OBSERVATIONS
SUR LA
PHTHISIE PULMONAIRE,
ou
E SSAI
SUR LA
MOUSSE DTSLANDE,
CONSIDEREE
Comme Medicament, et comme Ali-
ment, dans eette Maladie.
Par J. B. REGNAULT, D. M.
Ci-devant Medecin de VHopital de la charite de
Chareritoit, ancien Medecin des Hapitaux Mili-
t aires, et des Ar^mies Framoises^ S^c.
LONDRES :
Sc trouve chcz I'Auteur, No. 13, Duke Street, Manchester
Square ; et se vend chez Dulau et Co. Soho Square ;
Callow, Crown Court; Cox, dans le Borough; et
a Paris, chez Pougens,.jQuai Voltaire.
1802.
[ Entered at Stationers Hall. ]
D« rimprimeric dc L. N ardihi, No. 15, Poland-street.
T J B L E.
' INTRODUCTION 5
Du Lichen dTslande 13
Description dii Lichen dTslandt 15
Des lieiix oCi il sc; trouve 1^
Des Qualit^s Medicinales du Lichen
dTslande 19
Le Lichen dTslande considere comme
Aliment SS
Du Regime pendant 1' Usage du Lichen
dTslande 4fS
Observations a i'appui de notre m^thode
de Traitement 50
Quelques Reflexions sur diff^^rens mo-
yens qui ont 6t6 pr6conis6s et emplo-
yes dans le traitement de la Phthisic
Pulmonaire 8 1
Du Sejour des Etables ibid,
De I'Eau de Goudron ' 83
Des Acides Min^raux 84?
Des Balsamiques 87
Du Lait 88
Des Exutoires 92
De I'Eau de Chaux
Pes Eaux Min6rales, et particulierement
de cellps de Bristol ^6
J •■
Ojjtima Medicina Cibus opportwii^ daius. CpLSE.
(
INTRODUCTION.
Si Ton vent r6fl6chir au terrible ravage que
i'ait la Gonsomption Pulmonaire, sp6cialement
parmi la jeunesse, et h rin6fficacit6 des efforts
qu'on a tenths jusqu'ici pour en arrdter les pro-
gr^s et en pr6venir les suites funestes, on sera
convaincu qu'en fixant les regards sur un mo-
yen efficace de rendre la sant6 aux personnel
B
- ( 6 )
afflig^es de cette cruelle maladie, c'est consoler
k la fois et servir rhumanit6.
Nous ne pretendons pas donner un trait6 sur
la Phthisic ; tant d'hommes habiles ont decrit
cette maladie, et d'une manicire si lumineuse,
que Ton ne pourroit que r6p6ter beaucoup
moins bien ce qu'ils ont d6j^ dit.
C'est seulement une suite d'observations que
nous voulons presenter ici sur Tadministration
heureuse d'un remade* d6jk connu, mais trop
n6glig6, ou employe d'une mani^re imparfaite.
Rien n'est plus facile que de se former des
systdmes, de les adopter ensuite exclusivement,
et d'en imposer au public qui a toujours plus
de goCit pour le brillant que pour le vrai. Le
deslr d'abreger le chemin qui conduit k la c6-
16brite et ci la fortune, a d6tcrmin6 plus d'un
m^decin a pr^fercr ce moyen k celui de I'obser-
vation, qui est lent, p6nible, et n'a rien d*6cla-
* La Mousse J'IsIandc.
( 7 )
tant. On ne s'est done occup6 la plupart du
temps, dans I'^tiide de la m^decine, que des
productions de rimagination auxquelies on s'est
efforc6 de soumettre et d'adapter la pratique
de i'art. *' L'imagination," dit le Chancelier
Bacon, '* cr6e, invente, embellit lesarts; raais
** nuit aux v6ritables sciences."
Quarid on porte dans la pratique de la m^de-
cine des yeux attentifs, on decouvre Tinsuffi"
sance des theories. La nouvelle physique, mal-
gr6 tout ce qu'elle a de brillant, prouve ^ chaque
pas combien elle laisse ^ d^sirer, et que son
^clat m^me ne dissipe pas toutes les t6n^bres.
On reconnoit la necessite d'appeler son se-
cours des faits av6r^s et certains, et des expe-
riences reit6r6es. Ce n'est pas la speculation
seule qui doit 6tre le guide du m^decin, il taut
lui donner d'autres appuis ; il faut qu'en obser-
vateur exact, il cherche dans la Nature elle-
meme la y^rite de ses id^es, c'est-a-dire, qu'il
B y
( 8 )
faut soumettre la th6orie a des epreuves assi-
dues, et en attend re la confirmation de U
multitude des faits. " Le veritable Medecin,"
dit le c616bre Baglivi, " est celui qui ^tudie Ic
'* mieux la nature, et qui est conduit k une
" profonde p6n6tration de ses myst^res les
'* plus caches, par une suite continue d'ob-
" servations faites avec une sage et miire r^^
** flexion. Ce sont les observations qui sont
** les demonstrations des m6decins."
On verra par nos traitemens que nous n'a-
vops pas n6glig6 les moyens g6n6raux lorsque
les circonstances I'exigeoient ; mais que ce qui
nous a conduit a un succ^s soutenu, c'est d'a-
voir donne une grande activity k un remade
qu'on a administr6 jusqu'ici a beaucoup trop
legere dose pour en obtenir le succ^s dont il
est susceptible.
Pour juger d'une mani^re plus certaine les
6minentes vertus du Lichen d'Islande, nous
( 9 )
I'avons aussi employ^ souvent seul, sans aucunc
addition ni melange. On auroit certainement
des id^es plus positives sur les vertus des m6di-
camens, si banissant la polipharmacie des Arabes
on edt toujours suivi cette m^thode aussi simple
que sCive.
Nous nous attendons bien a rencontrer de
violens contradicteurs, des ^crivains sceptiques
qui, malgre les faits les plus constans, soutien-
dront qu'il est impossible de gu^rir une Phthi-
sic confirmee ; mais la bonne foi des praticlens
^clair6s et v6ridiques qui chaque jour offiiront
des faits nouveaux, repondra d'une mani^re
victorieuse k cette esp^ce d'hommes qui a in-
finiment nui k I'avancement de I'ait. Qui,
nous devons le dire, une des causes qui a Ic
plus contribu6 au peu de progr^s qu'on a fait
dans le traitement de la Phthisic Pulnionaire,
c'est I'id^e qu'cUe est incurable, idee que par-
tagent malheureusement encore la plupart des
( 10 ) ■
m6decins ; combien ne voyons-nous pas ce-
pendant de maladies trait^es aujourd'hui avec
siicc^s, qui autrefois 6toient regardees au-dessus
des ressources de I'art ?
II faut cependant convenir que les maladies
de poitrine ne pouvant avoir qu'une marche
lente et insensible vers la gu6rison, il est bien
essentiel, si I'on veut profiter de I'avantage
d'un bon traitement, d'y mettre de la suite et
de la pers6v6rance. Les malades sont assez
gen6ralement capables de prendre un parti,
mais on en trouve peu qui sachent le suivre
avec Constance. Aussi peut-on remarquer
gen^ralement que les grandes entreprises n'ont
rien d'extraordinaire, mais qu'il n'y a rien de
plus rare parmi les hommes que ce qu'on ap-
pelle la tenue dans leurs resolutions.
C'est une s^rie de faits que nous 6tablissons ;
c'est Texp^rience de dix ann^es que nous sou-
mettons au public, pendant lesquelles le succ6s
( II )
de ce remade nous a suivi en Allemagne, en
France et en Angleterre.
Nous avons observ6 attentivement les diff6-
rentes m^thodes curatives de ces difF6rens pays,
en les comparant les unes aux autres, sans pr6-
jug6 national, sans pr6jug6 d'adoption ; nous
appliquant k connottre et k saisir avec justesse
les nuances qui les distinguent, et k en cher-
cher le principe dans la diversity du climat,
corame dans celle des temperamens qu'il pro-
duit. Get objet nous a paru digne de la
science que nous professons, et utile k son per-
fectionnement g6n6ral. Nous nous proposons,
dans un autre ouvrage, de faire part de nos re-
flexions sur ce sujet int^ressant.
OBSERVATIONS
SUR LA
PHTHISIE PULMONAIRE,
ou
ESSAI
SUR LA
MOUSSE D'ISLANDE,
CONSIDEREE
Comme Medicament, et comme Ali-^
ment, dans cette Maladie.
LICHEN D'ISLANDE,
LICHEN ISLANDICUS, Lat.— ERYNGO-
LEAVED LICHEN, Angl — ISLAND
MOOS, All— FIALLA GRAAS, Isl.
Synonym. Lichen foliis oblongis, laciniatis,
marginibus cpnniventibus, ciliatis, FLor. lapp.
445.
14 )
Coralloides cornua Damae refercns Tournef.
Inst, rei herb. pag. '665, et Hist, des Plantes
des environs de P.aris, pag. 316.
Lichen fronde convexa, ciliat^, pustulate,
obtus^ ramosa, ulrinque levi, raniulis brevissi-
mis bicornibus, HalL. Stirp. Helv. Spec. 1978,
pag. 82.
Lichenoides rigidam eryngli foha rcferens.
Dill. hist. muse. pag. 209.
Lichenoides Islandicum. Hoffm. pi. Lickenos,
vol. l.fasc. 2. tab. 9./. I. p. Flor.Dan. 155.
Withering Bat. arr. p. 196.
Lichen pulmonarius minor angusti-follus,
spinis tenuissimis ad marginem omatis, re-
ceptaculis floruni transversa oblongis, rubris vel
ex rubro ferrugineis. Michel, genera, plant, 85.
Muscus pulmonarius terrestris sanguineus.
Breynii Valent. Muse.
Muscus Islandicus membranaceus, insigniter
sinuosus, in margine pinulis ciliaribus ornatus.
Raii. — hist, plant, p. 30. vol. 3.
Muscus catharticus borrichi. Honnebow's
History of Iceland.
( 15 )
Description de la Plante.
Cette Plante porte des feulllcs d'line couleur
fauve ou de giis cendr6 ; un verd pale s'y
trouve quelquefois m^ld; m6me en ^tat de sic-
cit6, mais il est bien plus apparent quand la
plante est fratche : la partie inf^rieure est souvent
teinte d'une couleur de sang.* Les feuilles
aft'ectent presque toujours la forme de corne de
daim, mais leur dentelure varie beaucoup :
elles ont deux ou trois pouces de long, elles
sont lin^aires, lacini^es, garnies de cils tr^s-fins
et courts : le dessous des feuilles est convexe
le dessus concave : leur surface enti^re est lisse,
luisante et pustul^e ; et leur substance est co-
riace, membrancuse et difficile i\ d^chirer, dans
I'etat de fraicheur comme dans celui de siccit6.
La tige seule devient cassantc quand elle est
dess6ch6e, les cupules sont terruinales, sessiles,
orbiculaires, et d'un rouge brun.
* Aeder dans sa Planche 155 de la Flore Danoise, Ta re-
present^ ainsi. T. Breynius, qui I'a obscrv6 pres de Dantzick,
a tiouv6 vers la partie inferieure tine liqueur semblable a du
lang,
C 2
( 16 )
Lieux oil elk sc trouve.
Ce Lichen croit naturellement en Europe,
dans les lieux st6riles, ancles, ou pierreux.
Xournefort I'a observ6 clans les environs de Paris.
Haller assure qu'on le trouve sur toute la chaine
des Alpes. StoU en a vu abondamment en Hon-
grie. Gilibert affirme que la Lithuanie en pro-
duit en assez grande quantity, cela doit etre sans
doute sur les monts Crapacks.
Dillen dit qu'il croit dans les communes aux
environs de Londres, dans les parties montucuscs
duCt6. de Cambridge et a Stieperstone en Shrop-
shire. Ray nous apprend qu'un botaniste I'a
trouv6 dans les montagnes de Galles.
Mr. Newberry en a vu ^ Dartemoor en Devon-
shire, sur des rochers; il a 6t6 aussi observ6 sur les
monts Pentland pr6s d'Edinbourg et dans di-
verses parties des montagnes d'Ecosse et du plat
pays. Sibbaldus Fa trouv6 a Stroma, I'une des
Hebrides. Acder dit qu'on le rencontre dans la
province de Dronthein en Norvvege.
Fabricius I'a observe sur ics rociicr? qui bor-
dent le Cat6gat.
( 17 )
Les montagnes de Hartz dans la Tliuringe
(Saxe 61ectorale) en fournissent abondamment ;
mais les lieux ou il croit en plus grande quan-
tity, sont la Laponie et I'lslandc, surtout la La-
ponie, qui paioit 6tre essentiellement la patrie
des Lichens*.
* Les Lichens sont d'un grand usage en m^decine dans la
teinture et dans I'economie rurale et domestique.
Le Lichen des Murs (Lichen Parietinus) est, suivant Ic
Earon de Haller, un puissant tonique contre la diarrhee. Lc
Lichen du Genevrler ( Lichen Juniperinus) est un specifiquc
contre lajaunisse. Le Lichen de Roche (Lichen Saxatilis)
sert aux paysans de I'Oelande et de la Gothlande a teindre le
fil en brun et en rouge, en faisant bouillir le fil et ce Lichen
a petit feu dans un suffisante quantite d'eau et de lessive. lis
composent avec le Lichen des Murs, dont nous venons de
parler, et I'alun, une teinture jaune pour lesl aincs. Le Lichen
Tartareux ( Lichen Tartareus J et le Lichen Calcareux
(Lichen Calcareus) sont egalement propres a composer une
teinture rouge, en les faisant mac6rer pendant six semaines ou
deux mois dans I'urine. Le Lichen Roccelle (Lichen
Roccella J le Lichen Parellc ( Lichen Parellus ) et le Lichen
Stigien ( Lichen Stigius J sont employes indifFeremment
pour faire une teinture purpurine ou violerte.
Le Lichen de Prunellier (Lichen Prunastri) est d'unc
grande utility en Egypte ; on s'cn sert pour faire du pain et
( 18 )
II est sans odeur ; sa saveur est un peu am^re ;
si on le mac he, la salive le dissout en mucilage
doux. Une once de ce Lichen, bouilli un
quart d'heure dans douze onces d'eau, a donn6
sept onces de mucilage aussi ^pais que celu;
qu'on se procure par la dissolution d'une partie
de gomme arabique dans trois parties d'eau.
Les habitans d'Islande en obtiennent un ali-
ment agreable et nourrissant a la fois.
C'est probablement des Islandois qu'on a ap-
pris les qualit6s m^dicinales de ce Lichen. lis
I'employent comme laxatif lorsque la plante
est dans un 6tat de fraicheur ; mais elle perd
cette quality par la dessication ; on peut en-
core Ten extraire par une leg^re infusion dans
I'eau : alors elle devient un remede efficace
pour la consomption, la toux, la dissenterie et
la diarrh^e.
de la bierre. Le Lichen Rhangiferinus qui v6getc sous la
neigc, est une partie de I'ann^e la principale subsistance des
Rennes dont les troupcaux sont la seule richesse des Lapons,
puisqu'ils lui fournissent scs v^temens, son lit et sa nourri-
turc.
( 1^ )
DES QUALITES MEDICINALES DU
LICHEN D'ISLANDE*.
Le Lichen d'Islande est b6chique, tonique,
agglutinatif, antiseptique, sedatif, corroborant
en mfeme terns qu'adoucissant. Sibbald i- et
Gilibertg. disent qu'il a 6te employ6 avec un tr^s-
grand succes contre la coqueluche. Quelques
auteurs lui ont reconnu des vertus anthelmin-
tiques. Haller^- et d'autres m6decins nous as-
surent que son infusion th^itorme d^truit les
hydatides de la matrice ; les medecins du nord
le regardent comme sp^cifique dans la Phthisic,
1. Hist. Plantarum in Scotia spont6 nascentium, p. 39.
3. D6monstrations Elementaires de Botan. torn. 3, p. 403.
3. Stirp. Helv. Spec. 1978, p. 82.
* Dans le cours de cet Ouvrage cette Plante sera nomm6c
Indiffercmment Lichen d'Islande ou MouMse d'Islande.
(20)
et sans contredit c'est le meilleur remade qu'on
ait encore trouv6 centre cette maladie. Ses
excellentes qualit^s sont parfaitement decrites
dans les m6moires de la Soci6t6 des Sciences et
Arts de Suede.
Scopoli paroit etre un des premiers qui ait
appel6 Tattentlon des m^decins sur Tusage de
ce Lichen dans Ics ditf6rentcs consomptions.
Le Dr. Hertz 5- rapporte plusieurs exemples de
ses heureux efFets dans cette maladie. II dit
aussi que ce remade h6roi"que dans la dissen-
terie a si bien r^pondu a son attentc, qu'il n'a
jamais eu besoin d'employcr aucun autre mo-
yen. Le Dr. Schoneider medecin Danois,
assure d'apr^s une foule d'exp6riences que c'est
le plus puissant medicament connu contre Ja
Phthisic Puhnonaire : il proteste qu'en cinq ou
six semaines il a vu des malades pariaitement
retablis par I'usage de ce Lichen. II est vrai
de dire, que dans ces cures si promptes, la
4. Ann. Hist. Nat. 1. 1769, p. 112. et Ann. 11, p, 141.
5. Briefe an Aerzte. vol. 2.
6 Societal. Medicas Hauniensis Collect, vol. 1. n?^, 8vo.
( 21 )
iPhthisie 6toit une suite de maladies ^ruptives.
Mr. Cramer, qui s'en est occup6 particuliere-
ment, a public, dans un savant 6crit, une mul-
titude de faits qui prouvent ses ^minentes ver-
tus dans les toux inv^ter6es, le crachement de
sang et la Phthisie Pulmonaire. Si quelquefois
il n'a pas gueri entierement, dit-il, il a au moins
constamment diminu6 les accidens, et procure
-un soulagement sensible. Tromsdorf,^- qui a tr^s-
bien ecrit sur cette production veg6tale, la re-
commande d'une mani^re positive. StoU ^- af-
firme qu'elle est tr^s-utile dans les cas de re-
lachement et de foiblesse des poumons, dans
les constitutions scrophuleuses et lorsque la poi-
trine est continuellement abreuv^e de s6rosit6s ;
le Lichen d'Islande, par sa vertu tonique et
plastique, corrige cette diath^se catharreuse.
La vertu tonique de cette substance est telle
aux yeux du Dr. Stoll, qu'il la conseille puis-
7. Dissertatio inauguralis medica de Lichene Islandico,
1 780, in 4to.
8. Dissertatio de Lichene Islandico.
9. Ratio Medendi, edit, de Paris, p. 1 17.
D
( 32 )
samment lorsque les forces du poumon ne peu-
Kfent suffire a I'expectoration, ou que I'abon-
dance de cctte meme expectoration atVoibllt
promptement le malade. Dans la toux stoma-
cale que; les mauvais traitemens de la multitude,
tels que les m6dicamens aqueux, tildes, 6mol-
Hens, huileux, font d6g6nerer souventen Phthi-
sic Pulmonaire, Stoll conseille le Lichen d'ls-
tande, apres avoir 6vacue les premieres voies ;
nous n'avons qu'a nous louer d'en avoir fait
usage dans pkisieurs cas pareils.
Le Dr. Crichton qui, de tous les auteurs qui'
ont ecrit sur le Lichen, a le plus born6 son usage,
convient cependant qu'il est excellent dans la
Phthisic Hemoptoique et la Phthisic Pituiteuse
ou Muqueuse. ** Le Lichen d'Islande," dit-il,
" paroit toujours avoir un effet Evident, cclui
" de fortifier la digestion et toute Thabitude du
" corps. Dans la Phthisic, ses bons effets con-
sistent am^liorcr la mati^re qui doit 6tre
" expectoree, h. rendre la toux moins frequente
" et rexpcctoration plus ais6e, a diminuer I'ir-
XO. Journ. de Medecine dc Londres, 1789.
( 23 )
" ritabilit6 du malade, a prevenir ou calmer
** bcaucoup la fi^vre 6tique."
Dillen parle de ses hautes veitus dans les
dljSerentes Consomptions : et nous devons dire
que, d'api^s notre propre experience, le Lichen
d'Islande a et6 employe avec le plus heureux
succes dans la Phthisic Dorsale*. Mr. Quarin^^- a
remarqu6 que lorsque le Lichen 6toit inefficace,
il n'avoit jamais produit de mauvais effets dans
les grandes suppurations, et qu'il avoit la vertu
de taire mieux supporter et dig6rer le lait a un
estomac langulssant et foible. Mr. Elwert I'a
recommand6 centre la Phthisic ulc^ree. D'apr^s
une foule d' observations, il est constant que ce
remade a reussi meme dans le cas ou il y avoit
depuis long-temps des sueurs nocturnes, oh les
eorts de la toux faisoient vomir, oh la maigreur
6toit extreme, oCi la fi^vre lente 6toit inveter6e.
11. Dillen Histor. Muse.
* Voyez rObseivation XVII.
1 2. Animadveisiones practicae in diversos morbos, p. 79,
et seq.
13. Fasciculus Plantarum, 1786.
D 2
( 24 )
Ses propri6t6s sudorifiques et diur<^tiques sont
g6n6ralement reconnues, et si I'observation ne
eonstatoit pas ses autres vertus dans la Phthisic,
son actipn vers I'organe de la peau, vers les
urines et sur I'expectoration, suffiroit pour lui
faire accorder la propri6t6 de guerir certaines
pulmonics, puisqu'enfin une indication essen-
tielle dans le traitement de la Phthisic est de
retablir les fonctions de la peau et de son tissu
cellulaire, afin que la transpiration insensible la
plus abondante de toutes les s6ci6tions, ainsi
que les autres qui se font par cet organe, ne
refluent point sur les poumons. Or le Lichen
d'Islande possede la propri6t6 de porter vers la
surface du corps, ind6pendamment de celle
d'agir avec force vers les urines.
Chacun sait corti'bien les substances muci-
lagineuses sont employees dans les affections
de poitrine ; en effet ces substances lubr6fient
les parois des visceres et des vaisseaux ; elles
apaisent le spasnie et I'irritation, calment I'in-
flammation et la douleur, envejoppent et d6-
* Voyez rObservation XV.
( 25 )
truisent I'acret^ des fluides, adoucissent leur
saveur trop forte, elles 6moussent enfin I'ac-
tivit6 des sues ^cres de premieres voies. Mais
comme la nature de ces maladies demande
une longue perseverance dans le traitement,
I'usage prolonge des mucilagineux a en gene-
ral de grands inconv^niens, en ce qu'ils sdi-
journent facilement dans restomac ci raison de
leur fadeur ; ils affoiblissent et diminuent le
ton de ce visc^re, ils otent rapp6tit, retardent
et font languir la digestion ; vers6s en trop
grande quantity dans le sang par les vaisseaux
chileux, ils otent h ces fluides leur propriete
active, stimulante, et ils enl^vent peu a peu
au mouvement Tenergie n6cessaire pour Ten-
tretien de la sant6. Mais si le Lichen d'ls-
lande jouit des qualit6s des mucilagineux,
il porte avec lui le correctif des inconveniens
qu'ils pr^sentent ; il augmente le ton des fi-
bres, il fortifie aiguise rapp6tit, aide la di-
gestion, d^truit les nausees, corrige I'acescence
des humeurs des premieres voies, et s'oppose a
la production spontan6e des aigres, Il defend
les fluides auimaux de la putrefaction, arrete
( 26 )
les progr^s de cette alteration, et change la na-
ture sceptique des humcurs qui ont subi cctte
fermentation.
On trouve encore un remede souverain dans
le Lichen d'Islande quand I'h^niophthisie est
de nature scorbutique, et qu'il y a dans les ma-
lades des signes de dissolution, avec oppression,
rougeur des joues, toux s^che et abattement:
cette derniere circonstance jointe a une foi-
blesse considerable dans les forces du systeme,
ou dans celles des poumons, justifie encore plus
I'heureux emploi de cette plante precieuse.
Quand il s'agit d'^teindre la chaleur dtique,
de modcrer le mouvement intestin du sang,
et pr6venir le retour de I'h^mophthisie et ses
suites, I'usage du Lichen comme aliment et
medicament a des vertus vraiment sp6cifiques,
qui lui donnent une 6minente superiority sur le
lait d'anesse, et tous les remedes pectoraux.
Le quinquina, qui a et^ vante dans ces cas
par Morton, Brunner, et Wa'loff, n'est pas a
beaucoup pres aussi utile que le Lichen, qui a
tous les a vantages du premier sans les inconve-
niens du second. On ne peut oublier que le
( 27 )
quinquina 6tant stiptique* peut etre nuisible, en
ce qu'il a sensiblenient des eifets d'astriction qui
peuvent renouveler I'h^morragie habituelle de
deux mani^res ; la premiere c'est que le systeme
vasculeux, inopin6ment reserr6 par I'impression
profondement ressentie du remade astringent,
donne r^ellement lieu a une pl6thore respec-,
tive, d'o^i nait la cause occasionelle de la re-
chute de rh6mophtisie. La seconde c'est que,
par une suite de Taction physique et vilale du
medicament administr6, la constipation, qui en
€st un effet naturel, am^ne pour I'ordinaire une
disposition h6morragique g6n6rale, marquee
m6me chez les sujets non h6mopto'iques par
* Cortex peruvianus Phthysln ab haemopthysi inflani-
matoria natam, ipsamque hanc haemophtisin adeo non Sanat,
ut illatn insigniterpromoveat, et aegros In perniciem precipites
agat. Inde etiam ratio habetur, quare adstringentia in ha-
viopthysi phlogistica^ etsi vulgata praxis iisdem toties utatur,
morbum plerumque immedicabilem reddant.
Pure alicubi intra corpus concluso, aut presente san-
guinis phlogistica diathesi, aut pulmonibus pen^s abscessum
graviter inflammatis hie cortex aut inutilis, aut perniciosus
artem ludit. Stoll. ratio medendi, p. 191.
( 28 )
line tension de pouls, et. dans la pi apart deS
malades, par la perte de quelques gouttes de
sang par le nez, le poumon, ou les h6morroides.
D'ailleursla diath^se inflammatoire des liqueurs,
et un vice d'irritabilite independant d'une foi-
blesse radicale contr'indiquent 6minemment
I'usage du quinquina, ainsi que I'a d6iTiontr6,
par des observations, De M6za medecin
Danois.
Les bons efFets du Lichen d'Islande sont sur-
tout tres-sensibles dans un des symptomes les plus
alarmans de la Phthisic, la diarrh6e*. La foule
de rem^des que Ton a employes dans ce cas
est innombrable, et tons les praticiens convien-
nent de leur infid61it6, et quelquefois de leur
danger.
Mr. Pauliski '^-j en parlant de la grande ef-
ficacite de cette substance v6getale centre la
14. Vis Corticis Peruviani suspecta in hemoptoes et
Phthiseos curatione — Vide Acta Societatis Medicte Regits
Haumensis, torn. 1 . p. 40.
* Vovez les Observations X. et XVI.
15. Med, pract. beob. 2. Samml 104.
1
( 29 )
t
Plithisie Pulmonaire, remarque qu'elle pr^vien
ou diminue la diarrhee, ce pbenomene si fu-
neste aiix Phthisiques. II pioclarae surtout ses
vertus contre la Phthisic occasionn^e par la M6-
tastase* de quelque humeur acre sur les pou-
mons; enfin il declare qu*il ne lui a jamais vu
produire de mauvais effets.
Lorsque la maladie est avanc6e, le but dii
traitement ^taiit de pr6niiinir les humeurs contre
la putrefaction dont elles sont menac6es, et de
corriger leur acrimonie ^ctuelle, on doit em-
ployer h. cet efFet les antiseptiques joints aux
antiscorbutiques. Mais si ces m6dicamens sont
indiqu^s pour attaquer I'^tat g6neral du sys-
tdme humoral, il arrive souvent que par leur
nature ils nuisent i\ I'^tat actuel des organes
de la respiration. Xe Lichen d'Islande, exempt
de ces inconv6niens, rempht cette double in-
dication de la mani(^re la plus satisfaisante ; et
il nc pent exister aucun doute sur ses 6m^lientes
vertus antiseptiques et meme antiscorbutiques,
* Voyez les Observations V. IX. XIII. et XIV.
( 30 )
pourv6 qu'on le prenne k une dose assee
forte *.
LE LICHEN D'ISLANDE a 6t€ donn6 cuit,
soit dans I'eau, soit dans le lait ; quelquefois en
infusion, sou vent en decoction ; il a ete aussi
donn6 en poudre-f-; on a m^me administr^,
dans ceitaines circonstances, I'extrait de cc
v^g^tal.
Dussions-nous paroitre minutieux aux yeux
de certains esprits tranchan's qui font la m6de-
cine en grand, nous recommanderons I'atten-
tion la plus scrupuleuse a separer de la Mousse
d'Islande, avant de Temployer, les substances
6trangdres qui semblent faire corps avec elie,
cette preparation preliminaire est essentielle,
si on veut jouir sCirement des vertus de cettc
plante. II faut ensuite la faire infuser dang
* Voyez r Observation VII.
f Dodoneus dans son histoire des plantes ^crite cn 1 650,
dit que les m^decins de son temps donnoient le Lichen d'Is-
lande en poudre.
Sibbaldus nous assure <jue la poudre de Lichen d'Islande
prise dans la petite biere est sp^cifique dans la coqueluchc.
( 31 )
l*eau bouillante, pour en s6parer touies les par-
ties terreuses dont elle 6st 6urcliarg6e, et pour
lui enlever ramertume qui la rend d^sagreable,
puis on la fera bouillir, et on se servira, soit
comme aliment, soit comme remade, du muci-
lage qu'on aura obtenu de cette mani^re. On
la rend plus ou moins agr^able, en y aujoutant
du lait, du miel, des sirops, &c.
On prepare aussi avec le Lichen d'Islande
una esp^ce de gel6e qui contient dans une
sorte de degr6 de concentration toutes ses pro-
pri6tes m6dicinales.
On prend a cet efFet six onces de ce Lichen,
on en fait une forte decoction avec trois pintes
d'cau de fontaine. Apr^s un quart d'heure
debullition, on passe la decoction bouillante
par un tamis de crins bien serr6s ; on remet de
nouveau cette decoction sur un feu doux, dans
une bassine a sirop, et on la laisse 6vaporer
•jusqu'a ce qu'elle soit r6duite a une demi-pinte
de liqueur; alors on y ajoute six onces de sucre
royal, et on fait ^vaporer de rechef ce melange,
pour en retirer environ une livre d'un sirop
E2
( 32 )
6pais, qui prend la consistence d'une gelee par
le r6froidissement.'
En prenant dans la journ6e six cuiller6es * k
soupe de cette gel6e, on est assur6 d'employer
I'extrait pur et naturel ^I'une once de Mousse
d'Islande.
Avant de finir cet article, nous devons faire
une observation, c'est que parmi les differens
Lichens d'Islande que nous avons employes,
celui qui avoit 6t6 tir6 de I'lslande meme, nous
a parii constamment d'un efFet plus certain que
celui de la Saxe et de la Grande Bretagne. Ne
pourroit-on pas soup^onner que dans les cli-
mats septentrionaux cette plante s6journant pr6s
de hult mois sous la neige, elle y eprouvepeut-
^trc une elaboration qui lui manque dans les
climats nioins s6veres. Au reste eeci n'est
qu'une conjecture : si elle donne lieu a une
explication plus saUsfaisante, nous serous heu-
reux d'en avoir donne Tid^e.
* Unc cuilleree doit contcnir une demi-oncc
( 33 ) .
LE LICHEN D'ISLANDE CONSIDERE
COMME ALIMENT.
Les anciens employoient ordinairement si
pen de rem^des, qu'on appeloit alors la m6de-
cine paucarum herbarum sciential la science de
peu de remedes ; parce qu'avec pen de plantes
niani6es habilement et sagepient, elie faisoit des
cures surprenantes. Ce n'6toit pourtant que des
choses qui (Stoient bien plus medicamenteuses
que m6dicamens, parce qu'ordinairement elles
6toient prises dans les alimens, ce qui faisoit
une m6decine alimenteuse, medicina in alimen-
to. Le m^decln s'appliquoit principalement k
savoir nourrir k propos les malades, et a con-
noitre les choscs qui cqmbattoient le fond de
leurs maladies.
S'il est un cas oh il faille adopter cette
doctrine des anciens, c'est sans doute dans la
( 3* )
Phthisic Puhnonaire, 06 non-seulement il faut
attaquer le maiivais 6tat des poumons, mais
encore corriger la masse des fluides qui se
trouve alter^e ou infectee, si la maladie a fait
quelqiies progr^s ; et comme les 6vacuans ne
feroient qu'affoiblir le malade, sans am61iorer
r6tat de ses humeurs, il faut insister sur I'usage
de remMes qui puissent changer la mauvaise
constitution qui est survenue dans tout le sys-
t6me. C'est cette v6rite qui nous a determine k
faire preparer en aliment* le Lichen d'Islande,
pour en pouvoir tirer tout le parti dont il est
susceptible. ^
Mr. Cramer a prouv6, par la nature de ses
principes constitutifs, et la longue experience
des Islandois, que cette substance est nourris-
sante, qu'elle est en m^me temps de tres-facile
digestion, fortific les solides, quoique mucilagi-
* Alexandre deTralles, Rhaies, Meybonius, Clerc, Da-
Hiel Cruger, La Peyre, parlent des avantages des alimens m6-
dicamenteux dans la Phthisic.
16. Dissertatio inauguralis medica, de Llchenc Islandico,
i790 in 4to.
\
( 35 )
neuse, donne du ton k I'estomac, et reveille
I'app^tit.
Les Islandois, au rapport de Dillen^'^', en font
du bouillon, ou le font s6cher pour en faire du
pain. lis en font aussi une esp^ce de gruau pour
meler avec le lait.
Le Dr. Gilibertjg. nous dit qu'apr^s I'^bulli-
tion du Lichen, la gelee qui en provient est
nutritive.
Fabricius dans son voyage de Norvege,
recommande dans les temps de chert6 et de
17. Dillen Hiit. Muse.
18. Demonstrations El^mentaires de Botanique, torn. 3, p.
402.
19. "Vorrede Zujohann. Christ. Fabriclus reise nach Nor-
weigen. Hambour'g, 1119, p. 23.
Les Norvegiens, dit-il, font un pain avec I'^corce int6-
ricure du sapin, qu'ils reduisent cn farine, et cuisent en
consistance de pain. Ce pain est doux, mais tres-lourd et
compacte. 11 cause des maladies graves, et souvent une mort
precoce. 11 seroit a souhaiter qu'on substitu^t d'autres subs-
tances vcigetales a celle-ci.
J'ai conscill6 a tous les ministrcs du culte, et aux magis-
trats, d'encourager I'usagc des Lichens, et par-dcissus tout du
Lichen d'Islande, qui fournit un aliment leger et nourrissanj.
( 35 )
varet6 de bled, I'usage du Lichen d'Islande,
qui fournit une substance tr^s-nourrissante et
sert d'aliment ordinaire aux Islandois.
Borrichius^o- nous rapporte que les Islandois
le font s6cher, et qu'apres I'avoir r^duit en fa-
rine, ils I'admettent au nombrc de leurs alimens
journaliers. Sibbaldus^i-, Haller^^., Crants23.
disent la m^rae chose, et ajoutent que les bouil-
lons de cctte substance, non-seulement soutien-
nent puissamment les phthisiques, mais les sou-
lagent de la maniere la plus efficace.
Linn6e2^-, dans unc dissertation sur les diff6-
rentes substances nutritives employees a la fa-
brication du pain, parle du Lichen comme tr^s-
propre k servir d'aliment ; il nous assure que
plusieurs peuples en font du pain.
II est connu qu'on en fait non-seulement cet usage en Is-
lande, mais qu'il est du plus grand service dans les maladies
du Poumon»
20. Borrichius in Bartholinl. — Act. Medic. Hafm. 1671.
21.. Historia Plantarum in Scotia sponte nascentiuw.
p. 39.
22. Stirp. Helv. spec. 1988, p. 82.
23. History of Greenland.
34. Ameni, Acad. torn. S, p. 67.
( 37 ) '
La Marck-5-, en parlant de ses veitus, nous
dit qu'il est nutrltif, tr^s-pectoral, et m^me an-
tiphthisique. En Islande, ajoute-t-il, on le r6-
duit en poudie, et on en fait une esp^ce de
gruau ou de semoule, que Ton met dans le po-
tage; on en fait mdme du pain. Bouilli dans
le lait, il offre un aliment qui n'est point d6sa;-
gr6able, et qui par son mucilage peut ^tre fort
utile aux poltrinaires, aux personnes menac6e^
de phthisie, et a celles qui sont convalescentes
aprds dcs maladies de poitrine.
Mr. Pallas dit qu'il a trouv6 dans le§ cam-
pagnes de la Russie Asiatique Aiistralc un Li-
chen esculent que les habitans mangent dans
les ann6es de disette. La description qu'il en
donne nous porte a croire que ce Lichen escu-
lent est le Lichen d'Islande.
Les Islandois, au rapport de Honnebow~'^',
font un plat tr^s-d61icat avec le Lichen. " J 'en
** ai mang6 souvent," dit-il, ** d'abord par cu-
25. Dictionnaire Encyclop6dique M^thodique. Bota-
liique, Art. Lichen Islande.
26. History of Iceland.
( 38 )
" iiosit6, ensuite parce que je le trouvois aussi
" agreable que sain: cette plaiite croit en
" giande abondance; les habitans qui demeu-
" rent pies des lieux oh elle se trouve, en ra-
" massent en grande quantity pour leur propre
usage, et pour envoyer au marcii6. Ceux
** qui en sont 61oignes envoyent plusieurs che-
" vaux pour en rapporter des charges consid6-
" rabies. Beaucoup de gens laissent la I'usage
*' de la farine, quand ils ont une ample provi-
sion de cette nourriture, aussi agreable au
** goCit qu'avantageuse a la sant6."
Voici ce qu'en dit I'auteur du voyage en
Islande, fait par ordre de sa Maj. Dan.*
*' Cette Mousse sert de nourriture dans toute
'* rislande, et on en mange journellement, ce
V qui fait que Ton en a soumis le prix au tarif
*' des denrees.
** La. preparation la plus babituelle de cette
Mousse est d'en faire du gruau, apres I'avoir
" laiss6 tremper dans de I'eau pendant un
* Voyage en Islande fait par ordre de sa Majesi6 Danoise.
Traduit clu Danoit par Gauihier de la Peyronie.
( 39 )
jour, parce que cela lui ote une esp^ce
** d'amertume qui n'est nullement agr6able,
" Apr^s Ten avoir retiree et fait 6goutter, on la
" fait cuire dans du petit lait jusqu'a la consis-
" tance de gel6e ; on mange cette bouillie de
** gruau toute chaude avec du beurre ou bien
" froide avec dy lait caill6. II y en a qui la
hachent apr^s I'avoir mis tremper dans de
" I'eau; d'autres la font secher au-dessus du
" feu ou au soleil, apr^s quoi ils la mettent en
" poudre en la frappant avec une esp6ce de
** maillet, dans un sac ovale, apr^s quoi ils la
** font cuire dans du lait, ce qui leur procure
*' un mets tr^s-agreable, facile k digcrer et en
** m^me temps tr^s-nourrissant.
" Nous ajouterons que cette nourriture dont
*' nous avons nous-memes fait usage, est la plus
" salutaire qu'on puisse donner aux personnes
" attaqu^es de phthisic et autres maladies de
*' poitrine."
Hippocrate, qui faisoit de la di^te son re-
medc principal et souvent unique, a le premier
ecrit sur le choix des alimens. Dans ce qu'il >
nous a laiss6 sur ce sujet, on reconnoit autar
( 40 )
que dans auciin autre de ses plus exccllens
ouvrages, le grand maitre, et le medecin con-
somme.
Si, comme personne n'en doute, le sue
nourricier est le fluide le plus6pur6 des liquides
animaux, lorsque ceux-ci sont dans le desordre
et dans I'appauvrissement, il doit perdre pen a
peu ses qualit^s, il ne r6pare plus les pertes
des solides qu'lmparCaiteraent ; celles-ci fer-
ment pour ainsi dire autant de plaies insensi-
bles, qui troublent I'ordre et la regularite des
oscillations des fibres. De 1'^, dans tout le sys-
t^me des nerfs, des irritations confuses, qu'on
distingue par des malaises, de sourdes inquie-
tudes, &c.
Si le succes du Lichen s'est montre si
souvent et si promptement avantageux, on
doit comprendre que son usage, comme ali-
ment et comme m6dicament, ne bornera pas
son effet au calme des symptomes, mais qu'un
aliment qui fournira toujours les m^mes prin-
cipes nourriciers et m^dicamenteux, en chan-
geant enti^rement la consistance et la qualit6
des fluides, (§teindra, absorbera, usera pour ain-
gi dire les levains morbifiques.
( -11 )
On a vu que les Islandois en font la plupart
du temps Icur principal e nourriture. Plusieurs
auteurs I'ont indiqu6 comme aliment dans les
cas dc disette: pourquoi la medecine n'en tire-
roit-elle pas ce parti, lorsque ses proprict6s
peuvent influer d'une mani^re si puissante sur
toiite I'economie animale? Cette substance a
quelque chose de doux, de veloute et de
moelleux. C'est une nouvelle lymplic, propre
a remplacer dans le corps d'un phthisique la
lymphe nourrici^re qui par Tamaigrissement
est derob^e h toutes les parties du corps. II
fournit un chyle temperant, propre a ralen-
tir le mouvement intestin du sang, qui entrc-
tient la disposition hemorragique naturelle aux
jeunes gens menaces de phthisic.
Tous les praticiens conviennent qu'un dcs
grands points dans la cure de la phthisic pul-
monaire, c'est d'entretcnir une espece d'egalite
entre les mouvemens des parties. Le choix et
la quantite moder^e des alimens doux et hu-
niectans sont d'un grand secours pour arriver a
ce but: le Lichen, comme aliment m6dica-
menteux, remplit cette indication; il a une
( ^2 )
vertu sedative qui opere \e silentium pectoris
tant rccommande par les anciens. II apaise
la toux dont les secousses muitipliees peuvent
produire la rupture des vaisseaux sanguins et
s'opposent k la gu6rison de ceux qui sont rom-
pus ou ulc6res dans les poumons.
Cette substance donnee avec perseverance
(Jans la toux des phthisiques, procurera indubi-
tablement la tranquillite du poumon, en lui ini-
posant silence. Ce n'estpas tout: il attaque le
mal dans sa racine, en facilitant aux sues ralen-
tis dans les v6sicules pulmonaires, la liberty de
reprendre le fil de la circulation, et favoriser en
nieme temps I'expectoration, qui se fait d'au-
tant mieux et plus abondamment que la source
en est plus diminu6e; il dissipe le spasme, et
en empeche m^me le retour, par la souplesse
qu'il met dans les entrailles.
Parmi les diiferentes m^diodes que nous
avons adoptees pour faire preparer le Lichen en
aliment, le chocolat* tient le premier rang.
* Pour 6viter les periphrases, nous appellerons, dans le
cours de nos observations, le chocolat prepare d'aprcs notre
m^thode, Chocolat Islandois.
( *s )
he chocolat est une des plus saines et des plus
pr6cieuses boissons dont ont ait us6 jusqu'k pre-
sent. II est tr^s-nourrissant, et convient daris
tous les cas o5 il faut fortifier. Un auteur Es-
pagnol dit qu'on a 6prouv6 en Amerique siir
des criminels condamn^s h mourir de faim,
qu'une once de Cacao les faisoit subsister plus
long-temps qu'une livre de viande ou qu'une
livre de riz.
Le Dr. Sparmann (dans son voyage au Cap
de Bonne Esp6rance) nous dit que I'equipag^
entier d'un vaisseau n'eut pendant deux mois
que du chocolat pour toute nourriture, et qu'il
s'en trouva bien. Cet aliment, ajoute-t-il, a:ug-
mente I'embonpoint et la vigueur des per-
sonnes us6es et affoiblies.
Le Dr. Navier a employ^ le chocolat avec
succ6s dans des maladies consomptives tr^s-an-
ciennes.
M. Gaterau, m6decm de Montpellier, agu6ri
une phthisic nerveuse qui avoit rdsiste h divers
traitcmens, par I'usage soutenu du chocolat.
Nous ne pouvons nous emp^cher de donner
un extrait de ce qu'en pcnse I'auteur de rhis-
toire gcnirale. et iconomiq^ie des planies.
( 44 )
" Le cbocolat," dil-il, " n'est pas sculement
alimenteux, mais il est encore medicamen-
teux, il convient dans les maladies chro-
niques, en raison de ses qualites reunies d'o-
16agineuses, dc balsamiques et de toniques.
II est ^galement salutaire aux personncs qui
sont attaquees de scorbut, ou qui y ont des
dispositions. Sa faculte, douce et onctueuse,
en fait aussi un excellent remede contre les
^cretes et les fontes pituiteuses catarrhales,
qui initent la gorge, ainsi que les parties
sup6rieures de la trachee artcre, qui excitent
des toux violentes."
" Les Pbthisiques trouvent dans son usage
un aliment medicamenteux, qu'en vain ils
s'efitorceroient de chercher ailleurs. S'ils
vouloient s'assujettir ji ne prendre, pour
nourriture, que du cbocolat et des cremes
faites avec des substances farineuses et adou-
cissante?, telles que la semoule, le sagou, le
vermicelle, le gruau de Bretagne, et autres
de cette nature, il est certain qu'il en gucri-
roit beaucoup plus, par le secours de pareils
alimens, que par I'usage de quelque lait que
ce soit."
( 45 )
Ind6pendamment de cette raani^re, nous
avons fait preparer le Lichen d'Islande en
gruau, nous I'avons fait entrer dans des crimes,
des pastilles, des gel6es, des biscuits ; nous I'a-
vons enfin vari6 le plus possible, pour pr6venir
autant que faire se pent chez nos malades,
Vennui de I'uniformite.
G
( ^6 ■)
DU REGIME PENDANT L'USAGE
DU LICHEN.
On a deja vu dans les articles pr6c6dens
comblen la mani^re de vivre influe sur la cure
des maladies de poitrine ; nous ne pouvons
donncr que quelques conseils g6n6raux qui,
suivant la difi'6rence des cas, doivent 6tre en-
suite modifi6s par la sagacit^ du m6decin.
Nous devons cependant rep6ter que plus la
diette sera simple, plus elle tendra k la perfec-
tion du traitement, et sera proche du succ^s.
Avant de I'aire usage du Lichen d'Islande, on
doit fixer son attention sur I'l^tat des premieres
voies pour les nettoyer, si le cas I'exige, des
impureles qu'elles peuvent contenir : car dans
cette esp^ce do maladie, la bile et les autres
( *^ )
humeurs ayant une grande disposition k la pu-
trescence, si on les laisse croupir dans les in-
testins, non-seulement elles y produiront un
principe constant de fermentation, mais il en
resultera encore des accidens locaux, tels que
des naus6es, le vomissement, des coliques, &c.
On s'abstiendra de toutes substances lourdes
et de digestion difficile, de mets 6pic6s, de cru-
dites, de patisseries, de cafi'(6, de liqueurs, &c.
les viandes fort nourrissantes comme perdrix,
chapons &c. ne conviennent pas; il faut s'abs-
tenir 6galement de bouillons trop forts, trop ri-
ches, faits avec la volaille, le mouton, &c. parce
que ces substances augmentant la turgescence
du sang, le determinent d'une mani^re plus par-
ticuli^re vers la partie affligee. II vaut mieux,
si Ton croit devoir ordonner des bouillons, qu'ils
soient moins nourrissans, et les rendre m^dica-
menteux, en les composant de mouton et de
veau, et en y mettant beaucoup de pourpier,
de laitue, de navets, de bourrache.
Mais ce qui convient encore mieux, ce sont
les preparations d'orge, d'avoine, la crdme de
ris, le sagou, le salep, Tanowroot; car outre que
G 2
{ *8 )
ces substances sont suffisamment nourrissantes,
elles sont de facile digestion, et ties-propres a
adoucir le sang, a lui donner de la consistance,
et a le rafraichir ; ces trois qualit6s sont celles
dont il a leplus besoin dans cet 6tat, ou il est en
meme temps fort acre, fort tenu, et extreme-
ment bouillant.
Le malade doit renoncer a toutes sortes d'af-
faires, ^ tout ce qui pourroit I'inqui^ter ; se
coucher a des heures reguUeres et 6viter les
veilles ; il evitera egalement I'humidite, la
grande chaleur, et le froid rigoureux ; il se
couvrira convenablement et surtout la poitrine
et les extremit^s.
Le malade doit respirer un air pur et frais :
celui de son appartement doit 6tre frequem-
ment renouvel^ par I'ouverture des portes et
des fen^tres, b. des heures convenables. Rien
n'est plus nuisible que d'habiter des apparte-
mens clos et chauds.
L'exercice pied, en voiture, a cheval, est
essentiel, malgr6 tout ce qu'ait pu dire contre
ce dernier, un m^decin d'ailleurs fort estimable,
on ne peut lui refuser de grands avantages.
( 49 )
Sidenham Tavoit justement pr6conis6 : et en
effet les secousses r6iter6es que I'on donne au
poumon jointe h Fair frais que Von respire,
chassant de la poitrine la mati^re purulente,
donnent plus d'activit6 aux rem^des, broient et
divisent les liqueurs, et la lymphe epaissie dans
la texture rnoUe et flasque du poumon, ce qui
facilite beaucoup la resolution des tubercules.
Quoi qu'il en soit, nous ne deciderons pas le
genre d'exercice auquel on doit donner la pr6-
f6rence : ce que nous regardons comme essen-
tiel, c'est de choisir autant qu'il est possible, le
moyen qui plait davantage, qui r6cr6e I'esprit '
en mdme temps qu'il met le corps en action ;
parce que, comme dit Platon, la liaison qui est
entre I'ame et le corps ne pennet pas rjue le
corps puisse ctre exerc6 sans i'esprit et I'esprit sans
le corps.
Dans le cas oCi le mauvais temps, ou d'autres
circonstances emp^cheroient le malade de sor-
tir, il faut faire usage des frictions s6chcs qui,
parmi leurs divers avantages, ont celui de forti-
fier et de procurer k peu pr^s le mdme eftet
que les exercices moderns.
( 50 )
OBSERVATIONS
A L'APPUI DE
NOTRE METHODE DE TRAITEMENT.
OBSERVATION I.
Mr. Alex. Keller, age de 35 ans, d'un tempera-
ment sanguin, bilieux, le cou long, la poitrine
6troite, les omoplates tr6s-elev6es, alarum instai\
au mois de Decembre 1794^, apres quelques
exc6s de vin, et avoir beaucoup chant6, fut at-
taque d'une toux .s^che et violente qui continua
( 51 )
pendant plusieurs mois. Malgr6 tout ce qu'on
lui ordonna pour I'arr^ter, cette toux devint si
vive, qu'elle excita des envies de vomir apr^s le
repas : une douleur sourde an c6t€ gauche ne
le quittoit pas; la rougeur vive des joues, une
chaleur aux paurties des mains, une petite fi^vie
qui augmentoit tous les soirs, des crachats san-
guinolens et purulens, un amaigrissement tr^s-
prompt ne laiss^rent plus aucun doute sur
r^tat de la poitrine. Au mois d'Avril suivant,
le malade i^clama mes solns. Apr^s avoir fait
appliquer quelques ventouses scarific;es sur le
c6t6 douloureux, je I'ai mis a I'usage du Lichen
d'Islande, dont il a fait d'abord son aliment
unique. Peu a peu je lui ai permis d'y joindre
quelques farineux, puis des oeufs; enfin au bout
de cinq mois sa sante 6toit r^tablie au point qu'il
pouvoit, a peu de choses pres, vivre comme
tout le monde. J'ai eu occasion de le voir en
1798. II se portoit a raerveille, et ne s'6toit
ressenti d'aucun de ses accidens dans le cours
des trois ann6es qui s'etoient 6coul6es.
{ 52 )
OBSERVATION II.
Mr. J. de Lablinaye, apr^s avoir eu
differentes h6moptysies, conservoit une toux
s^che et tres-fatiguante : ses cracbats ^toient
souvent sanguinolens et d'un mauvais carac-
tere ; il avoit des sueurs colliquatives, et respi-
roit difficilement : quoiqu'il d^sesperat de son
etat, il s'adressa k moi au commencement de
1795 : apres deux mois de traitement dont le
Lichen d'Islande fut la base, il s'est enti6re-
ment relabli, au grand etoimcment et k la satis-
faction plus grande encore de ses amis.
OBSERVATION III.
Au mois de Septembre, 1795, Mile. L.
K . . . Allemande, ag6e de 1 8 ans, 6tant a la
campagne, se pronienoit avec des jeunes per-
sonnes de ses amies, lorsqu'un chien d'une
( 53 )
grosseur prodigieiise se jeta imp6tueusement sur
elle; quoiqu'ii ne lui fit aucun mal, sa frayeur
fut cependant si graride qu'elle perdit sur le
champ connoissance, et qu'on la rapporta dans
cet ^tat chez scs parens dont la maison 6toit as-
sez ^loignee. Les secours qu'on lui donna la ra-
nim^rent bieritdt, mais comme elle se trouvoit
dans un nio'raent critique, le saisissement avoit
tout fait disparbitre. Pendant ce mols on em-
ploya les moyens convenablcs pour que la pro-
chaine 6poque fut r<Sguli6re, mais ce fut inu-
tilement. Une toux seclie et opihiatre se ma-
nifesta, des douleurs dans le dos et dans les
lombes se firent ressentir, elle devint pale et ca-
chectique, elle fut tourment6e de douleurs
crueiles de poitrine, des crachats sanguinolens
se montr^rent, bientot ils parurent mel6s de
pus; une fi^vre lente et une maigreur extreme
mirent le sceau la confirmation de la phthi-
sic.
Dans les premiers jours de Janvier 1196, on
me fit appeler pour donner mes soins a cette
jeune personne, qui excitoit justement de
graves inquietudes. La diette fut circonscrite
H
( 54 )
d'abord dans le Lichen d'Islande; je lui don;
nai le saffran oriental, non-sculement dans la
decoction de Lichen dont la malade faisoit
usage, mais encore dans les diff^rentes prepara-
tions aiimentaires qu'on faisoit pour elle. En
moins de six semaines de ce traitement simple,
les accidens cess^rent, les regies reparurent, le
regime devint moins severe, et en peu de
temps cette jeune et int^ressante personne put
reprendre ses anciennes habitudes, et se livrer
k ses anciennes occupations.
OBSERVATION IV,
Mme. De L . , . , ^gee de trente ans, d'une
constitution extr^mement nerveuse, ayant 6t6
attaqu6e de pertes r6it6r6es qui I'avoient mise
dans le plus grand danger, tomba dans un 6tat
de langueur et de maigreur extraordinaire,
^vec fi^vre lente habituelle, et ne pouvant
soutenir ni garder aucun aliment; son pouls
^toit si petit et si miserable qu'il ^toit h peine
( 55 )
sensible; les organes dela digestion 6toient dans
un etal si f^cheux, qu'a peine elle pouvoit
prendre trois ou qualre cuillerees de bouillon
sans 6prouver un spasme inouL et eilc 6toit k
cliaque instant sur ie point de perdre connois-
sance.
Je commencai par supprimer tout le luxe
de pharmacie dont sa chambre i§toit rem-
plie. Je la mis k I'usage du chocolat Islan-
dois, pour tout remade et pour toute nourri-
ture. 11 etoit pr6par6 k I'eau ; on lui en don-
noit une cuiller^e d'heure en heure : au bout
de trois jours le pouls commen^a a se d^velop-
per, la malade n'eprouvoit plus ni travail ni
foiblesse, en prenant de son nouvel aliment;
j'en fis augmenter la quantite par degr6, j'y
fis ajouter apr^s quelque temps la moitie d'un
jaune d'oeuf; successivement je le rendis plus
nourrissant en y ajoutant un jaune d'oeuf en-
tier, et chaque jour ensuite la dose devint
plus forte. Apr^s six semaines de ce regime,
ma malade cut assez de force pour que je pussc
lui permcttre un peu de poulet. Sa sant6 s'est
d6velopp6e de plus en plus, et en quatre mois
( 36 )
elle a reprls son ancienne habitude de vivre,
ses occupations, et sa sant6 est devenue beau-
plus brillante qu'auparavant, au grand etonne-
ment de ceux qui I'avoient vue dans son 6tat
afFreux de d6p6rissement.
OBSERVATION V.
Mme. Allard, veuve de 36 ans, avoit eu un
ulcere a la jambe, qui apr6s avoir dur6 fort
long-temps se s6cha de lui-m^me; peu de
temps apres il survint une toux s^che, et si
violente que quelquefois il s'ensuivoit un vo-
missement; bientot elle cracha du sang mele
de pus, la fievre lente se manifesta, et sans
doute elle eOt succomb6 si elle ne se fut deci-
d(6e a suivre notre methode, Elle ne tarda pas
a en sentir I'heureux effet; au bout de trois
mois sa sante a et<^ entierement r^tablie, et
la cure eut 6t6 surement plus prompte si la
malade n'edt pas quelquefois dans cet inter-
valle commis quelque imprudence dans son
regime.
( 57 )
OBSERVATION VI.
Mr. Meyer fut attaqu6 dans le mois d'Octo-
bre, 1794, d'un rhume considerable, qui ayant
^te n6glig6 laissa au malade une toux s^che,
de I'oppression, une douleur sourde entre les
deux 6paules, et de rembarras a la poitrine,
qui augmentoit par la marche et le moindre
mouvement. La langue neanmoins 6toit belle,
les urines peu alter6es, I'appetit passablement
bon; mais la soif etoit ardente, et la peau cons-
tamment aride et brCilante. La fievre hectique
6toit aussi tres-marquee par la petitesse et la vi-
vacity extraordinaires du pouls. Le gonflement
douloureux des vaisseaux h6morro'idaux me
determina k lui faire appliquer les sangsues.
Ce moyen diminua la secheresse et la rigidity
des solides, procura des sueurs douces et bien-
falsantes, qui abattirent un peu I'ardeur fe-
brile. Alors je lui fis prendre le Lichen dTs-
lande; il en fit aussi usage dans ses alimens;
le regime fut d'abord absolument vegetal; puis.
( 58 )
k mesure que la cure avan9oit, je fus molns ri-
gide; enfin deux mois de traitement suffirent
pour son enti^re gu6rison, et dcpuis il a acquis
un embonpoint aussi r6el que rassurant.
OBSERVATION VII.
Mr, J. Barbazan, n^gociant, age de 37 ans,
d'un tempi6rament flegmatique, de constitution
grdle et delicate, les 6paules hautes, la poitrine
i6troite, ayant 6te oblig6 de beaucoup voyager
dans diff6rens pays, expos6 k des variations ex-
tremes de Tatmosph^re, et a des erreurs raulti-
pli6es dans le regime, fut attaque de crache-
mens de sang fr6quens. II avoit des sueurs
abondantes, un ^coulement copieux d'urine,
une toux humide et r6p6t6e, des erosions aux
gencives, et difF6rentes 6ruptions de dartres mi-
liaires sur le corps; depuis tr^s-long-temps il
avoit subi divers traitemens, et toujours sans
succ^s: chaque jour son 6tat augmentoit d'au-
tant ses craintes, Au commencement de 1795,
V { 59 )
il nous donna sa confiance. Un r6gime abso-
lument v6g6tal, le Lichen d'Islande, combin6
avec les antiscorbutiques, firent au bout de
quelques mois cesser toute inquietude. Depuis
ce temps le malade a fait differens voyages
dans le nord et dans le midi, Quoique d'une .
constitution extidmement delicate, sa sant6 se
soutient; il est vrai de dire qu'il est fort sobre,
et sage dans son r«^ginie. Pendant tres-long-
temps il a fait usage de chocolat Islandois.
OBSERVATION VIII.
Mme, De S. . . . , d'une constitution tr^s-
d^licate, apr^s cinq ans de mariage devint
grosse. Son accouchement fut tr^s-heureux :
elle voulut absolument nourrir sa fille, contra
I'avis de son m^decin*, qui jugea parfaitement
* Le Dr. Prevener m^decin de beaucoup de m6rite tnort
beaucoup trop tot pour ses ajnis et pour Thumanitfi.
( 60 )
qu'elle ne pourroit pas supporter cette fatigue.
Alt bout de deux mols, une toux s^che, une
grande chaleur de poitrine, une foiblesse ex-
cessive, et une maigreur effrayante annonc^rent
imperieusement a cette tendre mere qu'il fal-
loit'absolument renonccr a la douceur d'allalter
son enfant. Tous ses parens la croyoient per-
due. Moins de trois semaines de nos soins
suffirent pour rassurer cette famille desol6e, et
deux mois apr^s elle fut parfaitement bien por-
tante, grace a la Mousse d'Islande, qui fut la
base de son traitement, et qui entroit dans la
pr6paration de ses alimens.
OBSERVATION IX.
Mr. A. Muller, neg. ag6 de 30 ans, d'un
temperament sanguin, bilieux, fut attaqu6
d'une fi^vre maligne, oCi Ton eut a combattre
les accidens les plus graves. Au trenti^me
jour de la maladie, il se fit un depot critique
( 61 )
SUV le poumon, qui excita une toux violente,
des expectorations sanguinolentes et purulentes,
la foiblesse du malade 6toit extreme. X-.'adini-
nistration du Lichen, a une dose tr^s-forte
comme medicament, et son usage en aliment
fircnt cesser bientot la toux et diminuer les
crachats. Sept semaines de ce traitement suf-
firent pour son parfait r6tablissement.
OBSERVATION' ix.
La fille de Mr. E. Schults, mar. ^g6e de sept
ans, 6toit tomb6e dans im amaigrissement uni-
versel; elle avoit une petite toux, une fi^vre
lente accompagn6e de diarrh6e et de vertige :
un m6decin distingu6, qui en avoit eu soin,
n'avoit rien n6glig6 de ce que Tart indique:
tout 6toit infructueux, et le mal augmentoit
chaque jour. Elle 6toit reduite a I'etat le plus
affreux lorsqu'on m'appela. Trois semaines de
traitement selon notre m6thode suffirent pour
faire apercevoir un mieux sensible; et en
I
( )
moins de trois mois elle fut enti^rement r6tablie.
Elle a tellement pris le cliocolat Islandois en
affection, que toiites les fois que ses parens veu-
lent lui faire un grand plaisir, ils lui en don-
nent pour son dejeuner.
OBSERVATION XI.
Mr. Fr. Dupond fut attaque dans le cours de
I'annee 1795, de rhumes frequens, accompa-
gn€s de toux vive et de maux de poitrine con-
siderables. La rongeur du visage, quelques
crachemens de sang, et r6tat du pouls, d^-
terniin^rent a des saign^es qui furent peut-etre
un peu trop multipli6es ; elles ne firent qu'au-
gmenter le mal, en affoiblissant le malade. La
maigreur faisoit chaque jour des progres ef-
frayans ; les excretions 6toient extrdmement
abondantes; I'exercice le plus mod^re au-
gmentoit la fi^vre, dont les acc6s se manifes-
toient plus sensiblement tous les soirs apr^s le
( es )
repas ; ayant consult^ un m^decln qui passoit
pour habile clans la cure de cette esp^ce de
maladie, celui-ci annon^a, sans aucun manage-
ment, au malade qu'il 6toit attaqu6 d'une Phthi-
sie incurable ; deji\ son <^tat I'inqui^toit beaucoup,
mais cette declaration le jeta dans unc profonde
melancolie.
Ce fut dans les premiers jours de Mai 1796
que le malade vint me voir, bien convaincu
qu'il 6toit sans ressource. Je calmai autant que
je pus ses inquietudes. Je le mis k I'usage du
Lichen d'Islande, en lui prescrivant le regime
convenable. Je lui continuai mes soins jusqu'au
mois d'AoOt, et alors il etoit si bien qu'il put
entreprendre un voyage assez considerable, :
depuis ce tems, j'ai recu de ses nouvelles, sa
sant6 s'est soutenue, et n'a pas eu le moindre
accident.
OBSERVATION XII,
Mr. Ch. R. de Launay, ag6 de 30 ans,
ayant la poitrine 6troite et plate, les 6paules
I 2
( 64^ )
dlevees, le cou long, fut attaqu6 au mois
d'Avril 1196 d'un vomissement de sang qui
sans doiite avoit 6te provoque par une course h,
pled fort longue et forc6e, apr^s dcs exc^s de
tabic de plusieurs jours. Le traitement auquel
il fut soumis sembloit avoir dissip^ toute esp^ce
d'inquietude, lorsque au mois de Mai suivant il
sui'vint une toux s^clie et acre t bientot apr6s
parurent des crachats de mauvais caract^re,
I'appetit ^^evanouit ; une soif ardente tourmen-
toit coiitinuellement le malade ; la fievre se mit
de la partie, |a respiration devint de plus en
plus- difficile, une chaleur brCllante se fit sentir
aux cxtremites, et ramaigrissement augmenta
chaque jour. L'usage dq Liclien d'Islande a.
large dose, une dictte vegetale dans laquelle le
Lichen d'Islande entroit pour beaucoup, un
exercice moder6 et journalier, tels sont les mo-
yens simples que j'ai employes pdur retablir
un malade de qui tous ses amis desesp6roient,
et ci qui il a fallu quatre mois de perseverance
dans le traitement pour etre enti6rement r^fabli,
( 65 )
OBSERVATION XIII.
Mme. de ag6e de 23 ans, 6toit sujettc,
depiils pr^s de quatre ans, i\ des fleiirs blanches
abondantes, acres ct irrltantes, au point de
causer une tension tr^s-douloureuse avcc des
^lancemens au bis' ventre et aux cuisses, qui
I'empdchoient de se tenir assise : elle avoit une
foiblesse considerable aux extr6mit6s inf6rieures;
elle ne marchoit qu'avec peine. Les pertes au
commencement 6toient blanches et epaisses ;
elles devinrent ensuite claires et verdatres, clles
caus^rent bcaucoup de cuissons. Ces pertes
rendirent les digestions lentes et penibles : elle
vomissoit bcaucoup de s6rosit6s. Elle consulta
un chirurgien qui lui prescrivit un traitement
qui au bout de quelque terns fit diminuer sien-
siblcment les fleurs blanches, bientot elles ces-
s^rent enti^rement. A peine I'^coulement avoit
commence ci diminuer qu'il survint une forte
toux qui ne tarda pas k augmenter considerable-
mcnt.
( 65 )
11 parut d'abord des crachats lymphatiques,
ils devinrent sangiiinolens, il s'etablit une lievre
lente, ramaigrissement devenoit de plus en plus
allarmant, lorsqu'au mois de Mai 17^8, elle
se decida k me faire appeler.
Des sangsues h la vulve, des bains de fautenil,
un caut^re b. la partie inf^rieure de la cuisse, et
I'usage soutenu du Lichen d'Islandc comma
aliment et medicament, ont r^tabli enti^rement
la malade en trois mois : depuis cette 6poque
elle n'a pas 6prouve le moindre- accident.
OBSERVATION XIV,
Mr. H. Fournier, pretre francols, ^ge dc
51 ans avoit eu un absc^s au m^sent^re, et
sembloit en avoir 6t6 bien gu6ri; mais I'hu-
meur s'etant jet6e sqr la poitrine, il lui survint
une petite toux, un crachement purulent et
sanguinolent, des sueurs nocturpes, le dess^che-
ment, la maigreur, enfin une petite fievre qui
( «7 )
aiigmentoit tous les soirs. Trois mois du Lichen
d'Islande, administr6 d'apres nos principes, ont
suffi pour r6tablir sa sante. Deux ans apres ce
traitement, nous avons eu occasion de le voir/
et il n'avoit plus 6prouv6 le moindre sentiment
de sa maladie.
OBSERVATION XV.
Le nomm6 Denis, ouvrier en passementerie,
ag6 d'environ 40 ans, d'une constitution fle-
gmatique, 6toit depuis environ six mois dans
un ^tat de Phthisic Pulmonaire, confirm6e et
caract6ris6e par une fi^vre lente, de I'oppres-
sion, et des points douloureux k la poitrine qui
le devenoient bien davantage par le moindre
exercice ; I'expectoration, quoique facile et
peu abondante, 6toit 6vdemment le produit
d'une exsudatiou inflammatoire. La foiblesse
et Tamaigrissement du corps, rinsomnie,^ les
sueurs nocturnes, le vomissement apr^s le re-
( 68 )
pas, tous ces symptomes donnoient au malade
les craintes les plus fond<^es sur spn 6tat. II
avoit employe tour a tour les baumes, les re-
sines, les aiTiers, les jus de cresson &c. sans
aucune esp6ce de succ^s. Apr^s lui avoir don-
ne un leger vomitif et un doux laxatif, je fis
ouvrir un s6ton au dessous de Taisselle sur la
partie laterale de la poitrine ; je le mis a I'usage
de la Mousse d'Islande, qu'il prit a forte dose ;
11 dejeunoit, et soupoit avec le chocolat Islan-
dois, et la plupart de ses autres aiimens 6toient
pr6par6s avec cette substance. Ce traitement
produisit un effet prompt ; la respiration devint
plus libre, et les points douloureux disparurent:
la fievre c6da en pen de temps, les sueurs noc-
turnes se supprim^rent par degr^s, les forces se
'retablirent de m^me, et en moins de six molt
le malade recouvra la sante la plus parfaite.
C 69 )
OBSERVATION XVI.
Mr. L. A*** ag6 de 27 ans, d'une constitu-
tion dielicate, et dont la foiblessc de poitrine est
iin mal presque h6reditaire dans sa famille, fut
attaqii6 le 2 du mois de 9bre 1801, d'une dou-
leur de c6t6, pour laquelle on le saigna. Le
6 du meme mois il survint un crachement de
sang, sans fi^vre, que Ton attaqua par trois sai-
gn6es successives, des boissons et potions astrln-
gentes &c. avec une apparence de succ^s. Ce
meilleur etat ne se soutint que quelques jours,
car le malade apr^s avoir un peu plus parle que
de coutume, fut tout k coup saisi d'un point de
c6t6 tr^s-violent, qu'on fit cesser par une nou-^
velle saignee, des fomentations, &c.; mais la
toux continua, les crachats prirent un tr6s-mau-
vais caract^re, et la fi^vre devint continue, avec
des redoublemens qui se faisoient sentir prin-
cipalement la nuit. Malgr6 la multitude de
rcm^des employ(3s pour vaincre ces accidens,
il survint un cours de ventre qui resista pen-
dant pr6s de trois mois ii tous les moyens d'u-
K
( 70 )
sage en pareil cas, la maigreur et la foiblesse
aTOient fait pendant ce temps des progr^s
effrayans.
Au mois d'Avril suivant, on me confia le
malade. Son mauvais 6tat me laissoit peu d'es-
poir, cependant le desir qu'il t^moignok de me
voir le soigner, la conviction qu'il avoit que je
le gu^riiois, nie port^rent k y appliquer toute
mon attention. Je ne tardai pas a concevoir
quelque esp6rance; apres trois semaines demon
traitement, la diarrh^e avoit djsparu, bientot les
crachats prirent un caract^re raeilleur, la fi^vre
diminua ; au mois de Juin le malade etoit hors
de tout danger, et au mois de Septembre il put
reprendre enti^rement son ancien regime, et
vivre comme tout le monde.
OBSERVATION XVII.
Le 7 Mai 1801, je fus consult^ par Sir Ch.
J*** pQur voir Mr. son fils, ag6 de 21 ans, que
( 71 )
Ton consld^M'oit comme enti^rement perdu,
d'apr^s I'opinion de plusieurs m6decins. .Ce
jeune homme iie avec une constitution forte,
6toit venu h bout de la d^truire par des exc^s
de tout genre. 11 souffroit une douleur de tSte
cruelle, il lui sembloit quelquefois qu'il en des-
cendoit comme des fourmis dans le dos : le
ecu, les reins, les muscles des lombes et les
jarrets lui faisoient aussi de la douleur, en sorte
qu'il avoit peine h. les fl6chir. Le ventre 6toit
paresseux, et resserre, il n'urinoit qu'avec dit-
ficulte, chaque fois, ou 'lorsqu'il alloit h
la garde-robe, il s'6couloit une mati^re t6nue
ressemblante k de la semence, ce qui lui
arrivoit aussi durant le sommcil, qu'il edt ou
non des reves voluptueux. S'il montoit sur un
lieu elev6, il 6toit aussitot hors d'haleine ; il se
sentoit la tdte lourde, 6t ses oreilles bruissoient.
Lorsque je fus consult^, il 6toit tomb6 dans
une extreme langueur, ses jambes etoient en-
fl6es comme dans la leucophlegmatie, tout son
corps 6toit d'une maigreur effrayante, ses yeux
Etoient c^ves et 6teints.
K 2
( 72 )
Pendant les 15 premiers jours, le Lichen
d'lslande a 6t6 la base de la nourriture du ma-
lade, en gruau, en chocolat, en biscuits, gel^es,
&;c. ensuite j'y ai joint le sagou, le salep, pcu
h. peu j'ai permis du potage gras, au riz, puis la
volaille rotie, enfin au bout de quatre mois de
soins, le malade est all6 k la campagne oil il a
mis le complement h sa sant6 en suivant tr^s-
€Xactement mes conseils.
OBSERVATION XVIII.
Mr. L. Grangeneuve, ^g6 de 28 ans, d'une
constitution originairement foible, et d'une dis-
position tendante evidemment k la phthisic, fut
saisi d'une affection grave au poumon, caractc-
ris^e par une toux s^che et fr6quente, par un
sentiment d'oppression et des points douloureux
k la poitrine, enfin par un crachement desang,
qui fut suivi de la fi^vre hectique. Apr^s les
repas il sentoit une ardeur brCllante a la plante
( 75 )
des picds et dans la paumc des mains. Son
^tat de malgieur et d'epuisement etoit extreme.
Apr^s avoir consulte dift'6rens m^decins, et
execute inutilement leurs prescriptions, il r6-
clama mes soins; ce fut an mois d'Octobre,
1801. Je ne me d6cidai a I'entreprendre qu'^-
pr^s qu'il m'eCit assure qu'il ne s'6carteroit en
rien du regime que je lui prescrirois. Je lui
d^clarai que pendant le premier mois de traite-
ment, son remade essentiel seroit le Lichen d'ls-
lande, et le chocolat Islandois son principal
aliment. II fut exact, et il s'aper<^ut d'un
bien-6tre si prompt, que lui-meme imagina
ditferentes mani^rcs d'jemployer le Lichen.
Moins de trois mois suffirent pour le r^tablir
entierement.
OBSERVATION XIX.
Lady Ch . D***, ag^e de 23 ans, n6e
d'un sang scrophuleux, de constitution tr^s-de-
( 7+ )
licate, la poitrlne etroite, Ics epaules ^levees, le
cou long, fut attaquec au mois de Septembre
1801 d'une toux seche, dont ropiniatrete la fa-
tiguoit beaucoup. Un son de voix aigu, une
pesanteur et une oppression de poitrine qui
augmentoit au moindre cxercice, une expecto-
ration, tres-abondante, il en eClt fallu beaucoup
moins pour effrayer justement sa familie ; la
malade seule assuroit que ce n'^toit qu'un
rhume qui se dissiperoit avec le temps.
Bientot la fi^vre survint, elle redoubloit
apr^s le repas ; ses joues 6toient d'un rouge
vif, et le reste du visage pale et d^fait ; la toux
devint plus forte, les crachats sanguinolens et de
mauvais odeur, la maigreur augmenta chaque
jour; enfin une tristesse morne, et une humeur
chagrine succ^derent a I'esprit d'insouciance
qu'elle montroit auparavant.
Ce fut dans le courant de D6cembre que je
fus appele aupr^s de cette jeune et int^ressante
personne, qui me d6clara qu'elle ne vouloit
rien faire, parce que son 6tat etoit incurable.
Apr^s m'^tre occup6 k rassurer son moral, en
gagnant sa confiance, je I'assurai de sa gu6rison.
( 75 )
pourvu qu'elle mit autant de docility que de
perseverance a suivre mes avis. En effet elle fut
exacte et ponctuelle; et I'ouverture d'un cau-
t^re, joint ci I'usage du Lichen d'Islande, don-
n6 d'apr^s notre methode comme aliment et
medicament, firent cesser tons ces accidens en
moins de quatre mois : et Lady Ch . D***
jouit aujourd'hui d'une excellente sant^.
OBSERVATION XX.
- Alexandre Lebas, valet de chambre de Mr.
De Mortemart, ag6 de 42 ans, d'un tempdra-
ment gras et pituiteux, fut attaqud dans le mois
de Septembre 1801, d'une t&ux s^che tr^s-vio-
lente, avec douleur et chaleur de poitrine, una
fievre dont les redoublemens se faisoient ressen-
tir tous les soirs. Un traitement method ique
n'empecha pas la continuation des symptomes
jusqu'ii la fin de Septembre, oh I'application
d'un v6sicatoire sur la poitrine sembla faire
{ 75 )
cesser les accidens ; mais ce succes ne fut que
passager. Dans les premiers jours de Fevriersui-
vant, le malade fut pris d'un enrouement consi-
derable, la toux se manifesta de nouveau plus
s^che ct plus opiniatre que jamais; nouvelles
douleurs, nouveiles chaleurs de poitrine, ti^vre
lente, chaleur danS: la paume des mains, mal
de tetc excessif, perte absolue d'appelit, in-
somnie, pouls petit et frequent. Differens
moyens curatifs avoient 6t6 inutilement em-
ployes, la maladie faisoit toujours des progres:
comme le vdsicatoire sur la poitrine avoit eu
d6jk une apparence de succes, on I'employa de
nouveau, mais bien loin de diminuer les acci-
dens, ceux-ci ne firent qu'augmenter; 1 'oppres-
sion devint plus considerable, une alteration ex-
cessive tourmentoit le malade, sa poitrine ^toit
couverte de sueurs, ses urines 6toient rouges,
ses forces diminuoient. Le 15 Mars le malade
sollicita mes soins, la Mousse d'Islande fut la
base du traitement auquel il fut soumis, les ac-
cidens ne tard^rent pas k diminuer, et bientot
lis cess-^rent enti^rement ; au mois de Mai sa
-santǤ fut parfaitement retablje.
( r:. )
OBSERVATION XXI.
Le Capltaine O'Shiell, ag6 de 38 ans, d'un -
temp6rament bilieux sanguin, apv^s avoir
comniis des exc^s que Ton pardonne volontiers
dans la bonne compagnie, ressentit une doiileur
dans la poitrinC;, qui bientot fut suivie d'une
toux s^che et d'un crachement de sang qui se
renouveloit chaque matin. Les malaises al-
loient croissant, et les alarmes du malade aug-
mentoient d'autant que les divers conseils qu'on
lui avoit donnas jusque-1^, n'avoient rien chang6
sa situation.
II y avoit plus d'un an que cela duroit, lors-
qu'au mois de Mai 1801 il me fit part de ses
inqui6tudes, et reclama mes avis. La Mousse
d'Islande k haute dose, et un regime convena^
ble, dissip6rent en trais mois ces divers accidens;
et depuis cette epoque sa poitrine n'a eprouv6
aucune atteinte de douleur ni de foiblesse.
II est h. remarquer que le Cap. O'Shiell 6toit
depuis long-temps sujct a des langueurs, et k des
( 78 )
foiblesses d'estomac * qui ont totalement cess6
depuis I'usage du Lichen d'Islande.
* Un de mes malades a qui j'avois rdcommand6 le Lichen
d'Islande sous djfPSrentes formes, persuade, d'apres mes avis,
que plus il cn prendroit plus il seroit soulage, s'avisa un ma-
tin, d'en mS.cher comme dutabac: le lendemain il me de-
manda s'il pouvoit continuer sans inconvenient. Je lui d6-
clarai que cette plante mucilagineuse et tonique dissoute par
la salive ne pouvoit qu'augmenter en efficacite, et agir d'unc
maniere tres-avantageuse sur les organes de la digestion, qui
etoient extremement delabres. II continua done a machcr
tous les jours a jeun un gros de Lichen d'Islande; peu a. peu
les forces digestives se ddvelopperent, et bientot le malade ne
se ressentit plus des debilites et des tiraillemens d'estomac dent
il efoit si cruellcment afFect6,
( 79 )
Nous aurions pu ajouter plusieurs autres faits;
mais nous nous sommes attaches a presenter lea
plus int^ressans, et nous les avons crus suffisans
pour fixer I'opinion du public -f. Comme on le
voit, notre m^thode n'est pas le produit d'une
imagination qui s'est 6chauffi6e a composer quel-
ques nouveaux syst^mes; mais le fruit de plu-
sieurs observations suivies et r6fl6chies pendant
dix ans, et confirmees par un succ^s constant.
Nous savons tr6s-bien qu'il est difficile de re-
venir des impressions que I'ecole nous sug-
t Nous ne pr6tendons pas dire que dans tous Ics cas ou
fious avons employ^ le Lichen d'Islande il ait produit I'efFet
que nous avions droit d'en attendre ; mais que si on veut con-
sid6rer la negligence ou I'indocilite de quelques malades, Ics
circonstances ou le Lichen n'a pas rempli nos esperances, ont
ct6 excessivement rares, et ne peuvent en aucunc manierc
ttre mises en balance avec les nombreux exeraples de succes
•[ue nous aurions pu joindre a ceux que nous avons choisis.
( 80 )
g^re; que nos premiers pr6jug6s*, siilvant Des-
cartes, entratnent nos idees et notre jugement ;
cependant comme la v6rit6 n'a besoin que
d'etre propos6e, quand T^vidence est son apa-
nage, nous esperons que notre m6tliode trouve-
ra des partisans, et que notre sinc6rit6 sera en-
core mieux reconnue par I'exp^rience de ceux
qui la raettront en pratique.
Au reste les phthisiques nous sauront gr6
de la perseverance de nos recherchcs, puis-
qu'elle nous a mis a meme de leur faire es-
p^rer une gu^rison assur^e, dans une mala-
die qui dans i'esprit de beaucoup de gens pas-
soit pour incurable.
* Un medecin a qui ks parens d'un phthisique proposoicnt
I'usage du Lichen d'Islande, repondit: le malade a lait u-
sage des gel6es de veau, de corne de cerf, de gomme arabique ;
k Lichen d'Islande ne se donnc qu'en gelee, il sera inutlk
comme ks autres. II faut con venir, que si ce m^deneut
voulu examiner la nature du Lichen d'Islande et ses propri6-
t6s, il n'eut pas hasarde une opinion aussi erron6e.
Voyez pages 24, 25, et 96, la difference du Lichen d'Is-
lande avcc ks autres mucilagineux ; et aux pages 30, 31, 32,
42 ct 45, ks diff<5rentes manidres de k pr6parer.
L 2
{ 81 )
QUELQUES REFLEXIONS
Snr differens Moyens qui ont etc pr iconises et
employes dans le Traitement de la Phthisic
Pulmonaire,
DU SEJOUR DES ETABLES.
On a beaucoup vant^ les efFets salutalres du
s6jour des etables dans la. Phthisic Pulmonaire ;
on a m^me cit6 divers exemples de gu6risons
par ce moyen, Malgr^ ces exemples, malgr^
ce qu'en a pu dire un m6decin savant dans un
6crit ex professo sur ce sujet, Tobservation a prou-
v6 que I'air des 6curies et des 6tables, 6toit plus
capable d'acc^lerer que d'arrdter la mort. Com-
ment en effet pourroit-on esp6rer de r^tablir le
jeu des poumons dans une pareille atmosphere.
( 8ii )
puisqu'il r6sulte des experiences des physiciens
modernes que I'air qui a ete expir6 est m6phi-
tique, que celui m^me qui s'^chappe des corps
par la transpiration est bientot mephitis6, et hors
d'etat de servir la transpiration I
La fraicheur du teint, la belle carnation, la
force des bouchers, des 6carisseurs, de ceux qui
habitent les triperies &c. qui tous respirent un
air surcharge de particules animales plus ou
moins f6tides, sont des faits qui semblent contre-
dire I'insalubrit^ de I'air dans les endroits ou
sont renfermes les animaux. Mais cette contra-
diction eessera bientot, si Ton considere que
Tair dans lequel vivent les bouchers, les 6caris-
seurs &c. n'est point decompose par Ic jeu du
poumon des animaux, comme il Test dans les
Stables. Si les pulmoniques avoient besoin d'un
air charg6 de particules animales, celui des
boucheries paroitroit beaucoup mieux leur con-
venir que celui des Stables ; mais si ce moyen
peut avoir quelque succ^s, ce n'est qu'en I'as-
sociant avec ceux que I'etat de la maladie re-
clame de I'art.
( 8.3 )
Les Drs. Clerc, Fouquet, d'Arluc, et depuis
plusieurs auties m^decins, h raison de la nature
putrid e des exhalaisons animales, et de la cha-
leur constante des 6tables, propre k provoquer
les sueurs si fatales aux Phthisiques, se sont
fortement elev6s contre ce genre de secours.
DE L'EAU DE GOUDRON.
Le Goudron, pix liquids, est un sc gommo-
r^sineux, que Ton tire d'une esp^ce de pin, des
pays septentionaux. Son odeur est forte, balsa-
mlque et empireumatique. On en prepare une
eau qui a ct6 fort employ6e en m^decine pen-
dant quelque temps, d'apr^s la recommanda-
tion de Berkley 6veque Anglois, qui dans un
ouvrage curieux par sa singularite, lui a pr^te
des vertus ^tonnantes. Mais il s'en faut de
beaucoup que I'usage de cette Panache ait
triomph6 de toutes les maladies 6num6r6es
dans I'ouvrage. II n'est m^me pas d6montr6
que ce remade ait eu de v6ritables succes dans
la Phthisic confirm6e. Cependant si Ton ne
peut compter sur ce remade dans cette ma-
( 8* )
kdie, s'il n'est pas universel, comme Ic pre-
tend r^veque Anglois, on ne pent disconve-
nir que c'est un secours qu'on ne doit j>as n6-
gliger dans le traitenient de plusieurs maladies^
de restomac, dans les embarras des reins, et des
voiea urinaires. D'ailleurs on peut appUqueir
en partie h. I'eau de Goudron ce que nous dirons
$ur les Balsamiques,
DES ACIDES MINERAUX.
Quelques m6decins ont preconis6 les acides
mineraux, et les ont employes avec assurance
et pers6v6rance ; mais les praticiens sages et
eclaires qui ont sans prevention suivi Taction
de ces rem^des, en ont senti ie danger, sans y
apercevoir aucun avantage. Je crois ne pou-
voir mieux faire que de rapporter ce qu'en pensc
un medecin * justement cel^bre par ses lu-»
mitres et son experience.
"Qu'on s'abstienne surtout contre les crache«
** mens de sang, de ces pr6tendus styptiques qui
* Le Dr. Portal.
( 85 )
" portent leiir action sur les premieres voies, et
non SLM- les vaisseaux sangiiins du poumon ;
** ce qui fait que non-seulement ils ne remplis-
*' sent pas I'objet qu'on en attend, mais qu'ils
•* donnent lieu ci des accidens auxquels on ne
peut souvent obvier. J'ai connu un nK^deciA
** qui donnoit il tr^s-haute dose I'acide vitrio-
" lique, dans toutes les boissons, h un Phthisique
" qui crachoit du sang. Ce remade fut con-
" tinu6 long-temps sans produire TeiTet qu'on
" en attendoit ; il excita enfin des vomisse-
** mens et des douleurs continuelles dans la
" legion 6plgastrique, qui tourment^rent le
*' malade jusqu'^i sa moit d'une maniere cru-
*' elle. J'en fis rouverture, et ind6pendamment
** des diverses alt6rations dans la poitrine qui
" avoient donne lieu k la maladie dont il avoit
** p6ri, je trouvai son estomac singuliibrement
** racorni, ses parois 6toient beaucoup plus epais
** qu'ils ne le sont ordinairement, et sa siu'face
" interne etoit in6gale et couverte de vaisseaux
variqueux.
** L'usage des acides continue long-temps est
" toujours dangercux, surtout celui des acides
M
( 86 )
" min6raux. II est encore plus faclieux dans
" les Phthisiques qui sont d'une sensibility in-
croyable ; et quand mdme ils ne produi-
** roient pas de si f^cheux effets, ils seroient
'* encore dangereux s'ils pouvoient arreter le
" sang, comme on se le propose en les pres-
" crivant."
Cartbeuser a soin de prevenir sur les suites
facheuses de cette esp^ce de remade. Desault
rapporte une observation d'un jeune homme
mort de Phthisic tuberculeuse, dont la naissance
fut en partie Teflet de Tabus des acides. Stoll*
et plusieurs praticiens c61^bres de nos jours, d6-
clarent que les ayant employes sur le credit que
leur avoient donn6 des m6decins estimables, ils
ont 6t6 obliges d'y renoncer, d'apres les maux
sans nombre qu'ils avoient occasionnes.
* Acidum in phtislcis vomitum facere, vidi in juvenr
F * * ; diarrhaeam idem facere certum est. Hinc est, cur
serum lactis acidum phcisicis ssspe non convcniat ; hinc etiam
ante sumptionem lactis, vel in eodem, sapo venetus cum la-
pidibus cancrorum sumatur. SioU ratio inedendi\ pag. 73,
'vol. 4.
( 87 )
DES BALSAMIQUES.
II est un pr6jug6 dont on ne peut trop sc
preserver, c'est I'usage des Balsamiques, tels
que les baumes de Copahu, d'Opobalsamum,
de Benjoin, la Gomme Ammoniaque, le Gayac,
la Myrrhe, le Styrax, I'Oliban &c. les plus dan-
gereux remedes que Ton puisse employer dans
la Phdiisie. Les qualit6s balsamiques, detersives
et mondifiantes que Ton relive dans les baumes,
ou ne parviennent pas au poumon, ou bien elles
n'y arrivent, apr^s avoir r6pandu I'ardeur et le
feu par tout le corps, que pour y allumer le
mdme feu. L'id6e d'ulc^re a favoris6 celle de
remade balsamique; mais en examinant ce que
c'est qu'un ulcere dans le poumon, on voit que
ce sont en general des ulcerations phlegmo-
neuses de tubercules qui entretiennent autant
d'abc^s que de v6sicules pulmonaires qui out
suppure. Parmi les medecins distingu^s qui
M 2
( 88 )
ont attaqu6 ces iibus revoltans, nous citerons les
Drs. Pringle, Fothergill, StoU* et White.
,Nous pourrlons 6galement parler de rinutilit^
des loocbs, et des autres rem^des huileux que
Ton donne dans res}3oir de calmer la toux.
Ces remedes sont plutot nulslbles que salutaires,
par I'empaitement qu'ils causent b. I'estomac, et
le degoCit qu'ils sollicitent ; d'ailleurs la toux ne
cesse qu'avec la maladie, c'est done elle qu'il
faut attaquer par des moyens convenables.
DU LAIT.
Le Lait, jouissant d'unc reputation fort eten-
due dans la Phthisie, est gen6ralement ordonn6
de la mani^re la plus inconsid6ree dans les diff6-
rens dcgr6s de cette maladie. Cependant ce
remede est non-seulement infidMe dans beau-
coup de cas, mais il est tr^s-souvent dangereux.
* Balsamica, ut balsamum locatelli, therebcntinam, myr-
rham, aliaque hujiis generis a multis celebrata reraedia Moi -
gagnius, et ipsa toties rcpetita obscrvaiio reprobat : calorem
ct febrim augent, suppurationemque promovent. Slcll,
fatio medcndi, pug. 189, w^. 1.
( 89 )
On a constamment iemarqu6 que donn6 avec
la fi^ivie, dans une pulmonie au dernier degr6,;
bien loin de r6ussir, il augmente les symptomes,
et produit divers accidens, tels que des aigreurs,
des pesanteurs d'estomac, des ventosit^s, des d6-
yoiemens, des^ sueurs &c. et que tous ces effets
cessent si on se determine k en supprimer I'u-
sage. Raulin le regarde conime pernicieux
dans tous les temps de la Pbthisie ; il assure
qu'il nc pent faire qu'un mauvais effet lorsque
les tubercules sont formes, et que la suppuration
est ^tablie. Il declare qu'il est plus difficile de
rem6dier aux mauvais effets que le lait produit
dans la Phtbisie Pulmonaire, que dans toute au-
tre maladie, Les medecins de Breslau observent
tres-sagement, dans le recueil de leurs observa-
tions, que le lait ne pent jamais produire de bons
effets lorsqu'il y a dans les poumons des duret6s,
des tubercules, des skirres &c.
Bennet, cel^bre m^decin Anglois, interdit le
lait aux Phtbisiques dans son traite vraiment
original intitul6 theatrum tabidorum.
Morton I'oracle de la m^decine moderne
dans les maladies cbroniques de la poitrine,
n'est rien moins que partisan de ce remade.
{ 90 )
Desault, m^decin de Bordeaux, Junker, Bor-
deu, I'avoient proscrit de leur pratique. Enfin
plusicurs habiles praticiens de nos jours, qui ont
61eves dans une endure confiance aux vertus
admirables du lait, ont absolunient renonc6 a.
son usasce.
" Ne seroit-il pas possible, dit le Dr. Tardy*,
que la couleur du lait ctant analogue a celledu
chyle, que son go^it doux et flatteur, enfin que
les qualites nutritives et balsamiques, que nous
attachons k cette substance 61ementaire, pr6pa-
ree par les mains de la nature pour I'estomac
des jeunes animaux, nous eussent peut-6tre fait
trop illusion en nous induisant a croire que, par
cette analogie, le lait devoit 6galement convenir
aux estomacs delabr^s et infirmes ? Si Ton con-
sid6re.le peu de rapports qui doit exister entre
restomac, tendre et delicat, mais bien constitu6,
d'un enfant, et celui d'un adulte d^bilc et lan-
giiissant, dont les organcs digestifs sont us6s, ou
* Rechercbes sur la Phthisie Pulmonaire, par leDr.Whitte,
tmduit de VAvglois, par A. A. Tardy mcdccin de Mont-
Dellier, noie 21.
( 91 ^
sc trouvent emp^tes de sues vici6s, acides, ct de
mati^res imparfaitement 61aborees ; si Ton veut,
dis-je, se rappeler I'esp^cc de decomposition
que subit ce fluide avant de pouvoir se dig^rer,
ct faire attention au travail p6nible que, dans
cet 6tat, il doit oecasionner a Testomac d'un
malade ; en un mot pour peu qu'on r6fl6chisse
sur le principe de corruption qu'il doit com-
muniquer a la masse des liquides qui, dans la
pulmonic, marchent eux-mdmes, a grands pas,
vers une corruption complete : combien ne trou-
vera-t-on pas de raisons qui s'opposent a ce que
le lait puisse jamais remplir les indications qu'on
lui suppose dans la Phthisic Pulmonaire
Le fameux Haller, en parlant du lait, s'ex-
prime ainsi. Est in lacte siium vitimn. De-
bilitat adultum homiiuni, vcntriculum obtundil:
alvum aliis nimis solvit, siccdt aliis ahlinitis in-
testinis, et in universum minus convenit Us ho-
minihus quihus fibra dehilis est et la.va.
Nous pouvons done assurer, d'apres ces au-
torites ct notre propre experience, qu'il est
un petit nombre de cas de Phthisic oh le lait
puisse 6tre employd; avcc succes. Nous ajoute-
( 92 )
rons meme que pour etre adrainistre d'une ma-
niere utile, il demande beaucoup plus de sa-
gacite et de pr6caution qu'on ne le soupconne
ordinairement. Au reste, comme on le voit,
nous ne pietendons pas dire que le lait doive
6tre entiercment proscrit : notre intention seule-
ment est de demontrer que cet aliment medica-
menteux ne m6rite pas la con fiance aveugle
que lui accorde la multitude ; nous voulons
surtout pr6munir quelques medecins centre
leur penchant journalier a prescrire la diette
lactee dans toutes les affections de poitrine, or-
donnance commode et banale qui a coute la
vie k beaucoup trop d'infortunes.
DES EXUTOIRES.
Les exutolres sont justement recommand^s
ct infiniment utiles dans la Phthisic, mais on
employe trop 16g^rement les v6sicatoires, et on
n6glige beaucoup trop le seton et le cautere.
L'application continue des cantaridcs fait passer
dans tout le syst^me himioral un sel volatil tr^s-
acre, qui favorise singuli^rcment la dissolution ;
( 93 )
aussi faut-il s'en abstenir plus particuli^remciit
dans la Phthisie Scorbutiquc.
Mr. Portal, dont les luml^res et la sagacit6
sont g6n6ralement connues, a fait voir, dans un
savant m^moire*, les communications directes
du poumon avec les extremites sup6rieures et
surtout avec les parties ext^rieures de la poi-
trine. ** C'est au-dessous des aisselles, dit-il,
** sur la partie lat6rale de la poitrine, c'est le
*' long de la partie interne du bras oh le tissu
*' cellulaire est tres-abondant, qu'il convient de
** placer Texutoire ; I'anatomie le prescrit, et
** la nature malade I'indique."
Nous devons dire que dans notre . pratique
nous avons profite de ce sage avis, et que nous
nous en sommes parfaitement trouves, mais ce
que nous devons aj outer, c'est que nous avons
toujours donn6 la preference au s^ton, lorsque
la repugnance des malades ne s'y est pas op-
pos6e : cette espece de Fontanelle a sur le cau-
t6re les avantages d'etre faite dans le moment ;
* Lu a rAcad6inic des Sciences de Paris, en 1791.
N
{ 94 j
la suppuration y est etablie le second jour, et
dans I'appHcation du cautere il faut attendre la
chute de rescaire, qui ne se fait souvent qu'au
bout de douze ou- quinze jours* La plaie pro-
duite par ie s6ton est tellement soumise a la vo-
lonte du chirurgien, qu'on I'entretient tant de
temps qu'on le desire, et qu'on la guerit de
meme d^s qu'on le souhaite, en otant la bande--
lette; le cautere se gu6rit quclquefois quoi qu'on
fasse, et souvent on desireroit le guerir sans pou-
voir y r6ussir, du moins aussi promptement que
le s6ton.
DE L'EAU DE CHAUX.
L'Eau de Chaux a 6t6 recommandee par
plusieurs m^decins dans la phthisic pulmonaire.
Willis, Morton, de Boissieu, Schmucker, lui ont
donne des 61ogcs. Detharding a fait un ou-
vrage pour demontrer son efficacit6 dans les ul-
eeres du poumon. Les proprietes detersives et
dessicatives de I'Eau de Chaux dans les plaies
exl6rieures, ont determine, sans doute, a en faire
iisage dans les ulc^;res aux poumons ; mais nous
( ^5 ) ^
avons d^montre, k raiticle balsamiqups, rabsiir"-
c]it6 et le clanger de cctte doctrine. D'ailleurs
I'emploi d'un pareil remade n'est pas sans de
grands inconv^nlens. Le m6decin sage ne
doit pas perdre de vue la grande causticite de
la chaux; elle est telle que, quoiqiie i'eau n'en
tienne en dissolution qu'nne quantity assez pe-
tite, cette eau a une saveur alkaline d'une acre-
t6 si considerable, qu'il est presque impossible
d'en boire iin verre entier. Pour qu'elle soit
potable et exempte d'inconvenient, il faut la
couper avec une tres-grande quantite d'eau
pure; peut-on bien r6pondre qu'ainsi affoiblie
elle conserve les vertus m6dicinales que les
propri6tes de la chaux semblent indiqueri
On a encore cherche i\ temperer la causticite
de I'Eau de Chaux, en la coupant avec le lait ;
mais cette maniere de Tordonner pent 6tre plus
pernicicuse qu'utile. Le Dr. Maquart en a
d6montre le danger, en rappelant que la cliaux
produit avec les corps mucqueux, le blanc
d'oeuf et les laitages, des coagulations qui sont
de la plus grande duret6.
Ce remade est funcste dans le cas d'irrltablii-
( 96 )
t6 du ventriculc. Ses partisans meme con-
viennent que son usage continu6 alt^re facile-
ment les forces digestives. De quelle utility
peutdonc ^tre un tel moyen, dans une maladie
oCi Ton ne pent esperer quelques succ^s, que
par unc longue perseverance dans le traite-
ment ?
DES EAUX MINER ALES
Et particulicrement de celles de Bristol*.
De tous les temps les eaux minerales ont ^t^
vantees pour dift'erentes maladies, et le plus
souvent elles ont 6t6 ordonnees comme un pr^-
cieux moyen de dissipation. Aussi en general
plaisent-elles aux personnes attaqu6es de mala-
dies chroniques qui aiment la nouveaut^ et la
diversity des remedes. Pline a dit, en parlant
*Bristolj ville maritime, une des plus importantes d' Angle-
terre apres Londres, dont elle est 61oign^e de 120 milles, en-
viron 40 lieues de France.
( 97 )
des medecins de son temps qui employoient ce
genre de secoiirs, medici, qui diverticulis aqua-
rum fallunt agrotos : quoi qu'en disc Pline, et
quoique les eaux ne repondent pas ordinaire-
ment a I'eclat de leur r6putation> on ne doit ni
en rejeter absolument I'usage, ni compter ex-
clusivement sur leur eft'et avantageux.
Les Eaux de Bristol ont 6te c^lebres pendant
long-temps comme sp6cifiques dans la consomp-
tion pulmonaire, mais la reconnoissance de
ceux qui en ont 6t6 soulag6s a 6t6 beaucoup
trop loin. Si le plaisir, la dissipation, et Texer-
cice sont d'un secours puissant dans le traite-
ment de la consomption pulmonaire, on ne
pent se dissimuler que tous ces avantages se
trouvant r6unis h cette source, on pent sans
partialite leur attribuer le soulagement qu'y ont
6prouve quelques malades.
Les perspectives pittoresques qui environnent
cette charmante ville, ses belles promenades^
sa position chaude et couverte, et le graiid.
nombre de personnes qui s'y rendent des di-
verse* provinces d'Angleterre, ces differens
agr6mens concourent k inspirer la gaiet6, et a
( 38 )
porter rharmonie dans tout Ic syst^mc. Mais
comme remade, I'Eau Min6rale dc Bristol iic
pent poss6der aiicune vcrtu sp6cifique, capable
de triompher de la cause morbifique qui agit
^uv I'es poumons dans la phthisie. Cette eau
est presque sans gout; sa gravity sp6cifique est
kl'eau distill6e con:ime 100,077 h 100,000; les
substances qu'on y d^couvre sont la terre cal-
caire, la s61enite et le sel de glauber ; le tout
dans une si foible proportion, qu'un gallon * de
cette eau n'en contient pas plus de 48 grains,
qui est moins que ce qu'on trouve dans la plu-
part des sources ordinaires, dont on fait usage
habituellement.
Le Dr. Saunders, dans son ouvrage sur les
eaux min6rales, en parlant des vcrtus de celles
de Bristol pour la cure de la consomption, dit :
** il s'est ^lev6 beaucoup d'opinions divcrses sur
" les vertus supposees des Eaux de Bristol dans
" cette maladie, et d'apresle nombre de cas ou
* Le gallon contient quatre pintes de Paris ou huit pintcs
d'Angleterrc.
( 99 )
' elles n'ont pas i^ussi a ceux qui fr6quentent
* ces eaux, plusleurs pcrsonncs ont 6t6 dispo-
* s6es cl nier qu'elles eussent aucune vertu par-
*' ticuliere, suph'ieure h celles de toute eau sim-
" pie. II n'est pas ais6 de determiner jusqu'k
" quel point on doit a la situation favorable ei
'* au climat doux et tempore dont Bristol jouit.
*' Mais il n'est pas douteux que sa source,
** quoiqu'clle ne solt nullement un remede
" pour la consomption, ne soulage quelques-
** uns des symptomes les plus alarmans de
*' cette terrible maladie."
Comme on peut faire le m^me 61oge dc
beaucoup d'autres moyens commun6ment em-
ployes ou recommandes pour la gu^rison de la
phthisle, on ne sera point etonne de voir notre
opinion sur les Eaux de Bristol conforme a
celle du respectable docteur Saunders.
( 100 )
Le grand nombie de personiies que nous
avons vuesperir de la phthisic pulmonaire, par-
mi lesquellesetoient des parens qui nous etoient
chers, nous a engag6, des les commencemens
de nos Etudes medicales, a donner une atten-
tion particuh^re *l cette cruelle raaladie, et a
chercher par un travail assidu quelque moyen
de I'attaquer avec avantage. Ce n'a 6te qu'a-
pr^s beaucoup d'annees, et des 6preuves multi-
pli6es, que nous avons adopte le mode de traite-
ment que nous soumettons maintenant au pu-
blic. Le succes de dix ans d'experiencc nous a
donne la conviction que le resultat de nos tra-
vaux diminuera les souffrances de cette nom-
breuse cl^sse de malades dont le soulagement a
et6 notre principal objet.
Mais le suffrage que nous ambitionnons le
plus en publiant cet ouvrage, est sans contredit
celui de nos collegues. Si apres Tavoir lu, ils
sont disposes, comme nous I'esperons, a donner
le Lichen a leurs malades comme medicament
ct comme aliment, conformement a notre m6-
( 101 )
thode de preparation et de traitement, et qu'lls
isn ^prouvent refficacit6, ils nous obligeront in-
finimentde nous communiquer les differens cas
dans lesquels ils auront juge convenabie de
remployer, les circonstances oh il aura paru
procurer un avantage imm^diat, de m^me que
celles, oCi il aura sembl6 ne pas r^ussir.
Nous nous proposons de publier bientot un
supplement k cet essai, nous serons charm 6s
d'y insurer le r6sultat de leur experience ; nous
nous empresserons d'accueillir leurs observa-
tions, et m^me leurs doutes, bien persuades que
comme nous, ils ne peuvent avoir en vue que le
soulagement de I'humanite souffrante, et I'a-
vancement de notre art.
FIN.
O
E R R A
T A.
Page.
ligne.
au lieu de
Hsez
14-
22
borrichi
borrichii
23
17
eorts
efforts
36
14
du Lichen
Lichen d'Islandc
37
22
Lichen Islande
Lichen d'Islandc
40
1(5
Lichen
Lichen d'Islandc
41
23
idem
idem
66
6
fautenil
fauteuil
80
19
m^deneut
medecin cut
83
8
un sc
un sue
lb.
10
Septentionaux
Septentrionaux
90
8
ce lledu
celle du
I
De rimprimerie de L. Nardini, No. 15, Poland Street.