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RAPPORTS
DE L’AIR
AVEC LES ÊTRES ORGANISÉS.
TOME TROISIÈME.
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RAPPORTS
DÉ L’ A I Pt
AVEC LES ÊTRES ORGANISÉS '
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Traités de Faction du poumon et de là
peau des animaux sur l’air > comme de
celle des plantes sur ce fliiide.
Tirés des Journaux d’observations et d’expériences
de Lazare Spallanzani, avec quelques Mémoires
de l’Éditeur sur ces matières.
Par Jean SENEBIER,
* v
Bibliothécaire de Genève , Membre de diverses Aca-
démies et Sociétés savantes , et Correspondant dé
V Institut national.
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iX.H'1 00V XCll € /? 7TV 0 OV 0À0 V TO (TW^aa.
Hipocuatis Epidemic. , liv. VI, § 6;
Tout le corps expire et inspire.
TOME TROISIÈME*
A GENÈVE,
Chez J. J. Pasciioud , Imprime ur-Lib^aird*
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TRAITE
SUR
LES RAPPORTS DES PLANTES
AVEC L’AIR ATMOSPHÉRIQUE.
INTRODUCTION DE L’ÉDITEUR.
Ïendant que Spallanzani s’occupoit de ses
expériences sur la respiration des animaux , il ne
put se dissimuler la quantité prodigieuse de gaz oxy-
gène absorbé, soit par l’acte lui -même de la res-
piration , soit par l’organe cutané de l’animal vivant,
et l’absorption considérable de ce gaz qui augmeute
par les déjections des animaux , par leurs dépouilles
et leurs cadavres ; de sorte que comme cette perle
est aussi grande que constante pour l’atmosphère à
chaque seconde du temps-, il fut forcé de porter ses
regards sur les moyens que la nature pouvoit em-
ployer pour remplacer ce gaz disparu ; cette re-
cherche devenoit d’autant plus nécessaire, que toutes
les expériences eudiométriques faites en mille en-
droits différens , et en des momens divers de la journée
et de l’année elle-même , ont toujours montré que
les quantités de l’oxygène et de l’azote sont cons-
tamment les mêmes dans l’air atmosphérique qui se
trouve en pleine liberté.
Dans ce but, il considéra les divers moyens qu’on
avoit soupçonné propres à remplir celte grande fin de
Tome 5, A
** N ; ’j %* **■'
. . r. > i: i .
( a )
l’économie générale de noire terre: aussi comme on
avoit avancé, que le gaz oxygène, rendu par les
piailles ver les exposées au soleil pouvoit remplir cel
effet important il s’en occupa particulièrement d’une
manière originale et ulile, et s’il a vu la plupart
des faits qu’Ingenhous et moi avions observé avant
lui, il en a vu quelques autres qui nous avoient
échappé; il a mis d’ailleurs dahs toutes ses expé-
riences une exactitude et une précision , que nous
avions été tous les deux bien éloignés de pouvoir y
mettre , parce que les procédés eudioinétriques étoient
alors trop imparfaits : de sorte qu’à cet égard seul
les travaux de Spallanzani deviennent extrêmement
précieux , puisqu’ils complètent tout ce que In-
genhous et moi avions pu faire sur ce beau sujet
et confirment tout ce que nous avions déjà vu.
Spallanzani m’avoit écrit qu’il vouloit composer
et publier incessamment un Mémoire qui renfer-
meroit les résultats de ces expériences sur ce sujet;
il m’en avoit envoyé déjà le plan que je publierai
ici avec une partie de notre correspondance relative
à cette matière ; on y verra son étendue et l’on sen-
tira combien il m’a manqué de moyens dans les
journaux d’expériences de ce naturaliste pour le
remplir; mais on saura ce qu’il avoit projeté, et ce
qu’il auroil fait, s’il avoit eu le temps d'exécuter
ce qu’il avoit si heureusement ébauché.
Cependant, quoique Spallanzani ne voulut donner
que quelques résultats généraux de son travail , j’ai
pourtant cru qu'il seroil utile aux savans, et sur-
tout aux jeunes physiciens ; de présenter ici le dé-
( 5 )
taîl et la suite de ses expériences, non comme elles se
trouvent répandues dans ses journaux , mais comme
je pou vois présumer qu’ils a voient été dans sa tête.
Je me suis écarté à certains égards du plan qu’il
m’a voit tracé et qu’il vouloit suivre , parce que comme
je l’ai déjà dit , je n’aurai pas pu le remplir avec
les matériaux que j’ai eus , et parce que ceux que
j’avois sembloient. me prescrire une autre disposi-
tion : ainsi , par exemple , j’ai renfermé dans un
chapitre particulier quelques questions importantes
et préliminaires , qui auroient pu à la vérité se dis-
cuter, en traitant la question principale; mais comme
elles auroient fait des épisodes trop longs , et comme
elles pouvoient servir à répandre du jour sur les
divers sujets dont Spallanzani s’est occupé, il m’a
paru plus convenable de les présenter à part , de
les mettre à la tête des autres sujets, où elles seront
comme autant de principes sur lesquels les autres
s’appuieront; telle est l’influence que la chaleur du
soleil exerce sur l’air clos , et sur divers gaz; telle est
celle de l’eau sur chacun d’eux , celle de la terre, etc.
Le public a déjà pu voir dans ma Physiologie
végétale , T. 111 , que nous avions eu des résultats
différens sur le gaz oxygène qui s’échappe des feuilles
vertes exposées sous l’eau au soleil ; j’y ai raconté ses
expériences, comme il me les avoit écrites lui-même ;
j’y ai répondu à quelques-unes de ses difficultés,
et il n’eut pas le temps d’examiner et de refaire les
expériences que j’avois opposées aux siennes; de
sorte que je joindrai aux mémoires de mon ami , un
mémoire que je lui ai adressé dans mes lettres et quel-
( 4 )
ques considérations nouvelles , que ses expériences
les miennes et celles de M.r Desaussure m’ont fait
naîlre depuis sa mort.
J’ai eu encore plus de peine pour faire ces mé-
moires que ceux sur la respiration, parce que toutes
les expériences de Spallanzani éloient mêlées avec
celles qu’il a voit faites sur les animaux ; ce qui en
rendoit encore le dépouillement moins facile $ mais
le désir sincère que j’ai toujours eu de tenir la parole
que j’avois donnée à cet excellent homme, et celui
d’avancer les progrès de la science m’ont fait vaincre
tous les dégoûts qui accompagnent ce genre de tra-
vail; on comprend aisément qu’il faut employer un
temps considérable pour rassembler des expériences
semblables au milieu de plusieurs milliers d’autres
qui sont très-différentes , pour les classer ensuite et
les mettre à leur place. Il est vi'ai que dans ce sujet
qui m’éloit familier , je n’ai pas eu à lutter contre
les hésitations et les doutes qui se présentoient sans
cesse à moi , lorsque je m’occujrois de l'ouvrage sur
la respiration des animaux : mais il m’a fallu tou-
jours rassembler et choisir ce qu’il falloit publier.
( 5 )
/
MÉMOIRE PREMIER.
Sur cette question : les eaux du globe décomposent-
elles l’acide carbonique (qu’elles reçoivent de
l' atmosphère (i) ?
Suivant lopimon des physiciens et de, chimiste,
modernes, il y a deux grands moyens employés par
la nature pour purifier l'atmosphère et la délivrer de
l’impureté que devroit lui porter la grande quantité
d’acide carbonique produit par la respiration de
l’homme et des animaux, par la fermentation et
par la combustion : ces deux moyens sont les eaux
et les plantes.
Les eaux produisent cet effet par l’affinité qu’elles
ont avec l’acide carbonique , qu’elles absorbent
continuellement, et les plantes par le gaz oxygène
qu’elles répandent continuellement , quand elles sont
recouvertes par la vive lumière du soleil.
Suivant ces physiciens, les eaux salées de la mer ,
les eaux douces des fleuves , des torrens, des marais,
des étangs , celles même qui tombent du ciel sous la
forme de pluie doivent concourir à décharger l’air
(i) Note de l'Editeur. Parmi les papiers de Spallanzani qui
m’ont été remis j’ai trouvé l’ébauche de ce mémoire qui devoit
servir d’introduction à ses recherches sur les plantes , et je me
suis borné à la traduire de l’italien en françois. J’en avertis afin
que l’on sache que dans ce mémoire la forme et le fond appar-
tiennent entièrement à ce grand homme.
( 6 )
de cette surabondance de gaz acide carbonique , qui
l’auroit bien lot infectée.
En considérant cependant celle absorption conti-
nuelle du gaz acide carbonique depuis l'époque où
les hommes et les animaux commencèrent d’exister,
quelques philosophes ont paru penser que les eaux
qui sont à la surface de la terre auroient dû s’aciduler
insensiblement, de manière qu’au bout d’un certain
temps, elles auroient manifesté le goût acidulé que
l’on remarque dans les eaux saturées artificiellement
de cet acide carbonique.
Pour écarter celte difficulté , quelques savans ont
pensé, que les eaux.avoienl le pouvoir de décom-
poser l’acide carbonique qu’elles avoieut absorbé ,
et qu’une partie de l’oxygène combiné avec le car-
bone pour former l’acide carbonique se dégageoit et
rentroit dans l’atmosphère.
Je me suis proposé dans ce mémoire de rechercher
par la voie de l’expérience , si les eaux sont un
moyen suffisant pour purifier l’air atmosphérique,
en me réservant dans un autre mémoire , de m’oc-
cuper du pouvoir des plantes pour exhaler le gaz
oxygène.
J’ai fixé mon attention sur le point capital de ce
sujet. J’ai cherché, si la décomposition de l’acide
carbonique a véritablement lieu dans les eaux plus
ou moins chargées de cet acide , ou si elle n’est
comme elle a été jusqu’à présent qu’une simple
hypothèse. Cette manière d’interroger la nature pour
la solution de ce problème m’a paru la plus conve-
nable.
( 7 )
Je me suis donc dil , si l’on acidulé l’eau avec
l’acide carbonique; si l’on remplit avec elle un flacon
fermé avec un bouchon usé à l’émeri jusques à une
certaine hauteur ; si le reste de la capacité du flacon
est remplie avec l’air commun; si le flacon bien
fermé est tenu renversé sur son col dans un petit
vase d’eau ; alors si l’acide carbonique est décomposé,
et si son oxygène reste libre , il sei’a évident que l’aii'
du flacon devra être devenu meilleur.
Expérience I.
Je préparai dans ce but l’acide carbonique avec
le spath calcaire cristallisé et Iransparent ; je le
relirai par le moyen de l'acide nitrique; j’en açidulai
l’eau de mon puits, et j’en remplis deux flacons bien
fermés avec des bouchons usés à l’émeri.
Je décrirai ces flaçons parce que je les emploirai
toujours dans ces expériences; ils contcnoienl 118,90
centimètres cubes, ou 6 pouces cubes d’eau chargée
d’acide carbonique.
Je les remplis avec 118,90 centimètres cubes, ou
6 pouces cubes d’eau chargée de gaz acide carboni-
nique , et j’y introduisis sous l’eau 5g, 45 centimètres
cubes , ou 3 pouces cubes d’air commun qui étoient
la mesure précise dè l’eudiomètre inventé par Mr.
Gioberl dont je me servis alors et que j'ai toujours
employé.
Je bouchai ces deux flacons avec soin , je les lins
ensuite sur leurs cols renversés dans un vase plein
d’eau.
Je ne parlerai plus de ces manipulations, que j'ai
observées dans toutes les autres expériences.
( 8 )
Je laissai ces deux flacons de celte manière à une
température de i5°; je la détermine, parce qu’elle
n est point indifférente dans ce genre d’expériences.
Au bout de l4 h ares , je .trouvai que l’air com-
mun s’étuit chargé de 160 ^d’acide carbonique , et
qu'il .étoi.t resté sans aucune altération (i ).
Cette expérience fait donc connoîlre que l’eau
chargée d’acide carbonique ne le décompose pas,
mais qu’elle l’abandonne à l’air atmosphérique dans
son état naturel.
J’avois ouvert l’un de ces flacons au bout de 10
• | * ! } » *■ f
heures ', et je remarquai par l’essai que je fis de l’air,
qu’il s’échappa hors de l’eau plus d’acide carbonique
dans dés premières heures qtie dans les suivantes.
Enfin j’ai vu qu’après avoir enlevé fiacide carbo-
nique mêlé avec l’air fcomimm. celui-ci étoil rigou-
reusement resté le meme ,i soit pour la quantité , soit
pour la ptWdl'é.
Expérience IL
Il paroissoit clair que l’eau acidulée des deux
flacons devoil avoir perdu de :son acidité en raison
de l’acide carbonique qu’elle avoit perdu , et je m'en
assurai par le goût et par soir mélange avec l’eau de
chaux.
Expérience' III.
Mais celle eau qui a été, eu partie privée de soi)
acide carbonique continuera-t-elle à produire ce gaz,
eu la soumettant à la. même expérience avec l’air
commun,?., H
(i) Note de l’Editeur. Un degré représente la centième partie
rie la mesuré de l’cudioniètre , ici donc nu degré est la centième
partie de 3 pouces cultes.
( 9 )
Il me semble que je ne devois pas négliger celte
expérience. Il s’échappa du nouvel acide carbonique
hors de cette eau , pour entrer dans l’air commun
enfermé avec elle ; mais la quantité en fui plus petite
que dans la précédente expérience , comme on peut
aisément le prévoir.
Expérience IV .
Que seroit - il arrivé, en faisant usage de l’eau
commune dans ces expériences ? On sait bien que
l’eau en contact avec l’air de l’expérience contient
plus ou moins d’acide carbonique, quoiqu’elle ne
nous paroisse point acidulée. L’eau de chaux en
fournit la preuve. Telle est , par exemple , l'eau de
mon puits, dont je me suis toujours servi dans mes
expériences •, mais le résultat ne correspondit point
à ceux des expériences précédentes, quoique celte
eau fût restée long-temps dans les llacons avec l’air
commun. J’éprouvai le même ellèt avec l’eau de
mon appareil prieunialo-chimique \ quoiqu’elle con-
tînt une plus grande quantité d’acide carbonique , il
ne s’en répandit point dans l’air renfermé avec ces
eaux dans mes flacons.
Expérience V.
Il me vint alors dans l’esprit d’aciduler par degré
avec l’acide carbonique une masse d’eau de puits.
J’employai pour cela un luhe cylindrique de 5,i5
décimètres , ou de 19 pouces de hauteur , contenant
654, j3 centimètres cubes , ou 32 pouces cubes que
je remplis de celle eau.
Je vis alors qu’en introduisant dans celte eau, eu
lui faisant absorber un cinquantième environ de son
( io )
volume d’acide carbonique, et en la soumettant aux
expériences précédentes, elle ne laissoil point encore
échapper d’acide carbonique dans l’air qui reposoit
sur elle} j’eus toujours les mêmes résultats , en aug-
mentant graduellement la quantité de l’acide carbo-
nique , jusqu’à ce qu’il y en eût un volume égal à
la trente-sixième partie du volume de l’eau } alors
la quantité de l’acide carbonique qui s’échappoit
dans l’air commun renfermé avec elle fut propor-
tionnelle au volume d’acide. carbonique qu’elle avoit
absorbé ; ensorte qu’elle croissoit avec la quantité de
l'acide carbonique que l'éau contenoit , et celle eau
en fournit le plus , quand elle en fut saturée.
Expérience VT.
J’ai dit en racontant la première expérience, qu’il
n’étoit pas indifférent de considérer la température ,
en faisant ces expériences ; j’entends par là le degré
de la chaleur de l’air où on les fait.
J’entrepris ces expériences dans le mois d avril ,
et je les ai suivies dans le mois de mai ; je m’aperçus
donc, que dans des circonstances semblables , la pro-
duction de l’acide carbonique hors de l’eau éloil diffé-
rente , et qu’elle croissoit d’autant plus, que la tem-
pérature éloil plus haute.
Au commencement de mes expériences le ther-
momètre éloil à 1 1°} vers le milieu de mai il éloil à
i6°. Il me vint alors dans l’esprit d’augmenter celte
chaleur en exposant les flacons au soleil , parce que
je n’avois encore fait mes expériences qu’à l’ombre ;
mais il me falloit un terme de comparaison.
J’acidulai l’eau de mon puits avec l’acide carbo-
( 11 )
nique , mais je ne i’en saturai pas ; je remplis avec
celle eau acidulée trois flacons , de manière qu’elle
occupai la moitié de la capacité de chacun d’eux ,
et que l’autre moitié y fût de l’air commun. J’ex-
posai un de ces flacons au soleil pendant six heures,
j’en tins un autre au soleil pendant le même temps ,
en le couvrant avec un carton , afin qu’il eût la
chaleur de cet astre sans sa lumière : le troisième
resta à l’ombre. Au bout de ces six heures , je fis
l’examen de l’air des trois flacons.
L’air du flacon tenu an soleil et qui avoil reçu
sa lumière conlenoit 270 d’acide carbonique.
L’air du flacon qui avoit été tenu au soleil cou-
vert d'un carton en avoit pris 210.
L’air du flacon qui avoit été à l’ombre n’avoit
reçu que 1 5° de ce gaz.
Il est donc prouvé , que l’élévation de la tempé-
rature influe sur le développement de l’acide carbo-
nique hors de l’eau , qui en a été acidulée. On voit
ensuite , que la lumière solaire 11e semble pas influer
sur l’avancement ou le retard du développement de
l’acide carbonique hors de l’eau acidulée, mais seu-
lement sur sa quantité , puisque le flacon couvert
d’un carton étoil non-seulement mis à l’abri de la
lumière, mais qu’il avoit encore éprouvé une chaleur
moindre. «
On a déjà observé , que l’eau chargée d’acide
carbonique laisse échapper cet acide , quand 011 la
fait bouillir, ou quand on l’expose à une tempéra-
ture de 8o° ; mais il me semble que mes expériences
boni d’un nouveau genre $ puisque j’ai vu les eaux
( 12 )
acidulées perdre leur acide carbonique à une tempé-
rature beaucoup plus basse , et puisque l’expérience
que je viens de rapporter en a fourni à la tempéra-
ture de i iu. J’ai même vu celle eau acidulée donner
l’acide carbonique à une température qui s’appro-
choit de o°.
Expérience VII.
Puisque l’eau acidulée par l’acide carbonique perd
l’acide qu’elle contenoit et le répand dans l'air qui
est en contact avec elle ; puisqu’elle se désacidule de
celle manière, il paroi Lroil naturel d’imaginer d’après
l’expérience II, que celte portion d’acide carbonique
qu’elle a perdue et qui reste mêlée dans l’air commun
avec lequel elle éloit renfermée dans les flacons, peut
être reprise par l’eau qu’on agileroit avec lui ; on
sait au moins que l’agitation de l’eau avec l’acide
carbonique favorise cet effet. Pour en avoir la cer-
titude avec la plus grande précision , je pi'is quatre
flacons de la même forme et de la même capacité
remplis à moitié d’eau acidulée et le reste d’air
commun.
Après 9 heures de la réunion de ces deux subs-
tances dans cos (laçons , j’examinai l’air d’un de ces
flacons, et j’y trouvai i4° d’acide carbonique;
j’agitai tout de suite fortement pendant quelques
minutes l’air d’un di^ces flacons dans l’appareil hy-
dro-pneumatique, et je fis l’essai de cel air; je trouvai
les i4u d’acide Carbonique.
Je laissai ensuite s’écouler onze autres heures , et
je pris le troisième flacon; j’en examinai l’air, et
j’y trouvai 21" d’acide carbonique, ce qui confirme
ce que j’avois dit en racontant l’expérience I, que
le plus grand développement de l’acide carbonique
contenu dans les eaux acidulées se fait dans les pre-
mières heures, depuis le moment où ces eaux ont
été renfermées dans les flacons.
Alors j’agitai le quatrième flacon plus long-temps
et plus vivement que le second ; j’en essayai l’air et
j’y trouvai 20° \ d’acide carbonique. La différence
n’étoit donc que d’un demi-degré; cependant elle
fait naître un doute; cette diminution d’un demi-
degré doit-elle être attribuée à l’absorption de l’eau
agitée , comme cela pou voit être arrivé , ou cette
eau n’a voit- elle donné à l’air que 20° 5 d’acide car-
bonique ?
Quoiqu’il en fut , je devois toujours conclure avec
raison, que l’eau acidulée renfermée dans des vases
clos refuse de prendre l’acide carbonique qui en a
été chassé , quoique l’on emploie le moyen le plus
propre pour l’en charger.
Expérience VTII.
Ce refus de l’eau pour reprendre l’acide carbo-
nique qu’elle a perdu 11e dure pourtant , que pen-
dant quelques jours , au moins quand celte eau a
été en grande partie dépouillée de son acide carbo-
nique , elle le reprend alors sans la moindre agitation,
en voici la preuve.
Je pris quatre flacons du même diamètre et de la
même forme que les précédera, j’en remplis les deux
tiers avec l’eau acidulée par l’acide carbonique , et
l’autre tiers éloit l’air commun qui nageoit sur elle,
je les fermai avec soin , et j’en examinai l’air de
temps en temps.
C 14 )
Au bout de 5 heures i l’air du premier flacon
contenoit 20° d’acide carbonique ; au bout de 32
heures l’air du second flacon en contenoit 33° : au
bout de 58 heures l’air du troisième flacon n’en
contenoit plus que 24°, et seulement 160 au bout
de 96 heures.
On est donc forcé de conclure , que lorsque l’eau
acidulée par l'acide carbonique s’est dépouillée à un
certain point de son acide carbonique, elle com-
mence à le reprendre. Ce fait n’est pourtant pas
toujours constant; il m’est souvent arrivé, qu’au
bout de plusieurs jours , je ne me suis aperçu d’au-
cune diminution de l’acide carbonique entré dans
l’air superposé à l’eau acidulée; mais c’est un fait
qui ne varie jamais , l’eau acidulée par l’acide car-
bonique exposée à l’air libre y perd une partie de
son acide cai’bonique, et si on la met de nouveau
en contact avec lui, elle le reprend proportionnelle-
ment à la perte plus ou moins grande qu’elle en
a faite.
Expérience IX.
J’avois sur ma table , ou j’ai coutume de faire
mes expériences , quelques flacons avec le col relevé
en haut ; ils n’étoicnt pas parfaitement fermés, et ils
étoient en partie remplis d’eau chargée d’acide car-
bonique , je jetai par hasard les yeux sur ces flacons,
et je vis à la surface de l’eau de petites bulles écu-
meuses qui s’échappoient avec un léger sifflement ,
au travers du col du flacon et de son bouchon. Ce
phénomène fixa mon attention , je remarquai qu’il
n’étoit pus constant , mais qu’il se renouvelait par
( i5 )
intervalles. Je pensai qu’il étoit produit par l’acide
carbonique qui se dégageoit de l’eau acidulée avec
lui ; comme il est plus léger que l’eau , elle le pous-
soit en haut, et le forçoit à s’échapper hors du flacon
en forme de petites bulles au travers du col et du
bouchon qui n’étoit pas bien serré, comme je m’en
aperçus en fermant mieux le flacon , et en mettant
celui-ci sous l’eau; aloi’s je l’ouvris et j’en recueillis
l’air dans mon eudiomètre , je trouvai qu’il conte-
noit 8° 5 d’acide carbonique.
J’avois encore un autre flacon sur ma table de
la capacité de 475,60 centimètres cubes , ou de 24
pouces cubes, parfaitement rempli d’eau acidulée
par l’acide carbonique jusques à son col, mais comme
je m’étois servi de celle eau, il n’y en avoit plus que
79,26 centimètres cubes , ou 4 pouces cubes , le
bouchon fermoit mal, et j’en vis sortir quelques
petites bulles; je voulus aussi faire l’essai de l’air
qu’il renfermoit , et j’y trouvai 5° { d’acide carbo-
nique; [ce qui me parut remarquable, puisque le
volume de l’air étoit de 596,53 centimètres cubes,
ou de 20 pouces cubes.
Expérience X.
Je pensai alors que si la bouche des flacons étoit
foi l étroite , 1 eau acidulée par l’acide carbonique
qu’ils renfermeroient , produiroit de l’acide carbo-
nique en assez grande quantité pour pouvoir le
recueillir sans les fermer. Je cherchai pourtant à
vérifier cetle conjecture par une expérience.
Je pris quatre flacons d’une égale capacité; je les
remplis à moitié avec une eau plus que modérément
( 16 )
acidulée; j’cn fermai deux exactement, et je laissai
les deux autres ouverts: l’ouverture de leùrs cols
eLoil de 9,02 millimètres, ou de 4 lignes; la tem-
pérature éloit de 1 70 ; voici les résultats.
Au bout de 5 heures l’air d’un des flacon fermés
contenoit i5° | d’acide carbonique; il y en avoit
1 b dans ] autre , mais dans les flacons ouverts je ne
trouvai dans l’air de 1 un que 6° i d’acide carboni-
que , et dans l’air de l’autre 7°.
Ces résultats démontrent donc , que lorsque l’air
commun est bien renfermé avec l’eau acidulée par
l'acide carbonique daus les flacons , celle - ci lui
fournit plus ou moins d’acide carbonique; mais que
la même chose arrive dans un degré moindre lors-
que l’air des vases est en communication directe avec
l’air extérieur.
Expérience XI.
Il sembleroit donc qu’on peut déduire par une
légitime conséquence, que lorsque l’ouverture des
vases est d’une considérable largeur, ou ne pourroit
recueillir que peu ou point de ce gaz , comme je l’ai
observé dans des vases cylindriques; après y avoir
laissé l’eau acidulée par l’acide carbonique pendant
quelques heures , et en avoir alors fermé l’ouverture
avec un bouchon scellé par la cire , de manière que
l’air des vases fut forcé d’y rester , et d’y reposer sur
l’eau acidulée; en examinant cet air , au bout de
quelque temps j’y trouvai tout au plus un degré
ou deux d'acide carbonique.
Expérience XII
Mais peut-être, dira-t-on , que la pesanteur
spécifique
( 17 )
spécifique de l’acide carbonique étant plus grande que
celle de l'air commun, il devroit rester dans la partie
inférieure des vases , où on les renferme, et que lors-
qu’on ouvre ces vases on y trouve l’acide carboni-
que et l’air dans cette position ? Je remarquerai, que
lorsque ce gaz se dégage successivement de l’eau qu’il
acid i iloit, il doit chasser peu à peu l’air commun
reposant sur celle eau ; alors celui-ci étant remplacé
par un air nouveau , il sera à son tour chassé de
même en tout ou en partie , suivant la grandeur de
l'ouverture du flacon. Cette réflexion me paroît
appuyée par l’expérience suivante.
Je pris trois flacons dont le diamètre éloit de 21
lignes et l’ouverture du col de 4,o5 centimètres, ou
de 16 ligues ; j’en remplis les deux tiers d’acide car-
bonique et le reste d’air commun. Après cela , je les
fermai, et je les laissai pendant un quart d’heure sur
ma table , de manière que le gaz put se placer sous
l’air commun ; je les débouchai , et quelques instans
après j’y introduisis un lumignon allumé jusques au
tiers de la profondeur; la flamme s’y conserva claire;
mais elle s’éteignit quand je voulus l’enfoncer da-
vantage. Je répétai l’opération au bout de 7 minutes;
j’enfonçai davantage le lumignon enflammé , la
flamme y devint obscure sans s’éteindre; au bout de
6 autres minutes, elle arriva jusques au fond du
. vase et y conserva son éclat comme il éloit dans l’air
libre.
Il est donc évident que lout l’acide carbonique
éloit sorti du flacon; je confirmai cette conclusion en
introduisant l’air du flacon dans un eudiomèlre au
Tome 5. JS
A
( 18 )
travers de l'eau de chaux, où cet air ne perdit qu’un
degré, comme il arrive le plus souvent, quand on
essaie de cette manière l’air commun.
Les résultats de ces expériences démontrent l’im-
probabilité de la conjecture de quelques physiciens et
chimistes, qui ont prétendu que l’eau avoil le pour
voir de décomposer l’acide carbonique contenu dans
l’atmosphère en l’absorbant, et de dégager son oxy-
gène , de manière qu’il reste libre et se restitue à
l’atmosphère qui l’avoit perdu, après s’èlre combiné
de nouveau avec le calorique. Il paroîl au moins
que les eaux douces du globe , quand elles ont ab-
sorbé une certaine quantité d’acide carbonique , le
rendent à l’atmosphère , comme elles l’ont pris : on
a pu déjà le remarquer , quand les eaux douces ont
absorbé la trente-sixième partie de leur volume de
cet acide. Expér. V. Cette expérience a été faite à
l’ombre -, mais j’ai montré aussi que la lumière solaire
favorisoit la sortie de l’acide carbonique hors des
eaux qui en contenoient. Expér. TI.
Je n’hésiterai pas à croire que l’eau acidulée par
l’acide carbonique dans une quantité beaucoup plus
petite que la trente-sixième partie de son volume
donneroit de l’acide carbonique , lorsqu’elle seroil
exposée au soleil.
Expérience XIII.
Il me restoit à faire des expériences sur les eaux
salées de la mer; celte recherche irritoit d'autant
plus ma curiosité, que toutes les eaux douces ne for-
ment qu’un petit objet en comparaison de celles qui
remplissent les mers ; j’élois alors malheureusement
, ( 19 )
très-éloigné des côtes de la mer , et je n’avois pas des
moyens pour m’en procurer l’eau.
J’eus recours à l’expédient de dissoudre le muriate
de soude dans l'eau de mon puits, et de l’aciduler
ensuite avec l’acide carbonique.
Je commençai donc à dissoudre une petite quan-
tité de ce muriate \ le llacon que j’employai à cette
expérience avoil 2i4 centimètres cubes, ou 7 pouces
cubes de capacité ; j'y mis 1 52,85 centimètres cubes,
ou 5 pouces cubes d’eau légèrement salée et aci-
dulée par l’acide carbonique, avec 6i,i4 centi-
mètres cubes ou 2 pouces cubes d’air commun qui
la recouvroil, je le fermai avec soin, et je le laissai
pendant 9 heures à la température de 17°.
Je fis ensuite l’essai de l’air commun, où je trouvai
270 d’acide carbonique.
Expérience X/F.
Je répétai celte expérience avec les mêmes cir-
constances, seulement l’eau éloit plus salée.
Je trouvai cependant 52° d’acide carbonique dans
l’air commun, peut-être la température fut-elle un
peu plus haute que dans ¥ Expérience XIII,
Expérience XE.
Je mis fin à celle recherche en dissolvant dans
l’eau une quantité plus grande de muriate de soude.
Le résultat fut encore le même , après 1 1 heures du
contact de l’air commun. avec celte dissolution du
muriate de soude, je trouvai l’air chargé de
d’acide carbonique.
Expérience XI I.
Je vis encore qu’en exposant l’appareil au soleil
( 20 )
avec celte eau forlement salée et acidulée par l’acide
carbonique , il y eut encore dans l’air commun qui
la recouvroit une quantité plus grande d’acide car-
bonique.
Je remarquai dans la première expérience , que
si l’eau acidulée par l’acide carbonique fournit de
l’acide carbonique à l’air qui la recouvre; cepen-
dant quand on a ôté à l’air cet acide carbonique, il
reste sans aucune altération quelconque ; il est tou-
jours tel qu’il a été introduit dans le flacon avec les
proportions des gaz oxygène et azote, qu’il a com-
munément. J’ai toujours observé cette permanence
de l’air dans toutes ces expériences , non-seulement
avec les eaux douces acidulées par l’acide carboni-
que , mais encore avec les eaux salées acidulées de
même.
Il faut donc conclure que si les eaux stagnantes
et courantes sur la surface de la terre considérées
dans leur immense étendue absorbent l’acide carbo-
nique qui vicie l’air atmosphérique , elles doivent lui
rendre d’abord le même gaz ; de sorte qu’il y auroit
une continuelle circulation du gaz acide carbonique
de l’atmosphère dans les eaux et de ces eaux dans
l’atmosphère. Rien donc ne montreroit ici la source
du gaz oxygène trouvé dans les eaux douces, et il
paroîtroit absorbé par elle dans l’atmosphère ,
comme je l’ai fait voir dans mon Chemico esame
dïegli esperimenti del signor Gottling.
( 2t )
MÉMOIRE II.
Résultats généraux sur la quantité de l’air que
les plantes renfermées dans Pair commun et
dans Veau peuvent fournir (i).
Un moyen plus puissant que celui dont je viens
de parler dans le mémoire précédent pour rendre à
l’atmosphère la portion de gaz oxygène détruit par
la combinaison de sa base avec le carbone , et par
conséquent pour le reproduire de nouveau , semble
se trouver dans les végétaux , ce moyen paroît d’a-
bord devoir être plus efficace , parce qu’il est appuyé
sur une série de faits innombrables.
Les premières traces de cette découverte lumi-
neuse et intéressante ont été aperçues par Priestley,
et c’est en les suivant que ce sont illustrés deux ex-
celleras physiciens, Ingenhouz etSenebier, par deux
ouvrages célèbres qui ne seront jamais oubliés.
Quand le génie créateur du physicien anglois eut
trouvé , que quelques plantes purifioient l’air eu y
versant du gaz oxygène, les deux autres physiciens
étendirent et développèrent cette belle découverte
par un nombre prodigieux d’expériences faites sur
une foule de plantes avec cette sagacité, cette cons-
. l__
(i) Note de T Editeur. Ce mémoire étoil sans Joule l’intro-
duction à ceux que Spallanzani Jevoil donner sur l’action que
les plantes exercent sur t’air ; j’ai encore traduit littéralement
tout ce que j’en ai trouvé dans les papiers de ce naturaliste iinmorl et
qui m’ont été confiés.
( 22 )
tance , et cette finesse de discernement, qui caracté-
risent les grands observateurs de la nature.
Chacun connoît la méthode d’Ingenhouz et de
Senebier pour faire leurs expériences ; elle consiste
à renfermer dans des vases de verre pleins d’eau , les
rameaux verts, ou les feuilles des plantes, et à les
exposer ainsi à la vive lumière du soleil. Ils pou voient
voir par ce procédé les végétaux verser dans l’eau
comme une pluie de bulles aéri formes, qui se rassem-
bloient au sommet des vases pleins d’eau et renversés
sur leur ouverture dans ce iluide , alors en exami-
nant chimiquement ce gaz, ils ont pu le connoître
et voir par conséquent s’il était plus ou moins pur
que l’air commun.
Il n’est plus question de mettre en doute la vé-
racité de ces expériences faites par des hommes
exercés dans l’art peu commun d’étudier les opéra-
tions de la nature; d’ailleurs l’accord remarquable
qu'il y a entr’eux dans les principaux résultats de
ces expériences faites par eux dans des lieux el des
temps différens , quelquefois même par des procédés
particuliers, offrent les preuves les plus convain-
cantes d’une vérité physique.
Quant à moi je dois applaudir à leurs travaux,
puisque j’ai répété leurs expérience; avec le plus
heureux succès. Je fus engagé dans ce travail par
une circonstance sans laquelle je n’aurai jamais pensé
à l’entreprendre.
Il y a deux ans , que dans ces momens de loisir,
qui me permettent de me dérober’ à mes occupations
publiques, je m’ocoupois plus particuliérement île
( 25 )
la respiration des animaux dans leurs différentes
familles , en commençant par celle des vers, eL en
procédant au travers des autres familles jusques aux
mammifères , et par conséquent j usques à 1 homme ;
alors ayant trouvé que l’altération de l’air atmos-
phérique par cette masse immense d’êtres vivans
étoit beaucoup plus grande , qu’on ne l’avoit géné-
ralement crue, et j’espère l’avoir démontré; je pensai
aux moyens cpxe les physiciens avoient imaginés ,
pour conserver à l’atmosphère la pureté qu’elle a
ordinairement ; mais comme je m’étois aperçu que
les eaux du globe rie pouvoient remplir ce but , je
tournai mes regards sur les plantes, en les exposant
au soleil dans l’eau avec les précautions indiquées
par Senebier et Ingenhouz, qui me servirent de
guides.
Je soumis donc à des expériences quelques-unes
des plantes que ces physiciens avoient employées ,
avec quelques auti’es dont ils ne s’éloient pas servi ,
et mes résultats furent toujours semblables aux leurs.
Je vis alors avec étonnement la prodigieuse abon-
dance du gaz oxygène qui s’échappoil de ces plantes,
et quoiqu’il ne soit pas toujours de la qualité la plus
parfaite , cependant il est toujours au moins de quel*
ques degrés plus pur que l’air de l’atmosphère.
Cependant comme c’est ma coutume en répétant
les expériences et les observations des autres physi-
ciens de les varier , et même d’employer quelquefois
des méthodes nouvelles , qui m’ont paru produire
des changemens propres à confirmer les vérités dé-
couvertes, ou à en dévoiler d’autres; je pensai à
( 24 )
emprisonner les plantes dans 1 air commun , en les
exposant au soleil, comme j’a vois fait en lis y pla-
çant au milieu de l’eau.
Ingenliouz avoit excité ma curiosité, en affirmant
que les plantes évaporoienl une quantité infiniment
plus grande de gaz oxygène dans un jour serein à
l’air libre ; que celle que nous leur voyons répandre,
quand eiles sont couvertes d eau. Expéne/ices sur
les végétaux , Tom . II , p, 80. Eu effet la condi-
tion de l’air pour les plantes terrestres est celle qui
leur a été destinée parla nature, pour végéter,
croître et se multiplier dans son sein ; au lieu que
leur état dans 1 eau est pour elle un état contre na-
lure , et elles ne sauroient y rester long- temps sans
langueur , sans souffrance et sans dépérissement.
Je me disois donc : si Ingenliouz , ce célèbre phy-
sicien , a préféré l’eau à l’air dans ses expériences,
c’est sans doute parce qu’il a pensé que l’on ne peut
pas voir l’air sans ce moyen, cl qu’il éloit difficile
de convaincre autrement , que les plantes répandent
véritablement ce fluide, à moins de les envelopper
d’eau , de les exposer ainsi à la lumière vive
du soleil , et à surprendre par celte ressource la
nature dans son opération -, c'est du moins de ccLle
manière que nous voyons clairement l’air sortir hors
de la surface de toutes les feuilles. Ibid. loin. I.
Je réponds cependant que, si lorsqu’on empri-
sonne les plantes dans l’air-, il est vraiment impos-
sible de voir 1 air qui est alors produit ; cependant
depuis la découverte de l’e.udio mètre à phosphore,
on peut estimer avec, exactitude la quantité et la
( 25 )
qualité de l’air produit par les plantes renfermées
dans l’air sous des vases clos : ce qui est pourtant le
but principal , si ce n’est pas l’unique de cette re-
cherche.
Je crois utile d'indiquer ici la méthode que j'ai
pratiquée , c’est encore celle que j’ai toujours suivie
dans toutes mes expériences de ce genre sur la res-
piration.
J’emploie des tubes de verre blanc cylindriques
et de différons calibres, suivant la nature des expé-
riences que je veux faire; ils ont 2,71 décimètres,
ou dix pouces de longueur ; ils sont fermés herméti-
quement dans la partie supérieure, et ouverts dans
Ja partie inférieure. Chacun de ces tubes est courbé
de manière que la partie la plus longue soit celle
qui plongera verticalement dans l’eau, et que celle
qui est fermée par le bout ou la plus courte soit
presque horizontale. J’introduis dans ce tube, et sur-
tout dans la partie coudée lorsqu’il est possible , les
plantes ou leurs feuilles que je veux examiner , en
supposant qu’elles doivent fournir de l’air; ensuite
je remplis le tube d’eau ; je le place sur l’appareil
hydro-pneumatique ; j’y fais entrer une mesure
connue d’air commun qui chasse l’eau de la partie
horizontale et y laisse toute Ja plante , ou ses parties
environnées d’air. Je prends celte mesure pour mes
eudiomèt i’es , par exemple, pour un de ceux ou
59,60 centimètres cubes, ou deux pouces cubes d’air
sont divisés en 100 parties. J’en ai fait faire de di-
verses capacités . parce que la variété de mes expé-
riences exigeoit celle variété dans les volumes de
1 air que je voulois employer.
( sB )
Quand le tube est ainsi préparé et plongé paf
sa partie inférieure dans un petit rase plein d’eau,
je l’expose alors aux rayons immédiats du soleil , et
je le laisse là à ma volonté.
Ensuite je rends l’air que contient le tube à son
eudiomètre correspondant par sa capacité , et j’ob-
serve le nombre de degrés qu’il y en a relativement
au zéro, qui marquoit précisément la quantité d’air
introduite dans le tube.
Mes eudiomètres sont construits comme les ther-
momètres de Réaumur , où l’on voit une échelle,
qui montre non-seulement les degrés au-dessus du
zéro , mais encore ceux qui sont au-dessous; ainsi le
nombre des degrés occupés par l’air au-dessous de
zéro seront la mesure de l’air produit par la plante
quand il n’y en aura point eu d’absorbé par elle.
On sait que la mesure de la quantité du gaz oxy-
gène contenu dans l’air commun marquée sur cet
instrument est. de. 20° , ou environ , et par consé-
quent que celle du gaz azote est de 8o°; en faisant
abstraction du gaz acide carbonique , qui y est tou-
jours en très-petite quantité.
Connoissant ainsi l’augmentation produite dans
l’air commun par son mélange avec celui qui est
sorti de la plante , je procède à son examen; j’allume
le phosphore , cl quand la combustion est finie ,
j’observe la hauteur à laquelle s’élève l’eau dans
l'eudiomètre ; cette hauteur exprimera les degrés du
gaz oxygène, et le surplus des ao° fait connoîlre la
quantité de la pureté de l’air fourni par la plante
relativement à celle de l’air commun.
( 27 )
11 y avoit une circonstance essenlielle au succès de
ce nouveau genre d’expériences. Quand les feuilles
sont exposées dans l’air au soleil sous des vases elos>
elles courent le risque d’y souffrir, ce qui ne leur
arrive pas quand elles sont sous l’eau , parce que la
température sous les vases clos est un peu plus haute
qu'à l’air libre. J’ai vu qu’en suspendant un ther-
momètre dans un récipient rempli cl’air , exposé en
plein air au soleil , et plongeant dans l’eau par son
ouverture, ce thermomètre montoit. à 6 on n° plus
haut qu’un thermomètre placé à côté de l’appareil
et à l’air libre.
J’ai supprimé cet inconvénient en faisant ces
expériences pendant l’hiver. Pour opérer avec encore
plus de sûreté, je faisois plonger les pétioles des
feuilles mises en expériences dans l’eau , par ce
moyen les plantes se conservoienl très-vertes. Ensuite
au printemps, quand la chaleur augmenta, j’em-
ployai des plantes grasses fort charnues, qui vivent
clans les climats les plus chauds, et qui ont besoin
d’une serre échaudée ppur prolonger Icmr exis-
tence dans nos pays. Telles sont diverses espèces
de cactus et. d’alo'ês, que je prenois dans le jardin
botanique de Pavie , et je fis plus volontiers des ex-
périences avec elles , parce quelles fournissent unie
grande quantité de gaz oxygène très-pur.
Ces moyens font plaisir , parce qu’ils semblent
indiqués parla nature,, et qu’ils peuvent conduire à
la vérité, que l’on ne peut découvrir que par de
semblables ressources , puisqu’il n’y a rien d’isolé
dans l’ univers.
t
( 28 )
Pendant que je faisois ces expériences dans l'air ,
je les faisois aussi dans l’eau avec les précautions
dont je viens de parler. Je n’indiquerai pas ici toutes
les espèces de plantes dont je me suis servi; je dirai
seulement que j’en ai soumis à mes expériences plus
de i5o; je me bornerai dans ce mémoire à faire
connoître leurs résultats généraux qui sont les suivans.
L’air obtenu par lés plantes exposées sous l’eau
au soleil fut plus ou moins abondant , plus ou moins
rare , suivant les diverses espèces des plantes em-
ployées dans mes expériences ; mais il fut toujours
préférable par sa pureté à l’air atmosphérique ,
parce que le gaz oxygène qu’il contenoit oulrepas-
soit dans mes eudiotnèlres les 20° qui fixoient la me-
sure du gaz oxygène contenu dans le premier : j’en ai
trouvé dans plusieurs 45° , 5o°, 58°; quelques autres
m’en ont donné 7 o° , 80 0 , et même jusques à 920 :
le reste des degrés pour arriver à 100 étoit un mé-
lange des gaz acide carbonique et azote.
Voici les résultats que me donnèrent les plantes
dans l’air. La mesure de l’air commun introduite
dans les tubes resta la même sans la moindre alté-
ration de ses composans les gaz oxygène et azote ,
ou celle mesure s’augmenloit le plus souvent par l’air
que la plante lui fournissoit. Il y avoit, par exemple,
20° d’air disparu par la combustion du phosphore,
et par conséquent l’air où la plante avoit été ren-
fermée étoit resté ce /qu’il étoit avant sa clôture;
c’éloit l’air commun lui-même ; mais je voyois aussi
d’autres fois 22% 28°, 24", et même 26° disparus par la
combustion ; il y a avoit quelques plantes qui laissoient
( 29 ) /•
8o° de gaz oxygène et davantage sons l’eau , alors les
résidus de ces gaz étoient les gaz acide carbonique et
azote.
Il paroît donc que la quantité de gaz oxygène
que les plantes répandent dans l’air est fort petite ,
en comparaison de celle qu’elles répandent dans
l’eau.
Je ne pense pas que l’on puisse dire , que la
quantité du gaz oxygène fournie par les plantes dans
l’eau soit aussi fournie dans l’air; parce que comme
il reste alors noyé dans le gaz azote de l’atmosphère,
le phosphore ne peut l’absorber qu’en petite dose.
Des expériences multipliées prouvent le contraire.
Si une mesure donnée de gaz oxygène se mêle avec
une double , une triple, une quadruple de gaz azote,
ou acide carbonique , ces quantités diverses de gaz
mêlées avec une mesure donnée du gaz oxygène
n’empêcheront point le phosphore d’y détruire cette
mesure : de même si au 20° de gaz oxygène de l’air
commun , on en mêle 100, 200 de gaz azote et
davantage , le phosphore absorbera de même les 20°
du premier. Il résulte donc de là , que la petite
quantité du gaz oxygène qui se trouve dans l’aie
commun avec lequel les plantes sont renfermées ,
provient uniquement de ce qu’elles n’en onl pas
donné davantage.
Appuyé sur ces principes je ne croirai pas m’é-
loigner de la vérité, en assurant, que les plantes
terrestres 11e fournissent pas à l’air atmosphérique
cette grande abondance de gaz oxygène qu’on a
soupçonnée.
(.5o )
Mon savant ami Senebier, quoiqu’il n’ait pas fait
des expériences directes sur ce sujet particulier ,
puisqu’il ne pouvoit pas se servir de l’eudiomèlre à
phosphore , que l’on ne connoissoil pas lorsqu’il
travailloit sur ces matières , a pourtant soutenu ces
conséquences par de très-fortes conjectures , et je le
vois tout-à-fait dans mon opinion ; cette conformité
me plaît d'autant plus, que je la partage ainsi avec
un physicien, qui est un des meilleurs juges sur ces
objets. Voici ses propres paroles : « J’ai fait observer
» que la quantité d’air fournie par les feuilles , et
» qui s’échappe dans l’air est proportionnelle à la
» quantité d’acide carbonique que l’atmosphère peut
» communiquer aux plantes , et comme elle en
» fournit pour l’ordinaire beaucoup moins que les
» eaux imprégnées d’acide carbonique , ou bien que
« celle des eaux de sources et d’étangs , il est évi-
» dent que les feuilles doivent donner beaucoup
)> moins de gaz ox}'gène dans l’air que dans l’eau ;
» d’ailleurs le poids de l’eau peut faciliter la sortie
» de cet air et la rendre plus abondante ; enfin l’air
» filtré au travers de l’eau doit être meilleur que
» celui qui traverse seulement les lèuilles pour en-
» trer dans l’air , parce que cette eau le lave et le
» sépare d’une partie de cet acide carbonique qu’il
)> auroit pu retenir. » 31cm. physico-chimiques
T. I ,p. 228 , 22g.
Jusques à présent j'ai parlé de ce qui arrive ,
quand les végétaux sont exposés à la lumière im-
médiate du soleil; à présent je dois m’occuper de ce
qu’ils produisent , quand ils sont exposés dans l’air
( Si )
et dans l’eau , à l’ombre et à l’obscurité de la nuit.
Ingenhouz a fait sur ce sujet plusieurs belles expé-
riences qui se réduisent à ce résultat final.
Les feuilles des piaules herbacées el ligneuses ren-
fermées dans l’eau et tenues à l’obscurité donnent
très-peu d’air, et cet air est très-rqéphitique, comme le
prouvent le gaz nitreux et l’extinction de la flamme
d’une bougie.
Il ajoute que les feuilles de ces deux genres de
plantes à l’ombre et à l’obscurité vicient aussi beau-
coup l’air dans lequel on les place , et il en fournit
deux preuves décisives par le gaz nitreux et l’ex-
tinction de la flamme *, il en ajoute même une troi-
sième , celle de la mort prompte d’un oiseau intro-
duit dans cet air.
Cet excellent physicien veut encore que le mé-
phitisme communiqué à l’air soit produit par une
exhalaison des plantes , parce que si une plante est
renfermée dans le vide par le mercure , on trouve
dans une seule nuit une quantité notable d’un fluide
aérien , qui paroit être en partie de l’acide carbo-
nique , et eu partie de l’air entièrement méphitique
et absolument mortel pour les animaux qu’on y
renferme. K. Expériences sur les végétaux , T. I }
p. u.
Le naturaliste de Genève qui a écrit après le -
HollandoLs, a une opinion parfaitement opposée , il
prétend que les plantes mises dans l’eau et privées
de l’action immédiate de la lumière ne fournissent
point d’air quand elles sont saines. Le nombre des
( 32 )
expériences qu’il a faites pendant deux étés sur ce
sujet est prodigieux-, il les a variées de mille manières,
il a soumis à ces épreuves les plantes qui fournissent
le plus d'air, comme celles qui en fournissent le
moins ; il ne s’est pas borné à suivre ces expériences
sur les plantes terrestres herbacées et ligneuses , il
les a étendues aux plantes aquatiques •, le résultat a
toujours été le même, les plantes ont toujours refusé
de donner de l’air lorsqu’elles ont été exposées sous
l’eau à l’obscurité naturelle de la* nuit , comme à
une obscurité artificielle 5 mais aussi ces plantes ne
tardoienl pas à donner de l’air , quand elles étoient
exposées au soleil , et s’il a vu très-rarement quel-
ques bulles d’air produites sous l’eau par ces plantes
à l’obscurité ; il s’est aussi aperçu qu’elles étoient le
produit d'une fermentation commencée.
Lé nombre des jours nébuleux étanL beaucoup
plus grand à Pavie que celui des jours clairs et se-
reins, j’eus tous les moyens de faire les expériences
que je voulus sur ce sujet. Je trouve dans mes
journaux que j’en ai fait n4. J’ai non-seulement
employé les plantes diverses dont Ingenliouz et
Senebier se sont servi -, j’ai voulu encore que cha-
cune d'elles resLâl seulement couverte d’eau pendant
l5 heures, de peur qu’un plus long séjour , surtout
quand la température étoit chaude, ne Les disposât à
fermenter.
Le résultat a été , que sur 1 14 espèces de plantes ,
j’ai vu dix espèces qui ont donné sous l’eau un peu
d’air véritablement méphitique s e'éloit un mélange
d’acide
( 35 )
d’acide carbonique et d’azote 5 mais les autres io4
espèces de plantes n’en ont point Fourni fi).
Que faudra-t-il donc conclure de cette dissonance
des résultats ? Il me semble qu’on doit dire que dans
le nombre infini des végétaux , il y en a qui sont
d'une nature différente, et par conséquent qu’il y eu
a un petit nombre qui sans une action immédiate du
soleil produisent plus ou moins d’air, à moins que cet
air n’y soit déjà moins pur, quand il est formé par
l’action de la lumière solaire , mais je n’oserai pas
l'affirmer par l’observation suivante. .... (2).
( 1 ) J’ai vu dans le Journal de Spallanzani comme je le dirai
eu son lieu , qu’il avoit cru que ces plantes qui avoient fourni
l’air gâté cornmençoient à s'altérer»
(2) Ici finit le manuscrit du mémoire que Spallanzani vouloit
publier ; j’ai préféré de raconter ses expériences à en donner les
résultats : il me semblé qu’on y trouvera plus d’instruction et
d’intérêt. Je vais recommencer à faire parler ce grand naturaliste j
ou regrettera sûrement sa manière.
Tome 3,
c
( 34 )
MÉMOIRE III.
Sur les Plantes exposées au soleil et à
V ombre dans V air et sous l’ eau (1).
CHAPITRE PREMIER.
Préliminaires nécessaires pour traiter ce sujet.
$ ï-
Comme ii est impossible de faire avec une grande
exactitude des expériences sur les plantes exposées
au soleil et à l’ombre , sans s’assurer d’abord , si la
lumière du soleil , l'air et l’eau exercent réciproque-
ment quelque action les uns sur les autres . et sans
savoir si la chaleur agit dans les vases clos d’une
manière différente qu’à l’air libre . il falloit néces-
sairement faire précéder des expériences sur ces
objets, parce que leurs résultats pourront toujours
facilement s’appliquer aux expériences racontées
dans cet ouvrage.
S «•
La première question qui se présente ici , c’est
celle dont la solution apprendra y si la chaleur et la
lumière ont quelque influence sur l’air commun et
6ur le gaz oxygène.
§ RI.
Pour le découvrir j’exposai un volume donné
(1) Note de l’Editeur. Je commence ici l’emploi que je ferai
des. journaux d’expe'rienccs de Spallanzani.
/
t 55 )
d'air commun et de gaz oxygène à la chaleur , à la
lumière et à l’obscurité dans des vaisseaux fermés
par l’eau; mais je m’aperçus bientôt parles diffé-
rences remarquables que j’observai entre mes expé-
riences , que l’eau jouoil un rôle particulier dans les
effets produits , et par conséquent que les inductions
que je pourrois en tirer ne seroient pas solides ; parce
que si le gaz oxygène est absorbé par l’eau , comme
cela éloit très-probable , et comme je l’ai prouvé
dans mon Che/nico estime degli esperimenti del
signor Gotlling , je ne pouvois pas conclure des
changemens produits par cette cause à ceux que la
lumière ou la chaleur pouvoit y faire naître ; de
sorte qu’en renonçant à cette manière de faire ces
expériences , je résolus d’en employer une autre qui
lût plus sûre.
5 IV.
Je renfermai donc de l’air commun et du gaz
oxygène, chacun séparément dans des flacons de
verre bien fermés avec des bouchons usés à l’émeri ;
je les mis ensuite sur leur col dans de petits vases
pleins d’eau, et je les exposai de celle façon à la
lumière du soleil , ayant bien soin qu’il y en eût
deux qui reçussent toute la lumière; tandis que deux
autres semblables et égaux à ceux-ci seroient tou-
jours dans la même exposition couverts d’un étui de
carton , afin qu’ils pussent éprouver la chaleur que
le soleil devoit leur communiquer, sans ressentir
aucun effet de son illumination.
Le gaz oxygène fut exposé au soleil sous l'étui de
carton pendant heures, et il en a voit éprouvé
( 54 )
toute la chaleur , c’étoit au milieu de juillet , le
thermomètre dans un de ces flacons éloit monté à
58° : le gaz oxygène essayé au bout de ce lemps-li
par le moyen du phosphore ne laissa que y— de
résidu. Le gaz oxygène exposé à la lumière du.
soleil pendant le même temps essayé de la même
manière laissa de résidu; de sorte que la diffé-
rence est an moins très-petite1; mais il faudroit encore
rabattre de ces résidus cette portion de gaz oxygène
que le phosphore brûlant ne consume pas.
Je répétai cette expérience sur le gaz oxygène
de la même manière pendant 452 heures d’exposition
au soleil ; je fis l’essai du gaz des deux flacons qui
étoient toujours restés voisins ; l’un d’eux avoit. été
découvei't et l’autre étoit sous l’étui de carton; j’eus
encore un résultat à peu près semblable au précédent.
L’air commun resta exposé au soleil dans les deux
flacons disposés de la même manière pendant 5oo
heures, il n’y souffrit aucune espèce d’altération.
Je répétai encore la même expérience avec le gaz
oxygène pendant 307 heures, et j’y apportai à tous
égards la plus scrupuleuse attention. J’essayai le gaz
oxygène des deux flacons au bout de ce temps-là ,
et je n’y trouvai que 5° i d’azote.
Celle expérience prouve incontestablement que la
lumière du soleil en été , lorsqu’elle est la plus vive
et la plus pure n’altère en aucune manière le gaz
oxygène pendant 807 heures , et qu’il y reste le
même que celui qui y avoit été exposé couvert d’un
étui de carton.
Je me suis assuré que les 3?^ d’azote, que j’ai
'( 55 )
trouvé dans ce gaz oxygène , y étoient de même
avant l’expérience.
J’ai encore vu par les mêmes moyens et pendant
le même temps , que l’air commun ne souffroit dans
les mêmes circonstances aucune espèce d’altération.
$ y-
Ingenhouzdans ses Expériences sur les végétaux ,
T1. Il, p. 210 et 211, dit : que «l’air enfermé et
mis au soleil se réchauffe naturellement plus vite
que l’air libre. Une plante donc renfermée dans cet
air reçoit facilement un degré de chaleur, qui fait
languir les plantes; de sorte que sa bénigne influence
sur l’air en contact avec elle se ralentit bientôt , et
cesse loul-à-fail ; aussi mes expériences répétées dans
des climats plus chauds que celui où je vis auroient
des résultats totalement différons de ceux que j’ai
eu, et les plantes altérées produiroient un air mau-
vais à la place d’un meilleur ».
J’examinai ce fait important par l’expérience; je
plaçai donc un ihermomèlre dans l’air libre au-
dessus d’un récipient plein d'air. Je suspendis' un
autre thermomètre sous un tube plein d’air fermé
hermétiquement dans sa partie supérieure et renversé
sur son ouverture dans un vase plein d’eau , qui y
Lenoit. l’air renfermé; les deux thermomètres à l’ombre
marquoienl 8°, je les laissai dans celte position pen-
dant trois-quarts d’heure, ce qui éloit bien suffisant,
puisqu’au bout d’un quart-d’heure ils atteignirent
le maximum de la chaleur.
Ue thermomètre à l’air élôil monté au soleil à
12V; celui qui éloit dans le tube exposé de meme
( 56 )
au soleil monta à iy°. La chaleur étoit donc bien
plus grande dans le tube qu’à l’air libre.
J’observerai ici comme je l’ai dc-jà dit , que mes
expériences ayant été faites sur les plantes pendant
l’hiver , je n’ai pas lieu de craindre qu’elles aient
épiouvé une chaleur qui ail pu leur nuire; puisque
quand le mercure seroit monté à 20°, les plantes
auroient alors été exposées à une lempérature moins
haute que celle qu’elles ressentent naturellement en
été à l’air libre dans nos climats.
Pendant que je faisois cette expérience , je mis
sous des récipients semblables à celui où j’avois
placé le thermomètre, et contenant 178,55 centimè-
tres cubes, ou 9 pouces cubes d’air commun trois
rameaux de la lave adula spica ; ils y restèrent ex-
posés au soleil pendant 6 heures i; le bout des tiges
trempoit dans l’eau qui fermoil les récipients; ces
rameaux se conservèrent très-verts , et la chaleur de
2i° qu’ils y éprouvèrent 11e leur nuisit en aucune
manière.
Je répétai cette expérience avec le même succès ,
et j’observai qu’il fallut le temps d’une heure et
demie , avant que ia chaleur y fût arrivée à son
maximum; de sorte qu’il faut un temps assez long ,
pour que la chaleur se communique à cet air ren-
fermé.
§ VI.
Mais les plantes souffrent - elles dans les vases
clos ?
.Te lins pendant 7 jouis à l’ombre, dans une tem-
pérature de 6 à 8°, trois flacons fermés avec de*
( ?7 )
bouchons usés à l’émeri ; j’avois mis dans l’un un
rameau de Lavendula spica , dans le second quel-
ques feuilles de i'aloè hurnilis , el dans le troisième
quelques-unes de celles du sempervivum iectorum ,
pour voir les cliangemens , que l’air leur occasiou-
neroit et ceux que les feuilles produiroient dans l’air;
au bout des 7 jours , je fis l’essai de l’air des flacons
et l’examen des plantes.
Le flacon de l'alo'è liumilis laissa échapper une
grande quantité d’air , quand je l’ouvris sous l’eau ;
c'éloit du gaz acide carbonique ; il n’y avoil plus de
gaz oxygène.
Le flacon du sempervivum tectorum laissa
échapper aussi en l’ouvrant une ou deux bulles
d’acide carbonique; il n’y a voit plus de gaz oxygène#
Le flacon de la lavenclula spica laissa échapper
en l’ouvrant deux ou trois bulles d’air ; il n’y avoit
plus de gaz oxygène, mais il y eut deux ou trois
degrés d’azote produit.
Les deux premières plantes me parurent encore
très-fraîches , mais la dernière avoit spufl'ert dans
ses feuilles.
11 est donc certain que dans ces trois expériences
tout le gaz oxygène de l’air commun avoit disparu ,’
el qu’il avoit été absorbé par les plantes rënfcrinées
avec lui. TI faudroit donc dire que le gaz ‘oxygène
de l'air qui s’est combiné avec le carbone de la plante
a produit l’acide carbonique trouvé dans le flacon ;
mais comme cet acide est composé de 72 parties
d’oxygène et de 28 de carbone, il est clair que r20^
de gaz oxygène doivent donner beaucoup plus de
f( 38 )
f~ d'acide carbonique, par conséquent il est claiV
qu’une partie de ce gaz oxygène a été absorbé par
la plante.
5 VII.
J’ait fait voir qu'elle étoit la température de l’air
renfermé sous un récipient exposé au soleil , et je
l’ai trouvée plus haute qu’à l’air libre; j’ai cru né-
cessaire de chercher encore la température de l’air
et de l’eau dans le même récipient dont la forme
étoit tubulaire.
Je renfermai pour cela sous le même récipient ,
deux thermomètres ; l’un étoit dans l’air qui reposoit
sur Veau; l’autre plongeoit dans cette eau ; les deux
thermomètres avant l’expérience éloient au même
degré.
Je plaçai cet appareil sur ma fenêtre à 4 heures
après midi ; le soleil fut quelquefois voilé par les
nuages. Voici le résultat de cette expérience.
Tandis que le thermomètre plongeant dans l’eau
étoit à u", le thermomètre dans l’àir étoit à i6®:
au bout de trois-quarts d’heure après cette obser-
vation , le thermomètre plongé dans l’eau étoit à
12° 3 ? et celui qui étoit au-dessus dans l’air à iS°;
demi-heure après le soleil baissa beaucoup , il n’é-
claira plus le vécipiei^tj alors les thermomètres dans
l’air et dans l’eau furent à 120.
•. : u o’i ... < • 1 •
XVIII.
* • i < ' î » • i 1 ■ ■ 1 ‘ | ^
J avpis .forrud. le projet d employer dîiïerens gaz;
dans mes expériences ; je dev.ois donc rechercher
encore , s’ils souflriroienl. quelqu’alléralion sur l’eau
à la lumière.
( 59 )
J’exposai le gaz hydrogène pendant plusieurs
jours à l’action de la lumière, il reposoit sur l’eau;
au bout de ce temps, il ne me parut point altère ;
sa flamme me sembla Ja même ; quand je le brûlai ,
il détonna avec la même force qu’auparavanl ; de
sorte qu’il me parut être resté ce qu’il étoit et par-
faitement semblable à celui qui avoil été à l’ombre
pendant le même temps.
5 ix.
Je remplis dans les mêmes vues un flacon fermé
par un bouchon usé à l’émeri avec le gaz acidç
carbonique ; je l’exposai au soleil , où il fut soumis
à son action pendant 00 heures, et où il éprouva
une chaleur de 20 à 5o°. Je mis alors un autre
flacon semblable rempli du même gaz à l’obscurité,
où il resta le même temps 5 je fis l’essai de ce gaz
au bout de 10 jours, et je trouvai que ce gaz s’éloit
conservé dans les deux cas sans altération , que son
absorption dans les deux cas fut la même par l’eau
de chaux, et j’y trouvai la même quantité d’azote
que l’on y trouve toujours.
5 x.
Il falloit s’assurer encore , que l’acide carbonique
ne s’alléroit pas sur le mercure. J’en laissai donc
sur le mercure sous un. récipient pendant 10 jours ;
il ne soutint alors d’autres altérations, que Celles qui
dévoient résulter de la différence de la chaleur et du
poids de .1 atmosphère ; au bout de ce temps, je
1 examinai avec plus de soin , et je le trouvai parfai-
tement le même ; il lut complètement absorbé par
leau de chaux, à l’exception de cette petite quantité
• ( 4o ) '
d’azote qui ne le quitte pas ; de sorte que j’ai pu être
assuré que dans tou Les mes expériences faites avec
le mercure, il est bien sûr que la quantité d’acide
carbonique produite par les animaux et les plantes
sur le mercure n’a point été changée.
§ XI.
Mais qu’arrivera-t-il , si le gaz acide cai'bonique
est mêlé avec l’air commun ? C’étoil encore une
question, qu’il failoit résoudre, pour pouvoir être
sûr de l’estimation , qu'il faudra faire de la quan-
tité d’acide carbonique fournie par les substances qui
eu rendent. Je fis donc l’expérience suivante pour
avoir celle solution que je cherchois.
Je remplis sous l’eau quatre flacons d’une capacité
égale, et fermés avec des bouchons usés à l’émeri,
en y introduisant un mélange d’air commun et d’a-
cide carbonique , dont les qualités éloient les mêmes :
je bouchai les flacons avec soin , je les redressai , et
je les laissai ainsi pendant une heure et demie, afin
que l’acide carbonique, qui est plus pesant gagnât le
fond. Entre ces quatre flacons, il y en a voit trois
d’un col étroit, le quatrième a voit un col fort large.
Je voulus savoir, si l'acide carbouique qui traver-
sent t s’échapperoil hors des flacons. Je les débouchai
au bout d’une heure et demie, et j’en voulois faire
l’examen douze heures après la préparation de l'ex-
périence.
Mais lorsqu’une heure se fut écoulée , je débou-
chai ces flacons j il me parut alors que l’acide car-
bonique s’étoi^évaporé 5 j’introduisis une petite bougie
( 41 )
dans le flacon à col large, elle entra jusques au fond,
et elle y resla allumée comme en plein air.
Au bout de l 'i heures je fis une analyse plus
sévère des trois autres flacons; j’en fis passer l’air
dans mon eudiomèlre, je le lavai avec l’eau de chaux,
et il n’y eul point de diminution.
Il paroît donc que l’acide carbonique malgré sa
pesanteur plus grande que celle de l’air commun ,
le traverse et s’évapore entièrement : mais l’expé-
rience que je fis avec la bougie allumée fait voir ,
que la sortie de l’acide carbonique hors de l’air
commun avec lequel il avoil été mêlé fut extrême-
ment prompte , puisqu’elle fut finie au bout d’une
heure.
5 XII.
Je répétai celle expérience d’une manière pins
précise: je pris trois flacons à col large, et fermant
bien avec des bouchons usés à l’émeri : je remplis
sous l’cair-chacun d’eux avec un tiers d’air commun
et deux tiers d’acide carbonique; je les fermai scru-
puleusement ; je les tins sur leurs fonds pendant un
quarl-d’heure, afin que le mélange se fit complète-
ment , ou que l’acide carbonique se pricipilât , je les
ouvris alors, j’y plongeai une bougie allumée qui
s’éteignit , lorsque j’arrivai au milieu du flacon, sept
minutes après la lumière s’y afibiblil; au bout de
six autres minutes , elle y brilioit comme dans l’air
commun ; enfin après trois autres minutes elle brûla
jusques au fond comme dans l’air libre , parce que
l’acide carbonique eu étoil sorti , en traversant l'air
commun qui a dû se placer dans la partie supérieure
du vase.
C 42 )
5 XIII.
Comment donc arrive -l-il qu’en remplissant à
moitié un flacon d’eau acidulée avec l’acide carbo-
nique, l’air qui est au-dessus d'elle ne contienne point
d'acide carbonique lorsque le diamètre de sou ou-
verture est large , et qu’on y en trouve lorsque ce
diamètre est étroit ?
Cela est probablement produit , parce que l’acide
carbonique de cette eau quitte continuellement ;
alors si la bouche du flacon est large , ce gaz en sort
avec facilité, et par conséquent avec promptitude;
mais si elle est étroite, ce gaz sort plus difficilement,
et par conséquent avec plus de lenteur.
5 xiv.
Je savois bien que je seroîs obligé d’employer l'eau
dans mes expériences et qu’elle pourroit aussi avoir
son influence sur l’air ; il m’éloit donc important de
la connoitre , soil pour la distinguer dans les effets
produits sur les sujets de mes expériences , soil pom-
me tranquilliser sur ceux que je saurois sûrement
qu’elle ne produit pas.
Il me convenoit d’autant plus de faire celle re-
cherche, que j’a vois aussi employé l’eau quelquefois
dans mes précédentes expériences sur les animaux ,
et que je devois l’employer encore plus souvent dans
celles-ci ; pour cela je me servis de l'eau de mon
puits qui m’a toujours servi, et qui me servira de
même toujours pour ces recherches.
J’essayai d’abord l'air que j’employai, et je trouvai
suivant la coutume et après plusieurs essais sem-
blables, qu’il contenoit 0,20 de gaz oxygène, ou
( 45 )
qu’il y avoit 20u absorbé par la combustion du phos-
phore.
La température pendant la durée de l’expérience
qui fut de 21 jours, se trouva de 90, , et 8°.
L’air resta renfermé sous un récipient qu’il rem-
plissoit eu partie pendant 21 jours, il reposoit sur
l’eau de mon puits, qui occupoit une partie du
récipient, et lui servoit de clôture , parce qu’il y
étoit renversé sur sa partie ouverte. PendauL cet
espacé de temps , je n’aperçus d’autres changemens
dans le niveau de Peau quienlroil sous le récipient,
que ceux qui éloient produits par les variations de
la température et du poids de l’atmosphère.
Au bout de ces 21 jours j’essayai cet air renfermé
avec l’eau de mon puits par mes moyens eudiomé-
triques, et je trouvai qu’il n’y avoit eu réellement
aucune espèce d’altération, et que les résultats que
j’obtins furent rigoureusement les mêmes que ceux
quej’avois eu avant de l’enfermer.
Je puis donc conclure, que celte eau pendant ces
21 jours 11’avoit altéré en aucune manière la pureté'
et la quantité de cet air. Je puis donc affirmer que
dans toutes mes expériences faites avec celle eau sur
les animaux et sur les plantes , les changemens que
j’ai observé dans l’air où je les ai placés leur doivent
être entièrement attribués.
Je répétai cette expérience de la même manière
en plaçant mon récipient plein d’air commun sur
l’eau de ma cuve, où il resta pendant 6 jours, et
j’eus les mêmes résultats que dans la précédente
expérience ; de sui te que j’affirme encore mieux les
conséquences que j’en avois tirées.
( 46 )
S xv.
Il me vinl pourtant un scrupule ; je pensai que si
l’eau froide n’altéroil pas la pureté de l’air, il pour-
voit arriver que l’eau employée quelquefois dans mes
expériences à une température plus haute causât de
l’altération à l'air qui la recouvvoit j il falloit donc
moudre encore ce scrupule.
J’exposai de l’air avec les mêmes précautions , que
dans l’expérience précédente sur l’eau dans un flacon
bien fermé et exposé à la chaleur de mon fourneau
pendant cinq ou six jours. J’en examinai alors l’air
avec soin , et je le trouvai au bout de ce temps-là au
même degré de pureté qu’il avoit loi’squeje le ren-
fermai avec l’eau dans le flacon où if séjourna ; de
sorte que la chaleur que l'eau éprouva ne produisit
aucun effet délétère sur l’air qui la recouvroit.
Je répétai cette expérience de la même manière
sur 29,71 centimètres cubes , ou un pouce et demi
cube d’air commun renfermé sur l’eau sous un petit
récipient placé sur mon fourneau pendant quatre
jours , cl j’eus encore un résultat semblable au pré-
cédent.
^ XVI.
Mais L’eau elle-même ne fourniroil-elle point de
l’air qui pût s’introduire dans l’air dont elle est
recouverte ? Senebier dans ses Mémoires physico-
chimie] aea , rJ\ I , p. 3o , 0/ , dit que l’eau seule
exposée au soleil sous des récipients qui eu sont
pleins ne donne ordinairement point d’air , ou que
si elle en donne c’est seulement dans une quantité
trè j-pclite j je voulus encore examiner ce phénomène.
( 4? )
J’exposai pendant trois heures au soleil deux tubes
pleins d’eau de puits; dans l’un je mis cette plante
appelée poi'celLcina qui peut être placée dans la classe
des plantes grasses, dans l’autre il n’y eut que l’eau
pure.
Pendant ce temps , il y eut dans le tube où éloit la
plante centimètres cubes, ou un quart de pouce
cube d’air produit ; mais dans le tube où étoit l’eau
pure , il y eut une bulle d’air qui pouvoit être en-
viron la septième partie de la bulle du récipient où
étoit la plante ; il y eut donc plus d’air produit dans
le tube, où étoit l’eau seule, que je n’aurois cru sui-
vant l’expérience de mon ami ; mais celte différence
dans le produit pouvoit dépendre de la différence de
l’eau qu’il pouvoit avoir employée.
§ XVII.
J’imaginai pourtant que cet air n’éloitpas produit
par l’eau , mais par une multitude de petites bulles
attachées à la surface intérieure du récipient de verre
où l’eau éloit renfermée , et que la chaleur délachoit;
puisque je les voyois partir des parois du tube et de
la surface du vase sur lequel reposoit le récipient.
Pour vérifier cette conjecture , je lins le récipient
et le vase , où il devoit reposer dans l’eau bouillante
pendant trois-quarts d’heure , afin d’en chasser tout
1 air qui pouvoit y être adhérent; ensuite pendant
que le récipient et le vase éloienl très-chauds , je les
remplis de la même eau du puits, qye j’avois em-
ployée précédemment , et je les exposai au soleil qui
ue fui pas de la plus pure clarté.
Je fis eu même temps une autre expérience ; je
( 48 )
remplis de celle eau bouillie et chaude un autre réci-
pient avec le vase qui le portoilj je l'emplis de même
un troisième récipient qui n’a voit pas élé mis dans
l'eau bouillante avec cette eau bouillie: enfin j'eus
un quatrième récipient plein de l’eau du puits sans
avoir soumis le récipient à la chaleur de l’eau bouil-
lante comme les deux premiers ; mais je les exposai
tous également aux rayons immédiats du soleil.
Le résultat ne lut point celui que j’a vois attendu.
Les récipiens et les vases remplis de l’eau qui n’avoit
pas élé bouillie donnèrent très-peu d’air au soleil ;
mais les récipiens pleins d'eau bouillie n’en donnè-
rent point du tout , quoiqu’il y eût des récipiens
qui n’a voient, pas été tenus dans l'eau bouillante avec
les vases qui les portaient.
Les premiers récipiens qui a voient donné très-
peu d’air firent d’abord paroître des bulles infiniment
petites sur la surface intérieure des récipiens j elles
s’augmentèrent ensuite , s’élevèrent et formèrent au
sommet du récipient une bulle , mais il n’y en eut
point dans les autres.
Il faut donc conclure , que les petites bulles qui
parurent sur la surface intérieure des récipiens et
des vases qui les portoient n’étoient pas adhérentes
à eux , puisqu’ils a voient été placés dans l’eau bouil-
lante , et par conséquent que les petites bulles, et
la bulle produite provenoient de l’eau elle-même ;
j’en trouvai au bout de deux heures et demie une
bulle à peu près égale à la précédente.
5 X'vur.
Je fis alors une autre expérience ; je remplis de
t'
nouveau
( 4 9 )
nouveau un de ces récipiens qui avoit été bouilli , où.
il y avoit eu de l’eau bouillante, et qui n’avoit point
fourni d’air au soleil avec l’eau de mon puits , je
remplis ainsi ce récipient immédiatement après en
avoir vidé l’eau bouillie qui y avoit été ; il étoit bien
sûr alors , que si les balles étaient restées attachées
au verre, malgré l’ébullition dans l’eau, elles n’y
seroient plus, et que si j’avois encore de l’air pro-
duit, il proviendroit vraiment de l’eau 5 puisqu’on
11e pourvoit comprendre comment cet air auroit
pu être sl fortement adhérent au récipient pour
résister à l’action du soleil dans l’expérience précé-
dente , et comment il auroit pu en produire autant ,
que lorsque les récipiens bouillis avoient été remplis
de l’eau non bouillie.
Je mis donc ce récipient ainsi préparé au soleil ,
et j’eus alors de petites bulles connue j’en avois eu
auparavant.
§ XIX. *
Je variai de nouveau l’expérience , je renversai le
tube sous l’eau dans mon appareil hydro-pneumati-
que , pour en sortir l’air qui s’étoit produit , je fis
la même chose pour le petit vase , qui portoit le
récipient, et je remis le même récipient ainsi rempli
au soleil , mais les petites bulles ne furent plus aussi
nombreuses.
La cause en fut sans doute , parce que l’eau du
récipient et celle du vase n’a voient pas été renouve-
lées et qu’elles avoient perdu une partie de l’air
qu’elles contenoient.
Tome 5.
D
( 5o )
§ XX.
Le lendemain je vidai le récipient et le vase qui
le porloit , el. je les remplis avec l’eau de mon
appareil pneumato-chimique; mais je n’eus encore
qu’un petit nombre de bulles; de sorte qu’il pou-
yoit bien être arrivé, que les bulles d’air que j’a-
vois obtenues dans les précédentes expériences fus-
sent produites par l’eau de l’appareil , qui étoit en-
trée dans le récipient ; je vidai donc de nouveau
le récipient, je le remplis avec l’eau du puits, mais
le soleil se couclioit et je n’eus rien de précis pour
le résultat que j’a lien dois.
Le lendemain donc encore, j’exposai cette eau
au soleil sous un récipient contenant un volume de
i48,62 centimètres cubes, ou 7 pouces^ cubes d’eau,
et j’obtins un volume d’air qui pouvoit être ~ de
ponce cube, les bulles se formèrent toujours sur les
parois du récipient et sur la surface intérieure du vase,
mais elles ne sortirent jamais de l’intérieur de l’eau j
qù les voyoit se détacher de la surface du verre ,
où elles se formoient, el je les faisois partir en se-
couant le récipient, il s’en échappoit même lors-
que je n’en voyois plus à la surface du verre.
Je plongeai alors le récipient dans l’eau fraîche
du puits; j’en fis sortir l’eau que je remplaçai avec
de l’eau nouvelle; je plaçai le récipient avec la
nouvelle eau au soleil , et j’obtins encore la même
quantité d’air ; je répétai ainsi huit fois cette opé-
ration, et j’eus toujours le même résultat, mais il
me parut, que j’avois un peu plus d’air, lorsque
la chaleur solaire étoit plus forte , alors j’en avois
^ de pouce cube*
( 5i )
Je n’eus pourtant jamais d’air hors de l’eau, lors*
que je faisois bouillir l’eau pendant une demi-heure,
avant de l’enfermer sous le récipient, ou lorsque
je l’a vois laissée long-temps exposée au soleil ; ce qui
me fait conclure que l’eau de mon puits dônnoit
véritablement de l’air , lorsqu’elle étoit ainsi exposée
au soleil sous un récipient qui en étoit rempli.
^ XXL
Je renouvelai souvent l’eau des récipiens , que
j’exposai ainsi au soleil, et je gardai l’air produit,
afin d’en avoir une quantité suffisante pour pou-
voir en faire l’essai; par ce moyen je trouvai que
cet air rendu par l'eau exposée au soleil étoit un
pur azote.
Ce gaz ne fut point diminué par l’eau de chaux ;
le phosphore n’y brûla point , et je ne pus l’enflam-
mer avec une bougie allumée. Il seroit possible que
ce fût l’azote uni avec l’acide carbonique , parce
Celui-ci restéroit dissous dans l’eau tandis que celui-
là pourroit s’en échapper.
§ XXII.
Je voulus connoître la quantité d’acide carboni-
que contenue dans l’eau de mon puits; j’avois 217,98
centimètres cubes , ou 1 1 pouces cubes de celle eau
dans un vase, j’y versai de l’eau de chaux, jusques
b Ce qu’il ne se fît plus de précipité; je filtrai cette
eau pour l’obtenir , je le séchai , et je trouvai qu’il
pesoit 26,54 milligrammes, un demi-grain fort;
ce qui m’indique à-peu-près la quantité en poids
d’acide carbonique contenu dans ces 11 pouces cubes
d’eau, puisque ce carbonate calcaire conteuoil les
Üo ce g™.
( 52 )
Celle eau cependant tenue au soleil en contact
avec l’air commun ne lui fournit point d’acide car-
bonique , comme je l’ai déjà dit, au moins, je n’y
ai jamais trouvé plus d’acide carbonique que cet
air n’en a communément.
Je ne répéterai pas les expériences que j’ai déjà
racontées dans le Mémoire où j’ai voulu prouver
que les eaux ne décomposoient pas l'acide carboni-
que , quoiqu’une partie d’entr’elles pût avoir ici na-
turellement sa place : il me suffira de les avoir rap-
pelées et d’y renvoyer , parce qu’elles peuvent être
utiles dans la suite de ces recherches.
§ XXIII.
Senejner m’apprit qu'lngenhouz et Desaussure
le fils avoient découvert séparément , que les terres
mouillées fournissoient l’acide carbonique ; cette dé-
couverte éloit importante , parce que cet acide peut
servir d’aliment aux plantes, suivant l’opinion de
mon ami de Genève ; je soumis cette découverte à
l’expérience, afin de voir si réellement cet acide étoit
formé dans ce cas par l’union du gaz oxygène de
l’air atmosphérique , avec le charbon contenu dans
la terre.
Je tins pour cela pendant 25 heures dans un
flacon bien fermé 39,60 centimètres cubes , ou 2
pouces cubes de la terre de mon jardin humectée
par la pluie avec 2 pouces cubes d’air commun ,
le flacon resta à l’ombre.
Je fis l’essai de cet air , et je n’y trouvai pas sen-
siblement l’acide carbonique, mais j’en trouvai 29,71
centimètres cubes , ou 1 pouce i cube dans la terre.
( 55 )
§ XXIV.
Je fis la même expérience sur la terre de quelques
pots de fleurs ; elle contenoit quelques grains de
raisins; j’en mis 69, 4 5 centimètres cubes , ou 5
pouces cubes dans un flacon qui contenoit , outre
cela, 128,80 centimètres cubes, ou 6 pouces \ cubes
d’air commun : je les laissai à l’ombre pendant 4
heures dans ce flacon soigneusement fermé.
Je fis ensuite l’essai de l’air où je trouvai 5° \ d’a-
cide carbonique provenant sans doute de la com-
binaison du gaz oxygène de l’air avec le charbon
des matières végétales contenues dans celte terre.
§ XXV.
Je refis la meme expérience avec plus de soin,
je renfermai dans un flacon 5g,4 5 centimètres cubes,
ou 5 pouces cubes de terre avec 5g, 63 centimètres ,
ou 2 pouces cubes d’air commun ; ils restèrent 1 8
heures dans cette clôture presqu’hermétique, puis-
que le col du flacon bien fermé fut encore renversé
dans un vase d’eau.
J'en examinai l’air à toute rigueur, et je trouvai
clairement 20 d’acide carbonique produit avec 70
d’azote; mais il y eut. io° de gaz oxygène absorbés
par celte terre humide.
§ XXVI.
Je mis ensuite sous un récipient 5g, 45 centimètres
cubes, ou 5 pouces cubes de sable quartzeux et un
peu humide avec une petite quantité de terre , j’y
laissai 5g, 65 centimètres cubes, ou 2 pouces cubes
d’air commun ; cet appareil disposé de celte manière
resta 1 8 heures dans cet état , c’est-à-dire une nuit
• ( 54 )
entière et le reste du temps exposé au soleil ; c’éloit
eu été.
Je trouvai d’acide carbonique.
§ XXVII.
Je refis l’expérience du § XXV , je mis dans un
flacon fermé soigneusement 79,26 centimètres cubes,
ou 4 pouces cubes de terre de jardin humide avec
69,45 centimètres cubes , ou trois pouces cubes d’air
commun ; je mis le flacon fermé avec un bouchon
usé à i’ëméri sur son col dans un vase plein d’eau ,
il passa la nuit dans cet état , et fut encore exposé
pendant 3 heures au soleil; de sorte que cet appareil
resta de celte manière pendant 18 heures.
Je fis ensuite l’essai de l’air, et je trouvai qu’il
y avoit eu io° de gaz oxygène absorbé et 5° d’acide
carbonique avec 5° d’azote produits.
5 xxviii.
Je répétai l’expérience du § XXVI avec du
sable assez sec; j'en mis 5g, 45 centimètres cubes,
ou 3 pouces cubes dans un flacon bien fermé avec
5g, 63 centimètres cubes, ou 2 pouces cubes d’air
commun; le flacon fut dans cet état pendant toute
une nuit et pendant 5 heures exposé au soleil , de
sorte que tout cela resta de cette manière pendant
18 heures.
En essayant l’air je trouvai 2°'de gaz oxygène
absorbé et 2n d’acide carbonique produit.
§ XXIX.
Enfin j’ai souvent employé des ÉroNOES dans mes
expériences sur les animaux et les plantes pour les
tenu’ humectés sans les mettre sous l’eau , il fui 1 oit
( 55 )
donc savoir encore si elles n’altéroient pas l’air em-
ployé dans l’expérience.
Je pris une éponge assez grosse que je lavai bien
dans l’eau pure, je la mis sous un récipient avec une
petite quantité d’air, que je plaçai sur mon four-
neau et je le laissai ainsi pendant dix jours , mais
je vis en essayant l’air qu’il n’avoit point été altéré
par l’éponge.
§ XXX.
Il résulte de ces expériences i.° que la chaleur
et la lumière n’altèrent ni l’air commun , ni le gaz
oxygène.
2. ° Que quelques plantes renfermées dans l’air
sous des récipiens ne souffrent pas de celte clôture
d’une manière apparente.
3. ° Que les gaz hydrogène et acide carbonique
ne sont point altérés par la chaleur du soleil.
4. ° Que l’eau n’altère point ces gaz exposés à
la lumière du soleil et à l’obscurité.
5. ° Que l’eau de puits exposée aux soleil fournit
le gaz azote en très-pet ite quantité.
6. ° Que les terres mouillées fournissent les gaz
acide carbonique et azote et qu’elles absorbent le
gaz oxygène.
*
( 56 )
CHAPITRE II.
Des plantes mises dans V air et divers gaz , de
diverses manières.
§ XXXI.
Je ne parlerai point ici de la manière de faire
ces expériences, des précautions employées pour y
réussir , de leur partie eudiomélrique , la répétition
en seroit inutile; j’ai déjà fait connoître quelques
précautions qu’il est nécessaire d’employer, et j’ai
décrit les procédés eudiométriques dans le premier
Mémoire sur la respiration . § XXVI et X XV II,
et au commencement de ce nouveau Mémoire.
§ XXXII.
J’ai mis à sec dans deux flacons contenant
5g, 64 centimètres cubes, ou 2 pouces cubes d’air
commun deux petites plantes d'œillets , je fermai
ces flacons presqu’hermétiquement , et je les plaçai
sur leur col dans un vase plein d’eau , où ils res-
tèrent 20 heures. Je me suis néanmoins aperçu que
la clôture n’étoit pas hermétique , puisqu’il éloit
entré un peu d’eau dans le flacon.
J’examinai l’air renfermé et je trouvai qu’il a voit
absorbé 17°^ de gaz oxygène et produit 6° ^ d’acide
carbonique : il y eu auroit eu sans doute davan-
tage, si l’eau entrée dans le flacon n’en a voit pas
absorbé une partie.
§ XXXIIT.
En fusant cette expérience , j’en avois préparé
une autre semblable dans un flacon dc#la même
( 57 )
capacité que le précédent, et fermé avec soin, l’ex-
périence dura pendant le même temps; mais au lieu
d’air commun je remplis le flacon avec le gaz hydro-
gène, et je m’étois bien assuré qu’il éloit pur et sans
gaz acide carbonique.
J’examinai le gaz hydrogène au bout des 20
heures que dura l’expérience, eL j’y trouvai 6° \ de
gaz acide carbonique qui y a voit été produit.
§ XXXIY.
Ap rès avoir fait l’examen des deux expériences
précédentes , je laissai les deux plantes d’oeillets
dans leurs flacons ; je renouvelai l’air commun de
l’un des deux et le gaz hydrogène de l’autre; je
fermai alors scrupuleusement ces deux (laçons avec
leurs bouchons usés à l’émeri ; je les renversai sur
leur col dans un vase plein d’eau , et je fis bana-
lise de l’air et du gaz hydrogène , après les avoir
ainsi laissés pendant 25 heures.
Je vis d’abord qu’il n’éloit point entré d’eau dans
le flacon de l’air commun, et qu’il n’en sortit point
de lui-même en l’ouvrant sous l’eau ; ces deux
plantes d’œillets a voient absorbé 120 de gaz oxygène
et produit 120 d’acide carbonique.
11 ne faut donc pas s'étonner s’il n’est pas entré de
l’eau dans le flacon comme dans l’expérience précé-
dente, puisqu’il y eut dans cette expérience 170 \ de
gaz oxygène absorbé et seulement dans l’autre un peu
plus de la moitié de celui qui éloit contenu dans le
flacon; car dans cette dernière expérience, il y a
eu une plus grande quantité d’acide carbonique pro-
duit, et celle augmentation d’acide carbonique a
suffi pour tenir le flacon plein.
( 58 )
Dans le gaz hydrogène, il y eut 5* d’acide carbo-
nique produit, ou i° i de moins que dans la première
expérience.
La température de l’air a vo it été de i5 à 20°,
et les plantes a voient sou fier t dans cette clôture.
§ XXXV.
Je répétai cette expérience , en renfermant dans
ces flacons une quantité de feuilles d'œillet égales
aux deux plantes que j’avois mises dans la précé-
dente; tout y étoit donc égal; mais je laissai ces
appareils remplis d’air commun en expérience pen-
dant 28 heures , durant lesquelles il y eut pour elles
i5 heures d’obscurité. Je fis ensuite l’essai de l’air.
J’ouvris ces flacons sous l’eau, il sortit du pre-
mier un jet d’air; j’examinai l’air du flacon, et je
trouvai que les feuilles avoient absorbé 17°^ de gaz
oxygène , et produit 4° d’acide carbonique et 1 5° ^
d'azote.
Les feuilles du second flacon absorbèrent 6° de
gaz oxygène et produisirent 6° d’acide carbonique.
Mais comment accorder deux expériences si dis-
parates; j’ai pensé que la différence pouvoit provenir
de ce que les feuilles mises dans chacun des flacons
avoient été prises sur des pots differents ; de sorte
que cette différence pouvoit dépendre de la nature
des plantes , ou peut-être de la santé des feuilles.
§ XXXVI.
Je variai l’expérience faite dans le gaz hydro-
gène , en la répétant dans le gaz azote.
Je mis donc une plante d œillet sous un récipient
contenant 5q,64 centimètres cubes, ou’,2 pouces
( 59 )
cubes d*aîr commun , et j’en plaçai une autre sem-
blable et égale clans 2 pouces cubes de gaz azote,
ils y restèrent pendant i5 heures 5 au bout de ce
temps-là j’essayai l’air et le gaz.
L’œillet absorba dans l'air commun 6° de gaz
oxygène et produisit 6° d’acide carbonique.
L’œillet dans le gaz azote produisit 4°^ d’acide car-
bonique, ou i° ~ de moins que dans l’air commun.
§ XXXVIT.
Je suivis ces expériences sur dilTérenles plantes
en les répétant et les variant.
Je tins renfermé dans 29,7 1 centimètres cubes , ou
1 pouce ^ cube d’air commun pendanl 7 heures sur
mon fourneau , quelques branches de thym , thymus
vulgaris , dont le pied plongeoiL dans l’eau à lu tem-
pérature de i4 à 18e.
J’en exposai pendant le même temps et de la
même manière dans la même quantité d’air à la
température de 70.
Le premier absorba i5° de gaz oxygène et pro-
duisit 6° d’acide carbonique.
Le second absorba 8° de gaz oxygène et produisit
4° d’acide carbonique.
La différence de température en produit donc une
grande dans l’absorption du gaz oxygène et la pro-
duction de l’acide carbonique.
§ xxxvm.
Je renfermai encore quelques branches de thym
dans un flacon fermé avec un bouchon usé à l’émeri,
et contenant 5g, 64 centimètres cubes, ou 2 pouces
cubes d’air commun , l’appareil resta 26 heures sur
mon fourneau.
( 6o )
En essayant l’air je trouvai n° de gaz oxygène
absorbé probablement, g0 d'azote détruit de même ,
et 5° d’acide carbonique produit.
§ XXXIX.
J’entrepris des expériences analogues sur la lavande,
lavendula spica.
Je mis dans deux tubes contenant 59, 64 centi-
mètres cubes, ou 2 pouces cubes d’air commun,
un rameau de lavande ; j’en plaçai un sur mon
fourneau à la température de 18, i5 et 1 5° pendant
24 heures. Je mis l’autre pendant le même temps
à la température de 70.
La lavande qui avoit été sur le fourneau absorba
tout le gaz oxygène et produisit 4° 5 d’acide car-
bonique.
La lavande qui avoit été à la température de 7*
absorba i3° de gaz oxygène, produisit 4° d’acide
carbonique et 70 d’azote, comme je m’en assurai
par une bougie allumée qui ne l’enflamma pas.
Je craignis quelque erreur dans l’essai de l’air,
de sorte que je répétai l’expérience rigoureusement
de la même manière que la précédente.
La lavande sur le fourneau absorba tout le gaz
oxygène et produisit 7 0 ^ d’acide carbonique, la tem-
pérature avoit été de 12, i5 et 20°.
La lavande qui avoit été à la température de 70
absorba aussi tout le gaz oxygène , et produisit 70 ^
d’acide carbonique ; cela est vraiment singulier ,
quand 011 considère la différence de température.
§ XL.
Je lins des feuilles de lavande dans un flacon fermé
( 6i )
avec un bouchon usé à l’émeri, contenant 29,71
centimètres cubes, ou 1 pouce ~ cube de gaz oxy-
gène pendant 7 jours sur mon fourneau : j’ouvris
de temps en temps le flacon sous l’eau qui y entra ,
de manière qu’à la fin quelque feuilles y plongèrent.
J’examinai l’air restant, je trouvai que 70° du
volume introduit ou les avoienl disparu et que
les 5o parties restantes renfermoient i° d’acide car-
bonique; celui quiauroit dix y être, avoit été absorbé
par l’eau; et après la combustion du phosphore je
trouvai 28°, c’est-à-dire, qu’il y a voit encore i° de
gaz oxygène, eL dans ce reste ues 28°, je plongeai
enfin une bougie allumée; il se fit alors un petit
bruit, la flamme s’élargit; ce qui me fil conclure
qu’il y avoit du gaz hydrogène; par conséquent tout
le gaz oxygène avoiL éLé absorbé à une centième
près, et il y avoit 28° de gaz hydrogène et azote qui
y furent produits.
^ XLI.
Je pris des tiges de lavande; je les mis dans un
flacon à col étroit, plein d’air commun; de manière
que l’extrémité des liges dépouillée de feuilles plon-
geât dans un vase plein d’eau, où le col du flacon
éloit renversé; dans le même temps je mis dans
un autre flacon de la même capacité et plein d’air
commun des liges de lavande; mais les tiges dé-
pouillées de leurs feuilles à leurs bases plongeoient
au travers du col du flacon dans un vase plein d’eau
chargée d’acide carbonique, je les exposai ainsi au
soleil pendant tout un jour du mois de Mars.
Je lis l’essai de l’air, et je trouvai que l’air du
( 6a )
flacon , où avoit été la lavande plongeant par le
bas de ses liges dans L’eau commune éloit resté sans
aucune altération ; tandis que l’air du flacon où
.avoit été la lavande plongeant par le bout de ses
liges dans Veau chargée d'acide carbonique étoit le
double meilleur, ou contenoit 4on de gaz oxygène.
§ XL1I.
Je relirai le bouquet de tiges de lavande dont les
bouts avoienl plongés dans l’eau acidulée par l’acide
carbonique , et je les introduisis dans un tube, où
il y avoit 29,71 centimètres cubes, ou 1 pouce 5
cube d’air commun -, les bouts de ces tiges plon-
geoient toujours dans l’eau, elles y passèrent la nuit,
et furent pendant le jour suivant exposées à la cha-
leur du soleil sans recevoir sa lumière.
Je trouvai le lendemain matin que le gaz oxygène
avoit été entièrement absorbé , et qu’il y avoit eu
5°£ d’azote produit ; l’acide carbonique avoit été
absorbé par l’eau qui fennoit le tube.
§ XLIII.
l’a vois encore exposé à la chaleur solaire deux
flacons pleins d’air commun , où j’avois introduit
dans chacun un bouquet de tiges de lavande dont
les bases plongeoicnl dans l’eau , sur laquelle s’eu-
fonçoienl les cols des flacons; ces flacons, couverts
d’un étui de carton, restèrent exposés ainsi au soleil
pendant toute la journée.
J’en essayai l'air , et je trouvai que la lavande avoit
absorbé tout le gaz oxygène du premier flacon, et
qu’il v avoit eu 5° £ d’acide carbonique absorbé ,
sans celui que l’eau avoit absorbé de même.
( 63 )
Dans le second flacon il n’y avoit plus de gaz
oxygène, et j’y trouvai 6° d’acide carbonique, sans
celui que l’eau avoit absorbé pareillement.
§ XLIV.
Je tins encore quelques tiges de lavande dans un
flacon plein d’air et bien fermé , contenant 5g, 45
centimètres cubes , ou 5 pouces cubes d’air commun
pendant g heures; c’étoitau commencement de Mars;
en faisant banalise de l’air, je trouvai i5° de gaz
oxygène détruit et 2 2° d’acide carbonique produit.
Ce qui m’a fait penser que l’acide carbonique pro-
duit ne vient pas immédiatement de la plante; mais
qu’il est plus raisonnable de croire , que la plante
avoit chassé hors d’elle du carbone , qui s’est com-
biné avec le gaz oxygène de l’atmosphère pour pro-
duire l’acide carbonique.
Je répétai la même expérience dans ma chambre
pendant le même temps , à la température de 8 à 9
degrés. Je trouvai que dans 70 parties d’air , il y en
avoit encore i4de gaz oxygène, et qu’il y eu eut
70 détruits par la plante. Ces 7 parties formèrent
donc en partie les 4° d’acide carbonique trouvés dans
l’air du récipient, et ceux qui furent absorbés par
1 humidité de cet air; par conséquent l’acide carbo-
nique trouvé ne seroit pas entièrement sorti de la
plante; mais il auroit été produit par la combinaison
du carbone avec le gaz oxygène de l’air, car si l’acide
carbonique étoit sorti de la plante, l'air trouvé auroit
été accru eu volume, bien loin d’être aussi diminué.
§ XLV.
Je fis encore la meme expérience le lendemain ;
( 64 )
ruais je remplis les flacons avec le gaz hydrogène,
au lieu de les remplir avec l’air commun. Un des
flacons ne fut tenu en expérience que pendant 9
heures , comme les précédeus ; j’en laissai un autre
jusques au lendemain.
La lavande parut en bon état dans les deux expé-
riences lorsque je la retirai ; après l'essai du gaz
hydrogène laissé en expérience avec cette plante pen-
dant 9 heures, je trouvai la même quantité de gaz
hydrogène sans acide carbonique , quoiqu’à la même
température j’eusse trouvé dans l’air commun 4;°
d’acide carbonique.
Le lendemain je fis l’essai du gaz hydrogène du
second flacon, et j’y trouvai i° ^ d’acide carbonique.
Il paroît donc ici qu’avec la lavande, la produc-
tion de l’acide carbonique se fait par la combinaison
du carbone de la plante avec le gaz oxygène de la
plante; mais le gaz hydrogène me parut diminué
de 6°|. SeroiL-il possible que la pkmte l’eût absorbé?
§ XLVI.
En faisant ces expériences avec le gaz hydrogène,
je me rappelai d’avoir lu dans les Annales de Chimie ,
T. XXI, p. 336 , que M.r Humbold avoil dit que
les plantes donuoient spontanément le gaz oxygène,
lorsqu’elles éloient dans le gaz hydrogène et sans
avoir besoin de l’action de la lumière. Je voulus en
faire l’épreuve.
Je renfermai par l’eau dans un tube 09,64,cen-
timètres cubes, ou 2 pouces cubes de gazh\rdrogène;
j’y introduisis une lige de lavande , dont le pied plon-
geoil dans l’eau, je tins l’appareil à l’ombre dans ma
chambre
(65 )
chambre pendant, trois jours: au bout de ce temps,
je fis l’essai du gaz; je trouvai sa quantité augmentée
de io°; je le lavai dans l’eau de chaux ; j’y observai
8° | d’acide carbonique ; ensuite j’y fis passer le phos-
phore que j’y vis bouillir après l’avoir échauffé ; il y
donna quelque fumée , comme on le voit fumer tou-
jours dans le gaz hydrogène; mais je n’y trouvai point
de gaz oxygène.
$ XLvu.
Je renfermai pendant 22 heures les Feuilles d’un
petit rosz’er dans 5g, 64 centimètres cubes, ou 2 pouces
cubes d’air commun contenus dans un flacon bien
fermé à la température de i4°-|, elles furent sans
contact avec l’eau ; de sorte que je pus bien con-
noître la quantité de l’acide carbonique produit.
Au bout de ces 22 heures les feuilles ne me paru-
rent pas avoir beaucoup souffert ; elles avoient con-»
•servé leur odeur naturelle ; je fis alors l’essai de l’air,
et je trouvai que ces feuilles du rosier avoient ab-
sorbé 1 70 i de gaz oxygène, et qu’elles avoient
produit io° d’acide carbonique et 70 d’azote.
§ XLVIir.
Je tins à l’ombre dans un flacon bien fermé con-
tenant 4g, 64 centimètres cubes, ou 2 pouces \ cubes
d’air commun , deux feuilles d’une crassula coty-
lédon; elle y resta pendant 10 heures.
Elle détruisit la moitié du gaz oxygène, etproi
duisit .5° d’acide carbonique
J’avois vu que ces feuilles de cette crassula
restées pendant 24 heures à l’obscurité dans 277,43
centimètres cubes, ou i4 pouces cubes d’air com-
Tome 3. ' E
( 66 )
mua avoient laissé cet air sans altération et que les
deux feuilles de cette même crassula à l’obscurité
pendant 48 heures dans 128,80 centimètres cubes ,
ou 6 pouces i cubes d’air commun avoient produit
4° 3 d’acide carbonique et avoient absorbé 4°i de gaz
oxygène ; alors je laissai le premier appareil , où se
trouvoient les deux feuilles de crassula pendant i5
jours à l’obscuriLé ; ces deux feuilles me parurent
saines, mais je vis qu’elles avoient absorbé 160 de
gaz oxygène et produit 4° d’acide carbonique.
§ XLIX.
Tout ce que j’avois vu me rendoit plus nécessaire
d’établir exactement les quantités d’acide carbonique
produit par les plantes renfermées dans l’air commun
comme dans les gaz hydrogène et azote.
Je pris donc trois tubes, je mis dans chacun des
portions égales de L’aloe disticha verrucosa , je ren-
fermai avec elles dans un des tubes 29,7 1 centimètres
cubes, ou 1 pouce et 3 cube d’air commun, dans
un autre la même quantité de gaz azote , et dans un
troisième la même quantité de gaz hydrogène ; j’ex-
posai ces trois tubes ainsi disposés et fermés par l’ean
au soleil pendant une matinée *, en voici les résultats:
Dans V air commun, il y eut io° de gaz oxygène
absorbé et 6° d’acide carbonique produit.
Dans le gaz hydrogène , celle portion de plante
avoit produit 4° de gaz oxygène et 4° d’acide car-
bonique , le reste étoit un mélange des gaz hydro-
gène et azote qui ne put s’enflammer à cause de ce
mélange.
Dans le gaz azote , il y eut 6° de gaz oxygène
( 67 )
produit avec 6° de gaz acide carbonique $ mais il y
eut encore 6° d’azote absorbé.
§ L.
Toutes les feuilles donnent-elles également l’acide
carbonique dans le gaz azote ? Cette question méri-
loit bien d’avoir une solution aussi étendue qu’il
seroit possible de la donner.
J’exposai pour cela pendant 2 heures ~ à un soleil
ardent dans des tubes différens contenant tous 4g, 64
centimètres cubes, ou 2 pouces \ cubes de gazazoLe,
des feuilles de vigne , de choux , de framboisier et
de romarin.
Je trouvai que les feuilles de vigne avoient souffert
et rougi , elles ne donnèrent point d’acide carbonique.
Les feuilles de choux produisirent 3° ~ d’acide
carbonique.
Les feuilles de framboisier n’en produisirent point.
Les feuilles de romarin donnèrent 6° d’acide car-
bonique.
Mais il faut observer , que l’eau employée pour
fermer les tubes avoit été privée de son acide carbo-
nique par l’eau de chaux ; de sorte qu’il est aisé de
comprendre , que les feuilles qui donnèrent peu d’a-
cide carbonique ne purent le rendre sensible dans le
gaz azote , parce que l’eau l’absorba à mesure que
les feuilles le produisirent ; aussi les feuille» qui en
fournirent ne laissèrent paroître qu’une partie de
celui qu’elles avoient produit.
§ LI.
Il étoit important de rechercher quelle est la quan-
tité de gaz oxygène, que les feuilles peuvent donner
dans l’air au soleil.
( 68 )
J’exposai donc au soleil pendant 5 heures de la
même manière séparément dans des tubes fermés par
l’eau commune et contenant la même quantité d’air
commun , que dans l’expérience précédente des feuilles
de framboisier, d’amarante et de violette.
Les feuilles de framboisier laissèrent le gaz oxy-
gène intact et produisirent 2° \ d’acide carbonique ;
il n’y eut donc point de gaz oxygène produit pen-
dant ces 5 heures.
Les feuilles d 'amarante absorbèrent 2° | de gaz
oxygène et produisirent 2° | d’acide carbonique ; il
n’y eut donc point de gaz oxygène produit.
Les feuilles de la violette jaune absorbèrent 5° de
gaz oxygène et produisirent 2° d’acide carbonique,
il n’y eut donc point encore de gaz oxygène produit.
§ UI.
Je tins pendant 4o heures six feuilles de violettes
jaunes dans 5g, 45 centimètres cubes, ou 5 pouces
cubes de gaz azote fermés par l’eau dans un tube ;
je disposai de même 6 feuilles de la même plante
dans 5 pouces cubes de gaz hydrogène , ces deux ap-
pareils furent toujours dans une pleine obscurité.
Au bout de ce temps, je trouvai les feuilles vertes,
et en essayant ces deux gaz; je vis que ces feuilles
avoient produits0 d’acide carbonique dans le gaz
hydrogène et 2° du même acide dans le gaz azote.
§ lui-
Je tins au soleil pendant 5 heures dans 4<);54 cen-
timètres cubes, ou 2 pouces £ cubes d’air commun
2 feuilles de fèves , j’en mis autant dans 2 pouces 5
çubes de gaz azote; j’employai toujours les tubes
( % )
dont je me suis servi , et je les emploierai toujours
lorsque je n’avertirai pas du changement;' la clôture’
de ces tubes sera toujours de même faite par l’eau
commune , quand je n’en indiquerai pas une autre.
Les feuilles de fève dans l’air commun et dans
le^nz azote ne produisirent point d’acide carbonique.
§ LIV.
J ’exposai au soleil une feuille du cactus cochini -
Tifer dans 5g, 4 5 centimètres cubes, ou 5 pouces cubes
d’air commun pendant 5 heures.
Celte feuille y produisit i° de gaz oxygène et
i° d’acide carbonique.
$ LV.
Ce ne sont pas seulement les plantes , et leurs par-
ties entières qui absorbent le gaz oxygène , leurs
fragmens ont encore la même propriété.
11 m’étoit resté des fragmens de plantes, que je
n’avois pas eu le temps d’employer pour mes expé-
riences; ce n’étoil pas des feuilles , mais des tiges, des
rameaux négligés; j’ai voulu voir encore ce qui leur
arriveroit en les exposant au soleil dans un air clos.
J’exposai pendant trois jours le tiers d’une tige de
cotylédon dans 5g, 45 centimètres cubes, ou 3 pouces
cubes d’air commun ; cette tige fut exposée ainsi
pendant un jour au soleil, et pendant les deux autres
à l’ombre; j’en essayai l’air, il y eut \ r]Q‘\ de gaz oxy-
gène absorbé et 7°^ d’acide carbonique produit.
Je répétai cette expérience de la même manière
sur uno tige du sedum arboreum ; il y eut i5° de
gais oxygène absorbé et 4° d'acide carbonique produit.
Je mis de même eu expérience une tige de s ta c/y s ,
( 70 )
elle absorba i4° de gaz oxygène et produisit 5° d’a-
cide carbonique.
Ces expériences méritent de l’attention , puisqu’elles
montrent* que ce ne sont pas les feuilles seules, mais
aussi les tendres rameaux cl les liges des plantes qui
absorbent le gaz oxygène et produisent l’acide car-
bonique.
§ LVI.
Je refis quelques-unes de ces expériences à une
température plus haute, c’étoil au mois de juin , la
températnre éloit de i70jà l’ombre; je mis donc
dans 29,71 centimètres cubes, ou 1 pouce -cube
d’air commun sous un petit récipient et j'y laissai
pendant 12 heures 5 feuilles du sempervivum. Pen-
dant le même temps et de la même manière je mis
6 feuilles du sempervivum dans 5g, 64 centimètres,
ou 2 pouces cubes de gaz hydrogène ; j’en mis encore
6 auli’es dans la même quantité de gaz azote. J’en
examinai l’air et les gaz après le même temps.
Dans l’air commun il y eut G0 de gaz oxygène
absorbé et 6° d’acide carbonique produit.
Dans le gaz hydrogène il y eut 2°^ d’acide car-
bonique produit , et le gaz hydrogène fut intact.
Dans le gaz azote il y eut 5° d’azote absorbé et
4° \ d’acide carbonique produit.
Ou remarque dans ces trois expériences la quan-
tité de gaz oxygène absorbé dans l'air commun et
la production d'acide carbonique qui a été plus
grande que dans les deux autres gaz; ensuite qu'il
v a eu de l’acide carbonique produit dans les deux
gaz hydrogène et azote ; mais qu’il y a eu une partie
de l’azote absorbée.
( 7* )
Puis donc que l’acide carbonique a été produit
dans les gaz hydrogène et azote, il fautvbien que cet
«eide se forme dans celle plante, et comme elles pa-
l’oissent s’y être bien conservées , on ne sauroit l'at-
tribuer à un défaut particulier; de sorte que comme
je m’élois assuré que ces deux gaz ne conlenoient
point d’acide carbonique , il faut en conclure qu’il
a bien élé produit par la plante.
§ LVII.
Je n’avois pas mis dans les expériences précédentes
une quantité d’air commun égale à celle des deux
autres gaz , ni le même nombre de feuilles, en sorte
que cette plante auroiL pu absorber encore plus de
gaz oxygène et fournir d’autres résultats; aussi je
me résolus à refaire celte expérience , et à employer
ainsi 6 feuilles du semper vivum avec 59,64 centi-
mètres cubes , ou 2 pouces cubes d’air commun et
2 pouces cubes des autres gaz, enfin à laisser durer
encore l’expérience pendant 12 heures, en conser-
vant la même température que j’avois eue daus la
précédente expérience. En voici les résultats.
Dans Pair commun, il y eut 90 de, gaz oxygène
absorbé et 6° d’acide carbonique produit.
Dans le gaz hydrogène , il y eut 2° ~ d’acide car-
bonique produit , c’est-à-dire 3°^ de moins que dans
l’air commun. •. *
Dans 1 a gaz azote , il y eut 4° 3 d’acide carbonique
produit, c’esl-à-dire i°| de moins que daus l’air
commun.
. Lorsque celle plante est à l’ombre , elle produit
plus d’acide carbonique dans l’air commun que danfc
les deux autres gaz; il faut donc conclure de celte
C 72 )
expérience et de quelques an 1res semblables , que les
plantes dans l’air commun à l’ombre produisent plus
d'acide carbonique que dans les autres gaz, et ce
doit être l'acide carbonique tiré par les racines , mais
on ne sauroit douter que cet acide carbonique , ou
plutôt une partie, n’aiL été produit aux dépens du
gaz oxygène de l’atmosphère, puisqu’il y en a une
quantité plus grande dans l’air commun que dans
les deux autres gaz.
Dira-t-on , que ces plantes qui exhalent le gaz acide
Carbonique exhalent aussi du carbone qui s’unit avec
le gaz oxygène pour former cet acide? Ce sujet de-
mande de nouvelles expériences semblables à celles-
ci , mais faites au soleil ; ce sera le seul moyen de ré-
soudre cette question capitale.
Je fais encore une observation sur cette dernière
expérience : il y a eu 90 de gaz oxygène absorbé et
6° d’acide carbonique produit ; mais ces 6° d’acide
•carbonique produit , ont-ils été produits aux dépens
seuls du gaz oxygène absorbé , cela ne paroît pas ,
puisque la plante doit en avoir fait naître qui lui
est propre , comme on l’a vu dans les gaz hydro-
gène et azote. Supposons pourtant que la plante ait.
chassé hors d’elle 2° d’acide carbonique , alors il y
auroit eu 4° de cet acide formé par le gaz oxy-
gène; cependant, il y a eu 90 de gaz oxygène dé-
truits. Comment.se feroil-il que 90 de gaz oxygène
n’eussent produit que 4° d'acide carbonique, puis-
qu’on sait que l’acide carbonique est composé de ^2
parties de gaz oxygène et de 28 de carbone , il faut
donc qu'une partie du gaz oxygène ail été absorbée
par la plante.
(' 73 )
§ lviti.
Enfin je tins pendant 4o heures à une pleine obs-
curité 6 feuilles de la violette-jaune daus 5g, 45 cen-
timètres cubes , ou 5 pouces cubes de gaz hydrogène;
l’eau qui fermoit les vases avoit été privée de son
acide carbonique par l’eau de chaux.
Eu essayant ce gaz hydrogène , je trouvai qu’il
y avoiL 5° d’acide carbonique qui ne pouvoient pro-
venir que de la plante.
§ LIX.
Dans un jour où le soleil fut quelquefois voilé
par les nuages, mais où il y eut quelques demi-
heures pendant lesquelles il fut brillant ; je pris deux
espèces d’uloë et quatre flacons fermant très-bien ;
je mis une espèce de chacun dans un flacon plein
d'air; j’en exposai deux à la vive lumière du soleil,
et les deux autres couverts d’un carton à la même
place où ils reçurent la chaleur de cet astre sans sa
lumière.
A la fin de la journée je fis l’essai de l’air de ces
flacons , et je trouvai que dans le premier flacon ,
l’air exposé à la lumière n’avoit point été mêlé avec
l’acide carbonique et qu’il étoil resté intact.
L’air du flacon correspondant à celui-ci qui avoit
éprouvé la chaleur solaire sans être exposé à la
lumière contcnoil 5° i d’acide carbonique et: l’air
commun étoil resté intact.
Dans le second flacon, où éloit la seconde espèce
d’aloë exposé au soleil, l’air commun étoil. resté
intact.
L'air commun du second flacon où étoil. la seconde
( 7^ )
espèce d'aloë correspondant au précédent exposé à
la chaleur du soleil sans recevoir sa lumière con-
tenoit 8° d’acide carbonique et l’air commun étoit
d’ailleurs resté intact.
Il est donc prouvé que l’air commun dans les
deux flacons exposés immédiatement au soleil est
resté ce qu'il étoit , et qu’il n’y a point eu d’acide
carbonique produit, tandis que dans les deux autres,
il n’y a point eu de gaz oxygène de l’air commun
absorbé , mais qu’il y a eu de l’acide carbonique pro-
duit ; il paroît par conséquent que ces deux dernières
plantes ont produit l'acide carbonique sans attaquer
le gaz oxygène de l’air.
Frappé de cette observation , j’examinai de nou-
veau mes eudiomètres que j’avois laissé dans le même
état , et je trouvai que la combustion qui s’éloit pro-
longée indiquoit que dans ces deux derniers qui n’a-
voient pas reçu la lumière du soleil , il y avoit eu
2° de plus de gaz oxygène absorbé; mais cet effet
pouvoit aussi être attribué à la température qui avoit
baissé.
§ LX.
J’ai tenu à l’ombre et à la température de-7 à 9?
dans ma chambre des lames minces d ’aloe humilis
elles étoient renfermées dans des flacons bien fermés ;
l’un d’eux étoit rempli d’air commun et l’autre de
gaz hydrogène, je les lins ainsi pendant 56 heures.
Au bout de ce temps-là, j’examinai l’air et le
gaz, et je trouvai que les lames minces d’aloë a voient
détruit dans l'air commun 180 de gaz oxygène et
pi'oduit i5° d’acide carbonique avec 5° d'azote.
( 75 )
Dans le gaz hydrogène , il y eut io° d'acide car--
bonique produit, ou 5° de moins que dans l’air
coin ni un.
Il paroît donc que Pair commun concourt à faire
produire de l'acide carbonique aux plantés. Les lames
d'aloè me semblèrent bien conservées.
§ LXI.
J’ai tenu pendant 7 jours à la température de 6
à 8° dans des flacons bien fermés et remplis d’air
commun des morceaux de l'aloè humilis pour sa-
voir ce qui arriveroit à cet air ainsi renfermé.
Ces morceaux d'aloè détruisirent tout le gaz oxy-
gène et produisirent 20° d’acide carbonique, c’est-
à-dire , autant qu’ils avoient détruit de gaz oxygène:
l’air sortit avec violence du flacon quand je le dé-
bouchai.
On devroit donc dire ici , comme je l’ai déjà re-
marqué en parlant de la lavande, § XLIII. XLIV.
XLV. que cet acide carbonique a été le produit de
la combinaison du gaz oxygène de l’air avec le car-
bone delà plante; mais encore, si , l’acide carbo-
nique est composé de 72 parties d’oxygène et de
28 de carbone; il est clair que ces 20° de gaz oxygène
dévoient produire plus de 20° d’acide carbonique;
il faut par conséquent qu'il y ail eu une partie d’a-
cide carbonique produit par la plante.
Il peut néanmoins y avoir une erreur dans l’expé-
rience, parce que le passage de l’air au travers de l’eau
de chaux ne lui enlève pas tout l'acide carbonique ;
quoique j’aie vu qu’aprèa avoir lait passer trois lois cet
air au travers de l'eau de chaux, il m’eu. ait paru
( 7^ )
privé ; d’ailleurs au bout de 7 jours l'eau gâtée aura
pu gâter l’air; de sorte que les conclusions que je
* tirerai ne sauroienl être rigoureusement fondées.
§ LXII.
Ingenhouz dans ses Expériences sur les végétaux
T. h. p. t4-6 , dit que les plantes ont le pouvoir
de changer pendant la nuit les gaz azote et hydro-
gène entièrement en acide carbonique. Ce sujet étoit
trop important pour ne pas mériter toute mon atten-
tion, je voulus donc l’étudier par des expériences.
Je mis pendant a4 heures dans un tube rempli
avec 59,64 centimètres cubes, ou 2 pouces cubes d’a-
zote et dans un autre tube semblable rempli avec
la même quantité de gaz hydrogène des feuilles de
V agave americana. Je tins ces deux tubes dans une
parfaite obscurité cl j’eus soin de changer deux fois
l’eau qui leur servoit de clôture pour prévenir son
altération.
J’essayai d’abord le gaz hydrogène , j’y trouvai
5° déplus de gaz que je n’y en avois mis; ensuite
je fis passer ce gaz au travei’s de l’eau de chaux ,
et je retrouvai tout le gaz hydrogène , que j’avois mis
dans le tube avec la plante ; j’allumai ensuite ce
gaz avec une bougie, il s’enflamma connue le gaz
hydrogène. L'agave me parut s’être conservée en
bon étal.
11 paroît donc que l'agave avoit produit 5° d’a-
cide carbonique; mais cet acide n’éloil pas produit
par le changement du gaz hydrogène métamor-
phosé en acide carbonique; puisqu’après le lavage
dans l’eau de chaux, il m’auroil dù manquer 5° du
( 77 )
gaz hydrogène , que j’avois introduit dans le tube
en préparant l’expérience, ou du moins une quan-
tité quelconque ; ce qui n’est pourtant pas arrivé ,
puisque j’ai eu 5° de plus que le gaz hydrogène mis
en expérience dans le tube; cependant In genhouz
dit que la quantité du gaz hydrogène alloit toujours
en diminuant.
J’examinai ensuile \cgaz azote ', mais j’avois pro-
longé pour lui la durée de l’expériences qui s’étendit
de même à l’obscurité pendant 4a heures ; j’eus en-
core 5° i de gaz en plus, que celui que j’avois intro-
duit dans le tube ; mais quand j’eus fait passer ce
gaz dans l’eau de chaux , je retrouvai précisément
le gaz azote que j’avois mis ; par conséquent l’acide
carbonique produit n’est pas une conversion du gaz
azote en acide carbonique.
§ LXI11.
Je poussai plus loin l’expérience; je tins pendant
quatre jours des feuilles coupées à L'agave ameri-
cana dans ces flacons fermés exactement et placés
dans l’obscurité la plus profonde , pour voir si les
feuilles que j’avois renfermées avec ces gaz , les
changeaient en acide carbonique suvant la pensée
d’Ingcnhouz.
J’ouvris au bout de cpiatre jours sous l’eau le flacon
du gaz hydrogène : il en sortit quelques bulles que
je recueillis, avec le gaz qui remplissoit le tube,
j’y trouvai d’abord i50^ d’acide carbonique; après
ce premier lavage , je fis repasser ce gaz dans une
autre eau de chaux , et je fis rentrer le reste dans
le flacon, d’où je l’a vois tiré; il resta un dixième
( -78 )
du flacon plein d’eau , il manquoil donc un dixième
du gaz hydrogène. Dira-l-on , que ce dixième de
gaz hydrogène qui manquoil s’est converti en acide
carbonique? je ne le crois pas , car il faudroit dire
aussi, que ce dixième de gaz hydrogène a produit
une quantité d’acide carbonique plus grande que
lui; puisque le flacon étoil plus que plein du gaz
aériforme . quand je l'ai ouvert. Il me semble plus
naturel de penser , que ce gaz hydrogène a été
absorbé par la plante. En examinant ce gaz hydro-
gène par la bougie je le trouvai affoibli , au moins
lorsque j’ai comparé son inflammation avec celle
du gaz hydrogène que j’avois mis dans le flacon.
Cet te expérience m’a engagé à renvoyer l’ouver-
ture du flacon , où le gaz azote étoit renfermé avec
les feuilles de l’agave americana , en le laissant
toujours dans la même obscurité.
§ LXIV.
Je laissai donc passer encore trois jours avant de
faire l’examen de ce gaz azote. Alors je débouchai
le flacon sous l’eau , il en sortit une petite quantité
de gaz que je receuillis: je trouvai 220 5 d’acide car-
bonique ; je fis repasser ce gaz au travers d’une
nouvelle eau de chaux ; ensuite je le transvasai dans
le flacon où il avoit été mis avec les feuilles de
L’agave americana qui y étoient encore, et je trouvai
qu’il y manquoit un quart du volume du gaz du
flacon. Il me semble qu’il seroit assez difficile de
croire que ce gaz azote a été changé en acide car-
bonique; il est bien plus probable, que ce gaz a
été absorbé par la plante , et que l’acide carbonique
en est sorti.
( 79 5
■S lxy.
Il résulte de ces expériences, i.°que les plantes
mises dans l’air commun , dans les gaz hydrogène
et azote absorbent le gaz oxygène dans l’air com-
mun , et donnent dans tous les trois l’acide carbo-
ninique; il y a même des cas, où il y a de l’azole
produit.
2.° Que la durée de l’expérience et l’aètion de
la chaleur augmentent la quantité de l’acide car-
bonique produit et l’absorption du gaz oxygène.
5.° Que l’influence de la lumiève solaire immé-
diate est plus grande que celle de la lumière du
jour pour faire produire le gaz oxygène , et qu’il
n’y en a point dans l’obscurité.
4. ° Les plantes qui séjournent long-temps dans
les vases clos à l’obscurité donnent quelquefois le
gaz hydrogène.
5. ° L’acide carbonique est formé souvent par le
contact du gaz oxygène de l’air commun avec le
carbone ; de sorte qu’il ne sort pas toujours tout
formé hors de la plante.
6. ° Plusieurs plantes 11e donnent au soleil dans
l’air clos que l’acide carbonique •, quelques - unes
altèrent le gaz oxygène de l’air; d’autres ne l’altè-
rent point.
7.0 Les plantes à l’obscurité donnent dans l’air
l’acide carbonique et l’azote comme dans les gaz
hydrogène et azote ; mais elles en fournissent moins
dans le dernier.
cj.° Les fragmens des plantes absorbent comme
elles le gaz oxygène et produisent l’acide carbonique.
( 8o )
9.0 Les plantes ne changent pas à l’obscurité le3
gaz azote et hydrogène en acide carbonique , suivant
l’opinion d’Ingenliouz.
CHAPITRE IL
Les jilanles mises dans l'air et dans Veau à
la lumière et à l'obscurité.
§ LXVL
Après avoir vu l’effet que les plantes renfermées
dans l’air y produisent , il éloit naturel de chercher
celui qu’elles font observer , quand on les place
sous l’eau à la lumière et à l’obscurité, comme l’ont
déjà montré ceux qui se sont occupés de ce sujet;
mais on peut rendre encore cette recherche inté-
ressante en y mettant une exactitude et une préci-
sion , que l’état où éloit la science , lorsqu’on tra-
vailla sur ces matières , ne permeltoit pas alors d’y
mettre.
§ LX\ir.
Je commençai ces expériences sous ce point de
vue avec la lavendula spica. Je mis donc , c’étoit
au mois de décembre , quelques rameaux de cette
lavande dans des tubes pleins d’eau, renversés dans
un vase plein d’eau sur leur ouverture : il n’y avoit
dans chaque tube qu’un nombre de rameaux tels
qu’ils ne pouvoient pas être serrés dans leurs tubes;
j’en disposai quatre de cette manière, ils restèrent
6 heures exposés au soleil ; mais pendant ce temps
le soleil fut quelquefois caché.
( Si )
Je trouvai lui peu d’air dans le haut des tubes ,
et cet air me parut lout-à-fait semblable à l’air
commun par la quantité de gaz oxygène et d’azote
•que l’expérience faite avec le phosphore me fit
remarquer.
Pendant que ces quatre tubes éloient placés' au
soleil, j’en avois mis un autre à côté d’eux, celui-ci
conlenoit 5 9,45 centimètres cubes, ou 5 pouces cubes
d’air, dans lesquels j’avois introduit la septième
partie de la lavande qui éloit dans les autres, et
dont l'extrémité des rameaux plougeoit dans l’eau
qui renfermoit l’air dans le tube.
J’examinai aussi cet air, et je trouvai que cette
petite quantité de lavande a voit absorbé 2Û de gaz
oxygène et produit 5° d’azote; je ne parle pas de
l’acide carbonique que l’eau de voit avoir absorbé
en grande partie.
J’avois mis encore un autre tube disposé comme
le précédent à la température de 5° et je vis que
cette plante à cette température n’avoil point altéré
l’air où élleétoit; mais comme j’avois observé qu’elle
absôrboit beaucoup de gaz oxygène, quand elle étoit
sur mon fourneau, je pensai que la conservation de
la pureté de l’air dans ce cas étoit produite par la
température où elle avoit été.
§ LXVIH.
Je répétai cette expérience à la fin de février d’une
autre manière; au lieu de me servir des tubes dont
j’ai parlé, j’employai des flacons bien fermés con-
tenant des volumes égaux d’eau, d’air, et de gais
hydrogène; j’introduisis dans chacun la même quam
Tome a,. F.
( 82 )
ti|Lé de lavande , et je laissai ces flacons exposés au
soleil pendant une journée entière 5 les uns reçurent
les rayons immédiats du soleil et les autres furent
couverts d’un étui de carton.
La lavande dans le flacon plein d’air commun
exposé aux rayons immédiats du soleil laissa l’air
intact à toute rigueur; il n’y eut point d’acide car-
bonique produit.
La lavande dans le flacon plein d’air commun
exposé sous un étui de carton au soleil produisit
8° ~ d’acide carbonique : mais après avoir fait cette
épreuve , il me vint dans l’esprit de purger cet air
de tout l’acide carbonique qu’il pouvoit contenir ; je
le lavai soigneusement dans l’eau de chaux; je i'emis
cet air dans le flacon, et je retrouvai tout l’air que
j’y avois d’abord introduit : celte expérience est bien
importante, elle prouve manifestement, que l’alté-
ration de l’air par la plante à l’obscurité et à la cha-
leur est vraiment causée par l’acide carbonique sorti
de la plante dans son état gazeux.
La lavande dans deux flacons pleins d’eau au
soleil donna de l’air un peu meilleur que l’air
commun.
Enfin la lavande mise dans le gaz hydrogène au
soleil où elle receo oit les rayons immédiats de cet
astre ne donna point d’açide carbonique, et je trouvai
tout, le gaz hydrogène que j’avois introduit dans le fla-
con; mais la lavande mise dans le flacon plein de gaz
hydrogène et exposé au soleil sous un étui de carton
donna 4° d’acide carbonique.
( 85 )
J LXIX.
Je lins au mois de décembre depuis huit heures
du ma lia jusqu’à 3 heures - à un très-beau soleil
le thymus vulgaris , ou plutôt quelques rameaux
de thym dans quatre tubes pleins d’eau et ren-
versés sur leur ouverture dans un vase plein de ce
fluide. Je disposai de même deux tubes contenant
59,45 centimètres cubes , ou 5 pouces cubes d’air
commun avec quelques rameaux de ce thym dont
la base des rameaux plongeoit dans l’eau ; j’en mis
deux autres disposés comme ces derniers sur mon
fourneau. Enfin j’exposai à l’ombre et à l’air libre
un tube semblable aux précédens et semblablement
arrangé : la température au soleil à une heure après
midi étoil de i5° et à l’ombre de 90 ; sur mon four-
neau elle fut de 8 à 20°.
Je recueillis l’air fourni sous l’eau par le thym
dans les quatre tubes pleins d'eau exposés au soleil ;
je trouvai d’abord qu’il en avoit donné moins que
la lavendula spica , quoique le soleil eût été très-
brillant, il ne conlenoit que de plus de gaz oxy-
gène que l’air commun.
Le thym dans le tube /'enfermant l’air commun
exposé au soleil n’avoit absolument £oint altéré
cet air.
Le thym dans les tubes renfermant l’air commun
sur mon fourneau absorba xo° de gaz oxygène et
produisit 5° d’acide carbonique; il y en eut davantage
sans doute, mais il fut absorbé par l’eau qui fermait
le tube.
Le thym resté à l’ombre du soleil mais à la
( 84 )
lumière du jour absorba 4° de gaz oxygène et pro-
duisit y0 d’acide carbonique.
Ces expériences présentent une espèce de contra-
diction. Lfe thym resté au soleil dans l’air commun
laissé l’air commun intact , quoique la chaleur y
fût d’e i5°; tandis que lé thym à la lumière du
j'our , mais sans l'action immédiate de la lumière du
soleil absorba 4° de gaz okygène, quoique la chaleur
qu’il y éprouva fût de 90 ; il paroît donc que si la
température influe sur l’absorption du gaz oxygène
dans ce second cas, il ne devroit pas y avoir une.
absorption moindre de ce gaz, lorsque la chaleur
est plüis 'forte, comme dans le premier cas, où le
thym fut exposé en plein soleil dans la même quan-
tité d’air. Il faut donc dire que la lumière solaire
a produit cet effet. >
Je répétai celle expérience sur le thym exposé
sous un tube au soleil dans la même quantité d’air
coünnuri , que ceux des précédentes expériences, et
je trouvai encore que l’air 11’y a voit subi aucune
altération .
' ■ , § LXX.
Au mois de janvier je lins pendant trois jours
Vehdivia la cliicorée sous l’eau à un très-beau soleil^
je remarquai que le troisième jour, elle ne donnoit
feins d’air; il n’en sortit point pendant la nuit.
Je tins de même une quantité égale de celle plante
'dans 19,81 centimètres cubes , ou i pouce cube d’air
renfermé par l’eau sous un tube ; je plaçai un de
ces tubes au soleil.
La cliidorée sous Veau au soleil avoil donné les
de 19,81 centimètres cubes, ou d’un pouce cube
d’air qui étoit inférieur en purelé à l’air commun.
La chicorée qui avoit été au soleil avoit absorbé
iô° de gaz oxygène et produit 5° d’acide carbonique.
Je divisai eu quatre parties une grande feuille de
pommier ; je mis ces fragmens sous un tube plein
d’eau, et renversé dans un vase plein d’eau 5 j’en
disposai une autre divisée de la même manière' dans
un tube contenant 5 pouces cubes d’air commun 5
je les exposai au soleil pendant 7 heures, et je fis
l’examen de l’air produit comme celui de l’influence
de la feuille sur l’air.
Celte feuille produisit sous l’eau 70 de gaz. oxy-
gène mêlé avec 5° d’acide carbonique.
Celte feuille dans lès trois pouces cubes cl' air
commun n’en augmenta pas le volume; elle y dé-
truisit i° de gaz oxygène, qui fut remplacé par i°
d’acide carbonique.
1 V8M-
Je mis trois petites feuilles de poirier sous, nnk
tube plein d'eau et renversé dans l’eau sur son 6u-
verture. Je disposai trois petites feuilles semblables
aux précédentes sous un tube contenant ü g, '45 cen-
timètres cubes , ou 5 po.uc.es cubes d’air commun ,
fermé par l’eau , comme dans tous les antres cas
semblables ; j’exposai alors ces deux tubes au soleil
pendant 7 heures. "<i .
Ces feuilles sous l'eau produisirent 5° dp gaz
oxygène mêlés avec 4° d’acide carbonique. ■
Ces feuilles ne produisirent rien dans l'air , elles
absorbèrent seulement i° de gaz oxygène.
( 86 )
§ LXXII.
.Une feuille de pommier resiée à V ombre pendant
24 heures dans 29,71 centimètres cubes, oui pouce \
.cube d’air commun absorba tout le gaz oxygène et
produisit 5° d’acide carbonique; elle eu avoil sans
doute produit d’avantage qui fut dissous par l’eau.
Une feuille de poirier restée à l’ombre dans les
mêmes circonstances, absorba i5° de gaz oxygène
et produisit 5° d’acide carbonique.
: Cette expérience pourroit indiquer, que les feuilles
à l’ombre gâteroient l’air, si la clôture n’influoil pas
sur leur élat de santé par l’humidité où elles se trou-
vent , et par le défaut de nourriture qui les fait
souffrir,
§ LXXIII.
Il étoit utile de multiplier les expériences faites
ainsi en même temps dans l’eau et dans l’air; c’est
pour cela que je n’ai pas craint de les varier à divers
égards ; elles me sembloient devoir être fort ins-
jtructives.
j Colles-ci durèrent pendant 6 heures, elles furent
faites sous des tubes pleins d’eau et renversés sur
leur ouverture dans un vase plein d’eau; celles qui
furent exécutées dans l’air , le furent dans des tubes
contenant 5g,45 centimètres cubes , ou 5 pouces cubes
d’air commun : je ne décrirai plus ces préparations
d’expériences; je dirai seulement que celles de ce
paragraphe durèrent 6 heures au soleil ; et que les
quantités des plantés employées furent égales dans
les deux cas, comme les quantités de l’eau et celles
de l’air.
« ( 87 )
Les feuilles du persil produisirent sous Veau 4® de
gaz oxygène, celles qui furent mises dans l'air absor-
bèrent 2° de gaz oxygène et produisirent 2° d'acide
carbonique.
Les feuilles de chêne produisirent sous l'eau 5°
de gaz oxygène; celles qui furent mises dans l'air
absorbèrent ± degré de gaz oxygène et produisirent
2° d'acide carbonique.
Les feuilles du peuplier produisirent sous Veau
4° de gaz oxygène; celles qui furent mises dans l'air
produisirent 2°~ d’acide carbonique ; l'air commun
introduit dans le tube fut intact , après avoir été
lavé dans l'eau de chaux.
§ LXXIV.
Je laissai subsister la même quantité d’air commun
dans les tubes; mais je variai la durée du temps; dans
cette suite d’expérience , elle fut de 8 heures d’ex-
posilion au soleil.
Un rameau de cyprès sous Veau donna 4° de
gaz oxygène et 3° d’acide carbonique.
Deux feuilles cVorrneau pendant 5 heures ^ ne
produisirent sous Veau qu’une quantité d’air trop
petite pour être essayée; celles qui furent dans l'air
produisirent 2n d’acide carbonique et laissèrent intact
l’air commun , qui avoit été introduit dans le tube.
§ LXXV.
Après avoir varié le temps de la clôture; je variai
la quantité de l’air dans lequel j’exposai les piaules
J’exposai au soleil pendant 6 heures sous l’eau
deux feuilles du coignassier , et j’en mis deux de
même dans 29,71 centimètres cubes, ou 1 pouce ^
cube d’air commun.
( 88 ) .
Les deux feuilles du coignassier sous Veau pro-
duisirent 5° ~ de gaz oxygène et dans l'air, 2° de
gaz oxygène.
Les feuilles de cèdre disposées de même produi-
sirent sous l'eau i° - d’air donL il y eut i 0 d’acide
carbonique et è degré de gaz oxygène ; dans l'air
elle produisirent 5° ^ d'acide carbonique.
§ LXXVI.
Je tins pendant 4 heures au soleil les feuilles du
pinus silvester dans 59,45 centimètres cubes , ou 3
pouces cubes d air commun ; il y eut 5° d’acide
carbonique produit, et un degré de gaz oxygène
absorbé. Sous l'eau j’eus de l’air qui fut beaucoup
meilleur que l’air commun-, mais je n’en eus pas
assez pour pouvoir en faire l’essai sans une addi-
tion d’air commun.
Je tins pendant 5 heures | un morceau de feuille
de courge , cucurbita pepo dans la même quantité
d’air commun; cette portion de feuille détruisit dans
l'air commun 3° ~ de gaz oxygène , et produisit
5° d’acide carbonique. Une partie égale de cette
feuille sous l'eau donna une petite quantité d’air
qui me parut contenir plus d’un tiers de gaz oxygène.
Quatre feuilles d'abricotier mises dans la même
quantité d'air commun pendant 2 heures absor-
bèrent 2° de gaz oxygène et produisirent 2° d'acide
carbonique. Quatre feuilles d’abricotier égales aux
précédentes fournirent pendant le même temps sous
l'eau une très-petite quantité d’air niais il me parut
excellent,
( 89 )
§ LXXVlï.
Te tins pendant un jour an soleil des feuilles du
laurier impérial dans des flacons pleins d'eau et
bien fermés; elles me donnèrent très-peu d'air, qui
me parut inférieur de 70 à l’air coin mon par sa
quantité de gaz oxygène. Je mis le même nombre
de feuilles égales aux précédentes dans 19,81 centi-
mètres cubes, ou 1 ponce cube d’air commun, elles
y absorbèrent i4° de gaz oxygène et produisirent
ü° d’acide carbonique.
§ LXXV1IT.
Après avoir fait toutes ces expériences sur toutes
ces plantes, .je voulus en faire encore sur une classe
dont je ne m’élois pas encore occupé; c’était celle
des plantes que l’on appelle grasses , ou. qui se dis-
tinguent par l’épaisseur de leurs feuilles. Je les com-
mençai par le sempjsrvivum factor uni.
J’exposai des leqillcs du semperoivum s.ous Veau
pendant 5 jours au mois de décembre; mais la quan-
tité d'air produit fut si petite qu’il me fut impossible
de l’essayer.
J’exposai de même pendant trois jours des feuilles
du sempervivum dans 19,81 centimètres cubes , ou
3 pouce cube d'air commun au soleil pendant le
même temps, elles absorbèrent, tout le gaz oxygène,
et produisirent 4° d’acide carbonique.
J’exposai la même quantité des feuilles de cette
plante dans 5g, 4b centimètres cubes, ou 5 pouces
cubes d air commun sur mon fourneau ; les’ feuilles
reposoienl sur une éponge humectée par l’eau de
la clôture, elles absorbèrent tout le gaz oxygène
( 9° )
et les 815 qu’il y eut d’air produit éloit fort mauvais.
§ LXXIX.
1/aloë disticha m’a fourni le sujet de diverses
expériences relatives à cet objet dont je m’occupe ici.
J’ai tenu pendant 5 heures au soleil 5 tubes pleins
d’eau renversés dans l’eau sur leur ouverture avec
des fragmens de feuilles de l'alo'é disticha, j’en a vois
exposé dans le même temps au soleil sous des tubes
contenant 19,81 centimètres cubes, ou 1 pouce cub«
d’air commun , j’en a vois mis de même sous des
tubes contenant 09,45 centimètres cubes, ou 5 pouces
cubes d’air commun ; enfin je mis un de ces derniers
à l’obscurité : l’expérience fut faite au mois de dé-
cembre, le froid avoit gelé le terrain qui étoit cou-
vert de gelée blanche.
Dans les cinq tubes pleins d’eau, je vis d’abord
l’air j’aillir hors des feuilles avec abondance ; j’en
trouvai 44,55 centimètres cubes , ou 2 pouces et un
quart cubes, il contenoit 8o° de gaz oxygène, l'air
commun n’en contient que 20°.
Les feuilles dans l'air donnèrent 3° | d'air de plus
que celui que j’avois introduit dans le tube , et c’é-
toit du ga'z oxygène.
Pendant le riiême temps sur mon fourneau les
feuilles louchèrent l’eau; de sorte que les résultats
ne sont pas sûrs ; je les passe sous silence.
§ LXXX.
Je voulus connoître plus particulièrement le ré-
sidu de ces 8o° de gaz oxygène fourni par l aloe
disticha , c'est-à-dire les 20° restants de la combus-
tion; je trouvai que c’étoil purement du gaz azote
sans acide carbonique.
( 91 )
§ LXXXL
Pendant que je préparai les fouilles de ValoëclLs-
licha pour une autre expérience, je jetai les yeux
sur le tube contenant 5g, 45 centimètres cubes , ou
3 pouces cubes d’air commun , où j’avois mis aussi ,
comme je l’ai dit § LXXIX des feuilles de cet aloë;
il étoit resté sur mon fourneau , où il avoii passé
24 heures; les feuilles me parurent environnées d’air;
elles n’avoient pas touché l’eau, et n’avoicnt pu lui
donner de l’air ou eu prendre; je l’examinai avec
soin et je trouvai qu’elles avoient absorbé 90 de gaz
oxygène et produit 5° d’acide carbonique.
§ LXXXII.
Je mis des feuilles du même aidé sous sept tubes
pleins d’eau; elles y passèrent toute la nuit, et ne
donnèrent absolument point d’air.
§ Lxxxur.
Ces mêmes feuilles restées à l’obscurité dans 19,81
centimètres cubes, ou 1 pouce cube d’air pendant
24 heures à la température de 5 à 6° , absorbèrent
6° de gaz oxygène; mais elles ne produisirent point
d’air. L’obscurité fût complète ; l’appareil a voit été
renfermé dans une cassette.
§ LXXXIV
Je remis au soleil les cinq tubes qui y avoient
été le jour auparavant avec les feuilles de l'a Idc
dlsticha § LXXIX , le soleil étoit moins vif; elles
donnèrent encore néanmoins sous l’eau 3,5o centi-
mètres cubes, ou un sixième de pouce cube d'air;
j’y trouvai plus de la moitié de gaz oxygène , il y
en avoit les f£.
( 92 )
§ IXXXV.
Je mis de même des feuilles de cet aloè dans 19581
centimètres cubes, ou 1 pouce cube d’air commun ,
celles-ci ne touchèrent pas l’eau, comme dans le
§ LXXIX; elles restèrent au soleil pendant 5 heures
comme dans l’expérience du paragraphe cité.
Je trouvai qu’elles u’a voient point absorbé de
gaz oxygène dans deux tubes; mais dans le troi-
sième, il y en eut 3° d’absorbé et 3° d'acide car-
bonique produit.
De sorte que daus ces deux cas il n’y eut point
de gaz .oxygène absorbé, mais il y en eut 5° dans
le troisième tube. Il paroîlroit donc que la brièveté
du temps fut la cause qui empêcha celte absorption ;
la température de g0 put encore y concourir.
§ LXXXYI.
Je tins donc pendant deux jours et demi des feuilles
de cet cdoe dans ig,8i centimètres cubes, ou î pouce
cube d’air commun à la température de 4 à 5°; elles
absorbèrent 4° de gaz oxygène.
§ LXXXYIL
Je profitai d’un beau jour du mois de mars pour
faire encore quelques expériences sur ce même alo'c.
Je coupai des lames minces à ces feuilles, que
je plaçai daus 6 flacons contenant de l'air commun
et fermant avec des bouchons usés à l’émeri : j'eq
mis dans d'autres flacons pleins d'eau , ou de gaz
hydrogène , ils restèrent tous exposés au soleil pen-
dant un jour,
h' air commun resta comme ii éloil dans le flacon.
Dans les flacons rempli d’eau , il y eut un air pro-
duit qui fut un tiers meilleur que l’air commun.
( 93 )
L’air commun qui avoit éprouvé la chaleur du
soleil sans recevoir sa lumière avoit perdu 8° de
gaz oxygène, qui fut absorbé par les lames ; elles
produisirent 8° d’acide carbonique.
Enfin le flacon rempli de gaz hydrogène ne foui-*
nit point d’acide carbonique à l’essai 3 lies lames de
Valo'è le laissèrent comme il étoit.
11 paroît donc que les feuilles d'a/oë au soleil ne
donnent point d'air dans le gaz hydrogène, ni dans
l’air commun, mais qu’elles en donnent sous l’eau avec
abondance; cependant ou ne peut pas dire, que dans
ces deux cas , il y ait eu de l’acide carbonique ab-
sorbé par l’eau , puisque Valo'è éLoit à sec dans le
flacon ; d’ailleurs comme on trouve l’acide carbo-
nique dans l’air quand le flacon est à l’obscurité ,
pourquoi ne le trouveroit-on pas de même quand
le flacon a été au soleil.
Toutes ces expériences ont été répétées deux fois
et m’ont fourni le? mêmes résultats.
§ lxxxviu.
Je savois déjà que Caloé caulescens glauca don-
Yioit beaucoup d'air au soleil sous l’eau , c’éloit un
motif pour l’employer encore dans ces expériences.*
J’en mis donc sous l'eau au mois de juillet dans
un tube plein de ce fluide; au bout de 2 heures £ ,
j’en obtins 49, 53 centimètres cubes , ou 2 pouces \
cubes et je trouvai qu’il contenoit 85° de gaz oxy-
gène ou le reste étoit l’azote pur ; cependant
le rameau que j’employai étoit détaché de la plante
depuis plus d’un mois, et je l’a vois conservé dans
mu chambre plongé dans l’eau par sa base.
( 94 )
§ LXXX1X.
Il y avoit 65 jours que j’avois détaché des frag-
mens de Valoe caulescens glauca et du cactus co-
chiniüfer ; je les avois gardé à l’ombre dans ma
chambre; je les plaçai chacun à sec dans 5g, •iH cen-
timètres cubes, ou 5 pouces cubes d’air commun
sous un tube fermé par l’eau, et je les laissai ainsi pen-
dant 5 heures au soleil .
Le cactus produisit i°- de gaz oxygène quis’a-
joula à celui de l’air commun.
L'aluë à moitié sec avoit beaucoup souffert , il
étoil bien plus altéré que le cactus ; le soleil devint
nébuleux ; de sorte qu’en répétant cette expérience
sous l’eau , il n’y eut vraiment pendant que je la fis,
qu’une heure et trois-quarts de soleil brillant; cepen-
dant je vis encore l’air jaillir hors des feuilles de
V alo'è et je trouvai dans cet air 42° de gaz 0x3' gène
ou les Le cactus donna un air qui contenoit
57° de gaz oxygène. •
On voiL donc que même dans ce degré d’altéra-
tion , ces deux plantes 11’ont pas perdu la faculté
de produire un air beaucoup meilleur que l’air com-
mun , par la quantité de gaz oxygène qu’il fournit;
cependant il en contient bien moins dans cet état,
que lorsque les plantes sont fraîches.
§ xc.
Enfin je voulus vérifier avec l'agave americana
l'expérience, que j’avois faite avec la lavendula
sj) ica , et prouver encore mieux que les plantes ne
donnent point de gaz oxygène dans le gaz hydro-
gène sa.m> l'action de la lumière immédiate du soleil.
*9
( 9^ )
\
Jé mis donc assez de cet aloë dans 5g, 45 centi-
mètres cubes, ou 5 pouces cubes de gaz hydrogène }
je les y laissai à la température de 8° pendant 42
heures , et comme cet aloë donne beaucoup de gaa
oxygène au soleil , il éloil très-propre à confirmer
ou à détruit e l’opinion d’Ingenhouz.
L'aloë me parut très-bien conservé au bout de
ce temps ; je fis alors l’essai de cet air produit danè
le gaz hydrogène , mais j’y trouvai 2° | d’acide car-
bonique, et le resle étoit le gaz hydrogène que j’a-
vois mis dans le tube.
§ xcr.
Je continuai ces l'echerches sur les fragmens des
plantes grasses.
Je tins pendant 5 heures ~ au soleil, sous un tube
contenant 5g, 45 centimètres cubes , ou 5 pouces
cubes d’air Commun, trois morceaux d’une tige
verte de l'aloë eaulescens spinis rubris , je trouvai
que ces morceaux produisant iw d’acide carboni-
que, et que 2°^ de gaz oxygène absorbé par eux
a voient été remplacés par 2° t de gaz acide carbo-
nique.
J’ai tenu de même au soleil, pendant 4 heures
dans la même quantité d’air commun que dans le
cas précédent , trois morceaux du tronc vert de
l' euphorbium eaput tnedusœ ; je mis de la même
manière 3 feuilles de la même plante sous un autre
tube , elles y donnèrent 19,81 centimètres cubes,
ou 1 pouce cube d’air très-pur. Les trois morceaux
du tronc produisirent peu d’air en comparaison des
feuilles, quoique le volume des premiers fut plus
( 96 )
grand que celui des secondes , et cet air éloit pu-
renient de l’acide carbonique.
En faisant de pareilles expériences, il m’a toujours
paru, que les feuilles dounoient plus d’air que les
liges, et que l’air fourni par ces dernières éloit
mauvais.
Je répétai cette expérience de la même manière :
les morceaux de la tige de cette plante me donnè-
rent encore une petite quantité d’air; il éloit d’un
tiers inférieur en purelé à l’air commun , et le reste
éloit de l’azote.
Ces mêmes morceaux disposés de la même ma-
nière absorbèrent 5° de gaz oxygène et produisirent
5° d’acide carbonique, pendant 5 jours; cette même
expérience faite sur mon fourneau me montra, que
ces morceaux absorbèrent dans 19,81 centimètres
cubes , ou 1 pouce cube d’air commun, 190 d’oxy-
gène et produisirent 1 5° d’acide carbonique.
§ XC1I.
Enfin je tins au soleil pendant un jour des feuilles
de la canne à sucre sous quelques tubes pleins d’eau,
et renversés sur leur ouverture dans un vase plein
de ce fluide; j’en tins de même sur mon fourneau
dans 19,81 centimètres cubes, ou 1 pouce cube d’air
commun ; j’en mis aussi dans la même quantité d’abc
commun au soleil.
Les feuilles sous l'eau me fournirent dans cinq
tubes 24,76 centimètres cubes, ou 1 pouce | cube
d’air qui conleiioil 4o° de gaz oxygène, ou qui éloit
le double mcilleur-que l’air commun, le reste éloit
li* pur azote.
Ces
t 97 )
Ces feuilles dans 19,81 centimètres cubes, ou 1
pouce cube d'air commun au soleil augmentèrent
d'un degré la quantité du gaz oxygène.
Ces feuilles dans la meme quantité d'air commun
sur rn.onfourne.au absorbèrent i4° de gaz oxygène
■et produisirent 5° d’acide carbonique.
Cette plante comme beaucoup d'autres donnent
sous l’eau un air très-pur , et elles n’en donnent
presque poînl dans l’air commun , lorsqu’elles sont
avec lui dans des vases clos : d’où vient cela ? Si
l’on dit que ce bon air ne peut sortir des plantes
dans l’air clos , parce qu’il y est retenu par la dila-
tation de l’air , il me semble qu’il devroit repousser
l’air ambiant , comme il repousse l’eau qu’il fait
baisser dans les tubes : d’ailleurs l’air qui sort sous
l’eau devroit y trouver bien plus de résistance que
dans l'air. Enfin il y a divers corps qui laissent échap-
per leur gaz dans l’air clos.
§ XCUf.
Le soleil étoit très-beau dans un des premiers jours
du mois de mars; je mis des feuilles de canne à sucx’e
sous l’eau dans un tube ; j’en mis dans un flacon
bien fermé contenant 49,64 centimètres cubes, ou
2 pouces | cubes d’air commun ; enfin j’en mis la
même quantité dans un autre flacon contenant la
même quantité de gaz hydrogène; ces trois tubes
passèrent le jour entier au soleil.
Ces feuilles dans Ceau ne donnèrent que deux ou
trois bulles.
J’essayai l’air commun et le gaz hydrogène où
ces feuilles a voient été exposées au soleil pendant
Tome 5. G
( 98 )
tout le jour, et je les trouvai sans aucune altération
et dans le même état où ils étoient lorsque je les mis
dans leurs flacons avec les feuilles de canne à sucre.
§ XC1V.
Je n’ai pas voulu négliger de faire quelques ex-
périences semblables à toutes les précédentes sur les
plantes aquatiques.
Dans ce but, je mis une poignée de myriophyllon
sous Veau au soleil , il fournit une grande abon-
dance d’air$ on le voyoit se former par petites bulles
autour des filets de la plante, je le laissai pendant
4 heures au soleil.
Je fis l’essai de cet air , j’y trouvai 770 de gaz
oxygène , 20° d’azote et 5° d’acide carbonique.
Cette plante mise dans 19,81 centimètres cubes,
ou 1 pouce cube cl'air commun pendant le même
temps y produisit 2° de gaz oxygène.
§ XCV.
La lentille de nuirais mise sous Veau pendant
5 heures au soleil donna peu d’air , mais celui
qu’elle fournit coutenoit 55° de gaz oxygène de plus
que l’air commun.
Cette lentille de marais mise à sec au soleil dans
un flacon contenant 4g, 54 centimètres cubes, ou
2 pouces 5 cubes d’air commun y donna 2° ~ de gaz
oxygène ; mais comme elle avoit fourni 2° d’acide
carbonique le volume de l’air éloit resLé le même.
§ XCVI.
J’avois depuis le mois de juin dans une chambre
des vases cylindriques de verre d’un petit diamètre,
où il étoit resté de l’eau de mon puits à une cer-
C . 99 )
taiae hauteur; il yen a voit encore le premier janvier
59 ,45 centimètres cubes , ou 5 pouces cubes, quand
je fis ces expériences. Ces vases ne reçurent jamais
qu’une lumière réfléchie , mais ils furent toujours,
très-bien éclairés. Les parois de ces vases s’étoient
tapissées d’une matière verte . Je versai l’eau de ces
vases ; je les remplis avec une eau nouvelle de mon
puits, j’en renversai un sur son ouverture dans un
vase plein d’eau. 11 resta trois jours exposé au soleil
et trois nuits dans l’obscurité.
Le premier jour il s’y développa beaucoup d’air,
moins dans le second , et point dans le troisième 5
mais je n’en aperçus jamais pendant la nuit.
J’obtins ainsi 29,71 centimètres cubes, ou 1 pouce
et demi cube d’air; il contenoit ■— de gaz oxygène,
c’est-à-dire de plus que dans l’air commun , le
reste éloit du pur azote.
§ XCVII.
Je mis une partie de cette matière verte attacîiée
au tube dans un autre récipient qui contenoit 237,80
centimètres cubes , ou 1 2 pouces cubes d’air commun
sur mon fourneau , cet air reposoit sur l’eau qui
l’onfermoit; cette matière ne causa aucune altération
à cet air.
5 xcvin.
La matière verte donne très-peu d’air dans l’air-
clos , quand elle n’éprouve pas l’action directe du
soleil , et elle n’en donne jamais pendant la nuit.
§ XCIX.
J exposai pendant un jour celte matière verte à sec
sous un tube contenant 19,81 centimètres cubes, ou
( T0° . )
1 pouce cube d'air commun au soleil , c’étoit au
mois de janvier, le soleil étoit très-brillant et celle
matière verte m’a voit déjà donné sous l’eau beau-
coup d’air.
Je fis l’essai de cet air, je trouvai 8° de gaz oxy-
gène absorbé et 2° d’acide carbonique produit, la
différence entre l’eau et l’air est considérable.
Quelques jours après , celte matière verte soumise à
l’expérience précédente fut placée dans l’eau à l’air
libre pendant dix jours; alors j’en mis une partie sous
un récipient plein d’eau et renversé dans un vase plein
d’eau sur son ouverture ; elle me donna 2,47 cen-
timètres cubes , ou | de pouce d’air dont la plus
grande partie étoit du gaz oxygène.
Il paroîl donc que cette matière verte mise dans
l’air y absorbe le gaz oxygène , et y produit l’acide
carbonique , lorsqu’elle y est dans l’air au soleil ;
mais qu’elle produit beaucoup' de gaz oxygène et
un peu d’azote lorsqu’elle est dans l’eau et au soleil.
§ c.
Il résulte de ces expériences i.° que les plantes
exposées sous l’eau au soleil y produisent un air
meilleur que l’air commun avec de l’acide carbo-
nique et de l’azote; que dans l’air au soleil sous
les vases clos, quelques-unes donnent un peu de
gaz oxygène, la plupart absorbent ce gaz, et don-
nent alors l’acide carbonique; enfin qu’à une basse
température , l’air où les plantes sont renfermées
y reste sans altération.
2.0 Que les plantes allèrent quelquefois l’air par
l’acide carbonique qui s’en échappe.
( TOI )
5.° Qu’elles donnent à l’obscurité l’acide carbo-
nique dans les gaz hydrogène et azote , et qu’elles
fournissent dans ces gaz le gazf oxygène à la lumière
solaii'e ; enfin qu’elles produisent plus d’acide carbo-
nique dans l’air que dans les gaz hydrogène et azote.
4. ° Que les plantes saines ne donnent jamais d’air
à l’obscurité sous l’eau, et ne changent point les
gaz hydrogène et azote en acide carbonique.
5. ° Que les plantes grasses offrent les même phé-
nomènes , qu’elles paroissent fournir plus de gaz
oxygène que les autres . et que ce gaz est plus pur.
6. ° Que la température influe beaucoup sur toutes
ces expériences et surtout sur l’absorption du gaz
oxygène.
7.0 Que toutes les plantes donnent plus de gaz
oxygène sous l’eau au soleil, que lorsqu’elles y sont
renfermées dans une petite quantité d’air commun.
8.° Qu’il paroît bien que le contact de l’air com-
mun avec les plantes indue sur la production de
l’acide carbonique.
9.0 Qu’il n’y a point de gaz oxygène produit par
les plantes sans l’action immédiate de la lumière
solaire.
1 o.° Que les fragmens des plantes grasses négligés
et presque desséchés donnent encore sous l’eau au
soleil le gaz oxygène.
1 1 .° Que les feuilles donnent plus de gaz oxygène
sous l’eau au soleil que leurs tiges.
12.0 Qu’il y a des plantes comme la canne à sucre
qui dorment assez d’azote avec le gaz oxygène sous
l’eau au soleil , et que la quantité du dernier croît
avec celle du premier.
( 102 )
13. * Que les plantes aquatiques offrent à tous
ces égards les mêmes phénomènes que les piaules
terrestres.
14. ° Que la matière présente offre encore lés.
mêmes résultats.
' • , ou /i : : • r- . . ;
CHAPITRE III.
Phénomènes particuliers que les plantes mises
dans l’air , dans L eau, au soleil, à l'ombre
et à V obscurité font observer .
§ Ci-
Après avoir parcouru les faits divers que pré-
sente le phénomène général' de l'influence des plaüles
sur l’air où elles sont renfermées, et de la nature
des gaz qu’elles produisent dans Feau et dans Pair;
il restoil encore diverses parties de ce phénomène
à considérer plus particulièrement dans leurs détails ;
il falloit rechercher, si toutes les saisons sont
également propres à produire ces effets, comparer
Pair produit par les plantes sous l'eau et dans l'air
soit relativement à sa quantité, soit relativement
à sa qualité; fixer les bornes de cette production
s’il y en a ; étudier l’influence de la lumière sur
cette production , et par conséquent les effets que
font naître l’ombre et Pobscurité ; enfin mesurer,
s’il est possible, la quantité de l’air que les plantes
contiennent. Chacun de ces problèmes demande une
solution qui lui soit propre et exige des recherches
particulières pour la découvrir dans la nature.
( ïo5 )
§cu.
Les plantes donnent - elles de V air au soleil
pendant l'hiver ? *
Il avoit soufflé le 20 décembre pendant la nuit
un venL du midi qui balaya tous les nuages; le soleil
fut alors aussi vif et aussi brillant qu’il peut l’être
dans la plus belle saison ; j’en pi’ofitai pour faire
quelques expériences. La température éloit alors à
o° 5 je tins sous l’eau et à ce soleil pendant 5 heures
les plantes suivantes : aloè caulescens glauca spinis
rubris ,aloe ame ricana elle sempervivum tectorum.
Je voulois voir si ces plantes donneroient au cœur
de l’hiver le gaz oxygèue comme elle le donnent
abondamment en été au soleil. La terre éloit cou-
verte de neige ; il avoit gelé fort la nuit précé-
cédenle ; la plus grande chaleur que les plantes
éprouvèrent au soleil fut de 90 au milieu du jour.
Eh bien, pendant la. journée, ces cinq plantes mises
sous des tubes larges, hauts et pleins d’eau donnè-
rent la moitié de l’air qu’elles m’avoient donné en
été , cet air sortoit par petites bulles qui se succé-
doient par jets tantôt continus et tantôt interrompus.
J’examinai l’air produit par ces trois plantes, et
je le trouvai aussi pur qu’en été.
Il en résulte donc que ces plantes et probable-
ment les autres donnent du gaz oxygène pendant
l’hiver; qu’elles en donnent la moitié moins qu’en été,
et que cet air est aussi bon.
§ cm.
J'exposai encore au mois de Janvier au soleil,
sous l’eau, des morceaux de feuilles dé V aloè aine -
( io4 ).
ricana qui Soient à moitié endurcies par le gel; je vis
le suc gelé lorsque je les coupai.
Ces morceaux ne donnèrent que très-peu d'air et
il ne fut pas meilleur que l’air commun. Le ther-
momètre dans les tubes pleins d’eau monta pour-
tant à g0 , et les morceaux de l’aloë se dégelèrent
peu de Lemps après qu’ils eurent été mis en expé-
rience : l’eau où ces plantes furent renfermées ne
cessa pas d’être fluide.
S CIV.
J’ai bien lait voir jusques à présent que les plante a
sous Veau au soleil donnoient de l'air meilleur
et en plus grande abondance que dans Vair , mais
il faut l’établir d’une manière plus précise.
Je mis au mois de Mai un poids égal de feuilles
d'œillets sous un tube plein d’eau et renversé sur
son ouverture dans un vase plein d'eau ; j’en mis
exactement autant sous un tube, où il y avoit 5g, 45
centimètres cubes, ou 3 pouces cubes d'air commun;
je lis rigoureusement la même expérience avec le
cactus cocliinilifer , et je laissai ces 4 tubes au soleil
pendant 5 heures.
Au bout de ce temps - là , j’en fis Fessai , et je
trouvai que la quantité d'air produit étoit à peu près
égale sous Veau et dans Vair , mais le cactus donna
un air d'un quart plus pur , sous l'eau que dans l’air.
§ cv.
Je refis cette expérience au mois d'Avril avec des
feuilles de framboisier ; j’en mis deux sous des tubes
pleins d’eau et renversés dans l'eau sur leur ouver-
ture ; j’en mis deux autres dans 5g, ta centimètres
( to5 )
cubes, ou 5 jiouces cubes d’air commun; elles y l’es-
tèrent au soleil pendant 5 heures.
Les feuilles dans L’air commun ne produisirent
point d’air et absorbèrent 2°-~ de gaz oxygène. Les
feuilles sozz.s l’eau produisirent 6, 6o centimètres cubes,
ou | pouce cube d’air dont le volume renfermoit i de
gaz oxygène.
S CYI.
Mais les plantes donnent - elles donc de l’air
dans Pair? On a déjà pu voir l’influence des plantes
sur de petits volumes d’air; j’ai voulu encore faire
cette expérience d’une manière différente sur un plus
grand volume d’air que les précédens.
J’exposai donc dans une quantité d’air remar-
quable , et à un soleil très-vif et très-pur pendant
6 heures les plantes suivantes, c’étoit au mois de
Juin.
Crassula cotylédon dans 277, 45 centimètres
cubes, ou 1 4 pouces cubes d’air occupoit l’espace
d’un volume d’air égal à 26,4 1 centimètres, ou à
1 pouce cube. Celle plante n’altéra point l’air com-
mun , mais elle en diminua la quantité.
Mesenibryanthemurn acinaci forme dans 277.45
centimètres cubes, ou i4pouces cubes d’air commun,
laissa la même quantité d’air et la même pureté ,
que celle de l’air commun.
Aloe caulescens glauca dans 2/17,61 centimètres
cubes, ou i5 pouces cubes d’air commun , a donné
les mêmes résultats que la plante précédente.
Sempervivum teclorurn dans 297,26 centimètres
cubes, ou 1 5 pouces cubes d’air commun , a donné les
( 106 )
mêmes résultats que les deux plantes précédentes.
L'ciloe margci rit if e ra disliclici fut pendant le
même temps exposée au soleil dans 217,98 centi-
mètres cubes, ou 11 pouces cubes d’air commun; et
le cactus cyliàdricus dans 1 58, 53 centimètres cubes,
ou 8 pouces cubes d’air commun; l’air n’y reçut au-
cune augmentation et sa pureté n’en fut point altérée.
Ces expériences sont capitales, puisque ces plantes
donnent sous l’eau au soleil une grande^abondance
d’air ; cependant elles n’en donnèrent point dans l'air :
ce qui prouve la grande différence qu’il y a dans
l’exposition des plantes au soleil dans l’air ou dans
l’eau.
§ CYII.
J'ai fait cette expérience d’une autre manière,
qui pouvoit seule être convaincante.
J'exposai pendant 6 heures à un soleil vif dans
59,45 centimètres cubes, ou 5 pouces cubes de gaz
hydrogène quelques plantes grasses ; mon but étoit
de voir, si elles donneroient du gaz oxygène, et de
l’acide carbonique; cependant il faut observer qu’on
11e peut introduire la plante dans ce gaz qu’au tra-
vers de l’eau qui peut fournir quelques atomes de
gaz oxygène, et qu’il peut y rester aussi quelques
atomes d’air commun adliérens aux parois du
récipient.
Cacalia euphorhium ; celte plante produisit 10°
de gaz oxygène et 5° d'acide carbonique, celte expé-
rience est capitale et conforme à ce que dit Senebier.
Cotylédon orbiculata ; cette plante produisit io°
de gaz oxygène et 20 d’acide carbonique; le gaz liy-
t 307 )
drogène avec ce mélange s’enflamma et détonna.
Alo'ë caulescens glaucci ; celle plante produisit
ii° de gaz oxygène et 4° d’acide carbonique.
Aloë spiralis ; cette plante produisit 3° de gaz
oxygène et 4° d’acide carbonique.
Cactus cylindricus ; celle plante a produit 5° de
gaz oxygène et 5° d’acide carbonique.
Sempervivum cirboreum ; celte plante a produit
5 degré de gaz oxygène et 5 degré d’acide carbo-
nique.
Euphorbium caput medusæ ; cette plante a pro-
duit xp de gaz oxygène et i°-t d’acide carbonique.
§ CVIII.
Je fis en même temps mais seulement pendant 4
heures les mêmes expériences avec le gaz azote je
n’en employai que 29,7 1 centimètres cubes, ou qu’un
pouce l cube.
Cactus cylindricus ; cette plante 11e produisit
point d’acide carbonique, mais elle y fourni L 90 de
gaz oxygène.
Crassula cotylédon ; produisit 4° de gaz oxygène
et i° d’acide carbonique.
Cotylédon orbiculqta ; produisit 5° de gaz oxy-
gène et 20 d'acide carbonique.
§ C1X.
Les expériences rapportées dans les § CVil et
C Y J 11 offrent deux considérations qui méritent qucl-
qu’attenlion.
Parmi les six plantes exposées au soleil dans le
gaz hydrogène , il y en a quatre qui ont produit
assez de gaz oxygène , et ce gaz y fut plus aboli-
( i°8 )
dant que l'acide carbonique; une d’elles a donné
io° de gaz oxygène, mais une autre n’a donné pres-
que ni acide carbonique , ni gaz oxygène , et l’autre
un tant soit peu plus de ces deux gaz. J’ai bien
tu que le gaz hydrogène ne se décomposoit pas ,
et qu’il restoit ce qu’il étoit, puisqu’il s’est enflammé
et qu'il a délonné comme auparavant ; mais je ne
me suis point aperçu que dans ces expériences, il
y ait eu du gaz azote produit.
Voilà donc vérifié ce que Senebier a dit , que
les plantes donnent le gaz oxygène dans le gaz hy-
drogène ; mais il dit encore que le gaz hydrogène
s’est enflammé après son expérience , je ne l’ai pas
vu; le phosphore y a brûlé sans inflammation du
gaz hydrogène , il est vrai que par le fait il n’y avoit
pas une quantité suffisante de gaz oxygène. Il en
résulte néanmoins contre l’opinion d’ingenhouz dont
j’ai parlé, que le gaz hydrogène ne s’est pas changé
en acide cai'bonique puisqu’il s’est enflammé.
Les deux autres plantes n’ont presque point donné
de gaz oxygène, ce qui ne s’arrange pas bien avec
ce qu’a dit Senebier.
- Senebier dit encore que les plantes au soleil dans
le gaz azote donnent le gaz oxygène , et que le gaz
azote s’est diminué , et il explique ingénieusement
le phénomène. J’ai bien remarqué aussi cette dimi-
nution dans d’autres cas; mais je ne l’ai pas observée
dans celui-ci; elle n’a donc pas lieu généralement;
cependant il est toujours clair que les plantes don-
nent le gaz oxygène dans le gaz azote. •
( i°9 )
S ex.
Je lins après cela pendant 7 heures au soleil des
tubes pleins d’eau avec des planles; je tins ensuite
deux de ces planles dans des tubes 'contenant 5g, 45
centimètres cubes, ou 5 pouces cubes d’air commun ,
je lins encore la troisième semblablement dans un
tube contenant seulement 29,71 centimètres cubes,
ou 1 pouce i cube d’air commun ; elles furent ainsi
exposées au soleil à la même place et pendant le même
temps; les volumes des plantes étoient égaux et toutes
les circonstances étoient à tous égards les mêmes ,
à l’exception des différences que j’ai voulu établir
et que j’ai indiquées. On comprend , qu’il devoif
être intéressant de connoîlre les résultats produits par
ces différences.
Le sempervivum tectorum a donné sous l'eau un
volume d’air qui contenoit la moitié de gaz oxygène.
Celte plante a donné dans 5 pouces cubes d’air
commun, 5° d’acide carbonique et a détruit 4° de
gaz oxygène.
L'euphorbium caput medusce-H donné sous l’eau
la millième de 5 pouces cubes d’air.
Dans les 3 pouces cubes d'air commun elle a
absorbé 90 de gaz oxygène et a produit 5° d’acide
carbonique.
L’aloè caulescens glauca a donné sous l’eau
de x pouce ^ cube en air qui contenoit plus des deux
tiers de gaz oxygène.
Dans 1 pouce ~ cube d’air commun elle a pro-
duit d’air de moins que sous l’eau , et dans
ces produites, il n’y avoil que ~ de gaz oxy-
gène, ^ d’acide carbonique et le l’este d’azote.
{ no )
Il résulte de ces expériences que ces trois plantes
ont donné de l’air sous l’eau , que sa quantité y a
été plus grande que dans l’air commun, que la quan-
tité du gaz oxygène est beaucoup plus grande sous
l’eau, lorsque les plantes en donnent, que dans l’air;
ou plutôt qu’il y a du gaz oxygène produit sous l’eau
loi'squ’il n’y en a point dans l’air -, enfin que ces
plantes sous l’eau comme dans l’air donnent de l’acide
carbonique.
§ CXI.
Je crus nécessaire de multiplier ces expériences.
Je tins donc encore sous l’eau pendant 4 heures
au soleil les plantes suivantes, dont je mis aussi des
volumes égaux dans 4g, 54 .centimètres cubes , ou 2
pouces | cubes d’air commun.
Crassula coccinea donna sous l’eau les de
t
2 pouces \ cubes ; il y avoit — de gaz oxygène.
Dans les 2 pouces j- cubes d’air commun , il y
eut la même quantité d’air pi'oduit, mais il ne con-
tenoit que de gaz oxygène.
Euphorbium cap ut meclusœ fade f rue tus pini,
a donné sous l’eau d’air contenant •— de gaz
oxygène.
Dans l’air commun , elle a produit d’air dont
il y avoit y— d’acide carbonique de gaz oxygène
et le reste d’azote.
JSIesembryanlhemum erassifolium , a donné
sous l’eau j~ d’un pouce ÿ cube qui contenoit
5g° de gaz oxygène : dans l’air il a donné la même
quantité d’air qui avoit la même pureté.
Aloe distic/ia verrucosa a donné sous l’eau ~
( 111 )
d'un pouce 4 cube d’air dont il y avoit 4i° de gaz
oxygène : dans L’air commun il a produit 2° de gaz
oxygène.
Crassula coecinea a produit dans l’air et sous
l’eau la même quantité d’air que Yeuphorbium caput
medusœ ; mais dans l’air produit sous l’eau, il y
a eu une beaucoup plus grande quantité de gaz
oxygène ; il n’y en eut que 5o° produits par celui
que l’air recouvroil.
Il résulte de ces expériences que la quantité de
l’air produit par les plantes exposées dans l’air au
soleil a été presqu’égale à celle que ces plantes ont
fourni sous l’eau au soleil; mais quelquefois, il y
en a eu moins: cependant le produit en gaz oxygène
sous l’eau a été toujours plus grand que dans l’air.
§ CXIL
En considérant ce grand excès de gaz oxygèue
produit au soleil par les plantes sous l’eau sur celui
qui est rendu par les plantes dans l’air clos au soleil;
j’ai soupçonné quelqu’erreur dans mes expériences,
ou du moins j’ai vu que l’excès ne devoit pas être
aussi réellement grand qu’il paroîL d’abord ; j’ai donc
pensé qu’une expérience pourroit décider la ques-
tion , et j’ai imaginé la suivante.
La même plante doit être mise au soleil dans un
égal volume d’air et d’eau, de même que pendant
un temps donné. Supposons alors que la plante dans
l’eau produise un volume d’air égal à celui qu’elle
a fourni dans l’air, je mets dans un eudiomètre l’air
de l’eau et par la combustion du phosphore, je con-
clus la quantité du gaz oxygène qu’il renfefmoit
( 112 )
avec assez de justesse pour les autres expériences que
j’avois faites. Ensuite je fais brûler le phosphore dans
un eudiomètre semblable qui contient l’air produit
dans l’air cymmun avec l’air commun lui-même. Je
suppose que ce soit la crassula coccinea qui a donné
dans l’eau et dans l’air d’air dans l’eudiomètre con-
tenant 49, 54 centimètres cubes, ou 2 pouces - cubes
d’air. J’ai dit que cet. air produit dans l’eau a donné
•—de gaz oxygène; mais que l’air de la même plante
produit dans l’air en avoit seulement donné par
conséquent la différence est très -grande enLre ces
deux produits, et cette grande différence m’avoit
fait craindre une erreur dans ma manière de pro-
céder; il est cependant aisé d’en trouver la cause.
En examinant séparément les deux produits , ou
les d’air trouvées dans l’eau , j’avois seule-
ment ces , ou le gaz oxygène est incomparable*
ment plus rapproché que dans l’air , ces y~ y sont
noyées dans tout l’air commun introduit dans le
tube pour faire l’expérience , et par conséquent il
y est disséminé dans les eo° de gaz oxygène et les
do° d’azote qui le forment; aussi la flamme est
incomparablement plus vive dans le premier cas.
Pour obvier à cet inconvénient dans la comparaison,
j’ai employé le procédé suivant.
Je mis quelques parties égales du cactus tuna
sous l’eau et dans l’air; je les exposai au soleil pen-
dant cinq heures. Elles produisirent beaucoup d’air
sous l’eau. Après avoir mis une mesure connue d’air
commun dans un eudiomètre , j’y ajoutai 20° de
l’air produit dans l’eau par le cactus , ou d’un air
* quelconque
( 115 )
quelconque produit de cette manière ce qui me don»
nuit 120° de cet eudiomètre; après l’inilammation
du phosphore l’eau est montée à i4° au-dessus du
zéro de l’instrument, par conséquent, il y avoit
dans ce mélange des deux airs 54° de gaz oxygène,
eL en ôtant les 20° de gaz oxygène de l’air commun,
que j a vois mis d’abord dans Feudiomèlre , il étoit
évident que les 20° d’air produit par la plante sous
l’eau en conteuoient i4°. Alors en mettant sans mé-
lange dans un eudiomètre semblable à celui que je
Tenois d'employer l’air de la piaule , j’ai eu après
la combustion du phosphore qui fut très-vive les
8o° ou les de gaz oxygène.
Celte manière de procéder qui m’a paru très-juste et
très-sure m’a bien fait voir que cet excès considérable
de gaz oxygène dans l’air produit sous l’eau sur l’air
produit par la même piaule dans l'air commun ne
peut provenir que de la pureté du premier qui reste
sans mélange, et du mélange do l’autre avec, l’air
commun introduit dans le tube pour faire l’ex-
périence.
§ GXJII.
Je continuai ces expériences sur les plantes expo-
sées sous l’eau et dans l’air au soleil pour eonnoîlre
mieux la quantité de l’air qu’elles y produisent,
et j’ai toujours employé des plantes grasses, parce
qu’elles supportent mieux que les autres Faction du;
soleil.
J’exposai sous Venu au soleil trois petits mor-
ceaux du cactus cohinitifcr ; j’en éprouvai l’air d’a-
près ma nouvelle méthode; il m’avoit donné cinq
Tome 3. H
( n4 )
degrés d air , dont quatre degrés étoienl du gaz
oxygène el un degré d’acide carbonique.
I rois petits morceaux, du même cactus exposés
de la même manière au soleil dans 69, 45 centimètres
cubes, ou 5 pouces cubes d' air commun produisirent
90 d’air, par conséquent la quantité d’air produit
dans l’eau a été plus petite que dans l’air ; mais il
11’y a eu que 20 de gaz oxygène dans l’air et 7®
d’acide carbonique.
§ CXIV.
J’exposai de même au soleil sous l’eau trois petits
morceaux de l'alo'ê dislicha verrucosa ; j’en exposai
autant au soleil dans 69,15 centimètres cubes, on
5 pouces cubes d’air commun.
Ils produisirent sous l’eau al0 de gaz oxygène et
i° d’acide carbonique.
Ils produisirent dans l’air 1 20 de gaz oxygène
et 2° d’acide carbonique.
L’alo'è disticha margaritifera traiLé.de la même
manière fournit sous l'eau 120 de gaz oxygène,
et dans l’air 8° de gaz oxygène avec 4° d’acide
carbonique
§ cxv.
Les feuilles , les parties vertes des végétaux don-
nent-elles toujours de l'air dans toutes les cir-
constances, où elles peuvent se trouver, lorsqu'elles
sont exposées sous l’eau au soleil ?
Pour répondre à celle question , il falloit, savoir
quel seroil l’effet produit par les feuilles sèches, mises
sous l’eau et dans l’air au soleil. Je lis pour cela sé-
cher des feuilles de violeLtes au soleil, je les exposai
ensuite sous l’eau aux rayons de cet astre.
Elles .s'y couvrirent d'abord de bulles , comme
la surface interne et le fond des tubes et des réci-
piens, où je faisois ces expériences 5 mais ces bulles
ne sont que l’air contenu dans l’eau qui s’altacbe
à la surface des corps solides que l'on y plonge,
et par conséquent à la surface des feuilles sèches
que l’on peut y mellre, comme Senebier l’a prouvé;
ceci pourtant a pu faire croire mal-à-propos , que
les feuilles sèches donnoiént de l’air comme les feuilles
vertes.
J’ai tenu pendant deux jours deux grands réci-
piens pleins d’eau au soleil , renversés sur leur ou-
verture dans des vases pleins d’eau , afin que tout
l’air qui pouvoil y être en sortît; je remplis alors
avec celle eau deux récipiens plus petits, que je
renversai dans la meme eau sur leur ouvertui'e. Je
fis passer sous l’un deux feuilles sèches de la violette
jaune. Je fis passer dans l’autre trois feuilles vertes
et fraîches oe ces violettes; je mis aussi trois feuilles
semblables de la même plante sous l’eau que je ve-
nois de tirer de mon puits et je les exposai ainsi
•au soleil.
Au bout d'une heure je n’aperçus pas une bulle
d'air sur les feuilles sèches de la violelte ; seulement
j en aperçus quelques-- unes sur les parois internes
et sur le fond du récipient , je les voyois monter;
mais je n’avois pu remplir entièrement le tube et
le vase où les feuilles sèches éloient avec l’eau privée
de son air.
Quant aux feuilles vertes et fraîches mises sous
les deux tubes , dont l’un éloit plein de l'eau privé*
\
( 116 )
de son air, el l’autre de l’eau fraîchement tirée du
puits; je vis presqu’à l’instant les feuilles qui étoient
dans l’eau du puits fraîchement tirée se couvrir de
huiles sur leurs deux surfaces , de même que les
parois du tube; mais elles ne parurent que quelque
temps après sur les feuilles placées, dans l'eau privée
de son air, et je remarquai bien celle différence
dans ces deux cas, c’est que les bulles furent plus
nombreuses sous l’eau du puits que sur les feuilles
placées sous cette eau privée de son air; outre cela
les bulles dans le premier cas furent plus grosses; ce
qui me fait croire que les bulles qui sont sur les
feuilles placées sous l’eau privée de son air sont exclu-
sivement celles des feuilles, je ne vis au moins qu'un
très-petit nombre de bulles sur les pavois intérieures
du tube; au lieu que sur les feuilles mises dans l’eau
fraîchement tirée , on y voyoit celles de l’eau et
celles de la feuille.
Je laissai ces trois tubes au soleil pendant 5 heures^
voici le résultat de leur séjour sous ces tubes.
Dans le tube où étoient les feuilles sèches de vio-
lette jaune mises dans l’eau privée d'air au soleil ;
il n’y eut qu’une petite bulle d’air produite par l’eau
elle-même.
J’avois mis aussi des feuilles sèches de pêcher sous
Veau de mon puits ; mais quoique d’abord , je n’eusse
observé se former sur elles aucune bulle, j'en vis
ensuite paroître qui n’éloient encore que celles de
l’eau elle-même qui s’y attachèrent et ne formèrent
pourtant qu’une petite bulle. Je remarquai le même
phénomène sur ces feuilles sèches de pêcher mises
( 117 )
sons l'eau privée d’air ; je ne vis point d’abord des
bulles sur leur surface, mais elles s’en couvrirent
à la fin de l’expérience , et elles me parurent pro-
duites par la fermentation que cette macération avec
chaleur a voit occasionnée, comme je le jugeai par
leur odeur, et par une espèce de coction qu’elles
paroissoient avoir subies; ce que l’on pouvoit remar-
quer déjà dans le changement de leur couleur.
Enfin dans les deux autres tubes où se trou voient
les feuilles vertes de vioîette dans l'eau privée d'air
et dans celle qui fut fraîchement tirée du puits ;
je vis bien qu’il y avoit un plus grand nombre de
bulles sur les dernières que sur les premières.
Celte expérience comparative prouve donc, que
l’eau commune, au môins celle de mon puits, aug-
mente la quantité de l’air produit par les plantes , et
qu’elle doit y mêler un gaz méphitique comme je
l’ai prouvé dans le premier Mémoire. Elle prouve
aussi que l’eau absorbe l’air, et que si la plante qui
y est plongée continue à y donner de l’air comme
dans l’eau aérée ; une partie de cet air de l’eau peut
se joindre à celui que la plante fournit. 11 faut donc
pour rendre les expériences plus précises priver l’eau
que l’on y emploie de l’air qu’elle peut avoir absorbé ,
surtout quand les feuilles donnent peu d’air par
elles-mêmes.
Enfin je voulus essayer l’air de ces bulles formées
dans les tubes de l’eau privée de son air , et dans
les tubes de l’eau qui l’a voient conservé , et je vis
que l’air des feuilles mises dans l’eau privée d’air
étoienl environ un quart meilleur, que celui de
l’air produit par les feuilles de l’eau aérée.
( v)
§ CXYI.
On a d('jà pu remarquer que les plantes exposées
au sokil sous l’eau donnent du gaz azote, je l’ai du
moins (indiqué dans les analiscs , que j’ai faites de
l’air rendu par quelques plantes. J’ai voulu m’en
assurer d’une manière plus certaine en conservant
sur l’eau dans quelques vases l’air que quelques plantes
avoient rendu au soleil , comme par exemple celui
de quelques alo’è , du cactus triangularis et du cachas
\cochinilifer ; parce moyenne potivois voir s’il res-
teroit vraiment de l’azote , quand j’en aurai séparé
le gaz oxygène par la combustion et l’acide carbo-
nique par l’eau de chaux.
C’est ce que j’ai bien remarqué, et j’ai bien vu
que le résidu étoit véritablement de l’azote ; puis-
qu’une bougie allumée s’éteignit dans ce gaz que
j’avois ainsi obtenu parfaitement solitaire.
J’ai trouvé des plantes qui en donnoient d’au-
tres d’autres d’autres enfin beaucoup moins.
Mais d’où vient cet azote dans les plantes ? Il se
trouve dans l’air intérieur , et il en est chassé par
l’action de la lumière solaire. Ceci s’arrange-t-il avec
l’analise des plantes qui ne fournissent point d’azote,
ou qui n’en fournissent que dans quelques-unes? Il faut
donc que cet azote vienne du dehors : "dans ce cas.
il faudroit dire qu’il est mêlé dans l’eau avec le gaz
oxygène, et, que ce dernier en sortant des plantes
s’unit à l’azote qui est dans l’eau.
§ CX VH.
Jl me reste à examiner la grande question, dont
la solution doit apprendre si les plantes donnent
( 319 )
vraiment de l’air indifféremment à l’obscurité et
à la lumière ? Ce qui la ramène à celle - ci ; la
lumière influe-t-elle comme lumière éclairante sur la
production du gaz oxygène? Cette question ponrroit
être déjà presque décidée par diverses observations,
que j’ai eu l’occasion de faire sur diverses expériences
rapportées dans ce mémoire ; mais comme elle a
été présentée d’une manière différente par Ingenhouz
et Senebier , et comme il y a encore quelques
physiciens qui ont adopté l’opinion du premier ; j’ai
voulu l’étudier moi-même et chercher dans la na-
ture la solution de cette question curieuse qui se
réduit à celle-ci ; les plantes saines donnent-elles de
l'air à l’obscurité?
§ CXV1II.
Je fis la première expérience sur ce sujet au mois
de Janvier 1798. Pendant un jour couvert, à l’air
libre et dans un lieu que le soleil éclaire, lorsqu’il
n’est pas éclipsé par les nuages, j’exposai sous l’eau
la lavande, la matière verte, et d’autres plantes qui
m’a voient donné de l’air au soleil avec abondance ;
elles ne m’en fournirent alors à cette lumière, qu’une
quantité très-petite pendant tout le jour; mais ces
végétaux et une foule que je soumis à la même
expérience pendant la nuit ne m’en fournirent point
du tout.
§ CXIX.
Il y a 1 4 jours que je tiens sous des récipiens sé-
parés dans l'air commun des rameaux de la lavande ,
elle a absorbé plus ou moins de gaz oxygène, et n’a
pas par conséquent rendu l’air meilleur.
( 120 )
J’exposai de la même manière pendant 5 jours la
matière verte dans l’air commun sur mon four-
neau, on l’a déjà vu, elle a laissé l’air commun
comme il étoit, quoiqu’elle fût dans l’eau.
Le pied de la Lavande étoit aussi dans l’eau; mais
le soleil ne s’est presque pas montré pendant la durée
de l’expérience; aussi l’air où cette plante étoit ne
s’est point accru.
Je vois donc clairement que la seule lumière ré-
fléchie du soleil laisse les plantes comme elle les
trouve sans leur faire produire aucune espèce d’air;
mais au treizième jour il y eut deux ou trois heures
de soleil , c’étoit au commencement de Février , et
le soleil qui éclaira l’expérience, fit produire assezt
d’air à la plante pour pouvoir en faire l’essai.
Alors je mis aussi au 'soleil la ma tière verte qui
n’avoit point altéré l’air commun sur mon four-
neau pendant trois jours ; elle donna yL d’air dans,
le volume d’air, où elle étoit, et je trouvai qu’il
contenait plus des deux tiers de gaz oxygène. Je
mis encore de cette même matière verte sous un
gi and récipient plein d’eau renversé sur son ouver-
ture dans un vase plein de ce (laide, il fournit ~ d
d’air qui furent réduits par la combustion du phos-
phore à (
5 CXX.
Je plaçai à cinq heures du soir dans quatre tubes
pleins d’eau beaucoup de ce cactus cochiuilifer qui
m’a voit fourni une si grande abondance d’un gaz.
oxygène si pur pendant le jour; la température étoit
de xo°j c’éi.oit au mois cl’ Avril ; je laissai donc çes
( 121 )
appareils ainsi disposés pendant toute la nuit 5 il n’y
eut pas une seule bulle d'air produite.
On voit donc bien nettement , que cette plante
privée de la lumière du soleil ne donne point d’air
sous l’eau.
§ CXXT.
J’avois pourtant tenu pendant trois heures au
soleil, qui fut quelquefois voilé par les nuages un
morceau de ce cactus cochinilifer dans 5g, 45 cen-
timètres cubes, ou 5 pouces cubes d’air commun
fermé par l’eau , mais de manière que le cactus
ne touclioit pas ce fluide et il y produisit i°| de
gaz oxygène.
§ CXXII.
Il y avoit 65 jours que j’avois sur une table à
l’ombre deux feuilles cValoê caulescens glauca spinis
rubris , et la moitié d’une feuille du cactus cochi-
nilifer à moitié desséchée, et qui auroit eu le temps
d’élaborer de l’air mauvais , si vraiment les plantes
en élaboroient à l’ombre; j’en mis de petits mor-
ceaux sous l’eau , qui y restèrent au soleil pendant
une heure il y eut de l’air produit avec abon-
dance; et je trouvai dans celui qui avoit été fourni
par l’aloë de gaz oxygène et dans celui du cactus
Ces deux plantes n’avoicnt donc pas perdu la
faculté de donner du gaz oxygène au soleil.
§ CXXII1.
Je préparai deux tubes remplis d’eau et renversés
sur leur ouverture dans des vases pleins de ce llnide ;
jolis passer sous chacun d’eux une quantité égale
de matière verte', je les plaçai à l’obscurité; ils
( 122 )
n’y donnèrent point d’air; je- transportai l’un d’eux
an soleil; et un peu après la matière verte qui étoit
au fond du vase commença de donner des bulles
d’air qui continuèrent à s’en échapper , tant que
le soleil l’éclaira. Je laissai l’autre tube à l’obscurité
pendant trois jours, et la matière verte n’y donna
pas un alome d’air, mais aussitôt que je l’eus tirée
t:*ie cette obscurité pour l’exposer au soleil, elle donna
du gaz oxygène très-pur.
§ CXXIV.
J’ai tenu pendant 22 heures sous l’eau dans une
pleine obscurité et sous de grands récipiens renversés
dans l’eau sur leur ouverture des feuilles de pavots,
de laurier, de noisetier, de figuier et de minier ;
la température étoit à 1 70 ; toutes ces feuilles ne
donnèrent point d’air à l’exception des feuilles de
pavots , qui en donnèrent de pouce cube.
§ CXXY.
La crassula cotylédon m’avoit fourni au soleil
un air qui contenoit 89° de gaz oxygène, ou un
air dont 100 parties en contenoient 89 de ce gaz; j’en
mis quelques feuilles dans 49,54 centimètres cubes,
ou 2pouces| cubes d’air commun pendant 10 heures
à la température de i6°| et à l’obscurité. Il me
parut que celte plante loin de donner du nouvel air
avoil absorbé la moitié du gaz oxygène et produit 5°
d’acide carbonique.
§ CXXVI.
Je disposai six tubes pleins d’eau et. renversés sur
leur ouverture dans des vases pleins cle ce fluide;
j’introduisis dans deux de ces tubes des feuilles du
( 125 )
scmpervivum tectorum ; dans deux autres des Feuilles
de framboisier , et dans les deux derniers des feuilles
de la violette jaune; je pris ensuite un de ces tubes con-
tenant chacun une des espèces de feuilles que je viens
d’indiquer , et je les exposai au soleil ; je pris ensuite
les trois autres tubes, que je couvris d’un étui de
carton, et que je plaçai à côté des autres; ils y res-
tèrent huit heures et le soleil fut très-brillant.
Au bout de ce temps , je trouvai que les feuilles
des trois tubes exposés à l’action immédiate du sbleil
avoient donné beaucoup de gaz oxygène très-pur ;
mais les autres n’en donnèrent point du tout d’au-
cune espèce. Te ne compte pas les bulles attachées
aux parois du récipient; parce que j’ai bien prouvé
qu’elles étoient un produit de l’eau , Mem. I.
Il me semble donc bien démontré que ces trois
plantes à l’obscurité et avec la chaleur du soleil n’ont
point donné d’air.
§ CXXVIT.
Il est donc bien prouvé , d’après les expériences
d'Ingenhouz, de Senebier et les miennes, que les
feuilles des plantes donnent du gaz oxygène au
soleil, et que, suivant Senebier, elles ne donnent
point d’air à l’obscurité ; mais qu’elles absorbent
alors le gaz oxygène, comme je crois l’avoir établi
le premier.
Ces idées me suivoienl dans mes promenades et
je cherchai leurs rapports avec l’économie générale
de notre globe. ,
J’étois à Modène au mois de Novembre 1 798, dans
le jardin de l’ancien Duc; il y a un bois d’ormeaux
( 124 )
très-élevés el très-louîFus qui donnent une ômbre
fort épaisse. A deux heures après midi, je m’enfonçai
dans ce bois pendant que le soleil étoit très-vif ; j’y
restai une demi-heui'e , et j’y pris mal à la têle; je
crus qu’il étoit occasionné par l’état de l’air dans
ce lieu obscur; je pensai à essayer celui qui étoit
dans l’ombre et dans les parties les plus basses; j’en,
pris avec M.r Venturi une bouteille, et je l’essayai
sur le champ par l’eau de chaux ; mais je trouvai
que l’acide carbonique n’y étoit pas plus sensible
que dans l’air commun pris dans la plaine la plus
découverte : mon mal de têle devoit donc avoir une
autre cause.
Je pensai que l’air est continuellement agité sous
ces ormeaux comme à l’extérieur du bois , et que
l’acide carbonique qui se forme constamment aux dé-
pens du gaz oxygène de l’air est subitement porté
ailleurs.
§ CXXVIII.
Ces idées, toujours présentes à mon esprit, ne
m’abandonnoient pas quand j’élois à la campagne;
un jour du mois d’octobre vers midi, le soleilêtant
bien vif, je faisois un grand tour dans un lieu où
il y avoil un grand nombre de chênes touffus. J’ob-
servai qu’à celle heure où le soleil est à sa plus grande
hauteur , les deux tiers des feuilles, pour ne pas dire
trop , étoienl dans l’ombre , el dévoient parconsé-
quent absorber le gaz oxygène. Je vis la même chose
sur d’autres arbres , où je remarquai une ombre plus
forte , sur— tout dans ceux auxquels la vigne se cram-
ponne , parce que l’ombre des feuilles nombreuses
( 125 )
de cette plante augmente celle des autres dans ^in-
térieur de l’arbre, et même de ceux dont les feuilles
sont les plus rares : on l’observe semblablement dans
tous les arbres dont la tête est épaisse et bien feuillée ;
mais il faut dire encore cela des bois , des bosquets,
et sur-tout de ceux de pins, de sapins et de hêtres,
de même que dans la Lombardie, des cyprès nom-
breux dont l’ombrage est si fort.
On ne peut se dissimuler d’après cela , que les
feuilles des arbres qui sont dans l’ombre et qui en
donnent, sont beaucoup plus nombreuses que celles
qui sont couvertes par les rayons du soleil : et si
l’on pense aux herbes , à celles des prés , que la
lumière couvre davantage , et qui se portent moins
d’ombre parce qu’elles sont plus courtes, mais aussi
qui sont en grand nombre sous l’ombrage des arbres,
dont l’ombre s’étend fort loin le matin et le soir ; et si
l’on ajoute tout cela à l’ombre jetée par les montagnes
et les collines, on verra combien il y a de tems où
une foule de végétaux ne donnent point de gaz oxy-
gène , et où plutôt ils en absorbent.
§ C XXIX.
Un jour du mois d’octobre je me promenai deux
heures et demie avant le coucher du soleil ; j’élois
dans un lieu où il y avoit plusieurs chênes ; le soleil
éloit encore très-vif, U me fournit quelques obser-
vations sur les parties éclairées de ces arbres , et sur
celles qui éloient dans l’ombre.
Le soleil éclairoit alors obliquement les chênes;
les parties de ces arbres sur lesquelles les rayons de
cet astre lomboient étoient bien éclairées , mais à la
( 126 )
réserve de celle partie le resle étoit dans l’ombre , en
exceptant pourtant plusieurs rayons qui s’échap-
poient dans le milieu des feuilles, et cpii rompoient
ainsi l’ombre en divers endroits. Ayant néanmoins
comparé attentivement la partie éclairée avec celle
qui éloit dans l’ombre, je trouvai celle-ci quatre
fois plus grande , et il faut dire la même chose de
l’ombre des feuilles dans les commencemens de la
matinée , ou à la même hauteur du soleil.
§ CXXX.
Je refis encore toutes ces observations dans le
même mois, je les répétai toujours avec un résultat
semblable sur les noyers et les ormeaux , surles haies
épaisses; il n’y avoil donc que les arbres ayant peu
de feuilles qui fussent les mieux éclairés par le soleil.
Que faudra-t-il donc dire des forêts , des bouquets
d’arbres de hautes futaies, comme les chênes et les
pins ? Ne résulteroil - il pas de mes expériences
précédentes , qu’il ne resle point de gaz oxygène
produit, ou qu’il n’y en a que très-peu, et même qu’il
doit y avoir du gaz oxygène absorbé dans l’air?
Il me paroît donc que quoique les feuilles donnent
beaucoup de gaz oxygène , lorsqu’elles sont expo-
sées au soleil; cependant la destruction de ce gaz
seroit plus considérable à l’ombre ; celte observation ,
comme je l’ai dit , est moins frappante pour les her-
bes qui sont mieux éclairées; mais nous avons vu
encore que les herbes se trouvoient aussi souvent
dans l’ombre des corps opaques qui les environnent.
§ CXXXI.
Enfin , pour terminer celle recherche , il me
( 127 )
falloit connoître l’influence des végétaux sur l’air
commun.
Pour y parvenir je pris des flacons fermant très-
bien avec des bouchons usés à l’émeri, et contenant
5g, 64 centimètres cubes, ou 2 pouces cubes d’air
commun , dans lesquels je mis séparément diverses
plantes que je tins dans ma chambre à la tempéra-
ture de 8°.
Alo'é vera , elle produisit 2° d’acide carbonique ,
et absorba 5° de gaz oxygène; si l’acide carbonique
avoit été produit aux dépens du gaz oxygène, il y en
auroit eu une plus grande quantité , de sorte qu’on
peuL dire que cette plante a absox’bé le gaz oxygène.
Crassulci pultacea , elle a produit 2° d’acide car-
bonique et absorbé 6° de gaz oxygène.
jMsstmb ry authe nium crassifolium a produit 5°1
d’acide carbonique.
Je ne parlerai plus du gaz oxygène absorbé, parce
que je veux sur-tout comparer l’acide carbonique
produit dans l’air commun avec celui que ces plantes
pourront produire dans les flacons contenant la
même quantité de gaz hydrogène, où je les ai aussi
placées, et tenues pendant le même temps à la
même température.
Cacalia repens a produit iü d’acide carbonique.
Aloe cœrulesce/is gtaucci spinis rubris a pro-
duit 5° ~ d’acide carbonique.
Aloe mitriformis a produit 2° ~ d’acide carbo-
nique.
Cactus triangularis a produit 5° d’acide carbo-
nique et absorbé xo° de gaz oxygèue.
( 128 )
Cactus cocliinilifer a produit 5° d’acide carbo-
nique et 2° d’azote , il a absorbé 5° de gaz oxygène.
Voici “à présent les résultats que ces plantes m'ont
fourni dans les mêmes circonstances à tous égards,
avec cette seule différence , que les flacons au lieu de
conlenir de l’air commun contenoient la même quan-
tité de gaz hydrogène.
Aloe vera a produit 2° d’acide carbonique comme
dans l’air commun.
Qra ss ulqpultacea a produit 5° d’acide carbonique
et seulement 2° dans l’air commun.
JVIesembryantJiem uni crassifo lium a produit i°i
d’acide carbonique et 5° A dans l’air commun.
Ccicalia repens a produit i degré d’acide carbo-
nique et i° dans l’air commun.
Aloe cœrulescens glauca a produit 4° d’acide
carbonique ël 5°5 dans l’air commun.
Aloe 7 nitriformis a produit 6° l d’acide carbo-
nique et 2° ~ dans l’air commun.
Cactus triangularis a produit 5° d’acide carbo-
nique et la même quantité dans l’air commun ; l’air
ne s’étoit accru que d’un degré dans le gaz hydro-
gène et de j o° dans l’air commun.
Cactus cocliinilifer a produit 70 d’acide carbo-
nique et 5° dans l’air commun.
Il résulte de ces expériences que dans le mesem-
bryanthemum crassi folium , et le cacalia repens
l’acide carbonique produit dans l’air commun est
plus abondant que dans le gaz hydrogène ; mais que
dans Y aloe vera , le cœrulescens glauca l’acide
carbonique est produit en égale quantité dans tous
les
{ 129 )
les deux ; tandis que dans la cra'ssnla putlctcèâ >
Valoe mitriformis el le cactus cochilmijer l'acide
carbonique a été produit en plus grande quantité
dans le. gaz hydrogène que dans l’air commun ,
quoique toutes leurs circonstances fussent rigoureu-
sement les mêmes.
§ CXXXII.
Il résulte de toutes les expériences de ce chapitre >
i° que les plantes vertes donnent du gaz oxygène
en hiver , mais dans une quantité moindre que dans
l'été.
Que quelques plantes mises dans l’air commun
au soleil, sous des vases clos , lui conservent sa pu-
reté , tandis que d’autres l’altèrent et d’autres l’aug-
mentent ; mais dans tous les cas il y a de l’acide
carbonique produit.
5.8 Le gaz oxy gène produit au soleil dans l’air par
les plantes que l’on y renferme et par celles qui en
donnent dans ce cas , est quelquefois égal en voltune
à l’air qu’elles produisent sous l'eau; il a été aussi
quelquefois moindre ; mais en général la quantité de
l’air produit sous l'eau n’est pas si supérieure à celle
de l’air qu’elles produisent dans l’air commun qu’on
l’a voit cru.
4. ° Les feuilles sèches ne donnent point d’air sous
l’eau au soleil, quand l’eau a été privée d’air avant
l’expérience.
5. ° Des feuilles dans l’eau privée d’air en donnent
un peu , el il est meilleur que l’air commun.
6. " Les plantes donnent de l’azote sous l’eau.
7 . ° Les plantes au soled donnent le gaz oxygène
Tome 3« I
( i3o )
. ’ N
sous 1 eau et n’eu donnent point à l’obscurité, mai»
elles absorbent le gaz oxygène dans l’air et fournis-
sent quelquefois l’acide carbonique.
8.° 11 paroîtroit par l’observation et le l’aisonne-
ment que les plantes doivent plutôt gâter l’air que
le purifier.
CHAPITRE IYT.
Del influence des eaux chargées d'acide carbonique
pour faire produire du gaz oxygène aux plantes
que Von y tient plongées.
§ CXXXIII.
J’ai fait mes expériences précédentes daus l’air ,
dans l’eau , à la lumière et à l’obscurité ; il me reste
à en faire encore avec les eaux chargées d'acide car-
bonique. Senebier avoil découvert qu’elles étoient
pour les plantes que l’on y tient plongées au soleil une
source, abondante de gaz oxygène. J’ai voulu aussi
m’occuper comme lui de ces expériences , et je les
ai faites par les moyens que j’ai employés précédem-
ment ; cependant comme ils étoient pluS exacts que
ceux de Senebier , et que ceux que l’on a pu. avoir
jusqu’à présent, ils m’ont fourni peut-être aussi des
résultats plus exacts et plus précis.
§ CXXXIV.
Je voulus d’abord m’assurer que les plantes don-
noient plus d'air au soleil sous les eaux chargées
d’acide carbonique que sous l’eau commune, et que
l’air produit par elles , dans le premier cas , éloit
alors meilleur que dans le second.
( i5i )
Je luis sous deux récipiens égaux, mais dont l'eau
qui remplissoit l’un d’eux éloit chargée d’acide car-
bonique, tandis que l’autre éloit seulement rempli avec
l’eau de mon puits, des morceaux égaux du cactus
cochinilifer ; ils restèrent ainsi pendant sept heures
exposés au soleil : c’étoil au mois d’avril.
L’air fourni par le cactus dans l’eau acidulée fut
le double meilleur que l’air atmosphérique 5 il con-
tenoit 6° d’acide carbonique.
L’air fourni par le cactus dans Y eau de mon puit
ne fournit que la sixième partie de l’air donné par
le cactus dans l’eau acidulée , et il ne fut qu’un peu
meilleur que l’air commun.
11 résulte donc de cette expérience, que ce cactus
exposé au soleil dans l’eau acidulée par l’acide car-
bonique , donne plus d’air que dans l’eau commune,
et que l’air qu’il a fourni est beaucoup meilleur.
§ cxxxv.
Je suivis, dès ce moment , les phénomènes pro-
duits par l’acide carbonique dissous dans l’eau en
exposant les plantes au soleil.
Dans ce but je pris trois récipiens égaux, j’en
remplis un avec l’eau commune de mon puits , qui
contient un peu d’acide carbonique, comme je l’ai
dit, Mémoire i.er; je remplis le second avec cette
-eau privée de son acide carbonique par l’eau de
chaux ; je remplis enfin le iroisiéme avec une eau
chargée d’une forte quantité d’acide carbonique 5
j’inl.oduisis sous chacun de ces récipiens quelques
lames du cactus cochinilifer , et j’exposai ces trois
récipiens au soleil pour observer les phénomène»
qui s’offrir oient à moi.
( )
Après un petit. nombre de minutes, la première
plante qui commença à lâcher des bulles fut celle
qui étoil dans l’eau acidulée ; ces bulles, qui me pa-
rurent d’abord fort peLiles, s’accrurent toujours en
diamètre avec une forme arrondie ; mais je ne
voyois point encore ces jets fins formés par une suite
de petites bulles dont j’ai déjà parlé ; après sept ou
huit minutes , je vis s’échapper de deux points fixes
de la lame du cactus des petites bulles quisorloient
et se succédoienl à petits intervalles ; je fis la même
observation dans les deux autres récipiens. Outre
cela , je remarquai dans l’eau du puits et dans celte
eau privée de son acide carbonique de très-petites
bulles d’abord attachées à la plante , et qui s'éle-
voienl eijsuite à- la partie supérieure du récipient;
de manière que la petite quantité d’air produite dans
l’eau du puits et dans celle qui étoit privée d’acide
carbonique , me parut dans ces deux derniers à-peu-
près égale; mais la quantité d’air produite sous l’eau
acidulée fut au moins triple, si elle ne fut pas qua ■
druple de celle de ces deux-ci.
Après cela les bulles s’échappèrent avec plus de
fréquence dans les trois récipiens, mais elles ne for-
mèrent pas de jets continus.
Je remarquai quelques différences entre ces lames
du cactus ; celles qui étaient dans l’eau acidulée
étoient couvertes de très-petites bulles, dont le nom-
bre dimiuuoit ; elles étoient en nombre bien plus
petit sous l’eau du puits , et ce nombre étoit infini-
ment petit dans l’eau privée de l’acide càrbonique;
i la quantité du produit de l’air dans ces trois récipiens
)
»•
( 253 )
cvoissoil avec lenteur par l’augmentation des petites
bulles qui s’échappoient des lames du cactus , et qui
sortoieut toujours de quelques points fixes de la lame.
Ceci me fit croire que les lames placées dans l’eau
acidulée avoient deux sources de l’air qu’elles ren-
doient, l’une intérieure et l'autre extérieure.
Il y avoit trois quarts d’heure que ces tubes éloient
au soleil ; l’air produit par les lames du cactus qui
étaient dans l’eau du puits me parut égal en volume
à l’air produit par les lames de ce cactus mises dans
l’eau privée de son acide carbonique; mais l’air pro-
duit par ces lames dans l’eau acidulée étoit. au moins
quintuple, et les bulles paroissoieut toujours plus
abondantes sur la surface des fragmens de cette plante;
ou voyoit de Irès-pelites bulles et très-rares s’échap-
per de quelques points fixes hors des lames mises sous
les deux autres récipiens , surtout sous celui qui étoit
rempli par l’eau privée d'acide carbonique.
J’observai encore que les bulles sont aussi nom-
breuses sur la surface des lames du cactus que sur
les parties coupées.
Tl y avoit deux heures que ces récipiens éloient
au soleil ,-la production de l’air resta la même, elle
ne s’accéléra point; après la première demi-heure
elle ne varia pas.
Au bout de trois heures il me sembla que la pro-
duction de l’air diminua dans les trois récipiens,
mais les phénomènes furent toujours les mêmes; enfin
le soleil me manqua, et l’air produit dans l’eau aci-
dulée fut au moins octuple de l’air produit sous les
deux autres récipiens.»
v. ( 134 )
Au fond du vase, où éloit l'eau privée de son
acide carbonique, je trouvai un précipité de carbo-
nate calcaire qui pesoit 434,5 1 millimètres, ou jj
grains et ~ , et qui prouvoil la présence de l’acide car-
bonique dans l'eau, ou sa production par les frag-
mens du cactus.
§ CXXXVI.
Pour suivre la méthode que je me suis prescrite ,
je mis dans deux tubes, contenant chacun 49,54
centimètres cubes, ou 2 pouces i cubes d’air com-
mun , un morceau semblable du cactus cochinilifer ;
un de ces tubes plongeoit dans l’eau chargée d’acide
carbonique et l’autre dans l’eau de mon puits; je les
exposai tous deux pendant trois heures au soleil.
L’air du tube plongé dans l’eau dit puits fut aug-
menté par le cactus de 4° de gaz oxygène.
L’air du tube plongé dans l’eau acidulée fut aug-
menté de 70 de gaz oxygène, c’est-à-dire qu’il four-
nit 5° de plus de gaz oxygène.
5 CXXX5 II.
Je répétai celte expérience en diminuant la quan-
tité de l’air commun : je mis les morceaux du cactus
dans 29,71 centimètres cubes, ou 1 pouce ~ cube
d’air commun , en laissant subsister tou les les autres
conditions de l’expérience précédente avec l’eau
chargée d’acide carbonique : ce tube resta exposé au
soleil pendant huit heures; mais au lieu de varier
l’eau je mis un morceau de ce cactus dans un tube
parfaitement rempli d’eau.
Dans l’air du premier tube l’air commun fut amé-
lioré de deux degrés.
( i35 )
Dans le tube plein d'eau acidulée le cactus fournit
9,90 centimètres cubes, 09 un demi-pouce cube
d’air qui contenoit 70 d’acide carbonique.
Je m'étonnai d’abord de celte production d’acide
carbonique dans l’eau , puisqu’il devoil s’absorber
dans l’eau de l’expérience ; je trouvai pourtant que
lngeiiliouz , dans ses expériences sur les végétaux ,
'J’. Il, pag. 27] , avoit vu un fait analogue dans
l’eau saturée cfacide carbonique, quoique le cas fût
different. Pendant , dit-il , que je mis une plante
dans celte eau , elle commença à se couvrir de bulles
d’air qui grossirent au soleil , j’cn obtins beaucoup
d’air , qui n’étoil que de l’air fixe.
§ cxxxvni.
En considérant les expériences que je viens de
rapporter, et toutes celles que j’ai faites sur les
plantes plongées sous l’eau , et qui y donnent un
air beaucoup meilleur que l’air commun, j’ai pour-
tant vu qu’elles ne donnoicnt dans l’air commun
où on les plaçoit, qu’un air à-peu-près semblable à
lui, et qu’elles ne le rendoient qu’un peu plus pur j
ce qui arrive également dans lés flacons bien fermés ,
et sous les vases fermés avec l’eàu et communiquant
avec elle. Je dois pourtant faire valoir davantage le
second cas que le premier , parce qu’on peut dire
que dans les (laçons bien fermés l’air 11e s’échappe
pas aussi facilement des plantes.
Dans tous les cas où les plantes furent exposées
dans l’air commun, on ne sauroil. objecter que la
chaleur fût trop vive, quoique j’aie observé que sous
les récipiens elle fut de 6° plus haute qu’à l’air libre,
\
V
( i36 )
puisque dans mes expériences , elle ne s'est pas élevée
au-dessus, de i8u, et puisque les plantes dont je me
suis servi supportent une chaleur bien plus grande
sans eu souffrir; d’aillcurs je ne leur ai pas vu trou-
bler l’eau où elles étoient , et elles ne lui onL pas
communiqué une mauvaise odeur.
Ingenhouz etSenebier ont bien trouvé l’acide car-
bonique mêlé avec l’air produit par les plantes plon-
gées sous l’eau chargée d’acide carbonique ; mais
c’est moi qui l'ai découvert dans l’air commun où on
les place.
§ CXXX1X.
D’après les idées de Senebier , l'acide carbonique
passe de la terre dans les plantes par les racines; il
arrive par les vaisseaux des plantes dans les feuilles,
où il se décompose par la lumière et y donne le gaz
oxygène.
J’ai d’abord pensé à chercher s’il y auroit quel-
qu’iudice de cet acide carbonique dans les plantes.
Je pris pour cela des feuilles fraîches du cclcLus co-
chinilifer qui donne beaucoup de gaz oxygène, je
les exprimai dans l’eau de chaux , il en sortit une
humeur visqueuse et transparente , qui se déposa au
fond de l’eau sans troubler l’eau de chaux; le lende-
main j’y versai de l’acide nitrique, qui n’y causa
aucune effervescence ; cependant une eau qui conte-
noit une petite quantité d’acide carbonique troubla
l’eau de chaux et forma un petit dépôt qui donna
l’acide carbonique lorsque j’y versai l’acide nitrique,
i J
§ CXL.
Je fis une autre expérience, j’employai diverses
eaux pour comparer leurs ellèls.
( 3 37 )
Je pris trois tubes égaux et semblables ; j’en rem-
plis un d’eau commune, le second avec cette eau
privée de son acide carbonique par l’eau de chaux,
et le troisième avec l'eau de chaux , je fis passer sous
chacun d'eux des quantités égales du cactus cocJii-
nilifer ; je fis encore la même suite d’expériences
avec L’a/oe cærulescens spinis rubris.
Le cactus cochinilifer fut le premier qui com-
mença de donner de l’air dans les coupures et sur
sa surface supérieure; il y eut de l’air produit dans
les trois tubes , et dans le même temps la bulle ovale,-
dans la partie supérieure du Lube, eut les mêmes
diamètres dans les trois tubes.
Je remarquai les mêmes phénomènes dans Vciloe >
mais la bulle qu’il produisit ne fut que — de celle
du cactus.
I
Au bout d’une heure d’exposition au soleil, les
feuilles continuèrent à donner de l’air dans les mêmes
proportions pour les deux plantes ; mais au bout de
quatre heures l’air produit s’augmenta dans les six
tubes, et il y eut la moitié moins d’air dans le lube
où éloit le cactus que dans celui de Yaloe.
J’essayai ccL air produit, que je trouvai le même
pour sa nature dans les six tubes que celui de ces
plantes, il contenoit la même quantité de gaz oxy-
gène dans l’eau fournie par les plantes renfermées
dans l’eau de chaux, que par celles qui étoient ren-
fermées dans l’eau commune; de sorte que l’on ne
voit pas que l’acide carbonique y ait influé.
§ CXU. ' K
Je tins ensuite, pendant quelque temps , des mov-
( i38 )
ceaux égaux du cactus cochinilifer au soleil, dans
des volumes égaux d'eau fort chargée d’acide carbo-
nique , c’est-à-dire , avec une eau qui conlenoit un
volume d’acide carbonique égal au volume de l’eau
elle-même; avec une eau qui en contenoit peu, et
avec l’eau pure.
D’abord il se forma dans les trois tubes qui ren-
fermoienl ces eaux avec le morceau de cactus , une
bulle qui fut égale dans tous les trois, je ne remàr-*
quai aucune différence.
Après quatre heures d’exposition à un soleil vrai-
ment voilé par les nuages, je vis que ce cactus four-
nissoit peu d’air , et je passai à son examen.
Voici le résultât de l’expérience; dans le tube où
étoit >Veau pur e , comme dans celui où étoit l’eau
peu acidulée. Il se forma des bulles égales , chacune
d’elle avoit 9,02 millimètres, ou un tiers de pouce
de diamètre , mais dans le tube où étoit l’eau forte-
ment acidulée , la bulle n’eut que 6,77 millimètres,
ou un quart de pouce de diamètre.
Je recueillis ensuite l’air des deux tubes qui con-
tenoit les eaux discrètement acidulées , et je l’es-
sayai ; je trouvai qu’il contenoit 74° de gaz oxygène ,
ai” de gaz acide carbonique, et 110 de gaz azote;
cet air fut meilleur que celui des eaux fortement
acidulées.
Dans le tube qui contenoit Veau pure , l'air que
j’y trouvai contenoit une moindre quantité d’acide
carbonique.
11 paroîtroit donc , par ces expériences , que l'eau
trop fortement chargée d’acide carbonique nuit à
( l59 )
la production de l’air; que l’acide carbonique ne
sert point à l’augmenlation de la production de l’air ,
puis que le volume d’air produit dans l’eau commune
et dans les eaux discrètement acidulées furent égaux
et plus considérables que ceux des eaux fortement
acidulées.
Je voulus ensuite exprimer sous l’eau les morceaux
de l’aloë qui avoient été mis en expérience; mais j’y
trouvai si peu d’air que je ne pus en faire l’essai : je
ne fus pas plus heureux en me servant de la laitue
pour en obtenir l’air qu’elle renfermait.
En comparant la quantité d’acide carbonique
fourni par la plante qui étoit dans les eaux acidulées,
avec celui qui fut rendu par la plante qui étoit dans
l’eau pure , j’en retirai un rapport plus exact; parce
que les tubes étant plus grands , les volumes de l’eau
qu’ils renfermoicnt étoient plus considérables. Je
trouvai 5° d’acide carbonique dans l’air produit par
les feuilles qui étoient dans l’eau pure, etn.°dans
l’air produit par la plante mise dans l’eau acidulée.
§ CXLtI.
J’exposai à un très-beau soleil , dans deux tubes
pleins de l’eau de mon puits, des fragmens de feuilles
de Cciloe cœrule.scens glaucd spinis rubris; je mis
de meme de ces feuilles coupées sous deux autres
remplis avec la même eau, privée de son acide car^
bonique par l’eau de chaux ; je m’assurai qu’elle en
était entièrement privée par un essai particulier, en
y versant au bout de quelque temps de l’eau de
chaux nouvelle, qui ne me parut point la troubler
de nouveau pendant une heure et demie ; ces tubes
( i4o ) „
furent alors exposés au soleil, el il ne parut j>as qu'il
y eût aucune différence dans la production de l'air.
Alors je remplis trois tubes avec l’eau de chaux ,
où je plaçai des fragmens du cactus cochinilifer
parce que je n’a vois plus d 'a/oc.
En observant ensuite Yalaë je remarquai de grosses
bulles qui se détachoient de la plante et des filets d’air
sortant de la section du cactus comme de l’épiderme,
qui me semblèrent clairement s’échapper de l’in-
térieur de la plante; au moins en observant avec
une loupe cet air qui jaillissoit , je vis que c’éloit une
fde de petites bulles1 sphériques, presqu’en contact
les unes avec les autres et semblables aux globules
du sang que l’on voit dans les grenouilles , lorsque
le vaisseau où ils sont n’en peut: contenir qu’un seul
dans sa largeur. J’eus pendant trois-quarts d'heure
quatre ou cinq de ces filets sous les yeux, et je les ai
vus constamment jaillir depuis la plante jusqu es au
sommet du tube.
Outre ces filets d’air constants , je remarquai dans
d’autres parties de la feuille qu’il s’échappoil d’un
point déterminé une petite bulle plus grande que les
autres qui formoient les filets, et qui se suivoieut
toujours sans interruption jusqu’à ce que leur série
fût interrompue par celte bulle plus grande que
les précédentes.
Au bout de trois heures d’exposition au soleil ,
l’air clans les quatre tubes me parut offrir un volume
égal , soit qu’ils eussent été remplis avec l’eau aci-
dulée par l’acide carbonique, soit qu’ils eussent été
remplis par l’eau privée de cet acide.
( i4i )
En examinant l’air, produit dans Veau sans acide
carbonique , j’y trouvai 5° de cel acide , et la plus
grande partie du reste étoit du gaz oxygène. J’exa-
ruinai dé même l'air produit dans Veau du puits , j’y
trouvai 2°^ d’acide carbonique; la plus grande par-
tie du reste étoit du gaz oxygène, mais j’y trouvai
8° de moins d’air.
Dans les tubes où étoit Veau de chaux , il n’y eut
que quelques bulles d’air.
il résulte donc de ces expériences , que ce cactus
donne autant d’air dans l’eau privée d’acide carbo-
nique que dans celle qui n’en avoil point ; mais cela
n’est pas général , comme je le ferai voir bientôt.
On y voit encore que Value et le cactus ont donné
sur tou L l'air qu’ils produisirent dans la première et
* #
la seconde heure ; on ÿ remarque que cet air sort
de l’intérieur , et qu’il se forme ou se rend sensible à
l’extérieur ; enfin cette émission se fait par jets liés,
et par bulles interrompues.
§ CXLIII.
Je mis en expérience deux tiges de lavande Iciven-
dula spica dans deux flacons d’air commun ; de ma-
nière que l’extrémité de la tige de la lavande de l’un
d’eux plongeât dans l’eau pure , et celle de l’autre
dans l’eau chargée d’acide carbonique ; je les tins
ainsi pendant douze heures dans ma chambre, et je
fis ensuite l’essai de l’air.
La lavande qui avoit le pied dans Veau pure dé-
truisit 7 0 de gaz oxygène; la lavande qui avoit le
pied dans l’eau chargée d’acide carbojiique détruisit
90 d’acide carbonique, muis il faut dire que l’air
V
( l42 )
contenu dans ce second flacon avoit un volume
double de celui du premier.
§ CXLIV.
Je fis la même expérience, de la même manière,
au soleil , en observant que la partie de la lige de la
lavande qui plongeoit dans l’eau d’une bouteille à
col étroit fût sans feuilles 5 elles y restèrent pendant
une journée entière : c’éLoit au mois de Mars.
La plante dont le pied plongeoit dans Veau com ■-
mune laissa l’air du flacon comme il étoit , sans au-
cune altération.
La plante dont le pied plongeoit dans Veau char-
gée d’acide carbonique , et qui avoit toujours été
dans les mêmes circonstances que la précédente ,
rendit l’air commun le double meilleur ou conte-
nant le double de gaz oxygène.
Je répétai cette curieuse expérience de la même
manière , et j’eus le même résultat ; le gaz oxygène
du flacon où étoit la lavande , dont le pied plongeoit
dans Veau chargée d’acide carbonique , s’éloit aug-
menté, et l'air du flacon où étoit la lavande, dont
le pied plongeoit dans l’eau commune , resta préci-
sément ce qu’il étoit.
§ CXLY.
J’exposai pendant toute une nuit un rameau de
lavande dans un tube plein d’eau chargée d’acide
carbonique ; je plaçai un autre rameau dans un tube
rempli d’eau commune ; ils restèrent tous les deux
au même lieu pendant le même temps à l’obscurité.
Le lendemain matin je ne trouvai pas un atome
d’air dans ces deux tubes.
( ï43 )
Te les exposai alors tous les deux au soleil , et aussi-
tôt qu'ils en eurent reçu les rayons, ces deux ra-
meaux de lavande donnèrent de l’air avec abondance.
Cette expérience démontre l’indispensable néces-
sité de la lumièi’e pour la production de l’air"que les
plantes donnent , et la preuve sans réplique qu’elles
n’en donnent point ,à l’obscurité.
§ CXLVI.
Après cela il me vint dans l’esprit de faire une
autre expérience avec ces rameaux de lavande dont
je viens de parler.
Je lavai bien le rameau qui m’avoit donné l’air à
la lumière du soleil, après avoir été pendant une
nuit et un jour dans l’eau chargée d’acide carbonique;
je l’exprimai alors dans l’eau de chaux , pour voir
si elle ne la troubleroit point , et je n’ai rien aperçu
qui pût y faire remarquer le moindre changement.
Je laissai ensuite reposer cette eau, il ne s’y forma
aucun dépôt; j’y versai quelques gouttes d’acide ni-
trique, il n’y eut aucune effervescence ; ce qui
prouve qu’il n’y eut point de carbonate calcaire pré-
cipité, et qu’il n’étoit point sorti d’acide carbonique
hors de la plante ; au contraire , je versai de l’eau de
chaux dans l’eau chargée d’acide carbonique dont je
m’étois servi , elle se troubla ; il se forma du carbo-
nate calcaire, comme l’acide nitreux le prouva.
Cette expérience fait voir que la lavande, pendant
tout le temps de son immersion dans l’eau chargée
d’acide carbonique , n’a point pris de cet acide, et
ne l’a pas fait passer au-dedans d’elle ; de sorte que
le gaz oxygène qu’elle a fourni à la lumière ne pro-
'( a 44 )
/
vient pas de la décomposition de l’acide carbonique
circulant dans la plante; mais de celui qui est incor-
poré dans l’eau , et que le contact de la plante dé-
compose.
§ CXLVlt.
Je répétai rigoureusement la même expérience
avec le cactus cochinilifer, et j’eus rigoureusement
encore les mêmes résultats à tous égards.
Ce qui confirme donc que l’acide carbonique se
décompose à la surface de la plante , et non pas in-
térieurement , et que les feuilles différentes ont par-
conséquent la propriété d’en décomposer une quan-
tité plus ou moins grande.
§ CXLVIII.
Je tins pendant une heure sous des tubes, dont
chacun étoit plein de différentes eaux, la plante co-
tyledon orbiculare et l’aloe disticha margaritifera ;
je nais des fragmens de chacune de ces plantes sépa-
rément dans un tube plein d’eau de chaux , dans
d’autres pleins d’eau privée de son acide carbonique
par cette eau de chaux, dans d’autres pleins de l’eau
du puits.
L ’aloe a formé dans les trois tubes pleins d'eau
de chaux une bulle d’air qui étoit égale à chacune
d’elles; il y eut diverses places d’où l’air sorloit con-
tinuellement.
Le cotylédon orbiculare forma dans l’eau de
chaux la bulle la plus petite ; mais elles furent égales
dans l’eau privée de son acide carbonique et dans
Veau du puits. Il ne s’est point échappé de la
plante cette série de bulles , ou ces jets d’air observés
dans
( 1 45 )
^ans Valoe, loutes les bulles étoîent adhérentes à la
surface de la feuille, cl elles ne s’éle voient à la cime
tlu tube que lorsqu’elles éloient 'parvenues à une cei>-
taiue grosseur.
tes plantes, au bout de trois heures, ne sem^
bloient presque plus donner d’air.
Le cotylédon orbicubare avoil donné dans Veau
<le puits 4,9 5 cenlimèti'es cubes, ou un quart de
pouce cube d air, dans les deux autres, il n’en avoit
donne que a, 5o centimètres cubes, ou un sixième de
pouce.
IValoe margarilifera disticha avoit fourni un
tjuarl de pouce cube dans les trois eaux , il contenoit
dans chacune 7a0 de gaz oxygène , et il y en eut 4*
de plus dans Veau commune.
§ CXLIX.
J exprimai l’air de la crassula cotylédon qui avoit
çtéau soleil pendant quatre heures , je l’essayai, et
je le trouvai le double meilleur que l’air commun;
cependant la veille j’en avois exprimé l’air après que
celle plante fut restée dans ma chambre , et j’en
trouvai l’air semblable à l’air commun.
Il faut donc reconnoîlre que la lumière agit dans
1 intérieur de la plante ou de la feuille, et qu’elle y
concourt a la formation du gaz oxygène.
Celle crassule mise sous l'eau commune pendant
quatre heures, m’a voit fourni un air qui contenoit
1 , < acide carbonique , et 69° de gaz oxygène : c’est
de toutes les plantes que j’ai employées dans mes
expériences , celle qui m’a fourni le plus de gaz
oxygéné et le moins d’acide carbonique.
Tome 5.
K
( i46 )
5 CL-
Je soumis aux expériences suivantes le semper -
vivum tectorum pendant huit heures.
Je plaçai à l'ombre , dans ma chambre, sous un
tube contenant 4.9,0 i centimètres cubes, ou deux
pouces et è cubes d’air et à sec des feuilles de cette
plante , elles y absorbèrent 8° \ de gaz oxygène et
y produisirent ’j0 \ d’acide carbonique.
Je plaçai au soleil , dans un tube disposé comme
le précédent et pendant le môme temps, des feuilles
de la même plante , il y eut 4° de gaz oxygène pro-
duit et 20 d’acide carbonique.
Je tins de même les feuilles de celte plante au soleil
dans un tube plein d'eau du puits , et l’air qu’elles
y produisirent fut de 4° meilleur que l’air commun.
Je mis encore de môme ces feuilles dans deux tubes
pleins d'eau privée de son acide carbonique , et
(j’obtins une quantité d’air égale à la précédente et
d’une pureté aussi grande.
Enfin je plaçai de même des feuilles , pendant le
même temps, dans beau fort chargée d’acide
carbonique et renfermées dans un flacon fermant
bien , que j’exposai au soleil pendant le même temps.
J’essayai cet air , j’y trouvai 69, 64 centimètres cubes,
ou 2 pouoes cubes d’air produit, il contenoit 4g 9
d’acide carbonique, 4g° d’azote, et 20 de gaz oxygène.
§ CLI.
En réfléchissant sur la troisième expérience du
paragraphe précédent , il sembleroit que le gaz trouve
sur l’eau, qui étoil d’environ 19,81 centimètres cubes,
ou un pouce cube , contenoit 6o° de gaz oxygène ,
( i 4? )
on le triple de celui qui est dans Pair Commun ; mais
l’air exprimé de la plante éloil précisément comme
l’air commun ; de sorte que pour avoir un air sem-
blable à l’air commun, il auroit fallu qu’il y eût dans
celui-ci c io0 d’azote, et par conséquent 5oo° ou 5g, 45
centimètres cubes, ou 5 pouces cubes, au lieu de 19,81
centimètres cubes, ou d’un seul pouce que j’ai eu ;
cependant. , par l’expression , la plante n’a fourni
que jj de cet air; d’où il résulte que cet air ne pouvoit
pas être venu entièrement de l’intérieur de la plante.
Cet air 11e pouvoit pas venir de l’acide carbonique,
puisqu’il n’y en avoil point dans l’eau privée de son
acide carbonique par l’eau de chaux. Faudra-t-il
donc recourir à la décomposition de l’eau ?
$ CLII.
J’avois fait sur le trèfle une expérience semblable
à celle du § CL, que j’avois exposé au soleil pen-
dant sept heures dans un flacon bien fermé et rempli
d’une eau fort chargée d’acide carbonique ; je trou-
vai dans l’air que je recueillis 66° d’acide car bonique,
üq0 d’azole et 5D de gaz oxygène.
§ CUIT.
Ces deux dernières expériences me rappelèrent
que les eaux acidulées par l’acide carbonique per-*
dent ce gaz , quand elles sont en contact avec l’air
commun dans les vaisseaux clos , Mémoire 1. Je
pensai donc que cet acide carbonique étoit sorti de
l’eau chargée d’acide carbonique ; parçonséquent
l’eau acidulée où a voient été le sempervivimi et le
trèfle avoit fourni cet acide carbonique, quoiqu’elle
fut encore acidulée après celle évacuation de cet acide.
1
( i48 )
Je remplis alors parfaitement un flacon avec cette
eau fortement chargée d'acide carbonique ; j’enrem-
pl;s un autre où je laissai un voile d’air commun sur
la surface de 1 eau; je les exposai au soleil , renversés
sur leurs bouchons , dans un vase où leurs cols plon-
geoient dans l eau , et je les abandonnai pendant
quelques heures.
Le résultat de cette expérience fut , que dans le
flacon parfaitement plein, il n’y eut point de gaz
produit; mais dans l’autre , sur l’eau duquel j’avois
laissé comme un voile d’air , il se forma lentement
une addition de gaz qui s’accroissoit lentement , et
au bout de deux heures il y en eut 09,65 centimètres
cubes , ou deux pouces cubes.
J’essayai cet air, et j’y trouvai 180 d’acide carbo-
nique , 12° de ga£ oxygène et le reste d’azote; ce
gaz oxygène et cet azote préexistoient à l’expérience
dans le voile d’air commun que j’avois laissé.
Voilà donc précisément ce qui arrive lorsqu’on
met une plante dans un flacon plein d’eau fort char-
gée d’acide carbonique et bien fermé. La plante au
soleil commence à donner du gaz oxygène, de l’azote
et un peu d’acide carbonique; il se forme ainsi un
voile d’air sur l’eau qui favorise l’émission de l’air;
cet air s’accroît ensuite , et forme celle quantité d’air
que j’ai observée dans ces deux expériences, et qui se
trouve pour la plus grande partie , comme on l’a vu,
être de l’acide carbonique.
Cet acide carbonique ne provient donc pas de la
plante , mais de l’eau acidulée par cet acide.
( l49 )
§ CLIV.
Je plaçai dans des tubes pleins d’eau chargée d’a-
ride carbonique des feuilles de figuier; au bout de
deux heures d’un soleil bien beau, auquel elles fu-
rent exposées dans celte eau , elles donnèrent 19,81
centimètres cubes, ou un pouce cube d’air, qui con-
tenoit o° I d'acide carbonique, 120 d’azote et 8i° i de
gaz oxygène.
J exprimai ces feuilles sous Peau de chaux , après
les avoir lavées; mais l’eau de chaux ne se troubla
point ; cependant, comme l’eau avoit pris une teinte
verte que le suc des feuilles lui avoit donnée, je la
laissai se reposer, et l’acide nitrique que j’y versai
ne laissa pas apercevoir un atome de carbonate cal-
caiie; par conséquent la feuille bien lavée avant d’en
exprimer le suc dans l’eau de chaux, ne contenoit
ni intérieurement ni extérieurement de l’acide car-
bonique.
§ CLV.
J’avois mis pendant le même temps des feuilles de
figuier dans l’air commun, où elles restèrent aussi
deux heures au même soleil.
Cet air y resta parfaitement intact, il 11e souffrit
aucune espèce d’altération.
§ CLV T.
J exposai au soleil des feuilles de figuier dans l’eau
privée de son acide carbonique par l’eau de chaux,
j’en mis de même dans leau de puits; les unes et les
autres restèrent au soleil pendant huit heures.
Les teuilles de figuier qui éloient dans Pëau du
puits donnèrent 9,90 centimètres cubes , ou un demi
( i3o )
pouce cube d’air, c’est-à-dire dans deux heures la
moitié des précédentes dont j’ai parlé § CLIV.
Les feuilles qui éloient dans l'eau privée d'acicle
carbonique n’en ont donné que très-peu.
Ou voit ici comment le défaut d'acide carbonique
dans l’eau influe sur la production de l’acide car-’
bonique , et surtout sur celle du gaz oxygène ;
peut-être que si les feuilles avoicnt été totalement
privées d’acide carbonique dans leur intérieur , elles
n’aaroicut point donné d’air dans l’eau privée d’a-
cide carbonique; cependant le gaz oxygène s’est
trouvé d'une égale pureté dans l’eau fort chargée
d’acide carbonique, et dans l’eau du puits qui en
conlenoit peu relativement à celle-là.
§ CLVII.
Les comparaisons seules peuvent instruire, pour
juger les causes par les effets et les effets par les causes;
je voulus employer cette méthode dans cette re-
cherche.
J'exposai au soleil pendant six heures quatre fla-
cons bien fermés ; chacun d'eux conlenoit huit
feuilles de framboisier ; le premier éloil rempli avec
line eau qui contenoit au moins son volume d’acide
carbonique ; le second , avec une eau qui n'en con-
tenoil que la moitié; le troisième, avec une eau qui
en conlenoit Un peu au-delà de celui qui éloil
dans l’eau de mon puits ; le quatrième, avec l’eau de
puits, Au bout de ces six heures je fis l’essai de Pair
• ■
, Je mesurai cet air dans un -eudiomètre qui con-
•tenpil .^9,45 centimètres cubes, ou 5 pouces cubes,
produit
( i5i )
d’eau, divisés en cenLièmes, et je trouvai que le
flacon qui éloit rempli avec L’eau fortement chargée
d'acide carbonique , avoit produit les ~ de cette
mesure d’air , et que cet air conlenoit 68° de gaz
oxygène, 2a0 d’acide carbonique et io° d’azote.
Dans le flacon dont l'eau étoit chargée de la moi-
tié de l'acide carbonique contenu dans le précédent,
je trouvai d’air produit , qui conlenoit 85° de gaz
oxygène, 5° d’acide carbonique et io° d'azote.
Dans le flacon où étoit l’eau un peu plus chargée
d'acide carbonique que l'eau de puits , il y eut -~
d’air produit; il conlenoit. 82° de gaz oxygène, 5°
d’acide carbonique et 1 5° d’azote.
Dans le flacon où étoit l'eau de puits , il y eut -~
d’air produit , qui contenoit 46° de gaz oxygène ,
2° d'acide carbonique et 220 d’azote.
Il résulte de ces expériences que dans l'eau qui ne
conlenoit d’acide carbonique que la moitié de celle
qui en contenoit son volume , il y a eu 4o° d’air de
plus produit par les feuilles du framboisier , que dans
celle eau la plus acidulée et qui conlenoit le double
d’acide carbonique; mais dans celle dernière eau
les feuilles ont donné 02° d’air de plus; et. le secoud
flacon , qui ne contenoit que la moitié de l’acide car-
bonique du premier , a donné 720 d'air de plus que
les feuilles de celui où éloit l’eau de puits.
Quant à L acide carbonique il y en a eu 2 2° de
plus dans l’eau fortement chargée de cet acide, 5°
dans celle qui l’étoit à moitié et 5° dans celle qui l’é-
toil le moins.
Dans l’eau fortement chargée d'acide carbon i -
( i5a )
ü y a en 68° de gaz oxygène, 85° dans celle
cjui l etoil à moitié, 82° dans celle qui l’éloit le moins
et -16° dans l’eau commune.
11 3r a eu io° d azote dans Veau fort chargée d'a-
cide carbonique , i5° dans celle qui 1 étoil le moins
et 220 dans l'eau commune.
îi paroit de là , que lorsque l’eau est la plus char-
gée d’acide carbonique elle donne moins d’air que
dans l’eau qui l’est médiocrement , cl qu’il y a moins,
de gaz oxygène: que l’eau médiocrement acidulée
donneplusd’acide carbonique que l’eau qui en estplus
fortement chargée; mais ensuite l’acide carbonique
diminue dans l’air rendu par la plante avec la dimi-
nution de la quantité de cet acide dans l’eau ; enfin la
quantité de 1 air fourni par l’eau la plus chargée
d acide carbonique est bien plus considérable pour-
tant que celui qui est fourni par l’eau de puits.
Il résulte donc de celle expérience , comme des
précédentes , que les feuilles dans l’eau qui contient
un volume d’acide carbonique égal au sien donnent
moins d’air que celles qui sont dans l’eau qui n’en
contient que la moitié de son volume, et que la quan-
tité d’acide carbonique produite dans la première
eau est plus grande que dans la seconde, mais que la
première donne beaucoup plus d’air que l’eau com-
mune qui contient le moins d’acide carbonique.
§ CLVIL
Je répétai cette expérience sur la violette jaune
et le se/npervivum tectorum , en me servant toujours
de flacons bien fermés.
Je mis huit feuilles de violette dans un flacon ,
que je remplis avec une eau chargée d’un volume
( i55 )
d'acide carbonique, au moins plus grand que le
sien; j’en mis le même nombre dans un autre flacon
rempli avec une eau qui ne contenoit que la moitié
de cel acide; enfin je mis autant de feuilles dans un
autre flacon rempli avec l’eau de mon puits. Le
nombre des feuilles fut le même dans les trois flacons,
et les feuilles étoient égales entr’elles comme dans la
précédente' expérience ; les flacons ainsi disposés res-
tèrent six heures au soleil.
Je me bornerai à donner ici la quantité des airs et
d’acide carbonique produits , parce qu’on a vu que
la quantité des airs produits est assez proportionnelle
à celle du gaz oxygène , et parce que j’ai assez mon-
tré que l’on trouvoil aussi le gaz azote dans ces pro-
duits aériformes.
J'ai préparé des tubes de la même manière avec le
sempervivum tectorum , et j'ai estimé les quantités
d’air produit avec un eudiomètre qui contenoit 5 9, 4 5
centimètres cubes , ou 3 pouces cubes cl'air, et qui se
divise en centièmes de ces 3 pouces.
Les feuilles de la violette jaune dans l’eau la plus
chargée d'acide carbonique ont donné d’air
et io° d’acide carbonique.
Ces feuilles dans l’eau qui ne contenoit que la
moitié de l’acide carbonique de la précédente en ont
donné je n’ai pas cherché l’acide carbonique.
Ces feuilles dans Veau commune donnèrent Too d’aii1.
Le sempervivum tectorum dans Veau La plus
chargée d’acide carbonique, a donné d'air, dont
il y avoit -f*- d’acide carbonique.
Dans l’eau à moitié chargée d'acide carbonique il
( i54 )
y eut fsê d’air produit, dont 7 étoit d’acide carbonique.
Dans beau commune il n’y eut qu-c-j— d’air , je 11e
cherchai pas l’acide carbonique.
§ CL VIII.
Je répétai celte expérience du sempervivum
teclorum dans un flacon rempli avec l’eau la plus
chargée d’acide carbonique , el je le laissai exposé
au soleil pendant huit heures; je voulois examiner
l’air produit avec plus de soin eu suivant les mêmes
procédés.
J’eus 59,65 centimètres cubes, ou deux pouces
cubes d’air/ produit , il contenoit 20 de gaz oxygène ,
49° d'acide carbonique et 49° d’azote.
On a vu précédemment , que j’ai eu un résultat
semblable.
§ eux.
Enfin , je répétai encore ces expériences de la
même manière avec l’eau la plus chargée d’acide
carbonique ; les flacons furent exposés au soleil
pendant 5 heures.
Huit feuilles de violette jaune me donnèrent
39,81 centimètres cubes, ou 1 pouce cube d’air , qui
contenoit 4a0 d acide carbouique , 2 3° de gaz oxygène,
eL 55° d’azote.
Des morceaux de Yaloe cœrulescens spinis rubris,
a produit un air qui contenoit 58° d’acide carbonique,
42° de gaz oxygène et 20° d’azote
Des feuilles du framboisier ont produit un air
contenant 42° d'acide carbonique, 48° de gaz oxy-
gène , et 12° d’azote. j
Quelques morceaux tValoé commun exposés sous
( i55 )
la même eau au soleil pendant 6 heures dans lin
flacon fermé, ont produit 68° d’acide carbonique ,
io° de gaz oxygène et 22° d’azote.
Quelques morceaux de Pciloe verrucosa disticha
exposés au soleil dans la même eau pendant 6 heures,
ont donné 64u d’acide carbonique , io°de gaz oxy-
gène et 26° d’azote.
Ces deux dernières expériences comparées avec
les trois premières monlrent clairement , que l’an g-
men talion du séjour des plantes dans l’eau fortement
acidulée avec l'acide carbonique, augmente la quantité
de l’acide carbonique produit, et diminue la quantité
du gaz oxygène.
§ CLX.
Je conservai l’eau chargée d’acide carbonique
qui m’avoit servi dans les expériences précédentes ;
j’en avois4 flacons que je remplis complètement , et
j’y renfermai avec soin de nouvelles plantes , que
j’exposai comme celles dont j’ai parlé pendant trois
heures au soleil.
Les feuilles du citronnier y produisirent un air
contenant 8i° de gaz oxygène, x 4° d’acide carbonique
et ,4° d’azote.
Les feuilles du chou : y produisirent un air contenant
6° d’acide carbonique , 90° de gaz oxygène et 4°
d’azote.
Les feuilles de la beta vulgnris produisirent un
air contenant io° d’acide carbonique , 70° de gaz
oxygène et ib° d’azote.
Les feuilles du pécher produisirent au bout de
•J heures d’exposition au soleil un air contenant
( 1 56 )
9° \ d’acide carbonique , 75° \ de gaz oxygène et
1 5° d'azote.
§ CLXXI.
J’entrepris des expériences d’un autre genre , mais
dans les mêmes vues.
Je mis dans deux tubes contenant 178,55 centi-
mètres cubes , ou 9 pouces cubes d’air commun un
rameau de pavot dans chacun des tubes; ces rameaux
étaient égaux enlr’eux ; mais l’un deux avoit son
pied dans l’eau de chaux et l’autre dans l’eau du
puits; l’eau s’élevoit dans chacun des tubes à 1,62
décimètre , ou 6 pouces de hauteur , je les exposai
ainsi au soleil. 1
Au bout de trois heures je vis que les feuilles
souüroient et je pensai à en essayer l’air; j’avois déjà
remarqué que l’eau de chaux s’étoit élevée dans son
tube, tandis qu’elle éloit restée au même niveau
dans l’eau du puits; quoique je les eusse ramenées à
leur première température. Alors j’en essayai l’air.
Dans le tube où étoit Veau du puits , il y eut 70 de
gaz oxygène absorbé et 5? 5 d’acide carbonique
produit.
Dans le tube où éloit l'eau de chaux , l’air resta
dans son état naturel sans aucune altération.
En comparant ces deux expériences , on voit que
la plante qui éloit dans le tube où éloit l’eau de chaux
avoit éprouvé une absorption de \ de pouce ; par
conséquent l’eau de chaux en avoit absorbé l’acide
carbonique, et il n’a pas paru daus l’air qui recouvroit
l’eau , tandis qu’il y a eu de l’acide carbonique
produit dans l’air de l'autre tube.
C l57 )
Une heure après cetle expérience , je mis à l’obs-
curité de la même manière et dans un tube semblable
rempli jusques à 1,62 décimètre, ou 6 pouces de
hauteur avec l’eau de chaux une tige de pavot, deux
heures après le volume de l’air étoil resté le même, il
y eut 20 de gaz oxy^gène absorbé; mais je m’aperçus
qu’au lieu d’un pavot j’avois mis une branche de
rosier.
§ CLXII.
Cetle erreur me fil faire des expériences avec le
rosier.
Je pi’is quatre tubes , je mis dans chacun un
rameau de rosie r , je remplis l’un d’eux avec l’eau
du puits , et les trois autres avec cette eau privée de
son acide carbonique par l’eau de chaux; je les exposai
ainsi au soleil pendant 5 heures et
Dans le tube plein cl’eau de puits , il y eut 6,60
centimètres cubes, ou un tiers de pouce d’air produit.
Dans les tubes , où étoit l’eau privée de son acide
carbonique , il u’y eut point d’air produit.
J’exposai de même au soleil pendant le même
temps de la marjolaine commune.
Dans Veau du puits, il y eut 5,5o centimètres cubes,
ou un sixième de pouce d’air produit qui étoit
très-pur.
Dans l'eau privée d’acide carbonique , il y eut
5,96 centimètres cubes , ou un cinquième de
pouce d’air produit. v
L’eau privée d’acide carbonique étoit la même
dans les deux cas; les résultats de feuilles de rosier
cadrent fort bien avec ce que Senebier a observé ;
( >68 )
mais il n’en esl pas de même de la marjolaine , il
faut dire aussi que les feuilles du l'osier donnent peit
d’air.
J’ai bien vu que les bulles d’air se manifestent sur
les feuilles dans l’eau pure comme dans l’eau privée
d’acide carbonique, qu’elles y restent quelquefois de
même attachées pendant un temps assez long aux
parties vertes.
Que dire donc de celte Contrariété dans les phéno-
mènes? dirai-je que l’air formé dans l’eau privée
cf acide carbonique par l’eau de chaux n’en a pas été
entièrement privée ? Cependant mon eau de chaux
étoit excellente, et lorsque j’ai vu que l’eau de chaux
versée dans l’eau commune cessoit de la troubler , et
n’y formoit plus de précipité calcaire , j’ai pensé
qu’il n’y avoit plus d’acide carbonique. Pensera-t-on
plutôt , que quelques plantes ont le pouvoir de
décomposer l’eau simple \ mais l’on verra par les
expériences que jJai faites , que l’air se produit en
volumes égaux dans l’eau privée d’acide carbonique
et dans celle qui en a : cependant dans tous ces cas
les tubes comme les vases où ils reposent étoient
remplis avec la même espèce d’eau.
§ CLX1II.
La matière verte dont j’ai parlé donne autant d’air
dans l’eau contenant l’acide carbonique que dans
celle qui en est pri vée , et l’air produit est également
bon dans les deux cas.
§ CLXIV.
Celle matière verte n’a point donné d’air dans
l’eau de chaux , où elle est complètement abîmée ,
( ^9 )
elle y blanchit ; je la remis néanmoins au soleil dans
l’eau commune après l’avoir bien lavée , mais elle
n’y donna point d’air.
§ CLXY.
Les feuilles du haricot et celles d’hyacinthe
donnent dans l’eau privée d’acide carbonique le
quart de l’air qu’elles donnent dans l’eau du puits.
Les feuilles du jujubier et du persil ont donné
huit fois plus d’air dans l’eau du puits que dans l’eau
privée d’acide carbonique.
Les feuilles du pécher ont donné dans l’eau pure
pendant le même temps le double de l’air qu'elles
ont donné dans l’eau privée d’acide carbonique ; elles
en fournissent un peu dans l’eau de chaux ; mais
dans tous les cas la quantité est très-petite; je n’en ai
pas eu assez pour essayer l’air qu’elles ont fourni.
§ CLXYI.
Après toutes ces expériences variées de tant de
manières . je voulus essayer ce que l’eau distillée
produiroit sur les plantes.
J’exposai au soleil pendant huit heures le semper-
vivum tectorum dans l’eau distillée et dans l’eau de
mon puits.
J’eus dans toutes les deux une quantité d’air égale
par son volume et sa pureté.
Je fis celte même expérience sur les feuilles du
framboisier rubus idœus ; l’air produit dans les
deux eaux fut égal en bonté ; mais le volume de
l’air produit dans l’eau du puits fut triple.
Deux feuilles d'alcœa mises dans 5q 45 centimètres
cubes, ou 5 pouces cubes d'air commun et exposées
( 160 )
pu soleil pendant 6 heures détruisirent i8 de gaz
oxygène et produisirent 5° d’acide carbonique.
Deux leuilles de cette plante mises dans Veau du
puits pendant 6 heures produisirent 5° d’air qui
furent presque en totalité du gaz oxygène.
Deux feuilles de cette plante mises dans Veau
distillée ne donnèrent qu’une quantité d’air infiniment
petite , qui me parut du gaz oxygène très- pur.
'J an dis que dans l’eau du puits les feuilles se cou-
vrirent de bulles d’air ; je n’en vis point dans l’eau
distillée.
Une feuille de citronnier exposée au soleil pen-
dant 6 heures dans l eau du puits donna un volume
d air quinze fois plus grand qu’une feuille semblable
exposée de la même manière dans l'eau distillée .
Il resuite clairement de ces expériences , que la
quantité del air produit par quelques plantes exposées
£u soleil sous 1 eau distiilee y est considérablement
diminuée.
§ CLXVIf.
J’avois fait ces dernières expériences à Pavie
avec les eaux que j’y a vois à ma disposition ; aussi
je profitai de mon séjour à Scandiano , où je trouvai
d autres eaux pour répéter encore quelques-unes
de ces expériences.
On a vu que les eaux dont je me suis servi à Pavie
précipitaient un peu plus de 26,54 milligrammes ,
ou d’un demi-grain de carbonate calcaire , lorsqu’on
le* meloit avec l’eau de ehaux par pouce cube ,
§ Mémoire I , et qu’elles donnoient au soleil du gaz
azote dans les vases clos, § Mémoire II.
L’eau
( i&> )
L’eau du TYevisaro me parut donner aussi un peu
moins de 26,54 milligrammes , ou d’un demi-grain
de carbonate calcaire par pouce cube avec l’eau de
chaux, et elle fournil moins d’air au soieil dans les
vases clos ; cet air étoit encore moins impur il
contenoil un peu de gaz oxygène , mais le reste
étoit aussi de l’azote : cependant l’eau de mon pùits
comme je l’ai remarqué ne donnolt point d’acide
carbonique au soleil dans les vases qui en étoient
pleins lorsque je les y exposai ; mais l’eau du Trevisaro
filtrée, parce qu’elle est un peu bourbeuse, ne donna
point d’air au soleil , pas une seule bulle.
§ CLXVI1I.
A près cet examen qui é toit indispensable, j’employai
cette eau du canal à mes expériences , et il étoit
vraiment curieux de l’employer ainsi, parce qu’elle
ne doimoit aucun air au Soleil.
J’exposai donc au soleil sous Un tube rempli de
celte eau sept feuilles du sertipervivum tectorum ;
au bout d’un quart d’heure il s’échappa d'une de ces
feuilles , dont la base se rompit , un filet d’air qui
s'élança au sommet du Vase , il étoit formé par une
suite de petites huiles d’uu diamètre égal , qui sem-
blaient se toucher , et qui ne discontinuèrent pas de
se suivre ; elles arri voient à une feuille supérieure ,
où elles s’arrêloient , et où elles formèrent une bulLe
qui s’augmenta peu-a-peu 5 ce jet d’air dura 26
minutes et la bulle qui en résulta avoit 5,6 1 milli-
mètres , ou 2 lignes de diamètre. Je vis encore çà
et là des espèces de jets iutermittens sur les feuilles j
ils éloient composés de 2 ou 5 petites bulles sortait
Tome 5. L
( 161 )
a la fois hors de l’épiderme des feuilles; ils s'arrêtaient
un moment pour reparoître un moment après.
Je ne vis ni dans l’inférieur du tube, ni sur la
soucoupe pleine d’eau qui le porloiL aucune bulle
d’air; aussi les feuilles du sempervivum tectorum
donnèrent non-seulement, l’air qui leur éloil propre ,
mais encore celui qui éloil contenu dans l’eau du
tube où elles éloienl placées.
Au bout d’une demi-heure, la base rompue d’une
feuille du sempervivum tectorum donna dans celle
eau du Trevisaro que j’avois privée de sou acide
carbonique un nouveau jet qui produisit une bulle
de j, 12 centimètres, ou 5 lignes.
Celte eau du canal privée d’air me fit pourtant
recueillir au bout de 5 heures d’exposition au soleil
une quantité d’air pi'oduit par le sempervivum
tectorum qui contenoit 12 ou i5° d’acide carbo-
nique, 7 2° de gaz oxygène et i4° d’azote.
Celte expérience prouve bien que l’air vient de
l’intérieur de la plante , que cet acide carbonique
en sort , qu’il n’est pas celui de l’eau qui en a voit.' été.,
privée , et que l’azote ne sauroil non plus venir de
l’eau , puisque celte eau n’en avoil point donné
au soleil.
§ CLXIX.
J’avois dit en racontant l’expérience précédente y
que le sempervivum tectorum a voit donné J 2 ou
i5° d’acide carbonique avec les gaz oxygène et azote;
je voulus répéter l’expérience avec la même plante;
mais je voulus aussi m’assurer, si l’eau avoil été bien
privée de son acide carbonique , parce que j’ai dit
/
( 1&2 )
qu'elle en «loti vraiment privée et je le Ci4oyoîs ,
parce que j'y avois versé de l’eau de chaux, jusques
à ce qu’elle ne se troublât plus ; cependant je me suis
bien trompé»
Je pris une petite quantité de celte eau que j’avois
cru privée de son acide carbonique ; j’y versai de la
nouvelle eau de chaux qui la troubla au bout de
quelque temps, et qui y produisit un précipité sensible
de carbonate calcaire ; je remis donc de la nouvelle
eau de chaux dans le grand vase d’oùj’avois tiré la
petite quantité que je venois d’éprouver ; je recom-
mençai la même opération dans le petit , et j’y
retrouvai encore de l’acide carbonique ; ce qui me
fit comprendre que je n’avois jamais privé entière-
ment d’acide carbonique les eaux que j’en avois vu
entièrement privées par ce procédé.
Cependant je voulois savoir , avec sûreté , si les
plantes dans l’eau parfaitement privé d’acide car-
bonique en donneroient encore. Je fis donc bouillir
de beau du puits pendant une heure et demie; quand
elle fut refroidie , j’y versai de l’eau de chaux à deux
ou trois reprises , je n’y aperçus alors aucun chan-
gement , et je m’assurai de cette manière que cette
eau ne contenoit point d’acide carbonique»
Je remplis avec cette eau deux flacons fermants
très-bien avec un bouchon usé à l’émeri ; j’y intro-
duisis du setnpervivum iectorum , et je l’exposai
là pendant 5 heures au soleil.
Dans un des flacons, il n’y eut point d’air pi-oduit }
et dans l’autre il y en eut 5g, 63 centimètres cubes, ou
2 pouces cubes. Quelle fut lu cause de cette différence?
( i63 )
Je ne saurais le dire, puisque les deux flacons avoieht
été également bien fermés , également exposés au
soleil dans la meme eau bouillie cl tirée du même
vase , où elle a voit été bouillie.
Quoiqu’il eu soit , j'essayai cet air produit , et j’y
trouvai 5° d’acide carbonique, 82° de gaz oxygène
et i5° d’azote.
Il faut donc conclure ici que cet air peut être un
produit de l’acide carbonique contenu dans la plante,
qui devient gazeux et se décompose à la lumière ; il
faut pourtant observer encore qu'il y a eu du gaz
azote produit.
§ CLXX.
Je fis bouillir pendant trois quarts d’heure l’eau
de mon puits; lorsqu’elle fut refroidie , j’en remplis
un tube , où je fis entrer quatre feuilles de la violette
jaune ; j’en mis quatre autres semblables dans un
tube rempli avec l’eau de mon puits qui n’a voit pas
été bouillie , je les exposai ainsi au soleil pendant
4 heures et demie.
Dans le flacon contenant l’eau du puits naturelle ,
l’air produit par les feuilles fut septuple de l’air
produit dans le tube où étoit l’eau bouillie .
11 paroît donc que l’eau bouillie 11’a pas empêche
toute production d’air , mais que cette production y
a été bien diminuée.
§ clxx r.
Je fis pendant le même temps cette expérience avec
les feuilles du sempervivum tectorum ; j’en rnis 8
feuilles sous un tube contenant l’eau naturelle de
mon puits ; j’en mis 8 autres feuilles dans un tube
( i64 )
égal contenant l’eau bouillie , je les exposai ainsi au
soleil pendant 4 heures 3.
Je variai cependant l’expérience ; je rompis sous
l’eau une de ces feuilles, j’en vis sortir immédia-
tement des bulles d’air qui n’étoient pas très-petites,
elles éloient à l’endroit de la rupture; je vis même
qu’eu pressant la feuille à l’endroit où la feuille avoit
été rompue , il en sortit de nouvelles bulles qui
éloient encore plus nombreuses.
Qu’arrivera-t-il donc , lorsque ces feuilles auront
cessé de donner de l’air sous l'eau ? Je lis celle expé-
rience dans l’eau du canal, privée de son acide car-
bonique par l’eau de chaux, dans l’eau bouillie et
dans l’eau du puits.
Eh bien , les bulles d’air sortirent à la rupture de
la feuille; elles sortirent de même par la compression.
Tl est donc clair encore que l’air qui s’échappe des
plantes au soleil ne vient pas de leur extérieur ; mais
qu'il sort de l’intérieur de la plante , et qu'il traverse
leur épiderme pour s’en détacher. 11 faut donc
convenir qu’il se forme , ou par l’acide carbonique
qui se décompose , ou par la décomposition de l’eau
qui pénétre la plante.
Je me suis assuré que l’eau du canal dont je me
suis servi dans celle expérience contient moins d’acide
carbonique que l’eau du Trevisaro, et par conséquent
qu’il y en a encore moins dans la première que dairs
l’eau du puits.
§ CLXXII.
Je mis pendant 2 heures £ au soleil , dans un flacon
bien fermé , contenant 99,08 centimètres cubes , on
( i65 )
5 pouces cubes de l’eau de mon puits qui le rem-*
plissoit , 19,81 centimètres cubes, ou 1 pouce cube
de feuilles de choux , tpiar|d elles eurent, donné ■i, 9b
centimètres cubes , ou un quarL de pouce cube d’air ,
j’en retirai l’eau, sur laquelle je versai 5g, 45 centi-
mètres cubes , on 5 pouces cubes d’eau de chaux
pour en précipiter tout l’acide carbonique. Ensuite
je remplis le flacon où les feuilles de choux éloient
restées a\ ec l’eau du puits et je versai de celle eau nou-
velle avec laquelle j’avois rempli le flacon dans un
ftutre vase , où je mêlai la même quantité d’eau de
chaux que dans l’eau précédente ; enfin quand le
précipité fut bien formé , je décantai l’eau , je séchai
bien le carbonate calcaire des deux vases , je les
pesai et je trouvai que le carbonate des deux vases
avoit le même poids.
Ce qui prouve que dans ces 2 heures ~ , il n’y a
pas eu la moindre perle d'acide carbonique , et par
conséquent qu’il n’y a point eu d’acido carbonique
décomposé par la lumière pour produire le gax
oxygène fourni par la plante.
J’ai répété rigoureusement la même expérience
avec le sempervivum tectorum , et j'ai eu le
même résultat.
§ CLXXIH,
J’ai fait voir que les feuilles du sempervivum
tectorum contenoient encore de l’air quand elles
cessoient d’en donner sous l’eau , §CLXXl, puis-
qu’elles en fournirent sous l’eau par la compression
autant qu’auparavant ; ce qui prouveroit pourtant
que l’air produit sous l’eau par les plantes y arrive
par l’iutériçur, ou s’y prépare»
( ;66 )
Je fis celte expérience sur les feuilles du fram-
boisier 3 du choux , de la violette jaune el du
sempervivum tectorum que j’avois tenues pendant
r heures sous l’eau de mon puits au soleil , alors je
les exprimai sous l’eau.
Je commençai par les feuilles de choux qui me
donnèrent 19,81 centimètres cubes , ou un pouce
cube d’air; il sortit alors de partout, mais surtout
de la ruplure des côtes.
J’en Lirai de même des feuilles de violette ; mais
il sorlit encore des côtes , et surtout des plus grosses.
Il en fut de même des feuilles1 du framboisier et
eu particulier du sempervivum tectorum qui en
donna beaucoup.
§ CLXXIY.
Je mis des feuilles de vigne , de pécher , de fram-
boisier au soleil sous l’eau de mon puits , jusques à
ce qu’elles eussent fourni tout l’air qu’elles pouvoient
donner ; elles en produisirent beaucoup , surtout
celles des deux dernières.
Je pris 19,81 centimètres cubes, ou un pouce
cube de l’eau de ces trois tubes, je versai sur chacun
5g, 65 centimètres cubes , ou 2 pouces cubes d’eau de
chaux , quand le carbonate calcaire fut précipité ,
j’obtins après la dessication environ 16, 54 milli-
grammes, ou i grain de carbonate calcaire, c’est-à-
dire la quantité elle même produite par l’eau du puits.
Il reste donc confirmé que le gaz oxygène produit
par ces plantes provient de leur intérieur sans être
produit par l’acide carbonique fourni par l’eau où
«lies étoienl ; mais il faut remarquer que ces trois
( i63 )
plantes dans l’eau privée de son acide carbonique y
donnent beaucoup moins de gaz oxygène.
§ CLXXY.
Sans rechercher précisément les sources de cet
air produit par les feuilles exposées sous l’eau au
soleil , voici quelques inductions tirées de mes ex-
périences,
J’ayois eu des feuilles de choux restées tout, le
jour sous l’eau au soleil; )c n’en eus que peu d’air,
mais j’en fis l’analiso, je n’y trouvai pas beaucoup
plus de gaz oxygène que dans l’air commun; cepen-
dant ces feuilles avaient été exposées dans l’air clos
a, u soleil, où elles «voient absorbé une partie du
gaz oxygène qui y étoit, ces feuilles sous l’eau ren-
dirent pourtant cet air plus pur.
Les plantes en passant donc d'un étal naturel à
un état qui ne l'est pas y donnent de l’air plus pur.
-et elles le gâtent lorsqu’elles sont dans l’air; ce qui
pourroit faire croire que l’air pur ne provient pas de
la plante, mais qu’il s’engendre par la décomposi-
tion de l’eau qui touche les feuilles , comme je l’avois
déjà remarqué,
§ CLXXVI.
Les feuilles de l'alaë cïislicha enfermées dans des
flacons bien fermés contenant 4 9, 54 centimètres cubes,
ou 2 pouces cubes d'air commun pendant un jour
laissèrent l’air commun intact.
Dans la même quantité d’air où elles éprouvèrent
]« chaleur pendant le même temps solaire à l’ombre x
il y eut 8° de gaz oxygène absorbé et 8° d’acide
carbonique produit.
( ïCg )
Dans la même quantité de gaz hydrogène pendant
le même temps à l’ombre, les feuilles le laissèrent
intact.
Dans l'eau elles produisirent de l’air un tiers meil-
leur que l’air commun.
Pourquoi donc l'aloè ne donne-t-il point d’acide
carbonique dans l’air au soleil et. en donne-t-il à
l’ombre? Pourquoi laisse-t-il au soleil l’air intact
et donne-t-il un air meilleur sous l’eau.
Suivant Senebier le gaz oxygène rendu par les
plantes exposées sous l’eau au soleil n’est que l'a-
cide carbonique décomposé dans le parenchyme des
plante» par l’action de la lumière, aussi dès que la
plante esL à l’ombre elle donne l'acide carbonique 5
cependant alors ou n’auroit pas l’acide carbonique
aux dépens de l'oxygène atmosphérique, et l’air
li’auroit pas perdu son oxygène.
Quand à l'autre question qui roule sur l'air pur
donné dans l'eau, tandis qu’il n’y eu a point de
produit, dans l’air clos, il en résulte seulement que
l’eau est une condition pour avoir cet air que la
plante ne donneroit pas autrement.
§ CLXXVII.
Il résulte de ces expériences, i.° que la plupart
des plantes donnent plus d'air au soleil sous l'eatl
chargée d'acide carbonique que sous l’eau commune.
e." Que les piaules dont les tiges plongent dans
l’eau chargée d'acide carbonique donnent plus de gaz
oxygène dans l’air au soleil qu’une plante dont la
tige plongeroil dans l’eau commune, et surtout dans
une eau privée d’acide carbonique.
( *7° )
5. 9 Qu’il y a dos plantes qui demandent seule-
ment une certaine quantité d’acide carbonique dans
l’eau pour y donner au soleil beaucoup de gaz oxy-
gène et qu’une trop grande quantité d’acide carbo-
nique dans l’eau nuit à la production du gaz oxygène.
4. ° Les plantes mises à l’obscurité dans l’eau
chargée d’acide carbonique n’y donnent point d’air;
mais elles en donnent d’abord après quand elles sont
exposées au soleil.
5. ° Le suc d’une plante qui a passé la nuit dans
l’eau chargée d’acide carbonique ne trouble pas l’eau
de chaux .
6. ° Une plante qui a été au soleil donne sous
l’eau de l’air meilleur que l’air commun.
7.0 L’acide carbonique qui est dans l’air pro-
duit par les plantes exposées sous l’eau au soleil est
en partie produit par l’eau ; mais les plantes en
donnent aussi dans les gaz hydrogène et azote.
8.° Les plantes exposées sous l’eau au soleil don-
nent assez d’azote.
9.0 La quantité de l’air produit par les plantes au
soleil dans les eaux distillées et bouillies est moindre
que celle qu’elles y fournissent dans les eaux char-
gées d’acide carbonique; il y en a qui ne donnent
point d’air dans les premières.
io.° L’eau chargée d’acide carbonique donne la
même quantité d’acide carbonique après l’émission
du gaz oxygène qu'avant.
11.0 Il y a des plantes qui donnent au soleil le
gaz oxygène dans les eaux privées d’acide carbo-
nique et même dans l'eau de chaux, mais il y en a
( *7* )
d’autres qui n'y en donnent point ou infiniment peu.
12.0 On retrouve dans l’eau chargée d’acide car-
bonique où l’on a exposé des plantes au soleil la
même quantité d’acide carbonique qu’il y en avoit
auparavant,
C II A P I T R E V.
Des fleurs exposées au soleil dans l'air et sous
Veau,
§ CLXXVUI.
Après m’être occupé des feuilles et des parties
vertes des plantes , il étoit naturel de faire sur les
fleurs des recherches analogues à celles que je viens
de raconter; la diversité des couleurs dans celle
belle production des plantes , leurs odeurs pou-
voient aisément faire soupçonner que les fleurs
produiroient des effets particuliers sur l’air , et qu’elles
dévoient en même temps être soumise à une in-
fluence spéciale de la lumière, qui pourroit se ma-
nifester dans des expériences semblables à celles que
j’ai faites jusques à présent ; je devois d’autant moins
négliger de les faire , que Ingéniions et Senehier
en avoicnl déjà entrepris quelques-unes sur ce sujet,
§ CL XXIX.
J’avois des fleurs du lys appelé de St. Antoine,
j’entrepris de faire quelques expériences sur leurs
pétales. J’en plongeai sous l’eau, où je les agitai et.
j’en vis sortir des bulles, qui partoieut de leur im
térieur, et qui continuèrent à s'en échapper; je com-
primai ces pétales légèrement , et j’en vis sortir urç
( 172 )
plus grand nombre de bulles, qui s’él an çoienl sur-
tout de la moitié delà pointe du pétale, où se ter-
mine la petite côte, .le vis encore que la pression
sur les bords du pétale, dans le voisinage de sa
pointe fa isoit rouler un plus grand nombre de bulles
entre les deux épidermes, qu'elles s’approchoient
ainsi de la côte , où elles s’échappoient. Je coupai
alors transversalement un pétale je le vis formé par-
deux membranes , qui n’étoient point assez adhé-
rentes enjr’elles pour empêcher leur séparation; il
m’a paru que l’air se logeoit entr'elles.
§ CLXXX.
Je mis les pétales d'un de ces lys sous l’eau au
soleil pendant 4 heures ^ , ils donnèrent très - peu
d’air , et il n’y avoiL point de gaz oxygène.
J’avois trouvé que les pétales du Lilium ccindidinn
plongés sous l’eau et piis au soleil avoienl donné io°
d'acide carbonique et 90° d’azote : quelle a été la
source de celui-ci? J’ai pensé qu'il sortoit de ces
pétales, puisque j’ai vu l’air s’err échapper par la
compression sous l’eau.
J ’avois trois lys fleuris, je les comprimai sous l’eau ;
j'en recueillis l’air, et quand j’en eus fait l’essai, je
trouvai qu'il y en a voit un cinquième qui étoil le
gaz oxygène mêlé avec un peu d'acide carbonique,
et le reste éloiL presqu’entièrement de l'azote.
Je mis deux fleurs du même lys à un beau soleil
sous l’eau pour suivre les phénomènes qui pourroient
s’offrir à moi. 11 y parut des petites bulles sur les deux
surfaces, elles s’accrurent peu-à-peu avant de se
détacher ; à l’extrémité de la cote de quelques pé-
( )
tôles, on voyoit la petite balle qu’on en fait sortir
par une légère compression: au bout d’une demi-
heure, ces pétales me parurent bien conservés.
Il est donc bien prouvé qu’il s’échappe de l’air
au travers des pores des pétales.
Pendant huit heures, trois lys sans leurs parties
sexuelles donnèrent sous l’eau 9,90 centimètres cubes,
ou un demi-pouce cube d’air, qui contenait 8° d’a-
cide carbonique, 25° d’azote et io° de gaz oxygène.
§ CL XXXI.
Les bulles d’air qui paroîssent au sommet des
vases pleins d’eau , où l’on expose au soleil les fleurs
du lys sont un produit de la macération dans l’eau
qui s’est réchauffée.
Je mis pendant 5 heures sous l’eau au soleil trois
fleurs de lys; elles y donnèrent très-peu d’air; il étoit
fort mauvais et bien sorti hors de ces pétales , puis-
que je le trouvais aussi mauvais par l’expression,
lorsque je les eus retirés de Peau; mais les lys fraî-
chement coupés me donnèrent par l’expression sous
l’eau un air aussi bon que l’air commun ; cet air
se gâte sous l’eau au soleil , et il se gâte de même
à l’ombre.
§ CLXXXII.
Je mis pendant 4 heures £ au soleil dans 49,54
centimètres cubes, ou 2 pouces | cubes d’air commun
les pétales d’un lys.
Ils absorbèrent io° i de gaz oxygène et 4° d’azote.
§ CLXXXIII.
Pendant 4 heures je tins les tiges de ce lys avec
leurs petites feuilles au soleil dans 69, 45 centimètres
( _1 74 )
Cubés, ou 3 pouces cubes d'air commun, elles le luis*
sèrenl intact*
Les petites feuilles seules de ce lys traitées de la
même manière laissèrent aussi l’air intact.
Les étamines êt les pistils de ce lys mis dans 09, 64
centimètres cubes, ou 3 pouces cubes cl air commun
pendant 3 heures absorbèrent io°de gaz oxygène
et produisirent io° d’acide carbonique avec 5°
d’azote.
§ C.LXXXIV.
Je mis les pistils et les étamines d’un lys sous
teçLU au soleil; j’obtins environ 6,60 centimètres
cubes , ou un tiers de pouce cube d’air qui contenoit
j?° d’acide carbonique , i degré de gaz oxygène. Je
crus d’abord que le reste étoit de l’azote, mais en
approchant de cet air une bougie allumée, il y eut
inflammation et détonation; c'étoit donc du gaz hy-
drogène mêlé d’azote.
Les étamines comme les pistils me parurent cou-
verts de petites bulles; mais cet air sembloil bien être
iormé au-dedans d’eux et en être sorti.
§ CLXXXV.
Enfin je mis des feuilles du lys sous Veau au soleil,
où elles 111e donnèrent beaucoup d’air qui me parut
très-pur.
Ces feuilles m’offrirent un phénomène singulier;
elle ne donnèrent presque point d’air, tant qu’elle»
y furent mises entières; mais elles le fournirent abon-
damment, aussitôt qu’elles furent déchirées; il sortit
alors aisément de la déchirure , et surtout des côtes
( 17^ )
longitudinales ; les bulles qui s’échappoienl Ploient
fort grosses (i).
§ CLXXXVI.
Je lins pendant 26 heures dans 5g, 64 centimètres
cubes, ou 2 pouces cubes d’air commun, 2 flacons
du pseudo narcissus ; j’en mis deux sous un tube,
r où les tiges des fleurs plongeoient dans l’eau ; j'en
mis de même deux autres dans la même quantité
d’air commun , mais les tiges des fleurs ne touchoient
pas l’eau, ces deux appareils furent ainsi à l’ombre
à la température de to°. J’en examinai ensuite l’air.
Les deux fleurs de narcisse dont les tiges plon-
geoient dans l’ectu absorbèrent tout le gaz oxygène
de l’air et y produisirent 4° d’acide carbonique.
Les deux fleurs de narcisse, dont les tiges ne tou-
choientpas Veau absorbèrent 180 de gaz oxygène
et produisirent 70 d’acide carbonique.
La lige de ces fleurs influe donc sur l’action dé-
létère qu’elles exercent sur l’air.
Je tins pendant 17 heures à la température de 8®
et à l’ombre dans un flacon bien fermé des fleurs
d’hyacinthe doubles et blanches; je mis dans uu
autre flacon un ■volume de tiges égal à celui des
fleurs et j’en examinai l’air.
Les fleurs absorbèrent 5° J de gaz oxygène , et
produisirent 5° 5 d’acide carbonique.
Les tiges absorbèrent 5° de gaz oxygène, et pro-
duisirent 5° d’acide carbonique.
(i) Note de VEditeur. Ceci me paraît propre aux plantes
moflocotyUdones.
( *76 )
Il nie sembla que les hyacinthes bleues produi-
sirent un effet, plus grand que les blanches.
§ CLXXX V II.
Je refis la même expérience sur des hyacinthes
blanches et bleues j elles restèrent 25 heures dans
5q,64 centimètres cubes, ou 2 pouces cubes d’air
commun à la même température 5 il y a voit sept
fleurs à chaque tige.
Les fleurs hyacinthes blanches sans tige. 9 absor-
bèrent ii°dcgaz oxygène et produisirent 4° d’a-
cide carbonique.
Celles qui avoieut une tige plongeant dans Veau
absorbèrent 8°,| de gaz oxygène et produisirent
5° 5 d’acide carbonique avec ^ degré d’azote.
Les fleurs de hyacinthe bleue absorbèrent 5° de
gaz oxygène et produisirent 5° d’acide carbonique.
. Les fleurs cle ces hyacinthes avec leurs liges plon-
geant dans l’eau absorbèrent 8° \ de gaz oxygène
et produisirent 5° | d’acide carbonique, avec i°i
d’azote.
Les fleurs seules d’hyaciute blanche ont donc ab-
sorbé ~ degré de plus de gaz oxygène que celles
dont la tige plongeoit dans l’eau.
La raison de ce phénomène ne seroit-elle pas ,
que la végétation de ces fleurs dont la tige plonge
dans l’eau est prolongée , et que la tige concourt
à gâter l’air.
§ CLXXX V1IÏ.
J’ai tenu à l’ombre pendant 24 heures dans 29,71
centimètres cubes, ou 1 pouce 5 cube d’air commun
les (leurs de la fumaria bullosa : je mis dans un
tube
/
( 177 )
lnbe semblable contenant la même quantité d’air et
un volume égal des feuilles de cette plante; les fleura
et les feuilles ne touehoient pas l’eau.
Les fleurs absorbèrent 7 0 de gaz oxygène et pro-
duisirent 5° d’acide carbonique; onze de ces fleur3
absorbèrent 8° de gaz oxygène et produisirent 20 5
d’acide carbonique.
Les feuilles absorbèrent 6° de gaz oxygène et
produisirent 20 | d acide carbonique.
Il paroît donc que les fleurs de cett ejumctria dont
le volume étoit un tiers plus petit que celui des
feuilles ont absorbé plus de gaz oxygène que ces
dernières.
§ CLXXXIX.
Je tins une rose à demi-ouverte fort odorante
sans sa tige à l’ombre pendant 20 heures dans 5g, 4:5
centimètres cubes , ou 3 pouces cubes d’air à la tem-
pérature de i4°.
Lorsque je la retirai de sa clôture 5 elle me parut
tres-fraiche ; elle absorba 190 de gaz oxygène, pro*
duisit 90 d’acide carbonique et io° d’azote; mais
comme l’appareil étoit fermé par l’eau , il y eut sans
doute plus d acide carbonique produit que celui que
je trouvai dans l’air.
Je mis les pelales d’une petite rose dans un flacon
bien feimé , sans eau, contenant 29,71 centimètres
cubes, ou 2 pouces cubes d’air commun; ils y restè-
rent 22 heu îes ; ils me parurent encore frais et avec
leur odeur; ils avoient absorbé 17° ± de gaz oxygène
eL produit io° \ d’acide carbonique avec 7°^ d’azote.
M
Tome 3.
( 178 )
§ CXC.
Je lins quatre bouquets de fleurs de sanguinelle
pendant 4 heures sous L'eau au soleil, il n’y eut point
d’air produit.
J’en mis la même quantité dans 5q,45 centimètres
cubes , 5 pouces cubes d'air commun au soleil , pen-
dant le même temps, elles y absorbèrent tout le gaz
oxygène et produisirent 90 d'acide carbonique avec
il0 d’azote.
§ CXCI.
Les fleurs de la violette jaune double mais souf-
frantes exposées au soleil pendant 9 heures dans l'air
commun absorbèrent i8°| de gaz oxygène et pro-
duisirent i5° d’acide carbonique avec 5° d’azole.
Ces fleurs exposées au soleil comme les précé-
dentes pendant le même temps sous un étui de
carton absorbèrent 170 de gaz oxygène, produisirent
90 d’acide carbonique et 7 0 d’azote.
Des fleurs de violette rouge exposées au soleil
dans 24,76 centimètres cubes , ou 1 pouce -j cube
d'air commun sans toucher l'eau absorbèrent 9®
de gaz oxygène , et 6° \ d’azole 5 elles produisirent
4° i d’acide carbonique ; la quantité de ces fleurs
égaloit le volume de trois roses , que j’avois mises
en expérience dans 29,71 centimètres cubes, ou 1
pouce \ cube d’air commun.
Un volume égal de fleurs de violette mises au
soleil dans la même quantité d’air commun pro-
duisirent 4° d’acide carbonique et laissèrent l’air
commun intact.
Neuf feuilles de violettes rouges mises au soleil,
0
( 179 )
dans 59,45 centimètres cubes, ou 5 pouces cubes
d’air commun pendant 2 heures \ laissèrent l’air égal
en boulé à ce qu’il etoit.
Neuf feuilles pareilles mises au soleil dans l’air
avec leurs pétioles plongeant dans l'eau produi-
sirent un peu de gaz oxygène et i°| d’acide car-
bonique.
Les fleurs exposées de la même manière au soleil
produisirent 20 de gaz oxygène et 20 d’acide car-
bonique.
Il n’est donc pas yrai comme Ingenhouz l’a cru,
que les fleurs répandent un air empoisonné.
§ CXCII.
Les fleurs du lamium purpureum mises au soleil
dans l'air commun pendant tout un jour absorbè-
rent 20 \ de gaz oxygène et produisirent autant
d’acide carbonique.
Les fleurs de Ÿiris pumila mises au soleil dans
l’air commun y absorbèrent g0 ^ de gaz oxygène et
produisirent 7°^ d’acide carbonique.
Les pétales de trois fleurs de l' amaryllis hella-
dona mises dans 69, 64 centimètres cubes, ou 2 pouces
cubes d’air commun absorbèrent 20 ~ de gaz oxy-
gène et produisirent autant d’acide carbonique.
Les parties sexuelles de ces trois fleurs mises dans
29,71 centimètres cubes, ou 1 pouce - cube d’air
commun y laissèrent l’air intact.
Les trois tiges de ces fleurs laissèrent aussi l’air
intact.
Les fleurs du brassica ernea absorbèrent 3° de
gaz oxygène et produisirent 3° d’acide carbonique»
( i8o )
Les fleurs du borrago cjJicinalLs laissèrent pres-
que l’air intact.
Les fleurs du senecio vulgaris absorbèrent 5° de
gaz oxygène et produisirent 5° d’acide carbonique.
Toutes ces expériences furent faites dans des fla-
cons bien fermés contenant 5g, 64 centimètres cubes,
ou 2 pouces cubes d’air, et ils furent tous exposés
au soleil pendant g heures.
§ CXCIII.
Je mis un morceau des feuilles de Valcea rosea dans
5g, 45 centimètres cubes , ou 5 pouces cubes d’air
commun nageant sur l’eau au soleil pendant trois
heures et demie. Il produisit 4° d’acide carbonique
et laissa l’air intact.
Un morceau semblable mis à sec dans l’air pro-
duisit i° d’acide carbonique.
Une fleur de cetLe plante pendant le même temps
et de la même manière absorba i4° de gaz oxygène
et produisit 6° d’acide carbonique.
Huit fleurs de cette plante donnèrent dans l’air
g 1,^4 millimètres cubes, ou 8 lignes cubes d'air dont
i étoit l’acide carbonique et | d’azote.
§ CXCIV.
Deux feuilles du gelsominum ocloratissimum te-
nues pendant 5 heures dans 2g, 71 centimètres cubes,
ou x pouce \ cube d’air commun sur l’eau absor-
bèrent 5° i de gaz oxygène et produisirent i°i d’a-
cide carbonique.
Ces deux feuilles mises à sec dans la même quan-
tité d’air absorbèrent 4° de gaz oxygène.
Onze fleurs produisirent 4° 5 d’acide carbonique
I
( 181 ' )
et absorbèrent io0^ de gaz oxygène, elles conti-
nuèrent d’avoir leur forte odeur.
§ CXCY.
Vingt fleurs du nerium oleander exposées sous
l’eau au soleil pendant 4 heures ont donné 19,81
centimètres , ou 1 pouce cube d’air contenant 2 ou
5° d’acide carbonique ; le reste étoit de l’azote.
Six feuilles de cette plante sous l’eau au soleil
pendant 4 heures ont donné 4° d’air purement gaz
oxygène.
Six feuilles exposées dans 59, 45 centimètres cubes,
ou 5 pouces cubes tl’air commun au soleil laissèrent
l’air intact.
§ CXCVI.
Six feuilles du capperis spinosa exposées au soleil
pendant 4 heures sous L’eau produisirent 5° de gaz
oxygène presque pur.
Dans 59,45 centimètres cubes, ou 3 pouces cubes
(J; air commun, elles absorbèrent i4° de gaz oxy-
gène et produisirent i° d’acide carbonique.
Cinq fleurs absorbèrent dans la même quantité
d’air commun tout le gaz oxygène et produisirent
io° d’acide carbonique.
§ CXCVÏI.
J’exposai pendant 4 heures au soleil les feuilles
du geltominum officinale sur l'eau dans 59, 45 cen-
timètres , ou 3 pouces cubes d’air commun; elles lais-
sèrent l’air intact.
Dans un flacon contenant la même quantité d’air
commun ces feuilles absorbèrent au soleil 5° \ de
gaz oxygène et produisirent autant d’acide carbo-
nique.
/
( i»a )
Huil fleurs mises dans un flacon de même capa-
cité et contenant la même quantité d’air commun
absorbèrent 90 de gaz oxygène et produisirent 4*
d’acide carbonique.
§ CXCVIII.
Les fleurs dont je vais parler ont été enfermées par
l’eau dans 5y/t5 centimètres cubes , ou 5 pouces
cubes d’air commun; le volume de ces fleurs étoit
d’un i pouce cube , et pendant huit heures elles ont
été ainsi exposées au soleil.
U A Ilium schoenoprasium absorba 160 de gaz
oxygène et produisit 90 d’acide carbonique.
Philadelphus germanus absorba 90 ~ de gaz oxy-
gène et produisit 5° ^cl’acide carbonique.
liemeroccdis Jlctva absorba 180 de gaz oxygène
et produisit 90 d’acide carbonique.
Astragalus galegiformis absorba io° de gaz
oxygène et produisit 70 d’acide carbonique.
Iris jambucina absorba tout le gaz oxygène et
produisit 90 d’acide carbonique.
Antirrhinum majus absorba 1 20 de gaz oxygène
et produisit 4° ■§ d’acide carbonique.
Scorzonerci hispanica absorba 180 de gaz oxygène
et produisit io° d’acide carbonique.
Toutes ces fleurs étoient odorantes et fraîches
après l’expérience comme avant ; leurs queues plon-
geoienl dans l’eau.
§ CXCIX.
J’ai voulu comparer l’action des feuilles de ces
plantes à l’air, après avoir trouvé l’action que eues
fleurs avoient exercée àur lui; elles ont été préci-
sément dans les mêmes circonstances.
( i83 )
Les feuilles de YAllium ont absorbé i4° de gaz
oxygène et produit 70 ^ d’acide carbonique.
C elles du Philaclelphus ont absorbé 120 de gaz
oxygène et produit 5° de gaz acide carbonique.
h'Ifenierocalis absorba 5° de gaz oxygène et pro-
duisit 5° d’acide carbonique avec 2° d’azote.
L ’Astragalus absorba 7°^ de gaz oxygène et
produisit 5°| d’acide carbonique.
L 'Iris absorba n° de gaz oxygène et produisit
6° d’acide carbonique avec 20 d’azote.
L ' Antirrhinum absorba 90 de gaz oxygène et
produisit 5° d'acide carbonique avec 4° d’azote.
La Scorzonera absorba n0^ de gaz oxygène et
produisit 6° d’acide carbonique et 3° 5 d’azote.
Les feuilles du Philaclelphus sont les seules qui
absorbent plus de gaz oxygène que les fleurs*, les
autres plantes ont produit l’effet contraire.
Les fleurs de l’ Hemerocalis produisirent 5° d’a-
zote, les autres n’en produisirent, point; mais les
feuilles de Y fris , de Y Antirrhinum et de la Scor-
zonera en produisirent. Il y a donc eu plus de
feuilles que de fleurs qui ont donné de l’azote.
Enfin si les fleui’s gâtent, l’air , il faut pourtant
convenir qu’elles ne le gâtent pas autant qu’Ingen-
liouz i’avoit cru.
5 ce.
J’ai exposé les feuilles des plantes suivantes et leurs
fleurs séparément dans des tubes contenant 5g, 45
centimètres cubes , ou 3 pouces cubes d’air commun
au soleil. Le volume d’air des fleurs et celui des
feuilles éloit égal. Si je n’ai pas prolongé l’expérience
( i84 )
pins long-temps, c’est parce que j'ai voulu prévenir
leur altération.
Les feuilles des pois ont laissé l’air intact.
Neuf fleurs de pois ont détruit 2° de gaz oxygène
et produit 20 d'acide carbonique.
Les feuilles à’ oeillet rouge , au bout de trois heures
de soleil, ont absorbé i° | de gaz oxygène et produit
i°5 d’acide carbonique.
Un oeillet rouge a absorbé 90 | de gaz oxygène
et produit 6° d’acide carbonique.
Les feuilles de pavot , pendant trois heures au
soleil dans l’air , laissèrent l’air intact.
Un gros pavot rougeâtre absorba à l’ombre 160 ~
de gaz oxygène et produisit 5° d’acide carbonique.
5 CCI.
Les pétales sous Veau donnent peu d’air , les fleurs
de Y Iris Jambucina donnèrent de pouce V cube,
qui contenoit de gaz oxygène.
Quatre grands pavots doubles mis sous l’eau et
au soleil pendant 64 heures ont donné les ~~ d’un
pouce \ cube; il y avoit d’acide carbonique et le
reste d’azote; en répétant l’expérience j’y trouvai un
peu moins d’azote.
Un grand nombre de fleurs de pois tenues sous
l’eau pendant 10 heures, donnèrent | d’un pouce ~
cube d’air meilleur que l’air commun.
§ CCII.
Je lins pendant 21 heures dans l’air à la tempéra-
ture de 8° un grand nombre de fleurs de hyacintes
bleues dans un flacon bien fermé; je mis dans un
autre flacon un grand nombre de leurs tiges; il y
( i85 )
eut JJ d'acide carbonique produit avec io° d’azote et
io° de gaz oxygène absorbé par les^Zei^s.
Les tiges fournirent aussi d’acide carbonique
produit avec n° d’azote et n° de gaz oxygène
absorbé.
Les fleurs , comme leurs queues , gâtent donc l’air
commun , mais les queues avoient conservé leur
odeur un peu plus que les fleurs.
§ CCIII.
Il résulte de ces expéi’iences , i° que les pétales
donnent peu d’air sous l’eau , et que cet air ne con-
tient que peu de gaz oxygène , de l’acide carbonique
et beaucoup d’azote.
2.° Les pétales dans l’air absorbent le gaz oxygène,
produisent l’acide carbonique et l’azote.
5.° Les étamines absorbent le gaz oxygène et pro-
duisent l’acide carbonique avec l’azote.
4. ° Les étamines et les pistils sous l’eau fournissent
l’acide carbonique , le gaz hy drogène et un peu de
gaz oxygène.
5. ° Les fleurs dont la lige plonge dans l’eau gâlent
plus l’air où elles sonl renfermées, que les fleurs en-
tièrement à sec.
6. ° Les feuilles absorbent plus de gaz oxygène
que les fleurs.
)
( i36 )
CHAPITRE VI.
Les fruits et les graines exposés au soleil, sous-
l eau et dans l'air .
§ CCIV.
Il me restoit encore à poursuivre ces recherches
de la même manière sur les fruits et les graines;
d autant plus que ces parties des végétaux avoient
été plus négligées, sous ce point de vue, par les phy-
siciens qui m’ont précédé dans ce genre de travail ,
que celles dont je viens de m’occuper.
3 ccv.
Je voulus d’abord comparer l’influence des pom-
mes et des poires sur Y air , avec celle que leurs
feuilles exerce sur ce fluide.
Je mis donc une feuille de pommier sous un tube
contenant 29,71 centimètres cubes, ou 1 pouce ^cube
d’air commun ; je la plaçai de celte manière dans
ma chambre , où elle resta 24 heures ; au bout de
ce temps elle absorba tout le gaz oxygène et pro-
duisit 3° d'acide carbonique.
Une feuille de poirier , placée de même , absorba
i5°de gaz oxygène et produisit 5° d’acide carbo-
nique.
La moitié d’une pomme verte , coupée en quatre
portions , mise sous l'eau au soleil donna assez d’air;
il conlenoit d’acide carbonique et d’azote.
Je mis de même dans 3g, 45 centimètres cubes , ou
3 pouces cubes d’air commun , le quart d’une poire
verte , que j’exposai au soleil pendant trois heures;
( ) -
je disposai un autre quart de la même manière , et
je le mis à l’ombre pendant le même temps.
Le morceau de poire au soleil produisit 2° d'acide
carbonique et 4° d’azote , à Y ombre il y eut 2° de gaz
oxygène absorbé et 2° d’acide carbonique produit.
§ CCVI.
Je tins pendant deux heures et demie dans 4g, 54
centimètres cubes , ou 2 pouces i cubes d’air com-
mun au soleil deux cerises mûres , elles y absorbè-
rent 4° i de gaz oxygène et y produisirent 2° ^ d’a-
cide carbonique avec 2°i d’azote.
Je tins pendant trois heures deux autres cerises
dans lu même quantité d'air commun , elles absor-
bèrent i8°i de gaz oxygène et produisirent 8° d’a-
cide carbonique.
§ CCVII.
Je mis treize figues bien vertes au soleil pendant
24 heures ; elles y produisirent de l’air contenant
les — d’un pouce - cube, contenant ■— d’acide
carbonique de gaz oxygène et d’azote.
Je tins pendant six heures une figue verte au soleil
dans 5i,45 centimètres cubes, ou 5 pouces cubes
d’air commun, elle y étoit coupée en quatre mor-
ceaux; il y eut 4° ^ d’air produit, dont 5° étoit de
l’acide carbonique; mais il y eut aussi 8° ^ de gaz
oxygène absorbé.
§ CCVIII.
J’exposai sous l'eciu au soleil, pendant sept heures,
une grosse grappe de raisins blancs bien mûrs. La
surface des grains se couvrit de petites bulles, qui
ne grossirent pas, et qui ne se détachèrent point,
( 1 38 )
lorsque j’agitai le vase où cette grappe é toit placée ,
elles étoient encore à la même place après ces sept
heures , au moins pour la plus grande partie, quel-
ques-unes seulement s’étoient échappées à la cime
du vase ; il y en eut si peu qu’elles ne m’offrirent que
les -f~ d’un pouce ~ cube ; mais dans ces 28° j’en
trouvai 8° de gaz oxygène, 4° d’acide carbonique et
le reste d’azote.
J’exposai de même au soleil pendant sept heures
9 grains mûrs de ces raisins dans 59,45 centimètres
ou 5 pouces cubes d’air commun ; ils y produisii’ent
6° d’acide carbonique et 20 d'azote , et ils absorbè-
rent 20 de gaz oxygène.
Je tins de la même manière 9 de ces grains de rai-
sins dans la même quantité d’air commun , à l'ombre,
pendant le même temps , je trouvai 5° d’acide car-
bonique produit et 5° de gaz oxygène absorbé.
Il y eut donc une différence, dans ces deux cas;
au soleil comme à l’ombre, j’eus 5° d’acide carbo-
nique, mais au soleil ces 5° furent ajoutés à l’air qui
environnoit les raisins , au lieu qu’à l’ombre il y eut
5° de gaz oxygène absorbé , tandis qu’il y en eut
seulement 20 au soleil et 20 d’azote produit.
§ CCIX.
J’exposai au soleil pendant quatre heures dans
5g, 45 centimètres cubes , ou 5 pouces cubes d’air
commun , une petite figue cVinde verte et acerbe ;
pendant le même temps je mis un morceau de cac-
tus cochinilifer dans 5 pouces cubes d’air commun.
Le fruit produisit 6° d’air dont il y eut 5° d’acide
carbonique , et il absorba 20 de gaz oxygène.
( l89 )
La feuille produisit 5° d’air , où il y en avoit 4° de
ga, oxygène. * ^
J’exposai au soleil deux chcltaignes mûres dans
la même quantité d’air commun 5 j’en tins deux
autres de même à l’ombre.
Au soleil il y eut 8° \ d’acide carbonique produit
et 4° de gaz oxygène absorbé.
A V ombre il y eut 20 \ d’acide carbonique produit
et 20 5 de gaz oxygène absorbé.
§ CCXI.
Je plaçai dans un tube long et large deux poignées
de glands avec leurs involucres ; ils étoient petits
et verts: ils restèrent sous l’eau , au soleil, pendant
huit heures : la plus grande partie de l’air sortit
entre le gland et l’involucre. J’en mis de même une
petite poignée dans 5g, 45 centimètres cubes, ou 5
pouces cubes d’air commim , et ils restèrent au soleil
pendant sept heures.
L’air produit au soleil sous l’eau fut les ~ de cette
quantité d’air , il conlenoit ~ d’acide carbonique
et ~ d’azote.
Dans l’air ces glands absorbèrent tout le gaz oxy-
gène 5 j’y trouvai 26° d’acide carbonique et 70 d’azote
outre les 8o° qui étoient déjà dans l’air commun.
§ ccxir.
J ’exposai pendant 4 heures | au soleil , dans la
même quantité d’air commun, des baies de la San -
guinelle ,* elles absorbèrent tout le gaz oxygène ,
produisirent 12° d’acide carbonique et 4° d’azote.
I
( *9° )
§ CÇXIII.
J'exposai au soleil pendant 5 heures dans la
même quantité d’air commun , des baies demi-
acerbes du Solarium tuberosum , du Solanum me *
longena et du Poivre long .
Les baies du Solanum tuberosum produisirent
5° d’acide carbonique et laissèrent l’air intact.
Celles du Solanum melongena absorbèrent 1 1° de
gaz oxygène.
Celles du Poivre long absorbèrent i° ^ de gag
oxygène.
§ CCX1V.
J’exposai pendant six heures sous l’eau , au soleil ,
12 siliques vertes de haricots , dans l’air produit il
y eut 2° de gaz oxygène , 20° d’acide carbonique et
78° d’azote.
J’exposai de même au soleil dans 5q ,45 centimè-
tres cubes , ou 5 pouces cubes d’air commun , 4 sili-
ques de haricots, elles y détruisirent i4° de gag
oxygène et y produisirent 120 d’acide carbonique
et 6° d’azote.
§ CC XV.
J’exposai sous l’eau au soleil , pendant 7 heures,
un grand nombre de baies noires du Laurier , elles
11’y donnèrent que 54,66 centimètres cubes , ou un
pouce et | cube d’air, qui contenoit 48° d’acide car-
bonique, 2° de gaz oxygène , probablement attaché
aux baies , et le reste d’azote : ces baies se couvrirent
de petites bulles.
Je fis la même expérience sur des baies vertes;
elles donnèrent moins d’air que les mûres , il n’y en.
( 191 )
avoit que le quart de 5 pouces cubes , dont il y eut
6° d’acide carbonique , 8° de gaz oxygène et le reste
d’azote : les baies vertes donnent donc plus de gaz
oxygène que les mûres.
J’exposai 12 baies de laurier dans 5g, 45 centi-
mètres cubes , ou 5 pouces cubes d’air commun au
soleil; pendant 7 heures elles absorbèrent io° de
gaz oxygène et produisirent 6° d’acide carbonique.
Douze de ces baies , exposées sous l’eau , ne don-
nèrent. presque point d’air.
§ CCXVI.
Je mis 12 fleurs de Valthea ojjicinalis pendant
six heures sous l’eau au soleil, elles y donnèrent g, go
centimètres cubes, ou un | pouce cube d’air , conte-
nant un peu d’acide carbonique et le reste d’azote.
Trois fleurs d’althea exposées au soleil dans 5g, 4 5
centimètres cubes , ou 5 pouces cubes d’air commun
pendant trois heures , absorbèrent tout le gaz oxy-
gne, produisirent 6° d’acide carbonique et 20 d’azote.
Deux feuilles d’althea exposées au soleil dans la
même quantité d'air commun , pendant six heures ,
produisirent 20 d’air, je trouvai dans le mélange 5.9
d’acide carbonique produit et i° de gaz oxygène
absorbé.
Deux autres feuilles mises sous Veau du puits au
soleil , pendant six heures , produisirent 5° d’air ,
c’éloit 5° de gaz oxygène ; dans l’eau distillée 3 elles
donnèrent quelques bulles d’un air excellent.
Huit capsules vertes d’althea , contenant leui's
graines et dépouillées de la corolle verte , furent ex-
posées pendant six heures au soleil , dans la même
( *92 )
quantité d'air commun ; elles y absorbèrent tout le
gaz oxygène, et produisirent io° d'acide carbo-
nique et io° d’azote.
Huit autres capsules semblables , exposées sous
l’eau au Soleil pendant le meme temps, produisirent
— d’air de 5 pouces cubes : c’étoit de l’acide carbo-
nique.
§ CCXYII.
J’exposai au soleil dans 5g, 45 centimètres cubes,
ou 5 pouces cubes d’air commun , pendant trois
heures, deux cônes verts du sapin sauvage; ils y
produisirent 2° d’acide carbonique , et laissèrent
l’air intact. _
Les fruits durs , résineux et ligneux du pin et du
sapin ne gâtent pas l’air, ils produisent au soleil un
peu d’acide carbonique.
§ CXCVIII.
J’exposai au soleil , sous Veau du puits , 3 épis
verts du seigle , j’en mis autant dans l’eau privée
d’acide carbonique v les tiges et les barbes furent
couvertes de bulles.
Les épis dans Veau du puits donnèrent six fois
plus d’air que dans l’eau désacidulée , et il étoit deux
fois meilleur que l’air commun; il fut aussi très-bon
dans l’eau désacidulée.
§ CCXIX.
Les graines de V ALcœa rosea mures furent expo-
sées en grand nombre sous l eau au soleil pendant
huit heures , elles y donnèrent trois quarts de pouce
cube d’air; un quart étoit de l’acide carbonique, le
reste de l’azote.
J’exposai
( i93 )
i.
J’exposai de meme un grand nombre de ces graines
dans 5g, 45 Centimètres cubes , ou 3 pouces cubes
d’air commun , pendant le même temps ; elles absor-
bèrent g" de gaz oxygène , et produisirent y0 d’acide
carbonique»
§ ccxx.
J’exposai pendant quatre heures au soleil , dans la
même quantité d'air commun que la précédente ,
huit petites galles des pétioles des feuilles du populus
alba ; elles étoient grosses comme une baie de lau-
rier , elles absorbèrent tout le gaz oxygène, pro-
duisirent 90 d’acide carbonique , et conservèrent leur
couleur»
§ CCXXT.
J’exposai au soleil pendant trois heures | dans
59,64 centimètres cubes, ou 2 pouces cubes d’air
commun cinq petites galles rougeâtres de l’osier
salix vitellina ; elles y produisirent 5° d’acide car-
bonique et absorbèrent 5° de gaz oxygène»
11 se forma un creux dans ces petites galles; le ver
qui y habitoit étoit vivant après fi expérience; cela
ne doit pas étonner , puisque ces vers qui sont ex-
posés tout le jour au soleil y vivent fort bien»
§ CCXXII.
Enfin j’exposai sous l'eau , au soleil, 18 galles du
chêne, elles conlenoient en apparence le petit œuf
qui devoit donner naissance au ver; mais c’étoit le
ver lui-même , prêt à se changer en chrysalide. L’air
produit contenoit io° d'acide carbonique et le reste
d’azote.
Je mis de même dans 59,45 centimètres cubes , oit
Tome 5. . N
( i94 )
5 pouces cubes cl’air commun , trois galles plus pe-
tites; elles y restèrent trois heures au soleil; ces
trois galles réunies , qui faisoierit à peine une des
galles précédentes, absorbèrent 4° de gaz oxygène
et produisirent 5° d’acide carbonique.
§ CCXXIll.
Il résulte de ces expériences, i° que les fruits à
l’ombre, dans l’air, absorbent le gaz oxygène et pro-
duisent l’acide carbonique.
2.° Les fruits au soleil , sous l’eau , donnent le
gaz acide carbonique et quelquefois un peu de gaz
oxygène.
5.° Les siliques , les baies donnent de cette ma-
nière beaucoup d’azote.
4.° Les épis verts du seigle donnent sous l’eau
beaucoup de gaz oxygène.
CHAPITRE Y IL
Réflexions générales sur les sujets traités dans
ce mémoire (î).
J’ai dit pourquoi j’avois fait surtout mes expé-
riences avec des plantes grasses , ou charnues et
exotiques ou indigènes , d’un pays plus chaud que
le nôtre; je senlois que leurs feuilles donneraient
plus d’air que les feuilles des autres plantes , parce
qu’ayant une épaisseur plus grande, elles dévoient
(i) Ces réflexions sont traduites d’un morceau compose par
Spallanzàni, et je les donne ici comme je les ai trouvées dans
scs papiers.
i
( )
'en contenir davantage; outre cela leur épiderme
étant pins dur et plus résistant, illeur faisoit mieux
supporter les inconvéniens de la clôture dans une
atmosphère fort, humide > et les rendoit plus propres
à des expériences prolongées. Enfin , comme ces
plantes croissent dans des climats plus chauds que
les nôtres, je ne pouvois supposer qu’elles souffris-
sent par une chaleur de 6 ou 7 0 plus grande qu’elles
éprouvoient sous mes vases au soleil qu’en plein air,
dans ce pays, sous les rayons de cet astre , tandis
qu’elles dévoient en éprouver une plus forte encore
dans leur vraie patrie.
Ces plantes , constamment exposées au soleil sous
l’eau , m'ont toujours donné beaucoup d’air meil-
leur que l’air commun , parce qu’il y avoit beaucoup
plus de gaz oxygène; c’étoit néanmoins un mélange
des gaz oxygène , carbonique et azote.
Quand l’eau dans laquelle ces plantes donnent de
l’air au soleil est acidulée avec l’acide carbonique , le
gaz oxygène qu’elles fournissent est plus pur et en
plus grande quantité.
Senebier prétend que si l’eau qui environne la
plante est privée d’acide carbonique, elle ne donne
pas de gaz oxygène. Je n’ai’ pas encore fait cette
observation ; mais comme l’eau du puits dont je
me suis servi confient plus ou moins décide carbo-
nique, je n’ai pu décider celle question avec elle.
J’ai bien vu que, les plantes mises à l’ombre sous
l’eau ne donnent point d’air, ou si elles en donnent,
ce qui est rare , il est mauvais.
Mais si l’on expose les plantes au soleil dans l’air*
( jg6 )
commun , alors elles l’augmentent plus ou moins , et
il se trouve , pour l'ordinaire , moins bon qu’il n’é-
toit. Cependant, celte augmentation de l’air et ce
gaz oxygène supérieur en pureté à l’air commun
que quelques plantes donnent dans l’air clos , ne sont
jxas comparables à la quantité d’air et de gaz oxygène
que ces plantes produisent lorsqu’elles sont environ-
nées d’eau de toutes parts.
Il y a donc une cause qui trouble plus ou moins la
sortie de l’air ou du gaz oxygène dans les piaules
plongées dans l’a if commun , lorsqu’elles sont expo -
sées au soleil : quelle peut être cette cause ?
Ce n’est pas la chaleur intérieure des vases où se
faiL l’expérience , puisque , comme je l’ai observé
jusqu’à présent, elle doit être pelile relativement à
la chaleur que les plantes exotiques dont je me suis
servi éprouvent dans leur patrie.
Ce n*esl pas la clôture des vases pleins d’airs qui
empêche la sortie de l’air hors des plantes qui y sont
renfermées, puisque l’on observe les mêmes phéno-
mènes dans les vases fermés hermétiquement , comme
dans ceux qui ne le sont pas.
Mais il est facile de voix- que , pour se former une
idée de cet obstacle , il faudroit connoître la vraie
cause productrice de l’air rendu par les plantes ex-
posées sous l’eau au soleil.
On a deux hypothèses pour expliquer ce fait,
l’une est tirée de l’eau elle-même ; elle est adoptée
par plusieurs physiciens et par M. Four roy , dans
sa Chimie , T. IV , pag. io. Il prétend que l’eau
absorbée par les plantes et portée dans les feuilles s'y
i
I
( 19-7 )
décompose , que les feuilles absorbent l’hydrogène
et laissent libre l’oxygène; mais que la lumière fa.
vorise celte décomposition, puisqu’elle ne se fait pas
à l’ombre. Il est donc clair qu’il doit y avoir une
plus grande absorption de l’air par les plantes plon-
gées dans l’eau et exposées au soleil , que dans l’air,
puisqu’elles ne peuvent sucer dans l’air que la petite
quantité d’eau qu’il y a.
La seconde hypothèse est tirée de l’acide carbo-
nique décomposé dans les plantes ; elle est toute
entière de Senebier. Voici quelques-unes des raisons
qu’il emploie pour l’établir comme il me les a com-
muniquées dans sa lettre du 21 Février 1798.
« J’ai fait voir que les plantes 11e donnent dans
» l’eau du gaz oxygène que lors que l’eau où on les
» place contient de l’acide carbonique. »
» Desaussure le fils a bien montré que les plantes
» végéloient mal dans un air privé d’acide carbo-
» nique et qu’elles végéloient vigoureusement dans
» une atmosphère qui en conlenoit jusques à un
» douzième de son volume. »
Il lire de là ceLle conséquence qu’il n'est pas dou-
teux que l’origine du gaz oxygène dans les plantes
ne soil la décomposition de l’acide carbonique.
« C’est encore un fait bien prouvé, ajoute Sene-
» hier, que la terre de jardin, celle des' prés, des
» champs fournissent une grande abondance d’a-
» eide carbonique à l’air libre comme dans les vases
» clos, et que celle terre perd cette propriété , lors-
» qu’elle a été bouillie long-temps dans beaucoup
v d'eau , et: qui m’a fait croire avec beaucoup d’au-
( 198 )
» très considérations , que la sève portoit dans les
» feuilles cet acide carbonique qui s'y décomposoit
» par l’action de la lumièi-e. »
En comparant les,deux hypothèses, celle de l’eau
et celle de l'acide carbonique, je préfère la seconde,
La première n’a pas les bases sur lesquelles la seconde
repose. Outre les raisons que Senebier m’a données
dans sa lettre pour appuyer sou opinion, j’en ai
aussi qui la favorisent, elles sont tirées de ce que
le cactus cochilinifer environné par une eau chargée
d’acide carbonique donne beaucoup plus d’air, que
lorsqu’elle en a peu, ou qu’elle en manque, et je
crois eu avoir trouvé plusieurs autres exemples dans
la longue suite de mes expériences.
Les plantés environnées d’eau et exposées ainsi
au soleil donnent de l’acide carbonique ^ on le trouve
abondamment dans le gaz oxygène produit alors
par ces plantes, comme je l’ai vu avec le cactus
cochinilifer , et l’on peut l’expliquer en disant , que
Ja lumière n’a pas suffi pour décomposer tout l’acide
carbonique qui sort de la plante, et qu’il y en a quel-
que petite portion , qui s’échappe avec le gaz oxygène
devenu gaz par sa combinaison avec le calorique.
Enfin l’acide carbonique que l’on trouve toujours
en plus ou moins grande quantité dans les gaz hy-
drogène et azote, où l’on fait végéter les plantes , est
une nouvelle preuve, qu’elles en laissent échapper,
comme cela arri ve lorsque les plantes ne paroissenl
pas même avoir souffert , ce que j’ai vu dans les
plantes grasses exotiques j on ne peut pas. dire alors,
que cet air soit lq produit de la fermentation qu’elles
ont éprouvée*
( 199 )
Quand on a posé ces faits, on explique comment
les plantes plongées sous l’eau donnent beaucoup
plus de gaz oxygène, que lorsqu’elles sont dans l’air
commun , parce que dans la supposition fondée que
les eaux contiennent de l’acide carbonique , les plantes
qui y sont plongées doivent donner plus de gaz
oxygène , parce qu’elles absorbent l’eau avec plus
d’acide carbonique , que dans l’air qui ne contient
pour l’ordinaire que d’acide carbonique de son
volume.
Voici comment Senebier en rend raison , d’après
ces principes. « Les plantes sous l’eau sont envelop-
» pées , m’écrit-il, par l’acide carbonique qu’elle
» contient , et les plantes le boivent , surtout par
» leurs pétioles , alors la lumière le décompose dans
» leur parenchyme; mais la quantité de cet acide
» carbonique est très-petite dans l’air. Il doit donc
» y avoir dans le premier cas beaucoup de gaz
» oxygène produit ; tandis qu’il y en aura moins
» dans l’air clos, et surtout quand la plante y sera
» altérée , on par la chaleur , ou par l’humidité
» produite par l'évaporation de la plante , ou par
)> tous les deux. »
On voit ainsi pourquoi la plupart des plantes
plongées dans l’air ne donnent pas du gaz oxygène,
et pourquoi elles le gâtent plus ou moins ; l’acide
carbonique ne pouvant se décomposer à cause de
l’absence de la lumière , se mêle réduit en gaz avec
l’air commun.
Il est aussi probable qu’alors outre l’acide car-
bonique sorti de la plante il s’en forme encore au
( 200 )
dépens de Pair commun avec le charbon de là plante.
J’ai observé que toutes choses étant d’ailleurs égales,
quelques plantes donnent dans Pair commun plus
d acide carbonique que dans les gaz hydrogène et
azote.
En récapitulant donc mes observations sur les
plantes grasses , il me paroît démontré que ces plantes
qui donnent le plus de gaz oxygène , lorsqu’elles
sont plongées sous Peau , et qui en donnent alors
plus que dans leur état naturel, c’est-à-dire au soleil
dans Pair, en donnent peu dans Pair clos; de sorte
qu’il n’y a pas de raison pour qu’elles en donnent
beaucoup davantage à Pair libre , d’autant plus que
sans lumière Pair que les plantes fournissent est
plutôt mauvais que bon. Aussi je ne saurois dire
quel moyen compensateur, il peut y avoir pour
remplacer le gaz oxygène que les animaux con-
somment (1 )..
(i) Note de l’Editeur. Ici finit tout ce que Spallanzani a voit
çomposé pour le mémoire qu’il vouloil donner à ce sujet.
( 201 )
Lettre du Professeur Spallanzani à
Monsieur Jean- Antoine Giobert ,
célébré chimiste ,
y . •
Sur les plantes renfermées sous des vaisseaux
pleins d eau ou d'air , et exposées à l'action
immédiate de la lumière solaire comme à
l'ombre (1).
ous vous souviendrez aisément, Monsieur, que
lorsque vous vîntes à Pavie l’hiver passé , Arous me
files une aimable visile, et qu’entre les diverses choses
dont nous parlâmes, je vous enlrelins de quelques-
unes de mes observations commencées sur l’air
que les piaules fournissent au soleil , et je vous dis
que je les avois trouvées discordantes avec celles
qu’a voient faites sur le même sujet, deux illustres
physiciens, fngenhouz et Senebier. Je crois encore
que je vous avois parlé des motifs qui nfa voient
engagé à faire ces recherches. L’intérêt que vous
y mîtes et la curiosité, que vous manifestâtes pour
en connoître les résultats me font croire, que vous
verrez sans peine que je vous en communique les
principaux dans celte lettre.
(1) Note rie V Editeur. Spallanzani m’envoya cette lettre eu
manuscrit avant de la publier, et je l’engageai à la faire imprimer,
afin que l’on sût les découvertes qu’il avoit faites , et celles qu’il
piéparoit. J’ai cru convenable de la joindre ici , quoiqu’elle ait
déjà paru dans le Journal de physique et les Annales de chimie,
afin que l’on eût touL ce que Spallanzani a fait sur cc sujet, et
que l’on pût juger ses expériences que j’ai racontées d’après les
lopres idées de ce grand observateur.
( 202 )
Mais avant de le faire permettez-moi de vous
donner une idée de quelques-unes de mes observa-
tions sur les plantes exposées sous l’eau au soleil et
à l’ombre; parce qu’elles me paraissent liées étroi-
tement avec mon but. Un des objets capitaux des
recherches des deux physiciens dont j’ai parlé a été
surtout de connoîlre la quantité et la qualité de l’air
produit ; après avoir déterminé la première, ils s’ac-
cordent sur la seconde ; ils trouvent que cet air-
chargé d’une plus grande quantité de gaz oxygène
que l’air commun est meilleur que lui, et ils en
fixent le degré précis. On ne pouvoit pas faire da-
vantage avec les moyens qu’ils avoient alors. Comme
cet air n’étoit jamais pur , que je sache; le gaz oxy-
gène fourni par les plantes devoit être mêlé avec
quelque substance méphitique. Mais quelle est la na-
ture de cette substance? C’est ce qu’il imporloit de
savoir; par le moyen de votre eudiomèlre, je suis
parvenu à découvrir que le gaz oxygène fourni par
les plantes exposées sous l’eau au soleil est insépa-
rablement joint avec le gaz azote , et souvent encore
avec l’acide carbonique , donl je me réserve de donner
une fois les proportions.
Senebier a été le premier qui a observé que les
plantes exposées au soleil sous l’eau chargée d’acide
carbonique donnent une quantité plus grande d’air ,
et qu’il est alors beaucoup plus pur. Il découvrit
aussi au contraire, que les eaux distillées et bouillies
privées ainsi de leur acide carbonique font produire
aux feuilles beaucoup moins d’air que l’eau com-
mune. 11 trouva néanmoins une exception dans le
( 2o5 )
ffimpervivinn tectorum , et la joubarbe, qui don-
nent. souvent une égale quantité d’air dans les eaux
bouillies distillées et communes.
Mes observations cadrent fort bien avec les siennes
sur cette plante placée au soleil dans l’eau privée
d’acide carbonique par l’eau de chaux; mais je vois
encore qu’un nombre d’autres plantes qui n’est pas
petit fournit autant d’air, et que cet air est égale-
ment bon dans celte eau, comme dans l’eau com-
mune. Je démontrerai même, que diverses planles
ne refusent pas de montrer le même phénomène
dans l'eau de chaux.
Quant à l’eau chargée d’acide carbonique, mes
expériences m’ont faiL voir, que dans quelques planles
l’air produit au soleil dans cette eau est plus abon-
dant que dans l’eau commune; mais qu’il y a d’au*
1res plantes, où elle est égale , quand l’eau est dis-
crètement acidulée par l’acide carbonique; et que
la production d’air est beaucoup plus petite, quand
l’eau en est saturée.
Que peut-on penser de ces anomalies ? Peut-être
que certaines planles ne produisent abondamment
Je gaz oxygène, que lorsqu’elles sont en contact avec
l’eau chargée de l’acide carbonique , qu’elles décom-
posent, et que d’autres fournissent ce gaz oxygène
par la décomposition de l’eau. Vous voyez bien
que je fais ici allusion aux deux grandes théories
qui sont le plus régnantes, et qui sont défendues
par des auteurs respectables ; je me permettrai d’en
dire ce que je pense.
A présent, si au lieu d’exposer les plantes à l’action
( 204 )
• • I
immédiate du soleil, on les place à l’obscurité de
la nuit naturelle, ou artificielle, la scène change
tout-à-fait d’apparence. Ce changement a été vu
sous deux points de vue différens par Ingenhouz et
Senebier ; le premier veut que les plantes fournis-
sent alors un air purement méphitique et fort mau-
vais. Le second affirme que les planles ne donnent
point alors d’air perceptible sous l’eau , et que si
elles en donnent, cet air méphitique est en très-petite
quantité et le produit d’une fermentation commencée.
Je ne veux point m’ériger en juge entre ces deux
physiciens , qui se sont occupés de ce sujet pendant
plusieurs années ; d’autant plus que je ne l’ai étudié
que depuis six mois; je me permettrai seulement
d’ouvrir la bouche sur cette question et je dirai
qu’une très-longue suite de faits m’engage à pancher
vers l’opinion du naturaliste de Genève.
Les observations faites sur les plantes couvertes
d’eau dévoient me servir de terme de comparaison
pour celles que j’ai faites dans l’air clos; aussi dans
le temps que je renfermois des plantes dans l’air
commun sous des récipiens et que je les exposai ainsi
au soleil et à l’ombre, je laisois les mêmes expériences
dans les mêmes circonstances sous l’eau. J’entrepris
celte recherche , parce qu’elle étoit nouvelle en grande
partie, puisque les deux observateurs dont j’ai parlé
s’étoient surtout occupés du gaz oxygène fourni par
les planles exposées sous l’eau au soleil; j’ignore si d’au-
tres ont étudié ce sujet : je l’entrepris encore, parce
qu’en faisant ces expériences dans l’air sur les planles
terrestres, j’avois l’avantage de les étudier dans leur
( 520 5 )
état naturel pour leur naissance, leur accroissement,
leur multiplication et dans le lieu où elles se trouvent
véritablement dans leur pleine végétation disposées à
verser dans l’air le gaz oxygène. Quand on les con-
sidère seulement sous l’eau , ou les tient dans une
situation violente, et qui ne leur est point naturelle.
Il n’y avoit aucun danger que le mélange de l’air
produit avec celui qu’elles émettent dans l’air où on
les renferme donnât lieu à des équivoques dans les
résultats; parce qu’en connoissant le volume de l'air,
où les plantes avoient été renfermées par le moyen
d’un tube gradué, en faisant rentrer l’air de l’ex-
périence dans ce tube, je savois si son volume s’é-
toil accru , et je connoissois la quantité de l’accrois-
sement ; l’eudiomèlre m’apprenoit alors de même
combien cet air s’étoit . amélioré (1).
Ingenliouz appuyé sur des raisonnemens analo-
giques pense que les plantes produisent une quantité
de gaz oxygène plus grande à l’air libre que celle
qu’elles répandent sous l’eau.
Senebier a une opinion opposée: il prétend au
moins que les plantes doivent donner une quanlié
d’air beaucoup plus petite dans l’air libre que sous
l’eau , et il l’établit sur des raisons très-plausibles ;
mais il croit que cel air rendu par les plantes est
(i) Note de l’Editeur. Je me réserve, dans te mémoire que je
publierai sur ce sujet, de détailler toutes les attentions et tous les
moyens que j’ai employés pour faire ces expériences avec la plus
grande exactitude , et je crois pouvoir dite que je les ai poussées
jusqu’au scrupule.
( 206 )
alors meilleur que l’air commun. Il falloil donc
consulter la nature . et voici les résultats que m’ont
fourni une prodigieuse quantité de végétaux tenus
au soleil dans l’eau et dans l’air.
Toutes les plantes confinées dans l’eau ou presque
toutes m’ont fourni une qualité d’air contenant beau-
coup plus de gaz oxygène que l’air commun; quel-
ques-unes en avoient un tiers de plus , quelques
autres le quadruple et même davantage ; mais les
choses se montrèrent autrement dans l’air commun ,
il n’étoit pas rare que le volume en fut accru de
quelques centièmes ; cet excès étoit peu de chose eu
comparaison de la quantité d’air fournie sous l’eau
par les mêmes plantes; plus souvent encore l’air
commun restoit comme il étoit, mais dans d’autres
le gaz oxygène étoit introduit dans les plantes , et
perdu pour l’atmosphère où elles étoient renfermées:
il est vrai qu’il n’y eut qu’un très-petit nombre de
plantes qui donnassent un air dont la quantité du
gaz oxygène fût plus petite que celle de -l'air com-
mun ; dans un grand nombre il fut égal; dans d’au-
tres il ne lui fut supérieur que de quelques cen-
tièmes de degré, et les plantes qui se portèrent le
mieux accrurent seulement de cinq, de six , de neuf
centièmes au plus le gaz oxygène atmosphérique (lJ.
En prenant donc un terme moyen la quantité de
(i) Note de Y Auteur. Des plantes analogues à ces dernières
' étoient probablement celles dont parle Ingenhouz, qui avoient le
pouvoir de rendre meilleur l’air gâte quand ou les y exposoit à la
lumière.
( 207 )
ce gaz pi’oduit dans Pair clos par les plantes qu’on
y renfermoit, fut très- petite comparée avec celle
qu’on obtenoit dans Peau. D’où il x'ésulte que cette
amélioration considérable de Pair atmosphérique
qu’on croit produit par le gaz oxygène, que les
plantes y versent dans Peau , n’est pas certainement
celui que les plantes y Versent dans Pair où on les
renferme ?
Mais que dirons-nous des plantes renfermées dans
l’obscurité , et par obscurité je n’entends pas seu-
lement celle de la nuit , mais une obscurité bien
moins forte comme est celle, par exemple, d’une
chambre éclairée par la lumière réfléchie du soleil.
Le physicien Hollandois que j’ai loué m’avoit pré-
venu à cet égard, il avoit démontré que les plantes
y gâtent Pair commun, et il avoit pensé, que cet
effet étoit produit par une exhalaison empoisonnée
sortant de la plante qui étoit en partie l'acide car-,
bonioue, et en partie Pair entièrement méphitique.
Quoique nous soyons d’accord sur l’altération de
Pair , nous sommes bien loin de l’être sur ses causes,
et je ri’ai point cru que ce fût une peine perdue que
de reprendre après lui ce sujet.
J’élois à Pavie pendant ces jours offusqués par
ces nuages bas et opaques qui y sont bien plus fré-
quens , que les jours sereius : de sorte qu’il me fut
fucile d’entreprendre les expériences variées et nom-
breuses que je pouvois vouloir faire. Le résultat
fut constamment celui-ci. Je n’ai jamais vu le vo-
lume de Pair commun augmenté par les plantes
que j’y renfermois. J’observai au contraire qu’il di-
( 2ü8 )
miiiuoiL , et que cet air éto'il surtout altéré par la
diminution successive de son gaz oxygène; et par
la production de l’acide carbonique ; enfin qu’au
bout de quelques heures le gaz oxygène étoit dis-
paru , l’altération de l’air commun est donc pro-
duite par le pouvoir qu’ont les plantes de produire
avec leur oxygène l’acide carbonique, mais si je
faisois passer mes plantes de l’obscurité au soleil et
même à toute la clarté du jour, elles ne cessoienl
pas de devenir, sous l’eau où on les plongeait, une
source de gaz oxygène: aussi il me parut que les
plantes dévoient causer une grande altération à l’air
respirable de l’atmosphère, si je calculois la durée
des ténèbres nocturnes, l’obscurité répandue parles
jours pluvieux, par les nuages noirs , et l’ombre
elle-même produite dans un ciel serein par les grands
arbres et portée sur les plantes voisines; je voyois
alors combien la pureté de l’air devait en souffrir.
Les observations donLje viens de parler regai’dent
les feuilles et la cime des plantes naissantes, comme
celles qui fournissent le plus d’air; mais il y a d’au-
tres parties qui allèrent l’air commun à l’obscurité,
cl même quelques-unes à la lumière immédiate du
soleil. Vous comprenez bien que je veux parler des
fleurs et des fruits , et cette découverte importante
a éLé en très-grande partie faite par lngenhouz : j’ai
eu le plaisir de la vérifier sur un très-grand nombre
des unes et des autres, et elle m’a paru peut-être
sans exception dans tout le règne végétal. U est vrai
que ce physicien pense que ceLlc altération de l’air
est alors produite par une émanation pernicieuse qui
*6
( 209 )
se fait hors de ces parties des végétaux; mais je
montrerai qu’elle est produite par la même cause
qui vicie l’air à l’ombre par les feuilles et les tendres
rameaux des plantes qui y sont.
Eli rassemblant sous un seul point de vue les faits
principaux relatifs aux plantes exposées au soleil et
à l’obscurité dans le sein de l’air, il en résulte, que
les feuilles de ce nombre infini de végétaux et leurs
sommités , lorsqu’elles sont frappées par la lumière
-immédiate du soleil augmentent la quantité du gaz
oxygène qui est dans l’air; mais que cette augmen-
tation est bien loin d’être aussi abondante qu’op
l’avoit crue; d’ailleurs ces parties qui fournissent le
gaz oxygène an soleil diminuent la quantité de ce
même gaz pendant la nuit, pendant les jours om-
breux. eL le changent lentement , mais constamment
en acide carbonique î que les fleurs le diminuent de
même à l’ombre et au soleil , et que les fruits pro-
- duisenl presque un effet semblable à celui des fleurs»
Que conclure donc de ces effets opposés? Que l’al-
tération de l’air respirable est plus grande que son
amélioration, ou du moins que le mal est contre-
balancé par le bien; de sorte que les plantes établi-*
roient une espèce d’équilibre entre la production de
cet air vital et sa destruction, à peu près comme la
destruction dans la masse des êtres vivons est mise en
équilibre par leur reproduction.
Mais dans l’une et l’autre hypothèse, comment
• les végétaux pourront-ils contribuer par le gaz oxy-
gène qu’ils produisent à pin ifier l’air atmosphérique
toujours altéré par la prodigieuse quantité d’acide
Tome 5» . O
( 210 )
carbonique fourni par la respiration des animaux,
par les fermentations, les combustions, etc. , comme
plusieurs le pensent? Vous comprenez bien, mon
cher ami, que par les simples aperçus de cette lettre
j’ai moins prétendu vous plaire que vous dire des
choses qui ne scroient pas tout-à-fait indignes de
votre attention. Quelle que soit mon opinion, je vous
la dirai dans le Mémoire que je vous adresserai , et
que vous recevrez bientôt; je le publierai incessam-
ment pour connoître l’opinion des physiciens et en
particulier du célèbre Senebier, qui s’est tant occupé
des végétaux, et sur-tout de celle partie de leur his-
toire, et à qui je communique successivement par
notre correspondance, le journal de mes obser-
valions.
Je souhaite que le public soil éclairé sur ce sujet,
et qu’il puisse prendre un parti sans aucune pré-
vention; si par hazard j’ai rencontré la vérité, cer-
tainement j’en serai flatté, et si je ine suis trompé,
il ne m’en coûtera pas pour revenir de mon erreur;
je puis vous assurer, que dans l’étude de la nature ,
je ne trouve du plaisir qu’en m’instruisant.
Vous savez bien que c’est l’opinion de plusieurs
physiciens, que non-seulement les plantes mais en-
core les eaux qui recouvrent le globe, concourent
à la purification de l’atmosphère en décomposant
l’acide carbonique qu’elles absorbent. Ce sujet aussi
beau que curieux qui n’a point encore été discuté
par aucune preuve directe m’a entraîné par sa rcs-
semblance avec celui de la respiration , et je me suis
occupé à l’examiner dans ce but par la voie de l’ex-
t ail )
périence, aussi ce mémoire sera associé à un autre sur
cette belle question. Les eaux du globe décomposent-
elles l'acide carbonique qu’elles reçoivent de Pat-
in osplière ?
Pavie, i.er Messidor an VI de la République.
Quelques Lettres et Fragmens de
Lettres de Sp a ll anzani à Senebier ,
et de Senebier à Spallanzani, propres
à éclairer la question traitée dans les Mé-
moires précédons.
Letti'e de Spallanzani du 8 Juin ijg8.
A-VA n t de répondre à votre lettre du 26 Mai ,
permeltez-moi de vous entretenir un moment sur le
Mémoire manuscrit; qui accompagne celte lettre (1) 5
en le lisant vous serez peut-être étonné que je me sois
occupé de cette matière , mais apprenez-en la cause ;
c’est un pur accident qui l’a occasionné. Un jour
que j’étois tracassé par la goutte , je réfléchissons sur
l'opinion de quelques physiciens qui attribuent aux
eaux du globe la propriété de décomposer l’acide
carbonique produit dans l’atmosphère ; il me sembla
que je pouvois résoudre ce problème d’après les prim
ripes du mémoire, et je le fis d’abord par ma première
(1) Note de l’Editeur. Ce Mémoire, que j’ai en manuscrit, est
publié en entier à la tête de cet ouvrage : j’engageai Spallanzani A
le garder pour le joindre à celui qu’il m’auuonçoit, en l’assurant de
l’oiiginalité de sa recherche, et en lui annonçant qu’il u« paroissoit
pas que personne s’occupât de cet objet.
( 212 )
expérience dont les autres ne sont que le dévelop-
pement.
J e vous envoie ce mémoire , parce que vous êtes
beaucoup plus versé que moi dans ces matières, et
que vous verrez d’abord , si j’ai frappé au but; d’ail-
leurs vos idées pourront me fournir le moyen de
perfectionner cet écrit. Ensuite comme vous savez
avant nous, par les Journaux, ce qu’on fait en
France et en Allemagne , vous pourrez me dire ,
si le fond de mon ouvrage est neuf, ou si j’ai déjà
été prévenu, parce que si les moyens que j’ai em-
ployés sont vraiment originaux , je désire d’insérer
ce mémoire dans les Annales de chimie de Paris.
Vous verrez que je promets un second mémoire sur
l’amélioration de l’air atmosphérique par les végé-
taux; mais je ne veux y toucher que les résultats
généraux , sans y nommer même les espèces de
plantes que j’aurai employées, parce que ces détails
sont seulement pour vous comme je le dirai dans
ce second mémoire.
J’ai le plus grand plaisir à me trouver d’accord
avec vous sur les points im port ans. Aux pag. 228 et
229 du tome I de vos Mémoires physico-chimiques ,
vous dites que les plantes au soleil doivent donner
beaucoup moins de gaz oxy gène dans l’air que sous
l’eau . et vous en exprimez la raison à la page 180 ;
vous confirmez encore cela dans la lettre instructive
que vous m’avez écrite le 21 février dernier; mes
recherches m’ont fait voir la même chose ; ce qui
est opposé à l’idée d’ingenhouz , pag. 80 du Tom. II
de ses Expériences sur les végétaux , que je citerai ;
et dont je montrerai l’erreur.
( 215 ")
Vous prouvez aussi la grande influence du gaz
acide carbonique sur la production du gaz oxygène
parles plantes exposées au soleil sous l’eau chargée
de cet acide , et je la montre aussi de diverses ma-
nières par plusieurs expériences variées.
Vous prouvez encore , contre l’assertion du phy-
sicien hollandais , que les plantes sous l’eau à l’ob-
scurilé ne donnent point d’air. Quoique je ne me
croie pas capable de décider celle question entre
vous et Ingenhouz , cependant je fais voir que je
préfère votre opinion à la sienne ; je raconterai que
sur 1 14 plantes différentes , tenues dans des vases
pleins d’eau à l’obscurité , il y eu a eu seulement 10
qui m’ont donné un peu d’air , qui étoit un mé-
lange d’acide carbonique et d’azote ; cependant ces
plantes ont été onze heures à l’obscurité , et ce fut
seulement au bout de ce temps que ces 10 plantes
commencèrent à donner quelques bulles ; j’eus
même lieu de soupçonner que ces plantes commen-
çoient alors à se gâter.
Je suis donc parfaitement d’accord avec vous sur
tous ces points , et je le suis de même sur la plus
grande partie des points les moins importans.
Nous avons enfin reçu les derniers cahiers des
i
Annales de Chimie de Paris ; j’ai lu avec plaisir,
dans l’un d’eux, un Mémoire de Desaussure le fils,
et j’ai vu qu’il vous y rendoil la justice que vous
méritez , etc. (1).
( i ) Je stipprime ici diverses lettres qui ne serment que I;*
répétition des expériences racontées dans ce mémoire.
( 2l4 )
Extrait de quelques lette.es écrites par
Senebier cl Spalljnzjni (i).
Je lui marquai que depuis long -temps j’avois
trouvé que le gaz oxygène fourni par les plantes au
soleil sous 1 eau eloil mêlé/avec l’acide carbonique,
et que lorsque cet acide avoit été absorbé par l’eau,
il restoit encore dans le gaz oxygène une impureté
qui m’avoit paru le gaz azote; mais que j’élois em-
barrassé sur son origine , je lui appris que j’en avois
parlé assez longuement dans un Mémoire lu à l’a-
cadémie de Turin en 1790 , et publié dans la collec-
tion de ses Mémoires. J’ajoutai cependant que j'é-
tois encore plus assuré de l’existence de ce gaz azote
dans l’air produit par les plantes depuis les expé-
riences qu’il avoit faites.
Je lui parlai de ses expériences faites sur diverses
plantes qui donnent à-peu-près la même quantité
d’air dans l’eau privée d’acide carbonique et dans
l’eau de chaux , comme dans l’eau chargée d'acide
carbonique et dans l’eau commune, et dont l’air
produit est à-peu-près aussi bon dans les deux cas;
je lui disois que pour y mettre plus d’exactitude
il faudrait peut-être faire comme moi les expériences
dans l’eau bouillie et dans l’eau distillée.
(1) Les extraits de mes lettres sout ceux-là môme que Spallan-
zani eu avoit faits ; je n’en avois aucune, copie. .l’ai cru convenable
de parler à la première personne, afin que l’ou vil bien qui étoit
celui qui parloit , mais j’y ai joint les notes que Spaltanzani y a
ttuses.
( 2l5 )
A la suite de ce paragraphe , Spallanzani ajoute
dans ses papiers , qu’il a eu les mêmes résultats que
moi avec les mêmes eaux , c’est-à-dire *pie plusieurs
plantes n’y donuoient point d’air, et qu’il n’a obtenu
cet air dans ces eaux qu’avec les plantes grasses et
les feuilles épaisses.
J’expliquai le phénomène des plantes grasses qui
donnent de l’air dans les eaux privées d’acide carbo-
nique , et même dans l’eau de chaux , par la nature
même de ces plantes , dont le parenchyme fort épais
est rempli d’une bonne quantité de cet acide carbo-
nique ou de ses élémens (ij.
Spallanzani, à la suite de cet extrait, explique le
phénomène par l’irritation que l’acide carbonique
doit produire dans ces plantes, et qui doit être bien
plus grande que dans les plantes membraneuses;
et il ajoute que Senebier cloute à présent de cette
irritabilité des plantes considérées en général (2).
Je continuai à lui parler de l’influence de l'acide
carbonique pour faire donner de l’air aux plantes
plongées sous les eaux chargées de cet acide, et je
la prouvai par la même plante de menthe mise dans
une eau privée d’acide carbonique et dans des eaux
qui en étoient plus ou moins chargées ; aloi-s , dans
(1) J’entrerai encore dans quelques details sur ces expériences
curieuses , dont je me suis déjà occupé dans ma Physiologie
végétale. [Cet ouvrage se vend chez J. J. Paschoud , Imprimeur-
Libraire , à Genève.
(2) Il faut observer que ces notes faites aux extraits de mes
lettres ctoicut Ir sujet des lettres nombreuses que Spallanzani jnra
écrites sur ce sujet.
( 2l6 )
le premier cas , la plante ne donnoît presque point
d’air, et dans les autres la quantité de l'air produit
étoit proportionnelle à la quantité d'acide carbo-
nique dissous dans ces eaux.
J’ajoutai que jusques alors j’avois été convaincu
de la décomposition de l’acide carbonique par la lu-
mière ; que son carbone , qui restoit alors libre ,
enlroit comme composant des plantes pour la plus-
grande partie ; enfin je montrai , par des expériences,
que le carbone en nature ne peut s’introduire dans
les plantes par la suction , et que l’acide carbonique
étoit le seul moyen connu qui put in traduire dans les
végétaux cet élément si considérable de leur sub-
stance.
Je lui parlai de l’influence des fleurs sur l’air ,
et _je lui disois que d’après mes expériences il ne me
paroissoit pas qu’elles consumassent autant de gaz
oxygène que les feuilles.
A cet article , Spallanzani ajoute, qu’une longue
suite d’expériences lui avoit fait voir que les fleurs
gâtaient l’air autant qu’Ingenhouz l’a voit dit; mais
cette altération est-elle produite par la substance des
fleure , ou par leur odeur? Senebier croit que c’est
le second cas ; mais j’ai vu , dit-il , que les fleurs
altèrent l’air avant d’être odorantes.
J’examme ensuite la production de l’air des feuilles
de figuier , de rosier et de pêcher dans 1 eau bouillie
et l’eau commune , et je lui marquai que ces feuilles
donnoient beaucoup moins d’air dans la première
eau que dans la seconde.
lin faisant la même expérience avec une plante
( 217 )'
grasse, le sedum anaccimpseros , je trouvai préci-
sément qu’il donnoit dans l’eau bouillie les £ de l’air
produit par les feuilles de la même plante dans l’eau
commune.
Je variai l'expérience. Une feuille de pêcher, res-
tée d’abord dans l’eau bouillie , fut mise dans une
autre eau bouillie , eL le nombre des bulles fournies
alors par cette feuille , comme leur grosseur , furent
beaucoup diminuées , tandis qu’une autre feuille qui
avoit été dans l’eau bouillie , mise dans les mêmes
circonstances que la précédente dans l’eau commune,
donna autant d’air sous l’eau commune au soleil ,
qu’une feuille du même arbre qui avoit été déjà sous
l’eau commune pendant le temps que la première
avoit été sous l’eau bouillie. Enfin je mis dans l’eau
bouillie une feuille qui avoit été dans l’eau com-
mune , et j’y recueillis le double d’air que lorsque
i’avois mis d’abord la feuille dans l’eau bouillie.
' ?■
Je répétai les mêmes expériences avec le même
succès sur le sedum anaccimpseros , et je conclus
que les feuilles , en passant de l’eau commune dans
l’eau bouillie , diminuoient la quantité de l’air qu’elles
y produisoient , et qu’en passant de l’dau bouill e
dans l’eau commune, la quantité de l’air produit
éloit augmentée ; par conséquent , que l’air fourni
dans l’eau bouillie étoit un air produit aux dépens de
l’acide carbonique contenu dans la feuille.
( 2l8 )
Extrait de deux autres Lettres de
Senebier, écrites le 25 août et à la fin
de Septembre 1 798.
J’observai à Spallanzani que j’avois remarqué
quelques différences dans les résultats de mes expé-
riences failes à Genève , et ceux de mes expériences
que je faisois alors à Rolle , mais que celte différence
éloit produite par la différente quantité d’acide car-
bonique contenue dans les eaux que j’avois em-
ployées ; que mes récipièns remplis de cette eau , et
renversés sur leur ouverture , donnoient à Rolle un
peu d’air au soleil , et qu’après l’expérience , qui du-
roit un jour, je trouvois encore de l’acide carbonique
dans l’eau.
Je fis celle expérience avec l’eau de Rolle , et une
eau bouillie qui contenoit au moins un volume d’acide
carbonique égal à celui que j’avois trouvé dans la
première ; après l’expérience je trouvai plus d’acide
carbonique fourni par cette eau que par l’autre, et
je concluois qu’il y avoit des eaux comme celles de
Genève, qui conlenoient de l’acide carbonique, et
qui ne le laissoient pas s’échapper au soleil dans les
vases clos et pleins, lorsqu’elles conlenoient moins
d’acide carbonique que les dernières, quoiqu’il y en
eût pourtant une certaine quantité (1).
(1) Spallanzani, dans son mémoire, a observé la même chose
sur les eaux qu’il chargeoit d’acide carbonique , et M. Paul a
pourtant trouvé que l’acide carbonique reste plus fortement uni à
l’eau quand elle lient avec lui dissoute une certaine quantité de
carbonate calcaire.
( 219 )
Je lui racontai que si l’on cJiargeoil d’acide carbo-
nique l’eau bouillie comme la précédente, et si l’on
y exposoit au soleil des feuilles du seclum anacamp-
seros dans, les mêmes circonstances que celle où
avoit été l’eau seule acidulée par l’acide carbonique ;
dans ce cas les feuilles du sedum cinacampseros me
fournissoient un volume d’air égal à un volume d’eau
de 28,90 grammes, ou de 538 grains f, où je trouvai |
d’acide carbonique, tandis que la même quantité d’eau
également acidulée ne me fournissoit qu’un volume
d’acide carbonique égal à un volume d’eau de 689,99
milligrammes, ou de i5 grains; d’où je concluois
que l’acide carbonique produit 11e vient pas seule-
ment de l’eau , mais encore de la plante comme le
gaz oxygène.
Spallanzani observe que ces expériences ne sont
pas décisives , puisque cet, acide carbonique peut
être venu de l’eau. Ces feuilles ayant commencé
d’abord à donner du gaz oxygène, qui a facilité la
sortie de l’acide carbonique, comme une lame d’air
mise en contact avec l’eau acidulée par l’acide car-
bonique facilite l’émission de ce gaz.
J’observe cependant deux choses sur celle re-
marque; la première c’est qu’il 11e nie pas que la
plante ait pu fournir cet acide carbonique, et il a
bien montré , que les plantes donnoienl hors d’elles
beaucoup d’acide carbonique , surtout celles qui
font observer les petits jets d’air qui eu sortent ,
comme je les avois sous les yeux , 2.0 le volume d’a-
cide carbonique égal à un volume d'eau de 689,99
milligrammes, ou de 10 grains, faisoil bien celle
( 220 )
lame cl’air qui devoil favoriser l’émission de cet acide
carbonique.
Je lui racontai les résultats fournis par les feuilles
du sedum anacampseros mises dans l’eau bouillie ,
dans l’eau commune contenant naturellement de
l’acide carbonique . et dans l’eau qui enétoit chargée
artificiellement. Ces feuilles , dans l’eau bouillie ,
donnoient très-peu d’air , beaucoup plus dans l’eau
commune, et infiniment plus dans l’eau chargée
d’acide carbonique. Cette expérience fut faite le
matin pendant cinq heures et demie au soleil , entre
lesquelles il y en eut deux où le soleil fut quelquefois
voilé par les nuages ; je la répétai l’après-midi, au
soleil , pendant cinq autres heures de cette manière.
Une feuille de la même plante , restée le matin au
soleil dans l'eau bouillie , fut remise l’après-midi au
soleil dans l’eau bouillie , où elle donna à peine une
bulle d’air ; une feuille semblable , tenue dans l’eau
bouillie le matin et mise de même dans l’eau com-
mune, y donna un volume d’air égal à un volume
d’eau de i,8o grammes, ou de 54 grains, et une
feuille semblable mise de même dans une eau char-
gée d’acide carbonique , y donna un volume d’air
égal à un volume d’eau de 1 4,58 grammes, ou de
262 grains.
Une feuille restée le matin dans l’eau commune , et
remise l’après-midi dans l’eau commune au soleil, y
donna un volume d’air égal à un volume d’eau de 1 ,5q
grammes, ou de 3o grains; une autre semblable,
mise dans l’eau bouillie au soleil, fournit un volume
d’air égal à un volume d’eau de 79,62 milligrammes,
\
( 221 )
ou d'un grain -j ; et une feuille semblable , mise de
même dans l’eau chargée d'acide carbonique , y
donna un volume d’air égal à un volume d’eau de
28 90 grammes, ou de 558 grains.
Ces expériences me semblent prouver clairement
l’influence de l’acide carbonique sur la production
de l’air.
J’ajoutai encore à tout cela une nouvelle consi-
dération qui me sembloil frappante; les feuilles du
sedufn qui avoient donné le plus d’air surnageoient
l’eau; il falloit donc qu’elles continssent encore de
l’air , puisqu’elles alloient à fond quand elles en
étoient privées, et elles en dévoient contenir autant
puisqu’elles n’avoient point une apparence flétrie.
D’où vient donc cet air qui est sorti , s’il y en a en-
core autant dans la feuille qui en a déjà fourni infi-
niment au-delà de ce qu’elle peut en contenir , et qui
en a autant qu’elle en avoit au commencement de
l’expérience , puisqu’elle surnage semblablement ?
Il faut donc que cet air se soit reproduit aux dépens
de l’acide carbonique qui y est entré avec l’eau; il
faut que l’acide carbonique se soit décomposé , et je
rendois cette décomposition probable par les expé-
riences de Tennanl , de Giobert et de Pearson par la
voie sèche , comme par les expériences de Mussin-
Puskin par la Voie humide. Il faut donc recourir à
ee moyen , puisque les expériences ne permettent
pas d’admettre la décomposition de l’eau. D’ailleurs,
pour l’ordinaire, ori voit la production du gaz oxy-
gène produit par les plantes sous l’eau au soleil, s’ac-
croître jusques à un certain point avec l’augmen-
talion de l’acide carbonique dissous dans l’eau.
( 222 J
Spallanzani m'accorde celte conclusion , quant à
l’influence du gaz acide carbonique pour faire pro-
duire aux plantes le gaz oxygène, lorsqu’elles sont
exposées au soleil sous l’eau chargée de cet acide 5
niais il observe qu’il a vu des plantes semblables
donner une égale quantité d’air dans les eaux privées
de cet acide par l’eau de chaux, et dans celles qui
en contenoient.
J’observerai seulement ici, que quelques plantes
peuvent rendre, sous l’eau privée d’acide carbonique,
l’air dont elles peuvent contenir les élémens dans
leur parenchyme , et comme on sait qu’une eau
trop fortement acidulée pour la constitution par-
ticulière de quelques plantes empêche sa production ,
il est possible qu’elle lui permette de rendre celui
qu’elle contient , sans lui permettre de se charger
d’une nouvelle quantité de cette eau fortement aci-
dulée, pour en rendre davantage.
Spallanzani remarque ensuite que l’air rendu par-
les plantes grasses sous l’eau chargée d’acide carbo-
nique n’est que l’acide carbonique dégagé de l’eau
acidulée.
Je répondrai que je n'ai jamais douté qu’il y eût
de l’acide carbonique produit par l’eau acidulée dans
l’eau rendue par les plantes qui y éloient exposées
au soleil 5 j’ai même dit qu’il y avoit quelquefois
environ | d’acide carbonique dans cet air 5 mais
quand j’ai vu souvent qu’il me falloit trois ou quatre
mesures de gaz nitreux pour en saturer une d’air
produit par les plantes exposées sous l’eau chargée
d’acide carbonique au soleil, je n’ai pu concevoir
( 220 )
que la plus grande partie de cet air fût de l’acide
carbonique , et cela m’étoit d’autant plus difficile à
reconnoître , que l’air fourni pour l’ordinaire par la
plupart des plantes exposées sous une eau suffisam-
ment chargée d’acide carbonique étoit meilleur que
celui qu’elles rendoient dans l’eau commune, comme
on peut le voir dans les ouvrages que j’ai publiés sur
ce sujet , et Ingenhouz a vu cela comme moi.
Spallanzani remarque encore , d’après ses obser-
vations et les miennes , que l’air produit, sous l’eau
au soleil n’est point celui qu’elles conlenoienl } mais
il soupçonne qu’il a été extérieurement produit ,
puisque ces plantes donnent de l’air par l’expression,
après en avoir donné sous l’eau comme dans leur
état naturel^ ce que Senebier confirme par la feuille
de sedum , qui surnage après avoir donné tout le
jour une grande quantité d’air.
J’observerai à cet égard que cela peut très-bien
être, et que cela doit être puisque cela a été 5 si la
feuilie reçoit de l’acide carbonique pour le décom-
poser , à mesure qu’elle chasse hors d’elle le gaz
oxygène résultant de la décomposition de cet acide
qui se renouvelle toujours; ce qui me paroîl d’au-
tant plus probable que lorsque la feuille commence
à perdre de sa faculté vitale, ou de son énergie .
pour décomposer l’acide carbonique et en recevoir
du nouveau , elle se fronce , se ride et gagne le fond
de l’eau.
Je lui racontai ensuite que j’avois pris des feuilles
du même sedum, gardées dans la chambre, atta-
chées à leur lige et pendues au plancher } je les mis
(# 224 )
tîans 1 eau , elles y surnagèrent encore , et quand
elles y furent restées, elles y reprirent une apparence
de fraîcheur. J exposai une feuille fraîche au soleil ,
sous l’eau commune, et une autre dans l’eau bouil-
lie j la première donna un volume d’air égal à un
volume d’eau de 44 grains 5 la seconde donna un
volume d air égal a un volume d’eau de 4 grains et i -
une feuille alleree sons 1 eau commune donna un
volume d’air égal à un volume d’eau de 19 grains,
et dans l’eau bouillie le volume d’air produit fut
égal à un volume d’eau d'un grain. Les feuilles
al lerees reprirent leur fraîcheur dans l’eau commune,
mais elles la reprirent peu dans l’eau, bouillie , elles
y allèrent à fond et surnagèrent dans l’eau com-
mune 5 ce qui me faisoit conclure que l’acide car-
bonique entré avec l’eau commune dans les feuilles
leur conservoit leur gravité spécifique naturelle par
le gaz qui s’y éloit introduit et élaboré.
Mais comment l’eau bouillie qui pénètre ces feuilles
leur rend-elle une vigueur moindre que l’eau eom-^
jnu ne ? Il est clair que cela doit être dans ma façon
d’envisager le fait; les deux eaux pénètrent égale-
ment les feuilles, mais elles les pénètrent différem-
ment 5 l’eau bouillie n’y porte que l’eau ; l’eau com-
mune y porte l’aliment qui peut augmenter la vi-
gueur de la plante, et le gaz qui se dégage et se dilate
diminue sa pesanteur spécifique 5 aussi la première
gagne le fond, quand elle a perdu la petite quantité
d’air qu’elle contenoit , parce qu’elle ne sauroit
en reprendre du nouveau dans l’eau bouillie ; et la
seconde, au contraire, se remplit d’un nouvel air
que
i
'{ 225 )
que l’eau lui porte à mesure qu’elle en évacue, et
elle continue à végéler et à surnager.
Enfin je remarquerai que Spallanzani fit quelques
expériences analogues à celles que j’avois faites , et
que je lui avois décrites dans mes lettres sur Valoé
cœralescens glauca et le cactus cochmüifer.
Je ferai remarquer encore ici que le gaz acide car-
bonique doit entrer dans les plantes et s’y décom-
poser , i° parce que lorsqu’on augmente la quantité
de l’acide carbonique dans l’eau jusques à un cer-
tain maximum déterminé par la nature de la plante ,
comme je Pavois observé, il y a bien long-tems, on
augmente la quantité de l’air produit 5 20 parce que
la propriété des feuilles de donner du gaz oxygène
sous l’eau ne s’épuise pas si vite, lorsque la feuille
ne s’altère pas trop ; j’en ai eu qui m’en ont donné
de cette manière pendant deux mois, lorsque je
renouvelai l’eau acidulée ; si donc la quantité de
l’acide carbonique influe sur la production du gaz
oxygène par les feuilles exposées au soleil sous
l'eau chargée de cet acide ; si ces feuilles continuent
à donner ce gaz lorsque l’acide se trouve dans l’eau
pendant deux mois, et si elles perdent cette propriété
dans l’eau qui en est privée, il faut reconnoître que
l’eau ne peut être la cause de cet effet, qu’elle n’a
pu fournir le gaz oxygène produit , et qu’il est par,
conséquent très-probable que l'acide carbonique a
concouru à sa production.
Spallanzani remarque , que la fraîcheur reprise
par les feuilles altérées de mon sedum est un effet
bien naturel, puisque les feuilles soudant de la *é—
Tome 3, P
( 22G )
chcresse reprennenl leur couleur et leur élasticité
lorsqu’on les arrose ; de sorte qu’il n’y a d’autre elfel
à y voir , que celui de la suctiori de l’eau, et comme
l’altération esL produite par .l’atrophie, le rétablis-
sement est amené par l’eau qui leur sert d’aliment.
Cette raison seroit sans réplique , si le change-
ment dans l'eau bouillie et l’eau commune ét oit le
même ; mais il ne l’est pas par l’expérience , puisque
le rétablissement esL plus prompt et plus complet
dans l’eau commune que dans l’eau bouillie, et puis-
que dans le premier cas la feuille surnage l’eau et
qu’elle ne la surnage pas dans le second.
Spallanzani ajoute dans ses notes : voici le fonde-
ment de mes doutes, comme je l’ai écrit à Senebier ;
l’eau acidulée par l’acide carbonique où les plantes
ont été exposées au soleil , et où elles ont donné
beaucoup de gaz oxygène, conserve l’acide carbo-
nique qu’elle avoiL auparavant , comme je m’en
suis assuré par l’eau de chaux. Si donc il y avoit eu
de l’acide carbonique décomposé , l’eau en auroit
nécessairement perdu, et il y en auroit eu moins ,
ce qui est contraire à mon expérience; au reste, ce
que je dis ici de l’acide carbonique de l’eau environ-
nant la feuille ne prouve rien contre l’acide carbo-
nique circulant dans les organes de la plante.
Celte expérience est vraiment tranchante , et elle
ne pouvoit être imaginée et exécutée que par un
génie de la force de l’excellent Spallanzani , aussi
ébranla-t-elle ma conviction sur la bonté de mon
opinion, pour expliquer la production du gaz oxy-
gène par les plantes exposées sous l'eau au soleil #
t 227 )
et je conclus la lettre que j'écrivis à ce grand homme*
comme il le remarque dans ses noies par ces mots :
ces considérations , et quelques autres, me font sus-
pendre mon jugement sur la décomposition de l’acidê
carbonique dans les feuilles 5 elles vous feront ima-
giner mieux qu’à moi les moyens de la confirmer
ou de la détruire, et quoique j’eusse repris plus de
confiance dans ce moyen , que je crois employé par
la nature pour faire produire le gaiz oxygène aux
plantes , en établissant la décomposition de l’acide
carbonique , lorsque je publiai ma Physiologie vé-
gétale; cependant dans les Desiranda que j’ai ajouté
à cet ouvrage sur celte partie de la science, Tom. 5 ,
pag. 297, je mels celui-ci. Examiner encore l’opinion
de Hassenfralz , qui proscrit la décomposition de
l'acide carbonique , afin de délruire ou de confirmer
lues idées sur la décomposition de cet acide par de
nouvelles observations. Je pense avoir bien montré,
de celle manière, que j'aime mieux pour moi et
pour les autres la vérité que mes opinions»
Cependant, comme je n’ai pas renoncé à cette
opinion, et que je l’ai adoptée dans ma physiologie,
je dois donner les raisons qui m’empêchent de la
rejeter*, elles seront tirées de l’expérience elle-même ,
décrite par Spallanzani , et de diverses autres consi-
dérations , qui me paroissent avoir quelque force. '
Je vois d’abord que l’expérience a été faite avec
deux plantes, le sempervivum lectorum et le choux ,
qui contiennent beaucoup d’air, et qui en donnent
toujours beaucoup *, le premier même en fournil dans
l’eau privée d’acide carbonique, et comme l’expé-*
( 228 )
rience n’a duré que deux [heures et demie , et qu’il
n’y a eu qu’un quart de pouce cube d’air produit,
il n'est pas absurde de croire que le gaz oxygène
qu’on a eu n’étoit probablement que celui qui éloit
dans les feuilles de ces plantes , ou plutôt dans ses
élémens renfermés par le parenchyme des feuilles;.
2.° il est difficile d’imaginer qu’il n’y eût pas de
l’acide carbonique séparé de l’eau où il éloit , en
supposant même que les feuilles n’en eussent point
pris , puisque Spallanzani a prouvé que lorsqu’il y
a une lame d’air sur l’eau chargée d’acide carbonique,
il y a un grand dégagement de cet acide contenu
dans l’eau ; 3.° l’action du soleil sur cette eau de-
voit favoriser le dégagement de cet air d’après les
expériences de notre célèbre auteur; 4.° l’exposi-
tion seule de l’eau qui servoit de clôture au vase de
l’expérience , devoit perdre beaucoup de ce gaz
dans son exposition à l’air libre ; 5.° la prodigieuse
difficulté de faire celle expérience d’une manière
rigoureuse . soit par la difficulté d’enlever parfai-
tement l’acide carbonique à l’eau par l’eau de chaux,
soit par la difficulté plus grande encore d’estimer la
petite différence qu’il pou voit y avoir entre l’acide
carbonique contenu avec l’eau acidulée où les plantes
a voient été , et celui qui éloit dans l’eau où il n y
avoit point eu de plantes , puisque cela dépendoit de
l’égale dessication du carbonate calcaire : toutes ces
difficultés m’ont paru insurmontables. Le flacon
contenoit cinq pouces cubes , il y en avoit un oc-
cupé par les feuilles , de sorte qu'il resloil quatre
pouces d’eau, dont chaque pouce devoit fournir \
•( 229 )
grain de carbonate calcaire ; de sorte qu’il y en au-
roil eu deux grains, qui dévoient contenir environ
de gaz acide carbonique, et l’on ne tient pas
compte de l’eau acidulée restée adhérente auxfeuilles;
mais je m’arrête , ces difficultés et mille autres em-
pêchèrent Desaussure de refaire cette expérience
comme je l’en avois prié , mais je reviendrai sur ce
sujet dans le Mémoire suivant.
J’avois fait des expériences rapportées dans mes
précédens ouvrages , qui m’ont semblé , comme à
d’autres, montrer l’influence du gaz acide carbonique
pour la production du gaz oxygène ; telles sont celles
en particulier où les feuilles ont donné pendant
plusieurs jours du gaz oxygène , lorsqu’elles ont été
exposées au soleil sous l’eau chargée de cet acide ;
je voyois alors la quantité de l’air fourni diminuer
avec la quantité de l’acide carbonique contenu [dans
l’eau , et je réussissois à rappeler cette production en
introduisant de l’acide carbonique dans cette eau.
J’en ai donné une preuve qui me paroît plus forte ,
lorsque je scellai dans des phioles remplies d'eau
chargée d’acide carbonique des rameaux de pêcher,
de mérisier et de framboisier , de manière que l’eau
ne pût y entrer ni le gaz acide carbonique , mêlé
avec l’eau que je meltois dans ces phioles, en sortir;
je les fis passer séparément sous de grands récipiens
pleins d’eau commune , ou d’eau chargée d’acide
carbonique , et lorsque j’eus scellé d’autres rameaux
égaux et semblables dans de petites phioles parfai-
tement vides , je les fis passer en même temps et.
séparément sous des récipiens égaux en capacité aux
( a3o ) .
précédons et pleins de la même eau qu’eux , pont
les exposer tous ensemble au soleil pendant une
journée; alors je trouvai dans les réeipiens, où éloient
les rameaux plongés dans des phioles remplies d’eau
chargée d’acide carbonique , une quantité au moins
décuple du gaz oxygène qui s’étoil produit sous les
réeipiens où étoient les rameaux scellés dans les
phioles vides ; que peut-on conclure de la différence
de ce produit, sinon que l’acide carbonique con-
tenu dans Peau qui remplissoit la phiole , étoit
monté dans le rameau , en avoit pénétré les feuilles
et s’éloit ajouté à celui que les feuilles avoient sucé
dans l’eau , et qu’il s’y étoit décomposé par l'action
du soleil sur les feuilles.
Je fis une autre expérience qui m’a semblé con--
firmer mon opinon ; je mis des feuilles du sedurn
anctcampseros dans l'eau sous un récipient plein
d’eau et placé sous celui d’une pompe pneumatique,
je fis le vide et Pair que les feuilles contenoient eu
, sortit , alors elles gagnèrent le fond du vase , où elles
restèrent : je me dis donc , ces feuilles sont privées
d’air ; si le gaz acide carbonique y rentre avec Peau ,
s’il y abandonne l’eau il doit les ramener à la sur-
face de Peau en gonflant les vésicules qui le con-
tiennent, et si elles donnent alors du gaz oxygène
en les exposant ainsi au soleil, il doit être produit
par l’acide carbonique qui y sera entré avec Peau.
Je retirai donc mes feuilles de dessous l’eau , où
elles étoient et j’en fis passer sous des réeipiens pleins,
d’eau chargée d’acide carbonique et sous d’autres
pleins d’eau bouillie; mais je pensai, qu’d laU.uit
( a5i )
d’abord les laisser dans la même température, où
elles étaient , parce que connue je savois qu’il est
extrêmement difficile de priver les feuilles de tout
l’air qu'elles contiennent , il arriveroit qu’en expo*
sanl les feuilles à une température plus haute, elles
pourvoient surnager encore par la dilatation de l'air
qui auroit pu y rester. Qu’arriva-t-il donc ? Au bout
d’un quart-d’heure les feuilles surnagèrent dans l’eau
chargée d’acide carbonique, et restèrent au fond do
vase dans l’eau bouillie. Je pouvois donc conclure
que le gaz acide carbonique étoit entré avec l'eau
dans les feuilles, recouvertes par cette eau; ou
que la feuille a voit extrait l’acide carbonique de
l’eau, où elle plongeoit; de sorte que je ne pouvois
me dissimuler, que l’acide carbonique étoit entré
dans la feuille.
Ensuite j’exposai ces feuilles sous leur récipient
au soleil; alors je vis deux ou trois feuilles qui
éloient sous l’eau bouillie s’élever à la surface de
l’eau , et je trouvai sous le récipient une petite bulle ,
qui devoit être nécessairement une bulle restée dans
la feuille; mais en les replaçant sous une nouvelle
eau bouillie, elles- cessèrent de fournir d’autres bulles;
celle bulle étoit donc bien le reste de l’air contenu
dans la feuille.
Quant aux feuilles qui éloient sous les récipiens
pleins d’eau chargée d’acide carbonique, elles don-
nèrent du gaz oxygène comme ces feuilles ont cou-
tume d’en donner dans cel le circonstance ; aussi
comme Spullanzani a vu avec moi l’air sortir du
centre des feuilles, el comme j’avois prouvé dans
( 252 )
mes Mémoires physico-chimiques que l’épiderme des
feuilles de joubarbe ne donnoit point d’air au soleil,
et que le parenchyme écorché en donnoit beau-
coup , je conclus , que l’air sorloil de la feuille ,
et qu’il étoit bien probable que l’acide carbonique
qui avoit pénétré la feuille en étoit la source; ce-
pendant je me garderai bien de dire à présent que
cette preuve soit rigoureusement démonstrative ,
quoique je ne voie pas ce qu’on peut lui opposer.
Enfin j’ai une nouvelle probabilité en faveur de
mon opinion : je la tire de la grande quantité d’air
qu’une infusion de tan fait produire aux plantes
que l’on expose au soleil dans cette infusion, comme
je l’ai prouvé dans ma Physiologie végétale $ car
puisque l’acide gallique est une combinaison d’oxy-
gène et de carbone de même que l’acide carbonique ;
je peux encore conclure, que les mêmes effets devant
avoir les mêmes causes et l’acide gallique se décom-
sant très-facilement, il résulte de celte expérience
que l’acide gallique doit par sa décomposition pro-
duire les mêmes effets que l’acide carbonique et réci-
proquement.
Je peux ici employer encore les belles expériences
de M.r Desaussure dans ses Recherches chimiques
sur la végétation , qui sont des conséquences natu-
relles de la théorie que j’avois établie, et comme elles
reposent toutes sur la décomposition de l’acide car-
bonique, et que chacune la démontre d’une manière
différente; je puis encore dire que la probabilité de la
décomposition de l’acide carbonique dans les plantes
est augmentée par toutes les découvertes capitales
( a55 )
que le génie de ce savant naturaliste lui a fait faire en
la suivant.
J’ai préféré joindre ces réponses aux notes que
Spallanzani a laissé sur mes lettres plutôt que de les
renvoyer au mémoire que je joindrai à celui-ci , et
dans lequel je traiterai ce sujet plus à fond ; parce
que chacun pourra voir quelle étoil la nature de
l’aimable et instructive correspondance que nous
avons soutenue pendant 25 ans; j’en regrette tous
les jours davantage la perte, uij ami comme lui ne
se remplace pas , et les sciences ne retrouvent pas
beaucoup d’hommes qui lui ressemblent par leur
amour pour la vérité, et par leurs moyens pour la
découvrir et la faire connoître.
Je joins encore ici des notes générales de Spallan-
zani sur mes lettres avant de donner la lettre elle-
même qu’il m'écrivit d’après ces notes que je viens
de traduire , et auxquelles j’ai répondu en partie
comme je viens de le faire : mais s’il avoit prolongé
sa vie plus long-temps, je lui aurai fait connoître
quelques-unes des réflexions et des expériences que
je viens d’exposer à présent , afin de les discuter
avec lui.
Spallanzani ajoute ensuite dans ses notes : nou3
n’avons aucune preuve directe de la décomposition
de l’acide carbonique, cependant tout concourt pour
prouver que cet acide favorise la production du gaz
oxygène dans les plantes tl augmente sa quantité.
Que faut-il penser de la décomposition de l’eau?
Dans ma lettre à Senebier, j’ai déjà dit qu’il n’y en
avoil aucune preuve directe ; mais ou doit observer
( 254 )
encore, que si l’expérience montre celte décompo-
sition opérée par la chaleur, elle n’est pourtant l’efièt
que de l’absorption que les combustibles font de
l’oxygène , ce qui met l’hydrogène à nu , cependant
on n’a pas vu encore l’oxygène dégagé par l’ab-
sorption de l’hydrogène.
Tout se réduit donc à ceci: les plantes sous l’eau
au soleil donnent le gaz oxygène. D’où vient-il ?
Est-il démontré qu’il ne sorte pas de l’ifltérieur des
végétaux ? Jusques à présent, on n’en voit que deux
sources ; la décomposition de l’eau et celle de l’acide
carbonique. La seconde est hypothétique , quoique
Senebier dise qu’elle est probable par les expériences
de Tennant, Giobert, Pearson, Mussin-Puskin. La
décomposition de l’eau n’esL pas moins hypothéti-
que; mais il faut dire que si l’on rejette ces deux
hypothèses, on ne peut expliquer la production du
gaz oxygène par les plantes.
Je remarquerai encore, que lorsqu’on lit la dé-
couverte du gaz oxygène produit par les plantes ,
on crut expliquer la production de ce gaz d’une
manière plausible par la décomposition de l’eau ,
et celte idée est bien dans l’analogie de la nouvelle
chimie; mais cette explication a été reçue par les
physiciens sans aucun examen ultérieur. Senebier
est le seul qui l’ait combattue indirectement , en
cherchant à montrer que la décomposition de l’a-
cide carbonique est la tJluse productrice de ce gaz
oxygène (i).
(i) Note de 1‘ Editeur. Ici finissent Içs notes de Spallanzani.
'( 255 )
Je n’ajoute qu’un mot , quoique le jugement de
Spallanzani me paroisse sévère, et quoiqu’il doive le
paroi tre après toutes les observations que j’ai faites ;
je me suis fait un plaisir de le publier , parce que
je ne le trouve pas à rigueur sans fondement, et
parce qu’il porte l’empreinte de cette logique scru-
puleuse et de cet amour pour la vérité qui ont tou-
jours caractérisé les recherches de mon illustre ami.
Lettre de Spallanzani du 27 Septembre
1798 (1).
.... Je vois bien qu'avant moi vous avez vu les jets
d’air qui sortent des plantes exposées sous l’eau au
soleil , et qu’ils avoient été aussi remarqués par
Jngenhouz.
Je n’avois point observé le phénomène des taches
qui se font sur quelques feuilles exposées sous l’eau
au soleil , votre explication me semble bonne; vous
pouvez l’élablir encore par l’hydrophaue (2). Voici
(1) Note de l’Editeur. J’ai "supprimé de cette lettre tout œ
qui n’étoiL pas relatif immédiatement à ce mémoire.
(2) Note de l’Editeur. Ces taches se peignent sur les feuilles ,
par exemple , du framboisier , du figuier > lorsqu’on les expose au
soleil , sous l'eau chargée d’acide cai bonique ; elles forment de gros
points d’un verd plus clair, disséminés sur la surface de la feuille,
et leur nombre augmente à mesure que les feuilles restent plus
long-temps en expérience. Je sortis de l’eau une de ces feuilles, et
je la laissai pour l’examiner; deux heures après je voulus voir ce
qu’elle oü’roit de particulier , et je trouvai les taches disparues <-
je pensai que ce pouvoit être l’eau qui avoil remplacé l’air, et qui
( 256 )
une observation que j’ai faite sur les feuilles du rubuê
idœus ; lorsque ses feuilles ont donné sous l’eau l’air
qu’elles pouvoient donner, je les tirai de l’eau, et
je les exposai à la vive lumière avec d’autres fraî-
chement coupées. Les premières me parurent plus
transparentes que les secondes, leur vert étoit plus
clair, et elles surnageoinl moins bien qu’elles.
Vous m’apprenez un autre phénomène qui m’é-
toit inconnu comme le précédent; c’est celui de la
pureté de l’air recueilli sur les feuilles qui est moin-
dre , que celle de l'air commun. Ces deux choses
me paroissent intéressantes par leurs conséquences,
vous attribuez la dernière à l’acide carbonique de
l’atmosphère qui s’y dépose , ou qui sort de la plante,
vous pouvez le vérifier par l’analise de l’air
Nous sommes parfaitement d’accord sur ce qu’il
n’y a aucune preuve de la décomposition de l’eau
par les plantes, qui y sont exposées au soleil; elle
devroit produire l’absorption de l’hydrogène par la
plante, et le dégagement de l’oxygène; mais je
ne connois aucune expérience pour le démontrer;
tandis qu’il y en a mille pour établir cette décom-
position par l’absorption de l’oxygène dans les corps
combustibles qui abandonnent l’hydrogène. Il n’est
avoit rendu l’e'piderme plus transparent , comme l’eau donne la
transparence au papier mouillé, aussi reprennent-ils tous deux leur
opacité quand l’eau introduite s’est évaporée. Cette expérience me
paroît capitale, parce qu’elle montre que l’air sort de l’intérieur de
la feuille , et j’en ai eu la preuve , puisque le phénomène paroi t
de même quand on place ces feuilles dans l’eau , sous la pompe
pneumatique, et que l’ou fait le vide.
• ( 207 )
'pourtant pas démontré que la nature ne puisse avoir
des moyens jusques à présent inconnus pour opérer
cette décomposition par le dégagement de l’oxy-
gène, et que ce moyen ne soit la végétation des
plantes combinée avec la lumière solaire.
Il est vrai, comme vous le dites, que dans cette sup-
position on devroit obtenir également le gaz oxygène
dans les eaux bouillies et distillées, comme dans celle
qui est imprégnée d’acide carbonique; mais je vous
dirai aussi, que j’ai fait des expériences avec ces eaux
sur des jalantes grasses et que j’ai obtenu de quel-
ques-unes d’elles une égale quantité d’air également
bon, comme avec l’eau de mon puits; cependant
avec un nombre de piaules plus grand, j’ai observé
précisément le contraire. Ne seroit-il pas possible,
que l'organisation de plusieurs plantes fût telle, qu’a-
vec l’intermède de la lumière , il fût nécessaire de
recourir à un second qui seroil l’acide carbonique?
Diverses expériences que vous rapportez, dans les-
quelles il y a eu dans des cas particuliers du gaz hy-
drogène produit par quelques plantes, deviendroient
un argument plausible en faveur de la décompo-
sition de l’eau ; parce que dans ces cas l’hydrogène
ne se fixeroit pas entièrement dans les piaules, et en
laisseroil une partie à nu. Je conviens bien avec
vous de bon gré, de ne vous avoir donné ici que
des subtilités , qui prouvent tout au plus que celte
décomposition de l’eau n’est pas impossible , et qu’elle
pourvoit être la cause du gaz oxygène fourni par les
plantes.
J’ai déjà noté dans mon mémoire que je me ferai
( 258 )
tüi devoir de publier , que la découverte du gaZ
azote î-eiidu par les plantes vous appartient, et que
je n’ai fait que la confirmer.
Je Arous ai donné les exemples de quatorze plantes
qui donnent au soleil une égale quantité d’air dans
l'eau chargée d’acide carbonique, comme dans celle
qui en est privée. Vous observez sagement que toutes
ces plantes sont grasses , toutes riches en paren-
chyme, que ce parenchyme, par conséquent, peut
être imprégné d’acide carbonique , et que par con-
séquent, il est en état de fournir abondamment du
gaz oxygène au soleil dans l’eau privée d'acide car-
bonique. Cette pensée me fil un grand plaisir, d’au-
tant plus qu’ayant fait ensuite plusieurs expérience»
sur d’autres plantes grasses, j’ai toujours trouvé les
résultats opposés à ceux que me fournissoient les
plantes membraneuses exposées au soleil dans des
eaux privées d’acide carbonique; celles-ci ont toujours
donné-dans les eaux chargées d'acide carbonique une
quantité d’air beaucoup plus considérable, que celles
qui étoient exposées au soleil dans des eaux privées
de cet acide.
Je ne savois pas que vous eussiez des doutes sur
l’irritabilité des plantes, parce que vous m’aviez paru
la reconnoître autrefois; les exemples en sont pour-
tant bien multipliés. Suivant donc vos nouvelles
idées vous devez être bien éloigné de ma conjecture
sim la différence de la production de l’air dans ces
deux cas; mais je vous prie de réfléchir, que quand
les plantes ne seroient pas irritables, vous ne pouvez
pourtant pas nier, que l'acide carbonique a quelque
( 23g )
influence sur elles, et qu’il est raisonnable de penser,
que cette influence doit varier avec leur organisa-
tion; ce qui suffiroit pour faire croire, que l’acide
carbonique agit mécaniquement sur les plantes, pour
leur faire produire plus d’air ; alors mon hypothèse
fondée sur l’irritabilité des plantes pourroil subsister.
Vous prouvez de nouveau l’influence de l’acide
carbonique sur la production du gaz oxygène par
les plantes avec un appareil d’expériences si nom-
breuses , si convaincantes et si belles qu’elles mettent
votre théorie dans le plus beau jour. Pour ne pas
rendre celte lettre trop longue je n’en examinerai
que quelques-unes.
L’origine du charbon dans les plantes est un pro-
blème qui n’a pas été encore clairement résolu , et
qui mérite de l'être; il intéresse fortement les pro-
grès de la physique végétale. La décomposition de
l’acide carbonique fournit une raison plausible de
l’origine du charbon dans les plantes; d’autant plus
que vous m’apprenez, que l’on ne peut introduire
le charbon eu nature dans les plantes avec les sucs
qui y montent , parce que vous vous êtes convaincu
par des expériences , que l’on ne peut obtenir cet
eflct par l’introduction de la sève dans leurs racines.
Mais il me semble que la nature pourroil opérer
ce qui est impossible à l’art. Je veux dire qu’elle
a des moyens pou^' produire lentement la dissolu-
tion du charbon dans l’eau sucée parles racines,
et il me semble avoir lu dans les Annales de chimie ,
qu’on a prétendu expliquer commeiiL L’eau des fu-
miers lient le charbon dissous et le fut entier dans
les plantes.
I
( 24o )
Vos feuilles de figuier, de rosier, de pêcher don-
• nenl infiniment plus d’air dans l’eau açi'ée que dans
l’eau bouillie. Votre sedum anacampseros , quoi-
qu'une piaule grasse vous a fourni des résultats qui ne
se sont pas beaucoup écartés de ceux que les autres
plantes vous ont offerts. Je n’a vois pas celte plante;
de sorte que je n’ai pu la soumettre à l’expérience;
mais j’ai répélé vos expériences sur les trois autres
feuilles , et les résultats que j’ai obtenus ont été
semblables à ceux que vous avez eus ; je n’ai pour-
tant pas pu trouver le temps de varier ces expé-
périences comme vous l’avez fait.
Vous avez fait à Rolle une nouvelle expérience
avec de l’eau qui conlenoit une plus grande quan-
tité d’acide carbonique, que celle que vous aviez
employée à Genève précédemment, et en remplis-
sant avec ^lle des récipens que vous avez renversé
sur leur ouverture dans des vases pleins d’eau, vous
avez obtenu quelque peu d’air , que vous n’aviez
pas observé dans vos premières expériences ; vous
avez répélé celte expérience avec de l’eau con-
tenant au moins un volume d’acide carbonique égal
au sien, et alors vous avez eu avec cette eau au
soleil une plus grande quantité d’air. En observant
les mêmes circonstances, vous avez mis dans l’eau
les feuilles d’une plante et alors vous avez eu au soleil
avec le gaz oxygène une plus grande quantité d’a-
cide carbonique que celle que vous aviez eue avec
l’eau commune , et vous en tirez néanmoins la con-
séquence , que l’acide carbonique trouvé sur l’eau
avçc le gaz oxygène n’est pas sorli de l’eau , mais
des
( 24l )
des feuilles» Permeltez-moi de vous dire qu'il y a
de l’erreur dans voire conséquence ; puisque suivant
ines idées, cette abondance d’acide carbonique pour-
roit venir de l’eau qui en contient : car par le moyen
de la plante vous avez obtenu du gaz oxygène,
et ce gaz a favorisé la sortie de l’acide carbonique
hors de l’eau comme une lame d’air commun pro-
duit cet effet (ij.
Cette conséquence que vous avez tirée, et que je
n’ai pas crue loul-à-fait contraire à la vérité m’a
fait naître des scrupules sur la mienne, que j’ap-
puyois sur ces jets d'air qui sortent de l’intérieur
de quelques plantes , comme je vous l’ai déjà écrit,
parce que j’avois trouvé de l’acide carbonique dans
l'air qu’ils m’avoient fourni, et j’en concluois comme
vous , que cet acide carbonique sortoil aussi de la
plante; mais revenant sur cette expérience, j’ai
vu que l’on pouvoit l’expliquer autrement dans
l’hypothèse de la décomposition de l’eau; puisqu’on
pourroit dire, que cet acide est le résultat de la
combinaison du charbon des plantes avec l’oxygène
de l’eau.
Vous verrez sûrement que ces considérations se
réduisent à rien , puisque vos expériences vous
ont montré comme vous me le marquez , que le
(i) Noie de TEditeur . J’avois eu tort en partie dans cette
conséquence , mais il est sûr qne si l’eau acidulée fournit de l’acide
carbonique, la plante, à son tour, en fournit aussi au soleil avéc le
gai oxygène , comme Spallauzani l’avoit vu avec les feuilles des
planoes grasses exposées au soleil «hns l’eau bouillie et. dans l’eatf
distillée.
Tome
»
Q
( 242 5
charbon en nature ne peut pas monter dans les
plantes.
Votre sedum anaccimpseros soumis à une foule
d’expériences ingénieuses vous a fait voir encore
l’influence de l’acide carbonique sur la production
de l’air par les plantes exposées au soleil sous l’eau
chargée de cet acide ; puisque les volumes de l’air
produit croissent en raison de l’augmentation de
cet acide dans l’eau, et comme cet air appartient
aux plantes dans votre opinion , vous concluez
qu’il doit provenir de la décomposition de l’acide
carbonique.
A l’occasion de cette conséquence que vous avez
- tirée, je vous rappellerai deux paragraphes de ma
lettre précédente. Le premier, que le gaz acide car-
bonique dans l’air de l'eau qui en est très-chargée
est toujours plus volumineux que dans l’eau mé-
diocrement acidulée , et plus grand dans celle-ci que
dans l’eau commune. Le second est celui - ci : la
quantité du gaz oxygène produit par les plantes
est d’autant plus grande que la quantité du gaz acide
carbonique qui est dans l’eau est aussi plus grande.
Je suis revenu à l’examen de ces deux propo-
sitions par l’expérience et j’ai toujours confirmé la
première , mais il n’en a pas été de même de la
seconde. J’ai constamment vu, que lorsque l’eau,
où l’on met les plantes contient beaucoup d’acide
carbonique, il y a beaucoup d’acide carbonique et
très-peu de gaz oxygène (1).
^ (i) Note de l’Editeur. J# n’ai pas réussi à voir cela, quoique
4
( a43 )
J’ai fait sur V dloè cœrulèscens glctucà spinis nt*
bris et le cactus cochinilifer qui étaient à la vé-
rité altérés dans leur constitution -, une expérience
analogue aux vôtres qui nie paroissent préférables
à la mienne. ïlyavoit 63 jours que quelques feuilles
de ces plantes se trouvoient à l’ombre sur une table
dans mon appartement ; elles avoient en partie perdu,
leur couleur verte et leur consistance; elles étoient
ridées. Je voulois voir, si dans cet état de maladie
elles donneroient du gaz oxygène. Je les tins le 26
Mai sous l’eau de mon puits au soleil pendant huit
heures , l’air de l’aloë contenoil de gaz oxygène ,
et celui du cactus — -; je fis une expérience com-
parative avec les feuilles fraîches de ces plantes ,
l’a r de Valoè contenoil ~ de gaz oxygène et celui
du cactus
Il paroît donc que ces plantes altérées pouvoient
encore donner du gaz oxygène , quoiqu’elles en don*
liassent moins que les fraîches, et l’on devoit s’at-
tendre à cette différence. Celte expérience est donc
d’accord avec la vôtre relativement à l’état altéré
des feuilles de votre sedum ,* ce qui de voit arriver
a toutes les feuilles , qui ont souffert de cette ma-
nière; on les voit pourtant reprendre de la vigueur
j’aie fait mes expériences avec des eaux fort chargées d’acide
carbonique; le gaz oxygène y dominoit toujours éminemment -,
Tomme on le voit par mes ouvrages ; il me falloit trois ou quatre
mesures de gaz nitreux pour en saturer une de cet air; mais quand
l’eau éioit surchargée d’acide carbonique, alors ce gaz s’échappe de
l’eau et ne se décompose pas, et la seconde proposition subsiste
comme je l’avois établie il y a bieu loug-temps.
( 244 )
dans une atmosphère fort humide. Ceci est une preuve
de l’absorption de l’eau par les plantes, et comme
leur altération éloil produite par l’atrophie, leur ré-
tablissement est l’effet de la nourriture que leur
donne l’eau qu’elles absorbent.
Suivant vos expériences, ces feuilles altérées se
rétablissent moins bien dans l’eau bouillie que dans
l'eau commune, parce que les premières sont privées
d’acide carbonique, et qu’il est une cause de leur
rétablissement. Mais si dans l’eau commune, il y
a d’auLres principes, qui sait par exemple, si l’é-»
bullition n’en fait pas disparoîlre qui sont essentiels
à la nourriture des plantes, que nous ne connois-
sons pas? Pour voir si l’acide carbonique a cetle
propriété exclusive, on pourroit chercher ce qui arri-
veroit à une plante altérée tenue sous l’eau bouillie ,
et ensuite immédiatement imprégnée d’acide car-
bonique (ij.
Vous terminez votre lettre par une considération,
qui honore votre sincérité , vous m’écrivez , que
malgré la multitude des expériences que vous avez
faites pour établir l’influence de l’acide carbonique
dans la production de l’air par les plantes exposées
au soleil sous l’eau chargée de cet acide , vous êtes
néanmoins indécis sur la décomposition de cet acide.
J’ai aussi des doutes très-forts sur ce sujet, puisque
(i) Note de l’Editeur. Notre ignorance sur des principes in-
connus , qui n’existent peut-être pas , nous permeltroit-elle d’en
tirer des inductions opposées à celles que les faits présentent?
J’ai répondu plus particulièrement à cette objection dans ma
'Physiologie végétale?
( 245
l’eau chargée d’acide carbonique, où les plantes ©nt
donné de l’air au soleil, en a conservé la même quan-
tité après l’expérience; mais si les expériences prou-
vent que l’acide carbonique n’influe pas toujours sur
la production du gaz oxygène par les plantes expo-
sées au soleil sous l’eau qui en est chargée, il a cette
influence un nombre innombrable de fois (1).
Vous savez ce que je pense sur la décomposition
de l’eau dans les plantes; si elle n’a pas des preuves
directes , on n’a j^as prouvé son impossibilité. Dans
le long chapitre, où je traiterai de l’air produit par
les plantes sous l'eau au soleil et dans l’air; je mon-
trerai que les plantes donnent beaucoup plus d’air
dans l’eau que dans l’air. Ce qui sembleroit fournir
la conjecture, que cet air provient de la décompo-
sition de l'eau; puisqu’il y a plus d’eau dans l’eau
que dans l’air; mais on peut dire la même chose de
l'acide carbonique qui est moins abondant dans l’air
que dans l’eau (e); il est pourtant sûr que si l’on
rejette ces deux hypothèses, il faut renoncer à ex-
pliquer la production de l’air dans les végétaux.
Vous avez la complaisance de me dire, que lors-
(1) Note de l’Editeur. J’ai donné dans les extraits de rnos
lettres quelques éclaircissemens sur cette expérience, dont je
parlerai encore dans le mémoire que j’ajoute à celui-ci.
(2) Note de l'Editeur. Je ne trouve pas de parité dans la
comparaison , il y a plus d’eau dans l’eau , relativement à celle
qui est dans l’air, qu’il n’y a d’acide carbonique dans l’eau commune,
relativement à celui qui est dans l’air. Outre cela toutes les plantes
donnent du gaz oxygène dans l’eau commune, et il n’y a que les
plantes grasses qui en donnent dans l’eau bouillie : je crois eu
•voir indiqué la raison.
( 246 )
que tous publierez votre physiologie végétale , vous
souhaitez avoir mon mémoire pour faire coiinoïlre
les résultats de mes expériences , vous me faites un
honneur que je ne mérite pas, parce que je sais bien
que sur ce sujet vous ne pouvez tirer de mon tra-
vail que peu de lumière ; vous y êtes un maître ,
tandis que je n’ai pu m’en occuper que très-légé-
rement. Cependant pour ne pas perdre le mérite
d’avoir cédé à votre prière; je vous indiquerai les
chapitres que je veux traiter et leur principaux ^
résultats, parce que je ne puis précisément vous
marquer le temps de la publication de mon ouvrage..
( 247 )
Plan du Mémoire que Spallanzani
vouloit publier.
Chapitre I.
Méthode pratiquée par deux illustres physiciens,
Ingenhouz et Senebier, pour observer Pair que les
plantes rendent au soleil.
Méthode différente suivie par l’auteur avec les pré-
cautions qu’il a employées pour l’exactitude de ses
expériences.
Chapitre II.
Si le gaz oxygène que les plantes rendent sous
l’eau au soleil provient de la décomposition de Peau
elle-même , ou de celle de l’acide carbonique.
Je ne vous donne pas les résultats de ce chapitre
suffisamment exprimés dans ma lettre.
Chapitre III.
Si les plantes couvertes d’eau et exposées au soleil
donnent plus d’air lorque le printemps est avancé
que dans Pété ou dans l’hiver.
Résultats. On parle ici des plantes toujours vertes
et l’on démontre l’affirmative de cette proposition.
Chapitre IV.
Quelle est. la proportion du gaz oxygène produit
au soleil par les mêmes plantes sous l’eau au soleil
et dans Pair.
Résultats. Il y a une égale quantité de gaz oxy-
gène produit par quelques plantes dans ces deux
circonstances ; mais il y a une beaucoup plus grande
quantité de gaz oxygène dans un nombre incom-
( 248 )
parablement plus grand de plantes mises sous l’eaw
au soleil, que dans leurs analogues dans l’air. La
quantité de l’air fourni par les plantes dans l’air est
pour l’ordinaire meilleur que l’air atmosphérique.
Chapitre Y.
Les plantes sous l’eau à l’ombre ne produisent point
ou presque point d’air. Les mêmes plantes à l’om-
bre dans l'air produisent l’acide carbonique au dé-
pens du gaz oxjrgène atmosphérique. L’altération de
l’air respirable occasionnée par les plantes est-elle pro-
portionnelle à l’amélioration que les mêmes plantes
produisent au soleil?
Résultats. La très-petite quantité d’air que les
plantes donnent quelquefois sous l’eau à l’ombre est
mauvais. D’une immense quantité de plantes mises
eu expérience à l’ombre, il ne s’en est pas trouvé
une seule qui ne détruisît le gaz oxygène.
Preuves de fait du grand désavantage que les
plantes causent à l’air respirable, en calculant le
temps des ténèbres de la nuit , l’obscurité des temps
pluvieux , ou celle qui est produite par les nuages
et l’ombre elle - même que les plantes ligueuses
jettent dans un temps serein sur les plantes placées
au-dessous d’elles, et sur celles qui sont opposées
au soleil; il naît de-là des soupçons fondés, que l’air
atmosphérique est plutôt altéré et privé de son gaz
oxygène à l’ombre par les plantes qu’amélioré par
elles au soleil.
Chapitre VI.
On trouve que les fleurs dans chaque saison gû-
'
( 2*9 )
tent l’air atmosphérique , de manière qu’en peu
d’heures elles lui ôtent tout son gaz oxygène dans
les vaisseaux clos.
Résultats. L’effet est le même soit que les fleurs
y restent à l’ombre ou au soleil; les expériences ont
été faites dans tous les temps de l’année , et le nom-
bre des fleurs soumises à ces expériences a été très-
grand. Les fleurs donnent dans l’eau au soleil fort
peu d’air, et il est communément mauvais.
Chapitre VII.
Chaque espèce de fruits, de graines, de bayes
produit sur l’air les mêmes effets que les fleurs.
Résultats. Ces productions végétales dans diverse#
périodes de leur existence ont été considérées soit
vertes, soit tendres, soit très-vertes , soit très-dures ,
soit mûres; il n’y a point eu de différences dans
les effets.
Chapitre VIII.
Les diverses galles des plantes gâtent autant l’air
que les fleurs et les fruits.
Résultats. J’ai voulu soumettre à l’expérience ce
nouveau genre de productions végétales, lorsqu’elles
sont plus ou moins vertes , ou plus ou moins mûres:
toutes gâtent l’air atmosphérique.
Chapitre IX et dernier.
Réflexions sur les expériences racontées dans les
chapitres précédons (i).
(i) Note de V Editeur. Tel fut le plan de l’ouvrage que Spal-
lanzani utéditoit et qu’il m’envoya : j’«u ai déjà parlé.
( 24o )
Lettre de Senebier à Sr allant a ni , de
Rolle, 6 Novembre 1798 (1).
T
*1 ’ai bien reçu vos deux lettres du 12 et 1 6 Octobre,
vous pouvez aisément croire le plaisir qu’elles m’ont
fait , elles m’ont fourni de l’instruction , et elles ont
contribué peut-être à me réconcilier avec mon hy-
pothèse qu’il me seroit très-dur d’abandonner lout-
à-fait; mais je ne veux pas anticiper sur ce sujet, je
veux répondre en détail et par ordre à votre der-
nière lettre du i 6, au moins à tout ce qui me pa-
roîlra exiger une réponse.
Je ne vous rappellerai pas mes lettres précédentes
et surtout celles du 25 Août et du i.cr Septembre,
relatives à cet objet.
Quant aux eaux qui donnent de l’air en très-petite
quantité lorsqu’elles sont exposées au soleil sous des
vases pleins et fermés , il ne peut y avoirde doute sim
la cause de l’apparition de ce gaz; c’est le gaz acide
carbonique lui-même dissous dans celte eau en une
quantité déterminée que je veux chercher; mais on
l’apperçoit d’une manière plus frappante, quand ou
voit ce gaz contenu dans l’eau, changé pour sa quan-
tité et sa qualité, dès qu’on introduit une feuille sous
le récipient; sans doute la feuille s’empare de ce gaz
et l’on est bien porté à croire que la feuille le dé-
compose; puisque sa quantité diminue à mesure que
(1) Noie de l’Editeur . J’ai trouvé celle lettre daus les papiers
de Spallanzam.
( q4i )
le gaz oxygène produit s'augmente; puisque dans
un très-grand nombre de plantes le gaz oxygène
produit est proportionnel à la quantité du gaz acide
carbonique contenu dans l’eau , et puisque le car-
bone est introduit dans la plante par ce moyen facile.
Si la quantité du gaz acide carbonique contenu dans
l’eau est très-petite, il n’y a point de gaz chassé hors
de l’eau sous des vaisseaux pleins au soleil , quoi-
qu’il y en ait suffisamment pour que les feuilles
puissent l’élaborer.
Je sais que M.r Paul qui fabrique à Genève des
eaux de Seltzer factices est parvenu par une com-
pression très-forte à faire entrer dans l’eau distillée
cinq fois son volume de gaz acide carbonique; un
de ses associés qui est allé à Londres , et qui y a
fabriqué des eaux factices par les mêmes moyens
a étonné les Membres des la Société Royale , qui
n’ont pu comprend, e d’abord comment on fabriquoit
ces eaux.
J’ai toujours vu que les plantes souffroient dans
l’air sous les vases clos , au bout d’un teins très-court,
et qu’elles y souffroient d’autant plus que le temps
de leur séjour étoit plus long , le vase plus petit , et
l’air moins pur; comme j’ai toujours trouvé de l’acide
carbonique dans cette atmosphère, j’ai conclu qu’il
étoit formé aux dépens du carbone de la plante ,
puisque le volume de cette atmosphère étoit dimi-
nué, que la quantité du gaz oxygène qui y restoit
étoit moindre , ou nulle , quand l’expérience étoit
prolongée; enfin que la plante étoit altérée. Je se-
rois bien curieux de voir votre lettre sur le piaule
( 25a )
chiuse , si elle est imprimée vous me feriez plaisir
de me l’envoyer par la poste.
Je croyois bien vous avoir parlé de votre mé-
thode ingénieuse pour estimer la qualité et la quan-
tité de l’air fourni par les plantes exposées dans l’air
sous des vaees clos au soleil; il me semble même que
je vous avois parlé à cette occasion de la difficulté
d’établir une comparaison propre à apprendre ce
qui se passe dans l'air libx'e ; i.° parce que la feuille
est enfermée , 2.0 parce qu’elle y est mouillée, 5.*
parce que la chaleur sous le verre y est beaucoup
plus considérable , 4.° parce que l’altération pro-
duite par la feuille sur une petite quantité d’air dans
cette circonstance extraordinaire change la quantité
de gaz oxygène que la plante doit rendre. Je vous
parlois d’une tentative que j’avois faite pour décou-
vrir si l’air fourni par les feuilles sous l’eau com-
mune au soleil avoit quelques rapports pour la quan-
tité avec l’air fourni par les feuilles dans de grands
récipiens. J’aimerai bien savoir, si vous avez éprouvé
l’air à la campagne dans des époques différentes de
la journée , et si vous avez eu les mêmes résultats
que moi. Votre méthode est ingénieuse, logique
et si vous trouvez mes scrupules trop scrupuleux,
ne vous plaignez que de l’espèce de violence que
vous m’avez faite pour censurer ce que d’autres
admireront avec moi. Vous auriez peut-être rendu
vos procédés plus sévères, si vous» aviez employé
l’eau bouillie pour la feuille renfermée dans l’air sous
un récipient; parce que l’attouchement de l’eau qui
contient de l’acide carbonique en auroit lait sucer
( 253 )
à la feuille qui n’eu auroit pas trouvé autant dans
l’air.
Il y a un fait remarquable pour les jets d’air dans
les plantes à nœuds, ils s’échappent des nœuds eux-
mêmes ; dans les polamogeton on les voit s’échap-
per des insertions des feuilles qui sont des espèces
de bourrelets comme les nœuds.
Il arrive que les feuilles exposées âu soleil pen- •
dant plusieurs heures dans une eau contenant de
l’acide carbonique vont à fond dès le premier jour;
mais si on les fait passer dans une autre eau chargée
d’acide carbonique, elles regagnent bientôt le som-
met du récipient : ceci s’observe plutôt au soleil qu’à
l'obscurité ; il arrive même que les feuilles qui se
sont relevées ainsi au soleil retombent à l’obscurité,
quand elles n’ont pas eu le temps de se gonfler
d’acide carbonique , parce que la chaleur ne dilate
plus l’air qu’elles contiennent ; je l’ai éprouvé de
même avec des feuilles épuisées d'air sous la pompe
pneumatique, ce qui prouve que l’acide carbonique
peut remplir leurs vaisseaux.
Je ne puis douter que l’air qui s’échappe de la
surface des feuilles ne contienne de l’acide carbo-
nique, puisqu’il se diminue sur l’eau; mais il con-
tient aussi de l’azote : la quantité du gaz oxygène
qu’on y trouve est bien plus petite que dans l’air
qui sort du parenchyme des feuilles; au reste je
me suis rappellé que dans mon Mémoire imprimé
dans le Tome Y des Mémoires de Turin, en cher-
chant comment le gaz azote éloit introduit dans les
plantes j’ayois soupçonné mais seulement soupçonné
( 244 )
que l'acide carbonique pouvoit bien avoir été Pin-
troducleur de l’azote, mais je n’ai point eu de livre
pour m’en assurer, et c’est en revenant sur mes
idées que j’ai eu la velléité de ce souvenir.
Il me semble que le plus fort argument qu’on
ait employé contre la décomposition de l’eau par
la végétation , c’est celui que j’ai proposé à M.r
Berlhollel. Les feuilles d'un très-grand nombre de
plantes exposées sous l’eau distillée et bouillie ne
donnent point de gaz oxygène au soleil, quoiqu’elles
en fournissent sous l’eau chargée d’acide carbonique;
cependant il n’y a de différence que la présence de
l’acide carbonique; alors on ne peut considérer la
question que sous ce point de vue , l’acide carbo-
nique serviroit-il d’intermède pour la décomposition
de l’eau comme vous paraissez le soupçonner ? ou
bien l’acide carbonique lui-même est-il décomposé
comme je suis bien porté à le croire?
Je ne vois pas comment le gaz acide carbonique
servirait d’intermède pour cette décomposition, puis-
que le carbone est déjà uni avec L’oxygène qu’d
pourrait enlever; puisque l’acide carbonique offre
un mélange saturé qui ne paraît pas susceptible de
sur-oxygénation ; puisqu il ne paraît pas un atome
de gaz hydrogène , et puisque la combinaison de
l’oxygène de l’eau avec l’acide carbonique ne pour-
rait fournir le gaz oxygène que l’on trouve. D un
autre côté l’hydrogène de l’eau ne se combinerait
pas avec une plus grande quantité d’oxygène; il
n’y a point d’eau sur-oxygénée; l’affinilé du car-
bone pour l’oxygène est plus forte que celle qu’il
( 245 )
a pour l’eau, en suposant qu’il en ail , et je sais par
rues expériences , que le gaz oxygène enlève le car
bone au gaz hydrogène carboné; on ne peut re-
courir ici aux affinités de ces gaz dans leur état
naissant , qui sont véritablement plus fortes et peut-
être différentes , puisque les deux substances sont
alors dans leur état de perfection.
Dans cette hypothèse on n’auroit pas même la
ressource du jeu des affinités doubles, puisqu’on a le
gaz oxygène séparé , il faudroit donc toujours arra-
cher l’hydrogène à l'oxygène dans une température
basse avec le carbone , qui ne l’enlève jamais qu’à
une température élevée pour dégager l’hydrogène,
et enchaîner de nouveau l’oxygène; mais il faut
remarquer surtout, et ceci est tranchant, c’est que
l’eau chargée d’acide carbonique ne se décompose
pas mieux au soleil que l’eau distillée; de sorte que
puisque la feuille mise sous l’eau pure ne donne point
de gaz oxygène, puisqu’elle en fournil quand l’eau est
combinée avec l’acide carbonique, il paroîl bien plus
probable que ce gaz oxygène donné par les feuilles
exposées sous l’eau chargée d’acide carbonique au
soleil, soit produit par la décomposition de l’acide
carbonique lui-même. Je ne répète pas ici les argu-
mens que j’ai proposé en faveur de cette théorie.
J’ai bien réfléchi encore sur le gaz oxygène fourni
par les plantes grasses exposées sous l’eau privée
d’acide carbonique au soleil, et je trouve que cette
observation affermit plutôt mon hypothèse qu’elle
ne la renverse. Quand je vois que les rameaux dq
ces plantes végètent, quoiqu’ils soient séparés de la
( ô56 )
plante mere el de ses racines , que leurs feuilles
se soutiennent vertes assez long-tems et ne perdent
que peu à peu leur fraîcheur et leur embonpoint
comme les feuilles séminales, dont ils ont le sort ; que
ces rameaux sont nourris par le parenchyme des
feuilles qui s’affaisse et disparoît ; qu’ils fleurissent
alors et. donnent des graines comme je Fai vu au
bout de deux mois sur deux rameaux du sedum
anacampseros : mais cette expérience ne réussit point
quand je voulus la faire avant le milieu du mois de
Juin. Ce parenchyme fournit sans doute la partie
alimentaire nécessaire pour le développement du
rameau qui s’allonge , de la fleur qui paroît, et de
la graine qui mûrit. Ces plantes qui végètent aux
dépens de leurs sucs les renouvellent sans doute dan*
l’atmosphère , où elles sucent l’eau et l’acide carbo-
nique qu’elles y trouvent par leurs feuilles, mais
ces feuilles au bout de deux mois l’ont pris dans
l’eau chargée de ce gaz , et ont produit du gaz oxy-
gène sous l’eau aérée au soleil. Ces plantes n’ont que
celte manière de vivre dans les climals brûlans situés
entre les Tropiques, elles ont aussi fort peu de ra-
cines relativement à leur grandeur , parce que leurs
feuilles les suppléent.
Il est évident que les plantes en croissant pren-
nent du carbone , et comme j'ai eu l’occasion d’ob-
server plusieurs fois, i.° que les plantes ne pouvoient
sucer les eaux de fumier qui doivent en être une
infusion, suivant l’opinion de ceux qui croient que
l’eau est le véhicule du carbone dans les plantes;
2°. que les rameaux que j’ai mis tremper dans ceLte
eau
( 257 )
eau y périssent d’abord quand elle est pure, parce
qu’ils n’en sucent point du tout, et y périssent tou-
jours plus tôt que dans l’eau comnfune , lorsque
l’eau de fumier est mêlée avec elle; ceci m’a fait con*
dure , que l’eau n’éloit pas le véhicule immédiat du
carbone et qu’elle ne pouvoil pas l’être ; de sorte
qu’il m’a semblé encore plus probable que le gaz
acide carbonique qui contient ce carbone, que les
plantes aspirent avec l’eau par leurs feuilles, et leur
racines; qui paroît se décomposer au soleil par les
feuilles mises dans l’eau chargée de ce gaz; que les
expériences chimiques montrent décomposable par
la voie sèche et la voie humide ; qui paroît favoriser
la végétation par les arroseniens faits avec les eaux
qui en ont dissous ; qui est peut-être la cause de
cette végétation luxuriante de la région selvosa de
l’Etna : tout cela m’a montré plus probable que le
gaz acide carbonique dissous dans l’eau et introduit
dans la plante étoit la source du carbone que l’on y
trouve et du gaz oxygène qui en sort.
L’expérience de M.r Chaptal que vous citez n’est
pourtant que celle de M.r Hassenfratz, mais j’ai fait
ces expériences sans succès de mille manières, et j’ai
toujours trouvé que les eaux de fumier nuisoient
considérablement à la suction des plantes , et par
conséquent à leur végétation ; il reste encore à dé-
cider, si cette eau contient véritablement le carbone
dissous , ou seulement combiné avec le mucilage qui
fournit, comme je le crois, l’acide carbonique par
la fermentation; alors les engrais n’agiroient, que
comme je pense qu’ils agissent , par l’acide çarbb-
Tome 5. R
( 258 )
nique qu’ils fournissent ; cel acide se combine avec
l’humidité delà terre, et passe avec elle depuis les
racines qui la sucent . jusques à la cime des arbres.
Vous croyez que le gaz acide carbonique que j’ai
obtenu des feuilles exposées sous l’eau chargée d’a-
cide carbonique au soleil vient de l’eau et non de
la plante; j’ai eu aussi cette idée, mais comme j’ai
eu l’occasion de remarquer qu'il pou voit y en avoir
environ et comme la même eau chargée d’acide
carbonique exposée au soleil dans des vases pleins,
n’eu donne pas à beaucoup près une quantité aussi
grande , j’en avois conclu que le gaz acide carbo-
nique éLoit un produit de la feuille. Vous soupçonnez
avec vraisemblance que le gaz acide carbonique ,
mêlé avec le gaz oxygène , est un produit de l’eau
chargée de gaz acide carbonique, parce qu’elle se
trouve dans l’air , lorsqu’il y a eu une couche de
gaz oxygène rendu par les feuilles ; mais je ne puis
encore adopter votre soupçon , parce que j’ai eu
lieu de remarquer, que les quantités de gaz produit
dans les premières heures de l’exposition au soleil
sont souvent plus grandes alors , que dans les sui-
vantes, quoique j’en eusse ôté le gaz produit cinq
ou six fois dans la journée, et parce que commu-
nément le gaz oxygène produit est d’autant plus
pur que sa quantité est plus grande.
L’acide carbonique trouvé dans les jets d’air sortis
des plantes seroil une nouvelle preuve de ce que
je viens de dire , puisque ces jets paroissent au mo-
ment que les plantes sont mises dans l’eau aérée ,
et l’on ne pourvoit l’expliquer par l’hypothèse de
( 25y )
ïa décomposition de l’eau : i.° parce qu’elle est moins
probable que celle de la décomposition de l'acide car-
bonique: 2.° parce qu’on ne verroil pas trop pour-
quoi la plante qui perdroil une si grande quantité
de carbone ne seroit pas blanchie par celte perle ,
ou réduite à la couleur jaune qui est la couleur
de la toile peinte par le carbone qui s’y dépose.
Vous voyez bien que je me garde très-fort de rire
de vos idées, et que je ne vous rappelle pas le car-
bone qui ne sauroit entrer dans la plante avec les
sucs qu’elle tire.
J’ai véritablement fait attention aux: deux para-
graphes de votre précédente lettre que vous me
rappelez dans celle-ci , mais je ne pénètre pas la
conséquence que vous en tirez contre mon hypo-
thèse ou ma théorie. J’ai toujours remarqué que
le gaz oxygène fourni par les feuilles exposées sous
l’eau chargée d’acide carbonique étoit toujours d’au-
tant plus sali par ce dernier que la quantité de
gaz acide carbonique contenu dans l’eau étoit plus
grande, et la quantité du gaz oxygène plus petite,
et j’en trouvois la cause dans la quantité du gaz
contenu dans le parenchyme, dans sa lenteur pour
l’élaborer, peut-être dans l’a Itération qu’il soufîroit
par cette abondance de gaz ; de sorte que comme
il arrivoit plus de gaz acide carbonique qu’il ne
pouvoit s’en décomposer, il étoit forcé de s’échap-
per avec le gaz oxygène dans l’état où il étoit eut ré.
Quant au second paragraphe , il me paroîl un
oxiome que toutes mes expériences ont démontré.
Lorsque j’ai fait voir que les feuilles exposées sous
I
( 260 )
l’eau chargée d’acide carbonique au soleil donnoieut
le gaz oxygène , il en résulloit que plus les plantes
donnoient de gaz , et plus il devoit y avoir de gaz
oxygène , puisqu’il y avoit plus d’acide décomposé,
mais c’esl précisément ce que je crois avoir montré
souvent.
J’ai toujours trouvé que le gaz oxygène produit
par les plantes exposées sous l’eau aérée au soleil éloit
d’au tant plus pur qu’il y avoit plus d’air produit , et
j’ai montré dans mes Mémoires physico-chiiuiques
et dans mes Expériences sur l’influence de la lu-
mière solaire, etc., qu’il y avoit plusieurs plantes
qui rendoient moins d’air , et un air moins bon
dans les eaux fortement chargées d’acide carbonique*,
de sorte que je connoissois bien ce phénomène qui
ne peut s’expliquer , que par une désorganisation
de la plante , ou une action particulière du gaz sur
les parties fluides ou solides du végétal , ou sur la
lenteur de la décomposition, ce qui annonceioit
aussi peut-être des organes particuliers.
Vos expériences sur l’ aloe caulescens et le cactus
cochùiilifer dévoient vous donner les résultats que
vous avez eu. Ce sont des plantes grasses qui con:
servent leur parenchyme végétant pendant long-
temps, comme je l’ai vu avec les feuilles de mon
sedum anacampseros dont je teriois les rameaux
pendus dans ma chambre : ce qui apprend que puis-
que les plantes végètent , elles tirent à elles l’eau
dissoute dans l’air avec quelques portions d’acide
carbonique qu’il y a toujours ; mais vous avez vu
dans mes expériences } que si les feuilles sucent l’eau.
( a6l )
elles sucent aussi l’air qui y est dissous, puisque les
feuilles rampantes au fond par l’action de la pompe
pneumatique , ou par l'air qu’elles avoient perdu
surnageoient bientôt , quand on les plaçoit dans
une eau chargée d’acide carbonique, ce qui inon-
treroit encore que le gaz quitte l’eau dans le paren-
chyme de la feuille , et y reprend toutes ses propriétés.
Je ne puis croire que l’eau bouillie perde par
l’ébullition quelque principe inconnu propre à fa-
voriser le développement des végétaux , i.° parce
que l’eau bouillie reprend sa propriété de faire rendre
le gaz oxygène aux feuilles , dès qu’on y fait entrer
de l’acide carbonique; 2.° parce que l’eau distillée
dont je me suis presque toujours servi, quand j’ai
employé des eaux fortement chargées d’acide car-
bonique, m’a procuré des effets semblables à. ceux de
Feau commune non bouillie, quand on l’a chargée
de ce gaz.
Mais j’ai bien vu que le gaz acide carbonique
diminnoit dans l’eau à mesure que les feuilles qu’on y
avoit mises produisoienl du gaz oxygène, et il m’est
arrivé en répétant l’introduction quotidienne des
feuilles sous un récipient plein d’eau chargée d’abord
d’acide carbonique et exposée au soleil, de la priver
presque totalement du gaz qu’elle avoit dissous. Je
sens bien que l’expérience est très-délicate, et qu’elle
ne se fait pas sans laisser des soupçons ; mais j’ai
eu lieu de voir souvent que la quantité de l’acide
carbonique étoit diminuée par les feuilles que l’on y
exposoil. au soleil sous l’eau qui en étoit chargée.
J’ai dit quelque part que les plantes fournissent
( sf)2 )
plus de gaz oxygène au printemps qu'en automne.
.1 ai prouve dans la nouvelle édition de ma Physio-
logie végétale que je prépare, que les plantes gâtoient
1 air qui leur servoit d’atmosphère eu changeant en
gaz acide carbonique le gaz oxygène qu’elle eon-
tenoit par sa combinaison avec leur carbone, comme
on s’en aperçoit par sa diminution soit à la mesure ,
soit à l’eudiomètre.
J’ai fait quelques expériences sur les odeurs des
fleurs, elles tendent à montrer que l’odeur fait plus
de mal aux animaux par son action sur les nerfs,
que par son action sur le poumon.
Je me garderai bien de vouloir vous suggérer
quelques idées pour terminer votre ouvrage, je ne
voudrois pas lui faire ce tort.
Enfin je voulois vous donner un extrait d'un Mé-
moire de M.r Humboldt sur le gaz nitreux , où il
prouve que les eudiomètres faits par la combustion
du phosphore , laissent dans l’air qu’on essaie une
quantité notable de gaz oxygène comme un dixième:
consultez le Mémoire , lui-même, c’est le N.® oo
des Annales de chimie.
J’ai l’honneur d’être avec considération, Monsieur,
votre très-humble et obéissant serviteur ,
Senebiee.
C =G5 )
Extrait d’une Lettre de Spajïlanzani ,
du 26 Novembre 1798(1).
Je réponds un peu tard à cette lettre, et je me
prévaux pour cela des fériés de Noël; il m’a été
impossible de le faire auparavant. Puisque vous le
souhaitez, je vous envoie ma lettre imprimée sur
Varia delle piaule chiuse , elle vous paroîtra sûre-
menl inutile, puisque je vous ai dit infiniment plus
de choses dans mes -lettres que je n’en ai renfermé
dans cet écrit.
J'ai relu deux fois votre lettre, ou pour dire
mieux votre mémoire , car en vérité , elle en est
un dans les formes , et c’est un mémoire excellent
et plein de sagesse, je ne puis vous exprimer com-
bien il m’a fait de plaisir, et combien il me sera
utile pour la composition du mien.
Je n’ai pas le temps à présent de vous répondre
en détail par une raison que je vous expliquerai:
je m’arrêterai seulement à deux ou trois de vos
paragraphes.
Dans les expériences que j'ai faites sur les feuilles
renfermées dans l’air commun , il est très-vrai que
(1) Note de T Editeur. Spallanzani me marque qu’il avoit in-
terrompu son ouvrage sur les plantes , pour travailler à rédiger
son ouvrage sur la respiration , dont il vouloit faire entrer l'in-
troduction que j ai publiée d'après son manuscrit avec les trois
autres mémoires qui la suivebt , dans les mémoires de la Société
Italienne, cl. qu’il votiloit me communiquer avant leur publication.
( 264 )
Teau que j ai employée pour fermer les vases ira
presque jamais été bouillie , c’éloit celle de mon
puits ; mais au printemps prochain je l’emploierai
bouillie comme vvous m’en faites heureusement naître
l’idée, et je ferai une comparaison entre l’air des
plantes obtenu par celles que j’aurai renfermées
avec l’eau bouillie et celles qui auront été renfer-
mées par l’eau non bouillie.
Vous me demandez : si j’ai examiné l’air dans
la campagne à différentes heures du jour ; je vous
dirai que oui, et qu’il y a eu des jours où j’ai fait
cet essai cinq ou six fois; en commençant, lorsque
le soleil étoit environ à un tiers de sa hauteur au-
dessus de l’horizon, et en les prolongeant jusques
à deux heures avant son coucher. Je mettois des
vaisseaux préparés avec des feuilles dans les in-
tervalles d’ombre produits par les feuilles des arbres.
Mon but étoit de voir si ces ombres gâteraient l’air
contenu dans ces vaisseaux , et je trouvai que cet
air étoit alors gâté. D'un autre coté, les feuilles des
vases éclairés par le soleil produisoient un air pour
l’ordinaire meilleur que l’air commun. En consi-
dérant ensuite avec attention à chaque heure du
jour les feuilles éclairées par les rayons immédiats
du soleil et les feuilles restées à l’ombre des feuilles
des arbres opposés , je concluois avec sûreté que la
somme des feuilles dans l’ombre surpassoit beaucoup
celle des feuilles éclairées dans toutes les circonstances*
( 265 )
MÉMOIRE DE L’ÉDITEUR,
Relatif aux expériences de Sjpallanzani sur l’air
produit et absorbé par les plantes exposées a
l’ombre et au soleil dans Vciir dans divers gaz
et sous l’eau.
§ I.
T i e célèbre docteur Priestley donna les premiers
indices de la faculté qu’ont les plantes de produire
du gaz oxygène sous l’eau , dans l’air commun, et
dans l’air gâté par la respiration , lorsqu’elles y sont
exposées au soleil; Ingenhouz suivit cetle recherche
curieuse et fit des découvertes importantes sur celte
partie de l’histoite des plante». Je m’occupois alors
plus particulièrement de la lumière et de son in-
fluence sur l’étiolement des végétaux et sur d’aulres
substances et je fus ainsi entraîné naturellement à
suivre celte nouvelle carrière ouverte par ces deux
célèbres physiciens ; je répétai leurs expériences ,
j’en fis de nouvelles, et j’eus comme eux, l’avan-
tage de faire la découverte de quelques faits incon-
nus , et d’en tirer quelques conséquences utiles.
Spallanzani, dans la dernière année de sa vie,
appliqua son génie à cet objet particulier de la phy-
siologie végétale , et trouva une manière de faire
nos expériences avec une précision, que l’état où
étoil l’eudiomélrie , lorsque nous suivîmes nos tra-
vaux ne nous permettoit pas d’employer; ce qui
le mit surtout dans le cas de rechercher l’influence
( 266 )
que les plantes exerçoient directement sur l’air et
sur les différens gaz où il pouvoit les placer. J’avois
bien déjà fait quelques expériences dans ce but ,
comme on peut le voir dans quelques-uns de mes
ouvrages sur ce sujet , mais elles étoient trop vagues
et se trouvoient ainsi vraiment insuffisantes ; de
sorte qu’elles avoient besoin d’être reprises et refaites
avec celte exactitude que j’avois cru mal à propos
impossible d’atteindre.
Enfin M.r Desaussure le fils, s’est emparé encore
de ce sujet et quoiqu’il n’ait eu aucune connoissance
des travaux de Spallanzani , il s’est tracé une route
nouvelle pour faire des recherches analogues à celles
dont je viens de parler , et il est parvenu par des
expériences qui annoncent en lui autant de génie
que de patience, d’adresse et desavoir à démontrer
la décomposition de l’acide carbonique dans les plantes
par l’action de la lumière , que j’avois découverte
mais seulement rendue très-probable; ce qui l’a con-
duit à Irouver des faits qui feront une époque ca-
pitale dans la physiologie des plantes.
§ II.
Je ne me propose pas d’ajouter des faits bien im-
portans à ceux que Spallanzani et M.r Desaussure
on t observés; mais il m’a semblé qu’il y auroit quelque
utilité à donner un résumé des connoissances ac-
quises sur ce sujet, cl à examiner en particulier les
doutes que Spallanzani a élevés par ses expériences
sur la décomposition de l'acide carbonique dans les
plantes par Faction de la lumière solaire , d’autant
i
( 267 )/
plus qu’il ne pareil pas avoir eu une opinion bien
tranchée conlr’elle comme on aura pu le voir dans
le Mémoire précédent : mais comme il ne a oit bien
décidément dans mon opinion qu’une pure hypo-
thèse, et recounoît pourtant son importance dans
une théorie de la végétation ; j’ai cru qu’il pour-
voit être nécessaire de reprendre ce sujet, de le con-
sidérer de nouveau, d’examiner ses fondemens pour
savoir , s’ils sont aussi solides que je les ai crus et sur
tout pour leur joindre toute la force que leur donne
les belles expériences que M.r Desaussure a faites
pour les appuyer.
Il m’a semblé encore qu’il conviendroit de s’oc-
cuper ici des moyens de la nature pour conserver
l’air atmosphérique dans l’uniformité de son état
eudiométrique qu’on lui trouve partout, au milieu
des causes toujours renaissantes qui concourent pour
la troubler.
5 I».
Avant de m’occuper plus directement de ces su-
jets curieux ; je dois dire quelque chose du mé-
moire précédent composé d’après les journaux d’ex-
périences de Spallanzani.
J’aurai dit en un mot tout ce qu’on peut eu dire
de plus vrai et de plus flatteur; eu disant que l’on
y retrouve par-tout le génie , la méthode , la pa-
tience , l’adresse , les scrupules , l’amour de la vérité
qui distinguent si avantageusement Spallanzani en-
tre les Naturalistes célèbres. O11 y remarque par-
tout ce désir pur de découvrir le vrai , réuni avec
les moyens les plus ingénieux et les plus sûrs pour
( 268 )
le «rer des ténèbres, dont il est si souvent enveloppé
e pour le faire briller avec tout son éclat.
La méthode que Spallanzani a suivie dans ses ex-
périences sur les plantes , n’avoit été employée
“Vant lü! Par aucun de ceux s’éloient occupés
de cet objet, ni dans aucune des expériences pa-
reilles qu’il a répétées avec ses nouveaux moyens-
mais il sentit bientôt les avantages qu’il retirerait
de 1 eudiomètre de M.r Giobert : c’est avec lui qu’il
a pu faire une analise rigoureuse des gaz produits
par les plantes, et de l’air avec lequel elles éloient
renfermées; qu’il est parvenn à distinguer les di-
vers gaz qui y sont presque toujours mêlés, et à
en mesurer les quantités; M.r Desaussure avec le
même instrument en a retiré à-peu-près les mêmes
avantages et à de certains égards est encore par-
venu à une plus grande précision.
C’est ainsi que Spallanzani répéta toutes les expé-
riences faites par lngenhouz et moi; et en jugeant
par lui-même le degré de confiance qu’elles méri-
tait, il apprend le degré de confiance que l’on
peut leur donner; mais il y ajoute ce qui leur
* nianquoit’ en déterminant la nature réelle des clian-
gcmens arrivés à l’air atmosphérique où il renfer-
moit des végétaux , en plaçant sur la voie qui
conduit à leurs causes , en fixant les caractères
des gaz produits ou formés, et en indiquant leur
absorption.
Ce qui rend encore les expériences de ce grand
observateur précieuses; c’est leur singulière variété:
on diroit qu’il connoissoit toutes les routes par les».
( 269 )
quelles on pouvoit arriver à la découverte de la
même vérité , et qu’il ne vouloiL jamais se dispen-
ser de les suivre toutes, parce qu’il youloit toujours
avoir la vérité toute entière et faire sentir quelle
est comme un foyer de lumière où tous les rayons
partants de tous les points de la circonférence doi-
vent. se réunir , pour y paraître plus sensibles et
y éclater chacun de l’éclat de tous.
Les expériences de Spallanzani ont encore ceci
de caractéristique ; leur but est toujours bien dé-
terminé, elles l’atteignent et le remplissent par-
* faitement, elles n’ont rien de vague , parce qu’elles
ne sont pas faites au hasard ; mais comme elles sont
le fruit de la réflexion , elles sont aussi des réponses
directes faites à une question simple qui devoit être
résolue complètement, ou qui 11e devoit l’être point
du tout ; de cette manière il dissipe tous les doutes,
et la nature que l’on explique si mal quand on la
Voit par l’imagination, s’explique ainsi toujours très-
bien par elle-même.
Spallanzani a un art particulier qu’il emploie con-
tinuellement avec succès ; il considère les expériences
qu’il a faites pour les comparer entre elles , et les
éclairer les unes par les autres; c’est ainsi qu’il éclaircit
par la lumière de l’une ce que l’autre pouvoit avoir
d’obscur; qu’il étend ce que l’autre ne faisoit qu’in-
diquer, et qu’il explique ce que l’autre, laissoit
sans explication. Il faut le dire; Spallanzani a sin-
gulièrement perfectionné à tous égards l’art de faire
les observations et les expériences , il y a toujours
porté oe coup-d’œil juste d’uu« logique sévère, que
( 270 )
Newton avoil déjà montré dans son optique, et qug
le Professeur de Pavie applique avec le même art
et le même avantage à des sujets qui n’étoient pas
pourtant susceptibles de la même rigueur que ceux
d’une science physico-mathématique.
Mais ce qui le distingue éminemment entre pres-
que tous les observateurs ; c’est la sagesse de ses con-
clusions qui sont toujours immédiates et qui ne dé-
passent jamais ce que les faits lui ont montré; aussi
quand il emploie l’analogie, c’est avec une circons-^
pection et une prudence qui semblent écarter tous
les hasards de cette méthode et qui lui donnent
entre ses mains une certitude qui est si rare , lors-
que la plupart des observateurs osent s’en servir*
Cependant je dois faire remarquer ici comme je
l’aurai fait à Spallanzani lui-même , si sa vie eût
été prolongée, et que j’eusse eu le temps de mé-
diter davantage ses belles expériences sur les végé-
taux; c’est que la manière de procéder qu’il y a
suivie ne me paroit pas tout-à-fait sans exception.
Ainsi le choix qu’il a fait de l’hiver pour faire un
grand nombre de ses expériences ne me semble pas
le plus convenable : il nous apprend bien qu’il a
voulu écarter un inconvénient que l’on Irouve en
été, celui de la grande chaleur que les plantes éprou-
vent au soleil, lorsqu’elles y sont exposées sous des
vaisseaux clos , et à cet égard il a eu une idée très-
heureuse; mais on ne peut se dissimuler que les'
plantes dans une saison froide végètent peu lors-
qu’elles végètent encore ; qu’elles ne vivent alors
que ce qu’il huit pour 11e pas périr, et qu’elles n’ont
( 271 )
pas assez de vie pour déployer leur vigueur : ce
qui influe considérablement sur la production du gaz
oxygène qui me paroît le premier signe de la vie
végétale , et l’on en trouve la preuve dans le Mémoire
même de Spallanzani, où l’on voit que les feuilles
de la canne à sucre qui ne donnèrent presque point
de gaz oxygène au mois de Mars , lorsqu’elles fu-
rent renfermées dans l’air, commun ou dans le gaz
hydrogène, lui en fournirent beaucoup pendant l’été
§ LXXV, LXXVIII, CIV. J’avois déjà prouvé
dans mes Recherches sur V influence de La lumière
solaire, que les feuilles des plantes en automne
donnoient moins de gaz oxygène que dans le mois
de Juin, et l’on peut aisément le vérifier pendant
toute l’année sur l’ellébore fétide.
Je dois remarquer encore que la seule inspection
d’une plante ne peut être une preuve qu’elle n’a pas
souffert' dans l’air clos , où elle est renfermée avec
une atmosphère complètement humectée, non-seu-
lement par l’évaporation de la plante, mais encore
par celle de l’eau qui lui sert de clôture : ce qu’il
y a de vrai, c’est qu’à l’air libre les plantes four-
nissent une quantité d’acide carbonique à peine per-
ceptible, tandis qu’elles en donnent une quantité
toujours remarquable dans les vases clos ; ce quji
ne peut être produit que par la clôture et par l’al-
tération que les plantes subissent dans cette atmos-
phère ; cette altération diminue leur vie en les dé-
sorganisant; aussi lorsque l’on prolonge l’expérience
dans les vases clos , les feuilles se séparent de la
matière verte contenue dans leur parenchyme «t
( 272 ).
ne conservent que leurs réseaux formés par les fibres
ligneuses; mais comme cet effet se produit plus vite
sur les feuilles quand on les lient quelque temps
sous l’eau, on ne peut douter que la macération
qui les met sous l’eau dans cet état ne le fasse naître
de même dans une portion d’air constamment
chargée de toute l’eau qu’elle 'peut contenir, et
comme cet effet doit commencer au moment où la
cause commence d’agir, il me semble que l’on doit
le remarquer dès que cette cause est active : de sorte
que comme il est bien proové dans divers cas que
l’acide carbonique, que l’on trouve dans les Arases
clos où elles sont renfermées sort en partie de l’in-
térieur de ;la plante, il n’est pas moins vrai, qu’il
est produit toujours de même par le contact du
gaz oxygène avec la plante , et par conséquent par
l’union de l’oxygène avec le carbone qu’il lui en-
lève; ce que l’on peut toujours sa\roir à-peu-près
par la quantité du gaz oxygène resté dans le vase
comparée avec celle du gaz acide carbonique pro-
duit; parce que l’on voit d’abord par un calcul fort
simple, si le gaz oxygène qui a disparu a pu former
tout l’acide carbonique que l’on a trouvé : cepen-
dant si ce calcul ne peut pas toujours servir à dé-
terminer l’emploi du gaz oxygène dans la forma*
tion de l’acide carbonique , parce que les plantes
en absorbent pour le combiner dans leurs fibres ou
leurs fluides ; cependant , il montre souvent que le
gaz oxygène disparu de quelque manièi’e que cela
se soit, fait, ne peut être entièrement un des élémens
de l’açide carbonique trouvé; puisque les plantes en
fournissent
( 275 )
fournissent dans les gaz hydrogène et azote comme
Spallanzani l’a bien prouvé , et sous les vases clos où
les plantes restent long-temps, et même sous l’eau
lorsque leur séjour y est prolongé.
Je dois pourtant observer ici que Spallanzani a
voulu prévenir cet inconvénient par la brièveté du
temps qu’il emploie à un grand nombre de ses ex-
périences ; mais ici l’on peut dire encore : s’il a
empêché les grands effets de cet inconvénient, les
a-t-il empêché dans toute leur étendue ?
§ IV.
Pour mettre quelqu’ordre dans ce mémoire et se
l'aire une juste idée de l’état de nos connoissances
sur ce sujet •, je crois qu’il faut le présenter d’une
manière qui en puisse lier toutes les parties.
J’examinerai donc d’abord si les plantes produi-
sent de l’air •, ensuite je me demanderai , si l’air
produit au soleil sous l’eau par les plantes est aussi
produit par elles dans une atmosphère d’air commun.
Il me conviendra ensuite de rechercher l’origine
de cet air, s’il sort de l’intérieur de la plante, et
quelle peut être la cause de sa production. Enfin
il faudra voir si les phénomènes produits par les
plantes dans l’air libre sont les mêmes que ceux
qui sont observés sous l’eau ou dans les vases
clos.
Dans cet examen que les expériences exactes de
Spallanzani rendent plus intéressant qu’il ne l’a-
voit été par celles qui avoieut été faites jusques à.
présent; je profilerai encore des savantes recherches
Tome 5. S
( 274 )
de M.r Desaussure et je ne craindrai pas d’y joindre
les nouvelles considérations que la masse de lumière
répandue par tous ces travaux importuns m’a mis
eu état de faire.
§ V.
C’est un fait assez généralement établi par In-
genhouz et moi , que les plantes exposées au soleil
sous l’eau commune donnent plus ou moins cfe gaz
oxygène suivant leur nature et leur état de santé;
j’a vois encore montré que ce gaz oxygène n’étoit
pas pur , qu’il conlenoit de l’acide carbonique et
du gaz azote. Spallanzani a confirmé ces résultats
par ses belles expériences , et il a déterminé comme
on a pu le voir les quantités précises des divers gaz
formant le mélange de l’air produit par les feuilles
exposées sous l’eau au soleil.
Il a encore démontré ce que j’avois aussi dé-
montré de mille manières, que les feuilles sous l’eau
à l’obscurité ne donnent aucun gaz qui se manifeste
aux yeux de l’observa Leur dans les appareils disposés
pour ces expériences , tanL que les feuilles y restent
parfaitement saines; il étoil bien important de ré-
péter ces expériences , parce qu’il y a encore divers
physiciens qui croient que les plantes y produisent
de l’air , de sorte qu’à cet égard ils ne peuvent plus
douter de la certitude de mes expériences.
J’observerai cependant , que je n’ai jamais pré-
tendu qu’il n’y eût point de gaz acide carbonique
produit sous l’eau à l’obscurité; j’ai même montré
que dans l’espace de douze ou quinze heures , di-
verses feuilles, de diverses plantes n’en donnoient
4
( 27^ )
point, mais qu’il commençoit à paroître quand îà
feuille fermentoit ; il faut pourtant remarquer ici
que lorsque la quantité de l’acide carbonique est
très-petite , lorsqu’il est mêlé avec une très-petite
quantité d’azote, il ne sauroit être perceptible , parce
qu’il se dissout dans l’eau de l’expérience , et s’il
échappe à la vue , il ne sauroit échapper à l’action
de l’eau de chaux.
Il résulte donc des expériences, que la lumière
seule soutire le gaz oxygène des plantes, et Spal-
lanzani fait observer à celle occasion que tant qu’il
reste un peu de vie aux plantes, elles peuvent four-
nir du gaz oxygène à la lumière; d’où je lire celte
conséquence , que le gaz oxygène rendu par les
plantes est une preuve de leur vie, et que la quan-
tité de ce gaz annonce l’énergie de leurs organes,
que l’on voit s’affoiblir quand on les lient long-temps
sous l’eau, lors même que fou a le soin de la réhou-
veler très-fréquemment.
C’est encore un résultat curieux des expériences
de Spallanzani , que la quantité de Vazote croît dans
la production de l’air fourni par les plantes exposées
sous l’eau au soleil avec celle du gaz oxygène qu’elles
px-oduisent ; . c'est-à-dire , qu’il y a d’autant plus
d’azote qu’il y a eu plus de gaz oxygène produit.
Ce phénomène s’explique fort bien dans mon opi-
nion de la décomposition du gaz acide carbonique,
car si l’azote se trouve toujours plus ou moins mêlé
avec le gaz acide carbonique, comme les expériences
de Priestley et de Spallanzani dans son Estime che-
jnieo tendent à l’établir; il est clair que plus il y
( 276 )
aura de gaz acide carbonique décomposé , plus il
doit y avoir de gaz azote et oxygène produits ; c’est
aussi le gaz acide carbonique que je regarde comme
le véhicule de l’azole dans les plantes , comme je l’a-
vois déjà dit, il y a bien long-temps , dans un Mé-
moire imprimé avec ceux de l’Académie de Turin;
c’est bien toujours mon opinion, et c’est bien encore
à l’acide carbonique contenu dans les eaux, que
j’attribuerai cet azote que Priestley y a trouvé ; à
moins d’imaginer une combinaison particulière du
carbone avec le gaz oxygène qui donne ainsi l’azote
lui-même, parce qu’il n’est pas sans vraisemblance
que cet azote appartienne au charbon : mais j’aurai
l’occasion de parler encore de l’azote contenu daus
les plantes
$ VI-
J’avois bien établi , que les différentes espèces de
plantes exposées au soleil dans les mêmes eaux,
pendant le même temps , avec des surfaces égales
donnoient des volumes d’air différens et d’une pu-
reté qui n’étoit pas la même, et j’avois bien fait
voir’ en même temps , que les feuilles les plus épaisses
ou qui contenoienl le plus de parenchyme étoient
celles qui donnoient le plus d’air, et qui le donnoient
le meilleur ; mais je dois dire qu’à cet égard la pré-
cision que Spallanzani a mise dans ses expériences
établit dans ces rapports une justesse , dont tous
ceux qui l’avoient précédé n’avoient pas approché.
A cette occasion, je démontrai que le parenchyme
de la feuille étoit l’organe élaborateur du gaz oxy-
gène, puisque après avoir écorché une feuille de la
( 277 )
grande joubarbe, et avoir mis sous l’eau au soleil
l’épiderme enlevé et le parenchyme , le premier ne
donna point d’air et le second en donna beaucoup.
§ VII.
Pavois bien établi que les plantes exposées au
soleil , sous l’eau chargée d’acide carbonique , don-
nent plus de gaz oxygène que sous l’eau commune ;
que les feuilles des plantes dont les tiges plongeoient
dans cette eau chargée d’acide carbonique et placées
sous cette eau donnoient plus de gaz oxygène au soleil
que les feuilles des plantes qui y étoient placées avec
leurs tiges conservées à scc , ou plongeant dans l’eau
commune. J’avois fait voir encore, que la même
quantité d’acide carbonique dissous dans l’eau ,
quand elle étoit considérable , ne faisoit pas pro-
duire la même quantité de gaz oxygène aux feuilles
que l’on y exposoit au soleil; mais qu’il y avoit
alors des feuilles de quelques plantes qui, dans ce
cas , en donnoient beaucoup moins , . comme par
exemple quelques plantes aquatiques : enfin j’avois
prouvé que les plantes exposées sous l’eau chargée
d’acide carbonique 11e donnoient point d’air à l'obscu-
rité quand elles étoient saines.
Spallanzani a vérifié tout cela par ses expériences
ingénieuses; mais il a voulu aller plus loin, et
quoiqu’il eût quelquefois penché pour admettre
mon opinion sur la décomposition de l’acide carbo-
nique , cependant il a été ébranlé par les expé-
riences suivantes : i.° il n’a point trouvé d'acide
carbonique dans le suc des plantes , et même dans
( 278 )
celui des plantes qui avoient, été exposées au soleil
sous l’eau chargée de cet acide; 2,0 il a vu plu-
sieurs plantes donner de l’air dans les eaux distillées
et bouillies; il en a vu même qui a été produit dans
l'eau de chaux ; 5.° il a remarqué encore que les
eaux chargées d’acide carbonique contenoienl une
quahlilé. d’acide carbonique aussi grande avant
d’être exposées au soleil avec des plantes, qù’après
en avoir retiré celles-ci ; ce qui lui ai fait concevoir,
comme ôn a pu l'apprendre dans ses mémoires ,
que mou opinion n’étoit point fondée , ou qu’elle
n’étoit qu’une simple hypothèse. Cependant, comme
jr'ai cru pouvoir défendre encore cette opinion, je
ne craindrai pas de de faire; mais je préviens tou-
jours que jé n’entréprends cette défense qu'avec toute
la défiance que doivent m’inspirer le génie et. l’amour
de la vérité de mon illustre ami. Je m’arrête ici un
moment, et je ne traiterai co sujet à fond qu'après
avoir donné les résultats des autres expériences que
j’ai racontées.. i
r § yihl
J’avoisi hien placé des plantes au soleil dans l’air
commun , sous des vases clos, mais à l'exception de>
la diminution de l’air, où elles éloient placées, de la:
production de l’acide carbonique , que je n'avois pas
déterminée , et de l’ébat eu dio métrique où l'air étoit
resté, je n’a voip su voir rien aur-delà. ? ; ■ q;
Spallanzani profile de ce radyeu pour déterminer
la quantité du gaz oxygène disparu, comme la
quantité dtt gaz acide dârboniquse produit , et il iv-<
gu) la clairement de ses expériences, qu'il y a J rès-
( 279 )
peu de plantes qui donnent du gaz oxygène au
soleil , sous des vases clos pleins d’air ; que quel-
ques-unes laissent l’air précisément dans l’état où il
étoit lorsqu’il fut enfermé avec elles , et que le plus
grand nombre absorbe beaucoup de gaz oxygène et
donne de l’acide carbonique , qui n’a pas toujours
été représenté par celui qui entroit dans la compo-
sition du gaz acide carbonique produit; enfin qu’il y
a eu des plantes qui ont laissé dans l’air avec lequel
.
elles ont été renfermées la même quantité de gaz oxy»
gène qu’il y a voit, mais qui y ont outre cela exhalé de
l’acide carbonique. On peut bien présumer que les
plantes qui ne donnent point de gaz oxygène dans
l’air , quoiqu’elles en donnent sous l’eau , produisent
cet effet , parce qu’elles ne contiennent pas l’acide
carbonique qui est décomposé au soleil; aussi ces
plantes ne donnent point de gaz oxygène sous l’eau
bouillie et l’eau de chaux , et elles donnent le gaz
oxygène dans l’air quand leurs tiges plongent dans
l’eau acidulée ; de même les plantes qui conservent
la pureté de l’air où on les place , lui fournissent
une quantité de gaz oxygène égale à celui qu’elles
absorbent.
Il paroît encore , par ces belles expériences , que
le gaz oxygène produit au soleil dans l’air par les
plantes qui en fournissent sous cette atmosphère et
dans celle clôture , a été quelquefois égal en volume
à celui qu’elles y produisent sous l’eau au soleil ;
quelquefois il y en a eu moins; mais en général la
quantité produite par les plantes sous l'eau au soleil
a été plus gi ande que celle qui. y a été produite dans
( 23o )
l’air commun •, par conséquent on peut et l’on doit
croire que la quantité d’air produite par les plantes
à l'air libre n’est pas si grande qu’on l’avoit cru
communément.
Il n’en est pas de même à l’ombre et à l’obscurité,
les plantes qui y ont été exposées, après avoir été
renfermées sous des vases clos par l’eau , y ont ab-
sorbé le gaz oxygène et produit l’acide carbonique,
et quelquefois de l’azote ; Spallanzani donne les
proportions rigoureuses de ces productions et de ces
absorptions.
Il résulte un fait général de ces expériences , c’est
qu’il y a toujours du gaz oxygène absorbé par les
plantes, quand elles n’en produisent pas, et qu'alors
elles rendent toujours de l’acide carbonique.
Mais ces expériences montrent aussi que le .gaz
acide carbonique produit a deux sources, l’une dans
l’intérieur de la plante , qui le chasse hors d’elle tout
formé ; l’autre dans le contact de la plante avec le
gaz oxygène de l’air qui se combine avec le carbone
de la plante, § XLTII, LV, LVI, LVIII , LXVII.
Enfin , quand les plantes n’absorbent pas le gaz
oxygène de l’air avec lequel elles sont renfermées ,
communément elles en donnent , et la quantité du
gaz acide carbonique produit est fort diminuée ; ce
qui insinueroit déjà qu’il y a eu du gaz acide carbo-
nique décomposé , § LXVII.
Il résulte encore des expériences de Spallanzani,
que les plantes fournissent au soleil d’autant moins
d’acide carbonique qu’elles donnent plus de gaz
oxygène, § LXXXI , ce qui appuyé d’une autre
manière la décomposition de l’acide carbonique.
( 28l )
§ IX.
Spallanzani a répété les mêmes expériences que
j’avois faites en introduisant des plantes dans les gaz
hydrogène et azote , et en les y exposant au soleil ,
il a eu encore les mêmes résultats que moi ; il a trouvé
qu’elles y l’endoient le gaz oxygène au soleil avec
l’acide carbonique \ mais il observe , ce que je n’a-
vois pas pensé à chercher , c’est que les plantes pla-
cées dans ces atmosphères gazeuses à l’obscurité y
donnoient le gaz acide carbonique. Cette expérience
étoit pourtant bien importante , puisqu’elle prouve
que les plantes peuvent le produire sans le concours
du gaz oxygène , et par conséquent que ce gaz doit
sortir tout formé de l’intérieur du végétal , puisqu’il
n’y a rien à l’extérieur qui puisse concourir à le
former ; mais aussi comme une plante semblable
fournit dans l’air commun une quantité de'gaz acide
carbonique plus grande que dans le gaz hydrogène ,
on est forcé de conclure que le gaz acide carbonique
fourni par les plantes dans l’air commun , est en
partie produit aux dépens du gaz oxygène de l’air,
et qu’il sort en partie tout fait hors de la plante.
Le gaz hydrogène dans lequel on fait végéter les
plantes sur l’eau produit un phénomène qui m’avoil
frappé depuis long -temps, et que j’ai vu se re-
nouveler dans les expériences que j’ai faites avec
M. Huber sur la germination 5 c’est la grande dimi-
nution de ce gaz , qui ne peut alors se charger que
de l’acide carbonique que les graines germantes
fournissent avec abondance, ou du gaz acide car-
bonique qui est produit par les plantes végétantes.
( 202 )
dans le premier cas , comme les expériences de
Spallanzani le prouvent. M. Desaussure explique
très-ingénieusement ce fait par la production du gaz
oxide de carbone : l'acide carbonique est décomposé
par le gaz hydrogène à l’aide du calorique que la
germination développe , il se forme alors de l'eau ,
eL le gaz acide , dépouillé de son oxygène , se trouve
changé en gaz oxide de carbone. Il est au moins
certain qu’il y a du gaz oxide de carbone produit ,
et il n’est pas moins certain que par celte combinai-
son, il doit y avoir une diminution dans le volume
du gaz hydrogène employé ; je puis même dire que
j’ai observé quelquefois des goutelettcs d’eau qui
tapissoient les vaisseaux où j'ai fait ces expériences.
Cependant , comme je me suis assez occupé de ce
phénomène en traitant le gaz hydrogène , et que
j’aurai l’occasion de publier ce travail , je me bor-
nerai à dire ici , qu’il n’y a jamais eu de diminution
du gaz hydrogène quand il a été fermé par le mer-
cure que je l’ai toujours observée quand ce gaz
éloit fermé par l'eau ; que je l'ai trouvée plus
grande, quand ce gaz éloit mêlé avec l’air commun,
et qu’elle a peut-être été la plus grande et la plus
prompte quand ce gaz étoit mêlé avec l’acide car-
bonique. Je n’en dis pas à présent davantage, parce
que pour traiter ce sujet comme je l’ai fait, il me
faudroit faire un épisode qui seroit trop grand dans
le Mémoire que je veux faire ici, et auquel celte
discussion paroi troit, avec raison, un hors-d'œuvre.
Le gaz azote, où l’on met végéter les plantes au
soleil , y reçoit du gaz oxygène, comme on le voit
( 285 )
lorsqu’on les place .clans le gaz hydrogène; mais
comme Spallanzani l’a observé, il y a du gaz acide
carbonique produit à l’obscurité; ce qui offre les
mêmes conséquences que celles que l’on tire de cette
production dans le gaz hydrogène.
Il faut pourtant observer que toutes choses étant
d’ailleurs égales ,' la quantité du gaz acide carbo-
nique produit dans le gaz azote par les plantes ,
est moindre que celle que l’on trouve dans le gaz
hydrogène ; ce que Spallanzani a vérifié de mille
manières.
Il paroîtroil donc que si le gaz acide carbonique
se décompose dans le gaz hydrogène , c’est seulement
au bout d’un certain temps; il seroit possible aussi
que le gaz azote pur suspendît plus vite l’énergie
vitale des plantes qui y sont placées , que le gaz hy-
drogène qui peut leur servir d’atmosphère.
- J’ai vu le gaz azote qui ne se diminue point sur
l’eau , souffrir une diminution quand on le mêloit
avec le gaz acide carbonique , ce qui peut faire
croire que le gaz acide carbonique l’entraîne avec
lui quand il se dissout dans l’eau ; d’autant plus que
le gaz acide carbonique ne m’a jamais paru absolu-
ment privé du gaz azote : on pourrait donc attri-
buer ainsi la diminution du gaz hydrogène, dans le
même cas , à la même cause , quoique le carbone
dont ces deux gaz se chargent, quand on les fait
servir d’atmosphère aux plantes et aux graines ,
pourvoit expliquer aussi celte diminution par la
contraction produite dans l’union des deux subs-
tances. Il est au moins vrai , que lorsque ces expé-
( 284 )
riences sont fort prolongées , et lorsque la diminu-
tion du gaz hydrogène a été considérable , ce gaz
qui ne donnoit point de gaz acide carbonique , quanti
on le brûloit , en donne alors beaucoup , et sa pe-
santeur eu est considérablement augmentée.
§ x.
Spallanzani a démontré que la chaleur avoit une
grande influence sur la production de ces gaz ; il
fait voir qu’à quelques degrés au-dessus de zéro les
plantes renfermées dans l’air ne donnent plus d’acide
carbonique à l’obscurité , par exemple peu à 5° \ ;
mais qu’elles en donnent ensuite d’autant plus que
la chaleur s’élève dans de certaines limites , ce que
l’on remarque également pour la production des gaz
oxygène et acide carbonique fournis par les plantes
exposées à la lumière.
Mais la chaleur semble influer surtout sur l’ab-
sorption que les plantes font du gaz oxygène, et sur
la production de l’acide carbonique , quand elles
sont renfermées dans l’air à l’obscurité.
Il me paroît donc , et cette conséquence me semble
capitale, que la chaleur n’agit pas purement et
simplement sur les solides et les fluides eux-inemes
des végétaux , elle doit y agir encore pour favo-
riser cette espèce de fermentation que l’on remarque
toujours; elle occasionne des décompositions et des
compositions qui se manifestent par le gaz acide
carbonique produit et par le gaz oxygène qui s’ab-
sorbe à l’obscurité. 11 me semble encore , d’après
mes expériences , que le gaz oxygène est plus prêt
( 285 )
à s'échapper hors des plantes , lorsque la tempéra-
ture est basse et lorsqu’elles sont exposées au soleil ,
que le gaz acide carbonique , lorsqu’elles sont à
l’obscurité; j’ai vu l’ellébore fétide et les mousses
donner du gaz oxygène au soleil , quoique le ther-
momètre y fût au-dessous de zéro , et qu’une partie
de l’eau fût gelée, tandis que suivant l’expérience
de Spallanzani elles cessent de donner le gaz acide
carbonique à l’obscurité , quand le thermomètre est
à 5° i au-dessus de zéro ; alors les plantes végété-*
roient encore , comme elles végètent à l’obscurité,
et la lumière , en agissant chimiquement sur l’acide
carbonique de la plante , le décomposeroit à une
température au-dessous de zéro pour lui faire donner
le gaz oxygène.
On peut comprendre ainsi comment les plantes
végètent sourdement pendant l’hiver et comment
elles sont en état de développer lentement leurs
boulons , qui sont pendant ce temps assez dévelop-
pés pour épanouir leurs feuilles et leurs fleurs aussi-
tôt que le printemps commence à se faire sentir.
§Xl.
Enfin Spallanzani a fait des expériences semblables
sur les fleurs et toutes leurs parties , sur les fruits
comme sur les graines. J’avois déjà trouvé qu’ils ne
donnoient point d’air, ou presque point d’air sous
l’eau , et qu’il éloit mauvais ; mais Spallanzani dé-
termine précisément que toutes ces substances don-
nent sous l’eau peu d’air , qu’il ne renferme que très-
peu de gaz oxygène et que le reste est toujours
( 286 )
l’acide carbonique mêlé avec beaucoup d’azote. Il
a vu que dans l’air ces substances absorboienl plus
de gaz oxygène qu’elles ne produisoient d’acide car-
bonique , et qu’elles fournissoient toutes assez d'a-
zote , mais que les pétales en donnoient plus que les
autres. Il a remarqué en particulier que les fleurs,
dont la queue plonge dans l’eau , gâtent plus ban-
que celles qui y sont renfermées à sec; que les
feuilles absorbent plus de gaz oxygène que les
fleurs, et surtout que les étamines donnent le gaz
hydrogène.
Ces expériences, bien imaginées et bien faites,
méritent une grande attention ; elles montrent d’a-
bord comment la différence des organes influe sur la
nature des produits ; il n’y a point- de rapports à la
lumière entre les gaz fournis par les feuilles et les
fleurs, puisque les premières absorbent, plus de
gaz oxygène que les secondes , et puisque les pre-
mières fournissent abondamment le gaz oxygène ,
tandis que les fleurs n’en fournissent que quelques
atomes et produisent beaucoup d’acide carbonique
et d’azote ; mais ce qui esL très-frappant , c’est ce gaz
hydrogène que les étamines laissent échapper; j’a-
voue que cette expérience me ramène à l’opinion
que j’avois eue, et que j’avois cherché à établir dans
le Mémoire sur l’ influence de l’air sur la germina-
tion, publié en l’an IX. ( ij, où je disois qu’il devoit y
avoir des cas où l’eau pouvoit être décomposée dans
(1) Cet ouvrage se vend chez J. J. Paschoud , Inipriroeur-
' Libraire, à Genève.
I
( 287 )
la végétation ; mais dans ce cas et dans la formation
des huiles , des résines qui existent dans tous les
végétaux , et dont parle avec raison M. Bcrlhollet
dans les Annales de Chimie , N° i5o, il seroil bien
difficile de chercher ailleurs la source de ce gaz hy-
drogène qu’ils contiennent.
Je supposois donc que cette décomposition de l’eau
n’avoit lieu dans les végétaux que lorsque les gaz
hydrogène et oxygène étoient immédiatement né-
cessaires pour les besuins du moment de la plante ,
tandis que l’acide carbonique se décomposoit tou-
jours à la lumière du soleil dans la plante vivante.
De celte manière la décomposition de l’eau s’opère
en vertu des affinités qüe les parties de la plante exer-
ceroient sur les parties de l’eau réduite à son dernier
terme de division dans les filtres du parenchyme ;
que ces affinités se manifesleroient par l’action de
la masse des matières qui agiroient sur ces petites
quantités de l’eau , et par conséquent que celte dé-
composition ne s’exécuteroil que pour former de
nouvelles combinaisons qui ne laisseroient échapper
aucune des parties décomposées; c’est ainsi qu’elle
s’opère dans les plantes étiolées ; où il ne peut y
avoir que très-peu de gaz acide carbonique décom-
posé ; c’est ainsi qu’elle a lieu dans la plante verte,
et qu’elle y est entretenue par la fermentation insen-
sible et continue qui s’y prolonge toujours : par ce
moyen la jjlante forme ses huiles et ses résines , et
se charge du charbon qu’elle renferme.
De cette manière l’explication de M. BertholîeL
subsiste dans toute sou étendue, dès qifiil admet uve<»
( 288 )
moi la décomposition de l'acide carbonique ; et c’est
pour moi une vraie jouissance de penser comme lui
à cet égard , puisqu'il admet aussi à présent la dé-
composition de l’acide carbonique , qui est de pre- .
mière nécessité pour trouver le carbone abondant
des plantes ; il me semble pourtant toujours que la
force des affinités employées pour décomposer l’eau
doit empêcher l’émission de ces parties décomposées.
Il est cependant vrai que le gaz hydrogène s’é-
chappe des étamines dans l’air libre, et je ne doute
pas que l’inflammation de l’atmosphère des fleurs
de la fraxinelle ne soit une preuve de l’expérience
de Spallanzani; mais la différence de l’organisation
de ces parties , l’abondance des matériaux inflam-
mables qui composent ces produits occasionnent aussi
des effets que l’on ne remarque pas ailleurs; ces éta-
mines sont remplis d’une huile très-ténue , presque
élhérée , qui doit nécessairement avoir pour com-
posant ce gaz hydrogène carboné avec une partie
d’ox}rgène , car tous ces hydrogènes végétaux sont
des hydrogènes oxy-carbonés , et ce sont ceux que
les chimistes hollandois ont trouvé les élémens de
l’huile combinée avec l’oxygène.
§ XII.
Spallanzani a traité la question neuve sur la répa-
ration du gaz oxygène atmosphérique employé par
les animaux , les plantes , etc. ; et s’il n’a pas indi-
qué sa cause, il a détruit une erreur, en montrant
que l’eau seule ne pouvoit décomposer l’acide car-
bonique qu’elle y boit , comme je l’avois cru , et.
. «omm»
( 289 )
comme je l’ai dit ; mais je dois le reconnoître, quoi-
que son Mémoire soit fini 5 et quoique j’eusse ex-
pressément donné mon opinion en divers endroits
de mes ouvrages , il ne m’y nomme jamais 5 mais
je dois avouer aussi qu’il m’a fait renoncer à cette
idée , et que je joindrai peuL-être encore quelque
chose sur ce beau problème.
§ xnr.
Enfin Spallanzani cherche à établir que les plantes
sont un très-petit moyen pour rendre à l’atmos-
phère le gaz oxygène qu’elle perd continuellement,
et que les idées que l’on avoit eues sur les avantages
que les plantes nous procurent à cet égard sonL fort
exagérées. Je me permettrai sur ce sujet quelques
réflexions que je présenterai au public comme je
les aui’ois adressées à Spallanzani lui-même , si j’a-
vois alors réfléchi autant que je l’ai fait depuis sur ce
beau sujet.
§ XIV.
Je voudrois à présent examiner les expériences de
Spallanzani, qui semble devoir anéantir l’opinion
de la décomposition de l’acide carbonique dans les
plantes végétantes au soleil ; mais avant de Je faire il
convient de rappeler les preuves qui l’ont rendue
probable , ensuite il me sera peut-être plus facile de
m’occuper des objections que l’on a faites contre
celle opinion. Je ne veux pourtant pas entrer dans
les détails que j’ai donnés dans divers ouvrages où je
m’occupe de ce sujet , et dont j’ai donné un précis
dans le troisième volume de ma Physiologie oègè-
Tome 5. T
(. 29° ( )
taie ; je me bornerai donc à le rappeler, en y joi-
gnant ce qui m’a paru depuis le plus propre pour
confirmer celle llu'orie.
§ XV.
Je découvris que l’acide carbonique dissous dans
l’eau favorisoit l’émission du gaz oxygène hors des
parties vertes des plantes végétantes qui y étoient
exposées au soleil , et ce fait a été confirmé par tous
çeux qui se sont occupés de ce sujet.
Je Pavois prouvé par l’expérience ; la plupart des
plantes ne donnent point d’air au soleil , ou du moins
quelquefois une quantité très-petite dans les eaux
distillée et bouillie , parce que dans cet état elles
sont privées d’acide carbonique; au moins ces mêmes
plantes en donnent avec abondance, quand on fait
dissoudre de l’acide carbonique dans ces eaux , et
quand on y expose alors les mêmes plantes au soleil ;
ce fait a été reconnu pour vrai par tous les physi-
ciens qui ont répété ces expériences.
Spallanzani l’a vu et démontré comme les autres;
mais son exactitude et son grand amour pour la
vérité lui firent porter son attention sur quelque»
faits particuliers qui lui parurent en contradiction
avec le premier , et qui lui inspirèrent des doutes
sur les conséquences que j’en a vois tirées.
Premier fait. Quelques plantes donnent moins
de gaz oxygène au soleil dans les eaux fortement
chargées d’acide carbonique que dans d’autres où il
v en avoit moins : j’avois aussi fait cette observa-
lion , et j’avois essayé d’expliquer la cause de cette
anomalie.
( 201 )
Second fait. Celui-ci paroîl d’abord une expé-
rience tranchante, et il appartient entièrement à
Spallanzani. Il y a des plantes qui donnent au soleil
du gaz oxygène dans les eaux bouillie ou distillée ,
dans l’eau privée d’acide carbonique par l’eau de
chaux, et dans l’eau de chaux elle-même.
Troisième fait , qui semble aussi d’abord sans
réplique, et dont j’avois indiqué les moyens de l’ob-
server, mais que je n’a vois pas vérifié par l’expé-
rience. L’eau chargée d’acide carbonique en contient
autant, après que les plantes y ont donné du gaz
oxygène qu’avant , et les sucs exprimés des plantes,
soit qu’elles aient été plongées dans l’eau chargée
d’acide carbonique et exposées ainsi au soleil , soit
qu’elles* se trouvent dans leur état naturel , ne
donnent point de marque qui indique chez elles la
présence de l’acide carbonique. Cette dernière expé-
rience paroît vraiment décisive , cl devroit anéantir
ma théorie sur la décomposition de l’acide carbonique.
J’ai été frappé de la force de ces objections, et
l’on aura pu voir par mes lettres à Spallanzani et
par ses réponses , que j’en avois senti l’importance ,
et j’aurai volontiers abandonné l’échafaudage que
j’avois bâti , s’il m’avoit toujours également paru
croulant par ses fondemens $ mais un examen plus
approfondi de ce sujet et des expériences de mon
ami , m’ont ramené à mon opinion , que les bril-
lantes expériences de M. Desaussure ont rendue aussi
solide qu’elle me l’avoit toujours paru, et que les
suffrages des chimistes les plus illustres ont confirmée
en l’adoptant. Je viens à cet examen.
( )
§ XVI.
Premier fait. Il y a des plantes qui donnent
moins de gaz oxygène au soleil dans les eaux qui
sont fortement chargées d'acide carbonique que
dans celles qui en contiennent une moindre quan-
tité , par conséquent V acide carbonique n’est pas
décomposé par la végétation des plantes au soleil.
J’ai observé ce fait comme Spallanzani , je suis
entré par rapport à lui dans quelques détails, et j’ai
remarqué que les plantes aquatiques étoient surtout
dans ce cas , comme on peut le voir dans mes Mé-
moires physico-chimiques , Tom. I.
Ce fait ne me semble point une objection contre
ma théorie , 1 ,° parce qu’il n’exclut pas la décom-
position de l’acide carbonique au soleil par ces
plantes , qui y donnent encore du gaz oxygène ,
mais qui en donnent seulement une quantité moindre
dans les eaux fortement chargées d'acide carbonique,
quoiqu’elles donnent pourtant toujours une quantité
de gaz oxygène plus grande dans les eaux qui con-
tiennent une quantité plus petite de ce gaz acide
carbonique que dans celles qui n’en contiennent
point, puisque ces plantes ne donnent point ou
presque point de gaz oxygène dans les eaux distillée
et bouillie , et qu’elles le manifestent bientôt dans
ces eaux-là même , dès que l’on y fait entrer une
petite quantité d’acide carbonique.
2°. 11 me paroît donc plutôt que la quantité de
l’acide carbonique dissous dans l’eau lorsqu’elle est
considérable, met un obstacle plus grand à l’émis-
sion du gaz oxygène que les plantes qui y sont pion*
/
( 2g5 )
gées n’en metlroient, s’il y avoit moins d’acide
carbonique dissous; puisque ces plantes donnent ce
gaz oxygène , lorsqu’elles sont exposées au soleil
dans une eau qui n’en contient qu’une quantité
moindre, et qu’elles n’en donnent point ou presque
point dans les eaux qui en sont totalement privées
par l’ébullition ou la distillation.
On conçoit d’ailleurs aisément comment une eau
fortement chargée d’acide carbonique peut altérer
l’organisation foible de quelques plantes en resser-
rant leurs surfaces, en fermant leurs pores, en leur
ôtant ainsi les sorties nécessaires au gaz oxygène
élaboré , et les entrées à l’acide carbonique qui pour-
roit s’y décomposer ; cet acide surabondant peut de
même altérer les organes intérieurs : ces considéra-
tions ne sont point sans fondeinens , puisque les
plantes trèfc-molles, et surtout les plantes aquatiques,
paroissent celles qui donnent alors le moins de gaz
oxygène. Celte observation sur les plantes aqua-
tiques me paroît ici frappante ; ces plantés habi-
tuées à un milieu qui ne contient jamais qu’une
petite quantité d’acide carbonique , et qui sont toutes
très-souples et d’une constitution fort lâche comme
les potamagetons et les conferves, sont plus propres
que les autres à s’altérer par l’action forte d’uu
acide; aussi lorsque l’on diminue la quantité de l’a-
cide carbonique ces plantes donnent , comme les
autres, une abondance de gaz oxygène, quoiqu’elles
cessent d’en donner au soleil dans les eaux privées
de cet acide.
Ceci me rappelle une expérience 'que j’ai faite et
( 294 )
qui a quelque rapport avec ce que je viens de dire;
âi l'on me! des pois, sous l’eau bouillie et sous l’eau
commune , il s’y développe une espèce de radicule
que M. Huber et moi avions prise pour un commen-
cement de germination , et que M. Desaussure a
démontré n’êlre qu’un gonflement accidentel ; n’im-
porte, ce gonflement , cette apparence de radicule
ne se montre point dans les pois qui sont mis dans
une eau fortement chargée d’acide carbonique, et si
les eaux produisent cet effet sur les graines dures,
si elles y interceptent l’entrée de l’eau, et si elles s’y
conservent comme dans un lieu très-sec , on peut
aisément concevoir comment elles produisent un
effet analogue sur certaines plantes.
Il paroît donc que dans ces cas l’action des eaux
fortement chargées d’acide carbonique est purement
mécanique , et que les conséquences que l’on en pour-
roit tirer contre la décomposition de l’acide carbo-
nique ne sa uroientêtre relatives à cette décomposition.
§ XVII.
Second fait. Mais comme Spallanzani a remar-
qué que quelques plantes donnent le gaz oxygène
dans les eaux distillée ou bouillie et même dans
les eaux de chaux , on ne peut pas dire dans ce
cas , que les plantes ont décomposé l'acide carbo-
nique qu’elles ne pouvaient trouver dans les eaux
qui en ètoient absolument privées , lorsqu’elles y
ont été exposées au soleil ; de sorte que la consé-
quence tirée du premier fait doit subsister , et se
trouve fortifiée par celui-ci.
( 205 )
J’avois répondu à Spallarizani par une foule d'ex-
périences que je fis , lorsqu'il m'eut appris celles
dont je viens de donner ici le résultat ; je l’ai dit
dans ma Physiologie végétale , Tom. III , p. 22 J.
Il m’écrivit seulement après avoir refait quelques-
unes de mes expériences , que ma réponse et ses con-
clusions méritoient toute son attention , et qu’il s’oc-
cuperoit particulièrement de ce sujet.
Je dirai donc en deux mots, comme je l’ai déjà
dit dans ma Physiologie végétale , i.° qu’il n’y a
que quelques plantes qui donnent du gaz oxygène
dans les eaux bouillies ou distillées et même dans
l’eau de chaux; que cette propriété appartient sur-
tout aux feuilles épaisses des plantes qu’on appelle
grasses, et que les feuilles minces n’en donnent point.
Spallanzani lui-même en convient, comme on aura
pu le voir dans son Mémoire où sont rapportées
toutes les expériences qu’il a faites sur ce sujet.
2.° J’ai fait voir dans l'ouvrage cité, que le gaz
oxygène rendu par les feuilles exposées au soleil
dans les eaux distillée ou bouillie , ou dans l’eau
de chaux, étoil le produit de l’air ou du gaz con-
tenu dans la feuille ; aussi la quantité que l’on en
obtient alors est communément très-petite , tandis
qu’elles en fournissent infiniment davantage, quand
elles sont exposées au soleil sous des eaux chargées
d’acide carbonique; que les feuilles qui donnent du
gaz oxygène en petite quantité sous ces eaux privées
d’acide carbonique vont bientôt à fond, parce qu’elles
sont privées de l’air qui les faisoit surnager; que ces
mêmes feuillos rfui ont séjourné au soleil sous ces
( 29G )
eaux privées d'acide carbonique pendant quelques
heures , transportées sous d’autres eaux semblables
et exposées encore au soleil ne donnent plus d’air ou
seulement que quelques atomes; enfin que si l’on
transporte au soleil des feuilles semblables aux pré-
cédentes , ou qui ont séjourné pendant quelques
heures dans des eaux privées d’acide carbonique
sous des eaux chargées de cet acide . elles y don-
nent du gaz oxygène à-peu-près comme les feuilles
fraîches ; ce qui prouve bien que l’acide carbonique
agit ici d’une manière marquée pour la production
du gaz oxygène.
5.° Je voulus rendre cette preuve plus saillante
par une autre d’un autre genre ; je mis les feuilles
que j’avois employées dans l’eau bouillie , sous la
pompe pneumatique où elles éloienl renfermées sous
un récipient plein d’eau bien privée d’air , et je fis le
vide ; je n’en retirai point ou presque point d’air ;
je mis des feuilles fraîches sous la pompe pneuma-
tique de la même manière ; je fis le vide et j’en retirai
une quantité d’air à-peu-près égale à celles qu’elles
avoient donnée au soleil sous l’eau bouillie. Ensuite
je mis ces feuilles épuisées d’air par les deux ma-
nières , séparément sous des récipiens pleins d’eau
chargée d’acide carbonique et sous l’eau bouillie;
elles restèrent les unes et les autres d’abord au fond
du vase; mais celles qui étoient sous l’eau chargée
d’acide carbonique ne lardèrent pas à gagner le haut
du récipient, tandis que les autres restèrent au fond
de l’eau bouillie; pour le succès de l’expérience il
faut les laisser à la même température où l’expé-
( 297 )
rience a été faite ; il est donc bien sûr que les feuilles
qni éloient sons l’eau chargée d’acide carbonique ,
ont tiré ce gaz avec l’eau ; qu’il a quitté l’eau qui le
lenoit dissous , et qu’il y a pris dans la feuille une
une forme gazeuse.
4.° Enfin ces feuilles exposées au soleil ont donné
beaucoup de gaz oxygène sous l’eau chargée d’acide
carbonique , et n’ont pas donné un atome d’air sous
l'eau bouillie ; il paroîl donc que les feuilles qui don-
nent de l’air au soleil sous l’eau bouillie ne donnent
que celui qu’elles contiennent , ou dont elles ont
l’élément dans leur parenchyme , et que dans tous
les cas elles décomposent l’acide carbonique. Il y a
plus , les feuilles tenues dans l’eau chargée d’acide
carbonique à l’obscurité donnent au soleil du gaz
oxygène sous l’eau bouillie et l’eau de chaux , quoi-
qu’elles n’en donnent point quand elles n’ont pas
élé dans les eaux acidulées •, il faut donc que l’acide
carbonique qu’elles ont sucé avec l’eau , se soit dé-
composé ensuite à la lumière dans les eaux qui ne
ponvoient leur en donner , et qu’il ait remplacé
celui qui est dissous dans l’eau acidulée où ces plantes
donnent du gaz oxygène.
Je dirai la même chose des feuilles mises dans
l’eau de chaux , en observant qu’il n’y a que les
feuilles qui peuvent supporter l’action de ce milieu
sans se désorganiser tout à fait , qui donnent de l’air;
mais dans tous les cas elles offrent les mêmes phéno-
mènes que les précédentes , et la difficulté que l’on
en liroit contre ma théorie a rigoureusement la
même solution. <
'Foules ces expériences , que j’ai variées de mille
manières , ont été faites sur quelques-unes des espèces
de plantes employées par Spallaozani , et sur d’au-
tres qui leur étoient analogues comme le sedum ana-
9 campseros , et elles m’ont toutes donné, chacune
dans leur espèce , des résultats parfaitement sem-
blables à ceux que j’ai rapportés; elles ne m’ont
fourni alors, sous l’eau bouillie et l’eau de chaux ,
qu’une quantité d’air à très-peu près égale à celle que
j’en ai retirée par la pompe pneumatique.
§ XVIII.
Troisième fait. L'eau chargée d'acide carbo-
nique ne le perd pas quand on y a exposé des
feuilles au soleil pendant un certain temps , puisque
l'eau employée à cette expérience fournit le même
poids de carbonate calcaire lorsqu'on la mêle avec
l'eau de chaux , que la même quantité de cette eau
avant V expérience , par conséquent il n'y a point
eu d'acide carbonique pris par les feuilles , et il
n'y en a point eu de décomposé par elles au soleil.
J’avois bien pensé à celle expérience en faisant les
autres, je l’ai même indiquée dans mes expériences
sur l'influence de la lumière solaire dans la végé-
tation , mais je ne la fis pas , parce que je n’imagi-
nois pas des moyens assez sûrs pour la faire con-
venablement. Spallanzani l’a faite, et il eut le ré-
sultat que j’ai donné dans 1 exposition du troisième
fait opposé à l’opinion que j’ai établie sur la décom-
position de l’acide carbonique dans la végétation au
soleil.
(> 299 )
> k.
Je dois faire remarquer ici la difficulté de faire
cette expérience avec quelque espoir de succès ; je
la vois dans le transvasement de l’eau chargée d’a-
cide carbonique, qui en laisse alors échapper beau-
coup ; dans l’exposition de l’eau chargée de cet acide
avec la feuille au soleil qui entraîne nécessairement
une perte d’acide carbonique comme Spallanzani l’a
démontré dans ses expériences sur les eaux chargées
d’acide carbonique, où il a bien montré qu’une lame
d'air favorise le départ de cet acide , et la feuille
fournit d’abord ceLte lame d’air au soleil , de sorte
qu’il doit y avoir dans celte expérience du gaz
acide carbonique nécessairement sorti de l’eau 5
enfin comme on fait cette expérience dans l’air, il y
a toujours à l’air l’eau qui renferme celle qui rem-
plit le récipient; de sorte que celle-ci doit y perdre
son acide carbonique, et ouvrir des sorties à celle
qui est sous le récipient, d’autant plus facilement
que cette eau est exposée au soleil ; par conséquent
ces difficultés éloient insurmontables dans celte
manière de procéder, et il ne restoit que la clôture
avec le mercure qui pût prévenir ce dernier incon-
vénient, sans faire éviter les autres, mais d’un autre
côté il en introduisoit de nouveaux qui me firent
renoncer à celte expérience.
Mais enfin Spallanzani l’a entreprise et exécutée; il
la fit durer pendant deux heures et demie, et au bout
de ce temps là , il retrouva en poids par le moyen
de l'eau de chaux la même quantité de carbonate
calcaire dans l'eau acidulée où les feuilles étoient
pures l’expérience , qu’il avoit trouvée dans la
( 5oo )
même quantité de la même eau chargée d’acide car-
bonique avant de l’exéculer et il s’assura de la pré-
sence du carbonate par l’acide nitreux.
Je voisji’abord par la petite durée de l’expérience
que Spallanzani avoit pensé aux inconvéniens dont
j’ai parlé. Je remarque ensuite que le poids du pré-
cipité n’indique pas tout ce que notre grand obser-
vateur lui fait indiquer , puisque les parties gom-
meuses et gommo-résineuses dissoutes par l’eau dé
l’expérience, furent précipitées par l’eau de chaux;
de sorte qu’il auroit fallu au moins laver à grande
eau ce précipité avant de le sécher pour séparer le
carbonate de ce qui n’éloil pas lui, et je ne doute
pas qu’il n’eut eu alors dans le vrai précipité du
carbonate un poids bien moindre que celui qui lui
avoit été fourni par le précipité de l’eau chargée
d’acide carbonique où l’on n’avoit point mis de
feuille , et l’on auroit eu dans ce cas le carbo-
nate pur, puisque dans l’eau de l’expérience il y
auroit eu de moins l’acide carbonique évadé pat*
le moyen de la lame d’air , celui qui auroit été
pris par la feuille , celui qui se seroit échappé par
l’eau qui servoil de clôture à l’expérience; de sorte
que si l’on avoit reçu le gaz de cette eau sous un
récipient plein de mercure , on auroit pu voir clai-
rement que la quantité d’acide carbonique introduite
dans l’eau y avoit été considérablement diminuée.
J’avois fait celte expérience autrement, parce que
j’avois désespéré de faire bien la précédente, elle
n’est certainement pas aussi tranchante que l'auroit
été la première, si elle avoit pu se fade avec rigueur,
mais elle peut pourtant signifier quelque chose.
f
( 3oi )
Je remplis un récipient contenant 244,5/ gram-
mes , ou 8 onces d’eau avec de l’eau chargée d’a-
cide carbonique , j’y mis pendant plusieurs jours
de suite des feuilles que je retirai de cette eau tous
les soirs , pour en remettre de nouvelles le malin
suivant, et je les laissai ainsi exposées au soleil de-
puis le moment où il pouvoit les éclairer jusques
à son coucher -, je vis la quantité de l’air produit
par elles diminuer chaque jour et je répétai les chan-
gemens de ces feuilles jusques au jour, où elles n’en
donnèrent plus ou presque plus, alors je fis entrer
de l’acide carbonique dans l’eau qui restoil, et quand
l’eau s’en fut chargée, j’y replaçai des feuilles de
la même espèce au soleil qui donnèrent du gaz
oxygène comme la première fois que je les y plaçai,
et je vis ce que j’a vois. déjà vu en faisant l’expé->
rience avec l’eau bouillie, où les feuilles minces ne
donnent point d’air au soleil, mais qui en donnent
aussitôt que l’on introduit dans cette eau de l’acide
carbonique.
Cette expérience n’a pas , il est vrai , l’élégance
de celle de Spallanzani , mais il me semble que
les conséquences que l’on en peut tirer sont bien
plus sûres, quoiqu’elles ne soient pas à rigueur sans
exception.
§ XIX.
Enfin , et ce fait devoit servir à Spallanzani de
preuve , pour le précédent les sucs des feuilles qui
ont séjourné dans les eaux chargées d'acide carbo-
nique ne donnent aucune trace d’acide carbonique ,
quoique ces feuilles aient donné au soleil du gaz
( 5o2 )
oxygène , ou même lorsqu’elles y ont èlè tenues
à l’obscurité. Celte expérience très-bien vue ébranla
encore l’opinion de ce grand physicien sur la dé-
composition de l'acide carbonique par la végétation
au soleil.
Cette expérience au premier coup-d’œil peut pa-
roilre décisive; cependant, quand on y fait bien
attention , il me semble que sa force peut être assez
diminuée.
Dans l’expression que l’on fait des feuilles pour
en obtenir les sucs; il est certain que les sucs pro-
pres sont mêlés avec la lymphe qui doit seule con-
tenir l’acide carbonique ; il est donc aussi certain
que la lymphe y est enveloppée, de manière qu’elle
empêche l’action immédiate de l’eau de chaux sur
l'acide carbonique > qui ne peut jamais y être que
dans une petite quantité et fort divisé; comme il
empêche l’action du soleil sur cet acide dans les
sues des plantes exposées au soleil ; je l’ai vu di-
verses fois , cependant il est bien sûr que cet acide
carbonique s’y trouve , puisque je l’ai vu dans les.
pleurs de la vigne , puisque les plantes qui plon-
gent dans une eau chargée d’acide carbonique don-
nent plus de gaz oxygène au soleil que celles qui
11’y trempent pas: ce que j’avois vu, il y a long-
temps et ce que Spallanzani a vérifié; enfin puisque
lés plantes elles-mêmes rendent l’acide carbonique
contenu dans leur intérieur , comme çe dernier l’a
démontré, et comme elles le rendent eucore avec le
gaz oxygène sous l’eau au soleil ; mais pourquoi donc
dirai -je encore les sucs des plantes exposées au soleil
( 5o5 )
sous des récipiens qu’ils remplissent , 11e donnent-ils
pas même ce gaz au soleil comme je l’ai vu mille fois?
Parce que Spallarizani a démontré que les eaux aci-
dulées ne Jaissoient échapper ce gaz dans les vases
pleins au soleil , que lorsqu’elles en contenoient une
certaine quantité, et lorsqu’il y avoit une lame d’air
pour en faciliter la sortie.
Je croirois aussi que l’expérience de Spallanzani
sur ces sucs n’a pas été assez prolongée et qu’il
n’auroit pas fallu conclure de ce que le gaz acide
carbonique ne s’étoit pas manifesté d’abord par le
moyen de l’eau de chaux à sa non-existence ab-
solue •, s’il avoit conservé le précipité mueilagineux
qui se forma, et s’il l’avoit desséché, je ne doute
pas qu’il n’en eut retiré l’acide carbonique en y ver-
sant l’acide nitrique.
On sait d’ailleurs qu’il y a des combinaisons cal-
caires , comme celle des terres de ce genre que l’en
appelle de première création , qui contiennent réel-
lement l’acide carbonique, et qui ne le développent
par le moyen d’un acide qu’au bout de quelque
temps et avec une extrême lenteur : j’ai eu des
résidus pareils d’analises de végétaux qui ne déga-
gèrent ce gaz que de cette manière , et en parti-
culier un résidu calcaire de banalise des pleurs de
la vigne.
Mais puisqu’il est vrai que la lymphe contient
l’acide carbonique; puisqu’il est également vrai que
les plantes tirent par leurs tiges l’eau acidulée par
l’acide carbonique, où on les plonge; puisqu’il est
encore aussi vrai que cet acide introduit par beau
( 5o4 )
dans la plante favorise l’émission du gaz oxygène
au soleil, et puisque les plantes donnent dans tous
les cas le gaz acide carbonique qui s’échappe hors
de leur intérieur, comment se fait-il que les feuilles
placées quelque temps dans ces eaux chargées d’a-
cide carbonique ne donnent point de gaz acide car-
bonique, ou ne troublent pas l’eau de chaux quand
on les y plonge , ou quand on y exprime leurs sucs?
Je rappelle d’abord ici tout ce que je viens de dire,
mais je dois observer d’abord, que dans les feuilles
exposées sous l’eau au soleil , le gaz acide carbonique
se décompose dans la feuille à mesure qu’il y entre,
que l’on y en trouve véritablement comme je l’ai
dit; qu’il faut penser encore que l’on ne peut nier
la présence du gaz acide carbonique dans l’intérieur
des feuilles, puisqu’elle y est prouvée par le fait,
puisqu’il en sort avec le gaz oxygène dans ces jets
d’air que fournissent les plantes grasses dont on dé-
chire les feuilles, comme on a pu le voir dans le
mémoire précédent ; de sorte que sa présence ne
peuL être mise eu doute : son existence incognito
dans les feuilles peut tenir à son union avec le mu-
cilage que l’eau de chaux peut précipiter sans tou-
cher l’acide carbonique ; enlin il peut éprouver telle
modification dans la feuille qui lui ôte ses affinités
avec la chaux dissoute dans l’eau , et ce cas ne se-
roit pas nouveau. On sait que l’acide carbonique
placé sur un mélange de limaille et de soufre y
perd au bout de quelque temps la propriété de se
dissoudre dans l’eau , sans doute parce qu’il y perd
une grande partie de son oxygène , au moins y
a-t-il
( 5o5 )
a-t-il une grande quantité de ce gaz qui disparoît,
et rien ne s’oppose à croire que les choses se passent
de celte manière dans les végétaux , et que l’oxy-
gène qui se sépare d’abord en partie de cet oxide de
charbon s’applique dans l’ombre à la nourriture du
végétal , tandis que lorsque cette décomposition est
accélérée par la lumière qui la favorise , l’abon-
dance de la production de l’oxygène le force alors
à s’échapper hors de la plante ; d’ailleurs l’acide
carboniqiie dans l’état de celui dont j’ai parlé ne
trouble plus l’eau de chaux.
Enfin j’ai bien vu que les plantes qui avoient sé-
journé dans une eau chargée d’acide carbonique à
l’ombre donnent par le moyen de la pompe pneu-
matique une quantité d’air qui contient environ un
huitième de son volume d’acide carbonique; M.r
Desaussure a fait aussi cette expérience et il y a
trouvé o,o5 d’acide carbonique dans le cactus opun-
tia , le résultat de cette expérience diffère à cet
égard des expériences analogues faites par Spallan-
zani, mais les moyens me paroissent aussi plus éner-
giques pour faire sortir ce gaz que ceux que mon'
ami a employés : on peut faire ces expériences avec'
le mercure , on peut les faire dans l’eau bouillie et
avec ce dernier fluide, on trouvera une partie de
l’acide carbonique dissous dans l’eau par le moyen
de l’eau de chaux.
il faut rappeler ici l’expérience que j’ai rap-
portée § XVU où les feuilles qui ne donnent point
de gaz oxygéné dans les eaux bouillie et distillée
comme dan . l’eau de chaux en donnent néanmoins
Tome 5. ' V
( 3o6 )
quand elles ont été tenues à l’obscurité dans des
çaux chargées d’acide carbonique , il huit donc
qu'elles y aient pris de l’acide carbonique et que cet
acide s’y soit décomposé.
M.r Desaussure qui n’a, voit pas pensé que l’on
pût faire cette objection , l’a néanmoins résolue
d’une manière aussi juste qu’élégante clans ses
Recherches chimiques sur La végétation ; il y mon-
Ire que la feuille après avoir été exposée au soleil
ne contient point de gaz acide carbonique, parce
qu’il a été décomposé , que si on l’expose alors à
l’obscurité, l’air la traverse comme les autres gaz,
cjue son gaz oxygène se combine avec le carbone
de la plante, et for inc l’acide carbonique qui se dis—
sput dans l’eau, et qu’il éprouve par l’organisation
de la plante une compression qui limite les quantités
de l’absorption ; de sorte que celui qui se forme
sans cesse devient libre, parce qu’il ne peut plus
se combiner, ce qui peut expliquer l’acide carbo-
nique fourni par les plantes, quoique cela n'expli-
que point celui qui est fourni dans les gaz hydrogène
et azote, mais comment la feuille ne se sature-t-elle
jamais d’acide carbonique quoiqu’elle paroisse devoir
en être saturée ou dans l’air ou dans les eaux qui
en sont chargées? M.r Desaussure monlre fort bien
que cet effet est produit par l'affinité bien décidée
de l’air pour d’acide carbonique, quia ses limites;
ce qu’il prouve par l’enlevemeut que l’air fait de
l’acide carbonique aux eaux qui en ont une cer-
taine quantité , comme Spallanzani l’avoit aussi
prouvé par des expériences directes; de sorte que
( 5c>7 )
l’air atmosphérique n’étant point en équilibre de
saturation avec une feuille saturée d’acide carbo-
nique , il lui en enlevera une partie, par conséquent
le végétal ne sauroit en accumuler beaucoup.
Enfin toutes les plantes donnent l’acide carbonique
dans les gaz hydrogène et azote comme Spallanzanï
l’a prouvé.
5 xx.
Spallanzani a eu encore une idée qui mérite l’exa-
men , quoiqu’il ne paroisse pas s’y arrêter, et qu’il
ait plutôt cherché à la combattre qu’à l’établir ;
il a pensé qu’il seroil possible que l’acide carbonique
ou l’eau se décomposât à la surface des plantes ex-
posées sous l’eau au soleil ; cette idée qui est dans
les possibles étoit vraiment digne de sortir de la
tête d’un homme qui aimoit la vérité autant que
ce grand observateur , et qui ne vouloit négliger
aucun des moyens propres à la faire trouver; cette
idée devoit donc être soumise à l’expérience ; mais
Spallanzani n’eut pas sans doute le temps de rem-
plir les vues qu’il s’étoit proposées, et j’ai cru qu’il
seroil utile de prouver par le fait que l’air que l’on
obtient des feuilles exposées sous l’eau au soleil sor-
toit de leur intérieur. Je me suis donc dit que si
l’on pou voit le prouver, on auroit démontré que
la décomposition de l’eau ou de l’acide carbonique
ne se fait pas à la surface des plantes; je crois même
que mes preuves ne permettront pas d’imaginer la
réunion des deux moyens.
J’ai prouvé par mie expérience qui m’a toujours
paru concluante que le parenchyme de la feuille
( 5o8 )
qui fournissoit le gaz oxygène rendu par les feuilles
exposées sous l’eau au soleil étoit la source de ce
gaz , connue ou peul le voir dans mes Mémoires
physico-chimiques : puisqu’une feuille de joubarbe
privée de son épiderme donnoit ce gaz par grosses
bulles, quand on la tenoitsous l’eau, tandis qu’il ne
se forme sur la feuille entière que par peliles bulles;
mais l’épiderme enlevé à celLe feuille ne donnoit pas
sous l’eau au soleil un atome d’air quand on l’a voit
soigneusement séparé du parenchyme , qu’il recou-
vroil : il paroît donc par cette expérience que l’air
produit par la feuille étoit sorti de son intérieur
ou de son parenchyme, puisque l’épiderme qui le
recouvroit n’a pas donné une bulle d’air.
On ne peut donc pas soupçonner que le gaz pro-
duit par le contact de l’eau avec l’épiderme de la
feuille soit l’effet de ce contact avec l’épiderme ,
puisque ce contact existoit dans celte expérience
avec l’épiderme , comme avec le parenchyme ,
et si le contact de l’épiderme seul avec l’^au n’a
point produit d’air, il faut convenir que ce contact
n’a pas produit le gaz oxygène que le parenchyme
écorché a donné, puisque cet air sort au travers
des pores de l’épiderme dans la feuille entière ; ce-
pendant cet épiderme séparé ne fournit point d’air.
J’ai prouvé cela d’une autre manière par une
expérience faite dans un autre but, il y a bien long-
temps , et que l’on peut trouver , dans mes Expé-
riences sur L’influence de la lumière solaire dans
la végétation. Je pris un rameau de framboisier,
je dépouillai son extrémité inférieure de ses feuilles.
( Sog )
je l’introduisis dans une bouteille vide où je la scellai
de manière que l’eau ne pût y entrer, et je plaçai
la bouteille et le rameau ^pus un récipient plein
d’eau chargée d’acide carbonique. Je pris un autre
rameau de la même plante parfaitement semblable
au premier avec le même nombre de feuilles dont
je fis entrer l’extrémité dépouillée de feuilles dans
une bouteille pleine d’eau chargée d’acide carbo-
nique, je scellai de même ce rameau à la bouteille,
et je le fis passer sous un récipient semblable au
premier et rempli de la même eau. Les deux ra-
meaux restèrent ainsi sous l’eau exposée au soleil
pendant 8 heures ; je vis alors clairement que ces 2
rameaux avoient été bien scellés, puisqu’il n’entra
point d’eau dans la bouteille vide, et puisqu’il man-
qua une partie de l’eau dans la bouteille pleine ;
ce qui m’apprit que le rameau de la plante l’avoit
tirée. Quel en fut le résultat? Le rameau dont
l'extrémité plongeoit dans l’eau chargée d’acide car-
bonique donna le double d’air que le rameau dont
l’extrémité plongeoit dans la bouteille vide. Si donc
la décomposition s’étoit faite à la surface des feuilles,
pourquoi y a-t-il eu cette différence si grande dans
le produit aériforme des deux rameaux , tandis que
toutes les autres circonstances étoicnt égales hors celles
du milieu où éloient placées les extrémités de ces
rameaux? D’où vient donc la différence, si ce n’est
parce que l’acide carbonique fourni par l’eau , où
l’extrémité de la plante étoit logée a pénétré le ra-
meau, est entré dans les feuilles et s’est décomposé
avec celui qui a pénétré dans les feuilles. Eu répétant
( 5io )
cette expérience j’employai l’eau commune au lieu
de l’air commun qui remplissoit une des bouteilles ;
alors j’eus dans la première bouteille une quantité
de gaz oxygène produite beaucoup plus grande que
dans celle de la précédente expérience qui avoit été
seulement remplie d’air commun , parce que celle-là
avoiL fourni au rameau , et par conséquent à ses
feuilles , l’acide carbonique que le rameau n’a voit
pu avoir dans l’autre cas.
Spallanzani a même confirmé celle expérience
par une autre qui lui est analogue et qui me pa-
roît plus concluante encoi’e , puisqu’il plaça sous
deux récipiens égaux en capacité et pleins d’air un
rameau semblable de la même plante , dont l’un
plongeoit dans une bouteille pleine d’eau commune
et l’autre dans une bouteille pleine d’eau chargée
d’acide carbonique ; il les exposa pendant le même-
temps au soleil et il y eut une grande différence dans
la quantité du gaz oxygène produit, elle fut beau-
coup plus grande dans le récipient où le rameau
plongeoit dans la bouteille dont l’eau éloit chargée
d’acide carbonique que dans l’autre rempli par l’eau
commune. Ici il ne reste plus de doute que l’acide
parbonique entré dans la plante avec l’eau qui l’a
pénétrée et qui s’est répandue dans les feuilles a été
la cause de celte quantité plus considérable de gaz
oxygène trouvé dans le récipient.
Enfin Spallanzani a vu comme moi ces jets d’air
qui s’échappent hors des parties coupées ou déchi-
rées des feuilles, et surtout de celles qui sont épaisses
pl privées de leur épiderme, il a recueilli cet air,
( 5n )
il l’a examiné et il a trouvé le gaz oxygène mêlé
avec l'acide carbonique qui en sortait égal en pureté
à celui qui se lamisoit au travers de l’épiderme ;
de so£te que je ne saurois imaginer qu’il pût rester
aucun doute sur la sortie du gaz oxygène hors de
l’intérieur de la plante, ni sur celle de l’acide car-
bonique qui lui est mêlé.
Comme ce point me paroît important ; je joins
encore ici quelques considérations qui peuvent avoir
leur intérêt pour apprécier ma théorie.
Si les feuilles de la jacobée donnent de l’air au
soled en passant d’une eau réchauffée par lui à 20°,
et si elles en donnent de même dans une eau ré-
chauffée au soleil seulement à 5° au-dessus du zéro ,
il est bien clair que ce n’est pas l’air détaché de
la feuille qui l’a fourni, puisque les feuilles mises
à l’obscurité dans une eau réchauffée à 20° n’en
donnent point; il faut donc que ce gaz soit pré-
paré dans l’intérieur de la feuille.
C’est un fait que les feuilles contiennent de l’air,
puisqu’elles surnagent dans l’eau avant de l’avoir
perdu au soleil et qu’elles surnagent dans l’eau
bouillie sous la pompe pneumatique quand on fait
le vide ; mais1 ces feuilles quelqu’effortxque l’on fasse
ne rendent qu’une très-petite quantité d’air qui est
assez mauvais par l’expression ou par le moyen de
la pompe pneumatique; on le voit alors s’échapper
sous l’eau , au moins par ce dernier moyen au tra-
vers des pores de l’épiderme , ou plus facilement
encore au travers des déchirures que l’on peut leur
taire, qui en accélèrent la sortie ; mais il est toujours
( 512 <)
très-difficile de le faire sortir entièrement, parce qu’il
se trouve plus ou moins niché dans le mucilage ou
dans les vaisseaux les plus petits, et les moyens les
plus torts ne réussissent pas d’abord à L’en déloger.
Outre cela , comme les feuilles donnent d'autant
plus d’air sous la même eau , lorsqu’elles sont plus
fraîches et plus vivantes; on conçoit que cet air
produit est un effet de la feuille végétante; aussi
les feuilles en donnent-elles , aussitôt qu’elles com-
mencent à vivre ou tant qu’elles vivent d’une manière
développée ; c’est pour cela que les jeunes feuilles
çt toutes les feuilles en automne fournissent moins
d’air au soleil que les feuilles adultes; dans le pre-
mier cas, l’organisation n’a pas pris toute sa con-
sistance ; et dans le second , elles commencent à
ralentir leur végétation ; c’est encore pour cela que
les feuilles sèches , les étiolées donnent très-peu d’air
comme je l’ai vu, parce qu’il n’y a point d’organes
assez en mouvement pour favoriser cette élaboration;
ç’est pour cela encore que les feuilles fanées donnent
très-peu d’air parce que leur organisation est altérée ,
mais tout cela prouve encore que le contact seul
des feuilles avec l’eau et avec l’air n’est pas suffi-
sant pour produire cet etfcL , puisque ce contact a
toujours lieu dans ces expériences.
Enfin l’expérience de Spallanzani et les miennes
ont bien prouvé qu’il n’y avoil point d’air produit
par les feuilles au éoleil sans végélalion, et que celte
production est toujours proportionnelle au degré de
chaleur dans de certaines limites et aux époques do
J’année qui favorisent celle végétation ; ainsi les
( 3i3 }
planles qui donnent beaucoup d’air au soleil pen-
dant l’été en donnent très -peu en automne, et
presque point en hiver, comme les expériences de
Spallanzani et les miennes l’ont bien établi; ainsi
à o° il n’y a point d’air produit par la plupart
d’entr’elles , parce qu’il n’y a plus de végétation ,
ou plutôt qu’elle est considérablement affoiblie.
§ XXI.
La solution de ces difficultés contre ma théorie'
de la décomposition de l’acide carbonique dans les
plantes qui végètent au soleil m’a mis dans le cas
de rappeler quelques - unes des preuves que j’en
avois déjà données; je ne m’arrêterai pas, à les dis-
cuter, parce que les objections qu’on a faites sont
seulement relatives à la proposition généi'ale, et ne
sauroient s’appliquer aux argumens particuliers par
lesquels j’ai voulu l’appuyer. Il paroîtroit même
que toutes mes expériences s’accordent parfaitement
avec celles de Spallanzani : aussi je me bornerai ici
à rappeler les expériences de Spallanzani qui peu-
vent lui servir de preuves et celles de M.r Desaussure
qui paraissent en être la démonstration ; pour le
reste je renvoie à mes autres ouvrages et à ma Phy-
siologie végétale .
Les plantes contiennent l’acide carbonique et le
rendent dans les gaz hydrogène et azote où certai-
nement, il n’y a rien qui puisse le produire, quand
ces gaz sont comme ils étoient dans les expériences
de Spallanzani parfaitement lavés et purs ; il en
résulte donc que cet acide est existant dans les plantes
puisqu’elles peuvent le chasser hors d’elles.
( 3i4 )
Spallanzani a fait une expérience où il a vu l’a-
cide carbonique s’échapper des feuilles mises dans
une eau privée d’acide carbonique par l’eau de chaux;
de sorte que lorsqu’il n’y a point de gaz acide car-
bonique produit dans l’air au soleil , c’est parce qu’il
y a eu du gaz oxygène produit par la décompo-
sition de l’aeide carbonique, et si l’on n’en trouve
point dans les sucs, c’est parce qu’il y est enve-
loppé de manière que l’eau de chaux est sans prise
sur lui , § CVI. C VII.
Les plantes qui donnent un peu d’air dans l’eau
bouillie en donnent beaucoup plus dans l’eau com-
mune qui contient de l’acide carbonique et encore
plus dans celte eau qui en est chargée atificielle-
ment d’une quantité plus grande; de sorte que par
ces nuances , on voit l’influence de l’acide carbo-
nique sur la production du gaz oxygène que les
plantes produisent depuis l’acide contenu dans la
plante elle-même jusques à celui que leur ajoutent
les eaux différemment acidulées où on les plonge ,
§ CIL, CIV.
L’azote trouvé par Spallanzani , et que j’avois
remarqué, depuis long-temps dans l’air rendu par les
plantes qui végètent au soleil , ne peut être que celui
qui est porté par l’acide carbonique , à moins d’être
comme cela n’est pas invraisemblable un effet des
modifications do l’acide carbonique ; mais de quelque
manière qu’on l’envisage , il faut reconnoître qu’il
sort de la plante , et qu’il accompagne l’élaboration
de l’acide carbonique , puisqu’il y en a d’autant plus
que la quantité du gaz oxygèue produit est plus
( 5i5 )
grande , et que la plante trouve sous l’eau une plus
grande quantité d’aeide carbonique , pourvu que
cette quantité soit en rapport avec la constitution
du végétal , § CXVI , CXVIII.
Je crois avoir bien prouvé que les plantes qui
donnent de l’air au soleil dans les eaux privées d’acide
carbonique et même dans l’eau de chaux ne donnent
que l’air qui provient de la décomposition de l’acide
carbonique renfermé dans leur parenchyme ; mais
Spallanzani a vu la feuille du sempervivum tec-
torurn rompue sous l’eau privée d’acide carbonique
par l’eau de chaux et exposée au soleil donner de
l’air ; ce qui n’a pu arriver que parce qu’il sortoit de
l’intérieur de la feuille où il étoit logé et où l’acide
carbonique décomposé l’avoit lait naître , et s’il a vu
comme moi que les feuilles minces ne donnoienl point
d’air de cette façon; c’est parce qu’elles ne contenoient
qu'une quantité d’acide carbonique à peine appré-
ciable ; de sorte qu’il falloit que cet acide fût sans cesse
renouvelé dans la feuille par lasuction pour lui faire
produire ce gaz oxygène , quand elle étoit exposée
sous l'eau chargée d’acide carbonique au soleil; enfin,
j’ai bien fait voir comme Spallanzani, que les feuilles
qui donnent du gaz oxygène au soleil sous les eaux
privées d’acide carbonique en donnent très-peu et
pendant très peu de temps , j’ai même montré qu’elles
n’en donnoient guères que la quantité qu’on peut en
tirer par la pompe pneumatique ; de sorte que les
plantes dans ce cas cessent de donner le gaz oxygène,
quand elles ont élaboré celui qu’elles contenoient et
qu elles n’en donnent plus long-temps, que lorsqu’elles
( 5i6 }
peuvent renouveler celui qu’elles ont décomposé, dans
les eaux chargées de cet acide, § CXXI1I, CXXVIII.
Spallanzani a vu encore que l’air exprimé sous
l’eau d’une plante qui a été exposée au soleil est
meilleur que celui que l’on relire d’une plante qui est
restée à l’ombre ; ce qui me semble prouver que
l’élaboration de cet air se fait dans l’intérieur de la
plante , et que la quantité du gaz acide carbonique y
est moindre , § CXXXIII , CXXXVI.
Mais Spallanzani observe aussi que les plantes
absorbent dans l’air le gaz oxygène et y produisent
l’acide carbonique comme ses expériences multipliées
le lui ont fait voir et comme il est aisé de s’en con-
vaincre en les répétant ; mais les plantes donnent
encore alors le gaz oxygène au soleil. Comment donc
imaginer l’émission simultanée de ces deux gaz , du
composé et d’un de ses composants?
Je ^comprends comment au premier coup-d’œil
cela peut former quelque obscurité, mais il me semble
aussi qu’avec quelque attention elle disparoît bientôt.
Si l’on imagine que l’acide carbonique pénétre les
feuilles avec trop d’abondance ; il peut y avoir un
degré de gonflement qui nécessite la sortie de tous
les deux. Il est bien probable aussi que l’acide car-
bonique en se décomposant fasse reprendre au gaz
oxygène qui se forme une expansibilité qui force sa
sortie , comme on le voil dans les jets d’air que
quelques feuilles fournissent; alors il n’est pas étonnant
que ces jets entraînent avec eux une quantité de
l’acide carbonique qui les avoisine: aussi ces jets d'air
en contiennent assez. Enfin l’expérience apprend que
( 3i7 )
celte double émission est réelle , puisqu’on l’observe
dans les plantes mises au soleil sous les gaz hydrogène
et azote. x
Je ne sais si je me trompe moi-même, mais comme
la décomposition de l’acide carbonique dans les
plantes explique tous les faits connus , el qu’elle
rend raison en particulier de la présence du charbon
dans les plantes que l’on chercheroit vainement à
concevoir par d’autres moyens ; il me semble que
cette idée doit être mise au-dessus d’une simple
hypothèse ; car enfin si la vraie cause d’un phénomène
les explique tous , il me semble qu’une hypothèse qui
amène toutes ces explications la remplace jusques à
un certain point , et si cette hypothèse est soutenue
par une foule d’expériences et d’analogies , ne doit-
elle pas êlre regardée comme montrant les moyens
que la nature a pu mettre en usage ?
Il y a un fait qui m’a toujours paru frappant dans
mes expériences. J ’avois mis un rameau deframboisier
sous un récipient, plein d’eau chargée d’acide carbo-
nique ; j’en fis passer un autre semblable à tous
égards, mais attenant à l’arbuste sous un récipient
semblable, contenant la même quantité de la même
eau; le premier jour la tige coupée donna moins d’air
que la seconde , mais le jour suivant la différence fut
beaucoup plus grande ; pourquoi cela ? toutes choses
étoient égales dans les deux récipiens avec la seule diffé-
rence que l’un des rameaux éloit coupé et que l’autre
tenoil à la plante? On voil bien que le premier tira
dans le premier jour à peu près autant d'eau que
çelui qui sorloit de l'arbuste , au lieu que dans le
( 3i8 )
second jour la suction diminua comme je Pavois
obsci’vé dans les rameaux dont j'étudiois la suction.
Il résulte de là que le premier jour , il y eut un
peu moins d'eau tirée dans le rameau coupé , que
dans celui qui étoit resté attaché à l’arbuste; de sorte
qu’il y eut moins d'acide carbonique porté dans les
feuilles pour se joindre à celui que l’eau pouvoil leur
donner et par conséquent il y en eut moins de
décomposé.
Cette expérience explique fort bien pourquoi les
plantes donnent moins de gaz oxygène au soleil sous
l’eau en automne qu’en été et au printemps , puisque
j’ai prouvé que la suction diminuoit en automne; de
sorte qu’il arrive alors moins de gaz acide carbonique
aux feuilles , et il y a moins de gaz acide carbonique
décomposé; aussi quand en hiver la suction est pres-
que nulle , il n’y a plus ou presque plus de gaz acide
carbonique décomposé dans la plupart des plantes ,
parce qu’elles ne tirent alors plus de sucs hors de
terre.
J’ai déjà parlé du gaz acide carbonique mêlé avec
le gaz oxygène que les plantes donnent sous l’eau au
soleil ; on le trouve aussi dans l’air où l’on place les
plantes au soleil sous des vases clos ; il est aisé de
comprendre qu’il s’échappe avec le gaz oxygène ,
mais Spallanzani a trouvé que les plantes en rendoient
toujours une quantité plus grande dans l’air commun
que dans les gaz hydrogène et azote ; ce qui lui a
fait conclure avec beaucoup de raison que l’excédent
que l’on trouve dans la production de ce gaz, lorsque
es plantes sont placées dans l’air commun, doit être
( 3ig )
attribué à la combinaison du gaz oxygène de l’air
avec le carbone de la plante.
Enfin Desaussure dans ses Recherches chimiques'
sur la végétation 3 cet ouvrage qui mérite une place
distinguée entre les meilleurs ouvrages de ce genre par
l'esprit philosophique qui en a dirigé les expériences ,
par l’exactitude avec laquelle elles sont faites , par là
chaîne vraiment logique d’idées qui les unit et la
solidité des conséquences qu’il en tire. M.r Desaussure
me semble avoir démontré avec rigueur ce que je
n’avois fait que rendre très-probable. Il a démontré
qu’une certaine quantité d’acide carbonique étoit
nécessaire dans l’air pour favoriser la végétation
des plantes, que cet acide carbonique étoit absorbé
par elles , que leur carbone étoit augmenté par la
décomposition de cet acide ^ et que ce carbone
diminuoit dans les plantes qui végétoienl dans une
atmosphère privée d’acide carbonique ; il a donc
montré de cette manière , que lai lumière qui dé-
compose cet acide dans les plantes favorise l'aug-
mentation de leur carbone à l’air libre et que les
plantes périssent beaucoup plus tôt au soleil dans
une atmosphère privée d’acide carbonique que dans
une atmosphère qui en contient une certaine quantité.
Il a fait voir outre cela que les plantes absorboient
le gaz oxygène et le rendoient à l’obscurité en acide
carbonique , que les plantes absorbent l’acide car-
bonique contenu dans l’air atmosphérique , et que le
gaz oxygène forme dans la feuille l’acide carbonique
qui se dissout dans l’eau de végétation , où il est
retenu jusque* à ce qu’il s’échappe à l’obscurité , ou
( 320 )
se décompose à la lumière. Enfin cjue quelques
plantes marécageuses qui supportent l’action d’un
hydrosulfure , quoiqu’il leur enlève le gaz oxygène
ne supportent pas de même le voisinage de la
potasse qui leur enlève l’acide carbonique.
Il prouve surtout par une expérience directe que
le cactus opuntia ne fournit du gaz oxygène que
par la décomposition de l’acide carbonique.
Je me suis borné à ces énoncés , parce que je ne
veux pas priver les physiciens du plaisir de lire ses
élégantes démonstrations , et leur ôter l’avantage de
connoître les moyens ingénieux qu’il a employés , et
les ressources qu’il leur fournira pour perfectionner
l’art de faire ces expériences.
§ XXII.
Cette belle opération des végétaux qui transforme
le gaz acide carbonique en gaz oxygène , ou plutôt
qui décompose cet acide en ses élémens , est certai-
nement l’elfet de la lumière immédiate du soleil ;
sans elle il n’y a point de gaz oxygène produit au
dehors des plantes, avec elle il n’y a que très-peu
d’acide carbonique qui s’en échappe , mais sans elle
les plantes en produisent beaucoup plus-, il résulte
donc de là par une conséquence naturelle, que l’acide
carbonique qui sort de la plante a l’obscurité s y
décompose à la lumière , et si Ja quantité du gaz
oxygène produit à la lumière est pour 1 ordinaire
plus considérable que la quantité d’acide carbonique
qui s’échappe à l’obscurité, on en voit la raison dans
ce que l’on sait sur l’influence de la lumière , pour
• faire
t 521 )
Faire sucer aux planles les sucs qui entoui’ent leurs
racines , et pour y faire entrer avec eux l’acide car-
bonique qui y est dissous ; aussi comme la vivacité
de la lumière augmente dans les plantes la production
du gaz oxygène, elle y favorise de même dans une
proportion pareille la quantité de l’acide carbonique
qui y entre.
D’un autre coté l’on voit que les plantes à l’obs-
curité sont blanches et effilées ; que la lumière seule
les peint de leurs couleurs , et que la chaleur loin,
de produire cet effet concourt à les étioler davantage ,
lorsqu’elles sont sous les tubes couverts. II résulte donc
de là, par une conséquence immédiate, que comme
il n’y a point alors de gaz oxygène produit , il n’y a
point d’acide carbonique décomposé dans une certaine
quantité, et que comme la matière colorante verte
des plantes contient une quantité considérable de
charbon, tandis que les plantes étiolées en contiennent
beaucoup moins , comme je l’ai prouvé 5 il paroîtroit
que cette matière colorante verte produite par l’action
immédiate de la lumière sur les plantes qui leur fait
rendre le gaz oxygène, est l’effet de la décomposition
du gaz acide carbonique , qui dépose alors son car-
bone sur le parenchyme de la plante originairement
jaune ; de sorte que le charbon étant plutôt bleu que
noir forme cette couleur verte en s’unissant à ce fond
jaune ; alors encore cette couleur verte se nuance
suivant la quantité du carbone déposé , ou suivant
la nuance jaune du fond auquel il s’unit.
On voit aussi comment tout se lie par cette théorie,
et comment ces phénomènes divers qui peuvent
Tome 5. ’ X
( 522 )
sembler si différons entr’eux se rapprochent et se
trouvent les effets naturels de la même cause.
Il est vrai que dans les plantes étiolées, on trouve
le carbone et la résine; aussi dans mon opinion il ne
sauroit y avoir du charbon sans une décomposition
du gaz acide carbonique, tout comme il ne sauroit y
avoir de résine sans gaz hydrogène; je conclus donc
encore avec M.r Berlhollet , qu’il y a des élémens
dans les composants des végétaux qui fournissent l'un
et l’autre; l’expérience démontre la décomposition de
l’acide carbonique pour la source du carbone , et
l’on peut supposer la décomposition de l’eau pour
l’hydrogène ; mais comme l’on trouve ce carbone et
cet hydrogène dans les plantes qui n’ont pas été
exposées à la lumière ; il en résulte que l’acide car-
bonique et l’eau doivent se décomposer encore sans
cet intennède.
J’avois déjà imaginé que cette décomposition de
l’acide carbonique pouvoit avoir lieu par une double
affinité , qu’alors ce qui éloit indispensablement
nécessaire à la conservation de la plante se décom-
posoit et s’appliquoit à son développement : de sorte
qu’il n’y a voit rien de surabondant ; mais lorsque la
végétation est vigoureuse , lorsque la lumière la
favorise par l’abondance des sucs ; lorsqu’il y a une
nouvelle affinité à contracter pour l’oxygène , alois
sa grande abondance relativement au charbon et à
l’hydrogène rend son gaz trop considérable en quan-
tité pour être combiné ou contenu dans la plante ,
alors encore il est forcé de s’échapper par les portes
qui lui sont ouvertes, et c’est pourtant ainsi probable-
( 525 )
ment que l’on trouve le charbon dans la plantule et
dans les plantes étiolées , comme on le trouve avec
le gaz hydrogène dans la résine qu’elles renferment;
aussi ce charbon disséminé dans les sucs , et ce gaz
hydrogène en petite quantité , salissent la couleur
jaune du fond sans la rendre verte, et le gaz hydrogène
combiné avec le charbon fournit la petite quantité de
résine qu’elles offrent, mais le charbon et la résine
sont tous les deux dans les plantes étiolées en moindre
quantité que dans les plantes exposées à la lumière*
C’est à l’action immédiate de la lumière du soleil
que l’on doit également ces phénomènes ; sa chaleur
en est presque ici toul-à-fait indépendante comme
dans quelques faits relalifsaux changemens de couleur
qu’elle produit. J’avois prié M.r Desaussure le père
de répéter au col du Géant , c’est-à-dire à 1800 toises ,
au dessus du niveau de la mer les expériences que
j’avois faites à Genève sur la coloration des bois par
la lumière ; il se trouva que les effets produits à celte
élévation du sol par la lumière et à une température
de 5 à 4° au dessus de zéro 'furent beaucoup plus
intenses et plus prompts que ceux que j'avois observé
à une chaleur de 20% cependant il suivît les mêmes
procédés que moi, et il y emplo}'a les mêmes moyens.
11 résulte de là que la lumière peut agir, et comme
corps éclairant et comme corps qui commünique la
chaleur , et qu’elle produit comme corps éclairant
des effets qu’elle ne sauroit produire connue corps
qui communique la chaleur ; c’est donc un fait assez
remarquable , que l’acide carbonique puisse être dé-
composé par ces deux moyens , car cet acide car-
( 5ii4 )
bonique que nous voyons décomposé dans les plantes
par la lumière éclairante est aussi décomposé avec le
soufre et lé phosphore , par la chaleur qu’on lui
applique , à moins que cet effet ne soit du à la
lumière produite pendant l’opération.
J’observerai seulement ici que si l’acide carbonique
est décomposé dans les plantes sans lumière, comme
je l’ai déjà remarqué ; ce phénomène s’observe aussi
comme je l’ai dit encore , quand on met cet acide en
contact avec les sulphures ; de sorte que mon expli-
cation de l’existence du carbone dans les plantes
étiolées devient ainsi très-probable ; si l’on suppose
qu’il y a des sucs propres à produire cet effet quand
ils sont aidés par faction de la végétation.
On ne peut douter de l’action de la lumière sur
l’oxygène et de l’effet produit par leurs affinités pour
gaziher celui-ci ; quand on voit l’acide nitrique dé-
composé par le seul contact de la lumière et le gaz
oxygène qui s’en échappe ; certainement rien n’em-
pêche de croire que la lumière produise le même
effet sur l’acide carbonique dans les plantes, quand
elle y est aidée par l’organisation active de ces êtres
organisés. Il est vrai qu’on ne sauroit décomposer
cet acide dans les sucs extraits des végétaux quand
on les expose au soleil , mais si cela faisoit une
objection que l’on crût insoluble , il faudroit aussi
nier que l’acide nitrique se décompose au soleil ,
parce que cet acide délayé d’eau ne s’y décompose
pas , cependant la conséquence seroil bien fausse.
Il faut d’abord observer , que si les sucs sur les-
quels on fait agir la lumière , quand on y expose
( 5a5 )
ceux que l'on relire des végétaux par l’expression se
trouvent dans les plantes dont la lumière tire le gaz
oxygène et qu’elle remplit d’acide carbonique, ils ne
s y trouvent pas dans le même état ; dans la plante
ces sucs sur lesquels là lumière opère ont été filtrés ,
élaborés de manière qu’ils y sont séparés, appropriés
pour l’action que la lumière doit exercer sur eux:
au lieu que dans le6 sucs exprimés ils y sont mêlés
avec la lymphe et délayés par elle : de sorte que
comme les particules de l’acide nitrique sont garanties
de l’action de la lumière par l’eau qui les étend , sans
doute à cause de la différente réfraction que la lumièi’e
y éprouve et qui doit changer ses effets , ou par la
differente porosité du fluide , ou plutôt par la diffé-
rente disposition des globules qui le forment ; de
même l’action de la lumière sur les sucs exprimés
des plantes , n’est plus celle qu’elle exerce sur le
suc séparé dans des organes particuliers qui doit en
éprouver les effets ; d’ailleurs comme les expériences
que j’ai rapportées montrent la nécessité d’un in-
termède pour favorisr la décomposition de l’acide
carbonique 5 il résulte du mélange de ces sucs dans
ceux qui sont exprimés , que ceux-ci en changeant
la nature de cet intermède , changent aussi les
propriétés du suc produit. Aussi dans la plante le
suc se conserve et il s’aigrit au soleil quand il y est
exjîosé hors de ses vaisseaux naturels.
Si l’on fait attention ensuite à l’action de la lumière
sur les feuilles , ou sur leurs sucs , on verra qu’elle
est bien différente; d’abord les couleurs ne sont plus
les mêmes, et l’on sait que ces couleurs dépendent des
( 5^6 )
rayons réfléchis et absorbés $ de 6orte qu’à cet égard
les conditions ne seront plus semblables ; elles seront
encore différentes par cette raison pour la quantité
de la chaleur communiquée , et celte considération
n’est pas inutile, puisqu’il y a du calorique à com-
biner avec l’oxygène.
Enfin si l’acide nitrique se décompose plus faci-
lement à la lumière que l’acide carbonique, ne seroil-
ce point parce que l’affinité de [l’oxygène pour
l’azote est moindre que celle de l’oxygène pour le
carbone, et par conséquent encore, parce que l’oxy-
gène dans l’acide nitrique est moins privé de son calo-
rique que dans l’acide carbonique.
§ XX UÏ.
Mais comment se fait-il que les racines, les fleurs ,
les fruits murs, les graines ne donnent plus au soleil
le gaz oxygène comme les parties vertes des plantes
auxquels ils appartiennent et qu’ils donnent à leur
place l’acide carbonique et l’azote ?
On pourroit dire que l’absence de la lumière en
seroit la cause pour les racines et les graines qui se
développent à l’obscurité j mais il n’en est pas de
même pour les fleurs et les fruits qui reçoivent toute
l’action du soleil comme les feuilles. Cependant on
peut assurer que celle raison seroit suffisante pour
les racines qui ont une^ grande analogie avec les
branches et les rameaux; j’ai du moins prouvé par
l’expérience , que les plantes étiolées ne donnent
point de gaz oxygène: ce qui confirme ce que j’ai
gyancé sur la nécessité de certains sucs pour favo-
( 527 )
viser Faction de la lumière; or comme les piaules
étiolées offrent des sucs plus délayés que les plantes
■vertes, et comme ils sont aussi plus délayés dans
les racines que dans les branches , il paroît na-
turel de conclure, que ce délaiemenl est un obstacle
à la production du gaz oxygène , lorsque les racines
sont exposées au soleil : mais il y a plus, quand ces
racines sont découvertes et exposées au soleil, elles
y verdissent un peu , et alors leurs parties verdies
donnent le gaz oxygène, comme le parenchyme
des branches et des rameaux, et leurs feuilles le
produisent com'me celles de ces derniers.
Les fleurs, les fruits et les graines offrent un
autre ordre de choses ; voici de nouveaux organes
destinés à préparer d'autres combinaisons; la seule
observation suffit pour montrer celte double diffé-
rence ; il paroît donc bien naturel que des com-
binaisons nouvelles et des organes différeras four-
nissent d’autres résultats , et par conséquent l'émis-
sion du gaz oxygène , comme le dépôt du charbon ,
qui sont nécessaires pour former les sucs propres ,
ces alimens des fleurs , des fruits et des graines
dans le boulon, jusque* à leur complet développe-
ment , connue je Fai montré dans ma Physiologie ,
et ceci par une nouvelle élaboration dans ces
organes particuliers ; alors les fruits et les graines
n’offrent plus les mêmes conditions à l’action de la
lumière : le gaz oxygène , le carbone, par exemple,
doivent former le sucre , de nouveaux acides subir
une nouvelle espèce de fermentation, tout ici doit
s’unir, rien ne doit se perdre : il fa.pt qu’il s’y for-
( 3,8 )
me de nouveaux composés avec ceux que les sucs
propres leur portent ; il faut qu’une nouvelle éla-
boration les perfectionne , et c’est l’effet d’une fer-
mentation toujours établie ; c’est encore ici que
s accumulent l’acide carbonique, l’azote et l’eau;
mais cèlle-ci diminue par l'évaporation qu’elle subit;
cette évaporation rapproche ces élémens déjà rap-
proches et les inet en étal d’agir plus énergique-
ment les uns sur les «autres et de former ces com-
binaisons que les sucs propres n’auroient pas pro-
duites ailleurs : de sorte que dans la formation des
fleurs et des graines , il n’y a pas plus de gaz oxy-
gène à1 chasser que dans la formation de l’aubier
et du bois; alors encore il ne reste plus que l'acide
carbonique et l’azote qui sont inséparables, et qui
sortiront des organes qui les recèlent avec d’autant
plus d’abondance que la chaleur favorisera davan-
tage la fermentation, et c’est aussi parce qu’il y a eu
beaucoup de gaz acide carbonique décomposé $ qu’il
est resté dans les fleurs et leurs organes une si
grande quantité d’azote. Mais d’où vient celle quan-
tité d’azote qui ne se trouve pas dans les autres
parties des plantes? Il me semble que l’on en trouve
la cause dans les nouvelles combinaisons qui se
sont formées ; il y a eu ou du gaz acide carbonique
combiné , ou du décomposé pour former la ma-
tière sucrée et dans celte élaboration particulière ,
il aura perdu son azote qui se manifeste alors en
plus grande abondance, parce qu’il se combine eu
plus petite quantité,
( 529 )
§ XXIV.
J’avois bien di L clans les expériences sur la germina-
tion , que je ne croyois pas que les plantes fussent
le seul moyen de la nature pour restituer à l’atmos-
phère le gaz oxygène qu’il perd sans cesse avec
abondance , par la respiration des animaux , par
l’absorption qu’ils en font toujours par la peau, par
celle que font les plantes au moins pendant la nuit ,
par les fermentations, etc. ; mais je ne voudrois
pas affirmer que les plantes n’y contribuent en rien ,
comme Spallanzani paroît entraîné à le croire ; il
me sepibleroil qu’il a trop conclu des expériences
faites dans des vaisseaux très-petits à ce qui se passe
dans l’air libre.
Il est certain que dans ces petits vaisseaux, les
végétaux ou leurs parties qui y sont renfermées
souffrent beaucoup au soleil comme à l’ombre et
à l’obscurité , quand ils y sont exposés , surtout-
quand l’expérience est prolongée : ou y voit les
feuilles se séparer du parenchyme vert et s’y ana-
lomiser, de manière qu’il ne leur reste qu’un sque-
lette formé par les fibres ligneuses; il est encore
certain que lorsqu’on fait celle expérience dans des
vaisseaux plus grands, mais avec le même volume
de plantes, l’altération de l’air y est diminuée au
commencement de l’expérience dans une px’oportion
beaucoup plus grande que celle des volumes de l’air
renfermé; de sorte qu’il faut conclure que l’in-
fluence délétère dans les petits récipiens estjusques
à un certain point accidentelle, et qu’elle ne peut;
instruire exactement sur l’action des végétaux à l’air
( 55o )
libre, où ils sont dégagés des causes qui influent
sur eux pour nuire à leur organisation.
Spallanzani a pourtant cru que l’air dans les bois
étoit moins pur que dans les lieux découverts; ce-
pendant il paroît que son opinion qu’il énonçoit
lui-même dans ses journaux avec la plus grande
réserve éloit plutôt le résultat des idées que lui
offfoient ses expériences faites dans de petits vais-
seaux, que celui des expériences suivies sur l’air
de ces diffère ns lieux.
Je me rappelle d’avoir fait des expériences de ce
genre avec une attention et des précautions qui me
paroissoient propres à éclairer cette question. .Pa-
vois trouvé le moyen de vider une caralfe contenant
environ 61 1,45 grammes, ou 20 onces d’eau avec
le degré de vitesse que je voulois, de manière que
lorsque cela me eonvenoit, elle ne se vidoit que dans
8 heures : de sorte que par ce moyen je pouvois
lorsqu’elle étoit remplie d’eau remplacer ce fluide
par l’air dans lequel elle se vidoit pendant cet
intervalle de temps ou pendant un plus court , et
V . ,
afin de faire l’expérience plus sûrement, je disposai
toujours mon appareil de manière que la caraffe
ne fût pas entièrement vidée quand je voulois en
examiner l’air, afin que l’air qu’elle contenoit üe
put pas se mêler plus abondamment avec l’air ex-
térieur que par les goutles d’eau qu’elle distilloit.
Eh bien j’ai placé cet appareil pendant le jour et
pendant la nuit dans le centre des têtes des arbres
les plus touffus, je le plaçai de même dans les lieux
les plus découverts, au-dessus des plantes herbacées
( 55i )
végétant avec le plus de vigueur, cl je irai jamais
trouvé dans aucun de ces cas une différence sen-
sible enlre ces différens airs pris dans des circons-
tances différentes relativement au but de l’expérience.
Mais il faut remarquer encore que si l’on compare
les observations eudiométriques de l'air faites par di-
vers physiciens en divers lieux sur terre et sur mer,
en différens temps de l'année; on voit que leurs résul-
tats sont toujours à-peu-près les mêmes, quand les
degrés de chaleur ou de la condensation de l’air sont
les mêmes et cela est vrai soit qu’on l’on s’élève sur la
cime des montagnes, soit que l’on descende au bord
de la mer , soit qu’on l’examine dans des lieux arides,
ou dans des lieux couverts par une végétation vi-
goureuse ; soit que l’on aille vers le nord, ou vers
le midi: soit enfin que l’on se trouve au milieu de
l'Océan ; soiL enfin pendant le jour et pendant la
nuit comme pendant toutes les saisons.
Si ces expériences qui ont été très- multipliées ne
laissent pas de doute , elles montrent bien que le
gaz oxygène fourni par les plantes ne change pas
l’état de l’atmosphère, et ne le rend pas meilleur,
mais par la même raison , elles prouveroient bien
aussi qu’elles ne concourent pas à l’altérer.
§ XXV.
Ce seroit sans doute un beau problème à résou-
dre , que celui de la permanence de l’air que nous
respirons dans son état de pureté constante, au mi*
lieu des causes innombrables, variées et toujours
actives et renaissantes qui tendent à l’altérer: telles
( 542 )
sont enlre mille autres la respiration de tous les
animaux pendant toute leur vie , l’absorption du
gaz oxygène par les animaux et les plantes vivans
et morts jusques à leur dissolution complète, les
corps en fermentation, les corps pourrissans, les
combustions de divers genres, les cendres même , les
•vapeurs liydrosulphureuses, quelques métaux, etc.
Cependant malgré toute cette perte de gaz oxygène,
l’air atmosphérique reste constamment le même ;
celui des villes populeuses pris dans leurs places pu-
bliques n’est pas plus altéré que celui des plaines sans
habitans ou des déserts. Ce phénomène mérite une
grande attention par son importance et par les dif-
ficultés qu’il offre pour l’expliquer , comme par la
lumière qu’il répandroit sur l’économie générale de
la nature , et en particulier sur la météorologie ;
il olfriroit un beau sujet de prix aux Acadé-
mies et aux Sociétés savantes. Voici quelques idées
qui se sont présentées à moi en m’occupant de ce
sujet.
11 y a quelques faits qui doivent à ce qu’il me
semble fixer les regards de ceux qui penseront à
ce phénomène curieux.
Il est certain que l’eau de la mer , celle des lacs ,
des fleuves , des fontaines froides contiennent de
l’acide carbonique, la présence des végétaux qui s’y
développent l’auroit annoncée, si les expériences di-
rectes ne l’avoient pas fait remarquer -, ces eaux con-
tiennent aussi du gaz oxygène mais communément
il y a plus d’acide carbonique que de gaz oxygène;
cependant il y a des eaux comme celles du Vau^
( 543 )
dier si bien analisées par M.r Giobert , qui contien-
nent beaucoup plus de gaz oxygène. Le gaz acide
carbonique trouvé dans les eaux peuL y être produit
par les animaux vivans qui y respirent et par ces
animaux qui y périssent et qui s’y décomposent,
par les végétaux qui y croissent et qui s’y détruisent,
sans parler ici des éruptions locales qui peuvent
l’enfanter : mais il ne faut pas perdre de vue , que
ces eaux qui contiennent peu de cet acide en doi-
vent prendre à l’air atmosphérique qui repose
sur elles. Cependant on ne peut s’empêcher de re-
marquer que la quantité de gaz acide carbonique
dans ces eaux est constamment la même, qu’elle
n’y augmente pas et n’y diminue pas d’une quan-
tité sensible.
Le gaz oxygène que l’on trouve dans ces eaux
peut être un produit du gaz oxygène de l’air qu’elles
ont absorbé, et de celui que les plantes et les ani-
maux leur ont fourni. Quoique je ne veuille pas
décider que les expériences faites dans des vases clos
et en petit puissent rigoureusement mener à con-
clure pour ce qui se passe dans de grandes masses
d’eau toujours agitées , ou la compression et les
mélanges de mille substances pourroient influer sur
le jeu des affinités:; cependant je dirai ici que les
conclusions de Spallanzani sont rigoureuses, parce
que dans l’état de nos connoissances on ne doit pas
aller au-delà des faits bien constatés , mais on ne
doit pas exclure la possibilité de trouver ce que
ces faits peuvent indiquer.
Il faut pourtant tirer toujours ce résultat j l’acide
( 344 )
carbonique et Je gaz oxygène qui se trouvent dans
"les eaux, y sont au moins en partie pour tous les
deux au dépens de l’air atmosphérique , mais il
doit y avoir une portion de l’acide carbonique que
l’on y trouve fournie par les êtres organisés, et une
partie du gaz oxygène produit par les plantes; il ne
faut pourtant pas oublier que ces eaux qui peuvent et
qui doivent recevoir toujours ces deux gaz , qui ne
semblent pouvoir employer leur gaz acide cai'bo-
nique qu’au profit de la végétation , et qui con-
somment une grande quantité de gaz oxygène pour
la respiration des myriades d’animaux qu’elles ren-
ferment, en ont toujours à très-peu près la même
quantité. On comprendra aisément que je n’ai pu
parler ici de ces sources qui comme celles de Seltzer
eL de Pyrmont contiennent une grande quantité
d’acide carbonique ou de celles du Vaudier qui ren-
ferment une grande abondance de gaz oxygène;
cependant il ne faut pas oublier que dans ces cas
la même quantité de ces gaz y est presque toujours
constante.
J.e me dis donc à présent , ces productions d’acide
carbonique et d’absorption de gaz oxygène sont
constantes ; elles se font dans toutes les minutes de
la journée et tous les jours avec quelques variétés
suivant les climats eL les saisons, ou plutôt suivant le
degré de chaleur que l’on y éprouve, puisque Spal-
lanzani a démontré, pour les animaux et les plantes,
que cette production d’acide carbonique et cette
absorption de gaz oxygène étoicnt proportionnelles
, à l’augmentation de la chaleur dans de certaines
/
( 545 )
limites, et qu'elles devenoient nulles ou presque
nulles quand le thermomètre étoit à zéro pour
les plantes et pour quelques espèces d’animaux 'vi-
vons, mais pour tous quand ils étoient morts.
Il résulte donc de ces faits que le gaz acide car-
bonique toujours produit doit s'accroître dans l’air
et dans les eaux; tandis que le gaz oxygène toujours
absorbé doit y diminuer ; mais cette conséquence
immédiate des faits est manifestement fausse, puis-
qu’il est démontré par une foule d’expériences eu-
diométriques faites en mille endroits différens et en
mille circonstances que l’acide carbonique n’est ja-
mais la centième partie du volume de l’air com-
mun , et que la quantité du gaz oxygène ne varie
jamais que de quelques centièmes en plus et en
moins, comme je m’en suis bien assuré pendant
25 ans, encore je ne voudroîs pas affirmer que ces
variations fussent indépendantes des moyens que j’ai
employé pour les découvrir ; de sorte que l’on peut
dire avec vérité que les proportions des gaz oxygène
et azote dans l’air que nous respirons sont à-peu-
près toujours les mêmes.
Ou peut en dire autant des grandes masses d’eau
qui paroissent toujours contenir la même quantité
des gaz acide carbonique, oxygène et azote comme
l’expérience le confirme tous les jours.
Si donc les causes qui consomment le gaz oxygène
et produisent l’acide carbonique avec l’azote sont
constantes comme l’expérience l’apprend ; il faut
aussi que les causes qui dissipent ce gaz acide car-
bonique et l’azote, et qui reproduisent le gaz oxy-
( 558 )
S’il y avoit un moyen de décomposer constam-
ment cet acide carbonique dans la proportion de
sa production, le problème seroit résolu; puisqu’en
retrouvant le gaz oxygène, on auroit le gaz azote
lié avec lui , le carbone rentreroit dans la circu-
lation générale eL s’appbqueroit à la formation et
à la conservation de nouveaux êtres organisés sem-
blables à ceux qui l’ont formée.
On avoit cru trouver cette solution lorsque l’on
avoit pensé que l’agitation des grandes masses d’eau
pouvoit décomposer l’acide carbonique; mais les
expériences de Spallanzani ont beaucoup diminué
la probabilité de ce moyen ; d’aillem-s seroiL-il pro-
bable que le carbone s’engouffrât dans les eaux d’où
il ne resorliroit plus , ce qui auroit bientôL épuisé
celui qui seroit sur le resLe du globe , et si on le
formoit avec les élémens qui lui appartiennent, ces
élémens eux-mêmes se délruiroient par leur em-
ploi successif.
On pourroit croire que l’acide carbonique qui
entre dans la formation des matières calcaires et
des coquillages pourroient délivrer l’atmosphère de
celui qui y entre , sur-tout quand on pense à ces
récifs calcaires qui enveloppent les isles de la mer
du Sud , les bords de la mer rouge et qui sont peut-
être les bases de la plupart des isles; mais cet effet
seroit bien lent et l’acide carbonique absorbé par
eux quelque grande que soit la quantité qu’ils en
contiennent, équivaudroit-elle à la quantité d’acide
carbonique produit chaque jour sur le globe ; et
si l’on pouvoit soupçonner que cela, se passât de
( )
celle manière > ce que mille considérations rendent
improbables, cela ne rendrait pas à l’atmosphère
le gaz oxygène qu’elle auroil. perdu , à moins de sup-
poser que ces concrétions calcaires se décomposent
dans la même proportion 5 cette supposition 11e sc-
roil pourtant pas fondée , puisque l’observâtion nous
apprend que ces récifs augmentent, bien loin de dimi-
nuer. 11 résulte néanmoins de ces considérations qu’il
y a encore de l’air perdu à reli'ouver , et l’on ne
peut imaginer cette perte, puisque le baromètre noua
montre depuis Toricelli que les colonnes d’air qui
reposent sur la terre ont conservé le même poids.
J’ai donc encore augmenté la difficulté puisqu’il
faut trouver une quantité d’air toujours égale à celle
qui se consume à chaque instant par les êtres inor-
ganisés et à celle qui ne rentre peut-être jamais dans
la circulation ou du moins que très -long -temps
après son emploi.
Où chercher donc ce gaz oxygène? J’avoue qu’il
est impossible de le trouver ailleurs que dans des
sources permanentes qui le fourniront toujours , qui
le fourniront dans la même quantité et qui conser-
veront à l’air atmosphérique l’identité dans le poids
et dans les proportions de ses composans.
Sera-ce dans l’intérieur de la terre? je n‘y vois
aucune impossibilité , quoique cela ne paroisse pas
probable ; je n’en vois sortir que le gaz acide car-
bonique , et l’on sait que La terre absorbe le gaz
oxygène de l’atmosphère 5 on sait bien aussi que le
gaz hydrogène s’échappe de quelques mines, qu’il
s’élève au-dessus de ces terrain* brûlans, tels que
( 54o )
que Spallanzani a décrits dans scs voyages; mais je n’ai
vu nulle part qu’il y eût des éruptions de gaz oxy-
gène , à moins d’en chercher la source dans les oxides
métalliques ; on trouve au moins communément les
métaux sous cette forme et très-rarement autrement;
mais on ne peut guères imaginer que ce soient ces
oxides toujours oxidés qui fournissent le gaz oxygène.
11 faut donc revenir aux eaux où l’on trouve
toujours une petite quantité de gaz oxygène, et la
vie des poissons que les eaux renferment le dé-
montre , puisqu’ils ne sauroient vivre sans lui, mais
nous avons vu que ces eaux en contiennent tou-
jours la même quantité : je sais bien que les eaux
absorbent le gaz oxygène , comme je l’ai vu avec
mille autres; de sorte qu’il est plus probable que
les eaux le prennent , qu’il ne l’est que les eaux le
donnent , puisqu’il paroît que les eaux n ont pas
la faculté de décomposer l’acide carbonique , et ques
les animaux aquatiques peuvent absorber le gaz
oxygène de l’atmosphère au travers de l'eau, comme
ils viennent le sucer à sa surface.
Il est vrai que l’on pourroil peut-être imaginer
que l’eau se décompose , mais il faudroit en indi-
quer les moyens ; il faudroit expliquer comment
les eaux diminuées par celte décomposition restent
toujours les mêmes pour leur quantité; il faudroit
montrer ce que deviendroil l’acide carbonique qui
disparoît, le gaz hydrogène de 1 eau qu’on ne retrouve
presque nulle part, de sorte que celte ressource est
encore rigoureusement exclue.
S’il y a du gaz oxygène produit pour entretenir
( 54 1 )
Je feu des volcans , ce gaz est employé pour en-
tretenir le feu qui les dévore, il ne s’échappe pas
sous sa forme, au contraire il produit une quantité
de gaz acide carbonique que l’on trouve dans les
eaux qui coulent de leurs entrailles, dans les grottes
formées autour d’eux, enfin ces volcans ne brûlent
pas toujours.
Mais les sels acides en se décomposant pourvoit
former le gaz oxygène et les sels acides végétaux se
décomposent aisément; l’acide muriatique même pa-
roît se décomposer dans les muriates mêlés avec des
corps fermentons; enfin l’acide muriatique est le plus
répandu: il semble qu’on le trouve partout , malgré
cela, je ne vois dans ceLle idée que des vraisemblances
très-légères; ces acides sont en une quantité trop petite,
ils ne sont pas assez répandus sur la surface de la terre
pour produire ce gaz oxygène , et ils ne se trouvent
pas toujours dans les conditions propres à éprouver
cette décomposition; d’ailleurs les eaux qui con-
tiennent ces sels paraissent eu contenir toujours à-peu-
près la même quantité, de sorte qu’il ne saurait y
en avoir aucune diminution ; les plantes qui en four-
nissent n’en ont jamais encore que les mêmes doses,
celle décomposition de l’acide marin est fort lente
et l’on ignore presque ses composans.
Au milieu de toutes ces difficultés qui paraissent
insurmontables, il ne reste que la voie des hypo-
thèses; mais il y a encore quelques données pro-
pres à répandre une foible lueur sur ce sujelïju’il ne
faut pas négliger de saisir.
C’est un fait que l’on ne trouve guères dans l’aie
N
( 54a )
atmosphérique qu’un centième d’acide carbonique;
c’est encore un fait que l’acide carbonique s’élève
à chaque seconde dans l’air ; si donc l’acide car-
bonique ne s’accumule pas dans l’air , il faut que
cet acide le quitte ou qu’il s’y décompose.
Cet acide ne pourroit quitter l’air atmosphérique
que de deux manières, ou en se précipitant sur la
terre, ou en gagnant les parties les plus élevées de
l’atmosphère..
L’acide carbonique ne paroît pas se précipiter sur
la terre et y rester, puisque sa quantité ne s’y aug-
mente pas, et puisqu’il est démontré qu'il s’en exhale
continuellement quand la température n’est pas trop
basse ; on sait de même que les eaux n’en contien-
nent jamais que la même quantité, ce qui ne pour'
voit arriver si ce gaz s’y accumuloit.
L’acide carbonique ne paroît pas s’élancer entiè-
rement dans les airs , puisqu’il en reste environ un
centième dans les couches basses ; il est vrai que
Dcsaussure en a trouvé sur la cîme du Mont-Blanc*
puisque l’eau de chaux s’y couvrit d’une mince pel-
licule, comme on l’observe dans la plaine: ce qui
aunonceroit qu’il n’y en a pas une quantité plus
grande dans cette haute élévation qu’il n’y en a dans
la plaine , et par conséquent qu'il ne s’y forme point
d’accumulation.
Il paroî trait. donc que l’acide carbonique doit
rester dans l’atmosphère; mais il ne s’y accumule
pas; mais il n’y en a jamais qu’un centième; mais
le gaz oxygène de l’atmosphère aux dépens duquel
il a été formé reste toujours dans la même pro-
( 543 )
portion avec l’azote ; mais le baromètre indique
toujours le même poids dans les colonnes de l’at-
mosphère : de sorte qu’en supposant que l’acide car-
bonique reste dans l’atmosphère sans une nouvelle
production de gaz oxygène ; il est évident que les
■j— de carbone qui se sont ajoutées au gaz oxygène
devroient changer son poids d’une manière sensible ,
ce que l’on n’a pas remarqué.
On pourrait peut-être dire , que l’acide carbo-
nique qui est dans l’air se dissout dans les vapeurs
et qu’il retombe avec la pluie, les rosées, etc., cela
arrive bien aussi, mais on sait de même que la quan-
tité d’acide carbonique contenue dans la pluie et dans
la rosée est très- petite , et qu’elle ne peut ni de près,
ni de loin être comparée à la quantité d’acide car-
bonique produite sans cesse dans l’atmosphère par
les corps organisés et inorganisés.
Il résulte donc de là que cet acide carbonique
doit au moins en très-grande partie être contenu
dans l’atmosphère; mais puisque l’on ne peut ja-
mais le trouver, il faut conclure qu’il y a un moyen
pour le faire disparaître, et ce moyen est celui de
la nature que l’on ne commît pas.
Il serait donc permis d’imaginer que ce gaz oxy-
gène se décompose dans l’air lui-même ; et j’éta-
blis cette hypothèse sur une expérience qu’avoit
faite Félix Fonlana , qui ferma soigneusement une
chambre et qui y répandit une très-grande quantité
de gaz acide carbonique , après l’opération il n’a-
perçut aucun changement eudiométrique dans l’état
de l’air qu’il avoit éprouvé auparavant.
( 344 )
Cependant comme il y auroil une partie de cet acide
carbonique absorbé et retenu par les concrétions
calcaires qui se forment sans cesse , je pense aussi
qu’il seroil bien possible que les fibres végétales et
animales qui absorbent une grande quantité de gaz
oxygène, comme on l’apprend par les expériences
de Spallanzani , dégageassent ce gaz lorsqu’elles se
décomposent , peut-être sous la forme d’acide carbo-
nique qui seroil décomposé par les moyens que j'ai
soupçonné; d’ailleurs on sait de même que les plantes
produisent ce gaz pendant qu’elles végètent.
Il ne resteroit que le carbone qui pourroît être
flottant dans l’air jusques à ce qu’il se fut assez oxidé
pour se précipiter , et certes l'on sait bien que l’on
voit des corps flollans dans l’air que les pluies balaient.
Au reste je suis bien éloigné de prétendre avoir
résolu de cette manière ce problème important, il
me semble n’avoir fait que ce qu’il faut pour inspirer
aux physiciens le désir de s’en occuper.
§ XXVI.
Après avoir lu ces expériences de Spallanzani sur
les animaux et les plantes , on voit un nouveau rap-
port entre tous les genres des êtres organisés. Tous
ces êtres démontrent les mêmes rapports avec le
gaz oxygène, ils ont tous le pouvoir de l’absorber
et de produire l’acide carbonique; ils l’ont non-seu-
lement lorsqu’ils sont entiers et vivans , mais encore
dans leurs fr a g mens et après leur mort.
L’organisation produit donc dans les deux rè-
gnes les mêmes effets,, elle a les mêmes rapports avec
\
( 545 )
lair atmosphérique; mais les circonstances et les
résultats sont-ils aussi semblables.
Les animaux et les plantes diminuent la quantité
du gaz oxygène de l’air atmosphérique dans lequel
ils sont renfermés; ils y produisent l’acide carbo-
nique soit en l’extrayant tout formé de leurs subs-
tances, soit par leur contact avec le gaz oxygène;
ils y combinent tous du gaz oxygène qui s’incar-
cère probablement dans leurs fibres , et ils donnent
naissance à ces effets pendant leur vie et après leur
mort; les quantités d’acide carbonique produit, de
gaz oxygène absorbé et même de gaz azote fourni
sont assez considérables. Je remarquerai ici que cet
azote que l’on croyoit seulement rendu par les subs-
tances animales dans leurs analises, que nosanalisles
modernes avoient su découvrir dans les produits des
végétaux est encore exhalé hors d’eux pendant leur
vie. Voilà donc des litres de ressemblance qui con-
fondent ces deux genres ou ces deux ordres d’êtres
organisés, et voici des preuves que l’air atmosphé-
rique avoit été calculé pour leurs besoins et que leur
*
organisation a été mise en rapport avec l’atmosphère.
Mais ces ressemblances n’excluent pas des diffé'-i
rences considérables; ainsi par exemple la lumière
ne change pas la nature des gaz que les animaux exha-
lent, comme dans les végélaux; les animaux dans
aucun cas connu ne donuentdu gaz oxygène; celui
qui s’échappe parla respiration est celui qu’ils ont ins-
piré , et les plantes en donnent toujours à la lumière;
les plantes n’absorbent pas le gaz oxygène à la lu-
mière et n’y donnent que peu ou point d’acide carbo-
( 346 )
nique , les animaux y donnent comme à l'obscurité 1«
gaz acide carbonique et y absorbent de même le gau
oxygène. Les animaux ne rendent pas communé-
ment J 'azote pendant leur vie sous la forme de gaz,
mais les plantes en exhalent toujours plus ou moins
avec le gaz oxygène, et il se trouve mêlé avec plus
ou moins d’acide carbonique. Les animaux rendent,
il est vrai, beaucoup d’azote dans leurs urines et
paroissent ainsi en combiner beaucoup plus que les
plantes qui en offrent peu par leur analise , mais
si celles - ci l’exhalent, ou a la preuve complète
qu’elles le repoussent sans le combiner; il faut pour-
tant reconnoître qu’il y a quelques espèces qui sem-
blent faire cette combinaison.
Ne pourroit-on pas soupçonner que le charbon
qui se trouve dans les animaux y est porté comme
dans les plantes par la voie de l’acide carbonique
et de l’hydrogène oxy - carboné , mais comme ce
dernier gaz se combine plus étroitement avec les
huiles, il ne paroît pouvoir s’en dégager que par
la décomposition de leurs composans, et c’est peut-
être à cela qu’est due la propriété qu’ont les huiles
d’absorber le gaz oxygène.
On ne peut pourtant s’empêcher de remarquer
cette uniformité de moyens pour conserver les êtres
organisés ; ils sont composés des mêmes élémens et
ils ne paroissent différer que par leurs proportions
dans les mélanges, c’est aussi pour cela qu’ils se
servent réciproquement d’alimens; qu’ils se trouvent
placés au milieu des mêmes substances et qu’ils sont
toujours en rapports avec elles.
J
I _
( 347 )
§ XXVII.
Ce paragraphe ou plutôt cette note devient inutile
à ceux qui ont eu la patience de lire les ouvrages
que j’ai publié sur le sujet traité dans ce volume ,
mais comme j’ai eu souvent l’occasion de me citer,
de la même manière que l’auroit sûrement fait Spal-
lanzani ; et comme j’ai craint de multiplier les noies
en renvoyant toujours à mes ouvrages ; j’ai cru qu’il
seroit plus court d’indiquer ici, les principaux ar-
ticles sur lesquels roulent ces citations avec les ou-
vrages d’où elles sont tirées : j’ai pensé qu’il seroit
facile à ceux qui auroient quelque goût pour ce
genre de recherches , de lire les ouvrages que j’ai
indiqué où ils trouveront tout ce que j’ai annoncé.
Les ouvrages dont je parle , sont :
Mémoire physico - chimiques , 3 vol., publiés
en 1782.
Recherches sur V influence de la lumière solaire
pour métamorphoser l'air fixe en air pur par
la végétation y 1 vol. 1780.
Expériences sur l' influence de la lumière solaire
dans la végétation , 1 vol. 1788.
Je ne dis rien de ma Physiologie végétale , im-
primée en 1790 pour l’Encyclopédie par ordre de
matières , ni de l’édition que j’en ai donnée en 5 vol.
l'an VIII, ou j’ai traité à fond la décomposition de
l’acide carbonique par la végétal ion , comme dans
les Recherches sur l'influence de la lumière solaire
dans la végétation. Je me borne ici à quelques sujets
que Spallanzani a traité après moi.
( 546 )
L’air commun et l’acide carbonique ne s’altè-
rent pas au soleil pendant plusieurs jours. Mémoires
phys. chimiques , T. I , p. 278. Expériences sur
L'action de la lumière , p. 324.
L’eau ne gâte pas l’air qui repose sur elle. 1 Mé-
moires phys. chim., T. I, p. 55.
Effet de la chaleur. Expériences sur l'action de
la lumière solaire, p. i63.
Expériences faites en hiver , ibid. p. 168. Mém.
phys. chim. , T. I, i65.
Air produit dans les gaz hydrogène, azote , oxy-
gène et air commun. Mém. phys. chim. , T. I ,
p. 2 5 1 et 2 07. Expériences sur l'action de la lu-
mière solaire, p. 253 , 23 7 , 24i, 244.
Absorption de l’air à l’obscurité. Mém. phys.
chim. , T. I , p. 85.
Les feuilles qui n’ont point donné d’air à l’obs-
curité, en fournissent quand elles sont exposées à
la lumière. Expériences sur l'action de la lumière
solaire, p. 48, 226.
Les feuilles cà l’obscurité dans les eaux chargées
d’acide carbonique ne donnent point d’air , ibid. 54.
Les plantes gâLent l’air à l’obscurité , ibid. 116,
159 , x4o.
L’air sort de l’intérieur des plantes. Mém. phys.
chim., T. I, p. 26, 28.
Les plantes donnent moins d’air dans l’air que
dans l’eau. Mém. phys. chim., T. I, p. 228.
L’acide carbonique cause de la production du
gaz oxygène dans l’exposition des plantes au soleil.
Expériences sut' l'action ue la lumière solaire , 21 i.
( 547 )
Le gaz acide carbonique , s’échappe hors des
plantes exposées au soleil. Mém. phys. chim. ,
T. I, p. 555. Expériences sur l'action de la lu-
mière, p. 182, 192, 527.
L’acide carbonique produit par les plantes, ibicL
p. 192.
Air fourni par les plantes dans les eaux bouillie
et distillée. Mém. phys. chim,. p. 07. Recherches
sur l’influence de la lumière solaire , p. 17.
Plantes qui donnent moins d’air au soleil dans
les eaux chargées d’acide carbonique que dans l’eau
commune. Mém. phys. chim. , T. I, p. 5 jl 5 .
Acide carbonique trouvé dans l’air des plantes.
Expériences sur l’action de la lumière solaire ,
p. 45o.
Les plantes exposées au soleil dans une eau aérée,
lorsque celte eau est mêlée avec l’eau de chaux
donne un précipité gommeux. Recherches sur l'in-
fluence de la lumière solaire , p. 25.
Expériences sur toutes les parties des plantes.
Mém. phys. chim. , T. X, p. i5i , 296, 298, 299.
Fin du troisième et derî.ier volume.
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