longitudinali. 

Sp.  typ.  Gobius  cjymnopomus  Blkr. 

Subgenus  Oligole^is  Blkr. 

Caput  ubique  alepidotum.  Squamae  trunco  25  ad  28  in  sérié 
longitudinali. 

Sp.  typ.  Gobius  melanostigma  Blkr. 

Subgenus  Gnatholepis  Blkr. 

Caput  superne  lateribusque  squamatum.  Squamae  trunco  26 
cire,  in  sérié  longitudinali. 

Sp.  typ.  Gobius  anjerensis  Blkr. 

Callogobius  Blkr. 

Dentes  utraque  maxilla  sérié  extern  a longiores  curvati  gra- 
eiles,  subaequales.  Corpus  antice  cylindraceum , capite  depresso 
convexo  latiore  quam  alto , superne  lateribusque  squamato. 
Squamae  ctenoideae  50  cire,  in  sérié  longitudinali.  Venter  ante 
et  post  pinnam  ventralem  squamatus.  Isthmus  latus.  Ventrales 
membrana  valde  tenui  unitae , basi  membrana  interspinali  rudimen- 
taria.  Caudalis  lanceolata.  B.  4.  D.  6 — 10  ad  12.  A.  9 vel  10. 

Sp.  typ.  Eleotris  Hassellii  Blkr. 

Hypogymnogobius  Blkr. 

Dentes  utraque  maxilla  serie  externa  longiores  acuti.  Squamae 
ctenoideae  50  cire,  in  serie  longitudinali,  capite,  nucha  et  ventre  ante 
et  post  pinnam  ventralem  nullae.  Caput  latum  convexum.  Isthmus 
. latus.  Pinnae  dorsales  distantes , radiosa  spinosa  multo  minus  duplo 


P.  RLEEKER.  ESQIHSSE  d’üNE  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES.  319 

longior.  Caudalis  obtusa  capite  brevior.  B.  4.  D.  6 — 10.  A.  10. 

Sp.  typ.  Gobius  xan/hozona  Blkr. 

Hemigobius  Blkr. 

Dentes  utraque  maxilla  sérié  externa  longiores , intermaxil- 
lares  medii  truncati , inframaxillares  recti.  Sqiiamae  ctenoideae , 20 
cire,  in  sérié  longitudinali.  Caput  acutum  superne  lateribusque 
squamatum.  Venter  squamatus.  Isthmus  latus.  Dorsales  distantes 
Pinnae  dorsalis  radiosa  spinosa  multo  minus  duplo  longior  ^ caudalis 
obtusa  capite  brevior.  B.  4.  D.  6 ~ 9 A.  9. 

Sp.  typ.  Gobius  melanuriis  Blkr. 

Eucyclogobius  Gill. 

Dentes  utraque  maxilla  sérié  externa  longiores  acuti.  Squamae 
cycloideae  parvae , capite  nullae.  Caput  obtusum  convexum.  Pinnae  ; 
ventralis  sub  pectoralibus  inserta,  dorsales  contiguae  radiosa  spinosa 
minus  duplo  longior,  caudalis  obtusa  capite  non  longior.  B.  5. 
D.  7 vel  8—13. 

Sp.  typ.  Gobius  Newberri  Gir. 

Lepidogobius  Gill  = Cyclogobius  Steind. 

Dentes  utraque  maxilla  sérié  externa  longiores  acuti.  Squamae 
cycloideae  parvae.  Caput  superne  lateribusque  squamatum.  Dorsalis 
radiosa  spinosa  plus  duplo  longior.  Ventralis  post  pectorales  in- 
serta.  Caudalis  obtusa.  B.  5.  D.  7 — 20.  A.  17. 

Sp.  typ.  Lepidogobius  gracilis  Gill  = Gobius  gracilis  Girard 
(nec  Jenyns). 

V ’ 

Actinogobius  Blkr. 

i.  Dentes  utraque  maxilla  sérié  externa  longiores  inaequales 
( acuti.  Squamae  ctenoideae  70  cire,  in  sérié  longitudinali.  Caput 
aeque  latum  cire,  ac  altum,  convexum,  superne  alepidotum , genis 
operculisque  ex  parte  squamatum.  Dorsales  distantes,  posterior 
anteriore  duplo  longior.  Caudalis  acute  rotundata  capite  brevior. 
D.  9 — 19  vel  20.  A.  16  ad  18. 

Sp.  typ.  Gobius  ommaturus  Rich. 


320  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

Acanthogobius  Gill. 

Dentes  utraque  maxilla  sérié  externa  longiores  acuti.  Squamae 
ctenoideae,  60  cire,  in  sérié  longitudinali.  Caput  superne  lateri- 
busque  squamatum , rostro  convexo  oculo  longiore.  Isthmus  latus. 
Dorsales  contiguae,  radiosa  spinosa  duplo  cire,  longior.  Caudalis 
obtusa  capite  brevior.  B.  4.  D.  8 — 14  vel  15.  A.  13  vel  14. 

Sp.  typ.  Gobius  flavimanus  Schl.  ^). 

2.  Généra  dentihus  utraque  maxilla  pluriseriatis  conferlis  cardifor- 
mibus  sérié  externa  brevioribus  distantibus  introrsum  directis  ; 
caninis  vel  caninoideis  intermaxillaribus  et  inframaxillaribus 
postsymphysïalibus. 

Cephalogobius  Blkr. 

Squamae  38  cire,  in  sérié  longitudinali.  Caput  elongatum , 
altius  quam  latum,  acutum.  Pinna  caudalis  acutiuscula.  B.  5. 
D.  6 — 9.  A.  9. 

Sp.  typ.  Gobius  subliius  Gant. 

3.  Généra  dentibus  utraque  maxilla  pluriseriatis  acutis  subae- 
qualibus  sérié  externa  erectis  celeris  non  longioribus  ^ caninis 
nullis. 

Awaous  Val. 

Squamae  ctenoideae , 50  ad  60  in  sérié  longitudinali.  Caput 
superne  squamatum , rostro  convexo.  Isthmus  latus.  Dorsales  dis- 
tantes , radiosa  spinosa  minus  duplo  longior.  Caudalis  obtusa  vel 
obtusiuscula.  B.  5.  D.  6 — 11  ad  13.  A.  11  vel  12. 

Sp.  typ.  Gobius  ocellaris  Brouss. 

Khinogobius  Gill.  Chonephorus  Poey. 

Squamae  28  cire,  in  sérié  longitudinali.  Caput  convexum  rostro 
conico.  D.  6 — 9 vel  10.  A.  9 vel'  10. 

Sp.  typ.  Rhinogobius  similis  Gill. 

0 Adde  Gen.  incertum  e Gobio  chiloënsi  Val.,  x\cantîiogobio  alFine  forma 
corporis  et  capitis  uumeroque  spinarum  et  radiorum  dorsalium  aualiumque  ut  et  for- 
mula squamarum  sed  caudali  sat.  profonde  cmarginata.  Gen.  lieterogohius  Blkr. 


P.  BLEÊKER.  ESQUISSE  d’uIS  SYSTEME  NATUREL  DES  (ÎORIOÏI)ES.  321 

4.  Gênera  dent  Unis  ntraque  maxilla  pliiriserialis  aeufis,  sérié 

exierna  lonqiorUnis , inframaxillarl  lalerali  posleriore  canino. 

Ctenogorius  Gill. 

Sqnamae  ctenoideae  14  ad  30  iu  sérié  longitudinali.  Caput 
obtiisum  coüvexum  alepidotum^  praeoperculo  inermi.  Nucha  squamis 
nullis.  Istlimus  latiis.  Dorsales  spina  pungente  nulla,  radiosa  spinosa 
miüto  minus  duplo  longior.  Caudalis  obtusa  capite  brevior.  ' 

B 4 vel  5.  D.  5 vel  6 — 10  vel  11.  A.  9 ad  11. 

Sp.  typ.  Ctenogobius  fascialus  Gill. 

Centrogobius  Blkr  ~ Oplopomus  Steind.  (nec  Gir.). 

Squamae  ctenoideae  28  ad  30  in  sérié  longltudinali.  Gaput 
et  corpus  compressa.  Caput  obtusum  convexum  superne  squama- 
tum , praeoperculo  dente  unico  vel  duplice  armatum.  Istlimus  latus. 
Dorsales  distantes  radio  anteriore  spinaeformi  valido  osseo  pun- 
gente , radiosa  spinosa  multo  minus  duplo  longior.  Caudalis  obtusa 
capite  brevior.  B.  4.  D.  6 — 10  ad  12.  A.  11  vel  12. 

Sp.  typ.  Gobiiis  noiacanthus  Blkr. 

Acentrogobius  Blkr. 

Squamae  ctenoideae  25  ad  35  in  sérié  longitudinali.  Corpus 
antice  cylindraceo-compressum.  Caput  compressum  obtusum  con- 
vexum squamatum,  praeoperculo  inermi.  Isthmus  latus. 'Dorsales 
spina  pungente  nulla , radiosa  spinosa  multo  minus  duplo  longior. 
Caudalis  obtusa  capite  brevior.  B.  4.  D.  6 — 11  ad  13.  A. 
11  ad  13. 

Sp.  typ.  Gobius  ehlorostigma  Blkr. 

}■  PoROGOBius  Blkr. 

Squamae  ctenoideae  28  ad  45  in  sérié  longitudinali.  Caput 
compressum  obtusum  convexum  superne  squamatum  vel  alepidotum  ^ 
praeoperculo  inermi.  Isthmus  latus.  Dorsales  spina  puugente 
nulla,  radiosa  spinosa  minus  duplo  longior.  Caudalis  lancolata 
acuta.  B.  4.  D.  6 — 10  vel  11.  A.  10  vel  11. 

Sp.  typ.  Gobius  Schlegeli  Günth. 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX. 


21 


322  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’üN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

Amblygobius  Blkr. 

Squamae  ctenoideae,  52  ad  56  in  sérié  longitudinali.  Corpus 
compressum.  Caput  compressum  obtusum  convexumsupernesquama- 
tum , praeoperculo  inermi.  Isthmus  latus.  Dorsales  spina  pungente 
nulla,  radiosa  spinosa  minus  duplo  longior.  Caudalis  obtusa 
capite  brevior.  B.  4.  D.  6 — 14  ad  16.  A.  15  vel  16. 

Sp.  typ.  Gobius  sphinx  Val. 

Cryptocentrus  Ehr.  z=  Paragobius  Blkr. 

Caninus  inframaxillaris  lateralis  magnus  mediocris  vel  rudi- 
mentarius.  Squamae  cycloideae  vel  ctenoideae  85  ad  plus  quam  100 
in  sérié  longitudinali.  Caput  compressum  obtusum  convexum  alepi- 
dotum.  Aperturae  branchiales  amplissimae  isthmo  angusto  separatae. 
Dorsales  spina  pungente  nulla,  radiosa  spinosa  multo  ad  duplo 
longior.  Caudalis  capite  longior  obtusa  vel  lanceolata.  B.  4. 
D.  6—11  ad  20.  A.  10  ad  21. 

Sp.  typ.  Gobius  cryptocentrus  Val. 

Pterogobius  Gill. 

(Dentitio  non  satis  cognita,  sed  dentes  pluriseriati  sérié 
externa  longiores,  — an  et  canini  parvi?).  Caput  compressum  con- 
vexum obtusum  superne  squamatum.  Squamae  minimae  plus  quam 
100  in  sérié  longitudinali.  Dorsales  contiguae  spina  pungente 
nulla,  radiosa  spinosa  duplo  longior.  Caudalis  obtusa  capite 
brevior.  D.  8—21  ad  28.  A.  20  ad  27. 

Sp.  typ.  Gobius  virgo  Schl. 

(Genus  sequens  quoad  sériés  dentium  non  satis  cognitum,  an 

sectioni  l^e  vel  2^e  adnumerandum.) 

Chaenogobius  Gill. 

Dentes  maxillis  médiocres  subcylindrici  curvati.  Corpus  me- 
diocriter  elongatum , squamis  cycloideis  parvis.  Caput  subconicum , 
alepidotum , rostro  brevi , rictu  magno , maxillis  aequalibus.  Nucba 
linea  mediana  tantum  squamata.  Dorsales  non  contiguae , radiosa 
brevis.  Caudalis  obtusa  capite  brevior.  D.  6 — 9.  A.  8. 

Sp.  typ.  Chaenogobius  annularis  Gill. 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GORIOÏDES.  323 

5.  Généra  clentibus  ulraque  maxilla  biseriatis  acutis. 

ZoNOGOBius  Blkr. 

Dentes  interraaxillares  sérié  externa,  infraDiaxillares  sérié 
interna  longiores,  canini  nulli.  Sqnamae  ctenoideae  30  cire,  in 
sérié  longitudinali.  ' Caput  compressum  obtusum  convexum  alepi- 
dotum.  Dorsales  subcontiguae , radiosa  spinosa  paulo  longior.  Cau- 
dalis  obtiisa.  D.  6—11.  A.  9. 

Sp.  typ.  Gobius  semifasciatm  Kner. 

Odontogobius  Blkr. 

Dentes  utraque  maxilla  sérié  externa  longiores,  inframaxil- 
laris  lateralis  posterior  caninus.  Sqnamae  ctenoideae  60  ad  70 
in  sérié  longitudinali.  Caput  compressum  obtusum  convexum 
superne  squamatum.  Isthmus  latus.  Dorsales  subcontiguae , radiosa 
spinosa  multo  sed  minus  duplo  longior.  Caudalis  obtusa  capite 
brevior.  B.  4.  D.  6 — 14  ad  17.  A.  15  ad  17. 

Sp.  typ.  Gobius  bynoënsis  Rich. 

6.  Généra  deniibus  acutis  intermaxillaribus  uniseriatis  vel  sub- 

biseriatis , inframaxillarihus  pluriseriatis. 

Stigmatogobius  Blkr. 

Dentes  intermaxillares  uniseriati , inframaxillares  sérié  externa 
longiores  et  insuper  canini  2 postsympby siales.  Corpus  subelon- 
gatum  compressum,  squamis  ctenoideis  30  cire,  in  sérié  longitu- 
dinali. Caput  obtusum  compressum  convexum  superne  lateribusque 
squamatum.  Isthmus  latus.  Pinnae,  dorsales  distantes  radiosa 
spinosa  paulo  longior,  caudalis  obtusa.  B.  4.  D.  6 — 9.  A.  10. 

Sp.  typ.  Gobius  pleurostigma  Blkr. 

Euctenogobiu^  Gill. 

Dentes  intermaxillares  uniseriati , inframaxillares  pauciseriati , 
canini  nulli.  Corpus  elongatum  compressum,  squamis  ctenoideis 
50  ad  60  in  sérié  longitudinali.  Caput  convexum  compressum 
superne  tantum  squamatum.  Dorsales  non  contiguae,  radiosa  spi- 

21* 


324  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

nosa  multo  sed  minus  duplo  longior.  Caudalis  obtusa.  B.  4. 
D.  6 — 11  vel  12.  A.  10  vel  11. 

Sp.  typ.  Euctenogobius  hadiis  GUI. 

OxYURiCHTHUs  Blki*  Gobüchtbys  Klunz. 

Dentes  intermaxillares  uniseriati  vel  subbiseriati  sérié  in- 
terna rudimentarii , inframaxillares  pluriseriati  sérié  externa  lon- 
giores;  canini  nulli.  Corpus  elongatum  compressum,  squamis 
ctenoideis  vel  cycloideis  40  ad  90  in  sérié  longitudinali.  Caput 
compressum  obtusum  convexum  regione  temporali  tantum  squa- 
matum.  Linea  nucbae  mediana  alepidota.  Isthmus  latus.  Pinnae; 
dorsales  contiguae,  radiosa  spinosa  duplo  longior,  caudalis  lan- 
ceolata  capite  longior.  B.  4.  D.  6 — 11  ad  15.  A.  14  vel  15. 

Sp.  typ.  Oxyurichihys  belosso  Blkr. 

Subphalanx  d.  Chaelurich  thy i. 

Gobiini  corpore  elongato,  altitudine  8 ad  9 in  ejus  longitudine, 
antice  cylindraceoj  capite  convexo  nec  depresso  nec  compresse, 
superne  lateribusque  squamato;  dentibus  caninis  nullis;  maxilla 
inferiore  pluricirrato  ; caudali  obtuse  vel  acute  lanceolata  capite 
longiore. 

Chaeturighthys  Kich. 

Dentes  maxillis  biseriati  sérié  externa  ceteris  confertis  se- 
taceis  longiores  fixi  acuti  curvati  subulati  oblique  antrorsum  spec- 
tantes.  Caput  obtusiusculum , rostre  convexo,  maxilla  inferiore 
utroque  ramo  cirris  3.  Squamae  cycloideae  53  cire,  in  sérié  lon- 
gitudinali. Dorsalis  radiosa  dorsali  spinosa  triple  circiter  longior. 
Caudalis  acute  lanceolata.  B.  5.  D.  8 — 23  vel  24.  A.  20  vel  21. 

Sp.  typ.  Chaelurich  thy  s stigmalias  Rich. 

Amblychaeturichtiius  Blkr. 

Dentes  intermaxillares  pauciseriati  sérié  externa  conspicue 
longiores  fixi  subulati  rectiusculi,  inframaxillares  autici  triseriati 
latérales  biseriati  sérié  externa  longiores  rectiusculi  mobiles  oblique 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  ü’UN  SYSTEME  NATUREL  DES  ROBIOÏDES.  325 

antrorsum  directi.  Dentes  pliaryngeales  setacei.  Capiit  obtusum  rostro 
valde  convexo,  maxilla  inferiore  utroque  ramo  cirris  3.  Squaraae 
ctenoideae  40  cire,  in  sérié  longitudinali,  ciliis  valde  décidais. 
Dorsalis  radiosa  spinosa  duplo  longior.  Caudalis  obtusiuscule 
rotundata.  Isthmus  angustus.  li.  5.  D.  8— 17  vel  18.  A.  14  ad  16. 
Sp.  typ.  Chaelurichthys  hexanema  Blkr. 

Parachaeturichthys  Blkr. 

Dentes  utraqne  maxilla  pluriseriati  acuti  sérié  externa  ceteris 
confertis  longiores  fixi  rectiusculi,  pbaryngeales  conici  et  setacei. 
Caput  obtusum  convexum,  maxilla  inferiore  utroque  ramo  cirris 
pluribus.  Squamae  ctenoideae  30  cire,  in  sérié  longitudinali.  Dor- 
salis radiosa  spinosa  minus  duplo  longior.  Caudalis  obtuse  lan- 
ceolata.  Isthmus  latus.  B.  4 (nec  3 ut  in  descriptione  speciei 
typicae).  D.  6 — 11.  A.  10. 

Sp.  typ.  Chaeturichthys  polynema  Blkr. 

Subphalanx  e.  GohionellL 

Gobiini  corpore  valde  elongato,  altitudine  10  ad  14  in  ejus  longitu- 
dine;  capite  non  depresso  obtuso,  convexo,  squamato,  genis  alepidoto; 
maxilla  inferiore  cirris  nullis  ; pinnis,  dorsali  radiosa  elongata  dorsali 
spinosa  triplo  cire,  longiore,  caudali  lanceolata.  Isthmus  latus. 
Dentes  canini  nulli. 

Synechogobius  Gill. 

Dentes  maxillis  pluriseriati  acuti  fixi , sérié  externa  longiores. 
Caput  superne  tantum  squamatum,  rostro  oculo  multo  longiore. 
Squamae  100  cire,  in  sérié  longitudinali.  Dorsales  distantes. 
D.  8 vel  9—20.  A.  17. 

Sp.  typ.  Gobius  hasia  Schl. 

Gobionellus  Gir.  zz:  Samaragdus  Poey. 

Dentes  maxillis  pluriseriati  minimi  sérié  externa  setacei 
mobiles.  Caput  superne  operculisque  squamatum,  rostro  obtuso 
brevi.  Squamae  ctenoideae  70  cire,  in  sérié  longitudinali  postrorsum 
magnitudine  valde  accrescentes.  Dorsales  contiguae.  D.  6 vel  7 — 
14.  A.  15. 


326  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’u.\  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

Sp.  tjp.  Gohius  lanceolatus  Bl.  (Sp.  typ.  Girardiana  Gobioacllus 
haslalus  non  satis  cognita). 

Phalanx  Periophthalmini. 

Gobiiformes  corpore  elongato  antice  cylindraceo,  capite  valde 
convexo  truncato  compresso  superne  lateribusque  dense  squamato , 
oculis  erectilibus  superne  cute  lata  mobili  squamata  inferne  pal- 
pebra  lata  libéra  protectis,  cute  rostro-suborbitali  pendula;  den- 
tibus  maxillis  uni-vel  biseriatis  conicis  fixis,  pbaryngealibus  ex 
parte  acicularibus  ex  parte  conicis;  squamis  cycloideis;  pinnis 
dorsalibus  longitudine  subaequalibus  ^ ) anteriore  flabelliformi , pec- 
toralibus  longibrachiatis  valde  squamatis,  caudali  oblique  rotun- 
data,  ventrali  integra  vel  profunde  bipartita.  B.  5. 

I 

I $ 

Periophthalmus  Bl.  Scbn. 

Dentes  utraque  maxilla  uniseriati  ex  parte  canini;  pharyn- 
geales  multiseriati  plurimi  aciculares  gracillimi.  Ventrales  dimidio 
basali  tantum  unitae.  Squamae  valde  parvae,  95  cire,  in  sérié 
longitudinali.  D.  11  vel  12 — 12  ad  14.  A.  11  vel  12. 

Sp.  typ.  Periophthalmus  papilio  Bl.  Schn. 

Euchoristopus  Gill. 

Dentes  utraque  maxilla  uniseriati , canini  nulli  ; pharyngeales 
pauciseriati  plurimi  conici.  Ventrales  dimidio  basali  tantum  unitae. 
Squamae  parvae,  .60  ad  100  cire,  in  sérié  longitudinali.  D.  10 
ad  15—12  ad  14.  A.  11  ad  14. 

Sp.  typ.  Periophthalmus  Koelreuteri  Val. 

Periophthalmodon  Blkr. 

Dentes  intermaxillares  anteriores  biseriati  sérié  externa  ca- 
nini, inframaxillares  uniseriati  ex  parte  canini,  pharyngeales 
pauciseriati  majore  parte  conici  validi.  Ventrales  basi  tantum  vel 
membrana  tenui  laxa  totae  unitae,  radiis  pinnis  unitis  2 mediis 

Sec.  Valenciennes  in  Perioplitlialmo  Freycineti  Val.  spinis  4 tantum,  an 
forsan  statu  abnormali,  vel  spccies  generis  proprii. 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  UES  GOBIOÏDES,  327 

quam  radiis  ceteris  magis  distantibus.  Squamae  médiocres , 50  ad 
60  in  sérié  longitudinali.  D.  10  ad  15 — 12  vel  13.  A.  12  vel  J3. 

Sp.  typ.  Periophthahnus  Schlosseri  Val. 

Phalanx  Apocrypteini. 

Gobiiformes  corpore  elongato  , capite  compressiusculo  obtuso  con- 
vexe superne  antice  lateribusque  dense  squamato , dentibus  maxil- 
lis  uniseriatis  inframaxillaribus  subhorizontalibus.  Dentes  insuper 
canini  2 inframaxillares  postsymphysiales.  Squamae  corpore  parvae 
cycloideae.  Dorsalis  radiosa  elongata  spinosa  plus  duplo  ad  plus 
triplo  longior.  Ventralis  integra  subinfundibuliformis  basi  tantum 
ventri  adnata.  Isthmus  latus.  B.  5. 

Subphalanx  a.  Apocryptei. 

Apocrypteini  caudali  lanceolata,  oculis  vix  vel  non  erectilibus 
palpebra  libéra  nulla,  pinna  dorsali  spinosa  non  altiore  quam  longa. 

Apogryptodon  Blkr. 

Dentes  intermaxillares  ex  parte  integri  truncati  ex  parte  ca- 
nini acuti,  inframaxillares  truncati  incisura  profunda  bilobi.  Squamae 
40  ad  50  in  sérié  longitudinali,  deciduae.  Dorsales  subcontiguae, 
radiosa  spinosa  minus  triplo  longior.  D.  6 — 23.  A.  22  vel  23. 

Sp.  typ.  Apocryptes  madurensis  Blkr. 

Parapogryptes  Blkr. 

Dentes  utraque  maxillaacuti  subulati  integri,  intermaxillares 
ex  parte  canini.  Squamae  75  cire,  in  sérié  longitudinali , deciduae. 
Dorsales  contiguae,  radiosa  spinosa  triplo  longior.  D.  6 — 26 
ad  30.  A.  26  ad  29. 

Sp.  typ.  Apocryptes  macrolepis  Blkr. 

Apocryptes  Val.  — Gobileptes  Swns. 

Dentes  utraque  maxilla  apice  incisi,  intermaxillares  canini 
nulli.  Squamae  100  cire,  in  sérié  longitudinali , sessiles.  Dorsales 
contiguae,  radiosa  spinosa  triplo  fere  longior.  D.  5 — 21.  A.  22. 

Sp.  typ.  Apocryptes  hato  Val. 


328  1*.  BLEEKER.  ESQUISSE  d’uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 


PSEUDAPOGRYPTES  Blkl*. 

Dentes  utraque  maxilla  apice  tumidi  obtusi  non  incisi,  in- 
termaxillares  canini  nulli.  Sqnamae  minimae,  200  cire,  in  sérié 
longitudinali.  Dorsales  distantes  ; radiosa  spinosa  quadruple  cire, 
longior.  D.  5 — 28  ad  31.  A.  26  ad  30. 

Sp.  typ.  Apocryptes  lanceolalus  Gant. 


Subphalanx  b.  B oleophlhalmi, 

Apocrypteini  caudali  lanceolata  vel  oblique  rotundata,  oculis 
erectilibus  cute  supraorbitali  mobili,  cute  infraorbitali  palpebram 
latam  liberam  efficiente;  dorsalibus  distantibus,  anteriore  altiore 
quam  longa. 

Boleophthalmus  Val. 

Dentes  intermaxillares  conici  acuti  simplices  anteriores  canini 
curvati,  inframaxillares  apice  dilatati  truncati  vel  oblique  emar- 
ginati.  Squamae  60  ad  plus  quam  100  in  sérié  longitudinal!. 
Dorsales  distantes,  spinosa  altior  quam  longa,  radiosa  spinosa 
plus  duplo  ad  triple  longior.  D.  5 — 24  ad  28.  A.  24  ad  26. 

Sp.  typ.  Boleophthalmus  Boddaerti  Val. 

Sc  A RTE  LAOS  Swns.  = Boloops  Gill. 

Dentes  intermaxillares  anteriores  canini  subulati  curvati  inaequa- 
les , inframaxillares  acuti  simplices  médiocres.  Squamae  minimae , 
sparsae,  capite  et  trunco  antice  vix  conspicuae.  Dorsales  distantes, 
spinosa  plus  triple  altior  quam  longa,  radiosa  spinosa  plus 
quintuple  longior.  D.  5 vel  6 — 25  ad  27.  A.  24  ad  26. 

Sp.  typ.  Boleophthalmus  viridis  Val. 


Subfamilia  AMBLYOPODIFOKMES. 

Gobioidei  pinnis  verticalibus  unitis , dorsali  unica  valde  elongata 
parte  spinosa  brevi  forma  non  vel  vix  distincta , oculis  minimis  vel 
inconspicuis , istlimo  lato,  squamis  cycloideis  vel  nullis. 


r.  BLEEKER.  ESQUISSE  d'uN  SYSTE31E  NATUREL  DES  GOBIOÏDES.  329 


Phalanx  A m b l y o r o d i n i. 

Amblyopodiformes  corpore  valde  eloDgato,  fossa  posttemporali 
nulla,  ventrali  iûtegra,  basi  tantum  ventri  adnata.  B.  5. 

Tyntlastes  Günth. 

Dentes  utraque  maxilla  uniseriati  parvi  subborizontales , ca- 
uini  nulli.  Corpus  elongatum  altitudine  10  cire,  inejus  longitudine. 
Maxilla  inferior  cirris  nullis,  antice  non  truncata.  Squamae  mini- 
mae  imbricatae.  Caudalis  basi  tantum  cum  dorsali  et  anali  unita 
D.  6—21.  A.  21. 

Sp.  typ.  Amblyopiis  (Tyntlastes)  sayitta  Günth. 

Brachyamblyopus  Blkr. 

Dentes  utraque  maxilla  acuti  subverticales , sérié  externa  ceteris 
longiores  curvati , canini  nulli  ; intermaxillares  biseriati , inframaxil- 
lares  pluriseriati.  Corpus  elongatum  altitudine  9 ad  10  in  ejus 
longitudine , capite  compresse  non  latiore  quam  alto  obtuso  convexe, 
oculis  minimis.  Maxilla  inferior  cirris  nullis.  Squamae  parvae 
dite  quasi  immersae.  Caudalis  tota  cum  dorsali  et  anali  unita. 
B.  5.  D.  6/29  ad  6/32.  A.  28  ad  34. 

Sp.  typ.  Amblyopus  brachysoma  Blkr. 

Gobioides  Lac.  = Ognichodes  Swns. 

Dentes  utraque  maxilla  acuti  pluriseriati,  seriebus  internis 
minimi,  sérié  externa  médiocres  vix  curvati  numerosi,  canini  vel 
caninoidei  nulli , inframaxillares  postsymphysiales  crassiores  nulli  ; 
pbaryngeaies  minutissimi  setacei  numerosissimi.  Corpus  elonga- 
tum valde  compressum  altitudine  IV/2  ad  14  in  ejus  longitudine. 
Capite  compressum  multo  altius  quam  latum  obtusum  convexum, 
oculis  parvis  conspicuis.  Maxilla  inferior  antice  non  truncata  inferne 
cirris  nullis.  Lingua  libéra  truncata.  Squamae  trunco  150  cire,  in 
sérié  longitudinali , anteriores  minirnae  posteriores  majores  imbri- 
catae.  Pinna  caudalis  basi  tantum  cum  dorsali  et  anali  unita, 
B.  5.  D.  6/17.  A.  17. 

Sp.  typ.  Gobioides  Broussoneli.  Lac. 


330  P.  BLEEKER.  ESQUISSE  ü’UN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES. 

Odontamblyopus  Blkr. 

Dentes  utraque  raaxilla  pluriseriati  sérié  externa  ceteris  plu- 
ritoties  loogiores  acuti  subulati  curvati  canini,  seriebus  internis 
conici  obtusiusculi  ; inframaxillares  postsymphysiales  2 conici 
crassi  ceteris  majores;  pharyngeales  minutissimi  setacei  numero- 
sissimi.  Corpus  elongatum  compressiusculum  altitudine  10  ad  12 
in  ejus  longitudine,  capite  altiore  quam  lato  obtuso  convexo, 
oculis  ,vix  conspicuis.  Maxilla  inferior  antice  non  truncata  inferne 
cirris  nullis.  Lingua  libéra  truncata.  Squamae  minimae  cute  im- 
mersae.  Pinna  caudalis  basi  tantum  cum  dorsali  et  anali  unita. 
B.  5.  D.  6/34  ad  6/40.  A.  33  ad  38. 

Sp.  typ.  Gobioides  ruhicundus  Ham.  Buch. 

Taenioides  Lac.  = Amblyopùs  Val.  :=  Psilosomus  Swns. 

Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  sérié  externa  longiores  acuti 
canini  curvati,  seriebus  internis  conici  obtusiusculi.  Corpus  valde 
elongatum,  altitudine  12  ad  plus  quam  25  in  ejus  longitu- 
dine.  Oculi  inconspicui  vel  subinconspicui.  Maxilla  inferior  inferne 
cirris  cutaneis,  antice  truncata.  Squamae  plane  nullae.  Pinna 
caudalis  basi  cum  dorsali  et  anali  unita.  D.  6/43  ad  6/50. 
A.  45  ad  49. 

Sp.  typ.  Taenioides  Hermannianus  Lac. 

Pbalanx  Trypaughenini. 

Amblyopodiformes  corpore  et  capite  valde  compressis , fossa  post- 
temporali  profunda,  squamis  deciduis  parvis,  ventrali  integra  vel 
profunde  incisa  basi  tantum  ventri  adnata.  B.  4. 

Trypauchen  Val. 

Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  sérié  externa  longiores 
acuti  validi  seriebus  internis  conico-graniformes.  Crista  occipitalis 
laevis.  Squamae  100  cire,  in  sérié  longitudinali.  Ventralis  integra. 
^ D.  6/41  ad  6/49.  A.  40  ad  46.  V 1/5.  5/1. 

Sp.  typ.  Trypauchen  vagina  Val. 


P.  BLEEKER.  ESQUISSE  d'uN  SYSTEME  NATUREL  DES  GOBIOÏDES.  331 

Trypauciienichthys  Blkr  — Ctenotrypauchen  Steind. 

Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  sérié  externa  longiores 
acuti  validi,  seriebus  internis  conico-graniformes.  Crista  occipitalis 
scabra.  Squamae  50  ad  65  in  sérié  iougitudinali.  Ventralis  incisura 
profunda  sabbipartita.  D.  6/50  ad  6/59  A.  45  ad  51  V.  1/4.4/1. 

Sp.  typ.  Trypauchenichlhys  typiis  Blkr. 

Siibfamilia  LUCIOGOBIIFORMES. 

Gobioidei  corpore  elongato  alepidoto  pinna  dorsali  unica  brevi 
caudae  quam  capite  propiore  parte  spiuosa  distincta  nulla,  ven- 
tralibus  totis  unitis. 

Luciogobius  GUI. 

Dentes  utraque  maxilla  pluriseriati  sérié  externa  ceteris  lon- 
giores.  Corpus  valde  elongatum,  altitudine  12  ad  13  in  ejuslon- 
gitudine.  Caput  depressum,  oculis  parvis.  B.  4.  D.  2/12.  A.  12. 
V.  1/5.5/1. 

Sp.  typ.  Luciogobius  guUatus  GUI. 


Hagae  Comitisy  Calendis  Maii  1874. 


ADDENDA. 

Genus  in  Systemate  Gobioideorum  omissum. 

Lophiogobius  Günth. 

Dentes  utraque  maxilla  biseriati , sérié  externa  ceteris  longiores 
distantes  subhorizontales;  canini  nulli.  Squamae  crenulatae,  38 
cire,  in  sérié  longitudinali.  Caput  depressum  latum.  Maxilla  inferior 
cirris  nullis.  Dorsales  non  continuae,  radiosa  spinosa  multo  longior, 
spinosa  spina  anteriore  rigida  pungente.  Caudalis  elongata  acuta. 
D.  7—17.  A.  17. 

Spec.  typ.  Lophiogobius  ocelliçauda  Günth. 

(Genus  quoad  dentitionem  generibus  Zonogobio  et  Odonto- 
gobio  affine;. 


SUR  L’INFLUENCE  QUE  LA  NATURE 


DE  LA 

MEMBRANE  EXERCE  SUR  L^OSMOSE  ÉLECTRiaUF., 

PAR 

Th.  W.  ENQELMANN. 


Dans  mon  travail  sur  les  glandes  cutanées  de  la  grenouille  ^ ) , 
j’étais  arrivé  à la  conclusion  que  les  forces  électromotrices,  qui 
sont  la  cause  des  courants  de  la  peau,  ont  leur  siège  principa- 
lement dans  la  couche  extérieure  contractile  de  l’épithélium  glan- 
dulaire , et  que , dans  les  glandes  elles-mêmes , ces  forces  sont  en 
général  dirigées  à travers  la  paroi  vers  la  cavité  de  l’organe. 
Par  l’étude  des  rapports  existant  entre  les  actions  électromotrices 
et  les  actions  sécrétoires  des  glandes,  j’avais  en  outre  acquis  la 
conviction  que  les  forces , qui  poussent  le  produit  de  la  sécrétion 
à travers  l’épithélium  de  la  glande  dans  sa  cavité,  ne  sont 
autres  que  les  forces  électromotrices  dont  il  vient  d’être  question. 
Comme,  au  pôle  supérieur  des  glandes,  les  courants  électriques 
retournent  de  la  cavité  dans  les  cellules  musculaires,  et  que  par 
suite  il  doit  se  produire  ici  une  action  cataphorique  de  direction 
contraire,  c’est-à-dire  de  dedans  en  dehors,  ma  théorie  de  la 
sécrétion  impliquait  la  supposition  que  les  forces  électromotrices 
entraînent  plus  facilement  le  liquide  des  cellules  de  l’épithélium 
dans  la  cavité  de  la  glande , qu’elles  ne  le  ramènent  de  cette  cavité 

*)  O'/iderzoek , geclaan  in  het  physiol.  lahor.  cler  UtrecMsche  lloogescJiool , 3e 
sér. , t.  II,  1873,  p.  1 et  suiv. 


TH.  W.  EiNGELMAlNN.  SUR  l’iNFLUENCE  QUE  LA  WATURE,  ETC.  333 

dans  les  cellules  musculaires.  Cette  supposition  eût  été  purement 
gratuite  si  les  conditions  qui  influencent  la  sortie  du  liquide , de 
la  cavité  dans  les  cellules  musculaires  , avaient  été  les  mêmes  que 
celles  qui  règlent  son  entrée , de  Tépithélium  dans  la  cavité  de 
la  glande.  Mais  tel  n'était  nullement  le  cas:  au  pôle  supérieur 
des  glandes , les  courants  électriques , pour  retourner , passent  di- 
rectement de  la  cavité  dans  les  extrémités  des  fibres  musculai- 
res 1 ) ; la  couche  épithéliale  intérieure  manque  en  ce  point.  Au 
contraire,  pour  pénétrer  dans  la  cavité,  les  courants  ont  partout 
à traverser  cette  couche  épithéliale  interne.  Or  cette  couche,  en 
ce  qui  concerne  l'entrée  et  la  sortie  de  liquides  aqueux  par  voie 
osmotique  ordinaire,  offre  une  résistance  incomparablement  plus 
petite  que  les  fibres  musculaires  des  glandes , ainsi  que  me  l'ont 
appris,  entre  autres,  les  changements  de  volume,  relativement  très 
rapides  et  très  considérables , qu'éprouvent  les  cellules  épithéliales 
à la  moindre  variation  du  degré  de  concentration  du  milieu  am- 
biant. Par  analogie , on  était  donc  autorisé  à supposer  que  le  mou- 
vement électro-osmotique  du  liquide  rencontrerait  également,  de 
la  part  des  cellules  épithéliales  non  contractiles,  une  résistance 
beaucoup  plus  faible  que  de  la  part  des  fibres  musculaires. 

Il  semble  toutefois,  — je  dois  l'inférer  de  quelques  objections 
faites  à mon  hypothèse  ^),  — que  l'on  n'accorde  pas  généralement 
l'exactitude  de  la  supposition  en  question,  et  que  l'on  conserve  des 
doutes  au  sujet  de  l'influence  considérable  que  la  structure  des 
membranes  exercerait  sur  l'action  osmotique  des  courants  qui  les 
traversent.Bien  que , en  principe , la  réalité  de  cette  influence  me 
paraisse  à peine  avoir  besoin  d'être  démontrée  expérimentalement, 
j'ai  pourtant  voulu  étudier  d'un  peu  plus  près  la  relation  entre 
la  nature  des  membranes  et  les  actions  électro-osmotiques , d'autant 
.plus  que  la  littérature  de  la  science  ne  fournit  encore  rien  sur 
cette  matière. 

Les  expériences  exécutées  jusqu'ici,  et  surtout  les  recherches  d^ 

1.  c,  p.  208. 

Hermann;  ArcMv  fiir  die  Physiologie  etc.  herausgeg.  von  E.  Pfüger,  t.  VI, 
1872,  p.  559.  — Bernstein,  Centralblatt fiir  die  medic.  Wissensch.y  1873. 


334  TH.  W.  ENGELMANN.  SUR  l’iNFLUENCE  QUE  LA  NATURE 

M.  Wiedemann  1 ) , avaient  établi  que  la  quantité  de  liquide , qu’un 
courant  électrique  fait  passer  en  un  temps  déterminé  à travers  une 
cloison  poreuse  (d’argile) , est  directement  proportionnelle  à l’inten- 
sité du  courant  électrique,  qu’elle  est  en  général  d’autant  plus 
grande  que  le  liquide  oppose  plus  de  résistance  à la  transmission 
du  courant , et  que  , toutes  choses  égales  d’ailleurs , elle  est  indé- 
pendante de  la  surface  et  de  l’épaisseur  de  la  cloison. 

Pour  montrer  l’influence  que  la  nature  de  la  cloison , c’est-à-dire 
sa  structure  intime,  exerce  sur  l’action  osmotique  du  courant,  j’ai 
eu  recours  à deux  sortes  d’expériences. 

Dans  le  premier  cas  (Méthode  A)  j’observais  et  mesurais  les 
variations  de  niveau  du  liquide  dans  un  espace  compris  entre  deux 
cloisons  ou  membranes  de  structure  différente.  Un  pareil  osmomètre 
différentiel  ne  met  pas  seulement  en  évidence  directe  le  fait  de 
l’osmose  électrique,  mais  aussi  l’influence  spécifique  de  la  membrane, 
et  par  l’ascension  ou  la  dépression  du  liquide , rattachée  à la  direc- 
tion du  courant  électrique , il  montre  à travers  laquelle  des  deux 
membranes  l’osmose  électrique  se  fait  avec  le  plus  de  facilité.  — 
Dans  le  second  cas  (Méthode  B) , un  courant  électrique  d’intensité 
déterminée,  maintenue  constante  à l’aide  d’un  rhéostat,  traver- 
sait des  membranes  de  structure  différente,  et  on  mesurait  ou 
bien  la  quantité  de  liquide  qui,  sous  l’influence  de  ce  courant, 
passait  en  un  temps  déterminé , ou  bien  le  temps  qui  était  néces- 
saire pour  le  passage  d’une  quantité  déterminée  de  liquide. 

U osmomètre  différentiel  ^ employé  dans  les  expériences  d’après 
la  méthode  A , se  compose  de  : 

1°.  La  pièce  centrale  ou  l’auge,  plaque  de  caoutchouc  dur  à 
faces  planes  et  parallèles  (épaisse  de  8 mm.,  haute  de  62  mm. 
et  large  de  42  mm.),  qui  est  percée  en  son  milieu  d’une  ouver- 
ture cylindrique  de  30  mm.  de  diamètre.  Gette  ouverture  commu- 
nique par  un  canal  cylindrique  de  4 mm.  de  largeur,  qui  s’élève 
verticalement  dans  l’épaisseur  de  la  plaque , avec  une  courte 
douille  en  laiton , sur  laquelle  peuvent  être  vissés , de  manière  à 

O Wiedemann , in  PoggendorfF’s  Annal.  ^ t.  87.  1852,  p.  321  sqq. . t.  99, 
1856 , p.  177  sqq. 


DE  LA  MEMBRANE  EXERCE  SUR  l’oSMOSE  ÉLECTRIQUE.  335 

ne  pas  laisser  échapper  de  liquide , divers  tubes , manomètres , etc. 

2°.  Deux  flacons  en  verre , à section  carrée  et  à col  rond , hauts 
d’environ  8 cm.  et  larges  de  42  mm. , dont  une  des  faces  latéra- 
les est  dressée  à l’émeri  et  percée  d’une  ouverture  ronde  de  30  mm. 
de  diamètre.  A l’intérieur,  au-devant  de  chaque  ouverture,  se 
trouve  une  électrode  discoïdale  en  platine , fixée  à un  fil  de  pla- 
tine , qui  est  scellé  dans  le  verre , près  du  bord , et  qui  aboutit 
extérieurement  à une  borne , destinée  à recevoir  le  fil  de  la  pile. 

Quand  on  veut  procéder  à l’expérience,  les  deux  membranes 
ou  plaques  poreuses,  qu’il  s’agit  de  comparer,  sont  appliquées  sur 
les  deux  côtés  de  l’ouverture  de  la  pièce  centrale,  puis  celle-ci 
est  placée  entre  les  deux  flacons  en  verre , qui  peuvent  alors  être 
serrés  l’un  contre  l’autre  au  moyen  de  deux  pinces  en  laiton.  — 
Lorsqu’on  opère  sur  des  cloisons  non  élastiques  (des  plaques  d’argile, 
par  ex.),  il  faut,  bien  entendu,  pour  éviter  les  ruptures  et  les  fui- 
tes , les  garnir  sur  chaque  face  latérale  d’un  cadre  élastique , par 
exemple  d’un  anneau  de  vessie  humide.  — Les  membranes  organi- 
ques minces  et  très  flexibles,  telles  que  la  peau  de  grenouille, 
la  membrane  de  la  vessie  etc. , doivent  être  bien  tendues , de 
manière  à offrir  une  surface  lisse  et  à ne  pouvoir  s’infléchir  même 
lorsqu’il  se  produit  une  grande  différence  de  pression  aux  deux 
côtés.  Il  faut  aussi  que  leur  forme  et  leur  position  ne  puissent  pas 
éprouver  de  changement  sensible  par  suite  du  gonflement  ou  de 
la  rétraction  auxquels  pourrait  donner  lieu  l’action  de  certains 
produits  d’électrolyse.  A cet  effet,  je  les  plaçais  entre  deux  petites 
plaques  de  caoutchouc  durci  parfaitement  planes,  épaisses  de  1,5 
mm.,  hautes  de  60  mm.  et  larges  de  42  mm.,  qui  au  milieu, 
dans  un  champ  circulaire  de  30  mm.  de  diamètre , étaient  percées , 
à la  façon  d’un  crible,  de  nombreux  trous  cylindriques.  La  lar- 
geur de  ces  trous  était  de  2 mm. , la  distance  de  leurs  axes  en 
moyenne  de  3 mm.  Maintenue  entre  deux  pareilles  plaques,  la 
membrane  la  plus  flexible  se  comporte  à peu  près  comme  une 
cloison  complètement  rigide. 

Dans  les  expériences  exécutées  d’après  la  méthode  B , la  pièce 
centrale  était  supprimée , et  la  membrane  se  trouvait  par  conséquent 


336  TH.  W.  ENGELMANN.  SUR  l’iNFLUENCE  QUE  LA  NATURE 

placée  directement  enti’e  les  deux  flacons  en  verre.  Du  flacon  qui 
contenait  la  cathode , le  liquide  entraîné  par  le  courant  pouvait 
s’écouler,  par  un  tube  en  forme  de  siphon,  dans  un  petit  verre  calibré. 

Les  autres  dispositions  étaient  les  mêmes  dans  les  deux  mé- 
thodes. Dans  le  circuit  conducteur  étaient  intercalés  une  clef,  un 
commutateur,  un  rhéostat  de  Siemens  et  Halske  (allant  jusqu’à 
10000  S.  E.)  et  un  galvanomètre  gradué  vertical.  Le  courant  était 
fourni  par  une  pile  zinc-charbon  de  Stohrer  (2  à 40  éléments) , ou 
par  une  série  de  petits  éléments  de  Grove  unis  à la  file  l’iin  de 
l’autre. 

Les  membranes  et  les  cloisons  poreuses,  qui  servirent  aux 
expériences,  étaient  les  suivantes:  vessie  de  bœuf  et  de  cochon 
fraîche  ou  bouillie,  membrane  musculeuse  et  membrane  muqueuse 
de  l’estomac , muscles  abdominaux , cartilages , foie  et  poumon  de 
divers  mammifères,  peau  de  grenouille  et  d’anguille,  lamelles  de 
différentes  espèces  de  bois,  tranches  de  pommes  de  terre  et  de 
carottes  crues  ou  cuites,  plaquettes  d’argile  diverses. 

Comme  la  quantité  de  liquide  entraîné  dépend  de  la  nature  de 
ce  liquide , on  employait , dans  toutes  les  expériences  appartenant 
à une  même  série,  le  même  liquide  (eau,  solution  de  sel  marin 
à 0,02  -0,5Vo)?  et  on  avait  soin,  avant  de  commencer  l’expé- 
rience , de  parfaitement  imbiber  du  liquide  les  membranes  ou  les 
cloisons  qu’on  voulait  étudier.  Pour  cela,  les  membranes  étaient 
ordinairement  soumises  a une  immersion  préalable , pendant  plu- 
sieurs heures  ou  plusieurs  jours,  dans  un  très  grand  volume  du 
liquide  en  question.  On  ne  faisait  d’exception  à cette  règle  que 
pour  les  membranes  très  minces  (la  peau  de  grenouille  par  ex.) , 
lorsqu’on  voulait  déterminer  leur  perméabilité  électro-osmotique 
dans  des  conditions  aussi  normales  que  possible. 

J’ai  veillé  tout  spécialement  à ce  que  les  phénomènes  me  fus- 
sent pas  troublés  par  des  actions  d’électrolyse.  Celle-ci , en  effet , 
peut  exercer  une  influence  de  différentes  manières.  En  premier 
lieu,  en  donnant  naissance  à des  courants  osmotiques  ordinaires, 
qui  nécessairement  s’ajoutent  algébriquement  au  flux  électro-os- 
motique. Ces  courants  seront  aisément  reconnus  à ce  qu’ils  ne  com- 


DE  LA  MEMBRANE  EXERCE  SUR  l’oSMOSE  ÉLECTRIQUE.  337 

naencent  que  quelque  temps  après  la  fermeture  du  circuit  et  per- 
sistent aussi  quelque  temps  après  Touverture. 

Pour  les  prévenir,  j’ai  toujours  opéré  avec  des  courants  électriques 
aussi  faibles  que  possible,  en  général  avec  des  courants  qui,  en  cinq 
minutes,  dégageaient  tout  au  plus  1 cm.  cube  du  mélange  détonant 
d’oxygène  et  d’hydrogène.  La  quantité  du  liquide  dans  lequel  plon- 
geaient les  électrodes  était  aussi  toujours  très  grande  comparativement 
à la  quantité  des  ions  mis  en  liberté,  et,  en  outre,  la  plus  petite 
distance  entre  l’électrode  et  la  cloison  était  dans  tous  les  cas  de 
plus  de  5 mm. , ordinairement  de  6 — 10  mm.  ; la  composition  chi- 
mique du  liquide  au  voisinage  immédiat  de  la  membrane , surtout 
pendant  les  premières  minutes  après  la  fermeture  du  circuit , pou- 
vait donc  à peine  varier,  d’autant  moins,  que  les  produits  non 
gazeux  de  l’électrolyse  étaient  chassés  vers  le  haut  par  les  bulles 
de  gaz  qui  s’élevaient  de  la  surface  des  électrodes.  Dans  quel- 
ques cas , surtout  lorsque  l’expérience  devait  se  continuer  pendant 
plusieurs  heures , le  liquide  des  deux  flacons  a aussi  été  renouvelé 
de  temps  en  temps.  Là  où  il  s’agissait  d’observer  des  actions  électro- 
osmotiques faibles,  par  exemple,  de  comparer  dans  l’osmomètre 
différentiel  des  membranes  organiques  à structure  presque  sem- 
blable, je  n’ai  tenu  compte  que  de  l’effet  produit,  pendant  les 
premières  minutes  ou  les  premières  secondes  après  la  fermeture 
du  circuit.  De  cette  manière,  on  est  entièrement  à l’abri  de  l’im- 
mixtion des  courants  osmotiques  ordinaires,  comme  j’ai  pu  d’ailleurs 
le  constater  par  le  fait  que  chaque  fois,  au  moment'  même  de 
l’ouverture,  l’action  osmotique  cessait  complètement.  — J’ai  en 
outre  fait  des  expériences  de  contrôle  avec  l’osmomètre  différen- 
tiel , en  laissant  le  circuit  ouvert , et  en  rendant  le  liquide  d’un  des 
flacons  fortement  acide  par  l’acide  chlorhydrique , celui  de  l’autre 
fortement  alcalin  par  la  soude.  Lorsque  l’auge  était  fermée  par 
deux  membranes  animales  ou  végétales  (peau  de  grenouille , ron- 
delles de  pomme  de  terre  ou  de  bois),  et  remplie  d’eau  ou  de 
solution  de  sel  marin  à 0,02 — 0,5%),  le  niveau  du  liquide  dans 
l’auge  ne  variait  pas  sensiblement  pendant  les  cinq  premières  mi- 
nutes , — mais  si  l’on  fermait  le  circuit,  le  niveau  changeait  immé- 
Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  22 


338  TH.  W.  E.XGELMAN.  SUR  L INFLUENCE  QUE  LA  NATURE 


diatement , dans  le  sens  positif  ou  négatif,  suivant  la  direction  du 
courant  galvanique.  L’auge  communiquait  dans  ces  expériences  avec 
un  tube  en  verre  horizontal,  de  0,8  mm.  de  diamètre  intérieur, 
muni  d’une  échelle  divisée  en  millimètres.  Une  augmentation  ou 
une  diminution  de  volume  du  liquide  contenu  dans  l’auge,  lors 
même  qu’elle  ne  s’élevait  qu’à  0,3  mm.  cub. , pouvait  donc  encore 
être  facilement  observée. 

L’électrolyse  peut,  en  second  lieu , exercer  une  influence  par  le 
changement  qu’elle  apporte  à la  composition  du  liquide  aux  deux 
côtés  de  la  cloison,  en  tant  que  la  quantité  de  liquide  entraînée 
par  voie  électro-osmotique  dépend  de  la  composition  du  liquide 
(voir  ci-dessus).  Par  chaque  section  transversale,  sur  le  trajet  du 
courant,  il  ne  passera  pas  alors,  toutes  choses  égales  d’ailleurs, 
la  même  quantité  de  liquide.  Cette  influence  perturbatrice  pourra 
surtout  se  faire  sentir  dans  l’osmomètre  différentiel.  Si  à l’anode , 
par  exemple,  le  liquide  est  modifié  de  telle  façon  qu’il  soit  plus 
facilement  entraîné  par  le  courant  que  celui  qui  occupe  l’auge , il 
pénétrera  trop  de  liquide  dans  ce  réservoir , et  par  suite  la  perméa- 
bilité électro-osmotique  de  la  cloison  située  du  côté  de  l’anode , — 
nous  l’appellerons,  pour  abréger,  la  cloison  positive,  — devra  être 
trouvée  trop  «grande. 

Enfin,  en  troisième  lieu,  — et  c’est  là  le  point  le  plus  im- 
portant de  tous , — il  pourra  arriver  que  par  l’action  des  ions  ^ 
surtout  de  celui  du  liquide  qui  pénètre  en  partant  de  l’anode , les 
propriétés  de  la  membrane , et  notamment  sa  perméabilité  électro- 
osmotique spécifique , se  trouvent  modifiées.  Cette  influence  pourra 
s’exercer  dans  le  même  sens  que  les  deux  autres , ou  bien  en  sens 
opposé,  question  qui  ne  se  laisse  pas  toujours  décider  à priori. 

Les  difficultés  provenant  de  ces  deux  dernières  sources  d’erreurs 
ont  également  été  évitées  en  faisant  choix  de  courants  aussi  fai- 
bles que  possible  et  en  restreignant  l’observation  aux  premiers 
instants  après  la  fermeture  du  circuit. 

11  va  sans  dire  qu’on  a toujours  eu  soin  de  maintenir,  autant 
que  possible , la  même  pression  sur  les  deux  faces  des  membranes. 
— Dans  toutes  les  expériences  appartenant  à une  même  série. 


DE  LA  MEMBRANE  EXERCE  SUR  l’oSMOSE  ÉLECTRIQUE.  339 


la  température  resta  à peu  près  la  même.  Pour  les  expériences 
faisant  partie  de  séries  différentes,  elle  ne  varia  non  plus  que 
dans  les  limites  ordinaires  de  la  température  d'appartement , 
savoir,  14 — 18"  C.  Entre  ces  limites,  aucune  influence  décidée 
de  la  température  sur  l’osmose  électrique  ne  put  être  constatée. 

Les  expériences  ont  mis  hors  de  doute  la  proposition  suivante  : 

La  nature  de  la  cloison  a une  in/luence  importante  sur  l'osmose 
électrique. 

Si  l’on  entend  par  constante  de  la  perméabilité  électro-osmotique 
la  quantité  de  liquide  qu’un  courant  de  l’intensité  1 fait  passer 
dans  l’unité  de  temps  à travers  une  membrane  ou  une  cloison 
j (à  une  température  déterminée) , le  résultat  énoncé  peut  se  traduire 
ainsi:  la  constante  de  la  perméabilité  dépend  de  la  nature  de  la 
membrane. 

Ce  fait  général  se  laisse  démontrer  le  plus  facilement  à l’aide 
, de  l’osmomètre  différentiel,  en  fermant  l’auge  de  celui-ci  par  deux 
I cloisons  différentes , et  observant  alors  la  position  du  liquide  dans 
un  tube  de  verre  étroit  horizontal , vissé  sur  l’auge , et  accompagné 
j d'une  échelle  (méthode  A). 

Presque  toujours  on  voit  alors , aussitôt  que  le  circuit  est  fermé , 
le  liquide  monter  ou  descendre  dans  le  tube , et  le  sens  du  mou- 
vement se  renverser  quand  on  renverse  le  courant  lui- même.  On 
peut  aussi  laisser  s’écouler  le  liquide  de  l’auge,  par  un  tube 
recourbé  en  siphon,  dans  un  petit  vase  calibré  ou  pesé  (méthode  A'). 

Je  donnerai  ici  les  résultats  de  quelques  expériences. 

Expériences  d’après  la  méthode  A. 

La  première  colonne  du  tableau  I indique  le  numéro  d’ordre 
de  l’expérience  ; la  deuxième  et  la  troisième , la  nature  des  deux 
/cloisons;  le  quatrième,  la  direction  du  courant  électrique  par  rap- 
I port  aux  deux  cloisons;  la  cinquième,  l’écart  permanent  de 
l’aiguille  galvanométrique , tel  qu’il  était  observé  pendant  l’expé- 
rience ; la  sixième , le  nombre  de  millimètres  dont  le  liquide  bais- 
I sait  (I)  ou  montait  (|)  dans  le  tube  abducteur  de  l’auge;  la 
septième,  le  temps  nécessaire  pour  produire  cet  effet  ; la  huitième , 

22* 


340  TH.  W.  ENGELMANN.  SUR  l’iNFLUENCE  QUE  LA  NATURE 

eufin,  la  quantité  de  liquide  trouvée  par  Texpérience,  réduite  à 
1 minute  de  temps  et  à Tunité  d'intensité,  cette  unité  étant 
l’intensité  du  courant  qui  en  1 minute  dégage  1 cm.  cube  de  gaz 
explosif  en  agissant  sur  l'acide  sulfurique  à 1%.  — Le  tube  dans 
lequel  on  observait  l'ascension  et  la  dépression  du  liquide  de  l’auge 
avait  dans  les  expériences  n®.  1 — 7 un  diamètre  intérieur  de 
0,8  mm.,  et  dans  les  expériences  8 — 11  un  diamètre  de  2,3  mm. 

TABLEAU  I. 

Expériences  1 — 7.  L'osmomètre  est  rempli  d'eau  de  pompe. 


I.  ’ II.  III.  IV.  V.  VI.  VII.  VIII. 


Ht 

Plaque  d’argile  No.  1 

n 

Plaque  d’argile  No.  4 

n 

lOo 

10^ 

O O 

kf»-  ‘fi- 
O O 

3868 

3868 

2693 

2693 

2693 

2606 

.a 

Plaque  d’argile  No.  2 
// 

H 

H 

Plaque  d’argile  No.  4 
// 

// 

// 

10^ 

lOo 

10° 

10° 

50  1 
50  1 
50  1 
50  1 

5.6 

5.6 

5.6 

5.8 

Plaque  d’argile  No.  3 

If 

Peau  de  grenouille 
// 

10° 

10° 

100  j 
100  l 

12.0 

12.0 

2512 

2512 

Mi 

Plaque  d’argile  No.  4 
// 

Peau  de  grenouille 
// 

10 

lOo 

100  1 
100  1 

15.0 

15.0 

2010 

2010 

la 

h' 

{d 

Peau  de  grenouille 
(vieille  de  4 jours) 
// 

'/ 

n 

Peau  de  grenouille 
fraîche 
// 

// 

// 

- 

20° 

200° 

20° 

20o 

20  1 
20  1 
20  f 
20  t 

12.4 

11.6 

10.8 

11.0 

242 

262 

278 

274 

Peau  de  grenouille 
(vieille  dè  2 jours) 
// 

Peau  de  grenouille 
fraîche 
// 

- 

20° 

20° 

' 1 
=*  î 

10.0 

9.0 

45 

50 

Ht 

Tranche  de  pomme 
de  terre 
// 

Peau  de  grenouille 
// 

20° 

20° 

1 

6 1 
0 1 

60.0 

60.0 

15 

15 

DE  LA  MEMBRANE  EXERCE  SUR  l’oSMOSE  ÉLECTRIQUE.  341 


Expérieoces  8 — 11.  L’osmomètre  est  rempli  de  Na  Cl  0,Ô5  "/o. 


^\t 

Plaque  d’argile  No.  1 
// 

Cartilage 

// 

- 

260 

26^^ 

20  î 
20 1 

6.5 

6.5 

2552 

2552 

Plaque  d’argile  No.  1 
// 

Tranche  de  pomme 
de  terre 
// 

< — 

350 

350 

20  î 
20  1 

14.0 

14.0 

715 

715 

10 

Plaque  d’argile  No.  1 

Lame  de  bois 

- 

22.5" 

20  î 

36.0 

614 

la 

■i 

Carotte  (coupée  en 
travers) 

n 

Tranche  de  pomme 
de  terre 
// 

- 

550 

55° 

10  î 

10  l 

• 

73.0 

75.0 

29.5 

29 

Expériences  d’après  la  méthode  A'. 

Le  tableau  II  fait  connaître  dans  la  colonne  VI  la  quantité  de 
liquide , en  millimètres  cubes , que  le  courant , de  l’intensité  répon- 
dant à la  déviation  inscrite  dans  la  colonne  IV,  faisait  sortir  de 
l’auge  dans  le  temps  marqué  par  la  colonne  V,  lorsque  l’auge 
était  limitée  par  les  cloisons  spécifiées  dans  les  colonnes  II  à III , 
et  que  le  courant  galvanique  traversait  l’osmomètre  dans  la  direc- 
tion de  II  à III.  Dans  la  colonne  VII  la  quantité  trouvée  est 
réduite  à l’unité  employée  dans  les  expériences  d’après  la  méthode  A. 

TABLEAU  IL 

Expériences  1 — 3.  L’osmomètre  est  rempli  d’eau  de  pompe. 


I.  II. 

III. 

IV. 

V. 

VI. 

VII. 

1 

L j Plaque  d’argile  No.  2 

Plaque  d’argile  No.  4 

70 

300 

750 

2250 

2 j Plaque  d’argile  No.  3 

Peau  de  grenouille 

10° 

300 

1150 

2300 

3 ' Plaque  d’argile  No.  4 

1 

Peau  de  grenouille 

10° 

300 

950 

1900 

342  TH.  W.  EWGELMANN.  SUR  L INFLUENCE  QUE  LA  NATURE 


Expériences  4 — 7.  L’osmomètre  est  rempli  de  Na  Cl  0,02  %• 


i 

é j 'Plaque  d’argile  No.  3 

j Peau  de  grenouille 

30° 

1 1 

140  i 

650 

1048 

5 1 Plaque  d’argile  No.  4 

Peau  de  grenouille 

30° 

60  1 

250 

958 

6 Peau  de  grenouille 

fraîche 

i 

Membrane  musculeuse 
de  l’estomac  (lapin) 

! 300 

1 

250 

200 

182 

1 

7 Muscles  abdominaux 
(lapin) 

Membrane  musculeuse 
de  l’estomac  (lapin) 

30° 

300 

150 

68.5 

Des  chiffres  des  tableaux  I et  II  ressortent  encore  quelques 
particularités  relatives  à Tinfluence  de  la  structure  de  la  membrane 
sur  Tosmose  électrique.  On  remarque  : que  des  membranes  organi- 
sées susceptibles  d'imbibition,  tant  animales  que  végétales  y possèdent 
en  général  une  constante  de  perméabilité  beaucoup  plus  petite  que 
dès  plaques  poreuses  d’argile  y tout  comme  cela  a lieu  par  rapport 
à la  constante  analogue  de  la  filtration.  On  voit  aussi:  que  des 
membranes  animales  ou  végétales  différentes  possèdent  une  perméa- 
bilité différente  (Tableau  I,  expériences  7 et  11 5 Tabl.  II,  6 et  7). 
Ensuite:  que  la  constante  de  perméabilité  d’une  membrane  organique 
peut  changer  avec  le  temps  (Tableau  I,  exp.  5 et  6).  Enfin,  ce 
qui  est  conforme  aux  résultats  obtenus  par  M.  Wiedemann,  que 
la  constante  de  perméabilité  dépend  à un  haut  degré  de  la  nature 
du  liquide  (Tableau  II,  exp.  2 et  4,  3 et  5).  Elle  est  plus  petite 
pour  des  liquides  meilleurs  conducteurs. 

Au  sujet  des  valeurs  absolues  de  la  constante  de  perméabilité 
des  cloisons  étudiées , les  expériences  avec  rosinomètre  différentiel 
ne  peuvent  naturellement  rien  nous  apprendre.  Ces  valeurs  sont 
trouvées  à T aide  des 

Expériences  d’après  la  méthode  B. 

Le  Tableau  III  donne  dans  la  colonne  III  la  déviation  de  Tai- 
guille  du  galvanomètre , déviation  maintenue  au  besoin  constante , 
pendant  l’expérience , à l’aide  d’un  rhéostat  ; dans  la  colonne 
IV,  la  durée  de  l’observation  en  secondes;  dans  la  colonne  V,  la 
quantité  de  liquide , en  millimètres  cubes , qui  s’écoulait  du  flacon 


DE  LA  MEMBRANE  EXERCE  SUR  l’oSMOSE  ÉLECTRIQUE.  343 

contenant  la  cathode  pendant  la  durée  de  l’expérience.  Au  moyen 
de  ces  chiffres  ont  été  calculées  les  constantes  de  perméabilité 
inscrites  dans  la  colonne  VI. 

Les  unités  d’intensité  et  de  temps  sont  les  mêmes  que  précé- 
demment. 

TABLEAU  III. 


Expériences  1 — 12.  L’osmomètre  est  rempli  d’eau. 

I.  II.  III.  lY.  V.  VI. 


1 

plaque  d’argile  No.  1 

5^ 

130 

800 

7385 

2 

//  //  //  2 

13° 

95 

1266 

6330 

3 

//  //  //  4 

200 

480 

5000 

3125 

4 

//  //  n 5 

22° 

150 

600 

1067 

5 

Trauche  de  pomme  de  terre 

22 

300 

466 

415 

6 

// 

20 

290 

400 

413 

7 

Cai’otte  (coupée  en  travers) 

23 

400 

666 

400 

8 

Lame  de  bois 

24 

600 

865 

347 

9 

Peau  de  grenouille  (conservée  2 jours 
dans  l’eau) 

30 

270 

533 

338 

10 

Vessie  de  porc 

30 

320 

600 

321 

11 

Peau  de  grenouille  (fraîche) 

20 

300 

140 

140 

12 

Poumon  de  chat 

30 

400 

200 

85' 

Expériences  13 — 16. 


13 

NaCl  0.06  pCt. 

1 

Plaque  d’argile  No.  1 

20° 

130 

400 

920 

14 

NaCl  0.06  pCt. 

//  // 

20° 

155 

466 

902 

15 

NaCl  0.1  pCt. 

U // 

40° 

60 

250  . 

500 

16 

NaCl  0.02  pCt. 

//  No.  4 

i 30o 

90 

400 

760 

Non-seulement , comme  on  le  voit , les  constantes  diffèrent  très 
considérablement  pour  des  membranes  différentes , même  analogues, 


344  TH.  W.  ENGELMANN.  SUR  l’iNFLUENCE  QUE  LA  NATURE 

mais  la  constante  d’une  seule  et  même  membrane  change  aussi 
dès  que  la  structure  de  la  membrane  éprouve  une  modification.  C’est 
ainsi,  par  exemple,  que  la  peau  de  grenouille  devient  beaucoup 
plus  perméable  en  séjournant  quelque  temps  dans  l’eau  (comp. 
Tabl.  I,  5 et  6,  Tabl.  III,  9 et  11).  En  général,  les  expérien- 
ces indiquent  déjà  que  des  membranes  organiques  molles , con- 
tenant beaucoup  d’eau,  possèdent  une  perméabilité  plus  grande 
que  des  membranes  denses  et  d’une  nature  plus  sèche. 

En  considération  du  point  de  départ  physiologique  de  mes  re- 
cherches , il  m’a  paru  utile  de  soumettre  cette  relation  à une  véri- 
fication ultérieure.  On  ne  pouvait  naturellement  songer  à déterminer 
séparément  la  constante  des  cellules  épithéliales  contractiles  des 
glandes  cutanées  et  celle  des  cellules  non  contractiles  ; et  il  était 
tout  aussi  impossible  de  trouver  deux  membranes  homogènes , dont 
l’une  — analogue  aux  cellules  non  contractiles  des  glandes  — 
possédât  un  grand  pouvoir  d’imbibition , l’autre  — analogue  aux 
cellules  musculaires  des  glandes  — un  pouvoir  faible.  La  plupart 
des  membranes  ont  une  structure  très  compliquée:  elles  se  com- 
posent en  général  de  différentes  sortes  d’éléments  et  de  tissus, 
à pouvoirs  d’imbibition  si  divers,  qu’on  ne  saurait  conclure,  de  la 
constante  osmotique  de  la  membrane  entière,  à celle  de  chacune 
des  parties  constituantes  séparément. 

Pour  lever  cette  difficulté , j’ai  modifié  artificiellement,  en  divers 
sens,  la  capacité  d’imbibition  d’un  certain  nombre  de  membranes 
primitivement  identiques:  chez  les  unes,  je  l’ai  augmentée  en 
les  ramollissant  par  une  courte  immersion  dans  un  alcali  causti- 
que; chez  les  autres,  je  l’ai  diminuée,  en  les  durcissant  dans 
l’alcool , les  acides  minéraux,  le  tannin , les  sels  des  métaux  lourds , 
ou  d’autres  matières  ayant  une  action  analogue.  Chez  les  pre- 
mières , la  perméabilité  devait  alors  devenir  plus  grande  que  dans 
la  membrane  fraîche  ; chez  les  secondes , plus  petite  ^ ). 

Le  résultat  des  expériences  a complètement  confirmé  cette  pré* 

')  Au  sujet  de  l’influence  des  acides  sur  la  perméabilité  on  peut  voir  aussi: 
Heynsius , ArcMv  fur  die  lioU.  Beitràge , I , p.  243  , et  Nederl.  Tijdschrift  voor 
Geneesk.  1860. 


DE  LA  MEMBRANE  EXERCE  SUR  l’oSMOSE  ÉLECTRIQUE.  345 

vision.  Quelques  exemples , réunis  dans  le  Tableau  IV , pourront 
en  faire  foi.  Les  expériences  ont  eu  lieu  suivant  la  méthode  A. 
Les  membranes  employées  étaient  des  morceaux , longs  de  5 cm. 
et  larges  de  4%  cm.,  de  la  peau  abdominale  de  grandes  Ranae 
esculentae.  Les  membranes  1 — 4 provenaient  d’individus  tués  tout 
récemment  ; elles  furent  plongées , la  pendant  2 minutes  dans 
une  dissolution  concentrée  de  sulfate  de  zinc , la  2^  un  temps  égal 
dans  l’alcool  absolu,  la  3^  dans  une  solution  concentrée  de  tannin, 
la  4e  pendant  1 minute  dans 'la  potasse  caustique  à 35  pour  cent; 
après  cela  elles  furent  lavées  durant  une  heure , dans  de  l’eau 
fréquemment  renouvelée.  La  membrane  5 avait  été  conservée  pen- 
dant 2 jours  sous  l’eau,  la  membrane  6 était  fraîche.  Entre  les 
deux  expériences  4^  et  5«,  la  membrane  5 fut  traitée  pendant 
une  minute  par  HCl  à environ  5 p.  c.,  et  la  membrane  6 pendant 
le  même  temps  par  la  soude  caustique  à environ  5 p.  c. , après 
quoi  elles  furent  soumises  à un  lavage  à l’eau , prolongé  durant 
une  heure.  Entre  les  expériences  bd  et  6^?,  l’inverse  eut  lieu:  la 
membrane  6 fut  traitée  par  HCl,  et  5 par  la  soude.  — Lorsque 
les  membranes  étaient  parfaitement  lavées , on  les  plaçait  dans 
l’osmomètre  et  on  remplissait  celui-ci  avec  de  l’eau  de  la  même 
pompe  qui  avait  fourni  l’eau  de  lavage.  Le  tube  d’ascension , qui 
surmontait  l’auge,  avait  un  diamètre  intérieur  de  0,8mm.  Après 
qu’on  s’était  assuré  que  le  niveau  du  liquide  dans  l’auge  restait 
constant  (on  attendait  chaque  fois  4 — 5 minutes) , le  courant  était 
établi,  alternativement  dans  une  direction  et  dans  l’autre.  On 
n’opérait  jamais  pendant  plus  de  10  minutes  avec  la  même  com- 
binaison de  membranes. 

La  disposition  du  Tableau  IV  (voir  p.  346)  est  la  même  que 
celle  du  Tableau  I. 

Ces  expériences  expliquent  en  outre  un  phénomène  qui  s’observe 
presque  constamment  lorsque  deux  membranes  organiques  sont 
exposées  pendant  longtemps , dans  l’osmomètre  différentiel,  à l’action 
du  même  courant  : on  voit  alors , dans  le  cas  où  le  courant  élec- 
trique avait  d’abord  fait  monter  le  niveau  du  liquide,  celui-ci 
s’abaisser  au  bout  de  quelque  temps,  et  même,  au  commencement, 
avec  une  vitesse  croissante. 


346.  TH.  W.  ENHELMANN.  SUR  l’iNFLUENCE  QUE  LA  NATURE 


TABLEAU  IV. 


Membrane  N'’.  1 

Membrane  N°.  4 



150 

60  1 

18. 

666 

S 

//  // 

//  n 

150 

18 

666 

//  // 

U n 

150 

60  f 

18 

666 

\d 

//  U 

U // 

150 

60  j 

18 

666 

Membrane  2 

Membrane  N®.  4 



170 

100  1 

31 

625 

[a 

//  _ // 

//  // 

170 

100  f 

30 

615 

l* 

//  // 

//  // 

170 

lodj 

31 

625 

T 

//  // 

//  U 

//  // 

//  // 

:: 

170 

170 

100  f 

50  i 

30,5 

15 

650 

612 

V 

n // 

//  // 

170 

50  î 

15 

615 

\9 

\h 

1 //  If 

//  // 

170 

50  i 

15 

615 

U // 

//  // 

170 

50  t 

15 

615 

Membrane  N®.  3 

Membrane  N®.  4 



80 

^Oj 

30 

400 

Cl 

I 7 

//  // 

//  // 

8® 

30  1 

30 

400 

(6 

//  // 

//  U 

80 

60  1 

60 

400 

Hd 

//  // 

U // 

80 

60  f 

59,5 

398 

\€ 

\ ^ 

//  n 

//  // 

80 

60 1 

60 

400 

//  // 

//  // 

80 

60  î 

60 

400 

4 

Membrane  N».  5 

Membrane  N®.  6 

200 

H 

10 

45 

//  V 

//  // 

20® 

3} 

9 

50 

//  // 

//  // 

150  . 

10  t 

5,4 

344 

//  U 

//  U 

150 

10  i 

5,4 

344 

U n 

U U 

150 

10  t 

5,4 

344 

[d 

//  // 

V/  // 

15® 

10  1 

5,4 

344 

a 

Y 

//  ^ // 
//  // 

U // 

//  U 

n // 

//  _ // 

— 

20® 

20® 

20® 

20  1 
20 1 
20  i 

10,4 

10,0 

9,6 

288 

300 

315 

[d 

U H 

//  // 

20® 

20  î 

9,6 

315 

Cette  dépression  du  liquide,  après  ascension  préalable,  est 
indubitablement  la  conséquence  de  • Faction  des  ions  sur  les  mem- 
branes; sous  Tinfluence  de  Facide  dégagé,  la  membrane  positive 
devient  plus  difficilement  perméable,  tandis  que  Falcali  mis  en 


DE  LA  MEMBRANE  EXERCE  SUR  l’oSMOSE  ELECTRIQUE.  347 

liberté  produit  un  effet  contraire  sur  la  membrane  négative.  Aussi 
voit-on,  en  pareil  cas,  la  membrane  positive  devenir  blanche  et 
opaque,  la  membrane  négative  devenir  plus  transparente,  et  en 
traitant  la  membrane  positive  par  un  alcali , la  membrane  néga- 
tive par  un  acide,  on  peut  immédiatement  faire  disparaître  la 
différence,  ou  même  la  renverser.  C’est  surtout  pour  prévenir  l’effet, 
mis  ici  en  évidence , des  produits  de  l’électrolyse  sur  la  perméabilité 
spécifique  des  membranes,  que  nous  étions  obligé,  dans  les  ex- 
périences décrites  plus  haut,  d’exclure  autant  que  possible  l’élec- 
trolyse , ou  du  moins  de  tâcher  de  la  rendre  inoffensive. 

En  dehors  de  l’action  des  produits  de  l’électrolyse , l’osmose 
elle-même  peut  modifier  la  perméabilité  des  membranes  organiques, 
même  lorsque  ces  membranes  ont  été  imbibées  d’avance  et  pen- 
dant longtemps  du  liquide  osmotique , de  sorte  qu’elles  n’ont  pas 
à craindre  d’altération  chimique  au  moment  du  passage  du  cou- 
rant. La  nécessité  de  pareilles  modifications  dans  les  corps  poreux 
non  homogènes  a déjà  été  signalée  par  M.  H.  Munk  ^ } , qui  a 
aussi  analysé  théoriquement  les  principaux  cas  possibles.  C’est 
avec  raison,  je  crois,  qu’il  fait  usage  de  cette  propriété  pour  ex- 
pliquer la  ,, résistance  interne  secondaire”  qui  a été  découverte  par 
M.  du  Bois-Keymond  dans  les  tissus  des  plantes  vivantes.  — Du 
reste,  même  dans  les  membranes  homogènes,  l’osmose  seule  paraît 
capable  de  déterminer  des  modifications  de  la  perméabilité:  ce 
point,  toutefois,  demande  encore  de  nouvelles  recherches^). 

Hermann  Munk,  Untersuchungen  üher  das  Wesen  der  Neruenerregmig 
I®!’ , 1868,  p.  461  et  suiv, 

‘O  Voir  aussi:  A.  Fick,  Medic.  Fhgsik.,  2®  éd.  1866,  p.  39. 


SUR  LA 


SOLUBILITÉ  ET  LA  DISSOCIATION 

DES 

BICARBONATES  DE  SOUDE,  DE  POTASSE  ET 
D'AMMONIAQUE, 

PAR 

H.  C.  DIBBITS. 


I.  Bicarbonate  de  Soude. 

La  décomposition  que  subit  le  bicarbonate  de  soude,  lorsqu'il 
est  dissous  dans  l'eau , a déjà  été  étudiée  par  plusieurs  chimistes. 
H.  Rose  *)  a communiqué  à ce  sujet,  en  1835,  les  expériences 
suivantes.  Du  bicarbonate  de  soude,  dissous  dans  l'eau  et  éva- 
poré à siccité  dans  le  vide  sur  l'acide  sulfurique , lui  avait  laissé 
un  résidu  qui  possédait  à peu  près  la  composition  du  sesquicar- 
bonate  de  soude.  Le  même  sel,  dissous  dans  l'eau  et  évaporé  à 
siccité  sons  la  pression  ordinaire  de  l'air , en  présence  de  l'acide 
sulfurique  et  d’une  grande  quantité  de  potasse  caustique,  puis 
redissous  dans  l’eau  et  évaporé  une  seconde  fois  à siccité , était 
presque  complètement  transformé  en  carbonate  neutre.  Lorsqu’une 
solution  de  bicarbonate  était  soumise  à une  ébullition  prolongée, 
le  sel  passait  aussi  presque  en  entier  à l'état  de  carbonate  neutre. 

Peu  de  temps  après,  en  1837,  G.  Magnus  montra  qu’un 
courant  d'hydrogène,  en  traversant  une  solution  de  bicarbonate 
de  soude , entraîne  une  quantité  très-notable  d'acide  carbonique. 


Pogg.  Annal,  t.  XXXIV,  p.  158. 
»)  Pogg.  Annal,  t.  XL,  p.  590. 


H.  C.  DIBBITS.  SUR  LA  SOLUBILITE  ET  LA  DISSOCIATION;  ETC.  349 

Cette  méthode  fut  employée  eu  1845  par  R.  F.  Marchand  ‘)  pour 
déterminer  la  grandeur  de  la  décomposition.  Voici  comment  il 
décrit  ses  expériences:  „A  travers  une  solution  complètement  sa- 
turée à 0^  de  bicarbonate  de  soude  pur,  solution  qui  occupait 
un  volume  de  140  C.C.,  on  fit  passer  un  fort  courant  d’air  at- 
mosphérique humide;  pendant  toute  la  durée  de  l’opération,  le 
liquide , qui  était  contenu  dans  une  haute  éprouvette  de  verre , 
resta  entouré  de  glace  fondante.  Après  qu’il  fut  ainsi  passé  un 
million  et  demi  de  centimètres  cubes  d’air,  j’examinai  la  compo- 
sition du  liquide,  en  dosant,  dans  deux  quantités  pesées,  une  fois 
la  soude  et  une  fois  l’acide  carbonique.  Je  trouvai  sur  1,785  gr. 
de  soude  1,892  gr.  d’acide  carbonique,  ou  sur  390  parties  de 
soude  402  parties  d’acide  carbonique.  Cela  conduit  au  rapport 
de  2 éq.  de  soude  à 3 éq.  d’acide  carbonique,  car  ce  rapport 
serait  2.  390  NaO  à 2.  412,5  CO^.  On  est  donc  fondé  à ad- 
mettre que  par  ce  traitement  le  bicarbonate  est  changé  en  ses- 
quicarbonate. 

„Dans  une  autre  solution,  qui,  après  avoir  été  saturée  à 0'^, 
fut  chauffée  à 38°  C.  et  maintenue  à cette  température  pendant 
toute  la  durée  de  l’expérience,  je  fis  passer  deux  millions  de  cen- 
timètres cubes  d’air.  Le  dégagement  d’acide  carbonique  fut  cette 
fois  beaucoup  plus  intense  que  dans  l’expérience  précédente.  Outre 
les  bulles  d’air  qui  traversaient  le  liquide,  il  s’en  élevait  de  nom- 
breuses petites  perles  gazeuses,  et  le  courant  gazeux  avait  dis- 
tinctement l’odeur  de  l’acide  carbonique.  Après  le  passage  de 
cette  grande  quantité  d’air,  la  composition  du  liquide  fut  déter- 
minée. Sur  390  parties  de  soude,  il  contenait  cette  fois  290 par- 
ties d’acide  carbonique.  Je  ne  doute  pas  que , si  le  courant  d’air 
avait  été  soutenu  encore  plus  longtemps,  le  rapport  n’eût  fini 
par  devenir  390:  275;  j’ai  jugé  inutile  de  continuer  l’expérience 
jusqu’à  ce  point.” 

Les  expériences  que  je  viens  de  citer  montrent  donc  clairement 
que  le  bicarbonate  de  soude  en  solution  est  partiellement  décom- 


0 Journ.f.  pi'akt.  Chem.,  t.  XXXV,  p.  389. 
0 0 = 8. 


350  H.  G.  DIBBITS.  SUR  LA  SOLUBILITÉ  ET  LA  DISSOCIATION 

posé.  Ainsi  que  H.  Rose  Ta  déjà  fait  remarquer  par  rapport 

au  bicarbonate  de  potasse,  — sel  qui  se  comporte  en  général 
de  la  même  manière  que  le  bicarbonate  de  soude , — une  solution 
de  bicarbonate , exposée  à Tair , laissera  donc  échapper  de  Tacide 
carbonique.  Lorsque  la  solution  a perdu  de  l’acide  carbonique,  une 
nouvelle  quantité  de  sel  est  décomposée,  de  sorte  qu’il  pejit  de 
nouveau  se  dégager  de  l’acide  carbonique,  ce  qui  amène  une 
nouvelle  décomposition  du  sel,  et  ainsi  de  suite,  jusqu’à  ce  que 
finalement  le  bicarbonate  soit  entièrement  converti  en  carbonate 
neutre.  Le  dégagement  de  l’acide  carbonique  libre  ne  dépend  pas 
de  la  pression  de  l’air  ou  d’autres  gaz,  mais  seulement  de  la 
pression  que  l’acide  carbonique  exerce  lui-même  à la  surface  de 
la  solution.  Lorsque  la  solution  est  exposée  à l’air,  l’acide  car- 
bonique qu’elle  abandonne  formera  temporairement  une  petite 
couche  au-dessus  du  liquide,  couche  qui  s’oppose  au  dégagement 
ultérieur  d’acide  carbonique  et  par  conséquent  à la  décomposition 
ultérieure  du  sel.  Si  l’on  enlève  cette  couche , soit  par  l’ébullition, 
soit  par  le  vide , ou  par  la  potasse  caustique , ou  par  un  courant 
d’un  autre  gaz,  l’acide  carbonique  se  dégage  sans  interruption, 
et  la  décomposition  ne  s’arrête  que  lorsqu’elle  est  devenue  com- 
plète. Si  au  contraire  l’acide  carbonique  dégagé  continue  à exercer 
sa  pression  sur  la  solution,  le  dégagement  cesse  dès  qu’un  cer- 
tain état  d’équilibre  est  atteint , et  la  décomposition  du  sel  ne  va 
pas  plus  loin.  La  décomposition  sera  d’autant  plus  faible  que  la 
pression  de  l’acide  carbonique  sur  la  solution  sera  plus  grande, 
et  en  rendant  cette  pression  très  grande,  on  empêcherait  proba- 
blement tout-à-fait  la  décomposition  du  bicarbonate. 

D’après  les  expériences  de  Rose,  le  bicarbonate  dépotasse  en 
solution  se  décompose  de  la  même  manière  que  le  bicarbonate 
de  soude.  Si  l’acide  carbonique  peut  s’échapper  au  fur  et  à mesure 
de  sa  mise  en  liberté,  — à l’aide  de  l’ébullition,  ou  sous  la  pompe 
pneumatique , ou  par  évaporation  répétée  en  présence  de  la  potasse 
caustique  dans  les  conditions  ordinaires  de  pression  et  de  tempé- 


0 Pogg.  Annal.,  t.  XXXIV,  p.  156. 


DES  BICAUBONATES  DE  SOUDE,  ETC. 


351 


rature,  — le  bicarbonate  de  potasse  finit  par  se  transformer  en- 
tièrement en  carbonate  neutre.  Ce  qui  a été  dit  tout  à Theure 
s’applique  donc  aux  deux  bicarbonates. 

Une  conséquence  de  cette  décomposition  partielle  est  que  les 
cristaux  des  deux  bicarbonates,  eu  séchant  à Tair,  perdent  tou- 
jours un  peu  d’acide  carbonique  et  se  recouvrent  ainsi  d’une 
mince  couche  de  carbonate  neutre.  Cette  perte  d’acide  carbonique , 
pendant  la  dessiccation  à l’air,  est  beaucoup  plus  faible  pour  le 
bicarbonate  de  soude  que  pour  le  bicarbonate  de  potasse , ce  qui 
s’explique  aisément.  En  effet,  le  carbonate  neutre  de  soude,  une 
fois  formé,  n’attire  que  très-lentement  l’humidité  atmosphérique, 
de  sorte  que  les  cristaux  du  bicarbonate  sont  bientôt  secs.  Avec 
le  bicarbonate  de  potasse  , au  contraire , le  carbonate  neutre  formé 
absorbe  rapidement  de  l’eau  chaque  fois  qu’il- vient  en  contact 
avec  de  l’air  humide  ; cette  eau  redissout  une  partie  du  bicarbo- 
nate , ce  qui  donne  de  nouveau  occasion  à une  décomposition  du 
sel  et  par  suite  à un  dégagement  d’acide  carbonique.  Même  pour 
le  bicarbonate  de  soude,  toutefois,  il  y a perte  d’acide  carboni- 
que quand  les  cristaux  sèchent  à l’air , ainsi  que  le  montrent  les 
expériences  suivantes. 

Des  cristaux  de  bicarbonate  de  soude,  parfaitement  exempts 
de  sulfate  et  de  chlorure , ont  été  pressés  entre  du  papier  à filtre  , 
réduits  en  poudre  et  ensuite  séchés  pendant  plusieurs  jours  dans 
de  l’air  en  contact  avec  l’acide  sulfurique.  Trois  analyses  du  sel 


ainsi  séché  m’ont  donné  : 

Perte  par  calcin.  Acide  carbonique  *). 

I  36,67  pCt 52,07  pCt. 

II  36,68  „ 52,12  „ 

III 36,73  .....  51,97  „ 

Moyenne 36,69  pCt 52,05  pCt. 

Calculé  36,90  „ 52,38  „ 


La  perte  trouvée  par  calcination  et  la  proportion  trouvée  d’acide 


U Dosé  en  le  chassant  par  l’acide  sulfurique  dilué  et  le  recueillant  dans  la 
chaux  sodée. 


352  H.  G.  DIBBITS.  SUR  LA  SOLUBILITE  ET  LA  DISSOCIATION 

carbonique  sont  donc  Tune  et  l’autre  plus  petites  que  les  quanti- 
tés calculées.  Si  l’on  considère , en  outre , que  le  carbonate  neutre 
de  soude,  supposé  primitivement  hydraté,  retient  dans  l’air  sec 
et  à la  température  ordinaire  1 molécule  H^O  ^),  et  que  par 
conséquent  Na^CO^-hH^O  ne  doit  donner  que  14,5  ®/o  de  perte 
par  calcination  et  35,3  ®/o  d’acide  carbonique , on  peut  conclure , 
de  la  différence  en  moins  entre  les  nombres  ci-dessus  trouvés  et 
les  nombres  calculés,  que  les  cristaux  séchés  /’uîV  sur  l’acide 
sulfurique  contiennent  un  peu  de  carbonate  neutre. 

Les  mêmes  cristaux , introduits  encore  humides  dans  une  capa- 
cité remplie  à la  pression  atmosphérique  ordinaire  d’acide  carbo- 
nique sec  J qui  était  maintenu  sec  au  moyen  de  l’acide  sulfurique, 
m’ont  au  contraire  donné,  après  être  restés  plusieurs  jours  dans 
cette  atmosphère  d’acide  carbonique: 


Perte  par  calcin.  Acide  carbonique. 

I  36,88  pCt 52,38  pCt. 

II  . . . . . 36,90  „ 52,25  „ 

Moyenne  . . . 36,89  pCt 52,31  pCt. 


• nombres  qui  se  rapprochent  beaucoup  plus  des  valeurs  calculées. 

J’ai  tâché  de  déterminer  la  solubilité  du  sel  dans  des  con- 
ditions où  la  décomposition,  dont  il  vient  d’être  parlé,  était 
empêchée  autant  que  possible.  Pour  cela,  j’ai  fait  usage  de  pe- 
tits flacons  de  40  à 50  c.c.  de  capacité,  qui,  après  avoir  été 
remplis  jusqu’au  col  de  sel  et  d’eau  (le  premier  en  excès) , étaient 
fermés  avec  un  bouchon  de  liège  d’excellente  qualité.  Au-dessus 
du  liquide  dans  le  flacon  il  ne  restait  alors  qu’une  bulle  d’air 
occupant  tout  au  plus  un  volume  de  2 c.c.  On  ne  pouvait  remplir 
le  flacon  complètement,  V.  parce  que  cela  aurait  nui  beaucoup 
à l’opération  du  secouement,  et  2®.  à cause  de  la  dilatation  du 
liquide  par  la  chaleur.  Je  ne  jugeai  pas  à propos  de  remplacer 
par  l’acide  carbonique  la  petite  quantité  d’air  laissée  dans  le  col 
du  flacon , parce  que  cet  acide  carbonique  se  serait  dissous  dans 
l’eau,  et  que  je  voulais  déterminer,  aussi  bien  que  possible,  la 


‘)  G.  J.  Mulder,  Bijdragen  tôt  de  geschied.v.h.  scheik.  gebondenwater  ^ p.  131. 


353 


solubilité  dans  Teau  pure.  Je  reconnus  que  Tacide  carbonique, 
mis  en  liberté  par  la  décomposition  du  sel  dissous,  exerçait  tou- 
jours, sur  la  paroi  interne  du  flacon  et  sur  le  bouchon,  une 
pression  très-forte,  et  d’autant  plus  forte  que  la  température 
était  plus  élevée.  En  conséquence,  le  bouchon  fut  toujours  attaché  au 
col  par  une  solide  ficelle.  Lorsque  cette  précaution  était  négligée, 
il  arrivait  souvent,  surtout  à des  températures  un  peu  élevées, 
que  le  bouchon  était  projeté  avec  explosion,  ou  bien  qu’il  se 
soulevait  et  laissait  échapper  latéralement  de  l’acide  carbonique. 
En  pareil  cas,  l’expérience  était  tenue  pour  manquée.  En  effet, 
' lorsqu’il  y a eu  perte  d’acide  carbonique,  la  solution  renferme 
' plus  de  carbonate  neutre  de  soude , lequel  est  beaucoup  plus  soluble 
que  le  bicarbonate,  et  le  dosage,  tant  celui  de  la  soude  que 
celui  de  l’acide  carbonique,  donne  alors  toujours  des.  résultats 
trop  forts. 

Pour  obtenir  la  matière  qui  devait  servir  aux  déterminations 
de  solubilité,  le  sel  du  commerce,  qui  était  déjà  passablement 
pur , fut  soumis  à 'une  nouvelle  cristallisation  par  la  dissolution 
dans  de  l’eau  à 60°  environ;  les  cristaux,  réduits  en  poudre, 
furent  lavés  deux  fois  à grande  eau,  pour  les  débarrasser  de 
l’eau-mère  adhérente,  puis  pressés  dans  du  papier  joseph  et  enfin 
séchés  sur  l’acide  sulfurique  dans  une  cloche  remplie  d’acide 
carbonique.  En  opérant  de  cette  manière  sur  1 kilogramme  de  bi- 
carbonate du  commerce , il  me  resta  environ  300  grammes  de  sel 
très-pur,  ne  renfermant  pas  trace  de  sulfate  ni  de  chlorure. 

J’obtins  des  dissolutions  saturées,*  au-dessus  de  0° , en  secouant 
les  flacons  pendant  longtemps  et  à une  température  aussi  con- 
stante que  possible,  dans  l’air  lorsque  cette  température  était 

, inférieure  à 10°,  dans  une  cuve  pleine  d’eau  lorsque  la  tempé- 

J rature  devait  être  plus  élevée.  La  température  fut  toujours  déter- 
minée dans  la  solution  même,  au  moyen  d’un  thermomètre  préa- 

, lablement  chauffé,  dans  une  étuve  à air,  jusqu’à  la  température 
J-  de  l’eau  de  la  cuve.  Pour  préparer  des  solutions  saturées  à 0°, 
H les  petits  flacons,  remplis  avec  de  l’eau  et  du  sel  pris  l’un  et 
K Tautre  à 5° , furent  fermés  hermétiquement , secoués  pendant  plu- 
K Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  23 


354  II.  C.  DIBBITS.  SUR  LA  SOLUBILITE  ET  LA  DISSOCIATION 


sieurs  heures  à la  température  de  5° , puis  déposés  dans  un  ba- 
quet plein  de  glace  fondante , convenablement  renouvelée  tous  les 
jours. 

La  température  du  local  où  ce  baquet  était  placé  varia  entre 
4°  et  7^.  Le  flacon  dont  la  solution  est  désignée  ci-aprés  sous  le 
No.  1 resta  dans  la  glace  fondante  pendant  jours,  le  No.  2 
pendant  cinq  jours , le  No.  3 pendant  sept  jours  5 tous  les  trois 
donnèrent  les  mêmes  résultats. 

Lors  de  Touverture  des  flacons,  il  se  dégageait  toujours  de 
Facide  carbonique,  dont  la  tension  était  évidemment  supérieure 
à la  pression  atmosphérique.  Même  à 0®,  on  voyait  distinctement, 
après  que  le  bouchon  était  retiré , se  former  des  bulles  d’acide 
carbonique  dans  la  solution  , et  à des  températures  plus 
élevées  il  se  produisait  une  effervescence  beaucoup  plus  forte. 
Quand  la  détermination  avait  eu  lieu  au-dessus  de  40° , il  suffisait 
de  couper  la  ficelle  pour  faire  sauter  le  bouchon.  Comme  le  bi- 
carbonate était  employé  sous  forme  de  poudre , et  que  les  bulles 
d’acide  carbonique,  en  montant  dans  le  liquide,  entraînaient 
toujours  avec  elles  quelques  parcelles  de  sel,  il  fallait  observer 
certaines  précautions  pour  obtenir  la  solution  saturée  à l’état 
limpide.  A cet  effet,  lorsqu’on  opérait  à de  basses  températures , 
la  solution  était  passée  par  un  filtre  sec,  qui  au  besoin  était 
légèrement  chauffé  ; aux  températures  supérieures  à 40  ’ , où  il  eût 
été  difficile  d’éviter  le  refroidissement  durant  la  filtration,  on 
puisait  dans  le  flacon , aussitôt  que  la  première  effervescence  était 
calmée,  au  moyen  d’une  pipette  préalablement  chauffée  dans  une 
étuve  jusqu’à  la  température  convenable,  une  certaine  quantité 
de  la  solution , et  si  celle-ci  paraissait  suffisamment  limpide , on 
l’employait  pour  les  dosages.  Une  partie  de  la  solution  saturée 
était  reçue  dans  un  creuset  de  platine , pesée  et  réservée  pour  la 
détermination  de  la  soude  ; une  autre  partie  de  la  même  solution 
était  introduite  dans  un  petit  matras  de  verre  qu’on  bouchait 
aussitôt,  et  dans  cette  partie,  immédiatement  après  la  pesée j on 
dosait  Facide  carbonique,  eu  le  chassant  par  Facide  sulfurique 


I 


DES  BICARDONATES  DE  SOUDE,  ETC. 


355 


dilué  et  le  recueillant  dans  deux  tubes  à chaux  sodée,  selon  la 
méthode  que  j’ai  décrite  ailleurs  ^). 

Pour  déterminer  la  soude,  le  contenu  du  creuset  de  platine 
était  évaporé  au  bain-marie,  à une  température  ne  dépassant 
pas  70°.  De  cette  manière,  la  solution  de  bicarbonate  de  soude 
s’évapore  sans  aucun  dégagement  visible  de  gaz,  et  par  consé- 
quent sans  aucune  perte  par  projection.  Finalement,  l’eau  du 
bain-marie  était  portée  à l’ébullition,  puis,  le  creuset  étant  cou- 
vert, la  masse  saline  sèche  était  chauffée  progressivement  jusqu’à 
calcination  faible,  de  façon  que  le  carbonate  de  soude  obtenu 
n’entrât  pas  en  fusion.  Ainsi  exécutées,  les  déterminations  de 
la  soude  possèdent  un  haut  degré  d’exactitude. 

Les  résultats  de  mes  expériences , réduits , pour  la  facilité  des  ■ 
comparaisons,  à 10  grammes  de  la  solution  saturée,  sont  les 
suivants  : 


Bicarbonate  de  soude. 


Numéro 

de 

Tempé- 

10 gr.  de  solution 

saturée  ont  donné: 

r expérience. 

rature. 

Na^CO^. 

CO^. 

B 

1 . . . 

Oo 

. . 0,40.57 

. . 0,3323 

grain . 

tr 

2 . . . 

. . 00 

. . . . 0,4065  //  ... 

. . 0,3332 

3 . . . 

. . 00 

....  0,4063  //  . . . 

. . 0,3329 

n 

4 . . . 

. . 50,6  ‘ . . 

....  0,4428  tr  ... 

. . 0,3613 

U 

5 ... 

. . 80,2  . . 

: . . 0,4620  n 

0,3764 

n 

6 . . . 

. . 14", 8 . . 

. . . . '0,5124  //  . . . 

. . 0,4165 

// 

7 . . . 

. . 200,5  . . 

. . . . 0,5573  //  ... 

. . 0,4524 

// 

8 . . . 

. . 240,8  . . 

. . . . 0,5913  //  ... 

. . 0,4792 

n 

9 . . . 

. . 300,2  . . 

....  0,6336  //  . 

. . 0,5127 

U 

10  . . . 

. . 340,7  . . 

. . 0,5415 

// 

11  . . . 

. . 40o,6  . . 

....  0,7192  //  ... 

. . 0,5808 

// 

12  . . . 

. . 44o,8  . . 

....  0,7554  //  ... 

. . 0,6080 

// 

13  . . . 

. . 510,4  . . 

....  0,8150  //  ... 

. . 0.6524 

// 

14  . . . 

. . 570,2  . . 

....  0,8684  //  . . . 

. . 0,6887 

tt 

15  . . . 

. . 600,0  . . 

....  0,8945  //  ... 

. . 0,6990 

.Maandhlad  i)Oor  natuurwetenschappen , IV,  p.  2. 

23* 


356  II.  C.  DIBBITS.  SUR  LA  SOLUBILITÉ  ET  LA  DISSOCIATION 

A l’aide  de  ces  données,  j’ai  calculé  le  tableau  suivant: 

Bicarbonate  de  soude. 

Solubilité  en  100  p.  d’eau,  déduite 
Numéro  ^ (jgg  déterminations  de  : 

l’expérience.  rature.  Na.  CO*. 


1 . . . . Oo  ....  6,87  ....  6,77  1,3 

2 . . . . Oo  ....  6,89  ....  6,79  1,3 

3 . . . . 0°  ....  6,88  ....  6,79  1,3 

4 . . . . 50,6  7,55  ....  7,41  1,7 

5 . . . . 80,2  ....  7,90  ....  7,74  1,8 

6 ....  140,8  ....  8,84  ....  8,64  2,1 

7 ....  200,5  ....  9,69  ....  9,46  2,2 

8 . . . . 240,8  ....  10,34  ....  10,07  2,4 

9 . . . . ' 300,2  ....  11,16  ....  10,85  ......  2,5 

10  ....  340,7  ....  11,87  ....  11,53  2,6 

11  ....  400,6  ....  12,87  ....  12,47  2,7 

12  ....  440,8  ....  13,60  ....  13,13  ......  3,0 

13  ....  51 0,4  ....  14,83  ....  14,23  3,6 

14  ....  570,2  ....  15,96  ....  15,14  4,5 

15  ....  60°,0  ....  16,52  ....  15,40  ......  5,9 


On  voit  que  la  solubilité  déduite  du  dosage  de  l’acide  carbo- 
nique est  toujours  plus  petite  que  celle  à laquelle  conduit,  pour 
la  même  solution , le  dosage  de  la  soude  ; c’est  là  une  conséquence 
du  dégagement  d’acide  carbonique , qui  a lieu  à l’ouverture  du 
flacon  et  pendant  la  courte  durée  de  la  filtration  ou  du  trans- 
vasement. La  dernière  colonne  du  second  tableau  montre  que  la 
perte  en  acide  carbonique  croît  constamment  avec  la  température,  ^ 
même  lorsque  cette  perte  est  exprimée  en  centièmes  de  la  quantité 
totale  d’acide  carbonique,  déduite  du  dosage  de  la  soude.  L’ac- 
croissement progressif  de  cette  perte  est  sans  doute  en  partie  le 
résultat  de  la  diminution  du  coefficient  d’absorption  aux  tempé- 
ratures supérieures,  mais  je  crois  qu’il  provient  aussi  en  partie 
d’une  décomposition  plus  avancée.  C’est  du  moins  ce  que  semble 
indiquer  la  tension  plus  forte  que  le  gaz  acquiert  alors  au-dessus 


Déficit 
en  CO* , 
sur  100  p.  de 
ce  gaz. 


DES  BICARBONATES  DE  SOUDE,  ETC. 


357 


de  la  solution.  A la  fin  de  ce  mémoire  je  donnerai  quelques 
détails  au  sujet  de  cette  tension. 

Je  n’ai  pas  déterminé  la  solubilité  au  delà  de  60° , parce  que , 
d’après  les  expériences  de  M.  A.  D.  van  Riemsdijk  le  bicar- 
bonate de  soude  à l’état  sec, — par  conséquent  sans  l’assistance 
de  l’eau, — commence  déjà  à se  décomposer  à 61°.  Si  donc,  à 61° 
ou  à Une  température  supérieure,  on  secoue  de  l’eau  avec  un  excès 
de  bicarbonate  de  soude,  le  sel  non  dissous  sera  lui-même  con- 
verti en  carbonate  neutre , acide  carbonique  et  eau , et  la  quantité 
trouvée  de  sel  dissous  acquerra  alors  une  signification  toute  dif- 
férente. 

Au-dessous  de  61°,  on  peut  parier  de  la  solubilité  du  bicarbo- 
nate , à condition  d’entendre  par  là  : la  quantité  maximum  de  sel , 
qui  J à la  température  donnée,  peut  être  dissoute  en  100  parties 
d’eau  dans  un  espace  fermé , c’est-à-dire  dans  un  espace  où  la  dé- 
composition est  réduite  à un  minimum.  En  ce  sens,  la  solubilité 
doit  être  déduite  des  déterminations  de  la  soude,  ou,  mieux 
encore,  elle  doit  être  calculée  comme  nous  le  verrons  chez  le 
bicarbonate  de  potasse  (page  361). 

Comme,  dans  mes  expériences,  le  petit  espace  que  le  liquide 
laissait  libre  au  sommet  du  flacon  était  occupé  par  de  l’air, 
dans  lequel  pouvait  se  dégager  un  peu  d’acide  carbonique,  une 
petite  quantité  du  sel  devait  être  décomposée;  or,  le  carbonate 
neutre  de  soude  étant  plus  soluble  que  le  bicarbonate , il  en 
résulte  que  si  l’on  pouvait  empêcher  complètement  la  décomposi- 
tion, soit  par  une  plus  forte  pression , soit  de  toute  autre  manière, 
la  solubilité  serait  probablement  trouvée  un  peu  moindre.  Les 
.valeurs  de  la  solubilité,  déduites  des  dosages  de  la  soude,  bien 
qu'approchant  de  la  vérité,  sont  donc,  selon  toute  apparence, 
un  peu  trop  grandes. 

Plus  loin  je  donnerai  un  tableau  plus  complet  de  ces  valeurs. 
La  ligne  de  solubilité  qui  se  déduit  de  mes  expériences  présente 
une  courbure  très-peu  prononcée;  entre  15°  et  30°,  elle  se  distin- 
gue à peine  d’une  ligne  droite. 

Be  scheikundige  loerking  der  toarmte  op  anorg.  verhindingen } p.  71. 


358  H.  C.  DIBBITS.  SUR  L/V  SOLUBILITÉ  ET  LA  DISSOCIATION 


Avant  d’en  finir  avec  le  bicarbonate  de  soude,  je  rappellerai  encore 
que  la  solubilité  de  ce  sel  a été  déterminée , en  1843,  parM.  Poc- 
GiALE*).  Les  défauts  d’un  grand  nombre  des  déterminations  de 
solubilité  de  ce  savant  ont  déjà  été  signalés  par  M.  G.  J.  Mulder  ^) , 
qui  les  appelle  „en  beaucoup  de  cas,  des  modèles  d’inexactitude 
et  de  négligence.”  Les  déterminations  de  M.  Poggiale,  relatives 
au  bicarbonate  de  soude,  s’écartent  notablement  des  miennes.  Il 
ne  dit  pas  un  mot  du  dégagement  d’acide  carbonique  ni  de  la 
décomposition  du  sel , qui  pourtant  ne  peuvent  échapper  à l’atten- 
tion dans  des  mesures  précises.  Il  donne  pour  la  solubilité  du  sel 
en  100  parties  d’eau  les  nombres  suivants: 


0®  . . . 

. 8,95 

40®  ...  . 

13,35 

10®  *.  . . 

. 10,04 

50®  ...  . 

14,45 

20®  . . . 

. 11,15 

60®  ...  . 

15,57 

30®  . . . 

. 12,24 

70®  ...  . 

16,69 

Poggiale, 

il  n’a 

plus  été  fait,  que 

je  sache 

déterminations  de  la  solubilité  du  bicarbonate  de  soude,  sauf 
une  seule  par  M.  Anthon  ^),  qui,  de  10®  à 11°,2,  a trouvé 
le  nombre  8,3;  pour  11^,2,  cette  valeur  concorde  exactement 
avec  mes  expériences. 


IL  Bicarbonate  de  potasse. 

Ainsi  que  H.  Rose  l’a  montré  le  premier,  le  bicarbonate  de 
potasse,  dissous  dans  l’eau,  laisse  déjà  échapper  de  l’acide  car- 
bonique à la  température  ordinaire,  tout  comme  le  bicarbonate 
de  soude  (voir  plus  haut).  C’est  là  la  raison  pour  laquelle  des 
cristaux  humides  de  bicarbonate  de  potasse  perdent  toujours  un 
peu  d’acide  carbonique  pendant  la  dessiccation  à l’air,  et  cette 


Aiin.  CMm.  Pkys.  (3),  VIII,  pag.  468. 

Bijdragen  tôt  de  geschiedenis  van  het  scheikundig  gehonden  water , p.  10. 
Chem.  Centralhlatt , 1861,  p.  629. 


DES  BICARBONATES  DE  SOUDE,  ETC. 


359 


perte  iracide  carbonique,  comme  il  a été  dit  à la  page  351, 
est  pour  le  bicarbonate  de  potasse,  à cause  de  l’hygroscopicité 
du  carbonate  neutre,  plus  grande  que  pour  le  bicarbonate  de 
soude.  Du  bicarbonate  de  potasse  pur,  soumis  à une  nouvelle 
cristallisation  dai]^  de  Teau  chargée  d’acide  carbonique,  et  séché 
sur  Tacide  sulfurique,  dans  l’air  ordinaire ^ m’a  donné  en  trois 
déterminations  : ' 

Perte  par  calcin.  Acide  carbonique. 

I 31,15 40,93 

II 31,08 42,02 

III  . 31,40 42,36 

Calculé 31,00 44,00 

Il  y avait  donc  constamment  trop  peu  d’acide  carbonique  et 
trop  d’eau,  et  par  conséquent  il  y avait  aussi  toujours  un  peu 
de  carbonate  neutre. 

Pour  préparer  du  bicarbonate  de  potasse  exempt  de  carbonate 
neutre,  je  pris  du  sel  cristallisé  qui  ne  renfermait  que  des  traces 
de  sulfate  et  de  chlorure  ; ce  sel  ayant  été  soumis  à une  nouvelle 
cristallisation,  dans  de  l’eau  à bO'’ — 60®,  les  cristaux  obtenus 
furent  pressés  entre  du  papier  à filtre,  réduits  en  poudre,  et 
séchés  par  petites  parties  sur  l’acide  sulfurique  dans  une  cloche 
remplie  d’acide  carbonique.  En  opérant  sur  1 kilogramme  des 
cristaux  primitifs,  je  recueillis  de  cette  manière  plus  de  300 
grammes  de  sel  pur,  entièrement  débarrassé  de  sulfate  et  de 
chlorure,  et  qui  dans  trois  dosages  (exécutés  chacun  sur  4 — 6 
grammes  de  matière)  donna: 


Perte  par  calcin. 

Acide  carboniqi 

I . . . 

. . . . 30,99  . . . 

. . . . 43,94 

II  . . . 

. . . . 31,00.  . . 

. . . . 43,95 

III  ..  . 

. . . . 31,00 . . . 

. . . . 44,00 

Moyenne.  . 

. . . .■3î;ôo.  . . 

. . . . 43,96 

L’accord  de  ces  résultats  avec  les  quantités  calculées  montre 
que  le  sel  obtenu  par  ce  traitement  était  aussi  complètement 
exempt  de  carbonate  neutre.  Ce  sel  fut  employé  pour  les  déter- 
minations de  solubilité. 


360  H.  G.  DIBBITS.  SUR  LA  SOLUBILITÉ  ET  LA  DISSOCIATION 

Les  solutions  saturées  furent  préparées  exactement  de  la  manière 
qui  a été  décrite  ci-dessus  pour  le  bicarbonate  de  soude.  Quand 
on  ouvrait  les  petits  flacons  qui  contenaient  la  solution  saturée, 
il  s’en  échappait,  même  à 0°,  de  l’acide  carbonique,  comme 
l’indiquait  la  tension  du  gaz  au-dessus  du  liquide,  et  déjà  à 21®, 5 
cette  tension  était  si  considérable,  que  le  bouchon,  à l’instant 
où  on  coupait  la  ficelle  qui  le  maintenait , était  chassé  du  goulot 
avec  bruit.  A cause  de  la  grandeur  de  cette  tension , je  n’ai  pas 
fait  de  déterminations  au-dessus  de  60'’.  D’après  M.  van  Riems- 
dijk  1) , le  sel  sec  commence  à perdre  de  l’acide  carbonique  vers  106'’. 

Dans  deux  portions  séparées  de  la  même  solution  je  dosais 
chaque  fois  le  potassium  et  l’acide  carbonique:  ce  dernier,  tou- 
jours immédiatement  après  l’ouverture  du  flacon,  de  la  manière 
indiquée  précédemment;  le  premier,  en  transformant  le  sel  en 
nitrate  dans  un  petit  matras  à long  col,  évaporant  à siccité  dans 
une  capsule  de  platine  chauffée  au  bain-marie,  et  desséchant  à 
150" — 160'^;  après  que  le  salpêtre  obtenu  avait  été  pesé , je  m’as- 
surais toujours  de  sa  neutralité  au  moyen  de  l’essai  tant  avec  le 
papier  de  tournesol  bleu  qu’avec  le  papier  rouge.  Le  poids  de 
la  solution  saturée  employée  pour  chaque  dosage  était  de  5—15 
grammes , ' le  poids  du  salpêtre  obtenu  dans  chaque  expérience 
s’élevait  à 1,5 — 2,5  grammes,  le  poids  de  l’acide  carbonique 
obtenu  dans  chaque  expérience  à 0,7 — 1,3  grammes. 

Les  données  de  mes  expériences,  réduites  à 10  grammes  de 
la  solution  saturée,  sont  les  suivantes: 


) I)e  scheikundige  tcerking  der  icarmte  op  cmorganiscJic  verhmdingen , p.  69, 


361 


DES  llICARBONATES  DE  SOUDE,  ETC. 


Numéro 

de 

l’expérience. 

Bicarbonal 

Tempé- 
rature . 

1 . . . 

Qo  

2 

0»  

3 

()o  

4 

50,5  

5 llo,0 


6 .... 

. . . lGo,3  . . 

7 .... 

. . 210,5  .. 

8 .... 

. . . 27o,4  . . 

9 .... 

. . . 320,2  . . 

10  .... 

. . . 370,5  . . 

11  .... 

. . . 410,8  . . 

12  .... 

. . . 460,3  . . 

13  .... 

14  .... 

. . . 540,9  . . 

15  . . . . 

. . . 590,0  . . 



e de  potasse. 


10  gr.  de  solution  saturée  ont  donné 


KNO^ 

COV 

1,8537  gram  . . . 

0 

00 

0 

0 

gram . 

1,8527  //  ... 

. . . . 0,8018 

.// 

1,8530  //  ... 

. . . . 0,8018 

U 

2,0398  //  ... 

. . . . 0,8783 

n 

2,2262  //  ... 

. . . . 0,9536 

U 

2,4034  //  ... 

. . . . 1,0265 

U 

2,5745  //  ... 

. . . . 1,0970 

H 

2,7616  //  ... 

. . . . 1,1737 

n 

2,9138  //  ... 

. ...  1,2345 

// 

3,0813  //  ... 

. . . . 1,3009 

U 

3,2171  //  . . . . 

. ...  1,3558 

// 

3,3643  //  ... 

. . . . 1,4147 

// 

3,5283  n ... 

. . . . 1,4832 

n 

3,6455  //  ... 

. . . . 1,5262 

U 

3,7903  ... 

. . . . 1,5486 

U 

Au  moyen  de  ces  données,  j’ai  calculé  la  solubilité  de  la  manière 
suivante,  qui  s’écarte  un  peu  de  celle  que  j’avais  adoptée  précé- 
demment. De  la  quantité  trouvée  de  KNO^,  par  conséquent  de 
la  quantité  trouvée  de  K,  je  déduisais  le  C0‘^  qui  aurait  dû  être 
trouvé  si  aucune  partie  de  CO^  ne  s’était  échappée  ; la  différence 
entre  cette  valeur  et  le  CO^  trouvé  directement  donne  la  quantité 
de  CO^  qui  s’est  échappée  au  moment  de  l’ouverture  du  flacon. 
Ce  CO^  échappé  appartenait  à la  solution,  et  en  conséquence 
son  poids  a été  ajouté  au  poids  de  la  solution  saturée.  — Un 
exemple  éclaircira  ce  que  je  viens  de  dire.  Dans  l’expérience 
No.  15,  temp.  1=  59®,0,  on  a trouvé, 

en  10  grammes  de  solution  saturée,  telle  qu’elle  avait  été  pesée: 

3,7903  gr.  KNO'  = 3,7528  gr.  KHCO' z=  1,6512  gr.  CO^ 

Trouvé:  1,5486  „ „ 

Différence  : 0,1026  gr.  CO^. 

A l’ouverture  du  flacon  et  pendant  la  décantation  ou  la  filtra- 


362  H.  C.  DIBBITS.  SUR  LA  SOLUBILITE  ET  LA  DISSOCIATION 


tion  il  s’était  donc  échappé,  sur  10  grammes  de  solution,  0,1026 
grammes  de  CO^. 

3,7528  grammes  KHCO^  avaient  donc  été  dissous,  lorsque 
le  flacon  était  encore  bouché,  non  pas  dans  10  grammes,  mais 
dans  10,1026  grammes  de  solution  saturée,  d’où  l’on  déduit  pour 
la  solubilité  en  100  parties  d’eau:  59,10.  Sans  cette  correction 
'pour  l’acide  carbonique  échappé,  on  trouverait:  60,07. 


En  opérant  ainsi,  on  a déduit  des  données  de  l’expérience  le 
tableau  suivant: 


]M  uméro 
de 

rexpérience. 

Bicarbonate  de 

Perte  de 
CO* 

Tempé-  sur  10  gr. 

rature.  de  sol.  sat. 

potasse. 

Perte  de 
CO?' 

en  centièmes 
du  CO?. 

Solubilité 

en 

100  p.  d’eau. 

] 

. Oo 

0,0067  gram 

0,8  ... 

. . . 22,16 

2 ...  . 

. 0® 

. . 0,0053  // 

0,7  ... 

. . . 22,15 

3 .... 

. Oo 

0,0051  // 

0.7  ... 

. . . 22,15 

1 .... 

50,5  . . . 

..  0,0103  // 

1,2  ... 

. . . 25,27 

5 .... 

. llo.O  . . . 

. . 0,0162  // 

1,7  ... 

. . . 28,22 

6 .... 

. 16o,3  . . . 

. . 0,0205  // 

2,0  ... 

. . . 31,11 

7 .... 

. 21o,5  . . . 

. . 0,0216  // 

2,2  ... 

. . . 31,10 

8 .... 

. 270,1  . . . 

. . 0,0291  // 

2,1  ... 

. . . 37,18 

9 .... 

. 320,2  . . . 

. . 0,0319  // 

2,7  ... 

. . . 10,35 

10  . . . . 

. 370,5  . . . 

3,1  ... 

...  13,61 

11  ... . 

. llo,8  . . . 

. . 0,0157 

:i,3  ... 

. . . 16,13 

12  .... 

. 160,3  . . . 

. . 0,0510  // 

3,5  ... 

. . . 19,57 

13  .... 

. 51o,l  . . . 

. . 0,0539  // 

3,1  ... 

. . . 53,25 

11  . . . . 

51o,9 

. . 0,0619  // 

3,9  ... 

: . . 55,91 

15  .... 

. 590,0  . . . 

. . 0,1026  // 

.....  6,2  ... 

. . . 59,10 

Ces  déterminations , tout  comme  celles  relatives  au  bicarbonate 
de  soude , s’éloignent  beaucoup  des  chiffres  de  M.  Poggiale , dont 
l’inexactitude  a déjà  été  signalée  plus  haut.  M.  Poggiale  donne' 
pour  la  solubilité  du  bicarbonate  de  potasse  en  100  parties  d’eau 


les  nombres  suivants  ^ ) : 

0“ 19,61  40° 34,15 

10°  . . . , . . 23,23  50° 37,92 

20° 26,91  60° 41,35 

30° 30,57  70° 45,24 


0 An?i.  Chini.  Phys.  (3),  8,  p.  168. 


DES  BICARBONATES  DE  SOUDE,  ETC. 


363 


Il  n’y  a pas  accord  non  plus  avec  la  détermination  deM.  Anthon  ^ ), 
qui  à 10^  — 110^2  trouve  la  solubilité  =24,4,  ni  avec  celle  de 
M.  Redwood  , d’après  lequel,  à 15'^  C , 1 partie  de  sel  exige  pour 
se  dissoudre  3|^  parties  d’eau,  ce  qui  fait  sur  100  parties  d’eau 
28,6  parties  de  sel.  Ces  deux  dernières  déterminations  se  rappro- 
chent pourtant  plus  des  miennes  que  Celles  de  M.  Poggiale  (Voir 
le  tableau  ci-après). 


III.  Bicarbonate  d’ammoniaque. 

On  doit  à H.  Rose  d’avoir  fait  connaître  le  premier  la  com- 
position du  bicarbonate  d’ammoniaque,  ainsi  que  différentes  manières  , 
de  le  préparer.  Miller  ^) , G.  Rose  et  Deville  ont  décrit  la  forme 
cristalline  de  ce  sel.  Teschenmacher , Ulex  et  T.  L.  Phipson 
l’ont  trouvé,  à l’état  cristallisé,  dans  du  guano  de  diverses  pro- 
venances, et  A.  Schrotter  l’a  rencontré  en  cristaux,  qui  mesu- 
raient jusqu'à  2 centimètres  de  longueur,  dans  un  tuyau  de  con- 
duite, large  de  3 décimètres,  de  la  fabrique  de  gaz  à Vienne. 
Du  reste,  ce  sel  n’a  encore  été  que  peu  étudié. 

Pour  déterminer  la  solubilité,  je  préparai  une  grande  quantité 
du  sel  en  dissolvant  du  carbonate  d’ammoniaque  du  commerce 
dans  de  l’eau  à 40°  — 50°,  et  faisant  passer  un  courant  d’acide 
carbonique  à travers  la  solution  pendant  qu’elle  se  refroidissait. 
J’obtins  ainsi  des  cristaux  tout-à-fait  transparents,  qui  parfois. 


*)  Chem.  Centralblatt , 1861,  p.  629. 

-)  Cité  dans  Otto,  Ausführl.  Lehrh.  der  anorg.  Chem.,  4e  éd. , II,  p.  141, 
Pogg.  Ann.,  46,  p,  353, 

")  Trans.  of  the  'phil.  Soc.  of  Cambridge , III.  — Pogg.  Ann.  , 23.,  p.  558. 
*)  Pogg.  Ann.,  46,  p.  400. 

®)  Ann.  Chim.  Phys.  (3),  40,  p,  87. 

’)  Ann.  Chem.  Pharm.,  66,  p.  44.  — Journ.f.prakt.  Chem.  ,46,p.  409. 
®)  Journ.  of  the  Chem.  Soc.  (2),  1,  p.  74. 

®)  Sitz.  Ber.  d.  hais.  Ahad.  d.  Wiss.  zu  Wien,  2te  Abtheil.  , p.  33, 
— Chem.  Centralhl.,  1862,  p.  92. 


364  H.  C.  DIBBITS.  SUR  LA  SOLUBILITÉ  ET  LA  DISSOCIATION 

lorsque  le  courant  de  gaz  carbonique  était  interrompu  avant  le 
refroidissement  complet , avaient  des  dimensions  assez  considérables 
et  atteignaient  jusqu’à  1 centimètre  de  longueur.  Même  quand  on  ne 
la  fait  pas  traverser  par  un  courant  d’acide  carbonique , la  solution 
saturée  à chaud  du  sel  du  commerce  laisse  encore  déposer  des 
cristaux  de  bicarbonate  d’ammoniaque,  mais  leur  quantité  est 
alors  un  peu  plus  faible.  Les  cristaux  ' obtenus  furent  pressés 
entre  du  papier  à filtre,  puis  séchés  sur  l’acide  sulfurique  et  la 
soude  caustique. 

Les  cristaux  appartenaient  au  système  rhombique  et  présentaient 
la  forme  décrite  par  Miller,  G.  Rose  et  Deville  L-  Leur  compo- 
sition était  représentée  par  la  formule  (NH^)HCO^,  ainsi  qu’il 
résulte  des  analyses  suivantes,  exécutées  à divers  intervalles: 

I II  III  IV  Moyenne.  Calculé. 

...  55,71  . . . 55,64  . . . 55,41  . . . 55,88  . . . 55,66  . . . 55,70 
NH3  ...  21,51  . . . 21,51  . . 21,43  . . . 21,40  . . . 21,46  . . . 21,52 
H^O : . . 22,88..  .22,78 

Dans  le  n“  IV,  le  dosage  de  l’acide  carbonique  se  fit  par  préci- 
pitation au  moyen  du  chlorure  de  baryum  et  de  l’ammoniaque; 
l’acide  carbonique  fut  donc  pesé  à l’état  de  carbonate  de  baryte. 
Les  dosages  I — III  eurent  lieu , comme  toutes  les  autres  déter- 
minations de  l’acide  carbonique  mentionnées  dans  ce  travail,  en 
chassant  le  gaz  par  l’acide  sulfurique  étendu  et  le  recueillant  dans 
la  chaux  sodée.  — Pour  l’ammoniaque , le  dosage  IV  s’effectua 
en  transformant  le  sel,  dans  un  matras  à long  col  tenu  incliné, 
en  chlorure  aramonique,  précipitant  par  le  chlorure  de  platine, 
calcinant  le  précipité  et  le  pesant  à l’état  de  platine.  Les  dosages 
I — III,  comme  tous  les  autres  dosages  d’ammoniaque  dont  il  sera 
ici  question,  furent  exécutés  en  décomposant  le  sel  par  l’acide 
chlorhydrique,  évaporant  au  bain-marie  dans  une  capsule  de  pla- 
tine , et , lorsque  le  poids  était  devenu  constant , pesant  le  chlorure 
ammonique  obtenu.  — L’eau  fut  déterminée  par  différence.  L’ac- 
cord entre  les  résultats  trouvés  et  la  composition  calculée  montre 
que  le  sel  était  exempt  de  carbonate  neutre. 

D Comparer  Rammelsbcrg,  Knjstallogr . Chemie » p.  152. 


365 


DES  BICARBOIVATES  DE  SOUDE,  ETC. 

Le  sel;  préparé  ainsi  qu’il  a été  dit , est  complètement  inodore. 
Exposé  à l’air  ; il  attire  un  peu  d’humidité,  et  répand  alors  une 
forte  odeur  d’ammoniaque  ou  de  carbonate  ‘d’ammoniaque.  Par 
l’eau,  le  sel  est  partiellement  décomposé;  il  se  dégage  d’abord 
de  l’acide  carbonique,  et  ensuite  de  l’ammoniaque,  ce  qui  expli- 
que l’odeur  du  sel  humide,  odeur  dont  le  sel  sec  ne  présente 
aucune  trace. 

Pourtant,  le  sel  sec  s’évapore  aussi,  comme  me  l’a  appris  l’ex- 
périence suivante.  Des  cristaux  du  sel,  réduits  en  poudre  fine, 
furent  d’abord  séchés  longtemps  sur  l’acide  sulfurique  et  la  soude 
caustique.  On  en  prit  alors  une  partie  déterminée  (2,476  grammes) , 
qui  fut  replacée  en  présence  de  l’acide  sulfurique  et  de  la  soude 
caustique  dans  un  espace  clos,  puis  pesée  de  nouveau  de  temps 
en  temps.  Après  12  jours  le  sel  avait  perdu  24,2  ”/o  de  son  poids, 
après  18  jours  36,5  ®/o , après  24  jours  52,0  Vo*  La  température 
avait  varié  entre  12  ’ et  16«.  Par  l’analyse  du  résidu  (après  que 
le  poids  du  sel  avait  diminué  de  52  °/o)  ? j’obtins  : 

55,64  o/o  CO^ 

67,71  „ NH^C1  = 21,52 

ce  qui  est  entièrement  conforme  à la  composition  du  sel  primitif. 
L’évaporation  partielle  n’apporte  donc  aucun  changement  dans  la 
composition  du  résidu. 

. La  détermination  du  poids  spécifique  du  sel , pour  laquelle  on 
a choisi  de  petits  cristaux  bien  conformés,  a été  faite  à l’aide 
d’un  pycnomètre  dont  le  volume  mesurait  2,8876  c.c.  à 15%  dans 
du  pétrqle  qui  possédait  à 15®  une  densité  de  0,7252  (eau  à 4*^  z=  1). 
J’ai  trouvé  ainsi  pour  le  poids  spécifique  du  sel  à 15®,  rapporté 
à celui  de  l’eau  à 4«: 

I 1,5448 

II  1,5439 

Moyenne 1,544 

M.  Ulex  1),  en  opérant,  il  est  vrai,  sur  des  cristaux  retirés 
du  guano  et  qui  n’étaient  pas  absolument  purs,  avait  trouvé  le 
poids  spécifique  1,45. 

’)  Ann.  Chem.  Pharm. , 66,  p.  44. 


1 


366  H.  C.  DIBBITS.  SUR  LA  SOLUBILITE  ET  LA  DISSOCIATION 


Les  déterminations  de  solubilité,  relatives  à ce  sel,  ont  eu  lieu 
de  la  manière  qui  a été  , décrite  ci-dessus  à roccasion  du  bicar- 
bonate de  soude  (p.  352).  Pour  chaque  solution  saturée,  et  im- 
médiatement après  sa  préparation,  on  dosait  dans  une  portion 
Tacide  carbonique  , et  dans  une  autre  portion  Pammoniaque , sous 
forme  de  chlorure  ammonique.  Au  moment  de  Pouverture  du 
flacon  il  s’échappait  toujours,  même  à 0°,  de  Pacide  carbonique, 
ce  qu’on  pouvait  conclure  de  la  tension  du  gaz.  A 4P  une  expé- 
rience vint  même  à manquer  par  suite  de  la  projection  du  bouchon , 
qui  cette  fois  avait  hiqn  été  fortement  serré,  mais  non  attaché  au 
moyen  d’une  ficelle.  A toutes  les  températures,  la  tension  de  Pacide 
carbonique  libre , et  par  conséquent  la  décomposition  du  sel , 
étaient  beaucoup  plus  fortes  que  pour  le  bicarbonate  de  potasse 
ou  de  soude.  Par  suite  de  la  tension  très-considérable  de  Pacide 
carbonique  aux  températures  un  peu  élevées , il  m’a  été  impossible 
de  déterminer  la  solubilité  au-dessus  de  30°. 

Les  données  .de  mes  expériences,  de  nouveau  réduites  à 10 
grammes  de  la  solution  saturée,  sont  les  suivantes: 


Bicarbonate 


Numéro 

de  Tempé- 

Texpérience.  rature. 

1 Oo 

2 Oo 

3 30, 0 

4 8o,4 

5 120,5 


d’ammoniaque. 

10  gr.  de  solution  saturée  ont  donné: 
~~~NR'>CL  COK  ■ 

0,7212  gram  0,5768  grain 

0,7222  //  0,5777  // 

0,7800  //  0,6222  // 

0,8943  //  0,7126  // 

0,9925  //  0,7800 


6 .... 

. . . . 170,1  . . . . 

....  1,1033  // 

0,8585 

7 .... 

....  20o,9  .... 

. . . . 1,2098  // 

0,9229 

8 .... 

....  220,8  . . . . 

....  1,2581  // 

0,9516 

9 

26o  2 

. . 1,3523  // 

1,0159 

10  .... 

. . . . 29o,9  .... 

1,0816 

De  ces  données  j’ai  déduit,  en  procédant  comme  il  a été  dit 
à l’article  du  bicarbonate  de  potasse,  le  tableau  suivant: 


DES  BICARBONATES  DE  SOUDE,  ETC. 


367 


Bicarbonate  d’ammoniaque. 


Perte  de 

Perte  de 

Numéro 

CO^ 

CO* 

Solubilité 

de 

Tempe- 

sur  10 

gr. 

en  centièmes 

eu 

rcxpériencc. 

rature. 

de  sol. 

sat. 

du  CO*. 

' 100  p.  d’eau. 

1 

Oo 

. . . . 0,0163  1 

^ram 

2,7  ... 

...  11,90 

2 ... 

. . Oo 

. . . . 0,0163 

// 

2,7  .... 

. . . 11,92 

3 .-. . 

. . 30,0  . 

. i. . 0,0193 

// 

3,0  ... 

. . . 12,99 

4 . . . 

. . 80,4  . 

....  0,0229 

// 

3,1  ... 

...  15,17 

5 . . . 

. . 12o,5  . 

....  0,0363 

// 

4,4  . . 

. ..  17,10 

6 ... 

..  17o,l  . 

....  0,0489 

// 

5,4  ... 

. . . 19,35 

7 ... 

. . 20o,9  . 

....  0,0721 

// 

7,2  ... 

. . . 21,56 

8 ..., 

. . 22o,8  . 

....  0,083] 

// 

8,0  ... 

. . . 22,59 

9 ... 

. . 2Go,2  . 

....  0,0963 

// 

8,7  ... 

. . . 24,65 

10  ... 

. . 290,9  . 

....  0,1163 

// 

9,7  ... 

. ..  27,00 

Finalement,  je  dois  encore  faire  remarquer  que,  dans  toutes 
mes  déterminations  de  la  solubilité  des  trois  sels  étudiés,  la 
température  a été  prise  dans  la  solution  même,  de  la  manière 
qui  a été  expliquée  à propos  du  bicarbonate  de  soude  (p.  353). 
Toutes  les  températures  indiquées  sont  corrigées  de  Terreur  du 
thermomètre,  qui  au  début  de  ces  expériences  marquait  0°,2  de 
trop,  tant  à 0°  qu’à  lOO®,  et  qui,  à la  fin  du  travail,  accusait 
à peine  une  variation  de  0°,1. 

Les  déterminations  de  la  solubilité  du  bicarbonate  de  soude, 
rapportées  ci-dessus,  ont  en  outre  été  calculées  par  moi  de  la 
même  manière  que  celles  des  deux  autres  bicarbonates , c’est-à-dire, 
en  y apportant  la  correction  relative  à la  perte  d’acide  carbo- 
nique ; cette  correction  est  toutefois , pour  ce  sel , plus  faible 
que  pour  les  deux  autres,  et  ne  s’élève  qu’à  quelques  centièmes 
dans  le  nombre  de  la  solubilité.  Les  valeurs  ainsi  calculées  en 
dernier  lieu  ont  servi  de  base  pour  la  composition  du  tableau 
qu’on  trouve  à la  page  suivante. 

Comme/  dans  toutes  mes  déterminations,  la  décomposition  du 
sel,  bien  que  n’étant  probablement  pas  nulle,  ne  pouvait  avoir 
qu’une  valeur  très-petite,  les  nombres  trouvés  pour  la  solubilité 
de  chacun  des  trois  sels  ne  peuvent  pas,  à ce  qu’il  me  semble. 


368  II.  C.  DIBBITS.  SUR  LA  SOLUBILITÉ  ET  LA  DISSOCIATION 

s’écarter  beaucoup  de  la  vérité.  Pour  la  raison  indiquée  précédem- 
ment (p.  357),  ces  nombres  sont,  toutefois,  plutôt  trop  grands 
que  trop  petits. 

Les  lignes  de  solubilité  des  trois  bicarbonates  étudiés  sont  toutes 
les  trois  des  courbes  faibles,  ne  différant  pas  beaucoup  entre 
elles  quant  à la  forme,  et  ayant  la  concavité  tournée  vers  le  haut. 


De  l’ensemble  de  mes  déterminations  j’ai  déduit  les  tableaux 
suivants,  dans  lesquels  j’ai  encore  tenu  compte  des  demi-dixiémes  ; 
c’est  pour  cela  que  le  chiffre  5 figure  seul  à la  seconde  décimale. 

Solubilité  en  100  parties  d/ eau. 

Bicarbonate  Bicarbonate  Bicarbonate 


Température. 

de  potasse. 

de  soude. 

d’ammon 

Oo  . . . . 

22.45  . . . 

6.9  . . , 

11,9 

1 .... 

....  22,95  . . . 

7,0  . . , 

12,25 

2 .... 

....  23,45  . . . 

7,1  . . 

12,6 

3 

....  24,0 

7,2  . . . 

12,95 

4 

....  24,5 

7,35  ... 

13,35 

5 

25,0 

7,45  . . . 

13,7 

6 .... 

....  25,55  . . . 

7,6  .. 

14,1 

7 .... 

....  26,1  . . . 

7,7  .. 

14,55 

8 

26,6 

7,85  . . , 

15,0 

9 

27,15  . . . 

8,0  . . , 

15,4 

10  ... 

....  27,7  . . . 

8,15  ... 

15,85 

11  .... 

....  28,2  . . . 

8,25  ... 

16,3 

12  .... 

. . 28,75  . . . 

8,4  . . . 

16,8 

13  . . . . 

....  29,3  . . . 

8,55  ... 

.....  17,3 

14  . . . . 

29,85  . . . 

. . . . : 8,7  . . . 

17,8 

15  .... 

30,4  . . . 

8,85  ... 

18,3 

16  .... 

, . . . . 30,95  . . . 

9,0  . . 

18,8 

17  .... 

31,5  ... 

9,15  .. 

19,35 

18  . . . . 

....  32,1  . . . 

9,3  . . . 

■ 19,9 

19  . . . . 

....  32,65  . . . 

9,45  ... 

20,45 

20  . . . . 

33,2 

9,6  . . 

21,0 

21  . . . . 

33,8  . . . 

9,75  .. 

21,6 

22  . . . . 

....  34,35  . . . 

9,9  . . , 

22,15 

369 


DES  BICARBONATES  DE  SOUDE,  ETC. 


Bicarbonate 

Bicarbonate 

Bicarbonate 

Température. 

de  potasse. 

de  soude,  d 

’ a m ni  O n i a q U e, 

23°  ... 

34,9  . . . 

10,05  

. . . 22,7 

24  ... 

35,5  ... 

10,2  

. . . 23,3 

25  ... 

36,1  . . . 

10,35  

. . . 23,9 

26  ... 

36,65  . . . 

10,5  

. . . 24,5 

27  ... 

37,25  . . . 

10,65  

. . . 25,1 

28  ... 

37,8  . . . 

10,8  

. . . 25,75 

29.  ... 

38,4  . . . 

10,95  

. . . 26,35 

30  . . 

39,0  . . . 

11,1  

. . . 27,0 

31  ... 

39,6  . . . 

11,25 

32  ... 

40,2  . . . 

11,4 

33  ... 

40,8  . . . 

11,55 

34  . . . . 

41,45  . . . 

11,7 

35  . . . , 

42,05  . . . 

11,9 

36  ... 

42,7  . . . 

12,05 

37  ... 

CO 

12,2 

- 38  ... 

43,95  . . . 

12,35 

39  ... 

44,6  . . . 

12,5 

40  . . . , 

45,25  . . . 

12,7 

41  . . . . 

45,9  ... 

12,9 

42  . . . , 

46,55  . . . 

13,05 

43  . . . . 

47,2  . . . 

13,2 

D 

44  . . . . 

47,9  .'. . 

13,4 

45  . . . . 

48,6  . . . 

i3,55 

46  .... 

....  49,3  . . . 

13,75 

47  . . . . 

....  50,0  . . . , 

13,9 

48  . . . . 

50,7  . . . 

14,1 

49  . . . . 

....  51,4  ... 

14,3 

50  . . . . 

....  52,15  . , 

14,45 

51  .... 

....  52,9  . . . . 

14,65 

52  .. . . 

....  53,65  . . . . 

14,85 

53  . . . . 

....  54,4  . . . , 

15,0 

54  . .. . 

....  55,15  . . . . 

15,2 

55  .... 

55,9  

....  15,4 

56  .... 

....  56,7  . . . . 

15,6 

57  . . . . 

....  57,5  . . . . 

15,8 

.58  .... 

58,3  ... 

......  16,0 

- 59  .... 

....  59,1  . . . . 

16,2 

60  . . . . 

....  60,0  . . . . 

16,4 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX. 


24 


370  H.  G.  DIBBITS.  SUR  LA  SOLUBILITE  ET  LA  DISSOCIATION 

IV.  Sur  la  tension  de  Ta  eide  carbonique  dans  les 
dissolutions  des  bicarbonates  alcalins. 

Pour  déterminer,  au  moins  en  quelque  sorte,  la  grandeur 
de  la  tension  de  T acide  carbonique  libre  dans  les  solutions 
saturées  des  bicarbonates  alcalins,  j'ai  fait  quelques  expériences 
spéciales,  en  procédant  de  la  manière  suivante.  Le  flacon,  dans 
lequel  devait  être  préparée  la  solution  saturée , étant  rempli  presque 
entièrement  de  sel  et  d'eau , on  le  fermait  avec  un  bouchon  percé 
d'une  ouverture , où  passait  un  tube  de  verre  deux  fois  recourbé , 
qui  près  de  son  extrémité  (la  plus  éloignée  du  flacon)  portait  un 
robinet  de  verre  à double  voie.  Après  que  le  bouchon  avait  été  bien 
adapté , on  fermait  le  robinet  5 puis  le  flacon , placé  dans  une  cuve 
d'eau,  était  secoué.  Quand  on  jugeait  la  solution  saturée,  l'extrémité 
inférieure  du  robinet  était  reliée  à un  tube  en  U placé  vertica- 
lement, qui  servait  de  manomètre  et  dont  l'une  des  branches 
avait  environ  deux  décimètres  de  long , l'autre  environ  un  mètre. 
Du  mercure  était  versé  dans  la  longue  branche,  et,  à l'aide  de 
la  seconde  voie  du  robinet , le  tube  pouvait  être  rempli  exactement 
jusqu'à  l’orifice  de  celui-ci.  On  ajoutait  alors  encore  du  mercure 
dans  la  longue  branche,  puis  le  robinet  était  disposé  de  façon 
que  le  flacon  se  trouvât  en  communication  avec  le  manomètre. 
En  ajoutant  du  mercure,  ou  en  tournant  le  robinet  de  manière 
à en  soutirer,  il  était  facile  d'obtenir  que  le  mercure  — la 
communication  étant  établie  entre  le  flacon  et  le  manomètre  — 
s'arrêtât  juste  dans  le  robinet.  La  différence  de  hauteur  du  mer 
cure  dans  les  deux  branches  du  manomètre  était  alors  mesurée, 
ce  qui  donnait  la  tension  du  gaz  sans  changement  de  volume. 

Lorsque  je  voulais  déterminer  la  tension  k une  température 
plus  élevée,  le  robinet  était  fermé,  le  manomètre  détaché,  l'eau 
de  la  cuve  chauffée  à une  température  déterminée,  et  le  flacon 
secoué  pendant  longtemps,  la  température  étant  maintenue  con- 
stante autant  que  possible.  Ensuite  le  manomètre  était  de  nouveau 
relié  au  flacon,  et  en  ajoutant  ou  soutirant  du  mercure,  on 
mesurait  la  tension  ainsi  qu'il  a été  dit  ci-dessus. 


DES  BICARÜONATES  DE  SOUDE^  ETC. 


371 


Cette  manière  d’expérimenter  n’a,  sans  doute,  pas  un  grand 
degré  d’exactitude.  La  tension  observée  dépend  en  effet,  même 
à température  constante , d’une  foule  de  circonstances , telles  que  : 
le  volume  du  mélange  de  CO^  et  d’air  qui  occupe  la  capacité 
au-dessus  de  la  solution  (dans  le  flacon  et  dans  le  tube  jusqu’au 
robinet),  ou  plutôt  le  rapport  entre  ce  volume  et  celui  de  la 
solution  ; la  diminution  de  volume  que  le  mélange  de  sel  et  d’eau 
éprouve  quand  on  l’agite,  par  le  fait  de  la  dissolution  du  sel; 
la  compressibilité  du  bouchon  ; la  compressibilité  du  verre , etc. 
Si,  en  outre,  on  élève  la  température,  la  tension  est  encore 
modifiée , non-seulement  par  l’augmentation  de  la  quantité  d’acide 
carbonique  devenu  libre  dans  la  solution,  mais  aussi  par  les  cir- 
constances suivantes:  la  dilatation  du  liquide,  laquelle  restreint 
d’autant  le  volume  du  gaz  qui  repose  sur  lui;  la  dilatation  du 
verre;  l’accroissement  de  tension  de  l’air  primitivement  inclus 
dans  le  tube;  l’accroissement  de  tension  de  la  vapeur  d’eau;  le 
changement  de  compressibilité  du  bouchon  et  -du  verre,  etc. 
Pour  ce  motif,  je  n’ai  fait  avec  cet  appareil  qu’un  petit  nombre 
de  déterminations,  dont  voici  les  résultats: 


Bicarbonate  de  potasse. 

Deux  déterminations.  Pour  II,  le  flacon  avait  été  rempli  de 
nouveau.  Dans  les  deux  cas,  le  flacon  fut  bouché  à 15°. 

Temp.  de  la  Hauteur  du 

saturation.  mercure. 

. . 15" 440  millim. 

. . 15° „ 

Moyenne:  461  „ 


I 

II 


Bicarbonate  de  soude. 

Le  flacon  fut  fermé  à 15o. 

Temp.  de  la  Hauteur  du 

saturation.  mercure. 

15“ 120  millim. 

30„ 282  „ 

40“ 484  „ 

50“ 750  „ 


24* 


372  H.  C.  DIBBITS.  SUR  LA  SOLUBILITÉ  ET  LA  DISSOCIATION 


Le  flacon  ayant  été  xQm^Xi  à!  eau  pure  y je  trouvai,  après  Tavoir 


fermé  à 15o: 


Hauteur  du 

Température. 

mercure. 

15» 

30„ 

70  „ 

0 

0 

128  „ 

50o 

187  „ 

' Si  ces  pressions , qui  résultent  de  la  tension  de  la  vapeur  d’eau 
et  de  la  tension  de  l’air  inclus,  toutes  deux  croissantes  quand 
on  chauffe , sont  retranchées  des  pressions  ci-dessus , on  obtient  : 


Temp.  de  la 
saturation . 

Tension  de  CO*. 

15o  ......  . 

de  mercure. 

30«  

212 

n 

JJ  JJ 

0 

0 

356 

n 

JJ  JJ 

50o 

563 

JJ  JJ 

Bicarbonate  d’ammoniaque. 

Le  flacon  fut  fermé  à 14°,5. 

Temp.  de  la  saturation.  Hauteur  du  mercure. 


140,5 720  millim. 

c’est-à-dire,  une  tension  de  presque  une  atmosphère  au-dessus 
de  la  pression  de  l’air. 

Lorsque,  pour  chacun  de  ces  sels,  on  laisse  échapper  l’excès 
de  gaz,  en  ouvrant  un  instant  le  robinet,  puis  le  refermant  aus- 
sitôt, il  recommence  à se  dégager  peu  à peu  de  l’acide  carbonique , 
et  la  tension , qui  était  devenue  = 0 , augmente  de  nouveau.  Cet 
accroissement  est  d’abord  assez  rapide,  ensuite  plus  lent.  Avec 
le  bicarbonate  de  potasse  (Exp.  I),  par  exemple,  la  tension,  2 
heures  après  que  le  robinet  eut  été  ouvert  puis  refermé , s’élevait 
de  nouveau  à 82  millim.  et  au  bout  de  24  heures  elle  atteignait 
400  millim.  de  mercure,  ou  presque  la  valeur  primitive,  tandis 
que  la  température  était  restée,  tout  ce  temps  stationnaire,  au 
moins  à 540  près.  Avec  le  bicarbonate  d’ammoniaque,  la  tension 
était  remontée , 24  heures  après  la  double  manœuvre  du  robinet , 


DES  BICARBONATES  DE  SOUDE,  ETC.  373 

à 355  millira.,  et  elle  continua  encore  à croître,  sans  variation 
sensible  de  la  température.  Quand  on  supprime  la  tension,  les 
dissolutions  abandonnent  donc  de  nouveau  de  Tacide  carbonique, 
mais  un  long  intervalle  de  temps  est  nécessaire  pour  que  l’équi- 
libre se  rétablisse. 

Vu  la  complication  du  phénomène , je  m’abstiens , pour  le  moment , 
de  pousser  plus  loin  l’étude  de  ces  tensions.  Ce  que  je  viens  d’en 
dire  suffit  pour  donner  une  idée  de  leur  grandeur , et  pour  expliquer 
complètement  les  phénomènes  décrits  par  H.  Rose  ^ ),  savoir , que 
les  solutions  de  bicarbonate  de  potasse  et  de  bicarbonate  de  soude , 
abandonnées  à l’air  ou  dans  le  vide , ou  bien  évaporées , perdent 
de  l’acide  carbonique  et  se  transforment  finalement  en  carbonates 
neutres. 

Avant  de  finir,  encore  une  remarque  concernant  le  bicarbonate 

ammoniaque. 

J’ai  mentionné  plus  haut  (p.  365)  le  fait  que  ce  sel,  à l’état  solide^ 
s’évapore  déjà  à la  température  ordinaire,  et  cela  sans  que  la 
composition  du  résidu  se  trouve  altérée.  Or  il  serait  intéres- 
sant de  déterminer  la  densité  de  vapeur  de  ce  sel  à différen- 
tes températures  et  sous  différentes  pressions,  attendu  qu’une 
décomposition  ou  dissociation , à l’état  de  vapeur , est  ici  à prévoir. 
Pour  l’examen  des  particularités  accompagnant  cette  dissociation 
présumée,  le  sd  conviendrait  peut-être  tout  aussi  bien  que  le 
carbaminate  d'ammoniaque  y ^étudié  à ce  point  de  vue  parM.  Nau- 
mann  ^ ) , et  qui  d’après  ce  chimiste  ne  saurait  exister  comme  tel 
sous  forme  de  vapeur , 1 molécule  du  sel  se  dédoublant  en  1 mol. 
CO^  et  2 mol.  NH^.  Dans  l’hypothèse  de  la  dissociation  du 
bicarbonate  d' ammoniaque  y 1 molécule  se  partagerait  en  1 mol. 
CO^,  1 mol.  et  1 mol.  H^O,  et  par  conséquent,  en  cas 

de  décomposition  complète , la  densité  de  vapeur  devrait  être  trouvée 
(de  même  que  chez  le  carbaminate  d’ammoniaque)  trois  fois  plus 
petite  que  la  densité  calculée. 

Amsterdam  y Oct.  1874. 


D ï’ogg.  Ann.  31,  p.  119. 

Ann.  Chem.  Pharm.  t.  160  p.  1. 


ENDOTHÉLIUM  ET  ÉMIGRATION, 


PAR 

LAIDLAW  PURVES. 


Le  but  des  observations  que  je  vais  communiquer  était  de  recher- 
cher quels  sont  les  changements  qui  ont  lieu  dans  Tendothélium 
des  veines  et  des  capillaires  pendant  les  premières  phases  du 
phénomène  inflammatoire.  Je  voulais  savoir,  en  premier  lieu,  si, 
avant  le  début  de  Témigration  des  corpuscules  sanguins , les  parois 
des  vaisseaux  ne  montreraient  pas  déjà  des  changements,  qu’il 
conviendrait  de  regarder  comme  préparatoires  à cette  émigration. 
Secondement,  j'espérais  déterminer,  avec  plus  de  précision  qu’on 
ne  l’a  fait  jusqu’ici,  la  voie  par  laquelle  les  corpuscules  sanguins 
traversent  l’endothélium;  il  s’agissait,  en  particulier,  d’essayer  de 
résoudre  la  question , très  controversée  et  encore  indécise,  de  l’exis- 
stence  de  stomates  préformés  dans  l’endothélium  normal  des 
vaisseaux,  et,  en  cas  de  solution  négative,  de  reconnaître  où  et, 
comment  se  forment  les  ouvertures  par  lesquelles  l’émigration 
s’effectue.  Enfin,  je  me  proposais  d’examiner  comment  les  stomates 
et  l’endothélium  se  comportent  dans  les  premiers  temps  après  le 
passage  des  corpuscules. 

Les  expériences  ont  porté  exclusivement  sur  le  mésentère  de 
grandes  grenouilles  mâles  (Ra?ia  esculenla  et  lemporaria)  ; la 
méthode  que  j’ai  suivie  dans  ces  recherches  est  la  suivante. 

La  grenouille  est  empoisonnée  par  une  dose  de  curare  tout 
juste  suffisante  pour  produire  la  paralysie,  ou  bien  elle  est  rendue 


LAIDLAW  PURVES.  ENDOïHÉLIU Al  ET  ÉMIGRATION. 


375 


immobile  au  moyen  d’une  aiguille , qu’on  enfonce  par  la  voûte  du 
crâne  jusqu’au  bas  de  la  moelle  épinière.  Les  intestins  grêles 
et  le  mésentère  étant  alors  amenés  avec  précaution  au  jour,  à 
travers  une  petite  incision  faite  dans  ce  but  à la  paroi  abdomi- 
nale, le  mieux  au  côté  droit,  on  étend  le  mésentère,  — à l’aide 
de  quatre  ou  cinq  courtes  épingles,  qui  fixent  l’intestin  sur  un 
anneau  de  liège , — dans  une  position  horizontale , en  ayant  soin 
qu’il  se  trouve  tiraillé  aussi  peu  que  possible.  On  doit  éviter  dans 
cette  opération  l’effusion  du  sang.  — Si  l’on  se  propose  d’étudier 
les  vaisseaux  dans  une  phase  plus  avancée  de  l’inflammation,  le 
mésentère  ne  doit  pas  être  tendu , parce  qu’il  en  résulte  aisément , 
dans  beaucoup  de  vaisseaux,  la  stase  du  sang  et  un  obstacle  à 
l’injection;  il  faut  se  borner  alors  à le  fixer  au  dehors  par  une 
seule  épingle.  Cette  dernière  précaution  est  nécessaire  pour  em- 
pêcher que  les  intestins,  par  suite  des  contractions  de  leurs 
muscles , ne  se  retirent  de  nouveau  dans  la  cavité  abdominale.  — 
La  grenouille  est  conservée  dans  un  espace  entièrement  saturé  de 
vapeur  d’eau,  et  de  temps  en  temps  on  observe  au  microscope 
l’état  des  vaisseaux  du  mésentère.  La  circulation  doit  encore 
pouvoir  continuer , dans  la  majeure  partie  des  vaisseaux , pendant 
au  moins  2 — 3 jours. 

Lorsque  l’inflammation  est  arrivée  au  point  convenable,  — ce 
qui  doit  être  décidé  par  l’examen  microscopique  du  mésentère  à 
un  grossissement  de  100 — 200  fois , attendu  que  le  temps  seul  est 
un  guide  insuffisant,  — on  met  le  cœur  à nu,  on  entoure  d’un 
fil  les  deux  aortes , et , par  une  incision  faite  au  bulbe  artérieux , 
on  introduit  une  fine  canule,  remplie  du  liquide  à injection,  dans 
une  des  deux  aortes.  La  boucle  du  fil  est  alors  serrée.  Ensuite 
on  injecte  environ  1 once  d’une  solution  de  nitrate  d’argent  à 
1 — tV  cent,  après  avoir  pratiqué  une  ouverture  à la  veine 

cave  ou  au  cœur,  pour  laisser  échapper  le  sang  et  le  superflu 
du  liquide  injecté. 

On  reconnaît  que  l’injection  a bien  pénétré  dans  les  vaisseaux , 
au  changement  de  couleur  des  divers  organes,  spécialement  du 
foie , et  aux  crampes  tétaniques  des  muscles  de  la  grenouille.  Au 


376 


LAIDLAW  PURVES.  ENDOTHELIUM  ET  ÉMIGRATION. 


bout  de  quelques  minutes  (5  — 10),  la  seringue,  préalablement  un 
peu  chauffée,  est  remplie  d’une  solution  de  gélatine  dans  l’eau 
distillée , puis  cette  solution  est  injectée  à son  tour.  Pour  empêcher 
tout  à fait  que,  dans  les  manipulations  ultérieures,  la  solution  de 
gélatine  ne  s’écoule  de  nouveau  des  vaisseaux,  on  lie  la  racine 
du  mésentère  de  l’intestin  grêle,  puis  on  laisse  la  gélatine  se 
coaguler  par  le  refroidissement.  La  préparation  peut  alors  être 
placée  dans  un  mélange  de  glycérine  et  d’eau  (10  p.  c.) , avec 
ou  sans  addition  d’un  peu  d’acide  acétique. 

De  cette  manière , il  est  possible  d’obtenir  une  image  claire  et 
nette  de  l’endothélium , sans  donner  lieu  à beaucoup  de  précipité 
et  sans  colorer  sur  une  trop  grande  étendue  les  corps  des  cellules 
endothéliales  ; en  outre , on  prévient  ainsi  l’affaissement  des  parois 
des  vaisseaux  capillaires,  qui  se  produit  presque  toujours  quand 
on  n’injecte  pas  de  gélatine,  et  qui  empêche  alors  de  juger  saine- 
ment de  la  situation  relative  des  cellules  endothéliales , soit  entre 
elles , soit  par  rapport  aux  corpuscules  du  sang.  En  même  temps 
que  les  cellules  de  l’endothélium , il  importe  beaucoup  de  conserver 
inaltérés , quant  à leur  forme  et  à leurs  caractères , les  corpuscules 
blancs  et  rouges  du  sang,  et  de  les  rendre  bien  apparents  par 
l’injection.  Pour  cela,  il  est  nécessaire  que  la  solution  argentique 
ne  soit  pas  trop  faible,  car  autrement  les  corpuscules  sanguins 
se  gonflent,  pâlissent  et  même  se  détruisent  complètement.  Les 
solutions  à pour  cent  sont  déjà  trop  étendues;  une  concen- 
tration à ^ — f pour  cent  paraît  convenir  le  mieux.  Les  solutions 
plus  fortes,  telles  qu’on  les  emploie  ordinairement,  doivent  être 
évitées,  attendu  qu’elles  donnent  des  images  très  inégales,  trou- 
blées par  toutes  sortes  de  précipitations,  de  colorations,  etc.  M. 
Robinsky  a attiré  avec  raison  l’attention  sur  ce  point. 

Lorsqu’on  a maintenant  injecté,  par  la  méthode  décrite,  les 
vaisseaux  d’un  mésentère  saiuj  on  trouve  que  chaque  cellule  de 
'l’endothélium  montre  un  contour  obscur  bien  limité,  qui  est  par- 
tout appliqué  immédiatement  contre  la  paroi  de  la  cellule  voisine, 
sans  stomates  y ni  entre  y m dans  les  cellules.  Cela  est  vrai  d’une 
manière  tout  à fait  générale,  pour  les  artères,  les  veines  et  les 


LAIDLAW  PURVES.  ENDOTHELIUM  ET  ÉMIGRATION. 


377 


capillaires,  alors  même  que,  par  suite  d’injection  sous  très 
haute  pression,  tous  les  vaissaux  sont  distendus  à l’excès.  De 
ce  dernier  fait,  il  suit  que  l'adhesion  etiire  les  cellules  de  l'endo- 
thélium est  très  grande  ^ et  que  le  corps  même  des  cellules  endo- 
théliales possède  une  grande  extensibilité.  Dans  le  tissu  extérieur 
aux  vaisseaux  on  peut  voir  quelquefois  un  corpuscule  blanc  du 
sang,  et  il  y en  a parfois  aussi  un  de  fixé  au  côté  interne  de  la 
paroi  vasculaire,  au  moins  dans  les  vénules  et  les  capillaires. 
Les  mêmes  résultats  m’ont  été  offerts,  par  des  mésentères  qui 
avaient  déjà  été  exposés  à l’air  pendant  plusieurs  heures,  et  qui 
montraient  çà  et  là  un  commencement  d’accumulation  et  d’émi- 
gration de  leucocytes.  Les  cellules  de  l’endothélium,  ainsi  que 
leurs  noyaux , étaient  à ce  moment  encore  parfaitement  normales . 
Même  dans  un  stade  plus  avancé  de  l’inflammation , en  des  points 
où  beaucoup  de  corpuscules  sanguins  ont  déjà  traversé  la  paroi 
du  vaisseau,  on  réussit  assez  souvent  à obtenir  des  images  qui 
ne  diffèrent  des  images  tout  à fait  normales  que  par  la  présence 
d’un  nombre  plus  ou  moins  grand  de  leucocytes , et  aussi  d’héma- 
ties, à la  face  interne  et  à la  face  externe  de  la  paroi  vascu- 
laire, et  dans  la  paroi  vasculaire  elle-même  y toujours  entre  les 
cellules  de  l’endothélium.  Là  seulement  où  un  corpuscule  du  sang 
se  tronve  en  partie  dans  la  paroi  vasculaire , en  partie  en  dehors , 
les  cellules  de  l’endothélium  ne  se  touchent  pas  directement  ; par- 
tout ailleurs,  les  choses  se  présentent  comme  dans  l’état  normal  : 
nulle  trace  de  stomates  y nul  signe  d’un  changement  des  cellules 
endothéliales  ou  de  leurs  noyaux. 

Il  est  vrai  que,  lorsque  les  mésentères  sont  parvenus  à une 
période  très  avancée  de  l’inflammation , les  résultats  de  l’injection 
ne  sont  plus  tout  à fait  uniformes  ; l’injection  reste  alors  presque 
toujours  incomplète,  certaines  vénules  et  certains  capillaires  ne  se 
gonflant  pas,  à cause  de  leur  obstruction  par  des  corpuscules  du 
sang,  surtout  par  des  blancs.  De  préférence  au  voisinage  de 
pareils  vaisseaux,  et  même  quand  on  injecte  une  solution  argen- 
tique  très  diluée  (à  pour  cent,  par  exemple) , il  se  forme  alors 
souvent,  à la  face  interne  des  cellules  de  l’endothélium,  et  plus 


378  LAIDLAW  PURVES.  ENDOTHÉLIUM  ET  ÉMIGRATION. 

spécialement  entre  les  cellules,  des  précipités  irréguliers,  qui  ne 
tardent  pas  à brunir  sous  Tinfluence  de  la  lumière.  Ils  ont  des 
dimensions  très  variables  (jusqu'à  0,003  mm.)  et  la  forme  de 
globules  ou  d’anneaux,  rarement  celle  de  granules  anguleux.  La 
preuve  que  ce  ne  sont  pas  des  stomates  résulte  de  leur  couleur 
brune , même  au  centre , ainsi  que  de  leur  situation  à la  face  interne 
de  la  paroi  vasculaire , situation  qui , à l’aide  de  très  forts  gros- 
sissements (Zeiss  F.)  et  d’une  bonne  vis  micrométrique , se  laisse 
constater  avec  certitude  dans  de  fins  vaisseaux  capillaires,  même 
par  l’examen  d’images  en  profil.  Ces  précipités  ressemblent  par 
tous  leurs  caractères  à ceux  qu’on  observe  aussi,  fréquemment, 
dans  les  vaisseaux  normaux , tant  artères  que  veines  et  capillaires, 
surtout  à la  suite  d’une  injection  rapide  de  solutions  assez  fortes 
de  nitrate  d’argent  ^ pour  cent).  Comme  d’ailleurs  ils  man- 

quent entièrement  dans  beaucoup  de  vaisseaux  où,  au  moment 
de  l’injection  , se  faisait  ou  s’était  déjà  faite  une  émigration  active , 
ils  ne  peuvent  être  regardés  comme  le  signe  d’une  altération 
pathologique  de  la  paroi  vasculaire. 

Les  figures  de  la  Planche  V donnent  une  idée  de  la  manière 
dont  s’effectue  le  passage  des  corpuscules  du  sang  entre  les  cel- 
lules de  l’endothélium.  La  fig.  1 montre  une  portion  de  l’endo- 
thélium d’une  veine  (d’environ  0,2  mm.  de  diamètre),  la  fig.  2 
une  portion  d’un  des  vaisseaux  capillaires  d’un  fragment  de  mé- 
sentère qui  était  resté  exposé  à l’air  pendant  48  heures.  Dans 
toutes  les  deux,  on  voit  que  les  cellules  de  l’endothélium  se  joi- 
gnent parfaitement,  sauf  à la  place  où  un  leucocyte  traverse  la 
membrane.  Là  où  les  cellules  de  l’endothélium  embrassent  le  leuco- 
cyte, leurs  bords  sont  beaucoup , moins  sinueux  qu’ailleurs,  ce 
qui  s’explique  par  l’extension  passive  des  parois  des  cellules, 
sous  l’effort  du  corpuscule  qui  s’insinue  entre  elles. 

Il  ne  peut  plus , en  effet , y avoir  de  doute  que  les  corpuscules 
blancs  se  fraient  activement  leur  chemin  entre  les  cellules  de 
l’endothèlium , qu’ils  commencent  par  conséquent  par  faire  eux- 
mêmes  les  ouvertures  qui  doivent  leur  livrer  passage.  Cela  est 
d’accord  avec  le  fait  que  non-seulement  les  stomates  manquent 


LAIDLAW  PURVES.  ENDOTHELIUM  ET  ÉMIGRATION.  379 

complètement  dans  les  vaisseaux  à l’état  normal,  mais  que,  avec 
notre  méthode  d’injection,  ils  font  aussi  habituellement  défaut  là 
où  a déjà  eu  lieu  une  forte  émigration.  Cette  dernière  circonstance 
ne  peut  s’expliquer  qu’en  admettant  que,  après  la  sortie  des  cor 
puscules  blancs  du  sang,  les  stomates ^ qu’ils  avaient  formés,  se 
referment  de  nouveau  par  suite  de  l'élasticité  des  parois  des  cellules 
de  r endothélium.  Si  ces  ouvertures  persistaient,  le  nombre  des 
corpuscules  rouges  du  sang  trouvés  en  dehors  de  la  paroi  vascu- 
laire, dans  une  phase  encore  relativement  récente  de  l’inflammation, 
devrait  aussi  être  beaucoup  plus  considérable  que  cela  n’est  en 
réalité  le  cas.  Selon  toute  apparence,  il  ne  sortirait  pas  d’hématies 
du  tout,  si  les  stomates  se  refermaient  immédiatement  derrière 
les  leucocytes;  car  ces  hématies,  en  leur  qualité  d’éléments  non 
contractiles,  ne  peuvent  sortir  que  passivement,  à travers  des 
ouvertures  préformées.  Or  puisqu’elles  émigrent , et  toujours , à ce 
qu’il  m’a  semblé,  en  des  points  où  peu  de  temps  auparavant 
un  leucocyte  a quitté  la  cavité  du  vaisseau,  on  doit  admettre 
que  les  stomates,  bien  que  se  refermant  assez  vite,  ne  disparais- 
sent pourtant  pas  aussitôt  après  le  passage  du  premier  corpuscule. 
La  méthode  suivie  pour  l’examen  ne  peut  être  la  cause  qu’on  ne 
trouve  plus  de  stomates  après  l’émigration.  Au  contraire,  l’injection , 
surtout  sous  une  pression  aussi  forte  que  celle  à laquelle  j’ai  eu 
fréquemment  recours,  doit  favoriser  la  formation  de  fentes  et 
d’ouvertures  entre  les  cellules  de  l’endothélium. 

En  ce  qui  concerne  les  points  de  sortie  des  leucocytes , je  dois 
encore  faire  remarquer  que  je  n’ai  jamais  vu  un  corpuscule  du 
sang  traverser  le  corps  d’une  cellule  de  l’endothélium.  Souvent  on 
observe  bien  un  corpuscule  appliqué  au  centre  de  la  paroi  interne 
d’une  cellule  de  l’endothélium,  mais  toujours,  ainsi  qu’on  peut 
s’en  assurer  à l’aide  des  grossissements  les  plus  puissants  et  de 
la  vis  micrométrique,  ce  corpuscule  se  trouve  en  entier  sur  la 
face  interne  de  la  cellule,  et  n’envoie  aucun  prolongement  au 
dehors,  à travers  le  corps  de  l’élément. 

L’émigration  a donc  lieu  exclusivement  par  le  passage  entre 
les  cellules , quelquefois  juste  au  point  où  trois  cellules  se  touchent , 


3 80  LAIDLAW  PURVES.  ENDOTHÉLIUM  ET  ÉMIGRATION. 

mais,  dans  le  cas  le  plus  ordinaire,  entre  deux  cellules  seulement, 
‘ et  alors,  à ce  qu’il  m’a  paru,  de  préférence  au  voisinage  d’une 
des  extrémités  de  la  cellule. 

Eu  terminant,  je  veux  encore  insister  sur  le  fait  que,  même 
dans  les  phases  les  plus  avancées  de  l’inflammation,  jusqu’à  48 
heures  après  le  commencement  d’une  émigration  active,  je  n’ai 
pu  découvrir  aucun  changement  caractéristique,  ni  aux  cellules 
endothéliales  des  capillaires,  ni  à celles  des  veines , et  qu’en  parti- 
culier je  n’ai  rien  vu  qui  annonçât  une  proliflcation  ou  multipli- 
cation des  cellules  ou  de  leurs  noyaux. 

Laboratoire  physiologique  de  L université  d' UtrecJil  ^ Avril  1873. 


SUR  LES  ACIDES  OCTYLIQUE  ET  CAPRYLIQUE, 


PAR 

J.  J.  VAN  RENESSE. 


A roccasion  de  mes  recherches  sur  la  composition  de  Thuile 
essentielle  retirée  des  fruits  du  Pastinaca  saliva  L.,  j’ai  soumis 
l’acide  octylique  et  l’acide  caprylique  à une  étudé  comparée , dont 
je  vais  communiquer  les  principaux  résultats.  L’acide  caprylique 
fut  obtenu  au  moyen  de  l’huile  de  coco , qui , saponifiée  et  ensuite 
acidifiée  par  l’acide  sulfurique,  donna  un  mélange  abondant 
d’acides  gras  libres.  Ce  mélange,  consistant  en  acides caproïque, 
caprylique,  caprique  et  laurique,  fut  distillé  avec  des  vapeurs 
d’eau,  opération  dans  laquelle  il  passa  d’abord  un  mélange  des 
trois  premiers  acides  et  finalement  aussi  un  peu  d’acide  laurique. 

Ce  dernier  est  facile  à reconnaître , car  il  se  fige  immédiatement 
dans  le  • récipient. 

La  partie  liquide  fut  séchée,  et  ensuite  soumise  à la  distilla- 
tion fractionnée. 

Après  que  les  acides  caproïque  et  caprique  eurent  été  séparés 
en  majeure  partie , le  produit  recueilli  entre  220®  et  240°  fut  mêlé 
avec  de  l’hydrate  de  baryte,  digéré  au  bain-marie  jusqu’à  réac- 
tion alcaline , et  débarrassé  de  l’excès  de  baryte  par  l’acide  car- 
bonique; au  moyen  de  cristallisations  répétées,  le  caprylate  de 
baryum  fut  alors  obtenu  parfaitement  pur. 

0,2241  gr.  séchés  à 120^  C.  donnèrent  0,1227  Ba  S O4  =0,0720  Ba. 

La  formule  Ba  (CgHj-O^)^  exige  en  centièmes: 

Calculé.  Trouvé. 

Ba  32,38  32,12. 

L’acide  ayant  été  dégagé  par  l’acide  chlorhydrique  de  sa  com- 
binaison avec  la  baryte,  la  couche  huileuse  fut  enlevée,  lavée 
à l’eau,  puis  séchée.  Dans  la  distillation  fractionnée  subséquente , 


382  J.  J.  VAN  RENESSE.  SUR  LES  ACIDES  OCTYLIQUE  ET  CAPRYLIQÜE. 

on  recueillit  séparément  la  portion  qui  passa  entre  230®  et  234°. 

L’acide  octylique  fut  préparé  en  oxydant  l’alcool  octylique 
à l’aide  du  bichromate  de  potasse  et  de  l’acide  sulfurique.  Ainsi 
que  je  l’ai  établi  ailleurs  ^ , cet  alcool  était  l’alcool  normal , et 
complètement  identique  à celui  qui  a été  décrit  par  M.  Zincke  ; 
il  devait  donc  aussi  fournir  un  acide  normal. 

L’acide  octylique  obtenu  se  solidifiait  promptement  à basse 
température,  et  il  fut  exprimé  plusieurs  fois,  après  liquéfaction 
et  solidification  préalables,  entre  des  doubles  de  papier. 

Acide  caprylique.  — Par  son  aspect  extérieur,  ce  corps  ressem- 
ble tout  à fait  à l’acide  octylique.  Il  cristallise  en  lamelles  à 
environ  10",  fond  vers  16®  à 16«,5  et  bout,  sous  la  pression  de 
761,7  mm.,  entre  236®  et  237"  (colonne  mercurielle  enveloppée 
tout  entière  par  la  vapeur  ^)). 

Caprylate  d’éthyle.  — Il  fut  préparé  en  mélangeant  1 partie  d’acide 
caprylique,  1 partie  d’alcool  à 98  ®/o  et  % partie  d’acide  sulfu- 
rique. De  la  chaleur  se  dégagea;  le  liquide  se  troubla  d’abord, 
mais  au  bout  de  peu  de  temps  il  était  séparé  en  deux  couches 
parfaitement  limpides.  Après  un  repos  de  24  heures,  la  couche 
supérieure  fut  enlevée,  lavée  à différentes  reprises  avec  de  l’eau 
et  séchée  au  moyen  du  chlorure  de  calcium. 

C’est  un  liquide  incolore,  insoluble  dans  l’eau,  facilement 
soluble  dans  l’alcool  et  l’éther,  possédant  une  très  agréable  odeur 
de  fruit.  Son  poids  spécifique  était  à 0°  C.  —0,8871,  à 16"  = 
0,8730;  le  point  d’ébullition,  sous  la  pression  de  753,1  mm.  se  main- 
tint constamment  entre  207®  et  208°  C. 

Caprylate  de  baryte.  — Ce  sel  se  dépose , pendant  le  refroidis- 
sement rapide  d’une  dissolution  concentrée,  en  jolies  lamelles, 
qui  possèdent  un  bel  éclat  nacré  et  ne  renferment  pas  d’eau  de 
cristallisation  ^).  Pour  déterminer  sa  solubilité,  un  excès  du  sel 
bien  pulvérisé  fut  laissé  tout  un  jour  en  contact  avec  l’eau  à une 

*)  Am.  d.  Chem.  u.  Pharm.,  t.  166,  p.  81. 

• 0 Ibid.,  t.  152,  p.  3. 

O Ceci  s’applique  à toutes  les  déterminations  de  points  d’ébullition. 

*)  La  dosage  du  baryum  a déjà  été  rapporté  ci-dessus. 


J.  J.  VAN  RENESSE.  SUR  LES  ACIDES  OCTYLIQUE  ET  CAPRYLIQUE.  383 

température  eonstante  de  20°  C. , en  ayant  soin  de  bien  secouer 
le  mélange  tous  les  quarts  d'heure *  *)  : 

5,8764  parties  d’eau  dissolvent  à 20°  C.  0,0367  gr.  de  sel, 
de  sorte  que  100  parties  d’eau  en  dissolvent  0,624  parties. 

Caprylate  de  chaux.  Ca  (CgH,  50^)2  + — Obtenu  en 

précipitant  la  solution  aqueuse  du  sel  ammonique  au  moyen 
d’une  solution  neutre  de  chlorure  de  calcium.  Il  est  très  semblable 
au  sel  barytique , mais  se  dissout  beaucoup  plus  difficilement.  Ce 
n’est  qu’à  130®  C.  qu’il  abandonne  toute  son  eau. 

0,4023  gr.  de  sel  séché  à l’air  perdirent  0,0212 
en  centièmes  : 

Calculé.  Trouvé. 

5,24  5,26. 

0,3677  gr.  de  sel  anhydre  donnèrent  par  la  calcination 
0,0635  Ca  0 = 0,0453  Ca; 

en  centièmes  : 

Calculé.  Trouvé. 

12,27  12,43. 

Caprylate  de  zinc  Zn  (CgH, 502)2-  — Quand  on  ajoute  à la 
dissolution  du  sel  ammonique  une  solution  de  sulfate  de  zinc, 
il  se  forme  un  précipité  blanc,  qui  se  dissout  très  difficilement 
dans  l’eau  bouillante , mais  mieux  dans  une  grande  quantité 
d’alcool  bouillant.  Pendant  le  refroidissement  de  la  solution 
alcoolique , le  sel  se  sépare  en  belles  écailles  blanches  et  brillan- 
tes , qui  ne  renferment  pas  d’eau  de  cristallisation  et  fondent 
entre  135®  et  136°  C. 

0,2486  gr.  du  sel  séché  à l’air  donnèrent  0,0506  Zn  0 = 0,0470  Zn  ; 
en  centièmes  : 

Calculé.  Trouvé. 

18,56  18,90. 

Acide  octylique.  — Cet  acide  a déjà  été  décrit  avec  soin  par 
M.  Zincke  ^).  Pour  pouvoir  le  comparer  exactement  avec  l’acide 

0 Je  crois  que  les  déterminations  de  solubilité  se  font  mieux  de  cette  manière 
que  par  l’emploi  d’eaux -mères  de  cristallisation,  cette  dernière  méthode  pouvant 
accidentellement  donner  lieu  à des  phénomènes  de  saturation  anormale. 

*)  Ann.  d.  Chem.  u.  Pharm.  , t.  152,  p.  9. 


384  J.  J.  VAN  RENESSE.  SUR  LES  ACIDES  OCTYLIQUE  ET  CAPRYLIQUE. 

caprylique,  j’ai  toutefois  répété  ces  expériences,  et  j’ai  obtenu 
tout  à fait  les  mêmes  résultats.  Seulement,  j’y  ai  ajouté  quelque 
chose  et  j’ai  détermiué  les  points  d’ébullition  en  laissant  la  colonne 
" mercurielle  tout  entière  dans  la  vapeur. 


ACIDE  OCTYLIQUE. 

ACIDE  CAPRYLIQUE. 

Cs Hj  6O2 

Bout , à la  pression  de  757,8 
mm,,  entre  235o  et  236o;  fond 
vers  I60  à 17o. 

Bout,  à la  pression  de  761,7 
mm.,  entre  236®  et  237°;  fond 
vers  I60  à 16®, 5. 

CjHs.CsHisOj 

Bout,  à la  pression  de  762,2 
mm. , entre  207o  et  208o  ; 
poids  spéc.  à Oo  = 0,8866, 
à I60  = 0,8732. 

Bout , à la  pression  de  753,1 
mm.,  entre  207°et208o;  poids 
spéc.  à Oo  = 0,8871 , à I60  = 
0,8730. 

Ba  (C  8 H 1 ^ 0 •>  ) 2 

Cristallise  en  lamelles,  qui 
ne  renferment  pas  d’eau  de 
cristallisation.  100  parties 
d’eau  dissolvent  à 20®  C. 
0,6101  parties  de  ce  sel. 

Cristallise  en  lamelles,  qui 
ne  renferment  pas  d’eau  de 
cristallisation.  100  parties 
d’eau  dissolvent  à 20o  C. 
0,6204  parties  de  ce  sel. 

CaCCsH, 502)2 
+ H2O 

Cristal  lise  avec  1 mol.  d’eau, 
que  le  sel  abandonne  à 130°. 

Cristallise  avec  1 mol.  d’eau , 
que  le  sel  abandonne  à 130o . 

Zu(C8Hig02)2 

Cristallise  en  belles  écailles , 
qui  ne  renferment  pas  d’eau 
de  cristallisation. 

Le  sel  fond  à 136o. 

Belles  lamelles , sans  eau  de 
cristallation. 

Le  sel  fond  entre  135o  et  136°. 

M.  Zincke,  s’appuyant  sur  les  résultats  obtenus  par  MM.  Lerch , 
Fehling  et  Felletar  ^ ) , termine  ses  considérations  au  sujet  de  ces 
deux  acides  par  les  mots  suivants:  „Pour  le  moment,  toutefois, 
il  ne  nous  reste  qu’à  regarder  les  deux  acides  comme  isomères, 
et  en  conséquence  j’ai  choisi  le  nom  d’acide  octylique” . Mes  re- 
cherches n’ont  pas  confirmé  cette  conclusion , mais  ont  au  contraire 
rendu  probable  que  les  deux  acides  sont  identiques  ; cela  s’accorde 
aussi  très  bien  avec  l’opinion  de  M.  Lieben  ^),  suivant  laquelle 
l’acide  caproïque  contenu  dans  les  corps  gras  naturels  doit  être 
regardé  comme  l’acide  normal. 

Ces  recherches  ont  été  exécutées  dans  le  laboratoire  de  M.  le 
professeur  Oudemans,  à Delft. 


1)  Pour  l’acide  caprylique. 

»)  Ann.  d.  Chem.  u.  Pharm.,  t.  170,  p.  189. 


.\i’('liiv  N'(rrl  T.  IX, 


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TOME  IX. 


5me  Livraison. 


ARCHIVES  NÉERLANDAISES 


DES 

SCIENCES 

EXACTES  ET  NATURELLES 

PUBLIÉES  PAR 

LA  SOCIÉTÉ  HOLLANDAISE  DES  SCIENCES  A HARLEM, 

ET  RÉDIGÉES  PAR 

E.  H.  VOM  BAEMHAIJER 


Secrétaire  de  la  Société , 

AVEC  la  COTLABORATION  DE 

MM.  D.  Bierens  de  Haan,  C.  A.  J.  A.  Oud«mans,  W.  Koster 
C.  H.  D.  Buijs  Ballot  et  S.  C.  Snellen  ^an  Vollenhoven. 


LA  HAYE 

MARTINUS  NIJHOFF. 


BRUXELLES 

PARIS 

LEIPZIG 

MUQUARDT. 

AUG.  DURAND. 

T..  0.  WEIGEL, 

LOXÜRES 

JVEW-YORli 

TRÜBNER  & WILLIAMS  & NOBGATE.  B.  WESTERMANN  & — E.  W,  CHRISTER^. 


ARCHIVES  NÉERLANDAISES 

DES 

Sciences  exactes  et  naturelles. 


SUR  LES  COMÈTES  1860  III,  1863  I ET  1863  VI, 

PAR 

M.  HOEK  ^). 


1.  J’admets  que  les  orbites  des  comètes  sont  de  leur  nature 
des  paraboles  ou  des  hyperboles,  et  que,  dans  les  cas  où  Ton 
rencontre  des  orbites  elliptiques,  celles-ci  sont  occasionnées  par 
l’attraction  planétaire,  ou  bien  doivent  leur  caractère  à l’incer- 
titude de  nos  observations.  Admettre  le  contraire , serait  reconnaî- 
tre certaines  comètes  comme  membres  permanents  de  notre  système 
planétaire,  auquel  elles  devraient  avoir  appartenu  depuis  son 

’)  Bien  que  les  deux  Notices  de  M.  Hoek,  auxquelles  les  Archives  font 
aujourd’hui  une  place,  aient  déjà  dix  ans  de  date,  la  Rédaction  ne  croit  pas 
avoir  à se  justifier  de  cette  dérogation  aux  règles  ordinaires.  Le  savant  et  mo- 
deste astronome,  dont  TUniversité  d’Utrecht  a eu  récemment  à déplorer  la  perte 
prématurée,  s’était  contenté  d’exposes  ses  vues  dans  les  Montlily  Notices  of  the 
Royal  Astronomical  Society.  Pourtant , il  était  à regretter  qu’elles  n’eussent  pas  reçu 
une  publicité  plus  étendue.  Il  est  arrivé  plus  d’une  fois , en  effet , que  des  savants 
français  ont  pris  des  informations  spéciales  pour  savoir  où  il  fallait  chercher  la  théorie 
de  M.  Hoek  sur  les  orbites  cométares.  D’autres  fois , on  a complètement  oublié  que 
notre  compatriote  s’était  occupé  de  cette  question  avec  autant  d’originalité  que 
de  succès,  et  on  a rapporté  à M.  Sciaparelli seull’honneur  des  idées  qui  ont  cours 
actuellement  dans  la  science.  Nous  croyons  donc  devoir  à la  mémoire  de  M. 
Hoek  de  reproduire,  quoique  tardivement,  un  travail  qui  a contribué,  d’une 
manière  si  notable,  à perfectionner  nos  connaissances  relativement  à l’origine 
et  aux  mouvements  des  comètes. 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  25 


/ 


386  M.  UOEK.  SUR  LES  COMETES  1860  III  , 1863  I ET  1863  VI. 

origine  ; ce  serait  soutenir , par  conséquent , la  naissance  simultanée 
de  ce  système  et  de  ces  comètes.  Pour  moi,  j’attribue  à ces  astres 
un  caractère  primitivement  errant.  Voyageant  à travers  l’espace, 
ils  se  meuvent  d’une  étoile  à une  autre,  pour  de  nouveau  quitter 
celle-ci,  à moins  qu’ils  ne  rencontrent  un  obstacle  qui  les  force 
à rester  dans  sa  sphère.  Au  voisinage  de  notre  Soleil,  Jupiter 
a été  un  pareil  obstacle  pour  les  comètes  de  Lexell  et  de  Brorsen , 
et  probablement  pour  la  plus  grande  partie  des  comètes  périodi- 
ques ; le  restant  de  celles-ci  est  sans  doute  redevable  de  ses  or- 
bites elliptiques  à l’attraction  de  Saturne  et  des  autres  planètes. 

En  général,  les  comètes  nous  arrivent  donc  de  l’une  ou  de 
l’autre  étoile.  L’attraction  de  notre  Soleil  modifie  leur  orbite, 
comme  l’avait  déjà  fait  chacune  des  étoiles  dont  elles  ont  traversé 
la  sphère  d’action.  On  peut  poser  la  question  de  savoir  si  elles 
arrivent  à l’état  de  corps  isolés  ou  bien  réunies  en  systèmes.  C’est 
cette  question  ' que  j’ai  entrepris  d’examiner.  Depuis  quelque  temps 
déjà  j’avais  senti  la  vérité  de  la  proposition  suivante: 

Il  y a dans  V espace  des  systèmes  de  Comètes , qui  sont  dissous 
par  r attraction  de  notre  Soleil,  et  dont  les  membres,  sous  forme 
de  corps  isolés,  atteignent  le  voisinage  de  la  Terre  durant  un  laps 
de  plusieurs  années. 

Pour  établir  cette  proposition,  nous  devons  montrer: 

Premièrement,  que  certaines  comètes  se  sont  trouvées  jadis 
rapprochées  l’une  de  l’autre,  à une  grande  distance  du  Soleil  ; 

Secondement , qu’elles  composaient  un  système  et  n’avaient  pas 
été  réunies  par  le'  hasard. 

2.  Le  premier  de  ces  deux  points  nous  conduit  à rechercher 
s’il  y a eu,  à un  moment  donné,  plusieurs  comètes  se  trouvant 
non- seulement  dans  la  même  direction , mais  aussi  à des  distances 
presque  égales  du  Soleil. 

L’équation  polaire  de  la  parabole  peut  être  écrite: 

cos  0 = - — 1 , 
r ^ 

où  l’on  voit  que,  r croissant  jusqu’à  l’infini,  cos  0 tend  vers  — 1 
et  B lui-même  vers  180®.  Nous  pouvons  donc  dire  qu’en  entrant 


M.  HOEK.  SUR  LES  COMÈTES  1860  III,  1863  I ET  1863  VI.  387 


dans  la  sphère  d’attraction  de  notre  Soleil , chaque  comète  occupe 
sur  cette  sphère  une  position  opposée  à celle  du  périhélie  de  son 
orbite.  Appelons  cette  position  l’aphélie,  suivant  l’usage  adopté 
en  parlant  d’orbites  elliptiques  ; la  première  chose  que  nous  ayons 
à faire  est  de  chercher  s’il  est  apparu  des  comètes  dont  les  po- 
sitions sur  la  sphère,  à l’aphélie,  sont  à peu  près  identiques. 

Lorsqu’il  s’agit  d’orbites  hyperboliques,  l’équation’ devient 

fl- (?_]), 

OÙ  « indique  l’excès  de  l’excentricité  sur  l’unité , et  comme  cette 
quantité  « est  ordinairement  très  petite,  je  l’ai  négligée  ^). 
, J’ai  donc  commencé  par  calculer  la  position  aphélie  de  65  comètes 
qui  ont  apparu  dans  les  années  1844 — 65,  et  j’ai  groupé  ensemble 
tous  les  cas  où  la  distance  angulaire  ne  surpasse  pas  lO®.  Ces 
cas  sont  donnés  par  les  comètes: 


1844  IL 

1845  I. 

1846  VIL 

1848  I. 

1854  IL 

45  IL 

46  V. 

46  VIII. 

47  II. 

59 

58  IV. 

1854  V. 

1855  I. 

1857  III. 

1857  VI. 

1860  III. 

61  III. 

61  L 

57  V. 

60  IL, 

^63  L 

63  VI. 


formant  un  total  de  dix  combinaisons,  qui  répondent , d’une  manière 
plus  ou  moins  satisfaisante,  à la  première  condition. 

Pour  le  moment,  je  ne  fixerai  l’attention  du  lecteur  que  sur 
les  deux  cas  dans  lesquels  trois  comètes  se  trouvent  réunies.  Ces 
cas  sont  les  suivants: 


Positions  aphélies. 
Comètes.  Long.  Lat. 

1845  I.  280^5  --41,6 
46  V.  275,3  —55,4 
46  VIII.  281,0  - 49,5 


Positions  aphélies. 
Comètes.  Long.  Lat. 

1860  III.  303"l  — 73"2 

63  I.  313,2  — 73,9 

63  VI.  313,9  — 76,4 


‘)  La  valeur  a = 0,05,  trouvée  par  Hartwig  pour  la  comète  1852  II,  étant 
tout  à fait  incertaine , la  plus  grande  valeur  de  « qui  se  présente  dans  la  théorie 
cométaire  est  0,02,  et  celle-ci  donne  11®  pour  la  distance  angulaire  entre  l’aphélie 
et  le  point  d’entrée  dans  la  sphère  d’attraction. 

25=^ 


388  M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  1860  III , 1863  I ET  1863  VI. 

On  remarquera  immédiatement  que  les  comètes  de  1845  et  1846 
ne  satisfont  que  par  couples  à la  limite  fixée.  L’accord  est  beau- 
coup meilleur  en  ce  qui  concerne  les  comètes  de  1860  et  1863, 
car  il  faut  observer  que  10°  de  longitude,  à la  latitude  de  73°, 
ne  représentent  qu’une  distance  angulaire  de  3|°. 

Il  ne  reste  maintenant  plus  qu’à  s’assurer  si  leurs  distances  au  So- 
leil ont  été  ; à une  certaine  époque , à peu  près  égales.  Le  calcul  me 
donne  pour  ces  distances , exprimées  en  rayons  de  l’orbite  terrestre  : 
Date.  Comète  1860  III.  Comète  1863  I.  Comète  1863  VI. 


de  sorte  que  ces  trois  comètes  remplissent  aussi  la  seconde  des 
deux  conditions. 

3.  Les  probabilités  portent  à conclure  qu’elles  ont  composé 
antérieurement  un  système  cométaire,  et  que  nous  n’avons  pas 
affaire  ici  à un  résultat  du  hasard.  Mais,  heureusement,  il  y a des 
moyens  de  décider  la  question.  . 

Au  moment  où  un  pareil  astre  commence  à ressentir  la  première 
attraction  de  notre  Soleil,  il  a un  mouvement  initial  rectiligne, 
dirigé  vers  un  certain  point  P de  la  sphère.  L’attraction  du  Soleil 
détermine  une  modification  de  ce  mouvement  primitif,  mais  il 
faut  que  le  plan  de  la  nouvelle  orbite  passe  par  le  point  P.  Si 
donc  les  comètes  ont  composé  un  système,  qui  s’est  maintenu 
sur  le  parcours  d’immenses  distances , il  est  nécessaire  que  le  point  P 
soit  commun  à chacun  de  ses  membres.  Les  nouvelles  orbites  doivent 
par  conséquent  avoir  sur  la  sphère  un  point  d’intersectiou  commun. 

Voyons  si  nos  comètes  satisfont  aussi  à cette  nouvelle  condi- 
tion. En  prenant  les  éléments  de  M.  Moesta  pour  la  comète  de 
1860,  et  ceux  de  M.  Engelmann  pour  les  deux  autres,  le  calcul 
me  donne  pour  les  positions  des  trois  points  d’intersection  : 


756,97  600,00 

1020,87,  500,00 


600,42 

500,56 


600,25 

500,36 


Points  d’intersection. 
Comètes.  Long.  Lat. 

O i ff  O i " 


Lat. 


Equinoxe  moyen 
de  1864,0 


— 76  56  42: 


Moyenne  316  35  55 


M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  1860  III,  1863  I ET  1863  VI.’  389 

l’accord  est  assez  satisfaisant  pour  qu’on  puisse  regarder  ces  trois 
comètes  comme  appartenant  à un  système. 

Le  résultat  est  tout  autre  pour  les  orbites  des  comètes  de  1845 
et  1846.  Leurs  points  d’intersection  ont  les  positions  suivantes  : 

Points  d’intersection. 

Comètes.  Long.  Lat. 

18451.  et  1846  V.  171  11  — 14  53j 

1845  I.  et  1846  VIII.  249  26  — 46  49  | Eq.  moy.  de  1846,0 

1846  V.  et  1846  VIII.  298  45  —47  5 ' 

Ces  astres  ne  formaient  donc  pas  un  système;  le  rapprochement 

de  leurs  orbites  était  purement  fortuit.  Et  en  effet , si  nous  exami- 
nons les  choses  de  plus  près , nous  trouvons  que  l’un  d’eux  avait 
un  mouvement  rétrograde , tandis  que  les  deux  autres  possédaient 
un  mouvement  direct:  différence  qui,  tout  en  n’ayant  rien  d’ab- 
solument impossible,  est  très  improbable  pour  des  astres  ayant 
fait  partie  antérieurement  d’un  même  système  cométaire.  Les 
comètes  de  1860  et  1863,  au  contraire,  ont  l’une  et  l’autre  un 
mouvement  direct. 

4.  Le  point  d’intersection  commun  des  trois  orbites  présente 
encore  une  autre  signification.  Je  dis  qu’il  y a une  très  grande 
probabilité  que  ce  point  soit  situé  sur  la  sphère  au  voisinage  du 
point  focal  autour  duquel  les  comètes  tournaient  antérieurement, 
point  focal  qui  est  probablement  occupé  par  quelque  étoile. 

Pour  le  prouver,  nous  devons  rappeler  combien  sont  nombreuses 
les  chances  pour  qu’un  semblable  système  s’approche  de  notre 
Soleil  dans  une  orbite  hyperbolique,  la  parabole  étant  presque 
impossible,  et  les  orbites  elliptiques  maintenant  généralement  le 
système  à proximité  de  l’étoile  focale.  Nous  devons  rappeler  aussi 
que,  dans  le  cas  d’un  pareil  mouvement  hyperbolique , le  système 
cométaire,  au  moment  où  il  pénètre  dans  la  sphère  d’attraction 
de  notre  Soleil,  se  meut  suivant  l’asymptote,  et  que  le  point  P 
devient  alors  le  centre  de  l’hyperbole.  Enfin,  il  faut  considérer 
que  notre  Soleil  doit  se  trouver  presque  sur  l’asymptote,  pour  que 


390  M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  1860  III,  1863  I ET  1863  IV. 


les  comètes  puissent  venir  si  près  de  la  Terre.  ^ ) En  conséquence, 
la  distance  angulaire  du  point  d’intersection  au  point  focal  est 
à peu  près  égale  à l’angle  sous  lequel  nous  voyons,  du  Soleil, 
la  perpendiculaire  menée  du  foyer  sur  l’asymptote,  perpendiculaire 


lie,  e l’excentricité  numérique. 

Pour  fixer  les  idées,  nous  supposerons  que  l’hyperbole  se  rap- 
proche de  la  parabole  par  sa  forme , ce  qui  constitue  un  cas  très 
désavantageux.  Nous  ferons  e n:  1,001 , ç = 10  rayons  de  l’orbite 
terrestre,  la  parallaxe  de  l’étoile  focale  = La  perpendiculaire 
a alors  une  valeur  de  447  unités,  correspondant  à 7°, 5 de  distance 
angulaire. 

5.  Nous  pourrions  être  portés , par  l’argumentation  ci  dessus , à 
chercher  l’étoile  focale  au  voisinage  du  point  d’intersection;  mais, 
il  ne  faut  pas  oublier  qu’il  y a une  circonstance  qui  peut  avoir 
modifié  considérablement  la  position  de  ce  point.  Cette  circonstance, 
c’est  le  mouvement  de  notre  Soleil. 

Dans  le  paragraphe  précédent,  le  point  P,  appartenant  à un 
système  cométaire,  a été  identifié  avec  le  centre  de  l’orbite  hy- 
perbolique, proposition  qui,  en  général,  cesse  d’être  vraie  lorsque 
le  Soleil  se  meut.  D’après  les  principes  de  la  mécanique,  nous 
devons  attribuer  au  système  cométaire,  qui  commence  à subir 
l’attraction  solaire,  un  mouvement  égal  à celui  du  Soleil,  mais 
de  direction  opposée.  Le  plan  de  l’orbite  change  alors  sa  situation 
dans  l’espace,  et  le  point  P ne  se  trouve  plus  dans  ce  plan. 

Quant  à la  proposition  concernant  le  point  d’intersection  com- 
mun des  orbites,  elle  reste  vraie.  Le  point  P est  remplacé  par 
quelque  autre  point  P',  mais  celui-ci  jouit  également  de  la  pro- 
priété d’être  commun  à tous  les  membres  du  système.' 

6.  Nous  ne  savons  rien  avec  certitude  de  la  vitesse  du  mou- 


* ) Le  cas  de  nos  comètes  est  en  accord  avec  ces  considérations , par  la  faible 
distance  angulaire  entre  le  point  d’intersection  et  la  position  moyenne  des  aphé- 
lies. Pour  l’un  on  a A = 316o  36' , ^ = — 76»  57',  pour  l’autre  X = 310°, 1 . 
^ — 7éo,5.  La  distance  est  par  suite  2<>55'. 


dont  la  valeur 


si  q représente  la  distance  périhé- 


M.  IIOEK.  SUR  LES  COMETES  1860  III,  1863  I ET  1863  VI.  391 


vement  solaire.  Il  est  possible  que  cette  vitesse  ait  été  iusignifi- 
ante  en  comparaison  de  la  vitesse  de  notre  système  cométaire.  En 
ce  cas,  il  y aurait  une  grande  probabilité  que  Tétoile , d’où  ce  système 
nous  est  venu , se  trouve  sur  la  sphère  à peu  de  distance  du  point 


^ = 316«35'  55"  ^ = — 76«56'43"/ 

ou«=  56‘>13'43“  = 3i*44>"54s  <J  = — 72°49' 45") 


Eq.  moy.  de  1864,0 


et  nous  pourrions  nous  demander  si  ce  n’aurait  pas  été  Ilydri , 
ou  quelque  étoile  plus  petite  située  dans  son  voisinage. 

Nous  sommes  en  outre  conduits  à ajouter,  au  sujet  de  la  nature 
des  orbites  de  nos  comètes,  l’intéressante  remarque  que  voici: 
Dans  la  note  jointe  au  § 4,  nous  avons  trouvé  2°55'  pour  la 
distance  du  point  d’intersection  au  point  aphélie  moyen.  Le  pre- 
mier de  ces  deux  points  est  situé  entre  l’aphélie  et  le  nœud 
ascendant.  Cela  prouve  que  l’orbite  moyenne  de  nos  comètes 
autour  du  Soleil  est  une  hyperbole , dont  l’excentricité  ne  saurait 
jamais  être  moindre  que  1,0013.  Une  construction  graphique  m’a 
montré  que  ce  caractère  hyperbolique  est  commun  à chacune  des 
trois  orbites,  mais  qu’il  est  le  plus  accusé  dans  l’orbite  de  la 
comète  1860  III,  moins  prononcé  dans  celle  de  1863  I,  et  peut- 
être  presque  imperceptible  dans  celle  de  1863  VI. 

7.  Mais,  d’un  autre  côté,  il  est  possible  aussi  que  le  mouve- 
ment du  Soleil  soit  du  même  ordre  de  vitesse  que  celui  du  système 
cométaire.  S’il  en 'était  ainsi,  le  point  d’intersection  n’aurait  plus 
la  signification  qui  lui  a été  donnée  au  § 4 , et  il  pourrait  être  situé 
sur  la  sphère  à une  distance  de  plusieurs  degrés  de  l’étoile  focale. 

Examinons  ce  point  de  plus  près.  D’abord , nous  devons  remar- 
quer que  le  cas  de  nos  comètes  est  un  cas  particulier,  où  le 
mouvement  du  Soleil  a lieu  presque  dans  le  plan  moyen  des 
orbites.  La  direction  de  ce  mouvement  est,  suivant  M.  Madler: 


ou 


Eq.  moy.  de  1864,0 


oc  = 261  39  (T  = H-  39  54  Eq.  moy.  de  1800,0 
^«  = 262  10  -h  39  51  I 

= 256  42  + 62  57  ^ 

et  le  plan  moyen  des  orbites  est  donné  par 

A = 102°  i=z  83o,  Mouvement  direct. 


392  M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  1860  III , 1863  I ET  1863  VI. 

Le  mouvement  du  Soleil  fait,  par  conséquent,  un  angle  de 
4°45'  avec  ce  plan.  Le  mouvement  que  nous  avons  à ajouter 
au  mouvement  asymptotique  de  nos  comètes  est  donc  situé  presque 
exactement  dans  le  plan  de  Torbite  moyenne.  Le  point  d’inter- 
section véritable  est  le  point  P',  mais,  pour  aller  de  ce  point 
à P,  nous  n’avons  qu’à  prendre  le  grand  cercle  qui  est  tracé 
sur  la*  sphère  par  l’orbite  moyenne,  et  à le  suivre  dans  la  direc- 
tion du  mouvement  direct.  La  valeur  minimum  de  l’excentricité 
serait  alors  plus  grande  que  nous  ne  l’avions  trouvée  dans  le 
paragraphe  précédent. 

Mais,  quelle  sera  la  distance  angulaire  des  points  P et  P”? 
Nous  pouvons  essayer  de  lui  assigner  une  limite  supérieure.  Pour 
la  comète  1860  III,  M.  Hall  a trouvé  e = 1,000656.  Admettant 
que  cette  grandeur  soit  trop  faible , nous  prendrons  pour  sa  limite 
une  valeur  dix  fois  plus  grande,  savoir,  1,0066.  Dans  cette  hy- 
pothèse, à la  distance  de  900  rayons  de  l’orbite  terrestre,  la 
comète  se  trouvait',  par  rapport  au  Soleil,  dans  une  direction 
donnée  par  d = — 173°  7'. 

En  désignant  l’aphélie  de  cette  comète  par  A,  nous  aurons 
A P z=  6°53' , et  comme  nous  connaissons  déjà  la  valeur  A P'  = 
5°5',  il  reste  1°48°  pour  la  limite  de  PP'. 

Dans  l’hypothèse  en  question,  nous  pouvons  même  calculer 
une  limite  supérieure  pour  la  vitesse  du  Soleil.  A la  distance 
indiquée  de  son  foyer , la  comète  a son  mouvement  dirigé  à peu 
près  vers  le  Soleil,  et  faisant  par  conséquent  un  angle  de  137° 
avec  la  direction  du  mouvement  de  cet  astre. 

Appelons  V la  vitesse  de  la  comète , v celle  du  Soleil , nous  avons  : 

V : V = sin  1°48'  : sin  137°, 
ou  V = 0,461  V. 

V ayant  une  valeur  de  0,002707  par  jour,  ou  de  0,989  par  an, 
le  mouvement  propre  annuel  du  Soleil  a pour  limite  0,46  du  rayon 
de  l’orbite  terrestre. 

Je  reconnais  que  ce  résultat  n’est  qu’un  simple  exemple  de  cal- 
cul , mais  il  montre  clairement  les  conséquences  qui  peuvent  être 
déduites  de  ce  nouvel  ordre  d’idées. 


M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  1860  III , 1863  I ET  1863  VI.  393 

8.  Comment  une  étoile  arrive-t-elle  à nous  envoyer  un  système 
de  comètes  ? Il  m’est  impossible  de  concevoir  que  l’étoile  pour- 
rait avoir  rassemblé,  et  uni  en  un  système,  des  corps  primitive- 
ment isolés.  Au  contraire,  on  a vu  qu’un  pareil  système  est  ex- 
posé à être  rompu  et  à avoir  ses  membres  dispersés  par  l’attrac- 
tion du  Soleil , et , sans  nul  doute , l’étoile  précédente  aurait  agi 
sur  lui  de  la  meme  manière , s’il  avait  existé  avant  ce  moment. 
Nous  devons  donc  conclure  qu’il  a pris  naissance  après  le  pas- 
sage au  dernier  périhélie,  ou,  pour  mieux  dire,  au  dernier 
périastérie.  Cela  revient  à dire  qu’une  comète  antérieure  a été 
divisée  en  parties,  qui  ont  voyagé'  de  concert,  sur  des  routes 
différentes  mais  voisines.  Et  en  effet,  il  me  paraît  impossible 
qu’une  comète,  après  avoir  pris  un  si  immense  volume  dans  la 
portion  périastérienne  de  son  orbite,  puisse  de  nouveau  rallier, 
en  se  refroidissant,  les  particules  éparpillées  dans  l’espace.  Les 
masses  sont  trop  petites,  les  vitesses  trop  grandes.  Rappelons- 
nous  le  phénomène  de  la  comète  de  Biela. 

En  résumé,  dans  le  fait  même  de  l’existence  d’un  système 
cométaire,  je.  vois  la  preuve  que  ce  système  nous  arrive  après 
avoir  tourné  autour  d’un  centre  d’attraction  qui  était  à une  tem- 
pérature très  élevée. 

9.  Peut-être  aurons-nous  un  jour  l’occasion  de  vérifier  l’exac- 
titude de  l’argumentation  du  paragraphe  précédent.  Les  queues 
des  comètes  étant  opposées  à l’étoile  focale  dans  le  plan  de 
l’orbite,  il  faut  nécessairement  que  les  fragments  d’une  pareille 
queue  continuent  à indiquer  le  plan  de  cette  orbite. 

En  conséquence,  si  nous  calculons  avec  tout  le  soin  possible, 
à l’aide  de  l’ensemble  de  toutes  les  bonnes  observations,  les  or- 
bites que  nos  comètes  décrivent  autour  du  Soleil,  et  que  nous 
les  corrigions  soigneusement  de  l’effet  des  perturbations  planétaires, 
nous  obtiendrons  la  vitesse  et  la  position  que  possédait  chacune 
de  ces  comètes  avant  d’avoir  éprouvé  aucune  attraction  percep- 
tible de  la  part  du  Soleil.  Le  plan  qui  passera  alors  par  ces 
trois  positions  indiquera  la  situation  de  l’orbite  antérieure , et  il 
devra  contenir  l’étoile  focale.  Telle  est  la  condition  sur  laquelle 


394  M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  1860  III,  1863  1 ET  1863  VI. 

nous  pourrons  fonder  ^un  contrôle,  aussitôt  que  l’étoile  et  sa  paral- 
laxe seront  connues. 

Pour  ce  qui  regarde  les  vitesses  de  ces  fragments , elles  doivent 
aussi , en  général , être  comprises  dans  ce  même  plan , si  le  Soleil 
reste  en  repos;  mais  elles  doivent  être  inclinées  par  rapport  à 
lui,  si  le  Soleil  se  meut.  Dans  ce  dernier  cas,  toutefois,  il  faut 
que  ces  inclinaisons  soient  à peu  prés  égaies  pour  chacun  des  frag- 
ments, ce  qui  fournit  la  base  d’une  nouvelle  vérification. 

D’un  autre  côté,  la  connaissance  de  ces  inclinaisons  pourrait 
nous  conduire  à des  évaluations  concernant  la  vitesse  du  mouve- 
ment propre  du  Soleil.  Nous  connaîtrions  alors , en  effet , la  valeur 
de  la  résultante  de  ce  mouvement,  pris  dans  une  direction  op- 
posée, et  du  mouvement  asymptotique  de  notre  système  comé- 
taire;  de  plus,  les  angles  que  cette  résultante  fait  avec  chacune 
de  ces  composantes.  Cela  nous  donnerait  la  valeur  de  ces  com- 
posantes, toujours  en  supposant  que  la  direction  assignée  à l’une 
d’elles  par  M.  Madler  soit  exacte. 

10.  Le  paragraphe  précédent  a déjà  indiqué  quelles  recherches 
il  serait  utile  de  faire  par  rapport  aux  comètes  de  1860  et  1863. 
J’ajouterai  encore  quelques  considérations  que  je  soumets  au 
jugement  des  astronomes: 

P.  Chaque  comète  peut  être  un  membre  d’un  système  comé- 
taire,  ce  qui  double  l’intérêt  attaché  à sa  connaissance.  Il  est 
donc  à désirer  que  pas  un  seul  de  ces  astres,  parmi  ceux  que 
leur  mouvement  rend  susceptibles  d’être  découverts,  n échappé 
à l’observation. 

Un  redoublement  de  vigilance , une  surveillance  systématique  du 
ciel,  produira,  sans  aucun  doute,  d’intéressants  résultats.  L’hémis- 
phère austral , spécialement , a besoin  d’organiser  une  sorte  de  police 
cométaire  : trois  observatoires,  — par  exemple , un  en  Australie , 
un  au  Cap  de  Bonne- Espérance  et  un  dans  l’Amérique  du  Sud , — 
devraient  entreprendre  de  surveiller  attentivement  les  parties  du 
ciel  invisibles  à nos  observatoires  du  nord,  et  s’engager  franche- 
ment dans  l’observation  des  comètes  qui  pourraient  être  découver- 
tes dans  ces  parties.  Les  frais  seraient  insignifiants:  un  bon  in- 


M.  IlOEK.  SUR  LES  COMETES  1860  111,  1863  I ET  1863  VI.  395 

strument,  un  observateur  de  second  ordre,  et  peut-être  quelques 
récompenses,  pour  encourager  et  pousser  au  succès.  Ce  dernier 
point  me  paraîtrait  nécessaire,  parce  que  ces  trois  observatoires 
auraient  à contrebalancer  dans  leurs  découvertes  T hémisphère  boréal 
tout  entier , avec  ses  puissants  instruments , ses  nombreux  obser- 
vateurs et  la  foule  de  ses  amateurs  zélés. 

J'ai  encore  d'autres  raisons  pour  souhaiter  que  les  découvertes 
de  comètes  soient  à l'avenir  aussi  complètes  que  possible.  Je  me 
propose  de  les  exposer  dans  un  Mémoire  suivant. 

2®.  Tout  ce  que  nous  savons  des  corps  célestes , nous  le  savons 
grâce  aux  propriétés  de  la  lumière.  Une  nouvelle  propriété  de  cet 
agent  a été  récemment  découverte  et  appliquée  à l'Astronomie. 
L'analyse  spectrale  est  déjà  devenue,  dans  les  mains  de  MM. 
Kirchhoff,  Donati,  Secchi  et  Huggins,  une  source  de  notions 
inattendues.  En  particulier,  les  travaux  de  M.  Huggins,  sur  les 
nébuleuses  et  les  amas  d'étoiles,  me  paraissent  offrir  un  haut 
degré  d'intérêt. 

Il  ne  faudra  pas  négliger  d'appliquer  ce  nouveau  moyen  d’in- 
vestigation aux  comètes  qui  pourront  se  montrer  à nos  yeux. 
M.  Donati  a déjà  donné  le  spectre  de  la  comète  1864 II,  spectre 
composé  de  trois  bandes  lumineuses,  et  qui,  indubitablement, 
rend  témoignage  de  la  composition  chimique  de  l'astre.  Je  suis 
porté  à croire  que  le  jour  viendra  où  les  specti*es  cométaires,  recueil- 
lis par  les  astronomes,  permettront  d’élucider  les  questions  qui 
peuvent  se  présenter  concernant  la  composition  et  l'origine,  com- 
mune ou  différente , des  comètes. 

3®.  L'étude  des  systèmes  cométaires  mérite  d’être  poursuivie. 
J'ai  l’intention  de  m’y  livrer,  et  d’étendre  mes  recherches  aux 
comètes  qui  ont  apparu  avant  l'année  1844. 


Utrecht,  6 Mai  1863. 


SUR  LES  COMÈTES  DE  1C77  ET  1C83;  1860  III, 
1863  I ET  1863  VI, 

PAR 


M.  HOEK. 


1.  Dans  le  Mémoire  précédent,  j'ai  essayé  de  prouver  que, 
avant  de  suivre  leurs  orbites  sous  Tinfluence  de  Tattraction  du 
Soleil,  les  comètes  1860  III,  1863  I et  1863  VI  formaient  un 
système,  c'est-à-dire,  qu’à  de  faibles  distances  l'une  de  l’autre, 
elles  avaient  des  mouvements  initiaux  de  même  direction  et  de 
même  vitesse. 

Cette  direction  est  indiquée  approximativement  par  la  ligne 
droite  qui  joint  le  Soleil  à / Hydri. 

A la  fin  du  meme  Mémoire,  j'ai  promis  d’étendre  mes  recher- 
ches aux  comètes  qui  ont  apparu  avant  1844.  Le  tableau  suivant 
contient  tous  les  cas,  depuis  1556,  dans  lesquels  la  question 
relative  à l'existence  d'un  système  cométaire  peut  être  posée, 
à raison  de  l’apparition  successive  de  comètes  dont  les  aphélies 
sont  rapprochés  l’un  de  l’autre  sur  la  sphère.  Dans  ces  investi- 
gations, j’ai  adopté  pour  limite  de  temps  l'intervalle  de  dix  années , 
pour  limite  de  distance  l’angle  de  10°.  Je  conviens  qu’il  y a 
quelque  chose  d’arbitraire  dans  ces  limites,  mais  j'ai  préféré,  en 
commençant,,  ne  pas  les  étendre  trop.  En  outre,  j’avertis  mes 
lecteurs  qu’ils  rencontreront  peut-être  dans  ce  tableau  quelques 
combinaisons  où  la  distance  surpasse  un  peu  10^,  parce  que  je 
me  suis  borné  à mesurer  ces  distances  sur  le  globe , pour  écono- 
miser le  temps  qu’auraient  exigé  les  calculs. 


M.  IIOEK.  sur'  les  comètes  DE  1677  ET  1683. 


397 


: >■ 


J’ai  donc  trouvé: 

Direction  Aphélie . 

Comètes . du 


mouvem . 

Long . 

Lat. 

1672 

Dir. 

279,4 

— 69,4 

1677 

Rétr. 

286,4 

— 75,7 

1683 

Rétr. 

290,8 

— 83,0 

1689 

Rétr. 

90,1 

+ 0,6 

1698 

Rétr. 

90,8 

+ 0,6 

1785  IL 

Rétr. 

67,8 

— 52,9 

1790  m. 

Rétr. 

72,5 

— 50,7 

1813  IL 

Rétr. 

38,6 

+ 24,7 

1822 III. 

Rétr. 

46,2 

H-  31,3 

18181. 

Dir. 

273,8 

4-  8,4 

1818  III. 

Rétr. 

275,4 

+ 10,5 

1830  I. 

Dir. 

31,8 

- 2,1 

1835 1. 

Rétr. 

28,0 

+ 4,6 

1842  IL 

Rétr. 

00 
T— 1 

+ 56,6 

1851 IV. 

Dir. 

193,1 

+ 61.2 

1844  IL 

. Rétr. 

9,8 

+ 22,9 

1845  IL 

^ Dir. 

1,9 

+ 21,0 

1845  I. 

Dir. 

280,5 

— 41,6 

1846  V. 

Rétr. 

275,3 

— 55,4 

1846  VIII. 

Dir. 

281,0 

— 49,5 

1846  VII. 

Rétr. 

340,7 

— 28,9 

1847  II. 

Rétr. 

347,4 

— 31,7 

1854  IL 

Rétr. 

347,7 

— 76,2 

1858  IV. 

Rétr. 

12,9 

— 76,7 

Remarques . 


Cas  analogue  à celui  des  comètes  de 
1845  et  1846.  Deux  mouvements  rétro- 
grades, avec  un  direct.  Probablement 
la  comète  de  1672  est-elle  étrangère 
à un  système  formé  par  les  deux  autres. 

' L’orbite  de  la  comète  de  1689  est 
plus  ou  moins  incertaine.  J’ai  adopté 
les  éléments  de  Vogel. 


L’orbite  de  la  comète  1818  lest  plus 
ou  moins  incertaine. 


Au  § 3 de  mon  précédent  Mémoire, 
I j’ai  déjà  indiqué  que  ces  comètes  ne 
i répondent  que  par  couples  à la  limite 
I fixée,  et  qu’elles  ne  satisfont  pas  non 
plus  à la  seconde  condition , celle  d’avoir 
1 pour  leurs  orbites  un  seul  point  d’inter- 
I section.  Probablement  1846  V est-elle 
I étrangère  à un  système  qui  peut  avoir 
' contenu  les  deux  autres  corps. 


398 


M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES,  DE  1677  ET  1683. 


Direction  Apliélie . 


Comètes . 

du 

Remarques . 

mouvem 

. Long. 

Lat. 

1854  V. 

Dir. 

345,7 

“1-  13,0 

1861 III. 

Rétr. 

347,3 

+ 18,2 

18551.  ' 

Rétr. 

35,0 

+ 28,1 

1861 1. 

Dir. 

36,6 

+ 32,9 

1857  III. 

Rétr. 

57,7 

— 38,0 

1857  V. 

Rétr. 

53,7 

— 42,9 

1857  VI. 

Rétr. 

222,9 

— 37,7 

1860  II. 

Dir. 

219,2 

- 29,4 

1860 III. 

Dir. 

303,1 

- 73,2  ^ 

1863  I. 

Dir. 

313,2 

0 ^ Système  dont  la  discussion  a été  don- 

^ L née  dans  le  Mémoire  précédent. 

1863  VI. 

Dir. 

313,9 

— 76,4  ) 

1862  IL 

Rétr. 

119,6 

8,6  1 Combinaison  qui  m’avait  échappé  dans 

1864  IL 

Rétr. 

124,2 

0 9^^®  Mémoire  précédent. 

La  récolte,  on 

le  voit. 

n’est  rien  moins  que  riche.  Aux  dix  cas 

appartenant 

aux 

années 

1844 — 65,  les  288  années  antérieures 

n’en  ont  ajouté  que  sept 

nouveaux , dont  deux , en  outre , dépen- 

dent  d’orbites  moins  bien  connues.  Ce  résultat  aurait  pu  être 
prévu.  La  période  1556 — 1764  comprend  dans  mes  calculs  seule- 
ment 46  comètes,  celle  de  1764 — 1840  seulement  72  comètes; 
tandis  que  ce  même  nombre  72  marque  les  apparitions  des  années 
1840 — 65.  Le  nombre  des  comètes  bien  observées  est  donc  annu- 
ellement de  0,22  dans  la  première  période,  de  0,95  dans  la  se- 
conde, et  de  2,9  dans  la  troisième. 

C’était  une  exception  lorsque,  avant  1700,  on  découvrait  une 
comète  dont  la  distance  aphélie  au  Soleil  dépassait  un  peu  l’unité , 
tandis  que  dans  la  période  1840 — 65  le  nombre  des  distances 
aphélies  supérieures  à l’unité  est  un  tiers  du  total. 

D’un  côté,  par  conséquent,  les  astronomes,  à l’aide  de  leurs 
puissants  instruments,  ont  étendu  la  sphère  dans  laquelle  ces 


M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  DE  1677  ET  1683. 


399 


corps  sont  découverts  et  observés;  de  Tautre  côté,  le  ciel  a été 
exploré  pendant  les  vingt-cinq  dernières  années  avec  des  soins 
inconnus  jadis. 

Le  premier  fruit  de  ces  recherches  a été  la  découverte  de  plu- 
sieurs comètes  périodiques  ; un  second  résultat  est  la  connaissance 
des  systèmes  cométaires. 

2.  Revenons  à notre  tableau  des  aphélies  concordants. 

Comment  pouvons-nous  distinguer  entre  les  cas  où  il  y a système 
et  ceux  où  il  y a coïncidence  fortuite  ? Un  cas  seulement  dans  le 
tableau  se  prête  à une  investigation  directe.  C’est  celui  des  comètes 
de  1672 , 1677  et  1683.  Examinons , en  premier  lieu , si  leurs  orbites 
ont  un  point  d’intersection  commun. 

Le  calcul,  avec  les  éléments  de  Halley,  donne: 


et  ces  comètes  ne  formaient  donc  pas  système,  ce  que  nous 
avions  déjà  présumé  d’après  la  divergence  de  leurs  mouvements. 

Mais  que  faut-il  penser  de  celles  de  1677  et  1683,  qui  ont 
toutes  les  deux  un  mouvement  rétrograde? 

Nous  pouvons  invoquer  ici  un  nouveau  principe.  Dans  mon 
précédent  Mémoire,  j’ai  indiqué  que  nous  avions  ordinairement 
à chercher,  l’étoile  focale,  par  laquelle  le  système  nous  a été 
envoyé,  dans  le  voisinage  du  point  d’intersection  commun  aux  orbites 
de  tous  les  membres  de  ce  système.  Par  conséquent , lorsque  nous 
présumons  que  deux  comètes  ont  formé  un  système  avant  de  s’appro- 
cher du  Soleil , nous  devons  calculer  la  position  du  point  d’intersec- 
tion de  leurs  orbites;  et  si  ce  point  coïncide  avec  quelque  autre 
point  déjà  connu  comme  centre  d’émanations  cométaires,  nous 
pouvons  presque  tenir  pour  certain  que  ces  comètes  formaient  un 
système,  dont  l’origine  se  trouve  dans  la  direction  du  point  d’in- 
tersection. 


Points  d’intersection. 


Comètes.  Long.  Lat. 


O O 


Equinoxe  moyen 


de  1677,0. 


400  M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  DE  1677  ET  1683. 


C’est  ce  qui  a lieu  dans  le  cas  dont  nous  nous  occupons.  Eappor- 
tons  le  point  d’intersection  des  comètes  1677  et  1683  à l’équinoxe 
moyen  de  1864,0,  et  comparons-le  avec  ceux  qui  appartiennent  au 
système  cométaire  de  1860  et  1863.  Nous  obtenons: 


Points  d’intersection. 
Comètes.  Long.  Lat. 


1677  et  1683  318,5 

1860 III.  et  1863  I.  316,7 
1860IILet  1863  VI.  312,3 
18631.  et  1863  VI.  320,8 


— 78,8 . 

— 76,5/  Equinoxe  moyen 

— 75,7  de  1864,0 
~ 78,7  ) 


Après  cette  nouvelle  coïncidence,  je  n’hésite  pas  à exprimer 
comme  mon  opinion,  qu’au  voisinage  du  point 


1 = 319°  ^ = —78°, 5 

il  doit  y avoir  quelque  étoile , qui  a envoyé  dans  la  direction  de 
notre  Soleil  — d’abord  les  comètes  de  1677  et  1683,  ensuite 
celles  de  1860  et  1863. 

3.  Pour  justifier  cette  opinion,  faisons  notre  calcul  du  degré 
de  probabilité.  Si  la  coïncidence  de  deux  points  d’intersection, 
dans  la  limite  de  2®,  est  regardée  comme  l’effet  du  hasard,  sa 
probabilité  est  0,0003.  A priori , nous  pourrions  donc  nous  attendre 
à la  rencontrer  une  fois  sur  3333  cas;  or  elle  se  présente  une 
fois  sur  20  cas. 

En  outre,  ce  phénomène  d’une  probabilité  si  faible  se  trouve 
uni  à un  autre,  que  nous  avions  tout  aussi  peu  de  chances  ma- 
thématiques de  rencontrer  dans  le  nombre  borné  des  cas  réelle- 
ment considérés.  Je  veux  parler  de  la  coïncidence , dans  un  étroit 
cercle  de  3“  de  rayon,  des  aphélies  de  trois  comètes  qui  ont 
apparu  dans  le  cours  de  354  années.  La  probabilité  de  ce  phéno- 
mène étant  seulement  de  0,00000049 , nous  pouvions  nous  atten- 
dre à le  voir  arriver  une  fois  en  2050000  cas,  et  toutes  nos 
comètes  ne  fournissent  en  somme  que  6600  cas. 

Je  passe  sous  silence  l’intersection  mutuelle  des  trois  mêmes 
orbites  dans  un  cercle  de  1°,5  de  rayon,  ainsi  que  la  faible  dis- 
tance, de  2°,5,  entre  l’aphélie  moyen  et  le  point  d’intersection  moyen. 


M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  DE  1677  ET  1683.  401 

On  est  donc  déjà  suffisamment  autorisé  à croire  que  révènement 
composé,  dont  il  est  ici  question,  dépend  d’une  cause  physique. 
L’explication  que  j’en  ai  donnée  est-elle  la  véritable?  C’est  ce 
que  décideront  les  recherches  futures  sur  les  comètes  qui  appa- 
raîtront  au  ciel.  Pour  le  moment,  je  ne  vois  pas  comment  on 
pourrait  arriver  à une  autre  conclusion , et  je  passe  en  conséquence 
à une  nouvelle  épreuve,  à laquelle  je  soumettrai  les  comètes  de 
1677  et  1683. 

4.  Leurs  distances  au  Soleil  ont-elles  été,  à une  époque  anté- 
rieure, à peu  près  égales? 

La  formule 

i :zz  Q [r  2 q)  \y r — q 

avec  sa  différentielle 

^ V -ydt, 

qui  suppose  un  mouvement  parabolique,  et  dans  laquelle 

log  C zz:  8,875232  — 10  donne  le  temps  en  années , 
logCzz  1,437812  „ „ „ „ jours, 

me  fournit  les  valeurs  suivantes  pour  les  distances  exprimées  en 
rayons  de  l’orbite  terrestre  : 

Distance  au  Soleil. 


Date  grégorienne. 

Comète  1677. 

Comète  1683. 

573,86 

600 

601,97 

.837,78 

500 

502,18 

1076,54 

400 

402,43 

1286,93 

300 

302,89 

1464,68 

200 

203,59 

1602,00 

100 

105,14 

De  ce  côté,  il  n’y  a donc  aucune  objection  ’). 

0 Le  dernier  tableau  donne  une  idée  de  la  raanière  dont  les  corps  de  ce 
système  ont  été  séparés  sous  l’influence  du  Soleil.  Peut-être  que  quelques-uns 
de  mes  lecteurs  ne  seront  pas  fâchés  d’avoir  sous  les  yeux  un  tableau  analogue 
pour  les  systèmes  de  1860  et  1868.  Le  voici: 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX. 


26 


402  M.  nOEK.  SUR  LES  COMÈTES  DE  1677  ET  1683. 

5.  PliisieuTS  questions  peuvent  être  soulevées  à la  suite  des 
faits  que  je  viens  d’établir. 

En  premier  lieu , il  y a le  point 

;.  = 319'^  = — 78o,5, 

dont  les  coordonnées  sphériques  rapportées  à l’équateur  sont 

a 3m, 5 J IZZ  — 72°,0 , 

et  qui  a été  appelé  P'  dans  mon  précédent  Mémoire. 

Nous  pouvons  nous  demander  s’il  j a quelque  intérêt  à cher- 
cher dans  cette  direction  une  étoile  à parallaxe  bien  définie.  Quand 
à moi,  je  pense  qu’une  pareille  étoile  sera  trouvée  à peu  de  degrés 
de  distance  du  point  P',  parce  qu’en  général  on  peut  admettre 
que  les  étoiles  d’où  les  comètes  arrivent  au  Soleil  sont  les  plus 
rapprochées  de  nous.  Il  ne  serait  même  pas  nécessaire  de  procéder 
à la  recherche  de  cette  étoile  P tout  autour  du  point  P',  car  il 
a déjà  été  démontré  au  § 7 de  mon  précédent  Mémoire  que , pour 
aller  du  point  P'  au  point  P,  nous  devons  suivre  sur  la  sphère 
l’orbite  moyenne  des  comètes  de  1860  et  1863,  et  la  suivre  dans 

Distances  au  Soleil. 


Date 

Comète 

Comète 

Comète 

grégorienne. 

1860  III. 

1863  I. 

1863  VI. 

756,97 

600 

600,42 

600,25 

1020,87 

500 

500,56 

500,36 

1259,57 

400 

400,67 

400,55 

1470,01 

300 

300,86 

300,80 

1647,78 

200 

201,15 

201,20 

1785,10 

100 

101,83 

102,11 

1833,70 

50 

52,76 

53,35 

1853,60 

20 

24,43  • 

25,52 

1857,98 

10 

15,92 

17,36 

Au  sujet  de  ces  deux  tableaux,  je  dois  remarquer  que  les  distances,  calcu- 
lées dans  la  supposition  d’orbites  paraboliques,  sont  seulement  approchées.  Pour 
obtenir  des  nombres  plus  exacts,  il  serait  nécessaire  de  faire  des  recherches 
concernant  l’excentricité  de  chacune  de  ces  orbites.  Relativement  à ce  point, 
comparez  le  paragraphe  10. 


M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  DE  1677  ET  1683. 


403 


la  direction  du  mouvement  direct^).  En  d’autres  termes,  et  d’une 
manière  plus  générale,  si  nous  appelons  M le  point  d’où  s’éloigne 
notre  système  planétaire,  P' P M est  un  grand  cercle  de  la  spbère , 
et  P est  situé  entre  P'  et  M. 

Si  le  point  P était  découvert , nous  serions  à même  de  calculer 
la  vitesse  du  mouvement  propre  de  notre  Soleil , de  laquelle  seule 
dépend  la  distance  P P'. 

Pour  éclaircir  ceci,  supposons  que  P P'  ait  été  trouvé  égal 
à 5° , et  rappelons-nous  que  le  mouvement  propre  du  Soleil , pris 
en  direction  opposée , marque  sur  la  sphère  le  point 

A zz:  76°  42'  (9  = — 62°  57'  ...  Equinoxe  moyen  de  1864,0, 

lequel  est  distant  de  P'  de  33°  50' , ou , en  nombres  ronds , de  34°. 
Maintenant , si  nous  appelons  V la  vitesse  de  la  comète  au  moment 
où  elle  entre  dans  la  sphère  d’attraction  du  Soleil,  v la  vitesse 
du  système  planétaire,  nous  aurons: 

V : V = sin  5°  : sin  29°, 
ou 

V=z  0,180  V; 

et  V elle-même  étant  de  0,367  par  an,  pour  une  excentricité 
= 1,001  de  l’orbite  de  la  comète  1860  III,  le  résultat  est 

V = 0,066  du  rayon  de  l’orbite  terrestre , par  an. 

Je  confesse  que  ce  raisonnement  n’est  qu’un  simple  exemple 
de  calcul , basé  sur  des  suppositions  arbitraires , mais  il  est  propre 
à montrer  les  conséquences  qui  peuvent  être  dérivées  de  la  con- 
naissance des  nouveaux  faits. 

6.  Nous  pouvons  ensuite  poser  la  question  de  savoir  si  les  cinq 
comètes  qui  nous  ont  été  envoyées  par  cette  étoile  l’ont  quittée 


')  Je  dois  prier  mes  lecteurs  de  considérer  la  portion  suivante  de  ce  para- 
graphe comme  un  erratum  à la  dernière  partie  du  § 7 de  mon  précédent  Mé- 
moire, c’est-à-dire,  à tout  ce  qui,  dans  ce  § 7,  suit  les  mêmes  mots  la 

direction  du  mouvement  direct.”  Aussitôt  que  j’eus  découvert  l’erreur  contenue 
dans  cette  partie,  j’écrivis  à \ Âstronomical  Society,  mais  il  paraît  que  ma  lettre 
ne  parvint  à la  Société  que  lorsque  mon  Mémoire  était  déjà  imprimé. 

26=^ 


204 


M.  nOEK.  SUR  LES  COMETES  DE  1677  ET  1683.  - 


simultanément,  ou  si  nous  devons  plutôt  les  considérer  comme 
dépêchées  à des  époques  différentes. 

Il  paraît  difficile  de  résoudre  cette  question  d’une  manière  satis- 
faisante, mais  nous  sommes  en  mesure  de  faire  des  recherches 
sur  la  possibilité  des  circonstances  supposées  par  chacune  de  ces 
deux  hypothèses. 

Pour  mettre  la  première  à l’épreuve,  admettons: 

1.  Que  la  parallaxe  de  l’étoile  est  1" , ou  sa  distance  de 
206265  unités. 

2.  Que  son  attraction  devient  imperceptible  à une  distance  de 
6265  unités , de  sorte  qu’il  restait  encore  aux  comètes  200000 
unités  à parcourir  après  qu’elles  eurent  abandonné  l’étoile. 

3.  Que  les  comètes  de  1860  et  1863  l’ont  abandonnée  avec 
des  vitesses  qui  étaient  exactement  égales,  et 'd’une  valeur 
telle  que  l’orbite  de  la  comète  de  1860  obtient  une  excen- 
tricité de  1,001. 

Les  équations  du  mouvement  hyperbolique  [Theoria  Motus 
Corporum  Cœlestiurriy  § 21  et  22), 

cos  ^ (v  — H’)  2rcos2^(v  — 1<>) 

U = TT — r = , 

cos  j (v  -h  V^)  P . cos 
1 ikt 

donnent,  pour  le  cas  de  r très  grand,  la  formule  approchée 

2 r 2 r 

^ P cos  i/;  b e 
I k t 

\).eu  — log  U = 


OU,  dans  notre  exemple, 

log  = 3,134852  / = 539061  ans.  Q 


«)  Ce  résultat  a une  très  grande  influence  sur  le  raisonnement  que  renferme 
le  § 5.  Dans  un  espace  de  temps  comparable  à un  pareil  nombre  d’années, 
l’étoile  à parallaxe  bien  définie , dont  il  a été  question  au  § 5 , peut  avoir  eu 
sur  la  sphère  un  mouvement  propre  très  considérable,  et  s’être  éloignée  beau- 
coup du  point  qu’elle  occupait  au  moment  où  les  comètes  la  quittèrent.  Néan- 
moins, et  pour  les  raisons  mentionnées  dans  la  note  attachée  à ce  paragraphe, 
j’ai  cru  devoir  laisser  celui-ce  tel  qu’il  avait  été  écrit  en  juillet. 


M.  EIOEK.  SUR  LES  COMETES  DE  1677  ET  1683. 


405 


vitesse  moyenne  r; 


200000 

539061 


nz  0,3710  par  an. 


Pour  contrôler  ce  résultat,  calculons  aussi  la  vitesse  à une 
distance  infinie,  donnée  par  la  formule. 


nous  trouvons,  dans  notre  cas,  0,001006  par  jour,  ou  0,3672 
par  an. 

Pour  que  la  comète  puisse  arriver  200  ans  plus  tôt,  il  suffit  que 
cette  vitesse  soit  augmentée  de  sa  2700ième  partie,  c’est-à-dire, 
de  0,000000372  d’unité  par  jour,  ou  de  0,66  de  mètre  par  seconde. 

En  ce  qui  touche  la  divergence  des  fragments  qui  arrivèrent 
successivement  en  1677  et  en  1860,  supposons  que  le  Soleil  se 
meuve  annuellement  de  deux  unités  à travers  l’espace , estimation 
qui  est  probablement  beaucoup  trop  forte.  Ce  corps  aurait  alors 
traversé,  pendant  ces  180  ans,  une  distance  de  360,  qui,  vue 
de  l’étoile,  représente  un  arc  de  6'sin  34®,  ou  3 ',6. 

Par  conséquent,  si  les  comètes  de  1677  et  1860  étaient  toutes 
deux  des  fragments  du  même  corps,  il  aurait  suffi  qu’elles  eus- 
sent quitté  la  sphèïe  d’attraction  de  l’étoile  à une  distance  de  11 
unités  l’une  de  l’autre,  dans  des  directions  divergeant  de  3 J mi- 
nutes d’angle,  et  avec  des  vitesses  différant  entre  elles  de  | de 
mètre  par  seconde.  ' 

Dans  l’état  présent  de  nos  connaissances,  il  n’y  a donc  rien 
d’absurde  à admettre  la  première  hypothèse. 

Quant  à la  seconde,  d’après  laquelle  nous  aurions  reçu  des 
corps  dépêchés  par  une  même  étoile  à des  époques  différentes, 
c’est  une  question  de  probabilités. 

Avec  une  vitesse  telle  que  paraît  avoir  été  environ  celle  des 
comètes  de  1860  et  1863,  la  distance  périhélie  q =1,3  corres- 
pond à une  direction  du  mouvement  initial  en  vertu  de  laquelle 
le  corps  passerait  près  du  Soleil  à la  distance  de  27  unités. 
Lorsque  ce  dernier  nombre  est  doublé,  la  distance  périhélie  de- 
vient 5,2 , c’est-à-dire  que  la  comète  cesse  d’être  visible  aux  ha- 
bitants de  la  Terre. 


1 


406 


M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  DE  1677  ET  1683. 


Nous  pouvons  donc  comparer  le  phénomène  au  tir  sur  une  cible 
de  120  unités  de  diamètre,  à une  distance  de  206265,  et  dans 
des  circonstances  telles  que  le  tireur  ignore  dans  quelle  direction 
la  cible  est  placée.  Le  diamètre  de  celle-ci  correspondant  à 2',  il 
y a seulement  une  probabilité  de  sin^  60'  qu’un  second  coup 
viendra  frapper  la  cible  déjà  atteinte  par  le  premier.  Tirant  au 
hasard,  nous  devons  décharger  47,300,000  coups  pour  avoir  la 
probabilité  mathématique  de  produire  1 fois  le  phénomène. 

Pour  revenir  à notre  étoile , même  si  nous  savions  qu’elle  lance 
annuellement  131300  comètes  dans  l’espace,  même  alors  nous 
pourrions,  à priori,  parier  à enjeu  égal  que  le  phénomène  de 
toucher  deux  fois  la  cible  solaire  ne  se  réalisera  pas , comme  simple 
effet  du  hasard,  dans  l’espace  de  180  ans. 

D’un  autre  côté,  s’il  existait  une  cause  physique  obligeant  deux 
coups  successifs  à ne  différer  que  de  3i^'  en  direction , nous  pour- 
rions, supposé  que  la  cible  ait  déjà  été  touchée,  parier  1 contre 
10  qu’elle  sera  atteinte  de  nouveau  par  un  second  coup , et  même 
1 contre  1 du  moment  qu’il  serait  connu  que  la  divergence  des 
coups , et  par  conséquent  le  mouvement  de  la  cible , sont  réduits 
à 4 de  la  valeur  ci-dessus. 

L’admission  de  la  seconde  hypothèse  implique  donc  la  supposi- 
tion d’un  très  grand  nombre  de  comètes  lancées  annuellement 
dans  l’espace  par  l’étoile.  Y a-t-il  quelque  chose  d’inacceptable 
dans  le  nombre  130,000?  Si  autour  du  Soleil,  comme  centre 
commun,  nous  supposons  deux  sphères  ayant  pour  rayons  l’unité 
et  la  distance  de  Neptune,  il  y aura , dans  la  plus  vaste  des  deux , 
un  nombre  de  périhélies  27000  plus  grand  que  dans  la  plus  petite, 
en  admettant  que  les  périhélies  soient  distribués  uniformément  dans 
l’espace.  Cela  étant,  la  petite  sphère  contient  en  moyenne  2 périhélies 
par  an , ce  qui  donne  54000  comètes  passant  annuellement  par  leur 
périhélie  dans  les  limites  d’une  sphère  assez  grande  pour  contenir 
notre  système  planétaire.  Ajoutons,  premièrement,  que  ce  nombre 
est  doublé  dès  que  nous  admettons  que  la  moitié  des  comètes  pas- 
sent inaperçues  ; secondement , qu’il  paraît  difficile  de  rejeter  cette 
répartition  uniforme  des  périhélies,  qui  rend  leur  nombre  propor- 


M.  IIOEK.  SUR  LES  COMETES  DE  1677  ET  1683. 


407 


tionnel  au  volume  de  la  sphère,  c’est-à-dire,  au  cube  de  son  rayon. 

En  résumé,  ni  l’une  ni  l’autre  des  deux  hypothèses  ne  nous 
conduit  à admettre  quelque  chose  d’absurde.  Il  semble  donc  pré- 
maturé, pour  le  moment,  de  donner  la  préférence  à l'une  d’elles. 

7.  Considérons  les  deux  hypothèses  à un  autre  point  de  vue. 

Si  les  cinq  comètes  sont  des  fragments  d’un  même  corps , elles 

ont  dû  se  mouvoir  vers  le  Soleil  dans  des  directions  ne  divergeant 
pas  de  plus  de  3.[',  et  que  nous  pouvons  par  conséquent  regarder 
comme  parallèles  entre  elles.  Dans  ce  cas , les  cinq  orbites  doivent 
avoir  un  point  d’intersection  unique. 

Si  au  contraire  elles  ont  été  dépêchées  à des  époques  différentes, 
le  point  d’intersection  des  comètes  de  1677  et  1683  peut  différer 
de  celui  qui  appartient  aux  comètes  de  1860  et  1863,  et,  dans 
ce  cas,  un  écart  de  ou  même  de  1'^  entre  ces  points  n’aurait  rien 
de  surprenant,  d’après  le  contenu  du  § 4 de  mon  précédent  Mémoire. 

Prenons  les  nombres  du  § 2.  Nous  avons  donc  pour  les  points 
d’intersection 

des  comètes  de  1677  et  1683 , long.  318°,5,  lat.  == — 78°, 8 

„ „ 18631  et  1863  VI,  long.  r=:  320% 8,  lat.  = — 78",7 

c’est-à-dire,  deux  points  dont  la  distance  mutuelle  est  d’environ 
Il  est  difficile , pour  le  moment , de  décider  si  nous  devons  les  regar- 
der comme  des  points  distincts , ou  bien  attribuer  simplement  leur 
différence  au  défaut  de  certitude  des  anciennes  orbites. 

Une  nouvelle  détermination  de  celles-ci , basée  sur  une  réduction 
nouvelle  et  très  soignée  des  observations , avec  le  calcul  exact  des  at- 
tractions planétaires,  pourrait  seule  nous  donner  les  moyens  de 
trancher  la  question. 

8.  Il  reste  encore  la  comète  1860  III,  dont  l’orbite  passe  à 
une  distance  de  plus  de  1°,5  du  point  d’intersection  moyen  des 
quatre  autres  orbites.  La  supposition  la  plus  simple  est  que  cette 
comète  a subi  quelque  perturbation.  Effectivement , je  trouve  qu’a- 
vant son  passage  au  périhélie  elle  s’était  rapprochée  de. la  planète 
Mercure,  savoir,  à la  distance  d’environ  0,04.  Un  calcul  approximatif 
m’a  montré,  toutefois,  que  l’attraction  de  cette  planète  était  in- 
suffisante pour  apporter  une  perturbation  si  notable  à la  position 


408  M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  DE  1677  ET  1683. 

du  plan  de  Torbite,  dans  le  cours  des  trois  ou  quatre  jours 
pendant  lesquels  les  deux  corps  furent  près  l’un  de  l’autre. 

Le  phénomène  demeure  donc  inexpliqué.  A-t-il  eu  son  origine 
au  voisinage  du  Soleil,  ou  bien,  longtemps  avant  cette  époque, 
dans  l’espace?  Dans  ce  dernier  cas,  la  comète  1860  III  doit 
avoir  eu,  en  entrant  dans  la  sphère  d’attraction  du  Soleil,  un 
mouvement  dont  la  direction  était  convergente  par  rapport  aux 
mouvements  parallèles  des  comètes  de  1863.  L’attraction  mutuelle 
de  ces  trois  corps  ne  pourrait-elle'  pas  avoir  exercé  quelque  in- 
fluence de  ce  genre  dans  le  cours  de  plusieurs  siècles? 

9.  Il  est  facile  de  marquer  la  position  relative  de  ces  corps 
à l’époque  où  ils  étaient  à une  grande  distance  du  Soleil. 

D’abord , nous  avons  pour  l’inclinaison  mutuelle  de  leurs  orbites  : 


Inclinaison  de  l’orbite  1860  III.  sur  l’orbite  1863  I.  = 32°29' 

„ „ „ 1860 III.  „ 1863  VI.  = 20  27 

„ „ „ 18631.  „ 1863  VI.  = 12  1. 

Ensuite , pour  les  perpendiculaires  abaissées  du  Soleil  sur  les 
tangentes  aux  orbites  (considérées  comme  des  paraboles),  nous 
avons  la  formule 

1 = 1^  rv, 

qui  donne 


Date 

grégorienne. 

756,97 

1020,87 


Comète 
1860  IIL 
23,26 
12,10 


Perpendiculaire. 

Comète 

18631. 

21,85 


19,94 


Comète 
1863  VI. 
28,08 
25,63 


de  sorte  que  nous  obtenons: 


Date. 


Distances  mutuelles. 

756,97 

1020,87. 

Comètes  1860  III.  et  1863  I. 

12,81 

11,71 

Comètes  1860 III.  et  1863  VI. 

16,31 

14,90 

Comètes  1863  I.  et  1863  VI. 

8,10 

7,32 

Si  nous  .préférons  considérer  les  orbites  comme  des  hyperboles , 
nous  avons  à calculer, 

l 


et  nous  devons  alors  admettre: 


M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  DE  1677  ET  1683. 


409 


1.  Que  le  mouvement  initial  est  le  même  pour  toutes,  ou  que 
e — 1 


est  une  quantité  constante  dans  les  trois  orbites. 


2.  Que  l’excentricité  de  l’orbite  de  1860  III  a une  certaine  valeur. 
Supposons  que  cette  quantité  soit  de  nouveau  1,001 , nous  obte- 
nons alors  pour  les  perpendiculaires: 


12,51  21,10  27,13, 


et  pour  les  distances  mutuelles  des  comètes  dans  l’espace: 

12,51  15,86  7,51, 

nombres  dont  les  rapports  ne  diffèrent  pas  beaucoup  de  ceux 
donnés  ci-dessus,  et  qui  pourraient  fournir,  si  cela  était  encore 
nécessaire,  une  nouvelle  preuve  du  fait  que,  avant  d’approcher 
du  Soleil,  nos  comètes  étaient  voisines  l’une  de  l’autre  dans 
l’espace , et  s’y  mouvaient  suivant  des  directions  parallèles , avec 
des  vitesses  égales. 

Or  il  suit  de  ces  nombres  que,  si  les  comètes  avaient  exercé 
dans  l’espace  quelque  attraction  mutuelle,  nous  devrions  en  cher- 
cher l’effet,  en  premier  lieu,  chez  les  comètes  de  1863,  qui  ont 
toujours  été  les  plus  rapprochées  l’une  de  l’autre. 

Aucune  attraction  mutuelle , par  conséquent , n’explique  la  dévia- 
tion de  l’orbite  1860  III.  Nous  pourrions  avoir  recours  à la  sup- 
position d’une  rencontre  avec  quelque  corps  inconnu,  qui  aurait 
influencé  plus  exclusivement  cette  comète;  mais  ce  serait  expli- 
quer l’inconnu  par  l’inconnu,  et  c’est  là  une  voie  dans  laquelle 
je  n’aime  pas  à m’aventurer. 

10.  Il  y a encore  une  autre  circonstance  digne  d’être  notée, 
parce  qu’elle  conduira  peut-être  à une  distinction  entre  les  deux 
hypothèses  du  paragraphe  6.  Je  veux  parler  de  la  distribution  des 
aphélies  autour  des  points  d’intersection.  Si  nous  suivons  les  orbi- 
tes dans  la  direction  des  mouvements  des  comètes , nous  rencon- 
trons, sur  celles  de  1860  et  de  1863,  les  aphélies  avant  d’at- 
teindre les  points  d’intersection.  Le  contraire  a lieu  sur  les  orbites 
de  1677  et  1683. 

Je  ne  doute  pas  qu’il  n’y  ait  une  intime  connexion  entre 


410  M.  HOEK.  SUR  LES  COMETES  DE  1677  ET  1683. 

Texcentricité  de  chaque  orbite  et  la  position  de  son  aphélie  par 
rapport  à celle  du  point  d’intersection.  Ensuite,  nous  avons  une 
relation  bien  connue  entre  l’excentricité  et  la  vitesse  du  mouve- 
ment initial. 

Mais,  toute  conclusion  à cet  égard  paraît  prématurée,  jusqu’à 
ce  qu’on  ait  fait  un  nouveau  calcul  des  orbites , avec  la  détermi- 
nation, pour  chacune  d’elles,  tant  du  maximum  que  du  minimum 
d’excentricité  compatibles  avec  les  observations. 

11.  Retournons,  pour  un  moment,  à la  formule  différentielle 
du  paragraphe  4. 

En  négligeant  la  petite  quantité  q , ainsi  que  cela  est  permis 
en  présence  de  grandes  valeurs  de  r,  nous  obtenons, 

30  _ 

d t r dr  J 

formule  qui  nous  met  en  état  d’établir  le  résultat  suivant  : Si  l’on 
admet  que,  à une  distance  de  600  unités  du  Soleil , les  différents 
membres  d’un  système  cométaire  aient  pu  s’écarter  entre  eux  de 
10  unités,  par  suite  d’une  légère  différence  dans  leurs  vitesses 
respectives,  il  est  possible  que  trois  comètes , antérieurement  unies 
en  un  système , passent  par  leurs  périhélies  durant  un  espace  de 
55  années. 

Il  sera  donc  nécessaire  de  procéder  à une  nouvelle  combinai- 
son de  tout  l’ensemble  de  nos  positions  aphélies,  en  élargissant 
convenablement  la  limite  de  temps , qui  a été  prise  trop  resserrée 
au  paragraphe  1. 

Je  me  propose  d’entreprendre  cette  recherche. 

Utbecht,  8 Juillet  1865. 


SUR  L’INTÉGRATION 


DE 

L’ÉQUATION  DIFFÉRENTIELLE  LINEAIRE 

DU  SECOND  ORDRE, 

PAR 

J.  ' D E J O N G. 


1.  Dans  un  travail  antérieur  j’ai  cherché  à établir  théori- 
quement , au  moyen  de  l’équation  intégrante , l’intégrale  particulière 
de  l’équation  différentielle  linéaire  à coefScients  constants.  La 
même  chose  a été  faite  par  M.  D.  Bierens  de  Haan  pour  l’équation 
différentielle  linéaire  à puissances  successives  de  la  variable  in- 
dépendante ^).  Dans  ces  recherches,  une  importance  toute  spéciale 
a été  reconnue  aux  relations  que  M.  Mayr  a indiquées  entre  l’in- 
tégrale particulière  de  l’équation  différentielle  linéaire  et  celle  de 
l’équation  intégrante  qui  s’en  déduit.  S’il  était  possible  de  découvrir 
des  relations  analogues  pour  d’autres  catégories  d’équations  dif- 
férentielles linéaires,  un  grand  pas  serait  fait;  à l’aide  d’une 
pareille  relation,  une  équation  différentielle  linéaire  de  l’ordre  n 
pourrait,  en  effet,  être  réduite  à une  équation  de  l’ordre  n — 1. 
Malheureusement , il  est  tout  aussi  difficile  de  trouver  des  relations 
de  ce  genre  entre  y et  que  d’intégrer  les  équations  différen- 
tielles elles-mêmes , comme  on  peut  le  voir , pour  les  deux  cas 
les  plus  simples,  dans  les  Mémoires  rappelés  ci-dessus.  J’ai  donc 


')  Arch.  Tiéerl.,  t.  VII,  p.  140. 

*)  Verüagen  en  Mededeelinyen  der  Koninkl.  Akad.  v.  IFetensch.,  2®  Sér., 
t.  VI,  1872. 


412 


J.  DE  JONG.  SUR  l’intégration  DE  l’ÉQUATION 


essayé  de  suivre  la  voie  opposée  et,  partant  d’une  relation  déter- 
minée entre  y et  je  me  suis  proposé  de  eonslruire  l’équation 
différentielle  à laquelle  convient  cette  relation,  ce  qui  permet 
alors  de  déterminer  en  même  temps  une  intégrale  particulière  de 
cette  équation.  Dans  ce  qui  va  suivre,  je  me  bornerai  à l’équation 
différentielle  linéaire  du  second  ordre.  La  méthode,  il  est  vrai, 
s’applique  aussi  aux  équations  d’ordre  supérieur,  mais  les  diffi- 
cultés analytiques  s’accroissent  alors  dans  une  proportion  con- 
sidérable. 


2.  Considérons  l’équation  différentielle  du  second  ordre  réduite 
à zéro 

ou  bien,  après  division  par  P,  l’équation 

(1). 


y 


dx 


dx^ 


L’équation  intégrante  de  (1)  sera  alors 

d (p 
d X 


— (X  — 2rf.XJ~+X,'i-ïz=0.  (2).  ') 

d X“ 


Prenons  maintenant,  comme  relation  la  plus  simple  entre  y et  go , 
g^  = y ou  =r  C ?/ (3) , 

donc  — — C — ^ ? =:  C ; portant  ces  valeurs  et  celle 

dx  dx  dx'^  dx^ 

de  go  dans  l’éq.  (2),  on  aura 

y(l-d.X  + d\X,)-(X-2d.X,)'^  + X,p>  = 0.  (4). 

’ dx  dx^ 


En  retranchant  ensuite  (1)  de  (4),  on  trouvera 

>j{-d.X  + d\X,}  — 2{X  — d.X,)'^^  = 0 

dx 


(p). 


*)  Dans  cc  Mémoire,  le  signe  d.,  placé  devant  une  lettre,  a la  même  signifi- 

d P 

cation  que  la  notation  D ou  Da-  chez  Cauchy;  d.  P est  donc  équivalent  à — — , 

d X 

d^Q 


DIFFÉRENTIELLE  LINÉAIRE  DU  SECOND  ORDRE. 


413 


Posons  maintenant 


X — d.  X,=zp • (6), 

(5)  devient  alors 

— ijd.p  — 2pŸ  = Oj 

(l  OC 

G 

ly^  — \lp  G et  y := (7) , 


\^P 


et 


^ = n-i±. 

dx  2 P 


(8) 


Substituant  ces  valeurs  de  — 

d X 


et  — d dans  (1),  cette  équation 


dx 


devient 


K?)l=» 


OU 

2p‘^—Xpd.p~X,pd\p  H-  [d.pY^O.  . . (10). 

Pour  que  la  relation  (p  = ?/  s’applique  à (1),  X et  Xj  doivent 
donc  satisfaire  à l’équation  (10),  dans  laquelle  la  fonction  p est 
déterminé  par  (6).  Lorsque  cette  condition  est  remplie, 

_ C 
i/p 

est  en  même  temps  une  intégrale  particulière  de  (1). 

Il  y a donc  toute  une  classe  d’équations  différentielles  linéaires 
du  second  ordre,  à laquelle  convient  la  relation  = y.  On  peut,  en 
effet,  attribuer  une  forme  quel  conque  à l’une  des  fonctions  Xou  Xj , 
puis  déterminer  l’autre  au  moyen  de  (10);  on  a alors  p et  une 
intégrale  particulière  de  l’équation  construite.  Mais  l’éq.  (10)  est 
une  équation  non  linéaire  du  second  ordre  en  p.  Si  l’on  prenait 
pour  X la  valeur  simple  x,  p deviendrait  x — d.X^,  et  en  sub- 
stituant ces  valeurs  dans  (10)  on  obtiendrait  une  équation  différen- 
tielle non  linéaire  en  X,  du  troisième  ordre.  Les  difficultés  ne 
seraient  guère  moindres  si  l’on  commençait  par  adopter  une  valeur 


414 


J.  DE  JONG.  SUR  l’intégration  DE  l’ÉQÜATION 


W- 


pour  X, . Mais  nous  pouvons  adopter  des  valeurs  pour  la  fonction  p , 
et  nous  avons  alors  dans  (10)  et  (6)  deux  relations  entre  XetXj, 
lesquelles  permettent  de  déterminer  ces  deux  fonctions.  Du  reste , 
on  voit  déjà  d’avance  que  le  nombre  des  équations  qui  se  laissent 
construire  en  suivant  cette  voie , est  limité  par  la  méthode  elle-même. 

Supposons  P -=z  y l’éq.  (10)  devient  alors,  après  quelques 
réductions , 

— icX  + 2X^  = 0; 

(6)  donne 

X — dX,  =x\ 
et  de  ces  équations  résultent  les  valeurs 

X,  = Ix  X^  y 

Xr=o;-i-  2 X l X — 2 x^  y 

et 


yrz:_sera  par  conséquent  une  intégrale  particulière  de  l’équation 


y X {1  2 Ix  — 2 x)  ^ x^  (Ix  — x)  = 0. 

dx  dx^ 

Q 

Si  l’on  avait  pris  pour  p la  valeur  a; , on  trouverait  que  y = 

V X 

est  une  intégrale  particulière  des  équations 

y -t2  x‘^  = 0 

dx  dx‘^ 

et  y 11  Q x‘^  =z  0, 

^ dx  dx^ 


résultat  auquel  nous  pouvons  aussi  parvenir  d’une  autre  manière , 
attendu  que  ces  équations  rentrent  dans  la  seconde  des  deux  caté- 
gories d’équations  différentielles  que  j’ai  citées  au  commencement 
de  ce  Mémoire. 

3.  Soit  entre  y et  cp  y dans  l’équation 


y 


d X 


d x’^ 


(1) 


niFFÉRENTlELLE  LINEAIRE  DU  SECOND  ORDRE. 


415 


et  son  équation  intégrante 


il 

dx 


v(l  — </.X  + (/^X,)  — '1?(X  — 2(/.X,)  + X,  — '^=0  . . (2) 


dx^ 


la  relation 


de  sorte  que 


y(f>  = Q 


(3), 


d y 


^ C d cp  ç d X d (p 
if  dx  y^  ^ dx"^ 


2(ï-»V  +./£! 


y' 


Substituant  ces  valeurs  dans  (2) , on  trouve  après  quelques 
réductions 


-X./ii^=0.(4). 
<dxf  ' dx‘^ 


f{l-d.X+d\lL . )+y  (X-2d.X , )+2X , 

dx 

' • d~  V 

Eliminons  maintenant  — entre  (1)  et  (4),  on  a 
d æ- 

y2(2_rf.x  + rf^X,)+2^(X-rf.X,)^|  +2X,  fy  =0.(5), 


OU 


dy 

(2 — (/.X  + <r- .X , ) + 2 (X  — rf.X , ) 'iî  + 2 X , 


ilm  \ 2 


= 0.  (6). 


Posons  ensuite 

X — d.Xj 

Féq.  (6)  se  transformera  en 

^ /<^\ 

(2  _ A.p)  + 2//-  + 2X,  ( - ) = 0 
y \ y / 

équation  qui  fournit 
rfy 

dx — P ± 1/  Ip^  — 2 X,  (2  — d.f>)\ 

__  _____ 


(7) , 

(8) , 


(9) 


416 


J.  DE  JONG.  SUR  l’intégration  DE  l’ÉQUATION 


et 


y = J , 2X. 

Soit  maintenant 


N = l^  \p'^  — 2X,  {2~d.p)\  . . . 
par  conséquent 

^ J^  — Pd-P  + X,  dKp—(2~d.p)d.X, 
~ N 

on  aura 

(-Zl±ld^ 

y = J 2X,  

*iï  — - y ,/ 

dx  2X,  

d’où  l’on  déduit 


(10). 

(11), 


(12), 

(13). 


d^y^,A{-p±W 

dx^  } 4Xj2 


d. 


/— P±N\ 
\ 2X,  J 


=2jj^)N(pX-2X,)+NMp+d.X0±X.(X,d^p+Xd./)-2d.X,)j(14) 


Substituant  ces  valeurs  dans  (l),  on  verra  que  les  coefficients , 
tant  de  que  de  N,  se  détruisent  réciproquement,  et  après 
quelques  réductions  et  en  divisant  par  + X,  on  obtiendra: 

X,  d\p  -hX(Lp~2d.X,=0 (15). 


Les  coefficients  X et  X,  dans  (1)  doivent  donc  satisfaire  à 
l’équation  (15),  lorsque  la  relation  ycpZzzC  existe  entre  y et  cp. 
L’équation  (12)  détermine  alors  en  même  temps  une  intégrale 
particulière  de  (1). 

Si  nous  posons  Xj  =c,  (15)  deviendra 
cd'^.p  -^Xd.  P zizO 

et  (7) 


P = X. 


DIFFÉREiNTIELLE  LIiXÉaIRE  DU  SECOND  ORDRE. 


417 


Il  en  résulte. 


P = x = 


2c 

X 

2c' 


N = — 2c('2  + ?|V=2i/  — 

(x^  \ x^/S 


et 


I 


— 2c 


±2}^~c 


yz=e 


2c 


dx 1 

X 


àzxV^  — 


sera  une  intégrale  particulière  de  l’équation 


dx 


4.  Soit  dans  les  équations 


dx^ 


+ + ^ 0 
dx  dx^ 


et 


y (1— rf.X  + rf^.X,)— ^(X-2rf.X,)  + X,  —z=0 
dx  dx^ 


la  relation 


on  a alors 
d(p 


O dij  d^  (p  ^ 

z=  2 , z=  2 y 

dx  dx^  dx^  dx'^ 


2 dtr  ^ 


■ (1) 

• (2) 
(3), 


Par  la  substitution  de  ces  valeurs  dans  (2),  cette  équation  se 
transforme  en 

^Hl-rf.X+rf^X,)-2y^(X-2rf.X,)+2X,  V2X,ÿ£f=0.(4). 

En  retranchant  de  celle-ci  le  produit  de  (1)  par  2//,  on  obtient 

X + d\  X,  ) -4Æ(X-d.X,)+2X,  ( ^ "=  0.  (5). 
dx  \dxj 

Posons  maintenant 

X — (/.X,  =/> (6), 


Archives  Néerlandaises,  T.  IX. 


27 


418 


J.  DE  JONG.  SUR  l’intégration  DE  l’ÉQUATION 


(5)  deviendra,  après  division  par 

®/  - \ 

Il  en  suit 

'^l  fP±l/|p^+iX.(l+rf.p)t  , 

dx_p±V^\p^+kX,{l+d.p)\  dx 

J X, ‘ («)• 

Posons  maintenant 

^ = i^\p^^lX,{i  + d,p)\ (9), 

par  conséquent 

^ ^ 2 P cLp  ,p  -\r  fd.X^  ( 1 H-  d.p) 

__  _ __  , 

on  aura 

[P^dx 

y = e (10), 

Ï='-YT’ <“»' 

et 


N\  ^ X,(d.p±d.X)-{p±X)  rf.X.i  _ 

dx-^  /\  X,  / X,^  1 

= ^r^iN[4p^  + X,  {1  + d.p)  + 2X,  d.p-2pd.x,'j  ± 
±2X^2p~-d.X,)±X,  j^|X,d.V+2pc(.p+irf.X,(H-rf.p)j(.  (12). 

Ces  valeurs  de  y,  — et  étant  substituées  dans(l),  on  a 

dx  dx‘^ 

N (3 Xj  -i-  SX^  d. p+6p‘‘±2 N’ (2/) — d.X^  +X)±Xj  ^}X,d.“p4- 


+ 2pd.p  -t-  |d.X,(l  + d.p)j=zO (13), 

ou 

3N“  ±3/jN±X,  d.N  = 0 (14). 


r, 

i' 


DIFFÉRENTIELLE  LINÉAIRE  DU  SECOND  ORDRE. 


419 


Pour  qu'on  ait  la  relation 

<p  ~ 

les  fonctions  X et  Xj  doivent  donc  satisfaire  aux  équations 
p=zX~-d.X^  , 

et 

0 = 3N^  ±3pN±X,d.N, 

et  alors 

y — e ' 

est  une  intégrale  particulière  de  l'équation  (1). 


5.  Lorsque  entre  y et  g,,  dans  les  équations 
y + +x.^  = o.  . 

dx  ' dx‘^ 


(1) 


et 


v(l-rf.X  + d.^X,).-(X-2rf.X,)^  + X,  (2), 


existe  la  relation 


(3), 


on  a 


et 


X d(p 
dx 


dx‘^ 


~yx 


dx' 


d y 

y — X ~ , 

d_X 

y' 

2yil  + 2xC^-l' 

^dx  \dx 


r 


En  portant  ces  valeurs  dans  (2)  on  obtiendra 
|æ(l-c(.X+rf^X,)— (X-2rf.X,)j -l-y^-a;(X-2rf.X,)-2X,(  + 

+ = w- 

et  en  ajoutant  à cette  expression  le  produit  de  (1)  par  yx^ 
jæ(2— rf.X+c/^X,)~(X-2rf.X,)  j +2y^|æ(X-rf.X,)-X,|  + 


+ 2a:X,l''^V=  O 


(5). 


27* 


420 


J.'DE  JOX(i.  SUR  l’intégration  DE  l’ÉQUATION 


Posons  maintenant 

p = x{X-d.X,)-X, (6), 

donc 

d.pz=æ{d,X  — dKX^)  -\-X  — 2d.X,, 

le  coefficient  de  dans  l’équation  (5)  sera 

2x  — \x{d.X  — d^.Xi)  -1-X  — 2d.Xi  j 2x  ~d,p, 

et  (5)  se  transformera  en 

{2x.  — cl.p)  + 2ypp  + 2æxY^V=  0.  . . (7), 
d X \dx ) 

ou 

©2  dj^ 

P dx  2x  — d,p ^ 

On  en  déduit 

<h 

dx — P dr  1/  \p"‘- — 2*X,  (2x  — d.p)\ 

7“  2^7  ’ 

t—p  ± IX-  — 2a;X,  {2x-  d.p)\ 

J 2xX. 

y = e ' ...(8). 

Posant  ensuite 

(2^  — z=N (9), 

on  a 

^ pd.p  — xX^  {2  — d^,p)  — {2x  — d.p)  (Xj  -h  xd.  X,) 

N 

xX^d^.p xXd.p  — 2x‘^d,X^ — ^xX^ 

~N  ^ 

donc 

(-P±^dx 
J 2xX, 

y = e (11), 

(12), 

dx  2xX^ 


DlFFÉRKiNTIELLE  LINÉAIRE  DU  SECOND  ORDRE. 


421 


2 ^ , (— t/./?±t/.N)— (— y?±N)(g:^/.X ^ +X 


(Ix 


2 A2^x,  ; 


.r2  Xj 


\p-  — icX,  {2x  — d.p)  + jdN 


2x^X,‘^ 


^ ( J . xXid^.p+xXd.p-2xH.Xt-4:xXt\  , xtn/  iv  v i 
^Xj  — l—L ^ î )-("P±N)(a;c/.Xi+Xi 

' N / U 

“H  t'»  ..O  V O \ 


2x^X^^ 


— — J J 

a:X,(2a;— rf.p)— æXirf.p  + p(a;(/.Xj  +X,)|  =F 


-4-N^  |p+X(i.Xj-fX j l±icXj  \xX^d^ ,p+xXd.p — 2x^d.Xi—4:xX^  j 


— y 


X{pxX  — 2x'^X^)±æXX‘^  ± 


d-  æ;X,  [xX^d'^.p  d-  xXd.p  — 2x‘^  d.X^  — 4icX,  { |.  (13). 


Si  ces  valeurs  de  y,  — et  sont  substituées  dans(l),  les 


dx  dx"^ 

termes  en  N ^ et  N disparaissent  et  on  obtient  Téquation 

X^d.^p  Xd.p  — 2xd.X^  — 4X,  = 0 . . . . (14). 

à laquelle  doivent  satisfaire  les  fonctions  X etXj  lorsque  y<)p  = ic , 
tandis  que  p est  déterminée  par  Téquation  (6). 

Prenons,  par  ex.,  p^c,  (14)  devient 


xd.X^  +2X,  =0,  Xj 


(6)  donne  alors 


X=: 


CX^  1 


, N = V/(c^-4), 


et 


— C±l^(c^— 4) 


>J  = e 


sera  par  conséquent  une  intégrale  particulière  de  Téquation 
yx^  d-  (cx^ — d-  x^—^z=:0. 


dx 


dx^ 


422 


J.  DE  JONG.  SUH  L INTEGRATION  DE  L ÉQUATION 


Mettons  /?  zz:  alors  (14)  devient 

— =0, 

tandis  que  (6)  donne,  dans  ce  cas, 

a?  X — iCi/.Xj  — Xj  z=ix‘^. 

Ces  deux  équations  ne  pouvant  exister  simultanément , XetXj 
doivent  être  qo  et  Téquation  différentielle  ne  peut  être  construite. 
Ceci  est  d’ailleurs  confirmé  par  la  valeur  de  3^,  car , pour zz:  a; , 
on  a 

N zz  \ x'^  — 2 a?  X J [2x  — 2a?)  j zz  a;^ , 


f- 


X^  zt  X 


J 2xX, 
y = e ‘ 


dx. 


Pour  le  signe  supérieur,  on  a 

’ • 

et  par  conséquent,  lorsque  Xj  est  infinie,  y zz  e®  zz  constante. 
Pour  le  signe  — , on  a 

yz=zj  1 

de  sorte  que  lorsque  X^  est  infinie,  y devient  e®  ou  constante. 
Il  est  donc  clair  que  pour  ce  cas  particulier  l’équation  différentielle 
est  impossible. 

6.  Supposons  entre  y et  (p  y dans  les  équations 

« 

et 

r/.  (1— d.X  + ti^XJ 
la  relation 

y(p  zz:  x"^ (3) 

par  conséquent 


‘^(X— 2rf.XJ  + X,^  = 0 . . (2), 
' 'dx^  ^ 


a?  ^ d(p dx 


y ^ dx  y‘^ 

,,  2y^— 4a:y^' + 2æ- 

d^(p dx 

dx^ 


(~) 

\dxj 


yx^i'l- 

dx-^ 


DIFFÉRENTIELLE  LINÉAIRE  DU  SECOND  ORDRE. 


423 


(2)  devient  alors  par  Tintroductiou  de  ces  valeurs 

y '-  |o:Ml-</.X+,/.^X,)+2a;(X-2rf.X,);  +^'1^  U.(X-2</.X,)-4xX  j 
f ) dx\  \ 


H-  2x^\ 


''i^V-yx^X,'i!l  = 0 

dx)  * dx'^ 


(4). 


Ajoutant  à cette  expression  le  produit  de  (1)  par  yx^ , on 
obtient 

y^-|o;^-(2  — d.X  + d\X^)  — 2x{X~2d.X^)  + 2Xj|  + 

+ 2xy‘^£]x{X-d.X,)~2X^l+  2x^X^^£y=0.  (5). 


Posons  maintenant 

a:(X  — d.XJ  — 2Xj  =p 


(6), 


donc 

d.p  — x{d.X  — d\X^)  + X — 3d.  X, , 
le  coefficient  de  y-  dans  (5)  devient 

2x^  — x\x{d.X  — d\X^)  + 2X  — 4d.Xj  -h  2X,  == 
z=z2x^  — x{d.p  4-  X — d.X£)  + 2Xj  = 2^c  - — xd.p  — 
— j:r(X  — d.Xj)  — 2Xjj  Z3  2x‘^ — xd.p — p. 

(5)'  devient  donc 

_L_  O/y.2  Y ^ 


{2x^  — xd.p — p)  4-  2yxp-l  4-  2x^  X (—\ 

dx  \dxj 


0, 


ou 


dx 


dx 


xXj  ' y 


+ 


2x^  — xd.p  — p 

^x’; 


0 


y 

Il  en  suit 
dy 

dx  — p ±^^  \P^  — 2X,  (2x^  — xd.p  — p)  j 


(«)• 


I- 


2xX^ 

-pztl^lp'^ — 2Xj  {2x‘^ — xd.p—p) 
2 xX^ 


dx  . 


(8). 


424 


J.  DE  JONG.  SUR  l’intégration  DE  l’ÉQUATION 


Posons  ensuite 

N = 1/^  \p'^  — 2Xj  {2  — xd.p  — p)\ (9), 

par  conséquent 

^ pd.p  — Xj  {Aæ — xd^.p — 2d.p) — r/.  X^  {2  æ- — xd.p — p) 

_a^X ,d\p^  d.p{p  + xd.X  J 4-  2X  J + p^/.X  J --2x^d.X , — 4a;X . _ 
__  _ ^ _ 

zzrijajXj  d'^.p  + xXd.p  -h  pd.X^  — 2x^  d.X^ — 4a?Xj|, 

on  aura 


-~p±N 

2a?X, 


dx 


(10), 


^ -'P±^ 
dx  2 a?  X J 


(11), 


d‘^y__  \^—p±X\  ^ ^xXt{—d.p±d.X)—{—p±N){xd.X,-j-X^)(__ 


_ y 


N ^p‘ 

2a;2Xj2N|  r 


-Xi(2a?^ — xd.p — p) — xX^d.p  + pxd.X^-^pXi^ 


I 


q^X‘^^^p+xd.Xt-tXi\±xXi^xXid^.p-hxXd.p+pd.Xi~2x^d.Xt—AxXj^  | — 
zzr— 2-  In  {pxX — 2a?^Xi)=f:N2(a?X — X,)H::aîXi  j {xXid'^.p+xXd.pA- 

Zx  J jN  f 


pd.X^  — 2a?2  d.X^  — AxX^ 


) 


(12). 


Ces  valeurs  étant  substituées  dans  (1),  on  obtient  après  quelques 
réductions,  par  lesquelles  les  termes  en  N se  détruisent  réci- 
proquement , 


d:XjN^±a;Xj  \ xX ^d"^ .pA-xXd.pA-pd.X ^—2x'^ d.X ^—AX ^x\'=.0.  (13). 


DIFFÉREiNTIELLIi  LINEAIRE  DU  SECOND  ORDRE. 


425 


Si  Ton  divise  cette  équation  par  ±Xj  et  qu’on  y substitue 
pour  N“  sa  valeur  tirée  de  (9),  elle  donne 
/>2-2X  J [2x‘^-xd , (P .p-\-x'^Xd.p-\-xp(LX  j -2xhl.X  j -Ax^X  ^ —O , 


ou 


o;2X , d^p+p{p+xd.X , +2X , )+d.p{x^X  J +2^X , )-2xH.X , ^ =0, 

ou 

X-  X ^d'^  .p pxX  -\-xd.p  (a?Xj  + 2X  J — 2x'^d.  Xj — Sx-  Xj  =0, 
ou  bien 

xX^d^.p  X -I-  2 X , ) d.p  -h  X P — 2x  ixd.  X ^ + 4 X j ) =r 0.  ( 14). 

Les  fonctions  X et  X . doivent  donc  satisfaire  à cette  équation 
lorsqu’on  a la  relation  y(f>-=.x^^  et  dans  ce  cas 


• ] 2xX. 

y — e > 

est  une  intégrale  particulière  de  (1),  tandis  que  p et  N sont 
déterminées  par  les  équations  (6)  et  (9). 

Soit  P = 0 , 

alors  (14)  donne  a; d.  X ^ +4Xjr=:0,  donc  X,rz:  — ; 


(6)  a;(X  — c/.X  J + 2X,  =0,  doncX=— 4; 

a?"" 

et  de  (9)  l’on  tire  2a?^  j — ^ 

! a?^  ) X 


±-l^^ 

X 


tti 


dx 


±\x^  , 


tandisque  (10)  donne  zzy  = e 

laquelle  est  par  conséquent  une  intégrale  particulière  de  l’équation 

y x^  — 2 — -h  X — ~ 0. 

^ dx  dx‘^ 

1.  Nous  traiterons  encore  le  cas  où,  dans  les  équations 

_i_  Y _u  Y — n 


426 


J.  DE  JONG.  SUR  l’intégration  DE  l’ÉQUATION 


et 


+ — 'iî(X-2rf,XJ+X,!f!f  = 0.  . (2), 


(læ 


il  existe  entre  et  <?)  la  relation 


1 

-..2 


dx‘^ 


(3). 


On  a alors 


)_  ch  __ 

^ dx 


-A- 2, 

dx 


ï^y- 


dH 

dx"^ 


+ -2.-^  (‘fl\ 

^ dx’^  \dxj 


4x^ 


ày_ 

dx 


x^ 


Qy^- 


Par  la  substitution  de  ces  valeurs,  (2)  devient 
y-i  (a;2{l— d.X+d^X,)+2a:(X— 2d.X,)+6X,  j-HryU(X-2d,X,)+ 


x^y^.  — --  z=.  0 
^ ' dx  '^ 


(4). 


En  ajoutant  le  produit  de  (1)  par  x-y , on  obtient 
y'^  ['æ^(2-d.X+d^X,)+2Æ^(X-2c/.X,)+6Xi  | +2a;/^|a;(X— d.X,)  + 


+ 2X.  I +2*^X,(^^y  = 0 (5). 

Posons  maintenant 

xÇL~d.^^  + 2X,  (6) 

et  par  conséquent 


d.p  =:  (d.  X — f/2 . X J 4-  X + d.  Xi , 
le  coefficient  de  y-  dans  (5)  devient 

2x-x^-\x[d.X-d\H,)+X+d.X,  |+2^(X-d.Xi)+6Xi=r2j;2-ard./?4-3p, 
et  (5)  prend  la  forme 

,f  {2^-^-xd.p  + Zp)  + 2^yp-Jl  +2a;^X,  = 0-  (7) 


DIFFÉRENTIELLE  LINÉAIRE  DU  SECQND  ORDRE. 


427 


X d.p  + 3/9  


: = 0. 


f 


2xX^ 

/?  + 1+  1/9^ — 2X,  (2x‘ 

2Jx7~ 


xd.p  + 3p) 


dx 


y = e 


■ (8). 


Posons 

1+  1/?^  — 2Xj  [2x^  — a;c^./9  + 3/))  I z=  N . . . . (9) , 
par  eonséquent 

^ P d.p — Xj  {àx — X d‘^  .p 2 d.p) — i/.Xj  {2x^ — xd.p  + 'dp) 

_ ^ _ 


__xX,d\p  + d.p{p—2X , + xd.X  2 )—èpd.X  J —2x  2 d.X , — 4^cX  j 
■“  N 

___xX,d\p  + ^Xt/./9— 3 pd.X,—2x‘^d.X^—AxX^ 

' N 


on  aura 


/ 


’ — P ± N 
2xX. 


dx 


y = e 


d y — P ± N 

dx  2 xX, 


y 


(10), 

(11), 


p±Ny  </.p±f/.N)-(— )»±N)(ærf.X+Xj))  _ 

_ p^—X,(2x^-xd.p+3p)+p^ ^ ^ (ptN)  (xrf.X,+X,)  ^ ^ 


2.ic2X," 


2x*X,2 


^X  /_  y ^_^xX^d‘^ .p-\-xXd.p — dpd.X^ — 2x-d.X^ — 4a?X  A 




2x^  X,^ 


428 


J.  DE  JüNCJ.  SUR  l’intégration  DE  l’ÉQUATION 


=—  y ^.^  \\p^-—X,(2x^—xil.p+3p)—xX,d.p+jml.X,+pX,  | ± 
±N^(/j+xrf.Xj)±a;X,  jxXj(i^./(+xXrf.p-3/(rf.Xj— 2x^rf.X,-4xXj  j|= 


— y (»xX— 2x^X , ) ± X ^'xX  + 3X , ) ± xX , (xX, </2.p+ 

“2*'^X,^N(  ^ A I 

+ xXrf.p— 3prf.Xi  — 2a;2rf.X,— 4xX,)| (12). 

En  portant  ces  valeurs  dans  (1),  on  verra  de  nouveau  se 
détruire  les  termes  en  N,  et  après  avoir  remplacé  par  sa 
valeur  tirée  de  (9),  on  aura^  à la  suite  de  quelques  réductions, 
l’équation 

.p-^xd,p(xX-6X , )-3p{xXAX ^ ^ -4X  J = 0.  (13), 


à laquelle  les  fonctions  X et  X,  doivent  satisfaire. 

Si  nous  prenons  pour  p la  valeur  0,  l’équation  (13)  devient 

xd.X^—àX^  =0  d’où  X,  zziX^, 

(6)  devient 

• x(X— ^/.XJ  + 2Xj  =0  dus  X=z-{-2x^- 

(9)  donne  alors  pour  N 

et  de  (10)  on  déduit 


_ J2xX,  _ J 


*±  2x^  1 


2x^ 


dx 


1^-1 


y=-B  * = e z=z  e 

comme  intégrale  particulière  de  l’équation 

^ dx  dx^ 

8.  Soit,  dans  les  équations 


DIFFÉRENTIELLE  LINEAIRE  DU  SECOND  ORDRE. 


429 


et 

^.{l-dX  + dKX,)-^l{X-2d.X,)+x/^  = 0.  . (2), 

dx  dx^ 

entre  ?/  et  la  relation 

= (3), 

X 

d’où 

/l-ÿ  + 

dg> dx  d^(f> dx'^  dx 

dx  x’^-  ’ dx‘^  x'^ 

En  introduisant  ces  valeurs  dans  (2)  on  obtient 

y \x^l-d.X-dKX,)+a:{X-2d.X^)+2X^  j-a;^'U(X-2rf.Xi)+2X,  | + 

» 

' . . d’^v 

Eliminant  ensuite  — - de  (1)  et  (4),  on  a 
dx^ 

y\-a^id.X-dKXi)-}-4X-2d.Xi)  {2XA-2Jl{Xi+x(X-d.Xi))=0.  (5). 
‘ ) dx 

Posons  maintenant 

;.(X— c/.XJ  -hXj  z=zp (6), 

donc 

d.p  = x(d.  X—d\X^)  + X, 

t 

le  coefficient  de  y devient 

—x{d.p — X)4-a?(X—  2d.X  ^ )+2X  j rz: — xd,p-{-2 1 xÇX—d.X  ^ )-f-X  ^ | — 
= — xd.p  H-  2 P , 

et  par  conséquent  (5)  devient 

y [2 P — xd.p)  — 2px  ^ = 0 (7); 

dx 

d’où 

dx 2 P — X d.p  1 J d.p 

y 2 xp  X ^ P ^ 


430 


J.  DE  JOISG.  SUR  l’intégration  DE  l’ÉQUATION 


donc 


Si  l’on  substitue  ces  valeurs  dans  (1),  on  trouvera  après 
quelques  simplifications 

2xX^pd^.p  —SxX ^{d.py  -\-2pd.p{xX-^2X — 4/9^(a?+X)=0.  (11). 

A cette  équation  doivent  donc  satisfaire  X et  Xj  pour  que 
entre  y et  q>  ait  lieu  la  relation  (3) , et  alors  l’équation  (8)  déter- 
mine une  intégrale  particulière  de  (1). 

. Faisons  p = (11)  devient 

a;  H-  X = 0 d’où  X = — X. 

(6)  donne  alors  pour  Xj 

Xj  — xd.X^  z=zc  -i-  x^  d’où  Xj  =z  c — x^  j 
et 


X 


est  une  intégrale  particulière  de  l’équation 

y — * ^ H-  (C— y-f  = 0 (A). 

dx  dx^ 


On  pourrait  obtenir  immédiatement  une  autre  intégrale  par- 
ticulière de  cette  dernière  équation  en  l’écrivant  sous  la  forme 

y + a?— ^ — 2x^  H-  {c — x^)^^  = 0. 
dx  dx  dx"^ 


DIFFÉRENTIELLE  LINEAIRE  DU  SECOND  ORDRE. 


431 


Le  premier  membre  est  alors  directement  intégrable  et  donne 

/ dx  „ 

yx  + (c  — zz:  0, 

d’où  il  suit 

y =z  ix"  — c). 

A l’aide  de  cette  intégrale  particulière^  on  peut  trouver  l'in- 
tégrale générale  de  (A).  On  obtient  ainsi  : 

— C2  a;  + C,  (a?2  — c). 

Si  l’on  pose  maintenant  ^ 

C,  = 0, 

la  seconde  intégrale  particulière  de  (A)  est 

y — 

ce  qui  s’accorde  avec  le  résultat  obtenu  par  notre  méthode. 

En  posant  dans  (11) 

P = x\ 

on  obtiendrait 

— 4a?^  =0, 

ce  qui  indique  que  dans  cette  hypothèse  l’équation  ne  peut  pas 
être  construite.  Effectivement,  on  a dans  ce  cas 

X 


y 


= constante. 


Nous  nous  en  tiendrons  là,  et  ferons  seulement  encore  remar- 
quer que  le  nombre  des  équations  qui  peuvent  être  construites 
par  cette  méthode  est  limité.  Nous  avons  bien  pu  traiter  une 
suite  de  relations  entre  cp  et  ?/,  mais  on  a vu  que  pour  chaque 
cas,  si  simple  qu’il  soit,  le  nombre  des  équations  qui  se  laissent 
construire  est  très  restreint,  à cause  des  difficultés  qu’on  a 
à vaincre.  D’un  autre  côté,  la  série  des  relations  qu’on  peut 


432 


J.  DE  JONG.  SUR  l’intégration  DE  l’ÉQUATION  ETC. 


admettre  entre  y et  g,  n’est  pas  indéfinie  non  plus  ; en  effet , 
toute  relation  qnelconque  ne  conviendrait  pas  dans  cette  méthode. 
Supposons,  par  exemple,  que  l’on  prenne 

(p  zzz  Sin  y d’onc  d.cp  — Cos  y d.y,  d^.cp  — Cos  y d^,y — Sin  y (d.y)  ^ ; 

en  substituant  ces  valeurs  dans  (2)  et  éliminant  ensuite  d-.y  k 
l’aide  de  (1),  on  parviendrait  à une  équation  non  linéaire  du 
premier  ordre , et  par  conséquent , en  général , on  ne  serait  pas 
avancé  d’un  pas. 

Toutefois,  il  n’est  peut-être  pas  impossible  d’arriver  par  cette 
voie  à la  découverte  d’intégrales  particulières  de  certaines  équations 
différentielles  qui  ne  se  laissent  pas  intégrer  d’une  autre  manière. 
La  méthode  est  également  applicable  aux  équations  du  troisième 
ordre;  c’est  un  point  sur  lequel  nous  reviendrons  peut-être 
plus  tard. 


SUR  LA  SALURE  DES  EAUX  DE  LA  ZÉLANDE 


PAR 


F.  SEELHEIM. 


Vers  la  fin  de  l’année  1871,  la  Direction  des  pêcheries  sur 
l’Escaut  et  les  eaux  de  la  Zélande  reçut  de  M.  le  Ministre  des 
Finances  l’ordre  de  faire  procéder  à un  examen  chimique  concer- 
nant le  degré  de  salure  de  l’eau  tant  de  l’Escaut  oriental  que 
de  l’Escaut  occidental. 

La  Direction  ayant  bien  voulu  me  charger  de  l’exécution  de 
ce  travail,  je  reçus  successivement,  de  sa  part,  les  échantillons 
d’eau  suivants: 

De  l’Escaut  occidental: 


1 bouteille  remplie  devant  Flessingue,  en  eau  haute,  1 Nov.  1871 


1 

U 

T) 

ff 

n 

Y! 

eau  basse , „ 

Y 

Y 

1 

n 

n 

dans  le  Braakman 

Y, 

e. 

h. 

28  Oct. 

Y 

1 

n 

Y)  Y! 

Yi 

Y 

e. 

b. 

Y 

Y 

Y 

1 

n 

devant 

Neuzen 

Y 

e. 

b. 

31 

Y 

Y 

1 

n 

n 

Y) 

Hansweert 

Y 

e. 

h. 

27 

Y 

Y 

1 

n 

n 

Y> 

Y) 

Y 

e. 

b. 

Y 

Y 

Y 

1 

n 

fl 

ff 

De  Paal 

Y 

e. 

h. 

26 

Y 

Y 

1 

r> 

ff 

Y) 

J?  Y) 

Y 

e. 

b. 

Y 

Y 

Y 

1 

n 

n 

f) 

Bath 

Y 

e. 

h. 

25 

Y 

Y 

1 

n 

n 

Y) 

Y) 

Y 

e. 

b. 

Y 

Y 

Y 

1 

r> 

r> 

dans  le  Kieldrechtsche  gai 

‘Y 

e. 

h. 

26 

Y 

Y 

1 

rt 

Y)  Y) 

ff  Y) 

Y 

e. 

b. 

Y 

Y 

Y 

1 

y> 

r) 

devant  Den  Doel 

Y 

e. 

h. 

27 

Y 

Y 

1 

V) 

Y) 

Y) 

Y)  Yi 

Y 

e. 

b. 

Y 

Y 

Y 

Archives  Néerlandaises.  T.  IX.  28 


434  F.  SEELHEIM.  SUR  LA  SALURE  DES  EAUX  DE  LA  ZELANDE. 


De  l’Escaut  oriental: 

1 bouteille  remplie  devant  Veere , en  eau  haute , 22  Mars  1872 


1 

T) 

77 

77  77 

77 

eau 

basse , 

77 

77 

77 

1 

n 

77 

„ Kortgeene 

77 

e. 

h. 

21 

77 

77 

1 

n 

77 

77  77 

77 

e. 

b. 

77 

77 

77 

1 

n 

77 

„ Zierikzee 

77 

e. 

h. 

8 

77 

77 

1 

« 

77 

77  77 

77 

e. 

b. 

77 

77 

7? 

1 

>7 

77 

dans  le  canal  de 

Wemeldinge 

77 

e. 

h. 

7 

77 

77 

1 

77 

77 

77  77 

77 

e. 

b. 

77 

77 

77 

1 

77 

77 

devant  Stavenisse 

77 

e. 

h. 

9 

77 

77 

1 

77 

77 

77  77 

77 

e. 

b. 

77 

77 

77 

1 

77 

77 

„ Yerzeke , sur  le 

banc  d’huîtres 

77 

e. 

h. 

6 

77 

77 

1 

77 

7? 

77  77 

77 

e. 

b. 

77 

77 

77 

1 

77 

77 

„ Tholen 

77 

e. 

h. 

17 

77 

77 

1 

77 

77 

77  77 

77 

e. 

b. 

77 

77 

77 

1 

77 

77 

„ Bergen  op  Zoom,, 

e. 

h. 

5 

77 

77 

1 

77 

77 

77  77  77 

77 

e. 

b. 

77 

77 

77 

1 

77 

77 

dans  le  Mosselkreek , 

à St.  Philipsland 

77 

e. 

h. 

12 

77 

77 

1 

77 

77 

77  77 

77 

e. 

b. 

77 

77 

77 

1 

77 

77 

devant  Bruinisse 

77 

e. 

h. 

11 

77 

77 

1 

77 

77 

77  77 

77 

e. 

b. 

77 

77 

77 

Plus  tard,  on  m’envoya  encore  d’autres  échantillons  d’eau, 
provenant  du  Krammer  et  du  Haringvliet,  savoir: 

1 bouteille  remplie  devant  Herkingen,  en  e.  h.,  le  28  Sept. 
1872,  à 11  h.  30  m.  du  matin,  par  un  temps  rude. 

1 bouteille  remplie  devant  Herkingen,  en  e.  b.,  le  28  Sept. 
1872,  à 5 h.  30  m.  du  soir,  par  un  temps  rude,  et  le  reflux 
étant  à peine  sensible. 

1 bouteille  remplie  devant  Oude  Tonge , en  e.  h. , le  28  Sept. 
1872,  à 11  h.  45  m.  du  matin. 

1 bouteille  remplie  devant  Oude  Tonge , en  e.  b.  le , 28  Sept. 
1872,  à 6 h.  30  m.  du  matin. 


F.  SEELHEIM.  SUR  LA  SALURE  DES  EAUX  DE  LA  ZELANDE.  435 

1 bouteille  remplie  devant  Ooltgensplaat , en  e.  h.  ; le  28  Sept. 
1872,  à 8 h.  30  m.  du  matin. 

1 bouteille  remplie  devant  Ooltgensplaat , en  e.  b.  ; le  28  Sept. 
1872,  à 11  b.  30  m.  du  matin. 

1 bouteille  remplie  devant  Hellevoetsluis,  à la  pointe  de  la 
jetée  orientale  du  port  de  la  Marine,  le  28  Sept.  1872,  à 11b. 
55  m.  du  matin.  L’eau,  à. ce  moment,  était  de  2 décimètres  plus 
haute  qu’à  marée  haute  ordinaire. 

1 bouteille  remplie  devant  Hellevoetsluis,  à la  pointe  de  la 
jetée  orientale  du  port  de  la  Marine,  le  28  Sept.  1872,  à 7 h. 
45  m.  du  matin.  L’eau , à ce  moment , était  de  9 décimètres  plus 
haute  qu’à  marée  basse  ordinaire. 

1' bouteille  remplie  devant  Middelharnis , en  e.  h.,  à 12  h. 
30  m.  de  l’après  midi. 

1 bouteille  remplie  devant  Middelharnis,  en  e.  b.,  à 7 h.  du  matin. 

1 bouteille  remplie  devant  Stad  aan  ’t  Haringvliet,  en  e.  h., 
le  28  Sept.  1872,  à 12  h.  15  m.  de  l’après  midi. 

1 bouteille  remplie  devant  Stad  aan  ’t Haringvliet,  en  e.  b., 
le  28  Sept.  1872,  à 7 h.  20  m.  du  matin. 

Les  échantillons  d’eau,  dont  je  viens  de  donner  la  liste,  ont 
été  examinés  de  la  manière  suivante: 

a.  100  c.  c.  de  chaque  bouteille  ont  été  évaporés  dans  une  cap- 
sule de  platine;  le  résidu  a été  séché  à 150°  C,  puis  pesé. 

b.  100  c.  c.,  additionnés  d’acide  chlorhydrique,  ont  été  préci- 
pités par  le  chlorure  de  baryum  ; le  précipité  a été  recueilli 
et  pesé. 

c.  100  c.  c.  ont  été  précipités  une  première  fois  par  l’oxalate 
d’ammoniaque;  le  précipité  d’oxalate  de  chaux,  recueilli^ 
a été  pesé  à l’état  de  chaux. 

d.  Le  liquide,  que  la  filtration  avait  séparé  de  l’oxalate  de  chaux 
a été  concentré  par  évaporation , puis  précipité  par  le  phos- 
phate de  soude  et  l’ammoniaque;  le  précipité  a été  pesé 
à l’état  de  pyrophosphate  de  magnésie,  et  le  résultat  cor- 
rigé par  la  mesure  de  l’eau  de  lavage. 


28* 


436  F.  SEELHEIM.  SUR  LA  SALURE  DES  EAUX  DE  LA  ZELANDE. 

e.  Le  chlore  a été  dosé  par  titrage  avec  une  solution  d’argent. 
/.  Le  poids  spécifique  a été  déterminé  à l’aide  de  la  balance 
et  d’une  ampoule  en  verre. 

Les  nombres  obtenus  de  cette  manière  ont  tous  été  rapportés 
par  le  calcul  à 100  parties  d’eau  en  poids. 

Voici  les  résultats  auxquels  je  suis  parvenu: 

A.  Escaut  occidental. 


100  parties  d’eau  contiennent. 


i 

Matières 
j solides. 

1 

Acide 

sulfurique 

Chaux. 

Magnésie. 

Chlore,  j 

Poids. 
1 Spéc. 

Plessingue 

e.  h 

3,3704 

0,2098 

0,0605 

1 

1 0,2031 

1,7161 

1,0248 

H 

e.  b 

3,2133 

0,1948 

0,0587 

0,1885 

1 1,6340 

1,0245 

Braakman 

e.  h 

3,0629 

0,1858 

0,0549 

; 0,1821  ! 

i 1,5270 

1,0232 

// 

e.  b 

3,0774 

0,1876 

0,0525 

i 0,1814  i 

1,5351 

1,0233 

Neuzen 

e.  b 

2,9066 

0,1754 

0,0539 

0,1711  ' 

1,4530 

1,0225 

Hansweert 

e.  h 

2,6088 

0,1619 

0,0473 

0,1604 

1,3387 

1,0204 

// 

e.  b 

2,5154 

0,1544 

0,0473 

0,1483 

1,2645 

1,0193 

de  Paal 

e.  h 

2,2888 

0,1433  ' 

0,0463 

0,1376  ' 

1,1740 

' 1,0180 

// 

e.  b 

2,1980 

0,1344  ' 

0,0394 

1 0,1331  1 

1,1244 

1,0Î73 

Bath 

e.  b . . 

i 2,2179 

0,1415 

' 0,0483 

1 0,1327 

1,1411 

1,0176 

// 

e.  b 

2,0073 

0,1232 

0,0385 

1 0,1208 

1,0071 

1,0158 

Kieldrechtsche  gat  e.  h . . 

2,3880 

0,1455 

0,0442 

0,1422 

1,1902 

1,0185 

U 

//  e . b . . 

2,2340 

0,1332 

0,0395 

! 0,1353 

1,0920 

1,0168 

den  Doel  e,  h 

1,9060 

0,1179 

i 0,0365 

0,1110 

0,9789  ; 

1,0148 

//  // 

e.  b.  

0,5327 

0,0338 

! 0,0159  ! 

, 0,0362 

0,2639  ' 

1,0047 

Je  dois  remarquer  ici  que  les  résultats  de  Neuzen  e.  h.  étaient 
tout  à fait  anormaux,  et  que  probablement  quelque  erreur  a été 
commise  dans  le  remplissage  de  la  bouteille.  Pour  cette  raison, 
les  nombres  relatifs  à Neuzen  e.  h.  n’ont  pas  été  mentionnés. 

Le  tableau  B fait  connaître  la  proportion  d’eau  de  mer  et  d’eau 
de  rivière  qui  existe  dans  chacune  des  eaux  analysées.  Par  eau 
de  rivière  j’entends  ici  l’eau  pure  ; bien  que  cela  ne  soit  pas  tout 
à fait  exact,  il  n’en  résulte  aucune  erreur  sensible  dans  les 
nombres  donnés.  Ces  nombres  ont  été  déduits  de  la  moyenne  de 
tous  les  résultats  obtenus  pour  chaque  espèce  d’eau. 


F.  SEELHEIM.  SUR  LA  SALURE  DES  EAUX  DE  LA  ZELANDE.  437 


B. 

100  parties  d’eau  de  l’Escaut  occidental  contiennent  : 


Eau  do  mer.  Eau  de  rivière. 

Elessingue  e.  h lOO  0 

//  e.  b 91,64  5,36 

Braakmau  e.  h 89,75  10,25 

//  e.  b 89,21  10,76 

Neuzen  e.  b 85,56  11,11 

Hansweert  e.  h 77,91  22,06 

//  e.  b 71,62  25,38 

de  Paal  e.  h 69,71  30,29 

//  e.  b 65,08  31,92 

Bath  e.  h 68,95  31,05 

//  e.  b 60,01  39,99 

Kieldrechtscbe  gat  e.  h 70,51  29,19 

//  //  e.  b 65,03  31,97 

den  Doel  e.  h 56,95  13,05 

//  e.  b 18,29  81,71 


La  proportion  des  matières  dissoutes,  telle  qu’elle  est  donnée 
dans  le  tableau  A,  montre  que  devant  Elessingue,  à marée 
haute,  on  rencontre  de  l’eau  de  mer  pure,  sans  mélange  appré- 
ciable d’eau  de  rivière  ; à marée  basse , la  proportion  des  matières 
dissoutes  est  plus  faible,  ce  qui  doit  être  attribué  au  mélange 
avec  une  quantité  notable  d’eau  de  rivière. 

Dans  le  Braakman , la  teneur  en  sels  est  à peu  près  constante , 
que  l’eau  soit  haute  ou  basse , mais  elle  est  sensiblement  moindre 
que  devant  Elessingue.  La  première  de  ces  circonstances  s’explique 
par  la  situation  latérale  de  cette  anse,  qui  fait  que  les  variations 
de  composition  de  l’eau  n’y  suivent  pas  les  mouvements  de  la 
marée,  que  l’eau  y est  à peu  près  stagnante  et  ne  se  renouvelle 
que  très  lentement.  Quant  à la  moindre  proportion  des  éléments 
dissous,  elle  provient  de  la  présence,  à cette  hauteur,  d’une 
plus  forte  proportion  d’eau  de  rivière. 

Près  de  Neuzen,  la  quantité  de  toutes  les  matières  dissoutes 
est  au-dessous  de  ce  qu’elle  est  dans  le  Braakman,  et  l’eau  y 
est  par  conséquent  mêlée  de  plus  d’eau  de  rivière;  la  position 
de  ce  point,  situé  plus  en  amont  que  le  précédent,  rend  par- 
faitement compte  de  ce  fait. 


438  F.  SEELHEIM.  SUR  LA  SALURE  DES  EAUX  DE  LA  ZELANDE. 

Devant  Hansweert,  le  degré  de  salure  est  de  nouveau  plus 
faible  que  devant  Neuzen,  et,  en  outre,  il  est  notablement 
moindre  lorsque  Teau  est  soulevée  par  le  flot  qne  lorsqu’elle  est 
déprimée  par  le  jusant.  L’explication  est  facile  : l’eau  de  rivière 
entre  ici  dans  le  mélange  pour  une  plus  grande  part , et  cette  in- 
fluence se  fait  sentir  plus  fortement  à marée  basse  qu’à  marée  haute. 

Devant  De  Paal  et  devant  Bath,  la  différence  de  richesse 
saline  est  peu  considérable  au  moment  de  l’eau  haute:  lors  du 
reflux , au  contraire , la  teneur  en  sel  est  notablement  plus  grande 
à De  Paal  qu’à  Bath,  ce  qui  tient  à ce  que,  devant  la  première 
de  ces  deux  localités,  l’eau,  à marée  descendante,  s’écoule  plus 
difficilement  que  devant  la  seconde.  En  l’un  et  l’autre  point  la 
salure  est  d’ailleurs,  par  suite  du  mélange  croissant  d’eau  de 
rivière,  notablement  moindre  qu’à  Hansvreert. 

Dans  le  Kieldretsche  gat,  la  proportion  de  sel  en  eau  basse 
est  égale  à celle  qu’on  trouve  devant  De  Paal  en  eau  basse; 

au  moment  de  l’eau  haute,  cette  proportion  est  même  encore  un 
peu  plus  grande  dans  la  première  localité  que  dans  la  seconde, 
bien  que  le  Kieldretsche  gat  soit  situé  plus  haut  sur  le  cours 
du  fleuve.  Mais  le  Kieldretsche  gat  formant  une  anse,  l’eau  ne 
peut  y être  remplacée  que  difficilement  ; l’eau  de  mer  s’y  maintient 
donc  pendant  quelque  temps,  et  même  encore  plus  longtemps 
que  devant  De  Paal,  ce  qui  explique  suffisamment  la  richesse 
plus  grande  en  éléments  salins. 

Devant  Den  Doel,  la  teneur  en  sel  diffère  considérablement 
de  l’eau  haute  à l’eau  basse;  au  moment  du  flux,  l’élément 

marin  a encore  la  prépondérance  dans  le  mélange  liquide;-  au 
moment  du  reflux,  l’eau  de  rivière  y domine  tout  à fait. 

En  considérant  l’ensemble  des  résultats  obtenus,  on  peut  se 
faire  une  idée  de  la  manière  dont  la  composition  de  l’eau  varie 
dans  l’Escaut  occidental  depuis  Flessingue  jusqu’à  Doel;  on 
reconnaît  que  si,  du  premier  de  ces  points  au  second,  le  rapport 
entre  la  quantité  d’eau  de  mer  et  la  quantité  d’eau  de  rivière 

diminue  d’une  façon  à peu  près  continue,  la  diminution  n’est 

pourtant  pas  entièrement  proportionnelle  à la  distance  de  l’em- 


F.  SEELIIEIM.  SUR  LA  SALURE  DES  EAUX  DE  LA  ZELANDE.  439 

bouchure,  mais  est  influencée  par  la  forme  des  rives,  qui  agit 
sur  la  montée  ou  la  descente  des  marées. 

Pour  la  facilité  des  comparaisons,  les  résultats  du  tableau  B 
ont  été  marqués  sur  la  carte  (PL  VI)  qui  accompagne  ce  travail. 

C.  Escaut  oriental. 

100  parties  d'eau  contiennent: 


Matières 

solides. 

Acide 

sulfurique 

Chaux 

Magnésie. 

Chlore. 

Poids 

spécifique 

Devant  Veere 

e.  h. 

3,3931 

0,2058 

0,0605 

0,2025 

1,7415 

] ,0249 

n // 

e.  b. 

3,3931 

0,2059 

0,0663 

0,2046 

1,7435 

1,0250 

" Kortgeene 

e.  h. 

3,3840 

0,2078 

0,0653 

0,2077 

1,7434 

1,0251 

//  // 

e.  b. 

3,3901 

0,2091 

0,0605 

0,2077 

1,7437 

1,0249 

//  Zierikzee 

e.  h. 

3,3830 

0,2072 

0,0585 

0,2074  , 

1,7437 

1,0249 

//  If 

Dans  le  canal  de 

e.  b. 

3,3826 

0,2086 

0,0608  ' 

0,2061 

1,7229 

1,0249 

Wemeldinge 

e.  h. 

3,3939 

0,2096 

0,0650 

0,2061 

1,7231 

1,0250 

//  //  // 

e.  b. 

3,2957 

0,2070 

0,0567 

0,2005 

1,7025 

1,0246 

Devant  Stavenisse 

e.  h. 

3,3841 

0,2073 

0,0544 

0,2050 

1,7228 

1,0248 

//  // 

//  Yerzeke,banc 

e.  b. 

3,2456 

0,1965 

0,0604 

0,1940 

1,6640 

1,0237 

d’huîtres 

e.  h. 

3,3372 

0,2026 

0,0557 

0,2039 

1.7123 

1,0245 

//  //  // 

e.  b. 

3,2968 

0,1976 

0,0547 

0,2033 

1,7022 

1,0242 

U Tholen 

e.  h. 

3,3177 

0,2036 

0,0644 

0,2022 

1,7231 

1,0244 

//  // 

e.  b. 

3,2998 

0,2026 

0,0594 

0,2005 

1,7126 

1,0243 

//  Bergen  op  Zoom  e.  h. 

3,3100 

0,2025 

0,0568 

0,1990 

1,6853 

1,0238 

n //  //  // 

Dans  la  Mosselbreek, 

e.  b. 

3,2115 

0,1928 

0’,0540 

0,1931 

1,5973 

1,0229 

à St  Phüipsland 

e.  h. 

3,0143 

0,1820 

0,0530 

0,1784 

1,4916 

1,0218 

//  //  J // 

e.  b. 

3,1576 

0,2012 

0,0544 

0,1947 

1,6425 

1,0237 

Devant  Bruinisse 

e.  11. 

2,9876 

0,1809 

0,0590 

0,1809 

1,5230 

1,0219 

//  // 

e.  b. 

2,9792 

0,1856 

0,0539 

0,1840 

1,5448 

1,0221 

Dans  le  tableau  D est  donné  le  rapport  entre  Teau  de  mer 
et  Teau  de  rivière,  calculé  d'après  la  proportion  moyenne  des 
matières  solides,  de  l’acide  sulfurique , de  la  magnésie  et  du  chlore. 
Eau  de  rivière  signifie  ici  eau  pure. 


440  F.  SEELHEIM.  SUR  LA  SALURE  DES  EAUX  DE  LA  ZELANDE. 


D. 

100  parties  d’ean  de  TEscaut  oriental  contiennent: 


Eau  de  mer-  Eau  de  rivière. 

Devant  Veere  e.  h 100  0 

//  //  e.  b 100  0 

//  Kortgeene  e.  h 100  0 

//  //  e.  b 100  0 

//  Zierikzee  e.  h 100  0 

n //  e.  b 100  0 

Dans  le  canal  deWemel- 

dinge  e.  b 100  0 

" " !'  n n e.  b 98,09  1,91 

Devant  Stavenisse  e.  h 100  0 

" » e.  b 95,17  4,88 

//  Yerzeke,  banc 

^ d’huîtres  e.  h 98,48  1,52 

n H //  e.  b 97,25  2,75 

//  Tholen  e.  h 98,40  1,60 

" >'  e.  b 97,79  2,21 

//  Bergen  op  Zoom  e.  h 97,28  2,72 

" " " //  e.  b 98,40  6,60 

Dans  la  Mosselbreek  de 

St.  Philipsland  e.  h 87,88  12,67 

" " " n e.  b 94,86  5,14 

Devant  Bruinisse  e.  h 87,76  12,24 

" » e.  b 88,60  11,40 


Les  résultats  communiqués  établissent  que  devant  Veere, 
Kortgeene  et  Zierikzee  la  proportion  des  matières  dissoutes  est 
presque  exactement  la  même,  aussi  bien  à marée  haute  qu’à 
marée  basse,  et  que  Teau  doit  y être  regardée  comme  de  Teau 
de  mer  pure. 

Devant  Stavenisse,  lorsque  Teau  est  haute,  elle  ne  renferme 
pas  non  plus  une  quantité  appréciable  d’eau  de  rivière,  tandis 
que  pendant  le  reflux  le  mélange  d’une  petite  quantité  d’eau 
douce  se  fait  sentir.  Le  fait  s’explique  par  la  circonstance  qu’un 
peu  d’eau  du  Krammer  descend  jusqu’à  Stavenisse  à l’heure  du 
reflux,  pour  être  de  nouveau  refoulée  quand  la  marée  monte. 

Dans  le  canal  de  Wemeldinge,  en  eau  haute,  il  n’y  pas  de 


F.  SEELHEIM.  SUR  LA  SALURE  DES  EAUX  DE  LA  ZELANDE.  441 


trace  sensible  d’eau  de  rivière  ; en  eau  basse  on  constate  le  mé- 
lange d’une  très  petite  quantité  d’eau  fluviale. 

Près  de  Yerzeke,  l’analyse  accuse  la  présence  constante  d’une 
très  faible  quantité  d’eau  de  rivière,  quantité  un  peu  plus  grande 
à marée  basse  qu’à  marée  haute. 

Près  de  Tholen,  la  composition  de  l’eau  est  à peu  près  la 
même  qu’à  Yerzeke. 

A Bergen  op  Zoom , la  quantité  d’eau  de  rivière , en  eau  basse , 
est  notablement  plus  grande  que  devant  Tholen  et  Yerzeke.  Cette 
eau  de  rivière  ne  peut  donc  pas  venir  d’une  de  ces  dernières 
localités,  mais  doit,  selon  toute  probabilité,  être  attribuée  à des 
canaux  qui  débouchent  ici , du  moins  en  tant  qu’elle  ne  tire  pas 
son  origine,  comme  dans  les  autres  localités , de  l’eau  de  la  Meuse 
déviée  jusqu’en  ces  parages.  Même  ici  toutefois,  la  quantité  en 
question  n’a  pas  encore  grande  importance. 

Au  premier  abord,  les  résultats  relatifs  à l’eau  de  la  Mossel- 
kreek  de  St-Philipsland  paraissent  très  surprenants,  vu  qu’ici  le 
maximum  de  richesse  saline  observée  ne  coïncide  pas  avec  le  flux , 
mais  avec  le  reflux,  de  sorte  que,  à l’inverse  de  ce  qui  a lieu 
ordinairement,  l’eau  tient  en  mélange  une  plus  forte  proportion 
d’eau  de  rivière  lorsqu’elle  est  haute  que  lorsqu’elle  est  basse. 
Peut-être  le  fait  doit-il  s’expliquer  en  admettant  que,  à marée 
descendante , de  l’eau  de  l’Escaut  oriental , passant  devant  Tholen , 
par  l’Eendragt,  s’écoule  par  la  Mosselkreek;  taudis  qu’à  marée 
montante,  de  l’eau  du  Krammer  est  refoulée  dans  cette  crique; 
celle-ci,  lors  du  reflux,  serait  donc  remplie  principalement  par 
l’eau  plus  salée  de  l’Escaut  oriental , et  lors  du  flux , au  contraire , 
principalement  par  l’eau  de  la  Meuse,  moins  riche  en  matières 
salines.  Cette  explication  est  confirmée  par  le  fait  que  la  propor- 
tion de  sel,  dans  la  Mosselkreek,  est,  en  eau  basse,  à peu  près  la 
même  que  celle  de  l’Escaut  oriental,  et,  en  eau  haute,  sensible- 
ment égale  à celle  qu’on  trouve  dans  le  Krammer,  à Bruinisse. 

Près  de  Bruinisse,  l’eau  est  mélangée  d’une  beaucoup  plus  grande 
quantité  d’eau  de  rivière  que  dans  l’Escaut  oriental,  et  sa  composition 
n’est  presque  pas  affectée  par  les  changements  de  hauteur  de  la  marée. 


442  F.  SEELHEIM.  SUR  LA.  SALURE  DES  EAUX  DE  LA  ZELANDE. 

De  Tensemble  des  résultats  précédents  on  peut  tirer  la  conclu- 
sion que  TEscaut  oriental  ne  doit  plus,  aujourd’hui,  être  consi- 
déré comme  une  bouche  fluviale,  attendu  qu’il  ne  livre  plus  pas- 
sage à de  l’eau  de  rivière.  Il  faut  y voir  plutôt  un  bras  de  mer 
qui  s’insinue  entre  les  terres  ; à sa  partie  postérieure , il  y pénètre 
bien  un  peu  d’eau  douce,  mais  celle-ci  reflue,  mêlée  d’une  forte 
proportion  d’eau  de  mer,  par  les  mêmes  voies  qui  l’ont  amenée. 

Les  résultats  du  tableau  D ont  été  inscrits  sur  la  carte,  pour 
qu’on  puisse  en  saisir  l’ensemble  d’un  seul  coup  d’œil. 

E.  Krammmer  et  Haringvliet, 


100  parties  d’eau  contiennent: 


1 

Matières  ! 
solides. 

1 

Acide 

sulfurique 

Chaux. 

i 

Magnésie. 

Chlore. 

Poids 

spécifique 

Devant  Herkingen  e.  h. 

1 

2,9170 

0,1799 

0,0528 

0,1833 

1,5098 

1,0216 

// 

n e . b . 

2,814=9 

0,1811 

0,0532 

0,1737 

1,4641 

1,0210 

// 

Onde  Tonge  e . li . 

1,54=08 

0,1018 

0,0418 

0,0951 

0,8033 

1,0112 

// 

n //  e . b . 

1,2511 

0,0784 

0,0300 

0,0827 

0,6560 

1,0094 

// 

Ooltgensplaat  e . h , 

1,8070 

0,1066 

0,0354 

0,1188 

0,9359 

1,0133 

// 

//  e . b . 

1,4=34=2 

0,0901 

i 0,0280 

0,0933 

0,7258 

1,0102 

// 

Hellevoetsluis  e . h . 

1,2747 

0,0888 

1 0,0310 

0,0859 

0,6762 

1,0096 

// 

//  e . b . 

1,0523 

0,0694 

i 0,0203 

0,0793 

0,5491 

1,0074 

// 

Middelharnis  e,  h. 

1,2063 

0,0805 

0,0252 

0,0826 

0,6228 

1,0089 

// 

//  e . b . 

1,1571 

0,0765 

0,0270 

0,0818 

0,6016 

1,0086 

U 

Stad  aan  ’t  Ha- 
ringvliet e.  h. 

1,0085 

0,0648 

i 

0,0202 

0,0705 

0,5177 

1,0074 

// 

a n e . b , 

1,0026 

0,0688 

! 0,0202 

0,0681 

0,5175 

1,0074 

Pour  déduire  de  ces  nombres  le  rapport  entre  l’eau  de  mer  et 
l’eau  de  rivière,  tel  qu’il  est  donné  dans  le  tableau  suivant  F, 
j’ai  dû  procéder  un  peu  autrement  que  dans  les  cas  antérieurs, 
et  cela  pour  la  raison  que  voici.  Dans  la  plupart  des  localités 
indiquées,  l’eau  de  rivière  domine  fortement;  surtout  la  chaux, 
principal  élément  salin  de  l’eau  de  rivière,  se  trouve,  compara- 
tivement aux  autres  éléments,  en  proportion  plus  considérable, 
ce  qui  se  fait  d’autant  plus  sentir  que  l’eau  de  mer  contient 
relativement  peu  de  chaux,  l’eau  de  rivière,  au  contraire , beau- 


F.  SEELIIEI3I.  SUR  LA  SALURE  DES  EAUX  DE  LA  ZÉLANDE.  443 

coup.  La  proportion  de  magnésie  et  d’acide  sulfurique  est  aussi 
légèrement  augmentée  par  les  éléments  appartenant  à Teau  de 
rivière.  En  général , ce  sont  les  éléments  représentés  en  petite 
quantité  dans  Teau  de  mer  qui  ont  éprouvé  une  augmentation, 
tandis  que  la  proportion  de  chlore  et  la  somme  des  matières  so- 
lides ne  se  montrent  pas  sensiblement  influencées  par  des  éléments 
faisant  partie  de  Teau  de  rivière.  Au  lieu  de  calculer  la  propor- 
tion d’eau  de  mer  d’après  l’ensemble  des  éléments  particuliers, 
on  approchera  donc  plus  de  la  vérité  en  prenant  pour  base  du 
calcul  seulement  la  somme  des  matières  solides  et  la  proportion 
du  chlore  ; en  conséquence , c’est  cette  dernière  méthode  qui  a été 
suivie  pour  obtenir  les  résultats  du  tableau  F. 

F. 

100  parties  d’eau  du  Krammer  et  du  Haringvliet  contiennent: 


Eau  de  mer.  Eau  de  rivière 

Devant  Herkingen  e.  h 87,26  12,74 

n » e.  b 84,41  15,59 

//  Onde  Tonge  e.  h 46,26  53,74 

//  //  //  e.b 37,67  62,33 

//  Ooltgensplaat  e.  b 54,07  45,93 

//  //  e.  b 42,42  57,58 

//  Hellevoetsluis  e.  h 38,61  6], 39 

^ //  e.  b 31,61  68,39 

//  Middelharnis  e.  h 36,04  63,96 

//  n e.  b 34,69  65,31 

//  Stad  aan ’t  Haringvliet  e . h 30,09  69,91 

//  //  //  e.  b 29.91  70,09 


On  voit,  par  ces  résultats,  qu’à  Herkingen  l’eau  de  îner  n’est 
que  faiblement  diluée  par  de  l’eau  de  rivière.  Même  à marée 
basse,  la  quantité  d’eau  de  rivière  en  mélange  n’est  pas  beaucoup 
augmentée;  il  faut  remarquer,  toutefois,  que  le  28  septembre, 
au  moment  où  l’eau  fut  puisée , le  reflux  était  très  peu  prononcé. 

En  remontant  le  Krammer,  on  trouve  qu’à  Oude  Tonge  l’eau 
de  rivière  est  déjà  dominante,  et  qu’elle  l’est  beaucoup  plus  lors 
du  jusant  que  lors  du  flot. 

Près  de  Ooltgensplaat,  bien  que  ce  point  soit  situé  plus  en 
amont  sur  le  Volkerak,  la  proportion  de  sel  est,  contre  toute 


444  F.  SEELHEIM.  SUR  LA  SALURE  DES  EAUX  DE  LA  ZELANDE. 

attente,  plus  élevée  qu’à  Oude  Tonge;  il  y a donc  ici,  de  nou- 
veau, plus  d’eau  de  mer  dans  le  mélange.  Cet  accroissement 
de  salure  pourrait  s’expliquer  en  admettant  que  de  l’eau  de  mer 
de  l’Escaut  oriental  pénètre  dans  le  Krammer  et  s’y  fait  sentir 
jusqu’à  Ooltgensplaat  ; mais  cette  hypothèse  ne  rend  pas  compte 
du  fait  que  la  proportion  de  sel  est  plus  grande  à Ooltgensplaat 
même  à marée  basse.  Il  semble  donc  plus  probable  que  ce  n’est 
pas  un  afflux  d’eau  de  mer  à Ooltgensplaat , mais  un  afflux  d’eau 
douce  à Oude  Tonge,  qui  occasionne  l’infériorité  de  salure  près 
de  cette  dernière  localité,  et  cet  apport  d’eau  douce  ne  peut 
provenir  que  des  écluses  qui  déchargent  près  de  Oude  Tonge 
l’eau  des  polders.  Mais  cette  évacuation  n’ayant  lieu  qu’à  marée 
basse,  elle  ne  nous  fait  pas  comprendre  pourquoi , même  à marée 
haute,  le  degré  de  salure  est  moins  élevé  à Oude  Tonge. 

Si  l’on  admet  à la  fois  les  deux  hypothèses,  celle  d’une  dé- 
charge d’eau  douce,  comme  cause  de  la  salure  plus  faible  devant 
Oude  Tonge  à marée  basse,  et  celle  d’un  afflux  d’eau  de  mer 
venant  de  l’Escaut  oriental,  comme  cause  de  la  salure  plus  forte 
devant  Ooltgensplaat  à marée  haute , la  différence  de  salure 
observée  se  trouve  expliquée  complètement. 

Abstraction  faite  des  modifications , d’ailleurs  peu  considérables, 
qui  résultent  des  deux  causes  mentionnées,  on  peut  dire  que 
dans  le  Krammer  l’eau  de  mer  prédomine  fortement  vers  la  partie 
inférieure,  tandis  que  de  Oude  Tonge  à Ooltgensplaat  l’eau  de 
rivière  a déjà  le  dessus. 

Dans  le  Haringvliet  l’eau  contient , en  moyenne  , environ  un 
tiers  d’eau  de  mer  et  deux  tiers  d’eau  de  rivière  ; en  aval  un 
peu  plus  de  la  première , en  amont  un  peu  plus  de  la  seconde. 

En  résumé,  ces  recherches  nous  apprennent  donc  dans  quelle 
mesure  l’eau  de  rivière,  provenant  en  partie  de  l’Escaut  et  en 
partie  de  la  Meuse,  se  mêle,  par  l’effet  des  marées,  près  des 
localités  indiquées,  avec  de  l’eau  de  mer;  de  quelle  source  dérive 
l’eau  de  rivière  qui  entre  dans  le  mélange , et  quelles  sont  les 
directions  suivies  par  le  courant  dans  les  estuaires  de  la  Zélande , 
en  résultat  du  conflit  des  marées  avec  l’eau  charriée  par  les  fleuves. 

Middelboürg  , juillet  1874. 


SUR 


LES  FORMULES  DE  STRUCTURE 

DANS  L’ESPACE, 

PAB, 

J.  H.  VAN  ’T  HOFF. 


Qu’il  me  soit  permis  d’exposer  ici  sommairement,  à titre  de 
communication  préliminaire,  quelques  vues  qui  me  paraissent 
susceptibles  d’application  ; appeler  sur  elles  la  discussion , et  profiter 
de  celle-ci  pour  donner  à mes  idées  plus  de  précision  et  de  déve- 
loppement, tel  est  le  but  que  je  me  propose. 

Comme  le  point  de  départ  des  considérations  suivantes  s’est 
trouvé  dans  la  chimie  des  combinaisons  du  carbone,  je  ne  m’occu- 
perai , pour  le  -moment , que  de  ce  qui  a rapport  à ces  dernières. 

On  reconnaît  de  plus  en  plus  que  les  formules  de  constitution 
généralement  adoptées  sont  incapables  d’expliquer  certains  cas 
d’isomérie;  or,  cela  tient  peut-être  à ce  qu’on  ne  s’est  pas  pro- 
noncé assez  nettement  au  sujet  de  la  situation  réelle  des  atomes. 

Si  l’on  admet  que  ceux-ci  sont  couchés  dans  un  plan , — comme, 
par  ex,,  pour  l’alcool  isobutylique  (PI.  VII,  fig.  I),  où  les  quatre 
affinités  de  chaque  atome  de  carbone  sont  représentées  par  quatre 
directions  situées  dans  le  plan  et  perpendiculaires  entre  elles , — 
et  qu’on  applique  cette  hypothèse  aux  dérivés  du  méthane  (pour 
prendre  le  cas  le  plus  simple),  obtenus  en  remplaçant  succès- 


446 


J.  H.  VAN  T.  HOFF.  SUR  LES  FORMULES 


sivement  les  différents  atomes  d’hydrogène  par  des  groupes  uni- 
valents Rj , Ro  etc.,  on  arrive  au  nombre  suivant  d’isomères: 

un  pour  CHjRj  et  pour  CH(Rj)3, 

deux  pour  (fig.  II  et  III),  pour  CE^{R,R^)  et 

pour  CH(Rj)2R2  , 

trois  pour  CH(RjR2Rg)  et  pour  C(RjR2R3R4)  fig.  IV,  V et  VI); 

nombre  évidemment  de  beaucoup  supérieur  à celui  qu’on  con- 
naît jusqu’ici. 

La  théorie  est,  au  contraire,  mise  d’accord  avec  les  faits  par 
l’adoption  d’une  hypothèse , consistant  à se  figurer  les  affinités 
de  l’atome  de  carbone  dirigées  vers  les  sommets  d’un  tétraèdre, 
dont  cet  atome  lui-même  occuperait  le  centre.  Le  nombre  d’iso- 
mères se  réduit  alors  simplement  à: 

Un  pour  CH3R,  , CH2(Ri)3,  CE^{R^R^),  CH(RJ3,  et 
CH(R,)2  (1^2)7  Daais  deux  pour  CH  (R j Rg  Rg)  ou,  d’une  manière 
plus  générale,  pour  C(RiR2R3R4).  En  effet,  si  l’on  se  suppose 
placé  dans  la  ligne  Rj  R3  (fig.  VII  et  VIII),  la  tête  en  R^ , 
regardant  vers  la  ligne  R2R4,  R^  peut  se  trouver  à droite  (fig. 
VII)  ou  à gauche  (fig.  VIII)  de  l’observateur  ; en  d’autres  termes  : 
Dans  le  cas  oit  les  quatre  affh7iités  d'un  atome  de  carbone  sont 
saturées  par  quatre  groupes  univaleiits  différents  entre  eux , on  peut 
obtenir  deux  y et  seulement  deux,  tétraèdres  différents , lesquels  sont 
l'image  spéculaire  l'un  de  l'autre  et  ne  peuvent  jamais  se  recouvrir  par 
la  pensée;  c’est-à-dire,  qu'on  a affaire  â deux  formules  isomères  de 
structure  dans  l'espace. 

D’après  cette  hypothèse,  les  combinaisons  C(RjR2R3R4)  se 
trouvent  dans  une  autre  condition  que  C(Rj)2E2R3»  ^(RJgRg 
ou  C(Rj)4,  différence  qui  n’est  pas  exprimée  par  le  mode  ordi- 
naire de  représentation  ; selon  celui-ci , en  effet , il  y aurait  entre 
C(RjR2R3R4)  et  C(Rj)2E2R3  une  différence  tout  aussi  grande 
qu’entre  C(R,)gR2R3  et  C (RJ3R2  ou  entre  C(Rj)3R2  et  C(Rj)4. 

Soumettant  ce  premier  résultat  de  l’hypothèse  au  contrôle  des 
faits,  je  crois  être  effectivement  parvenu  à établir  que  des  com- 
binaisons qui  possèdent  un  pareil  atome  de  carbone  (savoir,  un 


DE  STRUCTURE  DANS  l’eSPACE. 


447 


atome  uni  à quatre  groupes  univalents  différents  entre  eux,  ce 
que  nous  appellerons  dorénavant  un  atome  asymétrique)  présentent 
des  anomalies  sous  le  rapport  de  Tisomérie  et  d’autres  caractères, 
anomalies  qui  ne  sont  pas  impliquées  dans  les  formules  de  con- 
stitution admises  jusqu’ici. 

Première  partie.  I.  Relation  entre  le  carbone  asymétrique  et 
le  pouvoir  actif  optique. 

a.  Toute  combinaison  carbonée  qui  y en  solution  y imprime  une 
déviation  au  plan  de  polarisation , possède  un  atome  de  carbone  asy- 
métrique. 

Pour  se  convaincre  de  la  vérité  de  cette  remarque , il  suflSt  de 
considérer  la  petite  liste  suivante  de  composés  optiquement  actifs , 
dans  la  formule  desquels  les  atomes  de  carbone  asymétriques  sont 
indiqués  par  C: 


Acide  éthyle-lactique:  CH 3.  C.  H.  OH.  COOH. 


Acide  aspartique  : 

Asparagine  : 

Acide  malique: 

Acide  glutarique: 

Acide  tartrique: 

Dextrose , Lévulose , 
etc.: 

Mannite,  Quercite,  Pinite:  (C4  Hg  04)C.  H.  OH.  CH 2.  OH. 


COOH.  C.  H.  NH2  (CH2.  COOH). 

COOH.  C.  H.  NH2.  (CH2.  CONH). 

COOH.  C.  OH.  H.  (CH2.  COOH). 

CH^.  OH.  C.  H.  COOH.  (CH^.  COOH). 
COOH.  C.  H.  OH.  C.  H.  OH.  COOH. 
Galactose,  Maltose,  Sorbine,  Eucalyne, 
CH2.OH.  C.  H.  OH.  (C4  H7  O4). 


Le  sucre  de  canne , le  sucre  de  lait , la  mélisitose , la  mélitose , 
la  parasaccharose  et  la  tréhalose;  la  fécule,  l’inuline,  le  gly- 
cogène, la  dextrine  et  l'arabine  contiennent  aussi,  comme  éthers 
composés  des  combinaisons  précédentes,  les  atomes  de  carbone 
asymétriques  -qui  existent  dans  celles-ci. 

Camphre,  d’après  M.  Kekulé:  (fig.  XII). 

Bornéol , d’après  le  même:  (fig.  XIII). 

Acide  camphorique,  d’après  le  même:  CO^.  H.  C.  H.  (CgH,  4O). 

Essence  de  térébenthine , probablement  constituée  conformément 
à la  fig.  XIV , et  Menthol , représenté  peut-être  par  la  fig.  XV. 

Quant  aux  alcaloïdes  actifs , aux  matières  albuminoïdes , etc. , leur 


448 


J.  H.  VAN  ’t  HOFF.  sur  LES  FORMULES 


constitution  est  encore  trop  peu  connue  pour  qu’on  en  puisse  rien 
conclure  touchant  un  rapport  entre  la  structure  et  le  pouvoir  actif* 

La  seule  exception  positive  que  j’aie  pu  trouver  à la  règle 
ci-dessus,  est  fournie  par  l’alcool  propylique  actif  de  Chancel; 
mais,  d’après  une  communication  privée  de  M.  Henninger,  le 
pouvoir  rotatoire  relativement  faible  de  cette  substance  doit  être 
attribué  à des  impuretés. 

h.  Les  dérivés  de  combinaisons  optiquement  actives  perdent  le 
pouvoir  rotatoire  lorsque  V asymétrie  de  tous  les  atomes  de  carbone 
disparaît;  dans  le  cas  contraire,  ils  ne  le  perdent  souvent  pas. 

Un  petit  nombre  d’exemples  suffira  ici: 

Acides  malonique,  fumarique  et  maléique  inactifs,  dérivés  de 
l’acide  malique  actif;  acides  succinique  et  tartronique  inactifs., 
dérivés  de  l’acide  tartrique  actif  ; cymol  inactif,  dérivé  du  camphre 
actif,  etc. 

Comme  exemples  du  cas  opposé,  on  peut  citer: 

Acide  malique  actif,  dérivé  de  l’acide  tartrique  actif; 

Acide  tartrique  actif,  dérivé  de  la  lactose  active; 

Glycoses  actives,  dérivées  de  glycosides  actives; 

Nitromannite  active,  dérivée  de  la  mannite  active; 

Acide  camphorique  et  borneol  actifs,  dérivés  du  camphre  actif  ; 

Sels  et  éthers  actifs,  dérivés  d’acides  actifs,  etc. 

c.  Si,  inversement,  on  fait  une  liste  de  combinaisons  qui  renfer- 
ment un  atome  de  carbone  asymétrique , on  reconnaît  immédiatement 
que  dans  un  assez  qrand  nombre  de  cas  la  réciproque  de  {à)  ne 
se  vérifie  pas,  é est-à-dirc , que  les  combinaisons  où  se  trouve  un 
pareil  atome  ne  paraissent  pas  toutes  agir  sur  la  lumière  polarisée. 
Ce  fait  peut  être  attribué  à l’une  des  trois  causes  suivantes: 

1.  A ce  que  ces  combinaisons  consistent  en  un  mélange  inactif 
de  deux  isomères  à pouvoir  optique  égal  mais  opposé,  lesquels 
isomères,  par  suite  de  la  grande  analogie  de  leurs  autres  pro- 
priétés, sont  difficiles  à séparer,  et  n’ont  pas  été  isolés  jusqu’ici. 

2.  A ce  que  l’étude  du  pouvoir  rotatoire  est  souvent  demeurée 
imparfaite,  soit  à cause  de  la  faible  solubilité  de  beaucoup  de 


DE  STRUCTURE  DANS  l’eSPACE. 


449 


combinaisons,  soit  à cause  de  la  petitesse  du  pouvoir  rotatoire 
spécifique,  comme  cela  est  le  cas,  par  exemple,  pour  la  mannite. 

3.  A ce  que  la  condition  „carbone  asymétrique’'  ne  suffit  pas 
pour  l'activité  optique,  celle-ci  ne  dépendant  pas  seulement  de 
la  diversité  mutuelle  des  groupes  qui  adhèrent  à un  atome  de  \ 
carbone,  mais  aussi  de  leur  nature  propre. 

Quoi  qu’il  en  soit  de  cette  explication , les  faits  remarqués  n'en 
établissent  pas  moins,  entre  la  constitution  et  le  pouvoir  actif, 
un  lien  de  probabilité,  qui , à défaut  d'arguments  plus  forts , peut 
servir  dans  les  circonstances  suivantes: 

1.  Une  combinaison  qui  dévie  la  lumière  polarisée  contient 
probablement  un  atome  de  carbone  asymétrique;  il  en  résulte, 
dans  le  cas  où  la  constitution  reste  provisoirement  non  déterminée, 
un  motif  pour  accorder  la  préférence  à une  certaine  formule,  ce 
qui  permet,  entre  autres,  de  faire  un  choix  dans  les  tentatives 
de  synthèse. 

Exemple.  L'alcool  amyliqùe  actif,  avec  un  atome  de  carbone 
asymétrique,  ne  peut  avoir  pour  formule  que 

CH, .OH, 

idée  qui  a été  émise  également,  quoique  pour  une  raison  toute 
différente,  par  M.  Eiienmeyer. 

2.  Une  combinaison  qui  jusqu'à  présent  ' n'a  pas  d'isomère  phy- 
sique agissant  sur  la  lumière  polarisée  peut-être  regardée,  avec 
un  certain  degré  de  probabilité , comme  ne  renfermant  pas  d’atome 
de  carbone  asymétrique.  Cette  remarque  peutêtre  utilisée  de  la 
même  façon  que  la  précédente  ; c’est  ainsi  que  l'acide  citrique , 
en  tenant  compte  de  la  formation  de  l’acide  aconitique  et  de 
l’acide  tricarballylique , ne  peut  être  constitué  que  suivant  l'une 
de  ces  deux  formules  : 

Cl^H.OH.COOH  CH^.COOH 

CH.  COOH.  ou  C.  OH.  COOH 
CH^.COOH.  CH^.COOH 

L’absence  du  pouvoir  optique  conduit  à préférer  la  seconde  de 
ces  formules,  attendu  que  la  première  contient  un  atome  de  carbone 

Archives  Néerlandaises,  T.  IX.  29 


450 


J.  H.  VAN  HOFF.  sur  LES  F0R3IULES 


asymétrique;  j’espère  d’après  cela  obtenir  l’acide  en  question  par  la 
méthode  de  MM.  Frankland  et  Duppa,  au  moyen  des  éthers  oxa- 
lique et  iodo-acétique  agissant  en  présence  du  zinc. 

3.  Enfin  on  peut  assigner , avec  quelque  chance  de  succès , les 
limites  du  champ  des  combinaisons  actives,  c’est-à-dire  indiquer 
les  combinaisons  les  plus  simples  douées  du  pouvoir  optique. 

L’alcool  monoatomique  actif  le  plus  simple  sera  par  exemple: 

CH3.CH.  0H.CH,.CH3. 

L’acide  monoatomique  actif  le  plus  simple: 
CH3.CH.COOH.CH2.CH3. 

L’alcool  diatomique  actif  le  plus  simple: 

CH3.CH.  OH.  CH^.OH. 

L’hydrocarbure  saturé  actif  le  plus  simple: 

CH.C3.H,. 

L’hydrocarbure  aromatique  actif  le  plus  simple: 

etc. 

En  même  temps,  il  est  probable  que  quelques  séries  resteront 
exclues  de  toute  participation  au  pouvoir  rotatoire,  comme,  par 
exemple , 

Les  hydrocarbures  normaux  CH 3 (CH2)nCH3 

Les  alcools  normaux  CH3  (CH^)!! CH^. OH 

Les  acides  normaux  CH 3 (CH^jnCOOH,  etc. 

Une  circonstance  plus  remarquable,  toutefois,  c’est  que,  d’après 
la  remarque  présentée  ci-dessus,  CHBrClI  se  laissera  probable- 
ment scinder  en  deux  isomères  agissant  sur  la  lumière  polarisée. 

IL  Relation  entre  le  carbone  asymétrique  et  le  nombre 
d’isomères. 

Si  le  carbone  asymétrique  ne  rend  peut-être  pas  optiquement 
actives  toutes  les  combinaisons  dans  lesquelles  il  entre,  il  doit 
pourtant,  d’après  l’hypothèse  fondamentale,  donner  lieu  à une 
isomérie,  se  manifestant  de  l’une  ou  de  l’autre  manière  ; par  suite 


DE  STRUCTURE  DANS  l’eSPACE. 


451 


de  cette  isomérie , le  nombre  des  isomères,  tel  qu’il  est  prévu  par 
les  formules  de  structure  actuelles,  sera  doublé  dans  le  cas  de 
l’existence  d’un  seul  atome  de  carbone  asymétrique , et  augmentera 
progressivement  s’il  y a plusieurs  de  ces  atomes. 

Je  pense,  en  effet,  qu’on  peut  signaler  des  combinaisons  pré- 
sentant l’anomalie  apparente  que  M.  Wislifcenus  a désignée  sous 
le  nom  d’isomérie  géométrique , marquant  par  là  l’insuffisance  des 
notions  courantes,  sans  toutefois  formuler  une  hypothèse  mieux 
adaptée  aux  faits. 

Parmi  ces  combinaisons  je  crois  pouvoir  ^ citer  : 

Les  acides  éthylidéno-lactiques , qui  renferment  un  seul  atome 
de  carbone  asymétrique; 

Les  acides  tartriques,  les  acides  dibromo-  et  isodibromosuc- 
cinique , les  acides  citra-,  ita-  et  mésabromopyrotartrique , les  acides 
citra-,  ita-  et  mésamalique , la  mannite  et  ses  isomères , la  dextrose 
et  ses  isomères,  peut-être  aussi  l’essence  de  térébenthine,  les 
sucres,  etc.  avec  leurs  isomères,  — toutes  combinaisons  dans 
lesquelles  plusieurs  atomes  de  carbone  asymétriques  concourent 

à augmenter  le  nombre  des  isomères. 

‘ / * 

Seconde  partie.  Jusqu’à  présent,  nous  n’avons  examiné  l’in- 
fluence de  l’hypothèse  en  question  que  sur  des  combinaisons  où 
(à  part  quelques  corps  aromatiques)  les  atomes  de  carbone  sont 
liés  entre  eux  par  une  seule  affinité;  il  faut  maintenant  consi- 
dérer aussi: 

V Influence  du  nouveau  mode  de  représentation  sur  les  combinaisons 
à atomes  de  carbone  doublement  liés. 

Dans  le  cas  d’une  liaison  double,  l’image  consiste  en  deux 
tétraèdres  qui  se  touchent  par  une  arête  (fig.  IX)  ; A et  B repré- 
sentent les  liaisons  des  deux  atomes  de  carbone,  Rj  , R2 , R 3 
et  R 4 les  groupes  univalents  par  lesquels  sont  saturées  les  autres 
affinités,  restées  libres,  de  ces  atomes  de  carbone. 

Si  Rj,  R2,  R3ctR4  sont  les  mêmes  groupes,  on  ne  peut 
construire  par  la  pensée  qu’une  figure  unique , et  il  en  est  de  même 
lorqu’il  y a seulement  identité  entre  R,  et  R ou  entre  R3,  et  R4  ; 

29* 


452 


J.  H.  VAN  ’t  HOFF.  sur  LES  FORMULES 


mais  si  y à la  fois,  diffère  de  R et  R ^ de  R^,  — ce  qui 
d'ailleurs  n'empêche  pas  que  R^  et  R^,  R^  et  R^  puissent  être 
égaux,  — deux  solides  se  laissent  construire,  représentés  par  les 
figures  IX  et  X,  et  dont  la  différence  tient  à la  situation  relative 
des  groupes  R^  et  R^  par  rapport  à R^  et  R ; la  dissemblance  de 
ces  figures,  dont  le  nombre  se  réduit  à deux,  annonce  un  cas 
d'isomérie,  qui  ré  est  pas  impliqué  dans  le  mode  ordinaire  de  repré- 
sentation. 

En  consultant  les  faits,  je  crois  avoir  rencontré  parmi  les  com- 
binaisons organiques  des  cas  qui  peuvent  être  interprétés  de  cette 
manière  : 

1.  Acides  maléique  et  fumarique,  dont  Tisomérie  n’a  pas  encore 
trouvé  d’explication  plausible  (je  regarde  aussi  comme  inacceptable 
l’hypothèse  d’un  carbone  bivalent,  attendu  que  celui-ci , sans  dou- 
blement de  la  molécule , peut  exister  seulement , pour  des  raisons 
particulières,  chez  l’oxyde  de  carbone  et  les  carbylamines).  Ces 
acides  réalisent,  en  effet,  la  condition  indiquée  ci-dessus:  deux 
atomes  de  carbone,  à liaison  double,  portent  chacun  deux  groupes 
univalents  qui  diffèrent  entre  eux,  H.  et  CO  OH. 

2.  Acides  bromomaléique  et  isobromomaléique  ; l’explication  de 
' cette  isomérie  est  tout  à fait  la  même:  on  n’a  qu’à  remplacer, 

dans  les  acides  fumarique  et  maléique,  un  H par  un  Br. 

3.  Acides  citra-,  ita-  et  mésaconique.  En  adoptant 

CH3.CH.  COOH.CH^.COOH 

pour  l’acide  pyrotartrique , il  ne  reste  pour  les  acides  en  question 
que  les  formules 

CH,  znC.COOH.CH,  COOH,  ' 

CH3.C.C0CH  = CH.  COOH; 

et  si  la  dernière  ne  renfermait  pas,  conformément  à la  représen- 
tation que  je  propose,  deux  isomères  (probablement  les  acides 
itaconique  et  citraconique) , aucune  explication  plausible  ne  pourrait 
être  donnée. 

4.  Acides  crotoniques  solide  et  liquide.  La  constitution  de 


DE  STRUCTURE  DANS  L^ESPACE. 


453 


l’acide  crotonique  solide  est  indubitablement,  d’après  M.  Kekulé, 
CH3.CH  = CH.COOH; 

pour  l’acide  crotonique  liquide  il  ne  reste  donc  (ainsi  raisonnait-on) 
que  la  formule 

CH^  = CH.  CH^.COOH, 

capable  d’expliquer  la  non-identité. 

Mais  si  l’on  prend  en  considération  les  faits  suivants,  relatifs 
à cet  acide: 

a.  Fondu  avec  KO  H il  ne  donne,  selon  M.  M.  Hemilian , que 
de  l’acide  acétique; 

b.  Les  agents  d’oxydation  le  convertissent,  d’après  le  même 
chimiste , en  acide  acétique , acide  oxalique  et , indirectement , aux 
dépens  de  ce  dernier,  en  acide  carbonique; 

c.  Vers  170° — 180°  il  se  transforme,  toujours  selon  M.  Hemilian, 
en  acide  crotonique  solide; 

si  l’on  tient  compte  de  ces  faits,  dis-je,  rien  ne  plaide  pour 
la  formule  CH2  = CH.  CH2.  COOH,  et  tout  pour  un  isomère 
CH 3.  CH  = CH.  COOH,  exactement  comme  dans  le  cas  des  acides 
fumarique  et  maléique.  Effectivement,  la  formule  CH 3. CH  = CH. 
COOH  satisfait  aux  conditions  exigées  par  mon  hypothèse  pour  la 
possibilité  de  deux  isomères:  deux  atomes  de  carbone  à liaison 
double,  dont  les  affinités  libres  sont  saturées  chacune  par  deux 
groupes  univalents  différents,  lesquels  sont  ici  H et  CH  3,  H et  COOH. 

5.  Les  acides  chlorocrotonique  et  chlorisocrotonique  de  Geuther , 
dont  l’isomérie  était  exprimée  jusqu’ici  par 

CH^  =CH.C1.  CH,.  COOH 
et  CH3.CCI  = CH.COOH, 

donnent  suivant  M.  Froelich , quand  on  les  traite  par  l’hydrogène 
à l’état  naissant,  les  acides  mentionnés  au  numéro  4,  de  sorte 
que  leur  constitution  commune  devient 

CH3.CH.  CCI  = CH.  COOH 

et  que  leur  cas  d’isomérie  fortifie  par  conséquent  mon  hypothèse. 


454 


J.  H.  VAN  ’t  HOFF.  sur  LES  FORMULES,  ETC. 

Tkoisième  partie.  Il  reste  maintenant  encore  à parler  des 
atomes  de  carbone  à liaison  triple,  tels  que  ceux  de  l’acétylène. 
La  liaison  est  alors  représentée  par  deux  tétraèdres  coïncidant  par 
trois  de  leurs  sommets,  c’est-à-dire,  par  une  de  leurs  faces  (%. 
XI):  AC  B est  la  liaison  triple,  Rj  et  R^  sont  les  groupes  uni- 
valents par  lesquels  sont  satisfaites  les  deux  affinités  restantes  du 
carbone.  La  nouvelle  hypothèse  ne  conduit  ici  à aucune  discordance 
avec  les  vues  généralement  adoptées. 


En  terminant,  je  crois  pouvoir  faire  observer  que: 

1.  La  nouvelle  hypothèse  ne  laisse  inexpliqué  rien  de  ce  qui 
est  clairement  représenté  par  la  conception  ordinaire. 

2.  Certaines  propriétés  et  isoméries,  que  la  théorie  courante 
n’éclaircit  pas,  reçoivent  quelque  jour  de  l’hypothèse  proposée. 

3.  Enfin,  ma  remarque  concernant  les  combinaisons  qui  sont 
actives  à l’état  dissous,  c’est-à-dire,  concernant  les  molécules 
actives,  se  rattache  aux  vues  exposées  par  M.  Rammelsberg  sur 
les  cristaux  actifs.  Ce  savant,  en  effet,  étendant  les  obser- 
vations de  Herschell  et  de  M.  Pasteur,  soutient  que  la  propriété 
d’agir  à l’état  solide  sur  le  plan  de  polarisation  (par  conséquent , 
aussi  bien  la  condition  active  de  cristaux  composés  de  molécules 
inactives,  que  la  condition  inactive  de  cristaux  composés  de 
molécules  actives)  coïncide  avec  l’apparition  de  deux  formes  cristal- 
lines, qui  ne  montrent  pas  une  identité  complète,  mais  qui  sont  l’image 
spéculaire  l’une  de  l’autre.  Il  est  manifeste  qu’il  s’agit  ici  d’un 
arrangement  des  molécules  dans  le  cristal  actif,  entièrement  ana- 
logue à l’arrangement  asymétrique  des  groupes  d’atomes  dans  la 
molécule  active  , selon  mon  hypothèse;  arrangement  qui  a pour 
effet  que  ni  les  cristaux  actifs  énumérés  par  M.  Rammelsberg, 
ni  les  molécules  actives  représentées  d’une  manière  générale  dans 
les  figures  VII  et  VIII,  ne  possèdent  de  plan  de  symétrie. 


Utrecht,  5 Septembre  1874. 


SUR 


lÆS  ESPÈCES  INSULINDIENNES  DE  LA  FAMILLE  DES 

NANDOiDES, 

(avec  trois  figures  sur  Planclie  VIII) 

PAR 


P.  BLEEKER. 


La  famille  des  Nandoïdes,  telle  que  je  Pai  établie,  ne  se  com- 
pose que  des  genres  Nandus  CV.,  Badis  Blkr  et  Catopra  Blkr. 
Depuis,  M.  Gtinther,  adoptant  la  famille,  en  a élargi  les  limites 
en  y réunissant  les  genres  Plesiops  Cuv.  et  Trachinops  Günth.',  et 
même  le  genre  Acharnes  M.  Tr.  Pour  ce  qui  regarde  les  Plesiops 
et  les  Trachinops , ce  sont  de  vrais  Pseudochromidoïdes , et  le  genre 
Acharnes  a été  prouvé  n’être  pas  distinct  du  genre  Cichla. 

La  famille  des  Nandoïdes  appartient  à la  grande  division  des 
Perches,  où  elle  trouve  sa  place  naturelle  entre  le  groupe  des 
Centrarchini  des  Percoïdes  et  les  familles  des  Osphroménoïdes  et  des 
Polycentroïdes.  D’un  autre  côté,  elle  est  voisine  aussi  des  Pseu- 
dochromidoïdes et  des  Cichloïdes , et  ses  représentants  rappellent , 
par  leur  physionomie  générale , plusieurs  genres  des  quatre  familles 
qui  viennent  d’être  nommées.  Elle  est  aisément  à distinguer  de  toutes 
ces  familles  par  la  dentition  de  la  bouche  interne.  Elle  diffère , en 
outre , des  Percoïdes  par  la  ligne  latérale  interrompue , des  Osphro- 
ménoïdes par  l’absence  d’appendices  labyrinthiformes  aux  branchies, 


456 


P.  BLEEKER.  SUR  LES  ESPECES  INSÜLINDIENNES 


des  Pseudochromidoïdes  par  l’absence  de  pseudobranchies,  et  des 
Cichloïdes  par  ses  doubles  narines  de  chaque  côté  et  par  la  con- 
formation des  os  pharyngiens  inférieurs. 

La  diagnose  de  la  famille  est  à formuler  comme  suit: 

NANDOIDEI. 

Percoidei  corpore  oblongo  compresse  squamis  ctenoideis  magnis 
vel  mediocribus  vestito  ; capite  superne  ossibusque  opercularibus  squa- 
mato  ; naribus  utroque  latere  2 ; ore  protractili  ; dentibus  maxillis , 
vomerinis,  palatinis,  sphenoideis,  pharyngealibus  5 ossibus  pba- 
ryngealibus  inferioribus  oblongis  gracilibus  non  unitis;  branchiis 
simplicibus  non  appendiculatis  ; pseudo branchiis  nullis  ; linea  laterali 
interrupta;  pinnis  dorsali  unica  spinis  13  ad  17  et  radiis  7 ad 
17,  pectoralibus  et  caudali  rotundatis,  ventralibus  sub  basi  pec- 
toralium  insertis  spina  unica  et  radiis  5 anterioribus  2 ceteris 
longioribus , anali  brevi  spinis  3 vel  4 et  radiis  5 ad  9 , caudali 
radiis  divisis  12;  aperturis  branchialibus  externis  sub  gula  con- 
tinuis.  B.  6. 

L’exposé  suivant  résume  les  principaux  caractères  des  trois 
genres  de  la  famille. 

1.  Membrane  interbranchiale  étroite ,.  profondément  échancrée  et 
sans  écailles.  Opercule  à une  seule  épine.  A.  3/5  à 3/7. 

a.  Bouche  large.  Mâchoire  supérieure  fort  protractile,  à branche 
intermaxillaire  montante  s’étendant  jusqu’à  l’occiput.  Dents 
linguales.  Préopercule  dentelé.  Dorsale  à 13  ou  14  épines 
et  à 11  jusqu’à  13  rayons. 

Nandiis  Cuv.  = Bedula  Gr. 

b.  Bouche  petite.  Mâchoire  supérieure  médiocrement  protrac- 
tile , à branche  intermaxillaire  montante  très-courte.  Point 
de  dents  linguales.  Préopercule  lisse.  Dorsale  à 14  jusqu’à 
17  épines  et  à 7 ou  8 rayons. 


Badis  Blkr 


DE  LA  FAMILLE  DES  NANDOÏDES. 


457 


2.  Membrane  interbranchiale  large,  peu  ou  non  échancrée  et 
densement  couverte  d’écailles.  Opercule  à 2 épines.  A.  3/8 
ou  3/9  ou  4/8. 

a.  Fente  de  la  bouche  médiocre.  Mâchoire  supérieure  à branche 
intermaxillaire  montante  courte.  Dents  sphénoïdes  et  lin- 
guales granuleuses.  Dorsale  à 13  jusqu’à  16  épines  et 
à 11  jusqu’à  17  rayons. 

Catopra  Blkr  = Pristolepis  Jerd.  ? n:  Paranandus  Day. 

On  ne  connaît  de  toute  la  famille  que  neuf  ou  dix  espèces, 
deux  de  Nandus,  deux  de  Badis  et  les  autres  de  Catopra;  mais 
seulement  trois  de  ces  espèces,  savoir  une  de  Nandus  et  deux 
de  Catopra , ont  été  trouvées  dans  l’Inde  archipélagique , où  elles 
sont  limitées  aux  eaux  douces  des  îles  de  la  Sonde. 


NANDUS  CV. 

Dentes  sphenoidei  et  linguales  in  vittam  gracilem  dispositi. 
Maxilla  superior  maxime  protractilis  ramo  intermaxillari  adscen- 
dente  longissimo  verticem  attingente.  Rictus  magnus.  Praeoperculum 
denticulatum.  Operculum  spina  unica.  Membrana  interbranchialis 
profunde  incisa  gracilis  alepidota.  Linea  lateralis  basi  pinnae 
caudalis  desinens.  Squamae  inguinales  elongatae  nullae.  Isthmus 
interventralis  squama  elongata  composita.  Pinnae;  dorsalis  spi- 
nis  13  vel  14  et  radiis  11  ad  13,  analis  spinis  3 et  radiis 
5 ad  7. 

Rem.  On  ne  connaît  jusqu’ici  que  deux  espèces  de  Nandus, 
l’une  du  continent  indien  et  l’autre  des  îles  de  la  Sonde.  Ces  deux 
espèces  sont  fort  distinctes  l’une  de  l’autre,  le  Nandus  marmo- 
ratus,  c’est-à-dire  l’espèce  du  continent  de  l’Inde,  ayant  les  écailles 
beaucoup  plus  nombreuses  (plus  petites),  la  tête  plus  pointue, 
la  mâchoire  inférieure  notablement  plus  longue  que  la  supérieure , 


458 


P.  BLEEKER.  SUR  LES  ESPECES  IINSULINDIENNES 


uue  épine  de  moins  à la  dorsale,  etc.  — M.  Günther  cite  le 
Nandus  marmoratus  comme  habitant  aussi  .les  Moluques,  mais 
cette  indication,  fondée  seulement  sur  un  individu  provenant 
d’un  marchand  naturaliste,  ne  mérite  point  de  confiance  tant 
qu’il  n’a  pas  été  constaté,  par  l’observation  directe,  que  les 
Moluques  possèdent  en  effet  de  ces  poissons,  qu’on  n’a  trouvés 
jusqu’ici  que  dans  les  fleuves  des  îles  de  la  Sonde  et  de  l’Asie 
méridionale. 

Les  caractères  de  l’espèce  de  la  Sonde  se  rendent  en  peu  de  mots* 

T.  Corps  à 13  jusqu  a 35  rangées  transversales  d’écailles.  lé  Epines 
dorsales. 


NANDUS  NEBULosus  Blkr , Bijdr.  ichth.  Biliton,  Nat.  Tijdschr. 
Ned.  Ind.  III  p.  92  ; Gtinth. , Catal.  Fish.  III  p.  368.  — 
Fig.  L 

Nand.  corpore  oblongo  compresso,  altitudine  3 cire,  in  ejus 
longitudine,  latitudine  2 ad  2 et  paulo  in  ejus  altitudine  ; capite 
acuto  3J4  ad  3%  in  longitudine  corporis;  altitudine  capitis  1 ad  I 
et  paulo,  latitudine  capitis  1%  ad  2 fere  in  ejus  longitudine  ; oculis 
diametro  3 ad  3 in  longitudine  capitis,  diametro  Yz  ad  % distan- 
tibus;  linea  rostro-frontali  rectiuscula;  osse  suborbitali  edentulo 
vel  dentibus  rainimis  scabriusculo  ; naribus  distantibus  posterioribus 
orbitae  subcontiguis  patulis,  anterioribus  parum  conspicuis  mem- 
brana  elevata  claudendis;  maxilla  superiore  postice  alepidota,  maxilla 
inferiore  vix  breviore,  sub  oculi  margine  posteriore  desinente,  maxime 
protractili,  ramo  intermaxillari  adscendente  verticem  attingente;  den- 
tibus maxillis  parvis  aequalibus;  dentibus  vomerinis , sphenoideis  lin- 
gualibusquein  vittam  gracilem,  palatinis  et  pterygoideis  utroque  latere 
in  vittas  3 graciles  inaequales  dispositis;  dentibus  pharyngealibus 
parvis  acutis;  ossibus  pharyngealibus  inferioribus  oblongis  duplo 
cire,  longioribus  quam  latis,  parte  anteriore  tantum  subcontiguis  ; 
praeoperculo  obtuse  rotundato  ubique  squamato  squamis  ante  lim- 
bum  in  sériés  7 cire,  transversas  dispositis , margine  libero  angulo 
praesertim  leviter  denticulato;  spina  operculari  mediocri;  linea 


DE  LA  FAMILLE  DES  NANDOÏÜES. 


459 


laterali  sub  media  vel  posteriore  parte  dorsalis  radiosae  interrupta  ; 
squamis  corpore  angulum  aperturae  branchialis  superiorem  inter 
et  basin  pinnae  caudalis  supra  lineam  lateralem  in  sériés  33  ad 
35,  infra  lineam  lateralem  in  sériés  31  vel  32  tranversas  dispo- 
sitis;  squamis  16  in  sérié  transversali  basin  ventralis  inter  et 
dorsalem  quarum  4 vel  3%  lineam  lateralem  inter  et  spinas  dor- 
sales médias  : pinna  dorsali  spinis  validis  3^  4a  et  5a  ceteris  vulgo 
longioribus  3 ad  4 in  altitudine  corporis,  parte  radiosa  parte 
spinosa  multo  altiore  obtuse  rotundata  basi  squamata  ; pectoralibus 
obtuse  rotundatis  et  ventralibus  acutiusculis  capite  absque  rostro 
brevioribus;  anali  spinis  validis  2^  ceteris  longiore  oculo  non  ad 
paulo  longiore,  parte  radiosa  basi  squamata  dorsali  radiosa  non 
vel  vix  humiliore  acutiuscule  vel  obtusiuscule  rotundata;  caudali 
obtusa  rotundata  capite  absque  rostro  non  ad  paulo  breviore  ; colore 
corpore  superne  fuscescente-viridi , lateribus  et  inferne  aurantiaco- 
viridi  ; iride  aurea  fusco  tincta  ; corpore  fasciis  transversis  diffusis- 
fuscis;  capite  corporeque  insuper  maculis  sparsis  fuscis;  pinnis 
aurantiacis,  dorsali  parte  spinosa  fuscescente,  dorsali  radiosa 
guttulis  fuscis  in  sériés  longitudinales, -ventralibus  et  caudali  gut» 
tulis  fuscis  in  sériés  transversas  dispositis. 

B.  6.  D.  14/11  ad  14/13.  P.  2/15  ad  2/17.  V.  1/5.  A.  3/5 
ad  3/7.  C.  1/12/1  et  lat.  brev. 

Syn.  Bedula  nebulosus  Gr.  Hardw.,  Illustr.  Ind.  Zool.  II  Fisc, 
tab.  1 fig.  2. 

Hab.  Sumatra  (Lahat);  Singapura;  Bangka  .Toboali,  Marawang); 
Biliton  (Tjirutjup);  Bornéo  (Pamangkat,  Baugkayan).  in 
fluviis. 

Longitudo  14  speciminum  65'"  ad  135'". 

Rem.  Le  Nandus  des  îles  de  la  Sonde  est  fort  distinct  de  celui 
du  continent  indien  (Nandus  marmoratus  Cuv.).  Sur  un  individu  de 
cette  dernière  espèce  je  compte  50  rangées  transversales  d'écailles 
au-dessus  de  la  ligne  latérale,  et  22  ou  23  rangées  longitudinales 
entre  la  ventrale  et  la  dorsale , dont  6 entre  la  ligne  latérale  et 
la  dorsale.  Les  écailles  préoperculaires  aussi  y sont  plus  nom- 


460 


P.  BLEEKER.  SUR  LES  ESPECES  INSULINDIENNES 


breuses;  puis  encore  elle  a la  tête  plus  pointue,  la  mâchoire 
inférieure  notablement  plus  longue  que  la  supérieure , la  mâchoire 
supérieure  squammeuse,  une  épine  de  moins  à la  dorsale,  etc. 

CATROPA  Blkr  = Pristolepis  Jerd.  ? = Paranandus  Day. 

Dentes  sphenoidei  et  linguales  obtusi  vel  graniformes  in  thur- 
mam  magnam  latam  dispositi.  Maxilia  superior  ramo  intermaxillari 
adscendente  brevi.  Rictus  mediocris.  Praeoperculum  denticulatum. 
Operculum  spinis  2.  Membrana  interbranchialis  vix  emarginata 
lata  dense  squamata.  Lineae  lateralis  pars  posterior  pinna  caudali 
continua.  Inguines  et  isthmus  interventralis  squama  elongata. 
Pinnae  dorsalis  spinis  13  ad  16  et  radiis  11  ad  17,  analis 
spinis  3 vel  4 et  radiis  8 vel  9. 

Rem.  Le  genre  Catopra  est  éminemment  distinct  par  les  larges 
lames  dentaires  du  palais  et  de  la  langue , lames  occupant  les  os 
sphénoïdes  et  basi-hyaux , et  par  la  large  membrane  interbrachiale 
densément  couverte  d’écailles.  — Bien  que  je  ne  retrouve  pas 
ces  caractères  dans  la  description  du  Pristolepis  marginatus  Jerd. , 
dont  il  est  dit  que  les  dents  ptérygoïdiennes  et  linguales  sont  en 
velours,  il  se  pourrait  bien  que  cette  espèce  fût  un  vrai  Catopra. 
En  ce  cas,  le  nom  de  Pristolepis,  datant  de  1848,  aurait  droit 
de  priorité  sur  celui  que  j’ai  proposé  trois  ans  plus  tard.  M.  Day , 
depuis , a proposé  le  nom  de  Paranandus  pour  une  espèce  qu’il  a 
décrite  et  figurée  sous  le  nom  de  Nandus  malabaricus  (Fish.  Malab. 
p.  130  tab.  8).  Il  est  vrai  que,  d’après  ma  première  diagnose 
du  genre  Catopra , où  il  entrait  comme  caractère  la  phrase  „os 
suhorbitale  denticulatum! \ l’espèce  de  M.  Day  ne  serait  point  un  vrai 
Catopra , mais  plutôt  un  Nandus  ; mais  le  caractère  de  sousorbi- 
taires  dentelés  ayant  été  prouvé  n’être  point  générique,  et  le 
Nandus  malabaricus  Day,  dont  j’ai  un  specimen  devant  moi,  présen- 
tant du  reste  tous  les  caractères  de  Catopra,  même  les  larges 
lames  à dents  granuleuses  de  l’intérieur  de  la  bouche , M.  Günther 


DE  LA  FAMILLE  DES  NANDOÏDES. 


461 


a eu  raison  d’indiquer  cette  espèce  comme  un  vrai  Catopra  *) 
Les  deux  espèces  insulindiennes  de  Catopra  se  font  aisément 
reconnaître  par  les  caractères  suivants  : 

I Sousorbitaire  lisse.  Trois  épines  anales.  Joues  à six  rangées  longitudinales 
d’écailles. 

A.  Cinq  (1%)  rangées  d’écailles  entre  la  ligne  latérale  et  les  épines 
dorsales  médianes. 

1.  Catopra  fasciata  Blkr. 

B.  Quatre  (3%)  rangées  d’écailles  entre  la  ligne  latérale  et  les  épines 
dorsales  médianes. 

2.  Catopra  Grootii  Blkr. 


Catopra  fasciata  Blkr,  Derde  bijdrage  ichthyol.  Bornéo, 
Nat.  T.  Nederl.  Ind.  II  p.  65;  Günth.,  Catal.  Fish.  III 
p.  368.  — Fig.  2. 

Catopra  corpore  oblongo  cempresso,  altitudine  2|-  ad  2|  in 
ejus  longitudine,  latitudine  2^  ad  3 in  ejus  altitudine;  capite 
obtuso  354  ad  4 fere  in  longitudine  corporis,  aeque  alto  ac  longo 
ad  paulo  altiore  quam  longo;  latitudine  capitis  ad  2 in  ejus 
longitudine;  oculis  diametro  3%  ad  Ay  in  longitudine  capitis, 
diametro  1 ad  ly  distantibus  ; linea  rostro-frontali  junioribus 
réctiuscula  vel  concaviuscula , aetate  provectis  interdum  convexi- 
uscula;  rostro  obtuso  oculo  breviore,  alepidoto;  naribus  distanti- 
bus, posterioribus  orbitae  approximatis  patulis,  anterioribus  bre- 
vitubulatis;  dentibus  suborbitalibus  parvis  parum  conspicuis;  maxillis 
subaequalibus , superiore  sub  oculi  dimidio  anteriore  desinente; 
dentibus  maxillis  parvis  acutis,  sérié  externa  intermaxillaribus 
pracsertim  ceteris  majoribus  subaequalibus;  dentibus  vomerinis , 
palatinis  et  pharyngealibus  parvis  acutis , vomerinis  in  thurmulam 


^ ) Cette  espèce  est  - caractérisée . outre  le  sousorbitaire  lisse , par  les  trois 
rangées  d’écailles  au-dessus  de  la  ligne  latérale  et  par  les  trois  épines  anales. 


462  P.  BLEEKER.  SUR  LES  ESPECES  INSULINDIENNES 

oblongo  ovalem  transversam , palatinis  utroque  latere  in  vittam 
sat  gracilern  postice  quam  antice  latiorem  disposais;  dentibus 
lingualibus  et  sphenoideis  obtusis  graniformibus , lingualibus  in 
thnrmam  latam  lagenaeformem  antice  acutam  postice  subtruncatam 
multo  longiorem  quam  latam , sphenoideis  in  thurmam  duplo  cire, 
longiorem  quara  latam  quadratiusculam  vel  dimidio  posteriore  qua- 
dratiusculam  dimidio  anteriore  trigonam  apice  acutiusculam  dis- 
positis;  ossibus  pharyngealibus  inferioribus  sat  gracilibus  plus 
duplo  longioribus  quam  latis  parte  anteriore  tantum  subcontiguis  ; 
praeoperculo  subrectangulo  angulo  rotundato  leviter  denticulato; 
squamis  genis  in  sériés  6 longitudinales  dispositis , sérié  inferiore 
limbum  tegente  ; suboperculo  inferne  et  interoperculo  superne  mar- 
gine  libero  vulgo  scabriusculis  ; operculo  spinis  2 mediocribus 
pungentibus  ; mento  et  cute  interbranchiali  vix  emarginata  dense 
squamatis  ; squamis  corpore  angulum  aperturae  brancliialis  superi- 
orem  inter  et  basin  pinnae  caudalis  supra  lineam  lateralem  in 
sériés  30  cire.,  infra  lineam  lateralem  in  sériés  27  ou  28  trans- 
versas dispositis;  squamis  16  in  sérié  transversa  basin  pinnae 
ventralis  inter  et  dorsalem  quarum  5 (454)  lineam  lateralem  inter 
et  spinas  dorsales  médias;  linea  laterali  singulis  squamis  tubulo 
simplice  notata , sub  dorsalis  radiosae  parte  posteriore  interrupta , 
cauda  ante  partem  abruptam  reincipiente , basi  caudalis  deorsum 
curvata  caudalem  intrante  et  usque  ad  caudalis  marginem  poste- 
riore producta;  pinna  dorsali  spinis  validis  mediis  ceteris  lon- 
gioribus 3 ad  4 in  altitudine  corporis , parte  radiosa  dimidio  basali 
squamosa  parte  spinosa  multo  altiore  obtuse  vel  acutiuscule 
rotundata;  pectoralibus  obtuse  vel  obtusciuscule  rotundatis  ven- 
tralibus  acutis  vel  acute  rotundatis  paulo  longioribus  capite  paulo 
brevioribus;  inguinibus  squama  lanceolata  libéra  mediocri;  anali 
spinis  validis  2^  ceteris  majore  oculo  multo  ad  duplo  longiore, 
parte  radiosa  dimidio  basali  squamosa,  dorsali  radiosa  non  ad 
paulo  humiliore , obtuse  vel  obtusiuscule  rotundata  ; caudali  obtusa 
convexa  vel  rotundata  capite  non  ad  paulo  breviore;  colore  cor- 
pore  olivaceo  vel  fuscescente-olivaceo , inferne  dilutiore;  iride 
flava  vel  aurea;  pinnis  flavescentibus  vel  aurantiacis;  juvenilibus 


DE  LA  FAMILLE  DES  NANDOÏDES. 


463 


genis  vittis  3 ad  5 lougitudinalibus  curvatis  argenteis  et  corpore 
fasciis  8 ad  13  transversis  irregularibus  fuscis. 

B.  6.  D.  13/14  ad  13/17  vel  14/16  vel  14/17.  P.  2 14.  V.  1/5. 

A.  3/8  vel  3; 9.  C.  1/12/1  et  lat.  brev. 

Syn.  Catopra  mndoides  Blkr,  Nieuwe  bijdr.  Perc.  Sclerop.  etc. 

Nat.  T.  Ned.  Ind.  Il  p.  172  ; Güntb. , Cat.  Fish.  111  p.  368  ; 
an  et  Day,  Fish.  Burma,  Proc.  Zool. Soc.  1869  p.  615 ? 
Catopra  siamensis  Güntb.,  N.  Rept.  Fish.  Brit.  Mus,  Proc. 

Zool.  Soc.  1862  p.  191,  tab.  26  fig.  a. 

Katoprak  Mal.  Bat. 

Hab.  Sumatra  (Lahat,  Palembang,  Telokbetong,  Benculen; 
Bangka  (Marawangj  ; Java  (Batavia);  Bornéo  (Pamang- 
kat,  Montrado , Bankayan , Bandjermasin,  Pengaron); 
in  fluviis. 

Longitudo  12  speciminum  lOP"  ad  210'". 

Rem.  Les  descriptions  antérieures  du  Catopra  fasciata  et  nan- 
doides  ont  été  prises  sur  des  individus  uniques , et  il  s’y  est  glissé 
aussi  une  erreur  d’impression  par  rapport  au  nombre  des  écailles 
sur  une  rangée  transversale  du  Catopra  fasciata , nombre  qui  doit 
être  lu  16  au  lieu  de  13.  Une  série  complète  d’individus  m’a  permis 
de  constater  que  ces  deux  espèces  n’en  font  qu’une  seule,  l’individu 
que  j’ai  décrit  sous  le  nom  de  Catopra  nandoides , et  qui  provenait 
des  eaux  douces  de  Batavia,  ne  se  distinguant  en  rien  des  nom- 
breux individus  du  Catopra  fasciata  de  Sumatra , de  Bangka  et  de 
Bornéo , si  ce  n’est  par  la  présence  d’une  épine  de  plus  à la  dorsale. 
Les  bandes  transversales  du  corps  et  les  bandelettes  nacrées  des 
joues,  en  général  nettement  dessinées  chez  les  jeunes,  s’effa- 
cent plus  ou  moins  dans  l’adolescence  avancée  et  ne  laissent  plus 
de  traces  chez  les  adultes.  Je  ne  doute  point  que  le  Catopra 
siamensis  Günth.  soit  de  l’espèce  actuelle  et  que  par  conséquent 
le  fasciata  habite  aussi  les  eaux  douces  de  Siam.  C’est  une  espèce 
d’eau  douce  de  plus  que  Siam  a en  commun  avec  les  îles  de  la 
Sonde.  Si  le  Catopra  nandioides  de  M.  Day  est  en  effet  de  la 
même  espèce,  elle  habite  aussi  le  Burmah. 


464  P.  BLEEKER.  SUR  LES  ESPECES  INSULINDIENNES 

CATOPRA  GROOTii  Blki* , Bÿdrage  ichth.  Biliton^  Nat.  T.  Ned. 

Ind.  III  p.  90  ; Günth. , Cat.  Fish.  III  p.  369.  — Fig.  3. 

Catopr.  corpore  oblongo  compresse,  altitudine  2%  ad  2^  in 
ejus  longitudine,  latitudine  2]^  ad  2%  in  ejus  altitudine;  capite 
obtuso  3|  ad  4 in  longitudine  corporis,  aeque  alto  ac  longo  ad 
paulo  altiore  quam  longo;  latitudine  capitis  ad  2 in  ejus 
longitudine;  oculis  diametro  3 ad  4 in  longitudine  capitis,  dia- 
mètre 1 ad  II/  distantibus  ; linea  rostro-frontali  rectiuscula  vel 
convexiuscula  ; rostre  obtuso  oculo  breviore,  alepidoto;  naribus 
distantibus  posterioribus  orbitae  approximatis  patulis,  anterioribus 
brevitubulatis  ; dentibus  subor bitali bus  parvis  parum  conspicuis; 
maxillis  subaequalibus , superiore  sub  oculi  dimidio  anteriore  desi- 
nente;  dentibus  maxillis  parvis  acutis  sérié  externa  intermaxil- 
laribus  praesertim  ceteris  majoribus  subaequalibus  ; dentibus  vome- 
rinis,  palatinis  et  pharyngealibus  parvis  acutis,  vomerinis  in 
thurmulam  oblongam  Iransversam,  palatinis  utroque  latere  in 
vittam  sat  gracilem  postice  quam  antice  non  latiorem  dispositis; 
dentibus  lingualibus  et  sphenoïdeis  obtusis  graniformibus , lingua- 
libus  in  thurmam  latam  lagenaeformem  antice  acutam  postice  sub- 
truncatam  longiorem  quam  latam,-sphenoideis  in  thurmam  duplo 
circiter  longiorem  quam  latam  postice  truncatam  antice  acutam 
vel  acutiusculam  dispositis;  ossibus  pharyngealibus  inferioribus 
sat  gracilibus  plus  duplo  longioribus  quam  latis  parte  anteriore 
tantum  subcontiguis  ; praeoperculo  subrectangulo  angulo  rotundato 
leviter  denticulato  ; squamis  genis  in  sériés  6 longitudinales  dispo- 
sitis, sérié  inferiore  limbum  tegente;  suboperculo  inferne  etinter- 
operculo  superne  margine  libero  scabriusculis  ; opercule  spinis  2 
mediocribus  pungentibus  ; mento  et  cute  interbranchiali  vix  emar- 
ginata  dense  squamatis;  squamis  corpore  angulum  aperturae  branchi- 
ales superiorem  inter  et  basin  pinnae  caudalis  supra  lineam  lateralem 
in  sériés  28 , infra  lineam  lateralem  in  sériés  26  vel  27  trans- 
versas dispositis  ; squamis  15  in  sérié  transversa  basin  pinnae 
ventralis  inter  et  dorsalem  quarum  4 (35^)  lineam  lateralem  inter 
et  spinas  dorsales  médias  ; linea  laterali  singulis  squamis  tubulo 
simplice  notata , sub  dorsalis  radiosae  parte  posteriore  interrupta , 


DE  LA  FAMILLE  DES  NANDOÏDES. 


465 


cauda  ante  partem  abruptam  reincipiente , basi  caudalis  deorsum 
curvata , caudalem  intrante  et  usque  ad  caudalis  marginem  pos- 
teriorem  producta  ; pinna  dorsali  spinis  validis  mediis  ceteris  lon- 
gioribus  3 ad  854  in  altitudine  corporis,  parte  radiosa  dimidio 
basali  squamosa  parte  spinosa  multo  altiore  obtuse  vel  acutiuscule 
rotundata;  pectoralibus  obtuse  vel  obtusiuscule  rotundatis  ventralibus 
acutis  vel  acute  rotundatis  paulo  longioribus  capite  paulo  brevioribus; 
inguinibus  squama  lanceolata  libéra  mediocri;  anali  spinis  vali- 
dis 2a  ceteris  majore  oculo  multo  ad  duplo  fere  longiore  , parte 
radiosa  dimidio  basali  squamosa,  dorsali  radiosa  non  ad  paulo 
humiliore , obtuse  vel  acutiuscule  rotundata  ; caudali  obtusa  convexa 
vel  rotundata  capite  non  ad  paulo  breviore  ; colore  corpore  oliva  • 
ceo  vel  fuscescente-olivaceo  inferne  dilutiore  ; iride  flava  vel  aurea  ; 
pinnis  flavescentibus  vel  aurantiacis  ; juvenilibus  corpore  fasciis  8 
ad  10  transversis  irregularibus  fuscis. 

B.  6.  D.  13/15  ad  13/17.  P.  2/12  ad  2/14.  V.  1/5.  A.  3/8 
vel  3/9.  C.  1/12/1  et  lat.  brev. 

Hab.  Bangka  (Toboali)  ; Biliton  (Tjirutjup)  ; Bornéo  (Bankayan) , 
in  fluviis. 

Longitudo  13  speciminum  85'"  ad  184'". 

Rem.  Les  treize  individus  que  je  possède  de  cette  espèce  ne  se 
distinguent  bien  essentiellement  du  Catopra  fasciata  que  par 
une  rangée  longitudinale  d’écailles  de  moins  entre  la  ligne  latérale 
et  les  épines  médianes  du  dos.  Les  bandelettes  transversales  exis- 
tent ici  aussi  dans  les  jeunes  seulement , mais  sur  aucun  de  mes 
individus,  pas  même  sur  les  plus  petits,  je  ne  vois  les  bande- 
lettes nacrées  qui  sont  si  bien  accusées  sur  les  joues  des  jeunes 
fasciata.  Le  Grootii  a du  reste  les  yeux  généralement  plus  grands , 
le  profil  plus  convexe  et  le  corps  plus  épais  que  le  fasciata, 
différences  qui  s’observent  assez  nettement  en  comparant  des 
individus  des  deux  espèces  d’égale  longueur , surtout  ceux  de 
l’adolescence  avancée. 

La  Haye,  Septembre  1873, 


Archives  Néerlandaises,  T.  IX. 


30 


SUR 


LES  ESPÈCES  INSULINDIENNES  DE  LA  FAMILLE  DES 

OPISTHOGNATHOÏDES, 

(avec  quatre  figures  sur  Planche  IX.) 


PAR 

P.  BLEEKER. 


La  petite  famille  des  Opisthognathoïdes , intermédiaire  quant 
à ses  affinités,  entre  les  Blennioïdes  et  les  Pseudochromidoïdes , se 
distingue  nettement  par  la  combinaison  des  caractères  de  ventrales 
jugulaires  bien  développées  et  à cinq  rayons  mous , dont  les  deux 
antérieurs  sont  simples  épaissis  et  allongés,  d’une  tête  dénuée 
d’écailles,  d’un  palais  parfaitement  lisse,  d’écailles  cycloïdes, 
d’épines  très-grêles  et  flexibles  à la  dorsale  et  à l’anale , d’une  anale 
égalant  la  dorsale  molle  et  d’une  caudale  à douze  rayons  divisés. 

Ses  caractères  naturels  et  distinctifs  peuvent  être  formulés 
comme  il  suit: 

Pisces  ossei  acanthopterygii  jugulares,  corpore  subelongato  vel 
elongato  compresse  ; capite  obtuse  alepidoto , rictu  magno , maxillis 
dentatis  post  oculum  productis,  palato  edentulo,  naribus  utroque  latere 
duplicibus , ossibus  suborbitalibus  non  cum  praeoperculo  articulatis , 
ossibus  opercularibus  edentulis  ; ossibus  pharyngealibus  inferioribus 
non  unitis  ; branchiis  apparatu  labyrinthiformi  nulle  ; pseudobran- 


P.  BLEEKER.  SUR  LES  ESPECES  IN8ULINDIENNES , ETC.  467 

chiis  ; aperturis  branchialibus  sub  gula  continuis  ; vesica  natatoria  ; 
squamis  corpore  cycloideis  parvis;  linea  laterali  tumida  sub  dor- 
sal! radiosa  desineute;  pinnis  spinis  gracilibus  flexilibus,  dorsali 
unica  longa  indivisa  partibus  spinosa  et  radiosa  subaequilongis , 
pectoralibus  flabelliformibus , ventralibus  radiis  2 anterioribus 
incrassatis  simplicibus  elongatis , anali  dorsali  radiosae  subaequali , 
caudali  integra  radiis  divisis  12.  B.  6. 

Les  espèces  connues  de  la  famille  ne  sont  qu’au  nombre  de 
dix  ou  de  onze , dont  quatre  habitent  Tlnsulinde.  On  y reconnaît 
deux  types  d’une  valeur  générique , l’un  caractérisé  par  un  maxil- 
laire tronqué  et  sans  appendice  membraneux , et  l’autre  reconnais- 
sable par  un  maxillaire  prolongé  jusqu’au-delà  du  bord  préopercu- 
laire  et  finissant  en  lame  de  sabre  plus  ou  moins  membraneuse. 
L’espèce  type  du  genre  Opisthognathus  Cuv. , l’Opisthognathus 
Sonneratii  CV.  représente  le  second  genre.  Pour  le  premier  M.  Gill  a 
déjà  proposé  le  nom  de  Gnathypops,  qui  mérite  d’être  conservé. 
Le  genre  Lonchopistus , proposé  par  le  même  auteur  pour  une 
espèce  à mâchoires  de  Gnathypops  mais  à caudale  lancéolée , me 
paraît  devoir  être  rapporté  au  Gnathypops. 

Les  genres  Opisthognathus  et  Gnathypops  se  composent  d’es- 
pèces qui,  elles  aussi,  représentent  deux  types,  dans  lesquels  on 
verra  probablement  des  genres  ou  des  sousgenres  dès  que  les 
espèces  connues  seront  devenues  plus  nombreuses.  Parmi  les  Opistho- 
gnathes  proprement  dits , il  y a des  espèces , - et  parmi  elles  l’espèce 
type  du  genre,  où  les  écailles  sont  au  nombre  de  plus  de  cent 
sur  une  rangée  longitudinale , et  l’espèce  insulindienne  de  ce  type 
présente  le  caractère  remarquable  d’un  grand  trou  ovale  dans  la 
membrane  qui  unit  le  maxillaire  au  mandibulaire.  D’autres  espèces , 
au  contraire,  ne  présentent  qu’une  soixantaine  d’écailles  sur  une 
rangée  longitudinale,  et  la  membrane  maxillo-mandibulaire  est 
intègre  et  non  perforée.  La  même  différence  d’écaillure  se  trouve 
dans  les  espèces  de  Gnathypops,  où,  par  exemple,  lepapuensis 
a les  écailles  au  nombre  d’à  peu  près  120,  tandis  que  dans  le 
Rosenbergii  il  n’y  en  a qu’environ  70.  Dans  ces  deux  espèces  le 
trou  maxillo-mandibulaire  n’existe  pas.  30* 


468  . P.  BLEEKER.  SUR  LES  ESPECES  INSULINDIENNES 

Je  possède  quatre  espèces  d’Opisthognathoïdes  de  T Inde  archi- 
pélagique , dont  voici  les  noms  et  les  synonymes  : 

1.  Opisthognathus  Castelnau!  Blkr  = Opisthognathus  Sonneratii 

Cuv?  Blkr  ol. 

2.  Opisthognathus  solorensis  Blkr. 

• 3.  Gnathypops  papuensis  Blkr  :=  Opisthognathus  papuensis  Blkr. 
4.  „ Rosenbergii  Blkr  = Opisthognathus  Rosenbergii  Blkr. 

Toutes  ces  espèces  sont  exclusivement  insulindiennes.  Des  six 
ou  sept  autres  espèces  connues  de  la  famille,  une  seule,  T Opis- 
thognathus nigromarginatus  Riipp.  (zz:  Opisthognathus  Sonne- 
ratii Cuv.)  habite  la  Mer  Rouge  et  les  côtes  de  Zanzibar  et  de 
Mossambique , et  les  autres  les  côtes  atlantiques  de  l’Amérique  mé- 
ridionale, les  Antilles  et  le  Golfe  de  Mexique.  Ces  espèces  sont  en 
partie  des  Opisthognathus  (Opisthognathus  megastoma  Günth.  ? = 
Opisthognathus  macrognathus  Poey?)  et  en  partie  des  Gnathypops 
(Opisthognathus  Cuvieri  Val.,  Gnathypops  maxillosus  Gill,  Gna- 
thypops macrops  Gill  et  Lonchopistus  micrognathus  Gill). 

OPISTHOGNATUS  Cuv. 

Corpus  elongatum.  Dorsum  antice  et  regio  scapulo-thoraco- 
gularis  squamis  nullis.  Maxilla  superior  postice  ensiforme  producta 
praeoperculi  marginem  posteriorem  superans.  Dentes  maxillis  plu- 
riseriati  acuti,  sérié  externa  fortiores.  Pinnae  dorsalis  et  analis 
alepidotae,  dorsalis  spinis  flexilibus  11  ad  13  et  radiis  13  ad  16, 
analis  spinis  flexilibus  2 et  radiis  13  ad  16. 

Les  deux  espèces  insulindiennes  sont  parfaitement  reconnaissa- 
bles par  les  caractères  suivants: 

I Hauteur  du  corps  6 à 7 fois  dans  la  longueur  totale.  D.  25  ou  26  (11/14 
ou  11/15).  A 16  ou  17  (2/14  ou  2/15). 
a.  Plus  de  cent  écailles  sur  une  rangée  longitudinale.  Mâchoire  supérieure 
dépassant  le  bord  postérieur  de  l’opercule.  Membrane  maxillo-mandibu- 
laire  percée  d’un  grand  trou  ovale.  Base  de  la  dorsale  à huit  taches  brunes 
ou  noirâtres. 

1.  Opisthognathus  Castelnaui  Blkr 


DES  OPISTHOGNATHOÏDES. 


469 


b.  Environ  65  écailles  sur  une  rangée  longitudinale.  Mâchoire  supérieure 
n’atteignant  pas  le  bord  postérieur  de  l’opercule.  Membrane  maxillo* 
mandibulaire  sans  trou.  Une  taehe  noirâtre  sur  les  épines  antérieures 
de  la  dorsale,  suivie  ordinairement  d’une  ou  de  deux  taches  oblongues 
de  la  même  couleur. 

2.  Opisthognathus  solorensis  Blkr. 


Opisthognaihiis  Caslelnaui  Blkr,  Derde  bÿdr.  vischf.  Singap.  Nat. 

T.  Ned.  Ind.  XX  p.  450.  — Fig.  4. 

Opisthogn.  corpore  elongato  compresse,  altitudine  ad  7 in 
ejus  longitudine,  latitudine  1 ad  1%  in  ejus  altitudine;  capite 
obtuso  valde  convexo  4 ad  4J4.  iu  longitudine  corporis  ; altitudine 
capitis  ad  2,-  latitudine  capitis  2 cire,  in  ejus  longitudine; 
oculis  diametro  '6%  ad  4 in  longitudine  capitis,  diametro  % cire, 
distantibus;  regione  interoculari  concaya;  naribus  margini  oculi 
antero-inferiori  approximatis , posterioribus  rotundis  patulis,  ante- 
rioribus  non  tentaculatis  ; cute  capite  superne  lateribusque  verrucu- 
loso-rugosa;  maxilla  superiore  paulo  ante  maxillam  inferiorem 
prominente  postice  acuta  ensiformi  marginem  operculi  posteriorem 
superante,  membrana  os  supramaxillare  inter  et  inframaxillare 
apertura  magna  ovali  ; dentibus  maxillis  pbaryngealibusque  conicis 
acutis  pluriseriatis , maxillis  sérié  externa  ceteris  majoribus  cur- 
vatis,  intermaxillaribus  anterioribus  ceteris,  inframaxillaribus  mediis 
ceteris  paulo  'majoribus;  nucha,  dorso  antice  regionibusque 
suprascapulari  et  thoraco-gulari  alepidotis  ; squamis  minimis 
regionem  suprascapularem  inter  et  basin  pinnae  caudalis  in 
sériés  110  cire,  transversas  dispositis;  squamis  radios  anales 
anteriores  inter  et  dorsalem  in  sériés  28  cire,  longitudinales  dis- 
positis quarum  4 cire,  lineam  lateralem  inter  et  mediam  dorsalem 
radiosam;  linea  latéral!  sub  anteriore  dimidio  dorsalîs  radiosae 
abrupta  tumida  tubulis  contiguis  notata,  media  cauda  inconspicua; 
pinna  dorsal!  parte  spinosa  parte  radiosa  paulo  breviore  et  non 


470 


P.  BLEEKER.  SUR  LES  ESPECES  IJVSULINDIENNES 


vel  vix  humiliore  corpore  duplo  cire,  humiliore  postice  angulata  vel 
obtusiuscule  rotundata  ; pinnis  pectoralibus  obtuse  rotundatis  capite 
duplo  cire,  brevioribus;  ventralibus  radiis  2 anterioribus  tumidis 
simplicibus  capitis  parte  postoculari  non  vel  vix  brevioribus  ; anali 
forma  et  magnitudine  dorsali  radiosae  subaequali  ; caudali  obtusa 
rotundata  capitis  parte  postoculari  non  vel  vix  longiore;  colore 
corpore  superne  olivascente , inferne  dilute  roseo  ; iride  flavescente  ; 
corpore  fusco  irregulariter  striato  vel  nebulato;  maxilla  superiore 
postice  facie  externa  et  facie  interna  vittula  vel  macula  oblonga 
flava  nigricante  limbata  ; pinnis  roseis  ; dorsali  basi  maculis  8 vel 
9 rotundiusculis  subaequidistantibus  nigricantibus  vel  profunde 
fuscis,  dimidio  superiore  fuscescente  fréquenter  ocellis  roseis  in 
seriem  longitudinalem  disposais  ; ventralibus  apicem  versus , anali 
dimidio  inferiore,  caudali  postice  fuscescentibus. 

B.  6.  D.  11/14  P.  1/17  ad  1/19.  V.  1/5.  A.  2/14  vel  2/15. 

C.  1/12/1  et  lat.  brev. 

Syn.  Opisthognathus  Sonnerali  Cuv.  ? Blkr , Nieuwe  bgdr.  ichth. 

Celebes,  Nat.  T.  Ned.  Ind.  II  p.  221.  (nec  CV.). 

Hab.  Singapura;  Bintang  (Bio);  Cocos  (Novaselma);  Celebes 

(Bulucomba)  ; Batjan  (Labuha)  ; in  mari. 

Longitudo  4 speciminum  140"'  ad  200"' 

Rem.  J’ai  confondu  autrefois  cette  espèce,  que  je  ne  connais- 
sais primitivement  que  par  un  individu  mal  conservé,  avec  TOpis- 
thognatbus  nigromarginatus  Rüpp  (O.  Sonneratii  Cuv.);  mais  elle  s’en 
distingue  par  l’absence  du  grand  ocelle  noir  cerclé  de  blanchâtre 
ou  de  jaunâtre , entre  la  quatrième  et  la  huitième  épine  dorsale. 
En  revanche  le  Castelnau!  montre  le  long  de  la  base  de  la  na- 
geoire dorsale  une  rangée  de  huit  taches  noires , dont  la  huitième  se 
trouve  sur  les  rayons  postérieurs.  Le  nigromarginatus  paraît  aussi 
avoir  le  corps  plus  trapu  et  le  prolongement  en  forme  de  sabre 
du  maxillaire  plus  grêle. 


DES  OPISTHOGNATHOÏDES. 


471 


Opisthognathns  solorensis  Blkr,  Bÿdrage  ichthyol.  Solor, 

Natuurk.  T.  Nederl.  Ind.  V p.  81  ^ GüDth.,  Cat.  Fish. 

II  p.  256.  — Fig.  3. 

Opisthogn.  corpore  elongato  compresse , altitudine  6 ad  7 in  ejus 
longitudine,  latitudine  1^  ad  in  ejus  altitudine  ; capite  obtuso 
valde  convexo  4 ad  4^  in  longitudine  corporis  ; altitudine  capitis 
l}i  ad  2 fere,  latitudine  capitis  2 ad  2 et  paulo  in  ejus  longi- 
tudine; oculis  diametro  4 cire,  in  longitudine  capitis,  diametro 
1%  cire,  distantibus  ; regione  interoculari  concava  ; naribus  margini 
orbitae  antero-inferiori  approximatis , posterioribus  rotundis  patulis , 
anterioribus  minimis  non  tentaculatis  margine  membranaceo  clau- 
dendis  ; cute  capitis  superne , rostro  lateribusque  verruculoso- 
rugosa  ; maxilla  superiore  paulo  ante  maxillam  inferiorem  promi- 
nente  capite  paulo  breviore  postice  oblique  lanceolato-ensiformi 
apice  flexili  acute  rotundato  operculi  marginem  posteriorem  non 
attingente;  membrana  os  supramaxillare  inter  et  inframaxillare 
foramine  nullo  ; dentibus  maxillis  conicis  acutis  pluriseriatis , sérié 
externa  ceteris  majoribus  intermaxillaribus  anterioribus  tantum 
inframaxillaribus  longioribus  ; dentibus  pharyngealibus  conicis 
ex  parte  acutis  ex  parte  obtusiusculis  ; nucha,  dorso  sub  dorsali 
spinosa  regionibusque  suprascapulo-postaxillari  et  gulo-thoracico- 
ventrali  alepidotis  ; squamis  cetero  corpore  parvis  regionem 
postscapularem  inter  et  basin  pinnae  caudalis  in  sériés  65 
cire,  transversas  disposais  ; squamis  radios  anales  medios 
inter  et  dorsalem  in  sériés  24  cire,  longitudinales  dispositis, 
quarum  3 cire,  lineam  lateralem  inter  et  pinnam  dorsalem  radio- 
sam  ; linea  laterali  sub  anteriore  parte  dorsalis  radiosae  abrupta , 
tumida , tubulis  contiguis  notata , cauda  inconspicua  ; pinna  dorsali 
parte  spinosa  parte  radiosa  non  multo  breviore,  postice  quam 
medio  paulo  altiore , parte  radiosa  postice  parte  spinosa  sat  multo 
altiore  corpore  non  ad  paulo  humiliore,  obtuse  rotundata  vel 
angulata;  pectoralibus  flabelliformibus  capitis  parte  postoculari 
vix  vel  non  brevioribus  ; ventralibus  radiis  2 anterioribus  tumidis 


472 


P.  BLEEKER.  SUR  LES  ESPECES  INSULINDIENNES 


simplicibus  capitis  parte  postoculari  paulo  longioribus;  anali 
forma  et  magnitudine  dorsali  radiosae  subaequali  ; caudali  obtusa 
rotundata  capitis  parte  postoculari  vix  ad  non  breviore;  colore 
corpore  roseo-viridi , inferne  dilutiore;  iride  aurea  vel  rosea; 
maxilla  superiore  postice  macula  flava  fusco  cincta  ; corpore  fusco 
reticulato  cellulis  retis  oculo  non  ad  paulo  minoribus  ; pinnis  roseis , 
dorsali  et  anali  saepe  vitta  médian  a longitudinali  fuscescente 
vel  radiis  fuscescente  variegatis;  dorsali  spinosa  antice  dimidio 
basali  maculis  3 ad  1 nigricante-fuscis  oblongis  vel  rotundatis 
margaritaceo  annulatis. 

B.  6.  D.  11/14  vel  11/15  P.  2/16.  V.  1/5.  A.  2/14  vel  2/15. 

C.  1/12/1  et  lat.  brev. 

Hab.  ,Solor  (Larantuca);  Amboina;  Goram,  in  mari. 

Longitude  8 speciminum  60'"  ad  86'" 

Kern.  Cette  espèce  est  éminemment  distincte  par  le  prolon- 
gement relativement  peu  notable  de  la  mâchoire  supérieure,  par 
Tabsence  de  trou  dans  la  membrane  mâxillo-mandibulaire,  par  la 
formule  des  écailles  et  par  la  tache  noirâtre  sur  la  base  des  premières 
épines  dorsales.  C’est  la  seule  espèce  connue  des  vrais  Opisthognathus 
où  le  nombre  des  écailles  est  relativement  si  peu  considérable. 


GNATHYPOPS  Gill  = Lonchopistus  Gill. 

Corpus  subelongatum.  Dorsum  antice  et  regio  scapulo-tboraco- 
gularis  squamis  nullis.  Maxilla  superior  postice  truncata  longe 
ante  praeoperculi  marginem  posteriorem  desinens.  Dentes  maxillis 
pluriseriati  acuti,  sérié  externa  fortiores.  Pinnae*,  dorsalis  et  analis 
alepidotae,  dorsalis  spinis  flexilibus  10  ad  12  et  radiis  14  ad  17, 
analis  spinis  flexilibus  2 et  radiis  13  ad  16. 

Les  deux  espèces  indo-archipélagiques  sont  faciles  à distin- 
guer par  les  caractères  brièvement  exposés  ci-dessous: 


DES  OPISTHOGNATHOÏDES. 


473 


I.  Hauteur  du  corps  5 à 51/2  fois  dans  longueur  totale.  Membrane  maxillo- 
mandibulaire  sans  trou. 

a.  110  à 120  écailles  sur  une  rangée  longitudinale.  D.  12/16  ou  12/17. 
P.  2/20.  A.  2/15  ou  2/16.  Tête  3 Va  fois  dans  la  longueur  totale 
Corps  et  nageoires  dorsale  et  anale  à gouttelettes  éparses  et  noirâtres. 

1 Gnalhypops  papuensis  Blkr 

b.  Environ  65  écailles  sur  une  rangée  longitudinale.  D.  10/14  ou  10/15. 
P.  2/18.  A.  2/13  ou  2 '14.  Tête  4 fois  dans  la  longueur  totale.  Une 
série  de  cinq  taches  brunes  sur  la  base  de  la  dorsale. 

2 Gnathypops  Rosenbergii  Blkr 


Gnalhypops  papuensis  Blkr,  Fig.  2. 

Opisthogn.  corpore  subelongato  compresse , altitudine  5 cire,  in 
ejus  longitudine , latitudine  cire,  in  ej us  altitudine  ; capieobtuso 
valde  convexo  3^  circiter  in  longitudine  corporis;  altitudine 
capitis  fere-,  latitudine  capitis  2 cire,  in  ejus  longitudine; 
oculis  diametro  3^^  ad  3i^  in  longitudine  capitis , minus  diametro 
Î4  distandibus  ; regione  interoculari  concava  ; naribus  margini  oculi 
antero-inferiori  approximatis , posterioribus  rotundis  patulis , ante- 
rioribus  tentaculo  lato  subdigitato  munitis  ; cute  vertice , regionibus 
perioculari  et  operculari  verruculoso-rugosa  ; maxilla  superiore 
paulo  ante  maxillam  inferiorem  prominente , longe  ante  marginem 
praeoperculi  posteriorem  desinente,  1%  cire,  in  longitudine  capitis  , 
postice  convexo-truncata,  membrana  os  supramaxillare  inter  et 
inframaxillare  integra  foramine  nullo;  dentibus  maxillis  pharyn- 
gealibusque  conicis  acutis  pluriseriatis , maxillis  sérié  externa  ceteris 
majoribus  curvatis,  intermaxillaribus  inframaxillaribus  majoribus, 
squamis  nucha,  dorso  antice  regioneque  thoraco-gulari  nullis, 
cetero  corpore  minimis,  regionem  suprascapularem  inter  et  basin 
pinnae  caudalis  in  sériés  110  ad  120  transversas  dispositis  ; squa- 
mis radios  anales  anteriores  inter  et  dorsalem  in  sériés  40  cire. 


474 


P.  BLEEKER.  SUR  LES  ESPECES  INSULINDIENNES 


longitudinales  dispositis  quarum  7 cire,  lineam  lateralem  inter  et 
mediam  dorsalem  radiosam , linea  laterali  sub  dorsalis  radiosae  di- 
midio  posteriore  abrupta  tumida  tubulis  contiguis  notata,  media  cauda 
vix  vel  non  conspicua  ; pinna  dorsali  parte  spinosa  parte  radiosa  vix 
breviore  sed  duplo  cire,  humiliore , parte  radiosa  corpore  minus  duplo 
humiliore  oblique  et  obtuse  rotundata  ; pectoralibus  flabelliformibus 
capite  plus  duplo  brevioribus;  veutralibus  radiis  2 anterioribus 
tumidis  simplicibus  capitis  parte  postoculari  longioribus;  anali 
magnitudine  formaque  dorsali  radiosae  subaequali  ; caudali  obtusa 
rotundata  capitis  parte  postoculari  longiore  ; colore  corpore  superne 
roseo-viridi , inferne  roseo-margaritaceo  ; capite  corporeque  punctis 
majoribus  et  minoribus  nigricantibus  sat  numerosis  sparsis  ; piunis 
radiis  roseo-aurantiacis  membrana  dilutioribus , dorsali  et  anali 
marginem  liberam  versus  fuscescentibus , pectoralibus  punctis 
numerosis-,  dorsali  analique  punctis  parcioribus  sparsis  nigrican- 
tibus; iride  flava  margine  orbitali  fusca. 

B.  6.  D.  12/16  vel  12/17.  P.  2/20.  V.  1/5.  A.  2/15  vel  2/16. 

C.  1/12/1  et  lat.  brev. 

Syn.  Opisthognathus  papuensis  Blkr,  Descr.  trois  espèc.  inéd. 

Poissons  d’Amboine  et  de  Waigiou,  Versl.  Kon.  Akad. 

Wet.  2e  Rks  II  p.  333. 

Hab.  Waigiu,  in  mari. 

Longitude  speciminis  unici  250'". 

Rem.  Le  Gnathypops  actuel  paraît  être  la  seule  espèce  du  genre 
à plus  de  cent  écailles  sur  une  rangée  longitudinale.  Par  ce  ca- 
ractère , ainsi  que  par  les  gouttes  éparses  noirâtres  du  corps  et  des 
nageoires  dorsale  et  anale  et  par  la  grosseur  de  la  tête,  sa  dis- 
tinction est  des  plus  faciles. 

Gnathypops  Rosenbergii  Blkr,  Fig.  1. 

Opisthogn.  corpore  subelongato  compresse , altitudine  5%  cire  in 
ejus  longitudine,  latitudine  1%.  ad  in  ejus  altitudine;  capite 
obtuso  valde  convexo  4 cire,  in  longitudine  corporis  ; altitudine 


DES  OPISTHOGNATHOÏDES. 


475 


capitis  cire.,  - latitudine  capitis  cire,  in  ejus  longitudine ; 
oculis  diamètre  2%  ad  2M  in  longitudine  capitis , diametro  % ad 
distantibus;  regione  interoculari  concaviuscula  ; naribus  mar- 
gini  orbitae  antero-inferiori  approximatis , posterioribus  rotundis 
patulis , anterioribus  minimis  non  tentaculatis  sed  margine  elevato 
claudendis;  cute  capitis  superne,  rostro  lateribusque  verruculoso- 
riigosa  ; maxilla  siiperiore  paulo  ante  maxillam  inferiorem  promi- 
nente , sat  longe  ante  angulum  praeoperculi  desinente,  postice  obtusa 
convexo-truncata,  1%  cire,  in  longitudine  capitis;  membrana  os 
siipramaxillare  inter  et  infraraaxillare  integra  foramine  nullo  ; 
dentibus  maxillis  pbaryngealibusque  conicis  acutis  pluriseriatis , 
maxillis  sérié  externa  ceteris  majoribus  curvatis,  intermaxil- 
laribus  inframaxillaribus  longioribus  ; nuclia , dorso  antice , 
regionibus  suprascapula  thoracica  et  gulo-ventrali  alepidotis  ; 
squamis  cetero  corpore  parvis  regionem  suprascapularem  inter  et 
basin  pinnae  caudalis  in  sériés  65  ad  70  transversas  dispo- 
sitis  ; squamis  radios  anales  anteriores  inter  et  dorsalem  in 
sériés  24  cire,  longitudinales  dispositis  quarum  3 lineam 
lateralem  inter  et  mediam  dorsalem  radiosam;  linea  latéral!  sub 
dorsalis  radiosae  parte  anteriore  abrupta,  tumida,  tubulis  contiguis 
notata , cauda  inconspicua  ; pinna  dorsali  parte  spinosa  parte  radiosa 
sat  multo  breviore  postrorsum  altitudine  sensim  accrescente  parte 
radiosa  postice  corpore  paulo  humiliore  parte  spinosa  postice  duplo 
cire,  altiore  angulata;  pectoralibus  flabelliformibus  capite  duplo 
cire,  brevioribus;  ventralibus  radiis  2 anterioribus  tumidis  simpli- 
cibus  capitis  parte  postoculari  longioribus;  anali  magnitudine  et 
forma  dorsali  radiosae  subaequali  ; caudal!  obtuse  rotundata  capite 
absque  rostro  vix  breviore  ; colore  corpore  viridescente-roseo  ? 
iride  pinnisque  roseis  ; dorsali  maculis  5 magnis  nigricantibus 
subaequidistantibus , superne  fusco  marginata;  ventralibus  dimi- 
dio  apicali  fuscis  vel  nigris;  anali  vitta  longitudinal!  irregulari 
fusca  et  late  fusco  marginata;  caudali  fasciis  2 latis  transversis 
curvatis  fuscis. 

B.  6.  D.  10/14  vel  10/15.  P.  2/18.  V.  1/5.  A.  2/13  vel  e/14. 

C.  1/12/1  et  lat.  brev. 


476  P.  BLEEKER.  SUR  LES  ESPECES  INSULINDIENNES,  ETC. 

Syn.  Opislhognathus  Rosenbergi  Blkr,  Bÿdr.  ichth.  Nias,  Nat. 

T.  Ned.  Ind.  XII  p.  220;  Günth.,  Cat.  Fish.  II  p.  256. 
Hab.  Nias;  Singapura;  in  mari. 

Longitude  2 speciminum  123"'  cire. 

Kem.  Cette  espèce  fut  établie  sur  un  individu  mal  conservé, 
provenant  de  la  mer  de  Nias.  Depuis,  j'en  ai  trouvé  un  individu 
à Singapore,  où  les  couleurs  des  nageoires  sont  encore  bien 
marquées,  mais  où  le  corps  ne  montre  plus  aucun  détail  de  la 
coloration,  couleur  qui  me  paraît  avoir  été  plus  ou  moins  ver- 
dâtre ou  vert-rose. 

Le  Kosenbergii  est  voisin  du  Gnathypops^  Cuvieri  par  la  formule 
des  écailles,  mais  le  Cuvieri,  à en  juger  d’après  la  figure  dans 
la  grande  Histoire  naturelle  des  poissons , a la  tête  beaucoup  moins 
obtuse  et  moins  tronquée.  La  dorsale  n’y  porte  point  de  grandes 
taches  foncées  sur  la  base , mais  un  grand  ocelle  entre  la  quatrième 
et  la  huitième  épine,  et  la  formule  des  nageoires  donnée  par 
Valenciennes,  est  D.  10/18.  P.  17.  A.  2/16. 


La  Haye,  Décembre  1873. 


SUR  UN 


HYGROMÈTRE  A BALANCE, 


PAR 

MAURITS  SNELLEN. 


Si  Ton  compare  la  méthode  hygrométrique  chimique  avec  la 
méthode  physique,  on  doit  certainement,  quant  à Inexactitude 
des  résultats,  donner  la  préférence  à la  première.  Un  obstacle 
sérieux  s’oppose  toutefois  à son  application  dans  la  météorologie. 
Elle  nous  apprend  bien,  en  effet,  la  quantité  précise  de  vapeur 
d’eau , qu’un  certain  volume  d’air  tenait  en  dissolution , mais  elle 
ne  fait  pas  connaître  l’état  hygrométrique  de  l’air  à un  moment 
déterminé,  ce  qui  est  justement  ce  dont  le  météorologiste  a besoin. 
Par  contre,  les  divers  psychromètres  ont  le  défaut,  ou  bien  de 
fournir  des  indications  méritant  peu  de  confiance,  ou  bien  d’être 
d’une  observation  trop  embarrassante.  Ce  sont  sans  doute  des 
considérations  analogues  qui  ont  conduit  M.  von  Baumhauer 
à imaginer  son  hygromètre  aréométrique  *).  Cet  ingénieux  instru- 
ment consiste  essentiellement  en  un  aréomètre,  dont  le  flotteur 
est  rempli  de  fragments  de  pierre  ponce,  qui  ont  été  imbibés 
d’acide  sulfurique  concentré.  L’appareil  est  en  outre  disposé  de 
façon  qu’au  moyen  d’un  aspirateur  on  peut  y faire  passer  de 
l’air;  celui-ci  cédera  son  eau  à l’acide  sulfurique,  ce  qui  fera 
enfoncer  l’aréomètre.  Si  maintenant  on  connaît  la  quantité  d’air 
qui  a traversé  l’instrument,  il  sera  très  facile  de  déterminer, 

Archives  Néerlandaises  y t.  VI,  1871. 


478  MAURITS  SNELLEN.  SUR  UN  HYGROMETRE  A BALANCE. 

d’heure  en  heure  par  exemple,  la  proportion  de  vapeur  d’eau, 
en  notant  le  poids  qu’il  faut  enlever  du  plateau  de  l’aréomètre 
pour  qu’il  reprenne  sa  position  primitive  d’équilibre.  Au  moyen 
d’une  disposition  très  simple,  l’appareil  peut  d’ailleurs  aussi  être 
chargé  d’enregistrer  lui-même  ses  indications. 

Un  avantage  spécial  de  cet  instrument  est  encore  que  le  lieu 
où  l’on  observe  peut  être  très  différent  de  celui  dont  on  veut 
déterminer  l’état  hygrométrique  de  l’air.  Ce  dernier  lieu , en  effet, 
peut  être  mis  en  communication  avec  l’appareil  par  un  tube  de 
caoutchouc  ou  de  plomb.  De  cette  manière,  en  ayant  recours 
à un  ballon  captif,  on  serait  même  en  état  d’étudier  les  varia- 
tions hygrométriques  de  couches  atmosphériques  assez  élevées. 

Ayant  eu,  il  y a quelques  mois,  l’occasion  d’observer  un  hy- 
gromètre de  M.  von  Baumhauer , je  remarquai  que , même  en  ne 
faisant  pas  fonctionner  l’aspirateur,  la  position  de  l’instrument 
est  loin  de  demeurer  constante.  Cette  irrégularité  ne  peut  être 
attribuée  qu’à  des  variations  de  température;  celles-ci,  en  effet, 
amèneront  des  changements  dans  la  densité  de  l’huile  sur  laquelle 
flotte  l’appareil,  et  l’aréomètre  prendra  par  conséquent  une  nou- 
velle position  d’équilibre.  On  comprend  que , à raison  de  la  gran- 
deur et  de  l’irrégularité  de  la  dilatation  de  l’huile,  l’erreur  qui 
en  résulte  dans  les  indications  de  l’instrument  doit  être  assez 
considérable  et  ne  sera  pas  facile  à éliminer  par  une  correction 
de  température.  Pour  éviter  ces  imperfections , ainsi  que  quelques 
autres  défauts  accessoires , tels  que  la  grande  fragilité  de  l’appa- 
reil et  la  difficulté  de  le  réparer,  j’ai  eu  l’idée  de  déterminer 
l’augmentation  de  poids  non  par  un  aréomètre,  mais  au  moyen 
d’une  balance.  Le  petit ' instrument  que  j’ai  fait  construire  à cet 
effet  a la  disposition  suivante. 

Les  deux  extrémités  ouvertes  d’un  tube  en  U sont  en  commu- 
nication , au  moyen  de  bouchons  percés , avec  de  petits  tubes  de 
verre  deux  fois  recourbés,  dont  les  branches  descendantes  sont 
élargies  à leur  extrémité , sous  forme  de  petites  cloches  ouvertes. 
Le  tube  en  U étant  rempli  soit  de  pierre  ponce  humectée  d’acide 
sulfurique  concentré,  soit  de  fragments  de  chlorure  de  calcium. 


MAURITS  SNELLEN.  SUR  UN  HYGROMETRE  A BALANCE.  479 

le  système  des  tubes  est  suspendu  à Tun  des  bras  d’une  balance , 
de  telle  sorte  que  les  petites  cloches  plongent  d’environ  2 cm. 
dans  des  godets  contenant  de  l’huile  et  fixés  à un  support  par- 
ticulier ; au  moyen  de  tubes  débouchant  sous  les  cloches , on  pourra 
alors  faire  passer  de  l’air  sur  l’acide  sulfurique  ou  le  chlorure  de 
calcium , et  déduire  de  l’augmentation  de  poids  la  proportion  d’eau 
contenue  dans  l’air,  sans  qu’il  soit  besoin,  comme  dans  la 
méthode  chimique  ordinaire,  de  détacher  le  tube  exsiccateur. 
Les  indications  de  cet  instrument  seront  presque  indépendantes 
des  variations  de  température,  parce  que  la  partie  qui  plonge 
dans  l’huile  est  peu  de  chose  en  comparaison  du  volume  total. 
Un  autre  avantage  consiste  en  ce  que  le  renouvellement  de  l’acide 
sulfurique , qui  pour  l’hygromètre  aréométrique  est  une  manipulation 
assez  longue  et  délicate,  n’ofire  ici  aucune  difficulté;  il  suffit  dé 
détacher  le  tube  en  U , d’en  faire  écouler  le  liquide  employé 
et  d’y  verser  de  l’acide  concentré  frais,  opération  qu’il  est  bon 
de  répéter  une  couple  de  fois,  pour  être  sûr  que  tout  l’acide 
dilué  est  évacué.  Au  lieu  d’acide  sulfurique,  on  peut  d’ailleurs 
aussi  se  servir  de  chlorure  de  calcium.  Enfin,  on  voit  aisément 
que  l’appareil  est  très  facile  à construire  ou,  en  cas  d’accident, 
à réparer. 

Le  changement  proposé  à l’hygromètre  aréométrique  écarterait 
donc  l’objection  qu’on  pouvait  encore  faire  à l’introduction  de  la 
méthode  chimique  dans  l’hygrométrie  météorologique.  Quelques 
observations  préliminaires  me  donnent  lieu  de  croire  que  l’instru- 
ment ne  trompera  pas  mon  attente  ; toutefois , une  expérience  plus 
prolongée  est  nécessaire  pour  décider  s’il  satisfait,  sous  tous  les 
rapports,  aux  exigences  de  l’observation  journalière. 

Utrecht,  Octobre  1874. 


REMARQUES. 

Je  ne  puis  qu’applaudir  aux  efforts  de  M.  le  Dr.  M.  Snellen  pour  faire  entrer 
dans  la  pratique  l’idée,  émise  par  moi,  de  déterminer  l’état  hygrométrique  de 
l’air , dans  les  observatoires  météorologiques , non  plus  par  les  hygromètres  et 
psychrometres  ordinaires , mais  par  la  pesée  de  l’eau  contenue  dans  un  volume 


480 


REMARQUES. 


connu  d’air.  Toutefois,  je  ne  crois  pas  que  la  disposition  qu’il  a adoptée  puisse 
conduire  au  but,  surtout  si  l’on  veut  que  l’instrument  enregistre  lui-même  les  ' 
observations. 

M.  Snellen  reproche  à mon  appareil  sa  grande  fragilité.  Ce  reproche  serait 
parfaitement  fondé  si  l’instrument  devait  nécessairement  être  construit  en  verre, 
comme  l’était  le  modèle  que  M.  Snellen  a vu  à Utrecht.  Mais,  ainsi  que  j’en 
ai  fait  la  remarque  (Arch. , t.  VI,  p.  421),  il  n’y  a absolument  aucune  raison 
pour  ne  pas  le  construire’  en  métal , le  corps  de  l’instrument  étant  par  exemple 
en  tôle  de  laiton  dorée , et  les  tubes  de  verre  étant  remplacés  par  des  tubes  de 
cuivre  étirés,  très  minces,  tels  qu’on  les  trouve  aujourd’hui  dans  le  commerce. 

Le  renouvellement  de  l’acide  sulfurique,  lorsque  celui  qui  remplissait  l’appareil 
est  devenu  impropre  à absorber  plus  longtemps  la  vapeur  d’eau,  est,  comme  je 
l’ai  dit  p,  423 , si  simple  , que  l’opération  entière  ne  prend  pas  plus  d’une  couple 
de  minutes  et  s’exécute  tout  aussi  facilement  que  le  remplissage  du  tube  en  U 
de  M.  Snellen. 

La  seule  objection  sérieuse  est  celle  qui  concerne  la  dilatation  irrégulière  de 
l’huile  d’olive  ; il  pourra  effectivement  en  résulter , lorsque  la  température  variera , 
des  erreurs  assez  considérables , parce  que  l’aréomètre  entier  plonge  dans  le 
liquide.  A.ussi  ai-je  recommandé  de  placer  l’appareil  dans  un  local  dont  la  tem- 
pérature reste  autant  que  possible  constante , par  exemple  dans  une  cave.  Si  les 
circonstances  ne  le  permettent  pas , l’influence  que  la  température  exerce  sur  la  posi- 
tion de  l’instrument  pourra  être  corrigée  en  adaptant  à l’aréomètre  une  cloche  rem- 
plie d’air.  La  correction  ainsi  obtenue  serait  parfaite,  si  la  dilatation  de  l’huile, 
entre  — 10°  G et  -f-  ^0°  C , était  aussi  uniforme  que  celle  de  l’air.  Cela  n’est 
malheureusement  pas  le  cas  pour  l’huile  d’olive.  Quant  à l’huile  de  pétrole , que 
j’ai  recommandée  également  (p.  421),  j’ignore  quelle  est  sa  dilatation;  c’est  un 
^ point  que  j’espère  examiner  plus  tard. 

En  ce  qui  concerne  la  modification  proposée  par  M,  Snellen,  j’objecterai  que 
si  l’on  veut  charger  l’appareil  lui-même,  c’est-à-dire  ici  le  fléau  de  la  balance, 
d’enregistrer  les  observations,  la  profondeur  plus  ou  moins  grande  à laquelle 
les  petites  cloches  seront  plongées  dans  l’huile  exercera  sur  les  indications  une 
influence  perturbatrice  très  appréciable. 


E.  H.  VON  Baümhaüer. 


AHCmVK.S  A’EKHL.  T.  IX. 


ri.vi 


CARTE  DES  EAUX  DE  LA  ZÉLANDE, 

INDIQUANT  EN  POIDS, LA  PROPORTION 
D'EAU  DE  MER  CONTENUE  DANS  100  PARTIES  D'EAU 


Zith'Emnk  !/3ingerSaaiim 


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