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University of Ottawa
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BIOGRAPHIE
UNIVERSELLE,
ANCIENNE ET MODERNE.
AM — AT.
&>
BIOGRAPHIE
UNIVERSELLE,
ANCIENNE ET MODERNE,
OU
nrSTOIRE, PAR ORDRE ALPHABETIQUE, DE LA VIE PUBLIQUE ET PRIVe'e DE
TOUS LES HOMMES QUI SE SONT DISTINGUES PAR LEURS ECRITS, LEURS
ACTIONS, LEURS TALENTS, LEURS VERTUS OU LEURS CRIMES.
OUVRAGE ENTIEREMENT NEUF,
RÉDIGÉ PAR UNE SOCIÉTÉ DE GENS DE LETTRES ET DE SAVANTS.
On doit des *?gards aux vivants ; on ne doit
aux morts, que la vérité. (Volt.)
TOME DEUXIÈME.
A PARIS,
CHEZ MICHAUD FRÈRES, IMPRIM.-LIBRAIRES,
IHJE DES BONS-ENFANTS, S". 34*
"UnîversT^^
BISLfOTHECA
Il il
BIOGRAPHIE
UNIVERSELLE.
A M A BLE (S.), cure de Riom en
Auvergne, dans le 5". siècle , et
le patron de cette ville. Selon Gré-
goire de Tours, il mourut en 4^f ■>
et fut enterre à Clermont; mais d'au-
tres écrivains prétendent qu'il mourut
en 47 J, Pt que sou tombeau tut placé
dans l'église de St.-Bénigne , à Riom.
Grégoire de Tours rapporte qu'il exer-
çait un grand pouvoir sur les .serpents ;
et il affirme en avoir vu lui-même un
exemple remarquable. L'abbé Faydil
dit que , depuis 1 5oo ans , on a vu
de nombreux effets de ce polivoir mi-
raculeux. D^ — T.
AMAC , célèbre poète persan, du
5^. siècledel'hég. ( 1 1*. de J.-C.}, sur-
nommé Bokhardi^ ce qui semble in-
diquer qu'il était né à Bokharà. Il
jouit d'une grande faveur auprès de
KbederKbàn, qui avait rassemblé à sa
cour beaucoup de poètes et d'hom-
mes célèbres , dont Araac était comme
le chef; ce qui attira sur lui des regards
d'envie. Amac avait effectivement beau-
coup plus profité que tous ses rivaux
delà faveur et des bienfaits du prince.
Il possédait un nombie considérable
d'esclaves de l'un et de l'autre sexe,
et avait dans ses écuries jusqu'à 3o
chevaux de main richement enharna-
chés. Rachydy, poète persan, aussi
célèbre que lui, et dont il était le pro-
lecteur , vint à bout , par ses intrigues ,
de le supplanter à la cour. Vers la fin de
sa carrière , Amac rentra en faveur ,
II.
sous le règne du sulthan Sandjar. C«'
prince, profondément aflligédc U mort
de sa sœur Mohi-mu'k, ne pouvr.it
trouver aucun poète qui célébrât digne-
ment les qualités de celle qu'il pleu-
rait ; il se ressouvint du poète Araac, et
lui ordonna de composer une élégie.
Amacétait alors dans un âgv^ très-avan-
cé, et en proie aux infirmités de la
vieillesse. Il obéit cependant , et com-
posa une élégie qui, au jugement de
Sandjar , prince spirituel et bon litté-
rateur, était supérieure à toutes celles
qu'on lui avait présentées. La princesse
pour laquelle l'élégie fut composée était
morte jeune et dans la saison du prin-
temps. Amac saisit ce rapprochement,
facde sans doute , mais dont l'effe! était
sur , et commença ainsi son poème par
des vers qui lappellent les strophes cé-
lèbres de Malherbe à Duperrier soa
ami : « Au temps où la rose commence
» à édore dans les jardins, celle qui
» était déjà épanouie s'est flétrie en ua
» instant , etc.» .Amac parvint à un âge
très-avancé. Le plus célèbre de ses
ouvrages est l'histoire en vers de Jo-
seph etde Zulykhâ, roman tii'é de l'his-
toire de Joseph , telle qu'elle est l'ap-
portée dans le Coran. J — n.
AMAD-EDDOULAT. Foy. Imad-
Eddoulah.
AMADEI ( Charles - Antoine ) ,
médecin et botaniste de Bologne , sa
patrie, vécut vers k fin du 1 7*. siècle,
et s'appliqua très-jeune à la connais-
2 A Tii A
sance des plantes, sous la direction de
Zaïioiii , sou compatriote ; i! ue se bor-
na point à l'examen de leur structure
extérieure; il étudia leurs plus petites
parties , à 1 aide du microscope , et de-
vint si habile, qu'à la vue seule d'une
graine, il recounaissait de quelle plante
elle provenait. 11 s'appliqua aussi à dé-
couvrir toutes les espèces qui crois-
sent dans son pays , et il en rencontra
plusieurs de très-rares, dont on n'au-
rait peut-être jamais soupçonné l'exis-
icnoe dans ce climat. Il en trouva deux,
entre auii es , dont il ne put découvrir
les noms , quoiqu'il rùt consulte, à ce
sujet, les plus savants botanistes de son
temps, avec qui il était en relation. Ce
ne fiit que quelque temps après , qu'on
reconnut , avec surprise , que l'une et
l'autre se retrouvaient dans les reliions
équatoriales. Gaétau Monti en fit le su-
jet de deux dissertations insérées dans
les Mémoires de l'Institut de Bologne,
t. III et Y ; l'une d'elles nécessita la
formation d'un nouveau genre, sous
le nom diAldrovanda, en honneur
de son compatriote Aldroi>ande. Vai-
nement Adanson a voulu rendre à Ama-
dei le même honneur , en nommant
Amadea le genre Androiace ; ce
dernier nom a prévalu. Amadei mourut
en l 'j.to; il n'a pointlaissé d'ouvrages,
et il était du petit nombre des savants
modestes qui, contents de faire des dé-
couvertes, laissent aux autres le soin
de les publier. — Son fils , J.-J. Ama-
dei , aussi botaniste, et chanoine à Bo-
logne , se distingua par ses profondes
connaissances eu bibliographie.
D— P— s.
AMADESl ( Dominique ) , naquit à
Bologne, le 4 août 1657. Quoiqu'il fît
son état du commerce , il s'appliqua
aussi aux belles -lettres, et surtout à la
poésie. Le célèbre Jean-Pierre Zanotti,
son -intime ami , rcucouragea beau-
coup à s'y livrer, Ses premiers essais
AMA
poe'tiques se trouvent dans le recueil
donné par le Gobbi , Venise, 1 7 '.if) ,
sous le nom anagrammalique de Sinio-
nide di Meaco. La mort d'une épouse
qu'il aimait , fut pour lui un triste et
fécond sujet de vers. Ils furent publiés
en partie par son ami Zanotti , à Bo-
logne , en 1 7-i5 ; l'autre partie est res-
tée manuscrite après sa mort, arrivée
le 1 1 septembre 1 700. — Il eut un fils,
nommé Lelio Alberto , qui se dis-
tingua aussi par son érudition, et par
son talent pour la poésie , et qui mou-
rut en 1 "58 , âgé de 66 ans. G — e.
AMADESl (Joseph-Louis;, citoyen
de Bologne , naquit à Livourue , le iS
août 1701 , pendant un séjour passa-
ger qu'v firent ses parents. Son père
étant allé habiter Ra venue , en 1718,
il l'y suivit , et s'y fit tellement aimer
par ses talents et ses bonnes qualités,
qu'il fut successivement choisi pour
secrétaire par trois archevêques de ce
siège. Il fut mis, en 17541 à la tète
du clergé de l'église de St.-Nicandre ,
et nommé garde des célèbres archives
de Farchevêché de Ravenne. 11 les mit
en ordre , eu dressa une table exacte,
et eu lira une infinité de documents,
qu'il eniplova ensuite dans de savants
ouvrages. Il devint un des citoyens les
plus considérés de cette ville, et fut
l'un des fondateurs des réunions litté-
raires qui se formaient dans le palais
du savant marquis César Rasponi, et
où l'on traitait toutes les matières re-
latives aux sciences et aux lettres. I!
lut envoyé jusqu'à quatre lois à Rome,
par les archevêques , pour des affaires
importantes , qu'il termina toujours
heureusement. Il publia :L eu 1747^
à Ravenne, De jurlsdiclione Raven-
nntiim archiepiscoponan in civilale
et diocœsi Ferrariensi; IL en 1752,
à Rome, De jure Ravennalum archi-
episcoporuni deputandi iiotarius ,
etc. j IIL ibid, en 1765, De corni-
AMA
tûtu Ârgentano, etc., et plusieurs au-
tres ouvrages , dont 07i peut voir le ca-
talogue daus le i ''^. volume du livre de
Fantuzzi , sur les écrivains bolonais.
Ce personnage respectable faisait son
amusement de la poésie italienne. On
a de lui des vers spirituels dans plu-
sieurs recueils. Il prit part à la com-
position bizarre du poëme burlesque
intitulé : Berlholdo con Bertlioldino
e Cacasenno. Le i^''. chant, avec de
savantes notes , est de lui. 11 mourut
le 8 février , l'j'jS, à Rome , où l'é-
glise de Ravenne venait de le députer
encore pour soutenir ses droits sur
le comté d'Argenta. Il fut universelle-
ment regretté , et laissa une mémoire
aussi honorée du public, que chère à
ses nombreux amis , parmi lesquels on
comptait les hommes les plus distin-
gués de son temps. G — e.
AMADUZZI (Jean-Christophe) ,
€n latin Amadiitius , né dans l'état
romain , philologue distingué , ins-
pecteur de l'imprimerie de la propa-
gande h Rome , au milieu du 1 8". siè-
cle, a donné: I. Une quatrième édi-
tion de l'ouvrage de Bellori, intitulé:
Fragmenta vestigii veteris Romce ,
Rome , I -^64 , in - fol. Araaduzzi y
ajouta ses notes, et celles d'un ano-
nyme. IL Lcges noi'cllœ qiànque
anecdotœ 'vnperr. Theodosii junio-
ris et Valentinianl tertii, ciim celer-
rariim etiarn noi'ellarum edilarum
tilulis , et variis lectionihus ex co-
dice Oltoboniano ; quitus accedunt
alice Valeniiniani tertii conslilutio-
nes jam editœ , quœ in Codice Theo-
dosiano desiderantur ; ac ta?idem
lex romana^seu responsum Papiani,
titulis , anecdotis , variisque lectio-
nihus auclum, Rome, 1767, in-fo).
C'est un supplément à l'édition du
Code Tfiéodosien donné par Ritter.
IlL Anecdota litteraria è vianu-
scripiis codicibus emtaj Roroe^ 1770
A M A 5
et 177 4, 5 vol., grand in-8°.; IV. P'e-
tera monumenta quœ in hvrtis cœli-
inontanis, et in œdibus Malthceicrum
adservantur , collecta et adnotatio-
rdbus illustrata , Rome , 1 7 79 , 5 vol.
in-fol. , avec 270 planches. Rod. Ve-
nuti fut le cnliaborateur d'Amaduzzi.
V. Characterum ethicorum Theo-
phrasli capita duo , hactenus anec-
dota , grec et latin , avec une préface
et des notes, Parme, 1786, in-4".j
\I. Alphabetum B ami aman , seu
romanwn regni Avce , Jinitimannn-
cjueregionum, Rome, 1776, 1787,
in-8'\ Nous citons cet ouvrage d'après
un catalogue. \' II. Epistola ad Bodo-
nium super editionem Anacreontis ,
Parme, 1791, in-S". ; VIII. Discorso
filosofico sul fine ed utilita delta,
academia , Rome, 1777, in -8".
A. B— T.
AMALABERGUE , fille de Théo-
doric. ( F^oy. Hermanfroi. )
AMALAIRE - FORTUNATUS , de
moine de Madeloc, fut fait archevê-
que de Trêves , en 8 1 o , rétablit , l'an-
née suivante, la religion chrétienne
dans la partie de la Saxe située au-delà
de l'Ebre , consacra la première église
de Hambourg , et alla , en 8 1 5 , eu
ambassade à Constanîinople, pour ra-
tifier la paix que Charlemagne avait
conclue avec l'empereur Michel Curo-
palatc. Il mourut , l'année d'après ,
dans son diocèse. Nous avons de lui
un Traité du Baptême , imprimé
parmi les œuvres et sous le nom d'Al-
cuin. C'est une réponse à la lettre cir-
culaire par laquelle Charlemagne avait
consulté les métropolitains de ses états
sur ce sacrement. L'identité de nom
a fait souvent confondre cet Araalaire
avec le suivant. T — d.
AMALAIRE -SYMPHOSIUS, fut
successivement diacre et prêtre de Te'-»
glise de Metz , à laquelle il appartenait
pav sa naissance, directeur de l'écold
I..
4 A M A
du palais sous Louis-le-Debonuaire ,
abbe d'Hornbac , chorévêque du dio-
tèse de Lyon , puis de celui de Trêves ;
on prétend même qu'il fut revêtu de
la dignité' cpisropale. 11 assista , eu
Si5, au concile de Paris, qui le dé-
puta on cour, pour y porter, avec Halit-
f^aire , Touvrage de cette assemblée sur
fe culte des im^ages. Quelques auteurs
lui attribuent l'ouvrage qui parut, eu
S\n , en faveur du sentiment de Hiuc-
Miar de Reims , sur la prédestination;
mais il paraît trcs-vraiserablable qu'A-
mdlaire était mort environ dix ans au-
paravant. Il passe pour le plus savant
homme de son siècle dans la btur-
gie , et la lecture de ses ouvrages est
bien propre à lui confirmer cette ré-
putation. On a de lui : I. Traité des
Offices ecclésiastiques. 11 le donna
t\\ 8'io ; mais , ayant fait le voyage de
Rome pour s'instruire par lui-même
\les rits de cette église , il le publia de
nouveau, en 8i7, avec des cbange-
raenls considérables. L'édition la plus
correcte est celle de la Bibliothèque des
Pères , de Lyon. Son but est de ren-
dre raison des prières et des cérémo-
nies qui composent l'office divin. L'on
Trage est utile et curieux; il n'en vau-
drait pas moins, si l'auteur se fût moins
arrêté à rechercher les sens mystiques.
Âgob^rd et Florus , l'un archevêque ,
l'autre diacre de Lyon, l'attaquèrent
vivement. Quelques expressions nou-
velles sur l'Eucharistie fournirent
matière à l'accusation qu'ils lui inten-
tèrent au concile de Thionville , qui
donna gain de cause à l'auteur , et au
concile de Quierci , qui jugea l'ouvrage
dangereux ; ce qui ne diminua eu rien
la considération dont il jouissait. II.
Y Ordre de V Antijdionier , imprimé
ordinairement avec le précédent. Il
tache d'y concilier le vit romain avec
le rit gallican. Agobard, mécontent de
ce (£u U accusjdt son église d'avoir iu-
AMA
uové dans le chant ecclésiastique , écf i*
vit contre lui. III. L' Office de la Messe,
dans V Appendice des Capitulaires ,
deBaluze. C'est une explication mysti-
que des cérémonies de la messe pon-
tificale. IV. Des Lettres, dans le Spi-
cilége de D. d'Achcry , et dans les
Anecdotes de D. INIartenne ; Y. une
Règle des Chanoines , que Le IMiie
fit imprimer, avec de savantes notes,
dans le Cods des règles des Clercs ,
Anvers, i658, in -fol., d'où elle a
passé dans les Conciles de Sirmond
et de Labbe. Celte règle fut approu-
vée par le concile d'Aix, en8i6, et
envoyée dans tous les chapitres par
Louis-le-Débonnaire. On la suivit pen-
dant plus de deux siècles; mais, dans
le 1 1 ^ , Pierre Dainien ayant remar-
qué qu'elle permettait le pécule , et
qu'elle accordait une trop forte por-
tion de pain et de vin à chaque cha-
noine, commença à la décrier; Mco-
las 11 trouvant d'ailleurs qu'elle avait
été introduite sans le consentement du
Saint-Siège , on cessa de s'y conformer.
T— D.
A M A L A R I C , roi des Yisigoths ,
était fils d'Alaric 11 , qui périt de la
main de Clovis , à la bataille de Vouil-
lé, l'an 507. La division s'étant mise
entre les Visigoths, après cette mal-
heureuse journée , un parti d'entre
eux emmena en Espagne Amalaric , qui
n'avait que cinq ans; mais le plus
grand nombre , qui se réfugia à INar-
bonne , se hâta de proclamer Gesa-
laic , fils naturel d'Alaric. Clovis s'é-
tant rendu maître de toutes les pro-
vinces des Visigoths , depuis la Luii»
jusqu'aux Pyrénées , Gesala'ic se sauva
aussi en Espagne ; mais les débris du
royaume des Visigoths furent conser-
vés par la main puissante de Théodo-
ric, roi d'Italie, aïeul maternel d'A-
malaric. S.m armée tailla en pièces les
Bourguiguoui et les Fraucs, et leur
A M A
arracha la Provence et îe Languedoc.
Gesalaïc , qui disputait le tronc à son
iVère légitime , ayant été battu et tué,
le jeune Anialaric fut reconnu , en 5 1 1 ,
roi de tous les Visigoths , sous la tu-
telle de son aïeul Thcodoric. Ce prince,
pour se dédommager des frais de la
ijueiTe, garda la Provence, et gou-
-verua la monarchie des Visigoths ,
en qualité de régent , pendant la
minorité d'/iraalaric. Rentré dans tous
Ncs droits à la mort de Théodoi'ic, le
roi des Visigoths partagea ce qui lui
restait dans la Gaule avec son cousin
Aihalaric, devenu roi d'Italie, et dont
il voulait s'assurer les secours contre
les fils de Clovis. On convint que le
Rhône sernrait de limites entre les
deux empires des Ostrogoths et des
Visigoths , et qu'on cesserait d'en-
voyer les tributs d'Espagne en Italie.
Cependant , Amalaric , désirant vivre
en paix avec les Francs, épousa Clo-
til-de , fille de Clovis. Cette princesse
lui apporta en dot Toulouse , qui fut de
nouveau réunie à la monarchie d' Ama-
laric. Ce mariage semblait devoir con-
solider la paix entre les deux nations
rivales; miis bientôt on vit naître,
entre les deux époux, une mésintelli-
gence funeste. Amalaric voulut forcer
la reine à cmlorasscr l'arianisme, et,
n'ayant pu y parvenir par les voies de
la persuasion , il fit outrager cette prin-
cesse toutes les fois qu'elle se rendait
H l'église; et, furieux de la voir insen-
sible à ces insultes , il lui infligea hii-
«ueme , par un rafîinement de bruta-
lité, des châtiments indignes et cruels.
Réduite au désespoir, Clotilde fit pas-
ser à son frère Childebert , roi de
Paris , un mouchoir teint du sang
qu'elle avait répandu sous les coups
de son barbare mari. Childebert ne
demandait qu'un prétexte pour re-
prendre le Languedoc; il entra avec
une puissante armée dans les états de
A M A 5
son beau-frère, qui, étant vemi à sa
rencontre, fut battu et tué d'un coup
de lance, à î^arbonne, an moment ou
il y rentrait pour enlever ses trésors.
C'était un prince lâche, avare éternel.
En lui finit la race des Théodomes ,
qui régna m ans sur les Visigoths.
Cette monarchie , héréditaire jusques
alors, devint élective , et seconcenti'a
eu Espagne. Theudis succéda à Ama-
laric. B — p.
AMALASONTE ( Amalasventa ) ,
reine des Gitrogoths, eu Italie, était
fiile unique de Théodoric L''. , etd'Au-
dcfleda, fille du roi Childéric : son
]ilve lui donna pour époux, en5i5,
Eulharic Glicus, qui , comme lui, était
descendu de la dynastie des Amales ,
rois des Goths, au commencement du
4 '. siècle; mais ce prince mourut avant
son beau-pcre, laissant un fils d'Araa-
lasonte, nommé Athalaric, qui, à la
mort de Théodoric, en S^G, lui suc-
céda sous la tutelle de sa mère. Ama-
hisonte est accusée d'avoir em|X)isonné
sa mère. Elle choisit, pour principal
ministre et pour secrétaire , Cassio-
dore, romain, qui s'efforçait de com-
muniquer aux Goths les usages et les
mœurs de ses compatriotes, de leur
inspirer quelque respect pour les
arts, pour les lois, et pour ce qui
restait encoTC d'une antique civilisa-
tion. Amalasonte poursuivit le plan que
son père s'était tracé pour réconcilier
le peuple conquis au peuple conqué-
rant , et pour fondre les deux nations
eu une seule ; elle témoigna , pour les
lettres et pour les lois , un respect
qu'elle communiquait ainsi aux vain-
queurs de Rome; enfin, elle apporta,
dans l'administration et dans ses re-
lations avec les autres puissances j
assez de vigueur pour qu'un peuple
guerrier ne dût point avoir de honte
d'obéir à une femme; réparant, au-
tant qu'il dépendait d'elle, les dei-
6 AMA
iiièrcs rigueurs de The'odoric , elle
rendit, aux fils de Simmaque et de
Boèce, les biens de leurs pères, con-
fisques après leur supplice. Elle voulut
aussi que son fils pnrticipât aux con-
naissances des Romains, et qu'il fût
instruit dans les arts libéraux: mais
l'cdiicalion, pendant cinq siècles de
despotisme, avait pris quelque chose
de servile. Les précepteurs qu'elle
donna à son fils employèrent la crainte
pour lui inculquer la scieuce, et elle-
mèoie punit un jour une de ses fautes
par un souUlct. Ce n'etail pas ainsi que
les Goths avaient coutume d'élever
leurs eni;uits ; ils ne voulaient pas
qu'une seule oirense impunie laissât
dans leur ame un souvenir d'humilia-
tion ou de crainte. « Celui qui aura
» tremble devant la férule d'un péda-
» S^oi*^? disaient -ils, ne regardera
n jamais sans crainte le fer des en-
» nerais. w Us obligèrent Amalasontc
à e'carter de sou fils ses pre'cepteurs
leltre's, et à l'entourer de jeunes gens
qui rivalisaient aACC lui dans les exer-
cices du coips ; ceux-ci l'entraînèrent
dans de tels excès d'ivrognerie et de
débauche, qu'ils détruisirent sa saute,
et il mourut en 554. Amalasontc, pour
con-ervcr le trône après la mort de
son fils, oiTrit de le partager avec
Théodat, fils d'une sœur de Théo-
doric, et dernier héritier de la famille
des Amales {F'oy. Theodat); mais
elle avait précédemment offensé cet
homme lâche, avare et perfide, qui,
dès qu'il l'eût épousée, écarta d'elle
SCS partisans et ses ministres , la chassa
de Ravenne, en 555, la fit enfermer
dans une îie du lac de Bolsena, (t
permit à ceux qui avaient quelque
vengeance à exercer contre elle, de la
poursuivre et de l'étrangler. La mort
d' Amalasontc servi; J,. prétexte à h»
guerre que Jostiuieu déclara aux Os-
trogoths. S. S — 1.
A M A
AITALECH, fils d'Eliphaz {Fc^.
ESAÏI ).
AMALFI ( Constance r)\4vAL0& ,
duchesse d' ), dame illustre du i6\
siècle , et l'une de celles qui cultivè-
rent alors avec le plus de succès la
poésie italienne, était née à Najiles,
d'iEuicus , ou Innico d'Avalos , mar-
quis del Vasto, et de Laure San Seve-
riua. Ayant épousé Alphonse Pieco-
lomini , duc d'Amalfi, elle resta veuve
de très -bonne heure et sans enfants.
Sa conduite lui concilia l'estime géné-
rale. L'empereur Charles-Quint , pour
preuve de la sienne , lui donna le titre
de princesse. Elle mourut à Naples ^
vers l'an 1 56o. Ses poésies sont réu-
nies dans quelques éditions , avec
celles de Victoire Colonne, marquise
de Pescaire ; on en trouve plusieurs
morceaux dans le recueil intitidé :
Rime diverse di alcune nohilissime
e virtaosissime dorine , rac coite per
M. Lodovico Domenichi , Lnccpies ,
i55(), in-8"., et Naples, iSgS, id.
Dans des Dictionnaires où , en co-
piant tout , on estropie tout , on s'é-
tonne que Zoppi ait oublié cette dame-
poète dans sa Bibliothèque Napoli-
taine ; on a voulu dire Toppi. G — h.
AMALIE, (duchesse douairière de
Saxc-Wcimar). mérite une place dans
un Dictionnaire hir.lorique , pour
avoir été, pendant la dernière moi lié
du iS*". siècle, le centre etl'ame d'une
cour, qui avait plus d'un rapport avec
celle du duc de Ferrare , protecteur
du Tasse et de l'Arioste. Seule, elle a
rendu aux gens de lettres les services
qu'ils ont vainement attendus des
grands princes de l'empire germani-
que, en leur offrant un point de réunion,
et en leur donnant une existence dis-
tinguée. Mais ce n'est pas seulement
comme protectrice généreuse des lit-
térateurs et des artistes , et comme
juge éclaire' de Icius prodi'Ctious ,
A M A
fju'Amalre a des droits à la reconnais-
sance publique. Veuve , à l'àç^e de i g
ans , du duc Ernest-Auguste-Çoustan-
tin, qu'elle perdit le 28 mai 1758,
après deux ans de mariage, elle sut
reparer, par une bonne administra-
tion , les pertes que la guerre de sept
ans avait causées au duché de Weiraar,
faire des économies considëi ables sans
écraser le peuple, le préserver de la
ftiraine de > 77*2 , qui désola le reste de
la Saxe, et fonder ou perfectionner les
établissements les plus favorables à la
civilisation et aux lumières : elle donna
Wieland pour gouverneur à son (ils ,
Charles-Auguste, aujourd'hui duc ré-
gnant, et attira à Weimar tous les
gens de mérite que ses moyens lui
permirent de fixer auprès d'elle. Son
cercle était composé des écrivains les
plus illustres de l'Allemagne : Her-
der , Goethe et Wieland en étaient les
principaux ornements; mais on y re-
marquait, au second rang, une foule
d'hommes qui, ailleurs, se seraient
trouvés placés au premier, les poètes
Charles Sigismond de Seckeudorf et
de Knebel , l'antiquaire ,p|»ettiger,
Bode et Musœus , prosateurs pleins de
verve et d'originahté, etc. Schiller y
paraissait dans les derniers temps.
Certes, ce n'est qu'en réunissant au
plus rare mérite les grandes qualités
de l'esprit et du cœur, que h sou-
veraine d'un petit état est parvenue
à rassembler autour d'elle plus de
beaux génies et d'hommes distin;j;nés ,
qu'aucune cour contemporaine. Ce qui
prouve que cet heureux ascendant
était dû à son caractère personnel,
plus qu'à son rang et à son pouvoir,
c'est qu'elle le conserva intact depuis
l'an 1773, époque où elle déposa
l'autorité entre les mains de son fils
aîné. Sa maison , à Weimar, ses re-
traites champêtres de Tieliurt et d'Et-
tersburg , continuèrent à être le rca-
AMA 7
dez-vous de tous les écrivains, de tous
les voya<;eurs distingués. M. Mounier
fut, pendant plusieurs années, direc-
teur d'un pensionnat qu'elle avait éta-
bli dans le château du Belvédère, près
de Weimar. Un vovage qu'elle fit en
1 788 , en Italie , accompagnée de l'au-
teur de PFerther , accrut encore son
goût pour les arts , et sa cour fiit , plus
que jamais, le l'endez-vous de tous les
hommes supérieurs , l'asyle du mérite
ignoré ou méconnu : héritière des
grandes qualités de la maison des Guel-
fes , etde leur amour pour les sciences,
elle eut la gloire d'avoir honoré et
encouragé les écrivains d'Allemagne
les plus célèbres , après Leibnitz ,
qui avait été considéré et protégé par
une princesse de sa maison. Herder
mourut avant sa bienfaitrice; il ne vit
pas la journée du 14 octobre 1808.
Amalie en fut témoin, et mourut
quelques mois après, S — R.
AMALRIC (Arnaud), xn". abbé
de Cilcaux, fut choisi, en \io^, par
Innocent III, avec Pierre de Castel-
neau et Arnoul , pour travailler à la
conversion des Albigeois , dont la secte
faisait des progrès dans le Languedoc
et la Provence. Ces trois légats furent
l'cvêtus de pleins pouvoirs dans les
provinces d'Arles , d'Aix et de Nar-
bonne ; mais leurs prédications eu-
rent d'abord peu de succès ; l'évêque
d'Osma , en Castille , qui vint à cette
époque, avec S. Dominique, visiter
l'abbé deCîteaux , conseilla aux légats
de renoncer à l'appareil somptueux
dont ils se faisaient accompagner, et
leur fil entendre qu'ils ne parvien-
draient à convertir les hérétiques qu'eu
imitant la simpHcité des apôtres. Les
trois missionnaires ayant suivi ce con-
seil , ne trouvèrent pas les Albigeois
plus dociles. Comme l'ardeur des croi-
sades n'était pas encore éteinte dans
les esprits , Innocent III imagina de
8 A M A
tourner contre les hérétiques 1rs ar-
mes qu'on prenait contre les infidèles;
rt il ch;!rç;ea ses le'gnls en Languedoc
de prêolier nue croisade contre Ray-
mond, comte de Toulouse, et contre
ses sujets , coupables d'he're'sie. Araal-
vic se distingua par la chaleur avec
laquelle il prêcha une guerre qu'on
appelait X affaire de Jésus- Christ.
Comme cette croisade entraînait avec
elle peu de dangers , et qu'on pouvait
gagner les indulgences, sans quitter
l'Europe , une i'oule de croises aimè-
rent mieux aller combattre en Langue-
doc que dans les plaines de la Syrie.
On les -v it accourir de toutes les pro-
vinces de France , et même de TAlie-
magnc , jurant d'c5!terminer les Albi-
geois, auxquels les dc'vots allemands
avaient donne le surnom de béguins
ou pequins. Les croisc's , dont le nom-
bre s'éleva à près de 5oo,ooo hom-
mes , avaient à leur tète les comtes de
Montlbrt , de Nevers, le duc de Bour-
gogne, et plusieurs e'vcques. L'alihé
de (iîteaus était leur guide et leur con-
seil. Ne pouvant pardonner aux Albi-
geois d'avoir dédaigné ses exhorta-
tions , il échauffa contre eux l'esprit des
croisés , et contribua beaucoup à faire,
de cette croisade , une guerre d'ex-
termination. A la prise de Béziers , on
lui demanda ce qu'on devait faire, dans
j'impossi!)ilité de distinguer les ca-
tholiques des Albigeois : « Tuez -les
)> tous , répondit - il , Dieu connaît
» ceux qui sont à lui. « Les croisés
ïi'avaient pas besoin de cet horrible
conseil; les plus ardents étaient déjà
dans laville,dontilsraassacrcrent tous
les habitants. Sept mille personnes ,
réfugiées dans l'église de St''.-Madc-
laine , y furent passées au fd de l'épée ,
sans distinction de sexe, d'âge, ui de
religion; cependant, les croisés s'ef-
frayèrent derégnci mu des toral^eaux,
ït de conquérir des ruines : maîtres
AMA
de Carcassonne , ils épargnèrent ia vie
des habitants , et se contentèrent de les
faire sortir de la ville, en chemise;
condition qui poiurait passer pour bar-
bare dans une autre circonstance; mais
qu'il faut l'egardcr comme un trait
d'humanité dans une pareille guerre.
Araairic ne fut pas toujours maître d'ar-
rêter ainsi les fureurs qu'il avait pro-
voquées. Étant venu au siège de Mi-
nerbe, il fut interrogé, commcmaîlre
des croisés, sur les articles de la ca-
pitulation. « Je souhaite avec ardeur ,
» répondit -il cà Simon de Montfort,
» la mort des ennemis de Jésus-Christ;
» mais , étant prêtre et religieux , je
» n'ose opiner pour faire mourir les
» assiégés. » 11 demanda qu'on laissât
la vie au commandant , aux soldats ,
et aux hérétiques renfermés dans la
place , s'ils voulaient se convertir. Celte
condescendance déplut à un croisé,
jilus fanatique que les autres . nommé
Robert de Mauvoisin, quidittouthaut
«qu'on était Aenu pour exterminer les
impics , et non pour leur faire grâce. »
— « Ne craignez point, lui dit alors
w Amal^iifè; peu d'hérétiques se conver-
» tironf. » Malheureusement, il ne se
liompait point ; les Albigeois trouvés
dans la place persistèrent tous dans
leur hérésie, et plus de i4o furent
condamnés aux flammes , où ils se
précipitèrent eux-mêmes, tant le fa-
natisme était aveugledc part et d'autre.
x\malric conserva le plus grand ascen-
dant sur l'esprit des croisés dans le
commencement de cette guerre , ce qui
a fait dire faussement, à quelques bio-
giaphes, qu'il était généralissime delà
croisade. Ce fut hiiqui dounaau comte
de Montfort, de la part du pape, la
souveraincté-dcs pays conquis sur les
hérétiques; il lança plusieurs fois les
foudres de l'Église contre le comte de
Toulouse, mit ses états en interdit , et
força ce nialhenrcux prince à demau-
AMA
rlei" pardon à l'Église , flans la posture
Ja plus humiliante ; il se conduisit
même avec tant de violence et d'injus-
tice, qu'il s'attira les reproches d'In-
nocent 111, et fut rentpiacë dans ses
tonctions de légat apostohrpie. Le pape
lui adressa , ainsi qu'à Simon de
Montfort , une lettre , dans laquelle
ils étaient accusés, l'un et l'autre,
d'avoir envahi les biens des héréti-
ques , et même ceux des catholi-
ques. Amalric fut néanmoins nom-
mé archevêque de Narbonnc ; mais ,
i>e inquiet et remuant, il ne pouvait
aimer le repos; il abandonna un dio-
cèse qui avait plus que joraais besoin
de la présence de son chef, et alla en
Espagne faire la guerre aux Maures.
Il a laissé une relation en latin de cette
expédition. Revenu de cette autre croi-
sade , il voulut faire érigei' le diocèse
de Narbonue en principauté ; et , ses
prétentions n'ayant pas été accueillies
par Simon de Montfort, il abandonna
ses intérêts, pour épouser ceux du
comte de Toulouse. En i2'24 . il
présidait le concile de Montpellier ,
assemblé pour écouter les jilaintos de
Raymond. Il mourut , l'année suivante,
et sou corps fut transporté à Cîtcaux ,
où les moines lui firent ériger un mau-
solée. M — D.
AMALRIC ( AuGERi ), historien ec-
clésiastique du i4''. siècle, dédia au
pape Urbain V, élu, en i562, une
Histoire des Papes , sous le litre de
Chronicon Pontificale , pour la-
quelle il se vantait d'avoir consulté
plus de 200 écrivains. Cette Histoire
A'a jusqu'au ])ape Jean XXIi. D — t.
AMALTHEE ( Paul), le prcnrier,
de ce nom et de celte famille , qui se
soit illustré dans la carrière des lettres,
naquit à Pordenone, dans le Frinul,
vers l'an 1460 ; il entra dans l'ordre
des frères mineurs , et fut professeur
de bcîlcs-leltrcs dans s.t patrie . puis à
A M A 9
BcUune, à Trente , et enfin à Vienne
eu Autriche , oii il fut couronné poète
par l'empereur Maximilien , honneur
qu'il raériia par ses poéMt-s latines ,
dunt quelques-unes ontété imprimées;
les autres sont restées manuscrites à
Venise, dans la bibliothèque de St.-
IMichel de Miuano. Paul Amalthée fut
assassiné à Vienne en i5i7,sans que'
l'on ait pu savoir comment , ni pour
quel motif. G — e.
AMALTHÉE ( Marc - Antoine )
frère du précédent, niquit ea i475 ,
et se fil aussi connaître par ses talents
poéùques , en Autriche et en Hongrie.
Il fut ensuite professeur dans plusieurs
villes du Frioul , et mourut à Porde-
none, en i558, âgé de 83 ans. Ou
conserve , en manuscrit , un volume
entier de ses poésies latines , à Ve-
nise, dans la même bibliothèque qui
possède celles de Paul. G — É.
AMALTHÉE ( François ) , frère
cadetdesdeux précédents , se distingua
comme eux par son talent ])oétique ,
et professa , comme eux , les belles-
lettres à Pordenone , à Odcrzo , à Sa-
cile. On trouve un petit poème latin,
de lui , dans le 2''. volume de la pre-
mière collection d'Opuscules de Calo-
gcrà. 11 écrivit aussi , en latin , des Ha-
rangues et quelques Dissertations his-
torico - hltéraires ; mais il se rendit ,
dans un autre genre , plus utile à la
société que ses deux frères : il se ma-
ria en I 5o5 , et c'est de ce mariage que
sortirent les trois Amaltliées qui ont
donné à ce nom le plus d'éclat. G — É.
AINIALTHÉE ( Jérôme ) , né en
1 5o6 , fils aîné de François , fut mé-
decin, phiiosoplic , et célèbre poète la-
tin. Il enseigna, plusieurs années, la
médecine et la philosophie morale
dans l'université de Padoue ; il revint
ensuite dans le Frioul , et professa
dans plusieurs villes jusqu'à sa mort,
arrivée le 24 octobre 1574. II laissa
it> A Î\I A
deux fils , Octave et Atlllius, dont il
sera parle plus bas , H uue fille, qui
épousa Jérôme Aléandre , le jeune
( Fo>'. Aléandre). Le savant IVIuret
reconnaissait Jérôme Araalthée pour
le premier poète , et le plus habile
nie'decin de l'Ifalie. Ses poésies paru-
rent d'abord , éparses dans plusieurs
recueils , et furent ensuite reunies
avec celles de ses deux frèfes, par
Jean Math. Toscan , dans ses Car-
viina illïistrium poëlarum Italonim,
Paris, i5;G. Ale'andre les fit reim-
primer, avec les siennes , à Venise , eu
1G27 îi"'^". Enfin , le savant Grt-evius
f n donna une édition à Amsterdam ,
chez Wcsteii, 1684, in-î^; elles y
reparurent , en 1718, in-8". , et fu-
rent insérées depuis , avec la préface
de Graevius, dans la belle édition des
Œuvres latines de Sannazar, Ams-
terdam , 17 '^8, in-8^., qui fait suite
aux éditions Variorum. C'est de Jé-
rôme Amalllte'c qu'est celte charmante
epigrarame , tant de fois traduite dans
toutes les langues, et que Muratori
trouvait si parfaite , qu'il ne pouvait
croire qu'elle ne fût pas une traduc-
tion du grec ( Délia perjelta Poésia ,
t. II, p. 4ii):
Luinine Acondextro, capta est I eoniUa sinistro:
Et polerat forma vincere uterque Deos.
Parve puer , lumen quod habes concède soFOri ,
Sic tu ca-cus Amor , sic erit illa Venus.
Le P. ^'iceron, Morcri, et plusieurs
autres auteurs français, ont parle de
Jérôme avec beaucoup d'éloges. Ou
peut voir aussi ce qu'ont dit de lui ,
et des autres Amalthecs , Mazzuchelli ,
et Lirati dans yes Notices des Ecri-
vains du Frioid. — Octave Amai,-
the'e , fils aîné de Jérôme , ne à
Oderzo, en 1 T) |5 , après avoir professe
la philosophie à Padoue, prit, comme
son père , l'état de médecin, et mourut
à Venise, âge de 83 ans. On a de lui
quelques ouvrages en prose et en vers,
imprimes dans le regueil d'Opuscules
AMA
scientifiques et philologiques de Calo-
gera. — Attilus , second fils de Jé-
rôme, né à Oderzo , en i55o , prit
l'état ecclésiastique. Grégoire XIII lui
confia des emplois distingués, et Clé-
ment VIII, plusieurs nonciatures im-
portantes; il fut fait archevêque d'A-
thènes, et mourut à Rome, en i655.
G-E.
AMALTHÉE ( Jean - Baptiste) ,
frère de Jérôme , naquit à Oderzo ,
en 1 5-25. Les bonnes études qu'il fit
à Padoue le mirent en état d'être ap-
pelé, dès l'âge de vingt ans, à Venise,
pour y instruire , dans les belles-let-
tres, les enfants de la noble et riche
famille Lippomano. Il continua d'étu-
dier , avec une égale ardeur , les trois
langues , grecque , latine et italienne ,
la philosophie, la théologie et la juris-
prudence. Etant passé en Angleterre,
en 1 554 , à la suite de l'ambassade \q-
nitienne , il fut secrétaire de la répu-
blique de Raguse , puis appelé à Ro-
me, et secrétaire du ])ape Pie IV; il
était , en iSG^ , à Milan , avec le fa-
meux cardinal Charles Bororaée ; il
mourut à Rome, en 1375, n'étant âgé
que de 48 ans. Ses poésies latines ne le
cèdent en élégance à celles d'aucun
autre poète de son temps ; elles furent
réimprimées, avec celles de ses frères ,
dans les éihtions de Paris et d'Amster-
dam, citées à l'article précédent, et de-
puis encore , à Bergame. en 1 753, par
le savant abbé Serassi , qui y a joint
un éloge historique de Jean -Baptiste
Amalthée. Quelques-unes de ses épi-
grammes latines ont été' traduites en
vers italiens , par J. B. Viciui , et pu-
bliées avec la traduction du Temple
de Guide de Montesquieu, du même
poi;tc , Londres ( Venise), 1761.
G— E.
AMALTHÉE (Corneti.t.e), fièie
piiiné de Jérôme et de Jean-Baptiste .
né à Oderzo, vers Tau i55o; fut me-
AMA
docin et poète. La iépu])!ique de Ra-
guse le pril pour secrétaire , après son
frère Jcau-Uaptiste. Il repassa en Ita-
lie, eu i56i , et fut appelé à Rome,
par Paul Mauuce, pour l'aider dans le
travail que lui avait confie Pie IV, et
qui consistait à rédiger, dans le latin
le plus pur, le Catéchisme romain,
pour la belle édition qui parut la pre-
mière année du pontificat s:tivant ,
Romce , in ÂLdibiis populi Romani^
apud Paulum Manutium , 1 560 , in-fol.
(iorueille Amaltliée mourut en iGo5;
ses poésies ont été imprimées avec
celles de ses deux frères, dans les re-
cueils cités ci -dessus. On y distingue
surtout sou poème intitulé: Urbis f e-
vetianinipulchritudo, dix'inaque ciis-
îodia, qui est le premier , et le second,
adressé à l'archiduc Jean d'Autriche,
commandant de la flotte chrétienne
combinée, intitulé Protens, où il pré-
dit poétiquement la victoire de Lépante,
ou plutôt de Curzoiari , comme l'ap-
pellent les auteui-5 italiens. Ce poème
fut d'abord imprimé seul, en i5'j-2,
à Venise, in-4 '. G — e.
AMAMA (SixTi-NUs"), théologien
protestant, du l'j''. siècle, né dans la
Frise occidentale , fut élevé à l'univer-
vsité de Fraueker , sous Drusius , et s'y
instruisit dans les langues orientales.
Vers l'an 16 1 5, il voyagea en Angle-
terre , vint à Oxford , résida quelque
temps dans le collège d'Exeter, et en-
seigna l'hébreu dans l'université; de
retour dans son pays natal, il fut
nommé professeur d'hébreu à l'uni-
versité, et y demeura jusqu'à sa mort.
11 rejeta l'offre que l'université de
Leydc lui fît , de la chaire qu'avait oc-
cupée Erpénius , un des plus savants
oricntahstes de ce siècle. Le premier
ouvrage d'Amama fut une critique
de la version du Pentateuque , dite la
T^ids!;ate : ou l'imprima, en iGao,
iu-4"., à Franeker, sous le titre de
AMA I r
Censura Fulgaiœ latinœ editionis
Penlaleiœhi. Il méditait un ouvrage
plus considérable , dans lequel il sn
proposait de censurer généralement la
Fulgate, déclarée authentique par le
concile de Trente; mais il interrompit
ce travail , pour conférer la version
hollandaise des écritures avec les ori-
ginaux et les meilleures traductions.
Le résultat de ses travaux fut mis sons
les yeux du public , dans un Uvrc écrit
en hollandais , et intitulé : Bybehcka
conferencic, Amsterdam, i6i5. In-
forrac que le savant père Mersonne avait
entrepris la défense de ia P^idgate,
et écrit une réfutation de la Critique
sur les six premiers chapitres de la
Genèse, il reprit son premier dessein,
en i6'27, publia une lettre au père
Mersenne,et, en \6-îS, un ouvrage,
sous le titre à' Anîibarbarns BibliciiSy
contenant une réplique plus étendue ,
et une critique de la version vulgate
des livres historiques de ï ylncien
Testament, de Job, des Psaumes,
des livres de Salomon, et quelques dis-
sertations détachées. Ce livre fut réim-
primé en 16 56, augmenté de la cri-
tique de la même version des prophé-
ties d'isaic et de Jérémie. i^ marna
écrivit aussi une dissertation, sous le
titre de : De nomine Teiragram-
matOy publiée in-8"., à Francker, en
1 620. Les travaux d'AniL^nia attirèrcJit
l'attention sur l'étude de la Bible; et,
depuis ce ttinps, plusieurs synodes
ordonnèrent qu'on ne serait point ad-
mis dans le clergé, sans avoir au
moins quelque connaissance de la Bi-
ble en hébreu, et du Nouveau Tes-
tament en grec. Lorsque Amama vint
à l'université de Franeker, l'ivrognerie
et la débauche y étaient des vices très-
communs. Lui-même déclare que tous
les nouveaux venus étaient enrôlés au
service de Bacchus, en grande céré-;
monie , et obligés de jurer . par une
■VI AMA
statue de bols de S. Etienne, qu'ils
dépenseraient tout leui* argent. Si
qiielqu'un des etudia;its avait plus
d'cgard au serment qu'il avait prête
au recteur de l'université', qu'à cetîe
initiation bachique, les .uitres le tour-
mentaient de telle sorte, qu'il et;;it
force de quitter l'université. Amama
contribua beaucoup h détruire ces
abus punissables , et les attaqua trcs-
cîiergiqueuient, dans ini discours pu-
])!ic, eu 1621. Les habitants de la
Frise avaient pour lui tant d'attache-
ment, qu'après sa mort, arrivée en
167.9, ils ^^ montrcrenl très-généreux
envers ses eufanis , ainsi que Nicolas
Amama, l'uu d'eux, le leconnaîtdans
l'épltre dédicatoire d'un ouvrage qu'il
publia, en ]6.")i, iu-8\,sous le litre
de Disserlationum marinarnm De-
cas. D — T.
AMAN , Amalécite, descendant du
roi Agag , qui régnait au temps de
Said. Devenu !e favori d'Assuérus, roi
de Perse , i' fut élevé par ce prince au-
dessus de tous les grands de sa cour , et
il était ordouncàtous ceux qui se pré-
sentaient sur son passage de fléchir le
genou devant lui , chaque fois qu'il, en-
trerait au palais, ou qu'il en sortirait.
Le juif Marduchée fut le seul à s'y re-
luscr. Aman , qui avait hérité de l'an-
cienne haine de ga nation contre la
postérité de ceux qui l'avaient chassée
de la Palestine , conçut des lors le
projet d'assouvir sa vengeance contie
Mardochée, par la ruine de tout le
])euple juif répandu dans la vaste éten-
tiue de l'empire d'Assuérus. Il repré-
senta ee peuple, au monanjue, comme
étaut extrêmement dangereux pour
l'état , par sa prodigieuse jnulliplica-
tion , par son opiniâtreté à vouh^ir se
gouverner selon ses lois parlic.uhères,
par sa persévérance à pratiquer nnc,
religion exclusive, difTetcntc de celle
Acs aiatrcs suiets ; et , pour trancher
A M .\
la difficulté qui pouvait nrîire du vide
qi'.e la perte de tant d'hommes indus-
tiieux opérerait dans le trésor public ^
il offi-it de le combler, par la somme
immense de 10,000 talents d'argent
de son propre bien. Aman ojjlint donc
un édit adressé aux gouverneurs des
provinces , pour faire exterminer fous
les juifs à un joiu' marqué. Cet e'dit ,
publiquement affiché dans la ville de
Suze , capitale de l'empire , jeta la
consternaliott parmi tous les individus
de cette nation qui s'y trouvaient eu
grand nombre. La reine E.sthcr réus-
sit à le faire révoquer. Le nom de Mar-
dochée , rappelant à Assuérus le ser-
vice signalé qu'il en avait reçu jiar la
découverte d'un complot forme dan.s
sa cour : « Quedoil-cn faire , dit-il à
» Aman , pour honorer un homme
» que le roi désire combler d'hon -
wneurs? » Aman, convaincu qu'il
ciait l'objet de cette question , n'hésite
pas à répondre qu'il faut que cet hom-
me, rcvciu de la panpre royale, la
tête ceinte du diadème, monté sur un
cheval du roi , soit promené eu Iriora--
plie dans toute la ville , précédé du
premier des grands de la cour, qui,,
tenant les rênes de son cheval , crie
dans les rues et sur les places pu-
bliques : « Voilà les honneurs qui
» sont dus à celui qne le roi prend
u ])laisir à honorer. » Eh bien , rc--
prit Assuérus , tous ces honneurs .sont
pour Mardochée, hâte?.- vous de l'en
faire jouir. Aman, confus , humihc, fe.t
oblige d'aller prendre Mardochée à la
porte eu palais, et de présider lui-
même à la pompe triomphale dont
il s'était d'abord cru le héros. Cette
première disgrâce ne fut que le pré-
lude de la terrible catastrophe qui de-
vait consoaTimer .sa chute. Aiuan ,
prosterne aux pieds d'Esther , incliiu;
sur sou sopha pour lui demander
grâce, est surpris dans celte allitudsf
A MA
plr Assiienis , qui croit qu'il voulait
attenter à l'honneur delà reine. L'or-
dre est aussitôt donne, et prompte-
ment exécute , de le pendre à une po-
tence de cinquante coudées , que l'or-
gueilleux favori avait fait dresser dans
la cour de son palais , pour le supplice
de Mardochée ; ses biens furent con-
fisqués au profit de la reine , et la
mort de ses dix enfants suivit de près
la sienne. La mémoire de ce grand
événement, arrivé l'an ^^3 av. J— ('.,
fut consacrée par l'institution d'une
fête annuelle, qui se célèbre encore
aujourd'hui chez les juifs. Elle dure
trois jours, commence par un jeûne
rigoureux, et se termine par une or-
gie , qui l'a fait confondre avec les
liacchauales des païens. On s'y livre
surtout aux excès de la boisson , parce
qu'on suppose qu'Esther , pour se
rendve Assuérus favorable , avait cher-
ché à l'égayer, en le faisant buire au-
delà de sa mesure ordinaire. Pendant
cette fête, on lit le livre d'Esther dans
les svnagogues , et , chaque fois que le
nom d'Aman revient dans cette iecUne,
on bat des mains et des pieds , les en-
fanls frappent sur les bancs avec des
maillets, et, au milieu de tout ce
bruit, la voûte des svnagogues re-
tentit des dis de raalédiciiou contre
Aman. T — d.
AMAND( S. ),cvêquede Bordeaux,
sa patrie , succéda dans ce siégea
S. Delphin, en 4oj ou 4o5 au plus
tai'd. 11 gouverna cette église avec tant
de zèle et tant de vigilance , qu'il fut
regardé comme un des plus saints pré-
lats de son temps. S. Arnaud eut l'a-
vantage de convertir S. Paulin , depuis
évèque de JNole , et de l'instruire des
vérités de la foi. On ignore l'époque de
sa mort, et le nom de son successeur;
car l'histoire de sa démission en faveur
de S. Severin de Cologne . quoique
.rapportée par Grégoire de Tours, est
AMA t.5
un conte apocryphe, réfuté par les
meilleurs critiques modernes. De tous
ses écrits , qui avaient mérité les é!oges
de S. Paulin , il ne nous reste que le
précis d'une de ses lettres , dans une
de celles de S. Jérôme, à qui elle était
adressée. C'est sans fondement qu'où
lui attribue la co-iscrvation des ouvra-
ges de S. Paulin, qu'il précéda vrai-
semblablement dans# tombeau. ( F.
ÏHist. littér. de la France , tom. H,
p-ig-'?:-) T— 1>.
AMAND( S. ), né dans le pays
nantais, embrassa la vie religieuse
dans un monastère de la petite île
d'Oye, près de celle de Rhc. Sou zèle
pour lu conversion des païens le
conduisit dans la Belgique , oîi soa
apostolat eut les plus heureux succès.
Pour mieux assurer ses conquéies spi-
rituelles , il y fonda plusieurs monas-
tères devenus célèbres ; à Gand, celui
de Blandinberg , depuis l'abbaye de
St. -Pierre , et celui de St.-liavon ,
érigé en cathédrale , au milieu du
16'. siècle; aux environs de ïournay,
celui d'Elnon , sur la rivière de ce
nom , plus connu sous celui d'Abbaye
de St.-Amand. Élu , malgré lui, évêque
deTongres, eu G'iS , il se démit, au
bout de trois ans , de cet évêché , en
faveur de S. l'emacle , pour reprendre
ses travaux apostoliques, jusqu'à ce
que , accablé de travaux et de fatiguas ,
il se retira dans son monastère d'El-
non , qu'il gouverna encore pendant
4 ans, en qualité d'abbé, et mourut
en (j-jg. Sa Vie , écrite par Baude-
mont , se trouve dans les BoUandis-
tes. T-D.
AMAND ( Pierre ) , chirurgien de
la communauté de St.-Côme, naquit k
Riez en Provence , dans le 17". siècle,
et mourut à Paris en 1720. Il se livra
surtout à la pratique des accouche-
ments, et publia des Observations sur
cette branche de l'art, Paris, 1713 ,
î4 AMA
1 7 i5 , in-8''. Il imagina une sorte de
filet propre à tirer la tête de l'enfant,
dans le cas d'enclavement ; mais une
pratique plus h(;ureuse y a substitué le
forceps. C. et A — n.
AMANDUS ( iEiviEus Salvius ) ,
ge'nëral romain , vers l'an 'i85 , com-
mandait dans les Gaules, sous Dioclé-
lien , avec Aule'us Pomponius ^Elianus ;
tous deux , n'aylfct pour adhe'rents que
des paysans et des bandits , eurent l'au-
dace de se faire proclamer empereurs.
On prétend que ce fut leur révolte, et
les troubles qui la suivirent , qui dé-
terminèrent Dioclélien à se donner
pour collègue Ma^iiraicn, depuis long-
temps son ami. Ce nouvel empereur,
qui joignait , à de grands vices , beau-
coup de bravoure et d'activité , se ren-
dit aussitôt dans les Gaules , et , l'as-
serablantles troupes qui s'y trouvaient,
il attaqua sur-le-cliamp les ennemis.
Ces paysans s'appelaient Bacaudes ou
Hagaiides , du nom d'un château situé
aune lieue de Paris, qu'on a depuis
appelé St.-Maur-des-Fossés. Les Ba
gaudes , après avoir été battus en rase
campagne , se réfugièrent dans le châ-
teau , et s'y défendirent long-temps
contre Maximien, llparvint cependant
à s'en rendre maître , et le fit démolir.
Amandus périt dans cette guerre ; mais
les historiens ne donnent aucun détail
sur sa mort. Ils ne disent point non
plus ce que devint ^liauus. D — t.
AMANIEU-DES-ESC\S , trouba-
dour du 1 5^ siècle, qui vécut h la cour
de Jacques II , roi d'Aragon : l'abbé
Millot pense qu'il était de la famille
d'un Giraud d'Amanieu , chevalier
ç;ascon , (\y\y , en 1 3 1 7 , vint au secours
du comte de Toulouse, contre Simon
de Montfort; quoi qu'il en soit , ses ou-
vrages annoncent qu'il tenait un rang
distingué, et qu'il était très-attaché à la
maison d'Aragon. Les quatre pièces
qui nous restent de ce troiibadoiu'
AMA
prouvent qu'il étaitprolixe, et nefalsait
pas grâce des plus petits détails; l'une
de ces pièces est une espèce d'Epître
à sa maîtresse ; elle porte la date de
i'278, et paraît d'autant plus longue,
qu'elle ne contient guère que des lieux
communs. Une autre pièce ou vers
( c'est-à-dire Poème) , dans laquelle
Amanieu peint les tourments de l'ab-
sence , mérite d'être remarquée , parce
qu'il y cite un grand nombre de j)ro-
verbes , dont la plupart s'emploient
encore dans la conversation familière;
une troisième pièce contient dos ins-
tructions pour un jeune damoiseau,
nom que l'on donnait aux enfants des
seigneurs et des chevaliers : il v a peu
de conseils solides dans cette instruc-
tion , mais l'on y trouve des détails
précieux sur les miaeurs du temps , et
quelques aperçus qui ont de la finesse ;
ces détails sur les usages , les vête-
ments , les manières, se lisent en plus
grand nombre encore dans les leçons
qu'il donne à une demoiselle de qua-
lité, qui était au service d'une grande
dame; et, quoique ces conseils ne puis-
sent convenir aujourd'hui qu'à une
femme de chambre, on est bien aise de
voir, qu'à quelques nuances près , les
usages sont toujours les mêmes. Ces
quatre petits Poèmes annoncent un
homme qui a l'habitude du monde, et
le défaut trop ordinaire aux poètes ,
celui de ne pas savoir se borner.
P— X.
AMANT. VoY. Saint-Amanï.
AMARA-SINGHA, savantllindou ,
conseiller du célèbre radjah Vikra-
maditeva, et quitlorissait conséquem-
ment dans le i*^"^. siècle avant J.-C. Il
est auteur du Dictioiniaire samskrit
le plus exact, et sur tout le plus com-
plet que l'on connaisse. Ce Diction-
naire , iutitulé : Amara Kôcha ( Tré-
sor d'Amara ) , est divisé en sections,
et non par ordre alphabétique. On y
AMA
trouve successivement les noms des
dieux , des astres , des éléments , des
objets impalpables , des sciences , des
couleurs , de la terre , du monde , des
montagnes, des fleuves, des arbres ,
des plantes , des animaux , des hom-
mes , des tribus indiennes, des sacri-
fices , de l'agricultiu-e , etc. , etc. La
dernière section, mûtuïce: IVandrlha-
j^arga , contient les mots qui ont
plusieurs significations. Les adverbes
et les mots indéclinables forment la
section inhlulée : ^i>ia- Farga. Ce cé-
lèbre Dictionnaire est écrit en vers :
il en existe des traductions ou expli-
cations en différentes langues indien-
nes , telles que le taraoul , le mala-
bar, etc. Dans le raidi de l'Inde, il y
a une glose de ce Dictionnaire, con-
nue sous le nom de Tamouch-Koutta.
Le P. Paulin de St.-Barthélemy en
publia, à Rome, en 1798, la i"^*.
partie , eu caractère tamoul , sous ce
titre : Amara-Singha , sectio prima,
de cœlo , ex tribus ineditis codicibus
manuscriptis , Romae , apud Fulgo-
nium, in-4". Quoique ce volume ne
soit pas très-considérable , ce n'est pas
un des ouvrages les moins impor-
tants du P. Paulin. Nous possédons ,
à la Bibliothèque impériale, un exem-
plaire du Dictionnaire d'Amara-Sin-
gha^ sous les n°'. 53, 58, 09 du
Catalogue des Maruiscrits sams-
hrits. L— s.
AMARAL (André), Portugais, chan-
celier de l'ordre de St.-Jean de Jéru-
salem, était plein de courage, et habile
dans la marine , mais envieux et fier.
Chargé, en i5io, avec le comman-
deur ViHiers de l'Isle-Adam , d'une
expédition contre la flotte du Soudan
d'Egypte, il mit en mer avec les ga-
lères de la Religion , et eut , avec son
collègue, de violents démêlés , qui au-
raient fait échouer l'entreprise , si
VillJers del'Isle-Adacï; plus modéré,
A -yi A 1 5
n'eèt cédé à l'avis d'Amaral , qui fut,
au reste , couronné d'une victoire
complète. A la mort de Fabrice (ia-
rette , grand-maître de l'ordi'e, Araa-
ral demanda, avec hauteur, cette di-
gnité ; mais sa présomption, et le
mépris qu'il faisait de ses rivaux lui
attirèrent un refus unanime , et les
suffrages se réuniicnt eu faveur de
Villiers de l'Isle-Adam. Amaral en
fut outre , et, dans sa colère, il lui
érhappa de dire que l'Isle-Adam se-
rait le dernier grand-maître qui ré-
gnerait à Rhodes. On prétend qu'avant
gagné un esclave turk, il l'envoya à
Constantinople, pour exhorter Soli-
man à former le siège de Rhodes.
Cette place , dont les Turks ambi-
tionnaient, depuis long -temps , la
possession , ne tarda pas à être inves-
tie par les forces de terre et de mer.
On croit que Soliman , fatigué de la
résistance courageuse des chevahers
de Rhodes , aurait levé le siège , si
Amaral ne lui avait fait connaître, par
des avis secrets , les endroits les plus
faibles de la place , et ne l'eût informé
que les assiégés manquaient de vivres
et de munitions. De violents soup-
çons s'étant élevés contre Amaral .
il fut arrêté , par ordie du grand-
maître , et apphqué à la question , sur
la déposition de son propre domes-
tique. Il soutint la torture, et s'obstina
à ne rien avouer ; ce qui ne put le sous-
traire à la mort. Condamné a avoir
la tète tranchée , il vit les apprêts de
son supplice avec calme , et mourut
le 5 novembre i522. « Les services
w qu' Amaral avait rendus à la reli-
» gion , dit Vertot , sa fermeté au
» milieu des plus cruels tourments dp
» la question , tout cela aurait pu ba-
» lancer la déposition d'un domes-
» tique ; et peut-être qu'on n'aurait
» pas traiti si rigoui'eusement le
» chancelier de l'ordre , si , quand à
i6 AMA
» s'agit du salut public , le seul soup-
» çoii u'e'tait pas, pour ainsi dire , un
« crime que la politique ne pardonne
» guère. » K — P-
AMARITON (Jean \ jurisconsulte
du î()''. siècl'*, natif de Nenelte, en
Auvergne, fut d'abord collègue de
Cuias , dans l'université de Toulouse ,
d'où il vint à Paris exercer la pro-
fession d'avocat , s'y fit un nom dans
la consultation, fut mis en prison par
les ligueins, et v mourut, en iSgo.
Ses Commentaires sur les Epitres de
Cicéron et d'Horace, parurent à
Paris, en 1 555, et ses Notes sur le
"ùff. livre d'Ulpien, à Toulouse , en
1554. Ses autres manuscrits furent
perdus dans le pillage de sa maison, il
descendait d'un Pierre Amariton, chan-
celier de Jean , duc de Berri et d'Au-
vergne , et frère de Charles V. N — l.
AMASA, neveu de David (^.Joab\
AMASEO ( RoMOLO ), fils de Gré-
goire Amaseo , professeur de langue
latine à Venise , fut un des plus cé-
lèbres littérateurs italiens du 16". siè-
cle. Né à Udine en 1 489 , son père et
son oncle furent ses premiers maîtres :
il finit ensuite ses études à Padoue ,
et y enseigna lui-même les belles-let-
tres, en i5o8; mais la guerre occa-
sionnée par la ligue de Cambrai le
força d'en sortir l'année suivante. Il se
retira à Bologne, continua de pro-
fesser , s'y maria , eut plusieurs eu-
fants , et obtint que cette ville lui
rendît les droits de cité que ses an-
cèties y avaient eus autrefois. Il fut
même nommé premier secrétaire du
sénat, en i53o, honneur qui n'avait
jamais été accordé à pctsonne dont
le père et le grand-père n'eussent pas
été citoyens de Bologne. 11 avait été
choisi par le pape Clément \ 11 pour
prononcer, devant lui et devant l'em-
pereur Charles-Quiul , une h .l'angue
latine au sujet de la pais, conclue àBo-
AMA
logne entre ces deux souverains ; ef
il s'était acquitté de ce devoir, avec
un applaudissement universel , le pre-
mier jour de janvier de cette même
année, dans l'église de St.-Pétrone, an
milieu d'une assemblée nombreuse de
prélats et d'ambassadeurs. 11 continua
de professer à Bologne , avec un grand
concours d'auditeurs, jusqu'en i545,
et fut alors appelé à Rome par Paul 111
et par son neveu , le cardinal Alexan-
dre Farnèse. Il fut emplové par le
pape dans plusieurs missions politi-
ques, auprès de l'empereur, de quel-
(pies princes d'Allemagne et du roi
de Pologne; enfin, en i55o, après
la mort de sa femme, Jules 111 lui
conféra la charge de secrétaire des
brefs. 11 mourut deux ans après. On
a de lui : I. deux Traductions latines
d'auteurs grecs; l'une des sept Livres
de l'expédition de Cj'rus , par Xé-
nophou, Bologne, i533 , in-fol. ;
l'autre de la Description de la Grèce ,
par Pausanias , Rome , 1 547 ' i"'4 '• »
I f . un volume de harangues , ou de 1 8
discours latins prononcés en diflè-
rentes occasions , sous le titre de
Orationes , Bononia; , i58o, in-4"-
Les auteurs contemporains ont fait les
plus grands éloges de son éloquence et
de son savoir. — Son fils , Pompilio ,
eut une carrière moins brillante que
lui ; mais se livra aux mêmes études ,
et enseigna aussi les lettres grecqties à
Bologne, oii il mourut , vers la fin de
i584. 1! traduisit deux fragments de
Polybe, imprimés à Bologne, en i545.
II avait écrit aussi en latin l'histoire
des poètes de son temps , qui n'a pas
été imprimée. G — é.
AMASIAS, 8^ roi de Juda , étr.it
âgé de 25 ans , lorsque son père Joas
lui laissa le trône, l'an 85() av. J.-C.
Son premier soin , après avoir affer-
mi sa puissance , Ait de venger la mort
de Joas par la supplice d« ses mcur-
AMA
Iriers. Les commencements de son
règne furent heureux. Il avait pris
1 00,000 hommes du royaume d'Israël
à sa solde, pour faire la guerre aux Idu-
me'ens ; mais , Dieu ayant désapprouve'
cette guerre , il les congédia aussitôt ,
et celte obéissance fut suivie d'une vic-
toire complète. Amasias eut la faiblesse
d'adorer les idoles des peuples vain-
cus, et la cruauté de menacer de la
mort le prophète chargé de lui faire
des remontrances sur sou idolâtrie.
Enorgueilli de sa victoire, il envoya
défier le roi d'Israël, qui ne lui répon-
dit que par l'apologue du cèdre du
Liban dont un vil chardon veut épou-
ser la fille. Amasias, piqué de cette
réponse, lui déclare la guerre, perd
la bataille, est fait prisonnier, et ne
rentre dans ses états, après une lon-
gue captivité, que pour y être poi-
gnardé dans une conspiration de ses
sujets. Il avait régné 2g ans. Son fils
Azarias lui succéda. T- — d.
AMASIAS , prêtre de Bethel ( p'oy.
Amos ).
AMASIS, roid'ÉgvptP, était d'une
basse naissance , et parvint à captiver
la confiance du roi Apriès. Dans une
sédition contre ce prince , Araasis fut
proclamé roi, et l'Egypte devint en
proie à une guerre civile que teimina
la défaite d'Apriès. Amasis monta sur
le trône , 069 ans avant J-C, et
fît périr son maître. Il gouverna le
pays avec prudence et activité, se
prescrivant pour règle de donner le
matin à ses devoirs, le soir aux plai-
sirs de la société. Sous son règne ,
l'Egypte jouit , pendant plusieurs an-
uées , d'une fertilité non interrompue,
cl acquit une population prodigieuse.
Pour prévenir les délits que peut com-
mettre une populace oisive , il fit une
loi, enjoignant, sous peine de mort, à
chacun, de paraîtie une fois par an
devant le gouyerneur de la province ,
II.
AMA 17
et de déclarer ses moyens de subsis-
tance. Il montra un esprit éclairé dans
les permissions qu'il accorda aux étran-
gers , et surtout aux Grecs , pour vi-
siter son pays ; il leur donna des éta-
blissements sur la côte , et leur permit
de bâtir des temples , oii ils pouvaient
célébrer toutes leurs cérémonies reli-
gieuses. Solon fut un de ceux qui se
rendirent en Egypte sous le règne
d' Araasis. Ce prince épousa une femme
grecque, et contiibua libéralement aux
fondations et aux institutions de plu-
sieurs villes grecques. Il construisit,
dans son pays, plusieurs ouvrages
magnifiques, dans le goût gigantesque
qu'on y préférait alors à tout autre.
11 soumit l'île de Chypre, et la rendit
tributaire. Mais la prospérité de son
règne fut troublée par les préparatifs
de Cambyse pour attaquer l'Egypte.
Ce prince fut aidé par la défection
de Phanès, capitaine des auxiliaires
Grecs au service d' Amasis. Polycrate,
tyran de Samos , qui avait été lié avec
Amasis , devint aussi son ennemi. Le
roi d'Egypte n'échappa qu'avec peine
au danger qui menaçait son royaume ,
et mourut , après un règne de 44 ^^s ,
l'an 5^5 av. J.-C. Les malheurs qui
accablèrent son fils , Psammeticus ,
tombèrent aussi ,en quelque façon, sur
lui , car son corps, arraché de sa tom-
be , fut mis en pièces et brûlé. D — t-
AMASTRIS, fille d'Oxathre, frère
de Darius-Codoman, avait été élevée
avec Statira, fille de ce prince, qui
l'aimait beaucoup. Lorsqu' Alexandre
épousa Statira , il donna Amastris en
mariage à Cratérus. Après la mort d'A-
lexandre , se voyant négligée par son
époux, elle le quitta, d'accord avec
lui, et se maria avec Denys, tyiau
d'Héraclée , dont elle eut deux fils et
une fille. Il la laissa , en mourant , tu-
trice de ses enfants, et elle se remaria
à Lysiujaquc , roi de Tlirace; mais, ce
i8 A M A
prince ayant cpousé Arsiiuoc, elle ne
voulut plus rester avec lui , et retourna
dans ses états , où elle fonda une ville
à qui elle donna son nom. Ses fils ,
étant devenus grands , la firent périr
eu faisant couler à fond un vaisseau
sur lequel elle s'était embarquée ; Ly-
simaqne, qui avait eu d'elle uu fils
nommé Alexandre , veu^jjea sa mort.
On a d'elle quelques médailles. C — R.
AMATIUS, Romain d'une origine
chscm-e. Se disant petir-fils de Marins,
et proche parent de Jules César, il
voulut se faire reconnaître par Octave.
Après le meurtre du dictateur , il re-
parut à Rome , et prétendit avoir le
droit de venger sa mort. Des gens de
la lie du peuple, qu'attiraient les noms
de Marins et de César , et encore plus
le désir du pillage , commirent , sous
sa conduite, les plus grands désor-
dres ; mais Antoine , qui désirait se
concilier le sénat , fit arrêter Amatiiis,
«t ordonna tpi'on l'étranglât dans sa
prison : ce qui fut exécuté sans autre
formalité. D — t.
AMATO , ou plutôt AMATUS , re-
ligieux du mont Cassin , et ensuite
cvêque , vivait au 1 1*^^. siècle. Jl com-
posa diverses poésies latines , et , entre
autres, quatre livres qu'd dédia au
pape , Grégoire VII , et qui avaient
pour litre : De gestis apostolorum
Pétri et Pauli. Ces ouvrages sont
pei'dus , et ce serait un malheur , si
Ton en croyait Pierre Diacre, qui ap-
pelle Amatus un versificateur admi-
rable ( ch. XX ). Le chanoine Mari ,
dans ses notes sur ce même endroit
de Pierre Diacre, parle d'un manus-
crit conservé à la bibliothèque du mont
Cassin , et qui contient une Histoire
des Normands, eu huit livres, com-
posée par Amatus, Tiraboscbi regrette
(t. 111, p. 268 ) que cet euvrage n'ait
pas vu le jour. G — e.
AMATO (Vi>'Ge.\t), genliihomme
A M A
de Cantazaro, ville du royaume de
Naples, publia, en 1670, des Mé-
moires ]:istoriqiies de sa patrie, qu'il
appelle i Illustrissima , famosissima,
e fedelissima cilla di Cantazaro.
— Un antre Vincent Amato, Sicilien,
né en lOiQ, fut uu savant composi-
teur de musique, et a laissé: I. Sacri
Concerti, à 2, 5, 4 *'t 5 voix, avec
une Messe à 5 et 4, Palerrae, i65<5 ;
II. Mess a e Salmi di vespro e com-
pietd , k l^ Qi ^ voix , ibid. , i65H ;
III. Vlsauro , opéra di Vicenzio
d'u4mato, Aquila, 1664. G — e.
AMATUS LusiTANus ( Jean - Ro-
drigue Amato , plus connu sous le
nom d'), médecin portugais , juif d'o-
rigine , naqiii: , eu 1 5 1 1 , à Castel-
Bianco , étudia la médecine à Sala-
manque, voyagea en France , dans les
Pays-Bas, en Allemagne, en Italie, et
professa la médecine avec succès dans
les villes de Ferrare et d'Ancône. Son
att.irhement au judaïsme l'ayant rendu
suspect au clergé catholique , il n'é-
ch,i[q'.'. aux poursuites de l'inquisition
qu'en se réfugiant à Pésaro , en 1 55 j ,
de là, à Uaguse, et enfin à Thessaloni-
que. A compter de i5Gi, il n'e>t pins
iait mention de cet auteur, et l'on ignore
l'année et le lieu de sa mort. C'était nu
érudit , d'un esprit pénétrant et solide.
On a de lui : X.Exegemata inpriores
duos Dioscoridis de malerid ine-
dicd libros , Antverpiae, i55<), in-
4'. Il reproduisit cet ouvrage avec des
augmentations et changements consi-
dérables , sous le titre de : Enarra-
tiones in Dioscoridem , Venise ,
i553, in-8''. ; réimpr. à Strasbourg
en i554, et à Lyon en 1557. Le
savant Constantin ajouta des notes à
cette dernière édition. Plusieurs points
de l'histoire de la matière médicale
exotique sont assez bien éclaircis par
Amatus. On y trouve un petit nombre
de piaules décrites pour la première
AMA
fois; mais, d'un autre côte, l'auteur a
commis beaucoup d'erreurs ; et IMa-
îhiolc , qu'il avait attaqué indiscrète-
ment , releva ses méprises avec ai-
greur , dans YJpologia adversits
^ m alu :n, Y enise, 1.557 ,in-fol.Ma-
tliiolealla jusqu'à signaler son adver-
saire comme un apostat, qui n'était
chrétien qu'en apparence. Ces repro-
ches pouvaient avoir des suites fâ-
cheuses pour Ainatus ; et il est proba-
ble qu'ils le déterminèrent à se retirer
à Tliessaionique , où il justifia les in-
culpations de Mathiole, en y profes-
sant ouvertement le judaisme. Amatus
se proposait de publier une édition
complète de Dioscoride , avec des
notes daus lesquelles il aurait répondu
à Mathiole ; ce projet n'a pas été exé-
cuté , e! l'on doit en avoir peu de re-
grets ; II. Curationum medicinaliuia
centuriœ seplem , quitus prœmitli-
tur commenlalio de introitu medici
ad œgrotantem , deqiie crisi et die-
hus criticis. Ces Centuries furent pu-
bliées d'abord séparément , et en des
temps différents; la i''*. , à Florence,
i55f, in-foL; la '2*., à Venise, j555,
in- 13; les autres, successivement ;'i
Ancone , lîome , Raguse , Thessaloni-
que , etc. L'auteur , dans cet ouvrage,
fait preuve d'une connaissance pro-
fonde de Galien , d'Hippocrate et des
Aral)es , a répanda de bonnes obser-
vations sur ([uelques maladies rares ,
et des remarques physiologiques et
chirurgicales , dignes d'clre citées ; ce-
pendant i\ demande à être lu avec
doute et circonspection ; car il est for-
tement soupçonné d'avoir souvent
controuvé les faits. Ces Centuries oui
ensuite été réunies , et il v en a plu-
sieurs éditions, Lyon , 1 58o , in- 1 2 ;
Paris , U» I 5 , ïG'io, in- 4^ ; Franc-
fort, 164G, in-fol., eîc. L'auteur de-
vait en ajouter encore trois autres ; ou
i!8 s;iit pourquoi il n'a pas excculéce
A ?.î A tt)
projet. Amatus avait enti-epris des
Commentaires sur Aviceunc^ mais il
perdit son manuscrit dans sa faite
précipitée d'Ancône , où !e persécutait
le pape Pani IV. Don Antonio, dans
sa Bibliothèque Espagnole , dit qu'A-
matus avait traduit , en espagnol ,
Y Histoire dJEulrope ; mais il paraît
que cet ouvrage n'a pas été imprimé.
Astruc a fait , sur la vie de ce méde-
cin, des recherches, dont il a publié
le résultat dans son Traité De Morhis
Fenereis. C. et A — >'.
A'^IAURI, dit DE Chartres, natif
de Bène , dans le pavs Chartrain , vers
la fin du 12*. siècle, après s'être fait
une réputation à Paris, dans l'ensei-
gnement de la logique et des arts li-
béraux, entreprit de professer la théo-
lojiie, et d'expliquer i'Ecriture-Sainte,
suivant une nouvelle méthode. Les
livres d'Aristote , apportés depuis pea
de Conslantiuople , lui donnèrent du
goût pour les opinions singulières. Il
imagina un système de religion , qui
n'aurait été que ridicule daus un siècle
éclairé ; mais qui , alors , fat regardé
comme dangereux. On ne l'attaqua
crp.-^ndant juridiquement, pendant sa
vie , que sur une proposition , dans
laquelle il disait : « Que tout fidèle ,
pour être sauvé , doit croire ferme-
ment qu'il est membre du corps de
J -C. » Cette proposition équivoque ex-
cita de grandes rumeurs, jiarce qu'on
la regarda comme une suite du pan-
théisme , auquel on croyait (\\\c se ré-
duisait toute la doctrine d'Amauri. Il
reconnaissait, à la vérité, un être su-
prême, nécessaire, infini; mais il ne
le distinguait pas de la matière. Il ad-
mettait trois personnes en Dieu , qui
partageaient successivement entre elles
l'erapij-c du i!iondc. Le règne du Père
avait auré tout le temps de la loi mo-
saïque : celui du Fds subsistait depuis
le commencement de la loi évangéîi-
3..
2<> A M A
que , et devait expirer à la fin du 1 2^
siècle , pour laisser le goiiverncnieiit
de l'iinivers au St.-Esprit , jusqu'à la
consommation des siècles. Sous cette
dernière économie, tout culte exté-
rieur devait être aboli. 11 n'y aurait
plus eu de sacrements ; la charité
seule, ou la grâce , répandue dans les
âmes, serait devenue le seul moyeu
nécessaire de salut. La conduite des
disciples d'Araauri était aussi déréglée
que leur doctrine était absurde. Sous
le voile de h charité , tous les crimes
étaient justifiés , toutes les passions
satisfaites , tous les scrupules dissipés.
La plupart de ces erreurs , et de plu-
sieurs autres qu'on leur attribue , n'a-
vaient pas été soutenues par Amauri;
mais elles paraissaient être un déve-
loppement de son système , que les
disciples avaient poussé plus loin que
leur m;ûire. Le quatrième concile de
Latran jugea , par la suite , que cette
doctrine était phitot insensée qu'héré-
tique; mais la chose fut traitée plus
séneuscraent dans le temps où ces ex-
travr.gants débitaient leiu-s paradoxes.
Amaiiri fat d'abord c )ndarané , en
i2o4, par les docteurs de Paris , et
leur censure fut confirmée par Inno-
cent III , au tribunal duquel il en avait
appelé. Obligé de se rétracter , sans
changer pour cela de sentiment, il
alla se confiner à S. Martin - dcs-
Chumps, où il mourut de dépit et de
chagrin. Ses disciples comparurent,
en I2I0, devant un concile de Paris;
on épargna les moins coupables, quel-
ques-uns f'.uent enfermés. Les chefs ,
livrés au bras séculier , périrent dans
les flammes. On enveloppa les livres
d'Aristote dans la même proscription.
La mémoire d' Amauri fut également
condamnée, et ses ossements, arrachés
tle leur sépulture, pour être je|(BS à la
\uirie. T — d.
AÎ\LVliRY I". , roi de Jérusalem ,
AMA
succéda à son frère Baudouin III , et fut
couronné dans l'église du St.-Sépulcre,
le 18 février de f année 1 165 , à l'âge
de '27 ans. Doué d'un génie actif et en-
treprenant , il avait des vues grandes
et souvent gigantesques , pour le chef
d'un petit état. Vain et fier, il tenait
pour le moins autant à l'argent qu'à la
gloire, et croyait qu'en politique, tous
les movens sont bons pour arriver à
son but. Dès les premiers jours de son
règne , il eut une guerre à soutenir
contre le khalyfe d'Egypte , qui s'était
engagé à payer un tribut aux rois
de Jérusalem , et qui , pour s'en déli-
vrer, envova une armée contre la Pa-
lestine. Les hostilités étaient déjà com-
mencées , lorsque des troubles s'éle-
vèrent en Eg\i)te, et foicèrent le kha-
lyfe à rapi)e!cr ses troupes, à demander
la paix, et même à solliciter l'alliance
d'Amaury contre Nour-Eddyn , sul -
thân d'Alep , qui avait envoyé un de
ses lieutenants sur les bords du Nil ,
pour appuyer le parti des mécontents ,
et profiter des dissensions , afin d'a-
grandir ses états.Araaurv, s'étant rendu
aux désirs du khalyfe. qui lui accorda
des subsides considérables , entra avec
une armée en Egvpte, où il battit plu-
sieurs fois les troupes du sulthan : il
revint ensuite dans son royaume ,
chargé de présents , et comblé de ri-
chesses et de gloire ; mais comme, dans
cette expédition , il avait vu la prospé-
rité de fEgypte, la fertihté de sou sol,
sa nombreuse population, et la fai-
blesse de son gouvernement , il forma
le projet d'en faire la conquête , et
n'eut pas de peine à v faire entrer le
grand-maître des chevaliers de St.-
Jean , à qui il promit de céder la ville
de Bilbéis , lorsqu'elle serait tombée
au pouvoir des chrétiens. 11 trouva
aussi le moyen d'associer à son en-
treprise l'empereur de Conslantinople,
dout il avait épousé la nièce , après
AMA
avoir répudie Agnès de Conrtenai. Il
s'occupa pendaut plusieurs mois des
préparatifs de cette guerre, et rompit
tout à coupla pais, en assiégeant Bii-
héis , qui ue tarda pas à se rendre , et
fut remise à l'ordre de St. -Jean de Jé-
rusalem. Anvturv marcha ensuite vers
le Kaire , où l'avait déjà devancé la ter-
reur de ses armes. Le khaJvfL- et son
vizyr invoquèrent en vain la foi des
traités ; ils proposèrent d'acheter la
retraite des chre'tiens par des sommes
considérables. Amaury , toujours dis-
posé à vendre la paix et la guerre , con-
sentit alors à écouter les prières du
khalyfe , et les hostilités firent place
aux négocialions. Pendant ce temps , le
khalyfe implora le secours du siilthan
d'Alcp , qui envoya une puissante ar-
mée en Egvpte , pour combattre les
chrétiens. Au moment où Amaury se
croyait déjà possesseur des trésors du
Kaire , il l'ut obligé d'abandonner ses
conquêtes, et revint dans son royaume,
avec la honte qui suit toujours l'injus-
tice , quand elle n'est pas couronnée
par le succès. Cette guerre fut d'autant
plus maîheurruse pour les chrétiens,
que Nour-Eddyn , qui avait , comme
Araauiy , le projet de s'emparer de
l'Egypte , ne laissa pas échapper cette
occasion. Ce rovaume , troublé au-de-
dans, et menacé au-dchors , fut réuni
aux vastes états»du sulthan d'Alep , et
le petit royaume de Jérusalem se trou-
va environné et menacé de toutes parts
par une puissance formidable; pour
comble de rasllicurs , il s'était élevé,
au sein des troubles et des guerres
qui désolèrent l'Egypte , im jeune hé-
ros , dont le nom devait être un jour
redoutable aux chrétiens de la Pales-
tme ; ce héros était Saladin , qui fut d'a-
bord vizyr, ou gouverneur de l'Egvpte,
et qui, après !a mort de Nour-Eddyn,
recueillit l'immense héritage du suîthan
d'Alep. Le premier usage qu'il ûi de sa
A U A n
puis<;ance,fiit d'attaquer le rovaume de
Jérusalem. Amaïay , qui redoutait un
si dangereux ennemi , implora les ar-
mes des chrétiens d'Occident , et se
rendit lui-même à Constantiuople
pour solliciter le secoure des Grecs j
mais il n'obtint que des promesses , et
il ne lui resta plus alors que son cou-
rage et ses propres forces , pour arrêter
les progrès d'un ennemi dont il avait
préparé la puissance. Son rovaume
était agité par les factions des tem-
pUers et des hospitaliers , et les colo-
lùcs chrétiennes en Asie marchaient
rapidement à leur décadence. Amaury
mourut en i r^S, avant de voir écla-
ter les catastrophes dont Jérusalem
était menacé , et laissa ce triste héri-
tage à son fils Baudouin IV. M — d.
AMAURY H, DE LusiGNAw, roi
de Chypre, succéda à Guy, son frère.
A la mort de Henri , comte de Cham-
pagne, qui avait été reconnu roi de
Jérusalem, Amaurv épousa sa veuve,
Isabelle, qui avait déjà contracté trois
mariages j et donné à trois époux des
titres porj- un royaume, presque tout
entier coiiquis par les Sarrasins.
Amaury recueillit l'héritage , ou plutôt
les espérances de ses prédécesseurs,
et fut couronné roi de Jérusalem,
dans la ville de Ptolémaïs, l'an i ig^.
Heuii VI, empereur d'Allemagne,
avait envoyé une armée en Palestine,
et les croisés allemands eurent d'abord
quelques avantages; mais, rappelés en
Eiu'ope, après la mort de Henri, ils
laissèrent Amaury eri lutte à toutes
les forces des Sarrasius. Les faibles
restes de son royaume ne fm-ent sau-
vés que par la division qui régnait
alors dans la famille de Saladin.
Amaury sollicita plusieurs fois les se-
cours de l'Europe chrétienne : un©
croisade fut prêchée dans tout l'Occi-
dent ; mais les croisés allèrent assiéger
CoustanlÏDople, et ne songèrent plus.
23 A n A
aux serments qu'ils avaient faits de
délivrer Jérusalem. Lorsque le petit
nomore de guerriers qui défendaient
Ja Palestine eut appris la conquête
de Bysance , ils accoururent dans cette
ville, dont on leur avait vanté la ri-
chesse. Amaury resta presque seul à
Ptolémaïs, et il y mourut en iuo5,
laissant le royaume de Chypre à son
fi!s, Hugues de Lusignan , et le vain
litre de reine de Jérusalem, à Marie,
fille d'Isabelle. M— n.
AMAZIAS. For. Amasias.
AMBERGER ( Christophe ), pein-
tre de Nuremberg , fut disciple de
Holbeins le jeune, et imita fort hen-
l'eusenient sa manière : il dessinait
correctement , disposait bien ses figu-
res, excellait dans la perspective, et
ne manquait pas d'un beau coloris.
L'Histoire de Joseph , en i o. tableau,
est sa meilleure composition. La ga-
lerie royale de Munich conserve plu-
sieurs de ses ouvrages Cliarles-Qunit
l'attira à Augsbourg, en i53o , et en
faisait si grand cas , qu'il le mettait
souvent à cote du ïilion; mais cette
comparaison prouvait plus contre le
goût de l'empereur , qu'en faveur de
l'artiste. Ou a grave, d'après Amber-
ger, la Décollation de S.Jean-Bap-
tiste, en demi-figures. (j — t.
AMBILi.OU. Ver. Bouchut.
AMBIORIX, roi des Eburcns,
peuples des Gaules , entre la Meuse et
le Khin, régnait conjointement avec
Cativulcus, lorsque César commeiiç.»
la conquête des Gaules, fan 58 avant
J.-C. Pour s'attacher Ambiorix, le
général romain le déchargea du tribut
qu'il pavait aux Atur.ticiens, qui habi-
taient le pays de Naraur. Son fils et les
fils de son frère , retenus par ces peu-
ples comme otages, lui furent ren-
voyés ; mais ces bienfaits ne purent
calmer la haine dont Ambiorix était
animé contre les Romains. Exciléd'ail-
A M B
leurs parlndutiomare, roi de Trêves ,
il projeta de se soulever, et d'entraîner
toute la Gaule, qui supportait impatiem-
ment le joug des légions romaines. Cé-
sar, revenu de sou expédition contre les
Bretons , était alors à Amiens , et venait
de mettre son armée en quartier d'hi-
ver. L'isolement des légions donna
l'idée aux Gaulois de les attaquer sé-
parément, en employant à la fois, la
ruse et la force. Ambiorix et CiStivulcus
étaient allés au-devant de Sabinus et
de Cotta , lieutenants de César , et leur
avaient fourni des vivres , afin de don-
ner moins de défiance aux Romains ,
renfermés alors dans leur camp. Peu
de temps après, ceux-ci étant sortis
sans précaution , pour coujxïr du bois ,
Ambiorix fondit sur eux, et en fit nu
grand carnage; il courut ensuite at-
taquer leurs retranchements ; mais ,
ayant été repoussé avec perte, il entra
en pourparler , et dit aux généraux
romains que ce qui venait de se pas-
ser ne s'était pas fait par ses ordres,
mais qu'il n'avait pu contenir la fureur
des Gaulois; et , f<'ignant d'être très-
attaché aux Romains, il conseilla à
Sabinus de songer à sa retraite, parce
que les Germains , qui venaient do
passer le Rhin en grand nombre, na
tarderaient pas à tomber sur lui. Les
deux lieutenants de César, après quel-
ques hésitations , sortirent de leur
camp , avec riussi peu de précaution
que si l'avis leur fût venu du plus fidèle
ami des Romains. Ambiuiix, qui avait
divisé son armée en deux corps pla-
cés en embuscade dans les bois, fond
tout à coup sur 1rs Romains, et les
taiileen pièces. Enflé de cette victoire,
il part avec sa cavalerie pour se rendre
chez tous les peuples de la contrée, et
il les détermine à prendre les armes,
et à voler à l'improviste au camp de
Quintus Cicc'ron , frère de l'orateur.
Il se mit hii-mcme à leur tête, attaqu.i
AMB
les rptranclicraents de Qiiiutus, et
donna plusieurs assauts. Ne pouvant
les emporter, il tenta vainement de
tromper Ciccron , comme il avait
trompe Cotta et Sàbinus. César, ins-
truit du danger de Quintus Ciceron ,
marcha à son secours avec deux lé-
gions. A son approche, Ambiorix
quitte le siège , et va au-devant de Cé-
sar avec toutes ses forces, au nombre
de 60 mille hommes. Ccsar, feignant
de le redouter, se renferma dans ses
retranchements; et Ambiorix, attiré
ainsi par la ruse , les fit escalader.
Tout à coup. César sort de son camp
avec "jooo hommes ; et les Gaulois ,
surpris et mis en fuite , sont taillés eu
pièces. Ambiorix ne trouva de salut
que dans ses états. La déf^iite et la mort
d'Indutiomare, qui avait soulevé les
Trévisiens, porta l'épouvante parmi
les Eburons, qiii s'étaient de nouveau
ralliés sous les ordres d' Ambiorix : ils
se dispersèrent , et César fut un instant
fiaisibie maître des Gaules ; mais Am-
àorix ne tarda pas à fermer contre
lui une nouvelle ligue. César marcha
contre ce prince, et, sachant qu'il pro-
jetait de traîner la guerre en longueur ,
en évitant les actions générales , il
porta d'abord la terreur chez ses alliés,
pour lui otcr toute retraite, et marcha
ensuite sur ses états. Surpris par la
cavalerie de César, Ambiorix, qui
n'avait pas encore rassemblé ses trou-
jics , ne dut son salut qu'à la situation
de son château, au milieu de la foret des
Ardcnnes; Cativulcus, qui était entré
daiis ses projets , accablé de vieillesse ,
et ne pouvant plus supporter les fati-
gues de la guerre et de la fuite, s'em-
poisonna ', les Gaulois eux-mêmes, et les
Germains , qui d'abord s'étaient alliés
à Ambiorix , furent appelés à partager
ses dépouilles. Deux fois encore. Cé-
sar marcha contre les Eburons, et
poursuivit !ciu' malheureux roi, qui
AMB 25'
se cachait dans les bois et les cavernes ,
sans autre escorte que quatre cavaliers
à qui seuls il osait confier sa vie. 11 vé-
cut ainsi long-temps proscrit, fugitif,
et sans pouvoir jamais reprendre les
armes. B — p.
AMBLIMONT ( FUSCHEMBERG ,
comte d' ) , offitier - général de la
marine fi-ançaise , passa au service
d'Espagne depuis la révolution , com-
manda un vaisseau espagnol de 112.
canons , en 1 ^()6 , et fut tué dans le
combat où l'amiral Jcrvis , depuis
lord St.-Vinccnt , b.ittit la flotte espa-
gnole. On a de lui une Tactique na-
vale, Paris, Didot jeune, 1 788, in-4". ,
fig. , très-bon ouvrage. ]S — l.
AMBOISE ( Georges d') , connu
dans l'histoire sous le nom de Cardi-
nal d'iijnhoise , naquit , en 1 460 , au
château de Ciiaumont-sur-Loire, d'une
maison illustre , et lut nommé évêque
de Montauban , n'étant encore que
dans sa i4''- année, ce qui prouve le
désordre où la discipline ecclésias-
tique était à cette époque. On jieut
le remarquer avec d'autant plus d'as-
surance , que d'Aniboise , étant devenu
ministre , porta la réforme dans cette
partie , comme dans toutes les autres
branches de l'administration publique.
Ayant été choisi par Louis XI , pour
être un de ses aumôniers , son désin-
téressement et son aversion })Our
l'intrigue empêchèrent qu'il ne fût
remarqué de ce monarque soupçon-
neux. Cependant, il eut besoin de pru-
dence ; car il aimait beaucoup le jeune
duc d'Orléans , qui était as:;ez mal à
la cour pour que ce fat un crime d'être
du nombre de ses amis. Louis XI ,
à sa mort , ayant confié le soin de
gouverner le royaume à Anne de Beau-
jeu, sa fille aînée , le duc d'Orléans,
premier prince du sang , humilié d'un
choix qui l'excluait des affaires , forma
un parti; prit les armes, clfulyalucu
24 A M C
et enferme. D'Amboise, qui s'était dé-
clare' pour lui , partagea son sort.
Lorsque Charles YIII commença à
régner par lui-même , il rendit la li-
berté au duc d'Orléans , qui acquit
bientôt un grand crédit ; d'Amboise
suivit la nouvelle fortune du duc , et
obtint l'archevêché deNarbonne, qu'il
échangea, en 149^, pour celui de
Rouen , afin de se rapprocher de la
cour. Le ministère de ce prélat pour-
rait dater de cette époque , puisque
le duc d'Orléans , qui était gouver-
neur-général de la Normandie , lui
confia toute l'autorité , et que les heu-
reuses réformes qu'il fit dans cotte pro-
vince annoncèrent celles qu'il devait
bientôt opérer pour le bonheur du
royaume. Charles VIII étant mort en
l'année i4ri8, sans laisser dé^fils, le
duc d'Orléans monta sur le trône ,
sous le nom de Louis XII, et le pou-
voir que d'Amboise exerçait sur la
IN^ormandie s'étendit sur la France
entière. Le crédit qu'il avait sur l'es-
prit du roi fut d'abord partagé par
le maréchal de Gié; mais la reine et
M""*. d'Angoulême l'ayant fait disgra-
cier , d'Amboise devint premier mi-
nistre , et conserva ce titre et l'ami-
tié du monarque jussqii'à sa mort. Ou
trouverait difficilement, dansl'histoire,
im second exemple d'une faveur aussi
long-temps conservée ; mais il y avait
tant de rapports entre le caractère du
prince et celui du ministre , qu'il se-
rait difficile de dire lequel des deux
avait sur l'autre le plus d'influence.
Aimant tous deux sincèrement le
peuple, également économes, jaloux
d'obtenir de la gloire , l'ambition de
Louis Xll fut toujours subordonnée à
l'honneur; celle du cardinal d'Amboise,
toujours excitée par l'espérance de
faire plus de bien. Les historiens qui
lui ont reproché d'avoir montré j)eu
de capacité pour les affaires d'çtat,
À MB
ont oublié que la conquête dltalie
était alors la prétention générale des
puissances de l'Europe , et qu'il n'é-
tait pas au pouvoir du cardin^, quand
bien même il en aurait eu la volonté,
de retenir Louis XII , qui réclamait ,
à juste titre , le duché de Milan , et
d'arrêter la fougue de la noblesse
française, qui ne voyait qu'en Italie
un théâtre digne de ses exploits. Pour
juger les grands hommes, il ne faut
pas les séparer de l'esprit de leur
temps; d'ailleurs, il est probable que
Louis XII , entouré d'illustres guer-
riers, consultait peu d'Amboise sur
les opérations militaires. Il lui aban-
donnait l'administration du royaume ,
et il est remarquable que , malgré
tant de campagnes , dont le com-
mencement fut toujours brillant , et la
fin , désastreuse , la France ne cessa
pas de jouir du plus grand repos , et
que les impôts , diminués à l'avène-
ment de Louis XII , ne furent jamais
augmentés pendant son règne : c'est
en cela que consiste réellement la
gloire du ministre. Il fit de grandes
réformes dans la législation , pour
abi égcr les procès , et prévenir la
corruption des juges ; il mit de l'ordre
dans les finances, et donna un grand
exemple de modération, en se con-
tentant de l'archevêché de Rouea ,
dont il employait, en grande partie,
les revenus au soulagcuicnt des pau-
vres , et a l'entretien dos églises. On
peut croire qu'un homme , qui ne se
démentit pas un instant dans la plus
hante prospérité, ne souhaitait , en
ril'ot , d'être pape , que pour travail-
ler à améliorer les mœurs de la chré-
tienté ; raais il fallait , pour parvenir
au Saint-Siège , moins de bonhomie
que n'en avait le cardinal d'Amboise.
11 consentit à retirer les troupes fran-
çaises de Rome , pour ne pas paraître
gêner le* suffrages , et le cardinal
A MB
Julien de la Rovèic , qui lui donna
ce conseil , se fit e'iiic à sa ])lace, sons
le nom de Jules IL Le cardinal d'Ani-
boise avait été nommé légat du pape
en Fiance ; et c'est une chose vrai-
ment extraordinaire que le même
homme ait réuni les fonctions de pre-
mier ministre et de légat , sans que
la France et la cour de Rome aient
jamais eu à lui faire le moindre re-
proche. Il mourut à Lyon , le 2 5 mai
1 5 10 , dans le couvent des céiestins ,
à l'âge de cinquante ans. Son corps
fut transporté à Rouen , où l'on voit
encore le mausolée qui lui fut éli vé
dans la cathédrale. On dit qu'il répé-
tait souvent au frère infirmier qui le
servait dans sa miladie: « Frère Jean,
» que n'ai-je été toute ma vie frère
» Jean I » Il ne faut , au reste , rien
conclure de ces paroles contre la mé-
moire de ce ministre. A l'article de la
mort, les grandeurs sont jugées plus
sévèrement par les hommes modérés
que ])ar les ambitieux. Le cardinal
d'Amboise a été adoré des Français ,
qui l'appelaient le Père du Peuple^
litre qu'ils donnaient également à
Louis XII. On peut , aujourd'hui ,
condamner la politique de ce ministre,
surtout à l'égard du traité de Blois ,
conclu en i5o4, et qu'il ne signa,
peut-être , qu'avec la conviction que
les états du royaume s'opposeraient
à ce qu'il fût exécuté; mais que peut-on
opposer à la reconnaissance de ses
contemporains , et aux larmes d'un
roi dont il fut 37 ans l'ami, surtout
quand ce roi est compté , par la pos-
térité , au nombre des meilleurs qui
aient gouverné la France ? Le cardi-
nal d'Amboise eut deux frères aînés ,
également recomœandablcs paj- leurs
talents et par- leurs vertus; le premier
était Charles d'Amboise , sieur de
Chaumoivt {F. ce nom); le second
était Aimery d'Amboise , grand-maître
A MB 25
de Rhodes , en i5o3 , célèbre par la
victoire navale qu'il remporta , en
1 5 1 0 , près de Monténégro , sur le
Soudan d'Egypte , et à laquelle il ne
survécut que deux ans. C'était un
prince sage, habile dans le gouver-
nement , et heureux dans toutes ses
entreprises. F — e.
AMBOISE ( François d') , fils de
Jean d'Amboise , qui fut chirurgien des
rois François \"., Henri II, Fran-
çois II, Charles IX et Henri ill, na-
quit à Paris, en i55o. Charles IX fit
élever à ses frais le jeune d'Amboise ,
qui , après avoir terminé ses études
dans les belles -lettres, et les avoir
même professées , les abandonna pour
se livrer au barreau, où il se fit,
comme avocat, une grande réputation.
Henri III , appelé au trône de Pologne,
le choisit pour l'accompagner dans ses
nouveaux états, et, à la demande de
ce prince, d'Amboise en fit la descrip-
tion. De retour en France, il occupa
successivement différentes places daus
la haute magistrature : il fut nommé
conseiller -d'état en 1604, et mourut
en 1620. Les lettres ne furent qu'un
délassement pour d'Amboise, et il y
renonça de bonne heure pour s'oc-
cuper de sa fortune. Ses ouvrages , mal
indiqués par La Croix du Maine et par
Du Yerdier , le sont plus exactement
par Niceron, t. XXXIII. En voici les
principaux : I. Notable Discours ,
en forme de dialogue, touchant la
%'raie et parfaicte rtwu'fiV, traduit de
l'italien de Piccolomini, Lyon, 1077,
in-16". ; IL Dialogue et Devis des
Damoiselles , pour les rendre ver-
tueuses et bienheureuses en la vraye
et parfaicte amitié , Paris , 1 58 1 et
i583, in-16; m. Regrets facétieux
et plaisantes Harangues funèbres
sur la mort de divers ammaulx,ti'3i-
duit de l'italien d'Ortensio Lando,
Piins, 1576, in-16, i583, io-12:
•1(5 A M 13
CCS trois ouvrages ont ete publics son*
le nom de Tiiicrry de Tiiyoïophile,
gentilhomme Picard ; IV. Les iVVVi-
jjolitaines , comédie fra?icaise fort
facétieuse , sur le sujet d'une his-
toire d'un Espagnol et un Fran-
çois, Paris, i584, in-ifj; V. une
Édition des OEuvres d'AbaiJard.( f^.
Abailard ) VI. : Désespérades , ou
Eglogues amoureuses j esquilles sont
au vif dépeintes les passions et le
désespoir d' Amour , Vàv\Sj ï'>72,
ïn-8". — Son Irèrc puîné', Adrien,
lie à Paris en ijji , mort à Tre-
guier,Ie ySj.iiilî't i(3i6, successive-
ment recteur de Tiiniversite', grand-
maître du collège de Navarre , curé
de St.-Andre-des-Arcs, et, en 1604 ,
evcque de Tre'guier, avait compose,
dans sa jeunesse , une pièce intitulée :
Jlolopherne , tragédie sainte , ex-
traite do l'histoire de Judith , Paris ,
i5(So, in-8'. Il mourut le 28 juillet
1 G 1 6. R— T.
AMBOISE ( Jacqut- s d' ) , frère des
deux précédents , embrassa d'abord
la profession de son père , puis se fit
recevoir docteur en médecine. En
ï594. après la réduction de Paris
sous l'obéissance de Henri IV, il de-
vint recteur de l'université , qu'il
trouva, dit Crévier, dans le plus grand
état de délabrement, et qu'il laissa
florissante. Ce fut sous son rectorat
que cette compagnie prêta serment
de fidélité à Henri IV. Ce serment
avait éié précédé d'une démarclie
spontanée , faite par une partie de la
Sorbonne , le recteur à la tète, pour
iiller implorer la clémence du roi
( samedi 2 avril i5cf{ ), et f-it rédige
<lans une assemblée générale de l'uni-
versité, eu présence de l'archevêque
fie Bourges , le vendredi 22 avril
ï 694 , et signé d'un grand nombre
He docteurs en lii.éologie. On en trou-
vera la teneur dans le Journcd de
A M 15
l'Etoile, tom. îï , p. 55. D'Araboise
ayant élé conlinué dans sa dignité,
l'université rcpiit, avec clialeur, sou
ancien procès contre les jésuites, et
dont le résultat fut leur expulsion.
J. d'Amboise se signala par un zèle
ardent dans cette affaire , et alla jus-
qu'à les accuser , dans une harangue
pu])lique , d'être les ennemis de la loi
saii(juc et de la maison rovale. Il mou-
rut, de la peste, en jGoO. On a de
li'.i : T. Orationes duce in senalu ha-
hitv pro unii'ersis academiœ ordi-
nibusy'n Clarom.ontenses , qui se je-
suitas dicunt, oii il déploya beaucoup
d'auimosité, Paris, 1095, in-S".; II.
Questions médicales , citées dans la
Bibliothèque de la médecine ancien-
ne et moderne, par Carrcre. N — l.
AMBOISE ( Micnr.LD'), écuyer,
qui prenait, entête de ses ouvrages,
le titre de. seigneur de Chefi lion , était
fils naturel de Cliaumont d'Amboise ,
amiral de France, et lieutenant général
du roi en Lombardie. Il naquit , à Na-
pies, dans les premières anufîcs du i(>%
siècle. A peine au sortir du berceau, sou
père l'cnvova à Sagonne , dont il était
seigneur , pour y être élevé avec Geor-
ges d'Amboise, son (ils légitime , qui
n'étaitgiièreplusàgéquelni. En i5i 1,
Michel perdit son père , qui l'aimait
tendrement, et cette mort fut si pré-
cipitée, que ce dernier n'eut pas le
temps de faire des dispositions en sa
faveur. Amené à Paris , peu de temps
a])rès, on le fit étudier avec son frère
Georges, qui avait pour \vÀ beaucoup
d'amitié. Ses parents, qui le desti-
naient au barreau, le mirent chez un
procurenr; mais , au lieu de s'appli-
quer à l'élude du droit, Michel suivit
son penchant pour la poésie, et,
malgré les rcprésenlations qui lui fu-
rent faitrs, et le peu de surcès qu'ob-
tinient ses premiers ouvrages , il
cor*iniia de rimer en dépit de l\Ti»:
A u i;
nervc et dcses prirenîs, qui l'abanîcn-
nèrent. La bataille dcPavie lui enleva
son frère, et, par cette perte, il fut
prive de tout secours. S'c'taiit ensuite
marie' avec une demoiselle de condi-
tion , sans fortune , il fut renvoyé' de
chez le seigneur de Barbezieu-»; , son
parent. Il perdit , au bont de deux ans
de mariage , son épouse et un fils
qu'elle lui avait donne. De nouveaux
chagrins vinrent encore l'assaillir; il
fut enferme' deux fois , et manqua sou-
vent du nécessaire. Tant de mallieius
ai)régèrent ses jours, et il cessa de
vivre, ou plutôt de souftrir, à la fin
de l'année 1547. ^' "'^ ^'^^^^ chercher,
dans les poésies d'Araboise, ni élé'
gance , ni finesse , ni élévation ; ce
n'est, proprement, qu'une prose ri-
mée. Il avait beaucoup de facilité ;
mais , travaillant pour vivre , il ne
corrigeait jamais ses productions , dont
on trouve la liste dans les Bibliothè-
}jues francoises de La Croix du
Maine ^ et de Goitjet , tom. X, ainsi
que dans le XXXIÎi . vol. de Niceron ;
miis, ces auteurs s'étant trompés dans
le catalogue qu'ils en ont iircseutc, nous
allons le rétablir : I. Complaintes de
l'Eschweforluné, Paris, i t^'xc) , in-S".;
lî. la Panihaire de VEsclcwe for-
tuné, Paris, i55o , in-8°., fig-OH.
les Bucoliques de Baptiste Mantuan y
traduites du latin en rime française ,
Paris, i55o, in-4''; IV., cent Épi-
grammes , traduites du Mantuan , et
la Fable de Biblis et de Caunus ,
traduite d'Ovide, Paris, iï5'î, in- 16
et in-8\; YAes Epistres vénériennes
de l'Esclave fortuné , Paris, i532,
1 ") 5 4 et 1 536 , in-B". : ces épîtres sont
des plaintes ou des demandes d'amour,
des morts métaphoriques, où l'auteur
s'exprime avec une licence exti'éme;
W.h Bahrlon, autremeiit, la Con-
fusion de V Esclave fortuné , Pai;^,
1 531 , in- ! G et in-S"', sans daf? i
le Blason de la d^nt , dars le rrrueii
intitulé : les Blasons anatomiques dit
corps féminin; cette pièce a été réim-
primée dans le recueil de Blasons pu-
blié ri Paris, en 1808, in-8".; VIII.
les Contre- Epîstre s d'Ovide , Paris ,
i54<3, in-iO et l'y.; IX. Secret d'a-
mours ^ Paris, i5|^, in-8"'.; X. le
Guidon des gens de guerre^ Paris,
1543, in-S".; c'est le seul recricil en
prose de Michel d'Amboise; W.Dé-
ploratinn de la mort de messire
Guillaume du Belh.y , seigneur de
Langey., Paris , 1 545 , poème en vers
héroïques ; XII. quatre Satires de
Ju vénal ( les 8, 10, 11 et 1 5 ), trans-
latées en rime françoise, Paris, 1 544'>
in-t6; XIII. le Ris de Démocrilc et
le pleur d' Heraclite sur les folies et
misères de ce monde , tradiiit de
ritaiieu d'Antonio Phileremo Fregcso .
en riinefrançoise, Paris, 1 547 ' ^'''"8"'-.
et Rouen , i55o ,in-i5; XÏV. et enfin
uns traduction mi lo". livre des rJé-
tamorphoscs d'Ovide. Micl.el d'Am-
boise avait pris pour surnom on pour
devise Vépitbète à^Esclave fortuné,
c'est-à-dire , d'homme sujet ou exposé
aux inconstances, aux variations et
aux caprices de la fortune. ïi — t.
AMBRA ( François d ) , noble flo-
rentin , fut consul de l'académie de
Florence, en 1 549, et y fit souvent des
lectures publiques ; il composa trois
Comédies, qui sont citées, comme
de langue, d;ins le Victionnaire de la
Crusea, et mourut en i558. Ses Co-
médies furent iniprimées à Florence,
après sa mort ; sivoir : Il Furio , en
prose , I 5()o ; La Cofanaria , en vers
lij)res ( sciolti ) , avec des intermèdes ,
représentée aut fêtes de François de
Médicis et de Jeanne d'.\utriche, 1 56 1 j
/ Bemardl , en vers libres , 1 565.
Elles ont toutes été réimprimées plu-
sieurs fois. G — É.
AMBROGI ( A.NTOiNE- Marie ) ,
aS A M C
ji'Siiite italien , célèbre clans le ï 8*. siè-
cle , naquit à Florence, le 1 3 juin l '^ i3.
il remplit pendant trente ans , avec
distinction, la chaire d'éloquence et de
poésie dans l'iiniversitéde Rome, alors
florissante, La plupart des jeunes gens
qui se firent, depuis, un nom dans
les lettres, lui durent leur instruction.
Sa traduction de Vir<i;ile en vers blancs,
ou non rimes ( sciolti ) , fut maguifi-
quemenl imprimée à Rome , en 3 vol.
in-ful., i-jGj. Elle est accompagnée
de dissertations savantes , de variantes
et de notes , ornée de gravures d'après
les peintures du superbe manuscrit du
Vatican , qui fait aujourd'hui partie
de ceux de la BibHothèque impériale ,
et d'après les monuments antiques les
plus célèbres , édition devenue assez
rare , et justement recherchée. On a
imprimé , avec la même magnificence ,
sç:B traductions des deux poèmes la-
îins du jésuite Noceti , De ir'ule , et
De aurord boreali. Il a traduit du
français quelques tragédies de Vol-
taire, Florence, 1752; et, comme j)Our
former un contraste, V Histoire du
Pélagianisme , du jésuite; Patouillet.
Lufin , on a de lui: f. la Traduction
des lettres choisies de Cicéron ; II. un
Discours latin , In elecdoneJoseiilii II
Jîonianorum régis ; lil. Mnsœuni Kir-
cheriaiuim, Rome, i -jO 5, "3, vol. in-fol. ,
contonant la description et l'explica-
tion de ce musée, confié, pendant plu-
sieurs années , à ses soins , et que le
cirdiual Zclada a encore enrichi de-
puis. Ambrogi a laissé de plus un
poërae latin inédit sur la culture des
citronniers. Sa douceur et la bonté de
son caractère le faisaient généralement
aimer. 11 mourut à Rome eu n88.
G—k.
AMBROGIO , ou AMBllOlSE
(Thésée) , savant orieutali-te itahen ,
au i6\ siècle, était de la noble famille
des comtes d'Albauèse , dans la Lo-
AMB
melline , près de Pavic. Né en 1 4^(>,
on d t qu'il a^ait à peine 1 5 mois qu'il
parlait avec beaucoup de promptitude
et de netteté, et qu'à 1 5 ans , il parlait
et écrivait en italien , en latin et en
grec , comme les savants les plus con-
sommés dans ces trois langues. 11 entra
jeune dans l'ordre des chanoines ré-
guliers de St.- Jean ; mais il ne se rendit
à Rome qu'en 1 5 1 2. Le 5 ". concile gé-
néral de Latran y avait attiré plusieurs
religieux orientaux , maronites et sy-
riens. 11 saisit cette occasion d'appren-
dre leurs langues , et y devint bientôt
assez savant pour conférer avec les
orientaux les plus habiles. Ces langues
lui ouvrirent l'accès de toutes celles
de l'Orient. II en savait 1 8 , et les par-
lait aussi facilement, que si chacune eût
été sa Langue naturelle. Léon X le char-
gea d'enseigner publiquement , dans
l'université de Bologne , le sviiaque
et le caldéen. Quelques années après ,
il conçut le projet de publier un Psau-
tier en langue caldéenne, avec un Trai-
té sur cette langue , et sur les rapports
que plusieurs autres langues ont avec
elle. Il s'était retiré pour cela dans sa
patrie, où il rassembla les planches et
les caractères nécessaires cà ce dessein ,
lorsqu'en i5a7, ce pays, ayant étépris
par les troupes françaises , fut mis
au pillage pendant huit jours; leçon--
vent 011 habitait Ambroisc fut pillé
comme les autres ; ses planches , ses
caractères, ses manuscrits, caldccns,
syriaques , hébreux et grecs , qu'il avait
recueillis à grands frais , furent dis-
persés et perdus. 11 retiouva cepen-
dant, cinq ans après, son Psautier
caldéen , raiais gâté et à moitié déchiré ,
dans la boutique d'un charcuitier. 11
reprit de nouveau le projet de le pu-
l)!ier , et se rendit à Venise , oii il se
lia d'amitié avec le célèbre Guillaume
Pustel. Celui-ci lui dut l'idée de l'o-
pWfUl^qu' il publia quelques aanécs
AMB
après, en Ffance, intitule: Lin^iia-
ruTïi X characterihus diffcreniluin
alphabetuin, inlrodiiclio , ac Icgendi
melhodus. Aiubroise , ayaut lenoucë à
son Psautier caldéen, termina enfin
son Introduction aux langues cal-
déenne, syriaque, Cirménienne , etc.,
et la fit imprimer , à Pavie , en 1 559.
Il y mourut un an après , âç^e de ■j o
ans. G— E.
AMBROISE ( S. ) , Père de l'Église,
naquit vers l'an 040. Son père était
préfet du prétoire, l'une des quatre
premières ilit!;nités de l'empire , et ,
comme préfet des Gaules , il résidait à
Arles , à Lyon ou à Trêves ; mais plus
souvent dans cette dernière viile, ce
qui fait croire que S. Ambroise y vint
au monde. Les présages les plus heu-
reux cuviionnèrcnt son berceau; on
raconte qu'un essaim d'abeilles cou-
vrit son visage, lorsqu'il donnait dans
la cour du prétoire, et que la nour-
rice inquiète , s'cfant liàté de chasser
celles qui entraient dans la bouche
d' Ambroise, fut très -étonnée de les
voir sortir sans faire aucun mal à l'en-
fant. Le ])èie d'AmJn-oise , qui se rap-
pelait , sans doute , que toute l'anti-
quité avait attribué à un semblable
prodige la douceur et le charme qui ca-
ractérisèrent les discours de Platon ,
voulut qu'on attendît avec coiitîancc
la fin de ce présage , et les abeilles ,
après avoir vo'.tigé quelque temps au-
tour de l'enfant, s'élevèrent dans les
airs. Sa famille crut dès-!ors qu'il était
appelé à quelque chose de grand. On
dit encore qu'étant ta Rome, où sa
mère et sa sœur s'étaient retirées après
la mort de son père , il leur présenta
un jour sa main à baiser, disant qu'il
devir?udrait évèquc. L'éducation d'Am-
broise fut conforme à son rang, et aux
cspéiances qu'avaient fait naître ses
premières années; les maîtres les plus
liabilcs lui enseignèrent les scicuces ,
et il fut formé à la vertu par les le-
çons , et surtout par les exemples tou-
chants de sa mère et de sa sœur , Ste.
IVlarcelline, qui avait reçui, des mains
du pape Libère, le voile des Vierges*
Ambroise quitta Rome , lorsque ses
études fuvent terminées, et vint à Mi-
lan , avec 5on frère Salyrus. Ils sui-
virent l'un et l'autre la cairière du
barreau. Ambroise s'y montra avec
tant de réputation , que Petronius Pro-
bus , préfet d'Itahe et d'Iliyrie , le mit
au nombre de ses assesseurs , et l'éta-
blit , peu de temps après , gouver-
neur des provinces consulaires dt? la
Liguiie et de l'Emilie, qui compre-
naient tout le pays qui s'étend depuis
les Alpes jusqu'cà la Méditerranée, la
Toscane, l'Adige et l'Adriatique. Lors-
que l'empereur Vaienlinien eut con-
firmé ce choix , et qu'il v eut ajouté la
dignité du consulat , le préfet Probus
dit à Ambroise, comme il partait pour
son gouvernement : « Allez , et agissez,
» non en juge, mais en évèquc. » Le
vertueux Probus avait vu avec peine
la sévérité dont usaient la plupart des
gouverneurs , à l'exemple de Valeu-
tinicu. Ambroise retint cette belle le-
çon , qui convenait si bien à son ca-
ractère. Sa douceur et sa sagesse lui
gagnèrent l'estime et rattachement
des peuples , dans un temps où l'Ita-
lie et le pays de ?Jilan , surtout, étaient
déchirés par les troubles et les furem'S
de i'arianisme. Auxence, que les ariens
avaient placé sur le siège de IMilan ,
après en avoir éloigné S. Denis , ve-
nait de mourir. Les évêques de la
province s'étaient asserab'és , et deli^
béraient sur le choix d'un successeui*.
Les catholiques et les ariens deman-
daient, les uns et les autres , un évê-
que de leur croyance ; une sédition
violente s'était élevée ; on était sur le
point d'en venir aux mains , lors-
qu'AjsibrQise se rendit à l'église pour
5o A M ij
faire cesser !e lumulte ; son éloquence
émut tous les cœ.u s. Ou dit qu'un en-
fant s'e'tant écrié : Jmhroise évéqiie !
un cri unanime se fit entendre, et que
tous, ariens et catholiques, le deman-
dèrent pour pasteur. Aiubroise, étonné
et interdit , sort de l'éj^Iise , et ne songe
qu'aux moyens d'éioigner le fardeau
redoutable qu'on veut lui imposer;
contre sa coutume , il fait donner la
question à quelques accusés , espé-
rant qu'on le taxera de cruauté et de
barbarie j il mène une vie retirée;
jnais le peuple continue de l'appeler
à p,rands cris ; il pousse l'indiscrétion
de son zèle jusqu'à faire venir chez lui
des femmes publiqu."s, et cependant
on demeure toujours convaincu et de
la Dureîé de ses mœurs et de la subli-
milé de sa vocation. Il s'enfuit pen-
dant la nuit, et croit prendre le che-
min de Pavie ; mais le lendemain , il
se retrouve aux portes de IMilan. il
va chercher un asyle dans la terre de
l'illustre Léonce, son ami, et Léonce
le découvre lui-même. Enfin , on l'ar-
rête par ordre de l'empereur, qui était
ravi qu'on trouviàt dans celui qu'il
avait nommé p;ouverneur, toutes les
qualités d'un évêque. Valentinien en-
voya l'ordre au vicaire d'Italie de faire
ordonner Arabroisc , qui fut baptisé ;
car il n'était encore que cathécumèno,
et reçut la consécration des évèqnes,
Imit jours après son baptême. C'est
cette ordination que les Grecs et les
Latins célèbrent encore aujourd'hui
le T déceinbrc. Ambroise , élevé à'à'é-
piscopat d une manière aussi extraor-
dinaire, ne tarda pas à répandre au
loin l'éclat des plus sub'imes vertus.
S. Basile, du fond de l'Orient , s'esti-
mait heureux de correspondre avec
lui , et les deux jeunes empereurs ,
Graticn et Valentinien , qui avaient
succédé à Vaicnliiàcn P""., le regar-
daieol coijame leur père : Justine ello
A II B
même , malgré son attachement à l'a-
rianisme , révérait Ambroise , et eut
souvent recours à lui dans des con-
jonctures difficiles. Ou vit venir , de
difFJrentes viUes d' Italie ^ et même de
la Mauritanie , une foule de vierges
c|ui demandaient à recevoir le voile
de sa main , et ce fut à cette occa-
sion qu'il composa ses trois livres des
ridrges , et son Traité de la Fir^
ginite. Les Goths , vainqueurs de Va-
iens , qui avait péri malheureusement,
ravageaient la ihrace et l'illvrie, et
poussaient leurs courses jusqu'aux Al-
pes. Ambroise prodigua des secours
aux peuples qui fuvaient les contrées
ravagées par les Barbares , et vendit
jiis(pi',uix vases sacrés pour racheter
les captifs. Le jeune Gratien, qui était,
par ses vertus , l'espoir de l'empire
et de l'Église , fut cruellement massa-
cré à Lyon, le '^5 août 585, aban-
donné de ses gens , qui se rangè-
rent du parti du tyran jNIaxime, et
ce!iîi-ci, à la tête de forces redouta-
bles , menaçait à la fois l'Italie , le
jeune Valentinien , frère de Gratien ,
cl Justine leur mère. Justine eut re-
cours à Ambroise. Le saint évêque
part aussitôt pour Trêves, où résidait
Maxime, et , sans vouloir communi-
quer avec lui dans les choses spiri-
tuelles, parce qu'il était coupable du
meurtre de Gratien , il conclut , après
une année de séjour, un traité qui as-
surait la paix à l'Italie. Justine , mé-
connaissant les services dont elle était
redevable à S. Ambroise , profita de
cette paix pour lui susciter mille tra-
verses, en exigeant de lui qu'il permît
aux ariens d'avoir une égli,se à Milan.
Il eut à lutter , pendant plusieurs an-
nées , contre l'audace et les intrigues
des sectaires , contre les menaces et les
persécutions de tout genre; mais le ciel,
qui se montra toujours favorable aux
pieux desseins de cet intrépide défen-
seur de la foi, lui accorda eufiu un
triomphe que promettait sa lerraclé ,
et que faisaient désii er ses vertus. Am-
broise ne fat plus inquiète' au sujet de
l'arianisme. Ce fut à cette occasion
qu'il composa, dit -on, ce beau can-
tique d'actions de grâces, ce Te Deuin,
que toutes l^s sectes chrétiennes ont
retenu; mais une sage critique nous
porte à croire que cet hymne, si jus-
tement admire', est d'un auteur phis
récent , dont le nom ne nous a point
été conservé. Anibroise profita du re-
pos dont i! jouissait pour travailler à
plusieurs ouvrages utiles. Il eut la con-
solation de donner alors le baptême à
Augustin , qui fut admis au sacrement
des chrétiens , avec son fils, le jeune
Adeodat , et son ami Alypius. Cepen-
dant Maxime menaça encore une fois
l'Italie , et Ambroise , député vers lui,
par l'impératrice Justine, ne put , pour
cette fois , garantir cette contrée. Maxi-
me passa les Alpes. Théodose , suc-
cesseur de Valens , après plusieurs
avantages remportés sur Maxime , qui
fut tué en 588 , rétablit Valentinien
dans ses états, et dans ceux que Gra-
tien avait occupes. 11 vint à Milan , et
fut reçu , par le peuple et par l'évè-
que , comme un libérateur. Deux ans
s'étaient à peine écoulés depuis ces
heureux «véuements , que le cœur du
saint évêque fut déchiré par la nou-
velle du massacre de Thessalonique,
ordonné par Théodose ( F. ce nom ).
Ambroise, qui avait obtenu autrefois
la grâce des habitants de cette \-ille ,
apprenant la manière terrible dont ils
venaient d'expier cette seconde sédi-
tion , fut accablé de la plus profonde
douleur. Dans son prouiier chagrin ,
il s'abstient d'écrire à Théodose , qui
avait quitté Milan quelques jours
avant le massacre. Il sort de la viile,
souffrant et malade , et va se livrer ,
ditnâ le silence de la campagne , au
AMB 5i
chagrin qui l'accable , et au regret de
n'avoir pas empêché l'exécution de
cet ordre barbare. Enfin , au bout de
quelques jours , il écrit à Théodose
une kstre touchante , où il lui repré-
sente l'énormité de son crime , et lui
dit que le péché ne s'efKice que par
les larmes. H l'avertit qu'il ne peut
offrir le sacrifice , si Théodose veut y
assister. Cependant , quelque temps
après, l'empereur, de retour à Milan,
\oulut se présenter à l'église où offi-
ciait S. Ambroise. Le saint pontife s'a-
vance vers lui pour le retenir, et lui
représente que , d'après les règles de
la discipline , il ne lui est pas permis
d'entrer dans le temple. L'empereur
cherche à excuser son crime ; il rap-
pelle le pardon accordé autrefois au
roi David. « Vous l'avez imilé dans
» son péché, répond Ambroise, imi-
» tez-le dans sa pénitence. » Théo-
dose s'abstint d'aller à l'église pen-
dant huit mois entiers; il se soumit
à la pénitence pnbhque, et , pour pré-
venir dans la suite les funestes effets
de la colère des princes , d signa , à
la demande d'Ambroise , une loi qui
ordonnait de suspendre , pendant
trente jours après la sentence , les
exécutions des coupables condamnés à
la peine capitale. Théodose, récon-
cilié avec l'Eglise, fut toujours, depuis,
l'ami de S. Ambroise; il vengea, par-
la défaite du tyran Eugène , la mort
du jeune Valentinien , assassiné sur
les bords du Rhône; et, avant d'êtr«
attaqué de la maladie dont il mourut ,
il fit venir de Consfantinople deux
de ses enfants, Honorius et Placidie,
qui se trouvaient dans cette ville
taudis qu'Arcadius était dans l'Orient
et les mit entre les mains du saint
évêque , le priant d'être leur père ,
comme il l'avait été des infortunés en-
fants de Valentinien P^ Ambroise
toaiba malade vei's le mois de févriet'
32 A M B
de l'an 697 ; son troupeau , alarme
pour ses jours , l'envoya conjurer d'en
demander à Dieu la prolongation. On
regardait l'Italie comme menace'ed'une
ruine totale , par la mort d'un ëvêque
respecte' des barbares eux-mêmes,
chéri du peuple , des princes et des
empereurs , et dont l'autorité impo-
sait aux lùc'chants et étendait le
règne de la vertu. Le vendredi saint ,
troisième jour d'avril , le saint e'vê-
que , quoique fatigue par une mala-
ladie longue et douloureuse , demeura
en prière depuis cinq heures du soir
j;;squ'après minuit, et il expira , âge
d'environ 5"] ans, ayant occupé pen-
dant vingt-trois ans le sic'ge de INIilan,
Son corps fut porle dans la grande
église de celte ville , nommée depuis
la Basilique Amhroisienne. Il s'était
montré toute sa vie doux , compa-
tissant, affable, sensible à l'amitié,
jnodeste , ennemi du faste et de k
gTandeur , et n'usant de son n'éditquc
pour l'avantage des autres. Ses écrits
portent l'empreinte de son caractère;
il v règne beaucoup de douceur et
d'onction ; mais, au besoin, il sait s'é-
lever avec force et majesté. Son style
est sans doute bien éloigné de la pu-
reté des écrivains du beau siècle d'Au-
guste; mais il est toujours agréable et
animé , et il faut se rappeler que S.
Ambioise a vécu sur la fin du 4'^« siè-
cle. La morale en est j)ure ; on admire
surtout son explication du Psaume
1 1 8. Ses Traités de la Firginilé, de
Y Education des Fierges, et des Of-
fices , lenforreent les plus belles maxi-
mes. C'est à tort qu'on a voulu établir
une comparaison entre ce dernier ou-
vrage et les Offices de Cicéron.Qiiant
aux écrits dngmatiques d'Ambroise ,
on les cite souvent dans l'église, où
leur autorité est d'un grand poids. La
moilleiue édition dos OEuvres de S.
Amhroisc, est celle des Bcnc'dictins ,
AMB
( J. du Frisclie et N. le Nourri ) 1 toL
in-fol. , 1 686 -90. Les ouvrages de
S. Ambroise , traduits en fiançais ,
sont : L le Traité du Bien de la
Mort , Paris , Sim. Yostre , in-8". ,
gothique, sans date; 11. les trois
Discours, intitulés , les Vierges , avec
la sévère réprimande que fait S. Am-
broise à une religieuse qui avait
forfait à son honneur , trad. en
français , avec des annotations , par
J. Bertaut, abbé de N. D. d'Au-
naj , 1604, iu- 12. Le P. Duranti de
Bonrecueil en a donné une nouvelle
traduction ( P\ Duranti ). IlL Trois
harangues ( dont une de Svramache
et deux de S. Ambroise) sur le sujet
de la démolition de Vautel de la
Fictoire , 1 659 , in-i 2 ; i V. la Mo-
rale des Ecclésiastiques , etc. , ou
Traduction des Offices de S. Am-
broise ( par l'abbé Morvan de Belle-
garde ) , 1691 , in- 12. Le traducteur
avait d'abord imblié ce volume sous
le titre de : Devoirs de VHonnéte
Homme et du Chrétien , 1 (»89 , m-
12 ; V. Lettres ( F. Duranti ) ; VL
Lettres aux Souverains , 1787. Go-
defroy Hermanta publié , en 1678,
une Fie de S. Ambroise , d'après
celle qui a été composée par Paulin,
prêtre de Milan , contemporain de
S. Ambroise , qu'il ne iaut pas confon-
dre avec S. Paulin. C'est dans ses ou -
vrages qu'on lira avec intérêt tout ce
qui conc( rne un des Pères que l'église
latine a placé au premier rang , qui a
été le modèle des évêques de son temps,
qui eut S. Augustin pour disciple, des
monarques pour amis , pour sœur
Stc. IMarceline , cl pour frère S. Saty-
rus. C — T.
AMBROISE LE CAMALDULE,
naquit, en 1578, à Portico, dans U
Romagne , de l'illustre famille des
Traversari, de Ravenne. Il se fil ca-
lualdulcà '22 ans, et devint général de
A M B
cle son ordre , en 1 45 1 . Son mérite le
fît connaître d'Eugène IV, qui l'envoya
au concile de Bàle, à celui de Ferrare,
où il harangua l'empereur Palëologue,
en grec, avec tant de facilite, qu'il sur-
prit les Grecs eux-mêmes, et, eufîu,
à celui de Florence, où il fut charge de
dresser le décret d'union entre les
deux églises. Tant de services l'au-
raient élevé à la pourpre, si sa mort,
arrivée à Florence, en i459, n'eût
prévenu les dispositions du pape, qni
lui destinait cette dignité. Ambroi^e
réunissait les vertus d'un bon reli-
gieux et les talents d'un savant esti-
mable. Il avait entrepris, par ordre
d'Eugène IV, la réforme de plusieurs
couvents des deux sexes , tombés dans
un extrême relâchement. Ses visites,
ses travaux, les traverses qu'il eut à
essuyer dans cette péniJDle mission,
sont décrits , avec beaucoup de sincé-
rité , dans son Hodœporicon , qui
contient des anecdotes très-piquantes,
et oîi il est quelquefois obligé d'expri-
mer en grec certains désordres qu'il
lie voulait pas mettre sous les veux de
toute sorte de lecteurs ; Florence, 1 45 1
et 1452, in-4"., rare; iG78,in-8''.
Les autres ouvrages de ce savant re-
ligieux , sont des traductions latines :
I. de YEpîlre de S. Chrysostôme à
Stagrre, contre les délracleurs de
la vie monastique, x4lost, 1687 j
If. de la Hiérarchie sacrée de S. De-
nis l'aréopagile , i4g2 ; III. de
V Echelle spirituelle de S. Jean Cli-
maque , à la suite du Traité de Cassien :
De Institutis Cœnohiorum , Cologne ,
1 540 , in-fol. ; IV. du Traité de
l'Immortalité des Esprits , d'.^neas
le platonique , i645 , in-4''. ; V. du
Traité de Manuel Calecas, contre
les erreurs des Grecs, Genève ,
i5()2 , in-8°. ; VI. des Discours de
S.Ephrem, Florence, 1 48 1 , in-fol.;
Brixcn, 1490; Paris, i 5o5 ^ in-4^ ;
1 1.
A M B 33
Padoue, 1 585 , in-8''. Il est le premier
qui ait publiéquelque chose de ce saint.
D. ]\Iartenne a donné, dans le 5". tome
de V Amplissima collectio , ses Let-
tres, distribuées en 20 livres. La plu-
part roulent sur les affaires de sou or-
dre. On y trouve cependant quelques
traits curieux sur la vie et le caractère
des savants de son temps. Cdles qui
sont adressées au pape Eusçne ont
plus d'intérêt, à cause des particulari-
tés qu'elles contiennent surîci conciles
de Bàle et de Florence. T - d.
AMBR0I:5E de Lomijcz ( le Père ),
capucin , dont le nom de famille était
LA PEiRiE , né à Lombcz , \t -lo
mars 1 708, successivement professeur
de théologie , gardien et délîniteur de
son ordre , eut de grands talents pour
la direction des amcs , triompha , à
force d'humilité, d'un amour-propre
trop sensible, et d'un désir excessif de
l'estime pidihque, et mourut, en odeur
de sainteté, le lô octobre 1 778, à St.-
Sauveur, près de Barègcs, à 70. ans.
On a de lui : I. Traité de la paix in-
térieure, in-i2, réimprimé plusieurs
fois ; II. Lettres spirituelles sur la
paix intérieure, et autres sujets de
piété, l'-^dG, in-i'3.. A. B — t.
AMBUOSINI (Barthelemi), mé-
decin , et professeur de botanique à
l'université de Bologne, oii il mourut
en jGS-j. Les biographes ne doivent
guère parler de lui qu.î comme d'un
botaniste, et les ouvrages qu'il a com-
posés sur cette science , méritent des
éloges , savoir : De Capsicorum va-
rietate cum suis iconihus; accessit
panacea ex herhis quœ à sanctis
denoniinanlur , Bononias , iG5o ,
in- 12. Cependant, il fut aussi méde-
cin praticien distingué , et , dans la
peste qui, en 1 65 o, affligea sa patrie,
il rendit de grands services, ce qui
lui fournit l'occasion de pubher uu
ouvrage sur ce sujet : Modo, è facile
5
54 A M B
■préserva, è ciird di peste à henef.clo
de popolo di Bologna, j65i ,iii-4°'
La médecine lui doit encore plusieurs
Traites : Theorica medicina in tabu-
las , velnd digesta, ciim aliquol con-
suhationibus ,Bonom3e , i65u,in-4°.;
De pidsibus , ibid., i645, in-4".; De
exteniis malis opusculum, ib., i656;
De urinis, etc. Mais, si l'on veut ap-
précier surtout le mérite d'Aml)rosini,
U faut jeter les yeux sur quelques ou-
vraçres d'Aldrovaude, dont il a été l'é-
diteur , particulièrement les tomes 1 a ,
X, XI et XIÎ. — Son frère, Ambrosini
( Hyacinthe ), lui succéda dans sa
chargede directeur du jardinlîotanique
de Bologne, en 1637 , et en publia le
catalogue : Florins Bononiœ stiidio-
soriim consitus , in- 4". ; ppu de temps
avant sa mort , il fit paraître l'ouvrage
suivaîit : Phjtologia, hoc est., de
plaiitis partis primœ tomus primas ,
in qiio herbarum nostro sœcido des-
criptarwn nomina œqui\>oca, sjno-
nyma ac etymologica im>estiganlur,
addiiis aliquot planlarum vivis ico-
nibiis, lexicoque botanico, cum indice
trilingui , Bononia; , 1G66, in- fol.
Ce Dictionnaire , que l'on peut quel-
quefois consulter pour les synonymes ,
est superficiel, et les étymologics qu'il
donne sont très-hasardécs. Le 2"'. vo-
lume devait traiter des arbres, mais
n'a jamais paru. Les deux Ambrosini
cultivaient la botanique avant que cette
science eût pris , sous Linné , une
marche systématique, et surtout eût re-
çu de ce grand bomme une langue fixe
et convenable : on était alors embarrassé
continuellement par les dénomina-
tions, et , débrouiller à cet égard le
chaos des auteurs, était, sans contre-
dit , bien ])lus difficile que d'obser-
ver la nature elle-même. Bassi a dé-
dié un genre de plantes à la mémoire
des deux frères Ambrosius , ou Am-
ferosini, sous le uym iX Ambrosinia.
AMB
Ce genre fait partie de la famille des
aroides. C. et A — n.
AMBROSIUS AURÉLIANLS, ou,
selon quelques écrivains, AUREfdA-
NUS AMBROSIUS, fut général, et
ensuite roi de la Grande-Bretagne. On
a varié sur sa naissance ; quelques-uns
prétendent qu'il fut fils de Constantiu-
le- Soldat, élu emperem" dans cette
île, par une armée romaine , en 407 ;
mais, selon l'opinion la plus accréditée,
il eut pour père un des rois que les
Bretons se donnèrent après le départ
desRomains, dont il tirait son origine. Il
fut élevé à la cour d'Aldroën , roi de
l'Armorique, d'où il revint en 4^7»
avec 1 0,000 hommes , pour secourir
ses compatriotes contre les Saxons,
que Vortigerue avait appelés dans le
pays. Ses succès furent si grands,
qu'après la mort ou l'abdication de
Vortigcrne, il fut élu souverain de
toute i'Angh terre. Elevé à ce rang su-
prême, il se distingua , tant par sa va-
leur contre les ennemis étrangers , que
par son habileté dans le gouverne-
ment. Arthur , si fameux dans les
annales anglaises , apprit sous lui
l'art de la guerre , et remporta plu-
sieurs victoires sur les Saxons septen-
trionaux. Ce])endant , ses succès furent
mêlés de quelques revers; la S', année
de sou règne, Ambrosius fut battu
par le Saxon Hengist, et par Eck,
son fils. Quatre années après, ilccm-
battit , à la tête de toutes les forces de
l'île, d'autres Saxons qui y avaient
fait une invasion, sous la conduite
d'Ella. L'action fut sanglante et indé-
cise; mais, peu après, Ambrosius vain-
quit Hengist. GcollVoi de Montmou.th
rapporte qu'Ambrosius mourut à Win-
chester , du poison que lui dinna un
Saxon , qui s'offrit à lui comme méde-
cin; mais on croit plutôt qu'il fut tué
dans une grande bataille qu'd livra,
en 5 08, à Gcrdic, chef des Saxon*
AME
occidentaux. Geoffroi de Montrnoath
aUiil)ue à Âmbrosius l'érection* d'un
fameux monument, dit Stone-IIense ,
en l'honneur de plusieurs Bretons d un
rang distingue , que Hengist avait fait
massacrer. D— t.
AMÉDÉE , les comtes et ducs de
Savoie, p^oy. Savoie (maison de ).
AMELGARD , prêtre à Liège , vi-
vait à la fin du i5'. siècle, et a écrit :
De relus geslis CaroU Fil histo-
riariim libr. F ; et De rébus gestis
Ludovici XI ^ Francorum régis , his-
toriarum libr. L. Ces deux ouvrages
sont encore inédits : le manuscrit se
trouve dans la Bibliothèque impériale
de Paris. Charles VII chargea Amel-
gardde la révision du procès de Jeanne
d'Arc , lorsque les Anglais se furent
retires du royaume , et celui-ci com-
posa un Livre de Vexamen de cette
œuvre d'iniquité. G^t.
AMÉLIE ( Anne ) , princesse de
Prusse, sœur de Frédéric II , née le
9 novembre 1720 , fut non moins
distinguée par ses vertus que par ses
talents , son goût pour les arts , et sur-
tout par son habileté en musique : elle
fit de tels progrès dans l'étude de la
fugue et du contre-point , sous la direc-
tion du compositeur de la cour , Kirn-
berger , qu'elle composa bientôt elle-
même des morceaux remarquables.
Elle mit en musique , pour lutter contre
le célèbre Graun , la mort du Messie ,
de Ramier , et cette composition est
pleine de verve et d'harmonie : elle ex-
cellait sur le clavier. Unissant à des
goûts si nobles une piété et une bien-
faisance rares , elle retranchait conti-
nuellement sur ses dépenses de toilette,
afin de pouvoir donner davantage aux
pauvres. Elle mourut à Berlin , le 3o
mars 1787. G — t.
AMÉLIER-DE-TOULOUSE
( GuiLLEM ), troubadour du \i\ siè-
cle, a laisse des Sirvantes { espèce de
AME #35
satires) adressées au comte d'Astanac,
contre les mœurs du siècle, sur la dé-
cadence de la noblesse et de la jon-
glerie, sur la tyrannie et l'avarice des
grands, contre le clergé et les moines:
ces pièces , plus hardies que spirituel-
les , peuvent servir à faire connaître les
mœurs du temps. P — x.
AMÉLINE ( Claude ) , né à Paris,
vers 1629, d'un procurcurau Châtelet,
suivit quelque temps le barreau , se dé-
goûta ensuite du monde, et entra dans
la congrégation de l'Oratoire , le 'ig
avril 1660. Ce ne fut que malgré lui
qu'il fut fait grand-chantre de l'église
de Paris , dignité qu'il permuta avec
Claude Joli , pour celle de grand-ar-
chidiacre ; il mourut à Paris , en sep-
tembre 1 7 oG, âgé de 7 7 ans. Il a laissé :
I. un Traité de la P^olonté ^ Paris,
1 684 , in- 1 -2 ; II. Traité de l'amour
du souverain bien , Paris , iGqq ,
in- 12. Quelques-uns lui attribuent
V Art de vivre heureux , Paris , 1 690,
in- 1 -2 , que d'autres croient être de
Louis Pascal. C.T-y.
AMELIUS, philosophe éclectique ,
natif de Toscane , fut contemporain de
Porphyre, et, d'aboid, eut pour maître
Lysimaque , qui lui donna les principes
delà philosophie stoïcienne. Les écrits
de INuménius lui firent enstiite connaî-
tre et adopter les dogmes de Platon j
mais, enfin , il se rendit disciple de
Plotin , vers Tan 246 de l'ère vulgaire.
Pendant vingt-quatre ans , il n'aban-
donna point ce maître, et ne l'eût sans
doute jamais quitté , si Plotin , pour
raison de santé, ne se fût retiré dans la
Campanie. Amélius , alors , alla s'établir
à Apamée en Syrie. C'est sans doute son
long séjour dans cette ville qui a induit
Suidas en erreur, en lui persuadant
qu' Amélius y avait pris naissance. Le
mot Amélius , en grec , signifie négli-
gent. Jamais défaut ne fut plus éloigné
du caractère du philosophe toscan j
5..
6 ^ AME
aussi Porpliyre lapporte-t-il qu'il
aimait bien mieux être appelé Amé-
rius , et c'est sous ce deruier nom
qu'Eunape le désigne dans les Vies des
sophistes grecs. Ses disciples lui don-
nèrent aussi l'e'pithète de noble. Amc-
lius composa près de cent Traitc's, dont
aucun n'est panenu jusqu'à nous. L'un
de ces Traites avait pour objet la diire-
rcucc des doctrines de Nume'nius et
de Plotin. 11 mit en ordre les ouvrages
de ce dernier , dont il possédait si bien
les principes, que, souvent, Plotin le
chargeait de répondre aux arguments
de ses disciples ; et , ce qui fera con-
naître plus particulièrement le génie
de l'éclectisme . Eusèbe, Théodoret et
S. Cyrille rapportent un passage d'A-
mélius , dans lequel il cite le commen-
cement de VE^>aJlgile de S. Jean , eu
confirmation de la doctrine de Platon ,
concernant la nature divine. Amélius
eut un fils adoptif , nommé Justin
Hesychius , auquel il légua tous ses
écrits. On ignore l'époque et le lieu de
sa mort. D. L .
AMELOT DE LA HOUSSAYE
( Nicolas , et , selon quelques-uns ,
Abraham Nicolas ) , né à Orléans ,
en février 1654, fut, en 1G69, secré-
taire du président Saint-André ( am-
bassadeur de France à Venise ) , et de-
meura quelques années dans cette ville.
On ignore les autres particularités de
sa vie ; seulement , on sait qu'il mourut
à Paris , le 8 déc. i ■y oG, et qu'il fut en-
terré à St.-Ger vais. L'emploi qu'il avait
rempli à Venise lui fit diriger, pen-
dant un temps , ses études du côté de
la politique ; il passa une grande par-
tie de sa vie à composer des ouvrages ,
ou à faire des traductions. Malgré ses
travaux, il serait tombé dans la mi-
sère, sans les secours que lui donnait
un abbé. « Le style d'Amelot, dit Ni-
» ceron, est un peu dur; mais sa fidé-
V lilé, sou exactitude, et la solidité
AME
p de son jugement, dédommagent de
» ce défaut. » Voici la liste de ses
principaux écrits : L Histoire du gou-
tfernement de Fenise , avec le sup-
plément et l'examen de la liberté
originaire ( traité traduit de l'italien
de Marc Velferus ) , avec des notes
historiques et politiques , Amster-
dam , 1705, 3 vol. in-12; cet ou-
vrage , rempli de traits satiriques ,
mais cependant très - propre à faire
connaître le gouvernement de Venise,
déplut au sénat, qui s'en plaignit à la
cour de France ; on prétend même que
l'auteur fut enfermé à la Bastille; IL
Histoire du concile de Trente de
fra Paolo Sarpi, traduite par le sieur
de la Mothe Josseval. Amclot , qui s'est
caché ici sous ce dernier nom, ne fit
pas sa traduction sur l'original italien ;
mais sur la version latine , peu fidèle,
de Newton : aussi cette traduction a-
l-elle été efiacée par celle du père
Le Courrayer. UL L'Homme de cour,
traduit de l'espagnol de Balthazar Gra •
cian, 1684, i»-4"- '■> 1^ P- Courbeville
en a donné une nouvelle traduction en
17 5o, in-12 , sous le titre de Maxi-
mes de Balthazar Gracian; IV. le
Prince , de Nicolas Machiavel , tra-
duit de l'italien , avec des remarques ,
iG8">, 1G8G, in- 12. Amelot a pré-
tendu justifier Machiavel, en soutenant
qu'il dit ce que les princes font , et non
ce qu'ils doivent faire , et qu'ainsi
son ouvrage n'est qu'une ci'itique dr
leur politique ; opinion que Niceron
traite de paradoxe, et La Harpe, de
rêverie. V. La Morale de Tacite ,
1686, lu- 12; le mal qu'il disait de
la traduction de Tacite par Perrot
d'Ablancourt, lui attira une vive cri-
tique de la part de Fremont d'Ablan-
court, neveu de Perrot, qui v défiait
Amelot de faire une meilleure traduc-
tion ; V. Tacite, avec des notes politi-
ques et historiques, 1G92 et 17 55,
AME
îOVol.m-125 les 4 premiers vol, sont
d'Araelot , et contiennent la traduction
des 9 premiers livres qui nous restent
des Annales de Tacite. Les 6 autres-
vol, sont de François Bruys , et sont
inférieurs aux premiers; VIL Lettres
du cardinal d'Ossat, Amsterdam,
1 708, 5 vol. in-i 2 j VIIL Mémoires
historiques , politiques , critiques et
littéraires, i7'22, 2 vol., in -8".;
1757, 5 vol. in-i2. M, Coqueley en
a donne' une nouvelle édition , 1741?
3 vol, in- 12, « Amelot , dit le père
î) Niceron, n'est pas certainement l'au-
» teur de toutl'ouvi'age , qui ne futim-
» primé qu'après sa mort, n Ces mé-
moires sont très-fautifs ; ils sont dis-
posés par ordre alphabétique; mais
ce recueil est incomplet, puisqu'il ne
va pas jusqu'au milieu de l'alphabet ;
IX, Histoire de Philippe- Guillaume
de Nassau , prince d'Orange, et
d' Eléonore-Charlotte de Bourbon,
sa femme, avec des notes politiques ,
littéraires et critiques, 1754, 2 vol.
in- 1 2 ; cet ouvrage fut publiépar l'abbé
vSepher; X. Abrégé du procès fait
aux Juifs de Metz, avec plusieurs
Arrêts du parlement , 1670, in-i8;
cet ouvrage est généralement attribué
à Amelot; on en trouve la réfutation
dans la Bibliothèque critique de Ri-
chard Simon , tom. \". , p. 109.
Pour les autres ouvrages d'Amelot, on
peut consulter le tom, XXXV des Mé-
moires de Niceron. A. B — t,
AMELOTTE (Denis), prêtre de
l'Oratoire , né à Saintes, en 1606 , en-
tra dans cette congrégation en iG5o, et
mourut à Paris, le 7 oct, 1678. La part
qu'il eut au despotisme du P, Bour-
going , général de l'Oratoire , le rendit
odieux à ses confrères. Son attache-
ment aux principes de S. Augustin et
de S. Thomas ne l'empêcha pas de
marquer la plus forte prévention con-
tre les théologiens de Port-Royal. S'il
A >ï E Ô7
est vrai que, dans la guerre qu'il leur
fit , son projet fut de s'avancer dans
l'Église , il manqua son but; car toutes
ses démarches pour obtenir l'eVêchc
de Sarlat furent inutiles. ISicole se
chargea de venger ses collègues. On
dit que , pour peindre son original
au naturel, il alla lui faire une visite,
afin de mieux rendre son air grotes-
que , et les grimaces dont il accompa-
gnait tous ses mouvements. Le père
Amelotte s'en vengea en détournant le
chancelier Séguier , dont il était le
théologien , d'accorder le privilège
pour la traduction du Nouveau Tes-
tamertt, connu sous le nom de Mans.
Il craignait d'ailleurs que cette traduc-
tion ne nuisît à celle qu'il était sur le
point de publier lui-même , et qui
parut en 1666-67 et 68 , 4 '^'oh in-8''.
reliés en 3, Dans l'épître dédicatoire à
M. de Péuefixe , archevêque de Paris ,
MM, de Port-Royal, sans être nom-
més , se trouvaient peints des plus
noires couleurs. Cette cpître fut sup-
primée après la mort de l'auteur et du
Mécène , et remplacée , dans l'édition
de 1688, 2 vol. in-4''., par une dé-
dicace différente à M. de Harlay , suc-
cesseur de ce dernier. Cette traduc-
tion, sur laquelle est principalement
fondée la réputation du P. Amelotte,
a été souvent réimprimée avec des
notes ou sans notes : elle était mieux
éciite qu'aucune de celles qui l'avaient
précédée. Le protestant Conrart , re-
gardé comme un des hommes dr
France qui savaient le mieux leui-
langue, l'avait revue pour le style.
Aussi, quoiqu'elle manque d'exacti-
tude, quoique les notes pèchent sou-
vent contre les règles de la critique ,
elle fut autrefois fort en vogue , et elle
est encore aujourd'hui d'un usage assez
général. On sut mauvais gré à l'auteur
d'avoir représenté l'invitation de quel-
ques évêques pour la composer; com-
58 AME
lue un ordre du clergp de Franc?.
Port-Royal l'accusa de plaçât; il est
vrai qu'il avait eu communication delà
traduction manuscrite de ces savants
solitaires. Richard Simon, son confrè-
re , lui reprocha de s'être vante' , dans
sa préface, d'avoir consulte tous les
manuscrits de l'Europe. 11 est certain ,
et sa correspondance en fait foi , qu'il
s'était donné beaucoup de peines et de
soins pour se procurer les différentes
leçons des mcilieurs manuscrits conser-
vés dans les principaux dépots littérai-
res de France et des pays étrangers. Le
père Amelotte avait composé quelques
écrits sur les affaires du jansénisme, qui
ne valent pas la peine d'être tirés de
l'oubli; les Vies du P.deCondren et de
la sœur Marguerite du Saint-Sacre-
ment, qui sont pleines de mysticité;
plusieurs livres de dévotion , dont
quelques-uns sont restés entre les
mains des fidèles. T — -d.
AMELUNGHI (Jérôme), poète
burlesque italien , du \Cf. siècle, était
de Fisc , et sans doute bossu ; car on
l'appelle il Gohho da Pisa , le bossu
de Pise.On a de lui un poème, intitulé
la Gigantea, la Guerre des Géants,
qu'U publia sous le nom de Fora-
bosco, à Florence, en i56t), in-12,
avec un autre poème du même genre,
intitulé la Nanea . la Guerre des
Nains, d'un certain Francesco Aminta,
d'ailleurs tout -à -fait inconnu. Ces
poèmes ont été réimprimés à Florence,
en 1612, in- 1 1 , avec la Guerra de
Mostri, d'Antoine Gra/zini , dit le
Lasca. Ce sont les premières produc-
tions d'un genre dans lequel les Ita-
liens ont excellé; mais auquel ils se
sont trop livrés, pour l'honneur de leur
littérature. On trouve aussi, parmi les
chants ducarn aval, Cnnti Carnascia-
îeschi, un chaut ori-inald'Amelunghi,
sous le titre de gli ôcolari. les Éco-
liers. G— E.
AME
AMENTA ( Nicolas ) , né à Na-
ples , en 1 639 , fut , pendant ses qua-
torze premières années , affligé d'une
maladie des yeux, qui le força de
rester, tout ce temps, enfermé dans
une chambre, sans voir le jour. Dès
qu'il en fut guéri , il fit des progrès
rapides dans ses études , fut reçu
docteur en droit , et se distingua
bientôt , à Naplcs , dans la profession
d'avocat. Il fit son délassement de la
culture des lettres, et s'appliqua sur-
tout à l'étude de la langue toscane,
qu'il écrivit avec une grande pureté ,
et sur laquelle il a laissé des Obser-
vations , et d'autres écrits. On a de
lui : I. sept comédies en prose, savoir :
la Costanza , il Força , la Fante ,
la Somiglianza , la Carlotta , la
Giustina , et le Gemelle , ([\\e l'on
compte parmi les meilleures de son
temps ; II. Rapporti di Farnaso, etc.,
i''. partie , qui n'a pas été sui-
vie d'une 1''. , Naples , 1710, m-!y°.
Ces Rapports sont dans le genre des
liagguagli di Pamaso de Boccaliui ,
sinon que ceux-ci roulent souvent sur
la politique et sur la morale , au
lieu que ceux d'Amenta n'ont pour
objet que l'histoire littéraire et des
matières d'érudition ; 111. des Obser-
vations sur II Torto e'I dritto del
non si pub , etc., ouvra'ge sur la lan-
gue italienne , par le P. Daniel Bartoli,
sous le nom de Ferrante Longobardi,
publiées avec 1 ouvrage même , dans
l'édition de Naples , 1717, in-8". , et
réimprimées de même avec des re-
marques de l'abbé Cito ; Naples ,
1 7.18, in-8". ; I V^. délia Lingua nobile
d'Jtalia, etc. , autre ouvrage sur la
langue , divisé en deux parties , pu-
blié à Naples, en 1725 , in-4*'.; V.
les Vies de deux Hommes de lettres,
monsignor Scipion Pasquale de Co-
senza , et I>ionardo , poète napoli-
tain; VJ. vingl-qurtlrc Cupilcîi, (M
AME
Pièces satiriques , dans le genre des
Capiloli dn Berni, du Lasca, et auti-es
poètes biii'iesqiies , Naples , 1721 ,
in- 12.; VII. des Rime, ou Poésies
diverses , éparses dans dilFerenls re-
cueils. Amenta mourut à Naples , le 2 1
juillet 1719. G — E.
AMEHBACH ( ViTus ) , natif de
Wendingen, en Bavière, fit ses études
de philosophie , de droit et de the'o-
logie , à Wittenberg , et se l'augea
parmi les sectateurs de Luther ; mais ,
de retour dans sa ])atrie , il rentra
dans le sein de l'Eglise catholique ,
devint professeur de philosophie à
lugolstadt, et y mourut, âge' de 70
ans, vers 1557. ^^"^ ouvrages phi-
losophiques sont, un livre : De anima;
De philosophiâ naturali , etc. anti-
paradoxa , cinn oralinnibus de laii-
dihus, depatrid, et de ratione stu-
diorum ; il publia des Commentaires
sur les OJfices de C/cé'Vo/i, et sur le
Discours pour le poète Archias; sur
les Poèmes de Pjthagore et de Pho-
cjlide ; sur les Tristes d'Ovide , et
sur l'Art Poétique d'Horace. II tra-
duisit aussi, du grec en latin , les
Discours d'Isocrate et de Démos-
thène, le Traité de S. Chrysostôme
sur la Providence , et calxxx ^Epi-
phane sur la Foi catholique. On a
de lui , des Epigrammes , des Epi-
taphes, et plusieurs autres Pièces de
vers, qui prouvent que l'érudition
n'avait pas étouffé en lui le goût de la
poésie. N — l.
AMERBACH ( Jean), célèbre im-
primeur du iS". siècle, natif de Rut-
lingen , en Suabe , et étabh à Bâle.
On lui doit l'invention des caractères
ronds , qu'il substitua aux italiques et
aux gothiques, moins agréables à la vue,
et plus difficiles à la lecture. Il donna,
en i5o6, la i'"% édition de S. Au-
gustin, qu'il arait lui-même revue et
601-rigée, et le caractère dout il se ser-
AME 09
vit porte encore le nom de Saint-Au-
gustin. Il avait commencé le même
travail sur S. Jérôme ; mais sa mort,
arrivée en i5i5, ne lui permit pas
de l'achever. Il laissa ce soin à ses
enfants, qui remplirent ses intentions.
Les éditions de Jean Amerbach sont
estimées pour leur exactitude. — Bo-
niface Amerbach, son fi's aîné , mort
en 1 56.2 , occupa , pendant 20 ans ,
la chaire de jurisprudence à Bàle,
passa par toutes les places de la mu-
nicipalité, et jouit d'une grande répu-
tation de savoir et de probité. Il existe
de lui quelques ouvrages. On imprima,
en 1 6.59 , à Bàle , in- 4". , Bibliotheca.
Amerbachiana , etc. ; cet ouvrage ,
peu commun, est du nombre de ceux
qui servent à l'histoire de l'imprime-
rie, parce qu'il fait men^tion de plu-
sieurs anciennes éditions qii'ou ne
trouve pas facilement dans les plus
grands Catalogues. C'étaient Erasme et
Boniface Amerbach , son exécuteur
testamentaire , qui avaient jeté les pre-
miers fondements de cette Bibliothè-
que. T — D.
AMERGIN , ou AMERGINUS ,
archi- druide des anciens Scots- Ir-
landais , et Fuu des chefs de la colo-
nie Scytho-Mi'iésienne , qui, selon les
annales de ces peuples , vinrent, plu-
sieurs siècles avant J.-C. , fonder eu
Hibernie, et la monarchie suprême, et-
les dynasties subordonnées , que les
Anglais y trouvèrent encore existantes
dans les mêmes races , lors de leur pre-
mière invasion eu Irlande, l'an 1 1 70.
Amergiii avait un grand nombre de
frères , fils , ainsi que lui , d'un prince
établi dans le nord de l'Espagne ,
nommé d'abord Gallamk, mais sur-
nomn/é emphatiquement Mïleagh-
Easpain , ou le Champion d'Espa-
gne, surnom qui a fait oublier le nom
primitif, parce qu'après les Bax'des ^
les historiens l'ont employé couram-
4o AME
ment, et que, s^îlon Ifs divers idio-
mes , on a écrit et dit : Mileagh ,
Miles, Milesiiis^Milesicus. Quoique
prêtre, Amcrgin combattit aussi ar-
demment que ses frères, pour sou-
mettre l'île qu'ils étaient vernis con-
quérir. C'était même pour lui un de-
voir , énoncé avec précision parmi les
préceptes de sa doctrine.
Aris prstpositus sildoctior, aptior armis ,
a dit le savant O'Flaherty, en rendant,
par un vers latin , les deux vers hi-
berno - celtiques qui avaient ancien-
nement consacré cette maxime :
Fn scieni'e , en valeur , ministres des autels ,
Sun^eî à surpasser le reste des mortels.
Après la victoire acquise au prix du
sauf; le plus précieux, Hcber, Héré-
mon et Amergiu, survivant aux autres
fils de Mileagh, s'occupèrent de fon-
der leur établissement politique. Les
deux premiers prirent le titre de roi ,
en se partageant l'ile , sur laquelle
Hérémon ne devait pas tarder à ré-
gner seul. Le troisième ne voulut
d'autre caractère que celui de druide
suprême. Les Bardes ont dit de lui ,
dans leurs vers : « La nature l'avait
» lait poète et pliilosoplie; la loi le fit
» pontife et historien : il fléchissait ,
» devant les autels , des genoux plus
» blancs que la neige ». C'est eu ré-
pétant ces Bardes et leurs successeurs
immédiats , qu'O'Flalierty dans son
Ogygia , sir James Ware et Harris
dans leurs antiquités , O'Connor
dans ses Dissertations, O'Halloran
dans son Histoire, ont appelé Amer-
gin le premier auteur qu'ait eu l'Ir-
lande.
Primns j4mergintis gfriti-canaiau' anthor Jemof ,
"Vates , HisloricQS lejie , p<iéta , sopliu:^.
Dans une tragédie inédite , dont le
sujet est la restauration de la monar-
chie irlandaise, interrompue par une
ronspiralion pleliéicnne au premier
siècle d« notre ère , et dont la scène
AME
est à Cruacan , autrement îa Mon-
tagne de l'iVigle , chef-lieu des druides
en Irlande , un de ces druides , ex-
pliquant à un étranger dans quel sé-
jour il a porté ses pas , lui dit :
Ici , tandis quHéber et ITieureuT Hérémon
|)f vingt peuples divers formaient l.i nation ,
Leur frère Amerginus, héros . sa^e et druide ,
De nos rites sacrés devint le premier guide -
Et, dédaignant le trdne, aima mieuï enseigner
Aux uns à se soumettre , an\ antres à régner.
( Foy. les articles Mileagh , Heber,
Hérémon, etc. ) L — T — l.
AMÉRIG-VESPUCE ( Amerigo
Vespucci ) , né à Florence , le g mars
i45i, d'une famille distinguée, fut
élevé par son oncle George-Antoine
Vespuce , qui présidait à l'instruction
de la noblesse florentine, et jouissait
d'une grande réputation de savoir.
Le jeune AmeVic fit de grands pro-
grès dans la physique , l'astronomie
et la cosmographie ; telle était alors
l'éducation des nobles de Florence,
qui, pour la plupart, se destinaient
au commerce , et devaient être versés
dans toutes les sciences qui ont quel-
que rapport avec la navigation.
Comme le commerce avait contribué
à la prospérité de la république, dans
chaque famille il devait se trouver un
citovcn qui servît sa patrie dans cette
profession. .Améric fut choisi, dans la
famille des Vespuce , pour suivre
l'exemple de ses ancêtres. Il partit de
Florence, en i490i et «^ rendit en
Espagne , pour y faire le commerce.
Il se trouvait à Séville , en j 49^ ,
lorsque Christophe Colomb se prépa-
rait à entreprendre un nouveau voya-
ge , et que la passion des découvertes
commençait à enflammer la plupart
des navigateurs. Les succès de Co-
lomb reveillèrent l'émulation d'Amé-
ric , qui résolut d'abandonner les in-
térêts de son commerce, pour aller
reconnaître un monde dont l'Europe
venait d'apprendre IVxistcnce. Le
lo mai i497j il coramciiça sou prc-
AME
niier voyage , et partit de Cadix avec
ciuq vaisseaux , sous les ordres d'O-
je'da. Cette petite flotte se dirigea vers
ies îles Fortunées , et , faisant voile à
l'ouest , parvint jusqu'au continent
d'Amérique, après 3'] jours de nan-
pation : elle visita le golfe de Parias ,
l'île de Ste.-Marguerile , et côtoya la
terre ferme, dans un espace de plus de
4oo lieues. Après un voyage de 1 3
mois, elle revint en Espagne, et mouilla
à Cadix, le i 5 octobre 1 498. Ame'ric,
qui , par ses connaissances , avait
])eaucoup contribue' au succès de l'ex-
pédition , fut très-bien reçu à la cour
de Sèville. Au mois de mai 1 499 , il
repartit de Cadix pour le cap Vert ,
passa en vue des îles Canaries, et,
44 jours après son départ d'Espagne,
aborda à une terre inconnue , située
sous la zone torride , qui était la con-
tinuation de celle qu'il avait décou-
verte dans son premier voyage. Après
quelques courses le long de la côte ,
il revint à l'ile espagnole de Santo-
Domingo, où Ojeda eut des démêlés
avec les Européens, qui, six ans au-
paravant, y étaient venus avec Chris-
tophe Colomb. La flotte se dirigea en-
suite au nord, et découvrit plusieurs
îles , dont Améric fait monter le nom-
bre à plus de mille, calcul que sou
biographe se contente d'appeler une
exagération poétique. L'amiral Ojeda
voulait continuer sa route; mais les
plaintes de l'équipage le forcèrent à
j evenii" en Europe. Au retour de la
flotte , Ferdinand et IsabeUe, à qui
Améric présenta plusieurs productions
du Nouveau-Monde , lui firent l'ac-
cueil le plus flatteur. Lorsqu'on apprit
à Florence les découvertes de Ves-
piice , la république fit des réjouis-
sances, et s'honora d'avoir vu naître
un grand homme. Séduit par les
promesses d'Emmanuel, i-oi de Por-
tugal , Améric quitta le service d'Es-
A M E 4 1
pagne, et partit de Lisbonne , le
10 mai i5oi , avec trois vaisseaux
portugais. Il arriva au cap Saint-Au-
gustin , et côtoya presque tout le Brésil
jusqu'à la terre des Patagons. Assailli
par des tempêtes , il fut obligé de
revenir en Portugal, où il arriva le
7 décembre 1 5o2. Emmanuel, satisfait
de ce voyage, voulut qu' Améric en en-
treprît un autre, et, pour la quatrième
fois, le navigateur florentin s'embar-
qua le 10 mai i5o3, sur une flotte
de 6 vaisseaux , avec le projet de
trouver, par l'occident, un nouveau
chemin pour aller à Malacca. Cette ex-
pédition fut moins heureuse que les
précédentes. Après avoir perdu un
vaisseau , et couru les plus grands
dangers , la flotte portugaise entra dans
la baie de Tous-les-Saints au Brésil ,
et ne tarda pas à retourner en Europe :
Améric demeura en Portugal jusqu'en
l'année i5o6, époque de la mort de
Colomb. La cour de Séville rendait
alors de grands honneurs à ta mé-
moire de cet illustre navigateur, et
songeait à réparer la perte qu'elle ve-
nait de faire; elle rappela à son ser-
vice Améric Vespuce, qui s'embarqua
de nouveau, eu 1607 , sur une flotte
espagnole, avec le titre de premier |)ilo-
te. Pendant ce voyage, les Indes occi-
dentales commencèrent à porter le
nom du navigateur florentin , honneur
qui aurait dû être l'éservé à Colomb.
«Ainsi, dit Rayual, le premier ins-
» tant où l'Araérique fut connu du reste
» de la terre, est marqué par une in-
» justice. » Améric vécut assez long-
temps pour jouir de cette gloire usur-
pée, et pour revoir plusieurs fois le
vaste continent qui portait son nom.
Il mourut, en i5i6, au service du
Portugal. Emmanuel , pour honorer
sa mémoire , fit suspendre les restes
de son vaisseau dans la cathédrale de
Lisbonne , et Florence com])la d'hon-
42 AME
neurs sa famille. L'abbé Bandiui a pu-
blié, en 1745, I \o\.iu-^"., yilta
è Lellere di Amerigo f'espucci, etc.
Cette notice, beaucoup trop élendue, et
chargée de détails inutiles , n'est qu'un
panép;yrique continuel du navij^ateur
florentin , auquel l'historien n'hésite
pas d'accorder l'honneur d'avoir dé-
couvert l'Amérique. D'après les dates
qu'il donne des deux premiers voya-
ges d'Amcric Vespuce, et que nous
avons suivies dans cet article , il paraî-
trait que le navigateur florentin aurait
eu connaissance, le premier, du con-
tinent de l'Amériqiiej mais les auteurs
espagnols reculent de deux ans les
époques de ces deux vovages , et
placent le premier en i49<N au lieu
de 1/197. Au reste, cette question sera
discutée à l'article Christophe Co-
lomb. Tout le monde s'accorde à
dire qu'Améric ne commanda jamais
en chef une expédition , qu'il ne
voyagea qu'eu qualité de géographe
et de pilote , et qu'il ne partit pom'
iaire des découvertes qu'après le re-
tour de ChristopheColomb. Améric dut
sans doute sa gloire à son mérite , à
ses travaux; mais il dut aussi quc'que
chose à son caractère , et principale-
ment à la fortune qui se mclc de tout.
Tandis que Colomb accusait haute-
ment ses envieux , et que sa gloire
importunait les maîtres de laCasliile ,
Améric , modeste et paisible , ne donna
point d'ombrage aux rois ni à ses ri-
vaux ; la moitié de la terre prit son
nom , sans qu'd eût cherché cet hon-
neur, et sans que l'envie pût y prendre
garde. Améric Vespuce a laissé un
Journal de quatre de ses voyages ,
imprimé en latin, Paris , 1 5").i; liile,
1 555 , et ensuite traduit de l'italien en
français , Paris , 1 5 1 9. On a imprimé
à Florence, en 1 5 16 , quelques-unes
de ses Lettres , en italien , petit in-4°.
de 22 feuillets , tiré à très-petit nom-
AME
bre , et sur lequel on peut consulter ]&
Répertoire de Bibliographies spé-
ciales, etc., de M. Peignot , 1810,
in-S". , p. iSg. Ces lettres, adressées
à Pierre Soderini et à Laurent de
Médicis, annoncent un homme supé-
rieur dans les connaissances de la navi-
gation. L'académie de Cortone , sur la
fin du dernier siècle, a proposé un
prix au meilleur discours sur les titres
qu'Améric avait eus pour donner son
nom au Nouveau-Monde, elle P.Ca-
novai a obtenu ce prix. M — d.
AMERVAL , ou plutôt AMER LAN,
( Eloy d' ) , né à Bethune , vers la fin
du 1 4^ siècle, était maître des enfants-
de-chœnr , dans sa ville natale. Cet
auteur n'est connu que par un ouvrage
rare et curieux , intitulé : Le Livre de
la Déahlerie , en rimes et par per-
sonnaiges, Paris, 1 5o8, in-fol. ; 1 55 1,
in-4''. H est divisé en dt ux partiesj
les deux principaux personnages sont
Lucifer et Satan , qui rapportent, tout
au long, et sans rien requérir , les
ahuz,faultes et péchiez que les hom-
mes commettent journellement. Les
discours des deux démons sont ap-
puvés de passages tirés , tant de l'Ecri-
ture-Saiute, que des anciens poètes, et
enfinde toute l'éruditiondu 1 5". siècle.
R— T.
AMES ( Guillaume ) , théologien
anglais , né à Norfolk , en 1 5^6 ; sou
zèle pour le calvinisme l'obligea de se
réfugier en Hollande, où il occupa , pen-
dant 1 2 ans , la place de professeur en
théologie de l'iniiversité de Fraueker.
11 mourut à Rotterdam , en ■ 655. Ou
a de lui un grand nombre d'ouvrages ,
pirmi lesquels on distingue les sui-
vants : L Puritanismus anglicanus ,
in-8'- , 1610; et, en anglais, Londres',
1 64 i ; 1 L Medulla theologica, in- 1 2,
Franeker , 1623 ; Amsterdam , 1627,
1628,1654, 1641 ;et, en anglais,
Londres , m-12 ^ IIL De coiisci<in'
AME
f/rt, etc., Amsl. , t63o, i65i, i643,
iu-i2;et, en anglais, Londres, in-4".
1 643 ; IV. Dejv.GJJStratio logicœverœ^
in-iQi,Lugd. Bat., i652;V\ Tech-
nometria , Amsterdam , in-8°. i632 ;
\'I. Traité contrôles cérémonies hu-
maines observées dans le culte di-
vin,in-^.", 1 655. Les autres ouvrap,es
de G. Ames sont des écrits de contro-
verse contre le cardinal Rellarmin et
Je tliëologien Greviuchovius. 11 était
tellement pre'venu en faveur de sa
secte , que , dans son Puritanismus
anglicanus, il semble regarder les pu-
ritains comme les seuls honnêtes gens
de l'Angleterre. X — w.
AMES ( Joseph ) , antiquaire an-
glais , qui vivait dans le 18 . siècle. Il
commença par être marchand d'allu-
mettes dans le quartier de Wapping,
à Londres; et il était parvenu à un âge
assez avancé , lorsqu'il étudia les anti-
quités. Il devint alors membre de la
société royale de Londres, et secrétaire
de la société des antiquaires. Il a publié
les antiquités typographiques, ou
Précis historique de l'origine et des
progrès de l'imprimerie dans la
Grande-Bretagne , avec des notices
sur ses premiers imprimeurs , et un
catalogue des livres par eux impri-
més depuis Van 1471 jusqu'à Van
1600, avec un supplément, contenant
les progrès de l'impiimerie eu Ecosse
et en Irlande, 17491 "n vol, in-4". ,
réimpr. avec des additions considéra-
Lies de Guill. Herbert , 1 785-90 , 5
vol. in-4°. Ames a rédigé les Parent-
alia d'après les manuscrits de Wreu.
Il est mort en 1 7 5g. X — n.
AINIESTRIS , fille d'Otanes , l'un des
sept grands de la Perse qui tuèrent
vSraerdis-!e-Mage, fut mariée à Xerxès ,
fils de Darius , et se rendit fameuse par
les cruautés qu'elle exerça contre la
femme de Masistès , dont Xers.cs était
c'pris. Elle lai fit couper le nez , les
A IM H 43
oreilles , les lèvres , et la renvoya ainsi
défigurée à son époux. Dans sa vieil-
lesse, elle fit enterrei^vifs quatorze en-
fants des deux sexes des principales
familles de la Perse, espérant, par cette
pratique superstitieuse etbarbarc, pro-
longer ses jours , et apaiser les dieux
des enfers. C — r.
AMFRE VILLE, nom célèbpe dans
la marine française. Il y avait trois
d'Amfreville à la malheureuse bataille
de la Hogue, en 1 69. i : ils étaient frères.
L'aîné ( le marquis ), chef d'escadre ,
commandait l'avant-garde ; le second
montait le vaisseau M Ardent , de 70
canons, et le troisième commandait le
Kermandois , de 60. Tous les trois
combattirent avec la plus grande iu-
trépidilé.Leur nom se retrouve àtoutcs
les époques glorieuses de la marine,
sous le règne de Louis XIV. Le mar-
quis d'Amfreville mourut lieutenant-
général des armées navales, dans ua
âge très-avancé. E — d.
AMHURST (Nicolas), écrivain
anglais, né à Marden, dans le comté
de Kent, vers la fin du 17''. siècle.
C'était un homme de beaucoup d'es-
prit, mais sans mœurs. Sa mauvaise
conduite l'ayant fait chasser d'Oxford,
où il était membre du collège de
St.-Jean , il s'en vengea par deux
poèmes satiriques, intitulés : Oculus
Britanniœ , et Terrce fdius. Il alla
s'étabhr à Londres, oii il publia un
volume de Mélanges , et quelques au-
tres essais ; mais il est plus particuliè-
rement connu oomme ayant eu part
à la rédaction d'un ouvrage périodi-
que intitulé The Craftsman, auquel
travaillèrent aussi lord Bolingbroke et
Pultenev, depuis comte de Bath. Cette
feuille, chrigée contre le ministère du
chevalier Robert ^^ alpole, eut un suc-
cès si prodigieux, qu'jl s'en deTiitait
10 à i'2 mille exemplaires par jour. Ce
succès n'augmenta point la fortune
44 A M î
cVAmliurst, qui. après la chute du mi-
nistre, quoiqu'il fût un de ceux qui y
avaient le plus contribue' par leurs
écrits, ne reçut aucune récompense,
n'obtint aucune place . et fut entière-
ment oidîlic du parti qu'il avait si
Lien servi. 11 mourut , à ce qu'on croit ,
de chagrin, en i''j^'2, et dans un état
si misérable, que sou imprimeur , Ri-
chard Franklin, fut oblige de paver
son cercueil. On a aussi de lui, uncEpî-
ire à sir John Bloiint , i']io;Ie Gé-
néral anglais, poëme consacre' à la
me'moire de Jean , duc de IMarlbo-
rough ; Strephon vengé, satire contre
les toasts d'Oxford; la Convocation ,
pocrae en cinq chants, dirige contre le
haut derge'; la traduction de quelques
poëmes latins d'Addison. S — D.
AMICO (Antomn d'), de Mes-
sine, chanoine de l'église cathédrale
de Palcrme, et historiographe du roi
d'Espagne, PhiHppe lY, était très-
versé dans l'histoire et les antiquités
de Sicile. 11 écrivit sur ce sujet un
grand nombre d'ouvrages, dont quel-
ques-uns seulement sont imprimés :
les autres passèrent, après sa mort,
dans les deux bibhothèques du duc
de Madonia, et de monsig. Palafox,
archevêque de Palernie. On en trouve
le catalogue à la fin de l'un de ses ouvra-
ges imprimés, et dans la Bibliothèijue
sicilienne de Mongitore ; ses livres
connus, sont : I. Triitm orientalium
latinorum ordinum , post caplain à
duce Gothofredo Hierusalem, etc.,
Notitiœet Ta!mlaria;Pa.\crme, iG36,
in-fol.; II. Disserlntio historica et
chronologica de aniiquo urbis Sjra-
cnsarum archiepiscopatu , etc., Na-
ples, 1640, iu-4". Cette dissertation,
relative aux discussions très-animées
qui eurent lieu entre les trois églises
de Syracuse , de Palerme et de Mes-
sine, pour savoir à laquelle avaient
anciennement appartenu le titre cl les
AMI
droits de métropole, a étéréimprirncV,
avec les dissertations contradictoires ^
dans le -j''. volume du Thésaurus an-
tiquilatum Siciliœ , Lugd. , Batav. ,
1725, in-fol. ; m. Séries ammirato-
rum iiisulœ Siciliœ , ah an. D. 8^2,
usquead 1640, Palerme, i64o,in-4".;
IV. De Messanensis prioratus sa-
crée hospilitatis domus militumsancli
Joannis Hierosolymitani origine ,
Palerme, i64o, in-4"'; V. en espa-
gnol, Chronologia de los Virrej'es,
présidentes, y de otras personas ,
que han govemado elBeyno de Sici-
lia, despues que sus Rejes han dexa-
do de morar y vivir en el, Palerme,
1 64<' 1 iii-4 "• Araico mourut à Palerme,
en i6|i , l'année qui suivit l'impres-
sion de ces quatre derniers ouvrages.
G— E.
AMICO ( BAr.THELEMy), jésuite,
né à Anzo, en Lucanie, en iSôi,
professa la philosophie et la théologie,
au collège de Naples , et y fut long-
temps préfet des études. 11 y mourut
en 1649. Son principal ouvrage est
un recueil volumineux sur la philoso-
phie d'Aristote, intitulé: /n universam
Aristotelis philosopkiam notœ et dis-
putationes , quitus illustrium sclio-
larum, AveiTois, D. Thomœ, Scoli,
et Nominalium sciitentice expendun-
tur, earumque tuendarumprohahiles
inodi afférunlur, vol. \'1I, in-fol.
Ces sept volumes, dont le 1". a deux
parties , parurent successivement à
Naples, depuis 169.3, jusqu'en 164B.
On peut voir les titres de ses autres
ouvrages dans Alegambe ( Bibliolh.
script, soc. JesiL ). G — É.
AMICO (Bernardin) , de Galli-
poli , dans le royaume de Naples , re-
ligieux franciscain, était prieur de son
ordre à Jérusalem , en 1 59G. Pen-
dant un séjour de 5 ans , il dessina
et décrivit avec exactitude les saints
lieux ; et , de retour en Italie, il pu-
AMI
blia , en italien , cet ouvrage curieux
pour les arts : Trattato délie Piaule
( des plans, et non pas des plantes ,
comme on l'a imprime' et réimprime'
en français ) , e immagini de^ sacri
edifizl di Terra Santa, designate in
Jerusalemine , etc. , d'abord à Rome,
et ensuite à Florence, 16.10, petit
in-fol. Les gravures de ce livre sont
du célèbre Caliot, G — É.
AMICO ( ViTO -Marie ) , noble de
Catane en Sicile, ne' en lôgS, entra
dans la congrégation du Mont-Cassin ,
professa, pendant plusieurs années,
dans sa patrie , la philosophie et la
théologie, et se rendit célèbre par son
érudition , et par l'étendue de ses con-
naissances dans les antiquités de la
Sicile. Il fut élu prieur de son ordre
en 1745. On a de lui les deux ou-
vrages suivants : I. Sicilia sacra ,
disqidsitionibus et notitiis illustrata,
etc. , dont la dernière partie , seule-
ment, est de lui , et qui fut imprimé
à Venise , sous la fausse date de Pa-
ïenne, 1755, '1 vol. in-fol. Mécon-
tent de cette édition , il fit réimpri-
mer à Catane la partie qui lui apjiar-
tenait, sous ce titre : Siciliœ sacrœ li-
bri IV intégra pars secunda, etc.,
1753, in-fol. ; II. Catana illustrata,
sive sacra et civilis iirhis Catanœ
histurîa, Culàne, 4 vol. in-fol. ,1741
— 1740. G— É.
AiVUCO (Etienne d'), de Paler-
me , autre religieux de la congréga-
tion du Mont - Cnssin , né en i57'i,
fut prieur , abbé , et vicairc-géncral
de son ordre. Etant abbé de l'abbaye
de St.-Marlin , il en accrut considé-
rablement , à ses frais , la biblio-
thèque, et fit aussi construire, pour
ce monastère, de superbes bâtiments,
i-l mourut en 1662. Mongitore, qui
t.iit de lui de très-grands éloges , nous
apprend, dans sa Bibliolh. Sicula,
«jif'il donna, scus le ucmà^Famalo
AMI 45
Musica, un recueil de ses Poésies
latines, intitulé : Sacraljra , varia-
ruinauctoriim cantionibus cuntextaj
in latina epigravnnala com>ersis ,
Palerme, i65o, iu-12. De ces deux
noms supposés, le premi r, Fanesto^
est l'anagramme de Stefano , en fran-
çais , Etienne. G — É.
AMICO ( Philippe ) , de Milazzo ,
en Sicile, né en i654 , a publié des
Réflexions historiques sur ce que des
auteurs d^ anciennes chroniques ont
écrit au sujet de la ville de Mi-
lazzo , Catane , 1 70") , in-4 ". Cet ou-
vrage est écrit en italien : Rijlessi is-
torici , etc. , et non point en latin ^
comme l'a dit Leiiglet -Dufresnoy,
tome II de sa Méthode pour étudier
l'histoire. — Plusieurs autres littéra-
teurs italiens du même nom ont publié
des ouvrages peu importants. G — E.
AMICO ( DiomÈde), médecin, né
à Plaisance, vers la fin du 16^. siècle,
a publié: I. De morbis communibus,
liber; ejusdem traclatus de variO'
lis , etc. , Venise , 1 5g6 , in-4". ; IL
De morbis sporadibus , opus nwum ,
etc., 1 60 j, in-4''. (' — E-
AMICO ( Fau*tin) , de Bassaiio ,
poète du 16". siècle, mourut eui 5 j8.
n'étant âgé que de 24 ans. 11 annuii-
çait un talent extraordinaire, et fut
vivement regretté. Il avait adicssé i
son plus intime ami, Alexandre Cam-
pesano, une Epître en vers latins ,
écrite avec autant d'élégance et de pu-
reté qu'elle était conduite avec art , cl
forte de pensées : elle fut imprimée ,
après sa mort , sous ce titre : Faus-
tini Amici, Bassanensis, annoœtalis
sues XXI V immaturatd morte prce-
repti,Epistola adAlexandrum Catn-
pesanum, Venise, i564, in-4''. '*^<^
Poésies italiennes sont éparses dans
divers recueils, entr'autrcs, dans celui
des Poètes de Bassano. et dans la
collection du Gubbi. G — e.
4G A M I
AMIGONI , ou AMICONI ( Jac-
ques), peintre, uë à Venise en 1G75,
> oyagea en Flandre , et , pour perfec-
tionner son coloris , copia les grands
maîtres de cette école. Zanetti jiarle
de lui avec éloge. Ou demanderait ,
chez cet auteur , uu peu plus de re-
lief, moins de soiu pour faire briller
à la fois toutes les parties de sa com-
posilion : les peintures d'Amigoui en-
chantent , au premier abord , les fai-
bles connaisseurs. Jacques fut bien
accueilli en Angleterre, en Allemagne,
et en Espagne , oîi il mourut , en i n 52 ,
avec le titre de peintre de la cour. Il
fit, en Angleterre, des portraits et des
compositions historiques. Les ama-
teurs de musique étaient dans l'usage
de se faire peindre par lui. L'architecte
Kent , qui avait voulu être peintre ,
sans pouvoir y parvenir , avait dis-
posé les escaliers des maisons qu'il
construisait , de manière à ce qu'il fût
difficile de les enrichir de peintures:
cependant Araiconi eut occasion d'en
peindre plusieurs j entr'autres , celui
tle Powi-House , dans la rue d'Or-
mond , à Londres , où il représenta ,
en trois compartiments , X Histoire de
Judith. 11 exécuta aussi les Amours
tle Jupiter et d'Io , dans la salle du
château de More-Park , en Ilerlford-
shire. 11 y avait , chez, le musicien
Farinelli , à Bologne , une grande
quantité de tableaux de Jacques Ami-
coni, où il avait représenté ce célèbre
soprano , recevant des récompenses
de plusieurs souverains. A — d.
AMILCAR , général carthaginois ,
fils de Magon , fut chargé , l'an 4B4
av. J.-C. , du commandement d'une
expédition formidable contre la Sicile ,
et , ayant débar(]ué à Panorrae ( Pa-
leime ) , ouvrit la campagne par le siège
d'Himère ; mais , surpris par Gélon ,
tyran de Syracuse , au moment où il
offrait j au bord de la mer, uu saaifice
AMI
à Neptune, il périt au commencement
de l'action. Les Syracusaius taillèrent
sou armée en pièces, et livrèrent aux
flammes la plupart des vaisseaux car-
thaginois. Cette défaite , pres([ue sans
exemple , eut lieu le jour même du
combat des Thermoipyles. Carthage ,
consternée , s'estima trop heureuse
d'acheter la paix par un traité dont
Gélon dicta les conditions, et par la
perte de tout ce qu'elle avait en Sicile.
Les vainqueurs et les vaincus publiè-
rent qu'Aïuilcar avait disparu après le
carnage de ses troupes, sans qu'un eût
jamais pu le retrouver. B — p.
AMILCAR , fils de Giscon, envoyé
en Sicile avec une nombreuse armée
au secours de Syracuse , contre Aga-
thocle, l'an 5 16 av. J.-C, fut assailli
par une violente tempête, qui submer-
gea 60 vaisseaux et 000 transports.
Malgré ce désastre , Amilcar aborda
eu Sicile, réunit près de 5o,ooo hom-
mes , livra bataille , près d'Himère , à
Agathocle , le défit , réduisit un grand
nombre de villes , et mit le siège devant
Syracuse. Agathocle , qui s'v était ren-
fermé, s'embarqua pour aller attaquer
les Carthaginois eu Afrique, et Amilcar,
continuant de presser Syracuse, donna
un assaut général , et fut repoussé avec
perle. Forcé d'envoyer une partie de
son armée au secours de Carthage , et
vivement attaqué ensuite par les Sy-
racusaius, qui firent une sortie géné-
rale, il fut fait prisonnier, et les Svracu-
sains lui coupèrent la tête , qu'ils en-
voyèrent à Agathocle en Afrique , l'an
5o9 av. J.-C. B — p.
.\M1LCAR , antagoniste de Régulus
( for. RÉOULUS ).
AMILCAR, surnommé Barca ,
père d'Annibal , appartenait à une fa-
mille chère au peuple , et qui faisait re-
monter sou origine aux anciens rois de
Tyr. Très-jeune encore , il fut chargé
du commaudement de l'armée , eu Si-
AMI
cïïe , où les Cartliaginois avaient pres-
que tout perdu: c'était dans la 18".
aune'e de la première j:;uerre punijue.
Amilcar parut d'abord avec une flotte
vers les côtes d'italie , ravageales terres
des r,ocrieus et des Bruttiens , revint
en Sicile avec de riches dépouilles , y
débarqua ses troupes , fît des incur-
sions chez les alliés de Rome , décon-
certa toutes les mesures des consuls , et
termina glorieusement une campagne ,
qui fut regardée à Carlliage comme
un chet-u'œuvre d'habileté. Pendant
cinq ans, il désola l'Italie, et disputa la
Sicile aux Romains ; mais Hannou, ami-
ral de Cartilage, ayant été vaincu par
le consul Lutatius , dans un combat
naval près des îles rJga tes, l'an 24^ av.
J.-C. , les Carthaginois résolurent de
mettre fin à une guerre dont ils ne
pouvaient plus supporter le fardeau.
Chargé des négocialions de la paix ,
Amilcar signa, enfiémissant, un traité
qui mettait sa patrie dans la dépen-
dance de Rome. La conduite révoltante
des Romains , pendant les négocia-
tions , ne fit qu'augmenter l'aversion
qu'Amilcar avait conçue pour ces ri-
vaux ambitieux. De retour eii Afrique ,
il fut le défenseur , ou plutôt le libéra-
teur de sa patrie dans la guerre des
mercenaires , qui , au nombre de plus
de 20,000 , réunis à des hordes de
JNumides, assiégeaient Carthage mê-
me. Non seulement Amilcar les re-
poussa des murs de la capitale , mais il
reprit les viKes d'Utique etd'Hippone,
et, après avoir détruit ces rebelles , il
châtia les Numides , étendit la domina-
tion de Carthage, et rétablit le calme
dans toute l'Afrique. Bientôt après , le
coeiu- toujours ulcéré contre les Ro-
mains , il forma le projet de se rendre
maître de toute l'Espagne, espérant y
lever assez de soldats pour résister aux
troupes que l'Italie fournissait à la ri-
vale de (iarthage. Les services qu'il
AMI 47
venait de rendre à sa patrie lui firent
obtenir aisément le commandement
de l'armée d'Espagne ; il se rendit à
Abyla avec des forces imposantes , et ,
mettant à la voile , il traversa le dé -
troit, débarqua en Espagne , et s'établit
d''aboid à Cadix , capitale de la partie
de l'Espagne alors au pouvoir de
Carthage. Amilcar amenait avec lui scu
fils Annibal , âgé de 9 ans , et ce fut à
son arrivée en Espagne qu'il lui fit ju-
rer une haiue éternelle aux Romains.
Selon Appien et Polybe , Amilcar se
proposait deux vues dans cette guerre ,
la première de mettre Carthage en état
de se venger dfs outrages qu'elle avait
reçus , et la seconde, de s'absenter de
sa patrie, qui était aloi's divisée par
deux partis puissants , dont l'un avait
pour chef, clans le sénat, Hannon, son
eunemi,etdontrautre, qui avait épouse
ses intérêts , s'appelait la faction Bar-
cine. Amilcar commanda neuf ans eu
Espagne, subjugua plusieurs nations,
fonda Barcelone , et soutint son cretht
à Carthage, non seulement par les heu-
reux succès de ses armes , mais encore
par les grandes richesses qu'il v fit pas-
ser. L'histoire ne nous a pas conservé
le détail de ses conquêtes dans cctlR
contrée ; elle ne fait mention que de !a
bataille qu'il livra aux Vectones, ]>ei>
pies de la Lusitanie, cl dans laquelle il
fut tué, l'an 228 av. J.-C. Pobbe dit
qu'Amilcar eut une fin digne de sou
mérite , en mourant sur le champ de
bataille , à la tête de ses troupes. L'ar-
mée élut à sa place son gendre As-
drubal. B — p.
AMIN-BEN-HAROLN , 6 . kha-
lyfe de la race des Abaçydes( Foy,
Amyn ).
AMIOT ' LE PÈRE ), jésuite français,
de la misMOM de Pék'a, né a Toulon,
en 1718. Les trente dernières années
du siècle n;;i vient de s'écouler ont
été celles oii iios connaissances sur ia
48
AMI
Cbiue ont fait le plus de progrès. Les
missionnaires , dans cet intervalle de
temps, se sont empresses de répoudre à
une fonle de questions qui leur ont été
faites d'Europe. Parmi eux, se distin-
gua le P. Amiot , et c'est à lui surtout
que nous devons les renseignements
les plus exacts et les plus étendus sur
les antiquités, l'histoire, la langue et
les arts des Chinois. Ce jésuite arriva
à Macao eu 1750, et à Pékin, où il
fut bientôt appelé par les ordres de
l'empereur, le 2'2 août i-jSi : il ne
quitta plus cette capitale jusqu'à sa
mort. Ce missionnaire, outre le zèle
qui le conduisit à la Chine , y porta
des connaissances sur toutes les ])ar-
ties de la physique et des mathéma-
tiques, des talents pour la musique,
lin esprit juste , une mémoire heu-
reuse, et une infatigable ardeur pour
le travail. Une étude opiniâtre lui
rendit bientôt familières les langues
chinoise et tatare, et, muni de cette
double clef, il puisa dans les livres,
anciens et modernes , des notions
saines et vraies de l'histoire, des
sciences , et de toute la littérature de
la Chine. Les fruits de tant d'études et
db travaux ont été recueillis par la
France , oij le P. Amiot n'a pas cessé
de faire passer , soit des ouvrages ,
.soit un grand nombre de mémoires.
Nous lui devons : I. Eloge de la
ville de Moukden , poème chinois ,
composé par V empereur Aien-long,
traduit en français , Paris , veuve Til-
liard , 1770, in-8'. , fig. ; le traducteur
a joint à sa version un grand nombre
de notes historiques et géographiques
sur la ville et la contrée de Moukden ,
ancienne patrie des Tatars-Mant-
chcoux , aujourd'hui maîtres de la
Chine; II. ^rt militaire des Chinois,
Paris, Didot , 1772, in-4". , f'g-
Comme l'édition de cet ouvrage était
«puisée depuis long-temps , on l'a fait
AMI
réimprimer dans le tome VII des
Mémoires sur les Chinois , et l'on
trouve, dans le tome VIII de ces mê-
mes Mémoires , im Supplément avec
figures, envoyé postérieurement de
la Chine par le P. Amiot. Les Chinois
comptent six ouvrages classiques ou
king sur l'art mililaire , et chaque
gucri'ier qui aspire aux grades doit
subir un examen sur ces livres. Le
P. Amiot n'a traduit que les trois pre-
miers , avec quelques fragments du
quatrième , parce qu'ils contiennent
toute la doctrine des Chinois sur la
guerre. III. Lettre sur les Caractères
chinois , adressée à la société royale
de Londres, et insérée dans letom. I
des Mémoires sur les Chinois. Le
célèbre Needham crut trouver, sur un
buste d'Isis , conservé à Turin dans le
cabinet du roi , des caractères égvp •
tiens, qu'il disait être très-ressemblants
à ceux des Chinois. Celte découverte
prétendue fut publiée dans toute l'Eu-
rope , et divisa les savants. La société
royale de Londies prit Je parti d'en-
voyer les Mémoires de Needham aux
Jésuites de la Chine, en les priant
déjuger la question. Ceux-ci confièrent
au P. Amiot le soin de rédiger la ré-
ponse , et ce savant missionnaire dé-
cida que les caractères, gravés sur l'Isis
de Turin , n'avaient aucun trait de res-
semblance avec ceux de la Chine. Cette
lettre, qui est une analyse savante de
la langue et des caractères chinois ,
obtint tous les sufirages, même celui
de Needham. IV. De la Musique
des Chinois , tant anciens que mo-
dernes, ouvrage considérable , qui oc-
cupe la plus grande partie du tome VI
des Mémoires. Feu M. l'abbé Rous-
sier , si connu par ses profondes con-
naissances en musique , a non seule-
ment suivi l'impression de cet écrit,
mais il en a vérifié les calculs, et y a
joint des notes et des observations
AMI
étendues. V. Vie de Confuc'ius , bis-
toii'e la plus exacte de ce célèbre phi-
losophe , et dont tous les matériaux
ont été puisés dans les sources chi-
noises les plus authentiques. L'auteur
y a joint la longue suite des ancêtres
de Confucius , et celle de ses descen-
dants, qui subsistent encore à la
Chine ; généalogie unique dans le
monde, puisqu'elle embrasse plus de
quarante siècles. Cette vie, ornée de
figures, gravées d'après les dessins
chinois, occupe presque la totalité du
tome Xil des ^fémoires sur les
Chinois ; VI. Dictionnaire tatar-
manlcheou -français , Paris , Didot
aîné, 1789, 5 vol. in-4''. j ouvrage
précieux et qui manquait à l'Europe ,
oii cette langue était totalement ignorée.
On doit la publication de ce Diction-
naire à feu M. Bertin, ministre, ama-
teur zélé des arts et des sciences de la
Chine. Il fit graver les poinçons , et
fondre, à ses frais, les caractères néces-
saires pour son impression, et, par un
choix éclairé que le succès a pleinement
justifié, il en confia l'édition à M. Lan-
glès , savant distingué , et connu sur-
tout par une profonde connaissance
des langues orientales. Le P. Amiot
avait aussi envoyé une Grammaire
abrégée de la langue tatare-mant-
cheou; on la trouve imprimée dans le
tome XIII des Mémoires. Tous les
ouvrages que nous venons d'indiquer
ne sont encore qu'une partie des in-
téressants écrits que nous devons à
ce savant et laborieux missionnaire.
Le reste , sous la forme de lettres ,
d'observations et de mémoires , se
trouve répandu avec profusion dans
les i5 volumes iu-4'^ des Mémoires
concernant l'histoire, les sciences
et les arts des Chinois. Ceux qui
voudront connaître avec plus de pré-
cision ce qui lui appartient dans cette
utile collection , peuvent consulter
ir.
AMI 49
l'article Amiot de la Table générale ,
qui se trouve dans le tomeX : ils ver-
ront, sans doute avec quelque éton-
nement, que cette nomenclature seule
occupe quatorze colonnes de cette
table , laquelle cependant ne contient
encore que les matières des dix pre-
miers volumes. Le P. Amiot , de\enu
si justement célèbre en Europe, loin
de laquelle il a passé la plus grande
partie de sa vie , est mort à Pékin , eu
1794 5 âge de 77 ans. G—k.
AMIOT. Foj^. Amyot.
AMIR , souverain de Smyrne , fils
d'Aidin , l'un des chefs qui, à la mort
d'Aladin, sidthan d'Iconium, s'étaient
partagé l'Asie mineme avec Othman.
Amir, fils d'Aidin, régnait, vers l'an
1 34 1 , sur le pays de Smyrne , et sur
une partie maritime de l'ancienne lo-
nie. Cantacuzène , l'empereur grec ,
l'appela à son secours , et le prince
musulman vint mouiller à l'embou-
chure de l'Èbre, avec 3oo vaisseaux
et vingt - neuf raille hommes. Amir ap-
prend que Cantacuzène , vaincu par
ses ennemis domestiques , a fui chez
le despote de Servie ; mais que sa
femme , l'impératrice Irène , est as-
siégée par les Bulgares , dans Démo-
tica ; U surprend ces barbares , les met
en déroute, déhvre la ville, et sauve
l'impératrice. Content du glorieux titre
de libérateur, il refusa d'entrer dans
Démotica , pour recevoir les remer-
cîments d'Irène , parce que son mari
était absent, comme s'il eût craint,
dans ses mœurs orientales , de don-
ner un soupçon de jalousie à un ami
malheureux. Amir, en servant Canta-
cuzène , n'en nuisit pas moins aux
Grecs , ses ennemis naturels. Il assié-
gea Thessalouique , porta la terreur
jusque dans Ccnstantinople , et se
rembarqua chargé de dépouilles et de
captifs. Bientôt, après , le roi de Chi-
pre^ la république de Venise et les
5o A M M
chevaliers de St. -Jean de Jérusa-
lem , abordèrent sur les côtes de
riouie ; Aiiiii' fut blessé à mort, d'un
coup de flèche, à l'attaque de la ci-
tadelle de Smyruc,quc les chrètieus
avaient enlevée ; et , fidèle à rarailic
j usqu'à la fin , il recommanda à Can-
tacuzène , eu mourant, de rechercher
l'alliance du sulthan Orchan , conseil
sincère de la part du généreux Amir j
mais plus imprud(;nt que politique , et
qui avança la chute tle l'empire grec
eu Europe. V. Amir. S — y.
AMMAN (Paul), médecin et bo-
taniste allemand, naquit à Breslau , eu
î654, lit d'excellentes études dans
diverses luiiversités d'Allemagne, voya-
gea en Hollande et en Angleterre , fut
jeçu docteur eu mc'dcrine à l'univer-
.sitc de Leipzig , et bientôt associé à
l'académie des Curieux de la nature,
sous le nom de Dryander. I^a faculté
tle Leipzig créa aussi bientôt pour lui
une chaire extraordinaire , en 1674 ?
le fit monter à celle de botanique , et ,
eu i(i8'2, à celle de physiologie. Am-
înau , d'un esprit vif et remuant , fait
preuve , dans ses nombreux écrits , de
connaissances vastes ; mais on peut
lai reprocher une critique trop araci'e,
et souvent assaisonnée de plaisante-
ries, peu dignes des sujets graves qu'il
traitait. Ses opinions paradoxales lui
attirèrent àts désagréments. ïl mou-
rut, en 1691 , âge de 55 ans. Son
premier ouvrage fut un extrait critique
des difTérentes décisions consignées
dans les registres de la faculté de
Leipzig, Erfurt, lô'jo , iu-4''. La fa-
culté fut forcée de le condamner, par
un écrit public dans la même année.
Voici la hste de ses autres produc-
tions : I. Paracœnesis ad discen-
tes circa insUtulioiunn medicaîum
cmendidioneiii occiipatu , Uudols-
t.dii , 1G75 , in- IV. , ouvrage où l'au-
t<.ur ^'emporte avec furew coutrçles
A M M
systèmes , surtout contre la doctrine
de Galieu , et veut établir le scepti-
cisme en médecine. Amman sans doute
y exagère , mais û relève néanmoins un
très-grand nombre d'erreurs et d'abus
partiels j II. une réponse aux con-
tradicteurs de cet ouvrage : Archœas
syncuplicus Eccardi Leichneri ar-
chœo sjTicoptico contra pnracœnœ-
sim ad discentes oppositiis , it)-4->
in- 1 '2. ; 111. Irenicinn Niimœ Pompilii
cum Hippocrate, fjuà veleruni iiiedi-
corum et philosophonim hypothèses ,
in corpus juris civilis pariter ac ca-
nonici hactenàs Iransumptœ ^ àprœ-
conceplis opinionibus ïiindicnulur ,
Francofurti et Lipsiœ , 1689, i^i^^'-j
où l'auteur examine le rapport qui
existe entre les sentiments d'Hippocra-
te , les systèmes adoptés en médecine ,
et les diverses institutions civiles et
canoniques, et dans lequel , toujours
fidèle à ses principes sceptiques , il en
l'aille, souvent avec trop d'aigreur, l'in-
cohérence et les contradictions ; IV.
Praxis vidnerum leihalium, sex de-
cadibus historiantin rnriorum , ut
plurimuin trnumaticorum , cum cri-
balionibus adornata , Francofurti ,
1G90, in-8'. ; ouvrage de chirurgie,
oîi se décèlent encore l'dpreté de sa
critique et le tranchant de ses déci-
sions. Amman a publié aussi jilusieurs
ouvrages sur la Botanique , savoir : une
Description du Jardin de Leipzig ,
où il donne , non seulement le catalo-
gue des plantes cultivées dans ce jar-
din , mais encore une synonvmie assez
complète des différents noms de cha-
cune de ces plantes, ce qui ]ieut lo
faire regarder comme une continua-
tion du Pinax de Gaspard Bauhin.
lia préface de cet ouvrage contient
d«s principes certains sur l'emploi des
plantes ; il est terminé ])ar une intro-
duction à la matière médicale , écrite
d'uuQ manière savante et li'ès-piccisc.
AMM
Amman s'acquit encore plus de droits
ii la reconnaissance des botanistes , par
la pul)lication d'un second Traite' , in-
titulé : Character naluralis planta-
ru ni , iG-6. En prenant ])Our base
les principes qui venaient d'être posés
par Morisou , il prouva qu'on ne de-
vait élablii' la distinction des genres
de plantes que sur les parties de la
iVuctiflcation , et il en fait l'application
sur 147^ genres ou espèces, dont il
donna la notice par ordre alphabéti-
que. On doit donc compter Paul Am-
man , au nombre de ceux qui ont le
plus contribué à fonder les bases de
la science, telles quelles sont recon-
nues aujourd'hui. En i-joo , Nébcl
donna une nouvelle édition de cet ou-
vrage , avec des additions considéra-
bles , tirées principalement des mé-
thodes d'Herman et de Divin , qui
avaient paru depuis sa publication ;
par - là , cette seconde édition devint
bien plus utile que la première.
CetA— !?.
AMMAN (Jean Conrad ) , méde-
cin , natif de Schaffhouse , exerça sa
profession à Amsterdam, vers la fin
du l'j''. siècle, se fit une grande ré-
putation par- l'art de f.;ire parler les
sourds et muets , et fit connaître sa
métliodc dans deux écrits plusieurs
fois réimprimés, et fort recherchés :
I. Surdus loquens , Amsterdam ,
i6()2 , in-8\; II. Dissertatio de lo-
queld, i-op,iu-8'. Cette dissertation
d'Amman , traduite en français , par
Beauvais de Préau , se trouve im])ri-
mée à la suite du Cours d'éducation
des sourds et muets , par Deschamps,
I7'j9, in-ivi. Ou hîi doit aussi une
bonne édition des OEuvres de Cœ-
lius Amélianus, qui parut à Amster-
dam, en 1709, in-4°-)3vec les
notes et remarques de Jansson d'Al-
lueloveen. C. et A — n.
AIVIMAN (Jean), fils du précédeut,
A IM M 5 1
médecin comme lui, et savant bota-
niste, naquit à ischaffliouse , en 1707.
Attiré très - jeune à Pétersbourg , il y
professa la médecine et la botanique ;
reçu à l'académie des sciences de cette
ville, il pubha, dans les Mémoires de
celte compagnie , les caractères de
])lusieurs nouveaux genres de plantes.
La société royale de Londres l'admit
au nombre de ses membres. Pour com-
mencer à faire connaître les plantes que
J.-G. Gmelin , et d'autres voyageurs
avaient recueillies dans les différentes
contrées de la Pvussie asiatique, il publia
un ouvrage intitulé : Stirpium rario-
rum in imperio Buthcno spontepro-
venientium , icônes et descripiiones
(ib Joanne Ammano, M. JDocl. acad.
imper, scient, membro et botanices
professore^ regiœsociet. Londinensis
sodalis, Petropoli, 1759, i vol. in-4''.
Cet ouvrage ne renferme que trente-
cinq plantes assez bien figurées; l'au-
teur en promettait la continuation ,
mais la mort l'enleva un an après , à
la fleur de l'âge : ce fut une pei te pour
la science qu'il cultivait avec ardeur. I4
mérite de partager, avec Paul Amman,
l'honneur que Houston a rendu à ce
nom , en établissant le genre Amman-
nie. il comprend un petit nombre de
plantes herbacées de la famille des Sa-
licaires , qui n'habitent que les pays
chauds. D — P — s.
AMMAN ( Josse), dessinateur et
peintre, né à Zurich, en ij59, passa
sa vie à Nuremberg, où il acquit le
droit de bourgeoisie , et où il mourut
en 1 591 . Son talent était d'une fécon-
dité singuhère; il excellait dans l'art de
disposer et de grouper ses figures :
on a de lui beaucoup de dessins sur
bois , sur verre et à la plume ; il en
composa un grand nombre sur Tite-
Live, Tacite, Diogène Laërce , et au-
tres classiques. Sa collection des Por-
traits des rois de France , depuii
4-
52 A M M
Pharamond jusqu'à Henri HT, avec
une courte biographie de chacun d'eux ,
parut en i5-6. 11 a fait aussi des gra-
vures pour l'histoire du IVoiweau Tes-
tament , une collection de costumes de
femmes : Gjnœceum, sive theatrum
inulierum , in quo omnium Europœ
gentiiim fcemineos habitas figuris ex-
'pressos videre fas est, Francfort ,
i586, in-4''. ; Pnnoplia omnium li-
heralium mechanicarum etsedenta-
riarum artium gênera continens, etc. ,
Francfort, 1 564, collection de ^''5
pièces, où Amman s'est repre'sente' en
graveur ; et quelques productions du
même genre. G — t.
AMMAN ( Jean Jacques ) , chirur-
gien de Zurich, né eu i586, fit, en
1 G 12 , un voyage à Constantinople , eu
Syrie et en Egypte , dont il a e'crit la
relation. On y trouve des détails cu-
rieux ; il parle de l'usage du café ,
comme très-repandu en Oi'ient. Cet
ouvrage , qui porte le titre de Foyage
dans la terre promise , a paru dans
une collection de Voyages , en allc-
ïnand , Zurich , 1678. K.
AMMAN ATI, T. PrccotOMiNi.
AMMAN ATI ( Bartuelemi ) , ar-
chitecte et sculjJtcur , ne à Florence ,
l'an 1 5 1 1 , fut d'abord élève de Baccio
Bandinelli , et ensuite de Sansovino à
Venise ; revenu dans sa patrie, il s'atta-
cha particulièrement à l'ètiide des sculp-
tures de Michel-Ange, qu'on voit à la
chapelle de S. Laurent. Ses premiers
ouvrages sont à Pise; il exécuta, pour
Florence , une Léda , et, dans le même
temps, pour Naples , trois figures gran-
des comme nature , qui décorent le
tombeau de Sannazar, poète napoli-
tain. Avant éprouvé quelques dégoûts ,
il retourna à Venise , où il fut chargé
d'extfcuter un Neptune colossal , qu'on
voyait dans la place de S. Marc; il
fil h Padoue une autre statue colossale
ù^ Hercule y que l'çn y yoit encore,
A^MM
dans la cour du palais Montava ; elle
a été gravée. Amraanati passa ensuite
à Rome pour y étudier l'antique. Le
pape Jules III l'employa aux travaux
de sculpture du Capitole. Peu de temps
après , Georges Vasari avant été ap-
pelé, à Rome , ils se réunirent pour
ériger le tombeau du cardiualde Monti ,
à St. -Pierre in montorio : cet ouvrage
augmenta la réputation del'Ammanati ,
et, Vasari étant paiti , il exécuta son! ,
dans la vigne du pape Jules, une belle
fontaine. Rappelé à Florence , il entra
au service du grand-duc Cosme, qui
le nomma son ingénieur, et, en cett«
qualité , il rétablit les ponts de l'Arno ,
ruinés par l'inondation de 155^. Le
plus beau de ces ponts , celui de la
Trinité, a été entièrement reconstruit
sur ses dessins. Il décora de fignires
en marbre et en bronze plusieurs
fontaines, tant de Florence que des
maisons de plaisance des grand-ducs j
l'une des plus belles de Pra!olino, se
nomme encore la Fontaine de l'jdm-
manali ; celle de Neptune , qui est à
Florence , sur la place du Palais- Vieux ,
a été composée et exécutée par lui. Le-
projet en avait été mis au concour<:,
et il l'emporta sur Jean de Bologne et
sur Bcnvenuto Ccllini , les plus célè-
bres sculpteurs de ce temps. Amma-
nati était aussi bon architecte qu'ex-
cellent sculpteur^ à Rome, l'on cons-
truisit sur ses plans le palais Rucellai ^
qui a passé successivement dans la
maison Gaétani et dans celle des jniu-
ces Ruspoli. La cour et la façade du
collège romain ont aussi été élevées sur
ses dessins. A Florence , il bâtit plu-
sieurs monuments , termina le pa-
lais Pitti, commencé par Brunelles-
chi, et en décora la cour de trois
ordres de colonnes à bossages , qr.i ,
depuis , ont été imitées par l'archi-
tecte de Brosses, au palais du Luxem-
bourg, à Paris. Ammanati avait épou^c
A M M
nne femme célèbre , nommée Laura
Battiferri, dont ou a imprime les poé-
sies, en i56o, sous le titre d'O^ere
Toscane; il se livra lui-même à la
Jitîe'rature. II a laissé un ouvrage con-
sidérable , intitulé la Ciità , ou la
Fille, qui renferme les plans des dif-
férents édifices qui rendent une ville
commode et magnifique : cet ouvrage
important, que l'on croyait perdu ,
existe dans la collection de dessins de
la galerie de Florence, et mériterait
d'être publié. Ses ouvrages de sculp-
ture ont un caractère grand, mais un
peu maniéré, et ses bronzes sont exé-
cutés avec finesse. Il était instruit ,
fort pieux et charitable. A la mort de
sa femme , il consacra la plus grande
partie de ses richesses à des œuvres
pies. Il mourut quelque temps après,
à l'âge de 'jS ans, et fut enterré dans
Féglise de S. Giovannino des jésuites,
qu'il avait construite et embellie à ses
frais. C — n.
AM]\nEN (Marcellin) , historien
romain du 4*^' siècle , était Grec de
raissance, comme on peut s'en con-
vaincre par plusieurs passages de son
histoire. Une lettre que lui écrivait le
sophiste Libanius , et qui est parve-
nue jusqu'à nous, prouve qu'il était
tié à Antioche. Dans sa jeunesse, il
embrassa la carrière militaire , et fut
rnrôlé parmi les protectores dotnes-
tici, troupe dans laquelle on n'ad-
mettait que les jeunes gens des fa-
milles distinguées. En 35o, il accom-
pagna en Orient Arsificus , général de
c<ivalerie sous l'empereur Constance,
et suivit , quelque temps après , le
uicme officier dans les Gaules. Quel-
que modeste que soit le compte qu'il
a rendu de ces différentes expéditions,
il paraît qu'il s'y conduisit avec dis-
tinction ; il accompagna aussi l'empe-
reur Julien dans la guerre de Perse.
Sous le règne de Yalens , il résidait
A M M 55
à Antioche, où il fut témoin des per-
sécutions dirigées contre ses compa-
triotes , accusés de conspirer secrète-
ment, par des pratiques et des céré-
monies magiques, contre la vie et la
majesté des empereurs romains. Am-
mien , qui déplore cette persécution
dans son Histoire , dit que les condam-
nés et les fugitifs formaien t le pi us grand
nombre des habitants d'Antioche. Il
quitta, peu de temps après, le métier
des armes, et vint s'établir à Rome, où
il écrivit ï Histoire de l'empire , qu'il
commença à l'époque où Tacite avait
fini la sienne, et qu'il termina au règne
de Valcns. Libanius, dans la lettre
dont nous avons parlé, nous apprend
qu'Ammien Marcellin lut son Histoire
en public, et qu'il reçut les ajiplaudissc-
mcuts des Romains , dont il n'épargnait
pas les mœurs déréglées. Il paraît , par
plusieurs circonstances de son His-
toire , qu'il vécut jusqu'en 390. Dans
plusieurs passages , il loue la cons-
tance de quelques évèques et de plu-
sieurs martyrs; il est d'accord avec
S. AmbroiseetS. Chrysostomc, dans la
manière dont il raconte la vaine ten-
tative de Julien pour rebâtir le temple
de Salomon à Jérusalem ; quelques
biographes en ont conclu qu'il était
chrétien , ce qui nous semble peu
vraisemblable. Il se moque , il est
vrai , de la superstition de la plupart
des Romains de son temps : « Un grand
» nombre d'entr'cux, dit-il, n'oserait
55 ni prendre le bain , ni dîner, ni pa-
» raître en public , avant d'avoir con-
» suite , selon les règles de l'astrolo-
» gie , la position de Mercure, et Tas-
w pect de la lune. 11 est assez plai-
)> sant , ajoute-t-il , de découvinr cette
» crédulité chez un sceptique impie,
» qui ose nier ou révoquer en doute
» l'existence d'un Dieu tout-puissant.»
Cette phrase , qui nous montre que le
siècle d'iimmieu a quelque resscm-
V( A MM
blaifce avec le nôtre, ne prouve autre
cliose , si ce n'est que cet historien ne
partageait point les idées superstitieu-
ses de la plupart de ses contemporains.
Dans le cours de son Histoire , s'il
parle du chiistianismc avec modéra-
tion, il parle toujours du paganisme
avec respect; le taijjeau qu'il fait des
premiers temps de la repiJjlique, et
les louanges qu'il donne à Julien , nous
montiTnt assez qu'il regrettait les
mceurs de l'ancienne Rome, et qu'il te-
nailau culle des premiers Romains. Au
reste, ces doutes, ëleve's siu' ses opi-
nions, attestent son impartialité, et
l'esprit de sagesse avec lequel il a ra-
conte'des e've'nements dontplusieurs se
sont passes sous ses yeux. Gibbon le
caractérise Ircs-bicn , en disant qu'il
est un guide bnbile et fidèle , qui com-
posa l'histoire de son temps , sans se
livrer aux préjuges ou aux passions
qui afTectent oïdinairemeut un con-
temporain. M. de Sainte-Croix ne le
juge pas moins favorablement , en di-
sant que , pour l'ordinaire , il est vc-
ridique et impartial. Quoique son style
soit un peu barbare , il est , en gcne'-
ral, plein d'énergie; sa manière res-
semble quelquefois à celle de Polybe;
comme lui, il aime la vérité, et en-
tend l'art de la guerre. Ammien a des
morceaux dignes de Tacite ; celui de
l'état de Rome , au milieu du 4*. siècle,
est de ce nombre , et mérite d'être
cité. C'est le dernier des écrivains la-
tins qui aient écrit l'iiistcire avec une
certaine étendue, et avec tous les dé-
tails nécessaires. Un savant moderne
rend justice an mérite d'AramicnMar-
cellin comme historien; mais il l'ac-
cuse d'avoir commis de nombreuses
erreurs en géographie; ce reproche
est très-grave , et le nom du critique
^d'Anviiie ) est d'un très-grand poids;
6n doit croire cependant que les er-
reurs qu'on reproche ?. Amiiiic; i:» se
A JM M
rencontrent pas dans le récit des ex-
péditions où il s'est trouvé. L'Histoire
a Ammien Hlarcellin étM divisée en
3i livres, et, selon d'antres , en Si.
Les i3 premiers sont perdus; onzéli-
vres seulement furent publiés à Rome ,
par Sabinus, en i474? à Bologne ,
par Casteilus , en 1 5 1 ■; , et à Bàlc , par
Fiobénius, eui5i8. Accnrse en don-
na, à Augsbourg, 1 533 , une nouvelle
édition, dans laquelle il se vante d'avoir
corrigé plus de 5oo fautes. On y trouve
les 5 derniers livres, qui jusque-là
n'avaient point été imprimés. La même
année, Gélénius publia, à Bàle, une
édition avec les mêmes additions , ex-
cepté le dernier livre et la dernière
page de l'avant -dernier. Depuis cette
époque, l'ouvrage d'Ammien Marce'-
lin a eu plusieurs éditions, qui ont été
efiacées par celles de Valois , Paris ,
1 68 1 . Cette édition contient, outre les
notes de Lindenbrog , tirées de son
édition de 1 6 1 () , plusieurs notes nou-
velles de l'éditeur, et une T^ie de
l'Historien , en latin , par Chillîef ,
professeur de droit à Dole. Gronovius
reimprima , en i Qçp , cette édition à
Leyde , in-4". et in-fol., et y ajouta
quelques notes. Elle a aussi été réim-
primée par les soins de M. Wagner ,
Leipzig, tHoq, 5 vol. in-8'\ Ammien
JMarcellin n'a pas échappé à la plume ,
si malheureusement féconde, de l'abbé
de Marolles , dont la traduction parut
en iG7?>, -j vol. in- 12.M. Moulines en
a publié , à Berlin, en 1778 , une
nouvelle version en français , qui est
beaucoup meilleure; mais qui ne doit
pas décourager !es nouveaux traduc-
teurs. ( F. Spartikn ). M — ».
AMMIRAÏO ( ScirroN ), né le 27
sept. i53i, à liCcce, dans le royaume
de Napies, fut destiné, par son père ,
à l'étude des lois. Envoyé deux fois à
Napies pour suivre cette carrière, il en
fut écarté par son goût pour les belles-
A M M
lettres. Il crut que ce goût s'accorcîe-
rait mieux avec l'état eccle'siastiqiie ,
ou il entra en 1 55 1 . Ayant obtenu un
canonicat, il se rendit à Venise, où il
se lia avec plusieurs hommes célèbres ;
mais il en sortit peu de trmps après ,
pour éviter les effets de la jalousie d'un
mari puissant ; il cnit trouver la for-
tune et plus de tranquillité à Rome,
sous le pontificat de Paul IV ; mais
s'étant attachéà BriannaCaraffa , nièce
du pape, et ayant voulu servir en même
temps Calerina CarrafTa , sœur de ce
pontife , qui était brouillée avec sa
nièce, Briauna saisit le pirmier sujet
de mécontentement , et fit dire si po-
sitivement à Scipion qu'd était bien
lieureux qu'elle ne le fît pas assassiner ,
qu'il jugea plus prudent de quitter
Kome. Après quelques incertitudes , il
retourna à Naplcs pour y reprendre
l'étude des lois ; il y arrivait à peine ,
qu'un ecclésiastique, qui devint en suite
évêque de Calvi, lui avant dit quelque
injure , Ammirato s'oublia jusqu'à lui
donner un soufflet; la foule s'assembla
autour d'eux, et il reçut , entre les deux
épaules , un coup de couteau ou de
stylet. Guéri de cette blessure , il fut
rappelé dans sa patrie , par son père
qui voulait le marier. 11 se rendait à
Lecce, lorsqu'il rencontra un homme
qui se disait habile en chiromancie ,
et qui , ayant examiné sa main , lui
prédit que ce mariage ne se conclurait
pas. Le mariage manqua en effet , et
l'on remarqua alors la prédiction, qu'on
aurait oubliée, si le contraire était ar-
rivé. Quelques années se passèrent en-
core en déplacements et en projets
inutiles. Étant à Rome , en 1 5G3, Am-
mirato fut rappelé à Naples pour écrire
l'Histoire de ceroyaume.il y retourna
encore une fois ; mais, mécontent des
arrangements qu'on avait faits , et des
dispositions où il trouva ceux qui gou-
vernaient la ville , il reprit le chemin
A M I\I 35
de Rome , où il fit quelque séjour, et se
fit beaucoup d'amis; mais sans trouver
\\n protecteur qui se chargeât de sa
fortune. Enfin il se rendit à Florence,
dans le dessein de s'attachera la maison
de Médicis. Il y réussit , et le grand-
duc CosmeP'". le chargea, en 1370,
d'écrire l'Histoire de Florence. Le car-
dinal Ferdinand de IMédii is le logea
dans son palais à la ville et à la cam-
pagne , et lui lit aA'oir un bon canouicat.
Ces tdans celte position heureuse, mais
non tout-a-fait indépendante, qu'il
écrivit son Histoire , et qu'il passa !«
reste de sa vie. Il mourut à Floiciice le
5o janv. 1601, àgédcGgans.ll a laissd
un grand nombre d'ouvrages : I. Dclle
J'amiglie nohili nnf>oUta?ie , parte jyri-
ma, Florence , 1 !jSo, parle seconnu,
i()5i, in-fol. La première partie est
plus rare et beaucoup plus estimes quo
la seconde, qui n'a été imprimée quo
long-temps après la mort de l'auteur ;
IL Discorsi sopra Cornelio Tacito ,
Florence , Giunti , 1 5()4 , in-4°. ; ibid. ,
iSgS, et plusieurs fois ailleurs. Ce
furent sans doute les Discours deMu'
chiavcl sur Tite-Live qui donnèrent
à l'Aramirato l'idée d'eu faire sur Ta--
cite; mais ceux-ci n'ont, ni l'énergique
lilierlé de leur modèle , ni sa profon-
deur ; nous avons une Ti'aduction fran-
çaise de CCS Disconrs, Lyon , 1G19 ,
in-4''. ; IIL Orazioni a diversi priii-
cipi , intorno a' preparamenti contro
la potenza del Turco , Florence ,
Giunti , 1 5f)S, in-4°., contenant sept
Discours ou Harangues , adressées à
Sixte V, à Clément VIII, à Philippe II,
roi d'Espagne, etc.; IV. Isiorie flo-
rentine , le meilleur ouvrage de l'au-
teur , et l'une des meilleures histoires
d" l\'orenrc. I! ne faut pourtant pas ou-
blier la position où il était en l'écrivant,
et l'influence qu'elle a dû avoir sur
tout ce qui regarde la famille Médicis,
La première partie parut à Florence ^
56 A M M
chez les Juntes, en 1600 , in-fol. ; elle
comprend vingt livres , et s' étend jus-
qu'en 1434. La seconde partie ue fut
publiée que 4o ans après sa mort , par
Ammirato le jeune, Florence, i64i,in-
ibl.; elle contient quinze autres livres ,
et va jusqu'en 1 5'j4- Le même e'diteur
fit ensuite reimprimer la première par-
lie seulement, Florence 1647, 'x vol.
in-fol., avec des additions, marquées
flans le texte par des guillemets. Ce
sont les exemplaires , composes de ces
deux volumes, reimprimés en 1G47,
et de la seconde partie imprimée en
1 64 1 , qui sont les plus reclierchés , et
composent la meilleure édition des
Slnrie fioreTitine ; V. Délie fnmiglie
7iobili fioi^entine,Flonmce, 16 r 5, in-
fol. ; \ I./ FescovidiFiesole, di Fol-
ierra e d^^rezzo, Florence, 1637,
in-4''-j VIL Opuscoli , Florence,
5 vol. 10-4°. , T 640- 'G4'-^- Ce sont des
Mélanges - des Discoui-s, parmi lesquels
on retrouve les sept qui avaient été iju-
primés en i5ç)8; tîes Lettres , des Dia-
logues, des parallèles , des portraits ,
des morceaux de philosophie morale ,
des poésies diverses , etc. Ammirato
fut le premier éditeur des poésies de
Berardino Rota , célèbre poète napo-
litain; il les accompagna de notes , et
donna à leur publication des soins qui
n'ont pas peu servi à leur succès. On
lui dut l'impression de plusieurs autres
bons ouvrages en prose et en vers. 11
laissa lui-même plusiem's écrits qui
n'ont point été publics , entre autres
Y Histoire de sa 2>ie , que l'on dit con-
servée en manuscrit, à Florence, dans
la bibliothèque de l'hôpital de Ste.-
Marie-Nouvelle. Ammirato fit, en mou-
rant , son légataire universel , le fils
d'un maçon de ]Mont.ijone, noumié del
JUianco , qui avait été son secrétaire ,
<'t il mit à ce bienfait la condition de
jiorter son nom. DcI Bianco remplit
fidèlement cette couditioii , et uc s'ap-
A M M
pela plus que Scipion Ammirato-le-
JEUNE. Il fut ensuite attaché au j)rince
Laurent de Médicis , et eut quelques
autres emplois , où il se fît estimer. Il
n'a laissé aucun ouvrage de sa façon ;
mais il a pubUé plusieurs de ceux de
son père adoptif , et y a fait de bonnes
et utiles additions. 11 mourut à Flo-
rence, en 1640. G — e'.
AMjMONîO (André ) , de Lucques ,
])oète latin, intime ami d'Erasme, quj
l'a beaucoup loiié dans ses lettres. Né
en 1 4/7 ) il se livra de bonne heure ,
et avec succès , à l'étude des belles-let-
tres , de la langue grecque et de la poé-
sie latine ; il vécut quelque temps à
Rome, et passa ensuite en Angleterre ,
où il eut pour protecteur et pour ami
le célèbre Thomas Morus. Après quel-
f{ues années de gêne et de ine'contenw
tement , il devint , vers 1 5 1 5 , secré-
taire du loi Henri Vlil, pour les let-
tres latines. Il suivit ce prince, en cctt€
qualité, dans sa campagne contre la
France, fut témoin de notre défaite à
Guincgatc , et de la prise de Tournay
et de Theroucnne. Il célébra ces vic-
toires dans un poème latin , qu'il inti-
tula Panegyricus, dont Erasme faiï
uu grand éloge. Léon X le nomma ,
peu de temps après , son nonce au-
près du même Henri YIII , charge
qu'il exerça le reste de sa vie , sans
quitter celle de secrétaire du roi. Il
mourut à Londres , en 1517. On cite
de lui des poésies latines , dont il
n'existe ni éditions , ni manuscrits.
Une de ses Eglogues seulement se
trouve imprimée dans le recueil inti-
tulé : Bucoliconim auctores , Baie,
1 546 , in-S"*. Dans les Lettres d'E-
rasme , on en a inséré dix ou onze
d'Ammonio, qui suffisent pour donner
une bonne idée de son esprit et de sou
style. G — E.
* AMMONIUS SACCAS, ainsi nom-
mé parce qu'il fut, dit-ou porte-sac
AMM
dans sa ieunesse, était natif d'Alexan-
drie , et \ivait vers la fm du i^. siècle.
Ses parents étaient pauvres et chré-
tiens j ils relevèrent dans leur reli-
gion. Dégoûté de l'état pénible qu'il
exerçait, il le quitta pour se livrer à
l'étude de la philosopliic, dans laquelle
on croit qu'il eut pour maître Pantae-
luis. Au iDOut de quelques années, il
ouvrit une école, et se fit un grand
nombre de disciples, dont les plus
célèbres furent Hérennius, Origène ,
Plotin. On regarde ordinairement cette
école comme )a première de la plii-
losophie éclectique. Cette opinion ,
néanmoins, a besoin d'être rectifiée.
L'écleclîsme est la floctrine de ceux
qui, sans embrasser aucun système
particulier, prennent, dans chacun,
ce qui leur paraît le ]>Uis conforme à la
vérité, et, de ces diverses parties,
coordonnent un nouveau tout. C'était
sinsi qu'avait procédé Potamon. Mais
il est impossible de donner le nom
d'éclectisme à la philosophie d'Ammo-
nius, assemblage monstrueux et bi-
zarre des opinions les plus contra-
dictoires. En effet , non content d'avoir
amalgauié sans ordre les systèmes
fondamentaux des diverses sectes grec-
ques, l'épicurisme except*', il tomba
dans la même confusion , relativement
aux principes religieux.; de sorte que
le chaos de sa doctrine embrassait
également les opinions philosophiques,
et les dogmes sacrés. On doit donc
plutôt le regarder comme le fondateur
des théosophes ou illuminés. Aramo-
nius n'écrivit jamais rien. 11 ne con-
fiait ses principes qu'à un petit nom-
bre dedisciples, et sous le voile du mys-
tère. Cependant , quelques historiens
le font auteur d'une Concorde éi^angé-
liqite, qui se trouve dans le 7*. tome de
la Bibliothèque des Pères^ et que d'an-
tres attribuent, avec plus de fonde-
laeut , à un évêqw Ammonius. D. L .
A M M 57
AiNTMONITJS , philosophe éclecti-
que, fils d'Hermias et d'iEdesia , vivait
vers le milieu du 5". siècle. Il était na-
tif d'Alexandrie; mais, après la mort
de sou père , jEdesia le conduisit à
Athènes , avec son frère Héliodore ,
et les confia tous deux aux soins de
Proclus. Sous cet habile maître, Am-
monius obtint des succès honorables j
il eut même, à son tour, des disciples
distingués, tels que Simplicius, Dama-
scius, J. Philoponus. 11 nous reste,
d'Ammonius , divers commentaires sur
les OEuvres d'Arislote et de Por-
phyre; savoir : I. In lihr. Peri-Herme-
/?<?/ff5 , Venet. , Aid., i5o3, in-fol.j
II. In lib. Arislot. de interpretatio-
Tle ; 111. In ejusdem prœdicamenta ;
IV. In quinqiievoces Porpliyri. Les 3
Traités réunis, Venet., Aid. , i546,
in-S". Un extrait du 2". commentaire,
dans lequel Ammonius traite du hbre
arbitre et de la Providence , se trouve,
grec-latin, dans l'édition faite à Lon-
dres , du Traité De fato d'Alexandre
d'Aphrodisée ; et, en latin seulement,
dans le recr.eil de Grofius , intitulé:
Philosophorum senteniiœ de fato.
On attribue encore à Ammonius la
Fie d'Aristote qui orne plusieurs
éditions des œuvres de ce philosophe.
— Un autre Ammomus , philosophe
jiéripatéticien , fut un des maîtres de
Plutarque : il était également natif
d'Alexandrie, mais il quitta cette ville
pour aller s'élablir à Athèiies , où il
termina ses jours. 11 essaya de conci-
lier entre elles la doctrine d'Aristote
et celle de Platon, ce qui doit le faire
regarder comme un des fauteurs de
l'éclectisme. Plutarque avait écrit sa
Vie, qui est perdue. Au reste , on.
compte , dans l'antiquité , plusieurs
Ammonius, souvent confondus , et
dont l'histoire est enveloppée d'une
glande obscurité. Longin parle d'iiu
péripatélicieii de ce nooi, ditierent
5îi A M M
du prëcëdeut , et que Pliilostrate
regardait comme l'homme le plus sa-
vant de son siècle. D, L.
AMMONIUS , grammairien grec ,
est sans doute le même que celui qui ,
étant à Alexandrie, prêtre d'un singe,
fut oblige de prendre la fuite vers l'an
089 de notre ère, lorsque The'ophile,
patriarche de cette vii'e, eut porte les
chrétiens à détruire les temples des
païens. Il nous reste de lui un Traite;
De adfinium verborum dijjerentid ,
qui a été imprimé un grand nombre
de fois , à la suite de cliilérents Diction-
naires grecs. La meilleure édition est
celle que Valckenaer en a donnée,
avec des notes très-savantes , Lugd. ,
Bat., 1 759, iu-4''. M. Ammon, savant
professeur de Gottingue, l'a fait réim-
primer, avec des notes choisies de Val-
ckenaer , et les siennes propres , Er-
langaî, 1787, in-8'. C — r.
AMNON , fils aîné de David et
d'Achinoam, devint tellement épris de
sa sœur Thamar , qu'il lui fît "\iolence ;
mais il n'eût pas phus tôt commis cette
action détestable, que, sa passion se
changeant en haine , il chassa honteu-
sement Thamar. David , qui aimait
Aranon, laissa son crime impuni ; mais
Absalon, irrité de l'insulte qu'Amnon
avait faite à sa sœur, résolut de s'en
venger. Il invita ses frères à un festin ,
et , à peine Amnon se lut-ij abandonné
aux plaisirs de la table, qu'il le fit tuer,
l'an io5o avant J.-C. T — d.
AMOLON , disciple , diacre et suc-
cesseur d'Agobard dans i'archevêclic
de Lyon, en 8^0, gouverna cette
église avec beaucoup de zèle et de si-
gesse , jusqu'à sa mort, en 85'i : il avait
joui d'une grande considération auprès
du roi Charles-le-Ghauve, et du pape
Léon IV. Le petit nombre d'écrits qui
nous restent de ce prélat, donnent
une idée avantageuse de son esprit et
de son savoir. Le principal est une
AMO
lettre curieuse à Théobalde, cvêque
de Langres , sur de prétendues reliques
apportées de Rome, par des moines
vagabonds, et sur des convulsions
que des femmes éprouvaient auprès
de ces reliques , et qu'on voulait faire
passer pour des miracles. « Les mira-
» clés, dit Amolon , rendent souvent la
» santé aux malades, mais ils ne l'ètei-t
» jamais , non plus que l'usage de la rai-
» son , à ceux qui y ont foi. « . Sa lettre
à Gottescald, où il réfute les erreurs
attribuées à ce moine infortuné, est
écrite avec beaucoup de modération.
Rien n'eût été plus propre à le tirrr
de ses erreurs, s'il eut été coupable,
que le ton de charité et l'adresse
qu'emploie le respectable prélat. On a
encore de lui des opuscules sur la
grâce et la prédestination , oii les
matières sont traitées suivant les prin-
cipes de S. Augustin. Tous ces écrits
ont été insérés dans l'édition d'Agobard
que Baluze donna en i6t)6, d'où ils
sont passés dans la Bibliothèque des
Pères. On attribue à Amolon un petit
Traité contre les Juifs, rempli d'c'
rudition, que le pèrcChitHct pubHa ,
en i65(i, à Dijon, sous le nom de
Raban Maur. T— d.
AMO?sTONS ( GuiLL.AXTME ) na-
quit cà Paris, le 3i août i(J65. Etant
fort jeune, il éprouva une maladie
considéraljle , qui le rendit presque
entièrement soui d. Cet accident l'avant
force de chercher toutes ses res-
sources en lui-même, il s'adonna aux
mécaniques, pour la construction des-
quelles il avait beaucoup de dispo-
sitions naturelles; et , ce goût étant de-
venu une passion, il aurait volontiers
regardé sa surdité comme un avanMgr,
qui lui assurait une plus grande tran-
quillité. Il apjnùt le dessin , l'architec-
ture, et fut employé;» divers ouATagcs
publics ; mais bientôt les nouveaux
instruments dont la p^iysique venait de
A MO
s'cnrictir, le baromètre, le tliermo-
mètre, l'hygromètre, attirèrent toute
son attentiou. 11 travailla beaucoup à
les perfcctiouuer , et rassembla ses
recherches sur cet objet, dans uu ou-
vrage intitule : Remarques et expé-
riences physiques sur la construc-
tion d'une nouvelle clepsydre, sur
les baromètres , thermomètres et hy-
gromètres, Paris, 1G95. Quatre ans
après la publication de cet ouvrage , il
fut reçu de l'Académie des sciences,s'oc-
cupa des frottements , et de phisieiu'S
autres objets de mécanique et de phy-
sique, comme on peut le voir dans
l'Histoire de cette compagnie. Après
avoir joui constamment d'une saute
parliùte, qu'il devait à sa modèralioa
autant qu'à la nature, il fut tout à
coup attaqué d'une maladie aigiie , qui
l'emporta en peu de jours, et il mou-
rut le 1 1 octobre i-joS, à l'Age de 4'^
ans. Amontons est le véritable inven-
teur de l'art télégraphique, tel que
nous l'emjiloyons aujourd'hui; il en fit
deux fois l'expérience pubhquc devant
des membres de la famille royale.
« Le secret , dit Fontenelle , consistait
» à disposer, dans plusieurs postes
» consécutifs , des gens qui , par
» des lunettes de longue vue, ayant
« aperçu certains signaux du poste
)) précédent, les transmissent au sui-
» vaut, et toujours ainsi de suite. Ces
» difierents signaux étaient autant de
» lettres d'un alphabet , dont on n'avait
» le chiflre qu'à Paris et à Rome. La
)) plus grande portée des lunettes ré-
» glalt la distance des postes, dont le
» nombre devait être le moindre qu'il
» fût possible; et , comme le second
w poste faisait des signaux au troi-
» sième, à mesure qu'il les voyait fjire
» au premier, la nouvelle se trouvait
)) portée de Paris à Rome, presque
» en aussi peu de temps qu'il en fallait
D pour f.ire les signaux à Paris, »
A :M O 5o
L'invention des télégraphes ne pouvait
pas être plus clairement décrite, ni
son utilité, mieux exprimée. On pour-
rait s'étonner qu'il ait fallu cinquante
ans pour en sentir le mérite , et pour
la mettre à exécution ; mais la vérité
ne marche pas plus vite. La décou-
verte d'Amontons a eu le sort qu'il
éprouva lui-même pendant sa vie :
« 11 avait, dit Fontenelle, une entière
» incapacité de se faire valoir , autre-
» ment que par* ses ouvrages, ni de
» faire sa cour, autrement que par son
» mérite; et, par conséquent, une in-
» capacité presque entière de faire for-
» tune. » B — T.
AMORT (EusÈbe), doyen du cou-
vent de PoUingen, en Bavière, né le
i5 novembre 1692, près de Tœlz,
entra à Pollingen, dans l'ordre des
chanoines réguliers, et, après avoir
été professeur de théologie dans son
couvent , suivit à Rome le cardinal Ler-
cari; revenu à PoUingen, en 1755, il
fut nommé membre de l'Académie des
sciences de Munich : il employa dès-
lors tout son temps et tout son savoir
à combattre les préjugés et les supers-
titions qui régnaient dans sa patrie, et
à défendre l'autorité du pape. 11 mou-
rut le 5 février 1775. Ses écrits sont
fort nombreux , et roulent sur uu
grand nombre de matières diverses.
Les principaux sont : I. Philosophia
Pollitigena , Âugsb. , 1700 , in-fol. ;
11. une Histoire théologique des In-
dulgences, iu-fol.; m. nue Disserta-
tion sur l'auteur de Vlmitation de
J.-C. : i! croit que c'est Tliomas à
Kempis, etc. Ci — t.
AMOS, le troisième des petits pro-
phètes dans les Bibles ordinaires , et
le second dans les Septante , place
qu'il paraît plus couveualjle de lui
assigner , parce qu'ayant exerce' 5a
mission sous les règnes d'Osias , roi
de Juda , et de Jéroboam II , roi d'is-
6o A M 0
raël , il doit être mis avant Joëî , qui
occupe le second rang , quoiqu'il n'ait
paru qu'après le dernier de ces prin-
ces. Amos n'appartenait point â ces
troupes d'hommes inspirés qui se
rendirent célèbres sous la conduite
d'Elie et d'Elisée; son état ne sem-
Wait pas même le destiner à cet au-
guste ministère ; il gardait les trou-
jicaux, et cultivait des sycomores dans
les champs de Thécué, lorsqu'il reçut
sa mission , environ l'an "-80 avant
.T.-C. Il prophétisa à Béthel, où était
le siège principal de l'idolâtrie, an-
nonçant à Jéroboam la ruine de sa
inaisoH et la captivité de tout Israël,
•mI persistait dans le culte des faux
Dieux. Amasias , prêtre des idoles ,
.s'apercevant de l'impression que les
discours du prophète faisaient sur le
peuple, et craignant pour la silretéde
son temple , l'accusa , devant le roi
d'Israël, de soulever ses sujets contre
lui : cette dénonciation força Araos de
sortir de }3éthel , après avoir prédit à
Amasias que sa femme se prostitue-
rait au milieu de Samarie ; que ses (ils
et ses filles périraient par le glaive
ennemi, et qu'U mourrait lui-même
dans mie terre profane , loin du
tombeau de ses pères : voilà tout ce
qu'on sait de la vie de ce projihèle.
ÎjCs Grecs célèbrent sa fêle le 25
juin , et les Latins , le 5 1 mars. Sa
Frophétie contient neuf chapitres.
Son style se ressent de l'état dans le-
qr.el il était né, et c'est ce qu'on re-
connaît aisément à une certaine ru-
desse, et surtout aux comparaisons
prises dans la vie champêtre ; on y
trouve néanmoins quelquefois des ex-
pressions vives et figurées , qui ne
manquent point de grâce. On peut
.s'en convaincre par la peinture qu'il
fait , au 6''. chapitre , du luxe et de la
volupté qui régnaient à Samarie.
T— D.
AMO
AMOUR ( Guillaume de St.- ) ,
fameux docteur de Sorbonue, et cha-
noine de Beauvais , naquit, au com-
mencement du i5''. siècle, dans le
bourg de St.-Amour en Franche-Comté.
Le zèle, souvent exagéré, qu'il déploya ,
en toute occasion , contre les religieux
mendiants , nouvellement institués ,
soit comme prédicateur , soit comme
professeur de théologie , le fit choisir
par l'université de Paris pour dé-
fendre ses intérêts contre les domi-
nicains et les franciscains , auxquels
elle disputait le droit d'ouvrir des
chaires publiques de théologie et de
philosophie. Ces religieux , outrés de
l'animosité qu'il mettait à les décrier,
l'accusèrent d'avoir débité en chaire ,
dans ses leçons et dans des libelles ,
des choses peu honorables pour le
pape Alexandre IV, et des proposi-
tions erronées contre l'esprit de men-
dicité dont ils faisaient profession j
mais il s'en justifia pleinement , et
dans ses sermons, et dans ses défenses,
présentées à Renaud de Corbeil , évê-
que de Paris, à qui S. Louis avait
renvoyé la connaissance de cette af-
faire. Les plaintes se renouvelèrent
plus fort que jamai)», en laSG, lors-
qu'il publia son fameux Uvre des
Périls des derniers temps , oîi , à
ti'avers beaucoup d'invectives contre
ses adversaires , on trouve d'excel-
lentes choses sur la subordination
aux pasteurs , dont les nouveaux frères
cherchaient partout à secouer le joug,
à la faveur des bulles qu'ils obtenaient
de Rome. L'université le mit alors à la
tête d'une députation de sept de ses
membres, chargés d'aller défendre à
Agnani, où résidait le pape , le livre
des Périls j et demander la condam-
nation de V Evangile éternel, attribué
à un religieux mineur, qui y avait
compilé les rêveries de l'abbé Joa-
chim ; mais les religieux avaient pi é-
AMO
V'Cnu la de'putatlon , par l'envoi de
leurs plus célèbres docteurs , Thomas
d'Aquin , Albert - le - Grand, Boua-
venture , et autres. Ils avaient obtenu
la bulle Urhi et orbi, qui condam-
nait le livre des Périls , avec les
qualifications les plus odieuses. Les
collègues de St.-Amour se laissèrent
gagner et s'y soumirent ; lui seul resta
ferme, et il se défendit avec tant de
force, fju'il fut renvoyé absous; mais,
à peine fut-il reparti , que le pape lui
fit signifier la défense d'enseigner, de
prêcher , et de rentrer en France.
Alors, il se retira dans son lieu natal ,
d'où il n'eut la liberté de revenir à
Paris que sous le pontificat de Clé-
ment IV. C'est dans cette ville qu'il
mourut, en i -272. St.-Araoïu' était sa-
vant , régulier dans sa conduite, mais
d'une imagination exaltée, qui lui fai-
sait souvent dépasser les bornes de la
modération dans les choses qui con-
trariaient ses idées. Ses ouvrages ont
été imprimés à Paris eu 1602, i vol.
in-4°. ; ils ont tous pour objet de ré-
futer les prétentions des religieux
mendiants, et renferment beaucoup de
déclamations, T — d.
AMOUR (Louis-GoRiN deSt.-),
docteur de Sorbonne , fils d'un cocher
du roi , et filleul de Louis XIII , na-
quit à Paris, en 161 9, fit des études
brillantes dans l'université de cette
ville , dont il devint recteur , et dont
il défendit vigoureusement les droits
contre les entreprises des jésuites.
Docteur de Sorbonne en i644 ? il se
signala six ans après dans la querelle
du jansénisme. La chaleur avec la-
quelle il s'éleva, dans les assemblées de
la faculté de théologie , contre la con-
damnation des cinq fameuses propo-
sitions attribuées au livre de Jansé-
nius , lui mérita la confiance des évê-
ques opposés à cette condamnation ;
ils le charger eut , pendant qu'il était à
AMP 6ï
Rome, à l'occasion du jubilé, d'ob-
tenir d'Innocent X que, dans le juge-
ment qui interviendrait, il distinguât,
d'une manière claire et précise , le
sens dans lequel les propositions se-
raient condamnées , de celui dans le-
quel elles pouiTaient être soutenues y
mais tous les efforts de St.-Amour
échouèrent contre le crédit de ses
adversaires les jésuites. JN'ayant pu
gagner sa cause, il revint en France
soutenir celle de M. Aruauld , relusa
de souscrire à la condamnation de ce
docteur , et fut, pour cette raison , ex-
clu des assemblées de Sorbonne. Il
mourut, dans un âge avancé, le 14
nov. 1687 , à St.-Deuis. On a de lui ,
outre plusieurs écrits sur les alïaires
de l'Eglise , un Journal de ce qui
s'était passé à Rome , touchant les cinq
propositions ^ depuis 1646, jusqu'en
i653, imprimé , en 1662 , in-foL, es-
timé, malgré la partialité qu'on doit
s'attendre à y trouver. L'auteur n'y
parle que de ce qui s'est passé sous ses
yeux , et où il a eu souvent la princi-
pale part. Les faits importants y sont
appuyés par des pièces authentiques,
qui rendent l'ouvrage aussi curieux
qu'intéressant. Un arrêt du conseil
d'état , de 1G84 , sollicité par le parti
opposé, et rendu sur les mémoires de
plusieurs prélats et docteurs , qui y
avaient trouvé les cinq propositions
de Jansénius , le condamna à être
brûlé par la main du bourreau,
N— L.
AMPHIL0QLT3 ( S. ) , évêque
d'Icône , issu d'une famille noble de
Cappadoce, exerça, dans sa jeunesse ,
la profession de rhéteur , puis celle
d'avocat , et s'acquit beaucoup de
réputation dans l'une et l'autre. Il
se retira ensuite dans la soUtude ,
par le conseil de S. Grégoire de
Nazianze, pour s'y consacrer entière-
mentà Dieu. Amphiloque se trouvante
63
AMP
Iconc, au momeul où cette ville était
privée de sou pasteur , le clergé et le
peuple se réunirent, d'une voix unani-
me , pour le porter sur ce siège. On
croit que S. Grégoire de Nazianze ne
fut pas étranger à cet évéuement, qui
est de l'an 3-- 4- Le zèle et les talents du
nouveau prélat brillèrent dans le gou-
vernement de son diocèse, dans l'é-
clat avec lequel il parut à plusieurs
conciles. Il en tint un , à Icône , con-
tre les macédoniens, en 076. Il se
trouva , en 58 1 , au concile général
de Constantinople , et présida à celui
de Side , en Paraphilie , où furent
condamnés les mcssaliens , dont l'hé-
résie naissante commençait à infecter
son troupeau. L'empereur Tliéodosc
lui ayant refusé une loi pour défendie
aux ariens de tenir leurs assemblées ,
il affecta , dans une circonstance , de
ne point rendre au jeune Arcadius ,
nouvellement créé Auguste , les hon-
neurs d'usage. Théodose lui en té-
moigna sa surprise et son méconten-
tement : « Eh quoi I seigneur , lui dit
j) Amphiloque , vous ne voulez pas
« qu'on manque de respect à votre
» fils , et vous souffrez ceux qui blas-
» phèment contre le fils de Dieu î »
Cette prompte répartie produisit sou
effet ; car l'empereur rendit aussitôt
une loi pour défendre les assemblées
publiques de tous les hérétiques. On
Ignore l'époque précise de la mort de
cet év«que. On sait seulement qu'il
vivait encore en 094 , et qu'il mourut
dans un âge très-avancé. L'Eglise cé-
lèbre sa fête le 25 novembre. Il avait
composé beaucoup d'ouvrages contre
les hérésies de son temps , et spécia-
lement contre les mcssaliens. Il ne
nous en reste que des fragments assez
longs dans les Conciles d'Ephèse et
de Chalcédoinc , et dans les auteurs
ecclésiastiques de cette époque. Cot-
telier a publie sa kttre aux cvcques
AMR
macédoniens. Le P. Combesis a fait
imprimer, en i644, in-fol. , grec et
latin, les ouvrages qui portent son
nom, mais dont la plupart lui sont
faussement attribués : ils ont passé de
là dans la Bibliothèque des Pères.
T— D.
AMPHINOMUS. F. Anapius.
■ AMPSINGIUS , ou AMPSING
( Jean-Assuerus) , né dans la pro-
vince d'Over-Yssel , fut d'abord mi-
nistre de la ville de Harlem , se fit
ensuite recevoir médecin , exerça sou
art successivement, en Suède, dans la
basse Saxe , fut nommé professeur à
la faculté de Rostock , et mourut ,
médecin du duc de Mecklembourg , à
Rostock , en 1 04^ , h l'âge de 85 ans.
On a de lui : I. Dissertatio iatro-
maihematica , dans laquelle il relève
l'excellence de la médecine et de l'as-
tronomie sur toutes les autres sciences,
et veut les unir d'une manière indisso-
luble, Rostochii, 1602, i6i8,in-4". ;
1629, in-8". ; IL De theriacd ora-
fio, ibid., 1618, in-4°.; 1619, in-8".;
III. De morborum dijferentiis liber ,
ibid. , 1619, in. 4".; 1625, in-8".,
avec le Traité précédent; IV. Heclas
ajfectionum capillos et pilas hitmani
corporis z>?/«frt«/mTO, Wittebergias ,
1625, in-8''. ; Rostochii, 1623, id,
C. et A — N.
AiNIRI , roi d'Israël , fut proclamé
par l'armée qu'il commandait au siège
de Gebbéthon , après la mort d'Ela ,
assassiné par Zambri. 11 investit l'as-
sassin usurpateur dans Thersa , et le
força de se brûler , avec sa famille ,
dans le palais du roi. Thebni lui dis-
puta encore la couronne pendant
quatre ans ; mais enfin il se trouva
maître de tout Israël par la mort de
son concurrent. L'Ecriture loue la
valeur de ce prince : mais elle lui re-
proche d'avoir porté l'impiété plus
loin que ses prédécesseurs , en quoi il
A ?-î i\
îa\. surpasse par Acîiab , sou fils et son
successeur. Âinri mourut vers l'an 9 1 8
avant J.-C. , après avoir fait l»âtir Sa-
larie , pour en faire la capitale de
sou royaume. T — d.
AMRIAL-CÂIS, le plus célèbre des
anciens poètes arabes, est auteur d'une
des sept moallacah , poèmes com-
posés avant Mahomet, et qui avaient
été suspendus à la caabnîi , ou temple
de la r>Ickke , d'où leur est venu le
nom de vioallacah ( suspendus ).
Amriâl-Caïs était d'une famille dis-
tinguée; son goût pour la poésie ayant
déplu à son père , qui retenait sur la
tribu des Benoù-Asad , il fut cbassé de
sa maison , et mena une vie errante
parmi les Arabes vagabonds et bri-
gands , jusqu'à la mort de son père,
qui fut tué par ses sujets, indignes
de sa barbarie. Amriâl - Caïs , alors
obligé, selon raucienne coutume des
AraÎDCs , de venger , par le sang ,
le sang de son pèi'e, vint fondre,
avec une troupe d'Arabes errants ,
sur ses sujets ^ mais ceux. - cl s'é-
taient sauvés , et une tribu voisine
devint l'objet de la vengeance d'Amriâl-
Caïs. Ses compagnons, irrités de celte
méprise , l'abandonnèrent , et il se
réfugia auprès d'un prince du Yémen ,
qui lui promit , mais en vain , de lui
faciliter lesmoyens dose venger. Lassé
des retards que ce prince apportait à
l'exécution de sa promesse , il alla
trouver l'empereur grec , dont il im-
plora le secours. Mallieureuseraent,un
Arabe de la tribu des Bcnou-Asad se
trouvait à la cour de ce prince; il par-
vint à l'indisposer contre Amridl-Caïs ,
et enfin à perdre ce dernier. L'em-
pereur avait promis des troupes à
Amriàl-Cais. Il les lui donna en effet :
mais, pendant sa marche, il lui en-
voya une chemise empoisonnée. A
peiiK' Arariâl-Ca'is s'en fut-il revêtu ,
^u'il sentit de vives douleurs, et il
A I^î 11 G5
expira peu après. Il fut inhunjé près
d'Ancyre. Amriàl-Caïs était contem-
porain de Mahomet, et avait même fait
des vers satiriques contre lui. La Moal-
lacah , dont Lette a publié, à f ^eyde , en
1 7 48 , le texte ai-abe, et W- Jones , la
traduction anglaise , à Londres , en
l'^Ss, ne tient à aucun fait histo-
rique ; c'est une suite de tableaux , où
s'égaie l'imagination de l'auteur. Les
])laisirs qite lui a causés la présence
des belles , les charmes de ses maî-
tresses, la description de sou agile
coursier, et la peinture d'un orag^e
qui fond sur la terre, et dérobe à la
vue les sommets des montagnes , tels
sont les sujets traités dans ce poërae,
dont les riches détails , les comparai-
sons Avariées , et les figures hardies ,
scmbl(*lit avoir servi de modèle à la
plupart des poètes arabes des siècles
suivants. J — n.
AMROU-EEN-LEITS, deuxième
prince de la dynastie des Soffarides ,
succéda àYaçoub, son frère ,ran 265
de l'hég. ( 879 de J.-C. ). Maître d'un
trône où l'avait porté la faveur des
troupes , il voulut s'y affermir en mé-
ritant les bonnes grâces du khalyfe
alors régnant , et à qui son fièrc avait
juré une guerre perpétuelle. Une
splendide ambassade porta son hom-
mage au pied du trône , avec des
présents considérables , et le khalyfe
lui envoya à son tour un riche khi-
lah ( habillement ) , avec le diplôme
de gouverneur du Khoraçàn , d'Is-
pahân , etc. Le khalyfe et son lieute-
nant vécurent ainsi en bonne intel-
ligence pendant quelques années ,
qu'Amroù employa à étouffer les trou-
bles élevés dans son gouvernement °
mais , en 884 de l'hég. , soit qu'il né-
gligeât d'envoyer des présents à Bagl-
dàd, soit qu'il eût mécontenté, par
son avarice, les habitants du Khora-
çàn , le -khalyfe ordonna que sou
64 A M R
nom fut raye de la prièie, et qu'on
le chargeât de malédictions ; ce qui
fut le signal d'uue guerre funeste.
Complètement battu par les troupes
de Baglidàd , Amroù se réfugia daus
le Kermàn,et passa, de cette province,
dans le Kîioraçàn , où Refyi s'était
rendu indépendant. Amroù le vain-
quit , le fit prisonnier, ainsi que Mo-
hammed , et les envoya au khalyfe ,
avec qui ce service le réconcilia. Pen-
dant ce temps, Ismaël-le-Samanide
s'était révolté contre Amroù , à l'ins-
tigation du khàlyfej celui-ci , s'étant
mis à la tète de ses troupes , mar-
cha contre le rebelle ; mais , trop
sûr de vaincre , il négligea de choisir
un campement avantageux. L'armée
d'Ismacl , au contraire , qui avait ])assé
le Djyhoùn , était disposée de telle fa-
çon , qu'elle cernait celle d' Amroù. Ce
désavantage de position jeta l'effroi
dans le camp Soffaride , où avait déjà
retenti le bruit des exploits d'Ismacl.
Les généraux vinrent trouver Amroù,
«t le forcèrent à se retirer daus une
forêt voisine. Ce prince céda aux cir-
constances j mais sa marche fut plutôt
une déroijte qu'une retraite. Entraîné
l\ii-même jiar les fuyards , son clieval
Je jeta dans uu buisson , et un parti
ennemi le fît prisonnier. D'autres his-
toriens disent qu'Annoù fut emporté
])ar son cheval au milieu des rangs
«■nnemis ; (juoi qu'il en soit , Ismacl
obtint une victoire com])lète, et devint
maître d'un vaste empire ; Amroù fut
coudmt dans une tente pour y atten-
dre son sort. Le changement inattendu
de sa fortune ne lui fit rien perdre de sa
gaîté, et, comme on lui apprêtait quel-
que nourriture , un chien mit la tête
daus la marmite : s'étant brûlé , il la
retira avec tant de viv;unté, qu'il em-
porta à son col, et le repas du prince,
et le vase qui le contenait. Amroù ,
témoin de cette sccue , lil mii éclats ,
AMR
et, quelqu'un lui ayant témoigne son
étonncment de le voir si gai, lorsqu'il
avait tant de sujets d'être affliiic : « Ce
» qui me fait rire , lui dit Amroù ,
n c'est de penser que mon cuisinier se
)) plaignait ce matin que trois cents
» chameaux ne suffisaient pas pour
» porter ma cuisine , et de voir qu'un
» seul chien la porte si lestement. »
Lorsqu' Amroù parut devant Ismacl ,
celui-ci vint à sa rencontre, l'embrassa,
et jura qu'il ne lui arriverait rien de
fâcheux; mais, le khalyfe ayantréclanié
ce prisonnier , Ismacl , qui voulait
mériter ses faveurs , le lui envova.
Amroù entra à Baghdàd , monté sur
un chameau , et , quand il eut servi de
spectacle à toute la ville , on le jeta
dans uu cachot. Les circonstances de
sa mort diffèrent beaucoup chez les
divers historiens ; mais l'époque ]>eut
en être fixée à l'an 289 de l'hég.
( 902 de J.-C. ). Amroii avait régné
20 ans. Il se montra digne des fa-
veurs de la fortune , par ses vertus
militaires ; il parut supérieur à ses re-
vers , par la grandeur d'ame avec la-
quelle il les supporta. 11 n'eut pas
moins de férocité que la plupart des
autres chefs de dynasties asiatiques.
Ou lui reproche beaucoup d'avarice.
Sa politique consistait surtout à éle-
ver de jeunes garçons , qu'il donnait
ensuite en présents à ses officiers , et
ces jeunes gens , comblés de ses fa-
veurs , lui rendaient compte de toutes
les actions de leurs maîtres. Amroù
révélait ensuite à ces mêmes officiers
leurs plus secrètes démarches , et il
n'en fallait pas davantage pour leur
persuader que le prince avait des re-
lations avec les génies. On peut dire ,
avec vérité, qu'en sa personne finit la
dynastie des SofTarides . dont on place
les commencements à l'an •.).59 (879,
de J. - C.) ; car on ne doil pas nicUrc
au nowbi'e des souverains an cette
AMR
maison , Thaher, petit- fils d'Amroù,
qui fui déclaré son successeur dans
le Systân , mais qui n'eut réellement
qu'une puissance très - précaire dans
cette province ; et encore moins Am-
roîi, arrière-petit - fds d'Amroîi-ljeu-
Leïts, qui ne fut qu'un fantôme, dont
les khâridjy du Systân se servirent
pour se soustraire à la puissance des
tjamauides. Enfin , quelques histo-
riens placent, parmi les Soflarides ,
Ahmed-Ben-Khalaf. J — n.
AMROU-BEN-EL-ASS, l'un des
plus célèbres capitaines des premiers
temps de l'islamisme , était le fils
d'une prostituée , qui , dit-on , de cinq
koréiches qu'elle recevait chez elle ,
ne put dire lequel était le père de
cet enfant. Amroù s'adonna , dans sa
jeunesse , à la poésie , et fît des vers
satiriques contre Mahomet. Sa haine
contre le prophète fut telle , qu'il alla
poursuivre eu Abissinie les musul-
mans qui s'y étaient réfugiés ; mais
enfin , il se convertit à la doctrine du
Koran , et en fut un des plus zélés pro-
pagateurs. Quoiqu'il ait figuré dans
les différentes guerres qui eurent lieu
sous Abou-Bekr , et le commencement
du règne d'Omar , la conquête d'E-
gypte est néanmoins son plus beau
titre de gloix'e; à la mort d'Aboù-
Obéïdah , Amroù, malgré l'opposition
d'Otsmàn , fut nommé gouverneur
de la Syrie, qu'il avait contribué à
soumettre. Il se dirigea aussitôt après
vers l'Egypte; et, à peine était-il parti
de Gaznah , qu'on lui remit une lettre
d'Omar, qui lui ordonnait de revenir
sur ses pas , s'il n'était point encore
entré en Egypte; mais qui le laissait
libre de continuer sa route , s'il en
avait dépassé les frontières. Le rusé
Amroù fait alors doubler le pas à ses
troupes , et , lorsqu'il est assez avancé,
il ouvre la lettre d'Omar , et la lit en
présence des officiers ; il interroge
AMR 65
ensuite les h-ibitants sur le nom et
la situation géographique du lieu où
campait l'armée , et , comme on lui ré-
])ondit qu'il était sur les frontières
d'Egypte : a Continuons donc notre
» marche, dit-il à ses généraux. » Quoi-
qu'il n'eut avec lui que 4ooo hommes,
Sarmah , ou Peluse , tomba en sou
pouvoir, et Mesr subit le même sort,
après un siège de sept mois. Amioù,
aussitôt après cette dernière conquête,
à laquelle la trahison du commandant
grec contribua beaucoup , jeta les fon-
dements d'une nouvelle ville, nom-
mée alors Fostat , et aujourd'hui le
Vieux-Caire. Il continua sa marche, et
vint assiéger Alexandrie. Dans toutes
les attaques , le glaive et le drapeau
d'Amroù brillaient à l'avant-garde. La
jour , les guerriers qu'il avait à sa
suite avaient pénétré dans la cita-
delle, mais ils en furent chassés , et
le général , qui ne voyait plus autour
de lui qu'un ami et un esclave , de-
meura au pouvoir des Grecs. Lors-
qu'on le conduisit devant le préfet ,
son maintien audacieux et son langag-e
fier pouvaient avertir qu'il était le
chef des musulmans , et la hache d'iui
soldat, déjà levée sur lui, allait abattre
la tête de l'insolent captif. Sa vie fut
sauvée par la présence d'esprit de son
esclave, qui frappa son maître au vi-
sage, et qui, d'un ton irrité, lui or-
donna de garder le silence devant ses
supérieurs. L'officier grec fut trompé J
il écouta la proposition d'un traité, et
renvoya ses prisonniers , qui se don-
naient pour les députés des musul-
mans ; mais bientôt les acclamations
du camp ennemi annoncèrent le retouï
d'Amroù. La conquête d' Alexandrie
coûta aux Sarrasins 20,000 hommes.
« J'ai pris la grande ville de l'Occi-
» dent, écrivait Amroù au khalvfe ; il
)) n'est pas possible de faire l'énumé-
» ration des richesses et des beautés
5
6Ô AMR
•» qu'elle contient. » Amroîi eut assez
d'influence sur les fanatiques qu'il
commandait , pour préserver la ville
du pillage. Il ne fut pas cependant le
maître d'empêcher l'incendie de la fa-
meuse bibliothèque d'Alexandrie, dont
Jean-le-Grammarieu lui avait deman-
de' la conservation et la propriété;
Amroù ne voidut point disposer de
cette bibliothèque sans la permission
du khalyfe , et bientôt arriva l'ordre
d'Omar qui lui commandait de la
livrer aux flammes , ce qu'il exécuta
avecuuc funeste exactitude.il est bon
d'observer cependant que ce fait ,
digne de la barbarie d'Omar , mais
non de l'ame généreuse d'Amroù,est
encore aujourd'hui un poiutde contes-
tation entre les savants. Un gouverne-
ment sage et ferme , et une adroite
politique, concilièrent à Amroù l'esprit
des Egyptiens. Il fit creuser un canal
qui joignit la mer Rouge à la Méditir-
lanée ; entreprise digne de son génie ,
et qui avait élc teutée, peut-être même
exécutée, par les Pharaons et les Pto-
le'mées. De l'Egypte, Amroù étendit
ses conquêtes dans les parties voisines
de l'Afrique. Otsmàu , ayant été élu
khalyfe, rappela Amroù près de lui;
mais les habitants , mécontents de ce
changement , se révoltèrent, et livrè-
rent la ville à la flotte grecque. Am-
roù revint bientôt reconquérir cette
ville, et eut le pouvoir d'empêcher le
massacre des habitants. Le faible Ots-
raân, ne pouvant se passer de l'appui
de ce grand général , le rappela près
de lui. En 64G, lorsqu'Ali fut élevé
au khalyfat , Amroù se déclara pour
Moawyau , et vint à bout , par son
adresse , de placer la couronne sur la
tjte de son favori ( F. Ali), échappé
au poigmrd des Kharidjy ; il reçut de
Mo;Avyah le gouvernement d'Egypte,
en G 58 ou 59 , et le conserva justfu'à
sa mort^ arrivée l'an 42 de l'Iiég. (66ji-
AMS
3. ) La piété d' Amroù l'a fait mettre
au nombre des sept compagnons de
Mahomet, connus sous le nom de Se-
léf : ses victoires l'ont placé au rang
des plus grands conquérants qu'aient
produits les premiers siècles de l'hé-
gyre, et son adroite politique le fît ap-
peler , par les chrétiens, le plus rusé
des Arabes. J — n.
AMSDORF ( Nicolas d' ) , né en
1 485 , près de Wùrtzcn , en Misnie ,
d'une famille noble. Ses liaisons inti-
mes avec Luther sont aujourd'hui sou
principal titre à une place dans un
Dictionnaire historique; car ses ou-
vrages ne sont que des traités polémi-
ques contre l'Eglise romaine, les sec-
tateurs de Schwenckfeld, les appro-
bateurs de Yinterim , les réformés , et
contre tous les théologiens dont les
idées s'écartèrent , dans quelques
points, de celles de Luther. Il pro-
fessa la théologie, et remplit les fonc-
tions de pasteur à Wittenberg , Mag-
debourg et Naumbourg. En lo^-j, il
accompagna Luther à la diète de
Worms, et, en revenant de là, se
trouva dans la même voiture que le
réformateur, lorsque celui-ci fut en-
levé par les ordres de l'élccreur de
Saxe, et conduit à Wartbourg. En
1557 , il concourut à la rédaction des
articles de Smalcalde, et fut nommé,
en i54 i, évêque de Naumbourg, par
l'électeur Jean Frédéric, qui était mé-
content du choix que le chapitre avait
fait pour cette place, dans la personne
de Jules de Pflug. Cinq ans après, son
protecteur ayant été f.ùt prisonnier par
Charles-Quint , il fut obhgé de cé-
der son évêché à Pflug , et se retira à
Magdebourg. Il concourut ensuite à la
fondation de l'université de Jéua, qui
était destinée à être la rivale de celle
de Wittenberg, et mourut à Eisenach,
le i4 mai i;j65. Son zèle pour la dé-
fense de la doctrine de Luther , et une
AMT
fausse interprétation d'un passage de
S. Paul (Rom. III, 28), le portèrent
à soutenir, dans la chaleur de sa dis-
pute avec G. Major, que les bonnes
œuvres étaient pernicieuses pour le
salut , assertion dont rimmoralité éga-
lerait l'absurdité', si, dans l'intention
d'Arasdorf, elle n'eût c'te' identique
avec la proposition reçue, avec plus
ou moins de modifications, par toutes
les communions chrétiennes , que nos
bonnes actions ne peuvent nous mé-
riter le ciel, et qu'une foi sincère en
J.-C. U' us donne seule des droits à
la miséricorde céleste. Anisdorf en-
seignait d'ailleurs , comme tous les
théologiens, que cette foi était néces-
sairement féconde en vertus ; et il
n'avait d'autre but que de répéter éner-
giquement ce qu'ils avançaient tous ,
c'est-à-dire, que c'était à la foi, et non
à ses fruits, qu'étaient attachés, selon
les Saintes-Ecritures , les bienfaits de
Dieu et le pardon de nos péchés ;
mais, ayant mal exprimé sa pensée,
il n'en fallut pas davantage pour don-
ner naissance à une longue contro-
verse , et pour enrichir V Histoire
des hérésies d'un nouveau chapitie.
Waich , dans son Histoire des con-
troverses qui se sont élevées dans
l'Eglise luthérienne . i ". vol. , p. 98 ,
et Planck, Histoire de Vorigine et
des vicissitudes du protestantisme ,
4*'. vol., p. 469, sont ceux qui ont jugé
cette dispute avec le plus d'équité et
de sagacité. Les écrits d'Amsdorf sont
indiqués dans Jœcher tt Adelung.
S— R.
AMTHOR (Christophe-Henri),
jurisconsulte, néàStollberg, en 1678,
fut élevé à Rundsbourg, par un de
ses oncles, et, en 1704, nommé pro-
fesseur de droit et de pohtique à
Kiel, où il acquit une grande considé-
ration. Des vers qu'il composa à la
louange des ministres danois, leren-
AMU G7
dirent odieux à la cour de HoUstein-
Gottorp. En 1 7 1 5, il entraau ser\ ice du
Danemarck , et fut nommé historio-
graphe royal, et conseiller de la chan-
cellerie du duché de Hollstein-Schles-
wig. Il composa , par ordre du roi ,
plusieurs pamphlets relatifs aux dilïc-
rends qu'avait alors le Danrmaick
avec la Suède et le duché de HoHsteii:-
Gottorp. Ces écrits eurent un si grand
succès, qu'en 1715, on l'engagea à
venir à Copenhague , où il fut nommé
conseiller de justice, et eut pour loge-
ment le château royal de Rosem-
bourg, dans lequel il mourut, le 21
février 1721. Parmi ses nombreux
ouvrages , on peut citer : l.Meditatio-
nes philosophicœ de justitid divina et
materiis cum ed connexis ; IL Poé-
sies et traductions (en allemand),
Flensbourg , 1 7 i 7 ; HI. ses Ecrits
politiques [en allemand), entre autres :
l'Essai historique sur l'état passé et
présent de la Noblesse du duché de
Hollstein-Schleswig , et de ses privi-
lèges ; la Recherche des causes qui
ont fait naître les dijjérends existants
entre la Suède et le Danemarck ,
1713, in-4 ". , etc. G — T.
AMULIL S, roi d'.\Ibe, fils de Pro-
cas, lo"". descendant d'Ascagne. Son
frère Numitor avant succédé à la
couronne, par droit d'aînesse, il le
renversa du trône, et fit périr sou
fils jEgestus. Il obligea ensuite Rhéa-
Svlvia, fille de Numitor, à se consa-
crer air culte de Vesta , afin qu'elle ne
pût jamais être mère ; mais Rhc'a-
Sylvia devint enceinte , et prétendit
que, comme elle allait puiser de l'eau
à une fontaine, le dieu Mars lui avait
fait violence. Cette fable, toute digne
qu'elle était de ces temps grossiers , ne
fut pas crue par Amulius, et, lorsque
Rhéa-Sylvia mit au monde deux ju-
meaux, son oncle la fit condamner h
moi1. On ordonna en même temps
68 A M U
que les enfants fussent jete's dans le
Tiijre. Siiivant quelques auteurs ,
Amulius , à !a prière de sa fille Anlho ,
commua la sentence de mort, portée
contre sa nièce, en celle d'une prison
perpétuelle. On a prétendu que lui-
luème il lui avait fait violence, non
par amour, mais pour avoir un pré-
texte de la faire mourir. Les denx en-
fants, Romulus et Rémus, ajant été
Sauvés par un prodige {F. RoinuLus),
se décidèrent , lorsqu'ils eurent atteint
leur 18''. année, à venger leur mère
et leur aieul. Ils se mu'ent à la tcte de
plusieurs troupes de paysans, qui
n'avaient d'autres enseignes que des
bottes de foin attachées à de longues
perches , nommées alors manipuli,
forcèrent la garde qui défendait le pa-
lais d' Amulius, le tuèrent, et rétabli-
rent Numitor sur le trône. On rap-
porte cet événement à l'an ■^54 avant
J.-C, et on ajoute qu'Amulms avait
alors régné 4'i ans. D — t.
AMULIUS, peintre, vivait sous le
règne de Néron; ses plus beaux ou-
vrages furent exécutes dans la IMaison-
Dorée. Il était d'un caractère grave et
sévère , et ne peignait que durant
quelques heures de la journée, sans
quitter sa toge. Pline parle d'une Mi-
nen-e qu' Amulius avait peinte, et qui
semblait toujours regarder le specta-
teur j à quelque place qu'il se mît.
L — s — E.
AMURATH I". , ou MORAD , troi-
sième sultliau , fils et successeur du
sultlian Orchan , naquit l'an deThégyre
'j4o( i3i9 de J.-C. ), et monta siule
trône à 4* '••'S. Jusqu'à son règne,
les Othomans ,) maîtres de l'Asie mi-
neure, n'avaient fait que des incur-
sions en Europe, Sous cet heureux
conquérant , ils réduisirent les empe-
reurs grecs à ne régner que sur Cous-
tantmople et ses fauboui-gs, Amurath
fut souvent leur aibiti'c , et leur parla
AMU
toujours en maître. Il signala , par la
piise d'Ancvre, la première année de
son règne : l'armée othomane passa en-
suite le détroit de Gallipoli , s'empara
de la plu])art des villes de la Thrace ,
mit le siège devant Andrinoplc, et ré-
duisit celte ville sous l'obéissance du
sulthan , avec toute la Thessahe , à l'ex-
ception de Thessalonique. Amurath
transféra à Andrinople le siège de sou
empire, et y fit bâtir une superbe
mosquée, appelée encore aujourd'hui
Temple de Morad. U cmbelUt aussi
la ville de Prus. Le sulthan sema la
division parmi les princes de l'Asie
mineure, et les ménagea avec tant
d'adiesse que la plupart offrirent
d'eux - mêmes de tenir leur souverai-
neté comme une espèce de fief des
empereurs othomans. Chaque année
valait au petit-fils d'Orchan une nou-
velle province en Eiu'ojie. Il pénétra
dans la Macédoine et dans l'ADjanie ;
enfin , ce qu'il n'entreprit pas faute
de vaisseaux , présagea tout ce que ses
successeurs pourraient bientôt oser.
Pour assurer sa puissance, ce sulthan,
dont le génie égalait la fortune et la
valeur, fonda la milice des janis-
saires , armée permanente , formée
d';diord de jeunes chrétiens , enfants
de tribu, ou pris à la guerre , tous
dévoués au maître à qui leur ^ ie ap-
partenait ; phalange invincil)le dès
son institution, puisque sa vocation
était de combattre , et son devoir, de
mourir les armes à la main. Au mo-
ment de leur formation , un dervis ,
placé à la tête de leurs rangs, leur
donna sa ■bénédiction en prononçant
ces paroles : « Qu'on les nomme ja-
» nissaires ou nouveaux soldats; puis-
» se leur valeur être toujours bril-
» lante, leur épée, tranchante, et leurs
» bras, victorieux ! puissent tous leurs
» traits port(!r à la tête de leurs enne-
» mis , et puissent - ils rcvcuii' Llauc*
/VMU
» de toutes leurs expéditions ! » Les
janissaires furent long-temps la ter-
reur des ennemis, et, quelquefois, celle
des sulthans. Il est difficile de dire à
quelles bornes Tambition d'Amurath
se sei-ait arrête'e , s'il n'eût trouve' la
mort au sein même de la victoire.
Alarme's de l'accroissement de sa
puissance , les peuples voisins de TAl-
banie et de la IMace'doine formèrent
une ligue pour défendre leur inde'pen-
dauce. Les Valaques, les Hongrois,
les Dalmates et les Serviens compo-
sèrent cette espèce de conféde'ration ,
dont Lazare , prince de Servie , fut
le chef. Amuratli marcha au-devant
des ennemis , qu'il rencontra dans les
plaines de Cassovie , l'an de l'hégyre
791 ( 1389 d^ J.-C. ). Là, se donna
une bataille sanglante; la victoire
fut long-temps disputée ; enfin les
chrétiens plièrent , Lazare fut fait
pi'isonnier , et, presque tous les autres
chefs ayant été tues , le reste prit la
fuite , et fut taille en pièces. Cette
victoire anéantissait la ligue, et l'in-
de'pendance des tribus de l'Esclavo-
iiie. Amurath , en parcom'ant la scène
du carnage, remarquait que la plu-
part des moits n'étaient que des ado-
lescents ; son vizyr lui re'pondit que
des hommes d'un âge raisonnable
n'auraient pas entrepris de lui ré-
sister ; tandis que le sulthan prêtait
l*oreille aux flatteries du courtisan ,
un soldat servien , caché parmi les
morts , s'élança sur lui , et lui porta
un coup mortel. Les Othomaus
consternés jtirent de venger Amu-
rath; ils dressent sur le champ de
bataille la tente du sulthan , le pla-
cent dessous , reprennent leurs rangs
avec une ardeur et une furie sans éga-
le, et font massacrer, aux pieds d'A-
murath expirant, le prince de Servie ,
et les autres chefs , prisonniers de
guerre. Le règne d'Amurath fut de
 M U Cj)
vingt -neuf ans , et sa vie, de soixante-
dix. Pendant cette longue carrière ,
il entreprit trente-neuf guerres, qu'il
termina toutes avec gloire. Amurath
fut ambitieux , entreprenant , et tou-
jours heureux. Comme guerrier , il
fit couler plus de sang que ses deux
prédécesseurs ; mais, sous lui, la gloire
othomane pi'it un essor bien plus éle-
vé , et brilla sur un plus grand théâtre;
comme souverain , Amurath se mon-
tra juste , sévère et rehgieux. U ne
laissa jamais le crime impuni , pas.
même dans ses propres enfants : ja-
loux de son autorité , il fit crever les
yeux à un de ses fils rebelle , et fit mou-
rir dans d'horribles supplices tous ceux
qui avaient pris part àla révolte. Il était
ennemi du faste , à tel point qu'il ne
portait jamais que. des habits de laine :
enfin sa piété ne peut être mieux at-
testée que par la leçon pidjlique que
le muphti osa lui faire , et qu'il re-
çut avec soumission. Le suhhan était
venu déposer comme témoin devant
le tribunal du muphti, qui , dans l'em-
pire othoman , est à la fois pontife et
juge. « Partout ailleurs ta parole est
» sacrée , lui dit le chef de la religion
« et des lois , mais ici , elle ne doit
» être comptée pour rien : lu n'as -
» sistes point au namaz. » En clTct ,
les sulthans ne participaient point à
cette prière publique que les Musul-
mans font en commun : ils se con-
tentaient de prier dans l'intérieur de
leur palais. Amurath retira son té-
moignage , reconnut sa faute , assista
au namaz , et fit bâtir une mosquée.
L'accomplissement de tant de devoirs
divins et humains , ses brillantes qua-
lités , ses conquêtes et sa gloire, dont
la religion était le principe et le but ,
ont fait donner à ce prince le nom do
Khodovendikar , c'est-à-dire l'ouvrier
de Dieu. Ildérim Bajazet , son fils aîné.,
fut proclamé sulthan. S— y.
-jo A M U
AMURATH lî , succéda à son père
Maliomet P'. , l'an de l'hégyre 8^5,
(1422 de J.-C. )- n'ayant alors que
18 ans. Les mallieurs de Bajazet, son
aïeu! , avaient rais l'emjtire othoman
sur le penchant de sa ruinej mais les
déchirements intérieurs, fomentés par
l'interrègne , avaient donne une nou-
velle vigueur aux sujets , et semblaient
avoir trempé l'ame des sulthaus dans
l'adversité. Né au milieu des discordes
civiles et des d uigers publics , Amu-
rath apporta sur le trône ce courage
mâle et cette force de volonté qui ne
connaît point d'obstacles. Peu de temps
après son avènement, il s'éleva un
imposteur qui, appuyé par l'empereur
giec , prétendait être Blustapha , fils
de Bajazet ; mais , après avoir battu le
grand-vizyr, il fut défait par Amurath ,
et mis à mort. Le sulthan investit en-
suite Coustantinoplc avec une puis-
sante armée; mais il échoua dans son
projet; car l'empereur grec fit soule-
ver , contre lui , Mustapha son jeune
frère. Ce prince fut bientôt fait pri-
sonnier, et étranglé en présence d'A -
murath. D'autres troubles, survenus
en Asie, furent apaisés parles géné-
raux du sulthan. En i4->6, Amurath
dévasta l'île de Zante , appartenant aux
Vénitiens. L'année suivante , il sou-
mit la Morée, et obligea l'empereur
grec à lui payer tribut : il prit ensuite
Thessalonique , et força les Vénitiens
à la paix. La rébellion de Karaman-
Ogli fut étouffée, en i454i par le
sulthan en personne. Vers ce temps ,
la guerre eut lieu entre l'empire otho-
man et le roi de Hongrie : le fameux
général hongrois, Jean Huniade, rem-
porta plusieurs victoires; cependant
Amurath passa le Danube , ravagea le
pays, et assiégea Belgrade ; mais il ne
put s'en emparer. Il envahit et sub-
jugua la Servie ; mais il rendit cette
province lorsqu'il conclut la jiaix avec
AMU
la Hongrie et la Pologne. En 1422 ,
Karaman-Ogli reprit les armes , et fit
une irruption dans plusieurs provin-
ces d'Asie. Amurath marcha contre
lui ; mais sa sœur , femme de Kara-
raan, vint au-devant lui , et parvint à
les réconcilier. Voyant alors son em-
pire dans un repos parfait, Amurath,
qui s'était toujours montré très-atta-
ché aux pratiques de sa religion , re-
nouvela un exemple de modération et
de mépris des grandeurs que , jusqu'a-
lors, le seul Diocléticn avait donné au
monde ; il abdiqua , et , laissa ut le trône
au jeune Mahomet H, son fils, il se
relira à Magnésie, dans la société des
derviches , dont il partagea les austé-
rités. H n'avait pas encore ^o ans, et
fut bientôt tiré de sa retraite par les
dangers qui assiégèrent le trône des
sulthaus. Ladislas, roi de Hongrie, et
ses auxiliaires , envahirent le territoire
musulman , à l'instigation du parjure
Karaman - Ogii. Le nouveau sulthan
n'était encore qu'un enfant, et tous les
Othomans eurent recours à Amm-ath ,
qui consentit à les guider encore aux
combats. Il attaqua les chrétiens à
Varna, et, dans la chaleur de l'action ,
il fit porter dans ses rangs, au bout
d'une lance , le dernier traité conclu
enti-e lui et les chrétiens, en s'écrianî :
« Que les infidèles marchent contre
» lein- dieu et leurs serments ; et per-
« mots , juste Dieu , qu'ils se punissent
» eux-mêmes de leur perfidie 1 » Tandis
que la victoire était encore douteuse,
le jeune roi de Hongrie , pénétrant
jusqu'au sulthan , lui livra nu combat
singulier. Amurath ])erça son cheval ,
le roi tomba, et périt sous les coups
des janissaires. Sa tète, coupée, fut
montrée, au bout d'une lance, à ses
soldats , dont la plupart périrent ou
furent faits prisonniers. Le cardinal
Julien , qui avait obtenu du pape ,
pour le roi de îlungrie . la dispense de
son serment , fat une des victimes de
cette juste vengeance. Après cette vic-
toire , Amurath se dévoua de nouveau
à une vie pieuse et retirée; mais, eu
1 446 , il fut rappelé au souverain pou-
voir par une teriible sédition des janis-
saires, qui, sentant que les rênes de
l'empire étaient tenues par de faibles
mains , se révoltèrent pour la première
fois, etdévastèrent Andrinople. A peine
Amurath reparut-il, qu'il vit la milice à
ses pieds ; il tourna aussitôt ses armes
contre le célèbre Scauderbe^^ , prince
d'Epire, qui s'était révolté, le chassa
de ce pays , et le poursuivit en Alba-
nie. Il fit deux tentatives pour prendre
Kroya , capitale de cette province ;
mais il fut obligé d'abandonner son
dessein , après avoir éprouvé des per-
tes considérables. Amurath , cepen-
dant , convertit tous les Epirotes au
Koran , en les menaçant de la mort.
Les Hongrois ayant fait une nouvelle
invasion sur les bords du Danulje ,
le sulthau marcha contre eux , et les
joignit à Cassovie, où Amurath P^
avait été victorieux. Il s'ensuivit plu-
sieurs actions sanglantes , mais par-
tielles , qui se terminèrent par la dé-
route des chrétiens, et Jean Hmiiade,
dans sa retraite, fut fait prisonnier
par le despote de Servie. Amurath re-
vint à Andrinople , et ne songea plus
à résigner le pouvoir; car , après avoir
marié son fils Mahomet à la fille du
prince d'Elbistan , il lui donna le gou-
vernementdel'Asie mineure. En 1 45 1 ,
il fut attaqué d'une maladie de cer-
veau , qui bientôt l'enleva dans la 47*"-
année de son âge, après 29 ans de
règne. Les Othomans regardent Amu-
rath II comme un de leius plus illus-
tres souverains; ils louent ses vertus
civiles et militaires , sa piété , et la mu-
nificence qu'il montra en faisant bâtir
des mosquées , des caravenserais , des
collèges cl des hôpitaux. Mais il partici-
AMU "ji
paittrop au caractère des conquérants
de sa nation , qui regardent la cruauté et
la violence comme légitimes , lorsqu'il
s'agit de la propagation de la foi. Ce-
pendant, on reconnaît que rarement il
tira l'épée avant d'y avoir été provo-
qué, et qu'il observait les traités avec
une fidélité inviolable. S — y.
AMURATH III , fils de Séhm II,
monta sur le trône à 5i ans, l'an de
l'hégyrepSa ( iSyS). Le premier acte
de sa puissance fut le meurtre de cinq
de ses frères , dont le plus âgé n'avait
pas 8 ans. Cette barbarie , que la po-
litique othomane motive et n'excuse
pas , dut faire craindre aux sujets d'A-
murath un règne sanguinaire. Cepen-
dant , ces victimes furent les seules que
ce sulthan immola; il ne fit tomber la
tète d'aucun des grands-vizyrs qu'il dis-
gracia, presque chaque année. Il re-
commença la guerre contre les Per-
sans , dès l'an 1678; et cette longue
calamité, également funeste aux deux
peuples, affligea presque tout son rè-
gne. La paix fut enfin conclue, en 1 5go,
el elle mit Amurath en possession de
Tauris , et de trois provinces persan -
nés. Du côté de l'Eurojîc, ce sulthan fit
obtenir le trône de Polog,ne à Etien-
ne Battori , vaivode de Transylvanie ,
son vassal , au préjudice de l'empe-
reur Maximilien. Eu i585, il deman-
da un tribut à Rodolphe , successeur
de ce dernier prince, et, sur son refus,,
fit entrer en Hongrie le grand -vizyr
Sians-Pacha, qui, en iSq^ , fit lever
le siège de Grun à l'archiduc IMathias,
et prit l'importante place de Raab, au
nom du sulthan. Cet exploit, auquel
Amurath n'eut aucune part, ne l'a
pas moins fait placer au rang des prin-
ces qui ont reculé les bornes de l'em-
pire othojnan. Sous son règne, la Cri-
mée se souleva ; mais l'orage fut bientôt
dissipé. Les janissaires se révoltèrent,
et cette sédition , que la Êiiblesse d'A-
-ji AMU
raurath ne sut ni prévenir, ni arrêter ,
ni punir, coiîta la tète au tlefterdar de
l'empire , que son maître abandonna lâ-
chement, et causa, dans Constantino-
ple, le terrible incendie de i58i, qui
consuma 1 5,000 maisons. Amuratli 1 II
mourut l'an de l'he'g. 1002 {\^Ç}^), à
l'âge de 5 o ans, après en avoir régné 2 o.
Il aima la guerre , mais ne parut ja-
mais à la tète de ses armées. Timide ,
irrésolu , triste au milieu même des plai-
sirs , avare jusqu'à vendre les fleurs
qui ornaient ses jardins ; dur avec ses
ministres , il se montra toujours plus
porté à punir les fautes qu'à recom-
penser les services. S — Y.
AMURATII IV, neveu et suc-
cesseur de IMustapha , déposé en
J622, naquit l'an de l'hég. 1018 ,
( 160g), et prit les rênes de l'empire
dans les circonstances les plus diffi-
ciles , à peine âgé de 1 5 ans, La sul-
tliane Kirsera , sa mère , lui apprit à
régner , et bientôt il sut se faire
craindre de ses sujets et de ses en-
nemis. Après cinq règnes faibles , les
Othoraans virent sur le trône le prince
le plus absolu qui leur eût jamais
commandé. Doué d'un esprit ferme
et intrépide , la naîarc lui avait donné
une force de corps extraordinaire , et
une majesté qui appuyait ses qua-
lités morales de tout ce que les formes
extérieures ont de plus imposant :
aucun spaliis ne maiiiait un cheval
comme luij aucun Tatar ne décochait
une flèche avec plus d'adresse et de
force. 11 se mit sans crainte au-dessus
des lois et des préjugés de la nation ,
et fut le premier des sulthans qui osa
ouvertement permettre l'usage du vin ;
lui-même en buvait avec excès , et ses
deux favoris les plus chers , qu'il
éleva aux preraièies dignités, n'eurent
d'autres titres à la fortune que la cra-
puleuse passion qui les dominait
«ommc lui. Peu de règnes cependant
A M U
ont été plus glorieux que celui d''A-
muratli IV. Maître de ses passions,
il était sobre quand il se montrait à
ses troupes. Ses guerres contre les
Polonais et contre les Persans , où
toujours il combattit en personne ; la
prise de Van , et celle , à jamais fa-
meuse, de Baghdâd,oùil cnirasur les
cadavres de trente mille vaincus, lui
ont valu le titre de Ghazj ( le victo-
rieux ) , surnom que les sulthans ont
toujours été jaloux de mériter; mais
ses débauches avancJ-rent le terme de
ses jours , et le conduisirent à une
mort prématurée. Sous son règne ,
l'empire othoinan fut plus florissant
qu'il n'avait jamais été. La terreur
qu'il avait su inspirer contenait dans
leur devoir les pachas qui gouver-
naient les provinces ; et les magistrats
qui rendaient la justice , n'osaient
plus prévariqucr. Amurath y accou-
tumé à accueillir toutes les plaintes,
était toujours prêt à punir. Souvent
déguisé , et , par-là , présent dans des
lieux où il était le rtvcins attendu, son
nom seul suffisait pour faire pâlir
ceux qui n'auraient contrevenu qu'à
ses moindi'es ordres. On compte jus-
qu'à quatorze mille individus frappés
par sa justice, aussi prompte qu'inexo-
rable. La mort de ce terrible sulthan
fut digne de sa vie : quelques heures
avant d'expirer , on l'entendit menacer
ses médecins de les faire périr, s'ils ne
se hâtaient de le guérir. Il mourut ,
l'an de l'hég. io5o ( 1640), à l'âge
de 5 1 ans. S — y.
AMURATH , bey de Tunis , fils
de Mohamet-Bey, fut renfermé au
châleau de Soùi- , vers 1690, par
ordre de sou ohcle Ramadan. Con-
damné à perdre la vue pour avoir
aspiré au gouvernement . Arnnralh
corrompit ses gardes , tua l'aga qui les
commandait, et s'enfuit , vers les mon-
tagnes, à 5o lieues de Tunis ^ où il fut
AMY
joint par une grande partie des troupes
à la solde du bey. Il marcha alors sur
Tunis , s'en empara , et fit c'traup:Icr
Ramadan. Les Algériens, qui avaient
favorise son oncle, éprouvèrent son
ressentiment- il leur fit la guerre avec
tant de fureur, qu'il attira les plus
grandes calamités sur son royaujne.
Sa cruauté' n'eut point de bornes j
mais il fut enfin e'gorgc lui-même par
Ibrahim, son capitaine des gardes,
qui se fit proclamer bey à sa place ,
vers l'an i6g5. B — p.
AMY. Koyez Lamy.
AMY (....), avocat au parle-
ment d'Aix, mort en i 760, a publie'
quelques ouvrages de physique , qui
décèlent un homme ami de l'huma-
nité, et qui emploie ses lumières à
chercher ce qui peut être utile ou
nuisible à ses semblables. I. Obser-
vations expérimentales sur les eaux
des rivières de Seine , de Mar-
ne,de, 1749, in-isjll. Nouvelles
fontaines domestiques , 1 7 5 o , in- 1 tt ;
111. Nouvelles fontaines filtrantes ,
I75'i-i754 , iu-i2 ; IV. Réflexions
sur les vaisseaux de cuivré, de plomb
et d'étain ,1751 , in- 1 'i. On croit que
cet auteur était de la Provence, mais ou
ignore le lieu de sa naissance, et le
temps auquel il se rendit à Paris. K.
AMYiN -AHMED, rdzy , ou natif
de la ville de Rey en Azerbaïdjan ,
e'tait un savant persan, qui florissait
au commencement du 1 1 siècle de
l'hégyre. Nous n'avons pu recueillir au-
cun renseignement sur c^t écrivain ,
mais son existence et sa vaste érudi-
tion nous sont attestées par un Traité,
à la fois géographique et biographique,
de la plus haute importance. Cet ou-
vrage, intitulé Heft iclym ( les Sept
climats ) , contient la [description des
principales contrées et des villes con-
nues des Orientaux. Ces descriptions
ont été recueillies par les écrivains
AMY -5
arabes et persans les plus estimés.
A la suite de la description de cha-
que pays , on trouve les notices bio-
graphiques sur chacun des person-
nages célèbres auxquels il a donne
naissance. Ces notices peuvent être
d'une grande utilité pour l'histoire ci-
vile et littéraire de l'Orient , tant par
l'exaelitude des dates , que par la no-
menclature de tous les ouvrages de
chaque auteur. ]Jffeft iclym , fut ter-
miné en 1002 de l'hégyre, comme
l'auteur nous l'apprend lui - même,
foh 2 du manuscrit de la Bibliothèque
impériale , et non en i m o ou en i o 1 2,
comme on lit dans la Bibliothèque de
Hadjy-Khalfah. Nous possédons, à la
Bibliothèque im])éria}e, une excellente
copie de cet ouvragèj c'est nn gros
volume in-fol. de 582 feuillets , copié
en l'an 1094 de l'hég. ( i685 ). .l'ai
donné plusieurs descriptions extraites
de cet ouvrage , dans les notes que j'ai
ajoutées à la traduction française des
deux l'''^^vol. des Recherches asia-
tiques , ou Mémoires de la Société de
Calcutta , et à la nouvelle édition des
Foyaiies de Chardin. L — s.
AMYN ( Mohammed ) , surnomme
Al , c'est-à-dire , le Croyant, 6'\ kha-
lyfe abbaçydc, fils et successeur d'Ha-
roùn-Ël-Rachyd , né au mois de cha-
wàl, i7oderht^. (787), fut proclamé
khalyfc le 3 de djamàdy r'""., 190 de
l'hég. A peine fut- il sur le trône, qu'il
se livra à toutes ses passions , et sur-
tout à celles du vin et des femmes. Il
déposa ses frères Mamoùn et Motas-
scra des gouvernements que lein- avait
légués leui' père, et priva même le pre-
mier, dont il était jaloux, des biens
qui lui revenaient. Haroùn avait dési-
gné Mamoîm comme successeur d'A-
myn ; celui-ci fit couronner son fils ,
qui n'avait encore que 5 ans. Irrité de
ce que Mamoùn avait refusé de se ren-
dre à sa cour , il raya son nom de la
74 A M Y
khothbak (fv'ieve ) , et lui déclara so-
lennellement la guerre. Le gouverneur
du fils d'Amyn , Ali-beu-lssa , homirie
présomptueux et sans talents mili-
taires , offrit au klia'yfe de chasser Ma-
iD.oùn du Klioi'açàu ; et Amyn lui donna
le commandement d'une armée de
60,000 hommes. Mamoùn était aimé
de ses soldats , et son armée , bien
moins nombreuse que celle de son
frère , lui était toute dévouée. Aly s'a-
vança jusqu'à Rey , où commandait
Tbaher, général brave et expérimenté,
qui justifia pleinement la confiance de
Mamoùn ; avec 4,000 hommes d'élite
seidement , il attaqua et mit en fiûte
l'armée d'Aly , qui périt dans l'action :
ce revers fut sui\^e beaucoup d'autres
pour Amyn. Les généraux qu'il envoya
successivement contre Thaher fiirent
battus , et Baghdàd , où il s'était renfer-
mé, fiit prise. Lorsqu'on lui apprit que
Thaher victorieux venait l'assiéger ,
il s'amusait à pêcher à la ligne. « Ne
y> me troublez pas, dit-il au messager ,
» car mon affranchi a déjà pris deux
» poissons , et je n'en ai pas pris un
» seul. » Pendant le siège , au moment
où l'ennemi venait de se rendre maître
d'un poste important , les officiers du
khalyfe, qui venaient l'exhorter à pren-
dre les armes , le trouvèrent jouant
tranquillement aux échecs. Il leur or-
donna de se retirer , jiarce qu'il était
sur le point de faire son adversaire
échec et mat. Après la prise de Baglj-
dàd , Amyn , qui redoutait Thaher ,
alla se rendi-e à Hertserueli , autre gé-
néral de Mamoùn , qui le fit cmbar(pier
sur le Tygre; mais Thaher fit sub-
merger la barque , et Amyn , tombé
dans les mains dos soldats , fut massa-
cré par ses ordres ,]c-i5 de mobarreni,
198 ( 8 1 3 de J.-C. ) ; il n'était âgé que
de •j.S ans , dont il avait régné 5. Sa
mort mit Mamoùu en possession du
khulyfat. J — 1<.
AMY
AMYN ANDRE, roi des Ath,imanps,
peuples voisins desEtoliens, inter-
posa sa médiation en faveur de ces
derniers, pour obtenir la paix de Phi-
lippe, roi de Macédoine, l'an 208 av.
J.-C. Long-temps après , à la solhcita-
tion du consul romain, il engagea les
Etoliens dans la ligue contre Philippe ,
amena des secours aux Romains , se
laissa gagner ensuite par les promesses
d'Antiochus-le-Grand, fiit obligé de
quitter ses états par l'adresse de ce
même Philippe , remonta peu après
sur son trône , où le rapprla son peu-
ple, irrité de l'orgueil des lieutenants
du jnince macédonien , fit sa paix avec
les Romains, et engagea la ville d'Am-
bracie à leur ouvrir ses portes. On
ignore le temps et les circonstances de
sa mort. N — l.
AMYNTAS V\, roi de Macédoine,
fils d'Alcetas , auquel il succéda vers
l'an 507 av. J.-C. A cette époque , le
royaume de Macédoine était peu puis-
saut, et la monarchie des Perses pre-
nait chaque jour un nouvel accroisse-
ment, sous Darius , fils d'Histaspe. Ce
prince , à son retour de l'expédition
contre 1rs Sc^lhes, envoya demander
la terre et l'eau à Amyntas , qui , trop
faible pour refuser, se reconnut tribu-
tiiire delà Perse, et donna un magni-
fique repas aux ambassadeurs de Da-
rius. Ceux-ci , échauffes par le vin .
demandèrent, à la fin du repas , au roi
(-['■' Macédoine, ses femmes et ses filles.
Amyntas eut la bassesse de les amener ,
et les députes de Darius allaient s'aban-
donner à leur bi'utalité, lorsqu' Alexan-
dre , fils d'Amyntas , substituant avec
adresse aux princesses macédoniennes
de jeunes garçons armés de poignards
cl travestis en femmes , fit massacrer
les ambassadeurs, et sauva ainsi l'hon-
neur de sa famille. Il trouva ensuite le
moyen de dérober ce crime à la con-
naissance d» roi de Perse , eu donnant
AMY
çn mariage sa sœur Gygasa , qui était
d'une beauté ravissante , à Bubaris ,
seigneur persan , que Darius avait en-
voyé à la recherclie de ses ambassa-
deurs. Ce fut encore pendant le règne
d'AmyntasqueXercèsvintattaquerles
Grecs , avecrarmcc la plus formidable
qui eût jamais été rassemblée. 11 tra-
^ ersa la Macédoine , et Amyntas n'é-
pargna rien pour lui prouver son at-
tachement aux intérêts de la Perse. Il
mourut peu de jours après la bataille
de Salamine , l'an 480 av. J,-C. , et
eut pour successeur Alexandre P^ , son
fds. G — R.
AMYNTAS II , fds de Philippe ,
et petit - fils d'Alexandre l". , roi de
Macédoine. On l'a souvent confondu
avec Amyntas III , ce qui nous oblige
à entrer dans quelques détails sur les
rois de Macédoine , depuis Alexandre
i". Ce prince laissa trois fils : Per-
dircas , Philippe et Alcétas. Perdiccas
refusa de partager le royaume avec ses
frères ; Alcétas ne chercha point à
faire valoir ses droits; Philippe se re-
tira auprès de Sitalcès, roi deThrace,
qui ne fit rien pour lui. Après sa mort,
il ramena Amyntas II , son fils, dans
ses états , avec une puissante armée ,
l'an 4^8 aV. J.-C. Bientôt après , Si-
talcès , s'étant allié avec Perdiccas ,
abandonna Amynlas, qui se retira on
ne sait où ; car l'histoire n'en parle
plus, Perdiccas laissa , en mourant ,
deux fils , Arohélaiis , qu'il avait en
d'une esclave , et qui était déjà grand ,
et Alcétas, qu'd avait eu d'Eurydice,
son épouse, et qui n'avait que sept
ans. Archélaiis prit le gouvernement
de la Macédoine, comme tuteur de
son jeune frère. Feignant alors de
vouloir rendre la couionne à Alcétas ,
son oncle , qui avait un fils à peu près
de son âge , nommé Alexandre , il les
manda tous les deux , et , les ayant
'JiiiTrcs j il les égorgea. Il précipita
AMY 75
ensuite dans un puits le fils légitime
de Perdiccas , et se trouva ainsi seul
possesseur du trône ; il laissa , en
mourant, Oreste. son fils encore en-
fant f sous la tutelle d'Aéropus , qui le
tua, et s'empara du trône. L'orjgine
de cet Aéropus ne nous est pas con-
nue. Celui - ci , après avoir régné six
ans , mourut, et laissa la couronne à
Pa usa nias , son fils , qui fut tué au
bout d'un an, l'an Sg'Ji av. J.-C, par
Amyntas III , fils de TMéiiéîaus. Il v a
donc eu , entre ces deux Amyntas ,
trente-six ans d'mtei-valle; et, comme
le troisième a régné vingt-quatre ans
depuis la mort de Pausanias , que d'ail-
leurs on lui donne un père différent,
il est évident qu'on ne doit pas les
confoncbe. C — r.
AMYINTAS III , roi de Macédoine,
fils de Tharalée, selon les uns, et de
MénélaiJs, selon d'autres, et proba-
blement petit-fils d' Amynlas II , monta
sur le trône , par l'assassinat de Pau-
sanias, fils d'Aéropus , l'an 39^ av.
J.-C. ; mais Argée , frère de Pausa-
nias , s'étant fait un parti puissant
parmi les nobles de macédoine et les
princes voisins , Amyntas fut obligé
de lui abandonner la couronne , et de
se retirer en Thessaîie. Argée n'oc-
cupa le trône qi'e pendant deux ans.
Sa conduite impolifique ayant fait dé-
sirer à ses sujets le retour d'Amyntas ,
ce prince , à l'aide de quelques trou-
pes de la Thessaîie , força son com-
pétiteur à lui laisser enfin le rovaume.
11 iit aux Ojvnthiens une guerre d'a-
bord malheureuse, mais qui finit à
son avantage, parce qu'il réussit à en-
gager Sparte dans ses intérêts. Il vou-
lut aussi se lier avec les Athéniens ,
qui, jusqu'alors, n'avaient eu qu'une
médiocre confiance aux rois de Macé-
doine; mais Amyntas réussit dans ses
négociations, en déclarant qu'Amphi-
polis devait appartenir aux Athéoieus,
■jô A M Y
et en promettant de les mellre en pos-
session de cette place. Toute la con-
duite d'Amyntas fut celle d'un pro-
fond politique; il afî'crmit le trône dans
sa faïuillc, augmenta la puissance de
la Macédoine, s'attaclia ses voisins,
et mourut , 508 ans av. J.-C. , après
un règne de vingt -quatre ans, lais-
sant trois fils légitimes : Peidiccas ,
Philippe et Alexandre II, qui lui suc-
ce'da , sous la tutelle d'Eurydice , sa
mère. C — r.
AMYNTAS, fils d*Antioclius, ma-
cédonien , quitta la Macédoine après
la mort de Philippe , sans autre mo-
tif que sa haine pour Alexandre - le-
Grand; il se rendit à Eplièse, d'où il
s'enfuit, lorsqu'il apprit le passage du
(iranique, alla joindre Darius , et on-
cntretint une correspondance avec
Alexandre - Lvnceste , qui devait as-
sassiner Alexandre-le-Grand. Il donna
à Darius le sage conseil d'attendre
qu'Alexandre vînt l'attaquer dans les
])laincs de l'Assyrie , où il pouvait dé-
ployer toute son armée , et surtout sa
cavalerie, mais il ne fut pas écouté.
Amyntas fut un des commandants des
troupes grecques auxiliaires des Perses,
à la bataillcd'Issus. Aprèscette journée,
il se réfugia , avec d'autres transfuges
grecs , à Tripoli en Syrie , s'y embar-
qua, fit voile vers l'île de Chypre, et
ensuite vers Peluse, qu'il surprit, eu
faisant croire qu'il avait une commis-
sion de Darius , qui l'établissait gou-
verneur de l'Egypte, à la place de Sa-
bacas , tué à la bataille d'Issus. Quand
il se vit maître de cette place impor-
tante , il leva le masque , prétendit à
la couronne d'Egypte, et déclara qu'il
voulait en chasser les Perses. Les
Egyptiens se joignirent à lui , et for-
mèrent une armée, avec laquelle il
marcha droit à Memphis. Les Perses ,
commandés ])ar IMozarès, furent dé-
taiXs devaut celte place , et forcés de
AMY
s'y renfermer. Après cette victoire ^
Amyntas , se croyant maître du pays ,
laissa ses soldats se livrer au pillage ,
sans précaution; IMozarès sut en pro-
fiter, fit une sortie, tua Amvntas , et
détruisit son armée. — Ou trouve en-
core plusieurs autres Amvntas célèbres
dans l'Histoire de Macédoine, du temps
d'Alexandre : i°. Amyntas , fils d'An-
dromèue, qui commandait une por-
tion de la phalange ; il fut compris ,
ainsi que Poiemon , Altale et JSira-
rai^s , ses frères , dans l'accusation
portée contre Philotas ; mais il se jus-
tifia , et fut tué peu de temps après
d'un coup de flèche, en assiégeant un
bourg ; 2". AmynTj^s , l'un des chefs
de la garnison macédonienne qui était
dans la Cadmée , à Thèbes ; il fut tué
par les exilés qui venaient de rentrer.
C— R.
AMYNTIAN, ou AMYNTIANUS,
historien grec, vivait sous le règne de
l'empereur Marc-Antoine , auquel il
dédia une Fie d'Alexandre , où il
annonçait ridiculement que sou style
serait digne des exploits du conqué-
rant macédonien. Cet ouvrage n'est
point parvenu jusqu'à nous ; mais ,
d'après le jugement de Photius , la
vanité d'Amvntian tint mal ses pro-
messes. C'était un écrivain froid, dé-
cousu, et sans forces, très-inférieur
aux autres historiens d'Alexandre. On
regrette toutefois que Photius ne rap-
porte aucun passage qui puisse motiver
son jugement. Amvntian avait aussi
publié la fie d' Oljmpias, mère d'A-
Icxnndre-Ic-Grand, ainsi que des \ ics
parallèles, dans le genre de Plutarquc,
celles , par exemple , de f)cnys-le-
Tvian et de Domitieu; de Philippe ,
roi de Macédoine , et d'Auguste. De
tous les ouvrages de cet historien, celui
qu'on doit le plus regretter, c'est, sans
contredit , la f'icd'Oljinj>ias , qui ne
pouvais mauquer de jeter beaucoup de
AMY
jour sur l'histoire de la Macc'doine et
de la Grèce , à cette époque qui est
si peu counue, C — r.
AMYOT ( Jacques ) , naquit à Me-
lun, le 3o octobre i5i3. Ou ne sait
pas au juste quelle était la profession
de son père ; les uns eu font un bou-
cher, d'autres un corroyeur, d'autres
un petit mercier. St.-Réal , historiea
fort peu scrupuleux , a fait , de la jeu-
nesse d'Amyot, un récit, dont les prin-
cipales circonstances sont démenlies
par des faits avérés , et qu'en consé-
quence , nous ne rapporterons point.
Àrajot, étant venu à Paris pour y con-
tinuer ses éludes coraniencccs à Me-
îun , n'avait d'autre secours de ses pa-
rents qu'un pain que sa mère lui en-
voyait chaque semaine : pour y sup-
pléer , il fut obligé de servir de domes-
tique à d'autres écoliers de son collège ;
on j)rétend que la nuit, à défaut d'huile
ou de chandelle , il étudiait à la lueur
de quelques charbons embrasés. Après
avoir fait ses cours de poésie et d'élo-
quence latine , de philosophie et de
mathématiques , sous les plus célèbres
professeurs du collège de France ,
nouvellement fondé , il se fit recevoir
tnaîtrc-ès-arts , et ensuite se rendit à
Bourges , pour y étudier le droit civil.
Là, Jacques Gollin, lecteur du roi,
et abbé de St.-Arabroise, lui confia
l'éducation de ses neveux, et lui fit
obtenir , par le crédit de Marguerite ,
sœur du roi, une chaire de grec et de
latin , dans l'université. Pendant dix
ou douze ans qu'il occupa celte chaire,
il traduisit le roman grec de Théagène
•et C ha? idée, et quelques F'ies des
Jlommes illustres de Plutarque. Fran-
çois P'. , à qui il dédia cet essai, lui
ordonna de continuer l'ouvrage , et
lui fit présent de l'abbaye de Bello-
zane , vacante par la mort du savant
Valable. Désirant, pour le perfection-
nement de sa traduction de Plutarque,
AMY 77
conférer les manuscrits de cet auieur
qui existaient en Italie , il y alla , a la
suite de l'ambassadeur de France à
Venise. Odet de Selve , successeur de
cet ambassadeur , et le cardinal de
Touruon, résident à Rome, le char-
gèrent de porter au concile , assemblé
de nouveau à Trente , une lettre du
roi Henri II , contenant une protes-
tation courageuse contre quelques dé-
cisions du concile. Sans caractère pu-
blic, sans lettres de créances , il s'ac-
quitta de cette mission en homme éga-
lement ferme et adroit. Il eut le plai-
sir de donner une petite leçon de la-
tinité aux Pères du concile, dont l'or-
gueil , ou plutôt la malveillance , s'of-
fensait de ce q!ie le roi , dans sa lettre ,
avait donné <à leur assemblée , au lieu
du nom de Concilium , celui de Con^
ventiis , qui , en latin moderne , signifie
couvent. Il leur représenta que, dans
les bons auteurs , Cotwenius ne vou-
lait dire autre chose qu'assemblée ,
réunion , concile , en un mot. « Je ne
» sais , dil-il, dans une lettre où il
» rendait compte de sa mission , je
» ne sais s'ils avaient peur que le roi
» ne les prît tous pour des moiues. »
Le cardiual de Tournon, charmé de
son savoir et de son habileté en af-
faires, le ramena à Paris, et, appre-
nant que le roi cherchait un précep-
teur pour ses deux fils, lui proposa
Amyot , qui fut agréé. Durant le cours
de cette éducation , il termina sa tra-
duction des Fies de Plutarque , qu'il
dédia à Henri II, et commença celle
des OEuvres morales de cet écrivain,
qu'il n'acheva que sous le règne de
Charles IX , son élève , à qui il eu fît pa-
reillemeut l'hommage. Le lendemain
même de son avènement, Charles IX le
nomma son grand-aumônier. La reine-
mère , Catherine de Mèdicis , qui des-
tinait celte place à un autre, entra
eu fureur , fit appeler Amyot , et lui
78 AMY
dit : « J'ai fait bouquer les Guise et les
» Chàlillous , les connétables et les
V chanceliers , les rois de Navarre et
» les princes de Conde , et je vous ai
y> en tête, petit prestoieti » Elle lui
déclara qu'il ne vivrait pas vingt-qua-
tre heures, s'il ne renonçait à la charge.
31 se cacha, et laissa passer plusieurs
jours sans paraître à la table du roi.
Ce prince , soupçonnant sa mère d'a-
voir fair à Arayot plus que des mena-
ces, entra en fureur à sou tour, et
s'e'cria : « Quoi I parce que je l'ai fait
» grand-aumonier , on l'a fait dispa-
» raître? » La reine, pour apaiser
son fils, fut oblige'c de faire chercher
Arayot, à qui elle donna toutes les sû-
retés qu'il put désirer. On est forcé de
convenir que le récit de cette que-
relle , entre la mère et le lîls , n'a
d'autre garant que St.-Réal. Le siège
d'Auxerre étant venu à vaquer, le roi
y nomma son maître ^ tel est le titre
qu'il donnait à Amyot). Celui-ci, pre-
nant possession de son épiscojjat, se
fit rendre , avec fermeté , mais sans
hauteur , tous les honneurs , tant ecclé-
siastiques que seigneuriaux, attachés
à son siège. Il contribua d'assez bonne
grâce, malgré sa parcimonie, à res-
taurer et à orner de nouveau l'église
cathèdi'ale , que les huguenots avaient
profanée, et surtout pillée. Il avoua
que , n'ayant encore étudié que les au-
teurs profanes, il n'était ni théologien ,
ni prédicateur ; il se mit à lire l'Ecri-
ture et les Pères, eut de fréquentes
conférences avec des docteurs, et se
hasai'da, enfin, à prêcher devant son
troupeau. Son autre élève, Henri III,
étant parvenu au trône , lui conserva
la graude-aumonerie, et y ajouta le
titre de commandeur de l'ordre du
St.-Esprit , qu'il venait de créer, vou-
lant qu'à sa considération, tous ses
successeurs dans cette charge y réu-
nissent la même prérogative. Amyot
AMY
se trouvait à Blois, lorsque le duc de
Guise y fut assassiné. Un gardien des
cordehers d'Auxerre souleva contre
lui toute cette vdle, qui était du parti
de la ligue , en soutenant qu'il avait
su , et même conseillé le meurtre.
IN'ayant osé se rendre à Auxerre que
quelque temps après , il fut pillé en
loute par les ligueurs ; arrivé , il courut
de grands dangers ; on lui tira des
coups d'arquebuse, et on lui mille
pistolet sur la poitrine. Il fut obhgé de
se faue donner une absolution en
foi-me par le légat, et tout rentra dans
l'ordre. C'est à ce sujet que le prési-
dent de Thou l'accuse d'ingratitude
et d'infidélité envers Henri III. 11
paraît justifié de ce reproche , par
tout ce qu'il eut à souffrir de la j)avt
des ligueurs , comme trop attaché à
la cause du roi. Ce ne fut véritablement
qu'après la mort de Henri III , qu'en
quelques occasions, il se montra fa-
voral)le aux projets de la ligue. Du
reste , il passa ses dernières années
dans son diocèse , uniquement occupé
de l'étude , et de l'exercice de ses de-
voirs. 11 mourut à Auxerre , le 6 fé-
vrier I SpD , dans sa So*". année. Quoi-
qu'il se fût plaint d'avoir été ruiné par
les troubles civils, il laissa, dit-on,
en mourant, plus de 200,000 écus. 11
passe pour avoir été, à la fois, avide
et parcimonieux. 11 demandait une
nouvelle abbave à Charles JX , qui
lui en avait déjà donné plusieurs. « he
1) m'avez-vous pas assuré autrefois ,
» dit le roi , que vous borneriez votre
)) ambition à 1000 écus de rente? —
» Oui, sire, répondit-il, mais l'appétit
» vient en mangeant. « Personne n'a
rendu plus de services que lui à la
langue française. Un homme à qui
elle doit aussi beaucoup , Vaugelas , a
dit : « Quelle obligation ne lui a pas
M notre langue , n'y avant jamais eu
» personne qui en ait mieux su le gc-
A U Y
» nie et le caractère que lui, ni qui
» ait usé de mots et de phrases si na-
» tui'ellement françaises, sans aucun
» mélange des façons de parler des
» provinces , qui corrompent tous les
» jours la pureté du vrai langage fran-
» çais I Tous ses magasins et tous ses
» trésors sont dans les œuvres de ce
» grand homme. » Ou a prétendu,
les uus qu'il n'avait traduit Plutarque
que d'après une traduction italienue,
les autres , que ce travail n'était pas
de lui , mais d'un homme pauvre et
savant qu'il avait à ses gages. Ces
assertions sont détruites par la seule
vue des exemplaires de Pliilarqiie
qui lui ont appartenu; ils sont char-
gés de notes et de variantes , qui prou-
rent une véritable connaissance de la
langue grecque. Néanmoins, il paraît
prouvé qu'en beaucoup d'endroits, la
version manque de fidélité : le savant
Méziriac prétendait y avoir trouvé jus-
qu'à deux mille fautes. Quoi qu'il en
soit, elle n'a été effacée par aucune
de celles qui ont paru depuis , et l'on
trouve toujours beaucoup de chaiine
à la lire , malgré l'espèce d'obscinnlé
qu'y répand, pour les lecteurs ordi-
naires , l'emploi d'un assez grand
nombre de tournures et d'expressions
tombées en désuétude. « Cette traduc-
s) lion, dit Racine^ a. daus le vieux
» stvie du traducteur, une grâce que
» je ne crois pas pouvoir être égalée
» dans notre langue moderne. » Les
ouvrages d'Amyot sont : I. Histoire
cethiopique d^ffélindorus , contenant
dix Hures, traitant des loyales et
pudiques amours de Théagènes ,
Thessalien, et Chariclée, /Ethiopien-
ne, nouvellement traduite du s^rec
enfrancois, i547, i"-f"^''i ^^ i^/jQ,
in-8'\ Amyot, lors de son voyage en
Italie , ayant trouvé au Vatican un
manuscrit complet d'Héliodore, retou-
cha sa traduction . et la fit réimprimer
A M Y 79
en i559, in-fol. C'est cette édition qui
a servi de modèle aux réimpressiuns
faites à Lyon, à Paris et à Rouen.
II. Sept Hures des Histoires de Dio-
dore , sicilien , traduits du grec ,
Paris, Vascosan, i554, in-fol., réim-
primés en 1 587. Ce sont les livres XI
à XVII , commençant au voyage de
Xercès, et finissant à la mort d'A-
lexandre, m. Amours pastorales de
Daphnis et Chloe\ traduites du grec,
de Longus, iSSg, in-8''. Parmi les
nombreuses réimpressions , on distin-
gue : 1 ". l'édition dite du Piègent, im-
primée aux frais de ce prince, 1718,
petit in-8'., et ornée de 28 gravures,
faites sur ses dessins, par B. Audran :
dans quelques exemplaires , on trouve
une 29*^. gravure ; 1". celle de 1751 ,
in- 1 1 , avec des notes de Falconnet ;
3°. celle de i 757 , in-4''., offrant en
regard la traduction d'Amyot et une
traduction nouvelle , par un anonyme
( Le Camus ) ; 4"' l'édition donnée par
-Didot, an 7 (1798), grand in-4°. ,
avec 9 figures, et dont 27 exemplai-
res ont été tirés in-fol.; 5". l'édition
in- 1 8 , publiée à la même époque, par
le même imprimeur ; G'^. celle que
M. Courier vient de faire imprimer
sous ce titre : Daphnis et Chloé ,
traduction complète, d'après le ma-
nuscrit de Vabajre de Florence,
Florence, 181 o, grand in-8''., tiré à
60 exemplaires : l'éditeur a retouché,
en quelques endroits, la traduction
d'Amyot, et a traduit lui-même, eu
vieux langage, un fragment recouvré
à Florence, lequel remplit la lacune
qu'on sait être au premier livre de
l'ouvrage; IV^ les Vies des Hommes
illustres , grecs et romains, compa-
rées l'une avec Vautre, translatées
du grec en français, i559, 2 vol.,
in-fol. On recheiche l'édition donnée
par Vascosan, 1567, 6 vol. in-S". ;
on y joint la traduction d'une Décads
8o AMY
de Guevare , faite par A. Allègre
( Foy. Allègre). V. OEiwres mora-
les de Plularque , traduites eu fran-
çais, i574'. 6 vol., iu-8'. C'est cette
éditiou que l'ou joint à celle des T'ies
des Hommes illustres, de 15G7. Les
OEuvres complètes de Plutarque ,
traduites par Amyot, ont ete' recueil-
lies plusieurs fois. L'édition de Yasco-
san , iSôS-^S, quatre tomes en 2 vol.
in-fol., est peu rechercbe'e aujouid'hui ;
il en est de même de l'édition douiiée
par M. Basticu, en 1784, iB vol.
in-8"; mais on estime l'édition pu-
bliée eu 1785-87, avec des notes
ot observations de G. Broltier et
Vauvilliers, 22 vol. in-8". Elle a éîc
réimprimée par M. Cussac, 1801 ■■
i8oG, 25 vol.j M. Clavier, éditeur, y
a ajoute des notes, et, de plus, la
traduction, faite par lui, de la P'ie
d' Homère j de VEssai sur la poésie,
du Traité sur la IVoblesse , et de plu-
.sieurs fragments : ces additions for-
inent le 25". vol. Les tables des ma-
tières des Vies des Hommes illustres
et des OEm'res morales , forment les
24''. et 25^ vol. VL Lettre à M. de
Mojvilliers , maître des requêtes ,
du 8 septembre i55i. Cette lettre,
dans laquelle Amyot donne une rela-
tion de son voyage à Trente, se trouve
dans les Mémoires du concile de
Trente , par Vargas , dans les Mé-
moires du même concile , par Dupuy ,
et dans l'ouvrage de Pithou, intitulé:
Ecclesice Gallicanœ in schismate
status. \ll- OEuvres mêlées, 161 1,
iu-B". Le Père INiceron parle de ce
volume; mais nous croyons qu'd y a
erreur, et que ces OEuvres mêlées
n'ont jamais existé. YUl. Projet de
l'Eloquence royale , composé pour
Henri III, roi de France, imprimé
pour la première fois , en 1 8o5 , in-8 '.
et in-4 '. A — g — a.
AMYR - BE - IHKAMILLAH , sur-
AMY
nommé Mansdur , kbalvfe falliemite,
succéda à son père Mostaaly, le 17
de safar 495 de l'hég. (27 nov. 1 1 o î
de J.-C. ), n'étant âgé que de 5 ans.
Ce fut Alafdhal , vizvr de son père ,
qui le fit reconnaître khalyfe , afin de
se conserver l'autorité ; mais lors-
qu'Arayr se sentit assez puissant pour
se défaire d'uu tel ministre, il le fît
assassiner, et mit à sa place un nommé
Mohammed. Celui-ci ne fut pas long-
temps sans s'attribuer un pouvoir
semblable à celui d' Alafdhal , et blâma
publiquement les mœurs du kbalyfe,
qui s'en défit également par le poi-
gnard. Le règne d'Amyr, prince sans ju-
gement, se livrant à l'excès du vin et à
ses passions , fut de 29 ans 5 mois et
quelques jours; il mourut, assassine
par des Ismaéliens , partisans d'Alafd-
lial, le 3 de dzoul-hedjah , 524 de
l'hég. ( 7 nov. 1 1 3o). Lorsqu'il monta
sur le trône , Godcfroi régnait encore
à Jérusalem. Bcaudouin, nommé par
les Arabes Bardouil , cpii succéda à
Godefroy , Gt une invasion en Egypte,
et s'en serait emjiaré , si la mort ne
l'eût arrête au milieu de ses con-
quêtes. Arayr étant mort sans enfants,
Hafeth lui succéda. J — n.
AMYRAUT (Moïse), non pas AMY-
RAULT, comme l'écrivent ceux qui le
fontdescendrede l'ancienne famille des
Lamyrault d'Orléans , vit le jour à
Bourgueil , en Anjou, l'an idqG. Son
père , qui le destinait à occuper la
charge de sénéchal de cette petite ville,
possédée par un de ses oncles , le fît
d'abord étudier eu droit : mais la lec-
ture de Y Institution de Calvin lui ins-
pira un tel goiît pour la tliéologie ,
que ce goût l'emporta sur les arran-
gements de famille. Après avoir fait
son cours d'étude à Saumur, sous Ca-
meron, et rempU , pendant 18 mois,
les fonctions du ministère dans le
IMaine , ou l'appela pour remplacer
AMY
Daillë à l'academic de cette ville, et il
«ntra en exercice le même jour que
Louis Cappel et Josuë De la Place : ils
jjublièreut tous les trois les Thèses
Salmurienses , qui eurent une grande
vogue dans leur parti. Député , en
1 05 r , au synode de Charenton , il fut
chargé de porter en cour le cahier
des représentations sur les infrac-
tions faites aux édits de pacification ,
€t il obtint la suppression de l'usage
humiliant qui astreignait les députés
protestants à ne haranguer le roi qu'à
genoux. Arayraut était très-attaché à
sa croyance ; mais il combattit ouver-
Icment le zèle fanatique de ceux de
son parti qui abusaient de leur reli-
gion pour semer des maximes , ou
faire des démarches contraires à l'o-
béissance due aux princes légitimes. Il
défendit la digoitc des rois , et la sû-
reté inviolable de leur personne ,
contre les indépendants d'Angleterre ,
qui firent périr sur l'échafaud le mal-
heureux Charles F^ Ce fut à cette
occasion, qu'il se déclara ouverte-
ment pour l'obéissance passive , dans
son livre de la Souveraineté des
Rois. Un ministre de la Rochelle ,
ayant , auparavant , attaqué ses prin-
cipes sur cette matière , il l'avait déjà
complètement réfuté dans son Apo-
logie pour ceux de la Religion. Ma-
zarin l'employa utilement pour conte-
nir les protestants qu'on cherchait à
faire entrer dans les troubles de la
fronde. Amyraut sentit vivement le
tort que faisaient , à la réforme , les
«ombreux schismes qui la divisaient.
Ce fut pour ramener tous les partis
à un point central de réunion contre
l'Eghse romaine , qu'il composa son
Traité De Secessione ah Ecclesid
Tomand , deque pace inter evange-
licos in negotio religioiùs instituen-
dd. On dit qu'il traita plus ample-
ment ce sujet dans ua ouvrage inli-
AMY 8i
tulé: Irenicon; mais nous doutons
qu'il existe un pareil ouvrage de lui
sous ce titre. Bayle fait l'histoire d'une
conférence qu'il eut à Saumur avec
le P. Audebert, jésuite, par ordre du
cardinal de Richelieu , sur la réunioa
des cathohques et des réformés ; mais
il paraît que ce récit est une fable,
au moins dan= ses détails, de l'inven-
tion du fils d' Amyraut, qui avait four-
ni à Bayle le mémoire sur lequel a été
rédigé cet article de son Dictionnaire.
Cet habile homme avait l'usage du
monde ; il était doux et conciliant. Ces
qualités , qui se trouvent rarement
chez les théologiens , ne furent pas
du goût de tous ceux de son parti ;
mais elles lui méritèrent l'estime des
personnes les plus distinguées dans
les deux communions , qui eurent tou-
jours pour lui beaucoup de considé-
ration , jusqu'à sa mort , arrivée eu
1664. Le grand nombre d'écrits sor-
tis de sa plume, tant en français qu'eu
latiu , sur toutes sortes de matières ,
prouve sa facilité d'écrire dans les
deux langues , et des talents très-va-
riés. Ils sont très-rares aujourd'hui ,
la plupart n'ayant guère été impiimés
qu'une fois , et assez peu recherchés ,
par le peu d'intérêt qu'excitent mainte-
nant les matières de controverse dont
ils sont le sujet. On distingue , dans
ce nombre, outre ceux dont il a été
fait mention : I. Traité des religions
contre ceux qui les estiment indiffé-
rentes ; II. De l'élévation de la foi
et de l'abaissement de la raison ;
III. Morale chrétienne, 6 vo\. in-B".;
IV. Traité des songes ; V. Deux
volumes contre les millénaires , pour
réfuter le S\ De Launai , grand par-
tisan du millénarisme j VI. Traité de
l'état des fidèles après la mort^
dédié à sa femme , pour la consoler
de la perte de leur fille ; VII. Du
gouvernement de l'Eglise , dont
82 4^1 Y
l'objet est de soutenir l'-^'lorite et la
nécessite des synodes, contre les in-
dépendants, qui voulaient que chaque
église particulière se gouvernât par
ses propres lois , sans aucune subor-
dination à l'autorité des synodes ;
VIII. Considérations sur les droits
par lesquels la nature a réglé les
mariages; IX. ^ie de François de
La Noue , depuis le commencement
des troubles , en 1 56o , jusqu'à sa
mort, en idqi ; Leyde, 1661, in-4".
Le style en est lourd , les réflexions
communes ; l'auteur y prodigue à sou
héros des louanges exagérées , pour
les actions les plus ordinaires ; mais
on doit lui savoir gré d'avoir rédigé,
dans un ordre chronologique , les ac-
tions d'un guerrier également estime
des deux partis , et dont la vie inté-
resse tout bon Français. T — D.
AMYTIS , fille d'Aslyages , était
mariée à Spitaraès , dont elle avait
deux fils. Cyrus, ayant vaincu Astya-
ges, ce prince s'enfuit à Ecbatane,
où sa fille et son gendre le cachèrent ;
DiaisCyrus ordonna qu'on les mît à la
question , ainsi que leurs enfants ; As-
Ivages , voulant leur épargner les
tortures , se découvrit lui-même; Cy-
rus lui donna la liberté , et épousa ,
par la suite, Amytis, dont il eutCam-
Lvse etTauyoxercès. Ce récit, que j'a-
l)rège beaucoup , n'est fondé que sur
le rapport de Ctésias , qui se trouve
en contradicliou avec tous les autres
historiens , et qui mérite peu de con-
fiance. C — R.
ANACIIARSIS , Scythe de nation ,
était fils du roi Gnurus et d'une femme
grecque: de sorte, qu'avec la langue
de son pays , il apprit aussi celle d'Ho-
mère. Les beautés qu'il y découvrait
chaque jour exaltèrent sou admira-
tion pour les peuples qui la parlaient.
Bientôt, l'àpreté du climat , la rudesse
des raœi'rs de ses concitoyens , le
AN A
déterminèrent à visiter la Grèce. Il
quitta les bords du Pont-Euxin, que
fréquentaient les nomades auxquels
il devait le jour , et se rendit à Athè-
nes , sous l'archontat d'Eucrate , la
i'"'. année de la 47 • olympiade ( 089
ans avant J.-C. ). Toxaris , son com-
patriote , le présenta à Solou , dont il
ne tarda pas à devenir le disciple as-
sidu. La pureté de ses mœurs, la rec-
titude de son jugement , la sagacité de
son esprit, lui méritèrent l'amitié du
législateur d'Athènes , et , par suite ,
le titre de citoyen. Il cultiva les lettres ,
le> arts , et connut tous les grands hom-
mes contemporains de Solon. Parti
d'Athènes, il visita plusieurs autres
contrées de la Grèce. A Cyzique. il vit
célébrer la fête de la Mère des Dieux,
et fit vœu, s'il ai'rivait dans son pays,
sain et sauf, de sacrifier à la déesse
avec les mêmes cérémonies. Ce vœu
fut cause de sa perte ; car, ayant
voulu l'accomplir dans la ville d'Hyl-
lée , il fut tué d'un coup de flèche ,
par sou propre frère Saulius, di'\eiiu
roi du pays , qui ne lui pardonna pas
d'avoir préféré les dieux de la Grèce
à ceuxde la Scythie. Anacharsis fut un
des hommes les plus vertueux de l'.in-
tiquité. L'histoire nous a conserve plu-
sieurs de ses apophthegmes, qui feront
aisément connaître son caractère : « La
» vigne, disait-il, porte trois fruits;
» le premier, de volupté; le second,
» d'ivresse; le troisième, de repen-
» tir.» — Les turpitudes d'un ivrogne
sont la meilleure leçon de tempérance.
— Interrogé quel devait être le souve-
rain le plus illustre ? le plus sage ,
répondit-il. — Quelle était la meilleure
forme de gouvernement? celle où l'on
n'admet d'autre distinction que l'éclat
des vertus, et l'opprobre du vice. — Le
premier, il compara les lois aux toiles
d'araignées. — Chez les Athéniens ,
disait-il , ce sont les sages qui discu-
ANA
t^nt, et les foux qui décident. — Je
les admire, ajoutait -il; ils usent de
petites coupes au commencement du
repas, et de grandes, quand ils sont
ivres. — Un Giec lui reprochait d'être
Scythe; ma patrie fait mon de'shou-
Deur, repoudit-il, et toi, celui de ta
patrie. La vivaciie' de ses reparties , la
force de ses arguments , donnèrent lieu
à cette expression proverbiale : Un
discours scjthe. Il écrivit en vers hé-
roïques sur les lois de son pays, sur
l'art de la guerre, sur la frugalité.
Mais les Lettres publiées sous son
nom, Paris, i 55'2,gr. etlat. ,in-4"., et
réirapr. dans les Epistol. grec. , sont
apocryphes. Nous avons son portrait
dans leLaërce de Westein , et dans les
Antiquités grecques de Gronovius.
Chez les anciens, ses images portaient
ordinairement cette inscription : Liti-
guain , ventrem , veretrum contine.
L'abbé Barthélémy a rendu son nom
immortel. D. L.
AjNACLET (S.), ou S. CLET,
pape. Les anciens biographes distin-
guaient deux personnes sous ces deux
énonciations; les écrivains modernes,
et notamaent les auteurs de \Art
de vérifier les dates, n'en admettent
plus qu'une, qui a occupé le Saint-
Siège, depuis l'an ■] 8 jusqu'en 91. C'est
un point historique universellement
reconnu aujourd'hui. Anaclet était
originaire d'Athènes ; les Latins l'ont
appelé Clet par abréviation , et de-là
est venue l'erreur. Il vint à Rome, y
fut converti parles Apoti'es, et associé
au saint ministère. S. Pierre lui confia,
pendant son absence , le gouverne-
ment de l'Eglise, conjointement avec
S. Lin et S. Clément. Il succéda au
premier, suivant l'opinion des histo-
riens actuels ; les autres le faisaient
succéder a S. Clément. L'Eglise ho-
nore S. Anaclet comme martyr, ce qui
signifie seulement qu'il éprouva qucl-
ANA
85
ques persécutions pendant sa vie ; car
il ne s'est passé, de son temps, aucun
événement qui prouve qu'il ait ter-
miné sa vie dans les supplices. On â
quelques fausses Décrétâtes sous le
nom de ce pape. D — s.
ANACLET, anti-pape, élu en 1 i3o,
après la mort d'Honorius II , par une
petite partie des cardinaux, dont la
majorité, quelques jours auparavant,
avait choisi Innocent II. Anaclet s'ap-
pelait Pierre de Léon, ainsi que sou
aïeul. Cet homme, juif de naissance,
puis converti et baptisé par le pape
Léon , était savant , extrêmement riche
et très-considéré. Son fils , père d'A-
naclet, doué des mêmes avantages ot
de plus grandes qualités, jouit d'une
grande faveur auprès du pa])e Pas-
cal II. 11 servit si bien l'éghsc roimsinc
dans la querelle des investitures, et
par ses armes , et par ses conseils , »
qu'on lui donna le gouvernement de
la tour de Crcscence, ou chdteiu St.-
Ange. Anaclet se destina d'abord aux
lettres , et vint étudier en France , oii
il prit l'habit de l'ordre de Ciuni, ce
qui donnait, dans ce temps-là, une
grande considération. Etant encore
très -jeune, il servit d'ota^ije pour le
pape entre les mains de l'archevêque
de Cologne. Il fut rendu , en 1 1 1 9 ,
au concile de Pveims , où il parut , dit
Fleury, « magnifiquement vêtu , mais
» noir, pâle et de si mauvaise mine,
» que tous les assistants le trou-
» vaient plus semblable à un juif,
» ou à un sarrasin , qu'à un chrc-
» tien. » Calixte II le fit bientôt car-
dinal, et l'envoya légat en France ,
conjointement avec Innocent II , au-
quel depuis il disputa la thiaie. Ana-
clet, uomméainsiqu 'ou vient de le voir,
fit tout ce qu'il put pour se maintenir.
11 fint Innocent II assiégé dans le pa-
lais de Lalran, et s'empara de la Ba-
silique et du trésor de St.-Pieire. Il tu
0..
H
AIN A
fit autant de Stc.-Maiie-Majeure , et
des autres églises de Rome. Maître de
la ville et du territoire, après avoir
forcé Innocent II de fuir, il négocia
partout pour se faire des appuis et se
procurer des suffrages : il donna sa
sœur en mariage à Roger , duc de
Sicile , auquel il conféra le titre de
loi ; il écrivit à toutes les puissances
tour se faire reconnaître. Le schisme
s'établit , et la contestation fut longue.
Condamné par les conciles de Reims
et de Pise , rejeté par la plus grande
partie du clergé de toute la chrétien-
té , méconnu par tous les souve-
rains, excepté Roger et le duc d'A-
quitaine , Anaclet se soutint dans
Home , malgré les armes de l'empe-
reur Lothaire, qui protégeait Inno-
cent II , et dont les troupes Ancto-
rieuses avaient dépouillé Roger d'une
grande partie de ses états. Il mourut
à Rome, le 7 janvier 11 58, après
huit ans d'une élévation contestée.
Aussitôt après sa mort , ses frères re-
connurent Innocent II, et le schisme
cessa. Voltaire l'appelle le pape juif ,
quoiqu'il n'ait été, véritaLlcraent, ni
l'un ni l'autre. Anaclet a été fortement
décrié par S. Bernard, et surtout par
Arnoul , archidiacre de Sécz, dans un
Traité adressé à Geoffroy, légat du
pape Innocent. Arnoul reproche à
Pierre de Léon le vice de sa nais-
sauce , les usures de ses parents , l'in-
famie de sa jeunesse, son luxe, sa
profusion , ses débauches , et enfin un
commerce incestueux avec sa sœur.
( F. XHist. eccl. de Fleury). Toutes
•cfS accusations ont un caractère d'a-
uimosité qui peut y faire soupçonner
de l'cxagcralion. Fleury dit simple-
ment que telle était alors la réputa-
tion d'Anaclet ( Foy. Innocent II).
D— s.
ANACO ANA. Fqy. Ovando.
A>,ACRÉ0N, naquit à Teos, en
ANA
lonle ; il vivait vers la 7 i et la 7•2^
olympiade ( l'an 53o av. J. - C. ) ; voilà
tout ce qu'on sait de certain sur soa
compte. On croit que Polycrate , ty-
ran de Saraos, l'attira à sa cour, cl
lui accorda son amitié et ses faveurs.
Le voluptueux Anacréon , se couron-
nant de roses , chantait l'amour , s'eni-
vrait , et s'inquiétait peu des biens
de la fortune. On prétend même
qu'ayant reçu de Polycrate une somme
assez considérable , il ne put passer
qu'une nuit avec un hôte si dangereux,
et alla , le lendemain , reporter l'ar-
gent au tyran , en le conjurant de lui
rendre ses chansons et sa gaîté. Cette
anecdote a probablement fourni à La
Fontaine la fable intitulée : le Save-
tier et le Financier. Après la mort
de Polycrate, Anacréon alla à Athènes ;
et Hipparque , qui y commandait, en-
voya à sa rencontre une galère armée
de cinquante rames. La chute d'Hip-
parque chassa d'Athènes notre poète,,
qui, probablement, retourna alors à
Téos; car il s'y trouvait losqu'His-
tiée fit révolter l'ionie contre Darius.
Justement alarmé des suites que devait
avoir cette rébellion , le chantre des
amours et du vin se retira à Abdère ,
où il conduisit gaîmcnt sa carrièr«j
jusqu'à 85 ans. Il mourut étranglé,
dit-on , par un pépin de raisin :
AîQsî finirent ses beaux jours,
Évanouis dans la mollesse ;
Kt son nom , (jui vivra sans cess£ ,
Fut déposé par la Paresse
Uans les annales des Amours.
Téos honora sa mémoire , et sa sta-
tue fut placée à côté de celles de Péri-
clès et de Xanti]ipc. Nous avons d'A-
nacréon des odes bachiques et ero-
tiques ; ce sont presque autant de mo-
dèles achevés , dans un genre qui a
gardé le nom du vieillard de Téos 5
mais, tout en rendant justice à ses ta-
lents , il serait à désirer que la posté-
rité n'eût aucun reproche à faire aux
i
I
AN A
mœurs d'Anacréon. Malheureusement,
les noms de Batylle, de Smerdias et de
Cleobule , devenus désormais insépa-
rables de celui d'Anacréon , n'attes-
tent que trop la dépravation de ses
mœurs , et la licence de ses chants. In-
dépendamment de ses Odes, Anacréon
avait composé un assez grand nombre
d'ouvrages, dont quelques-uns sont
nommés par Suidas , et d'autres, cités
avec éloge par Athénée ; mais il ne
nous reste de tout cela que quelques
fragments , qui prouvent que ce poète
ingénieux et facile ne s'était guère
exercé que sur des matières erotiques.
Dans ce qui nous est parvenu de lui ,
tout respire l'enjouement et la moUessej
ce n'est point un auteur qui écrit , c'est
un convive aimable qui s'abandonne à
la gaîté de sa verve. Les œuvres d'Ana-
créon parurent, pour la première fois
(Paris, 1554), parles soins de Henri
Etienne , qui trouva l'ode XP. sur la
couverture d'un vieux livre. On ne
connaissait jusque-là, d'Anacréon , que
ce qu'Aulu-Gelle et Y Anthologie en
avaient conservé. Un hasard heureux
ayant procuré à ce même éditeur
deux manuscrits d'Anacréon , il les
conféra soigneusement, et publia l'é-
dition que je viens d'annoncer, avec
quelques fi'agments d'Alcée, et deux
odes de Sapho : les deux manuscrits
qui guidèrent Henri Etienne , les seuls
que l'on ait long-temps connus d'Ana-
créon , ne nous ont pas été conser-
vés. Henri étant tombé , sur la fin de
sa vie, dans une espèce d'aliénation
d'esprit , les laissa périr , avec beau-
coup d'autres, qu'il ne communiquait
à personne , pas même au savant Ca-
saubon , son gendre. Aussi cette édi-
tion Princeps, fut-elle reçue bien di-
versement de la plupart des érudits :
les uns l'accueiUirent avec transport,
les autres en suspectèrent l'authenti-
cité, et s'obstinèrcnl à ue reconnaître ,
ANA
85
pour poésies d'Anacréon, que celles
dont ils trouvaient des vestiges dans
les anciens auteurs. Tanneguy-Lefeb-
vre contesta , le premier , dans des
notes savantes, l'antiquité d'un grand
nombre d'odes (Saumur, 1660); la
célèbre M'"''. Dacier, sa fille , publia ces
notes (Paris, iG8'2, et Arast., 1695,
1 69g et 1716^ avec une version fran-
çaise et des notes, et Longcpierre, avec
une traduction en vers français. Le
Bouthilier de Rancé , devenu si fa-
meux depuis , comme abbé de la Trap-
pe, était à peine âgé de i5 ans, lors-
qu'il donna son édition dH Anacréon,
avec les Scholies grecques , dédiée au
cardinal de Richelieu , son parrain ,
(Paris, 1 659 et 1647)- Baxter donna ,
en 1O95, une édition réimprimée à
Londres ,1710, in-8 '. Rien n'égale la
téruérité avec laquelle il change, cor-
rige et mutile le texte, jusqu'alors
respecté, de H. Etienne. Barnès réfuta
Baxter, dans l'édition qu'il donna
(Cambridge, 1703), d'après un ma-
nuscrit du Vatican, et les conjectures
de Scaliger, Saumaise, et Dan. Hein-
sius. Enfin, parut crlie de Maittair-
( Londres, 1725 , in-4°. )i celle de
Corn. de Paw( Utrecht, 1752, in-4''. ),
remarquable par la hardiesse des con-
jectures que l'éditeur propose de subs-
tituer aux anciennes leçons. H fut
complètement réfuté par le savant
Dorville. Aidé de tant de secours, et
éclairé par tant de fautes , Fischer pu-
blia enfin ( Leipsick , 1 7 76 , et réimpr.
en 1795, in-8\ ), une édition d'^-
nacréoii , bien supérieure, sous tous
les rapports, à celles que je viens de
citer ; ce qui n'empêcha pas Brunck
d'en donner une autre ( Strasbourg ,
1778), avec des observations criti-
ques , et une révision exacte de tout
ie texte grec, d'après les manuscrits
et les remarques des éditeurs précé-
dents. Cette jolie édition a été surpassée
86 A ^^ A
par celle rie l'abbé Spaletti ( Rome ,
I nSi ) , qui, en faisant graver le texie
d'après le maïuiscrit du Vatican , en
jGt plutôt un objet de luse et un mo-
nument de curiosité typograpliique ,
qu'un ouvrage d'une utilité vraiment
littéraire. On en peut dire autant de la
jnagnifi.pieédi'jon de Parme ( Bodoni,
1 785 ). Eruuck donna , à Strasbourg ,
en 1786, in- 16, une seconde édition
de son Anacréon , d'après le ma-
nuscrit du Vatican. C'est cette édition
qui est le plus généralement estimée.
Beaucou)) de traducteurs se sont exer-
ces sur Anacréon ; il est peu de poètes
françaisqui n'aient imité quelqu'une de
sesjnèces. Régnier-Desmarais, La Fon-
taine , Mulot et beaucoup d'autres,
IVïM. Roman, Millevoye, Tissot, etc.,
en ont imité quelques unes. Voici l'in-
dication des traductions entières, outre
celles de IM'"*". Dacier et de Longe-
pierre , dont nous avons déjà parlé :
I. Odes iV Anacréon y traduites en
vers , par Rémi Beileau , Paris , 1 556,
1 5*^ 1 , petit in- 1 'i, et dans les Œuvres
deBeUeau, 1078, ou i585 , in-iji ;
3L Tvaduclion nouvelle des odes
d' Anacréon , sur l'original grec ,
■par La Fosse , avec des remarifues
et autres ouvr. du traducteur, 1 704 ,
in- 12 ; 11 L les Odes d" Anacréon
et de Sapho , traduites en vers
français , par le poète sans fard
( Gacon ), 1712, in-12, nouvelle
édilicn ( publiée par MM. Cjppero-
iiier et Querlon), 1754, in-i6;lV.
Imitation des odes d" Anacréon , en
vers, par M. deSeillans. avec la tra-
duction de mademoiselle Lefebvre,
en prose, 1704, in-8''. j V. Odes
d^ Anacréon , traduction noui'elle ,
en vers ( par M. Anson ), 1 795, in-8". j
VL Anacréon , Sapho , Bion et Mos-
chus , traduction en prose , par
M. Moulonnel de Clairfons, 1775,
lu-4 '. et iu-8".; 1 780, -1 vol. in- 1 'j ;
ANA
VIL Odes, Inscriptions, etc. , d' Ana-
créon, traduitsparG nil, 1 7g4,in-8''. ,
1 799, in-4". A cette dernière édition ,
est jointe la musique de quelques
odes, par MM. Gossec, Méhul , Le-
sueur etCherubini. y\\\. Anacréon ,
Sapho, Bion, Moschus , Tjrtée et
autres poètes grecs, trad. en vers par
Poinsinct de Sivry , 17.58, in-12,
plusieurs fois réimprimées; IX. Imi-
tation en vers français , ^^5 Odes
d' Anacréon , par M. Mérard de
St.-Just, i798,in-8°.; i799,iu-i8;
X. Poésies galantes et gracieuses ,
d' Anacréon, Bion, Moschus, Ca-
tulle et Horace , imitées en vers
français, et soumises, pour la plu-
part, au sj sterne musical, par
M. Lachabeaussière, Paris, an 1 1 ,
1 8o5 , in-8°. ; W. Anacréon , traduc-
tion nouvelle, en prose, par M. Cou-
pé, dans le tome 7". des Soirées Lit-
téraires ; XII. Odes d' Anacréon,
traduites en vers, sur le texte de
Brunck, par M. J. B. de St.-Fictor,
1810, in-8 '. Cette belle traduction est
accom])agnée du texte grec, d'après
Brunck , et ornée de 4 superbes vi-
gnettes , gravées par M. Girardet ,
sur les dessins de MM. Girodet et
Bouillon. A — D — r.
Aîn'AFESTE (Paxjl-Luc, ou Pao-
Luccio ) , premier doge de Venise. Les
habitants des îles vénitiennes , gou-
vernées , jusqu'en 697 , par des tri-
buus , prirent à cette époque la réso-
lution de se réunir en un seul peuple,
et sous un seul gouvernement. Ils
élurent, pour chef de leur république,
Paul-Luc Aiiafeste, d'iléraclée. Ainsi
(l'iiimença une magistrature qui de-
vait se continuer glorif usemcjit pen-
dant ou/ecents ans. An;ifesle fixa, de
conceil avec Liulprand, roi des Lom-
bards , les frontières de la \ eiiétie. Il
mourut en 717, et eut pour succes-
seur Marcello jasilunt». S. S— 1.
AN A
' ANANIA ( JoAîfisES de), Jean
d'ANANIE , ou d'AGNANY, juriscon-
sulte du 1 5''. siècle. On prétend , qu'é-
tant ne de parents obscurs et pauvres,
il ne voulut pas en porter le nom, et
qu'il prit celui à'Anania, ville très-
ancienne du Latium. Quoi qu'il en
soit, il fut auditeur de Florianus à
Sancto Pedro , et professa le droit
civil et canonique à Bologne , où il
fut fait archidiacre. Sa vie privée of-
fre un modèle de piété sincère, et
ses ouvrages annoncent une grande
érudition. Le droit civil , le droit ca-
nonique furent également l'objet de
ses travaux. Ses Commentaires sur
le S*", Ih're des Décrétales , et un
volume de Consultations , sont par-
ticulièrement estimés. Parmi ses autres
ouvrages, on fait cas de son Traité sur
les droits féodaux, De rev'ocatione feii-
di alienati,\A^(\nm, i546,in-4.". On
est étonné qu'un homme aussi éclairé
ait fait un Traité sur la magie et la na-
ture des démons , qui est réuni à son
corps d'ouvrage , et intitulé : De magid
et maleficiis , Lugduni, 1669, in-4^
Anania mourut, dans un àgo avancé,
en i458. M — x.
ANANIAS , nom commun à plu-
sieurs personnages dont il est fait
mention dans l'Ecriture- Sainte. Le
premier est un de ces trois jeunes Hé-
breux qui , pour n'avoir pas voulu
adorer la statue de Nabuchodonosor ,
furent jetés dans la fournaise ardente,
d'où Dieu les retira miraculeusement,
sans qu'ils eussent été atteints par les
flammes. Cet événement est d'environ
l'aa 538 avant J.-C. Le second fut
frappé de mort aux pieds de S. Pierre ,
avec sa femme Saphire , pour avoir,
l'iuï et l'autre , voulu tromper cet
apôlre sur le prix de la vente de leur
champ , afin de s'en résen'cr une par-
tie, taudis qu'ils s'étaient engagés à
distribuer le tout aux pauvres. Le
A N A 87
troisième fut fdit souverain pontife
des juifs , l'an 49 de J.-C. Après
8 ou g ans d'exercice , Cumanus ,
gouverneur de Judée , l'avant accusé
d'avoir cherché à soulever sa nation
contre les Romains, l'envoya, chargé
déchaînes, à Rome, d'où il revint
parfaitement justifié. A son retour ,.
il persécuta les chrétiens , traduisit
S. Paul devant le grand conseil des
juife , et le fit souffleter au moment
où il commençait à plaider sa cause.
« Dien te punira , muraille blanchie,
lui dit l'apôtre; » effectivement , quel-
ques années après, Agrippa II le dé-
pouilla de sa dignité , et il fut massacré
dans son propre palais par des sédi-
tieux , dont sou lils Eléazar était le
chef. T — D.
ANANUS , fameux docteur Juif du
S", siècle , l'auteur, ou plutôt le res-
taurateur de la secte des caraites ^
c'csl-à-dire, de ceux qui, scrupuleu-
sement attachés à la lettre de la loi
de Moïse , rejettent toutes les tradi-
tions , et les interprétations allégori-
ques , imaginées par les thalmudistes..
Cette secte avait perdu toute son im-
portance , depuis la destruction du
temple de Jérusalem, lorsque Ânanus
enti éprit, vers l'au 700 , de lui rendre
tout son éclat. Il combattit fortement
les sectatems d'HiUel , ou les tradi-
tionnaires , se fit de nombreux dis-
ciples, et devint chef de la captivité.
La secte dont il fut le chef subsiste
encore parmi les juifs. T — D.
ANAPIUSetAMPHINOMUS,
ét;iient deux frères qui demeuraient
à Gitane , en Sicile. Dans une des
éruptions de l'Etna , un torrent de
lave s'approrhant de la ville, chacua
s'empressi d'emporter ce qu'il avait de
plus précieux; mais ces deux frères,
abandonnant leur or et toutes leurs
richesses, prirent sur leurs épaules
leur père et leur mère, qui étaieut
88" A N A
très-avances en âge et hors d'état de
s'enfuir. Chargés de ce fardeau pré-
cieux , ils sortireut de la ville. Comme
ils n'allaient pas très-vite , la lave les
atteignit. L'histoire rapporte qu'elle se
sépara en deux , sans leur faire aucun
mal. On leur érigea des statues à Ca-
tane , et on les honorait sous le nom
des Frères pieux ; on avait aussi re-
présenté leur dévouement sublime sur
im des bas-reliefs qui ornaient le tem-
ple d'Apollonie à Cyzique. C— r.
ANASTASE T^ (S.), élu pape en
598 ou 599, succéda à Sirice. 11 ré-
concilia les deux Églises d'Orieiil et
d'Occident. Une traduction du livre
des Principes d'Ori^ène, par Hufin,
excita son zèle, et il le condamna,
ainsi que l'avait fait 8. Jérôme. Anas-
tase mourut eu l^oi^ regretté par cet
illustre Père de l'Église. On a de ce
pontife deux Épîtres dans les Epis.
Rom. PoJitif. de D. Coûtant , in-ful. Le
recueil d'Isidore contient de fausses
Dérrétales sous le nom de ce pape. On
lui attribue quelques règlements, entre
autres celui qui défend d'ordonner
prêtres les hérétiques convertis , et un
autre, pour défendre l'entrée , dans le
clergé, à ceux qui viendi-aieut d'outre-
mer, à moins qu'ils n'eussent par écrit
le témoignage de cinq évèques; ce qui
prouve qu'à celte époque , un grand
nombre d'iiérétiques , venus principa-
lement de l'Orient, faisaient, de leur
conversion , une espèce de trafic. Sa
vie fut très -exemplaire; il gouverua
avec beaucoup de sagesse , et main-
tint la discipline ecclésiastique avec
7èle. 11 mourut, en 4o'i , après avoir
occupé le Saint-Siège un peu plus de
trois ans. D — s.
ANASTASE II , Romain , élu pape
le a8 novembre ^ç)V}. 11 eut à combat-
tre l'ariasuime, qui était protégé par
l'empereur d'Orient , Anastase l". Il
envoya des légats, et écrivit à ce priocc,
AN A
pour faire ôter des sacrés dyptiques
le nom d'Acace , dernier patriarche de
Constantinople. Il félicita, par écrit,
Clovis sur sa conversion à la foi ca-
tholique. On a encore de lui une Let-
tie touchant les difiérends qui parta-
geaient les ÉgHses de Yicnue et d'Ar-
les. Ces écrits sont contenus dans le
Recueil des Conciles de Labbe. Ba-
luze a pubhé , en outre , des fragments
d'une autre Lettre relative aux héré-
sies de l'Église d'Orient. Ce pape
mourut le 17 novembre 4o^- ^ — ^•
ANASTASE , anti - pape en 855
(r. Benoit 111).
ANASTASE III, élu pape en 91 1 ,
après Sergius III. 11 est loué pour I»
douceur de son gouvernement , qui ne
dura que deux ans et quelques mois.
C'est tout ce que l'histoire nous en ap-
prend. D — s.
A^■ASTASE IV, élu pape le 9 juil-
let 1 1 55 , après Eugène III. Son nom
était Conrad; il était Romain , évêque
de Sabine , et cardinal. Élevé sur le
siège de S. Pierre, dans un âge très-
avancé, il n'y resta qu'un an et cinq
mois. Il favorisa l'ordre naissant de
St. -Jean de Jérusalem. C'était , dit
Fleury, un vieillard de grande vertu ,.
et de grande expérience dans les af-
faires de la cour de Home. Nous avons
neuf Lettres de ce pontife dans le Re-
cueil de Labbe. D — s.
ANASTASE; deux saints, deux
écrivains ecclésiastiques de ce nom ,
placés à un siècle d'intervalle , ont été
souvent confondus en un seul person-
nage.— Le premier, élevé, en 5(3 1, sur
le siège d'Antioche , se déclara , avec
beaucoup de zèle, contre les héréti-
ques qui soutenaient que J.-C. , pen-
dant sa vie mortelle, avait une chair
incorruptible et impassible. L'empe-
reur Justinicn , qui les protégeait ,
était sur le point de faire sentir à
Ajwslase les effets de son ressenti-
ANA
ment, lorsqu'il inouiul. Justin -le -
Jeune , son successeur , exila Anastase
pour la même cause. Rappelé, sous
Maurice, il vécut paisiijleraeut, dans
son éji,lise , jusqu'à sa mort , arrivée
cinq ou six ans après son retour. Anas-
tase avait traduit en |i;rec, à la prière
de ce dernier empereur , le Pastoral
de S. Grégoire , pour l'usage dos
églises d'Orient , et composé, contre
les incorruptibles , un Traité dont les
ancieus louent la solidité et i'éiéj;ance.
Il ne nous reste de lui que trois Dis-
cours, dans ^ Auctuarium de Com-
l)efis , et cinq , dans les Lecliones an-
iicjuœ de Canisius. — Le second
Anastase , surnommé Sinuïte, parce
qu'il était moine du mont Sinai, sortit
souvent de sa solitude pour combattre
les Acéphales , les Sévériens et les
Théodosiens d'Egypte et de Syrie. Il
vivait encore en 678. Nous avons de
lui : l. Odegos, ou le Guide du vrai
chemin. Cet ouvrage est dirigé contre
les Eufychiens , et il contient d'excel-
lentes règles pour pi'énmnir les fidèles
contre la séduction de tous les héré-
tiques. Grelser l'a publié en grec et en
latin, Ingolstadt, 1606, in-4''.,i'r'irej
il se trouve , en lalin seulement , dans
les œuvres de ce jésuite. Richard Sim on
pensait que ce n'est pas le véritable
ouvrage d' Anastase, et il avait promis
de le l'aire imprimer sur les manus-
crits j m;tis il n'a pas exécuté ce des-
sein. II. Considérations analogiques
surVHexameron. Les onze premiers
livres étaient dans la Bibliothèque des
Pères ^ en latin seulement. Allix, s'é-
tant procuré le i a". , crut y trouver
des choses contraires au dogme de la
transsubstantiation; i! le publia en grec
ci: en latin , Je la traduction d'André
Dacier, Londres, i68'2, in-4°. IIL
les cent cinquante- quatre Questions
et Réponses, qui ne sont qu'une com-
pilation de passages des Pères et des
ANA »>
Conciles sur la vie spirituelle. 11 v a
des auteurs qui les attribuent à Anas-
tase de Nicée , ou même à un écri-
vain du 1 1 ^. siècle. Gretser les a
données, dans les deux testes, Ingol-
stadt, 1 61 n. Elles ont été insérées, en
latin seulement, dans les œuvres de
l'éiliteur, et dans la Bibliothèque des
Pères. Ou n'a même pas eu soin, dans
cette dernière collection , de distinguer
du texte les notes de l'éditeur. IV. des
Sermons , à la suite de la Philocalie
d'Origène, Paris , 1 6 i 8 , dans lesquels
respire une piété affectueuse. Anastase
avait composé d'autres ouvrages contre
les juifs et contre les hérétiques de son
temps , qui sont restés inédits. T — d.
ANASTASE I"., empereur de
Constantinople , né à Dyracchium, vers
l'an 43o , remplissaitlcs fonctions obs-
cures de silsntiaire\)rcs de l'empereur
Zenon , lorsque ce prince , détesté de
ses sujets , perdit la vie , l'an 4v) i -
Ariadne , sa veuve , que la plupart des
historiens ont accusée de cette mort,
entreprit aussitôt de faire fi-anchir à
Anastase l'intervalle qui le séparait du
trône , et que l'amour de sa souveraine ,
suivant les mêmes auteurs, avait oublie*
depuis long-temps. On peut remarquer
cependant qu' Anastase , à Gi ans , n'é-
tait plus en âge d'inspirer une violente
jvission ; il était presque chauve, et avait
un œil noir et l'autre bleu, ce qui le fit
surnommer Dicore. Le sénat, le peu-
ple et l'armée secondèrent d'ailleurs les
vues de l'impératrice. Longin, frère
de Zenon , qui seul pouvait les traver-
ser , s'était attiré la haine générale par
son immoralité et son abrutissement ;
cependant Anastase, dont on proclamait
la sagesse et les vertus , rencontra m\
obstacle à son élévation dans le zèle
d'Euphémius, patriarche de Constan-
tinople , qui lui avait plus d'une fois,
reproché son attachement aux eneurs
d'Eutychès. Anastase leva la difficulté.
Oo A N A
m signant une profession de foi eon-
iormc aux décisions du concile de Chal-
rc'doine ; il prouva , par le reste de sa
vie , qu'une pareille promesse n'avait
aucune importance à ses yeux ; et la
même versatilité , la même faiblesse se
firent remarquer dans ses opinions,
tlaus ses projets , dans ses vices et
même dans ses vertus; cependanl le
début de son règne lui fit honneur.
Le peuple, enchanté deJa justice et
delà modéiation du nouveau prince,
raccueillitau Cirque avec les plus vifs
applaudissemculs. « Régnez, s'écriait -
« on de toutes parts, régnez, prince,
» comme vous avez vécu. » Anastase ,
quarante jours après la mort de Ze-
non, épousa Ariadne; Longin , écar-
té du trône , conjura avec plusieurs
chefs des Isauriens , dont quelques-
uns portaient le même nom que lui;
mais l'empereur le fit arrêter et con-
duire à Alexandrie . où on le força de
recevoir le sacerdoce, dont ses mœurs
infâmes auraient plutôt dû le faire éloi-
f;ner.Lcs conjurés , suivis de tous les
Isaures qu'on chassa de Constanti-
iiople , se réfugièrent en Isaurie , pri-
rent les armes , et saccagèrent la Phry-
gie ; ils y furent battus com])lètement ,
en 49a, par trois généraux d'Anastase,
nommés Jcan-lc-Scythe, .Tcan-!c-Bossu
ctDiogène; cependant cette guerre ne
finit qu'en /^[)'-j . ] / anuve ])récédente ,
le patriarche Eupheniius, que d'an-
ciennes liaisons avec les chefs des re-
belles , et plus encore ses principes
orthodoxes , rendaient odieux à Anas-
tase , vit deux fois ses jours menacés
par des assassins , et fut enfin déposé
et exilé. En 498 , les factions du
Cirque , connues sous les noms de
Verte , et de Rouge, et dont l'achar-
nement désola long-temps Constant i-
aiople , eurent une queielle si vive ,
qu'Anastase , qui s'était rang(' du côté
4^s Rouges, fiii sur le j)oiii1 d'être dé-
A iN A
trôné , et put la faiblesse de donner une
satisfaction publique à ses adversaires.
Un prince de ce caractère ne pouvait
intimider ses nombreux ennemis , et
les barbares désolaient toutes les pro-
vinces. Anastase, menacé au dehors,
ne s'occupait que de questions théolo-
giques , et portait, le trouble dans la
capitale et dans l'empire , en favorisant
les hérésies , et en versant à grands
flots le sang des Orthodoxes. Le pape
Symmaque, pressé par le clergé catho-
liqueJaDça,en 5oo, contre l'empereur,
la première excommunication dont m\
souverain ait été frappé. Cependant
Anastase , ému par les malheurs dont
l'empire était accablé, et dont son im-
péritie et ses capi'ices étaient les pre-
mières causes, s'attira tout à coup des
applaudissements universels , en sup-
primant le chrysargire , impôt odieux
qui se levait de cinq en cinq ans , et
dont la misère , les immondices et la
prostitution fournissaient une paiM. Il
fallait que cet impôt fut bien détesté ,
puisque les historiens disent que sa
suppression , en couvrant de gloire le
prince qui l'avait prononcée, suffit pour
faire pardonner ses plus grands crimes,
Anastase fit cesser aussi l'usage barbare
de livrer les coupables aux bêtes , et de
f lire , de ce supplice horrible , nu spec-
tacle pour le peuple. Cependant, de
nouvelles disgrâces all.iient fondre sur
l'empire. Cabades, roi de Perse, indi-
gné du refus qu'Anastase lui avait fait
de quelques secours dont il avait be-
soin pour soumettre les Nephtalites,
entra en Mésopotamie , à la tête d'une
pvii^sante armée , prit et saccagea Ami-
de, eu 5o'2, et, l'année suivante, battit,
l'un après l'autre , quatre généraux ro-
mains. Ils furent remplacés par Celer ,
qui força les Perses à la retraite, et
lenla de reprendre Amide ; ennuvé de
la longueur du siège , il la racheta à
prix d'argent. C'était avec ses trésors
AN A
qu'Anaslasc clefendait se^; états , moyen
honteux qui ne faisait qii^excitcr l'avi-
dité des barbares , et qui accroissait de
jour en jour l'avarice du prince , en
aiiîrmcntaDt ses besoins. Jl imagina
aussi de faire fermer, par une muraille
immense , la pointe de terre sur la-
quelle Coustantiuople est bâtie, de sorte
que les fertiles campagnes qui environ-
naient la capitale se trouvaient du
moins à l'abri des incursions. Anastase
forma, en Sog, quelques projets sur
l'Italie , et recliercba à cotte occasion
l'alliance de Clovis , roi des Francs ,
auquel il envoya le titre de consul.
L'empire se vit encore plongé di^ns
de nouvelles agitations , par l'impru-
dence d' Anastase , qui reprit, avec
une ardeur plus violente, les discus-
sions religieuses ; il persécuta , avec
acharnement , iMacéàonius , patriarche
de Constanîinople , et le fit remplacer
par Timotliée , eutychéen. Une sédi-
tion terrible épouvanta l'empereur ,
qui promit de favoriser les ortho-
doxes; mais, le danger passé, il re-
commença ses poursuites contre eux.
Vitalien , petit-fils du fameux Aspar ,
rasseralila les catholiques, et s'avança,
suivi d'une puissante armée; le sang
avait déjà coulé dans plus d'une sédi-
tion , occasionnée par les querelles re-
ligieuses ; mais ce fut la première guerre
dans les règles que la fureur humaine
entreprit au nom d'un Dieu de paix. Vi-
talien, triomphant, parut sous les murs
de Ccnstantinopîe. En vain un physi-
cien, nomméProclus, brûla, dit-on, ses
vaisseaux , au moyen d'un miroir ar-
dent ; doià le peuple , las d' Anastase ,
demandait à reconnaître Vitalien ; l'em-
pereur , tremblant , fit promptement
la pai'?, et pi-omit au vainqueur de sui-
vre ses volontés , pourvu qu'il s'éloi-
gnât. \ itahen y consentit, après avoir
exigé le rétablissement de Macédonius ,
et la convocation d'un concile; mais,
A N A g\
quand il eut posé les armes , Anastase.
viola encore une fois sa parole , et con-
tinua la persécution. Enfin , en 5 18 ,
la mort vint terminer ce long et dé-
plorable règne. Anastase , âgé de 88
ans , fui trouvé sans vie dans un sou-
terrain de son palais , oîi la crainte
d'un orage l'avait conduit. On crut que
la foudre l'avait frappe; mais, dans un
si grand âge, une mort naturelle a pu
l'atteindre avec non moins de rapi-
dité. Justin lui succéda. L — S — e.
ANASTASE II , empereur d'Orient,
n'eut point une naissance assez remar-
quable pour que l'Histoire eu ait fait
mention. L'extinction de la famille
d'Héraclius, dans la personne du se-
cond Justinien , et la déposition de
Philippique Bardanes, laissaient l'em-
pire d'Orient sans maître. Artémius,
scciétaire d'état, homme généralement
estimé, réunit les suffrages, et reçut
la couronne des mains du patri.uThe ,
le 4 ji'in 7i3, sous le nom d'Anas-
tase II. Le premier soin du nouvel
empereur fut de punir les auteurs de
l'attentat commis sur la peisonne de
Philippique. Les patrices George Bur-
gaphe et Théodore Myace,qni avaient
fait crever les yeux à Bardanes, subi-
rent le même supplice. Anastase les
envoya en exil à Thessalonique. L'or-
dre que ce prince apporta dans les fi-
nances, son amour poiu' le travail et.
la justice, rétablissaient l'empire, fati-
gué d'une longue tyrannie, et pou-
vaient le retenir sur le penchant d'^
sa ruine. Anastase était digne du trône ,
mais les Romains n'étaient plus dignes
d'iui tel empereur. Au commencement
de l'année 716, une sédition éclate sur
la flotte qu'il armait dans le port de
Rhodes, pour s'opposer aux progrès
des Sarrazins. Les mutins massacrent
le patrice Jean , leur général , et for-
cent Théodore, receveur des deniers,
à accepter le sceptre , et à marcher à
ni
AN A
leur tète vers Constantinople. Anas-
tase, re'i'iigie à Nice'e, se flattait d'op-
poser des forces aux rebelles ; mais la
prise de la capitale , et la défection de
ses troupes , lui firent perdre toute
espérance. Revêtu de l'habit monasti-
que , il se fit conduire à Théodose ,
qui lui laissa la vie. Suivant un usage
introduit dans ce temps, le prince dc-
])0sé fut ordonné prêtre, et relégué à
Thessaloiiique. Anastasc avait régné
deux ans et demi. Ce prince , si pru-
dent sur le trône , ne porta pas la même
sagesse dans son exil ; il ne put oublier
qu'il avait possédé l'empire, et ourdit
une trame pour recouvrer sa grandeur
passée. L'archevêque de Thessaloni-
que favorisait ses desseins; les Bul-
gares lui donnèrent un ass le ; ses in-
telligences s'étendaient jusque dans
le palais; Nicétas Xilonite, maître de
la milice , Isoës , commandant des
troupes de Mysie, Théognote, pre-
mier secrétaire d'état, Nicétas Autrax,
préfet de Constantiuople , tous ses
«•réatures, étaient prêts à remettre la
couronne sur la tête de leur bienfaiteur.
Léon lïl , risauricn , qui avait renversé
le faible Théodore, fut averti du com-
plot, et fit décapiter les quatre patri-
ces. Les Bulgares, intimidés par les
menaces de Léon , et séduits par son
or , livrèrent Anastasc et l'archevêque ;
amenés à Constautinople, tous deux
eurent la tête tranchée, en "j 19.
L— S— E.
ANASTASE, patriarche de Cons-
tantiuople, était de la secte des icono-
clastes. A force de bassesses et de
fourberies, il obtint, de l'empereur
Léon-1'Isaurien , d'être élevé sur le
çiége patriarchal; il avait été long-
temps syncelle, ou premier clerc du
patriarche Germain, prélat vénérable,
&uquel il ne cessa de susciter des
persécutions. Un jour qu'Anastasc
montait les drgics du palais, k la suite
ANA
du patriarche, il mit, par hasard, le
pied sur la robe de Geimain. « N'al-
» lez pas si vite, Anastase, lui dit-il,
» vous n'arriverezque trop tôt à l'hip-
» podrôme. » Ces mots furent regar-
dés comme une prophétie, que l'événe-
ment justifia. Lursqu'Anastase eut pris
la place de Germain , dépouillé de sa
dignité, le ■] janvier ySo, il s'aban-
donna sans réserve aux excès des
iconoclastes. L'avarice ayant porté
l'empereur à s'emparer des trésors de
l'Eglise, le complaisant prélat les livra
tous, et seconda la tyrannie et les per-
sécutions de ce prince. Ivéon étant
mort, en "j^i , Anastase, dans la vue
de conserver sa dignité, se prêta à
tous les caprices du sanguinaire Cons-
tantiu-Copronyme. L'année suivante ,
Artabase , Curopalate, et beau -frère
de l'empereur , se rendit maître de la
capitale ; le patriarche , facile à se
plier aux circonstances, et ingrat en-
vers ses bienfaiteurs, osa monter dans
la chaire sacrée , un crucifix à là
main, pour prêcher la rébellion. Le
châtiment ne tarda pas à s'appesantir
sur lui. Copronyme, devenu paisible
possesseur de la couronne , par la
défaite et la punition d'Artabase , fît
crever les yeux à Anastase. On le pro-
mena dans l'hippodrome , monté sur
un âne, et le AÎsagc tourné vers la
queue de cet animal. Il resta un jour
entier dans cet état , exposé aux in-
sultes de la populace; mais, après ce
traitement ignominieux, Constantin^
désespérant de trouver un prêtre qui
secondât ses fureurs, laissa Anastasc^
tout aveugle qu'il était, sur le siège
pati'iarchal, où il continua de déshono-
rer son ministère. Enfin, en 7 55, une
mort douloureuse en délivra l'Eglise
et l'empire. L — S — e.
AiN ASTASE ( LE BIBLIOTHÉC AIUE ) ^
célèbre et savant écrivain du ()".
siècle^ fut abbc d'un monastère de la
AN A
Vierge Marie, au-delà du Tibre, à
Rome, et bibliothécaire du Vatican. Il
assista , en 869 , au 8". concile ge'ne'-
ral, à Constautinople, où Photius fut
condamné. Ses connaissances, et le
talent qu'il avait de parler éloquem-
raent les langues grecque et latine, y
furent très-utiles aux légats du pape.
Il traduisit les actes de ce concile , du
grec eu latin, ainsi que ceux du -]'". ,
tenu dans le siècle précédent. La ])lu-
part des nombreux ouvrages qu'il a
laissés, sont des traductions sembla-
bles, qui sont regardées comme plus
fidèles qu'élégantes. Son Historia
ecclesiastica , sive chronographia
tripartita, imprimée à Paris, avec les
notes de Charles- Annib. Fabroti, à
l'imprimerie royale, 16^9, gr.in-fol.,
fait partie de> X Histoire Bysanline.
Ce qiu lui a donné le plus de célébrité,
c'est son Liber pontificalis , ou Re-
cueil des J^ies des Papes., depuis
S. Pierre jusqu'à Nicolas \". ; il fut
imprimé, pour la première fois , à
Maycuce, en iGo.i, in-4"., par les
soins du jésuite Busée. Il en a paru
deux éditions dans le dernier siècle ,
une en 4 vol. in-fol. , donnée par
François et Joseph Bianchini, i-j l8-
I735; une en 5 vol. in-4''., commen-
cée par l'abbé VignoH, en 1724? <^t
terminée en 1 n55 , sans parler de celle
que Muratori a insérée dans son grand
recueil Script, rer. ital. , vol. III , p. i ,
où elle est accompagnée de disserta-
lions savantes , écrites à différentes
époques . et par différents auteurs. Il
en résulte qu'Anastase ne fut point
proprement l'auteur , mais seulement
le rédacteur de ces Vies; qu'il les tira
des anciens catalogues des pontifes
romains, des actes des martyrs, et
d'autres mémoires , soigneusement
conservés dans les archives de l'Eglise
romaine ; qu'enfin , il n'a composé que
les Vies de quelques-uns des papes de
ANA ^ 9I
son temps, sans qii'U soit même possi-
ble d'en déterminer avec précision le
nombre , ni de reconnaître avec certi-
tude celles qui sont en effet de lui , les
auteurs de ces dissertations n'étant
pas d'accord sur ce point. On prétend
qu'il existe deux exemplaires de ces
Fies des Papes , de l'édition de 1 6o'i,
où l'on trouve l'histoire de la papesse
Jeanne. Les curieux peuvent consulter
à ce sujet David Bloudel ( Familier
éclaircissement , etc. , 1 649 , in • 8°. ) ,
et J. H. Boeder ( Bibl. critica. ) G— e.
ANASTASE f Olivier, de St.-), car-
me, dont le nom propre était deCrock,
vivait dans le 1 7^. siècle, se hvra à la
prédication, et mourut en 16-4» *
Bruxelles. Il reste de lui quelques ou-
vrages , dont les titres bizarres annon-
cent que, s'il réussissait dans la prédi-
cation, ce ne devait être qu'à la ma-
nière moitié pieuse, moitié burlesque
du fameux petit-père André : I. le Jar-
din spirituel des Carmes , émaillé
des vertus des Saints les plus célèbres
de ce saint ordre., comme d^ autant de
belles fleurs , et arrosé d'instructions
spirituelles , comme d'une agréable
rosée, 2 vol. in-12, Anvers, 16J9-
1661; II. le Combat spirituel d'a-
mour entre la mère de Dieu et les
serviteurs de l'ordre du mont Car-
mel , avec égal avantage des deux
côtés , Anvers 1 66 1 , in- 1 i ; III. apo-
logues moraux, traduits de S. Cy-
rille , et enrichis de petites Pièces da
poésies et de Conclusions, Anvers,
1669, in-i'^; IV. Pleias mystica
calculata ad meridia?nim desolati
Belgii, 1669, in-12; et d'autres ou-
vrages latins. N — L.
ANASTASE (le P. ). K Guicharo.
ANASTASIK. L'Église révère plu-
sieurs saintes de ce nom. Celle dont
la commémoration a lieu le 20 dé-
cembre, était d'une illustre famille de
Piome, et vivait au commencement du
f)4 A N A
4^ siècle.Les actes de S.Clirysogone,
qui fut son tuteur, et l'iustruisit dans
la foi, rapportent que , pendant la per-
sécution de Dioclclien , ce saint ayant
été arrête dans Aquilce, où il souffrit
ensuite le martyre, sa pieuse pupille
alla le rejoindre pour lui donner ses
secours. En 3o4, selon les mêmesactes,
auxquels on n'accorde que peu d'auto-
rite , elle fut brûlée vive, par ordre du
préfet d'IUyrie. Ses cendres furent por-
tées à Rome , et déposées dans l'église
qui porte son nom. Les actes de la sain-
te, par Meta pbraste, lui donnent pour
époux un ])aien nommé Publius, et ajou-
tent d'autres détails qu'on n'insère
point ici, parce que ces actes n'inspirent
aucune confiance, — Une autre Anas-
TASiE, ou Anastase, surnommée r^/i-
cienne, fut martyrisée à Sirmicb , et
l'Église l'bonore également le u5 dé-
cembre ; mais on n'a aucuns détails, ni
sur sa vie, ni sur l'époque précise où
elle vivait. Ses reliques , transportées
à Constantinople , restèrent quelque
temps dans l'église dite Auastasis , ou
de la Résut rection , d'où on les plaça
dans celle de Ste.-Sopbic; mais elle
n'y était plus , lorsqu'en 1 453, les
Turks s'emparèrent de la capitale de
l'enqjire d'Orient. — Enfin , une troi-
sième Anastasie, d'une famille illus-
tre de Rome, fut instruite-dans la re-
ligion cbrétienne, par S. Pierre et S.
Paul, ainsi que Stc.-Basilisse, son amie.
Toutes deux , selon les martyrologes
grecs et latins, eurent la tète trancbée
par ordre de Néron. L'Église fait leur
commémoration le 1 5 avril. D — t.
ANATOLICS, d'Alexandrie, flo-
rissait vers l'an Vi-jo avant J.-C. , et
ressuscita la pbilosopbie péripatéti-
cienne, que l'école de Plotin avait fait
abandonner. Né de parents chrétiens,
il fut porté, ])ar ses succès, à l'évèche'
de Laodicée. Il composa plusieurs ou-
vr.igfs , entre uutui dis livres ^Imi'v-
AN A
tulions arithnéiiques , dontFabricius
nous a conservé des fragments dans le
2". vol. de sa Bibliothèque grecque.
Nous avons encore de lui un Traité
sur le temps de celé hier la Pdque ,
publié en latin par jEgidius Bucberius,
dans sa Doctrina Icmponnn , Anvers ,
iG54 , in-fol. Ou ne doit point con-
fondre l'évêque de Laodicée avec un
autre Anatolius, philosophe platoni-
cien , l'un des maîtres de Jamhiique,-
et auteur d'un Traité sur les Sympa-
thies et les Antipathies^ dont on trouve
des fragments au tome IV de l'ouvrage
pré-cité de Fabricius. D. L.
ANATOLIUS, jurisconsulte, était
fils de Lcontius , et petit-fils d'Eu-
doxius, qui avaient, l'un et l'autre,
consacré leur vie à l'étude des lois , et
vécut du temps de Justinicn. D'abord
professeur en droit à Beryte, ville de
Phénicie , il devint successivement
avocat du préfet du prétoire , avocat
du fisc, juge pedané, ou des affaires
sommaires , et parvint enfin à la di-
gnité de consul. Justiuien, dans sa
Novelle Si , l'appelle vir spectahilis.
Il paraît qu'il fut un des jurisconsultes
emplovés et choisis par lui pour la
compilation du Digeste. On a accusé
Anatolius d'avoir abusé de sa place de
consul, et de s'être enrichi par ses
concussions. Si l'on en croit Agathias ,
historien contemporain , ce juriscon-
sulte périt dans un tremblement de
terre , frappé par un bloc de maibre
qui se détacha de la corniche de la
chambre où il couchait. Ce même his-
torien prétend que le peuple, en sui-
vant son convoi, trouvait que cette
mort était un effet de la justice divine,
en punition de ce qu'il avait dépouillé
plusieurs personnes de leurs biens. —
Un autre Anatolivs , jurisconsulte
grec, fut un des trois par lesquels
l'empereur Phocas fil traduire le Code
Jusùnien. M — x.
AN A
ANAXAGORAS , de la secte Toni-
que , fils d'He'gésii)a!iis , naquit à Cla-
zomène , la première année de la 'j o"".
olympiade , 5oo av. J.-C. Ses parents
étaient puissants et riches; mais il
leur abandonna le soin de ses biens ,
pour se livrer à l'étude de la pliiloso-
pliie , sous Anaxiinène de iVIilet. A vinf:;t
ans , il entreprit de voyager pour s'ins-
truire , visita l'Egypte, tous les peu-
ples qui cultivaient les sciences, et fut,
pendant près de vingt autres années,
absent de sa patrie. Il revint ensuite
s'établir à Athènes, où Périciès s'était
mis à la tcte des affaires publiques. Il
se lia particulièrement avec ce grand -
homme , et compta bientôt parmi ses
disciples les citoyens les plus célè-
bres , tels qu'Archelaiis et le poète
Euripide. L'étude approfondie qu'il
avait faite de la science de la nature,
le mettait en état d'assigner des causes
physiques à la plupart des phénomè-
nes que le peuple regardait comme un
elTct de la colère des Dieux , tels que
les éclipses , les trorablemenls de terre.
Il s'expliquait librement sur ces per-
turbations instantanées de l'ordre im-
muable des choses, et, quoiqu'il ad-
mît , sans équivoque , une Cause in-
telligente , créatrice de l'univers , les
gens superstitieux criaient souvent à
l'impiété, en l'entendant débiter ses le-
çons. Le grand crédit de Périciès le
soutint long-temps contre la malveil-
lance publique; mais, enfin, les fu-
nestes suites de la guerre du Pélopon-
nèse ayant exaspéré les esprits , on
s'en prit aux favoris du chef. Giéon ,
démagogue emporté, iutenta, contre
Anaxagoras, une accusation publique;
et le plus religieux peut-être des phi-
losophes, dit ['auteur d'^ïnarchanis,
fut traduit en justice pour crime d'im-
piété. Diodore de Sicile nous apprend
q^ie ce fut la seconde année de la 87".
olympiade. Les opinions sont Itcs-
AN A f,5
partagées sur les suites de cette accu-
sation. Les uns , mais en petit nombre ,
prétendent qu'il fut absous; d'autres,
qu'il prit la fuite avant la fin de son
jugement; d'autres, qu'il fut condam-
né au bannissement et à une amende
de cinq talents; d'auties , enfin, lui
fontinfîigerla peine deraort. Quoi qu'il
en soit , il est certain qu'à cette époque,
Anaxagoras sortit d'Athènes . et qu'il
futs'établir à Lampsaque, oîi il termina
ses jours , trois ans après, âgé de 72
ans. L'anniversaire de sa mort fut,
d'après sa demande, un jour de va-
cance pour les écoliers de la ville. On
rapporte que , ses amis lui ayant de-
mandé s'il voulait que ses cendres fus-
sent transportées dans sa patrie : « Ce
» serait prendre une peine inutile ,
» répondit-il , le chemin des enfers
» est partout le même.» Anaxagoras,
conformémentàrasiome que rien nese
produitde rien, admettait, pour princi-
pe unique etmuiliple des corps, des es-
pèces d'atomes, qu'il nommait ffomœ-
omeries , ou parties similaires, c'est-
à-dire, de même nature que les corps
qu'elles devaient former. Ces atomes,
par eux-mêmes dépourvus de la fa-
culté de se mouvoir , avaient été, dans
le commencement , mis en mouvement
par un autre pria, ipe co-élernel , dis-
tinct de la matière, VEsfril, qu'il ap—
pelait Nous j ce qui lui fit donner, à
lui-même, le surnom de xVoiw. Ainsi
s'était formé l'univers, dont les corps
terrestres , comme plus pesants , oc-
cupaient les parties inférieures, tandis
que l'étber , ou le feu , se trouvait dis-
séminé dans les parties supérieures.
Cependant Anaxagoras croyait les as-
tres de nature terrestre, et le soleil,
entre autres , une masse de pierre in-
candescente, plus grande que le Pélo-
ponnèse. La voie lactée n'était, suiv.int
li'.i , demèmequerarc-en-ciel, qu'une
réfies ion de la iumière solaire. La terre
%^
AN A
cfait plane; la lune, nn corps opa-
que, habitable, empruntant sa lumière
du soleil; les comètes, des astres er-
rauts. Enfin, par un de ces sopliismes
si commuas aux philosophes de l'an-
tiquitë, Anaxogaras niait que la neige
fût blanche , et soutenait qu'elle était
noire , parce que telle est , disait-il , la
couleur de l'ean , dont la neige n'est
qu'une modalité. — On compte , outre
le suivant, deux autres Anaxagoras :
l'un, disciple d'Isocrate , fut orateur;
l'autre, grammairien, disciple de Zé-
Dodotc. D. L.
AN AX AGORAS , sculpteur , ne à
Egine , fut chargé de faire la statue
de Jupiter que les Grecs élevèrent à
Élis , après la bataille de Platée , 49'^
ans avant J.-G. A l'imitation d'Aga-
tharque , il écrivit sur les décorations
de théâtre, et l'on ne pent douter ,
d'après le passage où Vitruve parle
de cet ouvrage, que les principales
rglcs de la perspective n'y fussent
expliquées. L — S — e.
AISAXANDRIDES, fils de Léon ,
de la i'". branche des rois de Sparte,
monta sur le trône , vers l'an 53o av.
J.-C. Il avait épousé une femme qu'il
aimait beaucoup ; mais comme, après
plusieurs années de mariage , il n'en
avait point d'enfants , les éphores lui
représentèrent que, pour ne pas laisser
éteindre la raced'Eurysthènes, il fallait
qu'il répudiât sa femme , et eu prît
une autre. Il ne voulut pas y consen-
tir ; alors , les éphores et le sénat, s'é-
tant consultés , lui dirent que , puis-
^u'd ne pouvait se déterminer à ren-
voyer celle-là , il fallait tout au moins
qu'il en prît une seconde , dont il pût
avoir des enfants. Il le fit , et eut
ainsi deux femmes à la fois , contre
l'usage , non .seulement de Sparte ,
niais même de toute la Grèce. 11 eut, de
cette seconde femme, Cléoracnes,qui
lui succéda. Peu de temps aprèis ,, la
AN A
première , après tant d'années de sté-
rilité, lui donna un fils, Doriéus, et
ensuite deux autres , Gléombrote et
Léonidas. Il ne se passa rien de mé-
morable sous son règne. Il mourut
l'an 5i5 avant J,-C. G — r.
ANAXANDRIDES , poète comi-
que , né à Rhodes , ou à Colophon ,
vivait du temps de Philippe , roi de
Macédoine. Suidas dit qu'il fut le pre-
mier qui représenta sur la scène les
malheurs que l'amour cause aux jeunes
filles , ( et non , comme l'ont dit quel-
ques biographes, les intrigues d'amour,
déjà connues sur la scène grecque. )
L'innovation introduite par Anaxan-
drides, consista en ccqu'il donna plus
d'étendue et d'importance aux rôles
àî amoureuses. 11 était opulent , et af-
fectait une grande magnificence. On
dit même qu'un jour, étant à Athènes,
il récita une de ses pièces, monté sur
un cheval. Il avait plus de verve que
de correction ; et , quoiqu'il fôt très-
affligé d'un mauvais succès , jamais il
ne prenait la peine de retoucher ses
ouvrages. Dans sa vieillesse , il en dé-
truisit plusieurs. Sa mort fut malheu-
reuse. Euripide avait dit, dans une de
ses tragédies : « La nature le voulait
» ainsi , elle qui n'écoute point les
» lois.» Anaxandrides parodia ce vers,
en substituant seulement les mots : la
ville ^ A ceux de la nature. On n'était
plus au temps d'Aristophanes : les
Athéniens permettaient bien encore
qu'on prît les plus grandes libertés à
l'égard des particuliers , mais ils ne
souffraient plus les critiques contre
l'état. Ils condamnèrent Anaxandrides
à mourir de faim. Athénée fait men-
tion d'une Odyssée .1 composée par
ce poète , et Aristote , dans sa Bhé-
torique , cite quelques-unes de sc>
comédies. Platon fut un de ceux qui
excitèrent la verve satirique d'Anax.n
dridcs. D — t.
ANA
ANAXARQUE , philosoplie de la
secte Éleatiqiie , était natif d'Abdères ,
et fut disciple de Diornènes de Smyr-
ne , ou , selon d'autres , de Me'trodore
de Cliios , tous deux, de l'exole de Dé-
mocrite. Appelé' auprès d'Alexandrc-
le-Graud, Anaxarque le suivit dans
toutes ses expe'ditions , et lui parla
toujours avec une entière liberté'. Le
monarque , un jour , s'était blesse :
« C'est bien là du sang liumain, dit
» Anaxarque, en montrant du doigt la
» blessure, et non du sang des dieux. »
Lorsque Alexandre s'enorgueillissait
d'avoir asservi sous ses lois tant de
peuples divers, Anaxarque lui faisait
ronsidc'rer les cieux, où gravitent une
infinité de mondes , semblables à celui
dont il n^avait pu seulement achever
la conquête. C'était ainsi que, par des
leçons puisées dans l'étude de la na-
ture, le philosophe instruisait le con-
quérant, modérait la fougue de ses
passions, dissipait les rêves de son
ambition , et le ramenait souvent à
des sentiments plus raisonnables. La
conduite d'Anaxarque dut nécessaire-
ment lui susciter beaucoup d'ennemis.
Les courtisans d'Alexandre, et le phi-
losophe Callisthcnes lui-même, lui
vouèrent une haine implacable , qui
fut la source de toutes les calomnies
qu'ont débitées contre lui les péripaté-
ticicns. Satyrus, Cléarque, Hermippus,
Athénée, Diogène Laërce, l'ont peint
sous les couleurs les plus odieuses, et
lui prêtent la même fin qu'à Zenon
d'Elée. Ils prétendent qu'après la moit
d'Alexandre , Anaxarque tomba entre
les mains de Nicocréon , tyran de Chy-
pre , dont il s'était attiré la haine , et
que ce dernier le fit piler dans un
mortier. Quoi qu'il en soit, ce philo-
sophe était digne d'un meilleur sort. II
faisait consister le souverain bien dans
la vertu , et pensait que le vrai sage
doit trouver son bonheur en lui-même ,
II.
ANA 97
indépendamment des objets extérieurs ;
ce qui lui fit donner le surnom (VEw
dœmonicos (qui rend heureux). On
trouvera, sur l'histoire d'Anaxarque,
des détails intéressants , dans l'ouvrage
de IM. de Luzac, intitulé Lecliones
Atlicœ, Leyde, 1809, in -4". D. L.
ANAXILAS P'-. , roi de Rhégium ,
descendait, à la quatrième génération,
d'^Vlcidamidas , Messcnien. Après la
prise d'Ira , vers l'an 625 av. J.-C, il
attira à Rhégium une partie des Mes-
séniens , qui ne voulurent pas se sou-
mettre aux Lacédémoniens , ce qui
rendit sa capitale très- florissante. On
l'a souvent confondu, mal-à- propos,
avec le suivant. C~r.
ANAXILAS II , fils de Crétinéus ,
et descendant du précédent , monta
sur le trône , à Rhégium , l'an 494 av.
J.-C. Il fut célèbre par sa modération
et son amour pour sa patrie. Il chassa
de Zancle les Samiens , qui s'en étaient
emparés, l'an 497 ^^* J-"C.; il y con-
duisit une colonie , et donna à cette
ville le nom de Messine, en mémoire
de la patrie de ses ancêtres. Hérodote
débite plusieurs contes sur Anaxilasj
il prétend que ce fut lui qui détermina
les Samiens à s'emparer de Zancle,
tandis qu'il n'était pas encore sur le
trône lorsque les Samiens vinrent en
Sicile. Il ajoute, d'après les Siciliens,
qu'il engagea les Carthaginois à faire
la guerre à Gélon et à Théron , pour
venger Terillus , son beau-père, que
Théron avait chassé d'iiimire, oii il
était tyran. Pausanias a aussi commis
plusieurs erreurs à son sujet , en le
confondant avec le précédent. 11 mou-
rut l'an 476 av. J.-C, et laissa plu-
sieurs enfants en bas âge , sous la tu-
telle de Micythus, son esclave. C — r.
ANAXILAS , de Larisse, philoso-
phe pythagoricien , vivait à Rome sous
le règne d'Auguste. Il s'adonna particu-
lièrement à k médecine, à l'étude des
î)8 A K A
merveilles de la nature , et consigna le
fruit de ses reclierches dans un ouvrage
intitulé : na.l-(ny. , cite par Irénée et par
Epipliane. Pline nous a conserve trois
de ses expériences , dont deux peuvent
être reléguées parmi les fables. Il en -
veloppait un arbre d'un voile d'a-
miante, et parvenait à l'abattre, sans
que l'on entendît les coups qu'd lui
portait. Eu brûlant dans une lampe
la liqueur que les cavales laissent écou-
ler pendant le co'it , il faisait apparaître
aux spectateurs des tètes de chevaux
monstrueuses. Enfin , il fut l'inventeur
de ce que nous nommons Flambeau
infernal , dont il produisait l'effet en
brûlant du soufre dans un lieu privé
de lumière. Ses recherches lui devin-
rent fatales ; il fut accusé de magie , et
banni par ordre d'Auguste. D. L.
ANAXEVIANDRE, fds de Praxia-
<les , fut le disciple et le successeur de
Thaïes , fondateur de la secte Ionique.
Comme son maître, il naquit à Milet,
Ja 5^ année de la 4'^". olympiade, 6 1 o
ans av. J.-C. La seule circonstance de
sa \ie qui nous soit parvenue, est
qu'il fut chargé de conduire la colo-
nie Milésienue fondatrice d'ApoJlo-
nie , sur les bords du Pont - Euxin.
Ana\.imandre se livra particulièrement
à l'étude des sciences mathématiques.
Le premier , il découvrit , ou , du
moins , fit connaître aux Grecs l'obli-
quité de l'échptique , et parvint à
déterminer l'observation plus exacte
des solstices et des équinoxes , par le
moyen d'une espèce de gnomon , dont
il fit l'essai à Lacédémone. Le pre-
mier encore , il traça des figures de
géométrie , pour rendre sensibles aux
veux, les principes de celte science. 11
essaya de décrire , sm- un globe , les
contours de la terre et des mers , au-
tant que le permettait l'état d'imper-
fection des connaissances géographi-
ques f et construisit une sphère céleste,
A N A
au moyen de laquelle il expliquait a
ses disciples le système du Monde.
Toutes ces assertions , néanmoins, ne
sont pas rigoureusement prouvées.
Quant aux opinions d'Auaximaudre ,
il regardait l'Infini ( Àîvetf wv ), comme
le principe de toutes choses , sans
toutefois déterminer la nature de ce
principe, éternel, incorruptible, qui
engendre et absorbe tout , dont les
parties sont mobiles , et reusemble ,
immuable. Les mondes , selon lui, sont
en nombre infini , et se résolvent
dans le principe universel. Les Dieux
naissent et meurent à de longs inter-
valles. I^e ciel est un composé de Iroid
et de chaud ; les astres , d'air et de
feu. Le soleil est au plus haut des
cieuxj il a la forme d'une roue, dont
la circonférence est vingt-huit fois plus
grande que celle de la terre. C'est par
le moyeu de cette roue que s'échap-
pent les torrents de feu qui produi-
sent la lumière. Si le trou vient à
s'obstruer , l'astre est éclipse. La lune
est une autre roue, dont l'obliquité
produit les phases, et la conversion
totale , les éclipses : elle n'a que dix-
neuf fois la grosseur de la terre. Le
veut , comprimé danj les nues , pro-
duit la foudre et les tonnerres. La terre
a la forme d'une colonne j elle occu[>e
le centre de l'univers, et voilà pour-
quoi elle demeure suspendue sans
tomber. Telles sont les opinions que
Plutarque prête au disciple de Thaïes.
Celles que lui donne Diogène-Laërce
en dilïêrcnt un peu. ApoUodorc nous
apprend qu'Anaximandre mourut peu
de temps après la 2*. année de la
58". olympiade , âgé d'environ 64
ans. Il avait été contemporain de
Polycratc , tvran de Samos. D. L.
AN AXl MÈNES, fils d'Euiystrate .
fut le compatriote , le disciple et le
successeur d'Anaximandre de Milet ,
dans la secte lonicjue. Ouelques-nus
AN A
Vf uleut qu'il ait aussi suivi les leçons
de Farmcnide. Pline lui attribue l'in-
vention du gnomon , dont d'autres
font honneur à son maître. Nous
avons, sous son nom , deux Lettres à
Pvthat^ore , dans l'une desquelles il
déplore la fiu tragique de Thaïes. Ses
disciples les plus célèbres furent
Anaxa'j;ore et Diogène - l'Apolloniate.
Anaxiniènes florisjait vers la 56"^.
olvmpiade; il est donc évident qu'A-
poUodore et i>aërce se sont trompés
en fixant sa mort à l'époque de la
prise de Sardes : tout porte à croire
qu'ils ont voulu parler de la prise
d'Athènes par les Perses , arrivée l'an
480 av. J.-C Lps opinions d'Anaxi-
mènes différent de celles de son maî-
tre. Il regardait r^iV comme le prin-
cipe de toutes choses ; principe divin ,
éternel , infini , toujours en mouve-
ment. Suivant lui , la couche extérieure
du ciel est composée de terre ; les
étoiles sont des corps pyro-terrestres,
soutenus par la force cxpansive de
l'air. Le soleil est plat comme une
lame ; c'est son cours seul qui déter-
mine les saisons. La terre, également,
est plate et soutenue par l'air. De ce
dernier élément sont nés tous les au-
tres; en lui se résolvent tous les corps.
D. L.
ANâXIMENES , natif de Lamp-
saque , fut un des historiens les plus
estimés de l'antiquité ; mais son ou-
vi'age est perdu. Il contenait, en 12
livres , l'histoire de la Grèce, et celle
des Barbares, depuis la naissance du
genre humain , jusqu'à la moi t d'Épa-
minondas. Ennemi de Théopompe ,
Ana:(imènes avait contrefait son style ,
et , si l'on en croit Pausanias , s'était
servi de son nom , pour dénigrer les
Athéniens , les Thébains et les Spar-
tiates, afin de détruire la réputation
de son rival. Il fut choisi, par Phi-
Lppe de Macédoine , pour enseigner
A N A 99
les belles lettres à son fils , et suivit ,
dans plusieurs expénitions, le vain-
queur de l'Asie. Son adresse sauva sa
patrie de la colère du conquérant. Ir-
rité de ce que les habitants de Lamp-
saque avaient embrassé le parti de Da-
lius , Alexandre voulait détruire cette
ville, et, prévoyant les sollicitations
d'Anaximcncs , il avait particulière-
ment juré de faire le contraire de ce
que lui demander .il son maître. « Je
» viens te supplier, seigneur, lui dit
» celui - ci , d'anéantir la coupable
» La rap saque. » Lié par son propre
serment , Alexandre fi:t obligé de par-
donner Anaximènes avait écrit la Vie
de ce héros , et celle de son père ; mais
le temps ne les a pas plus épargnées
que ses autres ouvrages. D. L.
ANaYA MALDÔNADO (Don
Diego ) , archevêque de Séville et de
Tarsis, naquit à Salamanque, vers le
milieu du 1 4*". siècle : les noms d'Anaya
et de Maldonado, qu'il portait, appar-
tiennent à deux maisons du premier
rang delà noblesse d'Espagne, et qui,
réunies par des alliances multipUées,
subsistent encore aujourd'hui, sous les
titres de comtes de Villagonzalo , mar-
quis de l'Escale , et de comtes d'Ha-
blitas. Don Diego fut précepteur des
enfants de Jean I"., roi de Castille,
et il était évêquede Salamanque, lors-
que le schisme de l'égîise fut poussé à
son comble. Le fameux Pierre de Luna
était reconnu par les rois d'Espagne et
de France. Fort de ce double appui ,
rien n'était capable de le faire céder.
Don Diego fut envoyé auprès de lui, à
Avignon , pour lui confirmer l'obéis-
sance du roi d'Espagne , avec deux
autres ambassad< urs. A son retour il
fut élevé à la première dignité de la
monarchie , ceÛe de président de Cas-
tille, et, bientôt après , il se rendit au
concile de Constance, en qualité d'am-
bassadear, avec Martin Fernaudez de
100 AT^A
Cordoue. Ce fat dans ce concile qu'eu-
rent lieu de vives contestations sur la
préséance entre les représentants des
différentes puissances. L'ambassadeur
du duc de Bourgogne voulut disputer
le siège d'honneur à celui de Castille ,
qui s'y oppos.iitavec trop de modéra-
tion, au gre de l'evêque Anaya, Celui-
ci, s'etant mis entre les deux préten-
dants, écarta brusquement l'envoyé de
Bourgogne , et , se tournant vers son
collègue : « Comme prêtre , lui dit-il ,
» j'ai fait plus que je ne devais; à pré-
» sent , c'est à vous , comme gcntil-
» homme, à faire ce que je ne puis. »
Nomme à l'evcché de Salamanca, dès
1 4o I , Anaya exécuta le projet de fon-
der dans cette ville un collège destine à
l'enseignement gratuit , et il consacra
à cet établissement presque toute sa
fortune ; rien ne fut épargne pour l'en-
richir et le consolider. Il obtint du
pape et de son souverain les approba-
tions nécessaires. Ce collège , sous le
nom de Si.-Barthelemi-le-Vieux , a
subsiste avec le plus grand éclat, jus-
qu'à nos jours. Il fut le premier, de ce
genre , en Europe. Ce généreux exem-
ple fut imite , dans la suite, par quel-
ques autres prélats. Le connétable Al-
varo de Luna suscita des tracasseries
à Don Diego, au sujet de ses relations
avec le pape Pierre de Luna , et le fit
suspendre de ses fonctions, pour faire
place à Don Juan de Cerezucla , son
frère utérin. Le souverain pontife eut la
faiblesse de consentir à dépouiller in-
justement cet évêque respectable, pour
complaire au ministre tout-puissant
d'un souverain qu'il voulait ménager;
mais Don Diego Anaya ne tarda pas à
être rétabli sur son siège. Il mourut,
vers le milieu du 1 5*". siècle , avec la
réputation d'un protecteur éclairé des
sciences et des lettres. Ruiz de Vergara
a écrit , en espagnol , la Vie de cet il-
lustre prélat. J. B. E — d.
ANC
ANAYA (Don Pedro ), amiral.
T^oy. Annaya.
ÂNCARANO (Pierre-Jean), ju-
risconsulte et poète italien , né à Reg-
gio, florissait vers le milieu du 16".
siècle. Il publia un livre de droit en
deux parties , sous le titre de Fami-
liaiium juris Qitœstiojwm, etc., Ve-
nise , 1 569 , in-8". 11 parut six de ses
sonnets dans la première édition du
poëme de IMolza, intitulé: Ninfa Ti-
htTina (la Nymphe du Tibre). Il y en
a deux autres à la louange du phénix ,
joints au poëme de la Fenice, de Tito
Scandiancse , qui lui dédia cet ouvrage,
Venise, i55y, et l'on voit, par son
épître dédicatoire, que c'était Anca-
rano lui-même qui l'avait engagé à
traiter ce sujet. G — e'.
ANCARANO (Gaspard), prêtre
et poète de Bassano, fit imprimer, en
1 587 , à Venise , un recueil intitulé :
Capitoli e Canzoni spiriluali sopra
il Pater noster, yive Maria, Credo,
Salve Begina , e Magnificat , etc. ,
in-4'. Quelques gens simples, ne sa-
chant pas que les canzoni italiennes
sont des odes , et non pas des chan-
sons, ou des cantiques, ont comparé
ce poète très-grave à notre abbé Pcl-
legiin. Gaspard Ancarauo a aussi
publié les Sette Salmi penilenziali ,
latini e volgari, in ottava rima j
accompagnés de quelques autres poé-
sies spirituelles , Venise , chez les
Juntes, i588, in-4". Ou a encore de
lui d'autres ouvrages du même genre,
où il y a beaucoup de piété, et qui ne
sont pas dépourvus de poésie.
G— E.
ANCHARANO ( Pierre d' ). né, vers
i33o, à Bologne, de l'illustre famille
des Farnèses , joignit le talent de l'é-
loquence, la connaissance de la phi-
losophie, et celle des aflaires, à un
profond savoir dans le droit, qu'il
ayait «tudié sous Balde. Sou mûite le
ANC
tendit utile à sa patrie, et lui procura
une grande considération dans toute
l'Italie. Ancliarano professa le droit à
Padoue , à Bologne , à Sienne et à
Feirare , parut avec distinction au
concile de Pise , dont il soutint vigou-
reusement la légitimité contre les am-
bassadeurs de Robert de Bavière,
prouva que ce concile pouvait procé-
der contre Grégoii eXlI et Benoît XIII,
et mourut , dans sa patrie , en 1 4 i o >
selon les uns, et en i4^7i selon les
autres. Quant à la date de i497i
marquée dans son épitaphe, elle n'est
pas souteuable, à moins qu'on ne
veuille le fiiire vivre bien au-delà d'mi
siècle. On a de lui des Commefitaires
sur les D êcrétrti es , Bologne , i58i,
in-fol.; sur les Clémentines , Lyon,
1 54q et 1 555 ; sur le Digeste, Franc-
fort, i58i; des Consilia juris , avec
les additions de Zancbius , Venise ,
1 568, et d'autres ouvrages du même
genre. Son é])itaplic le qualifie de
Juris canonici spéculum, et cii'ilis
arichora. T — d.
ANCH AR ANO ( Jacquesd' ), nommé
plus souvent, dans les Dictionnaires,
Jacques Palladijio, et aussi Jacques de
Teramo ou Theramo. ( 7^^. Teramo.)
ANCl]ER(PiERrxE-KoFOD).ll a oc-
cupé plusieurs postes importants dans
l'administration du Danemarck. Vers
la fin du 1 8'". siècle , il eut le titre de
conseiller de conférence. On a de lui
une Histoire de la législation da-
noise , depuis le roi Harald Bld-
iand , jusquau roi Christian F ,
Copenbague, 1769, 3 vol. in-8"., en
danois: c'est un ouvrage plein d'une
grande érudition bistorique , et digue
d'être extrait par un jurisconsulte pbi-
losopbe. Kofod Ancher a publié beau-
coup d'ouvrages élémentaires sur le
droit civil et criminel du Danemarck ,
qui dillère du di-oit romain en plusieurs
points importants. M — B — n.
ANC ^or
ANCHÈRES (Damel d' }, né à
Verdun , à la fin du 1 6''. siècle , était
jeune encore quand il fit imprimer ,
en 1 608 , à Paris , chez Jean Micard ,
une tragédie, avec des chœurs, inti-
tulée : Tyr et Sidon, ou les Fuiiestes
amours de Belcar et Méliane. Cette
pièce fait partie de son Becueil de
poésies diverses. On sait très-peu
de particularités de sa vie : il était
gentilhomme , et peut-être était-il at-
taché à la personne de Jacques P''.,
qu'il suivit en Angleterre. Beauchamp
fait mention de cet auteur dans ses
Becherches sur le Théâtre français ,
tome II, page 14, de l'édition in-8".,
mais ce qu'il en dit est assez peu satis-
faisant. La Vallière, dans sa Bibl. du
Th. Français , tom. l""'. , pag. 4^8 ,
donne un extrait assez étendu de la
tragédie d'Anchcres. D. Cal met l'a
oublié dans sa Bibliothèque de Lor-
raine. W — s.
ANCHERSEN ( Pierre ), profes-
seur au gymnase d'Odcnsé en Fionic,
île danoise, a vécu dans la prciuièie
moitié du 18''. siècle. C'était un des
hommes les plus érudifs de sa nation.
Quoiqu'il ne possédât pas la profOude
critique d'un Langcbck, d'un Sulem,
d'un Schœning , ces savants, qui l'ont
éclipsé, le citent avec estime. On a de
lui: I. Origines Z^an/ccP , Hafniae ,
1 -^47 ) in-4"- y II- Porva Cimbrorum
cii' ii as, ihid., 1746, in-4"-; IH- -O^
Sucifis, ibid., 1746, in-4". 5 IV.ZTer^
thedal , ou la f^allée de Hertha ,
ibid. , 1 745 ; V. De solduriis , ibid. ,
1734, et plusieurs autres ouvrages
historiques et littéraires , recueillis
en parfie dans ses Opuscula minora^
édita à G. Oebichs , Brème , 17 "5,
3 vol. in-4"-, ^"'i' "^ f'*"t plus con-
sidérer comme des modèles, mais qui^
à l'époque de leur publication, avaient
le mérite d'exciter les jeunes gens à ce
genre de recherches. M— B — y.
I03 ANC
ANCHIETA (Joseph d' ) , mission-
naire portugais , surnomme V Apôtre
du 1\ ouveau-Monde , naquit, en 1 555,
dans l'île de Ténériffe , de parents
nobles et riches , reçut une éducation
brillante , entra, à 17 ans, dans l'or-
dre des jésuites, et , animé d'un grand
zèle pour la propagation de la foi ,
partit pour le Brésil , en 1555, avec
don Edouard d'Acosta , second gou-
verneur-général , etsixautres religieux
de son ordre. Il fonda , à Piratiniu-
gua, à la suite de longs et pénibles
travaux , le premier collège du Brésil,
pour avancer la conversion et la civi-
lisation des sauvages de cette con-
frée. Les jésuites donnèrent à ce col-
lège le nom de St. -Paul , qui s'éten-
dit ensuite à la ville qui y fut bâtie.
il Ici , dit-il , dans une de ses lettres
» à S. Ignace de Loyola , nous som-
» mes quelquefois plus de vingt dans
« une hutte grossièrement construite
» en terre, couverte de paille , n'ayant
» que 1 4 pas de long et i o de large.
» C'est l'école , l'infirmerie , le dor-
» toir, le réfectoire et la cuisine. »
Les sauvages du Brésil et les créoles
portugais vinrent en foule se mettre
sous la direction d'Anchieta , qui leur
enseignait le latin , et apprenait d'eux
la langue du pays. Le ])remier , il en
composa une gi-ammaire et un voca-
bulaire. Travaillant jokU" et nuit , il
était tout pour ces nouveaux fidèles.
« Je sers , écrivait-il, de médecin et
» de barbier , traitant et saignant les
» Indiens malades. » Ces conversions
étant regardées par les colons portu-
gais de St. -André, comme nuisibles à
leurs intérêts, en ce qu'elles tendaient
à détruire res(>,!avage ; ils se réunirent
pour attaquer l'établissement de Pi-
f atiningua ; mais Anehieta fit prendre
les armes aux nouveaux convertis , et
repoussa les assaillan's. Son influence
augmenta sous le gouvernement de
ANC
Memdesa ; et, soutenu par ce gou-
verneur-général, il parcourut les ca-
pitaineries du Brésil , et s'efforça de
détruire l'anthropophagie parmi les
tribus sauvages. Durant la longue et
malheureuse guerredcs Portugais con-
tre les Tamovos, Anehieta, compagnon
fidèle du célèbre Nobrega , prêcha eu
chaire et sur les places pubUques des
villes nouvellement fondées , que les
Bré'-iliens avaient parfont l'avantage,
parce que le droit et la justice étaient
de leur côté , et qu'ainsi Dieu les
protégeait visiblement : « Vous les
» avez attaqués , disait-il aux Por-
» tugais , au mépris des traites ; vous
)) les avez faits esclaves contre le droit
» de la nature et des gens ; vous avez
» souffert que vos alliés dévorassent
» leurs prisonniers , etc. » A la fin,
les malheurs de cette guerre détermi-
nèrent Anehieta et Nobrega, de con-
cert avec le gouverneur-général, à aller
se metti'e entre les mains des Ta-
moyos, dans l'espoir d'en obtenir la
paix. Le danger était imminent; toutes
les tribus des Tamoyos s'éîaient réu-
nies pour faire une attaque générale:
aussi , jamais on n'entreprit une am-
bassade plus périlleuse et plus utile.
Après s'être exposés cent fois à perdre
la vie au milieu de ces anthropopha-
ges , Anehieta et Nobrega parvinrent
enfin , par la vénération qu'ils leur
inspirèrent , à conclure la paix, et
leur ambassade fut regardée comme le
salut des colonies portugaises. Les
Tamoyos , chez qui Anehieta resta
long-temps en otage , l'appelaient le
Grand Paye ( prêtre des chrétiens ).
Lorsque Memdesa , rassuré sur les
j)rojets hostiles des Brésiliens, voulut
chasser les Français de Rio-Janéiro ,
oîi ils s'étaient établis , il réclama la
coopération d'Anchieta. Ce mission-
naire fut nommé, par Nobrega, com-
mandant des ludions convertis, et.
ANC
à'etant mis à leui' tête , s'embarqua
jiour Rio-Janciro , en 1 566 , seconda,
avec autant de coiu:age que de zèle,
Texpe'ditiou portugaise , et , pendant
les deux années que dma cette guerre ,
vc'cut dans les camps , y maintint
l'ordre , et vit enfin sa constance cou-
ronnée par la prise des deux forte-
resses que les Français avaient éle-
vées à Rio-Janeiro , et par l'expul-
sion totale des vaincus, 11 contribua
également, avec les Indiens conver-
tis , à la fondation de la ville de St.-
Sébastien , maintenant la me'tropole
de l'Ame'rique portugaise. Anchieta
mourut , en 1 397 , à 64 ans. Les Por-
tugais et les sauvages croyaient éga-
lement à ses miracles. Les premiers
envoyèrent à Rome, après sa mort,
un grand nombre de déclarations et
d'attestations , en demandant qu'il fut
ranonise'. Anchieta a compose' un
Poème sur la rier^e, en 5ooo vers
latins , pour accomplir un vœu qu'il
avait fait lors de son ambassade chez
les sauvages. Sa Vie a ètë écrite eu
portugais par Vasconcellos, et. ensuite,
par le P. Sebastien Bazeroni de Flo-
rence, Lyon , 161 7, in-8". B— p.
ANCHITÉE. Foj: Pausanias.
ANCILLOiN (David ), né à Metz,
le 17 mars 1617 , d'un habile juris-
consulte calviniste , fit ses premières
e'tudes au collège des jésuites , qui
firent de vains efforts pour l'engager à
changer de rehgion. 11 alla étudier en
théologie , à Genève , sous les savants
Spanheira , Déodati et Tronchin , fut
reçu ministre à Charenton , en i64r ,
rt placé, la même année, en cette qua-
lité , à Meaux , où il fit un riche ma-
riage. Il fut appelé, en i653 , dans sa
patrie , pour y remplir les mêmes fonc-
tions ; lors de la révocation de l'édit de
liantes , Anclllon se retira d'abord à
Francfort , devint ministre à Hauau ,
d'où la jalousie que ses collègues con-
ANC
io5
curent de ses talents, l'obligea de re-
tourner à Francfort, et de là à Berlin ,
où il fut pourvu d'une église , et mou-
rut, le 3 septembre 1692. Quoiqu'il
eut conservé toute sa vie uue ardeur
extraordinaire pour l'étude , il n'a
laissé que peu d'ouvrages , dont les.
jnincipaux sont : I. Relation fidèle
de tout ce qui s'est passé dans la
conférence publique avec M. Bé-
dacier , évêque d'Aost , Sedan ,
1657 , in-4°. : c'était lui qui avait eu
cette conférence avec M. Bédacier ;
II. Apologie de Luther, de Zwingle,
de Calvin et de Bèze, Hanau , 1 666 ,
ouvrage écrit en style pompeux , et
dans le goût des mystiques; III. Fie
de Guill. Farel , ou l'Idée du fidèle
ministre de Christ, imprimée, sur un
manuscrit extrêmement défectueux , à
Amsterdam, 1691, in- 12. T — d.
ANCILLOIN ( Charles ) , fils du
précédent, né à Metz, le 28 juillet 1609,
commença ses études classiques dans
cette ville, et alla les continuer à Ha-
îiau. Il suivit des cours de droit à
Marsbourg, à Genève, à Paris, où il
se fit recevoir avocat. Il exerça cette
profession avec tant de succès , dans
sa patrie , que les réformés de Metz le
députèrent en cour , pour représenter
qu'ils ne devaient point être compris
dans la révocation de l'édit de Nantes.
Tout ce qu'il put obtenir, fut qu'on
userait , à leur égard , d'un traitement
plus doux qu'à l'égard des autres. Peu
satisfait des dispositions de la cour, il
suivit son père à Berlin. L'électeur de
Brandebourg le fit d'abord juge et
directeur des réfugiés français de cette
vilie, puis inspecteur des tribunaux de
justice que ces mêmes réfugiés avaient
en Prusse, enfin , conseiller d'ambas-
sade, historiographe du roi, et surin-
tendant de l'école française. Il avait
été employé dans des négociations
importantes en Suisse, ayait résida
ie4 ANC
quelque temps à la cour cle Ba^e-
I)oiirlhan,ct mourut à lîcpiiiijlc 5 juil.
I "y 1 5 , après avoir publié les ouvrages
suivants : I. Reflexions politiques , par
lesquelles on fait voir que la per-
sécution des réformés est contre les
véritables intérêts de la France,
C(»logne, i085 , iii-i'2 , ouvrage mal à
propos attribue' , par Bayle, à Sandras-
de - Courtilz ; 1 i . Vlrrévucahilité de
redit de Ayantes prouvée par les
principes du d^oit et de la politique ,
Amsterdam, iG88, in-iy. ; 111. la
France intéressée à rétablir redit
de Nantes, il.id., i^Qo, iti- i2 ;
IV. Histoire de l'établissement des
Français réfugiés dans les états de
Brandebourg. Ijcrlin, iGi)o, in- 8'. :
c'est un monument de la reconnais-
sance de l'auteur poiu- l'éleeteur; Y.
Dissertation sur Vusage de mettre
la première pierre au fondement
des -^difices publics , à l'occasion de la
preinière pierre poseV au temple de
Fre'déricstadt . pour les réfugies fran-
çais, ibid., 1701 , i!-8 .; VI. Dis-
cours sur ia statue érigée sur le
Pont- Neuf de Berlin à l'électeur
Frédéric- Guillaume, ibid., 1705,
in-fol. : c'est une dissertation , eu style
oratoire, sur les statues équestres et
pédestres , où les éloges les plus am-
poulés siint prodigués à son liéros; MI.
Mélanges critiques de littérature ,
Bàle, iOqB, iiJ-8 ., 5 vi 1. On y trou-
ve des remarques utiles et curieuses;
mais le 5". vol. , consacré tout entier à
l'éloge de sou p(?re et au sien , est trcs-
inexact. L'auteur désavoua un extrait
donné en 1701 , àRoueu, sous la ru-
brique d'Amsterdam, eu un seul vol. ,
parce qu'on y avait inséré des clioscs
qui faisaient tort à la mémoire de l'un
et de l'autre. Le titre de l'édition de la
même ville, en 170O, attribue fausse-
ment ces mélanges à Jean Leclcrc.
Vill. Mémoires concernant les Vies
ANC
de plusieurs modernes célèbres dans
la république des lettres , Àmstcrd. ,
1709, in-12; ces Vies, écrites d'un
stvle diffus, étaient destinées pour un
supplément au Dictionnaire de Bay-
le . que Renier-Leers se proposait de
donner; IX. fie de Soliman //, Rot-
terdam, 1706, in-S".; par cet ou-
vrage, où règne une grande incorrec-
tion de style, Ancillon voulait pres-
sentir le goût du public sur une His-
toire des hommes célèbres, dont M. de
Thon a fait l'éloge , mais elle n'a pas été
arlicvée ; X. Traite des Eunuques ,
I70':,in-i2, sous le nom deC. Ollin-
can , qui est l'anagramme du sien. Il
fut composé à l'occasion d'un eunuque
italien cpii voulait se marier. L'auteur
prouve que le mariage est absolument
interdit à ces sortes de gens : on y
trouve uneli ttérature variée et curieuse,
mais la critique en est fort légère. La
famille d'Ancillon existe encore en
Prusse, où elle jouit d'une grande con-
sidération , par les postes honorables
qu'elle V occupe, et par le succès avec
lequel elle continue à cultiver les let-
tres. T — D.
ANCKARSTROEM ( Jean -Jac-
ques ) , gentilhomme suédois , enseigne
des gardes tle Gustave II l , montra de
bonne heure des passions ardentes et
un caractère sombre. Gustave ayant
renversé successivement, eu 177'! et
en 1 789 , le pouvoir du sénat et des
grands, pour gouverner dans toute la
])léuitude de la puissance royale ,
Anckarstrcém partagea le méconten-
tement d'une grande partie de la no-
blesse , et manifesta , dans plusieurs
circonstances, sou opposition aux vues
du monarque. Il joignit , à l'aversion
qu'il éprouvait déjà pour Gustave , un
ressentiment particulier, à l'occasion de
la perte d'un procès où intervint le roi ;
mais il est faux , comme l'ont avancé
quelques biographes , qu'il eût élc coa-
A N r.
tlamne à mort , pour avoir clierche à
livrer la Fini inJc aux Russes, et que
Gustave lui eût failgi àce. Il se lia étroi-
ment avec les nobles Us plus acbarnës
contre la cour , et fut admis clans des
confércuces secrètes , où il s'agissait
de rétablir le sénat et de se dc'nsire de
Gustave , dont la mort fiit résolue.
Anckarstroëra demanda à porter lui-
même le coup ; mais les jeunes comtes
de Ribbing et de Horn lui disputèi eut
cette horrible mission , et il fallut s'en
remettre au sort , qui décida pour
Anckarstroém.Il fit, avec ses complices
quelques tentatives , vers la fin de
l'^gi, pour assassiner Gustave, à
Stockholm; mais, ce prince ayant con-
voqué tout à coup la diète à Gcfle ,
pour le ■i'3 janvier 1792 , ce voyage
inattendu dérangea le projet des con-
jurés. Cependant, la plupart se réuni-
rent à Gefle , sans qu'aucune occasion
favorisât leur com[)lot. Les décisions
de cette diète irritèrent encore davan- ■
tage la noblesse suédoise, et les con-
jurés , transportés de rage , revinrent
à Stockholm , et résolurent d'attaquer
Gustave dans un bal masqué , la nuit
du i5 mars. Avant de porter le coup
fatal , Anckarstroëm témoigna à ses
deux complices la crainte de se trom-
per, et de manquer le roi dans une si
grande foule. « Tu frapperas , lui dit
» le comte de Horn , celui à qui je di-
» rai : Bonjour , beau masque. » Ce
fut en effet sur cette indication qu' Anc-
karstroëm tira sur Gustave un coup de
pistolet , chargé de deux balles et de
plusieurs clous , au moment même où
ce prince parcourait la salle , appuyé
sur le comte d'Essen. Gustave , blessé
à mort , tomba dans les bras de son
favori ( F, Gustave 111 ) , et Anckars-
troëm se confondit dans la foule , après
avoir laisse tomber ses pistolets et son
poignard. Lorsque la fuule fut sortie
fie la salle , on vit à terre les armes
ANC iô5
d'Anckarstroëm. Tous les armuriers de
Stockholm furent interrogés ; et l'un
d'eux , à la vue des pistolets , déclara
qu'il les avait vendus à Anckarstroëm.
On al!a aussitôt l'arrêter chez lui , où il
s'était retiré , et une commission fut
nommée pour k juger. Il avait d'abord
pris la résolution de se brûler la cer-
velle , dès qu'il aurait frappé le roi j
mais, soit qu'il comptât sur l'impunité,
soit qu'il manquât de courage , il n'at-
tenta point à ses jours. Il reftisa cons-
tamment de nommer ses complices ;
a\ ouant néanmoins son crime, dont il
parut se glorifier. Le procès fut suivi
avec lenteur ; enfin , le 29 avril i ^gi ,
Anckarstroëm fut condamné à être dé-
capité , après avoir été battu de verges
pendant trois jours. Traîneau supplice
dans une charrette , il jeta des regards
tranquilles sur les spectateurs. Sou
courage parut néanmoins l'abandon-
ner au moment de perdre la vie , et
il réclama quelques minutes pour de-
mander pardon à Dieu. Ce régicide
n'avait que 55 ans ; il fut le seul des
conjurés que l'on condamnât à mort.
Les comtes de Horn , de Ribbing et le
colonel Lilieuhorn , furent bannis à
perpétuité. B — p.
A ^ CONE ( le cardinal d' ). Fof.
ACCOLTI.
AiNCOLTlT. roy. Dancourt.
ANCi>E (CoNCiM CoNCiNO , ma-
réchal d' ), fils d'un notaire de Flo-
rence , dut son élévation à sa femme ,
Léonore Galigaï, fille de la nourrice
de Marie de Médicis. Venu en France ,
en 1600, avec cette princesse, Con-
ciui , d'abord simple gentilhomme de
la reine , s'éleva , par le crédit de sa
femme , à la plus haute faveur. Ce ne
fut pourtant qu'après la mort d'Henri
JV qu'il put donner l'essor à son am-
hilion. Devenu nécessaire à la reine,
pendant les troubles d'une faible mino-
rité , Conciul bouleversa tout dans k
io6 ANC
conseil. Il acheta le marquisat d'Ancre,
fut crée successivement premier gen-
tilhomme de !a chambre, gouverneur
de Normandie , et enfin , dit Voltaire ,
premier ministre , sans connaître les
lois du royaume , et maréchal de
France , sans avoir jamais tire l'épée.
Tant de faveurs, répandues sur un
étranger, alarmèrent les principaux
seigneurs du royaume , et servirent
de prétexte à leur rébellion. Canton-
nés dans les provinces , ils déclarèrent
la guerre au premier ministre ; mais
Concini , devenu le maréchal d'Ancre ,
assuré de la faveur de la reine , les
bravait tous. Pour venger l'autorité
royale , ou plutôt pour conserver la
sienne, il leva 'jooo hommes à ses
frais , ce qui souleva contre lui toute
la France, indignée qu'un étranger,
venu sans aucun bien , eût de quoi
assembler ime armée aussi forte que
celles avec lesquelles Henri IV avait
reconquis son royaume. Concini, peu
satisfait de ne laisser à Lous XIII que
le vain titre de roi , et ne gaulant au-
cune mesure avec ce prince, s'assura
de sa personne, lui défendit de sortir
de Paris, et réduisit les distractions
qu'il voulait bien lui laisser , à la
chasse , et à la seule promenade aux
Tuileries. Jouant mi jour au billard
avec le roi , il mit son chapeau sur sa
tête , et lui dit : a Sire , votre majesté
3) me permettra bien de me couvrir. »
Tant d'insolence excita la haine de
Louis XIII. Le maréchal ne l'ignorait
point , et disait souvent qu elle cause-
rait sa perte ; mais il ne se doutait
guère que les intrigues d'un jeune
homme, étranger comme lui , devaient
l'amener. Charles Albert de Luines ,
qui devait sa fortune au maréchal,
et que sa jeunesse mettait à l'abri du
soupçon , parvint à décider Louis XIII
a secouer le joug, et le premier acte
d'autorité d'un prince de seize ans et
ANC
demi , anqnel on avait donné le sur-
nom de Juste, fut d'ordonner ra.>-
sassinat de son premier ministre; mais
l'exécution de ce projet n'était pas
facile ; Luines , surveillé de très-près ,
n'osait risquer une démarche qui pou-
vait le perdre, si elle ne réussissait
pas. M. de Maulus , frère de Luines ,
et riIôpital-Vitry , capitaine des gar-
des , arrêtèrent , en présence du roi ,
qu'on attaquerait le maréchal dans la
cour du Louvre , au moment où il
sortirait de chez la reine-mère. Cette
première tentative échoua par un
malenlendn ; mais , le ^4 avril 1617,
les mesures furent mieux prises } le
roi, sous prétexte d'aller h la chasse ,
avait fait monter à cheval son régi-
ment des gardes , le seul dont il pût
disposer pour soutenir l'entreprise.
Vitry se rendit au Louvre avec quel-
ques gentilshommes qui portaient des
pistolets sous leurs manteaux , et
se plaça sur le pont-levis. Le maré-
chal d'Ancre y arriva , suivi d'un cor-
tège assez nombreux ; les conjuiés
laissèrent passer le cortège ; alors ,
Vitry, suivi de ses gens , s'approcha
du maréchal, et lui dit, en lui por-
tant la main sur le bras droit : « Le
» roi m'a commandé de me saisir
» de votre personne, d Le maré-
chal , étonné , dit en italien : yi moi !
mais Vitry , du llallier , Perray , ]^-
«hcnt en même temps leurs pistolets ,
et le maréchal tombe mort à leurs
pieds : Vitiy cria aussitôt : « \ ive le
)» roi ! )' Los portes du Louvre furent
fermées , et la garde resta rangée en
bataille. Quand on apprit au roi la
mort de son ministre , il se montra
aux fenêtres du palais , et cria aux
conjurés : « Grand merci à vous; à
M cette heure , je suis roi. » Quelques
historiens ont prétendu que Louis
XIII avait seulement voulu faire ar-
rêter le maréchal d'.\ucre, et quiluo
AJNC
Fut tue que par accident ; mais ce qui
lève tous les cloutes à cet e'gard , c'est
que le roi se vauta de la mort du ma-
réchal , en présence de toule la cour ,
et que Vilry, lorsqu'il présenta au par-
lement ses provisions de maréchal de
France , présenta eu même temps des
lettres-patentes portant aveu du meur-
tre commis sur la personne du maré-
chal d'Ancre , par commandement ex-
près de S. M. Ou trouva dans les po-
ches de Concini , au moment de sa
mort , pour près de deux millions de
billets de l'épargne, et de rescrip-
tions , et deux millions vingt mille liv,
dans sa maison ; ce qui ferait croire
qu'il s'attendait à quelque malheur, et
qu'il se préparait à la fuite. Son corps
fut enveloppé dans un drap, et , vers
minuit , ou alla l'enterrer à St.-Gcr-
main-l'Auxorrois. Le lendemain, le
peuple se porta à l'église, et , maigre
la résistance du clergé , le corps fut
exhumé, traîné jusqu'au Pont-jNeuf, et
pendu à une potence que le maréchal
avait fait élever pour ceux qui parle-
raient mal de lui ; ensuite on le dé-
membra , on le coupa en raille pièces ,
et l'on vendit ses restes sanglants, que
la populace furieuse s'empressait d'a-
cheter. Le parlement de Pans pro-
céda contre sa mémoire, condamna
sa femme à être biûlée ( Foy l'article
suivant), et dcclaïaleur fils ignoble,
et incapable d'occuper aucune place.
On croit que le projet du maréchal
était de se rendre indépendant , en cas
de disgrâce, et que c'est dans ce des-
sein qu'il fit fortifier Quillebœuf , en
Normandie , m.ilgré les défenses du
parlement. Il allait acheter , au mo-
ment de sa mort , le comté de Mont-
béliard pour s'y retirer. Il laissa des
biens immenses. Outre le revenu de
ses charges , qui montait à un million
de livres , il avait plusieurs millions
places eu France , à i^ome c{ à Flo-
ANC 107
rence. Une fortune si considérable ne
pouvait manquer d'exciter l'envie. ï)es
ennemis ont dîi profiter de son im-
prudence pour aggraver ses torts. II
a pourtant trouvé des apologistes. Le
mc'sréchal d'Estrées ( Mémoires de la
Régence de Marie de Médicis ) ,
ainsi que Bassompierre , le disculpent
d'une partie des torts que lui imputa
une cour qui avait intérêt à les exa-
gérer, pour justifier la manière dont
on s'était défait de lui : « Concini était ,
» discnî-ils , un galant homme , d'un
» bon jugement, d'un cœur généreux,
» libéral jusqu'à la profusion , de
» bonne compagnie , et d'un accès fa-
» elle. Avant les troubles, il était aimé
» du peuple , auquel il donnait des
» spectacles , des fêtes , des tournois ,
» des courses de bagues , dans les-
» quels il excellait , par ce qu'il était
» beau cavalier , et adroit à tous les
» exercices. Il jouait beaucoup, mais
» noblement, et sans passion. Il avait
» l'esprit solide , enjoué , d'une tour-
» uure agréable. » On fit paraître, en
I G 1 7 , une tragédie en quatre actes et
en vers , intitulée : le Maréchal
d'Ancre , ou la Ficloire du Phébus
frmicais , contre le Pjihon de ce
temps. Les stances de Malherbe , sur
la chute du maréchal d'Ancre ,
Va-t-fn à la rcalbeure , excrément de la terre,
MoDStrequi d.ms iapaixtaU lc< maux de i a guerre...
parurent au?si cette même année ,
1617 ; les ti'ois dernières sont imi-
tées des vers que Claudien avait com-
posés après la mort de Ruffin, favori
de Théod.'ise. B — y.
A N C 1^ E ( Lifo>'ORE DoRi , dite
Galigaï, maréchale d'), née dans la
plus basse classe du peuple; elle dut
sa fortune au hasard qu' fil choisir sa
mère pom* nourrice de îMarie de Mé-
dicis. Lorsque cette princesse vint
en France, en 1600, pour épouser
Hemi IV , Galigaï , mariée à Coucinj ^
roS A N C
suivit cette princesse, en qualité de
femme de chambre : elle prit un tel
ascendant sur l'esprit de la reine ,
« qu'elle réglait à son gré, dit Mé-
zcvai, ses désirs, ses alTections, et ses
haines. » Galigai , vendue aux Espa-
gnols, entretint la mésintelligence qui
régnait entre Henri IV et Maiie de
!Médicis; maîtresse absolue de l'esprit
de la reine , elle réveillait sa jalousie
par de faux rapports , et l'aigrissait par
ses conseils. Plus d'une fois, ce prince
essaya de chasser de sa cour une femme
aussi dangereuse ; mais la reine n'y
voulut jamais consentir, et Jean de
Médicis, qui , à la prière du roi , s'était
chargé d'une commission si délicate ,
déplut tellement à la rciiic , par celte
démarche, que, depuis, elle ne cessa
de le persécuter , et le força de quitter
la France. Après la mort de Henri IV,
Galigaï ne mit plus de frein à son am-
bition ; son mari fut élevé aux pre-
mières dignités ; et , disposant elle-
même de tout dans le royaume, elle
poussait l'insolence jusqu'à fermer sa
porte aux princesses et aux grands
que sa faveur attirait. Le roi lui-même
n'était point à l'abri de ses caprices;
un jour que ce jeune prince s'amusait
à de petits jeux dans son appartement,
la maréchale d'Ancre, que ce bruit im-
portunait, osa lui faire dire de cesser,
parce qu'elle avait la migraine; Louis,
outré de son audace , répondit , « que ,
si la chambre de la maréchale était
exposée au bruit, Paris était assez
grand pour qu'elle pût en choisir une
autre. » Cependant l'orage grossissait
sur la tète de deux favoris également
hais du jeune roi , du peuple et des
grands. La mort de plusieurs person-
nages importants, sacriliés à la ven-
geance du maréchal et de sa femme ,
mit le comble à la haine ; enfin , le
a4 avril 1G17, le roi donna l'ordre
4'assassiner Gonciui , et cette raorl ,
AIS^C
qui devait bientôt entraîner celle de la
Galigaï, ne lui coûta pas unelarme; elle
parut plus émue lorsqu'on lui apprit
que le cadavre du maréchal avait été'
exhumé et pendu. Néanmoins, elle
répéta plusieurs fois qu'il était un pré-
somptuous , un orgJieilloiis , et qu'il
n'avait que le sort qu'il méritait. Oc-
cupée exclusivement du sein de sauver
ses pierreries , elle les mit dans un de
ses matelas, se couciia dessus, et ne
céda qu'à la violence. Lorsque les
archers , venus pour emporter ces
riches dépouilles, la forcèrent de se
lever , elle refusa long-temps de suivre
ceux qui voulaient la conduire à la
Bastille, a Ils ont tué mon mari, di-
» sait-elle, n'est-ce pas assez pour con-
» tenter leur haine ? qu'ils me laissent
» sortir du rovaumc. » Son apparte-
ment ayantété pillé par lesarchers, elle
arriva à la Bastille dans une telle dé-
tresse , qu'elle manquait de linge ; une
femme delà cour lui envoya deux che-
mises , et son fds , quoi:|u'il fût aussi
arrêté , lui fit passer quelques pièces
de monnaie. Le proccs de la Galigaï,
traduite devant une commission ex-
traordinaire , qui fut nommée pour
faire le procès à la mémoire du ma-
réchal , commença le 5 mai 161 "j.
Les circonstances en sont rapportées
fort en détail par Legrain , dans
ses Décades de Louis-le- Juste. Il est
curieux d'observer que la favorite
d'une grande reine , qu'une femme
qui avait tenu en quelque sorte le ti-
mon des affaires , dont la cupidité aA'ait
rais à prix les principaux emplois de
l'état, et dont les intelligences avec
l'étranger pouvaient donner quelqiic
apparence d'équité à son jugement;
ne fut condamnée que comme coupa-
ble de judaïsme et de sortilège. On
passa légèrement sur ce qui aurait dû
faire l'objet principal du proccs. La
seule circonstance raisomtablc sur la-
ANC
quelle on interrogea Galigaï , fut l'aver-
tisseraent (lu'elle avait reçu de la mort
de Henri IV , et le soin qu'elle avait
mis à s'opposer à la recherche des
auteurs de l'assassinat. La manière
dont elle repoussa ces inculpations ,
eloigue d'elle et de la reine toute idée
de complicité'. Les principales accu-
sations portèrent donc sur le crime de
sorcellei ie, et les preuves furent des let-
tres e'crites par sonsecre'lairc à un me'-
dccin juif, nomme' Montallo. La Place ,
ëcuyer de la mare'chale , soutint , de-
vant les juges, que, depuis l'arrive'c
de ce juif italien à la cour , elle avait
cesse' d'aller à la messe , et qu'elle s'a-
musait à faire de petites boules de cire
qu'elle avait l'habitude de porter à sa
bouche. Son carossier déposa qu'il
l'avait vu sacrifier un coq dans une
église, à minuit, et le procureur-ge'-
ne'ral prouva , par divers passages
des livres juifs, que cette oblation
d'un coq était une pratique tout-à-la
fois juive et païenne. Enfin on ajouta
encore à ces ridicules témoignages ,
que la maréchale , superstitieuse au
point qu'elle ne voulait pas que cer-
taines personnes la regardassent ,
disant qu'elles allaient l'ensorceler ,
consultait souvent , sur le sort de
son fils, une femme nommée Isa-
belle, regardée comme sorcière. Ces
révélations lui furent imputées à crime.
Des As,nus Dei, des images que, dans
la faiblesse qu'elle avait de se croire
ensorcelée, elle regardait comme des
préservatifs contre le pouvoir du dé-
mon, servirent de témoignages contre
elle. On crut découvrir dans quelques
livres he'br eux, saisis dans sou cabinet ,
le moyen dont elle s'était servie pour
obtenir un si grand ascendant sur les
volontés de la reine. Interrogée sur ce
point, elle répondit : « Mon sortilège
» a été le pouvoir que doivent avoir
n les âmes fortes sur les esprits fai-
A N G 1 09
» blés. » Quelques juges eurent assiz
d'équité et de lumières pour ne pas
opiner à la mort; Orlando Pagen , l'un
des deux rapporteurs , refusa de signer
l'arrêt que Courlin , vendu à Charles
de Luiues , lui présenta ; cinq juges
s'absentèrent, d'autres conclurent au
bannissement; mais le reste, entraîne
par le préjuge public , par l'ignorance ,
et surtout par les instigations de ceux
qui voulaient recueillir les dépouilles
du maréchal et de sa femme , signèrent
l'arrêt de mort, et il fut prononcé , le
8 juillet 1617, devant une foule im-
mense , venue pour examiner la con-
tenance de cette favorite, naguère toute-
puissante. Galiga'i , pendant cette lec-
ture, baissa la tête, et voulut d'abord
s'envelopper de ses coiffes ; mais on
la contraignit d'entendre , à visage dé-
couvert, l'arrêt qui la condamnait à
être briîlée. Pour en suspendre l'exé-
cution , elle déclara qu'elle était en-
ceinte ; mais on lui remontra que ,
d'après les dépositions qu'elle avait
faites pendant son séjour à la Bastille,
el!e ne pouvait être dans cet état sans
avoir manqué à son honneur. Cette
objection l'empêcha d'insister : elle re-
prit son courag^e , et se résigna à la
mort. Traîiiéeau supplice le jour même
de sa condamnation , elle passa au mi-
lieu d'un peuple nombreux, que sou
malheur commençait enfin à toucher;
elle vit sans effroi les flammes qui al-
laient dévorer son corps, a Intré-
» pide, mais modeste, ditAnquetil,
» elle mourut sans bravade et sans
» frayeur. » On fît, sur sa mort, une
tragédie en 4 actes et en vers, intitu-
lée : la Magicienne étrangère. Cette
pièce, imprimée à Rouen , en 1617,
n'est qu'une satire grossière. Une des
singularités de la destinée de la maré-
chale d'Ancre , c'est qu'elle fut le pre-
mier mobile de la fortune du cardinal
de Richelieu. ( F. RicajatiEu). B — r.
110 ANC
ANCUS MARTI US, 4"- roi de
Rome , était petit-fils de Numa , par
Pompilie , fille de ce prince. Après
un court interrègne qui suivit la mort
de ïullus Hostilius , il fut élu , l'an
1 1 5 de Rome ( 64 1 avant J.-C ). En
montant sur le trône, il annonça des
dispositions pacifiques, et s'appliqua
à remettre en honneur les cérémonies
religieuses. Les Latins , qui désiraient
tirer avantage de la mort de son pré-
décesseur , l'obligèrent , par une atta-
que soudaine , à prendre les armes.
Après leur avoir déclaré la guerre,
avec les cérémonies prescrites par Nu-
ma , Ancus ^Lirtius prit Politorinin.
Tellène et Ficcne , villes , ou , pour
mieux dire bourgades, dont il serait
aujourd'hui impossible de déterminer
la situation , mais qui étaient peu éloi-
gnées de Rome, et vers l'embouchure
du Tibre ; il les détruisit, et en trans-
porta à Rome les habitants , auxquels ,
par une sage ])olitique , il accorda le
droit de cité. LesLatinstentèrentdese
venger ; mais Ancus les défit en ba-
taille rangée. Les Fidéuates,lesVeïens,
les Sabins et les Volsques , ne furent
pas plus heureux. Il prit la ville du
premier de ces peuples , en pratiquant
des chemins sous terre , gcnie d'at-
taque dont l'histoire de Rome fait ici
mention pour la première fois. Ayant
ensuite vaincu deux fois les Véiens ,
Ancus obtint du sénat les honneurs
du triomphe. Sous son règne, le mont
Aventin et le mont Janicule furent en-
fermés dans l'enceinte de Rome. Pour
joindre le Janicule à la ville, dont il
était la citadelle, Ancus fit construire
surleTibre le pont Sublicius. Il fit bâtir
une prison dans la place pubhque ; le
port et la ville d'Ostie lui doivent leur
origine. Il fit creuser des salines, et
en distribua le se! au peuple : ce fut
l'origine des libéialites publiques , con-
nues dans la suite sous lenomdeco«-
AND
^laria. Au nombre des monuments
publics élevés par ses ordres , on doit
placer le temple de Jupiter Férétrien ,
l'aqueduc magnifique, dit de ÏAqua
Mania , qui , dans la suite , ne suf-
fisant pas aux besoins de Rome , fut
augmenté par le préteur Q. Martius
rcx , l'u!! des descendants de ce prince.
Ancus Martius raouiut après un règne
de 2'j. ans. Plutarque préfend que sa
mort fut viole: ite ; mais les autres
historiens ne partagent point cette
opinion. Il laissa deux fils , dont l'aîné
était âgé de i 5 ans , et leur donna
imprudemment pour tutevu" Tarquin ,
nouvellement établi à Rome. Si l'on
en crovait Denvs d'flalicarnasse , An-
cus IMartius n'aurait obtenu que par
un crime le pouvoir suprême. Cet his-
torien dit qu'il avait exterminé Tullns
Hostilius avec toute sa famille , lors-
que ce prince offrait un .sacrifice do-
mestique. D — T.
AN DEÇA, roi des Suèves en Espa-
gne, enleva la couronne à Ebonc,vers
l'an 585 , et s'affermit sur le tronc en
épousant Segonce, belle-mère d'Eboric,
qu'il relégua ensuite dans un monas-
tère, après lui avoir fait raser la tète,
ce qui, selon l'usage des Suèves, la
rendait inhabile au gouvernement. An-
deca ne jouit pas long-temps de son
usurpation. Leovigilde , roi des Yisi-
goths , ayant tourné ses armes contre
les Suèves, les défit, entra dans Bra-
gue , capitale du royaume , déposa
Andeca , qu il fit ordonner prêtre , et
le relégua à Badajoz, où il mourut
peu de temps après. Le royaume des
Suèves devint une province des Goths
en 584 1 après avoir existé pendant
un siècle et demi. Il s'étendait sur la
Lusilanic et sur la Galice. B — p.
ANDEIRO (don Juan -Ferdi-
nand), favori de la reine de Portugal,
Eléonore-Tellez, entra de bonne
heure au service du roi Ferdinand.
AND
Exilé, en 1370, il passa en Angleterre,
y jouit de la faveur du comte de Cam-
bridge , et reçut , de Ferdinand, l'ordre
secret d'engager la cour de Londres à
former une ligue avec le Portugal
contre la Castille. Andciro réussit,
revint à Lisbonne, en i58o, et rendit
compte au roi du succès de sa négo-
ciation. Ferdinand , pour mieux ca-
cher ses desseins , le (it enfermer dans
la tour d'Estremos , où il allait sou-
vent l'entretenir en secret, accompa-
gne' de la reine Ele'onore. Quelquefois
même cette princesse s'y rendait seule,
par ordre du roi. Se'duile par i'esprit
et les grâces d'Andeiro, elle oublia
bientôt avec lui sa dignité et son de-
voir. La négociation avec l'Angleterre
ayant été réglée entre le roi et le fa-
vori, celui-ci sortit de sa prison, et
Ferdinand, voulant encore user d'ar-
tifice , l'exila de nouveau avec éclat,
pour mieux cacher le but d'un second
voyage à Londres. Andciro reparut
bientôt en Portugal, avec une expédi-
tion anglaise : la reine le fit créer
comte d'Ourem et grand de Portugal ,
et il fut chargé, par Ferdinand, d'ajier
offrir la main de sa fiile Béatrix au roi
de Castille. De retour à Lisbonne, il
se vit au comble de la faveur , et ne
racTia plus sa passion pour la reine. Le
roi, éclairé enfin sur celte intrigue, allait
s'en venger, lorsque la mort l'en empê-
cha ; mais la perte d' Andcno n'était que
différée. La reine , qui s'était erajiaré
de la régence, avait fait, de son amant,
l'arbitre du Portugal. Les grands ,
indignés, se liguèrent contre lui, et
le grand-maître d'Aviz, frère bâtard de
l'infant don Juan , s'étant mis à leur
tête ,'pénétra dans le palais de la reine,
avec. -25 hommes armés, et poignarda
Andeiro , le 6 décembre 1 383 ; il
chassa ensuite la reine , et s'empara de
J'autorité (f^pj. Tkllez (Eléonore),
et Jfan 1"='. ). B — p.
AND III
ANDELOT. Foj. Dandelot et
COLIGNI.
ANDERSON , ou ANDREA (Lau-
rent), chancelier de Gustave Vasa,
né en Suède , en i48o, fut d'abord
prêtre à Strengnes, et devint ensuite
archidiacre à Upsal. Ayant reçu de la
nature des taleuts supérieurs , il les
avait cultivés par l'étude , et se distin-
guait surtout par une grande facilité à
développer ses idées, avec autant de
clarté que d'élégance. Des voyages en
divers pays , et un séjour à Rome , lui
avaient donné la connaissance des hom-
mes et des affaires. Lorsque les dogmes
de Luther, qu'il avait appris càconnaîti'e
à Wittenberg, se furent répandus en
Suède , il les recommanda fortement
à Gustave Wasa , qui venait de mon-
ter sur le trône, et devint le mobile
principal de la révolution qui chan-
gea la croyance religieuse des Suédois.
Le roi lui donna toute sa confiance,
suivit le plan qu'il traça, et le nomma
son chancelier. Ce fut lui qui, à la
diète de Vesteras, eu 1527, "islgréla
forte opposition du clergé et de plu-
sieurs grands du royaume, décida les
états à publier le recez qui mettait les
intérêts de l'Eglise à la disposition du
roi. Des incidents , dont les mémoires
du temps n'indiquent pas clairement
la marche , entraînèrent ensuite le
chancelier dans le parti des mécon-
tents. Instruit d'une conspiration con-
tre Gustave , il n'en avait pas donné
connaissance , et , le roi l'avant accusé
devant les états , il fut condamné à
perdre la vie. Il parvint cependant à
la racheter par une somme d'argent,
et se retira à Strengnes , où il mourut
en 1 55*2. Il donna la première traduc-
tion du Noui>eau Testament en lan-
gue suédoise. C'était un chef-d'œuvre
pour le temps ; mais le style en a
vieilli , et d'autres traductions l'ont
remplacée. C — au.
lia AND
ANDERSON ( sm Edmund ) , ju-
risconsulte anglais, ne vers l'an i54o ,
à Broughton , ou à Fiixborougli , dans
le comte' de Lincoln , fut nommé chef
juge de la cour des plaids communs ,
sous le règne d'Elisabeth; place qu'il
conserva sous le règne de Jacques F"".
C'était un homme plein d'érudition et
de lumières , mais qui porta , dans
l'administration de la justice, une ex-
cessive sévérité. Il fut un des com-
missaires nommés pour faire le procès
il la reine d'Ecosse , et l'un des juges
qui condamnèrent Davison, secrétaire
d'Elisabeth , accusé d'avoir fait hâ-
ter sans autorité l'exécution de la
reine Marie. Ce procès présente quel-
ques circonstances lemarquables, qui
font connaître l'influence que le pou-
voir exerçait sur l'administration de
la justice. Elisabeth voulait affaiblir ,
aux yeux des peuples, l'iniprcssion
de pitié que faisait généralement la
condamnation de l'infortunée Marie,
et cherchait même à faire croire qu'elle
n'était pas éloignée de lui accorder sa
grâce. Davison, homme vil et cor-
rompu , n'avait fait vraisemblablement
que se conformer aux intentions de sa
maîtresse, en envoyant l'ordre d'exé-
cuter la sentence ; il fut cependant
mis en jugement pour avoir donné cet
ordre , a contre le commandement de
» la reine, et sans sa participation. »
Dans l'instruction du procès, l'un des
juges exalta beaucoup la clémence
d'Elisabeth, et blâma fortement Da-
vison, d'en avoir arrêté les effets par
son imprudente précipitation ; celui-ci
se défendit, en disant qu'il avait fait
une chose juste, quoique d'une ma-
nière qui ne l'était pas : Justum sed
non juste. Cette distinction , très-
propre à faire condamner un innocent
ou absoudre un coupable , suivant
l'occasion , fut admise par le tribunal.
Davison fut condamne à payer une
AND /
amende de 10,000 liv. sterl, , et h
être emprisonné tant qu'il plairait à
la reine. On conçoit que la détention
ne fut pas longue , et que l'amende ne
tomba pas à sa charge. Audersou dé-
ploya un zèle actif contre toutes les
sectes sépai-ées de l'Eglise anglicane ,
et surtout centre les Brovvnistes, en-
vers lesquels il fut qaeîqfiefois injuste.
Ses ouvrages sont: 1. Jugemenls ren-
dus sons le règne de la reine Elisa-
beth,parlii cour de Common-Bench,
Londres , 1 64 4 ^ in-fol. ; II. Décisions
et Jugements des tribunaux de JVest-
minster, rendus dans les dernières
années du règne d^ Elisabeth, Lon-
dres, iG53, in-4 '. 11 mourut eu iGo5.
S— D.
ANDERSON (Alexandre), ne à
Aberdeen, en Ecosse, professait les
mathématiques à Paris , au commen-
cement du l'j^. siècle. Il était, à ce
qu'il paraît , un ami ou disciple de
Viette, dont il publia quelques ouvra-
ges posthumes. Il possédait fit bien,
dit Montucla, l'aualysc ancienne, ce
dont il donna un essai dans son Sup^
plementum jîpollonii redii'iv>i, i (i i u,
in-4 '• , où il supplée , en effet , ce que
Ghetaldi avait laissé d'incomplet dans
son ouvrage. A. B — t.
ANDKRSON ( Robert ) , simple fa-
bricant d'ctofl'es de soie, à Londies,
au milieu du 17''. siècle, publia, en
anglais, deux ouvrages de géométrie,
plus qu'élémentaires , dit Montucla : I.
Propositions stéréométriques , ap-
plicables à divers objets , mais spé-
cialement destinées au Jauseatre ,
1GG8, in-8'. ; II. \e Jaugeage perfec-
tionné, pour servir de supplément
aux Propositions stéréométriques ,
i66(), in-S"^. A. B — T.
AÎNDERSON ( Jean ) , médecin an-
glais , né vers l'année 17^6 , membre
des sociétés royales de Londres et d'E-
tliiûbouig , a occupé pendant 4 1 •'*ns
AND
ia cLaire de professeur de pliilosopliie
naturelle à l'uni versité de Glascow. Il
est auteur de plusieurs ouvrages utiles,
parmi lesquels on distingue ses Instî-
tiilions de médecine , dont eincj édi-
tions ont été' publiées de sou vivant,
il mourut en 1 79^ , âgé de 70 ans.
X N.
ANDERSON ( George ) , né à Tun-
dern , dans le duché de S( hlesvvig , au
commencement du I']^ siècle. 11 n'a-
vait point fait d'études , mais ses dis-
positions naturelles, et une mémoire
prodigieuse lui firent acquérir un sa-
voir étonnant. Il voyagea eu Orient, de-
puis l'an i6'|4i"^'^!'^''^' l'*'^ i65o, par-
couiiit d'aîjord l'Arabie , la Perse,
rinde , la Chine , le Japon , et revint
par la Tartarie , la Perse septentrio-
nale , la Mésopotamie , la Sy ne et la
Palestine. A son retour, il entra au ser-
vice du duc de Flolstein-Gottorp, qui ,
n'ayant |)u l'engager à écrire une rela-
tion de ses voyages , le faisait venir
chaque jour dans son cabinet , et s'en
entretenait une heure avec lui , tandis
qu'Adam Oléarius, caché derrière une
tapisserie , écrivait à la hâte ce que di-
sait Anderson. Le duc obtint enfin du
voyageur qu'il rédigeât lui-même cette
relation, et elle fut publiée à Schleswig ,
en 1OG9, P"*'" Ole'arius , sous ce titre :
fielatinn des yoyages en Orient , de
George Anderson et de f^olg. Iver-
se?is , iu-fol. (eu allemand ). G — t.
A N D E R S 0 N ( .Jean ) , juriscon-
sulte , né à Hambourg , le 1 4 mars
iG74' Après avoir fait ses études à
Leipzig , à Halle et a Leyde , il fut
fait , eu 1709., secrétaire du conseil de
Hambourg; syndic en 1 708, et bourg-
mestre en 1725. Il remplit plusieurs
n)issions pour les affaires de sa ville
natale , où il mourut , le 5 mai 1 745.
Ses principaux écrits sont: l. Des ren-
seignements sur l^ Islande, le Groen-
land et le détroit de Davis ( eu alle-
AND ii5
raand ) , imprimés après sa mort , eu
1 746 , et précédés d'une notice sur sa
vie; la traduction française, parSeIhus,
parut sous le titre d'//t5to/re naturelle
de V Islande, etc., 1704, 2 vol. iu-
1 2; 11. Glossarium teutonicum et ale-
manicum ,- III. des Observations phi-
lologiques et physiques sur la Bible
(en allemand), il a laisséen manuscrit :
Obsen>utiones juris germanici , ad
dnclwn elemenlorum juris germa-
nici Heineccii. G — t.
A N ! » E R S 0 N ( Adam ) , écrivain
écossais , qui vivait dans le 18". siècle.
11 fui premier commis d'i»n bmreau de
finances , et occupa quelques autres
places à Londres. On a de lui un sa-
vant ouvrage sur l'histoire du com-
merce , intitulé : Historical and chro-
nological déduction of trade and
comjnerce. La première édition parut
en I 762. H y en a eu plusieurs autres ;
la dernière est de j8oi , en 4 vol. in-
4". , très-bien exécutée. L'auteur est
mort en 1775. X — N.
ANDElRbON (Jacques), agricul-
teur anglais, né en 1739, à Hermis-
ton, près Edimbourg, d'une famille
qui cultiva , pendant plusieiu'S géné-
rations, le même fonds de terre. Ses
amis voulurent le détourner de faire
de longues études, pour succéder à
ses parents , qu'il venait de perdre
très-jeune; mais , après avoir lu Y Essai
de Hume sur VAe^riculture , et n'avoir
pu le comprendre , à cause de son
ignorance dans la chimie, il se dé-
termina à suivre le cours de Cullen ;
et bientôt il s'établit, entre le maître et
l'élève , une intimité qui ne cessa qu'à
la mort du profcs.«>cui . Les conseils
d'un tel maître lui furent utiles, non
seulement pour la chimie , mais pour
plusieuis autres sciences ; l'étude u©
lui fit pas négliger les soins de la
ferme qu'il dirigeait , dès l'âge de 1 5
ans y scccudc par quatre sœurs aj-
8
ii4 AND
uëes.ll trouvait même encore le temps
d'écrire sur l'agriculture. L'uulversite
d'Aberdeen lui envoya , sans qu'il les
eût sollicités, les diplômes de maître-
ès-arts et de docteur en droit. En
1785, Auderson se rapprocha d'E-
dimbourg , pour suivre l'éducation
de ses fils. La même année , l'Ecosse
lui eut l'obligation d'avoir employé
tous les moyens imaginables pour
diminuer la disette ; l'Angleterre lui
doit aussi l'amélioration des pêches
qui se font au nord de l'Ecosse. En
1797 , Andersou vint habiter les en-
virons de Londres , où il lia un com-
merce étroit avec les savants de cette
ville , et devint membre de la société
royale j mais, en 1802 , il se retira
dans la solitude , ne s'occupant plus
que du jardinage. Il y termina sa car-
rière , en 1808 , âgé de soixante-neuf
ans. Ses principaux ouvrages , en an-
glais, sont : L Essais sur lesylanta-
iions, 1 77 I ,in-8". , imprimés d'abord
dans le TVeekly magazine d'Edim-
l)ourg; IL Essais sur l'apiculture ,
!'}-■'], 5 vol. in-8" , oii l'on trouve
une méthode de dessécher les terrains
marécageux, réimprimée en 1797?
ÎII. Observations sur les moyens
d' exciter r industrie nationale ,lLii\m-
bourg , 1777, in -4". J IV. Relation
de l'état actuel des Hébrides et de
In côte occidentale de l'Ecosse ,
Edimbourg, 1 785, in-8 '.; V. Recher-
ches sur les troupeaux et l'améliora-
tion des laines , publiées à la suite
d'un ouvrage du proiesseur Pallas,
sur les races de brebis de la iUissie ,
in-8". , et analysées dans la Biblioth.
l/fitawiique deGme\e', YI. l'abeille,
journal hebdomadaire estimé , dont
Auderson est le fondateur, et dans le-
quel il signait ordinairement Senex ,
Timothj Hairhrain , .ilcibiades ;
Edimbourg, 1788 et suiv. , 18 vol.
in-8'.; VU. Récréations , journal
AND
consacre princij)alement àl'agricultn; e
et.à l'histoire natvuelle, i7()9ct suiv.,
G vol. in-8". ; Vlll. Correspondance
avec le général JVashington^ suivie
bientôt après des Recherches sur la
rareté des grains ; IX.V Encyclopédie
biitannique, 1778 , contieut , entre
autres , un article sur les vents appelés
moussons , dans lequel Andersou
prédit, avant le retour de Cook , le
résultat d'une des découvertes de ce
navigateur au Sud. Le Weekly ma-
gazine d'Edimbourg, et le Monthly
Rewiew sont enrichis d'un grand
nombre de ses articles signés Agrico-
la, Timoléon^ Gennanicus , Ciinon,
Scoto - Britannus , E. Aberdeen ,
Henry Plain , Impartial , a. Scot.
Les Mémoires de la société de Bath,
contiennent aussi plusieurs ^Mémoires
d'Anderson sur l'économie rurale.
]]— R. )^
ANDERTON (Jacques), habile
conlrovcrsiste anglais , natif de Los-
tock, dans la province de Lancastre,
a vécu à la fin du i6^ et au commen-
cement du 17'', siècle. Il était simple
laïque, et possédait une fortune consi-
dérable en fonds de terre. Pour se met-
tre à l'abri des lois pénales de son pavs.
contre les catholiques , il se déguisa ,
dans tous ses ouvrages, sous le nom de
Jean Brereley. Le principal, celui qui
fit le plus de sensation, est intitulé :
Apologie des Protestants pour la re-
ligion romaine, 1604, in-4". Le but
en est de prouver la vérité de la re-
ligion catholique , par le témoignage
même des auteurs protestants , dont il
rajiporte les passages avec la plus scru-
puleuse exactitude. Cet ouvrage fut
regardé, par ses propres antagonistes,
comme un chef-d'œuvre d'érudition ,
de raisonnement, et de précision,
écrit avec une politesse et sur un ton
de modération , cpii n'avaient pas en-
core eu d'exemple dans ecs soi tes d<
AND
controverses. Banckroft, arclievcqce
de CaiitorLcry, alarme de reifet qu'il
fit dans le public , chargea le savant
docteur iMuitou , cliapeîaiu du roi ,
depuis e'vètjue de Durhain , d'y ré-
pondre. C'est ce que celui-ci fit par
son Ajjpel aux Catholùjues , pour
les Protestants, 1606 j mais, au
lieu de discuter les faits et les pas-
sages rapporte's parAnderton, il cher-
cha à user de re'criiuinatioii contre les
catholiques, en voulant s'auloiiser de
leurs écrivains en faveur de la re-
ligion protestante. ]\ïalheureusenieiit ,
les auteurs dont il invoquait les té-
moignages , se trouvaient être des
gens décries pour la singularité des
leurs 0])inions , ou démentis par ceux
de leur comnuuiion , ou, enfin, les
passages allégués ne roulaient que sur
des choses peu import.intes. D'au-
tics controversistes se mirent sur les
rangs , et ne furent pas plus heureux.
Anderton leur répondit d'une manière
pe'remptoire , dans les notes mises à
la seconde édition de son livre , en
1 608 : c'est sur cette seconde édition
que fut faite la traduction latine, par
Guillaume Reyner , docteur de Paris ,
161 5. Anderton a donné plusieurs
autres ouvrages estimés , du même
genre , dont les principaux sont : une
Explication de la Liturgie de la
Messe, sur le sacrifice et la présence
réelle, en latin, Cologne, j6'.40,
in-4". , et la Pieligion de S. Augus-
tin , 1G20 , iu-8'. , où il applique la
méthode du saint docteur dans les
controverses , à celles qui existent
entre les callîoiiques et les protestants.
' — Laurence Anderton , de la même
])rovince , et peut-être de la même
famille, après avoir embrassé la reli-
;..'ion catholique, se distingua chez les
iisaites , par ses talents pour la pré-
dication et pour la controverse. On a
de lui : la Frogéniiure des Calho-
A :\ D I î 5
lifjues et des Protestants , Rouen ,
i(jj2, in -4"-; la Trip/e Corde ^
St-Omer , 1 654 > i»-4''' 1" — d.
ANDIER, graveur. /^. Desroches.
ANDJOU (le nabab Farhr, ed-
DYN HaÇAN Dje'mAL , ED-DYN Ho-
CEiN ), auteur de la préface du Fcr-
hang djthdnguyiy , tl l'un des prin-
cipaux collaborateurs de ce célèbre
Dictionnaire persan , commencé par
ordre du grand-moghol Akbar , pen-
dant son séjour au Kachemyr, et ter-
miné sous le règne de son fils Djihàn-
gnyr. Cette dernière circonslauce
valut , à ce monarque , l'honneur
d'avoir donné sou nom à un ouvrage
do la plus himte importance, parfai-
tement exécuté, et qui doit èti'e réel-
lement placé au nombre des plus beaux
monuments liltéraiics. Dans la pré-
face , qui est à la fuis bien faite et
extrêmement curieuse , Andjou len J
com])te du travail qu'exigea la com-
position de ce Dictionnaire. 11 donne
les titres de quarante-quatre autres
qui furent mis à contribution , sans
parler des ouvrages anonymes , des
nombreux commentaires persaus du
Koràn , des annales et des histoires ,
du livre Zend et du Pazend , d'uu
grand nombre de traités particuliers
dont la nomenclature serait trop lon-
gue pour trouver place ici; sans ou-
blier les poèmes et recueils de poésies
dont les auteurs ont écrit en slvle fi-
giué. a Enfin , ajoute Andjou, j'ai pris
» beaucoup de peines et lu beaucoup de
» livres arabes et pehlvy. » Le diction-
naire est divisé en 24 chapitres , con-
formément aux lettres de l'ancien al-
phabet persan , avec une préface et
douze traités généraux [aj-'in) sur
ré:riture persaune et sur la grammaire
de cette langue ; un glossaire des mots
particuliers au livre du Zend, et un
recueil de mots composés,- forment
ce que les Arabes et ks Persans uom-
8..
iiG AND
inrntlecoiQpîëment^A/m'?/me70.C''tte
partie manque dans la plupart des
copies du FiThaw^ Djihanguyr}%qui
fut terminé l'an i o i 7 de l'iiég. (1608-9
de J.-C ) , comme le princ ipal rédac-
teur l'a indiqué dans cet licmisticlie :
Voici le Dictionnaire de Noàr ed-
dvn Djikdnguyr. Le total de la valeur
Buméiique des lettres qui composent
cet hémistiche, est i o 1 -j, nombre cor-
respondant à l'année de l'hégire où
Touvrage fut terminé. L'impression
de ce Dictionnaire, avec de courtes
notes , serait un important service
rendu aux orientalistes d'Europe. La
Bibliothèque impériale possède deux
exemplaires du Ferhan^ Djilidn^iy-
ry\ d'uneérriture passable, mais on ne
trouve, dans aucun d>s deux, le com-
plém'^nt dont j'ai pailé. L — s.
ANDL()( l*jKRi(E d'), jurisoonsn'te
rt professeur à lîàle , fut recteur de
l'université en 1471- La bibliothèque
tle Bàle conserve qirclques-uns de ses
manuscrits, et l'ouvrage qu'il a écrit
«"U 1 460 , sous le titre ; Ve imperio
Bomano, RepscL-^Ui^usti creationc,
inaiitiuralione , administratinne et
cfficio , jurihus , ritihus et cerimn-
niis electornni aliisque itnperii par-
tibiis, a été imprimé à Sira^^bourg ,
en i(»o3eten iGii,ii!-4'. Ona aussi
de lui , en allemand , une Chvonitpte ^
depuis la création du moudc jusqu'à
ï'au i4oo. l' — I.
A^DOCIDR, fds de Léogoras, né
à Athènes, l'an 4^8 avant .L-C , e'iait
d'une des principales familles de cette
ville, et descendait, disait -on, de
Mercure. Léogoras , son bisaïeul , com-
manda , avec Chabrias , les ti oupes
que les Athéniens envoyèrent contre
Pisistrate. Andocidc se mêla de bonne
lieure des affaires publiques, et fut
l'un de ceux qui négocièrent, vers l'an
ij '1'» avant J.-C, avec les I>acédémo-
Biï'us, la paix de Ircule ans qui prc-
AND
céda la guerre du Péloponnèse. Quel-
que temps après, il eut, conjointement
avec Glaucon , le commandement de
vingt vaisseaux , qne les Athéniens
envoyaient au secours des Coreyrc'ens
contre les Corinthiens. Ses liaisons
avec Alcibiade, et d'autres jeunes gens,
le firent accuser d'avoir profané les
mvstères d'Eleusis , et d'avoir contri-
bué à la mutilation des Hermès; il se
tira d'affaiie en accusant plusieurs pei -
sonnes , du nombre desquelles était
Léogoras son père, qu'il parvint ce-
jK-nrlant à sauver. Dégoûté des affaiies
publiques, il se livra au commerce, et
alla dans l'île de Chvpre auprès d'Eva-
goras, roi de Salamine. On l'accusa de
lui avoir livré la fille d'Aristid(;, qu'il
avait enlevée à Athènes, fl revint dans
cette ville pendant la tvrannie des
quatre cents, qui le mirent en prison;
mais il ne tut pas condamné. Exilé
par les trente tvrans , il se retira dans
l'Elide , et retourna à Athènes , lorsque
le peuple eut repris !e dessus : on renou-
vela contre lui l'accusation d'impiété,
mais il parvint encore à échajqier à la
condamnation.il fit un second vovage
dansl'îledeChvpre.d'oîiil fitvenirdes
blés pour les Athéniens. Le reste de sa
vie nous est inconnu. Nous avons qua-
tre Discours qui lui sont attribués. Le
premier, sur les mystères, et le se-
cond, au sujet de son retour, sont
bien certainement de lui ; mais il n'en
est pas de même des deux autres. Le T
troisième fut composé pour décider !
les Athéniens à ratifier la paix avec
les Lacédémonions , négociée par An-
talcidas , l'an 38n avant J.-C. , mais
Andocide avait alors quaire-vingt-uu
ans, âge auquel on ne se mêle guère
des allaires publiques. Et , comme il
y est question dans ce discours d'une
paix négociée par Andocide, grand-
père de l'orateur , l'an 44^ av. J.-C, il
est probable qu'il est d'un troisième
AND
Ajidociile, petit-fils de c^lui dont nous
pillions. Ou lUt an 4*^- discours, contre
Alcibiade, au sujet de 1 oslr.icisme , d
f st évident, connue l'avait de'jà obser-
ve Taylor, que ce discours n'est pas
d'Andocide. On peut voir ce que j'ai
dit à ce sujet dans mes notes sur
Piiitarque, de la traduction d'Amyot,
tome V, page 4^^ et suiv. Les dis-
cours d'Andocide se trouvent dans les
O ratures grœci veleres. H. Stepha-
nus, ij-jS , in-fol. , et dans ceux de
lieiske. L'abbé Auger les a traduits
f'u français dans le recueil intitulé:
les Orateurs athéniens, Paris, i -jq'j,
in-8". La simplicité est le principal
caractère de l'éloquence d'Andocide;
il n'a pas de grands mouvements ora-
toires, mais d plaît, par cela même
qu'il montre moins de prétentions.
C— R.
ANDOQUE (Pierre), et non AN-
DROQLJE, comme on l'a dit, conseil-
ler au présidial de Béziers, mort en
i6G4 , a laissé : L Histoire du Lan-
guedoc , ai'ec l'état des provinces
voisines, Béziers, 1623, 1648, in-
fol. Toiles sont les deux dates que
donne à cet ouvrage la seconde édi-
tion de la Bibliothèque historique du
P. Lelong. Nous n'avons vu que l'édi-
tion de I BîJB ; on croit qu'il n'en existe
pas de i6i5. Cette liistoirc va jusqu'en
1 6 1 o. IL Catalogue des éve'ques de
Béziers j i65o , in-4''. Ce catalogue va
jusqu'en iG5o. W — s.
ANDRADA (Antoine), né vers
l'année 1 .'58o, entra iort jeune dans la
compagnie de Jésus, et se distingua
par un zcle infatigable , dans les mis-
sions des Indes et de la Tatarie. Si la
religion lui doit beaucoup, la géogra-
phie lui doit aussi une découverte im-
portante. En i6i4, il pénétra dans le
Thibet, probablement visité dans le
i5'. siècle, par Marc Paul, mais, de-
puis, totalemeuî oublié des Européens.
AND 1,7
De retour à Goa, ses supérieurs l'em-
])lovèrent dans plusieurs allaires im-
portantes. Il mourut empoisonné, le
1(3 mars iG34- La relation de sou
voyage, qui parut à Lisbonne, (u
1G26, et dans laquelle il confond le
pays qu'il avait parcouru avec le
Cathay ( la CLine ) , prouve que ses
connaissances sur les contrées de I»
haute Asie n'étaient pas très-ctcndues,
11 est, d'ailleurs, très-diH"n iie de dé-
mêler la vérité, au milieu des fables
qu'il débite sur le Tbibct ; il était ré-
servé à l'Anglais Turiier de lever une
grande partie du voile qui a long-temps
couvert l'antique patrie du grand La-
ma. Le Fojage d' Amlrada a été tra-
duit en français , Paris, 1628 , in-8".
MM. Pérou et Billecocq en ont donne
une nouvelle traduction, dans un Re-
cueil de Fojages au Thibet , Paris ,
179G, in- 18. L. R — E.
ANDRADA (Diego Payva d'),
théologien portugais, né en i5'28, à
Coimbre. 11 était fils du grand trésorier
du roi Jean. Sou goût le porta d'abord
vers les missions ; il avait même com-
mencé à s'y livrer, lorsque le roi
don Sébastien l'envoya au concile
de Trente, où il parut avec distinc-
tion. De retour eu Portugal, d y mou-
rut, en là-jS. Ses ouvrages sont:
L Orlhodoxarum quœstionum libri
X, etc. , contra Kemnitii petulantetn
audaciam, Venise, i5()4, in-4 '•? édi-
tion rare , et plus correcte que celic
de Cologne , in-8 '., de la même année.
Le premier livre , qui est une apologie
des jésuites, fut imprimé l'année sui-
vante, à Lyon. II. Defensio Trid.
Jîdei libri FI adi'ersùs hcereticor.
detestabiles calumnias , Lisbonne ^
i5'j8, in-^". , lare et recherchée;
Cologne, i58o, in-8\ Le 6'. livre»
qui traite de la concupiscence et de l;v
conception immaculée de la Sainte-
Vierge, est le plus curieux , à caiis^.
1 1 8 A ?<: D
de la dircrsite des nombreux senli-
mcRts que rauteiir y rapporte. III. De
conciliorum autontate. Cet ouvrage
fut bien reçu à Rome, parce qu'An-
drada v donne une grande extension
à l'autorile du pape. IV. Sept volumes
de Sermons, ci quelques autres écrits.
Andrada e'tail un liorarae d'esprit et
d'une grande application ; il a su
éviter la sécheres-e scholastique, par
la vivacité' et l'éicgancc de ses ou-
vrages. Ce qu'il dit , dans les deux
premiers, en faveur des sages du paga-
uisrae, auxquels il attribue la foi «|ui
fait vivre les justes, et, par consé-
quent, le salut, a été souvent cité par
les apologistes de Zwingle , sur cet ar-
ticle. Lcibnitz ne manque pas non plus
de s'en prévaloir. — Diego eut , pour
frères , François d Andrada , conseiller
et hisîoriograplie de Philippe 111, au-
teur d'une Histoire de Jean III, roi
de Portugal, Lisbonne, 1 5->,3, in-4''-i
et de quelques autres ouvrages; et
Thomas d'Andrada, plus connu sous
le nom de Thomas de Jésus , réfor-
mateur des Auguslins déchaussés. Il
suivit le roi Sc'bastien , dans la malheu-
reuse expédition d'Afrique. Il fut ra-
cheté, et eut la liberté de retourner
dans son pays ; mais il préféra rester
dans les fers, pour soutenir et encou-
rager ses compagnons d'infortune ,
employant, à les soulager, les sommes
d'argent que la comtesse de Lignarcs,
sa sœur, et le roi d'Espagne, lui fai-
.«aient passer pour son usage. C'est
dans cet état qu'il mourut, en 1582 :
il est auteur d'im livre plein d'onc-
tion , intitulé les Soufjrances de Jésus,
composé dans sa prison, traduit en
français, i vol. in-i2.— Diego, fils
de François, mort en i G6o, à 8 + ans,
est avantageusement connu en Portu-
gal, par un poëme en douze livres,
sur le siège de Chaou! , et ])ar la criti-
que d"i premier volume de la ?Jonay~
AN D
chie portugaise, de Bernard Biiîo ,
qui lui avait été préféré pour l'emploi
de bibliothécaire du roi. Cet ouvrage,
qui parut sous le titre d'Examen des
antiquités de Portugal, i vol.in-4".,
est d'une critiq;:e saine et approfondie.
Le même a encore donné, en i()5o ,
son Casajnento perfeclo, ou le Par-
fait MaJ'iage : livre d^une bonne mo-
rale , assez bien écrit , et qui a eu de
nombreuses éJilions. T — d.
ANDRADA (Hyacintde-Freire d'},
né à Beja , vers l'an 1^97 , d'une an-
cienne famille de Portugal , se distin-
gua de trts-bonne heure dans l'uui-
ATrsité de Coiiiibre; il y fit même im-
primer, sous le titre de Traduction ,
un écrit espagnol, pour défendre les
droits de la maison de Bragance. Son
mérite le mit 01 fiveur à la cour d'Pls-
pagne. Le duc d'O'ivarès l'admit à sa
confiance, prit ses conseils dans les
affaires importantes, et lui fit obtenir
la riche abbaye de Sainte-Mai ic-des-
Champs. Ces bienfaits n'enipêcluTent
pas Andrada de soutenir, devant le mi--
nistre favori, que le roi d'Espagne
n'avait d'autre droit sur le Portugal
que celui de la force et de l'usurpation.
11 composa même un écrit en faveifi'
de Catherine , duchesse de Bragance.
Cette franchise l'aurait fiit arrêter,
sans la précaution qii'il prit d'aller se
cacher dans son abbaye. Jean IV, re-
monté sur le trône de ses ancêtres, lui
offrit d'être précepteur du prince de
Brésil, et le nomma à l'évêché de
Viseu. Andrada refusa le premier em-
ploi , parce qu'il n'espérait pas tiref
beaucoup d'hoimeur d'un tel élève, et,
le second, parce qu'il prévovait que le
pape, qui ne reconnaissait pas le non-
veau roi , lui refuserait ses bulles.
Quelques mécontentements qu'il eut
de la cour, l'obligèrent de se retirer à
son abbaye; mais l'ennui l'en ayant
cfcas5c. après un assez long séjour, il
AND
revint se fixer à Lisbonne, où ii ter-
mina sacanière, en lôâ-j. Andrada
était d'an caraclèrc libre , gai et léger,
qui le faisait aimer dans la société , et
qui nuisit à sa fortune. Il avait cora-
posé un livre sur la Trinité, et une
Fie de don Juan de Gaslro , vice-
roi des Indes, qui périrent dans l'in-
cendie de sa maison. La Vie qu'il nous
a donnée de ce vice-rui, n'est que l'a-
brégé de celle qui fut brûlée j elle passe
jiour l'ouvrage le mieux écrit qu'on
ait en portugais. Le P. dcl Rotto l'a
traduite et puliliée en latin, à Rome.
Le peu de poésies latir»es que nous
avons de cet autour , se trouve dans
le Fenix Renacidœ : elles brillent par
leur élégance. — Gomez Freire d'An-
DRADA, son neveu, mort général de
cavalerie, avait composé une Histoire
du Maragnon ^ qui n'a point été im-
])rimée, et qui, dit-on, méritait de
l'être. — Andrada ( Alphonse d' ), né
à Tolède, en logo, axait déjà ensei-
gné la philosophie dans cette ville,
quand il entra dans l'ordre des jésui-
tes , en 1O22. Il y professa la théolo-
gie morale, etc., et mourut à Madrid,
le 20 juin 1G72. 11 a publié, en es-
pagnol, un grand nombre d'ouvrages,
Sont les principaux sont ; ï. Itinéraire
historique , Madrid , 1637 , '2, vol,
in-4". ; II. Méditations pour tous
les jours de l'année, 1660, 4 vol.
in- 16; III. P'ies des Jésuites illus-
tres , 1666 et 1667 ' ^ ^°'" iîi'folio;
IV. une traduction des cinq Li%>res
nscétiques du cardinal Bellarmin ,
i65o , in-8°. On trouve la liste de ses
autres ouvrages dans la Bibl. Script.
Societ. Jesu. T — d.
ANDR AGATHE, né sur les bords
duPont-Euxin, commandait, en 585,
duis les Gaules, la cavalerie de Maxi-
me, lorsque ce rebelle entreprit de se
i'.iire coinomier empereur; Andraga-
the, digne ministre d'un tel maître,
AND
ïiO
«vaut appris que l'erapcrenr Gratien,
trahi et fugitif, approchait de Lyon ,
courut à sa rencontre , enfermé dans
une litière ; le malheureux prince pa-
rut bientôt sur l'autre bord du Rhône j
Andragathe lui fit dire que sa femme
Lacta venait le joindre pour partage r
ses infortunes; Gratien se hâta de tra-
verser le fleuve; mais, à peine eut-il
mis le pied sur la rive, qu' Andragathe
s'élança de sa litière et le poignarda.
Ce récit n'est cepeft^ant pas confirme
par tous les auteurs ( ^. Gbatie.n).
Quoi qu'il en soit, Andragathe s'attacha
étroitement à la fortune de Maxime,
et , lorsqn'en 587 , ce dernier voulut
envahir tout l'empii-e d'Occident ,
et passa les Alpes pour combattre
Théodose, Andragathe fut chargé de
défendre l'entrée de l'Italie par les
Alpes-Juliennes ; mais Maxime le tira
bientôt de ce poste important, pour
l'envoyer, avec sa flotte, à la poursuite
de Valeutinien. Andragathe chercha
vainement ce jeune prince sur les mers
d'Italie et de Grèce; il essuya un échec
sur les côtes de Sicile, et se hâta de
faire voile pour AqaileV, afin de se
réunir à Maxime. Ce fut dans ce trajot ,
qu'il apprit la défaite et la mort du
tyran , dont il avait partagé les crimi-
nels projets. N'espérant plus de par-
don pour lui-même, il se précipita
dans la mer, en 588. L — S — e.
ANDRÉ ( S. ) , apôtre , frère de S.
Pierre. L'un et l'autre étaient de Beth-
saïde , et exerçaient le métier de pé-
cheurs à Capharnaiira. André s'attacha
d'abord à S. Jean-Baptiste ; il fut le
premier disciple que J.-C. se choisit ,
et se trouva aux noces de Cana , quoi-
que iS. Epiphane dise le contraire. Les
deux frères étaient occupés à pêcher ,
lorsque le Sauveur leur promit de les
faire pécheurs d'hommes , s'ils vou-
laient le suivre. A l'instant, ils qnittèrer.l
leurs filets, et s'attachèrciU irrc'voca-
1*20 AND
bleinent à sa personne. J.-C, ayant ,
l'année suivante , forme le collège des
apôtres , ils furent mis à la tête des
autres , et eurent , peu de temps après ,
le bonheur de recevoir J.-C. chez eux ,
à Capbarnaiim. André ne paraît plus
dans l'Évangile , que pour indiquer les
cinq pains et les deux, poissons , dont
5,000 personnes furent miraculeuse-
ment nourries . et pour faire à J.-C. la
question sur l'époque de la ruine du
temple. Les événements relatifs à ce
disciple, deviennent incertains après la
mort de son maître , parmi les anciens;
les uns le renvoyent porter la lumière
tie l'Évangile dans la Scytbie et la
Sogdiane , les autres , dans différentes
contrées de la Grèce , et lui font su-
bir le martyre à Patras , capitale de
l'Achaie , sans pouvoir en fixer l'épo-
que ; les Moscovites sont persuadés
qu'il annonça la foi dans leur pays ;
l'opinion commune est que cet apôtre
fut crucifié. Les peintres donnent à sa
croix une forme différente de celle de
J.-C. , et la représentent en forme
d'un X , quoique celle qu'on prétendait
conserver à S. Victor de Marseille , ne
différât point de la croix du Sauveur
du monde. Philippe, duc de Bourgogne
et de Brabant , avait obtenu et trans-
porté à Bruxelles une partie de cette
croix. II a couru , dans les premiers
temps de l'église, un faux Evangile sous
le nom de cet apôtre. Nous avons en-
core aujourd'hui des actes qui portent
son nom, et qui n'en sont pas pour cela
plus authentiques , quoiqu'ils soient
regardéscorarae tels par Baronius et le
P. Alexandre. Les Ecossais honorent
S. André comme le principal patron
de leur pays. T — D.
ANDRÉ (S.), d'Avclin , clerc régu-
lier théatin , né, en i5'2i , à Castro-
Nuovo, dans le royaume de Naples,
prit le bonnet de docteur en droit,
exerça la profession d'avocat dans la
AND
cour ecclésiastique de Naples , qu*3
quitta pour se consacrer entièremenî
à la pénitence dans la congrégation
des théatins. La réforme qu'il intro-
duisit dans quelques communautés re-
ligieuses, lui suscita beaucoup de con-
tradictions , au milieu desquelles il
mourut, en 1608 , épuisé de fatigue et
de vieilles^e. Il fut canonisé , en i ■] 1 2 ,
par Clément XI. La ville de Najiles et
la Sicile l'ont choisi pour un de leurs
patrons. Ses OEiwres de pieté ont élé
imprimées eu 5 vol. , Naples , i ■; 55 -
34. Nous avons encore de lui des Let-
tres intéressantes^ Naples i -j 52, '^ vol.
in-4". T — D.
ANDRÉ I". , roi de Hongrie, était
prince du sang royal , cousin de
S. Etienne , fils aîné de Ladislas-le-
Chauve , et concurrent de Piene P''. ,
^\tV Allemand ; il fut forcé, ainsi que
ses frères Bêla et Levrntlia , de quitter
la Hongrie, et de se réfugier en lîussie,
à l'avènement de ce prince , l'an i o44«
Rap]ielé néanmoins , en 1047 , par
des seigneurs hongrois , mécontents
du gouvernement de Pierre, il parvint
à chasser le roi, et à monter sur le
trône, après avoir promis de laisscp
à la nation hongroise la liberté de sui-
vre i'idolntiie, qui était l'ancienne re-
ligion ; mais André ne fut pas plutôt
en possession de l'auforilé , qu'il força
ses sujets à embrasser le christianisme.
Il se hâta ensuite de faire couronner
sou fils Salomon , âgé seulement de
cinq ans , pour lui assurer le trône,
malgré la convention par laquelle son
frère Bêla , duc de Hongrie , devait
jouir lui-iTiême de l'hérédité. Bêla fo-
menta des divisions, et se fit un parti
parmi les grands du royaume. La
guerre fut bientôt déclarée entre les
deux frères. Bêla , qui avait trouvé des
secours en Pologne , soutenait ses pré-
tentions avec autant de vigueur que
de courage. De son côté, André recul
AND
des renforts envovcs par l'empereur et
par le duc do Bohème , et livra biiîaille
à son frère, l'an loGi , sur les bords
de la Tcyssc; mais, abandonne par les
Hongrois au moment même de l'action ,
il fut enveloppe et fait prisonnier ; s'é-
tant évadé, il se réfui^ia dans la foret
de Boxon , où il mourut bientôt de
chagrin et de misère. Son frère Bêla se
fit couronner à sa place. B — p.
AiNDRÉ II , roi de Hongrie, sur-
nomme' le Ifierosolrmitain, second
fils de Bcla lîl , se révolta contre son
frère aîné , Emeric , qui avait succède
à leur père ; mais il fut abandonné
de tous ses partisans , et oblige de
se mettre à la merci de son frère. Le
caractère d'André , après cet événe-
ment , changea tellement à son avan-
tage , qu'il devint un des plus fidèles
appuis du trône. A la mort de son ne-
veu Ladislas, en i2o4, il Ini succéda,
du consentement général des élats du
royaume. Pendant les douz" premières
années de son règne , la Hongrie jouit
d'une paix profonde. Ce ne fut qu'en
l'iin, qu'André partit, avec une ar-
mée de Hongrois , pour la guerre
sainte, non par terre, comme l'as-
sure Bonfidius , mais sur des galères
de Venise. Les annales de cette répu-
blique rapportent que Je roi de Hon-
grie fut transporté, avec ses troupes,
en Palestine , sur la flotte vénitienne ,
et qu'il céda , en récompense , aux
Vénitiens , tous ses droits sur la Dal-
matie. On assure d'ailleurs , que ce fut
pour accomplir un vœu de son père
Bêla , qu'André fît son expédition ;
mais il paraît plutôt que ce fut dans
la crainte des censures de l'Église,
dont le pape Honorius III le mena-
çait, s'il différait plus long-temps,
d'aller combattre les infidèles. Bon-
fidius et Blondus prétendent que le
roi de Hongrie ne revint dans ses
états que trois ans après son départ ;
AND i-ii
mais Jacqiies de Vitry-, témoin ocu-
laire, atteste qu'André reprit la route
de son royaume dès l'année suivante
1 2 1 8 , malgré les prières des autres
chefs de la croisade , qui insistèrent
vivement pour que ce monarque les
accompagnât au siège de Damiette.
L'excommunication dont le frappa le
patriarche de Jérusalem ne lit pas
plus d'effet. André promit toutefois,
par un serment solennel , en présence
des évêques et seigneurs allemands,
qu'il ne ferait point la guerre au duc
d'Autriche , pendant tout le temps
que ce prince resterait a la croisade,
et qu'il laisserait même la moitié de
ses troupes en Palestine , sous son
commandement. Relevé alors de l'ex-
communication lancée contre lui, An-
dré, après s'être baigné dans le Jour-
dain , partit pour la Hongrie avec la
moitié de ses troupes. Il n'avait sé-
journé que trois mois en Palestine, et
il paraît certain que la nouvelle de
quelques mouvements excités dans
son royaume accéléra son retour.
Selon plusieurs historiens , ce fut pen-
dant son expédition que la reine Ger-
trude, sa femme, fille de Berthold,
duc de Moravie , fut assassinée d:uis
son palais , par le palatin Bancbanus,
à qui il avait confié la régence. Ce
seigneur lava dans le sang de la reine
l'outrage fait à sa femme , par le frère
de cette princesse. On assure qu'xAn-
dré, ayant acquis la preuve que la reine
avait tiTrapé dans la violence crimi-
nelle de sou frère , pardonna au pa-
latin ( Poj. Bancbanus ). Quoi qu'il
en soit , le roi de Hongrie revint par
mer, sur la flotte vénitienne, et fut
reçu avec de grands honneurs à la
cour d'Azon, marquis d'Est, dont il
épousa la fille , nommé Béatrix. Ce fut
aussi pendant son voyage de la Terre-
Sainte qu'il maria son fils aîné Bêla,
avec la fille de Théodore Lascaris ,
111 AND
empereur gicc. De retour en Hon-
grie , André trouva tout son royaume
dans le de'sordre et la eonfusion. Les
jijrauds avaient profite' de son absence
pour augmenter leur pouvoir, et usur-
per les domaines et les revenus de la
couronne, L'expe'dition de la Pales-
tine ayant occasionne des dépenses
cxtr.-ordinaircs , le roi fit de vains ef-
forts pour remédier à l'épuisement
des finances et aux maux de l'état. Il
prit enfin le parti de convoquer , en
1222, une diète générale, et, résolu
de s'attacher plus étroitement la iio-
Llesse et le clergé, il confirma, et
étendit même les privilèges que leur
avait accordés S. Etienne, et composa,
dans cette assemblée, ce décret célèbre,
ou huile d'or ^ véritable droit pul)lic
des Hongrois , monument aulïienti-
que de son amour pour ses peuples.
André y explique la nature du gou-
vernement établi par les coutumes et
les capitulations ; il y renouvelle les
privilèges et immunités de cette par-
tie de la nation appelée mililantcs , ou
sen'ientes palriœ; il promet de n'im-
j)oser aucune taxe sur les biens de la
noblesse et du clergé, sans le consen-
tement de ces deux ordres, cl termine
par ce fameux serment : « Si moi ,
» ou mes successeurs , voulions on-
«freindrc, en quelque temps que ce
» soit, vos privilèges, et porter aîleintc
» à la préseule constitution, qu'il vous
» soit permis , en vertu de cette pro-
« messe , à vous et à vos descendants,
» de résister et de vous défendre à
i> foiTC oiiverte , sans pouvoir être
» traités de rebelles. » Une copie de
ce serment fut envoyée au pa])e , et
une autre , mise en dépôt entre les
mains du palatin chargé de veiller
sur les intérêts de la nation : « Afin,
)) est-il dit , qu'ayant toujours cet écrit
» devant les yeux , il ne s'écarte pas
» de son devoir, ni ne consente que
AND
» les rois ou les nobles s'ccai'tcnt du
» leur. » Vers la fin du règne d'André,
les Tatars firent quelques incursions
en Hongrie. Ce prince mourut le -]
mars 1 235 , après avoir régné 5o au'^.
\\ est regardé comme un des plus
grands rois qui aient porté la cou-
ronne de Hongrie , et comme le -sou-
verain dont la mémoire inspire aux
Hongrois le plus de reconnaissance et
de vénération. Il eut pour successeur
son fils aîné. Bêla , à qui il avait déjà
résigné le souverain pouvoir. B — v.
ANDRÉ III, roi de Hongrie, petit-
fils du précédent , surnommé le Vé-
nitien, parce qu'il était né à Venise,
était fils d'Etienne de Hongrie , fiis
posthume d'André II , et de Thoraas-
sinc IMorasini. Sa mère l'ayant amené
très-jeune à la cour de Ladislas , ce
monarqi'.e le reconnut pour son héri-
tier; mais André était absent lorS(jue
Ladislas mourut. En passant par les
étals d'Albert , duc d'Autriche, pour
aller prendre ]K)ssession de son rovau-
me, il fut arrêté, contre le droit dos
gens , par ordre de ce prince, et n'ob-
tint la liberté qu'eu promettant d'é-
pouser sa fille Agnès. De retour à
Bude, André fut proclamé et cou-
ronné , le 1 1 août ] 5.90. Non seule-
ment il refusa de tenir la parole que
lui avait si indignement arrachée le
duc d'Autriche , mais il voulut enrore
se venger de cet affront , et il lui dé-
clara la guerre. L'empereur Rodolphe .
instruit de la résolution d'André, lui
suscita, pour l'occuper en Hongrie,
im concurrent, dans la personne d'Al-
bert , son propre fils. Le roi de Hon-
grie avait déjà un autre rival dau's
Charles Martel, fils de Charles II , 1 -i
de Naples. Apres avoir pris toutes 1( <
mesures nécessaires jiour résister à ers
deux rivaux , il porta ses armes on
Autriche pendant cinq campagnes d(î
suite. Rappelé dans ses états par tle
AND
11 onvpanx trouilles , il se liàta de faire
la paix avec le duc d'Autriclie , et de
il cimenter par son mariage avec
Agnès; mais il trouva la Hon2;rie en-
core divisée par quelques nobles , qui
soutenaient son compétiteur Ciiarles,
fi's du roi de Sicile, Le royaume de-
meura partage entre ces deux princes
rivaux, jusqu'à leur mort, ariivec en
i5oi. Charles mourut àNaples, et
André, à Bude, le i4 janvier de la
même année, après onze ans de règne.
Il fut le dernier roi de la famille de
St. -Etienne , n'avant laisse , de sou
mariage avec Agnès d'Autriche, qu'une
fiile nomme'e Elisabeth , qui prit le
voile dans le monastère de Roess, en
Suisse. Plusieurs compétiteurs se dis-
putèrent alors la couronne, qui devint
enfin le partage de la maison d'Anjou,
régnante à Napîes. B — p.
ANDRÉ DE Hn>GRiE , ri i de Na-
pîes , nomme ^^tidreasso par les Na-
j)oiilains , était second fils deCaribcrt,
loi de Hongrie; il fut appelé à la suc-
cession du rovau)ne de Nnph s , par
Rcbert , roi des Deux-Sici!es (jui , après
avoir usurpé celle couronne à (>aiibert,
se voyant sans enfants, voulait la faire
retourner à ses héritiers légitimes.
Robert fît, en i555, épouser à son
priit-neveu, Jeanne sa petile-fille. An-
dré n'était alors âgé que de sept ans^
mais déjà son caractère était fier , iui-
jiétiïïïux , presque féroce , tel enfin que
les mœurs encore demi-sauvages des
Hongrois avaient dû le former. Déjà
on l'avait accoutumé à dédaigner les
arts et la mollesse du midi, et bientôt
il conçut pour la cour de Naples, pour
sa femme et pour les princes du sang ,
un mépris qu'il ne prit pas la peine de
dissimuler. Le roi Robert, dès qu'il
reconnut ces dispositions hostiles ,
s'ciTorça de faire rentrer André sous la
dépendance de Jeanne. H fit prêter
i>cr!iiCïUdc fidélité à cctteprincesse par
AND iï3
les barons du royaume , et , lorsqu'il
mourut, en i34â, Jeajme fut seule
C'uronnéc, tandis qu'André continua
d'être désigné ])ar le nom de Duc de
Calabre. André, jaloux d'une autorité
qu'il croyait lui être due, impatient de
toute contrainte , et se croyant insulté
par torite opposition , sollicitait le paps
de le faire couronner; et sur l'étendard
qu'il destinait à cette cérémonie , il avait
lait peindre une bâche, un billot et
d'autres instruments de supplice, an-
nonçant à ses courtisans que , dès qu'il
serait roi, il ferait justice de ses arro-
gants ennemis. Jeanne, de son côté,
voluptueuse et inconstante, apprenait
de ses amants à mépriser son mari et à
le craindre. Louis de Tarente , son cou-
sin, qui l'avait entraînée dans le vice,
l'accoutuma, le premier, à souhaiter la
mort d'André. Philippine Cabane, dite
la Catanoise , sa confidente , lui fit dési-
rer cet événement, comme la délivrance
de son royaume, aussi bien que la sien-
ne. Jeanne donna son consentement à
un complot formé autour d'elle par ses
parents et ses courtisans. La cour était
alors dans un couvent près d'Averse,
hn'sqiie, le i8 septembre t545, les
conjurés , sous prétexte que de grandes
nouvelles étaient arrivées de Napîes ,
firent appeler, pendant la nuit, André
qui était auprès de la reine. Dès que
le prince fut au milieu d'eux , ils lui
jetèrent un lacet autour du col , et le
poussèrent hors d'un balcon peur l'é-
tr^ingler, tandis que leurs complices,
qtii étaient au-dessous, le tiraient par
les pieds. Le meurtre fut accouipli
avec une férocité révoltante , et le ca-
davre d'André, laissé dans le jardin,
fut trouvé mutilé d'une manière d'au-
tant plus horrible, que les cofijurés
n'avaient point osé employer de fer
contre lui , persuadés qu'unie amulette
qu'il portait le mettrait à l'abri de leurs
coups. Auvsi périt ce malheureux prin-.
re , à l'âge de \ C) ans. ( /". .Teatîne I".
LoL'is DE Tarente, et Cabane ).
S. 8—1.
ANDRÉ, juif de Cyrèue, surnom-
me LucuAS par Eusèbe, et Y Homme
tles lumières , par Abiil - Farage , se
rendit fameux sous i'einpire de Tra-
jan , à la tête de ses compatriotes ,
auxquels il persuada qu'il les ferait
rentrer triomphants à Jérusalem. I/en-
thousiamc qu'il inspira à ce peuple
crédule , lui procura plusieurs avan-
tages sur Lupus , préit t d'Egypte ,
qu'il obligea do se renfermer dans
Alexandrie, où ce général se vengea
de ses défaites par le massacre de tous
les Juifs qui habitaient cette grande
ville. André , usant de représailles ,
ravagea le plat pavs , désola toute
la Lybie, dont plus de 2oo,uoo ha-
bitants devinrent les victimes de ses
fureurs. Ces horribles désordres s'é-
tendirent jusque dans l'ile de Chypre,
où les Juifs, sous la conduite d'un
nommé Artémion , firent jiérir un
égal nombre de Grecs et de Komains.
Si l'on en croit Dion Cassius , les uns
étaient sciés dans toute la longueur du
corps , les autres devenaient la proie
des bètes féroces, contre lesquelles on
les faisait combattre. Les barbaies
vainqueurs mangeaient leurs «hairs,
se frottaient le corps de leur sang , et
se revêtaient de leurs peaux , après les
avoir écorchés vifs ; mais ces allrenx
détails ne sont pas confirmés par Eu-
sèbe. Ce ne fut qu'après plusieurs
combats très-sanglants , que INlartius
Turbo, d'autres disent Adrien . général
des troupes romaijjes, vint à bout de
les soumettre. T— d.
A>DUÉ, dit de Crète ^ parce qu'il
fut archevêque de cette île au com-
mencement du 8'. siècle, ou le Jèro-
soi) tnitain, parce qu'il était i esté quel-
que temps à Jérusalem, était natif de
Damas. Il s'acquit une grande répula-
AND
lion à Conslantinuple, par son el'iquon-
ce et par sa vertu. Il avait donné da!,*
les erreurs des monotheiites ; mais il
confessa ensuite la doctrine des deux
volontés eu J.-C. On place sa moit
vers l'an -jao. Le P. Combefis a pu-
blié , de cet archevêque , un poème
en vers iambes , un Commentaire
sur V Apocah pse ( mis en latin pai
Peltan , IngoLstadt, «5n4, et dans le
S. Chrvsostôme de Commelin ) , que
d'habiles critiques attribuent à Audi e
de Césarée. On trouve encore, sous
le nom de cet auteur , plusieurs dis-
cours dans la Bihliolhèciue des Pères ;
mais qu'on crcil être d'un auteur pos-
térieur. T — D.
AINDRÉ (Jean r)'),Ie plus célèbre
canoniste du 14*^. siècle, naquit , selo»
la plupart des auteurs, d;ins le canton
du 31ugello, près de Florence, mais ^
selon Tiraboschi , d'après un passaî;c
de Jean d'André lui-même, c'est à
Bologne qu'd naquit, et c'était Andréa
son père qui était né au Mugello. An-
dréa était maitre d'école à Ijologne,
et se fit prêtre lorsque Jean n'avait
encore que huit ans. Elevé d'abord par
son père , il étudia ensuite le di oii c.>-
non sous plusieurs professeurs de cette
université célèbre. Son dernier maître
fut Gui de Baiso , arehidiacro de Bo-
logne , où il reçut gratuitement le
doetoiat. Ce fut aussi par sou crédit
qu'il obtint à Bologne une chaire de
professeur j il eu remplit successive-
ment deux autres , l'une à Tadoue et
l'autre à Pise. Il mourut de la peste à
Bologne, le t juillet 1 34^, après avoir
professé le droit canon pendant 4 J ms
avec le plus grand éclat. Un a dit «ju'il
s'était fait dominicain, soit paice(|u'd
fut enterré dans l'église de ces reli-
gieux, soit parce qu'il avait pris lo
parti de cet ordre contre les francis •
cains, au sujet de la fameuse question
de i' Immaculée Conception; mais d
a?;d
tsî cerlaln qu'il vcciit et mourut sécu-
lier. On lui prodigua, dans son épifa-
j)he, les titres pompeux , d'archi-doc-
teiir des décrets , de rabbin des
docteurs , di^ lumière , de censeur^ et
de res^le des mœurs. ( Rabbi doctO'
rum , lux., censor, iwrinaque mo-
rum.) On pi'ctcnd que Buonincontro,
surnommé d'Andréa, dont nous avons
des ïrailés de jurisprudence, était son
fils naturel. Christine de Pisao assure
que sa (ilie aînée, nommée Novella ,
qu'il maria depuis avec Jean Caldcrino,
le remplaçait souvent dans sa chaire,
« et afin que la biauté d'elle u'cm-
» pescliast pas la pensée des oyans ,
» elle avait une petite courtine au de-
» vant d'elle. » I^es ouvrages qui nous
restent de ce savant canoniste, sont :
I. des Commentaires sur les De'cré-
iales et sur le Sexte^ qu'il intitula
NoK^ellœ , du nom de sa mère et de
sa fille, Rome, 1476; Pavie, t484;
Bàle , 1 4^0; Venise, 14B9, 1490 et
i58i ; II. des Commentaires sur les
Clémentines., ou sur les Novelles de
Clément /^ , Stiasbourg , 1471 ;
Mayence , Rome et Bàle , i47^';
J.yon, ir>~»i, in-ful.; III. des Addi-
tions au Spéculum j'uiis de Durand,
prises mot à mot des Consilia d'Ol-
diade, Paris , iSj-'î; Bàle, 1574.
C'est ainsi qu'il s'était encore approprié
le Traité de Sponsalibns et matrimo-
»io de Jean Anguissola , ou Anguis-
ciola. ( f^qy. Caldkrino. ) T — d.
ANDRÉ ( ValÈke ) , surnommé
Dksselius, du bourg de Desschel, dans
le Brabant , où il était né, en i5,i8,
fut professeur royal de droit, et bi-
bliothécaire de l'université de Lou-
vain , où il mourut en i65(>. Cet au-
teur est principalement connu par
l'ouvrage intitulé : Bibliotheca Belgi-
ca , Louvain , iGi5, iu-8". ; iG.p,
in -.'(''., édition augmentée. Foppens ,
chanoine de Bruxelles, en a donné
AND liî
une nouvelle édition en 1739, Bruxel-
les, in-4"., "2. vol., dans laquelle il a
fondu ce qu'on trouve dans Lemire,
Swerts et autres. Quoique cette der-
nière soit la plus belle , la plus amole
et la plus utile, les curieux i-echcrchent
encore les premières, parce qu'elles
contiennent des particularités que le
nouvel éditeur a abrégées ou omises.
C'est un bon ouvratre en ce genre , à
quelques mexactitudes et quelques
minuties près, défauts presque insé-
parables de cette sorte de composi-
tion. On a , du même auteur, I. Ca-
talogus claroT. Hispaniœ scriptor. ,
sous le nom de f^al. Taxander; Mo-
gimt. , 1607, in-4''. , rare ; ll.Fasii
academici sludii Lovaniensls., etc. ,
Louvain , i(35G, in-4". , considérable-
ment augmenté dans l'édition de i65o,
qui fut mise à Yindex ; III. Synopsis
juris canonici ; IV. De toga et sa-
gis, etc. T— D.
ANDRÉ (Jacques), proprement
Andre.î;, célèbre théologien du lÔ".
siècle, naquit, en i5iS, à Waiblin-
gen, dans le duché de Wurtemberg ,
fit ses études à Tubingcii, et fut pro-
fesseur de théologie , chancelier de
l'iuiiversilé , et prévôt. Ses lumières,
so!i énergie et son éloquence, lui ac-
quirei'.t la plus grande considération
dans l'Eglise luthérienne, et il n'v eut
jir.s de réunion ou de colloque en ma-
tière de religion , où il ne fut appelé.
On l'a accusé de violence et d'esprit
d'iutrigue. Quoiqu'on ne puisse pas
l'absoudre entièrement de ce reproche,
il est sûr qu'il a rendu de grands ser-
vices à sa communion. Il fit de nom •
breux voyages dans toutes les parties
de l'Allemagne, pour y organiser le
culte luthérien , et fut un des princi-
paux auteurs de la Formule de la
concorde ( Formula concordiœ ) ,
dont la rédaction définitive fut arrê-
tée en i5;0, au couvent de Bers^en,
i)6 AND
près de IMagdebourg , et qui devait
mettre un terme à toutes les disputes
élevées dans le sein de rAlleraagne
protestante, depuis la mort de Luther.
Le principal but de ce livre symbo-
lique était d'opposer aux opinions des
réformés , sur l'Eucharistie et la na-
ture humaine de J.-C. , à laquelle ils
refusaient la toute-présence , la doc-
trine de ce réformateur ; et , si cette
nouvelle profession de foi de ses sec-
tateurs a rendu l'union des calvinistes
et des chrétiens de la confession
d'Augsbouig désormais beaucoup
plus difficile, il n'est cependant pas
douteux qu'elle n'ait ramené la con-
corde au milieu des luthériens eux.-
nuMues , en terminant ou assoupissant
toutes les controverses qui avaient eu
lieu sur la grâce, sur les sacrements,
sur les bonnes œuvres , et sur la per-
sonne du Sauveur, depuis la naissance
du culte protestant. Parmi les confé-
rences que Jacques Andreae tint sur des
points religieux, il faut remarquer
celle qu'il eut , en i S-; i , avec Flacius ,
à Strasbourg , sur le péché originel,
que ce dernier soutenait être la sub-
.staneemème de l'homme, et son entre-
vue avec Théodore de lîiv.e, à INTont-
belliard, quatre ans avant sa mort,
qui arriva le "j janvier, i5r)o, à Tu-
Lingcn. Ses nombreux écrits sont
presque tous polén)iques , dirigés con-
tre le calvinisme et contre l'Eglise ro-
maine , ou destinés à défendre la doc-
trine de l'ubiquité ou de la présence
du corps du (Ihrist en tous lieux.
Ses contemporains l'ont aussi appelé
ScJunidlin, on Fahricius ( maréchal ),
à cause de la prof ssion de son père.
La vie de ce théologien a été écrite
fort souvent , même en hexamètres
latins , par Jean-Valentin Andréa?. Ou
peut consulter Adami , Filce theol.,
pag. 5o2. Son portrait est dans le
Theatrum de Freher, et on trouve
A>D
une médaille frappée en son honneiir
dans le Musée de Mazucchi, tome i ,
planche qI. S — R.
ANDiîÉ, ou ANDRÉ.E ( Jeax-
Yalenti> ) , un des hommes les pins
utiles et les plus intéressants que l'Al-
lemagne ait produits dans le i-i". siè-
cle. Il était petit-fils de Jacques , et
naquit à Herrenberg, dans le duché
de\^ urtemberg, en 1 5o6. Apres avoir
fait ses études à Tubingen , et quel-
ques voyages en France et en Italie ,
il parcourut les différents échelons de
dignités ecclésiastiques qu'offrait son
pavs , et mourut, en i6j4i ^W^éd'A-
deiberg , et aumônier luthérien du duc
de \\ urtembei'g. Profundéraent affligé
de voir les priijcipes de la reUgion
chrétienne livrés à de vaines dis-
putes, et les sciences servir l'orgueil
et la curiosité, au lieu de tourner au
profit de la vertu et du bonheur des
hommes , il passa sa vie à imaginer ,
à proposer et à organiser les moyens
qu'il croyait les plus propres à rendre ,
aux unes et aux autres , leur tendanco
morale et bienfaisante. Il emplova le
crédit , dont il jouissait, auprès de son
souverain, et auprès du duc de Bruns-
^vick -Woltlnbiittel , pour améliorer
l'état de l'instruction publique dans
les états de ces princes , et ne cessa ,
durant tonte sa vie , d'opérer ou de
préparer tout le bien que ses lumières
et son zèle lui faisaient désirer. Uc
la propension pour la mysticité , une
activité qui se portait sur tous les
genres de connaissances, ruic corres-
pondance étendue , et des allusions
mvstérieuses ou susceptibles de sens
divers , dont ses prenuers ouvrages
fourmillent, ont fiit naître ou accré-
dité le bruit qu'il est le véritable fon-
dateur du fameux ordre des Rose-
Croix. On ])eut consulter là-dessus le
savant ouvrage de IM. Fred. INicolaï,
Sur les crimes imputés aux Tem-
AIND
pliers, 2". vol. , pag. l'jf). Feu M. de
rierder a discute cette qiicbtion dans
le Muséum Allemand de «779,
et s'est prononcé pour la négative.
]\Ialgré une autorise' aussi imposante ,
deux littérateurs distingués de l'Al-
lemagne, M. Chr. G. de Murr {Sur
la véritable origine des Rose-Croix ,
SalzijacLi , 1 8o5 , in-t> '. ) , et M. J. G.
Buhle, dans une Dissertation lue, ea
i8o3 , dans une séance de la société
rovale de Gcettiugue ( De vera ori-
gine adhuc latente fratrum de Rosea-
Cruce , inprimis vero ordine Jran-
comurariorum)j et publiée en alle-
mand par l'auteui-, en 1804, in-8'.,
cnricLie de nouveaux développe-
ments, penchent pour l'opinion qui
rapporte à J.-Yal, Andréa^, sinon l'ori-
gine, au moins une nouvelle organisa-
tion de l'ordre des rose-croix, alïilié ou
identique avec celui des franc-maçons ,
dans lequel la mémoire d'Andréœ a
toujours été singulièrement vénérée.
La nature même de la chose ne laisse
guère d'espoir qu'elle soit jamais éclair-
tie suffisammeni. Si l'on cherche vai-
nement, dans la Biographie latine de
sa vie, qu'Andréa; avait laissée en ma-
nusciit , et dont M. Seybold a donné
une traduction allemande dans le se-
cond volume des autobiographies
d'hommes célèbres , imprimées à
Winterthour, eu 1799, in-8'., quel-
ques renseignements positifs sur ses
relations avec l'ordre dont on le dit
fondateur, en revanche, les écrits
d'Andi-éae , qui ont paru de son vi-
vant, sont pleins de raisonnements
sur la nécessité de former une société
uniquement consacrée à la régénéra-
tion des sciences et des mœurs. Quoi
qu'il en soit , il finit par désapprouver
la tendance de l'ordre dont on le croit
l'instituteur, et il est plus certain qu'il
ne lui appartint plus vers la fin de sa
vie, q.ul ne l'est qu'il en ait été le
AND nj
créateur. Ses ouvrages , au nombre de
cent , sont en partie indiqués dans
Adelung, et , plus complètement, dans
nne brochure particulière de M. Burk,
pasteur à Weiltingeu , dans le Wur-
temberg, Tubingeu, 1790 , in-8°.Ea
voici quelques-uns des plus remar-
quables: I. De Christiani Cosmoxeni
genitura judicium , Monlbelliard ,
1612 , in-r^ • c'est une satire contre
les astrologues; II. CoUectaneorum
mathcmaticorum décades AI, Tu-
biugen, 161 4, in- fi°. ; Ul. Im'ilatio
ad fraternitaiem Christi ; prior ,
Strasbourg, 16 1 7 ; posterior, ibid.,
1G18, in-i-2j IV. Rosa fujrescens,
contra Menapii calumuias , 1617,
in-8 '. ; l'auteur de cette apologie des
Rose Crois, se signe Florentïnus de
Falentia , nom qu'Audréae s'est donné
quelquefois , ainsi que celui d^An-
drœas de P'alentia; mais il n'est
pas entièrement sûr que cet ouvrage
soit de lui ( Voy, |a Bibl. theol. de
Walch). V. Menippus s. Dialogorum
satyricorum centuria inanilum nos-
tralium spéculum. Helicone juxta
Parnassum , 16 1 7 , in- 1 2. C'est dans
cet ouvrage qu'Andréœ s'est montré
vraiment supérieur à son siècle. Il y
fait toucher du doigt les défauts sans
nombre qui empêchaient l'Église et
les lettres d'être aussi utiles qu'elles
pouvaient l'être avec luic meilleure or-
ganisation. VI. Civis Chrislia7ms,sive
Peregrini quondam crranlis resti-
tutiones , Strasbourg, 1619, iii-8'. ;
traduit en français, sous le titre du
Sage citoyen , Genève , i G:i 2 , in-S". ;
\ II. Mj tholugiœ christianœ , sive
virtulum et vilionim vitce humance
imaginum libri III , Strasbourg,
1619, in- 12. MM. Sontag et Herder
en ont traduit en allemand la meilleure
partie. VIII. Reipublicœ christiano-
politancE desciiptio ; Turris Babels,
Judiciorum defralerniîate Rosacejs
Î2B AKD
Cruels chaos; Christianœ socielalis
idea; ces trois écrits , tous publies à
Strasbourg, en i6i9,in-i2, offreut
les indices les plus dairs de son projet
de former une société secrèti?. On ne
peut nier que sou imagination n'ait
ètc fortement travaillée par une idée
analogue , et , si deux ouvrages alle-
mands, intitulés, l'un les Noces chi-
miques de Chrétien Rosencreiitz ;
l'autre , la Réforme générale du
monde , sont en effet de lui , l'opi-
ïiion de INIM. Bulile et de Murr, ac-
quiert un haut degré de prttbahi-
lité. On cite encore , à l'appui , les
Voyages d'Andreœ, auquel ses con-
tenîporains n'ont connu aucun nioyen
de les entreprendre. Cet homme
cnigraatique est encore remarquable
comme écrivain na'ional. Dans un
temps où la langue allemande n'avait
encore reçu que peu de culture , où
tous les gens de lettres écrivaient en
lalin les livres au-îvquels ils donnaient
quelques soins , et où l'idiome du pays
n'était, comme dit ÎM. de Ilcrder, ré-
servé que pour les affaires du ménage
et du cœur, il sut donner à ses vers
une grâce et une aisance toutes parti-
culières. Il ne faut y chercher, ni
élégance, ni correction, ni beaucoup
d'harmonie; mais on est siàr d'y trou-
ver une imagination poétique , une
belle ame , et un heureux emjiloi du
dialecte de la Souabe ; on peut dire
qu'il préluda aux hciueux essais
d'Opitz. ( !.. Melch. Fischlini, Me-
moria theologurum Wirlemherg. ,
tome fl, page \i<^\ Son portrait
est dans le Theatrinn de Freher.
S— R.
AiSDRÉf Yves-Marie ),néle'>,2 mai
iG75,à Châteaulin, en basse Breta-
gne, entra chez les jé-^uites, en i6()^.
La distinction avec laquelle d fournit
sa carrière scholastiquc. dans plusieurs
collèges de proviuce, semblait le dési-
AND
gncr pour aller figurer sur le théâtre
de la capitale ; mais la défaveur où
le mit, dans son corps, la modérition
de ses sentiments sur les affaires qui
agitaient alors l'Église de France ,
l'obligea de se fixer, en 1 726, dans la
place de professeur roval de mathé-
matique, à Caen, qu'd remplit pendant
trente -neuf ans. Le P. André, dès
son début dans la république des let-
tres, attacha une grande réputation à
son nom , par V Essai sur le beau , qui
parut en 1 74 1 , in-i 2. Cet ouvrage, où
règne une philosophie douce et pro-
fonde, ornée des fleurs d'une littéra-
ture exquise, est devenu classique.
Le manuscrit du Discours sur le beau,
dans les pièces d' esprit, àonu^xX pour
modèle , le Craron fin de Pascal.
Une main étrangère substitua, dans
l'imprimé , le Pinceau léger de Pé-
lisson. L'auteur fut sensible à ce chan-
gement: il s'en plaignit. mais sa posi-
tion ne lui permettait pas de réclamer
publiquement. Ce ne fut qu'après être
devenu libre, par la destruction de sa
société, qu'il put faire rétablir, dans
l'édition de 1765, la leçon qui avait
étésuppriraée sans son aveu. Le P. An-
dré avait des sentiments peu analogues
à ceux de ses confrères, sur les ma-
tières de théologie et de philosophie :
il était grand admirateur de S. Augus-
tin, et avait eu même le projet d'en
composer la Yie, et d'y joindre une
analvse de ses ouvrages, .'^iiicèn-ment
attaché aux maximes de l'Église galli-
cane, il trouvait étrange qu'on laissât
aux moines la liberté de former , dans
le royaume, un parti pour les doc-
trines ultramontaines. Quoique soumis
aux décrets de Rome, sur le jansé-
nisme, il aurait voulu que tout le monde
se fût renfermé dans le silence, sur
les questions agitées alors avec tant
d'aiiimosilé. On voit, par sa corres-
pondance avec l'abbé de IMarbœuf,
ANO
qu'il blâmait les procèdes de ses coîi-
fières contre le cardinal de Noaillcs.
Admirateur de la doctrine du P. Mal-
lebranchc, il eut un commerce de let-
tres très-suivi avec ce célèbre philo-
sophe, qui ne finit qu'à la mort de ce
dernier. Il a consigne ses regrets sur
cet e've'nenient , dans une lettre extrê-
mement intéressante, au P. Lelong,
de l'Oratoire. Cette lettre , qui n'aurait
pas dépare' la collection de ses œuvres,
ne contient que l'esquisse de la Vie de
son illustre maître, qui est encore ma-
nuscrite, et que nous savons avoir e'té
e'trangement mutilée par celui qui en
est le dépositaire actuel : les senti-
ments du P. André' percèrent dans sa
société. On l'accusa d'être un novateur
en philosophie, et d'avoir une doctrine
suspecte en théologie. 11 fut éloigné des
charges, dépouillé de celles qu'il pos-
sédait, changé de lieu de résidence,
menacé d'un exil rigoureux. Heureu-
sement que la considération dont il
jouissait au dehors, et le crédit de ses
protecteurs, forcèrent ses supérieurs à
mettre des bornes à leurs tracasseries.
La paix fut conclue , sous la condition
qu'il ne serait plus question , entre ses
confrères et lui , des objets qui avaient
fait la matière de leurs contestations.
Mais rien ne fut capable de l'ébranler
dans ses opinions. 11 disait plaisam-
ment, à ce sujet : « Je ne saurais
» faire comme le P. Dutertre, qui, en
» vertu de la sainte obédience , s'est
» couché le soir Mallebranchiste, et
» s'est levé le matin, bon disciple
» d'Aristote. » A la destruction des
jésuites , le P. André se retira chez les
chanoines réguliers de Caen ; et le par-
lement de Rouen pourvut honorable-
ment à ses besoins. C'est dans cette
retraite qu'il termina paisiblement sa
longue carrière, le 9.G février 1764.
M. l'abbé Guyot , son ami , a recr.eilli
ses œuvres , qui ont été imprimées à
II.
Paris, en i^Gô, 5 vol. in- 12. Les
pièces de ce Hecueil sont inférieures à
Y Essai sur le beau; cependant, on
sent la touche de l'auteur dans le
Traité de l'Homme. Le P. André a
laissé plusieurs manuscrits, dont on
trouve une notice à la fin de l'éU ge
dont M. Guyot a orné l'édition dont
on vient de |iarler. La Correspondance
du P. André avec le P. Mallebranche
est entre les mains d'un homme de
lettres. T-d.
ANDRÉ (le Petit-Père). Foy.
BoULLANGER.
AiNDRE ( Jean ) , peintre , né à
Paris, en 16G2. A 17 ans, il se fit re-
ligieux dominicain. Ses supériem's
l'ay ,nt envoyé à Rome, il y étudia les
grands maîtres, et en revint avec un
talent assez estimable. Ses tableaux, re-
présentant des sujets de dévotion ,
étaient placés dans plusieurs églises
de Paris , et principalement dans celles
des jacobins. Ils sont aujourd'hui ,
pour la plupart, dispersés ou perdus ;
mais les arts ont fait, à la fin du 18*.
siècle , des pertes plus regrettables.
Le frère Andié était un de ces pein-
tres laborieux qui ne s'élèvent pas
aux grandes beautés de l'art. Venu
dans un temps où la peinture tendait
h la décadence, il sui\it la route tra-
cée par ses contemporains, plutôt que
celle des grands maîtres dont il était
allé méditer les ouvrages à Rome. Il
refusa, par modestie , d être reçu à l'A-
cadémie. Lafosse et Jouvenet avaient,
dit-on, de l'estime pour ses talents.
Il mourut à Paris, en 17^3, âgé de
91 ans, et eut, pour élèves, Duraont^
dit le Romain, Chasle et Taraval.
D— T.
ANDRÉ (Jean), musicien célè-
bre, né à Offenbach, sur le Rhin, le
liBmars \']l\i. Sa mère, qui dirigeait
dans sa ville natale une grande manu-
facture de soie, le destinait au com-
9
iDo AND
merce; mais son goût pour la musique
l'emporta , et , malgré le manque
d'instruction sui^^e , il y fit les plus
rapides progrès. Pendant qu'il était
chez un négociant de Francibrt-sur-
le-Mein , il composa son premier
opéra, le Potier, qui obtint un grand
succès; il mit en musique, peu après,
Envin et Elmire, opéra dont Gœtlie
avait fait les paroles. Cet ouvrage fut
joué sur le tliéàlre de Berlin , avec de
grands applaudissements. André se
rendit alors dans cette ville, obtint
la direction du grand tbéâtre , et se
distingua par de nombreuses compo-
sitions. Mais , comme la fabrique de
musique qu'il avait laissée à Offenbacli
périclitait en son absence , il se rendit
dans sa patrie , et reçut , avant de
partir, le titre de maître de chapelle du
margrave de Brandebourg - Schwcdt.
On a de lui vingt opéras, et des pièces
moins étendues : une mélodie fort spi-
rituelle en est le caractère : il s'était
formé presque sans maître. Un excès
de travail le conduisit au tombeau,
le 18 juin 1799. G — T.
ANDRÉ ( Charles ) , perruquier , à
Paris, eu 1756, était né à Langres,
eti i^aa. Un gentilhomme, nommé
de Lasalle Dampierre, l'un des régis-
seurs de l'impôt sur les cartes , dont
André était le perruquier, lui persua-
da de devenir auteur tragique. André
goûta cet avis, et, bientôt après, pa-
îurent successivement trois éditions
du Tremblement de terre de Lisbon-
ne , tragédie en cinq acte$ et en
vers, par M. André , perruquier,
privilégié, demeurant à Paris, me
de la Vannerie, près la Grève; im-
primé à Amsterdam ( Paris ),et se
vend chez l'auteur, m. DCC.LVi,in-8".
La première édition , dont le titre est
en grosses lettres romaines, porte la
fausse date de 1 755. On y voit , pour
cui-tic-ltmipc , uue grosse perruque ,
AND
dans l'intérieur de laquelle est une
tète à perruque. M. Dampierre était le
principal auteur de cette facétie , quoi-
qu'elle parût sous le nom d'André , qui
prit la chose au sérieux , et dédia la
pièce à l'illustre et célèbre poète ,
M. de Foliaire, qu'il appelle mon-
sieur et cher confrère. Cette farce
n'avait jamais été représentée, et était
oubliée, lorsqu'eu i8o5, à l'occasion
d'un mélodrame joué au théâtre de la
Porte-St.-iVIartin , on fit jouer sur un
très-petit théâtre des Boulevarts, et
réimprimer le Tremblement de terre
de Lisbonne ; et on en donna quatre-
vingts représentations, qui furent tou-
tes très-suivies. Si André eût vécu, il
eût encore été la dupe de cet empresse-
ment du public, qui, lui-même , était
la dupe de Dampierre. Quelques per-
sonnes attribuent aussi cette pièce à
M. Paris de IMaizienx. A. B — x.
ANDRÉ BARDON. Foj. Dandré.
AJNDRE DK St. - Nicolas , reli-
gieux carme, ué à Remiremont, en
Lorraine , vers iG5o, mort à Besan-
çon, en 1715, a publié: L De la-
pide sepulchrali, antiquis Bur^undo,
Sequanorum , comitibus , f'esuntio-
7ie,in S. Joannis Evangelisiœ Basi-
licd, recens positd, Besançon , 1695,
in-i2. C'est la critique d'une ins-
cription récemment ])lacée sur le
tombeau des anciens comtes de Bour-
gogne, qu'on voyait dans l'église ca-
thédrale de Besançon; II. Lettre en
forme de dissertation sur la préten-
due découverte de la ville d'Ajitr*
en Franche- Comté ; Dijon, Mioard,
1698, in-ia. Le P. Dunod , jésuite ,
venait d'annoncer qu'il avait décou-
vert la véritable position de l'ancienne
ville d'Avenches ( Aventicum ), et il
la plaçait près du lac d'Autre , aux
environs de Moirans. Cette opinion
insoutenable avait cependant trou\e
des partisaas. Le P. André la com-
AND
battit avec autant de clialeiir que cle
j-aison; mais, comme ou le pense bien,
il ne put parvenir à convaincre sou
adversaire. Le P. André a laisse' plu-
sieurs ouvrages manuscrits , concer-
nant riiistoixe ecclésiastique de Be-
sançon ; les plus importants sont : Se-
qiiani Chrisliani , seu Christiana
Sequanoruiii Decas historica ; uu
Pouillé des bénéfices du diocèse ,
qu'il a intitule : Folypticon Vesun-
ûno-Sequanxcimi ; et enfin f^eteres
Sequanorum regidi. Ces manuscrits
sont conserves dans la bibliothèque
publique de Besançon. Le P. Le Long
attribue au même auteur une Histoire
généalogique de la maison royale
de Bourbon , ancienne et moderne.
Le P. André a coopère à ï Histoire de
V Eglise Sl.-Etienne de Dijon , par
l'abbé Fyot. Il a travaille' aussi à l'his-
toire de l'abbaye de Cluni. W — s.
ANDRE (John ) , adjudant-ge'ne'ral
dans l'armée anglaise, à l'époque de la
guerre d'Amérique , fut victime de la
perfidie du général Arnold, qui, fei-
gnant de trahii- les Américains , avait
demandé à ouvrir une correspondance
secrète avec les Anglais. Le général en
chef Clinton , chargea AncLé de suivre
cette correspondance; et, lorsque toutes
les mesures furent prises pour l'exécu-
tion du projet d'Arnold , André vint le
trouver à West-Point , pour prendre
avec lui les derniers arrangements;
mais , à son retour , il fut arrêté par
trois soldats de milice , au moment où
il se croyait hors des postes de l'ar-
mée américaine. On trouva sur lui le
plan du fort de West-Point , avec des
notes de la main d'Arnold , sur l'état
de la garnison et des fortifications de
ce poste important , et sur les moyens
de l'attaquer. Traduit aussitôt devant
une commission militaire, André fut
condamné à mort , comme espion , et
ex«'cuté le 2 octobre 1780. Uu esprit
AND 1 D I
fin , une imagination brillante, une
élocution facile, un goût décidé poui."
les beaux-arts , les formes les plus sé-
duisantes, tout se réunissait pour ren-
dre intéressant ce malheureux jeune
homme. Après son arrêt de moi-t , il
s'occupa moins de lui que de sa fa-
mille , et du général Chuton, qu'il ai-
mait tendrement. Le colonel Harail-
tou , aide-de-camp de Washington ,
le consola dans ses derniers moments.
Il mourut avec le plus grand courage.
Les spectateurs fondaient en larmes ,
et cette catastrophe ne fit pas moins
délester Arnold par les Anglais que
par les Américains. B — a.
A>Di;É DEL CASTAGNO. Foj-.
Castagno.
ANDRÉ VANNUCCHI , dit André
DtL SaRTO. f^OJ'. VaNNUCCHI.
ANDRÉ ( LE P. CuRYSOLOGCE ).
/^oj'. Chrvsglogue.
ANDRÉ ( LE MARECnAL Sai>t-).
^. Saint- André.
ANDREA , piètre et chanoine de
Bergamc, vivait à la fin du [f. siè-
cle. Il est auteur d'une Chronique , qui
s'étend depuis l'entrée des Lombards
en Italie jusqu'à la mort de l'empe-
reur Louis II, c'est-à-dire, jusqu'en
874? et un peu au-delà. Elle a été
publiée par Muratori, dans leP''.voL
de ses Antiquités d'Italie , pag. 4*
et suiv. L'auteur y raconte lui-même
que , l'empereur étant mort à Brescia ,
sou corps fut porté à Milan , et qu'il
fut un de ceux qui le portèrent, dans
toute l'étendue du diocèse de Ber-
game , ^est-à-dire , depuis l'Oglio jus-
qu'à l'Adda. G — e'.
ANDREA (Alexandre d'), auteur
italien du 16'^. siècle , a écrit un ouvrage
historique , intitulé : Délia guerra di
campagna di Roma e del regno di
Napoli nel pomijicato di Paolo IP^,
Vanna i556 et iSS'-j , ragiona-
menti III^ etc, Ruscelli lefitimpri-
9-
î32 AND
mer à Venise, en i56o, in-4". ; il
fut réimprimé eu i6i5 , et traduit en
espagnol, en iSSq. Toppi , dans sa
Bibliothèque Napolitaine , ajoute que
d'Andréa avait aussi traduit le livre de
l'empereur Léon sur l'art de la guer-
re, et qu'il y avait ajouté de très-beaux
discours ; mais cet ouvrage , qu'il ne
faut pas confondre avec le précédent ,
n'a jamais été imprimé. G — e.
A^'DREA ( Jean ) , évêque d'Ale-
ria , eu Corse , s'est fait un nom dans
la république des lettres , non par ses
ouvrages , mais par le soin qu'il prit
par ordre du pape Paul II , de diriger
et de corriger les premières éditions
qui se firent, à Rome, de plusieurs au-
teurs latins , lorsque , peu de temps
après la découverte de l'imprimerie,
les deux célèbres imprimeurs, Conrad
Svveignbeym , et Arnould Pannartz ,
allèrent y exercer leur art. Sou nom
de famille était Bussi ou Bossi. II
était né à Vigevano , en i4i7- Après
avoir langui quelques années à Kome,
dans un état de dénuement et de
pauvreté , il en sortit , en s'attacbant
au cardinal de Cusa. Il obtint , par le
crédit de co cardinal, le titre de se-
crétaire de la bibliotbèque aposto-
lique , ensuite l'cvêclié d'Accia , dans
l'île de Corse , d'oîi il passa bientôt
après à celui d'Alcria. Les principales
éditions qu'il dirigea , et auxquelles
il ajoutait toujours des préfaces et des
cpîtres dédicatoircs , sont celles des
Epitres de S. Jérôme, en i vol. ; des
Épitres et des Oraisons de Çieéron ;
des Commentaires de César, de Lu-
cain , d'Aulu - Gelle , d'Apulée , de
Pline , de Quintilien , de Suétone ,
de Slrabon , de Virgile, d'Ovide , de
SiHus-Italicus , de Tite-Live, etc.
Les dates de ces éditions , justement
lechercbées , s'étendent depuis 1468,
jusqu'en i474' Quelques auteurs lui
ont attribué des écrits sur les Décré-
AND
taies , sur les Fiefs , etc.; mais ils Vont,
sans doute , confondu avec le célèbre
canoniste Jean d'Andréa , quiflorissait
dans le même temps. G — e.
ANDREA (Onuphre d'), poète
napolitain, florissait en i63o , et
mourut vers 1647. Quoiqu'il parti-
cipât à la corruption du style qui ré-
gnait alors , Crescimbeni et le Qua-
drio le mettent cependant au nombre
des meilleurs poètes du 17''. siècle.
On a de lui : L deux poèmes , l'un
fabuleux, l'autre héroïque, Aci ,
poema,canli FUI, inottava rima,
Naples , I Gi^ , in- 1 2 , et Italia lihe-
rata, poema eroico , Oi'e si traita la
distruzione del regno de' Longobar-
di , XX canti , Naples, 1 6;J G , in- 1 2 ;
II. deux pièces àc \\icà.hQ ,X Elpino ,
favola boschereccia , Naples, 161Q,
in- 12, et la Vana gelosia , comme-
dia , Naples, i655, iu-12; III. le
recueil de ses Poésies lyriques , eu
2 parties, Naples, i65i et i655,
iu-i 2 ; IV. des Discours sur différents
sujets de morale et de philosophie ,
Discorsi in prosa , che sono délia
bellezza, delf amicizia, delV amo-
re, délia musica , etc. , Naples , 1 Gj6,
in-4". G — É.
ANDREA de Nerciat. P\ Nerciat.
ANDRE A. ( PiSANO ), sculpteur et ar-
chitecte, naquit à Pise, en 1270. Déjà,
Aruolfo di Lapo , Jean de Pise , et
quelques autres , d'après l'exemple et
les conseils de Cimabué et de Giotto ,
avaient , en partie, renoncé au style go-
thique , qui régnait encore dans les
arts du dessin, et, prenant pour mo-
dèles les ouvrages des anciens, ra-
menaient la peinture , la sculpture et
l'architecture aux bons priucipes.
André de Pise contribua plus qu'eux
tous à cette heureuse révolution ; et ,
en cela , il fut aidé par les circons-
tances; car , à cette époque , ses com-
patriotes , très-puissants sur mer , fai-
AND
saient le commerce avec la Grèce, et
CD rapportaient des statues , des bas-
reliefs antiques, et jusqu'à des colon-
nes de marbre précieux, qu'ils em-
ployaient à la construction ou à l'or-
nement de leurs édifices , et surtout
de la cathédrale et du Campo Santo,
André fit la comparaison de ces beaux
ouvrages avec ceux qu'on avait exé-
cutés jusqu'alors , et ce fut pour lui un
trait de lumière, qui le guida dans la
bonne route , que devaient achever de
frayer les Donatello, les Brunelleschi
ei les Ghiberti. Les premiers ouvra-
ges d'André de Pise eurent tant de
succès , qu''il fut appelé à Florence
]>our exécuter , sur les dessins de
Giotto, les sculptures de la façade de
Stc-Marie del Fiore, le monument le
])lus magnifique de ce siècle. Il com-
mença par la statue de Boniface VIII,
])rotecteur des Florentins; il l'accom-
jiagna des figures de 5. Pierre et de
^*>. Paul , et de plusieurs autres saints
jicrsounages. Vers 1 586 , tous ces
morceaux de sculpture furent enle-
vés , lorsqu'on voulut refjiire cette fa-
çade sur un dessin plus moderne ;
mais, ce projet n'ayant pas eu de suite,
les statues d'André furent dispersées
dans l'église et en d'autres lieux ; on
en a transporté quelques-unes dans
l'allée princijjale du Poggio impériale,
maison de plaisance des grand -ducs
de Toscane. On cite la Madone et les
deux Anges, qu'on voit sur l'autel de
l'église de la Miséricorde , comme
ayant été faits dans le même temps ,
par André; ce groupe en marbre , et
de grandeur naturelle, est d'une bonne
exécution , et on remarque déjà dans
les poses une certaine souplesse qui
est voisine de la grâce. A la mort d'Ar-
nolfo di Lapo, la république de Flo-
rence chargea André de tous les grauds
ti-avaux qui s'exécutaient sur son ter-
iitoire ; bientôt après , il fut employé,
A ^' D 1 55
comme ingénieur ; il éleva des fortifi-
cations autour de la ville de Florence,
menacée par les armées impériales,
et construisit le château fort de Scar-
peria , situé au IMugclIo , sur le re-
vers de l'Apennin. Dans un temps plus
tranquille , André s'était occupé de
l'art de couler et de tiavailler le
bronze. Ce talent lui devint bientôt
utile ; les Florentins , voulant imiter
dans leurs temples la magnificence des
anciens , résolurent de prodiguer la
sculpture sur les portes de bi'onze du
baptistère. Giotto , dont le nom est
mêlé à tous les grands travaux de ce
temps , fut chargé de composer les
dessins de ces portes ; André se char-
gea de les exécuter. Elles sont cou-
vertes de bas - reliefs , représentant
toute l'histoire de S. Jean-Baptiste. Les
compositions sont bien entendues; les
attitudes des figures sont naturelles et
expressives, quoique toujours un peu
roides ; mais tous les détails sont ci-
selés avec im art et une adresse infinis.
Ces portes , commencées en 1 55 1 ,
furent terminées , pohcs et dorées huit
ans après; on les posa d'abord à l'en-
trée principale de l'édifice; mais, ayant
été remplacées ensuite par les admi-
rables portes de Laurent Ghiberti,
elles furent transportées à l'une des
faces latérales , où on les voit encore.
André exécuta plusieurs autres ou-
vrages en bronze , tels que le taber-
nacle de San-Giovanni , des bas-reliefs
et des statues qui ornent le campanille
de Sainte-Marie del Fiore. Cet ar-
tiste fit un vo3-age à Venise , pour
enrichir de sculpture la façade de l'é-
glise de St.-Marc ; il donna aussi le
modèle du baptistère de Pistoia , exé-
cute en i557 , et érigea, dans une
église de cette ville, le tombeau de
Ciino d'Angibolgi. Gaultier de Brienne,
duc d'Athènes, qui avait nsurpé le
pouvoir à Florence, chargea André de
i54 AND
plusieurs travaux d'arclutectm-e, et lui
fit élargir les places, fortifier son pa-
lais, et élever plusieurs tours sur les
murs de la ville 5 il lui fit bâtir la belle
porte San Friano , et presque toutes
les antres. Enfin , ce duc lui demanda
le modèle d'une forteresse qu'il vou-
lait faire construire sur la costa San
Giorgio , pour contenir les Florentins;
mais ayant ete' lui - même chassé en
1343 1 cette forteresse ne fut bâtie
que bien plus tard , par les Me'dicis ,
sous le nom de Behédère. André ne
partagea point la disgrâce du duc d'A-
thènes ; on ne considéra que les ser-
vices qu'il avait rendus; il fut nommé
citoyen de Florence , où il mourut ,
en 1 345 , comblé de biens et d'hono-
rables distinctions ; il fut inhumé à
St.-Marie dcl Fiore , oij son fils Nino
lui érigea un monument. Parmi les
élèves d'André Pisano, on cite Nino
son fils , qui termina une figure de la
' Vierge , commencée par son père ,
pour l'église de Santa Maria Novella ,
et qui exécuta beaucoup d'autres ou-
vrages de sculpture , tant à Florence
qu'à Pise et à Naplcs. C — n.
AN DRÉADE( Ferdinand d'),
amiral portugais , fut l'un des capi-
taines qui portèrent dans l'Inde les
lois et les arts de l'Europe. Andréade
fommandait, en i.5i8, la première
flotte européenne qui ait paru siu' les
cotes de la Chine. Il y fit le commerce
avec une modération et une bonne foi
à laquelle ses compatriotes n'avaient
point accoutume les peuples de l'Asie.
Au moment de son départ, on publia,
par son ordi'c , dans tous les ports où
il avait abordé , que. si quelqu'un avait
à se plaindre des Portugais , il était
invité à faire sa déclaration, pour que le
coupable fût puni , en présence même
de l'offensé. Cette conduite allait faire
ouvrir à sa nation les ports que la
jalousie des Chinois ferme si se-
AND
vèreraent aux étrangers , lorsque Si-
mon d'Andréade , frère de Ferdinand,
parut sur les côtes avec une nouvelle
escadre. Celui-ci détruisit, par la vio-
lence et le bjigandage , l'heureux etîVt
de la prudence et de la vertu de son
frère. Les ports de la Chine furent fer-
més aux Portugais, et n'ont été rou-
verts, depuis cette époque, aux navi-
gateurs européens , qu'à des condi-
tions onéreuses et humiliantes. E — o.
ANDREJ^. ( Jean ) , archiviste des
comtes de Nassau , qui vivait au com-
mencement du 1 -y", siècle , et occupa
cette pkce pendant quarante ans. U
a écrit une Histoire fort volumineuse
de la maison de Nassau, et , comme il
en avait les archives à sa disposition ,
son travail est fort précieux , surtout
pour l'histoire de la guerre de trente
ans , sur laquelle il a publié des do-
cuments qui ne se trouvent point ail-
leurs. G — T.
ANDREiE ( Jean - Gebard - Rein-
hard), pharmacien, non moins dis-
tingué par ses connaissances que par
ses vertus , né à Hanovre, en 1 724 ,
fit ses premières études à Berlin, et
parcourut ensuite , pour les achever,
les principales universités de l'Alle-
magne et de la Hollande. Il séjourna
aussi quelque temps en Angleterre ,
et contracta , ^vendant ses voyages , des
relations d'amitié avec les physiciens
et les chimistes les plus célèbres de ce
temps , tels que Musehenbroek , Fran-
klin , de Luc , Gmelin , etc. De retour
à Hanovre, il prit la direction de la
pharmacie de son père ; publia , dans
le Magasin Hanovrien^ des Disser-
tations de physique et de chimie, la
plupart intéressantes , et forma un
beau cabinet d'histoire naturelle ,
dont il a laissé, à sa mort, un cata-
logue raisonné. En i -jGS , le roi d'An-
gleterre le chargea d'examiner les
principaux genres de terre de Tclec-i
AND
torat de Hanovre , et le re'sultat de
ses recherches parut , en i "j 69 , sous
le titre de: Dissertation sur un grand
nombre de terres qui forment le sol
des possessions allemandes de S. M.
Biitannique . et sur leur emploi peur
l'agriculture. Les pertes de fortune
et les soLiftVauccs physiques qui rem-
plirent la fin de sa vie, interrompi-
rent ses travaux , mais n'alte'rèrent
point la douceur de son caracti?re. 11
mourut, en l'jga, regrette' surtoutdes
pauvres, qu'il avait toujours soignes
gratuitement. Le médecin Zimmer-
ii^nu , qui lui donna des soins pen-
dant sa maladie , parlait avec une
haute estime de ses lumières et de
ses vertus. Son portrait se trouve en
tête du 77''. vol. de la Biblioth. allem.
unif. de Kicoiaï. G — t.
ANDREAS, ou ANDRON , médecin
grec , disciple d'Hérophile , qui , selon
Polybe , vivait sous Ptolémée Philopa-
tor , deux siècles av. J.-C. Dioscoride
le cite comme s'étant distingué par la
connaissance des plantes; Celse, com-
me ayant beaucoup écrit sur la chi-
rurgie et les vertus des médicaments.
Galien en parle avec mépris , mais sans
doute pour venger Hippocrate, qu'An-
drcas , par aveuglement pour son maî-
tre Hérophile, faisait profession de dé-
daigner. Il avait composé un ouvrage
sous le titre de Narthex , espèce de
pharmacopée portative, qui n'est pas
parvenue jusqu'à nous , et qu'on ne
connaît que par ce qu'en dit Galien.
Voici les ouvrages que IManget lui at-
tribue , et qui sont aussi perdus pour
nous : I. De rébus in quibusque op-
pidis Siciliœ memoralibus ; II. De
Medicd origine ; 111. De iis quœ
falso creduntur ; IV. De iis quœ
morsus venenata surit , sive de ser^
pentibus ; V. De herbis sifedeplan-
tis ; VI. Glossometa ad Nicandrum.
On croit qu'il faut distinguer cet An-
ANT) i55
dréas d'un autre médecin du même
nom , fils de Chrysarus , auquel Ga-
lien fait le reproche d'avoir introduit,
dans la médecine , les noms et les su-
perstitions des Babyloniens , et autres
peuples orientaux. C. et A — n.
ANDREHAN, ENDREGHEN, ou
ANDENEHAM (Ar>-oul, sire d'),
maréchal de France , sous les rois Jean
et Charles V , se distingua contre les
Anglais , et obtint la faveur du roi
Jean , auquel il s'était attaché lors-
qu'il n'ciait encore que duc de Nor-
mandie. Ce prince lui fit assigner une
l'cnte sur le trésor royal, en i5f3,
et le nomma, six ans après, capitaine
souverain du comté d'Angoulème. La
trêve avec les Anglais ayant été rom-
pue , en 1 55 1 , Arnoul d'Andrclian
fut fait prisonnier dans un sanglant
combat en Saintonge. Après sa déli-
vrance et la mort du maré<hal de
Beaujeu , le roi le fit maréchal de
France , lieutenant - général dans les
provinces situées entre la Loire et la
Dordogne , et lui donna , en outre , la
terre de Wassiguies , près de Guise. îl
le chargea d'aller défier Edouard ,
prince de Galles, dit le Prince noir,
et ensuite d'étouffer une révolte de
la ville d'Arras , où il lit décapiter,
aux yeux du peuple, vingt révoltés des
plus coupables ; ce qui fit tout ren-
trer dans le devoir. Andrehan accom-
pagna le roi Jean à la bataille de Poi-
tiers, en i556, commença l'attaque
av<'c 5oo hommes d'armes, et, en-
veloppé par les archers anglais , se
rendit prisonnier, et fut conduit eu
Angleterre. A son retour, ilconimand.t
en Languedoc , suivit Dugiieschn eu
Espagne , au secours de Henri d&
Transtamare , contre Pierre-le-Cruel ,
et fut fait encore prisonnier à la ba-
taille de Navarelte, eii 1567. Après
avoir obtenu sa liberté , 11 remit sa
charge de maréchal àCliaile^V, quanl
]36 AND
son âge ne lui permit plus d'en exer-
cer les fondions , et reçut , en dédom-
magement, celle de porte-oriflamme.
« Chose non octroyée , ditBellcforest,
» qu'à des chevaliers vieux et expéri-
» mcnte's , et renommes de grand'-
» prudhomie.5) Ne pouvant supporter
l'inaction, il retourna, quoique vieux
et casse', chercher en Espagne de nou-
veaux dangers avec D.ugu( sclin , et y
mourut de maladie , en i j'jo, laissant
son héritage à Jean de Neuville, son
neveu, maréchal de France, B — p.
ANDREINI ( François ) , do Pis-
loia , comédien célèbre , fleurit à la fin
du lÔ*". siècle. 11 eut pour femme Isa-
belle de Padouc, comédienne comme
lui, mais qui dut surtout sa célébrité
à ses ouvrages. La troupe dont ils
étaient chefs ])ortait le titre de i Ge-
losi, (les Jaloux), et la devise de la
troupe annonçait que c'était de vertu,
de renommée et d'iumneur que ses
membres étaient jaloux : Firlù , fnma
ed onor ne fer gelosL Andreini joua
d'abord les rôles d'amoureux, ensuite
celui de Capilan Spavcnto délia ludlc
inferna, rôle de charge , dont nos Ca-
pitaines Tempête ne sont que le dimi-
nutif. Il s'y fit une grande réputation.
Il voulut la fixer , en quelque sorte ,
par son ouvrage intitulé : le Bra-
vure del Capilan Spavento , imprimé
pour la première fois à Venise , en
1609, in-4". Ce sont soixante-cinq
ragionameriti , ou entretiens entre
le Capitaine et son valet Trappola.
Andreini avait alors perdu sa femme,
qu'il regrettait beaucoup. Ii miten tête
de cet ouvrage bouffon , un discours
sérieux , ou plutôt triste , où il ex-
prime , à sa manière , sa tendresse
pour elle et ses i-cgrets. Il publia , de-
puis , d'autres dialogues en prose :
liagionamenti fantastici posti infor-
ma di dialoghi rappresenlativi , Ve-
nise, 16 ri, iu-4''. Ou a aussi de lui
AND
deux pièces ou représentations tlîc'a-
traies , en vers : U Altère zza di Nar-
ciso, Venise, 161 1 , in-i-j, et YIn~
gannata Proserpina , ibid., même
année. Andreini avait une excellente
mémoire; aussi apprenait-il facilement
les langues étrangères. Il entendait et
parlait le français, l'espagnol, l'escla-
von , le grec moderne, et même le
turk. Il vivait encore en 16 16; on le
voit par la date de l'édition qu'il don-
na de quelques fragments de sa femme
Isabelle. On croit qu'il mourut peu de
temps après. G — e.
ANDREINI (Isabelle), l'une des
plus célèbres comédiennes de son
temps, naquit à Padoue, en i5G'i.
Elle épousa François Andreini, dont
nous venons de parler , et prit , dans
tous ses ouvrages, le titre à'Isahella
Andreini, comica gelosa, accade-
tnica intenta, detta VAccesa, c'est-à-
dire, actrice de la troupe des Gelosi
( Foj. l'article précédent ) , membre
de l'académie des Intenti , et ayant ,
dans cette académie, le litre de XAcce-
5rf , l'enflammée; titres qui nous parais-
sent singuliers en France, mais rela-
tifs aux usages académiques d'Italie.
Isabelle montra de bonne heure les
dispositions les plus rares. Elle savait
à peine lire, qu'elle entreprit de com-
poser une pièce pastorale. Elle joignit à
ses études littéraires et poétiques , celle
de la philosophie. Après avoir brillé
sur les théâtres d'Italie , elle passa en
France , où elle obtint les plus grands
succès, à la ville et à la cour. Elle était
belle, et possédait , dans toute sa per-
sonne, une grâce extraordinaire. Elle
joignait à son talent pour le théâtre,
une belle voix , l'art du chant , celui
de jouer de plusieurs instruments , et
de parler avec facilité l'espagnol et le
français. Entourée de toutes les séduc-
tions, ses mœurs furent cependant
pures et irréprochables : clic aima uni-
AND
qtiement son mari , qui fut inconso-
lable de sa perte. Elle mourut à Lyon ,
eu i6o4, d'une fausse couclie : on lui.
fit des funcraillts magnifiques. Tous
les poètes de son temps la pleurèrent.
Ils 1 avaient romblëe d'éloges dès son
vivant : on frappa même pour elle une
médaille, avec celte légende : Mtema
fnnia. Les ouvrages qu'elle a laissés
sont : L M irlilla ^favola pastorale ,
Vérone, 1088, in-8'., tt réimpri-
mée plusieurs fois. C'est cette pièce
qu'elle avait commencée dès son en-
fance; elle n'eut pas, à ce qu'il paraît,
un grand succès au théâtre. II. Rime,
Milan, 1601, in-4°.; Paris, it)o5,
in- 12, etc. La plupart des morceaux
qui composent ce volume de poésies ,
étaient épars dans plusieurs recueils.
Il en a reparu d'autres dans le recueil
intitulé : Cumponimenti poetici délie
più illustri rimatrlci d'ogni secolo,
Venise, i726,in-i2; lli. Lettere,
Venise, 1607, in-4°. ; ces lettres rou-
lent presque toutes sur des sujets d'a-
mour. On remarque, comme une .'Sin-
gularité biljiiograpliique, que la date
de l'épître dédicatoire , adressée au
duc de Savoie , porte , ainsi que le
frontispice du livre , la date de 1607,
et que cependant Isabelle était morte
en î6o4; IV. Fras;menti d'alcune
scrilture , etc. , fragments recueillis et
publiés depuis sa mort, par son mari,
Venise, 16 16, selon la date de la
préface; mais, au frontispice, 162.5,
in-8°. Ce sont des dialogues , presque
tous roulant sur l'amour, comme ses
lettres, et comme tous ses écrits.
G— É.
ANDREINI ( Jean-Baptiste) , fils
de François et d'Isabelle Andreini , né
à Florence, -en 1578, fut aussi comé-
dien, et joua les rôles d'amoureux sous
le nom de Lelio. Il eut beaucoup de
succès en France, sous Louis XTIT,
(|ui, selon l'expression de Riccoboni,
AND 1 57
dans son Histoire du théâtre italien,
le favorisa de son estime. Il était de
l'académie des Spensierati , c'est-à-
dire , des Insouciants , et s'intitidait
ordinairement . Comico fedele ed ac-
cademico spensierato. il épousa Vir-
ginie Rampcni, comédienne, sous le
nom de Florinda , et qui avait aussi
du talent pour la poésie. 11 en était
très-amoureux , et donna son nom à
i'uue de ses pièces de thcàlre. Il en a
laissé plusieurs , et quelques poèmes
d'un autre genre. Elles ont eu une cer-
taine réputation; mais celles qui ne
sont pas entièrement oubliées auiour-
d'hui , doivent un reste de céielirité à
quelques circonstances particulières ,
plus qu'a lem- mérite. Elles ont, dans le
style, tous les vices dont la poésie ita-
lienne était infectée dans le 17''. siè-
cle, et que l'école du Marina v avait
introduits : elles ont de plus , dans !e
choix des sujets, dans le plan et dans
la conduite , quelque chose d'extraor-
dinaire et de follement irrégulier, qui
tient à l'imagination déréglée de l'au-
teur ; nous nous permettrons d'en
indiquer rapidement quelques traits.
Les principaux ouvrages d' Andreini ,
sont : I. La Saggia Egiziana, dia-
logo , etc., Florence, i6o4, in-4".
Dans ce dialogue , l'auteur fait de
grands éloges de l'art dramatique,
qui était le sien. II. Pianto d'Jpol-
lo , etc. , poésies funèbres sur la mort
d'Isabelle Andreini sa mère, avec quel-
ques poésies badines {rimepiacevoli')
sur un poète malheureux, Milan, 1 60G,
in-8". Dans ce recueil , où il a mêlé
si bizarrement le genre funèbre et le
genre badin, ou même burlesque, il
y a des morceaux qui passent pour lea
meilleurs qu'il ait faits. III . JJAdamo^
représentation sacrée , en 5 actes et eu
A'ers libres , mêlée de chœurs et de.
chants , Milan , 1 6 1 3 et 1 6 1 7 , in-4". ^,
avec des gravures à chaqiio scène _,
i38 AND
d'api'cs les dessins du fameux peintre
Procaccini. Cet ouvrage est le plus
ce'lèbre et le plus recherche' de J.-B,
Andreini. On a prétendu que Mil ton,
voyageant en Italie , l'avait vu représen-
ter , et avait puisé dans ce spectacle l'i-
dée de son Paradis perdu; mais c'est
faire trop d'honneur à un tel ouvrage.
Les principaux interlocuteurs sont,
il est vrai , le Père Eternel , Adam ,
Eve, l'archange Michel, et des chœurs
de séraphins , de chérubins , d'anges et
d'archanges , Lucifer , Satan , Belzé-
buth , et des chœurs d'esprits ignés ,
aériens , aquatiques et infernaux ; les
sept péchés mortels , le monde , la
chair , la faim , la mort, la vaine gloire ,
et le serpent; mais il n'y a pas le moin-
dre rapport entre l'imagination su-
blime de l'Homère anglais , et les in-
ventions bizarres et mesquines à la fois
d'Andreini; il est cependant vrai que
la curiosité des Anglais a fait passer
dans leur île le plus grand nombre des
exemplaires de YAdamo : aussi sont-
ils devenus, surle continent, ti'ès-rares
et très-chers , sans que la pièce en soit
meillem-e. IV. La Florinda, tragédie
en cinq actes , en vers , IMilan, 1606 ,
in-4". L'action de cette pièce se passe
en Ecosse, où jamais sans doute il n'y
eut de reine nommée Florinde , femme
d'un roi Ircan; mais Andreini avait,
comme nous l'avons dit , donné ce
nom à son héroïne et à sa pièce , à
cause de Virginie sa femme, qui por-
tait le nom de Florinde dans la troupe
dont ils étaient chefs. Virginie l'en ré-
compensa par un sonnet à sa louange,
qui est imprimé , avec ceux de plu-
sieurs autres poètes , en tète de la
JFïorinda. V. La Maddalena las-
civa e pénitente , action dramatique
et dévote , Mantoue , 1 6 1 7 , in - 4". ,
Milan , 1G20 , iu-8". , etc. Dans cette
1>ièce , qui est à peu près aussi singu-
ièi'c , et ne vaut pas mieux que YA-
A>D
damo,fiiadc\eh\e est mondaine ou pé-
cheresse pendant les deux premiers
actes, et pénitente dans le troisième. La
jeune et brillante Madeleine, Marthe
sa sœur , Lazare leur frère , trois
amants de IMadeleine , dont l'un se
nomme Samson , l'autre, David, et le
troisième, Ange, son page appelé Ba-
ruc , son sommelier Mordacai , son
cuisinier Emanuel , ses deux nains
Aron et Lion , les femmes de sa suite ,
et même trois vieilles de mauvaise
renommée , di hassa stima , qui la
servent, et doivent marcher courbées
et appuyées sur des bâtons ; tels sont
les personnages des deux premiers
actes, où l'on ne parle que d'amour,
de galanterie , de fêtes et de bonne
chère, et où Madeleine , livrée à toutes
les folies de son âge , rejette bien loin
les sages conseils que lui veut donner
Marthe, sa sœur. Elle se repent, au
troisième , congédie tout son monde ,
se couvre d'un cilice, tombe en extase,
est enlevée par des anges ; le ciel pa-
raît , la gloire s'ouvre ; quinze anges
chantent l'un après l'autre les louanges
de Madeleine ; la Faveur divine et l'ar-
change Michel descendent dos cieux ,
et finissent la pièce en exhortant les
spectateurs à imiter la sage péche-
resse. Vl.ifl Centaura, Paris, 16-22,
in-i-î , pièce encore plus bizarre , an-
nonce cette bizarrerie par son titre.
C'est un sujet divisé en comédie, pasto-
rale, et tragédie. Les acteurs de la pas-
torale sont réellement une famille de
Centaures , père , mère , fils et fille ,
ce qui ne doit pas être , comme on
voit , facile à représenter. La scène est
dans les bois de l'île de Crète. Dans
la première pièce, qui est la comédie ,
il est beaucoup parlé des Centaures :
on y apprend que la femme du Cen-
taure est fille d'un roi de l'île de
Rhodes, à qui la reine a donné ce sin-
gulier enfant, pour des raisons qu'on
AND
nous dispensera d'expliquer. Cette
Centaure, dans la troisième pièce, qui
est la tragédie , veut recouvrer ses
droits au trone.Toute la famille des Cen-
taures se transporte à Rhodes ; mais ,
par une suite d'accidents et d'éve'ne-
ments aussi peu naturels que le reste,
le père et la mère se tuent de désespoir,
et c'est la petite Centaure , leur tiile ,
qui hérite de la couronne. Tout paraît
dit sur une pièce pareille quand on en
a fait entrevoir l'extravagance et l'ab-
surdité. Ce qu'il faut pourtant ajouter ,
c'est qu'elle est dédiée à la rciue-mère,
Marie de Médicis , à laquelle l'auteur
dit , sur ce titre de Centaure , sur le
rapport qu'd y a entre la partie supé-
rieure et noble de ces monstres, et la
dédicace qu'il fait à sa majesté, entre
la partie basse et monstrueuse , et la
pièce qu'il lui dédie , des choses non
moins extravagantes que sa pièce mê-
me. Tl faut dire encore que cette pièce
est la suite d'une comédie du même
auteur , un peu moins folle , sans être
une bonne comédie, intitulée: Lidiio
Leli simili , imitée des Ménechmes de
Plante , mais bien moins heureusement
que ne lefureutdcpuis,les Ménechmes
de Regnard. Ces deux Lelio se retrou-
vent , parmi les ressorts de l'action ,
dans la Centaura, et l'un d'eux devient
même roi de Chypre. Enfin , ce qui
passe toute croyance, et est au-dessus
de toute expression , c'est que l'action
des deux Lelio , qui est la première ,
se passe entre des personnages mo-
dernes et d'une condition commune,
et que celle de la Centaura , qui en
est la suite , nous reporte à Rhodes et
en Crète , au temps du roi Minos.
VIT. On a encore du même auteur
huit autres comédies et cinq pasto-
rales , dont il serait inutile de citer les
titres, aujourd'hui totalement incon-
nus. VIII. II a laissé de plus trois poè-
mes ; le premier j en trois chants seu~
A ]S D 1 5o
lemcnt , sur cette même Madeleine ,
qu'il mit depuis au théâtre, Venise,
1 (3 1 o, in- 1 a ; le second, en sept chants,
sur Sainte Thècle, vierge et martyre ,
Venise, 1620, in- 1 2 , et le troisième ,
d'un genre tout différent des deux
autres , intitulé l' Olivastro^ l'olivâtre ,
ou le Poète infortuné ^ poème plaisant
ou fantastique, en vingt-cinq chants,.
Bologne, 1642, in-4''. Ce poème con-
tient la vie entière et les aventures ,
tantôt tristes et tantôt bouffonnes, d'un
poète malheureux. Tout ce qu'on peut
dire , c'est que celles de ces aventures
qui sont tristes . n'intéressent pas , que
celles qui ont des prétentions à la bouf-
fonnerie ne font point rire , et que l'ef.
fet général de ce long pocrac est l'en-
nui. En dernier résultat , les amateurs
de livres rares rechercheront toujours
YAdamo d'Andrcini; les hommes cu-
rieux d'observer, dans l'art dramati-
que , les déviations de l'esprit humain ,
peuvent réunir à cette pièce la Made-
leine et la Centaure ; le reste ne peut
être l'objet que d'une curiosité sans
plaisir comme sans fruit. G — e-
ANDRELINI ( Publio Fax-stoS
en latin , Puhlius Faustus Andueli-
Nus , poète latin moderne , né à Forli ,
dans la Romagne, vers le milieu du iS".
siècle. Ayant composé à Rome, dès sa
première jeunesse , quatre livres de
poésies, sous le titre ai Amours^ il
obtint, à 22 ans, les honneurs de la
couronne poétique. Après avoir été
quelque temps attaché au cardinal de
Gonzague, il vint s'établir à Paris , en
1 488 , et fut reçu , l'année suivante ,
professeur à l'université. Il y enseigna,
pendant trente années , dans des cours
publics et particuliers, la rhétorique,
la poésie et la connaissance de la sphè-
re. Il doit donc être compté, pour une
part considérable , parmi les causes qui
contribuèrent alors , en Fiance, à la
renaissance des leîti-es. Il obtint suc-
i4o AND
cessiveTcent la protection de Cliar-
Ics VIH, de Louis XII, d'Anne de
lUetagne et de François I".; il reçut
de Charles VîII, et ensuite d'Anne de
Brctaf^ne , deux pensions qu'il oon-
serya toujours , et les titres de poète
du roi et de la reine, poëta regius
et regineus. 11 eut , de plus , un bon
canonicat, comme on le voit par quel-
ques-uns de ses ouvrages , où il prend
îe titre de chanoine de Bayeux. On
ajoute qu'outre toutes ces faveurs , il
recevait encore des présents consi-
dérables, et l'on croit qu'il s'est mis
lui - même en scène , dans une de
ses églogucs , où un poète raconte
qu'ayant récité devant Charles VlIl un
poëme sur la conquête de Naples ,
le roi lui avait donné un sac d'or, ful-
vi caris , qu'il put à peine emporter
Sûr ses épaules. Malgré des querelles
littéraires vives et bruyantes, il jouit
d'une grande considération parmi les
gens de lettres ses contemporains.
Plusieurs le célèbrent comme l'un des
poètes les plus sublimes et les plus
élégants de ce siècle. Erasme, qui était
sou ami , et qui l'avait beaucoup loué
pendant sa vie, changea de langage
après sa mort, et alla jusqu'à s'éton-
ner que l'université de Paris l'eût si
long-temps souffert, et à l'accuser de
pétulance envers les théologiens de
son temps, de mœurs peu régulières,
et de médiocre savoir. I/accusation de
pétulance peut être justifiée par les que-
relles dont on vient de parler, et dans
lesquelles, en cflèt, Andrelini et ses
adversaires s'injuri.iient avec la plus
extrême violence. Ses mœurs peuvent
])araître suspectes , d'après la liberté
qu'il se donnait d'expliquer, dans ses
leçons, les morceaux les plus obscènes
des poètes grecs et latins. Son savoir
ne s'élevait pas non plus au-dessus du
^lédiocre, si l'on eu juge par ce qui
lious reste de lui : sci vers u'oiit
AND
guère d'autre mérite qu'une certaine
facilité de style, sans aucune des gran-
des qualités qu'on paraît y avoir trou-
vées de son temps. Baillet a dit de
lui, avec assez de justesse, dans ses
Jugements des Savants , « qu'il ne
se souciait pas beaucoup de mettre du
sens dans ses compositions, pourvu
qu'il y mît des mots bien choisis et
de riches expressions, comme si les
choses étaient faites pour les mots,
au lieu d'assujétir les mots aux cho-
ses. » Erasme allait plus loin j il pré-*
tendait qu'd ne manquait à ses vers
qu'une syllabe, vw; en gr'C,/ne«5 en
latin, c'est-à-dire, en français, le sens
commun. Andrelini mourut à Paris ^
presque subitement , le 25 février
1 5 18. Ses principaux ouvrages sont :
I. Lit'ia , seu Amonnn libri IF,
Paris, i/jQ'i, in-4"., et V^enrse, i5oi,
aussi in-4''. ; c'est ce recueil qui eut tant
de succès à Rome , et qui fit décerner
la couronne poétique à son jeune au-
teur; W.Elcgiaruni libri III , Paris,
i494-> iu-4"v 'II- l-pistolœ proi'cj-
hialc's et leyidissimœ , nec minas
sententiosœ , Paris, in-4'., sans date,
ensuite, Paris, i5o8, et réimprimées
plusieurs fois à Cologne, à Anvers,
à Bâle, etc. Plusieurs de ces c'pîtres
sont purement morales ; plusieuis
aussi sont satiriques , et prouvent
qu'Erasme n'avait pas tort d'accuser
l'auteur de pétulance et de malignité.
IV. DeNeapolitand victorid, Paris ,
1 ^<)(i et 1D08, in- 4"- Poème dédié
à Charles \'III, et dont nous avons
vu que ce roi avait si bien pavé la
dédicace. V. De sccundd Victoria
I\ eapolitana , à Ludoi>ico XII Te-
pnrlatd ,syl{^a,Pvins, iDO'iet 1607,
in-4°. ; VI. De regùi in Genuenses
Victor id libri III ^ Paris, iSog,
in-4". 0" voit, par ces derniers ou-
vrages, qu'Andrelini méritait bien son
litre de poêla retins. VU. Buco-
AND
tica, Paris, i5oi, iii-4". L'impri-
meur de ces Bucoliques dit, dans un
Avertissement au lecteur, qu'à son avis,
elles ne le ccdeut à celles ni de Vir-
gile ni de Galpurnius, deux poètes as-
sure'ment très-difterents l'un de l'au-
tre, et que l'on voit pourtant qu'il
mettait sur la même ligne ; m.iis, si
l'usage était dès ce temps-là, comme
il l'est assez souvent du nôtre, que les
nuteurs fissent eux-mêmes Y^4^'erlis-
sement de l'imprimeur , que devons-
nous penser de la modestie et du dis-
cernement d'Andrelini? W\\. Heca-
iodisticon , Paris , 1 5 1 '^ et 1 5 1 5 ,
in-4'\, et ensuite rc'imprime's plusieurs
fois. Ces cent distiques moraux curent,
pendant assez long-temps, beaucoup
de vogue. On en a eu deux traductions
eu vers français , l'une en quatrains ,
par Jean Paradin, i 545 , l'autre, par
Privé, i(io4, traduction très-propre,
selon Baillet, à discréditer l'original.
On trouve des vers d'Andrelini dans
la première partie du recueil de Gru-
ter, Deliciœ llalorum Poëlariim.
Quelques lettres de lui sont imprimées
parmi celles d'Erasme; il y en a une
autre à la tête de la première édition
des Adages du même Erasme , faite
à Paris, en i5oo. Ses poésies se con-
servent aussi manuscrites dans plu-
sicm-s grandes bibliothèques, et no-
tamment dans la Bibliothèque impé-
riale de France, n". 5087 ; et Mont-
faucon (Eibliotheca Bibliothecariun,
manuscrits , tome II, p. 1072 ), parle
d'un manuscrit faisant le 11)5^. vol,
delà Bibliothèque de Coishn, réunie
depuis à celle de St. - Germain , et
maintenant à la Bibliothèque impé-
riale , ayant pour titre : Lh>re plein
de miniatures, fait pour la reine
u4nne, tandis que son mari, Louis
XII, faisait la guerre en Italie,
avec des vers de Fauste Andreiin de
Forli, etc. G — e.
AND lit
ANDRÉOSSl ( François ) , né à
Paris, le 10 juin iG53, mourut à Gai-
teluaudary, en 1688. Jusqu'au com-
mencement de ce siècle , Kiquct avait
été généralement regardé comme l'in-
venteur et l'entrepreneur du canal de
Languedoc; c'était l'opinion du maré-
chal de Vauban , qui avait inspecté ce
canal , et dont le témoignage positif
ne laissait aucun doute ; c'était celle de
d'Aguesseau , de Basvillc, de Bczons,
intendants de la province ; de Golbert,
sous les ordi'cs et le ministère duquel
s'exécutait ce magnifique ouvrage; du
public , eu un mot ; et, dans l'inscrip-
tion gravée, en 1667, sur l'écluse de
Toulouse, Riquet est représentécomme
inventeur du projet : Instanleviro Cla-
ris simo, Riquei, tantio péris i aven-
ture anno 1 G67. Piganiol de la Force
avança, le premier, dans sa Descrip-
tion de la France , « que le sieur Ri-
» quet se chargea de l'exécution du
» canal , sur le ])lan et les mémoires
» du sieur Andréossi, qiu était pour
» lors employé dans les gabelles de
5) la province. » François Andréossi
était mathématicien et ingénieur ; il
n'occupa jamais d'emploi dans les ga-
belles , et cette inexactitude, dans une
partie de l'assertion de Piganiol, ne
prévient pas en faveur de l'autre.
Quoique l'opinion de cet auteur fut
copiée par quelques écrivains , celle
du public ne changea point , ne fut
même pas ébranlée , parce qu'aucun
témoignage contemporain ne venait
à l'appui; parce que l'ouvrage de Pi-
ganiol ne parut qu'en 1718, près de
quarante ans après la mort de Riquet.
La gloire, comme inventeur , lui sem-
blait donc assurée , lorsqu'un officier-
général , distingué par ses CDunais-
sances , ses talents , et le rang qu'il
occupe, vint la lui disputer, et la it-
clamer pour son bisaïeul, François
Andréossi. Il ne nous appartient point
i4i AMJ
ck- prononcer, ni racine d'emellre au-
cune opiniuu sur le prucès, dont les
pièces sonl mises sous les yeux du
public; contenions-nous de les indi-
quer j elles consistent : i^.dans M His-
toire du Canal du Midi , par M. le
gënéjal Andreossi ; 2°. dans la ré-
ponse de JVilM. de Caraman , intitu-
lée : Histoire du Canal de Langue-
doc, avec celte épigraphe : Cuique
suum. Si l'on veut voir un examen
impartial de cette question , une dis-
cussion faite avec beaucoup de soin,
et les recherches les plus approfon-
dies sur le véritable auteur du canal ,
on les trouvera dans YHistoire du
Corps impérial du Génie, parlM. Al-
lent, lieutenant-colonel dans ce corps,
et maître des requêtes. Si les droits
de François Andreossi à la gloire
d'avoir invente le canal , sont en h-
tige , celle d'avoir contribué à l'exé-
cution de ce beau monument de l'in-
dustrie humaine , ne peut lui être con-
testée , et l'on n'a jamais douté de ses
connaissances et de ses talents. On a
de cet ingénieur : I. une Carte du Ca-
nal de Lajiguedoc , 5 feuilles in-fol. ,
publiée en iC(k). Le 5 février del'an-
n('e suivante , Riquet écriA it à Colbert
une lettre , conservée aux archives du
canal ( A. C. G. ), et dans laquelle il ex-
p) iine son mécontentement eu ces ter-
mes : « J'ai été bien surpris , lorsque
>> j'ai vu certaine carte du canal , de
» l'invention du sieur Andreossi ,
» mon employé. L'auteur publie des
» pensées que je gardais dans le secret.
» Cela fera qu'à l'avenir , je serai plus
» circonspect envers ledit sieur An-
» dréossi , et que ])eut-être je ne m'en
» servirai plus. » Cette Carte est cu-
rieuse et recherchée des connaisseurs ,
précisément pour les motifs qui exci-
tèrent les rédamations de Riquet; IL
Extrait des Mémoires concernant
la construction du Canal rojal de
AND
communicatioji des deux mers ,
océane et méditerranée , en Lan-
guedoc, par François Andreossi, en
1675. Cet écrit n'a été imprimé qu'eu
l'an 8, pour la première fois, dans
Fouvrage cilé , du général Andi'éossi ;
il se trouve encore dans la réplique de
MM. de Caraman , avec quelques ob-
servations. François Andreossi était
d'une famille oi'iginaire d'Itahe : il
voyagea dans ce pays , pour perfec-
tionner ses connaissances en hydrau-
lique. Apres la mort de Riquet, il fut
dnectcur particulier du canal. Ce fut
en 1682, pendant qu'il exerçait ces
fonctions, qu'il publia une JSouvelle
Carie du Canal de Languedoc.
D — M — T.
ANDRÈS (l'abbé DON Juan), ex-
jésuite, né à Valence en Espagne, passa
une grande partie de sa vie en Italie ,
et s'y fit un nom par sa vaste érudition.
1! commença à fixer l'attenlion du pu-
blic , en 1 776, par son Saggio dell/c
Filosojia del Galileo. 11 publia à
Parme, en 1782, un ouvrage qui
suppose d'immenses recherches , et
une sagacité peu commune , sous le
titre : Dell' origine progressa et stalo
atlunle d' ogni Litteratura, en 5 vol.
grand in -4".; le premier vol. a été tra-
duit eu français par J. E. Ortolaui ,
Paris , 1 8o5 , in-8". La suite de la tra-
duction n'a pas paru , Ortolani étant
niorten 1807 ou 1808. Audrès mourut
au commencement de ce siècle. B — g.
ANDREWS ( Lancelot ) , théolo-
gien anglais, né à Londres , en i5G5.
I^a réputation de son savoir , et sou
talent comme prédicateur , attirèrent
sur lui l'attention de la reine Elisabeth,
qui le nomma son chapelain. 11 fut eu
grande faveur auprès de Jacques P'.
Ce prince a^ait composé une Défense
de la prérogative royale , à laquelle
Bellarmin avait répondu , sous le nom
supposé de Malhim Torlus. Au-
AND
dre^^ fut cliar|;e de réfuter le livre
de BelJarmin , et il s'en acquitta avec
beaucoup d'habileté dans ua ouvi'age
latin , publié en 1609 , in-4". , sous le
titre de Tortura Torti. Ce service fut
si agréable au roi , que l'auteur fut
nommé sur - le - champ évêque de
Chichester , ensuite d'Ely , et con-
seiller privé de S. M. , et enfin
e'vèque de Winchester. Ses ouvrages
sont peu lus aujourd'hui ; ils sont écrits
du ton pédantesque et sophistique qui
régnait alors, et dont le roi lui-même
avait donné l'exemple. Cependant Mil-
ton en faisait grand cas , et il a déplore
la mort d'Andrcv^'s, dans une élégie
latine. Outre l'ouvrage déjà cilé, il reste
de Lancelot Andrews un Manuel de
déi>otions privées ; un Manuel de di-
rections pour la Visitation des ma-
lades; un volume <le petits Traités,
la plupart en latin , sur les droits des
princes, les dunes , ïusure, etc., in-
4°. , 1 629 y un Recueil posthume de
Serinons , en i vol. in-fol. ; la Loi
morale expliquée, ou Leçons sur les
dix Commandements, in-fol. , i (i^i ;
et un Recueil d'œuvres posthumes, en
I vol. in-fol., 1657. Andrews mourut,
en 1 626. On trouve, dans les OEuvres
du poète Waller , une anecdote qui
mérite d'être conservée. Il raconte
qu'ayant assisté un jour au dîner de
Charles II, S. M. apostropha le doc-
teur Néale, évêque de Durham, et An-
drews , évêque de Winchester , qui
étaient tous deux derrière son fauteuil,
et leur dit : « Milords , est-ce que je
» ne puis pas prendre l'argent de mes
» sujets , quand j'en ai besoin , sans
» toutes les formalités de parlement ? »
L' évêque de Durham répondit , sans
hésiter : « Nul doute que V. M. ne
» puisse le faire ; vous êtes U souffle de
» nos narines. — Et vous, Milord,
» qu'en pensez-vous , dit le roi à l'é-
» vêquc de Winchester? — Sire, ré-
AND 145
» pondit ce prélat , je ne suis pas assez
» habile pour juger des affaires de par-
w lement. — Je ne veux point de faux-
» fuyants , répliqua le roi ; répondez-
)) moi nettement. — Eh bien , Sire ,
» répondit Andrews , je crois qu'il
» vous est permis de prendre l'argent
» de mon frère Néale , puisqu'il vous
» l'offre. » S — D.
ANDRISCUS , appelé par les Ro-
mains Pseudo-Philippus ( le faux
Philippe). Selon les historiens latins,
les seuls qui aient parlé de lui , il na-
quit à Adrarayttium , dans laTroade,
de parents d'une très-basse condition.
Seize ans après la mort de Persée , roi
de Macédoine, il prétendit être fils
naturel de ce prince , et prit le nom de
Phihppe. Il assurait que son père , in-
quiet sur les résultats de sa guerre
contre les Romains , l'avait envoyé à
Adiamyttium pour y être élevé comme
le fils d'un particulier indigent. Il ajou-
tait que ce secret de sa naissance se
trouvait consigné dans un écrit de la
propre main du roi. Ce qui rendait ce
récit plus croyable, c'était la ressem-
blance frappante qu'Audriscus avait,
dit-on , avec Persée. Pour se dérober
aux effets de la haine qu'Eumènes por-
tait à ce prince et à sa famille, An-
driscus se retira vers Démétrius-Soter,
qui avait épousé la sœur du roi de
Macédoine, et de qui il espérait des se-
cours. Soit que Démélrius le regardât
comme un imposteur, soit plutôt qu'il
craignît la vengeance des Romains, il
le MwA à la république, et le fit con-
duire à Rome. Audriscus y fut enfer-
mé; mais ses prétentions inspirèrent
peu d'inquiétude , dans un moment où
Alexandre, fils légitime de Persée, se
contentait de l'emploi de secrétaire du
sénat. On le garda si tiégligemraent ^
qu'il s'échappa et se réfugia en Thrace.
Les Macédoniens souffraient impa-
tiemment la domijiatioQ de leurs yaiti-
1/14 AND
cjviems , et on ne songeait ni à faire
di oit à leurs plaintes , ni à les con-
traindre au silence par la force. D'un,
autre cote, Andriscus avait inspire de
l'intérêt aux Thraces , et les avait
sans peine alarmés sur la conduite
violente et perfide des Romains. Il
rassembla un certain nombre de par-
tisans , qui s'attachèrent à sa fortune ,
marcha en Macédoine, et se déclara
héritier du trône. Ses succès passè-
rent d'abord son attente. Il se rendit
maître de tout le royaume, presque
sans obstacle , et en moins de temps
qu'il n'eu avait fallu auxRomains pour
vaincre Persée. Rome, étonnée de
ces cvéncraeuts, et voulant empêcher
le mal de s'étendre plus loin , envoya
Scipion Nasica , qui , à la tête d'une
armée auxiliaire d'Achéens , arrêta la
raaiche d'Andi'iscus , déjà maître de
la Thcssalie , et le força de rentrer en
Macédoine. Le sénat, convaincu de la
nécessité de mettre proraptement (in
à celte guerre, fit marcher contre An-
driscus le préteur Juventius Thalna.
Ce général avait un courage trop em-
porté; il méprisa son ennemi, s'a-
vança sans précaution en Macédoine,
et fut totalement défait. Il perdit même
la vie, ainsi que Q. Caîlius, son pre-
mier lieutenant. Cette victoire affermit
Andriscus sur le trône. liCS Carthagi-
nois , près d'être engagés dans leur
troisième guerre contre Rome, lui en-
vovèrent des ambassadeurs pour le
féliciter , et lui proposer une alliance,
qu'il accepta. Il avait sujiporté l'adver-
sité avec une fermeté héroïque; mais
son caractère ne fut point a l'épreuve
de la prospérité. 11 devint tyran, et,
par des actes d'oppression et de cruau-
té, perdit l'alfectiou de ses nouveaux
sujets. Cependant, ils continuèrent de
lui obéir , dans l'espoir d'échapper
pour toujours au joug des Romaijis,
qui ne tardèrent pas à envoyer eu
AND
Macédoine Q. CœciJius Métellus avce
une nombreuse ariuée. Andriscus ras-»
sembla toutes ses forces, et combattit
vaillamment; il obtint d'abord l'avan-
tage dans un combat de cavalerie ;
mais, enivré de ce succès , il eut l'im-
prudence de faire passer un corps
nombreux de son armée en Thessa-
hc , pour défendre ses conquêtes.
Métellus, profit;mt de cette faute, lui
livra bataille , le défit complètement ,
et le contraignit de se retirer de nou-
veau chez les Tbraccs. Ces peuples re-
çurent avec amitié le monarque fugi-
tif, et lui fournirent une nombreuse
armée, avec laquelle il pouvait encore
faire tète aux Romains , s'il eût tem-
porisé ; mais , impatient de réparer
promptemeut sa défaite , il se hâta de
livrer à Métellus une seconde bataille
qu'il perdit. Sesaffltires furentcomplc-
tcment ruinées par ces deux défaites,
qui lui coûtèreut '25,ooo hommes.
Il se réfugia chez Bysas, petit prince
deThrace, qui le livra aux Romains.
Métellus le conduisit à Rome, où il
fut mis à mort par oidre du sénat ,
l'an 1 47 av. J.-C. La guerre qu'il avait
excitée fut regardée comme si im]ior-
tante, que son vainqueur obtint le sur-
nom àc Mactdonique , etles honneurs
du triomphe. Les historiens ont re-
présenté Andriscus comme un impos-
teur; mais il n'est nullement démontré
qu'il ne fût pas un de ces princes mal-
heureux que les Romains calomniaient
pour mieux les opprimer. D — t.
ANDROCLES , fils de Phintas, et
roi des Messéniens , avec Antiochus
son frère , fut tue dans une sédition ,
comme on le vena à l'article de ce
dernier. Ses enfants se retirèrent à
Sparte, et, lorsque la première guerre
de Messène fut terminée , les Lacédé-
moniens leur donnèrent le canton
nommé Ilvaniie. Audroclès et Phintas,
ses descendants , prirent les armes
AND
avec les autres Messe'niens , dans la
seconde gueire de Messène, el ils fu-
rent tués en combattant à la bataille
de la Grand'Fosse. C — r.
ANDROCYDES, peintre, naquit
à Cyzique , et fut contemporain et rival
de Zeux.is. Il peignit , à Thèbes , un
tableau de bataille , qu'il fut oblige' d'a-
bandonner sans le finir, lors de la ré-
volte des TlieTaains contre Sparte. Ce
tableau fut ensuite consacré dans un.
temple , par le conseil de Méuécljde ,
orateur, ennemi de Pélopidas, qu'il
croyait humilier par-là; car la victoire
qui y était retracée avait été remportée
par un autre général. Androcydes avait
pemt , avec un art merveilleux, les
monstres marins qui entouraient Scyl-
la. L—S—E."
ANDROMACIIUS était , par sa
naissance et ses richesses, l'un des
principaux de Naxos , ville de la Si-
cile. Celte ville ayant été détruite par
Denys- l'Ancien, Audromachus en ras-
sembla les habitants, et s'établit avec
eux sur le mont Taurus, dans le voi-
sinage de son ancienne patrie ; ce qui
donna naissance à la ville de Tauro-
ménium, qui fut fondée l'an SgS av.
J.-C. Il paraît qu'il s'y maintint dans
l'indépendance ; car, lorsque Tiraoléon
vint pour délivrer la Sicile du joug
de Denys-le- Jeune , l'an 545 avant
J.-C, Andromachus le reçut dans sa
ville , et engagea ses concitoyens à se
V réunir aux Corinthiens , pour affran-
chir la Sicile. Tiniée l'historien était
son fils. C — R.
ANDROMACHUS, premier méde-
cin de Néron , naquit dans l'île de
Crète, et se rendit fameux par le
médicament appelé thé ri aq ne, dont il
est l'inventeur. On ne sait rien de ses
principes et de sa méthode en méde-
cine , et l'on n'a de lui qu'un recueil
de médicaments composés , la plupart ,
de son invention ; Galien le loue sous
AND
,45
ce rapport. C'est dans un poëme eu
vers élégiaques, intitulé : y oy.Y-w, ( cal-
me , tranquillité ) , dédié à Néron ,
qu'il donne le secret de la composition
de sa fameuse thériaque , ôïiffov , w/.aç
( remède contre les poisons ). Jusqu'à
lui, on n'usait que de l'antidote de Mi-
thridate, dont la thériaque, du reste,
ne diffère que par l'addition de vi-
pères. Les empereurs romains atta-
chaient une grande importance à la
préparation de ce médicament , com-
posé de soixante substances, et ils le
faisaient fabriquer dans leur palais.
De nos jours, en certains pays , cette
préparation est très-simplifiée; à Ber-
hn , par exemple , ce n'est plus qu'un
composé de quatre substances , dont
l'opium est la base. Le Poëme d'An-
dromachus nous a été conservé par
Galien , dans son Traite de la Thé-
riaqiie , adressé à Pison. Galien ob-
serve qu' Andromachus avait écrit
cette formule en vers , pour qu'elle
fût moins sujette à être altérée par les
copistes. IMo'ise Charas en a publié ,
en 1668, in-i 2 , une traduction. An-
dromachus introduisit un usage in-
connu avant lui , en prenant le titre
à' .4rchiater, ou premier médecin des
empereurs. — Son fils, nommé An-
dromachus comme lui , fut aussi ar-
chiater de Néron , et il laissa , sur
la médecine , beaucoup d'écrits que
le temps n'a point respectés.
C. et A — N.
ANDRONIC P^ (CoMNÈNE ), em-
pereur de Coustantinople , né l'an
1 1 1 o , était petit-fils , par son père
Isaac, d'Alexis Comnène. Il parvint,
par son audace, sa souplesse, et soi; élo-
quence insinua. ite, cà captiver la faveur
de l'empereur Manuel Comnène , son
cousin. Celui-ci vivait publiquement
avec sa nièce Théodora, dont la sœur, la
jeune Eudoxie , franchissait pour An-
drouic toutes les bornes de la pudeur
i46 AND
cl de la ddccnce publique ; elle le
suivait à rarme'e, et partageait ses fa-
tigues , SCS débauches et ses dangers.
Ce commerce scandaleux , plusieurs
attentats contre la personne même de
l'empereur , et enGu les intelligences
secrètes d'Audronic avec les Turks et
les Hongrois , forcèrent Manuel à le
faire arrêter. Il languissait depuis
quatre ans dans une tour du palais ,
lorsqu'il parvint à pratiquer , dans
sa prison , une issue , qu'il masqua
adroitement , mais qui ne le conduisit
que dans un cachot voisin. Cependant,
le bruitde son e'vasion sere'panditdans
Constautinople; Manuel, irrite' et ne
sachant qui soupçonner de cette déli-
vrance , fît enfermer la femme d'An-
dronic dans le même cachot d'oili son
mari venait de sortir ; les ge'misse-
ments de cette infortune'c la fîrent
bientôt reconnaître du captif, qui pa-
rut tout à coup à ses yeux comme un
spectre sortant d'un tombeau; il lui
confîa lesccret desaretraite, vëcutavec
elle sans qu'on le soupçonnât, et en
eut un fils : il profita même du peu de
surveillance qu'on crut pouvoir mettre
à la garde d'une femme pour s'é-
chapper; mais il fut repris, et ce ne
fut qu'après douze ans de détention ,
qu'une tentative plus heureuse lui fit
recouvrer la liberté. Il traversa la
Moldavie, trompa un corps de Va-
laques qui l'avaient arrêté, et se retira
en Russie. Cependant, IVIanuel ayant
porté la guerre en Hongrie, Andro-
nic saisit cette occasion pour rentrer
en grâce ; il persuada aux Russes de
s'unir aux Grecs, et contribua lui-
même , par sa valeur , à la prise de
Zeugminc ; ce qui lui valut un pardon
absolu. De nouvelles offenses , de
nouveaux désordres , des projets am-
bitieux déclarés ouvertement, éveil-
lèrent encore les craintes de Manuel;
Andronic séduisit successivement Phi-
AND
lippa, sœur de rimpcratrice Marie,
et Théodora , veuve de Baudoin III ,
roi de Jérusalem. Il était enfin relé-
gué à Oenoë , ville du Pont , lorsque
la mort de Manuel ouvrit un vaste
champ à son ambition. La jeunesse
du nouvel empereur Alexis II, l'im-
prudence de sa mère , l'impératrice
Marie , et sa faiblesse pour le proto-
sebaste Alexis, dont l'insolent orgueil
écrasait l'empire et iiritait la no-
blesse ; enfin les troubles auxquels
les partis livraient la capitale, firent
tourner les yeux vers Andronic, dont
les émissaires secrets disposaient
adroitement les esprits , et Constan-
tinople courut avec joie au devant du
tigre qui allait l'arroser de sang. An-
dronic publie qu'il va sauver l'em-
pire; il ne parle plus que de son dé-
vouement pour l'état et poiu- sou jeune
prince ; enlin il arrive devantConstan-
tinople;la flotte se rend à lui, le peuple j
lui livre le protosebaste , auquel il fait j
crever les yeux. Cependant on s'égorge
dans la ville ; Andronic y entre en maî-
tre irrité, s'empare de tous les palais ,
reçoit des délations , multiplie les châ-
timents , se défait de tout ce qui lui
cause quelque ombrage, et prélude aux
plus grands crimes, en faisant empoi-
sonner la princesse Marie , sœur du
jeune empereur, pour lequel il affecte
cependant un dévouement sans bor-
nes. Il donne même la plus grande
pompe au couronnement d'Alexis, et
le porte siu* ses épaides à l'église , en
versant des larmes d'attendrissement;
mais bientôt il cherche à irriter ce
malheureux enfant contre sa mère .
et, par un raffinement de cruauté , il
le force à siguer l'arrêt de mort
prononcé contre cette princesse par
les satellites du tyran. Deux jours
après , elle fut étranglée. La famille
impériale tombait autour du faib'c
rejeton qui occupait encore le troue ;
AND
Je vertueux Thcodose , patriarclie de
Constantinople, s'éloigna d'une ville
ofi son ministère eût ete' souillé par
l'aspect de tant de forfaits. Androuic ,
débarrassé do ce dernier obstacle , fit
répandre , par ses émissaires , que , les
divisions croissant tous les jours , il
fallait mettre à la tête des affaires un
homme d'une expérience consommée.
La pUis vile populace, excitée par
les plus vils moyens , proclama , au
mois de septembre ii83, Andronic
collègue d'Alexis. Le lendemain, les
deux empereurs se rendirent à Ste.-
Sophie ; Andronic scella , par un sa-
crilège, les fausses protestations qu'il
adi'essa à sa victime , et, quelques jours
après, il fit assassiner ce malheureux
prince , dont il insulta le cadavre.
« Ton père, dit-il , en le poussant du
5) pied , fut un traître j ta mère , une
n infâme ; et toi , un sot. » Alexis avait
été fiancé à Agnès de France , qui
n'avait que onze ans. Andronic , sans
renoncer à son commerce avec Tbéo-
dora , épousa la jeune impératiice ; et
la fille des rois passa dans les bras
d'un vieillard dissolu, l'assassin de
son premier époux. Au milieu de tous
ses crimes, Andronic invoquait sans
cesse l'autorité de la religion, alors si
puissante sur l'esprit des peuples ; il
voulut même se faire absoudre du
meuilre d'Alexis, et quelques évcques
furent assez vils pour prononcer un
pardon que le ciel ne ratifia point.
Quelques moments de tranquillité, ou,
pour mieux dire , de fêtes et de dé-
bauches , laissèrent respirer les Grecs
effrayés, qui nommèrent ce court in-
tervalle, les jours de l'Alcyon. Ce-
pendant, Lopade, Pruse et Nicée n'a-
vaient pas reconnu l'autorité du tyran ;
il les assiège, et les deux dernières
villes sont livrées à des horreurs que
la plume de l'histoii'e ose à peine re-
ti-acer. Uu liistorieu rapporte que les
AND î.J7
arbres des vergers qui environnaient
Pruse, portaient suspendus, autant de
cadavres que de fruits. Andronic, de
retour à Constantinople , redoubla de
rage et de férocité; les instruments
de ses fureurs en furent eux-mêmes
les victimes. La révolte d'Isaac Com-
nène , dans l'île de Chipre , devint le
prétexte des plus affreuses prosciip-
tions. Cependant, le tyran se voyait
menacer de tous côtés , ses généraux
avaient été battus par le roi de Sicile
excité jjar un Comnène ; Andronic
au lieu de réparer leur défaite, s'asite ,
consulte les devins ; ils fout naître
des soupçons qui tombent sur Isaac-
l'Ange , dont toute la famille avait péri
par les coups du tyran. La mort d'I-
saac est ordonnée; Hagiochristopho-
rite , l'instrument des fureurs d'Aii-
dronic , veut exécuter l'arrêt ; Isaac le
lue , et se sauve dans une église ; le
peuple , qui l'aimait , s'y porte en
foule ; on maudit Andronic , qui s'ef-
fraye de la sédition; il veut fuir, ou
t'atteint; Isaac est proclamé empe-
i'eur , le palais est livré au pillage.
Andronic , chargé de chaînes , fut re-
mis dans les mains de la populace
qui , pendant trois jours , exeiça sur
lui de telles cruautés , que le récit
de son supplice excite la pitié , mal-
gré le souvenir de ses crimes : le ciel
sembla prolonger son existence pour
prolonger ses tourments; les femmes
mêmes raffinèrent de cruautés , et lui
firent subir les tortures les plus in-
fâmes. Privé des dents, des cheveux
d'iui œil , d'une main , honteusement
mutilé, brûlé, lacéré dans toutes les
parties de son corps , il ne proféra au-
cune plainte , et sembla reconnaître la
souveraine justice qui le frappait et
dont il invoquait la miséricorde. Pendu
par les pieds, dans cet horrible état, il
respirait encore , lorsqu'un Italien , lui
plongeant sou épce dans le corps, mit
lo..
î48 AND
fin à cette affreuse tragetlie ,\e\i sept.
1 185. Aiidronic aviiit alors soixante-
quinze ans ; il en avait règne deux; il
était d*iine taille colossale, d'une force
prodigieuse , mais d'une figure dure
et repoussante. H avait l'esprit cultive',
et une é!ot|ueiice persuasive. Quel-
ques historiens ont loué sa fermeté
dans radrainistration. « Andronic, dit
» Montesquieu, était le Néron des
» Grecs; mais comme , parmi tous ses
» vices , il avait une fermeté admi-
» rable pour empêcher les injustices
» et les vexations des grands, ou a
» remarqué que , pendant son règne ,
» quelques provinces se rétahhrent. »
Gibbon a fait la même observation
sur le gouvernement de ce prince;
mais quelques traits de justice et de
prudence ne peuvent balanctr les
crimes et les vices infâmes dont son
histoire est souillée. 11 fut le dernier
empereur de la famille des Comncnes.
L— S— E.
ANDRONIC II (PALÉoLoca-E), em-
pereur de Constanlinople, ne vers l'an
i.iSS, était fils de Michel Paléulogue,
et de Théodora, petite-nièce de, Ican
Duras Yatace , empereur de Nicée.
Après la mort de Michel , en i '^i^'i ,
Andronic , âgé de a4 ans , fut re-
connu seul empereur. 11 avait déjà ré-
gne deux ans , conjointement avec son
père ; mais, soulage du fardeau de l'em-
pire par un prince qui , à de grands
vices joignait aussi de grandes qua-
lités , Andronic avait à peine senti le
poids du gouvernement. Son premier
i>oiu fut de révoquer toutes les me-
sures adoptées par Michel pour la
réunion des églises grecque et latine,
et d'assembler un concile de schisma-
ti([ue.s , auquel il demanda humblement
f)ardon d'avoir coopéré à la paix avec
es Latins. Ainsi, lorsqu'une croisade
formidable , dirigée par le pape IMar-
tin IV., et Cvjiumaudée par Charles
AND
d'Anjou , roi de Naples , menaçait d'un
côté Constantiuople, et que, de l'autre,
les progrès des Turks devenaient tons
les jours plus inquiétants , le chef de
l'empire, au lieu de songer à raffcrn)ir
son trône chancelant , s'occupait de
querelles ihéologiques, et perdait, dans
ces controverses, le temps que récla-
mait le salut de l'état. L'exil ou la no-
mination d'un patriarche , les épreuves
du feu ou des reliques , moyens em-
ployés , dans ces temps de supersti-
tion , pour découvrir les volontés du
ciel, telles étaient les occupations de
ce prince. Heureusement pour lui , la
mort le délivra du roi de Naples et du
pape. Peu de temps auparavant , An-
dronic avait su contracter une alliance
avantageuse , en épousant Irène , fille
du marquis de Montferrat , et nièce du
roi d'Aragon , qui venait d'enlever la
Sicile à Charles d'Anjou ; mais cette
diversion donnait à peine aux Grecs
quelque sécurité , lorsque les Turks
s'avancèrent vers les frontières do
l'empire. Philantropène , général ha-
bile , courut au-devant de ces barl>ares,
et les battit en plusicTU's rencontres ,
taudis qu'Andronic , au sein du lu\e
et de la mollesse, occupé de misérables
intrigues de cour , dépouillait de tous
ses biens son propre frère, Constantin
Porphirogénète , prince rempli de mé-
rite, et, sous de vains prétextes, le fai-
sait jeter dans une cage de fer. Ce fut
alors, en iiigo, que, pour se donner
un appui , Andronic associa au trône
son fils, le jeune Michel ; mais, à ce
moment, Philantropène, qui depuis
quelques années combattait les Turks
avec succès , ayant à se plaindre de la
cour , leva l'étendard de la révolte.
Ses progrès devenaient de jour en jour
plus inquiétants , lorsqu'il tomba entre
les mains de Libadaire , gouverneur
delà Lydie , qui lui fit crever les yeux ,
et étouffa ainsi la rébellion. La situa-
AND
tion d'Andronic n'eu fut pas plus tran-
quille ; trompe par de lâches ministres,
il avait laissé tomber la marine , et les
pirates ravageaient les côtes de THcl-
lespont. Les Vénitiens vinrent insul-
ter l'empereur jusque dans le port de
Conslantinopie , les Servicns violaient
eu même temps le territoire de l'em-
pire , tandis qu'en Asie , les Perses
«l'un côte, de l'autre les Turks, sacca-
geaient les frontières. Dans ces fâ-
cheuses extre'mite's , Andronic chercha
des secours étrangers ; un corps nom-
breux d'Alainslui vendit ses services ,
et bientôt Roger de Flor , célèbre aven-
turier , lui amena un pi?îssant renfort
de Catalans ; mais ces nouveaux, alliés
lie tardèrent pas cà devenir plus incom-
modes que les barliares dont ils de-
vaient délivrer l'état. Roger tourna ses
armes contre ceux mêmes qu'il avait
promis de défendre; il pilla plusieurs
villes et menaçait Andronic lui-même,
lorsque ce prince en fut debairassé par
nu assassinat. La mort de Roger fut
vengée par de nouveaux ravages ; des
essaims de barbares entamèrent de tou-
tes parts les provinces presque sans dé-
fense. Quelques victoires ne suffirent
point pour les arrêter , et , dans le
même temps, Andronic perdit son fils ,
qu'il avait associé à l'empire. Ce prince
laissait un fils, nommé aussi Andronic,
qui prétendit bientôt partager le trône
avec son aïeul. Celui-ci refusa d'abord
d'y consensir , et , pendant quelques
aimées , l'élat chancelant fut encore
ébr;i nié par les divisions de ces princes.
Eufiu, en i3i5, le vieil Andronic fut
contraint de reconnaître son petit-fils
empereur ; mais bientôt, jaloux du cré-
dit qu'il obtenait sur l'esprit du peu-
ple , il lui suscite de nouvelles tracas-
series ; le jeune prince , forcé de re-
l)rendre les armes, entre en vainqueur
d <ns Constantinople , et se fait recon-
naître pour scuisouveraiu. L'empcrcui'
AND i49
détrôné , condamné à ne plus quitter
son palais , achevait sa carrière dans
le mépris et presque dans le besoin ;
pour comble de maux , il venait de
perdre la vue , lorsque ceux qui le gar-
daient , apprenant que son petit-fils
était dangereusement malade , et crai-
gnant de voir le vieil empereur recou-
■yrer l'autorité, le forcèrent, en 1 55o,
à prendre l'habit monastique. On exi-
gea de plus une renonciation en forme
à la couronne, et, deux aus après , le
i3 février de l'année i532, Andronic
qui , avec le froc , avait pris le nom
d'Antoine , mourut presque subite-
ment , âgé de 74 3ns , et après 60 ans
de règne. Ce faible prince avait sans
doute quelques vertus ; il était sobre ,
laborieux, exemplaire dans ses mœurs ;
au respect pour la religion , il joignait
l'amour des sciences ; il savait distin-
guer le mérite , et se plaisait à le ré-
compenser ; mais la marine anéantie ,
l'empire dévasté , les provinces en-
vahies par les barbares , les monnaies
altérées pour subvenir à des dépenses
excessives , et satisf^iire l'avarice du
prince, le commerce ruiné, l'appau-
vrissement de l'état dans toutes ses
branches , prouvent assez qii' Andronic
n'était pas appelé à soutenir le trône
des Constantins , dans les jours de sa
décadence. On attribue à ce prince ua
Dialogue entre un juif et un chrétien ,
dont la version latine se trouve dans
le Recueil de Stewart , imprimé à Mu-
nich, en 1616. Andronic avait eu de
sa première femme , Anne, fille d'E-
tienne , roi de Hongrie , six fils , dont
un seul ( Michel ) , a conservé une
place dans l'histoire. L — S — e.
ANDRONIC III ( Paleologtje ) ,
dit LE Jeune, empereur de Cons-
tantinople , petit-fils du précédent, et
fils de Michel Paléologue , naquit vers
l'an 1-195. Sa jeunesse fut marquée
par quelques désordi'es , qui lui atti-
i5o AND
rcrent ranimadvcrsion de son aïeul ,
jusque-là tiès-prévcnu pour lui. Le
jeune Audronic, ainoineux d'une fem-
me galante, crut avoir à se plaindre
de^ visites d'un rival , et résolut de
s'en défaire ; mais , pai' une funeste
méprise, ses gardes tuèrent son propre
frère , Manuel Despote. La douleur
<{ue cet événement causa à l'empereur
Michel , leur père , le conduisit en
])('u de temps au tombeau, et le jeune
Audronic , ne vovant plus de compé-
titeur entre lui et le tronc , ne tarda
])as à manifester ses prétentions. Si
l'on en croit Cantacuzènc , le jeune
prince fut poussé à la révolte , par
les soupçons que laissa paraître le
vieil empereur , et par les dégoûts
qu'il se plut à donner à son j>etit-fils :
mais il ne faut pas oublier que Can-
tacuzènc était l'amc du parti du jeune
Andronic. Quoiqu'il en soit, le prince,
forcé de quitter Constantinoplc , se
vit bientôt à la tête d'une armée :
toutefois , il ne s'en servit que pour
amener '"lOn aïeul à une réconciliation,
et pour repousser les Bulgares , qui
s'étaient avancés jusqu'aux portes d'An-
drinople. Il les battit en plusieurs ren-
contres, et les poursuivait cliaude-
ment , lorsque la mort de sa femme ,
et le nouveau mariage qu'il allait con-
tracter avec Anne , princesse de Sa-
voie , le rappelèrent à la cour. Ce fut
à cette époque, en i5î5,que le vieil
Andronic le fit reconnaître et sacrer
empereur; mais la bonne inlelligence
des deux princes dura peu. Le soup-
çonneux vieillard força bientôt sou
jeune collègue à reprendre les armes.
Vainement Andronic, à la tète d'une
armée victorieuse , essaya d'en venir
il un accommodement ; le vieil em-
]»ereur rejeta toute espèce de propo-
sition. Andronic, conti'aint de pour-
suivre SCS avantages, surprit Cons-
tantiuople, qu'il ne put sauver du j^i!-
AND
lage , et, maître de la personne de son
aïeul , il lui rendit tout le respect qu'il
devait à son âge ; mais il se garda bien
de lui rendre le trône. Désormais seul
maître de l'empire , il signala son nou-
veau pouvoir par des largesses au
peuple, ainsi que par des traits de mo-
dération envers ses ennemis, et de re-
connaissance envers ceux qui l'avaient
servi : mais il lui fallut bientôt quitter
Constantinoplc, pour voler au-devant
des Bulgares , qu'il poursuivit au-delà
de leurs frontières. Il reprit, en 1 529,
l'île de Chio, que son aïeul avait perdue
par sa faiblesse. Quelque temps aupara-
vant, lesTurks avaient fait une irrup-
tion sur le territoire de l'empire en Asie^
Andronic marcha contre eux , quoi-
qu'inférieuren nombre, et les battit eu
plusieurs rencontres ; mais il fut griè-
vement blessé en faisant tout à la fois
l'office de général et de soldat. Il était
à peine rétabli de sa blessure, qu'une
maladie dangereuse le mit au bord du
tombeau. Ce fut dans cette conjonc-
ture que le vieil Andronic fut contraint
de prendre l'babit monastique : le jeune
empereur, guidé par un sentiment de
dévotion assez mal entendu, mais qui ,
dans ce temps , n'était pas rare , voulut
aussi donner la couronne au grand
Domestique, Jean Cantacnzène, com-
me au plus digne de la porter dans
des circonstances aussi difficiles ; mais
Caulacuzcne , qui n'avait pas perdu
l'espérance de conserver son maître ,
le fit changer de résolution. En effet,
Andronic ne tarda pas à recouvrer la
santé , et son premier soin fut d'aller
chasser les Turks qui étaient passés en
ïhrace ; il repoussa ensuite les Bul-
gares et les Scrviens jusque dans
leurs montagnes , et força ces bar-
bares d'accepter la paix, en i552.
La tranquillité momentanée , dont
jouissait l'état, fut troublée par qucl-
(^ucs révoltes et par des conjurulious ;
AND
la valeur de l'erapex-eiir , aidée par la
prudence de Cantacuzène , apaisa les
unes , et déjoua les autres. La répres-
sion des brigandages des Albanois ,
différentes guerres avec les Turks , la
prise de posse^ion de l'Acarnanie ,
occupèrent Andronic , depuis l'année
i554 juscpi'en lôôg. Ce fut alors
que , pour s'opposer plus efficace-
ment aux Turks, dont les progrès de-
venaient chaque jour plus effrayants,
il forma une ligue avec le roi de
France, Philippe de Valois , Robert
roi de JNapies, le roi de Chypre , le
grand-maître de Rhodes, et quelques
autres princes. Les infidèles, attaqués
par la flotte des allies , sur les côtes de
la Grèce, perdirent ti5o navires, et
plus de 5ooo hommes ; mais ce dé-
sastre ne les empêcha pas de rentrer
bientôt après dans le Péloponnèse ,
et d'y commettre de plus affreux ra-
vages qu'auparavant. Andronic , pour
résister à tant d'ennemis , crut qu'il
lui importait de contracter avec les
Latins une alliance durable, et d'a-
néantir le schisme qui divisait les deux
Eglises ; il s'occupa donc sérieusement
de la réunion ; mais les obstacles qu'il
rencontra, et le chagrin qu'il en res-
sentit , joint à une maladie dange-
reuse, le conduisirent au tombeau ,
dans la quarante-cinquième année de
son âge. 11 en avait régné seize , et ,
depuis treize ans , il gouvernait seul.
Les qualités qu'il développa sur le
trône firent oublier les désordres de
sa jeunesse. Forcé, par l'injustice et la
dureté de son grand-père, de lui raw
le sceptre, il s'en montra digne par
son courage , ses talents et sa modé-
ration. 11 trouva le moyen de suppri-
mer des impôts onéreux , et de con-
server néanmoins des armées toujours
prêtes à courir à la défense de l'état.
Ou le vit continuellement à la tête de
SCS troupes , et sa valeur cl ses talents
AND i5t
militaires suspendirent les désastres
dont l'empire d'Orient était accablé.
Andronic avait été marié, en pre-
mières noces , à la fille d'un duc de
Brunsv^'ick : après la mort de cette
princesse, arrivée en i325 , il épousa
Anne de Savoie, dont il eut deux en-
fants qu'il laissa en bas âge. L'aîné fut
Jean Paléologue. L — S — k.
ANDRONIC IV. Voy, Jean Pa-
léologue.
AiNDRONIC, de Cyrresthes, archi-
tecte grec, construisit, à Athènes, le
monument connu sous le nom de la
Tour-des-T'enls : c'était un bâtiment
octogone, sur chacune des faces du-
quel était sculptée la figure d'un des
Vents. Andronic les avait distingués
par divers attributs : on les nommait
Solanus, Eurus, Auster, Africanus,
Favonius, Corus, Scptentrio, et Aqui-
lo. Au sommet de la tour , s'élevait
une petite pyramide de marbre qui
supportait une mécanique assez sem-
blable à nos girouettes : elle consistait
eu un Triton d'airain, tournant sur
\\n pivot, et indiquant, avec une ba-
guette, le côté de la tour sur lequel
était représenté le vent qui soufflait.
On juge, par le style déjà corrompu
de l'architecture de ce monument, et
par la médiocrité des bas-reliefs , qu'il
est postérieur au siècle de Périclès.
Comme il est construit en gros blocs
de marbre , il n'a pas éprouvé de
grandes dégradations , et le couron-
nement seul en est détruit. Tout l'édi-
fice est enterré d'environ 12 pieds.
Chacune des faces avait aussi un ca-
dran; enfin, ou croit que ce monu-
ment renfermait un clepsydre , ou
horloge à eau. Le toit était de marbre
taillé en forme de tuiles : cette manière
de couvrir avait été inventée par Bv-
zes de Naxos, 58o avant J.-C. La
Toiir-des- Pénis sert aujourd'hui de
mosquée à des derviches. Spon , Whc.
i52 AND
1er, Leroi et Stuart ont parle avec
étendue de ce monument singulier.
LS — E.
ANDRONICUS CALLISTUS
(Jean), né à Thessalonique, Aint en
Italie après la prise de Constaniino-
ple parlesTurks, et donna des leçons
de grec, successivement, à Rome, à
Florence et à Ferrare. Il eut pour
disciples, Ange Politien, Janus Pan-
nonius, et George Yalla. Appelé en-
suite à Paris, pour v enseiguer le
grec, après Hermonyme de Sparte,
il lut un de ceux à qui l'université de
celte ville dut le rétablissement de l'é-
tude de !a langue grecque. Il mourut
en 1478. On a de lui un Traité des
Passions, en grec, que David Hœs-
chelius a fait imprimer : AuguslT. Fin-
delicornm , 1 595 , in-8". , et qui a été
réimprimé en 1617 et i0'j9, à la suite
de la paraphrase des Morales à Ni-
comaque. C — r.
ANDRONICUS (Livius), le plus
ancien des poètes latins, fit représenter
sa première pièce de théâtre , l'an de
Rome 5i4, 240 avant J.-C. On dit
qu'il avait été esclave, qu'il était d'ori-
gine grecque, et qu'il reçut son nom
latin , de Livius Salinator , dont il ins-
truisit les enfants, et qui l'affranchit.
Ses principales productions étaient
dramatiques , mais grossières dans
le plan, et d'un style barbare. 11
jouait lui-même un rôle dans ses piè-
ces, et l'on dit, qu'étant devenu en-
roué, il imagina de faire réciter les
paroles par un esclave , tandis (ju'il
faisait les gestes. Ce fut l'origine de la
pantomime chez les Romains. Il com-
posa aussi des hymnes en l'honneur
des dieux. Tite-Live et Valère-Maxime
disent que celui qu'il fit pour Junon ,
fut chanté dans toute la ville , par les
jeunes filles. Les grammairiens et les
critiques citent fréquemment ses vers ;
et ces citations sont tout ce qui resle
AND
de lui. Elles ont été imprimées , avec
les fragments des autres poètes latiiis,
dans les Comici lalitii , le Corpus
poëlarum, et la Collectio Pisaiiren-
sis. D — T.
ANDRONICUS de Rhodes , philo-
sophe péi ipatéticien , professa d'iibord
à Athènes avec peu de succès , puis
vint s'établir à Rome , du temps de Ci-
céron. Tyrannion , l'affranchi de Lu-
cullus , ( hargé , par Svlla , de trans-
crire les livres inédits d'Aristote qui
provenaient de la bibliothèque d'Apel-
licon, communiqua ces ouvrages à An-
dronicus. Ce dernier les classa , com-
posa des sommaires et des tables pour
les différents livres , et les enrichit
même de plusieure commentaires. On
lui avait attribué, jusqu'à présent,
une parapinase des Ethiques à J\i-
comaque , p)iblicV gr. lat. par Daniel
Hcinsius, Leyde, it)n-,in-4"-i it>'7j
in-8'\, et réimpri)née à Cambridge,
167Ç». in-S".; mais un manuscrit de
la Bibliothèque impériale , cité par
Stc. -Croix, dans son Examen des
Historiens d'Alexandre , png. 524'.
indique j pour auteur de celte para-
phrase , Heliodore de Pruze. D. L.
ANDROQIJE, Foy. Andoque.
ANDROUET-DU-CKRCEAU
( Jacques ^ , architecte , naquit à Or-
léans , ou , selon quelques écrivains, à
Paris, dans le i(j'. siècle. La faveur
du cardinal d'Armagnac lui procura
les moyens d'aller se perfrclionner
dans son art, en Italie. I/arc de
triomphe, dont on voit encore des res-
tes à Pôle, en Istrie, attira surtout
son admiration, et il reproduisit sou-
vent, dans ses compositions, les co-
lonnes accouplées qui sont de chaque
coté de l'ouverture de ce monument.
Le Pont-Neuf fut commencé le 5o mai
iS^S, par Androuct, d'après les or-
dres de Henri 111, dont il était archi-
leclej mais les guerres ci\ilos ne per-
AND
mirent pas que l'artiste achevât cette
construction. Ce ne fut qu'en iGo4j
sous le règne de Henri IV , que
Guillaume Marchand y mit la dernière
maiu. Les hôtels de Carnavalet, des
Fermes, de Bretonvilliers , de Suliy,
de Mayenne, etc., furent bâtis par
Audrouet. Il fut aussi chargé , en
I 596 , par Henri IV, de. continuer la
galerie du Louvre, commencée par
ordre de Charles XI j mais il ne put
la terminer. Il professait pour la re-
ligion réformée, un attachement qui
l'obhgea de s'expatrier , et de laisser
à Etienne du Pérac, peintre et archi-
tecte du roi , le soin de terminer son
travail. Androuet-du-Cerceau mourut
dans les pays étrangers. Cet artiste,
qui est regardé comme un des plus
habiles architectes de la Fiance, a
laissé plusieurs écrits; les principaux
sont: I. Livre d'architecture , coU'
tenant les plans et dessins de cin-
quante hdtiinents , tous différents ,
i5jg, in-fol. , rcimpr. en 1 611. II.
Second livre d'architecture , faisant
suite au précédent, i56i, in-folio.;
III. Les plus excellents bâtiments de
France, ouvrage dédié à la reine Cathe-
rine de Médicis , et imprimé à Paris ,
en i5';6 et suiv., deux parties en un
vol. in-fol., l'éimpr.en lécj; IV. Li-
vre d^ architecture auquel sont con-
tenues diverses ordonnances de plans
et élévations de bâtiments pour sei-
gneurs et autres qui voudront bâ-
tir aux champs , 1 58'2 , in-fol.; V. les
Edifices romains , recueil de dessins
gravés des antiquités de Rome, faits
sur les lieux, 1 585 , in - folio ; VI.
Leçons de perspective , 1 576 , in-fol.
II grava lui-même, à l'eau-fortc, les
planches qui accompagnent ces divers
recueils. D — t.
ANDRY (Nicolas), surnommé
Bois-Regard, né à Lyon , en i658,
sans fortune , vint à Paris , étudier en
AND i53
philosophie, au collège desGrassins,
où il fut réduit à faire l'éducalion de
quelques élèves pour subvenir aux
frais de ses études eu théologie. Il de-
vint professeur au collège fi^s Gras-
sins, et, en 1687, '^ commença à se
faire connaîlre, dans les lettres, par
sa triiduction du Panégyrique de
Théodose -le- Grand, [:ar Pacatus.
Dégoûté de la théologie, i! étudia la
médecine, fut reçu durtiur àReans,
et, en 1697, à la faculté de Paris.
Un peu de mérite, et un grand talent
d'intriçfue , le firent connaître et réus-
sir ; il fut nommé successivement pro-
fesseur au collège royal , censeur , et
cùWahoidiltuv AU Journal des Savants.
Malgré les justes préventions qu'avait
inspirées la manière adroite dont An-
dry avait préparé ses succès, et malgré
son caractère satirique et emporté, qui
ne lui faisait épargner ni rivaux ni
amis , il fut, en 1 724 ^ ehi doyen de
la faculté. Les premiers temps de son
décanat furent marqués par les vues
les plus sages ; frappé de la supério-
rité de talent qu'exige l'exercice de la
médecine , Andry voulut lui assurer
la prééminence sur la chirurgie , et fit
conserver, à la faculté, le droit d'ins-
pection, quelle avait toujours eu sur
les chirurgiens; mais, en mèmctemps,
il voulut assujétir les élèves médecins
i des études chirurgicales; il fit aussi
décréter que nul chirurgien ne pour-
rait pratiquer l'opération de la taille
qu'en présenced'un médecin, etc. Bien-
tôt, il voulut dominer la faculté elle-
même , et aspira dès-lors à faire nom-
mer Helvétius, son ami, premier méde-
cin du roi , et protecteur de la faculté ;
mais, deviné par cette compagnie, qui
reconnut dans celte apparence de zèle
l'ambilion particulière du doyen, il
ne lui pardonna pas de lui avoir fait
éprouver un refus. Dès ce moment,
Andry s'efforça de perdre ceux des
j54 and
membres de la facilite qui s'étaient op-
j>o.ses à sou projet, et, dans cette vue,
il ue rouf;;it pas d'altérer l'opinion que
celte laculte avait émise sur la bulle
f/nigenitus , afin de la perdre dans
l'espiit du ministre, L'aflàire se ter-
mina à sa honte, en 1726, et, pour
prévenir un semblable abus, il fut
décidé que les décrets de la fiiculté
seraient dorénavant signés par plu-
sieurs docteurs, afin que le doyen ne
pût rien y changer. L'on devine la
haine que, dcs-lors, la faculté porta
à Aiidry; elle s'augmenta encore par
les querelles parliculières qu'il eut
nvec plusieurs de ses memijrcs , Hcc-
quct, Lemery, le célèbre J.-L. Petit,
1 1 par divers écrits polémiques et in-
jurieux auxquels ces querelles donnè-
rent lieu. Andry ne fut pas réélu doyen.
La composition de quelques libelles
contre Geoffroy , son successeur , et
contre la faculté, parut d'abord le ven-
ger; elle lui valut même la censure,
au prix de laquelle on crut acheter la
paix; mais sort; triomphe ne fut que
de peu de durée ; le cardinal de Fleury
connut enfin les excès dans lesquels
le dépit et l'orgueil j^récipilaieut un
homme qui devait saréputalion plus à
l'intrigue qu'au talent ; il cessa de l'écou-
ter, et devint le protecteur et le vengeur
de la médecine et de l'université. An-
dry mourut le i5 mai 1742, âgé de
84 ans, doyen d'âge des professeurs du
collège royal. Voici la liste de ses nom-
breux écrits : L en 17 10, il publia la
première édition de sou Traité de la
génération des vers dans le coriis
de l'homme, ouvrage qui a été plu-
sieurs fois réimprimé, traduit eu plu-
sieurs langues ; Lemery en imprima
une critique assez sévère dans le Jour-
nal de Tréi'oux , pour se venger
de celle qu'Andry avait faite de son
'Traité des aliments; Valisnieri l'at-
taqua avec moins de ménagement en-
AIS'D
core; il vahit à notre satirique l'épi-
thèle dîHomo vermiculosus , parce
qu'il ne voyait partout et dans toutes
les maladies que vers. Andry répondit
à toutes ces censures, en publiant, sur
le mcinc su jet , en 1 7 04 , l-'ai is , in- 1 2 ,
ses Eclaircissements sur le livre de
la génération des vers dans le corps
de l'homme, contenant des remar-
ques nouvelles sur les i<ers et les ma-
ladies vermineuses. IL Pemarques
de médecine sur différents sujets,
principalement sur ce qui regarde
la saignée et la purgation , Paris ,
1710, in- 1 a ; 111 . le Régime du Ca-
rême ^ considéré par rapport à là
nature du corps et des aliments, Pa-
ris, 1710, in-! 1; Traité des ali-
ments du Carême, Paris, 1 7 1 5, 2 vol.
in- 1 2 , puis 5 vol. in-i 2 , parce qu'on
y a joint l'ouvrage preVédint. Dans
ces trois productions , l'auteur a pour
but de réfuter toutes les opinions
d'hlecqiiet , et la discussion des faits
n'est pour lui qu'un prétexte de faire
la guerre; IV. le Thé de l'Europe,
ou les Propriétés de la véronique ,
Paris, 1 7 1 2 , in- 1 2 ; V. Examen de
dijjérents points d'analomie, de chi-
rurgie, de physique et de médeci-
ne, Paris, 1723, in -8". Ici Andry
fait une criticpie trop amère du fameux
Traité de J.-L. Petit , sur les ma-
ladies des os , ouvi-age qui étonna
alors , et à juste titre , la chirurgie eu •
ropéenne , et contre lequel Andry,
dans son zèle amer et injuste, réunit
des accusations très-souvent fausses,
telles que celles qui traitaient de chimé-
rique la rupture du tendon d'Achille.
VI. Remarques de chimie touchant
la préparation de certains remèdes ,
Paris, 1755, in-12, écrit polémique
encore, et dirigé contre la première
édition de la Chimie médicale de
Malouin. VIL Cléon à Eudoie, tou-
chant la prééminence de la méde-
ANE
cine sur la chirurgie , Paris, 1 758,
in-i2 , où l'auteur veut prouver , par
l'ancienueté des usasies, et la raison
elle-même , la justice de la conduite
qu'il avait tenue à cet égard pen-
dant son décanat : VIII. Orthopé-
die , ou l'Art de prévenir et de
corriger , dans les enfants , les dif-
formités du corps , Paris , 2 vol.
1 7 4 1 • Andry est encore auteur de
quelques Thèses. Dionis , son gen-
dre, a publié de lui un Traité sur
la Peste, qu'il avait dicté en fran-
çais , au collège royal , par ordre du
régent. Du resté , le caractère de tous
CCS écrits confirme le jugement que
nous avons porté sur Andry; aucune
de ces grandes vues spéculatives et
pratiques qui rappellent la médecine
antique d'Hippoci'ate , l'observation
de la nature , et la connaissance de
ses lois ; tout y est sacrifié à cet esprit
de satire qui seul a semblé exciter
l'auteur à prendre la plume ; aussi , de
nos jours, où l'intérêt de ces contro-
verses locales est évanoui, ces pro-
ductions sont-elles oubliées , et n'or-
nent-elles plus que la bibliothèque de
nos plus infatigables érudits.
C. et A — N.
ANEAU (Barthelemi), dit At«^-
KULLUs , quahfié par La Croix du
Maine, de poète latin et français, his-
torien , jurisconsulte et orateur , na-
quit à Bourges, vers le commence-
ment du 16". siècle, fut professeur de
rhétorique au collège de la Trinité , à
Lyon, vers i53o, et en devint prin-
cipal en 1542. Il suivait, dans ses
poésies, le goût de son siècle , qui ap-
plaudissait aux pointes , aux jeux de
mots, et aux équivoques souvent gros-
sières. Ce poète mourut d'une mort
malheureuse. Le 2 1 juin 1 565 , jour
de la Fête-Dieu, une pierre ayant été
jetée, d'une des fenêtres du collège,
sur le prêtre qui poitait le saiut-sa-
ANE i5j>
erement à la procession , le peuple, ir-
rité , monta en foule dans le collège,
massacra Ancau , qu'on crut auteur
de cet attentat , sur le soupçon qu'il
était protestant. Aneau a laissé cent
quatre pièces en vers latins, quelques-
unes en vers grecs , et plusieurs autres
ouvrages, parmi lesquels on remarque:
I. Mystère de la Nativité , parper-
sonnaiges , composé en imitation
l'erbale et musicale de diverses
chansons. Ce mystère se trouve dans
un volume intitulé : Chant natal ,
contenant sept noèls , un chant pas-
toral et un chant royal , Lyon , 1 559.
in-4". Il a été imprimé, dans le même
format, en i559 , sous le titre de
Genethliac musical et historical de
la Conception et Nativité de /.- C.
IL Ljon marchant , satyre fran-
çaise sur la comparaison de Paris y
Rouen , Lyon et Orléans , Lyon ,
1542, in-4''. Ce drame, qui fut joue
en i54ï , sur le théâtre du collège
de la Trinité , est en vers de difTéreu-
tes mesures , et à neuf personnages;
les acteurs y font des récits sur les
aventures qui leur sont personnelles ,
ainsi que sur les principaux événe-
ments arrivés en Europe , depuis i524
jusqu'en i54o. III. Les Emblèmes
d'André Alciat , traduits vers pour
vers , Lyon , i 549 ■> ^^ ~ ^ '• •> leimpri-
més en i558, in- 16 ; IV. Picia
poësis , Lugduni, i552, in-8''. C'est
un recueil d'emblèmes ou de vers
grecs et latins , que cet auteur a pu-
blié lui-même sous ce titre : Imagina-
tion poétique, traduite en vers fran-
çais , des latins et grecs , par fau-
teur d'iceulx , Lyon , 1 552 , iu - 8".
V. La République d'Utopie , traduite
du latin, de Thomas Morus ,l?ai'i>,
in-8<^., et Lyon,in-iG.; VI. Alector^
ou le Coq , histoire fabuleuse , en
prose française , d'un fragment grec ,
Lyon, i56o, in-S'^.j sur le compte de
ï^>6 ANE
laquelle le savant criti(jiie Bernard de
La Monnoye s'exprime ainsi : « C'est
» ini mauvais ouvrage , où de bonnes
» gens croyent voir un sens mystique
» merveilleux , quoiqu'il n'y en ait pas
i> plus que dans les fanfreluches de Ra-
» bêlais. Anean, d'ailleurs, pauvre e'cri-
w vain , soit en latin, soit en français,
» feignait, pour donner plus de poids
» à son ouvrage , de l'avoir tiré d'un
» fragment grec. » Maigre' son imper-
fection , cette production est encore
fort recherchée des curieux. Ancau
c'tait lié avec Clément INIarot. R— t.
ANEAU ( Lambert d' ). F. Da-
NEAU.
ANEMAS (les ), furent quatre frè-
res , qui , sous le règne d'Alexis Com-
mènes , formèrent une conjuration
contre ce prince, dans l'année i io5.
Ils avaient engagé dans leur parti les
premiers de la noblesse ; déjà , Jean
Salomon, homme aussi vain que lé-
ger , distribuait d'avance les places
1 1 les dignités ; déjà les conjurés
s'étaient réunis sous les murs du pa-
lais, pour y pénétrer, et pour tuer
Alexis ; ils différèrent l'exécution de
leur complot , et ce délai les perdit.
Alexis, averti secrètement, fit arrêter
.lean Salomon , dont on ne put tirer
d'abord aucun éclaircissement; mais,
intimide bientôt |«r les menaces, il
déclara tous ses complices; l'exil et la
confiscation de leurs biens furent les
peincsinfligées au plus grand nombre ;
cependant les Anemas furent condam-
nés à un châtiment plus sévère : ils
devaient avoir la tête rasée, la barbe
arrachée , être promenés en cet état
dans Constantinoplc , et, à la suite de
cette humiliante représentation , avoir
les yeux crevés. Les hommes chargés
de l'exécution aggravèrent leur peine
par tant d'insultes, qu'au moment où
les Anemas passèrent devant le pa-
lais , ils levèrent leurs mains sup-
ANF
pliantes pour demander lamorf , mnfns
dure pour eux qu'un tel opprobre.
L'impératrice et sa fille, Anne Com-
nènes , touchées de leur horrible état ,
coururent implorer leur pardon aux
pir ds d'Alexis , qui l'accorda , au mo-
ment où les Anemas allaient passer les
mains de bronze. On nommait ainsi
deux bras de métal scellés dans une
muraille , pour marquer que, jusque-
là , le souverain pouvait encore tendre
une main protectrice aux criminels ;
mais aussitôt qu'ils avaient passé ce
point , leur supplice s'exécutait. Les
Ancmis virent commuer leur peine
en une prison perpétuelle. On 1rs ren-
ferma dans une tour voisine du pa-
lais des Blaquerncs , qui fut depuis
nommée la Tour anemas. ]j — S — e.
ANFINOÎ^IUS. r. A^fAPius.
ANFOSSl ( Pascal), compositeur
italien, né vers 1706, fit ses pre-
mières études musicales dans les con-
servatoires de Naples , où il reçut des
leçons de plusieurs grands maîtres.
Piccini, qui l'avait pris en affection,
lui procura, en 1771 •. l'u engage-
ment , comme compositeur , pour le
théâtre délie Dame, à Rome; mais,
malgic le ])eu de succès qu'obtinrent
SCS premiers ouvrages , il ne perdit pas
courage, et fit jouer , en 1773 , 1'/»-
conniie persécutée , qui eut la plus
grande vogue, ainsi que la Finta Giar-
diniera , et il Geloso in cim^nto, re-
présentés dans le courant des deux
années suivantes ; mais la chute de sou
o])éra de VOlrinpinde, et les désa-
grémcurs qu'il (-prouva , le détermi-
nèrent à voyager. Apres avoir visité
les principales villes d'Italie , il arriva
à Paris , avec le titre de maître du
conservatoire de Venise , et donna , à
l'Académie royale de musique , sou
Incoimuc persécutée , arrangée .sur
des paroles françaises; mais cet ou-
vrage n'eut [xis le même succès qu'eu
A N G
Italie. En 17B3, ce compositeur e'fait
cL.irgë de la direction du théâtre ita-
lien de Londres; enfin, en 1787 , il
se fixa à Rome , où il eut les plus bril-
lants succès; il fut porte' en ti'iomplie
dans cette ville, en 1789, et jouit
jusqu'à sa mort , arrivée vers 1 795 ,
d'une grande réputation. On cite, au
iwuibrede ses meilleurs ouvrages, les
grand > opéras (ï Antigone et de Démé-
tiius , et l'opéra buffa de YAvaro. Les
compositions théâtrales d'Anfossi ne
sont pas ses seuls droits à la célébrité. 11
fit lu musique de plusieurs de ces
poèmes appelés Oratorio , et dont les
sujets sont pris dans l'Ecriture-Sainte.
Pendant les dernières années de sa
vie , on en exécuta plusieurs à Rome ,
dont les poèmes avaient été, pour la
plupart , composés par Métastase ,
tt qui eurent beaucoup de succès.
P— X.
ANGE DE LA BROSSE, de Saint-
Joseph (le Père ), plus connu sous le
nom de P. Ange de St. Joseph, natif
de Toulouse, carme déchaussé, mis-
sionnaire apostolique en Orient , et
supérieur des missions de son ordre
dans la Belgique, était très- familia-
risé avec la langue persane vulgaire;
mais ses connaissances littéraires n'é-
taient pas, à beaucoup près, aussi
étendues qu'on pourrait l'imaginer ,
d'après les éloges que Chardin lui
donne , non seulement dans son
voyage , mais encore dans l'approba-
tion qu'il joignit au Gazophrlacium
Linpiiœ persarum , Amst. , 1684 ? ^^-
fol. Ue nombreuses inexactitudes dés-
lionoreiit ce dernier ouvrage , d'ail-
leurs curieux et utile. Quant à la Phar-
macopœa persica , publiée par le
même missionnaire , en 1 68 1 , en un
vol. in-8'. , à Paris , le docteur Hyde
atteste qu'elle a été traduite du Persan
par le P. Mathieu, dont le P. Ange a
tù le umn_, sans oser pourtant ysub-
A N G I V9
stitucr ouvertement le sien, placé ce-
pendant eu caractères persans , sur le
titre de l'ouvrage ; ce même nom est
en caractères romains , en tête de la
dédicace adressée au général des car-
mes déchaussés ; le style de la préface
qu'il a ajoutée, et le genre des nom-
breuses approbations qui accompa-
gnent cet ouvrage , tout concourt à fa-
voriser la supercherie littéraire de
notre religieux. Il futimpituyciblemcut
dénoncé par le docteur Hyde, qui en-
treprit de justifier et de venger les s.>
vanfs éditeurs du texte persan de la
Po(rg'fo«edeWallun, injustement, et
surtout bien maladroitement attaqués
par un trop faible adversaire ( Voy.
Pliannacopœa persica, pag. 58- j i ,
prœfat. Castigatioji. in Angelwn à
Sancto Joseph^ aliàs dictum de la.
Brosse, pa^. •;>9'2-5o8,du Sjntagma
dissertaùonum quas olim Thomas
Hyde separaliirt edidit , etc. , vol.
I '. ). Le suffrage de Beruier , de Pétis
de la Croix et de Chardin , a dédom-
magé notre missionnaire de la critique
acerbe, mais souvent fondée, du doc-
teur anglais. L— s.
ANGE DE SALXTE-ROSALIl'.,
auguslin déchaussé de la maison des
Petits-Pères , né à Blois, en i655 ,
mort à Paris, en 1726. On le destinait,
dans son corps , à professer la théo-
logie ; mais un goût particulier l'cntrai-
nait vers l'étude de l'histoire, et surtout
de cette partie de l'histoire qui se com-
pose de pièces diplomatiques , de Char-
tres et d'ordoimances ; on lui laissa la
liberté de s'y livrer , et il passa une
})artie de sa vie à dérouler les viens
titres de notre histoire , et l'autre, à
transcrire ce qu'il y avait l'emarqué
de plus curieux. Il avait été précède'
dans ces études , dont on ne peut con-
cevoir l'attrait dans le tourbillon du
monde , par le P. Anselme ( F. Ansel-
me. ), qui lui laissa de riches matériaux ;
i58 AN G
i! les mit en ordre, les grossit àe ses
propres recherches, et, du tout, il com-
posa l'/fistoire de la Maison de
France et des grands officiers de la
couronne, en 9 vol. in-fol. , ouvrage
d'une grande érudition , mais d'iuie
diffusion et d'une longueur insuppor-
tables , et dans lerpiel les historiens
Ye'ly, Garnier , Hénault ont puise',
sans scrupule, la partie de leur science
la plus difficile, et en même temps la
plus propre à donner à leurs récits le
caractère d'authenticité qui inspire tant
de confiance. Le P. Ange a publie, en
outre , avec les mêmes cléments et
les débris de sa grande Histoire de la
Maison de France , un Etat de la
France, en 5 vol. in-12 , ouvrage
dont Nicolas Besogne et Louis Tra-
bouillet, chapelain du roi et chanoine
de Meaux , avaient conçu la première
idée , que le P. Ange développa sur un
plan plus e'tendu , et auquel les reli-
gieux bénédictins de la congrégation
de St.-Maur mirent la dernière main ,
en 1749, en le publiant avec des aug-
mcnUitions, en G vol. in- 1*2. Cet Etat
de la France est curieux, en ce qu'il
contient , aussi exactement que possi-
lile , l'origine , la nature , les prcroga-
tives de tous les officiers ecclésias-
tiques, civils et militaires de la cou-
ronne, avec le cérémonial de leurs fonc-
tions et l'état de leurs appointements.
Le nom de famille du P. Angede Sainte-
Rosalie , était François FajJ'ard.
G — s.
ANGE(Rocca). rq>-. Rocca.
ANGELERIO. T^oy. Angelieri.
ANGELI ( BoNAVENTURE ) , histo-
rien italien , de quelque réputation ,
naquit à Ferrare , et fleurit dans le
16 . siècle.ll était savant jurisconsulte,
et fut d'abord chargé des affaires des
ducs de Ferrare, qu'il conduisit avec
beaucoup d'adresse et d'habileté. Il
alla ensuite s'établir à Parme , dont il
AN G
écrivit l'histoire. David Clément, dans
sa Bibliothèque curieuse , etc., tom.
I, p. 525 , dit qu'Angeli, ayant le projet
de décrire tous les fleuves de l'Italie,
avec les pays , les montagnes, les villes
et les châteaux situés sur leurs bords ,
et de corriger les erreurs de Ptolomée ,
de Pline et des géographes modernes ,
fit plusieurs vovages pour observer
les dilférentes positions des lieux ;
qu'arrivé à Parme , on le pria de join-
dre l'histoire de la ville à celle de la
rivière de ce nom; qu'il s'y arrêta , et
que, le libraire Erasme Violto lui avant
offert son magasin de livres , il l'ac-
cepta , se mit à écrire l'Histoire de
Parme, et l'ayant terminée en six mois,
la fit imprimer chez ce même libraire.
Elle ne parut cependant qu'en \~)()i ,
quinze ans après la mort de l'auteiu- ,
s'il est vrai qu'il mourut en iD-jG ,
comme l'assure BarufFaldi , dans son
Supplément àV Histoire de VUniv'er-
site de Ferrare, et, d'après lui , Maz-
zuchelli , Scrittori italiani , tom.I,
|Vîrt. 2. Son ouvrage est intitulé: Is-
toria délia cil ta di Parma e descri-
zione del Fiume Parma , lib. V 111 ,
Parma , Erasmo Viotto , 1 59 1 , in-4".
Chacun de ces huit livres est dédié à
quelqu'un des principaux seigneurs de
l'état de Parme , et, dans chacune de ces
dédicaces , l'auteur fait l'histoire généa-
logique de celui à qui elle est adressée.
Les exemplaires de celte histoire sont
assez rares , ceux surtout où certains
passages sur P. L. Farnèse ne sont pas
supprimés. Selon Clément, l'ouvrage
est très-recherché en Ijollande , parce
qu'il n'a pas été inséré dans le Trésor
des antiquités d'Italie. On avait pu-
blié, l'anuée précédente . cet autre ou-
vrage d'Angcli, qu'il faut joindre à son
histoire : Descrizione di Parma, suai
Fiumi, e laj-go territorio. Parma, Fr.
Vittorio . 1 5<)0. Parmi quelques écrits
que le msuie auteur avait pubhés à
ANG
Forrarc , on distingue : T. La VUa tll
Lodovico Cati , gentiluomo Ferra-
rese , etc. , 1 554 : ce Cati e'tait un doc-
teur en droit , ministre des ducs de
Ferrare ; II. De non sepeliendis mor-
tuis; III. Glielo<:^idesrlieroi Esiensi;
IV. Discorso intorno l'origine de^
cardinali , 1 565. G — é.
ANGELI ( Philippe ) , peintre , ne'
à Rome, vers la fin du i(3'\ siècle,
fut nommé Philippe Napolitain^ par-
ce qu'il travailla très-long- temps à Na-
ples. Il avait ete appelé, avec beau-
coup d'empressement, en i6i'^, à
la cour de CosmcII, grand -duc de
Toscane, et il avait reçu de ce prince,
ami des arts , des témoignages ho-
norables de bonté. Angeli composa ,
le premier , des paysages d'un style
nouveau , et conformes aux règles de la
perspective la plus sévère. Ces pay-
sages sont rares, et se vendent très-
cher. Le Musée Napoléon possède un
tableau représentant le Satyre et le
Passant., qu'on attribue à ce maître.
Si c'est la lecture de la 8*. fable
de La Fontaine ( livre 5". ) , qui a
donné l'idée de ce tableau , il ne peut
être de Philippe Angeli , qui mou-
rut en 1643 , époque à laquelle La
Fontaine n'avait que vingt-deux ans,
et ignorait encore ses heureuses dis-
positions pour la poésie. C'est avec
bien plus de raison que la Notice du
Musée attribue ensuite ce tableau
à Sébastien Ricci, né en lôSg, et
mort en i'^34. U est permis cepen-
dant de supposer que le sujet de cette
fable, étant emprunté des anciens, a
pu être aussi traité par Philippe
Angeli. A — d.
ANGELI (Pierre), /^ojk. Angelio.
ANGELI. Voj. Angely.
ANGELI (Etienne ), jésuate, fut,
dit Moutucla , un géomètre distingué
dans son temps , et très-fécond. 11 pu-
blia, dans l'intervalle des années i(i58
ANG
«59
à 1GG2, un grand nombre d'ouvrages
concernant tous des sujets de la géo-
métrie transcendante. L'ordre des ic-
suates ayant été supprimé en i (M'y'ii ,
Angeli vécut en particulier , et professa
les mathématiques à Padoue, où il
vivait encore à la fin du i-]". siècle.
Cornélius àBeughcm (dans ?,a.Bibliu-
graphia mathematica ) donne ks
titres des ouvrages d'Angeli, au nom-
bre de neuf. A. B — t.
ANGELICO. r. pRA. GiovANNi-
ANGELIERI ( Ronaventure ) ,
moine de l'ordre des frères mineurs
de S. François, né à Marsalla en Si-
cile , n'est connu que par la singula-
rité des titres de deux volumes qu'il
a pubhés , et qui devaient être suivis
de vingt-quatre autres , qu'il avait pré-
parés , sur les mêmes sujets. Le pre-
mier est intitulé : Lux magie a, etc.,
cœlestium , terrestrium et inferoruui
origo , ordo , et suhordinatio ciinc-
torum, quoad esse, fîeri, etoperari,
viginti quatuor volwninihus divisa,
pars prima , etc. , Venise , i ()8G ,
in-4°. Ne voulant point se faire con-
naître pour auteur de ce livre , il le
donna sous le nom de Livio Betani,
ce qui l'a lait ranger parmi les auteurs
pseudonymes ; mais il futplushardi ou
publiant son second volume, intitulé:
lAix magica academica^ pars secim-
da , primordia rerum naturalium ,
sanabilium, infirmarum et incurahi-
lium continens y etc., Venise, 1687,
in-4". On ne sait rien de la vie de ce
moine , sinon qu'il fut vicaire-général
de son ordre à Madrid, qu'il passa
ensuite parmi les pères de l'Obser-
vance , et qu'il vivait encore en 1707,
année oîi Mongitore parle de lui
comme d'un auteur vivant , Bibllo-
theca sicula , vol. P"". , pag. 11 u.
G— E.
ANGELTO, ou DEGLI ANGELÎ
( PiERfxE ) , né , eu 1 5 1 7 , à Barga .
i6o AN G
en Toscane , à vingt milles de Luc-
ques, et surnonimé en ita'ieu Bargeo,
et en latin Bccri:œns , a cause de sa
patrie , fut uu àcs littérateurs les plus
illustres du lô*". siècle. Elevé, daburd,
par un oncle triîs-vcrsé dans les lan-
gues anciennes , il savait le p;rec et le
latin ;'; dix ans. On voulut ensuite
qu'il ctudiàî '-?;' lois à Bologne; mais
ses jiuùts li!!o» aires étaient déclarés ;
et, après quelques ciForts inutiles, ses
oncles ne voulant pas l'entretenir à
Bologne , s'il n'y étudiait que les
belles-lettres , il vendit ses livres de
droit, et subsista ainsi pendant quel-
que temps. Uu riche Bolonais , de la
famille Pepoli, lui fournit les moyens
d'achever ses études. Son talent poé-
tique s'annonça de bonne heure; il
était encore à l'université de Bologne ,
lorsqu'il conçut l'idée de son poème
latin sur la chasse, celui de tous ses
ouvrages qui lui a fait le plus de ré-
putation. La crainte d'être recoiiuu
pour l'auteur de quelques vers sati-
riques qu'il avait faits, à la prière
d'une très-noble dame , dont il était
amoureux, contre un mari trop peu
jaloux de sa femme, l'obligea de qiut-
ter Bologne. 11 se rendit à Venise , où
il trouva un asyle honorable chez
l'ambassadeur de France, qui le re-
tint chez lui pendant trois ans , et
l'occupa à corriger des manuscrits
grecs, qu'il faisait copier par ordre
du roi, François 1"'., pour être placés
à Paris, dans la Bibliothèque royale.
Emmené ensuite àConstanîinoplepar
un autre ambassadeur français , dont
il avait fait la connaissance à Venise,
il visita avec lui, dans l'Asie mincue
et dans la Grèce, tous les lieux célé-
brés dans les ouvrages des anciens.
11 était , en i543 , sur la flotte en-
voyée par le grand-soigneur aux en-
virons de Mec, coulre l'empereur,
sous les ordres du fameux Barbe-
ANG
rousse. Il se trouva, avec son ambas-
sadeur , au siège de Nice, par les
F^-ançais. La ville fut prise : la cita-
delle était assiégée de près; un faux
bruit , répandu par les Italiens , lit
craindre, aux assiégeants, l'approche
d'une armée nombreuse; ils levèrent
le siège. 11 en résulta de l'aigreur entre
les deux nations. Un Français, qui se
trouvait auprès d'Angelio sur une ga-
lère, injuria les Italiens; Angelio lui
donna un soufflet, se battit avec lui
et le tua. Le commandant de la galère
le fit arrêter sur-le-champ , mais le
laissa ensuite échapper.On se mit aussi-
tôt à sa pouisuite : il eut bien de la
peine à se soustraire aux recherches ju-
ridiques et à celles des ennemis par-
ticuliers qu'il s'était faits. Son cou-
rage , et les secours de quelques amis,
le firent enfin arriver à Gênes; le cé-
lèbre marquis del Vasto , qu'il alla
trouver au siège de Mondovi , lui
donna les moyens de retoui'ner en
Toscane. Il fut attaqué de la fièvre
tierce à Florence, rencontra son frère
et SOS oncles en procès à Barga, sa
pairie; et. crovant trouver phis de re-
pos et de santé à Milan, où Alphonse
Davalos l'appeliit, il projetait de s'y
rendre, lorsqu'il apprit la mort de cet
illustre Mécène. Il chercha à se con-
soler par des travaux poétiques qu'il
avait interrompus depuis long-temps.
11 reprit son Poème de la Chasse , pour
Irquel il a^ait recueilli un grand nom-
bre de notes et d'observations en
Orient et en France. Fn i546, les
habitants de Reggio le choisirent pour
professer publiquement les langues
grecque et latine , avec des appointe-
ments honorables , et les droits de
cité dans leur ville : il accepta, et
remplit pendant trois ans cet em-
ploi. Au bout de ce temps, le grand-
duc, Cosme P'". , l'app'^la pour pro-
fesser les belles-lelljCs dans l'univei-
ANG
site de Pise. Après avoir occupe dix-
sept ans celte chaire, il passa à celle
de morale et de politique, où il fut char-
gé d'expliquer les deux p,rands Traités
d'Aristote sur ces matières. Son atta-
chement pour cette université et pour
le grand-duc était tel que, pendant
la guerre de Sienne , Cosrae ayant été
tlucé de suspendre les paiements des
professeurs de Pise , Angelio engagea
ses meubles et ses livres pour rester à
son poste , tandis que tous ses con-
frères désertaient. L'armée siennoise,
commandée par Pierre Strozzi, s'ap-
procha de Pise. 11 n'y avait point de
soldats pour la défendre. Le brave
professeui" fit prendre les armes à
t(3us les écoliers de l'université , les
, exerça , les encouragea , rassura et
■défendit avec eux la ville , jusqu'au
moment où le grand-duc y pat en-
voyer des secours. Le cardinal Fer-
dinand de Médicis , qui fut ensuite
grand-duc , l'appela à Uome , auprès
de lui, en iD^S. Il l'y fixa par une
forte pension , par de riches présents,
et par les traitements les plus hono-
rables. Il l'encouragea à terminer un
grand poème commencé depuis plus
de trente ans, et dont le sujet était la
conquête de la Syrie et de la Palestine
par les chrétiens. Angelio fit réimpri-
mer à Rome toutes ses poésies en
i585, et les dédia au même cardinal,
qui l'en récompensa par un présent de
deux mille florins d'or. Quand Fer-
dinand fut devenu grand-duc, An-
geho le suivit à Florence , où il fut
consul de l'académie, et où il publia
enfin son poème de la Sjriade. Des
pensions considérables lui assurèrent
une vieillesse libre et heureuse. S'é-
tant retiré à Pise, il y vécut paisi-
blement quelques années. Il y mou-
rut de maladie, le sç) février iSqO,
âge' de 'jij ans , et fut enterré dans
le Gampo Santo. On lui ût des ob-
A IN" G i6i
sèques magnifiques : son oraison fu-
nèbre fut prononcée dans l'acadé-
mie de Florence , et même, par une
exception très-rare, dans l'académie
de la Crusca , quoiqu'il n'en efit pas
été membre. Ces deux Discours sont
imprimés. Ceux des ouvrages d'An-
geiio qui ont vu le jour , sont :
1. Trois Oraisons funèbres ; la pre-
mière , du roi de France , Henri II ,
prononcée à Florence, en T55g; la
seconde, du grand-duc Cosinc de Mé-
dicis, à Pise, eu i5'j4 5 ^t la troisième,
du grand-duc Ferdinand de Médicis,
à Florence, en 1587: toutes trois,
écrites en latin , ont été traduites en
italien , et imprimées ; on croit que la
traduction de la troisième fut faite
par l'auteur même. II. De ordine
legendi scri plores Historiœ Romanœ.
Cet opuscule, imprimé deux fois à
part, a été inséré par Grotius dans
sou recueil, intitulé : De studiis iiis-
tiliiendis , Amsterdam, Blaeii, i(H5
et i645,in-i2, III. Poémata on nia,
diligenter ah ipso recognita , Romae,
i585, in-4''. Ce volume contient une
grande variété d'ouvrages , qui avaient
été, d'abord, presque tous imprimés
séparément , et dont voici les princi-
paux : Cjnegelicon lihri VI ^ le
meilleur de tous ses poèmes , et au-
quel il avait travaillé pendant vingt
ans, comme il l'avoue dans sa pré-
face ; De aucupio liber primas ; ce
poème était en quatre livres, mais
Angv'lio n'osa jamais publier que le
primifr; Eclogœ If'; Epistolarum
liber /,- C arniinum libri IT; Syrias ,
poëme en douze livres, sur le même
sujet que la Jérusalem délivrée du
Tasse; IV. Depri^atonim publico-
rumque urbis Romœ eversoribus épis-
toln, etc., Florence, iSSq, in-4^.,
et ensuite insérée dans le tome IV du
Thésaurus anLiquitatum Romana-
ruin. L'auteur y soutient que ce p'sst
II
l62
A N G
pas aux Gotlis ni aux Vandales, mais
aux ordres du pape Grégoire, et de
quelques-uns de ses successeiu's , et
en partie aussi à la piété mal entendue
des clirétieus, qu'il faut attribuer la
destruction des plus beaux monu-
ments de Rome. V. Poésie toscane ,
publiées avec une traduction de l' OE-
dipe Roi, de Sophocle, faite par le
même auteur, Florence , i SHg , in-8°- ;
VI. quelques lettres en latin et eu
italien , imprimé "s daus plusieurs re-
cueils ; \' il. les Ménioires de sa vie ,
écrits par lui-même , publiés par Sal-
vino Sah ini dans les Fasli consolari
de l'académie de Florence, et d'où
l'on a tiré, pour la première partie
de cet article , des faits intéressants ,
qui ne se trouvent point dans les
Dictionnaires historiques prétendus
universels , publiés, jusqu'à présent ,
en France , et même en Italie. G — e.
ANGELIO, ou DEGLI ANGELI
(Antoine), frère aîné du précédent,
et né à Barga , comme lui , fut aussi
de l'académie florentine, où il fil pu-
bliquement quelques leçons en i54i.
11 fiit précepteur de François et de
Ferdinand de Médicis , qui furent
grands-ducs de Toscane , et ensuite,
en i5to, évêquc de IMassa , cvêché
suffiagant de la métropole de Sienne.
Il mourut en iS'jg. Trois Epîtres
latines de lui , en vers héroïques ,
sont imprimées parmi les poésies de
son frère, dans l'édition de i585 ( P^.
l'article précédent , n". III.), et ont
été réimprimées par Gruter , dans le
1 "". vol. des Delitiœ poëtarian ita-
lorwn. G — i.
A.NGELIS( Dominique de ), au-
teur italien du 18". siècle , naquit, en
167 5, d'une famille noble et distin-
guée , à Lecce, ville capitale de la terre
d'Olranlc , dans le royaume de Na-
ples. Après avoir fait de bonnes étu-
des dans ka patrie, il fut appelé à
AN G
Naples par un de ses oncles , et y étu-
dia les lois , la géométrie , la langue
grecque, et la philosophie de Des-
cartes. 11 fit un voyage en Espagne,
en qualité de chapelain d'un régi-
ment napolitain j en passant à Paris
pour s'y rendre , il fut présenté à
Louis XIV , qui lui accorda le titre
â'Historieji du Roi. Il fut fait pri-
sonnier , dans les Pyrénées , par
les Miquelets , mais presque aussitôt
remis en liberté. De retour à Rome ,
le pape le nomma chapelain de l'ar-
mée pontificale, qui faisait une expé-
dition aux frontières. Cette expédition
finie , il revint à JNaples , et ensuite à
Lecce, vers l'année 17 10 : il y obtint
un bon canouicat , et fut pourvu, dans
la suite , de plusieurs vicariats géné-
raux , dont il remplit les fonctions
avec autant de zèle que de lumièi-es.
Il mourut , à Lecce même , le 7 août
1 7 1 8. Il était de plusieurs académies ,
et a laissé, entre autres ouvrages esti-
més : 1. Délia palria d'Ennio, à
Rome, 1701, in-8'. , et ensuite à
Naples , 1 7 1 '2 ; dissertation tendant à
prouver que la patrie du célèbre poète
Ennius est Rudia, à deux milles de
Lecce, et non pas Rudia, près de Ta-
rente , comme l'auteur d'une disserta-
tation , rendue publique , l'avait sou-
tenu ; II. Discorso istorico, in cui
si Iratla delV origine et délia fon-
dazione délia città di Lecce, etc. ,
Lecce, 1703, in-4". ; HL Le VitiS
de Leiterati Sabntini , parte 1 , k
Naples, sous le faux titre de Flo-
rence , 1710, in-4". ; parte II , à
Naples , 1713. D'autres écrits du
même auteur ont rapport à des que-
relles élevées entre la ville de Lecce
et son évêque , et à l'interdit qui en
fut la suite. Leurs titres ne seraieiit
d'aucun intérêt pour le lecteur. G — i:.
ANGELIS ( Jérôme d' ) , ué ru
1567, à Castro-Giovanni, ville de
AN G
Sicile, eutra , à dix-huit ans , dans la
compagnie des jésuites , et ol)tiut , en
1593 , d'être envoyé comme mission-
naire dans riiide et au Japon. A cet
effet , il s'embarqua à Lisbonne avec
Charles Spiuola, le 10 avril 159G;
et , après deux ans do navigation ,
jeté sur les cotes de Bi'ésil , pris par
des corsaires , et emmené en Angle-
terre , où il fut en prison pendant une
nuit , il reviut en Portugal , s'y fit or-
donner prêtre , et se reuibarqaa pour
le Japon, où il arriva enfin en 1G02.
Il aj)prit la langue du pays , et s'a-
donna avec fruit à la conversion des
habitants, jusqu'en 161 4) qu'il ^^^
bautii du royaume , avec tous ses-
compagnons. 11 oi)tint alors, do ses
supérieurs , la prrmission de rester
dans ce pays , et d'y quitter l'habit de
son ordre ; dévoré du zèle de la mai-
sou de Dieu, il parcourut plusieurs
fois le Japon , bravant et surmontant
tous les obstacles. Le premier, ilpur-
ta la foi à Malsuniai, dans la terre
d'Ycsso ; le premier , il alla visiter
les serviteurs du Christ , qu'on avait
relégués à Méaco, à Osacka , etc. ;
il y trouva a peine 1 000 cluétiens ,
et , en peu de temps , en porta le
nombre à 1 1,000. ^Ltis uue horrible
persécution s'étant élevée, en iG.>>!S ,
contre les chrétiens , Angelis , qui
avait disparu à propos de la maison
qui lui servait de ictraite, résolut de
se sacrifier pour sauver la vie à son
hôte , qu'on avait arrêté. 11 quitta les
habits japonnais , reprit ceux de sou
ordre, et se présenta devant le gou-
verneur de Jédo , qui le fit conduire
en prison , et bnVer vif le 'i\ décem-
bre 1 6i5 , avec deux autres jésuites et
quarante-sept Japonais chiétiens. An-
gelis était âgé de cinquante-six ans ; il
en avait passé vingt-deux au Japon.
« 11 avait, dit la Bibliolhe(fne des Jé-
« suites, écrit uue courte Relation du
ANG iG5
» royaume de Fessa. » Nous avons
en français uue Histoire de ce qui
s'est passé aux royaumes de la Chine
et du Japon , tirée des lettres écrites
des années 1 6 1 9- 1 G-2 1 , traduite de
Vitalienpar Pierre Morin, in-4*'. La
seconde lettre du P. Jérôme d'Ansre-
c
lis, sur la terre d'Yesso, se trouve
à la fin de cet ouvrage. -^— Angelis
(Alexandre), né à Spolcîte , entra
dans l'ordre des jésuites , en 1 58 1 ,
professa successivement la philoso-
phie et la théologie , fut appelé par
le cardinal Serra, à Florence, ou il
mourut , en iGio , âgé de cinquante-
huit ans. Il a laissé un ouvrage , en
cinq livres, contre les astrologues,
imprimé , pour la seconde fois , à
Rome , iG 1 5 , in-4". Il avait promis ,
mais ne put achever des Commen-
taires sur la philosophie et la théo-
logie universelle. — Angelis ( Fran-
çois-Antoine ) , né à Sorrento , en
1 5G7 , entra chez les jésuites eu 1 585,
fut envoyé, en 1G02 , dans l'Inde,
et , deux ans après , en Ethiopie , où
il prêcha l'évangile pendant clix-huit
ans. Il mourut eu iG,>.5j il avait tra-
duit , dans une des langues de i'Éthio-
pie , plusieurs ouvrages , entre autres
les Commentaires de Jean Maldo-
nat sur V Evang^ile de S. Mathieu ,
et sur VEvangile de S. Luc. — An-
gelis ( Mutins ) , né à S])olette , mort
en 1 597 , à trente-neuf ans , après
avoir professé , pendant seize ans , la
pliiiosophie et la théologie , a laissé
des commentaires sur presque tous les
Livres d'Aristote , sur la Somme de
S. Thomas , des notes sur les Epî-
très de S. Paul, etc. A. B — t.
A N G E L O ( Jacques d' ) , né à
Scarperia, dans la vallée de Mugello,
au 1 4"' siècle , était savant dans la
langue grecque. Il ctdit allé prendre,
à Venise , des leçons de Manuel Ghry-
sûloras et de Démétrius Cidonius, qui
lin
iG4 AN G
y étaient envoyés par l'empereur Ma-
nuel Pale'ologue. Lorsqu'ils retouniè-
reiit à Constantinople, il partit avec
eux, et fît un voyage en Grèce. De
retour à Florence, il se rendit ensuite
à Rome , où il disputa à Léonard
d'Arezzo la place de secrétaire apos-
tolique ; et , si alors Le'onard l'cm-
poita , d'Angolo fut ensuite revêtu de
cette charge, comme le prouve un
titre daté de l'année i4io. Depuis celte
époque , l'histoire littéraire ne nous
apprend plus rien de cet auteur , qui a
laisséplusieurstraductionslatines d'ou-
vrages grecs. Les principales sont : T,
Cosmographiœ Ptolomœi lihri FIIl;
IL Ptolomœi quadripartilian ; IIL
M. Tullii Ciceronis vita h Plutarcho
conscripta. Il y a de plus , du même
auteur , un ouvrage sur le même sujet ,
intitulé : Jacobi Angeli historica nar-
rntio de vita , rebiisque gestis ]\f.
Ttdlii Ciceronis , etc., Wirtemberg,
ij()^; Berlin, i58i et loS", dont
Fabricius parle , dans sa Bibliothèque
latine du mojen dge , comme d'im
ouvrage différent de la traduction de
celui de Plutarque. IV. Quatre autres
P^ies de'Plutarque , celles de Pompée ,
de M. Brutus , de Marins , et de Jules
César, aussi traduites en latin; mais
non imprimées , et conservées en ma-
nuscrit dans les bibliothèques de Flo-
rence et de Milan. G — e.
ANGELO, jurisconsulte du i5\
siècle , fils de Paul de Castro, un des
savants les plus estimés de son siècle ,
enseigna, comme son père, la juiis-
prudcnce dans l'université de Padoue,
et se fit une grande réputation par ses
connaissances dans le droit canoni-
que, ce qui le fit nommer chevalier,
et avocat consistorial. Il est difficile de
croire qu'un homme qui a professé
pendant quarante ans l'un et l'autre
droit, n'ait pas laissé d'ouvrages sur
ces matières j le temps ne nous les a
ANG
pas conservés ; sa réputation ne se
troîive consacrée que par son épita-
phc, qu'on lit sur le tombeau de son
père. Il paraît que c'était l'usage à cette
époque, lorsque le père et le fils s'é-
taient illustrés dans la même profes-
sion , de les réunir tous les deux dans
le même tombeau. M — x.
A N G E L 0 C E A ï 0 R ( Daniel ),
théologien reformé, né à Corbach,
en 1 56f), mort en 1 635 , surinten-
dant et pasteur à Kœlhen. Il assista
au synode de Dordrecht, en i6i8 , et
fut très-mallraité lors de la prise de
Casscl, en 1626, par Tilly. D^ns le
nombre de ses ouvrages, indiqués
dans la liesse sai'ante, de Striedel,
on rem;uque : Chronologia autopti-
ca , Cassel , 1 60 1 , iu-fo!. , c'est-à-dire ,
(7//ro7ir;Zogje tellement évidente qu'elle
équivaut à l'avantage d'avoir été té-
moin des événements. Ses écrits théo-
logiques n'annoncent pas moins de
confiance dans ses lumières et ses opi-
nions. On a encore de lui des ouvrages
sur l'art métrique des anciens , et un
Traité des poids, mesures et mon-
naies, accompagné de tableaux bien
faits : Doctrina de ponderibus ^men-
suris et monetis , Marbourg, iGi-j,
iu-4". Son nom de familh était Eiigel-
hardt. Sa Chronologie est nu ouvrage
savant , mais plein d'erreurs, et d'une
confiance déplacée dans les absurdes
compilations d'Annius de Viterbe.
S— R.
A^TJELOME , diacre et religieux
bcuédicliii de l'abbaye de Luxeuil, au
commencement du 9". siècle , se dis-
tingua , dans ces temps d'ignorance ,
par son goût pour l'étude. Ses talents
le firent connaître de l'empereur Lo-
thaire , qui tenta vainement de l'attirer
à sa cour. Il avait éciit, en latin, uu
grand nombre d'ouvrages qui se sont
perdus. On conservait, dans la biblio-
thèque de Luxeuil; ses Commentaires
AN G
s«r îa Genèse , sur le Cantique des
Cantiques , et sur les Livres des
Rois. Sou Commentaire sur le Can-
tique des Cantiques a ete imprime à
Colo^uc, eu i53o, in- 12; celui 5z<r
le Livre des Rois , à Rome, Paul Ma-
îiuce, i565, in-fol., suivaut Ciaco-
iiius. Ces deux ouvrages , qui portent
l'empreinte de l'espi'it bizarre et gros-
sier du 9''. siècle , avaient été' impri-
me's ensemble à Cologne, 1 53o, in-4"-
Angelouie mourut à Luxeuil en 854»
W— s.
ANGELONI (Francesco), savant
litte'rateur et antiquaire ne' àTerni, dans
rOmbrie , était secrétaire du cardinal
Ippolito Aldobrandini , et protono-
taire apostolique. Il était aussi mem-
bre de l'académie degVJnsensati de
Pérugia , et il avait formé une si riche
collection d'objets d'art de toute es-
pèce, qu'elle mérita le nom de Musée
romain. Le marquis. Vincenzo Gius-
tiniani , qui faisait alors graver les mo-
numents de sa magnifique galerie ,
persuada à Angeloni de publier aussi
la suite de médailles impériales latines
qu'il avait formée, et ce fut ainsi que
celui-ci fit paraître son Histoire métal-
lique des empereurs Romains , Rome,
1641, in-fol., qu'il dédia à Louis Xlll.
Angeloni , alors avancé en âge , et dis-
trait par les devoirs de son état, ne put
donnera son travail la perfection qu'on
avait le droit d'exiger; il éprouva de vio-
lentes critiques. 11 en préparait une nou-
velle édition , augmentée et corrigée ,
lorsque la mort vint le frapper , le 29
novembre i652. Giov. Pietro Bellori,
son neveu maternel, crut devoir, à la
mémoire de son oncle , de se charger
de cette édition , qui parut à Rome, eu
i685, in-fol.; c'est la meilleure. Bel-
lori y a fait beaucoup de corrections et
d'additions qui sont dues , en partie , à
Angeloni lui-même ; il a surtout consi-
dérablement augmenté le nombre des
AN G i65
planches , en y ajoutant plusieurs re-
vers de médailles qu'Angeloui avait
négljî^és : comme sa collection avait
été vendue et dispersée, ces revers
sont pris des médailles de la reine
Christine de Suède. Comme cette 2''.
édition est dédiée au cardinal Aificri ,
on en a retranché le frontispice allé-
gorique, la dédicace à Louis Xlll, et
les pièces en vers et en prose qui étaient
adressées à Monsieur et au cardinal de
Richelieu : le portrait d'Angeloni ne
s'y trouve pas non plus. Angeloni a
aussi écrit l'histoire de sa patrie , Slo-
riadiTenii, Rome, 1G46, in-4".;
elle est dédiée au cardinal Mazarin ;
elle a également eu une seconde édi-
tion, qui a paru dans la même ville,
eu i685, in-4"- K"g est accompa-
gnée du portrait de l'auteur. L'ou-
vrage est partagé en trois livres; le
premier traite des antiquités de Terni ;
l'auteur y publie et explique un grand
nombre d'insciiptioiis romaines ; Ir
second rapporte chronologiquement
tous les événements dont Terni a et»
le théâtre; le troisième donne une des-
cription de cette ville, et un apjjcndix
est consacré à tracer la vie des saints
qu'elle a produits. On attribue comnui-
nément à Angeloni un ouvrage aponv-
mc intitulé : // Bonino^ovvero Avver-
timenti al Trislano , intorno gli error i
nelle medaglie del primo tomo de'
suoi Commentari istori<;i , in-4"';
mais il est prouvé que cette critique,
qui a paru en 1649, sans date ni in-
dication de lieu, est de Bellori. An-
geloni a encore écrit des épîtres , et
plusieurs comédies , dont deux ont été
imprimées. I. gl' Irragionevoli Amo-
ri, Venise , 1 6 1 1 , in- 1 2. C'est un véri-
table imbroglio : un jeune homme
devient amoureux d'une femme qui est
élevée sous un nom supposé; on leur
apprend ensuite qu'ils sontiils du même
père j mais un second évéuement dé -
i66 AN G
truit cette erreur, et ils s'e'pouscnt.
Cette pièce est écrite en prose ,
et dédiée au cjirdiiial Aldobrandiiii.
U. La FZorrt, Padoue, )6i4,in-i2.
Am^cloniavalt aussi composé un opéra
inlitulé Arcadia , à l'iuiilation de
r.^rcrt<ifedc Sanuazar; des épîtres et
des ouvrages d'agrément , savoir : I.
Dialoghi Piego fiel signor yJgrestino
de" Calzanti adErasto Ifrone^per
fugir lefrnudi délie cattive femine ,
Veiietiis, i6i5cti(3i6, iu-8'.; W.Let-
tere de buonefeste, scrilte daprinci-
f'e a principi , Romœ , i(i58, iu-8".
Ces lettres sont celles qui ont été écrites
par Angeloni , selon l'usage italien ,
:v\ nom du cardinal Aldobrandini, à
divers princes, aux époques de Noël ,
de Pâques , ou d'autres solennités ;
elles ont été publiées par Btllori. An-
geloni a aussi laissé manuscrits Cento
Scherzi amorosi ; cent Nouvelles
dans le genredeBoccace, et vingt vo-
lumes de Lettres sur différents sujets.
A. [.. M.
ANGET.UCCI ( Théodore), poète
italien , florissait à la fin du \Cf.
siècle; il était né à BclTorte , cbàfeau
voisin de Tolrntino, dans la marche
d'Aucoue. Il fut médecin de profes-
sion, et l'exercice qu'il fit de son
art, dans un grand nombre de villes,
lui procura dans plusieurs , entre
autres à Trévise, le t'tre et les droits
de citoyen. Il se rendit surtout célè-
bre par ses querelles littéraires avec
François Patrizi , en faveur d'Aris-
tote. Quelques auteurs ont écrit qu'il
avait été professeur public àP.tdoue;
mais Riccoboni, Toraasiui et Papado-
poli, historiens de cette université,
n'en parlent pas. Il nous a|)]irend lui-
uicme, dans une de ses éj îtres dédi-
catoires, qu'étant encore très-jeune, il
avait fait quelque séjour à Rome, et,
qu'en iSqj, il se trouvait à Venise,
exilé de sa patrie, et accablé j>ar le
AN G
malheur. Il ne dit rien d'un prétendu
séjour en Fran^^e, dont il est à croire,
cependant, qu'il n'aurait pas manqué
de parler, surtout s'il y avait acheva'
ses études, H fut membre de l'acadé-
mie véuitienne, et mourut en 1600,
à Montagnana , où il était premier
médecin, et d'où son corps fut trans-
porté à Trévise. Il a laissé les ou-
vrages suivants : I. Sententia quod
3letaphrsica sit eadeni quœ Phy-
sica, \ enise , i58/|., in-4^ F. Pa-
trizi avait attaqué, dans un livre en
4 volumes, la philosophie d'Aristote,
pour y substituer celle de Platon : An-
gelucci entreprit de le réfuter dans cet
ouvrage. Patrizi lui répond;t par un
autre, auquel il répliqua par le sui-
vant : U. Exercitaiionurn ciim Pa-
tritio liber , \ cnise , i585, in-4". ;
III. ^rs medica, ex Hippocratis et
Galeni thesauris polissimitm de-
prompta, etc., Venise, 1 595, in-4".;
IV. De Naiurd et curatione mali-
gjice febrislibri I f^^ ^ Venise, i^qS,
in-4". Cet ouvrage fut durement cri-
tiqué par Donatelli de Castiglione, au-
quel Angclucci répondit de même; sa
réponse est intitulée : Bactria , qui-
biis riidens quidam ac falsiis crimi-
jiainr validé reperciititiir, etc. V.
Deus, canzone spiritiiale di Celio
magno , etc. , con due Lezioni di
Teodoro Angclucci^ Venise, i5f)7,
in-4'.; ^I- Cftpitolo in Iode délia
pazzia. iiiséié par Tommaso G.ir-
zoiii, à qui il est adressé, dans son
Ospitale de' pazzi, Venise, 1 586 et
iGoi ; Vil. l'Enéide di rirgilio ,
triidotla in i^erso sciolto, Naples,
i(> 19 , in-i SI. Cette édition , qui est la
seule, est fort rare. Les auteurs du
Journal des Letterati d'Italia, Alga-
rotti , dans ses Lettres sur la Tra-
duction d' Annihal Caro , le père
Beverini, dans la Préface de sa tra-
duction de V Enéide, en ottava rima y
ANG
ont parle avec cloges de la tradiirlion
attribuée à Théodore Angeluccl ; d'au-
tres ont peuse qu'elle est du père
J,Q;nace Angelucci , jésuite , ne' en 1 585,
à Belforte, comme Théodore, et, sans
doute , son parent ; mais ce père
Jgnace n'a laisse aucun autre ouvrage
qui puisse le faire croire capable d'a-
voir fait cette traduction. G — É.
ANGELUS ( Christophe ) , savant
p;rec du i 'J^ siècle , né dans le Pélo-
jionnèse, fut obligé, par lesTurks,
«l'abandonner son pays ; il seréfugia en
Angleterre, où il obtint des secours
de l'évêque deNorwich et de plusieurs
membres du clergé. A la recomman-
dation de ce prélat , il fut reçu au col-
lège de la Trinité , à Cambridge , et y
étudia , pendant trois ans. En 1610 ,
il se rendit à Oxford , et étudia au col-
lège de Baliol , où il enseigna le grec
jusqu'à sa mort , arrivée le i ^'. féviier
1(538. Ses ouvrages sont: I. Une Be-
lalion des tourments quil éprouva à
cause de sa foi en J.-C. , Oxford ,
1G19 , en grec et eu anglais. Enchi-
ridion de Institutis grœconim , Cam-
bridge, 1619, en grec et en latin. On
trouve, dans cet ouvrage, des détails
curieux sur les pratiques de \n religion
grecque ; II. ^n Encomium on the
kingdom of Great Britain , and the
two Jlourishing sister- unwersities ,
Cambridge and Oxford, Cambridge,
1 6 1 g ; m. De apostasio ecclesiœ et
dehominepeccati, scd. Antichristo ,
Londres 1624 , grec et latin. D — t.
ANGELUS, ou ENGEL (André),
né le 16 novembre i56i , à Slraus-
berg, dans la Marche moyenne, fit ses
études à Francfort - sur - l'Oder , et
voyagea si long-temps, pour pour-
suivre ses recherches historiques ,
qu'il dépensa ainsi tout son patrimoine.
En 1 585 , il fut fait recteur dans sa
patrie, et, peu après, co-rectcur à
î^ eu-Brandebourg ; mais il renonça
A N G
nj7
bientôt à ces fonctions, pour se livrer
à ses travaux sur l'histoire : après
avoir habité quelque temps à Berlin ,
il mourut de la peste , le 9 août 1 598 ,
à Strausberg , où il était pasteur. Peu
de jours auparavant, il avait dit qu'a-
près avoir chanté l'hymne fimcbre sur
SCS brebis, le pasteur terminerait par sa
mort cette scène de deuil , et, par un
hasard singulier, la peste cessa trois
jours après. Il a écrit plusieurs ouvra-
ges en allemand, entre autres : I. Corn-
pendium rerum M ar chic arum , Wit-
teiibcrg, 1 595 , in-^". Ce n'est qu'un
essai ou extrait de l'ouvrage suivant;
II. Annales Marchiœ Brandenbur-
gic , Francfort-sur-l'Oder , 1 596 , in-
fui. G — T.
ANGELY ( r ) , fou de Louis XIII ,
en titre d'office, serait aussi inconnu
aujourd'hui que la plupart de ses de-
vanciers , si Boileau ne lui eût pas fait
l'honneur de le nommer dans sa pre-
mière satyre :
Un poète , â la cour . était jadis de motle ;
Miiisdes fous, aujnurd'liui, c'est le plus incommode;
l'A l'esprit le plus beau , l'auteur le plus poli.
N'y par\iendra jamais au sort de l'Augely.
C'est bien là le ton et le langage du
poète satirique; cependant, si jamais les
favoris des Muses ont trouvé des pro-
tections puissantes, c'est dans le mo-
ment où Boileau écrivait; c'est dans ce
siècle si glorieux pour la nation fran-
çaise, et dont Boileau a lui-inciae fait
dos peintures beaucoup plus exactes.
Dans sa VHP. satire, il donne à
Alexandre, le surnom de XAngelj :
Qui ? cet écervelé qui mit le monde en cendre.
Ce fougueux l'Angely , qui , de sang altéré ,
Slaitre du monde entier, s'y trouvait trop serré.
L'Angely avait suivi le prince de Condé
dans ses campagnes de Flandre, comme
valet d'écurie; il lui plut par ses répar-
ties piquantes , et par la hardiesse avec
laquelle il raillait les scigneui's , même
les plus distingués. Ce priuce , l'ayant
ramené en France, le conduisit à la
i6B AN G
<^oiir, et, sur IVnvic que le roi lui té-
moigna d'avoir l'Aiigely à son service,
il le iui donna. L'AngeH fit, en peu de
temps , une fortune considérable. Aussi
Mari^nv, l'nu des gentilshommes du
prince de Conde, disait-il : « De tons
» nous autres fous qvii avons suivi
» M. le Pi ince , "Augely est le seul qui
» ait fait fortune, d Quelques auteurs
disent qu'il avait amassé une somme
de 23,000 ecus, des présents qu'il re-
cevait, soil de ceux qu'il amusait par
ses boctî'tnneries, soit de ceux dont il
s'était fait craindre par ses plaisante-
ries : il n'aimait pas le comte de No-
grnt. Ménage rapporte que, se trou-
vant un jour au dîner du roi avec ce
seigneur, l'Angely lui dit : « M. le
» comte , couvrons-nous , cela est sans
» conséquence pour nous » ; et que
M. de Nogeuten conçut un tel chagrin,
que cela coijlribua à le faire mourir
peu de temps après. Une autre fois , se
trouvant dans une compagnie ou il
faisait le fou depuis long -temps,
M. de Bautru vint à entrer 5 sitôt que
l'Angely i'cut aperçu : « Vous venez
V bien à propos, lui dil-il, pour me
» seconder ; je me lassais d'être seu'. »
Ce i'Angely , qui n'était rieu moins
que fini , comme on le voit , était d'une
famille noble, mais pavivre. Quand il
fut en Oiveur , ses parents le reconnu-
rent, et il se fit réhabiliter. On peut
consulter, sur ces anecdotes, le Mé-
72«£;7fl«rt, donné par La Mounoye,
tome i'\ , p. 18, édition de 1 7 1 5.
W— s.
A NGENNE S (Renavtd' ), sei-
gneur de Rambouillet, gouverneur du
Dauphin , lils de Charles VI . et cham-
bellan de ce monarque , fut employé
dans plusieurs négi*(ialiuns impor-
tantes eu Flandre et en Allemagne ,
et nommé, en idç)» , garde-capitaine
du château du Lou^ re. l^es factieux de
Paris , excités contre le dauphin par
A>^rT
^e dur de Bourgogne ,0*" ï^i5, sVra-
parèrent du palais, après a-'oir arrêté
d'Angennes . son fils, et plusieurs sei-
gneurs de la cour; mais, le dauphin
ayant réprimé les séditieux , d'An-
gennes recouvra la liberté , fut rétabli
dans sa charge, et , la même année,
reçut , de ce prince , une gratification ,
eu considération « de ce qu'il l'avoit
enseigné au fait de la jouxte, et avoit
été le premier contre qui il s'étoit es-
sayé et avoit jouxté. » Fidèle à la cause
de son pupille, d'Angennes se joignit
aux seigneurs français, qui s'opposaient
à l'usurpation des Bourguignons et des
Anglais, et périt, en i^'i^, à la ba-
taille de Verneuil. — Un autre d'An-
gennes ( Jacques ) , de la même fa-
mille , fut capitaine des gardes -du-
corps , sous les règnes de François) '"'".,
de Henri II , de François II, et de
Charles IX , lieutenant - général de
leurs armées, et gouverneur de Metz.
Chargé, en 1 Sfi-j , de conduire à Pai is
un corps de troupes pour réprimer
une sédition des étudiants de l'univer-
sité , il les fit rentrer dans le devoir.
Il se distingua, la même année, au siège
de M.-Qucntin. Catherine de Médiris
lui donna , en 1 5G 1 , la mission déli-
cate d'aller en Allemagne, proposer
anx princes protestants une ligue fé-
dérative pour s'opposer aux résolu-
tions qui allaient être prises au concile
de Trente. Cette démarche n'eutaucun
résultat, et d'Angennes mourut l'année
suivante. B — p.
ANGFNNES ( Claude d ) , fils du
précédent, néàRambouiikt,en i558,
conseiller-clerc au parlement de Paris
en i5G5; envoyé, trois ans après vers
Cosme de IMédicis , grand-duc de Tos-
cane , avec le titre de conseiller d'état ;
évêque de Noyon, en 1577 , P"'^ ^^
Mans , en 1 588 , à la place de son
frère Charles , y établit uu séminaire ,
et y myurut , le r5 mars 160 1 . Ua a
ANG
de lui : I. Bemontrance du clergé de
France, i585,iu-8''.;ll.aiitj;', iSqô,
in-8'. ; m. Lettre de l'éiéque du
Mans , a^'ec la réponse à elle faite
par un docteur en théologie , en la-
quelle est répondu à ces deux doutes :
Si on peut suivre en sûrtté de cons-
cience le parti du roi de Navarre et
le reconnaître pour roi, et si l'acte
de frère Jacques Clément doit être
approuvé en conscience , et s'il est
louable ou non ? 1 089 , in - 8 '. Le
docteur en théologie est le fameux li-
jïuenr Jean Bouclier , qui , dans sa re'-
ponse , vomit toutes sortes d'injures
contre Henri III; IV. Avis de Rome,
tirés des lettres de Vévéque du Mans
à Henri de Falois, 1 689, in-S". L'au-
teur des reflexions sur ces lettres est
fortement prononce contre Henri 111;
V. Lettre à Henri III , dans laquelle
il lui rend compte de sa mission à
Rome, relative à la mort du cardinal
de Guise. N — l.
Aïs GENNES ( d' ) , cardinal de
Rambouillet. Foy. Ramcguillet.
ANGERIANO (Girolamo), poète
napolitain qui florissait au iG. siècle,
laissa des poésies latines fort estimées
de son temps ; elles furent impri-
mées, pour la première fois, à Na-
ples , en i5'2o, in-8'., sous ce titre :
ÈjwTCTTaîyvtcv , Eclogœ ; De obitu Ly-
dœ; De vero poëtd; De Parthenope.
Son Erotopœgnioji , qui est un re-
cueil de petites pièces amoureuses , et
qu'il avait pourtant dédié à l'archevê-
que de Bari , fut réimprimé à Paris ,
en i54'A , in-12, avec les poésies de
Marulle et de Jean Second ; et ensuite
ibid. , en i582 , aussi in - 12. Elles
sont fort au -dessous de celles de ces
deux autres poètes. G — e.
A N G H I E U A ( PiETRO Martire
d'), naquit, en i455, à Arona , sur
le lac INÎajeur. Sa famille , l'une des
plus illustres de Milan, tirait son num
ANG i6ç)
d'Ânghiera, sur le même lac , d'où elle
était originaire. Etant allé à Rome ,
en 1477 , il se mit au service du car-
dinal Ascanio Sforza Visconti , et en-
suite de l'archevêque de IMilan. Pen-
dant dix ans qu'il y resta , il forma
des liaisons avec les lillératcurs les
plus disting'.iés ,' entre autres , avec
Pomponio Leto. Il passa en Espagne,
en 1487, à la suite d'un ambassa-
deur de cette cour, qui y retournait j
il fut présenté au roi Ferdinand et à
la reine Isabelle , entra au service, fit
deux campagnes , quitta les armes
pour l'état ecclésiastique , et fut char-
ge , par la reine , d'enseigner les
belles-lettres aux jeunes seigneurs de
la cour ; ce qu'il fit pendant un cer-
tain temps. Ayant saisi quelques oc-
casions de montrer de la capa», ité pour
les affaires , Ferdinand le chargea , en
i5oi , d'une mission délicate auprès
du Soudan d'Egvpte ; il s'en acquitta
à la satisfaction du roi; visita une par-
tie de l'Egypte , surtout les pyrami-
des , et fut de retour en Espagne au
mois d'août 1 5o2. I! continua de sui-
vre la cour. Le roi Ferdinand le fit
son conseiller pour les affiàres de
l'Inde , obtint pour lui , du pape , le
titre de protonotaire apostolique . et le
nomma, en iJo5, piieur de l'église
de Grenade, avec un bon bcuellce.
Après la mort de Ferdinand , Anghiera
conserva son crédit auprès du nou-
veau roi ; il obtint aussi une riche ab-
baye de l'empereur Charles-Quint, et
mourut à Grenade, en ijiG. Il a
laissé plusieurs ouvrages histoiiques.
On les cite souvent, en appelant l'au-
teur Pierre Martyr , comme si Mar-
tyr était son nom de famille, et il
n'est pas inutile d'être averti de cette
erreur. Ses trois principaux ouvrages
sont : I. Opus epistolarum Pétri Mar-
iyris Anglerii, Mediolanensis, i55o,
iu-fol., réimprimé plus correctement
fjo AN G
en Hollande , parles Elzcvir , en 1670,
in-fol. , avec les Lettres, et d'autres
ouvrages latins et espagnols , de Fer-
dinand de Pulgar. Ce recueil, juste-
ment estime, divise' en 58 livres , em-
brasse tout le temps de la vie politi-
que de l'auteur , c'est-à-dire , depuis
14B8 jusqu'en idtiS , et contient un
gi'and nombre de particularités his-
toriques, qu'on ne trouve point ail-
leurs j II. De rébus Oceanicis et orbe
noi'O décades. C'est une histoire de
la découverte du Nouveau-Monde ,
écrite d'après les originaux de Chris-
tophe Colomb, et les relations qui
étaient envoye'es en Espagne, au con-
seil des Indes , dont l'auteur était mem-
bre. Elle est divisée en huit décades ,
dont chacune contient dix livres ou
chapitres. Ces décades furent d'abord
publiées à différentes reprises; elles le
furent , pour la première fois ensem-
ble, à Paris, i556, in-fol. , et ont
été réimprimées plusieurs fois depuis.
III. De insidis nuper itn'entis et in-
colarum moribus, Bàle, 1 5-^ i , in-4". ,
et 1 555 , in-fol. ; IV. De legatione
Bubylonicd libri //'e^.- L'auteur y ra-
conte l'histoire de son ambassade au-
près du Soudan d'Egypte; cet ouvrage
a , presque toujours , été imprimé avec
les Décades. On lui attribue encore
quelques autres écrits, mais il est dou-
teux qu'ils soient de lui. G — e.
ANGIER (Paul), ne à Carentan,
en Normandie , était encore jeune
quand la seule pièce de vers que nous
ayons de lui, fut imprimée, et, suivant
Duverdier, ce fut en i .'')45 qu'elle le fut
pour la première fois. Cette pièce est
intitulée : XExperience de M. Paul
.^ngier, Carenlenois, contenant une
hriesve défense en la personne de
l'honneste Amant , pour VAmje de
Court, contre la Contre Amye. Pour
bien entendre ce titre, il faut savoir
que XAmje de Court est un pocmc
ANG
du sieur de la Borderie , compatriote
de Paul Aiigier , auquel Charles Fon-
taine en avait opposé un autre, in-
titulé : la ContrAmje. Paul Angier
prit la défense de la Borderie , dans
l'ouvrage que nous venons de citer.
Guill. des Autels , caché sous le nom
de G. Terbault , répondit à Paul An-
gier , qu'il appelle le dernier des no-
vices rimeurs. Paul Angier ne répli-
qua point ; et même il paraît qu'il
renonça tout-à-fait à la poésie , pour
laquelle, il faut en convenir , il n'an-
nonçait aucune disposition. Son poème,
si un ouvrage aussi médiocre mérite
ce nom, imprimé d'abord à Paris,
par Jean Ruelle, en i545, iu-i6,fut
réimprimé avec les Opuscules d'A-
mour, d'Héroèt, la Borderie et autres
divins poètes, Lyon , 1 ^47 , in-8".
W— s.
A N G I L B E R T , abbé de Centule
dans le 9' . siècle , était fils d'un des
grands de la cour de Pépin-le-Bref. Il
fut discij)lc d'Aleuin , élevé dans le
palais dcCharlemagne : c'était l'homme
le plus aimable de la cour de ce prince ,
qui lui fit épouser secrètement sa fille
Berthe. Quelques historiens racontent
que ce mariage n'eut lieu qu'après qu'il
eût été rendu nécessaire par la naissan-
ce de deux enfants. Il était membre de
l'académie du palais. Charlemague l'ap-
pelait son Homère , soit parce qu'An-
gilbert faisait ses délices de la lecture
de ce poète, soit parce qu'il composait
lui-même des vers. On trouve quelques
pièces de sa façon dans Duchêue, dans
les OEuvres d'Aleuin , et dans d'autres
recueils. Étant tombé malade au chà-
t<"au de Centide en Ponthieu , il fit
VOMI d'( mbrasser la vie monastique à
St.- Riquier , s'il en relevait ; ce qu'il
exécuta , après sou rétablissement ,
rivec le consentement de sa femme ,
qui prit en même temps le voile. Char-
lemague l'airacha de son cloître, pcn-
ANG
dant qu'il en était abbé , pour le faire
secre'taire d'état , et maître de sa cha-
pelle. Ce prince le chargea successi-
vement de trois ambassades à Rome.
Angilbert fut, pendant quelque temps ,
premier ministre de Pépin , roi d'Ita-
lie, et mourut, en 8i4- •!• D. Ma-
billon a inséré dans les Annales de
l'ordre de S. Benoît, la relation qu'il
avait écrite de son monastère , pendant
sa gestion en qualité d'abbé. On a pu-
blié une Histoire des premières ex-
péditions de Charlemagne pendant
sa Jeunesse et avant sonrègne , com-
posée pour V instruction de Louis-le-
Débonnaire , ouvrage d' Angilbert ,
surnommé Homère ; i'j4' , in-8". Ce
n'est qu'un roman dont l'auteur est
Diifresne de Francheville. T — d.
ANGÏOLELLO ( Jean -Mariée ,
r.é à Vicence, a écrit, en italien , une
Vie abrégée d'Ussum-Cassan , roi de
Perse , Brève narrazione délia vila
e fatti del sig. Ussun Cassano, rè di
Persia , insérée dans le second vo-
lume des Voyages publiés par Ra-
musio , Venise i55f), in-fol. Nous ap-
prenons , par la préface de cet ouvrage,
que son auteur avait écrit une autre
histoire , où il racontait qu'il avait servi
Mustapha, fils du Grand-Turk Maho-
met II , et qu'il s'était trouvé à la ba-
taille dans laquelle Mahomet fut vaincu,
])rès de l'Euphi ate , par l'armée de
Ussum-Cassan. En effet, Angiolello,
étant esclave de Mustapha , le suivit
dans cette expédition de son père , en
1 473 ; il écrivit ensuite la Vie de Ma-
homet II, en italien et en tiirk, et la
dédia à ce sulthan lui-même , qui l'ac-
cueillit, le récompensa généreusement,
et le mit en liberté. On ne sait rien de
précis sur l'époque de la naissance et
de la mort de cet écrivain. On voit
seulement , par un passage de la Vie
d'Ussum Cassan, qu'il n'avait point
encore fini cet (Uivrage au mois d'août
A In G 171
i5'.i4î puisqu'il y dit, chapitre 23,
que ce fut à cette même époque qu'on
apprii la mort du Sophi. C'était 5 1 ans
après la bataille sur l'Euphrate , où
Angiolello s'était trouvé. (i — e.
ANGLE ( JÉR. Ch. de 1' ) Voyez
Fleuri AU.
ANGLIVIEL. T.Beaumelle (la).
ANGLUS ( Thomas ) , prêtre ca-
tholique anglais , du 1 7' . siècle , se dé-
guisa sous les noms de Candidus,
Albius , Bianchi et Bichworth ; on
croit que sou vrai nom était IVhile
( Le blanc ) , mais il est plus générale-
ment connu sous celui d'Anglus. Il ré-
sida long-temps à Paris et à Rome ,
et fut successivement principal d'un
collège à Lisbonne , et sous-principal
de celui de Douav. H adopta les senti-
ments de Kenelm Digby sur la pliiîo-
sophie d'Aristote , et entreprit d'ex-
pliquer , par elle , les mystères les
plus impénétrables de la religion , tels
que la prédestination , le libre arbitre
et la grâce. Il a écrit, sur ces divers su-
jets , des ouvrages dont l'obscurité est
comparée par Baillet à celle des an-
ciens oracles. Anglus répondit à ce re-
proche d'obscurité d'une manière as-
sez remarquable : « Ou les savants
)> m'entendent , dit-il , ou ils ne in'eii-
» tendent pas. iS'ils m'entendent , et
» qu'ils trouvent que je me trompe , il
)) leur est aisé de me réfuter ; s'ils ne
« m'entendent point , ils ont tort de
» s'élever contre ma doctrine. » Plu-
sieurs de ses écrits ont été censurés à
Rome, en i658, par la congrégation
de Y Index., et les théologiens de Douay
ont condamné vingt -deux proposi-
tions, extraites de ses Institutions sa-
crées. Descartes, qui l'appelle AF. Vi-
ius , essava de lui faire adopter sou
système ; mais ils ne purent s'entendre.
Anglus mourut quelque temps après
le rétablissement de Charles IL Ses
principaux ouvragf^s sont: L InstilU'
I7S AÏS G
tiones peripateiicœ ; II. jdppendix
thevlogica de oripne mundi ; III.
Tnhidœ siijfragiales detenninandis
fidei Jitihus ah ecclesid calholicd
fi3:a} IV. Tesierce Boinanœ evulga-
îio; V. Stntera morum; VI. De mé-
dia animanim statu , etc. X — s.
ANGObClOLA, ou ANGUSSOLA
( SoPHONisBE ) , nëe en i555, est.
morte à Gênes, vers 1620. Cette
femme célèbre était d'une famille no-
ble de Crc'mone. Ses pnrcnts, voyant
qu'elle avait une vocation de'terminée
pour la pointure, lui firent apprendre
l'art du dessin. Vasaii dit que son
maître fut Jules Carapi, mort en 1672;
Alexandre Lami a rectifié cette erreur;
kSo])honisbe fut élève de Bernardin
Galti, mort en 1575, qui luidoiuiait
des leçons , comme les plus grands
peintres en donnent souvent à des
amateurs. Elle fit des progrès rapides ,
et fut bientôt en état d'être ellt-même
le maître de ses trois sœuis , Europe,
Anne et Lucie. On aimait beaucoup
ses dessins , dont un représente une
vieille apprenant à lire , tandis qu'une
jeune fille, caclice derrière un rideau,
se moque d'elle. Elle fit ensuite le
portrait de son père , placé entre ses
deux enfants , Asdrubal et Minerve.
Le duc d'Albe, avant eu connaissance
de la réputation de Sopbonisbe , en
informa Philippe II , qui l'invita à
venir en Espagne. Dès ce moment,
elle se décida à suivre tout-à-fait la
carrière de la peinture. Elle fit, à Ma-
drid, le portrait du roi et de la reine,
et reçut une pension de deux cents
piastres. J/infant don Carlos voulut
aussi avoir son portrait de la main
de Soplionisbe. Elle représenta ce
prince vêtu de la peau d'un loup cei*-
vier. Celte nouvelle production eut
encore un plus grand succès que les
précédentes. La ressemblance était si
fidèle, que dou Carlos, dans uii mou-
ANG
renient de reconnaissance , porta luf-
racme , à l'auteur , un diamant de
quinze cents piastres. Le roi maria cu-
huite Sopbonisbe avec don Fabrice
de Moncade, qui l'emmena en Si-
cile, sa patrie. Moncade étant mort,
elle épousa Horace Lomellini, d'une
illustre famille de Gènes. A 67 ans ,
elle eut le malheur de devenir aveugle ;
elle continua , cependant , de réunir
chez elle , à Gènes , les artistes , les
amateurs, etla sociétéla mieux choisie.
Tous les étrangers s empressaient de
lui faire visite, pour jouir des charmes
de sa conversation. Dans la Fie des
Peintres génois de Raphaël Soprani ,
revue par Ratti, on lit qu'Antoine van
Dyck s'estima Irès-heureux, pendant
SCS vovages , d'a\ oir pu parler de son
uitavec Sopbonisbe, et assurait qu'il
avait plus appris d'une femme aveu-
gle , que de l'élude des plus grands
maîtres. Nous crovons que des ad-
miialeurs passionnés du talent de
Sophonisbe ont inventé cette anec-
dote , qui est inutile à sa gloire. \an
Dyi k n'avait que vingt -un ans lors de la
mort de Sophonisbe , et, après les re-
cherches les plus exactes, nous trou-
vons que van Dyck ne commença à
voyager qu'à l'âge de'ijans. Sopho-
nisbe , pendant sa vie , fut louée par
les poètes les plus distingués. Le Père
dom Angiolo Grillo lui adressa un
sonnet italien Irès-esfimé. A — D.
AjNGOT (Robeiît), né à Gien ,
en 1 58 1 . Il paraît qu'il ajqiartenait à
une honnête famille, puisqu'il prend,
à la tète de ses œuvres, letitrede sieur
de l'Espéronnière; et que, dans une
de ses pièces , il parle d'une autre terre
qui lui appartenait. 11 n'avait que
vingt-deux ans lorsqu'il fit imprimer
le seul ouvrage que 1 on connaisse de
lui ; c'est un Recueil d'odes , de son-
nets, d'épigrammes et d'élégies, in-
tilulé le rr élude poétique , Paris ,
ANG
Gilles Robinot, i()o5,in-i2. Sa ver-
sification est assez naturelle; et, sui-
vant Goujet , on remarque , entre
Robert Angot et Vanquelin de La
Fresnaye, poète beaucoup plus connu,
quelque conformité' de tour d'esprit et
d'érudition. Robert Angot avait fait
de bonnes études , et , si l'on en juge
par ses traductions de plusieurs piè-
ces grecques , il possédait cette langue
dont l'étude commençrùl à être négli-
gée; il renonça de bonne heure à la
poésie, sans que l'on sache par quel
motif. W — s.
ANGOULÊME. Foy. Aymar.
ANGOULÉME ( Charles de Va-
lois, duc d'), fils naturel de Char-
les IX et de Marie Toncliet , naqm't
le 28 avril 1075, vécut sous cinq
rois , et se rendit célèbre par sa va-
leur. La fameuse marquise de Ver-
iieuil , maîtresse de Henri IV , était
sa sœur utérine. Charles de Valois ,
destiné dès son enfance à l'ordre de
Malte, fut pourvu, en 1587, ^'^ ^s^i-
baye de la Chaise - Dieu , et devint ,
en i589, grand -prieur de France.
Catherine de Médicis lui ayant légué
les comtés d'Auvergne et de Laura-
guais , il quitta l'ordre de Malte , avec
dispense pour se marier, et épousa,
le G mars 1 5() i , Charlotte , fille du
connétable Henri de Montmorenci. En
1606 , Marguerite de Valois fit casser,
par le parlement , la donation de Ca-
therine de Médicis , et donner les com-
tés qui en étaient l'objet au Dauphin
( depuis Louis XIII ). Charles , cepen-
dant , continua de porter le titre de
comte d'Auvergne, jusqu'en 1619,
qu'il obtint du roi le duché d'Angou-
lême. Il avait été un des premiers à
reconnaître , à St.-Cloud , le roi Hen-
ri IV, et combattit avec gloire pour
son service, aux journées d'Arqués,
en iSHq, d'Ivry, en iSgo, de Fon-
taine-Française^ en iSqS. Implique
ANG 1-^
dans la conspiration de Biron, eu
1602 , il fut mis à la Bastille ; mais
obtint sa grâce. Convaincu peu après ,
de nouvelles pratiques concrrtées con-
tre le roi, avec la marquise de Ver-
neuil , il fut arrêté une seconde fois ,
le 9 novembre i6o4, ^t condamné,
l'année suivante, à perdre la tète. Hcu-
li IV commua cette peine en une pri-
son perpétuelle. Il en sortit, en 161C,
et alla, en 1617, faire le siège de
Soissons. Nommé colonel -général de
la cavalerie légère de France, et créé
chevalier des ordres du roi, il fut,
en 1620, à la tète de l'ambassade en-
voyée à l'empereur Ferdinand II. Le
comte Philippe de Béthune, mort en
1649 y ^'^- i'^nie de cette ambassade,
qui eut lieu à cause du soulèvement de
la Bohême et de la Hongrie, a Le mo-
» tif de cette ambassade , dit le journal
» des savants , fut aussi glorieux à la
» France que le succès en fut avanta-
» geux à la maison d'Autriche. » La
relation de cette ambassade a été don-
née au public par Henri, comte de
Béthune, pelit-û!s de Philippe, sous
le titre (^Ambassade de M. le duc
d'Angouléme , etc., iG6t , in-fol.
Cet ouvrage est écrit sèchement, mais
peut donner connaissance de plusieurs
faits importants de ce temps-là. Leduc
d'Angoulême ouvrit, le i o août 1628,
le fameux siège de la Rochelle, où il
commanda en chef jusqu'au 11 octo-
bre, époque de l'arrivée du roi. II
donna de nouvelles ])rcuves de sa va-
leur et de son habileté dans les guerres
de Languedoc, d'Allemagne et de Flan-
dre. H mourut à Paris , le 2| sep-
tembre i65o. Françoise de Nargon ne,
qu'il avait épousée en secondes no-
ces, le 25 février 164 4' niourut i4t
ans après son b°au-père Charles IX ,
le To août 17 i5, à l'âge de quatre-
vingt-douze ans. On a du duc d'An-
goulême : I. Mémoires très-particu-
1-4 AN G
liers du duc d' Angouléme ^ pour ser-
vir à Vhisloire des règnes de Hen-
ri III et Henri IF, 16G2, iu-i-i.
Jacques Bineau, éditeur de ces IMe'-
moircs , y eu a joint d'autres assez
amples qui rapportent, jour par jour,
les négociations de la paix faite à Ver-
vins , en 1 598. Les Mémoires du duc
d'Angoulcme forment le tome P'. des
Mémoires particuliers pour servir à
V Histoire de France, 1756, 4 vol.
iu-12; et le tome III des Pièces fu-
gitives , pour servir à Vhistoire de
France, publiées par le marquis d'Au-
bais et Menard, 1739, 5 vol. in-4°.
W.LesHaranguesprononcées en V as-
semblée de MM. les princes protes-
tants d' Allemagne .. parle duc d'An-
goule'me, i()io, iu-8°.; III. la gé-
nérale et fidèle Relation de tout ce
qui s'est passé en Vile de Bé , en-
voyée par le roj' à la rojne sa mère,
162'!, in-8'\; IV. une traduction
française de la Relation de l'origine
et succès des schérifs , et de l'état
des royaumes de Maroc, Fez et
Tamdant, écrite en espagnol par
Dicjode Torrès, Paris, iGjG, in-4''.
Le traducteur n'a mis sur le frontis-
pice que les initiales M. C. D. \ . D'. A.
Celte traduction a été réimprimée dans
le S*', volume de XJfriipie de Mar-
mol, etc., i()G7, 3 vol. in-4". Bou-
tiiillier, évêque de Troyes, au com-
mencement du 18'. siècle, avait, dans
sa bibliothèque, un volume iu-ibiio de
l.ctues manuscrites de Charles de Va-
lois, duc d'Angoulème, depuis le i9oct.
iG5'), jusqu'au 10 déc. i G45. A. B — t.
ANGOULÊAîE^Lolis-Emma^uel
DE Valois, comte d'Alais , puis duc
d' ] , second fils du précédent et de
Charlotte de iMoutmorenci , né à
Clermout en Auvergne, en i5i)G,
entra d'abord dans l'état ecclésias-
tique , et , après avoir eu les ab-
bayes de St-Audré de Clermout et de
AN G
la Chaise-Dieu , fut , en 1612, éve*
que d'Agde. Henri , son frère aîné ,
ayant été , en 1 6 1 8 , pour cause de
démence, mis en prison, 011 il resta
cinquante ans, Louis-Emmanuel chan-
gea d'état, prit le parti des armes, se
signala aux sièges de Montauban et
de la Roche! :e , et dans les guerres
d'Italie et de Lorraine. Louis XllI le
nomma, eu 1G37, chevalier de ses
ordres , colonel-général de la ca\a-
lerie , et gouverneur de Provence. En
iG5o , il succéda à son père au duché
d'Angoulème. et mourut à Paris , le
i3 novembre i655, laissant une fille
qui mourut sans postérité , le 4 ui^i
1G9G. Bouthillier possédait aussi, en
manuscrit , des Lettres de Louis-
Emmaimel , écrites depuis le 28 juin
)G3o jusqu'au 8 oct. 1649. A- B — x.
ANGOULEVENT cadet. On n'a
point encore découvert l'auteur qui
s'est caché sous ce nom : tout ce qu't;u
peut conjecturer , c'est qu'il était moi t
avant 1G28 , puisque, dans le recueil
des poésies d'Auvrav, imprimé cette
anné? , il se trouve une pièce intitulée,
le Tombeau d' Angoulevenl cadel.
C'était, selon toute apparence, ua
plaisant de profession , qui rimait les
anecdotes du jour , pour en réjotùr
les sociétés où il était admis, Uaus le
grand nombre de pièces que nous
avons sous ce nom , il en est quel-
ques-unes de fort piquantes ; mais
toutes sont défigurées parle même cy-
nisme qu'on remarque dans les poésies
d'Auvrav , de iMotin , de Destcrnod ,
et de qui Iques auteurs du même temps.
Aussi, nous ne serions point éloigné
de croire que le prétendu Anguule-
vcnt cadet , n'est que le masque d'un
de ces poètes. Le recueil dont nous
avons parlé a pour titre , les Satyres
hastardes et autres œuvres folaslres
du cadet Angoulevent , vol. in- 12 ,
Parisj iGo,et Jion pas 1622. W — >.
AN G
ANGOULE VENT, fou d'Henri IV.
Voy. Imeert ( Nicolas ),
ÀNGRAN D'ALLERAY (Denis-
François), conseiller d'état, lieute-
nant civil au Ghàtelet de Paris , naquit
en cette ville, en 1 7 1 5 , d'une famille
distinguée depuis long-temps dans la
magistrature, par la science et par la
vertu. Il fut successivement conseiller
au parlement, en lySj, procureur-
général au grand conseil, en J "4^,
et lieutenant civil , le 29 décembre
1774' I'*^ Châtelet, dont les attribu-
tions s'étendaient sur toute la France,
était le premier tribunal dans le second
ordre des jurisdictions , et toujours
présidé par un chef choisi ])armi
des magistrats d'un mérite éaiinent.
D'Allcray n'y fit regretter aucun de
ses prédécesseurs. Le public l'ho-
norait de sa confiance ; le barreau l'es-
timait; il était respecte de tous les
officiers judiciaires, et aimé des jeunes
magistrats, qu'il servait de tout son
crédit, lorsqu'ils montraient du zèle
et des talents. L'érudition étendue et
profonde de d'Alleray lui douuait ,
comme au chancelier d'Aguesseau , un
peu de lenteur cl d'indécision dans
l'expédition des affaires; mais sa bien-
faisance était de la plus généreuse ac-
tivité. Dans lecours de l'hiver de 1 787,
les gardes du commerce conduisirent
pardevaut lui, eu référé, un malheu-
reux débiteur, arrêté pour une somme
assez considérable : c'était un honnête
pèi'e de laniille, qu'on venait d'arra-
eher à sa femme, à ses cinq enfants,
et dont le désespoir offrait le plus dou-
loureux spectacle. D'Alleray , après
avoir examiné la procédure des con-
suls, sévit obligé d'ordonner l'exécu-
tion de la contrainte par corps. Il 'était
onze heures du soir lorsque les recors
et leur capture quittèrent l'hôtel du
magistraf. Le temps était trcs-rigou-
icxa ; D'Alleray prit aussitôt avec
ANG 175
lui la somme nécessaire, sortit à pied
par une porte secrète, et arriva à la
prison presque en même temps que le
détenu , qu'il eut la satisfaction de faire
élargir sur-lc-charap , en sa présence.
Ce trait a fourni à M. A. M. H.Chastenet-
Puységar, le sujet d'une comédie ea
trois actes, intitulée : le Juge bien-
faisant, jouée à Paris, et imprimée à
Soissons, en 1 799 , in-8. U'Aleiay fut
nommé de l'assemblée des Notables,
en 1787. Il fut aussi des assemblées
de I 789, pour la formation des états-
géneraux. Le roi l'avait choisi pour
présider une des sections de la no-
blesse; les membres de cette sectiou
lui déclarèrent qu'ils ne voulaient plus
pour chef un commissaire du roi;
mais qu'ils le nommaient eux-mê-
mes à la présidence : D'Alleray se re-
tira. Il quitta la place de lieutenant
civil, en 1789, pour exercer ses fonc-
tions au conseil d'état, où il avait été'
admis dès 1787. Pendant les orages
révolutionnaires , il resta tranquille au
sein de sa famille ; mais le règne de la
terreur arriva, et il fut enveloppé dans
le système des arrestations générales.
Traduit au tribunal révolutionnaire,
il y trouva, pour son accusateur,
Fouquicr-Tliinville , au[)aravant pro-
cureur au Ghàtelet. Ce misérable ,
frappé des vertus du magistrat, con-
çut pourtant le projet de le sauver:
il lui fit dire qu'il serait acquitté, s'il
voulait nier qu'il eilt envoyéde l'aigcnt
à ses enfants émigrés. Le respectable
vieillard ne voulut point conserver ses
jours au prix d'un mensonge. Inter-
rogé s'il avait fait passer des secours
aux ennemis de l'état, il répondit sans
hésiter, qu'il avait envoyé de l'argent
à M. de la Luzerne, l'un de ses gen-
di'es. « Ignorais-tu la loi qui le dc-
» fend? lui dit un des jurés. — Non,
» 1 épliqua-t-il ; mais la loi de la uatui-e
» a parlé plus haut à mou cœur , que
1-6 ANG
» la loi de la repii];liqnc. » Sa fran-
chise et sa ferraele l-.ii valurent la
moi t. Il ]ie'rit siii- l'cchafaud, le 28
avril 1794^ ^ l'à?;e de 79 ans. D'Al-
Icray avait une physionomie remplie
de candeur et d'aménitë, qui peignait
toute la l)ontc; de son amc; son assi-
duité' au travail était infatigable; à une
grande simplicité do mœurs, il joignait
de la dignité dans la représentation ; il
aimait à parler en public, et l'on aimiit
à l'entendre; ses idées étaient élevées,
son éloquence était douce et péné-
trante; son style ne manquait ni d'élé-
cnnce ni d'harmonie. Il ne laissa point
d'hérili" r de son nom : il n'avait eu
que trois filles, dont une avait épousé
M. de \ ibravcs , maréchal de camp ,
ptlos deux autres, 1\ÎM. de la Luzerne,
frères; l'aîné, ministre de !a marine,
et le second, ambassadeur à Londres.
— Louis- Alexandre Aîsgran, frère du
président, né en 17 i3, président à
l'une des chambres des enquêtes du
parlement de Paris, lui survécut, et
mourut sans po-térité, le 6 juil. 1801,
âgé de 88 ans. Ce magistrat était égale-
ment recommandable par son intégri-
té, une j)icté profonde, et surtout par
une douceur de caractère inaltérable.
D— s.
ANGUiER (François'), scnlpîeur, né
à En en Normandie, en 1 6o4- d'un me-
nuisier , montra , ainsi que son frère
Michel , de si grandes dispositions
pour les arts , qu'ils furent envoyés à
Paris, et placés chez Guillain , sculp-
teur médiocre. François Anguier y fit
assez de progrès poiu- être appelé en
Angleterre, où d se procura les moyens
défaire le voyage d'Italie. A Rome, il
se lia avec plusieurs peintres célèbres,
tels que Poussin, Mignard, Oufresnoy
et Stella. Après y avoir étudié pen-
dant deux ans, il revint à Paris, où
ilobtint , de Louis Xll l , un logement
au Louvre , et la garde du cabinet des
ANG
antiques. On assure que , lors de la
formation de l'académie de peinture ,
etc. , il refusa d'y être admis. Les
principaux ouvrages d' Anguier étaient
dans les églises de Paris. On voyait,
à l'Oratoire , rue St.-Honoré, le tom-
beau en marbre du cardinal de Bé'
rulle; aux < '.élestins , une pyramide
ornée de trophées , avec des statues
et des bas-reliefs en Vlionneur de la
maison de Longueville , et la statue
du duc de Rohan-Chabot ; à St.-
Audié-des-Arcs , la décoration du
tombeau des De Thou , etc. Quel-
ques-uns de ces monuments sont main-
tenant au Musée des Petits - Augus-
tins. François Anguier avait fait aussi,
en 1 658 , le mausolée de Henri , duc
de Montmorencj , décapité à Tou-
louse en i65'2. Cette grande composi-
tion , qu'il fît pour l'église des reli-
gieuses de Ste-iMarie,à Moulins , et qui
n'a pas été détruite, est l'ouvrage le plus
remarquable de François Anguier.
Une grande pesanteur est le défaut
principal des ouvrages de cet artiste,
qui mourut à Paris, le 8 août i66ij,
à l'âge de soixante-cinq ans. D -t.
ANGUIER (Michel ) , frère cadet
du précédent, naquit à Eu , en 161 't;
et , dès l'âge de quinze ans , exécuta
dans celte ville , où il ne trouvait ni
maîtres ni modèles , quelques ouvra-
ges pour l'autel delà Congrégation des
jésuites. Après avoir travaillé quelque
temps à Paris, sous Guillain, il eut
le courage d'entreprendre le voyage de
Rome , sans avoir d'autres ressoiu'ces
que ses talents. 11 eut l'avantage de
travadler d'abord sous les yeux de
l'Algarde, qui lui fit faire quelques bas-
reliefs. Anguier fut employé ensuite
pour l'église de St.-Piei re , et pour
quelques palais particuliers, mais sans
négliger l'étude de l'antique, à laquelle
il consacra une partie des dix années
de soa séjour à Rome. Revenu eu
AN G
France tn i65i , il se vit contrarie
souvent par les troubles politiques.
11 ne laissa cf pendant pas de travail-
ler , et fit , entre antres , un modèie
de la Statue de Louis XIII , plus
grand que nature , qui fut jeté en
bronze, et placé à Narbonne. Il de'-
rora ensuite l'appartement de la reine
Anne d'Autriche, au vieux Louvre ,
d'un grand nombre de figures et de
bas -reliefs accompagnant des pein-
tures de Romanelli. La plus grande
partie des ouvrages de sculpture qui
étaient au Val -de -Grâce , était de
IVIicliel Anguier ; et le groupe , en
marbre, de la NatUdlé , placé sur le
maître-autel, était regai'dé comme son
chef-d'œuvre. L'académie le reçut dans
son sein, en 1668^ le nomma, le jour
même , adjoint à professeur , et , peu
après, professeur. Anguier lui donna ,
en 1669, un groupe de terre cuite,
représentant Hercule qui se charge
de débarrasser Atlas du fardeau de
porter le inonde. La même année , il
fut adjoint à recteur , et retteur en
16-1. 11 termina, veis ce temps ,
V Apparition de Notre-Seigneur à
S. Denis et à ses compagnons , giand
morceau de sculpture, on le bas-rehef
et la ronde-bosse étaient employés à
la fuis , et qu'Aune d'Autriche lui avait
demandé pour le maître-autel de St.-
Dcnis de la Châtre. On omet plusieurs
autres productions de cet artiste, pour
arriver à l'une des plus considéra-
bles. Ce fut en lô-jl? <I'j''l exécuta
les sculptures de l'arc triomphal, dit
Porte St.-Denis. A la vérité , Le
Brun , qui , en sa qualité de premier
peintre du roi, voulait exercer sur
tous les arts une suprématie à laquelle
les sculpteurs du temps se soumi-
rent , à l'exception du seul Puget ,
ôta le mérite de l'invention à Michel
Anguier , en le faisant travailler d'a-
près ses dessins ; mais le sculpteur
II.
AN G
77
n'en soutint pas moins sa réputation
par la manière dont il exécuta ces
grands ouvrages. L'âge , et de locgs
travaux avaient altéré la santé d'An-
guier, lorsqu'on lui demanda un cru-
cifix de m. rbre pour la Sorbonne. 11
avait toujours été pieux, et dit , en
l'exécutant, « qu'il ne pouvait ter-
miner sa carrière, par un morceau
plus analogue à ses sentiments. » Il
fit présent , en mourant , à l'église
de St.-Roch , sa paroiï.se, d'un Chiist
en bois, qui fut ensuite placé dans la
cliapelle du Calvaire de celte église. jNIi-
che! Anguier mourut le 1 1 juil. iG86,
à soixante-quatorze ans , et fut eulerié
à St.-Ilocli, près de son frère aîné.
On leur fit une épitaplie , en huit vei s
fiaiiçais, trop n)éuiocres pour être
rapportés. Cet artiste est au nombre
des bons sculpteurs du siècle de
Louis XIV. Son goût de dessin est
celui que Le Brun avait mis eu vogue ,
c'est-à-dire, qu'on v trouve pie.-que
toujours de la coriection , mais que ,
souvent aussi , on y désirerait plus
d'élégince. D — t.
A>GU1LLARA ( Giova>m An-
dréa Dell' ) , l'un des plus célèbres
poètes iialiens du i(V. siècle , naquit,
vers l'an i .5 1 "j , à Sutri , en Toscane ,
de parents pauvres et d'une basse
condition. Après avoir f ;it des études
aussi bonnes que sa furtune le lui per-
meltait, il se rendit à Rome, oii il se
mit corricteur d'épreuves chez un li-
braire. Une liaison sef^ète avec la
femme de ce libraire, découverte par
le mari , obligea l'Anguillara de quitter
Rome ; il emportait avec lui qu< Ique
argent et quelques bardes , lorsqu'il
rencontra des voleurs , qui lui enle-
vèrent ces fruits de son travail. 1! ar-
riva à \ enise dans l'équipage d'ua
mendiant ; mais il trouva prcmpte-
ment de l'emploi chez le libraire Fran-
ceschi. C'est là qu'il fit , pour uu
i-jS ANG
prix trcs-modique , sa traductiou des
Métamorphoses d'Ovide , en vers
italiens , et qii"'il composa quelques
autres ouvrages. Il retourna ensuite à
Rome, où sa réputation poétique était
parvenue ; mais son malheur l'y sui-
vit , et , après avoir vendu , pour vi-
vre , ses habits , ses livres , tout ce
qu'il possédait , il mourut de besoin ,
et d'une maladie, fruit de son incon-
duite, dans une auberge auprès de
Torre di Nona. On ne sait rien de po-
sitif sur l'é])oque de sa mort ; on voit
seulement, par une lettre d'Annibal
Caro , qui lui est adressée , qu'il vi-
vait encore en avril 1 564- Sa traduc-
tion des Métamorphoses , en oilava
rima, a joui et jouit encore, en Italie,
d'une grande réputation. Les critiques
les plus célèbres , et entre autres Var-
cbi , l'ont mise au - dessus même du
poëme ori;;ina!. Ces éloges sont exa-
gérés ; mais l'auteur en mérite beau-
coup , pour l'élégance et la poésie de
style , et pour la facilité ; il est vrai
que c'est plutôt une imitation libre
qu'une traduction exacte. 11 s'écarte à
chaque instant de son texte : il en re-
tranche, il y ajoute ce qui lui plaît. Par
exemple, au lieu de rendre, par des
expressions opposées l'une à l'autre ,
mais qui ont de la justesse et une sorte
de gravité, la masse informe du chaos
avant la création de l'univers, comme
l'a fait , en général , Ovide dans ce
morceau , il fait jouer ensemble, dans
tous les vers d'une octave , comme
Ovide dans deux des siens , le ciel, la
mer , la terre et le feu , à peu près de
cette maiiicrc : « Avant qu'existassent
le ciel , la mer , la terre et le feu , déjà
existaient le feu , la terre , le ciel et la
mer; mais la mer déformait le ciel, la
terre et le feu ; le feu rendait difforme
le ciel , la terre et la mer ; car , là où
étaient la terre , et le ciel , et la mer ,
et le fou , là étaient aussi le ciel , et la
ANG
terre , et le feu , et la mer : la terre , le
feu et la mer étaient dans le ciel , et
le ciel était dans la mer , dans le feu et
dans la terre. » C'est là un jeu d'es-
prit puéril , et un chquetis de mots
et d'idées beaucoup trop prolongé ;
mais il s'en faut bien que tout le poëme
soit écrit ainsi ; la lecture en est géné-
ralement agréable ; aussi en a-t-on fait
un grand nombre d'éditions. La pre-
mière , qui ne contenait que les trois
premiers livres , fut faite à Paris ,
1 554, in-4°., et dédiée au roi Henri II.
On en fit une complète à Venise , en
1 56 1 , in~4°- , que le libraire dédia au
roi de France Charles IX j mais le
nom de Henri II est constamment
resté dans la seconde octave du poëme,
que l'auteur eut toujours l'intention de
lui dédier en entier. La meilleure et la
plus belle édition est celle des Giunli ,
Venise , 1 584 •> iu-4''- , a"vcc les figu-
res de Jacopo Franco, les remarques
d'Orologi , les argiuuents et les petites
notes en marge , de Turchi. Elle a été
réimprimée par les mêmes , en \5g:i.
L'Anguillara avait aussi commencé
une traduction semblable de Y Enéide.
Le premier livre fut imprimé à Pa-
doue , eu 1 564 ■< iu-4°- ; luais l'ou-
vrage en resta là , soit par la mort de
l'auteur , soit par tout autre motif. On
a encore de lui : I. Edipn , tragédie eu
vers libres , Padoue , 1 556 , in - 4". ,
et Venise , 1 565 , in- 8". Ce n'est pas
une simple traduction de l'OEdipe-
Roi de Sophocle. L'auteur y introdui-
sit des épisodes , et y fit des addi-
tions, qui divisent l'intérêt, et altèrent
la simplicité du sujet. Elle fut cepen-
dant représentée, avec beaucoup de
magnificence et de succès, à Viccncc,
et ce fut pour cette représentation
que le célèbre architecte Palladio éleva,
en i565, un superbe théâtre. II. Quel-
ques odes , ou camoni, adressés aux
ducs de Florence et deFerrare; III.
ANG
àes Arguments en ottava rima , pour
tous les chants du Roland furieux ,
de l'Arioste. Le Tasse c'ait , dans
une de ses lettres , que l'Anguillara
vendait cinq Jules , au libraire , clia-
cun de ces arf^uments. IV. Quatre Ca-
pitoli , ou Satire , dans le genre
burlesque , im2>rimees dans plusieius
recueils de pièces de ce genre ; elles
sont estime'es , la dernière surtout ,
qui est adressée au cardinal de Trente,
et dans laquelle l'auteur parle fort lon-
guement de lui-même , sans ennuyer ,
et trouve le moyen d'être piquant et
gai , même en parlant de sa misère.
G— K.
iiNGUILLARA (Louis, ou Aloy-
sio), médecin, savant botaniste italien,
ne', vers le commencement du iG^.
siècle , à Anguillara , petite ville de l'état
eccle'siastique, d'où il a pris son nom.
La re'puîation qu'il s'était acquise par
ses voyages lui me'rita, de la part
de la république de Venise, le titre de
simplicista , ou de son botaniste en
chef, et la place de directeur du jardin
de botanique de Padoue. Il fut le troi-
sième qui la remplit depuis la fonda-
tion de ce jardin , en i 5-^ o. 11 remplaça
Mundella,qui se nommait comme lui
Aloysio , ce qui a occasionné quelques
méprises , et il fut remplace' ])ar Gui-
landin , lorsqu'en 1 5G i , il quitta cette
place, dc'goûte' par les tracasseries
qu'on lui suscita, pour se retirer à Flo-
rence, où il mourut en i S^o. On a peu
de détails sur sa vie privée. Voici ceux
qu'on a pu tirer du seul ouvrage qui ait
paru sous son nom. On ignore ou il fit
ses premières études , mais elles furent
soignées, et surtout dirigées vers la
connaissance des langues anciennes;
en sorte que, se trouvant entraîné
vers la botanique, il put facilement
remonter aux sources : il chercha
donc, suivant la manière d'envisager
alors cette science, à reconnaître les
ANG i7t)
plantes mentionnées dans les auteurs
grecs et latins ; mais il sentit de bonne
heure que, pour y parvenir, il fallait
visiter les pays où ils avaient écrit. Ce
fut dans ce dessein qu'il parcourut
successivement toute l'Italie, l'IUyrie,
la Turquie, les principales îles de la
Méditerranée, Crète, Chypre, la Corse
et la Sardaigne, enfin l'Helvélie trans-
alpine, et les environs de Marseille.
De grandes connaissances résultèrent
de ces courses, et lui acquirent beau-
coup de célébrité, en sorte qu'il se
trouva en relation avec les savants les
plus distingués, qui le consultèrent
sur les difficultés que leur présentait
l'histoire des plantes, et surtout sur la
concordance des noms anciens avec
les modernes, Anguillara répondit à
cette confiance, en exposant son opi-
nion ou parère dans des lettres parti-
culières. Marinello, qui était un de ses
correspondants , réunit quatorze de ces
lettres, et les publia du consentement
de l'auteur, sous ce titre : Semplici
delV eccelente M. wlii^uillara, H
quali in più pareri a diversi nobill
nomîni scritti appajono et nuo\>a-
mente da M. Giovanni Marinello
mandati in hice, Venise, Vinc. Val-
grisi, i56i, m-i)°. Le même impri-
meur en donna , la même année , une
autre édition, que l'on prélère , parce
qu'il y a deux figures de plantes qui
ne sont pas dans la première. Quoique
peu volumineux, ce livre a sufti pour
établir la réputation d'Anguillara. Tou-
tes les lettres qui le composent sont
datées de Padoue , la première , du i o
avril i558, et la dernière, du 20 mai
1 56o. On sent ({u'un ouvrage de ce
genre ne peut avoir de plan déter-
miné ; car ce n'est qu'à mesure que
l'occasion se présente , que l'auteur
parle des plantes qu'il a observées dans
ses voyages. Il se contente quelquefois
de les de'signer par le nom vulgaire
12.,
î8o ANG
qu'elles portent dans leur pays natal;
et, plus d'une fois, Anguillara a reconnu
que ces noms étaient ceux des anciens ,
avec une légère altération , ce qui l'a
beaucoup aidé dans ses recherches :
plus souvent il ajoute une description ,
mais qui est si précise que , malgré sa
brièveté, elle suffit pour reconnaître
presque tontes les espèces dont il fait
mention. Il s'en trouve au moins une
vingtaine' qu'il a fait connaître le pre-
mier : dans deux occasions seulement,
il a ajouté des planches en bois passa-
blement exécutées ; mais la manière
dont il a éclairci les passages dos an-
ciens botanistes a encore été plus utile
à la science. Il les connaissait tous par-
faitement , depuis Théophraste jusqu'à
Cassianus Bassus : non content d'étu-
dier ceux qui étaient imprimés, il avait
recours aux manuscrits; c'est par leur
moyen qu'il put connaître Cratajvas; il
en cite plusieurs passages en grec, et
ce sont les seuls de cet auteur qui aient
été imprimés. En g-enéral , son style est
facile, et ne manque pas d'élégance; il
discute avec sagacité, modestie, et
Éurtout beaucoup de modération, en
sorte que, lorsqu'il attaque les opinions
de ses contemporains, c'est avec tous
ics ménagements possibles; mais ils
lui furent inutiles vis-à-vis de Ma-
thiole ; c'est en vain qu'il lui prodigua
les épithctes les plus flatteuses, celle
iS'eccelentissimo. Celui-ci ne put lui
pardonner d'avoir osé relever quel-
ques-unes de ses méprises ; il répliqua
à sa manière , c'est-à-dire , avec des
injures. Anguillara ne fut pas toujours
de l'avis de Lucas Ghini, qui était
alors regardé comme l'oracle de la
botanique, et on a remarqué qu'il avait
été' le seul qui n'en eût pas parlé très-
avantageusement; mais on est parti ,
pour lui faire ce reproche, de la suppo-
sition qu'il avait été le disciple de ce
oélèbrc professeur. Dans ce, cas, ou
ANG
pourrait accuser Anguillara d'avoif
été peu respectueux envers son maili*e;
mais tout nous porte à croire que ces
deux hommes n'ont été que contem-
porains. Hallcr dit qu Anguillara fut le
disciple de Constantin iihodiota Spe-
tiale, ou apothicaire en Crête. Il fonde
celte opinion sur un passage d'An^
guillara; mais il paraît que cet écri-
vain , si exact ordinairement , s'est
trompé dans l'interprétation du pas-
sage qu'il cite : il prend le mot maes-
tro dans le sens de professeur , au
heu qu'il signifie, selon nous, maître
un tel, terme si employé à cette épo-
que ( anguillara , page i ao ). ïour-
nefort fait mention , d'après la Bi-
bliothèque latrique de Schenkius,
d'une traduction latine de cet ou-
vrage, avec des notes faites par Gas-
pard Bauhiu , et Seguier l'indique
sous ce titre : Aloysii Anguillarœ de
simpUcibus liber primus , cum notis
Gaspari Bauhini, ^kh^apud Henri-
cum Petnim , i ^çp. Haller la cile ,
mais d'après Sfguier, sans l'avoir
vue. Après avoir fait jilusicurs recher-
ches infructueuses , pour constater
l'existence de ce livre, recourant à
Schenkius lui-même, nous avons ap-
])ris qu'il n'avait jamais été imprimé.
L'ouvrage original est devenu très-
rare. Il paraît qu'Anguillara s'attira
de puissants ennemis; Maltioli, dans
la P'ie d' A ldro\^ande,ti\ parle avec le
plus profond mépris, et Aldrovandc
lui-même en faisait peu de cas. Gui-
landin le nommait par dérision Olitor
Palavinus. Peut-être que ce médecin ,
connu par sa causticité , lui suscita
des désagréments par l'amertume ilc
ses critiques, à tel point qu'Anguillara ,
se trouvant discrédité, abandonna sa
jilace. Elle fut occupée tout de suite
par cet antagoniste. Anguillara , retiré
à Florence, se rendit célèbre jwr la
composition de la thcViaque, et il alla
ANH
jusque danslaPouilIeclieixlierles plan-
tes nécessaires, accompagne d'un reli-
gîeux augustin , nomme Evangélista
Quadramio , qui fiit , par la suite , bota-
niste du duc de Ferrare. Anguillaia sur-
vécut peu de temps à ses expériences sur
cette composition, et mourut en oct.
iS^o, sans avoir rien publié par lui-
même. On ne sait ce que devinrent,
après sa mort, ses nombreux maté-
riaux: on doit les regretter, car, d'après
l'échantillon donné par Marinello, on
peut juger qu'ils étaient très-impor-
tants; ce seul essai a suffi pour placer
Anguillara au nombre de ceux qui ont
le mieux réussi à rattacher les connais-
sances botaniques modernes aux an-
ciennes; c'est le témoignage que lui
rend un des juges les plus compétents
sur ce point, M. Sprengel, dans son
Ilistoria rei Herbarice , et le fréquent
usage qu'il a fait de cet auteur, pour
déterminer les plantes de Dioscoride
et de Pline , en fournit la preuve. Le
célèbre Gaertncr a voulu tirer son nom
d'un oubli qu'il ne méritait pas, en
donnant le nom à'. anguillara à un
nouveau genre qu'il a formé; mais
cette tentative est devenue inutile ,
parce que , dans le même temps , M. de
Jussitu le nommait Badula ; et M.
Ssvarts, ylrdisia: ce dernier nom a
prévalu , quoique le moins convenable.
D— P— s.
A N H A L T ( Antoine Gunther ,
prince d') , lieutenant-général des ar-
mées prussiennes, fils de Jean , prince
d'Anhalt - Zerbst, et de Sophie- Au-
gusta , princesse de Holstcin-Gottorp :
il naquit le 1 1 novembre 1 653. Après
.".voir parcouru la Hollande , l'Italie ,
l'Angleterre et la France , il prit le com-
ra indement d'une compagnie dans le
régiment du comte Charles de Birck-
keufeld, et se trouva aux sièges de
Grave et d'Oudenarde, en 1676; il
se rendit à l'arrace impériale ^ et fut
ANI ï8r
présent au siège de Philisbourg. De
1680 à i685 , il fit de nouveaux
voyages , et revenu à la cour de l'élec-
teur de Saxe , George III , il aida , de
concert avec ce prince , à battre les
Turks devant Vienne. Son courage se
déploya , avec un nouvel éclat , de-
vant Mayence et devant Bonn : il en-
tra alors, comme colonel, au service
de l'électeur de Brandebourg. Il se
trouva aux batailles de Steinkcrque et
de Nerwinde , et reçut du roi de
Prusse, en 1703, le commandement
d'un corps de i5,ooo hommes, à la
solde de la Hollande et de l'Angleterre.
L'affaiblissement de sa santé l'ayant
contraint de donner sa démission , il
fut élevé au grade de lieutenant-géné-
ral , et mourut à Miihhngen, le 10
décembre 1 7 1 4 1 laissant la réputation
d'un guerrier vaillant et loyal. G — t.
AIS'IAISUS , astronome et poète ,
vivait dans le 15". siècle, et composa,
en vers hexamètres léonins , un poème
astronomique , intitulé : Computus
inanualis magistri Aniani , divisé
en quatre parties , qui a eu plusieurs
éditions , dont la plus ancienne est de
Strasbourg, 1488. 11 en existe deux
de Paris , l'une sans date , l'autre de
iSaô. A cette dernière est joint un
commentaire de Jacques Marsus , dau-
phinois , avec un calendrier , et plu-
sieurs tables dressées par Nicolas Bo-
naspes, au bas de chacun des mois
de ce calendrier. Anianus est auteur
des vers techniques si connus , sur
les signes du Zodiaque :
Sunt Aries , Taurus, Gemini, Cancffr, Léo, Virg»,
Libra<]iie,Scorpius, Âccitenens , Caper, Amphora,
Pisces. _
J N.
ANIBEBT (Louis-Mathieu), ne
à Trinquetaille- lez -Arles, le 13 oc-
tobre 174'^'^ mort le i5 mars 1782,
apprit d'abord la musique. Son maître,
qui était italien , lui fit naître le désir
d'apprendre sa langue. 11 s'adonna-en»
i82 ANI
suite à la poésie , et composa , en 1770,
un poëme he'roï - comique, où l'on
trouve, dit l'abbé Paul, d'excellents
morceaux, mais un ton trop libertin,
et semblable à celui de la Pucelle; en
1775, X Inconséquent , ou la Fête du
fVauxhall, comédie; en 1780, Jo-
crisse le Blanc ^ comédie. Ces deux
pièces sont restées manuscrites. Ani-
bcrt a fait imprimer : I. Mémoires
historiques et critiques ^ sur V an-
cienne république d Arles, pour ser-
vir à l'Histoire générale de la Pro-
vence ^ i779> 5 vol. in-12; II. Mé-
moire sur V ancienneté d' Arles, suivi
d'observations sur la formation des
marais voisins de cette ville , et sur
un passage de l'Histoire d'Ammien
MarcelUn, 1782, in- 12. Lorsque
la mort surprit l'auteur, il travaillait à
de Nouveaux Mémoires sur l'his-
toire d'Arles, depuis sa fondation
jusqu'au temps de la république ; il
avait fini le premier volume de cet
ouvrage, qui devait eu avoir deux.
A. B—T.
AN I CET, am-anchi de Néron.
V. NiÎROiy et Agrippine.
ANICET (S.), élu pape en i.')7,
suivant XArt de vérifier les dates ,
€t, en i5o, suivant Lcnglet Dufres-
noy. Il disputa, avec S. Polycjrpe, sur
la fixation de la fête de Pâques; mais
cette discussion n'altéra point l'amitié
qui régnait entre ces deux saints per-
sonnages. S.'Anicet souffrit le martyre,
le 17 avril 161 , sous le règne do
Marr-Aurèle. D — s.
ANICH ( PiERBE ), né le 22 février
•1725, à Ober-Perfuss, près d'Ins-
pruck , était fils d'un paysan , et ne
s'occupa, dans sa jeunesse, que des tra-
vaux de l'agriculture. A l'âge de 28
ans, son goût pour l'étude des scien-
ces prit sur lui tant d'empire, qu'il alla
à Inspruck, oii les jésuites lui ensei-
gnèrent l'astronomie et les mathéma-
ANI
tiques. Sans autre secours que leurs
leçons, il exécuta un globe terrestie,
un globe céleste , et divers instruments
de mathématiques. Le jésuite qui avait
dirigé ses études, lui conseilla de dres-
ser des cartes du Tyrol ; Anich com-
mença par le midi de cette province ,
et son travail obtint un si grand suc-
cès , que l'impératrice Marie-Tliéièse
lui ordonna de dresser aussi la carte
de la partie septentrionale. Les pré-
jugés superstitieux de ses compatriotes
rendirent ses recherches difficiles, et
quelquefois même dangereuses ; il vint
cependant à bout de sou entieprise ;
mais , quand elle fut terminée , la cour
de Vienne trouva ses cartes trop éten-
dues, et lui donna l'ordre de réunir
tout le Tyrol sur une seule carte, qui
n'eût pas plus de neuf feuilles. Quel-
que peine que dût éprouver Anich , en
se voyant forcé de recommencer son
travail , il s'en occupa avec persévé-
rance; mais cette assiduité lui coûta la
vie , avant qu'il eût achevé la carte du
nord du Tyrol. Il mourut le i*"^. sep-
tembre 1766, n'ayant joui que deux
mois de la pension de 200 florins que
l'impératrice lui avait accordée. Les
cartes qu'il avait laissées parurent à
Vienne, en 1774? sous le titre de
Tj rolis-chorographicè delineata à
Pet. /tnich et Blasio Hueher, curante
Ign. JFeinhart. { F. la Vie du célè-
bre mathématicien et mécanicieii
P. Anich, Munich , 1767, avec son
portrait , en allem.) G — t.
ANiCfllNI ( Louis), graveur. Ayant
quitté la ville de Ferrare, où il était
né , dans le 1 6'. siècle , il vint à Ve-
nise, où il se livra entièrement à la
gravure des médailles et à celle des
pierres fines. Ses médailles, représen-
tant Henri II , roi de France, et le
pape Paul III , sont fort estimées.
Michel-Ange en fut si content, qu'a-
près les avoir considérées attentive-
ANI
ment, il dit que cet art avait atteint la
perfection. Anichini mettait une telle
précision et une telle finesse dans ses
ouvrages, que, même ceux de la plus
petite dimension, sont remplis de sen-
timent et d'amej on ignore l'ëpoque de
sa mort. P — e.
ANIELLO. V. Mazamello.
ANIEN , jurisconsulte du 5*". siè-
cle, fut un des principaux officiers
d'Alaric II , roi des Visigotbs , qui ,
ayant reconnu la ne'cessite' de donner
des lois sages à l'Espagne , le char-
gea de ce travail. Ce jurisconsulte
parvint à se procurer une copie des
Institutes de Gaïus, ouvrage juste-
ment estimé , qui fit naître long-temps
après, à Justiuieu, le désir de rassem-
bler ses Institutes , dans lesquels on
fit beaucoup d'usage de celles de Gains.
Oïl a d'autant plus admire la sagesse
et la profondeur des lois des Visigotbs,
qu'elles ont été publiées dans un temps
de barbarie; mais l'étonnement cesse ,
lorsqu'on sait qu'elles ont été prises
dans un code composé dans les beaux
temps de la république romaine. Les
savants ont prétendu long-temps que
les lois des Visigotbs étaient une imi-
tation, ou au moins un abrégé, des
Institutes de Gains ; mais des juriscon-
sultes plus éclairés , et Cujas à leur
tête , ont prouvé que c'était une er-
reur. Elles n'en sont pas une imita-
tion, puisque le beau latin qu'on y
remarque n'était pas , à coup sûr, ce-
lui qu'on parlait du temps d'Alaric;
elles n'en sont pas même un abrégé,
puisque les passages qu'on y trouve
en grand nombre sont absolument les
mêmes que ceux que Justinien, les
empruntant de Gains, a placés tout
entiers dans ses Institutes. Anien fiit ,
à la vérité, obligé de retrancher de
ces lois tout ce qui était contraire
aux mœurs et aux coutumes des Visi-
gotbs , pom' les faire adoptex' par Ala-
ANI i83
rie : c'est ce qui fait que les Institutes
de Gaïus, qui forment quatre livres,
ont été léduits à deux par Anien.
C/est encore à lui que nous devons le
seid ouvrage qui reste de Julius Pau-
lus, ce savant, cité par les historiens
pour la fécondité de sa plume et la
profondeur de ses connaissances ; cet
ouvrage a pour titre : Receptarum
sententiarum libri quintjue. Quel-
ques auteurs ont cru que les loi.î des
Visigotbs, connues sous le nom de
Code Alaric , étaient tuées du Code
Théodosien ; c'est une errem* qui
vient de ce qu'Anien a publié un abrégé,
ou plutôt quelques fragments du Coide
Grégorien et Théodosien , l'un tt
l'autre en vigueur avant celui de Jus-
tinien. 11 publia ces fragments en 5 06,
à Aire, en Gascogne, dans le temps
qu' Alaric se préparait à la guerre dans
laquelle il fut tué par Glovis : il paraît
que c'est à la même époqne , et dans la
même bntaille , que périt Auien, aussi
estimé par sa bravoure , que par la pi'o-
fondcur de son jugement. M — x.
ANILÉE et ASIINÉE , frères juifs
de Babylone , apprentis tisserands ,
pour se soustraire aux mauvais traite-
ments de leur maître , prirent les
armes , rassemblèrent des gens déter-
minés , se fortifièrent dans des marais
formés par l'Euphrate , et repoussè-
rent le gouverneur de Babylone , qui
avait voulu les surprcndi'e. Ges ex-
ploits inspirèrent de l'estime à Arta-
bane , roi des Parthes , qui ordonna
de les laisser en paix dans le canton
dont ils s'étaient saisis. Quinze ans
après , Anilée avant épousé la femme
d'un seigneur parthe qu'il avait tue ,
celte femme apporta ses idoles , et em-
poisonna Asinée , sou beau-frère , qui
l'avait voulu faire répudier. Quelque
temps après , Anilée fut surpris et tué
par les Babylpniens , l'an 4f> <ie J.-C.
i8i ANI
ANISIO ( Jean ), ou Janus AW-
SIUS, poète latin mudcinie , né à Na-
p!es , vers l'an 1 4 7 "> ? ^^^ très-jeune ses
humanités , étudia cinq ans les lois ,
pour obéir à son père , et se livra en-
tièrement à la poésie, à i4 ans, pour
obéir au penchant qu'il avait reçu de
la nature. 11 fit quelques voyages hors
des états de Naples , et demeura plu-
sieurs années à Rome, où il se lia avec
les membres les plus distingués de l'a-
cadémie romaine : ce fut sans doute
a'ors qu'il changea , selon la coutume
de cette académie, son prénom mo-
derne pour un ancien, et qu'au lieu de
Joannes , il s'appela Jaims. De re-
tour dans sa patrie , la poésie latine
Tociupa tout entier, et il s'y fit une
grande réputation, qui se serait sans
doute mieux conservée, s'il avait com-
posé moins de vers. 11 était ecclé.ias-
tiquc. On ignore s'il posséda des hé-
iiélices. A en croire INiccolo Franco , il
en était peu digne par ses moeurs ; mais
on doit peu de fui à cet écri\ain pas-
sicniné ; et l'on eu doit davantage aux
écrits d'Anisio, qui ne respirent que
rhoniiêtdé et l'amour de l'étude. On
croit qu'il mourut, vers l'an i54o,
âgé d''nviron G8 ans. On a de lui :
I. Jani Inysii po'émata et scUrœ ,
€1,(1 Pompeium Columnam cardina-
lem , Naples , i55i , in-4". Ce titre
est ainsi, mais le volume ne contient
point les satires de l'auteur : il contient,
au contraire, ses Sentences eu vers
ïambes , que le titre n'annonce pas.
11 jiaraît donc qu'il y faut lire Senlen-
tiœ, au lieu de Satjrœ. Ses Sentenliœ,
l'ersis ïamhicis desci'iptœ, ont été
réimprimées dans le Recueil de divers
auteurs sur Véducalioii des enfants ,
Bàle , ifi + i ; ses Lglogucs l'ont été
dans la Collection des auteur?, buco-
liques, Bàle i5/iG, in -8". 11. Su-
irrcp tid FompeiuniCvlumnujn cardi-
nalem j^aiAcs , i55.2 , iu-4". } HT.
ANI
Profogenos , tragmdia , Naples ,
1 556 , in-4°. Ce Protogenos est notre
premier père Adam. La tragédie est
fort longue , et n'est pas très-bonne j
elle éprouva beaucoup de critiques ,
qui donnèrent lieu aux écrits suivants :
IV. Commentariolus in tragœdiain.
jépologia , Epislolœ , Correcliones ,
pièces imprimées sans date , mais qui
suivirent sans doute la tragédie , et qui
en sont comme l'appendice j V. Epis-
tolce de religione et epigrammala ,
Naples , 1 558 , in-4''. Anisio eut plu-
sieurs frères , l'un d'eux , nommé
Cosme , médecin de profession , fut
aussi poète latin. Ses OEuvres ont été
publiées à Naples , 1 557 ' i^'i"- ■> ^"
un volume, qui contient des Poésies
diverses , des Facéties , des Satires ,
des Épigrammes traduites du grec ,
des Sentences , et un Commentaii'C
sur les Satires de son frère Janus.
G— E.
ANISSON ( Lavrent ) , impri-
meur à Lyon, et écheviu en 1670,
est le premier de son nom qui se soir
distingué dans la liijrairie. C'est de
ses presses qu'est sortie la Bibliothè-
que des Pères ( Bibliolheca maxima
velerum Pairum et antiquorum
scriptorurn), Lyon, 1677, 117 vol.
in-fol. Phil. Despont fut éditeur de
cette importante coll.- ciion, à laquelle
on joint , 1. Apvnratus ad Biblio-
thecam ma.v. Patrum, de N. T-e
N ourry, Paris, 1 7 o5- 1 5, a vol. in-fol. ;
II. Index Bibliot. max. Patrum, de
vSimon de Ste.-Croix, Gênes, 170-^,
in-ful. — AmssoN (Jean), son fils,
fut aussi imprimeur à Lyon, et se
chargea de l'impression du Glossa-
riuni ad scriptores mediiC et in/iuut:
grœcitatiSydi': Ducange, 1O88, -i \ol.
in-fol., ouvrage que les libraires de
Paris refusaient d'imi)rimer. « Ce
» Glossaire, dit Pernotti, eut, pour
« premier concctcur , Jacf[ues Sjkhi.
A^I
» et pour dernier, le P. Colonia, je-
» suite qiii avoue que J. Anisson , y
» travaillait, et entendait fort bien le
» grec. » J. x\nisson eut, en 1701 , la
direction de l'imprimerie royale, qu'il
remit, en 1705, à Claude Rigaud ,
son beau-frère; il devint députe de la
ville de Lyon à la Chambre du com-
merce , à Paris , et en remplit les fonc-
tions jusqu'à sa mort , arrive'e en no-
vembre 1721. — Amsson ( Jacques ) ,
lière de Jean, fut aussi libraire, e'che-
vin en 1 7 1 1 , et mourut en 1 7 1 4 —
Anisson ( Louis - Laurent ) , fils de
Jacques, obtint, en i7'^3,la direc-
tion de l'imprimerie royale, que Claude
Eigaud, son oncle, ne pouvait plus
exercer à cause de sa mauvaise santé'.
Louis -Laurent mourut en 1 761 , sans
postérité. — Anisson f Jacques), frère
de Louis-Laurent, lui fut adjoint en
I 755 , et obtint sa survivance. Il rem-
plit avec distinction la même car-
rière que ses prédécesseurs , et mou-
rut en 1-^88. G. P— t.
ANISSON-DUPERON ( Etienne-
Alexandre- Jacques ) , fils de Jacques
Anisson, né à Paris, en i74B,fut,
€n 1783, directeur de l'imprimerie
royale , et le fut ensuite de l'imprime-
rie executive nationa'e. En 1790, il
publia une Lettre sur l'impression des
assignats , et fit inutilement plusieurs
tentatives pour être chargé de leur
confection. En décembre de la même
année , il exécuta le décret qui lui or-
donnait de faire l'inventaire des effets
existants à l'imprimerie royale , et de
le déposer aux archives. Le 4 juillet
179'2, inculpé pour l'impression d'un
arrêté inconstitutionnel du départe-
ment de la Somme, i! produisit, à
l'assemblée législative , l'ordre qui lui
en avait été donné par le secrélaire-
{:;énéral du ministère de l'intérieur.
Après le 10 août, Anisson fnt obligé
de quitter l'établissement qu'à i'cxem»
ANJ i8^>
pie de ses sfncêtres , il avait enrichi rt
illustré. Arrêté en germinal an 1 , il
employa tous ses efforts pour recou-
vrer sa liberté, et il essaya de faire
distribuer des sommes considérables
à quelques meinlires des autorités de
Ris et de Corbeil. Ce moyen accé-
léra sa perte ; il fut traduit devant
le tribunal révolutionnaire , et con-
damné à mort, le 6 floréal an 2 f 25
avril 1794)? et non le 26 novembre
1793. On a d'Anisson-Duperron un
Premier Mémoire sur l'impression
en lettres , suivi de la Description
d'une nouvelle presse ^ 1786, in-4".
Ce mémoire, lu à l'académie des scien-
ces, le 3 mars 1783, avait été im-
primé dans le tome X des Mémoires
de mathématiques et de physique
des Savants étrangers. L'auteur s'y
porte inventeur delà presse à un coup.
Cependant, cette invention est récla-
mée par MM. Didot, comme ayant
imprimé , en 1777, avec une presse
de cette forme, le Daphnis et Chloé
de Villoison. On peut, à ce sujet,
consulter une note de YEpître sur les
progrès de l'imprimerie , à la suite
d'un Essai de Fables nouvelles , par
Didot fils aîné , Paris , i 786 , in- 1 2,
G. P— T.
ANITUS. For. Anytus.
ANJOU ( François deFrance , duc
d') , fils de Henri II et de Catherine
de Médicis , frère des rois Fran-
çois II, Charles IX et Henri III , naqm't
en 1 554, porta d'abord le titre de duc
d'.\lcnçon, et fut envoyé, en i575, au
siège de la Rochelle, avec son frère le
duc d'Anjou, depuis Henri III, contre
lequel il témoigna toujours une secrète
jalousie. La reine-mère, ne lui voyant
pas le même éioignement qu'à ses
autres fils pour le parti protestant ,
lui reprocha souvent cette espèce de
condescendance , et surtout l'estime
(ju'il manifestait pour l'anùial Co-
i86 A^J
li^ni : cette princesse ayant vu clans
îes papiers de Coligni , après sa mort ,
qu'il avait conseille à Charles IX de
ne point accorder d'apanage considé-
rable à son frère le duc d'Alençon ,
dit à ce prince : « Voilà , mon fils, les
» conseils de votre ami. — Je ne sais
» pas, repondit le duc, s'il m'aimait
» beaucoup; mais je sais que ce cou-
» soil est d'un homme qui aimait
» l'c'tat, » A la mort de Charles IX,
un parti puissant voulut empêcher le
retour en France de Henri III, alors
roi de Pologne, et assurer la couronne
au duc d'Alençon; mais la cour prévint
l'exécution de ce complot , en faisant
arrêter ce prince et le roi de Navarre
Henri IV, qui furent transférés à Vin-
cennes. Leduc d'Alençon, interrogé,
répondit avec la timidité d'un conpa-
l>lc , et fut cause de la perle do sou
favori Lamole, qui fut décapité. Hen-
ri III , ayant été reconnu , mit son
frère en liberté ; mais , quatre ans
après , ce prince se retira de la cour ,
parce qu'on lui avait refusé la lieute-
iiancc - générale du royaume. Il fut
joint aussitôt par toute la noblesse pro-
testante , et le prince de Condé lui
amena d'Allemagne 20,000 hommes.
Tandis que la moitié de la France lui
confiait ses plus chers intérêts , ce
prince, à la tête d'une armée nom-
breuse, ne se proposait autre chose
que de venger son favori Lamole. Ja-
loux d'ailleurs du roi de Navarre et
du prince de Condé , ses rivaux de
gloire, il fit bientôt la paix avec la
cour pour ses intérêts particuliers , et
reçut en apanage le Berri, la Tou-
rainc et l'Anjou ; cette dernière pro-
vince fut alors érigée en duché , et il
en prit le titre. La guerre civile recom-
mença en 1576, et ce même prince,
qui , dans la guerre précédente , avait
été le chef du parti huguenot, fut, dans
celle-ci, le chef du parti calhohquc. 11
ANJ
commanda l'année qui prit, sur les
calvinistes, la Charité-sur-Loire , et
Issoire en Auvergne- Appelé l'année
suivante au secours des Flamands ré-
voltés contre Philippe II, il enleva
quelques villes aux Espagnols ; mais
Henri III , qui désapprouvait cette dé-
mai'che, le fit arrêter. Le duc d'Anjou,
ayant échappé à la surveillance de ses
gardes , descendit avec une échelle de
soie par une fenêtre du Louvre , et fut
conduit, par son favori Bussv d'Ara-
boise, à l'abbaye Saint-Germain , d'où
il sortit de Paris par un trou pratiqué
aux murs de la ville. La reine de Na-
varre, sa sœur, avait tellement dis-
posé les esprits en sa faveur dans les
Pays-Bas , qu'il en fut reconnu souve-
rain. Après avoir fait son traité avec
les confédérés , il se rend en Guienne
pour négocier la paix avec les protes-
tants ; repasse ensuite dans les Pays-
Bas avec 45^00- chevaux et 10,000
hommes d'infanterie , délivre Cam-
brai assiégé par le duc de Parme, y
fait son entrée en i58i, chasse les
Espagnols d'Orleux et de l'Écluse ,
et leur enlève Cateau - Cambrésis. Il
passe la même année en Angleterre,
pour conclure, avec la reine Elisa-
beth , son mariage qu'avait négocié la
la cour de France. De tous les préten-
dants à la main de cette princesse,
c'est le duc d'Anjou qui a été le plus
près de l'obîenir. Ses anciennes liai-
sons avec les réformés de France ,
rattachement qu'il avait montré pour
l'amiral de Coligni , étaient des titres
de recommandation auprès de la reine
d'Angleterre : elle alla au - devant de
lui jusqu'à Cantorbéry , et, malgré l'é-
norme disproportion d'âge , le mariage
fut résolu , au grand mécontentement
des Anglais. Elisabeth donna au duc
d'Anjou un anneau, gage de sa foi;
mais elle s'en repentit bientôt, et rom-
pit le mariage. « Il ne ferait , dit-elle
ANJ
» au prince , ni votre bonheur ni le
» mien. Vous ne connaissez pas le
» peuple anglais j jamais un prince
» catholique et français ne doit comp-
» ter sur son obéissance. J'aurais moi-
» même la douleur d'être perpe'tuelle-
» ment place'e entre mon peuple et mon
1) époux. » Le duc d'Anjou s'empor-
ta, brisa l'anneau de la reine, et vou-
lut partir. Ehsabeth, qui l'aimait, le
retint encore pendant trois mois , qui
se passèrent en fêtes , et , ne cessant
de lui donner des marques de con-
fiance et d'amitié, elle le conduisit
jusqu'à Cantorbéry, lui fit des pré-
sents considérables, et ordonna à des
seigneurs de sa cour de l'accompagner
eu Flandre , et de le recommander
en son nom aux états. Éhi solennelle-
ment souverain des Pays-Bas , eu fé-
vrier i582, le duc d'Anjou fut cou-
ronné duc de Brabant , comte de
Flandre, et installé par le prince d'O-
range , qui se contenta du titre de
lieutenant-général ; mais le duc d'Anjou
conçut bientôt le dessein d'usurper
une autorité indépendante, et de violer
les privilèges d'une nation qui venait
de lui en coniier la défense. Il fallait
s'emparer de toutes les places fortes, et
de la personne même du prince d'O-
range. L'entreprise réussit d'abord
sur quelques villes ; mais elle échoua
sur Anvers. Les habitants prennent les
armes, se joignent aux troupes du
prince d'Orange , repoussent et mas-
sacrent les Français ; le duc d'Anjou
n'a que le temps de fuir, laissant aSo
gentilshommes et ir>-oo soldats sur la
place , et 2,000 prisonniers. Anvers
lui ferme le passage de l'Escaur , Ma-
lines inonde ses environs, et ce ne
fut qu'à travers une plaine immense
d'eau que le prince français parvint,
à la faveur de mille détours, jusqu'à
Euremonde , où il rallia les débris de
soa aimée. Il eu perdit encore une
ANK 187
partie à Staembf rg , et arriva enfin
sur le territoire de France. Catherine
de Médicis vint le chercher elle-même
pom' le ramener à la cour , et le trouva
dans une grande agitation d'esprit,
causée par la confusion et la honte. 11
ne pouvait même souffrir la présence
de sa mère, et passa six mois dans une
entière solitude. Négligé à la cour,
parce qu'il était malheureux , on finit
par le rechercher , comme étant l'hé-
ritier présomptif de la couronne. Le
duc de Guisê l'attira d'abord dans le
parti de la Ligue ; ce qui n'empêcha
pas le duc d'Anjou de se déclarer con-
tre cet ennemi de sa maison, et d'a-
jouter à la haine du roi pour les princes
lorrains. Ou remarqua depuis une
grande altération dans sa santé ; atta-
qué par une sorte de phthisie, la vio-
lence de la toux lui rompit une veine,
et il vomit le sang, ce qui fit trouver
quelque conformité entre sa maladie
et celle qui avait emporté Charles IX.
Il mourut, le 10 juin i584 ? à^'ingt-
neuf ans , laissant pour trois cent
mille écus de dettes. Le roi aima mieux
dépenser deux cent mille écus à ses
funérailles , que de les payer , ce qui fit
dire que le duc d'Anjou n'était pleuré
que de ses créanciers. B — p.
ANJOU. Foy. Charlis, Louis,
Margueritte, Marie, Re'ne , Ro-
bert d'.
ANKARCRONA (Théodore),
amiral suédois , naquit à Carlscronn ,
en 1687. S' étant apphqué au com-
merce chez son oncle , établi à Ams-
terdam , il entra au ser\-ice de la
compagnie hollandaise des Indes oc-
cidentales ; mais , dans son premier
voyage, il fut pris par un corsaire
français. Son goût pour la mariiio
l'engagea à servir sous le chevalier de
Forbin ; il passa ensuite en Angle-
terre , 011 il parvint au grade de lisu-.
tenant de la marine royale. Son inîrc-
if^ A N K
pidite et ses talents s'étaient montrés
dans plusieurs occasions , et il en
donna de nouvelles preuves , lorsqu'il
fut retourne dans sa patrie. Ce fut lui
qui fit parvenir heureusement en
Allemagne le roi Stanislas et sa fa-
mille , lorsqu'à la suite des revers de
Charles XII, Auguste eut reconquis la
Pologne. En 1 7 1 5 , il conduisit Char-
les XII lui - même , de Stralsund en
Suède , à travers les glaces, et au mi-
lieu d'une obscurité profonde. Le roi
l'avança dans la marine^ et lui donna
des titres de noblesse. Il devint en-
suite , successivement , amiral , gou-
verneur de la province de Stockholm,
commandant de l'ordre de l'épée , et
mourut, en 1750, âgé de soixante-
neuf ans. N'ayant point laissé de fils ,
ses titres de noblesse passèrent à son
frère. C—- au.
ANK.\RSTROOM. ror.ANCKAns-
TROEM.
ANKWICZ , nonce du palalinat
deCracovic , ambassadeur de Pologue
à la cour de Danneraarck , de retour à
Varsovie , vers la fin de 179*2, fut,
l'année suivante, à Grodno , un des
membres les plus actifs de la diète,
et signa, le 20 juillet 1795 , au nom
du roi et de la république de Pologne,
à la suite du second partage , le traité
d'alliance avec la Russie. Soupçonné
d'avoir voulu asservir son pays à la
cour de Pétersbourg , il fut arrêté lors
de l'insurrection de Varsovie, le i8
avril 1 794 , jugé sur ses lettres , trou-
vées parmi celles du général russe
Igelstrom ,ct pendu devant l'hôlel-de-
villc de Varsovie. A la demande du
peuple, son corps fut jeté dans la
sépulture des malfaiteurs. Ankwicz
était éloquent, ambitieux; son peu de
fortune, et l'amour du jeu le jetèrent
daiis l'intrigue , et préparèrent sa triste
fin. B— p.
ANLY (Ji:an n'), hisloricu; ué à
ANN
Montmédy , florissait vers le miKea
du 16". siècle. On conservait de lui ,
à l'abbaye d'Orval, dans le pays de
Luxembourg , un manuscrit in - fol.,
intitulé : Recueil et abrège' de plu-
sieurs Histoires , conlenajit les faits
et gestes des Princes d' Ardemies ,
etc.; ensemble une Table généalogi-
que de la postérité de Clodion-le-
Chevelu , etc. N — l.
ANNAT ( François ). On lit dans
le Menagiana , que le nom de ce fa-
meux jésuite étatt Canard , et que,
pour éviter les mauvaises plaisante-
ries, il le latinisa en celui àiAnnat.
Il naquit à Rhodez, en 1607 , pro-
fessa la philosophie et la théologie,
pendant treize ans à Toulouse , et fiit
appelé à Rome, pour y être censeur
des livres que publiaient les auteurs
d* la société, et théologien du gé-
néral. Il revint en France, et fat suc-
cessivement recteur des collèges de
Montpellier et de Toulouse. Sa pro-
vince le députa , en i645 , à la hui-
tième congrégation générale des jé-
suites; il remplit, sous le général Ca-
raffe , la fonction d'assistant de Fran-
ce , qui lui fut continuée sous Pic-
colomiui. Revenu dans sa patrie ,
avec la quahté de provincial , il fut
choisi, en ïG54 , pour confesseur
de Louis XIV , poste qu'il occupa
pendant seize ans. L'âge lui ayant af-
faibli l'ouïe, il se retira de la cour,
et mourut, quatre mois après, dans la
maison professe de Paris , le 1 4 jiùa
1670. Ou remarque, à son avantage ,
qu'il n'avait point profité de sa place
de confesseur du roi, pour avancer
sa famille , quoiqu'il eût été forte-
ment sollicité à ce sujet. Le P. Sotwel
l'appelle le Marteau des hérésies , et
surtout de la nouvelle hérésie du
jansénisme. Il est vrai , qu'après
avoir agi puissamment à Rome pom-
obtenir U IniUc d'Innocent X, contLc
ANN
les cinq propositions attribuées à l'e'-
vcque d'Ypres , il réussit , par le cre'-
dit du cardinal Mazarin et de M. de
Marca , à faire déclarer , dans ras-
semblée du clergé de France ^ qu'elles
sont tirées du livre de cet évêque. Il
fut l'ame du parti oppose à Port-
Royal , et le promoteur de tous les ac-
tes d'autorité que fit le gouvernement
pour ériger le Formulaire d'Alexan-
dre VII en loi de l'état. Entraîné dans
une guerre très -vive avec MM. de
Port-Royal, pour se venger des coups
que lui portèrent ces célèbres tliéolo-
giens , il fit déférer et condamner en
Sorbonne les deux propositions qui
provoquèrent l'expulsion du grand Ar-
naiild de la faculté de théologie; mais
tous ses efforts pour traverser la con-
clusion de la paix de Clément IX, dont
on avait eu la précaution de lui ca-
cher les négociations , furent sans
succès. Le P. Annat composa un grand
nombre d'éciits polémiques, principa-
lement sur cette contestation , les uns
en latin , recueillis en 5 vol. in-4''. ,
Paris, 1666, les autres, en mauvais
français. Le plus singulier est inti-
tulé : le Rabat-joie des Jansénistes ,
ou Observations sur le Miracle
qu'on dit être arrivé à Port-Royal.
Ils furent, pour la plupart , réfutés
par Arnauld , Nicole et Pascal. C'est à
lui que ce dernier adressa les l'j'^. et
1 8". Provinciales ; les ouvrages d' An-
nat ne méritent guère d'être tirés de
l'oubli où ils sont tombés , avec les
querelles dont ils étaient l'objet, — Le
neveu du P. Annat, général de la con-
grégation de la doctrine chrétienne , a
publié un Apparat méthodique pour
la Théologie , en latin , imprimé en
l'joo, et réimprimé en lyoS , 1 vol.
in-4''. mis à X index à Rome , en 1 7 1 4.
T— D.
ANNA Y A (Pedro de), amiral
jwrtugais , fut chargé , par le roi Em-
ANN iMo
manuel , de former un établissement
dans la ville de Sofala, sur la cote
orientale d'Afrique , vis-à-vis l'île de
Madagascar. Annaya quitta les ports
de Portugal, en i5o8, avec sis vais-
seaux. Sa navigation fut heureuse;
il surprit le roi de Sofala , qui fut
obhgé de donner, à Annaya , la per-
mission de bâtir un fort dans ses états.
Quelque temps après, le roi de So-
fala voulant se défaire d'hôtes aussi
dangereux , saisit le moment où An-
naya avait détaché trois vaisseaux de
sa flotte , et où la garnison du nouveïfii
fort était affaiblie par les maladies,
et vint l'attaquer. Le général portu-
gais , qui n'avait que trente hommes
en état d« porter les armes, le repous-
sa avec perte. La nuit suivante , il vint
fondre sur le palais , et fut blessé par
le roi lui-même , qui s'était caché der-
rière une porte ; mais ce malheureux
prince fut tué sur-le-champ par les Por-
tugais , ainsi que ceux qui entreprirent
de le défendre. Annaya rétablit sur sou
trône un de ses fils , à qui il fit jurer
une alliance inviolable avec la nation
portugaise. Celte conquête a été effec-
tuée à peu près dans le temps où
François d'Almeyda , premier vice-
roi des Indes orientales , s'emparait
des villes de Quilloa et Mombassa,
sur la côte d'Afrique , à une petite dis-
tance, au sud , de Sofala. R — l.
ANNE. \J Ancien et le Nouveau
Testament parlent de plusieurs fem-
mes de ce nom ; la plus célèbre de toutes
est sainte Anne, dont le nom heliraïque
Channah signifie gracieuse. Ayant
épousé S. Joachim , elle devint mère
de la Sainte Vierge. Dès les premiers
siècles de l'Eglise , cette sainte fut ho-
norée , ainsi que son époux. Les em-
pereurs Justinien I". et Justmien II,
fondèrent des églises en son honneur.
On assure , qu'en 710, son corps fut
apporte de la Palesliue à Constanti-
ujo ANN
iiople. Plusieurs églises d'Occident se
vantent d'avoir quelques - unes de ses
reliques; mais ces prétentions ne pa-
raissent pas plus fondées que les ré-
cits consignés dans ks légendes , à
l'égard de cette sainte , dont la vie est
peu connue. S. Epiphane est le pre-
mier Père de l'Église qui nous ait ap-
pris son nom. La mère du prophète
Samuel portait aussi le nom <XAnne ,
ainsi que la femme de Tobie. S. Luc
fait mention d'Anne , la propliétesse ,
fille de Phanuel , de la tribu d'Aser ,
qui avait quatre-vingt-quatre ans lors-
que la sainte Vierge offrit J.-C. au tem-
ple, et qui se joignit au vieillard Si-
raéon pour prédire les merveilles que
le Messie allait opérer. D — t.
ANNE CoMNiiNES , fille de l'em-
pereur Alexis F' ., et de l'impératrice
Irène Ducas, naquit le i ''. décembre
I o83. Elle raconte elle-même les pro-
diges qui accompagnèrent sa nais-
sance , avec une bonne foi qui montre
bien l'esprit superstitieux de son siècle
rt de sa nation. Alexis était hors de
('onstnnlinO]ile, occupé d'une guerre
contre les Turks, lorsqu'Jrène, sen-
tant les douleurs de l'enfantement , fit
une croix sur sou ventre, et prononça
ces paroles : « Petit enfant, attends le
» retour de ton ])ère. » Anne, près
de voir le jour, obéit, et ne vint au
monde que lorsqu' Alexis fut de re-
tour, « rare docilité qui fut, dit-
» elle, comme le prélude de l'obéis-
» sance qu'elle devait montrer à ses
» parents , lorsqu'elle en serait deve-
» nue capable. » Alexis ne négligea rien
pour l'éducation de sa fille, qui étudia
l'éloquence, la poésie, les mathéma-
tiques, la physique, la philosophie de
Platon et d'Àristole, et surpassa bien-
tôt en savoir les plus habiles de ses
maîtres. Ses grâces et son esprit fai-
saieut l'admiration de la cour. Elle
était encore dans l'enfance , lorsqu'elle
ANN
fut demandée en mariage par Ma*
leksha , sulthan de Perse. Les Turks
devenaient chaque jour plus redou-
tables; Alexis, n'osant pas refuser ou-
vertement sa fille à leur chef, fit
traîner la négociation en longueur , et
la foitune vint enfin le soustraire à la
honte d'avoir un gendre parmi les
ennemis du nom chrétien. Aune Com-
nènes épousa, dans la suite, Nicéphore
Bryenne , homme qui réunissait à une
haute naissance , un rare savoir et le
talent d'écrire. La culture des lettres
avait donné à Bryenne l'amour de
la paix et de l'obscurité , tandis
qu'elle avait exalté l'esprit d'Anne
Comnènes , et réveillé dans son ame la
passion du changement, et l'impatience
de régner. Dans la dernière maladie
d'Alexis , elle alla se jeter à ses ge-
noux , pour l'engager à déshériter son
fils Jean , et à choisir Nicéphore
Bryenne pour son successeur; Alexis
rejeta les prières d'une fiUc ambi-
tieuse, et laissa la pourpre à son fils.
Quelque temps après la mort de son
pèie, Anne, se ressouvenant peu de
ce qu'elle devait à ses parents, et des
prodiges qui , dans le sein de sa mère,
l'avaient annoncée comme un modèle
de soumission , se mit à la tète d'une
conjuration pour détrôner son frère
Jean , et pour faire monter son mari
sur le trône. « Femme philosophe ,
M dit Le Beau , elle avait , dans son
» parti, tous les philosophes de l'em-
» pire , qui , prosternés à ses pieds ,
» et la comblant d'éloges outrés, dé-
» clamaient sans cesse contre la flat-
» teric et l'adulation. » Ses trésors et
ses intrigues avaient corrompu la
garde du palais, et les portes devaient
s'ouvrir à une certaine heure de la
nuit pour l'exécution du complot.
Tout était prêt; les conjurés n'atten-
daient plus que Nicéphore Bryenne;
mais^ retenu par la crainte ou par Ir
ANN
remords , il ne parut point , et fit
échouer la conspiration. Anne, au dé-
sespoir, ne put retenir sa colère j elle
s'emporta contre Bryenne , qui , à ses
yeux, n'était qu'une femme, tandis
qu'elle avait montré le caractère d'un
homme. Le lendemain , le complot fut
découvert ; l'empereur confisqua les
biens des conjurés, et leur fit grâce delà
vie : il offrit les biens d'Anne Comnènes
à l'un de ses favoris , qui eut la géné-
rosité de les refuser , et de conjurer
son maître de ne pas dépouiller une
princesse qui lui appartenait par les
liens les plus sacrés. Anne , vaincue
par tant de générosité, et dégoûtée
de ses entreprises par leur peu de
succès , se condamna , dès -lors , à
l'obscurité , et se contenta de régner
sur les beaux esprits et les philo-
sophes qui composaient sa cour. Dans
sa retraite ^ elie perdit son mari ,
et, quoiqu'elle l'eût accusé de n'être
qu'une femme, sa mort, si on l'en
croit, la plongea dans le plus profond
désespoir; il n'était plus à ses yeux
que le grand Bryenue, et toutes les
afflictions qu'elle avait éprouvées n'é-
taient , en comparaison de cette perte ,
« que comme une goutte d'eau com-
» parée à toutes les eaux de la mer. »
Anne Comnènes mourut en ii48,
sous le règne de Manuel : elle avait
vu trois empereurs. Témoin, dans son
enfance , du passage des premiers croi-
sés à Constantinople , elle put voir,
dans sa vieillesse, la seconde croisade,
prêchéeparS. Bernard, et comman-
dée par Conrad III et Louis-le-Jeune.
Anne avait un esprit inquiet et re-
muant, et ne trouva point le repos
dans la solitude. « Je ne vois dans
» ma vie , disait-elle , que des afflic-
» tions et des peines. « Lorsqu'on
examine sa conduite et ses écrits, il
est aisé de voir que ces afflictions ve-
naient, moins des aâectioDS du cœur,
ANN 191
que de l'ambition trompée. Toute
philosophe qu'elle était, elle mettait
beaucoup de prix aux avantages de sa
naissance, et, lorsqu'elle parle des dis-
grâces de sa vie , elle remercie la for-
tune de l'avoir fait naître d'une impé-
ratrice et d'un empereur. En se plai-
gnant de ses destinées , elle fait parade
de sa rhétorique ; elle s'efforce de faire
éclater son deuil , cherche plutôt à
surprendre l'admiration de ses lec-
teurs que leur pitié, et finit par dire
que le récit de ses malheurs ne doit
pas seulement affliger les hommes ,
mais émouvoir les animaux. Dans sa
retraite , elle écrivit la Vie de son
père , qui fait partie de la Collection
hysantine, et dans laquelle on trouve
les défauts qui tiennent à un temps
de décadence. L'envie d'étaler son
érudition , et de faire voir son es-
prit , entraîne l'auteur dans tous les
excès de l'affectation et de la recherche.
Un défaut plus grave encore s'y fait
remarquer presque à chaque page ;
partout l'histoire prend , sous la pluine
d'Anne Comnènes, le ton et les cou-
leurs du panégyrique ', elle reconnaît
elle-même l'embarras de sa position.
« Si je donne des louanges à Alexis ,
» dit-elle , dans sa préface , on me
» soupçonnera de préférer ma propre
» gloire à la vérité ; d'un autre coté, si
» la nécessité du sujet m'oblige à dé-
» sapprouver quelques-unes de ses
» actions , on m'accusera d'impiété. >»
L'auteur aurait dû conclure , comme
un critique moderne , qu'une fille ne
doit pas écrire l'histoire de son père.
Quoi qu'il en soit, il est certain qu'Anne
Comnènes est demeurée plus fidèle à
la piété filiale qu'à la vérité. Alexis est
représenté , dans son histoire , comme
un héros et comme un sage, quoiqu'il
ne fut ni l'un ni l'autre. Anne montre
partout les croisés dans ses récits,
sous les plus noires couleurs. Ce-
1 92 A ]S N
pendant le portrait l)rillant qu'elle
retrace de Bohc'mond a fait croire
qu'elle n'avait pas vu ce prince croisé
sans un tendr* intérêt j mais elle
n'avait que douze ans lorsque les ar-
mées de l'Occident passèrent à Cons-
lantinople pour aller à Jérusalem.
Quoiqu'elle eût revu Boliémond quel-
ques années après, dans l'Epire, où il
faisait la guerre à Alexis , rien n'an-
nonce qu'elle eut pour lui une se-
crète préférence, et, dans le cours de
son histoire , elle déclame souvent
contre l'ambition , la ruse et la fourbe-
rie du prince deTarente. Au reste Anne
Comnènes n'épargne pas plus les La-
tins , que les historiens latins n'ont
épargné les Grecs. Quoique les récits
et les plaintes des uns et des autres
soient exagérés , on y trouve cepen-
dant un fond de vérité ; les Grecs
avaient à se plaindre des guerriers de
l'Occident, et ceux-ci n'eurent pas
moins à se plaindre des (irecs. Il y
avait beaucoup de mal à dire des uns
et des autres. INous devons à Anne
Comnènes plusieurs particularités cu-
rieuses , qui , sans elle , seraient per-
dues poiu- l'histoire ; mais on lui a
reproché , avec raison , de se perdre
dans les détails , et de négliger quel-
quefois les faits importants. Elle cou-
fond souvent les époques , dénature
les événements et les noms des per-
sonnages; elle rapporte quelquefois
des prodiges et des fal)les, qu'on croyait
de son temps à Constantinople, et qui
prouvent que les Grecs du 1 2' . siècle
ii'étaicnt guère moins superstitieux
que les Latins ; en un mot , sou ou-
vrage est , en beaucoup d'endroits ,
un guide très-infidèle , et ceux qui y
cherchent la vérité , ne doivent le lire
qu'avec les Notes judicieuses et les
savants 0)mmentaires de Ducange.
l'Alexiade, ou X Histoire tVJlexis,
divisée eu quinze livres, a élé iMipû-
ANN
mée plusieurs fois ; une des meilleures
éditions est celle du Louvre , avec les
notes de David Hoeschelius , in-fol. ,
]65i. Le président Cousin, qui a
traduit la Bj'Santine, a fait une ver-
sion française de X Alexiade , qui a
été louée par quelques biographes ,
et qu'on doit cependant lire avec pré-
caution. M — D.
ANNE de Savoie, impératrice de
Constantinople , était fille d' Amédée V,
comte de Savoie. En 1 52'j, Andronic-
le-Jeune, empereur d'Orient, qui cher-
chait à s'appuyer de l'alliance des
puissances européennes , épousa cette
princesse. Elle arriva à Constantin 0-
])le avec une suite brillante , et les
chevaliers qui l'accompagnèrent fîient
connaître aux Grecs les tournois ,
jeux inconnus jusque-là dans l'Orient.
Lors de la mort d'Aiidronic , son fils ,
Jean Paléologue, étant encore en bas
âge , Anne , excilée par le protoves-
tiaire Apocauque , enleva la régence
à Cantacuzène dont les vertus et les
talents méritaient cette imj'ortante
fonction; les troupes indignées la for-
cèrent de le rappeler. Entraînée une
seconde fois par de basses intrigues ,
elle voulut le déposer, tandis qu'il
était occupé à repousser les ennemis
de l'empire , et les députés qu'il lui
avait euvoj'és reçurent de mauvais
traitements ; mais un parti puissant
portait Cantacuzène sur le trône. Anne,
cfTravée de cet orage , songea à se ré-
tracter ; Apocauquc et les anibitieus
dont elle était entourée , l'engagèrent
à la résistance ; les affaires de Canta-
cuzène prirent d'abord une tournure
fâcheuse ; cependant elles se rétabli-
rent en 1 544 1 ^^ l'impératrice ne rou-
git pas de mendier le secours des Bul-
gares et des Turks contre un prince
qui ne connaissait d'autres intérêts que
ceux de l'état. L'année suivante , Apo-
cauquc fut assassiné par des prison-
A N N
nirrs; Anne permit à la veuve de son
miui.-lre de faire un lioriible massacre
des assassins de son époux. Le de'sor-
die étant parvenu à sou condjle, en
iô'^'j, l'impérairice fut forcée de rece-
voir Cantacuzène dansConstantiuople,
et de partager avec lui le titre et les hon-
neurs impériaux; ce fut alors que, dé-
livrée d'une partie des soins du gou-
vernement, elle prit une ])art très-vive
dans des querelles tliéologiques , per-
sécuta et fit déposer le patriarche de
Constantinople, Jean d'Apri, qui jadis
l'avait soutenue contre Cantacuzène.
Il paraît même qu'elle embrassa les
erreurs des palamistes ou quiéiistesdu
mont Athos. En i55i, des dissen-
sions s'étant élevées entre Cantacu-
zène et Jean Paléologue, Anne par-
vint à les réconcilier; mais elle eut
bientôt la douleur de voir renaître ces
funestes querelles , dans lesquelles
l'histoire lui fait jouer l'honorable rôle
de médiatrice, et qui finirent par l'ab-
dication de Cantacuzène. Anne mourut
peu de temps après ; mais non pas en
1545, comme l'a dit Morcri.
L-S— E.
ANNE de Russie , fille de Jaraslas ,
e'pousa, en l'année io44> Henri ^^,
roi de France. Ce piince était veuf
depuis long-temps, quoiqu'il ne fût
que dans sa 09". année; n'ayant pas
d'héritier, ses sujets le pressaient de
former une nouvelle union ; mais la
crainte d'avoir des démêlés avec les
papes , le rendait sourd aux vœux de
son peuple. A cette époque, tous les
princes étaient alliés parle sang, et,
tout mariage entre parents étant in-
terdit, les papes intervenaient sans
cesse dans les affaires des rois, sous
f)rétexte d'examiner la validité de
enr mariage. Henri \"\ ayant entendu
parler de la beauté d'Anne de Russie,
forma le projet de l'épouser, certain
qu'il ne pouvait y avoir cnti'e eux aw-
ANN 193
cun degré de parenté. En effet, c'es
la pi'cmière fois qu'il est question de
la Russie dans nos Annales, et, jusqu'à
présent, c'est la seule alliance de ce
geme contractée entre cet empire et
la France. L'arrivée de la nouvelle
reine fut célébiée avec beaucoup de
joie; mais cette joie fut long-temps
troublée par sa stérilité. Enfin, la
neuvièm.e année de son mariage, elle
accoucha d'un fils, le premier des rois
de France qui régna sous le nom de
Philippe : elle eut, depuis , deux fils et
une fille. Henri P''. étant mort le 4
août I oGo , sa veuve se retira à Senlis,
avec le projet d'y fixer ses jours , dans
un monastère qu'elle faisait bâtir;
mais elle accorda bientôt sa main à
Raoul, comte de Crépi, en Valois,
quoiqu'il fût marié, et que son divorce
n'eût point été autorisé par l'Église;
d'ailleurs , Raoul était parent de Hen-
ri V'. , et cela seul aurait suffi , dans
les mœurs de ce temps , pour rendre
le mariage nul. Il brava les censures
de l'Église, se prépara à se défendre
envers et conti'c tous : sa fermeté lui
réussit; mais, peu de temps après,
Anne , répudiée par ce nouvel époux ,
retourna dans sa patrie, où elle ter-
mina ses jours. F — e.
ANNE de France, fille aîne'ede Louis
XI et de Charlotte de Savoie , mariée à
Pierre II , seigneur de Beaujeu , duc
de Bourbon , fut choisie, par son père,
pour gouverner la France , pendant la
jeunesse de Charles VIII. Ce monar-
que entrait daîis sa quatorzième année ,
lorsqu'il parvint au trône, le 3o août
i485. Selon l'ordonnance de Char-
les V, il étaitr majeur; mais cette ma-
jorité fictive ne diminuait pas la né-
cessité de confier les rênes de l'état à
des mains plus fermes. Louis XI au-
rait pu choisir entre les princes du
sang; il préféra sa fille, et Anne de
Beaujeu justifia cette préférence, en
i5
ig4 ANN
dissipant avco habileté toutes les fac-
tions. Le duc d'Orléans , place' , par sa
naissance, le plus près du trône, après
Charles YIIl, ayant pris les armes
pour réclamer, dans les affaires du
p;ou\erneraeut , la part qu'il croyait
due à son rang, fut vaincu et fait pri-
sonnier. Anne de Beaujeu le retint
captif plus de deux ans dans la grosse
tour de Bourges , et refusa constam-
ment sa liberté' aux sollicitations des
î^rauds de l'état. Plusieurs historiens
prétendent que sa sëveritc e'tiiit moins
cxcite'e par le de'sir de venger l'autorité'
royale, que par le dépit d'avoir témoi-
gné au duc un amour qu'il avait méprisé.
}ï fut mis en liberté par Charles YIII,
qui alla lui-même le tirer de prison ,
et qui n'eut jamais à se repentir de
cet acte de confiance et de géuéro-
iité. Depuis cette époque , Anne perdit
le crédit qu'elle avait à la coiu", mais
sans éprouver aucune violence. Lors-
que le duc d'Orléans parvint au trône ,
sous le nom de Louis XII , il se pluî à
accabler de bienfaits celle qui l'avait
persécuté, oubliant les mauvais tr.iite-
nieuts qu'il en avait reçus, pour ne se
souvenir que des services qu'elle avait
rendus à la France. Elle mourut au
château de Chantelle, en i52^, âgée
d'environ soixante ans. F — e.
ANNE de Bretagne, reine de Fran-
ce, naquit à Nantes, le 9,G janvier
1 4; 6. Ayant perdu le duc François II ,
son père, elle se trouva, à l'âge de
quatorze ans, unique héritière du du-
ché de Bretagne; il se forma , dans ses
états, plusieurs partis pour disposer
de sa main , et la guerre ci\"ile éclata
entre les Bretons, par suite des ]>ré-
cautions qu'ils prirent pour assurer
leur indéj)endaucc. Celte princesse
était belle, d'une taille élevée, mais un
peu boiteuse; elle avait de l'esprit,
une prudence au-dessus de son âge ,
et cette hauteur de caractère qui ne
ANN
déplaît point dans les femmes de son
rang , quand elle s'unit à de bonnes
mœurs. Après beaucoup d'événements
malheureux , qu'elle supporta avec
courage , elle accorda sa main à Maxi-
milieu d'Autriche, jeune encore, quoi-
que veuf de la duchesse de Bourgo-
gne. Il l'épousa par procureur ; mais
la France ne pouvait voir qu'avec
peine le possesseur de l'héritage de
Bourgogne devenir le maître de la
Bretagne , et offrir ainsi aux Anglais
un moyen d'attaquer le royaume tle
tous côtés. Charles VIII était fiancé à
la fille de Maximilien , qui demeurait
en France en attendant qu'elle eû(
l'âge requis poui" célébrer sou mariage ;
il s'agissait de lui enlever sa fernuK- ,
et de lui renvoyer sa fille; le comte de
Diuiois ne s'effraya point des difiirui-
tés de cette entreprise, et le duc d'Or-
léans , depuis Louis XII , se rendit eu
Bretagne , poiu" faire jnarcher ensem-
ble les combats et les négociations.
Tout réussit ; le mariage de Char-
les Vlll et d'Au'.ie de Bretagne se fit
à Langeais, le 6 décembre 1 491 , Anne
se réservant la souveraineté de ses
états. 11 fut inséré dans le contrat
« que, le roi venant a mourir sans en-
)i faut, la reine serait obligée d'époii-
)) ser sou successeur à la couronne,
» et que, si elle le précédait , le duché
» demeurerait au roi de France. »
Anne gouverna le royaume avec uiie
grande habileté, peudant l'expédition
de Charles Vlll en Italie; elle s'était
sincèrement attachée à ce prince, peu
favorisé des don^ de la nature , mais
d'une bonté si parfaite, qu'il était im-
possible de ne pas l'aimer. A la moi t
de ce monarque , qui arriva le 7 avril
1498, Anne donna les plus grandes
marques de douleur, et prit le deuil
on noir, quoique les reines, jusqu'aloo,
l'eussent porté eu blanc. La perte li.'
son époux lui rappelait ph;s vivcmej»;
ANN
U moi't des trois fils qu'elle en avait
eus ; mais sa douleur ne l'empècLa
point de penser aux intérêts des Bre-
tons : elle se retira au milieu d'eux,
assembla les e'tats à Reunes , et fit
plusieurs belles ordonnances. Louis
AII craignait de perdre une si belle
occasion de réunir la Bretagne à la
couronne, et , d'ailleurs , il avait mon-
tre' une passion assez vive pour l'he'ri-
lière de ce duché' , avant qu'elle épou-
sât Charles VIII. Il demanda et obtint
son divorce avec Jeanne, seconde fille
de Louis XI, dont il avait été forcé
d'accepter la main ; et , le 8 janvier
I ^99, il épousa la veuve de son pré-
décesseur. De cette union naquirent
plusieurs enfants; deux filles seule-
juent vécurent. L'aînée, Claude de
France, épousa le duc d'Angouléme,
qui régna sous le nom de François l".
C'est alors que le duché de Bietagne
fut irrévocablement réuni à la cou-
ronne. Pour feire l'éloge de la reine
Anne, il suffirait de remarquer qu'elle
captiva sans partage Louis XII, connu
par l'inconstance de ses amours, et
qu'elle soutint constamment, contre
toutes les cabales de la cour , le cardi-
nal d'Amboise, l'ami et le premier mi-
nistre de son époux. On a dit que
François I'"^. avait attiré les femmes à
la cour; il trouva cet usage établi par
la reine Anne, qui aurait l'éclat, la re-
présentation , et qui fixa , auprès de
sa personne, un grand nombre de
demoiselles , auxquelles on donnait le
titre de ^Z/e5 d'honneur de la reine,
titre bien mérité, carjamais les mœurs,
en France, ne furent meilleures qu'à
cette époque. Ces filles de la reine ont
été remplacées, en 1673, par les da-
mes du palais. Les revenus du duché
de Bretagne, que la reine s'était ré-
serves, étaient employés par elle à
soulager les veuves , les orphelins , les
pauvres religieux ; elle étendait aussi
ANN t(p
ses bienfaits siu- les savants, dont elle
aimait l'entretien; et , lorsque le roi al-
lait combattre en Italie , elle se rendait
à Lyon , afin d'être plus à portée de
faire des présents aux capitaines qui
se distinguaient, et de remettre eu
équipage ceux que le sort de la guerre
avait maltraités. Malgré ses libéralités
et son goût pour les fêtes, elle admi--
nistrait ses revenus avec tant d'ordi-e ,
que son ti'ésor était toujours rempli;
aussi, lorsqu'en i5oi , les chrétiens
se liguèrent contre les Turks, elle équi-
pa, à ses frais, iouze des plus grands
vaisseaux de cette expédition. Cette
princesse ne fut point sans quelques
défauts : son caractère la portait à do-
mintr, et Louis XII, qui l'excusait, en
disant « qu'il faut soulTi'ir quelque
chose d'une femme, quand elle aime
sou mari et son honneur, » avait
quelquefois besoin de résolution pour
lui résister. On connaît la fabie des
Biches qui perdirent leurs cornes
pour s'être égalées aux Cerfs, que
ce prince lui cita , pour lui faire com-
prendre qu'il n'appartenait pas à soh
sexe d'intervenir dans les affaires de
l'état et de l'église. Quelques actions
de sa vie ont autorisé à croire qu'elle
poussait la fierté jusqu'à ne pouvoir
supporter une insuite sans en tirer
vengeance. Le maréchal de Gié eïi fit
«ne funeste épreuve; mais- les verlu^
qu'elle possédait en si grand nombre',
les bienfaits qu'elle répandit , la pureté
de ses uîœurs, ont rendu sa mémoire
clière aux Français, et les historiens
étrangers se sont accordés pour, faire
son éloge. Elle mourut au château d^
Blois , le 9 janvier 1 5 1 4 , et fut enter-
rée à St.-Denis : c'est la première
reine de France tpii ait eu des gardes ,
des gentilshommes à elle , et qui ait
donné, en son nom , audience aux
anïbaSsadeurs ; mais elle agissait, en
cela, comme souyeraine deBretagn»,
up ANN
Il existe , à la Bibliothèque impeiiale ,
un monument précieux du goût qu'a-
vait cette princesse poiu' les sciences
et les arts : c'est sou livre d'Heures ,
en manuscrit, in-4°. Suivant l'usage
du temps, il est orne de figures en
miniature, très-bien exe'cutées; il y en
a une pour chaque mois , représentant
les opérations agricoles; les autres
figures représentent les fêtes de l'an-
née. Toutes les marges sont décorées
delà figure d'une plante, avec des in-
sectes, d'après nature. Les plantes
sont au nombre de trois cents ; pres-
que toutes reconuaissables , et dont
plusieurs ne seraient pas rendues, au-
jûurd'ljui, avec plus de goût et d'exac-
titude. Cette suite de dessins, qui est
de la fin du XV'". siècle, peut être re-
gardée comme l'herbier le plus com-
plet que l'on ait de cette époque , et
on doit présumer que, pour choisir
un tel genre d'ornement, on avait con-
sulte le goût de cette illustre princesse.
F~E.
ANNE d'Autriche , fille aînée de
Philippe II , roi d'Espagne , épousa
Louis XIII , roi de France , le 25 dé -
ccmbre i G 1 5. Ce nnriage , qui renver-
sait toute la ])olitiquc de Henri IV , ne
put maintenir long-temps la paix entre
les deux royaumfcs; aussi, cette prin-
cesse ne fut-elle pas heureuse. Louis
XIII , peu disposé à se laisser séduire
par les grâces et la beauté, mais facile
à conduire par la persuasion , parce
qu'il joignait à un caractère faible , un
■esprit juste, et un vif désir de foire le
bonheur de la France , accorda tou-
jours plus d'empire à ses favoris qu'à
.son épouse. Lorsque Uichelieu parvir.t
au ministère, sa plus constante pensée
fut d'abattre tout ce qui pouvait hii
nuire ; craignant de voir ses ennemis
secondés par la reine . il ne négligea
rien pour la mettre elle-même dans
l'impossibilité d'agir. Aune d'Autriche,
ANN
bonne, généreuse, d'une humeur af-
fable, mais fière, croyait ne devoir
dissimuler , ni son mécontentement du
peu de confiance que lui témoignait le
roi, ni l'attachement qu'elle conservait
à sa famille , malgré les guerres qui di-
visaient les deux royainnes. Richelieu
profita de quelques paroles légères ,
échappées à une épouse mécontente,
pour faire appréhender au soupçon-
neux Louis XIII , que la reine ne fût
entrée dans les complots de Chalais.
( Foj^. ce nom ). Cette conspiration nr
devait probablement attaquer que le
ministre j mais, pour effrayer le mo-
narque , on lui fit entendre qu'il s'a-
gissait de !e renverser du trône , après
l'avoir ftiit déclarer impuissant , et de
donnerson épouse à Gaston d'Orléans,
son frère. Anne répondit à celte accu-
sation : « qu'elle aurait peu gagné au
change , de commettre un si grand
crime pour un si petit intérêt , » ce
qui était fort juste ; car Gaston avait
encore moins de caractère que Louis
XIII, etnepossédait pas autant de ver-
tus. Il ne pouvait y avoir de preuves
contre cette princesse ; mais Richelieu
connaissait l'effet qu'un pareil soupçon
pouvait produire sur l'esprit du roi ;
aussi , lorsqu'il accusa plus tard Anne
d'Autriche d'entretenir des coirespon-
dauces avec les ennemis de l'état , il la
réduisit au rôle d'accusée, et cette prin-
cesse fut obligée de repoudre au chan-
celier, sur les intelligences qu'elle pou-
vait avoir avec les puissances étran-
gères ; ses aveux prouvèrent qu'elle
avait toute l'imprudence que donne la
fierté blessée; mais il aurait étéimpos?
sible de découvrir dans ses lettres la
trace d'aucun projet , d'aucune pensée
contraire aux intérêts de la France.
Toujours humiliée, toujours négligée
par sou époux , elle restait sans in-
fluence : un heureux rapprochement
mil SCS ennemis dans la uécessité de
ANN
la respecter ; elle devint enceinte , et
donna le jour à Lonis XIV, le 5 sep-
tembre iC)58. Louis Xlll , qui siiiyit
de près au tombeau le cardinal de
Richelieu , avait cru pouvoir borner
le pouvoir delà reine; mais, à peine
avait-il ferme les yeux , que son testa-
ment fut casse' par le parlement , et
Anne d'Autriche obtint sans partage la
régence du royaume, et la tutelle de
ses enfants. Rien n'éclaire comme le
malheur , et la nécessite' de tourner
toutes ses pcnse'es sur soi-même ; aussi
la reine , qui avait mille raisons de
haïr la me'moire du cardinal de Riche-
lien , se fit une loi de maintenir son
ouvrafre : il avait agrandi l'autorité
royale , c'est tout ce qu'elle voulut se
rappeler. « Si cet homme eût vécu jus-
» qu'à cette heure, dit-elle un jour, en
» regardant un portrait du cardinal ,
» il aurait e'të plus puissant que ja-
» mais. i> Elle compta moins les ser-
vices qu'on lui a^ait rendus, que ceux
qu'on pouvait rendre à l'état ; et , dans
la crainte d'être trahie par les grands ,
intéressés à renverser la politique de
Richelieu, elle donna toute sa con-
fiance à Mazarin , qui , étant étranger ,
ne pouvait trouver qu'en elle un vé-
ritable appui. C'est avec raison qu'on
a comparé la position et la conduite
d'Anne d'Autriche, mère de Louis XIV,
à la conduite que tint Blanche de Cas-
tille, mère de S. Louis , dans les pre-
miers jours du règne de son fils. Il
était impossible que les oppositions
formées sous le ministère de Richelieu
n'éclatassent point ; les Français n'ont
jamais supporté , sans impatience , le
joug de l'étranger ; une régente espa-
gnole et un premier ministre italien
rappelaient les temps malheureux de
Catherine et de Marie de Médicis: c'é-
tait assez pour les faire renaître. Quel-
ques opérations de finances , mal con-
duites par des Italiens , oflrii eut I'qc-
ANN 197
casion d'éclater ; et, dès-lors, commen-
cèrent les troubles et les guerres de la
fronde ; époque mémorable oi!i tous
les partis étaient unis par l'espoii- de
participer au gouvernement , aucun ,
par le désir d'y introduire des innova-
tions. Les princes et les grands pré-
tendaient revenir à l'ancienne monar-
chie ; la reine voulait la maintenir ce
que le cardinal de Richelieu l'avait
faite , et le parlement , qui venait d'ac-
corder la régence , se croyait de bonne
foi autorisé à régler les démarches du
conseil royal. Le peuple , dans cette
circonstance, comme dans toutes celles
où on le flatte , voyait des amis dans
ceux qui criaient contre les impôts ,
cî payait gaîment , pour renverser
Mazarin , beaucoup plus que ce mi-
nistre ne lui aurait jamais demand(-.
Que Mazarin triomp^iât , que ce fût
le grand Condé , ou même le cardinal
de Retz, l'établissement du pouvoir
absolu était inévitable ; car aucun chet"
ne pensait sérieusement à renverser,
l'ouvrage de Richelieu. C'est ce dont il-
faut bien se convaincre, pour com-
prendre toutes les ^ariations qu'il y
eut dans les partis , et pourquoi les
plus échauffés contre la cour lui re-
venaient , aussitôt qu'elle flattait louj-
ambition personnelle. Anne d' Autriche
se conduisit avec une fermeté, une
persévérance, qui lui font le plus grand
honneur, et qui lui méritèrent, jusqu'aii.
tombeau , la leconnaissance et l'amour
de Louis XIV. La vive douleur que ce
monarque montra en la perdant , ses
larmes , les lettres qu'il écrivit dans ce
triste moment, suffiraient pour venger
cette princesse des accusations portées,
contre elle, sousle règne de Louis Xlll,
et des bruits injurieux répandus sur sa
conduite, pendant les troubles civils.
En effet , on vit l'Espagne s'unir aux
factieux , correspondre avec le parle-
ment de Paris , pour accabler, cetic
iç)S ANN
reèrae reine qui avait ete accusée de
préférer les intérêts de l'Espagne à
la gloire de la Fiance. Elle parvint à
terminer la guerre civile sans faire
aucune concession , et remit , à son
fils majeur , un pouvoir qu'elle avait
accui en le défendant. Laissant la'ma-
gnifique église du Val - de - Grâce ,
comme tm monument digne d'attester
son goût pour les arts, aimée et res-
pectée de ses enfants , passant la plus
grande partie de ses journées en exer-
cice de piété, elle mourut d'un cancer,
le 20 janvier 1 666 , à l'âge de soixante-
quatre ans. On connaît la réponse
qu'elle fit au cardinal de Mazarin, qui,
cherchant à pénétrer ce qu'elle pen-
sait de l'amour que Louis XIV, dans
sa première jeunesse , avait conçu pour
une des nièces de ce ministre, a/ïèc-
tait de craindre an mariage ausssi dis-
proportionné : « Si le roi était capable
» de cette indignité, je me mettrais,
» avec mon second fils, à la tète do
» toute la nation , contre le roi et contre
» vous. » Cette princesse , si fière de
son rang , si ferme dans l'infortune ,
si résignée dans les douleurs qui pré-
cédèrent sa mort , était d'une délica-
tesse si recherchée sur tout ce qui tou-
chait à son corps , que le cardinal de
Mazarin lui disait : « Madame , si vous
» étiez damnée , votre enfer serait de
» coucher dans des draps de toile de
» Hollande.» Son portrait, gravé d'a-
iirès d'Egmont , fait partie de la col-
ection de M. Landon , que l'on peut
joindre h ce Dictionnaire. Elle aimait
passionnément les fleurs , et ne pou-
vait supporter la vue des roses , même
en peinture. Qu'Anne d'Autriche ait
été attaquée dans ses mœurs , pendant
les troubles de la fronde, cela se con-
çoit ; on sait que les guerres civiles
sont aussi fertiles en calomnies qu'eu
cruautés ; mais, lorsque sa vie entière
parle en sa faveur , et que l'histoire a
ANN
pris plaisir à la venger, qu'on ait va
des romanciers français répéter froi-
dement les injures des frondeurs , et
établir leurs calomnies sur des men-
songes aussi odieux , c'est ce qu'on
ne pouvait attendre que d'une époque
où toutes les convenances ont été ou-
bliées. Heureusement , dans les arts
qui dépendent de l'imagination , l'ou-
bli des convenances tient toujours à
l'absence du talent ; et les romanciers
dont nous parlons ne semblent avoir
écrit que pour confirmer la vérité de
cette observation. F — e.
ANNE DE iiOULEN. F. Boulen.
ANNE de Clèves , reine d'Angle-
terre ( f^oy. Henri VU! ).
ANNE, le dernier rejeton de l'in-
fortunée maison dé Stuart qui ait
occupé le trône de la Grande-Bre-
tagne : princesse d'un esprit médiocre,
et son règne a été l'un des plus féconds
efi grands événements; d'une bonté ex-
trême, et les circonstances l'ont entraî-
née à consommer la proscription de sa
famille , dont elle désirait la restaura-
tion. La princesse Anne naquit, le 6
février 1664, à Twickenham , près
de Londres. On y montre encore
aujourd'hui, avec respect, le château ,
la chambre et le lit où la bonne reine
Anne reçut le jour. Son oncle, Char-
les 11, était remonté, depuis quatre
ans , sur le trône sanglant du malheu-
reux Charles 1' ^ , et elle était la se-
conde fille issue du premier mariage
de Jacques 11 , alors dur d'York, avec
Anne Hvde, fille de l'illustre Claren-
diin. Son père, n'ayant ])oint encore ,
à cette époque , abjuré le protestan-
tisme pour rentrer dans le sein de
l'église romaine, Anne fut élevée dans
la religion anglicane , et , après avoir
perdu sa mère en iC)-^ i , elle fut ma-
riée en i685, par l'évêque de Lon-
dres, au prince George, fièredii roi
de Danemarck, Cbrisliin V. Lors-
ANT^
qu'en 1688, le parti qui appelait le
prince d'Orange à détrôner son beau-
père , eut prévalu , Anne , fille favo-
rite de l'infortune Jacques II , eût
])lut6t désiré de rester attachée à son
père. Le lord Churchill , qui , par sa
femme , la dominait déjà , l'entraîna
'lins le parti du vainqueur, la fit à
J1CU près enlever par l'évêque de
l^ondres, et conduire à Northamp-
ton , où , sous prétexte de lui donner
des gardes, on l'environna d'une ar-
mée. Le prince de Danemarck son
époux l'avait précédée. Celui-là était
un personnage si nul , que sa fuite
avait paru plus ridicule que sinistre
à Jacques II. Resté d'abord auprès
de son beau-père pendant les premiers
jours de la crise , il n'avait su faire
autre chose , à la nouvelle de chaque
désertion, que répéter ce cri mono-
tone : Est-il possible? Lorsqu'il eut
déserté lui-même , le malheureux roi ,
encore accessible à une idée de plai-
santerie, dit à ceuxqui l'environnaient :
« Eh bien! Est il possible s'est donc
<'n alléaussi ? » Mais en recevant la let-
tre par laquelle Anne, cette fille chérie,
lui annonçait sa défection , le malheu-
reux père , plus sensible à cet aban-
don qu'à l'usurpation de sa fille aînée ,
s'écria , fondant en larmes : « 0 mon
» Dieu ! ayez pitié de moi. Voilà que
1) mes propres enfants m'ont trahi î »
Cependant, le sombre Guillaume III,
après avoir d'abord témoigné beau-
coup d'égards a la princesse Anne ,
après avoir élevé lord Churchill à la
dignité de comte de MarlborougU ,
en le faisant meraljre de son conseil
privé , et gentilhomme de sa chambre,
ne tarda pas à concevoir des soup-
çons , et sur la fille qui avait aban-
donné son père , et sur le favori qui
avait trahi son bienfaiteur. Il offensa
la princesse , jusqu'à lui ôter sa garde
purement honorifique. Le comte se
ANN TO^
vit subitement privé de ses emplois '
puis enfermé à la tour , comme pré"
venu du crime de lèze-majesté , et i^
n'en sortit que parce qu'on ne trouva
pas de preuves à établir contre lui.
Alors Anne écrivit à son pèr€ des let-
tres de repentir et de soumission
( 1691 et 92 ). Une mort prématurée
enleva la reine Marie , épouse df
Guillaume ( i6(;4 )• Celui-ci, priAC
d'un tel soutien , crut de son intérêt
de se rapprocher de sa bellc-scein- ,
désignée par le parlement pour lui
succéder, et qui , dans son fils le duc
de Glocester, présentait aux Anglais
un héritier présomptif du sang de
leurs anciens monarques. Mariborough
l'ut rappelé au conseil , et , avec les
expressions les plus caressantes ,
nommé gouverneur de ce jeune du«;
de Glocester. Le duc mourut dans
la fleur de son adolescence ( 1699) ;
la santé du roi Guillaume devint
chancelante ; la princesse Anne ^ se
voyant si près de la couronne , et
sans héritier direct , fit demander se-
crètement à son père la permission de
monter sur le trône , avec le projet
d'y étabhr après elle son frère, connu
depuis sous le nom de Jacques III,
ou du Chevalier de St.-George. In-
flexible dans ses principes, Jacques If
répondit « qu'il savait subir l'injus-
tice , mais non l'autoriser ; que c'é-
tait à lui qu'appartenait la couronne,
et, après lui, au prince de Galles sou
fils. » Jacques II mourut ( 19 sep-
tembre 17 01 ) ; Guillaume 111 le sui-
vit de près dans le tombeau ( 1 9 mars
1703); Anne fut proclamée reine, et
gouverna, sous l'empire de la comtesse
et du comte de Mariborough , qui as-
socièrent successivement à leur pou -
voir leurs deux gendres , lord Godol-
phin , avec le titre de grand-trésorier ,
et, avec celui de secrétaire-d'état, lord
Sunderland, fils de ce ministre de
200 A jS N
Jacques II , qui avait trame la perte
de son maÎLre , qui , depuis , avait
conjure coutre le roi Guillaume , et
qui , à la honte de la politique , avait
e'tc' surnomme' le grand politique.
Tous les partis semblèrent rivaliser
à qui accueilieiait le plus cordiale-
ment leur nouvelle souveraine. Les
Torys se plaisaient à contempler le
sceptre dans les mains d'une fille de
Jacques II , et , un peu plus tôt , ou
un peu plus tard , vovaient déjà l'an-
cienne dynastie rappelée dans sa ligne
masculine. LesWhigs, quoique promp-
tement menaces de voir leurs rivaux
partager, pour le moins, les places du
ministère, ne pouvaient qu'applaudir
à l'imitatrice de Guillaurue III , qui
jurait , en montant sur le trône , de
rester fidèle aux plans de son prédé-
cesseur , d'adhérer plus fortement (jue
jamais à la tri])le alliance , de défen-
dre les libertés de l'Europe contre
l'ambition de Louis XIV ; enfin , de
ne pas souffrir, dans la même mai-
son , l'union des deux couronnes de
France et d'Espagne. Le même jour
( 4 mai 1 702 ), l'Angleterre , la Hol-
lande , et l'empereur d'Allemagne , dé-
clarèrent la guerre à la France. Le
prince Eugène commanda les troupes
de Léopold ; Mariborough , généra-
lissime des Anglais , le fut aussi des
alliés , et l'on Ait s'engager cette fa-
meuse lutte connue sous le nom de
guerre de la succession j où il s'agis-
sait , ])our ainsi dire , du partage de
toute l'Europe et de sos colonies. Dans
les premières campagnes , les succès
furent balancés. Les Français per-
dirent plus de places, et triomphèrent
plus souvent en bataille rangée ; mais,
les années qui suivirent , les victoires
cl les conquêtes prodigieuses tantôt
du comte , devenu duc de Maribo-
rough , tantôt du prince Eugène, et
sou\ent de tous deux réunis, les jour-
ANN
nées deHochstet, deRaraillies, d'Ôu-
denarde , de Malplaquet , rejetèrent
d'abord les troupes françaises, du Da-
nube, par-delà le Rhin, puis envoyè-
rent la terreur jusque sur les bords de
la Seine , remplirent la France de
deuil comme de crainte , et réjiau-
dirent, sur les armées de terre bri-
tanniques , nn éclat qu'elles n'avaient
poiuteu depuis les jours d'Edouard III
et du prince Noir. Ce fut , au muins
pour l'Angleterre , un éclat stérile. Les
alliés abusèrent de leur fortune , et
elle leur échappa. En Espagne , les
succès éphémères du comte de Peters-
borough et de l'archiduc Charles dis-
parurent sous les désastres qui acca-
blèrent lord Galiwai. Berwick,\ eu-
dôme , Noailles , le duc d'Orléans ,
maintinrent , sur son nouveau trône ,
le petit-fils de Louis XIV. La con-
quête de Lille ne valut pas plus de
gloire au prince Euaène , que sa dé-
fense au maréchal de Boufflcrs , et
la terrible bataille de Malplaquet ho-
nora autant la valeur des vaincus que
le talent des vainqueurs. Circonstance
bizarre , et qui caractérise les temps
de révolution : Jacques 111, dans
cette bataille , chargea douze fois , à
la tête de la cavalerie française, l'ar-
mée de sa sœur Anne , conduite par
Mai Iborough , créature de leur père
commun , et qui , selon ses intérêts ,
son ambition , ses déplaisirs du mo-
ment, tour à tour bannissait, rappe-
lait , repoussait les Stuarts. Vint la
journée où le maréchal de Villars re-
leva la France à Denain ( '^4 juillet
i-jis). Louis XIV, dont les offres
pacifiques , dont les pénibles sacri-
fices avaient été rcjetés avec insolence
à Gertruidemberg , força le congrès
d'Utrecht à signer les conditions ho-
norables qu'il était déterminé à obte-
nir , et put encore humilier ses enne-
mis , qu'il avait su diviser. Enfin , ce
ANN
grand duc de Marlborougli , après
avoir enivré d'orgiieil sa nalion , qui
Je lui avait aljondamment rendu , après
s'èti-e vu , pendant huit années , l'ululé
de la reine, du parlement, du peuple
d'Angleterre, futaccusé d'avoir sacrifié
le repos , les trésors et le sang des peu-
ples à sou ambition et à son avarice ;
d'avoir fait , de la guerre et de ses em-
plois , un barbare et honteux trafic. La
nation le maudit, la chambre des com-
munes le dénonça, la reine le destitua
de tous ses emplois, même avant la fin
de la guerre; et , suivi de sa femme
hautaine, qui, après avoir contribué
à sa disgrâce, fut, au moins, fidèle
à son malheur , il alla , pendant les
dernières années de ce règne, ense-
velir dans l'exil une vie signalée par de
grands talents , et d'aussi grands vices.
La conquête , vraiment importante , et
immensément utile, que fit alors l'An-
gleterre, ce fut celle de (Gibraltar, era-
portépar une valeur surnaturelle, pour
être à jamais retenu par unr^ ptilitique
liabile , et cependant , lorsqu'il fut pro-
posé, dans la chambre des communes ,
de remercier sir George Rooke et le
prince de Hesse , auxquels on devait
cette espèce de prodige, le parti Whig,
qui dominait encore , fit décider que
l'objet n'en valait pas la peine ; tandis
que les honneurs, les hommages et
les dons de toute espèce pleuvaient sur
le duc de Marlborough. Au dedans , le
grand acte politique du gouvernement
de la reine Anne, fut l'union de l'An-
gleterre et de l'Ecosse en un seul royau-
me , appelé désormais la Grande-
Bretagne. Chaque pays conserva ses
lois religieuses et civiles, son église,
ses tribunaux : l'existence politique et
les intérêts commerciaux furent con-
fondus , et il n'y eut plus qu'un seul
parlement britannique, où l'Ecosse
fut représentée par seize de ses lords
et quarante-cinq députés de ses com-
ANN 201
munes , tous librement élus par leurs
pairs. Ce projet, ardemment désiré et
vainement tenté par Jacques l*""., Char-
les II, Guillaume III , fut un grand et
incontestable bienfait du parti Whig.
Ce fut aussi une victoire diflicile rem-
portée sur les préjuges nationaux de
l'un et de l'autre peuple, et sur l'op-
position exaltée du parti Torv, dont
l'esprit commençait à gagner la majo-
rité des deux nations. Un des plus
puissants motifs de cette opposition ,
était l'intérêt jacobite , dont il est pi-
quant de suivre la marche , plus ou
moins sourde , à travers tous les évc •
nements de ce règne. Lors de l'acces-
sion de la reine Anne, Jacques 111 ,
plus condescendant que son père , avait
déclaré à sa sœur que, si elle voulait
occuper le trône pendant sa vie, et l'y
faire monter après elle , plutôt que d'y
établir une famille étrangère , il serait
pleinement satisfait. La reine avait
prêté l'oreille à celte proposition. Alors
les Jacobites , enhardis, allèrent plus
loin. Ils demandèrent que la reine
gardât pour elle la couronne d'Angle-
terre , et remît immédiatement celle
d'Ecosse à son frère , infiniment plus
jeune , sur la tête duquel les deux se
réuniraient un jour. Anne reçut cette
nouvelle ouverture sans témoigner ni
répugnance ni approbation ; mais son
silence en disait assez. Les faits ont
parlé plus clairement encore. A ne
considérer que l'empn ssement extrê-
me qu'elle mit à opérer cette réunion
des deux rovaumes , et Tardeur qu'elle
apporta ensuite à se composer un mi-
nistère Torv, ou peut assurer aujour-
d'hui que la rcme Anne , nourrissant
dès cette époque le désir de trans-
mettre un jour ses trois couronnes à
son frère, ne voulait cependant en
céder aucune tant qu'elle vivrait. Les
W hi2,s , de leur côté , en secondant
ses yifetix pour réunir l'Angleterrp et
302 A N N
l'Ecosse , n'oublièrent pas les leurs
pour la successiou bauovriennc. Le
premier article du traite' d'union sti-
pula que , si la reine mourait sans
enfants , l'héritage de la couronne
britannique serait dévolu à la ligne
protestante de la descendance des
Stuarts, c'esl-à-dire , à la princesse So-
phie , électrice douairière de Hanovre,
petite-fille de Jacques 1*^. , parla prin-
cesse Elisabeth , mariée à l'électeur
palatin , et qui , dans l'ordre de pri-
mogcniture, n'était pas la 45''. appe-
lée à cette grande succession. Jac-
ques III , écarté par cet acte solennel,
tenta , mais inutilement , une des-
cente en Ecosse ; la bonne reine
Anne signa une proclamation où elle
mettait a prix la tête de son frère. Il
est vrai que, quand on fit le procès
aux chefs de la conjuration, il ne se
trouva do preuves <{ue contre un seul ,
et cet unique condamné avait disparu
le jour où l'on voulut exécuter le ju-
gement. Veuve à quarante-quatre ans,
sans que, de dix-sept grossesses plus
ou moins heureuses, elle eût conservé
\m seul enfant, Anne se vit supplier,
par les deux chambres du pailemcnt,
de contracter un nouveau mariage.
Soit qu'elle n'eut pas une conGancc
égale dans sa fécondité , soit qu'elle
ne voulut pas risquer de créer im
obstacle de plus à la rcstauratiun
(le son frère et de sa famille , elle
se refusa au vœn du parlement, et
elle ne songea ))lus qu';; mettre le gou-
vernement tout entier dans la main des
Torys, qu'appelait alors la disposition
universelle des trois royaumes. Le [pre-
mier signal de ce grand changement
fut le procès du docteur Sache verel,
dénoncé , par les communes , pour
avoir prêché le droit divin des rois et
l'obéissance passive dos sujets; protégé
secrètement par la cour, mais si hau-
tement défendu par le peuple de la
A N'N
capitale et des grandes villes ; si dou-
cement puni après avoir été si violem-
ment accusé , qu'on peut dire que ce
sermon et ce procès révélèrent à la
reiîie le secret de ses forces , qu'elle
n'avait pas encore mesurées. Elle ne
tarda jias à s'en servir. Ce fut alors
que la duchesse de Marlborough , qui ,
par sa tyrannie et son arrogance, avait
mis dans le cœur de sa maîtresse l'a-
version à la place de l'engouement,
se vit supplanter par une de ses pa-
rentes qu'elle-même avait introduite k
la cour , Elisabeth Masham , aussi
respectueuse, aussi habile à flatter les
penchants de sa souveraine, que la
duchesse s'était montrée brusque , dé-
daigneuse , contrariante. Godolphin,
Snnderland , Sommers , Dévonshire,
Walpole, furent remplacés par Harley,
créé bientôt comte d'Oxf rd ; St.-Jean,
qui a été le fameux lord Bt^Iingbrokc y
liochester, Buckingam et George Gran-
ville ; le chevalier Simon Harcourt,
qui avait ])laidé pour Sacheverel ,
fut élevé à la dignité de grand chan-
celier , au lieu de lord (jovvper. De
tout ce gouvernement Whig, naguère
si puissant, il ne restait plus qu'une
chambre des communes désavouée
par le pc\iple , une guerre dont les
triomphes étaient oubliés , mais dont
" le poids était senti ; et l'autorité du
duc de Marlborough encore existante
à la tête des armées , mais menacée
d'une chute inévitable dans l'intérieur
de sou pays. Une proclamation royale
cassa le parlement. Le peuple députa
autant de Torys à la nouvelle chambre
des communes, qu'il avait envoyé de
Whigs à la chambre dissoute. La reine
créa douze pairs <i la fois, pour assurer
la même supériorité au même parti
dans la chambre haute. Le premier
acte du nouveau sénat fut une adresse
à la reine pour la supplier de con-
fondre toutes les mesures et toutes
ANN
les doctrines réoeraïuent hasardées
contre sa couronne et sa dignité' royale.
I.a paix fut résolue. Il fallait écarter
rhomnte incompatible avec elle : ce
fut le moment de l'accusation , de
la destitution , de l'exil du duc de
IMarlborough. Prier , illustre comme
poète , distmgue' comme homme d'é-
tat , fit un premier voyage en France
j;our y poser les fondements d'un
traité séparé, si les alliés des An-
glais persistaient à vouloir la prolon-
gation de la guerre. Il y retourna bien-
tôt , avec le vicomte de Bolingbroke ,
chargé d'y conclure définitivement un
double traité de paix et de commerce.
D'un autre côté , l'évéquc de Bristol et
le comte de Straffbrd allèrent notifier
à la Haye l'irrévocable résolution de
la reine. Enfin , malgré le duc de
Marlborough et le prince Eugène, mal-
gré les États-généraux des Provinces-
Unies et le conseil de l'empereur d'Al-
lemagne , les peuples respirèrent. La
fameuse paix. d'Utrccht fut signée ( 1 1
avril 1715) par toutes les puissances ,
à l'exception de l'empereur , qui de-
vait bientôt se voir forcé d'y accéder
lui-même. Tels sont les mvstèrcs et
les jeux de la poHtique, que, dans le
fiaiié, la reine Anne faisait stipuler
l'expulsion de son frère Jacqu s III
hors de France, et la transmission de
sa couronne, après elle, à la maison
de Hanovre , tandis qu'elle attendait
précisément, de ce traité, le repos et les
mesures nécessaires pour assurer son
bel itage à ce même frère, qui , de son
côté, prolestait formellement contre
toutes ces stipulations. Les Whigs ,
'a l'affût de tout ce qui pouvait rendre
l'existence à leur pouvoir , ne s'éle-
vèrent pas seulement avec force contre
la paix qui venait d'être signée , et
contre l'énorme disproportion qu'ils y
trouvaient entre les avantages stipulés
pour l'Angleterre, et le prix dont elle
ANN 20^
lés avait achete's. Cet argument , pré-
senté seul , eût pu , dans l'espèce par-
ticulière, être vivement rétorqué par
les accusés contre les accusateurs; et,
en thèse générale, combien y a-t-ilde
guerres où les victoires et les conquêtes
vaillent le sang, les trésors , et tous les
malheurs qu'elles ont coûtés ? Mais
les chefs du parti crurent avoir démêlé
les intentions secrètes de la reine en
faveur du prétendant , et l'ouverture
du parlement de 1 - 1 4 se ressentit dv>
impressions qu'ils avaient su répandre.
On mit en question, dans la chambre
haute , si le droit de succession de
la maison de Hanovre n était pas en
danger sous le gouvemement de la
reine? La majorité décida que le dan-
ger n^ existait pas , précisément parce
que beaucoup y croyaient et l'appe-
laient; maié , sur une nouvelle motion
des Whigs, cette même majuritc n'osa
se refuser à supplier la rcme de mettre
à prix, pour la seconde fois , la tête
de son frère. Anne résista. Le parti
opposé à la cour vota que le succes-
seur désigné de la reine fût imnté
à iienir en Angleterre veiller sur
son héritage : Anne écrivit à la prin-
cesse Sophie et au prince électoral ,
et elle sut les détourner d'un vovagc
qu'elle leur présenta comme le signal
d'une guerre civile. 11 est même incer-
tain si la princesse Sophie , pctite-
fîile , par sa mère , de Jacques I' '. , nr
préférait pas en secret la restauration
de son cousin Stuart à l'élévation de
son fils Brunswick. Tout à coup , vint
se montrer publiquement, à Londres,
lin envové de la reine douairière de
Jacques II , répétant treize années d'un
douaire de 5o,ooo hv. sterl. , que le
roi Guillaume s'était engage à lui payer
par un article secret du traité de bis-
Avick. Les Whigs crièrent plus fort
que jamais. Anne, pour les apaiser
ou les tromper , consentit à la procla-.
2o4 A N N
mation qu'ils lui ledcinandîrcrit en-
core. Elle cliercha seulement à eu
adoucir les expressions , en promet-
tant une récompense de 5,ooo liv.
sterl. à quiconque amènerait devant
lin juge de paix le ci-devant appelé
prince de Galles , qui se disait au-
jourd'hui j-oi d^ Angleterre , en cas
qu'il débarquât dans la Grande-
Bretagne ou dans V Irlande. Des
mémoires secrels , connus de l'au-
teur de cet article, l'autorisent à croire
que Jacques 111 débarquait secrète-
ment à Londres , pour y voir sa
sœur, dans le temps même où elle
lui défendait d'aborder en Anp,leterie,
sons ])eine de s'y voir hors de la loi.
Le frère et la sœur eussent peut-être
triomphe de l'opposition desWhi^s;
mais 1.1 discorde se mit parmi les To-
rys , et jusque dans le sein du minis-
tère. Oxford et Bolin£;bruke devinrent
irréconciliables. I.e premier accusa le
second de vouloir remettre le préten-
dant sur le trône , et devint tout à
coup ardent pour la li£;ne de Hanovre.
La reine, désespérée de celte division
entre des serviteurs sur l'union des-
quels reposaient toutes ses espérances ,
répéta plusieurs fois quelle n'j sur-
vivrait pas. Fatiguée des adresses du
parlement , que les Whij^s du dehors
tiouvaient moyen dedominer , elle ve-
nait de le proroger pour un mois , le
20 juillet 1 7 1 4^ lorsqu'elle tomba dans
un état de faiblesse et de léthargie qui
la mit au tombeau , le \i août suivant ,
n'étant âgée que de quarante-neuf ans ,
et dans le treizième de son règne.
Elle avait laissé échapper, dans son der-
nier jour, ce mot qui révélait le secret
de toute sa vie : « Ah ! mon cher frère,
que je vous plains I » Aussitôt qu'elle
eut rendu le dernier soupir, le conseil
privé s'assembla; un envoyé de l'élec-
teur de Hanovre ( l'électrice douai-
rière était morte depuis deux mois)^
A N N
y parut portant les ordres, et annoH-
çaut l'arrivée de son maître. Les clieJ'5
de l'aristocratie Whig, rasseudilés eu
un faisceau , se trouvèrent investis
de la régence ; les espérances de Jac-
ques m , errant et proscrit, les pro-
jets de ses partisans nombreux, mais
épars , s'évanouirent ; et la maison de
Ijruuswick se vit établie sur ce troue,
où la reine défunte l'avait si souvent
appelée avec tant de désir de l'en éloi-
gner ; étrange destinée, qui, consa-
crant tous les actes oftlciels de celte
piincesse, et frustrant toutes ses in-
tentions secrètes , lui composa nue
vie aussi triste que scn règne était
beau ( V. GEORCt 1' '^. ). Le règne de
la reine Anne n'est ])as moins célèbre
en Angleterre par l'éclat qu'y jeta l.i
littérature , que pai- la gloire des armes
et l'importance des transactions poli-
tiques. Jusqu'alors des hommes de
génie, tels que Shakspeare, Drydeu ,
Milton, etc., y avaient paru; mais les
lettres n'avaient jamais été cultivc-es à
la fois par un si grand nombre d'écri-
vains supérieurs. C'est sous ce règne
que vécurent , outre Prior, dont on a
parlé, Pope, Swift, Addison , Con-
grève, Parncll , Gay , Rowe, 8teele ,
Arbuthnot , Young , Thomson, lady
INIcntague , et plusieurs antres , dont
les productions rendirent cette époque
presque aussi brillante pour l'Angle-
terre , que le siècle de Louis XIV
venait de l'être pour la France. Les
progrès de cette éloquence parlemen-
taire , qui depuis, même hors des î!es
Britanniques, a tant excité lintérèldcs
nations et des souverains , se firent
aussi remarquer dans les discours d'un
duc d'Hamdfon , d'un marquis de
Tweddale , d'un lord Belhaven. d'un
lord Havcrsham , du fameux lord Bo-
lingbroke, du chevalier Parker, etc.
L_T— L.
ANNE - IWANOWNA , inipcra-
ANN
trice de Russie , naquit en 1690. Elle
était fiile d'hvan , frèie aîné' de Pierre-
le-Gfand, et de Prascovie Soltikoft'.
IMaiiée au duc de Courlande, veuve,
et sans enfants , elle monta sur le
trône des czars , eu 1750, à la fa-
veur d'une intrigue qui me'rite d'être
expliquée. Pierre II , fils de l'infor-
lunë czarovvitz Alexis, venait de fer-
mer les yeux à l'âge de seize ans : les
jeunes princes , Iwan et Basile Dolgo-
rouky, après avoir arrache' l'einpire
au fameux Menlzicoff", l'avaient gou-
verne , sous la direction du vieux
chancelier Ostcrraann. Celui-ci, se
flattant de conserver son crédit sous
le règne d'une princesse à laquelle il
avait donné les premières leçons de
lecture, se servit de toute l'influence
de son ministère pour engager le sé-
nat , les grands , les boyards , rassem-
blés à Moscou , dans le palais du
Kremlin , à déférer l'empire à la du-
chesse de Courlande. Anne fut donc
préférée aux deux filles de Pierre-le-
Grand ( Foy. ci-après ) , et le prince
Basile Dolgorouky fut chargé de lui
porter le choix de la nation. On as-
sure qu'en entrant clicz la nouvelle
impératrice , le prince aperçut auprès
d'elle un homme , ass(z mal vêtu , à
qui il fit signe de se retirer. Cet homme
ne paraissant pas pressé d'obéir, Dol-
gorouky le prit par le bras pour le
mettre à la porte. Anne l'arrèla. Cet
homme , que les Dolgoroukv appri-
rent bientôt à connaître, était Ernest-
Jean de Biren , qui vint gouverner
la Russie , à la suite de sa maître>^.se.
Anne , qui avait promis d'abord d'é-
carter son favori , et de modifier la
puissance absolue des czars , à peine
montée sur le trône, dédaigna ce dou-
ble engagement, et, par les conseils
du prince Troubetzkoï , se fit recon-
naître autocratrice de tous les Russics.
Aiors Bircu ne mit plus de borues à
ANN 2o3
ses fureui-s et à son ambition. Les Dol-
gorouky furent ses premières vic-
times. Exilés en Sibérie , où ils purent
rencontrer Menlzicoff, qu'ils y avaient
envoyé , ce supplice parut encore trop
doux à leur implacable ennemi. Bircu
les fit rappeler. Deux de ces princes
périrent sur la roue , deux autres fu-
rent écartelés , trois eurent la tèîe
tranchée; le reste de la famille, dé-
pouillé de tous ses biens , fut relé-
gué loin de Moscou. Presque tous
leurs amis tombèrent sous la haclic
des bourreaux , ou furent traînés dans
les déserts de la Sibérie. Biren- fit pé-
rir dans les supplices près de i '.1,000
personnes , et en exila plus de ^0,000.
On prétend que l'impératrice se jeta
plusieurs fuis à ses genoux, et pro-
digua vainement les larmes et les
prières pour l'adoucir. Elle l'avait fait
nommer duc de Courlande, maigre i.i
résistance de la noblesse, qui, peu
d'années auparavant , avait refusé de
le reconnaître pour simple gentil-
homme. Au reste, si, pendant les dix
années que régna sa maîtresse , il rem-
plit la cour de deuil et de terreur, il
faut avouer aussi qu'il étendit et fit
respecter au-dehors la puissance de la
Russie. Anne plaça l'électeur de Saxe,
Auguste III, sur le trône de Pologne, et
contraignit le sage Stanislas Leckzinsky
à renoncer , pour la seconde fois , à la
dangereuse préférence que les Polo-
nais lui avaient accordée. Ses armées,
commandées par le célèbre Munich ,
secoururent l'empereur Charles TI ^
vainquirent les Turks , et dispersè-
rent les Tatars de Crimée. Biren con-
serva le pouvoir , dont il abusait avec
tant d'audace , jusqu'aux derniers mo-
ments de sa souveraine : en mourant
elle le nomma re; < ut de l'empire ,
pendant l'enfance du prince Iwan ( de
Brunsv^'ick ) ; mais les dernières vo-
lontés de cette princesse, faible et ti-
5n6 A N N
înide,ue furent pas plus respectées
que celles de tant d'autres monarques
^qui ont occupé le trône avec plus de
À'igueur et de gloire. ( V. Brunswick
Bkvern , BiREN , Munich , Oster-
MANN , etc. ). Anne mourut le 28 oc-
tobre \^[\o ^'d,\k^& de quarante-sept
ans. E— -D.
ANiNE-PÉTROWNA , fîUeaîuee de
Pierre-le-Grand , et de Catherine I '"''.,
naquit en 1706, et iut mariée , en
17 '25 , à Cliarles-Frédéric , duc de
Holstein - Gottorp. Elle jouit peu du
bonheur qu'elle avait trouve' loin de
la cour de Pétersbourg, alors si fé-
conde en révolutions ; la duchesse de
Holstein , également distinguée par
son esprit et par sa beauté, mourut ,
en 1 7 28 , à l'âge de vingt-deux ans ,
laissant un fils unique , qui fut ensuite
l'infortuné Pierre III. La mère, ap-
pelée en Russie après la mort de Ca-
Uierine l". , n'avait assisté qu'une
seule fois au conseil de régence, le
prince MentzicotT, maître de l'empire
sous un monarque enfant, l'avant for-
, cée de se retirer à Kiel. Le fils , ap-
pelé au trône ]iar le vœu de sa tante ,
l'impcralrice Elisabeth, en fut préci-
pité , après un règne de six mois ,
par une catastrophe bien plus funeste.
eA'qr. Pierre lil). E— u.
AiNNE de Hongrie, fdle de Ladis-
las VI , roi de Pologne , et sœur de
Louis 11, roi de Hongrie, fut inie
d(!S plus belles f;'iunh?s de son temps.
Elle porta la couronne de Hongrie et
de Bohème à son époux , Ferdinand
d'Autriche, et le fit sacrer à Albe-
Royale , en i5'i7. Deux ans apiès ,
celte princesse donna Texeraple d'un
raTc courage , pendant le siège de
Vienne, ])ar Soliman, empereur des
Turks , et par Jean Zopolya , vav-
vode de Transylvanie , qui , après
s'être fait couronner roi de Hongrie ,
s'c'tait mis sous la pcotectiou de Soli-
A N N
tnan, Anne de Hongrie contribua
puissamment à la défense de Vienne.
En 1 538 , les deux concurrents se
partagèrent la Hongrie; ainsi, l'avé-
nement de la maison d'Autriche à la
couronne de Hongrie , date de ceîle
époque. Depuis lors , la Hongrie est
2)iutôt considérée comme faisant par-
tie d'une autre puissance, >pie comme
une souveraineté indépendante. Anne
mourut à Prague, le 27 janvier 1 547.
Marie de Médicis et Anne d'Autriche
étaient ses petites-filles. B — p.
ANNE, dernier rejeton de la se-
conde race des dauphins de Viennois,
de la maison de Bourgogne, et restée
seule héritière du Dauphiné. Elle eut
pour père Guigues VI , descendant
au dixième degré de Hugues Capet, et
pour mère, Béati'ix de Savoie, fille
de Pierre, comte de Savoie, et d'Agnès
de Faucigny , nièce du roi S. Louis.
Du mariage de Guigues et de Béatrix
étaient sortis deux fils et deux filles :
i". Jean, qui fut dauphin après son
père, et mourut, à vingt ans, d'une
chute de cheval , sans laisser aucun
enfant de son mariage avec Bonne de
Savoie ; 2". André , mort avant son
frère, sans avoir été marié; 5". Ca-
therine, enlevée par un trépas éga-
lement prématuré; et 4'^. AN>E,qui,
survivant seule à toute sa famille, eu
recueillit tous les droits en 1282. Elle
fut menacée de s'y voir troublée par son
parent Robert, duc de Bourgogne, (pii
j)rélendit que le Dauphiné était un fief
masculin , et qui s'en fit invesfir par
l'empereur Rodolphe. Mais , par un
bonheur singulier , Robert avait été
tuteur de la dauphiné , avant de pou-
voir songer à se porter pour son rival ,
et, dès l'année ia75 , il lui avait mé-
nagé un puissant défenseur contre son
agression de 1 •182, en lui faisant épou-
ser Humbert do la Tour-du-Pin , pos-
sesseiu" de yasles domaines dans le
A N N
Dauphlné , issu des anciens comtes
d'Auvergne , et déjà uni par alliance à
la maison del])hinale , puisque , par sa
mère Béatris de Coliguy , il était petit-
fils de la daupbiue Eéatrix. Elevé'
d'ailleurs à la cour de Philippe-le-Har-
di , engage' d'abord dans l'e'tat ecclé-
siastique , mais sécularise lorsque, par
la mort de son frère Albert IV, il était
devenu le chef et riuiiquc espoir de
sa maison , Hurabert de la ïour-du-
Pin s'était bientôt montre' un des plus
vaillants chevaliers de son temps. Il
avait été' récemment en Sicile avec
Pierre , comte d'Alençon, Robertd'Ar-
tois , et plusiems autres princes ou
seigneurs, pour tirer vengeance de cet
horrible massacre des Français , connu
sous le nom de J^éyres siciliennes.
Il lit dans cette nouvelle et importante
circonstance tout ce qu'où pouvait
attendre de lui, et parut également
digne de protéger et de partager le
trône delà dauphine. Le courage d'es-
piit qui distinguait éminemment cette
princesse seconda la valeur brillante
de son époux. Le duc Robert , le comte
de Savoie , l'empereur Rodolphe lui-
même , furent réprimés dans leurs
entreprises. Le souverain pontife, les
rois de France et d'Angleterre , inter-
vinrent eillcacement dans la querelki,
comme médiateurs. La succession à la
souveraineté du Dauphiué fut solen-
nellement établie et reconnue dans la
nouvelle dynastie qui venait de naître.
Les bai-onies de la Tour et de Coligny,
tous les domaines qu'avait apportés
Humbert de la ïuur-du-Pin, furent
affranchis de l'hommage dont plusieurs
avaient été tenus jusque-là envers la
maison de Savoie. La dauphine qui,
dès le premier jour de son avènement
au trône delphinal , avait voulu que son
époux exerçât tous les droits et prît
tous les litres de la souveraineté , se
bâla d'y asseoir leur fds aîaé^ aussitôt
ANN 20-J
qu'il fut en âge d'émancipation, et lou
vit tous les actes de gouvernement et de
justice , porter en tète : Nous Hum-
bert dauphin , comte de Fienne et
d'Albon , seigneur de la Tour ;
Anne dauphine^ sa compagfie , com-
tesse des susdits comtés et dame de
la Tour; Jean , leur fds , prince del-
phinal, comte d'Embrun et de Fa-
ïence, etc. Le règne de ces bons et
vertueux époux dura peu , et parut
d'autant plus coiu't, que leur union fat
constamment heureuse pour eux , leur
famille et leurs peuples. L'amour, la
gloire et la politique resserraient leurs
nœuds' chaque jour. Quatre fils et
quatre filles en étaient les fruits. Tran-
quilles au dehors , adorés dans l'in-
térieur de leurs états, le dauphin el la
dauphine s'occupaient de f jndatious
pieuses, d'établissements salutaires , de
sages règlements , lorsqu'en i ic)i^ la
mort vint frapper Anne au mi ieu de sa
carrière , dans la plénitude de son bon*
heur, et dans l'exercice de toutes ses
vertus. La désolation fut générale parmi
tous ses sujets. Son époux inconsolable
l'accompagna jusqu'à son tombeau
dans l'église des Chartreuses de Sa-
leltc , qu'elle avait fondée ; alla s'ense-
velh' lui-même dans la chartreuse du
Val de Ste.-Marie, oii il lui survécut
huit ans ]>our la pleurer; et ce fils
aîné , qu'ils avaient associé au gou-
vernement, leur succéda i P'. Hum-
BEUT ^^ et Jean II). L— T— l.
ANJN F de Chipre , duehesse de
Savoie, fille de Janus, roi de Chipre
et de Jérusalem , fut promise , en
i45j , à Araédée de Savoie, fils d'A-
médée V III ; mais ce prince étant
mort avant que cette alhance eût été
conclue, les ambassadeurs du duc de
Savoie demandèrent la main de ta
jeune princesse de Chipre pour Louis
de Savoie, comte de Genève, second
fils d'Amédec YiU, Le roiyconsea-
2o8 A N N
tit , et Anne de Chypre , dont Olivier
de La Marche parle comme d'une des
plus belles princesses de son temps ,
eut en dot cent mille e'eus d'or de
Venise : le duc Amëdëe lui assigna
cent mille écus de douaire. Ce ma-
nae,e fut célébré en i455, à Cham-
béry, avec beaucoup de magnificence.
Anne, par son esprit et les grâces de
sa figure , prit un tel ascendant sur
les volontés de son époux , que, lors-
qu'il parvint à la couronne, eu 1 4 J i ,
elle disposa entièrement des charges ,
des honneurs et des finances. Anne
n'avait pas assez de fermeté et de lu-
mières pour tenir seule les l'ênes du
gouvernement. Sous son règne, les
Cypriotes jouirent de toutes les fa-
veurs , et obtinrent les charges les
plus importantes; et cette préférence
excita beaucoup de mécontentement.
Anne se servit aussi de son pouvoir
pour faire des fondations pieuses, et
créer des élabUssements utiles. Elle
mourut à Genève , le 9,0 janvier 1 465 ,
deux ans avant le due son époux,
dont elle avait eu quatorze enfants ,
dont huit princes et six princesses.
Anne de Chypre se fit inhumer , selon
l'usage de son siècle, vêtue de l'habit
de S. François , dans l'église des cor-
dehersde Genève qu'elle avait fondée.
B— p.
ANNE DE FEHRARE. Voy. Fer-
rare.
ANNE DE GONZAGUE. Foy.
GONZAGUE.
ANNE , duchesse de Guise ( Voy.
Guise , François , duc de ).
ANNE-jNlARIE, née duchesse de
Brunswick, femme d'Albert, duc de
Prusse, était remarquable par ses
connaissances et par ses vertus : en
mourant, elle laissa à son fils , Albert-
Frédéric, un petit Traité de conduite,
intitulé: -V/ryiV des Princes, divisé
eu cent préceptes : ou en voit encore
ANN
un exemplaire dans la bibiiotlièquP
de Kœnigsberg. Elle mourut , le
20 mars i568, le même jour que
son époux. G — T.
ANNEBAUT , ou ANNEBAUD
(Claude, maréchal d') , guerrier,
ministre, favori, sous François P"". ,
roi de France , et du petit nombre de
ceux qui , dans ime pareille position,
ont laissé après eux l'exemple de la
plus incorruptible vertu , et du dé-
sintéressement le plus pur. Il sortait
d'une ancienne famille de Norraandir ,
possédant , de temps immémorial , la
seigneurie de son nom, près de Pont-
Audemer , et descendait, au 9^ degré ,
de Monsieur Jehan d'Annehaut ,
ainsi inscrit sur le rôle des seigneurs ,
qui, en 1 097, avaient accompagné à la
Terre-Sainte, Robert Courte-Heuse ,
duc de N- rniandie. Claude d'Annebaut
se signala de bonne heure par sa bra-
voure et sa loyauté. A la bataille de Pa-
vie , ( 'î.\ février 1 5j5 ) , il fut , avec
Montejean,Trans, la Roche du Maine,
du nombre de ceux qui , au lieu de
suivre le duc d'Alençon dans sa hoi>-
teuse retraite , se séparèrent d'avec
lui , quoique sous ses ordres , et allè-
rent, les uns périr aux pieds de leur
roi , en le défendant , les autres , par-
tager SCS périls et sa prison. Fran-
çois \". s'aflectionna , depuis cette épo-
que, à Claude d'Annebaut, et, plus il
le connut, plus il le chérit. Pendant
les campagnes d'Italie, de Flandre,
de Champ>)gne , le roi l'employa par-
tout, et presque toujoius avec le plus
grand succès. On vit d'Annebaut, suc-
cessivement colonel-général de la ca-
valerie légère , gouverneur du Pié-
mont , maréchal de France , amiral ,
plusieurs lois ambassadeur , car il
joignait la sagesse dans le conseil à
l'intrépidité dans l'action; enfin, le roi
le choisit pour remplacer l'amiral
Chabot , qui , avec le cardinal de
ANN
Tournon , avait etë mis à !a tête des
affaires , lors de la disgrâce du coune'-
table de Montmore-! -y. En i545, le
roi d'.Angleterre, Henri VIÏI, s'e'tant
ligue avec l'empereur Charles-Quiut ,
€t la ville de Boulogne, après la plus
vigoureuse re'sistance, ayant été obli-
gée de lui ouvrir ses portes , Fran-
çois P"". conçut le hardi projet de faire
luie descente en Angleterre , et char-
gea d'Annebaut de l'exécution. Dans
im seul hiver , le roi et l'amiral par-
vinrent à rassembler i5o gros navi-
res , (jo vaisseaux de moindre gran-
deur , et ao galères. Les Anglais n'a-
vaient à mettre en mer que 60 gros
vaisseaux et des ramberges. Ils n'en
bravèrent pas moins les efforts de la
France. L'expédition d'Annebaut se
réduisit à une vaine promenade de-
vant Portsmoutb , à quelques petites
débarcations d'un moment , et à un
vaisseau coulé bas par ses galères ,
succès insignifiants , trop achetés par
ïa perte d'im des meilleurs ofllciers
de la marine rovale , le chevalier
d'Aux , capitaine des galères de î^^or-
mandie, qui reçut ordre de descendre
dans l'île de Wigt, qui, en effet, y prit
poste ; mais qui, bientôt abandonné de
son monde , se battit ])resque seul
contre un détachement d'Anglais , et
finit par tomber sous leurs coups,
« ce qui fut grande perte pour le ser-
» vice du roi , dit Martin du Bellai ;
» car il était très-vadlant et expéri-
» mente gentilhomme. » L'année sui-
vante, d'Annebaut, grand-amiral de
France , négocia et conclut la paix
avec le grand -amiral d'Angleterre.
Les deux monarques ne sm-vécurent
pas long-temps au traité; ils mouru-
rent en 1547; Henri VIII, le 29
janvier , et François F'', le 5i mars.
Sur son lit de mort, le monarque
français conseilla au dauphin de con-
tinuer à se ser\ir du cardinal de
ANN 209
Tournon ; mais sui'tout de l'amiral
d'Annebaut. a Je vous le recommande
» spécialement , dit le roi mourant
» à sou successeur , comme le seul
» homme de la cour qui n'ait jamais
» eu eu vue que le bien de l'état, et
» qui se soit appauvri dans le manie-
» ment des affaires publiques. Aussi, en
» considération de sa probité et de ses
» services , je lui lègue une somme de
» 100,000 livres. » Cette dernière re-
commandation de François 1". fut la
première chose qu'oublia Henri II. Le
parti du connétable de Montmorency
prévalut. Ou ôta le ministère à d'An-
nebaut; mais on ne put lui oter, ni
l'estime générale, ni le crédit attaché
à ses services et à sa vertu. Catherine
de Médicis le rappela depuis au con-
seil. Il mourut à la Fère , le 2 no-
vembre i552. Son frère, Jacques,
évèque de Lisieux , cardinal ^ous le tiJ
tre de vSte.-Suzanne, était mort à Rouen,
en 1547. ^"^ fî\ie , Madeleine d'Anne-
baut , avait été mariée à Gabriel ,
marquis souverain de Saluées , et il
lai>5ait un fils unique , Jean d'Anne-
baut , baron de la Ilunauderie , tué à la
liataille de Dreux , en 1 062.
T T'
ANNEIX. ro_r. SOUVENEL.
A NNÈSE ( Gennaro ) , successeur
de Masauiollo dans le commande-
mentdes révoltés de Naples, en 1 647
et 1 648. Le duc d'Arcos , après avoir
fait assassiner Masaniello , voulut
exercer une vengeance éclatante sur
le peuple qu'il avait dirigé; et, en con-
séquence, il fit attaquer les Napolitains
par ses gendarmes espagnols , tandis
que les forteresses bombardaient la
ville , de concert avec l'armée navale
commandée par don Juan d'Autriche;
mais le peuple n'en devint que plus
furieux , il repoussa les Espagnols ,
et , après avoir massacré François de
Toraldo , prince de Massa , qu'il s'é-
^4
210 A N N
tait donne pour capitalne-gene'ral , et
qui avait trahi sa cause, il choisit,
jjour chef, le -ii octobre 1647,
Geniiaro Annèse , homme de basse
extraction , mais qui joignait un ca-
ractère ferme à beaucoup de pénétra-
tion et d'habileté. Annèse fut investi
d'une magistrature constitutionnelle ,
et reconnu cojnme l'élu du peuple et
le chef de la municipalité. Cependant
lesNapohtains, qui long- temps avaient
voulu demeurer fidèles à Philippe IV,
et repousser seulement le joug de son
vice-roi , avaient enfin été entraînés
dans une révolte complète. Après
avoir foulé aux pieds tous les signes
de la royauté, ils avaient aboh les
gabelles , mis à prix la tête de plu-
sieurs seigneurs. Enfin , par un ma-
nifeste , ils venaient de signaler la
mauvaise foi et la cruauté des Espa-
gnols , en invitant le pape , l'empereur,
tous les princes et républiques , à les
aider à recouvrer leurs anciens pri-
vilèges , ou plutôt à rétablir leur
liberté ; car la \"ille de Naples prenait
déjà le titre de république, Annèse
ouvrit une correspondance secrète
avec le ministre de France à Rome, et
détermina les Napolitains à appeler
Henri de Lorraine, duc de Guise,
pour être le protecteur de la nouvelle
république. Ce prince entra dans Na-
i)les ; l'autorité militaire lui fut attii-
i)uc'e, et Annèse fut chargé du gouver-
nement civil. Bien plus fier et plus am-
bitieux que I\lasaniello , il ne voulut
point reconnaître le duc de Guise
pour son supérieur. La mésintelli-
gence se mit bientôt entre les deux
chefs , et Annèse ne vit plus qu'avec
jaluusic le rival qu'il s'était donné
lui-même. Il chercha secrètement à
lui nuire auprès du peuple, tandis
que le cardinal Mazarin le traversait
à la cour de France. Annèse traita
«.ufiii avec les ïlspagnols. Le duc
ANN
d'Arcos , qui était l'objet do la haine
universelle , ayant été rappelé par son
maître, don Juan d'Autriche fut in-
troduit , le 6 avril 1 648 , dans Naples ,
par Annèse , qui lui remit les clefs
de la grande tour des Carmes qu'il
commandait. Le reste de la ville sui-
vit cet exemple , et don Juan fut mis
en possession de tous les postes et
de toutes les forteresses. Le comte
d'Onatte , qui succéda presque aussi-
tôt au jeune prince dans le gouver-
nement, jugea qu'd n'avait plus rien
à craindre de la populace. Au mépris
de l'amnistie générale , il établit une
junte pour faii'e juger tous ceux qui
avaient participé à la révolte. Ua
grand nombre de victimes périt sur
l'échafaud, et Annèse lui-même, après
avoir vu mourir presque tous ses
partisans , eut aussi la tète tranchée
par l'ordre du prince auquel il avait
rendu la couronne. S. S — 1.
ANNESLEY ( Arthur ) , comte
d'Anglesey , né à Dublin en 161 4- II
parcourut les diverses parties de l'Eu-
rope, et revint en Angleterre en 1640.
La division commença, quelque temps
après , à se manifester entre Charles
l*""". et le parlement ; Anneslev se dé-
clara d'abord en faveur de la cause
royale ; \m\\'^ il passa ensuite dans le
parti du parlement, qui le chargea de
plusieurs négociations , dont il s'ac-
quitta avec beaucoup d'habileté. A la
mort de Cromwell , et lorsqu'il vit que
tout tendait au rétablissement de l'an-
cienne constitution , il travailla de
tous ses movens au rappel de Char-
les II. Après la restauration , il fut
élevé à la dignité de comte , et nomme
garde du sceau-privé en iG-jS. Son
opposition au duc dTorck et quel-
ques autres circonstances , lui firent
perdre sa place en 1682 j mais il se
conduisit avec tant d'adresse qu'it
parvint à recouvrer toute la faveur de
ANN
te pi'înce , élevé au trône sous le nom
de Jacques II. Anncslcy mourut en
1 686 , âgé de soixante-douze ans :
c'était un homme très -éclairé et un
bon écrivain. On a pu lui reprocher
beaucoup de versatilité; mais jamais
il ne manqua de modération. Il s'op-
posa souvent aux mesures illégales
de Cromwell, et, comme il n'avait pris
aucune part à la condamnation de
Charles 1"., il ne craignit pas de se
montrer parmi les juges des régicides.
On a de lui des Mémoires entremê-
lés d'observations morales , poli-
tiques et historique s , Londres, in-8'.,
i6g3j et quelques écrits de contro-
verse politique et religieuse. Il avait
composé une Histoire des troubles
d'Irlande , £?e 1 64 1 à 1 66o ; mais
cet ouvrage est perdu. S — d.
ANNET (Pierre), maître d'école
à Londres , publia , en i ^62 , un
ouvrage, intitulé: Thefree Inquircr
( le libre Investigateur ) , qui contenait
des propositions contraires à la doc-
trine chrétienne. Cet ouvrage, très-
médiocre pour le fond et pour la
forme, ne pouvait attirer l'attention
publique que par la témérité des opi-
nions ; il excita un scandale assez gé-
néral, pour engager le gouvernement
à en poursuivre juridiquement l'au-
teur. Il fut cité devant la cour du
))anc du roi , et déclaré, par un jury,
coupable d'impiété et de blasphème.
En conséquence, la cour le condamna
k être emprisonné deux mois à New-
gate, à êtie, dans cet intervalle, ex-
posé deux fois au pilori , et ensuite
détenu , pendant une année , dans la
maison de force , appelée Bridewell.
Le même public qui avait été scan-
dalisé du livre, trouva la punition
trop sévère. Pierre Annet , étant au
])ilori , ne fut point maltraité par le
peuple. II y fut exposé un jour avec
un homme convaincu de parjure. Le
ANN lit
peuple, jetant de la boue et des pierres
à celui-ci , un des spectateurs dit :
« Prenez garde de blesser cet honnête
» homme , qui n'est que blasphéma-
» teur. » Une femme du peuple, li-
sant sur son écriteau : blasphémateur^
dit: « Pardi , voilà un grand crime I
» ne blasphémons- nous pas tous les
w jours ? )) Il paraît que le chàtunenr
ignominieux qu'il venait de subir, loin
de servir à le corriger de ses erreurs,
ne fit que l'y confirmer, et augmenta
même sa témérité. Après son élargis*
sèment , il alla se loger en face du
palais de l'archevêque de Cantorbéry,
et y établit une école jjublique, dans
laquelle il inspirait à ses élevés peu de
respect jxjur {'Ancien et le Nouveau
Testament. Cette conduite eut le suc-
cès qu'elle méritait : lorsqu'elle fut
connue , on lui retira peu a peu ses
pensionnaires, et il fut obligé d'aban-
donner son école. 11 continua de j)ro-
fesser assez hautement ses ])rincipes
irréligieux dans un café qu'il fréquen-
tait habituellement. On lui demanda
un jour ce qu'il pensait de la vie à
venir; 11 répondit par cet apologue:
« Un de mes amis , voyageant en Ita-
» he, entra dans une ville : il vit une
» auberge , et voulut savoir si c'était
» eello qu'on lui avait indiquée ; il de-
» manda à un passant si ce n'était pas
)) V enseigne de l'Ange. — Ne voycz-
» vous pas, lui répondit le passant,
» que c'est un dragon, et non pas
» un ange ? — Mon ami, dit le voya-
» geur , je n'ai jamais \m d'ange ni
» de dragon ; je ne sais ])as si cela
» ressemble à l'un ou à l'autre. »
S-D.
ANNIBAL, fils de Giscon, suffète
et général carthaginois, désirant ven-
ger sa patrie et sa famille , en effaçant
la honte de la défaite de son grand-
père Amilcar, devant Himère, en Si-
cile, partit l'an 4^9 avant J,-C., à la
i4-.
55 2 ÂN>'
tête d'une armée forte de cent mille
hommes, selon Tymeo, et de deux
cent raille, sui^^aiit Éphore. Débarqué
à Lllybée , il prit vSeliuonle et llimère
d'assaut , et aljaiidoiina ces deux
villes à la fureur du soldat. Il détrui-
sit entièrement la dernière , '2\o
ans après sa fondatioa, et fit e>^or-
£(;r trois mille de ses habitants, dans
l'endroit même ou son aïeul avait
été tué. Après cette campagne, l'une
des plus heureuses que les Carthagi-
nois aient faites en Sicile , Aniubal
laissa quelques troupes pour la sûietd
de ses allies, et retourna à Cari liage,
avec les dépouilles de Selinonte et
d'iiimère : tous ses concitoyens allè-
rent au-devant de lui, et le reçurent
au milieu des cris de joie. Trois ans
après, Anuibal fut rcnvovc en Sicile,
pour conquérir celle île toute entière,
avec une armée plus nombreuse en-
core que la précédente. On lui donna
pour hcutenant, à cause de son «^rand
âge, Imilcar, fils d'IIannon. Les deux
généraux ouvrirent la Champagne par
le siège d'Agrigcnte; ils le poussaient
avec vigueur, lorsque la peste se dé-
clara dans leur camp , et fit périr An-
nibal , avec une grande partie de son
armée, l'an 406 avant J.-C. [P\ Imil-
car ). B — p.
ANNIBAL l'Ancien , amiral car-
thaginois , ravagea les côtes d'Italie
1 rendant la première guerre punique,
'an a6i avant J.-C.j mais, attaqué
par le consul Duilins, et entièrement
défait, il fut obligé d'abandonner sa
galère amirale, et de se sauver dans
une chaloupe. Le sénat de Cartbage lui
ôta le commandement des forces na-
vales, si l'on en croit Orose et Zonare;
mais on doit plutôt s'en rapporter à
Polvbe , qui assui c que cet amiral 1 esta
à son poste, et que sa flolle fat ren-
forcée par nu grand nombre de galè-
res, avec Icsqueiici» il rciiîùeamcr,
ANN
et gagna les côtes de la Sardaigne.
Surpris par les Romains, dans un des
ports de cette île, il y perdit encore
plusieurs vaisseaux , fut attaché à
nue croix, et lapidé par ses propres
soldats, qui attribuaient leur défaite
à sa témérité et à sa négligence.
B— p.
ANNIBAL, fils d'Amilcar Barcas,
né l'an 247 avant J.-C. , n'avait que
neuf ans lorsque, voyant son père
oflrir un sarrifice pour se rendre les
dieux favorables, dans la guerre qu'il
allait porter en Espagne , il se jeta à
son cou , et le conjura de le mener avec
hii. Amilcar, vaincu par les caresses
de son fils, le prit entre ses bras, lui
accorda sa demande, et lui lit jurer,
au ]>ied des autels , qinl se déclare-
rait l'implacjible ennemi de Rome,
dès qu'il serait en âge de porter 1rs
armes. Amilcar s'attacha depuis à lui
inspirer la haine profonde que lui-
même ressentait contre les Romains.
Anuibal le suivit en Espagne, et fut
témoin de ses conquêtes. Amilcar
avant été tué neuf ans ajircs, d.ins une
bataille en Lusitanie, l'an i.ic) avant
J.-C, les Carthaginois lui donnèrent
pour successeur, Asdrubal, son gen-
dre, et le jeune Annibal retourna dans
sa patrie. Quatre ans après , Asdrubal
ccrivii au sénat de lui envoyer le (ils
d'Amilcar, qui avait alors vingt -deux
ans. Ilannou , ennemi de la famille
Barcine, s'y opposa avec véhémence ;
mais , l'ancien parti d'Amilcar l'ayant
emporté , Annibal reparut en Espagne ,
au milieu des soldats de son père : ils
crurent revoir Amiîcar à leur têtej
mêmes traits, même fierté, même feu
dans les regards. Devenu l'idole de
l'armée. Anuibal fit trois campagnes
sous Asdrubal, et donna tant de preu-
ves de capacité et de valeur, qu'après
rassassin:;t de ce général, l'an -^-ii
avant J.-C, l'aruice lui défera k cora-
mandement, an milieu des plus vives
acdamalions. Le se'uat et le peTiple
ayant cojifirnie' ce choix , le fils d'A-
niilcar , à peine âge' de vingt - six
ans , se vit investi du commande-
ment gene'ral de l'Espagne. Fidèle à
son premier serment, il laissa bientôt
entrevoir qu'il respecterait peu les
traites conclus avec Rome; il voila ce-
pendant ses desseins, et, marchant
d'abord à la conquête entière de la
péninsule , il se jeta dans la province
des Olcadcs , et s'empara de la capitale
nommée Althe'a. Les autres villes, ef-
frayées, se soumirent. Annibal, rame-
nant hiverner à Garlhagène, son ar-
mée , chargée de butin, en fit un égal
partage entre les Africains et les auxi-
liaires , et s'assura ainsi de leur fidélité'.
La campagne suivante, il pénétra dans
la province des Vaccëens , et s'empara
de Saimantica et d'Arbucala; il aurait
tout snl)jugue', jusqu'aux Pyrénées, si
la conféde'ration des Carpétans, peu-
ple le plus aguerri de l'Espagne, n'eût
arrêté sa marche. Pressé par cent mille
combattants , Annibal en tua quarante
mille, et dissipa le reste. 11 lui restait
encore à soumettre Sagonte, ville
puissante , l'alliée de Uomc, située non
loin de l'Ebrc, et au milieu de la mer.
En l'attaquant, Annibal donnait aux
Romains un prétexte de recommencer
la guerre ; c'était à cela que tendaient
ses vues. Des plaintes s'étant élevées
contre les Sagontins, Anniluil écrivit
lui-même au sénat de Carthagc, et en
reçut plein pouvoir de traiter Sagonte
selon que l'exigerait l'intérêt di l'état.
Kien alors ne l'arrête , ni les représen-
tations des ambassadeurs de Rome,
ni la diflllculté de l'entreprise. Le siège
fui long et meurtrier ; tout y fut mis eu
usage, tant pour la défense que pour
l'attaque. On remarqua, surtout, une
tour de la plus grande ciév.ition ,
chargée de balistes et de catapultes,
ANN ai3
qui dominait et foudroyait les assiégés
sur leurs remparts. Annibal, qui s'ex-
posait sans ménagement, eut, dans un
assaut, la cuisse percée d'un trait. Re-
mis de sa blessure, il poussa jilus vive-
ment les attaques, et , après huit mois
de siège, la ville fut emportée et dé-
truit^, l'an 2 19 avant J.-G. Annibal,
après avoir soumis, en moins de trois
ans, toutes les nations d« i'Esp.igne,
rentra triomphant ci Cartliagèiie. Cons-
ternés du désastre de Sagonte , qu'ils
avaient laissé succomber sans la se-
courir, les Romains déclarèrent la
guerre à Carthagc. Annibal rassemble
aussitôt une puissante armée, et con-
çoit le hardi projet de franchir les Pyré-
nées et les Alpes, et d'attaquer les
Romains au milieu de l'Italie. Il ouvre
la seconde guerre punique, en s'acquit-
tant à Cadix d'un vœu fait a Hercule;
là, il pourvoit à la sûreté de l'Afrique,
et, laissant une armée en Espagne,
sous Asdrubal son frère, il se met en
marche , avec 90 mille ihntassius ,
4o éléphants, et la mille chevaux ;^
franchit les Pyrénées, se dirige vers le
Rhone,et dissipe mie armée de Gaulois,
après avoir habilement trompé ces bar-
bares , en faisant passer le fleuve à un
détachement , au-dessus du pointqu'ils
défendaient. Il sut , ensuite , éviter l'ar-
mée de Publius Scipion , débarquée à
Marseille, etremonta encore le Rhône,
puis s'engagea dans les défilés des Al-
pes. Les Allobroges, peuple brave et
indépendant, en disputaient le passage :
Annibal les défît en plusieurs occa-
sions, malgré le désavantage du terrain.
Arrivé en neuf jours au sommet des
Alpes, il montre aux Africains étonnés
les plaines fertiles qu'arrose l'Éridan;
mais , à la descente de ces hautes mon-
tagnes , l'armée ne trouve plus ni
chemins , ni sentiers ; ce n'était partons
qu'abîmes couverts déneiges et rochers
iuaccessi])les. Quelques historiens af-
214 ANN
firment qu'Aniiibal fit calciner, avec du
vinaigre, un énorme rocher qui s'op-
posait àsou passage. Toujours est-il cei'-
tain que se frayant , à travers les glaces
fctlcs pre'cipices , une route inconnue,
il arriva enfin dans les plaines de l'in-
subrie , vers le i5 nov. de l'an 218
avant J.-C. L'armée e'tait en marclie
depuis près de six mois , et avait mis
quinze jours à passer les Alpes. Ce pas-
sage me'raorable a fait naître , parmi les
savants , des senliraents opposes. On
croit ge'ne'ralement qu'Annibal aborda
sur la rive gauche du Rhône, entre
Orange et Avignon ; mais les uns lui
font remonter le fleuve jusqu'à son
confluent avec la Saône, et de là le
dirigent vers sa source ; d'autres sou-
tiennent , avec plus de vraisemblance,
que, presse' d'arriver, il se détourna
au confluent de l'Isère et du Rhône,
pour pe'nëti-er en Italie par les Alpes
(iOtlicnnes , et les va'Iées connues
aujourd'hui sous le nom de l'Vnes-
trellcs et de Pignerol. Annibal entra
dans la plaine avec toute la hardiesse
«l'un conquérant, et, passant en revue
les restes de cette armée , si forniida-
îtte au sortir de l'Espagne, il la trouva
le'duite à u6 mille hommes , qui res-
.semblmcnt plutôt à des spectres qu'à
des soldats. Les Tauriniens ayant re-
jeté' son alliance par mépris , il ne lui
fili'ut que trois jours pour emporter
Tarin d'assaut. Ce premier succès lui
])rocura des vivres en abondance, et
un renfort de Gaulois cisalpins. Ils
.seraient accourus en plus grand nombre
sous ses drapeuix, sans l'arrivée de
l'armëe romaine , commandée par
Publius Scipion , qui , débarque à Pise,
venait à gi'andes journées au-dcvaut
des Cailhaginois. Ce fui près du Tè-
sin que les deux armées se rencon-
trèrent; une charge de la cavalerie
numide fut , pour Annibal , le premier
^gage de la victoire. Scipion , blesse' ,
ANN
se retire à Plaisance , et Annibal , qui
le poursuit, se voit bientôt en présence
d'une seconde arme'e, commandée par
Sempronius. Tenu d'abord on échec, il
irrite l'humeur fougueuse de Sempro-
nius pour l'attirer au combat, dresse
uneerabuscadeprèsdelaTrébie, tourne
l'armée romaine , et la taille en pièces.
Les Romains perdiient leur camp et
vingt-six mille hommes. Vainqueur de
deux armées, Annibal , arrêté par la
rigueur de la saison ,prit ses quartiers
d'hiver chez les Gaulois cisalpins , qui
devinrent ses alliés. A l'ouverture de la
campagne, il vit deux nouvelles ar-
mées lui fermer les débouchés des
Apennins. Voulant combattre séparé-
ment les deux consuls , et écraser Fla^
minius avant l'arrivée de son collègue,
il jette les Romains dans l'incertitude
par plusieurs marches contradictoires ;
pénètre au revers des Apennins , et
traverse, sur plusieurs colonnes, les
marais de Clusium. Pendant quatre
jours et autant de nuits , l'armée car^
thaginoise marcha dans l'eau. Son
chef, monté sur le seul éléphant qui
lui restât , ne sortit lui-même qu'avec
peine de ce terrain fangeux, et perdit
un œil , à la suite d'une fluxion que
cette marche péiii'>le lui fit négliger.
Lîne fois maître de la campagne, il
n'oublia rien de ce que la guerre fournit
d'adresse et de ruse pour ftu-cer Fla-
minius à recevoir la bataille. Il met
tout à feu et à sang , feint de marcher
vers Rome , ayant Cortone et les mon-
tagnes voisines à sa gauche , et à droite
le lac de Trasiraène ; tout à coup , il
s'embusque dans \\n étroit défilé ,
■fernuî au fond ])ar des rochers d'ac-
cès diflîcile. L'imprudent Flaminius
s'engage à sa poursuite , sans nulle
précaution ; et il est aussitôt assailli.
Là , près du Trasimène , se livre cette
bataille sanglante , où la ruse et les ta-
lents réunis triomphèrent de la vjileur
ÀNN
des Romains. Ceux - ci , attaques de
front , en queue , en flanc , et ayant
le lac à leur gaucte , furent tailles en
pièces , sans avoir pu se déployer. Ils
laissèrent , sur la place , quinze mille
morts , parmi lesquels se trouvait le
consul lui-même; un grand nombre
se noya dans le lac , en voulant se
sauver à la nage , et quinze mille pri-
sonniers complétèrent cette victoire
éclatante. Embarrassé de tant de cap-
tifs, et dirigé, d'ailleurs, par une po-
litique profonde , Annibal ne garda
que les Romains , et renvoya les La-
tins sans rançon. 11 se contenta de ra-
vager rOmbrie , le Picénum , et vint
ensuite refaire son armée dans les
plaines fertiles d'Adria , d'oîi il expé-
dia un vaisseau à Cartbage, pour an-
noncer ses victoires au sénat. Hicbe
des dépouilles de l'ennemi vaincu, il
arma ses soldats à la manière des Ro-
mains , et pénétra ensuite en Apulie,
portant de tous côtés l'épouvante.
Rome consternée avait confié son sa-
lut au dictateur Fabius Masimus, qui
entreprit d'épuiser la vigueur de l'ar-
mée carthaginoise en temporisant. An-
nibal saccage en vain l'Apulie , le
pays des Marses , les frontières de la
Fouille , les terres des Samnites ; en
vain ses soldats parcourent , la torclie
à la main , les plus belles campagnes
de l'Italie. Rien ne peut déconcerter Fa-
bius. Tl oppose à Annibal les armes et
les artifices d'Annibal, et il suit son re-
doutable adversaire à uneou deux jour-
nées de distance , sans vouloir ni le
joindre , ni le combattre , persuadé
que les Carthaginois ne pourront sé-
journer long-temps dans un pays dé-
vasté. Le général carthaginois se ré-
pandit alors dans les plaines de Ca-
poue , espérant que les villes épou-
vantées abandonneraient le parti des
Romains, et que Fabius quitterait enfin
les montagnes. Cette campagne , rem-
ANN 2i5
plie par des mouvements et des mar-
ches continuelles , allait finir sans ré-
sultat, lorsqu' Annibal , attiré parles
combinaisons de Fabius , se trouva
enfermé dans les défilés de Casili-
num , et tomba dans les mêmes pièges
où Flaminius avait trouvé sa perte.
Serré entre les rochers de Formies ,
les sables de Lecsternum et des étangs
impraticables, Annibal eut recours à
la ruse. Par son ordre , mille bœufs
sont réunis , et leurs cornes entou-
rées de torches allumées. Au milieu
de la nuit , ces animaux furieux sont
chassés vers les défilés que gardaient
les Romains ; ceux-ci, cHrayés de cette
mukitudc de feux errants , abandon-
nent les hauteurs , et Annibal force le
passage. Les Romains , alors , mécon-
tents de Fabius et de ses délais , par-
tagèrent la dictature entre ce grand
homme et Minutius Félix , son géné-
ral de cavalerie. Enflé par un léger
succès, ce dernier, pressé de com-
battre, tombe dans une embuscade,
près de Geruninra , et il y aurait
péri , sans le généreux secours de F.>-
bius. Cette campagne finie , d'autres
généraux romains semblèrent aussi
ne vouloir plus rien donner au ha-
sard , et temporisèrent , à rexem])lc
de Fabius. Annibal voyait avec dou-
leur son armée se consumer lente-
ment , lorsque ïerentius Varron ,
nouveau consul , homme ignoiant et
présomptueux , viut prendre le com-
mandement des légions. Annibal s'était
emparé de Cannes , et il avait réduit
les Romains à la nécessité de com-
battre. Les deux armées allaient être
en présence j Paul-Emile , collègue
de Varron , voulait différer la ba-
taille , à cause du désavantage du
terrain. Varron , au contraire , choisit
le jour de son commandement pour
donner le signal du combat. Quatre-
vingt-six mille Romains couvraient la
2iG ANN
p'fline qui s'étend près de la rivière
d'Aufide et du bourg de Caïuies , à
six lieues de l'Adriatique. Giscon ,
qui venait de les reconnaître , accourut
efFravè, pour annoncer que les en-
nemis étaient innombrables. «Oui,rë-
5) pond Annibal; mais i! y a une chose
» singulière , Giscon , à laquelle tu ne
» prends pas garde , c'est que , dans
V ce prodigieux nombre d'hommes ,
V il n' y en a pas un seul qui s'ap-
1) pelle Giscon comme toi. » Ce trait
pl.iisant , au moment d'un si grand
péril , peint l'admirable sang - froid
d'Annibal. Dans cette journe'e mémo-
rable , son armée , de moilié infé-
rieure à l'arniee romaine , dut la
victoire au génie de son chef. Quoi-
que les relations , parvenues jusqu'à
nous , ne soient point assez claires
pour en expliquer tous les détails , et
pour qu'on puisse en porter un juge-
ment raisonné , il paraît certain que
l'action commença par une victoire
complète que remporta l'aile gauche
de la cavalerie carthaginoise , con-
duite par Asdrubal, sur la cavalerie
romaine de l'aile droite. Celle-ci avait
imjirndemment rais ])ied à terre :
« J'aimerais autant , s'écria Annibal ,
» que le consul m'eût livré ses soldats
î) pieds et poings liés. » L'infanterie
gauloise et espagnole était placée au
centre de l'armée carthaginoise , en
ligne convexe et saillante , et présen-
tait ainsi à l'ennemi son côté f tible ;
elle fut repoussée par les Romains,
qui pénétrèrent dans le centre. Ce
iiit alors que la meilleure infanterie
d'Annibal , postée à droite et à gauche ,
iittaqua de front et en flanc le centre
des Romains , qui s'était ainsi té-
mérairement engagé. Il rompit leur
ligne; et Asdrubal, après avoir dé-
truit presque entièrement la cavalerie
des Romains , se liant , par une
conversion , avec les INumidcs, laissa
AKN
ceux-ci poursuivre les fuyards , et
se jeta sur les derrières du ccntie
de l'armée de Varron , dont il acheva
la défaite. L'infanterie l'omaine du cen-
tre fut taillée en pièces , tandis que le
reste , étant contenu , pouvait à peine
combatli'e, et fut à la un culbuté par la
nombreuse et excellente cavalerie car-
thaginoise. L'armée de Varron fut dé-
truite, le consul Paul Emile se fit tuer,
et près de 6,000 chevaliers et 60,000
soldats romains périrent dans cette
bataille célèbre , l'an 'iiG av. J.-C. Le
vainqueur envoya au sénat de Car-
thage un boisseau d'ann-aux pris aux
doigts des chevaliers romains morts
sur le champ de bataille. Le lende-
main, quelques corps qui s'étaient re-
tirés dans deux cam|is, furent obligé^
de mettre bas les armes. Au lieu de
marcher droit à Rome , Annibal s'a-
vança vers Naples. Ce fut alors que
Maherbal , son général de cavaleiic ,
lui dit : « Tu sais vaincre , Annibal ,
» mais tu ne sais point profiter de la
» victoire ! » Tite - Live semble ap-
prouver ces paroles remarquables. (>e
fut une faute, en effet, de n'avoir j)as
été camper sous Rome, qui, voyant
les vainqueurs à ses portes , n'aurait
probablement pas pu se remettre de
son effroi. Tout invitait Annibal à pro-
fiter des faveurs de la fortune. Cepen-
dant , réduit à 56,ooo hommes . com-
ment aurait-il investi une ville si éten-
due , et dont les murs étaient gardés
par deux légions et par toute sa popu-
lation guerrière? Aucun peuple d'Italie
ne s'était encore déclaré en faveur
d'Annibal. « Une preuve qu'il n'aurait
» pas réussi, dit Montesquieu, c'est
» qu'après la défaite de Ciannes, les
)) Romains furent encore eu état d'en-
» voyer partout des secours. » Que ne
devait-il pas craindre, en efllt, d'un
peuple qui, api es ce grand désastre,
refusait de racheter les prisonniers ?
ANN
Quoi <|iul en soit , la victoire de Cannes
avait oinertàAnniballoute'cette partie
de l'Italie qu'on appelle la Grande-
Grèce. N'ayant pu emporter Naples, il
tourna sa njarche vers Capoue qui lui
ouvrit ses portes. Le se'jt'ur de cette
ville opulente amollit ses soldats ; c'est
du moins l'opinion de quelques histo-
riens plus moralistes que politiques.
L'armée d'Annibal ne perdit point
sa discipline à Capoue; constamment
fidèle à son chef, on la vit s'exposer
sans murmure à de nouvelles fatigues ,
et se maintenir encore en Italie pen-
dant douze ans. Ce qui mit des bornes
à ses conquêtes , ce fut la fermeté des
Romains qui se montrèrent supérieurs
aux revers de la fortune; ce furent les
succès que les Scipions obtinrent en
Espaj^iie. En une seule année, Rome
leva dix-huit légions. Noie sut résis-
ter à Annibal ; mais Tarente , ville
puissante et riche, lui fut livrée par
trahison, l'an 212 avant J.-C. Aucun
j;éiiéral romain , depuis la bataille de
Cannes , n'osait plus camper en plaine
devant l'armée d'Annibal. Cependant ,
malçiré l'éclat de ses victoires , et le
crédit de la faction Barcine à Carlha-
ge , Hannon et ses partisans retardè-
rent le secours que le sénat avait ac-
cordé au vainqueur des Romains, Son
fl'ère Magon , qu'il avait envoyé à Car-
thage, n'obtint qu'avec peine 12,000
fantassins et 2,5oo chevaux , et encore
fut-il contraint de mener ce faible ren-
fort en Espagne. Abandonné ainsi, par
l'elTct des intrigues d'une faction ri-
vale , Annibal se vit forcé de rester sur
la défensive. Déjà même Capoue était
à la veille de retomber sous la puis-
sance romaine : deux armées consu-
laires en faisaient le siège. Annibal,
espérant sauver, par une diversion
hardie , cette ville importante , mar-
che sur Rome , et vient camper à la vue
^a Capitole, l'an 211 avant J.-C. Le
ANN 217
même jour, les Romains envoyèrent
un secours eu Espagne, et vendirent
les terres oia Anniba! campait,. Ne
pouvant plus rien entreprendre de
décisif contre une nation qui déployait
tant d'énergie , Annibal al3andonna le
territoire de Rome , sans avoir pu sau-
ver Capoue. L'heureux succès de ce
siège donna aux Romains une supé-
riorité évidente , et disposa presque
tous les peuples de l'Italie à se décla-
rer pour eux. Annibal releva néan-
moins sa réputation par la défaiîe du
consul Fulvius. Mais bientôt Fabius
Marcellus , en trois jours, lui livre
trois combats peu décisifs ; le qua-
trième jour, il lui présente encore
la bataille ; Annibal se retire en
disant : a Que faire avec un homme
« qui ne peut se résoudre à rester
» vainqueur ou vaincu ? » De son
coté , Fabius reprit Tarente au mo-
ment même oîi Annibal s'avançait
en toute hâte pour sauver cette ville.
La défaite de Sempronius Gracchus,
et la mort de Marcellus, surpris dans
une embuscade , ne firent point chan-
ger la fortune. Repoussé même dans
sou camp par le consul Claude Néron ,
Annibal ne put rien tenter pour se
joindre à sou frère Asdrubal , qui ve-
nait à sou secours du fond de l'Espa-
gne. Il avait déjà passé les Appennins ,
lorsqu'il fut attaqué et tué, ran20'j av.
J.-C, par ce même Néron , qui , reve-
nant sur ses pas, fit jeter sa tête san-
glante à l'entrée du camp d'Annibal.
Ce spectacle arracha au fils d'Amilcar
ces mots dictes par la plus proToude
douleur : « 0 Carthage ! malheureuse
» Carthage I je succombe sous le poids
» de tes maux! ». II lève aussitôt son
camp , et se retire dans le pays des
Bruttiens. Là, environné d'obst<icles ,
il ose encore lutter, avec des forces
inégales , contre des armées victorieu-
ses , et se maintient avec gloii'e daas
^i3 AN^
Hn coin du Brutiiiim. Mais Rome , par
de puissantes diversions , avait déjà
i-econquis la Sicile et l'Espagne ; déjà
même, l'heureux Scipion, après avoir
porte la guerre en Afrique , faisait
trembler Carlhage. Rappelé pour dé-
fendre sa patrie, Annibal ne put re-
tenir ses larmes en lisant les ordres
du sénat. Jamais exilé , suivant Tite-
Live, ne témoigna autant de regrets
en quittant sa terre natale. « Ce n'est
» point par les Romains , dit-il , mais
» par lesénatdeCarthage, qu'Annibal
« est vaincu I « Ses troupes s'embar-
quèrent , à l'exception de ses auxi-
liaires d'Italie qui refusèrent de le
suivre. Annibal , aigri par le malheur,
les fil tous massacrer dans le temnie
mcmedejunon, àLaeinium, en Ca-
labre. Il partit enfin , l'an 2o5 avant
J.-C. , et tourna plusieurs fois ses re-
gards vers cette belle ItaHe, théâtre
de sa gloire, où il s'était maintenu
seul, pendant seize ans , contre toutes
les forces des Romains, A la nouvelle
de son départ, Rome parut ivre de
joie. Carthage , au contraire, atten-
dait avec anxiété l'arrivée du seul gé-
néral qui pût balancer la fortune de
Scipion. 11 débarqua au port de Lep-
tis , attira d'abord, dans son camp,
irn parti de Numides, et vint camper
à Adrumète. jMaître de la campagne ,
Scipion s'empara de plusieurs villes
dont il fit passer les habitants sous
le joug. Annibal, pressé par ses con-
citoyeus d'en venir h une action dé-
dsive , s'approcha de l'ennemi , et
vint camper à Zama , à cinq jour-
nées de Carthage ; mais , se défiant
de la fortune , il soucrea sérieusement
à la paix , et fit demander une en-
trevue à Scipion. Ces deux grands
hommes , escortés par des détache-
ments égaux de cavalerie , se rencon-
trèrent à Nadagara, et restèrent quel-
tpie temps en silence , comme étonnés
ANN
à la vue l'un de l'autre. Annibal parla
le premier. Son discours fut noble et
touchant. Il dit que Carthage se ren-
fermerait volontiers dans les born. s
de l'Afrique, puisque telle était la vo-
lonté des dieux; et, rappelant à Sci-
pion l'inconstance de la fortune , il
se donna lui-même comme un exem-
ple de ses vicissitudes. Scipion , par
lant en vainqueur, dit que c'était
aux armes à terminer la querelle , 't
blessa Annibal par sa fierté. Les deux
généraux se séparèrent , résolus de li -
vrer bataille le lendemain. L'armée
romaine , forte de 25 à 3o,ooo hom-
mes , fut rangée eu colonnes, par co-
horte, sur une ligne, avec les dis-
tances nécessaires pour laisser le pas-
sage libre aux éléphants. Cinquante
mille hommes environ composaient
l'armée carthaginoise, qui fut rangée
sur trois lignes , eu phalanges , et les
vieilles troupes en réserve ; car An-
nibal n'espérait la victoire que des
efforts réunis de ses trois lignes, qui
devaient se prêter un soutien mutuil,
D& part et d'autre la cavalerie cou-
vi'ait les ailes. Les deux armées s'at-
taquèrent dans une plaine rase et
découverte, l'an 9,01 avant J.-C, Ja-
mais bataille ne fut plus mémorable,
soit que l'on considère les doux chefs,
la bravoure des troupes , ou l'im-
portance des résultats. L'action fut
engagée ]iar les éléphants ; mais Sci-
pion avait disposé ses troupes légères
de manière à détourner ces animaux
dans les intervalles des cohortes ,
ce qui réussit parfaitement. Alors la
ligue des colonnes romaines attaqua
avec impétuosité la ])remicre bgnc
d'Annibal et la culbuta sur la seconde.
Ce général avait commis la faute d'é-
tablir ses lignes serrées, sans laisser,
entre les différents corps, assez de
distance. Les fuyards , ne pouvant
trouver d'issue, mirent le dc'sordie
I
ANN
dans la seconde ligne, et l'entraînèrent
avec eux. Au même instant, la cava-
lerie numide auxiliaire des Romains
ayant culbute la cavalerie carthagi-
noise , revint triomphante de la pour-
suite de l'ennemi , prit à dos la re'-
serve d'Annibal et la tailla en pièces.
Titc-Live et Polybe assurent qu'il de-
meura sur la place près de 20,000
Carthaginois, et que Scipion fit un
égal nombre de prisonniers. Annibal ,
vaincu , s'enfuit à Adrumète , recueillit
les restes des fuyards, et, en peu de
jours , rassembla un corps d'arme'e
capable d'arrêter les progrès du vain-
queur. Il se rend ensuite à Carthage,
et déclare au sénat qu'on ne doit plus
espérer de salut que dans la paix.
Mais les conditions en étaient si du-
res, que Giscou, d'ailleurs ennemi de
la faction Barcine , hai'angua le sénat
pour les faire rejeter. Annibal , in-
digné , précipita Giscon de la tribune.
Cet acte de violence excita les mur-
mures de l'assemblée. « Absent depuis
« trente-six ans de Carthage, répondit
» Annibal, je n'ai appris que la guerre ;
» quant à vos lois , à vos coutumes ,
» je les ignore. » Puis , conjurant les
sénateurs d'oublier leurs divisions , et
d'opposer plus d'unanimité à la faction
populaire, déjà trop puissante , il les fit
consentir à la paix. Telle fut , après
dix-huit ans d'une lutte sanglante, la fin
de la seconde guerre punique, double-
ment fatale aux Carthaginois , qui se
virent arracher leurs anciennes con-
quêtes, et perdirent , avec leur flotte,
tout espoir d'en tenter de nouvelles.
Redeveiui simple citoyen , Annibal
conserva tout son crédit , et le sénat
lui donna le commandement d'une
armée, dans l'inlérieur de l'Afrique;
mais Rome, à qui le nom seul d'Anni-
bal faisait ombrage, exigea son rappel.
Les Carthaginois lui conférèrent alors
la prsïuie , charge qu'il éleva au
AjNN
i\f}
niveau de son génie. Réformant les
abus dans l'administration de la justice
et dans les finances , il osa mettre uti
terme aux concussions , malgré la
haine des vampires de l'état, et l'ani-
mosité de la faction d'Hannon. Ce fut
celte faction qui l'accusa, auprès des
Romains, d'entretenir des liaisons se-
crètes avec Antiochus , roi de Syrie ,
dans la vue de rallumer la guerre.
Des commissaires romains vinrent à
Carthage, et demandèrent qu'Annibal
leur fût livré. 11 n'eut que le temps de
fuir vers la côte , accompagné seule-
ment de deux personnes , et, mettant
à la voile , il gagna l'île de Cercine.
Ses ingrats concitoyens renversèrent
son palais , mirent ses biens en vente,
et le déclarèrent banni. Tite-Live nous
apprend que ce grand homme, pros-
crit et fugitif, déplora le sort de sa
patrie , bien plus que le sien. De Cer-
cine , il se rendit à Tyr , à qui Car-
thage devait son origine ; et il y fut reçu
avec de grands honneurs. Passant en-
suite à Éphèse , où était la cour d' An-
tiochus , il engagea ce prince à décla-
rer la guerre aux Romains, et lui
persuada que l'Italie devait eu êti'e le
théâtre. Antiochus approuva les pro-
jets d'Annibal j mais lorsque ce der-
nier envova proposer à Carthage de
s'allier avec ce monarque, et de rom-
pre avec Rome , ses ennemis préva-
lurent dans le sénat, et firent tout
échouer. D'un autre côté, les minis-
tres du l'oi de Syrie , jaloux de son
crédit, cherchèrent à le rendre sus-
pect à Antiochus, qui l'éloigna de ses
conseils. Ce fut alors qu'Annibal tint
ce discours au monarque syrien ;
« Vous flattez-vous, Antiochus, qu»:
^> les légions victorieuses qui vous ont
)< chasse d'Europe , n'oseront vous
» poursuivre en Asie ? Détrompez-
» vous ; le danger est pressant ; i!
» faut abdiquer la couronne, ou voua
220 A N N
V» opposer de tout votre pouvoir aux
» desseins d'un peuple qui aspire à la
» conquête du monde. » AntiocLus ,
frappe' de la solidité de ces raisons ,
résolut de poursuivre la pjuerre avec
vigueur : il rendit à Annibal tout sou
crédit, et lui confia le commande-
ment de sa flotte. Les Rhodiens, alors
allies de Rome, disputaient la Médi-
terranée au roi de Syrie. Annibal leur
livra, sur la cote de Pamphilie, un
combat naval , où il serait reste vain-
queur , s'il n'eût élé abandonné , au
commencement de l'aclion , par un
amiral syrien , nomme Apollonius ;
mais il fit une retraite habile , et les
Rhodiens n'osèrent le poursuivre. Ce-
pendant , un enchaînement de fautes
et de malheurs conduisit bientôt An-
liochus à négocier une pais honteuse
avec les Romains. Ces républicains
vindicatifs insistaient pour que le roi
de Syrie leur remît Annibal. Antio-
chus , dont l'ame était basse et timide ,
promit de le livrer ; mais l'illustre
carthaginois se réfugia dans l'île de
Crète , et de là en Arménie. Strabon
est le seul , parmi les anciens , qui as-
sure qu'Annibal trouva un asyle à la
cour d'Artaxias. Ce qui est ceitain ,
c'est qu'il fut attire en Bitliiiiic par
le roi Prusias , ennemi non encore dé-
claré des Romains. Exilé de sa patrie,
sans appui , sans ressource , Anni-
bal, toujours tourmenté de sa haine
contre Rome , accepta les offres d'un
prince qui ne respirait que guerre et
vengeance. Il fut l'ame d'ime ligue
puissante , formée entre Prusias et
divers autres princes voisins , contre
Eumène , roi de Pergamc , l'allié de
Rome. A la fois le moteur et le géné-
ralissime de cette ligue , Annibal rem-
porta plusieurs victoires sur terre et
sur mer. Malgré ces avantages l'Asie
tremblait au seul nom de Uome ; et
Prusias ayant reçu du sç'uat des am-
ANN
bassadeurs qui venaient demander
qu'il leur livrât Annibal, ou qu'il le fit
périr , n'hésita pas à obéir à cet ordre
cruel ; mais l'illustre proscrit eut re-
cours au poison qu'il portait toujours
dans sa bague, et, conservant, jusqu'au
dernier soupir , ce grand caractère que
le malheur n'avait pas abattu : «i Dc-
» livrons les Romains, dit -il, delà
» terreur que leur inspire un vieillard
» dont ils n'osent pas même attendre
» la mort. Ils eurent autrefois la géné-
» rosUé d'avertir Pyrrhus de se garder
» d'un traître qui voulait l'empoison-
» ner ; ils ont aujourd'hui la bassesse
» d'envoyer un personnage consu-
» laire pour soliciter Prusias de faire
» périr , par un crime , son hôte et
» son ami. » Ainsi mourut Annibal ,
âgé de soixante- quatre ans , i85 ans
av. J. - C. AuréliiîS A it tor nous ap-
prend qu'on voyait encore de sou
temps, en Lybie , une pierre de son
tombeau, sur laquelle était gravés ces
seuls mots : « Ici repose Annib.il I » Po-
lybe , après l'avoir proposé pour mo-
dèle à tous les généraux à venir ,
s'écrie : « Quel homme I quelle habi-
)) leté dans l'art de conduire les ar-
)) mées I Qu'une ame grande mérite
» notre admiration, lorsque la natarc
» la rend propre à exécuter tout ce
» qu'il lui plaît d'enlreprendi-e. w Ce
judicieux historien paraît persuadé
que Cartilage serait devenue la maî-
tresse du monde , si Annibal avait
commencé par soumettre tous les au-
tres peuples , avant d'attaquer Rome.
Eu effet, doue d'un courage raèlé de
sagesse, et d'une activité infatigable,
il mûrit et exécute, à vingt-six ans , le
plan militaire le plus hardi qu'ait ja-^
mais conçu le génie de l'homme; il
porte la guerre au sein de Rome même,
de Rome dans toute sa force. Rien ne
l'arrête , ni les peuples que l'Espagne
arme coutrc lui , ui les Pyicuécs , ui
ANN
î"s fleuves , ni les glaces e'ternelles des
Alpes. C'est en vain que Rome réunit
contre lui tous ses efforts , qu'elle lui
oppose les Fabius , les Emile , les
Marcellus , les Scipions : Annibal ,
seul , balance la fortune de tant d'il-
lustres capitaines • il maintient h dis-
cipline dans une armc'e formée de
vingt peuples divers , défait toutes
les armées romaines, et , pendant
seize ans menace le Capitole. « Quand
» on considère , dit Montesquieu ,
» cette foule d'obstacles qui se présen-
» tèrent devant Annibal , et que cet
» homme extraordinaire les surmonta
Dtous, on a le plus beau spectacle
» que nous ait fourni l'antiquité, w
Annibal , en effet , ne dut sa gloire
qu'à lui seul , et son expédition contre
les Romains est plus digue d'admi-
ration que celle d'Alexandre contre
les Perses , barbares indisciplinés. Il
se montra aussi étonnant dans la po-
litique que dans la guerre. Lui seul ,
pendant la seconde gueire punique ,
dirigea tout en Italie , par lui-même ,
et en Espagne , par ses frères Asdru-
bal et Alagon. Ce fut d'après ses or-
dres qu'agirent en Sicile , d'abord
Hippocrate , puis l'Africain Myton ;
ce fut encore lui qui souleva l'Ulyrie
et la Grèce contre les Romains , et
qui, par son traité avec Philippe, roi
de Macédoine, effrava Rome, et par-
vint à diviser ses forces. Les réfor-
mes d'x'Vnnibal dans le gouvernement
de Carthage , ses sages conseils à
Anliochus, la ligue qu^il forma en
faveur de Prusias, attestent égale-
ment qu'il connaissait l'art de con-
duire les hommes par la politique.
Tite-Live , et tous les historiens qui
ont écrit d'après lui, ont reproché au
fds d'Arailcar sa cruauté , sa perfi-
die, son irréligion ; ils ont dépeint,
avec les plus noires couleurs , ses
mœurs et soa caractère ; mais Tite-
ANN ^'2t
Lîve n'était ni assez profond politique
pour apprécier tous les motifs de sa
conduite , ni assez impartial histo-
rien pour juger un ennemi de Rumr .
Il appelle perfidie les ruses dont An-
nibal se servit tant de fois contre les
Romains; il l'accuse surtout de cruau-
té. Cependant , après la bataille de
Trasimène, il ordonna lui-même à
ses soldats de cesser le carnage , et
fit chercher le corps de Flaininius
parmi les morts pour lui rendre les
honneurs funèbres; il renvoya 5oo
jeunes Romains sans rançon ; plus tard,
il honora , par des funéi-ailles magnifi-
ques , les restes de Marcellus et de Sem-
pronius Gracchus, lues tous deux eu
combattant contre lui; et, recueillant
les cendres de IMarcellus, vainqueur
de Syracuse , il posa une comonne
d'or sur l'urne qui les renfermait , et
envoya ce gage de sa piété au fils de
son illustre adversaire. Polybe semble
convenir, cependant, qu'Annibal fut
accusé de cruauté à Rome, et d'avarice
à Carthage , et que les sentimenis
étaient fort partagés sur ce grand
homme. Il n'est point exempt de
biàme en effet, soit qu'on le considère
com.me homme d'état , ou comme gé-
néral : l'incxoiable postérité lui le-
prochcra éternellement sa conduite
timide après la bataille de Cannes.
L'idée de se faire joindre dans sa dé-
tresse par Asdrubal son frère , venant
avec l'armée d'Espagne au ti-avers de
l'Italie et de toutes les forces ro-
maines , fut , sans contredit, une fausse
et dangereuse combinaison , Auuibal
ne pouvant surtout manœuvrer pour
faciliter cette jonction difficile. Ou
l'armée d'Espagne devait s'embar-
quer vers Sagonte, pour débarquer
ensuite vers Naples , ou bien Anni-
bal , en combinant sa marche avec
celle de son frère, devait regagner la
haute Italie pour se joindre à Asdru-
'1-11 A N N
bal vers la Tiëbie , et se diriger âe
concert sur Rome. Les tacticiens exer-
cés remarquent aussi quelques fautes
dans l'ordre de bataille d'Annibal à
Cannes : voilà les seuls reproches
que la critique la plus sévère puisse
adresser à la mémoire de l'un des
plus grands capitaines de l'antiquité.
Quant à ses mœurs , elles furent irré-
prochables ; plusieurs historiens ci-
tent avec élo£;e la continence qu'il
montra an milieu des plus belles cap-
tives, et sa tempérance, malgré les
délices et l'abondance de Capoue. Les
mœurs d'Annibal furent , d'ailleurs ,
adoucies par la culture des lettres.
Suivant Cornélius Néposet Plutarque,
il cultiva la littérature grecque, et eut ,
pour maîtres , Sosile le Lacédémo-
nien , et l'historien Syllène ; tous deux
îia])i!èrent les camps avec lui , et l'ac-
rompagncrcut tant que le permit la
fortune, Annibal composa, en grec,
plusieurs ouvrages, entre autres V His-
toire des expéditions de Cnéiiis Man-
fiiis Vulso , en Asie , contre les
Gallo- Grecs , ouvrage qu'il dédia
aux Rhodiens , et qui n'est pas par-
venu jusqu'à nous. La plupart de ses
réparties prouA ent qu'il avait l'esprit
poli et orné. On cite surtout sa ré-
ponse à Anliochus. Le roi de Syrie,
fier de la richesse des armes de ses
troupes, demanda un jour de revue, à
Annibal , s'il croyait ces belles armes
suffisantes pour les Romains. « Oui ,
)) répond l'illustre Carthaginois ,
« quand même les Romains seraient
» encor<? plus avares. » La P ie d'An-
nibal, que nous a laissé Cornélius
Népos, n'est qu'un abixîgé incomplet
qui doit faire regrcttei- que Plutarque
lui-même ne l'ait pas écrite ( Foj^\
Donat AcciAjuoLi ). Sosile le La-
cédémonieri avait écrit, en grec, Y His-
toire des expéditions d'Annibal ,
dont il fut le maître, le compagnon et
ANN
l'ami ; mais cet ouvrage précieux n'est
point arrivé jusqu'à nous. On sait aussi
qu'Anuibal perpétua les principaux
événements de la seconde guerre pu-
nique, en les faisant graver , en langue
grecque , sur des tables d'airain , qu'il
laissa à Lacinium en Calabre; Polybe
a eu connaissance de ces tables, et les
a suivies dans son histoire. M. de
Fortia d'Urban, dans ses Antiquités
du déparlement de l^auclusc , a
discuté en détail le passage du Rhône
par Annibal , et a combattu l'opinioa
adoptée par d'Anville (i). B — p.
ANNIBAL CARO. Voy. Caro,
ANNIBALIEN , neveu du grand
Constantin ( /^q;'. Constantin, Cons-
tance et Julien).
ANNICÉRIS de CjTène , se distin-
gua par sa passion pour les chevaux
et par son adresse à conduire un
char. S'étant embarqué pour aller
à Olympie disputer le prix de la
course des chars , il aborda à jEgine
au moment où Pollis y exposait en
vente Platon qui lui avait été livré par
Denys-le-Jeune. Annicéris , qui con-
naissait le mérite de ce philosophe ,
l'acheta et le renvoya , ou jilutôt le re-
conduisit lui-même à Athènes. Ce fut
sans doute alors que, voulant faire voir
son adresse à Platon , il mena son char
dans l'académie , et lui fit faiie nu
grand nombre de tours, sans que les
roues sortissent de l'ornicre qu'elles
avaient tracée; ce qui fit tlire à Platon
qu'il était impossible que celui qui
avait mis tant de soin à s'exercer à des
futilités , eût rien appris de bien im-
portant. C — R.
ANNICERIS, de Cyrcne comme le
précédent , mais beaucoup postérieur
à lui , puisqu'il vivait du temps d'A-
(I^ Je dois à robll^'F.ince de M. le baron de
Joniini , oiiteiir du 'J'inilc des j^ranHe.' Opéra,
lions initilaires . des olucnatiors et des t'clair-
cissements csseulich «ut Ici bauilles de Canaei et
dï itiru.
A N N
Îes-Tndre , fut disciple de Paraebates ,
de l'ëcole d'Aristippe. Suidas et Dio-
gène Laërce out commis beaucoup
d'erreurs dans l'histoire de ce philo-
sophe , en le confondant avec le con-
temporain de Platon , et en le repre'-
sentant comme suivant la doctrine
d'Épicure : il e'tait de la secte cyre-
naique. Annice'ris fit à la philosophie
d'Aristippe diverses modifications, et
fut le fondateur de la secte annicé-
rienne, dont on peut lire dans Diogène
Laërce les principes fondamentaux. 11
florissait vers l'au 55o av. J.-G.
D. L.
ANNIUS de Viterbe. Son vëritable
nom était Jean Nanni, en latin,
Nanniiis. Par amour pour l'antiquité,
en supprimant une seule lettre, il
changea Nannius en Annius, selon
l'usage de son temps, et il y joignit le
nom de sa patrie. Ne à Viterbe, dans
l'ëtat de l'Église , vers l'an 1 45u , il y
entra fort jeune dans l'ordre des do-
minicains. Dès ce temps-là, et, pendant
toute sa vie , l'ëtude reraphssait tous
les moments qu'il ne donnait pas aux
devoirs de son ëlat. Celle qu'il fit,
non seulement des langues grecque et
latine , mais des langues orientales ,
lui atlira beaucoup de considération
dans son ordre. Suivant son institu-
tion , il exerça souvent , avec zèle , le
ministère de la parole. Ses succès le
firent appeler à Pvome, où il acquit
l'estime des membres les plus distin-
gues du sacre collège, et des souve-
rains pontifes Sixte IV et Alexandre
VI. Ce dernier lui donna, en i409j
la pbce honorable de maître du sacre
palais, vacante par la nomination de
Paul ÎMoucglia à l'ëvêchë de Chio.
Annius eut de la peine à conserver son
crédit sous ce méchant pape, dont le
fils, Cësar Borgia, plus méchant que
lui, et livré à tous les crimes, par-
donnait difficilement la vëritë , qu'An-
A Tn N 2^5
nius lui disait toujours. La femme de
Cësar, au contraire, la duchesse de
Valentinois , princesse aus^i vertueuse
que son mari était scëlërat, accordait
au savant dominicain toute sa con-
fiance. Le duc, fatigue des conseils
qu'il recevait de l'un et de l'autre, fit
tomber son ressentiment sur Annius,
et l'on prétend qu'il le fit enîpoison-
ner. Quoi qu'il eu soit, Annius mou-
rut le i5 novembre i5o2, âge ds
soixante-dix ans , comme le porte
l'ëpitaphe gravée sur son tombeau, à
Rome, dans l'ëglise de la Minerve, de-
vant la chapelle de S. Hyacinthe, et
non pas de S. Dominique, comme on
le dit communëraer.t. Cette ëpitaphe ,
que le temps avait eflacëe, fut restaurée
en ]6i8, par les soins des habitants
de Vitei'be. Annhis a laisse un grand
nombre d'ouvrar^es. Les deux pre-
miers qu'il publia , et qui firent une
grande sensation dans un temjis où
la destruction de l'empire de Cons-
tantin, par les sectateurs de Mahomet,
frappait Ions les esprits, furent son
Traité de l'empire des Turks , et
celui qu'il intitula : De futiiris Chris-
tianorum triumphis in Tiircas et
Saracenos , ad Xystiim IF et omnes
principes Christianos, Gennae, t48o,
in-4°. Ce dernier n'est qu'un recueil
de ses explications ou de ses réflexions
sur le livre de V Apocalypse. Il les
av;:it prêchces dans l'ëglise de Sl.-Do-
miuique, à Gênes, dans le cours de
l'année 1471. Cet ouvrage, qui a eu
plusieurs éditions, et dont il existe un
manuscrit à la Bibliothèque impériale,,
est divisé en trois parties. Dans la
première, l'a.Ueur fait un précis de
tout ce que les interprètes catholiques
avaient écrit avant lui sur les quinze
premiers chapitres de Y Apocalypse.
Dans la seconde , il donne ses propres
réflexions, depuis le seizième cha-
pitre jusqu'à la fin du même livre, et
2-24 A N N
il entreprend de prouver que le faux
prophète Mahomet est le véritable
autechrist prédit ]iar S. Paul , et dont
S. Jean décrit tous les caractères j
« car , dit-il , quoique ce faux pro-
« pliète soit mort, sa secte impie vit
» encore ; elle fait des prt!p;rès contre
» le ])cuple de Dieu, et elle durera
» Jusqu'à ce que, selon le septième
» chapitre de Daniel, le règne soit
» donne par le Trèr. - Haut au peuple
» des saints, c'est-à-dire aux chré-
» tiens.» La troisième et dei'nière par-
tie n'est qu'une ré'^apitulation de ce
que l'auteur avait déjà ])ubiié dans son
Traité de l'empire des Tiirks. Il ]ui-
biia aussi des questions , Super miiLuo
Judaïco el civili et dii>i?io , datées de
Vitcrbe, le 8 mai i49'^', ni-^"., mais
sans nom d'imj)rimeur, ni du lieu de
l'impression. Le Catalogue de la biblio-
thèque d'Oxford lui attribue un Com-
mentaire sur Catulle, TibuUe et Pro-
perce , Paris, i6o4. Le P. Mcéron
observe que les bibliothécaires des
dominicains ne parlent point de cet
ouvraj^e, non plus que du précédent ;
mais l'ouvrasse qui a donné à Annius le
plus de renommée, boiuie et mauvaise,
est le grand recueil d'antiquités qu'il
publia à Rome, en 1498, sous ce ti-
tre : Antiquilaium variarum volu-
mina XFIl , ciim commentariis
Fr. Joannis Annii Fiterbiensis , in-
fol. Elles furent réimpi imées la même
année, à Venise, dans le même for-
mat , et elles l'ont été plusieurs fois ,
depuis, à Paris, à Bàle , à Anvers, à
Lyon, tantôt avec, et tantôt sans les
commentaires. Dans ce recueil, An-
liius prélendit faire présent au monde
savant , des ouvrages originaux de
plusieurs historiens de la pliîs haute
antiquité , tels que Bérose , Fabius
Pictor, Myrsilc, Sempronius, Archi-
loque, Caton, Mégasthène (qu'il nom-
me jMelastbcue, quoiqu'il n'y ait ja-
ANN
mais eu d'auteur de ce nom ) , Mané-
thon , et plusieurs autres, qui devaient
jeter le plus grand jour sur la chro-
nologie des premiers temps, et qu'il
disait avoir heureusement retrouvés à
Blantoue , dans un voyage où il avait
accompagné Paul de Campo Fregoso,
cardinal de S. Sixte. L'attention pu-
blique était alors dirigée sur des dé-
couvertes de ce genre, qui se multi-
phaient tous les jours , et auxquelles
l'invention récente de l'imprimerie
donnait une nouvelle activité. On fut
d'abord ébloui par ces grands noms :
on reçut, comme originaux, les ouvra-
ges recueillis par Annius , et dont il
prétendait, dms ses Comvientaires ,
démontrer l'authenticité. Les histo-
riens de plusieurs villes et de plusieurs
provinces d'Italie , se lirent gloire de
trouver pour leur patrie, dans des au-
teurs qu'on leur doublait comme classi-
ques , des preuves d'une antiquité qui
se perdait dans la nuit des temps.
Annius n'eut jwint, d'abord, de con-
tradicteur, et l'on doit remarquer que
ce fut dans l'année qui suivit la pu-
blication de son livre qu'il fut nommé
maître du sacré palais ; mais bientôt ,
en Italie même , on cria de toutes
parts à l'erreur ou à l'imposture. An-
nius eut aussi quelques défenseurs.
On peut ranger en quatre classes les
sentiments des auteurs à son sujet : les
ims pensent qu'il eut réellement en
sa possesion certains fragments des
anciens auteurs qu'il a pubUc's , mais
qu'il les étendit considérablement , et
qu'il y ajouta toutes les fables et toutes
les fausses traditions dont ce recueil
est rempli; les autres croient que le
tout est faux et controuvé , mais
qu' Annius v fut trompé le premier, et
(pi'd publia de bonne foi ce qu'il
crut vrai et authentique. Théophile Rai-
naud est de cette opinion, dans son livre
De bonis et malis libris y p. \0\ ;
ANN
mais , dans son autre ouvrage , De
immunitate Cyriacoriim , qui est
plus moi'dantqiie le premier, et qu'il
a donne' sous le faux nom de Pierre
de Vaiicluse , il ne l'accuse point à
demi, et ne lui foit aucune grâce.
D'autres ont détendu Annius , et ont
pris pour de véritables antiquités tout
ce qu'il a donné sous ce litre : plu-
sieurs , il est vrai , sont des auteurs
sans vrai savoir et sans critique ; mais
plusieurs aussi méritent plus de con-
fiance, tels que Bernardino Baldi ,
Guillaume Postcl, Albert Krantz, Si-
gonius, r>éandre Alberti , et quelques
patres. On dit qu'Alberti reconnut
trop tard l'erreur où il élait tombé ,
et qu'il mourut de cliaç^rin d'avoir gàlé
sa Description de l'Italie par toutes
les fables qu'il avait puisées dans le
recueil d' Annius. Des critiques plus
sévères ont soutenu que le recueil
entier n'avait d'autre source que l'ima-
gination de l'éditeur : les plus célèbres
sont Antoine Agostini , Isaac Gasau-
bon ; Jean Mariana , dans son His-
toire d'Espagne ; Ferrari , dans son
livre De origine Romanomm ; Mar-
tin Hanckius , De rornanarnm reriiin
scriptoribus ; le cardinal Noris , Fa-
bricius , Fontanlni, etc., etc. De sa-
vants Italiens, contemporains d' An-
nius , furent les premiers à aperce-
voir et à dénoncer la fraude , entre au-
tres , Marc-Antoine Sabeliicus, Pierre
Crinitus , Raphaël de Volterre, etc. j
Pignoria , dans ses Origines de Pa-
doue, prit la précaution d'avertir qu'il
n'y faisait aucun usage des prétendus
auteurs sortis des mains d'Annius de
Viterbe . déclaration que le savant
Mafféi a cru devoir répéter, depuis,
dans sa Ferona illiisirata. On peut
voir, dans Niceron et dans Apostolo
Zeno ( Dissertazioni Fossiane ) , la
dispute qui s'éleva, dans le 17% siè-
cle , entre Mazza , dominicain , qui
A N N 225
publia une Apologie d'Annius , Spa-
ravieri de Vérone , qui écrivit contre ,
et François Macedo , qui répondit
pour IVIazza. Apostolo Zeno , ennemi
de tout excès , en trouve dans les
accusations, comme dans les défenses :
il lui paraît également impossible,
d'un côté, qu'un homme aussi savant
que l'était Annius , d'un état et d'un
caractère grave , et qui fut bientôt
après , revêtu d'une des premières
charges de la cour de Rome , ait in-
venté, fabriqué et supposé tous ces
auteurs qu'il donna pour authentiques,
et , de l'autre , que ces auteurs , pré-
tendus anciens , le soient véritable-
ment. Il ne le croit donc ni un im-
posteur , ni un homme tout-à-fait sin-
cère , mais un homme crédule et
trompé , qui s'est trop complu dans
son erreur , et qui a fait tous ses
efforts pour y entraîner ses lecteurs
après lui ( Voy. Disscrtaz. Vossia^
ne , tom. II , p. 189 à igu ). Ce ju-
dicieux critique cite deux preuves
bien fortes de la bonne foi d'Annius,
mais en même temps de sa crédu-
lité, et de la simplicité de ceux qui
croient en lui et aux auteurs de son
recueil. Le P. Labat , dominicain ,
dans le tome VU de ses Fojages en
Espagne et en Italie {Xmsîevd., l'j'ïn,
in-i2, p. 66 et suiv.), raconte que
le P. Lcquien, du même ordre , auteur
de r Oriens christianus , et d'uutreS
ouvrages , lui avait fait voir une dé-
fense d'Ajinius , dans laquelle il don-
nait ces deux preuves. L'une est ,
qu'avant confronté le Manethon et
le Bérose de la Collection d'Annius ,
avec divers fragments de ces deux
auteurs , épars dans les livres de Jo-
sephe , il les avait trouvés tout diffé-
rents. Or , si Annius eût été le fabri-
cateur de ces fausses histoires, il était
impossible qu'ii ne lui fût pas venu dans
l'esprit d'y encadrer ces fragments, qui
i5
226 ANN
auraient donné de l'aiitonté à son im-
posture. L'autre preuve est que, par mi
les manuscrits de Colhert ( faisant au-
jourd'hui partie de 1- Bibliothèque im-
périale), il s'en trouvait un du i5 .
siècle, entre I2'20 et r23o, contenant
un catalogue d'auteurs , parmi les-
quelles on remarquait Bérose et Mé-
gasthène , les mêmes qui font partie
du Recueil d'Annius : ce n'était doiic
pas lui qui les avait fabriqués ; ils l'é-
taient déjà depuis plusieurs siècles, Zé-
no conclut que les auteurs compris
dansccltecollectionneméritentaucune
confiance, et il se moque de Fietro
Lauro qui fut , dit-il , assez désœuvré
( cosï scioperato ) pour employer son
temps à traduire et à publier tous ces
ouvrages , et plus encore de Fr. San-
sovino,qui fit, à celle traduction, des
additions et des notes , et les fit réim-
primer à Venise , 1 55o, in-4". Tira-
boschi , autre critique non moins ju-
dicieux que Zcno , embrasse son
opinion ( Sior. délia Letter. ital. ,
tora. YI, part. II, pag. i6 et 17 ,
édition de Modène, in
- /■'
Comme lui, il se refuse à croire An-
nius un faussaire, et ne l'accuse que
d'une excessive crédulité. « 11 n'y a
» maintenant, ajoute-t-il, aucun hom-
)) me , médiocrement versé dans les
» premiers éléments de la liltéralure,
■>) qui ne rie, et des historiens publiés
» par Anuius, et de leur commenta-
V tcur; et je regarderais comme une
» perte inutile de temps que d'allé-
» guej- des preuves de ce dont per-
» sonne ne doute plus , si ce n'est
» ceux qu'il est impossible de cou-
» vaincie. »> G — é.
ANNOÎN, ou ILATmON(S.) , arche-
vêque et électeur de Cologne, était de
la famille des comtes de Sonnenberg
de Souabe : il fut d'abord rp( leur à
Bamberg, ensuite piévôl à Gosslar.
L'empereur Henri III ayant entendu
ANN
parler de ses talents , le fit venir à la
cour, et l'envoya peu après à Cologne ;,
en qualité d'ambassadeur. Il s'y con-
duisit avec tant d'habileté que l'ar-
chevêque Hermann le recommanda ,
comme digne de lui succéder , et il fut
élu, en I o55. Api es s'être appliqué à
fonder des chapitres , et à réformer
les monastères dans son diocèse, il fut
rappelé à la cour par l'impératrice
Agnès, qui lui confia l'éducation du
jeune empereur Henri IV , et l'admi-
nistration de l'empire qu'il dirigea
avec un égal succès. Privé quelque
temps du ministère , il retourna dans
son archevêché, où les révoltes de ses
propres sujets lui firent courir de
grands dangers , et occupèrent sou-
vent sa justice un peu sévère. 11 repa-
rut à la cour en 1072 , et mourut le 4
décembre 1075 , laissant une réputa-
tion honorable. Il fut enseveli dans le
couvent de Siegberg , et canonisé peu
après. G — T.
ANNONE ( Jean -Jacques de) ,
naquit à Bàleen j 7-28, et y mourut en
i8o4- H étudia la philosophie et la
jurisjn-udencc , et obtint dans sa pa-
trie , en 1 760 , la chaire d'éloquence ,
qu'il quitta en 1779, pour celle de
jurisprudence. Il s'occupa avec succès
d'aichœoiogie, d'histi-iie naturelle et
de physique ; ses collections , tant de
médailles et de monnaies , que d'ob-
jets d'histoire naturelle , qu'on con-
serve à Bàle , sont riches et remar-
quables. Outre un nombre considé-
rable de Mémoires, insérés dans le>
Acta Hel^elica et dans d'autres ou-
vrages périodiques de l'Allemagne , il
a donné d;'s Notes relatives aux mon-
naies antiques , pour l'édition de Bà!e ,
1762, du GZo55rtiVe de Ducange, et
il a enrichi le bel ouvrage de Knorr. sur
les pétrifications , d'un grand nombre
d'articles et de figures relatives à de*
pièces de son cabinet» U — i-
ANQ
ANQUËTIL ( Louis-Pierre ) , na-
quit à Paris, le 21 janvier 1723. En-
tré à dix-sept ans dans la congréga-
tion de Ste.-Geneviève , il se distingua
dans l'exercice des fonctions d'ensci-
j;nement tlie'ologique ou littéraire qui
lui furent confiées. Le séjour qu'il fit
à Reims, en qualité de directeur du
séminaire , lui donna tout à la fois
l'idée et le moyen de composer l'His-
toire de cette ville. Nommé, en i.^^Ç),
jirieur de l'abbaye de la Roc, en An-
jou , il fut peu après envoyé, en qua-
lité de directeur, au collège de Senlis,
pour y ranimer les études; ce fut là
qu'il composa VEsprit de la Ligue.
En 1766, il obtint la cure ou prieuré
deCliàteau-Renard, près de Montar-
gis, qu'il échangea, dès le commence-
ment de la révolution, contre la cure
de la Villette, près Paris. Enfermé à
St.-Lazare , pendant le règne de !a
terreur, il y continua son Histoire
universelle. Elu membre de la seconde
classe de l'Institut , lors de la forma-
tion de cette société, il fut bientôtaprès
attaché au ministère des relations ex-
térieures , et crut devoir composer ses
Motifs des traités de paix, etc. Doué
d'une santé robuste, fruit d'une hu-
meur égale et d'une tempérance uni-
verselle, Anquetil était très-laborieux;
il travaillait régulièrement dix heures
par jour; les ouvrages les plus péni-
bles ne l'effrayaient pas. Déjà plus
qu'octogénaire , il méditait les plus
vastes entreprises liltéraires, lorsque
la mort l'enleva , le 6 septembre 1 808 ,
dans sa quatre-vingt-qiiatrième année.
La veille encore, il disait à un de ses
amis : « Venez voir un homme qui
» meurt tout plein de vie. » On a de
lui : I. Histoire civile et politique de
la ville de Reims, 1756-57 , 5 vt-I.
in-i -2. Cette histoire ne va pas au-deià
de 1657; ^'^^ devait avoir un qua-
trième volume qui n'a pas paru. Un
ANQ 227
nommé Félix de la Salle est, dil-on ,
le principal auteur de l'Histoire de la
ville de Reims. Les deux collabora-
teurs disputèrent à qui mettrait son
nom à cet ouvrage. Le sort décida
en faveur d'Anquetil. ( On peut, sur
C( tte anecdote , consulter le Mémoire
servant de réponse, pour le sieur
Delaislre , contre le sieur Anqueiil ,
Reims, 1758, in-4". de 14 pages).
\/ Histoire de Reims est un ouvrage
rempli de recherches curieuses , et
d'où sont bannies les vaines con-
jectures et les dissertations futiles.
L'auteur disait , vers la fin de sa vie : « Je
w viens de relire V Histoire de Reims ^
» comme si elle n'était pas de moi; je
» ne crains pas de dire que c'est ua
» bon ouvrage. » II. Almanach de
Reims, 1754, in -24; \\\.X Esprit
de la Ligue , ou Histoire politique
des troubles de France, pendant les
iG*. et 17". siècles, J767, 5 vol.
in-12; 1771 , 5 vol. in-12; 1785,
5 vol. in-12; 1797, 5 vol. in- 12. Ou
ne trouve pas à un très-haut degré,
dans cet ouvrage , cette sagacité qui
aperçoit et développe aux yeux des
autres les causes morales ou poHtiqucs
des grands événements; mais l'exac-
titude et l'heureux enchaînement des
faits mettent le lecteur à portée de
pénétrer lui-même dans le secret des
cœurs ou des cabinets. IV. Intrigue
du cabinet sous Henri IV , et sous
Louis XIII, terminée par la Fron-
de, 1780, 4 vol. in-12. Cette nou-
velle production est très-inférieure à
la première : le style en parut médio-
cre et quelquefois même peu coriect;
mais ce qu'on y blâma le plus, c'est
l'indulgence timide ou partiale avec
laquelle l'administration et le carac-
tère de Richelieu y sont tracés ; ni le
génie, ni les rigueurs tyranniques de
ce grand minisire n'y sont peints de
couleurs assez fortes. V. Louis XI F,
228
ANQ
sa Cour et le Bêlent, 1789, 4 vol-
in-t'2, réimprimés en 1794? 5 vol.
in - 1 2. Cette espèce de continuation
des deux précédents ouvrages ne
mérite point de leur être comparée ;
c'est un amas d'anecdotes sans liaison
qui ont perdu tout leur prix depuis
la publication des Mémoires particu-
liers d'où elles étaient tirées. VI. Vie
du maréchal de Fillars, écrite par
lui-même, suivie du Journal de la
<7o«r(£e 1724 à 1754, Paris, 1787,
4 vol. in-ia; i79'2, /j vol. in- 12. Ce
n'est qu'un extrait des IMémoircs écrits
par Villars lui-même ; la fidélité en
fst le seul mérite. VII. Précis de
l'Histoire universelle , 1797 , 9 vol.
in-i2 ; 1801, 12 vol. iu-12, 5".
e'difion , entièrement revue ( c'est-
à-dire, corrigée par M. Jondot),
1807, 12 vol. in- 12. Cet ouvrage a
été traduit en anglais , en espagnol et
en italien. Cependant, ce n'est pres-
que qu'un abrégé de VHistoire uni-
verselle des Jonglais , et il ne doit
êtreluqu'avecprécaution.VIII.j'l/ot//i
des f;uerres et des traités de paix de
la France , pendant les règnes de
Louis XIV , Louis XV, et Louis
XVI, 1 798 , in-S"".; IX. Histoire de
France, depuis les Gaules jusqu a
la fin de la monarchie, i8o5 et suiv.,
14 vol. in-i2. Anquetil avait près de
quatre-vingts ans lorsqu'il commença
cette histoire , à laquelle la vie toute
entière semble ne devoir pas suflire.
Aussi se ressent -elle beaucoup de la
précipitation avec laquelle elle a été
faiic et de l'âge où l'auteur l'a com-
posée. X. Notice sur la vie de
M. anquetil du Perron , son frère ;
Xir. diverses Dissertations, dans les
Mémoires de l' Institut {V. Mailly).
ANQUETIL-DUPERRON (Abra-
ham-Hyacinte) , frère du précédent,
haquit, à Paris, le 7 décembre 1751.
ANQ
Après avoir fait ses études avec dis-
tinction dans l'université de cette
ville , et avoir acquis uue connais-
sance assez étendue de l'iielireu , il fut
appelé à Auxerre par M. de Caylus ,
qui en était alors évêque. Ce prélat
lui fit faire ses études théologiques ,
d'abord dans le séminaire de son dio-
cèse, et ensuite dans celui d'Amers-
foort près d'Utrccht ; mais le jeune
Anquetil n'avait aucune vocation pour
l'état ecclésiastique , et se livrait avec
ardeur à l'étude de l'hébreu et de ses
nombreux dialectes , de l'arabe et du
persan. Ni les sollicitations de IVI. de
Caylus , ni l'espoir d'un rapide avan-
cement, ne purent le retenir à Amers-
foort , lorsqu'il crut n'avoir plus rieii
à y apprendre. Il revint à Paris , où
sou assiduité à la Bibliothèque du
roi , sou ardeur ])our le travail et ses
progrès, lui meVitèrent l'attention de
l'abbé Sallier , garde des manuscrits.
Ce savant le fit connaître à ses con-
frères et à ses amis , qui s'unirent à
lui pour faire accorder au jeune An-
quetil un modique traitcraont , en
qualité d'élève pour les langues orien-
tales. Il avait à peine obtenu cet en-
couragement , lorsque le hasard fit
tomber dans ses mains quelques
feuillets calqués sur un manuscrit zend
du Vendidad-Sadé. Dès-lors , plus
do repos pour lui ; l'Inde devient le
but de ses travaux : il forme le projet
de la parcourir pour découvrir le>
livres sacrés des Parses , et ne songe
plus qu'aux movens de l'exécuter.
L'occasion était favorable ^ on prépa-
rait, au port de l'Orient, une expé-
dition pour cette contrée. Cependant ,
les démarches de ses protecteurs ,
pour lui obtenir le passage, sont sans
succès. Cet obstacle ne fait qu'ac-
croître son ardeur. Il va trouver le
capitaine de recrutement , s'engage ,
malgré ses représentations , et part de
ANQ
Paris , en qualité de soldat , le sac sur
le dos , le 7 novembre 1 754> Aussitôt
que ses protecteurs furent instruits de
son départ , ils volèrent chez le minis-
tre , qui , touché de ce trait de zèle pour
les sciences , lui accorda le passage
franc, la table du capitaine, et un traite-
ment qui devait être fixé par le gouver-
neur des établissements français dans
l'Inde. Anquetil, après neuf mois de
traversée , dcbaïqua , le 1 0 août 1 7 55 ,
à Pondichéry. Il ne resta dans celte
ville xjiie le temps nécessaire pour
apprendre le persan moderne , et il
se rendit eu diligence à Scbander-
nagor, où il se flattait d'étudier le
samskretan. Dès qu'il y fut arrivé , il
reconnut qu'il s'était livré à des es-
pérances trompeuses. Il était sur le
point de s'en retourner , lorsqu'une
maladie grave fît craindre pour ses
jours ; mais il était à peine échappé
à ce danger , que la guerre se dé-
clara entre la France et l'Angleterre.
Schandernagor fut pris , et Anquetil ,
craignant alors de manquer l'objet de
ses voyages , et désirant retourner à
Pondichéry, se décide à faire ce tra-
jet par terre : il part seul , presque
sans argent et sans bagages , traverse
des contrées infestées par des bêtes
féroces , brave leur fureur et la per-
fidie de ses guides, visite toutes les
pagodes, recueille tous les renseigne-
ments utiles, et arrive à Pondichéry
après cent jours de maixhe , pendant
lesquels 11 avait paixouru un espace
de près de quatre cents lieues , sous
un climat brûlant et inhabité. 11 y
trouva un de ses frères qui arrivait
de France, et s'embarqua avec lui pour
Surate j mais , désirant connaître le
pays, comme il connaissait la côte de
Goromandel , il descendit à Mahé , où
le vaisseau relâcha , et se rendit , à
pied , à Surate. Ce fut là qu'il par-
vint, à fqrce de persévérances et de
ANQ 2->g
soumission , à vaincre l'humeur fa-
rouche et les scrupules de quelques
destours ( prêtres parses ) du Guzara-
te. 11 acquit auprès d'eux une connais-
sance assez étendue du zend et du
pchlevy , pour traduire un Diction-
naire zend et pehlevy , le Fendidad-
Sadé et quelques auti'es ouvrages
écrits dans ces langues. Il se proposait
d'aller étudier les langues , les antiqui-
tés et les lois sacrées des Hindous à
Bénarès, lorsque la prise de Pondiché-
ry le força à retourner en France. II
monta sur un vaisseau anglais , débar-
qua à Londres , où il séjourna quelque
temps, visita Oxford, et arriva à Paris
le 4 mai i ^ô'i , sans fortune , sans désir
d'en acquérir, mais riche de cent qua-
tre-vingt manuscrits, et d'autres ob-
jets rares. L'abbé Barthélémy , et ses
autres amis , lui firent obtenir une
pension , avec le titre et les appointe-
ments d'interprète pour les languci
orientales à la liibliothèque du Koi.
Eu 1765, l'académie des belles-lettres
le reçut au noraI)re de ses associés;
dès-lors , il se livra tout entier à la ré-
daction et à la publication de ses ma-
tériaux. En 1771,1! pidilia, en 5 vol.
in-4"., sous le titre de Zend-Avesta,
le recueil des livres sacrés des Parses.
Les deux plus anciens morceaux de ce
recueil sontle F endidadcxV Izeschné ,
qui paraissent contenir des fragment»
des ouvrages de Zoroastre et de quel-
ques autres philosophes d'une antiquité
reculée. Anquetil joignit à son Zend'
Ai'esia une Rclarion curieuse de ses
voyages , et une savante Fie de
Zoroastre. En 1778,11 publia sa
Législation orientale , où if combat-
tit , avec plus de vérité que de succès,
le système de Montesquieu sur cette
même législation. En 1786, on pu-
blia ses B^echerches histori<jiies et
géographiques sur Vlnde ; cet ou-
vrage , qui fait partie de la Géogrœ-
si3(> A N Q
j)hie de l'Inde , du père ThiefTentlia-
1er, l'ut suivi , en i -jSq , de son Traite'
De la dignité du commerce et de
l'état du commerçant. La révolution
vint , peu de temps après , troubler
le repos dont il jor.issait. Trop sen-
sible pour envisager le spectacle des
maux, de sa patrie , il rompit toutes
ses liaisons , s'enferma dans son ca-
binet , et n'eut plus d'autres amis que
ses livres , d'autres délassements que
le souvenir de ses chers bralimes et de
ses destours. Les fruits de sa retraite
furent , en 1 798 , Y Inde en rapjwrt
avec l'Europe, 1 vol. in -8"., et , en
1 8o4 , la tr iduction latine , friitedu per-
san, des Oupnek'hat , on Upnnischa-
da , c'est-à-dire, Secrets qu'il ne faut
pas révéler, 2 vol. in-4". Quoiquel'au-
teur de la version persane n'ait point
conservé les idées indiennes dans toute
leur pureté, Anquetil n'en a pas moins
rendu un grand service aux lettres , eu
faisant connaître ces r/panischnda,
ou Extraits des Védas. Lorsq ne l'I ns-
titut fut l'éorganisé , Anquetil en fut
nommé membre , et donna , peu
après, sa démission. Enfin, épuisé
par ses longs travaux, par le régime
austère auquel il s'était astreint , et
par les infirmités de la vieillesse, il
mourut à Paris, le 17 janvier i8o5.
Outre les ouvrages que nous avons
indiqués, il avait encore lu à l'acadé-
mie plusieurs mémoires , dont l'objet
est de prouver l'authenticité des ouvra-
ges attribués par les Parses à Zoroas-
tre, et d'éclaircir l'histoire et tes lan-
gues anciennes derOrienl. 11 était occu-
pé à revoir une traduction du P'oyage
du père Paulin de St.-Bartliélemy
dans l'Inde^ et à la publier avec des
corrections et des additions, lorsque
sa mort arrêta l'impression de cet ou-
vrage : elle a été continuée par les
.soins de M. Silvestrc de Sacy , et l'ou-
vrage a paru en 1808,5 vol. iu-S".
ANS
Enfin , Anquetil a laissé un grand
nombre de manuscrits , parmi lesquc!&
on distingue la traduction d'un Traité
latin sur V Eglise , du célèbre doc-
teur Legros, en 4 volumes in-4". Une
immense érudition , la connaissance
de presque toutes Ips langues de l'Eu-
rope , dont il se facilitait l'étude par
des méthodes qui lui étaient propres,
et une activité infatigable, étaient unis,
chez Anquetil , ta l'amour sincère de la
vérité , à une saine philosophie , à uu
rare désintéressement , et aux plus
éminentes qualités du cœur. On se raji-
pellera toujours , avec un sentiment
d'admiration , qu'il refusa, des Anglais,
5o,ooo livres, qu'ils lui offi irent pour
son manuscrit de la traduction du
Zend-ylvesta. Comme tous les hom-
mes d'un mérite supérieur , il fut ou
1 lutte à l'envie, parce qu'il combattit
toujours le faux mérite ; mais le monde
savant, en reconnaissant dans ses
ouvrages quelques erreurs m imper-
i'cctions , Ta placé néanmoins au rang
des hommes les plus érudits qu'ait
pioduits le 1 8". siècle. J — n.
ANSALONI ( GioRDANo) , mission-
naire sicilien, que l'Eglise du Japon
compte au nombre de ses martyrs. Il
naquit à Saut' Angelo, ville dudiocèse
d'Agrigeiitc , et entra de bonne heure
dans l'ordi e de S. Dominique ; après
son noviciat , il fut envoyé à Salaman-
que en Espagne, pour y achever ses
études. Bientôt, son zèle lui fit tourner
ses vues vers les missions, et il obtint
de ses supérieurs la liberté de s'y con-
sacrer. 11 fut du nombre des mission-
naires de cet ordie qui partirent , en
iG'iS , pour les Philippines , où ils se
rendirent par la route du Mexique.
Arrivé à Manille, le père Ansaloni se
dévoua au service àcsi malades dans
les hôj)itaux , et donna le reste de son
temps à l'élude du chinois. Lorsqu'il
put entendre les livres écrits en cctto
ANS
Irngnc , il entreprit un Recueil des su-
jierstitions chinoises , pour se mettre
lui-même en e'tat de les combattre avec
j)!us de succès , s'il arrivait que son
Diiuistère l'appelât à la conversion des
peuples de cet empire j mais il n'eut
pas le temps de finir cet ouvrage , qui
Jie fut jamais publie': la Providence lui
.ivait marque' une autre destination. Il
reçut de ses supérieurs l'ordre de se
rendre au Japon. Accompagne d'un
de ses confrères , il y pénétra , en
^G^2, dans le temps oh la persécu-
tion contre les chrétiens y éclatait
avec le plus de violence. Les dan-
gers qui envii'onnaient de toutes parts
le vertueux missionnaire , ne l'empê-
chèrent pas de se livrer à toutes les
fonctions de son ministère. Il échappa
aux recherches pendant deux ans j
mais il fut enfin saisi , ainsi que sou
collègue, Soixanlc-neuf chrétiens, ar-
rêtés avec eux , furent décapités , et
les deux missionnaires , condamnés au
supplice de la fosse, y consommèi'ent
leur marlvre, le 1 8 novembre i(>r)4.
Pendant le séjour que le père Ansaloni
fut forcé de faire au Mexique , il y
employa ses loisirs à une traduction
latine des Vies des Saints de sou or-
dre, écrites en espagnol par Ferdinand
Tiastillo : le manuscrit de cette version,
qu'on dit être très-é!égante , se con-
serve encore à Seville. G — r.
ANSART ( André-Joseph ), né dans
l' Ailois, en 1 7 '25 , entra dans l'ordre de
St.-Benoît, et , ayant été nommé procu-
reur d'une des maisons de cet ordre ,
disparut avec les fonds qu'il avait entre
les mains. Il s'attacha à l'ordre de Mal-
te , en devint conventuel, se fit recevoir
avocat au parlement, et docteur en droit
de la faculté de Pans; il fut ensuite
nommé prieur- curé de Villeconin ,
membre des académies d'Arras et des
arcades de Rome. Il mourut vers i 790,
après avoir publié: I. Dialogues sur
ANS 25r
Vulilité des moines renies , 1 76H ',
in- 1 2 ;I1. Exposition sur le Cantique
des Cantiques de Salomon, '77<^ ■>
in-12; 111. Histoire de S. Maur ,
abbé de Glanfeuil , 1772, iu - l 'x.
La première partie comprend la Vie
de S. Maur ; les deuxième et troisième
parlent des diftërentes translations des
reliques du saint ; la quatrième est
l'Histoire de l'abbaye de St.-Maur-dcs-
Fossés ( Voy. Amandus). IV. Eloge
de Charles F^ empereur^ traduit du
latin de J. Masénius , 1777 , in-1'2;
\ . Esprit de S. Plncent-de-Paul , ou
Modèle de conduite proposé à tous
les ecclésiastiques , 1780 , in-i'2j
VI. Histoire de Sainte Reine d'A-
lise , et de Vabbare de Flavigny ,
1785, in -12; VII. Histoire de S.
Fiacre , 1784, i"-'^ ; VIII. Biblio-
thèque littéraire du Maine , Chalons-
sur-Marne, i 784, iu-8". Ansart afait
revivre trois cents auteurs , dont on
axait oublié jusqu'aux noms. 11 devait
V avoir sept auti-es volumes qui n'ont
pas paru. IX. La Fie de Grégoire
Cortez, bénédictin , éi>éque d'Urbin,
et cardinal, 1786, in-iu. Ansart
était ignorant et paresseux. On croit
qu'il avait pris tous les ouvrages qu'il
a publiés sous son nom , dans les
archives du Régime , autrement de
St.Germain-des-Prés. A. B— t.
ANSBERT ( S. ) , évêque de Rouen,
né à Chaussv, village du Vexin , d'une
famille noble. Ses progrès dans les
lettres furent rapides, et il parut jeune
encore à la cour de Glotaire III , oîi
le chancelier Robert voulut lui faire
épouser sa fille Angradisme ; mais
Ansbert, qui projetait dès- lors de se
consacrer à Dieu , préféra le célibat au
mariage. Son mérite l'ayant fait élever
à la dignité de chancelier , il n'en fut
pas moins entraîné par son penchant
pour la vie solitaire , quitta brusque-
ment la cour, et alla s'enfermer dans
252 A K S
l'abbaye de Fontenelle. Il en devint
abbé, marcha sur les traces de S.
Vaiidrille et de S. Lambert ses pré-
décesseurs , fonda des hôpitaux, et fit
de sages règlements. Elevé, en 685,
au siège cpiscopal de îiouen, il se voua
tout entier à la prédication des fidèles
et au soulagement des pauvres ; mais
Pépin d'Heristal, maire du palais, iné-
conlent de la sévérité de ce saint prélat,
l'arracha de son église et le relégua
dans le monastère de Hairaont , en
Haiuault, où il mourut, en 698 , dans
les exercices de la bienfaisance et de
la p'été, au moment même où il ve-
nait d'être autorisé à retourner dans
son dioccse. S^ai corps fut transporté,
selon sa deinière volonté, à l'alibave
de Fontenelle. Aigrade a écrit sa vie ,
que nous avons dans Surius et dans
Bollandus. K.
A^ SCHAIRE, ou ANSGARIUS (S.),
surnommé l'Apôtre du Nord, né en
Picardie, le 8 septembre 801 , fut
élevé dans un couvent de bénédictins ,
à Corbic , d'où il passa à Corvey en
Westphalie ; il y fit de tels progrès
dans les sciences , qu'en 82 1 il fut
nommé recteur de l'école du couvent.
Harald , roi deDanemarck , près de
quitter Mayeuce où il avait été baptisé,
pour retourner dans ses états , de-
manda quelques missionnaires qui pus^
sent y introduire le christianisme :
Anschalre, accompagné de son ami
Autbert, entreprit cette pénible tache.
11 oblint d'abord de grands succès, et
fonda une école chrétienne à Hadebv,
aujourd'hui Schleswig ; mais le zèle
violent d'Harald ayant soulevé ses su-
jets , il fut contraint de s'enfiiir et
Anschaire avec lui. Le roi de Suède
Biœrn , avant envoyé, peu après , des
ambassadeurs à Louis-le-Pieus , em-
pereur d'Allemagne , Anschaire les sui-
vit en Suède à leur retour. Le roi lui
accorda la permission d'enseigner pu-
ANS
bliquement le christianisme : on avait
préalablement consulté les idoles pour
savoir ce qu'on devait faire , et la ré-
ponse du sort avait été favorable au
mis^ionnaire chrétien. Il convertit un
grand nombre des principaux de la
cour, bâtit une église , et revint dans
son cloître, en 85 1. Louis-le-Pieux
le nomma , peu après , premier arche-
vèqiiede Hambourg, et le pape Pascal ,
en lui envovant le PaUium , lui donna
le titre de légat dans le Nord ; mais y.
en 845, Anschaire vit l'église et le cou-
vent de sa ville arcliiépiscopale pillés ,
et livrés aux flammes par des brigands:
à peine eut-il le temps de s'enfuir^
presque nu , à Brème. Il se retira alors
dans i'asyle qu'une femme nouvelle-
ment convertie , lui oftrit. L'évèque de
Brème , Leuterich , étant mort peu
après , l'empereur Louis II nomma
Auschaire à sa place : cet évéchéfut dès-
lors irrévocablement réuni à l'arche-
vêché de Hambourg. Le zèle d' Ans-
chaire ne lui permit pas de jouir en
paix de sa nouvelle dignité: il retourna
en Danemarck, acquit la faveur du roi
Eric , et donna , dans ce royaume ,
une base plus solide à la religion chré-
tienne. 11 réussit également en Suède ,
auprès du roi Olof ou Olaiis , dans le
Holsteinetdaus toutes les contrées voi-
sines où régnait l'idolâtrie. De retour à
Brème , il v moiuut d'une dyssenterie »
le ") février 8G4. 11 fonda des hôpitaux;
il visitait lui-même les pauvres et les
malades , rachetait les prisonniers , et
remplissait , avec la plus scrupuleuse
exactitude , tous les devoirs du cuite.
A sa mort , le pape Nicolas I' ^ le mit au
nombre des saints. Il avait écrit plu-
sieurs ouvrages; mais il ne nous reste
de lui que qnclijues lettres et Liber
de vita et mirucuUs Str.-fVilohadi y,
imprimé avec la Vie d'Anschaire; Co-
logne, 16'^). , in-8". , et plusieurs foii
depuis. {Foj. sa Vie ^ par Kimbcrt^
ANS
dans les Scriptor. rer. Danicarum ,
11". 3o,de Langcbek ; Hi$t. Cimbriœ
litlerariiE Molleri. ) G — t.
ANSEAUME (........),
né à Paris , y mourut en juillet 1 784 ;
il rendit beaucoup de services au théâ-
tre italien , dont il était souffleur , et
pour lequel il fit les compliments de
clôture de 1760 à 1778- H avait
contribué à la naissante de l'Opéia-
Coinique de la Foire, dont ii fut sous-
directeur de 1755 à 1757, souffleur
de 1758 a 17G1, et où il donna le
Peintre amoureux , opéra comique,
joué le 'j,3 juin 1757 , et qui resta
long-temps au théâtre. Dès 1755, il
avait fait imprimer la Vengeance de
jifelpojnène , prologue : il pul)iia , en
I 7GO, sou Théâtre , en 5 vol. in-8°.,
qui contiennent : I. le Monde ren-
versé, opéra comique de Le Sage et
Dorneval , qu'il mit tout eu vaude-
villes; II. le Chinois poli en France;
III. les amants trompés ;l\\ Ber-
tholde à la ville ; V. le Peintre
amoureux ; VI. la Fausse Aven-
turière , en société avec Marcou-
viile ; Yll. le Docteur Sangrado ,
avec un auonvme; VIII. le Médecin
de l'Amour; iX. Cendrillon ^ 1759,
imité du conte de Perrault ; X. 1'/-
vrogne corrigé, avec un anonyme ,
lire d'une fable de La Fontaine ; XL le
Soldat magicien, dont le plan est de
Serrières ; Xll. Vlsle des Foux^ avec
un anonyme; XIII. Mazet , tiré du
conte de La Fontaine; XIV. le Mi-
licien ; XV. les deux Chasseurs et
la Laitière ; XVI. l'Ecole de la
Jeunesse, ou le Barnevelt Français.
Pour former ces trois volumes , ou
s'est contenté de faire imprimer des
frontispices , et de recueillir les exem-
plaires des éditions que l'auteur avait
données de ces pièces dans leur nou-
veauté. On a encore d'Anseaume, les
Epreuves de l'Amour, 17^9; le
ANS
235
Dépit ge'néreux , avec M. Quêtant,
1761, in-8°. ; la Nouvelle Trou-
pe , 1760 ; le Procès des Aiiettes
et des Faudevilles , avec Favart ,
1 76 1 ; la Clochetle, 1 766 ; le 31aUre
d'Ecole , avec Marcouville ; la Res-
source comique , ou la Pièce à deux
acteurs, 177.2; la CoqueLie de l il-
lage , 1771; le Rendez-vous bien
employé, 1774; 1^ Retour de ten-
dresse, 1777, in-8'.; Zémire et Mc-
linde, 1773, in-8'. , et le Tableau
parlant, 176g, in-8'., £irce diver-
tissante , la meilleure de ce genre. Au-
seaume a encore retouché le Poirier
et la Preuve indécise , opéras comi-
ques de Vadé. Il avait été quelque
temps doctrinaire, puis maître de
pension à Paris. A. B — t.
ANSEGISE , archevêque de Sens,
né au diocèse de Reims , dans le q"".
siècle , fut d'abord abbé de St.-IMichel ,
et parvint , en 87 i , au siège archié-
piscopal de Sens. Charles-le-Chauve,
qui ambitionnait la dignité d'empe-
reur, envoya Ansegise en ambassade
à Rome, pour s'assurer du suflrage
du pape Jean VIII. Ce pontife éleva
Ansegise à la primatie des Gaules et
de la Germanie, dignité qui donna un
nouvel éclat à l'église de Sens , et fit
considérer sou archevêque comme le
second chef de la chrétienté; mais
quand il voulut se faire reconnaître
primat dans le concile de Pontion , plu-
sieurs prélats s'y opposèrent, entre
autres Hiucraar de Reims , qui avait
publié un écrit contre cette nouvelle
primatie. Le roi envoya encore à Rome
Ausegise , qui , à son retour , en 878 ,
assista au concile de Troyes , sacra et
couronna , l'année suivante , dans l'ab-
baye de Ferrières en Gatinois , Louis
m et Carloman , fils de Louis-le-
Bègue , et mourut en 883. K.
AjNSELME (S.), archevêque de
Cantorbéry , sous les règnes de Guil-
35 i A N S
laume - le - Roux et de Henri ï""'. ,
e'tait lie' à Aost, dans le Piémont, eu
io53. Ayant été' visiter plusieurs mo-
nastères de France, il fut attiré à ce-
lui du Bec, en Normandie, par la ré-
putation de Lanfranc , y prit l'habit
de S. Benoît . et en devint abbé. Il
eut occasion d'aller plusieurs lois en
Angleterre , oîi il acc[uit une telle ré-
putation , que Guillaume - le - Roux
étant tombé malade , voulut être as-
sisté par lui , et le nomma ensuite ar-
chevêque de Cantorbéry. Anselme
n'accepta cet honneur qu'à condition
qu'on restituerait à cet archevêché
toutes les tcri es dont il avait été dé-
pouillé par Guillaume lui-même. Il
n'était guère permis de compter sur
une union durable entre un prélat
étranger et un prince qui, marchant
sur les traces de son père, ne vouliit
rien céder au pape ni au clergé. An-
sebne lui tint tête avec courage : de
là, s'ensuivit entre eux un état de dis-
sension continuelle. Cependant, le roi
ayant besoin d'argent pour la guerre
qu'il avait entreprise contre son frère
Richard , duc de Normandie , l'arche-
vêque lui offrit 5oo livres sterliugs,
somme considéral)le pour le temps ;
mais que Guillaume trouva tro]) mo-
dique , et refusa avec humeur. Ils eu-
rent un sujet de mécontentement plus
sérieux encore, à l'époque où Tanli-
pape Guibcrt, reconnu sous le iii>m
de Clément III , par le roi et par le
plus grand nombre des prélats de son
royaume , disputait la tiare à Ur-
bain II. Anselme désirait établir l'au-
torité de ce dernier en Angleterre , et
était bien l'ésolu de se passer du con-
sentement de (tuillaume cpii, d'un au-
tre côté, ne supportait pas l'idée que
ses sujets promissent obéissance à un
pape que lui-même n'avait pas re-
connu. Il convoqua un synode pour
idire déposer le prélat qui osait lui lé-
ANS
sister. L'affaire s'accommoda, moyen-
nant quelques concessions mutuelles ;
mais Anselme ayant vainement de-
mandé la restitution de tous les reve-
nus de son siège, se décida, quoi-
qu'ayant reçu défense expresse de s'é-
loigner , à aller ap])uyer lui - même
l'appel qu'il avait fait à la cour de
Rome, où il fut accueilli comme nn
?,élé serviteur du Saint-Siège. 11 suivit
Urbain au concile de Bari , en 1098 ,
y défendit la procession du St.-Esprit
contre les Grecs , et soutint avec vi-
gueur le droit du clergé de nommer
exclusivement aux dignités ecclésias-
tiques , sans prêter foi et hommage
à aucun laïc; mais la cour de Rome
avait intérêt à faire sa paix avec Guil-
laume; elle ne tarda pas à abandonner
Anselme, qui , rebuté, aflligé, partit
pour Lyon , et y resta jusqu'à la mort
du roi , en 1 1 00. Henri I "^. , son suc-
cesseur , parvenu au trône par une
usurpation , ne négligeait rien pour
s'v maintenir. Sachant à quel point
l'archevêque de Cantorbéiy s'était con-
cilié l'affection du peuj)le , il lui en-
voya plusieurs messages pour le rap-
peler. Anselme céda à ces instances ,
et fut reçu avec les plus grands hon-
neurs, ce qui n'empêcha pas qu'une
contestation très-vive ne s'élevât pres-
que aussitôt entre le roi et le prélat.
Celui-ci, qui avait déjà rendu hom-
mage à Guillaume- le-Roux, refusait
de le renouveler entre les mains du
nouveau souverain. Malgré ce refus ,
<|uand le duc de Normandie raeuaç.i
d'envahir l'Angleterre, non seulement
Anselme fournit au roi des secours
d'hommes considérables , mais il em-
plova encore tout son crédit auprès
des barons , et alla même jusqu'à par-
courir à cheval les rangs de l'armée .
])our exciter l'ardeur des soldats. Peu
de temps après , il fut encore obligé
de faire uu voyage à Rome, avec le
ANS
consentement de Henri F''. , et , après
des lenteurs et dos difficultés de toute
espèce , il se retira une seconde fois à
Lyon, puis à sou abbaye du Bec, ou
il entretint une cori-espondance avec
la cour de Rome, et finit par o])tcnir
une convention , en vertu de laquelle
la cour de Rome conservait le droit
spirituel de donner les investitures , et
devait seule envoyer aux ëvêques la
croix et l'anneau pastoral , tandis que
le roi d'Angle! erre recevrait d'eux le
serment de fidélité pour lours proprié-
tés et privilèges temporels. Ce fut alors
que Henri, voulant tei'miner tous les
sujets de discussion , prit le ])arti de
se rendre en personne à l'abbaye du
Bec , où Anselme ét<iit malade , et le
ramena dans ses états , où k; prélat
fut accueilli pa les démonstrations de
joie les plus vives. La vénération
qu'Anselme sut inspirer au peuple
doit être surtout attribuée à la sévé-
rité de ses mœurs, et à l'énergie avec
laquelle il lutta contre les abus de
pouvoir. Il insista fortement sur la
nécessité du célibat ecclésiasfique , et
fut le premier qui le prescrivit en
Angleterre , où le synode national , te-
nu à Westminster en 1 1 02 , en fit une
loi religieuse. Anselme mourut en
1 109. Nous ne rapporterons pas Ips
miracles très -extraordinaires qui î ni
ont été attribués , et dont un écri-
vain du I i". siècle ( Jean de Saiis-
bury), a donné le récit. Ansdnie
possédait un assez grand fond A'ins-
truction pour l'époque où il vivait.
Ses ouvrages noml)reux ont eu ]ilu-
sicurs éditions , depuis celle de Nu-
remberg, in-fol. , 1.491 , jusqu'à celle
de Paris , iG-yS , par D. Gabriel Ger-
beron , et rciraprimce en XTi\; en-
fin, une autre , donnée à Venise eu
1744 , 2 vol. in-fol. La bibliothèque
de Lyon possède un très-beau mnnus-
criî de ses MéJàatiois- et Oraisons,
ANS 235
Tous ses écrits , qui ont pour objet la
discipline ecclésiastique , la piété et la
morale , portent l'empreinte de la bar-
barie de son siècle. Indépendamment
de Jean de Salisbury, Eadmer , moine
de Cautorbéry , a écrit la Vie de S. An-
soîme. On peut aussi consulter Guil-
laume de Malmesbury, De s^estis pon-
tijicinn Ans:l. H. L — E.
ANSELME ( S. ) , évêque de Luc-
ques, succéda, en 1061, dans cet
évêché, au pape Alexandre 11 soa
oncle, refusa d'abord de rerevoii* l'in-
vestiture de l'empereur Henri IV, s'y
soumit enfin, puis en eut des scru-
pules, et se retira à Cluni , d'où il ne
sortit , pour reprendre le gouverne-
ment de son église, que sur un ordre
exprès du pape Grégoire VII. Ayant
voulu réduire ses chanoines à la vie
commune, il éprouva, de leur part,
une telle résistance , qu'il fut obligé
de quitter sa ville épiscopalf». Léon IX
le fit son légat en Lombardie , et il
mourut dans l'exercice de sa légation ,
à Mantoue , le 18 mars 1 086. On a de
lui une Apologie de Gré^oiri; VII ^
et une Béfulntion des prétentions de
l'anti-pape Gu.bert. On trouve ces
deux écrits dans les Lectiones anti-
qiice de Canisius, et dans la Biblio-
thèque des Pètes. S. Anselme avait
composé un troisième Traité pour
prouver que les princes temporels r^c
peuvent disposer des biens de l'Eglise.
Le père Roto , jésuite, a donné sa
Fie en il'ilien. T — d.
ANSELME DE SAINTE-MARIE
( Pierre DE GuiBOURS, communément
appelé le Père^, augustin déchaussé,
a publié : I. l'Histoire généalogique
et chronologique de la maison de
France et des grands - officiers de
la couronne, 1^7 + l 'î'^'ol. in-4''. Cet
ouvrage a été contnnié par Du Fourni
et par les religieux augustins Ange de
Ste.-Sosalic et Siraplicieu, qui en ont
TtôQ ANS
donne la troisième et dernière édition ,
en t) vol. in-fol., i^aG-TjSo. La pre-
mière partie de cet ouvrage, donnée
parle père Auscbne, est moins estimée
que la suite, donnée par ses continua-
teurs. Aureste, c'est une source abon-
dante de r{'nseia,"nemcnts utiles. II. La
Science héraldique, i G7 5, iu-4". ; II 1 .
le Palais de Vkuîmeur, contenant les
généalogies historiques des illustres
inais07is de Lorraine et de Sai-oie ,
et de plusieurs nobles familles de
France iC65-iG68, in-4". ; IV. le
Palais de la gloire, conteriant les
généalogies historiques des illustres
maisons de France et de plusieurs
nobles familles de l'Europe , 1 664 ,
in-4". Le père Anselme est mort à
Paris , sa patrie , en 1 6ç)4 ■> ^g^ de
soixante-neuf ans. A. B — t.
ANSELME ( Antoine ) , fils d'un
chirurgien , HiKpiil le 1 5 janvier 1 65 2 ,
à risle-Jourdaiu , dans le comté d'Ar-
magnac, Un de ses oncles, curé dans
les environs , se chargea de sa pre-
mière éducation; puis, il fut envoyé
au collège de Gimont , et passa de là
à Toulouse , où il acheva ses études.
Il avait un talent si décidé pour la
chaire, et une mémoire si prodigieu-
se que , dès l'âge de douze ans , il lui
suflisait d'entendre un sermon pour
le répéter avec une extrême facihté et
beaucoup de grâces. Il remporta deux
fois le prix de Tode aux jeux floraux.
Dès que son cours de tl)é()logi<' fut
terminé , il se livra au ministère de la
prédication , et débuta à Gimont avec
tant de succès, qu'il y reçut le sur-
nom de Petit Prophète, qu'il con-
serva toujours. Il alla ensuite prêcher
à Toulouse; le marquis de Montes-
pan , qui l'cjitcndit , fut enchanté de
son éloquence et de son savoir , et lui
confia l'éducation de son fils , le mar-
quis d'Antin . âgé alors de dix ans. Au-
selmc viiii , avec son élève , à Paris ,
ANS
011 srs sennons obtinrent les mê-
mes succès. En t68i , Tacadémie
française le choisit pour prononcer
devnut elle le panégyrique de saint
Louis , et , dès-lors , il prêcha dans
toutes les grandes paroisses de la ca-
pitale ; il fallait même le retenir quatre
à cinq années d'avance. En i685, \\
fut nommé pour prêcher à la cour les
jours de la Ccne et de la Pentecôte ; en
1698 , il y prêcha pendant l'Avent,
et, en i-jog, pendant le Carême.
Après avoir parcouru , plus de trente
ans , «ette carrière , il revint auprès du
duc d'Antin qui l'aimait beaucoup ; et
sans abandonner entièrement le mi-
nistère de la prédication , il se fit une
occupation particulière de l'étude des
belles-lettres et des beaux arts. Bien-
tôt, il fut reçu amateur honoraire par
l'académie de peinture; presque dans
le même temps , le duc d'Antin fit re-
vivre , en sa faveur, la place d'his-
toiiographe des bâtiments ; et , ea
1 n I o , il fut admis à l'académie des
inscriptions et btUes-lettres, ea qua-
lité d'associé. Après la mort de Louis
XIV , il rendit à cette compagnie
d'importants services qui lui valurent
le titre de pensionnaire surnuméraire,
avec l'assurance de la première pen-
sion qui viendrait à vaquer. A l'.îge
de soixante - douze ans, il obtint la
vétérance , et il se retira , en 1724 ,
en Gascogne , dans l'abbaye de Saint-
Scver, que Louis XIV lui avaitdonnée
en 1699; il y vécut dans une par-
faite tranquillité, s'occupant de ses
livres, de ses jardins, et répandant
sur sou abbave et sur les paroisses
qui en dépendaient , toutes sortes de
bienfaits : il ouvrait de nouveaux che-
mins , décorait les églises , fondait des
hôpitaux , et conciliait les diflérends.
Après avoir fait deux voyages à Paris,
l'un , à l'àgcde soixante-dix-neuf ans ,
et l'aivtre à quatre- >ingt-uu , il mourut'
ANS
à Saint-Sev'cv, le 8 août I7")7, clans
sa quatre-viugt cinquième année. Ou a
de 1 abbe Anselme : 1. des Odes impri-
mées dans le Recueil de l'académie
des jeux floraux de Toulouse; II. des
Panéi^yriffues des Saints et des Orai-
sons funèbres qui ont paru ensemble
à Paris, en 1 7 1 8, 3 vol. iii-8 '. , avec sou
portrait. III. Des Sermons pour l'A-
vent , le Carcnie , et sur divers sujets,
publiés à Paris , en 1 731, en 4 vol.
in-8''., et en 6 vol. in- 1 2. Ces Sermons
ont eu un grand succès selon M '"', de
Sévigné, Lettre du 8 atriZ 1689.
« L'abbé Anselme avait de l'esprit, de
» la dévotion , de la grâce et de l'élo-
» quence, et il n'y avait guère de pré-
») dicatcur qu'elle crût devoir lui pré-
» férer. » IV. Diverses Disserlalions
insérées dans les Mémoires de V Aca-
démie des inscriptions et helles-let-
ires, des années l'^i^k 1 729. A. L. M.
ANSELME ( George) , poète la-
lin , qui florissait vers le commence-
cément du I6^ siècle , était né à
Parme , d'une très-ancienne famille ;
il était médecin , mais en même temps
littérateur distingué. Le volume qui
x:ontienl ses poésies latines est iort
rare ; il est intitulé : Georgii Anselmi
Nepolis Epigrammaton libri scptem;
Sosthyrides; P alladis Peplus ; E^lo-
gce quatuor, Venise, i5'28, in-8'.
Le titre de Nepos y est rais , pour
distinguer l'auteur d'un autre George
Anselme, son aïeul , mathématicien
et astronome ; celui-ci , qui était mort
vers l'an \l^'\o , avait écrit des Dia-
logues sur l'harmonie , et des Ins-
titutions astrologifjues , comme nous
l'apprennent deux epigrammcs de son
pelit-fîls; mais ces livres n'ont pas
été imprimés. George Anselme le
jeune adonné, outre ses poésies : I. des
Eclaircissements sur quelques comé-
dies de Plante , auxquels illui a plu de
doimer le titre d'Épiphyllides.lh se
A N S 257
tTOuvcnt dans l'édition de Plante don-
née à Venise, par Pierre Sessa,era
i5 18 , et avaient paru , pour la pre-
mière fois, dans celle^de Parme, 1 5 09,
in-ful. , avec les commentaires de
Burchard Pylades et de Thadée Ugo-
letus ; IL la Fie d'un romancier cé-
lèbre dans son temps , nommé Jac-
ques Cai'icco , compatriote d'Ansel-
me, et mort en i5i i. Cette Vie est
imprimée avec le roman de Cavicco ,
qui a pour titre : Libro del Peregri-
«0, Venise, 1 5 26, in-8'., et 1547.
G— E.
ANSELMO ( Antoine ) , né à An-
vers, où il fut écLevin pendant plu-
sieurs années , et avocat-fiscal de l'é-
vèque , mourut, en 1G68 , presque
octogénaire. Il a beaucoup écrit sur
le Droit belgique. On a de lui : I. un
Recueil d' Ordonnances en flamand ,
4 vol. in-fol., Auvers, 1648; IL Co-
dex belgicus , Anvers, 1649, in-fol.
Il L Tribonianus belgicus, Bruxelles,
1692 , in-ful.; IV. Coinmentaria ad
perpetuum ediciuin , Anvers, 1701,
in-fol.; V. Consultationes y 1671,
in-fol. Ces quatre derniers ouvrages
sont connus sous le nom d'Opéra
Juridica. A. B — t.
ANSGARDE , première femme do
Louis-Ie-Bègue , roi de France , fixa
les vœux de ce prince , lorsqu'il n'a-
vait encore que dix-huit ans. Gomme
elle avait moins de naissance que de
beauté, Charles-le-Chauve n'approuva
pa<; le mariage de son fils. Quelques
LtsLoriens ont regardé comme bâtards
les enfants qui en naquirent; ce qui
ne les a point empêchés de succéder
à leur père , l'aîné sous le nom de
Louis , et le second sous le nom de
Carloman. Lorsque Louis -le -Bègue
répudia Ansgarde,pour épouser Adé-
laïde, Hinciuar, archevêque de Heims,
et le pape Jean VIII, qui était alors
en France, refusèrent d'autoriser le
258 ANS
divorce et de courouner la nouvelle
reine ; aas-.i d'autres historiens ont-
ils déclare bâtard le fds qui naquit de
ce second mariage, et qui rép,na sous
Icr.om de Charles-le-Simple ; d'où i\
faudndt coiickiri; que Louis-le-Bègue
n'eut pas de poslé: ité légitime , quoi-
que tous ses fils aient monté sur le
Irone. On ignore ce que devint la belle
Ansgarde après sa répudiation.
F— E.
ANSLO (Reimer), poète huUan-
dais , célèbre dans sa patrie , naquit à
Amsterdam en lÔn. bn i G49, ii lit le
Toyygc d'Italie, et s'y acqtiit une grande
réputalioi) , suilout j)ar ses vers la-
tms. l.e pape Inn cent X lui donna
une fort belle médaille pour un poème
qu'il avait composé à l'occasion du
jubilé célébré en i65o. La reine Chris-
tine lui donna une chaîne d'or pour
une pièce eu vers hollandais qu'il lui
avait adressée. On a prétendu trouver
dans ses écrits quelques traces d'un
pencliant secret pour la religion ca-
tholique. ]i mourut à Pérouse , dans
l'état romain , le iGmai 1669. Le re-
cueil de ses poésies a paru à Rotter-
dam , 1713, in-8 '. On y remarque sa
Couronne pour S. Etienne le martyr,
publiée en i()4t>, et sa tragédie des
Noces Parisiennes , ou de la St.-
Barlhélemi , publiée en 1 649. G — t.
AIS80N ( (lEouGES ) , brille au
premier rang dans les fastes de la
marine britannique. Il naquit dans
je Stnlluidsliire, en 1O97, ti'o'sième
<ils de William Anson, seigneur de
Shuckborough. Au sortir de rentauce,
il fil paraître cet amour de la gloire
<]ui , dans la suite, diiigea toutes les
actions de sa vie. Il ainiait à entendre
raconter les histoires des héros de la
nier; le récit de leurs hauts faits en-
llammait sa jeune imagination ; il entra
fort jeune au service, et passa réguliè-
nnient par tous les grades. De I7'i4
ANS
à 1755, il alla trois fois, avec les
vaisseaux qu'il conmiandait, à la Ca-
roline du Sud, où il bâtit une ville qui
porte son nom , ainsi que le pays où
elle est située. Dans les années 1758
(t 1759, il fit uu quatrième vovage ,
tant à la côte de Guinée qu'en Améri-
que , et , sans eu venir à aucun acte
d'iiostilité, engagea les Français à ne
jias troiibler le commerce anglais. A
cette époque, le ministère, regardant
la guerre avec l'Espagne comme iné-
vitable, jeta les yeux sur lui pour
commander la flotte qui devait, dans
les mers du Sud . ruiner le cohimerce
et détruire les établissements de cette
nadou. Anson était eu mer lorsqu'il
apprit sa nomination; il revint sur-le-
champ tout préparer pour son dé-
part; des lenteurs et des contrariétés
le retardèrent pendant près d'un an ,
et cette expédition , cpii avait été d'a-
bord conçue sur uu vaste plan, fut
réduite à cinq vaisseaux et trois petits
bâtiments , portant 1 4oo hommes d'é-
G.ùpage. L'escadre quitta les côtes
d'Augieierre le 18 septembre 1740-
Au sortir du détruit de le Maire, elle
fut assaillie par d'horribles tempêtes,
qui l'empcclièrent, pendant trois mois,
de doubler l'orageux cap de Horn.
Anson , séparé de ses autres vaisseaux,
f-e dirigea sur l'île de Juan Fernandez.
Là, ce grand navigateur se montra le
bienfaiteur de l'humanité; il donna
l'exemple à ses ofliciers de porter à
terre les matelots malades, et, pour
l'avantage des marins qui, dans la
suite , aborderaient dans l'île , il y sema
di\erses espèces de légumes , et y
jtlanta quelques arbres à fruits. Le
IVjal, le Glocester et V^nne, l'y
rejoignirent. Ses équipages, fatigués
et diminués, avaient besoin de repos.
Anson séjourna trois mois sur ce ri-
vage, et alla ensuite attaquer la ville
de Payta , qui fut prise . pillée , brù-
A^s
îie'e, et abandonnée à l'approclie des
forces espagnoles. Le Ijutiii fui iia-
mense. Apres cette expédition , Anson
se dirigea au ^«oïd, vers Acapulco, fît
quelques riches prises dans cette tra-
versée, et attendit inutilement le gaî-
lion de Manille, qui était entre, et
celui d' Acapulco, qui ne sortit pas.
Obligé alors de brûler ou de couler
trois vaisseaux de son escadre , réduit
au seul Centurion^ qu'il montait, il
dirigea sa course vers les mers des
Philippines. Dans cette longue tra-
versée, l'équipage d' Anson eut à souf-
frir du plus terrible des scorbuts ; et il
allait y succomber , lorsqu'on découvrit
les rivages de Tinian , l'une des lies des
Larrons. Anson et la plus grande par-
tie de son équipage étaient déjà dé-
barqués, lorsqu'un événement inq^ré-
vu vint les menacer de la plus triste
destinée : le Centurion fut entraîné
dans la haute mer , et on désespéra
tellement de le voir reparaître, qu'on
s'occupa sur-le-champ à agrandir un
petit bâtiment trouvé dans l'ile, avec
lequel on se proposait d'en sortir.
Anson travaillait comme les autres,
et montrait un tel sang-froid, que le
seul moment où l'on aperçut quelque
émotion sr.r son visage, fut celui oià
Ion vint lui annoncer que le Centu-
rion était de nouveau eu vue, et ma-
nœuvrait pour regagner la terre. Un
séjour de quelques semaines dans
cette île rendit la santé aux nialades ,
et permit à l'uitrépide navigateur de
poursuivre son voyage, et d'aller re-
nouveler ses vivres à Macao. C'est là
qu il conçut le hardi projet d'enlever
le gal'.ion d'Acapulco. Dans ce des-
sein, il répandit le bruit de sou re-
tour eu Eurojie; mais , au lieu de faire
voile pour les îles de la Soude, il se
diiigea sur les Phihp])ines, et établit
sa croisière jîrès du cap de vSjiiritu-
.S;iu.to, Après uu mois d'unnaiiçnce
ANS 259
et d'inquiétude, parut ce gallion tant
désiré. Il arriva sur le Centurion,
dans le dessein de le combattre ; mais
l'artillerie anglaise remporta la victoire,
quoique le vaisseau espagnol fût plus
fort que celui d'Auson , et monté par
un plus grand nombre d'hommes. Au
moment où il venait de se rendre, le
feu prit auprès de la chambre aux pou-
dres du Centurion , et Anson ne dut
qu'à sa présence d'esprit d'échapper,
dans le moment même de son triumphe,
au plus grand danger qu'il tût encore
couru. Celte brillante affaire coûta pou
de sang au vainqueur : la cargaison se
montait à 400,000 livres sierl., et ce
que Anson avait pris aux Espagnols,
avant cette époque, à plus de 600,000
livres sterl. Avec ces immenses riches-
ses , il revint à Macao , vendit sa prise
aux Portugais , et soutint avec éner-
gie, contre le gouvernement Chinois,
à Canton, les droits de son pavillon.
Il prit enfin la route d'Europe , par le
cap de Bonne-Espérance, le i5 dé-
cembre 1745, et vint mouiller le i5
juin de l'année suivante , sur la rade de
Spithead, après une absence de trois
ans et neuf mois. Les richesses qu'il
rapportait devinrent le prix de sa va-
leur et de celle de ses équipages. Le roi
refusa la part qu'il pouvait y préten-
dre, et ne se réserva que le plaisir de
récompenser les braves qui avaient si
bien soutenu l'honneur des armes an-
glaises. Anson fut élevé successive-
ment au grade de contre-amiral de la
bleue et de la blanche. Son combat
avec de La Jonquière, qui fut oblige
de céder à des forces très-supérieures ,
lui valut, en 1 7 47 , la pairie, le grade
de vice-amiral d'Angleterre, et ce mot
si flatteur de l'illustre marin français :
« \'ous avez vaincu X invincible, et
)> la gloire vous suit. » Les six vais-
.seaux de ligne de La Jonquière, et
quuUc des vaisseaux qu'il convoyait.
24o A N g
furent pris. Uu écrivain anj;;lais dit
judicieriscinent, au sujet de ce combat:
a f-a c^rande supe'riorite' des forces
» d'Ânsoii sur celles de l'ennemi doit
1) plutôt faii-e regarder cette action
» comme une fa^eiu- de la fortune,
» que comme un véritable triomphe.»
Cependant , Ânson montra de grands
talents , en rendant impossible la fuite
d'un seul des vaisseaux de giurre en-
nemis. Quatre ans après, il fut nom-
mé premier lord de l'amirauté. Dans
celte qualité , il fut exposé à quel-
ques censures, relativement à la perte
de Minorque, au commencement de
coite guerre. On lui reprocha de n'a-
voir pas envoyé assez tôt une flotfe à
1,1 défense de cette île, et de ne l'avoir
pas composée d'un plus grand nombre
de vaisseaux. En novembre i75r), il
quitta son poste , à la suite d'un chan-
gement qui avait eu lieu dans l'admi-
nistration. Cependant, lors d'une en-
quête parleiiïentaire , lui et ses anciens
collègues dans le ministère furent
déchargés de toute accusation au sujet
de Minorque. Lorsque l'Angleterre
eut rompu la paix, en 1755, Anson
fut choisi , en 1758, pour commander
l'escadre qui d'abord bloqua Brest, et
protégea ensuite la descente que les An-
glais firent à St.-IMalo et à Cherbourg.
Anson recueillit sur ses vaisseaux les
restes de l'armée britannique repous-
sée du sol français. En 17G1 , il fut
nommé à la première de toutes les
dignités navales , celle d'amiral et
commandant en chef de la flotte qui
devait amener la reine en Anglelcrre.
Il avait été déjà plusieurs fois chargé
de transporter le roi Georges H sur le
continent, et de l'en ramener. Depuis
long-temps sa santé languissait. Il
mourut subitement, au retour d'une
]iromenade qu'il venait de faire dans
son jardin de INloor-Park, le 6 juin
1 76?,. Anson avait toutes les qualités
AT^S
qui constituent le marin : un sang-
froid à toute épreuve, une intrépidité
réfléchie, une connaissance profonde
de la tactique navale ; il i-espectait
l'humanité au milieu des horreurs de
la guerre; il n'eut qu'un seul défaut,
ce fut sa trop grande confiance : elle
le rendit quelqiicfois la dupe des in-
trigants et dés fripons. Il ne connais-
sait ni les hommes, ni la société; aussi
a-t-on dit de lui « qu'il avait fait le
tour du monde, et qu'il n'y était jamais
entré. » Son vovage appartient entiè-
rement aux expéditions militaires. Se
bornant à remplir ses instructions ,
Anson n'eut jamais en vue les progrès
de la géographie ; il traversa le grand
Océan, entre les -10°. et 20°. de lat.
nord, et ne s'arrêta pas un seul instant
pour explorer ces mers inconnues. Les
vues , cartes et plans, dont la rela-
tion de ce voyage est en^chie, méii-
tent des éloges pour leur exactitude.
On ne peut pas en dire autant de la
plupart des descriptions. IM. Robins ,
rédacteur de ce Voyage, <pii a paru
sous le nom de 31. JValter, chapelain
d'Anson , a mis trop souvent son ima-
gination à la place de la vérité. Qui
croirait que , dans cette séduisante
Tinian, dans cette île enchantée, le
commodore Byron n'a trouvé, depuis,
qu'un pays très - ordinaire, couvert
d'insectes, et qu'un soleil brûlant rend
presque inhabitable? La relation du
voyage d'Anson a paru en anglais,
sous ce titre : A f^qyage round the
PForld, in the years 1 74«> to 1 74^,
by Georges lord Anson, compiled,
front his papers , hv Richard JVal-
ter,in-4". fig-, Londres, 174^ ; »'é-
iraprimé en 1776 , gr. in-4". Ce
Vovage a été traduit en français , par
Gua de Malves , Amsterdam, 1749^
in-4". . fig. La réimpression de Lyon ,
1 750, \ivol. in-4"., est préférable, eu
ce qu'elle renferme la relation des oiii-
ANS
clersdu PFa^er, un des vaisseaux de
l'escadi'e, e'chouë sur la côte orientale
de laPatagonie. Il y en a une étlition en
5 vol. in- 1 1 ; Paiis , i '^5ly. L. K — e.
ANSON (PrERRE -Hubert ), ne à
Paris ( et non à Nemours ) , le 1 8 juin
n44 5 ^^^ descendait pas de l'amiral
Ansou , quoi qu'on en ait dit : il était
agre'ge' de la faculté' de droit, lorsque
d'Ormesson , intendant des finances ,
l'appela auprès de son fils , qui depuis
a e'te' contrôleur - ge'ne'ral. Anson fut
successivement receveur - gene'ral des
finances du Daupbiue' , membre du
comité' central des receveurs - gc'né-
i-aux , députe' à l'assemblée consti-
tuante , fermier , puis administrateur
des postes, il occupait cette dernière
place lorsqu'il est mort, le '^o novem-
bre i8io. Sous le règne de la ter-
reur , il fut long-temps caché chez un
des principaux membres de la société
des jacobins, à qui il pi'omit une pcu-
sion qu'il a payée exactement depuis.
Anson avait de grandes connaissances
en finances , et beaucoup de goût
pour les lettres. On a de lui : ï. Anec-
dotes sur la famille de Le Fevre ,
de la branche d' Ormesson , dans le
Journal Encyclopédique de 1770;
II. deux Mémoires historiques sur les
villes de 3filly et de Nemours , dans
les Nouvelles recherches sur la
France , 1 76G , 2 vol. in- 1 2 ; îll. les
Deux Seigneurs , ou X Alchjm.isle ,
comédie en deux actes et en vers ,
1 785 , in-8"., ouvrage fait en société ,
avec M. L. Th. Hérissant; IV. Odes
d'Anacréon, traduction nouvelle en
vers , Paris, an 5 ( 1 795), petit in -8".,
traduction encore moins estimée que
les notes qui l'accompagnent; Y. Let-
tres de milady Montagne , etc. , tra-
duction nouvelle, 1795, 2 vol. in-i2,
2". édition , i8o5, 2 vo!. in- 12. j cette
dernière édition est augmentée de la
traduction française; par M. Germain
II.
ANS 241
Garnier , des poésies de milady j\lou-
tague ; le travail de M. Anson a fait
oulilier les deux traductions que nous
avions des Lettres de cette femme cé-
lèbre; VI. plusieurs Discours ow Rap-
ports à l'assemblée constituante , et
beaucoup de pièces de vers dans plu-
sieurs recueils. C'est Ansou qui a com-
posé cette chanson si connue :
Dans les cbamps de la victoiro,
Qu'uD guerrier vule aux combats, etc.
A. B— T.
ANSPRAND , roi des Lombards ,
tut( ur de Lieubert , fils de Canibert ,
en l'an 700 , et dépouillé l'année sui-
vante de la régence , par P>aginibert ,
duc de Turin. Lieubert, son pupile ,
fut blessé et l'ait prisonnier en 702 ,
j)ar le même Ragimbert. Le rebelle le
lit ensuite massacrer dans le bain. La
femme et le fils aîné d'Ausprand fu-
rent mutilés avec une atroce barbarie.
Son plus jeune fils , Liutprand , fut
épargné; \\ alla rejoindre en Bavière
Ansprand , qui s'y était réfugié. Celui-
ci fut obligé de différer sa vengeance
jusqu'en 712. Enfin, il rassembla
une armée avec laquelle il vint atta-
quer Aribert, fils de Ragimbert. Celui-
ci ayant été défait , se noya en traver-
sant le Tésin à la nage. Les Lombards
lui donucrent Ansprand pour succes-
seur ; ce prince ne régna que trois
mois ; mais son fils Liutprand , qui
lui succéda , fut un des plus grands
monarques de la Lombardie. S. S — i.
ANSSE DE VILLOISON. Foj.
VlLLOlSON ( DE ).
ANSTIS (John) , antiquaire hé-
raldique distingué , était fils de John
Anstis , seigneur de St.-Néot, en Cor-
nouailles , oii il naquit en 1669, et fut
élevé à Oxford. Dans l'année 1702 et
les deux suivantes , il représenta au
parlement le bourg de St. -Germain.
Après avoir possédé d'autres places ,
il fut j en 1 7 1 4 ? nommé à celle de roi-
iG
2i2 ANT
d'armes , qu'il garda iusqn'à sa mort ,
arrivée en j 7/j4- H publia : I. A Letler
conceming the honourof Earl-Mar-
shal, 1706; in-8°.;Il. Theform of
the installation of the Garter, 1 720,
ia-S".; III. The register oflhe most
noble order of the Garter, with a
spécimen oflhe lives of the knights ,
1724, 2 vol. iii-fol. ; lY. Obserca-
tions ititroduclory to an historical
essay on the knighthood ofthe Bath,
1725 , iu- 4"' H laissa en manuscrit
im grand nombre de collections sur
la science héraldique , les antiquités ,
les histoires de familles, la topogra-
phie, etc. , et un ouvrage presque fini,
sur les Sceaux en Angleterre , qu'il
avait intitulé : Aspilogia. D - t.
AINTALCIDAS, Spartiate, fameux
par la paix honteuse qu'il conclut , au
uom de toute la Grèce, avec Artaxer-
cès Mnémon. Les Lacédémoniens ,
obligés de rappeler Agésilas de l'Asie ,
pour résister à la ligue qui s'était for-
mée dans la Grèce, et ne se trouvant
pas en état de lutter contre les forces
des Perses , envoyèrent Antalcidas au
satrape Téribaze , avec des ])Ouvoirs
sullisants pour traiter; et celui-ci con-
clut, l'an 587 av. J.-C.,un traité par
lequel les Lacédémoniens abandon-
naient au roi de Perse toutes les villes
grecques du continent de l'Asie , ainsi
que Clazomènes et Chypre. Le roi de
Perse ordonnait, par le même traité,
que toutes les autres villes grecques
fussent indépendantes , excepté Lem-
uos , Scyros et Irabros , qui devaient
continuer d'appartenir aux Athéniens,
et il menaçait de se déclarer contre les
peuples qui se refuseraient à cette pa-
cification. Arlaxercès fut si satisfait de
ce traité, qu'il fit l'accueil le plus fa-
vorable à Antalcidas; et un jour, au
sortir d'un repas, il lui envoya la cou-
ronne de fleurs qu'il avait sur la tète ,
après l'avoir trempée daus des huiles de
ANT
senteur. Antalcidas retourna à STparie^
oh il fut fait éphore. Les Lacédémo-
niens le renvoyèrent depuis vers Ar-
laxercès pour en obtenir des secours
en argent ; mais ce prince, qui appe-
lait Antalcidas son hôte et son ami,
tant que Sparte fut à la tcte de la
Grèce, ne fit plus attention à lui dès
qu'il vit la ])uissance de cette répu-
blique abattue , et rejeta sa demande.
Antalcidas revint à Lacédémone , et se
voyant en proie aux railleries de ses
ennemis, craignant morne d'être pour-
suivi par les éphores, il prit le parti
de se laisser mourir de faim. O — r.
AIN TANDRE, frère d'Agathocles ,
tyran de Syracuse , commanda les
troupes que les Syracusains envoyèren l
au secours des Crotoniates. Beaucoup
moins brave que son frère, il n'était
pas moins cruel, et il exécuta sans ré-
pugnance l'ordre qu'il reçut de lui , de
foire mourir les parents de ceux qu'il
avait laissés en Afrique avec ses fils,
et qui les avaient tués après son dé-
part. 11 survécut à Agalhocles, et écri-
vit son histoire qui est perdue. C — r.
ANTARAH , ancien poète arabe,
auteur d'une des sept Moallacah
( Foy. Amp.ial-Caïs ). Ce poème A^t
composé vers le commencement diî
6*". siècle de notre ère, à l'occasion
d'une guerre qui s'était élevée entre des
tribus arabes. Antarah , l'un des plus
braves guerriers de sa tribu , s'y
était distingué , et composa sa Moal-
lacah , après avoir tué de sa main
Dhemdhera, arabe illustre, de la tii-
bu de Dhobyàn. VV. Jones , qui a pu -
blié à Londres, en 1 782, une traduc-
tion anglaise de ce poëme, remarque
que le style en est noble, élevé, et très-
beau daus les descripUous. J — w.
ANTELMI (Nicolas), chanoine
H vicaire général de l'église de Fréjus ,
dans la première moitié du 1 7''. siècle,
rendit de grands services au chapitre
ANT
Ûe cette e'glise , en lui faisant restituer
les titres et les documents dont ses
archives avaient ëte' dépouille'es. Il les
rechercha de tous cotc's, à grands frais,
souvent même au péril de sa vie , et
les réunit en deux gros volumes. Il
exerça quarante ans les fonctions de
S} ndio-ge'ne'ral du cierge', et assista, en
cette qualité , à l'assemblée qui se tint
à Paris dans les années i6o5 et 1606.
Il était très-lie avec le savant protec-
teur des lettres , Pciresc , et c'est lui
qui a fourni aux frères Gaucher et
Louis de Sainte-Marthe , pour leur
Gallia Christiana , le catalogue des
€vèques de Fre'jus , qu'il a ic'digc sur
les plus anciens documents de l'èvê-
ché. 11 est mort le 2 mars i64'>. Ni-
colas Antelrai aècrit des Adversaria ,
qui sont cités à la page i -jo du Traité
de Joseph Antelmi , De iniliis Eccle-
sice Forojuliensis , Aix, 1680. in-4".
A. L. M.
ANTELMt ( Joseph ) , naquit à
Fréjus le 25 juillet i64<S. Lorsqu'il
eut fini ses études, il obtint, par la
démission de Pierre Antelnii , sou
oncle, un canonicat à la cathédrale
de cette ville; il avait composé, dans
sa jeunesse, un Traité De periculis
canonicorum , c'est-à-dire, sur les
dangers de la vie des chanoines ;
son dessein avait été sans doute de
s'en préserver ; Charles Antelmi, son
frère, a augmenté depuis ce traité,
qu'il trouva manuscrit , et qu'il se
proposait de publier. Eu 1680, il
donna une Dissertation latine sur
la fondation de l'église de Fréjus.
Non seulement il y cherche à fixer
l'époque de cette fondation , mais il
donne l'histoire de ses saints, de ses
évèques , et traite de ses privilèges
et de ses droits ; il y fait aussi des ob-
servations sur l'antiquité, l'origine,
It'S noms divers et l'histoire de la
ville ; il traite des célèbres mouu- .
ANT 245
ments que les P»omains y ont lais-
sés, et donne les deux meilleures li-
gures que nous ayons de la Grande
Porte , et de celle qu'on appelle la
Porte Dorée ; il termine par une
description exacte du diocèse , dans
laquelle ou trouve une histoire cu-
rieuse du célèbre monastère de Le-
rins. Cette dissertation di vait précéder
une Histoire complète de la ville et
de Véglise de Fréjus, qu'il se pro-
posait de publier ; m .is cette histoire
est restée manuscrite. F.n )G8j, la
recommandation du P. La Chaise,
sous lequel il avait fait sa théologie à
Lyon , lui valut la place de grand-
vicaire et d'official auprès de J.-B. de
Verthamon , évêque de Paniiers , qui
le chargea en même tf raps de rétablir
la paix dans son diocèse, où l'affaire
de la régale avait occasionné des trou-
bles : il s'acquitta de cette commission
avec un plein succès, et les peines que
lui donna celte affaire ne l'empê-
chèrent jias de s'occuper de travaux
littéraires. 11 publia , en 1 689, sur les
ouvrages de S. Léon-le-Grand et de
S. Prosper , plusieurs Dissertations y
dirigées contre le P. Quesnel: celui-ci
avait attribué à S. Léon j)lusieurs
ouvrages qu' Antelmi restitue à S. Pros-
per. Le P. Quesnel lui répondit par
une lettre insérée dans le Journal
des Savants , du 8 et du 1 5 août
1 689 , ce qui engagea Antelmi à i épli-
quer par l'ouvrage suivant : Deux
lettres de l'auteur des Dissertations
sur les ouvrages de S. Léon et de
S. Prosper, à M. l'abbé...... pour
servir de réponse aux deux parties
de la lettre du P. Quesnel , Paris ,
1690, in-4". !■''* Dissertation d\ku~
telmi, sur le Symbole d'Jthanase,
est aussi dirigée contre le P. Ques-
nel. Celui-ci avait conjecturé que ce
Svmbole était de Vigile df^ Tppse,
^.cvèque d'Afrique, vers la fin du 5*.
16.,
244 A N T
siède. Antclmi , au contraire , fait
revivre la conjecture de P. Pitliou , que
ce Symbole est d'un théologien fran-
çais du 5^. siècle , qu'il croit être
Vincent de Lerins. Il publia encore ,
dans la uicnie année , De œlale
S. Martini Turonensis episcopi , et
quoriindam ejiis geslorum ordine ,
anno emorluali , nec non S. Bric-
cio successore , Epistola ad B. P.
Anton. Pagium, Paris, i{)tj3, in-S".
11 indique tous les écrivains qui ont
traité de la vie de 8. Martin , et re-
trace les faits dans un ordre clnono-
logiquc. Outre ces ouvraj^es , on a
encore de lui : I. De Sanctœ Marimœ
inrginis , Callidiani in Forojuliensi
diocesi cultu et patria , Epistola
ad vinim CL Danielem Papebro-
chiuin. Cette lettre se trouve dans
la collection de Bollandus , du 1 6
mai , paj;. 58o. Il y prouve que cette
Ste. Maxime, qu'on révère particu-
lièrement d'ins le diocèse de Fré-
jus , appartient , en effet , à la Pro-
vence, et non au Frioul en Italie, où on
ne connaît ni sa mémoire ni son culte,
et oii on ne conserve aucune de ses
reliques 5 il pense qu'elle était de
. Grasse en Provence. Charles An-
telrai croit , au contraire , qu'elle
était d'Afrique , et qu'elle est morte
CM Provence, II. De translatione
corporis Sancli Aiixilii , Epistola
ad viruni CL Ludovician Thomas-
siniiin de Mazauge ; 111. Assertio
])ro unico S. Eucherio Liigdiinensi
episcopo , opus posthumiim ; acces-
sit Conciliiim liegiense suh Ros-
tagno metropolilano Aqucnsi anni
1285, Kiinc primwn prédit inte-
gruin , et notis illuslratum , opéra
Caroli Anlelmi , designati episcopi
Grassensis , prœpositi Forojuliensis,
Paris, i-j^ô, in -4"' Cet ouvrage fut
composé pour prouver qu'il n'y a eu
qti^ya i>. Euchcrj evêquc de Lyon;
ANT
on y donne son histoire et celle de
Ste. Consorte. PieiTe -François Chi-
flet avait déjà écrit en faveur de la
même opinion , mais Baillet avait
porté un autre jugement dans ses Vies
des Saints. Le concile de Riez, qui
fait le sujet de la seconde partie de cet
ouvrage , a eu lieu le 1 6 mars 1 285 ,
sous l'épiscopat de Rostagni, arche-
vêque d'Aix; on y ordonna des prières
pour la délivrance de Charles II ,
comte de Provence, alors prisonnier
à Barcelone, et on y fit des règlements
de discipline. L'ouvrage d'Autclmi n'a
étépublié qu'après la mort de l'auteur,
par les soins de son frère Charles An-
telmi , évêque de Grasse ; c'est même
le seul ouvrage que celui-ci ait trouve'
entièrement achevé dans les manus-
crits de son Aère. Joseph Antelmi est
mort le 21 juin iGij-j , à l'âge de 4f>
ans, à Fréjus, où il était revenu peu
auparavant pour y i-établir sa poitrine ,
fortement allérée par sa trop grande
application à l'élude. 11 laissa les maté-
riaux de plusieurs ouvrages qu'il avait
commencés, tels quc,vme édition des
OEuvres de S. Prospcr, une Histoire
complète du diocèse de Fréjus , une
autre du monastère de Lerins, sous
le titre de Sécréta Lirinensium seu
Thebais Lirino-Forojuliensis , une
Dissertation sur le Sjmbole des
Apôtres, un Traité de la translation
du corps de la B. Dileclrix , dont le
culte est célèbre dans le diocèse de Pa-
micrs ; d'autres sur S. Antonin, évêque
de Pamiers , sur la patrie de Cassia -
nus. A. L. M.
ANTELMI (Pierre), neveu do
Nicolas, né à Fréjus, étudia à Pa-
ris la théologie et la jurisprudence,
et y fut reçu docteur dans ces deux
facultés. De retour dans ses fovers ,
il voulut suivre les traces de son
oncle qui, dans sa vieillesse, avait
clierchc à lutter contre le célèbre Pei-
ANT
rfsc , en et;iblissant, comme lui ;, un
riclie cabinet d'antiquités. 11 s'appli-
qua donc avec ardeur à la recherche
des monuments de sa patrie, et en
forma une Irès-belle collection. Il pei'-
dit cependant , ensuite , le goiît de ce
genre d'occupation; car, dès i65o,
il commença à se défaire de son ca-
binet , dont il gratifia peu à peu le
célèbre de Peiresc : il lui donna, entre
autres , le beau trépied de bronze sur
lequel cehii-ci a composé une disser-
tation ( /^.Peiresc). Lorsqu'en 1657,
Peiresc vint à mourir, Pierre Antelmi
abandonna l'étude des antiquités , et
ne dirigea plus ses travaux que vers
la théologie. Après la démission de
son oncle , il obtint son canonicat ,
qu'il conserva jusqu'à la fin de ses
jours, arrivée le '27 nov. 1G68. Il
a refondu , sur des actes authenti-
que':, Icsleçons qu'on était dans l'usage
de lire aux oiîices de S. Léonce ,
et en a rejeté toutes les traditions
fabuleuses concernant ce patron de
l'église de Fréjus , ainsi qu'on le voit
dans la prélace de la dissertation de
Joseph Antelmi , De initiis Ecclesice
Forojuliensis , Aix , 1 680 , in-Zj.". , et
dans l'ouvrage de Louis Dufour , S.
Leomius Episcopus et Martyr, suis
Forojuliensibus reslilutus, Avignon ,
iG58,in-8'. A.L.M.
ANTELMY (Pierre -Thomas),
naquit le i4 septembre 1700, à Tri-
gance en Provence. Après avoir ache-
vé ses deux cours de philosophie , à
l'âge de quinze ans, il s'adonna aux
mathématiques. Arrivé à Paris , il se
ha avec les plus célèbres géomètres ,
et fut bientôt nommé professeur de
mathématiques à l'école militaire, puis
inspecteur des études. Chargé en même
temps de l'observatoire qu'on venait
d'y construire , ses observations lui
fournirent divers mémoires que l'aca-
démie des sciences a publiés dans ses
ANT 245
recueils. Il avait composé un Traité
de Dynamique qui n'a pas été im-
primé. Il a traduit de l'italien l'ouvrage
d'Agnési ( Foy. Agnesi ). On lui doit
encore : I . Fables de Lessing, et dis-
sertation sur la nature de la Fable ,
trad-deTallem., i764,in-ia; 1780,
petit in-8''. ; 1 800 , in-8 '. . eu trois par-
ties, contenant, 1°. le texte allemand
avec une version interlinéaire de
M. Boulard , éditeur; 'i", le texte alle-
mand , et la traduction d'Antelmy en
regard; 5". le texte allemand. La table
faite par l'éditeur contient la morale
des rd)les, 11 . Le Messie , poënie de
Klopstock , traduit d<^ l'allemand avec
Juuker et autres, 1769, ?. vol.in-i2.
(les deux volumes ne contiennent que
les dix premiers chants, et les traduc-
teurs n'ont pas continué leur travail.
Anthelmyest mort le 7 janvier 1783.
A. B— T.
ANTENOR, sculpteur, vivait à
Athènes dans la 76' . Olympiade : il
se rendit célèbre en sculj)fant les
statues d'flarmodius et d'Aristogiton ,
destinées à remplacer celles en bronze
qui avaient été enlevées par Xercès.
Âlexandre-le-Grand les retrouva en
Perse , et les renvoya aux Athéniens.
Pime, liv. XXXIV, chap. 8, attri-
bue celles-ci à Praxitèles ; c'est une
erreur évidente, puisque Xercès pnt
Athènes l'an 480 avant .1.-G. , et que
Praxitèles ne llorissait que 80 ans
plus tard. Winkelmanii nomme ce
sculpteur Agénor. L — S — e.
ANTÈRE ( S.) , ou ANTEROS ,
Grec de naissance , élu pape après la
mort de Poutien , le 'ii nov. 255,
et du temps de la persécution de Max i-
min. Antère n'occupa le St. - Siège
qu'un mois et quelques jours. Il mou-
rut le 5 janvier 236. D — s.
ANTESIGNAN (Pierre), gram^
mairien du 1 G^. siècle, né à Rabasteins
en Languedoc , publia lùxe Gram •
•j4<3 a n t
ïTiaire grecque , qui eut plusieurs ecli-
;ious , et un Traite de la grammaire
universelle , ouvrage considérable ,
înais mal dige're. Dans ses éditions de
Tërence , il n'épargna aucun soin
pour faciliter l'étude de la langue la-
tine. Il publia les comédies de cet au-
teur , de trois façons différentes , d'a-
bord avec de courtes notes , ensuite
avec les notes de tous les commenta-
teurs de Térence; et enfin, avec de
nouvelles notes marginales , une tra •
duction et une paraphrase en fran-
çais des trois premières comédies. Cet
ouvrage fut publié à Lyon, en i556.
Antesignau fit encore : Thematis ver-
horum im'esti^andi ralio , et Praxis
vrœceplorum tinguiv s,rcecœ. Antesi-
gnan eut le mérite de poursuivre avec
ime grande persévérance des travaux
utiles. D — T.
ANTHELME ( S. ) évcque de 15cl-
ley, d'une famille noble de Savoie,
fut d'abord premier dignitaire des
chapitres de Genève et de Belley , re-
nonça, jeune encore, au monde; et,
touché de la vie édifiante des char-
treux , il pratiqua avec une grande fer-
veur la règle de ces solitaires, et tut
élu général de son ordre. Il rétablit la
discipline qui s'était altérée, et se dé-
mit ensuite de sa dignité. Malgré son
amour pour la retraite, il rendit de
grands sen'ices à l'Église, divisée alors
par un schisme; il sut déconcerter les
projets de l'anti-papc Victor HT, que
.soutenait l'empereur Frédéric Barbe-
jousse , et contribua à faire prévaloir
le parti d'Alexandre lll, qui avait été
élu selon les formes canoniques , et en
fut récompensé par l'évèché de Belley ;
mais il fallut un ordre du pape pour
obligerS.Anthelme à accepter cet hon-
neur. Il commença la réforme de son
diocèse par celle du clergé, montra une
fermeté inébranlable dans les contes-
tations qu'il eut avec Humbert, comte
ANT
de Savoie; excommunia ce princf,
pour avoir permis à un de ses archers
de tuer un piètre ; mais le pape ayant
absous Hunibert de Savoie , Anthclme
quitta son siège pour se retirer dans
la grande Chartreuse. Il fut bientôt
ramené, par ordre du pape, à son
église , donna , dans sa dernière ma-
ladie, l'absolution au comte Hurabert,
qui vint la lui demander, et mourut-
le 26 juin 1 178,3 plusde 'jo ans. K.
AISTHÉMlUSJ'unde's hommes les
plus recommandables qui aient paru
dans l'Histoire de l'empire d'Orient ,
était petit-fils de Philippe, préfet d'O-
rient , qui , sous le règne de Constance ,
étrangla de ses propres mains Paul ,
évèquede Constantinople. Authémius
fut d'abord ambassadeur en Perse,
puis maître des offices, et enfin consul
en 4o5 , sous le règne d'Arcadius ; la
même année , il fut nommé préfet
d'Orient, et l'année suivante, patrice.
Il se montra, par sa prudence et par
ses vertus , digne de ces hautes fonc-
tions ; et lorsqu'en 408 , Arcadius, en
mourant , laissa le sceptre à Théo-
dose II, qui n'avait alors que 7 ans ,
Authémius, par sa sagesse, conserva
au jeune empereur son héritage. Il
s'entoura des hommes les plus habiles
et les plus intègres, forma une étroite
alliance avec les Perses, ca}>tiva les
Huns , arrêta les violences des difle-
rontes sectes qui jiarlageaient la capi-
tale, forma d'ulilis établissements,
éleva des monuments publics , et eu
4i5, enferma Constanfiuople d'une
nouvelle enceinte de murs. 11 eut sou-
vent à réprimer les intrigues des eu-
nuques, alors tout-puissants à la cour
des empereurs. Lors de l'élévation de
Pulchérie, vers l'an 4 '4? '' ^^ démit
du pouvoir, et vécut depuis dans
l'obscurité. Ses rares qualités lui at-
tirèrent ce bel éloge de la part de
S. Jean Chrysostômc : « k\i lieu àr
ANT
» vous féliciter d'avoir réuni leconsu-
» lat et la préfecture , je félicite ces
» deux dignités d'être si bien placées.
« La vertu va se trouver, à l'abri de
» votre tribunal, dans un asyle assure,
» et le temps de votre magistrature
w sera pour tout l'Orient une fête per-
« pétueile. » L — S — E.
ANTHÉMIUS, empereur d'Occi-
dent, était, par sa mère, petit-fils du
précédent. En 467 , l'Italie ge'missait
sous la tyrannie de Ricimer ( Foy. ce
nom); le sénat et le peuple romain
demandèrent à Léon, empereur d'O-
rient, de leur donner un souverain :
celui-ci désigna Anthernius, dont Ri-
cimer voulut bien confirmer et sou-
tenir la nomination, sous la condition
secrète que le nouvel empereur pren-
drait pour gendre ce dangereux sujet.
Le mariage se fit peu de temps après
l'arrivée d' Anthernius en Italie. Le
bruit de ses vertus l'y avait préce'dé;
on vantait sa bienfaisance et sa piété:
eu effet, il fonda quelques hospices;
mais ou n'est pas d'accord sur sou
orthodoxie. Sous sou règne, les Ro-
mains furent entièrement expulses
de l'Espagne ; mais un danger plus
imminent menaçait Anthémius ; des
Lrouilleries s'étant élevées entre Rici-
mer et lui,leSuève orgueilleux se
retira à Milan , et se prépara à com-
Iwttre son beau-père et son empereur.
Epiphanes, èvêque de Pavie, les ré-
cuncilia ; mais le vindicatif Ricimer
suscita de tous côtés des ennemis et
des traverses à Anthémius; enfin , en
4"2, Ricimer ayant appris que Léon,
empereur d'Orient , venait de faire
assassiner Aspar et Ardaburius, deux
de ses sujets aussi puissants qu'am-
Mlieux , redouta pour lui-même un
pareil sort , et , décidé à prévenir An-
thémius, il s'avança vers Rome , à la
tète d'une armée : il avait un parti
dans celte ville , qui se trouvait ainsi
ANT 247
par'age'e entre le beau - père et le
gendre. Au bruit de cette division,
l'empereur d'Orient envoya Olybrius
en Italie; mais Ricimer, accoutume'
à faire du sceptre l'instrument de ses
desseins , l'offrit à Olybrius qui l'ac-
cepta, soit par crainte, soit par tra-
hison. Anthémius ne trouvant qu'un
ennemi de plus dans celui qui devait
être son défenseur , se réfugia dans
une église; ses partisans n'osaient se
montrer, et la famine et la misère
les poursuivaient dans leurs maisons.
Déjà le rebelle entrait dans Rome; un
Gaulois, nommé Bilimer, fidèle à An-
thémius , lui amena un corps de
troupes avec lequel il livra un san-
glant combat sur le pont d'Adrien; il
fut défait et tué. Ricimer, victorieux,
saccagea Rome, et fit massacrer An-
thémius , l'an 475' Ce prince avait
régné 5 ans. 11 laissa trois fils , et une
fille mariée à Ricimer. L'un de ses
fils , nommé Marcien, fut sur le point
d'arracher l'empire d'Orient à Zenon ,
eu 479» "'^is il finit par être pris et
exilé au fort de Papyre, en Isaurie.
L— S— E.
ANTHÉMIUS, architecte et sculp-
teui- , né a Tralles en Lydie , vivait
som l'empire de Justinien , dont la ma-
gnificence donna lieu à Anthémius de
signaler fréquemment ses grands ta-
lents. Il connaissait parfaitement les
mathématiques, et ce fut avec leur se-
cours qu'il entreprit les plus vastes
constructions. 11 paraît aussi que les
secrets de la physique et de la chimie
ne lui étaient pas moins familiers ; car
les historiens rapportent qu'il imitait
les effets du tonnerre et des éclairs,
et même, ajoutent-ils, des tremble-
ments de terre. On serait tenté de
croire, d'après ce récit, qu' Anthémius
avait trouvé quelque composition as-
sez semblable à la poudre. Le rhéteur
ZéVion lui ayant donné des sujets
!i4B A N T
de plainte , Aulhémius , pour s*en
venger , déploya , auprès de la maison
de Zenon , l'appareil effrayant de son
art. Le rhéteur sentit tout à coup sa
maison e'branle'e jusque dans ses fon-
dements ; il vit briller la foudre , et,
croyant le ciel de'chaîue' contre lui, il
s'enfuit épouvanté. Le principal titrede
gloire d'Antliéraius est la construction
de l'église de Sainte - Sophie , la plus
belle que le christianisme ait élevée
dans l'Orient, bâtie d'abord par Cons-
tance, réparée par Théodose-le-Jeuuc,
décorée par tous les empereurs , elle
avait été réduite en cendres dans la
sédition arrivée en 53^ , sous le règne
de Justinicn , qui forma aussitôtle pro-
jet de la rebâtir et d'en faire le plus bel
édifice de l'uni vers. Anthémiusfutchar-
géd'en poser les fondements; et le plan
qu'il suivit est encore admiré de nos
jours. Il assitcelimmensc édifice dans la
plus grande place de Constanlinople,
nommée W4us;ustéon. ]/églisc, tour-
née vers l'Orient , selon l'ancien usage,
était de forme carrée ; elle avait 4'^
toises de longueur sur 58 de lajgeur.
On cmplova , pour la construire , un
ciment composé , suivant Codin , de
tuiles pilées, d'orge bouilli , de chaux
et d'écorce d'ormes hachée ; on se
servait d'eau tiède pour délaver ce ci-
îiient qui , suivant le même auteur ,
acquérait la solidité du for. Anthémius
ne poussa pas la construction plus loin
que les fondements ; il mourut vers
l'an 534, et laissa à Isidore de INlilet
la gloire de terminer ce monument.
Anthémius avait écrit un livre sur les
machines singulières , etc. Dupuy, se-
crc taire perpétuel de l'Académie des
inscriptions , a donné un Fragment
d' Anthémius, contenant des problèmes
de mécanique ctdedioptrique , auquel
il a joint des notes et des observations,
in-4". 1 7 7 7 ( Mémoires de l'académie
iies Bclks-LeUres). Daws ce morceau,
ANT
Anthémius donne la manière de cons-
trmre les miroirs ardents , et expli-
que, en quelque façon , comment Ar-
chimède a pu , à l'aide de ces miroirs ,
brûler les vaisseaux des Romains.
L— S— E.
ANTHERMUS , ou AÏHENIS, de
l'île de Chio, était frère de Bupalus :
tous deux étaient sculpteurs , ainsi que
leur père Anthermus, leur aïeul Mic-
ciades et leur bisaïeul Malas. Pline dit
que , pour trouver le commencement
de l'art dans cette famille , il faut re-
monter à la première olympiade. An-
thermus et son frère vivaient 54o
ans av. J.-G. Le poète Hypponax ,
leur contemporain, était d'une ];<i-
deur ellrayante ; les deux artistes s'a-
musèrent à le re])résenter dans toute
.sa difformité, et l'exposèrent ainsi à la
lisée pubjique. Hipponax , indigné ,
fit contre eux des vers satiriques qui
les mirent au désespoir j on crut même
qu'ils s'étaient pendus; mais Pline con-
tredit ce fait. Ln grand nombre de
leurs ouvrages décorait les îles de la
Grèce. 11 y eu avait plusieurs dans
l'ile de Délos , au bas desquels ils
avaienlgravé orgueilleusement : « Chio
» est aussi célèbre par les ouvrages
» des fils d'Anthermus que par sa
» puissance.» Pline parle el'une statue
de Di.uie, qui se voyait dans cette der-
nière île, et qu'ils avaient sculptée de
telle sorte, qu'en entrant dans le tem-
ple , on croyait lui voir un visage sé-
rieux , tandis qu'elle paraissait sourire
à ceux qui sortaient. Une grande partie
de leurs ouvrages passa de la Grèce à
Rome , où Auguste les jtlaça dans dif-
férents temples. Aristophanes, dans sa
comédie des Oiseaux, désigne Anther^
uius sous le nom (ï^rcheiinus,
L— S— E.
ANTHOINE ( François-Paul-Xi-
cof,As), lieutenant-général du bailli.igo
de Boulay , député du ticrs-ctat de
ANT
Sargueraines aux étals - généraux , s'y
raoïitta zelc partisan de la révolution.
11 y parla en faveur de l'institution
des jures , réclama pour le roi la
liberté d'organiser le ministère à sa
volonté , vota le licenciement des
ofliciers de l'armée, et appuya la sup-
presssion des ordres de chevalerie.
Nt)mmé, en septembre i ^Ç)'^ , député
du département de la Moselle à la con-
vention , il fut envoyé en mission dans
le département de la Meurthe , durant
l'hiver de i "yQD , et revint mourir à
!Metz , après avoir légué tous ses biens
à la nation : ce que la convention re-
fusa. . N — L.
ANTIBOUL(CHARLEs-Lours), né
à S.-Tropez, homme de loi , adminis-
trateur du département du Var, dé-
puté de ce département à la conven-
tion , rrfusa de prendre la qualité de
juge de Louis XVI, vota la détention,
fut eQV03é en mission en Corse, ar-
rêté à son retour à Marseille par les
sections insurgées, délivré par le gé-
néral Cartaud , décrété d'arrestation,
pour avoir compromis la dignité na-
tionale dans son interrogatoire à Ve-
nise, condamné à mort comme com-
plice du parti de la Gironde, et exé-
cuté le 3 1 oct. i';95,à4i ans. ]N — ^l.
AN TIC. roj.BosG.
ANTICO (Laurent), en latin An-
tifjuus , grammairien qui vivait au
commencement du l'j''. siècle, était
de Lentino, en Sicile. Il était prêtre,
et enseigna la grammaire dans le sé-
minaire de Padoue. Il a laissé : I. De
Eloquentid compendiarii libri ires,
Venise, iSg^i, in-8"., et ensuite Pa-
doue, 1 6 1 8 ; II. Pe institutione gram-
maticœ Commenlarii très, Padoue,
1 Go I , in-8°. Fabricius , Biblioth. lai. ,
vol. 2, avertit qu'Elie Putschius, dans
6PS Graminalici veteres , et Joseph
Quosncl , dans son Catalogus biblio-
theccE Tïuiunœ , oiU confondu cet An-
A N T o.!\i\
tico, ou Autiquus , avec les anciens
grammairiens. G — e.
ANTIDOTE, peintre grec, discipir
d'Euphranor , vivait dans la i o4''-
olym piade, 364 "^^^i ^^'- J-"^- ^^^ ^'^^^' '
ris était sévère, et ses ouvrages , plu?^
soignes que nombreux ; les jilus re-
marquables étaient un Lutteur et uu
Joueur de Jlute. On regardait comme
un titre encore plus glorieux pour lui ,
d'avoir été le maître de Nicias d'A-
thènes. L — S — E.
ANTIGÈNES , macédonien , l'un
des chefs des Argyraspides , qui sui-
vi rent Alexandre en Asie. Après la mort
de ce prince, il resta fidèle à sa fa-
mille, et ce fut pour cela qu'il prit le
parti, d'abord de Perdicas, et ensuite
d'Eumènes , qu'il n'abandonna jamais,
quelques offres qui lui fussent faites.
Ce général avant été livré à Antigone
par les Argyraspides eux-mêmes , An-
tigènes eut le même sort, et Antigone
le fit biûler tout vif, vers l'an BiS
av. J.-C. C— R.
ANTIGÉNIDAS. Deux Thébaius
de ce nom se distinguèrent par leur
talent à jouer de la flûte. Le premier,
fils de Dionysius , donna quelques
leçons à Alcibiade. Il en était ques-
tion dans un discours de Lvsias. Le
second, fîls de Satvrus , fut beau-
coup plus célèbre par les changements
qu'il fit à la flûte , en y multipliant
les trous de manière qu'on pût jouer
dans plusieurs modes. Il tira le plus
grand parti de cet instrument , qui
jusqu'alors avait été très-borné; il
joua de la flûte aux noces d'Iphicrate,
lorsque ce général athénien épousa la
fille deCotvs, roi de Thrace. Il joua
aussi devant Alexandre, et il accom-
pagnait ordiiiairemen!; le poète Phi-
loxène , lorsqu'il récitait ses vers.
D'après tout cela, il est évident qu'on
ne doit pas le confondre avec celui qui
fiU le maître d' Alcibiade. C — r.
25(> A N T
ANTIGONE, l'un lies capitaines
d'Alexandre , à qui , après ses pre-
mières conquêtes en Asie , ce prince
confia le gouvernement de la Lydie et
de la Phrygie. Antigène , quoique avec
peu de troupes, sut defcndie ces pro-
vinces, et parvint même à soumettre
la Lycaonie. Après la jnort du roi de
Macédoine, Antigone obtint, dans le
partage de ses conquêtes, la Phrygie,
la Lydie et la Pampliylie. Perdicas
s'étant rendu maître de l'esprit d'Ari-
dee, qui avait succède à Alexandre de
Macédoine, et ayant fait tuer Me'léagre,
aspirait à réunir sous sa domination
tous les e'iats d'Alexandre ; et comme
il craignait l'activitc d'Antigone , il
chercha un prétexte pour s'en défaire ,
et l'accusa d'avoir désobéi aux ordres
du roi. Antigone, devinant ses projets,
s'ombarqua furtivement avec Dèmc-
irins son fds et ses amis , se rendit ,
on Europe, auprès de Cratère et d'An-
tipater , et, de conçoit avec Ptolemee,
ils déclarèrent la guerre à Perdicas.
Ce dei'nier passa tout de suite en Asie,
résolu d'aller attaquer Ptole'raèc, qui
était le plus puissant ; mais comme
rtoléme'c était fort aimé en Egypte ,
et que Perdicas ne l'était pas autant
des Macédoniens, celui-ci n'eut aucun
succès, et fut même tué par ses propres
soldats. Eumènes,run de ses géné-
raux, était encore très-puissant eu
Asie y on chargea Antigone de conti-
nuer la guerre contre lui , et Eumèncs
ayant été trahi par ses propres sol-
dats , Antigone le fit mourir, et se
rendit bientôt maître de presque toute
l'xlsie, Séleucus ayant piis la fuite , et
s'étant retiré auprès do Plolémée. Il
s'empara aussi de la plus grande par-
lie des trésors d'Alexandre, qui étaient
à Ecbatane et à Suzc; Ptolémée, Cas-
sandre et Lysiniaquc lui en ayant
demandé compte , il s'y refusa , et
déclara même la guerre à Cissandre ,
A^"T
pour venger , disait-il , la mort d'O-
îympias , et délivrer Alexandre , fils
d'Alexandre , qui s'était renfermé ,
avec Roxanesa mère, dans Araphipo-
lis. Tous les chefs , révoltés de son
ambition , se coalisèrent, et tandis que
Cassandre attaquait l'Asie mineure,
Ptolémée et Séleucus s'avancèrent dans
la Syrie , où ils défirent Démétrius ,
fils d'Antigone. Séleucus, de son côté,
reprit Babylone. Antigone , apprenant
ces revers , revint promptement , et
fit abandonner la Svrie à Ptolémée ,
qui se retira en Egypte. Antigone
n'osa pas l'y attaquer ; il envoya Dé-
métrius contre Séleucus , à qui il
reprit Babylone ; alors Antigone ,
Ptolémée, Lvsiraaque et Cassandre
concluient un traité de paix, par lequel
ils devaient rester en possession des
pays qu'ils occupaient, jusqu'à la ma-
jorité d'Alexandre , fils de Roxane,
qui avait le titre de roi. A peine ce
traité eut-il été conclu , que Cassandre
fit périr le jeune Alexandre et sa mère,
et la guerre s'alluma de nouveau entie
les prétendants à l'empire. Ptolémée ,
après avoir eu quelques avantages ,
fut vaincu sur mer par Démétrius.
Antigone leva alors ouvertement le
masque , et prit le titre de roi , qu'il
donna aussi à son fils. Ptolémée , Ly-
simaque et Cassandre en firent de
même. Antigone entreprit ensuite de
chasser Ptolémée de l'Egypte, et ras-
sembla pour cela des forces considéra-
bles , tant de terre que de mer ; mais
ayant perdu par les tempêtes la plus
grande partie de ses vaisseaux, et Pto-
lémée ayant disposé ses troupes de
manière à rendre toute invasion impos-
sible, il fut obligé de se retirer. Peu de
temps après , Démétrius son (ils chassa
Gissandre de toute la Grèce. Ce der-
nier implora le secours de Lysimaque,
qui passa en Asie avec une puissante
armée ; et Séleucus s'étant réuni à lui ,
ANT
il se livra vers Ipsiis , rlnns h Pliry-
gie, une bataille dans laquelle Anti-
ç;one fut tué , l'an '299 av. J.-C. , à
l'âge de 84 ans. On ne peut dissimu-
ler qu'Antigone n'ait montré beaucoup
d'ambition. Cepentlant , il eut de
grandes qualités; il vivait dans la plus
grande union avec sa femme et ses
deux fils, Démétrfus et Philippe; jI
associa même le premier au trône, et
lui confia des forces trcs-considérables.
11 aimait les poètes et les gens de let-
tres, etil s'attacha entre autres l'histo-
rien Iliéronyrae de Cardys et le poète
Antagoras. 11 avait de l'esprit, et Plu-
tarque rapporte de lui plusieurs bons
mots. Durant son séjour dans une ville,
Philippe, son second fils , étant logé
chez une veuve qui avait trois filles
fràs-bellcs, il fit venir celui qui distri-
buait les logements, et lui dit : « Ne
)) tireras-tu pas mon fils de ce mauvais
» pas?» Hermodore,dansun poërae,
l'ayant a])pc\é Jils du Soleil : « Mon
«esclave, lui dit-il , sait bien le
» contraire. » Thrasylle le cynique lui
demandant une dragme , il lui dit :
« Ce don n'est pas digne d'un roi. »
L'antre alors demanda un talent.
« C'est trop pour un cynique , lui ré-
» pondit-il. » G — R.
AjNÏIGONE , surnommé Gona-
TAS , parce qu'il était né à Gonnusc ,
dans la Thessalie , était fils de Démé-
trius Poliorcète. 11 suivit sou pcre
dans la Béolie, lorsque la Macédoine
eut été conquise par Lysiraaque et
Pyrrhus, et, lorsque Démétrius eut
été fait prisonnier en Asie, par Sé-
leucus, il ne négligea rien pour obte-
nir sa liberté , et s'offrit même à aller
prendre sa place. Démétrius étant mort
dans sa captivité, Lysiraaque et Sé-
leucus l'ayant suivi de près , Antigone
crut l'occasion favorable pour repren-
dre la Macédoine ; mais il fut prévenu
par Ptolémée Céraunus, qui le défit
ANT 25i
et le força à se retirer. Ptolémée ayant
été tué par les Gaulois , et Sosthènes,
qui lui avait succédé, étant mort, An-
tig"bne rentra dans la Macédoine, et,
après avoir défait les Gaulois , et pris
ApoUodore, tyran de Cassandrée, il
se fit reconnaître roi de ce pays, l'an
^177 avant J.-C. Il fit, pu de temps
après, la paix avec Antiochus, qui
lui donna en mariage Phila, l'une de
ses sœurs. Il fut, vers l'an 272 av.
J.-C. , chassé de la Macédoine par
Pyrrhus ; mais ce prince ayant été tué
dans Argos, il rentra dans ses états,
et s'empara ensuite des principales
villes du Péloponnèse. Tandis qu'il
était occupé dans la Grèce, Alexandre
fils de Pyrrhus , entra dans la Macé-
doine pour venger la mort de son père;
Antigone étant venu à sa rencontre,
fut abandonné par les siens , qui re-
connurent Alexandre pour roi. H re-
tourna dans la Grèce, laissant dans
la Macédoine, Démétrius son fils, qui
parvint à la faire rentrer sous sou
obéissance. Voulant tenir la Grèce
dans sa dépendance, il s'empara, par
trahison , de l'Acrocorinthe , citadelle
de Corinthc , et y mit une garnison
commandée par Persée, disciple de
Zenon le Stoïcien , qui se laissa bientôt
après, reprendre cette place par Ara-
tus. Le reste de la vie d'Antigone
Gonatas nous est inconnu; nous sa-
vons seulement qu'il mourut âgé d'en-
viron quatre-vingts ans, l'an 241 av.
J.-C. Il eut deux fils, Alcyonéus et
Démétrius. Alcyonéus était déjà en
âge de porter les armes , lorsque Pyr-
rhus fut tué, vers l'an 271 av. J.-C.
Il apporta en effet la tête de ce prince
à son père , qui lui fit une sévère ré-
primande à ce sujet. Il était sans doute
d'une première femme , et mourut
avant Antigone , qui eut pour succes-
seur Démétrius , son autre fils. C — R.
ANTIGONE, surnommé Doson,
2^.1 ANT
parce qu'il promettait beaucoup et ne
donnait guère , était fils de Déraétrius
second , fils de Demétrius Poliorcète.
Démëtrius, fds d'Antigonc Gonatas,
ayant laisse en mourant, Philippe, son
fils , encore enfant , et la Macédoine
en guerre avec presque tous ses voi-
sins, les Macédoniens choisirent pour
roi Antigone Doson , l'an 25 1 av. J.-C.
Il épousa la veuve de son neveu j il
soumit les Dardaniens, les Thessa-
liens et les Mœsiens, qui avalent se-
coué le joug des rois de Macédoine.
Quelque temps après , ses propres
sujets se révoltèrent , ce qui leur arri-
vait souvent, et l'assiégèrent dans son
})alais. 11 parut sur-le-champ en leur
présence, et, leur ayant rappelé ce qu'il
avait fait pour eux , il leur jeta sa robe
de pourpre et son diadème, en leur
disant qu'ils n'avaient qu'à les donner
à quelqu'un qui les méritât mieux que
lui. Cette fermeté apaisa sur-le-champ
la sédition. On l'invita à reprendre le
diadème; mais il ne le voulut pas qu'on
n'eût livré au supplice les principaux
moteurs de la sédition. Il alla ensuite
au secours des Achéens, contre les
Lacédéraonicns , et, ayant été nommé
leur chef, il défit C.léomènes , et prit
la ville de Sparte. 11 se conduisit avec
beaucoup d'humanité envers tous les
Grecs en général , et il se dirigeait
particulièrement d'après les conseils
d'Aratus , avec qui il avait contracté
l'amitié la plus étroite. Il mourut l'an
5>.2 1 avant J. - G. , laissant le tronc à
Phihppe son petit-neveu. C — r.
ANTIGONE, fdsd'Aristobulc, fut
fait prisonnier avec son père , par
Pompée , l'an 6 1 avant J.-C. Us furent
amenés tous les deux à Rome , d'où
ils s'échappèrent , quelques années
après , et retournèrent dans la Judée,
où ils recommencèrent la guerre ; mais
ils furent pris une seconde fois par
Gabiûius ; qui les envoya encore à
A NT
Rome. Jules César leur ayant permis
de retourner dans la Judtie , ils tom-
bèrent entre les mains des partisans
de Pompée, qui firent périr Aristo-
bule et Alexandre, l'un de ses fds. Les
Parthes ayant ramené Antigone à Jéru-
salem, l'an 58 av. J.-C. , il fit couper
les oreilles à Hyrcan , son oncle , pour
qu'il fût incapable d'être grand-prétre ,
dignité qui était réunie à la princi-
pauté, et il se mit à sa place. Antigone-
fut bientôt après assiégé par les trou-
pes de Marc - Antoine , qui voulait
mettre Hérode sur le trône : il fut pris ,
battu de verges, et mis à mort l'an 35
avant J.-C. C'était la première fois que
les Romains avaient traité aussi cruel-
lement une tête couronnée. C — r.
ANTIGONE , surnommé Carys-
Tius, sans doute parce qu'il était de
Carystos , dans l'ile d'Eubée , était
contemporain de Pvrrhon , et vivrat
par conséquent sous le règne de Pto-
léraéc Philadelphe , vers l'an 270
avant J.-C. 11 avait écrit les Fies des
hommes célèbres dans les sciences ,
ouvrage qui s'est perdu. 11 nous reste ,
sous son nom, un Recueil d'histoires
extraordinaires , Jlistorianim viirn-
bilium collectio , dont la meilleme
édition est celle que M. Beckmaun a
donnée, avec les notes de plusieurs
savants et les siennes, Lipsia? , I7<)i,
in-4". , grec et latiu. Cette compilation ,
faite sans goût et sans jugement, sem-
ble plutôt appartenir à quelque gram-
mairien du Cas-Empire, qu'à un écii-
vain du siècle de Ptolémée. C — r.
ANTIGONUS SOCHOEUS, juif,
né à Socho, vivait du temps d'Eléazar ,
huitième grand-prètre, 5oo ans avant
J.-C. , et paraît avoir donné naissance
à la secte des saducéens. Il était dis-
ciple de Slméon-le-Juste. Mécontent
des innovations iritroduites par les
pharisiens, et particulièrement delc.'.r
doctrine sur les œuvres mciitoii-es, qui
ANT
promettait aux hommes des récom-
penses temporelles , il soutint que les
îiommes devaient servir Dieu , non
comme des Valets à gages , mais seu-
lement par une piété' pure et de'sinte'-
resse'e. Les disciples d'Antigonus éten-
dirent cette doctrine jusqu'aux récom-
penses de la vie future ; et deux d'entre
eux, Baithos et Sadoc , cnseignèient
qu'on ne devait attendre aucune ré-
compense future , et qu'en consé-
quence il n'y aurait point de résur-
rection des morts. De là vint la secte
des baitliosiens , ou saducéens. D — t.
ANT1IVL\CHIDES. Foy. Auns-
TATES.
ANTIMACO ( Marc-Antoine ) , un
des célèbres professeurs de Lmgue
grecque, qui fleurirent en Italie, au
1 6". siècle , était né à ]\îantoue, vers l'an
1473. Quoique l'on eût déjà bien des
secours dans sa pairie pour appren-
dre le grec, le désir de savoir parfai-
tement cette langue l'engagea, dans sa
jeunesse, à passer en Grèce, oii il l'é-
tudia pendant cinq ans, sous les plus
habiles maîtres. Il parvint à écrire et
à parler celte langue, aussi facilement
que le latin et l'italien. Il revint en-
suite à Mantoue , et y ouvrit un cours
de langue et de littérature grecques.
Appelé en 1 552 , à Ferrare , il y pro-
fessa , pendant vingt ans , et y mourut
en i55'i, âgé de soixante-dix-neuf
ans. Il traduisit du grec en latin
l'histoire de ce que firent les Grecs
après la bataille de Mantinée, écrite par
Gemistus Pletliou , et quelques opus-
cules de Denis d'Halicarnasse , de Dé-
métrius de Plialère, et de Polien. Ces
traductions furent imprimées avec un
discours du même auteur, à la louange
des lettres grecques , sous le titre sui-
vant : Gemisti Plethonis de s,eslis
grœcorum post pugnam ad Manti-
neam per cqpita traclatio duobus
libris expUcata, M, Anlonio Anti-
ANT 255
macho interprète. Ad hœc Dionysii
Halicarnassei prœcepta, etc., BâJe,
1 54 o , iu-4°. 11 fît aussi un as^ez grand
nombre de. vers latins , presque tous
restés inédits. Quelques auteurs lui
attiibuent huit livres d'épigrammes
grecques. On en trouve plusieurs de
lui, tant grecques que latines, à la
louange de Pierre Vettori, à la lin du
Recueil des lettres de quelques savants,
adressées à ce célèbre rhéteur, pu-
bliées pai- le savant chanoine Bandini,
à Pavie, 1708. G — e'.
ANTIMAQUE. Suidas ciie quatre
poètes de ce nom. Celui qui est le su-
jet de cet article était de Ckt.'os, sui-
vant Ovide , et de Colophon , selou
d'autres. L'auteur anonyme de la
Description des Olympiades le fait
contemporain deLysaudre, et même
de Platon , qui , très - jeune encore ,
assista , dit-on , à la lecture de la
Thébdide d'Anlimaque. Il est fâcheux
qu'il ne nous reste presque rien d'un
poète placé par les grammairiens im-
médiatement après Homère , et dont
l'empereur Adrien faisait , au rapoort
de Dion, un si grand cas, qu'il eut
un moment la fantaisie d'anéantir
Homère, pour lui substituer son poète
favori. On trouve un fragment d'An-
timaque dans les ylnalectes de M.
Brunck , tora. p"^. , pag. 167; et
Schekenberg a publié tout ce qui reste
de lui, en 1786, avec une épître de
Woif. La Thébàide d'Antimaque , et
sa Lydienne^ élégie louée par Ovide,
ne sont point parvenues jusqu'à nous.
A P) j^_
ANTINE (d'). Foj'. Dantine.
ANTIN (d"1. Foy. Gondrin.
ANTINOUS. Foy. AdJRjEN , em^
pereur.
ATvTIOCHUS, fils de Phintas^roi
des Messéniens , régna quelque temps
avec Androclès , son frère, dans la
Uieilleure intelligence j mais ils se di-
•ilii A N T
visèi-ent au sujet de Polycharès qii'An-
dioclcs voulait livrer aux Spartiates ;
le peuple s'ctant divise à l'exemple de
■ses chefs , il y eut une sédition dans
laquelle Andro<lès fut tué , et An-
tiochus resta seul roi des Messe'nieus.
Tl mourut vers l'an -^44 avant J.-C,
uu peu avant la guerre de Messène.
Il eut pour successeur Eupbaès sou
fils. C— R.
ANTIOCRUS I". , surnommé So-
T£R , fils de Séleucus I". et d'Apamé ,
.se distingua à la bataille d'Ipsus, où
il (commandait l'aile opposée à Déiué-
frius , fils d'Antigone. Il devint , par
la suite , amoureux de Stratonice ,
épouse de son père , qui la lui céda ,
vt lui donna en même temps la por-
tion de ses états située au-delà de l'Eu-
phrate ( F. Erasistrate }, Ils sou-
mirent , de concert , la plupart des
pavs situés entre la mer Caspienne et
rindus , et rétablirent plusieurs des
Aallcs qu'Alexandre v avait fondées.
Leurs expéditions , dans cette portion
de l'Asie , jetèrent beaucoup de lu-
mières sur la géographie. Séicucus
étant mort ( l'an 2b i avant J.-C. ) ,
Antiochus devint maître de tous ses
états. Ayant jicrdu , peu de temps
après , Stratonice , il épousa une de
ses sœurs dont le nom ne nous est
pas connu. Il remporta , l'an i-^S
avant J.-C. , une victoire signalée sur
les Gaulois qui ravageaient l'Asie ; et
comme il la dut à ses éléphants , il
en fit sculpter un sur le trophée qu'il
érigea. Appien dit que ce fut à cette
occasion qu'on lui donna le surnom
de Soter, mais il paraît qu'il le por-
tait auparavant. Après la mort de l-*hi-
Ictcre, il voulut s'emparer des états
de ce prince , et fut vaincu à Sardes
pas- Eumènes. Il déclara la guerre à
Ptolémée Philadelphe , à l'instigation
de Magas , roi de Cyrène, qui avait
épousé A pâmé, safiUc^mais ce priuce
ANT
lui donna tant d'occupation dans ses
propres élats, qu'il ne put pas aller
attaquer l'Egypte. Sur la fin de ses
jours , Ptolémée , son fils aîné, qu'il
avait associé au trône , se révolta
contre lui de concert avec Timarque
qui avait le gouvernement de l'Asie
mineure. Antiochus le fit mourir, et
fut tué lui-même peu de temps après,
l'an 'li'ri avant J.-C, dans un com-
bat près d'Éphèse , par un Gaulois ,
qui , ayant voulu aussitôt monter sur
le cheval de son ennemi . fut entraîné
dans un précipice où il périt. C — r.
ANTIOCHUS II, surnomme
TnÉos ( Dieu ) , fils du précédent et
de Stratonice , monta sur le trône ,
l'an 9.6i avant J.-C. Il commença son
règne par faire la guerre à Timarque,
qui, après s'être révolté contre sou
père, s'était rendu tyran de Miletj
il le vainquit , le chassa du pays ,
et les Milésiens, par reconnaissance,
lui donnèrent le surnom de Ditit. Il
coritinua la guerre que son père avait
commencée contre Ptolémée Phila-
delphe , roi d'Égy-})te , et n'eut pas
plus de succès que lui ; mais Ptole'-
méc , qui était d'une humeur paci-
fique , voulaiit mettre fiu à ces dé-
bals , eng-!gea Antiochus à répudier
Laodicé , sa sœur et son épouse , dont
il avait déjà deux fi!s, et lui donna
en mariage Bérénice , sa fille , avec
une dot considérable. Ce fut pendant
cette gucire que les Parthcs , sous
la conduite d'Arsace , se révoltèrent
contre Antiochus , cl jetèrent les f.ii-
dements de leur empire, qui devint ,
dans la suite, le redoutable rival de
Rome. Ptolémée étant mori , Antio-
chus , qui avait répudié Laodicé mal-
gré lui , la rappela et renvoj a Lei é-
nicc. Laodicé craignant l'inconslaïuf
de son époux , prit le parti de l'cui-
polsonner , et , ayant caché sa niuri ,
eHe plaça dans son lit un homme du
ANT
peuple , nomme Ai^témon , qui lui
ressemblait pai'faitement , et qui joua
le rôle du roi. Ce faux Antiochus re-
commanda ses fils et sa femme aux
grands du royaume , et de'sigua Se'-
leucus son fils aîné' pour son succes-
seur. Antiochus II mourut l'an 247
avant J.-C.( ^. BÉk£Nice,LaodicÉ,
Seleucus II ). C — R.
ANTIOCHUS, surnomme HiERAX,
fils du pre'ce'dent et de Laodice , n'a-
vait que quatorze ans , lorsque Pto-
ierae'e Évergètes le fit roi de la Cili-
cie , pour l'opposer à Séleucus Calli-
uice , frère du jeune Antiochus , qu'il
avait presque entièrement dépouille'
de ses états. Ce dernier ayant fait de
vains efforts pour les recouvrer , eut
recoui's à la générosité d'Antiochus ,
qui rassembla une armée , en appa-
rence pour aller à son secours , mais
réellement pour le dépouiller de ce
qui lui restait : cette avidité , remar-
quable dans un jeune homme , et
suitout dans un fi'èrc , lui fit donner
le suinom diHierax. Ptolémée ayant
fait une trêve avec Séleucus , la guerre
continua entre les deux frères , et An-
tiochus , à l'aide des Gaulois , rem-
porta une victoire signalée sur Sé-
leucus , que l'on crut même avoir été
tué : Antiochus en prit le deuil , et
témoigna le plus grand chagrin. Il
tourna ensuite ses armes contre Dé-
niétrius , roi de Macédoine , à l'insti-
gation de Nicée , sa sœur , que ce
prince avait épousée, et ensuite aban-
donnée pour en épouser une autre. Ou
ne connaît point les détails de cette
guerre. Celle qu'il eut contre Séleu-
cus , qui n'avait point péri comme on
l'avait cru , continuait toujours ; Eu-
îuènes en profita pour s'emparer
d'une grande partie de l'Asie mineure,
qui, désolée par les incursions des
Gaulois , qu' Antiochus avait à sa sol-
de, était toute disposée à changer de
ANT 255
maître. Antiochus ayant, par la suite,
été entièrement défait par Séleucus ,
se réfugia d'abord chez Artamènes ,
son beau-père , roi de Cappadoce ;
mais, s'étant aperçu qu'on lui tendait
des embûches , il s'enfuit ; et , ne
sachant où se retirer, il alla se livrer
à Ptoléraée Evergète , son ennemi ,
qui le fit enfermer. Il trouva, cepen-
dant , le moyen de s'échapper par le
secours d'une courtisane , et fut tué
en chemin par- des voleurs, l'an 'l'j.'j
avant J.-C. C — r.
ANTIOCHUS III, surnommé le
Grand, fils de Séleucus Calliuice et
de Laodicé, était à Babylone lorsque
Séleucus Céraunus son frère fut tué.
L'armée de Syrie le reconnut pour roi.
La Syrie était alors dans une situa-
tion très-fàcheuse , suite des divisions
entre Séleucus II et Antiochus Hié-
rax ; le satrape de la Bactriane s'é-
tait déclaré indépendant ; Ptolémée
Philopator s'était emparé de la Cœlé-
syrie et de la Phéuicie ; et Attale , roi
de Pergame, avait réuni à ses états
une grande partie de l'Asie , en-deçà
du Taui'us. Antiochus , quoique fort
jeune, ne perdit point courage. Ayant
confié le commandement de l'Asie
mineure à Achaeus , qui y était déjù
avec une armée , celui de la Médie a
Molon , et celui de la Perse à Alexan-
dre, il allaattaquer la Cœlésyrie. Tandis
qu'il était occupé de ce côté , Alexandre
et Molon firent révolter les provinces
qui étaient sous leurs ordres ; Antio-
chus abandonna alors la Cœlésyrie,
foudit sur les révoltés , les défît et
l'S réduisit à se donner la mort; il
entreprit ensuite une expédition contre
Artabazane, roi de l'Atropatène ; mais
ce prince , qui était déjà très-âgé , ne
voulut pas s'exposer à faire la guerre ,
et se soumit à toutes les conditions
qu' Antiochus lui imposa. Tandis qu'il
était dans ces pays éloignés , AcLieus
:i56 ANT
ceignit le diadème, et se fit recoiiuaîlre
roi des pays dont il était satrape. Au-
tioclius, de retour dans la Syrie , reprit
la guerre contre Ptolëmée , et s'em-
para de plusieurs villes de la Pales-
tine et de la Phe'nicie ; vaincu par ce
prince à Rhapliia dans la Palestine,
il fut obligé d'abandonner toutes ses
conquêtes, et se trouva trop heureux
d'obtenir une trêve d'un an , dont il
profita pour aller soumettre AcLaeus,
qu'il prit et fit mourir. Il attaqua en-
suite Arsalce , roi des Parthes , qu'il
força à dtlinander la paix , et à se
réunir à lui contre Eutliydême , roi
de la Bactriane, à qui il accorda aussi
la paix : il traversa ensuite le montPa-
ropamisus , et s'avança jusqu'à l'Inde.
Après avoir parcouru et soumis l'A-
racîiosie, la Drangiane, la Carmanie,
la Perse , la Susiane , la Babylonie et
la Mésopotamie , il revint dans sou
pavs, couvert de gloire, et ses sujets
lui donnèrent le surnom de Grand ,
qu'il avait bien mérilé, en rendant au
royaume de Svrie son ancienne splen-
deur. Le reste de sa vie ne répondit
pas à ces brillants commencements ;
Ptolémée Fliilopator étant mort l'an
ao4 avant J.-C, Antiochus se réunit
a\ec Philippe, roide Macédoine, pour
dépouiller de ses états Ptolémée Epi-
phanes son fils , qui n'avait, que cinq
ans ; mais le peuple romain que son
père lui avait nommé pour tuteur ,
s'o)>posa à cette invasion ; et comme
la puissance de ce peuple était déjà
redoutable , Antiochus n'osa rien en-
treprendre. Les ambassadeurs de Rome
i'emjièchèreut aussi de faire la guerre
à Attaic , roi de Pergame. 11 eut bien-
tôt de uouvcUes diiticultés avec les
Romains , au sujet de quelques villes
de l'Asie mvjieure nom il s'était em-
paré j tandis qu't n négociait à ce su-
jet , Annibal vint se réfugier auprès
de lui , et l'escila à taire la guerre aux
AïfT
Romains , en allant les attaquer dans
l'ItaUe même. Antiochus ne suivit pas
son consed ; mais quelque temps
après, il se rendit à l'invitation des
Etoliens , qui avaient pris les armes
contre les Romains, et passa dans la
Grèce avec dix mille hommes : l'Eu-
bée s'étant soumise sans résistance,
il se rendit dans la Thessahe , où les
Etoliens , les Athamanes et les Thé-
bains se joignirent à lui ; mais effrayé
par l'apparition de quelques troupes
que les Romains avaient envoyées en
avant , il retourna à Chalcis dans
l'Eubée , où il devint amoureux d'une
jeune fille, qu'il épousa ; et il y pas-
sa riiiver dans les plaisirs : ce qui
affaiblit beaucoup son armée. Au prin-
temps, il retourua dans la ïhessalie ;
et, sentant qu'il n'avait pas des forces
assez considérables pour se mesurer
avec les Romains qui avançaient à
grands pas , il fortifia le passage des
Tliermopyles , et fit garder les défilés
par lesquels les Persans avaient pé-
nétré dans la Grèce , espérant arrêter
l'armée romaine jusqu'à ce que les
secours qu'il attendait de l'Asie fus-
sent arrivés; mais lui corps de Ro-
mains commandé par Caton l'Ancien ,
ayant trouvé le moyen de franchir
la montagne malgré les Etoliens , le
prit à dos, tandis que le consul IMa-
nius l'attaquait par devant ; il ne lui fut
plus possible alors de retenir son ar-
mée qui prit la fuite ; il eut beaucoup
(le peine à s'échapper lui-même, avec
cinq cents cavaliers; tout le reste fut
tué ou fait prisonnier, .\ntiochus alla
s'embarquer à Chalcis , d'où il re-
tourna à Ephèse. Prévoyant alors que
les Romains vientlraient l'attaquer en
Asie, il rassembla des forces consi-
dérables dans le voisinage de la mer,
mit de fortes garnisons à Seslos et
Abydos , par où il fallait que les Ro-
iniins passassent pour arriver ea
ANT
Asie , fortifia la Cliersonnèse de
Tlirace , et fit de grands amas de
vivres et de minutions de guerre à
Lysiinachie , ville qui devait lui servir
de place d'armes ; mais ayant appris
quelque temps après, que son escadre ,
commandée par Polyxénidas avait été
battue par les Romains auprès de
IVlvounèsos, il perdit la tète , aban-
donna toutes les places qu'il avait for-
tifiées, et se retira à Sardes. Scipion-le-
Jeune , ç^cne'ral de l'armée romaine ,
qui avait pour lieutenant Scipion l'A-
fricain sou frère , ne tarda pas à pro-
fiter de sa fuite et à passer en Asie.
Antiochus lui ayant fait faire des propo-
sitions de ])aix, il lui répondit qu'il fal-
lait, pour l'obtenir, qu'il abandonnât
toute l'Asie en deçà du Taurus. Ces con-
ditions paraissant trop dures , Antio-
clms se prépara au combat; il avait
70,000 hommes, et les Romains n'en
avaieut pas plus de 5o,ooo : ils rempor-
tèrent cependant une victoire éclatante.
Antiochus fut obligé de demander la
paix une seconde fois , et il l'obtint aux
mêmes conditions, en s'obhgeant de
plus à livrer tous ses éléphants, à
n'avoir qu'un certain nombre de vais-
seaux, et à payer i5,ooo talents; en-
fin , à donner vingt otages , du nombre
desquels fut son propre fils, l'eu de
temps après, Artaxias et Zadriades,
satrapes de l'Arménie , se révoltèrent.
Voulant aller les soumettre , il fit re-
connaître roi Séleucus , son (ils aîné ;
et comme il avait besoin d'argent , il
entreprit de piller de nuit le temple
de Jupiter , ou plutôt de Béius , dans
le pays des Elyméens; mais les ha-
bitants s'étant réunis le massacrèrent ,
ainsi que les troupes qui l'accompa-
gnaient, l'an 187 avant J.-C. Auiélius
Victor rapporte différemment sa mort.
Il dit qu Antiochus fut tué dans une
fête par un de ses hôtes , qu'il avait
iûsulté. 11 était âgé de ciuquante-deux
ANT 2^7
ans , et en avait régne' trente-six. Il
avaii épousé Laodicé , fille de Mi-
thridate, roi de Pont , dont il eut cinq
fils et quatre filles. C— R.
A^iïlOCHUS IV, fils du précé-
dent , fut élevé à Rome , où son père
l'avait envoyé en otage. Séleucus IV,
son frère aîné , voulant ie faire reve-
nir auprès de lui, envoya Démétrius ,
son propre fils , à Rome , pour le
remplacer. Antiochus étant arrivé à
Athènes , apprit la mort de Séleucus ;
il prit aussitôt le titre de roi , et ayant
vaincu Héiiodoi'e , qui avait usurpe'
l'autorité , il se fit reconnaître par les
Syriens. Le coraraen cernent de son
règne ne fut remarquable que par ses
extravagances ; il s'échappait quelque-
fois de son palais, sans que ses minis-
tres le sussent , et , suivi de deux ou ,.
trois personnes, il allait courir les
rues d'Antioche , s'arrêtait dans les
boutiques des orfèvres , avec qui il
s'amusait à disputer sur leur art , qu'il
prétendait connaître aussi bien qu'eux.
11 allait souvent boire avec des étran-
gers ou des gens de la lie du peuple.
Se dépouillant quelquefois de la pour-
pre, et pratiquant ce qu'il avait vu
faire à Rome , il allait sur la place
publique, et faisait la cour à ceux
qu'il rencontrait , leur demandant
leurs suffi ages^ pour les places d'édile,
ou de tribun du peuple j pais il s'as-
seyait sur la chaise curule, et s'oc-
cupait sérieusement à juger les causes
qui étaient du ressort de ces magis-
tratiu£S. Bigarre dans ses générosités,
il donnait aux uns des dés à jouer ^
des dattes et d'auti'es choses de nulle
valeur ; il faisait à d'autres des pré-
sents magnifiques , sans les connaître.
11 s'amusait quelquefois à jeter sur
son chemin des poignées d'or , en
criant : « Attrape qui peut. » D'autres
fois , fiyaut des pierres sous sa robe
de pourpre , il eu accablait ceux qui
ajS A N T
le suivaient. 11 s'amusa un joiu' à faire
remplir de vin une fontaine d'Antio-
che ; il se plaisait à se baigner dans
les bains publics , et s'y faisait ap-
porter les huiles odorantes les plus
précieuses. Quelqu'un ayant dit un
jour que les rois étaient bien heureux
de pouvoir faire usage de parfums
pareils , le lendemain il lui en fit
répandre un grand vase sur la tête.
Antiochus avait pris , en montant
sur le tfone , le surnom de Thcos
Epiphanes (Dieu présent ). Ses es-
travagances firent qu'on le changea
en celui à' Epimanes ( fou ). Tou-
tes ces folies ne lui firent cependant
pas négliger le soin de ses états , et
Ciléopàlre, sa sœur, qui était mariée
à Ptolémce Philométor , étant morte
l'an 173, av. J.-C, il ne voulut plus
laisser à ce prince les revenus de la
Cœlésvrie et de la Phénicie, qu'on lui
avait donnés pour la dot de sa femme.
Comme il sut qu'il se disposait à l'at-
taquer , il le prévint , en allant porter
la guerre en Egypte. 11 la conduisit
avec tant d'activité , qu'il se serait
emparé de ce royaume s'il n'avait été
arrêté par les ordres des Romains,
qui lui firent abandonner celte con-
quête. Très -zélé pour la religion , il
entreprit de faire achevei" le temple de
Jupiter -Olympirn , à Athènes , en-
voya des oflVandes magnifiques à
Délos, à Oiympie, et dans d'autres
lieux. Par suite de ce zèle , il voulut
forcer les juifs à abandonner le culte
de leur Dieu , pilla leur temple , et
y fit placer la statue de Jupiter-
Olympien. JN'avant pu soumettre ce
peuple à ses volontés , il se livra con-
tre lui à toutes sortes de persécutions ,
ce qui fut la cause de la révolte des
MacludDées , qui défirent plusieurs
fois ses armées , et finirent par se
rendre maîtres du gouvernement de
(w Judée. Ayant besoin d'argent , An-
ANT
llocliiis rassembla une armée pour al-
ler piller le temple de la déesse d'Ely-
maïs, dans la Médie, qui était célèbre
par ses richesses ; mais il fut repoussé
par les habitants du pays. Il tomba
malade en revenant à Tabès , dans la
Perse, et mourut l'an 164 av. J.-C. ,
dans des accès de frénésie que les Per-
sans attribuèrent à son entreprise con-
tre le temple d'Elymaïs , et les juifs à
la profanation de celui de Jérusalem.
Antiochus n'était pas dépourvu de qua-
lités ; il était généreux , aimait les
arts , et montra beaucoup de valeur
et d'habihîté dans les guerres qu'il eut
à soutenir ; mais ses défauts et ses
folies ternirent sa gloire. 11 laissa deux
fils, Antiochus et Alexandre, et une
fille , nommée Laodicé. C — r.
ANTIOCHUS V, surnommé Eu-
PATOR , fils du précédent , monta sur
le trône, l'an 164 av. J.-C, âgé de
neuf ans. Les Romains lui donnèrent
Lysias pour tuteur , contre la volonté
de son père , qui avait chargé de cet
emploi Philippe, son ami. Il fut tué dans
la troisième année de son règne.( f^oj\
DÉMÉTUIUS SOTER et LySIAS}. C U.
ANTIOCHUS VI, surnommé Dio-
KYSus, ou Bacchus, était fils d'Alexan-
dre Balas. Démétrius Philadelphe sV-
tant fait détester de ses sujets par ses
rapines, Tryphon amena de l'Arabie
Antiochus , encore enfant , et le fil re-
connaître roi , vers l'an 1 44 ^v. S.-C.
Quelques victoires furent remportée,-
sur les généraux de Démétrius; mai-,
bientôt, Tryphon, las de gouverner
sous le nom d'un autre , se débarrassa
de ce jeune prince, en lui persuadant
qu'il avait la pierre, et en lui faisant
faire l'opération par des chirurgiens
gagnés , qui le firent périr. Antiochus
n'avait régné que deux ans. C — R.
ANTIOCHUS Vil, surnommé
EvergÈ TES , ou SidÈtes , fils dc Dé-
métrius Soter , demeurait à Rhodes,
ANT
forsqu'il apprit que Demetrius, son
fièie , avait été fait prisonnier par les
Parthes. Il se rendit sur-le-champ à
Antioche , et ayant épousé Cléopâtre,
femme de Démétrius, il fut reconnu
roi l'an i4o avant J.-C. Il alla d'a-
l)ord attaquer l'usurpateur Tryplion,
qu'il vainquit et fit prisonnier. 11 fit
ensuite la guerre aux juifs , qui avaient
depuis long-temps secoué le joug des
rois de Syrie , et assiégea Jérusalem
avec tant de vigueur, que le grand-
prêtre , Jean Hircan , se trouva heu-
reux d'acheter la paix en payant un
tribut. Antiochus , ayant ainsi établi
l'ordre dans ses états , rassembla une
armée considérable pour aller atta-
quer les Parthes et les forcer à relâ-
cher Démétrius. 11 les défit dans trois
combats , et Phraates , qui était alors
leur roi , prit le parti de renvoyer
Démétrius avec un corps de troupes
pour le mettre en état de disputer le
trône à son frère. Peu de temps après ,
Antiochus , ayant été obligé de dis-
perser les quartiei's d'hiver de son
armée, à cause du grand nombre de
valets , de marchands , et d'autres
touches inutiles dont elle était suivie,
les Parthes en profilèrent, et firent
égorger par les habitants les corps
les plus éloignés. Antiochus voulut
marcher à leur secours ; mais ayant
été défait , il se retira dans la haute
Asie, où il se défendit quelque temps.
Sur ces entrefaites , Cléopâtre l'ayant
abandonné pour retourner à son pre-
mier époux , il forma le projet insensé
d'épouser la déesse d'Elymaïs , dont
il convoitait les immenses richesses.
Les prêtres n'eurent pas l'air de s'y
opposer; mais lorsqu'il fut entré dans
le temple , pour s'emparer des trésors,
à titre de dot , ils ouvrirent une porte
secrète et l'accablèrent à coujjs de
pierres, ainsi que ceux qui étaient
avec lui , l'an 1^7 avant J.-C. C — r.
ANT
1^
ANTIOCHUS VIII, surnommé
Epiphanes et Grypus, ou IVéz cro-
chu, et ANTIOCHUS IX , surnommé
Philopator, ou Cyzicenus, étaient
tous les deux fils de Cléopâtre, et avaient
pour pères, le premier, Démétrius Ni-
canor , et le second , Antiochus SidèteSi
Cléopâtre , ayant fait mourir Séleucus
son fils aîné, vers l'an i25 avant
J.-C. , plaça sur le trône Grypus ,
qu'elle espérait gouverner. Ce prince
se dirigea effectivement quelque temps
par ses conseils ; mais ayant épousé
Tryphaené , fille de Ptolémée Phys-
con , et ayant vaincu et fait mou-
rir Alexandre Zabinas, il voulut ré-
gner par lui-même. Qéopâtre chercha
alors à le faire empoisonner, et, comme
il en fut averti, il la contraignit à
avaler elle-même le poison qu'elle lui
avait fait préparer. Son règne fut
long-temps assez tranquille; il se li-
vra au luxe et aux plaisirs; mais au
bout de huit ans , il prit des inquié-
tudes sur le compte cl' Antiochus Phi-
lopator , son frère , qui était à Cyzi-
que , où sa mère l'avait envoyé dans
sa première jeunesse, et il chercha
à le faire empoisonner. Celui-ci , s'en
étant aperçu, se tint sur ses gardes,
et ayant bientôt après épousé Cléo-
pâtre, fille de Ptolémée Physcon, il
rassembla une aimée et s'empara
d'Antioche. Antiochus Grypus étant
venu l'attaquer, le défit et reprit cette
ville où se trouvait Cléopâtre, que
Try])h<'ené, sa sœur, fit mourir de la
manière la plus cruelle , malgré son
mari. Bientôt après Antiochus IX,
étant revenu avec une armée, battit
son frère , et ayant pris Tryphaené ,
vengea sur elle la mort de sa femme.
Les deux frères se réconcilièrent eu-
suite , et régnèrent , l'un sur la Syrie
l'autre sur la Cœlésyrie; mais ils re-
commencèrent bientôt à se faire la
guerre. Il paraît que Ptolémée La-
!?6o ANT
îbyre, qui, bien que chasse tle l'Ejijypte
par sa mère , avait conserve quelque
puissance , donna des secours à An-
tiochus de Cyzique , et sa mère, par
haine pour kii , donna Sëléné, sa fille ,
en mariage à Antiochus Grypus , de
sorte que la Syrie > ainsi que les
pays voisins , devinrent le théâtre de
guerres civiles , dont plusieurs villes
prolitèrent pour se rendre indépen-
dantes. Au milieu de tous ces troubles,
Grypus fut tue' l'an 9-] avant J.-C,
par un certain He'racléon , qu'il avait
élevé' lui-même aux plus grands hon-
neurs. Il laissa cinq fils, qui tous
prétendirent au trône , savoir : Sé-
leucus VI , Antiochus XI , Philippe ,
Dcmëtrius III, et Antiochus XII. An-
tiochus de Cyzique ne survécut pas
long-temps à son frère, et ayant été
vaincu par Séleucus VI , dans une
bataille décisive , il se donna la mort ,
l'an 95 avant J.-C. Il ne laissa qu'un
fils , Antiochus X. C — r.
ANTIOCHUS IX (PniLOPATOR).
Voj. l'article précédent.
ANTIOCHUS X, qui prit les sur-
noms û'Eusébès ( ])icux ) , et de Phi-
lopntor {aimaiit son père), étant par-
venu à s'échapper d'Antioche , ras-
sembla une armée, et, pour venger la
mort de son père, continua la giicrre
contre Séleucus VI , et le défit dans
lin premier combat ; peu de temps
après, il épousa Sélénc, veuve d'An-
tiochus Grypus , et Séleucus VI étant
mort , il alla attaquer Autiochus XI
et Philippe , ses deux frères , qu'il
vainquit. Il fut défait l'année suivante
(9'2 ans avant J.-C. ) par Philippe et
Déraéti-ius VII , qui avait succédé à
Autiochus XI , et il se retira chez les
Parthcs. Son histoire , depuis cette épo-
que, est extrêmement obscure; on croit
^u'il mourut vers l'an 7 5 avant J.-C,
laissant deux fils , Antiochus XIII et
Séleucus Cybiosactes. C — r.
ANT
ANTIOCHUS XI , surnommé Epî*
PHANES et Philadelphe, pril la cou-
ronne avec Philippe son frère, après
la mort de Séleucus VI, leur aîné ,
qu'ils vengèrent en passant au fil de
l'épée les habitants de Mopsueste ,
ville où il avait été brûlé vif; mais en
revenant dans la Svrie, ils furent vain-
cus par Antiochus X ; et Antiochus XI 4
en fuyant, tomba avec son cheval
dans l'Orontc, où il se noya, l'an 9!!»
avant J.-C. C — r.
ANTIOCHUS XII, surnommé
DioNYSus -Epiphanes-Philopator-
Calumcus ( Bacchus présent, aimant
son père , Victorieux ) , prit la cou-
ronne, lorsqu'il sut que Démétrius III,
son frère, était prisonnier des Parthes,
et s'empara de Damas et de quelques
pays voisins. Il entrepiit une expédi-
tion conti'c les Arabes qui , depuis
long-temps, étaient en possession de ra-
vager la Syrie ; et ayant traversé la
Judée, malgi'é Alexandre Jannée, il en-
tra dans le pays des Arabes, qu'il vain-
quit dans un premier combat ; mais il
fut défait dans un second , et y perdit
la vie, vers l'an 85 av. J.-C. C — r.
ANTIOCHUS ( l'Asiatique ) ,
XIIP'. du nom, fils d' Antiochus X et
de Séléné , fut envoyé, par sa mère, à
Rome avec son frère, pour réclamer le
royaume d'Égvpfe. En revenant , il
}>assa par la Sicile, où il fut dépouillé
par Verres , comme on peut le voir
dans Y Oraison de Cicéroii. Lucullus
avant vaincu Tigrane , rendit à An-
tiochus une grande partie de la Syrie ;
mais Pompée , qui succéda à Lucullus,
l'en dé}iouilla l'an 64 av. J.-C. , et la
Svrie devint une province romaine.
C— R.
ANTIOCHUS , roi de Coramagène,
pays de l'Asie , au pied du mont
Taurus , était probablement de la fa-
mille des rois de Svrie. Il se réunit à
Tigrane . roi d'Arménie , pour faire
ANT
la guerre .lux Romains, et l'abandonna
après sa défaite. Il fit la paix avec Lu-
cullus l'an (jg av. J.-G. Mais peu de
temps après , il prit les armes avec Mi-
thridale, et fut vaincu par Pompée, qui
lui laissa ses états , et lui confia même
Séieucie et quelques autres portions
de la jNIésopotamie. Aufiochus , par
reconnaissance , lui envoya des trou-
pes , lorsqu'il fit la guerre à César.
Après la mort de Pompée, et la dé-
fjite de Cràssus , Antiochus prit le
parti d'Orodes , roi des Partlies , qui
avait épou:;é sa fille. 11 fal vaincu par
Ventidius , l'un des lieutenants de M.
Antoine. Ce dernier étant survenu ,
l'assiégea dans Samosate , et lui ac-
corda la paix , à dos conditions assez
douces , l'an 56 av. J.-C. 11 paraît qu'il
mourut peu de temps après ; car il s'é-
leva un procès entre Antiochus et ]\îi-
tkridate ses deux fiis, sans doute au
sujet de la succession au trône , dès
les commencements du règne d'Au-
guste. C — R.
ANTIOCHUS II, fils du précédent,
eut pour concurrent au trône Mitliri-
date son frère. Ce dernier voulant
avoir recours aux Romains pour faire
valoir ses droits , leur envoya un am-
bassadeur qu' Antiochus fit tuer. Au-
guste le manda à Rome, pour qu'il se
justifiât de cet attentat , et il le fit juger
par le sénat, qui le condamna à mort,
l'an 29 av. J.-C. Antiochus , sou fi's ,
fut replacé sur le trône de Comnia-
gène par Caligula qui le déposa eu-
suite, et il y fut remis par l'empereur
Claude. C — r.
ANTIOCHUS , d'Ascalon dans la
Palestine , fut disciple de Philon , chef
j de la quatrième académie. Lui-même
en fonda une autre , qui fut la cin-
quième , de sorte qu'il est souvent cité
sous le nom i' Jntiochus V académi-
que, il s'écarta néanmoins des prin-
cipes de Carnéades et de son maître ,
ANT a6i-
polir se rapprocher de la doctrine des
stoïciens. 11 entreprit même, dans un
livre adressé à Balbus , de concilier la
philosophie d'Aristote et celle de Xéno-
crate. Antiochus composa contre Phi-
lon , son maître , un autre livre in-
titulé: Sosus. 11 eut pour auditeurs Ci-
céronet Lucu'.lus. Ce dernier l'emmena
en Asie pendant sa questure. Gcéron
vante la finesse de sou esprit , l'élé-
gance et la facilité de sou discours.
Plutarque , dans la Pie de Lucuîlus ,
parle d'un Traité d' Antiochus, sur lex
Dieux. — Un autre Antiochus, de
Laodicée, eu Phrygie, philosophe scep-
tique de l'école d'^Euésidème , eut pour
disciples Théodas elle médecin Meuo-
dcte. — Un troisième , philosophe cy-
nique, né en Cilicie, suivit Sévère et
Caracalla dans la g\ierre contre les Par-
thes. Il excitait les soldats au combat,
et les endurcissait à la fatigue, par ses
leçons et par son exemple ; marchant
pieds nus , se roulant d ms la neige, li
déserta néanmoins le parti des Ro-
mains, et passa du côté des Parthes;
mais , à la paix, il fut réclamé par Ca-
ANTIOCHUS, moine de Seba ,
dans la Palestine, vivait au commen-
cement du -j^. siècle. 11 est auteur des
Pandectœ divinœ scriptiirœ , en cent
quatre-vingt dix homélies séparées. 1!
parle, dans sa Préface, de la prise de
Jérusalem , par Chosroës , roi de Per-
se, et rapporte les cruels tiaitemenl^
qu'éprouvèrent alors les moines de la
Palestine. H y a joint un poème dans
lequel il déplore la perte de la vraie
croix , que les Perses avaient, dit-on ,
emportée parmi leur butin. La restitu-
tion de cette relique fut , dans la suite ,
le sujet d'un autre poème , écrit en ita-
lien ( P^oj. Bracciolini dell'Api ).
On trouve le poème d' Antiochus, eu
grec et en latin, dans le supplément
de la Bibliotheca Palrum. D — r .
•^62 A N T
ANTIPAS. F. Antipater de l'Idu^
mée.
ANTIPATER, ami et ministre de
Philippe de Macédoine, et de son (ils
Alexandre-le-Grand , e'iait d'une fa-
mille illustre, et avait reçu de la na-
ture les talents les plus heureux, qui
furent encore perfectionnés par une
excellente éducation. Aristote fut son
ami et son maître, et lui inspira le
goîit des sciences. Il était aussi simple
dans ses manières et dans ses vête-
ments, que distingué par ses actions.
Philippe réleva au rang de premier
ministre, se lia avec lui d'une amitié
intime, et lui donna, en peu de mots,
le plus bel éloge qu'un ministre pût
recevoir de son souverain : « J'ai dormi
» profondément, dit-il un jour qu'il
» s'était levé tard, parce qu'Aiitipater
» veillait. » Après la mort de Philippe,
Alexandi'e voulant passer en Asie ,
crut que personne ne pouvait mieux
le remplacer dans la Macédoine, que
relui qui avait toujours joui de la con-
fiance de son père, et il le nomma son
lieutenant pour la Grèce et la Maré-
doine. Ce prince s'ctant enfoncé dans
l'Asie, et Memnon , général des trou-
pes grecques, à la suide du roi de
Perse, ctanl parAcnu i\ soulcAcr !a
Thrace, les Lacédémonieus crurent
l'occasion favorable pour reprendic
leur prépondérance dans la Grèce , et
ils parvinrent à armer tous les peu-
ples du Péloponnèse. Antij)ater ayant
d'abord pacifié la Thrace , se porta
promptement dans le Péloponnèse , où
il déiîtles Lacédémonieus et leurs alliés,
et tua Agis , roi de Sparte. Ces enneiuis
extérieurs n'étaient pas les seuls qu'il
eût à combattre. La mère d'Alexandre,
«t Cléopàtre , sœur de ce prince,
étaient sans cesse en (jnerelle; et Oiym-
pias portait, à chacpie instant, des
])laintesconlre Antipater, à Alexandre,
qui, pour y mettre lin. le manda en
ANT
Asie, en envoyant Cratère pour com-
mander à sa place dans la Macédoine.
Ce prince étant mort avant quece chan-
gement fût fait, on laissa à Antipater la
Macédoine et la Grèce, dans le par-
tage qui se fit à la suite de cette mort,
et on le nomma tuteur de l'enfant dont
Roxane était enceinte. Bientôt après ,
il eut à soutenir les efforts de toute la
Grèce, confédérée pour recouvrer sa
liberté. Il fut vaincu d'abord , et obligé
de se renfermer dans Lamia; mais
Léonnatus et Cratère étant venus à son
secours , les Grecs se soumirent de
nouveau. Cette guerre fut suivie d'une
autre contre Perdicas. Antipater passa
en Asie; mais Perdicas ayant été tué
en Egyptv", Autipaterchargea Antigone
du reste de la guerre, et revint en Ma-
cédoine, où il mourut très-âgé, l'an
5 1 7 avant J.-C. On l'a accusé , sans
vraisemblance, d'avoir fait empoison-
ner Alexandre. Avant de mourir, il
confia la tutelle du jeune roi à Polysper-
chon, et non à Cassandrc, son fils.
C— R.
ANTIPATER et ALEXANDRE,
fils de Cassandre et de Thessalonice,
se disputèrent le trône de Macédoine,
après la moit de Philippe, leur frère
aine. Antipater, crovant que sa mère
favorisait les prétentions d'Alexandre,
la fit mourir, ce qui indigna les Ma-
cédoniens contre lui; mais, comme il
avait épousé Eurydice , l'une des filles
de Lysimaque, Alexandre sévit oblige
d'avoir recours à Pyrrhus, qui rétablit
la paix entre les deux frères. Bientôt
après, Alexandre ayant été tué par
Di'uiétrius, Antipater fut chassé de ses
ét.ils, et se réfugia auprès de Lysima-
que, son beau-père, qui, ayant fait
([iielqucs tentatives pour le rétablir
sur le trône, finit par l'abandonner;
et comme Antipater l'accusait de l'a-
\o'n' trahi, il le fit mourir, vers W\\
'M)i avant J.-C. G— u.
ANT
ANTIPATER, dont le premier
nom e'tait Antipas , de l'une des
]Hincipales familles de l'Idiimcc, fut
gouverneur de cette province , sous
le règne d'Alexandre Janne'e et d'A-
loxandra , sa veuve. Son attachement
pour Hyrcan le fit tomber dans la
disgrâce, lorsqu'Aristobule eut usurpé
r;iutoritéj et il décida Hyrcan à aller
se mettre sous la protection d'Arétas ,
roi des Arabes, qui fit une tentative
iiuitile pour le rétablir sur le trône. 11
.s'adressa alors à Pompée , et ce fut
aux soins du général romain qu'Hyr-
can dut son rétablissement ; comme
c'était un homme très-faible, Antipa-
!cr jouissait de toute l'autorité, sous
son nom. Lorsque César se vit assiégé
])ar le peuple d'Alexandrie , Antipater
conduisit lui-même des troupes à sou
secours, et montra beaucoup de bra-
voure dans les divei s combats qui se
livrèrent; il défendit ensuite Hyrcan
contre les accusations d'Aristobule ,
devant César, qui le nomma procura-
teur de la Judée , sous les ordres
d'Hyrcan. II rétablit la tranquillité
dans ce pays, et l'y maintint, au mi-
lieu des troubles et des guerres civiles
qui déchiraient l'empire romain. Il
mourut l'an 49 avant J.-C, cmjx)i-
.soiiné par Malichus, à qui il avait sauvé
la vie, et qui, après avoir été du même
parti que lui, devint jaloux du crédit
dont il jouissait auprès d'Hyrcan. Au-
tij)ater laissa quatre fils, dont Hérode
est le plus célèbre. C — b.
ANTIPATER (L.îiuus Cjelius),
historien romain , vivait du temps des
Gracques , et composa une Histoire
(Je la seconde guerre punique dont
Urutus fit im Abrégé, selon le témoi-
gnage de Cicéron , qui parle souvent
d'Antipater. L'empereur Adrien pré-
férait Antipater à Sallustc, probable-
ment par la raison qui lui faisait pré-
ferer Eunius à Virgile , et paixc qu'il
ANT
■i65
avait un goût assez bizarre pour le
vieux langage. Riccoboni a pubUé, en
i568, des Fragments d'Antipater, qui
lurent réimprimés , avec des Frag-
ments de plusieurs autres historiens ,
par Antoine- Augustin, à Anvers, en
1 SgS ; et eiifin par Ânsonius Papona;
et cette dernière collection , qui est la
plus ample, se trouve à la suite da
Salluste , dans plusieurs éditions; '
entre autres, dans celle donnée par
Havercamp, Amsterdam, 1742, 2
vol. in-4°. D — T.
ANTIPATER, de Tarse, philoso-
phe stoïcien, fut disciple de Diogènc-
le-Babylonien. Quelques-uns le font
naître à Sidon , ou , plutôt , le con-
iondent avec un Antipater, originaire
de cette ville ( F. l'article suivant). Le
citoyen de Tarse eut, avec Carnéade,
dos démêlés très-vifs, qu'il consigna
dans ses écrits , ce qui lui fit donner
le surnom dcKaXaacgoâ; {sljlo cla-
mosus ). Il composa deux Livres de
la divination , et un autre sur les dis-
sensions entre Cléanthis et Chrysippc.
Sénèque nous a conservé plusieurs de
ses sophismes. D' L.
ANTIPATER, de Sidon , est
principalement connu par une par-
ticularité consignée dans Pline et dans
Valère Maxime. Tous les ans , le
jour de sa naissance , il avait une fiè-
vre éphémère , et ce jour fut aussi ce-
lui de sa mort. Cicéron vante sa pro-
digieuse facilité à faire des vers , et il
nous reste plusieurs épigrammes de
lui dans ['Anthologie. — Outre ces
deux philosophes , il y eut encore
Antipater , de Cyrène , disciple d'A-
ristippe , et deux Antipater , de Tyr ,
l'un , contemporain de Carnéade et vi-
vant à Athènes ; l'autre , stoïcien , corn -
mensal de Caton d'Utique. D. L.
ANTIPHANES. Suidas, Athénée,
Strabon , Etienne de Byzance , citent
plusieurs poètes de ce nom, q^iiitous
264 A N T
se sont exerces dans le genre comi-
que, et dont le plus célèbre est Aiiti-
phanes, de Rhodes, ou selon quelques
autres , de Cariste ou de Srnyrne. Il
appartient à la moAenne comédie, et
fut contemporain d'Alexandre. Ce
prince grûtait peu, dit-on, les coroe'-
dies d'Autipbanes , qui, pique' de'cette
indifférence , lui dit un jour : « Prince,
» pour goûter ces sortes de pièces ,
» il faudrait être plus familiarisé que
» vous ne l'êtes avec la nature des
V sujets et le lieu de la scène. » Or,
il faut savoir que les pièces en ques-
tion ne peignaient guère que des mœurs
excessivement dépravées ; ce qui n'em-
pêcha point ce poète de remporter le
juix treize fois. 11 avait composé trois
cent soixante-cinq, ou tout au moins,
deux cent quatre-vingt comédies , dont
Fabricius nous a donné le Catalogue ,
d'après Herléliiis , Koënig, Vossius
et Meursius , qui font souvent men-
tion de ces pièces d'Anliphaues; et
Gronovius en a recueilli , dans ses
Excerpla Comiconnn , les fiagments
rapportés par Athénée et quelques au-
tres. Le savant K^ppiers a donné un
travail inlîniment j^récieux sur ces
mêmes fragments , dans ses obserAa-
tions philologiques sur quelques pas-
sages d'Antiphanes, deThéocrite, etc.
(Leyde , in-8"., 1771). Ce poète, au
surplus, a souvent été confondu avec
d'autres auteurs comiques du même
nom , et même avec quelques autres ,
dont les noms avaient été défigurés.
Ces erreurs , qui ne sont que troji fré-
quentes dans les textes primitifs , ont
souvent multiplié , sans raison , les
articles biographiques , et fait d'un
seul et même auteur plusieurs per-
sonnages différents. — Pausanias
parle d'un célèbre statuaire d'Argos,
nommé Antiphaises ; et Clément d'A-
lexandrie , d'un médecin non moins
fameux, qui soutenait que la variété
ANT
des mets est la cause principale des
maladies. — Etienne de Byzance cite
un Antiphane, poète comique de
Berge , dans la Thrace , qui écrivit des
choses si incroyables, que l'on appelait
Berg;aiseurs ceux qui débitaient des
contes. A — D — r
ANTIPHANES, sculpteur. Fojez
Cléon.
ANTIPHÎLE , peintre , contem-
porain et rival d'Apelles, naqi:it en
Egypte et fut élève de Ctésidême. Il
se distinguait par sa grande facilité.
Un de ses plus beaux ouvrages repré-
sentait un enfant occupé à souffler le
feu ; on croyait voir la lumière s'.ic-
croître et se ré[)audre dans la pièce ou
il se trouvait. On estimait encore da-
vantage un satvre couvert d'une peau
de panthère. Pline cite un giand nom-
bre de tableaux peints par cet artiste,
et indique les lieux où ils se vovaient.
Antiphile avait inventé aussi une figure
grtitcsquc qu'il avait nommée Gryllits,
nom qui resta depuis à ces espèces
de caricatures. Lorsqu'Apelles vint à
la cour de Ptolémée, au service du-
quel Antiphile était attaché , celui-ci.
entraîné par luie basse jalousie , cher-
cha tous les moyens de perdre son ri-
val, et finit par le faire passer pour
complice d'une conjuration tramée
contre le roi d'Egypte. Apelles , dé-
claré coupable , fut chaigé de chaînes
et pensa perdre la vie; mais un des
conjurés , indigné de cette injustice ,
démontra la fausseté de l'accusation ,
et Antiphile fut à son toiu" jeté dans les
fers pour le reste de ses jours. — Pau-
sanias parle d'un statuaire du même
nom dont on voynit phisieurs ouvra-
ges , à Olympie , dans le lieu appelé
le Trésor. L — S — e.
ANTIPHON , né à Rhamnus , en
Attique , et appelé de là Rhamnusien,
florissait /|5o ans avant J.-C. , eut
pom' maître SopbiKis, son père, et
ANT
devint si célèbre par son éloquence ,
que le peuple se défiait de ses dis-
cours , ce qui reiiipêcha souvent de
pari.^' en public. Il ornait une e'cole de
rliétoiiqae à AtLènes, et enseigna cet
ait à Thucydide qui, dans son His-
toire, parle de lui comme d'un ora-
trur recommaiidcible. Selon Quinti-
lieu , Autiphon fut le premier qui
ccrivit des pré 'cptes sur l'art oratoire,
et Aramien MarccJlin dit qu'il intr dui-
sit la coutume de plaider pour de l'ar-
gent. Piutarque donne à Antiphon
autant d'èioges que Thucydide : il le
représente comme un orateur énergi-
que et persuasif, d'une imagination fer-
tile , et adroit à ménager les passions
et les préjugés de ses auditeurs. Pla-
ton , au contraire , dans son Menexè-
ne, le traite avec mépris , et s'appuie
sur l'autorité de Socratc ; mais il faut
observer que Socrate Ait souvent atta-
qué et insulté par les sophistes, parti-
culièrement parAntiphon.il contribua
puissamment à faire abolir la démocra-
tie et à introduire dans Athènes la tyran-
nie des Quatre-Cents, l'an 4i'-iav.J.-C.
La division s'étant mise , peu de temps
après , entre ces nombreux gouver-
nants dont il faisait partie, au sujet
d'Alcibiade, que les uns voulaient rap-
peler, tandis que d'autres s'y oppo-
saient, Antiphon, qui dirigeait ce der-
nier parti , alla , avec neuf autres
Athéniens, en ambassade à Lacédé-
moue , pour obtenir la paix , à quelque
condition que ce fût ; mais il ne put
réussir. La tyrannie des Quatre-Cents
ayant fait place à une forme de gou-
vernement plus populaire , Alcibiade
fut rappelé , et Antiphon mis en accu-
sation au sujet de son ambassade. Cefut
dans cette circonstance qu'il prononça ,
pour sa défense , le beau discours que
rappelle Cicéron ( in Brut., n". 47),
et que Thucydide, qui l'avait enten-
du, cite également avec éloge, ce qui
ANT 265
n'empêcha pas qu'il ne fût condamné
à mort, comme traître à la patrie. H
fut défendu de lui donner la sépulture ;
sa postérité fut déclarée infâme, et sa
maison fut rasée. Il existait de cet ora-
teur soixante Discours ou Déclama-
tions , dont Cœcilius le rhétoricien as-
surait que vingt-cinq étaient supposée?,
11 n'en reste maintenant que seize. Ce
sont des accusations de meurtre ou des
défenses contre des accusations sem-
blables. Quelques auteurs ont douté
que ces discours fussent à'Antiphon ;
mais Fabricius et d'autres grands cri-
tiques l'en regardent comme l'auteur.
Ils font partie de la Collection des
Auteurs grecs de Rtiske, et se trou-
vent . dans le septième volume , ac-
compagnés de notes philologiques ,
et suivis d'une dissertation de Yan
Spaan , et des notes de Hanpimann
etdeTaylor. Ils entêté publiés éga-
lement avec des Discours d'Eschy-
le, Lysias, etc., par Aide , in-fol., à
Rome, en i5i3, par Henri-Etienne,
en 15^5, et in-8 ". , par Miuiatus, à
Hanau , en 1619. K.
A^TIQUARI■0 ( Jacques \ de Pé-
rouse, ainsi appelé de son nom de fa-
mille, et non, comme quelques-uns l'ont
cru, à cause du goût qu'il put avoir pour
les antiquités , fleurit sur la lin du 1 5'.
siècle, et au commencement du 16".
Après avoir rempli , dans sa jeunesse,
la place de secrétaire auprès du cardi-
nal Savelli, légat à Bologne, il fut appelé
par le duc de INÏilan , Jean Galéas
Sforce, pour occuper le même emploi
auprès de lui. Ce duc l'employa dans
les affaires les plus importantes, et
lui accorda les droits de cité à Milan
et à Pavie. Louis Sforce, surnommé
le Maure , lui conserva sa place. Il
resta à Milan après que les Français
en eurent fait la conquête , et il pa-
raît qu'il se déclara entièrement pour
eux. Ou le voit par un discours qu'il
tîuô A N T
prononça au nom du peuple de Milan,
dans une occasion solennel'e , et qui
fut imprime sons ce titre: Oralio Ja-
cohi --Inliquarii pro populo AJedio-
laneiisi, in die tt'iiimphi Ludovici
Galliariimrcgis et Mediolani diicis
de fraclis P^enetis, Milan, juin 1 5og,
iu-4 ". 11 était prêtre , et obtint de
riches bénéfices du pape Alexandre Y I.
Jl se distingua par une grande régu-
larité' de mœurs, par son savoir, et
par l'appui qu'il prêta en toute oc-
casion aux gens de lettres. Ils l'en ré-
compensèrent par leurs éloges, et par
Ja dédicace qu'ils lui firent d'un grand
nombre de leurs ouvrages. II passa le
reste de ses jours à Milan, où il mou-
rut, en 1 5 12. On a recueilli, en uu
volume, ses J^ettres latines , qui ont
é;c inipriiuccs à Perouse , iSig,
in- 4°. On en trouve aussi plusieurs
parmi celles d'Ange Politien , et dans
d'autres recueils. C'est un auteur peu
coiuiu , mais un perjounagc important
dans l'histoire littéraire de son temps.
G—É.
ANTIQUUS (Jean^ peintre, né
à Groningue,le i i octobre j 70-^ , lut
d'abord oblige' de peindre sur verre.
A l'à-^e de 23 ans , il prit le parti de
s'embarquer pour aller à Paris ; mais
il fut forcé de revenir à Amsterdam. 11
ent. de nouveau l'intention de vovager
lUiilg.e tous les obstacles que sou in-
digence apportait à ce dessein. 11 allait
partir pour l'Angleterre avec son frère
Lambert , peintre de (laysage, lors-
qu'ils trouvèrent un vaissear. qui faisait
Tuile pour Gênes , et ils s'embar-
quèrent. Jean Antiquus fit en route le
porlraitdu capitaine, qui fut trouve si
ïessemblayt qu'on ne voulut rien re-
cevoir des deux artistes pour leur pas-
.<>age. Arrives à Gènes , les portraits
lurent encore leur ressource ; et, après
»:inq mois de séjour, ils se rendirent
à Florence çt k htyQurnq . f," craud-
ANT
duc fit une pension à Jean Antiquus;
et ce peintre ayant été de plus admis
à l'académie de Florence , exécuta ,
pour sou morceau de réception , une
vaste comjiosition , représentant la
Chute des Géants. ïl fit ensuite une
coj)ie du Martyre de S. Etie?me,\)av
le Cigoli , et la vendit 100 ducats.
Pendant un séjour de six années à
Florence, il fit quatre voyages à Rome.
Dans l'un , il reçut l'accueil le plus
obligeant et des marques de faveur du
pape lîenoît XIII. Les artistes lui té-
moignèrent aussi beaucoup d'estime;
et lorsqu'il alla voir Naples , Soli-
mèue , alors à la tête de l'école do
cette ville, lui oH'rit sa maison. De re-
tour à Rome , il était occupé à y faire
quelques tableaux, lorsqu'il apprit que
le grand-duc , son protecteur , était
dangereusement malade. Il courut à
Florence; mais il n'arriva que pour
joindre ses regrets à la douleur pu-
blique : le |)rincc venait de mourir.
Après avoir séjourné dans les princi-
pales villes «l'Italie, et avoir travaillé
à Venise, pour le fameux général Schul-
lembouig , Antiquus retourna dans sa
patrie. Le long séj<uir qu'il avait fait
en Italie, avait donné à ses compa-
triotes une opiniou avantageuse de ses
talents ; il la soutint par de beaux
portraits et des tableaux d'histoire. Le
prince d'Orange lui fit alors une pen-
sion , et le fixa à Breda. Aussi labo-
borieux qu'habile, Anfiquus fit plu-
.sicius grands ouvrages , et entre autres
deux plafonds. Il mourut, en 1750,
âgé de quarante-six ans. Descamps ,
qui a fourni ces détails , ajoute que ce
peintre était bon dessiu;iteur, peintre
facile, bon coloriste, et qu'il avait puisé
un goût sage dans l'école 'le Rome. La
Fiance ne possédant aucun ouvrage
d'Antiquus, on doit ici s'en rapporter
à l'autorité, d'ailleurs recornm.indabic,.
de Desciuups, D— 'iv
A N T
ANTISTHÈNES,filscl'iineferame
thrace ou phrygienne, et d'un père du
même nom que lui, naquit à Athènes ,
vers la seconde année de la 89''. olym-
piade. Dans sa jeunesse, il reçut des
leçons du sophiste Gorgias, et suivit
pendant quelque temps la profession de
rhéteur ; mais , ayant entendu Socrate ,
il abandonna bientôt les vams orne-
ments de l'éloquence, pour se livrer
tout entier à l'étude de la philosophie.
Chaque jour , il faisait un trajet de 4o
stades , pour se rendre , du Pirée , lieu
de sa résidence, auprès du fils de So-
phronisque. Ce fut dans les principes
Je ce philosophe qu'il puisa cet en-
thousiasme pour la vertu, cette haine
vigoureuse du vice, qui, portés au-delà
des justes bornes, si toutefois de tels
sentiments peuvent être trop forte-
ment prononcés, firent, du disciple d'un
gage, le fondateur de la secte cynique.
Socrate, ennemi des sophistes , et dé-
daignant l'esprit systématique, ne s'é-
tait attaché qu'à la connaissance du
cœur humain, qu'au moyen de reiidre
l'homme meilleur. Platon, s'emparant
des préceptes du maître , les revêtit
des charmes de l'éloquence, desbiil-
lantcs spéculations d'une métaphy-
sique élevée. Il ennoblit l'étude de
l'homme, mais parla plus souvent à
l'esprit qu'au cœur. Antisthènes, ins-
truit par Socrate que le bonheur
consiste dans la vertu , fit consister
cette vcriii dans le mépris des ri-
chesses, des grandeurs, des sciences,
de la volupté. 11 voulut, comme ou l'a
dit ingénieusement , réduire l'esprit et
le corps au strict nécessaire. Il revê-
tit le fameux, paihum, et parut en pu-
blic, la besace sur l'épau'e, un bâton
à la main. Cette affectation n'échappa
point à Socrate. «Je vois, lui disait-il,
» ton orgueil à travers les trous de ton
» manteau. » Cependant il faut êlre
j juste^siDiogcue^parlaiéniictédcsau
A N T 'iG-f
ame, parla vivacité de son esprit, par
l'originahté de ses expressions, sur-
passa de beaucoup les philosophes cy-
niques qui lui succédèrent, Antisthènes
sut mettre plus de dignité dans sa con-
duite : il fut constamment un citoyen
vertueux. Le premier, il osa poursuivre
les deux accusateurs de Socrate, et fut
la cause de l'exil de l'un , et de la mort
de l'autre ; fnit que néanmoins l'abbé
Barthélemi a révoqué en doute. Il était
d'un commerce agréable , et Xénophou
fait son éloge dans .son B anquet. Aptes
la moit de Socrate, il .s'établit dans
leCynosarge, gymnase d'Athènes; et-
l'on a prétendu que ce fut du nom de
ce lieu que vint celui de sa secte. Les
apophthegraes d'Antislhènes sont con-
nus de tout le monde. Il avait écrit un
grand nombre d'ouvrages , dont on
peut voir la liste dans Diogène Laërce.
Il nous reste , sous son nom , • des
lettres , imprimées avec celles des
autres Socratiques, et deux Déclama-
tions, l'une d'Ajax , l'autre d'Ulysse,
que l'on trouve dans les Orateurs
grecs, d'Henri Estieune ;mais les pre-
mières sont évidemment supposées;
et . quant aux déclamations , il est fort
douteux qu'elles soient authentiques.
Au lit de la mort , comme il souffrait
beaucoup : a Qui me délivrera de mes
» maux, s'écria-t-il ? — Ce fer, lui
» dit Diogène , en lui présentant un
» poignard. — C'est de mes maux, et
» non de la vie , que je voudrais me
» délivrer , répartit Antisthènes. » On
ignore l'époque précise de sa mort. Il
fut le maître du célèbre Diogène. D. L.
ANTOINE (Mauc) , appelé I'Ora-
TEUR, se fit un nom dans sa jeunesse,
par des accusations , qui souvent sont
im devoir dans les républiques. Il sa-
vait aussi défendre les accusés avec
un grand zèle. Dans la cause qu'il
plaida pour Aguillius , il poussa si
iuiu le pathétique y en pleufant Uu-
2G8
ANÏ
nièrae , et en découvrant la poitrine
de son client , couverte de cicatrices ,
qu'il triompha de ses juges. L'action
dont il accompagnait son débit était
d'une vigueur extraordinaire. Il ne
passait pas pour avoir de l'érudition ,
et ne mettait pas au jour ses plai-
doyers , ne voulant pas qu'on pût lui
0|iposer , dans une affaire , ce qu'il
avait dit dans une autre. 11 fut honoré
du consulat et de la censure, et gou-
verna la (ilicie en qualité de procon-
sul. Cicéron dit qu'il le regardait comme
Ff'gal des hommes les plus éloquents
de la Grèce. Proscrit par Marins , il
fut mis à mort l'an de Rome G67 , et
l'on vit sa tète attachée à la tribune où
il avait défendu courageusement la ré-
publique, et qu'il avait, pendant sa
censure, ornée des dépouilles des vain-
cus. Il était l'aieul de Marc Antoine le
triumvir. Q — R — y.
ANTOINE ( Marc ) , fils de Marc
Antoine, l'orateur, et père du trium-
vir de ce nom, était préteur, l'an de
Rome 6-(). Il obtint par la faction de
Céthégus , et par le crédit du consul
Cotta , un commandement illimité sur
toutes les côtes ; et fit eu Cilicie une
expédition assez heureuse contre les
pirates ; mais il se déshonora en Si-
cile , jjar ses exactions et ses rapines.
Cicéron reproche à Verres de justifier
ses brigandages par l'exemple d'An-
toine. Ce dernier porta la guerre en
d'été , ce qui lui fit donner le surnom
de C rétique ; il la fit sans succès et
V pé.nt. Q — R — Y.
ANTOINE (Marc), le triumvir,
était petit-fils et fils des précédents. Il
avait pour mère Julia , de la famille de
César, et femme d'un mérite distingué;
il naquit l'an 86 av. J.-C. , et fut élevé
sous la direction de sa mère. Jeune en-
core, il devint ami intime de Curion ,
qui lui donna des leçons de débauche
que Marc Antoine jte rei;ul qu'avec
ANT
trop d'avidité , et lui fit contracter des
dettes nombreuses. Il se lia ensuite
avec Clodius , autre libertin fameux ;
mais alarme de la témérité de sa con-
duite , il alla en Grèce, où il étudia
l'éloquence et l'art militaire. Tandis
qu'il était en ce pays , le consul Gabi-
nius le pressa de faire avec lui une
campagne en Syrie, et lui donna un
corps de cavalerie à commander. An-
toine déploya beaucoup de courage et
d'activité , particulièrement contre
AristoLule, chef des juifs, qui ten-
taient de secouer le joug de Rome.
Antoine accompagna ensuite Gabinius
dans une expédition en Egypte , dont
le but était de rétablir Ptolémée sur le
trône, et là encore, il se signala, en
se frayant une route à travers les ma-
rais, et en s'emparanl de Peinse; en-
suite il montra son humanité en em-
pêchant Ptolémée de mettre à mort
les habitants de cette ville. Il se ren-
dit très - agréable aux soldats , en af-
fectant des mœurs grossières, ainsi
que par une libéralité excessive , et
beaucoup d'indulgence et de familia-
rité envers eux. De retour à Rome, il
s'unit à Curion , et soutint comme lui ,
avec chaleur , le parti de César. Leur
protection le fit créer auguie et tii-
bun du peuple. Il se rendit si odieux
au sénat , par quelques propositions
hardies , qu'il jugea convenable de
quitter secrètement Rome avec Cu-
rion et Cassius Longinus , déguises
comme lui en esclaves , et de chercher
un asvle dans le camp de César : cette
démarche fut une des causes , ou, pour
mieux dire , des prétextes de la guerre
civile. Dans les troubles qui suivirent ,
Autoine fut nommé, par César , com-
mandant suprême en Itahe; il s'y ren-
dit plus agréable aux soldats qu'au
peuple , dont il ne songeait guère à
venger les outrages. César lui ayant
donné ordre de le venir trouver avec
ÂNT
SCS troupes en Macédoine , il le re-
joi|];nit devant Dvrrachium , avec un
puissant secours. Après avoir échappé
aux amiraux de Pompée , il commanda
Faile gauche à la bataille de Pharsale,
et, après la victoire, revint à Rome,
avec le titre de général de la cavalerie,
et de gouverneur de l'Italie. Il eut une
querelle avec Dolabella , tribun du
peuple, et combattit son parli au mi-
lieu même du Forum. Il acheta à vil
prix les biens de Pompée, que per-
sonne ne voulait acquérir , par res-
pect pour sa mémoire. Les débau-
ches et les violences d'Antoine avili-
rent tellement son caractère, que Cé-
sar, à son retour, le traita froidement.
Vers ce temps , il épousa Fulvie ,
% euve de Clodius, et cette femme vio-
lente lui fît sentir tout le poids de son
autorité despotique. Quand César re-
vint d'Espagne, Antoine recouvra sa
faveur par l'adulation et les basses-
ses les plus honteuses , et devint son
collègue dans le consulat , l'an 44 av.
J.-C. Ce fut alors qu'à la fête des Lu-
percales, il se jeta aux pieds de César
dans la place publique , et lui offrit
deux fois un diadème que César re-
fusa au milieu des applaudissements
réitérés de la multitude. Comme il pa-
raissait probable que c'était uo plan
concerté pour éprouver les inclina-
tions du peuple , et que cette tentative
serait renouvelée , il se forma peu
après une conspiration qui fit périr
César. Antoine eût éprouvé le même
sort, sans l'intercession de Brutus,
qui espérait le gagner au parti répu-
blicain ; mais on comprit bientôt que
les autres conjurés avaient mieux jugé
Antoine. Il montra dans celte occasion
importante une éloquence et une pro-
fo'.ideur de politique dont on ne l'eût
pas cru capable, si on ne l'eût jugé
que d'après les lettres et les harangues
4e Gcéron, Foit de l'affection que le
ANT afio
peuple portait à César , il empêcha les
sénateurs , en faisant agir sur eux ir
grand mobile de l'intérêt personnel, de
le déclarer usurpateur. Le peuple avait
été calmé par une harangue de Brutus;
Antoine, sachant combien les objets
extéi leurs frappent la multitude, ex-
posa en public le corps de César sur uu
lit d'ivoire et de pourpre , avec sa robe
sanglante , et prononça son oraison
funèbre , qui rendit au peuple tous ses
sentiments de haine et'de vengeance.
Les meurtriers furent obligés de s'en-
fuir de Rome. Shakspeare et Voltaire
ont tiré un grand parti de celte situa-
tion vraiment dramatique. Antoine ,
sûr de l'affection du peuple , et ayant
toujours l'adresse de ménager le sé-
nat , gouverna quelque temps avec un
pouvoir absolu , et ne cacha point son
intention de succéder à César dans
l'exercice de la souveraineté. La su-
périorité, qu'en qualité de consul ii
tenait de la loi , lui donnait de grands
avantages pour la poursuite de ses
plans ambitieux. L'orgueil qu'il en
eut lui fit traiter le jeune Octave ,
héritier de César, de manière à lui
faire embrasser le parti du sénat. An-
toine alors essaya de le regagner, et
les différentes factions eurent recours
aux manœuvres de la politique. Enfin,
après s'être plusieurs fois raccommodé
et brouillé de nouveau avec Octave,
qui désirait, comme lui, être à la tête
de la faction de César, Antoine leva
des forces, se retira dans la Gaule
cisalpine , dont le gouvernement lui
avait été accordé , et mit le siège de-
vant Mutina , aujourd'hui Modène ,
que Décimus Brutus défendit vaillam-
ment. Alors le sénat déclara Antoine
ennemi public , et les deux nouveaux:
consuls , Hirtius et Pansa , accom-
pagnés d'Octave, marchèrent contre
lui. Antoine défit d'abord Pansa dans
une action très-meurtrière ; mais Hir-
a^o ANT
tius survint , et , malgré des prodiges
de valeur, Antoiue et ses soldats fu-
rent complètement battus , quoique
les deux cousuls eussent e'td tues. Cet
éve'ueraent mit à la tête de toute l'arme'e
de la re'publique, Octave, à qui Pansa
mourant, avait donné le conseil de se
réconcilier avec Antoine. Apres sa dé-
faite , Antoine fut forcé par Decimus
Brulus de lever le siège de Mutina,
et même de quitter l'Italie. Il éprou-
va, ainsi que ses troupes, de grandes
fatigues et de cruelles privations , en
passant les Alpes: il les souffrit avec un
grand courage-; car il pouvait mieux
supporter l'adversité que la prospé-
rité. Arrivé dans les Gaules, il vint, en
suppliant, au camp de Lépide, q;ii
commandait alors en Provence; mais
bientôt | ar son influence sur les trou-
pes , il obligea ce général à se joindre à
lui , et à lui céder toute l'autorité. Plau-
cus et Pollion vinrent aussiiortifîer son
parti de leurs soldats : ainsi Antoine ,
qui , peu auparavant, avait quitté l'I-
talie en fugitif , y rentra à la tète de
vingt-trois légions et de dix mille clu-
vaux. Alors Octave , après avou- long-
temps agi comme ami du sénat , jeta
le masque , et , s'étant avancé au de-
vant d'Antoine tt de Lépide , eut avec
eux, dans une petite île formée par
le Rhénus , aujoiud'hui Rliéuo , près
de Bologne , la fameuse entrevue où
ils se partagèrent l'univers romain,
(ki fut aussi là (pi'iis arrêtèrent les
plans de ces proscriptions sanglantes
qui ont rendu leurs noms exécrables.
Antoine insista surtout pour qu'on
lui sacrifiât Cicérou. 11 lui poitait luie
haine implacable, en partie hérédi-
taire , à cause de la condamuation de
Lentulus, second mari de sa propre
mère ; et en partie personnelle, à
cause des fameuses Philippiques, pro-
noncées contre lui par l'orateur. An-
tuiue , comDie pour payer le pris de
ANT
la tête de son ennemi , aban(îcnna
celle de son oncle, Lucius César. Les
triumvirs marchèrent alors à Rome ^
pour affermir leur usurpation , et
mettre à exécution leurs projets san-
guinaires. Les rapines et le meurtre
désolèrent Rome et l'Italie. Antoine
jouit de la lâche satisfaction d'attacher
la tête et la main droite de Cicéron
sur cette même tribune aux haran-
gues , si souvent témoin du triomphe
de son éloquence. Après avoir fait
périr leurs ennemis dans Rome , An-
toine et Octave marchèrent en Macé-
doine contre Brutus et Cassius , et ,
dans la première bataille do Philippes ,
Antoinecommauda la division opposée
à Cassius. Après une action sanglante, il
mit les soldats de Cassius en déroute,
et le contraignit à se tuer. Dans la
seconde action , ce fut principalement
lui qui obligea Brutus à prendre aussi
ce parti désespéré. Outre ses talents
militaires , il montra une générosité
qui doit d'autant plus êlre remarquée y
qu'elle formait un contraste absolu
avec la cruauté de son lâche collègue.
Lufilius qui , en se rendant à des sol-
dats thr.ices de l'armée d'Antoine ,
leur avait dit qu'il était Brutus , afin
de lui donner le temps de fuir , fut
conduit devant le vainqueur. Loin de
témoigner du courroux de celte res-
pectable supercherie , Antoine loua
hautement Lucilius sur sa fidélité ,
l'embrassa et le traita comme un ami.
Il fil paraître aussi une grande se nsi-
bilité , à l'aspect du cadavre de Bru-
tus , jeta dessus sou ricite manteau ,
et ordonna qu'on l'ensevelît honora-
blement. Antoine marcha ensuite en
Grèce , et s'arrêta quelque temps à
Athènes , oii il fréquenta les écoles
publiques et le gvmnase , et s'effor-
ça , par des égards el des marques de
faveur, déplaire à cette ville , illuslre
encore daus sa décadouce. De là , il
ANT
.Vàvança en Asie , où il se livra , sans
réserve , à son goût pour la magnifi-
cence et la volupté. 11 traita avec
beaucoup de douceur les partisans de
Brutus qui tombèrent dans ses mains ;
mais il rançonna impitoyablement
plusieurs villes , et donna, sans aucun
scrupule , les biens d'un grand nom-
bre de citoyens riches et paisibles à
ses parasites et à ses bouffons. Quand
il fut en Ciiicie , il enjoignit à la fa-
meuse Cle'opàîre , reine d'Egypte , de
rendre compte de sa conduite , qui
avait déplu aux triumvirs ; mais sa
présence le captiva tellement qu'il
ne put jamais , par la suite , rompre
ce charme, et cette circonstance fut
décisive pour sa destinée. Il accom-
pagna cette reine dans Alexandrie ,
où il vécut avec elle dans une dissipa-
tion continuelle , oubliant absolument
ce qui se passait dans le reste de
l'univers. Cependant Fulvie, restée à
Komc , eut de si grandes dissensions
avec Octave , qu'enfin , réunie à Lu-
cius , frère de Marc Antoine , elle ras-
sembla qr.flques légions à Préncste ,
et , se mettant à leur tête , commença
les hostilités. H s'ensuivit une guerre
de peu de durée , qui fut terminée à
l'avantage d'Octave, avant qu'Antoine
arrivât en Italie , où il avait enfin
jugé sa présence nécessaire. La mort
de Fulvie, qui s'était avancée jusqu'à
Sycione au devant de son mari, facilita
unerécoiu^iliation qui fut complète, du
moin^ en apparence , par le mariage
d'Antoine avec Oclavie , sœur chérie
d'Octave , et dont le caractère inspirait
l'amour et l'eslimc. Les deux maîtres
de l'empire en firent alors un nouveau
parijige. Tout, jusqu'à l'est deCodro-
polis en Illyric , appartint à Octave ;
Antoine eut l'Orient; et, poiu-nepas
paraître oublier tout-à-fait le faillie et
insignifiant Lépide, ou luidonna l'Afri-
que. Un accord a^ ec Sextus Pompée.
A !? T ï^ ï
qui dominait sur la ÎMéditcrranée , fut
un nouveau pas fait vers It; rétablisse-
ment delà tranquillité publique. Antoi-
ne retourna ensuite en Grèce. 11 passa
l'hiver dans Athènes , au tailicu des
fêtes, et envoya son lieutenant, Vcn-
tidius , contre les Parthes qui avaient
fait de grands progrès dans les provin-
ces romaines d'Asie. Ventidins eut des
succès qui excitèrent la jalousie d'Ar-
toine , de sorte qu'après l'avoir rejon.t
devant Samosate , il se débarrassa de
lui, en l'envoyant recevoir à Romeles
honneurs du triomphe. Antoine , après
une campagne peu glorieuse, revint à
Athènes , et fit , presque aussitôt ,
voile pour l'Italie, à la sollicitation
d'Octave, que Sextus Pompée, qui
avait repris les armes, pressait vigou-
reusement. Par la médiation d'Octa-
vie, une parfaite intelligence scrabia
régner entrelcs deux triumvirs ; mais la
passion d'Antoine pour Cléopàtre vint
de nouveau jeter entre eux la dissen-
sion. A son retour en Asie, il foula aux
pieds toute décence, en menant avec
cette reine la ^ ie la plus scandaleuse : il
alla même jusqu'à compromettre les in-
térêts de l'état, par les dons qu'il lui fit
avec profiision , de provinces , et même
de royaume,; entiers , ainsi que par
les injusficcs qu'il commit à sa sugges-
tion. Il marcha de nouveau contre îe>
Parthes; mais, après avoir perdu
beaucoup d'hommes et de muin-
tions , il fut contraint à une hon-
teuse retraite. Il termina la campagne ,
en faisant prisonnier, par trahison.
Artasasdes, roi d'Arménie, et il le
mena en triomphe dans Alexandrie.
La vertueuse Ocia vie, qui était venue
de Rome avec des renforts d'hommes,
et des vêtements pour les troupes, ne
put pas se réunir à lui. Elle était en-
core à .Athènes. lorsqu'Antoine, cé-
dant aux artifices de Cléopàtre, lui
ordouua de s'en retourner. Octave
27a A N T
Bc manquait pas de se prévaloir de
la mauvaise conduite d'Antoine , et
d'exciter contre lui le mc'couteute-
inont des Romains. La guerre entre
c<;s rivaux de puissance , devint iné-
vitable, et, des deux côte's, on s'y
j)ropara; mais Antoine, plonge' dans
les plaisirs , n'agissait guère en
homme dont les plus cliers intérêts
ctaient en danger. L'île de Samos ,
rendez-vous général de ses troupes ,
«•'fait remplie de musiciens, de bate-
leurs, et de tous les agents de ses dé-
bauches; les afl'aires sérieuses cédaient
aux divertissements continuels aux-
quels Cléopàtre et lui se livraient
avec les princes et les rois de leur
parti. Pour mieux montrer son ressen-
timent contre son ennemi, il divorça
puljliquement avec Octavic , et lui
ordonna de quitter sa maison de Ro-
me. L'impression que cette conduite
fit sur les amis d'Antoine fut telle , que
quelques-uns l'abandonnèrent; les
manières impérieuses et hautaines de
Cléopàtre y contribuèrent aussi beau-
coup. Enfin, dans Rome, on déclara la
guerre à la reine d'Egypte, et Antoine
iïit privé de son consulat et de son
gouvernement. Chaque parti rassera-
l)la ses forces de terre et de mer, et le
golfe d'Ambracie devint le théàlr<' de
cette grande querelle. Tandis qu'An-
toine était à Actium, le pressentiment
de sa ruine prochain* engagea plu-
sieurs personnages de distinction à
se rendre auprès de son rival. Paimi
eux, était un de ses plus intimes
amis, Domitius Ahenobarbus, dont
l'abandon afTecta sensiblement le cœur
d'Antoine, qui, toutefois, tint envers
lui une conduite ti-cs-louable ; car il
lui renvoya tous ses gens et tous ses
équipages. Domitius fut affecté d'une
générosité à laquelle il uc s'attendait
pas ; il était alors malade , et mourut,
peu de temps après, de duulem'. La
ANT
fameuse bataille d' Actium eut ensuîfe
lieu. On combattit sui mer, conire le
sentiment des meilleurs officiers d'An-
toine. 11 voulut déférer à celui de Cléo-
pàtre , qui était ficre de ses forces na-
vales. Au milieu de l'action ,C!éopâtre,
avec son escadre de soixante galères,
prit la fuite; Antoine, courant sur ses
traces, avec un petit vaisseau, et
abandonnant ses braves défenseurs ,
perdit l'empire du monde, et se cou-
vrit d'une honte éternelle. Ses soldats,
privés de leur chef, combattirent en-
core long-temps; mais, à la fin, ils
succombèrent. Ses troupes de terre,
ne pouvant penser qu'il les eut tout à
fait abandonnées, tinrent ferme pen-
dant quelques jours, quoiqu'elles fus-
sent environnées par les ennemis j
mais, à la fin, délaissées par leurs
principaux officiers, elles se rendii'ent
à Octave, et furent incorporées dans
ses légions. Antoine , dévoré de honte,
et rempli d'indignation contre celle
qui avait causé sa ruine, refusa , pen-
dant quelque temps, de lui parler. A
la fin, ils se i éconcilièrent , et Antoine
alla en Lybie, où il avait laissé uu
corps de troupes considérable ; mais,
en arrivant, il vit qu'elles avaient em-
brassé le parti d'Octave , et en fut
tellement affligé, qu'on eut de la peine
à l'empêcher de se poignarder. Il re-
vint en Egypte, et vécut quelque
temps dans une triste solitude; mais
Cléopàtre eut l'art de le ramener à son
palais, où il reprit ses habitudes vo-
lupteuscs. Leurs fêtes furent interrom-
pues par l'arrivée d'Octave, qui re-
jeta toutes les propositions de sou-
mission qu'ils lui firent. Quand il se
présenta devant Alexandrie , Antoine
parut retrouver un instant son ancien
courage ; il fit une sortie à la tête de sa
cavalerie , et battit celle d'Octave ; mais
dans la suite, abandonné par la flotte
e'gyptieuue et par ses forces de terre,
A N T
ayant même raison de se croire tralii
par Cle'opàfrc , il tomba dans le plus
profond désespoir. 11 courut d'abord
au palais de Clëopàtre, pour tirer
d'elle une vengeance à laquelle elle se
déroba par la fuite. Résolu de mou-
rir, il appela Eros, sou fidèle servi-
teur , pour qu'il acquittât la promesse
qu'il lui avait faite, de le tuer quand il
le lui ordonnerait. Eros, feignant de
lui obéir, lui dit de détourner la tête,
et , se frappant lui-même , tomba mort
à ses pieds. Un tel exemple d'héroïs-
me, et une telle affection, touchè-
rent Antoine , et il se jeta sur l'épée
d'Eros. La blessure ne fut pas immé-
diatement mortelle , et , comrne il dé-
sirait dire à Cléopàtre un dernier
adieu , il fut hissé, par le moyen d'une
corde, au haut de la tour où la reine
avait cherché un asyle contre ses fu-
reurs. Elle-même aida ses femmes ,
dans cette triste circonstance. Antoine,
faible jusqu'au dernier moment, lui
adx'essa quelques paroles pleines de
tendresse, lui donna des conseils, et
mourut entre ses bras , à l'âge de 56
ans, 3o ans av. J.-C. Cléopàtre lui fil de
magnifiques funérailles ; mais, à Rome,
on abattit toutes ses statues , et sa mé-
moire fut déclarée infâme. Antoine
laissa cinq enfants de ses trois femmes
( car, après son divorce avec Octavie,
il avait épousé légalement Cléopà-
tre), deux fils de Fulvie, deux filles
d'Octavie, et une fille de Cléopàtre.
Les singularités de la vie d'Antoine
lui ont acquis une célébiilé qu'il ne
devait pas attendre de son caractère.
Doué de quelques qualités brillantes ,
il n'avait ni assez de génie, ni assez de
force d'ame pour être rangé parmi
les grands hommes. On peut encore
moins le mettre au nombre des hom-
mes de bien , puisqu'il fut toujours
sans principes , amateur effréné des
plaisirs, et souvent cruel. Cependant,
H.
ANT l'^-y
peu d'hommes ont été plus chéris de
leurs amis et de leurs partisans, et
plusieurs de ses actions annonçaient
des dispositions généreuses, préféra*
blés à la prudence et à la froide politi-
que de son rival Octave. D — t.
ANTOINE ;Lucius), fut surnommé
le Gladiateur asiatique. Frère de
Marc-Antoine le Triumvir, il fut créé,
])ar lui, septemvir, pour procéder à une
estimation de propriétés , et à un par-
tage de terres , commission qu'il rem-
plit en brigand , suivant Cicéron , dans
sa cinquième Philippique. Il lui fut
élevé , dans le Forum , une statue
équestre dorée , avec cette inscription:
Qninque et triginta tribus palrono.
Cicéron , dans sa sixième Philippique^
se rit amèrement de l'impudence d'An-
toine, qui se croyait le patron du peu-
ple romain. 11 se trouva avec Marc
Antoine à la bataille qui décida de la
levée du siège de Modène; il s'enfuit
avec lui , et fut poursuivi par Plan-.-
eus jusque dans les Alpes. Lorsque
Marc Antoine était en Orient, Lucius
et Fulvie attaquèrent Octave. Après
une tentative infructueuse pour dé-
faire un corps de troupes que le trium-
vir faisait venir d'Espagne en Italie ,
Lucius s'enferma dans Pérouse. As-
siégé par les lieutenants d'Octave ,
il se vit h. peu près abandonné par
tous ceux qui tenaient le parti de
son frère. Ils lui reprochaient de
s'être engagé témérairement dans cette
guerre à son insu. Dans ce siège,
Lucius montra beaucoup de valeur
et de cruauté. Il fît de fréquentes sor-
ties , et , pour économiser le peu de
vivres qu'd avait, il défendit d'en don-
ner aux esclaves et aux valets de l'ar-
mée , que cependant il ne chassa point
de la place , dans la crainte qu'ils
n'allassent révéler à l'ennemi sa fâ-
cheuse situation. Ses soldats combat-
tirent avec un rare courage, mais en-
i8
274 ANT
fin il fallut capituler. Luciiis essaya
d'obtenir, pour ceux qui l'avaient si
bien seconde' , une amnistie générale, il
alla se renie Ure aux mains d'Octave,
qui le reçut avec bienveillance , lui
laissa la vie , et exerça toute sa ven-
geance contre les habitants. ( Foy. Au-
guste. ) Q — R — y.
ANTOINE ( Caïus ) , fut consul
avec Cice'ron. Il était favorable au
parti de Catilina. Cice'ron le gagna par
de grands ménagements , et en lui cé-
dant le gouvernement de la Macé-
doine qui lui était échu. Il marcha
avec une armée centre Catilina; mais ,
pour éviter de le combattre, il pré-
texta une attaque de goutte. Ayant été
accusé de malversation dans son gou-
vernement , il fut condamné à un
exil perpétuel. Dans la guerre qui sui-
vit la mort de César , il fut battu et
fait prisonnier par le fils de Cicéron ,
lieutenant de M. Brutus. Q — R — y.
ANTOINE (S.), patriaixhe des
cénobites, naquit, en 25 1 , au village
de Come , près d'Héraclée , dans la
haute Egypte. Ses parents, après lui
avoir donné une éducation chrétienne ,
furent enlevés de ce monde , et le lais-
sèrent , à l'iîge de 1 8 ans , possesseur
d'une fortune consitlérable. Ces pa-
roles de J.-C, adressées au ieiuic
homme de l'évangile : « Vendez ce
» que vous avez , donnez-le aux pau-
y> vrcs, et vous aurez un trésor dans
» le ciel , » firent une telle impression
sur lui , qu'il vendit ses terres , eu
distribua le prix aux pauvres, et se
retira dans le désert, pour s'y livrer
9 toutes les rigueurs de la vie ascé-
tique. Les tentations que le démon lui
fit éprouver dans cet état, sous toutes
sortes de formes , et qui troublèrent ,
pendant vingt ans, sa solitude, sont
célèbres daus l'antiquité ecclésiasti-
que , aussi bien que les mortifications
par Icsq^iieUcs jl sortit yiçtoiicux de
ANT
CCS longs et nides combats , qui luî
valurent le don des miracles. Antoine
vivait isolé au milieu des décombres
d'un vieux château situé sur une haute
montagne , sans autre communication
avec les hommes que par un serviteur
qui lui portait, de temps eu temps ,
quelques aliments ; un cilice qui lui
servait de tunique, couvert d'un man-
teau de peaux de brebis , attaché par
une ceinture , formait son vêtement.
Six onces de pain trempé dans l'eau,
un peu de sel et quelques dattes y
étaient sa nourriture de tous les jours,
lorsqu'il ne jeûnait pas. Il ne s'inter-
rompait, dans la contemplation des
choses célestes, dans la méditation
des vérités éternelles, que par le tra-
vail des mains , soit pour cultiver un
petit coin de terre , soit pour faire des
nattes, dont la vente lui prodnisait
encore de' quoi soulager les pauvres.
La réputation de sa sainteté attira au-
près de lui de nombreux disciples. Il
descendit de sa montagne , pour les
rassembler dans le monastère de
Phaium , composé de diverses cellu-
les, ou plutôt de huttes et de cabanes,
éparses cà et là. Le désir d'une vie
plus retirée le porta ensuite à s'enfon-
cer plus avant dans le désert. Il s'ar-
rèla au pied d'une montagne dont
l'aspect seul était dira vaut. L'af-
flucuce des personnes qui l'y suivi-
rent l'obligea de former , en cet
endroit, un nouveau monastère sem-
blable au premier, a])rès quoi il gra-
vit sur le sommet escarpé de la luon-
tagne , y bâtit une cellule , et y fixa sa
demeure. Ijientôt d'autres monastères
s'étabhrent dans cette partie du désert,
de sorte que les vastes solitudes de la
Thébaïde furent couvertes de céno-
bites , dont les uns rem|)lissaient ces
monastères , les autres s'enterraient
dans des cavernes formées par l'ex-
liacliou des pierres qui avaient seivi
ANT
a la construction des fameuses pyra-
mides. Le nombre de ces habitants
du désert s'élevait , à sa mort, à plus
de 1 5,000. S. Athanase, que la perse'-
cution avait souvent contraint de se
réfugier dans ces retraites profondes ,
nous trace ainsi le tableau de la vie
qu^n y menait. « Les monastères ,
■)) comme autant de temples , dit-il ,
)) sont remplis de personnes dont la
» vie se passe à chanter des psaumes ,
» à lire , à prier , à jeûner , à veiller ,
» qui mettent toutes leurs espérances
« dans les biens à venir , sont unies
» par les liens d'une charité' admi-
■>■> rable, et travaillent , moins j)0ur
» leur propre entretien que pour ce-
« lui des pauvres : c'est comme une
)) vaste région absolument séparée
» du monde, et dont les heureux ha-
» bitauts n'ont d'autre soin que celui
)) de s'exercer dans la justice et dans
» la piété. » Les différents monastères
avaient chacun leur supérieur, et tous
ces supérieurs étaient subordonnés à
Antoine , qui avait conservé la surin-
tendance générale sur toutes les co-
lonies rehgieuses du désert. Lorsqu'il
ne pouvait point y faire de visites , il
leur adressait des lettres et des ins-
tructions pour les entretenir dans leur
premiî're ferveur. Il descendait encore
de sa montagne pour satisfaire à l'em-
pressement des gens du monde , qui
venaient le consulter sur leurs besoins
spirituels. Quoique Antoine ne se fût
point appliqué à l'étude des sciences
et des belles-lettres , la lecture des
livres saints , et ses propres médita-
lions , l'avaient mis en état de défendre
la religion contre ses ennemis. Des
philosophes pa'iens , curieux de voir
un solitaire, dont Li renommée pu-
bliait tant de merveilles , allaient sou-
vent le voir pour disputer avec lui.
Plusieurs , frappés de la force et de
la clarté avec lesquelles il confondait
ANT s- 5
leurs sophismes , prouvait la vérité
du christianisme , et dévoilait les
absurdités du paganisme , se con-
vertirent à la foi. Deux fois , il fut
obligé de quitter sa solitude et de se
rendre à Alexandrie; la première, eu
5 1 1 , pendant la persécution de Maxi-
min , pour servir les chrétiens détenus
en prison , ou condamnés aux mines,
et les encourager, jusqu'au pied des
tribunaux et sous la hache des bour-
reaux, à persévérer dans la foi de
Nicée ; la seconde , à la prière de
saint Athanase , en 555 , pour con-
fondre les Ariens, qui voulaient le
faire regarder comme un de leurs
partisans , et le peuple courait en
foule pour lui entendre prêcher la
doctrine de J.-G.Constantin-Ie-Grand,
qui le traitait de père , lui écrivit de
sa propre main , pour lui demander
le secours de ses prières. Saint Atha-
nase nous a conservé la réponse du
saint anachorète. Antoine, sentant sa
fin approcher, entreprit, pour la der-
nière fois, la visite de ses monastères;
il se retira ensuite sur le sommet de
sa montagne avec ses deux plus chers
disciples, Macaire et Amathas. il leur
défendit d'embaumer son corps, sui-
vant l'usage des Egyptiens , qu'il avait
souvent condamné, comme étantlondé
sur un motif de vanité, et renfermant
quelque pratique superstitieuse: il leur
recommanda de l'enterrer comme les
anciens patriarches, de garder le se-
cret sur le lieu de sa sépulture , et
d'envoyer son manteau à saint Atha-
nase , afin de prouver par-là qu'il
mourait dans sa communion. Après
quelques autres dispositions sembla-
bles : (c Adieu , mes enfants , leur
» dit-il; Antoine s'en va, il n'est plus
w avec vous. » C'est ainsi qu'il expiia
paisiblement , en 556, à l'âge de cent
cinq ans , sans que ses grandes austé-
rités lui eusseut jamais fait éprouvée
1,8..
2^j6 A N T
aucune des infimiite's qui sont le par-
tage ordinaire de la vieillesse. L'église
célèbre sa fête le 1 7 janvier. Ses
lettres , écrites en lan^^ue égyptienne,
se conservent dans divers luonastcres
d'Egypte. Plusieurs ont été traduites
en grec , et du grec en mauvais latin ,
dans la Bibliothèque des Pères. Abra-
ham Echellensis en publia vingt en
1641 , dont il n'y en a que sept qui
soient véritablement du S. patriarche.
Le P. Mingarelli a retiré de la biblio-
thèque Nanienne de Venise , et fait
imprimer , en i ^85 , dans ses JEgyp-
tiorum codicum reliquice , deux
lettres du même saint, en langue de
la The'baïde ; l'une adressée à saint
Théodore, et l'autre à saint Atlianase.
Elles respirent le ton , l'esprit et les
maximes des apôtres. Le même au-
teur a aussi donné une règle de S.
Antoine ; mais il n'en est lait men-
tion , ni dans la vie du saint, écrite
par S. Ath.inase, ni dans aucun autre
monument de l'anticjuité.Ses exemples
et ses instructions étaient la règle vi-
vante à la({uelle ses disciples se con-
formaient. Le corps de S.Antoine fut
dérouvert en 56 1 , transféré solen-
nellement à Alexandrie , et de là, un
siècle après , à Constantinople , pour
le soustraire aux ravages des Sarra-
sins. Josselin , gentilhomme dauphi-
nois , le transporta , sur la fin du
1 o*. siècle , à V ionnc , et le déposa
dans un prieure de Bénédictins , à
quatre lieues de cette ville. Gaston,
autre gentilhomme de la même pro-
vince, ayant été guéri d'une grave
maladie, par l'mtercession du saint,
fonda en cet endroit un hôpital pour
les pauvres attiiqucs de la même ma-
ladie , connue sous le nom de feu de
S. Antoine , et qui avaient recours à
ce saint pour en obtenir la guérison
par son intercession. Ce prieuré, érigé
cil abbaye par Bonifacc V III , fut
ANT
le berceau de l'ordre des chanoines
régulicis de S. Antoine, approuvé
par Urbain II , et par le concile de
Clermont en i o()5 , et incorporé , en
1 777, dans l'ordre de Malte. Albert de
Bavière , comte de Hainaut , fonda ,
en i582, sous les auspices de saiut
Antoine, un ordre de chevaliers des-
tinés à faire la guerre aux Turks.
Us portaient un colher d'or , fiiit en
forme de ceinlure d'hermine , d'oij
pendaient une béquille et une clochette
d'argent. Suivant plusieurs auteurs ,
un ordre militaire du même nom avait
déjà été fondé en Ethiopie , par un
empereur , nommé Jean-le-Saint ,
en 070 j d'autres regardent cette ins-
titution comme une fable. T — d.
ANTOINE de Padoue (S.), fils
d'un officier de l'armée d'Alphonse 1' ^,
roi de Portugal , naquit à Lisbonne ,
en 1 195, changea son nom de Fer-
dinand en celui d'Antoine, par dévo-
tion pour le patriarche dos cénobites,
et fit ses études à Coimbre. Son ap-
plication et son esprit pénétrant lui
avant acquis de bonne heure une con-
naissance profonde de la théologie , il
se forma bientôt à ce genre d'élo([uence
nerveuse et pcrsuc-;sivc qui , dans la
suite , fut si utile à l'Église. Les reli-
ques de cinq franciscains martyrisés
par les infidèles firent sur lui une si
vive impression que , dans l'espoir
d'obtenir la couronne du martyre , il
prit l'habit de S. François, en 1221 ,
et alla prêcher l'Évangile aux Maures
d'Afrique. Forcé par une maladie dan-
gereuse, de se rembarquer pour l'Es-
pagne, un coup de vent le jeta en
Sicile , où il vit S. François , fonda-
teur de son ordre, lequel le tua en-
suite de sa solitude, près de Bolugiu-,
pour l'envoyer professer la théologie
àVerceil, à Bologne, à MontpeUier,
à Padoue et à Limoges. Antoine se vou»
aussi à la prédication, parcouiant k*
ANT
villes , les Lourgs et les villages avec
un zèîc que rieu ne pouvait ralentir.
Le pape Grégoire IX l'ayant entendu
prêcher à Rome, en 1 22'] , fut si tou-
che, cpi'il le surnomma ï Arche du
Testament et le Saint dépositaire
des Livres sacrés. Elevé aux pre-
mières dignités de son ordre, Antoine
tonna contre les abus, et s'attira la
haine de son général par sa rigidité.
Il allait être renfermé pour le reste de
ses joms , dans une cellule , lorsqu'il
se réfugia près de Grégoire IX, qui
l'attacha à sa personne. Antoine se
retira d'aljoi d sur le mont Aventiu et
de là à Padoiie, où il mit la dernière
main à ses Sermons que nous avons
encore, mais non pas tels qu'il les
prêcha. Sa coutume était de les diver-
sider, selon les circonstances , et de
suivre , dans son débit , l'impétuosité
de son zè!e. Epuisé, quoique jeune
encore , par ses fatigues et ses austé-
rités, il se retira dans un lieu soli-
taire pour se préparer à la mort , et
rendit le dernier soupir, le i5 juin
i'.>.5r, à trente-six ans. Dès qu'on sut
qu'il avait cessé de vivre , le peuple se
mit à crier dans les rues : Le saint est
mort. Grégoire IX le canonisa en
I25'A. Une église magnifique fut bâtie
à Padoue, en son honneur, et ses re-
liques y furent déposées, S. Antoine
de Padoue est honoré avec autant de
dévotion en Portugal qu'en Italie. Sa
Vie a été interpolée en plusieurs en-
droits, d'après des traditions popu-
laires qui ne sont d'aucune autorité j
aussi n'avons nous suivi que les An-
nales de Wading , comme plus au-
thentiques. Parmi les nombreux mi-
racles qu'on lui a attribués , il eu est
un plus fameux que les autres en Ita-
lie ; c'est la prédication que, dans la
fervem" de son zèle , il adressa un jour
aux poissons , qui , disent les légen-
daires ,1'écoutèreut avec attention. Cet
ANT 277
événement a été rcpioduit par plusieui s
peintres fameux. Les Sermons de S. An-
toine , ainsi que sa Concorde morale
de la Bible, ont été réimprimés à
Venise , en 1570, et à Paris , 1641,
in-fol. Le père Antoine Pagi a donné
plusieurs autres Sermons du même
saint, écrits aussi en latin , Avignon,
i684- LepèreWadmg publia à Rome,
en 1G24 , les Sermons de S. /Inloine,
avec Y Exposition mystique des livres
divins. Azzoguidi les a fait réimpri-
mer avec des notes , à Bologne ,1737,
in^". K.
ANTOINE , dit le Gra^d Bâtard,
fils naturel dePhilippe-le-Bou , duc de
Bourgogne, et de Jeanne de GruUes,
naquit en 1 4^ i , et dojuia , jeune en-
core, des preuves d'héroisme qui lui
méritèrent le surnom de Grand. 11
passa en Afrique avec son frère Bau-
douin, et força les Maures à lever le
siège de Ceuta. De retour en France,
il servit dans l'armée du duc de Bour-
gogne pendant les guerres contre les
Liégeois et contre les Suisses, et se
signala en plusieurs rencontres. 11
commandait l'avant-garde , en 1476,
au combat de Grandson. L'année sui-
vante , il fut fait prisonnier à la ba-
taille de Nancy, où périt Charles , der-
nier duc de Bourgogne. Louis XI fit
les plus vives instances auprès de
René, duc de Lorraine , pour se faire
céder le prisonnier. En vain Antoine
de Bourgogne pria-t-il René de ne pas
le livrer au plus implacable ennemi de
sa maison , et lui offrit-il une raiiçon
considérable. Le duc de Lorraine U
conduisit lui-jnêrae au monarque fran-
çais, qui l'acheta de Jean de Bidâts,
pour la somme de dis. mille écus ; mais ,
à l'étonnement do toute l'Europe, il
le combla d'honneurs et de biens , es-
pérant se l'attacher; et, en effet, le
bâtard de Bourgogne le servit avec zèle ,
ainsi que Charles Yltl , qui le fit che -
278 ANT
vaiier de St.-Miclici , et lui tlonna des
lettres de légitimation. Antoine mou-
nit , en i5o4, âge de quatre-vingt
trois ans. B — p.
ANTOINE ( DE Bourbon ) , roi de
Navarre, père de Henri TV, fils de
Ciharîes de Bourbon , duc de Ven-
dôme , naquit en 1 5 1 8. Il fut nomme'
d'abord duc de Vendôme, devint de
son chef premier prince du sang de
France, et épousa , en 1 548 , Jeanne
d'Albrel, héritière de Navarre , qui lui
apporta en dot la principauté de
Béaru, et le litre de roi. Ce prince,
brave , mais irrésolu , flotta presque
toujours entre les deux religions et
les deux partis qui divl.-aicnt la France.
Après la mort de Henri 11 , le conné-
table de Montmorenci, pour balan-
cer le crédit des Guises , pressa le roi
de Navarre de venir prendre au con-
•scil, et auprès du nouveau roi, la
jilacc qui lui appartenait; mais An-
toine hésita , n'osant se fier à Mont-
morenci , qui avait conseillé autrefois
à Henri II de s'emparer du reste de
son petit royaume de Navarre, déjà
jiresquc eutibrenient envahi par Fer-
diuand-lc-Catholique. Le roi de Na-
vaire n'arriva à la cour que pour en-
tendre François 11 lui déclarer qu'il
avait confié les rênes du gouverne-
ment à ses oncles, les Guises. OnlVloi-
giia même bientôt , sous le prétexte ho-
norable de conduire sur les fi'ontières
d'Espagne la jnincesse Elisabeth de
France, cpii allait épouser Philippe 11.
Rebuîéde tous les obstacles qu'on lui
opposait à la cour , il se retira dans la
principauté de Bearn ; et, par son irré-
solution . se perdit dans l'esprit des
huguenots , qui n'attendaient qu'un
chclpcur prendre les armes. Us choi-
sirent le prince de Condé, son ft'ère,
plus entreprenant, plus ferme dans
ses j)rinripes. Ce ])rince , vovant le
roi de Navarre oublié, et méprisé de
ANT
la cour , rcdoidjla d'efforts pour l'en-
traîner dans la révolte. Sur le bruit
d'une confédération redoutable , les
deux frères sont mandés à la cour ;
et le roi de Navarre refuse d'accepter
les secours que la noblesse s'empresse
de lui offrir , ne voulant être armé
que de sa seule innocence. Instruit que
les Guises ont arraché à la faiblesse
de François II le consentement de son
assassinat, il montre alors une fermeté
qui n'était point dans son caractère :
« S'ils me tuent, dit-il, à Reinsy, son
)) gentilhomme , portez à ma femme et
» à mon fils mes habits tout sanglants j
» ils y liront leur devoir. » 11. entre
d'un air intrépide dans la salle du
conseil , et en impose h ses ennemis,
qui n'osent attenter à ses jours. Ses
alarmes , après la condamnation du
prince de Condé, et les dangers aux-
quels il se trouva exposé lui-même,
le décidèrent h céder la régence a Ca-
therine de Médicis, pendant la mino-
rité de Charles IX , et à se contenter
de la lieutcnance-générale du royaume,
qui ne fut qu'un vain titre entre ses
mains. Il servit dès-lors la reinemère,
qu'il haïssait , et se réconcilia même
avec les Guises , qui lui faisaient espé-
rer , tantôt de lui faire restituer , par
le roi d'Espagne , son royaume de
Navarre; tantôt de lui faire donner la
Sardaigne en échange. Détaché entiè-
rement du parti des huguenots , il
embrassa la religion catholique , ren-
voya en Béarn Jeanne d'Albret , après
lui avoir ôté l'éducation du jeune
Henri, son fils, et forma , avec le duc
de Guise et le connétable de Mont-
morenci, cette union appelée par les
])rotestants le triumvirat. La guerre
civile s'étant allumée , le prince de
Condé, chef des protestants, s'appro-
cha en armes , de Fontainebleau , oti
étaient la cour , son frère le roi de Na-
varre et Calhciine de Médicis. Ccttr
ANT
princesse e'tait alors d'intelligence avec
le prince de C-nde, ci voulait se re-
mettre entre ses mains ; mais le roi de
Navarre , gagne' par les Guises , vint
lui déclarer qu'il fallait ramener le
roi à Paris. La reine hésitait : « Vous
» pouvez rester, si bon vous semble,
» lui dit le roi de jNavarre ; nous par-
» tons. » Il fallut le suivre. Au milieu
des lioslilile's , les deux frères eurent
une entrevue à Tlioury , en présence
de Catherine de Me'dicis. Le roi de
INavarre reprocha au prince de
Condé sa révolte et l'embrasement du
royaume , et ce prince reprocha au
roi de Navarre son asservissement aux
Guises. Les esprits s'aigrirent , il fal-
lut rompre la conîérence et reprendre
les armes. L'amour du roi de Navarre
pour la belle du Kouet , l'une des de-
moiselles de la cour que Catherine de
Me'dicis menait à sa suite, le retint dans
le parti catholique, et servit aux projets
de la l'eine mère. S'étant mis à la tête de
l'armée royale, il fit échouer, à l'ou-
vertui-e de la campagne de i5Gii ,
l'entreprise du prince de Condc sur le
cimp royal , et soumit ensuite la ville
de Bourges. La même année , il fit le
siège de Rouen , et fut blessé, dans la
tranchée , d'un coup de mousqueton.
Lorsque la ville fut prise , il s'y fit
porter, sur son lit, par ses Suisses,
€t y entra victorieux par la brèche.
iSa blessure, qui n'était point dange-
reuse , devint mortelle par son incon-
tinence. Pressé de revenir à Paris , et
remontant la Seine en bateau, une
fièvre ardente et des douleurs aiguës
l'obligèrent à se faire débarquer aux
Andelys,oùilexpira,le i- novembre
i562 , en horreur aux protestants
qu'il avait abandonnés, et peu regretté
des catholiques. Les historiens le
peignentcomme un prince voluptueux
et timide , oubliant les injures , plus
par faiblesse que par magnauimité ;
ANT 279
aussi les Parisiens dirent-ils , qu'en
ouvrant son corps , on n'avait trouvé
ni cœur , ni fiel. Il momut dans la
même irrésolution où il avait vécu ,
relativement à la religion. Jamais on
n'avait pu le porter à répudier Jeanne
d'Albret , pour épouser Marie Stuart ;
alliance qui, au lieu des restes toujours
menacés du royaume de Navarre , lui
aurait procuré l'Ecosse, et peut-être
les trois royaumes Britanniques. Son
allacliement pour Jeanne d'Albret ,
ou , selon quelques auteurs , le respect
de Marie Stuart pour les droits de
cette première épouse, fit échouer la
négociation. Antoine de Navarre laissa
de son mariage avec l'héritière de ce
royaimje , Henri IV, et Catherine de
Navarre, mariée à Louis de Lorraine.
Il avait eu de Louise deLaberaudière,
demoiselle du Rouet, un fils naturel ,
nommé Charles de Bourbon , arcbe-
vêque de Rouen, mort en 161 5.
B— p.
ANTOINE ( Don ) , prieur de
Crato , roi titulaire de Portugal , fils
naturel de l'infant Don Louis , duc de
Bcja, et d'Islande de Gomez, que ce
prince avait ])romis d'épouser , suivit
le roi Don Sebastien à la malheureuse
expédition d'Afrique. Enveloppé lui-
même dans la déroute de l'armée , à
la bataille d'Alcazar-Quivir , en 1 558 ,
il fut pris par les Maures, cacha son
nom , et fut sauvé de sa prison , ])ar
un esclave , après 40 jours de captivité.
Don Antoine reparut aussitôt à Lis-
bonne , et trouva le trône occupé par
le cardinal Henri son oncle. Il demanda
hautement la couronne , et prétendit
que Don Louis, son père, avait épousé
sa mère en secret 5 mais déclaré bâ-
tard et banni du royaume, il fut obligé
de se cacher , en attendant l'occasion
de s'emparer d'un trône qu'il croyait
lui appartenir. A la mort du cardinal ,
qu'où appelait le Fretre-Roi , il rcpa-
28o A N ï
riità Lisbonne, et fut proclame le 19
juin i58o, p.tr le peuple, au mo-
ment même où Philippe 11 levait une
année pour faire valoir ses droits sur
le Portugal. Reconnu seulement dans
les villes situées au nord du Tage , et
abandonne' de la noblesse portugaise ,
Don Antoine s'empara de l'arsenal ,
des magasins de Lisbonne, et forma , à
!a luUe , une armée pour s'opposer au
duc d'Albe , contre lequel il osa en ve-
nir aux mains, le 'tS août, à Alcan-
tara ; mais, force' dans ses retranche-
mfuts , il fut vaincu et poursuivi, le
Kicnic jour et à la même heure que sa
flotte était défaite par le marquis de
Sanfa-Crux. Lisbonneouvrit ses portes
aux Espagnols. Don Antoine , ayant
rallie les débris de sonarme'e sur les
bordsdu Duero, voulut encore risquer
le sort des armes, cl fut défait une se-
conde fois , le '^-i septembre. N'ayant
})lus ni ressources , ni cspéranro , il
]irit la fuite et gagna \Kina , où il s'cm-
])aiqua sur uu vaisseau marchand.
Une violente tempête l'avant rejeté'
sur la cote, il prit l'habit d'iui simple
matelot, pour se soustraire h la pour-
suite de l'ennemi. Philippe II promit
une récompense de 80,000 ducats à
quiconque lui livrerait Don Antoine;
mais, telle était l'aversion des Portu-
gais pom' le gouvernement espagnol ,
et leur attachement pour le prince fu-
gitif, q\i'Antoinc resta caché pendant
plusieurs mois , dans le pays situé en-
tre Duero et Minho , sans être trahi.
Enfin , il se réfugia en France , où il
implora le secours de Catherine de
Médicis , et publia uu manifeste , de-
venu depuis fort rare , intitulé : Ex-
planatio veri ac legitimi Juris qiio
serenissimtis Lusitaniœ rex Antonius
nititur ad hélium Philippo régi, etc.
Ce manifeste, écrit en latin, en français
et en hollandais ( Lugd. Eat., Plantin ,
1 583 , in 4". ) , fut remis aux cours
ANT
de France et d'Angleterre, et aux Pro-
vinces-Unies. Catherine de Medicis
accorda à Don Antoine 6,000 hommes
et une flotte, qui fut défaite complète-
ment, le 27 juillet i5iS'i, par l'esca-
dre espagnole. Don Antoine , poursuivi
par les vainqueurs, passa sur un na-
^ ire flamand , erra en Hollande , en
Angleterre, et revint h Paiis, où il
mourut , le 26 août 1 ^qS , à l'âge de
64 ans , après avoir cédé tout ses droits
à Henri IV. Il eut un fils naturel ,
nommé Emmanuel , d'abord novice
chez les capucins , attaché ensuite à
Maurice d'Orange , dont il épousa la
sœur , et qui mourut à Bruxelles , en
i658, à soixante-dix ans. Son petit-
fils, Emmanuel Eugène , mourut sans
postérité, en i G87 . Un a imprimé, sous
le nom de Don Antoine , prieur de
Crato, une Paraphrasa des Psaumes
de la pénitence , traduite p)ar l'abbé
de Kellegnrde, 1718, in-i(i. B — p.
ANTOINE ( GuNTaEu d'Akhalt ).
p^oy. Anoalt.
ANTOINE, duc de Brunswick.
f^oy. Brunswick.
ANTOINE DE Lebrija, appelé
communément Lebrisa, naquit, au
commencement de i44*^>'l3"^ '■* ville
do l'Andalousie dont il porte le nom.
A l'âge de quatoizeans, il passa à l'u-
niversité de ^alamanque, et, à dix-neuf,
il alla en Italie fréquenter les écoles
les plus célèbres. Son application fut
telle, qu'au bout de dix ans, il avait
presque parcouru tout le cercle des
connaissances humaines. Versé sur-
ttmt dans l'hébreu, le grec et le latin,
il obtint, à son retour à Salamanqne,
une chaire d'humanités. Ce savant in-
fatigable professa près de vingt ans
à Salamanqne, publia plusieurs ou-
vrages sur les langues , hs belles-
lettres , les mathématiques, la méde-
cine , et porta la lumière dans la
grammaire, dans la jurisprudence et
ANT
ilans la critique sacrée. Le cirdinal
Ximeuès, qui était sou admirateur,
l'ayant attiré dans l'université d'Al-
cala, imae;ina, d'après lui, le plan de
sa Poljglotie. Lebrija fut un des prin-
cipaux directeurs de ce beau monu-
ment. Il couronna dignement ses tra-
vaux par les soins qu'il donna à
l'histoire , débrouilla l'origine et les
antiquités de sa nation, et voulut
terminer cette nouvelle carrière par
y Histoire des rois catholiques ; mais
il n'acheva point cet ouvrage, qui lui
avait valu, dans un âge avancé, le
litre d'IiistoriogTaphe du roi. Il mou-
rut à Alcala dellenarcz, le ii juillet
1322, à soixaute-dix-sept ans. Son
éloge, proposé par l'académie de Ma-
drid, a été publié en juillet, 1796,
par D. J. B. Muuoz. Comme il n'existe
aucune liste exacte de ses ouvrages ,
le loug article cpii lui est consacré dans
\aBibliolheca Hispanicaiiova^ étant
plein d'omissions et d'inexactitude,
nous nous contenterons de citer de
lui : I. Deux Décades de l'histoire
de Ferdinand et d'Isabelle , Gre-
nade, 1545, in-fol.; II. Des Lexiques,
espagnol-latin, et latin-espagnol ; qui ,
au rapport de David Clément , ont eu
dix-huit éditions; L première, d'Al-
cala de Hennarrz, i532, in-fol., est
très-rare ; Grenade, i53G, in-fol;
III. Des Explications de l'Ecriture-
Sainle , dans les Critici sacri ; IV.
Des Commentaires surbeaucoup d'au-
teurs anciens. Ses Poésies latines
furent publiées par \ ivamo , en 1 49 1 ■
B— p.
ANTOINE (Nicolas). To^. An-
tonio.
ANTOINE de Messine, peintre,
communément appelé, en Italie, An-
TORELLo, né à Messine en i447 >
mourut en 1496, suivant Gallo, qui
ÊC fonde, pour ces dates , sur un ma-
nuscrit de Siisiuo , peintre du 17'".
A N T
18 f
siècle. Vasari en parle plus vague-
ment : il se contente de due que ce
maître ne vécut que 49 aos, et alla
en Flandre pour apprendre de Jean
van Eyck , dit Jean de Bruges ,
l'art de peindre à l'huile, qui était,
ajoute-t-il, inconnu en Italie. La dé-
couverte de la pcinlure à l'huile date
de i4' Oj et Jean de Biiiges , qui eu
fut, dit-on, l'inventeur, mourut en
i44i' Comment se pourrait-il, sui-
vant Gallo , qu'Antoncllo, né en t4 »7,
eut vu Jean de Bruges, inoit six an-
nées auparavant? L'opinion de Va-
sari, quoique peu déterminée, doit
donc être, eu quelques poiçts , préfé-
l'ée à celle de Susiuo, rapportée par
Gallo. Cependant les tableaux à l'huile
d'Anlonello portent les dates de 1 474 >
et même de i49^- Celui que pos'iède
M. Martinengo, à Venise, est signé
ainsi : Anlonellus Mrtssaneus me fe-
cit, i474' Dans la salie des Dix de
la même ville, on en vovait un autre
signé , Antoniiis Messinensis. Si ces
tableaux sont véritablement d'Anfo-
nello, comment n'a-t-il vécu que qua-
rante-neuf ans ? Il n'a pu apprendre
de van Evck l'art de peindre à l'huile
qu'avant la mort de ce célèbre aifiste
flamand, au moins eu i44'- I' avait
aussi au moins dix-huit ans , quand
il a fait le voyage de Flandre , et ,
dans cette supposition, il a dû vivre
soixante - sept ans , si ou se borne
encore à ne reconnaître . comme
lui appartenant, que le tableau seul
de M. Martinengo, signé, en i474-
Quoi qu'il en soit , on peut croii'e ce
que rapporte Vasari, pourvu qu'on
admette positivement qu'Antoncllo a
vécu plus de quarante-neuf ans. De
retour de son voyage en Flandre , il
communiqua sou secret à Dominique
Vénitien. Ce dernier, se trouvant à
Florence , le communiqua , à son tour,
à André del Gastagno , qui , poussé
in-2 A N T
par une horrible jalousie, l'assassina,
pour n'avoir pas de rival dans cotte
nouvelle manière de peindre , ne sa-
chant pas qu'Ântonello avait aussi
lionne le même secret à Pino de Mes-
sine , sou ami , et que Roger de Bruges ,
élève de van Eyck lui-même , e'tait
venu faire connaître ce procède' à
Venise. Les comj)ositions d'Antonello
ne sont pas dans le goût italien d'alors.
La couleur est moins bonne que celle
de quelques Vénitiens ses contempo-
rains , qui , en même temps que lui ,
commencèrent à peindre à l'huile.
A— D.
ANTOINE (Paul -Gabriel),
the'ologien jésuite, ne, en iG-jq, à Lu-
neVille, mort, en 174^? '' Pont-à-
Mousson , où il avait long-temps oc-
cupe une chaire de théologie. Nous
avons de lui : L Theologia universa,
Pont- à- Mousson , i7'?..'îj Nancy,
1732, I vol. in-4". , 5 vol. in- 12;
Paris, 1740 5 7 vol. in-12, réimpri-
mée à Mayencc par les soins du père
O^ermann , qui l'a augmentée et mise
dans une nouvelle forme ; IL TheO'
los,ia moralis , Nancy, 1731 , Paris,
1750,5 vol. in-8'\ ; Paris, i744>
in-i 2 , 4 vol. Cette dernière partie est
plus estimée que la première. L'auteur
s'est éloigné , dans la décision des cas
de conscience, des opinions relâchées
de ses confrères. On trouve cepen-
dant quelques-unes de ses proposi-
tions dans le Recueil des asser-
tions. M. Cassieu Fenici, comte d'Ar-
tenberg , a relevé plusieurs vices de
sa morale dans un ouvrage intitulé:
Theologiœ ascelico - moralis insti-
iutiones , Cologne, 1769, in-12.
Néanmoins le P. Antoine s'est pro-
noncé formellement contre le proba-
bilisme, les équivoques, les restric-
tions mentales, etc.; aussi Benoît XIV
fit-il adopter sa morale au collège de
la Propagande. Il fut l'édilcur des
ANT
Instructions spirituelles du P. Caus-
sade,son confrère, et a publié plu-
sieurs ouvrages de piété , dont ou
trouvera la liste dans la Bibliothèque
de Lorraine. T — d.
ANTOINE (Marc-), graveur. F.
Baymondi.
ANTOINE (Jean), dit le Sodoma.
P^oj. Sodoma.
ANTOINE ( Jacques -Denis) ,
architecte , naquit à Paris , le G août
1735. Jean - Baptiste Antoine, son
père , était menuisier , et voulait faire
de son fils un simple artisan. Jac-
ques - Denis fut maçon. La charge
d'expcrt-entrtpreneur, qu'il obtint , le
mit à portée li'iicquèrir des connais-
sances et de les perfectionner. Bientôt
il eut la réputation de constructeur ha-
bile. La A'oûte du palais de Justice ,
et le grand escalier du même bâtiment
prouvèrent ses talents. Cbargé , eu
1 7 7 1 , de la construction de l'holel des
Monnaies , à Paris , il fut obligé de res-
serrer quelques parties de cet édifice,
et de troji avancer la façade sur le quai,
parce que le surintendant des bâti-
ments, d'Angivilliers, prit, pour se
faire bâtir un hôtel , une partie du ter-
rain qui était destiné à la Monnaie.
L'hôtel de Bervicq , à Madrid , l'hôtel
des Monnaies , à Berne , sont encore
l'ouvrage d'Antuinc, qui, nommé mem-
bre de l'institut , en 1 799, est mort le
9,4 août 1801. Son éloge , par M. Lus-
sault, a été imprimé en 1801 ,in-8".
A. B— T.
ANTOINETTE d'Orléans, fille
d'Eléonore d'Orléans , duc de Lon-
gueville, et de Marie de Bourbon.
Douée d'une rare beauté, elle épousa
Charles de Gondi , marquis de Bcllc-
Isle , qui fut tué en 1 5ç)t) , en voulant
surprendre le mont Saint-Michel. Un
soldat , qu'elle avait chargé de venger
la mort de son époux , ayant été
pmidu , malgré ses sullicitalious poui:
ANT
obtenir sa grâce, elle n'écouta plus
que sa douleur, abandonna le inonde
et prit riiabil de feuillantine à Tou-
louse , en I opg , sous le nom de Sœur
Antoinette de Sainle-Scholastique.
Cinq années après , Henri IV la
nomma coadjutrice d'Elc'onore de
Bourbon \'endônie , abbesse de Fon-
tevrault. Elle obéit à ret^ret, refusa,
par la suite , le titre d'abbessc , et alla
s'enfermer dans le monastère de l'Eu-
ciaistre , diocèse de Poitiers , où elle
avait établi la réforme. Ce fut là qu'elle
conçut le dessein de fonder la nou-
velle congrégation des Filles du Cal-
vaire , pour y pratiquer la règle de
S. Benoît dans toute sa rigueur. Les
statuts en furent dressés par le fa-
meux P. Jose}.li, capucin, directeur
de l'ordre. Dans cet intervalle , An-
toinette d'Orléans entreprit aussi de
réformer l'ordre de Fontevrault, ayant
reçu des pleins pouvoirs du pape
Paul V. Elle quitta tout-à-fait Fonte-
vrault en 1617, pour aller prendre
possession du monastère du calvaire,
à Poitiers, où elle mourut au mois
d'avril de l'année suivante. K.
ANTOINETTE d'Autriche ( Ma-
rie ). T^oy. Marie.
ANT0:N , ou ANTONlUS(PArL),
théologien delà communion de Luther,
né eu 1661, àHirschfeldjdanslaLusa-
cc supérieure, mort en i-ySo à Halle,
étant professeur de théologie et inspec-
teur des églises du cercle de la Saale, fut
ami et coopérateur d'A. II. Francke ,
un des chefs de ceux qu'on a appelés
piétistes, et qui ont contribué, par
une vie exemplaire , autant que par
leurs écrits, à ramener l'enseignement
religieux à son véritable but, à être
une école de vertus et de piété. Il fut
instituteur des enfants d'Otto Menc-
ken, et accompagna, comme aumô-
nier, dans ses voyages, le prince
électoral Frédéric - Auguste , depuis
ANT 383
électeur de Saxe et roi de Polo-
gne. Ses principaux ouvrages sont :
I. De sacris gentilium procès sionibus.
Lcipsig, 1684, in-4; n. Concilii Tri-
dentini adeoque et Pontificiorum doc-
trina publica^haWe, 1697, in-8., sou-
vent réimprimé ; III. diflcrents écrits de
controverse, publiés dans une discus-
sion tliéologique avec J. G. Neumann
( V. Walch , Bihlioth. théol. , t. II ,
p. 754); IV. Elementa homiletica ,
Halle, 1 700, in-8" ; V. Collegium an-
titheticum, ib., l 'jZi. S — R.
ANTONELLI ( Nicolas-Marie ),
comte de la Pergola, s'éleva par degrés
à la cour de Rome, dans les dignités
ecclésiastiques , jusqu'à celle de cardi-
nal. 11 se distingua par un profond sa-
voir, par une modestie rare, et des
mœurs pures. Il était né en 1697 , et
mourut !e i\ sept, i 767. Il a laissé,
entre autres ouvrages : I. une disserta-
tion latine , De titulis quos S. Evaris-
tus Romanis presbj leris distrlbuit. ,
Rome, 1725, in-8°.î IL Ragioni délia
Sede apostolica sopra il Ducato di
Parnia e Piacenza esposte à" sovra-
ni eprincipi Catlolici delVEuropa ,
1 742, 4 vol. in-4., sans nom de lieu,
d'imprimeur ni d'auteur, maisécritpar
Antonelli, et imprimé à Rome; III. S.
Athanasii archiepiscopi Alexan-
driœ interfyretatio psalmorum , etc. ,
Rome, 1 746, in-folio; ouvrage qu'il a
eu le mérite de publier pour la pre-
mière fois , et qu'il avait tiré d'un ma-
nuscrit original de la bibliothèque Bar-
berini. Il y a joint une traduction latine,
imprimée en face du texte grec, des
corrections et des notes. IV. Fétus
Miss aie Romanum , prœfationibus et
jiotis ilîustratum, Rome, \ 756. in-4°.
V. Il cultivait aussi la poésie italienne,
et l'on trouve des morceaux de lui dans
le X^. vol. des poésies degli Arcadi
di Roma , i']^'], in-8'. Plusieurs de
ses ouvrages ^ imprimes d'abord sépa -
28-1
A N T
rc'iaf-nt, onl ëfc rassembles en un vo-
Junie in folio, Rome, 1 706. G — e.
ANTOrsELLO,peintie( Foy. An-
ToiivE de Messine '.
AWTONI ( Alexandre- YiCTOR-
Papacino d* ) , directciu" de l'école
royale d'artillerie du roi de Sardaignc,
iiaquitleioniai 1 7 i/j, à Ville-Franche,
danslecomie'delNice ,oiJ son pèreclait
capitaine du port. Le nom de d'ANxoM,
sous lequel il est plus connu, est celui
de sa mère, qu'il ajouta au sien. 11
entra au service à l'âge de dix-huit
ans, dans le corps d'artillerie, et s'é-
leva au grade de capitaine ; il fut même
employé dans quelques négociations
«léiieates; mais, au milieu des camps et
des fatigues militaires, d'Autoni trou-
va le temps de s'occuper aussi des
e'iudes théoriques relatives à son art,
et se lia avec ceux qui pouvaient lui
fournir des lumières. 11 gagna surtout
l'estime du comte Beitola, directeur
des écoles d'artillerie qui venaientd'ètre
fondées à Turin, en 1759. D'Antoni
fit tant de progrès en ce genre, qu'en
1755, il fut nommé lui-même direc-
teur de ces écoles. C'est en cette qualité
qu'il composa son Cours de mathéma-
tiques , d'artillerie et d'architecture
militaire {Iruduit en français par Mon-
truzard , 1777, in-S". ). H fut aidé,
dans quelques parties , par Tignola et
Kozzolino, ofFiciers de son corps, et
]iar lîana , architecte et professeur aux
mêmes écoles. Ce Cours a été adopté
fiour l'enseignement dans les écoles
d'artillerie de Prusse, de Venise, etc.
l)'" toutes Us parties qui le composent,
< elle qui fit le plus d'honneur à d'Auto-
ni, c'est VE saine délia Polvere, ou-
vrage qui renferme un grand nombre
d'expériences originales sur la force et
b'5 effets delà poudre à canon. Ce livre,
traduit en plusieurs langues ( en fran-
t;ais, par Flavigny, 1778, in-8". ),
lui acquit une brillante rcpulaliouchcz
ANT
l'étranger. L' Uso delV armi dafuocn,
traduit aussi en français par St.-Aii-
ban, et en Anglais, eu est comme un
supplément. Dans un moment où les
nouvelles connaissances mécaniquesct
physiques, qui commençaient à se ré-
pandre, excitaient partout le goiît des
recherches sur la théorie de l'ailillerie ,
les artilleurs piémontais se distinguè-
rent par les travaux les plus étendus et
les plus profonds. Un grand nombre
d'expériences furent faites par ordre
du gouvernement, et sous la direction
des colonels d'artillerie, et en particu-
lier de M. de Viucenti. Ce sont ces
expériences qui ont servi de base aux
deux ouvrages de d'Autoni. « On sera
» sans doute étonné, dit avec raison le
» savant traducteur franç.iis , du nom-
» bre et delà variété desdillerentes es-
» périences qui ont été faites en grand
» sur chacun des objets j de la rigueur,
» de la précision et de l'exactitude qu'un
» a employées, afin de pouvoir asseoir
» sur leurs résultats des jugements posi-
» tifs, irrévocables et sans l'etour ». H
ne paraît pas que d'Antoni connût d'au-
tres ouvrages modernes sur son art
que celui deRobins( New Principlcs
of Gunnerj ). 11 ne le cite même pas ,
mais il le réfute plusieurs fois indirecte-
ment. Au reste , outre les choses tout-à-
fait nouvelles que son ouvrage contient,
il a encore rectifié quelques-uns des ré-
sultats de l'auteur anglais. D'ailleurs ,
ses jirincipcs se trouvent assez d'accord
avec les expériences qui furent faites
en France vers le même temps , et qui
n'étaient pasencore connues, lorsqu'il
écrivait. Un trouverait même bien peu
de choses à changer dans la partie qui
tient à la chimie, quoique l'auteur fût
étranger à cette science , et que la
théorie des gaz n'eût pas encore été
éclaircic; les dernières exjiériences
de INI. de Rumfort confirment en par-
ticulier ce qu'avait dit d'Autoni sur la
ANT
part qu'ont les vapeurs dans la force
de la poudre. Le roi de Sardaigne ré-
compensa le me'iile de d'Anioiii par
miecominaiiderie des ordres réunis de
Saint-Maurice et de Saint-Lazare : il lui
confia, en 1783, la direction supé-
rieure de tout ce qui appartient à l'ar-
tillerie. L'année d'après, il le nomma
lieutenant-gcne'ral. D'Antoni mourut
If 7 de'c. 1 78G , regrette de tous les ar-
tilleurs dont il était le maître et le père.
Ses Principes fondamentaux de la
construction des places avec un nou-
veau système de fortifications , ont
ëtc traduits en français par Flavigny,
1.77 5. La Fie de d' Antoni a cié écrite
par M. de Balbe, en 1 79 1 , et insérée,
en i8o5, dans les Mémoires de l'a-
cadémie des sciences de Turin, dont
d'Antoui était membre. B — be.
ANTONIA, vestale ( r.CLAUDiA\
ANTONIA , seconde fille de Marc
Antoine le triumvir , et d'Octavie pre-
mière , épousa Drusus , fils de Tibère-
Claude Néron et de Livie. Elle se dis-
tingua par des vertus dont son père
ne lui avait pas donné l'exemple , mais
qui furent rcj-roduites par Germanicns
son fils. Ce fut elle qui informa Tibère
des trames de Séjau, par une lettre
que lui porta l'alFranclii Pallas. Elle
vit régner Galigula son pelit-fils. Ce
fou , dans un de ses caprices , lui fit
donner le nom d'Auguste, et décerner
tous les honneurs qui avaient été pro-
digués à Livie. Bientôt il l'abreuva de
tant d'humiliations et de dégoûts, qu'il
la foi'ça de mettre fin à ses jours , s'il
ne l'empoisonna pas , comme on l'a
dit. Elle mourut l'an 37 ou 38 de
J.-C. Q— R— Y.
ANT0NL4N0 ( Silvio ) , cardinal ,
originaire de Castello dans l'Abruzze,
au royaume de Naples, et né à Rome,
d'un marchand de draps et d'étoffes
de laine, le 3i décembre i54o. Il
montra, dans sou enfance, des dis-
ANT
285
positions singulières pour les lettres,
mais surtout pour la poésie et la mu-
sique. A 10 ans , il jouait parfaitement
de la lyre , et il s'accompagnait en
chantant des vers, qu'il improvisait
sur toute sorte de sujets, et dans toutes
les mesures et toutes les formes de la
poésie italienne. On l'appelait ilpoeti-
710 ( le petit poète). Sa réputation nais-
sante le fit prendre en amitié par un
cardinal , dont les bienfaits le mirent
en état de continuer ses études , et de
se rendre habile dans les langues
grecque et latine. Il n'en cultivait pas
moins sou talent d'improvisateur; on
rapporte des preuves étonnantes de
ce talent, données dans des occasions
heureuses, qui le fiient connaître avan-
tageusement des princes de la cour
romaine , entre autres du cardinal
Jean-Ange de Médicis, qui se souvint
de lui lorsqu'd fut devenu pape , sous
le nom de Pie IV. Avant cette époque,
le duc de Ferrarc , Hercule II , fut
tellement ravi, dans un voyage qu'il
fit à Rome, de la poésie, du chant ,
et du talent de toucher la lyre du
jeune Anloniano , qu'il l'emmena avec
lui à Ferrare , d'oîi le cardinal d'Est ,
frère du duc, le conduisit à Venise.
Il y donna de nouvelles preuves de ses
talents devant les assemijleVs les jjIus
imposantes et les plus nombreuses.
De retour à Ferrare , et n'ayant encore
que seize ans , il obtint du duc une
chaire publique de belles-lettres , qu'il
remplit avec un grand concours d'au-
diteurs. Conduit à Florenge peu de
temps après , par le prince Alphonse
d'Est , il y eut les mêmes succès qu'à
Venise. Varclii en paiie, avec la plus
grande admiration , dans son Erco-
lano. Ce fut alors que le duc Hercule II
étant mojt, Antoniano fut appelé à
Rome , en 1 5^9 , par Pie IV. Ce pape
le donna pour maître, et pour secré-
taire des lettres latines, au cardinal
s8G
ANT
Charles Bonome'c , avec qui il se ren-
dit à INIilan. H rédigea les actes du
coucile qui s'y tiut, étendit beaucoup
le nombre de ses amis et de ses pro-
tecteurs. Ramené' à Rome par le car-
dinal , il tut nomme par le pontife, pro-
fesseur de belles-lettres au collège de
]a Sapieuce. Ses leçons curent tant
n'e'clat , -que le jour où il commença
«.l'expliquer le discours de Cice'ron
pour Marcellus, il avait vingt -cinq
cardinaux pour auditeurs. Il fut un
.les membres les plus distingues de
l'académie dn Vatican , institue'e par
le cardinal Borrome'e ; il en fut même
■j)rcsident, lorsqu'il n'avait encore que
vingt ans. Bientôt il quitta prcsqu'cn-
ticrement les lettres humaines ])our se
livrer tout entier à l'étude de la phi-
losophie , de la théologie et des Pères.
Ayant été ordonné prêtre en iSO^, il
fut nommé , peu de temps après , se-
crétaire du sacré collège ; les papes
Grégoire XIII et Sixte-Quint , lui con -
fièrent plusieurs missions et divers
travaux , dont il s'acquitta toujours
avec succès; Grégoire XIV voulut le
nommer à trois évêchés , qu'il refusa
successivement. Enfin , Clément VIII
le fit chanoine de la basilique du Va-
tican, et ensuite cardinal, le 5 mars
iSgS. 11 mourut à Rome le i5 août
i6o3. Ses ouvrages imprimés sont :
I. Dell' Educazione Cristiana de'
Fis,Uuoli lihri trè , Vérone , 1 584 ?
in-4". , réimprimé à Crémone et en-
•suite à Naples. 11 composa cet écrit
à la demande du cardinal Borrome'e ,
lorsqu'il lui était attaché. II. Orationes
ircdecim , publiées pour la première
fois après sa mort, Rome, iGio,
i^i-4". , pai' Joso])h Castiglione , qui y
a joint la vie de l'auteur. III. Plusieurs
discours , dissertai ions , lellros et mor-
ceaux de poésie , tant latine qu'ita-
lienne , imprimes dans dillérents re-
«iieils. G — i.
ANT
ANTONIA^US (Jean), domini-
cain de Nimègue , mort en i588 ,
était versé dans les écrits des Pères
de l'Église , et on a de lui quelques
éditions de leurs ouvrages les moins
connus. Voici celles que lui attribue
Harzlieim , Bibl. colon. , p. 1 5g : I. Li-
ber D. Grcgorii Ep. Nrsseni Ds
creatione IJomùds , Supplementum
Hexœmeri Basilii Magrd, interprète
Dionjsio Romano exigiio, nunc pri-
jnum typis excusas , Cologne, i557,
in-fol. ; II. D. Paulini Nolani quot-
qiiot cxslani opéra omnia , H. Grœ-
vii studio restilula et ilL, Cologne,
i56o, in-8'. ; III. Epistolajwn D.
Hieroaymi Decas I. , ub Henr. Gnc-
vio priorc quondam sua recensiia
et illustrata, Anvers , i568, in -8'. ;
Joclier lui attribue encore l'édition de
Gregorii AWsseni Ub. de philoso-
pjdâ, et vijstica mosaicœ xntœ nar~
ratio , du même; Basilii magni. Tr.
de differentid usics et hjftostasis ;
Gregorii Nazianz. or. in. laudein
Gregorii A^jsseni, et un' sermon du
Jiiêine : De moderandis disputalio-
nibus. S — B.
ANTOMDES Nerdenus ^He>ri>,
de Naerdcn , près d'Amsterdam , né
en i546, mourut en i6o4. On a de
lui un Srsteina theologiœ , Frane-
kerae , i G 1 5 , in - 4". , et Initia aca-
demiœ Franekerensis , ib. iGi5 ,
ia-4 '. Il s'appelait aussi Henr. An-
TONILS VAN DER LîNDEN. LcspcrsécU-
tious du duc d'Albe, qui fit périr son
père et une grande partie de sa la-
millc , dans le massacre de Naerden ,
l'avaient forcé d'émigrcr dans sa jeu-
nesse. La préface de son Systema iheo-
logiœ contient des renseignements
précieux sur les commencements de
la réformation dans les Pays-Bas.
S— R.
AN TO NI DES ( Jean } van dei;
Ll>Dt.N. Foj, LlNDEN.
ANT
ANTON IDES (Jean), appelé
Alcrmarianus, d'Alckmar, son lieu
de naissance , savant orientaliste. On
lui doit : Epistola Pauli ad Titiim ,
Arahicè, cum Jo. Anton, interlineari
versione latind ad verbiim , Antv. ,
i6i'j, in-4°. On ignore les années
dé sa naissance et de sa mort. S — R.
ANTONIDES ( Théodore ) , théo-
logien hollandais du commencement
du 18". siècle. 11 a donné des com-
racntaii-es en langue hollandaise, sur les
Epilres de S. Jacques , S. Pierre et
S. Jade , et sur le Livre de Job. Il
était partisan de l'interprétation mys-
tique (Voy. fValch , Biblioth. thebl. ,
t. IV, p. 487 , 745 ^^ 7S3> ii — R.
ANTONIDES ( Jeak) , surnommé
VAN DER GoEs , à causc dc la ville du
même nom , en Zélande , où il na-
quit, en 1647 ' ^'^ parents peu for-
tunés. A l'âge de neuf ans, son père le
mit à l'école latine d'Amsterdam, où
il étudia sous les plus fameux maîtres.
Le goût de la poésie semblait héré-
ditaire dans sa laraille ; car son père ,
sans avoir fait aucune étude , la cuUi-
vait avec beaucoup d'ardeur. Les pre-
miers essais d'Antonides furent des
imitations d'Horace , d'0\Tide et de Sl-
lius Italicus. Il composa ensuite une
tragédie intitulée : Trazet, ou la Chine
. envahie , dont Vondel , poète célèbre
de ce temps, fut fort coulent. Les élo-
ges d'un homme du mérite de Von-
del étaient faits pour encourager le
jeune poète ; aussi , après quelques
pièces plus ou moins bien composées ,
il donna , en 1G7 i , l'ouvrage que les
Hollandais estiment le plus , et qui est
intitulé: 1^5froom, c'esl-cà-dire , la
rivière de V Y , k Amsterdam. La
description de celte rivière , ou plutôt
4e ce lac , est le sujet de ce poème ,
divisé en quatre chants. Dans le pre-
mier, le poète fait une pompeuse des-
criptiou do tout ce qui est remarqua-
A N T 087
ble sur la rivière de l'Y , où Amster-
dam est bâti j dans le second , il com-
mence par les éloges de la navigation ,
et décrit les flottes nombreuses qui
couvrent l'Y , comme une immense
forêt , et de là , vont dans chaque par-
tie du monde pour en rapporter tout
ce qui peut satisfaire les besoins, le
luxe ou la vanité des hommes ; dans
le troisième, le poète se suppose trans-
porté à la source de la rivière de l'Y; il
y voit les divinités aquatiques qui, ac-
compagnées de demi-dieux et de nvm-
phes , se parent pour aller à une fcte
qui doit être célébrée à la cour de
Neptune ; dans le quatrième livre , il
décrit l'autre rive de l'Y, où s'élèvent
plusieurs villes de la Nord-Hollande ,
et , à la fin du poème , il s'adresse aux
magistrats d'Amsterdam, et attribue à
leur sagesse la prospérité de cette
ville. Ce poème , où il y a de grandes
beautés , excita l'admiration générale.
Plusieurs personnes s'intéressèrent vi-
vement à l'auteur, qui n'avait encore
que vingt-quatre ans , et qui était dans
la boutique d'un apothicaire. Ils lui
firent étudier la médecine à Utrecht,
où il fut promu au grade de docteur ,
en 1675. Pendant son séjour à Ams-
terdam, il avait été membre de la so-
ciété des artistes , et il avait eu part à
la composition de plusieurs pièces ,
notamment du Roi d\4lbe, à! Oron-
date à Siatire , etc. Un de ses pro-
tecteurs le plaça ensuite avantageuse-
ment dans l'amirauté, ce qui procura
à Antonides le moyen de se Uvrer com-
modément à son penchant naturel. Il
projeta alors un grand poème , qvù
devait se composer de douze livres ,
et contenir les actions mémorables de
S. Paul , l'apotre ; mais il fut enlevé
aux lettres, en 1G84, dans sa trente-
huitième année. Les plus fameux poètes
de son temps firent des élégies sur
cctle mort prématurée. La collection
28S A N T
de ses œuvres a été imprimée à Ams-
terdam , en I 7 1 4 •. iii-4"' ij — g.-
A^'T0^'1LES (Joseph), peintre,
né à Se'vilie , eu ib56 , apprit dans
celle ville les cléments de la peinture,
et alla ensuite à Madrid pour se per-
fectionner, Ce fut surtout dans le pay-
sage qu'il excella ; il avait un bon choix
de sirjcls , sa touche était spirituelle et
légère ; il s'exerça aussi , mjis avec
moins de succès , dans les sujets de
dévotion et dms le portrait. Alcala de
Hénarrz et Madrid possèdent quel-
ques talileaux de cet artiste , qui mou-
rut dans cette dernière ville , en 1(376,
âgé de quarante ans. D — t.
ANTONIN ( Titus Aurelius Ful-
V1US AlNTOKlNUS Plus, CODOU SOUS le
nom d' ) , tirait son origine de Nisraes ,
et naquit à Lanuviuni ou Lavinium ,
dans la campagne de Rome, le 19
septembre de l'an 86. Sa famille,
uoinmce -Aurélia, était très-ancienne;
mais elle n'avait été honorée de gran-
des charges que depuis peu de temps.
Il dut le jour à Aurelius Fulvius , per-
soimagc consulaire, et à Arria Fadilla.
Dès son enfance, la douceur de son
caractère le rendit cher à ses j)arents ,
et tous l'ayant choisi pour héritier,
il devint possesseur d'une fortune con-
sidérable. Sa naissance et les amis
que lui acquirent ses vertus, lui firent
J)ientôt posséder des charges honora-
bles. L'an i'.).o, il parvint au consulat,
et fut choisi par Adrien pour l'un des
quatre personnages consulaires entre
lesquels fut partagée la suprême magis-
trature de l'Italie. Il devint ensuile
proconsul d'Asie, et surpassa dans
cette dignité la réputation qu'y avait
acquise son grand-père Arrius, ami
de Phne le jeune. De retour à Rome ,
Antonin oljtint I.» confiance d'Adrien ,
et fut admis d:ins le conseil de ce
prince , où il inclina toujours pour les
mesures de douceur. Ayaut épouse
ANT
Faustine, fille d'AnniusVcrus, il évita
tout scandale public dans sa manière
d'agir envers cette femme , dont la
conduite licencieuse a déshonoré la mé-
moire. Il eu eut quatre enfants, dont
trois moururent dans un âge peu avan-
cé. Faustine , dite la jeune , qui sur-
vécut à ses deux frères et à sa sœur,
devint l'épouse de Marc-Aurèle. Ce ne
fut pas sans quelque résistance qu'An-
tonin consentit à être adopté par
Adrien. Il redoutait de se charger du
fardeau de l'empire , et hésistait à sous-
crire aux conditions de l'empereur,
qui l'obligeait d'adopter L. ^ érus et
M. Annius Vécus, depuis si connu sous
le nom de Marc Rurale. 11 y consentit
enfin , et, en i58, année même de
son adoption , il parvint à l'empii e ,
aux acclamations des Romains. Sous
ses lois, l'état jouit d'une tranquillité
qui fournit peu de faits à l'histoire.
D'ailleurs , il ne nous reste , sur le
règne de ce prince , que sa P^ie, com-
posée sans méthode et avec beau-
coup de confusion , par Julius Capito-
linus. Ce que Dion Cassius eu avait
écrit est perdu. Au reste, il demeure
constant que le sénat joignit aux hon-
neurs ordinaires qu'il lui déféra, le
surnom de Pins , qu'Antonin méiita,
dans quelque sens que l'on prenne la
signification de ce mot, par son res-
pect pour la religion , et par son atta-
chement pour ses parents. Pausanias
dit à ce sujet qu'Antonin méritait non
seulement ce surnom , mais encore
celui de Père du genre humain, au-
trefois décerné à Cyrus. Dès le com-
mencement de son règne , il signala
sa clémence, lors des conspirations
qui curent lieu contre lui. Quoiqu'il
ne put empêcher la jusUce d'atteindre
les principaux coupables , il défendit
qu'on recherchât leurs complices . et
prit sous sa protection spéciale le fils
d'Atiilius, uu des couspirateurs. Ses
ANT
lîeutetiants apaisèrent quelques Sou-
lèvements qui s'élevèrent dans diver-
ses parties de l'empire. Dans laGrande-
Eretagnc, les incursions des Brigantes
furent réprimées , et les limites de
l'empire romain étendues par la cons-
truction d'un nouveau mur , au nord de
celui d'Adrien, depuis l'embouchure de
l'Esk jusqu'à celle de la Tweed. En
général , le règne d'Antonin fut extrê-
mement pacifique , et il mit en prati-
que ce beau mot de Scipion , qu'il ré-
pétait souvent : « J'aime mieux con~
1) server les jours d'un seul citoyen ,
» que de faire périr mille ennemis. )>
11 donnait tout son temps au gou-
vernement de ses états, étendant ses
soins jusque sur les contrées les plus
éloignées, et s'occupant surtout de
rendre ses peuples heureux. Il aimait
à rendre compte au sénat des motifs
de ses actions. En plus d'une occa-
sion , il fit paraître la douceur de
son caractère. Lorsqu'il était pro-
consul en Asie , il logea dans la maison
du sophiste Polémou , alors absent.
Celui-ci étant survenu, s'en plaignit
avec tant de violence , qu'Antonin sor-
tit aussitôt et alla , au milieu de la nuit,
chercher un autre logement. Lorsqu'il
fut empereur , un comédien vint se
plaindre à lui de ce que le même Po-
lémon l'avait chassé du théâtre en plein
midi, et ajouta qu'il en appelait à sa
justice. « Il m'a chassé à minuit, ré-
» pondit Antonin , et je n'en ai point
» appelé. » Il fit venir de Chalcis à
Rome le philosophe stoïcien Apol-
lonius, pour être précepteur de Marc
Am-èle. ( F. Apollonius de Chalcis ).
Par son ordre, l'infâme classe des déla-
teurs fut anéantie ; et , ainsi , jamais
les condamnations ni les confiscations
ne furent plus rares que sous son rè-
gne. Plusieurs calamités publiques,
telles que des disettes, des inonda-
tions , des incendies et de$ tremble-
ANT 289
ments de terre, affligèrent ses peu-
ples j sa bienfaisance et sa libéralité
réparèrent ces malheurs autant qu'il
était possible. Attentifs ne point fouler
le peuple, il ne fit jamais de voyages
lointains. Cette manière de penser le
rendait économe des revenus publics
et prodigue de son patrimoine. Il en
donna la preuve en payant de ses
propres deniers , et malgré l'opposi-
tion de sa femme , un don qu'il avait
promis au peuple lors de son adop-
tion. Son économie et son esprit de
justice le portèient à supprimer plu-
sieurs pensions mal à propos accor-
dées ; toutefois il ne connaissait ni l'a-
varice ni la cupidité , et il dépensait
volontiers des sommes considérables
jiour tout ce qui pouvait servir à l'or-
nement ou à Tutifité de l'empire, ainsi
qu'aux plaisirs du peuple. Le plus re-
marquable des édifices qu'il fit élever
à Rome fut un temple en l'honneur
d'Adrien. On pense que c'est à Anto-
nin que Niiiies , patrie de ses aïeux,
doit son amphithéâtre et le magnifique
aqueduc connu sous le nom de Pont
du Gard. Antonin rendait lui-même la
justice, et, parmi plusieurs décrets re-
marquables , on cite de lui les trois sui-
vants. Il ne voulut pas qu'un accusé
acquitté pût être poursuivi de nou-
veau pour le même fait. Il défendit
qu'on déshéritât , comme auparavant ,
au profit du trésor public, les enfants
de ceux qui avaient été reconnus ci-
toyens romains. Enfin , il permit aux
femmes , accusées d'adultère , de de-
mander qu'on examinât la conduite
de leurs maris. 11 donna aussi des
édits en faveur des chrétiens , pour
les soustraire à des injustices légales
et aux fureurs populaires. Un de ces
édits se trouve dans l'Histoire ecclé-
siastique d'Eusèbe: cependant, quel-
ques critiques l'attribuent à Marc-
Aurèlc. Il est adressé au peuple de
19
^go A N T
l'Asie mineure , et rond hommage an
caractère des clire'ticns. Quelques rois
voisins des frontières de l'Empire
Tinrent visiter AutOnin; d'autres lui
envoyèrent des ambassadeurs , et
le firent arbitre de leurs différends.
Une seule lettre de sa main suffit
Î)our détourner le roi des Parthes de
"aire la guerre aux Arme'niens , et,
sur sa recommandation , les Lazes ,
peuples delà Colcbide, choisirent Pa-
çorus pour leur roi. Dans sa vie pri-
Te'e , il e'tait frugal , modeste , et rien
ïi'alle'rait la sérénité' de son caractère.
Peut-être , comme on l'a déjà indi-
qué, fut -il trop indidgcnt envers
«on indigne épouse , Faustine ( Voy.
Fa u s t I n e ). Peu de temps après
son avènement au trône, il manifesta
son estime pour les vertus de Marc
Aurèle , eu lui faisant ëpouser sa fille
Faustine , et en le déclarant César.
Dans la suite , il accumula sur lui
toutes sortes d'honneurs , et fut payé
de retour par la plus profonde sou-
mission, et une tendresse vraiment fi-
liile. Marc Aurèle ne le quitta point, et
partagea avec lui tous les soins du gou-
vernement, sans qu'aucun d'eux eût
jijmais la nioindi'e défiance de l'au-
tre. Aiitouin était parvenu à l'âge de
•j4 ans et demi, lorsqu'au mois de
mars i6i de J.-C. , il fut attaqué,
dans sa campagne de Lori , d'une
fièvre dont il prévit bientôt le fatal
résultat. Il fit venir les grands ofii-
ciers de l'empire , et , en leur pré-
sence , choisit pour son successeur
]\Iarc-Aurè!e , à qui il fit porter les
ornements impériaux. 11 eut ensuite
le délire, et en cemomentmême, on
vit combien cet excellent prince avait
à cœur la félicité de ses peuples. Il
mourut après un règne de vingt-trois
ans : ses cendres furent placées dans
le tombeau d'Adrien , et le sénat lui
decenw «nanimement les honneurs
divins. Tout l'empire pleura saperîe,
comme une calamité publique. Une
des plus fortes preuves de l'extrême
vénération que son nom inspirait, fut
que, pendant un siècle, tous les em-
pereurs prirent le surnom à'Anlo-
nin, comme étant celui qui pouvait
les rendre le plus chers au peuple.
Marc Aurèle et le sénat consacrèrent
à sa mémoire une colonne entourée
de bas-reliefs. Elle subsiste encore ,
et porte le nom de Colonne Auto-
mne; mais on a substitué la statue de
S. Paul à celle de ce prince , qui était
placée au sommet de ce beau monu-
ment. Nous avons quelques Haran-
gues publiées sous le nom d'Antonin ,
mais on doute qu'il en soit l'auteur.
Il n'est pas non plus constant qu'il soit
auteur de Y Itinéraire qui porte sou
nom , et oii l'on trouve les routes
militaires des Romains. Ou attribue
aussi cet ouvrage à Marc-Aurèle , et
même à Caracalla , aussi bien que
ïlter Brilanniciim. 11 serait plus na-
turel de croire qu'ils auront été rédi-
gés par ordre de quelqu'un de ces
empereurs. Quoi qu'il en soit , tous
deux sont utiles pour l'étude de la
géographie des anciens. D — t.
ANTONIN. For. Marc-Aubèle.
ANTON IN de Forciglioni ( S. ), ar-
chevêque de Florence , né dans cette
ville, eu 1 589, entra très-jeune dans
l'ordre de S. Dominique, ayant déjà ap-
pris par cœur, \e Décret de Gratien,
qui était alors le livre par excellence. 11
devint supérieur-général d'une nom-
breuse congrégation , qui avait em-
brassé une austère réforme, et parut
avec éclat au concile de Florence, où
il fut chargé d'entrer en controverse
avec les Grecs. Les Florentins ayant
demande, on i44^'i ^ Eugène IV,
un archcvê(juc pieux, savant, et leur
compatiiotc, afin qu'il connût les be-
soins du pays, et qu'il fût à même d'y
AXT
pourvoir, toutes ces quaUtes se trou-
vèreut re'unies dans la personne d'An-
tonin, qui fit d'inutiles efforts pour
se soustr.iire au vœu de ses conci-
toyens et aux ordres du pape. A peine
fut-il installe', qu'il retraça, dans sa
conduite, les vertus qu'on avait ad-
mirées dans les e'vêques de la pri-
mitive église. Austèie dans sa vie pri-
vée, simple dans son extérieur, en-
nemi des honneurs, attaché à tous
les devoirs de sa place , sou zèle et sa
cliaiilc ne connurent point de bornes,
surtout pendant la peste et la famine
qui affli(;èrent Florence, en i44^- Ce
fut au mi ieu de l'exercice de tontes
ies vertus pastorales, qu'il mourut,
en, 1459. Cosme de Me'dicis lui avait
donne loute sa confiance. Eugî-ne IV
voulut momir dans ses bras : Pie II
assista à ses funérailles, et Adrien VI
le mit , en 1 5^5 , au nombre des saints.
Les études de S. Antonin avaient eu
principalement pour objet l'histoire
ecclésiastique et la théologie. JNous
avons de lui : I. Historiarum opus
Iriiim partiiim historialium , seu
Chronica libri xxiv, Venise, i48o;
Nuremberg, j4B4; Bà'e, 149'» i"-
fol., 5 vol. L'édition de Lyon, en
1 5 J 7 , contient une lettre curieuse du
rabbin Samuel au rabbin Isaac , sur
les prophéties de X Ancien Testament
qui ont rapport à la destruction de la
loi judaïque. L'auteur montre de la
sincérité , de la bonne foi , mais man-
que souvent d'exactitude pour les
l'iits éloignés de son temps. 11. Sum-
ma theologice moralis partibus IF
distincla, Wnise , i477 ^^ '479 >
in-4 '. , 4 vol. ; Nuremberg , 1 47^> , 4
Tol. in-fol. ; Méming. , 1 485 ; 5trasb.
1 49>), in-4"-, 4 ^ol. ; Bàle, 1 5 1 1 , in-fol.
L'édition de Venise, i58.i, 4 "^ol.
in-4". 1 3 pour titre : Juris Pontijicii
et C-vsarœi summa , etc. Le P. Ma-
machi en a doniié une uouveile édi-
ANT ^91
tion, dans la même ville, en 1751 ,
4 vol. in-4''., 3V*^c des notes très-pro-
lixes. C'est le plus soigné des ouvrages
de S. Antonin : ou le consulte encore,
niais il faut du courage pour le lire.
IIL Summula confessionis , im])ri-
niée^peu de temps après l'uivention tle
l'imprimerie , en caractères gothiques ,
sous ce titre : Tractatus de inslruc-
tione , seu direclione simplicium
confessorum, in-fol., sans nom de
lieu, et sans date; en latin, sous le
titre de ConfessionrJe, Yenise, i473,
in-4".; ^" italien, Florence, i474
et 1479 1 in-8". Cet auteur a encore
composé un Traité de l'excommuni-
cation, des sermons, et quelques au-
tres ouvrages , dont plusieui'S sont res-
tés manuscrits. T — d.
ANTONIN - HONORAT , évêque
de Coustantine, ou de Cirthe, eu
Afrique, dans le S**, siècle, est prin-
cipalement connu par une lettre
adressée à Arcade , évcque espagnol ,
exiié par Gcnséric , avec trois autres
évèques de la même nation , pour
n'avoir pss voulu embrasser l'aria-
nisme. Cette lettre, destinée à les en-
courager au martyre , plutôt que de
renier leur foi , est remarquable par
la vigueur du style , par les pensées
vives et les raisonnements pressants.
Elle produisit son effet; car cesquatre
confesseurs de J.-C. souffrirent le
martyre, en 1457. Cette lettre leur
avait été envoyée deux ans aupara-
vant. On la trouve dans la Biblio-
thèque des Pères , et dans le Com-
mentaire de Don Ruinart , sur la
persécution des Vandales. T — d.
ANTONINA, femme de Bélisaire,
ét-iit fille d'un cocher du Cirque et
d'une comédienne. Ses mœurs répon-
dirent à cette basse extraction, et son
car;;ctère fut encore plus odieux que
ses mœurs : elle eut, néanmoins, l'art
de séduire Bélisaire , qui l'épousa vers
19..
af)3 A NT
r^n 5*27, an mèrae instant oùrinfàme
Tlicudoi'a s'unissait à Jiislinicn, qui
n'était encore que Cc'sar. Ces deux
femmes, destinées à ternir l'éclat de
deux grands noms, par l'ascendant
qu'elles prirent sur leurs époux, fu-
rent long-temps unies par l'intrigue,
la débauche et le crime. Antonina avait
été mariée une première fois , et Pho-
tius, né de ce mariage, était même
assez âgé pour servir sous son beau-
père, lors de la campagne d'Italie.
Aetonina suivit toujours Bélisaire dans
ses expéditions, et quelquefois elle
lui rendait des services essentiels, par
son activité, son audace, son zèle à
solliciter les renforts et les secours dont
il avait besoin. Mais , sans respect pour
les vertus et la gloire de cet homme
illustre, elle se livrait à tous les dé-
sordres. Un jeune Thrace, nommé
ïhéodosc , qu'elle traînait effronté-
ment à sa suite, fut plusieurs fois sur-
pris jusque dans ses bras. Antonina
.se justifia avec audace auprès d'un
époux trop faible, et poursuivit avec
acharnement les indiscrets témoins de
sa conduite. Ce fut ainsi qu'elle irrita
EéHsaire contre un officier, nommé
Constantin , dont elle obtint la mort
pendant le siège de Rome. Excitée par
l'impératrice Théodora, elle contriljua
pareillement aux persécutions dirigées
dans le même temps , contre le pape
Silvère. Sa lubricité n'épargna pas
même son propre fils Photius , qui ,
honteux de cette infâme passion, en
instruisit Bélisaire. Tous deux jurèrent
de punir Antonina . dont un eunuque
leur révéla tous les désordres. Celle-ci ,
accoutumée à faire tète aux orages de
ce genre, trouva un appui dans l'im-
pératrice Théodora. Bélisaire fléchit
encore devant l'audace de sa femme;
elle se fit rendre le Thrace Théodose,
que Photius avait fait enfermer par
nu acte arbitraiic, dont elle se vengea
ANT
bientôt, en faisant infliger la torture h
ce même fils, que sa jeunesse, la fai-
blesse de sa constitution, et la toge
consulaire , ne purent sauver des
cruautés d'une mère implacable. Elle
le fit jeter ensuite dans un cachot , d'où
il s'échappa trois ans après, pour se 1
réfugier dans un cloître, où il prit "
l'habit monastique. Antonina éprouva
néanmoins, de la part de Théodora,
des contradictions qu'elle ne puté\'iter,
et elle fut forcée de donner en mariage
sa fille Joanine à un petit-fils naturel
de l'impératrice; mais, après la mort
de cette princesse, elle fit casser cette
union, qui blessait sa fierté. Enfin,
son âge, et la disgrâce de Bélisaire, la
firent disparaître peu à peu de la scène.
Après la mort de son époux , arrivée
vers l'an i iG5, on lui rendit une par-
tie de ses biens, qui avaient été con-
fisqués , et elle chercha à expier sa vie
criminelle , en fondant un couvent.
L'époque précise de sa mort n'est pas
connue. L — S — e.
AN TONINI( Joseph), fils d'Al-
phonse Antonini , baron et seigneur ti-
tulaire d'une terre située dans la pro-
vince de Salerne, fit ses études à Na-
ples , au commencement du 1 8 ". siècle,
se livra particu'ièrcment à l'étude des
lois, et fut employé dans plusieurs pro-
vinces du royaume , en qualité d'audi-
teur et de juge fiscal , sous l'empereur
Charles VI. Ce fut alors qu'il écrivit
une Histoire complète de la Lucanie,
imprimée ensuite à Naples. On y a
aussi imprimé des lettres du même au-
teur, contenant des observations géo-
graphiques, adressées à INIatleo Egizio,
qui avait fait quelques corrections à la
Géographie de Lenglet. Los réponses
d'Egi'ào sont jointes à ces lettres. Ce
fiit Joseph Antonini qui fit présent au
grand-duc de Florence, Cosme III ,
du manuscrit très-précieux du Traite'
de François Philclphc De exilio, qui
ANT
s'était conserve dans l'ancienne biblio-
thèque de sa famille. G — e.
ANTON INI ( Annibal ) , frère du
préiédent, et plus connu que lui en
France, naquit dans la terre de son
père, près de Salerne , en i^ci-Il fit
à Naplos nne partie de ses e'tudes , sous
la direction de son frère Joseph : après
les avoir achevées à Rome , il voyap;ea
en Augleteife, en Hollande, en Alle-
magne , et définitivement en France ,
où il se fixa. Il enseigna pendant près
de vingt-cinq ans, à Paris, la langue
italienne , retourna ensuite dans sa pa-
trie , et y mourut au mois d'août i 'jj5.
Pendant son séjour à Paris , il y a pu-
blié : I. Dizionario italiano, latino e
francese ; francese , latino ed ita-
liano, imprimé, pour la première fois ,
en 1755, '1 vol. in -4'., réimprimé
plusieurs fuis , et le meilleur que l'on
ait eu pour les deux langues ( française
et italienne ) , avant celui d'Alberti ;
II. Grammaire italienne, 1726,
in-i2 , et i7'.),9, id.; III. Distinta
descrizione de' contorni di Pariai ;
IV. Traité de la prononciation Jran-
çaise ; V. on lui doit de ])lus de
bonnes éditions italiennes de l'Iialia
Uberata del Trissino,des poésies de
Jean de la Casa , de l' Orlando Furio-
so , de rArioste;de la Gerusalemme
Uberata , et àeV Aminta, du Tasse, et
un Recueil ou Choix de poésies ita-
liennes , de divers auteurs , lait avec
goût, 170,9, en 2 vol. m- 12. G — e.
ANTONINUS LiBERALis, écrivain
grec, qui vivait , à ce qu'on croit , sous
le règne des Antonins , vers l'an i5o
de J.-C. Nous avons de lui un Recueil
de Métamorphoses , en 4i chapitres,
recueillies de différents auteurs, et écri-
) tes avec assez d'élégance. La meilleure
j édition de cet ouvrage est celle qu'en
â donnée H. Verheyck, en grec et
en latin , avec ses notes et celles
de Munckerus , Lugduni Batavo-
A N T 293
rura, 1774j in-S". Cette édition a été
réimprimée sans la traduction latine ,
à Leipzig, 1791 , in-S".; mais les notes
de Munckerus et celles de Verheyck
ont été tronquées , quoiqu'on annonce
qu'elles sont entières. Un nouvel édi-
teur fera bien de profiter des variantes
du manuscrit du Vaticati , apporté à la
Bil)liothèque impér. , variantes que le
savant M. Bast a publiées, avec ses re-
marques , dans sa Lettre critique a M.
Boissonade , Paris , i8o5 , in-S"., et
traduite en latin , avee beaucoup d'aug-
mentations, Lips. 1809, iu-8\ C — R.
ANTONIO (Nicolas), né à Sé-
ville , en 1617 , y fit ses humanités
et sa philosophie chez les domini-
cains , et alla achever ses études à
Salamanque, souslesplus célèbrespro-
fesseurs , entre autres sous D. Fran-
çois Ramos del Manzano. Il revint à
Séville , où, plongé dans l'étude, il
passait tout son temps dans le couvent
des bénédictins. Benoît de la Serra ,
abbé de ce monastère, y avait rassem-
blé une riche bibliothèque. Ce fut là
qu'il composa sa Bibliothèque espa-
gnole. Son ouvrage était très-avancé,
et il le porta à Rome, lorsqu'cn 1659 ,
il y fut envoyé par Philippe IV, avec le
titre d'agent-général des affaires con-
cernant la couronne d'Espagne , les
Deux-Siciles et l'inquisition. 11 occupa
cette place pendant vingt-deux ans.
Charles II le rappela à Madrid et le
fit entrer dans son conseil. Malgré
les fonctions qu'il avait remplies ^
Antonio , qui distribuait ses biens
aux pauvres, se trouvait dans le be-
soin ; et ce fut sans qu'il l'eût de-
mandé , que le pape Alexandre VII lui
donna un canonicat àSéville, sur la
recommandation du cardinal d'Ara-
gon. Antonio mouiut à Madrid, en
1684 , chevalier de l'ordre de S. Jac-
ques, Ou prétend qu'on trouva dans
ses papiers un brevet de membre du.
304 A IV T
conseil suprême de justice : il est cer-
tain cependant qu'il n'exerça pas cette
charge. On a de lui : I, De exilio, sive
de exila pœnd aritiqud et noi'd, ex-
sulumque conditione etjnribus , libri
ires, Anvers, 1641 , in-fol,; i65(),
in-fol. , Seelcn qui cite la première édi-
tion, dit que l'auteur n'avait que vinet-
Irois ans lorsqu'il coraposa cet ou-
vrage très - estime'. II. Bihliotheca
Hispana nova , seu Uispanornm
qui sive latind aut popidari , sive
alid qudvis lingiid scripto aliquid
cousignaveruTit, Rome, iG-ri , 2 vol.
in-fol. ; nouvelle édition donnée par
François Ferez Bayer , de Valence :
Madrid, Ibarra , 1785, 2 vol. in-fol.
Antonio, suivant l'usage de son temps,
a rangé les auteurs dans l'ordre al-
phabétique de leurs prénoms. C'est
peut-être un défaut; pour v remé-
dier, il a multiplié les tables. La pre-
mière donne les noms de famille; d.nis
la seconde, les auteurs sont classés par
pays ; la troisième est consaci'ée aux
ecclésiastiques séculiers ; la quatrième
aux ecclésiastiques réguliers; li cin-
quième les distingue par leurs emplois
ecclésiastiques; la sixième par leurs
emplois civils ; la septième est une
table systématique; on v voit que cent
soixante auteurs espagnols ont écrit
sur Yimmncidée conception de la
Fierge. III. Bihliotheca Hispana
velus complectens scriplores qui ab
Oclaviani ^^ugusti imperio usque
ad anmim M , jloruenint , Rome ,
i()Ç)6, 2 vol. in-folio. Le titre con-
tient nue grosse faute d'impression ,
en annonçant que l'on y psrle des
auteurs , depuis le règne d'Auguste
jusqu'en l'an i\I ( 1 000 ) ; il faut lire :
M. D. (i5oo). Antonio n'avait pas
laissé à ses héritiers de quoi faire im-
priiner cet ouvrage ; le cardinal d'A-
gnirre en fit les frais , et confia la
direction de l'éditiou à Emmanuel
A NT
Mars , savant Valencjen, Les auîrm-s
y sont rangés par ordre chronologi-
que ; les tables y sont aussi miihi-
])liées. La Bihliotheca zzot'rt, quoique
publiée la première, n'est que la suite
de la Bihliotheca r>etus , qui a été
réimprimée aussi par les soins de
Bayer, IMadrid , Ibarra , i 788, 2 vol.
in-fol. Ces deux ouvrages sont con-
nus sous le nom de Bibliothèque es-
pagnole. Baillet ne faisait pas de dif-
ficulté de les préférer à tout ce qui
avait paru dans ce genre, même à
l'Alegambe pour quelques points. « La
» critique de l'auteur , dit- il , est Sai-
» ne , sou latin est pur, son sivîe
» n'est point rampant ; mais quelquc-
» fois, el rarement, obscur et em-
» barrasse : ce qu'il faut attribuer à la
» longueur des phrases , qu'il entre-
» lasse, de temps en temps , les unes
)) dans les autres. Sa préface est une
» pièce fort belle et très-judieieuse. »
MorhoGus cite l'ouvrage d'Antonio
comme un modèle. David Clément dit
que c'était la meilleure de toutes les
Bibliothèques qu'il connaissait , ex-
cepté celle des P. Quétif et Echard.
Seelen et D. Clément reprochent seu-
lement à Antonio d'avoir rendu les
titres des ouvrages méconnaissables,
eu traduisant ces titres en latin , au
lieu de les rapporter dans leur langue.
IV. Censura de histnrias fabulosas,
obrapostuma, Valence, 1742, in-
fo!. , ouvrage orné de cartes , et pu-
blié par D. Gré;?oire Mavans v vSiscar.
" A. ii— T.
WTOMUS-MUSA if\r. Musa).
AN rONIUS(GoDEFRoi), juriscon-
sulte célèbre, né à Freudenberg en
Wcstphalic, mort en 1G18, pr(>fcs-
seur en droit, et chancelier de l'uni-
versité de Gicssen , dont il a été un
de? fondateurs. Le landgrave Louis
l'estimait beaucoup , et lui confia des
missions imporlaulcs. il avait, sur les
ANT
droits constitutionnels de l'emperenr
d'Allemagne , des idées plus favorables
à ce chef de l'Empire , que Hermann
Vullcjus , avec lequel il soutint à ce
sujet une controverse. Ou a de lui tin
grand nombre de Dissertations sur
presque toutes les parties du droit pu-
blic et civil. On en trouve le catalogue
dans les Memorice ictorum de Witten,
et dans la Hesse savante de Strieder.
Ses principaux ouvrages sont: I. Dis-
putationes feiidales XF, Marbourg,
i(3o4,iii-4'. Elles ontetérëiraprimc'es
six fois ; l'édition de J. S, Stryk, Halle
i6q9 , in-4". , est la meilleure; II.
De Camerœ imperialis jurisdiclio-
ne. Ceint cette Dissertation qui l'en-
gagea dans une dispute avec Hermann
\ ullejus , et qui produisit : III. Disp.
apolog. de potestate imperatoris le-
gibus soluta , et IV, Dispp. anti-
vidlejanœ , Giessen 1 6o() et 1610 ,
iu-4'' Hermann Vulle'jus montra,
dans cette controverse, beaucoup plus
de modération queGodefroiAutouius.
— Son petit-fils, J. G. Antonius, fut
me'decin, e'crivit Deœgro iiephretico
malo lahorante , et mourut à Giessen ,
eu 1715. S — R.
ANTONIUS PRIMUS. F. Primus.
ANUND, roi de Suède, surnomme
Braut, c'est-à-dire, destructeur des
forets ,\\ér\xat., dans le 7*". sièxie, des
couronnes de Gothie et de Daneraarck,
dont sou père Inguar s'était lendu
maître; il prit aussitôt les armes pour
venger la mort de ce prince, assassiné
par des rebelles , et revint triomphant
de cette expe'dition. Il fît ensuite jouir
SCS sujets de la paix et d'un gouverne-
raienl paternel. Dans un siècle où le
Nord ne connaissait d'autre vertu
qu'une bravoure aveugle et féroce , il
se montra juste et généreux ; n'ayant
d'autre ministre que lui-iuème , il fit
ouvrir des routes, et publia les ré-
glemonls les plus sages. On prétend
que par ses ordres fut biûlée une partie
des immenses forêts qui couvraient la
Suède , et qu'ayant distribué des terres
aux habitants les plus industrieux, sariS
exiger de redevance, il parvint à fiire
fleurir l'agriculture. Il périt dans uu
voyage, par la chute d'une masse fie
terre. Son fils Ingiald lui succéda. B — p.
ANUND II ( Jacob), roi de Suède ,
succéda, eu 1 024 -, à son père Olaiis ,
premier roi chrétien , et fut surnommé
Kolbrener , ou charbonnier , parce
qu'il fit une k'i pénale, portant que celui
qui ferait tort à son concitoyeu , se-
rait condamné à voir brûler sa propre
maison. Ce prince , après avoir donné
aux lois de la vigueur , favorisa les
progrès du christianisme dans ses
états. Selon J. Gothus et Loccenius ,
il fut entraîné dans une guerre contre
Canut-Ie-Riche , roi de Danemarck et
d'Angleterre, et périt daus une ba-
taille, en io55. Son frère, Emund-
le-Vieax , lui succéda. B — p.
ANVARl , poète persan. ( P'oj\
Anwery. )
ANVILLE ( N. DE La Rochefou-
cauld , duc d' ), né au commencement
du iH*". siècle , entra de bonne heure
dans la marine française, et s'y fit re-
marquer par ses talents et son zè'e »
encore plus que par son nom. U
avait conservé, dans un service pé-
nible, où la rudesse est trop souvent
unie au courage , le goût des lettres
et l'élégauce des mœurs qui caracté-
risent son illustre maison. En i 745 ,
le duc d'Anville fut envoyé dans les
mers de l'Amérique scpteutriouale ,
avec une escadre de quatorze vaisseaux
de ligne , pour essayer de reprendre
Louisbourg, ou de ruiner la colonie
andaise d'Annapolis; sa flotte fut dis-
persce par une violente tempête ;
quelques-uns de ses vaisseaux pé-
rirent , d'autres tombèrent au pou-
voir de l'coiicmi , et le duc d'Anville,
296 ANV
consume par une maladie, qui tenait
peut-être également à la force de sou
ame et à la faiblesse de son corps ,
mouriit , accable de chagrms , sur le
rivage barbare de Chibouctou , près
de la place où les Anglais ont bàli
depuis [avilie d'Halifox, aujourd'hui
capitale de la Nouvelle-Ecosse.
E-D.
ANVILLE (Jean-Baptiste Bour-
guignon d'), premier géographe du
roi, pensionnaire de l'académie des
inscriptions et belles-lettres , adjoint-
géographe de l'académie des sciences ,
de la société des antiquaires de Lon-
dres , de l'académie de Pétersbourg ,
et secrétaire ordinaire de M. le duc
d'Orléans , naquit à Paris , le 1 1 juil-
let 1697 , de Hubert Bourguignon , et
de Charlotte Vaugon. Une carte géo-
graphique tombée j)ar hasard entre
ses mains, lorsqu'il n'avait que 12 ans,
lui donna occasion de manifester sou
goût pour la géographie. Il employa,
depuis , une partie du temps de ses
classes , et même de ses récréations ,
à dessiner les j)ays et les contrées dont
parlent les historiens latins. Ce goût
ne tarda fas à se convertir en une es-
pèce de passion. Dès -lors, toutes les
études du jeune d'Anville furent di-
rigées vers la géographie ; il ne lisait
plus les poètes et les historiens grecs
ou latins , que dans l'intention de trou-
ver la place que les Allies dont ils ont
parle occupaient sur le globe , et
il essayait de fixer les limites de ces
vastes empires, dont il ne reste de
traces que dans l'histoire. IL suivait sur
SCS cartes la marche des armées , à
travers des contrées devenues déser-
tes , et s'occupait à retrouver les
champs de bataille où s'était autrefois
décidé le sort du monde. Ses études,
soutenues par un noble enthousiasme,
et cop.stamment dirigées vers le même
but , lui avaient procuré de très-boone
ANV
heure d'immenses connaissances en
géographie. Il se lit connaître, bientôt
après avoir fini le cours de ses classes,
des savants les plus distingués; avant
l'âge de vingt -deux ans, il obtint le
brevet de géographe du roi. C'est sans
doute dans ia conversation des hom-
mes qui alors jouissaient de la plus
grande réputation, qu'il puisa les pre-
miers éléments de cette critique saine
et judicieuse qui lui a fait assigner un
rang si distingué à la tète des géogra-
phes. Il s'habitua à comparer les cou-
naissances qu'il n'avait jusqu'alors que
rassemblées; il apjiritàlcs classer , et
finit par acquérir ce tact si délicat et si
difficile à définir , qu'on l'a comparé à
une espèce d'instinct ; mais vraisem-
blablement ce n'était chez d'Anville
que le résultat des combinaisons d'un
esprit extraordiuairement juste , dont
les idées bien ordonnées venaient en
foule à l'appui d'une première con-
ception, sans que la plus légère cir-
constance propre à la confirmer ou à
la détruire , pût lui échapper. Quoi
qu'il en soit , de l'aveu de tous les géo-
graphes , d'Anville était doué , au plus
haut degré, d'une finesse de tact sur-
prenante , qui lui faisait presque tou-
jours distinguer la vérité de l'erreur.
L!u des objets les plus importants,
dont il se soit occupé , fut de déter-
miner la longueur des mesures itiné-
raires des anciens , et de les compa-
rer avec celles des modernes. La sa-
gacité avec laquelle il a su éclaircir im
sujet si obscur, et semé de tant de dif-
ficultés , est ce qui lui fait le plus
d'honneur; et c'est à cette première-
connaissaiice qui sert de base à toute
la géographie ancienne, (juc d'Anville
doit le plus grand nombre de ses au-
tres succès. La partie de ses ouvrages
qui comprend la géographie moderne,
contient tout ce qu'on savait sur les
pays qu'il a décrits à l'époque oîi ses
ANV
cartes ont e'te publiées ; mais nos con-
naissances se sont tellement accrues ,
que ces cartes sont inférieures à celles
qui ont été faites depuis. C'est cepen-
dant dans cette partie , qui n'est pres-
que plus consultée , que d'Anville a
donné la preuve la moins contestable
de la supériorité de son talent. 11 par-
vint, par l'application des mesures
anciennes qu'il avait établies , à ré-
duire considérablement l'étendue que
l'on avait donnée à l'Italie , et il eut
la satisfaction de voir les corrections
qu'il avait faites à la carte de cette con-
trée , confirmées par les opérations
géodésiqucs exécutées d'après les
ordres du pape Benoît XIV, pour
mesurer nn arc du méridien dans
l'état ecclésiastique. Ce succès surpre-
nant tend à confirmer les diflerentcs
mesures dont il avait fait usage , et,
d'après ce fait , on ne doit plus être
surpris du degré d'exactitude qui a
donné une si grande réputation à sa
Géographie ancienne. La plupart des
cartes qu'il a publiées sur cette ma-
tière , ont été faites j>our accompagner
des dissertations sur l'histoire des
peuples de l'antiquité. Nous avons eu
depuis , sur les mêmes sujets , des
ouvrages qui ont reculé nos connais-
sauces ; mais les auteurs à qui nous
les devons , n'ont pas cru pouvoir
mieux faire , que de se servir des car-
tes de d'Anville. A l'époque où nos
connaissances sur les mœurs et l'his-
toire des anciens peuples avaient en-
core de si grands progrès à faire, d'An-
ville , par une sagacité plus qu'hu-
maine , semble avoir posé les limites
de celles que nous pouvons acquérir
sur les pays qu'ils ont habités. Cette
exactitude ne paraîtrait j)eut-être pas
extraordinaire, si nous n'avions, pour
vérifier ses conjectures, que les ou-
vrages qui les ont fait naître; mais, ce
qui est une espèce de prodige, c'est
ANV 297
que la phipart de ses opinions out
été confirmées par ceux qui ont visité
les contrées qu'il a décrites. M. de
Choiseul-Gouiilpr , dans son Voyage
pitloresque de la Grèce, rend hom-
mage à l'exactitude des cartes de
d'Anville. Les cartes d'Egypte, pour
lesquelles d'Anville a toujours témoigné
une affection particulière, ont donuéà
sa gloire le plus grand éclat dont elle
pût êti'e couronnée; leur exactitude a
été également confirmée par les savants
français qui , d'après les ordres de
l'empereur Napoléon , ont été chargés
de visiter le pays , et d'en dresser de
nouvelles cai'tes. Les Anglais ont été
forcés de rendre hommage à la supé-
riorité de d'Anville, etle plus bel é'oge
qu'ils aient pu donner au major Renuel,
le plus célèbre de leurs géographes , a
été de le nommer le iïAnville de l'An-
gleterre. L' Orbis veteribus notus ,
XOrbis roman us , doivent être entre
les mains de tous ceux qui lisent l'his-
toire ancienne ; ainsi que ses cartes de
la Gaule , de l'Italie et de la Grèce an-
cienne ; il en est de même des cartes
des mêmes pays qui font partie de la
géograpliie du moyen âge. D'Anville
ne publiait guère de carte sur la géo-
graphie ancienne, sans l'accompagner
ou la faire suivre d'un mémoire où il
donnait , en détail , les raisons qu'il
avait d'abandonner les idées de ceux
qui l'avaient précédé, et d'en adopter
de nouvelles. Les hommes curieux de
s'instruire pourront ;uger , en les con-
sultant, de la profondeur de son éru-
dition , et de la solidité de son jugement ;
mais, soitque,tropoccupédu fond d' 3
choses , il eût négligé de former son
style, soit que, dans la discussion, il ait
trop souvent paru attacher autant d'im-
portance aux plus légères consideia-
tious qu'aux principales raisons qui de-
vaient le déterminer, on s'aperçoit avec
peine que ses idées ne sont pas dé-
398 A N V
veloppces cTvec cette lucidité que l'on
a droit d'attendre d'au esprit aussi
juste et d'un jugement aussi sain : ces
mémoires ne peuvent être lus que par
ceux qui se livrent à l'étude de la géo-
graphie. D'Anville a publié deux cent
onze cartes et plans, et soixante- dix-
huit mémoires , épars dans diverses
collections et dans différentes biblio-
thcqiies. Les mémoires qu'il a compo-
sés sur les mesures itinéraires des Ro-
mains , des Grecs et des Chinois , sont
les plus beaux monuments de géogra-
phie que nous possédions. D'Anville
avait essayé de déterminer la figure de
la terre , d'après les roules et les ob-
servations des navigateurs qui avaient
fait le tour du globe, ou qui avaient
traversé la mer du Sud; nous ne nous
étendrons pas sur cette partie de ses
travaus,à laquelle on a peut-être voulu
ajouter trop de prix : les résultats qu'il
en a tirés doivent être rangés dans le
très -petit nombre de ses erreurs.
MM. de Mnnnc cl Barl)ié du Bocage
ont annoncé, en iSo'.i, qu'ils travail-
laient à rassembler et k publier un re-
cueil complet de ses ouvrages , en 6
vol. in-4"'. M. de Manne , qui reste
seul chargé de cette édition , doit
publier les deux premiers volumes en
181 i .D'Anvilleavait forme une collec-
tion immense de cartes tantgravéosqiie
manuscrites ; le gouvernement l'-icquit
en I -j-jf) , et l'eu laissa jouir le reste de
sa vip. Le dernier ser\ ice que d'An-
ville ait rendu à la science , fut de
mettre cette collection en ordre. Quoi-
que d'une constitution faible et déli-
cate , il résista , depuis sa jeunesse
jusfiu'à un âge très-avancé , à >in tra-
vail de quinze heures par jour. Il
était naturellement simple et modeste;
iniis la conscience qu'd avait de ses
ibrces, l'avait peut-être rendu un peu
trop sensible à la critique. Deux ans
avant sa mort , il perdit l'usage de ses
A N W
facultés , et termina sa carrière le o3
janvier fjHi. , âgé de près de qnatn -
vingt -cinq ans. Il avait épousé, en i
I ^So , Charlotte Testard, qui mourut i
en I •jSi , dans un temps où les infir-
mités de d'Anville ne lui permettaient
plus de sentir le prix de ses affections;
il en avait eu deux filles, dont l'une
mourut religieuse, et l'autre fut avan-
tageusement mariée. L'éloge de d'An-
ville a été prononcé par Condorcet et
par M. Dacier ; on le trouve dans les
Mémoires de l'Acadévde. M. de
Manne a publié la Nolke des cuivra-
ges de d'Aiwille, x'éo'x , in-H". Cette
îs'otice est composée de l'éloge de d'An-
ville par M. Dacier , et di\ catalogue des
cartes et des ouvrages ou mémoires de
ce gé graphe. Parmi ses cartes, on doit
distinguer les quatorze qu'il fit pour
X Histoire ancienne de RoUin ; les
douze , pour V Histoire romaine de
RoUin et Crévier; les cin(} , pour V His-
toire des Emjicreurs romains , de
Crévier, etc. Parmi ses ouvrages ou
dissertations, on recherche: \. Dis-
sertation sur retendue de l'ancienne
Jérusalem et de son temple , 1 747 *
in-8". , avec un plan ; le plus rare des
ouvrages de l'auteur : II. Géographie
ancienne , 1768 ou 178'^ , 3 vol.
in- 1 fi, avec cartes ; 1 769, gr. in-ful.
avec dix grandes cartes. — L'ouvrage
publié sous le titre de Géographie de
d'Anville, par M. B. D. M., Paris,
1807, 2 vol. in-8''. avec un atlas
in-fol. de 25 cartes , est de M. Baren-
tiu de TNIontchal. R — l.
ANWKRY, l'un des poètes les plus
célèbres de la Perse, naquit à Bcdneh ,
petit village dépendant du district d'A-
biverd, eu Khoraçàn. Lorsqu'il fut eu
âge de commencer ses études , on l'en -
voya à Thoùs , où il y avait une célèbre
académie , nommée Manssoùrrjah.
Le jeune homme fit des progrès dans
les sciences et Icslettrcsj mais le has«n.l
AN Y
eoiitribua, plus que les leçons qu'il re-
revaitde ses habiles maîtres, à déve-
lopper le germe de son talent poétique.
Ce talent le conduisit à la fortune. Un
soir, qu'il était tristement assis sur la
porte du collège , les équipages du sul-
tîian Sandjar le sekljoùqvde, vinrent à
jiasseï'; il fut frappé de la bonne mine
d'un cavalier magnifiquement vêtu , et
entouré d'esclaves empressés à le ser-
vir; il demanda qui était ce seigneur,
et , quand on le lui désigna comme un
poJte au service du sulthan : « Quoi ,
» s'écria-t-il, les vers sont honorés à
» ce point? J'en jure par le Très-
« liant; je veux, sous peu, éclipser
» tout ce qu'il y a de poètes à la cour
» du sulthan! » L'imagination exaltée
par un aussi beau projet , il compose,
la nuit même, en vers, un éloge de
Sandjar, et va, le lendemain, le pré-
senter au monarque. Ce prince , ravi de
la chaleur qui régnait dans cette com-
position , admet aussitôt Anwéry au
nombre des beaux esprits qu'il avait
réunis autour de sa personne. Cepen-
dant, la poésie n'occupait pas seule tous
les instants d'Anwéry; il sut y associer
des études plus sérieuses, telles que
celle de l'astronomie, où il paraît qu'il
fit d'assez grands progrès; msis il par-
tagea avec ])liisieurs astronomes de son
])ays la ridicule prétention de prédire
j'.ivonir. Cette prétention lui devint
Irès-funeste. Quelque temps avant !a
grande conjonction qui , suivant les
Tables yllphonsines^cnt lieu l'an 58'^
de l'hégire ( i t8'3 de J.-C. ), Anwérv
avait prédit que , le jour où cette con-
jonction s'effectuerait, i! s'élèverait un
ouiagan si furieux , que les arbres
et les maisons même en seraient et
renversés. La consternation l'effroi se
répandirent parmi les habitants de
Merve, quand ils apprirent cette ter-
T'b'e prédiction ; tous désertent la
ville , et fuient éperdus à travers la
AN Y
2f.<)
campagn'^, dans l'.ittenîe du faîal ("vc-
nement. Or, ce jour-là même, l'air fut
plus calme que jamais, et les lampes
que l'on avait allumées au haut des mos-
quées , ne vacillèrent même pas. Les
ennemis d'Anwéry ne raanquèn ntpas
de saisir cette occasion pom* le tourner
en ridicule auprès de Thogrul-Beu-
Arslan, prince alors régnant, qui lui
témoigna beaucoup de méconlenle-
ment. Inconsolable d'avoir perdu la
faveur de son souverain , et sans cesse
harcelé par les poètes ses envieux,
qui ne cessaient de lui décocher les
plus mordantes épigrammes , il fut
forcé de quitter Merve, et se retira à
Balkli , espéiant y vivre plus tranqn 1-
le; mais il fut presque lapidé par le
peuple, qui l'aurait aussi forcé d'aban-
donner cette \\\\c, s'd n'eût été l'ami
du càdhy Hamed-êd-Dvn , qui le prit
sous sa protection ; encore fut-il obligé
de faire une protcstaïion publique et
solennelle, de ne plus se mêler d'as-
trologie ni de prédictions. Ce fut dans
cette ville qu'd mourut, l'at: de l'hé-
gire 597 ( 1 .200-1 9.01 de J.-C.}. Oii A
d'Anwéri des éloges, dos satires et des
ghazels. JJ&'ioge est Je genre où il a Ir
mieux réussi. Il l'emporte de beaucoup,
à notre avis, sur Khacànv, Nizamv,
S'a'ady et Djàmv , dans le cacydèh;
mais il le cède à Hàfiz dans la ghazel,
ou poésie erotique. Ce poète, rempli do
verve et d'imagination, est encore fu)i
peu connu en Europe. 11 n'y a , à pro-
prement parler, que deux seuls mor-
ceaux imprimés de ses poésies qui puis-
sent donner une idée de son esprit et da
ses talents. Le premier est une élégie
sur la captivité du sulthan Sandjar,
souverain de la Perse, fait prisonnier
par les Ghouzz. Ce poème est un des
pliis beaux de la langue persanne. Les
images y sont généralement frappantes
et justes , la diction neneuse , élé-
gante, animée et pure; et quoique la
3oo A N Y
versification ne soit pas partout égale-
ment douce et coulante, elle paraît
très-bien adaptée au sujet. Le texte de
ce petit poënie a été public avec une
excellente traduction en vers anglais ,
par un des membres les plus distin-
gués de la Société Asiatique de Calcut-
ta, le capitaine Kirk Patrick, qui a
fait insérer cet intéressant travail,
turae I , p. 286 - 5 1 0 de XAsiaiik
Miscellanj , recueil aussi rare que
«;urieux, publié à Calcutta, in -4".,
i'j85-i -jHGjpar les soins de M.Glad-
\sin , dont il n'a paru que 1 vol , et qui
a clé beaucoup trop tôt intcrrompn.
L'autre , qui est un éloge de Maudoud
ben Zengury, traduit en allemand,
en octaves , par M""". Chézv. Cette
élégante traduction est insérée dans le
second N". des Mines de l'Orient,
journal destiné à la littérature orien-
tale, et qui s'imprime à Vienne, sous
les auspices et auxlVaisdu Mécène des
orientalistes de l'Allemagne, M. le C".
tic Kzcwuski. Ij — s.
AN Y SIS, quoique arengle , fut
choisi pour roi d'Egypte, après la
mort d'Asychis. Peu de temps après
son avènement à la couronne , Saba-
cos , roi d'Ethiopie, s'empara de l'E-
gypte, et Anysis se retira dans les
marais , oîi il demeura cinquante ans ,
et forma , dit-on , une île , de la cendre
qu'il se faisait apporter. Sabacos ayant
quitté l'Egypte, il revint prendre la
couronne. INLLarcher place le com-
mencement de son rè^'ue veis l'an
ioi'2 avant J.-C. C — R.
ANYTUS, fds d'Anthémius, était
corroyeur à Athènes, c'est-à-dire,
qu'il avait un atelier où il employait
des esclaves à travailler les cuirs , de
même que le père de Démostliènes
en avait un où l'on fabriquait des
épées. Cela ne l'empêchait pas de se
livrer aux aflàires publiques. 11 fut
chargé , dans la 4'. année de la 92^.
AN Y
olympiade ( 409 avant J,-C. ) , de con-
duire trente vaisseaux au secours de
Pvlos , qui était assiégé par les Lacé-
démoniens. N'ayant pu doubler le
promontoire 3Ialée, il revint à Athè-
nes , et le peuple , croyant qu'il avait
trahi sa confiance, lui fit faire son
procès. Il parvint à s'en tirer en
corrompant les juges avec de l'ar-
gent , et on citait ce trait comme le
premier de ce genre (|u'on eût vu à
Athènes. Je crois qu'il est le même
qu'Auytiis qui , exilé par les trente
tvrans, se mit à la tête de ceux qui
s'étaient fortifiés à Phylé. Il revint à
Athènes avec les autres , et , l'an 3ç)()
av. J.-C. , il fat un des accusateurs d«
Socrate, à qui tous les exilés en vou-
laieut parce qu'Alcibiadc , qui avait
porté la première atteinte à la démo-
cratie , Théramènes qui , dans son
aîtibassade à Sparte, avait agi direc-
tement mnlre l'intérêt du peuple, et
Ciitias , le plus cruel des trente ty-
rans , avaient été les disciples du
j)liilosophc. On sait quelle fut l'issue
de cette accusation. Anytus, et ceux
qui s'étaient joints à lui , ne taidèient
pas à être punis de leur conduite,
par la haine publique; car personne
ne voulut communiquer avec eux. On
faisait changer l'eau des bains dans
lesquels ils s'étaient lavés, et on leur
refusait du feu lorsqu'ils en deman-
daient. Le ])Ciiple, n'avant pas tardé
h revenir sur le compte de Socrate ,
Anytus fut exilé; 11 se retira à Héra--
dée Vers le Pont-Euxin, où il fut,
à ce qu'on dit, assommé à cou])S de
pierres par les gens du pays. IjC sa-
vant Fréret, dans une Dissertation
qui vient de paraître dans le 47' • ■vo-
lume des Mémoires de l'académie
des inscriptions , semble douter de
l'exil d'Anvtus, et de ce qu'on raconte
au sujet de sa mort ; je partage son
opinion, mais ce n'est pas ici le lieu
AOD
de déduire les raisons sur lesquelles
je me fonde. C — u.
AOD , fils de Ge'ra , de la tribu de
Benjamin , fut élu juge d'Israël après
Othoniel, vers l'an i443 avanf J.-C.
Ayant e'te clioisi pour portera Eglon,
roi de Moal), le tribut annuel que les
israclites lui payaient depuis dis-luiit
ans, il conçut le dessein de profiler de
cette occasion pour délivrer son pnys
de l'oppression sous laquelle il gémis-
sait. Après qu'il eut remis le tribut, il
feignit d'avoir à communiquer au roi
lui secret important. Eglon fit retirer
tous ceux, qui étaient dans son appar-
tement, et, dès qu'ils furent seuls,
Aod lui enfonça un poignard dans le
sein , et se relira aussitôt en fermant
la porte sur lui. Les gardes crurent
que leur maître voulait reposer ; et ,
îorsqu'après avoir attendu quelque
temps , ils entrèrent dans l'apparîe-
ment, ils le trouvèrent étendu mort.
Aod avait eu le temps , pendant le
premier trouble qu'excita cet évé-
nement, de gagner les frontières d'Is-
raël. Du haut de la montagne d'E-
phraïm , il sonna de la trompette,
rassembla autour de lui une nom-
breuse troupe à laquelle il fit part de
son action , s'empara de tous les gués
par lesquelles Moabites auraient pu
s'échapper, fondit sur eux avec sou
armée , de sorte qu'il en périt dix mille
dans cette journée, qui procura une
paix de quatre-vingt-dix ans à la terre
de Canaan. T — d.
APAGZAI, APATZAI TSERE
( Jean ), savant remarquable du i -'^.
siècle, né en Transylvanie, dans le vil-
lage d'Apatza, fut envoyé, aux frais du
gouvernement de son pays , à U trecht ,
où il s'appliqua aux langues orientales,
à la théologie, à la philosophie, avec
tant de succès, qu'on lui offrit une
diaire de professeur; mais il la refusa
pour s'acquitter enyers sa pauie, où
APA 5or
il retourna vers l'année iG55. Il fut
placé au collège de Weisseiibourg,
pour y enseigner la géographie, 1;*
pliysique et l'astronomie. S' étant
déclaré pour la philosophie de Des-
carfes, et pour plusieurs opinions des
presbytériens, il se fît un grand nom-
bre d'cnncaiis , et f'it condamné i
être précipité du haut d'une tour. Uu
protecteur puissant lui sauva la vie,
et on se contenta de le bannir. S'étant
rendu h Clausenbourg, il obtint une
place au collège de celte ville, et ga-
gna la faveur de Jean Bethîera. Ce-
pendant il se forma contre lui un
nouvel orage, qui allait éclater, lors-
qu'il mourut, en iG5p. On a de lui :
I. Dissertatlo continens introduclio-
nem ad philosophiam sacram , avec
des Lettres à Leusâen , Glandorjis
Gelder, Utrecht, iG5o ; U.Mag,var
Encjclopediat , etc. ( Encyclopédie
en hongrois ) , Utrecht, i6j5;11Ï.
Magyar logica ( Logique en hon-
grois ) , Weissenbourg , jG56 ; IV.
Oratio de studio sapientiœ ^ etc.,
Utrecht, i655; V. Dissertalio de
politia ecclesiastica , Clausenbourg ,
i(}j8 , et quelques Z?/5COi<r5 non im-
piimés. C — AU.
APAFFI. r.ABAFFt.
APAME , fdie d'Artabaze, satrape
de la Bactriane, épousa Sélcucus, l'un
des généraux d'Alexandre , qui donna
son nom à trois villes , dont la plus cé-
lèbre fut Apamé en Syrie. — Une autre
Apamé, fdIe d'Antiochus Soter et de
Stratonice , fut mariée à Magas , roi
de Cyrènc. Mou savant confrère et
ami , ]\[. Visconti , croit qu'elle est la
même que rArsiucé dont parle Justin;
mais j'ai quelques doutes à cet égard
( F. Arsînoe II et Berî^mce). C — r.
APCHON(Cl.-Marc-A.xt. d'), né
à Montbrison , quitta le parti des ar-
mes pour l'église, devint évêque de
Dijon , archevêque d'Auch , consacra
5o2 A F E
sa vie entière aux vertus uîiles . ex-
posa ses jours dans un incendie pour
sauver deux, enfants, et mourut à Pa-
ris, en i-yHS, à soixante ans. On a
de ce prélat des Instructions pas-
torales pleines d'onction. N — l.
APEL ( Jeaïv ) , en latin Apellus ,
Jurisconsulte contemporain de Lu-
tiier, et un des professeurs de l'uiii-
versitë de Wittcnberg qui coopérèrent
à la réforraation. Il naquit à Nurem-
berg , en 1 4B6; son père cl ait citoven
de cette ville. Avant, quoique cha-
noine du chapitre de Wurzbourç, ,
CDousc une religieuse , il fut arrête
par les ordres de i'èvèque, et n'obtint
sa liberté que par la protection d'un
régiment impérial qui était en garni-
son à Nuremberg, et en donnant >a
démission de tous ses emplois. Il
mourut à Nuremberg , avec les titres
dejurisconsuhe de celte république, et
de conseiller de l'électeur de Brande-
bourg. On a de lui : 1. L'apologie tle
son ma liage, adressée au prince évê-
que de Wurebourg, dont il était un
des conseillers : Dffensio Jo. /Ipeîli
prosuo conjupo , citm prœf. Lulhevi
ad Jo. Crojum , Wittenberg , 1 5^i5 ,
in -4'.; II. Mcthodica dialeclices
ratio, ad jurispnidentiam accommo-
rfrtW. , Norimb., i555, in-4°. C'est
un Traité de droit romain , ou
p'utot une Logique appliquée à
l'élude du droit , dégagée de cette
marie allégorique qui infestait alors
les écoles. Nie. Rer.i<ner l'a f.tit réim-
primer dans sa Crnosura. lil. Bra-
chyloqiis juris civilis , siv>e corpus le-
£7/m,abré!ié de droit qu'on a long-
temps cru être une production du 6".
siècle , et qu'on a même attiibné à
FempeiTur Jusîinien. ( For. le Dic-
tioTinaire des savants de Nuremberg
par Will , et les Suppl. de M. Frehr-
manii au Dict. hist. de Grohman,
tom. VIII, p?g. i"»5.) S — B.
APE
APELLES , peintre , naquit à Cos ,
selon la plupart des auteurs , et reçut
le droit de cité à Ephèse : il était fils
de Pylhius . et frère de Ctésiochus.
Eplioius d'Ephèse lui donna les
preraièics leçons de son art , et Pam-
pliile d'Amphipolis fut son second
maître. Ap( l'es cfTlica tous les peintres
qui l'avaient précédé, et il excella dans
toutes les parties de l'art ; mais il se
fit lemarquer surtout par une grâce
inimitable, et par la pureté, l'élégance
et le choix des formes. Les villes de
la Grèce , de l'Arcliipel, de l'Asie, de
l'Fgvpte, se décoraient et s'hono-
raient de ses nombreux chefs-d'œuvre.
Apelles n'avait rien négligé pour porter
son talent au plus haut degré ; il visita
les écoles les plus célèbres , entre au-
tres celle de Sicyone, qni jouissait
alors d'ime grande réputation. Il se
rer.dit également à Rhodes pour voir
Piotogène, dont la célébrité excitait
son émulation : ce dernier était ab-
sent lors de l'arrivée d'Apelles, qui,
sans dire son nom, se contenta de
tracer avec le pinceau un trait d'une
précision et d'une ]uireté remarqua-
bles, et se retira. Protogène, de retour,
reconnut la m.dn d'Apclles, comme la
seule capable de dessiner une esquisse
aussi parfr.ite; mais il entreprit de la
surpasser, et les nouveaux traits qu'il
fit étaient encore plus légers et pins
précieux. Apelles revint une seconde
fois ; ou lui montra l'ouvrage de Pro-
logèneà côté du sien , et il remplit de
nouveau l'espace qni restait , p.ir un
contour si délicat, que le peintre rho-
dien se conic-ssa vaincu, et courut cher-
cher Apelles qu'il reçut chez lui , en
lui rendant tontes sortes d'honneurs.
Ce tableau, ou plutôt ce Irait, sur le-
quel on a beaucoup disserté , était
regardé comme un miracle de l'art;
dans la suite , il fut porté à Rome , et
placé dans le palais des Césars, où un
ÂPE
i-ncenulc le consuma. La douceur et
la noblesse des manières et du lan-
gage d'Apclles le faisaient chérir de
SCS rivaux comme de ses élèves ; il fit
passer les ouvrages de Protogène pour
les sipus, afin qu'on en donnât un
plus hautprix. Adrairateurde la beauté',
il en cherchait les plus rares modèles;
re fut lui qui distingua la fameuse
Lais , qui, jeune encore et ignore'e ,
puisait de l'eau à uae fontaine. Apel'es
l'engagea à le suivre; et , comme ses amis
se moquaient de son choix : « Avant
» trois ans, dit-i!, elle n'aura plus
» rien à apprendre dans l'art de la
« volupîè » On croit aussi que la belle
Phryné lui servit de modèle, et que
ce fut après l'avoir vue dans le bain ,
qu'il peignit , pour les habitants de
Cos, micyénus Anadj'omène, qu'Au-
guste plaça depuis dans le temple de
César, chef-d'œuvre qu'effaçait néan-
moins une autre Vénus que la mort
empêcha Apelles de terminer, et que
personne n'osa achever. La gloire et
le talent d'Apelles étaient à leur comble
vers la ii'i"". olymjiiade, 33.i ans
avant J.-C. On le nommait le prince
<3cs peintres , et, depuis, la peinture fut
appelée par excellence XArt d'A-
pelles. Alexandre le combla de ses
faveurs, et ne voulut être peint que
par lui; il lui permettait de l'entrete-
nir familièrement ; et un jour que ce
XQon.irque dissertait sur la peinture ,
«t se trompait sur plusieurs points :
« Prenez garde , lui dit Apelles , et
» parlez plus bas ; car les ouvriers
» qui broient mes couleurs riraient
9 de vos discours. » Mais plusieurs
■auteurs font adresser cette réponse,
un peu hardie , au grand -prêtre
d'Ephèsc , homme riche et puissant ,
qu'Apelles avait peint conduisant la
-pompe d'un sacrifice: cet ouvrage était
mis au rangdcs plus bcauxde ce grand
ailisle. On ciUiX aussi ua Alexandre
APE
5o5
foudroyant , dont la foudre et les bras
semblaient se détacher du tableau, un
Antigone peint de profil, pour cacher
un défaut de ce prince dont un œil
était crevé. Plusieurs auteurs ont parlé
d'un cheval peint , dont la vue faisait
hennir les cavales. En peignant un
autre tableau du même genre, Apelles
essayait vainement de représenter l'é-
cumequi sortait de la bouche d'un cour-
sier fougueux ; impatienté de la faibles-
se de son imitation, il saisit une éponge
qu'il jeta sur cet ouvrage imparfait,
et le hasard lui fit obtenir l'elFet qu'il
n'avait pu rendre jusque-là. Alexandre
le chérissait tellement , qu'il n'hésita
pas à lui sacrifier une esclave char-
mante, nommée Campaspe, dont ce
prince était amoureux. Il avait charge'
Apelles de la peindre nue; à la vue
de Tant de charmes , l'artiste ne put
dissimuler son trouble, et Alexandre,
qui s'en aperçut , la lui donna. Après
la mort d'Alexandre, Apelles se rendit
à Alexandrie, à la cour de Ptolomée,
près duquel il ne trouva pas le même
appui. On chercha d'abord à le com-
promettre vis-à-vis de ce prince , en
le faisant venir, par un faux avis, au
miUeu d'un festin qui se donnait à la
cour ; comme le roi paraissait irrité
delà hardiesse du peintre, celui-ci, ne
connaissant pas le nom de l'hommp
qui lui avait tendu ce piège , prit le
parti d'en dessiner la figure sur la
muraille; chacun le reconnut, etil fut
puni. Peu de temps après , Apelles fut
accusé par le peintre Antiphile d'avoir
trempé dans une conjuration ( P^oy.
Antjpuile ). Plusieurs auteurs ont
désigné cette conjuration comme celle
de Théodote , gouverneur de ïyr ;
mais cette dernière n'eut lieu que sous
le règne de Ptolomée Philopator , cent
ans après la mort d'Alexandre. Quoi
qu'il en soit , Apelles vit ses jours me-
nacés, et fut chargé de fers; mais un
5o4 APE
lies coupables le justifia. De retour
dans sa patrie, il peignit, eu mémoire
de cet événement , son fameux Ta-
bleau de la Calomnie. On y voyait
un roi avec des oreilles éuormes ; à
ses cotés se tenaient le Soupçon et l'I-
tîuorance. La Calomnie, sousia figure
d'une femme superbe, richement vê-
tue, et tenant une torche à la main ,
amenait devant lui un jeune homme
qiiV-lie traînait par les cheveux, et qui
semblait prendre le ciel à témoin de
son innocence; la Fraude et la Perfidie
suivaient la Calomnie; et, derrière ce
groupe , on voyait le Repentir en habit
de deuil, qui m.ontrait plus loin la
Vérité, sous les traits d'une femme
belle et modeste. On ignore le temps
et le lieu de la mort d'Apelles ; il
avait écrit sur les secrets de son art
trois Traités , qui existaient encore du
temps de Pline. Apelles recueillait avec
soin les avis du public sur ses ou-
vrages , et il exposait aux regards des
passants ses tableaux , derrière les-
quels il se cachait souvent pour en-
tendre ce qu'on en disait. Un cor-
donnier critiqua un jour le cothurne
d'une de ses figures; Apelles l'enten-
dit et corrigea cette chaussure; le
même artisan , fier de voir sou avis
suivi, voulut le lendemain censurer
une autre partie : u Cordonnier , ne
» passez pas la chaussure , lui dit
» Apelles. » 11 croyait qu'un peintre
ue devait pas laisser écouler un jour
sans manier le crayon. Un artiste lui
montrait un ouvrage qu'il avait fait
avec une extrême promptitude , et qui
n'avait pas d'autre mérite ; et comme
il s'enorgueillissait de cette célérité :
« Je m'en étais aperçu , lui dit Apelles,
» et je n-'étonne seulement que vous
w n'en avez pas fait davantage dans
» le même temps.» Un de ses élèves
avait peint une Hélène magnifiquement
habillée; Apelles l'ayant vue, s'écria:
APE
« Tu n'as pu la faire belle , et tu l'aS
» faite riche. » Il ne se servait habi-
tuellement que de quatre couleurs ,
dont Pline indique les bases et la com-
position. 11 avait inventé un vernis
qui donnait de l'accord à ses tableaux,
et les garantissait de la poussière; lui
seul en avait le secret. Reynolds a
prouve que ce vernis différait peu des
nôtres. Pline et Pausanias citent un
très-grand nombre des ouvrages d'A-
pelles. L - S — E.
APELLES , hérétique , vivait vers
l'an 1 6o. U suivit d'abord la doctrine
de Marcion , mais ensuite il adopta et
propagea les opinions d'une pi éten-
due prophètesse, nommée Philumèna.
Tertullien prétend qu'ils avaient eu
ensemble une intrigue criminelle. Sa
d ctrine sur la nature divine était
qu'il existe un principe parfaitement
bon , d'un pouvoir ineffable et supé-
rieur à tout. Ce Dieu avait donné Ictre
à un autre Dieu , son inférieur et son
sujet, et cette seconde divinité qui était
delà nature du feu, avait créé le monde.
A l'égard de J.-C, il enseignait qu'il était
le fils du Dieu bon, et son Saint-Esprit,
et qu'il avait eu un corps réel , qu'il ne
tenait point de la Vierge Marie. Selon
Apelles, il l'avait tiré des quatre élé-
ments eu descendant du ciel ; cl en y
retournant, avait rendu à chacun d'eux
la portion qui lui appartenait. 11 con-
damnait, comme Marcion , le mariage ,
rejetait l'autorité divine de Yy/ncien
Testament , ainsi que celle de Moïse,
et soutenait que les prophètes étaient
pleins de contradictions. On n'a plus
aucun des nombreux ouvrages de cet
homme, auquel les écrivains ortho-
doxes n'ont pas épargné les objections
et les reproches. D — t.
APELLICOX, de Téos , de la secte
péripaléticieune , est un de ceux aux-
quels nous devons la conservation dos
livre* d'.Viislote. Eu mourant , le phi-
APE
losophe de Stagyre confia ses ouvrages
à Théophraste , qu'il avait désigné
pour son successeur. Théophraste les
légua , par son testament , à Nélée ,
qui les transporta à Scepsis, sa patrie,
dans la Troade. Après la mort de Né-
lée , ses héritiers , gens sans culture ,
craignant les poursuites des rois de
Pergame , qui faisaient enlever , dans
toutes les villes de leur dorainatiou ,
les livres précieux , pour enrichir leur
bibliothèque , cachèrent les ouvrages
d'Aristote dans une caverne , où ils
restèrent plus de cent trente ans, et
souffrirent beaucoup des vers et de
4'humidité. Au bout de ce temps , Apel-
licon les acheta de quelques descen-
dants d'Aristote, ou de Théophraste.
Il voulut ensuite les mettre en ordre,
et réparer les lacunes occasionnées
par l'altération des manuscrits; mais,
plus riche que savant, plus bibliomaue
que lettré , il s'acquitta mal de celte
tache difficile. Après sa mort , Sylla ,
s'étant emparé d'Athènes, la l^". année
de la i'j3°. olympiade , fit enlever et
transporter à Rome la bibliothèque
d'Apellicon , et ce fut Tyrannion,
grammairien assez obscur, que l'on
chargea de les classer , d'en corriger
le texte , et de les copier. Apellicon ,
que sa grande fortune , et le titre de
citoyen d'Athènes dont il jouissait ,
mettaient à même de satisfaire sa pas-
sion pour les livres , ne se contenta
pas toujours de les acheter ; il en dé-
roba quelquefois. Il enleva , des ar-
chives d'Athènes et d'autres lieux,
les originaux des anciens décrets du
peuple. Il fut même obligé de fuir ,
pour éviter la punition de ce vol. Il
s'était lié avec Athénion , tyran d'A-
thènes, qui Se chargea d'aller à Dé-
los enlever les trésors du temple d'A-
pollon. Mais , surpris par le général
romain , ApeUicon fut trop heureux
d'échapper à la mort par une prompte
II.
A P H 5ofî
fuite. Il avait écrit un ouvrage pour
la défense d'Aristote. D. L.
APER ( Marcus ), orateur- romain,
Gaulois de nation, voyagea dans sa
jeunesse, alla jusque dans la Grande-
Bretagne, et se rendit ensuite à Rome,
oîi il fréquenta le barreau , et acquit
beaucoup de réputation par sou élo-
quence. Il fut successivement sénateur,
questeur, tribun et préteur; mais s'il
faut l'en croire , tous les agréments
attachés à ces charges honorables
avaient moins d'attrait pour lui que
l'exercice de sa première profession.
11 mourut vers l'an 85, av. J.-C. C'est
un des orateurs qui brillent le plus
dans le fumeux Dialogue, intitulé: Des
orateurs , ou De la corruption de ZV-
/©(/iiCMce, qu'on a attribué long-temps,
tantôt à Quintilien , tantôt à Tacite ,
et que D. Rivet ne fait point difficulté
d'attribuer àAper; il en donne des
preuves qui paraissent concluantes.
Du reste , les savants qui ont examiné
ce point de critique avec le plus de
soin , conviennent que ce Dialogue
n'est ni de Quintilien , ni de Tacite. Il
a été traduit en fiançais , par Giry , de
l'académie française , Paris , i O26 ,
in-4 ". ; par Maucroix , Paris , 1710,
in-12; parMorabin, Paris, 172'i,
in-i2 ; par Bourdon de Sigrais, de
l'académie des Inscriptions , Paris
1782, et par Durcau de la Malle,
dans la seconde édition de sa Traduc-
tion de Tacite j Paris , 1809 , 5 vol.
iu-S". K.
APER (ArIUS). FoJ. DiOCLtTIEN.
APHTHONIUS, rhéteur d'An-
tioche, vivait dans le 5'. ou le 4".
siècle. Nous avons de lui des exercices
( Progymnasmata ) de rhétorique
adaptés aux préceptes d'Hermogène ,
et 4o fables. Aphthonius , suivant
Suidas, a le défait d'avoir négligé de
traiter des premiers élénicnts de la
rhétorique , et de ne s'être uuUeiuent
20
ocô A P 1
applique à fermer le slyle de ceux
qu'il voulait instruire. On ne trouve
dans sou Traité que les règles ora-
toires , et l'application de ces règles à
difJerents sujets. Les Progrmnas-
mata ont été imprimés , pour la pre-
mière fois , en grec , dans le recueil
intitulé : Rhetores Gncci, Venetiis
Aldus, i5o8, in-fol. Dans le second
volume de ce recueil , imprimé en
i5o9, et qui est extrêmement rare ,
ou trouve un commentaire sur Aph-
thonius, qui n'a jamais été réimprimé.
Quant à l'ouvrage d'Aphthonius ,
comme il a été long-temps en usage
dans les écoles , il y en a un grand
nombre d'éditions. Les meilleures
sont : J/jhlhoniiis , Hermogenes et
Longbms , grœcè, cura jEm. Porli,
Genevae , Crispin , 1070 , in-8°. j
AprUlionii Prosrmnasmata gr. lai.
Fr. Scobario interprète , Hier. , Com-
nielinus , 1J97, in-8". (ses fables y
sont jointes); Gr. lut. cura D. Hein-
sii, Lug., Bat., i6u6; in-S". ; Ejus-
dcm et Theonis Progrmnasmata
(rr. lat. cum ?wtis , J. Scliefieri,
Upsaliœ, 1670, in-8 '.Le Traitéd'Aph-
thonius a été traduit en latin, dans
un recueil de traductions latines de
divers rhéteurs grecs , imprimé à Ve-
nise, .Aide i5:?.5, in-fol.; imprimé
séparément en grec el en latin, Paris,
iG-îi , in-8'.; Jnais on préfè-re la
traduction de François Escobar , qui
j.arut à Barcelone, 161 i , in-8°. , et
celle de Rodolphe Agricola, Amster-
dam, Elzevir, 1642 — 1665, in-i2,
avec des notes de ReinliardLorichius.
Les fables d'Aphthonius se trouvent
souvent à la suite de celles d'Ésope ,
Venise, Aide ii)o5, in-fol. ; Franc-
fort 16 10, in-8". , fig. Ci — R,
APL\NUS ( Pierre ), professeur
de niathémati([ues à Ingolstadt , né en
I fO J , à Leysnick de IVlisnie ; son
nom alicmaud était Eienewilz : Bicne
API
signifie abeille, apis, à^ où Apianns,
Charles-Quint l'estimait, le fit cheva-
lier de l'empire Germnnique, et lui
fit présent de trois mille pièces d'or.
On a de lui : L une Cosmographie
en latin, Landshut, 1 5^4, et quelques
ouvrages de géographie ; IL Astro-
nomicwn Cœsareum , Ingolstadt,
i54o , format d'atlas. Cet ouvrage
est dédié à Charles Quint , et à son
frère Ferdinand; d'à pour objet de
substituer les instruments aux tables
astronomiques, pour trouver en tout
temps la position des astres , et toutes
les circonstances des éclipses. L'idée
n'est pas heureuse, mais l'exécution
prouve de l'adresse et une industrie
que Kepler appelle malheureuse {mi-
serabilem), et qu'on ne saurait assez
déplorer. Dans la seconde partie de
cet ouvrage, on trouve la description
d'un instrument pour résoudre, sans
calcul, tous les triangles sphériques;
on y trouve les observations de cinq
comètes , et cette remarque curieuse ,
que les queues des comètes sont tou-
jours à l'opposite du soleil , et dirigées
suivant une ligne qui est le prolonge-
ment de la droite , menée du centre
du soleil à celui de la comète. Dans
le privilège de ce hvre, privilège dont
la date est 1 55'.>, , et la durée, 5oans ,
on voit la liste des ouvrages qu'Apia-
nus se proposait de publier, tels que
des Fphéinéridfsde 1 554 ^ 1570, des
livies d'arithmétique et d algèbre, dos
almanachs avec des prédictions, les
œuvres de Ptolémce , en grec et avec
une traduction latine ; ceux d'iUoph ,
ancien astrologue; des livres sur les
éclipses , des cartes géographiques ,
et divers instruments. On n'v trouve
ni l'ouvrage intitulé : Inscriptiones
S. S. vetustatis , non illœ quidem Ho-
manœ , sedtotius i<erc orbis, ingols-
tadt, 1 5')4 , qu'on lui attribue, qu'on
dit excellent pour le temps ^ et beau-
I
API
coup plus complet que tous ceux qui
avaient paru eu Italie , ni celui qui
porte pour titre : Tabiilœ direclionuni
profecliomiinque , Witteiub, , 1606,
qui paraît être celui de Rcgiomontanus.
]I mourut à lugolstadt , le 21 avril
1 >ji. Apianus fut un des prensiers
à proposer l'observation des mouve-
ments de la lune , pour de'couvrir
les longitudes. Il exposa sa méthode
dans la première partie de sa Cos-
mographie. 11 veut qu'où observe !a
distance de la lune à quelque étoile
tixe, peu éloignée de l'écliptique, et
c'est encore l'idée que l'on suit actuelle-
ment.— Philippe, son (ils, lui succéda
dans sa chaire de mathématiques , et
publia plusieurs écrits, notamment:
I. De Cjlindriutilitate; II. De usu
trientis instrinnenti astronomici no-
vi, etc. 11 mourut à Tubingeu , oi!i il
avait été forcé de se retirer , ayant
embrassé la religion réformée. Ty-
cho nous a conservé dans ses Pro-
gymnasmes , la lettre qu'il écrivit
de Tubiugen au Landgrave de Hesse-
( iassel , sur l'étoile nouvelle de Cas-
Mopée , en iS']x. D — l — e.
APICATA. Foy. Séjan.
APICIUS. Il y eut trois Romains
de ce nom , devenus fameux , non par
leur génie, leurs vertus ou leurs grandes
qualités, mais par leur gloutonnerie et
leur supériorité dans l'art gastrono-
mique. Le premier vivait sous Sylla ,
le second sous Auguste et Tibère, et
le troisième sous Trajau. C'est le se-
cond qui est le plus célèbre , et c'est
de lui que Séncque , Pline , Juvénal
et Martial ont tant paiié. Athénée dit
c[u'il dépensa, pour satisfaire sa gour-
mandise, des sommes immenses , et
' inventa plusieurs espèces de gâteaux
qui portèrent son nom. Sénèt^ue , dont
■^ était le contemporain, nous apprend
qu'il tenait Une espèce d'école de bonne
; chère , et avait depeusc de celle soile
A P I 5o7
deux millions et demi. Il ajoute qu'A-
picius étant fort endetté , fut obligé
d'examiner enfin l'état de ses airanes,
et que, voyant qu'il ne lui restait plus
que 'j5o,ooo livres, il s'empoisonna,
dans la crainte qu'une pareille somme
ne lui suffit pas pour vivre. Dion at-
teste le même fait. li ajoute une parti-
cularité rapportée aussi par Tacite ,
et qui est également honteuse ])our
Apicius et pour la jeunesse de Séjau.
Pline parle souvent des ragoûts qu'A-
picuis inventa, et l'appelle iVe^»o<w.»ft
omnium aUissimits gurges. Le troi-
sième Apicius vivait sous Trajan. In-
venteur d'un secret pour conserver les
huîtres , il en fit parvenir de très-fraî-
ches à l'empereur, alors occupé à com-
battre les Pai thés. Le nom des Apicius
ne fut pas seulement donné à des gâ-
teaux, il s'éteuditcà plusieurs espèces de
sauces. Ils firent secte iiarmi les cuisi-
niers. Athénée dit que l'un d'eux fit le
vovage d'Afrique, parce qu'on lui dit
qu'on y trouvait des espèces de sau-
terelles d'eau beaucoup plu? grosses
que celles qu'il mangeait à Minturne.
On croit que ces sauterelles n'étaient
autre chose que des écrevisses. II
existe, sous le nom de Cœlius Apicius,
un traité l)e re cuUnarid , imprirati
po'u" la |)remièrefois,a Milan, i4<)B,
in-4 . Les critiques regardent cet ou^
vrage comme fort ancien, mais ils ne
croient pas qu'il ait été écrit par aucun
des trois Apicius dont on vient de par-
ler. Martin Lister en a donné nue belle
édition , sous le titre de De obsoniis et
condimentis, sivede arte coquinarid,
Londres, in-8°. , «705, tiré à cent
vingt exemplaires , et Amsterdam ,
l'-oQ, in- 12. Bernhold eu a donné
une nouvelle édition , Lubeck , 1791,
in-8 '. De nos jours, l'art des Apicius a
trouvé des panégyristes , qui en ont
tracé sérieusement les leçons. Plus
heureux ei plus habile, un de nos plus
5o8 API
flimablos poètes, M. Berclioiix, a gaî-
ment traité ce sujet daus sou poërae de
la Gastronomie. D — t.
APINLJS(Jean-Louis), médecin, ne'
en 1 668,àHoIenloë,en Frauconie.Son
goût pour les sciences le fit triompher
de tous les obstacles , et surtout de
son indi[;ence. Afin de pouvoir se li-
vrer à la médecine qu'il chérissait par
inclination , il fit des répétitions à de
jeunes élèves, et remplit les fonctions
de prote dans une imprimerie ; il
trouva ainsi les moyens de séjourner
à Altorf , et de s'y faire recevoir doc-
teur, en i6()i. 11 alla ensuite exercer
sa profession à Hersbruck, et revint, en
I ncî, occuper la chaire de physioloyçie
et de chirurgie , dans l'université d'Al-
torf. Plusieurs sociétés savantes se l'a-
grégèrent. Une mort prématurée l'en-
leva un an après , le 28 octobre
i^oj. Il a, par ses observations, en-
richi les éphémerides de l'académie
Léopoldine , oi\ il était entré sous le
nom de Nomis. On a de lui : I. Fe-
bris epidemicœ anno i6c)4'- '^qS,
in Noricœ dilionis oppido Herspruc-
censi grassari deprehensœ historica
relatio, JJorimbcrgœ , i(x)7 , in-8'.;
II. Fasciciilus dissertationum aca-
demicarum , Altorlii , i 7 1 8 , in-8°.
Cet ouvrage dut le jour aux soins du fils
d'Apinus. Il a laissé eu nianusf rit, Col-
lecUtnea de fehribus et Ohservaiio-
nes medico-chimicœ. C. et A — n.
API NUS ( Sigismond-Jacques ) ,
philologue distingué, fils du précédent,
né à Hersbruck , près de Nurem-
berg , en 1 695 , mort en 1 752 , rec-
teur de l'école de St-Gilles , à Bruns-
wick. Les plus estimés d'entre ses ou-
vrages sont : Dissertationes de in-
tellfctu puro ; De reguld Lesbid ,
Altdorf, 1713, in-4''-; De variis
discendi methodis memoriœ causa
iiiventis ; Obsen>ationes de loricis
iinteis veterum , ibid. , 1719, in-4"-J
APT
Fitce Professoriim philosopliiœ Al-
torfinorum, ISuremhcr^.i 728, in-4°.:
Medilationes epist. , de incremento
phjsices per medicos facto , i 720 ,
in-fol. ( V. le Dictionn. des savants
de Nuremberg , par Wille, et Saxii
Onom. , t. VI , p. 5o6. ) S — R.
APION, grammairien , natif d'Oa-
sis, en Egypte, vint s'étabhr à Alexan-
drie, ou il se fit recevoir citoyen. On
lui donna le surnom de Plistonices ,
parce qu'il avait vaincu plusieurs fois
ses antagonistes. Il avait quelque éru-
dition , mais beaucoup plus de jac-
tance , et c'est , sans doute , peur cela
que l'empereur Tibère le nomma Cjm-
halum mundi. Il se vantait de donner
l'immorfahté à ceux dont il parlait
dans ses ouvrages , dont cependant
aucun n'est parvenu jusqu'à nous; il
dcljitait beaucoup de mensonges, et ,
entre autres , qu'il avait évoqué l'amc
d'Homère , pour savoir de quelle ville
il était. Le seul de ses ouvrages qui
soit cité par les anciens, est V Histoire
d'Egypte , qui contenait le détail de
toutes les curiosités et antiquités de ce
pays. Eusèbe et Tatien en citent quel-
ques passages tirés du 5*". livre qui ,
vraisemblablement , était le dernier.
Apion déchirait les juifsque les Alexan^
drins baissaient mortellement; il com-
posa encore un ouvrage , dont les juifj
ëtaieut seuls le sujet ; il était rem-
pli de calomnies ridicules que Josephs
réfuta dans sa Réponse à Apion. Ce
même Apion mérita , par sa haine dé-
clarée contre les juifs , d'être le chef
de l'ambassade que les habitants d'A-
lexandrie envovèrent àCaligula, pour
se plaindre des juifs qui habitaient
leur ville. Après s'être moqué de la
circoncision , il fut contraint , par une
maladie, de s'v soumettre; mais , par
une punition divine, dit Josephe, ri
mourut., peu de temps après, des
suites de l'opération. C — ^».
APO
APOCAUQUE, était protovestiaire
de l'empire d'Orient, en 1 54 1 , époque
delà mort d' Androuic le jeune, et de l'a -
vènement de son fils Jean Pale'ologue. 11
était d'une naissance obscure , mais son
esprit remuant et fécond en ressources,
SCS talents et son ambition l'avaient
f, lit monter aux premiers grades de
l'éiat. Dès qu'Aiidronic eut fermé les
yeux, Apocauque voulut persuader au
grand domesUqueCantacuzène de s'em-
parer du trône ; mais ce grand hom-
me, nommé à la régence, fit ccui'on-
ncr à l'instant même Jean, fils aîné
d'Andronic. Dès-lors Apocauque de-
vint l'ennemi de Cantacuzène, et ne
songea plus qu'à le perdre et à le sup-
planter, en l'accusant de projets am-
bitieux et en semant la discorde entre
lui et l'impératrice Anne de Savoie ,
mère du jeune erapei'eur. Cependant,
les troupes se déclarèrent pour le grand
domestique, et leur fureur pensa de-
venir fatale au fourbe Apocauque, que
Caotacuzène eut la générosité de sau-
ver , et qui n'en fut que plus acharné
à sa perte. Le régent s'étant rendu en
Asie pour défendre l'empire menacé
par ses nombreux ennemis , Apocau-
que profita de cette absence pour cons-
pirer contre son rival ; il forma le pro-
jet de l'assassiner et d'enlever l'empe-
reur qu'il voulait retenir prisonnier
dans la tour d'Epibate , bâtie par ses
soins près de Coustantinople ; mais il
fut bientôt forcé, par la découverte de
la conjuration, de s'y enfermer lui-
même. Apocauque, audacieux dans
les revers, voulut encore dicter des
lois du fond d'une retraite qu'il croyait
inaccessible. L'impératrice le menaça
de déployer contre lui la rigueur des
lois 5 Cantacuzène lui offrit de sages
conseils et une médiation généreuse.
Apocauque ne changea ni de sen-
timents , ni de ton , ni de résolu-
tion. Ou fut force de faire invcstii- la
APO 5o0
tour, et Cantacuzène, ardent à sauver
cet homme dangereux, vint le trouver
lui-même avec confiance , parvint à
opérer une réconciliation , et obtint
d'Apocauque quelques marques de sou-
mission envers l'impératrice. Aussitôt
qu'Apocauque fut en liberté, il ea
profita pour ourdir de nouvelles in-
trigues, dans lesquelles il entraîna le
patriarche et les principaux officiers
de la cour. Tous se réunirent pour dé-
noncer Cantacuzène à l'impératrice,
qui rejeta d'abord cette accusation j
mais qui finit par entreprendre une
guerre ouverte contre le régent, qu'elle
déclara déchu de cette dignité. Apo-
cauque triomphait j Cantacuzène, re-
doutant les malheurs d'une guerre ci-
vile, demanda des juges, et offrit de
se remettre entre les mains de l'impé-
ratrice. Les prières de ses amis l'en
détournèrent et le déterminèrent enfin
à se faire associer à l'empire. Les villes
et les provinces applaudirent à son
élévafion ; mais Apocauque , maître
dans Constantin! pie, agitait les bran-
dons de la discorde ; il fit ti-aiter avec
indignité des ambassadeurs que le
nouvel empereur avait envoyés pour
tenter un accommodement, et causa,
par sa dureté et par les chagrins et 1( s
inquiétudes qu'il lui donna, la moit
de la mère de Cantacuzène. Du reste ,
il se fit nommer grand-duc. La chance
fut d'abord contraire à Cantacuzène ;
Apocauque pubha avec arrogance la
défaite de son rival et sa retraite dans
im cloître ; mais après de longues va-
riations de fortune, Cantacuzène, que
les ennemis de l'empire , les Servieus ,
les Bulgares et les Turks , servaient et
abandonnaient aUernativement , grâce
aux intrigues d'Apocauque , se vit en-
fin en état de menacer Coustantinople.
Apocauque chercha à le faire assassi-
ner par un prisonnier nommé Alu~
sien , qui ne put exécuter ce projet ^
3io APO
cependant, de nouveais emharrns et
des guerres sans cesse renaissantes oc-
cupaient encore Gant icuzëne , contre
lequel Apocauque multipliait ses ca-
lomnies et ses complots. Ce factieux
remplissait les prisons de Constanti-
nopîe , et , comme elles ne se trou-
vaient plus assez grandes , il en fit
construire une y\us vaste dont il pres-
sait lui-même les travaux. Un jour
qu'il les visitait, des prisonniers, sai-
sis d'indignation à sa vue , Ibriuerent
tout à coup le projet d'en délivrer
l'empire ; l'un d'eux , nomme' Banni,
brisa ses fers et s'élança sur Ajiorau-
quc , qui se défendit d'abord ; mais
les autres prisonniers accoururent et
l'assommèrent avec les outils des ou-
vriers qui bâtissaient la prison ; on fit
Jîiille insultes à son cadavre; mais sa
îaoït fuit cruellement vengée. I/im-
pcratrice l'ayant apprise, fit entourer
îa prison , et permit à la veuve d'A-
]>ocauque de punir ellc-mcme les cou-
])ables. Cette femme furieuse rassem-
bla des matelots , leur distribua îles
largesses, les enivra de liqueurs for-
tes et les conduisit à la prison , où
c'ilc leur ordonna le plus afîreux mas-
^acre. Nicephore Gvegoras , témoin
oculaire , en a fait un récit elb'ayant.
Xa mort d' Apocauque arriva le i i
juin 1 545. Iv— S — E.
APOLLINAIRE (S.), e'vèqne
d Ilieraple, en Plirygie. se rendit ce'-
lèbre, dans le second siècle de l'Kglise,
par de savants traités contre les lie're-
îiques de son temps , oii il s'attachait à
ïnontrcr la source de leurs erreurs
<lans les anciennes sectes des pliilo-
toplies; ])ar cinq livres contre les
païens, deux contre les juifs, deux
<te la vérité, contre Julien, où il com-
battait, parla raison seule, les fausses
idées du paganisme sur la divinité;
par des commcjitaires sur ]ilusiein's
■livres de X Ancien Tci^tainint, dont
APO
on trouve des extraits ilaiis Ips reciîrils
intitulés : Catenœ patrain. Apollinaire
arlressa vers l'an l'y 7, à l'empereur
MarcAurèle, une éloquente apologie
pour les chrétiens. Elle produisit, du
moins en partie, l'ellct qu'on devait
en attendre. Cette apologie était re-
marquable, en ce qu'il y prenait Marc
Aiuèle lui-même à témoin du miracle
opéré sous ses veux, par les prières
de la légion mélitine, toute composée
de chrétiens, et auquel il avait dû le
salut de son armée, dans la guerre
contre les Quades. On ignore l'époque
de la mort de 8. ApoUiiiaire, qui dut
arriver sous le règne de Marc Aurèle.
Il ne m)us reste aucun de ses écrits;
mais iMiotius, qui les avait lus, en fait
un grand éloge. T — d.
APOLLINAIRE (l'ancieîv^ j.ro-
fessa d'abord la rhétorique à Beryle ,
puis à Laodicée. Sa femme étant
inorte dans celte dernière ville , il
V reçut l'ordre de préirise. Lorsque
.hdicn eut défendu aux chrétiens l'é-
tude des bcUes-lcltrcs , il c.)m[)0sa ,
de concert avec sou fils, dont il sera
(|u<-.stion dans l'article sui\ant , plu-
Mouis ouvrages en prose et en vers ,
pour remplacer les autcuis prolancs.
I. Une Grammaire on une filiétori-
qac , dont les exemples , imités des
p!us beaux endroits des orateurs et des
poètes païens, étaient jnésentés dans
un sens conforme aux piéccples et
aux faits de l'Évangile. 11. Les livres
lùstoriques de W4iicieii Testament,
jusqu'au règne de Saùl, mis en vers
héroïques , et divisés en vmgt-qualre
livres, distingués par les viiigl-qnatie
lettres de l'alphabet grec On assuie
qu'il eut le talent d'y faire passer
les tours et les expressions des nu-il-
leurs auteurs ])r()fanes , imitant par-
faitement Mcnandre dans le genre
comiqiie, Piudare, dansle genre hni-
que, etc. \\\. Los quatre E\'angiles
APO
en forme de dialogues, dans le goût
de ceux de Platon ; IV. une tragédie
sur la Passion de Jësus-Cbrist, qui
se trouve dans les OEuvres de Saint
Grégoiie de ISazianze; V. un Tra'ué
des différents âges des hommes ,
Liège , iD^-j-On n'est pas sûr que ces
deux derniers ouvrages soient de lui.
VI. Trente livres contre Julien; VU.
une paraphrase des Psaumes , en
vers hexamètres , dont il y a eu plu-
sieurs éditions ; elle est aussi dans la
Bibliothèque des Pères. Il serait fort
cifficile de savoir au juste lesquels de
ces ouvrages appartenaient au père ou
au fils; il paraît seuîemeut que la plu-
part ont été faits eu commun. T — d.
APOLLINAIRE le jeune, fils du
précèdent, fut, comme lui, professeur
debellcs-ktti'esà Laodicée. llembrassa
l'état ecclésiastique, servit l'église de
cette ville en qualité de lecteur, et finit
par eu éîre élu évcque. Apollinaire avait
été un des plus zélés défenseurs de la
consubstantiaiitédu verlx;, contre les
ariens ; mais, en méditant sur les pas-
sages de l'Ecriture qui donnent à
J.-C. tous les attributs de la Divinité,
il jugea qu'une ame humaine lui était
inuliie , qu'il n'en avait point pris une,
ou du moins , que l'ame humaine à la-
quelle le verbes'étaituni, n'était qu'une
ame scnsitive, dénuée d'intelligence ;
que le verbe divin présidait à toutes
ses actions, et faisait toutes les fonc-
tions de l'ame. Cette opinion avait son
fondemeu! dans les pi'incipes de la
phihisophie pythagoncienne , qui sup-
pose dans l'homme une ame raison-
nable, intelligente, capable d'éprouver
1 agitation des passions, et une ame
puremi^nt sensitive , incapable d'intel-
ligence. On attribue à Apollinaire d'a-
voir enseigné que l'ame humaine n'a-
vait point participé au bienfait de la
rédemption; que le corps de J.-C,
dtsccudii du ciel, n'était point né de
APO 5iî
la Vierge ?tlarie; qu'il était impassible,
et n'avait soufTerl qu'en apparence. Le
savant King prétend, dans son His-
toire critique du Symbole ^ que ces
dernières erreurs et plusieurs autres,
qu'on met sur le compte de cet héré-
siarque, n'étaient que des conséquen-
ces qu'on tirait de son erreur fonda-
mentale sur la nature de J.-C. ,ef qu'il
ne les avait jamais professées. Il làut
avouer qu'elles en étaient des consé-
quences bien immédiates. Ses disci-
ples ajoutèrent à ses impiétés beau-
coup d'autres rêveries, prises des ma-
nichéens, sur la nature du péché; de
Tertullien, sur l'origine de l'ame; de
Sabellius, sur la confusion des jjerson-
nes divines. Les erreurs d'Apollinaiie
furent condamnées, en odi , d'abord
par S. Athanase, son ancien ami, dans
le concile d'Alexandrie, où l'on épar-
gna sa personne , qui n'y fut pas
même nommée, en considération des
services qu'il avait précédemment
rendus à l'Église, et dans l'espoir de le
ramener à la vraie foi. Ce procédé
n'ayant pu le faire revenir, les conciles
de liorae en D'y 7 , et d'Antiocheranuce
d'après, l'anathématisci-ent, et il fut
définitivement condamné dans le se-
cond concile ceouménique, en 58 1. Il
mourut vers cette époque, en persistant
dans son hérésie. Après lui, sa secte
se divisa eu plusieurs blanches, qui
finirent par aller se fondre dans l'eu-
Ivchianisme. Whiston, dans le dernier
siècle, a renouvelé sou erreur princi-
pale, Apollinaire était regardé cjmme
un des premiers hommes de son temps,
pour les talents, l'érudition et la piété.
Vincent de Lérins, Eusèbe,ct d'autres
anciens auteurs , disent que , dans une
foule d'ouvrages, il avait confondu les
hérésies , et réfuté victorieuscnent les
calomnies de Porphyre contre les chré-
tiens. Ils reconnaissent qu'il eût étf^
une des principales colonnes de TÉ-
5 1 2 A P 0
j^lisc , s'il ne se fut précipite dans TLe'-
rësie. Il avait, dit-on, fait une version
de la Bible , sur l'iiébreu , qui fut reje-
tee par les juifs, corarae n'étant pas
conforme au texte original , et par les
chrétiens, comme s'eloignant trop de
celle des Septante. T — D.
APOLi.INAlRE ( C. Sulpicius),
p;raramairien , qui naquit, dit-on, à
Carlliagc, et vivait sous les Antonins.
11 eut pour élève Helvius Pertinax,
qui, après l'avoir remplace' dans son
état, devint empereur. On le croit au-
teur des Sommaires, en A'ers, place's
au-devant des comédies de Térence.
On a les six vers qu'il composa sur
l'ordre que Virgile avait donne de brû-
ler VEnéids:
InfeliTalio ceciditpropè Perjjamon Igné,
Et pcuè est alio Troja crcmala rogu , etc.
Ces vers ne sont que spirituels, au lieu
que ceux qui furent composes par Au-
guste , sur le même sujet , sont remplis
de sentiment. Aulu-Gelle , qui étudia
sous Apollinaire , donne la plus haute
idée de son savoir ; mais il y ajoute un
autre éloge préférable à celui-ci : il dit
qu'il n'avait rien de cette morgue pé-
dantesque, de cet air magistral , qui
rendent quelquefois l'érudition re-
poussante. C'est surtout dans le cha-
])itre IV du i8". livre de ses Noctes
atticœ , qu'Aulu-GcUe a parlé avec le
plus d'cleudue d'.Vpollinaire , et a
donné, par des anecdotes, la meil-
leure idée de son esprit. D — t.
APOLLINAIRE ( Sidoine ).r. Si-
doine.
APOLLODORE était né à Cassan-
drée, anciennement Polidée, ville qui
était alors somnise aux rois de ]\facé-
doine. Eurydice , fille d'Antipater,
avant rendu la liberté aux Cassan-
dréens, après la mort de Ptulémée-
ttraunus , vers l'an •i'S av. J.-C. ,
ApoUodore se montra le plus zélé par-
tisan de la liberté, et obtint, par ce
APO
moyen, la faveur du peuple; lors-
qu'il se crut en état de tout oser, il
fit une tentative pour s'emparer de
l'autorité , et y échoua , ce qui le (it
accuser devant les juges; mais ils fu-
rent attendris par ses larmes et celles
de sa femme et de ses filles. Cette dis-
grâce ne le rebuta point, et il recom-
mença bientôt après ; mais, pom* s'as-
surer de la fidélité de ses conjurés , il
les invita à un repas, où il leur fit ser-
vir , sans qu'ils le sussent , les en-
trailles d'un jeune homme qu'il avait
égorgé , et leur en fil boire le sang
mêlé dans du \in rouge ; il leur fit
voir ensuite le corps du jeune homme ,
et, les ayant ainsi associés à son crime ,
il les mit dans l'impossibilité de re-
culer. 11 parvint, par leur moyen, et
avec le secours des esclaves à qui il
avait promis la liberté , à s'emparer
de la tyrannie, et il se livra alors à
toute sa cruauté. Ayant pris pour gar-
des des Gaulois qui étaient accoutu-
més aux meurtres et au pillage, et
pour ministre un certain Calliplion ,
qui avait été l'un des agents â'Aga-
thocles , tyran de Syracuse , il fit mou-
rir tous ceux dont les biens pouviiient
tenter sa cupidité. Il ne s'en tint pas
là : voir couler le sang était pour lui
un plaisir , surtout lorsqu'il était ivre,
ce qui lui arrivait souvent , et il fit
égorger beaucoup de gens, unique-
ment pour se satisfiure. Il fut enfin
détrôné par Anfigone-Gouatas, et ou
le fit mourir en le jetant dans une
chaudière d'eau bouillante , après l'a-
voir écorché vif, et avoir fait brûler
ses deux filles sous ses veux. V. — r.
APOLLODORE , fils d'Asclépiade ,
et célèbre grammairien d'Athènes , vi-
vait vers l'an i5d av. J.-C. 11 étudia la
philosophie sous Panastius, et la gram-
maire sous le célèbre Aristarque. Ou
comprenait alors sous 1« nom de gram-
maiic tout ce qui tenait à l'explica--
APO
tion des poètes , comme l'iustoire , la
géographie , etc. Apollodore s'acquit
une telle réputation en ce genre , que
les amphictyons lui décernèrent des
honneurs publics. Il avait écrit un
grand nombre d'ouvrages, dont les
principaux étaient un Traité sur les
Dieux, en 20 livres au moins; un
Commentaire sur le catalogue des vais-
seaux d'Homère , et une Chronique
en vers ïambiques. Il nous reste, sous
son nom , un ouvrage intitulé : Bi-
hliotlièque ^ qui contient l'histoire des
Dieux et l'histoire héroïque , jusqu'au
retour des Héraclides dans le Pélo-
ponèse; mais il est aisé de voir que
cet ouvrage n'est pas du célèbre grara-
marien dont il porte le nom , et qu'il
n'est qu'un abrégé extrait probable-
ment des livres dont nous avons par-
lé. Il n'en est pas moins un ouvrage
très-important pour l'histoire héroïque
et la mythologie. La première édition
est celle qu'iËginus Spoletinus en a
donnée avec sa traduction latine et des
notes, Romae , i55o , in-8'. Les meil-
leures sont celles de M. Heyne , la pre-
mière , en 4 vol. in - 12., Gottingue ,
1782-83; la seconde , dans la même
ville , en i8o3, in -8°. , 2 vol. Il n'y
a de traduction ni dans l'une ni dans
l'autre de ces éditions ; mais la dernière
est de beaucoup préférable à la pre-
mière. L'auteur de cet article en a aussi
donné une édition avec une traduction
française et des notes, Paris, i8o5,
2 vol. in-8". C — R.
APOLLODORE , savant médecin
et naturaliste de l'antiquité , naquit à
Lemnos , environ un siècle avant
J. - C. ; il a vécu sous les règnes
de Ptolomée Soter et de Lagus , à
l'un desquels il dédia ses livres, sui-
vant Strabon. Il a écrit sur les plan-
tes, suivant le scholiaste de Nicander.
Phne dit qu'il a vanté le suc des choux
€t des raiforts , comme un remède
APO 5i5
contre les champignons vénéneux;
qu'il a parlé de l'ortie et de l'eryngium.
Il est souvent cité par Athénée. Il pa-
raît que c'est le même qui a écrit uu
Traité sur les animaux venimeux , et
il y a lieu de croire que c'est de son
ouvrage que Galien a tiré la composi-
tion d'un antidote contre la vipère.
— Il y a eu plusieurs autres Apollo-
dore qui ont écrit sur la médecine.
Pline fait mention de trois, dont l'un
était de Tareute , un de Citium , et un
de Pergame. D — P — s.
APOLLODORE, peintre athénien ,
avait porté son art à un degré de per-
fection inconnu jusque-là , vers la gS*".
olympiade, 4o8 ans av. J.-C. 11 connut
le premier l'art de fondre et de dé-
grader les couleurs , et d'imiter l'effet
exact des ombres. Pline en parle avec
enthousiasme , et ajoute , peut-être au
figuré , « qu'il était écrit , au bas des
ouvrages d'Apollodore : Il sera plus
facile de les critiquer que de les
imiter. » Ses tableaux les plus re-
marquables étaient : wi Prêtre en
prières devaiit une idole , et un
Ajax frappé de la foudre. Du temps
de PHne , ces deux chefs - d'oeuvre
existaient encore à Pergame , et y
excitaient la plus vive admiration.
Apollodore , fier de ses succès , se re-
gardait comme le prince des peintres ,
et ne sortait jamais sans avoir sur sa
tête une tiare , à la manière des Mèdes.
Il avait écrit un Traité sur les règles
de la peinture. Toutefois , il vit sa
gloire éclipsée par celle de Zeuxis, qui
perfectionna toutes les découvertes
d'Apollodore. Ce dernier exhala son
chagrin par des vers , dans lesquels il
convient de la supériorité de son ri-
val. « J'avais trouvé , dit-il , pour la
» distribution des ombres , des se-
» crets inconnus jusqu'à moi ; on me
» les a ravis. L'art est entre les mains
» de Zei\sis. » L— S— e;
5 1 4 A P 0
APOLLODORE , philosophe épi-
curien , que l'on croit avoir été con-
tPinporaiii deCiccron, fut le maître
de Zenon de Sidon. 11 gouverna ,
comme chef, l'école d'Épicure, et la
sévérité de son administration lui fît
donner le surnom de Cépotyrannos
( tyran d» Jardin ). Il avait , au rap-
poj t de Diogène Laërce , composé
plus de quatre cents traités, et, en-
tr'autrcs , une /-^/e d'Epicure. On
ne doit point le confondre avec Apol-
lodore le grammairien. 1). L.
APOLLODORE, architecte, naquit
à Damas, et parvint, sous le règne de
Trajan , au plus haut degré de réputa-
tion. H la dut aux monuments nom-
breux, hardis et magnifiques qu'il
construisit par les ordres de ce grand
prince, soit à Rome, soit dans les
provinces de l'empire. Les principaux
étaient, le Forum de Trajan, cons-
truit sur l'emplacement d'une monta-
gne qu'on abaissa de i^\ pieds, et
au milieu duquel s'élevait la colonne
trajane, une bibliothèque immense,
un odeum, la basilique ulpicnne, des
thermes, des aqueducs, et enfin, ce
pont célèbre jeté sur le Danube, dans
la Basse-Hongrie. Il avait vingt -une
arches, larges de cent soixante-di\:
pieds; les piles s'élevaient à la hauteur
décent cinquante pieds, et l'eiiscmble
du pont à près du double. Les pierres
qui le composaient étaient d'une di-
nieusionextraoïdinairc.Cc gigantesque
ouvrage, fait pour braver le cours
des siècles, n'eut pourtant qu'une du-
rée de quelques années. La victoijc
l'avait fait élever sous Trajan ; la
crainte des barbares le fit détruire sous
Adrien; mais ni le temps, ni les bar-
bares, ni la fmcur du fleuve rapide et
profond dans «et endroit, n'ont pu
tmpècher que quelques piles res-
tées inébranlables, n'attestent encore
aujom-d'hui le génie d' Apoilodore. Tra-
APO
jan, juste appréciateur du mérite,
combla de faveurs cet habile artiste,
avec lequel il se plaisait à converser.
ApoUodore porta, dans le commerce
des grands, une liberté et une fran-
chise qui lui devinrent funestes. Lu
jour qu'il s'entretenait avec Trajan sur
quelques parties de l'art, Adrien qui
était présent, ayant fait des observa-
tions peu fondées, Apollodorc lui ré-
pondit par une amère raillerie; Adrien ,
parvenu à l'empire , et déjà irrité con-
tre l'artiste, le consulta néanmoins
sur un temple élevé en l'honneur de
Vénus , et qu'on venait de bâtir d'après
les plans donnés par ce prince. Apol-
lodorc en critiqua les proporfions sans
ménagement. « Eh quoi ! dit-il , si la
» déesse voulait sortir, elle se briserait
» la tète contre la porte.» L'empereur,
blessé profondément , lui supposa
bientijt des crimes imaginaires, et le
fit mourir, environ i5o ans après
J.-C. L— S— E.
APOLLODORE , statuaire et mo-
deleur , vivait dans la ii4''« olym-
piade ( 024 ^^^ avant J.-C). Il se fit
remarquer ])ar le soin et la recherche
qu'il mettait dans ses ouvrages; il pous-
sait le scrupule au point qu'il brisait
souvent les meilleurs morceaux sortis
de sa main : ce qui le fit nommer Vin-
sensé, Silauion , autre statuaire , l'a-
vait représenté dans un de ces accès ,
avec tant de vérité , qu'on croyait
voir la Colère pi-rsonnifiée. Pline cite
ApoUodore , Asciépiodorc , Andro-
bole et Alevas, comme excellant à re-
présenter les figures des philosophes.
L—S— E.
APOLLONIAS. r. Apoi.lonis.
APOLLONIUES, de Cos, médecin
célèbre, attaché à la cour des rois de
Perse , n'est connu que par l'anec-
dote suivante. 11 avait guéri d'une bles-
sure dangereuse Mcgabize. gendre de
Xcrcès , et fut ensuite cousuité par
APO
Amytis , sœur de ce motiarque , rie-
venue veuve de Meg;ibize , sur une
indisposition grave. Il devint amou-
reux de cette princesse , et l.ui conseilla
le commerce des hommes comme un
moyen infaillible de guerison. Le de-
sir de sa conservation ayant aveugle'
Amvtis, elle céda aux instances d'A-
jiollonides ; mais la maladie d'Amytis
n'ayant fait qu'empirer , elle tomba
dans le marasme, et Apolionides l'a-
bandonna. Soit par desespoir , soit
par dépit , elle raconta ce qui s'était
passé à Araestris sa mère , et , en ren-
dant le dernier soupir, la chargea de
sa vengeance. Ameslris , ayant obtenu
qu'on lui livrât Apolionides , le fit en-
terrer vif dans le tombeau d'Amytis,
après lui avoir fait souffrir divers
supplices pendant deux mois. Plu-
sieurs critiques regardent ce récit
comme ayant e'ië imaginé par l'histo-
rien Ctésias , qui , médecin lui-même
à la cour de Perse , fut, sans doute,
jaloux de la considération dont Apol-
ionides avait joui. Ces critiques se
fondent sur l'âge que devait avoir
alors Amytis , sur le peu de régularité
de ses mœiu-s , qui l'avait mise sou-
vent à même d'apprécier l'influence
du remède que lui avait proposé Apol-
ionides, et ils en concluent que vrai-
semblablement ce médecin fut victime
d'un aveugle despotisme, qui vengea
sur le médecin l'impuissance de sou
art. C. et A— n.
APOLLONIDES, de Nicée, gram-
mairien , dédia à l'empereur Tibère
un Commentaire qu'il avait fait sur
les Silles de Timon. — ]i y a eu plu-
sieurs Apollokides, et entre autres,
un historien et géographe , qui avait
comjiosë un traité de X ambassade de
Démosihènes , un recued à'^da^es ,
une Description des côtes de l Eu-
rope. \J Antliologie a conservé vingt-
quatre de ses Épigraiiiraes. C — b.
APO 015
A P 0 L L 0 In I S , née à Cyzique ,
dans un rang obscur, eut le bonheur
de plaire à Attale , roi dePergame,
qui l'épousa. L'éclat de son nouveau
lang ne changea point sou caractère.
Elle eut quatre fils , Euraènes , At-
tale , Phileîère et Athénée , qui vé-
curent dans une telle union , que lors-
que l'aîné fut monté sur le troue, les
trois autres lui servirent de gardes. Ils
conservèrent pour leur mère un atta-
chement invariable ; et , lorsqu'ils al-
lèrent la voir à Cvziqtie où elle s'était
retirée après la mort de son mari , ils
la placèrent au milieu d'eux , et ayant
entrelacé leurs liras autour d'elle , ils
la conduisirent ainsi dans les temples,
et la promenèrent dans la ville , en-
tourée d'un nombreux cortège, x^près
sa mort, ils lui érigèrent un temple à
C\zique, sur les colonnes duquel étaient
placées dix-neuf lablettes, sculptées en
bas-relief, qui retraçaient les traits les
plus t(Aichants de l'histoiie et de la
mvihologie relatifs à l'amour filial. Au
bas de ces tabh ttes étaient des ins-
criptions en vers, qui nous ont été
conservées dans le manuscrit àcV An-
tholos,ie du Vatican , maintenant à
la Bibliothèque impériale. Elles ont
été publiées par M. Jacob , dans le
s"", vol. de l'ouvrage intitulé : Exerci-
tationes criiicœ in scriptores vete-
res ; Lipsiœ, 1797 , iû-8'.; et par
M. Chardon de la Hochette, Magasin
EncYclojiédique , 5''. année, t. vi,
p. i5t) et sniv. G— R.
APOLLONIUS, un des courtisans
d'Antiochus Épiphane , fut envoyé,
l'au 173 de J.-C, en Egypte , pour
féliciter Ptolémée Philoinctor sur son
avènement. La même année, député
à Rome, il eut un plein succès dans
son ambassade, dont l'objet était de
renouveler l'alliance de son maître avec
les Romains. Quelques années après ,
charge de déliuire Jérusalem , il rcm«
5i6 APO
plit cet ordre avec la plus grande
cruauté, massacra les habitants, brûla
la ville, et , sur ses débris, éleva une
citadelle , où il mit une forte garnison.
Deux ans après , il fut battu et tue
par Judas MacLabe'e (Rolliu , Histoire
ancienne , tome 1\ )• N — l.
APOLLOiMUS , de Perge en Pam-
philie , est l'un des quatie auteurs que
nous devons regarder comme les pères
delà srieiicodes mathématiques, puis-
que c'est dans leurs écrits que les mo-
dernes en ont puisé la connaissance.
Ces auteurs sont, dans l'ordre chrono-
logique, Euclide, Archimède, Apol-
lonius et Diophante ( r'br. ces articles
ft celui de Pappls \ Apollonius vit le
jour du temps de Ptolomce Evergète,
roi d'Égvpte , dont le règne commença
247 ans av. notre ère. Il étudia long-
temps à Alexandrie sous les disciples
d'Euclide, et florissait sous Plolémc'e
Philopator, qui mourut, après 16 ans
de règne , eu 'io5. On conjecture de là
qu'il vécul cnwon 4o ans après Ar-
• liiraède , qu'il devança peu Géminius
Rhodius, et qu'il est bien certainement
antérieur à Hipparque. Vitruve ( cha-
pitre 1"'"., liv. i'"'. ), le cite avant
Archimède. C'est à ce peu de rensei-
gnements que se borne tout ce qu'on
sait sur l'existence d'Apollonius ; ils
ont été rassemblés par Halley , dans
la préface qui! a placée à la tète du
Traité des sections coniques , prin-
cipal ouvrage d'Apollonius. Ce traité
lui mérita , dit Géminius , le titre de
grand géomètre parmi ses contempo-
rains. On ne peut pas dire cependant
qu'il fut l'inventeur de tout ce que
renferme son ouvrage ; car c'est .4ristée
l'Ancien, qui vivait 55o ans av. notre
ère, que l'on cite pour s'être appliqué
le premier aux sections coniques: mais
en recueillant ce qui avait été fat avant
lui , Apollonius) ajouta considcrable-
racnt. 11 paraît que les prcuiicrs qui
APO
ont considéré les sections coniques
supposaient le plan coupant perpen-
diculaire au côté du cône , et em-
ployaient par conséquent trois cônes
distincts pour obtenir l'ellipse , la pa-
rabole etl'hypcrbole, qu'ils désignaient
sous les noms de section du cône acu-
tangle , section du cône rectangle ,
section du cône obtusangle. Apollo-
nius les a tirées toutes d'un cône obli-
que à base circulaire , mais quelconque
d'ailleurs, et leur a assigné les noms
qu'elles portent aujourd'hui ; au moins
pour l'ellipse et l'hyperbole , puisque
le mot parabole se trouve dans les
écrits d'Archiiièi'e. Apollonius eut des
commentateurs illustres , tels que Pap-
pus, la savante et malheureuse Hypa-
tia, Serenus , Eutocius. L'étendue et
l'élégance de son Traité des sections
coniques firent probalement disparaî-
tre les ouvrages qui l'avaient précédé,
comme les Eléments d'Euclidc sur-
vécurent à tous les autres traités du
même genre. La difficulté de se pro-
curer les exemplaires d'un ouvrage,
avant qu'on eût inventé l'imprimerie,
ne permettait guère que de s'attacher
aux plus importants, et forçait sou-
vent à se contenter d'extraits ou de
fragments plus ou moins étendus ; et,
par malheur, ce sont de ces copies
tronquées qui ont échappé seules à la
main destructive du temps. Des huit
livres qu'Apollonius avait écrits sur
les sections coniques, il ne nous en
est parvenu, en original, que quatre,
dont Memmius a donné le premier
une version latine, imprimée à Venise
en 1.557. Comm.-indin, en i56G, eu
publia une nouvelle, plus exacte, et à
laquelle il joignit le Commentaire
d'Èutocius et les Lemmes de Pappus,
qui donnaient quelques indications sur
ce que devaient contenir les livies per-
dus. Les Arabes, lorsqu'ils transpor-
lèieat chez eux. les sciences de la
APO
Grèce, ne négligeront point les écrits
d'Apollonius; ils en firent plusieurs
traductions, et même des abre'ge's. Le
géomètre persan, Nassir-F.ddiii, en
i25o, en revit un, et l'enricliit de
notes : mais tout cela e'tait ignore' en
Europe, où l'on ne s'appliquait point
encore à la littérature orientale; et Vi-
viani, géomètre ilalien, disciple de
Galilée, travaillait à sa divination des
livres d'Apollonius, que l'on ne possé-
dait pas , iorsqii'Alplionse Borelli
trouva, dans la bibliothèque des Mé-
dicis, à Florence, un manuscrit ara-
be, qu'à l'inspection des figures, il
reconnut pour une traduction des Sec-
tions coniques d'Apollonius. Il obtint
]a permission d'emporter l'ouvrage à
Rome, oîi, avecl'aide d'Abraham Ec-
chellensis, il parvint à traduire en la-
tin , les 5". , 6 . et 'j''. livres . que cette
traduction contenait de plus que les
exemplaires grecs publiés jusqu'alors;
mais Vivian! , qui voulait s'assurer la
propriété de ses découvertes sur celte
matière, obtint que Horelli ne publiât
rien, avant qu'il n'eût lui-même fait
paraître son travail. Depuis cette épo-
que, il parvint en Europe d'autres
traductions arabes , parmi lesquelles
on remarque 1 exemplaire apporté par
le savant Golius: elles ne contenaient
encore que sept livres; mais elles pré-
sentèrent des variantes précieuses, soit
pour reii plir des lacunes dans les li-
vres précédents, soit pour corriger des
passages défectueux. C'est avec leur
secours qu'Halley a donné l'excellente
édition du Traité des sections coni-
ques d'Apollonius, déjà citée, et que
Grégori avait coinmeucée; le huitième
livre s'y trouve, mais seulement resti-
tué par Halley, d'après les indications
tirées des Lemmes de Pappus. Apol-
lonius est encore l'auteur d'autres ou-
vrages , dont plusieurs ne sont connus
«jiie par leurs litres, ou par quelq^ues
APO 5i7
fragments et des sommaires, insérés
dans les collections mathématiques de
Pappus. Ces ouvrages sont : De sec-
tione ratiojiis. De sectione spatii. De
sectione determinatd, De tactioni-
bus, De inclinationibus , enfin. De
locis planis. Le premier nous est par-
venu en arabe; Hali'ey en a publié la
traduction latine, en 1708, avec une
restitution du second , fondée sur les
indications transmises par Pappus; Ro-
bert Simson, géomètre du siècle der-
nier, qui s'est exclusivement occupé
de la géométrie ancienne, a laissé,
dans ses œuvres posthumes , une res-
titution du traité De sectione déter-
minât. Les tires de la plupart des
ouvrages indiqués ci-dessus , ne peu-
vent guère en faire saisir l'objet aux
lecteurs qui ne sont point initiés dans
l'analyse géométrique des anciens ,
qui consistait dans un système de pro-
positions leramatiques , auxquelles ils
ramenaient la démonstration des théo-
rimes et la solution des problèmes,
et dont il importait par conséquent
beaucoup d'augmenter le nombre
et de varier les sujets, par la com-
binaison des rapports que pouvaient
présenter les lignes et les espaces.
C'est à ce genre d'ouvrages que se
rapporte le Traité De inclinationibus^
dont M. Horsley a donné une restitu-
tion , imprimée à Londres en 1770.
On a des idées plus nettes sur celui
De tactionibus , qui a pour objet le
contact des lignes droites et des cer-
cles. Viète a tâché de le rétabUr, et
d'autres modernes ont résolu les ques-
tions qu'il pouvait contenir , et les
ont généralisées en les étendant aux
sphères. Ceux qui voudraient connaî-
tre en détail cette partie assez curieuse
de l'Histo-ire des Mathématiques , doi-
vent consulter l'ouvrage que M. Camc-
r^r a publié sous le titre Ôl .■ipollonii
Pergœi de tactionibus quce super-
5i8
APO
siinl, ac maxime lemmata Pappi iîi
hos libros.ciim ohseivaiiomhuf, etc.,
Gollia, !■; 95,111-8 '.Le Traité Delocis
planls, ou Des lieux plans , qui n'est
qu'un recueil de propriétés du cercle et
de la lii;ne droite, et qui répond à peu
près à la construction des équations
du premier et du second degré, a été
restitué par Robert Siinsou. Je n'ad-
mets ici, au nombre des restitutions
de ce dernier ouvrage , comme des
autres, que celles qui sont composées
dans les termes de la géométrie an-
cienne. Le fragment du second livre
des collections mathématiques de Pap-
pus , publié par Wallis, nous apprend
qu'Apollonius s'est occupé de recher-
ches arithmétiques , et qu'il a composé
un Tt ailé sur la mullipli cation des
grands nombres. Enfin, l'astronoinic
ancienne lui est redevable de la dé-
couverte, ou du moins de la flémons-
Iratitm du procédé pour représenter,
par des épicyles, les phénomènes des
stations et des rétrogradations des pla-
nètes; Ptoléinée l'a cité, à ce sujet,
dans son Almageste. Nous n'avons
aucune anecdote sur la vie privée
d'Apollonius , et son caractère ne nous
est indiqué que par un parallèle désa-
■yanlagiux (jue Pappus lait de son
amour-propre et de sa jalousie, avec
la sirnpiicilé et le désintéressement
d'Euclide. Ce sont sans doute ces dé-
fauts qui lui ont lait intenter l'accusa-
tion de plagiat, dont le justifie l'article
qui le concerne dans le Dictionnaire
de Bayle ; car, en portant ses pré-
tentions trop haut, on excite, dans
les autres , une sorte de réaction
d'amour-propre , qui les porte à ccii-
teslcr les titres les ])lus légitimes. Les
éditions remarquables des ouvrages
d'Apollonius sont : L JpoUonii Per-
gœi conicorum libricjualiior , ex ver-
sione Federici Commandini , in-lo!.,
Bouoiiia?, 1 5(3(3 j \\. yJpollonii Fer-
APO
g.vi conicorum libri P', Vl , VII ,
Paraphrasle Ahalpliato Asphanen-
si, nunc primuvi editi ; addilus in
calce Archimedis assumplorum ^li-
ber^ ex codicihus arahicis manus'ci ,
Abrahamus Ecchellensis latinas
reddidit; J. Alfotisius B or ell us cu-
rant in geometricis i^ej'sioni con-
tulit et notas uberiores in universum
opus adjecit , in -fol., Florentiae ,
1 60 1 ; III. ApoUonii Pergœi coni-
corum libri oclo, et Sereni Antissen-
sis de sectione cjlindri et coni libri
duo , in-fol. , Oxoniae , i -y i o ( c'est
l'édition donnée par Halley ). lY. L'é-
dition des quatre premiers livres du
même, donné en i(j'y5 par Barrow,
avec cdles d'Archimèdc et de Théo-
dose; V. ApoUonii Pergœi de sec-
tione rationis libri duo ; accédant
ejusdem de sectione spalii libri
duo restiluiis ; prœmittilur Pappi
Alexandrini prœfalin (grœcè édita),
ad septimum collectionis mathema-
ticc cum len^malibus ejusdem Pappi
in hos ApoUonii libros , opéra et
studio Edmundi Halley , in -8'.,
Oxoiiii , i-joO. L — X.
APOLLONIUS de Rhodes, na-
quit à Alexandrie, suivant les uns,
ou à Naucrates , selon Athénée , vers
la 146^ olympiade (194 fins av. J.-C.},
sons le rîgne de Ptoloméc Evergètes;
mais, poursuivi sans cesse, dans son
pavs, par la jalousie de ses confrères,
il se retira à Rhodes , où il professa
la rhétorique avec tant de distinc-
tion, et s'acquit , par ses ouvrages ,
une si grande célébrité , que les Rho-
dieiis lui accordèrent le litre de ci-
toveii. Il revint cependant à Alexan-
drie , et remplaça Érathosthènes dans
la direction de la fameuse bibliothècpio
de celte ville. Des nombreux onvragt s
qu'Apollonius avait composés, et dont
on peut voir le catalogue dans la non-
mUc cditiou de Li Bibliothèque gr^c-
At>0
ijue de Fabriciits , le temps n'a épar-
gne que son poëme sur l'expédition des
Argonautes, sujet de la plus haute
importance pour l'antiquité , et déjà
traite par Orphée , Épiméuides , Dc-
nvsde Milct, Hérodore, Pisandre et
Cléon, desquels noire poète empn-.nta
une foule de choses, au rapport d'As-
rlépiades , élève d'Apollonius. Malgré
les s;ius, et peu!-ctre même à cause
des soins avec lesquels le poète revit
son ouvrage , dans sa retraite de
Rhodes , il n'est point parvenu à lui
donner l'invention et la chaleur d'un
style constamment poclique. « C'est un
» ouvrage estimable . dit Quiutilien ;
» mais crénéralement médiocre. » Lon-
giu n eu portait pas un jugement beau-
coup plusfavorjbîe; il n'y voit aucune
tache sensible , mais il trouve aussi
qu'il ue s'élève jamais. Il y a , en
général , plus d'érudition que de poé-
sie dans le poëme d'Apollonius j son
catalogue des Argonautes a exercé la
sagacité des c'rudils, et M. Krause, en-
tre autres, en a donné un assez bon
commentaire ,,à Hall , 1 798. L'on dis-
tingue, cependant, dans ^ Argon auli-
que , des beautés de détail du premier
ordre, et principalement les amours de
Médée , qui ont servi de modèle à
celles de Didou : c'est ce que l'on peut
dire de plus à la louange d'Apollo-
nius. Mais , pour bien apprécier le
mérite du modèle et le génie de l'imi-
tateur, il faut consulter la Poétique
de Scaliger et le Firgilius collalus
de Fulv. Ursiuus. Apolionuis était
élève de Caihmaque. L'ingratitude du
disciple , et l'amour-propre ombra-
geux du maître, ne tanièrent pas à
les brouiller. Ciliimaque fit un poëuie
( \'lbis ) pour satisfaire sa haine et
sa vengeance, et poursuivit Apollo'
uius ju^que dans son Hjmne à Apol-
lon, ïcrcntius Varro avait traduit
en vers btins, la poëme d'Apolio-
APO 019
nius; Ovide et Properce rapprlicnt
fréquemment cette traduction. Valé-
rius Flarcus, en traitant, long-temps
après , le même sujet , a surpassé de
beaucoup son modèle , pour la richesse
etla variété du plan, et l'emporte même
quelquefois sur lui , par la beauté des
détails; ce que Burmann, M. Har-
les , M. Wagner et M. Pindemonte,
prouvent très-bien , en rapprochant
des morceaux de l'un et de l'antre
poète , ( FoV' les éditions qu'ils ont
données de Valérius Flaccus, et sur-
tout la traduction en vers français de
M. A. Bureau delà Malie). VArgo-
nautique d'Apollonius parut , pour la
première fois , à Florence, i4<)t), chez
Laur. F. Alopa. Cette édition , de
format in-4". , en lettres capitales ,
et accompagnée des scholies grecques,
est excessivement rare ; ainsi que celle
de Venise par les Aides, en iSai,
in-8°. Henri Etienne fit entrer Apol-
lonius dans sa belle collection des
poètes héroïques grecs , iii-fol., Paris,
1 566 , et donna particulièrement à
Genève ( 1574 ■> in-4'' ) ? ""^ f*^''t
bonne édition du même poète , avec
les scholies en marge , et une préface
savante , dans laquelle il éclaire it quel-
ques dif^ficultés du texte et du com-
mentaire. Parmi les éditions plus ré-
centes, il faut distinguer celles d'Hœlz-
bn (Leyde, 1641, in-8°.), de Shaw
(Oxford, 1777, in-4^, et 1779,
i»-8°.), et surtout celle de Bruiick,
qui , le premier , a véritablement éta-
bli le texte de ce poète , et corrigé
un grand nombre de fautes gramma-
ticales et métriques : mais ces éditions
in-4°. et in 8°. manquent absolument
aujourd'hui : ce qui fait vivement dé-
sirer que M. B<ck aciiève la sienne.
Le i"'. vol. , qui a déjà paru ( Leips.
I 797 . in-8 '. ) , contient le texte d'a-
près Brunck , avec quelques correc-
tions , une L-jnne version latine , et
aso APO
une excellente table des matières. Il
existe , à la Bibliothèque impériale ,
un manuscrit coté sous le n". 2727 ,
et contenant beaucoup de scLolies
inédites, qu'on suppose avoir été écrites
par Théon , le scholiaste d'Aratus. Il
est à désirer que M. Beck , dans son
édition d'Apollonius , fasse imprimer
en entier ce précieux commentaire ,
l'un des plus instructifs que l'anti-
quité nous ait transmis. Apollonius a
été traduit , en anglais , par Green
et Fawkes; en italien, par le cardinal
Flangiui ( 2 vol. in-4''. , Roma, i 791,
avec notes, cartes et planches gra-
vées ) ; en allemand , par Bodmer
( Zurich , 1 780 ) , et eu français , par
M.Caussin , 1 797, in-8". A — D — r.
APOLLONIUS, fds de Molon d'A-
labande, dans la Carie, alla professer
la rhétorique à Rhodes , et son école
y jouit d'une grande réputation. Il
forma , par ses leçons , les deux plus
crands orateurs romains , Cicéron et
Jules César. Il renvoyait ceux quil
ne croyait pas faits pour devenir ora-
teurs , et ne leur laissait pas perdre
leur temps inutilement. C — b .
APOLLONIUS de Tyanes , philo-
sophe pythagoricien , naquit dans les
premières années de l'ère chrétienne , à
Tyanes , ville de Cappadoce. Son père,
nommé aussi Apollonius , et riche ci-
toyen, l'envoya à Tarse, à l'âge de
quatorze ans , pour y étudier , sous le
phénicien Euthydémus , la grammaire
et la rhétorique. Mécontent du luxe et
de l'indolence des citoyens, il obtint
de son père la permission de se retirer,
avec son précepteur , à vEgaî , ville
peu éloignée de Tarse. Il y connut les
diverses doctrines des philosophes. 11
eut pour maître Euxénus d'Héraclée,
dans le Pont , et pythagoricien ; mais
homme peu disposé à pratiquer les
austérités de sa secte. Apollonius , dont
l'esprit «tait plus «kvé, sentit uue ijû-
APO
pulsion irrésistible pour devenir dis-
ciple de Pylhagore , selon les règles
strictes de son institution. Il y avait
dans le temple d'jEgas , un temple con-
sacré à Esculape , fameux par les mi-
racles que le Dieu de la santé y opé-
rait en faveur des malades. Apollo-
nius s'y étabUt. Il s'abstint, d'après
les institutions de Pythagore, de toute
nourriture animale , et ne vécut que
de fruits et d'herbes , ne but point de
vin, et ne s'habilla que de toile, évi-
tant de se servir de tout vêtement
forme de substances animales. II
marchait pieds nus, et laissait croître
ses cheveux. Les prêtres du temple
lui trouvèrent des talents et des dis-
positions qui méritaient d'être culti-
vées dans leur école. Ils l'iiiitièreDt
dans leurs mystères. On allait jusqu'à
dire qu'Esculape lui-même se réjouis-
sait d'avoir Apollonius pour témoin
de ses cures. Nous ne voyons cepen-
dant pas qu'il ait rien tenté de mira-
culeux alors. Il ne fit que se servir de
l'intervention des Dieux, pour don-
ner plus de force à des leçons morales.
Il dit à un jeune Assyrien , malade
d'intempérance , que les Dieux accor-
daient toujours la santé à ceux qui
voulaient la recevoir ; et, en lui recom-
mandant l'abstinence , il lui rendit la
santé. A la mort de son père , Apollo-
nius vint à Tyanes pour l'ensevelir ,
ne se réserva qu'une faible portion
de la succession , et revint à M'^sc , où
il forma uue école de philosophie ;
mais pour être tout-à-lait pUh^go-
ricien , il s'assujétit aux cinq années
de silence. Pendant ce noviciat , il
visita plusieurs villes de Pamphylic
et de Cilicie , sans ])rononcer un
seul mot. Dans la ville d'Aspenda ,
quelques mots écrits sur des ta-
blettes , lui suffirent pour calmer
une sédition causée par la cherté des
grains. Lorsque le temps du silence
APO
fut expiré , Apollonius visita Antioche,
Ephèse, et d'autres villes, se liant sur-
tout avec les prêtres. Il cliercliait plus
à instruire les auties qu'à étudier. Il
annonçait sa doctrine d'un ton d'auto-
rité, et lorsqu'on lui en demandait la
raison , il répondait : « Quand j'eljis
» jeune , je cherchais la vérité j niain-
» tenant je dois enseigner ce que
)) j'ai appris : un saçîje doit parler en
» léu;islateur , et ordonner au peuple
» » la doctrine qu'il embrasse. » Apol-
A lonius résolut d'aller , par Babylone ,
aux Indes , pour converser avec les
brames. Il communiqua ce dessein à
ses disciples , au nombre de sept j
mais ils refusèrent de l'accompagner,
sur quoi il leur dit , en les quittant :
« Puisque vous êtes trop etTérainés
» pour une pareille entreprise , restez
» ici, et étudiez la philosophie ; moi,
» j'irai où la sagesse et les Dieux me
» conduiront. » Il quitta Antioche ,
suivi seulement de deux valets , et
trouva sur sa route un associé, nommé
Damis , qui le regarda comme une
divinité, et devint son compagnon et
l'historiographe de son voyage. A Ba-
bylone, il conversa avec les mages. En
entrant dans le palais du roi , il montra
son mépris pour la grandeur , en con-
versant avec Damis , comme s'ils eus-
sent été en voyage , sans jeter les yeux
sur les objets magniiiques dont ils
étaient entourés. Apollonius n'en de-
vint pas moins agréable au roi , qui
reçut de lui un grand nombre d'excel-
lents conseils. Il quitta Babylone ,
chargé des présents du monarque. Le
roi des Indes, Phraortes , qui demeu-
rait à Taxella, lui donna , pour le chef
des philosophes , ou gymuosophistcs
indiens , une lettre ainsi conçue : « Le
» roi Phraortes, à son maître la; chas
» et aux sages qui sont avec lui : Apol-
» lonius , homme très - sage , pensant
» que vous êtes plus sage que lui,
II.
APO 321
» vient vous voir , pour prendre con-
)> naissance de votre sagesse. Faites-
» lui part librement de tout ce quo
» vous savez, et soyez assuré que vos
» instructions ne seront point perdues.
» Il est le plus éloquent des hommes ,
» et a une excellente mémoire. Ses
» compagnons aussi méritent votre
» bon accueil, puisqu'ils savent aimer
» un pareil homme. » Après un sé-
jour de quatre mois parmi les Indiens,
Apollonius revint a Babylone. Il passa
de là en Iouic,et visita plusieurs villes.
Telle était la renommé*- qu'il avait
alors acquise, que lorsqu'il entra dans
Ephèse , les artisans même quittèrent
leurs travaux poiu' le voir. Dans ses
discours publics, il reprocha au peuple
sa paresse , et recomm?inda , d'après
la doctrine de Pythagore, la commu-
nauté des biens. On assure qu'il pré-
dit aux Ephésiens , l'approche d'une
peste, et de plus, des tremblemenis de
terre qui eurent lieu ensuite dans l'Io-
nie. A Perganie , et sur l'ancien em-
placement de Troie, il passa seul une
nuit , sur le tombeau d'Achille , et en-
suite informa ses compagnons que, par
le pouvoir d'un sortilège qu'il avait
appris dans l'Inde , il avait évoqué ce
héros de sa tombe , et avait eu avec lui
une conversation. A Lesbos , il con-
versa avec les prêtres d'Orphée , et fit
voile pour Athènes. Le prêtre ne voulut
pas le recevoir aux saints mystères ,
parce qu'il était un euchautcur j cepen-
dant , peu d'années après, il fut admis.
Il parla aux Athéniens de sacrifices, de
prières , de la corruption de leurs
mœurs, etc. Il visita encore Lacédé-
raouc, Oivmpie, et d'autres villes de la
Grèce, prétendant toujours prédire l'a-
venir, et ime des miracles. Ue la
Crète , Apulloniiis vint à Rome : Né-
ron venait de rendre un édil pour
bannir de la ville tous ceux qui pra-
tiquaieut la magie. Apollonius sentit
ai
ooL-i A P O
qu'il pouvait être compris dans cette
mesure : mais il n'en vint pas moins à
Rome avec huit de ses compagnons.
De trente-quatre , qui l'avaient suivi
en Italie, ils étaient les seuls qui fussent
restes avec lui. 11 fut conduit, le
Jendemaiu de son arrivée , au consul
Te'le'sinus , qui lui accorda la permis-
sion de visiter les temples , et de con-
verser avec les prêtres. Son séjour ce
fut pas long: « Il ressuscita, dit son
» historien, une jeune femme, et fut
» chassé de Rome par édit de Néron. »
Il voyagea en Espagne , où il ne resta
que jusqu'à la mort de cet •empereur.
Il retourna de là en Italie , pour aller
en Grèce, d'où il passa en Egypte,
où Vespasien cherchait à établir son
pouvoir. Ce prince connut ce que va-
lait un ausilinire tel qu'Apollonius ,
ayant un grand pouvoir sur le vul-
gaire , et se l'attacha en le consultant
comme une espèce d'oracle. En re-
tour, le philosophe employa son in-
iluence sur le peuple , en faveur de
Vespasien. Pendant son séjour en
Egypte, Apollonius fit, par curiosité,
un voyage en Ethiopie. A son retour,
il fut reçu favorablement par Titus,
successeur de Vespasien qui le con-
sulta sur des affaires du gouverne-
ment. Sur ce que cet empereur avait
refusé la couronne de la victoire, après
la prise de Jérusalem , Apollonius lui
écrivit cette épîtrc laconi([ue : « Puis-
» que vous refusez d'être applaudi
» pour une victoire sanglante, je vous
)) envoie la couronne de la modéra-
» tion. Vous savez à quelle sorte de
« mérite des couronnes sont dues. »
A l'avènement de Domiticn , il fut
accusé d'avoir e-scilé une sédition dans
FEgypie en faveur de JNerva , se pré-
senta volontairement devant le pré-
teur , et fut acquitté. Apollonius passa
rnsuite eu Grèce, visita le temple de
Jupiter Olympien, l'antie de Tro-
APO
phonius en Arcadie, et d'autres Keu'S
célèbres dans les fastes religieux. Il
s'établit enfin à Ephèse, où il ouvrit
une école pythagoricienne , et eut plu-
sieurs disciples. On dit (Dion Cassius
liv. 57 ; Philostr. , liv. 8 , c. 16)
qu'au moment où Domiticn périt ,
Apollonius , au milieu d'une discus-
sion publique , s'arrêta , el, changeant
de voix , s'écria : « C'est bien fait ,
« Stéphanus, courage ! tue le tyran. »
Ensuite , après un léger intervalle ,
il reprit : « Le tyran est mort ; il est
» tué à ce moment même ...» On ne
pourrait expliquer ce fait, s'il est vrai,
qu'eu admettant qu'Apollonius était
dans le secret de la conspiration. Après
cela, on ne sait plus rien d'Apollonius,
sinon que Nerva lui écrivit, lors de son
avènement à l'empire, pour lui de-
mander des conseils , etc. , et qu'il
reçut de lui une réponse énigmatique,
dont on conclut que bientôt ils se re-
trouveraient dans un autre monde. On
n'a point d'informations certaines sur
le temps, le lieu et le genre de sa mort :
il est probable , cependant , qu'il mou-
rut à Ephèse de pure vieillesse , pen-
dant le court règne de Nerva , ou
vers l'an g-i, approchant alors de cent
ans. Les notions sur cet homme
extraordinaire sont incertaines, Da-
m:s , qui fut son compagnon à Baby-
lone, est le premier qui en parle. Ses
Mémoires , qu'il laissa dans les mains
d'un ami, furent donnés à l'impéra-
trice Julie , femme de Sévère qui
commença à régner l'an 194. Ces
IMc'moires furent remis à Philostrate,
sophiste éloquent , alors à Rome , qui
se plut à embelUr l'histoire d'Apol-
lonius de contes merveilleux , etc. ,
qui discréditent beaucoup son ou\Tage.
On V trouve aussi de grandes con-
tradictions. Cependant , le récit de
Philostrate , avec toutes ses fautes ,
fut, environ cent ans après qu'il cul
A PO
paru, préféré à tous les autres, par
Hiéroclès, qui, le premier, voulut
établir une comparaison entre le Christ
et Apollonius. Eusèbe, en réfutant
cette attaque contre le christianisme ,
admet en général le récit de Phi-
lostrate, et soutient que, d'aiirès ce
récit même , Apollonius ne mérite pas
d'être comparé au Christ. 11 païaît
constant que l'existence d'Apollonius
ue peut être révoquée en doute ,
comme on l'a fait. On doit croire qu'il
fut un pythagoricien sévère ; qu'il
voyagea dans plusieurs contrées , et
fut un philosophe parmi les sages , un
magicien pour le peuple. Sa célébrité
est démontrée par dr-s preuves nom-
breuses. De son vivant, il fut appelé
Dieu, et accepta cette dénomination ,
en dis.'int que ce titre appartenait à
tout homme debien(Phi!ostr., liv. 8,
ch. 5). Après sa murt, il fut long-
temps compté parmi les divinités. I.cs
habitants de Tyanes lui dédièrent un
temple ; les Ephésiens lui consacrèrent
une statue, sous le titre d' Hercule
Alexicacus. Adrien recueillit ses Let-
tres ; Alexandre Sévère plaça son image
parmi celles d'Aluaham, d'Orphée,
de J.-C, etc.; Caracalla lui dédia un
temple , comme à une divinité venue
parmi les hommes; \mélicn ne sacca-
gea point Tyanes, par respect pour
sa mémoire; Ammieu Marcellin place
ce philosophe au rang des hommes
éminents qui ont été assistés de quel-
que démon , ou génie surnaturel , tels
que Socrate et Numa. Eunapius ,
d'ailleurs platonicien crédule et ami
des fables, parle d'Apollonius, comme
d'un être tenant du Dieu et de l'hom-
me, et ajoute qui. Philostrate aurait dû
intituler son histoire : la descente
d'an Dieu sur terre. Tout porte à
croii\ qu'. Apollonius réunissait le ca-
ractère d'uu sage et celui d'un impos-
tctu-j mais on ne voit pas trop que
APO 5i')
l'on puisse ajouter, avec Gibbon,
celui d'un fanatique. Il ne reste, des
écrits d'Apollonius, que son /fpologie
à Domitien, donnée sans doute, tout
au plus en substance , par Philostrate,
et quatre-vingt quatre épîtres, pour la
plupart philosophiques , dont la doc-
trine n'est pas strictement pythagori-
cienne , mais tient du système d'He-
raclite , sur l'unité de nature. Leur
style laconique est une présomptioa
en faveur de leur authenticité. Com-
melin les publia en i(3oi, in-S". , et
Etienne, dans ses Epistolia, etc., eu
157"^. La vie d'Apollonius a été tra-
duite en français; Berlin, 1774? 4 vol.
in-I•.^. M — d.
APOLLONIUS, philosophe stoï-
cien , natif de Chalcis , dans l'île
d'Eubée , on , suivant d'autres , de
Calchédon en Bithvnie , s'acquit une
telle réputation , qu'Antonin-le-Pieux
le fit venir à Rome, pour lui confier
l'éducation de Marc Aurèle. Ason arri-
vée, Antoniu, empressé de le con-
naître , lui fit dire de se rendre au
palais. « C'est au disciple à venir trou-
» ver son maître , répondit Apollo-
» nius, et non au maître à aller cher-
» cher le di;^ciple. » Autonin sourit à
celte réponse. « Apparemment, dit-il,
» que le philosophe trouve moins pé-
« nible de venir de Chalcis à Rome,
» que de sa demeure au palais. » Il se
hâia néanmoins de lui envoyer son
nouveau disciple. Marc Aurèle profita
beaucoup de ses leçons ; l'ouvrage que
nous avons de cet empereur contient
l'éloge de son maître. — Un autre
.Apollonius, surnommé Cronus, de la
secte mégarienne , fut disciple d'Eubu-
luie. Sirabon l'appelle Cronus Apollo-
nius , et veut que le deuxième nom lui
soit venu d'ApolIonie , sa patrie , port
delà Cyrénaïque, et le premier, del'â-
preté de son caractère. — On compte
encore deux autres Apollonius, l'un,
21..
3^4 APD
stoïcien, natif de Nyscedans l'Âttiqiie,
et disciple de Panaetius ; l'autre , péri-
pate'ticien , et à peu après contempo-
rain d'Adraste. K.
APOLLONIUS, fils d'Arcbibius,
grammairien d'Alexandrie, vivait sous
le règne d'Auguste , et Apion fut l'un
de ses disciples. Il nous reste sous son
nom , un Lexique des mots d'Ho-
mère , publié , pour la première fois ,
en grec et eu latin, avec des notes
très-copieuses, par M. deVilloison,
Paris , 1775, in-4''. , ou in-fol. , et
réimprime' , seulement en grec , avec
les notes de M.HermanTollius, Lugd.
Bat,, 1788, in-8". Le fonds de cet
ouvrage peut bien être d'Apollonius ;
mais comme ou l'y cite lui-même, il
est évident que des compilateurs plus
modernes l'ont mutilé en l'abrégeant ,
tt y ont ajouté beaucoup. C — a.
APOLLONIUS, surnommé Dys-
toLE, à cause de son bumcur cha-
grine, né à Alexandrie , y fleurit vers
l'an 1 58 de J.-C. Il passa sa vie dans
le Bruchium , quaitier de la ville oîi
beaucoup de gens de lettres étaient
logés et nourris ans dépens des rois
d'Egypte. Il est le premier qui ail ré-
duit la grammaire en système. 11 avait
fait, sur cette science, un grand nombre
d'ouvrages, qui sout perdus pour la
plupart ; mais dont Priscien a fait un
grand usage pour la composition de
sa Grammaire latine. Il nous reste d'A-
pollonius un Traité sur la syntaxe ,
en quatre livres , qui a été imprimé
plusieurs fois. La meilleure édition est
celle de Frédéric Sylburge, avec la tra-
duction latine d'^Em. Portus , et des
notes , Francofurti apud Wecliel He-
i-edes , 1 5ç)0, in-4". '■< *^^^ ^^^ fort rare.
On ti'ouve à la fin du Traité des dia-
lectes grecs de Maittaire , édition de
Reitzius , Hagae Comitum, 1758, et
édition de Sturtzius , Lipsiae , 1807 ,
guclques extraits de la grammaii'e
APO
d'Apollonius Dyscole , que Vossius
avait tirés d'un manuscrit de la bi-
bliothèque royale de Paris. Ce manus-
ciit , qui existe à la Bibliothèque im-
périale , est beaucoup plus ample que
les imprimés ; et ce serait rendre un
service important à la littérature grec-
que que de le faire imprimer avec les
autres traités du même auteur , qui
se trouvent dans différentes bibho-
thèques. On attribue encore à Apol-
lonius un Recueii d'histoires mer-
veilleuses , dont la meilleure édition
est celle qui a été donnée par Meursius,
Lugd. Bat. , 1620, in-4''., ^^ ^1"^ ^ ^^ô
réimprimée à Florence , dans le 7".
volume des Œuvres de Meursius,
et séparément à Leipzig , 1 79.», , in-8".
Il est fort douteux que cet ouvrage soit
de lui. Hcrodien , célèbre grammairien,
était fils d'Apollonius Dvscole. C — r.
APOLLONIUS , de" Rhodes, sta-
tuaire , fit, de concert avec ïauriscus,
le groupe immense , connu sous le-
nom de Taureau Farnèse. Il repré-
sente Zéthus et Araphion , attachant
Dircé aux cornes d'un taureau furieux,
pour venger leur mère Antiopc , qu'elle
avait persécutée. Antiope et un jeune
pâtre assistent au supplice de Dircé.
Ou ne peut guère douter que ce
groupe ne soit le même que Pline a
décrit , et qu'il attribue à ces deux
sculpteurs ; mais il s'en faut de beau-
coup que leur ouvrage nous soit par-
venu dans son entier. Il a subi une
rcstaïu'ation si considérable , qu'il n'y
reste d'antique que !a moitié inférieure
de la figure de Dircé, les deux troncs
et une jaudie de Zéthus et d'Amphion.
Antiope et le jeune pâtre étaicntmoin&
mutilés. Ces restes de la maiu des ar-
tistes grecs, sont d'un grand caractère;
les restaurations ont été faites assez
faiblement par un sculpteur de IMilan,
nommé Batista Bianchi. Suivant
Pliue, le morceau, sculpte d'uii seul
I
APO
bloG, ^ut apporte de Rhodes à Rome.
Apollonius et Tauriscus y avaient gravé
leurs noms. Cette inscription existait
sans doute sur quelques-unes des par-
ties perdues. Les débris antiques ont
f té retrouvés dans les bains de Cara-
calla. 11 est impossible de décider au-
jourd'hui si l'ouvrage était réellement
d'un seul morceau. D'après l'ordre
dans lequel Pline nomme ces deux
sculpteurs , on peut juger qu'ils ont
vécu quelques années après Alexandre-
le-Graud. L — S — e.
APOLLONIUS, statuaire, fils de
Nestor d'Athènes, vivait, selon Win-
kelmann , peu de temps après Alexan-
dre-le- Grand. C'est de lui qu'est
le fameux torse du Belvédère , qui
fut découvex't à la fin du iS'^. siècle,
et qui se voit à présent dans le Musée
des antiques. On le regarde comme le
débris d'un Hercule en repos, mais
dans lequel la force et la puissance
ont déjà piis le caractère calme et idéal
de la divinité. Quoique cette statue
n'ait plus ni tête , ni bras , ni jambes,
elle est cependant encore un chef-
d'œuvre de l'art. Elle a donné lieu à
de nombreuses dissertations , dont
l'utilité n'est pas bien démontrée j mais
elle a fourni aux artistes une foule
d'études excellentes. Michel-Ange l'a
dessinée sous tous les aspects ; il ne
pouvait se lasser de l'admirer , et
lorsque, dans sa vieillesse, il fui privé
de la vue, il se faisait conduire près de
ce chef-d'œuvre , en parcourait toutes
les formes avec ses mains savantes , et
devait encore aux beaux-arts des jouis-
sances que son malheur semblait lui
interdire. Le nom d'Apollonius est
gravé dans le marbre ; c'est d'après la
forme de quelques lettres grecques ,
qu'on prétend assigner le temps oîi
vivait le sculpteur; mais cette conjec-
ture ne peut être qu'approximative.
L— S— E
APO
25
APOLLONIUS (LiEviNTs), voya-
geur du I Q". siècle , né dans un bourg,
près de Bruges , et mort aux îles Cana-
ries, en se rendant au Pérou : ses écrits
sont : 1. Lihri V de Peniviœ regio-
nis inter novi orhis provincias cele-
berrimœ inventione et rébus in eaderti
gestis, Anvers, 1567, 111-8".; IL De
navigatione Gallorum in terram Flo-
ridam,deque clade an. 1 565 ab His-
panis accepta; ib. 1 568, in-8\ G — t.
APOLLÔNIUS( Guillaume ) ,
théologien de la communion des ré-
formés , né à Middelbourg , au com-
mencement du i^*". siècle, est connu
par une controverse avec Nicolas
Vedel , sur les limites du pouvoir du
souverain dans les affaires ecclésiasti-
ques. Les titres les plus bizarres,
Grallœ , Echasus , Grallator et
Grallopœus y figurent dans cette dis-
pute, et caractérisent le temps où ces
écrits furent publiés. Un des plus cé-
lèbres restaurateurs de la saine philo-
sophie , Chrétien Thomasius , en a
donné un ample extrait dans son his~
toria contentionis inler Imperium
et sacerdotium , Halle, l'ji'i, in-8.
On ne ht plus de pareils écrits, mais
leui' influence sur le progrès des idées,
dans une matière de la plus haute im-
portance , n'en est pas pour cela moins
remarquable. On a encore d'Apollo-
nius, Disputationes de legc Dei.
Middelbourg, i65d, in- 12. {^oy,
Vedel ). S — r.
APOLLONIUS COLLATIUS. K
Collatius.
APOLLOPHANES , un des pre-
miers disciples d'Érasistrate, était
médecin d'Antiochus III , roi de Sy-
rie, smnommé le Grand, et vivait
dans le 5 . siècle avant J.-C. Her-
raias , ministre d'Antiochus , exerçait
dans le royaume des concussions et
des violences qui répandaient partout
la désolation j personne n'osait portée
ùi6 A P O
au roi les plaintes du peuple, tant on
craignait la vengeance du mipislre op-
presseur. Apollopliane.s osa le faire ,
oubliant ses intérêts pour ceux de son
pays , et le ministre pre'varicatcur fut
dévoile et mis à mort, l'an :i'^o avant
J. -(1. Antioclius eut dès-lors une
grande confimcedans Apolloplianes,
qui lui donna d'excellents conseils.
Apres la mort d'Antiochus, Apollo-
phanes se retira à Smyrne , et y fonda
imeécole d'Erasistratcens qui florissait
encore du temps de Strabon.On croit
que c'est le morne que Galieu et Celse
citent avec éloge. G. et A — n.
APONO. Foj-. Abano.
APOSTOLIUS ( Michel ), né à
Constantinople, vint en Italie yers le
milieu du i5'. siè<Ie, après la prise
de cette ville par les ïurks. Il y fut
d'abord accueilli par ie cardinal Bcs-
sarion; mais ayant été par la suite
privé de ses secours , il passa dans l'ile
de Crète , où il g<ignait sa vie à copier
des livres. Il eut plusieurs fils dont le
plus célèbre fut Arsénius , évèquc de
Monerabasie. Il avait fait u!i grand
nombre d'ouvrages qui sont restés ma-
nuscrits. Le seul que je connaisse im-
primé est le suivant : Mich. AposloUi
parcemice gr. lat. ex vevsione el cuin
nolisPet.Panlini, Lugd., Bat., El-
zevirs , 1619, in - 4"- — Son fils ,
ApostoliUs ( Aristobule ) , est connu
par une espère de drame en vers ïara-
biques, intitulé : Galcomjomachie ,
ou le Combat des Chats et des Bats ,
qui se trouve à la suite dos Fables
d'Ésope , dans un grand nomîire d'é-
ditions. C — a.
APOSTOOL (Samuel), prédica-
teur de l'église des mennonites à Ams-
terdam , a donné son nom aux apos-
tolici, apostolicns, une secte des ana-
batistos , qu'on appcllr waterlandins,
parce qu'elle s'est particulièrement ré-
pandue dans le Watcrlaud , coutréo
APO
delà Nord-Hollande. En 166^, ces
mennonites du Waterland, qu'on dis-
tingue des mennonites flamands , et
qu'on appelle aussi memionites relâ-
chés ( crassîeres ) , se subdivisèrent
en deux partis , les galenistes , ayant
pour chef le médecin Galcnns Abra-
ham de Haan , et les adhérents de
Samuel Apostool. Galenus voulait ad-
mettre dans la société religieuse dont
il était un des ministres , tous ceux
qui croyaient la divine origine des
livres saints, pourvu que leurs mœurs
fussent pures et leur réputation de pro-
bité intacte : sans le diie ouvertement,
il se rapprochait bcaucoupdcs opinions
des sociniens. Samuel Apostool, tout eu
défendant les dogtnes caractéristiques
des mennonites sur l'absurdité du
baptême des enfants, sur l'inulilité
des magistrats dans le royaume de
Jésus-Christ , sur la forme visible de
ce royaume dès cette vie, etc., mainte-
nait l'orthodoxie sur tous les autres
points de la doctrine des réformateurs:
vainement quelques hommes sages ta-
chèrent de prévenir une nouvelle
scission dans la secte des waterlan-
diens. Depuis cette époque , les gale-
nistes et les apostoliens formèrent ,
dans cette secte , constamment deux
pirtis distincts, qu'aucnn acte public,
mais bien l'adoucissement général des
esprits à l'égard des opinions reli-
gieuses , et rindillorcr.ce du plus
grand nombre , ont seuls rapproi liés
dans les derniers temps. liOS aposto-
licns sont quelquefois désignés par
la dénomination drs mennonites du
soleil , à sause do l'imago qu'ils avaient
])rise pour symbole de leur lieu de
réunion. On n'a de Samuel Apostool
qu'un petit catéchisme , sous le titre
de Feritatis exercilatio , à la ré-
daction duquel son collègue Sanuicl
deDevI ont quelque part. On trouve,
sur Apostool et sou adversaire Ga~
APP
lenus , les détails les plus exacts dans
Herrn. Schyn Deduct.plenior Hislor.
jt/ie/i«omï. ,cliap.XVetchap. XVIII;
et sur le parti qui porte sou nom dans
Casp. Conimelini , Description de la
ville d' Amsterdam (en hollandais),
tome I, pag. 5oo ( /^. aussi Mosheim
Instit. Hist. eccle's., p. 1012 ).
S— R.
APPEL (Jacques), peintre , ne à
Amsterdam, le 29 novembre 1680,
d'une honnête famille , reçut une
bonne e'ducation ; et dès son enfance
annonça un goût particulier pour les
arts , en dessinant à la plume, ou en
de'coupant de petites figures d'ani-
maux , etc. On le plaça comme élève
chez Timothëe de Graef , paysagiste.
Les leçons de cet artiste , celles de
Meyring, les ouvrages de Tempête ,
et l'étude assidue de la nature , for-
mèrent tellement le jeune Appel ,que,
dès l'âge de dix-huit ans , il s'était pla-
cé au rang des bons artistes. Après
avoir vu et étudié un g-rand nombre
de sites , surtout aux environs de
la Haye , il revint à Amsterdam , où
il travailla beaucoup. Il se maria à
vingt-deux ans , et peignit ensuite les
portraits des principaux habitants de
Sardam , qui lui firent faire aussi
des tableaux d'histoire ctdes paysages.
Revenu de nouveau dans le lieu de
sa naissance , il établit une espèce de
manufacture de peinture , où , sous sa
direction, d'autres arlistes exécutaient
toutes sortes de sujets. Cette entre-
prise enrichit Ajjpel , qui d'ailleurs
ne négligeait point de travailler lui-
même. Jl fit un grand nombre de ta-
bleaux qui lui furent très-bien payés.
Ce fut siu'tout dans le paysage qu'il
eut les succès les plus nombreux et les
plus assurés. Ou peut dire que son
bonheur l'accompagna constamment
jusqu'au dernier moment de sa vie ;
car, s'étant couche un soir sans res-
A P P 527
sentir aucune incommodité , il fut
trouvé mort dans son lit le lendemain ,
-j mai 1751, à l'âge de près de
soixante-dix ans. Selon Descamps,
dont l'ouvrage a fourni ces détails ,
Appel , très-inférieur à Berghem , était
cependant supériem' à plusieurs pay-
sagistes esfimés. D — T.
APPIANO ( Jacques d') , tyran de
Pise. Son père, Jacques d'Appiano,
né de basse condition, sur le terri-
toire de Florence, s'était attaché aux
Gambacorti, chefs d'vm parti dans
Pise. Il eut la tête tranchée avec plu-
sieurs d'entr'eux, en 1 548, par ordre
de l'empereur Charles IV. Pierre Gam-
bacorti, rappelé dans sa patrie en
1569, y ramena Jacques d'Appiano,
à qui il accordait la plus eutièie con-
fiance, et il le fit nommer chancelier
perpétuel de la répubhque. Appiano ,
rempli de talents et d'adresse, se ren-
dit maître des principales affaires, et
s'assura une foule de créatures indé-
pendantes de celles de son protec-
teur. Il embrassa le parti Gibelin avec
un zèle extrême, et contracta une
étroite alliance avec Jean Galéas Vis-
conti, seigneur de Milan. Le 21 octo-
bre 1 592 , Appiano excita un tumulle
dans Pise, en faisant massacrer deux
de ses ennemis; GamlDacorli, qu'on
avait vainement voulu prévenir contre
lui , ne pouvait croire à une trahison
de son vieil ami ; ils avaient vécu
et souffert ensemble, et tous deux
avaient déjà passé soixante-dix ans.
Gambacoiti renvoya donc des parti-
sans qui prenaient les armes pour sa
défense. Il demanda une conférence
à son ami , et , dès qu'il fut auprès de
lui , Appiano le fit massacrer. Les fils
de Gambacorti , tous deux blessés ,
tombèrent au pouvoir d'Appiano , qui
les fit empoisonner dans leur prison.
Les maisons de tous les amis des Gam-
bacorti furent abandonnées au piilag;e ^
328 A P P
et lo 0.5 octobre, le tj'ran obtint clu
peuple intimide , le titre de seigneur
de Pise. Jacques d'Appiano régna dans
Pisc, plutôt comme une créature de
Jean Gale'as, que comme vin prince
indépendant. Il s'engagea dans toutes
ses intrigues contre les Florentins,
et attira sur son pays, à plusieurs
reprises, les malheurs de la guerre.
Cependant, son fils aÎ!ié , le seul en qui
il eût reconnu le talent de gouverner ,
mourut avant lui , et Jean Gale'as
voulut de son vivant même , ôtcr au
second son héritage. Il essaya, le 2
janvier 1 398 , de faire occuper , par
surprise, toutes les forteresses de Pise;
Appiano résista, les soldats du duc
de ^lilan furent dévalisés, et le seigneur
de Pise éclairé sur la perfidie de son
allié , fut sur le point d'embrasser le
pai'ti des Florentins. Cependant, Jean
ôaléas réussit à l'apaiser , Appiano
étar>raort le 5 septembre de la même
année. S. S — i.
APPIANO (Gérard), fils et suc-
cesseur de Jacques, capitaine et sei-
gneur de Pise. Se sentant mal afïermi
dans sa domination, il entra aussitôt
en négociation avec ses voisins. U
voulut d'alwrd s'assurer l'alliance des
Florentins; mais il leur demanda de
.<:e rendre garants de sa tvrannie , et
d'entretenir une garde pour sa défense.
Les Florentins rejetèrent ces condi-
tions , qui leur p;n'urent honteuses
pour un peuple libre. Alors, Gérard
tl'A]ipiauo se jeta dans les bras du duc
de Mi'.an; il lui vendit la seigneurie de
Pise poiu' le prix de deux cent mille
florins, se réservant, seulement la
souveraineté de Picmuino et de l'île
tl'Elbe. Ce fut là qu'il se retira au
mois de févri'^r i")»)») , emportant
avec lui les malédictions de ses con-
ritoyens. Ses descendants sont de-
meurés pendant deux siècles princes
J« Piombino, a2)rès quoi cette sou-
APP
reraineté à e'té réunie à la couronne
de Naples. S. S— i.
APPIANO , prince de Piombino,
après que Gérard d'Appiano ( Foj.
l'article précédent ) eut échangé , en
1099, la seigneurie de Pise contre la
principauté de Piombino. Il évita de se
mêler dans les guerres de ses voisins ;
son mariage avec Paula Coloona , sœur
du pape Blarlin V , assura la protec-
tion de ce pontife à sa famille. Lui-
même était mort avant l'élévation
de son beau-frère au pontificat ; mais ,
en mourant, il avait déclaré la répu-
blique florentine tutrice de son fils
Jacques 11 d'Appiano. Les Florentins
exercèrent fidèlement cette tutelle; ils
protégèrent, pendant tout le i5^ siè-
cle, les difTerents princes de la mai-
son d'Appiano, et ceux-ci s'engagèrent
souvent au service de la république ,
comme condottieri. Lorsque Cosme
P"". de Médicis parvint, en i557, à
la dignité de duc de Florence, il ne
fut point satisfait du pouvoir souverain
qu'il avait usurpé dans sa patrie ; il
voulut soumettre toute la Toscane , et
la pi tite principauté de Piombino ex-
cita sa cupidité , à cause des riches
mines de fer de l'île d'Elbe , qui en font
partie; mais Jacques V d'Appiano, qui
régna jusqu'en i545, s'était mis sous la
protection de Charles-Quint ; dépouillé
plusieurs fois de ses états, sous diOe-
rents prétextes , par Médicis, il fut au-
tant de fois rétabli par l'empereur dans
sa souveraineté. Le duc de Florence ,
renonçantà conquérirla principautéde j
Piombino , chercha dès-lors à s'assu-
)er l'alliance de ce petit état. Jacques
VI d'Appiano qui , en 1 545 , succéda
à son père, demeura, pendant tout son
règne, dans la dépendance absolue des
Médicis. Il avait laissé conquérir aux
corsaires de Barbarie les deux îles
de Pianosa et de Monfc-Chrislo , qui
faisaient partie île sa principauté , et
APP
il était sur le point de vendre l'île
d'Elbe au grand-duc François, lors-
qu'il mourut le i5 mai i585. Avec
lui finit la ligne lëgitimo des Appiani;
mais il avait laissé deux fils natuiels,
dont l'aï, é, Alexandre, avait été légi-
timé par l'empereur. En succédant à
la principauté de Plombino , Alexan-
dre fut obligé de recevoir une garnison
espagnole. Sa femme, Isabelle de Men-
doça , de concert avec ie commandant
espagnol qu'elle aimait , et avec les
habitants de Piombino mécontents de
leur ])riuce , fit assassiner Alexandre
d'Appiano , le 28 septembre 1 58().
La maison d'Appiano étant ainsi
éteinte, la principauté de Piombino
demeura long-temps en séquestre , en-
tre les mains des Espagnols , malgré
les instances des grand-ducs de Tos-
cane , qui voulaient l'acquérir à tout
prix. Le conseil auliquc adjugea, vers
l'année 16 19, ce fief de l'empire, à la
maison de Mendoça , comme plus pro-
che héritière des Appiani. Les Ludo-
vici l'achetèrent ensuite , et le réuni-
rent à la principauté de Venosa ; en-
fin , les Buoncompagni, ducs de Sora ,
en ont hérité, et l'ont possédé jusqu'à
nos jours. S. S — i.
A P P I E N , historien grec , né à
Alexandrie , vécut sous les empereurs
Trajan, Adrien et Antonin. Il vint de
bonne heure s'établir à Rome , où il
se distingua dans la profession d'avo-
cat, et fut nommé /^roa/rflîor, ou su-
rintendantdes aiïaires domesliquescles
empereurs ; quelques biographes ajou-
tent qu')l fut envoyé en Egvpte comme
gouverneur de cette province. Appica,
dans son histoire , parle de la destruo-
1^. tion de Jérusalem, par Adrien , comme
u-' d'un événement contemporain, et il
dit, dans sa préface, que la puissance
romaine avait duré 900 ans : ce qui
prouve qu'il écrivait vers la 11*'. an-
cée du règne d'Antonin. Son histoire,
APP 5ci9
qui e'tait diviseV en 'i4 livres, n'était
poil. t asservie a l'ordr'^ chronologique;
m.'jis à !''U\ir<r des nations et des pays
dont parie l'historien. Il raconte sans
interruption , et séparément, tous les
événements qui ont rapport, soit à l'I-
tahe , soit à l'Afrique, ou à d'autres
contrées. L'ensemble de son histoire
générale se compose ainsi des histoùes
particulières de plusieurs peuples et
de plusieurs provinces. Cette méthode,
qui a été quelquefois imitée en par-
tie chez les modernes , et surtout
par Gibbon , présente quelques avan-
tages ; mais elle a le grand inconvé-
nient de détourner l'attention du su-
jet principal. Il est difficile de suivre,
dans Appien, les progrès de la gran-
deur et de la décadence de l'empire
dont il a fait l'histoire. Cependant ,
les renseignements qu'il nous donne ,
jettent de grandes lumières sur l'his-
toire de sOn temps, et sur la géogra-
phie ancienne, (/est par lui que nous
savonsque l'empire romain était borne
à l'est par l'Euphratc, le mont Caucase,
la grande Arménie et la Colchide, et au
nord par le Danube , au-delà duquel
il dit que les Romains possédaient en-
core la Dacie , aussi bien que plusieurs
autres pays au-delà du Rhin. Selon le
même historien , ils étaient maîtres
de la moitié de la Grande-Bi'etagne ;
mais ils négligeaient le reste. Ils pos-
sédaient p'usieurs autres contrées qui
leur coûtaient plus qu'ils n'eu reti-
raient, et ils ne les conservaient que
comme un poste militaire d'oii ils
pouvaient marcher à de nouvelles cou-
quêtes. Telles étaient les provinces de
la grande Arménie. Appien nous ap-
prend encore qu'il vit à Rome plusieurs
ambassadeurs de peuples barbares ,
qui désiraient se soumettre à l'empire;
mais qui furentrefusés par l'empereur,
parce qu'ils étaient pauvres. Quelques
érudits ont peusé qu'il fallait lire Ap-
55o A P P
pien avec deïîauce ; inaJs d'autres , et
Photius à leur tcte, soutiennent que
cet historien est plein de respect pour
]a vérité , et qu'il montre surtout une
grande connaissance des affaires mili-
taires, a Eu lisant l'histoire d'Appicn,
» ajoute Photius, on croit assister aux
« batailles qu'il décrit. » On admire
surtout les discours qu'il met dans la
bouche des personnages , qui , sans
avoir l'éloquence de ceux de Tite-Live,
sont remarquables par la force des rai-
sonnements. Quel que soit le juge-
ment qu'on peut porter sur le mérite
d'Appien, et sur l'ensemble de son
ouvrage , ou doit avouer que les cinq
livres qui nous restent des guerres
civiles , sont un des morceaux les plus
précieux qui nous soieut parvenus de
l'antiquité. Si ce morceau était perdu ,
une foule de détails curieux nous se-
raient restés inconnus. Appieu des-
cend , dans cette partie de son ou-
vrage , jusqu'aux moindres particula-
rités; son récit est simple et sans or-
nement; mais il porte tellement l'em-
preinte de la vérité, qu'on croit être
témoin des événements qu'il raconte.
Ses chapitres sur les proscriptions de
îilarius et de Sylla , sur celles de
ti iumvirs , seront toujours une lecture
attachante pour ceux qui ont eu le
malheur d'étudier le cœur humain à
l'école des révolutions. Montesquieu a
beaucoup profité de la lecture d'Ap-
pien; à l'aide du récit de l'hist(>rien ,
il peint à grands traits la corruption
des Romains; mais le sim])le et véri-
dique Appicn la décrit peut-être d'une
manière plus énergique ; car , après
avoir peint tous les crimes qu'enfantent
l'ambitiou et l'avarice, il consacre un
chapitre aux vertus qui se montraient
au milieu du désordre général , et ,
dans ce chapitre , il ne trouve à louer
que la conduite des femmes et des
e&clayes. 11 ne nous reste que des
APP
extraits de ses cinq premiers livres,
contenant l'histoire des Romains sous
leurs rois, de leurs guerres en Italie ,
di- celles des Samnites, de celles des
Gaulois ( dont il nous reste un abré-
gé très-succinct ) , et de celles de la
Sicile et des îles. Les trois livres
suivants , qui contiennent les guer-
res d'Espagne , celle d'Anuibal et les
Puniques , nous sont restés ; nous
avons cependant perdu la seconde
partie des Puniques , qui contenait
les guerres de la ^uraidie. Il nais
resîe des extraits du IX*". sur les guerres
de Macédoine. Le X*. , sur les guerres
de la Grèce et de l'Ionie, est entière-
ment perdu. 11 ne nous reste que la
première pariic du XI*^. livre qui con-
tenait les Syriaques et les Parthiques.
Ce que nous en avons eu effet sous lo
nom d'Appius, sur la guerre des Par-
ihes , n'est point de lui. C'est tout
simplement un extrait des ^ ies de
Crassus et de Marc Antoine, de Plu-
tarque. Le XIP'. livre sur les guerres
de Mithridate est entier. I^es livres
Xlir . et XYIP. contiennent l'histoire
des guerres civiles, jusqu'à la mort de
Sextus Pompée, et sont entiers. 11 ne
nous reste rien des cinq suivants qui
contenaient la suite des guerres civiles,
et l'histoire de l'empire romain sous
les empereurs, pendant cent ans. Le
XXIIP. sur les guerres d'Illyrie, nous
reste. Le XXIV''. sur les guerres d'Ara-
bie, est entièrement perdu. La première
édition grecque d'Appicn, a ])aru à
Paris chez Charles Etienne, i53i ,
iu-fol. Il y manqueles guerres d'Anni-
bal, et les Puniques qu'Henri Etienne
publia pour la première fois , en 1 557,
in-8"., et les guerres d'Illyrie, publiées
par D. Hœschelius, Augustae Vindcli-
corum, i599,iu-4". ("e dernier livre
manque aussi dans l'éd. gr. et latine ,
donnée par H. Etienne, i Hg.i, in-fvd, ,
et dans cdlcqui a été donuce par Alex»
APP
ToIUus , Amsterdam, 1670, 2 vol. in-
8'. Les extraits qui nous restent des
livres perdus , sont tirés des Excerpta
de legationibus , publiés par Fulvius
Ursinus , Antwerpias, 1D8.2, in-4°.,
et des Excerpta de virtutihus et vitiis ,
publiés par Henri de Valois, Paris,
i654,iii-4°'Tousces extraits se trou-
vent réunis dans l'excellente édition
d'Appien , que M. Schweigbaeuser , a
donnée , à Leipzig 1 -85 , 5 vol. in-B".
grec et latin. L'bistoire d'Appien a été
traduite en allemand , par Seybold ,
1 795 ; en français, par Claude Seyssel,
Lyou,in-fol., i544j par Odct- Desmar-
res , in-fol., Paris, 1639, in-lbl. Les
cmq livres des guerres civiles ont été
traduits séparément par M. Combes-
Dounous , Paris, 1808, 5 vol. in-S".
M— D.
APPIUS CLÂUDIUS, cbef de la
famille Claudia, l'une des plus illustres
de Home, et surtout remarquajjle par
une opposition constante aux plébéiens.
L'an 25o de Rome(5o4 avant J.-C. ),
Appius Claudius vint s'établir à Rome.
Il était né chez les Sabins, de parents
distingues , et s'appelait alors Actius
Clausus. Il s'était opposé aux prépara-
tifs de guerre que ses compatriotes
faisaient contre les Romains, et, n'ayant
pu les déterminer à prendre un p irti
pacifique, il avait renoncé pour tou-
jours à eux, emmenant avec lui, dans
sa patrie adoplive , 5ooo familles
qui lui étaient attachées par les liens
du sang ou par ceux de la dépen-
dance. On reçut aA^ec joie cet accrois-
sement de population, Appius fut classé
dans l'ordre des patriciens, et admis au
nombre des sénateurs. On lui donna
vingt-cinq acres de terre, et chacun
de ceux qui étaient venus avec lui, en
eut deux, avec tous les priviléc;es des
citoyens romains. Dans la neuvième
année de son séjour à Rome, il fut
nomme consul. Le scuat voulait l'op-
APP 35i
poser au peuple qui murmurait, sur-
tout à cause des rigueurs exercées
contre les débiteurs. L'inflexible Ap-
pius soutint que tout adoucissement
aux volontés de la loi était une injus-
tice envers les créanciers. Lorsqu'il
fallut marcher contre les Volsques,
empressés de profiter des circonstan-
ces, aucun citoyen ne s'enrôla. Servi-
lius, collègue d' Appius, ne put, mal-
gré sa popularité , mener contre
l'ennemi qu'un petit nombre de
soldats. Ils lui suffirent, cependant,
pour vaincre ; mais , à l'intérieur ,
Rome n'en fut pas plus paisible. La
vue d'un vieillard qui s'était trouvé à
vingt-huit batailles, et qui, chargé
de fers, montra au peuple ses cica-
trices et les marques récentes des ver-
ges dont on l'avait frappé, mit les
citoyens en fureur ; Appius futcontraint
de se réfugier dans sa maison; mais il
se montra de nouveau dans le sénat,
et soutint que toute faiblesse serait
une source de troubles. Sur ces entre-
faites, les Yolsques firent une nouvelle
irruption, plus redoutable que la pre-
mière, et Servilius obtint, enfin, que
le peuple combattrait sous ses ordres.
Il remporta une victoire complète, et,
pendant ce temps, Appius, reste' à
Rome, fît trancher la tête à 5oo otages
donnés par les Volsques. Lorsque son
collègue revint, et demanda les hon-
neurs du triomphe, Appius engagea le
sénat à le lui refuser, sous prétexte
que Servilius s'était montré trop com-
plaisant et trop libéral envers les sol-
dats, ce qui fut cause que Servilius
donna un exemple de mépris pour les
lois et le premier corps de l'état, qui,
dans la suite, ne fut que trop suivi. Il
se décerna lui-même les honneurs du
triomphe, et marcha au Capitole, aux
acclamations du peuple et de l'armée,
Appius, invariable dans sa conduite ^
ne vit pas plutôt cette guerre terminée,
'32 APP
que, malgré lo3 assurances données au
peuple par Scrvilius , il ordonna qu'on
livrât de nouveau à leurs créanciers
ceux qui avaient été mis en liberté
pour marcher conti'e l'ennemi. Lors-
que dans la suite, le peuple se retira
sur le Mont-Sacré, il fut le seul sénateur
qui s'opposât à ce qu'on entrât en né-
gociation avec ceux qu'il appelait des
rebelles; lors du procès de Coriolan , il
fit sentir , dans un discours vélic'raent ,
que le procès de ce patricien était une
insulte au sénat. Un homme tel qu'Ap-
pius ne pouvait pas adopter le projet de
la loi agraire. Aussi , lorsque Sp. Cas-
sins ( P'oy. Cassius), fit cette proposi-
tion , qui devint pour Rome la source
de tant de discordes, Appius déclara
qu'il fallait, à la vérité, s'approprier une
partie des terres conquises, mais les
Tendre, et en déposer le produit dans le
trésor public. Le sénat se servit ensuite
du nom d' Appius, comme d'un épou-
vantail. Trompé plusieurs fois dans
son attente, le peuple refusait de s'en-
rôler pour combattre les Veiens; mais,
lorsque les patriciens eurent répanda
le bruit qu' Appius allait être nommé
dictateur , la seule crainte de voir un
homme si sévère investi du pouvoir
suprême . fit prendre les armes à la
inidtitude. Appius donna ensuite au
îiénat un conseil très-utile . et qui fut
souvent suivi dans la suite. Ce fut
celui de s'assurer toujours de quelques
tribuns du peuple, afin qu'ils s'oppo-
sassent à ce que leurs collègues pro-
poseraient de désagréable aux patri-
ciens. Depuis cette époque, l'histoire
ne parle plus d' Appius , qui sembla
léguer à ses descendants sa fierté et
sa haine contre le peuple. D — t.
APPIUS CLAUDIUS , fils du pré-
cédent , se montra , s'il se peut, encore
plus inflexible et plus ennemi des
plébéiens , que son père. L'an 285 de
Rome (4;! ^'^' J'-C-)> ^ts patriciens
ATP
le firent nommer consul , quoiqu'il ne
se fût pas trouvé aux comices. Le tri-
bun du peuple Voléron avait proposé
une loi , portant qu'à l'avenir les tri-
buns seraient élus par ti'ibus, et non
par curies. Appius s'y opposa forte-
ment , et mit en usage un moyeu au-
quel le sénat avait eu souvent recours,
celui d'occuper par une guerre étran-
gère l'inquiète activité de la multitude.
Après de violents débats, la loi de Vo-
léron fut adoptée, et les deux consuls
entrèrent en campagne. Capitolinus ,
aimé de ses soldaL<;, remporta plusieurs
avantages sur les Eques ( fo}-. Capi-
tolinus). Les troupes d'Appius , au
contraire , qui l'appelaiant le tyran de
l'armée , conspirèrent, non contre sa
personne , mais contre sa gloire , et se
laissèrent battre par les Yolsques.
Appius , irrité , cita toute l'armée à son
tribunal. Les magistrats du peuple ob-
tinrent de lui qu'il ne donnât aucune
suite à cet étrange emploi de son au-
torité; mais il trouva bientôt une autre
occasion d'exercer sa vengeance. Son
arrière-garde avant été mise en fuite ,
il fit décimer les soldats , trancher la
tête aux chefs qui avaient quitté leurs
rangs , et battre de verges jusqu'à la
mort , ceux qui avaient perdu leurs en-
seignes ; il s'opposa l'année suivante,
avec tant de chaleur, au partage des
terres conquises, qu'il détermina le sé-
nat à rejeter cette proposition. Les
tribuns voulant se délivrer d'un si re-
doutable adversaire , l'accusèrent de-
vant la peuple d'être ennemi de la li-
berté publique ; Appius se présenta fiè-
rement à l'assemblée; et , loin de s'a-
baisser aux excuses et aux prières, il
se défendit «vec tant d'énergie , que le
peuple n'osa pas le condamner. Les
tribuns , frappés de stuf/eur , prirent
le parti de remettre le jugement à un
autre jour ; mais Appius ne vécut pas
jusqu'à celle époque. Selon quelques
APP
auteurs, il mourut de maladie; selon
d'autres , dont l'opinion paraît vrai-
semblable, il prévit qu'il serait con-
damné, et se donna la mort. Les p!e-
be'iens qui l'avaient tant haï pendant
sa vie , n'insultèrent point à sa mé-
moire . et ce fut en vain que leurs tri-
buns tentèrent de lui faire refuser les
honneui's funèbres. Les consuls per-
mirent à son fils de prononcer sou
cloge public, et le peuple l' écouta avec
recueillement, D — t.
APPIUS Claudius Crassi^us , le
décemvir, fut nommé consul l'an 3o3
de Rome ( 45 1 ans av. J,-C, ), et
peu de temps après , au grand éton-
nement du sénat, il appuya la propo-
sition de la loi Terentia , qui devait
changer la forme du gouvernement,
bien persuadé qu'il aurait plus de pou-
voir sous un nouveau titre. Il fut ef-
fectivement nommé décemvir, et eut
pour collègues Génucius, le second
consul , les trois sénateurs qui avaient
e'îé envoyés en Grèce pour transcrire
les lois de Solon, et d'autres person-
Bages consulaires. Les commencements
de cette magistrature extraordinaire
furent assez doux. Appius se montra
même plus populaire qu'aucun de ses
collègues. Quand les dix. tables de lois
furent dressées, et quand les pouvoirs
des décemvirs furent expirés, ils firent
procéder à de nouvelles nominations,
sous prétexte de dresser encore deux
tables , et Appius mit tout en usage
pom- être réélu. Malgré l'orgueil natu-
rel à la famille Claudia , il eut recours
aux bassesses auprès de la multitude.
Les patriciens le choisirent pour pré-
sider l'assemblée, dans l'espoir qu'il
aurait assez de pudeur pour ne pas se
proposer lui-même; mais il trompa
leurs conjectures , fut réélu , et fit
choisir ses amis pour remplir les neuf
autres places ,à l'exclusion de plusieurs
candidats dislingués^ cî eulr'rfutres de
APP ^53
G. Claudius son oncle. On nomma d'a-
bord six autres pati'iciens, à qui leur
attachement aux intérêts d'Appius tint
lieu de mérite. Enfin , pour port» r au
comble le fol enthousiasme du peuple,
Appius proposa, et fit encore éhre
trois plébéiens. Alors, il jeta le mas-
que , et ne songea plus qu'à perpétuer
son autorité. Ses collègues entrèrent
facilement dans ses projets. Chacun
d'eux se fît précéder de douze licteurs,
et accompagner d'une foule de jeunes
patriciens qui recevaient d'eux , com-
me un don, l«s biens des condam-
nés , et qui préféraient , dit Tite-Live ,
la licence pour eux-mêmes à la liberté
publique. Un grand nombre de patri-
ciens , obligés de fuir des tyrans dont
les jugements étaient sans appel, s«
retirèrent à la campagne et dans des vil-
les voisines. Les décemvirs publièrent,
aux ides de mars, les deux tables de
lois qui devaient compléter le nomljre
de douze , et le peuple fut content de
ces lois si chèrement achetées, à l'ex-
ception de la dernière , qui défendait
aux patriciens de s'allier, par des ma-
riages, aux familles plébéiennes. Les
décemvirs attachaient une grande im-
portance à ce qu'il n'existât pas de
rapprochement entre les deux ordres.
L'instant où leur puissance devait
cesser étant arrivé , ils la prorogèrent
de leur propre autorité. Montesquieu
â caractérisé en peu de mots cette épo-
que funeste. « Ou nt manifestement,
» dit-il, pendant le peu de temps que
» dura la tyrannie des décemvirs, à
» quel point l'agrandissement de Rome
» dépendait de sa hberté; l'état sembla
» avoir perdu l'arae qui le faisait mou-
« voir.» En effet, les Sabins et les
Eques profitèrent des circonstances
pour ravager le territoii'e romain. Les
décemvirs alarmés convoquèrent le
sénat , et le peuple fit cette réflexion
douloureuse, quq c'était à ses enacaiis
S54 APP
qu'il était redevable de celte omtre
de liberté. Apres de longs débats , on
parvint à lever des troupes , qui se mi-
rent en marche sous le commandement
de huit des dëcemvirs. Appius et Oppius
restèrent à Rome avec deux légions.
Les Romains se laissèrent vaincre, ne
voulant pas procurer de la gloire à des
chefs qu'ils haïssaient. Appius mandait
.sans cesse à ses collègues d'employer
les moyens rigoureux , et il n'était que
trop écoute. Plusieurs soldats périrent
par trahison, et entr 'autres le fameux
iSicinius Dentatus (^. Sicinius) dont
tout le crime étaitde s'être expriméavec
trop de franchise sur les malheurs de
son pays. ]\Iais l'abus du pouvoir en
amena enfin le terme. Appius aperçut
un jour, dans la place, la jeune V^irgi-
nie , fille de Virginius , de la classe des
plébéiens, mais très-considérc dans
l'armée. Virginie, douée d'une rare
beauté, était promise à Icilius, qui
avait été tribun du peuple, et devait
l'épouser à la fin de la campagne. Ap-
pius conçut pour elle une passion vio-
lente; mais il était marié : le divorce,
quoique autorisé, était jusqu'alors sans
exemple; et la propre loi d'Apicius, qui
interdisait toule union conjugale entre
les patriciens et les plébéiens, nelui per-
mett.iitd'cmplover que la séduction ou
la violence. Le premier parti ne lui réus-
sit pas : il eut recours au second. Par
son ordre, un de ses clients , appelé M.
(^laudius, entra un jour, à la tête d'une
troupe de misérables, dans l'école pu-
blique oîi était Virginie, et, la récla-
mant comme fille d'une de ses escla-
ves , il la saisit et voulut l'entraîner. Le
peuple l'obligea à la remettre en li-
berté; mais Claudius la cita aussitôt
au tribunal d'Appius, qui décida que
provisoirement la prétendue esclave
suivrait sou maître. Le peuplederaanda
à grands Cl is que les parents de Vir-
ginie fussent entendus. Numitorius,
APP
son oncle, parut, ainsi qu'Icilius , son
fiancé; ils dévoilèrent les desseins cri-
minels d'Appius. Un tumulte horrible
s'ensuivit, et le décemvir fut oblige
de laisser Virginie aux mains de sa
famille; mais il annonça qu'il pronon-
cerait le lendemain son jugement. Vir-
ginius , mandé pai- son frère et par
Icilius , pai-ut sur la place en habits de
deuil, ainsi que sa LLIle. Il donna des
preuves cerfcùnes des liens sacrés qui
les unissaient; mais Appius , plein de
confiance dans le nombre de ses sa-
tellites, ordonna à Claudius de s'em-
parer de son esclave. Alors Virginius
demanda au décemvir la permission
d'interroger de nouveau la nourrice
de Virginie, en présence de Virginie
elle-même, afin, disait-il, d'avoir au
moins la consolation d'être détrompé.
Appius y consentit. Aussitôt ce père
infortuné embrassa tendrement sa
fille , et, la conduisant peu à peu vers
une boutique de boucher , il v saisit
un couteau ; puis , se tournant vers
elle : « IMachère fille, dit-il, voici i'u-
« nique moyen de conserver ton hon-
)) neiir et ta liberté; va, Virginie, va
)) rejoindre ta mère et tes aïeux, libre
» et pure. » A ces mots , il lui enfonça
le couteau dans le sein ; et , le montrant
tout ensanglanté à Appius : «C'est par
» ce sang innocent , lui cria-t-il, que
» je dévoue ta tête aux dieux infer-
» nauxl » Appius commanda qu'il fût
arrêté ; mais V irgijiius s'enfuit et arriva
au camp. Valérius et Horatius, séna-
teurs et ennemis du déccmvirat, ap-
pelèrent à la vengeance le peuple dont
le spectacle du cadavre de Virginie
excitait déjà la fureur. Appius demanda
en vain que l'on condamnât ses deux
adversaires à être précipités du haut
delà roche ïarpeïenne. Alors , il prit le
parti de convoquer le sénat; et le peu-
ple s'apaisa , dans la confiance que
le décemyiiat allait être aboli , mais le
APP
•petit nombre des se'nateurs qui étaient
alors à Rome , favorisaient par crainte
on par intérêt le despotisme d'Appius.
Ils se contentèrent d'exhorter le peu-
ple à la patience. Cependant Virgi-
tiius , de retour à l'armée , y raconta
ses malheurs, et l'affreux parti qu'il
s'était vu forcé de prendre pour sous-
traire sa fille à l'infamie. Les soldats
émus, irrités , revinrent à Rome, mal-
gré les décemvirs , traversèrent la ville ,
et allèrent se poster sur le mont Aven-
tin. L'autre armée, opposée aux Sa-
bins , suivit cet exemple. Le sénat alors
résolut de faire renaître la puissance
consulaire et tribunitienne. Les décem-
virs sentirentqueles derniers moments
de leur puissance étaient venus; ils
voulurent se faire honneur d'une mo-
dération tardive , et offrirent de rési-
gner leur pouvoir. Valérius et Hora-
tius consentirent à aller vers le peuple,
dont Icilius leur porta les proposi-
tions. Le rétablissement du tribunal
et du consulat n'éprouva aucune diffi-
culté ; mais les plébéiens demandaient
de plus qu'on leur livrât les décem-
virs pour être brûlés vifs ; et le sénat
ne voulut pas y consentir. De tous les
décemvirs, Appius fut le seulqui, ne
démentant point son caractère, s'op-
posa au rétabhssement des tribuns ;
mais il déclara en même temps qu'il
ne refusait pas d'être la victime offerte
aux fureurs populaires. On procéda à
l'élection des tribuns et des consuls,
Virginius , Icilius et Numitorius fu-
rent nommés les premiers parmi les
magistrats du peuple. Valérius et Ho-
ralius obtinrent les faisceaux consu-
laires. Ce grand événement eut lieu
l'an de Rome 5o5 (449ansav. J.-C. ).
Accusé pai- Virginius , Àppius fut traîné
en prison , malgré les prières de sou
oncle qui , après s'être retiré à Régille,
pour fuir sa tyrannie, revintalors faire
>talQir, auprès des citoyens j, tous les
APP 555
droits de la famille Claudia , honorée
par tant de magistratures ; mais Virgi-
nius et la mémoire, de sa fille parlèrent
plus fortement qne lui. Appius mourut
en prison, avant le jour où il devait
paraître en jugement. Tite-Live assure
qu'il se tua lui-même. Deuvs d'Halicar-
uasse prétend que les tribuns le firent
étrangler. Oppius fut accusé par un
vétéran de l'avoir fait battre de verges,
et éprouva le même sort qu' Appius,
Les huit autres décemvirs, effrayés,
s'exilèrent volontairement. On vendit
leurs biens , et le prix en fut versé
dans le trésor public. D — t.
APPIUS Claudius , de la même
famille que les précédents , fut élu
censeur, fan de Rome ^f^i, et com-
mença ses fonctions par humiher le
sénat. On n'y avait reçu jusqu'alors
que des patriciens, ou les plébéiens les
plus recommand.ibles ; Appius y in-
troduisit des fils d'affranchis, et donna
à quelques-uns d'entre eux la prêtrise
du temple d'Hercule , fonction qui
avait été jusque-là exercée par la fa-
mille Potitia. Mais ce qui rendit sa cen-
sure plus célèbre, fut la construction
d'un aqueduc pour conduire de l'eau
dans Rome, et la prolongation jusqu'au-
delà de Capoue, pendant environ 1 4^
milles , du grand chemin auquel la re-
connaissance publique donna le nom
de Voie Appienne. Ce chemin dura y
dans sou intégrité, près de goo ans,
et ce qui en subsiste aujourd'hui, ex-
cite encore l'admiration. Sûr d'avoir
captivé, par ces travaux utiles , l'affec-
tion du peuple, Appius refusa d'abdi-
quer la censure au bout de i8 mois,
quoiqu'elle eût été limitée à ce terme
par un décret. Il fut cité en jugement, et
sept tribuns voulaient qu'on le condui-
sît en prison , mais les trois autres se
déclarèrent pour lui , et l'obstinatioa
d'Appius l'emporta sur une loi positive.
11 resta cejisew et, n'eut point de collé-
556
APP
giie. A peine etait-ii sorti de fonctions,
qu'il se mit sur les rang;s pour le consu-
lat. Ouoique Appius ne fôt pas recom-
mandable par des talents militaires, et
que la république eût alors besoin de
coHSprver à la îèle de ses armées les
grands généraux qu'olle possédait , il
fut élu avec L, Yoluranius Flamma ,
l'an de Rome 44" • t'était encore le
peuple qui le favorisait. Le ïéuat , forcé
de céder, voulut du moins qucFabri-
cius , qui s'était illustré l'année précé-
dente a la tète d'uiie ai-mée , en conser-
vât le commandement , arec le titre
de proconsul. A))piusn'avanlrcti!éde
son couMilat d'.mtre Lonuem' que ce-
lui d'occuper quelque temps la ];re-
mi^re i lace de la rcpuLlique, se fît
nommer préteur, et ce choix fut ^é-
néraif ment approuve, parce qu Appius
était orateur et liabile jurisconsulte.
L'an 0^98 av. J.-C. , Ap])ius , à qui
l'extrême iiarlialité du peuple envers
lui n'.tvaiî [las fait oublier les principes
inflexibles delà famille Claudia, tenta
d'empêcher qu'aucun plcLéien ne par-
vînt au consulat ; mais il ne put y
réussir. Deux aus plus tard, il repro-
duisit son projet, commença par se
faire nommer consul, et demanda pour
coi!é£;ue Fabius, qui, en sa qualité
de consul sortant de charge, jnésidait
l'assemblée; mais cet hounne illustre
refusa de donnor un exemple aussi
dangereux. Il résista aux piières des
patriciens, et le plébéien L. Yolu-
n)inus devint, pour la seconde fois,
collègue d'Appius. Le sénat ayant ton-
jours très-peu de confiance dans les
talents militaires d'Appius, prorogea,
pour six mois , le commandement des
consuls précédents , et les chargea de
continuer la guerre dans le Samninm.
Les Samnitesbattusserérugicrcnt dans
le nay^dcs Etrusques. Ces peuples se
réunirent pour résister aux Komains,
et appelacut même uu corps de Gau-
APP
lois. Appius marcha contre eux avec
deux légions et 2,000 auxiliaires ;
mais son incapacité fut bientôt démou-
trée,tant aux ennemis qu'à ses soldats
qu'elle jeta dans le découragement.
Ou assure qu'alors il manda secrète-
ment à son collègue de venir à son
secours. Volumnius accourut, et l'ar-
mée d'Appius l'accueillit avec enthou-
siasme ; mais le fier patricien alFecta
un air de hauteur, et lui exprima son
étonnement de ce que, abandonnant
le soin de sa province, il venait oflrir
son aide à qui ne la réclamait pas. Une
dispute, aussi violente que scandaleuse,
s'ensuivit entre les deux consuls, en
présence des armées ; et Volumnius ,
après avoir fait sentir à Appius que
l'éloquence dont il se piquait n'était
pas alors aussi nécessaire à l'état que
le talent de se battre , lui laissa le
choix du Samuium et de l'Etrurie ;
mais les soldats demandèrent à grands
cris que les deux consuls fissent en-
semble la guerre dans ce dernier pays,
et Volumnius céda à leurs instances.
Dans la bataille qui eut lieu aussitôt,
Appius , opposé aux Samnites , trompa
toutes les conjectures, et montra tant
de valeur et d'habileté, qu'il parut au
moins l'égal de Volumnius. La victoire
fut complète , et produisit entre les
deux collègues une sincère réconcilia-
tion. L'année suivante, ils joignirent
de nouveau leurs armes , et domp-
tèrent encore les Samnites. Depuis
cette époque , il ne paraît pas qu'Ap-
pius ait été revêtu d'aucune dignité
publique. Dans un âge avancé . il per-
dit la vue, ce qui lui fit donner le sur-
nom de Citais ; et le peuple supers-
titieux ne manqua pas de croire que
les Dieux lui faisaient éprouver ce mal -
heur , pour punir le sacrilège qu'il
avait Commis, pendant sa censure , à
l'égard du temple d'Hercufc. Pyrrhus,
roi d'Epire , ayant envoyé h Rome
APP
l' cloquent et sageCyneas, AppiusCIaii-
dius, retire depuis loDg-teirps au sein
de sa famille , se fit poiter au sénat,
et fit décréter que la république n'en-
tamerait aucuue négociation avec le
roi d'Epire , avant qu'il fût sorti de
l'Italie. On ne sait dans quelle an-
née mourut ce Romain, que Cicéron
a placé au nombre des anciens ora-
teurs. Il lui accorde de l'éloquence et
de la chaleur; et dans son Traité de
la vieillesse, il trace de lui cet éloge,
qu'il met daus la bouche de Caton :
« Appius, vieux et aveugle, gouver-
» naît une maison, composée de quatre
» fils, hommes faits, de cinq filles,
» et d'un grand nombre de domes-
» tiques. Doué d'un esprit dont la
» vigueur n'avait été nullement affai-
» blie , il avait conservé non seulement
» l'autorité, mais un pouvoir suprême
» sur toute sa famille. Ses esclaves le
» redoutaient, ses enfants avaient de
» la vénération pour lui , et tous le
» chérissaient ; enfin , sa maison était
» le vrai modèle des mœurs austères
» de nos aïeux. » D — t.
APPONCOURT, r. Grafigny.
APRAXIlN ( N. Comte ) , feld-maré-
chial des armées russes , sous le règne
de l'impératrice Elisabeth. Il fit ses
premières campagnes contre les Turks,
sous les ordres du célèbre IMunich , et
parnnt aux premiers grades militaires,
sans avoir illustré son nom par d'écla-
tants services ; mais, dans la guerre de
1756, qui réunit la France, l'Autri-
che, l'Krapire germanique et la Rus-
sie, contre Frédéric-le-Grand, lefcld-
inaréchal Apraxin , à la tête de 40,000
Russes, entra dans le rovaume de
Prusse , s'empara de la ville de Mé-
mel, et s'avançi jusqu'auprès de Jœ-
gcrsdorff, où il fut attaque par le gé-
néral Lcwald, l'un des plus illustres
lieutenants de Frédéiic. Après une
action opiniâtre et sanglante, les Rus-
II.
APR 337
ses restèrent maîtres du champ de
bataille et d'u:ie partie de l'artillerie
prussienne. Cette victoire porta l'a-
larme jusqu'aux portes de Berhn ,
et le fcld-maréchal Apraxin, s'il eût
profité de tous ses avantages, pouvait ai-
sément marcher sur cette capitale sans
défense. Elle fut sauvée , cette fois, par
la fortune de Frédéric : les Russes, au
grand étonnemcnt de leurs alliés et de
leurs ennemis , se replièrent tout à
coup vers les frontières de la Cour-
laude, et prirent leurs quarfiers d'hi-
ver. Lne intrigue de cour avait dirigé
ce mouvement rétrograde, qui étonna
l'Europe, [.'inipéralrice Elisabeth pa-
raissait alors attaquée d'une maladie
dangereuse. Son neveu, qui lui succéda
deux ans après, sous le nom de Pierre
III ^ était admirateur passionne du roi
de Prusse , et personne n'ignore com-
bien cet enthousiasme imprudent blessa
la vanité de sa nation , lors de son avè-
nement au trône. Le chancelier Bestu-
cheff , qui le crut tout près d'y monter,
n'hésita point à sacrifier ses sentiments
particuliers et la fidélité qu'il devait à
sa souvei'aine, à la chimérique espé-
rance de conserver sa place et son
crédit. 11 détendit donc au maréchal
Apraxin de profiter de sa victoire, et,
peu de temps après, lui donna l'ordre
de ramener ses troupes en Courlande.
Une nouvelle intrigue changea bientôt
la face des affaires, à la cour de Pet* rs-
bourg : Bestucheff, privé de fous ses
emplois , déclaré coupable de lèze-
majesté, condamné à perdre la tète sur
un échafaud , fut exilé daus un village ,
par la clémence d'Elisabeth. \.q maré-
chal Apraxin , arrêté à la tête de son
année victorieuse, fut envoyé prison-
nier à Narva , et soumis à un conseil
de guerre , qui n'osa le condamner ni
l'absoudre; et, dès ce moment, il cessa
de jouer un rôle dans les événe-
ments hisloriqucs dont la Russie fut
553 A P R
le théâtre. Ou ignore l'epoqne de sa
mort. E — D.
APRÈS DE MANNE VILLETTE
( Jean-Baptiste-Nicolas-Dems d' ),
naquit au Havre. le i i tèv. i-jo-.Soa
Bom n'est peut-être pas aussi générale-
ment connu qu'il devrait l'être ; mais il
est très-répandu parmi les na\ngatears,
qui le regardent comme le premier
hydrographe. Son père, Jean-Baptiste-
Claude d'Après de Blangy . capitaine
des vaisseaux de la compagnie des
Indes , lui donna une éducation très-
soignée , et prit soin de la surveiller
lui-même. 11 l'amena avec lui dans
l'Inde à l'âge de douze ans , sur
un vaisseau qu'il commandait ; à sou
retour , il l'envova à Paris , afin qu'il
s'y perfectionnât dans la géométrie et
l'astronomie, dont il lui avait ensei-
gné les premiers éléments. Ce ne fut
qu'en i']i6 que d'Après de Manne-
villette fit sa première campagne en
qualité d'officier, sur un vaisseau de
la compagnie des Indes; et c'est alors
qu'il manifesta les talents qui, depuis,
l'ont placé au nombre des navigateurs
les plus distingués et des plus liabiles
hydrogra])hes. Le vaisseau le Maré-
chal d'Eslrées , sur lequel il était em-
barqué , échoua sur les écueils du
Pv'ord de St.-Domingue, et, si l'on
avait suivi la route que d'Après, alors
âgé de 19 ans , avait conseillé de te-
nir , on eût évité sa perte. 11 avait éga-
lement fait preuve daus cette même
campagne d'un esprit miir et fertile en
expédients ; mais cette lois on avait
déféré à son avis, et on lui dut le salut
du Maréchal d'Eslrées. qui, pendant
le terrible ouragan du 20 septembre
i-j^T, avait perdu, près de la Mar-
tinique, tous ses mâts , et était sur le
point de couler bas , par une voie
d'eau. D'Après est un des premiers
Français qui aient fait usage des ins-
truments û'asti ououiie à rcHexiou ou
APR
à miroirs, inventés par Hadîev ; iî
rectifia, en allant en Chine, avec un
octant, 1,1 latitude de plusieurs points
qui avait été déterminée avec des ins-
truments bien inférieurs à celui-ci.
Frappé de ce nouveau moyen de per-
fectionner l'hydrographie, il se sentit
animé d'un nouveau zèle, et forma le
projet de corriger toutes les cartes de
l'Inde ou d'en faire de nouvelles. Du
moins , ce fut pendant la campagne où
il fit , pour la première fois , usage de
cet instrument, que, n'étant encore que
simple officier, il commença à recueil-
lir les cartes, les plans et les ditTé-
rents mémoires qu'il pût se procurer
sur la navigation des côtes d'Afrique,
de l'Inde et de la Chine, Depuis l'an-
née 1755, il travailla à exécuter ce
projet, et, en i']^'!, il annonça, aux
directeurs de la compagnie, qu'il avait
construit un assez grand nombre de
cartes pour en former une collection.
Sou travad fut soumis à l'académie
des sciences qui l'approuva. D'Après
employa encore trois années à per-
fectionner son ouvrage; en 1 745, il
fut nommé correspondant de l'acailJ-
mie des sciences , et ce ne fut qu en
1745 qui' publia ses cartes, sous Je
nom de Neptune oriental. 11 y joi-
gnit une instruction nautique, dans la-
quelle il donne la description de toutes
les cotes, les divers aspects sous lesquels
elles se présentent, vues de diflerents
côtés , ainsi que les vents régnants et
les courants qui ont lieu daus tous les
parages pendant les diverses saisons
de l'année ; en un mot, il n'y a rien
omis de ce qui peut faire connaître les
routes que les vaisseaux doivent tenir.
Le Neptune oriental, avec les instriK-
lions qui l'accompagnent, est le pre-
mier grand ouvraqe de ce genre , le
plus complet et le plus parfait qui ait
paru, 11 fut accueilli avec empresse-
ment par les uayigatcurs de toutes les
APR
nations. Plus de .soixante ans d'expé-
rience ont justifié l'opinion que l'on en
avait d'abord conçue. D'Après a tra-
vaillé pendant trente ans à ajouter de
nouvelles perfections à ce bel et impor-
tant ouvrage; la seconde et dernière
édition ne parut qu'en 1775, in-fol.atl.,
considérablement augmentée et corri-
gée. A sa mort , on trouva encore , dans
ses papiers , plusieurs cartes achevées
et des mémoires qui ont été publiés
dans un volume séparé , sous le titre de
Supplément au Neptune oriental. La
partie la plus estimée de cet ouvrage
est celle qui comprend les côtes orien-
tales d'Afrique , les cotes de Malabar
et de Coromaiidel, le golfe du Ben-
gale , les détroits de Malac et de la
Sonde, et en généra! toutes les côtes
qu'il avait visitées lui-même, ou qui
étaient les plus fréquentées par les
vaisseaux français. 11 est encoreauteur
de Description et usage d'un nouvel
instrument pour observer la longitu-
de^ appelé le Quartier anglais ; augm.
par Borv ; 1751 , in- 12. Cet habile
hydrographe est le premier qui aitem-
ployé la méthode des distances du soleil
à la lune pour déterminer la longitude ;
ainsi il a pu placer les côtes avec as-
sez de précision, relativement au temps
oii il a fût ses obser\ ations. Les ren-
seignements d'après lesquels il a dres-
sé les cartf s des autres pays , lui
ont été fournis par des navigateurs
fiançais et par des étrangers ; mais
celui dont les communications ont le
plus contribué à enrichir son ou-
vrage , est M. d'Alrymple , célèbre hy-
drographe anglais , avec lequel il n'a
jamais cessé d'être en correspondance,
et qui, dans plusieurs écrits, lui a
donné des témoignages de son estime.
Dans l'état où se trouve le Neptune
oriental, il y a bien peu de chose à
changer aux cartes des côtes qu'on
viem de citer. Il faudrait se contenter
APR 559
d'y faire de légères corrections, pour
rectifier, avec des montres marines, les
différences en longitude, qui n'ont été
déterminées que par des routes esti-
mées ; mais on devrait y ajouter les
cartes des pays qui n'étaient pas encore
bien connus à l'époque de la mort de
d'Après. I>es renseignements contenus
dans l'instruction nautique qui ac-
compagne ce recueil de cartes , font,
depuis long-temps, autorité pai mi les
marins. Le cours des navigations de
d'Après se trouva interrompu pen-
dant qu'il travaillait à la rédaction de
son grand ouvrage ; il ne le reprit
qu'en 1749- Ce fut lui qui, étant ca-
pitaine du Glorieux, conduisit, au
caj) de Bonne -Esj)érance, l'abbé de
La Caille , avec qui il s'était intime-
ment lié. On aime à voir s'associer
deux hommes dont les travaux ont été
si utiles ; l'un , en ouvrant une nou-
velle carrière à l'astronomie, nous a
fait connaître la partie australe du
ciel, tandis que l'hydrographe était
occupé à décrire la vaste étendue de
mer qui lui correspond. D'Après com-
manda uu vaisseau de la compagnie ,
armé en guerre , dans l'escadre de
M. d'Aché; il fut obligé de revenir
en France pour se justifier de quel-
ques reproches qui lui avaient été
faits sur différentes manœuvres ; mais
voyant qu'il ne pouvait obtenir justice,
il abandonna la navigation. Il ne dis-
continua cependant pas ses travaux
hydrographiques. La compagnie créa,
en 1 76.1 , un dépôt des cartes et plans
de la navigation des Indes , et le mit à
la tête de cet établissement. Sa place
lui fut conservée par le gouvernement
à l'époque de la suppression de cette
compagnie. Louis XV lui accorda , en
1767 , la décoration de St.-Michel.
D'Après s'était marié à l'âge de 27 ans;
il mourut, le l'^'.mars 1780, à 75ans,
sans avoir eu d'enfants. R~l.
21..
34o A P R
APRIES , fils de Psammis , devint
roi d'Egypte, après la mort de son
père, vers \m\ Sgfi av. J.-C. Il fit la
guerre aux Phéniciens de Tyr et de
Sidon. Il envova aussi contre les Cy-
rénéens une armée qui fut défaite;
ceux qui échappèrent , croyant qu'il
les avait chargés de cette expédition
pour les faire périr , se révoltèrent
contre lui , et nommèrent roi Amasis ,
qu'Apriès leur avait envoyé pour les
ramener à leur devoir. 11 fut bientôt
abandonné par le reste des Egyptiens.
Il essaya cependant , avec les troupes
qu'il avait à sa solde , de tenir tète
aux révoltés ; mais il fut vaincu et fait
prisonnier , après un règne de 25 ans.
Amasis eut pendant long-temps beau-
coup d'égards j)0urlui , et fut , à la fin,
obligé de l'abandonneraux Egyptiens,
qui l'étoufR-rent. C-^r.
APROSIO ( Angelico), religieux
augustin , né à Vintimille dans la Li-
gurie, en iGo 7 , rendit célèbre le nom
lie sa patrie , ayant été souvent appelé
simplement le Père f^iiiti mille, dans
le temps de sa plus grande réputation.
Il annonça , dès l'enfance , un goût
décidé pour les livres ; son père ,
quoique très-pauvre , s'efforçait de lui
ou fournir; et , comme il en était tou-
jours chargé quand il allait à l'école ,
oui'vappelait le Philosophe, lleutra,
eu 1 620 , dans l'ordre de S. Augustin ,
alla faire sou noviciat à Gênes , et
fit profession un an après ; il prit
alors le nom dJ^ngelico , au lieu
de ix'lui de Lodovico ( Louis), qu'il
avait porlé jusqu'alors. 11 voyagea en-
suite, le plus souvent pour ks affaires
de son ordre , et alla successivement à
Florence , à Bologne, à Ferrare , à
Padoue , à Venise , et dans plusieurs
autres villes; se liant partout avec
ks gens de lettres les plus connus , et
s'instruisant avec curiosité de toutes
les parliculaùtcs littcVaiies de chaque
APR
ville. Le plus long séjour qu'il fit fut A
Venise, où il fit impiimer la plupart
de ses ouvrages. Il retourna ensuite à
Gênes, se livra à la prédication, et,
ajant prêché le carême, en 1648,
dans la cathédrale de Vintimille , sa
patrie, il forma le dessein d'y fonder
une bibliothèque par le don de ses
livres et de ses manuscrits , dont la
collection était aussi riche que nom-
breuse. Il consacra des sommes consi-
dérables à élever le bâfiment néces-
saire pour la recevoir. Il éprouva de
grandes difficultés dans cette entre-
prise ; mais il en vint enfin à bout , et
c'est avec justice que cet établissement
a toujours conservé depuis, le nom de
Bibliothèque ^prosienne. Apres avoir
rempli avec distinction plusieurs des
grandes dignités de son ordre , il
mourut, dans sa patrie, en 1O81,
âgé de soixante-quatorze ans. il a
laissé un grand nombre d'ouvrages , la
plupart de critique littéraire , mais
tous anonvracs ou pseudonymes, sans
doute parce que les sujets du plus
grand nombre, et la manière dont ils
sont traités, étaient peu convenables
à l'élat de l'auteur. Les premiers qu'il
fit eurent pour objet de déftndre le
Marini, àunii' adonis avait été for-
tement critiqué par le poète Sligliani.
Ce poète ayant fait paraître un poème
intitule: le ]\ouveau Monde, le Père
Aprosio soutint que le premier chant
de ce poème contenait lui seul plus de
fautes que ^Adonis tout entier. 11
entreprit de le prouver dans uu
pamphlet, intitulé : // T'a^lio, ou
le Crible , selon l'usage qu'avaient
introduit les académiciens de la Crus-
ca, de donner aux écrits de ce genre
des noms tirés de la mouture. Sti-
gliani répondit , ou fit répondre par
son fils, et donna, à sa réponse, le
titre de // Molino , le Moulin : Apro-
sio répliqua par // But alto, le Elut-
APR
toir', ilans le premier de ces deux
opuscuLs , il cacha son nom sous
celui de Masotlo Galistoni da Te-
rama, qui n'est autre chose que l'ana-
gramme de Tommaso Sligliani da
Matera, nom du poète qu'il attaquait.
»S(igliani avait donuë, à sa critique de
V Adonis , le titre de YOcchiale , la
Lunette : Aprosio y répondit d'a-
bord par r Occhiale stritolato , la
Lunette brisée , et , cette fois , il se
nomma Scipio Glareano ; ensuite
par la Sferza poetica , le Fouet poé-
tique , de Sapricio Saprici , et enfin
par II Feratro , Y Ellébore, du même
prétendu auteur. Tous ces ouvrages
furent imprimés, in- 12, à Venise,
depuis 1657 jusqu'en 1647. H écrivit
daus un genre différent, mais tou-
jours avec un titre singulier et sous
un de ses faux noms , un ouvrage de
morale contre le luxe , et qu'il inti-
tula : Lo Scudo di Rinaldo , ovvero
lo Spentrio del disinganno , opéra
di Scipio Glareano , Venise , 1 64'2 ,
in-1'2. Il traduisit même, de l'espa-
gnol en italien , des sermons pour les
dimanches et fêtes de l'Avent , com-
posés par le P. Agostiuo Osorio ,
provincial dans le royaume d'Aragon,
et il y mit, au lieu de sou nom , celui
d' Oldauro Scioppio , Venise , 1 645 ,
in-4 '. 11 donna encore , sous son nom
favori , de Scipio Glareano , un ou-
vrage d'érudition , avec le titre sin-
gulier de la Grillaja ( la Lande ,
ou la Terre en friche ) ; Curiosi-
ta erudite , etc. , Naples , 1668 ,
in- 12. 11 mit enfin son nom, ou du
moins celui qu'il portait avant d'en-
trer en religion, à un autre ouvrage
d'érudition sur la patrie du poète
satirique Perse : Délia patria di
J. Persio Flacco , Dissertazione di
Lodovico Aprosio , etc. , Gênes ,
1664, in-4°. Il s'y propose de prou-
ver que ce poète satirique n'était point
APR 341
né à Volterre , comme on le croit
communément , mais dans la Ligurie^
L'un des ouvrages les plus curieux
de cet auteur, est sa Bibliotheca
Aprosiana , passatempo autunnale
di Cornelio Aspasio Anti^ngilmi ,
etc., Bologne, 1673, iu-13. 11 est
fort rare; les autres le sont aussi ,
mais 6n s'en aperçoit peu , parce
qu'on ne les cherche pas. On trouve
dans la Bibliotheca Aprosiana , des
notices et des faits particuliers qui
ne sont nulle part ailleurs. Elle c^t
comme divisée en deux parties j la
première contient différentes parti-
cularités de la vie de l'auteur , et
la seconde , une table alphabétique
des personnes qui lui avaient fait
présent de quehjue livre , avec le
titre entier de ce livre , accompagné
le plus souvent de circonstances cu-
rieuses et quelquefois intéressantes;
mais cette table ne contient que les
trois premières lettres de l'alphabet :
on croit que le P. Aprosio n'avait écrit
que ce premier volume , et que la
mort le sui'prit avant qu'il eût pu ré-
diger le second. Un autre ouvrage,
encore plus rare , parce qu'il n'en
fit tirer que quelques exemplaires
pour ses amis, est celui qui a pour
titre : La T'isieraalzata hecatoste di
scrittori , etc. , c'est-à-dire, la Fisièrr
levée ; Centaine d'écrivaiiis^ curieux
d^ aller en ma? que hors du temps de
carnaval, et découverts par Jean-
PieiTe- Jacques Fillam de Sienne^
Passetemps caniculaires , etc., Par-
me, 1689, in-r2. Ces cent auteurs
qu'il démasque sont ceux qui avaient
publié des ouvrages pseudonymes .
surtout en Italie, et l'on voit qu'il
pouvait, à bon droit, s'y donner une
place. 11 joint souvent, à leurs noms,
des notes et des anecdotes piquantes ,
et qui rendent ce livre aussi cu-
rieux qu'il est vaiT. C'est un ouYi'a!j;o
34?. A F S
posthume; l'éditeur avertit lui-même
que l'auteur était mort depuis quelques
années. II est suivi d'un supple'ment
imprime' dans le même volume , et
intitule' : Pentecoste d'altri scrit-
tori, etc. (Cinquantaine d'autres au-
teurs ),traite'e dans le même goût que
la première centaine. Quelques mor-
ceaux de Poésie italienne (hi P. Apro-
sio ont été insères dans plusieurs
recueils. G — r.
APSINES, rLe'teur grec de Gudare,
flans la Phe'nicie, vivait sous le règne
de Maximin, vers l'an 256 avant J.-C.
Is'o'.is avons de lui une Rhétorique et
un ouvrage sur les questions qu'on
traitait dans les éculis des rhéteur».
On les trouvedansles Rhetores s^rœci,
«l'Aide, Venctiis, i5n8, in -fol. Ils
ji'unt pas été imprimés depuis. Plu-
sieurs rhéteurs out porté le même
nom. C — R.
APSYRTE , né à Pruse, ou à ÎSico-
mc'die, embrassa la profession mili-
taire sous le règne de Constantin. Il
avait écrit un livre à' Hippiatrique , ou
Médecine vétérinaire , dont il nous
reste de très-longs extraits dans le re-
cueil intitulé : Velerinariœ medicinœ
lihri duo, grœcè , liasilece , i557 ,
in-4".; livre extrêmement rare, n'ayant
jamais été réimprime depuis, et beau-
coup plus complet d.'nis les manuscrits
qui se trouvent dans la lîibliolhèque
impéi'ialc. Il a été traduit en latin par
Jean Ruel, de Soissons, et imprimé
à Paris, i Sjo, in-fol. C — r.
APULÉE (Lucius), oupluiot,
suivant d'autres , seulement Apulée,
j)hilosophe platonicien , naquit au
.second siècle, vers la fin du règne
d'Adrien, à Madaurc, ville d'Afrique,
dont la position , sur les confins
de deux contrées , lui fit donner
le surnom de Sémi-Gélule, Sénii-
Numide. Sa lamille était illustre ;
Thésée, son père, remplissait, dans
APU
sa patrie, les fonctions de duumvir;
et , par Salvia , sa mère , parente du
philosophe Sestus, il descendait de
Plutarqne. 11 fit ses premières études
à Carthage, où l'idiome naturel était
la langue punique. Puis , il s'embar-
qua pour Athènes, afin de s'y familia-
riser avec les lettres grecques. Il s'y
rendit habile dans les arts libéraux ,
et s'adonna particulièi'ement à la doc-
trin(! de Platon. D'Athènes , il vint à
Rome, où, comme il le dit lui-même,
seul , sans le secours d'aucun maître ,
il apprit la langue latine, avec des
peines infinies, œrumnabili labore.
J'insiste sur cette dernière circonstan-
ce, parce qu'elle peut servir à expli-
quer ce que l'on trouve d'affecté, de
pénible et de néologique dans les écrits
latins d'Apulée. Il suivit ensuite pen-
dant quelque temps le barreau; mais
le désir de voyager, et le besom d'ac-
croitre ses lumières , lui firent par-
courir les diverses contrées de la
Grèce , et le portèrent à se faire ini-
tier à tous les mvstèies. Il dissipa pres-
que tout son patrimoine à satisfaire son
insatiable curiosité; revint à Rome,
où, pour être admis au nombre des
])rêties d'Osiris, il vendit jusqu'à ses
habits, exerça la profession d'avocat,
puis retourna dans sa patrie , espe'^
lant V rétablir sa fortune. Il ne fut pas
trompé dans son attente. Ses plai-
doyers eurent un tel succès, que les
magistrats de Carthage et de plusieurs
autres villes lui firent ériger des sta-
tues. L'hymen vint ajouter à sa féli-
cité. Une veuve , nommée Piulenlilla,
lui fit partager son opulence ; mais
les parents de cette veuve, outrés de
se voir ainsi frustiés de sa succession,
accusèrent Apulée de magie , et le dé-
noncèrent à Claudius Maximus, pro-
consul d'Afrique. Apulée plaida lui-
même sa cause , et prononça , devant
le proconsul, une apologie qui se
APU
trouve parmi ses œuvres. îl confon-
dit ses accusaleiirs , dévoila leur cupi-
dité, leurs mensonges, et fut renvoyé'
al)sous. Depuis cette époque, il mena,
dans sa patrie, une vie heureuse et
tranquille, se livrant, sans réserve,
aux charmes de l'étude. On i{:;nore
l'époque de sa mort. Apulée composa ,
soit en grec, soit en latin , un grand
nombre d'ouvrages , dont il ne uous
CNt pai-vcnu que la moindre partie.
Je vais indiquer successivement ceux
que nous possédons et qui sont au-
ti'.entiques , ceux qu'on lui attribue,
et ceux que nous avons perdus.
On compte quarante - trois éditions
des Œuvres d'Apulée , dont neuf
du 1 5". siècle. La première, très-rare
et non mutilée, fut faite à Rome, par
l'ordre du cardinal Bessarion , et les
soins de J. André , évêque d'Aleria ,
14^39, in -fol., de l'imprimerie de
Conrard Sweç;nheym , et d'Arnoul
Pannartz. On trouvera la liste des au-
tres éditions dans celle quia été faite, en
1788 , par la société des Deux-Ponts,
qui, néanmoins, en a omis une de
Lyon, sib. à Porta, 1587 ' '"'8°. , 'î
vol. Ces OEuvres contiennent : I. la
Métamorphose , hyperboUquement
appelée Y Ane d'or, en onze livres;
le ])lus considérable des ouvrages qui
nous restent d'Apulée, imité du grec
de Lucius de Patras , et , comme
il le dit lui t même , composé dans
le genre des fables railésiennes. La
meilleure édition de celte fiction sin--
gulière est celle de Leyde , 1786,
in-4°. , cum notis var. L'Ane d'or
a été traduit en français par Guill.
l^îichel, dit de l'ours, Paris, sans
date, et 1 517, iu-4".; i5i8, iS'.i'2,in-
fol.; par George de la Bouthière, Lyon,
i'">53, i556, in-iî2; par Jean Lou-
veau , Lyon, i558, i58o, in-i6;
1559, i584, in-8"., Paris, i586,
in- 16; par Jean de Moutlyait, Paris,
APU 545
161 5, i6i6,in-i3; 162.0, i63i,
1648, in-8". ; ces trois dernières édi-
tions avec d'assez jolies fig. , de Cris-
pin de Pas aux deux premières , et de
Michel Lasne à la troisième ; par
l'abbé Compain de St.-Martin , Paris,
1707, 1756, in-i2, 2 vol. , Francfort
et Leipsick , 1 769 , in-8- . , 2 vol. ( i ) ;
enfin , par M. Bastien , Paris , 1 787 ,
in-8". , 2 vol. De ces diverses traduc-
tions , il n'est aucune oii l'on puisse
prendre une idée de l'élégance et du
néologisme expressif et brillant d'Apu-
lée. On compte quatre versions italien-
nes de sa Métamorphose , par- Boiar-
do, Firenzuola, Parabosci,et Visani.
]! Ane d'or A encore été traduit en espa-
gnol, Madrid, i6o5 , in-8'.; en alle-
mand, par J.Siéder, Francfort, i6o5,
Magdebourg, 1606, in-8'., et par
Aug. Rode,Dessau, 1780, in-8".; il
avait publié la Psjché séparément,
Berlin, 1780, in-8".; en flamand,
Harlem, 1 656, Anvers, i66(), in- 12,
et en anglais, par Will. AdJington,
Londres, 1371, 1659, in-4'. Aux qua-
trième, cinquième et sixième livres de
la Métamorphose, se trouve le fameux
épisode de Psyché, que tous les arts
ont , à l'envi , mis à contribution. Cet
épisode , imprimé séparément , au
nombre de 90 exemplaires, par le
libraire Renouard , Paris , 1 796 ,
in- 18 , a été traduit en suédois ,
par Nyman; en français , par Breu-
gière , sieur de Barante , Paris ,
1 692 , 1 695 , in- 1 2 ; Rotterdam ( Pa-
ris ) , J 7 1 9 , in - I 2 ; puis , par M.
Blanvillain , d'Orléans , Paris , 1 797,
iu-16. En 1802, MM. Dubois et Mar-
chais , peintres , ont donné , de cet
épisode, une superbe édition latine et
française , grand in-4"., ^^ec les trente-
(0 A Vépoqiie des bouleversements révolution-
naiies, on en a lait à l'arisiiue sorte de miitUa-
tion, sous le titre de Y Ane an bouquet de ro/e,
in-iS, 2 vol.
5î4 APU
deux fig. deBaphaël , gravées par eux
au Uùit, d'après Marc- Antoine. I^e
texte , COI rigé avec beaucoup de sr iu ,
est preoëde d'ur.e courte dissertation
sur la fable de Psycl.éj la tradu-^tion
est celle de Breugière , avec quelques
corrections. M. Landon a , depuis ,
renouvelé cette édition. Tout le monde
connaît l'imitation qu'a faite de cet
épisode l'inimitable La Fontaine. Les
autres se trouvent indiquées dans
mon édition de 1 802. IL V Apologie
d'Ai ulée, sous le titre de Oratio de
Mai^iu , que l'uii di'-isc quriqucfois en
deux discours. Elle a été impriuice sé-
parément à Heidelberg, j 594 , in-4°. ;
à Leyde, 160-;, in-8"., avec les cor-
rections de J. Meursius; à Hanovre,
la même année, in-8°. , avec un coni-
raentaire de Scipion Gentijis, et à Pa-
ris, i655, in-4". , enrichie des notes
de J. Pricœus. III. Les Florides, ainsi
Dommées par emj^base , et mal à pro-
pos divisées en quatre livres, puisque
ce ne sont que des fragments des lia-
rangucs prononcées par Apulée. On y
trouve des particularités curieuses sur
l'histoire et la mythologie. Elles ont été
imprimées séparément à Strasbourg,
i5iG, in-4''.,ctàParis, i5i8, iii-4'.,
avec les corrections de .L Pyrrhus.
IV. Trois livres de philosophie , pu-
bliés sous ce titre : De hahiludine
doctrinarum et îxalivilate Plaionis.
Le premier, De dogmaie Platonis,
traite de la philosophie naturelle , le
second , de la morale , et le troisième,
du syllogisme catégorique , ou de la
philosophie rationnelle. V. Un livre
curieux , De Deo Socralis , que S.
Augustin a réfuté très-durement : il est
imprimé séparément avec les notes de
Josias Mercier, Paris , iGi4i i'i-»^'
Jacques Parrain , baron des Coutures,
l'a traduit en français , et public avec le
texte; Paris, 1G98, in-i'.î. Couipain
de Sf-Martin en a juiul une traduc-
APU
tion à celle de VAne d'or. VI. Un
livre De Miindo , que l'on regarde
comme une version assez exacte de
celui qu'Aristote composa. Ce livre a
étéimprimé .>éparémeut àM( œmingrn,
1494 7 iii-fo!, , et à Leyde, i5ç)\ ,
in-8' ; avec celui d'Aristote en grec ,
la version de Guil!. Budé , et les
notes de Bonavenlnre Vulcanius. Les
ouvrages douteux d'Apulée sont :
I. une traduction latine de YAsclé-
pius d'Hermès Trismégiste , de na-
turd Deorum ; elle se trouve dans
phisieurs éditions des Œuvres du
]»hiiosophe de Madaure ; IL un livre
De nominihus , inrlulibus , seu rne-
dicaminihus Jierharum , que d'autres
attribuent au médecin ApuléiusCelsus,
mais qui doit être d'un auteur plus
moderne que ce dernier. Ce livre,
qui se trouve dans quelques éditions
d'Apulée , est encore imprimé à Bâ!e ,
1528, in-fol. , à la suite de Plinius
Valériauus ; à Paris , mêmes année et
format , avec le traité de Galien De
Plenitudine ; à Zurich, 1 557, 'i^"4 '• y
avec le traite de Musa sur la Bétoine ;
à Venise, chez les Aides, in Antiij.
Medicis lut. ; et avec les notes de
M. Ackcrmann , dans le recueil inii-
tulé Parabilium mcdicamentorum
scriptores antiqid ;^\\\vm\)VY^, 1 788,
in - 8\ ; III. un petit Traité De
iiolis adspir adonis et de diphlhoii-
gis , qui se trouvait en manuscrit
dans la bibHothè([ue de Marq. Gu-
dius, mais que l'on croit être d'un
auteur plus moderne, Caecilius Apu-
léius le grammairien ; IV. un Traité
De ponderibiis, mensuris ac sigJiis
cujusfjiie , traduit du grec par J.-B.
rsicolas, et que l'on trouve dans le
supplément des OEuvres de Mesuè ,
Venise, les .Juntes, i558, i589, iGa"),
iu-fol., et ! S'-Ojiu-fol.; V. Anechomc-
nos, petit poëme erotique, imité de Mc-
nandjre , qiù se trouve dans quelques
AQU
éditions d'Apulce , dans les Amours
de Haudiiis , et avec les Priapées de
Gasp. Si ioppius , Franefurt , i5o6,
in-ia ; VI, enfin , Ratio Sphœrce
Pjthagoricœ ( de la Rone de Pytha-
ç;oie), figure ast'.ologique, que Bai-
tliius a publiée au ch. VII, liv. 5o de
ses Advers. Les ouvrages perdus
d'Apulée sont des épîtres , des gry-
plies, des proverbes, des facéties,
des traités sur les arbres , sur les
poissons , sur les nombres , sur la
musique , sur le gouvernement , des
questions médicinales , naturelles ,
symposiaques , des dialogues , un
hymne à Esculape , nn éloge de ce
dieu , deux livres d'Hermagoi'as , une
liarangue sur la statue que voulaient
lui ériger les habitants d'Oéa, des
histoires , des traités d'agronomie ,
des poèmes , une version latine du
Phœdoii de Platon , etc. A ses nom-
breux talents , Apulée joignait tous
les dons de la nature : il nous a
fait lui-même son portrait au i*'. livre
de VAne d'or. On trouve son effigie
dans les Antiquités grecques de
Gronovius, dans Havercarap , dans
l'édition des œuvres d'Apulée, donnée
à Deux-Ponts , et dans la collection
de M. Landon. Daniel-Guill. Moller
a publié une dissertation sur ce plii-
losophe, Ahdcrf, 1691 , in-8°.D. L.
AQUAPENDENTE. F. Fabricio
DE AqUAPENDENTE.
AQUaVIVA( Claude), de la fa-
mille des Aquaviva , ducs d'Atri et de
Teramo , dans le royaume de Naplès ,
né en 1 545 , et mort en 1 6 f 5, général
des jésuites, fut regardé, avec raison ,
comme un des généraux de cet ordre
qui montrèrent le plus de sagesse dans
leur administration , quoiqu'il eût dans
le caractère une fermeté qui ressemblait
par fois aux effets de l'obsUnation. Ce
fut lui qui fit dresser l'ordonnance con-
nue sous le nom de Ratio studiorum,
AOU
315
Roraae, i586, in-8'.; ouvrage qui fut
supprimé par l'inquisifion , et vu de
mauvais œil par les jésuites , qui ne
voulaient pas être gênés dans leurs
opinions. Ou l'a réimprimé , avec des
changements, en iSgi. Le P. Aqua-
viva a laissé plusieurs ouvrages de
piété : 1 . des Epiires , au nombre de
seize, Rome, 161 5, iii-8". ; IL Di-
reclorium exercitionum S. Ignatii ;
III, Meditationes in psalmos 44 c^
ii8,Uomae, i6i5 , iu-12 : IV, Ora-
tio de Passione Domi/ii , 164^?
m-\2. Ce discours avait été prononcé
devant Grégoire XI II , en i575;
\ . Indusiriœ pro superiorihus socie-
tatis ad curandos animœ morbos ,
Venise , 1 6 1 1 , in- 1 2 ; IMdan , 1 624 ,
in-12; Anvers, 16 55, in-8 .; traduit
en fn.nçais par le P. Pierre Parcelly,
de l'ordre des frères mineurs , Paris ,
1625 , iii-i2 ; une traduction sous le
titre de Manuel des supérieurs ecclé-
siastiques et réguliers, fut imprimée
à Paris, i'j"j6,'m-ii.{ Foy. Acqua-
VI VA ). G — s.
AQUILA , prosélyte juif, était né à
Synope dans la province de Pont. 11
s'attacha d'abord à l'étude des mathé-
matiques et de l'arcliiteclnre. L'empe-
reur Adrien , au rapport de S. Epipha-
ne , le fit infendant de ses bâtiments .
et le chargea de rebâtir' Jérusalem, sou>-
le nom à'yElia. Cette commission lui
fournit l'occtlsion de s'instruire de l,<
religion chrétienne. Il reçut même Ir
baptême ; mais s'étant ensuite livré à
l'astrologie judiciaire , il fut excommu-
nié; ce qui le porta à embrasser le ju-
daïsme. Aquila s'est rendu célèbre par
sa Version grecque de la Bible , qu'il
publia en 1 58, C'est la première qui
ait été faite depuis celle des septante;
elle est composée avec beaucoup de
soin, quoi qu'en ait dit Buxtorf, qui
contestait mal à propos à l'aiiteur une
parfaite intelligence de la langue hé-^.
546 A Q U
braique.Saraelhodecstdelraduiremot
à mot, et d'exprimer jusqu'à l'ëtymolo-
gicdes termes. Quoique cette version
eût e'ie entreprise dans le dessein de
contredire celle des septante , dont les
enlises se servaient à l'exemple des
apôtres, lesancicus Pères la trouvaient
en général si exacte , qu'ils y puisaient
souvent leurs textes, coinmeplus pro-
pres, en certains endroits , à exprimer
le vrai sens des auteurs sacrés, S. Jérô-
me , qui l'avait d'abord blâmée , en
loua dans la suite l'exactitude. Lesjuifî
hellénistes la préféraient aussi pour
l'usage de leurs synagogues. On en
trouve des fragments dans lesHexaples
d'Origcne. Aquila avait joint à une
seconde édition de sa version les tra-
ditions judaïques , qu'ilavait apprises
du rabbin Akiba, son maître. Elle fut
encore mieux reçue des juifs hellénistes
que la première. Justinien leur en in-
terdit la lecture , parce qu'elle contri-
buait à les rendre plus opiniâtres dans
leur erreur. Les docteurs de la loi eux-
inêmes défendirent de s'en servir dans
les synagogues , et ordonnèrent de
s'en tenir au texte original et aux para-
phrases ch.ilda'iques. T — d.
AQUILA (Jean dell'), médecin ,
né dans le royaume de Naples , ])ro-
fesseur à l'université de Pise , et ensuite
à Padoue, florissait dans le 1 5' . siècle;
il fut regardé comme un autre EsculajM;
dans toute l'itahe. Il professa pendant
45 ans. Toppi, dans sa Bibliothèque
napolitaine , fait mention d'un de ses
ouvrages : De sanguinis. missione in
pleurilide , Venetiis , apiid hœredes
Octai'.Scole \:vio. C. et A — n.
AQUILA ( PiETRO ) , peintre et gra-
veur, naquit à Païenne en Sicile, dans
le iG*". siècle, suivant certains auteurs,
et à Rome , en 1 6i4 ^ smvant d'autres.
Ou a de lui, les Loges du f^atican,
d'après Raphaël , en 5 i pièces , qu'il a
f^ravccs coujoiuicment avec Fauîeltij la
AQU
Bataille de Constantin, en 4 pièces,
d'après le même ; la Galerie du pa-
lais Farnèse, en 1 2 pièces, d'après les
tableaux d'Annibal Carraclie , et beau-
cou]) d'autres estampes, gravées à l'eau
forte , d'après difTérents maîtres. II
avait d'abord embrassé l'état ecclésias-
tique , (ju'il quitta pour se livrer aux
arts, Oîi ignore l'époque de sa mort. —
Son frère, François Faronnius Aquila,
a gravé également à l'eau forte diffé-
rents sujets , parmi lesquels ou dis-
tingue la suite des peintures que Ra-
phaël a exécutées dans les chambres
du Vatican , en 1 9 pièces ; la coupole
de l'église neuve de l'Oratoire à Rome ,
d'après le Cortoue , et quelques autres
estampes. P— e.
AQUILANO ( SÉRAPHIN ), ou d'A-
QUILA , poète itaUen , né en 1466.
On dit dans sa Vie , placée à la tète
de ses OEuvres , qu'il n'était pas de
basse naissance , mais on ne dit pas
le nom de sa famille ; celui d'Aquilano
qu'il prit et qui lui est resté, n'indi-
quait que sa ville natale, Aquila dans
l'Abruzzc , comme le surnom (W^re-
tino , pris delà ville d'Arezzo,estdevenu
le nom de Pierre Arelin. Selon le Qua-
drio , l'Aquilano était de la famille des
Ciraini. Il fut placé, dès son enfance ,
à la cour du comte de Potenza ; il y ap-
prit la musique de Guillaume Fla-
mand , qui avait alors de la célébrité.
Il se livra pendant trois ans à l'étude
de Pétrarque et du Dante , et à com-
poser des chants figurés. 11 alla en-
suite a. Rome , où il se fit une grande
réputation par ses poésies , qu'il im-.
pro visait souvent , et qu'il chantait avec
beaucoup d'expression et de grâce , sur
des airs de sa composition. Ces avan-
tages réunis faisaient illusion , au point
qu'on allait jusqu'à le mettre au-dessus
de Pétrarque. 11 fut attaché pendant
plusieurs annés au cardinal Ascagne
Sforcc , ensuite à Ferdiuaud II , alor^
AQU
duc deCalabre, et, api'èsla chxile âe
cette fjmilli'. à François de Gonzague ,
marquis Ac Mantoue. Son dernier pa-
tron fut !e fameux duc de Valentinois,
César Borgia, qui le traitait avec beau-
coup de distinction et de générosité.
On ajoute que ce duc obtint pour kii
le titre de chevalier de p-âce , dans
l'ordie de Malte. Séraphin mourut à
Tome, daus le palais de Borp,ia, le i o
août i5oo, n'étant âgé que de trente-
cinq ans. 11 fut enterré à Ste.-Marie-du-
Peuple. On grava sur son tombeau, ces
trois vers, faits par Bénédetto Accolti
d'Arezzo, surnommé V Unico yiretino
( f'oj. Accolti ) :
Qui Jïiace Serafin : partirtl hor puoi
Sql (l'haver vcsto il ;asso chf lo serra
Assai sel débiter alll occhi tuoi.
On imprima, pour la première fois, ses
poésies à V^euise , en 1 5o2 , in-4"* ,
puis à Rome , en i5o5 , etc. Ce sont
des sonnets, des églogues, des épi-
tres, des capiloli , ou pièces sur dif-
férents sujets , en tercets ou terza
rima , et d'autres qui ne sont plus
d'usage, comme des strambotti , es-
pèces d'épigrammes eu octave , ou
ottava rima , des barzelette , sortes
de ballades ou de chansons à danser,
dont le premier vers sert de refrain
à toutes les strophes, etc. L'Aquilano
partagea avec le Tébaldoo, le Caritéo ,
l'Altissimo , et d'autres poètes de la
fin du 1 5''. siècle , des éloges exagérés ,
et une renommée qui s'évanouit dès le
commencement du lô'. G — e.
AQUILANO ( SÉBASTIEN ), mé-
decin it^ien du iS*". siècle. Son véri-
table nom est inconnu ; celui qu'il porte
lui vient delà ville d'Aquila, au royau-
me de Naples , où il avait pris nais-
sance. Il fut en réputation du temps
de Louis de Gonzague , évêque de
Mantoue, vers la fin du i5% et au
commencement du 16". siècle. Il se
montra, tant dans sa pratiqiie que dans
AQU 347
ses écrits , un des plus zélés défenseurs
de G-ilien, On a de lui : I. De morbo
Gallico, Lyon , in-4". , i5o6, et Bo-
logne, iu-8'., 1017, faisant partie de
l'ouvrage de INIarc Gattiuaria, intitulé :
De medendis hitmani corparis ma'
Us practica uberrima , et quelques
autres de Gentilis, de Foligni, de
Biaise Astarius. II. De febre sangui-
ned ad mentem Galeni , imprimé
avec le traité précédent, dans la Prac-
tica de Gatlinarid , Bàle , in-B'.,
1537; Lyon,in-8'. , i558; Franc-
fort , in -8"., 1604. Aquilano est
un des premiers qui aient accrédité
l'emploi du mercure dans les mala-
dies vénériennes ; mais il ne l'em-
ployait qu'à très-petite dose.
C. et A — N.
AQUILIUS (Manius), consul, et
collègue de Marins. L'an 655 de Ro-
me, 101 avant J.-C, il fut envoyé en
Sicile, contre les esclaves révoltés que
commandait Alhénion. Il s'occupa d'a-
bord de leur couper les vivres. L'an-
née suivante, ayant retenu le com-
mandement en qualité de proconsul,
il en vint aux mains avec l'ennemi;
et, comme la victoire flottait incer-
taine, les deux généraux convinrent
de décider la querelle par un combat
singulier. Le proconsul , qui était
d'une force de corps extraordinaire,
étendit, du premier coup, Atbénion
mort à ses pieds, d'une blessure h la
tète. Les Romains , profitant de sa vic-
toire, chargèrent à l'instant les révol-
tés, et leur tuèrent tant de monde,
qu'à peine 10,000 hommes regagnè-
rent leur camp , où ils aimèrent mieux
s'entretuer que de se rendre. Mille,
qui restaient , capitulèrent avec le
proconsul, qui, après leur avoir pro-
mis la vie, voidutles envoyer à Rome,
pour y combattre contre les bètes fé-
roces, dans le cirque; mais ils aimè-
rent mieux imiter l'exemple de leurs
5 .i{5 A Q U
compagnons, et se tuer les uns les
autres, que de se soumettre à cette
ignominie. Aquilius, à son retour, ne
fut honoré que de l'ovation, maigre'
l'importance de ses services, le triom-
phe ne s'accordant point à ceux qui
remportaient des victoires sur les re-
belles, et particulièrement sur des es-
claves. Il fut accusé de concussions par
L. Fusius, avec beaucoup de chaleur et
de talent , même convaincu , dit Cieé-
ron; mais il fut absous, en mémoire de
ses grands succès dans la guerre des
esclaves. Il périt misérablement, dans
la guerre contre Mithridrate, par la
cruauté de ce prince ( F. jMithridate).
Q_R_Y.
AQUILIUS (Sabinus), juriscon-
sulte romain, du 5^ siècle de l'ère
chrétienne. Sa sagesse et ses connais-
sances lui firent donner le surnom de
Caton. Il fut élu consul, deux fois
de suite , en l'aimée 2 1 4 ^t en 9, 1 6.
On a prétendu qu'il était père ou frère
d'Aquilia Sévéra , vestale , qu'Hélio-
gabale contraignit à devenir sa femme;
ce qui a pu le faire présumer , c'est la
haine que cet empereur porta à Aqui-
lius , dont la sagesse l'irritait. Il
voulut le faire périr ; mais un heu-
reux hasard sauva cet homme ver-
tueux. L'empereur ayant commandé à
un de ses ofllciers de se défaire du
consul Aquilius , cet oflicier, dont l'o-
reille était un peu dure , et qui avait
reçu Tordre, quelques jours aupara-
vant, de faire sortir de la ville le sénat
entier, crut que ce prince lui donnait
le même ordre à exécuter à l'égard du
consul , et il fit sortir de la ville Aqui-
lius Sabinus. Aucun des ouvrages
«le ce jurisconsulte n'est parvenu jus-
qu'à nous. ]\I — X.
AQUILIUS GALLUS, juriscon-
sulte romain, disciple de Scœvola, fut
d'abord chevalier , et exerça , avec Al-
îéJus Capito , la charge de tribun du
A Q U
peuple , dans la même année que Pom-
pée obtint le consulat. On le regarde
comme l'auteur de la loi Aquilia;
mais tout porte à croire que cette loi
est plus ancienne. Ce fut lui qui régla
la manière d'instituer héritiers les
petits enfants posthumes : ce qui est
prouvé par la loi Gallus, n". o.g,
dans le Digeste, De liberis etposthn-
mis. L'amilié de Cicéron est un grand
titre à la réputation de Gallus, qui
exerça la questure avec lui; ce gi-ard
orateur , dans son ouvrage De claris
oratoribus , nous !e dépeint comme
un homme d'un esprit vif et péné-
trant. Sa formule De dolo inalo, est
appelée par Cicéion le remède contre
toute espèce de fourberies , Ever-
riculum maliliarum omnium ; cet
éloge doit exciter nos regrets sur la
perte de ce Traité. M — x.
AQUIN ( Thomas d' ). F. Thomas.
AQUIN ( Philippe n' ), savant rab-
bin de Carpentras , dont le véritable
nom était Mardoçai, ou Mar-
D o c h É E. Chassé de la synago-
gue d'Avignon , en 1610, à cause de
son penchant pour le christianisme,
il se retira dans le rovaume de Naples,
et se fit baptiser à Aquino, dont il prit
le nom. 11 en supprima la terminaison
lorsqu'il vint en France , et se fit appe-
ler d'Aquin. Le clergé lui donna une
pension. Il vint ensuite, avec sa famille,
s'établir à Paris, où il se consacra à
l'enseignement de l'hebreii. Louis XllI
le nomma professeur royal au collège
de France, et interprète pour la lan-
gue hébraïque. Il occupa cette chaire
jusqu'à sa mort, arrivée vers l'an i6jo,
au moment où il préparait une version
àx\ Nouveau Testament, en hébreu,
avec des notes sur chaque épître de
S. Paul. On assure également que Le-
jai l'avait chargé de l'impression et de
la correction des textes hébreu et
chaldécu de sa Polyglotte. Voici la
AQU
liste do ses ouvrages : I. Dictionarium
hehrao - chaldao - talmudico - rabhi-
uicum, Paris, 162g, in-fol.; \\. Ra-
cines de la langue sainte, Paris,
1620, in-fol.; III. Explication des
treize moyens dont se servaient les
rabbins pour entendre le Pentaleu-
(jue , recueillie du Talinud ; IV".
Traduction italienne des apophthep;-
mes des anciens docteurs de l'E-
glise Judaïque ; V. Aquinatis hebrece
ling. prof. lacrimcE in obitum illuslr.
card. de Bendle. Dans cet e'crit, où
il s'acquitte envers sou bienfaiteur de
la reconnaissance qu'il lui devait , il
parle de deux autres ouvrages qu'il
avait composes , l'un imprimé et tiré
des rabbins, intitulé : Examen mun-
di ; l'autre , qu'il était près de mettre
au jour sous ce titre : De ulrdque po-
lilid judàicd tàm civili qnàm eccle-
siasticd. On a encore de lui : Discours
du Tabernacle et du Camp des Israé-
lites^ Paris , i6jt3, in-4''. ; Discours
des Sacrifices de la Loi mosaïque,
Paris, iG'24 lin-i"-; interprétation de
l'Arbre de la Cabbale des Hébreux^
Paris , in-8°. , sans date ; Foces primi-
geniœseu radiées grcecce, Paris, 1 620,
in- 16. — Son fils, Louis d'Agum , né
à Avignon en 1 600 , pensionné comme
lui par le clergé, fit aussi sa principale
étude de la science rabbinique, et se
rendit très -habile dans les langues
orientales. Il tradui^iten latin, le Com-
mentaire de Ben - Gersou sur Job ,
Paris, 1622, in-4''., ^^ 1^ Commen-
taire sur Esther, qu'il enrichit de
notes. — Antoine d'ÂQUiN, premier
médecin de Louis XI V, mort en 1 696 ,
était petit-fils de Philippe, et pèie de
Louis d'Aquin, évêque de Fréjus.
J— N.
AQUIN ( Louis Claude d' ) , fa-
meux organiste , né à Paris le 4 juillet
i694,Diortlp 1 5 juin i 7 n-j. Ses dis-
positions^ secoudées par les leçons du
AQU 549
musicien Bernier, le firent regarder
comme un petit prodige , puisqn'à
l'âge de six ans , il étonna Louis XIV ,
devaiit qui il toucha du clavecin , et
que, deux ans après, il cessa d'avoir
des maîtres. Nommé organiste du Petit-
St.-Antoine , à l'âge de douze ans, il
fit admirer son exécution facile et bril-
lante; il concourut, en 1727, pour
l'orgue de St.-Paul, et l'emporta sur
Rameau , qui , depuis , acquit tant de
celelirité, comme compositeur de mu-
sique dramatique. En 1759, le roi le
nomma l'un des organistes de sa cha-
pelle. On assure que le célèbre Handel
fit le voyage de France , exprès pour
entendre d'Aquin. On a , de cet orga-
niste, deux Recueils gravés, l'un de
Pièces de Clai>ecin, Y aulre de Noëls.
P— X.
AQUINdeChateau-Lyon (Pierre-
Louis) , fils du précédent . et bache-
lier en médecine, mourut vers 1 '-97 ,
après avoir publié : I. Contes mis en
vers par un petit cousin de Rabelais,
1775, in-8°.; IL Lettres sur les hom-
mes célèbres dans les sciences , la
littérature et les arts , sous le règne
de Louis XF, 1752 , 2 vol. in - i 2 ;
repoduits en 1765 , sous le titre de
Siècle littéraire de Louis XF ; III.
Lettres sur Fontenelle , i-Sî .in-12;
IV. Observations sur les OEuvres
poétiques de M. de Caux de Cap-
pei'al , 1 754, in-i 2 ; V. la Plejade
française, ou l'Esprit des sept plus
grands poètes , 1764 , 2 vol. in- 12 j
VI. Semaine littéraire, 1 75g , 4 vol.
in - 1 2 (en société avec de Caux) ; VIL
Idée du siècle littéraire présent , ré-
duit à six vrais auteurs ( Gresset ^
Crébillon , Trublet , Fontenellc ^ Mon-
tesquieu et Voltaire), in- 12 , sans
date; on attribue aussi cet ouvrage à
l'abbé Blanchet ; VIII. Poésies de
Lainez , 1 755 , in - 8". ; IX. Satire
sur la corruption du goût et du sijle,
o5o ARA
inSo, in - 8°. ; X. Almanach litté-
raire, ou Étrennes d' Apollon, 1777-
o3, 17 vol. petit in-i'^; quelques
volumes sont sous le nom d'wH Cou-
sin de Rabelais, à' autres sous le nom
de Rabelais d'Aquim ÎVP. C.-J.-B.
Lucas-Rochemonta ajoute 4 volumes
à cette collection , 1801-1804. Ces
2 1 volumes sont un recueil de pièces
en vers et en prose. Un si2^. volume ,
ne contenant que des poésies , a été
publie par M. Millevoye , Paris , li-
brairie économique, 1 806 ; XI. Eloge
de Molière , en vers , avec des notes
curieuses , 1775, in-8'. ; XII. quel-
ques autres ouvrages , qui , comme
ceux que nous venons d'indiquer ,
prouvent peu de talent , et eurent peu
de succès. Aussi , faisant allusion à la
profession de son père , a-t-on dit :
On souftla pour le pure , on siffla pour le fils.
A. B— T.
AQUTNO (Charles d'), jésuite, né
à ^^aples en iG54, professa la rliéto-
rique à Rome avec beaucoup d'éclat,
fut ensuite recteur du collège de Rivoli ,
et revint à Rome, où il mourut en
1 740. llotaitdcl'académiedes sciences,
et de celle des Arcades. Ses ouvrages ,
écrits en latin, sont estimés, tant par le
choix des sujets que par le style et l'é-
rudition qu'il a su y répandre. Les
pi-incipaux sont : I. trois Aolumes de
poésies, Rome, 1 702 , parmi lesquelles
on remarque un Anacreon Recanta-
ius , c'est-à-dire, des odes édifiantes
que l'auteur a cru devoir opposer,
comme antidote, aux odes erotiques
du poète grec ; II. Orationes , Ro-
me, 1 704 , 2 vol. in-8"- , dont le pre-
mier contient les oraisons funèbres, et
le second, des harangues sur divers
sujets ; III. Lexicon mililare, Rome ,
1-^07, in-foho, réimprimé en 1759.
Outre l'explication des termes mili-
taires, on ti'ouye, dans ce dictiou-
ARA
naire , un grand nombre d'observâ-
tious qui servent àéclaircir les écrivains
anciens et modernes, et de savantes
dissertations. IV. Une histoire de la
guerre de Hongrie, sous le titre de
Fragmenta historiœ de hello Hun-
gffln"a?,Rome, 1726, in- 12. L'auteur
fut forcé d'abandonner cet ouvrage,
faute des mémoires qu'on lui avait pro-
mis; il n'en reste que quelques parties
où l'on trouve une description géogra-
phique de la Hongrie , l'histoire de la
nation hongroise jusqu'au règne de
Léopold, elle commencement des trou-
bles excités par Éméric Tékéh. V. No-
menclatorAgricullurœ,làoms',i'j3G^
iii-4"- C'est un dictionnaire de tous
les termes d'agriculture employés par
les auteurs latins qui parlent de cette
science. Cet ouvrage est terminé par
un index méthodique dans lequel tous
les termes sont rangés sous vingt
classes assez bien déterminées. G — s.
ARAB-CHAH ( Ahmed Bex), his-
torien arabe , est auteur d'une Vie de
Tymour (Tamerlan), ouvrage estimé,
intitulé .- Les prodigieux ejfets des
Décrets divins dans les ajfjaires
de Tjmour. Le style ne nous semble
pas mériter les éloges pompeux qu'en
ont faits quelques orientalistes j l'au-
teur , il est vrai , étale tout ce que
l'imagination a de plus brillant , accu-
mule les figures les plus exagérée* ,
mais il s'étudie coutinucllenient à em-
ployer des mots à double sens , et dont
la signification est très-difficile à saisir.
Il n'est donc pas étonnant que les tra-
ductions qu'on a faites de cette histoire,
qui doit être lue dans la langue origi-
nale, soient très-fautives. Golius en a
publié le texte à Lcyde , en i()5G , et
Vatier, une traduction française, en
16 58. Manger en a publié le texte,
accompagné d'une traduction latine, à
Lewardin , en 17C7 et 1772, 2 vol.
in-4''. On en a imprimé en outre , à
A Fv A
Coustantinople , une traduction turkc,
l'an 1 142 de l'iieg. ( 1 •y 29 de J.-G. ).
La Bibliothèque impériale de France
en possède deux beaux manuscrits,
d'après lesquels on pourrait en pu-
blier un texte pur. Arab-Chàh est en-
core auteur de plusieurs ouvrages; il
mourut en Egypte, l'an 854 del'he'gire
( 1 4^0 de J.-G.)- Ou trouve des détails
curieux sur cet historien dans la Bio-
graphie d'Aboul-Mahaçan. J — ^.
ARADON ( Jérôme ) , de Quinipily,
l'un des principaux officiers du duc de
Mercœur , dans la guerre de la hgue,
fut oblige de rendre, eu 1089 1 ^^^
prince de Dombes , la ville d'Hen-
nebon , où il commandait ; mais il
contribua, l'année suivante , à la re-
prise de cette place , dont le gouver-
nement lui tut rendu. On a , de ce ca-
pitaine, un journal très- inexact et très-
paitial des événements qui eurent
lieu dans cette partie de la Bretagne.
Aradon de Quinipily demeura dans le
parti des ligueurs , même après la con-
version de Henri IV, et il ne se sou-
mit à l'autorité légitime qu'en 1697,
époque à laquelle le duc de I\Iercœur
fit sa paix. Toute la famille d'Aradon ,
composée de cinq frères , était dé-
vouée à ce chef, et lui rendit de
grands services ; l'un d'eux était gou-
verneur de Vannes; un troisième (Du-
plessis d'ARADON ) , évèque de cette
ville , fut député aux états - généraux
de la ligue , en 1 595. D. N — l.
ARiGON (Jea-vxe d ). Un recueil
de vers itaheus , publié à Venise , en
i558 , sous le litre de : Tempio alla
divina signora Giovanna tV Ara-
fotia, et qui contient des morceaux
d'un grand nombre de poètes , à la
louange de cette dame , n'est pas la
seule preuve que l'on ait de son mé-
rite, de son courage, de ses vertus
presque héroïques. Dans le 16^. siècle,
©ù l'Italie compta plusieurs femmes
ARA 56î
illustres , elle fut une des pliis dislin-
g'ieVs et des plus belles. Epouse d'As-
cagne Golonne , prince de Tagliacozzo,
elle eut occasion de faire preuve de
ses grandes qualités dajis les querelUs
de la famille Colonne avec le pape
Paul IV. Son mari ayant été arrête à
Naples, elle voulait l'aller rejoindre;
elle eut défense de sortir de Rome ,
et le respect dû à sou sexe empêcha
seul qu'on ne l'arrêtât elle - même ;
mais rien ne put Ini arracher une
marque de crainte ou de Liblese. Elle
mom-ut , en iS-;-; , dans un âge très-
avancé. G— E.
ARAGON (TuLLiE d) , l'une des
femmes-poètes les plus célèbres d'Ita-
lie, florissait au iG". siècle. Elle des-
cendait de la branche de cette maison
royale qui avait régné à Naphs; mais
non par une descendance légitime.
Le cardinal Pierre Tagliavia d'Aragon,
archevêque de Palerme , l'avait eue à
Rome d'une belle Ferraraise , nom-
mée Giidia. Il lui assura une fortune
suffisante pour la faire vivre dans
l'aisance. Hle était belle , et une édu-
cation soignée joignit à cet avantage
naturel les talents les plus rares. Étant
encore presque enfant , elle parlait et
écrivait en latin et en italien , sur
toutes sortes de sujets , comme le lit-
térateur le plus instruit; et lorsqu'elle
parut dans le monde , sa beauté, sou
esprit, sa politesse , la décence de ses
manières, l'élégante magnificence de
ses habits , attirèrent tous les regards.
Elle jouait de plusieurs instruments
et chantait avec un goût et un art ad-
mirables. Ses discours étaient remplis
de raison et de grâce ; rien enfin ne
lui manquait pour séduire , aussi eut-
elle un grand nombre d'adorateurs,
et principalement parmi les poètes. Ils
lui adressaient des vers pleins d'admi-
ration et d'amour ; elle leur répondait
souveat dans le même langage ^ et elle
5 j-i A R A
passe pour avoir répondu à plusieurs
d'entre eux, autreiueut que par d> s
vers. Le cardinal fiypolite de Médicis,
Hercule Bentivoglio , Philippe Slrozzi,
le Moiza , Varclii lui-même, et , plus
encore, Pierre Manelli de Florence,
et le célèbre poète Muzio , furent ses
intimes amis. Elle vécut le plus sou-
vent à Ferrare et à Rome ; elle fit
aussi un assez long séjour à Venise.
Enfin, déjà avancée eu âge, elle se
retua à Florence , sous la protection
de la duchesse Léonore de Tolède.
Elle lui dédia le recueil de ses poésies ,
auxquelles elle joignit plusieurs de
celles dont elle avait été l'objet; et
mourut , comme elle l'avait toujours
désiré , avant d'arriver à une extrême
vieillesse. Ses ouvrages sont : I. ses
Poésies, ou /?jme,Ycnise, 10477 iii-8".,
dédiées à la duchesse de Florence , et
réimpriraeVs ensuite plusieurs lois ;
II. Dialogo delV infinità d'Ainore,
Venise, i547, in-8". ; dans ce dia-
logue sur la puissance infinie de l'a-
mour, Tullie d'Aragon se met elle-
même en scène avec Varchi, et un
autre de ses amis intimes , Lactance
Ijenucci; III. IlMeschiiio, o il Gue-
rino , poema {in ottava rima), Ve-
nise , 1 5Go , in-4°. Ce poème , en 50
chants , est tiré d'un vieux roman en
prose , que Tullie dit espagnol , mais
que les philoli gués italiens prétendent,
avec plus de fondement , avoir été d'a-
bord écrit en vieux langage italien ,
d'où il avait élé liaduit en es|)agnol ,
et plus anciennement en vieux fran-
çais. G — r..
ARAJA (FiiANçois), compositeur
de nuisique, né à ^aples. Le premier
opéra qu'il fit représenter est Béré-
nice; il fut exécuté dans le château du
grand-duc, près de Florence. Après
avoir composé quelques autres ouvra-
ges en Italie, et principalement l'opéra
d'Amore yer régnante, représente
ARA
à Rome, en 1701 , il fut appelé, en
i-jSS, à Pétersbourg, avec plusieurs
chanteurs italiens, et nommé maître
de la chapelle impériale. Pendant son
séjour en Russie, il fit exécuter, sur
le théâtre de la cour, les opéras ita-
liens à'Abiatare , de Sémiramide ,
de Scipione, d'Arsaceet de Seleuco;
mais l'ouvrage le plus remarquable de
ce compositeur, est Ce'phale et Pro'
cm, écrit en russe, et qu'on regarde
comme le premier grand ope'ra exé-
cuté dans cette langue. L'impératrice
fut si satisfaite de la musique de cet
ouvrage, qu'elle fit présent à l'auteur
d'une très -belle pelisse en zibeline.
Ai'aja , ayant ramassé de quoi vivre
dans l'aisance, vint terminer ses jours
dans sa patrie. P — x.
ARAM ( Eugène) , savant anglais ,
né à Ramsgill, dans le comté d'Yorck,
était fils d'un pauvre jardinier, et des-
tiné à la même profession; mais animé
du désir de s'instruire , il acheta des
livres, qu'il apprenait par cœur dans
SCS moments de loisir. Ce fut ainsi qu'il
acquit la connaissance des langues sa-
vantes, do plusieurs sciences, de l'his-
toire , des antiquités , etc. Eu i '^44 > il
vint à Londres , où il se mit à enseigner
l'écriture et la langue latine, dans dif-
férentes maisons d'éducation , ne lais-
sant échapper aucune occasion d'ajou-
ter de nouvelles connaissances à celles
qu'il avait acquises. Il travaillait à la
composition d'un dictionnaire com-
paré des langues celtique , anglaise ,
latine , grecque et hébraïque , lors-
qu'un événement affreux vint arrêter
ses progrès. 11 lut saisi, en i'j:j8, à
Lynn , dans le comté de INurfolk ,
cumrae assassin d'un cordonnier ,
nomme Daniel Clark, disparu depuis
plus de i5 ans. Aram fit uuc défense
remplie de talent et d'adresse, mais
n'eu fut pas moins convaincu du crime,
qu'il avoua ensuite lui-même au mi-
ARA
nistre qui l'assista au supplice, qu'il
subit avec une grande résignation. Il
paraît que sou crime lui avait e'të ins-
pire par la jalousie ; il croyait avoir
lieu de soupçonner Clark d'entretenir
lin commerce illicite avec sa femme. Il
tenta vainement de se détruire après
sou jugement , et fut exécuté à Yorck,
en 1 739. X — s.
ARAMON , ou AR AMOiNÏ ( Ga-
briel DE LuETZ , baron d' ), ambassa-
sadeiu' de France à Constantiuuplc,
sous le règne de Henri II , est appelé
citoyen de JNimes par Poido d Albe-
nas ; d'autres circonstances se réu-
nissent pour prouver qu'il naquit
dans cette ville , ou aux environs ,
dans le commencement du 1 6 '. siècle,
et qu'ainsi Moréri et Bayle se sont
trompés en le disant natif de Gas-
cogne. Il se maria en iSaG, et ayant
essuyé quelques dégoûts dans sa pro-
vince, se rendit à la cour, oii il obtint
la confiance de François I". et de
Henri II. Ambassadeur à Constanti-
liople, depuis i546 jusqu'en i5j5,
il ramena dans les intérêts de la France
Soliman II, qu'on en avait éloigné,
et obtint de ce prince une flotte pour
faire , on menaçant Naples et la
Sicile, une utile diversion en Italie,
Charles-Quint informé de cette négo-
ciation , ne manqua pas de se récrier
sur le scandale de l'alliance du roi très-
chrétien avec des infidèles , plaintes
hypocrites que l'empereur, comme l'a
judicieusement observé Bayle, se se-
rait lui-même rais peu en peine d'exci-
ter. D'ailleurs , l'idée du renouvelle-
ment de l'alliance avec le grand-sei-
gneur avait été inspirée par le pape
Paul m , et, sans doute, il n'en aurait
pas fallu davantage pour triompher
. des scrupules de Henri II , si ce prince
en avait eu , dans une telle circons-
tance. Les fausses mesures de la cour
,iic France rendirent à peu près inu-
II.
ARA 553
tile le succès de cet ambassadeur , et
un incident qu'il s'elTorça en vain de
prévenir , le compromit quelque temps
d'une manière assez grave. Revenu
eu France pour rendre compte de sa
mission , et prendre de nouveaux
ordres , il retournait à Constantinople.
De Malte , où il avait touché , il alla,
sur la demande du grand-maître , es-<
sayer d'engager , au nom du roi de
France , Dragut , qui attaquait Tri-
poli, à renoncer au siège de cette place.
Il n'y réussit point, et le grand-maître.
Espagnol de naissance , n'épargna
rien pour accuser l'ambassadeur fran*
çais } mais d'Aramont se justifia facile-
ment, et alla reprendre son poste au-
près de Soliman il. Quelques histo*
riens disent que le don des Iles-d'Or,
( d'Hièrcs ) , érigées en marquisat eu
faveur de d'Armont , avait été le prix
de ses services. C'est une erreur : il
ne les posséda que par la cession que
lui en fit un Allemand , le comte de
Roquendolf. Aramont, par son crédit,
avait fait sortir cet Allemazid du châ-
teau des Sept-Tours , et Roquendolf,
par reconnaissance, fit don à Aramont
de ces îles , ([ue le roi lui avait don-
nées. Il paraît certain qu'au lieu d'ob-
tenir quelques récompenses de ses
services , d'Aramont ne parvint pas
même à se faire restituer des terres
qu'on lui avait confisquées avant soa
ambassade. Ces terres, immédiatement
après sa mort, furent données à Diane
de Poitiers. D'Aramont suivit Soli-
man II dans une expédition en Perse,
et passa de là en Syrie , dans la Pales-
tine et en Egypte. La relation de ses
voyages a été écrite par Jean Ches-
neau , son secrétaire. « Cette pièce ,
» disent avec raison les compilateurs
» qui l'ont publiée, l'une des plus cu-
» rieuses du 16". siècle, nous laitcon-
» naître l'état de Constantinople, de
» JérusalenjetduCaire, au milieu decç
a3
5j4 ara
» siècle. Elle nous apprend des parti-
V ciilarités intéressantes de ces régions
» éloignées , et qui ne se trouvent point
» ailleurs. On y voit un détail de la
» campagne de Soliman II eu Perse. »
D' Aramont , revenu de son ambas-
sade , se retira en Provence , où il
mourut vers l'an i553. V. S — l.
ARANDA (Emmanuel d') , natif de
Bruges , passa sa jeunesse en Espagne,
eu revenant dans sa patrie fut pris
par un corsaire algérien , et resta es-
clave pendant deux ans. De retour
dans le Brabant , en \6^i , il ut, eu
espagnol , une Relation de sa captivité,
relation qui a été traduite en latin ,
La Haye, i657 , in- 12. ; en flamand,
en anglais. La traduction française ,
imprimée à Bruxelles, i656, in-is,
■ a été réimprimée à Paris , sous ce titre :
Jielation de la captivité et liberté du
sieur Emmanuel d'Aranda , jadis
esclave à Al^ei\ où se trouvent plu-
sieurs particularités de l'Afrique,
dignes de remarques ; nouvelle édi-
tion , augmentée de treize relations ,
Pjiris, iGt>5,in-i6. Indépendam-
«nent d'un sommaire sur l'antiquité
d'Alger, et de quelques détails assez
instructifs sm- la forme du gouvcrue-
lucnt et de la police de cette ville,
cette relation, et celles des treize es-
claves, donnent quelques lumières sur
les mœurs et les usages des liabitauts.
Le Dictionnaire historique des Pays-
Bas fait mention d'une édition aug-
mentée, Bruges, i68'-i. On ignore les
tlates de la naissance et de la mort de
l'auteiu". — Antoine de Aranda a pu-
blié J'erdadera informacion de la
Tierra Santa , Tolède , 1 545 , in-4".
gothique, — Jean de Aranda a laissé
Lugares communes de conceptos ,
dicfios Y sententias en diversas ma-
terias, Séville, i5()5,iii-4". A.B — t.
ARANDA (DON Pedro -Pablo
Abarca de Bolea , comte d' ) , d'une
ARA
des familles les plus disiinguécs d?
l'Aragou , naquit vers l'an 17 19- Il
embrassa d'abord la profession des
armes ; mais comme il annonça de
l'aptitude aux affaires qui demandent
un esprit observateur, Charles III,
peu après son avènement au trône ,
le nomma sou ministre auprès d'Au-
guste III son beau-père. Le comte
d'Aranda passa , en cette qualité ,
près de sept ans auprès du roi
de Pologne , tant à Varsovie qu'è
Dresde. A son retour en Espagne ,
Charles Ilï le plaça comme capitaine-
général à Valence , d'où il le rappela
en 1765 , à la suite de l'émeute de
Madrid , qui lui avait fait sentir la
nécessité de mettre à la tête de son
administration un homme d'un ca-
ractère vigoureux. D'Aranda justifia
son choix, comme président du con-
seil de Castille : ce fut lui qui prépara,
dans le plus grand secret, et fit exé-
cuter dans le plus grand ordre , l'ex-
pulsion des jésuites hors de tous les
états du roi ; mais les intrigues de
Rome et du clergé forcèrent le roi
à écarter lioncrablement d'Aranda, en
le nommant ambassadeur en France.
Pendant les neuf ans qu'il résida à
Paris, il s'y concilia la considération
universelle; mais la roideur de son
caractère , qui souvent servit bien
sa cour auprès de celle de Ver-
sailles , avait indisposé le roi d'Es-
pagne, ou plutôt le comte de Florida
Blanca, son ministre principal. D'A-
randa fut rappelé à Madrid, en i 784 ,
avec le titre honorifique de conseiller
d'état. Il y vivait dans une sorte de
disgrâce, lorsque la reine, mécontente
du comte de Florida Blanca , le fit
nommer à sa place, au mois de mars
j 792. Ce retour à la faveur fut de
courte durée. Quelques mois après ,
au grand scand.tle de la cour et de la
nation , le comte d'Aranda fut tout
A I^ A
à coup remplacé par don Manuel Go-
doï, si connu depuis sous le nom de
Prince de la Paix. 11 resta cepen-
dant doyen du conseil d'état, que ,
pendant sou ministère, il avait remis
en activité; mais ayant, dans ce con-
seil , énoncé son 0])inion sur la guerre
contre la Frauce , il fut exilé dans ses
terres d'Aragon , où il termina , eu
J794, sa longue et honorable car-
rière, en laissant une jeune veuve
dont il n'avait pas eu d'enfanîs. Ri-
. goureusement parlant , le comte d'A-
randa ne fut ni un grand homme, ni
un homme de génie; mais ce qui le
plaçait au-dessus des hommes vul-
gaires, c'était l'indépendance de sou
caractère et la force de sa volonté.
Exempt de beaucoup des préjugés
qu'on prête à ses compatriotes , il mé-
ritait, à quelques égai'ds, le litre de
philosophe dans l'acceplion favorable.
Pendant qu'il était président du con-
seil de Castille, il fit, contre l'inqui-
sition , quelques tentatives , et c'en fut
assez pour le faire préconiser par le
parti qui distribuait alors les répu-
tations ; mais les éloges des philoso-
phes ne servirent qu'à éveiller la mé-
îiance du pieux Charles III. La capi-
tale de l'Espagne lui doit , en grande
partie, sa sûreté, sa propreté et la ré-
forme de plusieurs abus. Il n'avait rien
d'imposant ni de prévenant dans son
extérieur , qui pouvait même paraître
«n peu grotesque; il avait des opinions
saines sur beaucoup d'objets, de l'ori-
ginahté dans les idées, et surtout dans
la manière de les rendre. Ses lumières
n'étaient pas très-étendues; mais il sa-
vait , dans un certain ordre de choses ,
concevoir , vouloir , et exécuter. Le
marquis de Carracioli , ambassadeur
de Na^jles, qui l'avait beaucoup connu
à Paiis, camparait assez ingénieuse-
ment son esprit à un puits profond
dont l'orifice est élroit. B — g.
A lU 355
ARANTIUS (Jules -César), cé-
lèbre auatomiste , né à Bologne , vers
l'an 1 53o. Elève de Vesale et de Bar-
tliéiemi Mags^ius son oncle, il concou-
rut aux travaux par lesquels le pre-
mier a marqué les premiers progrès
de l'anatomie chez les modernes, et
l'on pourrait dire chez les anciens ;
car leurs institutions religieuses et
civiles ne leur permettaient pas de la
cultiver. 11 fut reçu docteur en mé-
decine par l'universilé de Bologne,
et bientôt nommé professeur de chi-
rurgie et d'auatomic. Il en remplit
les fonctions pendant trente-deux ans ,
jusqu'à sa mort, arrivée en iSSg.
Arantius a fait faire plus particuliè-
rement quelques pas à la partie de
l'anatomie qui traite des muscles, et
jelé aussi quelques lumières sur la
théorie de la circulation. Voici les ou-
vrages qui lui sont dus : I. De hu-
inano fœlii liber, Yenetiis , ioti,
ia-S".; Basilcae, i579,in-8'.; Lug-
duni Batavorum, 1664, in-i-i. Aran-
tius, dans cet ouvrage, entre dans de
grands détails sur la structure e!e l'u-
térus , du placenta et des membranes
du fœtus. Il y en a encore deux édi-
tions, Venise, 1587 ^^ ï595,in-4o.,
auxquelles on a joint deux autres ou-
vrages du même auteur, Anatomi-
carum obseri>ationum liber ^ et De
tumoribus secundum locos aff'ectos j
II. In Hipocraiis librum de vulne-
ribus capitis commentai iiis brevis ^
ex ejus lectionibus collectas, Lug-
duni, i58o, in-8°.; Lugduni Bata-
vorum, 1659, '64t, iu-12. 11 est
assez remai-quable que ce soit en Ita-
lie, le pays le plus chaud de notre
Europe , qu'ait été cultivée principa-
leniont l'anatomie, surtout dans les
premiers temps de la naissance de
cette science; Mundinus, Gabriel de
Zerbis , Bereng.-r de Carpi , Fallopia,
Eustachi, etc.,anatomistes distingués
25..
356 ARA
de ce siècle, e'taient Italiens, ou au
moins attaches à des écoles d'Italie;
les universités de Bologne et de Pa-
doue sont celles qui servaient alors le
plus cette science, C. et A- — y.
ARAS. F'oj-. Are Frode.
ARATOlî , secrétaire et intendant
des finances d'Athalaric , puis sous-
diacre de l'église romaine , florissait
.lu sixième siècle. Il était Ligurien ;
mais de son temps la Ligurie com-
prenait une grande partie de la Lom-
bardie, et Milan en était la ville prin-
cipale. De-là , naissent les différents
avis sur la patrie d'Aralor , les uns
réclamanj pour la rivière de Gènes ,
les autres pour Milan , d'autres pour
Pavie , l'honneur de l'avoir produit.
Il mourut en 5 jG. 11 avait d'abord
exercé son talent pour la poésie sur
des sujets profanes ; mais depuis qu'il
eut changé d'état , il changea aussi de
sujets. Il présenta, en 544, au pape
Vigile les ^ctes des Jpôtres , en vers
latins. Ce pontife en fut si satisfait,
qu'il ordonna de les lire publiquement
dans l'e'nlise de St.-Pierre-aux-Liens.
L'ouvrage y fut imivcrsellcment ap-
plaudi. On y trouve beaucoup d'allé-
gories dont le vénérable Bcde a orné
ses Commentaires sur les ^ctes des
apôtres. Le poème d'Arator est impri-
n!é avec d'autres poèmes chrétiens ,
\enise , Aide , 1 5o2 , in-4". ; Stras-
bourg, 1 007 , in-8'. , Leipsik, 1 5 1 5 ,
in-4". Ottletrouveaussi dans plusieurs
des recueils intitulés : Bibliothèque
des Pères, notamment dans celles de
Paris, 1575, 1589, etc., de Cologne,
1618, de Lyon , 1677, etc. Le père
Sirmond a publié le premier, à la (in
de son édition d'Ennodius, luie Épître
en vers élégiaques d'Arator à Partlsé-
nius , qui était alors en France, pour
l'engager à y publier son poème.
G— E.
ARATUS, né à Sicyoïie, vers l'an
ARA
272 avant J.-C, était encore fort
jeune, lorsque Clinias, son père, fut
tué; il fut exilé lui-même , et se réfu-
gia à Argos , oîi il se livra à la gymnas-
tique avec succès ; car il remporta des
prix, au Pentalhle. Presque toutes les
villes du Péloponnèse étaient alors sou-
mises à des tyrans protégés par Anti-
gone Gonatas, et Sicyone avait encore
plus souffert que les autres, la tyrannie
avant plusieurs fois changé de maui-.
Après la mort de Clinias , Abanti-
das s'érigea en tyran. Ce dernier ayant
été tué lui-même , Paséas, sou père, prit
sa place, et fut assassiné par Mcoclès.
Ce fut sous le règne de ce dernier
qu'Aratus, à peine âgé de vingt ans,
forma le projet d'affranchir sa patrie;
ayant rassemblé quelques exilés, il par-
vint à prendre Sicyime par surprise,
et , le tyran s'étant échappé, il ren-
dit la liberté à ses concitoyens, qu'il
fit entrer sur-le-champ dans la ligue
achéenne, très-faible alors , n'étant
que dans la •.)-4''. année de sa forma-
tion. Le retour des exilés occasionnait
beaucoup de troubles à Sicvone, ceux
qui avaient acheté leurs biens refu-
sant de les leur rendre. Aratus eut
recours à Ptolcmée Philade'phe, à qui
il avait rendu quelques services, et
qui lui donna i5o talents, avec les-
quels il indemnisa les nouveaux acqué-
reurs, et rendit les biens aux anciens
propriétaires. Étant , pour la seconde
fois, préteur des Achéens, l'an U44
avant J.-C. , il s'empara , par ruse , de
l'Acrocorinthe, citadelle qu'Antigone
gardait avec le plus grand soin , comme
l'une des clefs du Péloponnèse, et il
engagea les Corinthiens à entrer dans
la ligue achéenne. Les Mcgariens , les
Epidauriens et les Trœzéniens en fi-
rent de même. Aniigoue étant mort
peu de temps après, la guerre se dé-
clara entre Démétrius, son fils, et les
Etolieiis, qui curent alors recours aux
ARA
Arlip'eiis. Celte guerre dnra pendant
tout le rogne de De'métrius. Après sa
mort, beaucoup de tyrans du Pélopon-
nèse se voyant prives de son appui,
et sachant qu'Aratus se disposait à les
attaquer, prirent le paili de se dé-
mettre volontairement : c'est ainsi que
les villes de Megalopolis, d'Argos,
d'flermione, dePIiliase, et beaucoup
d'autres entrèrent dans la confédéra-
tion achéenne, qui se trouva au plus
haut degré de sa puissance. A peu près
vers le même temps , Aratus engagea
Diogène, qui commandait les garni-
sons que les rois de Macédoine te-
naient au Pyrée , à Munychie , à Su-
niura et à Salamine, à remettre ces
places aux Athéniens, moyennant i5o
talents, dont il leur donna la sixième
partie; mais ils ne lui en surent aucun
gré. Quelque temps après, les Eto-
iiens, jaloux de la prospérité des
Achéens , et comptant sur les secours
d'Antigone, tuteur de Philippe, for-
mèrent une alliance avec les La-
cédémoniens , ennemis naturels des
Achéens. Aratus connaissant la force
des Lacédémouiens , sentit que les
Achéens auraient beaucoup de peine
à se défendre sans secours étrangers ;
il les conduisit cependant au secours
des villes de l'Arcadie, que menaçait
Cléomènes, i^oi des Lacédémouiens;
mais, ayant été vaincu dans trois
combats successifs, sur le mont Ly-
né , près de Megalopolis , et dans
le pays de Dymé , il se vit obligé
d'avoir recours à Antigone, a qui il
rendit l'Acrocorinthe, pour le décider
à venir au secours des Achéens ;
ce prince étant venu lui-même avec
uue armée, les Achéens le nommè-
rent généralissime de leurs troupes.
Plutarque prétend que Cléomènes
avait olFert la paix aux Achéens , s'ils
voulaient lui donner cette place de géné-
ralissime, et qu'Aratus s'y opposa par
ARA 357
jalousie, et il lui reproche d'avoir jnc-
féré l'alhanced'un barbare à celle d'un
descendant d'flercule. Mais il n'y avait
pas de choix à faire entre Antigone ,
prince humain et religieux observa-
teur de ses serments, et Cléomènes,
devenu tyran de sa patrie, à laquelle
il voulait asservir tout le Péloponnèse.
Beaucoup de villes qui avaient aban-
donné les xAchécns pour se ranger du
coté des Lacédémouiens, changèrent
de nouveau de parti, dès qu'elles vi-
rent Antigone à la tête des affaires. Ce
prince entra ensuite dans la Laconie,
délit, à Sellasie, Cléomènes, qui se
réfugia auprès de Ptolémée ; et ayant
pris Sparte, il lui rendit ses lois , que
Cléomènes avait abrogées. Antigone
témoigna toujours beaucoup de con-
sidération pour Aratus, et se gouverna
d'après ses conseils , en ce qui con-
cernait les aff;iires de la Grèce. Phi-
lippe, sou neveu et son successeur,
en fil de même pendant les premières
années de son règne. Une nouvelle
guerre ayant éclaté entre les Achéens
et les Etoliens , au sujet de la Messénie ,
que ces derniers avaient ravagée ,
Aratus fut nommé préteur ; mais il se
laissa surprendre par les Etoliens , et
fut complètement défait. Ses ennemis
ayant profité de cet échec pour l'accuser
devant le peuple, il convint de ses torts ;
et, comme on lui avait de grandes obli-
gations , on n'en eût pas moins de
confiance en lui; on eut alors recoure
à Philippe, et il s'engagea uue guerrr-
qui fut très-longue , mais où Aratus ne
joua plus qu'un rôle secondaire. Phi-
lippe se laissa même prévenir contre
lui, et chercha à le faire éloigner du
gouvernement; il ne tarda pas, ce-
pendant, à revenir sur son compte, et
lui rendit sa confiance. Cette guerre
étant terminée , Philippe voulut tour-
ner ses armes du côté de l'Italie;
ayant été repoussé, il chercha de bou-
55S ARA
veau à agiter la Grèce , et sema la di-
vision parmi les Messenicns ; il s'em-
para même de leur ville, à l'aide de
l'un des partis qu'il y avait formés. 11
écouta cependant encore Aratus, eu
cette occasion, et rendit Ithome aux
Messenicns, au lieu d'y mettre une
garnison , comme le lui conseillait
Déiiietrius de Pharos. Mais à partir de
cette époque, Aratus s'éloigna de plus en
plus de Philippe, dont les mauvaises
qualités se développaient de jour en
jour , et dont il voyait avec peine le
commerce scandaleux avec la femme
d'Aratus, son fds. Philippe, de son
côté, vojait dans Aratus un censeur
sévère ; il se détermina donc à le
faire empoisonner, et il employa,
pour cela, un certain Taurion, qui
gouvernait pour lui le Péloponnèse.
Aratus ne tarda pas à s'apercevoir du
poison lent qu'on lui avait fait prendre ;
mais il n'en dit rien à personne. Ce-
pendant, un de ses esclaves, qui avait
sa confiance, lui faisant un jour ob-
server qu'il venait de crachei' du sang :
« C'est le prix, lui dit-il, de l'amitié
» de Philippe ». Il mourut bientôt
après, dans un âge avancé, et les
Achéens lui rendirent les plus grands
honneurs. On l'enterra dans la ville de
Sicyone, distinction qu'on n'accordait
qu'aux héros. Il avait écrit des Mé-
moires, que Polybc cite avec éloge ; il
fut plutôt un homme d'état qu'un
grand général ; car il fut souvent
vaincu. Il avait un fils du même nom
que lui, du même âge, à peu près,
que Philippe, et qui fut très -lie avec
ce prince, ce qui n'empêcha pas ce
dernier de le faire empoisonner, ,-ynsi
que son père ; il n'en mourut pas ;
mais il tomba daus un état de démence
si déplorable, que ses amis regardè-
rciit sa mort comme un bonheur.
C-R.
.. ARATUS, de Soles, v^lle de Cilicie,
A R A
contemporain de Théocrite, qui fail
de lui une mention honorable dans
sa sixième idylle , vécut en faveur
auprès de Ptolémée Philadelphe, et
dans la constante intimité d'Antigone
Gonatas , le fils de Déraétrius Polio-
certcs. 1! avait, dit-on, composé plu-
sieurs ouvrages , et donné une édition
d'Homère , qui précéda celle d'^ris-
tarque ; luais il n'est connu aujour-
d'hui que par son poërae des Phéno-
mènes. Quintilien lui reproche de
manquer de variété et de sentiment ;
c'est l'inévitable inconvénient attache
au genre desciiptif : il accorde cepen-
dant au poète le mérite de n'être pas
resté au-dessous de son sujet : Sufficit
tamen operi. C'est probablement ce
dernier mérite qui avait successive-
ment engagé Gcéron , Germanicus
César , Ovide et Avienus , à traduire
en vers latins le poëme d'Aratus, au-
quel Ovide ne balance pas à garantir
une durée égale à celle des grands ob-
jets qu'il avait chantés:
Cùm sole et Luoà setnper Aratus erit.
Hugues Grotius a réuni, dans son Syn-
tagma ylrateonim (Leyde, 1600,
in-4".), les trois versions latines dont
nous venons de parler , et a rempli
de son mieux les nombreuses lacunes
qu'offrait celle de Cicéron. C'est sur
cette dernière , ainsi complétée , que
le chanoine Pingre a traduit et public
les Phénomènes d'Aratus, à la suite
des Astronomiques deManilius (Pa-
ris , 1 786 , :i vol. in-8 '. ). Nous avons
encore 'd'Aratus une édition fort esti-
mée , celle de J. Fill , Oxford , 1673,
in-S". , avec les Calarlérismes d'E-
ratosthèncs. Bandini en publia une
à Florence, en 1 724 et 1 76J , in-8'\ ,
qui ne jouit d'aucune considération
parmi les érudits. Le savant danois,
M. Ancher, en préparait une qui n'a
pas encore vu le jour. L'édition la
plus complète du poëme d'Aratus,
ARA
est celle qui a été donuee par J. Th.
Biilile , Leipzig , i'j95-i8oi,2 vol.
iu-8'.: ou y trouve des anciens com-
mentaires grecs avec quelques addi-
tions tirées des manuscrits. Aratus a
eu l'honneur d'être commente' par
Hipparque , qui sans doute était jeune
alors, et n'avait encore fait aucun des
travaux qui lui assurent -le premier
rang parmi les astronomes de l'anti-
quité. Ce commentaire offre cependant
quelques observations dont ou a voulu
tirer parti , pour déterminer la pré-
cession des équinoxes. Aratus a été
commenté aussi, dit-on , par Eratos-
thcnes ; mais ce commentaire est bien
moins important que celui d'Hippar-
que ( Voy. l' Uranologion de Pétau ).
Ce n'est, à proprement parler, qu'un
abrégé d'astconomie, pour servir d'in-
troduction à la lecture d'Aratus. Les
savants ne regardent plus Eratosthè-
ncs comme auteur de ce prétendu
commentaire. Quant au poërae , il a du
moins , pour nous , le mérite de nous
avoir transmis tout ce qu'on savait
alors sur la sphère. L'astronomie ,
proprement dite, n'était pas encore
née. Les positions des étoiles ne
se rapportent pas toutes à la même
époque , d'où l'on est en droit d'infé-
rer qu' Aratus n'était pas astronome.
Il paraît certain qu'il n'a fait que
mettre en vers deux ouvrages d'Lu-
doue , intitulés : l'un , les Phéno-
mènes , et l'autre , le Miroir. Ces
deux ouvrages sont perdus. La der-
nière partie du poème d'Aratus ,
beaucoup moins intéressante que la
première, n'est qu'un recueil de pro-
nostics et d'erreurs populaires.
B— L— E.
ARBACE , capitaine Mède , jeta les
fondements d'une nouvelle monar-
chie sur les ruines du trône d'Assy-
rie, dont il renversa Sardanapalc,
devenu odieux et méprisable par sa
A E B 55()
vie efféminée. Ce fut , selon Ctésias ,
la seule cause de sa chute. Il se fai-
sait garder par des troupes qui ve-
naient alternativement de chacun des
pays de sa domination. Arbace vint
à son tour à Ninive , avec les Mèdes.
C'était un capitaine d'une grande ré-
putation. 11 avait le cœur élevé, des
mœurs sévères, et il fut indigné des
excès honteux du monarque. Il se
lia avec Bélésis , chef des troupes de
Babylone , homme i usé et ambitieux ,
versé dans l'aslrologie, et le premier
de ce célèbre collège de prêtres bal)v-
loniens, qu'on appelait Chaldéens.
Bélésis excite Arbace à la révolte , et
lui annonce qu'il a vu dans les astres
des signes certains de sa grandeur fu-
ture. Arbace promit à Bélésis , en cas
de succès , le gouvernement de Ba-
bylone, et ils entraînèrent dans leur
parti les principaux ofGciers de l'ar-
mée. Arbace retourna en Médie, pour
faire soulever ses compatriotes, tandis
que Bélésis excitait les Babyloniens à
la révohe. On fit entrer dans le com-
plot les commandants des troupes
qui devaient servir l'année suivante
dans l'armée delSinive. Enfin , les sol-
dats marchent de toutes parts, et se
réunissent sous la conduite d' Arbace.
Sardanapalc sortit enfin de sa léthar-
gie , et se mit à la tête des troupes qui
lui étaient restées fidèles ( Vor. Sar-
danapale). 11 marcha au - devant
d' Arbace, le défit successivement dans
trois batailles, et chaque fois l'obli-
gea à se réfugier dans les montagnes
de la Médie , jusqu'à ce qu'Arbace eût
réussi à ranger sous ses drapeaux une
année de Bactriens , qui venaient au
secours de Sardanapalc. Avec ce se-
cours , il reprit l'offensive , surprit de
nuit le camp Assyrien , contraignit le
roi de se renfermer dans sa capitale ,
et remporta, peu de temps après, deux
victoires, sous les murs de Nimyc,
36o A R B
dont il forma le siège. Il fit peu de
progrès pendant deux ans; mais un
delDordemcnt du Tigre ayant ren-
verse une partie des murailles , il ne
rencontra plus d'obstacles pour entrer
dans Ninive. Selon les uns , Sardana-
palerail lui-même le feu à son palais,
et périt dans les flammes; selon d'au-
tres , il sortit secrètement de Ninive, et
])arvinl à s'échapper, Arbacc fut revêtu
du manteau impérial , et tout se sou-
mit à lui. 1! sut conserver, au milieu
de SCS victoires , une grande modéra-
tion. Cette révolution donna naissance
h plusieurs royaumes , dont Arbace
composa un empire fédératif , et dont
il fut le premier souverain. La royauté,
«pioique héréditaire , ne fut plus ab-
so'ne , le monarque n'ayant pas le
droit de changer les lois consenties
par les princes confédérés. Il régna
vingt-huit ans , et eut Maudocès , son
fils, pour successeur. La confédéra-
tion qu'il avait établie ne subsistait
plus un siècle après sa mort , les rois
de Ninive ayant recouvré leur pou-
voir sur les quatre grandes monar-
chies asiatiques. Les chronologistes ne
sont pas d'accord sur l'époque de la
révolte d' Arbace; ils la placent géné-
ralement vers l'archontat d'Ariphron,
if, archonte perpétuel d'Athènes ;
mais ils ne s'accordent pas davantage
sur l'époque précise de cet archontat ,
qu? les uns font remonter en 917,
il'autres en 898 av. J.-C. B — p.
ARBâUD(Frawçois), sieur de Por-
chères, né à St.-MasJmin en Provence,
fut un des premiers membres de l'Aca-
démie française. Il n'aurait guère mé-
rité cet honneur, si le sonnet ridicule
qu'on lui a attribué, sur les jeux de
Gahrielle d'Estrées , était efFective-
nieul de lui ; mais il est prouvé que ce
îionnet est de Laugier de Porchères ,
qui fut récompensé de cette misérable
pièce , pai" une pension de i4oo IiV-
ARB
François Arbaud avait appris de Mal-
licrbe à faire des vers, et û en a com-
posé quelques-uns , dans la manière
de son maître , que peut-être celui-
ci n'eût pas désavoués. Fatigué de la
vie des cours , il se retira en Bour-
gone, où il se maria. Il mourut peu
de temps après, en \6/^o. On a de lui :
1. Une ode'à Louis XIII; II. Para-
phrase des psaumes graduels, tX Poé-
sies sur divers sujets , Paris 1 655 ,
in-8". 11 avait composé un Poëme de
la Madclaine , qui est perdu. On doit
le regretter , si l'épigramme suivante
dcRacan n'est pas trop flatteuse:
Crtte sninte donl tes veilles
Mettent la gloire en si haut lieu ,
F.iit voir deux sorles de merveille*,
l.cs tiennes et celles de Dieu.
]l est vrai que je porte envie
A les beaux \crs comme à sa vie ;
Mais, ijuciquc je veuille tenter,
Ma faiblesse y lail ri-'sislance :
Je rv puis non plus imiter
'l'es écrits que sa pénitence.
-Jean Arbaud, son frère, gentilhomme
de la chambre dii roi , a aussi publié
plusieurs sonnets dans des recueils, et
une Traduction de quelques psau-
mes , Grenoble , iG5 1 , et ÏNIarseille,
iG8i. W— s.
ARBETION , général des armées
romaines, sous le règne de Constance,
servit d'abord dans les grades les ))lus
obscurs , et s'éleva rapidement, pai!'
beaucouj) d'intrigues et par quelques
talents. En 555, Constance l'envoya
contre les Allemands révoltés; Arbe-
tion , d'abord vaincu , obtint ensuite
des succès. Jaloux de la répuîalion de
Sylvain , autre général romain , il fei-
gnit long-temps de l'appuyer, et luiflt
donner le commandement de l'armée
des Gaules , croyant, par-là , le con-
duire à l'ignominie, dans une guerre
difficile; Sylvain, au contraire, triom-
pha de tous les obstacles. Arbetion ,
furieux , multiplia tellement ses arti-
fices, entoura son rival de tant de
pièges , qu'il le força à une révolte , à
ARB
Î.1 suite de laquelle cet officier, plus
malbcureux que coupable , fut mas-
sacre'. Ce ne fat point la seule victime
qu'Arbetion immola à son ambition ;
aidé de Rufiu , préfet du prétoire , et
de l'eunuque Eusèbe , en 55 ■j , il mul-
tiplia les délations, pour plaire à Cons-
tance, et pour s'enrichir des dépouilles
des condamne's; mais lui-même fut
accuse' d'aspirer à l'empire : ses amis
pre'\'inrent sa ruine , et assoupirent
cette affaire. L'empereur lui rendit sa
confiance, et , en 56o , le chargea des
informations dirige'es sur la conduite
d'Ursicin , à l'occasion de la prise d'A-
mide. Aibetion contribua à le faire
condamner injustement. En 56i , il
fut envoyé' contre les Perses , avec
Agilon. Constance voulut aussi l'oppo-
ser à Julien. Ce dernier c'tant devenu
maître de l'empire , par la mort de
Constance , fit poursuivre les cour-
tisans de ce prince ; mais Arbetion , à
force de souplesse et d'intrigue , par-
vint à se faire mettre à la tête d'une
commission forme'e à Chalce'doiue
pour diriger ces poursuites. Arbetion
vivait encore dans la retraite , sous le
règne de Valens , en 565 , lorsqu'un
re'volte', nommé Procope, dont le parti
devenait de jour en jour plus redou-
table , le sollicita de s'unir à lui; Arbe-
tion s'y e'tant refuse' , vit piller sa mai-
son. Outre de cette injure, il se décida
à prendre parti en faveur de Valens ,
courut au camp de l'empereur, et, s'a-
vançant seul vers les révoltés , il leur
montra ses cheveux blancs , les rap-
pela à leur devoir, et en ébranla un
grand nombre, ce qui amena, bientôt
après , la défaite de Procope. Ce trait ,
du moins, répand quelque honneur sur
la fin d'une vie dégradée par l'intrigue
«t par la bassesse. L — S — e.
■ ARBOGAST( Louis - François-
Antoine), géomètre fiançais, né à
Mutzig, petite ville d'Alsace, en 1759.
ARB 56r
D'abord professeur de matliémaliqucs
à l'école d'artillerie de Strasbourg , il
est devenu ensuite recteur de l'uni-
versité nationale de la même ville , et
député du dépailemeiit du Bas-Rhin,
à l'assemblée législative et à la con-
vention nationale. Son caractère doux
et timide ne lui permit pas de prendre
beaucoup de part aux travaux de ces
assemblées; il n'y est cité que pour la
vérification du télégraphe de M.
Chappe , et un rapport sur l'unifor-
mité des poids et mesures. Consacrant
tout son temps à l'étude dans la bi-
bliothèque du comité d'instruction pu-
blique , à la formation de laquelle il
avait beaucoup contribué, il s'occuj)ait
des recherches qui ont servi de base à
son Traité du Calcul des dérivations
dont le but est d'offrir des procédés ré-
guliers et faciles pour développer des
puissances etdes fonctions de polynô-
mes ordonnés suivant les puissances
d'une ou plusieurs variables. Ces pro-
cédés, qui sont une modification de ceux
du calcul différentiel , l'ont conduit à
des résultats élégants , et à des rappro-
chements curieux. On croit cependant
qu'il aurait pu se dispenserd'introduire
autant de signes nouveaux qui rendent
assez pénible la lecture de son livre, et
rapprocher davantage ses méthodes de
la différentratiou ordinaire. On pense
aussi que ce n'est pas du côté vers le-
quel Arbogast avait tourné ses recher-
ches , qu'il faut attendre le dénoûracnt
des difficultés qui arrêtent maintenant
les progrès de l'analyse. Cependant ,
sans rien préjuger sur le sort futur du
Calcul des dérivations , on doit dirft
qu'il paraît supérieur aux règles de
ï Analyse comhinatoire , dont on
s'est occupé depuis quelque temps en
Allemagne , pour la formation des
mêmes développements. Arbogast a
présenté en i 789 , à l'académie des
sciences , un Essai sur de nouveaux
^(ii A R B
principes de calcul différentiel et in-
léornl , indépendants de la théo-
rie des infiniment petits , et de celle
des limites. Ce luenioire n'a pas été
imprime, mais on en trouve un extrait
dans la préface de l'ouvrage cité plus
Jiaut. En 179'^, le même géomètre
remporta le prix proposé par l'aca-
démie de Pétersbourg, pour déter-
miner la nature des fonrtious arbi-
traires , introduites par l'intégration
des équations différcntiel!os partielles :
ce mémoire est imprimé. Après sa
sortie de la convention , Arbogast ,
iatigué du séjour de Paris , alla rem-
plir la place de professeur de mathé-
raalhiques à l'école centrale du dé-
partement du Bas-Rhin, à vStrasbourg,
et y mourut le y avril 1 8<>5. Il était
associé de l'Institut. Son traité du
Calcul des dérivations ,1 paru à Stras-
bourg, en 1800, en lui vol. in-4".
L— X.
ARBOGASTE, Gaulois d'origine,
était l'un des principaux officiers de
l'armée de Théodose , lorsqu'eu 588,
ce prince passa de Consfantinople en
Italie pour défendre Valentinieu II
contre l'usurpateur Maxime. Ce fut
Arbogastc qui surprit Maxime dans
Aquilée , et qui marcha ensuite dans
les Gaules pour extirper les restes de
la rébellion. Théodose, retournant à
Constantinople , le laissa près de Va-
Icntinien pour l'aider de ses conseils
et de ses services. Ses talents , son dé-
sintéressement et sa bravoure firent
applaudir à ce choix ; mais l'habitude
du pouvoir fit naître l'ambition d'Ar-
bogaste, qui ne regarda plus Valen-
linien que comme son esclave. Ce
prince, impatient du joug qu'où lui
imposait, voulut trop tard réprimer
l'orgueil d'Arbogaste, et le priver de
ses emplois. Le fier Gaulois refusa avec
insolence d'obéir, s'empara de plus
en plus de l'autorité , poursuivit ou fit
ARB
périr les amis de Valentinien , qui fut
obligé de recourir à l'appui de Théo-
dose et à la médiation de S. Ambroise.
Arbogaste, redoutant également l'un
et l'autre , les prévint en faisant périr
Valentinien qui se trouvait à \1enne
eu Dauphiné. On croit que ce prince
fut étranglé par des eunuques. Arbo-
gaste n'osa avouer le crime ni en re-
cueillir ouvertement le fruit; il choisit
le rhéteur Eugène pour porter le scep-
tre sous sa direction , et ce fut en son
nom qu'il rechercha l'alliance deThéo-
dose et l'amitié de S. Arabroise. Cepen-
dant, il marcha contre IMarcomir et
Sunnou , chefs des Francs , qu'il pour-
suivit sur les terres des Bructères et
des Chamaves, aujourd'hui la West-
phalie ; mais sur le bruit des prépa-
ratifs que Théodose faisait contre Eu-
gène et contre lui , il revint en Italie,
où , appuyé de Flavien , consul e\
pontife païen, il rétablit le culte des
idoles. Cependant, Théodose appro-
chait à la tête d'une armée nombreuse;
Arbogaste et Eugène voulurent l'ar-
rêter dans les défilés des Alpes Ju-
liennes ; déjà l'empereur, après avoir
forcé les passages , défait et tué Fla-
vien , était parvenu sur les bords du
Frigidus. aujourd'hui le Vipao, dans
le comté de Gorice. La bataille se livra
en 594- La première journée fut con-
Iraireà Théodose. Eugène et Arbogaste
triomphaient et s'apprêtaient à l'enve-
lopper; mais le lendemain le ciel sem-
bla tout à coup se déclarer pour l'em-
pereur grec; le courage et la piété du
prince enflammèrent ses soldats; un
tourbillon de sable aveugla les troupes
d'Arbogaste dont une paitie mit bas les
armes. Eugène fut pris et décapité ;
Arbogaste , après des prodiges de va-
leur, se sauva dans les montagnes;
mais , voyant qu'il ne pourrait échap-
per , il se tua de deux coups d'épec.
L — S— E-
ARB
ARBORIO DE Gattinara ( Mer-
cuRiN ), cliancelier de Charles-Quint ,
naquit en i4ti5, d'une famille noble
de Vcrccil , devint un des plus grands
jurisconsultes de son teirips, fut con-
seiller du duc de Savoie, et en suite pré-
sident du parlcnientde Franche-Com-
te. En 1 5o8 , l'empereur Maximilien le
chargea d'une négociation à la cour de
Louis XII, au sujet du traite de Cam-
brai. Charles -Quint le nomma son
chancelier eu 1 5 1 8, et l'employa avec
succès dans plusieurs négociations im-
portantes. Ce fut lui qui dressa les
articles de pacification entre Clément
VU et Charles-Quint. Ce même pon-
tife le créa cardinal en i5'i(j. Au mois
de décembre de la même année, Ar-
borio conclut à Bologne , pour la dé-
fense de l'Italie, un traité que le car-
dinal de Granvclle appelle un chef-
d'œuvre de politique. Arborio mourut
à Inspruck, le 5 juin i55o, à l'âge
de soixante-cinq ans. B — p.
ARBORIUS ( iEMiLius-MAGKus ),
fils d'un habitant du pays des Eduens ,
distingué par sa naissance et son mé-
rite , qui avait été dépouillé de ses
biens, et obiigéde s'enfuir par suite des
troubles qui agitèrent les Gaules sous
l'empire de Valcntinien , naquit dans
l'Aquitaine, vers l'an a-o. Son père,
aïeul maternel du poète Ausone ,
lui donna les premiers principes de
l'éloquence. Il épousa, jeune encore,
une femme fort riche , et vint ensuite
à Toulouse , oîi il pi-ofessa la rhéto-
rique pendant plusieurs années, avec
une grande distinction. Les princes
Dalmace , Jules Constance , et Anni-
balien , frères de l'empereur Constan-
tin , qui se trouvaient alors dans celte
ville, où ils avaient été exilés, suivi-
rent ses leçons et l'en payèrent par
leur amitié. De Toulouse, il se rendit
à Narbonne, où il continua de pro-
fesser i'cloquencc. Son école , quoique
ARB 365
fréquentée par un grand nombre d'é-
lèves , lui laissait cependant encore des
loisirs. Il en profita pour plaider quel-
ques causes d'éclat devant les tribu-
naux. Sa réputation s'en accrut en-
core , et l'empereur Constantin , tou-
ché de son mérite , l'appela à sa cour,
et le chargea de l'éducation d'un de
ses fils. Il sut conserver la faveur du
prince , sans user de bassesses , amassa
de grands biens , et mourut à Con«-
tantinoplc, vers 555, comblé de gloire
et d'honneur. Arborius était un des
hommes les plus éloquents de son siè-
cle j à beaucoup de facihté et de talents
pour parler en pubhc , il joignait une
grande érudition , et des connaissan-
ces très-étendues dans les mathémati-
ques et dans l'astronomie. Les ouvra-,
ges qu'il avaitcomposés se sont perdus.
Ausone, son neveu et son disciple, a
consacré deux pièces de vers à sa mé-
moire. On trouve la première dans sou
livre intitulé : Parenlalia ; et la se-
conde , dans celui ou il a conservé la
souvenir des professeurs les plus célè-
bres de son temps. W — s.
ARBRISSEL (Robert d'), fon-
dateur de l'oidre de Fontevrau'.t, et
de l'abbaye de ce nom , naquit , en
I o47 , dans le village d'Arbrisscl , à
sept lieues de Rennes , vint de bonne
heure à Paris , où il fit des progrès ra-
pides dans les lettres , et fut reçu doc-
teur en théologie. Son évcquc, Silvest lo
de La Guerche , le rappela auprès de
lui , s'aida de ses lumières , lui con-
féra les dignités d'archiprêtre et d'of-
ficial , et eut la satisfaction de le voir
combattre avec succès la simonie, l'in-
continence et les autres vices de sou
clergé. Après avoir travaillé pendant
quatre ans à l'extirpation de ces dé-
sordres , Robert se vit exposé , par la
mort de sou protecteur, »i ressenti-
ment des ecclésiastiques qu'il avait
humiliés j et Marbodus , successcuv
do La Gucrcbe , qui apparemment
n'aimait jias autant (pie celui-ci les
réformes et les réformateurs , le re-
mercia de ses soins , et le laissa partir
pour Angers , où il alla enseigner la
théologie. Ce fut là qu'Urbain II , qui
l'entendit prêcher , fut si content de
ses sermons, qu'il lui conféra le titre
de prédicateur apostolique , avec la
permission de prêcher ^er universum
miindum. Robert , d'après celte per-
mission , allait prêchant partout la
parole de Dieu , et partout entraî-
nant après lui une foule d'auditeuisde
tout âge et de tout sexe , que son élo-
quence attachait à sa personne. Ce
mélange d'hommes et de femmes ne
manqua pas d'éveiller la curiosité pu-
blique , et de scandaliser quelques per-
sonnes. C'est ce dont on peut juger par
deux lettres contemporaines qui nous
sont restées, l'une de Geoffroy, a!)bé
de Vendôme , qui , quoique lié avec
Robert , l'accuse d'indiscrétion dans
sa trop grande familiarité avec les
femmes qu'il gouvernait. Voici un
passage de cette lettre : Fœminarum
ipiasdam , ut dicitur , niinis fami-
liariter tecum hahitare permittis , et
cum ipsis etiam, et inter ipsas noctu
fréquenter cubare permittis
L'autre lettre est de Marbodus , évê-
que de Rennes , qui , outre les mêmes
reproches, lui fait ceux de singularité
dans sa conduite, et d'excès dans
son zèle , principalement contre les
prêtres et lesévêques ; il l'exhorte à la
prudence et à la discrétion : « afin
d'imposer silence à la calomnie , et de
faire cesser des discours auxquels sa
conduite donne lieu. « Robert prit
alors une résolution bien extraordi-
naire j ce fut , comme dit Bayle , de
fixer ses tabernacles dans les soli-
tudes de Monteiraidt , de soumettre
les hommes à l'empire des femmes ;
et tandis qu'il imposait à coUcs-ci l'o-
A RB
bhgalion de prier, il voulut que ceux-
là , leurs serviteurs perpéluels,fnsseut
occupés à dessécher des marais, à dé-
fricher des landes, à labourer les terres
qu'ils avaient conquises sur les eaux et
sur le désert. L'abbaye de Fontevrault ,
fondéepar ses soins en i io5, devint en
peu de temps considérable et célèbre ,
quoi qu'en aient dit quelques prélats
de son temps , dont il n'eut pas osé
accuser les mœurs, si les siennes n'eus-
sent pas été exemptes de reproche ;
et les tristes échos de Bayle , qui ont
trouvé plaisant de répéter après lui
que Robert d'Arbrissel ne faisait qu'un
même lit avec ses plus jolies prosé-
lytes , afin de vaquer plus commodé-
ment à l'oraison. Il est certain que sa
piété ne se démentit jamais, que sa
réputation fui attaquée, et non flétrie
par les accusations dont nous venons
de parler; que les papes, les rois et
les prélats les plus distingués lui
rendirent justice et le protégèrent
contre toutes les interprétations ma-
lignes. Lorsqu'il crut que son éta-
blissem-^nt pouvait se passer de lui ,
il reprit son premier emploi de prédi-
cateur ambulant, parcourut la France ,
exhortant les riches à la charité , les
pauvres à l'humilité, les femmes à la
continence , et les hommes à l'amour
de Dieu. Il assista , en 1 1 o4 , au concile
de Baugency , et prit place parmi les
prélats. L'évê<|ue de Poitiers fut si
satisfait de sa doctrine et des lois qu'il
avait données à ses disciples, qu'il
sollicita auprès du Saint -Siège les
bulles de confirmation; et, en les dé-
livrant , le pape Pascal II déclara
qu'il prenait cet ordre sous sa protec-
tion spéciale. Ce fut au milieu de ses
travaux apostoliques que Robert tom-
ba malade , et moiu-ut au prieuré d'Or-
san , diocèse de Bourges, L'arche-
vêque de cette ville, sou clergé, la
noblesse des environs et une foule de
ARB
Lues , accompagnèrent son corps jus-
ffii'à l'abbaye de Fontevrault , où on
Ini fit des obsèques raa^niliques. En
jG55 , Louise de Bourbon , abbcsse
de Fontevrault, fit placer les restes
de Robert dans un superbe tombeau
de marbre , sur lequel on li<;ait l'cpi-
taphe qu'Hildcbert , évêquedu Mans ,
avait faite en son honneur , et dont
voici quelques vers :
Atirivit lorica latus . sitls arida fauces ,
Dura fam.'^s slomachum , iumiiia CLira vigil
fudulsit t ai'ô requiem sibi ^ rarius escam.
Guttura paseebat j;ramine , conta Deo.
Le^ibus est subjecta caro doraiaœ ratioa'is;
tt sapor unus ei , sed sapor ille Ocus.
L'ordre de Fontevrault, supprime' avec
tous les autres , par suite de la révolu-
tion , était divise en quatre provinces;
savoir : la province de France , dans
laquelle il v avait quinze prieure's ; la
province d'Aquitaine, quatorze prieu-
rés ; la province d'Auvei gne , quinze
prieures ; la province de Bretagne ,
treize prieure's. L'habit des hommes
consistait en une robe noire, une chape,
un chaperon, ou grand capuce, auquel
étaient atlache'es par derrière et par
devant deux petites pièces de drap ,
qu'ils nommèrent des Roberis. L'ha-
bit des femmes consistait en une robe
blanche, une cuculle noire, un sur-
plis blanc , et une ceinture de laine
noire. En prononçant leurs vœux, les
hommes et les femmes promettaient
stabilité' , conversion de mœurs , chas-
teté pure, pauvreté nue, et obéissance.
G — s.
ARBUTHNOT (Alexandre),
tliéologien anglican , fils du baron
d'Arbuthnot, était né en Ecosse en
i558. II se fit remarquer par un
grand zèle pour la religion réformée,
et par une habileté particulière dans
les affaires ecclésiastiques. En i56(),
il fut nommé principal du collège du
roi à Aberdeen. Ayant encouru en-
suite le ressentiment de Jacques VI ,
par la publication de \ Histoire d'E-
ARB 5Gâi
cosse, de Bucbanan, il en fut tellement
afi'ecté qu'il ne fit plus que tiaîner
une vie languissante. Il mourut , à
Aberdeen, en i585. On a de lui m\
ouvrage intitulé : Orationes de ori-
gine et dignitate j'iiris , imprimé à
Edimbourg, in-4''., en 1579,.' X — s.
ARBUTHNOT ( Jean ), Écossais ,
célèbre comme médecin et comme
Ijomrae de lettres, était né à Arbuth-
not, près de Montrose, quoique temps
après la restauration. Il prit le degré
de docteur en médecine à l'université
d' Aberdeen , et alla ensuite s'établir à
Londres, où il joignit d'abord l'ensei-
gnement des mathématiques à la prati-
que de son art. Il se fit bientôt connaî-
tre par quelques ouvrages scientifiques
qui le firent recevoir dms la société
royale. Il fut successivement médecin
extraordinaire du prince George de
Danemarck, et l'un des médecins de
la reine Anne. En 17 10, le collège
des médecins de Londres l'admit au
nombre de ses membres. Ce fut vers
ce temps que commença entre Swift,
Pope, Gay et lui, une liaison très-
étroite, qui dura jusqu'à sa mort. En
1714, il conçut, avec les deux pre-
miers, le plan d'une satire sur les abus
de l'érudition, présentée, sous une
forme ironique , comme le récit des
aventures d'un personnage supposé.
La seule partie de cette satire qui ait
paru , a été imprimée dans les OEu-
vres de Pope, sous le titre de Mé-
moires de Martinus Scriblerus ; elle
est regardée presque entièrement
comme l'ouvrage du docteur Arbuth-
not. La mt)rt de la reine Anne l'affecta
sensiblement. Il fit un voyage à Paris
pour se distraire. De retour en Angle-
terre, il contmua de pratiquer la mé-
decine avec beaucoup de réputation. Il
publia aussi , par intervalles, divers
Traités dogmatiques , et quelques écrits
pleins d'esprit , de raison et d'origina-
556 A R B
litc, mais où domine une teinte très-
marquée d'es]nit de parti. Le premier
ouvrage qui fit connaître Arbutlinot,
tst vin examen critique de l'hypothèse
du docteur Woodvvard^ pour expliquer
le dchige , (t qui se trouve dans un
Jissai sur l'histoire naturelle de la
terre, publié par ce savant physi-
cien, en 1G95. Arbuthnot attaqua
tilteliypothèsc, comme incompatible
;ivcc les principes des mathématiques
et delà saine philosophie. Son ouvrage
sur ce sujet avait pour titre : Examen
lie l'explication du Déluç;e , par le
docteur TFoodward , suivi d'une
comparaison de la doctrine de Ste-
non ai'ec celle du docteur, relative-
tnenl aux corps marins contenus dans
le sein de la terre, 1697. Un petit
écrit qu'il ])ublia peu de temps après,
le fit connaître encore plus avantageu-
fcment; il est intitulé : Essai sur
l'utilité de f étude des Mathémati-
ques, 1 700. Cet écrit le plaça au rang
des esprits supérieurs : il u'a paru,
même depuis Arbuthnot, aucun ou-
vrage qui ( IFrc, sur ce sujet, des idées
plus justes sous une forme plus impo-
sante. I.cs pnnci|iaux aA'antages que
l'auteur prétend résulter de l'étude des
mathématiques, sont : 1°. d'accoulu-
mer res])rit à une forte attention;
2". de lui faire contracter l'habilude
d'uîic logique serrée et des démons-
trations rigoureuses ; 5". de lui ap-
prendre à écarter du raisonnement
toute espèce de préjugé, de créduUté
et de su])erslition. Arbuthnot fait eu-
suite rajipheation de ces principes à
l'étude de toutes les autres sciences; et
c'est dans ces développements qu'il^
montre autant de pénétration que de
sagacité. Les principaux de ses autres
ouviages sont : \. De la régularité
des naissances des deux sexes; IL
Tables des Monnaies , Poids et Me-
sures des anciçns, expliquées avec
ARB
des exemples , dans une suite de diS'
sertations, ï']^'],m-^°.; IIL De la
nature et du choix des aliments ,
1 752 ; IV. Des EJfets de l'air sur le
corps humain, 1755; V, Traité sur
la manière de quereller chez les
anciens ; VI. VArt de mentir en
politique ; Vil. le Procès sans fin y
ou Histoire de John Bull, roman
allégorique , publié sous le nom de
Swift, trcs-estimé en Angleterre, et
où le peuple anglais est désigne sous
le nom de John Bull ; dénomination
dérisoire , qui a été depuis adoptée par
l'usage. On lui attribue quelques autres
petits ouvrages, où la satire est toujours
ti'aitée sur le ton do l'ironie. En 1751,
on publia , à Glascow , les Œuvres
mêlées du docteur Arbuthnot, en
deux vol. in-8"., où l'on trouve beau-
coup de pièces qui ne lui appartiennent
pas. Arbuthnot est un des hommes
célèbres d'Angleterre qui a réuni le
plus de genres d'esprit aux connaissan-
ces les plus sohdes et les plus étendues.
Les excellentes qualités de son cœur
égalaient les lumières et les agréments
de son esprit. C'est un témoignage que
lui rendait Swift, qui disait de lui :
« Il a plus d'esprit que nous tous, et
» son humanité égale son esprit. » Il
fut constamment l'ami des hommes les
plus distingués de son temps, Swift,
Pope , Gay, Parnell , les lords Boling-
broke et Chesterfield. Il c'ait d'une
constitution délicate, qui faisait dire
au docteur Sw ift : « C'est un homme
» propre à tout , excepté à marcher. »
Les dernières années de sa vie fiu-ent
éprouvées par de vives et continuelles
souffrances, qu'd supporta, non seule-
ment avec courage, mais avec gaîtc. 11
mourut à Londres en i^aS. Ses ou-
\Taq,es de plaisanterie ne neuvent
guère être apprécies par les étrangers ;
mais quelques écrits solides , tels que
sou Traité sur les aliments , et ses
A R C
Tables des Monnaies, des Poids et
des Mesures des anciens, sufliront
pour reconamander sa mcmoire chez
toutes les nations éclairées. M. Boyer
de Prébandier a traduit en iVançais
l'Essai sur les aliments , \']^i , 'i
vol. in- 1 2 ; ainsi que celui sur les effets
de l'air, ^']^^i , in- 12, V Histoire de
John Bull a été traduite par l'abbé
VeU y , 1753, in- 1 -i . S — d.
ARC ( Jeanne d' ). Foy. Jeanne.
ARC ( Philippe-Auguste de Sïe.-
Foix , chevalier d' ) , (ils naturel du
comte de Toulouse, mourut en 1779,
à Tulle , où il était exilé. 11 a laissé :
I. Lettre d'Osman, 1753, 5 par-
ties , in- 12 ; II. le Roman du jour ,
pour servir à Vhisloire du siècle ,
1754, 2 vol. in-12; JII. le Palais
du Silence , 1 754 , in-12 ; IV. Mes
Loisirs, 1755, in- 1 2 ; V. la Noblesse
militaire, ou le Patriote français
opposé à la Noblesse commerçante
(de l'abbé Coyer ) , i75(i, in-12;
VI. Histoire générale des guerres ,
tora. I"., 175G, tom. II, 1758,
in-4". L'auteur avait divisé son ou-
vrage en trois époques ; la première,
de[)uis le déluge jusqu'à l'ère chré-
tienne ; la seconde, dej)uis l'ère chré-
tienne jusqu'à la chute de l'empire
d'Orient; latroisièrae, depuis la chute
de l'empire d'Orient jusqu'ej» 17^8.
Les deux volumes publiés conlieunent
Fhistoire de la grande Arménie, des
deux petites Arménics, de la Gappa-
doce , du Pont , de la Paphlagonie ,
de la république d'Hc'raclée, de la
Bithynie , de Pergame , de la Phry-
gie et de la Lydie, (let ouvrage ayant
eu peu de succès, ne fut pas conti-
nué ; le premier volume a été réim-
primé en Hollande en 1758, iu-i2.
VII. Histoire du commerce et de
la Tiai>igation des anciens et des mo-
dernes , 1758, 2 vol. in- 12. C'est
encore un ouvrage interrompu. Les
A K G 367
deux volumes imprimes ne traitent
que du commerce des anciens ( 'es
Égyptiens, les Phéniciens, les Juifs ,
les Assyriens, les Mèdes, les Perses,
les Lydiens , les Grecs et les Romains).
L'auteur s'est proposé de faire voir
en général , que les nations belli-
queuses n'ont pas fait le commerce
par elles-mêmes ; et que la noblesse
ne doit pas être commerçante. L'his-
toire nous ayant conservé jt€u de dé-
tails sur le commerce des anciens ,
l'auteur s'est rejeté sur l'état des an-
ciens peuples, et sur leur j)oliiique eu
généi-nl, de sorle qu'à cet égard, soîi
ouATage est inférieur à celui de Knet
sur la même matière , oîi l'on tiouve
plus de faits particuliers rJatifs au
commerce, et moins de choses étran-
gères. A. B — T.
ARCADIUS , empereur de Cons-
tantinople , fut l'indigne successeur
du grand Théodose , qui laisSa , oa
mourant , le sceptre d'Occident à Ho-
norius , et celui d'Orient à Arradius.
Ce dernier était né en Espagne en
577; ce fut le ]>remier enfant que
Théodose eut de Flaccille. Dès sa plui
tendre jeunesse, il donna des mar-
ques de son mauvais naturel, en mal-
traitant Arsenue qui était son précep-
teur , et qui , eilrayé des dispositions
d'un tel élève , se relira , malgré les
prières de Théodose, dans les déserfs
de l'Egypte. Arcadius , à peine âgé de
sept à huit ans, venait d'être décore
de la pourpre et associé à l'empire ;
il n'avait que dix-huit ans, lorsque la
mort de Théodose le laissa seul pos-
sesseur du trône d'Orient. Arcadius ne
roccuj)a (pie pour être le vil esclave
des ambitieux qui , tour à tour , dé-
chirèrent l'état par leurs perfidies ,
leurs querelles et leur connivence
avec les Goths , les Huns et les Van-
dales , auxquels ils livrèrent les pro-
vinces et les trésors de l'empire. L'his-
368 ARC
toire d'Arcadius n'est, en quelque
sorte , que celle des hommes dont sa
faiblesse et ses vices servirent et ex-
citèrent l'audace et les fureurs ; d'un
Puifin qui , chargé par Thëodose de
diriger le jeune jDrince , voulut bien-
tôt lui faire épouser sa fille et devenir
son collègue , et qui, trompé dans ses
desseins ambitieux, appela les Iluns
et les Goths dans l'Asie et dans la
Grèce; d'un Eutrope , vil eunuque,
qui succéda au crédit de Rufiu, après
la mort tragique de ce dernier, et
qui , plus scélérat encore , acheva ,
par ses violences, d'avilir et de dé-
courager les Romains ; d'un Gainas ,
général , qui ravagea l'empire , au lieu
de le défendre , mais qui contribua
à perdre Eutrope ; d'une impéra-
trice Eudoxie , tantôt l'ennemie , tan-
tôt l'appui des ambitieux , qui per-
sécuta le vertueux Jean Chrysostôme,
patriarche de Constantinople. Arca-
dius servit successivement les pas-
sions de ces lâches tyi ans. Il vit, avec
une égale indifférence , Alaric ravager
ses états , ses sujets gémir dans l'oji-
pressiou , les secours que lui ame-
naient Stilicon , général et tuteur
d'fh)norius , devenir inutiles par la
perfidie et les intrigues des ministres
grecs , les meilleurs citoyens tomber
sous les proscriptions , et l'arianisme
désoler la religion que défendait en
vain S. Jean Chrysostôme. Tel fut,
en peu de mots , le règne de ce prince,
qui mourut , en 4o8 , dans la trente-
unième année de son âge, après en
avoir régné ({uatorze, La nature lui
avait donnÇ un extérieur digne de
son caractère; une figure désagréable,
une taille petite et mal faite , un air
faible, un parler lent, des yeux éteints,
annonçaient le plus lâche et le plus
inibécille des empereurs. Il eut , de sa
femme Eudoxie , Théodose II , qui lui
i;uccéda. L— S— f.
ARC
A RC AD I US , grammairien groc
d'Aiitioche , a fait un abrégé en dix'
neuf Uvres de la Prosodie univer-
selle , ou Traité des accents du
célèbre grammairien Hérodien. Cet
ouvrage se trouve dans le manuscrit
aioT) de la Bibliothèque impériale.
Yilloison en a donné quelques extraits
à la suite de ses Epistolœ Finarieii'
ses ; mais il serait à souhaiter que
l'ouviage fût publié en entier. Suidas
attribue à Arcadius quelques autres
ouvrages sur la grammaire. C — r.
ARCiEUS ( François ), exerça la
médecine et la chirurgie en Espagne,
et à l'âge de quatre-vingts ans, en
1075, écrivit le Traité intitulé: De
recld curandorumvulnerum ralione
libri duo ; accessit ejusdem de fe-
brium curandoium ralione libeÙus ,
irapr. à Anvers, 1 5747i"-8"., avec les
notes de Louis Nonnius; en flamand,
Amsterdam , 1 658 , in- 1 2 ; Lewarde ,
itiG^, in-S"., en allemand, Nuremb.,
1O74, in-8''. Arcœus pressentit, dans
la chirurgie, plusieurs des pratiques
consacrées et démontrées utiles de
nos jours. Il défendait le tamponne-
ment des plaies , et se bornait à l'em-
ploi de l'onguent, vulgairement appelé
Baume j qui porte son nom , et qui
dut , peut-être , tous ses succès au
nouveau procédé de pansement que
suivait Arcaius. Il blâmait aussi l'u-
sage des sutures. C. et A — n.
ARCANO ( GiovANM Mauro d') ,
l'un des poètes italiens les plus célè-
bres dans le genre burlesque, et com-
munément appelé II Mauro , floiis-
sait vers i55o. Il était d'une famille
noble du Frioul , qui tirait son nom
du château d'Arcano , dont elle était
propriétaire. Son talent poétique se
déclara de très-bonne heure. 11 fut
attaché , à Rome , en qualité de secré-
taire, au cardinal Alexandre Césarini,
et le suivit dans plusieurs voyages à
ARC
Sienne, à Florence, à Bologne, à Ve-
nise, et peut-être même en Espagne,
comme le feraient croiie un passage
de ses poésies , et la connaissance
qu'il avait de la langue espagnole. On
dit qu'il vécut aussi à la cour du car-
dinal Hyppolite de Mëdicis. 11 fut un
des principaux membres de l'acadé-
mie des \ ignajuoli, ou des Vignerons,
qui se réunissait chez Uberlo Strozzi,
et dont tous les académiciens pre-
naient des «oms tirés de la culture
de la vigne, ou d'autres objets cham-
pêtres. Il mourut à Rome , n'étant
guère âgé que de trente - cinq ans,
d'une fièvre qui l'emporta en peu de
jours. 11 eut pour amis presque tous
les beaux esprits de son temps ; mais
il fut un des ennemis les plus irrécon-
ciliables de l'Arétin , qu'il n'épargna
pas dans ses poésies satiriques. Elles
sont presque toutes de ce caractère,
ainsi que la plupart de celles que l'on
appelle burlesques , genre dans lequel
on sait que le Berni s'est principale-
ment distingué ( Foy. Bekni ). Les
Poésies de Mauro d'Arcano, ou du
Mauro, sont imprimées avec celles de
ce dernier poète , et de quelques au-
tres du même genre. Elles consistent
en XXI capiluli. Ce sont celles qui
approchent le plus de celles du Berui,
avec lesquelles même quelques criti-
ques les ont mises de pair. G-^e.
ARCASIO , professeur de droit ro-
main à l'ancienne université de Tu-
rin, ne le 20 janvier 1712 , à Bi-
sagno , province d'Acqui , fut reçu
avocat en 17J5, s'attacha particuliè-
rement à l'étude des antiquités et de
la jurisprudence romaines , et cultiva,
avec beaucoup de succès , les lettres
latines. En 1748, le roi de Sardai-.
gne, Charles Emmanuel III , le nom-
ma professeur de droit civil. Le suc-
cesseur de ce prince lui accorda ,
après trente années de service , une
A R C SGq
pension et le titie de sénateur. Cette
distinction avait été jusqu'alors sans
exemple dans l'histoire de l'université
de Turin. Arcasio ne cessa de profes-
ser que vers la fin de sa carrière; il
mourut à Bisagno , le 2 5 novembre
i7<)i. 11 a laissé plusieurs ouvrages
imprimés. Ses Commentaires de droit
civil ( Commentaria jiiris civilis ) ,
publiés à Turin , en 1 7S2 et en 1 784,
sont très-estimes, et offrent un foius
de droit romain qui sera toujours utile.
Arcasio , porté naturellement au re-
cueillement et à la méditation , aimait
la solitude, et , sur le déclin de sa vie,
il se retirait tous les ans, pendant uu
mois . dans un couvent de caraaldules,
sur la Colline près de Turin. Le ba-
ron Vernazza de Freney a publié sou
éloge , qui est iuséré dans le recueil
intitulé : Bibliuleca OltremonUma.
P— I.
ARCEREr Louis-Étienne), prêtre
de l'Oratoire, né à Marseille, en 1698,
se distingua, pendant qu'il fut empiové
à professer les humanités,par plusieurs
pris de poésie qu'il remporta dans di-
verses académies de province, dont
quelques unes s'empressèrent de lui
ouvrir leurs portes. Fixé, vers 174^,
à la Rochelle, il devint secrétaire perpé-
tuel de la société royale d'agriculture ,
et travailla, conjointement avec le P.
Jaillot, son confrère, à ['Histoire de
la BocheUe et du pays d'Aiinis. Le
P. Jaillot , qui en avait amassé les ma-
tériaux, étant mort en i74<)> le P-
Arcère se tiouva seul chargé de l'ou-
vrage , qui parut , en 1 7 56 , en 2 vol.
in - 4". Cette histoire , la meilleure
qu'on eût encore vue en ce genre, par
les recherches curieuses qu'elle con-
tient, par l'exactitude des faits , la sa-
gesse des vues , la profondeur des
réflexions , et à laquelle il ne man-
que que d'être écrite d'un style plus
Simple, cl sur un ton plus naturel,
24
070 ARC
valut à l'auteur une pension de la pro-
vince , et le titre de correspondant de
l'académie des inscriptions et belles-
lettres. Le P. Arcère est encore auteur
d'un Journal historique d-i la prise
de Mahon , d'un Mémoire apologé-
tique de la révolution de Corse, en
1 760 , de plusieurs Mémoires insères
dans le recueil de l'académie de la Ro-
cliclle , d'une Siavante Dissertation
sur l'état de l'agriculture chez les
Romains , dans ses rapports avec le
gouvernement , les mœurs et le com-
merce, in-8"., Paris , i77t), qui eut
Yaccessit du prix propose' sur ce sujet,
]iar l'acadcniic des inscriptions. L'au-
teur avait soixante - seize ans quand il
Ja composa. Il savait plusieurs lan-
gues anciennes et modernes , et fut
cliar2;c de mettre en état de paraître
ini Dictionnaire tuik, latin et français,
composé par son oncle, Antoine Arcère.
Un assez long séjour dans le Levant
avait procuré à celui-ci tous les moyens
nécessaires pour la composition d'un
pareil ouvrage. Le neveu ayant été
uî rêté dans ce travail par la faiblesse
de sa vue , et par son âge avancé ,
en légua le manuscrit à la Bibliothèque
(iii roi ; il légua pareillement à la bi-
Lliotlièque de l'Oiatuire de Marseille,
ics propres manuscrits , qui compo-
."^eiit \ vul. in -fol. , intitulés: -'^/ce-
riana. Ses poésies , où il v a du feu et
de l'clévatiou , sont répandues dans
différents recueils. Ce savant respec-
table mourut à la l\oiliel!c , supérieur
de la maison de sa congrégation , le
7 février 178^. T — d.
ARCÉSILAS, de la secte académi-
que , naquit , d'un père Scythe , à
Pitane en yEdIide, la première anuée
tic la 1 16''. olympiade. Son éducation
fut très-soignée. Il apprit les mathe-
lu.'itiques d'Autulycus et d'iîipponicus
le géomètre; la musique, de Xantiuis
l'Athémcii, et cullivià mciue la poc&ic.
ARC
Mais Moéréas , son frère aîné , qui
devint sou tuteur, l'envoya bientôt à
Athènes, jx)ur s'y livrera la profession
de rhéteur , à laquelle il le destinait.
Arcésilas ne répondit point à ses vues.
La philosophie eut pour lui plus de
charme que l'éloquence : il sxxvnl les
leçons de Théophraste le péiipatéti-
cicn, puis celles de Crantor; et , après
la mort de Cratès , se trouvant à la tète
de l'école, il devint le fondateur de la
seconde académie. 11 fit néanmoins de
grands changements à la doctrine aca-
démique. Platon et ses successeurs
avaient distingué deux sortes d'êtres j
les uns , substantiels , exerçant leur
action sur les sens ; les autres , abs-
traits, perceptibles seulement par l'es-
prit. La connaissance des premiers
constituait , disaient - ils , Y opinion ;
celle de.-> autres, \a science. Arcésilas,
se ra])prorhant du scepticisme , ou
plutôt l'outrepassant , niait que l'on
pût rien savoir, pas même, comme
Socrate , que l'on ne savait rien. 11 re-
jetait , comme faux ou trompeur , le
témoignage des sens , et prétendait ,
qu'en conséquence, le vrai sage ne
doit jamais rien affirmer ; qu'au con-
traire , il jxnit , avec une égale supé-
riorité , combattre toutes les asser-
tions reçues. Cependant, comme il
fallait bien faire concorder ces idée»
bizarres avec la nécessité de vivre ,
imposée à tous les êtres animés , il
disait que ces principes n'étaient de
rigueur que pour la science ; que , du
reste , dans le commerce de la vie ,
on pouvait agir comme les autres, et
s'en tenir aux apparences. C'est ainsi
que , par d'ingénieuses et subtiles dis-
tinctions, le rigoriste le plus sévère
croit pouvoir justifier aux autres , et .
souvent à lui-même, ses faiblesses et
ses goûts. Aussi Arcésilas, malgré son
.scepticisme, ne fut point ouiieuii de*
pkiisiis; et son humeur libérale , à lit-
ARC
quelle sa foitime et les faveurs d'Eu-
ïnènes, roi de Pergamc, lui permet-
taient de se livrer, le rendit cher à ses
concitoyens. Dans les secours qu'il por-
tait aux indigents , il savait mettre cette
délicatesse si rare qui double le prix
du bienfait. Émule d'Aristippe, il par-
tagea son temps entre l'Amour, Bac-
chus, et les Muses, sans jamais se
mêler des affaires publiques. 11 était
enthousiaste de Piudare et ci'Ilomère ,
et, lorsqu'il se livrait à la lecture de
ce dernier, il avait coutume de dire
qu'il allait chez sa maîtresse. Ce |)]ii-
losophe aimable et bizarre eut une lin
bien digne de lui. Il mourut , si l'onen
croit l'histoire , d'un excès de vin, à
l'àgc de soixante-quinze ans , la qua-
trième année de la i54 • olympiade.
Il eut pour successeur Lacvdes. — On
compte trois autres ArcÉsilas ; l'un ,
poète de l'ancienne comédie; l'autre ,
élégiaque; le troisième, statuaire, fils
d'Aristodicus. D. L.
ARCESILAUS, peintre grec, était
de Pharos , et contemporain de Poly-
gnote : il peignait à l'encaustique. On
voyait au Pvrée un tableau , dans lequel
il avait représenté Léosthènes et ses
enfants. — Il y eut aussi à Rome un
statuaire du même nom , qui vivait
65 av. J.-C. Lucullus l'aimait et lui fit
laire plusieurs ouvrages ; on les payait
plus cher que ceux des autres artistes.
\arron en parle avec éloge; il cite un
groupe de marbre, d'un seul mor-
ceau, de la main d'Arcésilaiis, et re-
présentant une lionne avec laquelle
jouaient des Amours ailés. L — S — e.
ARCET. For. Darcet.
ARCHAGATHUS , premier méde-
cin grec qui vint s'établir à Rome, l'an
554 de la fondation de cette ville, 9. 19
ans av. J.-C. Selon Pliue , ou lui donna
le droit de citoyen, .et le public lui
acheta M7ie boutique dans le faubourg
(V^Eilius, pour \ exercer saprofcssio».
ARC 071
Il paraît qu'il s'occupa plus de chirur-
gie que de médecine; et , dans le prin-
cipe, sa méthode était si douce , qu'elle
lui fit appliquer le nom de Guérisseur
de plaies , Fulnerarius ; mais , en -
suite , certains cas qui exigeaient l'em-
ploi du feu et de l'instrument tran-
chant, s'étaiit rencontrés , on changea
son premier nom en celui de Bour-
reau , et les Romains prirent en haine
la médecine et les médecins. Celte
haine, né;inraoiijs, fut peu durable,
et Asclépiade bientôt acquit aux sa-
vants de celle pr(;f(.ssion la considé-
ration de ce peuple, plus militaire qu'é-
clairé. On a aussi d- isné à ce médecin
le nom à! Areagathus ; ce qui a tron)-
pé des biographes qui , par erreur , en
ont fait deux personnages différents.
' C. et A— N.
ARCIIÉLAUS, roi de Macédoine,
était (ils naturel de Perdiicas, et d'une
esclave d'Alcétas son frère. Perdiccas,
en mourant , le laissa tuteur d'Alcétas,
fils légitime qinl avait eu de Cléopâtrc,
sou épouse, et qui n'avait que sept
ans. Archélaiis, voulant s'emparer du
trône , commença par mander Alcé-
tas , son oncle, et Alexandre, son fils,
comme s'il avait voulu leur rendre la
couronne que Perdiccas avait usur-
]ice. Ces infortunés ayant été assez cré-
dules pour se rendre à son invitation,
il les fit égorger, et jeta ensuite dans
un puits Alcétas,son jeune frère, puis
écrivit à sa mère qu'il y était tombé en
pniu'suivantunecie. Après s'être ainsi
ouvert le chemin du ti'ôue, il sembla
vouloir faire oublier, par sa conduite,
les moyens qu'il avait employés pour y
parvenir, et se distingua par sa modé-
ration. La Macédoine était sans cesse
exposée aux ravages des peuples voi-
sins ; il fitconstruire des places fortes et
ouvrit des grandes routes. 11 fit des
amas considérables d'armes , et sepro-
cura des chevaux pour monter sacava-
24..
Ô72 ARC
lerie. Il fit même consliuirp des vais-
seaux pour s'opposer aux incursions
desAîlirniens ; et, comme Pydno, ville
marilime delà Macédoine, leur servait
de point de delDarqucment , il s'en em-
para, maigre leurs efforts, et en trans-
porta les habitants dans l'intérieur. Il
aimait les arts et les lettres; car il de'-
pensa "^ talents (environ 40,000 fr.),
à faire peindre son palais par Zeuxis,
qui lui reconnut sans doute un goût
réel pour la peintmc , puisqu'il lui fit
présent, par la suite, de son tableau
de Pan. Arcbélaiis attira à sa cour Eu-
ripide et Agatli' n, deux poètes tragi-
ques célèbres, 11 voulut aussi y attirer
Socrate ; mais ce pliilosoplie ne se
rendit pas à sou invitation. 11 fut vic-
time d'une consjiiration formée par
Cratiœus , à qui il avait promis (n
mariage une de ses filles , qu'il avait
ensuite donnée à un autre; Hellano-
crates de Larisse, dont il avait abusé,
en lui fusant la vaine promesse de le
rétablir diins ses états, et Décamnichus,
l'un de ses courtisans, qu'il avait livré
à la vengeance d'Euripide. 11 fut as-
sassiné, l'an 098 avant J.-C, après
avoir régne 1 4 ans. Il laissa un fils eu
bas âge, nommé Oreste. C — r.
ARCHELAUS, né dans la Cappa-
doce, devint l'un des plus habiles gé-
néraux de Mithridate , qu'il servit avec
zèle dans sa première guerre contre
les Romains. Ce prince , l'ayant en-
.vuite envoyé en Grèce , avec une nom-
breuse armée , pour y exciter les
habitants à la révolte, Archélaiis la
souleva presque entièrement, se ren-
dit maître d'Athènes , et fit mourir, ou
envoya à Mithridate, tous ceux qui
avaient favorisé les Romains; mais
Athènes fut prise, sous ses yeux, par
Sylla, qui le défit deux fois eu ba-
taille rangée, à Chéronée et à Orcho-
iuène. Archélaiis , convaincu de la
s«périorité des Romains , engagea
ARC
Mithiidate à demander la paix, eî es
fut lui-même qui en traita les condi-
tions avec Sylia , dont il sut acquérir
l'estime. Quelques années après, il de-
vint suspect à Mithridate , qui crut
qu'il avait sacrifié ses intérêts; et, con-
naissant la cruauté de ce prince , il
se retira auprès des Romains , qui le
traitèrcEt avec beaucoup d'égards.
C— R.
ARCHELAUS, fils du précédent,
resta attaché aux Romains , et Pom-
pée , après avoir terminé la guerre
contre Mithridate , le nomma grand-
prêtre de la déesse qu'on admait à
Comane , dans l'Arménie, dont le
temple avait un territoire très-étendu ,
et un grand nombre d'esclaves , ce qui
faisait de ce grand-prêtre une espèce
de roi. Mais une place aussi tranquille
ne convenait pas à son ambition, et,
lorsque Gabniius . dont il était l'ami ^
vint commander dans la Syrie , il se
rendit vers lui , espérant être employé
dans une expédition contre les Par-
thes ; cette expédition n'ayant pas
été approuvée par le sénat romain ,
Archélaiis alla en Egypte. Les Égyp-
tiens venaient de chasser Plolémée , et
avaient nommé, pour reine , Cléopâ-
tre , sa fille , à qui ils cherchaient uu
époux digne d'elle, Archélaiis s'offrit,
en se disant fils de IMithi idate , et il fut
accepté. Gabinius , qui avait Lusse .Ar-
chélaiis aller en Égvpte , quoiqu'il
connût bien ses projets , étant venu
peu de temps après l'attaquer pour
rendre la couronne à Ptolémée Aulé-
tès ; le nouveau roi se montra digne
du trône par sa valeur ; mais n'élant
pas secondé par les Égvpticns , il fut
tué dans la bataille. î\Tarc Antoine, qui
avait été son ami , lui donna la scpul-
tm'e.ll avait eu, de la courtisane Gla-
phyra, deux fils, Archélaiis et Si^inua.
C— R.
ARCHELAUS, fils du préccdcut.
ARC
devint, après la mort de son père,
grand-prètre de la déesse de Comanc,
dignité dont J. César le priva après la
défaite de Pompée. Quelques années
après ( l'an 56 avant J.-C.) , Marc An-
toine , qui avait eu beaucoup d'amitié
pour sou père, et à qui Glaphyra , sa
mire, n'était pas indifférente, le fit
roi de Cappadoce , à la place d'Ariara-
the X. Archélaiis se trouva avec An-
toine à la bataille d'Actiura; cepen-
dant Auguste lui pardonna, et lui con-
serva ses étals; il les agrandit même
par la suite, en lui donnant la petite
Arménie et la Cilicie pierreuse , en ré-
compf nse de ce qu'il avait aidé Tibère
à rétablir Tigrane sur le trône d'Ar-
ménie. Lorsque Tibère se retira à
Ehodes, ce qui ressemblait à une es-
pèce d'exil, Archélaiis négligea de lui
rendre ses hommages, et ce prince,
irrité de ce manque de respect , le fit
mander à Rome, lorsqu'il fut devenu
ompercur , et lui suscita des accusa-
teurs; mais son âge avancé, et la fai-
blesse de son esprit , désarmèrent le
sénat et même l'empereur. Archélaiis
mourut à Rome , l'an 17 de J. - C. ,
après avoir régné cinquante-deux ans.
Il avait eu, d'une première femme,
Glaphyra, qu'il donna en mariage à
Alexandre, l'un des fils d'Hérode. Il
avait épousé , après un premier ma-
riage , Pythodoris , veuve de Polémon,
roi de Pont, dont il paraît qu'il n'eut
jMJint d'enfants ; après sa mort, la
Cappadoce devint une province ro-
maine. C — R.
ARCHÉLAUS fut désigné par Hé-
rodc-le-Grand , sou père , pour lui
.«succéder ; comme ce prince avait fait
auparavant un autre testament, où il
nommait Philippe Antipas , un autre
de ses fils, pour son successeur, il
s'éleva des débats entre les deux frères,
cl ils allèrent à Rome pour être jugés
par Auguste , qui ^ après les ayoir cn-
ARC 375
tendus , donna à Archélaiis , sous le
titre de tétrarque, la moitié des états
d'Hérode, qui comprenait la Judée pro-
prement dite , et ITdumée. Archélaiis ,
de retour à Jérusalem, se livra à la
cruauté héréditaire dans sa famille , et
même dans sa nation ; on porta des
plaintes contre lui à Auguste , qui le
destitua en l'an 6 de J.-C. , et l'envoya
eu exil à Vienne en Dauphiné: il était
dans la dixième année de sou règne.
C— R.
ARCHELAUS, de Milet, ou, sui-
vant d'autres , d'Athènes, eut pour
maître Auaxagore, qu'il suivit dans
son exil à Lampsaque, et auquel il
succéda drns la secte ionique. Après
la mort de ce philosophe , il revint
à Athènes , où l'on prétend qu'il eut
pour disciples Euripide et Socrate.
On lui donna le snrnom de Phj'sicien,
parce que , à l'exemple d'Anaxagore , il
s'occupa particulièrement des sciences
naturelles, à l'étude desquelles Socrate
substitua depuis celle de la morale.
Suivant Plutarquc , Archélaiis admet-
tait deux principes des choses : l'Air
et l'Infini ; le premier , susceptible de
condensation et de dilatation. De ces
deux mouvements, le dernier produi-
sit le feu , l'autre, l'eau. La génération
a , de même , deux causes , le chaud et
le froid. Les animaux sont nés du li-
mon échauffé de la terre, qui fut leur
nourriture première. La terre , dans
le principe, était un marais , élevé sur
ses bords, concave dans le milieu,
mais de figure ronde. IjC soleil est le
jilus grand des astres, etc. Archélaiis,
comme beaucoup d'autres philoso-
phes, disait que le juste et l'injuste
ue sont point dans la nature, et n'exis-
tent que par la loi. — On compte dans
l'antiquité plusieurs personnages da
même nom , dont on peut voir l'cnu-
niération dans laBibliolhèque f:^recque
de Fabricius. i). L,
574 AP. C
ARCHETiAUS , sculpteur , ne à
Prience , et fils d'Apollonius , est un
de ces artistes dont les noms ne nous
sont parvenus que par les monuments,
et dont les anciens auteurs n'ont pas
fait laenii.îu. L'inscription grecque qui
nous a conserve le nom et la patrie
d'Aiclielaiis , se lit au bas Ae\ Apo-
théose d'Homère , bas-relief de petite
proportion , qui fut trouve' sur la voie
Appicnne , près d'Albaiio , dans un
lieu nommé autrefois ad Bovillas.
L'empereur Qaude avait une maison
dans cet endroit, et il est probable
que ce bas-relief la décorait. L'ant^Iais
Reynoldsa voulu prouver, par la forme
des lettres de l'inscription qu'il n'avait
pas vue, que l'ouvrage a|!]iarteiiait à
une époque fort ancienne delà scul[>
ture grecque, entre la -y?.', et la g4''.
olympiade ; mais ce sentiment a été
réfuté complètement parWiiikelmann,
et le style même du monument per-
met de conjecturer que le sculpteur'
vivait sous les premiers Césars.
L— S— E.
ARCHESTRATE, poète grec, na-
quit à Syracuse , selon Athénée, el flo-
rissaif peu de tempsaprèsle règne d'A-
lexandre. Vossius ( de Poët. grœc. ,
p. 85 ), le place parmi les ])oètes d'une
époque incertaine. Ce qu'il y a déplus
sûr h son égard , c'est le genre et
l'emploi de son talent , uniquement
consacrera tracer les lois de la table,
Voici ce qu'en dit Barthélémy, d'après
Athénée : « Cet auteur Fut l'ami d'un
» des fils de Périclcs. Il avait parcouru
» les terres et les mers pour connaître
» parlni-mêmecequ'ellespniduisaient
» de meilleur. Il s'iiistruiNul dans ses
» voyages, non des mœurs des jkhi-
» pies , dont il est inutile de s'instruire ,
» puisqu'il est impossible de les chan-
» ger; mais il entrait dans les labora-
» toires où se préparent les délices de
yb table, et il »'<ut de coiamerce
ARC
» qu'avec les hommes utiles à ses plai-
» sirs. Son poème est un trésor de
» lumière , et ne contient pas un vers
» qui ne soit un précepte. C'est dans
» cette école que plusieurs cuisiniers
» ont pnisé les principes d'un art qui
» les a rendus immortels. » C'est ce
passage de l'auteur d'Anacharsis qui a
donné à M. Berclioux l'idée de son
charmant poème. Chrysippe regarde
les leçons d'Archestrale comme le
point fondamental de la doctrine épi-
curienne , et la vraie théogonie des
philosophes gourmands. 11 avait pour
précepte , que, quand le nombre des
convives excède celui de trois ou de
quatre, ce n'est plus qu'un rassemble-
ment de journaliers, ou de soldats, qui
mangent leur butin. Il paraît que ses
leçons ne contribuèrent pas à l'enri-
chir; car Plutarque rapporte cette
exclamation d'un partisan du poète
et de sa doctrine : « 0 Archestrate ,
» que n'as-tu vécu sous Alexandre !
» chaciui de tes vers eût obtenu Chypre
» ou la Phénicie pour récompense. »
— Plutarque fait mention d'un auire
Archestrate, poète tragique, dont les
pièces furent jouées pendant la guérie
du Péloponnèse. A — T3 — r.
ARClilAS, poète grec, d'Antioche,
jouit, à Rome, d'une grande considé-
ratiiiu , sous le consulat de Mélelius
et d'Afranius , et grâce à la protection
signalée des Lucullus. qui lui avaient
procuré le droit de cité ta Héraclco ,
ville alliée qui jiaiissait des privilèges
de la bourgeoisie romaine ; mais un
incendie ayant dévoré les archives de
celle ville , et anéanti les preuves du
titre d'Archias, un certain Gratins lui
contesta juridiquement le titre et les
droit>^ de citoven romain. Ce fut à cette
occasion que Cicéron , l'élève et l'ami
d'Archias , prononça ce magnifique
plaidoyer, dans lequel il a si élcqucm-
laçut consigne sou amour pour les
ARC
lettres , et son admiration pour ceux
qui les cultivent. Arcliias avait com-
posé un poëme sur la gucire des Cira-
î)res , et il eu avait commencé un autre
sur le consulat de Cicérou. Il ne nous
reste de lui qu'une quarantaine d'épi-
»:rammes , recueillies d'abord dans
Y Anthologie grecque, et publiées en-
suite à part, avec un commentaire,
par Daniel Alsworth, le même qui
imprima, en 1 5g5, à Rome , une tra-
duction des Géologiques envers grecs.
M. Brunck a recueilli trente-quatre des
épigrammes d' Aixbias , dans ses Ana-
lecta veterum poétarum grœcorum,
tome II,png. 92. Ces mêmes frag-
ments ont été publiés depuis , accom-
pagnés de notes et d'une vei-sion
latine, par llgen ( 1800 ), avec une
épître critique sur la personne et
le génie d'Archias. Il est difficile de
concilier les éloges dont Cicéron com-
ble ce poète, avec l'extrême médio-
crité des pièces qui lui sont attribuées.
Imitateur servile du Tareutin Léo-
nidas , et d'Antipater , il se traîne sur
des sujets qu'ils ont traités avant lui,
et n'en reproduit que d'infidèles co-
pies. Deux ou trois pièces , à peine ,
méritent d'être distmguées : ce sont
les épigrammes siu- le sanglier de
Calydon ; sur le Priape placé sur les
rives du Bosphore ; sur une Imon-
delle , etc. ; celle enfin sur Diogène
le Cynique , qui veut passer l'Aché-
ron : encore cette dernière n'est-ellc
qu'une imitation de Léouidas. Il ftmt
donc supposer que les Poèmes que
nous n'avons plus , et dans lesquels
Arcliias avait célébré la guerre des
Cimbres et celle de Mitliridate, étaient
des morceaux d'un mérite bien su-
périeur à ce qui nous reste.
A— D— R.
ARCHIAS, architecte, né à Corin-
the , fut appelé en Sicile par le roi Hié-
roii, qui le chargea de diriger les
ARC
575
travaux de tout genre que ce prince
faisait exécuter pour l'avantage et l'or-
nement de son royaume. Archias
poussa très-loin l'art des constructions
navales : on lui attribue les plus belles
de ces fameuses galères siciliciuîes,
dont l'histoire a souvent parlé, et dont
les mâts et les principales pièces de
bois étaient tirés des forêts de la
Gaule et de la Bretagne. Archias vi-
vait vers la 135". olympiade, 240 ans
avant J.-C. L — S — e.
ARCHIDAMIE, femme lacédémo-
nienne, avant appris qu'on avait ré-
solu d'envoyer les femmes dans l'ile
de Crète, parce qu'on craignait, à
chaque instant, que la ville ne fàt
prise par Pyrrhus, se présenta au
sénat, une épée à la main, et dit que
les hommes les connaissaient bien
peu , s'ils croyaient qu'elles pussent
survivre à la ruine de leur patrie. Ce
trait, que l'on répète sur la foi de
Plutarque , est hasardé , ainsi que
beaucomi d'autres du même genre, et
il s'en faut de beaucoup que les fem-
mes de Sparte fussent telles qu'il les
représente. Aristote, qui vivait à une
époque où la république existait en-
core , les peint comme livrées au luxe
et au libertinage, et il ajoute que,
lorsque les Thébains, commandés par
Epaminondas, entrèrent dans la La-
conic, loin de contribuer à la défense
de leur pays , comme le faisaient les
femmes dans les autres villes, elles
occasionnèrent plus de trouble que
les ennemis eux-mêmes. Cette Ar-
chidamie est probablement la même
que la grand'mère d'Agis IV, dont
nous avons parlé à l'article de ce
prince. C — r.
ARCHIDAMUS, fils d'Anaxida-
mus, de la seconde branche des rois
de Sparte, monta sur le trône après la
mort de son père, vers l'an 620 av.
J. - C. Comme les Lacc'démoniens
576 ARC
étaient affaiblis par les pertes qu'ils
avaient e'prouve'cs durant la seconde
guerre de Messine , ils restèrent tran-
quilles sous son règne, qui ne nous
olFre aucun événement remarquable.
Il eut pour successeur Agasiclès , son
fils. C— n.
ARCHIDAMUS II, fils de Zeuxi-
(lamus, de la seconde brauche des
rois de Sparte, monta sur le tronc
î'au 476 avant J.-C. Il ne succéda pas
à son père , qui moiu-nt sans avoir été
loi ; mais à Léotvcliidès , son grand-
jière, que les Lacédémoniens avaient
exile. La Laconie fut dévastée vers la
19/. année de son règne, par des
trenibleraents de terre, à la suite des-
quels les Messéniens se révoltèrent, et
se fortifièrent sur le mont Ithome.
Archidamus montra beaucoup de pré-
sence d'esprit dans ces événements,
el il alla assiéger les Messéniens, qui,
cTprès s'être défendus pendant dix ans,
capitulèrent, à condition qu'on leur
permît de se retirer où ils voudraient.
Il s'opposa à la guerre du Pélopon-
nèse; mais ses conseils n'ayant pas été
suivis, il prit le commandement de
J'armée, et fit plusieurs invasions dans
l'Attique. 11 prit ;uissi la ville de Pla-
tées, alliée des Athéniens. Il mourut
l'an 4^8 avant J.-C, laissant deux,
fi's. Agis, Agésilas, et une fille, Cy-
iiisca. C — R.
ARCHIDAMUS m. fils d'Agésilas,
de la seconde branche des rois de
Sparte, fut, du vivant de son père,
chargé du commandement des trou-
pes que les Lacédémoniens envoyèrent
au secours des leurs, après la bataille
<h- Lcuctres. De retour dans le Pélo-
]>onuèse, il remporta quelques avau-
t-igcs sur les Arcadiens, quoique les
Thcl)ains fussent venus à leur secours,
î'.tant monté sur le trône , l'an 5G 1 av.
.[.-C, il engagea, par haine pour les
Thébaius, les Lacc'démouieus à don-
ARC
ner des secours aux Phocéens, qui
s'étaient emparés du temple de Del-
phes; et l'on prétend que quelques
présents , faits par leur chef à Dini'
cha . son épouse, ne contribuèrent pas
peu à le décider. On doit cependant le
louer de ce qu'il empêcha les Pho-
céens de massacrer les Delphiens, et
de vendre leurs femmes et leurs enfants
comme esclaves. Il prit boriucoup de
part à cette guerre, connue sous le
nom de sacrée. Il alla ensuite en Ita-
lie , au secours des ïarentins, qui
étaient en guerre avec des peuples cle
leur voisinage, et il v fut tué dans un
combat, I'au 558 avaut J.-C. On ne
put pas retrouver son corps , pour lui
donner la sépulture; ce qu'on ne man-
qua pas d'attribuer à la vengeance
d'Apollon. Il laissa un fils, nomuié
Agi*. C — R.
ARCHIDAMUS IV, fils d'Eudami-
das, était roi de Sparte, lorsque Dé-
métrius, fils d'Antigone, vint attaquer
cette ^ille, l'an 2ç)5 avant J.-C. 11 fut
défait à la vue de Sparte même, par ce
piincc, qui aurait pi's la ville, sans
les événements qui Tippelèreiit ail-
leurs. Le reste de l'histoire d'Archida-
nuis IV est inconnue. M. Larchcr pré-
tend qu'il monta sur le trône l'an 5o4
avant J.-C, et qu'il régna /^6 ans.
Plutarque, qu'il cite, n'en dit rien. Je
ne sais donc pas sur quoi M. Larcher
fonde ses calculs. — On connaît plu-
sieurs autres Archidamus, dans l'his-
toire de Sparte; le premier, fils de
Théopompe, moiuut avant son père,
vers l'an '^9.0 avant J.-C. 11 laissa un
fils , nommé Zeiixidamus. — Un autre
Archidamus, fils d'Eudamidas , s'en-
fuit à Messène, lorsqu'Agis IV, son
frère, eut été tué par les Ephores; il
en fut rappelé par Clée)mènes; mais, à
peine fut-il arrivé à Sparte, que les
meurtriers de son frère le firent périr.
C— r.
^
ARC
ARCHTGENE , mcdecin célèbre ,
ne à Apamee en Syrie , étudia la mé-
decine sous Agalbinus, et vint l'exer-
cer à Rome sous Domitien, >'erva et
Trajan. 11 était de la secte pneuma-
tique , dont il avait reçu les principes
d'Agathiuus , disciple immédiat d'A-
thénée, qui en était le fo'.;dateur. Ce-
pendant, on le regarde aussi comme le
chef de la secte des éclectiques ou
clioisisseurs , qui , pensant que la
médecine ne peut avoir pour base
aucune considération exclusive, pre-
naient , dans toutes les philosophies ,
l'observation fondamentale qui en fai-
sait l'essence, pour l'appliquer aux faits
qu'elle expliquait. Archigène eut, à
Rome, une grande réputation. Juvé-
nal , son contemporain , en parle plu-
sieurs fois dans ses satires , et Galicn
le cite souvent avec éloge ; il l'indique
comme l'auteur de d'iT: Livres sur les
fièvres j,el de douze Lettres savantes.
11 ne nous en est parvenu que quel-
ques fragments , qu'on trouve dans
£tius , comme : Hier a ; De Balneis
naturalibus ; De verliginosis , insa-
nid , resoîutione , tetano et convul-
sione , cephalœa et hemicranid ;
De <potigiœ usa ; De dropace , pi-
catione et sinapismo ; De pectore
suppuratis ; De volvulo , cœliaca
Ojffectione , dysenterid ; De hepatis
ahcessu ; De his qui per circuitum
ffue/ndam sanguinem mingunt ; Is-
chiadis exacerbatœ cura; De ele-
phantiasi ; De viperarum esu et
pruritibus ; De leprd ; De cancris
mammarum , fliuxu muliebri , uteri
abcessu , uteri exulceratione , uteri
cancris. Selon Suidas , Arcliigêne
nK)urut à soixante-trois ans, la der-
nière année du règne de Trajan.
C. et A — X.
ARCHILOQUE, poète grec, né à
Paros , l'une des Cyclades , vers l'an
700 avant J. -C; d'une famille des
ARC 577
plus illustres de cette île , mais dont
l'éclat fut terni p^r son père Télé-
siclès , qui épousa l'esclave Enipo.
C'est à cette union si disproportion-
née qu'Archi'oque dut sa naissance.
Il porta d'abord les armes ; mais il ne
nous donne pas une grande idée de
sa bravoure , en nous apprenant qu*il
prit la fuite dans un combat , et que ,
pour être plus léger à la course, il
laissa son bouclier sur le champ de
bataille. Il fut plus redoutable la plume
à la main. La fureur avec laquelle il se
déchaîna contre Lvcambe , qui , mal-
gré sa promesse, donna sa fille Néo-
bulé à un concurrent plus riche, était
si forte, que ce bon homme, furieux
de se voir déchiré cruellement dans
des vers que tout le monde chantait,
se pendit de désespoir , et son exemple
fut suivi par ses trois filles. Fier de
ce premier succès, Archiloque se li-
vra sans réserve à son dangereux ta-
lent , contre tous ceux de ses con-
citoyens qui avaient le malheur de
lui déplaire. Cet acharnement lui sus-
cita un grand nombre d'ennemis , et
les désordi'es de sa vie licencieuse
achevèrent de lui aliéner les esprits.
Non content d'avoir séduit plusieurs
filles et femmes de Paros , il rendit ,
dans ses vers , leur déshonneur ])u-
blic. Réduit enfin à la plus extrême
misère , odieux à tout le monde,
il alla chercher des ressources dans
l'île de Thasos , colonie qui de-
vait l'existence à son père, et pour la-
quelle il avait lui-même combattu. Les
Thasiens le redoutaient trop pour
remjilir les devoirs de la reconnais-
sance aux dépens de leur tranquillité;
il se vengea de leur ingratitude par
des vers sanglants. Les Lacédémo-
niens ne voulurent pas lui permettre
de coucher seulement dans leur ville;
mais les jeux olympiques ouvrirent
un théâtre plus brillaut à ses talents.
578 A R G
Il y remporta la couronne par un
Hjmnecn rii.onnciir d'Hercule, qu'il
clianta lui-mcme , et dont les paroles
et la musique étaient de sa composi-
tion. On le chantait encore du temps
de Piudarc, pour célébrer les vain-
queurs dans ces courses renommées.
Ce triomphe réconcilia Archiloqiie
s\vc sa patrie, sur laquelle il rejaillis-
sait. 11 y reporta son funeste talent
pour la satire , et périt enfin par le
fer de ceux qui étaient les objets de
ses vers sanglants. L'oracle de Del-
phes s'intéressa à sa mort , et obligea
l'assassin d'apaiser ses mânes par des
sacrifices. Les Parir ns , qui l'avaient
redouté vivant , le comblci'ent d'hon-
neurs après sa mort , et sa mémoire
resta en vénération dans toute la
Grèce. On célébrait tous les ans sa
naissance comme celle d'Homère, et
l'on chantait ses vers dans les fètC5
publiques , comme ceux de ce père
de 1,1 poésie , qui lui avait servi de
modèle ; ils passaient pour avoir at-
teint la perfection chiicun dans leur
genre. Les anciens vantaient , dans
Arcliiloque, l'énergie du stvlc , la vi-
vacité des images , une précision
pleine de sens , des sentiments éle-
vés, et une satire vigoureuse: ()uin-
tilien a dit de lui : Sinnma in eo vis ,
eleg;antes vibrantesqiœ sentenliœ ;
plurimùm sanguinis et nen-oriim ,
etc.; mais ces grandes qualités étaient
dégradées par des calomnies infâmes,
et par de grandes obscénités. Ce sont
ces défauts qui firent proscrire ses
productions par la sévère Laccdénio-
nc, et qui obligèrent l'empereur Julien
d'en interdire la lecture aux prêtres
du paganisme. Cicéron faisait allusion
aux traits mordants qu'ils renferment ,
en donnant le nom d^ Archiloquia
edicta aux placards injurieux affi'
cbés dans Rome contre César. La poé-
sie grecque lui dut l'invention, ou du
ARC
moins la perfection des e'pisodcs, des
vers ïambes et scazons. H était aussi
excellent musicien que poète, et cet
art se perfectionna beaucoup par les
changements qu'il y fit :ou peut voir
là-dessus une Dissertation Ag M. Bu-
rette dans le 10°. tome des Mémoires
de l'académie des inscriptions. Tous
ses ouvrages ont été la proie du temps,
à l'exception de quelques fragments,
qu'on a recueillis dans les Poêles grecs
de Genève , 1606 et 1614, in-fol. ,
2 vol. ; et dans les Analecta de
Brunck, tom.I,page 4o, et tom. III,
page f) et 'i36. T — D.
AHCHIMÈDE, le plus célèbre des
géomètres anciens , est peut-être celui
de tous les savants qui a eu la réputa-
tion la plusélendue et la plus populaire,
parce qu'à ses travaux sur les théories
abstraites , il a joint des inventions
mécaniques d'une utilité frappante , et
qu'il s'est trouvé dans les circonstances
les plus propres à les faire valoir.
Il naquit à Svracuse, vers l'an •.).87 ,
avant l'ère chrétienne. Il était parent
d'Hiéron , roi de cette ville; mais il
ne paraît pas qu'il ait occupé aucune
place dans le gouvernement , il s'est
renfermé tout entier dans la culture
des sciences. Considéions-le d'ab jrd
dans les progrès qu'il a fait faire aux
théories mathématiques. Pour l'ap-
précier eomjilctement sous ce rappoi t,
il nous manque nue connaissance
exacte de l'état de la science avant
lui, et des travaux des géomètres qui
Vont précédé ; ii ne nous reste , de cm
temps, que les écrits d'Euclide, et
quelques fragments, ou plutôt des in-
dications données par ses commenta-
teurs , Théon et Proclus , et par Pap-
pus, dans ses Collections mathéma-
tiques.Mais, quoi (pi'ii puisse devoir
à ses devanciers , Aichimède a enrichi
la science de découvertes de la plus
haute iuiportancc , et que l'on peut
ARC
regarder comme la base sur laquelle
les modernes se sont appuyés pour
mesurer les espaces termines par des
lignes ou par des surfaces courbes.
Dans ses cléments, Er.elide considère
seulement le rapport que quelques
grandeurs de celte espèce ont entre
elles ; il ne dit rien sur leur me-
sure absolue , c'est - à -dire , sur leur
rapport avec les figures terminées par
des lignes droites ou par des plans. A
la vérité, le moyen employé pour par-
venir au premier de ces rapports,
devait mettre sur la voie qui conduit
au second ; néanmoins il y avait en-
core bien des propositions intermé-
diaires à développer : c'est ce qu'Ar-
chimède a fait dans ses Traités de la
sphère et du cvlindre, des sphéroïdes
et des conoides , et dans celui delà
mesure du cercle. l\ s'est élevé à des
considéralions encore ]ilus difficijes
dans son Traité des spirales, courbes
qui sont regardées aujourd'hui comme
transcendantes , et dont il sut cepen-
dant mener les tangentes, et mesurer
les aires. Il y a lieu de penser que ce
n'est point de la manière dont il les
présente , qu'il a découvert ses prin-
cipaux théorèmes. Si l'on s'arrêtait
au sens propre dfs expressions dont
il se sert dans les lettres d'envoi qui
précèdent les ouvrages que nous avons
cités, on serait autorisé à croire qu'il
connaissait ces théorèmes, avant d'en
avoir la démonstration ; c'est pour
cela qu'il serait curieux de posséder
le tableau de la science, à l'époque où
il écrivait , afin de saisir le fil qui a
pu le diriger. Quoi qu'il en soit , on
peut remarquer, par la comparaison
des Traités de la sphère et du cylin-
dre , de la mesure du cercle , avec
les propositions correspondantes, dans
quelques élémtnts de géométrie, où
l'on s'est relâche sur la rigueur des
démonstrations , que c'est seulement
ARC -79
cette rigueur, et les détours qu'ii faut
em])loyer pour l'obtenir, qui ont dû
coûter de la peine à Archimède , et qui
rendent difficde la lecture de ses
écrits. La véri'é des propositions se
trouve en quelque sorte le dernier
terme d'inie approximation qui se
présente d'elle-même, et que la consi-
déraiion des indivisibles de Cavalleri,
ou celle des infiniment petits deLeib-
iiitz, transforment en une évaluation
rigoureuse. Comme je i'ai déia'dit, le
Traité des spirales renferme des pro-
positions d'un ordre plus élevé , mais
il est aussi pins obscur. Boullian ,
astronome célèbre, et géomètre ins-
truit, déclarait n'y rien comprendre,
et Viète l'accusait de fausseté : mais
c'est à tort ; car le calcul différentiel et
le calcul intégral en ont fait retrouver
tous les résultats. CeTraitéestdoncuiic
preuve d'une grande force de tête dans
son auteur, et celui de la quadrature de
la parabole , n'annonce pas moins de
sagacilé. Archimède est le seul des
anciens qui nous ait laissé quelque
chose de satisfaisant sur la théorie de
la mécanique, et sur l'hydrostatique,
dans SCS Traités sur les centres de
gravité des lignes et des plans, et sur
V équilibre des corps plongés dans un
jluide. 11 a , le premier, fait connaîlic
ce principp : « Qu'un corps plongé
» dans un fluide perd une partie de
» son poids, égale à celui du volume
» de fluide qu'il déplace. » 11 s'en est
sern pour déterminer l'alliage intro-
duit en fraude dans une couronne
que le roi Hiéron avait commandée en
or pur. La solution de ce problême
lui causa tant de joie, dit -on , qu'il
sortit tout nu du bain , et courut dans
Syracuse , en criant : « Je l'ai trouvé !
» jo l'ai trouvé î » Cette anecdote ,
qu'on lit dans toutes les P'ies d' Ar-
chimède, pourrait bien n'être qu'une
de ces eiagératious dout le vulgaire
58o A R C
croit devoir embellir l'iilstoire des
grands hommes ; elle a sans doute
pour fondement la préoccupation as-
sez ordinaire aux esprits livrés à des
méditations profondes , et qu'Arclii-
Tnède, à ce qu'il paraît , portait très-
loin. Il fut ainsi consulté, dans plus
d'une occasion , parles premières }»er-
àonnes de l'état; c'est au roi Géîon ,
fils d'Hiéron , qu'il adressa le livre in-
titulé : Arénaire , dans lequel il se
montre astronome et aritlimclicien
habile , à une époque oii les calculs
numériques n'étaient pas réduits en
règles, comme ils le sont maintenant.
Cet ouvrage , qui semble d'abord
n'être qu'un jeu d'esprit , avait pour-
tant un but très-philosophique, puis-
qu'en donnant la formation d'une
progression numérique , au moven
de laquelle on pouvait exprimer , non
.seulement le nombre des grains de sa-
ble contenus dans un volume égal à
celui de la terre , mais encore dans
une sjjhèrc de même rayon que celle
à la surface de laquelle on supposait
alors les étoiles fixes attachées , il ten-
dait à préciser les idées qu'on se f li-
.sait sur le système du monde. Ce
problême indiquait un esprit de cal-
cul peu commun, à ce qu'il paraît,
dans ce temps, et sa solution n'était
pas sans quelque difficulté , parce
qu'on n'avait point de notation com-
mode pour représenter de grands
nombres. I! semble aussi que la mé-
canique pratique était une science
Joute nouvelle au temps d'Archimède;
car Pappus , eu lui faisant dire qu'il ne
demandait qu'un point d'appui pour
mouvoir la terre , exprime l'espèce
«l'enthousiasme que lui avait inspiré la
puissance que les machines ajoutent
nnz. elforts de l'homme. Il est peut-
être le premier inventeur des moiijles,
c'est-à-dire, d'une combinaison de
poulies avec laquelle ou élève les
ARC
plus grands fardeaux : ce n'est du
moins que de cette manière qu'on
peut entendre ce que dit Athénée de
la machine qu'employait Archimèdc
pour mouvoir un vaisseau d'une gran-
deur extraordinaire. Probablement, il
y a encore de 1\ xagération dans ce que
l'on raconte à ce sujet, et je renvoie ,
sur cela, le lecteur, aux réflexions ju-
dicieuses de Montucla ( Histoire des
Mathématiques, •2''. édition, tome l*"".,
p. 2.5o). Ou met encore , au nombre
des inventions d'Archimède, la vis
sans fin et la vis creuse, dans laquelle
l'eau monte par son propre poids.
Il imagina cette dernière pendant le
voyage qu'il fit en Egypte , où il l'ap-
pliqua à dessécher des terres inondées
par le jN il ; mais c'est pendant le siège de
Syracuse, qu'Archimède déploya tous
sesmoyens pour la défense de sa patrie.
Polvbe, Tite-Live, et Plutarque, dans
la Fie de Marcellus, parlent en dé-
tail, et avec admiration, des machines
puissantes et variées qu'il opposa aux
attaques des Romains. On sait que ce
ne fut que par surprise qu'ils parvin-
rent à s'introduire dans la place. Ou
dit qu'Archimède, absorbé par ses
méditations, ignorant que la ville était
tombée au pouvoir de l'ennemi, fut
tué par un soldat romain, qui venait
le chercher de la part de INIarccllus , et
qui fut irrité de ne pouvoir l'ana-
cher aux réflexions dans lesquelles il
était plongé. En racontant celle mort ,
Plutarque ajoute que Marcellus eut en
horreur le meurtrier d'Archimède, et
qu'il rechercha , caressa et honora les
parents de ce grand géomètre. On fixe
la prise de Syracuse à l'an -x \x avant
l'ère chrétienne; ainsi Archimède avait
•j 5 ans lorsqu'il perdit la vie. Ses inten-
tions furent suivies après sa mort, puis-
qu'on lui éleva un tombeau surmonté
d'une colonne, oucylindre, sur laquelle
OU grava le rapport de la capacité de ce
ARC
eOrps, à celle de la splicre inscrite,
découverte à laquelle Ai'chimcde atta-
chait un grand prix. Le souvenir de la
forme de ce tombeau se conservait à
Rome , lorsque les compatriotes d'Ar-
chimède croyaient que le monument
n'existait plus. Cicéron , étant questeur
en Sicile, le découvrit au milieu des
ronces, qui le cachaient en partie.
Plutarque dit qu'Archimède prisait
beaucoup plus ses découvertes géomé-
triques que ses inventions mécaniques,
et qu'il n'écrivit point sur ces derniè-
res ; du moins , ne nous est-il resié au-
cune indication précise d'ouvrages où
elles soient décrites, si ce n'est à l'é-
gard d'une sphère qui , suivant Cicé-
ron , représentait les mouvements des
astres, dans les rapports de leurs
vitesses respectives : Claudien en parle
aussi. Par ce qu'ils en ont dit tous
deux, on reconnaît que ce devait être
une sphère mouvante; ou, s'il faut
douter qu'elle se soit mue d'elle-même ,
par un mouvement d'horlogerie , il est
facile de concevoir qu'elle pouvait res-
sembler à ces machines inventées
pour rendre sensibles les phénomènes
astronomiques , et que l'on fait mou-
Yoir à la main. Tzetzès, et d'autres
«crivains du Bas-Empire, en citant des
passages perdus d'historiens plus an-
ciens, ont affiimé qu'Archimède, au
inoven de miroirs ardents , incendia
la flotte des Romains , au siège de Sy-
racuse ; mais, sans entrer dans au-
cune discussion sur la forme que de-
vaient avoir ces miroirs , pour pro-
duire l'effet indiqué, je me bornerai à
diio que, puisque Polybe, Tite-Live
et Plutarque, écrivains beaucoup plus
rapprochés de l'événement, surtout le
premier, ne parlent point d'un fait si
merveilleux et si nouveau, il est au
moins très-douteux, et pourrait bien
n'être encore qu'un conte, auquel aura
donné lieu la haute réputation qu'avait
ARC o8t
laissée Archimède. Ses ouvrages nous
sont tous parvenus en original, a l'ex-
ception des dcuxli^Tes surVf'qiiilibre
des corps plongés dans un fluide, et
d'un livre de lemmes, que Borelh trou-
va à la suite des trois livres d'Apollo-
nius, qu'il découvrit dans un manuscrit
arabe ( roj\ Apollonius de P.rge ).
Quelques personnes ne regardent pour-
tant point ce dernier livre comme au-
thentique. Le plus grand nombre des
Traités d' Archimède est accompagné
d'un Commentaire d'Eutocius, oiiTun
trouve, sur l'histoire des mathémati-
ques, des particularités remarquables,
et des indications d'ouvrages iucon.'ius
aujourd'hui, parce qu'ils ont péri,
sans doute, avec la bibliothèque d'A-
lexaudiie. Voici la notice des principa-
les éditions d' Archimède : 1. Archi-
medis Sj'racusani,philosophi acgeo-
metrœ excellentissimi ^ opéra quœ
qnidem extant, algue à quàm pau-
cissimis hactenus visa nuncqne pri-
mum et grœce et latine in lucem
édita. Adjecta quoque sunt Eutocil
Ascalonitœ in eosdem ylrchimedis
libros commentaria, item grœce et
latine, numquam antea ercusa,
Basileœ, Jo. Hervagius excud. fe~
oit, an. i544jii-fol. Cest l'Editio
Princeps ; elle fut faite par les soins
de Thomas GeckaufT, surnommé f'^e-
nalorius. II. Archiinedis opéra quce
extant gr. et lat. noi'is demonstra-
tionihus commentariisque illustrala
per Davidem Rii'altnm à Flurenlid,
Paris, i6i5, in-fol.; III. Admirandi
Archimedis Sjracusani monumeiitct
omnia mathemaiica quœ extant, ex
traditione Francisci Maurolici, Pa-
normi, i685, in-fol. Cette édition n'e^t
encore qu'une sorte d'imitation des
écrits d'Archimède. IV. Archimedis
opéra , Apollonii Pergœi conicorirn
libri IV , etc. , methodo nova illus-
IraUi et succincts demonstrata , per
382 ARC
Js. Barrow, T.ondini, 1675, in-4°.;
V. Archimedii (juœ supersunt omnia
ciini Eutocii Ascalonitœ commenta-
riis , ex rccensione Josephi Torelli
T^eronensls cum novd versione lati-
nd ; accedunt lectiones variantes
ex cod. Mediceo et P arisiemibus ,
Os-oiiii, 1793, iu-folio. Cette belle
édition, qui fait suite à XEiiclide de
Gre'gori et à V Apollonius de Halley ,
est la première vraiment complète que
l'on ait donnée d'Arclnmède. Sa publi-
cation est due aux. soins de l'univer-
sité d'Oxford, sollicitée d'abord, par
M. Philippe Stanhope, à se charger de
l'impression du manuscrit resté entre
les mains des héritiers de Torelli.
Les OEuvres d' Archimède ont aussi
été tiaduites dans quehiues langues
vivantes, savoir : eu allemand, par
Sturmius, en 1670, et ou français,
par M. Peyrard, en 1807 , in-4'. ,
180H, •?. vol. in-8'. A la suite de
cette dernière traduction , qu'il a re-
vue , M. Delambre a joint un Mé-
moire sur l'arithmétique dis Grecs,
sujet très-cuiieux.; car il ne nous est
resté, pour ainsi dire, que quelques
indices sur les procédés qu'ils em-
plovaient pour elloctucr cîe gi-auds
caicu's. L — X.
ARCHINTO (Octave), comte
"Milanais , fds d'Horace Archinto et de
Léonore Tonsa , naquit vers la fin du
seizième siècle. Il occupa plusieurs
cuij)lois publics, et reçut de Philip-
pe 111, roi d'Espagne, le litre de
comte de Barate. 11 mourut le i5
ji'.in i656. Archinto avait de grandes
connaissances en antiquités , et avait
particulièrement éluilié celles de sa
patrie. 11 avait rassemblé tnie collec-
tion cui'ieuse de monuments dont il a
publié les descriptions. Ses principaux
ouvrages sont : Epilo^ati racconti
ddl(' anlichilà , e nohillà dvlla fa-
inii^liu Archinli , cic. Ai^giuntM'i
ARC
una brève esposizione degli antichi
marmi, che ne"" palagi di ijuesta fa-
miglia si legguno , Milan , 1 648 ,
iii-foL ; II. Colleclanea anliquitatum
inejus Domo , in-fol., sans date, ni
nom de lieu , ouvrage tellement raie ,
qu'il a été inconnu à Argellati, qui n'en
fait pas mention dans sa Bibliothèque
des Ecrivains Milanais. G — e.
ARCHINTO ( le comte Chaules),
fils du sénateur Philippe Archinto, na-
quit à Milan, le 5o juillet i6Gf). Après
avoir fini , dans sa ])atrie , ses pre-
mières études au collège de Bréra , il
alla étudier à Ingolstadt, en Bavière,
la philosophie et les mathématiques.
11 voyagea ensuite pendant quelques
années en France, en Allemagne, en
Hollande et dans toute l'Italie. 11 s'ar-
rêta principalement à Rome, et ne
revint se fixer à Milan qu'en i 700. Il
institua , deux ans après , une académie
qui embrassait dans ses travaux les
sciences et les beaux arts. 11 rassembla
aussi , dans son jxilais , une biblio-
thèque nombreuse et choisie, qu'il en-
richit des instruments de mathémati-
ques les mieux travaillés et les plus
rares , construits par les artistes les
plushabiles d'Italie, do Fraiiceet d'An-
gleterre. Ce fut à lui que l'un dut la
réunion de la céVvhic société palatine ,
qui donna au monde savant des édi-
tions si précieuses, et qui commença
par la grande collection de îMiuatori ,
Scriptores Reruin italicarum ( f'^oj .
Argellati). Charles Archinto fut re-
vêtu dos premières dignités dans sa
patrie; créé, par l't inpereur Léopold,
gentilhomme de sa chambre , et , par
les rois d'Espagne Charles II et Phi-
lippe V , chevalisn- de la toison d'or , et
grand d'Espagne. H mourut le 17 dé-
cembre i75-.i. Ou n'a imprimé de lui
que quelques notes, sur trois livres
de V Histoire d'.Jrnolphe de Milan,
tome IV. Script. Rer. itul., et quel-
ARC
ques Tables des Sciences et des arts ,
publiées à Venise , après la mort de
l'auteur, sous ce titre : Tahulœ ,prœ-
cipua scientiurium et arlium capita
digesta pcr ordinem reprœsentantes ;
mais il laissa uu assez grand nombre
de inauuscrils , qui se sont conserves
dans sa famille. Ils sont écrits , les
uns en latin, les autres en italien, et
ont tous pour objet la pliilosopliie ou
les sciences; tels que : I. Ragiona-
vienti IF délia storia filosofica , in-
fol. ; H. Sjlvœ pro dissertationibus
philosophicis , ni-4". ; \\\.De Renan
existentid contra scepticos disputa-
tio, in-ful.; IV. Demonstrationes nia-
Viematicce in ordine ad Sphœram,
in-4".; V. Tracîalus de horologiis ^
in-4". ; VI. Progetto délia nuoi'a
confereuza da farsi sopra le scien-
ze ed arti , in-fol. , etc. , etc. ; et enfin ,
ce qui fait voir que cet illustre ami des
sciences avait en effet le goût des arts
de l'imagination , un recueil intitidé :
Carmina plura lalina. G — e.
ARGHON (Louis), ne, en i645,
à Riom en Auvergne , oîi il mourut en
1 7 1 •] , fut licencie' en Sorboune, cha-
pelain de Louis XIV, sacristain de la
rbaptUe de Versailles , et abbe de St.-
Gilbert- Neuf- Fontaines. On a de lui
une Histoire ecclésiastupie de la
Chapelle des rois de France , 1 704-
1711, 'X vol. in-4". ^''^^^^ histoire ne
va que jusqu'au règne de Louis XIII
inclusivemeul. Un 5". vol. devait con-
tenir l'histoire de la chapelle royale
jsous Louis XïV. Les Mémoires de
Trévoux firent l'éloge de ce livre , dont
M. Oroux préparait, çn 1771, une
nouvelle édition. A. ij — T.
ARCIIYTAS, deTarrnte, huitième
successeur de Pythagore, fut coulem-
porain de Platon, qui suivit, pendant
quelque temps , ses leçons. 11 eut
même le bonheur de soustraire le fils
.d'Aristyn à la Golèic de Di^jivs le tv-
ARC 383
ran , qui voulait le faire périr. Archy-
tas se livra particulièrement à l'étude
des sciences mathém;) tiques et méca-
ni({ues. 11 n'est personne qui n'ait en-
tendu parier de sa colombe volante.
On lui attribue l'invenlicn de la pou-
lie, de la vis, de la crécelle, et la so-
lution de plusieurs problèmes de géo-
métrie. Ses profondes méditations ne
l'empêchèrent point de se rendre utile
à ses concitoyens. Sept fois consécu-
tives , il fut mis à la tète du gouverne-
ment de sa patrie. Il commanda, dans
plusieurs rencontres , les troupes com-
binées de la Grèce, et ne fut jamais
vaincu. Rigide observateur des pré-
ceptes de Pythagore, il disait à sou
intendant, qui , pendant son absence,
n'avait pris aucun soin de ses biens :
« ïu es bien heureux que je sois eu
» colère; car, autrement, je ne laisse-
» rais point ta négligence impunie. »
Archytas périt dans un naufrage, et fut
trouvé mort sur les côtes de la Pouille.
Horace lui a consacre une ode , la 28''.
du I*"*^. livre. Archytas avait com-
posé plusieurs ouvrages , dont on
peut voLi- les titres dans Stanley. 11
nous reste, sous son nom, uu traite
sur les uni\'ersaux , ou les Caté-
gories, publié en grec, par Joachim
Caraérarius, à Leipzig, i564, in-8".,
et, à Venise, 1J71 , in-4°., gi'. etlat.
Un fragment d' Archytas, sur les ma-
thématiques , édile d'abord, avec d'au-
tres opuscules, par Henri Etienne,
Paris , 1 557 , in-8"., a été réimprimé,
gr. et lat. , à Copenhague, 1707,
in-4"., P-ii' les soins de Jean Gramm,
danois, qui l'a enrichi d'une disserta-
tion sur ce philosophe. Thomas Gale,
d'après Stobée , a pubhé , d'Archytas ,
un autre fragntent sur la sagesse ,àsa:~,
ses Opuscules mythologicpies. Il serait
possible d'en recueillir d'autres dan»
les écrits des aucicni cummentateurs.
D. L.
58 i ARC
ARCKENHOLZ (Jean), historien,
né eu Finlande, en lÔgS, accompa-
gna un gentilhomme suédois dans ses
voyages , et s'arrêta long-temps à Pa-
ris. Ce fut dans cette ville qu'il rédigea
des Considérations politiques, ayant
pour but de prouver que l'alliance de
la France était désavantageuse à la
Suède. Il communiqua son manuscrit
à quelques personnes, et, de retour
en Suède, il fut enfermé dans une
forteiesse. On lui rendit cependant,
peu à près , la liberté , à condition
qu'il ferait réparation par écrit au car-
dinal de Fleurv. Le roi Frédéric l^, de
la maison de Hesse-Cassel , qui appré-
ciait son méiite littéraire, le nomma,
en 174^^1 bibliothécaire et garde du
cabinet des médailles à (^assel , où il
resta pendant vingt années. Ayant dé-
siré retourner en vSuède , il en obtint
la permission , et fut chargé par les
états d'écrire l'Histoire de Frédéric ,
mort en 1751; mais sa tète s'étant
afliiiblie, il donna dans les visions,
renonça aux travaux historiques , et
mourut le i4juil. 1777 ,àgéde8'.ians.
Arckenholz est connu principalement
par ses Mémoires concernant Chris-
tine, reine de Suède , en 4 vol.in-4".,
Amsterdam, 1751. à 1760. Ils sont
écrits en français , d'un style lourd et
dift\js. Les événements remarquables
et les pièces intéressantes y sont mêlés
de détails minutieux et de lettres insi-
gnifiantes. D'Alcmbert a tiré de cette
compilation les Anecdotes sur Chris-
tine , insérées dans ses Mélanges.
Arckenholz a fait de plus : Lettres sur
les Lapons et les Finois , en fr:înçais ,
Francfort et Lcipsick, 1736, in-S .;
Mémoires de Rusdoif, ministre de
l'électeur palatin, traduits en alîe-
mand sur le manuscrit français, par
Casparson , Francfort et Leipsick ,
i-iii; Recueil des sentiments et des
propos de Gustave Adolphe , eufran-
ARC
çais , Stockholm, 1769, etc. Ses
Considérations sur Vaillance de la
Suède et de la France , ont été im-
primées dans le Magasin histor. de
Busching. C — AU.
ARCO( Alexis del ). P^. Alexis.
ARC-0 (Nicolas, comte d') , bon
poète latin du 16*'. siècle, second {ils
du comte Odcric , conseiller intime de
l'emptreur Maximilien I"., naquit le
5 décembre 1 479 , à Arco , petite ville
du Tyrol , dans le diocèse de Trente ,
qui était l'ancien fief de sa famille. IJ
fut d'abord page de l'empereur Fré-
déiic m, père de Maximilieu. Ce
service ne l'empêcha point de se livrer
à l'étude des lettres. 11 se rendit savuit
dans les langues anciennes , et pailait
toutes les langues modernes aussi fa-
cilement que la sienne. Son père , qui
le destinait h la profession des armes,
le relira de la cour, en obtenant pour
lui une compagnie de cavalerie ; d'Arco
servit sous les ordres de \ olfang de
Furstembcrg , l'un des généraux les
plus estimés de son temps ; mais la
mort de son frère aîné lui fit aban-
donner la carrière mililaire; il revint
dans sou fief, avec le consentement de
l'empereur , et fut successivement dé-
core de plusieurs ordres , et rev^êtu de
divers emplois. Depuis lors, il ne s'oc-
cupa plus que des lettres ; il fut lié
avec tous ceux qui s'y distinguaient le
plus , tels que Paul Jove , Aunibal
Caro , Fiaminio , Fracasior , et plu-
sieurs autres. On présume qu'il mou-
rut vers la fin de l'année I 546. Ses poé-
sies latines parurent, pour la jireinière
fois , la mêmeannéc, sous ce titre : i\7-
colai Archii comitis ^umeri , Man-
toue, 1546, iu-4"., édition devenue
très-rare, mais à laquelle peut suppléer
celle que Comino a donnée de ces
poeVies, avec celles de Fimiano et de
Fracastor, Padoue , 1759, 2 vol, 4">
D'Arco avait coi?ipo?c d'autres oit^
AKG
Vtagés en vers et en ])rose, qtii sont
conservés eu manuscrit dans quelques
bibliothèques d'Italie, mais qui n'ont
point vu le jour. — Un de sesdescen-
aanls , le comte Giarabattista d'Aftco,
intendant impérial à Mantoue, de l'a-
cadémie royale des sciences et belles-
lettres de cette ville, s'est aussi rendu
recommandable par divers bons écrits,
par une dissertation savante sur le
fameux troubadour Sordello, par l'éloge
du comte de Firmian ( i ^85 ), et par
la protection qu'il a accordée aux arts.
On doit à ses soins la découverte du
beau buste original de Virgile que cette
ville possédait. G — É.
ARÇON (Jean-Claude-Éléonore
liEMicEAUD d'), naquit, en i-jSSjà
Pontarlier. Son père , avocat instruit ,
est auteur de plusieuis brochures
relatives à des questions concernant
la coutume de Franche-Comté. Afin
d'inspirer à son fils du goût pour
l'état ecclésiastique, auquel il lé des-
tinait, il le fit pourvoir d'un béné-
fice j mais d'Arçon eut, dès son en-
fance , une passion dominante pour
les armes. Au lieu d'étudier le latin ,
il dessinait et traçait des ouvrages de
fortifications. Il se servit d'un moyen
ingénieux pour faire Connaître à ses
parents l'erreur danslaquelleils étaient
sur sa vocation. On venait de faire
son portrait : il substitua lui-même, de
sa propre main , l'habit d'ingénieur à
celui d'abbé , sous lequel il avait été
peint. Le père entendit ce langage
muet, abandonna ses premiers pro-
jets , et ne songea plus qu'à seconder
ceux de son fils. Admis à l'école de
Mézières, en 1754, d'Arçon fut reçu
ingénieur ordinaire l'année suivante.
Il se distingua dans la guerre de sept
ans, et particulièrement eu i-jbi , à
la défense de Cassel. En 1774 > il fut
chargé de lever la carte du Jura et
(ics Vosges. Pour accélérer cette opé-
ARO
385
ration , il inventa une nouvelle ma-
nière de lavis à la sèche avec un seul
pinceau, beaucoup plus expéditive , et
produisant plus d'effet que le lavis
ordinaire. Cette invention heureuse a
été regardée comme une véritable con-
quête pour l'art. Doué d'une imagina-
tion inépuisable, et d'une infatigable
activité, d'Arçon s'occUpait sans cesse
des moyens d'accroître lés progrès de
l'art militaire. En 1774 et 1776 , il
se mêla de la querelle occasionnée par
l'opinion de M. de Guibert, sur l'ordre
profond et sur l'ordre mince , et il
publia deux brochures, intitulées : Cor-
respondance sur y art militaire. Dan&
tous ces écrits, comme dans ceux du
même auteur , on i:emarque une abon-
dance d'idées et des traits de génie ,
qui, malgré quelques néologismes et des
incorrectioiis , en rendent la lecture
intéressaiite. Les obstacles ne faisaient
qu'irriter son courage. Ce fut lui qui
conçut, en 1780, pour le siège de
Gibraltar, le projet audacieux, dont
l'exécution demandait des moyens si
extraordinaires. Ce projet , qui fil tant
de bruit en Europe , a été mal appré-
cié, parce qu'on ne juge que d'après
l'événement. L'attaque de terre étant
alors regardée comme impossible, il
fallait sortir des règles communes.
Convaincu de cette vérité , d'Arçon ,
après de longues méditations , et quel-
ques expériences sur la combustion ,
rédige son fameux projet des batte-
ries insubmersibles et incombustibles,
destinées à faire brèche aU corps de
place du côté de la mer , feu même
temps que l'on devait, par d'autres
batteries avancées sur le continent ,
prendre de revers tous les ouvrages
que les batteries flottantes attaque-
raient de front. Leur donner une cons-
truction analogue au but qu'il fallait
atteindre ; les revêtir d'une forte cui-
rasse en b«is ; y ménager une circu-
586 ARC
laiioD d'eau , entretenue pai' des pom-
pes , pour les garautir du feu ; établir
un équilibre parfait, au moyen d'un
lest capable de contrebalancer le poids
de l'artillerie j couvrir ces nouvelles
machines de guerre d'un blindage as-
sez fort pour résister aux bombes; les
faire revêtir d'un lit de vieux cables,
dont l'élasticité devait an n uller la chute
des projectiles : enfin , les soutenir
par des chaloupes canonnières , des
vaisseaux de ligne et des bombardes ,
manœuvrant sur plusieurs points pour
occuper les assiégés et les obliger à
plusieurs diversions. Telles furent les
précautions qu'ajouta la prudence à
l'audace, et qui justifiaient la témérité
du général d'Arçon, Cinq machines à
deux rangs de batteries, et cinq au-
tres à un seul rang , formaient une
artillerie de cent cinquante pièces. La
cour d'Espagne accueilht ce projet
avec enthousiasme. Pour être plus sûr
de la position de ses prames, et de la
justesse de ses calculs, d'Arçon s'était
embarqué sur un frêle esquif exposé
au feu de la place, afin de sonder
lui-même en avant des fronts qu'on
devait attaquer. En conséquence de
ce travail , ou détermina la route
qu'auraient à tenir les machines et
leur position définitive. L'expédition
eut lieu le i5 septembre i^S'i, non
comme on l'avait concertée , mais de
manière à montrer l'intention évidente
de la faire échouer. Deux des prames
mirent à la voile ^ et furent suivies
des huit autres, qui se portèrent beau-
coup trop en arrière , de sorte que
les premières essuyèrent, sans partage,
tout le feu de la place. Au lieu de les
faire retirer pour rejoindre les autres,
on apporta, pendant cette attaque,
l'ordre de les consumer toutes les dix,
sous prétexte qu'elles pouvaient tom-
ber au pouvoir des Aus;lais. Cette me-
sure, que l'envie etl'iutcntion evideute
ARC
de faire manquer l'entreprise cxpîi*-
quèrent bientôt après, réduisit le gé-
néral d'Arçon à un désespoir concen-
tré, dont il conserva toute sa vie un
profond ressentiment. La jalousie et
le peu d'accord qui régnait entre les
officiers espagnols et français , firent
échouer ce projet , qu'EUiot , défen-
seur de Gibraltar, sut apprécier, en
rendant à l'inventeur un témoignage
glorieux. D'Arçon fit imprimer une
espèce de justification. On y voit une
ame vivement affectée. Toujours o.c-
cupé de son art , il écrivit et publia
un mémoire sur les lunettes à réduit
et à feux de revers, dont l'objet est
d'établir une résistance imposante .
quoiqu'il peu de frais , sur un très-petit
espace isolé. Chargé , en i "^gô, de faire
une reconhaissance au mont St.-Ber-
nard , il fut dénoncé et obligé de se
retirer à St-Germain ; mais le souve-
nir de ses talents l'arracha de sa
retraite , pour exécuter le projet de
l'invasion de la Hollande. 11 enleva
plusieurs places aux ennemis, entre
autres Breda ; cette campagne , dans
un pays marécageux , altéra sa santé.
Dénoncé de nouveau il se mit à l'écart,
et rédigea , dans la solitude , son der-
nier ouvrage , qui fut imprime par
ordredu gouvernement; il est intitulé :
Considérations militaires et poli-
tiques sur les fortifications. Porté au
sénatpar le premier Consul, en 1799,
d'Arçon y fut reçu par acclamation :
mais il ne jouit pas long-temps de cet
honneur , et mourut le premier juil-
let 1800, âgé de soixante-sept ans.
Il était membre de l'Institut. M. Girod
Chantrans , officier du génie , a fait
imprimer une Notice sur INI. d'Arçon,
Besançon , 1 80 1 , in- 1 ?.. Les ouvrages
qu'on a de lui sont : I. Réflexions d'un
ingénieur, en réponse à un tacticien ,
Amsterdam, 1775, iu-i-.i ; II. Cor-
respondance sur l'art de la guerre ,
ARC
antre un colonel de dragons et un ca-
pitaine d'infanterie. Bouillon , i n -j 4 ?
deux pallies , in-H". ; III. Défense
d'un système de guerre nationale,
ou Analyse raisonné d'un ouvrage ,
intitulé : Réfutation complète du
système de ( JVT. Mënil-Durand , par
M. Guibcrt ) , Amsterdam , i 779 ?
ih-S". ; IV. Conseil de gueri-e privé,
sur l'événement de Gibraltar , en
I nS'i, sans nom de ville, i 785, in-8°.;.
V. Mémoires pour servir à l'histoire
du siège de Gibraltar, par l'auteur
des b literies flottantes, Cadix , Her-
nill, 17B3, in-8". ; VI. Considéra-
tions sur l'influence du génie de
Vauban dans la balance des forces
de l'état, 1786 , in-8'.; Vil. Exa-
men détaillé de l'importante ques-
tion de l'utilité des places fortes et
retranchements , Strasbourg , 1 78g,
in-8 '. ; VIII. De la force militaire
considérée dans ses rapports con-
servateurs, Strasbourg, i 'y8<.), in-8°.,
suite, 1790, in-8".; IX. Réponse
aux Mémoires de M. de Montalem-
bert , sur la fortification dite per-
pendiculaire , 1790, in-8".; X.
Considérations militaires et poli-
tiques sur les fortif cations , Paris ,
imprimerie de la République , i ■jgS ,
in-8". Cet ouvrage, imprime aux fiais
du gouvernement , est le plus ji^por-
tant de ceux de M. d^Arçonvil^, con-
tient , pour ainsi dire , le résurafe' de
toutes ses observations , et de tout ce
qu'il avait c'crit sur un art dont il
avait fait l'étude de toute sa vie.
D— M - T. et W — s.
AliçONS (CÉSAR d'), avocat au par-
lement de Bordeaux , mort en 1 68 1 ,
était dc.Viviers, bourg de la Gascogne:
ses ouvraçes n'ont rien d'analogue à
son étit; ils rou'enttous sur la physi-
que et sur la philologie sacrée. I. Du
jCux et du reflux de la Mer , et des
longitudes^ Rouen, lôSS", iu-8°., Bor-
. , ARC ,. 58;
deàu^'* ':f 66'% m-^\;.lf. divers. Ti-ai-
tés de Physique , Bordeaux , j()(j8 ,
in-4''. , où il veut tenir Iç milieu entre
Aristote et Descarles ; lit. trois, DiV-
sertations , Bruxelles, i(i8o, iu-4'\ ,
sur la dispute entre S. Pierre et S.
Paul ; sur l'eïidroit où J..-G. établit
S. Pierre pour son vicaira en terre:;
sur la généalogie de J.-C! : ,IV. Es-
chantillon , ou le Premier des trois:
tomes d'un ouvrage qui fera voir
dans V Apocaly se les traditions apos-
toliques , ou les mystères de l'Eglise
passés , présents et à venir , dédié au
Sacrement de l\4utel , Paris, iGlS,
in-4''. Cet ouvrage avait pour objel de
découvrir , dans W4pocalypse , les
sept sacrements , les sept ordres de
la hiérarchi'", etc. Heureusement que
l'auteur fit grâce an puLlic des tiois
tomes aimoncés par cette .es^^èce de
prospectus. D'Arçons av^it eu la con-
fiance du nonce Bargelliui dans l'af-
faire de la paix de Clément IX. Il a
laissé , dans un Mémoire, le détail
des conférences qu'ils eurent ensem-
ble à ce sujet. T — d.
ARCUDl (ALEXA^DRE-ÏU0MAS) ^
dominicain, qui flonssait à la fin du.
17'". siècle^ et au commencement du,
1 8''. , n'était pas Vénitien , comme on l'a
prétendu, mais néà vM.-Picrreen Gala-
tine , dans la Pouille , au royaume de
Naples. Sa famille était noble et origi-
naire de Corfou. Il dit lui-même, dans
la dédicace d'un de ses oirvrrages, que
leur nom d^Arcudi était dérivé d'^rc-
tos grec , ou di Arclurus latin, qui si-'
gnifient la petite our5e ; qu'ils portaient
nue ourse pour armes , et que sts an-
cêtres , à Galatine , avaient reçu d'ua
prince de la maison Orsini, qui avait''
eu de tout temps cette enseigne , la per-
mission de la porter. Il mourut eu
1 720. Ses principaux ouvrages impri-
més sont: I. AnatomiadegV Ipocriliy
sous le faux nom de Candido Mala-
AÈC
sorte Ussaro, Venise, 1699, in-4''.;
il. G alatinaletterata. Gènes, 1709,
in-8°. Cet ouvrage contient quarante-
quatre articles , sur autant d'hommes
distingués dans les lettres , qui ont
illustré S. Pierre en Galatine , leur
patrie; il devait sujffire pour indiquer
que c'était aussi celle de l'auteur. Ce
livre fut vivement critiqué, ce qui
donna Heu au P. Arcudi de publier un
recueil de réponses et de défenses ,
sous ce titre i Le due Galatine difese,
il libro e la patria , sous le nom de
Fr. Saver. Volante , prétendu neveu
de l'auteur , Gênes , 1 7 1 5 , in - 8".
111. Prediche quaresimali, Lecce ,
1712, in-4''. ; rV • Sant Atanasio
magno , Lecce, 1 7 1 4 > in-4''- 1^ laissa
déplus, un certain nombre d'ouvrages
de piété, tant en prose qu'en vers,
qui n'ont point été publiés. G — E.
ARCUDIUS (Pierre), savant
prêtre grec , né dans l'île de Coifou ,
ilevé à Rome, où Clément VIII l'em-
ploya dans plusieurs affaires, dont il
s'acquitta avec succès, notamment en
Russie , où il fut envoyé pour régler
des contestations élevées dans ce pays
sur certaines questions de doctrine,
qu'il eut le bonheur de terminer. A
fOD retour, il s'attacha au cardinal
Borghèse , neveu de Paul V ; mais ,
ayant perdu tout espoir de parvenir
aux dignités auxquelles il aspirait ,
il se retira au collège des Grecs de
Rome, et y mourut vers i654. Arcu-
dius était si attaché aux sentiments
de l'Église latine , qu'il obtint du pape
la permission de célébrer la messe
selon le rit latin, après s'être jusque-
là conformé au rit grec. Il avait conçu
la plus forte pi'évention contre les
luthériens et les calvinistes. C'est dans
cet esprit qu'A composa son traité de
la Concorde de l'Eglise occidentale
et de l'Eglise orientale, sur l'admi-
Bistratioa des sacrements , Paris ,
ARC
1619, in-fol. Son but est de preu-*
ver que les deux églises étaient an-
ciennement parfaitement d'accord ,
non seulement sur la doctrine , mais
encore sur l'administration des sept
sacrements ; que les Grecs modernes
n'ont rien changé sur leur nature ,
leur nombre et leur vertu; que les
changements qu'ils se sont permis
dans l'administration sont peu consi-
dérables , et n'ont rien d'incompa-
tible avec la discipline de l'Église la-
tine à cet égard. Cet ouvrage est esti
mable par les monuments que l'au-
teur y a recueillis avec beaucoup de
soin et d'exactitude ; mais il est dé-
paré par l'emportement qui y règne ,
par les injures qui y tiennent souvent
la place de bonnes raisons, par des
digressions qui y jettent beaucoup d«
confusion ; enfin , par la méthode et
les opinions des scholastiques , aux-
quelles il attache trop d'importance,
r^'ous avons d'Arcudlus , deux autre»-
traités, rares et curieux: I. Opuscu-
culum quod inscribitur : utrum detur
purgatorium , et an illiid sitperig-
nem ? Rome, i652 , ; II. Z?e Purga-
torio igné adversùs Barlaam, Rome,
1637, in-4''. lï a encore traduit du
grec en latin, etfaitimptimer à Romt
en i63o , plusieurs traités des nou-
veaux Grecs , principalement sur la
fameuse question de la procession du
S. Esprit. T— D.
ARCULPHE, théologien français,
qui vivait vers l'an 690 , entreprit,
vers l'an 64o, un voyage en Orient,
et visita la Terre -Sain te, Gonstanti-
nople , et d'autres h'eux. Comme il
révenait en France , il fut jeté , par
une tempête , sur la côte occiden-
tale de la Grande-Bretagne, et reçu
avec hospitalité par l'abbé Adaman.
D'après ses conversations, Adaman
mit par écrit le détail de ses voyages
«t uae description des lieux saiuts.
ARC
L'ouvrage forma trois volumes , et fut
publie par Seranius sous le titre de
Libri de situ Terrœ Sanctœ, Ingols-
tadt, 1619. Des extraits de son ou-
Trage furent recueillis par Bède; et
Matillon les a fait imprimer dans ses
jàcta Benediclor. D — t-
ARCY (Patrice d' ), né d'une fa-
mille noble et ancienne, à Galloway, en
Irlande, le i8sep!.i725. Ses parents,
qui étaient catholiques, l'envoyèrent,
en I -y 59 , à Paris , où le goût naturel
qu'il avait pour les mathématiques se
développa et se fortifia par les circons-
tances qui le lièrent avec le jeune Clai-
raut.Dès l'âge de dix-sept ans, il donna
la solution de plusieurs problèmes qui
exigeaient beaucoup de sagacité. La
guerre vint l'enlever à ses études : il
enti'a au service, et fit plusieurs cam-
pagnes en Allemagne et en Flandre,
comme capitaine au régiment de
Condé. En i']/\6, il fut destiné à faire
partie des troupes envoyées en Ecosse
au secours du prétendant. Une flotte
anglaise enleva le convoi; etd'Arcy,
Irlandais d'origine , pris les armes à
ïa main contre son pays , pouvait être
légitimement condamné à mort; mais
l'humanité du commandant anglais le
sauva. Il avait publié , pendant la
guerre , quelques mémoires , qui ,
après qu'il eût été échangé , lui ou-
vrirent les portes de l'académie des
sciences en 1749* L'un de ces mé-
moires renfermait un principe général
de mécanique , celui de la conserva-
tion du mouvement giratoire , ou de
la conservation d'action , principe au
moyen duquel il résolut plusieurs pro-
blèmes importants, et qu'il appliqua
même au problême de la précession
des équinoxes. Il fit avec M. Leroi ,
son collègue à l'académie des scien-
ces, une série d'expériences sur l'é-
lectricité, et se livra ensuite seul à
4«$ expériences sur la poudre à ca-^
A R I> 58f
non , dont il rassembla les résultats
dans un Essai sur l'artillerie, pu-
blié en 1760. Il reprit les armes, et
fit , comme colonel à la suite du ré-
giment de Fitz- James, la campagne
de 1757. Rendu de nouveau aux
sciences par la paix , il donna , en
1 765 , un Mémoire sur la durée dçi
sensations de la vue, celui de ses ou-»
vrages oii brille le plus son talent et
sa sagacité. En 1770, il fut nommi^'
maréchal-de-camp , et cette même an»
née, l'académie des sciences l'admit
au rang de pensionnaire. Il épousa,,
en 1777, une nièce élevée à Paris
sous ses yeux, et il prit alors le nom •
de comte d'Arcy. Il mourut deux ans
après son mariage , le 18 oct. 1779»
âgé de cinquante -quatre ans. Plu-,
sieurs de ses écrits sont insérés dans >
les Mémoires de l'académie des
inscriptions. II a publié de plus : L
Réflexions sur la théorie de la lune,
1 749 , in-S''.; II. Observations sur lu
théorie et la pratique de V artillerie^
1751 , in -8". ; III. Essai d'une
nouvelle théorie d'artillerie , 1766,. V
1^-8". j IV. Recueil de pièces sur ^ y
un nouveau fusil y 1767 ,in-8". On
trouvera une analyse très -détaillée de
tous les travaux de d'Arcy , dans
l'éloge qu'a fait de lui Coudorcet,.
alors secrétaire perpétuel de l'acadé-
mie des sciences. Cet éloge fait au-
tant d'honneur au caractère qu'au '
talent de Condorcet , qui avait été
constamment l'objet de la haine la
plus animée comme la plus injuste
de la part de d'Arcy, et qui paraît
s'être attaché à relever, avec une re-
cherche particulière, tous les genres
de mérite qui pouvaient honorer la.
mémoire de l'académicien dont il avaij
tant à se plaindre.. S — -d. v, (
ARDABURIUS, généi-al sous ;Ie- ^
règne de Théodose II , était Alain
df origine. En 421, il commanda l'aç^
5^0 A R D
mie q.ui m^irclia contre les Perses sur
îès borcîs^'i Tigre. Il battit Narsès et
l'ass.egbà daiis iVisibe; mais ses trou-
pes s'cifrayènnt à la nouvelle dé l'ar-
rivée dû roi de Perse , et regagnèréut
en de'jordrc'les frontières de Ifrapire,
après aivOii" brûle' les machines qu^elles
avaient cou^fruites jjour renverser les
murs de ^Ni^iibe, tandis que de leur
côté les Pe'rses , frappes de la même
terreur , se pré> ipitaii ut dans l'Eu-
phrate. En ^iS , Ardaburius, et son
fils Aspar , furent envoyés en Italie
par Thcodosc II, pour soutenir Va-
lenliiiieu ÏII et sa mèrePlacidie, con-
tre l'usurjiateur Jean. Aspar marcha
sur Aquiléo avec la cavalerie ; Ardabu-
lius s'embarqua avec l'infanterie pour
aller former le siège de Ravcunej
mais uiic tempête jeta son vaisseau
dans le port même de cette ville. Jean ,
voulant profiter de cette capture inat-
tendue, traita Ardiiburius avec égards,
dans l'espérance que Théodose ferait
la paix pour rccouyrer son général.
Celui-ci profita de la lUicrfé qu'on lui
donnait, pour se ménager jdes intelli-
gences dniis la place; il lit prévciur
Aspar de s'a[qirochcr en grande hâte,
gagna les principaux officiers de l'ar-:
niée de Jean, et, lorsqu'Aspar se prcT
senta, Ardabui uis se saisit du tyran et le
fil conduire à Aquilée devant Placidie
et Nalentinien. Quelque tenq)s après,
Ardaburuis s'attacha un Thrace, nom-
mé jMarcien , qui venait de s'enr.ôlei;
dans la miUce , ( t que la fortune poj ta
depuis sur le trône d'Orient. On ne
doit pas confondre Ardaburius avec
un fiis d'Aspar, qui port^ le même
nom que son aïeul, et qui périt avec
son père ei> /j'y i ( f^oj'. Aspar ).
L— S— E.
ARDFXm^R BABÉOAN , fonda-
teur de la dynastie cles Saçàjnydes , et
nommé AnTAXERcfEs , par les histo-
riens grecs , était fils de iîàbek , in-
ARD
tendant-général des pyrées de 'a Perse,
et petit-fils d'un nommé Saçàu. Ce-
lui-ci, quoique descendant d'mi ûl«
d'Ardechyr-Longue - Main , deshérité
en faveur de la reine Honiâi, avait
mené une vie très r misérable ; car il
était , suivant quelques écrivains
orientaux, bei'ge.r de Bàbek, et père
d'Ardechyr. INous nVntreprendi'ons
pas de concilier les différentes opi-
nions de nos auteurs , touchant l'ori-
gine de ce dernier. Il y a seulement
heu de croiie que la protection
toute particulière de Bàbck , person-
nage très - important vers la fin du
dernier monarque Arsacide, favorisa
beaucoup les projets ambitieux d'Ar-
dechyr. 11 n'hésita même plus à les réa-
liser, d'après l'apparitiou d'un ange
qui lui annonça que Dieu lui avait
donné la souveraineté de la terre en-
tière. Secondé d'un assez grand nom-
bre de mécontents, que la mauvaise
administration d'Ardwàu ( Artaban )
augmentait chaque jour , il s'empara
de i'Irac et de l'Azerbàïdjàn ; enfin , il
n'hésita pas à se mesurer avec son
souverain légitime. Après avoir- rem-
porté sur lui deux victoires éclatantes,
en '^23 de J.-C. , 11 prend les ornements
de la royauté, et se fait reconnaître sou-
verain delà Perse; on prele;itl cepen-
dant qu'ArdWcàtt ne fut déposé qu'en
2:i5 , et périt dans une grande bataille
qu'il livra à ce rebelle, en -i-yÂ), épo-
que où l'usurpateiu- se vit maître pai-
sible et absolu de sou nouvel empire ;
car avant cette époque , il avait déjà
vaincu et exterminé un de ses frères ,
qui prétendait lui disputer la cou-
ronne. Quoique usurpateur, Ardechyr
paraît avoir eu un règne fort paisible ,
et avoir gouverné ses peuples avec
douceur et équité , surtout si l'on eu
j^uge par la maxime qu'il se plaisait à
répéter souvent : a tu lion dévoraiit
)) est moins à redouter qu'un monai que
ARD
» injuste. » 11 réunissait la plus rare
prudence au courage le plus héroïque ,
et l'amour des lettres à la passion des
armes. Doue d'une vaste érudition , et
même de talents littéraires , il ne dé-
daigna pas de composer plusieurs ou-
vrages , parmi lesquels on cite un Kdr-
Ndméh , ou Commentaire de sa vie
et de ses actions , et un Traité de mo-
rale , dont le célèbre Noncbyrwân ,
un de ses successeurs, donna, quelques
siècles après , une nouvelle édition.
Ardechyr mourut en if\0, après avoir
régné quatorze ou quinze ans ; car il
exerça l'autorité suprême , comme
nous l'avons x'emarqué, quelques an-
nées avant la mort d'Ardwân. La dy-
nastie des Saçànydes , dont il est le
fondateur, dura 4-29 ans, suivant le
calcul le plus communément adopté.
L— s.
ARDELL (Jean Mac ) , né en Ir-
lande , et mort jeune à Londres , en
I-^ÔS , est un des meilleurs graveurs
en manière noire , que l'Angleterre
ait produit. Ses estampes sunt d'un
beau ton , et d'un faire très-moelleux.
II a gravé plusieurs sujets d'après Rem-
brandt , qui rendent parfaitement l'ori-
ginal, son genre de gravure étant,
sans contredit, le plus propre à imiter
l'effet et l'harmonie des tableaux de
ce maître, l'armi ses nombreux ou-
vrages , on remarque : les portraits
de Ruhens et de sa femme ^ figures
en pieds ; celui du duc de Buckingham,
et un Moïse sur les eaux, d'après Van
Dyck ; une Assomption , d'après Mu-
rillio , et beaucoup de portraits d'après
Reynolds, Lely , Ramsav. P — e.
ARDENK ( Esprit-Jean de Rome
d' ) , né à Marseille , d'un commissaire
des galères, le 3 mars 1684, fit
ses premières études à Nancy, et
vint les achever sous les yeux de ses
parents , qui habitaient alors une petite
ferre près de Lyon. D'Ardene graA^a ses
ARD 391
premiers vers sur des arbres. Le sé-
jour de la campagne lui inspira des
idylles et des églogues. Vainement ses
parents le pressèrent de prendre un
état ; il s'y refusa : sa fortune le lui
permettait. Il se maria en 1 7 1 1 , et,
peu de temps après , vint faire un
voyage à Paris, où il se lia avec Dubos,
Dauchet et Fontenelle. Pendant son sé-
jour dans cette ville, il composa ses pre-
mières Fables. En i "^i!^ , il revint en
Provence, et concourut pour quelques
prix proposés par des académies de
provinces. 11 fit imprimer ses dis-
cours, en 1727 ; il retourna à Paris,
y séjourna assez long-temps, et revint
en Provence , où il habitait la cam-
pagne. Le dérangement de sa santé le
fit revenir à Marseille , où il mourut
le 27 mars 1 748. On a de lui : 1. Re-
cueil de Fables nouvelles en vers ,
1747, in- 12; II. OEuvres posthu-
mes , Marseille , 1767 , 4 vol. petit
in-12, publiés par sou frère. Ou y
trouve un volume entier de nouvelles
Fables , une comédie en trois actes et
en vers , intitulée : le Nouvelliste ,
des Odes , des Epigrammes , des Epî-
tres en vers et en prose , des Discours
académiques en prose. Le Discours pré-
liminaire sur la Fable , inséré dans
le premier volume, est estimé.
A. B— T.
ARDENE ( Jean-Paul de Rome
d' ) , frère du précédent , cl prêtre
de l'Oratoire , né à Marseille , eu
1 689 , remporta quelques prix de
poésies dans des académies de pro-
vince , et devint supérieur du collège
de sa Congrégation , dans sa patrie.
La délicatesse de sa sauté ue lui per-
mettant pas d'occuper des places qui
auraient exigé quelque contention d'es-
prit, il se retira au château d'Ardene,
près de Sistcrou , où il passa le reste do-
ses jours dans la pratique des vertus
analogues à son état , et surtout dans un
5q2 ARP
exercice continuel des œuvres de cha •
rite' , qui le firent regarder comme le
père des pauvi'cs du canton. Il mourut,
le 5de'c. i 76g. Le P. d'Ardene, qui s'ë-
tait adonné à la botanique, possédait
un jardin qui attii'ait dans sa retraite les
curieux et même les savants ama-
teurs des plantes et des fleurs rares.
Ses obseiTations sur les unes et sur
les autres , nous ont valu les ouvrages
suivants : I. Traité des Renoncules j
Paris, 1746 , in-8'.; II. Traité des
Tulipes, 1760, in- 12.; III. Traité
des OEillets , 176:2 , in -12.; IV.
Traité des Jacinthes , in - 1 2. ; V.
Traité de V Oreille d'ours , in-8". ,
VI. Lettres intéressantes pour les
médecins de profession , utiles aux
ecclésiastiques, Avignon, 1759, 2
vol. in- 12.; VIL Année champêtre j
Florence ( Lyon ) , 1769,0 volumes
in- 12. Cet ouvrage fut regardé dans
le temps comme le meilleur qu*on eût
en ce genre ; on y trouve un ex-
trait bien fait , de ce qu'il y avait de
plus certain dans les auteurs qui ont
traité de ces matières. Celte première
partie, qui roule sur le /»o(ag^er, de-
vait être suivie de deux autres , sur le
parterre et sur la ferme, dont le ma-
nuscrit passa dans les mains du pré-
sident de la Tour -d'Aiguës, ami de
l'auteur. On a encore, du P. d'Ardene,
un discours qui avait remporte le prix
à l'académie de Marseille, en i744i
sur cette question : « Il est plus dif-
» ficilc et plus glorieux de remplir
» exactement son devoir, que de faire
» des actions brillantes que ce devoir
» n'exige pas. » Il fut l'éditeur des
OEuvres posthumes d'Esprit Jean
d'Ardene , son frère aîné. T — d.
ARDERN ( John), chirurgien an-
glais, du i4'. siècle, dont le docteur
Freind a honorablement pr.rlé dans
, son History of Phjsic , .paraît avoir
e'te' un des premiers qui, dans son
ARD
pays, pratiquèrent la chirurgie d'après
des principes fixes. Il habita Newaik,
de i349 à 1570; alors il se rendit à
Londres, où sa réputation s'était déjà
étendue. Ce fut un homme instruit,
et un praticien habile, pour le temps
où il vivait. Il a laissé , sur la médeci-
ne et la chirurgie, et particulièrement
sur ce dernier art, un gros volume
latin, dont il existe plusieurs manus-
crits; mais en n'en a imprimé qu'un
Traité de la Fistule à Vaiius , tra-
duit en anglais, par John Bead, en
1 588. Sa pratique est surtout empv-
rique, et se ressent de la superstition
de son siècle. Cependant on trouve,
dans ses écrits, des observations
utiles , et on doit le placer parmi ceux
qui ont rendu à leur profession, des
services réels. 11 abonde en ordonnan-
ces, dont plusieurs sont de sa propre
invention, et qui furent ensuite reçues
dans les Pharmacopées, Il inventa un
instrument pour donner des lave-
ments, opération pour laquelle il pos-
sédait un talent tout particulier, dont
il tirait vanité. Sa chirurgie était piiuci-
palement tirée deCelse et de Paulus. K.
ARDICES de Corinthe , et Tu'lÉ-
PUA>ES deSicyone, furent deux des
premiers artistes qui cultivèrent la
peinture, inventée, selon Pljne, par
Philoclès égjqitien , ou par Cléajithc
de Corinthe. Tout leur art consistait
alors à tr.icer quelques lignes , ai»
moyen desquelles ils faisaient sentir
les ombres et les lumières ; du reste ,
ils n'avaient aucune idée de la cou-
leur. L — S — E.
ARDIZON ( JACQrts d' ) , juris-
consulte, florissait à Vérone, dans le
quatoraème siècle. 11 cousaçia sa vie
à l'étude des lois, et l'Italie le compte
parmi ses savants distingués. Son ou-
vrage sur les fiefs , appelé communé-
ment Summa feudorum, mais dont
le véritable titre est Summa in usus
ARD
feudorumy a ëtc généralement estimé :
il en a été fait plusieurs éditions 5 une,
k Lyon, i5i8, in -fol.; les autres, à
Cologne, i562, i566, i569,in-8'\
Cette dernière était la plus recherchée ;
mais elle n'a d'autre avantage que
d'être plus commode, en raison de
son format. Les Traités d'Ârdizon, de-
puis la suppression en France de
tout ce qui tient à la féodalité, offi'ent
peu d'intérêt dans ce pays. M — x.
ARDUIN , chef normand. Fofez
GuiscARD (Robert).
ARDUIN, marquis d'Yvrée, roi
d'Italie, élu par les Italiens, le i5
février 1 002 , après la mort d'Othon
III; mais, dans le même temps, Hen-
ri, duc de Bavière, était élu par les
Allemands, sous le nom de Henri II,
et ce dernier prétendait succéder à
tous les droits que les Othons avaient
eus sur l'Italie. Malheureusement pour
Arduin , plusieurs des grands seigneurs
de ses états prirent parti pour le mo-
narque allemand, Arnolphe, arche-
vêque de Milan, et Othon, marquis
de Vérone , furent les plus zélés pour
Henri IL Ils l'introduisirent, en 1 004,
dans toutes les villes de Lombardie,
et le firent couronner à Pavie , le
1 4 mai. Arduin , abandonné par ses
compatriotes , se vit obligé de s'enfer-
mer dans les forteresses du mai'quisat
d'Yvrée, et d'attendre la retraite vo-
lontaire des Allemands. Dès-lors, l'Ita-
lie , partagée entre deux concurrents ,
secoua presque absolument le joug de
l'autorité royale ; les villes s'attaquèrent
au nom des deux rois , sans vouloir
cependant obéir ni à l'un ni à l'autre.
Arduin, reconnu à Pavie, ne sortit
guère, cependant, de son marquisat
d'Yvrée. Il ne put point mettre obsta-
cle à la seconde invasion de l'Italie,
par Henri II, en ioi5 et 1014, et,
après le départ de cet empereur , en
ip.i5; étant tombe jjraYcmeat ma-
ARD
393
lade , il déposa les ornements royaux
sur l'autel du couvent de Fructérie, au
diocèse d'Yvrée. Il y revêtit l'habit
religieux, et y mourut le 3o octobre
de la même année. On assure que la
violence de son caractère , et l'oi^eil
avec lequel il traitait ses courtisans,
furent les causes piincipales de l'aban^
don où le laissèrent les Italiens, lors*
qu'il fut attaqué par un monarqu»
étranger. S. S- — i.
ARDUINl ( PreRRE ), né à Ve'ronne,
a publié un ouvrage sur la botanique ,
intitulé : Animadversionum hotani-
carum spécimen , pars i". , Patavii ,
i759,in-4**.,tab. la; parsII'.^Ve-
nitiis, 1764 7 iQ"4''5 tab. 20. Il con-
tient des observations et des remar-
ques intéressantes , avec la description
de plusieurs plantes rai-es, dont quet-
ques-unes sont nouvelles. La première
partie n'a que la planches. Dans la
seconde , pubiiée cinq ans après , à
Venise , l'auteur décrit plusieurs plan-
tes qui ont été découvertes aux envi-
rons de Padoue : elle renferme 20
planches. Ayant été nommé, depuis,
professeur d'agriculture et d'économie
rurale à Padoue , Arduini publia des
observations et des expériences sur la
culture et les usages de diverses plan-
tes qui peuvent servir dans l'économie
rurale et domestique, sous ce titre:
Memorie di Osservazioni e d'Espe-
rienze sopra la coltura e gli usi di
varie plante che servir possono alP
economia , Padova , 1766, in -4%
D'autres observations ont été insérées
dan s les Opusc. Scientif. , tome VI . Ar-
duini a considéré la botanique sous les
rapports d'une utilité immédiate ; il •
décrit et donné de bonnes figures de
beaucoup de végétaux incLgènes inté-
ressants par leurs produits ; il a fait
voir tous les avantages que l'on en
pouvait retirer et qui avaient été né-
gliges ou à peu près ioconnus jusque
■"^94
ARD
là. Haller, dans sa. Bibliolhècfue bo-
tanique, dit qu'Arduiiù ou Ardiiiu
^e nommait Hardidn dans ses derniers
ouvrages. Linné luiadedië, sous le
j^omd' ^rduinia, un genre déplantes,
qui a e'ie réuni depuis à celui du
Carissa. D — P — s.
ARDYS, fils de Gygès, monta sur
le trône de Lydie , vers î'aa 678 à J.-C.
}\ combattit les Ioniens , prit la ville de
Priène, et fit plusieurs irruptions
d.ms le pays de IVlilct. Il vit ses états
ienvaliis par les Cirame'riens , qui
avaient c'te clias:ësdcs bords du Bos-
phore , (pii porte leur nom , par les
Scylhes nomades. Les Ciuime'riens
prirent la ville de Sardes , à l'excep-
tion de la citadelle. Ardys régna qua-
rante-neuf ans, et laissa son trône à
Sadyatte , son fils. C — r.
AKEAGATHUS. r.AucHAGATus.
ARE-FRODE, c'est-à-dire, ARE
JLE SAVANT, historien islandais , le
plus ancien et un dc^ plus estimes des
annalistes du jNord, quoiqu'on lui pré-
fère Suorre-Sturlcson , auteur du i5'.
siècle, qui est généralement regardé
comme le père de l'histoire du iSojd.
Are-Frode , dont le nom de famille
on plutôt le nom patronimiquc était
Tliorgilsen, naquit en Islande, l'an
1 0G8 , et mourut en i 1 48. D'après le
témoignage de Snorron, il a laissé un
grand ouvrage historique sur les rois
de Norwcge, de Danuemarck et d'An-
gleterre j mais cet ouvrage est perdu.
Le célèbre Suhra . dans son Histoire
critique , tome IV , préface , p. 5 ,
observe qu'un manuscrit , conservé
dans la collection d'Arnas Maguacus ,
sons ce titre : jEttartalJVoregs konon-
ga, c'est-à-dire, Généalogie des rois
de JVorwège, paraît être l'abrégé de
l'ouvrage d'Aro-Frode ; mais le seul
reste authentique de cet ouvrage est
le fragment intitulé ; Sdiedœ de Is-
îandia , public par Thcodoie XW-
ARE
lacius, évêque de Skalhot, àSkalholt,
en Islande, 1688, par Worm,avec
une version latine , à Oxford , 1 697 ,
in - 8\ , et par Bussœus, Hafniae ,
1755, in-4'. Quoique cette dernière
édition soit la plus estimée, le titre
renferme une erreur on du moins
une conjecture très-hasardéc, on y lit :
^rii Schedœ , seu hlendinga-Boc ,
etc.; mais M. Nyerup , dans son savant
Tableau historique de Vélat ancien
et moderne du Vannemarck, vol. x ,
p. 80, rend probable que l' hlenâinga-
Boc est un ouvrage ditiéront des Sche-
dœ. La partie importante de ces Sche-
dœ est une table généalogique des an-
cêtres d'Are-Frode qui remonte depuis
Roguoald, cousiii du roi Haraldus Pul-
chricenius, vivant en 8o5, jusqu'à
Ingre , contemporain d'Odin. Cette
gêné ilogics'accordegénéralenn ni avec
celle qui est nommée l'nglingas- Tal,
et ces deux monuments sont les prin-
cipales bases de la chronologie du
Mord , pendant les temps héruiqucs ou
les huit premiers siècles de l'ère vul-
gaire. M — B — N.
AREGONDE. Foj. Clotaire V\
AllELLANO (Juan de), peintre
espagnol, naquit à Torcas, près de
Tolède, en 1607. 11 apprit les prin-
cipes de son art à Alcala de Henarès ,
et fut élève de Juan de Solis. S'aper-
cevaut qu'il ne faisait que de médio-
cres progrès dans le genre historique,
il eut le bon esprit de se borner à
peindi-e des fleurs. Après avoii' copié
quelques t.ibleaux de Mario ISuzii ,
dit Mario di Fiori, il travailla dans
le même genre d'après nature. Il avait
la patience et l'assiduité nécessaires
pour réussir dans ce genre estimable,
comme l'est toute imitation de la na-
ture , mais le plus facile de tous. Arel-
lano mourut à Madrid, en 1670,^
1 âge de soixante-trois ans. La rha|>e!le
de !'< oire-L'ame-ùc-Boiî-Couseil , dans
ARE
celte ville, possède quatre de ses ta-
hlcaux. D — T.
ARELLANO (Gilles RAMmEZDE\
rnembie du conseil de Castille, et pi é-
sideut de l'inquisition , est auteur d'un
ouvrage intitule' : El mémorial de la
grandeza del conde de Aquilar^ et
d'un Traite Deprivilegiis credilorum.
— Un autre Ramirez de Arellano ,
écrivit en espap,nol un Traite sur Y Or-
thographe de la langue castellane. —
Un troisième Arellano ( J. Salvador
Bapt. de ) moine espagnol de l'ordre
des Re'coUets, ve'ciit au commence-
ment du l'j'', siècle. On a de lui :
I. Antiqiiilales iirbis Carmonœ,e jus-
que Hixtoriœ cornpendium ; U. De
Origine ima^inis S. Mariœ ; III. De
lieliquiis SS, Justœ et Rujinœ
Quelques-uns lui attribuent aussi l'ou-
vrage publie sous ce titre : Antiqui-
tates m.onasterii S. Trinilatis quod
est Sevillio. — Enfin un quatrième
Arellano y Luna (Michel Gomez
de), chevalier de l'ordre de S. Jacques
et membre du conseil des affaires de
l'fnde , a écrit : I. Opéra juridica
iripartila, Anvers, iG5i, iu-4°. ;
îf. Juris canonici anlilegomena ;
III. Theoremata pro immaculatd
Conceptione S. Mariœ ; IV. Suppli-
çatio ad Innocentium X ( au sujet de
la Conception ). D — g.
ARELLIUS, peintre romain, flo-
rissait dans les dernières années de la
république ; il avait peint, dans plu-
sieurs temples, des tableaux repré-
sentant des déesses j mais le sénat
ayant appris qu'il avait retracé ,
sous les attributs divins , des courti-
sanes qu'il aimait avec passion, fit dé-
truire ces ouvrages, malgré leur rare
l)eauté, comme profanant, par leur
origine , là sainteté des lieux qu'ils
décoraient. - - L — S — E.
AREMBERGH (Jean de Ligne,
jomte p'^ ,^ servit avec zèle Cliarlt-s-
A R E 5(ï5
Quint, et fut tué dans une bataille,
près de Groningue, le 24 niai i5.68.
Un de ses descendants périt de bles-
sures reçues à la bataille de Sahmt-
mène, livrée aux Turks, le '25 août
1691. — Le Père Charles d'AREM-
BERGH , capucin , de la mcme famille ,
né à Bruxelles, vers i5g5, mort on
lôtig, a publié, sous le titre de Flo-
res Seraphici I. une Histoire des écri-
vains de son ordre, depuis iSaS,
jusqu'en i58o, Colugne, 1640, io-
fol. IL Cljpeus Seraphicus , sive scu-
tum veritalis in dejensionem Ordinis
Minorum, i(i5(). N — l.
ARÉNA (Antoine d'), juriscon-
sulte et poète macaronique du lO'.
siècle , né à Solli( rs , diocèse de Tou-
lon , d'une fauiille qui était connue
dès le treizième siècle , sous le nom de
la Sable. Il étudia sous Alciat à
Avignon , et fit imprimer quelques
Traités de jurisprudence d'un très-
mauvais latin. Il est plus connu par des
poésies niacaroniqucs , genre ridicule
qui consiste à réunir des mots d'ui-
mauvais jargon italien , piov.ençal et
latin ; ce qui produit un mélange tout-
à-fait barbare et inintelligible. On a
publié à Bruxelles t ( Avignon ) , en
1748, une édition in-8". de ces poé-
sies , et une plus récente à Lyon en
1760, iii-8'\ Voici les tiUes singu-
liers de la plup^irt dç .ces pièces : De
arte dansundi ; De guerra Napoli'
tana ; Trïeygra entreprisa catholiqui
imperatofis qiiando en i55.6, ve-r-
jiiehat per Proi>ensam henè caros'^
satus in postam prendere Fransam
cumvillis de Provensd , etc. On lit «
la fin : Scribalum estando cum gail-
lardis pajsanis per boscos , mon-
tagnas , forestas de Provensd, Ave-
nione , 1 537 , in- 1 a. Bouche remarque
que, de tous ceux qui ont écrit sur
cette expédition, aucun n'enatransmis
uu aussi grand nombre de jxirJicuia-
5cj6
ARE
rites que cet auteur qui y e'tait pre'sent.
On peut juger de son talent et de son
courage par les vers suivants :
De tali guerra non escapare putabant ,
f,t œihl de murte granda paura fuit.
Poa, pou , bombarda; de tota parte petabant
In terram multos hamiaes tombare videbam
Testas etbrassos atque Tolare pedet.
Non espargnabant ullos de morte ferire ;
Quem non blessabant iUe beata» erat.
Aréna mourut en i544? juge àe St.-
Remy , diocèse d'Arles. Il paraît qu'il
avait eu une jeunesse très -orageuse.
On peut en juger par la dédicace de
son u4rs dansandi, ad follotissimam
suam Garsam Janam Rosœam ,pro
passando tempus, à la tète de laquelle
il s'intitule : JBragardissimus atque
falotus homo , et qui a eu treize édi-
tions. T— D.
ARÉNA (Jacques de), juriscon-
sulte, naquit, selon les uns, à Parme,
et, selon d'autres, en Flandre , dans le
i3*. siècle. On l'a aussi confondu avec
Jacques de Ravennes , jurisconsulte
français 5 mais il n'y a pas autant d'in-
ccrlitude sur ses écrits. Il a publié ,
sur 1« Code et sur le Digeste , des
notes d'une grande érudition , et que
Ton consulte encore avec utilité. Son
ouvrage sur les exécuteurs testamen-
taires, intitulé 3 De commis s ariis ,
Venise, i584 » ' vol. in-fol., est fort
estimé. Son Traité sur les séquestres ,
intitulé : De excussione bonanim, ,
Cologne, iSgi, in-8". , a beaucoup
de réputation , et son traité De Ban-
nitis l'a placé honorablement parmi
les criminalistes dont on a recueilli
les ouvrages à Francfort en 1 587 ,
in-folio. M — x.
ARÉNA ( Joseph ) , né dans l'île de
Corse , devint adjudant-général en
1793, et fut employé au siège de
Toulon , puis député au Corps légis-
latif en 1797 , et ensuite chef de
Jîrigade de gendarmerie , place dont
il se démit à la suite de la révolution
<lu i8 brumaire an 9(9 novembre
ARE
î 800 ). Il fut arrêté , le 1 0 ocf obrf
1801 , au spectacle de l'Opéra , étant
accusé de vouloir attenter aux jours
du premier Consul; et le tiibunal
criminel le condamna à mort le 3o
janvier 1802, ainsi que Cerachi, Tp-
pino-Lebrun, Demerville et Diana, set
complices. K.
ARENDS (Thomas), poète hol-
landais, né à Amsterdam, en i653,
travailla dans le comptoii' d'un mar-<
chand , auquel il succéda dans la suite.
Ses poésies fiigitives , dont la plu»
grande partie roule sur des sujets de
piété, ont été publiées, en 1724» P^^
Mathieu van j<idek, sous le titre de
Mengelpoezij. Arends a aussi publié
des tragédies et des comédies médio-
cres , où l'on reconnaît cependant
quelques talents. Il mourut en 1700. ^
— Un autre Arends (Rodolphe)^ I
aussi poète hollandais , mort à Dor-
drecht , en 1 787, dans un état voisia
de l'indigence , a été loué par Hœufft,
D— G.
ARENSBECii (PiebreDiederich),
né en Suède , s'appliqua au grec et
aux langues orientales , et visita les
universités étrangères aux frais de la
reine Christine. Il fut nommé profes-
seur à Strengues , et devint ensuite
pasteur à Stockholm, où il mourut, ea
1673. Il travailla, sous la direction de
l'évêque Jean Mathiœ , à une traduc-
tion de la Bible , en Suédois , et pu-
blia , à cette occasion , un ouvrage
très-rare, même en Suède, ayant pouF
titre : Spécimen concil^atitonis lirif
guarum , ex nativis earumdem pro-
prietatibus in textus aliquot sacros
ad veram et convenientem linguœ
sueticœversionem déduction, Streng.,
1648. La traduction ne fut pas achevée.
C AU.
ARESI (Paxjl), Mihiiials, m,u$
né à Crémone vers l'an^ 1.574» ^ors-
crue son pèi^ venait d^^êWtTlàOOUB»
ARE
^clestat. II fut alors nomme César, el
lie prit le nom de Paul qu'en entrant
chez les clercs-réguliers , ou théatins ,
à l'âge de seize ans , après avoir perdu
son père. 11 montra, dans sese'tudes,
une telle subtilité' d'esprit , que son
professeur en théologie e'tait oblige' de
se pre'parer, avec une application par-
ticulière, pour re'soudre ses objections,
oure'futer ses arguments. Il était doue,
de plus , d'une telle mémoire , qu'ayant
reçu un jour l'ordre de faire le lende-
main un discours au réfectoire, il y
répéta, comme en extrait, tout le ca-
rême que venait de prêcher le supérieur
même qui lui avait donné cet ordre»
Il se fit une grande réputation comme
prédicateur, quoiqu'il eût contre liii
la prononciation et le geste, A Na-
ples , à Rome , par - tout où il en-
seigna la philosophie et la théologie ,
il donnait aussi aux jeunes gens, pen-
dant l'été , des leçons sur l'éloquence
de la chaire. Choisi pour confesseur
à Turin par Isabelle de Savoie , qui
liit ensuite duchesse de Modène, il fut
nommé à l'évêché de Tortone. Il s'y
fixa; et, après une vie exemplaire, par-
tagée entre les devoirs d'un évêque ,
d'un rehgieux, et des travaux litté-
raires assortis à son état , il y mourut
le 1 3 juin 1 644' Ou a de lui , en latin :
I. In Libres Aristotelis de Gene-
ratione et Coiruptione, Milan, 1 6 1 7 ,
«-4°. ; II. De Aquce transmuiaiio-
ne in sacrificio Missœ , Tortone ,
1622, in-8'. , et avec beaucoup d'ad-
ditions, Anvers, 1628, in-B*". -, III.
De Cantici Canticorum sensu, veli-
tatio bina, Milan, 1640, in-4°. ;
IV. F'elitationes sex in Apocalyp-
sîm, Milan, 1647, in-fol., ouvrage
mis au jour après sa mort par le P.
Paul Sfondrati , qui y joignit une Vie
de l'auteur. En itahen : I. Arte di
predicar bene, Venise , 1 61 1 , in-4". ;
le m*isi^f augiueaté par l'auteur, Mi-
ARE 59^
lan , 1622 , et réimprimé plusieurs
fois. C'est le Recueil des leçons qu'il
donnait pendant l'été aux jeunes gens
qui suivaient ses cours de philosophie
et de théologie , et ce fut le premier
ouvrage qu'il mit au jour. II. Imprese
sacre con triplicati discorsi illus-
trate ed arrichite , ouvrage publié
d'abord , à peu près sous le même
titre, Vérone, i6i3 et i6i5, in-4° ,
mais tellement augmenté ensuite par
l'auteur, qu'il reparut en 7 vol. in-^". ,
les 2 premiers à Milan , 1621 et
1625, les 3 suivants à Tortone, i63o,
le 6*., ibid., i634, «tie 7^, ibid.,
1 655. Il ajouta à son 1 ". volume une
réponse à ses critiques , sous le titre
de la Penna rajîlata, Milan , 1 626 ,
in-fol.; et après la publication du 7=.
volume , un 8*". tout entier , intitulé :
la Ritroguardia ( l'Arrière - garde )
in dijesa dise stesso, con un trattato
delV arte e scienza impresistica ,
etc., Gênes, \Ç>\o ,\n-!^°.',M\. Délia
Tribolazione e suoi rimedii , Tor-
tone, 1624, 2 vol. in-4°. , Venise,
1627 , et réimprimé plusieurs fois
depuis j IV. Panegirici fatti in di-
verse occasioni , Milan, sans date,
mais l'Épître dédicatoire , de Mogna-
na, est datée de i644, in-S"., réim-
primé, ibid., i659,in-4°. ; ce re-
cueil contient dix-sept panégyriques;
ils sont tous en italien. Les sermon»
latins d'Aresi sont un rêve bibliogra-
phique : au I7^ siècle, on ne prê-
chait plus dans toute l'Italie qu'eu
italien. G— É.
ARETA , ou ARETE , fille d'Aris-
tippe ( Foy. Aristippe ).
ARÉTAPHILE , fiUe d'^glator ,
vivait à Cyrène , à l'époque des guer-
res entre Milhridate et les Romains.
Nicocrates , tyran de Cyrène , ayant
fait mourir Phaedimus , son mari , de-
vint éperduement amoureux d'elle , et
l'épousa ; mais quelque bon traiteioeat
59^ ARE
qu'elle en rfoîit , elle ne perdit jamais
de vue la vengeance de la mort de
son mari , et la liberté de sa patrie.
Elle chercha d'abord à empoisonner
Nicocrates ; ayant été découverte , elle
se justifia en disant qu'elle avait voulu
composer un philtre pour se faire ai-
mer davantage. Elle tourna alors ses
vues d'un autre côté. Elle avait une
fHle très-.belle , et que Léandre , frère
du tyran , épousa. Ces deux femmes
employèrent tous les moyens de sé-
duction pour engager ce dernier à
faire périr Nicocrates. Il y consentit ,
et le fit tuer par un de Ses esclaves;
mais il usurpa lui-même l'autorité,
et ne se montra pas moins cruel que
son frère , ce qui obligea Arétapliile
d'avoir recours à d'autres moyens.
Ayant engagé secrètement un certain
Atiabus, roi d'un peuple de la Libye ,
à fiiire des incursions dans le pays de
Cyrène , elle dit que la guerre et la
tvrannie ne s'accordaient point , et
elle offrit d'aller négocier la paix.
S'étant rendue vers Anabus , elle
fit ses conditions avec lui , et , étant
revetinc vers Léandre, elle l'engagea
à se rendre, sans armes , auprès d'A-
nabus, pour ratifier , disait -elle , le
traité. A peine' y fut-il arrivé , qu^^na-
bns le fit arrcler , et le livra aux Oyré-
nèéns, qui le firent mourir. Ils ofTri-
rént le gouvernement à Arétapliile,
qui le refiisa , leur donna des lois
sages , de bonnes institutions, et alla
finir ses jours dans la retraite. G— r.
ARÉTAS. Nom de plusieurs rois
de l'Arabie Pctrée, que la faiblesse des
rois de Syrie ^hardit à' faire des irt-
cursiotts datis là' Cœlésyrîe. L'e pc-
nïier qui rions soit connu est celui qui
battit J.ison , cliéfdes Hébreux, vers
l'an i-^o av. J.-C. — Uii'alili-è Aré-
TAS s'çmpara de la Cœlésyriè , vers
l'an 84 av. J.-C. , prit le titre de roi
de Damas , et fit frapper des nioii-
ARE
nales eu son nom. Il alla au secours
d'Hyrcan , contre Aristobule , son
frère; mais, pendant ce temps, Scau-
rus , l'un des lieutenants de Pompée ,
reprit Damas. Il paraît cependant que
Pompée lui rendit cette ville , et que
ses descendants y régnèrent; car S.
Paul , dans sa seconde Epilre aux
Corinthiens , ch. 2 , parle d'un Arétas,
roi de Damas , qui voulut le faire ar-
rêter , vers l'an 55 de J.-C. C — r.
ARÉTÉE de Cappadoce ( Are-^
tœus , Apivatoi; , que quelques-uns
écrivent Arelhée), médecin grec qui ,
par sa fidélité à suivre la méthode
d'expérience et d'observation tra-
cée par Hippocrate , mérite d'être,
mis au nombre des classiques en
médecine. On ne sait en quel temps
il a vécu ; Wigan , un de ses édi-
teurs et commentateurs , prétend
que c'est sous le règne de Néron ;
cependant Galien , qui a parle de tous
les auteurs antérieurs à lui, n'en fait
pas mention , et , certes , il n'en aurait
pas omis un d'un mérite aussi cmi-
nent qu'Arétée. Goulin penche à croire
qu'il est le même qu'Athénée, chef de
la secte des pneumatiques ; il appuie
son assertion sur de légères altéra-
tions de mots , accident qui doit arri-
ver dans la langue grecque plus qu'en
aucune autre langue. Quoi qu'il en
soit de l'histoire personnelle d'iViétc'e,
le petit nombre d'ouvrages qu'on attri-
bue à cet auteur , et qui nous retracent
les beaux temps et les principes sûrs
de la médecine grecque et hippocra-
lique , nous sont heuiTusemcnt par-
venus. Ils sont divisés eu huit livres ^^ J
deux sur les causes des maladies ai- , \
guës , deux sur celles des maladies
chroniques , deux sur la description
des maladies aiguës , et deux sur
celle des maladies chroniques. Rien
de plus exact que le tableau qu'y fait |
Arclce des maladies ; rien de plus ra- *
ARE
lioncl que la mauière avec laquelle il
f n établit le diagnostic, et en règle le
traitement, puisé autant dans l'hygiène
que dans la pharmacie. On croit relire
Hippocrate ; c'est la même méthode
d'observation , même précision dans
les détails , même étendue de vues
dans leur générahsation , même style
sentencieux et pittoresque pour leur
expression. S'il ne saisit pas avec
moins de sagacité qu'Hippocrate les
divers mouvements de la nature dans
le cours d'une maladie, s'il n'en note
pas avec moins d'exactitude la succes-
sion , il sait de même aussi allier le
mérite d'observateur passif à celui
de médecin agissant, qui, selon les
cas , se propose d'influer sur les di-
vers mouvements des maladies ; et
c'est à lui qu'on doit le premier em-
ploi de ce dérivatif et excitant puis-
sant , les cantharidcs en vésicatoire ,
que jusqu'alors on n'avait lait prendre
qu'à l'intérieur. Arétée fait précéder
l'histoire de chaque maladie de l'indi-
cation anatomique de l'organe qui en
est le siège , et quelque imparfaite que
soit cette anatomie, à cause des nom-
breux obstacles opposés à l'étude de
cette science chez les anciens , cela
n'en démontre pas moins la sage mé-
thode que suivait Arétée ; et même
encore , sous ce rapport , mérite-t-il
d'être consulté , comme présentant le
tableau fidèle de l'état de cette science
à cette époque. En somme, cet ou-
vrage doit être mis sur la même ligne
que ceux du père de la médecine. Il
a eu de nombreuses éditions ; la pre-
mière, en latin, parut en i552,in-4''.,
h Venise , par les soins de Junius
Paulus Crassus, professeur de Pa-
doue ; il y manque les 2 , 5 , 5 , 6 et 7%
chapitres du deuxième livre de la Cu-
ration des maladies chroniques. En
1554. J. Goupyl, docteur de la fa-
culté de Paris, en donna une en grec ,
ARE 5ç)ç)
à Paris, in-8\, où ces cinq chapitres
étaient rétablis. Ces deux premières
éditions se réimprimèrent plusieurs
fuis avec de légères additions, Ea
i6o3 , il en parut une grecque et la-
tine , in-fol., par George Henisch, arec
d'assez mauvais commentaires de ce
dernier. Eu 1 728 , J. Wigan en donna
une grecque et latine, bien plus soi-
gnée, à Oxford, in-fol.; il la fit sur
deux manuscrits grecs , dont l'origine
pure lui était garantie sans avoir pu
se procurer les éditions de Henisch
et de Turnèbe. Elle n'empêcha pas
cependant Boerhaave d'en donner une
autre , aussi grecque et latine, à Ams-
terdam, 1755, in-fol., et celte der-
nière doit être préférée , parce que
l'éditeur profita des recherches de
Wigan ; Boeihaave y a suivi le texte
grec de Goupyl , la version latine de
Crassus, et y a ajouté de fort bons
commentaires faits par Petit , médecin
de Paris, quele célèbre critique anglais
Mattaire avait déjà fait imprimer sé-
parément dès 179.6. Henri Etienne,
réunissant, dans un seul ouvrage inti-
tulé : Medicœ aj-tis principes , tout ce
que les anciens avaient de recomman-
dable en médecine, n'avait eu garde
d'omettre Arétée, et, dès 1567, la
version latine de ce médecin grec, par
Crassus , avait été insérée dans cette
intéressante et utile collection. Enfin,
Haller, donnant une nouveii;^ édition
de ces Medicœ artis principes , en
1772, retoucha encore le bel Arétée,
qui compose le 5^. vol. de cette édition
in-8".; mais Haller, dans ce travail,
fut inférieur à lui-même, et l'édition
de Boerhaave , quoique antérieure à la
sienne , mérite encore aujourd'hui la
préférence. Enfin Lefcbvre ds Vi'le-
brune , mort depuis peu , en avait
fait une traduction française , mais
qui n'a pas été encore imprimée.
C.etA-.v.
îoo ARE
ARETIN (Léonard), ou Léonard
Bruni d'Aiezzo. Foy. Bruni.
ARETIN (François). /^.Accolti.
ARETIN ( Bernard ) , surnommé
XUnico Aretino. F. Accoltî.
ARÉTlN ( Pierre ), l'un des
auteurs italiens du seizième siècle
qui fit le plus de bruit , mais qui
dut la plus grande partie de sa re'-
putation aux excès de sa plume. La
bizarrerie de sa destinée répond à celle
de son génie. FiJs naturel d'un simple
geptilhorame, il parvint à la faveur
des princes et des rois. On le nomma
leur fléau , et il poussa auprès d'eux
la flatterie jusqu'à la plus basse adu-
lation : il eut lui-mèuie des admira-
teurs outrés et des flatteurs , malgré
la virulence et l'emportement de ses
satires : aussi rempli de jactance et
d'orgueil que de fiel , il souffrit avec
résignation les traitements qu'on ne
hasarde qu'avec des lâches : écrivain
licencieux , au point que son nom est
devenu celui de l'effronterie, du scan-
dale et de l'obscénité même , il fut
aussi un auteur déV^ot , et publia un
assez grand nombre d'ouvrages de
piété, qui ne paraissent pas lui avoir
plus coûté que les autres , et qu'il
préférait, quand ils lui rapportaient
davantage; enfin, auteur souvent au-
dessous du médiocre, sinon dans un
genre où il est honteux d'exceller, il
reçut le surnom de divin ,• il se le
donna lui-même , le répéta , le signa ,
comme on ajoute à son nom une sei-
gneurie ou un ornement de plus à
ses armes. Né, en 1492, dans cette
ville de Toscane dont il a jiresque
souillé le nom, il n'y fit que de mé-
diocres études ; mais il annonça de
bonne heure et des dispositions brillan-
tes , et l'usage qu'il en devait faire un
jour. Un sonnet contre les indulgences
le fit chasser d'Arczzo. Réfugié à Pé-
rouse , il y fut d'abord connu j)ar un«
AfÎE
polissonnerie bouffonne. Une peinturé
édifiante, qui ornait la place publique,
représentait la Madeleine aux pieds
du Christ, tendant les bras, dans l'at^
titude de la douleur. Pierre, qui pei-
gnait passablement , alla , pendant la
nuit, y peindre un luth qu'il mit entre
les mains de la sainte , et l'on conçoit
quel changement cela fit dans l'ex-
pression du tableau. Il subsista quelque
temps à Pérouse de l'état de relieur. Il
se rendit ensuite à Rome à pied, et
sans autres habits que celui qu'il avait
sur le corps. Il parvint, en assez peu
de temps, à être attaché, sans que
l'on sache à quel titre , au pape Léon X;
Il le fut ensuite à Cléraeni VII , succes-
seur d'Adrien VI. Seize infâmes sou-
nefs, qu'il fit pour les seize figures obs-
cènes dessinées par Jules Romain j
et gravées par Marc - Antoine Rai-
moudi , le firent sortir de Rome. Jean
de Médicis , connu dans les guerres
d'Italie sous le nom de chef des bandes
noires , peu effrayé sans doute de cette
licence de mœurs, l'appela auprès de
lui , et le conduisit à Milan , où l'A-
rélui eut l'occasion de se rendre agréa-
ble à François P"". De retour à Rome ,
il fut , peu de temps après, poignardé
et estropié par un gentilhomme bo-
lonais , poiu- des vers qu'il avait faits
pour ou contre une cuisinière, dont
ils étaient amoureux à la fois , l'un ,
malgré l'orgueil de son talent, l'autre ,
malgré l'orgueil de sa noblesse.
N'ayant pu obtenir justice de cet as-
sassinat, il retourna auprès de Jean
de Médicis , qui le prit si fort en ami-
tié, qu'il lui faisait partager, non seu-
lement sa table, mais sou lit. C'était
alors le comble de la politesse. On
n'est pas aujourd'hui aussi poli entre
hommes, ou, du moius, on l'est autre-
ment. Jean de Médicis , blessé dans
un combat , mourut peu de temps
après des suites de ses blessures , et
A r, Ë
i] mourut en Ire les bras de son clier
Are'tin , qui montra pour lui, pendant
sa maladie , et même après sa mort ,
une aflectiou , pour ainsi dire , pas-
sionnée. Il prit alors le parti de vivre
libre, et du seul produit de sa plume.
Il alla se fis.er à Venise en i5'i7 : il
s'v fit des amis puissants, dont l'un,
évêqne suffragant de Vicence , le ré-
concilia avec le pape Clément VII, et
le servit si bien auprès de l'empereur
Charles-Quint, que ce monarque lui
envoya une de ces belles chaînes
d'or que l'on portait alors au cou ,
comme objet de luxe et comme mar-
que d'honneur. François 1 "^. ne vou-
lut pas être moins généreux que son
rival , et fit présent à l'Arélin d'une
chaîne pareille. Le fameux duc de
Lève lui fit une forte pension. Pierre
provoquait ces libéralités, en déclarant
de temps en temps que , puisque les
princes chrétiens récompensaient si
mal son mérite , il passerait chez les
infidèles , oii il irait vieillir dans la
pauvreté. Outre les pensions et les
présents, écrivant sans cesse, dans
une ville où il lui était permis de tout
imprimer, il gagnait, selon ses pro-
pres expressions, mille cens d'or par
an , avec une rame de papier et une
bouteille d'encre. Il prit, ])our l'aider
dans ses travaux, le célèbre Niccolo
Franco, auteur aussi mordant et aussi
impudent que lui, mais beaucoup plus
savant , surtout en grec et en latin ,
langues dont l'Arétin ignorait entiè-
rement l'une, et savait médiocrement
l'autre, quoique dans ses écrits sé-
rieux , il ne fit aucune difficulté de
décider et de trancher également
sur toutes deux. Alors , sa renommée
s'accrut; de toutes les parties de l'I-
talie , on lui écrivait , on le vantait ,
on lui adressait des dédicaces , et l'on
Venait le visiter. C'était une jouis-
sance pour son oi-gucil, mais c'était
II.
AËE 4ot
aussi une perte de temps à laquelle il
trouvait l'emède, eu se réfugiant, pour
travailler , chez quelques-uns de ses
amis, ou, comme il l'avoue franche-
ment, de ses amies. Il ne dissimulait
pas plus sa vénalité que son immo-
ralité. Quelque temps , il tint la ba-
lance des louanges égale entre Char-
les-Quint et François l""". ; mais le mo-'
narque espagnol lui fit une pension
de 200 écus , le monarque français
ne l'imita pas cette fois ; toutes les;
louanges furent alors pour Charles ,
et le nom de François disparut des
vers et de la prose de l'Arétin. On lui
promit, au nom du roi, une pension
de 4oo écus ; il promit, à son tour,
que , dès qu'il aurait reçu le brevet de
S. M., il célébrerait p!us haut que
jamais sa gloire. Le brevet ne vint pas,
et le poète ne chanta plus que Charles^
Quint. L'empereur fit bientôt une phi.<
forte recette en louanges et l'ArétÎ!! ,
en traitements honorables, et ce qu'il
aimait encore mieux , eu or. Chailes-
Quint , à son retour en Allemagne
en 1543, passant sur les états de Ve-
nise , le duc d'Urbiu , député par le
sénat pour le comphmenter , mena
l'Arétin avec lui. L'empereur, qui était
achevai , comme l'ambassadeur et soit
cortège, ayant aperçu le poète décoré
de sa belle chaîne, lui fit signe d'ap-
procher , le mit à sa droite, et l'entre-
tint, pendant tout le chemin , jusqu'à
Peschiéra , où il eut encore, avec lui ,
une conversation longue et familière.
Ce fut alors que l'Arétin lui récita ua
panégvrique de près de 5oo vers>
plein de ces exagérations qu'il n'y a
de pudeur ni à prononcer ni à en-
tendre. Une somme considérable , que
l'empereur lui fit compter le lende-
main , prouva qu'il n'en avait pas été
blessé. Les ouvrages de dévotion que
l'Arétin composait à Venise , en même
temps que les œuvres les plus obs-
4o2 AU E
cènes , avaient pour but , outre l'ar-
gent, celui de se coucilier la cuur de
Roiïie. Les bonnes dispositions de
Paul m enhardirent le duc de Parme
R demander por.r lui le cîiapeau de
cardinal. Jules 111 ; qui était d'Artzzo,
ayant sucrédë à Fanl, fut si touché
d'un sonnet que lui adressa son com-
patriote, qu'il lui envoya mille cou-
ronnes d'or, avec le titre et le cordon
de chevalier de St.-Pierre. Conduit à
Rome, environ trois ans après, par
le duc d'Urbin, et présente au pape,
il en fut accueilli avec honneur , pres-
que avec tendresse; car Jules 111 alla
Jusqu'à le baiser au front, jusqu'à ap-
pliquer les lèvres d'un souverain pon-
tife sur le front de l'Arclin 1 Celui-ci
ne mit plus de bornes à ses espéran-
ces; il se crut sûr de ce chapeau, au-
quel il avait réellement l'ellVouterie
d'aspirer. Mais tout ce grand accueil
n'ayant rien produit de solide, il revint
à Venise , où il ne manqua pas de dire
et d'écrire qu'il avait refuse le cardi-
nalat. L'àgc ne le mûrissait point. Sa
langue et sa plume conservaient leur
impudente acrimonie. L'Italie reten-
tissait de ses querelles avec ce même
Mccolo Franco, qui, de son collabora-
teur et de son commensal , était devenu
son plus mortel ennemi; avec un
poète milanais, nommé Albicanle, qui
avait moins d'esprit que lui , mais non
pas moins de fiel et d'emportement;
avec plusieurs autres gens de lettres;
et il n'était pas plus circonspect avec
des gens qui , n'écrivant pas , pouvaient
se venger autrement qu'avec la plume.
On a vu comment il avait été traite à
Rome dans sa jeunesse. Dans d'autres
occasions, il en fut quitte pour la
peur; mais elle fut grande , et il y avait
de quoi s'en souvenir. Le célèbre ca-
pitaine, ou condottiere, Pierre Stroz-
zi, s'étant mis au service de France,
avait ejiWv» a l'cmpcivui U forteresse
ARE
de Marnuo; TArétin s'avisa de le plai-
sauter dans une de ses satires. Strozzi,
qui n'était pas plaisant, lui fit dire de
changer de ton, ou qu'il le ferait poi-
gnarder jusque dans son lit. L'Arétin ,
qui le connaissait capable de lui tenir
parole, eut tant de frayeur, qu'il se
tint enfermé chez lui, n'y laissa plus
entrer personne, et mena jour et nuit
la vie la plus misérable , jusqu'au mo-
ment où le capitaine quitta les états
de Venise. Deux peintres célèbres,
le Tintoret et le Titien , s'étaient brouil-
lés : l'Arétin prit parti pour le Titien,
qui élait son intime ami , et ne man-
qua pas, selon sa coutume, de se dé-
chaîner contre le Tintoret. Celui-ci, le
rencontrant un jour près de sa maison ,
feint de tout ignorer , lui dit qu'il dé-
sire depuis long-temps de faire son
portrait, le fait entrer chez lui, le pla-
ce, et tout à coup, se saisissant d'un
pistolet , vient à lui d'un air menaçant.
« Eh! Jacques, s'écria le poète épou-
» vanté, que voulez-vous donc faire? —
» Prendre votre mesure, » lépondit
gravement le peintre; et l'ayant en
effet mesuré, il ajouta du même ton :
« Vous avez quatre et demi de mes
» pistolets de haut. » Cela dit, il
reuvova l'Arétin, qui ne se le fit pas
dire deux fois. Un ambassadeur d'An-
gleterre , qui avait à se plaindre de lui,
ne se contenta pas de l'effrayer ; et peu
s'en fallut que, dans toute la force du
terme, il ne le fit mourir sous le bâton.
Si l'on en croit ses ennemis, il courut
plus d'une fois risque de finir de cette
manière; mais il élait destiné à une
mort plus gaie, si toutefois le gros rire
du vice est vraiment de la gai té. 11 avait
des sœurs qui menaient à Venise une
vie aussi dissolue que la sienne. On lui
contait un jour quelques-uns de leurs
faits galants ; il les trouva si comiques ,
qu'il se renversa sur sa chaise, en riant
aux eckts. La chaiic tomba, il frappa
I
ARE
de la tête sur le pave, et raourut à
Tinstant même, àç;é de soixante-cinq
ans , au milieu des convulsions du
rire. Il n'est donc pas vrai, comme on
l'a dit, qu'ayant reçu l'extrême onc-
tion, il dit, "en riant, ce vers impie:
Guardatemi da' topi or che son unio,
que l'on peut rendre par celui-ci :
Me voilà bien huilé , préservez-moi des rats.
Il avait conservé, malgré ses deTiau-
ches , un tempérament robuste , et
semblait destiné à une longue vieillesse.
La nature l'avait très-lieureusement
doué : il avait un goût inné pour les
arts. Il fut ami du grand Michel-Ange,
On vient de voir qu'il le fut aussi du
Tiiien, et ce fut à sa recommandation
que Charles-Quint employa ce dernier
peintre. Il aimait passionnément la
musique, et jouait de quelques instru-
ments; mais , ce qu'il aima par dessus
tout, ce fut l'argent, la table et les
femmes. On a vu des preuves du pre-
mier de ces goûts ; quant au second, il
paraît souvent, dans ses lettres, occupé
de bonne chère, et c'était, assure-t-on,
par gourmandise, qu'il ne dînait jamais
Lors de chez lui. Il eut beaucoup
de maîtresses, de tout rang et de tous
états. Les aima-t-il? Leur nombre, la
dépravation scandaleuse de plusieurs
d'entre elles , et la sienne , en font
douter; mais les preuves d'attachement
qu'il leur donna quelquefois, le fê-
laient croire. Tl eut trois filles natu-
relles: dans sa famille, on ne surpro-
duisait pas autrement; et il fut pour
elles un très-bon père. S'il aimait l'ar-
gent, c'était pour le dépenser, pour
vivre splendidement, s'habiller avec
magnificence, se montrer libéral, et
même quelquefois bienfaisant , tant il
réunissait de contrastes dans son ca-
ractère comme dans sou esprit. On le
loua beaucoup trop pendant sa vie, et
surtout, il se loua beaucoup trop Uii-
ARE
4o5
même. La postérité en a fait justice :
elle a couvert son nom d'opprobre,
quant aux mœurs; et, à f l'égard du
talent, si elle a conservé de l'estime
poirr quelques uns de ses ouvrages ,
elle en a proscrit un bien plus grand
nombre. Voici les principaux ; car
il serait aussi long qu'inutile de les
citer tous. Ouvrages en prose : I. ses
dialogues licencieux en italien : Ragio*
namenti del Zoppin fattofrate e Lo-
doi'ico p....niere dove si contiene la.
vita e genealogia di tutte le corti-
giane di Roma. divisés en 5 parties,
dont la première a été imptimée à
Venise , i 555 , la deuxième à Turin,
i530, la troisième à >uvarre, i558.
Ll V en a eu ensuite plusieurs éditions,
avec quelques difiérences dans le titre ,
et des additions d'ouvrages du même
genre; entr'aulres, avec un dialogue
non moins obscène, intitulé la P...,
errante, ovvero dialor^o di Madda-
lena e Giuiia, que la plupart des bi-
bliographes attribuent à Lorenzo Ve-
niero , élève de l'Arétin. Mais cet élève ^
digne de son maître, a fait, sous le même
titre, un petit poème de 1 58 octaves; le
dialogue, au contraire, esten prose, et
l'Arétin en est l'auteur, (^n les trouve
tous réunis dans les meilleures édi-
tions, entre autres dans celle des El-
zevirs, i66o, in- 12. Il faut distin-
guer, parmi ces dialogues, celui que
l'on désigne par le titre abrégé Délie
corti ( des cours ). Le titre entier est :
Ragionamento , etc. Dialogue dans
lequel Pierre Arétin introduit quatre
de ses amis, qui parlent des cours
de ce inonde et de celle du ciel : il
parut dans la même année, i558, à
iNovare, à Venise, et ailleurs. Celui-ci
n'est ni licencieux ni obscène, mais
fort ennuyeux. On y dit beaucoup de
mal des cours, sans plaire à ceux qui
ne les aiment pas : ce qu'il v a de sin-
gulier^ c'est qu'il est dédié au roi
2G.,
4o4 ARE
François I-"". La forme de la de'dicace
n'est pas moins singulière que le reste.
Elle peut donner une idée du tour
d'esprit de l'auteur. Elle signifie litté-
ralement : « Ouvrage offert comme
î) l'hostie de la vertu, sur l'autel de la
V renomme'e , consacre' au nom du
» glorieux François P""., roi de Fran-
» ce, créature sage, et ame pleine de
» valeur. » II. 1 sette Salmi délia pe-
7iitentia, etc. C'est une paraphrase des
sept Psaumes de la pénitence, qui
tranche fortement avec ses premiers
dialogues , et qui passe pour le mieux
écrit de ses ouvrages, Venise, 1 554 ,
m-4°., et réimprimé j)lusieurs fois, en
divers formats, tant à Venise qu'ail-
leurs. III. 7 trè libri délia humanità
di Christo ( trois livres sur l'huma-
nité du Christ), Venise, i555,in-4^,
et ensuite souvent réimprimés, comme
les sept psaumes. IV. // Gtnesi , etc.
(la Genèse) j avec la vision de Noé, où
l'on voit les mystères de X Ancien et
du Nom'eau Testament, Venise,
I 558 et 1559, in-8". , réimprimé de
même. Ces trois derniers ouvrages,
sur lesquels 11 n'y a rien à dire, sinon
qu'ils sont écrits le plus sérieusement
du monde, et d'un air de persuasion
e'gal à celui de quelque ouviage de
piété que ce soit, furent iTCueillis en-
semble , dans une édition donnée par
les Aides, en i55i , in- 4"., et dédiés
au pape Jules III. En tète de cette
édition, l'Arétin s'intitule Del sacro
santo Monte humil sperme , parce
que Jules III était de la f;iraille del
Monte , et il ajoute , comme pour
se relever de cet acte d'humilité, ce
que tout véritable homme de lettres
désire pouvoir mettre au titre de ses
ouvrages : E per divina s^azia huomo
îibero, et par la giâce divine , homme
libre. Ces trois mêmes ouvrages ont
été traduits en français, savoir : la
rnraphrase des sept Psaumes ^ deux
ARE
fois, l'une par Jean de Vauzelks?
prieur de Montrotlier, Lyon, i54o»
in-8°. ; l'autre, par François de Rosset,
Paris, i6o5, in-i^; les trois livres
de y Humanité dujils de Dieu , par
le même Jean de V auz. Iles , impii-
més vers l'an i549; la Genèse, tra-
duite par le même, Lyon, i54'-i. Les
Dialogues obscènes l'ont aussi été
dans notre langue : on nous permet-
tra de n'eu pas indiquer ici les édi-
tions. V. La Fie de Ste. Catherine ,
celle de la Fierge Marie, et celle ele
S. Thomas d'Aquin, tro\s ouvrages
qui parurent, pour la première fois,
à Venise; les deux premiers en i54o,
et l'autre en i545, ne doivent point
être séparés des précédents, et com-
plètent cette classe d'écrits pieux , tra-
cés par la plume la plus proftne,
VI. Nous rangerons sous le même
N". , ses cinq comédies , la Corli-
giana , il Marescallo , VHipocrito,
il Filosofo , et la Talanla , impri-
mées successivement à Venise depuis
i555 jusqu'en i555, et ensuite en-
semble , à l'exception du Philosophe,
en i588, sans nom tie ville, mais
vraisemblablement à Paris. Il y a . en
général , dans ces comédies , peu d'art
et encore moins de décence; mais
de la verve comique, des scènes sin-
gulièrement plaisantes , des caractères
bien tracés, un dialogue vif et animé,
des traits de satire imprévus et har-
dis ; (Je tous les ouvrages de l'Aré-
tin , ©B sont aussi ceux dont le style
est le meilleur , et qui peuvent le mieux
justifier l'admission que lui ont ac-
cordée les académiciens de la Crusca ,
parmi les auteurs qu'ils citent comme
classiques. VII. Six livres tle Lettres
familières , imprimés d'abord l'un
après l'autre , le premier dès 1 558 ,
et le sixième en i55- , recueillis en-
suite en 6 vol. , Paris , Mathieu Le
Maître, iCog, iu-8'. Elles sont ai-
ARE
rieuses pour l'histoire tic la vie de
l'auteur , et pour la connaissance de
son caractère : il est impossible de se
fi;^urcr , sans les avoir lues , la bizar-
rerie, la jactance , la cupidité', la bas-
sesse et l'orgueil de ce jx;rsonnage.
Il n'est pas difficiie d'y recueillir assez
de traits de tous ces vices pour rem-
plir des colonnes et des jiagcs entières;
mais cela est plus dégoûtant qu'agréa-
ble ou utile , et il en reste encore ,
après cela, beaucoup plus à dire qu'on
n'en a dit. Ce ne sont rien moins ,
d'ailleurs , que des modèles de style
e'pistolauc : ce style doit tenir le mi-
lieu entre l'ampoule et le trivial ;-l'A-
re'tin va sans cesse de l'un à l'autre
des deux extrêmes , sans s'arrêter
jamais au milieu. Ouvrages en vers :
I. les iG sonnets obscènes, Sonnetù
lassuriosi , dont on a parlé dans sa
Vie ; ils sont extrêmement rares , et
ne peuvent jamais le devenir trop ;
II. des Rime , Stanze et Capiioli,
les uns remplis de louanges outrées ,
et adressés à des papes, des princes
et d'autres puissances ; les autres , en
plus grand nombre , satiriques et li-
cencieux. Ceux de cette espèce sont
insérés dans plusieurs recueils , tant
parmi les poésies burlesques du Berni,
du Molza et d'auties poètes du même
genre , qu'ailleurs. Dans la plupart de
ces pièces, l'auteur est moins prodigue
de beautés poétiques que d'ordures et
d'injures. 11 est bien loin , pour la
délicatesse d'esprit et de style , des
autres poètes satiriques , auxquels
on l'a associé. III. Ce génie entre-
prenant essaya de s'exercer dans l'é-
popée; il en commença plusieurs ;
mais il s'arrêta toujours après les pre-
miers efforts , et laissa imparfait tout
ce qu'il avait tenté. Ses Dui canti
di Marfisa , dédiés au marquis dcl
Vasto , furent suivis d'un 5^ chant,
et réimprimés ensemble à Venise eu
ARE
403
155"° ; mais d n'alla pas plus loin,
et l'on dit même que , mécontent de
ce qu'il avait fait , il exigea de son
libraire Marcoliui qu'il en lirûlàt trois
mille stances ou octaves , ce qui fe-
rait \ingt-quatre mille vers. Ses La-
grime d'Angelica, publiées en 1 558,
en restèrent aussi aux deux premiers
chants. Quoique Y Orlandino , qu'il
avait entrepris pour se moquer de
rOr/a/i^/o, fût plus conforme à sou
génie satirique , il s'arrêta de même à
la sixième octave du second chant ; et
il ne remit jamais la main à aucune
de ces trois ébauches. IV. Enfin , il
manquerait quelque chose à l'audace
de ses entreprises , s'il n'avait osé
faire une tragédie. Il l'osa , et , ce qu'il
y a de plus exti'aordiuaiie, c'est que
ce ne fut pas sans succès. Le sujet
qu'il traita est austère, c'est celui des
Horaces : il le traita, dans toute sou
austérité , un siècle avant le grand
Corneille ; il est , certainement , fort
au-dessous de ce grand homme, dans
ses trois premiers actes , quoique l'on
y voie une certaine fidélité historique,
une connaissance des mœurs et des
usages civils et religieux de l'ancienne
Rome , et un art de les mettre en
scène, qui ne sont point à mépriser ;
mais j'ai osé dire ailleurs , que , dans
les deux derniers actes , à ne parler
que du plan , il paraissait l'emporter
à son tour. La cause d'Horace, meur-
trier de sa sœur, y est plaidée par son
père , d'abord devant les décemvirs ,
qui le condamnent , ensuite devant
le peuple assemblé ; c'est le peuple
qui juge solennellement , et si l'auteur
n'avait pas gâté celte fin par quelques
inconvenances , et par l'intervention
d'un dieu dans une machine , qui lui
a paru le seul moyen de dénouer sa
pièce , il n'y aurait pas la moindre
comparaison à faire entre les deux
dénoîimeuts. Sa tragédie , telle qu'elle
4o6 ARE
est , est celui de tous ses ouvrages
qui étonne le plus , quand on connaît
tous les autres. La Fie de VArélin
a ete' écrite avec beaucoup de soin et
d'exactitude , par le savant Mazzu-
chelii , Padoue, 1741 , in-8^. Bois-
pre'aux en a publie', en i75o,in-i6,
un extrait plutôt qu'une traduction ,
où l'on trouve beaucoup de fautes ,
comme dans presque tout ce qui est
traduit de l'italien eu français. Ou
trouvera , peutrèti-e , cet article trop
long; mais on parle souvent de l'Aré-
tin, on le méprise beaucoup, et ou
le connaît peu; j'ai voulu , non qu'on
k méprisât moins , mais qu'où le
connût davantage , et que l'on joi-
gnît aussi l'appréciation de ce qu'il a
écrit de louable , à ce mépris qui lui
<st légitimement dû. G — e.
ARETIN. FoY. Guy.
ARÉTIUS ( Benédict), théologien
rt botaniste , né à Berne , au com-
raencemeut du seizième siècle. Etroi-
tement lié avec Conrard Gessner ,
surnommé le Pline de l'Allema-
gne , il fut aussi en correspondance
avec la plupart des savants et des
botanistes de sDn temps , et parti-
culièrement avec ceux de la Suisse.
Occupé surtout des plantes des Alpes,
il en a découvert et fait connaître en-
viron 4o , qui sont très-rares , et qu'il
a brièvement décrites. 11 en a introduit
plusieurs daus les jardins , à cause de
leur beauté , en indiquant la manière
de les conserver. Arétius a publié la
description de deux montagnes du bas
Symmenthal, dans le canton de Berne,
le Niescn et le Stokhorn , remar-
quables par leur hauteur et le grand
nombre de végétaux qui y croissent.
C'est un petit ouvrage , eu forme de
lettre, adressée à Pipériuus , sou com-
patriote et son ami ; elle est impri-
mée à la suite désœuvrés de Valéiius
Cordus , sous ce titre : Slokhornii et
ARE
Nessi Helvetiœ montium , et nos-
centium in eis stirpium descriptio.
impr. in operibus Fal. Cordi. Stras-
bourg, 1 56 1 .Conrard Gessner fîiit l'é-
loge d'Arétius , dans son Horius ger-
manicus , et dans plusieurs autres de
ses ouvrages , et il a nommé Aretia
une des plantes qu'il avait fait con-
naître le premier. Hallcr , et ensuite
Linné, ont conservé ce nom à la même
espèce , et l'ont donné au genre dont
elle fait partie ; c'est une trcs-pelite
plante de la famille des primulacées.
Arétius a mérité cet honneiu', quoi-
qu'il n'ait pas publié de grand ou-
vrage. Le petit nombie de plantes
qu'il a le piemier fait connaître, suffit
pour le placer parmi les fondateurs de
la botanique. Arétius a aussi publié
quelques ouvrages de théologie , et ,
entre autres, un Examende Théolo-
gie , qui a eu de nombreuses édi-
tions ; une Fie de l'hérésiarque Gen-
tilis , et des sermons. Enfin , embras-
sant à la fois tous les genres , il a
donné un catalogue des comètes cal-
culées jusqu'au temps où il vivait; des
commentaires sur Pindare, les tables
d'une grammaire hébraïtpie , etc.
D— P— s.
ARÉUS , fils d'Acrotalus, de la
première branche des rois de Sparte,
monta sur le trône après la mort de
Cléomènes 11, son grand-père, l'an
5t>9 avant J.-C. On ne connaît pas
l'histoire des premières années de son
règne; mais, vers l'an 283, Pyrrhus,
roi d'Épire, à l'iustigation de Cléo-
nvme, oncle d'Aréus , étant venu at-
taquer Lacédémonc , tandis qu'Aréus
était dans l'île de Crète , où il avait
été appelé par les Gortynicns, il revint
tandis qu'on se battait encore , et Pyr-
rhus fut repoussé; il alla ensuite au
secours des Athéniens , attaqués par
Antigone Gonatas, et il perdit la vie
daus uu combat contre ce priuce , aux
ARG
environs de Corintlie , i'an 268 avant
J.-C. Il eut pour successeur Acrotatus
son fils. C— R.
ARÉUS, mal nomme Arius, natif
d'Alexandrie, et philosophe pythago-
ricien, suivant l'opinion la plus com-
mune, fut un des maîtres d'Auguste,
et jouit , auprès de ce prince , d'une
telle faveur que, lors de son entrée à
Alexandrie , après la défaite d'Antoine
et de Géopâtre , Auguste parut au
théâtre ayant son maître à sa droite ,
s'entretenant familièrement avec lui ,
et déclara qu'une des causes pour les-
quelles il pardonnait aux habitants,
était son amitié pour Aréus. L'élo-
quence et la philosophie de ce der-
nier étaient si persuasives, qu'au rap-
port de Sénèquc , il contribua puis-
samment à consoler Livie de la moi't
de son époux. Aréus eut deux fils ,
Dcnys etNicanor. On a prétendu qu'il
fut lié d'amitié avec Dioscoridc , et que
ce dernier lui dédia ses livres sur la
matière médicale 5 mais le fait n'est
point certain. — 11 y eut un autre
Aréus , philosophe stoïcien , surnom-
mé Didime. D. L.
AREZZO ( François d' ). Foy.
AcCOLTietGuY.
ARFE ( Juan de) , sculpteur, né
à Séville , en i(îo3, commença par
étudier son art dans cette ville, et lit
ensuite le voyage d'Italie pour se per-
fectionner. De retour dans sa patrie,
il exécuta entre autres ouvrages re-
marquables les Statues en marbre , et
de 20 pieds de hauteur , des Evan-
gélistes et Docteurs , dans la chapelle
de communion de Séville. — Un autre
Juan de Arfe Villafano , né en 1 5^4 ,
à Léon , s'adonna tout à la fois à la
sculpture et à l'architecture. Il publia
un ouvrage curieux intitulé, Quila-
ladetj c'est-à-dire, l'Essayeur de
Vor, de Vargent et des pierres pré-
cieuses , Yalladoyid, 1 S-j 2 , Madrid,
ARG 407
139861 i6';8. Il mourut à Madrid,
en iSqS à 71 ans. D — t.
ARGAIZ ( Grégoire de ) , moine
espagnol de Tordre de S. Benoît,
vivait dans le 17^. siècle. Il pu-
blia, à Madrid, en 1667 , une ^15-
toire ecclésiastique de V Espagne ,
qu'il prétendait avoir tirée des écrits
de S. Grégoire, évèque de Grenade,
et de la Chronique de Haubert^ bé-
nédictin , et à laquelle i! donna le titre
suivant : Poblacion ecclesiastica de
Espana, y noticia de sus primeras
hcfuras, hallada en los escritos de S.
Gregorio obispo de Granada y en
el Cronicon de ffauberto^ etc., 'i vol.
in-fol. Pour accréditer sa fraude pieuse ,
il dédia cet ouvrage à la majesté su-
prême et souveraine de Dieu ; mais les
savants ne furent pas dupes de celte
su]»ercherie , et Garcia de Molina con-
vainquit bientôt Argaiz d'avoir forgé
les prétendus manuscrits de S. Gré-
goire, ainsi que celui de Haubert , et d'a-
voir puisé dans son imagination seule
les détails de son histoire. D — G.
ARGELLATI ( Philippe ), l'un des
plus laborieux écrivains et des plus
savants litléraieurs de son temps ,
naquit vers la fin de l'année i685, à
Bologne, d'une des plus anciennes fa-
milles de celte ville ; mais qui ét.ùt
originaire de Florence. Apres avoir
fait ses premières études dans sa pa-
trie, il se rendit à Florence, oîi il se
lia avec les divers savants de cette
ville, et en particulier avec le célèbre
Antonio Magliabecchi. De Florence ,
il passa h Lucqties , ensuite à Livourne,
où il avait dessein de s'embarquer pouc
venir en France ; mais la mort d'un de
ses oncles le força de retourner dans
sa pat ic. Ce fut alors qu'il entreprit de
publier les ouvrages , tant inédits que
déjà imprimés, d'Ulysse Aldrovandi,
avec des additions, des observations ,
et des correclious. U s'associa pour
4oS A R G
ce 2;raud travail , plusieurs professeurs
avantageusement connus dans les dif-
férentes parties des sciences ; mais le
plus grand nombre de ces savants
étant morts successivement en peu
d'années , il lui fallut renoncer à l'en-
treprise. Il ne tarda pas à en former
d'autres. Il publia d'abord le Recueil
des poe'sics de Carlantonio Hedori ,
gentilhomme bolonais, Bologne, !■] i5,
in-4". Deux ans après , s'e'tant trouve
à Bologne l'un des magistrats qui por-
taient le titre de tribuns du peuple, il
adressa , en sortant de charge , un
discours éloquent aux ti-ibuns ses suc-
cesseurs, sur les devoirs qu'ils avaient
à reraphr. Ce discours eut un si grand
succès, que le tribunal même ordonna
qu'il fût transcrit dans ses actes. La
plus importante des entreprises d'Ar-
(fcUati, futrcLlition du grand Recueil ,
devenu si cc'ièbre sous le titre de Scrip-
iores Berum Italicarum. JjC savant
Ivlnratcri lui avant fait part du dessein
qu'il avait forme de rassembler et de
publier ces anciens écrivains de l'his-
toire d'Italie, lui avoua qu'il e'iait ar-
rête' dans son projet par l'impossibilité'
où l'on était alors de trouver en Italie
une imprimerie capable de i'cxc'cuter ;
en effet on y avait laisse de'choir de
la manière la plus dc'plorable , cet art
où l'Italie s'était preVedeniment acquis
tant de gloire, Argellati jugea que l'en-
treprise ne pouvait réussir qu'a Milan.
11 s'y transporta aussitôt, communi-
qua le dessein do ^ïuratori au comte
(Charles Archinto , protecteur des let-
îrcs , et sou protecteur particulier.
Archinto réunit une société de nobles
Milanais qui prit le litre de Société
palatine , et qui s'engagea , de con-
cert a\ec lui , à suppléer aux frais de
J'cdilion. Il y en eut jusqu'à seize qui
lournireut chacun qu.itre mille écus.
Argellati se donna tous les soins né-
vcssaires pour rétablissement d'une
ARG
magnifique impiiniciie. Le premier
ouvrage qui en sortit fui ce pré.ieux et
volumineux recueil. Argellati y eut
beaucoup de part ; ce fut lui qui ras-
sembla et qui fournit à Muratori le plus
grand nombre des manuscrits et des
notices pour les premiers volumes , et
qui en rédigea les dédicaces , dont la
plupart portent son nom. Il ne laissait
pas de conduire en même temps d'au-
tres impressions. La ])lus remarqua-
ble est celle des œuvres de Sigouius,
in JEdibus palatinis , achevée en
1758, en 6 vol. in-fol. L'empereur
Charles VI, à qui il la dédia, et qui
l'avait déjà récompensé de la dédicace
du premier volume des Ecrivains de
V Histoire d' Italie, en lui accordant
le titre de son secrétaire et une pen-
sion de trois cents écns, doubla alors
cette pension. Argellati continua de
pubher, avec une activité inlàtigable,
dincrenics éditions d'ouvrages iinpoi-
tants pour les lettres. Les principales
sont : le Opère inedile di Ludovico
Castelvetro, 1727 , in -4'.; le Traité
du P. Pietro Grazioli , harnabite , Di;
antiqids Mediolani œdijiciis, 1736,
in - fol. ; Thésaurus novus veteriiin
inscriptionwn , de Muratori , I75(),
in-fol. Les réimpressions faites à Mi-
lan de l'ouvrage du P. Martcnne, Do
anti/fuis ecclesiiP ritiùiis, des Trans-
actions philosophiques , du Recueil
de Dissertations de divers auteurs ,
Milan, i7 5o,Z>e Monetis Italiœ ,
et plusieurs autres. On a de plus de
ce laborieux écrivain : ï. Bibliolheca
scriptorum Mediolanensium , Milan ,
1745, OL vol. in-fol.; II. Biblioîeca
de Fol^arizzalori Italiam , INIi-
lan , 5 vol. 111-4". ? pi''>l'ês en 1 7G7 ,
et un grand nombre de Dissertations
ou de Lettres éparscs dans diffé-
rents recueils, Argellati mourut à Mi-
lan , le 5 janvier 1735, après avoir
eu le chagrin do perdre sou fils Frau-
ARG
çois , qui est l'objet de rarliclc sui-
vant. Cl — É.
AetGFXLATI (François), fils du
pre'cedcsît, naquit à Bologne, le 8
mai n I Ci. 11 se livra d'abord à i'c'tude
de la philosophie et des lois , et fut
reçu docteur eu droit à Padoue, en
i^Sf). S'e'tant ensuite applique' aux
mathématiques , et spécialement au
gc'uierailitaire, il fut nomme', en 1740,
ingénieur de S. M. C. Il joignit ta ces
liantes sciences le goût des lettres la-
tines et italiennes. L'exemple de son
père l'engageait à les cultiver. Il vécut
presque toujours avec lui , soit à IVFi-
lan, soit à Bologne, et mourut quelques
mois avant lui à Bologne , en l'y 54.
François Argellali a pnbUé: l.Pratica
del foro Fenelo ^ Venise , 1737 ,
in-4'. ; II. Une traduction italienne
de l'ouvrage du savant Huet, de la
silnatioTidu Paradis terrestre, i 737,
in-8'. ; \ll. Saggio d^una nuova ji-
losofia, Venise, 1740, in-8''.; IV.
Storia délia nascilà délie scienze
e h Aie leltere, etc. , Florence, 174^,
iu-8". Cet ouvrage devait être com-
pose de douze volumes , mais le pre-
mier seul a paru. V. De prœclaris
Jiirisconsullis Bononicns ibus Oratio,
etc. , 1 749 j iu-4°- 1 S'Tis nom de ville ;
mais le discours est suivi d'une lettre
latine de Philippe Argeliati , père de
l'auteur , qui est datée de Milan.
VI. Il Decamerone , Bologne , 1 75 1 ,
2 vol. in-S". Ce Décaméron, fait à l'imi-
tation de celui de Boccace, contient
de même cent nouvelles partagées en
dix journées. Les sujets en sont tirés
de quelques faits extraordinaires rap-
portés dans les Transactions philnso-
jjhiques d' Angleterre, ou dans les re-
lations de quelques voyageurs : on y
voit aussi des bons mots, des histo-
riettes curieuses ou galantes , mais oîi
les mœurs sont toujours respectées.
VU, Novissimo sistema di Jilosofia
ARG 4or)
alla Capuccina. a van'aggio di cld
non pub interternersi in lunghc ap-
plicazioni a qiiesto studio , Modène,
1 755 , in-8°. 11 avait aussi écrit la vie
de Jean Gaston , grand-duc de Tos-
cane , et celle d'une sainte religieuse
du tiers ordre de saint François ; mais
ces deux ouvrages n'ont point vu le
jom'. G — E.
A RGEN S ( Jean -Baptiste de
BoYER, marquis d' ) , naquit , le ^4 i"in
1 704 , à Aix en Provence. Son père ,
procureur - général au parlement de
cette ville , le destinait à la magis-
trature; mais l'état militaire convenait
mieux à ses goîits , et il y entra des
l'âge de quinze aus. Ses amours avec
la belle Sylvie, dont il fait le récit
dans ses Mémoires , lui firent quit-
ter le service et la France, pour aller
épouser cette comédienne en Espagne.
Arrêté à la demande d'un ami de sa
famille , avant d'avoir pu exécuter son
projet , il fut ramené en Provence ,
et bientôt envoyé à Constautinople
avec l'ambassadeur de France. Son
séjour dans les pays musulmans fut
marqué par plusieurs aventures folles
et plaisantes, qui auraient pu lui coû-
ter la vie. De retour en France, il
voulut suivre le barreau pour com-
plaire à sa famille ; mais de nouvelles
liaisons avec des actrices l'enlcvèrenl
encore à ce grave métier , et il finit
par reprendre celui des armes, il fut
blessé, en 1754, a« siège de Kelh ;
et, après celui de PhiHsbourg , il fit
une chute de cheval , qui le mit hors
d'état d'y remonter jamais , et dans
l'obligition d'abandonner le service.
Déshériîé par siiu père, il se fit écri-
vain pour vivre , et passa en Hol-
lande, afin d'écrire plus librement.
Ce fut là qu'il composa ses Lettres
juives, chinoises , et cabalistiques.
Frédéric II, qui n'était encore que
prince royal , désira en connaître Y ira
4 1 o A R G
leur , et se l'attacher. D'Argens ré-
pondit qu'avec sa taille de cinq pieds
sept pouces , il y aurait du danger
pour lui à passer près de Frédéric-
Guillaume. Ce roi-caporal étant mort,
son Gis écrivit à d'Argens de ne plus
craindre les bataillons des gardes , et
de venir les braver jusque dans Post-
dam. Il s'y rendit, l'ut fort bien ac-
cueilli, et, après quelque temps d'in-
certitude sur son sort , reçut la clef
de chambellan , 6000 liv. de pension ,
et la place de dirccteiu'-général des
belles-lettres de l'académie. 11 était
des soupers et de la société habituelle
du roi, qui paraissait le préférer à
beaucoup d'autres , à cause de sa
bonhomie et de sa conduite toul-à-
fail exempte d'intrigue et de tracasse-
vie , mais qui ne l'en épargnait jias
davantage dans ses plaisanteries , et
lui jouait même nombre de tours ma-
lins , auxquels il donnait lieu par
ses manies hypoconcbi.iques. Pjes(|ue
sexagénaire, il devint amoureux d'une
comédienne, nommée Cochois, et l'é-
pousa à l'iusu de. Frédéric , qui ne
l'apprit pas sans beaucoup d'humeur,
et en conserva toujours du ressenti-
ment. Après la guerre de sept ans,
étant allé voir sa famille en Provence
pour la seconde fois , depuis sou éta-
blissement en Prusse, Frédéric ima-
gina de composer sous le nom de Vé-
vêqiie d\4ix , et de f>iire répandre sur
la route du marquis un mandement
où il était signalé et excommunié com-
jne impie. Cet écrit lui donna d'abord
de vives alarmes ; heureusement , il
découvrit la ruse, au titre diévéque
d'Aix , que Frédéric, par mégarde,
.'ivait employé à la place de celui
à! archevêque. r\etourné en Prusse, il
«'Ut plus que jamais à souffrir de l'hu-
meur caustique du roi- il demanda
la permission de faire un troisième
voyage eu Provence j elle lui fut d'a-
ARG
bord refusée , puis accordée pour sis:
mois seulement. 11 retournait auprès
du roi , lorsqu'il tomba malade à
Boiug en Bresse : le roi , qui se crut
joué, se livra à des emportements in-
dignes de lui. D'ArgeiiS , se regardant
comme dégagé de sa promesse, reprit
le chemin de la Provence, où il passa
environ deux ans dans un petit bien
que lui avait donné l'un de ses frères,
trop généreux pour ne pas enfreiridre
en sa faveur l'acte d'exhérédation. II
mourut le i i janvier 177 i , dans sa
soixante-huitième année , après avoir
manifesté des sentiments , et même
exercé des pratiques de dévotion que
sa vie et ses écrits ne faisaient point
attendre de lui. Frédéric lui fit éle-
ver un mausolée dans l'église des Mi-
nimes d'Aix. Ses ouvrages sont : I.
Lettres juives , 1754,8 vol. in- 1 2 ;
II. Lettres chinoises, 1735, 6 vol.
in-i'2 ; III. Lettres cabalistiques ,
1 769, 7 vol. in-i 2 ; IV. Philosophie
du bon sens, 1768, 3 vol. in-r,i ;
V. Mémoires du marquis de Mire-
mon , ou le Philosophe solitaire^
1756, I vol. in-12; VI. Nouveaux
Mémoires du comte de Bonneval ,
publiés sous le ni m de Mirone, i 717,
4 vol. in- r2 ; VII. Mémoires du
chevalier de ***, 1745 , 'i vol.
in-8 '. ; VIII. Mémoires du comte de
Vaxère , ou le faux Rabbin, i 707 ,
I vol. in-i:i ; IX. Mentor cavalier ,
1 750 , I vol. in- 12 ; X. Nonnes ca-
lantes, omV Jmour embéç^uiné, 1 7 'jQ,
i vol. in- !•.>.; XI. Discours de l'em-
pereur Julien contre les cJiréiiens ,
nouvelle édition , avec des notes de
Voltaire, 17G8, i vol. in-8 ; XII.
Songes philosophiques, 174<>? ' '^f*'-
in- 1 -i ; XIII. Triomphe de la f'ertu ,
ou T\\rages sur mer et Aventures
de la comtesse de Bressol , i']\i ,,
5 vol. in- 1 '.i ; XIV. Ocellus lucanus^
traduit, x vol ja-12; XV. Timée de
ARG
Locres, lrac]n[l,\ vol. iu-ia;XVI. Ré-
flexions critiques sur les différentes
Ecoles de peinture , 1750, in-12;
XVII. Mémoires secrets delà Répu-
blique des Lettres, 1 7 44 ? 7 '^'- "^" ' ^ '■>
XVIII. Lettres philosophiques et
critiques , par M""". Cochois , avecles
Réponses de M. d'Argens, 1744 j *
vol. in- 12; XIX, Mémoires du
marquis d'Argens, nouvelle édition,
1807, I vol. in -8°. Ces nombreux
ouvrages, fruit d'une philosophie au-
dacieuse que ne contenait ni la crainte
de l'autorité' , ni celle des jugements
publics , ont joui assez long -temps
d'une sorte de vogue qui a fait piace
au dédain, et même à l'oubli. L'ins-
truction y est grande et variée, mais
emjiioyée avec trop peu de goût , de
critique et de bonne fui ; les rappro-
chements y sont quelquefois ingé-
nieux , mais beaucoup plus souvent
bizarres; le style en est facile, mais
diffus , chargé de néologismes, et en
géiiéra! entaché de tous les défauts
qu'entraîne l'habitude d'écrire vite et
beaucoup , dégénérée en métier ou eu
manie. — Son frère , chevalier de
Malte, a publié des Réflexions sur le
dei>oir et Vétat des chevaliers de son
ordre. A — g — r.
ARGENSOLA. 11 y a eu deux
poètes espagnols de ce nom. Ils étaient
frères et naquirent à Balbastro , eu
Aragon , d'une famille originaire de
Ravennes. Leurs poésies, recueillies
par Gabriel-Léonard d'Albion, et Ar-
geusola , fîis de Lupercio , ont été
imprimées sous ce titre : Rimas de
Lupercio, i del doctor Rarlolome
Leonardo de Argensola , Sarago-
ce, 1654, in -4". Antonio ( Nicolas )
vante beaucoup leurs poésies , et d'a-
près lui , Baillet et Feutry ont dit
qu'ils étaient les Horace de l'Espagne.
Antonio ajoute « que la parfaite les-
» scmblance de leur talent les a faits
ARG
4rr
» prendre par leurs compatriotes pour
» des jumeaux d'Apollon et de quel-
» que Muse. » Lupercio ou Lobergo-
Leonardo d'Argeusola , né vers 1 565 ,
fut gentilhomme de la chambre du
cardinal Albert d'Autriche, sccrctaire
de l'impératrice Marie d'Autriche, se-
crétaire-d'état et de la guerre sous le
comte de Lemos , vice-roi de Naples,
où il alla en 1 6 1 t . 11 y contribua à
la foudatiou de ^^ Académie des Oi-
sifs, Pi mouiut en 161 5. Il avait
composé trois tragédies : Isabelle ,
Philis , et Alexandre. — Barthélemi
Léonard d'Argeusola, né eu i566,
successivement chanoine de l'église
métropolitaine de Saragoce , chape-
lain de rimjiéra'rice Marie d'Autriche,
et recteur de Villa-Hermosa, accom-
pagna son frère à Naples ; et, jiprès
l'avoir perdu , voyagea quelque temps ,
revint à Naples , fut nommé historia-
graphe d'Aragon, vint s'établir à Sa-
ragoce, et y mourut le 26 février
i65i. Outre ses poésies recueillies
avec celles de son frère , on a de lui :
I. Conquista de las islas Molucas,
IMadrid, 1609, in-folio : traduit en
français sous le titre ^Histoire de la
conquête des îles Moluques , Amster-
dam, 1706, ou 1707, 5 vol. in-12;
II. Primera parte de los anales de
Aragon que prosigue los de Zurita ,
Saragoce, i63o,in-fol. Cette pre-
mière partie est la seule qui ait paru;
ainsi que le titre l'annonce , c'est une
des continuations des Annales d'A-
ragon, par Zurita {Voy. Zurita).
III. Quelques Opuscules qui ne mé-
Titenl pas d'être mentionnés. A. B — T.
ARGENSON. f^oy. Le Voyer,
ARGENTAL (Charles- Augustin
DE Ferriol, comte d'), né à Paris,
le 20 décembre 1700, était fils de
M. de Ferriol , président au parle-
ment de Metz , frère de Pont - de-
Ycyîc, l'auteur du Complaisant, et
4i2 ARG
neveu de la fameuse M"'*. doTencin.
Destiné à l'état militaire , il accepta ,
par déférence pour ses parents, une
charge de conseiller au parlement de
Paris , à laquelle son frère avait re-
noncé. Ayant cédé cette charge après
quarante ans d'exercice , ii fut nommé
iiiinislre du duc de Parme, auprès du
roi de France. Il mourut le 5 janvier
1 7S8, âgé de ([uatre- vingt- huit ans.
Dans sa jeunesse, il avait été éper-
duement amoureux de la célèbre ac-
trice Lecouvreur. Une passion d'un
autre genre , non moins forte , et beau-
coup plus longue, fut celle qu'il eut
]>our Voltaire : elle avait commencé au
collège, et elle ne finit qu'au tom-
beau. « Son admiration pour Voltaire,
•-) a dit La Harpe , était ua sentiment
w vrai , et saus aucune ostentation ,
» il adorait ses talents , comme il ai-
» mait sa personne, avec la plus grande
5) sincérité. 11 jouissait véritablement
» de ses confidences et de ses succès :
» il n'en était pas vain; il en était hcu-
■» reux , et de si bonne foi , que tous
« ceux qui le voyaient , lui savaient
» gré de son bonheur. » Marmoutel,
dans ses Mémoires , le représente
comme un gobe-mouche , une espèce
d'imbécille qui ne savait ni avoir ni
exprimer une opinion. Il est difficile
d'adopter celle-ci sur le compte d'un
horan>e que, pendant soixante -dix
ans , Voltaire consulta docilement sur
tous ses ouvrages. 11 lui est échappé
un petit nombre de vers , qui ne man-
quent ni de sentiment ni de grâce. Le
jour même de sa mort , il en adressa
d'assez jolis à une de ses plus ancien-
nes amies. S'il en faut croire le témoi-
gnage de cette dame , il est le véritable
auteur du Comte de Comminge , que
ÎM'"^. de Toncin publia comme son
Ouvrage.On dit encore qu'on a trouvé
dans ses papiers p'.usieuis pages dos
yinecdoles de la cour d'Edouard,
ARG
autre roman de sa tante, entièrement
écrites et raturées de sa main.
ARGENTI, ou ARIENTI ( Au-
GUSTiîv ), noble Ferrarais et poète ita-
lien , florissait vers le milieu du 16".
siècle; il fut jurisconsulte de profes-
sion , et particulièrement protégé du
cardinal Louis d'Est, Il mourut le 20
août iS^ô. Ce poète est un des pre-
miers qui aient écrit des pièces de théâ-
tre dans le genre pastoral ( favole
pastorali). 11 en composa une en vers
libres ( sciolii ), intitulée : lo Sforlu-
ncitOyfui'oIa pastorale, Venise, 1 56H,
in-4". , et la dédia au cardinal d'Est ,
son protecteur. Cette pièce fut repré-
sentée à Ferrare , au mois de mai ,
1 567, avec le plus grand succès. Dans
le prologue qui la précède, Aigenti
affirme que ce fut la premièie pasto-
rale composée en italien , et qu'il l'a-
vait écrite dans sa jeunesse ; elle est
divisée en cinq actes, sans chœurs,
et avec neuf interlocuteurs. On a en-
core d'Argenti : Cavallerie di Fer-
rara , ouvrage dans lequel il décrit
les fêtes publiques et les spectacles
donnés à la cour des ducs de Fer-
rare. G — E.
ARGENTI ( BoRso ) , frère du pré-
cédent, né à Ferrare, comme lui , se
livra aussi d'abord à la profession des
lois. 11 prit ensuite l'étal ecclésiasti-
que , et fut fiit archi-prêlre de la ca-
thédrale de Ferrare. Envoyé à Rome,
pour les alTiires de son chapitre , il y
mourut en i594' '-'«' poésie italienne
était pour lui un délassement. Ou
trouve uu essai de ses t^dents dans le
Rime scelle de' poeti Ferraresi. On
lui doit une comédie en prose : la
Prigione , Fi>rrare, i58o , in-8"., et
Venise , 1587 , in-12 , qui est re-
gardée comme l'une des meilleures de
ce temps - là. G — e.
ARGENTIER (Jean) , médecin.
ARG
naquit à Qiiiers, ville de Pie'monî,
en 1 5 j 5. Des dispositions naturelles
qu'il cultiva avec ardeur , le firent
triompher des obstacles que dut ap-
porter à sa profession le peu de for-
tune de ses parents. En 1 539 ; *' eom-
meuça à exercer la rae'deciue à Lyon ,
où il avait ete attire' par son frère
aîné , Bartliélcnii , médecin comr;ie
lui ; il y resta cinq ans , et en 1 545 ,
passa à Anvers , puis en Italie ; il
ens(.'ip;na avec succès à Naples , à Pise
et à Turin , où il se fixa , et épousa
?/îarguerite Broglio , sœur de l'arche-
vêque de cette ville. Il y mourut, en
iS'ju, âgé de cinquante - neuf ans.
Argentier avait reçu de la nature nu
génie actif , mais qu'il ne sut pas di-
riger ; il acquit de vasies connaissan-
ces dans les diverses théories qui se
sont succédées dans la médecine; il
savait en débrouiller le chaos ; mais
entièrement occupé de cette étude cri-
tique, qu'on pourrait appeler l'élude
des médecins , plutôt que celle de la
médecine, il n'acquit nullement la con-
naissance des mouvements que pré-
sente la nature malade , l'observation
des lois qu'elle suit alors, ni enfin ce
tact et cette expérience qui doivent
diriger dans les applications, 11 se fit
remarquer par les préventions les
plus injustes contre Galien , et il y
revient sans cesse dans ses nombreux
écrits , imprimés séparément en diffé-
rents temps, qu'on a réunis plusieurs
fois après sa mort, et dont l'édision
la plus complète est celle de Hanovre,
iu-fol. , lOio. II faut joindre à ce
volume I e traité de £'n'ortZ'«5 veterum
medicoruni, Florence, i555 , in-fol.
C. et A— N.
ARGENTRÉ ( Bertrand d' ) , né
à Vitré, en iSip , fut pourvu de la
place de sénéchal de Rennes, que son
père, l'un des hommes les plus ins-
truits as so» temps, avait occupée;
ARG 4i5
et , suivant l'expression de Dumou-
lin, fut un des plus beaux ornements
de cette famille , distinguée par sou
rang et les talents qui y semblaient
héréditaires. A la prière des états de
Bretagne, il entreprit d'écrire l'his-
toire de cette province, et son ou-
vrage fut publié à Rennes, eu rSSi,
in-fol. , et à Paris, en 1 588. Cette
histoire écrite dans le style du temps,
et dépourvue d'une saine critique , a
beaucoup perdu de sa réputation.
Quoique d'Argentré ait pris Pierre Le
Baud pour guide, et qu'il l'ait copié,
même dans ses erreurs , il n'a pas
laissé de l'abandonner en plusieurs
endroits , et souvent pour s'égarer en-
coie davantage. Le Baud s'était ar-
rêté au duc François 11 ; d'Argentré
a donnéle règne de ce ]u-ince , et celui
de sa fille Anne de Bretagne. Celte
partie de son travail est une des plus
défectueuses ; il a négligé la recherche
de beaucoup de pièces utiles , et n'a
pas su toujours faire un bon emploi
de celles qu'il avait entre les mains.
D'Argentré a aussi publié des com-
mentaires sur la Coutume de Bre-
tagne ^ dont Dumoulin parle avec
éloge. Il avait achevé divers autres
ouvrages qu'il n'eut pas le temps de
publier. Les ligueurs , qui étaient par-
venus à s'introduire dans lieimes , en
furent bientôt chassés ( 1 589' ; mais le
parti du roi qui redoutait leurs nou-
velles entreprises , fit sortir de la ville
les gens suspects. Bertrand d'Argentré
fut du nombre des bannis , et cette
rigueur abrégea ses jours. Il mou-
rut, le 1 5 janvier 1 590 , à l'âge de 7 1
ans. Son corps fut apporté à Rennes ,
et inhumé dans l'église des cordeliers.
Le mauvais goût et la crédulité qu'eu
reproche a d'Argentré , tiennent k
l'époqiie à laquelle il a vécu. Ce qui lui
appartient , à plus juste titre , c'est la
géjiérosiîé de caractè/e, et les pria-
4i4 ARG
cipes cle probité dont il ne se dé-
partit jamais. S'il piofita du travail
de ses devanciers , il a mérite, à sou
tour, d'être lu -t même consulté par
ceux: qui ont érrit , après lui, sur
l'histoire de Bretagne. La collectiou
des ouvrages de d'Argentré a été pu-
bliée en 160H et 1612. — Son fils
(CJiarles d'Argentre de la Bois-
siÈre ), président au parlement, fit
de nombreuses corrections à l'His-
toire de Bretagne, et en publia une
nouvelle édition, à Paris, en 1612,
un vol. in-fol. : cet ouvrage , ainsi
revu et corrigé , a été réimprimé , à
Paris, en 1 6 1 8 , et à Rennes , eu i G68.
D. N - L.
ARGENTRÉ (Chaules Duplessis
d' ) , évèque de Tuile , fils du doyen
de la noblesse de Bretagne , naquit ,
le iG mai iG-jS , au cliâteau du
Plessis, paroisse d'Argentré, au dio-
cèse de Reunes. Il se distingua pen-
dant sa licence , fut docteur de Sor-
bonne en 1700, aumônier du roi en
1 709 , et le premic r à qui l'on contera
gratuitement celte charge, évèque de
Tulh; en l'j^'5. Ce savant prélat fai-
sait ses délices de l'élude de la théo-
logie, et y employait tous les moments
que les fonctions de l'épiscopat , ([u'il
remplissait fidèlement, lui laissaient.
Ou a de lui : I. des notes latines sur
VAnalyse de la Foi, de Holden,
Paris, 1G98; II. -apologie de Va-
mour qui nous' fait désirer de pos-
séder Dieu seul , par le motif de
trouver notre bonheur dans sa con-
naissance et son amour , avec des
remarques sur les maximes et les
principes de M. de Fénélon, Amst.,
1698, iu-8'\; III. Traité de l'É-
glise , Lvon , 1G98 , 2 vol. in 12 ;
IV. Elementa theolo^iœ , etc. , Paris,
170'., in-4" , suivis, en 1705 , d'un
u4ppendix à cet ouvrage , pour s'ex-
])liqucr sur quelques sentiments par-
ARG
ticulii^rs qu'on lui avait reprocliés ;
Y . Lexiconphilosophicum , la Haye,
1706, in-4"'.; ^ I- ^^ proprid ra-
tione qud res supernalurales à rehus
naiuralibus difjerunt , Paris, i'"07,
iu-4°.; Vil. Martini Grandini opé-
ra, Paris, 1710, 6 vol. in-8°., où
il inséra plusif^urs de ses ouvrages ;
VIII. Colleciio judiciorum de novis
errorihus , 1726 , 1755 et 17 5G, 5
A'ol. in-fol. Ce recueil renferme nu
giand nombre de pièces importantes ,
cuiieuses ,et dont la plupart n'avaient
pas encore été imprimées ; IX. Re-
marques sur la traduction de l'E-
criture-Sainte de Sacy , in-4". ; X.
Instruction pastorale sur la juri-
diction qui appartient à la hiérar-
chie de l'Eglise , i 75t , in-4 -7 XF.
Dissertation pour expliquer en quel
sens on peut dire qu'un Jugement de
l'Eglise , qui condamne plusieurs
propositions de quelque écrit dog-
matique, est une règle de foi, Tulle,
1735, in-i2, supprimée par arrêt
du conseil; XII. plusieurs- livres de
piété. Ce prélat était sur le point de
mettre sous presse : Theologia de
divinis litteris expressa , lorsqu'il
mourut dans son diocèse, le 27 oct.
1740. T — D.
ARGENVILLE. Foj. Dezallier.
ARGHOUN , fils d"'Holakoù . fut
choisi , d'un commun accord , par tous
les grands de l'empire Mogol de
Perse , pour succéder à son oncle
Ahmed , nommé aussi Tengddr; il
monta sur le trône de la dynastie
llkhanyenne régnante à Tauryz , le
27 du mois de djomàdy 2"., G85 de
l'hégire (11 août 1284J, suivant le
Hhabyh dl - Séir de Khondemyr.
Aboul-Féda place le même événement
au mois de djomadv i".,G82^août
1285 . Fait prisouuier et gardé se-
crètement par son oncle Abacà-Kliàn,
il ne dut la yie qu'à la haine et au
ARG
tncpris qu'inspirait ce lâche et timide
usurpateur, ]1 avait ordonne de faire
périr Arghouu ', mais les officiers
charge's de cet ordre profitèrent de
l'absence d'Abacâ pour rendre la li-
berté' au prisonnier. Celui-ci eut bien-
tôt réuni un gros de mécontents. Il se
mit à la poursuite de l'usurpateur, le
prit , et fut aussitôt salué empereur
j)ar toute l'armée. Arglioun signala son
avènement par un acte de perfidie
atroce bien digue d'un Mogol. Le pré-
sident du dyvàn , sous le règne précé-
dent, avait cru devoir se soustraire par
la fuite au ressentiment du nouveau
monarque. 11 avait passé d'Ispalhàn à
Cliyràz, et de là à Hormouz ( Orraus ) ,
drins l'intention de s'embarquer pour
l'Inde , lorsque les protestations les
plus rassurantes d'Arghouu l'engagè-
rent à revenir sur ses pas. Il fut mis
à mort le 4 chaàbàn de la même année.
Les immenses biens qu'il possédait
dans l'Irâc et dans l'Azeibaidjàn , fu-
rent confisqués au profit du trésor
impérial. Un Mogol, nommé Boucà ,
succéda au pi'oscrit dans la place de
président du conseil, et subjugua son
faible souverain , au point d'être bien-
tôt déclaré premier ministre, et d'exer-
cer réellement l'autorité suprême. 11
reçut, de son maître le titre de djeiih-
sének (l'invincible), et, parmi un grand
nombre de prérogatives , celles de
commettre impunément neuf fois le
même crime , et de n'avoir jamais
d'autre juge que le monarque. «Enfin ,
» dit Khondémyr , Arglioun ne garda
» que le titre de roi. » Boucà se con-
duisit envers le peuple avec une
équité vraiment remarquable. Les
honneurs dont il était environné , et
l'absolu pouvoir , l'enivrèrent au point
qu'il aspira à la couronne, et forma le
projet de renverser sou bienfaiteur
pour occuper sa place. Peut-être aussi
I4 jaiousiç des grands et les ijitrigues
A Ë G 4 1 5
d'un médecin juif, autrefois cricur
public , et nommé Saàd êd-Dau!ah ,
contribuèrent -elles à la chute de ce
favori. Au reste, il fut Uvré par ses
propres officiers, et périt en l'an 6qo.
Sa chute entraîna la perte de tous ses
parents et de ceux qui avaient suivi sa
fortune. Il eut pour successeur dans
sa place, et surtout dans la faveur du
souverain, ce juif dont nous venons
de parler; les soins qu'il donna à Ar-
glioun , dans une maladie assez grave,
assurèrent sa fortune ; mais il ne de-
vait pas s'attendre à un sort plus heu-
reux que celui du favori qu'il avait
renversé et supplanté. Aussitôt après
son élévation , il distribua les gou-
vernements de Baghdàd, de l'Azer-
bàïdjàn , du Farsistân , à Fakhr êd-
Daulah son frère , « l'égal de Platon
pour la sagesse,» à Cliems êd-Dau-
lah et à plusieurs de ses parents , et ,
quoique le monarque eût confié le
gouvernement du Khoràçân et de la
Homélie à ses fils Ghazàn et Kaï-
Khàtou , le nouveau ministre eut l'au-
dace de les destituer et de les rem-
placer par deux de ses parents. Au
reste, il faut convenir que jamais le
royaume n'avait été aussi florissant
et le peuple aussi heureux que sous
le ministère de Saàd êd-Daulah. Les
grands et les généraux n'osaient com-
mettre aucune injustice , aucune es-
pèce de vexations envers les cultiva-
teurs et autres sujets non militaires.
Cet état heureux dura deux ans ,
c'est-à-dire, autant que l'administra-
tion de ce favori ; et ce temps lui suffit
pour amasser, dans le trésor public,
une somme de deux mille tomans
d'or. Chéri des peuples comme de son
prince, le ministre affecta peut-être
trop de familiarité , et voulut tenir les
grands à une excessive distance. Ceux-
ci , profondément indignés , saisis-
saieut ayec empressement toutes les
4i6 ARG
occasions qui leur paraissaient favo-
rables pour perdre l'odieux ministre
qui les reprisait trop pour les crain-
dre, et pour s'imposer la plus légère
circonspection. Un jour qu'il jouait au
trictrac avec le nionarque , irrité d'a-
voir battu à faux, il jeta les dés à
à terre. Un grand, qui éiait présent ,
releva vivement cet acte d'insolence ,
mais le ministre obtint aisément son
pardon. L'audace de Saàd êd-Daulali,
croissait avec sa fortune. Les musul-
mans furent exclus du dyvàn et sup-
plantés par les juifs et par les chrétiens;
on parla deproiitnerla Kaàbah,etd'cn
faire un temple d'idoles : d'autres actes
arbitraires, dont l'énumération ser;)it
])e.ucouj) trop longue, provoquèrent
•le mécontentement des grands. Une
maladie grave menaça les jours d'Ar-
giioun et favorisa les projets des cons-
j)irateurs. Us s'assemblèrent chez un
des principaux nobles, décoré, chez les
Mogols , du titre de Néi'jdn , et s'é-
tant parfaitement concertés, « ils com-
3> mencèrent par s'emparer des affi-
1) dés et intimes amis de Saàd êd-Dau-
» lah; on les envoya dans l'autre
» monde ; le lendemain , on se saisit
n de Saàd èd-Daulab lui même , et lui
» avant fait boire le sorbet de la dcs-
» truclion dans l'onde d'un cimeterre
» flambovant, on l'expédia pour le
» feu. » Les Mogolset les musulmans
furent dans le ravissement ; tout le
monde se livra aux plus vifs trans-
ports de joie. Arglioun , qui était faible
et languissant, demanda plusieurs fuis
son favori, et fut très-inquiet de ne
plus le voir paraître. On ignore si c'est
le chagrin que lui donna cette catas-
trophe, quand il en fut instruit, ou
quelque cause encore plus active, qui
le conduisit au tombeau ; il mourut le
mardi 'jt^ de rabyi i"., l'an 690 ( du
2 au 5 avril 1291 ), laissant quatre
fils , l'un nomme Ghazàji - Khàn )
A?,G
sa mère s'appelait Cotluc Eïkàhy ^
Içoun - Tymour, Oldjàïtou -Sullliàn ,
tous deux fils de Oudouk-Khàloun,
mère de l'érnyr Eirendiyz - Khataïs
Oghoul, fils d« ColluC'Khàtouu, fille
de Cotluc-Boucà. Parmi ces quatre
princes , deux , savoir : Gliazàn-Khân
tt Oldjàïtou, montèrent sur le tiône.
L— s.
ARGILLATA, ou DE ARGEL-
LAÏA ( PiEBRE de), médecin bolo-
nais , y prcjfessa long-temps la logi-
que, l'astronomie et la médecine, et y
mourut eu \^-2T). H est un de ceux
qui ont travaillé à perfectionner la
chirurgie en Italie. Ses écrits, pleins
d'ailleurs d'observations précieuses ,
sont encore remarquables par la can-
deur avec laquelle il avoue ses pro-
pres fautes. Entre autres vérités neu-
ves pour son temps , on y trouve le
conseil de restreindre beaucoup l'u-
sage de la suture ; une méthode cu-
rative , plus rationelle pour le svina
venlosa ; l'expression de ce dogme
])livsio!ogique que le mouvement peut
s'éteindre dans les muscles indépen-
damment du sentiment. Ses ouvrages,
en moins de vingt ans , eurent quatre
éditions : Chirurgiœ libri sex , Ve-
iictiis, 1480, 1492, i4f)7, •499»'""
foi. Le savant Hallcr parle d'une 5' .
édition de 1 5'io, in-folio. C. et A — rv.
AliGlROPULO. V. Argyropulo.
AHGl Si Boucher d'). V. Boucher.
ARGILS. Foy. Policlète.
AKGOLl ( André ), mathémati-
cien , né eu 1570, à Tagliacozzo,
dans le royaume de Napics , étudia
la philosophie et la médecine , où
il lit de grands progrès ; mais il ne
put se défendre des rêveries de l'as-
trologie. Ses ennemis tirèrent avan-
tage de sa faiblesse pour le persécu-
ter, et il fut obligé de se retirera \ e-
nise, où le sénat lui fit un accueil ho-
norable , lui fournit des iustruiuent»
ARa
jTOUi' ses observations , et le nomma
professeur de mathématiques dans l'u-
niversite' de Padoue , en i6~>2. Vers
l'an i64o, il fut fait chev.iiier de St.-
Marc, et mourut, en i655, àf^e de
quatre-vingt-un ans. On a de lui : I.
De diebus crilicis , A slroiiomicorum
lib. manus. , prohlemata astrono-
mica; de plus , Primi mobilis ta-
hulœ , Padoue, n vol. in-4°. , i644?
avec le portrait de l'auteur j II. Obser-
vations sur la Comète de i653, im-
primées en latin là même année; III.
des Ephémérides , imprimées d'abord
à Venise, in-4 ". , en i658,commen
çant à i65o, et dédiées à la républi-
que ; elles furent ensuite réimprimées
de nouveau à Padoue et à Lyon , avec
des continuations. K.
ARGOLl ( Giovanni ) , fils du pré-
cédent, naquit à Taaliacozza, dans
l'Abbruzze, vers l'an 1609. Il s'appli-
qua de bonne heure à l'étude des
belles-lettres , et , des l'âge de quinze
ans, il composa et pubha, eu italien,
une Idylle sur le ver à soie , Bam-
bace e seta, idillio , Rome , 1624 ,
in-i'2. Deux années après, enflammé
d'énuilition par les applaudissements
que valut à Gio. Battista Marini, son
poëme d' Adonis , il voulut en compo-
ser un du même genre; il se renferma
dans une chambre, dans laquelle on
n'entrait que pour lui apporter sa
nourriture, et il acheva , en sept mois ,
à l'âge de dix-sept ans, son poëme
^Endyinion, caiit. XII , i6-i6, iu-4".
Ce poëme eut tant de succès , que,
quuiqu'Argoli l'eût publié sous son
nom, on avait de la peine à croire
qu'il fût de lui, et qu'on l'accusa même
de l'avoir pris dans les papiers de
son père, qui cependant n'avait jamais
fait de vers. En i G52 , il suivit à
Padoue, son père , qui avait obtenu
une chaire de mathématiques; Jean
s'y livra li l'étude de la jurisprudence ,
IT.
ARG 417
et y fut reçu docteur en droit ; bientôt
après, il abandonna cette science, et
retourna aux belles-lettres , qu'il en-
seigna pendant quelques aniiées , et
jusque A'crs l'an iG4o, à Bohgne,
avec beaucoup de succès. Il revint
encore à la jurisprudence, mais sans
ncVlig'^r les helks-leltres, qui lui ser-
vaient de délassement; il occupa dès-
lors dilTérents emplois civils , dans
l'état de l'Eglise , et il obtint er.tre
autres , par l'ei;trrn-ise du cardinal
Anton-o Barberini, celui de podestà ,
ou bailli, à Cervia, et ensuite à l.usio.
Un ne connaît pas 1 époque précise de
sa mort ; mais on croit qu'elle arriva
vers l'an 1660. Argoli , outre ses
poésies it iliirnes , a composé des
vers latins: Epithalnmium in nuptiis
Thaddei Burberrini et Annce Co-
lumnœ , Rome, i(r2p, iii-S". — latro
Laurea Gabrielis Naudœi Parisini
grœco carminé inauv^urata à Leone
Allatio, latine reddita à Barlholo-
meo Tortoletto et Johanne Argolo,
Rome, i'y55,in-8 . Quoique la poésie
ait été l'occupation favorite d'Argoli ,
il a aussi composé des ouvrages sur la
philologie et l'archœologie: on a de lui
une lettre sur une pierre sépulcrale
antique, insérée dans le premier tome
du recueil : De quœsilis per epislolas
à claris viris responsa Fortunii Li-
ceti, Bologne, i64o , in-4"., page
112, sous ce litre : De lapide spe-
culari veterum , Desypso in Ilercu-
lis Clrpeo, et De impostura lapidis
indici apud Thuanum : elle est datée
de Padoue , le i"^. juin 1609 , et
adressée à Fnrtunio Liceti : une auti'e
épitre sur un temple de Diane : Epis-
tola ad Jacobum Philippwn Tonta-
sinum de templo Dianœ Nemuren-
sis , insérée dans l'ouvrage de Toma-
sini , De donariis et tabellis votivis ,
1654, iii-4"v pag- 13- (t que l'oa
trouve aussi dans le Thesaur. an-
27
4i8 ARG
tiquit. Romnji. , de J. G. Giaevius,
tome XII , p. 7JI ; et, enfui , une
édition des traités d'OnutVio Pauvini,
sur les jeux du cirque et sur les
tjiomphes des Romains. Elle a paru
a Pad(uie,en 1 64 -i, i n-fol. , et ensuite,
dans la uiéiueviile, en 1G81 , in-ful.,
sous ce titre : Omiphrii Panvinii
Feronensis d-e ludis circensil>us li-
hri II, de Iriuwphis liber I , quibus
univers^ ferè Romanoruin veterum
sacra ritusque declarantur ac fi-
guris œneis illustrnntur , cum notis
Joannis Arpoli J. U. D., et Addila-
mento Nicolai PintHi. On la trouve
aussi au coinmcnccnicnt du ncuvièïuc
tome du Thésaurus de Graevius. Ar-
goli a laissé en manuscrit : Vitœ Co-
lumellœ et Q. Curtii Rufi ; Aniinad-
versiones in auclorem ad lleren-
nium ; une traduction italienne des
Philippiques de Ciréron ; Libellas de
aqud Marlid; Commentaria in Ta-
eiium; Notiv in Juvenalem et Per-
sium ; Indagines , ubi expwtctioiies
cuctorum ac ejotum meuda coiitinen-
tur, et un assez gnind nombre de
poésies latines et italiennes. K.
ARGONNE (Noël, dit Bonaveîv-
ture), né à Paris, vers l'an i654,
s'appliqua à la inrisprudcnce, et exerça
la profession d'avocat , jusqu'à l'âge de
vini^t-liuit ans. Dégoûté du monde, il
entra dans l'ordre des charireux , oîi
son nom de Noël lut changé en celui
de Ronaventure. Dans sa retraite, il
conserva toujours son goût pour la lit-
térature, et entretint les liaisons qu'il
avait eues dans le monde. Il mourut
à la tlhartreuse de Gaillon, en Nor-
mandie, le a8 janvier 1704- On a de
lui : I. Traité de la lecture des Pè-
res de V Eglise, deux parties, i()88,
in-ii, ouvrage d lit Mabillon fait un
^rand éloge. L'edilion de 1O97, qui
est la meilleure, est divisée en quatre
parties. Les deux dernières saut de
ARG
Pierre Pelhestre, de Rouen, mort en
1710. ILU Education, maximes et
réflexions de M. de Moncade , avec
un Discours du sel dans les ouvra-
ges d^ esprit, 1691, in-12; III. Mé-
langes d'histoire et de littérature ,
recueillis par P'igneul - Marville ,
Rouen, 3 vol. in-12, 1699- 1701,
imprimés, pour la quatrième fois, eu
1725, Paiis, 3 vol. in 12, par les soins
de l'abbé Banier, qui a fait beaucoup
d'additions au 3^ volume. Ces Mélan-
ges sont remplis d'anecdotes curieuses
et hasardées. Ils ont été réimprimés
sous le litre de Figneul-Marvilliana ,
et forment les tomes 5 et 6 d'une collec-
tion diAna, 1 789, 1 o vol. in-8'^., dont
on a rafraîchi le titre en l'an 7 (i79ç)\
Parmi plusieurs articles retranchés
dans cette réimpression, nous cite-
rons le long et intéressant passage sur
])lusieurs religieux de la congrégation
de S. Maur. D'Argonne, qui n'avait
pas mis son nom à son premier ou-
vrage , et qui publia les autres sous les
noms de Moncade et de Vigneul-
Marville , « est, dit Voltaire, le seul
» chartreux qui ait cultivé la httéra-
» ture ; » mais ce n'est pas le seul qui
ait écrit. A. B — t.
ARGOTE ( Jérôme Contador d' ) ,
savant théatin portugais , né à Collares,
dansl'Estramadure, en 1(376, et mort
à Lisbonne en 17^9. llfut un des pre-
miers membres de l'académie rovale
d'histoire portugaise, dans les Mé-
moires de laquelle on trouve plusieurs
dissertations historiques de sa compo-
sition ; mais c'est aux ouvrages sui-
vants qu'il doit surtout sa réputation :
I. De Antiquitatibus conventus Rra-
carugustani libri ir, 1728, i vol.
111-4". II en publia une seconde édi-
tion , aussi in-4". , en 1758, augmen-
tée d'un livre. Cet ouvrage traite de
tout ce qui a rapport aux antiquités de
ce pays avant que les Romains en fis •
ARG
sent la conquête, et sous leur domi-
nation ; et il est surtout remarquable
par le grand nombre de raonumeiils
que ses recherches surent déterrer ,
et qui s'y trouvent expliques. II. Mé-
moires pour servir à l'histoire de Vé-
s^lise primaliale de Brague , 5 vol.
in-4°., Lisbonne, i ^Sti-i 744? I^ï-^*^-
gras de lingoa portugueza , i vol.
iu-S". , Lisbonne, i^UJ. Argote a
aussi laissé des Sermons el des Vies
de saints , qui , quoique assez bien
écrites, ne méritent pas une mention
particulière. C — S — a.
ARGOU( Gabriel), avocat ccicbre
au parlement de Paris, naquit dans le
Vivarais. Il fut lié avec tous les savants
de son temps , et particulièrement avec
l'abbé de FIcury. Sa réputation com-
mença par les Mémoires qu'il fit pu-
blier en i6'-4? relativement au comté
doNeufchàlel, et aux différends élevés
entre les duchesses de Longueville et
de Nemours , pour la succession de
cette souveraineté ; mais, ce qui lui
assura un rang distingué parmi les
jurisconsultes, ce fut son livre intitulé:
Institution au Droit français , dont
il fut fait deux éditions pendant sa vie.
On prétend qu'un ouvrage de l'abbé
de Fleury , son ami , ayant pour titre :
Histoire du Droit français, le dé-
termina à composer son Institution.
D'autres ne craignent pas d'affirmer
que cet ouvrage fut composé par
l'abbé de Fleury lui-même, qui en
fit présent à Argou. Cette assertion
est entièrement dénuée de fondement.
Argou mourut au commencement du
18. siècle. Depuis sa mort , il a été fait
beaucoup d'éditions de ses oeuvres ; les
meilleures sont celles qui ont été pu-
bliées avec des augmentations , par
Boucher d'Argis, Paris, 1755, 1762,
)77iet 1788, 2Vol.in-i2. M—x.
. ARGUES (Geuard des). V.H^-
SARGULS,
L
ARG 419
ÂRGYRE, prince et duc d'Itahe,
fils de Melo, puissant citoyen de Bari ,
resserra, en io4o, l'alliance conclue
par son père, avec les fils de Tan-
crède de Haute ville , et, par leur assis-
tance, se rendit maître de Bari, et
prit, en i o^'i , le titre de duc d'Italie,
quoiqu'il eût à peine soumis une par-
tie de la Pouille et de la Calabre. Ma-
niacès , le général grec auquel il faisait
la guerre, ayant usurpé la pourpre,
Argyre put se réconcilier avec l'empe-
reur Constantin Monomaque, l'ennemi
de son ennemi. Il reçut de lui les titres
de patiice et de catapan. Ces dignités
nouvelles l'éloignèrenl des Normands,
contre lesquels on le vit solliciter, en
1 046 , les secours des Grecs. Dès-lors,
il fut toujours à la tète des ligues for-
mées contre ces redoutables conqué-
rants. 11 conserva jusqu'en io58, le
gouvernement de Bari, et les titres
pompeux que la cour de Constanti-
nople lui avait donnés. Vers cette
époque, il paraît qu'il tomba dans la
défaveur de l'empereur, et qu'il mou-
rut exilé de sa patrie. S. S — i.
ARGYROPULO f Jean), né à Cons-
tanlinople, passa en Italie vers l'an
1 4^4 7 et séjourna quelque temps à
Padoue. Il retourna ensuite dans sa
patrie , où il enseigna la philosophie;
mais les Turhs s'en étant emparés, il
se rendit à Florence, où il fut accueilli
par Cosme de Médicis, qui le chargea
d'enseigner la philosophie pciipatéli-
cienne, en lui assignant un traitement
très-considérable. Après la mort de
Cosme, il ne fut pas moins en faveur
auprès de Pierre de Médicis ; et il
compta, parmi ses disciples, Laurent,
fils de Pierre , ainsi que le célèbre
Politien. La peste s'étant déclarée à
Florence, il passa à Rome, où il en-
seicjna le grec et la philosophie, et
Reuchlin y fut un de ses auditeurs. Il
mourut dans cette ville, on ne sait
420 A R I
daûs quelle année, à l'âge de soixante-
dix ans. Il avait traduit eu latin
plusieurs ouvrages d'Aristote, et avait
fait un Comraentiiire sur la morale. Il
avait aussi écrit en grec plusieurs ou-
vrages, qui sont, pour la plupart,
encore manuscrits. Ses traductions
d'Aristote se trouvent dans plusieurs
anciennes éditions : elles ont e'te' ou-
bliées, parce qu'on en a fait de meil-
leures depuis; nous n'en devons pas
moins beaucoup de reconnaissance à
ceux qui ont ainsi ouvert la voie au
retour de l'érudition; ce qui était le
plus difficile. Hody a publié la Vie
d'Argyropulo , avec celles des plus
illustres Grecs, \'j/yi , m-^°. G— r.
ARIADNE, impératrice de Cons-
lanfinople , était fille de l'empereur
I.éon 1 "^. et de Vérine. Son père ,
voulants'attacherla nation des Isaures,
fameuse par ses brigandages et par
une valeur indomptable , attira près
de lui Trascalsée , l'un des chefs de
ces barbares , le revêtit de la dignité
de patrice, et lui donna en mariage
Ariadne sa fille , en 4^)8. Léon étant
mort , Ariadne se joignit à sa mère
Vérine , et leurs intrigues portèrent
au tronc Trascalsée , qui avait quitté
son nom pour celui de Zenon. Peu
d'années après, Zenon se vit forcé,
par la révolte de Basilisque, de fuir
en Isauric ; Ariadne le suivit , et op-
posa son courage à la faiblesse de sou
lâche époux. Rentrée à Constanti-
nople, après la défaite de Basilisque,
elle tempéra la cruauté de Zenon dans
le châtiment des rebelles. Plusieurs cir-
constances de sa vie montrent qu'elle
n'était pas inaccessible à la pitié. Elle
traversa souvent les mauvais desseins
des deux princes qu'elle épousa suc-
cessivement ; mais ses mœurs dissolues
et la mort de Zenon flétriront à ja-
mais sa mémoire. Depuis long-temps,
Ariadne entjtvtenait un commerce se-
ARI
cret avec Anastase-le-Silentiaire; l'em-
pereur en avant eu des soupçons ,
l'impératrice saisit une occasion favo-
rable de se soustraire à la vengeance
d'un époux outragé. On rapporte que
Zenon , qui était attaqué d'épilepsie ,
fut un jour saisi d'un accès si violent ,
que ses officiers le crurent mort ;
Ariadne s'empressa de le faire cou-
vrir d'un suaire , et le fît porter se-
crètement au tombeau des empereurs j
l'entrée en fut fermée par une pierre,
et on y mit des gardes, avec défense,
sous peine de la vie , de laisser appro-
cher du tombeau , ou de l'ouvrir. Ils
obéirent , et , malgré les cris lamen-
tables de Zenon , ils n'osèrent lui don-
ner aucun secours. Ce malheureux
prince mourut de rage , en se ron-
geant les bras avec les dents. Qua-
rante jours après la mort de Zenon,
Ariadne épousa publiquement Anas-
tase , qu'elle avait eu l'adresse de faire
élire empereur. Il ne paraît pas qu'elle
ait pris part aux événements arrivés
sous le règne de ce prince. Elle mou-
rut sexagénaire , en 5 1 5 , sans laisser
de postérité. L — S — E.
ARIARATHE , nom de plusieurs
rois de la Cappadoce. Le premier
était fils d'Ariarancs , et lui succéda.
Il rendit de grands services à Ar-
taxercès dans son expédition contre
l'Egypte, et ce prince l'en récompensa
magnifiquement. Il vivait vers l'an
55o avant J.-C. Il eut deux fils , Aria-
rathe et Arézas ; mais, conune ils étaient
fort jeunes lorsqu'il mourut, il laissa
la couronne à Olopherne son frère ,
avec qui il avait toujours vécu dans la
plus grande union. C — r.
ARIARATHE II , fils du précé-
dent , succéda à Olopherne , son on-
cle. Alexandre-le-Grand , étant entré
dans l'Asie sous son règne , il resta
fidèle au roi de Perse ; mais comme
sou pays ne se trouvait pas sur k-
ARI
passage de l'armëe macédonienne, on
le laissa tranquille : il en profita pour
mettre ses forces sur un pied res-
pectable. Après la mort d'Alexandre ,
Perdiccas alla l'attaquer , et , l'ayant
vaincu et fait prisonnier, le fit mettre
en croix , ainsi que tous ceux de la
famille royale qui tombèrent entre
ses mains. Cependant , un des fils
d'Ariarathe parvint à s'échapper.
C— R.
ARIARATHE III , ou F^ , suivant
ceux qui ne commencent qu'à lui la
suite des rois de Cappadoce , trouva
le moyen de s'échapper lorsque son
père fut pris par Perdiccas , et se re-
tira dans l'Arménie. Perdiccas et Eu-
mènc s étant morts , il profita de la
guerre qui s'était allumée entre An-
tigone et Séleucus , et, étant revenu
dans la Cappadoce avec des troupes
qu'il avait eues d'Ardoatus , roi d'Ar-
ménie , il défit les Macédoniens, tua
Amyutas , leur général , et se remit
en possession des états de son père ,
vers l'an 5io avant J.-C. Il eut trois
fils ,' dont nous ne connaissons qu'A-
riamnès , qui lui succéda. C — r.
ARIARATHE IV, fils d'Ariam-
nès II, vivait vers l'an 25o avant
J.-C. Il épousa Stratonice , fille d'An-
tiochus Théos. Son père l'associa au
trône de son vivant , et lui laissa ses
états en mourant. Son alliance avec
les rois de Syiùe lui fît adopter l'u-
sage de la langue grecque , qu'on
trouve employée sur une médaille qui
nous reste de lui. Il eut un fils nom-
mé Arlaralhe comme lui. C — r.
ARIARATHE V, fils du précèdent,
était encore enfant lorsque son père
mourut, vers l'an 110 avant J.-C. Il
épousa Antiochis , fille d'Antiochus-le-
Grand , roi de Syiie , et prit le parti
de ce prince dans les guerres contre
les Romains. Antiochus ayant été
vaincH , Ariarathe deœauda la paix
ARI 45t
à Manlius , qui exigea de lui six cents
talents ; mais , par considération pour
Eumènes , qui venait d'épouser la fiJlc
d'Ariarathe , cette somme fut réduite à
trois cents talents. Il fit ensuite , de
concert avec son gendre, la guerre à
Pharnace, qu'il força à demander la
paix. Antiochis , épouse d'Ariarathe ,
ayant été long-temps sans avoir d'en-
fants, et croyant n'en avoir jamais ,
s'en était supposé deux à l'insu de
son maii , et les avait nommés Aria-
rathe et Olopheme. Etant devenue
enceinte quelque temps après , et étant
accouchée, à diverses époques, de deux
filles et d'un fils; elle dévoila le secret
de la naissance des deux princes ;
comme ils étaient déjà grands , Aria-
rathe , qui avait conçu de l'attache-
ment pour eux , envoya Aiiarathe à
Rome , et Olopheme dans l'Ionie ,
pour qu'ils ne pussent pas disputer le
trône à son fils légitime. Il mourut
vers l'an 168 avant J.-C. C — b.
ARIARATHE \ I ; suinommé Pm-
LOPATOR , était fils du précédent. Il
se nommait Mithridate , et ne prit
qu'en montant sur le trône , vers l'an
168 av. J.-C, le nom d'Ariarathe.
Son père voulut lui céder la couronne
de son vivant , mais il la refusa. Son
premier soin , lorsqu'il parvint au
trône , fut de renouveler l'alliance
avec les Romains; il piit ensuite les
armes pour rétablir sur le trône Mi-
throbarzane , roi d'Arménie. Démé-
trius Soter , roi de Syrie , ayant voulu
lui faire épouser Laodicé , sa sœur ,
Ariarathe la refusa , et Démétrius,
irrité, donna des secours à Olopheme ,
dont il a été question plus haut , lequel
se prétendait légitime héritier du
rovaume ; Ariarathe ayant étéchassé de
ses états, malgré les secours d'Eumè-
ues', roi de Pergame , se réfugia à
Rome , et le peuple romain , quoique
son allié, se contenta d'ordonner qu'il
k
4'ic» A R I
partageraitleroyauraeavecOîoplierne.
Il parvint cependant , pai- la suite , à
recouvrer tous ses états, tant par le
secours d' Attale , qu'en épousant Lao-
dicc. La î^uerre s'étant déclarée , quel-
que temps après , entre les Romains
et Aristonicus , qui réclamait le royau-
me de Pergamc , Ariarallie se joignit ,
avec ses troupes , à l'armée romame
que couimaudait P. Crassus, et il périt
dans la bataille où ce général fut dé-
fait. Il avait été élevé à la manière
grecque , avait tait de grands progrès
dans les lettres et dans la philosophie,
et sa cour fut fréquentée par les sa-
vants. 11 avait eu de LaoïUcé plusieurs
fils, à qui les Romains donnèrent la
Cilirie et la Lvcaonic, en récompense
du dévoûmeijî de leur père. C — R.
ARIABATHE VII, surnommé Epi-
PHA^E , échappa seul des six fils du
précédent, à la cruauté de sa mère,
qui, voulant régner seule, sacrifia cinq
de ses enfants à son ambition. Celui
dont nous parlons , ayant trouvé le
moyen de se soustraire à sa fureur,
fut mis sur le trône par le jjeuple , qui
fit mourir cette femme barbare. Il
épousa Laodicé , fille du célèbre Mi-
thridate; mais ce prince ([ui sacrifiait
tout à son ambition , le fit assassiner
par un certain («ordius , ])our s'em-
parer de ses états : i! aurait aussi lait
périr ses fils , s'il n'avait pas été pré-
venu par Nicomède , qui s'empara de
la Cappadoce , et épousa Laodicé.
Alors Mithridate feignant de piendre
le paru de son neveu , attaqua Nico-
mède, et le chassa de la Cappadoce ,
qu'il rendit à Ariarathe Mil. Ariara-
the VII fut tué vers l'an 1 17 av. J.-C.
C— R.
ARTARATIIE VIII , surnommé
PniLOMÉTOR , fils du précédent ^ fut
plaie sur le trône par IVlithridaîe. Co
prince qui ne chercbait qu'iui pré-
texte pour s'emparer de la Cappadoce,
ARI
voulut l'obliger à rappeler Gordius ,
l'assassin de sou père. Ariarathe s'y
étant refusé , Mithridate lui déclara
la guerre , et entra en campagne à la
tête d'une puissante armée; Ariarathe
qui s'y attendait , en avait rassemble
une non moins formidable , et Mithri-
date , craiguant que le sort des armes
ne lui fût pas favorable , eut recours
à la trahison. Il fit proposer une con-
férence à Ariarathe , qui ne s'y rendit
qu'avec défiance. Mithridate avait ca-
ché, dans les plis de sa robe, un poi-
gnard avec lequel il frappa Ariarathe
au cœur , en présence des deux ar-
mées, l'an 106 av. J.-C. Il s'empara
alors de la Cappadoce, où il mit pour
roi un de ses fils , âgé de huit ans , à
qui il fit prendre le nom d'Ariarathe ,
et il lui donna Gordius pour tuteur.
Le peuple se souleva bientôt , le chas-
sa , et appela au trône Ariarathe IX ,
qui fut encore détrôné par Mithridate ,
et mourut de chagrir. peu de temps
après. G^E.
ARIARATHE X , fils d'Aiiobarzane
II, prit le surnom de Philadelphe, à
cause de l'attachement qu'il avait mon-
tré à Ariobarzane 111 , son frère ,
après la mort duquel il devint roi de
la Cappadoce. Quoique sa famille se
fût déclarée contre les assassins de
César , M. Antoine lui enleva la cou-
ronne , pour la mettre sur la tète d'un
certain Sisinna, fils d'une courtisane,
Ariarathe parvint à s'en ressaisir, et
il en jouit quelques années ; mais il
fut de nouveau détrôné par Antoine,
qui le fit même mourir , si l'on en
croit Valère - Maxime. Il paraît que
c'était un prince sans mérite, et qui
s'amusait à arrêter des fleuves, pour
inonder les campagnes , et y former
des îles. Après sa mort, un inconnu
qui lui ressemblait bcaucouj). voulut
se faire passer pour lui ,etsefitrccou -
naître par la plus grande partie des
A RI
peuples de la Cappadoce et des en-
virons ; mais Auguste le fit mouiif.
C— R.
ARIAS MONTANUS ( Benoît ) ,
ne' à Frexe'nal , en Estramadnre , eu
i527, ^'^i*- ^'* 'l'"'^ notaire; il fit
ses études dans l'université d'Alcala ,
s'y rendit trcs-habile dans les langues
anciennes , prit l'habit de l'ordre de
St.-Jacques , et accompagna , en 1 56^,
l'évêque de Ségovie , au concile de
Trente , oix il jeta les premiers fon-
dements de sa réputation. De retour
en Espagne , il se retira à l'hermi-
tage de Notre-Darae-des-Anges , situé
au haut d'un rocher , près d'Aracena ,
où il se proposait de se livrer , sans
L interruption , à son goût pour la mé-
f ditatiou; mais Philippe II ayant en-
tendu vanter son savoir , l'arracha à
sa retraite, pour lui confier la direc-
tion d'une nouvelle Polyglotte , qui
devait être imprimée à Anvers, par
Christophe Plaulin. Arias se rendit
dans cette ville, et employa quatre ans,
de i568à 1572 , au travail confié à
ses soins. Il remplit l'attenle desou sou-
verain et du public , en donnant , sous
les titres de Polr^lotte d'Arwers , de
Bible royale^ ou de Philippe II , huit
vol. in-fol. Les caractéresen avaient été
fondus par le fameux Guillaume Lebé ,
que Plantin avait fait venir de Paris.
Elle rf nferme , outie ce qui se trouve
dans la Bible d'Alcala, des paraphrases
chaliiaiqucs , une version syriaque du
Nouveau Testament , en caractères
syriaques et en caractères hébraïques ,
accompagnée d'une traduction latine ,
(etc. Ce bel ouvrage lit beaucoup d'hon-
\ neur à Montanus ; mais il lui suscita
un ennemi acharné , dans la personne
de Léon de Castro, professeur de lan-
};ucs orientales à Salamanque. Castro
dénonça Arias , d'abord à l'inquisition
de Rome , puis à celle d'Espagne ,
pour avoir altéré fe texte de la Bible ^
A R I 4a3
etcoiifirmélesjuifs dans leur croyance
par ses paraphrases chaldaïques. Arias
fut obligé de faire plusieurs voyages à
Rome , pour sa justification , et finit
par confondre et rendre méprisable
l'animosité de son adversaire. Justifié
et absous , eu ï58o, il refusa un évè-
ché que Philippe II lui offrit, et se
retira de nouveau dans son hermitafre
d Aracena , espérait y terminer sa
vie. 11 y fit construire une habitation
d'hiver et une autre pour la belle sai-
son, et l'entoura de jardins et de
vignes. A peine ces travaux étaient-
ils terminés, que Philippe II arracha
de nouveau Arias à sa solitude, pour
lui confier la bililinthèque de l'Escu-
rial, et le soin d'enseigner aux reli-
gieux les langues orientales. Enfin, il
se retira à Séville , où il termina sa
carrière , eu i5ç^, à soixante -dix-
neuf ans. Arias fut un des plus savants
théologiens du i6^ siècle. 11 savait
très - l)ien l'hébreu , le chaldéen , le
svriaque , l'arabe, le grec et le latin ,
et parlait avec la plus grande facilité,
ralieraaud, le français , le flamand et
le portugais. Il était sobre, pieux, mo-
deste, infatigable , et il n'avait pas
d'autre lit qu'une planche couverte
d'un manteau. Les savants , les artis-
tes , les rehgieux et les grands recher-
clKii<*nt sa conversation , et on était
toujours édifié de sa piété et de sa
modestie. Il vécut dans la médiocrité,
tandis qu'il aurait pu obterir des di-
gnités et des richesses. Outre la Poly-
glotte d'Anvers , on a d'Arias Monta-
nus : I. neuf livres sur les Antiquités
jitdaïrpies , Leyde , 1 5i}3 , in - 4". ;
IL les Psaumes de David et d'autres
prophètes, en vers latins, 1574, in-4°« ?
111. un Traité intitulé : Humanœ
salulis monumenla , Anvers , 1 57 1 ,
in-4°. , avec beaucoup de figures ;
lY. Une traduction latine de Vldné-
Taire de Benjarain deTudèle^.V. /lis-
4i4 A RI
toria nalurœ, 1 60 1 , in-4''' ; ^^. Une
Rlictorique en quatre livres, Anvers,
1 56() iii-8 '^ , avec des note.>) d'Antoine
Morales. Ou vante surtout ce dernier
ouvraf^e; c'est, selon le savant Mayans
y Siscar , uft recueil d'excellents pre'-
cept.'S, disposes avec une méthode
admirable. — ^bias de BeauvidÈs
{ Pierre ) , néà Toro, dans le royaume
de Léon, docteur eu médecine, voya-
gea en Amérique , et donna à son
Tetoiir : Secretos de Chirurgia ;
Valladoiid , i56- , iu-8". D — g.
ARIBERT , fils d' Clol;iire 11 , roi
de France, était frère de D.Tgobert i ^;
mais plus jeiiHc que lui , et né d'un
auîreiit. Il se trouvait .uii-rcs du r<ji sou
père quand celui-ci mourut; Dagobc*t,
au^untraire, était en Ausfrasie; ainsi
il ™t été facile à Ariuert de s'emparer
<lcs trésors de Clotaire H, et de se
faire leciarer son successeur . s'il avait
e'ié d'un À^e plus mur; mais il entrait
à peine dans sa quatorzième année.
Da^obert usa d'une grande diligence,
s'assura des seigneurs puissants dans
les divers royaumes dont se compo-
•sait la monarchie française, et ne fit
aucune part au jeune Ariberî. Cepen-
dant, par les pressantes -oiiicitations
d( •; grands , révoltes de cette injustice,
il nbti'it une pu tu- des provinces qui
formai* iiî le royaume d' \quitaine, et
se lit Couronner roi à Toulouse , où il
rlaîj'it le siège de son gouvernement.
]l mourut d'ux ans après , et ne laissa
qu'un iîis qui lui survécut peu. Gom^
me la mort Je cet enfant était utile à
Dagobert, auquel les crimes ne coû-
taient aucun effort , les historiens l'ont
accusé de l'avoir avancée. D.Vaissette,
auteur de Y Histoire du Languedoc ,
prétend qu' Vribert laissa deux autres
fils qui échappèrent aux poursuites de
leu! oncle, et il fût descendre d'eux
d'ii'iistro.s maisons. Si l'on réfléchit
que Qolaire 11 mourut en 628 , qu'A-
ARI
ribert alors touchait à peine à sa qua-
torzième année , qu'il cessa de vi^re
en 65o , ayant au plus seize ans , on
croira difficilement qu'il fut père de
trois fils; et l'on metua les recherches
de Y Histoire du Languedoc au nom-
bre des flatteries que les généalogistes
inventent pour satisfaire la vanité' des
grands. F — e.
ARIBERT P'., roi des Lombards,
fils de Gundoald , duc d'Asti , bava-
rois d'origine , fut nommé roi par les
Lombards , en 055 , pour succéder à
Radoald. Il établit défiuitivi ment la
religion catholique sur le trône, et
proscrivit l'ariauisme. Du reste, U
mémoire d'aucune de ses actions ne
s'est conservée, A sa mort, en (3Gi ,
il partagea le rovaume entre ses deux
fils Pertharite et Godebert. S. S — i.
ARIBERT II, roi des Lombards,
étaitfils de Ragimln;rt, duc de Turin ,
qui , avant usurpé , l'an '^00, la cou-
ronne de Lombardie, associa son fils
au trône , et mourut p«m de mois après.
Aribert fit mourir Liutbert, que son
père avait dépouillé de la couronne ;
il fit mourir aussi Holharis, duc de
Bc. gamc , qui s'était opj)osé à son
usurpation. Il exerça contre la femme
et les enfants d'Ansprand , tuteur de
Liutbert , des cruautés inouïes. 11 ne
se montra généreux qu'envers l'église
romaine, à laquelle il restitua, en ■jo'-,
les biens qu'elle avait possédés dan*
les Alpes Cottiennes. 11 passait pour
aimer la justice, et l'on a raconté de
lui , comme du khàlyfe Aaron Al-Re*
cliyd, qu'il sortait de nuit, déguisé,
pour se mêler parmi ses sujets, voir
la manière dont ses officiers exer-
çaient leurs emplois, et apprécier par
lui-même les plaintes du peuple. Ans-
prand , qu'il a^ ait chassé de Lombar-
die au commencement de son règne,
revint, en *; 1 2 , l'attaquer avec une ar-
mée bavaroise. Aiibcil , abaudumw
ÂRl
par ses soldats , se jeta dans le Tesin
pour s'échapper à la nage ; mais l'or
dont il s'était cbarge lui rendit plus
diificile de se soutenir sur les eaux :
il se noya. Son corps, cependant, fut
retiré de la rivière et inhumé à Pavie.
S. S— I.
ARIEH, rabbin. V. Léon (Jacob
Judas ).
ARIEH , rabbin. ( Voy. Léon de
Modène ).
ARIENTL Voy. Argenti.
ARIGISE I"., duc de Bénévent,
succéda, en 5i)i, à Zotton, fondateur
de ce puissant état. Il eu reçut l'investi-
ture d'Agiluphe, roi des Lombards.
Il fit de nouvelles conquêtes sur les
(irecs , auxquels il enleva , eu Sgô, la
ville deCrotoue. Il mourut, en 64 1,
après cinquante ans de règne : son
fils Aione, qui lui succéda , fut tué,
l'année suivante, par les Slaves. li fit
place à Radoald, qui fut élu par le
j)euple et confirmé par le roi des Lom-
bards. S. S — I.
ARIGISE II, duc de Bénévent,
donné, en 7 58, pour successeur à
Jjiutprand , par Désidério , roi des
Lombards. Arigise , qui avait épousé
Adelberge, fille de Désidério, ne se
soumit point à Charlemagne, lorsque
Je royaume des Lombards fut détruit ;
il prit le titre de prince , déclarant
que sa couronne était désormais in-
dépendante ) il se fit sacrer par les
r'vêqucs de ses états , et s'attribua tous
!''s droits de la souveraineté ; mais,
en "^87 , après treize ans de lutte , il
fut enfin obligé de se reconnaître pour
feudalaire de la couronne d'Italie; il
promit un tribut annuel de sept raiile
^ols d'or , et il donna son fils Grimoald
en otage pour l'observation de la paix.
La même année , Arigise mourut le 26
août , laissant la réputation d'un prince
non moins sage et pieux que brave,
U cultiva les lettres , et composa sa
A R I 425
cour de philosophes , ou plutôt de
grammairiens et d'érudits. Paul Dia-
cre, ou Warnefrid, rhistorien des
Lombards , y chercha un refuge lors-
que sa natiou fut soumise par Charle-
magne. Le fils d' Arigise , Grimoald ,
lui succéda. S. S — i.
ARIGNOTE , fille de Pythagore et
deThéano, composa divers Traités sur
les mystères de Gérés et de Bacchus ;
mais c'est à tort que Vossius, trompé
par un passage altéré de Qément d'A-
lexandi ie , lui attribue d'avoir écrit la
vie de Denys le tyran. L'homonymi«
du nom de ce prince et de celui de
Bacchus, en grec , a causé l'erreur de
Vossius , que n'ont pas manqué de
copier la plupart des biographes.
D. L,.
ARIMAZE était gouverneur d'une
forteresse située sur un rocher extrê-
mement escarpé de la Sogdiane, dans
laquelle s'étaient réfugiées la femme
et la fille d'Oxyarte. Sommé par
Alexandre de se rendre , il lui de-
manda si les Macédoniens avaient des
ailes pour le forcer dans ses murs.
Alexandi-e choisit dans son armée tous
ceux qui étaient accoutumés à gravir
sur les rochers , et leur promit des
récompenses considérables. Ils trou-
vèrent le moyen de monter sur la par-
tie du rocher qui dominait la forte-
resse ; alors Arimaze proposa de se
rendre ; mais Alexandie ne voulut
point le recevoir à composition, et,
étant entré dans la place , il le fil pen-
dre , ainsi que ses soldats , au bas du
rocher. Tel est le récit de Quinto-
Curce j mais Arrien , qui ne nomme
point le chef qui commandait dans
celte forteresse , dit simplement qu'elle
se rendit. G — r.
ARINGHI ( Paul ), prêtre de l'Ora-
toire à [lome , sa ville natale, où il est
mort en 1676. Il est principalement
connu par sa traduction latine de ses
4^0 ARI
comraentairrs sur l'ouvrage de Basio ,
uiiivûé : Rome souterraine , etc. , Ro-
me, i65 1 , 2 vol. in-fol. Il en a pnru,
Cologneet Paris, en lOog, une édition
plus complète et plus correcte. En
1668, CliristoplieBaumanen a publié
un extrait en Ianî;ue allemande , qui a
ete' imprime' à Arnlieim , et re'imprimé,
en 167 1, in-i3. Cette même année
167 1 , il en a anssi paru un extrait, en
langue laline , imprimé dans la même
ville, in- l'i. M. Artaud en a donné un
retrait raisonné dans son Foyage
nu V Catacombes de Rome , 181 o,
in-8". Antoine Bosio avait écrit en ita-
lien une Roma sotterranea qui avait
été publiée après sa raort , et avec des
additions considérables de Jean Scve-
rani, par les soins de Charles Aldro-
bandino , à Rome, i65'i , format
<i'atlas; mais cet ouvrage était très-
iucoraplet. Aringlii l'a porté à un tel
degré de perfection , que tous ceux
qui ont parlé de son travail, en ont
i;nt l'éloge. On y trouve des'reclier-
clies importantes sur les antiquités
ecclésiastiques ( Vor. Bosio et Bot-
TAni). On a encore d'Aringhi : Mo-
vunienla mfelieiinlis , sive Mortes
perraiorKm pessimœ, Rome, 1G64,
•iAol. in-fol.; et Triiimvhus pœniten-
li^, seii selcctœ pœniteniiuin mortes,
Rome, 1670 , in-folio. K.
ARIOAFjD , roi lombard, mari de
Gundcberga , soeur du roi Adaloald,
fut élu roi à sa place en 62 5 , lor.-que
ce prince devint fou. Arioald était en-
core arien, comme la plus grande par-
tie de sa nation , tandis qu'Adaloald,
étant calbolique , avait voulu faire
triompher sa foi. Les prêtres témoi-
gnèrent avec arrogance leur aveision
pour un roi qu'ils nommaient héré-
tique. L'abbé de Bobbio refusa, dans
Pavie même , de rendre au roi le
salut : on supposa qu'un miracle
Taviiit soustrait à la punition q^ii'il
ARI
avait méritée ; et l'insolence de ce
moine fut admirée comme une Aertu.
La reine Gundebcrga avant été ac-
cusée , par un homme qui avait voula
la séduire , d'avoir conspiré contre
son époux Arioald , ce prince la fit
enfermer pendant trois ans dans une
tour à Loiaello, jusqu'à ce qu'il se pré-
sentât un chevalier qui voulût se sou-
mettre pour elle au jugement de Dieu.
Ce chevalier avant vaincu son adver-
saire , Guudcberga fut rétablie sur le
trône, et, comme le roi mourut quel-
ques années après, en 656, ce fut
die qui disposa de la couronne en fa-
veur de Rotharis , duc de Brescia ,
qu'elle épousa en secondes noces.
S. S— I.
ARIOBARZANE, surnommé Pur-
LOROMjEus , devint roi de Cappadoce
de la manière suivante. Mithridate
«yant vaincu Ariarathe IX , plaça sur
le trône son propre fils , à qui il
avait fait prendre le nom d'Ariarathe,
et qu'il voulait faire passer pour un
des descendants d'Ariarathe VL INi-
comède , de son côté , mit en avant
un jeune homme qui était , suivant
lui, un troi.sième fils d'Ariarathe VII,
et qui était reconnu pour tel par Lao-
dicé, veuve de ce prince. Le sénat
romain iiyant pris connaissance de
cette alfaire , décida que les préten-
tions des deux concurrents étaient
sans fondement, et qu'il ne restait plus
personne de la famille royale. On dé-
clara donc les Cappadociens libres j
mais comme ils étaient accoutimiés au
gouvernement monarchique , ils ne
voulurent pas en changer , et ils choi-
sirent pour roi Ariobarzane. Mithri-
date, qii ne renonçait pas facilement
à ses projets, ne tarda pas à venir
l'attaquer , et à remettre son fils sur
le trône ; Ariobarzane eut recours aux
Romains, et Sylla , qu'on avait chargé
de diirércnttîs missions en Asie, le ré-
ARI
tablit dans ses états. Il n'y resta pas
Jong-ternps tranquille ; car , dès que
j'occasion s'en présentait , Mithridate
envahissait la Cappadoco ; et il s'en
était enijiare' pour la troisième fois ,
lorsqiie s'alluma cette guerre célèbre,
dans laquelle d s'en fallut de peu qu'il
ne renversât l'empire romain. Vaincu
à la fin par Sylla , il tut obligé de res-
tituer toutes ses conquêtes , et la Cap-
padoce fut rendue à Ariobarzane, Il la
lui enleva bientôt une quatrième fois ;
mais Sylla , alors dictateur , envoya
en Asie Gabinius, qui les obligea à
faire la paix ; ce qui n'empêcha pas
Mithridate de garder la plus grande
partie de la Cappadoce, sous prétexte
du mariage arrêté entre sa fille , qui
n'avait que quatre ans , et Ariol)ar-
zane. Ce dernier s'étaul plaiut aux Ro-
mains , ils forcèi ent Mithridate à ren-
dre tout ce qu'il avait pris. N'osant
plus alors attaquer ouvertement Ario-
barzane , il engagea Tigrane, roi d'Ar-
ménie, à faire une Invasiou dans la
Cappadoce. Ce prince s'en étnit em-
paré , en enleva 3oo,o()o hommes ,
qu'il emmena pour peupler Tigrano-
cerles qu'il venait de fonder, et il
rendit le pays au lils de Mithridate.
Ce fut l'occasion d'une nouvelle guerre,
qui finit par la mort de Mithridate,
et Pom])ée rétablit Ariobarzane sur le
trône : mais ce prince , déjà très-àgc,
et fatigué du poids d'une couronne qui
lui avait occasionné tant de tourments,
voulut la céder à Ariobarzane , fils
qu'il avait eu d'Athénaïs, son épouse.
Ce jeinie prince ne voulut pas l'accep-
ter, et il s'engagea un combat entre
l'amour paternel et l'amour fiUal , au-
t|uel Pompée mit fin , en décidant le
fils à monter sur le trône. C — R.
ARIOBARZANE II , surnommé
Philopator, fils du précédent, de-
vint roi par l'abdication de sou père,
vers l'an G 7 avant J.-C. , et sa cou-
ARI 427
duite à cette occasion lui fit donner le
surnom de Philopator. On voit , par
une inscription trouvée à Athènes ,
qu'il entreprit de faire rebâtir l'Odéon
de cette ville, qui avait été brûlé par
Sylla. Sa femme se nommaïtAihénaïs ,
ainsi que sa mère , ce qui pourrait
faire conjecturer qu'il avait épousé sa
sœur , comme c'était l'usage parmi les
rois de FAsic. Il en eut deux fils ,
Ariobarzane et Ariarathe. Cicéron .
dans ses Lettres familières , liv. XV,
ép. 2 , nous apprend qu'il fut vic-
time d'une conjuration , mais on en
ignore les détails. Il mourut vers l'an
5'2 avant J.-C. C — k.
ARÏOB\t\ZANE III, surnommé
EusebÈs Philorom.'eus , fils du pré-
cédent, monta sur le trône vers l'an
52 avant J.-C. 11 paraît qu'il fut obligé
de faire de grands sacrifices pour
acheter la protection du peuple ro-
main, et lorsque Cicéron arriva dans
ses états , peu de temps après son
avènement au trône , il le trouva dé-
biteur de sommes considérables à Pom-
pée et à Brutus. Son autorité n'était
pas non plus très-affermie ; Athénaïs ,
sa mère , femme aîlière , lui avait fait
beaucoup d'ennemis , et les mécontents
avaient proposé à Ariarathe, son frère,
de le faire roi à sa place ; mais l'union
qui existait entre eux ne lui permit pas
d'écouter cette proposition. Cicéron ,
à qui ce prince avait été rccommaiïdé
par le sénat, fit tout ce qui dépendait
de lui ])Our l'assurer sur le trône. Le
grand-prêtre d'Enyo, ou Bellone, qui,
étant la seconde personne de l'état,
avait beaucoup de pouvoir, se trou-
vait à la tète des mécontents ; Cicéron
l'obligea à sortir du royaume. Il jtaraît
que cet Ariobarzane avait rendu quel-
ques services aux Athéniens ; car ils
lui avaient érigé une statue , dont il ne
nous reste que l'inscription. Après la
mort de César , il prit le parti dt.'S
428 A R I
triumvirs contre ses meurtners , et
Cassius , qui se trouvait en Asie , le
fit assassiner, et s'empara de ses tré-
sors vers l'an 4^ av. J.-C. C — r.
. ARION, de Méthyrane, célèbre Iv-
lique grec , fils de Cydee , et disciple
d'Alcman, s'illustra vers la 58 . olym-
piade; et, selon M. Larclier (dans sa
Chronologie d'Hérodote ) , au du
monde 4o88, avant J.-C. 626. Hé-
rodote rapporte qu'il vécut contempo-
rain de Périandrc, tyran de Corinthe;
qu'il fut le plus habile musicien de son
siècle sur la lyre; et que c'est à lui
qu'on doit l'origine et le nom du Di-
ihvrambe. Il avait compose un grand
nombre de poésies lyricpies, dont il
ne nousresteaujourd'lnù([u'uu hymne
eu l'honneur de Neptune , conserve'
par Élien ( Ilist. des Jii. , lib. 1 2 ,
<'. 45 ) et transporte, avec des correc-
tions, par Bruuck, dans ses Analtc-
ta , totu, 5 , pag. 357 ). Arion in-
tioduisit un nouveau mode musical
dans la tragédie , assujètit les satires
des chœurs au langage métrique , et
donna le nom de Dithyrambe au
chant de ces mêmes chœurs. On ra-
conte qu'ayant acquis de grandes ri-
chesses à h cour de Corintlie , il s'é-
tait embarqué sur un vaisseau , avec
toute sa fortune, pour n tourner dans
sa patrie; que les matelots ayant voulu
Je jeter à la mer ))our s'emparer de
ses trésors, il obtnit de jouer, aupa-
ravant, un air funèbre sur sa lyre;
et qu'un dauphin , attiré par le charme
de ses sons , le reçut sur son dos au
moment où il se précipita dans les
flots, et le porta jusqu'au cap Ténarc,
d'où Arion retourna à Corinthe. Après
avoir consacré cet événement dans le
temple d'Apollon par une statue, Pé-
liandrc fit mourir tous les matelots
qui avaient commis ce crime; il fit
«lever un tombeau au dauphin qui avait
sauve Aiiou, et cet cvéucmcut devint
ARI
célèbre, par le nom du dauphin qui a
été donne à une constellation. Toute
fiîbuleuse qu'est cette histoire , elle a
été très-accrédilée dans l'antiquité, et
la poésie, ainsi que la sculpture, s'est
souvent plu à la célébrer ; ce qu'il y
a de vrai , c'est qu' Arion , ayant fait
naufrage vers les côtes de Laconie, se
sauva sur le cap Ténare , où on l'ac-
cueillit avec hospitalité , et il érigea ,
dans le temple d'Apollon , situé sur
le même promontoire, une statue de
bronze, comme monument de ce fait.
Le distique qui l'accompagnait se trou-
ve également dans les ^dnalecta ,
( même vol., pag. 558 ). A — D — r.
ARIOSTE (Louis ) , naquit à Reg-
gio deModène, le 8 septembre, i474>
d'une famille noble, et d'un père qui ,
ayant été attaché long-temps au duc
de Ferrare , Hercule I" . , et l'ayant
servi dans divers emplois , fut fait ,
par lui , juge du premier tribunal de
Ferrare. Louis fut l'aîné de dix en-
fants; il montra des dispositions poé-
tiques dans les jeux mêmes de sou
enfance ; il composait des espèces de
tragédies qu'il représentait avec ses
frères : il en fit une, entre autres, de
Pjrame et Tishé. Entré au collège à
Ferrare , il se distingua dans ses étu-
des; et il était à peine dans sa pre-
mière adolescence , qu'il y prononça ,
pour l'ouverture des cours , une ha-
rangue latine qui fit concevoir de lui
les plus grandes espérances. Son père,
comme les pères de plusieurs autres
grands poètes, voulut qu'il étudiât les
lois : après cinq ans de dégoûts et
d'efforts inutiles , le jeune Anoste y
renonça, pour se livrer entièrement
aux lettres. H suivit alors les leçons
du savant Grégoire de Spolète. Plante
et ïérence , qu'il expliquait, lui don-
nèrent l'idée de deux comédies , U
Cassaria et i Siij>positi . qu'il éb,îu-
cha dès <c Icntpj-'à. Des [.-ocsios ly-
ART
riqnes , italiennes et latines , remar-
quables par l'e'légance et la facilité du
stvle , le firent connaître du cardinal
HyppoHte d'Est, fils du ducHerculeP'".
Hyppolite se l'attacha, vers l'an 1 5o5,
eu qualité' de simple gentilhomme ;
mais il ne tarda pas à l'employer dans
ses affaires même les plus importantes;
et, à la mort d'Hercule, Alphonse ,
frère du cardinal , ayant succède' à
leur père, n'accorda pas à l'Arioste
moins de confiance. C'est dans cette
cour qu'il entreprit, et qu'au milieu
des distractions de toute espèce , il
parvint , en dix ou onze ans , à ter-
miner sou grand et immortel ouvrage,
le poème de Roland furieux. Il en
commença l'impression en i5i5, et
le publia en i5i6. Tout le monde sait
le mot qu'on attribue au cardinal
Hyppolite, quand l'Arioste lui en eut
présente un exemplaire , mot qu'on
ne peut traduire honnêtement en fran-
çais que par ceux-ci : Maître Louis ,
où avez-vous pris tant de niaiseries,
ou de bagatelles , ou même de sot-
tises. Si ce mot est vrai, que prouve-
t-il , sinon qu'Hyppolite d'Est , quoi-
qu'homme d'esprit, prince et cardinal,
était plus capable de dire lui-même
une sottise que d'apprécier le génie
supérieur de l'Arioste, et qu'il était
peu ditjne de le posséder auprès de
lui ? Il l'y voulut cependant avoir, en
1 5 1 7 , ou 1 5 1 8 , dans son voyage en
Hongrie , où ses affaires le retinrent
deux ans. La dureté du climat, et la
faible santé de l'Arioste, ne lui pa-
rurent pas des excuses suffisantes; le
poète, persistant dans son refus de l'y
suivre, perdit entièrement la faveur
du cardinal , et celui-ci passa même
d'une protection froide et indifférente
à une haine déclarée. L'Ai'ioste fut
alors recueilli par le duc Alphonse, qui
le fit son gentilhomme , l'admit à sa
familiarité, mais le laissa en proie à des
A R I 420
embarras de famille et de fortune , à
des procès ruineux , et, quoique ha-
bituellement magnifique , ne le récom-
pensa jamais que mesquinement. Crut-
il le récompenser ou le pimir en lui don-
nant, en 1 52 1 , ou i52'2, la commis-
sion d'apaiser les troubles qui s'étaient
élevés dans une partie montueuse et
sauvage de ses états, nommée la Gar-
fagnana ? Elle était infestée par des
brigands , reste des partis et des
factions qui l'avaient agitée. L'Arioste
parvint , en peu de temps , à en purger
le pays , et à ramener tous les esprits
à la soumission et à la concorde. Ce fut
là que lui arriva cette as'enture avec le
chef de brigands Pacchione , que le
Garofalo a racontée le premier dans
sa Fie de l'Arioste , et que les autres
biographes ont altérée en la copiant.
Selon le récit du Garofalo, le poète
passait, avec six ou sept domestiques,
à cheval comme lui , entre des mon-
tagnes. Us trouvèrent une troupe
d'hommes armés qui étaient assis à
l'ombre. Leur mine suspecte engagea
l'Arioste à s'écarter d'eux et à presser
le pas. Lorsqu'il fut passé , le chef de
la troupe arrêta celui des domestiques
qui marchait le dernier, et lui de-
manda qui était ce gentilhomme. Le
domestique l'ayant nommé , le brigand
courut , tout armé comme il était ,
après l'Arioste. Celui-ci s'arrêta , ne
sachant ce que cet empressement vou-
lait dire , ni comment cela finirait.
L'homme armé l'ayant joint, le salua
respectueusement , lui dit qu'il était
Philippe Pacchione, lui demanda par-
don de ne lui avoir rien dit à son
passage : il ignorait alors son nom ;
l'ayant appris , il était accouru pour
connaître de vue celui qu'il connais-
sait SI bien de réputati m. Enfin , lui
ayant fait les off'res les plus polies ,
il prit congé de lui avec de grandes
mcirques de respect. L'Arigste, de rt-
45o A R I
tour à Ferrare , après trois ans d'ab-
sence , V fut occupé, pendant plusieurs
années , à composer, ou du moins à
faire jouer ses comédies sur le tb-éàtre
«le la cour, dans les fêtes que le duc
y donnait sans cesse. Il tiavaillail on
même temps à corriger , achever et
perfectionner son poërae , dont il
donna la seconde édition en i532.
Peu de temps après , il fut attaqué
d'une maladie de vessie, dont il mou-
rut après huit mois de souffrances ,
le 6 juin i555, dans la cinquante-
huitième année de son âge, I>'Arioste
joignait, aux avantages extérieuis de
la taille et de la figure , un caractère
doirx, des manières pOlies, et IVsprit
le plus aimable. S'il avait été riche ,
il eût aimé la magnificence. 11 aimait
les bâtiments et les jardins, plus qu'il
ne convenait à sa fortune. Obligé de
ne bâtir qu'une maison très-petite,
il l'avait du moins rendue agréable
et commode. 11 avait fait graver ce
distique latin sur l'entrée :
Par\'a , sed apta itithi, sed nulll obnoTiia , scd non
Sordida, parla meo sed lamea a-re dornus.
« Maison petite, mais commode pour
» moi , mais incommode à personne ,
« mais assez propre, mais pourîaut
i> achetée de mes propres fonds. »
Ces dcruieis mots prouvent que Ti-
rabosrhi a eu tort de répéter , après
d'autres biographes , que l'Arioste
tenait cette maison des libéralités du
duc Alphonse. Cette famille, destinée
à être encore plus ingrate envers un
autre grand poète, ne fit, en quelque
sorte, que pourvoir aux besoins de
l'Arioste, et ne fit rien pour sa for-
tune. Une autre circonstance de même
espèce est peut-être encore plus re-
marquable. Léon X , lorsqu'il était le
cardinal Jean de Médiris . exilé de
Florence avec toute sa famille , avait
été généreusement accueilli à la cour
de Ferrare : il s'v était lié de l'ami-
ARI
tié la plus intime avec l'Arioste, et
lui avait promis que , s'il parvenait
jamais au pouvoir, il s'en servirait
pour le rendre heureux. 11 devint
pape, et l'Arioste, qui alla le compli-
menter à Rome, ne reçut de lui d'autre
bienfait que le bref pontifical pour
l'impression de son poème, bref dont
l'expédition ne fut même pas gratuite.
C'est une singularité qu'il faut ajouter
à celles que présente le privilège
donné, par un tel pouvoir, pour la
publication d'un tel ouvrage. On de-
raaadait un jour à l'Arioste comment
il avait fait bâtir une maison si simple,
lui qui avait décrit dans son Roland
tant de palais magnifiques , tant de
beaux portiques et d'agréables fon-
taines : a C'est , répondit-il , parce
» qu'on rassemble Iji^n plus vite et
» plus facilement des mots que des
» pierres. » Cependant ce n'était pas
sans travail et sans peine qu'il rassem-
blait des mots, et qu'il composait ses
poésies. Il les corrigeait sans cesse,
et les manuscrits de son Roland ,
conservés à Ferrare, sont chargés de
ratures. Ceux du Tasse , au contraire ,
l'étaient f;"rt peu. C'est pour cela , sans
doute , que les beaux vers du Tasse ont
quelquefois , je ne sais quoi de pénible,
et que ceux de l'Arioste ont toujours
une admirable facilité. Lorsqu'il eut
choisi le sujet qu'il voulait traiter , le
cardinal Bembo , son ami , l'engageait
fortement à l'écrire en vers latins.
Il répondit qu'il aimait mieux être le
premier entre les poètes toscans, qu'à
peine le second parmi les latins. On
lui conseillait aussi de composer, non
un poème romanesque , mais un A'éri-'
table poème épique : « Je ferai un ro-
« man , répondit - il ( selon C^millo
» Pcllegrino , dans son Dinlopte sur
» la poésie épique]., mais je ra'éléve-
» rai si haut , par mon sujet et par
» mou slvle , que j'ùterai à tout autre-
ARI
V poète l'espérance de me surpasser
» et mcrae de m'égaler dans un
>> poërae du même genre que le mien. »
Cet auteur italien a peut-être mis dans
la bouche de l'Arioste son propre ju-
gement, peut-être aussi ce grand poète,
quoique doux et habituellement mo-
deste , sentait-il cependant sa force ,
et ne craignait-il pas de parler ainsi
dans un épanchemcnt d'amitié'. Ce qui
est certain , c'est qu'il tint parole. Au-
cun poète en elFet ne l'a égale dans
ce genre d' épopée , où l'imagination
a bien une autre carrière à fournir
([ue dans l'épope'e purement hèroi-
que. Aucun n'a mêle' avec autant d'a-
dresse, le sérieux elle plaisant, le
gracieux et le terrible, le sabiime et
le familier. Aucun n'a mené de front
un aussi grand nombre de person-
nages et d'actions diverses , qui tous
concourent au môme but. Aucun n'a
été plus poète dans son style , plus
varié dans ses tableaux , ])lus riche
dans ses descriptions , plus iiilèledans
la peinture des caraclères et des
mœurs , plus vrai, plus animé, plus
vivant. Pour lui préférer , pour lui
comparer même un autre poète épi-
que itahen, qui dispute ou partage
avec lui le premier rang, qu'aucun au-
tre poète moderne ne peut ni leur dis-
puter ni partager avec eux , il faut
commencer par établir la supériorité
du genre qu'a choisi le Tasse , sur ce-
lui que l'Arioste a préfë'i'é. Presque
partout oii l'on peut les comp.uer dans
des sujets parallèles, ou semblables, il
est rare que l'Homère de Ferrare n'ait
pas l'avantage sur son rival. Les deux
éditions les plus rares de ce poëme ,
sont : la première de Ferrare , 1 5 16,
in - 4°. 7 où il n'est qu'en quarante
chants, et la seconde , donnée aussi k
Feriare, par l'auteur, en 1 552, in-4". ,
ou il est en quarante- six chants, et
loi qu'il est toujours resté depuis.
ART 43 1
Cette dernière est cependant si incor-
recte , que l'on assure que le chagrin
qu'en eut l'Arioste contribua à lui
donner la maladie dont il mourut. On
distingue encore , parmi les éditions
rares , celle des Aide, Venise , i545 ,
in-4". , où sont les cinq chants dé-
tachés qui font suite au poëme; plu-
sieurs des éditions de Valgrisi , à Ve-
nise, dont la première est de i556,
plusieurs de celles de Gabriel Giolito,
aussi à Venise , dont la première est
de i549, ^' '^ dernièie de i56o;
mais plus encore celle de Franceschi ,
Venise, i584 , iu-fol., avec les argu-
ments de Scipiun Ammirato , les notes
et les avertissements de Ruscclli, la
l^ie de Vu4noste , écrite par J.-B.
Pigna , et par le Garofulo , plusieurs
autres pièces importantes et curieu-
ses , et surtout les belles gravures de
Girolamo Porro. Les exemplaires en
sont très-chers , principalement ceux
où la planche 54 ne manque pas.
Dans le plus grand nombre des exem-
plaires , au li'ju de la gravure du trente-
quatrième chant , qui doit représenter
la descente d'Astolphe aux enfers , et
son ascension dans la lune , où il
trouve S. Jean , et où il reprend la
fiole du bon sens de son cousin Ro-
land , et celle qui contenait le sien
même , on a répété la gravure du chant
précédent, qui représente Bradamante
et une société nombreuse , n^gardant
aux flambeaux , les guerres futures
d'Italie , peintes sur les murs de la
grande salle d'un château. On ignore la
cause de cette particularité; mais il
est bon que les amateurs en soient
instruits. Celle des éditions plus mo-
dernes qui a eu long - temps l'avan-
tage sur toutes les autres , est celle
qui fut donnée eu i 77'i , aVec les ca-
ractères de Baskerville , en 4 vol. gr.
in-8'. ; mais les deux plus belles édi-
tions de luxe , sont aujourd'hui celles
432 ARÏ
de Bodoni à Parnip , et de Miissi à
Milan. Le Roland furieux , traduit
en vers dans presque toutes les lan-
gues , l'a été' quatre fois eu prose dans
la notre , pendant le siècle dernier.
La traduction de Mirabaud est tron-
quée, altérée, et très-imparfaite ; celle
de Tressan , ouvrage de sa vieillesse,
est d'un style précieux, et souvent em-
phatique , qui est tout l'opposé de
celui de l'Arioste, et qu'on ne pardon-
nerait pas à un jeune homme; celle
de d'Ussieux est faible et sans cou-
leur; celle enGn qu'ont donnée Panc-
koukc et Framery , est simple , sou-
vent élégante , et presque toujours
liclcle ; c'est la plus utile pour l'étude
<>t l'intelligence du texte. Outre ce
poème, qui est son premier titre de
j^loire, on a de l'Arioste : L sept Sa-
tires , oîi la malice est sans amer-
tume, et qui tiennent plus de l'urba-
nité d'Horace que de l'àcreté de Ju-
venal ; elles ont de plus le mérite d'of-
frir un grand nombre de faits utiles
pour l'histoire de sa vie, et qui ne
sont même pas inutiles pour celle de
son temps; II. cinq comédies, Za Cas
saria , i Supposai , la meilleure des
siennes, ilNcffromanie, la Lena ei
la Scolastica; il commença cette der-
nière pour le mariage de M'"*". Renée,
fille du roi Louis XII , avec Hercule ,
lils du duc Alphonse ; mais il n'en fit
que trois actes et trois scènes; le reste
fut fait, après sa mort , par son frère
( iabriel. Son Cls Virginio la rait toute
entière en prose , et la refit ensuite en
vers. Aussi n'est - elle pas regardée
comme un ouvrage de l'Arioste, et les
académiciens de la Crusca ne la citent
ijas. La versification de ses quatre au-
tres comédies , est élégante et facile ;
mais il y emploie , du commencc-
}ncnt à la fin , le vers sdrucciolo ,
glissant, qu'on devrait plutôt appeler
saulillvint , et qui se termine toujours
ARI
par un dactyle ; cela produit une uni-»
formité fatigante à la lecture, et qui
doit l'être encore plus au théâtre. III.
Ses Rime , ou poésies diverses , con-
sistant en élégies , odes ou canzoni ,
sonnets , madrigaux, etc.; IV. ses
poésies latines , eu deux Uvres , im-
primées d'abord, en i553 , à Ve-
nise , avec celles de Pigna et de Celio
Calcagnini , et réimprimées ensuite
dans presque toutes les éditions de ses
œuvres ; V. un petit écrit en prose ,
intitulé : Erholalo , où il introduit uu
certain Antonio de Faenza , qui parle
de la noblesse de l'homme , et de l'art
de la médecine , imprimé à Venise ,
par Niccolini, en i545 , in-8'., avec
le portrait de l'Arioste , gravé en bois ,
réimprimé ensuite plusieurs fois dans
ses œuvres. Ces divers ouvrages ont
sans doute différents degrés de mérite;
mais on reconnaît dans tous la même
clarté d'idées , la même faciiilé de
style, et, selon les sujets , ce don de
plaire et cette grâce dont la nature
l'avait éminemment doué. G — t'.
ARIOSTO ( Gabriel ) , l'un des
frères du grand Arioste , eut aussi quel-
que talent, surtout pour la poésie latine.
Liho Giraldi en fait même un grand
éloge dans le Dialogue II des poètes
de son temps. Il était né contrefait , et
vécut dans de continuelles souffran-
ces. Il mourut à Ferrare, sa patrie,
vers l'an i552 , selon Mazziichclli ,
Scrittori ital. , et d'après les auteurs
du recueil intitulé : Rime scelle de
poeli Ferraresi ; mais ce dut être
beaucoup plus tard , puisqu'il laissa
un fils qui , selon IMazzuchelli , lui-
même, naquit en i555. Il est pro-
bable que celui des frères de l'Arioste
qui mourut eu i552, est Galasso ,
mort, selon le Garofalo dans sa yie
de l'Arioste , à lugolstadt , où il était
ambassadeur du duc de Ferrare . au-
près de l\nipcrtiii Quilcs-Quiuî. Ce
A'RI
fut Gabriel qui acheva la Scolastica ,
comédie que son frère Louis avait lais-
Se'e imparfaite. On a publié un volume
de ses poésies latines, Ferrare, i582,
in-8°. G— E.
ARIOSTO ( HoKACE ), fils du pré-
cédent , neveu du célèbre poète , et
poète lui-même , naquit en 1 555. Ba-
rulfaldi et Crescembini , ne le font
même naître qu'eu iSSp. Il faut donc
retarder de deux ou trois ans au
moins , et peut-être de six ou sept , la
mort de son père ( Foj. rarticle ci-
dessus). Il fut prêtre séculier et cha-
Tioine de la cathédrale de Ferrare. In-
time ami de l'abbé Angelo Grillo,
poète de quelque célébrité, il le fut
aussi du Tasse. Il lui donna une
grande preuve d'amitié, en composant
les argumejits de tous les chants de
la Jérusalem délivrée , qui y sont
joints dans plusieurs éditions de ce
poème. Dans la dispute qui s'éleva
entre les partisans de son oncle et
ceux du Tasse , Horace Arioste écrivit
un ouvrage intitulé : le Difese dell'
Orlandofurioso dell' AriostO', etc.;
inais dans ces défenses" mêmes, il té-
moigna tant d'admiration pour le
Tasse , que celui-ci lui e-i fit quelque
reproche dans une lettjc imprimée
parmi ses œuvres. Horace Arioste
avait entrepris un grand poème inti-
tule VAlfeo , dont il avait composé
S( ize chants lorsqu'il mourut , n'étant
âgé que de trente-huit ans, le 19 avril
1 5g5. Ces seize chants se sont conser-
vés long -temps en manuscrit à Fer-
rare ; ils appartenaient , dans le der-
nier siècle, au célèbre Baruflaldi. On
dit aussi qu'il avait composé une co-
médie intitulée : la Sirega ; mais elle
n'a jamais été imprimée. G — e.
ARIOT ( Thomas ). Foj. Hariot,
ARIOVISTE, en allemand, Ehren-
vest , chef germain , d'abord allié de
Home , se brouilla bientôt avec ciie ,
A R I 453
en soumettant à son pouvoir les jE-
duens , les Séquanois , et quelques
autres tribus de la Gaule. César le
fit engager à choisir un lieu où ils
pussent avoir une entrevue pour trai-
ter de leurs affaires : Arioviste l'é-
pondit que , a s'il avait besoin de
César , il irait le trouver , et que , si
César avait besoin de lui , il n'avait
qu'à venir le trouver à son tour ; que
du reste , il était fort surpris que
César et le peuple romain eussent
quelque chose à voir dans une partie
de la Gaule qu'il avait conquise. »
César irrité se disposa à marcher con-
tre lui ; mais l'armée romaine fut
saisie d'une telle frayeur, qu'un grand
nombre de soldats firent leur testa-
ment : il ne fallut rien moins que l'élo-
quence et les victoires passées de leur
général pour relever leur courage.
Lorsque les deux armées fiuent eu
présence, César eut, avec le chef ger-
main , une entrevue qui n'amena aucun
accommodement : deux jours après ,
il lui envoya des députés pour renou-
veler les négociations ; mais Arioviste
les fit mettre aux fers , s'approcha du
camp des Romains , chercha à inter-
cepter les convois ; et , soigneux ce-
pendant d'éviter une action , se con-
tenta d'escarraoucher avec sa cavale-
rie. La superstition des Germains
fournit bientôt à l'habileté de César le
moyen de les contraindre à un combat
désavantageux : il apprit , par les
prisonniers , que les matrones char-
gées de rendre des oracles , avaient
prédit que les Germains ne pouvaient
vaincre s'ils combattaient avant la
nouvelle lune. César s'empressa alors
de les attaquer, et,malgréleur courage
désespéré , malgré l'impossibilité oi!i ils
s'étaient mis de fuir , en s' entourant de
tout leur bagage mihtaire , la disci-
pline et la valeur romaine triomphè-
rent de leurs efforts -.quatre- vingt raille
2S
434 ART
Germains restèrent sur le champ de
bataille: Arioviste repassa le Rhin;
deux de ses femmes et une de ses
sœurs furent tuc'es dans l'action. Celte
victoire fut remportée à six journées
de Besançon. Ceux qui ont cru qu'il
s'agissait de six journées comme pour
des troupes , ont placé le lieu du com-
bat à Dampierre , village au confluent
du Doubs et de la Halle , distant de
sis joui-nées militaii-es de Besançon ,
et d'environ cinquante milles du Rhin.
Mais ceux qui ont pensé que César
avait fait faire à ses troupes des
marches forcées , ont placé ce lieu
plus près du Hhiu , c'est-à-dire, à une
dibtance de cinq milles. G — t.
ARIPKRT. Foj. Aribert.
ARISI ( François ) , savant littéra-
teur et jurisconsulte de Crémone, y
naquit , le 5 février iG57 , de Louis
Arisi et de Lucie Ncgri , tleux familles
distinguées de cette ville. Presque
toujours malade dans son enfance ,
il fut confié aux soins d'un précep-
teur , prêtre séculier, et fil ensuite chez
les jésuites son cours de philosophie.
Son père l'envoya, en 1(374 -, étudier
les lois à Rome : il y resta jusqu'en
1O77 , et passa ensuite à Bologne ,
pour y suivre les mêmes études : mais
la mort de son père le força , l'année
.suivante, à revenir dans sa patrie.
Enfin , désirant achever son cours ,
il alla d'abord à Pavic , où il obtint le
doctorat eu 1679 ; de là il se rendit
à INlilan , et travailla pendant six mois,
sous un avocat célèbre. De retour à
Crémone , il partageait son temps en-
tre les études de l'état qu'il avait em-
brassé , et la culture des lettres ,
surtout de la poésie , pour laquelle il
avait eu , dès sa première jeunesse ,
tm penchant particulier. En relation
avec les plus célèbres littérateurs de
son temps, avec lesquels il entre-
tenait une correspondance assidue ,
ARÏ
r<iisi fut aussi • membre du plu*
grand nombre des académies d'Ita-
lie. La réputation de savoir et de
probité dont il jouissait dans sa
profession de jurisconsulte , le fit re-
vêtir de plusieurs emplois honorables
dans lesquels il acquit une grande
considération: il fut envoyé, jusqu'à
quatorze fois , à Milan , pour les af-
faires les plus épineuses , qu'il ter-
mina toujours à la satisfaction et
des ministxes et de sa patrie. Enfin ,
après une assez longue maladie , il
mourut , le aS janvier 174^ . à
l'âge de quatre-vingt-six ans , quatre
mois et dix jours. Mazzuchelli donne
la liste des ouvrages d'Arisi; elle se
monte à soixante-quatre articles , tant
manuscrits qu'imprimés : parmi ces
derniers, nous citerons: L la Tirra-
nide soggiogaîa , Oratorio pour St.-
Antoine de Padoue, Crémone, 1677,
in-4°. : il en publia trois autres dans
différentes années , pour la fête du
même saint ; IL Cremona litterata,
sen in Cremonenses , doclrind et
litterariis digiiitatihiis emincntiores ,
chronologicœ adnotaliones , 5 vol.
in-fol. Les deux premiers parurent à
Parme , en 1702 et 1703, et le troi-
sième à Crémone en 174'' Wl.Sena-
toruni Mediolanensiavi ex collagio
judicum Cremonœ ab ipso erecto ,
iisque ad hœc tempora continuata
séries, etc. Crémone, 1703, in-fol.
W . Rime per le sacre stimate del
Santo Patriarca Francesco , etc. ,
Crémone, 171 3, in-4". On ne croi-
rait peut-être pas que l'on ])ùt faire
U'ois cent vingt-cinq sonnets sur les
stigmates de S. François : ce volume
n'en contient, cependant, ni plus ni
moins. Y. La Findemmia, Baccha-
nale ditirambico. Crémone, l'Jiif
in- 12; VL il Tabacco masticato ,
e fiimato , trattenimenii ditiramhici
colle sue awiotuzioni j. ^lilan. ir-i^f
ARÎ
in-'i".; Vîl. il Cioccolato , tratteni-
menlo dilirambico, Crémone, 1730,
in-4". ; Vlll. Poésie liriche , Gié-
itione , i""'. partie, 1680, 2^ partie ,
1684 , in-i-;t. IX. Le 20«. et dernier
chant du poiime plaisant et original,
intitulé : Beriholdo cou Berjjioldino
e Cacasenno , Bologne, 1756, iu-4'.
X. Un grand nombre de sunnets et
d'autres poésies , dans les Rime dé"
Pastori drcadi , et dans plusieurs
autres recueils. G — e.
AKISTAGORAS , fils de Molpago-
ras de Milet , avait épousé la fille
d'Histiaeus , tyran de cette ville, qui,
en partant pour Suse , lui en confia
le gouvernement. S'étant engagea faire,
pour le roi de Perse , la conquête de
l'île de INaxos , il eut l'imprudence de
se brouiller avec Artaphernes, satrape
de la Lydie , qui fit échouer son expé-
dition. Craignant alors qu'on ne le
rendît responsable de cet événement,
et poussé d'Hilleurs par les conseils
d'Histiœus, il se décida à faire révol-
ter les Ioniens. Il chassa donc de
toutes les villes les tyrans qui y avaient
été placés par le roi de Perse , et y
rétablit le gouvernement populaire. 11
alla ensuite dans la Grèce, pour ob-
tenir des secours ; il s'adressa d'abord
aux Lacédémoniens qui le refusèrent:
mais il tut plus heureux à Athènes ,
et on lui accorda vingt vaisseaux aux-
quels se joignirent cinq vaisseaux Eré-
trieus. Lorsqu'ils furent arrivés dans
l'Ionie, il envoya les troupes qui y
étaient embarquées , avec celles qu'il
avait rassemblées , pour assiéger la
ville de Sardes , qui fut prise et brû-
lée par cette armée , l'an 5o5 avant
J.-(i. Les Athéniens retournèrent en-
suite dans leur pays. Les Ioniens ,
quoique restés seuls, persistèrent dans
leur révolte , et soulevèrent presque
toute la Carie, ainsi que les îles : mais
Aristagoras n'avait pas assez d'habi-
A R I 45Sr
lete pour soutenir ce qu'il avait com-
mencé , et , après avoir éprouvé plu-
sieurs échecs , il désespéra de pou-
voir résister aux forces du roi de
Perse, et ayant confié Milet à Pytha-
gore , il s embarqua avec ceux qui
voulurent le suivre , et alla s'établir
dans la Thrace , où il fut tué par les
barbares , vers l'an 498 avant J.-C.
C— K.
ARIST ARQUE , astronome grec ,
né à Samos, et, selon Plutarque, con-
temporain de CléanlLes, successeur
de Zenon , dans la 1 29*". olympiade ,
a64 ans avant J.-C. Il était connu
comme astronome, du temps d'Archi-
mcde , qui parla de lui dans son Psam-
mile, ou J^re/iar/W. Aristarque sou-
tint l'opinion qu'on dit que Pythagore
avait enseignée avant lui, et qui a été
démontrée par les astronomes mo-
dernes , que la terre tourne autour du
soleil. Dans l'ouvrage qu'on vient de
citer, Archimède dit : « Aristarque de
)> Samos , l'éfutant ces opinions des
» astrologues, a fait une hypothèse^
» d'oîi il résulte que le monde est beau-
» coup plus grand que nous ne l'avons
» cru; car il suppose que les étoiles
» fixes et le soleil sont immobiles ,
» et que la terre tourne autour da
» soleil , dans la circonférence d'un
» cercle. » Plutarque ( Quœst. Plat. )
observe que cette opinion du mouve-
ment de la terre fut enseignée comme
une hypothèse, par Aristarque, et
que Séleucus l'établit dogmatiquement.
Sextus Empiricus {Adversus Mathe-
matheos ) dit qu' Aristarque niait le
mouvement de l'uniA'ers, mais qu'il
croyait que la terre est mobile. Au
moyen de la judicieuse correction du
passage de Plutarque, proposée par
Gassendi , et adoptée par Ménage ,
Fabricius et Bayle , on a un autre té-
moignage décisif, qui prouve qu' Aris-
tarque souteoait cette opinion. Le pas-
i8..
43G A RI
saj^e, corrige de cette manitire, peut
être ainsi rendu ( Plurarque , De facie
in orbe lunœ ) : « Ne uous accusez
» point d'iiupicte , comme Cléauthe
» pense que ies Grecs auraient dû en
» accuser Aristarqvic le samien, parce
» qu'il avait dc'ti uit les foudemt'nts du
» monde, et qu'il voulait exjjliqiier les
M aspects des astres, eu supposant
» que les cicux sont immol aies, et qie
» la terre tourne autour, dins un or-
» bite oblique, et, en même temps,
» tourne sur son axe. » Aristarqiie
inventa une espèce particulière de ca-
dran solaire, dont parle \ itruve. Le
seul ouvrage existant d'Anstarque, est
un Traité sur les grandeurs et les
distances du Soleil et de la Lune. Il
est à remarquer que, dans cet ouvra-
ge, Aristarque ne dit pas un seul mot
du système qui lui est attribue'; mais
ou y trouve le moyen ingénieux par
lequel il essaie de prouver (pic la dis-
tance du soleil à la terre est de dix-
huit à vingt fois plus grande que celle
de la 'une à la terre. Cette détermina-
tion est fort inexacte , ainsi que tous
les rapports de grandeurs calcules par
Aristarque ; mais la méthode ètùt
bonne, et, pendant 1800 ans, les as-
tronomes n'en ont pas connu de meil-
leure : elle consiste à mesurer l'angle
entre la lune et le soleil, à l'instant où
la lune entre dans son premier ou son
dernier quartier. Si l'on prend pour
rayon ou pour unité' la distance de la
lunt- à la terre, la distance du soleil à
la terre sera la sécante de cet angle. La
difficulté était de saisir avec assez de
précision l'instant où la lune est moi-
tié éclairée et moitié obscure, où la
lumière et l'ombre ont pour limite
commune une ligne droite. Aristarque
trouva qu'il s'en fallait de 5 ' que cet
angle ne fût de 90" ; il ne s'en faut que
de quelques minutes. Il fit, en ccusé-
quence , la distanûc vingt fois trop pe-
ARÎ
tite. L'ouvrage d'Aristarque fut publié
in-fol., à Venise, en 1498, ensuite
parWaIlis,in-8'., Oxford, 1688, et
dans le '5". vol. des ouvrages de Wallis ,
imprimé in-fol., à Oxford, en 1699.
D— L— E.
ARISTARQUE. Ce critique célè-
bre, formé à l'école d'Aristophanes le
grammairien, et qui a mérité que son
nom désignât, dans tous les siècles,
un censeur sévère , mais juste et éclai-
ré , était né dans la Samothracc , 160
ans av. J. G. , et eut Alexandrie p'iur
patrie aduptive. Il fut fort estimé de
Ptolémée Philomctor, qui lui confia
l'éducation de ses enfants. Il avait
beaucoup travaillé sur Pindare , sur
Aratus , et sur d'autres poètes ; mais
il n'est plus connu aujourd'hui que
comme éditeur d'Homère. Jamais cri-
tique plus rigoureuse ne fut exercée
sur les ouvrages de ce génie immor-
tel. Les éditeurs précédents, depuis
Lycurgue jusqu'au poète Aratus , s'é-
taient bornés à recueillir , à mettre en
ordre et à publier, le plus correcte-
ment possible , tout ce qu'ils avaient
pu rasseinljler d'Homère. Aristarque
lit ])lus : il nota sévèrement tous les
vers qui lui déplaisaient, admettant ou
rej.t.uit sans scrupule tout ce qui lui
paraissait plus ou moins digne du
prince des poètes. Aussi, son édition
fut -elle vivement attaquée. Zénodote,
le leune , le stoïcien Cléauthe , Lucien ,
Phil'jxène , et une foule d'autres s'é-
levèrent contre Aristarque. Slrabon,
Plutarquc et Athénée ne l'épargnèrent
pas davantage. Grâce à l'cxcelJentti
édition de Y Iliade , publiée par \il-
loison , les philologues modernes sont
à portée d'apprécier aujourd'hui la
justesse ou la témérité des conjec-
tures d'Aristarque et des premiers édi-
teurs d'Homère. Ce grand critique
mourur dans l'île de Chypre, âgé de
soixante- douze ans. Il était attaque'
ART
«l'une tydroplsie , dont il desospërait
de s^uérir , et se laissa , dit-on , mou-
rir de faim , pour se tirer d'aflàirc. —
Suidas fait mention d'un autre Aris-
TABQCE, poète tragique, de Te'gée en
Arcadie , qui vécut plus de cent ans ,
fut le contemporain d'Euripide , et fît ,
dit-on , chausser, le premier, le co-
thurne aux acteurs tr.''giques. 11 avait
compose' soixonte-dix tragédies, dont
une ( Achillis ) avait été traduite par
Ennius, et imitée par Plante dans son
Pœnulus. Athénée cite cet Aristar-
que vers la fin de sou i5"*. livre.
A_D— R.
ARISTÉE. Nous avons, sous son
nom, ? Histoire des Septante, c'est-
à-dire, de la manière doiit a été faite la
version grecque de la Bible , connue
sous le nom des Septante. Cet Ari;tée ,
qui se dit attaché à la personne de Ptolé-
mée Philadelphe , raconte que ce prin-
ce, ayant chargé Démétrius do Pha-
lère du soin de lui former une biljlio-
thèque , apprit de lui que les juifs
avaient, dans leur langue, des livres
qu'il étaitimpoitant de faire traduire en
grec, pour les avoir dans sa bibliothè-
que. Ptolémée, d'après cet avis, envoya
les ambassadeurs, du nombre des-
quels était Aristée, et des présents
considérables à Éléazar, souverain pon-
tife des juifs, pour lui demai/der ces
livres, et des interprètes qui pussent
les traduire. Eléazar choisit, dans
chacune des. douze tribus, six person-
nes également versées dans les livres
saints et dans la langue grecque, et il
les chargea de porter ces livres à Pto-
lémée et de les traduire; on pinça ces
soixante-douze interprètes dans l'île de
Phares, pour qu'ils fussent moins dé-
tournés de leur travail, et ils v firent
cette version célèbre, dont faisaient
usage dans leurs synagogues les juifs
établis en Egypte , qui ignoraient ,
«n général, la langue '^hébraïquej et
ARI 437
elle est encore la seule qwe reconnais- ,
sent les églises grecques. Pour rendre
la chose plus merveilleuse, on ajouta,
par la suite, que ocs soixante-douze
interprètes, enfermés dans des cellules
particulières, ti'aduisirent chacun la
Bible eu entier , et que , lorsqu'on
compara ces traductions, on trouva
qu'ils s'étaieiit rencontrés, non seule-
ment pour le sens, mais encore pour
les expressions. Il est reconnu main-
tenant, que toute cette histoire a été
imaginée par quelque juif d'Alexau-
drie, qui a voulu relever le mérite de
cette version , que les juifs de la Pales-
tine étaient bien éloignés d'approuver,
puisqu'ils la regardaient comme ime
profanation, pour l'expiation de la-
quelle ils instituèrent, dit-on, un deuil
annuel. Cependant , l'ouvrage que
nous avons sous le nom diAristé^
es? ancien, car Philon le juif, et Jo-
scphe , le citent. Il a été irapiimé plu-
sieurs fois séparément : la meilleure
édition est celle qui a paru en gi ec et
en latin, Oxi nii, iGg'i, iii-8'. On le
trouve sussi , avec une léfutation
très-savanîc, dans l'ouvrage intitulé:
Humfr. Hodii de iibliorum textibus
originalibus libri I J^, Oxoiii, 1 705,
in-fol., et, à la suite de la disserta-
tion de van Dale, De LXX. Inter-
prelibus super Arisleam, Amstelo-
dami , 1705, in-4 . On croit mainte-
nant que la version , dite des Septante,
a été faite par parties, et à différent 35
époques, par des juifs d'Alexandrie :
celle du Pentateuque est la plus an-
ci( une , et peut bien remonter au règne
de Ptolémée Philadelphe. Les autre»
livres ont été traduits un peu plus
tard; mais long-temps avant la con,-
quète de l'Egypte par les Romain^.
Cette traduction est la première doî\t
les chrétiens se soient servis, et c'est
d'après elle que les Apôtres citen.t
l'Ancien Testament. Elle a été impr^
438 A R I
mee un gr.Tncl nombre <1p fuis ; les meil-
leures éditions sont : celles qui furent
données, i". pai les ordres de Sixte-
Quiiit, d'après un manuscrit très-an-
cien du Vatican, Rome, 1587, '"^'^ol-j
réimprimée avec le Nouveau Testa-
ment, gr, lat. studio Jo. Morinî, Pa-
risiis. 1628, in-fol., 5 vol.; 1°. par
Lambert BoS, d'après le manusciit du
Vatican, avec des variantes, Franec-
kerae, 1709, in-4"., 2 vol.; 5". par
Grabc, d'après le manuscrit d'Alexan-
drie, qui se trouve dans la bibliothè-
que du roi d'Angleterre, Oxonii,
1707 et suiv. , in-fo!., 1 vol., rc'im-
prime'e à Zinich ( Tigwii), par les
soins de Bieitinger, 1700, in-4'., 4
vol.; ^". par Davitl Millius, Trajecti
nd Rlienum, 1723, in-8'., 2 vol.
M. Holmes , savant anglais , avait
entrepris d'en donner une, avec les
variantes de tous les manuscrits exis-
tants : il en a paru un spécimen, con-
tenant la Genèse, Oxonii, 1798, in-
fol. M. Holmes étant mort, je ne sais
si l'ouvrage se continue. Le livre de
Daniel, qui se trouve dans toutes les
éditions des LXX, n'était point de la
même traduction que le reste; celle
des LXX a e'te' imprimée, pour la
première fois , à Rome, «772, in-fol. ,
et ré'mpiiuKc avec les notes de
M. Cb. Sé^aar, Trajecti ad Rhenum,
1775,11-8". G — R.
ARISTENÈTE, auteur grec du
4". siècle, ne à ISicée, mourut dans
ie tremblement de terre de Niconic-
die, en ô58. Il fut i^•2rai do Libanius.
On prc'snme qu'il est l'auteur dr s let-
tres connues sous son nom. Ces lettres
furent imprimées, pour la première
fois . p.ir les soins de Sarabucus , An-
vers , 1 50(3 , in-^". Josias Mercier en
donna, ru i5()5, uneu» vivelleédifion,
avec une version latine et des notes,
réimprimée en iGoo, i6io, lôSg.
La meilleure édition est «elle qui a été
ART
donnée par Fr. L. Abrescli , Zwoll,
1749, in-8". On trouve à la suite
Lectionum AristeneLarum libri duo.
On doit y joindre P'irorum alir/not
eruditorum in Aristœnetœ epistolas
conjecturœ, Amsterdam, 1 752, in-8".
lia paru à Vienne, en i8o5, une édi-
tion toute grecque d'Aristenète, avec
une lettre qui u'av.iit jamais été impri-
mée; mais on attend toujours celle qu'a
promise M. Bast , et dont il avait, dès
179G, publié un spécimen. Il existe
plusieurs traduciions françaises des
Lettres d'Aristenète. Cyre Foucault
en donna une dès 1 597. Lesage publia
la sienne en 1695, iu-8**. : elle a été
réimprimée à Lille , dans le forjnat
in- 1 8 , et insérée dans le Manuel des
Boudoirs. Cette traduction est bien
moins exacte que celle de Cyre-Fou-
caull. I\L iMoreau , procureur du roi
au Châtelet donna, en I75i , une
nouvelle traduction , ou plutôt imi-
tai ion d'une partie des Lettres i^A-
ristenèle. M. Félix Nogarct a pu-
blié, en J797, 2 vol. in- 18, YAris-
tenètc français. C'est une espèce
d'imitation des Lettres d'Aristenète.
M. Boissonade a traduit en entier cet
auteur , et son travail , comme celui
de AI. Bast, n'a pas encore vu le jour.
« Des critiques très -éclairés, dit le
» moderne traducteur, ont parlé du
» style des Lettres d'Aristenète cixec
» beaucoup d'éloges ; mais il faut con-
» venir qu'il manque trop souvent de
» goût et de naturel, qu'il est pres-
» que toujours déclamatoire , et que
» cet ouvrage n'a vraiment de mérite
» que celui de son antiquité, et des
» peintures toujours ])iecieuses des
» mœurs de la Grèce ancienne. »
A. B— T.
ARISTIDE, fils de Lysimaquc, de
la tribu Antiochide, était de l'une des
principales familles d' Athènes. 11 se
distingua de bonne heure par une
ARI
probité sëvèrc , ce qui lui valut le snr-
iioni de Juste. Hélait polemarque, ou
capitaine de sa tribu , lorsque les
Alhe'nicns combattirent les Perses à
Maratlion. Chacun de ces poléraarqucs
avait à son tour le commandement de
l'armée, pour un jour seulement, ce qui
em|)èchait qu'on ne pût mettre de la
suite dans les opérations militaires ;
Aristide, sentant le vice de cette institu-
tion , céda son jour à Miltiades, celui
d'entre eux qui avait le plus de ta-
lents , et engagea les autres polémar-
ques à en faire de même ; et ce fut
principalement à cette mesure qu'on
dut le gain de la bataille de Mara-
thon. Après le combat , il res'a avec
sa tribu pour garder les prisonniers
rt les dépouilles des Perses , tandis que
les neuf autres retournèrent en hâte à
la ville, dans la crainte que les Perses
ne tentassent un débarquement. 11 fut
archonte l'année suivante. La consi-
dération dont il jouissait excita la ja-
lousie de Thémistocles , qui cherchait
â s'avancer aux dépens de tout ce
qu'il y avait de plus dislingué à Athè-
nes ; il n'osa pas l'attaquer ouverte-
ment ; mais il fit répandre sourdement
le bruit qu'Aristide s'arrogeait une es-
pèce de royauté, en attirant à lui tous
les procès pour les accommoder , ce
qui laissait les tribunaux dans l'inac-
tion , accusation d'un grand poids au-
près de la dernière classe du peu-
ple , à qui les jugements étaient aban-
donnes , et qui tenait beaucoup à ces
fonctions à cause du salaire qui y
était attaché. Ces insinuations produi-
sirent leur effet , Aristide fut exilé par
l'ostracisme , moyen dont le peuple
athénien , naturellement jaloux et in-
grat , se servait pour se débarrasser
de ceux dont le mérite l'offusquait.
On raconte à ce sujet qu'un citoyen
obscur qui se trouvait à côté d'Aris-
tide , dans l'assemblée où il fut exilé,
ARI
4^9
s'adressa à lui-même pour faire écrire
son nom sur sa coquille. « Aristide
» vous aurait-il offensé , lui demanda
» celui-ci? — Non, répondit l'homme
» du peuple ; je ne le connais même
» pas ; mais je suis las de l'entendre
» toujours nommer \e Juste ». En quit-
tant la ville , il pria les dieux qu'il n'ar-
rivât rien à sa patrie qui pût le faire
regretter. Ses vœux ne furent point
exaucés ; car Xerxès vint, trois ans
après, attaquer la Grèce avec une armée
innombrable. Aristide, qui était alors k
Égine , V nt à Salamine; et , ayant dit
appeler Thémistocles , il se réconcilia
avec lui , et lui annonça que l'armée
grecque était presque enveloppée par
les Perses ; Thémistocles , alors , lui fit
part du stratagème qu'il avait employé
pour empêcher les forces navales de
la Grèce de se séparer. Aristide passa
avec quelques troupes dans la petite
île de Psyttalie, qu'il reprit aux Per-
ses : ce qui fut d'un grand secours aux
Grecs, ceux dont les vaisseaux étaient
submergés y trouvant un refuge as-
suré. 11 commanda les Athéniens à la
bataille de Platée , et eut beaucoup
de part à la victoire qui fut remportée
sur les Perses. On croit qu'il fut encore
archonte l'année suivante. Ilfit rendre
une loi pour que le peuple fût admis à
toutes les places , même à celle d'ar-
chonte. Thémistocles ayant annoncé
qu'il avait un projet très - important
pour la république; mais qu'il ne pou-
vait pas communiquer en assemblée
publique , on lui dit d'en faire part à
Aristide , et de le discuter avec lui • ce
projet était de brûler les vaisseaux des
Grecs qui étaient tous réunis dans un
port voisin , pour assurer l'empire de
la mer aux Athéniens. Aristide vint
dire au peuple qu'il n'y avait rien de
plus avantageux et en même temps de
plus injuste que le projet de Thémis-
tocle, et on le rejeta sur-le-champ. Les
44o A R I
Grecs avaient euvoyé en Asie une es-
cadre considérable pour faire la guerre
nu roi de Perse , et Pausauias , l'un
des rois de Sparte qui en avait le com-
mandement , se conduisait avec beau-
coup de hauteur et d'insolence envers
les allies ; Cimon et Aristide étant ve-
nus prendre celui des vaisseaux athé-
niens qui faisaient partie de cette es-
cadre , mirent tant de douceur et de
modération dans leur conduite, que
les Grecs abandonnèrent les Lacédé-
inoniens et décernèrent le commande-
ment général aux Athéniens. Aristide
les décida ensuite a se soumettre à une
contributiou réglée pour subvenir aux
frais de la guerre, contribution qui
devait être payée entre les mains des
trésoriers nommés en commun , et
déposée à Délos. On le chargea d'en
faire lui-même la répartition , et il s'en
acquitta d'une manière qui ne fit que
confirmer la haute opinion qu'on avait
de son équité. Plutarque raconte que
celte répartition fut l'objet d'un traité
entre les Athéniens, d'un côté, et les
alliés de l'autre , dont l'observation fut
sanctionnée par les serments les plus
sacrés qu'Aristide prêta au nom de ses
concitoyens ; que l'occasion s'étant
présentée par la suite de violer ce
traité , il dit aux Athéniens qu'ils pou-
vaient agir suivant leurs intérêts , et
rejeter le parjure sur lui. 11 ajoute que
lorsqu'on proposa d'enlever de Délos
les sommes qui y étaient en dépôt
pour les apporter à Athènes , il l'ap-
prouva , en disant que cela était utile
quoique injuste. Ces deux anecdotes
sont si peu dans le caractère d'Aris-
tide , que je ne balance pas à les re-
jeter. Il n'y avait pas besoin d'un traité
pour que les Grecs donnassent aux
Athéniens le commandement de leurs
forces réunies , et l'argent de Délos
BC fut transporté à Athènes que long-
temps après la mort d' Aristide. Plu-
ARÎ
tarque , qui n'est pas très-sévère dans
le choix de ses anecdotes , avait tiré
ces deux-là d'un ouvrage attribué au
philosophe Théophraste , mais qui
était sans doute supposé. On ne doit
pas ajouter plus de foi à l'anecdote
suivante. Plutarque dit qu'Aristide
voyant que Thémistocles était tiès-
remuant et s'opposait à toutes les
propositions qu'il faisait , prit le parti
d'en faire de même, et qu'ayant uu
jour fait rejeter un projet très-avan-
tageux qu'avait présenté son antago-
niste , il ne put s'empêcher de dire en
sortant qu'il n'y aurait pas de salut
pour la république , qu'on ne les eût
jetés tous les deux dans le Barathrum ,
lieu où l'on précipitait les malfaiteurs.
11 mourut à un âge très -avancé, et ,
comme il ne laissa pas de quoi faire
les frais de sa sépulture, le peuple s'en
chargea et lui fit ériger un tombeau à
Phalères. Il avait deux filles, et uu fils
nommé Lysimaqiie. On dota les deux
premières aux dépens de la républi-
que , et on leur donna à chacune 5,ooo
drachmes ( 2,'^ oofr.); on donna à son
fils I CD mines d'argent ( 9,000 fr.), et
un terrain planté d'arbres, de cent
plethres d'étendue ( le plethre était
d'un peu plus de 1 4 toises en carré j.
Quelques auteurs disent que Socrate,
quoique déjà marié, épousa Myrto ,
la petite-fille d'Aristide, qui se trou-
vait veuve et dans la plus grande in-
digence ; mais Plutaïque lui-même
révoque ce fait eu doute. La /7e d'A-
ristide a été écrite par Plutarque et par
Cornélius Népos. C — r.
ARISTIDE de Milct , écrivain dont
l'époque n'est pas bien connue, quoi-
qu'on sache qu'il florissait long-temps
avant J.-C. Il avait écrit diflérents
ouvrages historiques dans lesquels il y
avait beaucoup de fables , à en juger
par ce que nous en trouvons dans les
anciens. Il était beaucoup plus connu
par SCS Milèsiaques , qui étaient un
recueil de contes très-obscènes , et Plu-
tarque raconte que Surëna les ayant
trouve's dans le bagage d'un Romain
de l'arme'e de Crassus , les fit voir au
Se'nat de Se'ieucie , pour le mettre à
portée de juger de la dissolution des
mœurs des Romains , qui , au milieu
même des camps , se livraient à des
lectures de ce genre. Siscnna les avait
traduites en latin. Apulée, dans sa
pre'face de ÏAne d'or, avertit qu'il
va écrire des contes à la Milésiaque.
C— R.
ARISTIDE (^uus ), disciple de
Pole'mon , était né à Hadrianes dans
la Bitliynie , l'an de J.-C. 1 29. Après
avoir fi c'quenté les écoles des rhéteurs
les plys célèbres de son temps , il en-
treprit plusieurs voyages , poussa ses
courses jusque dans l'Étliiopie, et se
vantait d'avoir parcouru quatre fois
l'Egypte toute entière. Il se fixa enfin
à Smyrne , où son éloquence lui fit
bientôt une grande réputation ; mais
ce qui contribua le plus à sa célébrité,
ce fut le service qu'il rendit à cette
ville , presque entièrement renver-
sée, l'an lyHde J.-C. , par un trem-
blement déterre. L'empereur Antonin
lui en accorda la restauration ; et la
reconnaissance des habitants fut sans
bornes. Ou éleva à Aristide une statue
d'airain auprès du temple d'Escu-
lape. Ce rhéteur était fort instruit ,
écrivait et parlait avec une grâce par-
ticulière, mais s'exagérait son mérite
comme orateur , au point d'oser lutter
avec Isocrate ( dans son Panathé-
ndique ) pour l'élégance et la pureté
du style 5 et avec Démosthènes lui-
même , pour la force et la véhé-
mence , dans son Discours contre
Lepline. Il imposa réellement à la
plupart de ses contemporains -, mais
la postérité a considérablement ra-
battu de ces éloges outrés ; et les juges
ARI 4/n
ëclaire's ont reconnu que le principal ,
pour ne pas dire l'unique mérite des
cinquante-quatre Discours qui nous
restent d'Aristide , consiste dans le
choix et l'arrangement des mots , vain
et frivole artifice qui ne déguise ja-
mais qu'imparfaitement le vide des
choses. Les Discours d'Aristide ont
été publiés , pour la première fois , à
Florence ( 1 5 1 "j ) , chez les Juntes ,
in-fol. j à Venise , chez les Aides ,
i5'27; à Genève, i6o4,5 vol.in-8°.,
par P. Etienne ; à Oxford, enfin ,
1 7'22 — 5o, par Samuel Jebb , 2 vol.
in-4°., avec les Notes et coiTicùons
de Canter , Paulmicr , Spanheira ,
Normann, Tristan, T. Lefcvre, L. Bos,
et celles de l'éditeur, édition Irès-
incorrecte et très-incommode , comme
la plupart de celles publiées en Angle-
terre. A la suitede son édition du /?i5-
coiirs de Démosthcnes contre Lep-
tine, M. Wolf a publié celui d'Aris-
tide sur le même sujet ; c'est une
simple réimpression du texte grec ,
donné pour la première fois à Venise,
i'j85, par le savant abbé Morelli.
A_D— R.
ARISTIDE ( S. ) , apologiste de la
religion, était Athénien de naissance ,
philosophede profession, dont il garda
l'habit, même après avoir embrassé le
christianisme. L'empereur Adrien se
trouvant à Athènes, en 1 25, Aristide
lui présenta lui-même une Apologie
pour les chrétiens, afui de faire cesser
la persécution qu'on exerçait contre
eux dans toute l'étendue de l'empire.
Cette Apologie contribua à faire rendre
le célèbre édit par lequel l'empereur
ordonna de ne faire mourir personne
qu'après une accusation et ime con-
viction juridique de son crime , ce qui
étant appliqué aux chrétiens leur
procura plus de calme qu'ils n'en
avaient eu jusque-là. Cet ouvrage, qui
fut regardé comme uu monunieiit de
/.^'i ARÏ
l'esprit el de l'eloquenoc de son au-
teur, est perdu, S. Jérôme, qui l'avait
lu, nous apprend qu'il était rempli de
passages choisis des philosophes. Adon
prétend que cette Apologie se conser-
vait encore de son temps à Athènes.
La Guilletière assure même dans son
Athènes ancienne et moderne , que
quelques caloyers se vantent de la
posséder dans la bibliothèque du mo-
nastère de Medelli , à sis railles d'A-
thènes. T — D.
ARISTIDE QUINTILIEN, vivait ,
à ce qu'on croit, vers le commence-
ment du 1". siècle de notre ère,iui peu
avant Ptolémée. Nous avons de lui trois
livres sur la musique en grec, dont
la meilleure édition est celle que M.
Meibomius a donnée en grec et en
latin , avec ses notes, dans le Recueil
iniitïdé: Antiqiue miisicœ auctores,
Amstclodami, Lud. Elzevirius, i65-2,
in-4''. Aristide ne s'appesantit point,
dans ce Traité, sur«la partie technique
de la musique , mais sur la partie
morale. 11 est étonnant q'.ie cet ou-
vrage , p!cin de s.^ges principes , d'es-
prit et de grâce , n'ait pas trouvé un
traducteur français. C — r.
ARISTIDE de Thèbes , peintre ,
fut élève d'Euxénidas , et vécut vers
la 1 10*". olympiade, 5.(0 ans av. J-C.
11 fut le premier qui sut donner de
l'expression aux figm-es , et y retracer
le caractèi e des passions et les mou-
vements de l'ame. Son chef-d'œuvre
était un tableau représentant le sac
d'une ville ; on y voyait une mère
blessée et mourante , avant près d'elle
son enfant qui cherchait encore la
mamelle ; les traits de cette femme
exprimaient'i'inquiétude qu'elle éprou-
vait, que l'eufant ne suçât le sang dont
elle était baignée. Alexandre fit trans-
porter ce tableau à Pella. Aristide pei-
gnit pour Mnason , tyran d'Elatée,
wn combat livré aux Perses , et ce
ARÎ
tableau lui fut payé à raison d'une
mine par figure; il y en avait cent.
Pline cite en détail les principaux ou-
vrages d'Aristide ; une grande par-
tie fut détruite à la prise de Corintlie
par les Romains. Polybe rapporte
que les tableaux étaient jetés pêle-mêle,
et que les soldats jouaient aux dés
dessus, sans en connaître le prix. Ee
roi Attale avant aperçu , lors de la
vente du butin , un tableau de Bac-
chiis , de la main d'Aristide , le pava
6ooo sesterces. Ce prix fit soupçon-
ner au consul Mumraius le mérite de
l'ouvrage; il le relira des mains d'At-
tale , et le porta à Rome , où l'on
n'avait point encore vu de peinture
étrangère. Un autre tableau du même
artiste fut brûlé à Rome dans l'incen-
die du temple de Gérés. Aristide, eu
mourant , laissa imparfaite une 7m
que personne n'osa terminer. Ses prin-
cipaux élèves furent Euphranor, An-
torides , et ses propres enfants , Ni-
céros et Arislippe : ce dernier avait
peint un Satyre avec une coupe sur
la tête. On croit aussi qu'Aristide
avait connu la peinture à l'encaus-
tique.— Piiiie parle d'un autre Aris-
tide , peintre, élève de Nicomaque.
— 11 y a eu encore un statuaire de ce
nom , élève de Polyelète , et qui ex-
cellait à représenter drs chars à deux
et à quatre chevaux; il et. it de Sycio-
ne, et vivait dans la 87'". olympiade,
452 ans avant J.-C. — Pausanias cite
aussi un Aristide , qui avait perfec-
tionné la barrière des jeux olympiques,
inventée par Cléotas. L — S — e.
ARISTION, fils d'un Athénien,
philosophe péripaféticien , et d'une
esclave égyptienne , se nommait Athè-
nion dans sa jeunesse. Son père avant
pris soin de l'instruire dans les belles-
lettres et la ]>hilosopliie , lui laissa ses
biens en mourant. Athenion se rendit
alors à Athènes , où il se fit recevoii"
APiI
citoyen, cl prit le nom d^Aristîon.
Comme il ne manquait pas de talents, il
se mit à professer les belles-lettres à
Messène et à Larisse, dans la Tlies-
salie, et, après avoir amassé beaucoup
de bien , il revint à Athènes. Peu de
temps après, Mitbridate ayant déclaré
la j^uerre aux Romains, les Athéniens,
qui furent toujours amis du change-
ment, lui envoyèrent des ambassa-
deurs, du nombre desquels fut Aris-
tion. Il parvint à s'insinuer dans la
confiance du l'oi, et devint l'un de ses
amis. Mithridate étant parvenu à sou-
lever l'Asie entière contre les Romains ,
envoya Archc'laiis, l'un de ses lieute-
nants, avec une escadre, et Aristion
avec lui, pour faire révolter les Grecs
de l'Europe. Archélaijs aborda d'abord
à Délos, qu'il prit et rendit aux Alhé-
iiiens; et, voulant leur envoyer les
trésors sacrés , il chargea Aristion de
les conduire à Athènes, et lui donna
2000 hommes; au premier bruit de
son arrivée , les Athéniens envoyèrent
des vaisse?ux à Carystos, dans l'Eu-
béc, où il avait été jeté par la tempête.
Lorsqu'il fut dans la ville, il leur fit
un discours dans lequel il éleva bien
haut le pouvoir de Mithridate, et la
bonne volonté qu'il avait pour les
Athéniens, à qui il voulait rendre la
démocratie, et il les décida à se décla-
rer peur lui , et le peuple , toujours
prompt à se livrer aux espérances les
plus légèrement fondées, le nomma
général de ses troupes. Bientôt après,
il s'empara de la citadelle, àl'aidedes
2000 hommes qu'il avait amenés, et,
s'etant déclaré tyran , il fit arrêter tous
ceux qui tenaient au parti des Ro-
mains, fit périr les uns sur-le-champ,
et envoya les autres à Mithridate;
donnpnt ensuite l'essor à sa cupidité ,
il s'en)para du bien des riches et même
des étrangers, et il envoya Apellicon
' à Délos j pour piller les trésors du
A RI 445
temple. Sylla étant alors arrive dans la
Grèce, envoya une partie de son ai-
mée assiéger Athènes, et alla, avec le
reste, attaquer le Pirée,tque tenait
Archélaiis. N'ayaut pas pu le prendre
d'assaut , il tourna tous ses efforts con-
tre la ville, qui se défendit long-temps.
Aristion, qui avait fait provision de
vivres pour sa garnison et pour lui,
s'inquiétait fort peu de voir les habi-
tants en proie à la famine la plus
cruelle; il insultait même à leur mi-
sère , en se livrant à la débauihe la
plus effrénée; il s'eniviait fréquem-
ment, et venait, dans cet état, sur les
murs, d'où il vomissait, contre Sylla
et Mctella , son épouse , les propos
les plus outrageants. A la fin , cepen-
dant, Sylla prit la ville d'assaut; et
Aristion, s'etant réfugié dans la cita-
delle, fut, bientôt après, obliçié de
capituler , et SvHa le fit mourir. Appien
dit qu'il était de la secte d'Épicure;
mais on doit plutôt croire Posidonius,
qui dit qu'il était péripatéticien.
C— R.
ARÏSTIPPE devint tyran d'Argos.
après la mort du premifr Aristoma-
chus. 11 y avait peu de temps qu'il l'é-
tait, lorsqu'Aratus forma le projet de
délivrer Argos du joug d'Aristippe, et
il essaya de prendre la ville par sur-
prise ; mais n'ayant point été seconde
par les habitants, il fut obligé de se
retirer, et Aristippe chercha, par la
suite, à le faire assassiner. Ce tyran,
quoique protégé par Antigone Gona-
tas, vivait dans des alarmes conti-
nuelles, ne se fiant ni à ses esclaves»
ni même à ses gardes; il s'enfermait
pendant la nuit, avec sa maîtresse ,
dans une chambre écartée, où il en-
trait par une trappe , et avec unr
échelle que la mère de sa maîtresse
avait soin de venir enlever tous les
soirs : elle venait la remettre le lende-
main. Aratus n'ayaut pu réussir à
444 A R I
prendre Argos par surprise, déclara
la guerre aux. Argieus, et Aristippe fut
tué dans un comliat, près de Mycè-
nes , l'an iLo. avant J.-C. Mais les Ar-
giens ne rec:ouvrèrcuî point leur li-
berté, Pt ie second Aiistumachus se 6t
tyra;! d'Arg*";. 11 i.'est que.-.lio!i d'Aris-
tippt (jue J 'IIS Plutarque , cl Polvbe,
qui entie dtus beaucoujj Af détails
sur Araf i> et sur la ligue acbé une,
n'eu di; pas un mot. C r,
ARISTIPPE, céubre philosophe,
était né à Cyrèie, d'une familie qui
e'tait dansl'.tisanre; car Aiéiadès, son
père, l'envoya aux jeux olympiques,
prtLabicmeuî pour disputer le prix
de la course des chars; i! v rencontra
Ischum.ichus, qui lui parla de So-
crale , et lui inspira un tel désir de
l'cntcudre , qu'il vint sur-le-champ à
Athènes , et se l'angea au nombre de
ses disciples. Il n'ado[ita cependant
j)as tous SCS principes ; il pensait,
comme lui , qu'on devait s'abstenir de
raisonner sur les ( hoses qui sont hors
de la portée humaine; il lui ressem-
blait aussi par le peu de cas (ju'il fai-
sait des sciences physiques et milhé-
matiques ; mais sa morale différait
beaucoup de celle de S<^)crate. Ses
principaux dogmes étaient que toutes
les affl-ctions de l'homme peuvent se
réduire à deux, !e plaisir et la douleur.
Le plaisir est un mouvement doux , la
douleur un mouvement violent ; tous
les animaux recherchent le premier,
et évitent l'autre. Le bonheur n'est
que l'assemblage de plusieurs plaisirs
particuliers, et, comme il est le but
auquel tout homme tend , ou ne doit
se icfuser à aucune espèce de vohipté.
Il faut cependant y mettre du choix ,
et la raison doit toujours nous diriger
dans nos jouissances. Celte morale ne
plaisait pas beaucoup à Socrate , qui ,
si nous en croyons Xéuophon , eut
plusieurs discussions avec lui à ce
A RI
sujet ; et c'était sans doute pour eSitec
ses reproches qu' Aristippe passait une
partie de son temps à Egine , où il se
trouvait lorsque son maître mourut. Il
Gt plusieurs voyages en Sicile , où il
fut admis dans l'iitimité de Denys-le-
Tyran , qui s'accommodait fi.rt de son
genre d'esprit. Il y conserva cepen-
dant jusqu'à un certain point son
indépendance, et ce prince lui ayant
récité deux vers de Sophocle, dont
le sens est que celui qui vient à la
cour d'un tyran , devient son esclave
s'il était libre auparavant , il répliqua
en changeant un seul mot, « ne de-
» vient point esclave , s'il était libre
» auparavant.» Denvslui reprochant
un jour le peu d'utilité qu'il tirait de
ses leçons : a Cela est vrai , répondit
» Ai'istippe; car si vous aviez fait
» quelque progrès , vous vous seriez
» défait de la tyrannie comme d'un
» fardeau très-incommode.» Il passait
aussi une partie de sou temps à Co-
rinthe, où ilélait attiré parles charmes
de Lais, célèbre courtisane; et quel-
qu'un lui reprochant la dépense qu'il
faisait avec cette femme , qui se livrait
gratis à Diogène le cynique : « C'est
» pour qu'elle m'accoide ses faveurs
» que je la paie , dit-il , et non pour
» qu'elle ne les accorde pas à d'au-
» très. » A cette occasion il dit encore :
« Je possède Laïs, mais elle ne me
» ])0ssède pas. » Quoique adonné
aux plaisirs , il savait s'en ]iriver
pour prouver qu'il était maître de
lui - même. Denys lui ayant donné
le choix entre trois belles courtisanes,
il les emmena toutes trois , en disant
que P^.ris s'était m 1 trouvé d'un pareil
choix ; et arrivé a la porte de sa mai-
son il les congédia. Son valet, charge
d'argent, avant de la peine à le suivre,
il lui dit d'en jeter une partie. Souvent
rev("tu de la laine de Milct la plus fine,
il prenait d'autics fois le inanlca-i;
ARI
grossier du pliilosoplie , sans en avoir
l'air plus emprunté ; et Platon , qui ne
l'aimait pas , était forcé de convenir
qu'il était le seul à qui la pourpre et
le pailiiim allassent également bien ;
idée qu'Horace a esprimée dans ce
vers :
Ornais Arùlippum decuic colar ctttatas et res.
Étant un jour à Gorinthe, Diogène ,
qui lavait des herbes, lui dit : « Tu
» ne ferais pas la cour aux tyrans , si
» tu savais te contenter de cela. —
» Tu n'en serais pas réduit à laver
» des herbes, si tu savais vivre avec
1) les hommes » , répliqua Aristippe. Il
retourna encore en Sicile sous le règne
de Deuys-le-Jeune,et il eut le bonheur
d'y rendre service à Eschine , qui
était venu chercher fortune. 11 s y
trouva aussi avec Platon , et prévit
que ce philosophe et le tjTan ne se-
raient pas long-temps d'accord. Dio-
gène Laërce prétend qu'il revint en-
suite à Athènes , oii il ouvrit une école,
înais cela ne me paraît guère probable ;
en effet, il aurait eu des disciples ,
et cependant nous n'en connaissons
aucun ; car sa doctrine ne fut propagée
que par Arétaou Arété, sa fille , et Anti-
pater de Cyrène , qu'il eut sans doute
pour auditeurs dans sa vieillesse, et
lorsqu'il se fut retiré dans sa patrie. Il
avait un fils et une fille : le fils se
'conduisant mal , il l'abandonna; mais
il s'attacha à l'éducation de sa fiile
Arété , qui fit de grands progrès dans
la philosophie. Elle s'y rendit très-
célèbre , et fit elle-même l'éducation
de son fils , nommé Aristippe, comme
son aïeul. Boccace prétend qu Arété
enseigna publiquement à Athènes. On
ignore absolument l'époque de sa mort.
On rapporte de hù beauoup d? mots
ingénifux, dont les plus remarquables
sont les suivants : il demandait de l'ar-
gent à Denys , qui lui répondit : « Ne
T> dites-vous pas quele sage ne manque
À RI 445
» jamais de rien? — Donnez d'abord ,
» répliqua Aristippe ; nous examiue-
» rons ensuite cette question. » Ayant
reçu l'argent : « Vous voyez bien que
» le sage ne manque jamais de lien. »
Le même lui faisant remarquer qu'un
voyait souvent les philosophes à la
porte des riches , et jamais les riches à
celle des philosophes : « C'est , dit
» Aristippe , parce que les uns connais-
» sent leurs besoins et les autres non.
» — A quoi seit la philosophie ? lui de-
» mandait quelqu'un. — A ce que ceux.
» qui la professent , répondit - il , ne
)) changeraient pas de manière de vivre,
» lors même qu'il n'y aurait plus de
» lois. )> il avait fait beaucoup d'ou-
vrages qui sont perdus. Diogène Laërce
cite souvent sous son nom un ouvrage
intitidé : Du Luxe ancierij dans lequel
on calomniait sans pudeur les plus
grands philosophes de l'antiquité; mais
il est évident qu'il n'est point de notre
Aristippe , comme l'a fort bien prouvé
M. Luzac , dans ses Lectiones atticce,
section II , ^ 2. H en est de même des
lettres , sous son nom , qui se trouvent
dans la collection que j'mdiquerai à
l'article Socp.ate. Wielaud a donno
un ouvrage intitulé : Aristippe et
quelques-uns de ses contemporains ,
traduit en français par Cuiilier, \'6oi ,
5 vol. in-8.; i8o5, 7 vol. in- 12. —
On compte deux autres Aristippe; l'un
écrivit Y Histoire d\lrcadie', l'autre
fut un philosophe de la nouvelle aca-
démie. G - R.
ARISTOBULE, fils d'Aritubule,
l'un des officiers de l'armée d'Alexan-
dre, le suivit dans toute.-, ses expédi-
tions, et fut chargé par lui, de réta-
blir le tombeau de Cyrus. 11 écrivit
X Histoire d^ Alexandre, qu'il ne vou-
lut publier qu'après sa mort , pour
qu'on ne le soupçonnât pas de flatte-
rie; et Arrien, qui en a lait beaucoup
d'usage, loue son exactitude. 11 ne
446 A R I
faut pas le coiifoiiilre, comme Tout
fait Vossius et plusieurs savants, avec
Aristobuie de Cassandiëe, aussi liis-
toiieu , qui ne se mit à écrire qu'à l'âge
de quatrc-vitigt-qnatre ans; car, en
supposant qu'Ai istobule fût ne' à Poti-
dec , il n'aurait pas adopté le nouveau
nom que cette ville prit , lorsque Cas-
sandre la rétablit, neuf ans après la
mort d'Alexandre. C — R.
AUISTOBLLE , fils d'Hyrcan , de-
vint, après la mort de son père, vers
l'an I o5 avant J.-C. , grand prêtre des
juifs. L'autorité souveraine était ordi-
nairement réunie à cette disçnité; ce-
pendant, Hyican en avait disposé en
faveur de sou épouse; mais Aristobuie
la lit enfermer, et prit le diadènie
et le titre de roi, qui n'était pas en
usage chez les juifs. Il entreprit ensuite
une expédition contre les Ituréens,
qu'il soumit en grande partie, et à qui
il fit embrasser la religion juive. Etant
tombé malade , il laissa à Antigone
son frère , qu'il aimait beaucoup , le
soin de terminer cette conquête , et
revint à Jérusalem. Son épouse pro-
fila de l'absence d'Anligoue pour le
calomnier, et fit entendre à son mari,
qu'il elurchait à s'emparer de son au-
torité. Sur ces entrefaites, Anligonc,
qui avait terminé la guerre, étant re-
venu à Jérusalem, avec son armée,
pour la iête du Tabernacle, Aristo-
buie lui fit dire de venir lui parler
dans son palais : on s'y rendait
par un passage souterrain, où il avait
placé quelques-uns de ses gardes, avec
ordre de le tuer , s'il se présentait avec
ses armes, et de le laisser passer, s'il
ne les avait pas; alors sa femme, qui
voulait perdre Antigone, lui fit dire
que le roi désirait voir sou armu-
re. Celui-ci, ne se méfiant de rien,
se présenta donc tout armé, et fut tué
aussitôt. Les remords qu'Aristobule
eut de ce meurtre, aggra\cvcat sm m;*-
ARI
ladie, et il mourut après un règne
d'une année, — Trois de ses frères,
qu'il tenait dans les fers, furent mis en
liberté, et l'aîné, nommé Alexandre
Jamvee , monta sur le trône. C— a.
ARiSTOBULE, était le second fils
d'Alexandre Jannée; il n'avait, par
conséquent , aucun droit au trône ni
au souverain pontificat; mais comme
Hyrcan , son frère aîné, que sa mère
avait fait reconnaître grand -prêtre,
était entièrement livré aux Pharisiens ,
et ne s'occupait que de religion , il crut
pouvoir aspirer à l'un et à l'autre. S'ë-
lant fait des partisans dans l'armée,
dont sa mère lui avait donné le com-
mandement, il n'eut pas plutôt appris
la mort de celle-ci , qu'il sortit la nuit
de Jérusalem et alla ])arcourir les fur-
l( resses où s'étaient réfugiés les auiis
de son père que les Pharisiens persé-
cutaient. Ils le nommèrent roi , et il
alla avec eux attaquer Hyrcan , sou
lière, qu'il défit, et, comme les juifs
ne supportaient qu'avec peine le joug
des Pharisiens, il se rendit l^icilement
maître de Jérusalem, et força Hyrcan
à se démettre de la royauté et du sa-
cerdoce , mais il ne fut point reconnu
pour roi par les Romains; et Pompée
étant venu dans la Syrie , l'an (35
avant J.-C, Hyrcan se rendit auprès
de lui pour reclamer le trône; Aris-
tobuie s'y rendit aussi d'après les or-
dres de Pompée , et, s'étant aperçu que
le jugement ne serait point en sa fa-
veur, il retourna dans la Judée pour
se mettre en défense ; Pompée l'y sui-
nt et l'assiégea dans Jérusalem , où il
le prit après trois mois de siège par la
superstition des juifs , qui ne voulu-
rent pas se défendre un jour de sab-
bat ; il le conduisit à Rome, où il le fit
paraître à son triomphe. Au bout de
quelques années, Aristobuie parvint
à s'échapper avec Antigone son fils ,
Cl retourna dans la Juclcc , où il ei-
ARI
cita de nouveaux troubles, Gabinius,
en ayant c'te instruit , fit marcher
contre lui des troupes , se rendit
maître de sa personne , et l'envoya à
Rome, ATrs l'an 5o avant J.-C. La
guerre civile s'étant déclarée entre
Pompée et Ce'sar , celui-ci relâcha
Aristobule et le renvoya dans la Ju-
de'e avec deux légions pour faire dé-
clarer ce pays en sa faveur ; mais les
partisans de Pompée trouvèrent le
moyen de le faire empoisonner en
chemin. G — r.
ARI STOBULE, frère de Mariamne,
et A R I S T 0 B U L E , fils d'flérode
( Foy. Hérode-le -Grand).
ARISTOBULE , juif d'Alexandrie,
et philosophe péripatéticien , composa
un commentaire en grec sur le Pen-
tateuque , et le dédia à Ptoléraée Phi-
lométor. Son but, dans cet ouvrage
très - volumineux , était de prouver
que les anciens poètes, et les anciens
philosophes grecs, avaient profité des
livres de Moïse , et que le peuple juif
et son histoire n'avaient point été in-
coimus aux anciens historiens grecs.
Pour y parvenir , il se permit de
forger un grand nombre de passages
de poètes et d'historiens, et il le fit
avec assez d'art pour tromper, non
seulement quelques pères de l'Eglise,
mais encore des écrivains profanes.
(Voy. LuA. Gasp. Falckenaerii dia-
tribe de Aristobulo Judœo , Lugd.
Bat, , 1 806 , iu-4''. ) — Un des frères
d'Epicure se nommait Aristobule.
C— R.
ARISTOCLÈS. Il y eut en Grèce
plusieurs artistes célèbres de ce nom ;
le plus ancien , né à Cydonia en Crète,
était sculpteur et florissait avant l'é-
poque où la ville de Zanclé prit le
nom de Messine ; événement qui se
rapporte à la 'xif. olympiade, G64.
ans avant J.-C. Il avait fait, pour la
\i!le d'Elis, un Hercule combatlant
ARI 4^^
contre l'Amazone Aîithiope pour
lui rai'ir sa ceinture. — Un autre
AristoclÈs , sculpteur de Sycione ,
vivait dans la gô^ olympiade, 4oo
ans avant J.-C. JI était frère de Ca-
nachus, autre sculpteur très-renommé,
et maître de Synnoon. Suivant Pau-
sanias , Aristoclès était fils et disciple
de Cléotas, et avait fait, à Elis, un
groupe représentant Jupiter et Ga-
nymède. — Enfin , il y eut un peintre
de ce nom , élève de Nicomaque.
L— S-E.
ARISTOCLÈS de Messine, phi-
losophe péripatéticien du 'x". siècle,
eut pour disciple Alexandre d'Aphro-
disée. Il composa dix livres de {'His-
toire des philosophes et de leurs
opinions , dont Eusebe nous a con-
servé de précieux fragments , aux 1 4*'.
et 1 5''. livres de sa Préparation évan-
gélique. Il avait écrit aussi des com-
mentaires particuliers sur la Philo-
sophie d'Aristole.- — Un autre Aris-
toclès , de Pergame , suivit également
l'école péripatéticienne, mais la quitta
pour embrasser la profession de rhé-
teur. Il eut pour maître d'éloquence
Hérode Atticus. L'aïeul de Platon se
nommait Aristoclès , et Platon lui-
même porta ce nom dans son enfance.
K.
ARISTOCRATE I". , fils d'^ch-
rais , devint roi d'Arcadie ajirès la
mort de son père , vers l'an -jso
avant J.-C. Etant devenu amoureux
d'une jeune fille, prêtresse de Diane,
Hymnia , il la viola dans le temple
même de la déesse; les Ai'cadiens le
lapidèrent pour expier ce forfait , et
ordonnèrent qu'à l'avenir on choisirait
une femme mariée, et non une fille ^
pour prêtresse de Diane. Aristocrate
eut pour successeur Hicétas son fils.
C— R.
ARISTOCRATE II , fils d'Hicétas,
et petit-fiis du précédent , devint roi
448 A h I
de l'Arcadic vers l'an 640 avant J.-C.
Les Messéuicns s'e'tant , peu de temps
après , révoltes contre les Lace'dérao-
niens , les Ai'cadiens leur envoyèrent
des secours ; mais les Lacedc'monîens
ayant corrompu Aristocrate à prix
d'argent , il trahit les Messe'niens au
combat de la grande Fosse , et les
abandonna au moment où la bataille
allait s'engager , ce qui fut cause de
leur de'faite. Lorsque la forteresse
d'ira eut été prise, les Messéniens se
réfugièrent dans l'Arcadie , et Aristo-
mènes forma le projet d^aller attaquer
Sparte même , tandis que ses habi-
tants étaient occupés au pillage d'Ira.
On fut obligé de remettre au lende-
main rexéciition de ce projet ; mais
Aristocrate en fit avertir les Laccdé-
moniens durant la nuit. Sa trahison
ayant été découverte, les Arcadiens le
lapidèrent, et ne voulurent plus de roi
par la suite. Il laissa deux enfants ,
Aristodème , qui , bien qu'il n'eût pas
le titre de roi , conserva beaucoup
d'autorité dans rx\rcadie, et Eristhé-
nie , mère de ]\ïélisse , femme de Pc-
riandre , tyran de Corinthe. C — r.
ARISTODÈME, Messénicn, était
l'un des descendants d'jEpytus , et de
la race des Héraclidcs. 11 se distin-
gua , par sa valeur , dès le commen-
cement de la première guerre de Mes-
sénie. L'oracle ayant ordonné de
sacrifier aux dieux infernaux une
vierge du sang d'iEpytus , il ofl'rit sa
fille ; un jeune Messénien , à qui
elle était promise en mariage , ayant
dit qu'elle était grosse , pour empê-
cher qu'elle ne fût sacrifiée, Ari^to-
todème la tua , et l'ouvrit de ses
propres mains , pour faire voir que
cela était faux. Euphaès ayant été tué
Fan 751 avant J.-C., Aristodème fut
nommé roi à sa place , et remporta
plusieurs victoires signalées sur les
Lacédémyuicnsj mais comme la Rles-
AÙi
sénie e'tait ruinée par les suites de la
guerre , tous ses efforts n'aboutirent
qu'à retarder de quelque temps là
prise d'Ithome et l'asservissement de
sa patrie } et , voyant que l'un et
l'autre étaient inévitables , il se tua
lui-même sur le tombeau de sa fille ,
l'an 7^4 avant J.-C. C — r.
ARISTODÈME, surnommé Ma-
LACus ( le mol ) , soit parce qu'il avait
été efféminé dans sa jeunesse , soit
pour quelque autre raison qui nous
est inconnue , était d'une des meil-
leures familles de Cumes, en Italie.
Des Tyrrhéniens , chassés par les
(iaulois des bords de la mer Adria-
tique , s'e'tant réunis aux Oml^ricns ,
aux Dauniens et à d'autres barbares,
vinrent assiéger Cumes , l'an 5^4
avant J.-C. Les Cuméens, quoique
bien inférieurs en nombre , osèrent
leur livrer bataille , et les défirent en-
tièrement^. Aristodème , qui était alors
tics-jeune , se conduisit avec tant de
bravoure, que lorsqu'il s'agit de dé-
cerner le premier prix de valeur, le
peuple voulut qu'on le lui donnât. Les
grands , de leur côté, voulaient le faire
clonner à Hi[)pomédou , général de la
cavalerie, et comme le gouvernement
de Cumes était aristocratique, le sénat
penchait de leur côté :1c peuple, ce-
pendant , ne voulant pas céder , oh
était j)rès d'en venir à une sédition ,
lorsque les vieillards s'en étant mêlés ,
firent un accommodement, par lequel
il fut convenu que le premier prix
serait partagé entre les deux préteii-
dauls. A partir de cette époque , Aris-
todème se trouva le chef du peuple ,
et en butte, par conséquent, aux grands
quicherchaient les moyens de s'en dé-
livrer. Ils crurent en trouver l'occasion
vingtans après. Les Ariciniens, assièges
par Arron, lils de Porsenna, ayant en-
voyé demander des secours à Cumes,
le parti aristocratique imagina de Icai
ârî
«iTTOyer Aristodème, avec deux mille
homines , qu'on eut soin de < hoisir
J)armi ce qu'il v aviiit de plus jiaiivre
etdepkis se'ditieii^i dans la populace;
ou leur donna dix vaisseaux virux et
■en très-mauvais état, et on les força
de s'embarquer , dans i'espcrance
qu'il n'en échapperait guère aux dan-
gers de la mer. Aristodème devina
bien leurs intentions; cependant, il ne
crut pas devoir refuser cette expe'di-
tiou. Tl parvint à Aricie avec un bon-
heur inespéré , défit , presque avec
ses seules troupes , l'armée ennemie,
«t fit beaucovip de butin et un grand
nombre de prisonniers. S'étant em-
barqué pour revenir , il fit connaître
à ses soldats le danger auquel on avait
voulu les exposer, et leur fit promettre
de le seconder eu tout ce qu'il vou-
drait entreprendre. Ayant ensuite dé-
voilé ses projets à ceux sur qui il
comptait le plus , il rendit la liberté
aux prisonniers poiu' se les attacher.
Arrivé à Cumes , il fît convoquer une
assemblée du sénat , pour rendre
compte de son expédition , et, à peine
eut-il commencé à parler, que ses sa-
tellites , pénétrant dans le lieu de l'as-
semblée , massacrèrent tous les prin-
cipaux delà ville. Il s'empara ensuite de
la citadelle, des vaisseaux , et des eu-
droits les plus forts de la ville, et con-
voqua le lendemain une assemblée du
peuple, dans laquelle il chercha à justi-
fier ce qui s'était passe la veille, en ac-
cusant ceux qui avaient été tués , et il
se fit investir de toute l'autorité par h
peuple, en lui promettant un nou-
veau partage des terres et l'abolition
des dettes. Il n'eut pas beaucoup de
peine alors à s'empirer de la tyran-
nie ; et , s'étant formé une garde com-
posée de ce qu'il y avait de plus cor-
rompu dans le peuple , d'esclaves qui
avaient massacré leurs maîtres , et de
Iroupes étrangères, il désarma le reste
lu
ARI 449
des citoyens. Il voulait faire périr les
fils de ceux qui avaient été tués; mais
leurs mères , qu'il avait mariées mal-
gré elles à ses satellites, employèrent
eu leur faveur le ciédit de leurs nou-
veaux époux , et il se contenta de les
reléguer à la campagne , où on les
occupait aux emplois les plus vils.
Quant au reste de la jeunesse , il la
faisait élever de la manière la plus
efféminée , pour qu'elle fût hors d'état
de former aucun projet contre lui.
Toutes ces mesures, par lesquelles il
croyait avoir bien assuré son autorité,
n'aboutirent cependant à iien , et il
se perdit par un excès de précaution.
Ayant toujours des craintes sur ceux
qu'il avait relégués à la campagne , il
résolut de s'en défaire ; ils en furent
instruits , et se retirèrent dans les
bois , d'où ils ne sortaient que pour
ravager le pays ; mais les exilés , qui
s'étaient établis à Capoue , et à la tète
desquels étaient les fils d'Hippomé-
don , s'étant réunis à eux , ils s'empa-
rèrent de Cumes par surprise , firent
périr Aristodème dans les tourments
les plus affreux , tuèrent ses enfants
et toute sa famille, et rétablirent l'an-
cien gouvernement. Sa tyrannie avait
duré quatorze ans. Il fut doue tué vers
l'an 490 avant J.-C. C — r.
ARISTODÈME , Athénien et ac-
teur tragique , avait, par son élat, la
fadlitéd'aller par-tout, même en temps
de guerre ; il se rendit avec jN'éoplo-
lème, acteur tragique comme lui, au-
près de Philippe, roi de Macédoine,
qui était alors en guerre avec les Athé-
niens. Ce prince , qui avait sur la Pho-^'
cide, et quelques autres pays, des
projets que cette guerre l'empêchait
d'exécuter , imngina de la teimincr
par le moyen de ces deux acteurs, et,
les ayant comblés de présents , il les
renvoya à Athènes, en leur disant,
qu'il était ami des Athéniens , et qu'il
20
/-
45o A R I
ne savait pas pourquoi ils lui fai-
saient la guerre : ceux-ci, de i-etour,
ne manquèrent pas de le dire , et le
peuple athénien , qui désirait aussi
la paix, nomma sur-le -champ des
aniLassadeuis, du nonilire desquels fu-
rent Démosthcnes et Eschine. Ce der-
nier se laissa gagner par Philippe , et
conclut un traité très-désavautageux
pour les Athéniens ; ses prévarica-
tions dans cette ambassade sont le
sujet d'un des plus beaux discours de
Démosthcnes. C — r.
ARISTOGITON, Athénien , d'une
classe ordinaire, avait conçu une pas-
sion honteuse pour Harmodius, jeune
homme de la plus jirandel>eaulé. Hip-
parchus , l'un des Pisistratides , étant
devenu son rival , Aristogiton , trans-
porté de jalousie, forma une conspira-
tion contre lui et contre ses frères , et y
entraîna Harmodius. Ils attendirent ,
pour la faire éclater, la fête des Panathé-
nées , où les principaux citoyens étaient
armés pour escorter la procession. Ce
jour étant arrivé, ils se disposaient à
exécuter leur projet ; mais voyant un
des conjures pailer à Hippias , ils
cnu'ent qu'il lui dévoilait leur conju-
ration; ils sortirent alors comme des
furieux, et ayant rencontré llippar-
thus , ils fondirent sur lui et le tuèrent.
Aristogiton parvint à s'échapper, mais
il fut bientôt pris et mis à mort. Après
avoir été livré à la torture , afin d'ob-
tenir l'aveu de ses complices , il nom-
ma successivement les plus intimes
amis d'Hippias , qui furent aussitôt
mis à mort ; après quoi le tyran lui
avant demandé s'il n'y en avait plus :
« Il n'y a plus que toi, lui répondit
» en som-iant Aristogiton , qui soit
» digne de mort.» On raconte la même
chose de Zenon d'Élée, ce qui peut
laire douter de la vérité de cette anec-
dote dont il n'est pas question dans
Ihucydides. Qu Iciu' çrigea des sU-
ARI
tues par la suite , et leur nom servait
de signe de ralliement contre tous
ceux qu'on soupçonnait de vouIolf
attenter à la liberté, C — r.
APiISTOLAUS , peintre Athénien ,
fils et disciple de Pausias ; il avait
peint Eparainoudas , Périclès et plu-
sieurs autres grands hommes. Oa
citait aiussi de lui un tableau repré-
sentant le Peuple athénien personni-
fié , sujet qui exerçait assez souvent le
génie des artistes grecs. Pline donne
la liste des ouvrages d'Aristolaiis ,
recommandables surtout par la cor-
rection du dessin. 11 vivait environ
5'-j5 ans avant J.-C L — S — e.
AR1ST03IACHUS. Il va eu, sui-
vant Plutarque , deux tyrans de ce
nom à Argos , tous les deux contem-
porains d'Aratus, qui chercha à faire
tuor le premier pour rendre la liberté'
aux Avgiens , chez qui il s'était re-
tiré pendant son exil ; mais cette
conspiiation fut découverte. Aiisto-
machus fut tué peu de temps après
pai- ses esclaves, et Âristippe, pro-
tégé par Antigone Gouatas , se fit
tyran à sa place. — Ce dernier eut
pour successeur un autre Aristoma-
CHus , qui se voyant privé de tout
appui après la mort de Démétrius,
roi de Macédoine, rendit lui-même la
liberté aux Argiens, et les fit entrer
dans la ligue achéenne , dont il devint
préteur par la suite. Polybe, de sou
côté, ne semble reconnaître qu'un seul
Aristomachus , qui était tyran d'Argos
lorscju'Aratus chercha à prendre cette
ville par surprise. Ce général n'ayant
pas réussi, Aristomachus fit périr dans
les tourments les plus affreux quatre-
vingts des principaux citovens d'Argos
qu'il soupçonnait d'inlelhgence avec
Aralus. 11 déposa par la suite son au-
torité, parce qu'il voyait qu'il n'était
plus possible de la conserver, et il
dvviiit pvQtçiu' de* AcLcçuS; mais ii
ARI
saisit la première occasion qui se pré-
senta pour les trahir , et fit entrer les
Argiens dans le parti de Cléomèues.
Il fut fait prisonnier quelque temps
après par Antigone et les Ache'ens ,
qui le noyèrent à Cenclirèes. Phylar-
que , que Plutarque a suivi , prétendait
qu'il avait e'të sacrifié à la jalousie d'A-
ratus; mais Polybe justifie très-bien
ce grand homme, et prouve qu'Aris-
tomachus avait mérité sou sort. C — r.
ARISTOMAQUE , philosophe pé-
ripatéticien , né à Soles en Cilicie , et
disciple de Lycon , cultiva l'histoire
naturelle , et s'occupa principalement
des abeilles , sur lesquelles il fit des
observations pendant cinquante-huit
ans ; il avait écrit aussi sur l'agricul-
ture. Pline le cite souvent. Son por-
trait nous a été conservé sur une
cornaline , où il est représenté con-
templant des ruches. On en trouve la
gravure dans le i "". volume de '^Ico-
nographie de M. Visconti. C — r.
AR1ST0MÈ>'ES, Messénien, était
né à Andanie. Nicomède, son père,
descendait des amiens rois de Mes-
sène ; sa mère se nommait Nicotélie.
Lorsqu'il vit le jour , la Messénie était
depuis long-temps sous le joug des La-
cédémoniens; mais elle s'était peuplée
d'une jeunesse nomlireusc qui , impa-
tiente du joug, n'attend ut qu'un chef
pour le secouer. Elle le trouva dans
Aristomènes , qui réuuissait les plus
grandes qualités aux droits qu'il te-
nait de sa naissance. Comme il n'avait
pas moins de prudence que de valeur ,
il commença par s'assurer des dispo-
sitions des peuples voisins , et, lors-
qu'il les sut prêts à seconder les INIes-
séniens , il leva l'étendard de la ré-
volte. Les Lacédémoniens étant entrés
sur-le-champ dans la Messénie pour
la faire rentrer dans le devoir , il leur
livra, vers Déra?, un combat dont le
succès fut incertain ; mais où t1 fit de
ARI 45i
tels prodiges de valeur , qu'on voulut
lui donner Je titre de roi , qu'il refusa.
11 harcela tellement les Lacédémo-
niens, que ceux-ci, réduits au déses-
poir, consultèrent l'oracle , qui leur dit
de demander un chef aux Athéniens ;
et ceux-ci leur envoyèrent le poète
Tyrtée. Cela n'empêcha pas que les
Lacédémoniens ne fussent déftits vers
le monument du Sanglier, et qu'ils
n'éprouvassent plusieurs échecs par-
ticuliers. Ils eurent alors recours à la
trahison , et parvinrent , à prix d'ar-
gent , à corrompre Aristocrate II , roi
d'Arcadie , qui abandonna les IMessé-
niens au moment d'une bataille géné-
rale , vers la grande Fosse , et fiit la
cause d'une déroute complète ; Aris-
tomènes , alors , se fortifia sur le mont
Ira avec ce qui lui restait de troupes,
et se mit à faire des inciu'sions, tant
dans la Lacouie , qu'il ravagea entiè-
rement , que dans la portion de la
Messénie qui était au pouvoir des La-
cédémoniens; il prit même et pilla
Amvcles , ville voisine de Sparte. A
la fin, cependant , il fut lui-même fait
pr isonnier dans une de ces incursions ,
et les Lacédémoniens le précipitèrent
dans le (^éadas ( on donnait ce nom à
un précipice où l'on jclait ceux qu'où
condamnait à mort), d'où il s'échappa
comme par miracle. A peine revenu
dans la Messénie , il tailla en pièces
des troupes que les Corinthiens en-
voyaient au secours des Lacédémo-
niens. Il fut pris une seconde fois par
des archers Cretois, et il parvmt en-
core à s'échapper de leurs muins Ce-
pendant , malgré tous ses efforts, il lui
était difficile de se défendre bien long-
temps dans une place isolée, au mi-
lieu d'un pays dont les Lacédémoniens
étaient entièrement maîtres ; il s'atten-
dait donc à chaque instant à en être
chassé , et les Lacédémoniens s'étant
emparés par surprise de la citadelle
2CJ..
4321 ARI
fl'Ira , dans la i > ". anuëa île la s;nerrp ,
il ne deTeiiftit k A'ilif qu'autant de
temps qu'il lui en fallait pour se dis-
poser à raie retraite honorable; il
parvint à la faire avec toutes ses trou-
pes , et emmena même les femmes,
les enfants et les vieillards. Ils se re-
tirèrent dans TArcadic , où iis furent
très-Lieu reçus. Il forma le projet hardi
d'aller le lendemain même attaquer la
■nlie de Sparte , dont les habitants
étaient occupes au pillage d'Ira ; mais
il fut encore trahi par Arisîociate, qui
dévoila ce projet aux Lace'démoniens,
11 donna alors Gorgiis, son fils, pour
chef aux Messe'niens qui allèrent s'éta-
blir à Rhègium , et il resta qiidquc
temps dans l'Arcadic , où il maria deux
de ses filles ; Darua^etus , roi d'Ialy-
sos, dans File de i\hodes, épousa la
troisième. Aristomènes lasuiAitdans
l'île de Rhodes , où il termina ses jours.
Sa vie a été e'ciitc avec beaucoup de
détail par Pausauias, dans le quatrièuie
livre de sa Description de la Grèce.
On la trouve aussi dans le second
volume de ÏUisloire des premiers
iemps de la Grèce. C — r.
ARISTON, fils d'Apsides, delà
seconde branche des rois de Sparte ,
monta sur le troue vers Tau 56o av.
J.-C. Les Laccdcinonicr.s , sous sou
règne , prirent cufiu l'a.scendant sur
^cs Tégo'atcs qui les avaient vaincus
plusieurs fois sous les règnes précé-
dents. Comme leurs victoires leur don-
naient une grande prépondérance dans
la Grèce , Crçesus rechercha leur al-
liance pour se doiendrc contre Gyrus.
Aiistou, après avoir épousé successi-
vement deux femmes sans en avoir
d'enfants, dcviut amoureux de l'é-
pouse d'Agétas , son ami , qui était la
plus belle fcmnie de Sparte. 11 panint
à se la faire céder par une ruse dont
on peut voir les détails dans Héro-
dote, et au bo'vt de sept mois de laa-
ARi
riagc, elle accoucha deDémarate , suir
la légitimité duquel Ariston eut quel-
ques soupçons , comme on le verra à
l'article Demarate. G' — r.
ARISTO^^ natif de l'île de Chic,
fut surnommé Phalanthus, parce qu'il
était chauve , et Sirène , à cause de
la douceur de sou éloquence. Il fut
d'abord disciple de Zenon, fondateur
de la secte stoïcienne ; mais , la sé\c-
rilé des principes du maître s'accor-
dant mal avec ses mœurs douces., il
le quitta pour s'attacher à Polémon ;
puis , s'ctant formé une doctrine par-
ticulière , il s'établit dans le Gynosar-
ge , et ouvrit une école , dont les dis-
ciples retinrent son nom. La philoso-
])hie d' Ariston fut du nombre de celles
dont il est facile d'abuser. 11 était
adiaphoriste , faisaut consister la sa-
gesse dans l'inililférence pour ce qui
n'est ni vice ni vertu. Le sage lui pa-
raissait semblable au comédien habile,
qui joue également bien le rôle d'A-
gaiiumnou et celui de Thersite. Il re-
jetait , des études , la logique et la
science de la nature; la première,
comme inutile ; la seconde , comme
excédant les bornes de notre intelli-
gence. Il voulait que l'on se bornât
à cultiver les mœurs. Il ne reconnais-
sait en substance qu'une seule verta,
qu'il appelait santé .^ toutes les autres
n'étant que des modifications de celle-
là. G'est ainsi, disait-il, qu'on appelle
la vertu tempérance , quand elle mo-
(ièrc notre ajipélit ; prudence , quand
die règle nos actions ; justice , lors-
qu'elle prévient les délits; mais elle
n'en est pas moins une , de même que
le feu ne change point de nature,
quoique ses propriétés soient infinies.
11 regardait la forme des Dieux comme
incompréhensible , ne leur accordait
point de sens, et doutait si Ton pou-
vait les compter parmi les êtres vi-
Yaals. Aiislon composa plusieurs ou-
Aïll
vrages , dont on peut voir les titres
dans Diogène Laërce. Sa morale était
peu austère; aussi, dans sa vieillesse,
se livra-t-il aux plaisirs. Il mourut des
suites d'un coup de soleil. — Un autre
Ariston, philosophe péripatéticien ,
surnomme' lulietes , parce qu'il était
iialii' de lulis, dans l'île de Ze'e , fut
disciple et successeur de Lycon, —
Ou compte encore deux poripatéticiens
du même nom; l'un, natif de l'île de
Cos , disciple de lulietes , qui l'insti-
tua son héritier; l'autre, natif d'A-
lexandrie. D. L.
ARISTON (Titus), jurisconsulte
romain, qui vivait du temps de Ti-a-
jan. Nous ne connaissons de ce per-
sonnage, que ce qu'eu a dit Pline le
jeune , dans deux epîtres , où il témoi-
gne pour lui beaucoup d'eslime et
d'affection , et vante ses connaissances
dans toutes les branches de la juris-
prudence. Il faut observer qu'Ariston
était l'ami de Pline , et que celui-ci ai-
mait surtout le genre du panégyrique.
Aulu-Gelle dit qu'Ariston avait com-
posé beaucoup de livres, et ià\i men-
tion d'un de ses ouvrages. K.
ARISTONICUS, fils naturel d*Eu-
mèncs , roi de Pcrgame , et d'une
joueuse d'instruments d'Ephèse, en-
treprit, après la mort d'Altale, de se
remettre en possession des états de
son père. Les Romains ayant envoyé
contre lui le consul P. Licinius Crassus ,
il le défît et le fit périr, l'an 1 28 av.
J.-C; mais Perpenna étant venu, aus-
tôt après, en Asie, dt^t Aristonicus,
et le fit prisonnier. Ou le conduisit à
Rome , où il tern)ina ses jours en pri-
san. Ce prince fut le dernier de la dy-
nastie des Attalides , qui avait occupé
le trône pendant i54 ans. C — r.
ARISTOPHANE , célèbre poète
comique, était fils de Philippe, et
Athénien de naissance, suivant l'ancien
aitcur de sa vie, plus croyable à ceî
"A R I 455
c'gard que Suidas , compilateur sans
jugement. Il commença à se faire con-
naître, daus la quatrième année de la
guerre du Péloponnèse (427 av. J.-C),
par les Dœtaliens , comédie que nous
n'avons plus. Il osa, l'année suivante,
dans les Babyloniens , attaquer la
coutume des Athéniens, de nommer
les archontes et d'autres magistrats
par la voie du sort. Comme il s'était
déjà sans doute permis dans cette
pièce quelques plaisanteries sur Ciéon ,
ce démagogue l'accusa d'usurper le
litre de citoyen d'Atisènes. Aristopha-
ne répondit à celte accusation par les
deux vers qu'Homère met dans li
l>ouche de Télémaquc , lorsqu'on lui
demande s'il est fils d'Ulysse : « Ma
» mère me l'a dit , je ne le sais pas
» autrement ; qui peut en effet se flat-
» ter de connaître son père ? » Celte
accusation fut renouvelée deux fois
parla suite, mais il s'en tira toujours
avec honneur. Il se vengea , bientôt
après, de Cléon , en le couvrant de ridi-
cule, et en l'accusant de dilapidations ,
dansla comédie des Chevaliei'S. Aucun
acteur n'ayant osé se charger du rôle
de Cléon , qui était alois tout-puissant,
Aristophane prit le masque, et le joua
lui-même. Enhardi parle succès, ilmit
sur la scène les juges, les philosophes et
les dieux eux-mêmes. Sa comédie dts
Guêpes ^ qui a fourni à Racine l'idée de
celle des Plaideurs ^ est une satire très-
ingénieuse de la passion des Athé-
niens pour juger. Dans \cs Nuées, il
attaqua Socrate sur son mépris pour
les dieux , sur sa manière de rai-
sonner qui tendait à mettre tout en
problême , jusqu'aux notions sur le
juste et l'injuste , et il tourne en ri-
dicule les vaines spéculations du phi-
losophe. Ce n'est pas ici le heu d'exa-
miner jusqu'à quel point ces accu-
sations étaient fondées; mais il est
certain qu'elles u'eurent aucune in-
454 ARI
fluence sur la condamnation de So-
ciale , qsii n'eut lieu que vingt-trois
ans après. Dans les Grenouilles et
daus la Faix , Aristophane se per-
in( t sur Bacchus , Hercule et Jupi-
ter, des railleries qu'il est as^ez sin-
gulier que le peuple Athénien , su-
perstitieux comme il l'était, ait souf-
fej'tes. Cette tolérance venait sans
doute de ce q le la comédie faisait
partie du culte de Bacchus. Les poètes
ses contemporains , Agathon , Carci-
nus , Euripide , ttc. , furent aussi
souvent en proie à ses sarcasmes; il
en voulait surtout à Euripide , et il en
revient à lui à chaque instant; il le
traduisit même sur la scène, ainsi
qu'Agathon , dans les Femmes cé-
léhrantles Thesmophories.hc peuple
athénien, tout susceptible qu'il était,
n'échappa pas davantage à ses plai-
santeries. Il lui reproche sans cesse
son inconstance , sa légèreté , sou
amour pour la flatterie, sa sotte cré-
dulité , et sa facilité à se livrer à des
espérances chimériques , enfin il lui
dit les vérités les phis dures. Aussi se
Vante-t-il, dans une de ses pièces, d'a-
voir osé le premier relever ses défauts
avec franchise , et il prétend que le roi
des Perses trouvait les armes d s Athé-
niens beaucoup plus redoutables de-
puis qu'il leur donnait des conseils. Il
faut qu'il y eût quelque chose de vrai
dans tout cela; car, loin de s'offenser
de ses avis , les Athéniens loi décer-
nèrent une couronne de l'olivier sacré,
ce qui était un honneur extraordi-
naire. Cette licence de la vieille comé-
die , qu'on avait regardée pendant
long- temps comme une des sauve-
gardes de la démocratie , devint bien-
tôt à charge, lorsque les orateurs se
furent emparés de l'esprit du peuple ,
ce qui arriva à la suite de la guerre
du Péloponnèse. Ces orateurs , ja-
loux de riuûucQce des poètes couki>
ARI
qiies, firent rendre, vers l'an 58B
av. J.-C, sur la proposition d'un
certain Antimachus , une loi qui dé-
fendait de nommer personne sur le
théâtre. Cette loi mit dans le plus
grand emb-îrras les administrateurs
des jeux. La comédie était , comme
nous l'avons dit , une partie essentielle
des fêtes de Bacchus , et aucun poète
ne voulait se charger de faire des
pièces. On eut alors recours à Aris-
tophane , qui fit le Cocalus , pièce
dans laquelle une fille violée par un
jeune homme , est ensuite reconnue ,
et se marie avec celui qui l'a \'iolée.
Cette coméilie, qu'il donna sous le nom
d^Ararus , son fils aîné , fut l'origine
de la comédie nouvelle. Ménandre et
les autres poètes plus récents , l'imi-
tèrent , et firent souvent usage de
cette intrigue, comme nous le voyons
dans les pièces Imitées d'eux par Plante
et Térence. Aristophane était alors
très-âgé, et il paraît qu'il ne vécut
pas long-temps après. 11 ne fuit pas
juger ses comédies par ce qu'en ont
dit quelques littérateurs modernes ,
qui n'étaient pas en état de les en-
tendre , et qui ont voulu les comparer
à celles de Ménandre , ou à nos comé-
dies modernes. La comédie , du temps
d'Aristophane , n'était autre chose
qu'un dialogue satirique en vers, mêlé
de chœurs, et il ne pouvait pas s'écai^-
tcr du genre adopte. On lui reproche
les obscénités dont ses pièces sont
remplies, qui tiennent même quelque-
fois au sujet , couirae dans la Lyais-
trale : mais cette licence était autori-
sée ; la comédie ne fut pas plus décen-
te àlxome dans ses commencements,
quoique les mœurs y fussent très-sé-
vères , et il en fut de même de nos
incmières représentations théâtrales.
\ ne faut donc chercher dans Aris-
tophane que rélégance du style ,
rurbaijiléattiquc, uu grand talent j)Our
ART
saisir les ridicules , et une peinture
fidèle des mœurs athe'uiennes. Il faut
convenir que sur tous ces points , il ne
laisse rien à désirer. Platon , si bon
juge en fait de style, avait fait sur
Aristophane deux vers dont le sens
était que les Grâces , voulant se faire
un temple impérissable , avaient
choisi l'esprit d'Aristophane. Il lisait
sans cesse ses come'dies ; on les trouva
dans son lit à sa mort, et il les envoya
à Denys le tyran, qui désirait con-
naître le gouvernement d'Athènes.
Enfin , il en fait un des acteurs de son
Banquet. On pourrait joindre au témoi-
gnage de Platon , cehii de S. Jean Chry-
sostome , s'il était vrai qu'il eût tou-
jours les comédies d'Aristophane
sous son chevet; mais Aide Manuce
est le seul qui le dise , et la pureté des
mœurs de S. Jean Chrysostôme ne
permet pas de croire qu'il se plût à
la lecture d'un poète aussi licencieux.
Il ne nous reste que onze comédies
d'Aristophane , qui ont été imprimées
un grand nombre de fois. Les meil-
leures éditions sont les suivantes,
1 °. avec la traduction latine, Amster-
dam, i670,in-i2; 2°. avec la traduc-
tion latine , les schoHes grecques , les
notes de divers savants , et celles de
Ijud. Kuster , Amsterdam , 1 7 1 o , in-
fol. ; 3". avec les notes de Bergler,
Amsterdam, 1760, in-4". , 2 vol.;
4°. avec les notes de Brunck, Stras-
bourg, 1783, in-8°., 3 vol., quel-
quefois en quatre; 5°. celle d'Inver-
nizi, d'après un manuscrit du 10''.
siècle , trouvé à Ravennes , Leipsick ,
1 794 , in-8°. , 1 vol. On aurait su
beaucoup plus de gré à M. Beck,
éditeur de cet ouvrage , s'il avait pu-
blié le sclïoliaste grec , qui est absolu-
ment nécessaire pour l'intelligence
des comédies d'Aristophane, au heu de
nous donner, dans un énorme volume
JQ-8°. qui a paru en 1809, tous les
ART
455
commentaires sur le Plutus. On a
publié à Leipsick , eu 1 804 , un pre-
mier volume d'Aristophane, contenant
le Plutus, avec un commentaire peu
important de J. F. Fischer. Je crois
que cette édition ne se continue pas.
Parmi les éditions de pièces détachées
d'Aristophane , on doit remarquer le
Plutus, avec les scholies grecques et
les notes de Tib. Hemsterhuis , Har-
lingue , 1 745 , iu-8" , et les Oiseaux ,
avec les notes de M. Beck, Lipsia; ,
1782 , in-8°. Traductions françai-
ses, 1°. du Plutus et des IVue'es , par
1V^"^ Dacier, Paris , 1684, 1692 ; 1".
des Oiseaux , par Boivin ; 3". d'une
grande partie des Guêpes , par M.
GeofFroi , dans son édition de Racine ,
Paris, 1808; 4°' •iii Théâtre com-
plet, par Poinsinet de Sivry , 1784
ou 1790, 4 vol' in-8°. ; quelques
pièces sont traduites en vers, quelques
autres en prose; 5°. du théâtre com-
plet , en prose , par A. Ch. Brottier ,
neveu de l'éditeur de Tacit-- ; tom. X
à XIII , de la nouvelle édition du
Théâtre des Grecs ; 6". Lisistrata ,
opéra de M. Hoffmann. C — r.
ARISTOPHANE, célèbre grammai-
rien , né à Byzance , étudia sous Calli-
maque et sous Zénodote , vers l'an
198 avant J.-C, et vint à Alexandrie,
où se trouvaient le plus de ressources
pour ceux qui se livraient à la gram-
maire et à la critique. Il est souvent
cité dans les scholiastes des anciens
poètes. Si l'on en croit Vitruve , Aris-
tophane obtint, de la manière sui-
vante , la place de surintendant de
la bibliothèque d'Alexandrie. Ptolé-
mée Physcon , qui régnait alors en
Egypte , employait toutes sortes de
moyens pour augmenter sa bibliothè-
que ; il accordait des honneurs et des
récompenses aux écrivains , et voulait
qu'il y eût sept juges pour décider du
mérite des ouvrages .^ On n'en trom'a
456 ARI
que six, parmi les p;eus de lettres qui
étaient alors à Alexandrie. Ces six ju-
ges proposèrent au roi de s'adjoindre
Ai'istophane, qui était occupé conti-
nuellement à lire les livres de la bi-
bliothèque : le roi y consentit. Les
poètes lurent les premiers leurs ou-
vraj^es. Six juges avaient déjà décidé
en faveur de quelques-uns, pour qui
le peuple avait témoigné du pencliai;t ;
mais Aristophane accorda le premier
prix à un poêle qu'on n'avait presque
pas daigné écoutei ; il soutint qu'il était
le seul qui eût réellement composé ses
ouvrages , et que tous les autres n'é-
taient que des plagiaires. Il les en con-
vainquit publiquement, ayant fait ap-
porter de la bibliothèque des livres
ou il montra les endroits qu'ils avaient
pillés. Ce jugement d'Aristophane fut
une preuve de sa capacité, et lui mé-
rita la place de surintendant de la bi-
Lliothèque. Ce même Aristophane est
rite comme ayant partage les Dia-
logues de Platon en trilogies.
C— n.
ARISTOTE, philosophe, naquit à
Sfagire , ville de Maccdonie , la pre-
mière année de la 99''. olympiade
(384'. avant J.-C.\ Nicomachus, son
père , descendait de Machaon, fils
d'Esculape. Phacstis, sa mère, appar-
tenait aussi à des parents illustres.
La médecine était une profession hé-
réditaire dans la famille des Asclépia-
des, et le père d'Arislote s'y était livré
avec succès. Il avait même laissé quel-
ques ouvrages sur cette science, et ses
connaissances l'avaient fait appeler à
}a cour d'Amyntas II l, roi de Macé-
doine, père do Philippe et aïeul d'A-
lexandre. Il destina son fils à la même
carrière, et le dirigea lui-même dans
l'étude dclamédccine et dans celledela
philosophie, qui en était déjà la com-
pagne inséparable, comme le prou-
vent les ouvrages d'Ilippocrate. Ou
ARÏ
ne sait jusqu'oïl Aristote porta ses étu-
des en ce genre; mais on voit par ses-
Problèmes , et quelques autres écrits,
qu'il aurait obtenu de giauds succès
dans cette scicuce , s'il av"it voulu s'y
livrer uniquement. Ce fut s.uis di ute à
cette pren.i( re éducation , qu'il dut le
goiltqui se développa chez lui, dans
la suite, pour l'histoire naturelle,
dont il fut le créateur, puisqu'il est le
premier qui ait fait des observations
exactes. Avint perdu son père et sa
mère, à l'âge de dix-huit ans, il alla
d'abord à Atarné , auprès de Froxénus,
ami de sa famille; après y avoir de-
meuré peu de temps, il >e rendit à
Athènes, pour y entendre Platon,
dont l'école était alors très-renommée.
Quelques auteuis prétendent que,
dans sa première jeune'-se, il avait
dissipé sa fortune, et qu'il fut obligé
d'embrasser l'état de pl;arnîaeieu à
Athènes; mais ce fait, rapporte daçs
une lettre d'Epicure, qui e>t évidem-
ment sup])osée , ne mérite aucune
croyance. Il est cependant possible
qu'il ait exercé la profession de mé-
decin à Athènes , et qu'il ait vendu
des remèdes comîue le f;iisaient tous
les anciens médecins, ce qui n'avait
rien d^ déshonorant. Aristote re ta ,
pour cette première fois, vingt ans
à Athènes, et ne se borna point a sui-
vre, pendant un si long espace de
temps, les leçons de Platon; car Cicé-
ron, et plusieurs autres auteurs, di-
sent qu'il ouvrit une école d'éloquence,
pour rivaliser Isocrate , ce qu'il n'a pu
faire qu'à cette époque Isocrate étant
mort l'an 5j9 av. J.-C. Il est probable
qu'il y publia aussi quelques ouvrages
sur la philosophie, qui commencèrent
à le faire connaître, et que ce fut d'a-
près sa réputation que Phili|pe de
Macédoine lui écrivit, peu de temps
après la naissance d'Alexandre, l'an
55t> avant J.-C, celte lettie téUbre :
ARI
« PMippe, roi de Macédoine, à Aris-
» tote, Siilut. Sachez qui: m'est ne un
» fils : je- remercie les Dieux , non pas
w tant de me l'avoir donné, que de
» l'avou' fait i.aître du temps cl'Aris-
» tote. J'espère que vous en ferez un
» roi digne de me succéder et de
» commander aux Macédoniens. »
Quelques auteurs disent que , peu de
temps avant la mort de Platon, Aris-
tote rompit avec lui , et chercha même
à élever une école rivale de la sienne.
Nous n'avons , à la vérité , d'autre au-
toriié, là-dessus, que celle d'Aristoxè-
ne, disciple d'Aristote, et qui, irrité
contre lui , de la préférence qu'il avait
donnée à Théophraste, pour le pi.iccr
à la tète de son école, ne l'avait guè-
re ménagé dans ses écrits. Cepen-
dant, ou ne peut le soupçonner que
d'exagération ; car il n'est pas proba-
ble qu'il eût inventé ces faits. 11 est
assci naturel de penser que Platon
fut oifusqué par la réputation toujours
croissante de son élève, qui avait
abandonne sa manière de traiter la
philosophie, pour en adopter une au-
tre, fondée sur des principes plus cer-
tains, La lettre de Phihppe dut encore
augmenter sa jalousie ; mais , malgré le
refroidissement qui eut lieu entre eux,
ils n'en vinrent jamais à une scission
ouverte. Aristote témoigna toujours à
Platon les plus grands égards , et ne
parle de lui qu'avec respect dans
tous ses ouvrages. Platon étant mort
l'an 348 avant J.-C., et les Athéniens
ayant, vers le même temps, déclaré la
guerre à Philippe, Aristote ne crut
pas devoir rester à Athènes, et se
rendit à Atarné, où Hcrmias, son ami,
avait l'autorité souveraine. I^ous ne
répéterons pas les bruits que la ca-
lomnie avait répandus sur ce voyage ;
ils sont si absurdes , qu'ils ne méritent
pas d'être réfutés. Peu de temps après,
Hermias s'ciant confié imprudemranit
A R r 457
à Mentor Rhodien , frère de Memnon ,
géiiéral des troupes grecques , à la
solde du roi de Perse, fut livré par ce
traître à Artaxerces, qui le fit mourir
de la manière la plus ignominieuse.
Aristote , très-affligé de sa mort , cher-
cha à éterniser sa mémoire, par un
hymne qui est un des plus beaux mor-
ceaux de poésie que nous connaissions.
Aristote érigea aussi, dans Delphes, une
statue à Hermias , avec une inscription
qui rappelait la trahison dont il avait
été victime. Hermias avait une sœur,
nommée Pvthias, beaucoup plus jeune
que lui, et qu'il élevait comme sa fille.
Elie se trouvait dénuée de tout secours ,
par la mort de son frère, et Aristote ,
qui ne voulut pas l'ab indonner, l'é-
pousa. Elle mourut long-temps avant
Aristote, qui la regretta au point de
donner lieu à une accusation d'une
espèce singulière. On prétendit que ,
lorsqu'il l'eut perdue, il en fit une di-
vinité, et lui rendit le même cuhc que
les Athéniens rendaient à Cérès. Il
paraît qu'après la m rt d Hermias,
Aristote alla passer quelque temps à
Mitylène; mais, vers l'an 545 avant
J.-C. , Philippe l'appela à sa cour ,
pour le charger del'éducationd'Alexan-
die, son fils, alox'S âgé de treize ans.
Nous ne connaissons guère les détails
de cette éducation ; mais., à voir les
grandes qualités qu'Alexandre déploya
dans les pi'emières années de son rè-
gne, l'empire qu'il conserva sur ses
passions tant qu'il ne fut pas cor-
rompu par ses flatteurs ; enfin , le
goût éclairé qu'il eut toujours pour les
sciences , les lettres et les arts , ou doit
croire que le philosophe n'avait pas
prodigué à son élève d'inutiles le-
çons. On lui reprochera peut-être de
n'avoir pas su prémunir Alexandre
contre l'ambition et la passion des con-
quêtes; mais Aristote était Grec , et,
par consé(jueui, eniiemi ualwcl du
453 A R î
roi de Perse ; sa haine sVtait accnic
par le meurtre d'Hennias; eufin , la
conquête de la Perse e'faif, depuis
loDç:;-temps, l'objet des vœux de toute
la Grèce. Aristote dut donc employer
tous ses talents pour mettre son roval
disciple on état de réaliser ce projet ,
et pour lui apprendre à faire tourner
cette conquête au profit de la civilisa-
tion ; il faut convenir qu'il y avait bien
réussi; car peu de conquérants ont
montré autant de talents politiques
qu Alexandre, et il aurait |)eul-ètre fait
une révolution très-hcurcuse dans le
s(ut du p;enre humain , si la mort ne
Ttût arrêté au milieu de sa carrière.
Philippe ayant été assassiné l'an 53-]
avant J.-C, Alexandre monta sur le
trône, et , par afTection pour son
maître , rétablit la ville de Stap;ire ,
que Philippe avait détruite. Les Staj^i-
rites, en reconnaissance, instituèrent,
tn l'honneur d'Aristote, une fête nom-
race Arislolelia, qu'ils célébraient
tous les ans. Aristote engagea aussi ,
par la suite, son disciple, à épargner
]a ville d'Eressos , patrie de Théo-
phraste, son disci])le chéri. Il paraît
constant qu'Arislote resta au moins
un an avec Alexandre, après son
avèuement au trône, et l'on prétend
(fi.ril se retira ensuite à Athènes ; mais
je trouve dans sa Vie, par Ammo-
iiius, qu'il suivit son élève dans une
partie de ses expéditions; et cela me
paraît très-crovable; car on ne conçoit
guère comment ce prince aurait pu
envoyer à Athènes tous les animaux
dont Aristote avait donné la descrip-
tion anatomique de la manière la plus
exacte, ce qui prouve qu'il les avait
disséqués !ui-niènie. Je suis donc porté
à croire qu'il le suivit jiisqu'en Egypte ,
et qu'il ne revint à Athènes que vers
l'an 301 avant J.-C, apportant tous
les matériuix uéccssaires pour la com-
position de son immortel ouvrage.
A RI
Xllistoire des animaux. Il laissa ,
auprès d'Alexandre, Callisthènes, son
parent et son disciple, qui eut le mal-
heur de s'attirer la haine de ce prince.
Quelques auteurs prétendent que cetta
haine s'étendit jusqu'à Aristote ; et
Plutarque en donne, pour preuve,
une lettre où Alexandre semble dé-
signer Aristote comme son ennemi ;
mais on avait forgé beaucoup de let-
tres sous le nom du roi de Macédoine,
et celle-là est sans doute de ce nombre.
Alexaixlre ne dut jamais oublier les
obligations qu'il avait à son maître, et
les persécutions auxquelles Aristote
fut exposé, immédiatement après sa
mort , semblent ])iouver que les
Athéniens le considéraient comme lui
étant entièrement dévoué. Aristote,
revenu à Athènes , y ouvrit une
école de jihilosophie dans le Lvcée ,
gymnase à peu de distance de la
ville. Il s'v rendait deux fois par jour.
Le matin était destiné à ses disciples ,
et il leur expliquait ce que les sciences
offrent de plus difficile. Le soir , il
admettait tous ceux qui désiraient
l'entendre , se mettait à la poitée de
tout le monde, et raisonnait sur les
connaissances qui sont d'un usage plus
ha'nitiiel dans le cours de la vie. C'est
à cette distinction que l'on doit la di-
vision de ses ouvrages en ésoléri-
ques et en acroamaliques. Les pre-
micrsconlenaientunedoctrine usuelle,
et chacun pouvait les entendre : les
seconds , destinés plus ]i-!rficulière-
ment à ses chsciples , avaient besoin
d'être expliqués par des leçons. L'au
5^4 avant J.-C. , Alexandre mourut ,
et Aristote , privé de sou protecteur ,
se trouva, de plus, en bute à la ca-
lomnie. De toutes les inculpations
qu'elle ait inventées contre lui , celle
de sa complicité avec les prétendus
assassins d'Alexandre, est sans doute
la plus absmde. Les Athéniens , es-
A1\I
pérant se mettre encore une fois à la
tête de la Grèce , cherchèrent à la
soulever pour lui faire secouer le joug
des Macédoniens, et comme l'atta-
chement d'Âristote à Philippe , à
Alexandre et à Antipater le rendait
suspect , les démagogues se déchaî-
nèrent contre lui , et ils furent secon-
dés , non seulement par les sophistes ,
dont il avait dévoilé les vaines subtili-
tés, mais encore par les platoniciens,
qui ne lui pardonnaient pas la célébrité
que son école avait acquise. On sus-
cita contre lui l'iiiérophante Eury-
Biedon , ou un certain Déraophile ,
pour l'accuser d'impiété. 11 necrutpas
devoir courir la chance d'un juge-
ment , et voulant, disait-il , en faisant
allusion à la condamnation de Socrate,
épargner aux Athéniens un second
Attentat contre la philosophie , il prit
le parti de la retraite, et alla s'étabhr
à Chalcis , dans l'Ëubée , avec la plus
grande partie de ses disciples. Il mou-
rut de maladie , peu de temps après,
l'an 52'2 av. J.-C., à l'âge de soixante-
trois ans. Car il ne faut ajouter aucune
foi à ce que dit Hésychius de Milet ,
écrivain du Bas- Empire , qu'y^ristote
fat condamné à boire la ciguë et que
l'arrêt fut exécuté. Nous avons vu que
Pytbias, son épouse, était morte avant
lui. Elle lui avait laissé une fijle
nommée Pjthias comme elle , et il
avait eu un fils , nommé Nicoma-
chus , d'Her pyllis de Stagire , qu'il avait
prise pour concubine après la mort de
sa femme. On prétend qu'il avait, outre
cela , adopté Proxénus , fils de Nicanor
son ami, mortdcpuis long-temps. Nous
TOj-onsbien, eirectivement, qu'il avait
élevé Nicanor, mais rien ne prouve
qu'il l'eût adopté. Diogèue Laërcenous
a conservé son Testament, dans lequel
son caractère se peint d'une manière
très-avantageuse ; car il n'est pas un
«eal de ceux qui lui avaient été atta*.
A R I 459
che's, qui n'y obtienne quelque mar-
que de souvenir. Il règle le sort de
ses enfants, celuid'Herpyllis, et donne
la liberté à ses esclaves ; il charge ses
six exécuteurs testamentaires , parmi
lesquels on comptait Antipater et
Théophraste, de faire terminer, par
Gryllion , les statues de Phaeslis sa
mère , de Proxénus son père , d'Arim-
nestus son frère , et de Nicanor. Il
désire, enfin, qu'on réunisse les restes
de Pythias aux siens dans un même
tombeau. On voit , par ce testament ,
qu'Aristote avait une fortune assez
considérable , qu'il tenait en partie de
son père, en partie de la libéralité
d'Alexandre. Il fut le fondateur d'une
secte de philosophie qui prit le nom
de péripatélicienne , parce qu'il don-
nait ses leçons en se promenant. Son
école , qui revint bientôt à Athènes , y
subsista long-temps ; mais sa doctrine
ne larda pas à s'a'terer , et Théo-
phraste, son successeur, fut presque
le seul qui se montrât digne d'un tel
maître, par le soin avec lequel il con-
serva sa doctrine ; et les recherches
qu'il fit pour la compléter par de nou-
velles découvertes. Après sa mort, les
écrits d'Aristote et les siens , ou tout
au moins ceux qui ne pouvaient être
compris sans des leçons particulières,
tombèrent presque dans l'oubli , et
l'on ne doit pas s'en étonner. Doue
du génie le plus éminemment philo-
sophique, que la nature ait jamais
donne' en partage à aucun individu ,
Aristote avait créé un «système de
philosophie fondé sur la raison , sur
l'expérience , et n'avait presque rien
sacrifié à l'imagination. Son style avait
pris l'empreinte de son génie. Avare
de mots , il n'en emploie pas deux ,
lorsqu'il peut exprimer sa pensée par
uu seul , et il en a souvent créé de
nouveaux ])0ur éviter des circonlo-
: cutions. EuOn, il s'est fait un style phi-
46o A R I
losophique qui doit être l'objet d'une
etnde particulière , et cette étude n'e'-
tait point du goîit des Grecs , qui
s'occupaient beaucoup moins des cho-
ses en clles-inèmes que de la manière
dont elles étidcut ënonce'es ; et il faut
convenir qu'à cet égard Platon eut
un grand avantage sur Aristote. Le
premier rnisonne souvent mal , ou
plutôt il lui arrive rarement de i-ai-
.«ionner juste ; mais son style, le mo-
dèle du style attiquc , est si élégant
et si gracieux , qu'il n'est pas surpre-
nant fpie SCS ouvrages aient eu plus
de lecteurs que ceux d'Aristote , où.
l'on ne trouvait que le langage de la
iroide raison. Les péripnléliclens eus-
jiièmes négligèrent les écrits de leurs
deux premiers maîtres pour se jeter
dans do vaines disputes de mots, et
se livrer a des études étrangères à la
j)liilosopbie. Il est cependant dildcile
de croire, qu'à aucune époque, les
ouvrages d'Aristote aient été entière-
ment ignorés, comme le dit Strabon.
Quoique Théophraste en eût gardé
les originaux , il avait dû en laisser
des copies à ses successeurs , et ils se
trouvaient sans doute dans les granrlcs
l>ibliotlièques ; mais on ne daignait pas
clicrcher à les lire. Us ne commen-
cèrent à être lui peu plus connus que
lorsque les Romains s'adonnèrent à
la philosophie. Svlla avait ajjporté à
Rome la bibliothèque d'A|)ellicon ,
où se trouvaient les originaux des
ouvrages d'Aristote et de Théophrasie.
31 permit à qui le désira d'en faire
des copies, et Andronicus de Rhodes,
se les étant procurés, les mit en ordre,
y ajouta des sommaires, et les revit
avec beaucoup de soin. Us ne se ré-
j)audirent cependant pas trcs-piomp-
temcut ; car (jicéron dit, que de son
temps, il y avait encore peu de phi-
losophes qui les con missent. Les Ro-
mains furent les premiers qui eu siu-
ARI
tirent le prix , et ils contribuèrent
beaucoup , ainsi que le remarque
Strabon, à en ramener l'étude. Les
péripatéticiens se mirent, dès-lors ,à
professer la véritable doctrine d'A-
ristote , qui , depuis cette époque , a
éprouvé une infinité de vicissitudes ,
dont on peut voir l'histoire dans le
Traité de Launoy, De varia Aris-
totelis fortund. Il n'est cependant pas
indifférent de rapporter ici, ne fût-ce
que pour faire sentir la bizarrerie de
certaines destinées , et jusqu'à quel
point l'esprit humain peut s'égarer ,
quelques-unes des opinions que l'on
tut dans la suite sur Aristote ; car il
est bien constant que l'histoire de ce
philosophe ne finit point avec sa vie.
11 a trouvé, chez toutes les nations
policées , d'ardents admirateurs. L'A-
rabe Averrccs n'hésite point à l'appe-
ler le comble de la perfection hu-
maine , etc. Dans plusieurs sectes
chrétiennes , il a été l'objet d'un vé-
ritable culte, et la certitude de sou
salut a été soutenue par plus d'un doc-
teur. La philosopTiie d'Aristote, long-
temps négligée par les Grecs, à l'ima-
gination riante desquels elle ne con-
venait point , et par les Romains , à
qui toute philosophie spéculative était
assez indifférente ; condamnée par les
premiers chrétiens qui furent presque
tous des platoniciens outrés , repnt
faveur chez les Arabes , et fiit intro-
duite par eux, dans le moyen âge , en
Europe , où on lui voua un culte tout-
à-fait superstitieux. Non seulement ou
en adoptait les principes généraux ,
(pie l'on développait avec une subti-
lité exagérée et dans un style barbare;
mais on regardait encore comme in-
dubitables jusqu'aux moindres choses
de l'ait ra])portées par le philosophe
Ramus fut assassiné pour avoir voulu
attaquer cette prévention , et si Des-
' cartes rc'u.-^sit à la détruire, ce ne fut
A ni
pas sans e'prouvci- des persécutions
cruelles ; mais , par une de ces révolu-
tions trop ordinaires dans les opi-
nions de la foule , même quand cette
foule est savante , on tomba dans un
excès oppose' j la philosophie d'Aris-
tote fut méprisée; on s'en moqua
dans des satires, dans des comédies;
le nom même de ce philosophe fut
quelque temps ridicule , et ses écrits
ont fini par être presque oubliés des
maîtres et des jeunes gens. Le fait est,
cependant , que Platon et Aristole sont
les chefs des deux grands partis qui
ont divisé la philosophie jusqu'à nos
jours : l'un qui attribue aux idées gé-
nérales , une existence indépendante,
et qui prétend conclure de la dé/îni-
lion des choses à leur nature ; et l'au-
tre qui affirme, au contraire, que nos
idées générales ne naissent que par
abstraction, et ont, dans l'observa-
tion et dans l'expérience , leurs pre-
mières racines. Sous les noms de pla-
toniciens , de réaux , d'idéalistes, les
philosophes du piemier parti ont
toujours penché vers les illusions du
mysticisme ; sous ceux de pc:ipatéti-
ciens , de nominaux , d'empyristes ,
ceux de l'autre parti nous ont con-
duits 5 à l'aide de l'expérience et
d'une raison calme, à tout ce que
nnus savons de réel touchant la na-
ture physique et morale. Newton et
Locke se sont déclarés les chefs des
péripatéticiens modernes; le premier,
en admettant comme vraies, les pro-
priétés reconnues par l'expérience , et
eu cherchant à en déduire les effets
qui en dépendent, sans s'inquiéter si
ces propriétés sont occultes, ou non;
le second , en soutenant que l'esprit
est une table rase, qui ne reçoit que
de l'expérience les germes de ses idées.
Ce sont les deux pivots sur lesquels
Aristote appuie toute sa philosophie
g^éuérale, el sur lesquels roulent toutes
ART 4^11
les applications qu'il en a faites. Ces
apphcations ne sont pas toutes égale-
ment heureuses : la métaphysiqueetia
physique d'Aristote ne sont jvis bon-
nes; mais c'est nue preuve de plus
de la justesse de ses principes; car nos
idées générales ne naissant que des
idées particulières , les plus générales
de toutes ne pouvaient se développer
que les dernières. Lorsqn'Aristote éta-
blissait Vhorreur du vide, il se for-
mait une idée générale , telle que la
donnaient les expériences d'alors.
Quand on eut observé que les pompes
ne soulevaient l'eau qu'à 52 pieds ,
et le merciuc qu'à 28 pouces , il fallut
bien en chercher une autre. On se
borna alors à reconnaître la pesanteur
de l'air. De là au principe de la pe-
santeur universelle , il y a encore loin
sans doute. Cependant l'on y est arrivé
en suivant le même chemin. Aristote
dut être plus heureux dans les ma-
tières plus rapprochées , oîi il n'est
pas nécessaire de s'élever à de si
hautes abstractions ; et en effet , sa
poétique et sa rhétorique contiennent
sur tous les genres d'écrire les règles
les plus saines ; sa morale offi'e une
analyse délicate de tous les penchants
du cœur, et une distinction fine de
toutes les vertus et de tons les vicf-s ;
dans sa logique il développe , avec
une sagacité infinie , la marche et les
ressorts du raisonnement ; il lui trace
la route propre à l'empêcher de s'é-
garer, et poursuit dans tous leurs
détours les sophismes les plus spé-
cieux. Mais de toutes les sciences ,
celle qui doit le plus à Aristote , c'est
l'histoire naturelle des animaux. Non
seulement il en a connu un grand
nombre d'espèces , mais il les a étu-
diés et décrits d'après un plan vaste
et lumineux, dont peut-être aucun de
SCS successeui'S n'a approché, ran-
geant les faits , non point selon les
462 ARI
espèces, mais selon les organes et
les fonctions , seul moyen d'établir
des résultats comparatifs : aussi peut-
on dire qu'il est nun seulement le plus
ancien auteur d'anatomie comparée
dont nous possédions les écrits ,
mais encore que c'est un de ceux qui
OHt traité avrc le plus de génie cette
branche de l'iiistoirc naturelle, et ce-
lui qui mérite le mieux d'être pris
pour modèle. Les principales divi-
sions que les naturalistes suivent en-
core dans le règne animal , sont dues
à .\i'istote , et il en avait déjà indiqué
plusieurs , auxquelles on est revenu
dans ces derniers temps , après s'en
être écarté mal à propos. Si l'on exa-
mine le fondement de ces grands tra-
vaux, l'on verra qu'ils s'appuient tous
sur la même méthode , laquelle dé-
rive elle-même de la théorie sur l'o-
rigine des idées générales. Par-tout
Aristote observe les faits avec, atten-
tion; il les compare avec Gnesse, et
cherche à s'élever vers ce qu'ils ont
de commun ; ainsi , sa Poétique est
fondée sur les ouvrages d'Homère et
des grands tragiques ; sa Politique ,
sur les constitutions d'un grand nom-
bre de gouvernements grecs et bar-
bares , et son Histoire naturelle , sur
cette immensité d'observations que hii
procurèrent les généreux secours d'A-
lexandre. Son style est accommodé
à sa méthode; simple, piécis, sans
recherche et sans chaleur, il semble en
tout rop}K)sé de celui de Platon ; mais
aussi a-t-il le mérite d'être généralement
clair, excepté en quelques endroiis,
où ses idées elles-mêmes ne l'étaient
]»as.Théophraste, qui succéda à Aris-
tote dai.s la chaire du lycée, employa
la même méthode, et en retira les
mêmes avantages dans ses ouvrages
classiques sur les plantes et sur les
caractères. 11 s'en ftuit beaucoup que
nous ayons tous les ouvrages d'Ai'is-
ARI
tote; nous en avon» perdu de très*
importants , et entre autres le Recueil
qu'il avait fait des institutions poli-
tiques de cent cinquante-huit états dé-
mocratiques , aristocratiques , oligar-
chiques et tyranniques. 11 nous en
reste cependant un grand nombre. On
en trouvera le détail ci-après. Ils ont
été imprimés plusieurs lois conjointe-
ment ; la première édition , toute
grecque , a été donnée à Venise par
Aide Mannce , de i495 à 1498,
en 5 vol. in-fol. Elle n'a pas d'autre
méiite que sa rareté. On recherche
aussi celle que Camotius a donnée
à Venise, chez Paul Manuce, i55i
— 55, in-S*»., 6 vol. : le 6*. con-
tient les ouvrages de Théophraste.
Mais la meilleure de toutes jusqu'à pré-
sent est celle que Fréd. Sylburge a
donnée, in-4°.,à Francfwt, chez les
héritiers d'André Wechel , et dont
voici le détail : Organon, i585; —
lîlietorica et Poëtica , 1 584 î —
Ethica ad Nicjtnachum , 1 584 »
— Ethica magna, etc., i584; —
Polilicn et OEconomica, 1587; —
Animalium Historia , 1 587 ; — De
Anivialium partihus , etc., i585;
— Phrsico' Auscultationis lib. nil,
et alia opéra , \ 5g6 ; — De Cœlo
lib. 1 V^ sans titre ; — De Genera-
lione et Conceptione, sans titre; —
De Meteoris lib. IT'\ sans tilre ; —
De HJundo, sans titre ; — De Ani'
rnâ, sans titre; — Paiva Natiiralia,
sans titre; — Faria Opuscula. lîîS'j;
— Aristotelis , Alexandri et Cas-
sii Problemata. i5b5; — Aristotelis
et Tlieophrasti Metapfiysica, i585.
Cette édition, toute grecque , se trouve
rarement complète; elle est très-re-
cherchée par les savants. On estime
aussi les suivantes : Aristotelis ope-
rumnoi>a edilio, ^7*. lat.^ ex biblio-
theca Is. Casauboni , Genève , 1 5r)o.,
1596, i6o5 , iu-fol. , a vol. Ces édi-
ARI
lions , qui portent tantôt le titre de
Genève, tantôt celui de Lyon , tantôt
celui de Coloniœ Allobrogum ( Co-
Jogny, petite ville dans le voisinage
de Genève ) , sont ëgaleinenl bonnes.
— Arislotelis opéra gr. lat. cura
Gui. D in> al. ,î'Ans\ïs, i6ig, 16-29,
1G59, i654, fn 2 ou en 4 vol. in-fol.
Les deux dernières sont un peu plus
amples queles auties. M. Buhie, actuel-
lement professeur du droit de la na-
ture et des gens à Moscow, a com-
mence à donner une e'dition d'Aristote
en grec et en latin, avec des notes
critiques. Il n'en a paru jusqu'à pre'-
sent que 5 vol. in-S"., le i'''". à Deux-
Ponts, en 1791 ■, et le 5*". à Stras-
bourg, en l'an 8.11s contiennent,
YOrgauum , les livres sur la Rhéto-
rique , et la Poétique, Les ouvrages
d'Aristote ont e'te , pour la plupart ,
imprimés sc'parément un grand nom-
bre de fois , avec ou sans Commen-
taires. Nous allons indiquer les meil-
leures de ces éditions : Arislotelis
Organon, gr. lat., Julio Pacio inter-
prète cum argumeiitis , tabulis et
notis synopticis , Genevae , 1 6o5 ,
in-4°. Celte édition , réimprimée plu-
sieurs fois depuis , est la meilleure de
ce Recueil , qui contient tous les ou-
vrages d'Aristote sur la logique. —
udristotelis Rhetorica gr. cum com-
mentariis gr. anonjmi , Parisiis ,
1 559, in-fol. , édit. très-rare, ce Com-
mentaire n'ayant pas été réimprimé j
— cum commentario Joannis Slur-
mii , gr. lat. , Argentorali , 1670 ,
iu-8".; — gr. lat. cum commenta-
rio P. Fictorii , Floreutiae , Junise ,
1579, in-fol.; — gr. lat. cum com-
vientariis Fr. Porti Cretensis , Spi-
rae , i SgS , in-8°. ; — gr. lat. cum
commentario Christ. Schroderi ,
Helmstadii, 1672, in-4*'.; — gr.lat.
cum Notis selectis , Cantabrigiae ,
1728 , iu-8°. j — gr. cum varii$
ARI 463
leclionihus et notis , Oxonii, 1759,
in-8''. , le grec est imprimé sans ac-
cents ; — Aristotelis de Poëtica li-
ber gr. et lat. cum commentario P.
Fictorii , Florentiae , Juntae , 1 56o ,
167 3, in-fol.; — en grec et eu italien,
avec le Commentaire italien de Louis
Castelveltro, Bâle, 1570, in-4". ; —
gr. lat. cum notis, Oxonii , 1760,
in-B". ; — gr. lat. cum animadver-
sionibus Th. Christ. Harles, Lipsi.T ,
1780, in-8°. ; — gr. lat. cum notis
Th. Tkrrrhwit,Q\onn, 1 794, in-8°. ;
— gr. lat. cum commentario Godi
Hennann ., Lipsias , i8o5 , in-8**.,
excellent Commentaire par un des
plus savants hommes de l'Allemagne;
— Aristotelis Ethica ad Nicoma~
chum gr. cum Eustratii , Aspasii ,
Michaelis Ephesii aliorumque com-
mentariis , Venetiis Aldus , 1 536 ,
in-fol.; — gr. lat. cum notis D.
Lamhini et Ch. Zuingeri scholiis ,
Basika;, i566, in-4''.; — cumcom-
mentariis P. /^/ctorà, Florentiae Jun-
tae , i583, in-fol.; — gr. lat. cum
netis Gui. fVilkinson^Oxov.W. 17 16,
in-8°. ; — Aristotelis Pcliticorum
lib. FUI, cum commentariis P. Fic-
torii; — gr. lat. Florentia» , Juntae ,
1576, in-fol. ; — cum duplici l'er-
sione latina D. Lambini et P. Fic-
torii commentariis et scholiis Th.
Zuingeri, Basileae, i582, in-fol. ; —
gr.lat. cum paraphrasi latindDan.
Heinsii , Lug. Bat. , Eizcvir , 1 62 1 ,
in-8°.; — gr. lat. cum notis Hemi.
Conringii^ Helmstadii , 1 659, in-4°. ;
— gr. lat. cum commentario Jo.
Gottl. Schneideri , Francofurti ad
Vidrium , 1809, in-8''. , 2 vol.,
excellente édition, corametoutes celles
qui ont été données par M. Schneider.
— Aristotelis Historia Animalium,
gr. lat. cum versione et commen-
tariis Jul. Cœs. Scaligeri , ïolosas ,
16 jç), in-fol. On imprime dans ce
464 A R I
moment, en Alleiilaçîne , une nouvelle
e'diiiou de cet ouvrage , avec les notes
de M. Schnfider. — Arislotelis Ds
miindo lib. gr. citm duplici inter-
pretatione Luc. Apuleii et G. Bii-
(faei\ schoUis et castigationibus Bon.
Fidcanii^\Av^. Bat. , i ')9 r , in-S". : —
cuvi notis J. Frid, Kappii, Alteu-
Lurp , I -jÇ)'! , in-8". , le texte e«t im-
prime' sans accents ; — Arislotelis
liber de Mirahilibus Auscultationi-
bus gr. lat. explicatus à J. Beck-
mann, Gottiiiç;ae , 1786, in-4°. Ces
deux derniers Traités ne sont pas d'A-
ristote. Voiri les traductions françaises
qui sont parvenues à ma connaissance :
les Éthiques et les Politiques , trad.
par Vrir. Oresmc , Paris , Verard ,
1/(88- 1489, 'i. vol, in -fol. — Les
Politiques d'Arislote , traduites en
français , avec des annotations , par
L. Le Roy > dit Rcf^ius ; dans le
même volume sont la République
et le Pkœdon de Platon, traduits
par le même , Paris, 1600 , in-fol.
Cette traduction , qui a e'tc imprimée
plusieurs fois , est encore la meil-
leure, quoique le style en soit très-
suranné; — traduit, en français avec
des notes, par IM. Cl). Millon, Paris,
1 8o3 , iu-S". , 3 vol. , traduction assez
bonne, et que l'auteur rendra encore
meilleure, s'il en donne une nouvelle
édition; — les Politiques de la trad. de
J. Fr.Champaç;ne. Paris, 1 -jp-;, CivoJ.
in-S". ; — Id Rhétorique d'Aristote,
traduite par Cassandre , Par)s, 1(373,
in- 12 ; cette traduction, quoique pa-
raphrasée , est très-fidèle , et il serait
à souhaiter qu'elle fût plus répandue ;
elle a été imprimée plusieurs fois ; —
la Poétique d'Aristote , traduite en
français , avec des Remarques , par
Dacier, Paris, 168*2 , in-4". Cette
traduction, avec des Remanpies très-
ditfuses , a été imprimée plusieurs
t'ois J — la même, en grec et eu latin ,
ARI
par l'abbé Le Batteux , dans les quatre
Poétiques, Paris, 1771 , in-8°. et
in- 1 2 , 2 vol. ; — V Histoire des ani-
maux d'Aristote, traduite en fran-
çais , avec le texte grec à côté, et des
Notes, par Camus, 1785, in-4°., 2
vol. Camus n'était pas assez savaut
en grec et en histoire naturelle pour
une entreprise pareille; — le Traite'
De Mwuio , attribué à Aristote , se
trouve en grec et traduit en français, par
l'abbé Le Batleux, d.ins le i". volume
de son Histoire des causes premières ,
Paris , 1 7G5 , iu-8°. Nous n'avons pas
cru devoir parler des Coramentaiies
grecs d'Aristote, qui sont en très-grand
nombre. — Il v a eu beaucoup d'au-
tres Aristote , dont on peut voir le
catalogue dans Diogène Laërce , et
dans les notes de IMénage sur cet au-
teur. — Aristote était aussi le nom
d'un des Battus , roi de Cyrène. ( F'.
Battus. ) C — v — r et C — R.
ARISTOTIMUS, fils de Damai é-
tus , fils d'Etymou , se fit tyran de
l'Élidepar le secours d'Antigine, fils
de Démétiius , roi de Macédoine. Ne
se fiant pas aux gens du pa\s, il avait
une garde composée de barbares de
toute sorte de nations , et , comme il
avait besoin d'eux, il leur permettait
tous les excès auxquels ils voulaient
se livrer. 11 avait fait périr un grand
nombre de citoyens, et beaucoupd'au-
tres avaient été exilés ; huit cents dé
ces derniers s' étant retirés chez les
J*>toIicns , lui firent demander leurs
femmes et leui'S enfants, et Aristoti-
mus fit annoncer publiquement que
les femmes qui voudraient aller re-
joindre leurs maris pourraient ie faire,
et emporter ce qu'elles voudraient de
leurs biens. Plus de six cents s'étanl
disposées à user de cette permission ,
il leur fixa un jour pour partir, en
leur annonçant qu'il veillerait à ce
qu'elles lissent la roule eu sûi^né ; ce
ARI
jonr arrive, ces feiiiraes s*e'tant ras-
semblées vers la porte de'signc'e , avec
leurs enfants et ce qu'elles voulaient
emporter , les satellites du tyran sur-
vinrent, et, à grands coups de fouet,
les firent rentrer dans la ville, où on
les mit toutes eu prison , et Aristoti-
mus s'empara de leurs effets. Les
seize prêtresses de Bacclius étant ai-
lé le supplier pour ces femmes , il
les fit chasser, et les condamna cha-
cune à une amende de deux talents.
Dans ces entrefaites, Hcllanicus, hom-
me avancé en âge, et dont les deux
fils avaient été tués , forma une cons-
piration contre le tyran , et ceux qui
avaient été exilés dans i'jEtolie étant
revenus , s'emparèrent d'Amyamone ,
lieu de l'Élide fortifié et commode
pour faire la guerre , et beaucoup
d'Eléens se réunirent à eux. Aristo-
timus s'adressa alors à leurs femmes
qu'il tenait en prison, et leur dit d'en-
gager leurs maris à se retirer, ou qu'il
les ferait mourir de la manière la plus
ignominieuse , après avoir tué leurs
enfants j mais elles le refusèrent cou-
rageusement. Quelques jours après ,
sachant que Cratérus , l'un des géné-
raux d'Antigone, venait à son se-
cours, et était déjà à Olympieavec ses
troupes , il reprit courage, et se rendit
sur la place publique, accompagné du
seul Gylon qu'il croyait de ses amis ,
mais qui était un des conjurés; alors
Hellanicus , Chilon , Lampis et d'au-
tres , se jetèrent sur lui et le tuèrent.
On fit mourir ses deux filles. G — r.
ARISTOXÈNE, né à Tarente, en
Italie , était fils de Spintharus ; il se
livra , sous la direction de son père,
à l'étude de la musique et de la phi-
losophie. 11 alla ensuite voyager dans
la Grèce, oh il reçut des leçons de
Lamprus d'Erythres , de Xénophile
de Chalcis, philosophe pythagoricien,
et enfuhd'Aristote, à qui il resta long-
ARI 465
temps attaché • mais ce philosophe ,
en mouraut , ayant désigné Théo-
phraste pour son successeur, Aris-
toxène , iirité de cette préférence ,
chercha à noircir la mémoire de sou
maître , et on lui attribue une partie
des calomnies qui ont été débitées sur
ce grand homme. Il avait fait un grand
nombre d'ouvrages , dans plusieurs
desquels il avait cherché à rassembler
les institutions et les principes des py-
thagoriciens. 11 avait aussi écrit les Vies
de plusieurs grands hommes , tels que
Pylhagore , Archytas , Socrate et Pla-
ton; mais, dominé par une basse ja-
jousie , il avait adopté et même inventé,
sur leur compte, au moins à l'égard
des deux derniers, beaucoup de faus-
setés , et ses écrits n'ont pas peu con-
tribué à jeter de l'incertitude sur l'his-
toire de la philosophie. Il nous reste
de lui des Éléments harmoiiiques, eu
trois livre. , ouvrage fort utile pour la
connaissance de ia musique ancienne.
La meilleure édition est celle que
Meibomius en a donnée , en grec et en
latin, dans le recueil intituîé : Anti-
qiiœ musicœ aiictores , Amstelodami ,
1 G5ji, in-40. M. Morelli , savant biblio-
thécaire de Venise , a publié à Venise ,
en 1786, d'après deux manuscrits,
l'un de la bil)hothèque de S. Marc ,
l'autre de celle du Vatican , quelques
fragments des Éléments Rhythmi-
qiies d'Aristoxène. On peut consulter
sur cet auteur, la savante Dissertation
de M. Mahne, intitulée : Diatribe de
Aristoxeno philosopha peripatetico ,
Amstelodami, 1793,111-8'.; etJoan-
nis Luzac Lectiones alticœ , Lugd.
Bat., 1809, in-4''. On trouvera dans
ce dernier ouvrage beaucoup de preu-
ves de la mauvaise foi d'Aristoxène ,
et de sa malveillance envers ses maî-
tres. G R.
ARIUS, le plus fameux hérésiarque
qui ait paiu dans les premiers siècle-» de
00
f^ÛG A RI
l'Église, était natif de la Libye cyre'-
iiaiquc. C'était un homme d'une taille
avantageuse , d'une ûgure imposante,
d'un maintien grave qui inspirait le res-
pect. Son abord affable et gracieux , sa
conversation douce et agréable appe-
laient la confiance. Des mœurs austères,
un air pénitent , un zèle apparent pour
la religion, soutenu par des connais-
sances assez étendues dans les scien-
ces profanes et ecclésiastiques , et par
un rare talent pour la dialectique ,
faisaient espérer que l'Église trouverait
dans sa personne de grands secours
contre ses ennemis. Malheureusement,
tout cela couvrait un fonds de mélan-
colie, d'inquiétude, d'ambition , et un
goût secret pour les nouveautés, qui,
joints à tant de qualités éminentes ,
n'en firent qu'un dangereux chef de
parti. Ces qualités en imposèrent à
trois saints patriarches , qui se succé-
dèrent immédiatement sur le siège
d'Alexandrie; à Pierre, qui l'ordonna
diacre, et fut ensuite obligé de l'in-
terdire, à cause de ses baisons avec
les Mcléciens ; à Achillas qui , touché
de son repentir hy^^ocrite , l'éleva au
sacerdoce ; et à Alexandre , qui lui
donna le premier rang dans son
clei'gé, et le chargea du soin d'une
éghse considérable. Après la mort de
S. Achillas, Arius, qui s'était mis sur
les rangs pour le remplacer , avait
conçu une violente jalousie de la pré-
jférence donnée à Alexandre , bien
résolu de saisir la première occasion
de s'en venger. Un jour que le pa-
triarche , conférant avec son clergé ,
dit qu'il y avait unité de substance dans
les trois personnes divines , Arius
l'accusa hautement de donner dans
l'erreur de SabelUus qui avait con-
fondu ces trois personnes , et il sou-
tint que le fils était une pure créa-
ture tirée du néant; que le nom de
Dieu ne lui convenait que par partici-
ARI
pation , comme à toutes les autres
créatures douées de grâces extraordi'
naires. Ebion , Artémas et Théodote
avaient bien nié, avant Arius, la di-
vinité de J.-C. ; mais il était le pre-
mier qui eût dit que le fils de Dieu est
tiré du néant et sujet au péché. U
commença d'abord à insinuer sa nou-
velle doctrine dans des assemblées par-
ticulières , et ne la produisit en pu-
blic qu'après s'être assuré d'un grand
nombre de sectateurs. Alors il la dé-
bita dans le monde, la prêcha dans
l'église , et la propagea dans les cam-
pagnes; pour l'insinuer plus facile-
ment dans les dernières classes du
peuple, il la mit en chansons et en
caniiques burlesques , dont le plus
fameux, connu sous le nom de Tha-
lie , était sur la mesure et sur l'air des
chansons que Sotade avait autrefois
composées pour les festins et les dan-
ses profanes. S. Alexandre , après
avoir inutilement cherché à le rame-
ner par toutes les voies de douceur
que sa charité jiut lui suggérer , le
cita eu plein concile. Arius y soutint
sa doctrine avec tant d'obstinntion ,
que les Pères furent obligés de le con-
damner , et d'anathématiser sa per-
sonne et celle de ses partisans , au
nombre desquels se trouvaient deux
évêques , des prêtres, des diacres et
des vierges. Dès ce moment , Arius se
mit à courir les provinces voisines ,
cherchant partout à apitover sur son
sort , à jeter de l'odieux sur Alexan-
dre, déguisant ses erreurs sous des
formes équivoques, n'annonçant que
de> dispositions pacifiques. Plusieurs
évêques se laissèrent séduire par ses
discours hvpocrites. Eusèbe de Nico-
médie 1 absout, dans un concile de Bi-
thynie, de l'excommunication lancée
contre lui par le concile d'Alexandrie,
et il écrivit à tous les évêques d'Orient ,
au nom de son concile, poiu" les en-
ARI
gager à le recevoir dans leur commu-
nion. Ce prélat courtisan , consulté
par l't^ipereur Constantin , qui com-
mençait à s'alarmer des troubles que
causait la division entre Arius et
Alexandre , voulut lui faire entendre
qu'il ne s'agissait que d'une querelle
particulière sur une question de mots,
qui ne touchait point au fond de la
religion ; que le plus graiid mal ve-
nait de l'aversion de l'évêque Alexan-
dre pour le prêtre Arius , et qu'il fal-
lait employer l'autorité impériale pour
imposer silence au premier ; mais les
procédés séditieux se multipliant cha-
que jour à Alexandrie , Constantin
chargea le célèbre Osius d'aller faire
des informations sur les lieux : elles
ne furent pas favorables à Arius , qui ,
plein de confiance dans le crédit de
l'évêque de Nicoraédie, son zélé pro-
tecteur, présenta à l'empereur une
confession de foi captieuse , pour in-
firmer le rapport d'Osins ; mais ce
prince jugea , d'après ce rapport, que
le sujet de la dispute était assez impor-
tant pour avoir besoin d'être sérieu-
sement examiné dans un concile par
tous les évêques de son empire. Ce fut
ce qui produisit la convocation du cé-
lèbre concile de Nicée, en 3a5. Arius ,
appelé dans des conférences prélimi-
naires , exposa sa doctrine sans détour,
et la soutint avec impudence. Il compa-
rut ensuite dans le concile , où elle fut
examinée contradictoirement en pré-
sence de Constantin. Plusieurs for-
mules de profession de foi y furent
proposées. Ai-ius rejeta toutes celles
où la divinité de J.-C. et la consubs-
tantialité du Verbe étaient exprimées.
IN'ayant voulu, ni céder à l'autorité
des Pères , ni se rendre à leurs pres-
santes sollicitations , il fut anathéma-
tJsé par le concile , et exilé en lllyrie
par l'empereur , avec les deux seuls
fvèques qui lui étaient restés attaches.
ARI 467
Après trois ans d'exil , Constantin ,
gagné par un prêtre arien, qui était
l'agent secret d'Eusèbe de Nicomédie,
le rappela sur une confession de foi
équivoque , où il semblait adhérer
aux décisions du concile de Nicée, et
le renvoya à Alexandrie pour y re-
pi-endre possession de son église ; mais
le grand Athanase , successeur de
S. Alexandre, qui connaissait sa four-
berie, ne voulut jamais l'y admettre.
Il eut plus de succès dans les conciles
de Tvr et de Jérusalem , où les ou-
sébieiis , qui y dominaient, le reçurent
sans difficulté à leur communion, et
le recommandèrent à S. Athanase , qui
connaissait trop bien ses ruses et
celles de ses partisans pour se laisser
prendre à une semblable recomman-
dation. Arius, mandé à Constantin ople
pour rendre raison des troubles que
sa présence excitait a Alexandrie ,
présenta à l'empereur une troisième
confession de foi , rédigée avec tant
d'artifice, que l'hérésie n'y paraissait
point. Il protesta même , avec ser-
ment, de sa soumission au concile de
Nicée. Le patriarche Alexandre fit de
vains efforts pour détromper l'empe-
reur. 11 eut ordre de recevoir Arius.
Les euseliiens menacèrent de l'in-
troduire de force dans l'Eglise, si le
patriarche entreprenait de s'y oppo-
ser : alors le saint vieillard, prosterné
au pied de l'autel, fondant en larmes ,
le visage contre terre, adressa cette
prière à Dieu : « Seigneur, si Arius
» doit être reçu dans l'Église , retirez
» votre serviteur de ce monde; mais
» si vous avez encore pitié de votre
» troupeau , ne permettez pas que
» votre héritage soit li\Té à l'oppro-
» bre, ne souffrez pas qu'il soit souillé
» par la présence de l'hérésiarque. »
Cependant les euseliiens s'avançaient
en triomphe. Arius, à leur tète, haran-
guait le peuple qui le suivait eu foide.
468 A R I
Comme il s'approcbait du temple , où
on lui avait piepaië une réception
solennelle, il sentit tout à coup les
douleurs d'une colique violente , qui
lui déchirait les entrailles. Pressé par
un besoin naturel , il alla dans un lieu
retiré, et l'histoire rapporte que, lors-
que étonné de ce qu'il ne reparaissait
plus , on alla le chercher , il fut trouvé
mort dans une affreuse attitude, et
ayant rendu ses entrailles. Ses secta-
teurs dirent qu'ilavaitété empoisonné,
et , les catholiques regardèrent cet évé-
nement, vraiment extraordinaire dans
la circonstance , comme un effet mi-
raculeux des prières d'Alexandre , et,
pendant long-temps, ils n'approchè-
rent qu'avec horreur du heu où il
était arrivé, en 556. On peut consulter,
sur les détails de l'histoire d'Arius ,
la Fie qu'en a publiée à Venise , en
j 746 , le P. ïravasi, Théatin, auteur
des Fies des hérésiarques des trois
premiers siècles. L'Église ne fut point
délivrée, par sa mort, des maux qu'il
lui avait causés. Tant que les ariens
furent unis entre eux , ils formèrent
une secte dangereuse dans l'Eglise et
une faction redoutable dans l'état, et
firent éprouver aux catholiques des
vexations de tout genre, i'orcés , sous
l'empire de Théodose -le- Grand, de
se replier sur eux-mêmes , ils agi-
tèrent entre eux diverses questions
subtiles qui les divisèrent. Tous ces
partis ne communiquèrent bientôt
plus les uns avec les autres : ils se
donnèrent des noms odieux, se ren-
dirent ridicules , tombèrent dans le
mépris, et s'éteignirent insensible-
ment , de sorte qu'au commencement
du S*", siècle, les ariens n'avaient plus
ni évcques, ni églises , et ne formai( nt
plus corps dans l'empire. Cependant
i'arianisme subsista encore parmi les
Vandales, chez les Goths, qui le com-
muniquèrent aux Bourguignons, et
ARK
même chez les Francs, où il disparut j
insensiblement après la conversion de
Clovis. Plusieurs siècles après, il ré-
suscita , du principe de la réforme qui
soumet tous les dogmes de la religion
à l'examen particulier. Capiton, Cel-
larius , Servet , guidés par ce prin-
cipe, combattirent la consubstanlia-
htédu Verbe. L'arianisme se répandit
en Allemagne , en Pologne , en Hol-
lande , eu Angleterre , à Genève , et
forma une infinité de sectes dans ces
différents pays. Parmi les noms illus-
tres inscrits sur la liste des nouveaux
ariens , on distingua les Locke , les
Newton , les Clarke , les Whiston ,
les Le Clerc , les Sandius , les Zuic-
kerfi. Heureusement l'arianisme mo-
derne, réduit à n'être qu'une erreur
systématique , n'a point fait de fana-
tiques comme l'ancien : néanmoins ses
progrès ont paiu si alarmants pour
la religion en Angleterre , qu'on y a
fait , dans le dernier siècle , pour le
combattre , une fondation semblable
h celle que Boyle avait faite , dans le
siècle précédent , pour combattre l'a-
théisme. T — D.
ARKWRIGHT ( Sm Richard ) ,
célèbre manufacturier d'Angleterre.
Né pauvre, il travailla d'abord chez
un barbier , à Manchester ; et , avec
ses épargnes , loua une cave , où il éta-
blit une boutique de barbier , avec
cette enseigne : ^u Barbier souter-
rain, on rase pour un pennji^i sols}.
Cette uouveauté eut tant de succès ,
que les autres barbiers furent obliges
de baisser leur prix ; et alors il baissa
lui-même le sien jusqu'à un demi-
pennv. On raconte qu'un savttier
étant venu chez lui avec une barbe
extrêmement dure , lebarbier observa
qu'il lui en coulerait un i asoir, et qu'il
n'en pouvait être dédommagé par le
demi-pcnny; mais que le savetier per-
sista à ne payer que selon la taxe dt-
ARK
rcnscigiip, flont Arkwriglit se conlen-
ta. Ce trait excita l'adrairation du save-
tier, au pointqii^il prit en affection Ark-
wrij^ht, et lui fit l'aire ia connaissance
d'un homme qui avait invente' une
inachine à filer , ce qui fut l'origine de
la fortune d'Arkwright, Il avait l'es-
prit inventif, et cette persévérance
si nécessaire à ceux qui veulent mettre
à exécution des projets nouveaux. Il
quitta la profession de barbier , et se
fit marchand de cheveux ; ce fut en
cette qualité qu'il parcourut quelques
comtés d'Angleterre ; il avait, dit-on ,
conçu le projet d'une mécanique , qui
devait réaliser le problème du mou-
vement perpétuel : vers l'an 1 767 ,
Arkwright fit connaissance , à Wa-
rington , avec un horloger , nommé
John Kay , qui le détourna de son
projet, et lui fit entendre qu'en ap-
pliquant l'invention qu'il méditait aux
filatures de coton , il pouvait en tirer
de plus grands profits. Arkwright ,
qui savait que plusieurs inventeurs de
mécaniques à filer s'étaient successi-
vement ruinés, n'était pas trop dis-
posé à suivre le conseil de Kay. Il
lui demanda s'il pouvait faire une
petite machine avec très-peu de dé-
pense. Kay . qui avait été employé
comme ouvrier machiniste dans une
filature de cotnn , s'associa avec Ark-
wright , et ils s'adressèrent à P. Athec-
ton , pour faire la machine qu'ils
avaient projetée. Les apparences mi-
sérables d'Ark Wright n'inspirant au-
cune confiance à Athecton , il refusa
d'eutreprcudie la machine , mais il
consentit à prêter à Kay deux de
ses ouvriers ; ce fut ainsi que Kay
parvint a faire la première machine
à filer d'Aïkwri j;ht , pour laquelle il
obtinlune patente. Arkwright s'associa
ensuite à SmuUoy de Preston,dans le
Lancatsliire; leurs affaires tournèrent
Hial^ ils se rendirent à Norlingham ,
ARK 4G9
et y trouvèrent des capitalistes plus
confiants , par le secours desquels ils
élevèrent une filature considérable ,
mise en mouvement par des chevaux.
Ces succès d'Arkwright lui suscitè-
rent des envieux ; on l'accusa de n'être
pas l'inventeur des machines qu'il em-
ployait, et on chercha à lui faire re-
tirer sa patente. Los mécaniques à
filer n'étaient pas , il est vrai , une
invention nouvelle , lorsqu'Arkwright
s'en occupa; mais les tentatives qu'on
avait faites jusqu'à lui avaient eu peu
de succès. Un M. Hayes, qui avait
établi des machines cylindriques à
carder le coton , et chez lequel Kay
avait été employé comme mécanicien ,
fut appelé en témoignage dans le pro-
cès intenté à Arkwright pour lui fùrc
retirer sa patente. Ce procès fut ins-
truit devant la cour du banc du roi
le '23 juin i-jSj. Hayes prouva qu'il
était l'inventeur de la machine ; mais
Arkwright l'avait beaucoup perfec-
tionnée. Celui-ci établit , qu'environ
cinquante ans avant lui , un nommé
Paul , et quelques autres personnes
de Londres avaient inventé une ma-
chine à filer le coton et obtenu une
pntente; qu'ils s'établirent à Northin-
ghara , et dans d'autres lieux ; qu'ils
avaient fait des essais très-malheureux , '
et ruiné tous ceux qui s'cLaieut asso-
ciés à leurs entreprises; que , depuis
vingt ou trente ans , plusieurs ma-
chines avaient été construites pour
filer le coton , le lin , la laine , etc ,
mais qu'on n'en avait retiré aucun
avantage réel ; qu'en 1767, un nom-
mé Kargrave de Blackwell construi-
sit aussi une machine à filer; mais,
qu'après avoir souffert par la destruc-
truction de cette machine , dans les
émeutes populaires qui eurent lieu
dans le Lancatshirc , il s'était retiré à
Nortingham, où une association for-
mée contre lui fit anniiUer sa pateuîr
4^0 ARL
et le réduisit à une grande de'tresse ;
que lui Arkwright , pour atteindre le
perfectionnement auquel il e'tait arri-
ve' , avait dépense plus de douze
mille livres storlings avant d'avoir pu
obtenir aucun profit ; qu'on devait
prote'ger uu homme qui , après s'être
aventuré dans une entreprise si utile
à l'état, et où tant d'antres avaient
e'choué, avait montré tanl de per-
►sévérance. Arkwright avait beaucoup
de partisans , mais il avait aussi de
nombreux ennemis ; les uns le re-
présentaient comme un génie supé-
rieur , un inventeur habile, infati-
gablej les autres, comme un homme
rusé, toujours prêt à s'emparer des
découvertes des autres , ingrat envers
ses bienfaiteurs. S&s succès prouvent
un mérite peu commun , et ils ont
donné aux fabriques anglaises une
grande supériorité. Il fut créé cheva-
lier par le roi, à St.-Jamcs, le 'x-x dé-
cembre 1 -jSô , sur une adresse pré-
sentée par les notables dcWickwortli.
11 mourut , au milieu de ses travaux ,
à Crumbford , dans le Derbysliire , le
5 août 1 -^ç)^ , laissant à sa laraille une
fortune de cinq cent mille livres sler-
lings. V. h — X.
ARLAUD ( Jacques - Antoi>e ),
naquit à Genève, en mai i(i68. Il
voulut se destiner à la théologie; mais
la nature avait décidé, avant lui, qu'il
serait peintre. 11 étudia pendant deux
mois le dessin , avec un maître ; son
travail et son goût lui enseignèrent le
reste. A l'âge de vingt ans, il vint à
Paris, où il peignait, pendant le jour,
les portraits qu'on lui demandait, et il
dessinait pendant la nuit. Arlaud de-
vint bientôt si célèbre, que G, lîrice
disait, en 1715, «qu'aucun peintre
» en miniature ne pouvait l'emporter
» sur Arlaud. Le duc d'Orléans, qui
fut depuis régent, di'»ait aussi: « Jus-
» qu'à présent, les peintres en luinia-
ARL
» tare ont fait des images ; Arlaud leur
» a appris à faire des portraits.» Le duc
le choisit pour son maître , et lui donna
un appartement dans le château de
St.-Cloud. Arlaud pénétrait si bien la
physionomie et le caractère de ceux
qu'il peignait, qu'un courtisan s'écria
un jour : « Il lit jusque dans le fond
» de nos âmes. » Ailaud fit aussi quel-
ques tableaux j il avait fait une Leda,
qu'il copia sur un bas-relief de Michel-
Ange; il la déchira, on ne sait pour
quel motif; on présume que ce fut
par scrupule. On conserve les deux
mains de cette Léda , dans la biblio-
thèque de Genève. Le duc de Médicis
fit demander à Arlaud son portrait ,
pour le placer dans la galerie des pein-
tres de Florence. Newton fut son ami,
cl lui fit présent delà version française
de son 0/;a"<7i/e,- il était en correspon-
dance avec lui. Arlaud revint à Genève,
sur la fin de sa vie , avec une fortune
considérable , et il mourut dans cette
ville, en 1746. Il légua, à la biblio-
thèque, plusieurs médailles en or et en
argent, de beaux tableaux, d'amples
recueils d'estampes, et plusieurs livres
de prix. — Benoît Arlaud, frère du
précédent, s'établit en Angleterre, et
y mourut en 1719. On a de lui le
portrait de Shakspeare , gravé par Dn-
cliange. — Louis-Ame Arlaud, leur
neveu, a fait des peintures en minia-
tures , bien supérieures à celles (jui
rendirent Jacques Antoine si célèbre.
A. B— T.
ARLOTTl (Rodolphe ], poète ita-
lien, né à Reggio, en Lombariie , flo-
rissaitvers i5()o. Après avoir pris, à
Ferrare, le degré de docteur en droit
civil et en droit canon, il résida pen-
dant plusieurs années, au nom de sa
patrie , auprès du duc Alphonse 11 , et
fut secrétaire du cardinal Alexandre
d'Est. Son goût pour les lettres, et
ses talents pour la poésie , le lièrent
I
ARL
(Tainitië avec plusieurs hommes célè-
bres, tels que le Tasse, Guariiii, etc.
Ses productions sont répandues dans
plusieurs recueils du temps. 11 avait
commencé un poëmc en octaves , sur
la Conquête de Grenade, par le roi
Ferdinand de Castille; sujet traité de-
puis, avec succès, par le Graziani.
Arlotti a aussi laissé imparfaite une
tragédie, dont Guasco a publié la
première scène dans le troisième livre
de son Histoire littéraire de Reggio ;
il y a de plus inséré, liv. IV, p. i<)i ,
douze lettres du même auteur, écrites
avec goût, et d'un très-bon style.
G— E.
ARLOTTO MATNARDO, Floren-
tin , Pio^>ano, ou curé d'une paroisse
de l'évècbé de Fiésole , mort en i jHS,
h quatre-vingt-sept ans, se rendit cé-
lèbre par ses bons mots et ses facéties ,
dont le recueil fut publié après sa
mort , sous ce titre : Facétie piace-
voli , fahide e motti del piovano
Arlotto , prête Fiorentino , Venise,
1 5^0 , in-8°. , édition plus complète
que toutes celles qui ont paru depuis.
Le Piovano Arlotto paraît être un
personnage idéal , ou de fantaisie j ce
fut , cependant , un très-réel , très-bon ,
mais très - joyeux curé. Jean Mai-
nardo, son père, était originaire du
canton de Mugello; l'enfant, né à
Florence, le a 5 décembre iSqS,
ne reçut, au baptême, d'autre nom
que celui d'Arlolto, qui signifie pro-
prement un boranie grossier , mal-
propre et glouton. Arlotto fit pourtant
de bonnes études; il fut ensuite, pen-
dant quelques années, ouvrier eu lai-
ne , qui était alors un assez bon état à
Florence; mais, enfin, il prit l'habit
ecclésiastique, et se fit prêlre à vingt-
huit ans. 11 obtint d'abord uue chape-
lainic du dôme de Florence , et ensviite
la cure de S. Cresci di MaciuoU, dans
l'évêché de Fiésole, qu'il garda pres-
ARL 471
qiic toute sa vie. Il y fit beaucoup de
bien, et commença par faire rebâtir, à
ses frais , l'église , qui tombait en rui-
nes. Les curés n'étaient pas , alors ,
obligés à une résidence continue; car
notre Arlotto voyagea beaucoup : il
alla en Flandres, jusqu'à neuf fois,
passa en Angleterre , où il fut présenté
au roi Edouard, qu'il amusa par ses
plaisanteries, et qui l'en récompensa
par de riches présents. Dans un auli'e
voyage qu'il fit à JNaples, sur les galè-
res de Florence, il en obtint autant,
et par les mêmes moyens, du roi Al-
phonse , et autant encore , en Proven-
ce , du roi René d'Anjou. Chacun le
recherchait, et sa bonne humeur, ac-
compagnée de beaucoup de bon sens ,
le rendait agréable à tout le mc.nde. A
la cour, à la ville, en campagne, il
était partout le même : il tint , pendant
quelque temps, maison à Florence,
et il ne se passait point de jour qu'il ne
circulât dans la ville quelques uus de
ses bons mots. Parvenu à une extrême
vieillesse, et seuleineut un au avant
sa mort, il résigna son bénéfice entre
les mains du chapitre de Florence. Il
fut enterré dans un tombeau qu'il
avait fait construire, et sur lequel il
avait fait graver une inscription , ita-
lienne , qui voulait dire : Le curé Ar-
lotto a fait construire ce tombeau
pour lui-même, et pour ceux qui
voudront 5 jK loger a^'ec lui. Le pre-
mier des bons mots qui composent son
recueil, peut faire juger des autres. Il
raconte que , l'archevêque de Florence
lui ayant demandé quel nom il avait
reçu au baptême , il lui répondit : « ^r-
» lotto. — Quel singulier nom, reprit
» l'archevêque I Comment volJ'e père,
» qui était un homme d'esprit, a-t-il
» fait la sottise de vous le donner ? — ■
» Ne vous en étonnez pas, monsei-
» gneur, il eu a fait de bien plus,
)) grandes. — Quelles sont ces aulits.^
47^ ARL
» sotliscs ? — En voici une : Quand il
» pouvait prêlcr à usure, il y empruii-
» tait. — Eh.' ne savez-vous pas que
» de prêter à usure l'aurait fait aller en
•n eu fer? — Fort bien , mais d'emprun-
« ter l'a fait aller en prison pour det-
» tes , et il y est mort. » Les deux plus
ancienues e'ditions de ses Facéties,
api'ès la première citée ci-dessus , sont
celles de Milan, iSso, et Venise, i525,
toutes deux in-8'. Il y en a de plus,
une sans date et sans nom de lieu,
10-4°. , qui est à peu près du même
temps : ce sont les plus rares. Dans
l'édition de Venise, i538, et dans la
plupart des suivantes , que l'on cite , les
bons mots du Piovano Arlotto sont
joints à ceux de Gonclla et de quel-
ques autres. G — e. ,
ARLUNO ( BERNARDI^ ), noble mi-
lanais , florissait au commencement
du iG'. siècle. Après avoir étudié la
jurisprudence, d'abord à Pavic , puis
a Padoue , où il fut reçu docteur, il
retourna à Milan, où il fut aggrcj:;c
au collège des jurisconsultes , depuis
i5o7 jusqu'en i555. On a de lui :
De Bello reneto. libri VI ^ ah nnno
MD ad MDXVI, impiimé dans le
Thésaurus Anliquit. Ilaliœ , tom.V,
page 4, I-'Cyiït^? in-fol. Pierre Bur-
mann , dans la préface qui se trouve
tome IV , part. i". dn Thésaurus,
fait l'éloge de cette histoire ; il la
trouve exacte , véridique et surtout
bien écrite. Il ajoute seulement qu'Ar-
luno y claie trop d'érudition , qu'il
parle souvent moins en historien
qu'eu poète , et qu'il a trop facilement
foi aux prodiges. II. Uistoria patriœ ,
5 vol. in-fol. Cette histoire de Milan
commence depuis la fondation de cette
ville jusqu'au temps où vivait l'auteur.
L'impre?sion fut commencée à Bàle,
par Jean Opoiin ; mais , avant été in-
terrompue , s:uis qu'un en sache le
motif, elle n'a pas été reprise. Le
ABL
manuscrit est conservé à Milan, clans
la bibliothèque Ambroisienne , où l'on
garde aussi plusieurs autres ouvrages
d'Arluno , tant en prose qu'eu vers
latins , qui n'ont jamais vu le jour. —
Ou a, de Jean-Pierre Arluno, son
frère , qui était médecin , un volume
in-fol. ( INIilan , 1 5 1 5 ) , d'ouvrages de
sa profession , parmi lesquels on dis-
tingue : I. De faciliori alimenta com-
menlarius tripartitns ; II. De hal-
neis commenlarius ; 111. Vinwn ne
mixtum an nieracum ohnoxiis junc-
tarum doloribus mugis conveniat;
ces trois traités ont ensuite été réim-
primés séparément. IV. De lotii dif-
ficullate ; V. De arliculari morho
quem podagram vocilant; VI. De
spirandi difficultale ; VII. De fe-
hre quarland , etc. Dans des diction-
naires oii l'on f lit de ce Jean - Pierre
Arluno et d'un Pierre Arluno , deux
médecins didércnts , dont l'un est
frère de Bernardin , et l'autre ne l'est
pas , on attribue au premier le Re-
cueil iu-fol. de Milan, i 5 1 5, et au se-
cond, ces ditrérents Traités, quoique
la liste des traités ne soit, en quelque
sorte, que la table du Recueil. G — É.
ARMAGNAC (Jean I•■^, comte d),
fils et successeur de Bernard \ I ,
comte d'Armagnac , issu de la race
IMéroviu'rienne , descendait de Qovis
])ar les ducs d'Aquitaine et les ducs de
Gascogne. Les domaines de cette mai-
son comprenaient l'Armagnac , le
Rouergue , et le val Dorât , à une épo-
que où les possesseurs de grands fiefs
étaient tout - puissants en France.
Jean P^ seconda, en 1 556 , le comte
d'Eu, connétable de France, dans la
guerre contre les Anglais , en Gas-
cogne et en Guienne. >oinmé, par le
roi Jean , commandant du Langue-
doc , en i555 , il présida les étals de
cette province, et refusa de passer
sous la domination anglaise , après le
ARM
traite de Bretigny. Des inte'rèts de
litmille ayant fait naître une lon£;iie
inimitié entre les maisons de Foix et
d'Armagnac, la guerre s'alluma, et le
comte d'Armagnac fut fait pi'isonnier
h la suite d'un combat sanglant livre'
pris de Toulouse , eu i3Gi. Le comte
de Foix exigea 5o,ooo livres pour sa
rançon. Jean d'Armagnac accompagna
Edouard, prince de Galles, dans son
expédition en Espagne, eu faveur de
Pierre-le-Cruel , se brouilla à son re-
tour avec le prince anglais , embrassa
les intérêts de la France, contribua à
la soumission du Limousin, et mourut
en 1075. B — p.
ARMAGNAC ( Jean TII , comte d'),
petit-fils du précédent, fit, en iSgi,
une expédition dans le Milanais, con-
tre Galéaz \ isconti, avec une armée
de quinze mille aventuriers , tirés des
bandes qui avaient pendant si long-
temps désolé la France et l'Espa-
gne. Le comte d'Armagnac vint met-
tre le siège devant Alexandrie de-
la-Paille , et tomba , avec son avant-
garde, dans une embuscade. Ses trou-
pes furent taillées en pièces , et lui-
même, ayant élc blessé et fait pri-
sonnier , mourut le lendemain , 'i5
juillet de la même année. Après sa
mort, son armée, sans chef, se dis-
persa ; la plus grande partie fut exter-
minée en Lombardie; le reste, trou-
vant le passage des Alpes fermé ,
périt de faim et de misère. B — p.
ARMAGNAC ( Bernard VIII ,
comte d' ) connétable de France , em-
brassa , en 1 4 1 o , le parti de Cbarles ,
duc d'Orléans, contre le duc de Bour-
gogne, et devint le principal mobile
de la faction d'Orléans , à laquelle il
eut le triste honneur de donner son
nom. Ses liens avec le duc d'Orléans
furent cimentés par le mariage de
ce prince avec sa fîUe. Remontant
par ses aïeux au berceau de la mo-
ARM 475
narchie , Bernard d'Arraagiiac liC
voyait au-dessus de lui que la mai-
son régnante. L'étendue de ses do-
maines, la force et la situation de
ses places , lui offraient de puissants
moyens de satisfiirc son ambition ;
et il fut le principal moteur de cette
longue guerre civile qui embrasa le
royaume, sous le malheureux règne de
Charles VI. Il combattit d'abord con-
tre son roi , conjointement avec les
Anglais , et se reconcilia avec la cour
en i4i3. Leduc de Bourgogne ayant
été forcé de quitter Paris l'année sui-
vante, le comte d'Armagnac entra
dans cette ville, à la tête de l'armée
royale , et fit éprouver aux Parisiens
un traitement rigoureux , et qu'ils 11c
purent jamais oublier. L'armée royale
arbora les couleurs et l'étendard de sa
maison. Appelé par la reine Izabeau
de Bavière à la défense du royaume,
après la défaite d'Azincourt , il ( xigea
la dignité de connétable, et la place de
premier ministre. Arrivé à Paris avec
un corps considérable de troupes , il
fit aussitôt changer de face à toute
l'admnistratiou , et y montra toute la
hauteur et l'inflexibilité de son carac-
tère. Il se fit accorder la surinten-
dance des finances et le gouvernement
général de toutes les forteresses du
royaume; il établit de nouveaux im-
pôts • et le trône , entouré d'alarmes
et de soupçons , ne fut plus accessible
qu'aux délateurs; les destitutions, les
emprisonnements et les supplices ,
portèrent la terreur dans toute la
France. Le connétable étant allé eu
Normandie pour réprimer les courses
de la garnison anglaise de Harfleur,
une conspiration s'ourdit contre Im,
dans la capitale ; mais elle fut décou-
verte, et le connétable se hâta de venir
rassurer la cour. Sa présence répandit
la terreur dans toute la ville. Il désar-
ma les habitants . interdit les réunions ,
A R ■\ï
et fit démolir la grande Eoucherie ,
qu'on pouvait regarder comme le ber-
ceau des pren7ières séditions excite'es
en laveur du duc de Bourgogne. Ou
augmenta les taxes , on niidtiplia les
proscriptions, et les troupes des deux
partis infestèrent les provinces. La
reine , opprimée comme le reste de la
France, attendait que son fils fût à
même de la tirer de cette fâcheuse po-
sition , lorsque ce jeune prince mourut
presque subitement. Cette moi t , à
laquelle le connétable fut soupçonne
d'avoir contribue, renversa toutes les
espérances. Le connétable ne garda
plus aucun ménagement ; il fit reléguer
la reine à Tours ; mais le duc de Bour-
gogne la délivra bientôt j et ce prùice,
.s'ajipntcbant de Paris avec une puis-
SDute armée, vint jeter le connétable
dans les plus vives alarmes. Il fut,
dans le même temps, déclaré scliis-
niatique par le onrile de Constance.
Plusieurs conjurations furent décou-
vertes, et produisirent des rigueui's qui
augmentèrent le nondjie des meVon-
tents. Il fut réduit à ne plus faire dé-
jiendrc sa sûreté que de la terreur, et
rejeta même tous les projets de paix
avec l'Angleterre ; mais au moment
où il avait le plus besoin de ses trou-
pes pour contenir les Parisiens , il en
envoya -nie partie vivre à discrétion
dans la Brie , afin de se dispenser de
payer leur solde. Cette imprudence
causa sa perte. Paris fut li\ré au duc
de Bourgogne, le ti9 mai i4i8. Le
connétable , effrayé, sort en secret de
son hôtel , et va se réfugier chez un
maçon. Ce fut dans cet asvle que ce
seigneur, quelques moments aupara-
A'^ant si fier , si redoutable , crut échap-
per, sous les haillons d'un mendiant,
■■* une populace furieuse, qui venait de
prendre les armes pour égorger tous
les Armaepmcs. Trahi pai celui cluz
h-quel il s'était eaiLé, sâ vie fut d'a-
ARM
bord respectée par ses ennemis , qui
espéraient lui faire avouer où étaient
ses trésors ; mais, peu de jours après,
la populace furieuse força la prison et
le massacra. Son corps fut exposé aux
regards de ses ennemis. Ce ne fut que
dix-huit ans après , lors de la rentJ éc
de Charles Yll à Paris, que les en-
fants du comte d'Armagnac firent cé-
lébrer les obsèques de leur père. Ses
restes furent alors transportés dans
le comté d'Armagnac, pour y être in-
humés près de ses ancêtres. B — p.
ARlNL'iGNAC ( Jean V , comte d' ) ,
petit-fils du précédent, fils de Jean I\ .
comte d'Armagnac , et d'Isabelle de
Navarre, naquit vers l'an i/jso, fit
ses premières armes sous les dra-
peaux du comte de Dunois, et con-
tribua , en i45i, à la conquête de
la Guienne sur les Anglais, Devenu
prince souverain d'Armagnac par la
mort de son père, arrivée en i45o,
il avait conçu, vers cette époque, l'a-
mour le plus violent pour Isabelle, la
plus jeune de ses sœurs , princesse
d'une rare beauté, et (jui , dans d'au-
tres temps , avait été destinée au r<»i
d'Angleterre. 11 la séduisit, et deux
enfants, nés de ce commerce inces-
tueux, rendirent le scandale public.
La passion déplorable du comte d'Ar-
magnac ayant rendu inutiles les exhor-
tations du pape et les remontrantes
de Charles VU , il fut excommunié, et
n'obtint son absolution qu'en pro-
mettant de renoncer à ses liens cri-
minels ; mais son amour s'irritant par
les obstacles , il résolut de légitimer
une alliance si contiaire à nos mœurs,
et sollicita à Rome une dispense, qui
lui fut refusée. Aveuglé enfin par sa
passion , et voulant apaiser les re-
mords de sa sœur , il l'épousa publi-
quement, en vertu d'une prétendue
bulle de Calixte 111 , qu'il avait fait
fabiiquer par deux ccclcsiaàtiquci dé~.
ARM
voues à ses intérêts. Cette union scan-
daleuse indigna toute la France, ot
attira , au comte d'Armagnac , une
seconde excommunication; mais peut-
être aurait-il joui de i'irapunilë, si , au
lieu d'adoucir Char'es VH, il n'eut
irrite ce prince, en forçant le chapitre
d'Aucl) de nommer, à l'archevêcliede
cette ville, Jean de Lescun, son frère
naturel, au préjudice de Philippe de
Lévi , que protégeait le roi de France.
Le mariage incestueux de ce seigneur,
et l'emportement de ses démarches ,
n'étaient pas les seuls ciimes qu'on
avait à lui reprocher ; on l'accusait de
favoriser en secret les Anglais, d'avoir
témoigné une joie indiscrète de leur
descente en Guienne , et d'avoir tenu
des propos indécents contre le roi et
l'état. Charles VII donna ordre à ses
généraux de se saisir de sa personne.
Le comte fortifia ses places , et parut
vouloir se défendre; mais, à l'approche
des troupes royales, la plupart de ses
villes ouvrirent leurs portes , et, obligé
de chercher unasylehors du royaume,
il se r fugia , en 1 455 , avec sa sœur,
en Aragon , où il possédait encore
quelques châteaux. Le roi chargea le
parlement de Paris d'instruire son
procès ; le comte, absent, prétendit
être jugé par la cour des pairs , en
qualité de prince du sang par Elisa-
beth de Navarre , sa mère , et comme
issu, disait-il, du côté paternel , de-
puis plus de mille ans d^hoir en
hoir, des rois d'Espagne et des an-
ciens ducs d'Aquitaine. Sa requête
n'ayant point été admise, il fit allé-
guer qu'il était clerc tonsuré, ajou-
tant qu'an chevalier, combattant pour
l'état , ne pouvait être piivé du privi-
lège de cléricature. Ainsi, un inces-
tueux bigame; car le comte d'Arma-
gnac avait une autre femme que sa
sœur, déclinait la jurisdiction sécu-
lière, et demandait son renvoi parde-
ARM 475
vant le juge ecclésiastique. Cette siii-
giilière prétî ntion n'eut pas plus de
succès que la première. Sommé de
comparaître en personne , il osa se
présenter au parlement, à la vérité
avec un sauf conduit, mais qui ne
fut pas respecté. An été , au milieu de
la capitale , puis élargi , à condition
de ne pas s'éloigner de plus de dix
lieues de Paris , il fut effrayé de la
vivacité avec laquelle on instruisait
son procès , et se i-efugia à Besançon.
Le parlement , par un arrêt définitif,
le condamna au bannissement, et con-
fîsca ses domaines au profit de la
couronne. Le comte d'Armagnac eut
recours au pape Pie II , et fit à Rome
un voyage de pénitence , pour obtenir
l'absolution du souverain pontife , et
son intervention auprès du roi de
France. Pie II le releva de l'excom-
munication , mais Charles VII de-
meura inflexible. Ce ne fut que sous
le règne suivant que le comte rentra
en France, et obtint, en i46i , de
Louis XI, la restitution de ses do-
maines. Il servit d'abord ce prince
dans ses prétentions sur la Navarre ,
et marcha contre le comte de Foix ;
mais il se montra bientôt ingrat en-
vers son bienfaiteur, et prit les armes ,
en i465, conire Louis XI, avec 1rs
seigneurs mécontents, dans la guerre
appelée du bien public. Au traité de
Conflans, qui pacifia le royaume, il
parvint à se faire restituer qiialre
chatellenies, et obtint même une pen-
sion et une compagnie d'ordonnance.
Enhardi par ce succès , il aggra\ a
bientôt, par de nouvelles perfidies,
le crime de sa première ingratitude.
En butte à la Laine publique par les
violences qu'il exerçait contre ses voi-
sins , il avait à sa solde une armée
toujours subsistante, à l'entretien de
laquelle il ne pouvait subvenir qu'en
tolérant les excès des brigands qui la
47<> A R M
composaient. Louis XI savait d'ail-
leurs qu'il entretenait des intelligences
avec l'Angleterre , et qu'il fomentait
de nouveaux troubles; il lui offiit
ï 0,000 livres s'il consentait à con-
gédier ses gendarmes, D'Armagnac
iTçut les 10,000 livres, et conserva
son armée. Louis , indigné , envoya
contre lui des forces considérables.
Le comte alla une seconde fois cbcr-
cber un asyle dans les terres du roi
d'Aragon ; mais il ne perdit rien de
son audace. Dépouille' encore une fois
de ses biens, et condamne à mort par
arrêt du parlement , il se jeta dans lo
parti du duc de Guicnnn , ficre et
ennemi de Louis XI , reprit à main
armée ses anciennes possessions , et
se vit en état , après la mort do son
protecteur, arrivée en \^li, de se
défendre , pendant quelque temps ,
contre l'armée royale. Louis XI, forcé
de porter ailleurs ses armes, ne dé-
daigna même pas de traiter avec le
comte d'Armagnac, et de lui accorder
la jouissance de plusieurs villes , à
condition qu'il y vivrait paisible; mais
le comte , incapable de changer , crut
pouvoir piofiler des embarras de son
souverain pour s'emparer de Lec-
lour, regardé alors comme le boule-
vart de la Guienneet de la Gascogne.
Son nom, son courage et la vie licen-
cieuse qu'on menait à sa cour , lui
avaient gagné la noblesse de Langue-
doc et de la Guiennc, et, s'étant ménage
des intelligences dans Lectour, il en-
gagea Charles d'AIbret , seigneur de
jSt.-Bazcille , à surprendre celte ville,
qui tomba ainsi en son pouvoir. En-
fermé dans celte forte place, qu'il avait
m le temps d'approvisionner, il senï-
blait y délier le roi de France qui ,
n'osant dégarnir ses frontières du côté
de la Bourgogne , se contenta d'en-
voyer, contre le rebelle, les milices
des provinces méridionales , sous le
ARM
commandement du cardinal Jonffroi ,
cvèque d' Albi , et de Gaston-du-Lvon ,
sénéchal de Toulouse; ils avaient or-
dre d'assiéger la place dans les formes.
A l'approche des trou])es royales, ^in
conseilla au comte d'Armagnac d'a-
bandonner Lcrtour , et de se retirer
dans quelque place du royaume d'A-
ragon , d'où il pourrait traiter en sû-
reté aA'ec le roi; mais le comte , qui
se rappelait tout ce qu'il avait eu à
souffrir pendant son premier exil, ne
put se résoudre à s'exposer au même
malheur. Il résolut de se défendre ,
espérant d'ailleurs qu'il surviendrait
au roi des affiires qui l'obligeraient à
rappeler sfs troupes. 11 soutint, pen-
dant deux jnois , avec beaucoup de
valeur, tous les efforts des assiégeants.
Louis XI , vo3"ant que la saison s'a-
vançait, et que le roi d'Aragon pro-
filait de la longueur du siège pour
achever d'envahir le Houssillon, don-
na ordre au cardinal d'Albi d'entrer
en négociations avec le comte d'x\r-
raagnac. Les conditions que proposa
ce seigneur furent acceptées , en ap-
parence , par le cardinal, qui, pour
le mieux tromper , rompit une hostie
consacrée , dont il prit une moitié et
lui donna l'autre , comme une garan-
tie de la capitulation. Déjà l'on com-
mençait à en exécuter les articles ,
lorsque les troupes du roi , profitant
de la séciuité des assiégés , s'intro-
duisent dans la ville , pénètrent sSlis
résistance dans le palais du comte , et
le percent de plusieurs coups de poi-
gnards , dans les bras de Jeanne de
Foix , son épouse légitime. Les femmes
de la comtesse , et la comtesse elle-
même , sont dépouillées par la sol-
datesque , la ville entière est aban-
doinice au pillage et livrée aux flam-
mes , et tous les habitants égorgés
sans pilié. Cet événement eut lieu le
5 mars 1 47"). Goi-gias , qui avait porté
ARM
le premier coup au comte , reçut ,
de Louis XI , une tusse d'aigcnt rem-
plie d'écus , et fut fait archer de la
garde. Traînée prisonnière au châ-
teau de Burzet, la comtesse d'Arma-
gnac fut contrainte d'avaler un breu-
vage empoisonne', qui fit périr l'enfant
qu'elle portait dans sou sein, et la
délivra elle-même , deux jours après,
du fardeau de la vie. Charles d'Arma-
gnac, frère de Jean V, enveloppé
dans la même proscription, fut chargé
de fers , traîné dans les prisons , ap-
pliqué à la torture, et remis entre les
mains du parlement de Paris. Il tou-
chait au moment d'être justifié de sa
prétendue participation à la révolte
de sou frère , lorsqu'il fut tiré de la
conciergerie pour être livré à Pliihppe
l'Huiliier, gouverneur de la Bastille,
qui l'enferma dans un cachot infect,
et lui fit éprouver les plus cruels traite-
ments. Ce ne fut qu'au bout de qua-
torze ans , sous la minorité de Char-
les VIII , qu'on lui rendit la liberté.
Réduit à la plus déplorable déti esse ,
il implora, à genoux, et fondant en
larmes, la justice et les secours des
états-généraux du royaume, eu 1 484,
pour être remis en possession de ses
domaines, et mourut, en i 497, après
avoir fait une donation de ses biens
au duc d'Alençon son neveu. B — p.
ARMAGNAC ( Jasques d' ). Foy.
Nemours.
ARMAGNAC ( Louis d'). F. Ne-
TUOURS.
ARMAGNAC (George d' ) , fils
de Pierre d'Armagnac , bâtard de
Charles d'Armagnac, comte de l'Ile-
en-Jourdain, l'ut élevé par les soins
de Louis, cardinal d'Auiboise, son
parent , auquel il témoigna depuis sa
reconnaissance , en lui faisant dresser
un mausolée à N. D. de Lorette. Il fut
.successivement évêque de Rhodes , et
Cl) même temps administrateur des
ARM 4^7
évêcîiés de Vabres et de Lecteur ,
ambassadeur à Venise, à Rome, con-
seiller d'état, archevêque de Toulouse,
associé, en qualité de co-légat,au car-
dinal de Bourbon, légat d'Avignon. Il
sut , par sa bonne administration ,
gagner le cœur des peuples de ce petit
état, et, par-là , le conserver au Saint-
Siège , au milieu des guerres civiles
qui désolaient les pi'ovinces voisines.
Paul III l'avait créé cardinal en 1 544-
Il succéda , en 1577,3 Félicien Capi-
ton , dans le siège d'Avignon , y fit
plusieurs fondations rehgicuses, et y
mourut en i585 , âgé de 84 ans.
D'Armagn.ic protégea les gens de let-
tres , les faisait connaître à François
I'"^., et en avait plusieurs chez lui.
C'était un homme très -attaché à la
religion. Les Mémoires de Condé
contiennent deux lettres de ce prélat,
l'une à la reine de Navarre, pour lui
faire des remontrances sur ce qu'elle
faisait arracher les images , enlever
les ornements, détruire les autels, et
les fonds bapiismaux de l'église de
Lescar ; l'autre , à Louis d'Albert ,
évêque de cette ville, qui consentait à
ces désordres. Ce cardinal avait fait
des Statuts synodaux , pour l'évêché
de Rhodcz , imprimés à Lyon, en
i55G, iu-8". On conserve de lui uu
volume in-fol. de lettres en manuscrit,
écrites pendant les années 1 55 4-55-
56-57-59. T— D.
ARMAND DE BOURBON , prince
de Conti ( Foy. Conti ).
ARMAND ( Fr A > çois - Armand
HUGUET), comédien. On le place
ici sous l'un de ses prénoms , parce
qu'il n'est connu que sous ce nom , qui
lui fut donné par sou parrain, le ma-
réchal de Richelieu , et qu'il le porta
toujours par respect et pat reconnais-
sance. Né, en 1699, à Richelieu , d'un
honnête bourgeois, il quitta fort jeune
cette petite yille, et fut confié, à Paris^
478 ARM
aux soins de l'abbé Nadal , connu par
quelques ouvrages. Cet abbé , après
avoir essayé d'en faire un musicien ,
le plaça chez un notaire ; mais dès-
lois tout annonç.iit sou goût pour le
théâtre, et l'on peut dire sa vocation
pour l'état de comédien. Aussi prompt
à Sciisir les ridicules des personnes
qui iVéquentaitiit la maison du no-
taire, qu'habile à les représenter, ceux
mêmes dont il siu2;s.«it les manières ne
pouvaient s'empêcher de sourire à des
portiviits un ])eu outrés ; et i'abbé
INadal , témoin de ces parodies , dit
un jour, que , s'il n'y avait jamais
eu de comédiens, Armand aurait pu
donner l'idée de cette profession. Il
n'en fallait pas davantage pour lui
faire vivement désirer de voir la comé-
die, li'abbé Nailal l'y conduisit , et il
est inutile de dire quelle impression
le spectacle fit sur un enfant de treize
ans , qui annonçait de semblables dis-
positions. Dès ce moment , les repré-
sentiitions théâtrales firent tout son
amusemei;t, et il employa ses écono-
mies à se procurer les moyens d'aller
souvent au théâtre Français. 11 ins-
pira ses goûts aux autres clercs, leur
distribua des rôles , construisit un pe-
tit théâtre , et fit de l'étude du notaire
un véritable fover de comédie. Cette
vie , si conforme à ses goûts, dura
peu : une espièglerie l'ayant brouillé
avec le maîtie de la m lison , il ne
sut où donner do la tète , et s'en-
rôla dans une troupe de désœuvrés ,
qui allaient en pèleniiage à Ste. -Reine,
<>n Bourgogne. Cette troupe digérait
peu d'une bande de Bohémiens , et ,
< omme il y a quelques rapports entre
cdle vie errante et celle de comédien
ambulant , Armand ])assa sans se-
fuiisse de l'une à l'autre, et joua la co-
médie en Languedoc. Il se fit surtout
remarquer dans une troupe con)po-
séc en partie d'Italiens, et entre autres
A R M
du fameux Dominique. On pense bien
que toute son ambition était de reve-
nir à Paris. Il fit solliciter un ordre
de début , parut pour la première
fois au théâtre Français , le 2 mars
1 7Ji3 , dans l'emploi des premiers co-
miques , et fut reçu l'année suivante.
Il remplit cet emploi pendant qua-
rante-deux ans , et Cl éa un grand nom-
bre de rolws. Sa phvsionomie se prê-
tait surtout à ceux de valets fourbes
et intrigants. H paraît que vers la fin
de sa carrière dramatique , Armand
perdit une partie de sa verve comi-
que, et chercha à la rem])lacer par
une exagération que le bon goût ré-
prouve. Le Kain , après avoir dit dans
ses mémoires, qu'Armand est le mo-
dèle de tous les comédiens , ajoute :
« J'observerai seulement , pour le
» malheur de l'humanité, que le génie
» usé par le temps , cherche des
» moyens qui , visant à la charge ,
» sont hors delà nature.... « Armand
contait avec beaucoup d'intérêt. Il
mourut à Paris , le 26 novembre i '-65.
P X.
ARMELLINI (Jérôme), domini-
cain, né à Faenza, que cpielques au-
teurs appellent Armenini , et plus
communément Jérôme de Faenza,
était inquisiteur -général, pour la foi
catholique, à Mantoue , vers l'an 1 5 1 6.
Il reçut, de son vivant, de grands élo-
ges pour avoir écrit un livre contre un
certain Tiberio Rossiliano , Calabiois
et astrologue, qui soutenait que l'as-
trologie aurait pu facilement prévoir,
par la conjonction des planètes , le dé-
luge de Noé. Ce livre n'est connu au-
jourd'hui , que par ce qu'en dit Echard,
Scnpl. ord. Prœdic, vol. II, p. 55;
mais il prétend que le livre était en
manuscrit, dans la bibliothèque du
Vatican, que peut-être même il a été
imprimé. Maz^uchelli, malgré ses re-
cherches; n'a pu avoir connaissance
A l\ M
ni de l'imprime, ni du maniismt ;
mais il a découvert , daus la biblio-
thèque vaticaiie, un autre mauuscrit
du même auteur : c'est une explication
morale du psaume Dixit Dominas
Domino meo , adressée au cardinal
Adrien , par une lettre datée du 1 5 no-
vembre i5o6. Pio, dans ses Vomini
illustri di S. Domenico , et , d'après
lui, d'autres auteurs assurent que Jé-
rôme Armellini avait aussi écrit sur les
OEuvres d'Aristote. G — e.
ARMELLTNI (Mariano), moine
bénédictin, né à Aucôue, s'est rendu
recoramaudable dans son ordre , vers
le commencement du dernier siècle,
par plusieurs ouvrages dont cet ordre
même est l'objet. Il s'adonna d'abord
a la prédication , et prêcha le carême
à Ste.-Marie de Transtevere, à Rieti,
Yiterbe, Ravenne et Reggio. Il fut fait
prieur en 1 7"2'2 , et abbé par dispense ,
en i-j 25.11 fut successivement abbé en
exercice , à Sienne, Assise et Foligno. Il
mourutjdans ce dernier monastère, le 4
mai 1757. Il a publié : I. Bibliotheca
Benedictino-Casinensis , ou Notices
de lavie et des ouvrages des écrivains
de la congrégation du Monl-Cassin,
quij ont Jleuri jusqu au temps de
l'auteur, i""". partie. Assise, 1731,
iii-fol. ; i\ partie , .assise, 1 752, in-fol.
II. Catalogi très monachorum , epis-
coporum reformatorum et virorum
sanctitate illustrium è congregatione
Cassinensi , Assise, 1705, in-fol.
Le troisième de ces catalogues n'est
imprimé à Assise , que jusqu'à la page
uo. Il fut continué à Rome , sous ce
titre : Continualio Catalogi viro-
rum sanctitate illustrium , etc., 1 7^4?
in-fol. III. Additiones et correctio-
nes hibliothecœ Benedicto-Casinen-
iis, etc., à Foligno, 1755, in-fol.
Avant ces grands travaux, Armellini
s'était essayé dans une f^ie de la bien-
hsureu^e Marguerite Corradi , écrite
A R M 479
en italien, Venise, i7'2G, in-12, ou-
vrage qui n'annonçait ni les mêmes
connaissances , ni le même esprit
de recherches. Il laissa de plus, eu
manuscrit, une Bibliotheca sjnop-
tica ordinis sancti Benedicti, qui
complète ses travaux sur son ordre,
dont on voit qu'il fut sans cesse oc-
cupé. G — E.
ARMENONVILLE. F. Morville.
^ ARMFELDÏ ( Charles , baron
d'), général suédois, né en 1666,
servit d'abord avec distinction dans
l'étranger , et retourna en Suède
pour prendre part aux exploits de
Charles Xil. Lorsque ce prince eut
été défait à Pultava , et que ses états
furent attaqués sur tous les points ,
Armfeldt eut un commandement eu
Finlande contre les Russes , et il fut
un de ceux qui firent de généreux
efforts pour réparer les malheurs de
leur patrie. Eu 1 7 1 3 , Pierre I", parut
lui-même , avec une flotte considé-
rable, devant Helsingfors , pour s'em-
parer de cette place importante. Arm-
feld, ne pouvant l'empêcher d'entrer
dans le port, fît une résistance daus
la ville et le long de la cote ; mais n'ayant
qu'un très- petit nombre de combat-
tants , et ne recevant aucun secours , il
fut obligé de se retirer. Cependant,
avant d'effectuer sa retraite, il engagea
les habitants d'Hclsingfors à abandon-
ner la ville , et toutes les maisons ayant
été brûlées , l'ennemi ne put conqué-
rir que des ruines. Ayant ensuite ob-
tenu le commandement de toutes les
troupes de Finlande, il se dirigea vers
les parties septentrionales de ce pays ,
et y l'assembla environ six mille
hommes; le général russe Apraxin
s'étant présenté avec dix-huit mille
hommes, le combat s'engagea, le i5
février 1714? pi'ès de Storkyro , en
Osti'obothnie , au mdicu des neiges et
des glaces. L'infanterie suédoise, qui
4Ho A R M
avait lutte avec une fermeté inébrau-
lable , ayant été abaudounee par la
cavalerie, rcmierai resta maître du
cbanip de bataille, qu'Armfeld lui-mê-
me quitta le dernier. Malp;rë cet e'chec ,
il sut opposer des obstacles aux progrès
des Russes. En 1718, Charles XII ,
qui était de retour eu Suède, lui donna
l'ordre de pénétrer dans les divisions
septentrionales de la Norwège , vers
Drontheini, avec un corps de six mille
hommes. On ne pouvait exécuter ce
projet qu'en franchissant des lacs ,
des torrents et des montagnes escar-
pées. Pendant la marche , une tem-
pête violente s'éleva , et la neige tomba
en si grande abondance , que les che-
mins en furent couverts. Des guides
maladroits ou perfides égarèrent les
Suédois , qui se trouvèrent dans la
situation la plus critique. Ils rencon-
trèrent rarement des troupes enne-
mies ; mais les éléments avaient con-
juré leur perte. Le plus grand nombre
expira de froid au milieu de la neige;
les autres , tourmentés par la faim ,
et accablés de fatigue, cherchèrent des
asyles, que leur accorda la pitié des pay-
sans norwégiens. Les chevaux ayant
succombé également, il fallut aban-
donner l'artillerie et le bagage , et
Armfeldt ne revint de cette expédi-
tion qu'avec quelques officiers , pour
apprendre la mort de Charles XII.
Lorsque la paix eut enfin terminé une
des guerres les plus désastreuses , et
qui avait duré plus de vingt ans, Arm-
feldt fut envoyé en Finlande , pour
réorganiser les troupes de cette pro-
vince. 11 mourut en i-jjG. C — au.
ARMLMUS. En traitant de cet il-
lustre chef des Chérusques , sous le
nom que les anciens lui douncnt, et
non sous celui de Hermann, son vé-
ritab'e nom, nous consultons la com-
modité de la plus grande partie de nos
lecteui's, qui conuaisscut beaucoup
ARM
mieux l'Arminius de Tacite que le
Hermaun deKlopstock. Nous n'avons
malheureusement que bien peu de
détails sur la vie du plus grand des
Germains, né l'an 18 avant J.-C. :
tout ce que nous en savons se ré-
duit à quelques mots du récit que
les anciens nous ont laissé de la dé-
faite de Varus. Les victoires de Dru-
sus avaient agrandi l'empire romain , de
tous les pays d'Allemagne compris
entre le Rhin, l'Elbe et la Saale. Pour
maintenir sous leur obéissance les bel-
liqueux habitants de ces contrées , les
R(<mains prirent toutes les mesures
que la prudence et le caractère de leurs
nouveaux sujets pouvaient leur dic-
ter. Quelques-unes des peuplades les
plus puissantes , comme les Sicambres,
dont l'énergie avait été si funeste à
LoUius , furent transplantées sur les
bords du Rhin , et jusque dans l'hi-
téiicur des Gaules, pendant qu'on ta-
chait de s'assurer de la fidélité des
autres , en prenant des otages , et en
donnant aux enfants de leurs princi-
paux chefs une éJucafion toute romai-
ne. Ai'minius , qui était fils de Sigiraer
[Sigmer ou Siegmar sv^nifml , dans
l'ancien langage teutonique , illustre
par la %^ictoire ) , le premier d'entre
les Chérusques , fut élevé à Rome ,
décoré du titre de chevalier , et cni-
jiloyé dans les armées d'Auguste. Ce-
pendant, ni les fiveurs de ce piince,
ni les prestiges d'une civilisation qui
était bien propre à fasciner les yeux
d'un barbare , ne purent changer son
ame germanique. Il resta fidèle aux
souvenirs et aux dieux de sa patrie.
Au lieu de lui forger des chaînes ,
Rome lui fournit des armes , et ,
formé à l'école des Romains , il apprit
à vaincre Rome dans Rome. 11 semble
qu'on le voie à la cour, à la ville ,
dans les camps , n'observer que ce
qui peut l'aider dans l'cxcculioa ^c
ARM
son grand projet , ne méditer que la
délivrance de sa patrie. Malhenrcuse-
meul pour sa gloire, qui devait être
plus grande que pure, il de'sespëra
du succès d'une lutte engagée ouver-
tement ; mais, si la puissance colossale
de l'empire le força de recourir à une
ruse indigne des motifs qui l'animaient
et des re'sukats qu'il obtint, quelques
circonstances le favorisèrent singuliè-
rement. Le proconsuK)ulnîilius Virns
qui , suivant l'expression d'un écri-
vain de son temps , «était entre pau-
» vre dans la Syrie riche , et était
» sorti riche de la Syrie pau\Te , »
commandait la plus belle des armées
romaines, destinée à maintenir dans la
.soumission les nouvelles acquisitions
d'outre Rliin. Les historiens déplorent
son imprudence , et vantent la dou-
ceur de ses mœurs , qui , selon toute
probabilité, n'était autre chose qu'une
funeste indulgence pour ses complices,
et pour tous les citoyens de Rome
qu'il avait intérêt à obliger. L'inso-
lence et les exactions de ses agents exas-
pérèrent des peuples fiers et pati-
vres; mais ce qui mit le comble à
l'irritation , fut le projet insensé de
jeter les tribus germaniques dans le
mou'e des institutions romaines (i);
écueil que la sagesse de l'ancien sénat
avait toujours su éviter , en laissant
aux peuples vaincus leurs lois et leurs
usages , et que le désastre de Varus
signala vainement aux héritiers de la
puissance et de l'ambition des Césars.
Varus traînait à sa suite une multi-
tude de légistes, et se croyait lui-même
plutôt appelé à remplir les fonctions
d'un proconsul , et à exercer la juri-
diction d'un préteur , au sein d'une
province vieillie dans des habitudes de
(il Les expressions de Dion Cass-us sort aussi
positives qu'énergiques : m II se hâta de les méta-
» raorpUoseren masse, et sur-le-champ. » Liv. 56,
ch. i8, p. 819, éd. Reim. Dans des temps pliu
modernes, on a appcli; cela régànérer.
ARM 481
soumission à l'iiifluence romaine . qu'à
surveiller des peuplades figuenies et
jalouses d'une liberté, naguère leur
suprême jouissance , et toujours leur
idole unique. Arniinins jugea !e mo-
ment favorable à l'exécution de ses
desseins , et , l'énergie nationale se-
condant soii activité, il parvint à y
associer les chefs de presque toutes
les tribus germaniques domici'it'es en-
tre l'Elbe tt le Rhin. L'in.sufQsance des
renseignements que nons ont transmis
les historiens de l'aniiqtuté sur cette
confédération à jamais mémorable ,
et la confusion qui règne dans tout ce
qu'ils nous disent ùe la Germanie, ne
nous })ermettent pas de juger toute
l'étendue du plan (''irminius. A cette
même époque (Tan 9 ,:.e notre ère),
une insurrection générale éclata dans
la Pannonie et sur les limites de la
Dalmatie. Si nous pouvions supposer
quelque liaison entre tous ces mou-
vements dépeuples aussi éloignés, s'il
était permis de croire ct le ces atta-
ques simultanées étaientc' .s diversions
fiiles dans l'intention de parer les
coups que les Romains al!aier;t porter
à la monarchie que MarLod venait
de former entre l'Elbe , la Saale et
l'Oder , nous serions étonnés sans
doute de trouver une si vaste concep-
tion et des combinaisons si savantes,
à une époqup et chez des peuples ou
l'on est peu disposé à les chercher; mais
nous en comjjiendrions mieux com-
ment Armiiiius, avec une îcte aussi
forte , a pu exécuter une entreprise
qui n'avait encore 1 éussi à aucun en-
nemi des Romains , et pourquoi ce
héros est devenu l'objet du culte et le
sujet des chants guerriers des peuples
bai-bares ( i ). Au reste , on n'a pas be-
soin de lui attribuer un plan si vôite,
pour admirer et les talents qu'il dé-
(O Caniliir adkhc barbarar apuJgentei Tac
Anu. , l.v. I, cb. S8.
5t
482
A R M
ploya, et le concert qui régna entre
les opérations des confédérés , concert
que la dëfectiou même de Ségeste
lie parvint pas à troid^ler. Ce chef
desCattes, soit par un scrupule qui ne
lui permettait pas de conquérir l'indé-
pendance eu blessant la lo^-auté , soit
par un motif moins loual)le, dénonça
au général rom;àn la trame qui s'our-
dissait ; mais la présomption et la lé-
gèreté de Varus lui firent négliger cet
avis, et Arminius redoubla de soins
auprès de lui pour dissiper ses doutes ,
en portant sou attention sur les trou-
bles qui venaient d'éclater sur les
Lords du Weser , etqu'Armiuius avait
excités lui-même, dans le but d'atti-
rer l'armée romaine dans l'intérieur de
la Germanie. Les trwupes allemandes,
qui servaient comme auxiliaires dans
cettearmée , affectèrent la plus entière
soumission , et leurs officiers , amis
d'Arminius et ses complices , confir-
mèrent de plus en plus Varus dans
son aveugle sécurité. Des soulèvements
concertés et partiels eurent d'abord
lieu dans des contrées lointaines, pour
obliger le préfet romain à disséminer
ses forces. Quand le corps de l'armée
se trouva réduit à trois légions, à quel-
ques cohortes et aux perfides auxi-
liaires, l'insurrection devint plus géné-
rale; Hermann et ses amis vivant dans
l'intimité de Varus , et admis à son
conseil, multiplièrent les preuves ap-
parentes de zèle , et insistèrent sur la
nécessité de ne pas attendre les re-
belles , mais d'aller étouffer le feu de
la révolte dans son foyer. En A'ain le
fidèle Ségcstc renouvelait-il ses aver-
tissements ; tous les jours l'armée s'é-
loignait davantage du Rhin , et s'en-
fonçait dans les contrées où l'atten-
dait le piège le plus funeste. Arrivée
près des sources de la Lippe, dans
le pays des Bructères , après une
marche pénible sur un terrain , liuitôt
ARM
glissant , tantôt marécageux, et où iî
fallait à chaque pas se faiie jour à coups
de hache , elle vit tout à coup , dans
un bassin entouré de collines élevées ,
toutes les hauteurs voisines couver-
tes de Germains, et apprit en même
temps , qu' Arminius était tombé sur
les Romains de l'arrière-garde qui lui
était confiée, et qu'il était l'ame des
mouvements hostiles qui se déveluU'
paient devant eux ( i ). Alors se dessil-
lèrent les yeux de l'infortuné Varus ;
le courage et la discipline des vain-
queurs du monde firent des prodiges ,
mais ne servirent qu'à prolonger leurs
souffrances. Elles durèrent trois jours.
Peut-être la valeur et la constance
romaines, déployées dans ces jours
funèbres , sauvèrent-elles les Gaules,
en détournant les Germains d'une in-
vasion , dont la crainte remplit Au-
guste de terreur dans les premiers mo-
ments {'i); mais elles n'empêchèrent
pas Arminius de s'emparer de trois
aigles romaines , et de mettre pour
jamais un terme à leurs progrès
dans le Nord de la Germanie. Varus
ne voulut pas survivre à sa honte.
Arminius souilla sa victoire par des
cruautés inutiles. La rage des vain-
queurs s'exerça particulièrement sur
ces hommes de loi , dont les idées
et les arguties avaient si fort contrarié
leurs habitudes nationales : aux uns
ils coupaient les mains; ils crevaient
les yeux aux autres. Un soldat ayant
arraché la langue à un de ces légistes,
et cousu sa bouche , ne pouvait se
(i"i I.es Bruclères et les Marses , peuples df la
Westphalie , entre rEms et le Rhia , et après le»
Cbéntsques , membres principaux de la ligue d'Ar-
minius.
(il .\ la première ncuvelle , il déchira ses yéle-
ments, prit toutes les luesurcs que pouvaient ins-
pirer la consternation et Tcffroi, et ne cessa pen-
dant plusieurs mois Uc s'ccrier, en donnaut les
marques du plus violent désespoir : i, Vt pet coii-
tiniios mentes barba capillorjue jummiiio , caput
iiUerJum foribni iltidciet, vociferans. « Quin-
» tilius Varus, r*adt-moi meiUgiooj. uSuet. Ai<;. ,
«U. a3 , 34.
A R M
rassasier de cet liorrible spectacle , et
s'ëciiait, en serrant la langue dans
sa main : « Vipère , maintenant tu
» cesses de siffler. » Le lieu précis du
cbamp de bataille est difficile à déter-
miner, les anciens ne le desiç;nant que
sous le nom vague de Foret Teulohur-
gienne; mais les indications qu'offre
le re'cit de Tacite repoussent cnticrc-
ment l'opinion du savant géographe
Mannert, qui lecherclie sur les confins
des comtés de la Lippe méridionale,
de la Marche, et du duché de West-
phalie ; elles s'accordent mieux avec la
tradilion qui place la bataille de Varns
non loin des sources de l'Ems et de la
Lippe, auprès de la petite ville de Deth-
moid. Les lieux voisins son| pleins des
souvenirs de ce mémorable événement.
Le champ qui est au pied du Teute-
berg, s'appelle encore Wintfeld, ou
Champ de la Victoire; il est traversé
par le Rodenhecke , ou Ruisseau de
Sang, et le Knochenhach^oa. Ruisseau
des Os, qui rappelle ces ossements
trouvés six ans après la défaite de
Varus , par les soldats de Germanicus ,
venus pour leur rendre les derniers
honneurs. Tout près de là, est Fel-
drom , le Champ des Romains ; un
peu plus loin, dans les environs de
Pyrmont, le Henninsberg , ou Mont
d'Arrainius , couvert des ruines d'un
château qui porte le nom de Harmins-
boiirg, et, sur les bords du Weser,
dans le même comté de la Lippe, on
trouve Varenholz , Bois de Varus.
C'est aussi dans cette même contrée
que Charlemagne s'empara d'Ermen-
sul, image d'un guerrier, objet de la
plus ferventeadoration despeuples qu'il
combattait, et, suivant toutes les pro-
babilités , dernier reste du cidtc que
les nations de la Germanie rendaient
à leur libérateur. Après avoir délivré
son pays, Arminius ne demeura pas
înactif sous ses lauriers j il dcliuisit
A R M 485
les forts que les Romains avaient fait
bâtir sur l'Elbe, le Weser et le Rhin. Il
fit plus ; il nourrit , dans sa nation , l'ar-
deur guerrière qu'il croyait, avec rai-
son, être le meilleur boulevart contre
la soif de conquêtes qui animait les
Césars. Ses eiforts ne furent sans
doute pas infructueux; mais il eut à
combattre ses propres concitoyens,
dont un grand nombre demandait la
paix à tout prix, et surtout le chef
d'une tribu puissante, Ségeste, dont il
avait enlevé la fille , promise à un autre
prince. Ségeste, attaqué par le parti
national, dont Arminius était l'ame,
appela Germanicus ; les Romains , ac-
courus à sa prière, le dé'ivrèrent d'une
espèce de siège , et , parmi les prison-
niers qui tombèrent entre leurs mains,
ils comptèrent avec orgueil la femme
d'Arminius ( i ). Elle se présenta devant
Germanicus , avec un maintien et des
sentiments dignes de son époux; sa
douleur, dit Tacite, était muette; elle
ne laissa échapper ni larmes ni priè-
res. Ce grand peintre ajoute qu'elle
tenait ses mains serrées , et que ses
regards étaient fixés sur le sein qui
portait le fils du libérateur de la Ger-
manie (2). La trahison de Ségeste et
le sort de Thousnelda , enflammèrent
le patriotisme d'Arminius , et donnè-
rent une nouvelle énergie à sa voix.
Son oncle Inguiomar, guerrier d'un
grand et ancien renom dans l'armée
romaine, lui prêta tnut son appui.
Germanicus sen(it la nécessité de pré-
venir l'attaque, et engagea une lutte (5)
dont les résultats, quelque brillants que
[ i) Strabon noiis a conservé son nom, peut-être
défiguré. Les meilleures éditions récrivent 7'hous-
rulda. Adelun^ liv. I , p. 33- 1 croit que c'est la
contraction ou Taltération de l'heodelini^a. Quand
Strabon rédigeait r.iriicle de sa géographie qui
traite de la Germanie, le fils dont elle était ac-
couchée à Ravenne , lieu de sa captivité , avait
trois ans ; il le nomme l'houmelicus. ,
(2) Compressis inlra smummanibiu , gravidariL
itterum irtUtens. ( ïhid. )
(3 , C'estsa troisième campagne; elle coïncide avec
i'iiii iti lie ii'jUc ère. Tac, Anu. , lib. 1 , ch. Cu— ;».
5i..
484 A R M
fussent les succès partiels de la valeur
et de la discijiline romaines , ne firent
qu'accroîti'c la confiance et cimenter la
licçue de ses ennemis. Il faut en voir les
détails dans Tacite ; il n'échappera
pas au lecteur attentif combien , en
conservant un cœur entièrement ro-
main, sa grande ame rend justice à la
cause et au caractère d'Arminius; il
prend plaisir à donner aux discours
qu'il met dans sa bouche, toute l'éner-
gie et toute]|â chaleur de ce Che'rus-
que; il semble même qu'il écrive avec
im pressentiment sombre , avec le
présage que la barrière e'ieve'e contre
les envahissements de Rome par le gé-
nie d'Armiuius, s'ouvrant uu jour,
versera la honte et la destruction sur
sa patrie dégénérée. Il fait ciaircment
entendre que , sans la fougue d'Iuguio-
mar, qui négligea les conseils d'un
héros non moins prudent que brave,
Arminius aurait fait éprouver le sort
de Varus aux légions de GcVina. L'an-
née suivante, Germanicus fit de nou-
veaux efforts j ses préparatifs furent
prodigieux, et son plan, aussi sage-
ment conçu que vigoureusement exé-
cuté; mais cette expédition, qui est sa
quatrième en Germanie, quoique il-
lustrée par la défaite d'Arminius, dans
les champs d'Idistavisus , sur les bords
du Wescr ( I ), n'amena aucun résultat
décisif, puisqu'elle finit par la retraite
des Romains, et par la défaite navale
la plus désastreuse. C'est au commen-
cement de cette campagne, et peu
avant la bataille d'Idistavisus, qu'Ar-
minius demanda une entrevue avec
son frère Flavus, élevé en Italie
comme lui, et resté dévoué aux inté-
rêts de Rc.mc : elle eut lieu sur le We-
(i) Entre Mlnclen et Hanirln , suiT.iDtle prince
•^T^que de l'jrlerborn ( Voy. Moiinm. Pa/ierb.,
p. 74- 1 • selon Citterer, un peu au-dessus de Men-
nourg l 1. c. , p. ^Soi ). M.murrt ilierrhe le local
de 1.1 seconde défaite entre I.ockum et le lac de
Sletohudc , ilani le pnyt d Uanovrc ( t. UI, p. 1 13_\
ARM
ser , et se fit d'une rive à l'autre, dans
la langue des Romains. Arminius tenta
inutilement de rattacher son frère à la
cause nationale , en traitant les déco-
rations miUtaires dont il était orné,
de vil salaire de sa bassesse, et de ga-
ges d'une servitude honteuse. Le
fleuve seul les empêcha de fondre l'un
sur l'autre. Flavus fut emmené par les
siens, La jalousie de Tibère contre
Germanicus vint encore seconder les
efforts des confédérés; mais , tranquil-
les au dehors, ils tournèrent bientôt
leurs armes contre eux-mêmes. Maro-
boduus , roi des Suèves , et fondateur
de la monarchie des Marcomans ,
voulut étendre ses conquêtes au-del.i
de la Saale et de l'Elbe ; il avait été
élevé à Rome comme Arminius, et eu
avait rapporté des principes entière-
ment opposés à ceux du chef des Ché-
rusques; mais il trouva dans Arminius,
un aussi redoutable ennemi de ses pro-
jets d'asservissement , que les Romains
l'avaient éprouvé défenseur ardent de
l'indépendance de son pays. Maigre
la défection d'Inguiomnr, qui, dédai-
gnant de ^ervir sous les ordres de son
neveu, se joignit à Marbod , Armi-
nius sortit vain([ueur de cette guerre
civile, et eut la gloire de sauver ses
compatriotes de l'oppression qui les
menaçait dans rinîérieur, après les
avoir affranchis du joug de l'ctranger.
L'action qui décida la (lucrellc fut
longue et sanglante; les Germains ne
se battaient plus en corps détaohrs ,
et sans s'assujciir à aut^un ordre; Ar-
minius les avait accoutumés à la chsci-
pline romaine, et leur avait fait faire
des progrès rapides dans toutes les
parties de l'art militaire. Les disposi-
tions des combattants furent dignes
de l'école où leurs chefs s'étaient for-
més, et le succès , long-temps indécis.
Mais le roi des Marcomans ayant le
premier rctué ses troupes du champ
ARM
de hat.iille , l'opiulon le déclara vain-
cu; il pcidit, par désertion, la plus
gi'ande partie de son armée, fut oblige'
de rentrer avec précipitation dans le
centre de ses états, eu Bohème, et
finit par se rcTugier en Italie, où il
vécut dans le mépris. Quand on con-
sidère toutes les preuves de dévoue-
ment à la cause de la liberté qu'Ar-
luiuius avait donne'es, il est bien dif-
ficile de croire qu'il ait pu former le
projet d'asservir les hommes libres de
la Germanie. Cependant, Tacite l'af-
firme , et son autorite' doit pre'valoir
sur des considérations purement mo-
rales. Tacite nous apprend, qu'aspi-
rant à la royauté, il s'attira la haine
de SCS compatriotes, et pc'rit à l'âge de
trente-sept ans (i), victime d'un com-
plot de ses proches. Peu de temps avant
sa mort , Adgandestes ou Adgandcs-
trius , prince des Gettes , avait e'crit
au sénat, pour offrir d'empoisonner
Armiuius. Mais le se'nat avait refuse de
faire commettre ce crime. Arminius
n'avait que 26 ans quand il extermina
les légions de Varus. Deux ans avant
sa mort, il remporta sa victoire sur
Maroboduus. « Arminius, dit Tacite,
» fut incontestablement le libérateur
« de la Germanie ; il ne combattit pas le
» peuple romain dans les commencc-
w ments de sa puissance, comme d'au-
» très rois et d'autres généraux , mais
» au faîte de sa gloire, et dans les
» temps où l'empire avait atteint le
» plus haut degré de splendeur : il ne
» fut pas toujours heureux ; mais il ne
» cessa pas un moment d'imposer au
» vainqueur, par son altitude et par
» ses forces. Pendant douze ans , l'ar-
» bitre des affaires de la Germanie,
» du gré de ses coucitojous, il fut
(O L'an 7-5! de Rome , 19 de J.-G. ( Tac. Ann. ,
liv. U, c. 8K . S- Ion quelques cbronologistes, la
mort d'Arniinius doit être placée sous Tan 20 ou ai
de i.-C. Nous suivons l'exact et savant Gatlerer;
ARM 485
» l'objet de leur vénération après sa
» mort. » C'est à lui qu'ils doivent la
conservation de leur indépeudance po-
litique , de leur existence nationale , et,
par conséquent, de leur langue, qui,
sans les victoires d'Arminius , chassée
par le latin, ou reléguée comme le
celtique, dans quelques districts écar-
tés , ne serait plus , aujourd'hui , le lien
de tant de peuples estimables, et la
source d'une des littératures qui font le
plus d'honneur à l'esprit humain. Il ne
faut donc pas s'étonner que la mé-
moire de ce héros leur soit chère, et
que leur plus grand poète l'ait célébrée.
On a deux poëines de l'auteur de la
Messiade , dont Herraann est le sujet :
nous en parlerons à l'article deKLOP-
STOCK (Voyez aussi celui de Lohens-
TEiar, dont Y Arminius eut le plus
grand succès , à une époque où le goût
des Allemands n'était pas encore fir-
me). L'historien moderne qui a mis le
mieux en œuvre les passages des an-
ciens où il est fait mention de Her-
mann, estSchmidt, dans le \". vol. de
son Histoire des Allemands. S— r.
ARMINIUS (Jacques) , propre-
ment Harmensen ( et non Hermanns),
chef de la secte des arminiens , ou re-
montrants , naquit , en 1 56o , à Oude-
Water , dans la Sud-Hollande , où son
père était conseiller. Il le perdit de
bonne heure , et n'aurait pu se livrer
aux études , sans les secours de quel-
ques bienfaiteurs , et du magistrat de
Lcyde. 11 les fit dans cette dernière
ville, à Marbourg, à Genève, sous
Th. de Bèzc , et à Bâle , sous Gry-
naeus. De là, il retourna à Genève , où
l'ardeur avec laquelle il avait soutenu
la philosophie de Ramus, lui avait,
pendant son piemier séjour , attiré des
désagréments. Le désir d'entendre
Jacques Zobarella lui ayant fait faire
le voyage de Padoue , la curiosité le
conduisit à Romej curiosité dont on
486 A R ]M
ne lui sut pas de gre en Hollande ;
mais les jnëvcntions qui s'ctaienl éle-
vées contre lui se dissipèrent bien-
tôt , lorsque , de retour dans son pays ,
il se fit entendre dans les chaires de
l'église réformée. Ses succl's lui valu-
rent une place de pasteur à Amster-
dam, en 1 588 , et bientôt après , une
correspondance qui lui donna occasion
de changer ses idées en théologie , et
iit naître le parti considérable , connu
sous son nom. Des ecclésiastiques de
Dcift avaient publié un livre oîi la doc-
trine de Calvin , sur la prédestination,
cîait combattue ; INIartin Lydius , pro-
fesseur à Franecker , s'adressa à Ar-
îninius , pour l'engager à réfuter cet
écrit. Arminius , en l'examinant ,
trouva les doutes des théologiens de
Deift fondés , et finit non seulement
par adopter leurs sentiments sur le
point en litige, mais par leur donner
beaucoup plus de développement, en
.se prononçant avec force contre le sii-
]>rnlapsarisme , c'est-à-dire ,^ contre
le dogme qui représente la chute d'A-
dam comme !a suite , et non conmic la
cause des décrets de Dieu sur la ré-
demption. Révolté de l'idée querètrc
souverainement bon devait avoir , de
toute éternité, condamné les ims au
péché et à la douleur , et prédestiné
les autres <à l'adojUion de la foi salu-
taire et à la félicité cé'este , sans autre
motif que son bon plaisir, pour faire,
des premiers , des monuments de sa
justice, pendant que les derniers prou-
veraient sa miséricorde , il enseigna
que Dieu avait laissé à tous les hommes
la faculté de s'appliquer les bientaits de
sa grcàce , offerts à tous ceux qui s'en
rendraient dignes par leurs efforts.
Celte doctrine fit , des sou origine ,
beaucoup de bruit , et trouva un grand
nombre d'adversaires ardents ; mais
elle n'empêcha pas les curateurs de
l'université de Levde d'offrir , en
A 11 ^î
1 6o5 , rà Arminius , une chaire de théo-
logie, vacante par la mort de Frau-
çois du Jon ( Franc. Junius ). Dans
cette nouvelle place, que ses parois-
siens le virent accepter avec regret,
il eut à soutenir les attaques de son
collègue François Gomarus, zélé cal-
viniste; la dispute s'échauffa, les deux
partis des arminiens et des goma-
ristes se formèrent; et, bien que les
plus grands hommes de la république,
Hugo de Groot ( Giotius ) , Rembold
Hoogerbeets, et l'ornement de sa pa-
trie , Jean van Olden-Barneveld, pen-
chassent pour ses opinions , et le pro-
tégeassent contre la violence des go-
maristes , cette controverse prenant
chaque jour une tournure plus alar-
mante, ôta toute franquillilé à Armi-
nius, et contribua indubitablement a
abréger ses jours. Il mourut le 19 oc-
tobre 1 609 , laissant sept fils et de
nombreux disciples , qui obtinrent
d'abord la faculté de professer leurs
principes en toute liberté ; mais qui
ensuite, victimes de la haine de Mau-
rice, prince d'Orange, contre Olden-
Barneveld , furent enveloppés dans
la chute du parti républicain , et con-
damnés par le synode de Dordrecht,
convoqué , eu 1618 , par leurs enne-
mis religieux et pohtiques. Voici les
cinq articles que les arminiens présen-
tèrent aux États de Hollande , eu 1610,
comme renfermant toute la doctrine
de leur chef , tels qu'ils se trouvent
dans leur Mémoire , intitulé Remon-
trances, d'où ils ont pris le nom de
remontrants, i". Dieu a, de toute éter-
nité, décrété d'admettre au nombre
des élus ceux qu'il a prévu devoir
garder la foi en J. - C. , inviolable jus-
qu'à leur mort ; 2°. J.-C. a expié les
péchés de tous les hommes , sans ex-
ception, quoique ceux-là seuls qui
croient en lui puissent s'en apphquer
les fruits; 3'. saus la coopération ilu
ARM
S. Esprit , riidfnmc naturellement en-
clin au mal , ne peut produire en lui
la loi salutaire 5 l\^". la j^ràce divine est
la source de tout bien dans l'iiorame ,
<'t les bonnes œuvres ne peuvent être
attribuées qu'à ce secours de Dieu ;
juais la grâce n'exerce pas sur la vo-
lonté du pécheur une force irrésis-
tible , et peut être repoussée par sa
perversité; 5'. ceux qui sont unis au
Christ par la foi , ont des forces suffi-
santes pour vaincre tous les obstacles
au bien ; en revanche , on ne jiourra,
qu'au moyen d'un examen plus ap-
profondi des saintes Eci'itures , déter-
miner s'il est possible que l'homme
régénéré sorte de l'état de grâce et
perde sa foi. Ces cinq articles n'offrent
rien qui ne soit conforme à la doctrine
orthodoxe de l'église luthérienne j les
gomaristes , ou auti - l'cmontrants ,
n'auraient pas eu l'ombre de droit d'ac-
cuser les arminiens d'hérésie , si les
successeurs d'Arininius ne s'étaient
pas expliqués avec moins de retenue,
sur les conditions du salut , que ne
l'avait fait ce chef. Lorsqu'aprcs la
mort de Maurice , ils obtinreiit la fa-
culté de rentrer dans leur patrie , et de
professer librement leurs principes,
Episcopins , et ses successeurs dans
la chaiie de théologie au gymnase
fondé h Amsterdam par les Arminiens,
enseignèrent ouvertement que , pour
avoir des droits au titre de disciple,
et aux bienfaits de J.-C. , il suffisait de
reconnaître le Nouveau Testament
pfjjur règle de la foi , de fuir l'idolâ-
trie et le vice ; de mener une vie con-
t forme à l'Evangile, et de regarder
comme frères tous ceux qui faisaient
de même , quelles que fussent d'ail-
leurs leurs opinions sur le dogme ,
pourvu qu'ils n'adoptassent aucune
maxime d'exclusion et d'intolérance
envers les chrétiens dissidents. L'équi-
table et judicieux Moshcin n'hésite
A'RM
487
pas à attribuer à Arminius des senti-
ments analogues à ceux des Arminiens
modernes, et le projet de réunir, à
l'exception de la communion romaine,
toutes les autres sectes chrétiennes eu
une seule société rehgieuse. 11 croit
que la prudence et une mort préma-
turée l'empêchèrent seules de parler
avec la même franchise, et de prêcher
cette doctrine de ses illustres succes-
seurs , qui , dans les temps modernes ,
a fait de si grands progrès au sein de
toutes les églises chrétiennes de l'Eu-
rope éclairée. La vie d'Arminius fut
irréprochable , et sa piété aussi douce
que sincère. Sa devise était: Une bonne
conscience est lejmradis. Ses oeuvres
consistent en quelques Traités de théo-
logie sur la prédestination, et en une
Analj'Se des chap. Yll et IX de VÉ-
jjitre aux Romains, texte classique
pour toute celte discussion ; elles for-
ment un vol. in-4 ". , imprimé à Leyde,
en lôiiQ, et très - souvent dans la
suite. Gaspar Brandt est le meilleur
biographe d'Arminius , ffist. vilce Ar-
min. Leyde, 1 7'.>./|, in-8. Son portrait
est dans la B'ihl. calcogr. Boissard,
N". 226. S— R.
ARMSTnONG (Jean), poète et
médecin écossais , né vers l'année
3 709 , était fils d'un ecclésiastique dé
(iaslleton , dans le comté de Roxburgh.
Après avoir étudié la médecine à l'uni-
versité d'Edimbourg, il vint, en 1 732,
s'ctabUr à Londres , où il se fit bien-
tôt remarquer , mais plutôt comme
littérateur et homme d'esprit que
comme médecin. Le premier essai pu-
blic qu'il fit de ses talents, en 1755^
fut une satire ingénieuse contre les
empyriques, écrite à la manière de
Lucien, et intitulée : Essai sur l'art
d'abréger l'étude de la médecine,
auquel étaient joints un Dialogue
entre Ifygie , Mercure et Phi ton ,
rdaiivevient à la pratique de la
4S8 A R M
médecine , suivant la méthode de
certaine illustre société; et une Epi-
tre du penaii UsheckàJosné fFurd.
Vi publiri en 1757, im l.aitc dogma-
tique sur la Maladie vénérienne , et
blcutôl après , un poëme int tiilei'£co«
j20ihïe de l'Amour. Ce p' ëme eut un
giaud succès, mais .111 genre de succès
qui compromit le caractère ui: 'rai de
l'auteur., plus cucore (fu'il n'honora
son talent poétique ; car il tenait plus
à certaines peintures licericieuses, qu'à
la beauté' des vers. Armstrong chercha
à réparer ce scandale, dans une édi-
tion qu'il doin.a de son poème, eu
1 768 , et dans l?(jueUe il retrancha
ou adoucit ce qu'il y avait de plus
libre dans la première. L'ouvrage sur
lequel se fonde principalement aujoiu-
d'hui sa réputation , c'est son pocmc
^u^ XAri de conserver la santé , pu-
Itlié en 17 44 » et regardé comme l'un
des plus beaux poèmes didactiques
qui existent dans la langue anglaise.
JiCs gens de goiii le metlenl au nombre
des ouvrages classiques de celte langue.
]j'auleur , au jugement de ses compa-
triotes , écrit avec chaleur , et joint
rénergie de la pensée à la clarté et à
réiégance du stsle. Il ne croit pas,
comme la plujiarl des poètes anglais,
que le langage poétique consiste dans
les invei'sions forcées , les images bi-
zarres ou les constructions inusitées.
"iJArl de conserver la santé a été
très-souvent réimprimé, soit séparc-
jnent, soit dans dilférentes collections.
Arm.<:troug était d'un naturel indolent
ot mélancolique , et portail dans la
société, une habitude de lacituruile et
liiie suscep'ibilitcdecaractère, qui nui-
sirent à sa fortune comme à sa réputa-
tion. Il obtint, en 17<)0, la place de
médecin der.<rmée d'AlieUia^ne, qu'il
exerça jusqu'à la paix de 1 7G'>, époque
oii il rc\i!;tà Londres. Il fil, en 1771,
ua voyage en France cl en Italie , dt-nt
A R N •
il a donné une courte felafion , en 5e
déguisant sous le nom de Lancelot
Temple. Outre les ouvrages dont nous
avons fait mention , on a de lui un
poème sur la Bienveillance , i75i J
le Goût, épilre à un jtwie critique,
1755; Essais sur difjérents sujets,
eu prcsc , publiés sous le nom de
Lancelot Temple, eu 1 758; le Jour ,
poëmej Essais de médecine, et quel-
ques autres écrits. Il mourut en 1 779.
S— D.
ARNALDO ( Pierre-Antoine ) , né
en i658, à Villefranche , comté de
Kice, à l'âge de dix - sept ans,- alla
étudier la tl)éologie au collège de Brera,
à Milan; il y fut reçu docteur, et de-
vint prolonotairc apostohqr.e. On a de
lui , outre quelques ouvrages de piété,
L un Discours sur l'inauguration du
pape Alexandre fil, et un Elos,e
de lévéque de Nice ; 1 1 . Honorato II
principi Monacœo , etc. , poéticœ gra-
lulationes , Milan , in - 4".; HL Iti
Gloria veslita a lullo per la morte
di Carlo Emmanuelle II , duca di
Savoia, Turin, 1G76, in-4". ; c'est
un poème en octaves ; IV. il Giardin
dtl Piemonte oggi vivenle nelV anno
1675, diviso inprincipi, dame,pre-
lati , abati , cavalieri , ministri , etc. ,
Turin, -lOSS, in-y. C'est un recueil
de sonnets , d'odes ou canzoni , à la
louange des personnages les plus illus-
tres de la cour de Tmiu, de ce temps-là.
G— £.
ARNAUD DE CARCASSES, trou-
badour de la iin du i5 . siècle, dj^st
connu que par une novelle , espèce de
fabliau dans le genre de ceux que com-
posaient les trouvères français. Ce
conte, dans lequel un perroquet est
le principal interlocuteur, oflrc un mé-
lange bizarre d'idées morales et de
conseils très - condamnables. On en
jugera par celui que donne le messager
ailé à une dame aimcL' d'Antiphai:o;î,
ARN
maître clii perroquet, de se laisser en-
lever au moment où il mettra le feu à
la tour, avec du feu grégeois; expe'dieut
qui est adopte et qui réussit. L'auteur
termine ainsi son conte : « Ceci a été
» fait par Aa'naud de Carcasses, qui a
» aimé beaucoup de dames , et pour
» corriger les maris qui veulent gar-
» der leurs femmes. Il vaut mieux les
» laisser aller oîi il leur plaît; c'est le
» parti le pins sûr. » P — x.
ARNAUD DE Marveil , ou AR-
NAUT, troubadour du i-i". siècle.
Ne' de parents pauvres , il fit des ef-
forts pour s'élever au-dessus de leur
basse condition. Apres avoir exercé
quelque temps l'état de clerc , qua-
hté que l'on donnait non seulement
aux ecclésiastiques , mais aussi aux
laies qui remplissaient des fonctions
assez semblables à celles des notaires,
il pensa qu'avec une figure agréable et
quelques taleuts pour la poésie , il se
distinguerait dans le monde. Il fut en
effet très-bien accueiiii à la cour d'A-
délaide , comtesse de Béziers , femme
de Roger II, vicomte de Bcziers, sur-
nommé TaiUefer. Selon l'usage , Ar-
naud célébra la beauté et les grâces de
sa bienfaitrice ; mais ces éloges , d'a-
bord dictés par la reconnaissance ,
furent bientôt inspirés par la passion
la plus vive. Plusieurs pièces de vers
très-longues peignent ses sentiments
et ses espérances , et , lors même qu'il
se plaint de l'exagération de ses con-
frères, il épuise les comparaisons.
« La fraîcheur de l'air, l'émail des
» prés, le coloris des fleurs, en me
- » retraçant quelques-uns de ses ap-
» pas, m'invitent sans cesse à laclian-
» ter. Grâces aux exagérations des
» troubadours, je puis la louer autant
» qu'elle en est digne; je puis dire
» impunément qu'elle est la plus belle
» dame de l'univers. S'ils n'avaient
» paj; prodigue cent fois cet éloge à
A R N 48(^
» qui ne le méritait point , je n'osc-
» rais le donner à celle que j'aime :
» ce serait la nommer. » H est diffi-
cile , quand on chante aussi longue-
ment , de ne pas commettre quelques
indiscrétions. Adélaïde fui obligée d'é-
loigner son troubadour : il se retira
à la cour du seigneur de Montpellier,
où , après avoir exhalé ses regrets et
ses remords , il composa une pièce
d'environ quati'e cents vers , dans la-
quelle il semble avoir pour objet d'en-
seigner l'art de se conduire dans le
monde. Cette épître murale pai-aît être
la dernière production de ce poète : elle
offre quelques traits qui peignent les
mœurs du temps; mais , amoureux ou
moraliste , Arnaud fut toujours très-
diffus. Ce troubadour dut le nom de
Marveil ou Marvelh à celui d'un châ-
teau du Périgord, dans lequel il était
né. P — X.
ARNAUD Damel , troubadour
du \'i\ siècle , né de parents nobles,
au château de Ribeyrac , en Périgord.
Si l'on juge du mérite de ce poète parles
pièces qu'on a recueillies de lui, on aura
de la peine à lui accorder la préférence
sur d'autrestioubadoursde son temps;
cependant les anciens auteurs italiens
semblent lui assigner le premier rang :
le Dante surtout le cite comme le poète
qui faisait le mieux des vers tendres
eu langue romance provençale , et ne
prise pas moins la prose de ses ro-
mans. Pétrarque, qui le place à la
tête des poètes provençaux , l'ap-
pelle le grand maître d^ amour; l'a-
mant de Laure a même terminé une
stance d'inie de ses chansons par un
des vers d' Ai-uaud Daniel ; à la véiité ,
on a prétendu que ce vers n'était peint
de ce troubadour, et ce doute est
l'objet d'une longue digression qu'on
peut lire dans l'ouvrage de Crescim-
beni. Il paraît , au reste , que les meil-
leures pièces de ce poète ont été per-
490 ARN
(lues , puisque celles qui nous restent
ne pourraient soutenir la comparai-
sou du coté de l'imagination et de la
grâce avec celles de quelques-uns de
ses contemporains. Arnaud Daniel est
rinventeur d'un genre de composition
nomme' sestine , dont le mérite con-
siste dans certaines combinaisons et
répétitions : il attachait surtout beau-
coup d'importance à la rime. 11 joignait
au talent de la poésie celui de faire les
iiirs de ses cliansons, qu'il exécutait
aussi bien que le meilleur jongleur.
P— X.
ARNAUD DE Marsan , troubadour
5ur la vie duquel on n'a point de dé-
tails ; mais que Millot suppose appar-
tenir à l'illustre maison de Marsan. On
peut croire en effet , d'après la pièce
qui nous reste, que ce poète, quiflo-
lissait sans doute vers la fin du |5^
siècle, joignait l'éclat d'un grand nom
à celui du talent. Cette pièce est très-
curieuse, parce qu'elle peint les modes,
et la manière de vivre des grands sei-
gneurs du temps : c'est une espèce
d'instruction de chevalerie dont Millot
donne un long extrait dans son His-
toire des Trouhadcurs. Cette instruc-
tion est remarquable en ce qu'elle ne
contient aucun conseil dont l'honnê-
teté puisse s'offenser, ce qui est fort
rare dans les pièces du même genre
et du même temps. P — x.
ARNAUD DE TiNTir.NAC , trouba-
dour du 14*^. siècle, que No^tradamus
nomme, avec raison , .4 niant de Cnti-
gjiac , naquit sans fortune, et dut à ses
talents poétiques la faveur de Louis ,
roi de Sicile et comte de Provence , qui
l'employa dans des négociations 4ont
le succès fut récompensé par le fief de
Cotignac. Il fut moins heureux en
amour; n'ayant pu faire agréer ses
vœux à Isnacde , fille du seigneur
d'Antravènes , il se décida à voyager
dans le Lcvaiit. Les trois Chansons
ARN
qu'on nous a conservées de ce trou-
badour justifient assez l'indifférence
d'Isnarde. On a été obligé de tirer ces
détails de Nostradamus , historien peu
digne de foi, et que Crcscimbeni a
consulté. P — X.
ARNAUD DE Bkescia, né au com-
mencement du i-i". siècle, vint en
France dans sa jeunesse, et fut dis-
ciple d'Abailard. Jl s'élevait alors des
opinions nouvelles qui entraînaient
les meilleurs esprits ; et S. Bernard s'en
plaint dans plusieurs de ses lettres.
Cet amour des nouveautés dange-
reuses enflamma l'imagination d'Àr-
naiid et égara son zèle. 11 quitta l'é-
cole d'Abailard ])Our retourner en
Italie, où il pint l'habit monastique,
et chercha bientôt à se faire un nom
en prêchant la réforme du clergé. Le
clergé était a'ors fort corrompu ;
l'abbé de Cîteaux , et quelques autres
avaient entrepris de le réformer j Ar-
naud alla beaucoup plus loin ; il vou-
lut le dépouiller de tous ses biens
temporels, cl le ramener au temps
de la primitive église ; il eut pour lui
les nobles, jaloux de la puissance des
prêtres , et le ])euple , toujo\us prêt à
adopter les opinions qui tondent à
dépouiller les riches. Sa doctrine fit
fermenter toutes les têtes , et le j)re-
mier succès do ses prédications fut
une révolte du peuple de Ereseia con-
tre son évêque. Le clergé porta , de
toutes parts , ses plaintes au pape ,
qui , dans le concile de Latran , en
ij^f), condamna la doctrine d'Ar-
jiaud , et ordonna qu'il fiit enferme.
Poursuivi par les foudres de Rome,
Arnaud qr.itt.'' l'Italie, et vint à Zu-
rich, oiV il déclama, avec succès,
contre l'opuienre des prêtres , au mi-
lieu d'un peuple et d'un clergé pauvres;
il était sur le point d'entraîner dans
son parti le légat du pape, lorsque
les Épîtres de S. Bernard vinrcn!.!!-
ARN
faiblir l'autorité de ses discours , et
troubler sa retraite. Il fut bientôt per-
sécute eu Suisse comme il l'avait e'të
en Italie ; mais sa doctrine faisait des
progrès rapides, et menaçait le sou-
verain pontife jusque sur la chaire de
Pierre. Innocent II venait de mourir;
stjn faible successeur , Lucius , n'a-
vait pu étouffer l'esprit de sédition
qui s'était emparé du peuple de Rome;
Eugène III , plus faible encore , vit
éclater la révolte sans pouvoir l'arrê-
ter. Ce fut alors qu'Arnaud conçut
le ju'ojet hardi de se rendre à Rome ,
et de porter l'étendard de la réfor-
me ecclésiastique et de la liberté civile
dans la capitale du monde chrétien.
11 avait peut-être été appelé , dit Gib-
bon , par les nobles et par le peuple.
Il déclama avec violence contre le
luxe et les vices du clergé : mêlant
dans ses discours les passages de Tite-
Live et de S. Paul , les maximes de
l'Evangile et celles de la politique , il
rappela aux Romains la grandeur de
l'ancienne Rome et la simplicité de
la primitive Église , réveillant ainsi
toutes les passions. Il réussit à faire
chasser le pape de Rome, et resta le
chef du peuple que sa doctrine avait
entraîné dans la révolte. Son règne
dura dix ans , et ne fut qu'ime longue
sédition , dans laquelle on pilla les
palais, on démolit les maisons, on se
partagea les dépouilles des vaincus ,
en invoquant tour à tour le nom des
apôtres et celui des Caton , des Paul-
Emile et des Fabius. S. Bernard dé-
clame vivement , dans ses lettres ,
contre les Romains , entraînés par Ar-
naud de Brescia, et l'histoire est for-
cée d'avouer que ce qu*il en dit n'est
point exagéré. Cependant les choses
commencèrent à changer à l'avène-
ment d'Adrien IV , et la démocratie,
fondée par Ai'naud, trouva son écuf il
dans ses excès. Un cardinal, blesse
ARN 40 î
ou tué dans la rue, commença à de-
populariser le parti des séditieux, l.e
pape profita de cette occasion pour
jeter un interdit sur le peuple de Rome ;
depuis Noël jusqu'à Pâques, la ville
fut privée du culte religieux. Le
peuj^le , qui avait fait trembler le sou-
verain temporel , trembla à son tour
devant le chef spirituel de l'Église.
Les Romains expièrent leur révolte
par le repentir , et n'hésitèrent point
à acheter leur grâce et leur absolu-
tion par l'exil du prédicateur qu'ils
avaient long-temps révéré comme un
législateur et comme un prophète.
Arnaud se retira à Otiricoli en Tos-
cane, où il fut accueilli par le peuple
et même par les grands qui étaient
0]ppo5.és au souverain pontife ; sa doc-
trine avait trop de partisans pour
que, dans sa retraite, il ne donnât
pas au pape de vives inquiétudes.
Le couronnement de Frédéric Barbe-
rousse vint offrir à Adrien une occa-
sion de se défaire du plus dangereux
de ses ennemis ; le pape exposa à
l'empereur les funestes conséquences
de la doctrine d'Arnaud de Brescia j
Frédéric se laissa d'autant plus facile-
ment persuader, qu'il avait lui-même
quelque chose à obtenir du souverain
pontife; il fit enlever Arnaud, qui fut
traîné à Rome , condamné par le pré-
fet , et brûlé vif, en 1 1 55, sous les yc"X
du peuple, qui applaudit à sa mort et
ne larda pas à le regretter. Les cendres
du martyr de la liberté furent jetées
dans le Tibre, pour qu'il ne restât
rien de lui qui pût réveiller l'enthou-
siasme de ses partisans ; mais sa doc-
trine vivait encore dans l'esprit de la
multitude , et souleva plusieurs fois ,
dans la- suite , les Romains contre les
chefs de l'Église. Arnaud de Bresse
avait, comme tous les novateurs, un
esprit inquiet et une imagination ar-
dente : son caractère ne connaissait
4()i A UN
point d'obstacles ; son éloquence élait
vive et entraînante ; apôtre fanatique
de !a pauvreté , il n'est pas inutile de
remarquer, pour le temps où nous
sommes, qu'il méprisait de bonne foi
les richesses; partisan de la réforme ec-
clésiastique, il était irréprochable dans
SCS mœurs : il n'en fit pas moins beau-
coup de mal, et fut entraîné, sans doute,
beaucoup plus loin qu'il ncl'aurait vou-
Ki. Ses contemporains lui reprochèrent
plusieurs hérésies sur la Trinité et sur
quelques autres points de notre croyan-
ce; mais on ne se souvient plus que de
son hérésie politique, qui a trouvé, de
nos jours , de chauds partisans. M — d.
ARNAUD , de Villeneuve , méde-
cin de la fin du i3". siècle. On n'est
pas d'accord sur l'époque et suivie
lieu de sa naissance : les uns croient
qu'il naquit à Villeneuve, petit village
voisin de Montpellier ; d'autres hé-
sitent , parce qu'il est aussi en Cata-
logne , en Languedoc , en Provence ,
des bourgs de ce nom. Quoi qu'il en
soit, Arnaud eut beaucoup de répu-
tation connni médecin , llséologieu et
alchimiste. Ce n'est plus gicrc que
sous ce dernier rappel qu'il peu! être
de quelque intérêt pour nous; c'est
en effet par lui etparRaymond-Lulle,
son disciple , que la chimie commerça
à faire des découvertes. 11 découvrit
les Ircis acides sulfurique, muriatique
et nitrique ; il composa le premier de
l'alcool , et s'aperçut uiêmc que cet
alcool pouvait retenir quelques -mis
des principes odorants et sapidcs des
végétaux cpii y macèrent , d'où sont
Tenues les diverses eaux spiritueuses
employées en médecine et pour la
cosmétique. On lui doit aussi les pre-
miers essais réguliers de distillation ;
il fît connaître l'essence de térében-
ihine ; il composa les premiers ratafias.
Mais il fut conduit sur le chemin de
ces diverses découvertes en se pro-
ÂilN
posant de faire de l'or, et assurant
même en avoir le secret. Arnaud est
moins remarquable comme médecin;
cependant , il est un des premiers
docteurs de Montpellier qui se soient
montrés moins servîtes imitateurs des
Arabes, dont la doctrine dominait alors
tout le moude savant. 11 connaissait
plusieurs langues, surtoutle grec, l'hé-
breu et l'arabe. !l voyagea en Espagne,
et séjourna long-temps ensuite à Paris
et à Montpelli' r ; 11 paraît même assez
prouvé qu'il fut quelque temps régent
delà faculté de cette dernière ville. Mal-
heureusement , il associa à ses connais-
sances médicales proprement dites, des
rêveries sur l'astrologie : c'élait la folie
de son siècle; il prédit la fin du monde,
qu'il annonça devoir arriver en 1 535.
Les propositions qui lui attirèrent la
censure ecclésiastique se réduisaient
à celle-ci : « Les œuvres de charité tt
» les services que rend à l'humanité
)) un bon et sage médecin , sont pré-
» férables à tout ce que les prêtres ap-
» pellent œuvres-pies , aux ])i ières , et
)) mêmeausaint sacrifice delamcssc.»
Poursuivi comme hérétique par l'uni-
versité de Paris, il s'enfrit on Sicile,
où il fut accueilli par Frédéric d'Arra-
gun . et par Robert , roi de Naples : le
premier lui confia même des missions
diplomatiques, l.c pape Clément V
étant tombé malade à Avignon , ré-
clama les soins d'Arnaud, qui revint
pour le soigner ; mais , dans la traver-
sée, le vaisseau qui le portait fit naiî-
frage , et Arnaud périt à l'âge de
soixante-seize ans , en 1 3 1 4 . ft fut
enterré à Gênes. Le pape fut telle-
ment aflligéde sa mort , qu'il ordonna ,
sous peine d'exccmmunication , qu'on
lui remît fidèlement un Traité de
Praxi Medica, que lui avait promis
le docteur. Les divers Traités d'Ar-
naud se ressentent généralement, pour
le fonds et pour le stjlc, du temps où
ARN
il écrivait; ils sont courts, et parais-
sent être plutôt des mémoires, des con-
sultationSj que des traite's dogmatiques.
Parmi ses ouvrages, nous citerons son
Commentaire sur l'École de Saicrne ,
Scholce Salemilanœ Opuscuhmi ,
qu'il Ht pendant Si rctrai'e en Si.ile;
Tni Traité De conservandd juven-
ttite et de retardante seneclule ,
qu'il dédia au roi Robert. Sans doute,
beaucoup des ouvrages qui lui sont
attribués ne lui appartiennent pas ;
car ce fut une pratique constante dos
alcliimiites de mettre sous le nom
de ceux qui avaient illustré leur secte
un graiid nombre d< productions, afin
de les fiire passer à la faveur de ce
nom célèbre : aussi plusieurs de ses
OEuvres véritables peut-être lui ont
été dérobées. 11 fut ridiculement accusé
de magie , et Mariana va jusqu'.à lui
reprocher d'avoir essayé de former
un homme avec delà semence, mêlée
dans une citrouille h de certaines dro-
gues ; ce bizarre essai ne supposerait
tout au plus que la marche fausse d'un
esprit bouillant et avide de connais-
sances ; du reste , c'était le reproche
banal fait à tous les génies extraor-
dintires de ces temps de ténèbres. La
condamnation qu'avaient portée contre
Arnaud les théologiens de Paris, sus-
pendue par la protection du pape Clé-
ment V, fut renouvelée trois ans après
la mort de ce pontife , par l'inquisi-
teur de Tanagone , et quinze des pro-
positions de notre docteur furent cen-
surées. Toutes les OEuvres d'Arnaud
ont été réunies en un volume. La pre-
mière édition parut à Lyon , en 1 5o4,
in-ful., avec une Préface de Thomas
Minchius.! I en a paru ensuite plusieurs
du même format, Paris, i5o9; Ve-
nise , i5i4;Lyon, i5uo, avec la Vie
d'Arnaud , par Sympborieu Cham-
picr; et à Bâ!e , eu i5i5, 2 vol.,
«ivcc (pielques annotations de Jérôme
A R rr 4,)3
Taurellus , de IMontLclliard. Haitze,
sous les noms de Pierre Joseph , a
donné la Fie d'Arnaud , Aix , i 7 1 9,
in- 12. C. etA^N,
ARNAUD ( George d') , naquit à
Franecker, le i G sc])t. irii. Il appar-
tenait à une famille dé réfugiés français.
Son graud-père , Antoine d'Arnaud ,
avait exercé les fonctions d'avocat au
siège de Puy-Laurcus , et son a'icul ma-
ternel, Philippe Ccuppé, celles de pro-
fesseur de théologie à St. -Hilaire, dans
le diocèse de Poilicrs. Honoré d'Ar-
naud, son père, fut élu, en 172S,
pasteur de l'église française de Fra-
necker, et parvint h. une extrême vieil-
lesse : il vivait encore en 1 763. George
d'Arnaud publia , à l'âge de 1 2 ans, des
vers latins et grecs, où l'on remarqua
de l'élégance cl de i' harmonie. Après ce
brfllant début , il entra à l'université
de Franecker , et y reçut les leçons
de Wesseling et de Hemsterhuis. En-
couragé par ce dernier, il mit au jour,
en 1728 : Spécimen animadv. criti-
canim ad aliquot scriptores gnecos,
etc., in -8 '. , Harling.Ces auteurs sont :
Auaci éon , Callimaque , Eschyle , Hé-
rodote, Xénophon, et le grammairien
Héphestion. Deux ans après , il fît pa-
raître un nouveau volume de critique :
Lectionum grœcnrmn libri duo , etc. ,
in - 8°., la Haye , i 750. D'Arnaud s'y
occupe principalement d'Hesvchius ,
d'Aratus , de Théon , d'Appien et
d'Apollonius de Rhodes. En 1732,
il donna une savante diï)Sertation : De
Diis •n:ap£(5'poK ^ sive adsessoribus et
conjunctis , in-8 '. , la Haye. Vers ce
temps , il fit un voyage à Levde , pour
recueillir , dans la riche bibliothèque
de cette ville, les matériaux d'une édi-
tion de Sophocle , qu'il avait projetée,
mais qu'il ne donna pis. Hevenu à
Franecker , d'Arnaud, jiar les conseilé
de Hemsterhuis , se livra à l'étude de
la jurisprudence j il eiit préféré le mr-
,H,4 ARN
iiistère ecclésiastique , si la faiblesse
de sa poitrine ne lui eût pas interdit
les travaux de la prédication. Abr.
Wieling fut son professeur de droit .
et lui fit soutenir , sous sa présidence
{ le 9 oct. I -y 54 ) , une thèse : De jure
servorum apud Romanos. Le jeune
candidat montra, dans cet acte, tant de
talent et d'érudition . qu'au mois de juin
de l'année suivante, il fut créé lecteur
eu droit. Ses deux livres de conjectures
diverses ( Fariarwn conjecturanan
libri duo ) virent le jour à Franecker ,
en 1758, in-4''. Il y traite de plusieurs
questions de droit civil, et explique
nu corrii:;c un grand nombre de pas-
sages pris dans les livres de jurispru-
dence et de littérature. Ce volume fut
réimprimé à Lemvarde , eu 1744 >
in-4". 5 ^^ 0" joignit à cette seconde
édition la dissertation : De jure s»r-
vorum , et une autre thèse dont il avait
été président, le 17 juin 1739: De
lis qui prelii parlicipandi caussa se-
met venundari paliunlur. Cette même
année 1759, Abr. Wicling quitta
l'université de Franecker pour celle de
Leyde , et sa chaire fut donnée à d'Ar-
naud j mais il mourut avant d'avoir
pris possession , le i'''". juin 1740»
n'ayant pas encore vingt - neuf ans
accomplis. Dans les vol. 4» 5 et 6,
ùcs Miscellaueœ observât. d'Amster-
dam, il y a quelques morceaux de lui ,
signés des initiales G. D. A. Il avait
laissé , manuscrite , une Dissertation
sur la famille des Scévo!a( P'ilœ Scœ-
i'olarum ) ; elle a été publiée par H. J.
Arntzenius, à Utrecht, 1767, Jn-8'.
On sait encore qu'il avait eu le projet de
donner une nouvelle édition de la Pa-
raphrase grecque de Théophile. Son
oraison funèbre fut prononcée par
IJemsterhuis; elle se trouve dans le re-
cueil intitulé : T. Ilemsterhusii et L.
C. Falckenarii oraùoncs , Levde ,
1784, iû-8^ B-
ARN
ARNAUD DE ROxNSIL (Geor-
ges), habile chii'urgien français, après
avoir enseigné dans l'école de St.-
Côme , à Paris , se retira à Londres ,
où il jouit d'une grande réputation , et
où il est mort le 27 février 1774- Ses
ouvrages ont de la clarté et de la pro-
fondeur. En voici la liste : I. Traité des
hernies ou descentes ^ i749'> 2 vol.
in-i 2, en anglais; 1754, in-8'.;II. Ob-
servations sur l'anévrisme, 1760,
in-8". , qui parut aussi préalablement
en anglais; \\\. Instructions simples et
aisées sur les maladies de l'urètre
et de la l'essie , en anglais , Londres ,
1765, iu-8° ; en français, Amsterd.,
1 704 , in- 1 2 ; IV. Dissertation sur
les hermaphrodites, 1 765 , in-8 '.; V.
^ discourse on the importance of
anatomis, Londres, 1 7G7 , prononcé
dans une séance académique; W. Mé-
moires historiques sur l'étude de la.
chirurgie et de la médecine enFrance
et en Angleterre , Londres et Paris ,
1 768, 2 vol. in-4''., '''^'^'^ '^ ^ '<^ <!" ^^^~
teur Huutcr; VU. Remarques sur la
composition , l'usage et les efjets de
l'eau végéto-minérale de Goulard ,
Londres, 1 7 7 1 . H y a une édition com-
plète de tous ces ouvrages traduits en
français, 2 vol. in-4". Arnaud vivait
dans le temps de la splendeur de l'a-
cadémie de chirurgie , et partagea le
mouvement heureux que cette com-
pagnie imprimait à tous ceux qui cul-
tivaient celle science. C. et A — n.
ARNAUD ( François ), né à Au-
bignan, près de Carpcntras, le 27
juillet 1721 , ^'engagea dans l'état
ecclésiastique , vint à Paris en 1 762 ,
et fut, en 1 7G2 , reçu à l'académie des
inscriptions et belles-lettres. Il fut,
pendant quelque temps , attaché au
prince Louis de Wirtemberg, depuis
souverain de ce duché , mais alors |
attaché au senice de France. L'avocat
Gcrbicr, iOUiiuii, ayant, en 1703,
ARN
pgne ime cause imporlaute pour le
cierge' de Frauce contre l'ordre des
be'ne'dictius , demanda , pour prix de
ses travaux , et obtiut , pour l'abbe'
Arnaud , l'abbaye de Graudcbarap. A
peine entrait-il dans son abbaye ,
qu'un cure' vint lui demander le paie-
ment d'une portion congrue ; i'abbe'
Arnaud veut d'abord se défendre ,
mais touché de l'indigence du curé, il
clierclie des titres contre lui-même ,
les remet à son adversaire, et parvient
ainsi à faire établir son droit en sa
fjveur. Reçu à l'académie française,
le i5 mai 1771 , Arnaud obtint, par
la suite , la place de lecteur et biblio-
thécaire de Monsieur , et la survivance
de la place d'historiographe de l'ordre
de St.-Lazarc. Il mourut à Paris, le
2 décembre 1784 , et fut remplacé à
l'académie française par Target. L'ab-
bé Arnaud fut un homme instruit , et
doué d'un sentiment vif pour les
beaux-arts; mais le goût du monde,
et un peu de paresse l'ont empêché
de développer tous ses talents. On a
de lui une Lettre sur la musique , an
comte de Caylus , 1754, in-8 '. Cette
brochure, qui commença sa réputation,
n'était que le prospectus d'un grand
ouvrage sur la musique des anciens ,
« qu'il avait , disait-il , médité au fond
» de la province , dans les ombres du
» cabinet et le silence de la réflexion, »
mais que l'auteur n'a ni terminé, ni
même, à ce qu'il paraît, commencé
sérieusement : il ne travailla le reste
de sa vie que par morceaux détachés ,
et à mesure que les sujets se présen-
taient. Ardent admirateur de Gluck,
l'abbé Arnaud fît , à l'occasion des
querelles qui s'élevèrent en 1777, sur
la musique , imprimer , dans le Jour-
nal de Paris , un assez grand nom-
bre de morceaux, en faveur du musi-
cien allemand. Il a été, avec son ami,
M. Siiard, éditem' de ï Histoire an-
A R N 4çi3
cienne des peuples de l'Europe , par
du Buat , 1772 , 12 vol. in- 12. Voici
l'indication des ouvrages auxquels il a
coopéré : I. Journal étranger , avec
M. Suard , de janvier 1760, à mars
1762. La collection complète de ce
journal , depuis 1754, forme 45 vol.
in- 12. Les deux amis abandonnèrent
cette entreprise pour se charger de la
rédaction de la Gazette de France.
II. Gazette littéraire de V Europe ^
1 764-1 76G, 8 vol. in-8". , avec
M. Suard. III. Variétés littéraires ,
ou Recueil des pièces tant originales
que traduites , concernant la philo-
sophie , la littérature et les arts,
1768-1769, 4 "^'ol- in-i2 ; c'est uu
choix fait par Arnaud et M. Suard,
des meilleurs morceaux qui avaient
paru dans le Journal étranger et
dans la Gazette littéraire. On peut
considérer comme une nouvelle édi-
tion de ce recueil les 3Iélanges de
littérature publiés par M. Suard ,
i8o5-4, 5 vol. in-S". ; mais si plu-
sieurs pièces se trouvent dans ces deux
collections , plusieurs aussi ne sont
que dans l'une ou dans l'autre. Ce
n'est , par exemple , que dans les
Variétés que l'on trouve la traduction
d'une ou deux Nuits d'Young , par
Bissy. IV. Description des princi-
pales pierres gravées du cabinet du
duc d'Orléans , 1780^ 2 vol. in-fol.
Le premier volume est de l'abbé Ar-
naud ; le second porte les noms des
abbés de la Chau et le Blond. V. Des
dissertations dans les Mémoires de
l' académie des inscriptions et belles-
lettres. Les opuscules de l'abbé de
Grandcliamp ont été recueillis pres-
que eu entier, et publiés par M. Léo-
nard Boudou, sous le ixiveà^ OEuvres
complètes de l'abbé Arnaud, 1 808
5 vol. in-S''.; ils sont incorrectement
imprimés ; mais, quoi qu'en dise le
Dict. hisl.des musiciens, on y trouve
4.,G AËN
la Soirée perdue à l'Opéra, etc. La
plupart (le ces opuscules , comme l'a
reroarqtip M. Ginj^iicne , sont , sans
que l'auteur en ait averti , imités ou
Iradnils de Carlo Dati, du Quadrio ,
de l'abbé Couti , etc. Mal£;ré quel-
ques erreurs, malgré quelques cons-
tructions irrégulicres, quelques-unes
des productions littéraires de l'abbé
Arnaud lui méritent une place parmi
nos écrivains distingués. — La compi-
lation , publiée sous le titre de Mémoi-
res pour servir à l'histoire de la révo-
lution opérée dans la musique par le
chevalier Gluck, 1-^81 , iii-8 ., est
de l'abbé Leblond , et non de l'abbé
Arnaud. A. E — t.
ARNAUD ( François-Tuomas-Ma-
BiE DE Baculard d' ) , naquît à Paris,
le i5 sepicmbre 171b, d'une famille
noble, onginairedu Comtat Vcnaissin.
11 5tudia aux jcsuiles de Paris, et fut du
nombre des enfants précoces. Dès l'âge
de neuf ans, ili^iisait passablement des
vers. 11 composa, dans sa jeunesse, trois
tragédi<s , qui ne furent point jouées,
Idoménée , Didoji, et Col igiii ou la
Sl.-Barthélemi ; cette dernière fut
imprimée en 1 74^- Ces divers ouvra-
ges lui procurèrent la connaissance de
Voltaire , qui le prit en amitié, lui
donna des conseils , et lui fit compfer
de temps en temps de petites sommes
d'argent , qui l'aidèrent à suivre son
penchant pour les lettres. C'est à lui
qu'est duc la liaison de deux hommes
qui, pendant long-temps, ont associé
leurs grands talents pour leur gloire
nnituclle et pour les plaisirs de la
France , la liaison de Voltaire et de le
Kain. En 1 760, il fit représenter, sur
un théâtre de société, sa comédie du
Mauvais Biche , où le Kain jouait le
principal rôle. Voltaire, qui assistait
à la représentation , prévit dès-lors tout
Ce que le Kain pouvait devenir un
jour, et il pria d' Arnaud de le lui ajnC'
ARN
ner. Quelques poésies fugitives assez
agréables ; entre autres ^Èpilre à Ma-
non, plus connue sous un titre un peu
plus libre, avaient attiré sur d'Arnaud
l'attention du roi de Prusse Frédéric,
qui le fît , pendant deux ans , son cor-
respondant littéraire à Paris, et l'ap-
pela ensuite à Berlin. Il lui fit la ré-
ception la plus aimable , le nomma
son Ovide , et lui adressa des vers qui
finissaient ainsi :
Déjà rAjiollon lie la France
S"achemir.e a sa décadence;
Venez briller a votre tour \
Elevez-vous , s'il baisse encore :
Ainsi !•• rouclimt d'un beau jour
Promet une plus belle aurore.
L'Apolion de la France , Voltaire , fut
fort blessé de la comparaison , et la fit
expier à d'Arnaud par beaucoup de
plaisanteries sur sa personne et sur
ses vers. Us se retrouvèrent à Berlin ;
d'Arnaud en sortit après moins d'un
an de séjour , et se retira à Dresde ,
cù il fut nommé conseiller de léga-
tion. Le désir de revoir sa patrie, et
l'invitation du comte de Frise , neveu
du maréchal de Saxe , le déteriuinè-
r( nt à revenir à Paris. Il y v^cut pen-
dant plusieurs années, fort répandu
dans la société , et ensuite s'en retira
peu à peu , pour se livrer à la com-
position de SCS nombreux ouvrages.
Il fut légèrement impliqué dans le fa-
meux procès de Bcaumarcliais avec
Goczman , et il eut sa part du ridi-
cule que le premier jeta , avec tant
d'esprit et de gaîté , sur tous ses adver-
saires. Il fut mis en prison pendant la
terreur , et n'eu sortit que pour mener
une vie fort malheureuse , qu'il aurait
pu rendre beaucoup plus honorable.
Il était sans fortune , et sou défaut
d'économie rendait iusufllsants les se-
cours du gouvernement , et le produit
de ses ouvrages. 11 avait montré autre-
fois plus d'élévation d'anie. On peut
citer, comme un mot plein de noblesse
«t de courage, ce quM dil un jour an
ARN
roi de Prusse , dans uu souper où
tous les convives professaient à l'envi
îe plus pur atbe'isme. Lui seul se tai-
sait : « Eh bien I d'Arnaud , lui dit le
» roi , quel est votre avis sur tout cela?
» — Sire , re'pondit-il , j'aime à croire
» à l'existence d'un être au-dessus des
» rois. » Il mourut le 8 novembre
i8o5 , dans sa quatre-vingt-neuvième
année. Il a prodigieusement écrit. Ses
j^riucipaux ouvrages sont : les Épreu-
ves du sentiment, les Délassements
de l'homme sensible ^ et les Loisirs
utiles; ce sont des recueils d'anec-
dotes , de nouvelles et de contes qui,
suivant La Harpe : « Ne sont pas des
contes bleus, mais des contes noirs,
îa pUipait tires de l'anglais, et sur-
tharge's d'une déclamation prolixe,
qui est le genre d'éloquence de l'au-
teur. » 11 y a dans presque toutes , ce-
pendant , une sorte de chaleur et d'in-
térêt. J.-J. Rousseau disait de d'Ar-
naud : a La plupart de nus gens de
» lettres écrivent avec leur tète et leurs
» mains : M' . d'Arnaud écrit avec sou
y> cœur. » Les nouvelles qui compo-
sent ses Epreuves du sentiment et ses
Délassements de l'homme sensible,
eurent dans le temps beaucoup de
vogue , furent traduites dans plusieurs
langues , el fournirent quelques sujets
au théâtre. Il faut y ajouter les Époux
malheureux , ou Histoire de M'', et
de M"", de La Bédojère , qu'il pu-
blia , pour la première fois , en t '^45 ,
et dont il donna une suite en i -ySS.
fv Ses derniers romans, trop nombreux
■ et trop peu connus pour qu'on en rap-
•. porte les titres , se ressentent singu-
P ' lièreraent de la caducité de l'âge et de
!a précipitation du besoin. Son théâtre
; est composé de quatre pièces d'un
genre tout-à-fait sombre et lugubre,
le Comte de Commin^es, Euphémie,
ou le Triomphe de la Religion, Fayel,
et Merinval; elles ue furent point re-
11.
ARN 497
présentées , à l'exception du Comte
de Comminges , qui ne le fut qu'en
1 790 , et ne dut une ombre de succès
qu'a l'horrible nouveauté du spectacle.
Le nombre de ses poëraes est infini ;
une partie a été recueillie en 5 vol.
in-i'2 , 175 i. Ses Lamentations de
Jérémie, odes sacrées , ont été impri-
mées eu 1732, et ont eu plusieurs
éditions. A — g — r.
AîiNAULD (Antoine), fils aîaé
d'Antoine Arnauld , avocat-général de
Catherine de IMédicis , naquit à Paris
en 1 56o. Sa famille était originaire de
Provence où elle tenait un rang dis-
tingué ,dès le 1 2". siècle. Une des bran-
ches passa en Auvergne. Son père ,
attaché au connétable de Bourbon ,
s'était distingué par son zèle pour
les intérêts de sa maison , et il avait
favorisé son évasion ; reçu avocat au
parlement , le fils s'y fit uu nom par
son éloquence. Lorsque Henri IV vou-
lut donner au duc de Savoie une idée
du barreau fiançais , il choisit un jour
où Arnauld devait plaider. Il s'agissait
d'une femme qui accusait un jeune
homme d'avoir tué son fils ; Arnauld,
avocat de la mère , g^gua sa cause , et
le roi fut si satisfait, qu'd le nomma
conseiller d'état. L'avocat-général Ma-
rio u fut un jour si enchanté de l'en-
tendre, qu'après l'audience il l'em-
mena chez lui , et lui donna sa fille
aînée en mariage. Le plus célèbre de
tous ses plaidoyers fut celui qu'il fit
en 1 594 , en faveur de l'université
de Paris , dont il était l'élève , contre
les jésuites. U mit sur leur compte
tous les forfaits de la ligue, et conclut
à leur expulsion du royaume, -Cette
violente déclamation , qui , dans Je
. temps , fut appelée une Philippique ,
a été impiùmée plusieurs fois , et no-
tamment en 1717, in- 1 2 5 et le pré-
sident J. A. De Thou en a inséré une
partie dans sou Histoire. Mais ce (\ai,
32
493 AT.!?
est plus estimable qu'un beau dis*
cours , c'est le désintéressement avec
lequel Arnauld refusa les présents que
lui ofirit l'université. Cette compa-
jjnie s'en venj;ca ])ar un décret hono-
rable, qui obligeait tous les ordres de
l'université, euvers son défenseur, et
ses descendants , à tous les devoirs
d'un client envers son patron. Un
autre ouvra^^e qu'Antoine Arn lu'd pu-
blia contre la sociélé de Jésus , a pour
titre : Le franc et véritable Dis-
cours du roi , sur le rétablisse-
ment qui lui est demande par les
jésuites , in-8". On a encore de lui ,
Ï^nti-Espagnol , imjirimc dans le
Becu(ildes excellents et libres Dis-
cours sur l'état présent de la France ,
1606, in-i2 , et dans les Mémoires
de la ligue, toni, IV , pag. 200 ; la
Fleur de Ljs, i5()5 , in-8". ; la Dé-
livrance de la Bretagne; la Première
S avoi sienne , iGoi , in-B"., réiinpr.
à (îrenoble, en i63o, avec la se-
conde; un Ai'is au roi Louis XII [,
pour bien régner^ i6i5, iu-8".; la
j '"'. et la 2*. Philippiques, contre le roi
dEspagne Philippe 11 , i Gç) >. , in-8'.
11 mourut le ■j'.g dét euibre i()i9, âgé
de cinquante-ucufans. Gttlierine Ma-
rion , son épouse , lui avait donné
vingt-deux enfants, dont dix morts
en l3as âge , quatre fds et >ix (ilKs
toutes religieuses à Port- Royal , mo-
nastère dont il avait été comme le se-
cond fondateur. Sa probité, son atta-
chement aux véritables intérêts du
royaume, sa modestie , égalèrent ses
talents. 11 avait refusé les places d'a-
vocat-gcnéral au parlement de Paris,
de premier président à celui de Pio-
Vence. Catherine de Médicis voulut
le faire secrétaire d'état; mais il eut le
désintéressement de répondre « qu'il
la servirait mieux en qualité d'avocat-
général. )' Le Maître, son petit -fils
et son ûllcul , fait allusion à cette
ARN
anecdote, dans cette Epitaphe qu'il fil
en son honneur :
Passant, du granJ Arnauld révèrf la mémoire ;
Ses verlui a sa race uni servi d'ornement,
S;i plume .'t son p lys , sa voix .'lu paih^ment,
Son esprit à son sierle, et ses faits à Thistoirs.
Contre un secoiul liilippe , usurpateur des ly» ,
Ce secoud Oernostlicoe anima ses écrits,
Et contre Ém'n .uuel arm-i s >n éloquence.
Il vit, comme un ni-ani les hautes lii^nilé»,
E' préféra l'ii .niicur iloraclc dr la France,
A tout le vain éclat d>^9 lilres empruntés.
Sou animosité contre les jésuites lui
valut de leur part , le reproche d'clrc
huguenot; mais la vérité est qu'il sut
tenir le milieu entre la ligue et le cal-
vinisme, modération ,qui, si elle avait
éié plus commune, eût épargné bien
des malheurs à la France. Il jouissait
d'une telle vénération , qu'après sa
mort il fut exposé sur un ht , p< ndaut
quelque temps, pour satisfaire le pu-
blic {[ui le demanda avec instance.
ARNAULD D'ANDILLY Robert),
fils aîné du précédent , né à Pans, en
1689, occupa, jeune encore, des
charges importantes, et les remplit
avec une supériorité de génie et uik;
intégrité peu communes. Il jouit à l;i
cour d'un grand crédit , et n'en us'i
que pour rendre service. Il avait l'es-
prit noble , les inclinations généreuses,
et le courage de les suivre. Avant ren-
contré , dans une prison , des per-
sonnes dont la détention était injuste,
il brava tout pour faire cesser leur
captivité. Innocent au milieu de la
cour, incorruptible au milieu des plus
grandes occasions de s'enrichir , il
mérita que Ba'zac dît de lui : « H ne
» rougit point des vertus chrétiennes,
» et ne tira point vanité des vertus
1) morales. » A l'âge de cinquante-
cinq ans , il quitta le monde , pour se
retirer dans le monastère de Port-
Royal-des-Cliamps. Comme on répé-
tait à la cour que les solitaires de
Porl-Roval fai'^a'ent des sabots par
humilité , il dit à la rciue-mère , eu
ARN
prenant congé d'elle « que si S. M.
euleudait dire qu'il faisait des sabots
à Port-Royal , elle n'en cjût rien ;
mais que si on lui rapportait qu'il y
cultivait des espaliers , elle le crût ,
et ({u'il espérait en faire manger des
fruits à S. M. » Eu effet , comme
chaque solitaire s'imposait un travail
manu>'l , il choisit pour le sien la cul-
ture des arbres. 11 envoyait tous les
ans , à la reine, des fruits que le car-
dinal Mazarin appelait en riant des
fi^uits bénis , et la reine avait recom-
mandé qu'on ne les lui servît jamais
sans la prévenir que c'était un présent
d'ArnanId d'Andilly. Lorsque Louis
XIV éleva M. de Pompone , son fils ,
à la place de ministre des aflliircs
étraui^cres, « il voulut voir le ion/iom-
me, dit IM"\ de Sévigné, l'entretint
long-temps ,1e fit promener en calèche
dans ses jardins , et lui fit un accueil
si aimable, qu'Arnauld enchanté répé-
tait de moment en moment : « 11 faut
s'humilier. « Il avait épousé la fille
du S^ Le Fevrc de la Boderie, connu
par son ambassade en Angleterre ; il
en eut trois fils et cinq filles. 11 mourut
le '2'j septembre id"]^, à qualre-
vingt-ciuq ans , après avoir conservé
la vigueur de l'esprit et du corps jus-
qu'à ses dernieis instants. « Ses veux
» vifs , dit l'historien de Port-Royal ,
)) sa démarche prompte et ferme , sa
» voix de tonnerre , son corps sain
» et droit , plein de vigueur ; ses
» cheveux blancs qui s'accordaient
» si bien avec le vermillon de son
» visage ; sa grâce a monter et à se
» tcnii- à cheval , la fermeté de sa mé-
» moire, la promptitude de son esprit,
» la sûreté de sa main, soit en tenant
» la plume , soit en taillant les arbres,
» étaient pour lui mie espèce d'immor-
» talitc. » On a de lui : 1. la triduction,
plus élégante que fidèle , des Confes-
sions de S. Auffistin , in-8". et iu- 1 2 ;
ARN /^nq
II. de l'Histoire {les Juifs , de Jo-
sephe , 5 vol, in-8^. et in- 12, et
dont la meilleure édition est celle
d'Amstfrdam, 1681 , 2 vol. in-fol. ,
avec fig. ; 111. des Fies des Saints
Pères du désert , et de queUfiies
Saintes , écrites par les Pères de l'É-
glise, 5 vol. in-8'. ; IV. de \' Échelle
Sainte de S, Jean Climaque / du
Traité du mépris du monde , par
S. Eucher; du Pré spirituel de J.
Moschus ; V. des OEuvres de Ste.-
Thérèse, in-4°., 1670 ; VI. de celles
du B. Jean d'Ai>ila , in-fol. ; VIT.
Mémoires de sa Pie, écrits par lui-
même , publiés par l'abbé Goujet, 2
vol. in-i'2, 1754, pleins de candeur
et d'inlérèt; VIII. Poëme sur la Vie
de J.-C. , petit in- 12 ; IX. OEuvres
chrétiennes , en vers , et plusieurs
autres ouvrages. N — l.
AR>JAULi) (Henri \ frère du pré-
cédent , naquit à Paris , en i5()-' , et
annonça de bonne heure le mérite qui
distinguait >i hoiinrablcment tous les
Arnauld. Il fut d'abord destiné au bar-
reau. Le cardinal Bentivoglioi'emmcna
à Rome , et ce fut durant cette absence,
qui dura cinq ans, que la cour lui donna
l'abbaye de ï)t.->ico!as, en 1624. A son
retour , en 1 0^7 , le chapitre de Toul ,
dont il était le doyen , l'élut tout
d'une voix , pour évcque de cette ville,
et cette nomination fut confirmée par-
le roi , à la prière du P. Joseph , ca-
pucin ; mais d'après les contestations
survenues entre le pape et le roi sur
le droit d'élire , Arnauld remercia. Il
refusa aussi, en 16447 1^ charge de
visiteur-genéra! en Catalogne, que le
cardinal Mazarin fit , à son refus ,
donner à W. de Marca, En iG/p,
lors de la brouilierie des Barberins
avec Innocent X, le comte de Lionne
fit envoyer l'abbé de St.-Nicolas à
Rome, en quahté de chargé des affai-
res de France, Le négociateur traita .,
52..
5()o ARN
en passant , des affaires importantes
dans îes cours de Parme, de Modène
et de Plaisance , prit part aux mouve-
ments de Naples , et, si ses conseils
eussent été suivis , peut-être alors ce
rovaume eût-U été' perdu pour l'Espa-
gne. Arrivé à Rome, il trouva le pape
aiqri contre les Barberins , au point
de l'aire saisir tous leurs biens. La
première preuve qu'il donna de son
habileté, fut l'expédient qu'il sugcçéra
|)Our empêcher la saisie du palais
Rarberin , un des plus beaux de l'ila-
he. Ce lut une vente simulée faite au
roi de France , et conclue dans le plus
Çraiid secret. La nuit qui précéda celle
où (levait avoir lieu la saisie , les armes
de France furent apposées aux quatre
coins du palais , de sorte que lorsque
les agents du pontife se présentèrent
pour en prendre possession , ils furent
obligés de respecter une propriété de-
venue française. Le pape, malj^ré son
dépit, conçut tant d'estime pour l'abbé
de St.-Nicolas , qu'il lui accorda la grâce
et le retour des Barberins; négocia-
tion dont Arnauld eut toute la gloirc.
Aussi , les cardinaux de ce nom , ré-
tablis dans leurs biens et leurs digni-
tés , firent frapper une médaille en
son honneur , et lui élevèrent, dans
leur palais, une statue, avec ce vers
que Forlunat avait composé pour S.
Grégoire de Tours :
Alpibus ÂFTCruis Teoieni Mons altior ipsit.
allusion aux armes et à la pitrse des
Arnauld, dont la famille était origi-
naire d'Auvergne , et dont les armes
étaient une montagne. De retour en
France , l'abbé de St.-lNicrolas fut fait
évèque d'Angers, en iG4o, ft se voua
tout entier aux obligations de son étaf.
Il ne quitta qu'une seule fois son dio-
cèse , et ce fut pour avoir avec le
prince de Tarcnte, et à la prière de
ce seigneur, une confcrence, dont le
rësHltat fut sa conversion et sa rccon-
A R N
ciliation avec le duc de la Trémouillf .
son père. Angers dut , en 1 652 , sa
conservation et celle de ses habitants
à son courage. Chassé de la ville , par
une troupe de factieux , il alla trouver
la reine-mère qui s'avanç.iit pour pu-
nir cette révolte , et la trouvant in-
llexible , il lui dit un jour, en la com-
mimiant : « Recevez , madame , votre
)) Dieu , qui a pardonné à ses enne-
» mis , en mourant sur la croix. » Ce
peu de mots désarma la reine, qui ne
fit éprouver aux l'ebelles que les ef-
fets de sa clémence. Cette doctrine
devait avoir un grand poids dans la
bouche d'un homme qui la suivait
dans la pratique , au point qu'il était
passé en proverbe , que le meilleur
titre pour obtenir des grâces de M'.
d'Angers , était de l'avoir offensé. Il
avait même une liste des noms de
ceux qui lui avaient rendu de mau-
vais offices , et ne la consultait que
pour leur en rendre de bons. 1! alUùt
tous les dimanches , visiter l'hôpital
et consoler les malados. Ceux à qui
une noble fierté faisait dissimuler leur
indigence, étaient étonnés de voir à
la fois leur secret pénétré, leur pau-
vreté secourue et leur délicatesse res-
pectée par les ingénieuses libéralite's
de leur pasteur. Sa charité était aussi
active que modeste. Un jour qu'il avait
reçu une somme de 2,000 livres pour
les lods et vente d'une terre, il n'ac-
corda la diminution que lui deman-
dait l'acheteur , qu'à comiition que le
prix serait remis entre ses mains et
non entre celles de ses gens d'affaires ,
qui auraient pu mettre obstacle à ses
largesses. Dans une grande disette
dont Angers fut désolé, le charitable
évèque emplova , en une seule fois .
jusqu'à 10,000 livres poiu- ramenci
l'abundancc, et cette libéralité fut tel-
lement seirète . que la gl. iie en fut
attribuée au maréchal de la Mciilcraj e^.
ARN
Aois gouverneur de Bretagne, el que
le hasard seui en fit découvrir i'au-
teur. Doux, égal , d'un accès facile , il
ne rebutait jamais personne , et fai-
sait aimer jusqu'au refus , par la boute
qu'il y mettait. Ne donnant que quatre
heures au sommeil , la prière, la lec-
ture , et plus encore la visite des ma-
lades , la consolation des malheureux ,
ses fonctions de l'épiscopat occu-
paient tout son temps. Un de ses amis
lui représentant qu'il devait prendre
un jour de la semaine pour se délas-
ser : « Volontiers, répondit-il, pourvu
» que vous me donniez un jour où je
» tie sois pas évêque. » Etianger aux.
troubles qui agitèrent alors la France,
il demeura fidèle au rui. Malheureu-
sement la querelle du jansénisme vint
agiter quelque temps ses dernièies
années. Ami du monastère de Port-
Royal , où il avait été sacré , et où il
avait sa mère, six sœurs , ciuq nièces
et plusieurs de ses proches , il eut à
essuyer les mêmes traverses pour la
même cause , et fut un des quatre évê-
ques qui se signalèrent dans l'affaire
du foimulaire. Il le signa enfin , eu
ménageant , par une clause expresse,
les intérêts de Port - Royal ; fit sa paix
avec Clément IX, et ne s'occupa plus
que du bonheur et de l'édification de
son diocèse , conservant dans un âge
avancé , comme le témoigne M'"", de
Sévigné, toute la vivacité d'esprit des
Ârnauld. llperditlavuecinq ans avant
M mort, et mourut , le 8 mars i6ps>. ,
à l'âge de quatre- vingt -quinze ans ,
après quaraute-quatre ansd'épiscopat,
pleuré de son peuple , qui le regar-
dait comme un saint , et dont le pieux
enthousiasme se disputa les moin-
dres choses qui avaient pu être à son
usage. Ses négociations à la cour de
Rouie , et en différentes cours d'Ita-
lie , ont été publiées à Pai'is , en 5 vol.
vu- ï'i y ' 74<^ } P^i' l<^s soins de son ge-
ARN 5»i
tit-neveu , l'abbé de Pomponc; on y
trouve beaucou]) de parUeularités in-
téressantes. Le manuscrit en était conr
serve dans la bibliothèque de Lyon ,
où le P. la Chaise l'envoya, N— l.
ARNAULD ( Antoihe ) , frèi e du
précédent, et le vingtième des enfants
d'Antoine Ai^nauld et de Catherine
Marion, naquit à Pai'is, le 6 féviier
i6i2. La vivacité de son génie s'an-
nonça de bonne heure. Etant emoie
enfant, et se trouvant à la campagne,
dans le cabinet du cardinal du Per-
ron , il lui demanda une plume. «Qu'en
» voulez-vous faire, lui dit le prélat?
» — Ecrire comme vous contre les
» huguenots. — C'est très-bien , ré-
» pondit du Perron; je suis vieux, et
» j'ai besoin d'un substitut. Je vous la
» donne donc, comme le bei-ger Da-
» métas remit, en mourant, son cha-
») lumeau au petit Coridon. » Arnauld ,
après avoir fait avec distinction ses
humanités et sa philosophie, aux col-
lèges de Calvi et de Lisieux, voulut
se livrer à l'étude de la jurisprudence ;
mais le vœu de sa mère, et les conseils
de l'abbé de St.-Cyran , son directeur,
le décidèrent à préférer la théologie.
Il en prit des leçons sous Lescot ', mais
ne trouvant point la doctrine de ce
professeur de Sorbonne, sur la grâce,
conforme à celle de S. Paul, il étudia
cette matière dans S. Augustin ; et dans
son .'4ct€ de Tentatwe , soutenu en
i656, et dédié au clergé de France,
alors assemblé à Paris, il soutint des
sentiments entièrement opposés à ceux
qu'on lui avait dictés. Lescot en conçut-
un ressentiment que, ni l'éloquence,
nile talent du candidat ne purent adou-
cir. «Ce confesseur du cardinal de Ri-
chelieu qui n'avait point, dit Bayle,
appris à sou pénitent à pardonner,
et qui avait appris de son pénitent à
ne pardonner jamais, retarda, pai
sou crédit . l'admission d'Aroaul'i
5o2
A R N
dans !a maison de Sorbonne. » Enfin,
la mort du cardinal leva cet obstacle;
Arnauld prit le bonnet de docteur,
en 1G41 , et, en prêtant le serment
ordinaire , dans l'église de TSotre-
Dame , sur l'autel des Martyrs, il jura :
« de défendre la vérité, jusqu'à l'cffu-
» sion de son sang, » promesse que
firent , depuis , tous les docteurs.
Deux ans après, il publia son livre
De [ ou plutôt Contre ) la fréquente
Communion. Ce tniité, revêtu de l'ap-
probation de la province ecclésiastique
d'Auch , en corps, de plusieurs évê-
ques, et de vingt-quatre docteurs de
Sorbonne, fut ^ivement attaqué par
les jésuites, contre lesquels il parais-
sait dirigé, et qui venaient do laisser
publier le livre du P. Séguirand, sur
cet objet ; ils le combattirent dans leurs
sermons et dans leurs écrits, comme
rempli d'une pernicieuse doctrine ;
M " . de Sévigné parle d un auteur qui
avait entrepris de prouver que cet
forit rcnferjnait trente-deux hérésies.
J/adversaire d'Arnauld disait, au com-
mencement de l'ouvrage : « Comme
3) nous le prouverons ci -dessous; »
ei , à la liu , il disait : « Comme
» nous l'avons prouvé ci - dessus , »
sans que ni dessus ni dessous , il v
eût rien de prouvé. Cet ouvrage, qui
lait époque dans l'Église de Kranee
par la réforme qu'il opéra dans l'ad-
ininistraliou des sacrements , fut le
principe des persécutions que l'auteur
essuva dans la suite. Le père Nouet
ayant traité Arnauld à'hérésiarqite
pire que Luther et Calvin, et les ajî-
probateurs, dLaÀ>eu^les, fut obligé d'en
flcmauder pardon à genoux, devant
l'assemblée du clergé , en présence des
.supéri<"urs des jésuites de Paris. Vol-
taire relève gaîment l'expression em-
phatique d'un Dictionnaire critique,
au siijcl de cet ouvrage : Aussitôt que
le livre sur la fréquente Communion
ARN
parut, l'enferen frémit, a II est difficile,
» dit l'historien du -iècle de Louis XI V,
» de savoir au juste quelle est l'opinion
» de l'enfer sur un livre nouveau. »
Au reste, ce triompbe d'Arnauld en-
flamma d'autant plus la haine de ses
adversaires. Les disputes sur la grâce,
qui s'élevèrent alors, vinrent ajouter
encore à cette animosité. Arnauld prit
le parti de Jansénius, et le soutint
avec la plus grande force. Cependant,
il n'y avait point encore lieu à une
censure juridique , lorsqu'il en fournit
une occasion. Le duc de Liancourt ,
qui faisait élever sa petite-fille à Port-
Roval , et qui donnait asyle à lui abbé
de Bourzéis. janséniste, s'étant vn re-
fuser l'ab-olution par un prêtre de
St.-Sul]»ice , parce que, d'ailleurs, il
ne crovait pas que les cinq pioposi-
tions de .lansénius fussent dans le
gros livre de cet évêque flamand , Ar-
nauld écrivit deux lettres à cette occa-
sion. Deux propositions contenues
dans ces écrits, furent censuiées par
la Sorbonne, en i63(î. r>a première,
qu'on appelait de Droit, était ainsi
conçue : « L''s Pères nous montrent
» un juste dans la personne de S. Pier-
» re, à qui la grâce, sans laquelle oh
» ne peut rien, a manqué, dans une
» occasion où l'on ne saurait dire
» qu'il n'ait point poché. » La secon-
de, qu'on appelait de Fait: « li'ou
w peut douter que les cinq proposi-
» tiuns condamnées par Innocent X
» et nar .Alexandre VII , comme étant
» de Jansénius , évêque ù'YniTS ,
» soient dans le livre de cet auteur. »
L'examen en fut confié à des comrais-
.saires ennemis de l'auteur. trent< -deux
moines mendiants de jilus que ne per-
mettaient les statuts de la faculté, furent
introduits dans l'assemblée, qui se tint
.sous l'iiilluence du chamelier Scguier.
Ou n'eut aucun égard aux explica-
tions ofierles par Arnaidd. Il fui réduit
ARN
à sortir de Porl-l\oyal, pour mettre sa
j)ersonne en sûreté d.ms uuc retr<iite
iç^norëede ses ennemis. Arnauld refusa
(!c souscrire;! cette lensure, et, comme
d'ailleurs, il eut pour juges les docteurs
contre lesquels il avait écrit, et ce même
Lcscotiiont il a été question, il l'ut exclus
do la faculté, malgré ses protestations
contre l'irréguLirité de sa condamna-
tion. Avec lui, fuientenvcl()j)[)és dans
la même disgrâce soixantc-duuze doc-
teurs , et plusieurs licenciés et baclie-
liors , sur leur refus de prendre part à
cette censure , que l'on a continué
depuis de faire signer à ceux qui vou-
laient devenir docteurs. Depuis les
troubles qu'av.iit excités son premier
ouvrage, et qui l'avaient fait citer à
Rome, i\ s'était retiré à Port-Ro va! ; il
s'ensevelit encore plus profondément
dans sa n traite, et n'en soilit qu'a la
paix de Clément IX , en i G68. L'arche-
vêque de Sens et l'évêque de Châlons,
inédiateurs de cet accommodement ,
firent comprendre Arnauld dans celte
pacification, et le piésentèrent au non-
ce. Ce prélat l'accueillit avec la plus
grande distinction, et lui dit: «Qu'il ne
» pouvait mieux employer sa jdtune
» d'or, qu'à défendre l'Église. » Louis
XIV voulut voir aussi un théologien
si renommé, et il lui fut présenté par
Pompone, son neveu. « J'ai été bien
>> aise, lui dit ce prince, de voir un
» homme de votre mérite, et je souhaite
» que vous employiez vos grands ta-
» lents à la déiénse de la religion. »
Et toute la cour fêta le savant docteur.
Mais Annat et Peïéfîxe empêchèrent
son rélabhssement en Sorbonne. Du-
rant les premières années qui suivirent
la paix derÉglisc , Arnauld tourna con-
tre les calvinistes , les armes dont il
s'était servi contre ses adversaires. Ce
calme heureux produisit : i". La Per-
pétuité de la Foi , qu'il avait com-
Uîcucéc avec jNicole, lorsqu'il se tenait
ARN 5o5
cache' à l'hôtel de Longiicville, où la
duchesse lui avait donné un asyle, et
qui produisit le plus grand effet dans
le parti de la réforme,, auquel elle
enleva des partisans illustres et nom-
breux. '1". Le renversement de la mO'
lale de J.-C. par les calvinistes , et
plusieurs autres ouvr;.g' s de contro-
v^erse, qui le firent i-eduuter des pro-
testants. Mais la tranquillité ne fut pas
de longue durée; la démangeaison de
dogmatiser dans les uns, et l'ardeur de
combatire les dogmatisants dans les
autres , rallumèrent la guerre. Arnauld
ne fut pas des derniers à recommen-
cer les hostilités. Suivant des auto-
rités graves , il fut fidèle à ses engage-
ments, et s'interdit toute composifioa
sur les affaires du jansénisme. Mais
Harlav, dit-on , protégeait sourdement
toutes les provocations contre lui. Quoi
qu'il en scil, il en revint aux )ésuite;s,
ses ennemis naturels. Aussi prétendait-
on, dans le temps, que sa haine con-
tre cette corapaguie célèbre était nue
haine d'éducation , et le compara-t-on
au jeune Annibal, promettant à son
père, dès ses plus tendres années,
qu'aussitôt qu'il serait en âge de porter
les armes, il ferait aux Romains une
guerre éternelle. Arnauld , devenu
suspect par le concours des visites
qu'il recevait , et regardé cou)mc
dangereux par Louis XIV, que l'ar-
chevêque de Paris , M. de Harlay , ne
cessait d'animer contre lui, crut de-
voir disparaître pour quelque temps.
11 se retira dans h s pays étrangers ,
en i(3'-9. Innocent XI lui fit offrir une
retraite honorable à Rome, qu'il re-
fusa , de peur de se rendre suspect à
Louis XIV, à cause des disputes sui- la
régale. Ce fut alors que Boileau, devant
qui l'on disait que le roi faisait chercher
le docteur pour qu'on l'arrêtât, répon-
dit : « Le roi est trop heureux pour le
» tiouvcr. » Il y a tout© apparence que
5o4 AKN
ces recherches ne furent que commi-
natoires ; car Arnauld traliissait à cha-
que instant son secret par l'impctuo-
sité de son caractère. On peut en juger
par les anecdotes suivantes. 11 avait
trouvé une retraite à l'hôtel de Lon-
gueville , à condition qu'il n'y paraî-
trait qu'en habit séculier, une grande
perruque sur la tèlc , et l'épée au coté.
11 y fut attaqué de la fièvre, et M™".
de Longueville ayant fait venir le mé-
decin Braver, lui recommanda un
gentilhomme qu'elle honorait d'une
protection particulière, et à qui elle
avait donné uu appartement dans son
hôtel. Brayer monte chez le malade
qui , après avoir parlé de son indis-
position, demande des nouvelles. « On
» parle, lui dit le médecin, d'un livre
» nouveau qu'on attribue à M. Arnauld
» ouàM.deSacv; mnisje nele crois pas
» deM. deSacv; il n'écrit pas si bien.»
A ce mot, Arnauld, oubliant son ha-
bit gris et sa perruque, lui répond
vivement: « Que voulez- vous due?
» Mon neveu écrit mieux que nïoi. »
Brayer envisage son malade , se met
à rire, descend chez M""", de Kon-
gueville , et lui dit : « La maladie de
» votre gentilhonnne n'est pas consi-
» dérable; je vous conseille pourtant
» de faire en sorte qu'il ne vove per-
» sonne ; il no faut pas le l.uf;ser
)) parler. » Bientôt , craignant d'être
recherché même chez cette princesse,
il alla se loger au fyubourg St.-Jac-
ques , dans uu taudis ignoré; il y
tomba malade. Ses amis lui envovè-
rent un médecin, qui, dans la con-
versation , comprit bientôt que son
malade était un homme de mérite.
Arnauld , curieux de nouvelles , î'.ii
demanda ce qu'on disait dans Paris.
« Rien d'intéressant, répondit le médc-
» cin , si ce n'est que M. Ai uauld est
» arrêté. — Oh ! pour cette nouvelle,
1» répUtpia ce dernier ,. clic est un peu
ARN
■» difficile à croii e ; c'est moi qui 5iii>
» Arnauld.» Le médecin, étonné, liir
remontra son imprudence. « Heureu-
» sèment, ajoula-t-il , vous avez à faire
» à un honnête homme. Sans cela,
» voyez à quoi vo\is vous exposiez. »
11 fit avertir la duchesse de Longue-
ville qui , toute alarmée , envoya cher-
cher Arnauld. Elle lui donne un loge-
ment , le fait cacher dans une cham-
bre, et ne veut se reposer que sur
elle-même du soin de lui porter à
manger. Cette princesse, étonnée des
indiscrétions qui échappaient souvent
à Arnauld et à Nicole, disait «qu'elle
» aimerait mieux confier son secret à
» un hbertin. » Craignant donc les
conséquences de l'animosité de ses
ennemis et des préventions du roi ,
Arnauld s'exila lui-même de sa pa-
trie, et se retira dans les Pays-Bas.
Après avoir erré en différents en-
droits , il se fixa à Bruxelles , où le
marquis de Grana le fit assurer de sa
protection , et témoigna un grand désir
de voir im homme dont la réputation
avait déjà rempli l'Europe. L'illustre
fugitif ne refusa point sa protection ;•
mais il le fit prier de le laisser dans
son obscurité , et de ne point l'obliger
à voir un gouverneur des Pays-Bas es-
pagnols pendant que l'F^spagne était en
guerre avec la France; délicatesse que
le marquis de (irana ne put blâmer.
Le premier fruit de sa retraite fut
Yy^polopie pour les Catholiques cou -
tre les faussetés du ministre Jurieu ,
ouvrage qui , ,->u jugement de Racine,
présente la force et l'éliquencc des
Philippiques de Démosthènes , et om
l'auteur prit généreusement la défeuiC
des jésuites ses persécuteurs. Jurieu,
que sa violence et son fanatisme avaient
rendu odieux à son propre paiti, ras-
sembla , dans un libelle qu'il inlitiih ;
ÏEspritde M. Arnauld, mille calon-
nics grossières contre le doctcm" qui lié-
ARN
daigna d'y répondre; mais qui n'y fut
pas moins scusiblc. f^e père Simon
doute que ce recueil d'infamies ail e'îe'
fait par Jurieu. Il pense qu'il fut com-
pose à Paris , et qu'on en fît passer
le manuscrit à Jurieu, qui l'arrangea
k sa manière. Le repos était un c'î.'.t
violent pour cet athlète infatig;dilo ; il
trouva moyen de s'enc;ap;er bientôt
dans une nouvelle querelle. Le père
Mallebranclie , qui avait embrassé des
sentiments ditrèients sur la grâce, les
de'veloppa dans un Traite, et le fît
parvenir à celui qu'il regardait comme
son maître. Le docteur voulut arrêter
l'impression de son livre; mais, n'avant
pu y réussir , il lui déclara la guerre
en i683. Il y eut plusiein-s écrits de
part et d'autre, i-emplis d'expressions
})iquautes et de reproches très-vils.
Arnauld n'attaquait pas le Traité de
la Nature et de la Grâce ; mais l'o-
pinion que ïon voit tout en Dieu,
exposée dans la Recherche de la vé-
rité, qu'il avait lui-même vantée au-
trefois. I! intitula son ouvrage : Des
inaies et des fausses Idées. 11 pre-
nait ce chemin j-.our apprendre , di -ait-
il , à Mailebranche, à se défier de ses
plus chères spéculations méta]>hvsi-
ques, et le préparer ainsi à se laisser
plus aisément désabuser sur la grâce.
Mailebranche se plaignit de la mali-
gnité qu'il y avait à choisir une ma-
tière donti! n'était nullement (juestion ,
parce qu'elle était la plus méta))iivsi-
que, et par conséquent lapins suscep-
tible de ridicule aux yeux de la plu-
part des lecteurs. Le danger des dis-
cussions polémiques de cette nature
est de mener les cœurs les plus droits
et les esprits les plus justes beaucoup
plus loin qu'ils ne se le proposent
eux-mêmes. Arnauld en vint à des
accusations révoltantes; selon lui , son
adversaire met en Dieu une étendue
matérielle , et insinue artifieieuscmeîit
ARN
5o5
des doamcs qui corrompent la p-ucîe
de la religion. Ses Béjlexions philo-
sophiques et théologiques sur le
Traité de la Nature et de la Grâce,
publiées en i685 , ouvrage cemposea
la sollicitation de Bossuet, le rendirent
vainqueur dans l'esprit de ses nom-
breux partisans qui chantaient^ictoirc
pour leur chef, dès qu'il entrait dans la
lice; mais Mailebranche le fut aux
yeux de ses disciples. Ce dernier, aussi
pacifique que l'autre était guerrier ,
eut du moins sur lui l'avantage d'une
plus grande modération , en déciar-int
à son adveisaire « qu'il était las de
donner au monde un spectacle, et de
remplir le Journal des Savants de
leurs poÀivretés réciproques. On peut
dire pourtant que si le théologien
avait mis trop de dureté dans quel-
ques - uns de ses écrits , le philoso-
phe mit aussi tiop de fiel et d'amer-
tume dans les siens , en accusant ce
malheureux exilé, son ancien ami,
d'être chef de secte, d'entretenir le
schisme. On voulut engager Arnauld
à produire la rétractation que son an-
tagoniste lui avait confiée autrefois de
la signature du Formulaire. Arnauld
se révolta contre un tel procédé :
« TAien ne serait plus malhonnête ,
» dit-il , que d'abuser de cette con-
» fiance. J'aimerais mieux qu'on m'eût
« coupé la main que de lui en faiie
» aucun reproche. » Celte querelle ,
qui dura jusqu'à la mort d' Arnauld ,
ne l'empêcha pas d'eu avoir une
autre avec le père Simon , à l'occa-
sion de la traduction des livres saints
en langue vulgaire. « Enfin , après
une carrière si orageuse et malhcu-
leuse , dit Voltaire , selon les idées
ordinaires qui mettent le malheur dans
l'exil et la pauvielé, sans considérer
la gloire, les amis et une vieillesse
saine, qui furent le partage de cel
homme fameux , » Arnaidd vit appro-^
5o6 Â R N
cher la mort sans f rouble ni faiblesse,
et expira entre les bias du père Ques-
ncl, à Bruxelles, le 8 août i6g4, à
quatre-vingt trois ans , et fut enterre
dans le cliœur de la paroisse Sainte-
Catlierine. Sa mort enleva anx parti-
sans de Jansénius le jilus l);;bilc dé-
fenseur qu'ils aient jamais eu, et aux
jésuites leur plus ri duntable adver-
saire. Le lieu de sa sépulture fut lonp;-
teiupsit^noré; mais son eœur fut porté
à Port-Royal, puis transféré à Palai-
seau. Los poètes les plus illustres lui
firent des épitaplies. On eût pu lui
ajipliquer celle de Trivulee : Hic qiiies-
cil, qui nitmquàm quievit. Boiieau
ne craignit pas de dépla-re aux enne-
mis de l'ort-Ro\al, en consacrant les
Vers suivants à sa mémoire :
Ali pied Hp cet autel «le strnciure grossirre ,
L.;. s.in» |)nmpe , enfume .|..ns um- vile biire,
le plus s.iv.,iit mortel qin j.inials ail .-crit:
Arii uld qui sur la );ràce instruit par Jesus-Chrisl ,
Ç.mhatt.int pour 1 e;;li,e, a , dans réalise m.'me ,
Snnllert plus tl'nu outr pe ei plus H'iin un itliéme.
Plein dun l'eu qu'en son. (cur.voulfla ri;»prildi>in.,
«t terrsss Pélag- , il foudroya Calvin;
lie tous ces faux durlcurs lunlVindii la murale;
Mai* , pour fruit de «on lèl,- . on l'a vu rebuté ,
i;n renl lieux opprimé p ir U noire Ci.bale .
F.rrant. pauvre, banni, pr..scrit . persécuté;
Kt même par sa rp.iri, Irur furcnr mal erinte
N'en eftl jamiis laisse les een.'res en repos,
Si Dieu lui-raéme , iei . de son oiiaille sainte ,
A ce« luups dévoranu n'avait caclic les os.
Le IVecrologe de P ort- fi o y al en ^Ihî-
bue deux autres à Racine. Sauteul lui
fit cette épitaplie placée sur la pierre
qui couvrait son cœur à Port-Roval.
Perqnem r'-lHgU> slelil inconcutsa fulesque ,
Mapiaiiiraa e; pi- las it constans re;;nla vcri
rontempl.ire virum, s tolam 3;;nos. il in ili»
Ruijis pulcbra suis patrum rediviva velustas.
Elle attira au poclc des persécutions
et des s.itiies. On ignore l'auteur de
cet antre distique, remarquable pai'
sa précision :
Hic jacct .Vroaldus, lucem rui GalUa , portum
KlanJrii, R^juia (idem , pra:bu>t astra DvUs.
Une petite pièce du temps nous ajv-
j-rend une anecdote assez ])iqiiante ,
c'est que Racine fil le seul qui osa
se trouYer à sou cuuvui. Les icsuitcs
ARN
opposère,nt , à tous ces éloges , quel-
ques pièces satiriques ; et ils s'éle-
vèrent surtout avec violence contre
l'épilLètc de grand , dont les jansé-
nistes accompagnaient le nom d'Ar-
nauld. Bourdaloue qui , plus d'une
fuis , a fait servir le ministère évan-
f;é!iqiie à la défense de sa compagnie ,
y fit allusion dans son Sermon sur
l'Ai>eitgle-né. On attribua aussi,
lion sans quelque fomlement, à l'ani-
mosité des jésuites , la suppression
des articles de Pascal et d'Arnau'd
dans l'ouvrage de Periault, intitulé :
les Hommes illustres du x-^". siècle ;
l'on fit à cette occasion l'i^pplicalion
ingénieuse de ce passage de Tacite :
Prœfiilgebant Cassius atque Brutus,
eo ipso quhd effigies eorum non visC'
huntur ; mais si personne n'eut droit
de s'étonner de voir cette compagnie
conserver quelque ressentiment des
coups terribles qu'Arnauld lui avait
portés , beaucouj) de personnes furent
ofTen.sées du ton léger et presque amer
dont l'abué de Rancé annonça la
mort d'un homme avec lequel il avait
eu des liaisons d'estime et d'amitié,
ce qui valut à cet abl>é une lettre sé-
vère attribuée an P. Quesnel, qui crut
devoir la désavouer. < Uielque respect
qu'on ait pour la mémoire dvi réfor-
mateur de laTrapc, ii est j)ermis de
soupçonner que ce pieux solitaire n'a-
vait pas ])ardonné à Arnauld le parti
qu'il avait pris dans la qucrelie sur
les étudt s monastiques entre lui et le
P. INLibillon. En effet, Arnauld était
trop érudit et trop lettré poiu* ap-
prouver uu système qui condamnait
les moines à la paresse et à l'igiio-
rance. Arnauld était plus que savant ;
« personne , dit un écrivain célèbre ,
u'etait né avec un esprit plus philo-
sopliique; mais sa j)}iilosopl)ic fut cor-
rompue par la faclion qui l'entraîna.
G.'ltc l'acticu illusUc , qui voyait à sa.
<
ARN
tête les Arnauld , les Pascal , les Ni-
cole ; qui comptait dans ses rangs les
personnages les plus distingues du
royaume par l'éclat de la naissance et
des talents ; qui peut s'euurgueillir
d'avoii- eu , pour partisans , Boileau et
Racine , plongea , dui'ant soixante ans,
dans des controverses toujours lon-
gues et souvent inutiles , un esprit
fait pour éclairer les hommes » ; ré-
flexion judicieuse , mais qui peut s'ap-
pliquer avec la même justesse aux
esprits supérieurs du parti opposé.
Une anecdote peint l'inflexibilité de
sou caractère. Nicole , son compa-
gnon d'armes , et qui avait partagé sa
retraite et toutes les agitations de sa
vie errante , mais né avec un ca-
raclère plus doux et plus accommo-
dant, lui représentant un jour, qu'il
ciait las de guerroyer sans cesse, la
plume à la main , et qu'il voulait, enfin,
se reposer. — a Vous reposer ! reprit
» l'impétueux docteur ! Eh n'aurez-
» vous pas pour vous reposer l'éter-
« ulté toute entière? » Pour lui, il don-
na , jusqu'au dernier moment , l'exem-
ple d'une ame forte , ine'branlable , et
supérieure à la mauvaise fortune, selon
les uns , et selon les autres , d'une opi-
niâtreté que l'on confond trop souvent
avec la fermeté. Il vécut dans une re-
traite Ignorée, sans fortune, sans do-
mestique, lui dont le neveu avait été mi-
nistre d'état, lui qui aurait pu être cardi-
nal! Ses partisans prétendent, en effet,
qu'Innocent XI lui fit offrir la pour-
pre, et qu'à sa mort plusieurs cardi-
naux dirent , en plein consistoire ,
qu'on connaissait des saints qui n'a-
vaient pas rendu tant de services à
l'Eglise j mais le plaisir d'écrire en
liberté, et peut-être aussi l'orgueil
d'être chef de pai ti , lui tinrent lieu de
tout. Sou extérieur ne prévenait point
en sa favctir. Sa taille élaii petite, et sa
tctc d'une giosseur disproportionnée.
ARN 5o7
Ses traits n'auraient annoncé que la
stupidité, sans la vivacité de ses yeux
qui révélait le secret de son qénie.
Cet homme , si terrible la plume à la
main, apportait, dans la société, des
mœurs simples et douces. Sa conver-
sation était grave et réfléchie , sans
exclure, pourtant, une honnête gaite.
Sa mémoire , vraiment extraordinaire,
lui fournissait toujours , a point nom-
mé, quelque trait de ce que les au-
t(urs avaient dit de plus saillant sur
ce qui faisait le sujet de l'entretien. 11
possédait à fond les poètes latins, et
en appliqu it les plus beaux endroits
avec autant de justesse que de pré-
sence d'esprit. Il s'exprimait '^'un tou
fort haut, lorsqu'il soutenait ses opi-
nions. Plusieurs traits prouvent ce-
pendant qu'il était plus modeste que
ses ennemis n'ont voulu le faire croire.
Sou frère, l'évêque d'Angers, l'ayant
invité à le venir voir , il prit la voiture
publique. On vint à parler de soa
livre De la Perpétuité de la Foi;
on le vantait beaucoup , lui seul le
déprécia. Un des voyageurs indigne'
lui dit : « Il vous appartient bien de
i) vous ériger en censeur du grai.d
» Arnauld I Et que trouvez-vous à blà-
» mer dans sou livre ? — Beaucoup
» de choses, répondit Arnauld ; on a
» manqué tel et tel endroit : on eût
» dû mettre plus d'ordre, pousser
» davantage le raisonnement. » Il
parla de tout en maître , et cependant
personne ne fut désabusé. Le caresse
de son frère étant venu le prendre à
quelques lieues d'Angers, on reconnut
que le censeur d'Arnauld était Ar-
nauld lui-même, et chacun se répandit
eu excuses. « Ce qu'il v a de singu-
lier , dit l'auteur de VHistoire des
querelles littéraires , c'est que cet
homme , qu'on a cru l'ennemi des
pnpps , avait, de Rome, la permission
de dire la messe dans sa ch^tuibre. Ses
5oS A R N
liaisons nvec ccHc cour , pour être
ètonuantos , n'en sont pas moins vé-
ritables. Il entretint , toute sa vie, des
correspondances avec des membres
du sacre collège. Il avait des instruc-
tions Irès-sûres concernant les pa-
piers importants envoyés à la congré-
gation de la Propagande. Personne ne
connaissait mieux que lui la biblio-
thèque du Vatican : il citait les pièces
originales, l'endroit oii on les avait
placées , et défiait les jésuites d'en
contester l'authenlicité. Ils ne ]nuent
pas faire mettre à l'Index sa Morale
pratique , tandis que le livre du P. Le
Tel!ier,5H7"Ze5 chrétiens de la Chine,
y lut mis. Son crédit , à lioiue , était au
point qu'il en |»laisantait lui-racinc.
« Ou me croit en Frana; , di.Nait-i! ,
i> io plus grand ennemi des papes , et
» l'on ignore comme j'ai toujours été
» chez eux. » Une lettre de Piomc,
niséréc dans le Mercure do février,
169G, ajoute, à ces détails, luic anec-
dote qui vient à l'appui ; c'est qu'un
des plus célèbres professeurs du col-
lège de la Sapience , avant appris la
mort dAruauld , la vrille dujour où il
devait faire un di.^cuurs btju d'appa-
rat , auquel tout Rome était invité ,
consacra sa harangue toute entière à
l'éloge de ce docteur, ne parla que
de la grande perte que l'iilglise venait
de faire en sa personne , et le mil au-
dessus de tous les écrivains anciens
et modernes. Cet homme extraordi-
naire ne fut pas seulement profond
dans la théologie, dans l'intelligence
de récriture , dans la science ecclé-
siastique , il était eucorc versé dans
la dialectique, la géométrie, la gram-
maire et la rhétorique. Les anciens
lui étaient familiers ; mais il paraît
avoir surtout atVcctionné Cieéron. On
lui demandait i.c qu'il fallait f lire pour
se former un bon .sf^le: « Lisez Cicé-
^) ron , répondit-il. — il ne s'agit pas,
A R \
)> répliqua -t -on , d'écrire en latm .,
» mais en français. — En ce cas, re-
» prit le docteur , lisez Cieéron. » II
avait lui-même profilé de cette lec-
ture ; son style était plein de chaleur
et d'énergie , et cette énergie serait plus
fra[jpante s'il avait tu l'art de se res-
serrer. « Arnauld. dit I\I. Bossut, était
» né avec une grande éloquence; mais
» il n'en réglait pas assez les moiive-
)> ments. Les négligences de la dic-
» tion , le ton pesant et dogmatique ,
» nuisirent quelquefois à la force de
i> sa logique, et dans les premièi'es
» disputes qui le signalèrent , il eut
» besoin que Pascal fit valoir ses rai-
1) sons par les charmes de l'expres-
» sion et par le piquant de la pl.ùsan-
« terie. Il n'eiit pas , comme cet écri-
» vain inimitable , l'art de se resser-
» rer, et d'être précis , sans cesser
» d'eue éloquent. » On a , de cet
homme illustre, environ cent quarante
volumes en dillérents formats, dont
plusieui s ont été faits en société avec
Pascal , Nicole . Lamv, etc. . et , malgré
l'inépuisable fécondité de Fauteur ,
rien n'cmpèche de croire qu'un grand
nombre est l'ouvrage de ses disciple^ .
(pii ont voulu en faire honneur a leur
chef, ou les mettre en crédit par l'au-
torité d'un grand nom. Le recueil com-
])ltt de ces écrits a été publié en 4 3
vol. in-4'. , à Lausanne, en 1777-
78-79-85. On peut diviser ces
écrits eu cinq disses : la i"^""., com-
posée des livres de briles-lettres et de
philosophie : 1. Grammaire générale
et raisonnée , contenant les fonde-
ments de Vart de parler , etc. , par
MM. de Port-Royal ; nouvelle édi-
tion , augmentée des notes de M,
Duclos , de V académie française ,
et d'un supplément par M. l'abbé
Froment, iu-r.>, , 1706- M. Pctitol ■<
donné, en i8(>5, iu-8'. , ime nou-
velle édition de cet ouvrage foiuia-
ARN
mental , et qui est la clef de toutes les
langues. II. Eléments de Géomé-
trie; III. V/lrl dépenser, avec M.
Nicole, lirre excellent , qui a fait ré-
volution dans l'enseignement de la
loi^ique. Les auteurs ont cru devoir ,
par nic'nngeinent pour les partisans
de l'ancienne barbarie scojastiqiie ,
y faire entrer des matières que , plus
tard , ils n'auraient pas manqué d'ex-
clure. Arnauld , du moins , y fait
assez sentir le cas qu'il faisait de ces
sottises , dont Molière fit justice peu de
temps après. IV''. Réflexions sur V é-
loquence des Prédicateurs , Paris ,
1695. Cet écrit fut composé à l'occa-
sion d'une préface de M. Dubois , qui
interdisait l'éloquence aux orateurs
chrétiens. Arnauld à qui il avait en-
voyé son ouvrage , répondit à ses so-
pliismes avec une telle supériorité de
dialectique et de raison , que. Nicole
dit en le lisant : 0 Si M. Dubois n'était
)) ]MS mort , il en mourrait. » En
effet, l'écrit d'Arnauld ne fut impri-
mé qu'après la mort de ce faible tra-
ducteur de Cicéron et de S. Augus-
tin. Ce livre obtint le suffrage même
des jésuites, qui, d'ailleurs, n'étaient
pas fâchés de voir le maître humilier
le disciple. Le P. Bouhoursfit la pré-
face de l'édition de 1700, qui parut
«ious le titre général de Réflexions sur
V Eloquence, avec des lettres de M. de
Sillery , évêque de Soissons, contre
le P. Laniy , bénédictin , sur le même
sujet. Enfin , on le réimprima , cii
i^So, en Hollande, dans un recueil
de divers traités sur l'éloquence et
sur la poésie , public par Bruzen
de la Marti nière. V. Objections sur
les Méditations de Descartes ; VI,
Traité des vraies et des fausses
idées. Colonie, i685. La deuxième
classe est celle des ouvrages sur les
matières de la Grâce. On en trouve
U!i« liste fort longue dans k Diction-
ARN 5o<)
naire de Moréri , et dans le Supplé-
ment au jVécroloofe des principaux
défenseurs et confesseurs de la Fé-
rite. Le principal est celui dont nous
avons parlé plus haut , sous le titre
(\e Réflexions philosophiques et théo-
logiques. La plupart des autres ne
roulent que sur des disputes particu-
lières , si l'on en excepte la Traduc-
tion des Lii'res de S. Augustin , des
3Iœurs de l'Église catholique , de
la Correction et de la Grâce ; de la
véritable Religion ; de la Foi , de
V Espérance et de la Charité, 16 |8.
La troisième, des livres de controverse
contre les calvinistes: I. la Perpé-
tuité de la Foi , ouvrage auquel il avait
eu beaucoup de part, et qu'il publia
sous son nom, comme Nicole, son prin-
cipal coopérateur , l'avait désiré. Clé-
ment 1 X , a qui il fut dédié , Clément X
et Innocent XI , lui firent écrire des
lettres de remercîuient. II. Le Ren-
uersement de la morale de J.-C.
par les calvinistes, en 1672 , in-4'',;
III. y Impiété de la morale des cal-
vinistes, en 1675 ; IV. V Apologie
pour les catholiques, 1 08 1-82, 'i
vol, in- 1 '2; V. les Calvinistes con-
vaincus de dogmes impics sur la
morale ; VI. le Prince d'Orange,
nouvel Jbsalon , nouvel Hérode ,
nouveau Cromwell. L'auteur du Siè-
cle de Louis Air doute que ce livre
soit d'Arnauld , parce que le stvle du
litre ressemble à celui du P. Garasse.
Cependant, le Supplément au Né-
crologe, déjà cité, le range dans la
longue liste des écrits du docteur. On
dit même que Louis XIV ordonna
qu'on le fît imprimer , et qu'on en en-
voyàt des exemplaires dans toutes les
cours. I\Iais celle assertion n'est pas
prouvée. On a plus de plaisir à penser,
comme de savants théologiens l'assu-
rent , que ce fut à l'Apologie pour les
Catholiques qua Louis XlVfitcethou-
5to ARN
ncur. La quatrième classe , des écrits
cuntrc les jésuiles, parmi lesqi:els ou
di.stinp,iie 'a Pratique morale des jé-
suites , en 8 vol. , qui sont presque
tous d'Arnaiild , à rexccption du pre-
mier et d'une partit du second . qui
sont de Cambout de Pont-Chàtcan. Il
y a , dans cet ouvrage , comme dans
tous les écrits de parti , des ve'nte's et
des exagérations. On doit pourtant
convenir qu'il est précieux par le
nombre et la qualité des j)ièces origi-
nales qu'il contient , dont l'authen-
ticité n'a jamais été contestée par ceux
qui y avaient le plus d'intérêt , el qu'on
peut proposer comme un modèle de
la méthode avec laquelle on doit trai-
ter, approfondir, épuiser une matière.
Ou peut comprendre, dans celte qua-
ti ième classe , tous les écrits contre la
morale relâchée, dont il était nn des
pins ardents ennemis. Le Su]>]>lé-
vienl au Nécrologe des défenseurs
de la vérité nous apprend qu'il eut
part aux â**., 9' . , i «'• , 1 •*'• , i lï '. ,
1 4 . el 1 5 . Lettres prfH'inciales. Dans
la cinquième partie, sont tous les écrits
sur l'Écriture-Sainte : I. Histoire et
Concorde évangélique , en latin ,
i655; IL Traduction du Missel ,
en langue vulgaire, autorisée par
rÉcriture-Saihte et parles Pères, ftilc
avec De Voi'^in ; 111. Défense du
Nouveau Testament de Mons , con-
tre les Sermons de Maimbourg, avec
T>ficole, etc. On a imprimé, après sa
mort, neuf volumes de Ze«7V'5, où l'on
distingue les noms de Boileau , de
Léibnitz, etc. Le P. Quesncl a publié
sa fie, avec des pièces relatives et
des écrits posthumes. On y trouve une
réponse aux reproches qu'on lui avait
faits de se servir de termes injurieux
contre ses adversaires. L'objet de
cette Dissertation est de prouver,
par l'Écriture et par les Pères , qu'il
est permis de combattre sts adversai-
ARN
res avec des traits forts et piquant?.
L'éditeur des Œuvres comf.ltics
d\4rnauld a mis à la tète de sa col-
lection une /-"l'e extrêmement détaillée^
qu'on a réimprimée en 2 vol. in-8". ,
Lausanne, i'j85. Les journaux ont
rapporté, dans le temps, cet article
du testament de M. Grosley : « Je
» lègue une somme de six cents livres
» pour contribution de ma part au
» monument à ériger au célèbre An-
» If.ine Arnauld , soit à Paris , soit à
)) Bruxelles. L'étude suivie que j'ai
» faite de ses écrits , m'a offert un
» homme courageux au milieu d'une
» persécution continue , supérieur aux
» deux grands mobiles des détermi-
» nations humaines , la crainte et
I) l'espérance. Ses ouvrages sont i'ex-
» pression de l'éloquence du cœur ,
» qui n'appartient qu'aux âmes for-
» tes.» Il ne paraît pas que cette dis-
position ait eu aucune suite. N — l.
ARNAULD ( Antoine ),fds aine de
Robert Arnauld d'Andilly, servit d'a-
bord dans le régiment d'un de ^es cou-
sins, Isaac Arnauld, gouverneur de
Philishourg , et mestre-de-camp, em-
brassa l'état ecclé>iastique , devint
abbé de Chaumes, se retira auprès de
son oncle, l'évèque d'Angers, dont il
gouverna le temporel , qu'il dérangea
consitlérablemenl, et mourut en i G98.
Ses 3Iémoires , où il se plaint be<in-
coupde son père, ont paru, en 175G,
en trois parties , in-8". , publiées par
le P. Plngré. On y trouve des faits
piquant^ qu'on chen lierait vainement
dans les nombreux mémoires sur le
siècle de Louis XlW II y annonce la
même manière de penser que les
autres Arnauld, sur les affaires du
temps. ^ — L.
ARNAULD , marquis de Pompon-
ne , et ARrsAULD , abbé de Pom-
ponne. Voy. Pomponne.
ARNAULD (^MjkRiE- Angélique de
A R N
Sriinte-Madeleine, sœur d'Antoine Ar-
naud l , né en > Sqi , abbessp de Port-
Kov-il-cles-Cliamps, à quatorze ans, y
rétablit à di\-srpt ans la réior ne de
Cîteaiix cl le premier espi it do l'insliîut
de St.-Bernard.Ciiargée, parle pjénéral
dcl'ordre , d'inlrodnircla réforme dans
l'abbaye de Maubuisson, que gouver-
nait jilors sœur G ibrielle d'Estrées ,
qui s'y était fait installer à main-armée,
elle en vint à bout, après bien des
peines , en donnant le premier excm-
j)lc de toutes les privations (pi'olle im-
posait à ses religieuses. Ce fut alors
qu'elle se mit sous la direction de S.
François de Sales. Dp retour à Port-
Boval , elle transféra son monastère
des ('.liampsà Paris; et, periuadée que
son élection n'avait pas été canonique,
après avoir obtenu que l'abbesse fût
désormais triennale et élective , elle
donna sa démission. Quelques années
après, le pape la nomma pour établir
un nouveau monastère, que la du-
chesse de Longueville voulait fonder
en riionneur du S. Sacrement. Cet éta-
blissement n'ayant pas subsisté, la
mère Marie-Angélique revint à Port-
Royal, dont les religieuses l'élurent
abbcisc , douze ans après sa démis-
sion, et la continuèrent pend.^nt douze
ans de suite, f^e monastère dei Champs
ayant été rétabli , elle se partagea en-
tre le gouvernement des deux mai-
sons, y déplova des qualités émiiientes,
et mourut, le 6 août i(it)i , àsoixan'e-
dixans , après cinquante-quatre ans de
profession , laissant une grande réputa-
tion d'esprit, de savoir et de vertu. Ra-
cine , dans \! Histoire de Port-Royal^
lui attribue les relations des persécu-
tions qu'on fit soufFiir à ces religicii-
ses , publiées à Paris, en 1724. — Sa
sœur, la mère Aguès, fut d'abord,
malgré sa jeunesse, maîtresse des no-
vices, gouverna Port-Royal durant les
cinq ans que la nièt'e Marie -Angélique
ARN r>iî
passa à Maubuisson , devint sa coad-
ju'rice, fut e'ie-mciue élue abbesse,
et, durant vingt-sept ans, gouverna
Porl-Roval alternalivemcnt avec sa
sœur , à l'qudle e'ie survécut neuf
ans, éprouva de grands chagrins à
roccasi(jn du Formulaire, vit enfin ré-
tablir le monastère de Port-Royal , et
mourut, le i<)févii(r 167 r,àsùixante-
dix-sept ans, après soixante-douze ans
de profession, et soixante -deux de
gouvernement. Elle publia deux livres,
l'un intitulé : L'image de la Reli-
gieH<;e parfaite et imparfaite , Paris,
I G65 , in- 1 i ; et l'aulre : Le Chapelet
secret du St.-Sacreinent, i6(i5, m-
\'i , supprime à Rome, sans être cen-
suré. On lui attribue aussi : Les Cons-
titutions de Port- Royal. Ces deux
abbesses eurent quatre sœurs, toutes
religieuses dans le même monastère,
et toutes fttachées au parti janséniste,
et occupées de disputes sur la grâce ;
« Comme si , dit Bossuet, la simple foi
» ne valait pas mieux que tout cela, »
C'(î3t ce qui faisait dire à l'archevêque
de Paris, Péréfixe, «que ces files
» étaient pures comme des anges, mis
» orgueilleuses comme des dénions. »
— Leur nièce, la mère Angélique de St.-
Jean Arnauld, née en iGa^ , entra à
Port-Royal a six ans, fut élevée par ses
deux tantes, eatre les mains desquelles
elle devint un prodige d'esprit et de
vertu, fut durant vingt ans maîtresse
des novices , puis abbesse , et moiuut
en 1684 » ^r>^^ ^^^ cinquante-neuf ans.
Elle eut une grande part aux articles
du Nécrologe de Port- Royal. On a
de plus d'elle des Relations , des Re'-
Jlexions, et des Conférences. Ce der-
nier écrit a été publié par D. C'é-
mencet, en 17O0, 5vol.in-i2. M ".
de Sévigné vante une lettre qu'elle
écrivit à l'occasion de la disgrâce de
son frère, le marquis de Pomponne.
«C'était^ ajoute-t-elle , la chère fille
5 13 ARN
» de M. LVÂndilly, et dont il rae disait :
» Comptez que tous mes frères , tous
)) mes enfants, et moi, nous sommes
» des sots , en comparaison d'Aiige'-
» lique. Jamais rien n'a été bon de
» tout ce qui est sorti de ces pays-là ,
» qui n'ait été' corrigé et approuvé
» d'eiîr. Tontes les langues, toutes les
» sciences lui sont infuses , etc. » M.
Arnauld et M. Duguot ont fait son
éloge. N— L.
ARNAULT DE NOBLEVILLE
(Louis-Daniel), agi'égé ati collège
des médecins d'Orléans , de la société
et corres])ondance royale de méde-
cine, né à Orléans , le 2 f décend)re
i-joi, mort le 1". mars 1778, a
publié: 1. Le Manuel des dames de
Charité, on Formules de médica-
ments faciles à préparer, 1747, iu-
i'2 , réimprimé en 17J0, 1757,
1760, 1760, in-r>., traduit en italien
et en hollandais; II. .J^dologie, ou
Traité du rossignol franc ou chan-
teur , 1751 , in - 1 i ; 111. Histoire
naturelle des animaux , pour servir
de suite à la madère médicale de
Geo/Jroj , i7r)(), 9 vol. in- 13. Ar-
n.iult eut pour collaborateur un nom-
mé Salerne. IV'. Description abrénée
des plantes usuelles , employées dans
le Manuel de charité { avec le même
collaborateur ) - '7^7 , in- 12; V.
Cours de médecine pratique , ré-
digée d'après les principes de Fer-
rein. I7t>9, 3 vol. in- 12; 1781,
5 vol. in- 12. — Arnault DE la
BoRiE ( François ), chanoine de St.-
E.iennc et de St.-Front,de IVrigueux ,
sa ])atric , successivement archidiacre
et chancelier de l'université de Bor-
deaux, mort en 1607 , dans un âge
Ivès-avancé, est auteur des Anti-
cpiités de Pérlgord , imprimées en
i577, dit le P. Le'ong. 1! avait, sui-
vant l'abbé Goujct, traduit le Traité
des anges et dès déjnons , de J. Mal-
ARN
donat , et composé l'Anti - Drusac ,
Toulouse, i5d4. A. B — t.
ARND (Jean) , un des théologiens
de la communion luthérienne, qui ont
le plus contribué à donner à l'instruc-
tion religieuse une tendance pratique.
Il naquit à Ballenslsedt , dans le duché
d'Anhalt, en i555. II étudia d'abord
la médecine, et c'est apj)aremuient à
ces premières étudi-s qu'on doit les
fréquentes allusions à la mauvaise chi-
mie de son temps , qui jettent de l'obs-
curité sur un grand nombre de pas-
sages de ses écrits , et qui leur ont
donné une teinte de mysticité. Une
dangereuse maladie lui fit, dit -on,
embrasser la carrière ihcologique, dans
laquelle il se distingua par une cha-
lité inépuisable, qui, dans la modicité
de sa fortune , lui valut la réputation
d'avoir trouvé la pierre philosophale,
et par des écrits ascétiques , pleins
d'onction et de chaleur, dont le plus
connu, intitulé : Jm vrai Christia-
nisme, a été traduit en latin , en fran-
çais , par Samuel de Eeauval , et
dans presque toutes les langues de
l'Europe et de l'Asie, Ce livre, dont
les expressions ne sont pas toujours
réglées avec rigueur sur la théologie
liithérienne,hii attira de vifs reproches
de la part de quelques théologiens
de cette communion, surtout de Luc
Osiander. Il mourut à Zell, en 162 c ,
suiinleudant des églises du duché de
Lunibourg ; peu d'heures avant ss
mort , il avait fait un sermon sur ces
paroles du 126^ psaume: Ceux qui
sèment dans les larmes, moisson-
neront dans la joie , et était rentré
chez lui en disant qu'il venait de
pronoucerune oraison funèbre. Il sup-
porta les persécutions de quelques-uns
de ses contemporains avec une dou-
ceur angéiique. Le théologien Wcrns-
dorf, de Bàle, a écrit un très-bon
ïaorceau sur Arnd, qu'on trouve daus
ARN
la collection de ses OEuvres. ( V. aussi
Witte, Meinoria Theologorum, Dec.
II , p. 1 7 I ). S — R.
ARND ( Christian ), ne en i6i3,
fit ses études à F.eyde , à Wiîiei;berg ,
à Leipzig;, à Strasbourg , et mourut
à Rostock , eu r685, après y avoir
occupe' trois ans la chaire de logique.
Ou a de lui : 1. Dissert, de Philoso-
phid i<ete?'iim, Rostock, i6'jo, in-
4". ; II. Discursus politicus da prin-
cipiis constiluentUms et conservan-
tibus rempublicam , ibid. , 1 65 i ;
III. De vcro usu Logices in Theolo-
gia, ib. i(i5o. G — t.
ARND ( JosuÉ ^ , miui.-îre du culte
luthérien, né à Gustrou , en 1626,
succéda, en i65?> , à son frère Chré-
tien Arnd dans la chaire de logique à
Rostock , fut ensuite aumônier du duc
de Mecklenbourg , Gu'-îave Adolphe,
et mourut, en i685, après avoir pu-
blié un grand nombre d'ouvrages de
philosuphic, d'histoire et de contro-
verse. La plupart sont indiqués dans
les Mémoires de Niccrou , t. XLIII.
Les plus remarquables sont : I. Lexi-
con antiquitaium Ecclesinsticanim,
Greif vvild , i6()7, 1669, in-4°. ; II.
Genealogia Scaligerorum , Copen-
bague, 1648; III. Trutina Slatuum
Europœ Duels de Rohan, imprimé
plusieurs foi-, et à Gustrou, eu i(j65,
in-S". ; IV. Laniena S abuudic a, Ros-
tock, i655, in-4*'.; V. Exercit. de
Claudii Salmasii erroribus in theo-
logid; Wiîcb. , 1 65 i , in-4' .: VI. Ob-
servat. ad Franc. Favassoris librum
déforma Christi , Rostock, 1666,
in-8'.; VII. Des Poésies latines, etc. ;
VIII. Une traduction en latin deï' His-
toire de TVallenslein , écrite en ita-
lien , par Gualdi, avec des Notes,
ibid.; 16G9. Josué Arnd était très-
versé dans l'histoire de la guerre de
trente ans. S — r.
ARND ( Charles}, fils du préce-
II.
ARN 5i3
dent, né en 167^. à Gustrou, mort
en 1721 , professeur de langue hé-
braïque à Lio/tock. Sa vie est racontée
dans hs yinnal. literar. Meklenburg.
ad an. 1721, p. 57—57. Les prin-
cipaux de ses ; uvrages sont : I. Sche-
diajma de Fhalaride , M. Antonini
scriplis et Agapeii Scheda regia,
Rosto-'k, 1702, in-.'^.'' .;M. Schedias-
ma Biblioikccœ grœcœ diffîcilioris ^
ibid. III. Bihliotheca polilico-heral-
dica, I 705, ir.-B'. : IV. Sjstema li-
terarium , compleclens prœcipun
scienliœ lilerariœ monwnenta , Ros-
tock, 17 i4 7 iu-4 '• Ch. Arnd est un
des créateurs de l'Histoire bihiiogra-
phique générale ; V. Dissert, philolo.
trigo. , I °. De cancellariorwn et
procancellariorum apud Hebrœos
f^estigiis ; 1°. De Apostolo Paido
Doctoris titulo condecoralo ; o".De
prœconiorum , promotiones hodier'
nas antecedentium, nidimentis apud
hebrœos , ibid.. r 7 14 , in-4°. ; VI. Il
y a plusieurs morceaux de lui dans les
'Miscellan. Lips. t. V, Mil, IX et
XI; VII. une Vie de son père. —
Arnd ( Godefroy ) a donné une Chro-
nique de la Livonie ( en allemand ),
Halle, 1747? et réimprimée in-fol. en
1755. S — R.
ARNE (Thomas-Augustin), mu-
sicien anglais , né en 1710, était fils
d'un tapissier de Covent-Garden. Il
était destiné au barreau ; mais un
coût irrésistible l'entraînait à l'étude
de la musique , et il s'v livra à l'insu
de ses parents ; il fit de si rapides
progrès qu'il fut admis , très -jeune
encore , comme chef d'orchestre , dans
la troupe de Drury-Lane. L'univer-
sité d'Oxford lui conféra , en 1759,
le degré de docteur en musique. Il
réunissait le talent de l'exécution à
celui de la composition, et il a formé
d'excellents élèves pour le chant. Le
docteur Burney lui accorde l'honneur
55
5 1 4 A R N
d'avoir introdait en Angleterre un
nouveau style musical , forme d'un
inelanp;e de style anglais , italien et
écossais. Ses cliniits patriotiques et
populaires sont aujourd'hui à peu près
tout ce qu'on connaît de lui , mais
sufQsent pour honorer sa mémoire.
L'espèce d'hymne surtout qui com-
mence par Ruîe, Britannia (Triom-
phe, Angleterre), est excculc dans
toutes les occasions où l'on veut cé-
lébrer quelque événement honorable
pour la nation , ou exciter le patrio-
tisme national. Les aulrcs ouvrages
de Thomas Arne sont la musique
de la Rosamonde , opéra d'Addi-
$on; du Cornus, de ]\Ii!ton, et de
\ Alfred, de M.diet, etc. On lui
doit aussi les opéras d'Jrtnxerce,
du Tuteur trompé, de la Base, et
autres, dont il a compose les paroles
«t la musique ; mais le talent du poète
y est fort au-dessous de celui du musi-
cien. 11 mourut en 1778, âgé de
.soixante-huit ans. Il était frère de la
célèbre actrice misîriss Cibber, dont
il guida les premiers pas dans la car-
rière du ihcàlre , et il avait épousé
«ne fameuse cantatrice dont il eut un
fils, Michel Auni:, connu par la iuu-
sique de qucl([ues opéras. S — d.
ARNHEIM, ou ARINIM (Jean-
George ) , général saxon , né en 1 58 r ,
dans rUckermarck , d'une famille
noble, entra d'abord au service de
Pologne, ensuite à celui de la Suède,
et passa, en \(h.6, d.uis l'armée de
l'empereur Ferdinand 11, où i! acquit
si bien la faveur du général Wallens-
tein, qu'en iC.*7, il fut fait feld-nia-
réchal, et chargé, eu iG).8, d'assiéger
Straisund. Forcé de lever ce siège, il
fut envoyé au secours de Sigismond
III, roi de Pologne. Des querelles qui
s'élevèrent entre les chefs polonais et
lui , l'engagèrent à se retirer du ser-
vice de l'empereur. Il passa alors.
ARN
avec le litre de feld-maréehal , à celui
de l'électeur de Saxe , et combattit
sous les drapeaux de Gustave Adolphe,
à la bataille de Breitenfeld : il prit Pra-
gue , Egra , E'iibogen ; mais il se vit
bientôt forcé, par Wallenstoin, d'a-
bandonner ses conquêtes. On l'accuse
de ne les avoir pas défendues. Un mot
pi(piant de Gustave -Adolphe l'avait
irrité, dit-on, contre ce roi et contre
les protestants; et, pour s'en venger,
il s'entendit secrètement avec les
impériaux; il fut soupçonné d'avoir
joué le même rôle dans la campagne
de Silésie; mais, lors([ue la guerre
recommença, eu i655, il s'opposa,
par une marche rapide, à Wallens-
ttiu , qui se dirigeait vers le Palatinat,
et protégea , avec autant de bravoure
que de vigilance, les frontières de l'é-
lecteur de lirandebourg. Au commen-
cement de rauuée if^>5j,, il fut em-
ployé pour les propositions de paix
que Wallenstein fit faire aux électeurs
de Saxe et de lirandcbourg , et qui
échouèrent. Arnheim rentra alors eu
campagne, prit Bautzcu, Limbourg,
et battit les impériaux à Liegnitz. Eu
1 G55 , il fut envoyé p.w l'électeur de
Saxe aux négociations de Berlin , et,
après le traité de Prague , il fit sortir
ses troujîes de la Silésie. Comme les
droits des luthériens ne lui parurent
pas assez respectés, assez assurés par
ce traite, il donna sa démission, et se
retira dans son château de Boitzen-
bourg, dans l'Ukcrmarck; il y fut saisi
et enlevé, le 17 mars 1637, par or-
dre du roi de Suède, qui le soupçon-
nait de former contre lui des complots
dangereux. On le conduisit d'abord à
Sletin, et ensuite à Stockholm; il s'é-
ehajipa de celte dernière ville en i658,
à la laveur d'une fête donnée à la
cour, pendant laquelle on le surveil-
lait avec moins d'exactitude. De retour
en Allcmague , il se tint caché quelcjue
ARN
temps dans une cabane de pêcbeur,
rentra peu après au service de l'élec-
teur de Saxe, alors allie de l'empe-
reur, et voulut lever une nouvelle ar-
mée. N'avant pas réussi , il tomba
malade à Dresde, et y mourut le i8
avril 164I. C'était un homme d'une
activité prodigieuse, prêt à la faire
servir aux intérêts de ses passions,
comme à ceux de son prince; sa tem-
pérance était si remarquable, qu'on
le nommait le capucin luthérien. Il se
distingua dans le nombre de ces géné-
raux qui, pendant la guerre de trente
ans , commandant des troupes à leur
solde et dévouées à leur personne ,
rendirent leur nom aussi redoutable
que leurs armes. G — t.
ARNIGIO ( Barthelemi ), né à
Brescia, ville de Lombardie, en iD^S,
dans la plus basse condition, fut un
des plus célèbres littérateurs de son
temps. Son père était forgeron, et lui
apprit d'abord cet état, qu'il exerça
jusqu'à l'âge de dix-huit ans. Alors,
poussé par son génie, il commença à
se livrer à l'étude des lettres, tirant
des secours , tantôt d'un de ses amis ,
tantôt d'un autre. Il parvint ainsi , non
sans peine, à se mettre en état d'en-
trer dans l'université de Padoue. Il y
étudia particulièrement la médecine,
et dut les movens d'v être reçu doc-
teur , à la générosité de quelques gen-
tilshommes de son pays, qui recon-
naissaient en lui des talents naturels,
et des dispositions extraordinaires.
De retour à Brescia, il s'y mit sous la
protection du médecin Conforto, qui
lui procura des pratiques utiles ; mais
de nouvelles expériences, qu'd voulut
faire, lui réussirent si mal, et il lui
mourut tant de malades , qu'il fut sur
le point d'être lapidé, et ne se sauva
que par la fuite. Abandonnant alors
la médecine, qu'il avait cultivée plus
par nécessité que par goût, il se livra
ARN 5i5
entièrement aux lettres, et surtout à
la poésie. Il séjourna quelque temps à
Venise et dans d'autres villes, où il
se fit un grand nombre d'admirateurs.
Il était retourné depuis peu de temps ,
dans sa patrie , quand il v fut attaque
d'une maladie contagieuse, dont il
mourut le cinquième jour, en 1377.
Ses principaux ouvrages imprimés ,
sont : I. Le Rime, Venise, i555,
in-8°. ; II. Lettera , Bime , ed ora~
zione, i558, in-4'., sans nom de
lieu ni d'imprimeur ; III. Lettura,
letta publicamente sopra il sonetto
del Petrarca ,
Liete . pensose , accompagnate , e soie ,
Brescia , 1 565, in-8 '. ; IV. Meteoria^
ovveTO discorso intomo aile impres-
sioni imperfette umide e secche , etc.,
Brescia , 1 568 , in-8''. ; à ce traité , le
plus ancien peut-être que les modernes
aient écrit sur ces matières , sont joints
des pronostics perpétuels , deafi'phé-
mérides , et d'autres appUcations plus
ou moins arbitraires de k philosophie
naturelle; V. Dieci Veglie degli am-
mendali costumi delV umana vita^
etc., Brescia, 1577. in-4""., ouvrage
de morale qui eut une grande répu-
tation , et qui en conserve assez pour
que l'on ait reproché à Fontaniiù de
ne lui avoir point donné place dans sa
Bibliothèque italienne; VI. la Medi'
cina d'Amure, citée par Mazzuchelli,
d'après plusieurs bibliographes, dont
il avoue qu'aucun n'atteste qu'elle ait
été imprimée. G — e'.
ARNISOEUS ( Hen-vi>-gus\ né ans
environs d'Halberstadt,dHns la Basse-
Saxe , étudia la médecine , et voyagea
en France et en Angleterre pour se per-
fectionner dans cette science. Il l'en-
seigna ensuite avec beaucoup de répu-
tation à Fr?*ncfort- sur -l'Oder, et à
Helmsdaet , au duché de Brunsvvick.
Arnisceus , poiu" suppléer a ce qui man-
quait à cette derriière université , y fit
55..
5i6 ARN
bâtir, à ses frais, un laboratoire de
chimie, et y créa un jardin botanique.
Pour remplacer les dissectiftus anato-
miqiics , qui ne s'y faisaient que très-
rarement, il avait fait, par ordre du
duc de Brunswick , vingt-cinq plan-
ches, repre'sentant les muscles avec
leur grandeur et couleur naturelles ,
mais qui n'étaient point assez nettes. 11
y en avait aussi de relatives au\ partips
sexuelles de la femme. En i65o,
Arnisœus quitta cette université' pour
aller occujicr la place de premier mé-
decin du roi de Danemarck, Cîiris-
tiern IV. Il n'eu jouit pas long-temps;
car il mourut en iG5t), Il a composé
plusieurs ouvrages sur la médecine, la
politiqiu" et la jiu'isprudence : I. Ob-
sen>atiojies aualomiccp ex q'tibus
conlrovers'ue multœ phrsicœ et me-
dicœ breviier deciduntur , Fiancof. ,
iG I o, in-4"., Helmstadt. 1618, in-4 ".,
avec ses Disquisitiones de partiis ter-
miniif^A. ce dernier ouvrage séparc-
mcnt, Fianciiort , t64^, in-i'2 ; 111.
Disputatio de lue venered cos^nos-
ceiidd et curundd , Oppenheimi ,
i6io,in-4°. ; IV. De observationi-
hus quibitsdam analomicis epislola,
qui se truuve parmi les Ohscr\ationi
médirlua'es de Gréguire Hi^rstius, qui
ont paru à L Im , eu i()-),8, in-4'*.;
V. De auctoritate prinripum in po-
pulum sernper imnolahili . Francfort,
lOia, in-4".; ^I- ^^ /'"'^ majes-
tatis , i655 , in-4''.; ^ i'- -^^ ^'^^'
jetione et exemptione clericorinn ,
it>i9. , in-l*^. ; Vlll. Lectiones poli-
ticce , in-4°. C. et A — >'.
ARNKIKL (Trogillus"), mort eu
1 -; 1 3 , surintendant des églises luthé-
riennes du Holstein , a bien mérite' de
l'ancienne histoire du Nord. La der-
nière édition de sa Religion des Cim-
bres païens ( en allemand) , a paru à
Hambourg eu i'^()3 . in-4 '• H '"^ ■'"^''^
donne i'Z/«(o//'e de lacom-ersiondes
ARN
peuples du Nord, accompagnée d'un
tnhleau de leurs mœurs, etc. ( eu
allemand) , et un grand nombre d' cui-
vrages de controverse et de piété. Nous
indiquerons encore son Traité DePhi-
losophid et Schold Epicuri , Kiel ,
iG-ji, in-4°. — Sou fils, Arxriel.
( Frid. ) , bourgmestre d'Appenrade ,
dans le Holstein, a publié, en alle-
mand , une Histoire intéressanîe de
X Etablissement du Christianisme
dans le Nord ( Gblckstadt , 1712,
in-4''.); elle ^■''^ ^n grande partie d'une
tendance polémique contre l'Historien
ecclé^iast. Godefroi Arnold. 8 — r.
ARNOBE , l'ancien , célèbi e apo-
logiste de la religion chrétienne, était
né a Sicque, en N uniidie, dans le 3'. siè-
cle. Chargé d'enstigner la rhétorique
dans sa patrie , son savoir et son élo-
quence lui acqnirent une grande répu-
tation. F'ansces premiers temps, l'es-
prit de Dieu ,dit Ori-^èue, frapp àt sou-
vent les âmes d'une impression subite ,
en songe ou en vision , qui les portait
à embrasser le christianisme. Arnobe,
pressé par une impulsion de cette na-
ture , dans laquelle il crut entcndiv la
vois du ciel, (|uitta aussitôt le paganis-
me; mais comme, dans ses leçons, il
s'éLiil fortement prononcé contre la
religion chrétienne, l'évèqne de Sicque
exigea, avant de l'admettre au bap-
tême, qu'il constitàt sa conversion
par quelque acte public. Ce fut pour
remplir cette condition qu'il composa
ses sept livres contre les Gentils; dès
lors l'F.giise lui ouvrit proniptcment
son sein. Trlthèine a prétend'i qu'il fut
par la suite élevé aux ordres sacrés.
Sun ouvrage , selon l'opinion la plus
probable , date du commencement
du 4*' siècle, .iu temps de la persé-
cution de Dioclétien. On croit que le
dernier livre ne nous est pas parvenu
dans son intégrité. La j reniière édi-
tiou est de Rome , 1 54.i , in-fol. , faite
ARN
sur un vieux manuscrit du Vatican ,
qui e^t m'tiiitenaut à la Bibliothèque
impériale (c'est le seul qu'on conuai.sse
de cet auteui-), plein de fautes qui ont
passe dans l'imprimé : on y donne com-
me iS*". livre de cet auteur l' Oclavius de
Minuiius Félix. Eliefut suivie de plu-
sieurs autres, à Baie, à Paris , à Hei-
deiljcrq; , oîi cîiaque e'diteur se donna la
lib rté de corriger le texte sur de sim-
ples conjectures. Fulvius Ursinus en
publia une nouvelle à Rome, en i583,
in-4''. , dans laquelle il réforma plu-
sieurs leçons que des personnes mal
intenlionnées y avaient insérées. Celle
de Leyde, en 1 65 ï , in-4". , revue par
Saumaise, est préféi-ée à toutes les
auties , à cause des notes de diffé-
rents savants qui y sont jointes , et
de la correction du texte. Saumaise
avait entrepris uncoramentaire sur cet
auteur. I^a mort l'arrêta dans son tra-
vail. Ce qu'il en avait fait a été pu-
blié par Fabricius , dans le second
tome des OEuvies de S. Hippolyte ,
Hambourg, 1718, in-fol. M. Te
Water , savant profi^sseur hollandais,
prépare une nouvelle édition d'Aruobe.
j.e Commentaire latin sur les Psau-
7Rf?çqni porte le nom de cet ancien ajio-
lo<;iste du cliristiaiiisme, est d'un auteur
du même nom qui a vécu dans le 5*^.
sièc!e. La profession d'Arnobe l'ayant
oblii;é de lire les auteurs pr;faiies an-
ciens (t modernes, il s'était rendu
très-habile dans la théologie païenne,
où il puisa depuis les arj^um'^nts qui lui
servirent à la terrasser; mais, comme
tous les nouveaux convertis, qui con-
naissent mieux le faible de la religion
qu'ils abandonnent, que les dogmes de
ci'lie qu'ils embrassent, il montre plus
d'habileté à combattre le paganisme
qu'à défendre le christianisme. 11 écri-
vit son ouvrage n'étant encore que
cathéciimène, avant d'avoir eu le temps
de s'inslruiie des dogmes de la reli-
ARN 517
gion. C'est ce déf lut d'instruction qui
l'a fait tomber dans quelques erreurs
si;r l'origine et la nature de l'arae, et
sur d'autres vérités importantes , très-
mal présentées dans ses livres ; mais
qui ne doivent pas tiner à c nséquen-
ce pour sou ordiodoxie , d'autant qu'il
ne s'est point attaché opiniâtrement
sux erreurs qu'on lui reproche , et
que, dans d'autres endroits, il s'ex-
plique plus exactement sur ces mêmes
vérités. Vossius appelle Arnobe le
Varron des écrivains ecclésiaîiques.
Son style africain est inégal, dur, en-
flé , et quelquefois obscur : on y re-
marque cependant une certaine élé-
gance , de l'énergie , des tours et des
raisonnements subtils ; il a du talent
pour une raillerie ingénieuse, dans la
manière dont il représente la théologie
païenne , ne se permettant jamais au-
cune satire personnelle. D. le Nourry,
D. Cellier , et le père Merlin , dans le
Journal de Trévoux, ont justifié Ai'-
nobe des erreurs que Bavie lui impute.
— Arnobe le jeune, dont nous avons
parlé , fut moine à Lérins ou à Mar-
seille. Il attaqua vivement 1 1 doctrine
de S. Augustin. Son Commentaire sur
les sept Psaumes a été souvent réim-
primé. T — D.
ARNOLD , archevêque et électeur
de Mayence, élu en l'an 1 153. Quel-
ques historiens prétendent qu'il était
d'abord prévôt de Maycncc, et qu'ayant
été envoyé à Rome par l'aixlievêquc
Henri! '..pour défcndrecelui-ei contre
des accusations qui avaient été portées
devant le pape, il corrompit dux car-
dinaux , et fît si bien que le pape dé-
posa Henri , et nomma Arnold à sa
place. S'il est vrai qu'il fût parvenu à
ce haut rang par une semblable per-
fidie , il eu fut cruellement puni : à la
suite d'une violente discussion qu'il
eut avec les bourgeois de Mayence ,
au sujet de certains privilèges , il fut
3i8 ARN
massacre par le peuple , dans le cloître
de St.-Jacques ; son corps , après avoir
été traîne nu dans les rues , fut jeté
sur un tas de fumier, rais en morceaux
et enseveli sans honneur. L'empereur
Fre'déric l". , auprès duquel il jouissait
d'ure grande faveur, tira de ce meur-
tre une vengeance non moins cruelle:
s'ëlant rendu à Mayence, trois ans
après, il condamna à mort les trois
principaux chefs de la sédition , fit
raser les remparts et le cloître de St.-
Jacques , anéantit tousles privilèges de
la ville , et la convertit en une vaste
sohtude : elle resta trente-six ans dans
cet état. Christian II, l'un des succes-
seurs d'Arnold, a écrit sa vie. G — t.
ARNOLD ( Nicolas ) , naquit à
Lesna , en Pologne , le 17 décembre
j6i8. Après avoir étudie avec succès
sous les plus habiles maîtres de Lesna
et de Dantzick, il fut placé, en i63() ,
à la tête do l'école et de l'église de
.lablonow. Les talents qu'il montra
dans cette place engagèrent ses supé-
rieurs à l'envoyer dans les universités
c'irangères , afin qu'il y trouvât , pour
perfectionner ses études , les secours
qui lui manquaient dans sa patrie. En
1641 .il arriva à Franecker, et sui-
vit les leçons de Makowski, du fameux
Cocceius , de Vedel , de Cloppenburg.
Il alla passer, en 1645, quelques
mois dans les universités de Levde,
de Groningue et d'Utrecht, pour y
écouter Voet, Sitanhcira , et quelques
autres savants théologiens. On lui
confia, en i645, la direction d'une
petite église hollandaise, à laquelle il
s'attacha tellement , que des ofiTies
^plus brillantes ne purent la lui faire
quitter. Cocceius ayant été appelé par
l'iuiiversilé de Leyde , la chaire de
ihéologie qu'il occupait à Fianecker
resta vacante ; les magistrats la don-
ïièrent à Arnold , en i()5i , et, trois
ans après , ils y joignirent la place de
ARN
prédicateur académique. Arnold, qui
possédait parfaitement le hollandais ,
et s'était, dès les premières années de
son séjour en Hollande , exercé avec
succès au ministère de la parole , se fit ,
dans ces nouvelles fonctions, une fort
grande réputation. Ses ouvrages sont
écrits en latin , et appartiennent pres-
que tous au genre dogmatique et polé-
mique; H suffira d'en indiquer quel-
ques-uns : L Scoyœ dissolutœ H.
E c hardi , Fran. i654, iu-8'. ; II.
Lux in ienebris , etc. , ou Défense et
conciliation des passasses delà Bible
dont les sectaires se servent pour
établir leurs erreurs , 'x\o\. in -8".,
Fran. , 1662 ; et i665 , in-4''. ; HL
Atheismus Socinianus J. Bidelli
refutatus , Fian. , i65p , in-4°. ; IV.
Oraison funèbre de Christ. Schota-
nus , professeur à Franecker , Fran. ,
1671 , in-fol. Arnold mourut le i5
octobre 1680. — Michel Arnold , un
de ses fils, mort le .18 mars 1708, à
Harlem , où il était ministre du Saint
Evangile , a publié , en 1 680 , à Fra-
necker : Codex Talmudicus Ta-
viid. , etc. , avec une traduction et un
commentaire. Cet ouvrage a été insé-
ré dans le tome V. de la Mishna de
Surenhusius. On connaît encore de
lui, en hollandais, des Méditations
chrétiennes , Harling, 16S7 •. «o-i^ ;
et une Oraison funèbre du prince
Henri Casimir, Lemv., 1697 , in-4".
B— ss.
ARNOLD ( Christophe ) , philo-
logue, né en 1627 , mort à Nurem-
berg , professeur d'histoire , d'élo-
quence et de poésie. Il eut des rela-
tions avec les savants les plus distin-
gués de son temps ( f^oy. sa vie dans
Will , Dictionnaire des savants de
Nuremberg ). On y trouve un cata-
logue de ses nombreux écrits; celui
qu'ortie Adelung est plus complet.
Nous n'mdiquons ici que les plus re-
ARN'
marquables : I. Fal. Catonis gram-
matici dirœ ciim commenlario peiye-
tuo , Leyde , 1 652 , édition très-rare ;
II. Or. de Jano et Januario ; 111.
Ornatus liiiguœ latince , imprimé
quatre fois à jSuremberg; IV. Tesli-
monium Flavianum de Christo , liv.
18, Antiq., c. 4> Nuremb. , 1661 ,
in- 12. Ce sont trente dissertations en
forme de lettres , que Havercamp a
insérées dans le 2*. volume de son Jo-
sephe, V. De Parasitis , en tête de
ÏEpulum parasiticinn, ib. , i665 ,
in- 1 •! ; VI. Notœ ad Jo. Eph. fFa-
genseilii coinmentarium in Sotam,
iJï., 1670, in-/|".; Vil. Ses Lettres à
Nicol. Heinsius se trouvent dans la
collection de Burmann, t. V. S — R.
ARNOLD (GoDEFROi), théologien
de la communion de Luther, et his-
toriographe du roi de Prusse, Frédé-
ric r '^. , naquit, le 5 septembre 1 665 ,
à Annaberg, dans l'Estzgcbiirg. Il fit
ses études à Géra et à Wittenberg, fut
nommé professeur d'histoire à Giessen;
mais résigna presque aussitôt cette
place par des motifs de piété dont il
rendit compte au public , en 1 698 ,
dans un écrit parliculier, remplit en-
suite les fonctions de pasteur à Alt-
staedt , dans le duché d'Eisenach , à
Werben et à Perleberg, dans la mar-
che de Pricgnitz, et mourut, le 2,0
mai 17145 de douleur d'avoir vu des
recruteurs prussiens entrer dans l'égli-
se où il administrait le St-Sacrement,
et enlever de force plusieurs jeunes
gens de sa paroisse. Avant de mourir
il exprima à un de ses amis le regret
d'avoir écrit le livre mystique intitulé :
Sophia, ou Mystères de la sagesse
divine, Leips., 1700, etArasterd.,
i702,-in-8°. (cnallera.), et de n'avoir
pas rédigé avec plus de circonspection
sa grande Histoire de l^ Église et des
Hérésies. Ce dernier ouvrage , qui
comprend tous les siècles chrétiens
ARN 5iç)
jusqu'à l'an 1688, et qui parut pour
la première fois à Fraucfort-sur-le-
Mein, en 1699 — 1700, en quatre
parties (2 vol. in-fol.), et augmenté
à SchafThouse , de 1 740-42 , en 5 vol.
in-fol. , a fait sa réputation et ses mal-
heurs. Les théologiens orthodoxes ne
purent lui pardonner ses diatribes
contre le clergé dominant , et sa pré-
dilection pour tous les sectaires qui
avaient, soit par ignorance, soit dans
des intentions pieuses , essayé de dé-
pouiller la doctrine chrétienne de tou-
tes les subtilités de la dogmatique, et
de la réduire à la morale évaugélique
en préceptes el en action. 11 est pi-o-
bable que les conférences de Spener
sur la religion , connues sous le nom
de Collegia pielatis , entretiens aux-
quels Arnold avait assisté à Dresde ,
en 1686, curent une grande part à la
direction que prit son esprit. Le judi-
cieux Mosheim , qui parle durement
d'Arnold, ne paraît pas avoir app r-
té, dans son jugement, l'équité qui le
distingue ; il a trop vu ce qui man-
quait à Arnold , comme logicien et
comme historien , et trop peu ce qui
enflammait l'homme uniquement oc-
cupé des progrès de la piété. Voy. Ins-
til. Hist.Eccles., Sœc.XP^li, sect.
2, pars 2, c. I, vol. Sa, pag. 948ct
suiv. Ce serait faire toit à Arnold que
de le confondre avec les fanatiques
ignorants qu'il s'est plu à vanter. 11
avait fait d'excellentes études , et con-
naissait bien toutes les sources de l'é-
rudition. Son tableau de la Foi et de
r Amour des premiers Chrétiens
( Francfort-sur-le-Mein , i G90, in-fol.,
et pour la sixième fois, Lcips., 1740,
in-4''. ), peut être taxé de partialité;
mais on doit y reconnaître des re-
chei'ches savantes et une sagacité rare.
Les mêmes défauts et les mêmes qua-
lités se font remarquer dans son His-
toria et Descriptio théologies nrys-
5 10 A R N
ticœ , seii theosojiîdœ nrcanœ et
recunditœ , itenujut veteruiii et no-
voriim mjslicorum , FmiicF., 1709.,
in-8''. Ou |if'ut faire des lopruc lies plus
graves à sou Tableau du Chrhtia-
jiisme intérieur ( eu allem. , Francf. ,
ï-yOi), iu-4"., et plusieurs fois depuis).
C'est tout siraplemcut une exposiîion
de sou système mystique , bien que
l'exaltation s'v fasse moins apercevoir
que dans la Sophia que nous avons
dcji citc'e. Parmi ses nombreux ou-
vrages, on remarque encore : I. Chris-
lianornm ad metalla daiimatonim
historia que l'illustre Clirelieu Tho-
juasius , ami zc!c d'Aruold , auquel il
fournit beaucoup de matériaux pour
sou Histoire des Hérésies , a insérée
dans sou Historia sapientiœ et stul-
tiliœ , tome III , art. 7 ; II. Sa Fie a
été écrite par lui-même en allemand
(Leips., 1716, in-4'\), ft en latin,
par Jean -Christophe Colerus ( Wit-
Icnb., 1718, ii)-8°.). S — R.
ARNOLD (Christophe), paysan
de Sommerfcld dans les environs de
Leipzig, vécut et termina sa vie dans
son village. 11 fil des proji;rcs eu as-
tronomie tels, que ses observations
de la cymcîc do i685 , de celle de
1 (580 , et du pissage do Mercure en
1690, attirèrent l'attention des as-
tronomes. Le magistral de Leipzig lui
fhnuia plusieurs marques de cuusidé-
lati II ; son portrait est à la biblio-
thèque du conseil de cette ville. Il
naquit en i65o,et mourut en 1G97,
après avoir fait de nombreuses ob-
servations astronomiques et météoro-
logiques , dont uue partie fut , par lui,
remise à l'astronome Godefroi Kirch ,
et le reste déposé dans cette bibUo-
ihèque. S— a.
ARNOLD ( Samuel ) , musicien
organiste , et compositeur de la cour
du roi d'Angleterre, né en Allemagne,
tt uioit à Londres, le 'rx octobre
ARN
1 8o'2 , à l'âge de soixante-trois ans. Il
a donné, sur les théâtres de celte ville,
un très -grand nombre d'ouvrages,
dont quelques-uns sont conservés. On
estime surtout son Oratorio A^Xa Gué-
ris07i de Saïd, exécuté en 1707,61
celui de la Bésurrection , exécuté en
1770. Ces deux ouvrages eurent le
plus brillant succès ; les chœurs du
premier sont regardés comme ce
qu'Arnold a produit de plus beau. 11
a en outre publié, à diverses époques ,
quinze volumes d'ariettes , de canons ,
de sonates , d'ouvertures et de concer-
tos pour le clavecin. Il était un des
disciples et des gdmirateurs de Haeu-
del. Il se chargea , en 1 7SO , de l'édi-
tion des ouvrages de ce célèbre com-
])0siteur, arrangés pour le clavecin.
Les opéras italiens de Hîendel ne font
point partie de ce magnifique recueil.
P-x.
ARNOLD ( BE^oÎT ) , l'un des gé-
néraux les plus célèbres de l'armée
amérii aine , pendant la guerre de
l'indépendame des Ltats-L'nis, fai-
sait , avant cette époque , le com-
merce de chevaux, il embrassa, avec
ardeur , le parti de la révolution. Son
audace le fit bientôt distinguer : il ue
tarda pas à être nommé colonel , se
trouva à la prise du fort Ticondé-
roga, et fit partie, pen de temps après,
de l'oxpédilion du Canada, rta mar-
che , dans le cours de l'hiver , à
travers les montagnes iuhabiléos du
]\laine , est une des entreprises les plus
hardies que jamais chef militaire ait
tentées. 11 commandait un détachement
de l'armée du congrès , qui donna
l'assaut à Québec , dans les derniers
jours de 1 '■70. Arnold fut blessé dans
cette occasion , et obligé de se retirer
du combat. Par suite de sa blessure ,
et par la mort de Montgommery ,
l'assaut n'eut point de succès. Dans
un combat naval qu'il livra aux An-
ARN
glais , sur le îac Cliamplain, il soutint
sa réputation militaiic ; et il ut , sous
les ordres de Gates , îles prodiges de
valeur dans deux batailles sanglantes,
que celui-ci livra au général anglais
Bin-goyne sur les bords de la rivière
du Nord, en 1777. On lui doit, en
grande partie , le succès de ces deux
journées, qui obligèrent toute l'araiée
anglaise à mettre bas les armes. Ar-
nold lut uoînnié commandant de Phi-
ladelphie , lorsque les Anglais eurent
évacué cette place en 1 778 ; mais ce fut
alors qu'il commença a se faire remar-
quer par une conduite qui contrastait
vivement avec les mœurs de son pays
et avec les circonstances où se trou-
vait sa patrie. 11 faisait tous les jours
une dépense énorme en dîners , eu
bals , en concerts , et montrait une
insolence à laquelle on n'était pas
accoutumé, t'mioiguant les plus grands
mépiis pour l'autorité civile. Ses dettes
s'accu m nièrent, et il fut accusé de pé-
culat par l'assemblée de Pensilvanie.
On le condamna à être réprimandé
par le général Washington. Son ame
altière ne jnit supporter un pareil af-
front : ce fut alors qu'il forma le projet
detrahii sa patrie cl de se vendre aux
Anglais. 11 demanda et obtint le com-
mandement du poste im])ortant de
West-Poiut, situé dans le voisinage
de New-Yorck, quartier-général de
l'armée anglaise. Une correspondance
s'établit bientôt entre lui et le général
anglais Clinton , par l'intermédiaire
du major André, aide -de -camp de
ce dernier. André lui-même vint
trouver Arnold à West-Poiul : le pro-
jet était de livrer cette place aux An-
glais, et de faire prendre, au corps
d'armée commandé par Arnold , une
posilion telle , que l'armée anglaise
pût le surprendre, le faire prisonnier,
et s'emparer de toutes ses armes et
de ses munitions ; mais le major Au-
ARN Su
drc est arrêté en retournant à Ncw-
Yorck , et la trame est découverte ;
Arnold , ayant eu le temps de se sau-
ver auprès de Clinton , publie deux
manifestes, et attribue son climge-
mcnt d'opinion à la déclaration de
l'indépendance , et à l'alliance avec la
France, quoiqu'il eût continué à ser-
vir sous les drapeaux du congrès,
long-tem])s après ces deux événe-
ments. H fut nommé major-général
dans l'armée anglaise ; mais il ne fît
plus la guerre qu'en brigand ; il brûla
et dévasta un pays qu'il avait si bien
défendu. Après le traité de paix , qui
reconnut l'indépendatice des Etats-
Unis , il vint en Aiigleterre , où il
mourut à la fin du iS''. siècle, uni-
versellement méprisé. B — a.
ARNOLFE , ou ARNOUL, de Mi-
lan , et historien milanais , vivait à
la fin du ij''. siècle. 11 se déclara
d'abord pour le mariage des prêtres ;
mais ensuite il se rapprocha , sur ce
point , de l'Eglise romaine. Il était
petit-neveu d'un frère d'Arnolphe ,
archevêque de Milan dans le 10*.
siècle : ce qui a fait dire , par une
bévue plaisaute , dans un article sur
notre Arnolfe , que , dans ses opi-
nions sur le mariage des prêtres , il
n'avait plu ni à la cour de Rome, ni à
son oncle, archevêque de Milan (qui
était mort depuis près d'un siècle ). Il
a composé une Histoire de Milan de-
puis gy.5jitsquen 1 077, remarquable
par lafîdélité etl' exactitude. Elle parut
d'abord dans le ô". vol. Scripiorum
Reriim Brunswic. de Léibnitz, 17x1;
puis dans le 4"- du Thesaur. Antiq.
liai, de Rurmann , 1722, et enfin,
dans le 4". du Eer. Ital. scriptor. de
Muratori. Cette dernière édition est
préférable aux autres, ayant été con-
frontée avec quatre manuscrits au-
thentiques , et accompagnée de sa-
vantes notes. G— fi.
5^1 ARN
ARNOLFO Dl LAPO , arcliitecte
et sculpteur , originaire de Colle di
Valderso, naquit eu laSi. Sou père,
également architecte , fit le modèle
de l'cglise de St. -François d'Assise ;
il fonda, en 1 218, les piles du pont
à la Carraya, à Florence , qui fut fiui
en bois , comme c'était alors l'usage.
Ce fut encore lui qui pava la ville avec
de larges dalies. Les rues ne l'avaient
e'të jusque-là qu'en briques posées
sur champ. Arnolphe apprit de son
père les principes de l'architecture et
le dessin sous Qraabue' ; il consulta
ensuite les modèles antiques ; dès-
lors . il commença à s'écarter de la
manière gothique, et contribua à faire
renaître le bon goût ; en un mot , il
rendit à son art le même service que
la peinture devait à Cimabué. En
i'284, il fonda la troisième enceinte
des murs de Florence qu'il flanqua
de tours , et , en 1 294 , l'église de
Ste.-Croix , où l'on voit sou portrait
de la main de Giotto. Il construisit
aussi la place appelée Or San Mi-
cliele , la loge et la place des Priori,
l'église de la Badia, et le palais de'
Signori , actuellement appelé le Pa-
lais fleiix, sur le plan d'un édifice
que son père avait projeté, et enfin,
une foule de palais , de châteaux forts
et d'autres monuments. Son dernier
ouvrage est un pont tri'S-hardi , et
d'une seule arche, sur la rivière d'Ersa,
à l'endroit où se croisent les routes
de Florence à Sienne et de Colle à
Voltorre ; mais rou\Tage qui a im-
mortalisé le nom d'Arnolphe est la
fameuse église de Santa Maria del
Fiore , cathédrale de Florence, l'un
des plus vastes édifices modernes, et
qui suppose , dans celui qui en doima
le plan , uu génie hardi et qui avait
devancé son siècle. Il ne vécut point
assez pour achever ce monument ;
mais il fit une grande paitie du revè-
ARN
tissement extérieur , éleva le pour-
tour des murs, et banda les quatre
grands arcs qui devaient recevoir
cette fameuse coupole dont l'honneur
était réservé au célèbre Brunelleschi.
On peut dire que cet édifice, anté-
rieur au renouvellement de l'architec-
ture , fait époque dans son histoire ,
en ce que , tenant le milieu entre le
stvie gothique , qui avait régné jus-
qu'alors , et le style antique qui bien-
tôt reparut, il sert à maïquer la nuance
du passage d'un style à l'autre. Ar-
nolphe, auquel tant et de si impor-
tants ouvrages avaient mérite le titre
et les droits de citoyen de Florence y
termina sa carrière, l'an i5oo, âgé
de soixante-huit ans. C — n.
A.RNOUL , empereur , successeur
de Charles-le-Gros , son oncle , était
fils naturel de Carloraan , roi de Ba-
vière, et petit-fils, par conséquent,
de Louis-le-Germanique. Il commença
par être exclu de l'héritage de son
père , en 882, à cause de l'illégifimité
de sa naissance; mais, six ans après,
il succéda à Charles-le-Gros , qu'il
avait fait déposer à la diète de Tri-
bur. Arnoul eut plusieurs guerres à
soutenir , et fut presque toujours vic-
torieux. Allié du roi Eudes , il défit
les Normands près de Louvain, en
892. 11 jiassa en Italie l'année sui-
vante, vainquit le roi Guy, qui lui
disputait la souveraineté de cette con-
trée , s'empara de plusieurs villes, et
se fit couronner roi d'Italie, à Pavie.
Peu de temps après , assisté par les
Hongrois , il attaqua Zwentcbold , roi
de IVioravie , auquel il avait conféré le
duché de Bohême , et qui abusait de
cette faveur pour essayer de se rendre
indépendant. Arnould força Zwcn-
lebold à se soumettre et à se recon-
naîtra son tributaire. En 895 , Hil-
degarde , sa cousine , qui l'avait aidé
à monter sur le troue , tenta de l'co
ARN
renverser. Cette conspiration fut clé-
couverte, et Hildegarde exilée. Ar-
ïioui retourna en Italie , pénétra jus-
qu'à Rome, et le pape Forinose le
couronna empereur ; mais son élec-
tion et son sacre furent annulés par
le concile de Rome , en 898. Arnoul
mourut à Ratisbonne , le 29 novem-
bre 899 , empoisonné , à ce que plu-
sieurs historiens prétendent. On voit
encore son tombeau dans une église
de cette ville. Il eut deux enfants
légitimes, Ghismute ou Ghismonde,
qui fut mère de Conrad 1". , et
Louis IV , qui succéda à son père.
11 eut aussi trois eufcuits naturels ,
dont l'aîné , nommé Zwenlebold ,
fut roi de Lorraine. B. C — t.
ARNOLPHE , ou ARNOUL , de
Calabre , écrivain du i o'". siècle , a
laissé une Chronique historique de
son pays , depuis goS jusqu'en 960.
Taffuri l'a publiée dans le vol. W.
de son Histoire des écrivains du
royaume de Naples, sous le titre de
Chronicon Saracenico- Calabrum.
G— É.
ARNOUL, ou ARNULPH, évêque
de Rochester , sous le règne de Hen-
ri P"". , était né à Beauvais , vers l'an
lODo. Il passa en Angleterre à la sol-
licitation de Lanfranc , archevêque de
Cantorbéry , sous la discipline duquel
il avait été dans l'abbaye du Bec; et il
ne tarda pas à être appelé au siège
de Rochester. Imbu de la supersti-
tion de son siècle , il raconta aux
moines , le jour de son élection ,
que , peu de temps auparavant , Gon-
dolphe , l'un de ses prédécesseurs,
lui était apparu pour lui offrir un an-
neau pastoral d'un grand poids ; que
d'abord il avait refusé cet anneau com-
me trop fort pour lui , mais que Gon-
dolphe l'aA'ait obligé de l'accepter,
puis s'était dérobé à sa vue ; et les
religieux le prièrent , au moment où
ARN 5a5
il devait être consacré, de prendre
l'anneau donné réellement par Gon-
dolphc à Ralph, prédécesseur immé-
diat d'Arnoul. Ce prélat a écrit VHis-
toire de V Eglise de Rochester , con-
nue sous le titre de Textus RofjensiSy
dont W arton , dans son Anglia sacra^
a donné un extrait. On a encore de
lui un Traité De incertis nuptiis , et
un autre contenant des Réponses à
diverses questions de Lambert, abbé
de Munster , principalement sur le
corps et le sang de N.-S. J.-C. Il
mourut e; 1 124? âgé de quatre-vingt-
quatre ans. L — P — E.
ARNOUL DE LENS. Fo^. Lens.
ARNOUL de Milan. F. Arnolfe.
ARNOULD ( Sophie ) , actrice de
l'Opéra , à Paris , débuta le 1 5 dé-
cembre 1 757 , et dut à une voix tou-
chante , à une sensibilité vraie , l'a-
vantage d'être reçue dès l'année sui-
vante : elle joua les premiers rôles
jusqu'en 1778, époque de sa retraite,
et se distingua surtout dans celui de
Thélaire , de Castor et Pollux ; dans
ceux d'Ephise , de Dardanus , et d'/-
phigénie en Aulide. On assure que
dans un voyage que Garrick fît à
Paris , ce comédien donna les plus
grands éloges à M^^^ Arnould; Dorât
l'a célébrée dans son poème de la
Déclamation. On cite une foule de
bons mots de cette actrice , mais la
plupart sont d'un cynisme qui les exclut
de cet ouvrage. Malgré le mordant de
ses saillies, elle n'eut point d'ennemis et
laissa de justes regrets à ceux qui l'a-
vaient connue. Une dame, qui n'était
que jolie , se plaignait d'être obsédée
par la foule de ses amants : « Eh ! ma
» chère, lui dit M^^* Arnould, il vous
)) est si facile de les éloigner ; vous
» n'avez qu'à parler. » A une époque
où un Iwimme de qualité, fort riche,
était son amant en titre , il la surprit
eu tête en têlc avec uu cheyalier de
5ii ARN
Blalte, et voulut se fâclicr, quoiqu'il
fùl lui-uiêine très-connu par sa légè-
reté et son inconstance. « Votre pro-
» ccdé est Hijuste, dit M'^\ Aruould ,
» monsieur accoii>plit son vœu dechc-
» valier de Malte ; il fait la guerre
» aux infîdè'ts. » Une cantatrice assez
médiocre , et qui av?it un organe
rauque et commun , fut un jour très-
mal accueillie dans le rôle de Clitem-
nestre : « C'est étonnant, dit M"'".
V Arnould, cileaccperdant la voix du
» peuple. » Ayant acheté , dans les
premières aimées de la i( voluiion ,
pour eu f ire sa maison dt- camp.igne,
le petit presbytère de Luzarclie , elle
fit mettre sur la poi-te d entrée : Ite ,
missa est. Ces saillies prouvent plus
d'esprit que de respect pour les con-
venances : nous tel minerons ptp un
mot qui, du moins, n'a p.is le défaut
qu'on peut reprocher aux autres. Elle
dit à quelqu'un qui lui montrait une
boîte sur laquelle la flitteiie avait
accolé au portrait de Sul! celui du
ministre Clioiseul : « C'est la recelte
w et la dépense. » M"^ Arnould était
née à Paris le 14 février 17 44 1 ^l^ns
la chambre où l'amiral C/^ligiiy avait
été massacré. Elle est uu rte eu 1 8o3.
Elle a fourni aux auteurs du Vaude-
ville le sujet d'une petite pièce. I* — x.
ARNOULT (Jean-Baptiste), ex-
jésuite, né en 1G89, et mort à Besan-
çon, en 1755, a composé quelques
ouvrages assez singuliers. Le preniit r
est un Recueil de proverbes français,
i'aliens et espaguols , iniitulé : Traité
fie la prudence , pclit ouvrage assez
rare ( Besançon ), i 755, in- 1 a. L'au-
teur se cacha sous le nom d'./ntoine
Dumont, pour éviter les desagréments
que n'auraient pas manqué de k)i atti-
rer les ])laisantcries qu'il s'était per-
mises contre les jansénistes, puissants
à cette époque. Il publia, en l']'^^i,
ious le même uom, eulatiu , im Traité
ARN
de la grâce. Son ouvrage le plus con-
sidérable est intitulé : le Précepteur ,
c'est-à-dire huit traités , savoir : une
Grammaire francese, une Ortografe
fraiwèse , les Éléments de V Arith-
métique^ un Abrégé de la Cronolo-
gie , de la Géografie, les Eléments
de la Religion crétienne , et VArt de
se santifier, i-i.'jo ( Besançon 1 747 )•>
iii-4 '• Suivant M. Sabatliier, cet ou-
vrage est mal écrit, mais il contient des
réflexions utiles. L'abbé Arnoult atta-
chait beaucoup d'importance à ses
id"'es sur la réforme de notre ortho-
graphe; et il >se proposait de les ap-
piiqiier dans jiis éditions qu'il prépa-
rait des Di<li(^naires français-larin, et
latin-frauçais, d'- Joubert et Uanet Ce
projet n'a nas eu de suite. \\ — s.
AKNTZENIUS ',Jeax), né à We-
sel, en s 7» a, eut pour père Henri
Arnîzénius , (ju! , après avoir été suc-
cessivement directeur des gymnases
de VVesel , d'Arn! eim et d'L'trecht ,
mourut en 17^8. Arntzénius joignit
l'élude de la jurispinidence à celle des
lettres. I! suivit à l'université d'Utrccht
les leçons de Drakenborck et de Du-
ker;à Le\de, cel.es de i'.Buimann
et de Havercamp. Ses cours n'étaient
pas encore finis , quand , ^ur son ex-
cellente réputation , les magistr ts de
Mmègue lui oflVirent la direeîion des
petites écoles de leur vi'.le. Avant d'en-
trer en fonctions, il prit à Utrecht le
d'gré de rloct ur eu dr. it, et soutint,
pi ur ce gr.ide , en juillet 17'i'^,
une thèse : De nvptiis inter fratrem
et sororem , imprimée à Nimègue,
cette même année. En 1718. il fut
nommé professeur d'histoire tt d'élo-
quence à l'athénée de?^iinègue; et, en
1 7 \i , l'université de Fianecker lui
donna la chaire de Burmann. O phi-
lologue estimable a 'ai<sé plusieurs ou-
vrages, dont voici l'iniHcation L Dis-
sertaliones de colore et iinclura co-
ARN
marum et de ci,>itale Romana Apos-
toli Pouli , L'trecîit , i "/lô , in - 8 \ ;
II. Orat. de delectu scriptoriim qui
juventuli iji scholisprœlegefidi <:unt,
iSiintg, , 1-^6, in-4'. ; Hi. Orat.de
caussis corruptc? e/oqueniie. Niîuèp;.,
1 7'>8 , iii-4 '• ; IV- une éditiou de iffic-
toire Romaine de S. Aureliiis Victor,
Am.^t. , 1-35 , in-4 . ; V. une édition
du Paiiéf^rrique de Pline , Âmst. ,
1 708 , in-4". ' VI. une édition du Pa-
né jj'rique de Pacatus , Amst. , 1755,
in-4''.; VII. il a dirigé une réimpres-
sion des Scmestria de Faur de St.-
Jorrv, Franeck., 1757 ,in-f()l.;VIÏI.
SCS Poèmes latins , et trois Discours
ont été publiés après sa mort , par son
fils , 11. J, Arnîzénius , Leuw. , 1762,
iu-S". 11 mourut en i75<> B — ss.
ARNTZ EM US ( Otbon 1 , frère du
précédent, naquit, en 1705, à Arn-
heim . et mourut en 1 765. Il professa
les belles-lettres d'abord à Ltrcclit ,
puis à Goude , ensuite à Deift, enfin ,
à Amsterdam. Son premier ouvrage
est une dissertation De milUario au-
reo , Utrecht , 1 728 , in - 4'- ■< léim-
primée dans le Trésor de disserta-
tions choisies , de Gérard OEIrichs ,
Leipz. , 1769. En 1755 , il donna , à
Utreclit, une bonne édition Variorum
des Distiques de Calon ; elle reparut
à Amsterdam, 1704 , laueinentée de
deux Dissertations de Witliof sur
l'aiiteur et le texte dés Distiques. On
connaît encore de lui quelques hiran-
gués académiques : Pro latina erudi-
torum lingua , Goude , 1757, in-4°.;
De gTiSca latini sermonis origine,
etc., Deift, 1741, in-4°.; De ^Mer-
curio, etc. , Amst. , 1 746 , in-4". Ses
remarques et ses corrections sur le
Pseudo - Hégésippe sont restées ma-
nuscrites enlre les mains de J. H.
Arnîzénius son neveu. B — ss.
AR iNTZEN! US ( Jean-Hexri> , fils
de Jean Arntzénius , naquit à Nimè-
AEO 5-25
gue, en 1734. Il suivit, comme son
jière et son oncle , la carrière de l'é-
ducation piddiqup ; et , après avoir pro-
fessé dans les écoles de Leuwarde et de
Z'.Uplien. i! obtint une cb,nre de droit
daus T'iuiversité de Groningue, d'où il
passa à ce-Je d'Utrecht Ses oiivriges
sont nombreux ; nous nousb.rijerous
à indiquer les plu- intéressants : I. une
Dissertation philologico -juridique,
sur la loi: De in jus vocando , Fra-
neck. , 1755, iu-4''. : elle a été réimpri-
mé'' à la suite de ses Miscdlanea ; IJ.
un Discours surV Importance des ins-
criptions et des pierres savantes, [ la-
pidum eruditorum^, Leuw., 1-60,
in-4''.; Ill- une édition des Poéiies
de Sedulius , avec les notes f'ario-
nim, Leuw.. 1761 , in-8 . — un Dis-
cours De Natalibus et incrcmentis
Gymnasii Leovardiensis , Leuw. ,
1762, in -4°.; IV. Miscellanea ,
Utrecht, 1765, in-8'.; V. une édi-
tion des Poésies d' Arator , Zutph. ,
1769, in-8'.; VI. un discours De le-
gibus quibusdam regiis , civdis apud
Romanos sapientice fonte , Gron. ,
1774, in-4°. ; VIL Institntiones Su-
ris Bel^ici , Gron., 1785, et la se-
conde partie, Utrccbt, 1788, in-8'.;
VIll. une édition des Pancgrrici
veteres, -i vol, iri-4"., Utrecht, i 790,
1 797 ; IX. une Lettre critique^ adres-
sée a Ruard, sur Pindare- Thebanus.
Il est mort le 7 avril 1797, avec la ré-
putation de philologue laborieux et
savant. B — ss.
AROMATARI ; Joseph de gli }, sa-
vant médecin, naquit à Assise, vers l'an-
née 1 580. Son père, qui était écjalemeiit
bon médecin , ne négligea rien pour
lui donner luie éducation convenable
à l'état qu'il voulait lui fiire cmbras-
Sf^r. Après avoir commencé ses études
à Pérouse , le jeime Aro taalaii eut des-
sein de les al'er tcra; :er à la célèbre
université de Montpellier; mais i! fut
526 A R 0
retenu à Pacloue , où il e'tudla succes-
sivement la logique , la philosophie et
la mëde('iiie. Ayant obtenu le doctorat
à dix-huit ans , il alla pratiquer à Ve-
nise, où il exerça pendant cinquante
ans. 11 n'en voulut point sortir, maigre'
les offres avantageuses qu'il reçut du
duc de Mantoue , du roi d'Angleterre ,
et du pape Urbain VIII. 11 y mourut,
le 1 6 juillet iG6o.Aromatari avait ras-
semble une immense bibliothèque , re-
marquable surtout par un grand nom-
bre de manuscrits. Il joignit le goût
et la cuUure des lettres aux études de
sa profession. Il n'a laisse, dans ce
dernier genre, qu'une Dissertation sur
la rage, moins connue qu'une lettre
qui la précède , dont il sera parle plus
bas, et que les deux ouvrages suivants :
1. Riposte aile consideraziondi Alcs-
sandro Tassoni, sopra le rime del
Petrarca, Padoue, i6i i , in-8°. Le
Tassoni répondit à cet écrit, sous le
nom supposé de Crescenzio Pepe ,
par : Â^vertiinenti di Crescenzio
Pepe a Giiiseppe degli Aromatari
inlorno aile riposte da te da lui aile
Considerazioni di Alessandro Tas-
soni sopra le rime del Petrarca, Mo-
dène, i G 1 1 , in-8'. Aromatari répliqua
par l'ouvrage suivant , en se couvrant à
son tour d'un nom supposé : Dialoghi
di Falcidio Melampodio in riposta
asli awerliinenti dati solto nome di
Crescenzio Pepe a Giuseppc degli
Aromatari, etc., Venise, 161'), in-8".j
mais l'ouvrage qui fait le plus d'hon-
neur au génie d' Aromatari , est sans
nul doute sa Lettre : De generatione
plantarum ex seminilms , adressée
à Barthélemi Nanti , imprimée pour
la première fois en tète de la Disserta-
tion sur la rage , sous ce titre : Dispu-
tatio de raine contagiosd , cuiprœpo-
sita est epistola de generatione , etc.
Venise, i<v.>.5 , in - 4". ; Francfort ,
i GjiG, iu-4". La lettre lui iuscree dans
ARO
les Epistolœ seleclœ de G. Eicht , Nu-
remberg, 1662, in-4". Le célèbre Har-
vey, en ayant eu connaissance, en adop-
ta les principes ; ce qui a fait dire que
c'était à lui qu'elle était adressée. Elle fut
traduite en anglais, et insérée dans les
Transactions philosophiques , N".
'2.1 \. Elle a été réimprimée à la suite
des OEuvres de Jungius , en 1747 ■> à
Cobourg. Cette lettre ne contient, pour
ainsi dire , que l'annonce qu' Aromatari
faisait à son ami Nanti, d'un Traité
complet sur la génération. 11 y f lit une
esquisse rapide de sa manière d'en^^-
sager la germination des plantes, met-
tant des faits à la place des mots vides
de sens de actû et potentid , par les-
quels les scolastiques voulaient expli-
quer la génération. 11 démontra la
grande analogie qui existe entre les
graines des plantes et les œufs des
animaux; en sorte que, dans les uns
comme dans les autres , l'admission
d'une matière subtile détermine l'exis-
tence de l'embryon; qu'alors il em-
ploie à son développement , par sa pro-
pre organisation, les substances dé-
posées dans la coque ou dans les
téguments , et que , dans certaines
graines , une partie se trouve conver-
tie en une espèce de lait , qui sert ,
par la suite , à son développement. La
mauvaise santé d'Aromatari , et sur-
tout les soins qu'il était obhgé de don-
ner à ses malades , l'empêchèrent de
développer ses grandes conceptions;
elles étaient d'ailleurs trop au-dessus
des connaissances qu'on avait alors ,
pour être saisies. Ce ne fut que succes-
sivement qu'on en reconnut la vérité;
c'était une espèce de problème qui ,
durant l'espace d'un siècle et demi,
n'a eu que des solutions partielles. La
découverte du sexe des plantes , com-
mencée par Grew, et continuée jus-
qu'à Vaillant, a été la première ; enfin,
l'analomie de riutciicur de la jraine,
ARP
par Gaertner et Î\I. de Jussieu , ont
e'té les dernières ; mais elles n'ont pas
encore comple'téresplicatiou des prin-
cipes poses par ce savant médecin.
Peu de personnes , en France , ont été'
à portée de lire l'original, parce qu'J
ne se trouve que dans des livres assez
rares , et -qu'on n'en connaît point de
traductions. G — É et D — P — s.
AUPAJON ( Louis , marquis de Se-
verac, duc d' ) , général français sous
Louis XIII , reçut neuf blessures au
combat de Félissant, se distingua, en
i6.i I , au siège de Montauban , et par
la défaite d'un corps de calvinistes ,
assura le Languedoc à l'autorité royale.
Il contribua ensuite à défendre Casai,
Mont- Ferrât et le Piémont. La Fran-
ehe-Gomté , Trêves , St.-Omer et le
Roussillon furent aussi témoius de son
courage et de ses talents militaires.
Lorsqu'en lÔ/JS, le sulthan Ibrahim
menaça Malte , d'Arpajon se signala
pour la défense des chevaliers. Il
fit prendre les armes à tous ses vas-
saux, leva 2,000 hommes à ses dé-
pens, chargea quelques vaisseaux de
munitions , et vint trouver le grand-
maître , Paul Lascaris Castellard , à la
tète d'un grand nombre de gentils-
hommes , ses parents ou ses amis ,
« lui présentant ainsi , dit Vertot, un
secours si considérable , qu'il n'eut
osé en espérer un semblable de plu-
sieurs souverains. » Il fut nommé gé-
néral , avec pouvoir de se choisir trois
lieutenants-généraux. Lorsque le dan-
ger fut passé , le grand-maître , de l'a-
vis du conseil, lui accorda plusieurs
honneurs et privilèges, dont le plus
remarquable fut qu'un de ses fils ou
descendants serait reçu chevalier des
sa naissance , et grand-croix à l'âge de
seize ans. Après l'extinction des mâles
de la famille d'Arpajon , ces privilèges
passèrent à la famille de Noailles. De
«Qjt&ur ca France , d'Arpajon fut uom-
ARR ^2^
me ambassadeur extraordinaire en Po»
logne, près de Ladislas IV, et favorisa
l'élection de Casimir , successeur de
ce prince. En iG5i , il fut créé duc
par Louis XIV, et mourut , en 1679,
à Séverac , où il fut enterré. D— t.
ARPINO (JosEPE César d'). Foj'.
JOSEPIN.
AROUIER. rojK. Darquier.
ARRAES (Amador), un des plus
e'iégauts écrivains du Portugal , et dont
l'autorité est classique pour cette lan-
gue. Il naquit à Béja, dans la province
d'Aleutejo , en 1 55o. A l'âge de quinze
ans , il entra dans l'ordre des Carmes ,
et , bien jeune encore , acquit beau-
coup de réputation par l'élégance de
SCS sermons et par ses connaissances
théologiqaes. En 1678, le cardinal
D. Henri, infant de Portugal, arche-
vêque d'Evora , le nomma son sufTra-
gant et le fit sacrer évéque in partibiis ,
de Tripoli, et, trois ans après, Phi-
lippe II le nomma à l'évêche de Por-
talègre, qu'il résigna , en iSgô , pour
se retirer auprès de ses moines à Coira-
bre , oîi il mourut en 1600. Ses Hia-
logues moraux , au nombre de dix ,
sont l'ouvrage qui lui a mérité la
grande réputation dont il jouit paimi
les Portugais. Il avait pris Platon pour
modèle ; mais la nature lui avait don-
né un caractère fort différent; cp.r ce
n'est pas l'harmonie et l'aménité qui
brillent dans ses dialogues , mais l'é-
nergie et la force; et quelquefois même
la dureté dont il n'a pas toujours su
se garder. C — S — a.
ARRHACHION, ou ARRHICHION,
athlète dePhigalie, en Arcadie, fut
vainqueur au Pancrace à Olympie , ,
dans la ^2''. et la 4^' olympiade
( 6 1 2 et 608 av. J.-C. ). Il se présenta
également dans l'olympiade suivante ^
et fut encore vainqueur de tous ses ri-
vaux , à l'exception d'un seul , qui ,
étant paryeuu à l'enlacer aYec ses
o;.8 A R R
pieds , le saisit à la gorge avec ses
mains , et le serra jusqu'à l'étrangler.
Comme dans ce combat il fallait se
confesser vaincu pour que l'adversaire
eût la victoire , il s'en suivait que celui
qui était le plus fort tuait quelquefois
son antagoniste, lorsque celui-ci tar-
dait trop à se rendre ; mais Arrlia-
chion , en mourant , serra si fortement
un doigt du pied de son adversaire ,
que la douleur lui arracha l'aveu qu'il
était vaincu, ainsi Arrhachion fut cou-
ronné , quoique mort. On lui avait
érigé, sur la place publique de Phiga-
lie , une statue , qui était un des plus
anciens ouvrages de l'art grec ; car les
pieds n'étaient presque pas séparés ,
et les bras et les mauis étaient joints
le long du corps, jusqu'aux genoux,
comme dans l'ancien stvle égvpticn.
C— R.
ARRHENIUS( Jacob), professeur
d'histoire à Upsal, né à Linkœping,
en i(i4>. , était frère de Claude Ai-
rhéniiis OEruhielm auteur d'une //«-
ioireecc}t'siasth]iiedeSutile.ef,i\méc.
Il fut d'abord secrétaire de i'uuiveisiié
d'Up^al ; puis obtint la chaire d'his-
toire. Eu même temps , il était charge
des finances de l'université, à laquelle
il rendit des services importants par
son crédit et sa probité. 11 procura à
la bibllotlièque des manuscrits pré-
cieux, et fit construire rédifice oiiellc
est placée. Les statuts relatifs à l'or-
ganisation et à la police intérieure fu-
ient rédigés sous sa direction. En
1716, il demanda à être renip'acé
par son fils dans la chaire d'histoire.
11 mourut, eu 17^5, dans un à^e
avancé. Ses ouvrages sont : 1. Patria
et ejus amor, ex Cicérone de le^^i-
hus , libr. n.\ Up-al , 1670 ; U. Re-
cueil de cantiques , en suédois, Up-
sal, 1GS9 ; 111. Dissertations latines
sur di^-ers sujets d'histoire et de lit-
térature. G — AU.
ARR
ARRHIDÉE ou ARIDÉE , fîls natu-
re! de Philippe, et d'une courtisane de
Larisse , fut placé sur le trône par les
Macédoniens , après la mort d'Alexan-
dre-le-Graud,ran 5ii av. J.-C. Comme
il était également faible d'esprit et de
corps , Perdiccas avait toute l'autorité ,
et, après la mort de ce général, il se
laissa conduire par Eurydice, sa nièce
et son épouse. Il finit par tomber entre
les mains d'Olympias, qui le fit mou-
rir, l'an 3i5 av. J.-C. {Fov- Cléo-
d.î:us). C — R.
ARRTA , femme de Caecina Fœtus ,
romain consulaire, qui, s'élant trouvé
engagé dans la révolte malheureuse
de Caraillus Scribonianus , en Illyrie,
contre l'empereur Claude, fut arrêté
pour être conduit à Rome par mer.
Arria fit les plus vives instances pour
être reçue dans le vaisseau , afin de
servir Paetus; n'ayant pu obtenir cette
faveur, elle loua une barque de pê-
cheur , et suivit le vaisseau. Arrivée
à Rome , elle se rendit au palais de
l'empereur, où, rencontrant la femme
de Scribonianus , qui dénonçait ses
complices, elle lui fit , devant Claude
même, un crime de vivre encore, après
avoir vu tuer son mari dans ses bras.
Ces paroles, et d'autres semblables ,
donnèrent à penser qu'elle était réso-
lue à mourir. Sa famille la fit garder
quelque temps pour l'empêcher de
s'(iler la vie. Elle , pour faire voir
qu'elle en avait tous les moyens , alla
se précipiter la tète contre un mur, et
tomba demi-morte du coup. Perdant
tout espoir de sauver son mari , et
vovant qu'il n'avait pas le courage de
se donner la mort , elle prit un poi-
gnard devant lui, se l'enfonça dans
le sein , et, le retirant , elle le lui pré-
senta, eu disant froidement : Pccie ,
non dolel : a Pajtus , cela ne fait poin*.
» de mal. w Pœtus se donna la mort, J
l'exemple de sa femme. Q — R — v.
ARR
ARRIAGA (RoDERic de), jésuite,
Me à Logrono , eu Castille , en i Sga ,
enseigna la philosophie à Valladolid, et
Ja théologie à Salaraanqne , se rendit
ensuite à Prague, en Bohême, où il
professa pendant treize ans la théolo-
gie, llfut, pendant vingt-un ans, préfet-
général des études, et , pendant douze
ans, chancelier de l'université de Pra-
gue. Les jésuites de Bohême l'envoyè-
rent trois fois à Rome pour assister aux
assemblées de leur ordre. Il fut très-
cbtimé non seulement par Urbain VI 1 1
et Innocent X, mais encore par l'em-
pereur Ferdinand. Il mourut à Pra-
gue, en 1667. On a de lui un Cours
de Philosophie, 1 vol.in-fol., i652,
et un Cours de Théologie , en b vol.
in-fol. , Anvers, i645-i655. 11 tra-
vaillait au g^. volume lorsqu'il mou-
rut. On dit qu'il savait mieux réfuter
les opinions des autres que prouver
les siennes. Bayle traite assez lon-
guement du mérite de ce jésuite.
« C'est dommage , dit-il , qu'un esprit
» si net et si pénétrant n'ait pas eu
» plus d'ouverture sur les véritables
» principes; il eût pu les pousser très-
» loin. » — Deux autres Arriaga ont
figuré dans la littérature espagnole.
L'un ( Gonzalve ) , dominicain , né à
Burgos, mort en 1657, recteur du
collège de S. Thomas à Ehcadrien ,
publia , en espagnol ,1a f^ie de S. Tho-
mas d^yiquin, et celle de Jean de
Zazcano ; l'autre ( Paul-Joseph ), jé-
suite , né à Vergura , alla au Pérou ,
où il fut long-temps préfet du collège
de Lima. II périt dans un naufrage,
en i6'2'i. Il a laissé les ouvrages sui-
vants : I. Rheior Chrisiianus ; II. Di-
reclorium spirituale; III. De Exlir-
patione fdolotatriœ, et de mediis ad
conversionem Indorum aplissimis ,
ouvrage imprimé an Pérou, en \&'x\)
IV. Exercitia, spiritualia. D — g.
ARHIE^J (Flavius), né à Nico-
ARR 5i()
médie, dans la Bithyuie, fut disciple
d'Epictète, ce qui ne l'empêcha pas
de se livrer à la profession des armes ,
dans laquelle il se distingua bientôt de
manière à attirer sur lui les regards
de l'empereur Adrien , qui le lit ci-
toyen romain , et lui donna le gouver-
nement de laCappadoce, qu'il défen-
dit contre les Alains , l'an 1 34 avant
J.-C. Adrien le récompensa par la di-
gnité consulaire et le titre de sénateur;
on le fit aussi , dans sa patrie, grand-
prêtre de Cérès et de Proscrpine.
On dit qu'Arrien se proposa Xénophon
pour modèle. En effet, Xénophon avait
rédigé les Dicts de Socra te; Arricn écri-
vit ceux d'Epictète; Xénophon avait
pubhé sept livres de l'expédition de
Cyrus qui fonda la grandeur des Per-
ses; Arrien composa sept livres sur
l'expédition d'Alexandre qui détruisit
l'empire des Perses. Les Helléniques
de Xénophon donnèrent, dit-on , nais-
sance aux Bithyniques, aux Alaniques
d' Arrien. Xénophon avait traité de la
chasse et de la tactique ; Arrien traita de
la tactique et de la chasse : copiste à la
fois du style et du caractère de Xéno-
phon , Arrien se moîitr- aussi jaloux
de la réput'Uion ^ ./Ou général que
vil celle d .. écrivain. En lisant ces
deux auteurs avec attention, on trouve
que Xénophon est plus naif, et Arrioii
plus sec. On sent que l'un fut disciple
de Socrate, et l'autre d'Epictète. Les
ouvrages d'Arrien , perdus pour nous,
sont des Discours familiers d'Epic-
tèle , en douze livres ; De la vie et de
la mort d'Epictète ; les Guerres
contre les Parthes , en dix-sept li-
vres ; la Fie de Tilliborus , brigand
célèbre ; dix livres des Evénementi
qui sui^>irent la mort d' Alexandre :
on en trouve un abrégé dans Photius ;
les Gestes de T imoléon ; DeV ajjran'
chissement de Sjracuse par Dion;
les Bithyniques ; ou Origine et His^
31
55o A K R
toire de la Biihynie , en îiuit livres ;
ce! ouvrage n'est coiniii que par le te!-
moignage de Pliotius. Il reste. des ou-
vrages d'Arrim: Lie ManuelcVEpic-
lète et les Dissertations sur sa Phi-
losophie , dont nous n'avons que
quati-e livres dç huit qu'il avait faits
( F. ÉpictÈte ) ; 11. Sept livres des
Expéditions d'Alexandre. Cet ou-
vrage écrit d'après les relations per-
dues pour nous, d'Aristobule et de
Ptolcifie'e qui accompagnèrent ce prin-
ce dans toutes ses entreprises, est
très-estime'. Photius pense qu'Arrien
doit être range' parmi les meilleurs
historiens. Arrien est celui de tous les
historiens d'Alexandre qui ait écrit
d'une manière raisonnable : h peine
trouve-t-on dans sou histoire un seul
événement miraculeux qui puisse la
j'endre suspecte , si on veut excepter
quelques prédictions d'Aristandre,avec
le conte de ces deux fontaines nou-
velles d'eau et d'iuiile, qui parurent
auprès du fleuve Oxus, aussitôt qu'A-
lexandre y fut campé. 111. Les Indi-
ques, en un seul livre, écrits en dialecte
ionien. Ces deux ouvrages sont ordinai-
rement réunis; les meilleures éditions
sont celles de JacqiK,s Grouovius, grec
latin, Levdc , 1704, iti-fol.; celle
^e Rapheiius, grec latin, Amstelod.,
3^57 , in-8'.; celle de Sclimiederus ,
qui a publié les sept livres des Expé-
ditions d' Alexandre , Lipsiœ, i7<)8,
in-S". , et les Indiques , Halis Magde-
burgicis , 1 798 , in-8 '. Cette édition est
très-estimée. Perrot d'Ablancourt a
donné une traduction française des
Expéditions d'Alexandre ( P^oj-,
Perrot ). M. Chaussard en a donné
une nouvelle traduction , avec des
Commentaires , Paris , 1802 , 5 vol.
in -8°., et atlas. M. Schweigh.ien-
aer , fils du célèbre ])rofesseur de
ce nom , s'occupe d'une nouvelle
ï'-lilion du texte . el d'une traduction
A n R
française des Indiques. IV. Un /*/•*
riple du Potit-Euxin , adressé à Tein-
prreur Adrien; V. un Périple de la
mer Erythrée , que quelques savants
veulent lui ôter, mais qui paraît de
lui; ces deux ouvrriges se Iroavent en
grec et en latin dans le premier vo-
lume des Petits Géographes d'Ox-
ford; VI. deux Traités sur la Tacti-
que; VIL un Traité sur la Chasse,
])our servir de supplément à celui de
Xénophon ; ce Traité a été traduit eu
français par Fermât, Paris, i(")9o,
in- 1 •! ; VlII. Delà Manière de faire
la Guerre aux Alains. Ces cinq der-
niers Traités , ainsi que le Manuel
d'Épictète , se trouvent réunis dans
lerecufil intitulé : FI. Arriani Tacti-
ca Acies contra Alanos , etc. , grec
latiu , cum notis varionun éd. Kic.
Ijlancardo, Amsterd., 168"), cm, avec
le titre seulement de changé, 1750,
hi-8". C—R.
ARRIGHETTI (Philippe), gen-
tilhomme fl(uentin, né en i582, lit
ses études dans l'université de Pise,
et ensuite dans celle de Padoue , où
il apprit la langue grecque , la philo-
sophie d'Aiistofe et de Platon , sous
les ])lus célèbres professeurs : il prit
ses degrés en thcolopic dans l'uni-
versité de Floriuce. Peu après , le
pape Urbain Vlll le nomma cha-
noine pénitencier de la cathédrale de
la même ville; il fut ensuite exami-
nateur synodal jusqu'à sa mort , ar-
rivée le 27 novembre i()6'2. Il fut
un des membres les plus distingués
de l'académie florentine, et de celle
des Ahéraîi , parmi lesquels il prenait
le nom de Fiorilo , et pour devise ,
un raisin en fleur avec ces mots grecs :
AOTE AÏAION. Arrighetti n'a rien
publié ; ses ditlcrents ouvrages sont
restés manuscrits. Negri en a donné
la liste, Istor. degli scritt. PHoren-
uni, pag. lOG. Ou y distingue: 1. lu
ARR
Betorica d'Àristolile , expliquée en
cinqudiite-six Itçons; II. la Po'ética
^'.'/ristolile , traduite , expliquée et
récitée dans l'académie des S\'ngliati
de Pise; Ij[. quattro Discorsi Jc-
cademici , cioè del Piûcere , del
liiso , deir Ligegno , e deW Onore ,
récités dans l'académie florentine ;
IV. Sermoni sacri , volgari , e la-
tini, prononcés dans diverses éf;lises
ou assemblées de Florence; V. Fita
di S. Francesco Saverio , extraite
de la relation faite dans le consistoire
par François - Marie , cardinal del
Monte, etc. G — e.
ARRIGHETTI (Nicolas), né à
Florence , où il mourut eu iG39, se
distingua dans plusieurs genres de
littérature, et principalement dans les
mathématiques , dans la philosophie
platonique, dans les sciences natu-
relles , et dans les belles lettres. Il
fut nu des phts illustres élèves du
célèbre Galilée, et il remplit une place
distinguée dans l'académie florentine
et dans celle de la Crusca, C'est dans
la première qu'Arrighetti occupa la
charge de conseiller depuis 16 1 4
jusqu'en iGaS, qu'il fut nommé con-
sul. Il fut aussi l'un de ceux qui for-
mèrent, à Florence , l'acadénne jda-
toni|ue, rétablie par le grand -duc
Ferdinand , et par le pri.'ice, depuis
cardinal, Léopold de Toscane. Jl fut
choisi pour composer le discoiu'S
d'ouverture (jui se trouve dans les
Prose Fiorenline. Ce fut alors qu'il
entreprit de traduire en lanç;ue tos-
cane les Dialogues de Platon ; il
était près de terminer (e travail quand
la mort vint le surprendre. Sou ne-
veu , le célèbre Charles Dati , pro-
nonça son éloge à l'académie de la
Crusca , le i5 mai 1 645 ; on le trouve
dans le même recueil des Prose Flo-
rentine. Les ouvrages impriincs d'Ar-
vigheltt, sont ; I. Délie lodi dd iig.
ARR 53i
Filippo Salvlali, Florence, 161 4,
in-4''. , et dans la première partie du
troisième volume des Prose Floren-
tine ; II. Orazione recilata al se-
renissimo granduca di Toscana,
F'erdinando 11 , neW esequie délia,
granduchessa sua madré, Florence,
i65i , in-4'., et dans la première
paiîie du quairièîue volimie des Prose
Florentine; 111. enfin, Orazione
faîla da lui nel dur a spiegare
Plalone; Cicalata sopra il Cllrlolo;
Cicalata in Iode délia Torta , tous
trois imprimés dans le recueil déjà
cilc. Ces Cicalate , autrefois en usage
dans l'académie florentine, étaient,
comme on sait, des diycours ironique-
ment sérieux stu' des sujets plaisants,
comme ici le corniihon , uu le con-
combre et la tourte. Arrighetti a laissé,
en outre, un très-grand nombre d'ou-
viages manuscrits eu vers et en prose,
conservés dans plusieurs bibliothè-
ques. G — £.
AHRIGHETTO, ou ARRIGO
( Henri ) , da Settimello , poète la-
tin du 12'. siècle, naquit de parents
laboureurs à Settimello, village à sept
milles de Florence. C'est lui qui nous
apprend ces parlicilarités dans une
élégie dont nous parlei'ons plus bas_
Maigre l'hunible état où il était né, if
s'appli(iua , dans sa jeunesse , à l'étude
des arîs libéraux, de la poésie et de
la philosophie : il paraît , d'après la
même élégie , que ce fut à Eulogne
qu'il fit ses études. Il était alors ré-
duit à une telle misère, que, ne pou-
vant se procurer du jiapier ou du
parchemin, il écrivait, dit-on, sur
une vicUie pelisse toute usée. Philippe
A illani ( Vite d'uominl lllustri Fio~
re/ji., traduit par Mazzucbeili) nous
apprend qu'Arrighclto sent prêtre, cî
qu'il obtint ia cure de Galenzano, bé-
néfice d'un grand revenu , qui bii lais-
sait le temps de s'occuj)er de liiiéra-
54..
552 ARR
ture; mais que cette dignité fut pour
lui une source de disgrâces et de per-
sécutions. Il eut un procès à soutenir
contre l'évéque de Florence , et , y
ayant mange tout son che'tif patri-
moine , sans en voir la fin , il fut
obligé d'abandonner son bénéfice , et
se vit réduit à mendier. L'état de
pauvreté où il tomba , lui fit donner
le nom de Arrigo ilpovero (Henri le
pauvre). 11 a raconté lui-même ses
disgrâces dans un petit poëme en vers
e'Iégiaqucs , intitulé : De diversitale
fortiinœ etphilosophiœ consolatione,
qui contient à peu près mille vers , et
qu'il a divisé en quatre parties. Dans
les deux premières , il se plaint de ses
malheurs , et dans les deux autres , à
l'exemple de Boëce , il introduit la
philosophie , à laquelle il reproche
tous les maux qu'il a soufferts ; puis
il la prie de le consoler et de venir à
son secours. Cette production fut es-
timée du temps de l'auteur , au point
qu'on la lisait dans les écoles , et
qu'elle était proposée poiu' modèle.
On revint sans doute ensuite de cette
opinion , et son poème resta long-
temps manuscrit dans diverses biblio-
thèques. Il fut publié, la première fois,
sans date (vers i495), iu-4".; Lyon,
1 5 1 1 , avec un commentaire ; Kem-
nitz, 1684 1 in-S". , d'après une copie
communiquée à Christian de Daum
par le savant Magliabecchi ; et par
Polyc. Leyser , dans son Hlsloria
poëtarum medii œvi. Ou est rede-
vable de la meilleure édition à Do-
minique-Marie Manni , Florence ,
injo, in-4''. , avec une traduction
italienne fort élégante, et souvent ci-
tée dans le /^oca&ii/rt/re de la Crusca,
ARRIGONI (Pompée), cardinal,
naquit, à Rome, en i55i, de J.-J.
Arrigoni de Milan , et d'Eugénie Tara,
ftomaiue, tous deiutdc noble famille.
ARR
Après avoir étudié à Pérouse, pais a.
Bologne , et enfin à Padoue , où il
reçut, dans l'une et l'autre loi, ce
que nous appelons le bonnet , et
ce qu'en Italie ou nomme le laurier
de docteur, il retourna dans sa patrie.
Il se distingua tellement dans la ju-
risprudence , que le roi d'Espagne le
choisit pour être son avocat à Rome.
Grégoire XIII le nomma, en i584,
avocat cousistorial et Grégoire XIV
auditeur des causes du Palais apos-
tolique. 11 fut fait ensuite auditeur
de Rote, et créé cardinal diacre, par
Clément VIII, en i5g6. Il exerça la
charge de dafaire sous les deux pon-
tificats de Léon XI et de Paul V, qui
le nomma archevêque de Bénévent
en 1607. Arrigoni mourut, le 4 avril
1616, dans un des faubourgs de Na-
ples , d'où il fut transporté à Béné-
vent , et inhume dans l'église métro -
politaine. On lui attribue divers ou-
vrages, parmi lesquels on distingue
un discours latin prononcé à Rome ,
le '^5 juillet i588, dans le consis-
toire , sur la canonisalion de Santo
Diego d'Alcala. Il est imprimé avec
la l'elation de cette canonisation i
Rome , 1 588, iu-4". On le dit encore
auteur, I. d'un Discours prononcé
en 1 584 ^" présence de (}régoire XIII,
lors de la nomination des cardinaux
Fondrati et Aug. Valière; II. de plu-
sieurs Leltres qui se trouvent, dit-on ,
imprimées parmi celles de Jean-Bap-
tiste Lauro, Cologne, iG-24' i"-8°.;
mais Mazzuchelli révoque en doute
l'existence du discours , et atteste que
les lettres ne se trouvent point parmi
celles de Lauro, dont il avait l'édition
sous les yeux. G — e.
ARRIQUIBAR ( Don Nicolas ) ,
commerçant de Bilbao, composa, eu
1770 , sur l'économie politique ,
science alors peu connue de ses com-
patriotes, un ouvrage intitule: Rti-
ARR
ci'eacloji politica , et imprime à Vlf-
toria, après sa mort, en 1779- H y
combat non seulement les préjuge's
de son propre pays , relativement
aux finances , à l'industrie , au com-
merce et à la population , mais en-
core les principes des économistes des
autres pays, et notamment ceux de
b VÂmi des Hommes. Son ouvrage
n'est pas exempt d'erreurs de cal-
cul , mais il de'veloppe des idc'cs très-
saines , dont l'Espagne a profite' à
quelques e'gards. Il n'a pas ete' traduit
en français. B — g.
ARRiVABENE (Jean-François),
poète italien du 1 6'^. siècle , naquit à
Mantoue. On a de lui diverses poe'-
sies , parmi lesquelles on distingue
particulièrement deux Eglogues ma-
ritimes , en vers libres , ou sciolti.
Elles sont intitule'es , l'une Idroman-
zia , et l'autre Cloanto , dans les
poésies des académiciens Argonau-
tes , parmi lesquels l'auteur prenait
le nom d'Oronte. Ces Eglogues sont
iraprime'es avec les Dialogues mari-
times de J.-J. Botazzo , Mantoue ,
1547, in-8". Outre ces composi-
tions , on trouve aussi des poésies
d'Arrivabene : I. dans le 4*^- 'ivre ,
p. 274 des Rime di diversi eccel-
lenlissimi Autori , recueillies par Her-
cule Bottrigari; II. dans le 6". livre
des Rime di Diversi, d'André' Arri-
vabenej III. dans le recueil de Jean
Offredi , et dans plusieurs auties re-
cueils. 11 écrivait aussi fort bien en
prose ; on a de lui un discours inti-
tule' : Orazione agli amanti , etc. ;
discours aux amants , dans lequel on
veut les rappeler , de tous les autres
amours , à l'amour platonique ; il se
trouve à la fin des Lettres de dif-
férents auteurs , publiées par Raffi-
nelli , Mantoue, i547, in-8". Dans
une lettre de ce recueil , on apprend
qu'Arrivabene florissait eu 1 546 , que
ARR 553
son père vivait encore , et que notre
poète fut lie d'amitié avec J.-B. Pos-
sevino et le célèbre Nicolo Franco.
Une autre lettre nous apprend encore
qu'Arrivabene était assez bien par-'
tagé des biens de la fortune , et qu'il
vivait dans l'aisance ; qu'il était dans
un mouvement perpétuel de corps et
d'esprit, allant sans cesse de la cour
d'un roi à celle d'un autre ; qu'il fut
principalement attaché au cardinal de
Mantoue; qu'enfin, il fut marié, et
qu'd eut plusieurs enfants. G — e.
ARRIVABENE ( Jean-Pierre ) , de
Mantoue. Il fut disciple du célèbre
Philelphe , et devint très-liabile dans
la langue grecque. Il demeura à
Rome en qualité de secrétaire apos-
tolique , et étant devenu évcque d'Ur-
bin , il mourut dans cette ville, en
i5o4 , à soixante-trois ans. Il fit un
poème latin , intitulé : Gonzagidos ,
en l'honneur du marquis Louis III
de Gonzague , célèbre général du
duc de Mantoue, mort en 1 484- Ce
poème fut imprimé pour la première
fois, par Menschenius , en 17 58.
Il y a quelques Lettres latines d'Ar-
rivabene, imprimées à Milan en i5o6,
avec celles du cardinal Jacques Am-
raanati de' Piccolomini, cardinal de
Pavie. ( F. Mazzuchelli, Scritt. Ital.,
vol. P''. , p. I I.) G — E.
ARROY ( Besian ) , docteur de
Sorbonne , et théologal de Lyon , a
donné : I. Questions décidées sur la
justice des armes des rois de Fran-
ce, et l'alliance ai'cc les Hérétiques
et les Infidèles , i654 , in-8".; ou-
vrage composé pour la défense des
traités de Louis XIII avec les Suédois
et les protestants d'Allemagne , et qu'es-
saya de réfuter Jansénius , qui , sous le
nom d'Alexandre, patricc d'Armach ,
publia le Mars Gallicus. IL Apo-
logie pour l'Eglise de Lyon, contre
les ?iotes et prétendues corrections
534 A R S
sur le nouveau Brés'iaire de Ljon^
iG44i in-8 . Cette apologie, qui con-
tient i' éloge des premiers archevêques
de Lyon, dont l'auteur relève la no-
blesse et la sainteté' , est une réponse
à un ouvrage de Claude Le Labou-
reur ( /^.Laboureur ). IIL Briès'e et
tlevole Histoire de V abbaye de Vite
Barbe , Lyon , 1 664 , in- 1 2 . C'est en-
« oie un ouM-age contre Le Labinu'eur
ÎV. Domûs Umbrœvallis T imiacœ
descriptio , 1661 , in-4"- C'est une
dcscripliou de la maison de campagne
de l'archevêque de Lyon. A. B — t.
ARSACES F'., fondateur de la
monarchie des Parthes , commença sa
carrière vers l'an 55o avant J -C,
en exctant une re'volte contre l'ofli-
oiev qui gouvernait le pays pour An-
tiocliiis Thèos , et qui avait voulu
faire un outrage inHlme au jeune frère
d'Arsaces. Le gouverneur fut tue , et
Arsaces engagea ses compatriotes à
.se joiudre à lui pour chasser les con-
quérants , et établir l'indépendance
nationale. Parvenu à excVnt( r tous
CCS desseins, les Parthes relevèrent
•sur le trône , et il fixa sa résidence
à Ilécaetompolis. Séicucus Callinicus,
successeur d'Antiochus , tenta de re-
couvrer les provinces partîtes ; mais
Arsaces le vainquit , et le fit ))rison-
iiier , dans une grande bataille que
les Parthes regardèrent comme la vé-
ritable époque de leur iiidé[;cn(lance,
et dont ils célébrèrent long -temps
ranniversaire. Arsaces se tcialit en-
suite maître de l'Hircanie , de quel-
ques provinces voisines, et, après un
règne prospère d'environ trente-huit
ans , il périt dans une bataille contre
le roi de Cappadoce. Son nom fut
très-célèbre eu Orient , et les rois
})arthes , ses successeurs , le prirent
tous, comme les empereurs romains
prenaient celui de Ccsar. On les ap-
pela les Arsacides. D— r.
A R S
ARSACES II , roi des Parthes,
succéda à son père , Arsaces \^\ , et
fut comme lui un prince belliqueux.
Taudis qu'Antiocbus - le - Grand était
engaué dans une guerre contre Pto-
lémoe, rui d'Kgypte , il c-nira dans la
Médie, et s'en rendit mjîlre. Antio-
chus , lorsque la guerre d'Egypte fut
terminée , marcha contre le roi des
Parthes , le chassa de la province
qu'il avait conquise , et, le poursuivant
même dans ses états , l'obligea de se
réfugier en Hyrcanie ; mais Arsaces
ayant rassemblé une armée de 1 0,000
hommes de pied, et de 20,000 che-
vaux, revint sur ses pas, et parut à
Antiochus un ennemi si formidable,
que ce roi s'estima lieureux de le
confirmer dans la possession du pays
des Parthes et de l'ilyrcanie , sens la
seule condition d'une alliance entre
eux. On ne sait plus rien de l'histoire
d'Arsaces, sinon qu'il laissa son trône
à son fils Arsaces Priapatius. 0 — t.
ARSACES TIR \^XS, roi d'Armé-
nie , à l'époque lài Julien fit une inva-
sion dans la Perse. Cet emjicrour le
somma de réunir ses forces à celles
des Romains, par une lettre pleine de
hauteur ( si toutefois celle qui existe
sous son nom n'est pas apo<Typhe ).
Lo prince arménien qui, en qualité de
chrétien , ne souhaitait pas que Julien
acquît de la gloire , fit, dit-on , déser-
ter ses troupes dans un moment où
les Romains avaient le plus besoin de
leurs secours , ce qui contribua beau-
coup à faire échouer l'entreprise. I^ors-
que Jovien fut forcé de faire , avec le
roi des Perses, une paix ignominieuse,
on stipula spécialement que les Ro-
mains renonceraient à la souveraineté
de l'Arménie , et ne donneraient au-
cune assistance à Arsaces , s'il était at-
taqué par les Perses. Peu d'années
après , Sapor entra dans l'Arménie
avec une armée, mais sans annoncer
fontre Arsaces aucune intention hos-
îile. 11 l'invita même à un festin splen-
tîide; mais, au milieu de la l'ète, il le
lit charger de chaînes d'ajgent , et
mettre en prison. Arsaces, après une
captivité de peu de durée, dans la
Tour de rOubJi, à Ecbataue, fut as-
sassine, l'an SOQdeJ.-C, et l'Arme-
iiic devint une province de la Perse.
D— T.
ARSACHEL. Foy. Arzachel.
ARSAMES , ou ARSAMaS, l'un
des premiers rois de l'Arménie, lors-
qu'elle eut secoué le joug des rois de
Syrie, successeurs d'Alexandre , ne
nous est connu que par une médaille
dont l'exergue est en grec , et par un
passage de Polyen , qui nous apprend
qu'il donna des secours à Antiochus
Hiérax , qui s'était réfugié dans ses
états. On croit qu'il fut le fondateur
d'Arsamosate , ville de l'Arménie. Il
vivait vers l'an ■i^'j av. J.-C. — Il est
question de plu.sieurs Arsames dans
l'histoire de la Perse, savoir : Arsame,
père d'Hystaspe , père de Darius ;
Arsame, lils de Diuius; Ausame, con-
temporain du même prince , et qui se
révolta contre lui ; Arsame, fils d'Ar-
tnxercès-Longue-Main , qu'Artaxercès-
Ochus lit assassiner ; Arsame , qui
commandait l'armée des Perses , au
passage du Gra nique , et qui fut tué à
la bataille d'Issus. C — r.
ARSEGNINO, de Padoue, gram-
mairien très - obscur , du i3'. siècle ,
s'est glissé dans les Dictionnaires des
grands hommes , sur la seule autorité
du Scardéone , qui , dans son ouvvage
intitulé : De anliquitaie urbis Palav.
et cl. civibus , pag. l'iÇ) , afiirrae
avoir vu un ancien manuscrit où cet
Arscgnino avait rassemblé , sous le
titre de Qiiadriga , quelques règles
de grammaire, des sentences , des pro-
verbes et quelques épîtres. On dit
tloiic , et î'ou répèle , qu'il nous a laissé
A R S 5Ô5
cet ouvrage, quoique personne, depui^
Scardé: ne , ne puisse se vanter de l'a-
voir vu. G — E.
ARSÈNE , patriarctc grec , était
moine-laïc dans un monastère de la
Macéduine , lorsqu'en I255 , Las-
caris II , résolut de l'élever sur le
siège patriarcal. Dans l'espace d'une
semaine, Arsène fut fait diacre, prêtre,
patriarche , et couronna son souverain.
Lascaris en mourant, quatre ans après ,
le chargea , conjointement avec Mi'.za-
lon , de la tutèle du jeune empereur
Jean Lascaris. Mais Muzalon ayant
été assassiné , et Michel Paléologuc
s'étant emparé peu à peu de toute l'au-
torité , Arsène prévit le so-'-t qui me-
naçait son pupille, sans avoir assez de
talent ni de caractère pour s'opposer
aux desseins de Paléologue ; tout ce
qu'il put faire , fut de se retirer avec
éclat dans un monastère près de Nicée.
Michel le fit déposer , et lit élire Nicé-
phore en sa place. L'église grecque se
divisa entre ces deux patriarches. Ce-
pendant, en i'i6i , après avoir repris
Constantinople sur les Latins, Michel
rétablit Arsène , qui le couronna dans
Ste.-Sophie, et qui bientôt s'en re-
pentit amèrement , lorsque Paléologue
eut fait crever les yeux au jeune Las-
caris. Arsène, tendrement attaché à sou
pupille, éclata sans ménagement, et
excommunia l'empereur. Celui-ci fei-
gnit de fléchir , et témoigna plus d'é-
gards pour Arsène; mais la hauteur
imprudente , et l'inflexibilité du pa-
triarche , irritèrent de nouveau Michel ,
qui , s'étant assuré du consentement
de plusieurs évêqiies, convoqua , en
1^66, un concile dans lequel Arsène
fut condamné et déposé. Il reçut son
arrêt avec fermeté , et fut transporté ,
la nuit suivante ,dans l'île de Procon-
uèze , où on le garda étroitement. Le
schisme recommença avec plus de fu-
reiu'. Eu 1 267 , les ennemis d'Arsctie
530 ARS
l'accusèrent d'avoir trempé dans une
conjuration contre ?ùicliel , qui le fit
interroger dans sou exil; mais l'ëtat
misérable du patriarche , et sa justifi-
cation noble et vigoureuse , persuadè-
rent l'empereur de son innocence , et
firent apporter quelques adoucisse-
ments à son sort. Arsène mourut dans
son exil, le 5o septembre 1275, et
laissa , dans son testament qui nous
est parvenu , des preuves de son in-
flexibilité et de sa baine contre Paléo-
logue. On a encore de ce patriarche un
Becueil de canons , rapprochés des
liis des empereurs , avec des notes
tendant à en établir la concordance.
L__S-E.
ARSÉNIUS , fils de Michel Apos-
toHus , vivait à Rome du temps de
î>ëon X, qui le fit archevêque de Mo-
ncmbasie , dans le Péloponnèse. Il fit
imprimer à Rome , chez Calliergi, avant
3 5'22, un petit Ri^cueil en deux par-
tics , intitulé : Prœclara dicta phi-
îosophorum, imj>eratorum etpoéla-
ruvi ab Anenio Monemhasiœ ar-
ihiepiscopo collecta , grece , in-S".
31 y a dans ce recued des choses qu'on
ne trouve pas ailleurs. Il a aussi re-
cueilli dans les manuscrits , des scho-
iies sur sept tragédies d'Euripide ,
qu'il fit imprimer à Venise en 1 55 î ,
in- 8"., et qu'il dédia au pape Paul 111.
On ne connaît pas l'époque de sa mort.
C— R.
ARSENNE , saint anachorète en
Egypte, naquit à Rome vers la fin du
4'. siècle , d'une l'amille alliée à plu-
sieurs sénateurs. Dès son enfance , il se
montia plein d'ardeur pour l'étude et
pour la pratique delà vertu ; et se rendit
bientôt habiie dansla connaissance des
auteurs grecs et latins, et de l'Ecriture
sainte. Ayant embrassé l'état ecclésias-
tique , il fut ordonné diacre, et véi.ut
long -temps dans la retraite : mais
rt'mj)cieur Théodos«-lc-Giand ohor-
AR5
chant un gouverneur pour l'éduCrition
de ses enfants , son choix tomba sur
Arsenne, qui fut élevé à la dignité de
sénateur , et nommé tuteur des jeunes
princes : l'empereur voulut qu' Arsenne
eût un train magnifique ; et cent do-
mestiques , richement habillés , furent
attachés à son service. Un jour que
Tbéodose était allé voir les jeunes
princes pendant leurs études , il les
trouva assis , tandis qu'Arsenne était
debout devant eux; il fit de vifs re-
proches à ses enfants , les dépouilla ,
]iour quelque temps , des marques de
leur dignité, et ordonna que pendant
leurs leçons , ils fussent debout et
Arsenne, assis. Mais tous ces honneurs
ne remplissaient point le cœur d' Ar-
senne. Doué d'une ame vive et tendre ,
et peut-être en seciet tourmenté par
une passion que sa pieté cherchait à
étoulîpr, il ne soupirait qu'après la
solitude. Un jour Arcadius , un des en-
fants de Théodose, avant commis une
faute, Arsenne voulut l'eu punir; mais
le jeune prince n'en devint que plus
indocile et plus opiniâtre. Arsenne pro-
fita de cette occasion pour quitter la
cour ; il s'embarqua secrètement sur un
vaisseau qui faisait voile poin- Alexan-
drie, d'où il se rendit dans le désert
de Sceté, pour y vivre en anachorète,
li'empire romain s'écroulait alors sous
les coups des Barbares; le monde était
ravagé par tous les genres de fléaux,
et ne présentait partout que le spec-
tacle de la |)lus honteuse barbarie. Dans
cet affreux désordre , beaucoup de
chrélii-ns oublièrent ces paroles de
l'Ecriture : // n^est pas bon que l'hom-
me soit seul , et se réfugièrent dans
les lieux écartés. Lorsqu'Arsenne ar-
riva dans le désert de Secte, et qu'il
parla de la cour de Conslantinopic aux
anachorètes, depuis long-temps re-
tirés du monde , il leur causa la plus
\ï\c surprise; dans leur simplicité, \h
ARS
ne concevaient pas que des hommes
s'occupassent à bâtir des villes , re-
cheichasseiit les pompes et la vaine
gloire , et daignassent occuper des
troncs ; mais ce qu'ils comprenaient
encore moins , c'était la corruption ,
la poi fidie , rimpiëtë; ils ne pouvaient
s'expliquer les récits d'Arsenne. Com-
me il venait de quitter un monde qui
leur e'iait inconnu , et qui ne leur ins-
pirait que des défiances, ils xe'solurent
de le soumettre aux plus rudes épreu-
ves , pour savoir si une vaine curiosité
ne l'avait point amené dans le désert.
S. Jean , surnommé le Nain , leur su-
périeur , s'assit avec ses frères pour
prendre un peu de nourriture , et
laissa Arsenne debout, sans faire at-
tention à lui. Cette épreuve devait pa-
raître dure à un homme élevé à la
cour ; mais elle fut suivie d'une autre
plus dure encore. Au milieu du repas,
S. Jean prend un morceau de pain
qu'il jette à terre devant Arsenne ,
en lui disant avec un air de mépris ,
qu'il peut manger s'il a faim. Arsenne
se couche à terre et mange dans cette
posture. S. Jean , édifié de tant d'hu-
milité, n'exigea plus d'autre épreuve :
« Allez , dit-il aux frères , retournez
» dans vos celluleti avec la bénédiction
» du Seigneur ; priez pous nous ; cet
» homme est appelé à la vie reli-
» gieuse, » Dès-lors Arsenne prit sa
place parmi les pères du désert. Gom-
me les autres anachorètes , il faisait des
nattes et des ouvrages de joncs, se nour-
rissait de pain noir , et couchait sur la
terre. Cependant Théodose , affligé de
sa fuite , le fît chercher dans tout son
empire j après la mort de ce piince,
Arcadius , qui lui succéda, n'oublia pas
non plus Arsenne , et voulut le rap-
peler à la cour. Ayant appris qu'il
était dans les déserts de Sceté, il lui
écrivit pour se recommander à ses
prières. Dans sa lettre , il offrait uc
A E S 557
lui abandonner les tributs de l'E-
gypte , pour être employés aux be-
soins des monastères et au soulagement
des pauvres ; le pieux cénobite se con-
tenta de répondre à l'envovc de l'em-
pereur : « Je prie Dieu qu'il nous par-
» donne à tous, nos péchés ; quant à la
)) distribution de l'argent , je ne suis
» point capable d'un tel emploi, étant
» déjà mort au monde. » De tous les
moines de Sceté , il n'y en avait point
qui fût plus pauvre , plus humble ,
plus mal nourri et plus mal vêtu que
l'ancien gouverneur d'Arcade. Dans
une longue maladie, il fut secouru par
la charité de ses frères , et transporté
dans un logement plus commode que
le sien ; on le coucha sur un lit fait de
peaux de bêles, un oreiller fut placé sous
sa tête affaiblie; un des moines étant
venu le voir, se scandalisa de le trouver
ainsi couché, et s'écria qu'il ne recon-
naissait pas le père Arsenne. Le supé-
rieur demanda alors au moine qui mon-
trait cette surprise, quelle avait été sa
profession avant d'être cénobite? « J'é-
» tais berger , répondit-il , et j'avais
» beaucoup de peine à vivre. — Vous
» voyez l'abbé Arsenne , répliqua le
» supérieur ; il ftit le père des empe-
•» reurs ; il avait à sa suite cent es-
» claves habillés de soie ; il était molle-
» ment couché surdcshts magnifiques;
» pour vous , qui étiez berger , vous
» vous trouviez plus mal à votre aise
» dans le monde qu'ici. » Le bon
moine, touché de ces paroles, s'hu-
milia , et se retira plein de respect
pour Arsenne. Un des officiers de
l'empereur apporta un jour à Arsenne
le testament d'un sénateur de ses pa-
rents qui lui donnait tous ses biens ;
le solitaire refusa l'héritage, en disant :
« Je suis mort avant mon parent, je
» ne puis être son héritier. » 11 con-
tinua à vivre dans la pauvreté et la
morliiication; lorsqu'il se ressouvenait
538 A R S
tics Jcui's qu'il avilit passes à la cour
des ( Qjprreiirs , il ne pouviiit letcuir
ses larmes , et rim ne pouvait l'aira-
chcr à sa soli'ude, ni le détuuiner
do la pensée de Lieu. Un jour , une
dame roniainc , nommée sMélanie, qui
avait quille Rome pour voir le père
Arsenne , parut à !a porte de sa cellule
et se jeta à ses pieds j le serviteur de
Dieu lui dit : « Une femme ne doit
» point quittei sa maison, et traverser
" les mers pour satisfiire une vaine
)> cunosile. » Mclanie , loujouis pros-
ternée , le conjura de se souvenir
d'elle, et de ])rierpour sa sauetilica-
tion : « Je prie Dieu, lui repomlit-il ,
» de ne jamais me ressouvenir de
» vous. r> 11 s elcig;tia plein de trouble
et les yeux mouilles de pliurs. Ar-
senne avait un goût si profond pour
la retraite, qu'il évitait jusqu'à la so-
cielé de ses frères du désert ; il ne
leur parlait presque jamais : n Je me
» suis toujours repenti , disait - il ,
» d'iivoir converse' avtc les liommes,
» et jamais d'avoir f^ardt" le silence. »
II recevait néanmoins les avis des plus
simples d'entre les moines: » J'ai eu
» la sci( nce des Grecs et des Romains ;
M mai»; les liommes les plus simples
» sont plus avances que moi dans la
» science de la vertu. Les hommes
i> simples sont ceux qui plaisent à
» Dieu ; car il veut des âmes qui no
5> soient pas toujours devant un nu'roir,
» poiirse composer avec art.') Arsenne
avait (|uarante ans, lorsqu'il quitta la
cour de Constantinople; après avoir
passé plusieurs années dans le désert
de Seeté, il fut ol)lit;é de le quitter
qr.elque temps, à cause d'une irrup-
tion que firent les Masi(pies , peuple
liarbarc de la Libye. Le danger passé,
il levint dans sa cellule; mais il fut
wbligc de l'abandonner pour toujours
vers l'an 454 , à cause d'une seconde
iiT:ip!ii,«;i dcb barbares qui massacrè-
ARS
rent plusieurs ermites. Il se rclua
d'abord sur le roc de Troë, ou Pura,
vis-à-vis de Meraplns , et dix ans après
à Canope , près d'Alexandrie. Le voi-
sinage d'une ville lui fit regretter le
désert ; il revint à Trcé , oii il mou-
rut. Voyant approcher sa dernière
heure, il fondait en laimes: « Vous
» craignez donc de mourir , lui dit un
n de ses disciples? — J'avoue, ré-
» pondit-il, que je suis saisi decrainte,
» et que cette crainte ne m'a point
» quitté, depuis que je suis dans le
)> désert. » Il était âgé de quatre-
vingt-quinze ans, et en avait passé
cinquante dans la solitude. Les com-
pagnons d'Arsenne lui donnèrent la
sépulture , en disant : « Heureux Ar-
» senne d'.jvoir pleuré sur lui-même,
» tant qu'il était sur la terre I » Saint
Arsenne a été souvent cité comme le
modèle de la vie monastique. 11 est
nommé sous le 1 9 juillet dans le mar-
tyrologe romain. M — D.
AlîSÈS, le plus jeune des fils d'Ar-
taxercès Ochus, fut placé sur le trône
par l'eunuque Ijagoas , qui avait fait
périr son père et ses frères , vers l'au
456 avant .l.-C. U n'en jouit pas long-
temps; car le même Bagoas, voyant
qu'il prenait des mesures pour le pu-
nir, le fit mourir, dans la troisième
année de sou règne. C — r.
ARSILLI (François), de Siniga-
clia , dans le duché d'Urbia , célèbre
poète et médecin , llorissait à Rome .
sous les pontificats de Léon X et d«
Cléitient VIL Paul Jove, qui fut son
ami , lui a accordé une place dans se»
éloges ; il rapporte qu'Arsiili . obligé de
pratiquer la médecme , ne laissait pas
néanmoins de prodiure chaque jour
quelques compositions poétiques. Hon-
nête homme, et attaché à sa liberté,
ce poète , peu courtisan, n'eut pas le
bonheur de plaire au pape et à sa
cour; il s'en tint toujours éloigné , cL
A l'x S
ou ne le rechercha pas. Après avoir
exercé !a me'decine pendant i'esp-.ce
de treiite ans , Arsilli mourut d'une
hydropisie, dans la soixante-seizième
année de son âge. On a de lui un
p'iëme elégiaque , intitule: De poëtis
Urbanis , qu'il adressa à Paul Jove ,
et dans lequel il parle do tous les
poètes de son temps qui florissaient
à Rome ; il est imprim.é dans un re-
cueil de poe'sios latines de plusieurs
auteurs , sous le titre de Corjciana ,
Rome, i5-24, in-4°., et a été' réim-
primé par Tiraboschi , à la fin du
tome vil, part. 5 , de son Histoire de
la Littérature italienne, i '"''. édit. de
Modène, in-4^ Paul Jove et Giraldi
attribuent aussi à Arsilli une traduction
des Vrolos^ues (THippocrate , en vers
lalius , mais elle n'a pas été imprimée.
G—é.
ARSINOÉ , fdle de Ptolémée , fils
de Lagus, roi d'Egypte, et de Eéré-
iiice, épousa Lysiniaque, roi deThra-
ce , qui était déjà avancé en âge ,
et avait plusieurs enfants. Elle devint
jalouse d'Agathoclès , l'aîné des fils de
ce prince, qui était marié à Lysandi'a,
fille du même Ptolémée et d'Eurydice;
d'autres disent qu'elle conçut une vio-
lente passion pour lui , et qu'il ne vou-
lut pas la satisfaire; quoi qu'il en soit ,
elle parvint à le perdre dans l'esprit
de son père , qui le fît mourir. Quel-
que temps après , Lysimaque étant
parti pour l'Asie , la laissa dans la
Macédoine , avec Lysimaque et Phi-
hppe, deux fils qu'd avait eus d'elle;
ce prince ayant été tué dans une ex-
pédilion , Ptolémée Céraunus s'em-
para de la Macédoine ; mais il ne put
pas jireudre Cassandrée , oîi Arsinoé
s'était renfermée avec ses enfants.
Alors, il lui fit proposer de l'épouser j
elle eut beaucoup de peine à s'y déci-
der, cependant, à la fin, elle y consentit,
et voulut bien même le recevoir dans la
AKS
ville de Cassandrée ; mais à peine y^
fut-il rr.tré , qu''' fit massacrer ses
deux fils , et l'exila elle-même dans
l'île de Samotiira.'e , d'où elle sortit
bientôt pour épouser '-'to'e'mée Phila-
delphe , son frère de père < t de mère ,
et, quoiqu'elle fût beaucoup plus âgée
que lui, elle lui inspira uni- telle passiun,
qu'après sa mort , il donna son nom à
un des nomes de l'Egvple; iliui fit faire
une statue de quatre coudées de haut ,
d'une seu'e pierre qui ressemblai" à la
topaze, et il lui consacra une enceinte
où il fit placer un obélisque. Il voulait
lui ériger un temple dont la voûte au-
rait été en aimant , pour que la statue
d' Arsinoé, qu'il aurait fait exécuter en
fiT, restât suspeiidue en l'air. Il n'eu
avait point eu d'enfants , mais il lui
fit adopter ceux qu'il avait eus d'Arsi-
uoé , fille de Lysimaque, sa prru.ière
épouse. C — R.
ARSINOÉ , fille de Lysimaque , roi
de Thrace , épousa Ptolémée Philadel-
phe , dont elle eut trois enfants , Pto-
lémée , Lysimaque et Bérénice. Son
époux avant cru qu'f-lle avait cons-
piré contre lui, l'exila à Coptos , dans
la Thébaïde ; elle trouva le moyen de
s'en échapper, et se rendit auprès de
Magas , frère de mère de Ptolémée ,
et roi de Gyrène , qui i'épousa , et
adopta Bérénice sa fille, qu'elle avait
emmenée. Ptolémée et Magas voulant
par la suite terminer la guerre qui
avait long-temps subsisté entre eux,
convinrent que Ptolémée , fils de Pto-
lémée Philadelphe et d'Arsinoé, mais
qu'il avait fait adopter par Arsinoé sa
sœur et sa seconde femme , épouserait
Bérénice. Magas éîant mort dans ces
entrefaites , Arsinoé , sa veuve , vou-
lant rompre un mariage auquel cll&
n'avait pas consenti , fit venir de la
Macédoine Démétri'.is , fils de Démé-
trius Polioccrîes, pour lui faire épou-
ser sa fille , et , lorsqu'il fut arrive' ,
5io Ans
plie le prit pour son ainant , et lui
abandonna toute son autorité. Com-
me il en abusait, il se forma contre
lui une conspiration , à la tète de la-
quelle était Bérénice, elle-même. On
îc tua dans la chambre même d'Arsi-
noe', et entre ses bras; mais on ne lui
fit à elle aucun mal. C'est ainsi que
j'ai cru devoir concilier Callimaque et
Justin , qui disent , le premier , que
Bérénice était fille d'Arsinoé et do
Ptoléraée, le second, qu'elle était fille
d'Arsinoé et de Magas ( Voj. Apamk
et Bérénice ). C — r.
ARbINOÉ, fille de PtoléméeEver-
gète et de Bérénice , épousa Plolémée
Philopator son frère; elle se trouva
a\'cc lui au combat de Raphia , contre
Antiochus, et ne contribua pas peu
au succès de cette journée. Ptolémée,
par la suite , étant devenu amoureux
d'A;:jathoclée , se laissa entièrement
subjuguer par cette femme et ji.u'
ses frères, qui obtinrent de lui l'ordre
de faire mourir Arsinoé , et ils la
firent tuer par un certain Philammou.
C— R.
ARTABAN , frère de Darius ( Voy.
Darius ).
ARTABAN , capitaine des gardes
de Xcrcès ( T'oj. XercÈs ).
ARTABAN 1 V, roi des Parthes ,
était frère de Volgèse III. Excité par
quelques nobles mécontents, il lui dis-
puta la couronne. Après la mort de ce
prince , il lui succéda sans opposi-
tion , quoique Tiridate eut un droit
plus légitime, en qualité d'aîné. Comme
il était en paix avec l'empire romain ,
il ne se tint pas assez sur ses gardes
quand Sévère ravagea les territoires
voisins , et , dans une incursion des
li'oupcs romaines , il manqua d'être
fait prisonnier. Caracaîla le mit dans
un danger encore plus grand, par un
des actes de perfidie les plus odieux
dont l'bisloirç fasse mculiou. Sous
A R T
prétexte d'assurer entre les deux na-
tions une paix durable , il demanda
en nniiage la fille d'Artaban , et, quoi-
que d'abord le roi des Parthes eut re-
jeté cette proposition , on finit par ob-
tenir son consentement. Le général
romain fit, en conséquence, marcher
.son armée dans le pays des Parthes ,
et fut reçu partout en ami. Lorsqu'il
approcha de la capitale , Artaban vint
à sa rencontre avec un brillant cor-
tège , et des démonstrations de joie ;
mais tandis que les Parthes ne son-
geaient qu'à se livrer aux plaisirs ,
(]aracalla donna le signal à ses troupes
qui se jetèrent l'épée à la main sur ces
hommes désarmés , en firent périr le
plus grand nombre , et dispersèrent
le reste : Artaban lui-même eut peine
<à échapper au massacre. Caracaîla
pilla et incendia tout le pays voisin, et
se retira ensuite en Mésopotamie. Ar-
taban , liriilant de scvengn", asseml'la
l'armée la plus considérable que les
Parthes eussent encore mise sur pied ,
passa l'Euphrate , et , mettant tout à
feu et à sang , entra dans la Syrie ,
où les Romains marchèrent à sa ren-
contre. Ils avaient alors substitué Ma-
crin à Caracaîla. L'action dura deux
jours. Le champ de bataille était dé;à
couvert de quarante mille morts , lors-
que, le troisième jour, Artaban renou-
vela l'attaque , en disant qu'elle ne
faisait que de commencer , et qu'il la
continuerait jusqu'à ce que le dernier
des Partbes ou des Romains eût péri.
Un hérault d'armes , envoyé par Ma-
crin , l'informa de la mort de Cara-
caîla , et proposa uu traité entre les
deux empires. Cette offre fut accep-
tée. On rendit au roi des Parthes les
captifs qu'on lui avait faits ; on lui
paya les frais de la guerre , et il re-
tourna dans son pays, en l'an 217.
Ses succès l'avaient tellement exalté ,
que, le premier des monarques par-
A R T
jlies, il prit le double diadème, et le
titre de Grand-Roi ; mais sa pros-
pe'rite' fut de peu de durée. Ardshir
Babegaa , ou Artaxerce , excita les
Persans à se révolter contre lui, et,
daus une sanglante bataille , Artaban
fut défait , pris et rais à mort. Par cet
e'vénemcnt , l'empire des Parthes , qui
avait subsisté quatre cent soixante-
quinze aus, fut détruit. Cependant, la
famille des Arsacides ne fut point
éteinte dans la personne d'Artaban ;
elle .continua de régner en Arménie ,
comme tributaire des monarques per-
sans , jusqu'au temps de l'empereur
Juslinien. D — t.
ARTABASDE, né eu Arménie,
commandait dans cette province un
détachement des armées romaines ,
en 71G, lorsque Léon III l'Isaurien
disputa l'empire à Tliéodose III,
qui venait de détrôner Anastase II;
Artabasde promit à Léon de le favo-
riser , et celui-ci s'engagea à le pren-
dre pour gendre. Effectivement , lors-
que Léon eût été couronné, Artabasde
épousa la princesse Anne, et fut nom-
mé curopalate. En j^'i , Léon l'Isau-
rien étant mort, laissa le sceptre à
son fds Constantin Copron^Tnej la
haine qu'on portait à celui-ci fit con-
cevoir à Artabasde la possibilité de
s'emparer du trône. Il leva l'étendard
de la révolte , et marcha contre Cons-
tantin qui s'avançait en Phrygie pour
combattre les Sarrasins. Les premiers
succès furent pour Artabasde; il en
profita pour s'approcher de Coustan-
tinople , où le patrice Théophane et
le patriarche Anastase venaient de sou-
lever le peuple contre Constantin ,
dont ils avaient faussement publié la
mort. Artabasde fut reçu dans la ca-
pitale et reconnu empereur ; mais Co •
pronyme rassemblait dans la ville
d'Amorium les débris de son parti.
Cependant les deux empereurs implo-
AUT 5^1
raient l'appui des khàlyfes sarrasins ,
les plus cruels ennemis de l'enipire.
En 743, Artabasde, après av^ir fait
couronner Nicéphore , son (ils aîné ,
passa eu Asie avec son autre fils iNi-
cétas, et se mit à ravager les provin-
ces qui lui étaient opposées; mais son
armée fat surprise par celle de Cons-
tantin , et taillée en pièces , près de
Sardes. Artabasde , vaincu et pour-
suivi , regagna Constaiitinople avec
peine. Bientôt il s'y vit assiégé par
son rival ; la ville n'était point app 0-
visionnée , et en peu de jours la fa-
mine s'y fît sentir. Enfin , le 2 no-
vembre , Constantin s'en rendit maî-
tre; Artabasde se sauva à ^'icée, et de
là au fort de Puzane , dans lequel il
fut pris. Constantin lui Gt crever les
yeux, ainsi qu'à ^ icétas et à Nicéphore :
on les promena pendant les jeux du
cirque , montés sur un âne , et le vi-
sage tourné vers la queue. Après celte
catastrophe, l'histoire ne parle plus
d' Artabasde. L — S — e.
ARTABAZE, fils de Pharnace,
commandait les Parthes et les Choras-
miens , dans l'expédition que Xercès
fit contre la Grèce. Ce prince , après
la défaite de son escadre, voulant re-
tourner daus la Perse , voulut qu'Ar-
tabaze l'escoitàt avec Go, 000 hommes
pour traverser l'Europe , et lui or-
donna de retourner joindre Mardo-
nius pour faire la guerre aux Grecs.
Artabaze soumit, pendant l'iiiver, quel-
ques villes maritimes de la 3Iacédoi-
ne, et, étant revenu au printemps
vers MardoniuH, il chercha à le dis-
suader de livrer la bataille de Platée,
Au moment du combat, jugeant, par
ses dispositions, qu'il serait battu, il
se tint à l'écart et se retira avec sou
armée, en répandant sur toute la
route que Mardonius était vainqueur,
afin qu'on le laissât passer sans l'atta-
quer. C—B.
542 ART
ARTABÂZE , l'un des généraux
d'Arîaxcl■cè^ -LonsiU"-i\Iaiu , resta fi-
dèle à ce pniicc tant qu'il vécut, et fit
tons SCS elTui tspour sGiimeitre Datame
qiii s'c'îait revoité. Apres la mort de ce
pnnre , il se révolta lui-même contre
Artaxercès Ocluis , sou successeur, et
défit deux fois ses troupes. Obiigé à
la fin de céder, il se réfugia dans la
Macédoine. Quelque temps après ,
jMentur de Rhodes, dont Artabazc
avait é))0nsé la sœur, ayant rendu de
grands services à Artaxercès Ocbus
dans son e\])édilion contre l'EgN'pte,
obtint la t^râce de son beau-frère , vers
l'an 55o av. J.-C. Il se trouva, par la
suite, avec Darius Codoman , à ia ba-
taille d'Arbèles , et il le sui\it dans sa
fuite; mais, ne voulant pas se prêter
aux projets de Bcssus contre ce prince,
il se relira, de concert avec ses fils et
avec les troupes grecques ; il se 'endit
à Alexandre qui le fil satrape de la ij le-
Iriane, vers l'an 55oav. J.-C. Environ
deux ans après, i! pria Al<'xandre de
donner sa satrapie à un autre , pnrce
qu'il était trop vieux pour la gouver-
ner. 11 avait un grand nombre de fils
à qui Alexandre donna des gouverne-
ments. Ses filles furent mariées, l'une
à Ptoléméc, fils de Lagus; l'autre à
Eumènts deCardie, et une troisième
à Séleucus. C — R.
ARTABAZE, ou ARTAVASDE
( car c'est le même nom ) , fils de Ti-
grane, hérita de la portion des états
de sou père qui ne lui avait pa» été
enlevée par les Rondins, et qui se
leduisait à peu près a l'Arménie. Lors-
que Crassus entreprit son expédition
contre les Partlies, Artabaze lui pro-
mit des secours considérables; mais
livrodès, roi des Parthes, étant venu
l'attaquer, il ne put pas les envoyer,
et il fit même bientôt sa paix avec les
Parthes. Quelques années après, l'an
.53 av. J.-C. , il engagea Ajityiuc à fa-' vc
ART
la guerre à Artabaze , roi des Mèdcs ^
et aux Parthes, en lui promettant de
se réunir à lui avec toutes ses forces ,
et il l'abandonna encore, ce qui ex-
posa Antoine à de très-grands dan-
gers. Irrité de cet.'e trahison, celui-ci
trouva le moyen de se saisir d'Artabazc,
et l'emmena en Egypte , où il le fit
ser\ ir d'ornement à son triomphe.
Après la bataille d'Actium , Cléopâlre
étant revenue en Egypte, et voulant
obtenir des secours du roi des JMèdes,
fit couper la tête à Ait;.baze qui était
son ennemi , et la lui envova, l'an :i3
av. J.-('i. Ce prince était très-instruit,
et il avait éorit en grec des tragédies,
des discours et des ouvrages d'his-
toire , dont quelques-uns existaient en-
core du temps de Phitarque. C — r.
ARTAl.E (Joseph), poète italien,
né en iGiH à Maz«»rcno, en Sicile,
s'adonna d'abord à l'art militaire, et
se trouva à Candie lorsque cette place
fut assiégée pjr les Turks. La valeur
qu'il déploya , en diverses rencontres ,
le fil juger digne du titre de chevi.lier
de l'ordre Constaiitinicn de v*^t. -Geor-
ges, qui lui fut conicré, avec la faculté
de pouvoir ajouter aux armes de sa
famille l'aigle à deux têtes. 11 était si
fort à l'escrime , qu'on l'appelait com-
munément // Cavalier sunf^iiinario.
11 mourut à Naples , des suites de
maladies honteuses et de la goutte , le
1 1 février 1679. Ou a de lui: I. Dell'
Eiiciclopedia , parte prima , Pérou-
se, io58, in -8'.; Venise, 1660 et
iGt)4 ■> in-12; parte seconda, ou
la Guerra fia i luV/ e morfi , tra-
iiedia , di lielo fine , et il Cor di
Marte , rumanio , Naples , 1 679 ,
in -10.; parle terza , ou VAlloro
frultitnso, rSaples, i()7(), in-ia ; II.
la Pnsife (Pasiphaé^, ovvero l'im-
possibile fatto possibile , dramrna
per inusica, Venise, 1661 , in-i'i;
III. la Belhzza uV.errata , elesi^i
AlîT
(m seste rime), Naplcs , 1646,
reimprimëe à Venise eu 1 60 1 , in- 1 2.
G— E.
ARTAUD , archevêque de Reinis
au I o". siècle , est fameux par la con-
testation qu'il eut avec Jlebrrt et
H!i2;ues, comtes de Paris. Ces nobles ,
Jaloux de raccroisseaieut du pouvoir
dt'S cccle'siastiques , engagèrent , on
94"? Guillaume, duc de Normandie,
à se joindre à eux pour assie'j^er Reims.
Dès le sixième jour, le prélat lut aban-
donne' par ses vassaux et se soumit.
Ses ennemis l'obligèrent à résigner
son arcbevêclié et à quitter le dio-
cèse. 11 s'enfuit à Laon , et se pre'-
senta devant la cour qui s'y trouvait
alors. On mit tout en usage pour l'inti-
mider et pour le faire consentir à l'or-
dination de Hugues , son compétiteur,
qui n'avait pas plus de 20 ans. Artaud
résista fermement, et menaça de l'ex-
communication et de l'appel au pape ,
si l'on élisait un autre arclievcque de
Pieims pendant sa vie. Hugues fut
ce])cndant ordonne dans une assem-
blée d'ëvcques, tenue à Soissons , en
Ç)4 1 '• depuis ce temps , le droit au
siège archiépiscopal fut le sujet d'une
longue contestation entre les deux
pre'tendants , jusqiî'à ce qu'en 947 '^
roi rétablit Artaud. Peu après Hugues
fut excommunié dans un concile tenu
à Trêves. Artaud av.'.it sacré, en gSô,
Louis-d'outre-mer ; en 953 , il sacra
Lothaire , fils de ce prince : tous deux
lui accordèrent leur confiance et le
nommèrent leur grand-chancelier. Il
mourut le 5o septembre 9G1. H a
laissé une Relation de ses démêlés
avec le jeune Hugues , qu'on trouve
dans Y Histoire de l'église de Reims ,
te Gallia Christiana , et ailleurs.
M— D.
ARTAUD ( Pierre -Joseph ) , né à
Bonieux dnis le Gomtat-Vénaissin ,
Vi\ 1706, vint trcs-jaiue à Paris, et
s'y distingua dans le ministère de la
chaire. On lui confia d'aboid la cure
de St.-Mé:y; ses talents et ses vertus
lui méritèrent , ensuite , l'évêché de
Civaillon , dont i; fut jvourvu en 1 "^50.
L:i mort l'enleva , le 5 sept. 1760, au
troupeau qu'il instruisait asitant par
ses exemples que par ses prédications.
iSon Panégyrique de S. Louis , 1754,
in-4". ; son Discours sur les maria-
ges, h l'occasion de la naissance du
duc de Bourgogne, 17J7, in-4".;
ses Mandements , ses Instructioris
pastorales , etc. , ne sont dépourvus
ni d'élégance ni d'onction. Ses prônes,
qui n'ont point été imprimés , pas-
saient pour des modèles dans le genre
familier. Sx — t.
ARTAXERCES , surnommé Lon-
gue-Main, à cause de la longueur de
l'un de ses bras , était second fils de
Xercès. Son père, ainsi que Darius
son frère aîné, ayant été tué par Ar-
taban ( Foy. XercÈs ) et d'autres con-
jurés , il eut le bonheur de leur
échapper, et monta sur le trône l'aa
404 avant J.-C. Son premier soin fiit
de punir les assassins de son père. Il
se vit ensuite obligé de faire la guerre
aux Egyptiens qui s'étaient révoltés
dès qu'ils avaient appris la mort de
Xercès , et avaient appelé à leur se-
cours les Athéniens. Artaxercès étant
parvenu à les faire rentrer dans le
devoir, les Athéniens continuèrent à
lui faire la guerre, et Cimon s'cm-
])ara de la plus grande partie de l'île
de Chypre ; alors Artaxercès , qui n'é-
tait point belliqueux, résolut de faire
la paix à quelque condilion que ce
fut , et ses généraux conclurent, avec
les Athéniens , un traité par lequel le
roi de Perse consentait à ce que toutes
les villes grecques de l'Asie fussent
libres , et s'engageait à empêcher que
ses satrapes n'approchassent de la
mca- , de plus de trois jouraécs. Ce
s 14 ART
fut à la cour d'Aiiaxcrcès que The-
misloclcs se réfugia et fut reçu avec
de crands honneurs. Ce roi se montra
très-favorable aux juifs , et l'on croit
qu'il est l'Assuérus de l'Écriture , qui
épousa Esthcr et permit à Esdras de
re'tabln- le culte juif et le gouverne-
ment civil à Jérusalem. Il passa le
reste de ses jours eu paix, et mourut
l'an 4'i4 avant J.-C, après avoir ré-
gne quarante ans; Xercès son fils lui
succéda. C — r.
ARTAXERCÈS, surnommé Mnl-
MON , devint roi de Perse après la
mort de Darius II, son père , l'an 4o5
av. J.-C. Cyrus, son jeune frère, que
Parysatis, leur mère, avait cucrciic à
f lire placer sur le trône , ayant cons-
piré contre lui , il eut la bonté de lui
pardonner, et de le faire satrape de
la Lydie et des cotes de l'Asie , ce qui
n'einpccha pas qu'il ne se révoltât
contre lui , par la suite , et ne rassem-
blât une armée considérable pour le
détrôner. Artaxcrcès étant allé à sa
rencontre, il se livra une bataille dans
laquelle Cyrus fut tué en s'ex|)osant
téniéraireuient ; Artaxercès resta pai-
sible [)ossesscur du trône. Mécontent
des Lacédcmoniens qui avaient em-
brassé la eau se de son frère , il prit à son
service Conon , général athénien , et
enleva , par son moyen, l'empire de la
mer aux Lacédéiaoniens. Il lui fourint
ensuite de l'argent pour faire releverles
raurs d'Athènes. 11 parvint au> si, par les
divisions qu'il seiua dans la Grèce , à
forcer Agé>i!as d'abandonner ses états,
où il avait déjà fait de grands progrès.
Enfin , il amena les Spartiates à signer
ce traité de paix honteux , par lequel
ils lui abandonnaient les villes ( t les
îles grecques de l'Asie. Les Egyptiens
étaient presque toujours en révolte
contre !-e roi de Perse ; Artaxercès
ehcrcha à les réduire , mais il ne put
pas en venir à bout. Il entreprit aussi
ART
en personne, contre les Cadusiens ,
une expédition qui ne fut pas heu-
reuse. H épousa Amestris et Atosse ,
deux de ses propres filles, et l'on croit
qu'il donna le premier exemple de ces
sorteSjde mariages. Cependant il paraît
qu'ils n'étaient pas défendus par la
religion des mages. Il se laissa gou-
verner par Parysatis , sa mère , qui lui
fit commettre de très - grandes injus-
tices. Après avoir fait péril' Darius,
l'aîné de ses fils , qui avait conspiré
contre lui , il fut tué par Oclius , le
plus jeune de ses fils , qui lui succéda
l'an 56 1 avant J.-C. Artaxercès avait
régné quarante-trois ans. C — r.
ARTAXERCÈS III, eu OCHUS,
était le troisième des fils légitimes
d'Artaxercès Bliiémon. Darius son
frère aîné , avant été mis à mort , pour
avoir conspiré contre son père , et
Ariaspe , le second , s'étaut empoi -
sonné , Ochus monta sur le tr()ne
après la mort de son père , l'an 5Gi
av. J.-C. , et prit le nom d'Artaxercès.
Il commença son règne parfaire mas-
sacrer son frère et tout ce qui tenait
à la famille royale, et la suite ne ré-
ponditque trop à ces commencements.
L'Egypte était alors en pleine révolte ,
et Artaxercès Muémon avait vaine-
ment tenté de la soumettre ; Ochus
continua long-temps à y faire la guerre
ptr ses généraux; mais, ayant appris
que les Égyptiens faisaient des raille-
ries sur sa personne , et voyant que
la Phénicie et l'île de Chypre s'étaient
révoltées , il sortit de cet état d'inertie,
et se mit à la tête de ses années. Il
alla d'abord attaquer la Phénicie , où
il aurait obtenu peu de succès, sans
la trahison de Mentor de Rhodes , qui
cominaudait les troupes grecques .î
la solde du roi de Sidon, tt qui, de
concert avec le roi lui-même , livra les
principaux de celte ville à Ochus, qui
les fit massacrer : les liabitaats aimé-
ART
rent raîeux péri:- clans les flammes que
de se rendre. Les autres villes scsou-
ïiiirrnt sans combat. Il entra ensuite
dans l'Egypte, qu'il eut bientôt réduite,
grâce aux talents de Bagoas. Une fois
maître du pays, il s'y li". ra à toutes sor-
tes de cruautés , dc'truisit les temp'es;
et enfin , ayant fait égorger le bœuf
Apis , il se le fit servir dans un repas.
Cette dernière action exrita l'indigna-
tion de Bagoas , qui , ne en Egypte ,
était très-attacbc à sa religion. 11 ne
témoigna pas tout de suite sou ressen-
timent ; mais de retour dans la Perse ,
Ochns s'cîant de nouveau livre à son
indolence , et ayant abandonné tous
les soins du gouvernement à Bagoas ,
celui-ci le fit empoisonner, donna son
corps à manger à des chats , et fit faire,
avec ses os , des poignées de sabres ,
pour rappeler son humeur farouche
et sanguinaire. Il plaça ensuite sur le
trône Arsès , le jîIus jeune de ses fils,
et fit mourir tous li s autres. C — r.
AKTAXERCES BABEGAN. Foy.
AnoÉcHiR.
^ ARTaXIAS, ou ARTAXAS, fils
d'Ai'tabaze, fut proclamé roi d' \rménie
par l'armée , lorsque son père se fut
kissé prendre par iMarc Antoine. Ce
général , de concert avec Artabaze ,
roi des Mèdes , l'ayant attaqué, il fut
vaincu et prit la fuite; mais il revint
bientôt , et, ayant défait Artabaze , et
l'ayant fait prisonnier , il rentra ^
possession de ses états. Il fut tué,
quelque temps après. C — u.
ARTÉAGA ( Etienne ), jésuite es-
pagnol, était fort jeune 'ors de la sup-
pression en Espagne de la < ompagnie
de Jésus. Il se retira en Italie, et vé( ut
long-temps à Bologne , dans la maison
du cardinal Albergati. Arteaga suivit en
France son ami le chevalier Azara, et
mourut chez lui , à Paris , le 3o octo-
bre 1799. On a de lui : I. Traité sur
le beau idéal ( en espagnol ) ; II. le
n.
ART 545
Rivoîuzioni del teatro musicale Tta-
liiino , dalla sua orisine , fmo al
présente, \ei\ise, i ^85 , 3 vol. in-B°>
C'est la seconde édition, mais la seule
qui soit conij)lèle. La première était
en un seul volume : elle avait paru
à Bologne plusieurs années aupara-
vant. L'auteur ayant tirinmé son ou-
vrage , des diffii u'tés arrètèrei.t l'im-
pression de ce qu'il y avait ajouté. Il
se décida à donner a Venise une se-
conde édition comp'ète , en fai :i:t,
dans le premier vo'umc, de tels chan-
gements que l'ouvra-e était entière-
ment neuf. <?est ce qu'il nous apprend
lui - même dans si n averlissenient.
C'est sur une troisième édiliwi' qu'a
été fait 1'; xlrait publié en tiançais
sous ce titre : les Révolutions du théâ-
tre musical en Italie , de; uis son
origine jusques à nos jours , traduites
et abiégée- de l'italien, Londres ^
180a , in-8\ de 1 o'2 pages. III. l'Iu-
sieurs Hissertations savanles, et des
Poésies grecques et latmes dont il se
proposait de pubher Le recueil. « Ar-
» teagaaiaisséeii Qianusi rit.dit Grain-
» ville, un ouvrage en italien delrit-
» 1110 sojioro , e del rilmo muta desli
» anlichi disstrtaiioni V il^ dont il
» m'avait confie ia tr.idiu tion. L'au-
» teur y a mis a contribi tiuii les pîus
» cclèbn s écrivains de i'aiiliquite; il
» y traite de la musique, de ia pc esie,
» de la grauiuiaiic, de la paDfomime,
» de la danse, ttc D'après 1' vis de
» plusieurs savants du premier 01 dre,
» ses découvertes sont absolument
» neuves et très-essentielles à l'art
)) Il avait été question d'imprimer cet
» ouvrage a Parme avec les caractères
» de Bodoni ; mc;is la révolution , qui
» a fait de l'Italie un des. théâtres de
» la guerre, avait Suspendu celte en-
)> treprise littéraire ». La mort d'Ar-
tédga suspendit aussi la traduction
de Graiuville qui était à peine au
55
'i
S46 ART
tiers de son ouvrage ( yof. Grai^-
VîLLE ). A. B T.
ARTEDI (Pierre), méJecla et
natiiraliste suédois , ami et conlem-
porain de Liune' , naquit, en i-^oS,
danslapi'ovince d'Angcrmauland , en
Suède. Destine d'abord par son père
à l'élat ecclésiastique , son g ait l'en-
traîna vei'S l'histoire naturelle. 11 com-
niença ses études à Upsal , et c'est là
qu'il contracta avec Linné' une amilie
qui s'étendit au-delà du tombeau. Ils
travaillèrent de concert à l'histoire
naturelle, leur science favorite : l'obli-
gation do voyager , que cette science
impose à ceux qui la cultivent , les
sépara momentanément; Artedi partit
pour l'Angleterre , et Linné' pour la
Jjaponie ; mais avant de se quitter , ils
firent un accord par lequel , en cas de
malheur, le survivant devait hériter
des manuscrits de son ami. En 1755,
jjs se rejoignirent à Leyde , pour en-
tendre les leçons de Boerhaave. Ce
savant, juste appréciateur du mérite,
en leur procurant une existence ho-
norable, leur fournit les moyens de
<léveloppcr leur génie. Il les plaça
auprès de deux riches amateurs d'his-
toire naturelle, Linné chez C'.iffort,
et Artedi chez le naturaliste Seba.
Celui-ci avait employé une immense
fortune à composer un cabinet d'his-
toirt' naturelle , le plus riche qu'on
oût encore vu. Il en faisait imprimer
alors la description avec de très-belles
planches , sous le titre de Trésor , et
cet ouvrage méritait en effet ce nom ,
pour la magnificence de son exécu-
tion. Artedi s'engagea donc à concou-
1-ir à ce travail ; de plus il profita de
la position où il se trouvait pour com-
poser une Histoire des Poissons ,
mais il ne put la faire paraître lui-
lucrae , car un accident terrible vint
terminer sa carrière au moment où
H donnait les plus grandes espérances.
ART
Artedi sortant un soir de chez Se]>a ^
tomba dans un des canaux d'Ams-
dam , et s'y noya. Ce fut en i755;
il n'avait que trente ans. On peut
juj^cr de la do;!l?«r qu'éprouva Linné/
mais il ne s'en laissa point abaltre , et
songea tout de suite a élever un mo-
nument à la mémoire de son ami :
ce fut en faisant iiuprimcr le Traité
des Poissons , q;:'i! avait laissé , sous
le titre d'ic/»/t)o/oo;^/rt, Lugd. Bat.,
17 58, in-8 .,avec une ï^ie d' Artedi
par Linné, en latin. Cet ouvrage,
plein de ces vues savantes qui ont
illustré depuis Linné, est écrit dans
la manière concise de ce grand natu-
raliste. 11 est divisé en cinq parties ,
dont la première est la Bibliothèque
IchtJifolo^ique ; la seconde , la Phi-
losophie Ichlhj'olo^ique ; la troi-
sième , la Description des genres ,
la quatrième la Synonymie ; la cin-
quième la Description des espèces.
C'était l'ouvrage lopins complet qui eût
encore paru sur cette partie.On admire
le plan , l'ordre et le goût avec lesquels
l'auteur a su réunir et distribuer une si
grande variété de conn;dssances. C'est
un modèle à suivre , pour faire l'his-
toire complète et détaillée des êtres.
Ce chef-d'œuvre n'a point encore été
surpassé, et s'il a perdu de son utilité,
c*cst que le grand nombre d'espèces
qui ont été observées depuis dans les
diverses parties du monde , ont uéccs*
Sllé de grands changements dans
cette paitie de la Zoologie. 11 en a
paru une nouvelle édition , corrigée
it augmentée , sous ce titre : Pétri
Artedi Ichtkyologia , nova editio ,
emendata et aucta à Johannes Julio
IValbauvi , Grvpswalda; , 1 788 ,
in-4". Jean Gottheb Schneider a aussi
donné une nouvelle édition d'une pav
tic de cet ouvrage , également corri-
gée et augmentée , avec trois planches;
clic est intitulée : Pétri Artedi Sj'
ART
ncnymia piscium , etc. , Lipsiae ^
1789, in-4". , Isih. aenese 5. Le seul
reproche qu'on ait fait à Artcdi , c'est
d'avoir compris les cdtace'es parmi les
poissons ; mais il n'a fait en cela
que suivre l'opinion des auteurs qui
l'avaient précédé ; c'était une erreur
consacrée : ce n'était pas encore lui
■qui devait la faire disparaître. Artcdi
s'était occupé d'abord de la botanique,
et il avait fîiit une étude particulière de
la famille des Orabellifères. Voyant que
les tentatives que l'on avait faites jus-
qu'alors pour les ran;^cr méthodique-
ment, ou pour établir leur genre d'après
leurs fleurs et leurs graines , avaient
présenté peu d'avantages, il crut trou-
verplus de certitude dans la considéra-
tion d'une partie à laquelle , jusque-
là , on avait fait peu d'attention : c'est
telle des feuilles ou folioles qui sont
à la base de l'ombelle , et qu'il dé-
signe par le nom d'involucre ( mw-
iucrum ) dans l'ombelle générale , et
par celui d'involucelle ( ini>olucel~
liim ) , lorsqu'il y en a dans l'om-
belle particulière. Cette partie pré-
sente effectivement un caractère fa-
cile à saisir ; mais , comme tous les
autres , il ne peut être employé seul ;
parce que souvent il sépare des plan-
tes qui ont de l'affinité, et en réunit
qui sont dispai'ates. Linné consacra
à la mémoire de son ami , sous le
i)om d^Arledia , un genre de plantes
de cette même famille des Ombelli-
ïères , qui avait été le sujet de ses
observations. Ou n'en connaît qu'une
iespèce , qu'il surnomma écailleuse
( squamata ) , faisant allusion aux
poissons «caillcux dont Artedi avait
fait l'histoire. D — P — s.
ARTÊME ( S.) , général des Ro-
mains , en Egypte , sous le règne de
Constance, se chargea de coiinnission s
qui le firent soupçonner d'être ennemi
de S. Athauase j cliarj^é de l'arrêter,
ART 547
il le chercha vainement dans le désert
de la Thébaïde. Du reste, on a tou-
jours pensé qu'Artème n'avait obéi à
l'empereur que par faiblesse ; car il
n'approuva jamais l'hérésie. Son or-
thodoxie parut surtout avec éclat sous
l'empereur Julien. Les païens d'Egypte
l'ayant accusé d'avoir démoli leurs tem-
ples et brisé leurs idoles , Julien le fit
comparaître devant lui, àAntioche, en
5()2 , et , sur cette simple accusation ,
ce prince le condamna à perdre la
tête , au mois de juin de la même an-
née. Les Grecs l'honorent parmi ceux
qu'ils appellent ç^runds marljrs. K.
ATÉMIDORË, natif d'Épiièse, vi-
vait sous le règne d'Antonin-le-Pieux.
On lui donna le surnom de Daldien^
parce que , par sa mère , il était origi-
naire de Daldis , en Lydie. Il est au-
teur d'un Traité des songes , eu cinq
livres, intitulé: Oneïrocriiicon, pu-
blié, pour la première fois, en grec ,
à Venise , Aide , 1 5 1 8 , in-8 '. , et plu-
sieurs fois réimprimé. N. Rigaud en
donna une édit. gr. lat. , avec le Traité
d'Achmet sur la même matière , et des
notes , Paris, i6o5 , in-4'. La traduc-
tion est du médecin Jean Haguenbot,
connu sous le nom de Janus Coma-
riiis. M. Reiss a publié de nouveau le
texte grec, Leipzig, i8o5, in- 8°.,
2 vol. Cet ouvrage a été traduit eu ita-
lien, par Pierre Lauro de Modène j
en français , les trois premiers livres
seulement, parCh. Fontaine; Lyon,
i54<^3, i555, in-S".; Paris, 1647,
in-i () ; et , en entier, jiar Anthoine Du-
moulin , avec le Traité d'Aug. Niphus
sur les augures, Rouen, i6{i4i 'D-12.
— Un autre ArtÉmidore, géographe,
vivait environ 1 00 ans av. J.-C. Stra-
bûu et Pline parlent souvent avec
éloge de sa Description de la terre.
Hudson a recueilli, dans le premier
vol. de Svja édition des Géographes
if^GQiulaires de la Grèce, Oxford,
55..
548 A R ï
1705, des Fragments de cet écrivain.
— Il y eut encore un Artemidore ,
dialecticien , cité par Diogènc Laerce ,
qui écrivit un livre contre Chrysippe.
K.
ARTÉMISE , fille de Lygdamie ,
après la mort de son mari , dont nous
ue connaissons pas le nom , devint
reine d'Haiicarnassse , comme tutrice
de Pisindélas, son fils; elle suivit, avec
ses vaisseaux , Xercès dans son expé-
dition contre la Grèce j elle se distin-
gua dans les combats sur mer qui
précédèrent la b;itaille de Salamine.
Elle était d'avis d'éviter l'action , et
son avis i\it justifie par l'événement.
Elle s'y conduisit avec beaucoup de
valeur. Se voyant poursuivie par un
vaisseau athénien , elle attaqua, pour
lui donner le change , un vaisseau ca-
lyndien , de l'escadre du roi de Perse,
et lecoulaàlbnd ; ctrathénien, croyant
qu'elle faisait partie de l'escadre grec-
que, cessa delà poursuivre. Artémise
tira deux avantages de ce hardi stra-
tagème; elle se garantit d'une mort
certaine, et fit périr Damas Acymus ,
avec lequel elle avait eu de vi tlents
démêlés. Xercès, eu apprenant l'action
héroïque de cette princesse, s'écria:
<i Les hommes aujourd'hui se sont
» comportés eu femmes , et les fem-
)) mes en hommes. » Ce prince la com-
bla d'éloges; et lors de son départ, il
la pria de conduire ses enl'auls jusqu'à
Ephèsc. Les Grecs étant maîtres de
la mer, Artémise fut la seule personne
sur qui Xercès crut devoir se reposer
de la conservation de ses enfants. ]^es
Athéniens la redoutaient tellement,
qu'ils avaient promis de magnifiques
récompenses à celui qui l'ai-rèterait,
ou qui la ferait prisonnière. La statue
que les Lacédémonicns lui érigèrent
jie fait pas moies ci'houncur à sa mé-
moire. De retour à Haluarnasse , Ar-
témise saisit toutes les occasions qui
ART
se présentèrent d'étendre les bornes
de ses pelits états , fit le siège de Pat-
mos, et soumit cette ville. La fin de la
vie de cette princesse ne répondit pas
à de si beaux commencements. Dans
un âge où la raison doit exercer tout
son empire, elle devint, suivani Pto-
lémée Éphasstion, éperdiimenf amou-
reuse d'un jeune homme d'Abvdos,
ï\ommé Dardariits; s'en voyant mé-
prisée , elle lui creva les yeux , tandis
qu'il dormait; mais son amour, au lieu
do duninucr, s'étant rallumé avec plus
de violence encore , elle fil le saut du
rocher de Leucate, et périt misérable-
ment. Cependant , comme ce récit n'est
appuvé que sur le témoignage de Plo-
lemée Ejdiœstion , on ue peut pas y
ajouter beaucoup de foi. K.
ARTÉMISE Jillc d'Hécalomus, loi
de la Carie , fut mariée à Mausole , son
frère, sorte de mari.ige que la cou-
tume autorisait en Carie, selon Ai rien.
Elle le perdit, l'an 555 av. J. C, et en
l'ut inconsolable. Elle préposa des prix
considérables à ceux des Grecs qui
composcrai( nt avec le plus de succès,
un discours à la louange de son époux.
Isocratc , Théjdecte , Nauerite et
Tl:éopompe parurent , selon Auhi-
Gelle , à cette espèce de concours. Ar-
témise fit érigera Mausole un tombeau
magnifique, connu sous le nom de
Mausolée, et qu'on regardait comme
l'une des sept merveilles du monde.
Les Grecs et les Romains ne se las-
saient pas d'admirer ce monument
qui faisait le pins bel ornement dlla-
lica masse. Il a subsisté plusieurs siè-
cles, et Pline en a laissé une descrip-
tion , dont la vérité ne saurai I èlre
contestée. La douleur d' Artémise ,
quelque vive qu'elle fût , ne lui fit pas
néghger le soin de ses états ; car el!e
s'empara de l'île de Rhodes , de celle de
Gos, et de quelques villes grecques du
continent j ou dit cependant qu'elle
ART
mourut de douleur , deux ans après
sou époux. Tlicoporape, auteur con-
temporain, et Ciiéron après lui, la
fout mourir de phthisie. Il y a quel-
que chose de plus merveilleux, et dès-
lors de moins croyable , dans le récit
de Valère Maxime et d'AuIu-Gelle ;
selon eux, elle but les cendres de son
mari, aiusi que ses os, broye's avec
des perles et jetés dans un vase rempli
d'eau. Elle no jouit pas, dans un rèune
si court, de la satisfaction de voir le
tombeau qu'elle élevait à son mari,
conduit à sa perfection. Ilydricus, son
fière et son successeur , eut proba-
blement la gloire de l'achever ( f^oj.
Ada ). B- — p.
ARTEiMON, deClazomène, méca-
nicien célèbre , se trouva aA^ec Péri-
clès au siège de Samos , et iuvcnta ,
pour cette opération, la tortue et d'au-
tres machines de guerre. Ejihore, cité
par Plutarque , dit qu'il était boiteux ,
et qu'il se faisait porter dans une li-
tière , ce qui le fit nommer Péripho-
rétos; mais il est probable qu'il l'avait
confondu avec un autre Artemois, con-
temporain d'Anacréon, qui, né dans
la plus basse classe du peuple, avait
acquis une très -grande fortune, et
étiiit devenu si efféminé et si peureux ,
que, lorrqu'il était dans sa maison, deux
esci jves lui tenaient un bouclier de
cuivre sur la tète, pour le garantir de
ce qui pounait tomber, et qu'il ne
sortait jauiai- que das, s un lit suspendu.
La bli.'ncic Eurypvlelui donna, a cause
de sa richesse, la préférence sur Ana-
créon, qui s'en vengea par une chan-
son, conservée par Aîhenée. — 11 est
question, dans Pline , d'un autre Aii-
tiîmos , homme du peuple , dont la
ressemblance avec Antiochus 11 était
si frappante, que Lnodicé, après avoir
enq)uisoi ne son époux , lui en fit
jouer le rôle pendaut quelques jours,
^)our avoir le temps de l'aire de'si-
ART
5.i9
gncr son successeur ( Foy. Antio-
cuus II ). C — R.
ARÏÉlVîON, peintre, a vécu sous
les Césars. Rome s'était ornée d'un
grand nombre de ses ouvrages , parmi
lesquels on remarquait surtout une
Stralonice , et une Danaé recevant
la pluie d'or. Les portiques d'Octavie
avaient été décorés par cet artiste de
peiniures très-précieuses. — Il y eut
aussi un Artemon sculpteur , qui fit
plusieurs belles statues pour le palais
des Césars. L — S — e.
ARÏEPHIUS, philosophe hermé-
tique, vivait vers i i5o. Il est auteur
des Traités suivants : I. Claçis ma-
joris sapienliœ ,'ïmT^xnné(\.àVi?, le Tliéd-
tre chymiqtte, à Francfort , i6i4,
in-8''., à Strasbourg, iCiQi), in-12,
puis traduit en français. 11. Liber
secretits ; III. De characteiibus pla-
netaruni , cantu et moiibus ainum,
rerian prœteritarum et fiditrarum ^
lapiâeqae philosophico ; IV. Dcvita
propagancla , ouvrage que l'auteur
composa , dit-il, à l'âge de mille vingt-
cinq ans ; V. Spéculum speculorum.
Le Traité d'Arléphius, sur la pien'e
pliilosophaîe, a été traduit en fran-
çais , par Pierre Arnauld , siem- de la
Cbevaleiie, et imjnimé avec ceux de
vSynesius et de Flaniel , Paris, 1612^
iG5() , i68'2, in-4°. K.
ARTEVELLE (Jacques d'), de
Gand , brasseur de bierre , homme
éloquent, adroit et factieux, parvint
à un tel excès de richesses et d'auto-
rité, qu'il se l'cndit plus absolu, dans
le 1 4". siècle , à la tête du parti po-
pulaire, que jamais aucun comte de»
Flandre ne l'avait été. Suivi de la po-
pulace , il ne cessait de déclamer
contre le priuce et la noblesse , et ne
paraissait qu'escorté d'une troupe de
satellites qui exterminaient, au moin»
dre signal , ceux qui avaient le mal-
heur de lui déplaire. Ea vain le comte
/
530
ABT
de Flandre voulut s'opposer aux en-
treprises de ce nouveau tribun du
peu])lej il fut contraint de se réfugier
en France. Arlevelle se vit , par cette
retraite , souverain absolu , et ce fut
par son entremise qu'Edouard III,
roi d'Anç^îetcrre , régla les conditiojis
de son alliance avec les Flamands.
Elle n'eut d'abord pour objet que
l'inte'rêt du commerce des deux peu -
pics ; mais elle eut bientôt un but po-
litique, Edouard , ayant déclare !a
gueiTC à la France, cliercba à gagner
Artevelle pour qu'il décidât les Fla-
mands en sa faveur. Une assemblée
générale de tous les alliés de cette
puissance fut indiquée à Bruxelles.
Artevelle v parut avec le cortège d'un
souverain, traînant à sa suite les dé-
putés des villes de Flandre, tous dé-
Toués à ses ordres. Un scrupule ar-
rêtait encore les Flamands : ils s'é-
taient engages, par serment, à ne point
faire la guerre à la France , sous peine
d'excommunication. Ce fut pour lever
ces difficultés qu'Artevelle conseilla,
dit- on, au roi d'Angleterre , de prendre
le titre et les armes de roi de France,
€t, aussilèt a])rès, à la tête d'un corps
de troupes , il vint ravager le Tour-
naisis , en combinant ses mouvements
avec l'armée anglaise ; mais les comtes
de Salisbury et de SufTolck ayant é!c
battus , et faits prisonniers par la gar-
nison de Lille , Artevelle se retira.
Convaincu qu'il était allé trop loin
pour pouvoir se soustraire à la ven-
geance du comte de Flandre, il ré-
solut de faire passer la souveraineté
"^ au prince de Galles , fils d'Edouard.
Suivi des députés des villes de Flan-
dre, il vint trouver Édouaid et le
prince de Galles à l'Ecluse ; mais il
employa vainement son éloquence et
son autorité; les députés furent iné-
branlables , et répondirent unanime-
ment qu'ils ne consentiraient jamais
ART
à déshériter leur comte pour un princ«
étranger. Artevelle prit alors d'autres
mesures avec Edouard; il introduisit
secrètement 5oo Anglais dans la ville
de Gand ; mais le peuple se souleva
contre lui, investit sa maison, et le
perçademillecoups,eni54-'5-Edouard
se hâta de retourner en Angleterre.
B— p.
ARTEVELLE (Philippe d'), fils
du précédent , fut choisi pour chef par
les Gantois , révoltés contre Louis llî,
comte de Flandre, en 1082. Le nom
d'Artevelle, toujours cher au:i Fla-
mands , ne fut pas plutôt prononcé
par les factieux , qu'ils coururent en
foule à la maison de Philippe, le con-
duisirent sur la place publique et lui
prêtèrent serment de fidélité, comme
à leur souveraii!. Son premier acte
d'autorité fut de venger la mort
de son père, en faisant mourir, sous
ses yeux , douze des principaux au-
teurs de ce meurtre. Il déclara en-
suite la guerre au comte de Flandre,
qui Aint investir Gand, mais sans suc-
cès. Artevelle le défit, s'empara de
Bruges , et , enflé de cette victoire ,
affecta le faste d'un souverain ; mais le
comte de Flandre , ayant imploré le
secours de la France, Artevelle et
les autres chefs de la révolte , s'effor-
cèrent en vain de conjurer l'crago.
Leurs négociations échouèrent à la
cour de France et même à celle d'An-
gleterre. Une nombreuse armée fran-
çaise , commandée par le connétable
de Clisson , et à la tète de laquelle on
voyait le jeune roi Charles VI, péné-
tia eu Flandre. Artevelle fit prendre,
les armes à toiis ceux qui étaient eu.
état de les porter, et il eut la témérité
de se mesurer avec les Français dans
une bataille rangée, qui se donna dans
la plaine, entre Rosbec et Courtray,
le 9.7 novembre i58i. Les Flamands
fiu'cnt taillés en pièces, Artevelle pé-
AKT
ïît , et son corps , trouve sous un
monceau de cadavres , fut pendu à
un arbre. Cette defoile e'toulîa la re'-
volte , et le comte de Flandre rentra
dans ses états. B — p.
ARTHUR, ou ARTUS. La vie de
ce fameux prince de la Grande-Bre-
tagne , est teliemen.t nièlee de fables ,
que quelques critiques ont nié jusqu'où
son existence ; mais ces fables nom-
breuses suffisaient elles-mêmes pour
prouver qu'il vécut et qu'il fit des ex-
ploits mèracrabîes. Voici au reste son
ni^oire, telle que nous l'ont trans-
mise GeoflTrci de Montmouth, et d'au-
tres anciens historiens, sans mélant^e
de contes incroyables. Il était fils d'I-
gerne, f mme de Gorlois , duc de
Cornouailles ; mais Utlier , pendra-
gon, ou dictateur des Bretons , était ,
dit- on, son père, et, pour relever ce
commerce adultère , on inventa une
histoire serai lable à celle de Jupiter et
d'Alcmène , et dans laquelle ou fit in-
tervenir le pouvoir mar;ique du fameux
Merlin. Lorsque Uther mourut , en
3 iG, Arthur lui succéda, et commença,
contre les Sajous cnv.ihisseurs de l'île,
cette suite d'exploits qui ont rendu
son nom si illustre. 11 mit en déroute,
sur les burds cb la rivière Douglas ,
dans k Lancashire , une armée com-
binée de Saxons, d'Eros^ais et de
Pittes II marcha de là sur Yorck et
mit le siège devant cette ville ; mais
un puissant lenfurt étant arrivé aux
Saxons, i! se retira sur Londres, et,
ayant obtenu des secours deHoel , roi
deTArmonque , fils de sa sœur , il m.ar-
clia de nouveau à la rencontre des
Saxons, assiégea Lincoln, qu'il prit,
et força ce qui restait des défenseurs de
la place à se rendre, sous la c-ondition
de quitter l'Angleterre. Un autre jvarti
de Saxons débarqua dans l'Ouest, fit de
grands ravages, et mit le siège devant
Badon ouBath. Gete'vèneraentdétour-
ART 55t
na Arthur d'une expédition projetée
contre les Écossais; Û marcha rapide-
ment contre les Saxons , les défit dans
un combat sanglant, qui dura deux,
jours , et tua deux de leurs chefs. Alors,
il retourna au Nord, avec la même rapi-
dité, pour débloquer son neveu , Hoel ,
que les Ecossais et les Pietés avaient,
investi dans Dunbritton. Là encore il
fut victorieux j il obligea l'ennemi ,
qi'i fuyait, de capituler, et plaça en
Ecosse un souverain de son choix.
Revenu à Yorck, il i établit la foi chré-
tienne sur les ruines du paganisme, et
épousa une iémme , appelée GiiMiliu-
marrt, élevée dans la famille de Cador,
duc de Cornouailles , la même (|ui ,
sous le nom de Genièvre , a été le
sujet de plusieurs romans en vers , et
qui est plus renommée par sa beauté
que par sa fidélité conjugale. On le re-
présente ensuite comme envahissant
l'Irlande^ l'assujétissant entièrement,
et obtenant le même succès dans l'îs-
lande , la Gothlande et les îles Or-
cadcs; mais ce ne sont pas là les plu.i
croyables dç ses aventures. Se repo-
sant de ces travaux , il gouverna son
royaume en paix pendant douze ans ,
et éleva , dit-on, sa cour à un degré
de splendeur et de civilisation qui s'ac-
corde mal avec la barbarie du siècle.
Il institua son fameux ordre des che-
valiers de la Tablc-Eonde , ces mo-
dèles de la chevalerie , devenus si fa-
meux chez les romanciers. Le reste
de son histoire est mêlé des plus exj-
travagan tes fictions. L'orgueil et l'igno-
rance de quelques anciens écrivains.,
ses compatriotes, lui font conquérir
la Norwège, le Danemarck et la France,,
tuer lui géant espagnol et déclaixr la
guerre à l'empire romain. Selon eux ,
il était en pleine, marche sur Rome ,
lorsqu'il reçut la nouvelle que son ne-
veu Modred s'était , en son absence j^
révolté contre lui, et avait éponsé sa
55-i A R T
femme. AilLiir , ob;igc de revenir dé-
fendre ses propres e'taîs , livr-a trois
batailles à Modred , qui avait appelé
à son serours les Saxons et les Bar-
bares du Nord. Dans la dernière, il
fut vietorirux , ràais il reçut tant de
bl( ssurt s , qu'il se relira dans l'iîe d'A-
\alon, où il mourut, l'au 54^. Whi-
takcr est l'etriv.iin qui a mis le plus
de soin.', h ëclaircir l'histoire d'Artliur.
ïl admet qu'il fut Anh-uir. ou souve-
rain des Silui'es , et (ju'il combaMit
sous les ordres d'Ambroiius, pendra-
gon des Bretons (/^oj. âmbrosius},
qui l'envova secourir les Brtlon.s du
JNord , (jpjirimes par les Saxons. En-
suite Arlliur devint lui - même chef
suj-rème de .ses compatriotes. Arthur
fut enfcrjé à GlaN.scnl ury. et scuj le
règne de Hemi II, vers l'an 11H9,
son i ercu( il fut découvert, et on trouva,
près de sou corps , une petite croix do
plomb, sur laquelle elùent j^raves ces
mots: Hic jacet se^mllus iiichtns rex
Artiirius in insitîà Avalonid. Apres
avoir .apj.ortcf cette preuve irrécusable
de !'cxis:cucc d'Arthur, on ne peut
mieux terminer cet article , que par
J'observali(!U judicieuse d'un écrivain
anp,l,iis : « Si ce hor. s eût clé moins cé-
V lebré par les faiseurs de romans,
» on n'aurait ])cul-ctre pas révoqué en
» d( nte 1.1 vérité des exploits que de
■>•' plus c;raves bistoriens lui or.t attri-
» bues. » D — T.
ARTHUR DUCK. Vov. Duck.
ARTHirS , ou ARTUR , V . duc de
Bretagne, fils po.^thnme de Ge« (fioi,
troisième fils du roi d'Ans;letcrre Hen-
ri 11 , et de Constance de Bretagne,
liérilicre de le duché, naquit à ^autes,
le 3o avril 1 18'j. 11 n'avait pas encore
neuf ans, que son oncle Riehard 1*'.,
roi d'Angiclerre , étant pai ti pour la
Terre-Sainte avec Philippe-Auguste ,
s'engagea, par un traité avecTaiurède,
roi de Sicile , à faire épouser la fille de
ART
ce prince au jeune Artur , son béritic?
présomptif. Les droits d'Artur à la
coiu-on ne d'Angleterre furent alors éta-
blis d'une manière non moins authen-
tique par l'évèque d'Eli , régent du
royaume ; il reconnut le jeune prince
pour héiitier de Richard, et le fit re-
connaître, en la même qualité, par
le roi d'Ecosse. La duchesse Cons-
tance fit aussi proclamer son fils duc
dcBr tagne , dans une assemblée gé-
nérale a Renues , en 1 1 96. Richard
ne conserva pas long-temps ces bonnes
dispusilions |)Our son neveu. 11 réso-
lut de !e dépouiller de ses étals ; mais
coniiiiis.«ant toutes les difficultés de
cette entreprise , tant que la duchesse
Constance veillerait aux intérêts de
son Dis, il la pria devenir le trouver
en Noimandie , et la fit enlever en
route , par son mari , le comte de
Chestre. Fier du succès de sa ruse, le
roi d'Angleterre entra en Bretagne , et
y commit mille horreurs. Il ne put
cependant ^e rendre maître de la
personne d'Artur, qui fut sauvé par
l'évèque de Vannes , et conduit à la
cour de France. L'évasion d'Artur ,
et la crainte de vcir les Bretons em-
brasser le parti t;e Philippe-Auguste ,
rendirent peut- être Richard moins
difficile sur les condition^ de la paix.
Elle fut conclue en 1 197 : Constance
fut mise eu liberté, et conlii ua de
gouverner la Bretagne pendant la
minorité de son fils ; Richard feignit
même d'avoir rendu son amitié au
jeune Artur; mais, à sa mort, qui arriva
le 6 avril 1 199, il déclara., par sou
testament, Jean-saus-Terre son suc-
cessein-, au préjudice d'Artur. On pré-
tendit que ce testament était supposé.
L'Anjou, le Maine et la Tor.rainc se
déclarèrent en faveur d'Artur ; le roi
de France reçut son hommage pour
ces trois provinces , ainsi que pour
la Bretagne, le Poitou et la Norman-
ART
die. Le jeune prince annonçait les
qualités les plus brillantes et les plus
aimables ; tous les cœurs étair nt pour
lui ; mais il ëtail sans arç;rnt , sans
armée, tandis que son compétiteur,
qui s'était emparé des trésors de Ri-
chard, n'avait pas perdu de temps
pour lever des troupes. On proposa
de laisser l'Angleterre à Jean , et de
donner les provinces du continent à
Artur. La duchesse Constance mou-
rut, en l'^oi , au milieu de ces négo-
ciations , qui n'eurent aucun résultat.
Artur ne pouvait pas faire une plus
grande jîcrle dans de telles circons-
tances. Cependant Pbiiippe-Auguste,
qu'on avait vu abandonner ou proté-
ger le duc de Bretagne, selon qu'il y
trouvait son avantage , l'arma che -
valier à Gournay , reçut de nouveau
son hommage , et déclara la guerre à
Jean. Artur, plein de feu et de cou-
rage , court assiéger la ville de Mire-
beau en Poitou; mais le roi Jean, qui
était en Normandie, étant accouru à
la télé de forces considérables , sur-
prit Artur , qui ne s'attendait pas à une
éi grande diligence, et le fit prison-
nier, avec les principaux seigneurs
de son parti. Il en fit enfermer vingt-
deux dc\s plus distingués par leur va-
leur dans le chât<au de Corf, où il
les fit périr de faim , et il envoya
Artur dans la prison de Falaise. Jean
conçut alors le dessein de faire périr
son neveu ; et il employa les caresses
et les présents auprès de ceux qu'il
crut devoir lui être le plus dévoués ,
afin de les engager à commettre ce
crime. Mais ne trouvant personne qui
voulût servir sa vengeance, il fît con-
duire ce jeune prince à Rouen, où on
l'enferma dans une tour sur !a ri\ icre ;
et il fit de nouvelles recherches pour
trouver des assassins. Ces recherches
furent encore inutiles; l'honneur ins-
jtirait les uus , la crainte arrêtait les
ART 553
autres. On savait trop bien que Jean
était capable d'immoler le bourreau
après la victime. Ce monstre, vovant
qu'il ne pouvait compter que sur lui-
même, se rendit par eau , pejidant la
nuit, au pied de la tour de Rouen , fit
amener le prince dans sa barque , lui
passa plt'.sieurs fois son épée au tra-
vers du corps, et le jeta ensuite dans
le fleuve avec une grosse pierre au
cou. On assure que, malgré ces pré-
cautions barbares , le corj)S d'Artur fut
tiré par les filets d'un j.êcheur, et en-
terre à l'insu de Jean , dans le prieuré
de Notre-D.ime-du-Pré. Phiiippe-Au-
gusîe cita le mcurtri(r à la cour des
pairs , qui rendit l'arrêt suivant :
tt Jran, duc de Normandie, ayant
» violé son serment envers le roi Phi-
» lippe, son seigneur; tué le fils de
» son frère aîné, vassal de la cou-
» ronne de France, cousin du roi ,
» et commis ce crime dans l'étendue
» de la seigneurie de France , il est
» déclaré coup;ibie de félonie et de
» trahison; toutes ie^teries qu'il tient
» à hommage seront confisquées. »
{T. Jean-sans-Tebre). L'assassinat
d'Artur est de l'an itiouj ce prince
avait alors quinze ans. D. N — l.
AR ' IGNY (Antoine Gachetd'),
chanoine de l'égiise primatiale de
Vienne eu Dauphiné, était né en celte
ville If 8 nov. i-^cô. Littérateur mo-
deste et laborieux, il passa sa vie dans
l'obscurité de son cabinet, occupé sur-
tout de remarques critiques et biblio-
graphiques. En 1759, il publia une
brochure, mûlxAé^t: Belation d'une
assemblée tenue au bas du Parnasse,
pour la réforme des Belles-lettres ,
in- 12. M. Sabathier a dit, avec plus
de malignité que de raison, que le
lieu de l'assemblée était bien choisi.
Cette brochure est écrite avec plus de
finesse et d'esprit qu'on ne le devait
attendre d'un homme occupé de re-
554 ART
chercLes minutieuses , et qui songeait
moinsà soigner sou style qu'à iinc;mcn-
terses collections. Cette pièce eut quel-
que succès , et il se proposait d'en
donner une nouvelle e'diti ,n ; il aA'ait
même adresse son manuscrit à un li-
braire de Hollande , qui se contenta
d'en pulili r la pi-enùèie partu , "^ans en
nommer l'auteur, dans ul-" rompila-
tion ayant pour titre : PelilRésen'f'ir ,
contenant une variété défaits hisiuri-
ques et critiques, la Haye, 1-750,5 vol.
in -8°. L'aUbc d'Arfigny abandonna
donc son projet d'une licuvcllcëdilion;
mais il inséra le» changements et les
additions qu'il avait laits à sou ou-
vrage , d.iiis le dcnii'T volume de
ses Nouveaux Mémoires d'histoire ,
de critique et de littérature , Pans,
1749 — 5(i, 7 vol. in-i'^. 11 a réuni
dans re Uceueil p>lusieurs pièces éga-
lement r.ins et curieuses ; des Dis-
sertr.tiorssur dilFercnts points deTliis-
toire iiîtéjire, remajqutibles par un
ton dt'Ctut de cri'ique, et par un air
de benne foi qui piaît au lecteur et qui
le persuade. On a reprodië à l'abbé
d'Artigny d'avoif lire les articles les
Élus intéressants de son Recueil d'une
listoire manuscrite des poêles fran-
çais, composée pir l'abbé Brun, doyen
de ^t.-Agric^le d'Avignon. On ne peut
douter que l'abbé d'Arfigny ne counAt
l'existence de l'ouvrage de Brun , puis-
qu'il dit que le manuscrit en était reste'
dans la bibliothèque du séminaire de
St.-Sulpicede Lvon , ainsi qu'un Traité
du plagiat , par le même auteur; mais
les articles concernant les poè'es fran-
çais ne sont pas les plus intéressants
de sou Recueil , comme on a alFecté
de. le dire; et l'abbé d'Artigny aurait
pu avouer qu'd les avait emprtuités à
Brun,sansquesaréput.itiou en souifi ît.
Il s'occupait d'un abrégé de l'Histoire
imii' ers elle, dont on a trouvé le manus-
«xil informe dans ses papiers. Sur la fin
ART
de sa vie , il abandonna tous ses pro
jets littéraires pour se livrer à l'éliide
des médailles, devenue pour lui une
passion. Dans sa jeunesse, il avait fait
des vers qu'il supprima dans un âge
plus mùr, et avec raison, si l'on en
juge par ceux qu'il a laissés, en petit
nombre. 11 mourut à Vienne le 6 mai
1778, d^iiS sa soixante -deuxième
année. \Y — s,
ARTOIS (Jacques Van), peintre,
ré à Bruxelles en 161 5. On ignore
quel fut son maître; mais on sait qu'il
étudia la ijature avec assiduité. 11 ac-
quit, par cette méthode, la plus sîire
de toutes , une grande manière , une
touche agréable, et le talent de donner
à chaque objet le caractère qu- lui est
propre. H avait acquis égalenent un
coloris très-vigouieux ; mais la plupart
de se.s tableaux ont poussé au mir.
Teuiers , qui était très-lie av€c Van
Artois , a souvent peint ou retouche'
les figures et Us animaux dans les ta-
bleaux de cet artiste. Van Artois pei-
gnant avec biaiîconp de facilité, fai-
sant payer fort cher ses ouvrages, et
jouissant d'une grande réputation, (ût
])u acquérir de la fortune , s'il ne se
fût avisé de fréquenter les grands et
de loin- donner des repas somptueux.
Avec ce genre de vie, il mourut pauvre,
on ne sait en quelle année. On voit de
ses ouvrages à Bruxelles, àMalines,
à Gand et à Dussoldorf. D — t.
ARTUR et ARTUS. roj-.AmavR
et Arthus.
ARTL'R III , dit Le Justiciuu.
f^OV. RiCHEMOND.
ARTL SI (.Tkan-Marif.), né à Bo-
logne, vers le milieu du iG'. siècle,
chanoine régulier de la congrégation
du S. wSH>iveur, fut un célèbre profes-
seur de musique. Il florissait vers
1690. On a de lui : I. XArte dcl con-
trapuntn ridotto in tai'ole, parte
prima, VcnisCj i58G, iu-fol., cl parle-
ART
seconda , Venise, 1 589, in-fol.Cet ou-
vrage, fort estime', est rare. W.Delle
imperfezioni délia moderna musica,
Venise, 1600, in-fol. , réimprime' en
i6o5, dans le même format; III. /m-
presa del R. P. Giosejfo Zarlino da
Chioggin dichiarata dal R. D. G.
Artusi, etc., Bologne, i6o4,in-4''.
G— É.
ARTUSIM (Antoine), de Forli,
et non pas de Ravenne, comme l'ont
cru quelques écrivains , naquit le 3
octojjve i554- 11 fut jurisconsulte,
poète et orateur. Il prenait le titre de
chevalier, et vivait encore en 1G24,
comme il païaît par le titre de cet ou-
vrage : Oratio habita in puhlico con-
sislorio ad S. D. N. Urbanwn VIII.
Pont. opt. max. in kal. maii, iGi4?
dum illustrissimi Helvelîonnn legali
homini uni\^ersœ Helvetiorum Ca-
thol. reipub. debitiim eidem pont,
ohsequium redderent, Rome, in-4''.
A la fin de ce discours, oùil se nomme
lui-même Antonius Astusinus Foro-
liviensis^ se trompe la réponse faite par
Je célèbre Jean Ciarapoli , de Florence.
On trouve encore d'Arlusiui quelques
pièces de versj entr'auti-es une can-
zone italienne , dans les Rime Scella
dé" poeli Ravennati , où elle a c'ic
insérée par erreur, et nn sonnet, mis
en tête du recueil des cinq discours
intitulés Corone , etc., par Etienne
Lusignano, Padoue, 1377, in-4".
G— E.
ARUM (Dominique Van), noble
Ûison , né à Lcuv?arde eu 1679, s'ap-
pliqua de bonne heure à la jiuispru-
dence. Après avoir fait d'excellentes
études à Franccker, à Oxford et à Ros-
lock , il se rendit, en 1 399, à Jéna , où
il fut nommé professeur de droit, eu
i6o5, et où il mourut le 24 février
1637. Il rendit d'importants services
au droit public de l'Allemagne, et fut
yn de ceux qui commencèrent à le ré-
ARU 555
duire en un corps de doctrine. Ses
principaux ouvrages sont : I. Discur-
sus academici de jurepublico , Jéna,
1 6 1 7-23 , 5 vol. in-4°. ; II- Discursus
academici ad auream bullam Ca~
roli IF, ib., 1617, in-4°. ; III. Com-
mentar. de comiliis Roman. German,
imp. , ib. , i(i5o-55-Go, in-4°- Ce
traité est un des meilleurs qui soient
sortis de sa plume. G — t.
ARUINDEL (Thomas ) , archevêque
deCantorbéry, naquit en i535, d'une
maison illustre, et lut nommé évêque
d'Ely, à l'âge de 21 ans , exemple uni-
que dans l'histoire de ce pays. On l'ac-
cuse d'avoir , dans tout le cours de
sa carrière épiscopale , montré un
goût puéril pour l'ostentation et le
luxe ; ce qui tourna cependant quel-
quefois au profit des églises dont il
fut successivement le chef. De l'arche-
vêché d'Yorck, il passa , en iStjG, à
celui de Cantorbéryj mais, dans les
dix années cpii précédèrent cette der-
nière nomination , ses fonctions ecclé-
siastiques ne l'empêchèrent pas d'oc-
cuper , avec quelques interruptions ,
le poste important de lord chancelier.
En 1590, il transporta les cours de
justice de Londres à Yorck, afin,
disait-il , de punir Torgiieil que le nii
reprochait aux habitants de la capi-
tale; mais probablement aussi pour
donner plus d'éclat et de richesses à
sonfliocèse. Bientôt, on sentit l'incon-
vénient d'un tel déplacement , et l'or-
dre ancien qui existe encore fiit réiabli.
Comme Arundel , en obtenant une
commission qui donnait la régence au
duc de Glocester , au comte d' Arun-
del et autres, avair pris une part très-
active aux premiers efforts tentés pout
déliATer la nation de l'oppression de
Ricl'.ard II , il fut banni par ce prince ,
et le pape Boniface IX, qui avait à se
plaindre du roi et du parlement , se
vengea en accucillaut un de leurs en-
;56
AKU
ncmis ; il iioinma Ariindel à l'arcte-
vêclie de St.-Audre en Ecosse , et
déclara l'iiiteution où il était de lui ac-
corder, eu Aiiglf'teire , d'autres hon-
neurs ecciésiasliques; mais une lettre
où Richard faisait sentir au souveiaiu
poiilife la néces-ité d'uu rapproche-
lucut et de l'iiarmonie la plus entière
eutre le trône et l'autel , fit changer
les dispositions de !a cour de nouie.
Heureusement poiu' Arundel , il ne
tarda pas à trouver, dans le mecon-
tent<'mcnt toujoiu-s croissant du peuple
aiij;!ais contre le roi, une occasion de
revoir sa patrie, et d'v reprendre «es
dij;iiités. Il clail arrivé dans la Bre-
taL^acau moment où la nojjlesse d'An-
ç;lolcrre et unt^ ;uitrc partie de la na-
tion soliiiitait ll':nri, duc de Laucas-
tie, excite par Richard, de quitter lu
Frtmcc pour venir recevuii ia cou-
ronne de ce monarque lui-même. On
chargea l'archevêque de Cantorbcry
de remettre au duc ui.e lettre pres-
sante qu'il accompagna des plus vives
remontrances sur l'état où se trouvait
le royanme, et sur la nécessité de re-
médier j)roraptemeiit au mal Henri,
retenu par quelques scrupules sur la
légitimité d'une pareille succession ,
finit par se rendre , et Arundel plaça
la couronne sur la tète de Henri IV ,
son nouveau maître. Au commence-
ment du règne de ce prince, les be-
soins de l'état exigeant des secours
considérables, on employa (dans le
parlement convoqué à Gjventry , en
1404), des arguments renouvelés
souvent depuis pour prouver que ces
secours pouvaient être pris sur les
Liens du clergé. Arundel mit en œu-
vre , auprès du parlement et du roi ,
tons ses moyens pour détourner Je
coup , et parvint du moins à le sus-
pendre. Il combattit ensuite une nou-
velle secte d'hérétiques ( les Lollards
ou ^YicklcI^ltcs ) , avec toute l'cU-dîui"
ARU
et "activité de son caractère. Il alla
jusqu'à déclarer que cette hérésie ne
pouv.iit se punir que par le feu , et une
exéc.tiou préparée par ses ordres eut
lieu ; il venait de prononcer , sous le
règne de Henry IV , imc pareille sen-
ter:ce Contre lord Ccbhain , lorsqu'il
fut sais; d'inie inflammation à la gorge
dont il mourut presque subitement.
L'espiit superstitieux de ce temps-là
ne manqua pas d'attribuer une fin si
prompte à la justice dinue. Arundel
fiît !e prenùer qui, par un zèle mal en-
tendu , défendit d traduire l'Écriture
saintf" CI) langue vulgaire. L — v — r.
ARUNDEL ( TnoMAS Howard,
comte d' ) , maiéchal (''Vngk terre ,
sous ics règiRS de Jacques 1". et
de Charles I^' , était un zélé protec-
teur des savants etd'^s arîisies. Après
avait p ssé quelques années sur le
continent, pinu* se livrer à l'otude
de? arts et de la littérature , il revint
d;^ns sa jiatrie , et dès-loi s son pa-
lais , situé sur le bord de la Tamise ,
et sa maison de campagne , dans la
province de Surrev . devinrent le sé-
jour des hommes les plus distingues
par leurs talents. Doué Ini-mêiue d'un
goût exquis, il dirigea, avec hiigo
Jones , dont il était le protecteur, les
embellissements des bâtiments de
Westminster; et , en 1618, il fut
chargé , avec d'antres pairs , de di-
riger les édifices de Lincoln's-lnn-
Fields , etc. , etc. , dont les desMUS ,
par Inigo Joues , sont aujourd'hui
chczle lord Fembroke , àWi'ton. Lord
Arundel et lord Pembroke furent
les premiers qui forraèrt nt en Angle-
terre des collections de monuments
antiques. Arundel associa à ses tra-
vaux le savant Jeaa Evelyn , qi'il
cnvova à Rome. l\ envoya ensuite
dans le Levant Gnill. Petfy, et ce fut
hiiqui, en iGi-y, apporta en Angleterre
les marbres connus sous le nom de
A RU
Marbres d'Arnndel, parmi lesquels
se trouve la cëlcbie Chronique de
Paras, qui contient les ëpnquv-'s les
plus mémorables de l'histoiie de !a
Grèce depuis i58i av. J.-C, , époque
de la foiidaùond'Atlièues, jusqu'en ^64
av. J.-C, et plusieurs traile's relatifs à
Priène, à Map;ne'sieet à Srayine ( f^.
Maittaire, Chaxdler, Peiresc). Dès
que lord Arundel eu; réuni les trésors
qu'il av^it rassemblés à Rome et dans
la Grèce , les stitues et les bustes
furent places dans sa ^aleri*? ; les
marbres eVrits furent appliqués aux
murs du jardin de son hôti^l , et les
statues d'un mérite inférieur , ou
qui étaient mutilées , occupèi eut son
jardin d'été à Larabeth. La collection
conten lit trente-sept statues, cent vingt-
huit bustes , et deux cent cinquante
marbres chargés d'insciiptions , sans
compter les autels , les sarcophages ,
divers fragments, et des bijoux d'un
grand prix. Arundel ne jouit du fruit
de ses soins que jusqu'en i64'i, où
la gueiTC civile le força de quilter sa
patrie , et d'y laisser tous ses biens et
sa collection , à l'exception de ses dia-
mants , de ses pierres gravées et de ses
tableaux, qui furent transpoités à
Anvers : lui-même se réfugia en Ita-
lie, et s'établit à Padovie, oi» il mou-
rut en 1646. A sa mort, il partagea
sa précieuse collection entre son fils
aîné et Guillaume Howard, l'infortuné
comte de SlafFord. Le partage de l'aîné
devint dans la suite l'héritage de son
fils Henri Howard, comte d'Arundel,
qui, en lôô-j, à la sollicitation de Jean
Seldenet de Jean Kvelyn, fit don à l'u-
niversité d'Oxford de tous ses marbres
écrits, qui , depuis cette époque , ont
été connus sous le nom de Marbres
d'Oxford ( Marmara Oxoiiiensia).
On peut voir , dans la traduction que
W. Miilin a donnée de l'ouvrage de
Dallaway , intitulé : les Arts en An-
A R u r^^.-i
çleterre , quel a été le sort du reste
de la magnifique coUeclio» d'Arundel.
Ces maibres furent dëciaffrés , aussi-
tôt après leur irrivé' , par le savant
Jean Sclden : il les publia, en i6iÇ),
ayec une traduction latine et un com-
mentaire , st'us ce titre : Mannora
Arundelliana, swe saxa grœrè in-
cisa , ex venerandis prisccf Orien-
tis gloriœ riiderihus. aitsjnriis et iin-
-/jetisis Thomœ , Comitis ylrundel-
liœ, etc. Accédant Inscriplinnes ali-
quotveleris Laii! ,€x ejusdem velus^
tatis ihesauro selectœ , Londres ,
iu-'i^o. Eu i6'^6, Hnnifroi Prideaux
les publia de nouveau , avec d'autres
marbres qui avaient été donnés à
l'université d'tJsford ; il les acc(;m-
pagna, dans cette édition, (qui estin-
titulée : Marmara Oxoniensia , ex
Arnndellianis , Seldeniards , aliis-
quecanflala, Oxford, iG^O, iii-fol. ,)
d'un commentaire auquel il ajouta les
observations de Seiden et de Thomas
Lydiat. Cette édition a été réimpri-
mée à Londres, en i^ôa, in-fol. ,
par les soins de Michel Maittairc ,
sous ce titre : Marim rum Arundel-
Uanorum , Seldeiiianorum , alio-
riimque Academiœ Oxoniensi do-
natorum , cum variis cummentariis
et indice. Mailtaire y a disposé les
marbres dans un meilleur ordre que
Prideaux ne l'avait fait , et a ajouté
aux commentaires de Prideaux et de
Seiden les observations d'autres sa-
vanîs qui se sont occupes de ces belles
anfiauités. La meili«ure et la plus
belle édition de ces marbres est c^lle
du savant et célèbre docteur Richard
Chandier, intitulée: vV^/rmor^ Oxo-
niensia, Oxford, i^Od, in-fol. , for-
mat d'atlas. Il y a , ccpcLidant , dans
les deux éditions précédentes, de bous
commentaires qui ne se trouvent pas
dans cel:eci , et qui les rendent néces-
saires. Des inscriptions, mais sans
558 A R U
grav., ont ete rëimpr. à Oxford, 1791,
iu-8". La Chronique de Paros a été
traduite par Scipioii Maffei , Lenglet-
Dufrcsiioi , le docteur Playfair et ]\F.
Bobinson ( Foy. la Dissertation de
ce dernier, concernant V authenticité
de la Chronique de Paros , 1 788 ,
in-8°, ; les Observations de Gibcrt
sur le mêrae sujet, Acad. des Inscr.,
tom. XXllI ; une Réclamation en
faveur de la Chronique de Paros ,
par liewlett , dans une Iclti'C à M"".
Robîiison,) Lord Arundel a c'te' peint
par Van Dyck, regardant la belle tête
d'Homère qu'il possédait , et qui est
a présent dans le Musée Brltauniquc.
C'est d'après ce buste qu'a été gravée la
planche de la collection dc]\P. Landon.
Ou voit , au château de Warksop ,
son portrait et celui de sa femme ,
lady Alathea Talbot , réunis dans un
même tableau , par Paul Van Somcr.
— Un comte d'AauKDEL, de la même
famille que les précédents, fut , à la fin
du i6'". siècle, emprisonné pendant
trois ans, condamné à mortel exécuté,
pour avoir entretenu une correspon-
dance avec le cardinal Alan. ( rq/.
Alan. ) K.
ARÛNS, pctit-fils de Tarquin
l'Ancien , roi de Rome , et frère de
Lucius Tarquin , dit le Superbe. Scr-
vius Tullius, successeur de Tarquin
l'Ancien , était le tuteur des deux
jeunes princes. 11 résolut , pour s'at-
tirer leur affection , de leur faire
épouser ses deux filles ; mais il eut
plus égard aux rapports de l'âge qu'à
ceux des caractères. Lucius, qui était
l'aîné , annonçait déjà des inclina-
tions violentes. Il eut une épouse douce
et vertueuse. Aruns , bien plus hu-
main que son frère , trouva dans
Tuljie une compagne ambitieuse et
capable des ] lus grands forfaits. Plus
Servius devint âgé. plus elle cher-
cha à porter aux entreprises les plus
ARV
hardies Aruns , qui ne faisait consis-
ter son bonheur que dans une vie
paisible. Elle se plaignait sans cesse
de la destinée qui avait uni son sort à
celui d'un époux indolent , et dési-
rait avec ardeur d'en être délivrée.
Des inclinations également perverses
Lèrent bientôt Tarquin et TuUie.
Tarquin empoisonna sa femme ; Tid-
lie se déhvra d' Aruns par un crime
semblable , et ces deux coujiables
s'unirent vers l'an 218 de Rome,
456 av. J.-C. {F. Tullie). D— t.
ARUNS, fils de Tarquin -Ic-Su-
pcrbe ( /^. Brtjtus ).
ARUNS, fils de Porscnna ( F,
Clelie).
ARVIDSON (Truls) , graveur
suédois, né vers le milieu du 17^.
siècle , mort en 1 7 o5 , voyagea , aux
frais du gouvernement, en plusieurs
pays, et revint dans sa patrie avec
une religieuse de Flandre , qu'il
épousa à Stockholm. Il fut employé
juincipalement à dessiner et à graver
les anciens monuments du Nord ,
dont l'étude était alors protégée par
Charles XI et par plusieurs grands
du royaume. On trouve une notice
sur les ouvrages d'Arvidson dans le
Spécimen biographicum de Dahl, im-
primé à la suite de la vie de l'antiquaire
Iladorph. AiTidson ne se bornait pas
au travail du burin. Ayant fait uu
cours d'études à Upsal , il s'occupait
aussi des sciences , et surtout des
langues orientales. 11 portait habi-
tuellement sous le bras la Bible hé-
braïque de Leusden , imprimée sans
points, et la lisait avec une grande
facilité. En 1705, il publia un ou-
vrage singulier , ayant pour titre :
Psalmi Davidis idiomate origi-
nali hehrœo , adscripta ad lattis
litteris ilalicis vocum lectura. Cet
ouvrage avait pour but de faire con-
naître les sept premiers Psaumes
ARY
aans la langue originale, suivant 1b
rythme musical des Hébreux, eu in-
diquant le ton de chaque mot. Ar-
"vidson n'eut pas lieu d'être satisfait
du succès de cette production , qui
ïui attira beaucoup de critiques ; mais,
maigre' ces critiques et maigre plu-
sieurs autres difficu'îe's , il se propo-
sait d'achever son travail et de pu-
blier de la m-ême manière tout le
Psautier, lorsque la mort mit un
terme à son activité et à son zèle.
C AU.
ARVIEUX (Laurent d), né à
Marseille en i65j, d'une fanùlle ori-
ginaiie de Toscane , fit paraître, dès
sou enfance, les plus heureuses dis-
jjositious pour l'étude des langues, et
une grande passion pour les voyages.
En i655, il suivit Bertandier , son
parent, nommé consul à Sevde, sé-
j ourna douze ans dans les différentes
Echelles du Levant , y apprit les
langues persanne, arabe, hébraïque,
syriaque, et revint en France pourvu
de toutes sortes de connaissances. Il
fut envoyé en 1668 à Tunis pour y
négocier un traité avec le Dey , s'ac-
quitta de sa commission au gré de la
cour, délivra trois cent quatre-vingts
esclaves français , qui voulurent lui
témoigner leur reconnaissance par une
bourse de Goo pistoles, qu'il refusa
généreusement. D'yirvieux fut en-
voyé en 1672 à Constantiuople. il y
eut beaucoup de part au traité que
M. de Noiniel , ambassadeur de
France , conclut avec Mahomet IV ,
par la facilité avec laquelle il parlait
le turk , ce qui étonna , et lui rendit
fivorable le grand vizyr. M. de Tu-
rcnne l'avait chargé de s'informer des
Grecs les plus instruits , quelle était
la croyance de leur église sur le mys-
tère de l'Eucharistie. Le résultat de
ses informations fut qu'elle était la
hiêuie que celle des Latins. A sou re-
ARY 559
tour, il fut fait chevalier de St.-La-
zare , et pourvu d'une pension de
1000 iiv. sur l'évêché d'Apt. Sou ex-
périence et sou intelligence dans la
conduite des affaires du Levant en-
gagèrent la cour à l'envoyer consul à
Alger, puis à Alep. Innocent XI,
instruit tles services qu'il y rendait à
la religion, le nomma à l'évé/'lâé de
Babyloue , qu'il ref'.sa , et lui permit
d'ajouter à ses armes ce^es de Jérusa-
lem. Le chevalier d'Arvieux se retira
les dernières années de sa vie à Mar-
seille; il y consacra tout son temps
à l'étude de l'Écriture Sainte , qu'il
lisait dans les textes originaux , et y
termina sa carrière le 5 oc'obre i "cj.
Il avait composé la Relation iVun
vojagefaitpar ordre de Louis XIV
vers le ^randEmyr, chef des princes
arabes du désert , et un Traité des
mœurs et coulumes des Arabes M. de
la Roque a publié l'un et l'autre
avec des notes , et une traduclirm de
h Description de V Arabie d'ALoul-
Feda, Paris, 17 17, in- 12. Ses Mé-
moires ont été donnés au public par
le P. Labat,Paris, 1705, 6 vjI.
in- 12. Ils furent attaqués par les
Lettres critiques de Hadgi-Mehe-
met-Effendi, Paris , I735,in-i2,
attribuées à M. Petis de la Croix.
T— D.
ARYSDAGHÈS ( S. ) , né en Césa-
rés de Cappadoce, vers l'an 279 de
l'ère vulgaire , étudia avec ardeur au-
près d'un habile maître , nomme iV7co-
maque , qui venait d'embrasser la reli-
gion de J.-C. V'jQ 5i8, il fut appelé à
Va'.arsabad , viile capit^ile de la grande
Arménie, par le roi Tiridate et par
son père , S. Grégoire, illumina teur,
qui venait d'établir publiquement le
christianisme dans ce royaume, par
l'ordre de son souverain. Arysd ghès
y fut sacré évêque de Diospont et
d'ime partie de l' Arménie majeure ,
56o A Tx Z
-par son père , qui , ayant abdiqué ,
vers l'an 53 1 , lui laissa les soius de
gouverner rëq;Iise naissante d'Arme'-
nie. S. Arvsdaççhès s\ maintint avec
feimrlé; il était pUin d'ardeur pour
la défense de la iTligion , et lit con-
naître un grand zèle contre les pa'iens;
et ii punit avec sévérité ceux qui n'ob-
servaient pas rigoureusement la loi
evan^éliquc. Quelques hommes puis-
sants s'opposèrert ouvertement à ses
entreprises ; mais ils furent réprimés
pai l'ordre du roi Tiridate. S. Arysda-
glit"; établit des monastères dar.s plu-
sieurs jirevinces d'Arménie, et il y ap-
pela des lioramcs instruits dans !a re-
ligion , leur assura desmoyous d'exis-
tence, et les chsrgea de prêcher la
doctrine de l'évangiîe. Il bâtit ensuite
une église dans !e bourg de Tilu.ivan,
qui lui avait et • donné en ap uiige ,
et une autre à Khozan , dans la pro-
vince de Sophcne. Le gouverneur de
cette contrée , nommé yirchélaus ,
l'un des ennemis de ce patriarche,
le surprit un jour dans un voyage ,
et le mit à mort, l'an 359 ^'' ^•-^'
— Un autre ARVsnAGHr:s. surnommé
AVrt^.ser, c'est-à-dire Bihliophile , vi-
vait dans la même cuntiée, à la fin
du 12'. siècle, et a laissé mie Gram-
maire et un Dictionnaire arménien.
C— D.
AF^ZACHE^ ( Abraham ) , autre-
ment dit EizARAREL , né à Tolède ,
dans le 12*^. siècle, fut un des plus
célèbres astronomes qui aient vécu
après les Grecs , et avant la renaissance
des lettres. H écrivit un livre sur l'o-
bliquité du zodiaque , qu'il fixa , pour
son temps , à -23 " 34 ', et Jétf rinina
Vapngée du soleil, par l^oi olis«rva-
tions. Les fimenses Tnhies alphon-
sines. pnbliccspar ordre d'Alphonsc-le-
Savant, roi de Casiille, sont, en partie,
tirées des ouvrages d'Arzacliel. On
ignore rannce de la naissance, et celle
ARZ
de la mort de cet astronome , qui pro*
fessa la reliçion juive. IMontucla dit
que ses tables exii-tcnt en manuscrit,
dans plusieurs bibliothèques , avec
une introduclion qui en explique
l'usage. C — S — A.
ARZAN, pontife païen, en Arme'-
raénie, au commencement du 4 • siè-
cle, était en grande vénération dans
cette contrée j il exerçait un pouvoir
souverain d'ius la province de Daron.
Les bourgs de Huran , de Govars, de
Meghdy et d'Achdichad, formaient
l'-ipaurige de sa maison. 11 avait sa ré-
sidence à Vichab , et il portait le
titre fi'-tucux ('^enfant du Soleil ,
gardien des temples des dieux Kis-
sané et Théinetz. Lorsque S. Gré-
goire, illuminaleur , établit le chris-
tianisme en Arménie , Arzan fit de
vains elfurts pour s'y opposer. S. Gré-
goire, au reti.ur d'un vuvage à Césarée
deCappadocc, eut le dessein de pas-
ser par cette province, afin de con-
vertir SCS haltitanls el de détruire les
idoles. Les officiers et les seigneurs du
pays, qui l'accompagnaient par l'ordre
du roi Tiridate, rassembKn\nt une
armée de "joco hommes. Aizan ,
avant été averti des préparatifs qu'on
faisait contrelui, forma , à la hUe , une
armée de tiooo combattants, et vint à
la rencontre de sou ennemi, aux en-
virons de Govars. S. Gn goire se re-
tira alors dans la forteresse d'(.)l';;an ,
avec plusieurs personnes de sa suite,
et, entre autres, G!ag-Zenop, qui a
laisse l'histoire de cet événement. La
bataille se donna bientôt , au pied
d'une montagne. Arzin , qui était dans
un âge avancé, se battit iK'anmoins
en désespéré. Il pous-^alViineiiii a plu-
sieurs reprises, avec une iinpéluosité
extraordinaire, et il excitait se> sol-
dats à le suivre, en criant à haute
voix ; « Il vans mieux se battre pour
» mourir en héros, que de vivre pouv
ASA
» voir nos temples delruits rt nos
» dieux outrages. » Et, s'adressnnt
aux chrétiens : « O renégats des dieux
» de la patrie, leur criait-il, sachez
■» que c'est le glorieux Kissani qui se
» bat contre vousl » Arzan , malgré
ses efforts , voyaut ses forces diminuer,
s'élança dans le centre de l'année
chrétienne , pour appeler le prince
d'Anghegshdam , qui la commandait,
à un combat singulier. Les deux
chefs s'élancèrent aussitôt l'un contre
i'autre, et, aprts quelque résistance,
ie pontife Arzan fut tué d'un coup
sur la tête, l'an 3o2 de J.-C. — Un
autre A r z a p» , tpii florissait dans
le 5^. siècle , traduisit eu arménien
les Œuvras de S. Athanase , et a
laissé manuscrit : I. Traite contre le
jfvrisme , ou la religion du Feu ;
II. un Discours sur l'ascension de
J.-C; 111. une Homélie sur V apôtre
S. Paul. C — D.
ASA , roi de Juda , succéda à son
père Abia , vers l'an goS av. J. - G.
ÏjCS premières années de son règue
furent marquées par la destruction
des autels élevés aux idoles , par le
rétablissement du culte du Seigneur ,
€t par la paix dont Dieu récompensa
son zèle. 11 en profita pour réparer et
fortifier les villes de Juda, qui avaient
beaucoup souffert des guerres de sou
prédécesseur. Il obligea sa grand'-
raère , qui s'était faite prêtresse de
Priape, de renoncer à ce culte abo-
minable, déposa dans le temple toutes
les richesses que son père avait rap-
portées de son exjiédition contre Jé-
roboam , roi d'Israël. Eu la quinzième
année de son règne , les Madiauites ,
ou Ghuséens , qui habitaient l'Arabie
déserte , ayant fait marcher contre
lui, dit l'Ecriture, une armée d'un
million d'hommes et de 5oo charricts ,
il les défit, à la tête de 58o,ooo
Jjommes. 11 eut le même succès contre
«I.
ASA 56ï
Zara , roi d'Etliiopie, sur lequel il fit
un immenscbutin. Asa avait négligé de
détruire les hauts lieux ; il est vrai
qu'on n'y adorait que le Seigneur ;
mais depuis que Dieu avait concentré
tout son culte dans le temple de Jéru-
salem , celui qu'un pouvait lui rendre
en tout autre endroit était devenu
illégitime. A cette picraière faute , il
ajouta celle d'acheter avec l'argent du
temple et du trésor royal , le secours
de Bénadab , roi de Syrie , contre
Baasa, roi d'Israël , qui lui avait dé-
claré la guerre , et de faire mettre en
prison le prophète Ananus, chargé de
lui reprocher, de la part de Dieu , d'a-
voir implcré des secours étrangers ,
au lieu de mettre toute sa confiance
dans le Seigneur , qui lui avait été
constamment favorable dans ses autres
guerres. Sur la fin de ses jours , Asa
attaqué d'une grave maladie , eut re-
cours aux médecins, sans s'adresser à
Dieu par la prière. Cette maladie le
conduisit au tombeau , aprèsr un règne
de quarai\tp-un ans ; il eut son fils Jo-
sapliat pour successeur. T — d.
AS AN , l'un des fondateurs du
royaume des Bulgares ( P'aj. Pierre,
prince de Bulgarie ].
AS AN 111 , roi de Bulgarie, descen-
dait, par sa mère, du célèbre Asan
qui, réuni à son frère Pierre, déUvra
son pays du joug des Grecs. Asan III
était l'héritier légitime de la couronne;
mais l'ordre de la succession avait été
interverti plus d'une fois, au milieu de
sanglantes révolutions. Un usui^paîeur
obscur exerçait l'autorité, lorsque Mi-
chel Paléologue entreprit de rétablir
sur le trône de ses pères, le jeune Asan,
auquel il avait donné sa fille Irène en
mariage. L'usurpateur fut chassé, et
se réfugia chez les Tatars. Une partie
de la nation n'avait reçu qu'avec peine
son souverain , de la main de l'empe-
reur. De nouvelles factions s'élevèrent.
36
562 A S A
Asan, qui pouvait les combattre, aima
mieux éviter à son pays les horreurs
d'une guerre civile ; et, emportant
iivec lui tous SCS trésors, il se retii-a
chez sou beau-père , et finit paisible-
ment SCS jours à Constantinople. Du-
cau2;e place les événements de son
règne entre les années i '275 et i-aSo.
D. N— L.
ASANDRE , l'un des généraux de
Pbarnace II , roi de Pont , se révolta
contre lui , à cause de sa cruauté, et ce
prince, vaincu par César, ayant voulu
rentrer dans ses états , Asandre alla
à sa rencontre , le délit et le tua. Cé-
sar disposa de la couronne eu faveur
de Mithridate -le - Pergaménien , fils
naturel du gtaiid Mithridate ; mais
Asandre le défit aussi. Il se contenta
cependant du titre d'archonte , qu'on
voit sur plusieurs médailles , et il u'osa
prendre celui de roi que lorsqu'Au-
guste l'eut coiifirmé dans son autorité.
11 épousa Dynamis, fille de Pbarnace,
et mourut l'an i4 av. J.-C. , «gé de
quatre-vingt-treize ans. C — r.
AS1310iiN , surnommé Blak , sei-
gneur danois , beau-frère du roi Ila-
lald , se mit , en i o85 , à la tète de la
nîultitude révoltée contre Canut IW
Pour mieux iissurcr son entre])rise , il
passa lui-même dans le camp du roi ,
sous prétexte de concerter avec Ca-
nut les moyens d'étouffer la rébellion.
Après avoir donné à ce prince le con-
seil perfide de se montrer dans la ville
d'OJensé, en Fionie, il revint trouver
une petite troupe de rebelles , et , péné-
trant avec eux dans la ville , il massacia
le roi, agenouillé devant l'autel, avec
ses principaux courtisans. Quelques
auteurs ])réleudejit (pi'Asbiorn ayant
voulu se laire j)roclamcr roi lui-même ,
SCS partisans l'abandonnèrent , et que
son armée s'étant dissipée , il périt
peu de temps après, d'iuie manière
misérable. La mémoixc du crime de
ASC
ce rebelle s'est tellement conservée,
que le peuple , en Danemarck , dit en-
core proverbialement : « Monter le
» cheval de Blak , » pour désigner un
traître , qui se donne un faux air de
conciliateur entre deux partis.
]M— B— N.
ASCELIN, ou ANSELME (Nico-
las), religieux missionnaire , fut en-
voyé, par Innocent IV, vers uu des
généraux Mongols, en 1247, suivit
le sud de la mer Caspienne , traversa
la Syrie et la Perse , et se présenta
devant Baju-Novian ( Bajothuoi ) , un
des chefs Mongols , qui probablement
rampait, avec ses nomades, dans le
Chowarezem. La relation de ce voya-
ge , moins importante que celle de
Carpin, a peu contribué aux progrès
de la géographie de cette partie de
l'Asie. Le bon religieux, observateur
crédule et superficiel, n'entre dans
quelques détails que relativement à
son séjour parmi les Mongols. Sou
Journal ne nous est pas parvenu en
entier; ce que nous en avons nous
a été conservé par Vincent de Beau-
vais, qui tenait cet extrait de Simon
de St.-Qucntin , compagnon d'Asce-
lin, et qui l'inséra dans son Miroir
historique. Bergeron l'a traduit en
français dans son recueil à la suite
de la relation de Carpin. L. R — e.
yVSCH ( Georges-Thomas , baron
d' ) , médecin des armées russes , con-
seiller d'état, tt membre de plusieurs
académies , né, à St.-Pétersbourg, de
parents allemands, en i ']'.iQ, mort en
la même ville, en 1807. D'Asch ,
comme tant d'autres Russes , devejms
depuis célèbres dans les sciences ou
dans la politique , fit ses éludes à
l'université do Gœltingue, oii il suivit
particulièrement les cours de Ilaller.
La plus belle partie de sa réputation
se fonde sur le constant et noble at-
lachemcut qu'il conserva toute sa via
ASC
pour cette illustre école, et pour les
grands maîtres sous lesquels il s'y
était formé. Sa fortune et ses nom-
breux voyages lui donnèrent la pos-
sil^lilé de rassembler de précieuses
collections , dont il envoyait chaque
année une partie à Gœttinf^ue. Il a
enrichi la superbe bibliutlièque de
cette université d'une bibliothèque en-
tière de livres russes , d'un beau Ko-
ran, de manuscrits turks et de plu-
sieurs autres laretés, et le Musée, d'une
foule d'objets instructifs et curieux ,
tant de la Sibérie que des autres pro-
vinces du vaste empire russe , comme
vêtements, instruments, armes de di-
vers peuples , minéraux , médailles ,
antiquités. Il a de même contribué à
compléter les collections particulières
du savant Blumenbach. D'Ascb, dont
la mémoire mérite d'être honorée
comme citoyen , autant que comme sa-
vant, eut trop de devoirs divers à rem-
phr pour pouvoir beaucoup écrire. Il
eut cependant une part principale à la
Pharmacopée nisse , imprimée à Pé-
tersbourg , 1778, in-4". On a de lui
encore quelques morceaux, en latin
et en allemand , sur divers points
de physiologie et de médecine. Sa Dis-
sertation inaugurale : De primo pare
nervorum medullœ spinalis , Gœt-
tingue, 1750, iu-4'-7 parut, dans le
temps , neuve et remarquable ; peut-
être que Haller y eut quelque part.
Entre ses autres ouvra;.',es , il faut
surtout distinguer celui qu'il publia
sur la peste , où l'on trouve d'excel-
lentes observations , et les meilleurs
moyens de se préserver de cette ma-
ladie. On peut voir les titres et les
dates de ces écrits dans X Allemagne
littéraire^ Gelehrles Deutschland ,
de M. Meusel, 4''« édition , i'\ vol.,
pag. 98. M. Heyne a publié à Gœt-
tingue , en 1807, son Elo<^e histo-
rique j sous ce titre : De obitu Bar.
ASC 563
de Asch , ad viifos amantissimos
J. Fr. Blumenbach , et J. D. Reuss.,
I 'X pag. in-4". V - s.
ASCHAM (Roger), né dans le
Yorkshire, vers i5i5. En i53o, il
entra au collège St. -Jean, à Cam-
bridge , où il devint professeur de
grec. Henri VIII lui fit une pension
de I o hvrcs sterlings, le plaça comme
instituteur auprès d'Elisabeth , à la-
quelle il expliquait (jcéron , Sophocle
et d'autres auteurs anciens. Apiès avoir
été occupé deux ans dans ces honora-
bles fonctions , il revint à Cambridge et
y remplit la place d'orateur avec une
grande distinction. En i55o, il suivit
sir Richard Morysinc dans son ambas-
sade auprès de Charles Quint, et resta
plusieurs années en Aliemague. Pen-
dant ce temps , Ascham fut nommé se-
crétaire latin du roi Edouard, mais,
à la mort de ce prince , il perdit sa
place et sa pension, 11 devint secré-
taire latin de la reine lilarie , et fut
employé par le cardinal Pôle. A l'avè-
nement de la reine Elisabeth , il fut ré-
tabli dans la place de secvétairo, et de-
vint son instituteur particulier pour les
langues anciennes. Il mourut, à Lon-
dres , en 1 568. Son ouvrage !e plus es-
timé est intitulé : le Maître d'école , ou
Mojen simple d' appremlre aux en-
fants à entendre, à écrire et à parler
la langue latine. Upton en a donné
une bonne édition en 1711, in-H**.
Ses Lettres latines , Oxford, 1705,
in-8". , ont été souvent im])rimées.
On a recueilli ses œuvres, en 1769,
in-4''. — Un auti-e Ascham (Antoine),
républicain anglais , fut membre du
long parlement, et ensuite envoyé
comme ambassadeur en Espagne , où
six royalistes exilés l'assassinèrent ,
ainsi que son interprète , le 6 juin 1 65 o.
II est auteur d'un ouvrage sur les Ré-
volutions des gouvernements , 1649,
iu-S". — EulUi un troisième Ascuam,
56..
564 ASC
vicaire de Burnishtou , vivait sous
Edouard VI , et a publié quelques
écrits sur l'astrologie et sur la bota-
nique. -B — B. j*.
ASCHAN^US (Martin), ecclé-
siastique suédois, vécut daus le 17^.
siècle, et se livra, avec beaucoup de
.succès , à l'étude de l'histoiie et des
r.ntiquilés ; mais ce qui le reud sur-
tout reuiarquablc , c'est d'avoir été
un des preuiiers, en Suède, qui se soit
uccujié d'y former la langue du pays
i>ar des traductions. Il fit paraître , en
suédois , vers l'année iGk'> , le Traité
de Chvtraîus , De patienUd et con-
solatione , qui avait une grande vogue
dans ce temps. Peu après, parurent les
traductions de quelques autres ou-
vrages étrangers , et, daus le dernier
siècle , celte partie de la littéral lu-e
r.atiouale s'est étendue cousidérable-
inenl. On a même traduit en vers,
avec succès , Ar.acréon , une partie
d'Homère et d'Horace, V Enéide de
Virgile , plusier.rs tragédies de Ra-
cine et de Voltaire. C — au.
ASCIIARY. roy. AcHARY.
ASCiHl!;.NliKRG (RuTGER , comte
d'), feld-maréchal de Suède, avait ap-
pris l'art de la guerre daus les campa-
gnes brillantes de (]iiarles X, ou Char-
îes Gustave , en Poioguc et en ]);me-
inarck. So.i courage et son expérience
eurent occasiou de se signaler, lors-
qu'au commencement du règne de
(îliarles XI, les Danois (irent une in-
vasion dans la province de Scanie. Le
roi conduisit, dans cette province ,
>uie armée considérable , pour arrêter
les progrès de l'ennemi ; deux ba-
tailles, gagnées par les Suédois , l'une
près de Lund , en lO'jô, l'autre près
de Landscrona, en 1O77, sauvèrent
la Suède , et forcèrent les Danois à
repasser le Sund. Pendant ces deux
ijatailles. Aschenbcrg ne quitta point
h loi ; l'aida de ses conseils , et décida
ASC
la victoire. La paix ayant été' concîne,
Aschenbcrg rendit, à sa patrie, des ser-
vices d'un autre genre. Nommé séna-
teur, il prit part à toutes les délibé-
rations importantes, encouragea les
travaux utiles , et protégea les scien-
ces, les lettres et les arts. Charles XL
avait en lui la plus grande confiance ,
et, pour récompenser ses services, il
lui accorda le titre de comte , le créa
feld-maréchal, et lui donna le gou-
vernement général des provinces du
]\iidi. La vie du feld-rnarcchal d' As-
chenbcrg a été écrite en suédois par
Svcn Lagerbiing. C — au.
ASCHEPkiRabbi) BEN JÉCHIEL,
juif allemand, mort en iS^i , à To-
lède, recleur de la synagogue, et pèref
de huit (i's qui se sont tous distingués
dans la carrière des lettres. On a de
lui : 1 . Fasciculus , sive Collectanea ,
imprimé à Cracovic en 1 5 i , in-fol.;
ce sont des observations sur diffé-
lents passages du Thalmitd. W.Schea-
lolh et Theschuvolh , c'est - à - chre ,
des Qiiestiofis et des Réponses ; 111.
Thouscpholh , c'est-à-dire appen-
dices ; c'est encore un commentaire
le Thahmid. IV. Diss. super e/Jalo
Jiulœonim : Israël nidli planetœ est
snbjecUis , qui est encore en manus-
crit daus la bibliothèque du Vatican.
D'autres ouvrages de R. Asclier ont été
compris daus la collection de Sal. Ben
Jehuda Lœw, Prague, 17 '.>."), in-^"-
( f^oj-. Bartolocci , Bibl. Rabbinica ).
S— R.
ASCLÉPIADE, médecin, natif de
Prusa , en Bithynie , est le premier
qui rendit l'art de la médecine recom-
mandableà Rome. Après s'être fait une
réputation en Asie , il vint s'établir
dans cette capitale, l'an GiO de sa
fondation, i 10 ans av. J.-C. , refusant
les otl'res de Mithridatc , roi de Pont ,
qui voulait l'attirer près de lui. II était
de ces esprits ardents destinés à faire
ASC
rôvolulion dans les carrières qu'ils
parrourcnt. La nature l'avait doué
d'une éloquence entraînante dont il
abusa souvent. A Rome , il commença
par donner des leçons de l'hétorique ;
maistout à coup, se persuadant , d'a-
près une connaissance assez superfi-
cielle de la médecine, connaître à fond
cet art, il se mit à la pratiquer; mal-
heureusement, il y porta toute la fou-
j^ue de sou esprit indépendant, ettoutcs
les erreurs des opinions philosophi-
ques que, comme rhéteur , il avaitsuc-
f e.ssiveraent adoptées. Les Romains ,
qui, d'abord, avaient paru accueillir
favorablement Arclia^atus , l'avaient
ensuite injustement pris eu haine ,
parce qu'il avait recours quelquefois,
dans ses traitements , à des moyens
douloureux. Asclépiade, pour se faire
une réputation , prit une méthode in-
verse ; il s'attacha d'abord à ne donner
que des remèdes apjréables et iaciles;
il fit à la médecine un.> fuisse applica-
tion de toutes les philosophies du
temps; et, parlant ainsi aux Romains
de choses qui entraient dans le plan
de leurs études , et les entraînant d'ail-
leurs par le charme de son éloquence ,
il put d'autant plus les séduire et ga-
gner leur confiance que, lui-même,
était séduit et se croyait près de la vé-
rité. Adoptant la philosophie corpus-
culaire d'Épicure, il en fit la base de
sa doctrine. 11 méconnut celle d'Hip-
pocrate , la seule vraie ; il défendit
cette sage réserve avec laquelle ce
prince de la médecine reste souvent
spectateur des mouvements de la natu-
j'c, et en attend la favorable, mais spon-
iauéc solution ; Asclépiade qualifiait
.cette sage attente de méditation sur
la mort. Du reste, comme cela se
remarque chez tous les esprits ardents
tnù adoptent pour base de leur con-
iluite , tour à tour , un principe , tou-
jcurà pria hors de la limite rigoureuse
ASC 565
Je l'observation et de rexpérîcnce ,
rien de plus mobile et de plus con-
tradictoire que les dogmes théoriques
et pratiques d' Asclépiade. Parexcinpie,
s'il mérite d'être loué pour avoir em-
ployé souvenil'cxercice comme moyen
perturbateur, souvent aussi il est tom-
bé, à cet égard, dans l'ancien excès
d'Hérodicus : on le voit à la fois don-
ner le vin dans les maladies par fai-
blesse et dans les frénésies; saigner
dans les pleurésies et dans les mala-
dies nerveuses , comme l'épilepsie ;
faire une proscription absolue des pur-
gatifs, défendre toutes boissons aux
nialades dans les deux premiers jours
oaleur maladie , c'est-à-dire, dans le
temps où ils en demandent avec le plus
d'instance, etc. En somme, ses prin-
cipes sont si vagues, qu'on ne peut
pas même dire qu'il ait fait école. Pline
rapporte à cinq chefs ses principaux
moyens de traitement; l'abstinence
des viandes , celle du vin , les fric-
tions , la promenade , et la gestation
à cheval et en voilure ; on peut expli-
quer tous les suceès prafiqucs qu'on lui
atribue par l'effet le plus général de
ces moyens , qui tendent tous à exci-
ter l'action de la peau, ce couloir im-
portant de l'économie , jioint de prati-
que qu'avait entrevu Asclépiade, mais
qu'il ne se proposait que d'après les
vues fausses de sa philosophie corpus-
culaire. Ce que nous avons dit de l'é-
loquence d' Asclépiade , et du soiu
qu'il prenait à satifaire les moindres
fantaisies de ses malades , explique
assez sa grande réputation qui s'est
évanouie avec lui. LIne circonstance
heureuse vint d'ailleurs la commandes
en quelque sorte; passant près d'ua
convoi , il reconnut que le corps qu'on
portait au bûcher avait encore un reste
dévie; il lui prodigua des secours qui
furent suivis du succès, et il parut
plutôt ressusciter un mort que guâù"^
f.66 ASC
tin malade. Tl osa se vanter de n'être
jamais lualade , et, si l'on en croit
Pline , le hasard le servit encore à cet
é'^ard; car il dit qu'il mourut vieux et
par accident , par suite d'une chute.
Cependant Suidas nie ce fait, et attri-
bue sa mort à une inflammation de
poitrine. Asclëpiade fut le maître de
Themison , chef de la secte des mé-
thodistes; mais la doctrine professée
par ces derniers est toute entière le
fait de Themison , et ne doit nullement
cire rapportée à Asclépiad'^ , trop
honiliaut pour se plier ainsi toujours
à un même système. Il nous reste
quelques fragments des ouvrac;es d'As-
rlépiade dans Aëtius : Mahii^mnta
h\ fh'opica qiiœ évacuant hmnorwn;
Ènjplastnimàscilldqiiœuteriitlcera
tid cicatricein ducunt, eoriigés, aug-
mentes et publiés séparément , par
Jurapert ; Weimar, 1 794 , in-8 '. Celse
et Cœlius Auréliaims le citent comme
auteur de plusieurs traités. C. et A — n.
ASCLEl'IADES, philosophe pla-
tonicien, natif de Phliase, s'établit à
Athènes , et se lia d'une étroite amitié
avec Mcnédcme. Ils étaient tous deux
S! pauvres , qu'ils servirent d'abord les
maçons , puis se louèrent à un Ikhi-
langcr, chez lequel ils passaient les
riuits à moudre du blé. Cités devant
l'aréopage j)onr jur.tifier de leurs
moyens d'existence , ils firent compa-
raître le boulanger, et les magistrats,
charmés de leur amour pour l'étude,
leur donnèrent à chacun -200 dragmes.
Asclemades quitta l'école platonique
pour celle de Stilpon de Mé,',^ire ;
celte dernière, pour le séjour d'Elis,
et d'Élis se rendit à Érétrie, toujours
en la compagnie de Ménédcme , qui
fut le fondateur de la secte Érétria-
que ( F. IMenedÈme). Les deux amis
avaient d'abord fait vœu de rester cé-
libataires; mais ils changèrent de rc-
iolutiou , et se marièrent tous deux en
ASC
même temps , Ménédème épousant la
mère, et Asclépiadcs, la fille. Celle-ci
mourut, et Ménédème céda sa femme
à son ami. Asclépiades termina ses jours
dans un âge avancé, vers le milieu du
5". siècle av. notre ère, laissant un
fils dont Ménédème prit soin. D. I..
ASCLÉWODORE , peintre athé-
nien , florissait en même temps qu'A-
pejles , sur lequel il reraj)ortait pour
les proportions et pour l'ordonnance.
Apellcs était ie premier à l'admirer
sous ce rapport. Mnason lui fit pein-
dre les douze Dieux, et lui paya 5oo
mines pour chacun. — Il v eut un au-
tre AscLEPioDORE, statuaiic, qui ex-
cellait à laire les tètes des philosophes.
L— S— E.
ASCLÉPIODOTE, natif d'Alexan-
drie, fut disciple de Procîus, pour la
médecine et pour la philosophie éciec-
lique. 11 s'acquit, dans l'une et l'autre
sciences, une grande réputation. Da-
mascius a parlé de lui fort au long,
dans la Vie d'Isidore, dont Suidas et
Ph tius nous ont conservé des Frag-
ments. Asclépiodote , dirigeant ses
recherches vfrs la philosophie natu-
relle , s'attachait particulièrement à
connaître la cause des choses ; il dé-
termina le nombre des couleurs pri-
mitives, et des diverses nuances que
l'on peut former par leurmélange. Il
connaissait cinq cents espèces de bois;
étudia les vertus des plantes, et celles
des animaux. Il cultiva la musique ,
et, dans la médecine, surpassa sou
maître. Il rétablit , parmi les remèdes ,
l'usage de l'eileboie blanc, avec lequel
il fit des cures très-heureuses. De ces
recherches, à la magie, il y a jieu de
chemin , surtout dans le temps oii vi-
vait Asclépiodote. Aussi Damascius
rajiporte-î-il qu'il lisait dans les plus
épaisses ténèbres; que, près de se
noyer dins le Mœandre, il se relira
des eaux , pai' la vertu de certaines pa-
ASC
rolçs, etc. De toutes ces choses, on
doit conclure qii'AscIepiodote fut un
thaumaturge. 11 as'aitfait, sur le Timee
de Platon, un Commentaire qui s'est
perdu. Nous avons, sous son nom, un
ouvrage manusciit sur la tactique ,
mais on ignore s'il est de lui , ou de
son gendre , médecin célèbre. K.
ASCLÉPIOS, ou ASGLÉPTADES.
P\y. ESCULAPE.
ÀSCLÉPIUS, de Tralles, l'un des
disciples d'Ammonius Herme'.ts, cher-
cha, comme les autres philosophes de
la secte e'clcctique, à concilier les dog-
mes de Platon avec, ceux d'Aristote. Il
nous reste de lui des Scholies sur les
six premiers livres des Métaphysiques
d'Aristote , et sur X Arithmétique de
Nicomaque. Ces deux livres , qui n'ont
jamais été imprimés, se trouvent, en
manuscrit, clans la BibHothèque im-
périale. C — R.
ASGOMUS PEDIANUS ( Qui>-
Tus ) , grammairien, né à Padoue , te-
nait une école d'éloquence à Rome ,
sous l'empire de Tibère. On sait , par
un passage des Institutions oratoires,
que Tite-Live et Quialilien lui-même ,
fréquentèrent , dans leur jeunesse , l'é-
cole d'Asconius , et tous deux parlent
avec respect de leur maître. 11 perdit
la vue à soixante-treize ans , supporta
ce malheur avec résignation , et mou-
rut sous Néron , âgé de quatre-vingt-
cinq ans. Il avait vu Virgile , à un àj,e
où tout ce qui est beau semble avoir
des droits à notre admiration , et il
s'était formé entre eux une liaison du-
rable ; mais S. Jérôme, dans sa Chro-
nique , ayant reculé la mort d'Asco-
nius jusqu'à la •j'^. année du règne de
Vespasien , quekjues critiques en
avaient conclu que l'ami de Virgile
était différent d'Asconius le grammai-
rien , et en conséquence , avaient admis
deux auteurs de ce nom. L'erreur
échappée à S. Jérôme a été ju;te-
ASC 567
ment relevée, et tous les savants , en
reconnaissant qu'il n'a existé qu'un
seul Ascoiiius , s'accordent à fixer l'é-
poque de sa mort comme nous l'avons
tait plus haut. Il nous reste de lui des
commentaires utiles et fort intéres-
sants sur trois des Ferrines , le com-
mencement de la quatrième, et cinq
autres discours de Gicéron. Il est cer-
tain que nous ne possédons qu'une
partie de son travail sur les ouvrages
du plus éloquent des orateurs romains;
et c'est à Pogge que nous en devons la
conservation. Ces commentaires ont
été imprimés , pour la première fois ,
à Venise , en 1 477 , in - fol. ; les édi-
tions de Venise, .Aide, \oii,\a-Q°.;
Lyon, I 55 1, même format, etLeyde,
1 644 7 '°' ' 2 , sont estimées ; on les a
insérés dans les éditions de Cicéron ,
publiées par IManuce , Gruter , Gro-
uoviusetî'abbéd'Olivet.Asconiusavait
composé une Vie de Virgile, et une de
Salluste, dont on. doit regretter la perte.
W— s.
ASCOUGH ( Sir George ) , vice-
amiral dans la marine anglaise, né au
commencement du 1 7 \ siècle, fut char-
gé, en 1 65 1 , d'aller réduire sous l'o-
béissance du parlement , la Barbade
et les autres colonies anglaises des An-
tilles , qui ne voulaient reconnaître que
l'autorité du roi. Lord Willoughby ,
gouverncurde laBarhade pourCharles
11, se défendit plusieurs mois contre
les forces de terre et de mer confiées
au chevalier Ascough. 11 est Viai que
l'amiral, forcé d'exécuter les ordres
d'un gouvernement tyran nique, avait
dans son caractère autant de modéra-
tion et d'équité , qu'il y avait d'injus-
tice et de violence dans la conduite de
ceux dont il exerçait le pouvoir. IJ
accorda la capitulation lapins honora-
ble au lord Willoughby; et, passant
ensuite à St.-Cliristophe et à la Vir-
ginie, il ramena parciOemcnt les coloiis
ÏC8
ASD
sous les lois de la république anglaise,
sans que le succès de celte mission
délicate fût souiilc par les cruautés
inutiles , malheureusement si fréquen-
tes dans les l'évolutions politiques et
ks troubles civils. Charles II, remonté
sur le trône, ne fit pas un reproche au
chevalier G. Asrough, des services qu'il
avait rendus à son pays, sous le pro-
tectorat de Cromwcl. Ce brave cffi( icr
continua de commander les flottes bri-
tanniques ; et tantôt en ch;f, tantôt sous
les ordres du duc d'Yorck,du comte de
Sandwich et du duc d'Albcmarle, li
vra plusieurs combats aux amiraux
hollandais van Tronip, Ruyler et Was-
senaér , qui soutenaient alors avec tant
d'éclat la gloire et la puissance m.iri-
time de leur patrie. Ce lut dans une de
ces actions sanglantes, le >, juin i(j66,
que le vaisseau le Prince-Royal, mon-
té par le chevalier G. Ascongh, amiral
de l'escadre Blanche, ayant touché sur
un banc de sable, fut brû'é par les
ennemis : sir George fut fait prison-
nier , et sa perte contribua beaucoup
aux revers de cette journée. 11 paraît
que , depuis cette époque , il cessa de
commander, et qu'il survécut peu de
temps au premier malheur qu'eussent
éprouvé sou courage et son habileté.
E— D.
ASDRUBAL, général carthaginois,
fils de iMagon, hérita des vertus de son
père , et, après avoir été onze fois l'un
des stiJfetU's , ou magistrat suprême,
et s'être vu honoréde quatre triomphes,
il fut choisi , vers l'an 489 av. J.-C. ,
jiour eiitrcprcudre la conquête de la
Sardaigne; il débarqua dans cette île,
et obtint de grands avantages; mais
ayant été blessé mortellement dans
ime action , vers la fin de la guerre ,
il remit le commandement de l'ar-
mée entre les mains de son frère
Amilcar , et mourut presque aussitôt.
Son (ils fit la guerre aux Maures et aux
ASD
Numides, et parvint à affranchir îes
Carthaginois d'un tiibut qui remon-
tait à l'origine de leur ville. B — p.
ASDRUBAL, fils de Hannon, envové
en Sicile, vers l'an u55 av. J.-C, at-
taqua Pauorme, oii était renfermé le
proconsul Métcllus, perdit une grande
bataille et trente éléphants, et fut mis
à mort, à son retour , à Carthage.
B— p.
ASDRUBAL, surnommé l»
Chauve , contemporain du précédent,
conduisit, vers l'an 2i5av. J.-C. , une
expéditi(m pour soutenir les Sardes,
qui étaient las du joug des Romains ;
mais ils avaient été défaits par Man-
lius avant son arrivée. Asdrubal fit
cependant sa jonction avec les insu-
laires , et marcha droit à Caralis , dans
le dessein de s'emparer de cette capi-
tale de l'ile. Prévenu par Manlius , il
en vint à une action générale , et ba-
lança la victuire pendant quatre heures.
Vaincu à la fin , il fut fait ju'isonnier,
et l'Ile entière fut réduite sous l'obéis-
sance des Romains. B — p.
ASDRUBAL, gendre d' Amilcar
Barca , et beau-frère d'Annibal, fut
surnomme le Beau , à cause des
grâces de sa figure. 11 s'attacha ,
jeune encore , à Amilcar , et l'accom-
pagna ilans ses cKpedilions; mais
avant été accusé pub'iquement de
s'être prostitué à ce gencial, il reçut
des magistrats chargés de la censure
l'ordre de s'éloigner de lui. Cepen-
dant, comme les lois de Carthage ne
permettaient pas de séparer un gen-
dre" de son beau-père, Amilcar Barea
donna sa fille en mariage à Asdru-
bal , et l'emmena en Espagne , l'an
237 av. J.-C. Le jeune Asdrubal ne
tarda point à sedislinguer sous les yeux
de son beau -père; mais ce fut sur-
tout en Afrique qu'il trouva une oc-
casion de sigualer ses talents et son
couraee. Les Numides s'étaut révol-
ASD
tes tandis que les Carthaginois e'taient
occupés en Espagne , Anailcar en-
voya contre eux son gendre à la tête
d'un corps d'armée. Asdrubal exé-
cuta cette coraroission avec autant de
vigueur que d'intelligence , et re\'iut
en Espagne. A la mort de son beau-
père, l'an 25o av. J.-("i. , l'armée le
proclama général. Ce choix fut con-
firmé par le sénat , qui envoya de
puissants renforts en Espagne pour
mettre Asdrubal eu état de conserver
et d'étendre ses conquêtes. Pénétré de
reconnaissance pour la mémoire de
son beau -père, le nouveau général
sollicita le sénat de lui envoyer le
jeune Annibal pour le faire entrer de
bonne heure dans la carrière de la
gloire. Asdrubal marqua les premiers
jours de son commandement par une
grande victoire qu'il remporta sur un
prince espagnol nommé Orisson.
Douze villes lui ouvrirent leurs portes
immédiatement après la bataille, et
cet exemple fut suivi par un grand
nombre d'autres. Voulant assurer ses
conquêtes, il bàlit Carthage-la-
iVeut^e , appelée aujourd'hui Cartha-
£;ène , qu'il deslitiait à servir de bou -
levart et de place d'armes aux pos-
sessions des Carthaginois eu Espa-
gne. Cette ville, par sa situation avan-
tageuse devint bientôt une des plus
opulentes du monde. Les Romains,
occupés jusqu'alors contre les Gau-
lois qui avaient pénétré dans l'Italie
septentrionale, crurent devoir arrêter
enfin par une négociation les progrès
des Carthaginois dont ils commen-
çaient à prendre ombrage; ils con-
clurent un traité par lequel ceux -ci
s'engagèrent à ue point passer l'Èbre.
Asdrubal l'observa religieusement, et,
poussant ses conquêtes du côté op-
posé, soumit, autant par son affabilité
que par sa valeur , toute cette partie
<lc l'Espague qui s'étend depuis
ASD j6tr
l'Océan jusqu'à l'Èbre. Son mariago
avec la fille d'un prince espagnol con-
tribua à lui assurer ses conquêtes. Il
gouvernait l'Espagne depuis neuf
ans avec autant de sagesse que d'ac-
tivité lorsqu'il fut assassine' , 225
ans av. J.-C. par un esclave gaulois
dont il avait fait périr le maître. An-
nibal lui succéda dans le commande-
ment. B — p.
ASDRUBAL-BARCA , fils d'Amil-
car, et frère d'Annibal, partagea la
haine de sa famille contre Rome, et se
signala de bonne heure en Espagne,
sous son illustre frère , qui lui laissa
le commandement en chef lorsqu'il
porta la guerre en Italie. Quoique
vaincu souvent par les Romains , et
abandonné par les Espagnols, Asdru-
bal se soutint pendant plusieurs an-
nées, et acquit même la réputation
d'un grand capitaine. Défait en bataille
rangée , l'an 2 19 av. J.-C, vers l'em-
bouchure de l'Ebre , par Cneïus Sci-
pion , réuni aux Celtibériens, il se re-
tira eu Lusitanie, et reçut enfin quel-
ques renforts , avec ordre du sénat
d'aller en Italie au secours de sou
frère. Asdrubal s'avança d'abord con-
tre les Carpétiens , qui s'étaient révol-
tés , et les soumit ; il marcha ensuite
vers les Pyrénées ; mais Scipion s'é-
tant mis en devoir de lui fermer la
sortie de la péninsule , il fut pour-
suivi dans sa marche et obhgé de
combattre. Vaincu et forcé de rétro-
grader , il se borna quelque temps à
la défense de l'Espagne méridionale ,
puis, ayant gagné les Celtibériens , il
réunit ses forces à celles de son frère
Magon et de Masinissa , roi des Nu-
mides , attaqua séparément les deux
Scipions , et détruisit leur armée dans
deux combats différent^^ où ces deux
généraux perdirent la vie , 2 1 5 ans
av. J.-C. Après cette victoire, Asdru-
bal se mit euûii ea état de passer en
570 ASD
It ilie pour joindre ses troupes à celles
d'Aiinibal ; mais attaque par le jeune
Scipion , son ramp fut force et pillé ,
et son armée presque détruite. Le gé-
nie fécond d'Asdrubal eu créa bientôt
nue nouvelle , et il fut impossible au
AMinqueur de lui fermer les Pyrénées.
Asdrubal , après avoir surmonté tous
les obstacles , se dirigea vers l'Italie,
laissant le commandement de l'armée
d'Espagne à Asdrubal , fils de Giscon.
Quelque? nations gauloises facilitèrent
sa m.Hrcbc. Arrivé devant Plaisance,
il euircprit imprudemment le siège de
celte A'illr, et donna le temps aux Ro-
mains de rassembler des forces pour
!e combattre. 11 se bâta de lever le
siège , et prit la route de l'Ombrie. 11
s'avançait plein d'espérance , lorqu'il
fut attaqué à l'improviste , près du Mé-
tauro, par les consuls Livius wSalina-
tor et Claudius Néron, qui s'étaient
réunis. 11 range aussitôt son année en
bataille, se place au centre , anime ses
soldats, dispute long-temps la victoire,
rt , voyant , qu'elle se déclare pour les
Romains , il se précipite au milieu
d'une cohorte, et meurt comme il
convenait au fils d'Amilcar et au frère
d'Annibal. Celte bataille, donnée l'an
207 av. J.-C, qucTite-Live compare
à celle de Cannes , décida du sort de
l'Italie. Annibal n'apprit ce terrible
revers, qu'à la vue de la tète de son
frèrc,*quc le consul Néron fit jeter dans
son camp. Attendri et consterné , il
s'écria : « C'en est fait; en perdant
» Asdrubal , j'ai perdu tout mon bon-
» heur, et (^.arlhage toute son espé-
» rance. « li — p.
ASDRUBAL, fils de Giscon, se si-
gnala de bonu!" heure en Espagne, au
commencement de la seconde guerre
pvmique, et prit le commandement de
l'armée, lorsqu'Asdrubal lîarca passa
en Italie, l'an •.>,07 avant J.-C. Soipion,
ayant ramène la victoire sous les dra-
ASE
peaux des Romains, en Espagne, As-
drubal se retira en Lusifanie, et prit
soin d'éviter tout engigemerit. L'anuc'e
suivante, ayant rassemblé une armée
nombreuse, il vint présenter la bataille
à Scipion; mais il fut défait, et forcé
de se réfugier à Cadix, d'où, passant
à la cour de Svpliax, il parvint à attirer
ce prince dans le parti des Carthagi-
nois, en lui faisant épouser sa fille
Sophonisbe. Appelé à la défense de
son pays, lorsque Scipion débarqua
en Afrique, il fut joint par Syphax, à
la tète d'une armée, et fit cchoïK^r les
projets de Scipion, sur Utitpie, l'an
2o4 av. J.-C. iMais l'année suivante,
le général romain attaqua son camp el
celui de Svphax, v mit le feu, et dé-
truisit, le même jour , les deux armées
carthaginoise et numide. Asdrubal se
sauva , u'avant plus avec lui qnc si 000
hommes d'infanterie et 5oo cavaliers.
Appien assure qu'il fut mis en croix à
son retour à C.rthagc; mais, selon
Tite-Live, il parvint, au contraire, à
détourner le sénat et les suffèltes d'une
paix déshonorante , hasaida même
une seconde bataille contre Scipion,
qui t.ii'.la son armée en pièces, et
mourut peu de temps après, vers l'an
uoi avant J.-C. ( /^bj. Sophonisbe ).
B— p.
ASDRUBAL, surnommé Hoedus ,
ennemi de la faction Baniue, fut en-
voyé à Rome, après la bataille de
Zama , l'an -io \ av. J.-C. , pour oblinir
la ratification du traité conclu entre
Scipion et Carthage; il fit un discours
touchant au sénat romain, et rejeta
tout le blâme de la seconde guerre pu-
nique sur la famille d'Amilcar, dont il
déplora l'ambition. Après avoir vanté
sa conduite et celle de Hannon , envers
Rome, il implora la paix. «Quels
)) Dieux rendez-vous garants de la sin-
» cérité de vos serments.* lui dit 1*"
» cçnsul Cornélius Lcutuilus, qui opi-
ASD
« naît déjà pour rciiticrp dpstrnclion
w de Cailii.Tge. — Les mêmes, rfpon-
» dit Asdrubal, qui ont si sévèrement
» puni nos parjures! » Cette réponse
fut applaudie de tout le sénat, et As-
drubal obtint la paix , mais à des con-
ditions humiliantes. B — p.
ASDRUBAL, dernier suffetîe de
Cartilage, d'une autre famille que celle
des Asdrubal Barca , donna lieu à des
ti'onbles par son caractère turbulent,
et, après la seconde t^uerre punique,
entraîna sa patrie dans une guerre
malheureuse contre Masinissa , qui
le défit en bataille rangée. 11 fut con-
damne à mort par le parti de la paix,
pour avoir offensé Borne en faisant
la guerre au roi des INnmides, son
allié; mais, avant pris la fuite, il ras-
sembla un corps de '.lo.ooo hommes, et
marcha vers Carthage, dans le dessein
d'en faire le siège. C'était au moment
même oii les RomaiiiS, contre la foi
des traités, ordonnaient aux Carthagi-
nois d'abandonner leur ville. Ceux-ci,
réduits au désespoir, rappelèrent As-
drubal pour les défendre contre l'ar-
mée romaine. Ce général mit sur pied
des forces imposantes, campa sur une
haute montagne qui paraissait inac-
cessible, et d'où il coupait les vivres
aux Romains , au moyen de sa cavale-
rie. Le consul Manilius ayant voulu le
chasser de ce poste, Asdrubal fondit
sur son armée, tailla en piices sou
arrière-garde, et continua de harceler
les troupes ennemies qui assiégeaient
Carthage; mais il fallut bientôt céder
à l'ase^ndant et à l'habileté de Seipiou
Emilius. Après avoir abandonné la
campagne, y^sdrr.bal se renferma dans
Carthage; ses efforts pour la défendre
furent inutiles, Scipion s'en étant rendu
maître de vive force, l'an 1 46 av.J.-G.
Asdrubal se retrancha d'abord dans
le temple d'Esculape, avec les trans-
fuges romains , et en sortit bientôt
ASE 571
pour se jeter aux pieds du vainqueur.
Sa femme, qui l'aperçut en cet état,
se para de ses plus riches habits, vo-
mit contre son mari des imprécations,
mil le feu au temple, se jeta dans les
flammes avec ses deux enfants, et
périt avec 900 transfuges, que le gé-
néral romain avait exceptés du pardon.
A|)pien est le seul auteur qui assure
qu'Asdrubal se tua lui-même pour se
soustraire à la honte d'ctre mené en
triomphe à la suite du vainqueur.
B— r.
ASDRUBAL, pctit-fils de Masinis-
sa, l'oi des Numides, fut associé au
précédent, pour commander les trou-
pes qui défendaient Carthage contre
les Romains, et mit le feu à leurflollc,
dont la plus grande partie fut réduite
en cendres; mais, accusé ensuite d'être
d'intelligence avec les ennemis, et de
vouloir livrer h ville à son oncle Gu-
lussa, roi des Numides, les partisans
de son collègue Asdrubal excitèrent le
peuple contre lui, et le firent massa-
crer dans la place publique, l'an 147
avant J.-C. B — v.
ASEDY-TIiOUCY , l'un des plus
anciens poètes persans, contemporain
du sulthan Mahmoud le Gasneinde ,
fut le maître du célèbre Ferdoùçy et
de presque tous les poètes qui pa-
rurent alors eu Khoràçàn. On lui
avait proposé pîusieui-s fois de mettre
en vers le Chah-Nameh ( K. pEn-
douçy); mais il s'en était excusé sur
son âge et sa faiblesse, et il engageait
Ferdoùçv à s'en chai'ger, lorsque ce-
lui-ci , après avoir long-temps erré ,
levint enfin à Thoùs. Sentant appro-
cher sa fin , il témoigna à Asédy la
crainte que personne ne pût achever
le CIiait-A'anieh , dont il ne restait
plus qu'une liès-prtite partie à mettre
en vers. Asédy lui promit que , s'il lui
survivait . il terminerait ce beau poème
épique. Il s'en o-cupa, en effet, dès
571 ASF
ce moment, et ne tarda pas à en pre'-
senfer près de quatre milie vers à Fer-
doùçy , qui les loua beaucoup. Asc-
dy avait pris l'ouvrage au muuient où
les Arabes entrèrent sur le territoire
pcr-an , et il l'avait termine'. Quel
qu'ait c'te son talent , il est reste in-
Jérieur à son élève , et il est facile da
reconnaître où finit la versification de
Ferdoùçy. Ase'dy excellait dans les
petites pièces de vers nommées Mou-
ndzéréh , ou comparaisons. Ou en
trouve une, sur le Jour et la j'Viiit ,
dans la Biographie des poètes per-
sans de DauJel-Chàh {F. ce nom. )
J— N.
ASELLI ( Gaspard ) , médecin , ne'
à Crémone, dans le iG". siècle , fut
jirofesseur d'anatomie à PaVie , et se
ïit un nom dans cette science , par la
(IcVouverte des vaisseaux lactés. 11 la
dut en entier au hasard , c'est-à-dire
t[u'cllc fut le résultat de dissections
faites dans un auti'c but. Is'en con-
naissant pas même tout l'ensemble ,
il adopta sur ces vaisseaux beaucoup
d'erreurs , telle que de regarder le
loie comme leur point de réunion.
Cependant , ce n'est pas moins à lui
que remonte cette découverte physio-
logique importante, qu'il présenta tou-
jours d'ailleurs avec la plus grande
modestie. De plus , il prépara la dé-
couverte des vaisseaux absorbants, ou
au moins la rendit dès lors assurée.
En elFit, jusques à lui, on avait cru
que l'absorption se faisait par les vei-
nes ; mais dès qu'on eut reconnu que
la partie nutritive des aliments était
puisée au milieu de la masse alimen-
taire, et portée dans le torrent de la
circulation , par un ordre particulier
de vaisseaux, on soupçonna que l'ab-
sorption n'était pas plus exercée ail-
leurs par les veines. L'éveil fut donné
à l'observation , et la découverte des
vaisseaux chilii'ères par Asclli mit
ASF
ainsi sm" Il voie de celle de tout le
système absorbant. La dissertation De
Veiiis lacteis , ciiin figuris ele-
ganiissimis , dans laquelle il dév^ -
loppe sa découverte , imprimée d'a-
bord à Milan , 16^7 , in-4''. , puis à
Bàle , i6ii8, iu-4'\, Leyde , i54o ,
in- 4" , et parmi les Traités de Spi-
gelius , in-fol. , Leyde, 1^45, fut
probablement un ouvrage poslluime,
car il paraît qu'Aselli mourut en 1 G'26
à Milan. G. et A — iv.
ASFELD ( BiDAL , chevalier d' ) ,
s'est illustré par la défense de Jjonn,
en 1689. Après avoir blorjué cette
])lace pendant deux mois,rcleeteur de
Bavière , que l'armée du duc de Lor-
raine venait de joindre , se détermina
à faire le siège dans les formes. L'in-
térieur de la place n'était qu'un mon-
ceau de ruines. D'Asfcld en avait fait
sortir les femmes , les vieillards et les
enfants. Sans abri pour la garnison , il
se défendit enrore pendant deux mois.
L'ennemi fit brèche à l'enceinte. La
garnison n'avait plus de munitions ,
et, depuis long-îemps, elle était réduite
à manger les chevaux. D'Asfeld ofti e
de capituler, exigeant que sa troupe
sortît libre avec ses armes. Le due de
Lorraine veut tout accorder; l'électeiu'
s'v refuse, et se montre inflexible aux
représentations du duc , qui lui dé-
clare que, puisqu'il veut que la gar-
nison soit prisonnière , c'est à lui de
la prendre. Le prince furieux choisit
l'élite des Bavarois , monte à l'assaut ,
est repoussé , revient à la charge , ral-
lie ses soldats, et parvient enfin sur
la brèche : mais il est encore vaincu
et arrêté par d'Asfeld. Le spectacle de
deux mille Bavarois , précipilés du
haut des murs , ne fait qu'augiienter
la fureur du prince. H veut recom-
mencer ; mais sos troupes refusent
d'obéir , et il est forcé de sou'^crire
aux. coudilious exigées par d'Asfeld^
AS F
On vît alors sortir par la brèche huit
à neuf cents honimes presque nus ,
exténués de faim et de fatigue, et l'on
s'étonna d' abord de ne voir sur leurs
visages que des tnarques de douleur;
maison en sut bientôt la cause, en
voyant d'Asfeld blessé d'un coup
ciortel dans le dernier assaut , porté
sur un biancard par ses grenadiers,
ayant à ses côtés les officiers de son
état-major. L'électeur détourna ses re-
p;ards. Le duc de Lorraine et les auti'cs
généraux entourèrent le brave et mal-
lieureux d'Asfeld, qui survécut peu à sa
gloire , et aux marques d'estime qu'il
reçut de ses ennemis. D — m — t.
ASFELD (Claude- François Bi-
DAL d' ) , maréchal de France , de la
même famille que le précédent, était
fils du baron d'Asfeld , ministre de
Suède auprès des cours de France,
d'Italie et d'Espagne, anobli par la
reine Christine , pour les services qu'il
lui avait rendus. Le chevalier d'Asfeld
son fils , prit la carrière militaire , de-
vint mestre-de-camp d'un régiment de
dragons , fut fait brigadier des armées
du roi en 1 694 , maréchal de camp
en 1702, et reçut le grade de heute-
nant-général , en 1704, avec l'ordre
il'aller commander en Espagne , sous
!e maréchal de Berwick. Il contribua ,
vn 1707, au gain de la bataille d'Al-
manza ; fut chargé , avec vingt batail-
lons et ti'cnte - six escadrons, de ré-
duire le royaume de Valence , et s'em-
para de Xativa , de Tortose et d'Ah-
«ante, La paix d'Utrecht le ramena
tn France , en 1715. Cette paix ne
terminait pas la guerre d'Allemagne ,
et le chevalier d'Asfeld reçut du maré-
rhal de Villars l'ordre d'aller investir
Jiandau ; la même année , il se trouva
à la prise de Fribourg en Brisgaw,
dont il eut le commandement. Envoyé
de nouveau en Espagne, il aida, en
4714, le maréchal de Berwick à
ASF 575
prendre Barcelone , et Philippe V
n'eut plus de sujets rebelles que dans
l'ile de Majorque , qui fut aussi sou-
mise l'année suivante par d'Asfeld. Le
titre de mrirquis, l'ordre de la (oison
d'or, le droit d'ajouter à ses armoi-
ries celles <!e Vrdence , furent la ré-
compense de ses services. A son retour,
en 1 7 1 5, il fut nommé membre du con-
seil de guerre, et directeiu'-général des
fortifications. La guerre ayant étédécla-
rée à l'Espagne , en i 7 1 9 , le marquis
d'Asfeld refusa de commander une ar-
mée destinée à marcher contre son
bicnfiiteur; le régent ne l'en estima
que davantage , et l'envoya remplacer
en Guienne le maréchal de B'Twi' k.
Enfin, en 1754, le marquis d'Asfeld ^
le compagnon d'armes de Bei'wick ^
fut ajjpelé <à lui succéder dans le con;-
ranndenient de l'armée, après que ce
général eut été emporté d'un coup de
canon. Deux jours après son arrivée,
le marquis d'Asfeld fut fait mdrécbal
de France ; il joignit à la gloire de rem-
placer Ber\%'ick, et de faire tète au
prince Eugène, celle de prendre Phi-
lisbourg , qui résistait depuis quarante-
quatre jours de tranchée ouverte. Le
commandement de Strasbourg , qu'a-
■vait eu le maréchal de Berwick , fut
confie au maréchal d'Asfeld ; il termina
sa glorieuse et longue carrière , le
7 mars 174^, à l'âge de 78 ans.
Digne successeur de Vauban , lat-
taque et la défense des places fon-
dèrent sa réputation. Ses vertus et sa
piété le firent respecter et chérir chez
l'étranger comme dans sa patrie. —
L'abbé DE LA ViEUviLLE , SOU frère ,
défendit avec chaleur le jansénisme ,
ce qui lui attira une lettre de cachet.
Il composa quelques écrits qui n'ont
pas survécu aux circonstances qui les
ont fait naître , et il eut part à l'expli-
cation des saintes Écritures par Du-
guct. U est mort en 1745» S— y.
574 ASG
ASGILL (Jean), avocat anglais,
tjé vers le milieu du 1 7'. siècle , se
Ht connaître de bonne heure par des
productions très -originales, où l'on
trouve un mélange singulier de gra-
vite et de plaisanterie. Il publia, vers
i()o8,un pamphlet sur la création
d'une espèce de monnaie autre que
l'or et l'argent , et un Essai sur un
T-egistre pour les titres de terres.
Ces deux ouvrages fiu-ent générale-
ment goûtes. En 1G69, il passa eu
Irlande , où ses talents au barreau lui
acquirent beaucoup de réputation et
dp. fortune, et le firent élire membre
du parlement d'Irlande. 11 avait pu-
blie, quelque temps au])aravant , un
Traite, en anglais, sur la possibilité
d'éviter la mort, sous un titre singu-
lier, dont voici la tradiK:tion : Argu-
ment qui prouve que , conformément
à la conviction de la vie éternelle ,
révélée dans l'écriture , l'homme
peut y être transporté sans passer
par la mort, quoique la nature hu-
maine du Christ lui-même n'ait pu
Y être transportée jusqu'à ce qu'il
eût passé par la mort. Ce livre
excita un cri général contre l'auteur,
qui fut regarde comme blasphémateur,
et en conscqucuce expulsé de la cham-
bre des communes , quatre jours après
qu'il y avait été admis. U revint eu
Angleterre en 1705, et fut élu mem-
bre de la chambre des comnumcs de
ce royaume. Après y avoir siégé quel-
ques'anné( s, les anciennes accusa-
tions d'impiété furent renouvelées con-
tre lui à l'occasion de sou ouvrage ;
ft, malgré une défense très-énergique,
il fut également expulsé du parlement
anglais. Ses aflaircs étaient alors dans
le plus mauvais état ; le défaut d'ordre
et d'écononùe ayant détruit sa for-
tune, il se vit arrêté et emprisonné
pour dettes. Il mourut, dans la prison
du Bauc-du-Roi , en 1758, âge de
ASH
plus de quatre-vingts ans, après «n^
détention de trente aimées, durant
lesquelles il publia un grand nombre
de traités, entre autres celui intitulé:
De jure divino , dans lefjuel il a
voulu prouver que la maison de Ha-
novre a un di'oit divin au trône d'An-
gleterre. Ces écrits furent presque
tous favorablement accueillis , mais
ce succès ne put rétabhr ses affaires.
X— s.
ASGILIj. Voy. Wasingïuoîv.
ASHBY ( sir John ) , amiral anglais ,
né eu 1 64 '2 : il fut regarde comme un
des meilleurs officiers de la marine
britannique, à l'époque où elle a pro-
duit ses amiraux les plus célèbres ,
et dans la guerre la plus féconde en
événements mémorables. Guiliatnne
et ÎMarie étaient montés sur le trône ,
où n'avait pu se maintenir Jacques 11 ,
qui , n'étant cnc(u'e que duc d'Yorck ,
avait souvent conduit les flottes an-
glaises à la victoire : la bataille de la
Boyne avait décidé du sort de l'Ir-
lande : le chevalier John Ashby fut
chargé , avec les amiraux Haddock et
Killegrcw, d'éloigner les escadres fran-
çaises de cette île imjiortante, où le
vœu des habitants catholiques rappe-
lait sans cesse la maison de Sîuart;
el il s'acquitta de cette commission
difficile avec autant d'activité que de
bonheur. Deux ans aj)rès (i(3ç)'j),
commandant l'escadre Bleue dans l'ar-
mée navale d'Angleterre et de Hol-
lande, réunie sous les ordres de l'A-
miral Russel , sir John Ashby com-
battit à cette fameuse journée de la
Hogue , la plus sanglante et la plus
décisive dont l'histoire de la marine
moderne ait consen é le souvenir. Les
officiers gcnéiaux qui servaient sous
lui étaient George Roock , illustre
depuis par la prise de Gibraltar, et
le contre-amiral Carter, qui fut tué
dans l'actiou. Sir Juhu Ashby se con-
ASH
âuisit avpc sa valeur accoutumée. Une
parlie de son escadre, commandée
^lar le vice-amiral Roock , brûla onze
vaisseaux français dans la baie de la
Hogue. Ashby lui - même fut moins
heureux en poursuivant les restes de
l'arme'e , que Pannctier parvint à
rallier dans la rade de 8l.-Malo. L'e-
vêque Burnct prétend que cette pai tic
de la flotte française ne fut sauvée que
par la négligence de l'amiral anglais;
et sir John Ashby , ainsi que Rus-
sel , furent accusés l'un et l'autre par
le comte de Nottiugham , secrétaire
d'état , devant le parlement britanni-
que : mais ils furent tous les deux dé-
chargés de l'accusatic n , et reçurent
les témoignages les plus honorables
de l'estime publique. Russel reprit,
au bout d'un an , le comuiandemcnt
des forces navales de sa ]iatrie , mais
il paraît que sir John Ashby quitta ,
sans retour, le service dans lequel il
avait acquis une si glorieuse réputa-
tion. E — D.
ASIIMOLE ( Élie ), antiquaire
anglais , fondateur du Muséum Ash-
moléen , à Oxford , naquit , en 1 6 1 7 ,
à Litchfield, et y reçut sa première
éducation. Vers l'âge de 16 ans, il
vint à Londres , pour s'y livrer à
l'étude du droit, et devint, en i(34i ,
procureur à la cour des plaids com-
muns. En 1644? pendant leslroubles
de la guerre civile , il se rendit à Ox-
ford , où le roi Charles I'"'. était alors
réfugié, et passa de là à Woroester,
on il fut fait capitaine dans l'armée
royale , et conti'ôlcur de l'artillerie.
Après la défaite du parti royaliste ,
Ashmole revint à Londres , oh il se
trouva lié avec le fameux Lilly, et
quelques autres astrologues anglais ,
.qui lui inspirèrent le g ût de l'alchy-
mie. 11 publia , en i65o , un traité du
docteur Arthur Dée , sur la pierre
philosophale , ainsi q^ii'un autre lr.àté
ASH 5^5
sur le même sujet , par un auteur
inconnu , sous le titre de Fascicidus
cheinicus , ou Collections chimiques ,
etc. , mis - eu- anglais par Jacques
Hasolle , ou le Mercnriophile an-
glais , Londres , i65o , in- 12. Il
publia ensuite le Tiieatrum chemi-
cum brilannicum , contenant diffé-
rents poëmes des fameux philoso-
phes a?i^lais qui ont écrit dans leur
vieux langage , sur les mystères
hermétiques , fidèlement recueillis
en un volume, et accompagnés de
notes , par Elie Ashmole , ou le
Mercuriophile anglais ; Londres ,
iG5'2 , in-4°. Ce recueil fut suivi , en
iG.58, de la publication d'un volume
in-4 '. , inliîulé : le Chemin du hon-
lieur, en trois livres. Ce dernier traité,
qui n'était point l'ouvrage d' Ashmole,
mais auquel il avait ajouté une pré-
face, roule également sur la pierre
philosophale; mais il se livra ensuite
à des travaux plus utiles et plus esti-
mables , et commença à recueillir les
matériaux de son Histoire de l'ordie
de la Jarretière , imprimée paur la
première fois, en iG^'i, en i vol,
iu-fol. , et intitulée : Institution , lois
et cérémonies de l'ordre illustre de
la Jarretière. Charles II , rétabli sur
le trône , le nomma, eu iGGo , héraut,
d'armes de Windsor , et secrétaire de
Surinam en iG6'2. La société royale
de [jondres l'avait admis l'année pré-
cédente au nombre de ses membres. Il
mourut, le i8mai iG9'i,âgéde7'jans,
laissant à l'université d'Oxford, ])0ur
laquelle il avait une affection particu-
lière , ses manuscrits et sa bibliothè-
que. Il avait donné à cette université ,
en iG85, une riche collection d'objcls
rares et curieux , qui ont été déposés
dans le magnifique cabinet ou muséum;
qui jjorte son nom. Ashmole a encore
laissé quelques ouvrages manuscrits ,
dont plusieurs ont été imprimés après
57G ASH
sa mort, tels que les I\Icmo!res de sa
vie , publiés par Charles Burmaii ,
Londres , i 7 1 7 , in- 1 -2. X — s.
ASHTON (Charles), prêtre an-
glais et principal du collège de Jésus
à Cambridge , ters i'ati 1701, est re-
gardé comme un dp< plus savants cri-
tiques de son temps. Ou a de lui divers
ouvrages publiés sans nom d'auteur,
parmi le-queb on remarqua : 1. Lo-
ciis Justini mi..rtj'ris emendatm in
^pol. 1 , p:i;^. 1 1 , édil. Tliirlby ,
.T'44; ïî- f^i(^''i'on et Ilirtius con-
ciliés sur le temps du départ de
César pour la guerre d'Afrique ,
avec une explication de l'aucicune
;<nnce romaine, réglée par César;
311. Origt'U de oratione ; IV. Hie-
roclis in aurea carmina Fjtha-
forea coininenl. Londres, 174*^?
in-8'. X— s.
ASIATICUS fut, dans sa jeunesse ,
Fesclave de \ itellius et l'aj^iont de ses
iul'àmcs plaisirs. L'esclave se déçjoûla
du maître : celui-ci le fit anêter et
mettre aux fers. Aussitôt après il lui
rendit la liberté, et l'associa de nou-
veau h ses plaisirs. Fatigué de ses vi-
ces , il le vendit, le reprit ensuite et
l'affrancliit , lorsqu'il eut le gouver-
nement de la Germanie. Dans les pre-
miers jours de son règne , son armée
lui ayant demandé pour Asiaticus la
dignité de chevalier , Vitellius re-
poussa cette injurieuse adulation ,
puis , par un elïét de la mobilité de
son esprit , il accorda, dans le secret
de sa débauche , ce qu'd avait refusé
publiquement, et décora Asiaticus de
j'annean de chevalier. Il paraît que
ce favori usa insolemment de sa puis-
sance. Après la mort de Vitellius. il
expia ses excès par le supplice des
esclaves, l'an de Rome 8).o.
Q— R— Y.
ASINARI (Fredkric ), noble d'Asti,
eu Piémont, comtç de Gaïuerauo , Uo-
ASI
rissaitvers 1 55o; il s'adonna de bonne
heure aux armes, et fut envoyé, par
le duc de Savoie, avec 4oo arquebu-
siers , au secours de Maximilien II,
lorsque celui-ci tenait la diète, pom'
s'opposer aux victoires et aux troupes
de Soliman. J.-Jacques Lucchio, dans
son S^ylloge numismatum elegantio-
rmn, Argentinae, iti^o, In-fol., pré-
tend que c'est en cette occasion que
fut frappée une médaille qui rejirésen-
tait, d'un coté, Asinari eu Labit mili-
taire , avec cette inscription : Frede-
riciis Asinarius co. Cnmcrani; et au
revers, Diane allant à la chasse, son-
nant du cor, qu'elle tient de la main
droite, et dans la gaucho portant son
dard. Asinari faisait ses délassements
de la poésie, et soumettait ses com-
positions au jugement du célèbre An-
nibalCaro; elles se trouvent répandues
daiis divers recueils: I. deux Sonnets
dans la seconde partie de la Scelta di
rime di di^>erd excellenli Poeti, pu-
bliée par Zabata, Gènes, 1579, in-isi.
II. (Juatre Canzoni et un Sonnet dans
la deuxième partie des Muse Toscatie^
recueilhe pa. Ghcrardo Borgogni, Ber-
garae, i5o4, iu-8". III. Quatre-vingt-
deux pièces , consistant en Sonnets ,
Canzoni , IMadrigaux , etc. , dans les
aime di diversi illustri Podd, don-
nées par le même Borgogni, Venise,
iSqç), in- 12 , etc., etc. Asinari avait
composé plusieurs autres ouvrages ,
qui sont restés manuscrits. La bi-
bliothèque de Turin possède : I. f^n, •
ri sonctti e canzoni ; 11. // Tran-
credi , tragedia ; \\\. Tre libri
délie transformazioni ; W . Tre li-
bri deW ira d' Orljndo, Les mêmes
poésies se trouvent encore parmi les
manuscrits de la bibliothèque St.-
Marc, à Venise. La tragédie de Tan-
crède. notée ici N°. II , a élé imprimée
à Paris , 1 587, in-8''. , sous le titre de
Gismonda^ nom de l'uu des persou-
ASI
nages, Ptattiibueeà Torquato Tasso:
raniic'e siiivdute, on corrip;ea cette er-
reur daus une édition faite à Berjijame ,
i588j in -4°-; mais on se trompa
encore, en attribuant le Tancredi à
Ottavio Asinari , conte di Carne-
rano , parent de Fre'de'ric Asinari ,
qui fait le sujet de cet article; et Glie-
rardo Borgogni, qui en fut l'e'diteur,
is^nora, ou feignit d'ignorer la pre-
mière édition de Paris , comme on le
voit par son épître dédicatoire , adres-
sée au comte J. B. Borroraeo. G — e.
ASINÉE. f^oj. Anilee.
ASINIUSPOLLIO. Foy. Pollion.
ASKEW,ou ASCUE (.\nwe ), fdle
de sir William Askew de Kersay, dans
le comte de Lincoln, ue'e en i52i ,
fut élevée, avec beaucoup de soin, dans
la religion catholique, et montra, dès
sa plus grande jeunesse , un goût par-
ticulier pour les études théologiques.
La réformation agitait alors tous les
esprits. Elle fut curieuse d'examiner
par elle-même les questions qui divi-
saient les cathohques et les protestants.
Cet examen éleva dans son esprit des
doutes sur la doctrine qu'elle avait pro-
fessée jusque-là , et elle finit par adop-
ter les principes des réformateurs. Eile
avait épousé un gentilhomme du voi-
sinage, qu'elle n'aimait pas, et qui,
zélé catholique, fut indigné de voir
une jeune femme oser , d'après ses
propres lumières, rejeter la religion
de ses pères. Il la chassa de chez lui.
Anne prit le parti d'aller à Londres ,
solliciter une sentence de séparation ,
espérant trouver de l'appui dans les
personnes puissantes attachées au pro-
testantisme. Elle fut, en effet, accueillie
très-favorablement par les femmes les
f)lus considérables de la cour, et par
a reine elle-même. Sa conduite d'ail-
leurs fut à l'abri de tout reproche.
Mais son mari , excité par des prêtres
fanatiques, la dénonça à Henri VIII,
ASK 577
comme dogmatisant sur le sujet de la
présence réelle. Henri, aussi capri-
cieux dans ses opinions que cruel dans
son gouvernement, faisait, dans le
même temps , pendre les partisans du
pape, et brûler ceux de Luther. Il fit
arrêter Anne Askew, et chargea le
chancelier, le lord maire et quelques
évèques de l'examiner sur saciovance^
relativement à la transsubstantiation et
aux messes dites pour les âmes des
morts. Elle exposa ses opinions avec
franchise et fermeté ; le lord maire
lui demanda a si elle ne croyait pas
» qu'un prêtre pût faire d'une hostie le
«corps de J. -C? » Elle répondit:
« J'ai lu que Dieu avait fait l'homme ;
» mais je n'ai jamais lu que l'homme
» puisse faire Dieu , et je ne crois pas
»que vous lelisiez jamais nulle part.»
Le lord maire reprit : « Si un rat man-
» geait l'hostie, après qu'elle a étécon-
» sacrée , qu'arriverait-il au rat ? — Je
» ne puis vous le dire, milord , répon-
))dit Anne. — Eh bien , répliqua 1*
» lord maire , je dis que le rat serait
«damné. — Pauvre rat! dit -elle ea
» souriant. » Le chancelier l'ayant me-
nacée d'être brûlée vive , elle ob'^erva
qu'après avoir étudié les Saintes Écri-
tures , elle n'avait pu y découvrir que
le Christ ou ses apôtres eussent jamais
mis à mort une créature humaine. Le
chancehcr lui reprocha durement de
citer l'Écriture, en disant que S. Paul
avait défendu aux femmes de parler
de la parole de Dieu. Elle répondit
avec modestie , que S. Paul leur avait
défendu simplement d'enseigner pu-
bliquement dans les congrégations.
Les détails de cette conférence , écrits
par elle-même , ont été publiés après
sa mort. Anne fut mise en prison, et
privée de toute communication avec
ses amis. On employa toutes sortes de
moyens pour l'engager à rétracter ses
opinions ; mais rien ne put vaincre sa
3-'
578 A s K
fermeté. Le roi ordonna qu'elle fût
conduite de Newgate àla tour de Lon-
dres, et qu'on l'interrogeât sur les
personnes de la cour avec qui elle était
en correspondance, en lui déclarant
que si elle refusait les communications
qu'on lui demandait , elle serait mise
à la torture. Cette menace ne put lui.
arracher aucun aveu. Son sexe , sa
beauté , son esprit et son noble cou-
rage avaient fini par attendrir presque
tous ceux qui étaient témoins des per-
sécutions qu'on lui faisait essuyer. Le
chancelier de la tour , Wriothesely,
inaccessible à tout sentiment d'huma-
nité , ordonna au lieutenant de la tour
d'appliquer Anne à la torture; mats
celui-ci s'y refusa obstinément. On as-
.sure que le chancelier, par un zèle
aussi servile que féroce, se dépouilla
de sa robe, pour laire lui-même l'of-
fice de bourreau , et fit subir à la
malheureuse Anne les plus horrihles
tourments, sans obtenir d'elle aucun
symptôme de faiblesse. Cependant, la
violence des douleurs lui fit perdie
connaissance, et , lorsqu'elle eut repris
ses sens, elle retrouva tout son cou-
rage. On lui offrit de nouveau sa grâce,
à condition qu'elle désavouerait ses
principes; de nouveau, elle refusa la
vie à ce prix , et se résigna au sup-
phce barbare qu'on lui annonçait. La
torture avait disloqué tous ses mem-
bres; elle ne pouvait faire aucun mou-
vement; on la transporta dans un fcm-
teuil au lieu de son supplice. Attachée
au poteau où elle allait être livrée aux
flammes, ou lui apporta une lettre du
chancelier , qui l'exhoilait encore à ra-
cheter sa vie par une rétractation de
ses erreurs. En détournant les yeux
du papier qu'on voulait lui faire lire,
elle dit avec calme et simplicité: « Je
» ne suis pas venue ici pour renier
» mon Seigneur et Maître. » Elle vit
niiiltic le feu au fatal bûcher, sans pa-
ASM
raîfre troublée , et reçut la mort en re^*
commandant son am»» à la miséricorde
divine. Anne Askew mourut le 16
juillet 1546, dans la vingt-cinquième
année de son âge. On a publié . apiès 1
sa mort, indépendamment de la rcla- 1
tiou de son procès , et de ses souffran-
ces , des prières et quelques écrits de
dévotion qu'elle avait composés dans sa
prison. S — d.
ASMAI(Abdelmelek-Ben-
C o R AÏ B ) , grammairien arabe , na-
quit à Bassorah , l'an i-i-?. de l'hég.
( 739 de J -C. }, et alla habiter Bagh-
dàd , où il obtint la faveur du célèbre
ffaroùn-El-Rachvd. Outre un grand
nombre d'ouvrages précieux sur la
grammaire , l'éloquence , l'ancienne
poésie des Arabes , et le droit , Asmaï
a composé plusieurs traités sur les che-
vaux et les bètes de somme. Il mourut
l'an Ci 1.5 de l'hég. Ibn-Khalekàn a
conservé, dans sa Biographie , la no-
menclature de ses écrits. J — iv.
ASMONÉE , ou ASSAMONÊE ,
de la tribu de f>évi , n'est personnelle-
ment connu dans l'histoire que pour
avoir donné son nom à l'illustre fa-
mille des Asmonéens ou IMacchabécs.
Les Asmonéens réunirent sur leur
tète la dignité de grand sacrificateur
et la souveraineté de la nation : ils s'at-
tirèrent l'amour des juifs , qu'ils déli-
vrèrent du joug des Macédoniens et
qu'ils filent triompher de leurs auties
ennemis. Ils se rendirent formidables
aux étrangers par leurs victoires, et
sont devenus célèbres dans tout l'u-
nr\'ers , par une suite d'actions écla-
tantes , telles que l'histoire d'aucun
peuple n'en offre pas de semblables.
La famille des Asmonéens dura lîG
ans , depuis Simon , fils d'Asmonée ,
qui fut le premier de ces héros , jus-
qu'à Antigone, le dernier qui porta le
sceptre , que ïlérode sacrifia à son
ambition , et à .\ristobule , soiueraiii
ASP
sacrificateur , que le même Herode
fit étoufFer dans un bain , à Jéricho ,
lorsqu'il n'avait encore qn' dix-huit
ans. C'est par ce double crime que le
sceptre des juifs passa entre les mains
de l'assassin de leurs chefs. T — d.
ASNIER ( l' ). Fof. Lasnier.
ASP 579
ASPAR , patrice et ge'néral des
armées romaines , pendant le règne
de Théodose 1 1 et de ses successem-s ,
fit ses premières armes sous la con-
duit© de son père Ardaburius , et par-
tijgea bientôt avec lui les honneurs
du commandement ; le père et le
ASP (Matthieu) , archidiacre dQm*fils furent chargés, en 4^5 , de pas-
la cathédrale d'Upsal , né en iGr)6, ser en Italie , pour défendre Va-
fit des voyages en Allemagne , en lentinien III et sa mère Placidie ,
contre le rebelle Jean ; Aspar devait
les conduire par terre en Italie , tandis
qu' Ardaburius attaquerait Eaveune
par mer. Aspar surprit d'abord Aqui-
lée, mais il eut la douleur d'apprendre
que la tempête avait conduit le vais-
seau monté par son père dans le
port ennemi , ou ce général se tiouvait
prisonnier. Cependant , un avis secret
que reçut Aspar le déteimina à mar-
cher vers Ravenne en toute hâte ; un
berger lui indiqua une route inconnue,
qui le conduisit au pied des murs :
Ardaburius avait séduit les troupes de
Jean , et lorsqu'Aspar arriva pour at-
taquer Ravenne . il trouva les portes
sans défense , et fut bientôt maître
de la ville et de la personne du tyrau
qui fut conduit à Aquiléc , et mis à
mort par ordre de Placidie. Trois
jours après , Aètius qui avait embrassé
le parti de Jean , parut avec une ar-
mée de (3o,ooo Huns. Aspar lui hvra
une bataille sanglante , dont le succès
fut incertain . mais qui fut suivie de la
soumission d' Aètius. En 45 1 , Aspar
passa en Afrique , pour secourir le
comte Boniface contre Genseric , roi
des Vandales; les Romains furent taillés
en ])ièces, et Aspar s'enfuit à Constau-
tinople. Il conserva son crédit et sa
puissance sous le règne de Marcieu ^
et fut soupçonné d'avoir hâté, par le
poison, la mort de ce prince vertueux
Ce qui est plus certain , c'est qu'il pro- •
fita de cet événement pour disposer
du sceptre , dont il n'osait s'emparec
57..
voyages en Allemagne , en
Angleterre et en France. Les langues
savantes étant l'objet auquel il s'ap-
pliquait principalement , il se lia à
Paris avec Fourmont , Longuerue,
Montfaucon et madame Dacier. Se
trouvant à Altdorf , en 1717, pendant
la fête séculaire de l'université , il sou-
tint , jiendant neuf heures consécu-
tives, des thèses sur Luther, contre
des théologiens catholiques , et fut
créé à la suite de ce combat acadé-
mique , maître ès-arts de la faculté de
théologie. Retourné en Suède , il pro-
fessa successivement à Upsal l'élo-
quence , les langues anciennes et la
théologie. 11 portait souvent la parole
au nom de l'université , dans les cir-
constances solennelles, et il prononça
même des discours en langue grecque.
Il mourut en 1765. L'archevêque
d'Upsal fit lui - même son oraison fu-
nèbre. On a de lui plusieurs disserta-
tions en latin, sur la littérature an-
cienne , et deux oraisons funèbres en
suédois , l'une du docteur Olaus Cel-
sius , l'autre de l'archevêque Henri
Benzélius. Le docteur Asp laissa un
fils, qui fut ennobli, et qui mourut
en 1808, après avoir été ministre de
Suède près de plusieurs cours. En
revenant d'une mission à Constanti-
nople, il fit un voyage dans les îles de
l'Archipel , et recueillit plusieurs obser-
vations intéressantes, qui furentimpri-
mées en suédois , peu avant sa mort.
Il publia aussi quelques ouvrages sur
les finances de Suède. C— av.
58o ASP
ouvertement, parce qu'il e'taitarifn.II
plaça sur ie trône Léon , simple tri-
Lun, et sa créature, auquel il fit pro-
mettre de nommer Ce'sar un de ses
fils. Mais bientôt le nouvel empereur
oublia cette promesse ; Aspar en exigea
l'accomplissement, avec une hauteur
qui ne parut point effrayer Le'on. Dans
l'horrible incendie qui dévasta Cous-
tantinople, en 4^3, Aspar montra un
courage et une activité dont l'histoire
a fait une mention honorable. Cepen-
dant, mécontent de l'empereur, qui
s'était affranchi de sa tyrannie , il
forma, de concert avec son fils Arda-
burius , plusieurs intrigues pour faire
échouer les entreprises de Léon j celui-
ci, pour se concilier ces hommes dan-
gereux, déclara enfin César, Patricius,
le second fils d'Aspar et lui fiança sa
fille Léontie. Mais Aspar et Ardabu-
rius , peu satisfaits d'avoir faittrembler
leur maître, conspirèrent de nouveau;
Léon en étant instruit, les manda au
palais , où ils furent massacrés par les
eunuques, en ^"ji. La puissance et le
crédit de cet homme ne furent point
anéantis par sa mort j des officiers
Goths voulurent le venger et excitè-
rent des troubles violents ; Constanti-
nople fut menacée, les provinces fu-
rent ravagées , et l'esprit séditieux
d'Aspar , du fond de la tombe, fut en-
core funeste à l'empire qu'il avait si
long-temps opprimé. L — S — e.
ASPASIE. Lorsqu'on est appelé à
caractériser les femmes de l'antiquité,
et surtout de la Grèce , on éprouve un
genre d'embarras très-pénible; on est
séduit par leurs talents, et repoussé
par leur conduite. Rarement les fem-
mes illustres, à cette époque delà ci-
vilisation , méritaient tout à la fois
l'admiratiion et l'estime, et, parmi les
bienfaits sans nombre de la religion
chrétienne , il faut compter l'intro-
ductiou de ces mœurs sociales et pures
ASP
qui permettent aux femmes de se
montrer sans s'avilir, et de manifester
leur ame sans souiller leur réputation.
Aspasie naquit à Milet, en lonie; elle
était fille d'Axiochus. On prétend que
les femmes de l'Asie mineure étaient
plus belles que celles d'Athènes. L'A-
sie a quelque chose de merveilleux
qu'on retrouve sous mille formes di-
verses. Une autre beauté d'Ionie ^
Thargelie , avait , aVant Aspasie , don-
né l'exemple de la singulière réunion
des talents politiques et littéraires, avec
toutes les grâces de son sexe. Il paraît
qu'Aspasiela prit pour modèle, quoi-
qu'elle ne consacrât pas , comme
Thargelie , ses moyens de plaire à
faire des partisans au roi de Perse.
Les femmes étrangères étaient , pour
ainsi dire , proscrites par les lois d'A-
thènes, puisque leurs enfants, nés dans
le mariage , ne pouvaient être consi-
dérés comme légitimes : peut - être
cette situation contribua-t-elle à pla-
cer Aspasie dans la classe des courti-
sanes. Quand l'ordre social est injuste,
les individus sur lesquels il pèse, s'af-
franchissent souvent de toutes les bar-
rières, irrités qu'ils sont de n'avoir
pas été protégés par elles. Dans les
monarchies , on se sent une sorte d'é-
loignement pour les femmes qui se
mêlent des affaires publiques ; il sem-
ble qu'elles deviennent les rivales des
hommes , en usurpant la carrière
dans laquelle ils peuvent se mou-
voir ; mais dans une république , la
politique étant le premier intérêt de
tous les hommes , ils ne seraient point
associés du fond de l'anie avec les
femmes qui ne partageraient pas cet
intérêt. Aspasie s'occupa donc d'une
manière remarquable de l'art des gou-
vernements , et en particulier de l'élo-
quence , l'arme la plus puissante des
pays libres. Platon , dans son Dialo-
gue de Mcnçxène, cite une Ucs-bcUe
ASP
harangue d'Aspasic , en l'honneur des
Athéuiens morts à Léchée. Il dit
qu'elle avait enseigné l'art oratoire à
Përiclès. Le poète élégiaque Herraé-
sianax nous peint Socrate comme
amoureux d'Aspasie : « Vénus , dit-il,
» se vengea sur lui de son austère sa-
» gesse, en l'enflammant pour Aspa-
» sie ; son esprit profond n'était plus
» occupé que des frivoles inquiétudes
» de l'amour. Toujours il inventait de
» nouveaux prétextes pour retourner
» chez Aspasie , et lui qui avait dé-
» mc'é la vérité dans les sophismes
» les plus tortueux , ne pouvait trou-
» ver d'issue aux détours de son pro-
» pre cœur. » Aspasie , elle - même ,
adressa des vers à Socrate , pour le
consoler de l'amour malheureux qu'il
ressentait; mais il est permis de pen-
ser qu'elle s'enorgueillissait un peu
d'un empire dont Socrate pouvait tou-
jours se dégager à son gré. La gloire
de la vie d'Aspasie , ce fut le sentiment
sincère et durable qu'elle sut inspirer
à Périclès , à ce grand homme , qui
savait être à la fois citoyen et roi d'une
république. On l'avait surnommé /i<-
piter- Olympien, et sa compagne As-
pasie fut appelée Junon j il avait
d'elle un fils naturel. Toutefois, l'éga-
rement de la passion ne suffit point
à son bonheur ; il voulut contracter
des liens plus intimes avec elle , et se
sépara de sa femme pour épouser As-
pasie. Plutarque raconte qu'il avait
pour elle la tendresse conjugale la
plus parfaite : un tel sentiment peut-il
être inspiré par une femme dépravée?
Aspasie fut accusée d'avoir été la cause
de deux guerres ; entre les Athéniens
et les Samiens , à cause de Milet ,
sa patrie ; et entre les Athéniens et
les Lacédéraoniens, à l'occasion de la
ville de Mégare. Plutarque la justifie
de ce tort, et Thucydide ne prononce
pas son nom, en racontant avec détail
ASP 5SI
toutes les causes de la longue guerre du
Péloponnèse. Le seul Aristophane dési-
gne Aspasie comme en étant la cause ;
mais Aristophane attaquait tous ceux
dont la réputation faisait du bruit dans
Athènes, parce que le succès de ses
comédies tenait non seulement au bril-
lant de son esprit, mais à l'audace de
son caractère. D'ailleurs, dès qu'une
femme a du crédit sur les chefs de
l'étal, il est impossible qu'on ne lui
attribue pas les revers quelconques
qui tombent sur la chose publique on
sur les particuliers. L'imaginatioix
s'exerce sur la puissance secrète
dont personne ne peut calculer l'éten-
due , et les malheureux aiment à s'en
prendre de ce qu'ils souffrent, à ce
qu'ils ignorent. Le peuple d'Athènes,
irrité contre Périclès, intenta des pro-
cès pour cause d'impiété, à Anaxagore,
à Phidias et à Aspasie. Il poursuivait
les premiers objets de l'affection de
Périclès , n'osant pas s'attaquer à lui-
même. Périclès ne put sauver de l'exil
Anaxagore ni Phidias; mais, au milieu
de l'aréopage, il versa des larmes, en
défendant Aspasie. Le sentiment qu'on
dut éprouver en voyant une ame si
forte atteinte par une émotion si tou-
chante, désarma les juges. Périclès
mourut la troisième année de la guerre
du Péloponnèse, et l'on dit qu'Aspasie,
l'amie de Socrate, la compagne de
Périclès , l'objet des hommages d'Alci-
biade, s'attacha dans la suite à un
homme obscur et vulgaire, nommé
Lysiclès ; mais bientôt elle le pénétra
de son ame, et il acquit, en peu de
temps, un grand pouvoir dans Athè-
nes. Quelques poètes comiques du
temps ont accusé Aspasie de tenir
une école de mauvaises mœurs, et
d'en donner à la fois l'exemple et le
précepte. Peut-être la jalousie qu'ins-
piraient ses raies talents et sa brillante
existence, a-t-elle envcnirajé ces iinpu-
oSi ASP
talions. On a vu plusieurs exemples, h
Paris, de femmes qui reunissaient au-
tour d'elles le eercle le plus distingue,
et sans lesquelles les hommes d'esprit
de France n'auraient pti goûter le plai-
sir de se comuuniiquer entre eux, et
de s'encourager mutuellement ; mais
l'ascendant d'Aspasie e'iait d'une toute
autre nature : on aimait à l'admirer
comme orateur, tandis qu'en France,
la parole n'était jamais qu'un jeu facile
et léger. Aspasie influait sur la nation
entière , dont elle pouvait presque se
faire entendre ; car le nombre des ci-
toyens qui formaient l'ctat politique
d'Athènes était singftlièrement resser-
re. Les beaux arts se reproduisaient
en Grèce sous toutes les formes. Non
seulement l'éloquence , mais la science
du gouvernement elle-racrae était ins-
pirée par une sorte d'esprit artiste,
qui prenait naissance dans les mœurs
et la religion des Athéniens. Ce pou-
voir universel de l'imagination donnait
un grand empire à Aspasie, puisqu'elle
en connaissait tous les secrets. S'eni-
vrer de la vie, était presque un devoir
dans le culte des Athéniens. Le renon-
cement au monde et à ses pompes doit
être la vertu des modernes ; il est
donc impossible de jugi-r d'après les
mêmes principes, deux époques si
différentes dans l'histoire des senti-
ments humains. Un poète allemand a
donne à une femme le nom de Sainte
Aspasie. Ce serait une belle chose, en
effet , que de réunir toute la magie de
la culture poétique des Grecs , avec la
sévérité de mtriJe qui fortifie l'ame,
et peut seule lui donner du sérieux et
de la profondeur. Le nom d'Aspasie
e'tait devenu tellement célèbre , que le
jeune Cyrus le fit ])i'cndre à sa maî-
ti-esse Milto( For. l'article suivant),
afin d'exprimer ainsi l'enthousiasme
qu'il éprouvait pour ses grâces et pour
ses charmes : Aspasie signifiait la plus
ASP
aimable des femmes, comme Alexan-
dre le plus grand des héros. Appeler
une femme Aspasie , c'était presque la
comparer à quelques divinités de la
fable ; car , en Grèce , les hommes et
les femmes célèbres dans quelque gen-
re queceh'it, se confondaient bien vite
avec les habitants de l'Olympe, qui tou-
chait de si près à la terre. N. S. H.
ASPASIE, fille d'Hermotimus, née
à Phocée dans l'ionie, était si remar-
quable par sa beauté , qu'un satrape
de l'Asie mineure l'enleva pour en faire
présent à Cyrus le jeune. Amenée de-
A'ant ce prince avec d'autres femmes,
elle ne voulut se prêter à aucune de
ses caresses , et se mit à crier fort
haut lorsqu'il voulut prendre quelque
hberté avec elle. Cette résistance plut
beaucoup au jeune prince, et, loin
d'employer la violence , il crut de-
voir chercher à gagner sou cœur ;
comme il était naturellement aima-
ble , il y réussit facilement. Ils s'atta-
chèrent tellement l'un à l'autre que
Cyrus oublia son sérail pour vivre
avec elle , comme avec une épouse
légitime , union qui devint célèbre
dans toute la Grèce. Après sa mort ,
elle tomba entre les mains d'Artaxer-
cès , qui chercha vainement à s'eu
faire aimer, la mémoire de Cyrus lui
étant toujours chère. Elle céda cepen-
dant enfin à la nécessité. Quelques
années après , Darius , qu'Artaxercès ,
son père , venait d'associer au trône ,
lui demanda Aspasie ; ce jirince n'o-
sant pas refuser , répondit qu'elle était
maîfiesse de choisir. As])asie avant
donné la préférence au fils , Artaxer-
cès , irrité, s'en vengea en la fai-
sant grande -prêtresse de la déesse
Anailis , à Ecbatane , dignité qui l'o-
bligeait à vivre dans la chasteté le
reste de ses jours. Elle se nommait
d'abord Milto ; ce fut Cyrus qui lui
donna le ui»m d'Aspasie, devenu ce-
ASP
lebre par le rôle que la pre'ce'dcnte avait
ioiie'. C — R.
ASPER (Jean), peintre, ue à
Zurich , en 1 409 , y mourut en 1 57 1 .
Il imita son célèbre contemporain ,
J. Holbein , et parvint (jiiclquefois
à l'égaler dans ses portraits , qu'on
recherche. Les gravures de XHelvetia
sancla de Henri Murer (Lucerne,
1648 , in-folio), ont été fiiites sur
ses dessins. Les habitants de Zurich
firentfrapper une médaille en son hon-
neur • ce qui ne l'empcclia pas de
mourir dans l'indigence. — Deux de
ses fils ont suivi la même carrièi e ,
et leurs tableaux ont été souvent pris
pour ceux de leur père. U — i.
ASPREMONT ( d' ), vicomte d'Or-
tlie , gouverneur de l-5ayonne sous le
règne de Charles IX à l'époque de la
St. -Barthélémy , fut un des hommes
courageux et vraiment fidèles qui osè-
rent désobéir aux ordres de la cour,
lorsqu'ils n'auraient pu la servir que
par des assassinats. « J'ai trouvé ,
» écrivait-il au prince, parmi les ha-
ïi bitauts et les gens de guerre , des
» homuîes dévoués à votre majesté,
» mais pas un bourreau. Ainsi , eux
» et moi nous vous supplions de n'«m-
» ployer nos bras et nos vies qu'en
» choses possibles, quelque hasardeii-
» ses qu'elles soient. » ( /''.Jean Hen-
KUYER ). B — T.
ASPREMONT ( François de la
MotheVillebert, vicomte d' ) , étant
entré au service la même année que
Vauban , se voua comme lui à la guerre
des sièges, et quitta une compagnie des
gardes pour êlrc ingéniem*. On le vit
successivement souinetire Bordeaux,
Bourg et Libourne (i(355), assitiger
Stenai , Laudi-ecy , Condé , Saint-
Guislain, et secourir Arras ( i655 ).
Il reçut une blessure au siège de Condé ,
tiois à celui de Vaienciennes , et une
-à celui de Graveiines. Plus heureux à
A S S 585
la bataille des Dunes, aux sièges de
Diuikerque , de Tournay et de Douai
( 1 667 ) , aux travaux d'Ath , qu'il di-
rigeait , il s'exposa impunément à tous
les dangers. En 1672, il conduit les
attaques de plusieurs places , sert aux
sièges d'Orsay , de Rheiuberg , de Ni-
mègue, et s'empare des forts de l'île de
Bommel. Aprèsavoir inspecté les tra-
vaux du Dauphinc et de la Provence,
rédigé un projet d'agrandissement pour
la place et le porl de Toulon , d'Aspre-
mout, fait )naréchal de camp, est en-
voyé en Espagne ( en i()77 ). A la ba-
taille d'Espouilles, la gauche des en-
nemis s'était emparée d'une hauteur
qui dominait la droite de l'armée fran-
çaise, d'Asprcmont les attaque l'épée
à la main, et les chasse au-delà du
ruisseau qui séparait les deux camps.
Le champ de bataille reste aux Fran-
çais; mais la disette des vivres les
oblige de revenir en Roussillon. Trois
fois les ennemis tombent sur l'arrière-
garde, et trois fois d'x4spremont les
charge et les repousse. Us menacent un
autre corps, d'Aspremont vole à son
secours, les devance, taille en pièces
le régiment d'Aragon , les di'agons es-
pagnols, et fuit prisonnier le marquis
de Fueutes. Ce furent ses derniers ex-
])loits. A peine l'armée repassait les
monts , qu'il reçut l'ordre d'aller à
Toulon , tracer les agrandissements
jîrojelés. Épuisé de fatigues , il y tomba
malade, et mourut le 27 juin 1G78.
D — M — T.
ASSAH AR ADDON , nommé Assar-
Addim:s dans Plolomée , et Osnapar
dans Esdras, le plus jeune des en-
fants de Scnnacherib lui succéda dans
le royaume de BabyloRc, l'an 680
avant J.-C. La quatrième année de
son règne, il reconquit ce que son
père avait perdu de l'.Assyrie et de la
Palestine, et réunit sur sa tête les
deux rojaumes de Bahyloiie et de
584 A S S
r^inive qui avaient ete démembres.
Étant ensui;e entré dans le royaume
d'Israël, il emmena en captivité' tout
ce qui s'v trouvait encore des dix tri-
bus, qu'il remplaça par des colonies
des pays situes au-delà de l'Euphrate.
Ainsi fut accomplie la prédiction d'I-
sa'ie, faite la première année du règne
d'Achaz : Encore soixante-cinq ans,
et Ephraïm cessera d'être un peuple.
Effectivement, tous ceux qui furent
déportés prirent les mœurs et suivi-
rent les supf-rstitiOns des peuples par-
mi lesquels ils vécurent, se confondi-
rent avec eux, pçrdirent leur nom,
leur langage , tout , jusqu'au souvenir
de leur origiue, de sorte qu'il ne resta
plus de trace des dix tribus dans l'his-
toire ; car les Samaritains d'aujourd'hui
descendent des colonies étrangères
qu'Assaharaddon avait envoyées à Sa-
maiie. Après cette première expédi-
tion , ses généraux envahirent le royau-
me de Juda, délirent le roi Manassé,
le réduisirent en captivité avec son
peuple , et il le remplaça par des colo-
nies, comme il avait fait dans le rovau-
me d'Israël. Ces colonies étant tour-
mentées par des lions, parce qu'elles
n'adoraient point le vrai Dieu , il y en-
voya un prètieisraélite, afin qu'il leur
enseignât le culte du dieu d'Israël ;
mais ces peuplades associèrent le culte
du Seigneur à celui de leurs divinités, et
ce culte, ainsi corrompu, fut la source
de l'aversion des juif» pour les Sama-
ritains. Assaharaddon mourut l'an (JG8
av. J.-C. , après avoir régné avec gloire
treize ans sur les Babvloniens et trente-
neuf ans sur les Assviiens. Ce prince
a donné lieu à divers systèmes parmi
les savants. Los uns veulent qu'il soit
le même qu'Asserad du livre de Ju-
dith; les autres le prennent pour As-
tyages , bisaïeul maternel de Cyrus.
Ceux-ci le confondent avec Artaxercès
Ochus } ceux-là avec Artaxercès Mné-
ASS
mon ; quelques - uns avec Darius le !
Mède. T — d.
ASSAS (Nicolas, chevalier d' )
capitaine au service de France, dans
le régiment d'AuA'ergne, naquit au
Vigan, et périt victime d'un dévoue-
ment patriotique digne des Romains,
dans la nuit du i5au 1 6 octobre i-jOo,
à Clostercamp, jirès de Gueldre , où il
commandait une grand'-garde. Etant
allé au point du jour, reconnaître les
postes , il tomba sur une colonne
ennemie, qui s'avançait en silence
pour surprendre l'armée fiançaise.
Aussitôt, des grenadiers le saisissent,
et le menacent de l'égorger s'i' dit un
seul mot. H y allait du salut de l'ai mée
française, qui n'était point préparée à
cette attaque. D'Assas se recueille
un moment pour enfler sa voix , et
il crie : « A moi , Auvergne, voilà les
» ennemis. » Aussitôt, il tombe percé
de coups. Ce trait héroïque, long-
temps oublié, a été rapporté j>ar \ ol-
taire avec tous les éloges dont il est
digne ; et c'est la voix de cet historien
qui en a provoqué les tardives récom-
penses. D'Assas était célibataire; on
créa pour sa famille une pension de
looo livres, réversible à perpétuité
aux aînés de son nom. Supprimée
pendant la révolution, cette pension
a été rétablie depuis peu de tenijis ,
sur la demande de 31. Imbert de St.-
Paul, sous -préfet du Vigan.
V. S— L.
ASSEDI. r'qr. Asedy-Thoccy.
ASSELIN , bourgeois de Caen ,
Foj. Gun,LAUM£-LE-Co>QUERANÏ.
ÂSSELIlN (Gilles-Thomas), doc-
teur de Sorbonne , né à Vire , en i GHo.,
fit ses études à Paris, et mérita d'être
distingué par Thomas Corneille. Il se
montra le digne élève de l'auteur
(ï Ariane, en remportant le prix de
poésie à l'académie française , en 17 < .çj.
Peu de Itmps après, il publia un petit
ASS
poërae médiocre, sur la Religion. Ses
odes sir V existence de Dieu, le mé-
pris de la fortune , la foi et la paix
du cœur , toutes couronnées aux jeux
floraux , ont quelqîiefoi's la pompe et
la richesse du geure. La touchante
élégie que lui inspira la mort de Tho-
m.is Corneill'% fut également couron-
ne';" aux jeux floraux. Nommé ensuite
principal du collège d'Harcourt , Asse-
lin consacra tous ses moments à ses
nombreux élèves, donna une nouvelle
activité aux études, et fît des réformes
utiles 11 mourut à Issy, oîi il s'était
retiré, le 1 1 octobre ^^fi-j. ises OEu-
vres poétiques, suivies d'un Discours
pour disposer les dci.stps à l'examen
de la vérité, ont été impriiners à l'aris,
en i7'25, i vol. in-8'. L. P> — e.
ASSELYN (Jean), peintre, né à
Anvers en 1610, mort à Amsterdam
en 1660, fut élève d'isa'ie Van deu
Velde, peintre de batailles. Il fît un
voyage à Rome, et y étudia long-temps
les antiquités et les grands maîtres :
la manière de Bamboche fut celle qu'il
suivit de préférence. A son retour , il
séjourna h Lyon, où ses ouvrages fii-
rent recherchés ; plusieurs d'entre
eux retracent des vues prises aux en-
virons de cette ville : il y épousa la
fille d'un de ses compatriotes, et revint
avec elle à Amsterdam. 11 contribua,
par son exemple, à réformer le goût
des artistes de son pays , et à leur
inspirer une manière plus franche et
plus conforme à la nature. Il a repré-
senté quelquefois des sujets d'histoire
et des batailles; mais le plus souvint,
des paysa es ornés de monuments,
de ruines , et animés par de très-bon-
nes figures. Son coloris a de l'éc'at et
de la chaleur; sa touche est fine, et
ses compositions offrent beaucoup de
goût dans le choix des sites et des
ornements. Le Musée Napoléon pos-
sède de ce maître, un paysage avec
ASS 585
bestiaux traversant le Tibre à gué, et
une marine par Un temps d'orage,
dont l'effet est bien senti, et la couleur
très-vi'aie. V — t.
ASSEMANI (Joseph-Simon), Sy-
rien maronite, archevêque de Tyr,
préfet de la bibliothèque du Vatican ,
etc. , naquit en 1 687 , et mourut le 1 4
janvier 1 ^(jS. Il était très-versé dans
la connaissance des langues anciennes
et de celles de l'Orient. Il a publié plu-
sieurs ouvrages, qui le placent parmi
les plus célèbres orientaUstes de l'Eu-
l'ope : I. Bibliotheca orientalis Cle-
mentino-P^aticana recensens manus-
criplos codices , sjriacos, arabicas,
persicos, turcicos, hebraïcus , sama-
ritanos , armenicos ceihiopicos ,
^rœcos , œg;}ptios, ibericos et ma-
labaricos , etc., jussu et munificen-
tia Clem. XI, Romae, 1719- i7'28.
Ce savant et bel ouvrage , sorti des
presses de la Propagande, est le plus
beau titre de la gloire d'Assemaui.
II. S. Ephrœm, sjri, opéra omnia
qiiœ extant, grœcè , srriacè et lati-
ne, in .sex tomos distribiUa, admnniis-
criptos codices T^alicanos aliosque
cnsligtita, mullis aiicta, n()s>a inler-
pretatione , prœfationibus , notis , va-
riantibus lectionibus , illustrata, Ro-
mas, 1 75'i- 1 754, 6 vol. in-fol.; III.
VeSanctis Ferentinis in Tuscid Bo-
nifacio ac Bedeinpto episcopis : de-
que preshytero et martyre Eutychio.
de quihus , S. Gregorius , papa , in
libro dialogorum scribit, disserta-
tio, Romae, 1743; IV. Italicœ his-
toriée scriptores ex Bihl. Fatic, etc. ,
collegit et prœfat. notisque illuslra-
vit^ J. S. Assemaniis, Romae, 1 tS 1 -
1755, 4 vol. in-4°.; V. Kalendaria
ecclesiœ universce, etc., Rornse ,1755-
1757, 6vol. in-4"- J — N.
A.SSEMANI ( Etienne -Évode ) ,
archevêque d'Apamée, neveu du pré-
cédent , et son successeur dans k
586 ASS
cbarge de préfet de la bibUotLcque
du Vatican , s'est aussi rendu célèbre
par ses connaissances dans les lan-
gues orientales et les ouvraj^es pleins
d'érudition qu'il a donnes : I. Biblio'
ihecœ Mediceo-Laurentianœ el Pa-
hilince codicum nianuscr. orienta-
lium calaiogus, etc., Florentiœ, i 74^,
3 vol. in-ful. , avec des notes de Go-
ri; II. v4cta sanclorum marfyrum
Orientalium et Occidentalium , in
duas partes distribida, uli etiam
acta Sim. styliLe è Bihl. Apost.
Italie, inlucemprutraxit, Chaldai-
cum textiim recensuit , notis vocali-
biis anhnavit, latine vertit, admo-
nit. perpetuisque annot. illiistraiùt
Steph. E. Assemani, Rom?e, 174^?
2 vol. in-fol. 11 a publié , conjointe-
ment avec son oncle : Bihl. Apost.
Vatic. codic. manuscr. Catol. , Ro-
mœ, 175O-1769. Cet ouvrage devait
former quatre volumes , et il avait été
déjà imprimé plusieurs feuilles du
4*'. volume , lorsque le feu prit au cabi-
net d'Assemani , el consuiiia les maté-
riaux qui devaientlecomposer. J — N.
ASSRR, célèbre docteur juif , au-
teur du Thalmiid de Bahjlone, né
dans cette ville, en 553, fut fait pré-
sident do l'académie de Sora, sur
l'Euphrate , à l'âge de quatorze ans.
Les rabbins disent qu'il possédait la
loi, la dévotion , l'Iiunnlite, la magni-
ficence, quatre choses qu'aucun autre
docteur n'a réunies. Asser imap,ina une
nouvel le nic'thode d'enseigner. Au
mois de février, il dictait un traite à
^es écoliers , qu'ils allaient étudier
rhez eux pendant six mois, et dont
ils revenaient lui rendre compte au
mois d'août. Alors il les faisait dispu-
ter en sa présence, bv.til leurs doutes
jiar les décisions de ses ])rédccesseurs,
chargeait les chefs de chaque classe,
appelés les princes des couronnes, de
leur expliquer plus aiuplcmeut ce que
ASS
le maître avait dit sommairement. On
distribuait des couronnes à ceux qui
s'étaient le plus distingués; puis, As-
ser dictait un autre traité qu'on devait
étudier le semestre suivant. Le nom- J
bre de ses écoliers était de u,4oo. f
C'est du recueil des matières ainsi dis-
cutées , qu'après avoir enseigné pen-
dant soixante ans , il composa le Thal-
miid de Bahylone; mais ce docteur
étant mort, en 4^7 , il n'eut pas le
temps de l'achever ; ce furent ses en-
fants et ses disciples qui y mirent la
dernière main. Les juifs le prélèrent
à celui de Jérusalem. C'est une vaste
compilation qui renferme les tradi-
tions , le droit canon des juifs, et
toutes les questions qui regardent la
loi. La Misne de Juda le saint , en
forme le texte , et la Gemmar en est
le commentaire. On y a fait de temps
en temps des additions. Il a été im-
primé à Amsterdam , en i744) *'^^*^
tous ses commentaires , \i vol. iu-
ful. T— D.
A.SSER ( AssERius Menevensis),
prélat anglais du g"", siècle, né dans
le pays de Galles. Après avoir passé
quelque temps chez les bénédictins
de St.-David, il vint à la cour du roi
Alfred , qui lui confia l'éducation de
son fils , et le nomma évèque de Shir-
])urn. On dit que c'est d'après ses con-
seils que ce monarque fonda l'univer-
sité d'Oxford. Asser est auteur d'une
Vie du roi Alfred , jusqu'à sa quarante-
cinquième année , publiée à Londres ,
en 1574, Pt réimprimée l'année sui-
vante à Zurich. La meilleure édition
est celle 1 79.2 , Oxford , in-/|°. On lui
attribue un autre ouvrage , publié par
le docteur Gale , à Oxford, en 165)1 >
sous le titie A\4nnales. Asser a la
réputation d'un his'orien exact et véri-
dique. 11 mourut vers l'an 885 , sui-
vant quelques biographes , et en 90Q,
suivant d'autres. X — s.
ASS
ASSERETO, amiral génois {Toy.
Alphonse V ).
ASSEZAN (Pader d'), avocat à
Toulouse, sa patrie, elait fils de Hi-
laire Pader, peintre assez estime, et
poète. D'Assezan ayant rcmportff trois
ibis le prix des jeux floraux, crut de-
voir chausser le cothurne. 11 vmt à
Paris , se lia d'amitié avec l'abbe'
Boyer , auquel il communiqua son
Agamemnon. Ce dernier lui donna
des conseils, peut-être même fit-il
quelques corrections à cctic pièce, qui
fut représentée en iGSo, imprimée la
même année, in-i'i , et dont il préten-
dit ensuite être l'auteur. La pièce eut
du succès, et d'Assezan retourna à
Toulouse, piqué, dit-on, des préten-
tions de l'abbé Boyer, qui, suivant
quelques écrivains, ne fit ses réclama-
tions qu'après le départ de l'auteur.
L'abbé Boyer disait et imprima, dans
la préface de son ArLaxerce , qu'il
avait prié d'Assezan de lui prêter son
nom. En 1G8O, d'Assezan revint à
Paris, et y fit jouer Aniigone, qui eut
quelques représentations. Cette pièce
a été imprimée, et, dans la préface,
l'auteur détruit les prétentions de
Boyer sur Agamemnon. D'Assezan,
revenu à Toulouse, y mourut vci's
i6c)G. A. B — T.
ÀSSHETON (Guillaume), théo-
loden anglican, né en i64i,àMid-
dleîon, dans le comté de Lancastre,
réunissait à quelques talents et à des
vertus réelles, une teinte de fanatisn»e
et de superstition. On lui a reproché
d'avoir écrit en faveur du roi Guillau-
me, après avoir montré un zèle ardent
pour la cause de Jacques II. Ce qui lui
fait le plus d'honneur, c'est un projet
de secours de bienfaisance , (pt'il pro-
posa en faveur des veuves des ecclé-
siastiques, et les soins qu'il scdoiuia
pour le faire réussir. Il est auleurd'iui
grand nombre d'ouvrages, dont les
ASS 587
principaux sont : I. La Tolérance
désapprouvée et condamnée , etc. ,
Oxford, iG-ijo; II. ï Apologie rojale
(en faveur de .Jacques II), Londres,
i685 ; III. Apologie de leurs majes-
tés actuelles (le roi Guillaume et la
reine Marie), Londres, iG88;IV. la,
possibUité des apparitions. Les au-
tres ouvrages de ce théologien se com-
posent de quelques traités de piété, tt
de beaucoup d'écrits de controverse,
dirigés contre les papistes et les dissi-
dents. Il mourut à Beckenham, eu
1 7 1 1 , dans la 70". année de son âge.
X— s.
ASSOUCY ou DASSOUCY ( Chau-
les Ce Y PEAU d'), né à Paris, vers
Tau ifio4, eut une jeunesse très-de'-
sordonnée. A l'âge de neuf ans^ il quitta
la maison de son père, qui était avo-
cat au parlement , et se rendit à Calais,
où il se donna pour un fils de César
Nostradamus, et guérit par stratagè-
me, un malade d'imagination. Le peu-
ple ayant voulu le jeter à la mcr^
comme sorcier, il se réfugia en Angle-
terre. Comme il jouait du luth et faisait
des chansons, à son retour en France,
M""". Royale, fille de Henri IV, et
femme du duc de Savoie, le prit à son
service pour qu'il la divertît. Ensuite,
il exerça la même charge auprès de
Louis XI II et de Louis XIV, enfant,
à qui il lisait ses vers burlesques.
Étant retourné à la cour de Turin, il
y essuya quelques disgrâces, et la
quitta de nouveau. 11 se mit à eirer eu
Italie et en France, escorte de deux
petits pages de musique, qui exécu-
taient ses chansons, et partout il eut
de fâcheuses aventui'cs. Il fut empri-
sonné à Moulpellicr, pour avoir mal
parlé de plusieurs damés considéra-
bles de celte ville, t'n nommé Loret,
auteur de la Gazette burlesque ,
écrivit qu'on l'y avait condamné au
feu, pour un criir.c qui est eu abomi-
58S ASS
nation parmi les femmes. Cbapelle et
Bacliaumont fireut malignement usage
de cette nouvelle , dans la relation de
leur voyage. D'Assoucy s'en vengea ,
en imputant à Chapelle le mêmecrime.
A Rome, il fuî jeté dans les prisons du
Saint-Ofîlce, pour avoir cent des cho-
ses très-raordanlcs contre des prélats
en crc'dit, et, pendant sa captivité, il
composa un livre de Pensées sur la
Divinité. Le pape lui rendit la liberté' ,
et lui donna sa bénédiction , des mé-
dailles et des indulgences. Étant revenu
à Paris, il fut mis à la Bastille, et de
là au Chàtelet, avec ses deux petits
pages , qui donnaient toujours lieu à
d'étranges soupçons. Cette nouvelle
détention dura six nioisj quatre ans
après, il mourut, vers 1Ô79, âgé
d'environ soixante-quatorze ans. Ses
ouvrages sont : I. Y Ovide en belle
humeur; II. le Ravissement de Pro-
serpine , traduit de Claudicn, en vers
burlesques ; III. un Recueil de poésies
et lettres , contenant diverses pièces
héroïques , satiriques et burlesques ;
im autre de rimes redoublées, sur
difierents sujets; IV. ses Aventures
d'Italie, sa Prison de Paris, et ses
Pensées dans le Saint- Office de
Rome. Boileau ayant dit de lui, dans
Y Art poétique :
El jusqu'à d'Assoucy, tout trouva des lecteurs,
il fut très-sensible à ce trait de satire,
et s'écria douloureusement : « qu'on
voulait faire déchoir de ses honneurs,
Charles d'Assoucy, empereur du bur-
lesque, premier du nom. » Il se donne
pour le maître de Chapelle, et l'ami
de Molière, qui, s'il faut l'en croire,
n'a pas dédaigné de mettre la main à
l'une de ses chansons. Il est fort infé-
rieur à Scarron, daus un genre misé-
rable, où la supériorité même est hou-
leuse. A — G — R.
ASSUÉRUS , roi de Perse , cé-
lèbre daus rÉcriture-Saintc par son
ASS
mariage avec Esther , et par le sup-
plice d'Aman. Les savants sont peu
d'accord sur celui des rois de Perse
auquel ce nom appartient. Les uns
pensent que c'est à Darius, fils d'Hys-
tapes ; les autres, que c'est à Xercès ,
et d'auties enfin , que c'est à Artaxer-
ccs Mnénion. L'opinion commune est
pour Artaxercès-Longuc-Main. Cette
opinion est fondée sur la version des
Septante du Livre d' Esther , sur les
additions de cette version au même
livre , sur l'historien Joscphe , et sur
les diverses circonstances de la vie
d'Assuérus , rapportées dans ces an-
ciens monuments , qui ne peuvent
convenir qu'à Artaxerces - Longue -
Main. T — d.
ASSUMPÇ\0 (D. JoACHiM de),
chanoine régulier de la congrégation
de Ste.-Croix, membre de l'académie
royale des sciences de Lisbonne, et un
des meilleurs physiciens du Portugal,
est mort à l'âge de quarante ans, en
\ -jqS , laissant imparfaits des travaux
qui lui auraient procuré une grande ré-
putation en Europe, s'il avait eu le
temps de les terminer. 11 reste de lui,
des Mémoires sur des phénomènes
électriques, et la description des con-
ducteurs et de l'armure métaUiquc,
moyennant laquelle on a préservé des
rflets de la foudre le château royal de
Mafra , qui, à cause de sa situation et
du genre de son architecture, était
expose à de fréquents accidents. C'est
d'Assumpçao qui avait imaginé, et qui
fit exécuter ce travail, le plus remar-
quable dans ce genre. Il a aussi pu-
blié des observations météorologiques
d'une grande exactitude, et il a été
peut-être le premier (jui ait cherché à
lier à cette sorte d'observations, les
mouvements de la population. Sa
mort , causée par un excès de travail ,
fut vivement rrgieltéo, à cause des
grandes cspéiauces qu'il dounait, et
AST
de l'améiilte de son caractère. Ses
connaissances étaient très - étendues
dans d'autres sciences, comme en phy-
sique; mais il avait un zèle extraordi-
naire pour propager le goût de celle-
ci, et il était parvenu à l'inspirer aux
princes de la maison royale , et même
aux courtisans. C — S — a.
ASTELL ( Marie ) , savante an-
glaise , née à Newcastle , sur la Tyne ,
en 1668, était fille d'un négociant de
cette ville. Un ecclésiastique, son pa-
rent, se chargea de son éducation. Ins-
truite dans la philosophie , les mathé-
matiques , la logique J et dans les lan-
gues grecque, latine et française , elle
vint à Londres à l'âge de vingt ans.
Elle y publia divers ouvrages, dont les
principaux sont : I, Lettres concer-
nantV amour divin, i6g.5, in-8\ ; II.
Essai de Défense du Sexe féminin,
1696; III. Proposition sérieuse,
adressée aux femmes , contenant
une méthode pour le perfectionne-
ment de leur esprit, vn-i'i , 1697 >
IV. Réflexions sur le Mariage,i'j 00
et 1 705 , in-8".; V. la Religion chré-
tienne professée par une fille de
r Eglise d^ Angleterre , 1 706 , in- 8" ;
VI. six Essais familiers sur le ma-
riage , les contrariétés en amour et
en amitié , écrits par une dame ,
1706, in- 12. Marie Astell mourut ,
en 1751 , après avoir souffert l'opé-
ration cruelle du cancer au sein. X — s.
ASTEMIO ( Laurent). F. Aeste-
MIUS.
ASTÈRE, ou ASTÉRIUS (S.),
métropolitain d'Amasée dans le Pont ,
s'appliqua, dans sa jeunesse, à l'é-
tude des belles-lettres, de l'éloquence,
du droit, et parut au barreau avec
distinction. Ayant ensuite renoncé à
tous les avantages que ses talents lui
promettaient dans cette profession ,
il entra dans l'état ecclésiastique , et
succéda , vers la fia d« 4^ siècle , k
AST 589
Eulalius, sur le siège d'Amasée. Il sn
montra, dans cette place, très-zélé
pour la pureté de la foi , très-attentif
à instruire les peuples confiés à ses
soins, et mourut, dans un âge avancé,
peu après le commencement du 5''.
siècle. Photius le qualifie de bienheu-
reux. Adrien II parle de l'estime qu'on
avait, dans tout l'Orient, pour sa per-
sonne et ses écrits , et le septième con-
cile œcuménique le considère comme
un des pères de la tradition ecclésias-
tique , ce qui le fait compter au nombre
des docteurs de l'Eglise. On trouve ,
dans Y Auctuarium du P. Combefis ,
quatorze sermons, qui sont incontes-
tablement de S. Astère. Cotelier eu a
fait imprimer sept autres sous son
nom , qui paraissent appartenir à un
Astère différent de l'archevêque d'A-
masée. Il en avait composé un grand
nombre qui ne nous sont point par-
venus. Photius nous a seulement con-
servé les extraits de six. Ceux qui nous
restent ont été traduits en français par
l'abbé de Bellegarde, Paris, iGqi ,
in-8°. M. de Maucroix a traduit V Ho-
mélie sur le martyre de Sle. Eu-
phémie. Malgré quelques termes ex-
traordinaires, et cette éloquence asia-
tique qui approche de la diffusion ,
on y remarque de belles pensées, des
réfiexions justes et solides, des tours
naturels, des expressions élégantes,
de la vivacité, de la variété, de l'agré-
ment dans les descriptions. La doc-
trine en est partout exacte et la morale
pure : dans son Sermon sur S. Pierre
et S. Paul, il établit formellement la
primauté de jurisdiction du successeur
des saints apôtres en Orient et ea
Occident. Dans le Panégyrique de
S. Phocas, martyr, il s'exprime,
comme le fait encore aujourd'hui l'É-
glise catholique , sur l'invocation des
saints , sur le culte des reliques , et
sur les miracles, — Deux Asténus
5go A S T
sont morts martyrs dans les pre-
miers siècles du christianisme ; et un
autre saint du même nom fut évêque
de Pe'tra , en Arabie , dans le 4' • siècle.
Après avoir partage les erreurs d'A-
rius, il rentra dans le sein de l'Église.
S. Athanase a fait l'éloge de ce prélat
dans sa Lettre aux solilnires. Le
même saint père parle aussi d'un rhé-
teur de ce nom, qu'il appelle ïai^ocat
des ariens. ï — d.
ASÏESANO ( A^-ToiNE d' ) , né en
i4i2, à Yillanuova, ancien château
dans le territoire d'Asti , en Piémont ,
écrivit en vers élégiaqucs Yffistoire
d'Asti, sa patrie; elle est divisée en
six livres. Il annonce, au commence-
ment, qu'il voulait la conduire jusqu'au
temps où il vivait, c'est-à-dire , au
milieu du i5''. siècle: mais ce qui
nous en reste , et qui a été publié
par Muratori , Scrip. Benmi Ital. ,
vol. XIV, ne va que jusqu'à l'an
1542. Il emploie le i". livre et une
partie du -x^. , à parler de lui-même et
des vicissitudes de sa vie , et ce récit
est fait avec un air de sincérité qui
donne du plaisir à le lire , quoique le
fond en soit de peu d'intérêt. Cette
Histoire est , en grande partie, com-
posée d'après les anciennes chroniques
d'Oger Allieri et de Guill. Ventura,
insérées , par Muratori , dans le i T".
vol. du même recueil. On doit re-
gretter de n'avoir poiut la partie où
i'auleur traitait des événements dont
il fut le témoin , soit qu'il ne l'ait pas
composée , soit qu'elle se soit perdue.
G - É.
ASTLE (Thomas), antiquaire
anglais du i8^ siècle, mort en i8o3,
est auteur de divers écrits concer-
nant l'histoire et les antiquités de son
pays, imprimés dans les tomes IV,
VII, X, Xll et XIII de XArchœo-
logia Brilarmica [ Mémoires de la
■Société des .Antiquaires de LQodi-es }.
AST
Il a publié séparément : I. le Testa-
ment du roi Henri VIII , i''75 ,
in-4"r j II' l Origine et les Progrès
de VEcrilure Iderogljphique et élé-
mentaire , avec des planches gra-
vées, suivie d'un Précis sur l'ori-
gine et les progrès de la Peinture ,
i'^84, in- 4"- Une nouvelle édition
de cet ouvrage a paru en i8o3.
X— s.
ASTOLPHE, roi Lombard, troi-
sième fils de Penuone, duc de Frioul,
succéda, en 749 ? àRachls son frère,
sur le trône des Lombards. Ses pré-
décesseurs avaient eu constamment à
lutter contre les intrigues et la perfidie
des exarques de Ravenne et des Grecs,
qui occupaient encore une partie de
l'Italie. Astolphe résolut de les en
chasser. Il enleva , en 75 1 , Ravenne
à Eutichius, le dernier des exarques ;
il conquit également la Pentapole , il
soumit ristrie , et il porta ensuite ses
armes dans le duché de Rome; mais le
pape Etienne II , qui voulait conser-
ver au St. - Siège la haute influence
qu'il exerçait dans Rome , sous l'au-
torité des empereurs de Constantino-
ple , s'adressa, en 755, à Pépin ,
qu'un pape avait , l'année précédente ,
reconnu pour roi de France , au pré-
judice de Chilpéric. Etienne se rendit
lui-même à Paris, auprès de Pépin,
qui saisit avec empressement une oc-
casion de plaire au pape, et d'enri-
chir en même temps ses soldats des
dépouilles de l'Italie. Il y conduisit une
armée en 754; il mit le siège devant
Pavie, et il contraignit Astolphe à pro-
mettre au pape la restitution de l'exar-
chat à l'empereur. Les rois Lombards,
sans doute à cause de la grande indépen-
dance de leurs feudataires , ne pou-
vaient jamais rassembler leurs armées
à temps pour résister à une invasion;
mais , après la retraite du roi français ,
Astolphe trouva ses sujets uou moius
AST
lionlcux mie lui de la paix qu'il avait
été contnùnt à signer; il recommença
donc, à leur prière, les hostilités, et
il vint, eu 705, mettre le sie^j^je de-
vant Rome. Etienne, de son côte, eut
recoursunesecondefois à la piofcction
de Pépin ; il ne se contenta pas d'c'ciire
lui - même au roi et à la nation , il fit
pantître une lettre de l'apôtre S.
Pierre, qui invitait les Français à dé-
fendre l'Église, en menaçant leur tié-
deur des peines ëterueiles. Pépin ren-
tra en eft'ct en Italie, sans qu'aucune
armée lui en disputât le chemin; il
assiégea une seconde fois Astolphe
dans Pdvic, et il le contraignit à faire
présent à S. Pierre de toutes les villes
de l'exarchat et de la pentapole. Jus-
qu'alors il n'avait été question que de
les recouvrer pour l'empire grec , et
Consiautin Copronime réclama vai-
nement à cette nouvelle , contre la do-
nation de provinces qui n'apparte-
naient point encore au donateur. Les
clefs de toutes les villes enlevées aux
Grecs furent déposées sur l'autel de
S. Pierre , et leui s otages fureiiJ con-
duits à Rome. Il ne paraît pas cepen-
dant que la souveraineté des papes
ait été, dans cette occasion, Lien éta-
blie dans l'exarchat. Ils recommen-
cèrent bientôt à se plaindre de ce que
les villes qui leur avaient été promises
ne leur étaient point livrées , et ils
formèrent contre Didier , successeur
d' Astolphe , les mêmes plaintes qu'ils
avaient formées contre lui. Astolphe,
renversé à la chasse par un sanglier,
en "JJ^, mourut de ses blessures,
trois jours après sa chute, sans laisser
d'entants. S. S—i.
ASTORGA. Fox. Alva.
ASTGRI ( Jean-Antoine ) , né à
Venise, le i G janvier 1672, l'un des
plus savants littérateurs du commen-
cement du 1 8*". siècle , s'adonna île
bonne heure à l'étude dç b langue
AST Sgt
latine, des belles-lettres, du dessin et
de la musique. Après avoir fait soa
cours de philosophie , il étudia la
langue grecque, dans laquelle il fit les
plus grands progrès. Ayant perdu ses
parents, en 1698, il entra dans les
ordres ; son mérite lui attacha des
protecteurs , qui luioffrirent des ])laces
que l'amour des lettres lui fît refuser;
il fut me mjjre, et même secrctaii-e de
l'académie des Animosi de Venise ;
il fut aussi de celle des Arcades de
Rome , sous le nom de Demade
Olimpico. Il était en commerce de
lettres avec un grand nombre de sa-
vants , tant italiens qu'étrangers , et
compta , au nombre de ses amis ,
Alexandre Rurgos, évêque de Catania,
Dom, Guglielmini, Mich. Ange Far-
della , l'abbé Dom. Lazzarini , Apos-
tolo Zeno, le marquis Scipion MaiTei,
J. Poleni , J. B. Morgagni , c\^. , etc.
Astori fut d'abord maître de chceur et
de cérémonie , ensuite .chanoine de
l'église ducale de St.-Marc ;il mourut
le ^5 juin 1 745 > e' fi't enterre dans
l'église des pères de l'Oratoire. On a
de lui I. Commentariolum in anti-
quum Aicmanis poëtce laconis mo-
numentum , \ enise , 1697 , in-fol.
Cet ouvrage , dédié par l'auteur au
célèbre Magliabecchi , se trouve encore
dans le tome II de la Galleria di
Minejva, Venise , 1697 ' '"'f^l-? et
fut de nouveau publié par Sailengre ,
tom. II du IVoi'us Thésaurus anti-
quitatum Bomanarum , La Haye,
1718, iu-fol. II. De Deo Brotonle
Epistola , dans le tome II de la Gal-
leria diMinerva. Cette dissoi tation fui
faite à i'occasiou d'un buste de marbre
qui portait cette inscription : Bono Deo
JJrotonti , qu'on doit lire Brontonli ,
c'esl-à-dii'e, Jovi Tonanli, Deo Do-
mestico sacniin. Cette dissertation a
aussi été reimprimée d;uis Salleugi* ,
tow, Jl du rçcueil ci-dessui. lU, Plu-
r^ç)i A s T
sieurslettres en forme de disserrations,
sur des médailles , des stafurines ,
telles que sur le dieu Télesphore,
sur les dieux Cabires , etc. , insérées
dausdiversescoileclions;ÏV.7l/fl7jmi,
iragœdia sacra musice recitanda^
etc. , Venise, 171"), sans nom d'im-
]>rinieur ; V. Supplices , trugœdia
sncra , Venise , j 7 1 3 , sans nom
d'imprimeur ; VI. enfin , plusieurs
cpu.scules grecs, latins et italiens, en
prose, et même en vers, épars dans
divers recueils; on croit aussi qu'il
avait traduit eu italien le Traité du
Sublime de Longin ; cette traduction
était même annoncée dans Le tom. !"■.
di; la Galleria di Minerva , mais elle
n'a jamais paru. G — e.
ASTRAMPSYCHUS, auteur d'un
petit ouvrage en vers iambiques sur
l'explication des songes , qu'on trouve
en grec et en latin à la suite d'Arté-
midore, dans l'édition donnée par Ri-
gault. 11 axdM aussi écrit, suivant
Suidas , un Traité sur les maladies
des dues. L'époque à laquelle il a
vécu nous est absolument inconnue ;
on voit seulement par sou style qu'il
était du Bas- Empire. C — R.
ASTRONOME (l') est le nom
sous lequel on désigne un écrivain
du g*", siècle qui était savant en as-
tronomie , et qui a laissé une Fie de
Louis-le-Débonnaire. Cet ouvrage,
très-souvent imprimé, et qu'on trouve
dans les Recueils de Pithou, de Reu-
ber , de Freher , de Du Chesne , de
dom Bouquet, a été traduit en fran-
çais par le président Cousin , dans le
tome l*""". de son Histoire de Vempire
d'Occident. « Cette Fie de Louis-
5) le-Débonnaire est, dit l'abbé Le
i> Gendre, ce que nous avons de mcil-
» leur sur le règne de ce prince : ses
» mœurs, ses inclinations et ses dif-
)) férentes aventures y sont décrites
» fort au long , surtout depuis qu'il
AST
» fut empereur. » Kile commence en
778, à la naissance de Louis, et vient
jusqu'en ^\o , époqi;e de sa mort.
L'auteur dit, dan^ sa préface , que ce
qu'il dit de Louis-!e-Déb<>nnaire, avant
son avènement au trône, il l'a ap-
pris d'Ademar, religieux élevé avec
ce prince, et qu'il a su le reste par
lui-même, étant à la cour, et l'avant
vu de ses propres yeux. A. B — t.
ASTRUC(Jean), médecin distin-
gué du 1 8 . siècle , naquit à Sauves ,
dans le bas Languedoc, le 19 mars
i684- Il fit ses études à MoLtpellier, et
manifesta de bonne beiu-e cette force
de mémoire , et ce degré de rectitude
dans l'esprit qui , appliqué aux don-
nées certaines que présentent les livres,
fait arriver à de grands succès d'éru-
dition. C'est aussi à Montpellier qu'il
étudia la médecine, et dans la faculté
de cette ville qu'il fut reçu au bacca-
lauréat en i 70 2,etaudoctorateni7o5.
Le système mécanique de Boërliaave
s'établissait alors peu à peu sur les
théories cliimiques de Silvius de le
Boë, de Graaf et de Willis. Astruc,
que la nature avait doué d'un esprit
droit , mais non assez actif pour pres-
sentir de lui-même aucune liante vé-
rité, suivit cette fausse impulsion, et
dans tout le cours de sa longue et la-
borieuse carrière , s'il se montra pro-
fond et habile dans la science des li-
vres , il resta fort en arrière dans la
voie rigoureuse de l'obsei-vation et de
l'expérience ; en un mot , sa méde-
cine spéculative et pratique , au lieu
d'être hippocratique , staaiienne , vi-
tale, fut entièrement mécanique et ma-
thématique. Cependant , peu d'hom-
mes ont obtenu parmi leurs contempo-
rains une aussi grande réputation ;
Astruc, sous le rapport théorique ,
la dut d'abord à son éloquence natu-
relle, et à un esprit de méthode qui ,
lui faisant diviser les sujets qu'il vou-
AST
lait développer , le faisait marcher
d'iiiie division à l'autre par des défi-
nitions rigoureuses , ce t(ui le rendait
un professeur séduisant, en nième
temps que sou zèle pour l'ctude et sa
prodigieuse mémoire en faisaient un
homme érudit ; et , sous le rapport
pratique , à un esprit de réserve et de
circonspection qui prescrit le plus sou-
vent au médecin , dans les maladies ,
une sage expectation , par laquelle il
remplace, tant bien que mal, cette pré-
cieuse, mais rare quaiité du tact médi-
cal. Astruc n'avait , dans la théorie,
aucune de ces vues grandes qui pénè-
trent jusqu'aux bases profondes d'une
philosophie de la médecine, n' dans
la pratique ce coup d'œil rapide et sûr
qui juge de suite et sans risque de
la moindre erreur, les mouvements
de la nature dans les maladies. Cela,
en effet; ne se retrouve dans aucun
des nombreux écrits qu'il a composés.
D(îs 170-^, il publia une Dissertation
De mollis fermenlativi causa, Moiit-
pellier, in- 1 'i , sur l'effervescence, qu'il
expliquait par un fluide subtil, selon la
philosophie cartésirnne, théorie fautive
coinnie ou le voit, mais dans l'exposition
de laquelle onreconnaîîdéjà ce mérite
particulier à l'auteur, de séduire ses
lecteurs par une marche tellement mé-
thodiijue , qu'elle fait croire à l'évi-
dence des résultats, comme à la sévé-
rité des raisonnements. L'illustreVieus-
sens la jugea digne d'une criiique pu-
Llique, à laquelle répondit , sinon vic-
torieusement , au moins avec mo-
destie, notre jeune auteur. De i^od
à 1710, Astruc se livra à des études
solitaires, passant en revue tout le ma-
tériel de l'art ; cependant , il com-
mença à y faire une application des
i mathématiques , apphcation plus spé-
cieuse que solide , et dans laquelle il
suivait l'exemple de ses maîtres Bo-
fclli et Belliai ^ il imprima sculcmeut
n.
AST 595
deux Mémoires, parmi ceux de l'aca-
démie des sciences de ^ïonlpellier ,
1708, un sur les Pétrifications de
Boutonnet , petit village près de Mont-
pellier, et un intitulé : Conjectures
sur le redressement des plantes in-
clinées à V horizon. Il commença aussi
alors la carrière de l'enseignement,
et, pendant les années 1707, 1708 et
1709, occupa la chaire de Chirac,
appelé à l'armée. En 1710, il publia
une Dissertation physico- mathémati-
que sur le mouvement musculaire ,
Dissertatio ph^sica de motu mus-
culari, Montp., in-1'2, écrite dans
les faux principes de Borelli ; mais
d'une élégance de style dont l'école
de Montpellier présentait alors peu
d'exemples. Cette même année, il lut
encore à la société dt;s sciences de
Montpellier une Dissertation sur la
iligestion , Mémoire sur la cause de
la digestion des aliments , Montp. ,
in-4". , qui, plus tard, occupa beau-
coup le monde savant. En 171 i, il
obtmt, au concours, une chaire d'a-
uatomie dans l'université de Toulouse,
et c'est dans cette ville que parut son
Traité de la cause de la digestion^
Toulouse , 17 14? in-4". I^ y renverse
la doctrine des mécaniciens, à la tête
desquels était Pitcarn, qui établit ia
trituration comme l'essence de cette
fonction ; mais c'est pour y substituer
une hypothèse aussi gratuite, la fer-
mentation. Le médecin écossais réfuta
Astruc, et même, sous le nom d'un
de ses disciples, Thomas Boër, lui
prodigua des injures ; notre docteur
ne resta pas muet ; ses Epistolce
Joan. astruc , quibus responde-
tiir epistolari dissertalioni Thomce
Boeri de concoctione , Toulouse ,
I 7 1 5, parurent; et si, de nos jours, oa
trouve, avec raison, la cause d' Astruc
aussi mauvaise que celle de son anta-
goniste ; au moins peut-on le citer
58
59 i AST
comme un modèle de bienséance dans
les controverses. Cependant, la répu-
tation d'Astriic s'établissait, et, dès
1715, elle était telle, que Chirac, qui
occupait la première place de son
é!at, le prit pour juge, dans une dis-
cussion scientifique qui s'était élevée
entre lui et Vieussens, et lui pardonna
même de leur avoir démontré qu'ils
avaient également tort. En 17 16, il
eut enfin une chaire à Montpellier, et
établit alors sa réputation comme pro-
fesseur, fondée, comme nous l'avons
dit, sur cette qualité de son esprit qui
le portait sans cesse à diviser ses ma-
tières , et à parcourir ensuite chaque
division par des définitions précises.
Livré tout entier à l'enseignement,
il ne publia rien jusqu'enS7'25, si
ce n'est quelques thèses qu'il présida,
savoir : Dissertado de ani Jistiild,
Montpellier, 1718, in- i.î; Dis-
serlatio medica de hjdrophobid ,
1 720, et certaines autres sur la méta-
physique, science qu'il cultivait avec
.>ttrait , mais dans laquelle il ne porta,
])as plus que dans les autres, ce génie
d'observation qui y est peut-être en-
core plus nécessaire, et qui seul la fé-
conde ; Vissertatio de sensatione ,
Montpellier, 1720, in-8'.; Questio
medica de naturali et prœlematii-
rnli judicio exercitu , id. ; Disputalio
de phaiiiasid et imaginalione , IVIont-
jK'llior, 1 7'25 , iu-8 '. Ces divers écrits
do métaphysique devaient être fondus
dans un ouvrage général, où il expo-
sait une phvsique des sens, et qu'il
intitulait : De Animisùcd. La cour,
instruite alors des travaux, et du zèle
d'Astruc, le récompensa par une pen-
sion de 700 livres, et par l.i place
d'inspecteur des eaux minérales du
Languedoc. La peste, qui ravageait
alors iMarseille et le midi de la France ,
vint bientôt fournir à Astruc l'occasion
du reconuaitre ces bienfait:», et de scr-
AST
vir son pays et la science. Chirac, qui,
par sa place et son caractère impérieux,
dominait alors la médecine française,
soutenait la maladie non contagieuse,
et donnait ainsi, au gouvernement, le
conseil tacite d'abandonner toutes les
précautions de séquestration ; Astruc
ne craignit pas d'attaquer ouverte-
ment cette dangereuse et fausse asser-
tion, dans trois écrits : Dissertation
sur Vori^ijie des maladies épidémi-
qiifs , et particulièrement de la
peste , 1 7'ii , in-8'.; Dissertation sur
la peste de Provence, Montpellier,
1 7'2o-i 72'2 , in-8 '.; Dissertation sur
la contagion de la peste, où cette
qualité contagieuse est démontrée ,
Toulouse, 1724- «725, in-8". Astruc
remporta cette fois nue victoire com-
plète, et s'il la dut à la bonté de sa
cause, il la dut aussi à la manière
dont il la présenta. ÎMontpellier n'était
plus, dès-lors, un champ assez vaste
pour les travaux d'Astruc ; deux entre-
prises bibliographiques , et qui sont
ses plus beaux titres de gloire, son
ouvrage sur la maladie vénérienne, et
ses recherches sur la Faculté de Mont-
pellier, l'occupaient alors, et exigeaient
de nombreux matériaux ; il vint à
Paris. Cependant, il s'en éloigna quel-
que temps, attiré , en 1720, par
le roi de Pologne, en qualité de pre-
mier médecin; mais le séjour d'une
cour devait peu lui conveuir, et, dès
1730, il était rendu à ses livres et à
ses amis. C'est dans cette année que la
ville de Toulouse , où il avait professé,
le nomma, par reconnaissance, son
capitoul; le roi, son médecin consul-
tant; et la Faculté de Paris, son régent
et professeur au collège royal. Il ne
démentit pas l'opinion qu'on avait delui
comme professeur ; et , déplus , ayant
bientôt dans la capitale une pratique
assez étendue , quoique bien éloignée
de la doctrine hippocratique, elle fuf
AST
iieanrnoins assez lieurcuse, parce que,
iiatiiiellciiient circonspect, il se ren-
fermait le plus souvent dans nue sage
expectatioM, et laissait ainsi à la nature
le tempsJc marquer, pardes traits sail-
lants, ce que le génie et le tact médi-
cal saveni deviner, d'après les qualités
les plus fugitives. C'est alors qu'il com-
pléta sou grand travail sur la maladie
vénérienne , De morbis veaereis
Z/èrt 5<^j:, Parisiis,in-4''., 17 56, dont
la seconde édition, augmentée par
l'auteur, parut en 174^? "^ ^^'- iD"4"-j
ouvrage qui a souvent été reimprimé,
traduit eu plusieurs langues, dont il y
a une traduction française en 4 vol.
in-i2, 1 745-1 755-T 777 ,par Jauit,
avec des remarques de Louis , et
qui , sous le rapport de l'érudition
et des recherches historiques , est
encore le plus complet que l'on
ait sur ce sujet. De si grands tra-
.vaux n'empêchaient pas, cependant,
Astruc de s'occuper de sciences eu
quelque sorte accessoires : il imprima ,
eu 1737, in-4". , des Mémoires pour
servir à l'histoire naturelle du Lan-
guedoc, avec fig. et cart. en taille
douce, et, cbnsle mèmetemps, le procès
entre les cnirurg eus et les médecins,
qui s'agitait devant le parlement, lui
fournit le sujet de cinq Lettres, où il
soutient, avec autant d'esprit que de
raison , la cause de la médecine. Ce ser-
vice, rendu à la Facu! té, l'associa de cœur
à cette compagnie ; il voulut encore
lui appartenir de droit, il s'y fit agré-
ger en 1 745 , et subit, à cet effet , les
examens et thèses exigées ; sa thèse
avait pour titre : An sjmpatiaparlium
à certd nervornm positurd in interna
sensorio. Depuis Icrs, il concourut,
avec le plus grand zèle , aux travaux
de cette compagnie , fusant df s leçons
aux sages-ffnimes, visitant les pauvres
malades qui étaient sous sa hienveil-
lante survt^illance.ctc. ^^ousavon> dit
AST 5<j5
que la métaphysique était une de ses
occupations iavorites ; en 1755, elle
lui inspira ^es Conjectures sur les
Mémoires originaux , dont il paraît
que Moïse s'était servi pour compo-
ser le livre de la Genèse , Bruxelles
et Paris, in-ii ; et bientôt, pour dé-
truire les doutes que cet ouvrage avait
fait élever sur son orthodoxie . il pu-
blia encore deux Dissertations sur
\ immortalité , )l immatérialité et la
liberté de l'ame, 1755, in- 12. [/an-
née 1 756 vit encore paraître ses Dow
tes sur l'inoculation , Paris, in-12.
Enfin, l'usage qu'il avait de dicter ses
Leçons dans ses cours, et l'impression
prématurée qui en fut faite par plu-
sieurs élèves , et qui avait été accueil-
lie par l'Angleterre, nation rivale qui
fait rarement cet honneur aux écri-
vains des autres peuples , vint lui
commander de nouveaux travaux. Dès
1743, avait paru à Genève, par les
soins d'un nommé Lamotte , quin'in'*
diqua pas la source où il avait puisé
pour s'en attirer tout le mérite , un ou-
vrage intitulé : Tractatus therapeuti-
eus , qric du reste Astruc renie cons-
tamment ; et dans la même ville, en
1 7.55 , un autre ouvrage : Tractatus
pathoiogicus , in-8\, partant aussi
de la même origine , et qu'Astruc re-
connut pour être, à peu de chose près,
littéral. Dès-lors , notre laborieux écri-
vain se détermina à les publier lui-
même, et il donna successivement:
Traité des tumeurs et des ulcères y
2 vol. in-12, 1759, accompagné de
deux Lettres relatives à quelques ob-
jets de matière médicale : Traité des
maladies des femmes , 6 vol, in-i 2,
dont les quatre premiers parurent en
1 -G r , et les deux derniers en 1 763 ; et
Manuel des accouchements à l'usasse
des sagi^s-femmes , in-12, 1-66. La
mort qui, dans cette année 17GO, vint
le iVapper à 1 âge de rniîtire-vinglTcieux
5g6 A S T
ans , le 5 mai , l'cmpêclia de publier
Jui-mème ses Mémoires pour sennr à
l'histoire de la faculté de médecine
de Montpellier , in-4". , qui ne pa-
rurent qu'en 1767, par les soins de
Lorry. Cette lonj^ue suite de travaux ,
leur cnraclèie , l'esprit qui y règne,
confirment assez le jugement que nous
avons porte d'Astruc, me'deeiu doue
d'une mémoire prodigieuse , d'un es-
prit droit , mais froid et peu inventif;
plus capable de recevoir une impul-
sion que de l'imprimer; qui ne con-
tribua nullement à l'heureuse révolu-
tion qui ramena la médecine dans les
sûrs et bons principes d'Hippocrate ;
qui ne passa pour bon praticien, que
parce que, le plus souvent, il laissait
agir la nature; mais qui, par l'ordre
qu'il établit dans ses vastes travaux
d'érudition , doit servir de modèle à
ceux qui aspirent au même genre
de succès. C. et A — n.
ASTYAGE, fils de Cyaxare, roi
des Mcdes, monta sur le trône après
la m.ort de son père , vers l'an 594
av. J. - C. 11 avait épousé Arycnis ,
fille d'Alyatte et sœur de Crésus. On
ne sait si ce fut d'elle ou d'une autre
iemme qu'il eut INIandane. Craignant
d'être délrùné par son petit -fils, il
jnaria IMandane à un Perse nommé
6'/7/n7;r56' , et ordonna de tuer le ills
<(u'c!le en eut. Ce fils , qui fut le grand
(lyrus, ayant été élevé par un berger,
.se fit reconnaître par son grand-père,
et finit par le détrôner, comme on
le verra plus en détail à son article;
mais si on suit le lécit de Xénopbon,
qui, tout en faisant un roman de la
viedcCyrus, a dû respecter le fonds
des événements, Astvage aur;iit eu,
(jutie sa fille . un fils nommé Cyaxare,
qui lui succéda, et qui, mourant sans
f nf'inls, laissa ses états à Cvrus. C - r.
ASYCrnS, roi d'Egypte, succéda
h Myccriuus j il ût faire des propy-.
ATA
lées au temple de Vulcain du côté da
leA'an" , et fit construire une pyramide
de brique pour éterniser sa mémoire.
Ce fut sous son rèç;ne que fut rendue
une loi qui permettait aux Egyptiens
d'emprunter, en donnant pour gage le
corps de leur père. L'éjioque de son
règne n'est pas bien conuue. M. Lar-
cher le place vers l'an io5-2 avant
J.-C. G - R.
ATAHUALPA, Inca du Pérou,
plus connu en Europe sous h nom
défiguré d^.4tahaliba, fils d'Huana
Capac , douzième Inca, et d'une prin-
cesse de Quito , hérita , en 1 5 1 7 , de
ce dernier rovaume , que son père
avait réuni au Pérou. Le reste de l'em-
pire étant échuà Huascar, son frère,
né d'une princesse du sang des Incas,
les deux Jrères ne tardèrent pas <à se
disputer ce bel héritage , et à vider
leur querelle, les armes à la main.
Celle guerre était dans toute sa force,
quand Pizarrc aborda au Pérou , eu
1 55 '.i. La renommée avait grossi ses
forces et ses exploits , et, de même que
les Mexicains , les Péruviens regardè-
rent les Espagnols comme des êtres
d'une nature supérieure. Dans leur
haine aveugle, chacun des deux Incas
crut quil pourrait se servir de ces
étrangers contre son rival. Un cnvové
d'Huasear vint demander, au nom de
ce prince, des secours à P.zarre, qui
déjà marchait vers le centre de l'em-
pire, pour profiter de ces divisi(ns,
lorsque Huascar fut fait prisonnier,
par son frère , à la suite de deux ba-
tailles sanglantes. Maître de l'empire,
Atahualpa fit égorger tous les piinccs
du sang des Incas; il envoya ensuite
phisieius ambassadeurs à Pizarre ,
avec de riches présents ; il ouvrit
même une espèce de négociation avec
les Espagnols, et consentit a. reeevoii*
Pizarre en qualité d'ambassadeur du
roi d'Espagne , mais à couditiou qu'il
ATA
sortirait incontinent de ses états. Pour
toute réponse , Pizarre précipite sa
marclie a la tête de ses trou])es , arrive
à Caxainarca , et y attend l'Inca , qni
était campé à deux iieues de cette ville,
avec 20,000 Indiens. Le lendemain,
16 novembre i552, l'empereur, vou-
lant avoir une entrevue avec Pizarre ,
se présente avec un cortège magni-
fique. Pizarre fond aussitôt sur les
Indiens , étonnés de cette perfidie ,
en fait un horrible massacre , et se
saisit lui-même de l'empereur. Chargé
de chaînes , Atahualpa promit, pour
prix de sa liberté , de remplir d'or
une des salles de son palais , et les
Péruviens s'empressaient d'apporter
de quoi satisfaire à cette énorme ran-
çon , lorsqu'une action cruelle de l'Inca
fournit à Pizarre un prétexte pour s'en
débarrasser. Ataluialpa, craignant que
les Espagnols ne rendissent la cou-
ronne à son fi'ère , qu'il tenait toujours
prisonnier , donna des ordres secrets
pour qu'un le fît périr. Pizarre , irrité
de ce meurtre , ou feignant de l'être ,
fit juger l'empereur du Pérou ; et, d'a-
près des dépositions concertées , il le
fit condamner à être brûlé vif, pour
avoir usurpé l'autorité et fait assassi-
ner son frère, et ordonné à ses sujets
de massacrer les Espagnols. L'aumô-
nier Valverde promit de faire adou-
cir ce jugement , si le malheureux
Inca embrassait le christianisme. L'ef-
froi soumit ce prince à la volonté de
ses bouri^eaux; il reçut le baptême, et
ses juges barbares parurent lui ac-
corder une espèce de faveur , en le
faisant étrangler , en 1 533, sur la place
publique. B — p.
AT AI DE (Don Louis d'), comte
d'Atougia , vice-roi des Indes , servit
debonueheuresousEtiennedeGama ,
et, s'étant distingué dans l'expédition
de la mer Rouge , fut armé chevalier,
par ce vice-roi, à l'âge de vingt-deux
ATA 5g'j
ans. De retour en Portugal , il fui en-
voyé en ambassade auprès de Charles
Quint, qu'il accompagna à la balailiede
MuhlLerg, en i547, ^^ ^' rcçutde ce
prince un cheval magnifique, en re-
connaissance do ce qu'il l'avait aidé de
ses conseils et de son bras dans celte
fameuse journée. Ataïdc fut nommé,
en i5(jç), vice-roi des Indes, au mo-
ment où toutes les puissances- indien-
nes se liguaient pour chasser les Por-
tugais de l'Asie. A son arrivée à Goa »
ses officiers effrayés proposèrent d'a-
bandonner les possessions éloignées ,
et de ne défendre que Goa. « Compa-
» gnons , leur dit Ata'ide , je veux tout
» conseiTer ; et, tant que je vivrai, les
» ennemis ne gagneront pas un pouce
» de terrain. » Il expédia aussitôt des
secours pour toutes les places mena-
cées , et , opposant à un si giand nom-
bre d'ennemis la force des armes et
la politique, il contraignit Idalcan h
lever le siège de Goa, vola au secours
de Chovd, et défit le Zamorin. Vain-
queur de tous les princes de l'Inde, il
rétablit l'ordre dans l'administration.
De retour à Lisbonne, en iO']5, il fut
reçu , par Sébastien , sous un dais ,
avec les plus grands honneurs; mais
ce grand homme déplut bientôt à la
cour, par sa franchise, et il en fut
éloigné. Cependant on eut encore be-
soin de ses services. Envoyé une se-
conde fois dans les Indes , en qualité
de vice-roi , il mourut à Goa , en 1 58o,
emportant les regrets de toute la na-
tion portugaise , qu'il avait élevée au
plus haut point de gloire dans l'Inde.
B— p.
ATANAGI ( Denis ) , né à CagH ,
dans le duché d'Urbin , fut un des
littérateurs italiens les plus célèbres,
versle milieu du 16''. siècle. On ignore
l'année précise de sa naissance; on
sait seulement que, vers l'an i53'2,
il se rendit à Rome , dans le dessein
5^S ATA
d'y tirer parti de ses connaissances
littëraiies pour se placer avanlagcu-
scmeiat ; il n'y put réussir , et ,
après avoir perdu vingt-cinq annëts
en efforts inuiiles et en vaines espé-
rances , après avoir éprouvé des procès
fâcheux, dos maladies graves, en un
mot, des contrariétés et des malheurs
de toute espèce, il quitta Rome en oc-
tobre 1557, et retourna dans sa pa-
trie , aussi pauvre qu'il en était sorti.
A peine y était-il de retour, que la
réputation dont il jouissait dans les
lettres, et la délicatesse connue de son
goût le firent appeler à la cour d'Ur-
bin pour revoir le poëme d^ Amadii
de Bernardo Tasso, père du Tasse.
Eernardo, avant de le publier, dési-
rait le soumettre à la censure d'Ata-
ïiagi qui se rendit à ce désir , et passa
cinq mois dans cette cour, occu[X'de
la révision du poëme de son ami, très-
bien ti'aitë par le duc; mais souvent
forcé, par sa mauvaise sanlé, d'inter-
rompre ce travail. L'ayant enfin ter-
miné, il fit un vovage à Venise, où
\Amadis fut inijuinié , sans doute
par ses soins, en 1 5tio. Alanagi passa
le reste de sa vie dans cette ville, oc-
cupé de travaux pareils . de révisions ,
de corrections , d'éditions d'ouvrages ,
«t tirant de ce qu'il recevait des au-
teurs et des liljraires , tous ses moyens
d'exister. 11 vécut ainsi dans un état
louj urs voisin de la pauvreté; mais
indépendant et assez content de son
sort. L'année de sa mort n'est pa^
plus certaine que celle de sa naissance.
On voit seulement , par une de ses
dédicaces , qu'il vivait encore en 1 567,
et par la dédicace d'im autre auteur,
où il est parlé de sa mort, qu'elle
était arrivée avant 1574. Les princi-
paux ouvrages qu'il a j)ul)liés , soit
composés par lui , soit seulement im-
primés sous son nom , sont : I. Rhe-
tericorum AristoUHs , nec non pa-
ATA
raphrar.is Ifermo^enis tabuLe , ce
Diimysio Alhanasio collecta;, Ve-
nise, i555,in-4". ; II. Leilere fa-
migliari di XI If uomini illusiri
raccolti da Dionlgi Atanagi , lib.
XIII , Rome , 1 554 , «"-^ '• ; !"• ^"««
di M. Bernardo Cappella , Venise ,
1 5Go , in-4". , avec une longue épître
dëdicatoire de l'éditeur ; IV. Sonetli,
Canzoni, rime ed eglov^ie pescatorie
di Bernrdino Hota , Venise, 15G7,
in-S". ; il publia aussi les poésies la-
tines du même auteur, avec une pré-
face latine de sa composition , très-
ëleVamment écrite. V. Rime e Fersi
lattni di diversi, in morte d'Irène di
Spilimbergo , Venise, i5t)i , iu-8'.
Dans ces poésies recueillies par Ata-
nagi, il y a plusieurs morceaux de
lui , et il les a fait précéder d'une Vie
intéressante d'Irène de Spiîimberg.
VI. Délie Leilere facete e piacei>oli
di dif'ersi uomini grandi e cliiari e
hegl'ingegni , raccolte , etc. , libro
primn, Venise, i5()i, iu-8'. Atauagi
ne publia que ce Ijvre; le second ne
parut qu'en i574 , quelque temps
après sa m<»rt. VU. Il libro degli
uomini illustri di Caio Flinio Ceci-
lio , ridotlo in lingua volgare , etc. ,
Venise, i56'2, in -8". Le reste du
titre annonce , et le livre contient
en effet , les Vies d'Alexandre , de
Marc- Antoine, de Catou d'LI tique,
de César et d'Octave , et de plus
une espèce de Traité sur les mœurs
et les habitudes de César , tant à la
guerre que dans le reste des actions de
sa vie , recueilli de plusieurs auteurs
grecs et latins , etc. Atanagi avoue ,
dans son ëpîlre dëdicatoire, que l'ou-
vrage n'est pas entièrement de lui ;
qu'il est d'un jeune honuiic qu'il ne
nomme pas, et dont il n'a fait, eu
parfie , que revoir le travail. Ce jeune
homme, qui se nommait Mercure
Coiworrcggio , lui sut très - mauvais
ATA
j;re d'avoir publie son ouvrage , de ne
l'avoir point uomraé, et de s'en être
attribué une partie. Il écrivit contre
lui une diatribe violente , sous le titre
de Risposle di .Mercurio Concor-
reggio in sua difesa , contro le ca-
lunnie date gli da Dionigi Ata-
ruigi , etc., Brescia, i56'2, in-8'. ,
petit livre très-rare. Il y traite Atanagi
d'insigne plagiaire , et même de scélé-
rat. Atanagi n'ayant point répondu à
celte attaque , les choses en restèrent
là. Ou sait au reste que ce livre De
Flris illustribus, dont la traduction
donna lieu à cette querelle, attribué
par Atanagi , à Pline le jeune , par
d'autres, à Cornélius Népos, à Sué-
tone, et même à Tacite , est généra-
lement reconnu aujourd'hui pour être
d'Aurélius Victor. YIII. De le rime
di diversi nobili poeti toscani rac-
colte da M. Dionigi Atanagi, Ve-
nise , 1 565 , 2 vol. iii-S". C'est un des
meilleurs recueils de ce genre. Il y a
inséré quelques-unes de ses poésies.
On en trouve aussi dans d'autres re-
cueils, ainsi qu'un grand nombre de
ses Lettres en prose. G — e.
ATAULPHË, beau-frère d'Alaric,
roi des V^isigoths , auquel il succéda
eu 4 1 ' > suivit le pi'ojet formé par
son prédécesseur de s'allier aux Ro-
mains , et d'en obtenir un ctiblisse-
meut dans les Gaules; un autre mo-
tif le portait encore à rechercher l'al-
liance de l'empereur. Ataulphe s'était
signalé à la prise de Rome, et avait
emmené captive Galla Placidie , fille
du grand Théodose et sœur d'Houo-
rius. Épris des charmes de cette prin-
cesse, il épargna Rome à «a prière,
sortit de iîtalie , envoya des secours
à Honorius pour combattre Constan-
tin , et lui demanda la main de Placi-
die; mais Honorius ayant refusé de
s'allier avec un roi barbare, Ataulphe
passa dan§ la Gaule , et la ravagea j
ATA 599
laissant dès lors eutrcvoir le projet
d'enlever l'Aquitaine aux Romains, et
de s'y établir. Ce prince se ligua en-
suite avec Jovinien , autre ennemi
d'Honorius , et parvint ainsi à se
faire craindre et rechercher de l'em-
pereur. Celui - ci consentit à un traité
par lequel , en prenant possession de
l'Aquitaine , Ataulphe s'engageait à
rendre Placidie , et à détruire les en-
nemis d'Honorius dans la Gaule. La
dernière de ces conditions fut rem-
plie ; Ataulphe battit l'armée de Jo-
vinien , et envoya la ttte de ce géné-
ral à Honorius. Le roi Goth prélen-
dit alors que, par les services qu'il
venait de rendre à l'empereur, il était
digne d'être son beau-frère; mais Ho-
noriiis persista à demander Placidie ;
Ataulphe ne lui répond qu'en rava-
geant la Provence , et en épousant, à
Karbonne, Placidie, donli! était aimé.
Il fît ensuite le siège de IMarscille ,
devenu si célèbre par la résistance
des habitants; Ataulphe y fut blessé ,
et abandonna son entrepiisc. Placi-
die, usant de sou pouvoir sur ce prince,
l'engagea, en 4 1 5, à rendre Narbouue
aux Romains, et à tourner ses armes
contre les Suèves , les Alain s et les
V andales , qui avaient envahi l'Espa-
gne. Il passa les Pyrénécb, et tout
semblait lui présager la conquête de
l'Espagne , lorsqu'il fut assassiné à
Barceloune par un de ses officiers.
Les dernières paroles de ce prince
furent pour Placidie ; il recommanda
à ses courtisans de la renvoyer avec
honneur à la coiu- de son frère , et
de conserver la paix avec les Ro-
mains. Mais cet ordre ne fut point
exécuté; et Singerie, qui usurpa le
trône , força Placidie de suivre à
pied dans les rues de Barcelonne la
marche triomphale de l'assassin de
son mari. Le règne d'Ataulphe ne
dura que quatre ans. B - p.
6oo A T E
: ATÉNION , peintre grec , élève de
Glaucon deCorinthe, se fit une grande
réputation a Athènes, où il peignit,
entre autres ouvrages , un tableau
qui repre'sentait une de ces proces-
sions de jeunes filles , qu'on appe-
lait Polv^ynœcon. Ou comparait ce
peintre à iSir ias , et quelquefois on le
mettait au-dessus. Quoique le coloris
d'Atènion fut pius austère, il n'en était
pas moins séduisant; on estimait aussi
l'érudition qui brillait dans ses ta-
bleaux. Il peignit plusieurs morceaux,
dans le temple de Cerès Kleusine. On
citait encore , parmi ses chefs-d'ceuvre ,
un Ulysse découvrant Achille caché
soits des habits de femme, et un Grec
avec son cheval. Pline assure (pie si la
mort n'eût point enlevé Atéuion dans
sa jeunesse, il aurait effacé la réputa-
tion des plus grands peintres. Il a dû
vivre vers la iia*". olympiade, 55'2
ans av. J.-C. L — S — e.
ATE.NOLPHE ï""., prince de Ca-
poue, profita, en 887, d'une maladie de
Landunc , prince de Capoue , son pa-
rent, pour s'emparer, en son absence,
de sa principauté. Landone étant gué-
ri , rentra dans Capoue , caché dans
un chariot de foin , et rassembla ses
partisans à révcché pour attaquer l'u-
surpateur; mais il fut défait dans le
combat , et obHgé de s'enfuir. Atc-
nolphe fut engagé dans de longues
guerres avec Athanaze II , évèque et
duc de Naplcs , et les Sarrasins , alliés
.de cet évèque. Il conquit Bénévent en
l'an 900, sur Radelchise II , qui s'é-
tait rendu odieux à ses sujets : il n'a-
bandonna point cependant le séjoiu'
de Cjpoue pour la capitale de sa nou-
velle principauté. Les Sarrasins, éta-
,blis au Garighano , lui causaient beau-
coup d'inquiétude; il forma vainement
contre eux , en 908 , une ligue dans le
raidi de l'Italie. L'armée chrétienne
fut battue , parce que les babitantâ de
ATH
Gaëte favorisèrent les infidèles. AtCr-
nolphe fit demander alors des secours
à Léon-le-Sage , empereur d'Orient ;
mais il mourut en 910, avant de les
avoir reçus. Atenolphe II , et Landol-
phe, ses fils, lui succédèrent conjoin-
tement. S. S — I.
ATENOLPHE H, fils du précédent,
hérita, avec sou frère Landolphe , au
mois d'avril 910, des principautés de
Bénévent et de Capoue. L'union des
deux, frères , et la sagesse de leur ad-
ministration firent prospérer le pays
qui leur était soumis, et qui comprenait
une grande partie du royaume de Na-
ples. Ils acceptèrent des empereurs
grecs le titre de patrices , et ils rame-
nèrent ainsi l'Italie méridionale sous
la suzeraineté de l'empire d'Orient.
Atenolphe mourut en 940 , et son
frère Landolphe l". en 945. Landol-
phe U, fils de celui-ci, lui succéda.
S. S— I.
ATHA, célèbi'c irapo.steur du 1". siè-
cle de riiégire(8 .dcJ.-C. ), était natif
de Mcroù , oîi il exerçait, dans sa jeu-
nesse, le métier de foulon. Il s'adonna
à la magie , s'attacha à Aboù-Moslein
( f^oy. ce nom ) , et , de simple soldat ,
devint général et chef de parti. Le
dogme qu'il voulut pixipager dérivait
de la métcmpsvcose , qui, de l'Inde ,
s'était répandue dans l'Asie. Il pré-
tendait que l'esprit de Dieu avait passe
dans Adam, Noé, les grands pro-
phètes, Aboîi-Moslem , et était enfin
arrivé jusqu'à lui, en qui il se trou-
vait dans toute sa plénitude. Cette fa-
ble , soutenue des prestiges de la ma-
gie et de la phvsique, fit de grands
progrès chez un peuple crédule et
ignorant. Atha vit en peu de temps
se réunir autour de lui un grand
nombre de sectaires avec lesquels il
se retrancha dans le château de Kech ,
en Transoxane. C'est là qu'il fut as-
siégé par le kliàlyfo JMclidj, Réduit à
AT H
l'extrëmite , il mit le feu au cbâtean ,
le réduisit eu cendres , et se prëcijiita
lui-même dans les flammes , en s e-
criant : «Je pars pour le ciel; que
» quiconque veut participer à ma feli-
» cite' , me suive. » Ses femmes , ses
enfants et ses sectateurs, exaltes par
ces paroles prononcées avec eutliou-
siasme, !e suivirent en eflef. Quclqtics
auteurs pre'tendent qu'il prit du poison
et en fit prendre à toute sa maisiin.
Cete'veiiemont arriva l'an i65 de l'iië-
gire ( 7 79 de J.-C. ). Atha avait perdu
un œil en combattant, et, pour cacher
cette difformité', il portait un masque
d'or, ce qui le fit appeler Mocanna
{voil(î), nom sous lequel il est égale-
ment connu. J — N.
ATHALARTC . roi des Osîro-oîlis ,
en Italie , fils d'Eutharic et d'Auiaîa-
sonte, succe'da , en 5iG, à The'odo-
ric 1'''. , roi des Ostrogoths; mais com-
me il était à peine âgé de dix: ans à
cette époque , et qu'il mourut en 554,
il ne régna que sous la tutèle de sa mère.
( P^oy. Amalasonte ). S. S — i.
ATHALIE , fille d'Achab , roi d'Is-
raël , épouse de Joram , roi de Juda ,
femme impie , ambitieuse , cruelle ,
qui , après la mort de son fils Ocho-
zias , se fraya le cliemin au troue par
le massacre de quarante-deux princes
du sang royal. Son règne fut de six
ans ; la septième année, le grand prê-
tre Joiada , qui faisait élever secrète-
ment dans le temple , le jeune Joas ,
fils d'Ochozias, que Jocobed avait
soustrait au massacre de toute sa fa-
mille, le replaça sur le trône de ses
pères. Athalie , attirée par le bruit du
peuple qui accourait de toutes parts
pour assister au couronnement de Joas,
entra , avec la foule , dans le temple
où cet événement se passait ; à la vue
du nouveau roi , assis sur son trône ,
«■ntourë des prêtres , des lévites , des
jiiands-oiiicicrs de l'état , et d'un pcu-
ATH fiot
pie immense qui applaudissait à ceî'e
révolution subite , et dont le son des
instruments excitait l'enthousiasme ;
elle entra en fureur , déchira ses vête-
ments , et cria à la trahison. Joiada la
fit conduire hors de l'enceinte du tem-
ple , par des soldats , avec ordre de
passer au fil de l'ëpée tout ce qui se
présenterait pour la défendre , et clic
fut elle-même massacrée à la porte de
son palais, sans la moindre opposition.
Cet événement , arrivé environ l'au
877 av. J.-C, , fut marqué par la des-
truction des autels de Baal , qu'elle
avait relevés, par le renouvellement
de l'alliance avec le Seigneur , dont elle
avait brisé les liens , et est surtout de-
venu célèbre par la belle tragédie de
Racine , regardée com.me !e chef-d'œu-
vre du théâtre français. T — d.
ATHALIN (Claude -François),
né à Ceraboing , en Franche-Comté ,
le 10 mars 1701 , professeur en mé-
decine à l'université de Besançon ,
membre de l'académie de celte ville ,
où il est mort le i5 mai 1 78^. , a pu-
blié : ]. une Lettre à un médecin, au
sujet d^une obsen^adon rare et inté-
ressante sur des accidents funestes
survenus seulement au bout de cin-
quante-quatre jours, ensinte d'un
coup reçu h la tête , qui n avait oc-
casionné aucun accident primitif ^
Besançon , i 7 46 , in-8". ; II. des Elé-
ments d'anatomie, en latin, sous ce
titre : Instituticnes anatomicœ jter
placila et responsa , Yesuntione ,
1756 , in-S". W — s.
ATHA-MÉLIK DJOUWA«YNY
( Ala-ed-Dyn ) , historien persan ,
ëîcT.t originaire du Khoraçân. Son bi-
saïeul avait mérité, par ses talents, la
faveur deTakach , sulthan du Khova-
resm ; et son père, d'abord attaché an
suithan Manberny, avait été revêtu de
fonctions importantes par les Mcghols.
Pluàeui's circonstaECcs , rapporU:es
(wa A T H
dinsses ouvrantes, peuvent faire placer
sa naissaucp à l'an Iri^ou 6 25 derhég.
( 1.127-8 de J.C.)- Il occupa, dès sa
jeunesse, plusieurs emplois impor-
tants, et mérita , par ses talents , la bien-
veillauce d'ArghoiJu, gouverneur du
Khoraçàn. Cet e'mvr s'en fit accompa-
gner , en G49 , lorsqu'il se rendit à la
diète générale tenue pour l'élection de
Mangou-Khàn. Ce fut là qu'Atlia-Mé-
lik , pressé par ses amis, foi'ma le pro-
jet d'écrire l'histoire de ce prince.
En G54 , il resta auprès du sulthan
Ilalàgoù , et fut chargé , conjointe-
ment avec deux autres o/liciers , du
gouvernement du Khoraçàn , de l'Irac
et du Mazendéràn. Il usa de la fa-
veur que lui accordait Holàgoù pour
faire rétablir la ville de Djénou-
chàn , détruite par les Moghols. Après
la prise du château d'Alamont , rési-
dence de ces Ismaéliens , si fameux
dans nos croisades sous le nom d'rt.s-
sassms , il se transporta dans ce heu
pour examiner la bibliothèque que
ces sectaires y avaient rassemblée : il
mit à part les Koràns et les livres
précieux, puis livra aux flammes tous
ceux qui étaient contraires aux dog-
mes du pur islamisme. Atha-Mélik
accompagna Holàgoù dans son expé-
dition contre le khalyfe Mcstassem ,
et obtint le gouvernement de Bagb-
dàd . lorsque Hoiagoà s'en fut rendu
maître. Chems - ed - Dyn , son frère ,
non moins grand homme d'état , ob-
nnt la dignité de vizyr. Abakà-Khâu ,
iils et successeur d'Holagoù, confirma
ces deux frères dans leur dignité. Ce-
pendant , la faveur dont ils jouissaient
avait excité la jalousie ; et Atha-Mé-
iik,sans le secours de Chems-cd-Dyn,
aurait été sacrifié par ses ennemis; mais
;1 ks confondit, retourna à son gouver-
^iemeut,et, par la sagesse de son admi-
nistration , les améliorations qu'il fit à
î3ag,hdùU cl à son territoire , il rendit
ATH
à celte ville son ancienne splendeur ;
ce qui n'empêcha pas que , peu de
temps après , il ne fut accusé de spo-
liation et d'intelligence avec les enne-
mis de l'état, et condamné à payer
500 toumans ; ne pouvant acquitter
cette somme , il fut mis dans une
prison , d'où il ne sortit qu'à l'arrivée
d'Abaca-Khàn. Ne pouvant payer une
somme a laquelle il était condamné, il
y fuli'emis, fut battu , promené igno-
minieusement dans Baghdàd, et enfin
transporté à liamadàu, où on le tint
prisonnier. Abaca étant mort, Ahmed ,
son fils et son successeur, rendit à
Atha-jMélik la liberté et le gouver-
nement de Baghdàd. Chems-cd-Dyn
son frère , fut revêtu de la dignité de
vizyr. Mais, en 681 , Argboun , qui
avait levé l'étendard de la révolte,
vint à Baghdàd , et déclara qu'il vou-
lait exiger d'Atha-Melik les sommes
dont il était redevable. Cette nouvelle
accabla tellement Atha-Melik, qu'il
mourut, peu de jours après, à la
suite d'un violent mal de tête , le 4 de
dzoul-hedjah 681 (6 mars ixSh de
J.-C. ). L'ouvrage le plus considérable
de cet homme célèbre est une Histoire
des priiicei du Khovarism et des
Moghols, iufitulée : Djehdn Kuchdj,
la Conquête du Monde. La biblio-
thèque impériale en possède im exem-
plaire, certainement incomplet, puis-
(ju'il finit à l'expédition d'Holagoù
contre les Ismaéliens. Il était aussi
poète estimé. Parmi les vers qui nous
ont été conservés , on remarque un
distique dont voici la traduction :
M Mes malheurs , malgré les peines
» et les angoisses qu'ils m'ont fait
» soidTrir , méritent ma rcconnais-
» sauce ; car c'est à eux que je dois
» d'avoir su distinguer mon ami d«
» mon ennemi. » J — n.
AÏHANAGI. Fof. Atanagi.
ATIIAWAGILDE , roi des Yisi-
ATH
golLs en Espagne , se fît d'abord re-
marquer parmi les grands du royau-
me, et fut proclame par les habitants
de TAndaiousie, qui avaient pris les
armes contre le roi Agila. Voulant se
ménager un appui et des secours
étrangers, il appela d'Italie les trou-
pes de Jiistinien, auquel il céda toutes
les places sur la Méditenanée , depuis
Valence jusqu'à Gibraltar. C'était ou-
vrir de nouveau aux Romains la con-
quête de l'Espagne, L'empereur y fit
passer une armée sous la conduite du
pati'ice Libérius , l'élève de Bélisaire.
Alhanagilde avant joint ses troupes à
celles de Justinien , défit Agila près de
Séville , et , débarrassé de ce rival ,
que ses propres partisans massacrè-
veut, il fut l'econnu roi de toute l'Es-
pagne; il mit aussitôt Libérius eu pos-
session des places qu'il avait promises
à Justinien ; mais ce général s'étendit
bien au-delà. Plusieurs villes considé-
rables , ennemies du gouvernement et
de la religion des Visigoths, qui pro-
fessaient l'arianisme , se livrèrent
d'elles - mêmes aux Romains. L'Es-
pagne entière aurait échappé à Atha-
uagilde, sans la faiblesse de Justinien
et la révolte de Narsès eu Ilalic. Ce-
pendant, la guerre éclata en Espagiie ,
entre les Visigoths et les Romains ,
sans qu'Athanagilde, malgré quelques
succès, pût chasser entièrement d'an-
ciens auxiliaires, devenus ses ennemis
les plus acharnés. Ce prince fixa son
séjour à Tulède , qui devint la capitale
de l'empire des Goths ; il se soutint
par une sage administration et par des
alliances, en mariant Gaisuinde , l'aî-
née de ses filles , à Chilpéric, roi de
Soissous , et Bmuchaut , la cadette ,
a Sigebert , roi d'Austrasie. H mourut
à Tolède , eu 56^ , après treize ans
de règne, regretté de ses sujets, qui
avaient rendu justice à sa prudence et
à SCS taleuls. Il était catholique au
ATH 6i>3
fond du coeur ; mais il dissimula sa
religion, dans la crainte de dép'aire
aux Visigoths, qui étaient ariens zeiés ;
aussi lui pardonnèrent-ils d'avoir ap-
pelé et éiabli dans ses états des étran-
gers dangereux et puissants. B — p.
ATHANARIC, roi des Visigoths,
n'était encore que juge, et l'un des
principaux de sa nation , lorsque \es
Romains cédèrent aux Goths occiden-
taux , ou ^ isigoths , des habitations
dans la Thrace. Athansric était extrê-
mement courageux j mais son courage,
dit Thémistius, le cédait encore à sa
pénétration , à son éloquence et à sou
habileté. Procope s'étaut révolté contre
Valens, et ayant. pris le titre d'em-
pereur , Athauaric épousa sa cause ,
et lui envoya un corps de trois mille
liommes ; mais Procope fut vaincu ,
et Valeus, iirité contre les Goths, leur
déclara la guerre. En vain Athanaric
leprésenta qu'il avait considéré Pro-
cope comme parent de Constantin , et
héritier de sa maison; en vain il pro-
duisit des lettres qu'il avait reçues de
ce priuce, et allégua qu'il était venu
comme ami et allié de l'empire , au
secours d'un empereur romain ; Va-
lens marcha contre lui, et le délit en
bataille rangée , vers le Danube , eu
569. Les chefs des Goths se soumi-
rent , et payèrent leur imprudence par
la perte de leurs subsides et de leurs
pensions ; et l'exception stipulée en
faveur d'Athauaiic lut peu Ixonorablc
à ce juge des Visigoths , qui parut
avoir ménagé dans cette occasion ses
intérêts personnels ; mais il soutint
mieux ensuite sa dignité et celle de sa
nation, lorsque les ministres de Va-
lens lui proposèrent une entrevue.
Athanaric relusa de passer le fleuve ,
sous prétexte que son père lui avait fait
jurer de nejamais mettre le pied sur les
terres des Romains. On choisit, pour le
lieu de la cou.%euce, le Danube même.
6o4 A T H
L'empereur et le juge des Visigcllis ,
accompagnes d'i'.ii nombre égal de sol-
dais , s'avancèrent ci)aoun dans un
grand bateau, au milieu du fleuve. La
paix fut conclue à des conditions peu
honorables pour les Gotlis , cpii s'obli-
gèrent à ne plus passer le Danube. Ils
restèrent paisibles environ six ans,
jusqu'à l'époque où les Huns , descen-
dus des re'gions du Nord , les chas-
sèrent de leurs l'uyers , et les rejetèrent
vers les provinces romaines. Athana-
ric plaça alors sou camp sur les rives
du Nicster, re'solu de se défendre con-
tre les barbares victorieux ; mais les
Huns surprirent son armée , et ce ne
fut qu'à force de courage et d'intelli-
gence qu'il parvint à opérer sa retraite.
11 avait déjà forme un nouveau plan
de guerre défensive, lorsque ses com-
patriotes trompèrent son espoir, et
déconcertèrent ses projets. Le corps
entier de la nation s'avança vers les
bords du Danube, sous la conduite de
deux autres clirfs, et implora la pro-
leclion de l'empereur. Atlianaric, ayant
perdu son ascendant, se retira, suivi
d'une tiOTipe fidèle , dans le pays mon-
tagneux de Caucaland , défendu par
rimpe'ne'trable foret de Transylvanie;
il s'y forma un établissement , et ne
prit qu'une part indirecte à la guerre
qui éclata bientôt entre sa nation et
les Romains. Ceux-ci tremblaient au
nom des (lotlis , comme les (ioths
avaient tremblé au nom des Huns. La
plus grande partie de la nation des
Gollis avait reconnu pour roi Fritigern,
et Atlianaric , retire dans le pays de
Caucaland, contempla de loin les succès
des GotLs; mais à la mort de Friti-
gern , il abandonna sa retraite et tra-
versa le Danube , malgré son prétendu
serment de ne jamais entrer sur les
terres de l'empire. I-a plus grande par-
tie des sujets de F'riligern, qui sen-
taient déjà tous les maux de l'anarchie,
ATH
reconnurent volontiers pour roi un
juge de leur nation , dont ils respec-
taient la naissance , et dont ils avaient
éprouvé souvent l'habileté ; mais l'âge
avait refroidi l'audace d'Athanaric, et,
au lieu de conduire les Goths aux com-
bats et à la victoire, il écouta la pro-
position d'un traité avantageux que lui
fit Théodose. L'empereur alla au-de-
vant de lui , et Athanaric fit son en-
trée dans Constantinople, avec Théo-
dose , le 1 1 janvier 58 1 , et v fut reçu
avec magnificence. I>e prince goth
contemplant l'éclat de la ville impériale,
voyant la vaste étendue de son port
rempli de vaisseaux , les armes et la dis-
cipline des troupes , dit ces paroles :
« Un empereur romain est un dieu
» sur la terre , et le mortel présomp-
» tueux qui ose l'attaquer devient ho-
» micide de lui-même. » Le roi des
Goths ne jouit pas long-temps de cette
brillante réception. ]1 mourut, le -^5
janvier , des excès auxquels il se livra
à la table somptueuse de l'empereur.
Théodose le fit inhumer à la manière
des Romains, et avec tant de pompe,
que les Goths , par reconnaissanro
pour l'empereur qui avait ainsi honoré
la mémoire de leur prince, se chargè-
rent de garder les bords du Danube ,
et passèrent sous lesdrapeauxdc Théo-
dose, qui eut soin de les gagner par
ses libéralités. Auiien f lit l'é'oge d'A-
thanaric; mais , selon S. Jérôme , c'é-
tait un barbare , ennemi irréconciliable
des chrétiens. B — p.
ATHANASE ( S. ) , patriarche d'A-
lexandrie, docteur de î'Éghse, mquit
dans cette ville , vers l'an 296. A]nès
avoir reçu dans sa famille une cduci-
tion chrétienne , il passa dans la mai-
son de S. Alexandre , depuis arche-
vêque d'Alexandrie , qui se chargea
de le diriger dans ses études , et le fit
cnsiiito son secrétaire. Atlivc- par la
grande ic'putatiou de S. Antoiuc, li
AT H
alla mener pendant quelque temps la
vie asccliqiio auprès de ce ce'Icbrc ana-
chorète, d'où il revint recevoir le dia-
conat à Alexandrie. S. Alexandre le
produisit au concile de Nicëe, oii ses
vertus naissantes et les talents qu'il
déploya dans les discussions contre
Arius, frappèrent les Pères, de sur-
prise et de respect. Quoique très-
jeune encore , il eut beaucoup de part
aux décisions qui y furent prises.
C'est de là qu'il faut dater la haine
que lui vouèrent les ariens , et les per-
sécutions qu'ils lui suscitèrent pendant
tout le cours de sa vie. Six mois après
ie concile, S. Alexandre mourant, le
de'signa pour son successeur , et ce
choix, accueilli par les vœux unani-
mes du cierge' et du peuple , fut con-
firmé par les cvêques d'Egypte. A
cette nouvelle , les méléciens et les
ariens déposèrent leur animosité réci-
proque pour se liguer contre lui , et ,
dès ce moment , sa vie n'offre plus
qu'une suite de combats, d'où il fit
toujours sortir la vérité triomphante,
aux dépens de son propre repos. Les
imputations les plus absurdes furent
le prélude des procédés les plus atro-
ces. Ses ennemis conimencèrent par
l'accuser d'avoir imposé une espèce
de tribut sur l'Egypte , d'avoir fourni
de l'argent à des séditieux, d'avoir
fait briser un ca'ice, renverser l'autel
d'une éghse, brûler des livres saints,
d'avoir coupé le bras à un évêque
mélécicn , et de s'en servir pour
des opérations magiques. L'empereur
Constaiitin reconnut par lui-même la
fausseté des deux premières accusa-
tions; mais cédant enfin à l'importn-
iiité des ennemis du saint patriarche,
il renvoya les autres à l'examen des
évèques , le fit citer , en 554 , au con-
cile de Tyr , et coiunaraîfrc à celai de
Jérusalem , oii , quoique ses juges fus-
•syit eu même temps ses parties, il
ATH 6 5
dévoila l'imposture, confondit la ca-
lomnie , ce qui iriita tellement ses
persécuteurs, qu'd fallut toute la fer-
meté du commissaire impérial pour
l'arracher à leur fureur. Alors, ils se
bornèrent à le déposer. Il n'en con-
tinua pas moins ses fonctions; mais
l'empereur, trompé ])ar une confes-
sion de foi ca])tieuse , que lui présenta
Arius , n'ayant pu obtenir d'Athanase
le rétablissement de cet hérésiarque
dans la communion de l'église, relé-
gua le saint patriarche à Trêves. Ce
premier exil ne cessa que par la
mort de Constantin, arrivée au bout
d'un an et quelques mois. Constance,
empereur d'Orient , qu;)ique livré aux
ariens, ne put refuser son rappel aux
pressantes sollicitations de Constant,
qui régnait en Occidcfit. Les peuples
accoururent de toutes parts sur soa
passage , pour admirer le généreux
défenseur de la foi de Nicée , et son
entrée à Alexandrie ressembla à une
pompe triomphale. Les ariens, déses-
pérés de son retour , le dénoncèrent
comme un séditieux, qui se proposait
de retenir à Alexandrie la flotte des-
tinée à l'approvisionnement de Cons-
tantinople; comme un homme avide,
qui détournait à son profit les grains
accordés par le gouvernement pour
la subsistance des vierges, des clercs,
et pour le service de l'autel. Quatre-
vingt-dix évê((ues ariens, présidés par
le fameux Eusèbe de Nicomédie , dans
la ville d'Antioche, le condamnent sur
ces accusations dénuées de preuves.
Cent évêques orthodoxes , réunis à
Alexandrie , le déclarent innocent.
L'afr;iire est portée à Rome par les
deux partis. Le pape Jules confirme,
dans un concile de cinquante évêques,
le jugement rendu à Alexandrie, et sa
sentence est approuvée par plus de
trois cents evèques , tant de l'Orient
que de l'Occident, rassemblés à Sar-
f)(,G A T H
dique. Constance , pressé de nouveau
par son frère Constant, lui laissa la
Liberté de relourner à son siège. Il fut
accompagné dans sa route, accueilli à
son arrivée par les mêmes scènes d'at-
tendrissementqui avaient signalé le re-
tour de son premier exil; et ce second
triomphe fut marqué par le repentir
et la rétractation d'un grand nombre
d'évêques que la séduction avait pré-
oédemment attirés dans le camp de ses
ennemis. Constance , devenu maître
de tout l'empire , par la mort de Cons-
tant , laissa la carrière libre aux ariens
poiu- reprendre leur système de per-
sécution. INIalgré son innoci'nc* attes-
tée par ions les évoques d'Egypte, et
prcuvée contradictoiremeiit dans les
cc.nc iies de Rome et de Sardique, Atlia-
nase fut de nouveau coudanuié dans
ceux d'Arles et de Milan, tenus sous
l'infliunce de la faction arienne. Les
ëvêqurs qui refusèrent de scriscrire à
sa condamnation , furent exilés. Le
gouverneur d'Alexandrie eut ordre de
le cliisser de son siège. Atlianasc , se-
lon la remarque de Gibbon , savait
distinguer quand on pouvait com-
battre l'autorité , et quand il était pru-
dent de !uir sa colère. Il crut devoir
nster à son poste jusqu'à ce qu'on lui
eût produit les ordres signés de l'em-
pereur , ne croyant pas qu'un ordre
verbal, et si contraire aux promesses
authentiques que ce prince lui avait
faites, pût émaner de son autorité.
Qu'on '■c représente le vénérable pa-
triarche, présidant l'a.'^serablée des fi-
dèles , qu'une fête solennelle avait
réunis dans l'église de Sî.-ïliéon, in-
veMic par 5,ooo soldats qui veident y
entrer de force , entonnant le psaume
destiné à célébrer le triomphe du
l^ieu d'Isr.ièl sur le tyran d'Egypte ,
le peuple faisant , à la lin de chaque
verset , retentir les voûtes de ces con-
solantes paroles : car la miséricorde
ATH
du Seigneur est étemelle ; qu'on se
le représente au moment ou les sol-
dats enfoncent les portes de l'église ,
ordonnant tranquillement à ce même
peuple de se retu'er en silence , resté
seul au ]ned de l'autel , entouré des
clercs et des moines , qui lui font un
rempart de leurs corps , et réussissent
à le soustraire aux gardes chargés de
s'assurer de sa personne. Athana^e ,
proscrit pour la troisième fois , se
réfugie dans les déserts de l'Egypte ;
ses ennemis l'y poursuivent ; sa tête
est mise à prix ; les solitaires de cette
affreuse contrée, auxquels on ne peut
arracher le secret de sa retraite, sont,
les uns indignement tourmentés, les
antres impitoval)lement massacrés. Il
ne lui reste d'autre moven, ])Our les
délivrer de la fureur du soldat atta-
ché à sa poursuite, que de s'enfoncer
dans la partie absolument inhabiléc
du désert , où il ne conserve plus de
communication avec les hommes, que
par un simple serviteur qui se dé-
voue, au péril continuel de sa vie, à
lui porter ses aliments. Qui croirait
que c'est au milieu de cette vie er-
rante , que c'est au fond de cette re-
traite inaccessible, qu'Athanase com-
posa tant d'écrits éloquents , destinés
à ratlcrmir la foi des fidèles, à dé-
voiler les artifices de ses ennemis, et
à jeter l'elFroi dans l'ame de ses per-
sécuteurs? Julien, en montant sur le
trône, permit aux évêques orthodoxes
de rentrer dans leurs églises. Atha-
rase , après six ans d'absence , reparut
au milieu de son peuple , qui le reçut
avec des transports d'allégresse. Le
])remier usage qu'il fit de son auto-
rité fut de ramener à la subordina-
tion les habitants d'A'exandrie, qui,
dans une sédition , venaient de se por-
ter à dos excès tiès-repréhensib!es ,
d'user d'indulgence envers les évèqucs
qui , par faiblesse , avaient souscrit sa
ÂTH
pondamnalion à Rimini , en les ad-
mettant à la coiainuniou de l'Eglise.
Sou exemple, suivi dans les Gaules,
eu Espague , en Italie , dans la Gièce,
ramena enfin la bonne harmonie parmi
les orthodoxes , et la paix dans l'E-
glise, maigre' les murmures de quel-
ques esprits ardents. Pendant que tout
était calme et tranquille au dedans . les
cris des païens, dont le zèle d'Atlsa-
nase rendait les temples déserts , ani-
mèrent contre lui Julien -l'Apostat.
Le saint pati iarclie se vit obligé de
regagner la Thèbaïde pour mettre sa
vie en sûreté'. La mort de cet empe-
reur , et l'avènement de Jovien au
trône impérial , le ramenèrent à ses
fonctions. Le règne de Jovien ne fut
que de huit mois. Valens, son suc-
cesseur, entièrement livré aux aiiens,
força de nouveau le patriarche à la
retraite. II lui fallut se dérober, par
ruse, aux empressements de son peu-
ple , qui voulait le retenir de force ,
et alla chercher un asyle parmi les
morts , dans le sépulcre de son père.
Valens , craignant les effets du res-
sentiment des Alexandrins , qui miu"-
muraient hautement de l'éloignement
de leur pasteur, lui permit, au bout
de quatre mois de proscription , de
rentrer dans son église; et ce fut pour
y passer enfin paisiblement le reste
de ses jours dans l'exercice de ses
fonctions , jusqu'à sa mort, arrivée en
S-jS, après quarante-six ans d'épis-
copat, dont il en avait passé vingt
dans différents exils , et la plus grande
partie des autres dans des combats
continuels pour la défense de la foi
de Nicée. a Athanase, dit La Blettc-
» rie, était le plus grand homme de
» son siècle , et peut-être , qu'à tout
» prendre, l'Eglise n'en a jamais eu
» de plus grand. Il avait l'esprit juste,
» vif et pénétrant, le cœur généreux
» et désjntér*'>.sé, un courage de sang-
A T II 607
» froid , et , pour ainsi dire , un hé-
» roïsme uni , toujours égal , sans im-
» pétuosité ni sailhes , une foi vive ,
» une charité sans bornes, une humi-
» lité profonde, un christianisme mâle,
» simple et noble comme l'Evangile,
» une éloquence naturelle, semée de
w traits perçants, forte de choses , al-
» lant droit au but et d'une précision
» rare dans les Grecs de ce temps-là.
» L'austérité de sa vie rendait sa vertu
» respectable : sa douceur dans le
)) commerce le faisait aimer. Le
» calme et la sérénité de son ame se
» peignaient sur son visage : jamais
» ni les Grecs, ni les Romains, n'ai-
» nièrent autant la patrie qu'Athanase
» aima l'Église , dont les intérêts fu-
» rent toujours inséparables des siens.
» Une longueexpériencel'avaitrompu
» aux affaires : l'adversité lui avait
» donné un coup-d'œil admirable pour
» apercevoir des ressources , même
» humaines , quand tout paraissait
» désespéré. Personne ne discerna
» mieux que lui les moments de se
» produire ou de se cacher, ceux de
» la parole ou du silence, de l'aciion oa
» du repos. Il sut fixer l'inconstance
» du peuple , trouver une nouvelle
» patrie dans les lieux de son exil , en-
» tretenir des correspondances , mé-
» nager des protections , lier entre
» eux les orthodoxes, encourager les
» plus timides , d'un faible ami ne
» se faire jamais un ennemi, excuser
» les faiblesses avec une charité et
» une b'jnté d'arae qui font sentir
» que , s'il condamnait les voies de
» rigueur en matière de religion , c'é-
» tait moins par intérêt que par prin-
» cipe et par caractère. Juhen, qui ne
» persécutait pas les autres évêques,
» du moins ouvertement , regardait
5> comme un coup d'état de lui ôter
a II vie, croyant que la destinée du
j> christianisme était attachée à ccik
6o3 A T H
» d'Athanase. » Ses écrits sont, les
uns de controverse , les autres histo-
riques , et uae troisième classe de
moraux. Pbotius, si bon juge en cette
partie, eu fait un très-graud éloge. Ils
ne sont cependant pas tous d'une
égale force , ni composés avec la même
élégance. Le loisir lui manquait sou-
vent pour les polir, d'autant qu'il les
écrivait quelquefois en fuyant dans les
déserts cle la ïhébaïde ; mais le style
en est toujours clair , et le ton pro-
portionné aux. sujets et aux personnes,
^îou Apologie à Vempereiir Cons-
tance est un chef-d'œuvre en ce
genre. Ses ouvTagcs de controverse
ont principalement ])our objet les
mystères de la Trinité , de l'incarua-
liou et de la divinité du S. Esprit;
les liisloiiqucs contiennent une foule
de détails sur l'histoire ecclésiastique
de son temps qu'on chercherait vai-
nement ailleurs, du moins présentés
avec la même exactitude. La- plus
ancienne édition des OEuvres de
S. Athaiiase est de Viccnce, 148:2,
tu latin seulement. CoaimcUn est le
premier qui en ait donné une en grec
;jvec la traduction latine de Nannius,
ïleidelbcrg , 1601 , 2 vol. in-fol. Cette
ediiion était extrêmement défectueuse,
soit pour le texte , soit pour la vcr-
.sion. Celle que D. Montfaucon publia
en 1O98, Paris, 3 vol. in-fol., rehés
en deux , est une des plus parfaites édi-
tions des saints Pères qu'aient don-
nées les bénédictins. Le même éditeur
fii imprimer, en 1 706, une collection
en '->. vol. in-fol., sous le titre de Bi-
hliolhètfue des Pères , dont le second
est rcg;udé comme un supplément à
l'édition de S. Athanase , parce qu'il
est, pour 1.1 jihis grande partie, com-
posé des écrits du saint docteur, ou
du moins qui portent son nom. L'édi-
tion des bénédictins a été réimprimée
à Padoup, en 1777, eji 4 vol. iu-fol.,
ATH
et quoiqu'on y ait inséré les pièces de
la Bibliothèque dont nous venons de
parler, on lui préfère celle de Paris,
à cause de la beauté de l'exécution.
T— D.
ATHANASE II, évêque et duc de
Napics, avait été consacré, en 877,
par le crédit de son frère Sergius II ,
alors duc de Naples; mais l'année sui-
vante il conspira contre ce frère, que
sou aliiante avec les Sarrasins avait
rendu odieux au pape ; il lui lit arra-
cher les yeux cl le lit conduire à Pvome ,
où Scigius mourut en prison. Le pape
Jean MU paraît avoir pris part à
cette conjuration, et il écrivit au nou-
veau duc Athanase pour le féliciter;
mais, contre son attente, Athanase re-
nouvela l'alliance de son frère avec les
Sarrasins, il favorisa leur établisse-
ment dans le voisinage de Naples , et ,
s'associant à leurs brigandafres , il par-
tagea le bnlin qu'ils enlevaient dans
les étals de l'Eglise et dans ceux des
princes lombards. Athanase fut ex-
communié par le pape , comme l'avait
clé son fière ; il n'en tint /lucuu
compte; il répandit la désolation dans
tout le mitli de l'Italie , jusqu'à laa
ç)oo qu'il mourut. Ses voisins l'avaient
en horreur , mais les Napolitains su-
rent gré à ce prélat guerrier d'avoir
rétabli la réputation de leurs armes.
S. S— I.
ATIIANASIO (don Pedro), pein-
tre, né à Grenade, eu iGiS, fut élève
du célèbre Alexis Cano. Palomino Ye-
lasco , qui lui fait plusieurs reproches
très-graves, tels que ceux de froideur,
d'incorrection et de défaut d'inven-
tion , lui accorde le mérite très-émi-
ncnl d'avoir été le plus grand coloriste
de son temps. Il dut cet avantage à
l'étude des tableaux de Pierre de
Muva, qui avait été l'élève de Va»
Dyck, et de ceux de Van Dyck lui-
mcmc. La plupart des ouvrages d'A-
ÂTÈ
'tnanasio se voient dans les églises de
ia ville natale. On estime, surtout,
une Conception de la Fierge, dans
le cloître de Notre-Dame-des-Grâces ,
et une Conversion de S. Paul. Atha-
iiasio mourut à Grenade, en 1O88,
à l'âge de cinquante ans. D— t.
ATHÉAS, ou ATÉAS, roi de
plusieurs peuples Scythes, étant en
guerre avec les Istriens , demanda des
secours à Philippe, roi de Macédoine,
en lui promettant de l'adopter pour
son successeur. Philippe lui ayant en-
voyé' des troupes , Athéas , qui n'en
avait plus besoin , les renvoya, on di-
sant qu'il n'avait point demande' de
secours , et qu'il n'avait rien promis; il
refusa même de payer la dépense que
Philippe avait faite pour lui envoyer
ces troupes : alors ce prince, irrité, leva
[e siège de Bysance , marcha contre
lui, le défit , et emporta un butin consi-
dérable. Athéas , quoiqu âgé de quatre-
vingt-dix ans , se mit lui-même à la
tête de ses troupes , et fut tué dans le
combat. C'est ce prince qui, ayant fait
prisonnier Iménias , célèbre joueur de
flûte, le fît jouer devant lui, et, lors-
qu'il l'eul entendu, dit qu'il aimait
beaucoup mieux le hennissement de
sou cheval. G*— a.
ATHELARD. Foy. Adelard.
ATHELSTAN. Foy. Adelstan.
ATHÉiN AGORAS, philosophe
platonicien , ou plutôt éclectique , na-
quit à Athènes , au 1^. siècle de l'ère
vulgaire. Dès sa jeunesse , U em-
brassa la religion chrétienne , et alla
s'établir à Alexandrie , oi!i il ouvrit une
ëcolc, dans laquelle il eut pour but
de concilier les dogmes de sa nouvelle
religion avec ceux du Toudateur de l'a-
cadémie. Nous avons, de ce philosophe,
deux ouvrages : l'un , un Traité de la
résurrection des morts ; l'autre , une
Apologie de la religion chrétienne ,
qu'il adressa *ux empereurs Marc
Aurèle et Commode. Ces deux traités
furent imprimés , en grec et en latin ,
par Henri Estienne , iSS-] , in-S*'. ,
et plusieurs fois depuis. L'édition la
p'us estimée est celle de Edw. Dé
Chair, Oxford, 1706, in-8°. Lind-
ner en a donné une plus récente en-
core, à Leipzig, 1774? in-S". Ils se
trouvent, en outre, à la suite des
OEuvres de S. Justin , publiées par
les Bénédictins, 1742, in-fol. Le
Traité de la résurrection des morts
a été traduit en itaheu par GirolamO
Faleti , et publié par les Aides , à Ve-
nise , 1 556 , in-4^ Tous deux l'oat
été en français par Gaussart , prieur
de Sainte-^oy , Paris , i574 7 ^t par
Armand Du Ferrier, Bordeaux, 1577,
in -8'. — Martin Fumée , Sieur de
Genillé , ' a publié , comme traduit
d'Athénagoras , un roman , dont il
est l'auteur, intitulé : Du vray et par-
fait amour , contenant les Amours
honestes de Theogenes et de Cha-
ride , de Pherecides et de Melan-
genie , Paris, Sonnius, iSgg; Guil-
lemot, 161 2, in-i'2. Tout insipide
qu'est ce roman , Fumée a trouvé le
moyen de le faire rechercher des
adeptes , par diverses allusions , et ,
surtout, par un passage curieux, où ,
sous le voile de 1 allégorie , il peint
la confection du grand-œuvre. Ce pas-
sage , devenu célèbre chez les enfants
de l'art , se trouve à la page 345,
Verso, de l'édition de 1612, moins
rare que la première , ainsi que dans
r Harmonie mystique de David Lai-
gncau, Paris, i63(i, in-8''. D. L.
ATHÉNAIS, impératrice d'Orient»
sous le nom d'Èlia Eudûxia, était
fille d'un sophiste d'Athènes, nommé
Léjnce , qui l'éleva dans la religion
païenne , mais qui ne négUgea rien
pour orner son esprit , et pour ajouter
l'attrait des talents aux charmes que
là nature lui avait prodigués. Les belles*
39
6io ATÎI
lettres et les sciences lui de>'inrent
également familières. Léonce crut avoir
tout fait pour elle, et, la trouvant assez
dote'e par tant de qualités séduisantes ,
il la déshérita , et laissa toute sa mo-
dique fortune aux deux frères d'Athé-
naïs. Celle-ci vint à Constautinople
réclamer son héritage; Pulchérie, sœur
de Théodose II, gouvernait alors l'em-
pire ; elle fut touchée des grâces et de
la modestie de cette jeune fille , dont
l'éloquence l'étonua et la captiva; Pau-
lin , ami et confident de Théodose , se
réunit à Pulchérie, pour vanter au
jeune empereur la rare beauté et les
qualités séduisantes d'Athénaïsj Théo-
dose voulut la voir , en devint épris ,
la jugea digne du trône, et, de concert
avec Pulchérie , il lui fit abjurer les
erreurs du paganisme, et l'épousa en
4'2 1 ; elle prit à ce moment le nom
A'Eudoxie; son premier soin fut de
rassurer ses frères , qui redoutaient
son ressentiment. Elle les combla
d'honneurs et de bienfaits , et le seul
usage qu'elle Gt de son pouvoir fut
d'écarter de la cour l'eunuque An-
tiochus , favori ambitieux et détesté,
qui balançait le crédit de Pulchérie,
près de Théodose , dont il avait été
gouverneur. Athéuais continua de cul-
tiver les lettres , et d'encourager les
savants. La conformité de ces goûts
heureux lui faisait rechercher la so-
ciété de Paulin, qui d'ailleurs avait con-
tribué à son élévation. Cette haison ,
malgré sa pureté, alluma la plus som-
bre jalousie dans le cœur du jeune
empereur. Il oublia les vertus d'Ëu-
doxie et l'amour qu'il avait eu pour
elle; Paulin lui devint odieux au point
<pi'il lui fit ôter la vie, en 44o. Eu-
doxie, accablée par ces soupçons flé-
trissants, demanda et obtint facile-
ment la permission de se retirer à
Jérusalem. Les lettres y furent sa con-
solation ; mais la jalousie de Théodosc
ATH
l'y poursuivit encore. Il sut qu'elle
voyait fréquemment le prêtre Sévère
et le diacre Jean ; le comte Saturnin fut
envoyé aussitôt pour les faire mourir :
il exécuta sans examen cet ordre bar-
bare. Eudoxie, exaspérée par cette
cruelle persécution, ternit une vie in-
tacte jusque-là, eu faisant tuer Sa-
turnin. L'empereur la priva de toute
sa maison. Eudoxie vécut encore
vingt aus , expiaut par ses larmes ,
par son repentir , par sa piété, le crime
que l'honneur outragé lui avait fait
commettre ; elle bâtit des églises et
des monastères , releva les murs de
Jérusalem qui tombaient en ruines.
Quelques historiens rapportent qu'elle
embrassa les erreurs d'Eutychès ,
mais que S. Simcon Stylite , par ses
exhortations touchantes, la ramena à
la foi de l'Eglise. Elle mourut vers l'an
460 , en protestant de sou innocence
et de l'injustice des soupçons élevés
contre elle. Athénaïs, ou Eudoxie,
avait composé plusieurs ouvrages, en-
tre autres uu Poème sur la victoire
remportée par les Romains sur les
Perses, eu 421, ime traduction en
vers des livres de IMoise , de Josué ,
des Juges et de Ruth. On lui attribue
aussi , mais avec peu de certitude ,
une /7e deJ.-C. , composée avec des
vas pris dans Homère; idée bizarre ,
qui , tout en prouvant l'instniction
d'Eudoxie, montre assez les rapides
progrès que le mauvais goût faisait
alors dans la littérature. Cet ouvrage
nommé le Centon d'Homère, est com-
pris dans la Bibliothèque des Pères.
11 a été imprimé sous ce titre : Home-
rici centones , Virgiliani centonesy
Nonni paraphrasis evangelii Joan-
nis,8,r. Int.; II. Stephuniis , 1578,
in- 16. Pholius attribue encore à cctie
princesse un Poome , en trois livres,
sur le martvre de S. Cyprien , ouvrage
dont ij vante le mérite , tout en coa-
ATH
Tenant que la fidélité historique n'a
pas permis à Eudoxie d'y mettre beau-
coup de poésie. L — S — e.
ATHE^ÉR, médecin qui paraît
être né à Attaie en Ciiicie , vers
l'an 9 de l'ère clirétieune. Celse et
Pline n'en parlent pas ; Ga!ien seul
en fait mention. On ne peut guère
avoir une opinion précise de sa doc-
ti'ine; car , de tous ses écrits , quelque
nombreux qu'ils paraissent avoir été ,
il ne nous reste que deux ou trois
chapitres dans le recueil d'Oribaze. Il
n'admettait pas le feu, la terre , l'eau
et l'air comme éléments ; mais il ré-
servait ce nom aux qualités premières
de ces corps , et en consacrait uu cin-
quième , sous le nom de pneuma , ou
esprit, dont les manières d'être dé-
terminaient tous les mouvements en
santé et en maladie. C'est de ce nom
que la secte dont il est le chef a pris
le nom de pneumatique. Nous avons
déjà dit, à l'art. Arete'e, que plu-
sieurs veulent que ce dernier ne soit
qu'Athénée , et dès lors , tous les
éloges que nous avons donnés au bel
ouvrage des maladies aigiies et chro-
niques du premier devraient s'appli-
quer à cehii-ci. C, et A — n.
ATflENÉE, grammairien , né à
Naucratis en Egypte, sous le l'ègne
de Marc Aurèle , vivait encore sous
celui d'Alexandre-Sévère, vers l'an
iiS de J.-C. Sa vie ne nous est
point connue. Nous avons de lui un
ouvrage intitulé les Deipnosophistes ,
ou le Banquet des sa\>ants , qui est
un trésor d'érudition dans tous les
genres, et sans lequel nous ignore-
rions beaucoup de choses sur l'anti-
quité. Cet ouvrage , divisé en quinze
livres , nous est parvenu en entier, à
l'exception des deux premiers livres,
dont nous n'avons qu'un abrégé. La
première édition est due àAlde,Ve-
ikise, 4 5 1 4? iû-fol. ; les meilleures sont
ATH 6it
les suivantes : Athenœi Naucratitce
Deipnosophistce , curd et studio I§.
Casauboni , cum inîerpretalione la^
tind Jacobi Dalechampii , apud Hie-
ron, Carreliacura , i oç)-; , in-fol. Cette
édition, faite sous ies yeux de Casaubon
lui-même , a été long-temps la plus cor-
•recte. Il fit paraître ses notes trois ans
après sous ce titre : Is. Casauboni
animadversionum in Athenœi Deip"
nosophistas libri XV , Lugduni,
i6oo, in-fol. On a réimprimé plu-
sieurs fois , par la suite , à Lyon, Athé-
née et !e Comment (ire de Casaubon.
On préfère la réimpression de lOS-j,
avec quelques notes de Fermât. Athe-
nœi Deipnosophistce è codicibus
manuscriptis emendavit Joannes
Schwœighaeuser, Argentorati, i8oi-
1H07, iu-8". 14 vol., dont cinq
volumes pour le texte et la traduc-
tion latine , huit pour les notes , et
un pour les tables. Cette édition, revue
sur un manuscrit de la bibliothèque
de Saint-Marc de Venise, qaiestmain-
tenautdans la Bibliothèque impériale,
est beaucoup meilleure que les précé-
dentes ; cependant elle laisse encore
à désirer. On a reproché au savant
éditeur de n'être pas assez versé dans
les règles de la versification grecque ,
ce qui était absolument nécessaire
pour un ouvrage tissu en grande par-
tie de fragments de poètes. Il n'a
peut-être pas assez consulté les ou-
vrages des critiques modernes qui
ont corrigé beaucoup de passages
d'Athénée. Cependant, il a rendu un
très-grand service à la littérature
grecque, en pubhant cette édition.
L'abbé de jMarolles a traduit Athénée ;,
Paris , 1 680 , in - 4°. On a une
nouvelle traduction d'Athénée par Le-
febvre de ViUeb'une, Paris, I'^Sj-
91,5 vol. in-4''., Elle est très-in-
fîdèle et très-mal écrite. M. Jacobs ,
savant professeur de Munich, vient
39..
6i2 ATH
de publier Additamenla animad-
versionum in Athenœi Deipnoso-
phistas, , Jena , 1809, in -8". ,
ijii'ou peut joindre à l'e'dition de
M. Schvvcighauser. Dans les Deipno-
sophistes d'Athèuée , on trouve plu-
sieurs passages concernant les fleurs
ft les fruits, et leurs différents usages
d'utilité' ou d'agrément, et ils ont
servi plus d'une fois à e'claircir le texte
des auteurs qui ont écrit] sur ce su-
jet , tels que Théophraste et Dios-
coridc. Dans le livre quinze, en par-
lant des arbrisseaux qui servent à
faire des bouquets et des couronnes ,
il décrit assez bien le sjringa sous le
noTU de philadeîphus , uoniraë au-
jourd'hui , par cette raison , philadeî-
phus curonarius. Lorsqu'à la renais-
sance des lettres, les botanistes du
16''. siècle s'occupèrent à rechercher
les plantes qui étaient nommées ou
décrites dans les livres des anciens,
ils le reconnurent, et le nommèrent
philadeîphus Athenœi. Quoique cet
auteur ne puisse être compté dans le
nombre des botanistes, cependant
Qn lui a consacré , dans ces derniers
temps, un genre sous le nom (^Athe-
nœa. C — r et D — P — s.
ATHÉNÉE , mathématicien grec ,
dont la patrie nous est inconnue ,
vivait vers l'an 210 av. J.-C. 11 nous
reste de lui un Traité sur les machines
de guerre , adressé à M. Marcellus ,
qui avait pris Syracuse. On le trouve
daiis le recueil intitulé Mathematici
veleres , Paris , imprimei-ie royale ,
i6()5 , in-fol. — 11 ne faut pas le con-
fondre avec AïhÉ>Ée de Bvzance ,
que i*emj.>ereur Gallien chargea , avec
Cléodamus de la même ville , d'aller
fortifier les villes voisines du Danube,
pour les mettre en état d'.iri èter les
incursionsdesScytlios, — Antiphilius,
dans une épiç,ramme grecque de l'an-
iîioîogie, pailo d'ua AlKçuéc qui avait
aTH
exécuté une Lorloge très-ingénieuse,
qui indiquait les heures par le siffle-
ment de l'air, au moyen de l'impulsion
de l'eau , poussée par une ouverture
fort étroite ; il est probable que cet
Athénée est le premier de ceux dont
il est question dans cet article. C — r.
ATHÉNÉE, philosophe péripatéli-
cien,était natif de Séleucie, où, pendant
quelque temps, il fut employé dans
les affaires publiques. Il se lia ensuite
avec Murena , fut fait prisonnier com-
me lui, puis mis en liberté par César ,
qui reconnut son innocence. A son re-
tour à Rome , ses amis l'interrogeant
sur les motifs de son absence: «Je sors
» des goufres de l'enfer , » leur répon-
dit-il. il ne sui'vécut pas long-temps à
cet événement , ayant été enseveli , de
nuit , sous les ruines de sa maison.
— On compte plusieurs autres Athé-
nées , parmi lesquels Porphyre en cite
un qui fut philosophe stoïcien. K.
ATHÉNION, chef des esclaves ré-
voltés en Sicile. Vers l'an 65o de Rome,
io4''. av. J.-C, les esclaves des Ro-
mains profitèrent d'un décret proposé
en leiu' faveur par Marins, pour se
soulever dans plusieurs provinces sou-
mises à la république. Ces soulève-
ments , apaisés dès l'origine dans
quelques contrées , devinrent, en Si-
cile , une véritable guerre. Un joueur
de flûte , nommé Salvius , fut le pre-
mier chef reconnu par les esclaves , et
porta même le litre de roi. Il eut en peu
de temps sous ses ordres 'io, 000 hom-
mes de pied, 9.000 cavaliers , et battit
le préteur Licinius. Alors l'esclave
Athénion, né eu Cilioie, causa un nou-
veau soulèvement dans le voisinage
d'Égeste et de Lilybce. Il assiégea cette
dernière ville; mais l'arrivée d'une
flotte , envoyée par Bocrhus , roi de
Mauritanie, au secours des Romains,
l'obligea à lever le siège. Il eut toute-
fuii l'ait de persuader à ses ignorants
ATH
compagnons , qu'il suivait l'avis fies
dieux en prenant ce parti ; et, depuis
ce temps, ils le regardèrent comme
un homme inspiré du ciel. Salvius, qui
avait établi à îriocola le siège de son
gouvernement , invita Athénien à l'y
Tenir trouver , pour s'entendre sur
leurs intérêts communs. Il se rendit à
cette invitation , et Salvius le fit arrê-
ter; mais lorsque les Eomains eurent
reçu des renforts, Salvius rendit la
Kberté à Athénien , et ils se concer-
tèrent sur les moyens de résister aux
ennemis. Il fût résolu que Salvius res-
terait dans la ville de Triocola , et
qu' Athénien marcherait contre le pré-
teur Licinius Lucullus , avec 4o,ooo
hommes. La bataille eut lieu aux. en-
Tirons de Scyrtaeum , et les esclaves
montraient le plus grand courage,
lorsqu Athénien , qui s'était jeté an
milieu des troupes romaines, fut blessé
aux deux genoux , et peu après cou-
Tert d'un monceau de corps morts.
Privés de leur vaillant chef, les es-
claves prirent la fuite, et perdirent
plus de 20,000 hommes. A la nouvelle
de ce désastre , Salvius abandonna lâ-
chement Triocola ; mais Athénien , qui
s'était dégagé de dessous les morts
dont il avait été accablé , rassembla les
restes de son armée, et soutint le siège
avec tant de résohition , que Licinius
fut forcé de jse retirer au milieu des
huées des esclaves. Salvius étant mort ,
Athénien, devenu seul chef dés révol-
tés, battit le préteur Servilius, et s'em-
para même dé son camp. Il prit aussi
Macella ; mais ce fut le terme de ses
succès. Le sénat sentant enfin l'im-
portance de finir cette guerre, envoya
en Sicile , l'an 653 de Rome , le con-
sul Manius Aquilius , qui , l'année sui-
vante, tua, dans un combat siuguher,
Athénien , dont la mort entraîna la
déroute de toute son armée ( Voy.
\quîliu5 ). D— ^T.
ATH
6i3
ATHÉNTS. Voy, Akthermus.
ATHÊNODORE , philosophe stoï-
cien , de Tarse , en Qlicie , fut en grand
crédit auprès d'Auguste, et ne se ser-
vit de cette influence, que pour inspi-
rer à son disciple des sentiments de
clémence et de modérati n. C'était lui
qui conseillait à l'empereur de compter
toutes les lettres de l'alphabet, avant
que de se livrer aux mouvements de
sa colère. Auguste , à sa prière, djmi^-
nua les impôts que payait la ville de
Tarse. Il lui confia l'éducation du jeune
Claude, qui fut depuis empereur, et
qui réjjondit si mai anx soins de son
vertueux maître. Athénodbre mourut
dans sa patrie , à quatre-vingt-deux
ans. Il avait écrit, sur la ville de Tarse,
un livre qui ne nous est peint par-
Tcnu. -— Un autre Athenodore, éga-
kment de Tarse , et surnommé Cor-
dflion , fut chargé de la garde de la
bibhothequedePergame.il avait rayé,
des livres des stoïciens , dont il suivait
la doctrine, tout ce qu'il y trouvait à
reprendre ; mais on l'obligea de resti-
tuer ces passages. Caton fît expiés le
voyage de Pergame pour le voir , par-
vint à se l'attacher , et l'emmena avec
lui. — On compte un troisième Athe=
NODORE , de Soles , aussi philosophe
stoïcien, et un quatrième, de la secte
de Platon , contemporain et ami da
Sallustele Cynique. On a souvent con-
fondu ces homonymes. D. L.
ATHIAS (Joseph;, rabbin et im-
primeivr d'Amsterdam , auquel nous
devons une des éditions les plus cor-
rectes du texte hébraïque de \ Ancien
Testament. Elle a été imprimée deux
fois, en i6()veten 1667 {Foy. sur
le. mérite comparatif de ces deux im-
pressions, \3i Bibliothèque sacrée j du
P. Le Longj p. 98 du 2^. volume
de l'édit. de 1709, in-8°.). La plupart
des éditeurs modernes de la Bible on t
suivi le teste d'AthiaSy nonmiéiftent
6i;
ATH
Clodius , Majus , Jablonski , J. H. Mi-
cliaëlis, Opitins , Everard van der
Ilooght, Piops , Houbigant et Simon ;
il est aussi la base de l'édilion cri-
tique de Hennicott , et , conjointe-
ment avec ccr.x de la Pclyg^loUe d'Al-
cala et de Boinbeig , une des sources
de l'édition de Reineccius , réimpri-
mée en 1795, sous la direction du
savant Dordcrlcin. Le texte en est en-
core remarquable par les soins que lui
donna Jean Leusden , dont la préface
est en tète de Touvrage. Les versefs y
ont e'te', pour la première fois, tous
marques d'un chiftVe arabe. Avant ces
éditeurs, les chapitres ne portaient
pas d'autres marques de divisions que
les lettre-, hébroiaues que Rabbi Natlian
avait placées de cinq en cinq vers, et
que le rabbi n Atl) ias a de même admises
ilans son édition. Les états -généraux
des Provinces-Unies lui témoignèrent,
rn 1667, leur satisfaction, en lui en-
voyant une chaîne d'or et une médaille.
Je ne trouve pas de renseignements
précis sur ses années de naissance et
de mort ( Vor. sur le mérite critique
de sa Bible, V Introduction aux livres
du Fieux Testament , par J. Godef.
Eirhliorn, 5''. édition de Leipzig, de
i8o5, '1 vol. p. 217, et V Histoire
de la Philologie moderne , du même
savant, Gœtting., 1807, vol. 1, p.
462. T'^oy. aussi Prideaux , Histoire
des juif'i , tom. a , p. l 'iS ). S — r.
ATkINS (Sir Robert }, juriscon-
Snltc céicbrc en Angleterre , fils de
sir Edouard Atkins , lord-baron de
l'échiquier , et descendant d'une des
plus anciennes familles du comté de
Glocestcr , fut créé chevalier du Hain
au couronnement de Charles 11 , en
ï6Gi . et, dix ans après, nomméTun
des douze grands-juges d'Angleterre
dans la cour des communs-plaids. En
1679, mécontent de la tournure que
prenaient les affaires publiques , il se
ATK
démit de sa charge, et se relira dans
sa campagne : on l'y vint chercher eu
i683 , pour le consulter sur l'accusa-
tion particulière intentée dans le fa-
meux procès de Bye-House ^ contre
ce lord Russel dont les vertus privées
commandaient le respect à tous les
partis , et dont les délits politiques ,
restés sans exécution , éteints par une
prescription légale, dénués de preuves
juridi<jues , étrangers enfin au statut
d'Édou«.rd III , au nom duquel on les
poursuivait , ou n'avaient jamais pu ,
ou ne pouvaient plus attirer sur cet
infortuné seigneur une peine capitale.
Les deux consultation!^ données à ce
sujet par sir Robert Atkins, sont par-
venues jusqu'à nous. « Je ne me dissi-
» niulc pas, disait-il , en commen-
)) çant la première , le danger que
)> court aujourd'hui celui qui donne un
» conseil , ou qui hasarde une discus-
» sion sur les afïaires publiques : mais
» jamais aucun danger nem'empèche-
» ra de reniplir l'obligation par la-
» quelle tout homme est lié envers
» son semblable. Jamais je ne repous-
» serai celui qui aura besoin de mes
» conseils ; jamais je ne me refuserai
» au devoir d'aider ceux dont une
» accusation capitale mettra la vie en
» péril , et surtout quand la conduite
» générale de ces accu&g^, quand leurs
» actions et leurs discours me mon-
» trent en eux des hommes dignes de
» respect , de vrais amis de leur pays ,
» de leur religion , de leur roi. »
Oue Russel et Sydney ( Foy. leurs
articles ) fussent dignes de respect ,
c'est ce que la postérité a proclamé
plus solennellement encore que leurs
contemporains; qu'un patriote angli-
can vit en eux de r-rais amis de leur
pays et de leur religion , c'est ce qui
devait êlre ; mais conçoit-on que
même l'esprit de ficlion ÏM pu abuser
des mots , jusqu'à quahficr à' ami
ATK
véritable du roi, ce lord Russel, qui,
•sans doute, repoussait avec horreur le
simple soupçon d'avoir pu consen-
tir à l'assassinat du roi , mais à qui,
suivant le langage de Hume , sa
probité ne permit pas de nier un
projet de soulèvement général, et
qui ne se défendait contre cette accu-
sation que par le statut qui la décla-
rait prescrite de quelques mois? Atkins
cependant e'tait bientôt ramené à ce
vrai , sans lequel rieti nest beau ,
lorsqu'il e'tablissait la de'fense de son
client 5 lorsque discutant la non-revc-
lation des pre'tendus complots , il
disait , sur le procès de Russel et de
Sidney , ce que Montesquieu a dit
depuis sur le procès de Cinq-Mars et
de Thou ; lorsqu'il s'e'levait contre les
inventeurs de ces trahisons construc-
tives , qui renverseraient toutes les
lois, si une seule loi pouvait les recon-
naître; lorsque dévoilant l'infamie des
dénonciateurs prétendus complices ,
il s'écriait : « Dieu préserve ma patiie
» de la honte de voir de tels accusés
w condamnés sur la f )i de tels te-
» moins ! » Lorsqu'enfiu arrivé au
terme de sa consultation, il disait :
« Je désire de toute mon ame , je
» demande au Tout-Puissant , avec
» une humble ferveur, que ceux qui
» ont donné tant de preuves de leur
1) amour pour la vraie religion , pour
1) les libertés et les droits légitimes de
» leur pays, puissent paraître inno-
s> cents dans le procès qui s'instruit. »
Les vœux, d' Atkins ne furent pas exau-
cés ; son avis ne fut pas plus respecté
que les lois qui l'avaient dicté. Ce Jef-
fereis , dont le caractère est une si triste
exception dans l'histoire des juges an-
glais , enflamma le jury , et lord Russel
porta sa tête sur l'échafaud. Sir Ro-
bert Atkins n« put maîtriser son in-
dignation. Les ministres ayant fait
distribuer un pamphlet poiir capter
ATK 6i5
l'opinion publique, Atkins y répondit
par un écrit qu'il intitula : Défense
de feu lord Russel, mort innocent ,
ou Réfutation du libelle qui a pour
titre : antidote contre le poison.
Il inséra dans sa préface, les con-
sultations qu'il avait données pour
l'infortuné lord. Il ne craignit pas de
déclarer qu'il les pubhait « pour venir
» au secours de tous ceux qui, expo-
» posés aux mêmes poursuites que
» cette noble victime, trouveraient,
» dans cette collection , les moyens
» de défense à employer. » Il réprou-
va, comme indigne de figurer dans
un Code anglais, la loi qui refusait
l'assistance d'un conseil aux prévenus
d'un délit de lèze-majesté; et l'Angle-
terre rapporte, à cette réclamation, le
premier principe des lois plus huraii-
nes qu'elle a obtenues a cet égard ;
mais, en analysant toutes les charges
alléguées contre lord Russel, sir Ro-
bert Atkins se laissa encore entraîner,
non pas seulement par son indignation
et sa pitié, mais par un esprit de parti
dont l'exaltation, quand elle est portée
à ce point, franchit jusqu'aux bornes
de la raison. Le dernier passage qui
parut exagéré, même en Angleterre,
serait trouvé à peine intelligible ail-
leurs, surtout quand on imaginerait
tout à coup de ne pas comprendre ce
qu'était , juridiquement parlant , un
garde-du-corps du roi. « Des gardes!
» s'écriait Atkins, des gardes! Quelle
» est la chose que la loi autorise?
« Quels sont les individus que la loi
« reconnaît sous ce titi'c de gardes du
» roi? Et la cour, qui a instruit le
» procès de ce noble lord, et les juges
» de la loi, qui ont concouru à sa sen-
» tence , sous la religion du serment,
» qu'ils me disent quel jugement légal
» ils ont porté , quel sens légal ils ont
» conçu , en prononçant ce mot de
» gardes ? Ont-ils jamais lu dans leurs
€i6 ATÇ
j^ livres de loi? ont-ils jamais reiicon-
» tre' , dans leui' recueil de statuts , la
» plus légère mention d'aucune espèce
» de gardes ? La loi d'Angleterre ne
» sait pas ce que c'est que ces gardes;
» elle n'en dit pas un mot , elle n'eu
» prononce pas le nom, : FaccusatLon
» était donc vague, incertaine, radica-
^ lement nulle. Des gardes ! le roi est
» gardé par la protection spéciale de la
» toute -puissante Providence, qui a
» voulu qu'il régnât, et dont il est ici-
w bas le i-eprésentant. Le roi a , autour
» de lui , une garde invisible, qnc lui
» forment les anges du ciel :
Non eget Mauri jaculis nec arcn ,
Wec venenatis gravidà sagittis,
Crede , Pharelrâ.
» Le roi est gardé par l'amour de ses
» sujets , sa première , sa plus sûre
» garde après Dieu ; il est gardé par
T» la loi et les cours de justice. La mi-
» lice , et les bandes légalement enré-
» gimentées , voilà la garde légale du
» roi , et , en même temps , la garde
y> de tout le royaume. Que dis-je ? ces
» juges eux-mêmes qui ont prononcé
» sur la destinée du noble et infortune
» lord , ils étaient les gardes du roi et
» du royaume ; mais ils étaient aussi
» les gardes de lord Russel , contre
» toutes les accusations erronées et ir-
» régulières , contre tous les faux té-
» moins et toutes les preuves fallacieu-
» ses , contre tous ces torrents d'un
» esprit et d'une éloquence , employés
» à de si malheureuses fins.... , etc. »
En nous arrêtant sui' cette dernière
phrase, qui nous paraît réunir tous les
penres de sublime, la beauté du senti-
ment , la force de la pensée , et l'éner-
gique simplicité de l'expression , nous
regretterons de la trouver, pour ainsi
dire , perdue au milieu d'une si vaine
déclamation, quenousavons beaucoup
abrégée. Quelle est donc la société hu-
maine, à peine initiée dan? la civilisa-
ATK
tion , qui n'ait senti la nécessité de cqua.
fier à une garde spéciale , la sûreté,
d'une tête aussi précieuse que celle du
chef de l'État ? Et quels juges , quels
jurys, quels hommes abandonnés à
leur seule raison , verront un factieux
machiner h. destruction de celte gar-
de, sans en conclure qu'il en veut à la
vie gardée par elle? L'année suivante,
1684, le défenseur de lord Russel dé-
fendit avec autant de chaleur et avec
plus de succès , comme avec plus de
jugement, l'orateur de la chambre des
communes , sir William Williams ,
accusé par le procureur-général, de-
vant la cciu' du banc du roij comme
coupable fie libelle séditieux, pouç
avoir imprimé et publié, par ordre
de sa chambre, une narration et pé-
tition inculpant les ministres. On
devine aisément que sir Robert
Alkins fut un des partisans les plus
zélés et des instruments les plus ac-
tifs de la révolution de 1688. Le rot
Guillaume lui en témoigna sa recon-
naissance, en le nommant, dans le.
mois de mai 1O89, lord chef-baron ,
ou premier président de la cour de.
l'échiquier. Le 19 octobre suivant, il
fut élu orateur de la chambre des
pairs , à la place du marquis de Hali-
fax. Il remplit ces dernières fonctions
pendant quatre ans , les autres pen-
dant six ; et , âgé alors de soixante-
quatorze ans , il se retira , pour le
reste de sa vie , dans ses terres de
Glocestershire. 11 y passa encore,
quatorze années , tranquille et heu-,
reux, avec sa bonne conscience, sa.
bonne renommée , ses livres , et une
famille dont il était cheriautant que
respecté. Il mourut à 88 ans , en
1709. Tous ses ouvrages ont été ras-
seniblés dans un volume in-S". , sous
le titre de Traités parlementaires et
politiques ; on y trouve , indépen-
damment des écrits dont nous avons
ATK
parlé, une Dissertation mr Vélee-
tion des membres du parlement, des
Becherches sur le pouvoir de dis-
penser des lois pénales , une Dé-
fense de la juridiction ecclésiasti-
que dans le ro^raume d'Angleterre;
çnfin un Discours du lord chef-baron
de V échiquier , le jour de la récep-
tion et prestation de serment du lord
maire de Londres , devant la cour
de l'échiquier, en \6ç)5. Ce dernier
discours , célèbre alçrs en Angleterre ,
parce qu'il contenait une diatribe vio-
lente contre Louis XIV, dénonçait
pour le moins autant la corruption du
gouverneinent anglais que l'ambition
du monarque français. Quant au mé-
rite de la composition , il est impos-
sible de n'y pas trouver aujourd'hui
plus d'esprit que de goût , plus d'hu-
meur que de noblesse, et toujours
cette espèce d'originalité qu'on appel-
lerait plus justement de la bizarrerie.
Au surplus , les auteurs de la Biogra-
graphie britannique disent que « qui-
conque veut connaître à fond la vraie
constitution de l'Angleterre, les vraies
causes de la révolution de 1688, et le
danger de laisser la prérogative s'éle-
ver au-dessus de la loi, ne peuvent lire
un ou-^Tage plus instructif ni plus clair
que les traités de sir Robert Atkins ».
L— T— L.
ATKINS (Sir Robert), fils du pré-
cèdent, né en i644j passionné, dès
sa jeunesse , pour l'étude des lois et de
l'histoire de son pays ; élu membre du
parlement , par son comte do Gloces-
ter j auteur , enfin , d'une histoire Irès-
estimée de ce comté, gage de sa re-
connaissance pour l'affcclion extrême
que les habitants avaient constamment
témoignée à sa famille et à lui. 11 avait
été élevé sous les yeux, éclairé par les
lumières de son père. Le respect filial
de l'un égalait la tendresse paternelle
i$e l'autre, et tandis que leurs scnti-
A T K 6if
m^nts naturels se confondaient, leurs
jn'incipes et leurs opinions publiques,
étaient diamétralemeut opposés. On
peut en juger par ce passage de V His-
toire de Glocestershire , Londres ,
171a, in -fol. , rare (la plupart des
exemplaires avant péri dans l'incendie
du magasin de l'imprimeur ) où , en par-
lant du siège de la capitale de cette pro-
vince, entrepris et levé par Charles 1''''.,
en 1645 , Atkins s'écrie avec douleur :
« Ce malheureux siège arrêta le cours
» des victoires du roi ; il fallut le lever j
» la chance de la terre tourna cntière-
» ment j Charles n'obtint plus aucun
» succès , et il fut prouvé que le plus
)) crand des rois, et le meilleur des
» nommes , n'était pas a l'abri de la
» violence des méchants. Famille vrai-
» ment royale î qui sera toujours hono-
» rée dans la mémoire des hommes de
» bien, et à qui tout le monde chré-.
« tien eût reodu les mêmes hommages,
» si elle eût été aussi heureuse qu'elle
» méritait de l'être ! » Peut-être faut-
il observer que c'était sous le gouver-
nement de la reine Anne que s'écri-
vait et se publiait cette Histoire , dont
l'auteur mourut, en 1711, n'ayant
survécu qu'une année à son père.
L— T— L.
ATKINS (Richard), auteur an-
glais, né en i6i5 , d'une famille noble
du comté de Glocestre, Son dévoue-
ment à la cause royale , pendant la
guerre civile, ayant amené la perte de sa
fortune , il se mit à composer des livres;
mais cette ressource ne contribua pasà
l'enrichir, et il mourut en prison , poijr
dettes , çn 1677. On a de lui: I. un
Traité sur l'origine et les progrès de
l'imprimerie en Angleterre, publié à
Londres, en 1664, in-4''v IL SQU
Apologie, contenant une Relation de
quelques circonstances de la guerre
qui se faisait à l'ouest de l'Angleten-e ,
suivie d'un petit ouvrage de mysticité?
Çi8 ATK
infitulc : Soupirs et éjaculalions de
l'ame, in-4". 4669. X — s.
ATKINS (John, ou Jean), chi-
rurgien anglais, partit en 1721 , sur
le bâtiment de guerre , le Swallo-^v ,
qui , de concert avec le TFebnoulh ,
alla croiser contre les pirates dont les
cotes d'Afrique étaient infestées. Les
deux vaisseaux visitèrent ces côtes ,
depuis la rivière de Sicrra-Léone jus-
qu'au golfe de Bénin, et relâchèrent
ensuite à l'île du Prince , où la plus
grande partie des équipages mourut
d'une lièvre contagieuse. Atkins fut
nomme tre'sorier du fFeimoiith, par-
ce qu'il ne restait plus personne sur
ce vaisseau , qui fût propre à remplir
cet office ; et il continua néanmoins à
y exercer les fondions de chirurgien.
Les deux bâtiments allèrent au Brésil,
à la Barbadc et à la Jamaïque ; ils ar-
livcrent en Angleterre, dans l'année
1723. Atkins publia ses Voyages, à
Londres, en 1705. On y trouve des dé-
tails curieux sur les mœurs et les pro-
ductions des contrées qu'il a visitc'cs.
Quoiqu'il ne fût pas marin , son ou-
vrage est rempli de renseignements
nautiques très-utiles, parmi lesquels il
feut distinguer ce qu'il dit sur les
vents, les marées et les courants qui
ont lieu près de la côte de Guinée. Les
explications qu'il en donne prouvent
que ses connaissances n'étaient pas bor-
ne'es à ce qui concerne son état. On lui
reproche cependant de s'être laisse'
quelquefois entraîner à la vivacité' de
son imagination , et d'avoii: avance' , sur
d'aqtres articles, des opinions para-
doxales. Ses re'cits plaisent par leur
rapiditcet par la manièrepiquante dont
il peint ce qu'il a vu ; maisils sont plus
propres à de'prècier les pays et les
hommes dont il parle , qu'à les faire
réellement connaître. R — h.
ATOSSE était l'aînée des filles âe
Cyrus j elle fut d'abord mariée à Cara-
ATT
byse, son frère; après la mort de ce
prince, Sraerdis le mage, qui se fai-
sait passer pour son frère, usurpa
l'empire et épousa Atosse j elle fut ma-
riée en troisième lieu à Darius qui fiit
nommé roi lorsque Smcrdiseut été tué.
Un ulccreiuiétantvenu au sein, elle eut
recours à Démocède de Crotone, cé-
lèbre médecin , qui la guérit parfaite-
ment, et elle lui procura les moyens
de retourner dans la Grèce. On ne
doit pas ajouter foi à ce qu'on lit dans
un commentateur d'Aristote , que Xer-
cès, son fils, la dévora dans un ac-
cès de fureur. On lui attribue l'inven-
tion des lettres missives, ce qui n'est
pas non plus très -croyable. — Une
autre Atosse, fille d'Artaxcrcès Mné-
mon , se maria avec son propre père ,
qui avait conçu pour elle la passion la
plus violente. G — R.
ATSIZ. P^qy. Atzyz.
ATTAIGNÂNT (Gabriel-Charles
DE l' ) , né à Paris, en 1697 , fut des-
tiné , par sa famille, à l'état ecclésias-
tique , et obtint un canonicat à Reims.
Il passa sa vie à Paris, fréquentant
tour à tour la bonne et la mauvaise
compagnie; aussi disait-il: «J'allume
» mon génie au soleil , et je l'cteins
» dans la bo>ie. » Sa facilité et sa com-
plaisance à fiiro des iraproHiptus , des
chansons , des madi'igaux, le faisaient
bien .'iccuciliir partout. Quoiqu'on ait
dit et imprimé qu'il ne s'était jamais
permis la moindre pièce satirique, il
est constant qu'il fit plusieurs vaude-
villes , qui lui attirèrent quelques désa-
gréments. Le comte de Clermont, atta-
qué dans uno de ces bluettes , le fit,
comme dit Boileau , repentir d'avoir
voulu imiter Régnier. Un autre jour,
un des mécontents , voulant lui donner
sa rétribution ordinaire, se trompa, et
s'adressa à un autre chanoine de Reims,
qui lui ressemblait, et que le chanson-
nier appelait depuis son receveur. Sur
ATT
ïafintlcsesjoursJ'abliéderÂttalgnant
renonça au moudô qu'il avait trop aime,
et se retira chez les pères de la doc-
trine chrétienne. C'était l'abbé Gau-
tier, chapelain de l'hôpital des Incu-
rables, et confesseur de Voltaire qui
avait opéré cette conversion ; ce qui fit
naître l'épigramme suivante :
yoUaîre et PAttaîgnaDt . par avis de famille.
Au même confesseur nnl fait le même aveu :
En tel cas, il iraporlp pt-u
Que ce soit à Gautier, que ce jnil à Garguille ;
Mais Gaulier cependant me semble mieux trouvé:
L'honneur de deu^ cures semblables
A bon droit était réservé
Au chapelain des Incurables.
L'abbé de l'Attaiguant mourut à Paris ,
le lo janvier 1779. Ou a de lui : I.
Pièces dérobées à un ami , 1750,3
vol. in-i2, publiés par Meunier de
Querlon , qui les dédia à l'auteur lui-
même. Toutes les pièces qui forment
ce recueil sont reproduites dans le
suivant. II. Poésies de Vabbé de
VAttaignant, 1737, 4 "^ol. in 12.
L'éditeur fut l'infatigable abbé de La
Porte. Un cinquième volume parut , en
1779, sous le titre de Chansons et
poésies fugitives de l'abbé de VAttai-
gnant^ in- 1 2. III. Épitre à M. L. P.
sur ma retraite, 1 769, in-8\ IV. Ré-
Jlexions nocturnes, 1769, in-8\ Il
a €u part au Rossignol , opéra comi-
que , fait avec Fleury , en 1752.
^I"". Millevoye a donné un Choix
des poésies de Vabbé de VAttai-
gnant , 1 8 1 o , in- 1 8. Ce petit volume
contient tout ce que l'abbé de l'At-
taignant a fait de mieux ; et il y a en-
core beaucoup de pièces médiocres.
On a publié à Paris, en 1788, les
Muses chrétiennes , ou Correspon-
dance poétique et morale entre deux
célèbres poètes , in-8 '. , de 54 pages.
M^ Erscli pense que l'abbé de l'Attai-
guant est un de ces deux célèbres
poètes. Les vers qu'on trouve dans
cette brochure , ne sont pas au-dessus
d£ ce que l'abbé de l'Attaignant a fait
ATT 61^
de plus médiocre. — L'Attaignant
DE Dainville , parent du précédent ,
trésorier de vSt.-Lazarc, est auteur du
Fat , comédie en 5 actes et en vers ,
jouée en 1751, et non imprimée.
A. B— T.
ATTALE , roi de Pergame , était
fils d'un autre Attale, frère de Philae-
tère. Eumène son cousin étant mort
sans enfants , Attale prit le gouverne-
ment de Pergame, vers l'an 241 av.
J.-C. Il défit les Gaulois qui rava-
gaient depuis long-temps l'Asie mi-
neure, et, pour les empêcher de re-
cevoir à chaque instant de nouvelles
recrues, il les força à abandonner les
bords de la mer et à se retirer dans
l'intérieur du pays, où ils fondèrent
un état et ne cherchèrent plus à trou-
bler le repos des autres nations voi-
sines. Attale, après cette victoire, prit
le titre de roi , ce que n'avaient pas
osé faire ses deux prédécesseurs ; il
profita de la captivité de Séleucus Ca!-
linice pour s'emparer de toute l'Asie
en dcçi du mont Taurus. Ces conquêtes
lui furent presque toutes enlevées par
Achaeus ; mais il en reprit une partie
avec l'aide d'un corps de Gaulois qu'il
avait fait venir de l'Europe; il s'allia
ensuite avec Antiochus-le-Grandpour
faire la guerre à Achaeus qui s'était ré-
volte'. Il fit aussi une alliance avec les
Romains contre Philippe, roi de Ma-
cédoine. Toujours fidèle à ses engage-
ments , il contracta la maladie dont il
mourut , en faisant un discours aux
Béotiens pour les exhorter à se réunir
aux Romains contre Philippe; il parla
avec tant de véhémence, qu'il tomba
en faiblesse ; on le transporta à Per*-
game , où il mourut l'an 1 97 ar. J.-C.
11 était âgé de soixante-douze ans , çt
en avait régnéquarante-quatre; il laissa
quatre fils, Eumène, Attale, Philae-
tère , et Athénéus qu'il avait eus d' A-
poUonis de Cwzique. C — r.
620 ATT
ATTALE II, second fils du précè-
dent, fut célèbre par son union avec
ses frères et par son amour pour Ap-
poUonis sa mère. Il seconda Euraène,
son frère aîné , dans les soins du gou-
vernement, et fut cbarge par lui de
plusieurs missions très-importantes ,
entre autres de quelques ambassades
auprès du peuple romain , qui avait
beaucoup d'estime pour lui ; il fut sur
le point, dans une de ses ambassades,
de céder aux suggestions de quelques
émissaires du se'uat, qui, étant mé-
content d'Eumène , aurait voulu que
son frère se révoltât contre lui; mais
il fut ramené par les sages conseils du
médecin Strattius. Euraène étant mort
l'an i59 av. J.-C, Attale prit la cou-
ronne en attendant que son neveu fût
en âge de régner; il épousa Stratonice,
veuve d'Eumène ; et , pour ne faire
aucun tort à son pupille, il ne voulut
élever aucun des enfants qu'il eut de
aon épouse ; il se réunit à Alexandre ,
fils d'Antiochus, pour faiix; la guerre
à Déraétrius, fils de Séleucus, et il
aida les Romains dans leur expédition
contre le faux Philippe. 11 renversa
aussi la puissance de Prusias , en sou-
levant contre lui Nicomède, son pro-
pre fils, et mourut l'an i38 av. J.-C,
à un âge très -avancé , dans la vingt-
unième aimée de son règne. Il laissa
le trône à Attale , sou neveu. C — r.
ATÏALE m, fils d'Eumène,
monta sur le trône après la mort d'At-
tale , son oncle, l'an i58 av. J.-C.
Étant tombé en démence dès le com-
mencement de son règne , il fit mou-
rir un grand nombre de ses amis et
même de ses parents , sous prétexte
qu'ils avaient cause la mort , disait-il ,
tantôt de sa mère , tantôt de Bérénice,
son épouse; négligeant ensuite sa per-
sonne, il laissa croître sa barbe et ses
cheveux , ne se couvrit que de vête-
Hients sales et usés, ne parut plus eu pu-
ATT
blic , et négligea entièrement les soins
du gouvernement : il s'occupait à tra-
vailler à ses jardins où il semait toutes
sortes dépiautes salutaires et venimeu-
ses , dont il avait fait une étude parti-
culière. Il avait même éci'it, sur î'agii-
culture , un ouvrage que Varron a cité.
De cette folie, il passa à une autre; il se
mit à fondre des ouvrages en bronze , et
se livra tout entier à ce travail. Enfin,
il forma le projet d'ériger lui même un
tombeau à sa mère, et, enytravaiU
lant . il fut frappé d'un coup de soleil ,
dont il raounjt'au bout de cinq ans ds
règne. 11 institua, eu mourant, Iç
peuple romain son héritier. C — r.
ATTALE, préfet de Rome, sous
le règne d'IIonorius, devint, en 4^9 >
un de ces empereurs que les barbares
élevaient alors fréquemment sur le-
ti'ône , comme pour y placer un mo-
nument de leur triomphe et de ^a^^-
lisscmentdes Romains. Alaric, maître
de l'Italie, que le faible Honorius , re-
tiré dans Havenne , n'avait pu dé-
fendre, fit proclamer Attale, par le
sénat de Rome , et ce fantôme d'em-
pereur témoigna sa reconnaissance ,
en nommant Alaric et son beau - frère
Ataulfe , aux premières dignités de
l'empire. Le règne d' Attale fut d'abord,
assez heureux; plusieurs villes d'Italie
se soumirent , et on songea à s'em-
parer de l'Afrique ; mais bientôt U
fortune changea; les projets d'Attaift
échouèrent de tous côtés; il voulut
contrarier ceux d'Aîaric, qui le déposa
sur-le-champ aussi facilement <ju'il la-
vait élevé , et qui lui fit même arracher
le sceptre , eu présence de toute l'ar-
mée. Attale détrôné, suivit honteuse-
ment son capricieux tyran. Après la
mort d'Alaric , Attale passa au service
d' Ataulfe , et fut chargé , en 4 1 4 ^ d^*
préparatifs du mariage de ce prince
avec Placidie , fille de Théodose.
Ataulfe , irrité de ce qu'Honorius r,«-^
i
ATT
fusait la paix, fit reprendre à Altale le
tili'c d'empereur; mais le prince golh
étant mort , Constance , gc'ue'ral ro-
main, surprit, en 4*6, Attale errant
et sans appui , et l'cnvuya prisonnier
à Honorius , qui lui fit couper la main
di'oite , et le relégua dans l'ile de Li-
pari , où il mourut dans l'obscurité'.
L— S— E.
ATTAUOTA ( Michel ) , juge et
proconsul, vers l'an lo-o de J.-C. ,
u composé un Manuel de Droit, qu'ïl
a dédie' à l'empereur Michel Ducas.
Cet ouvrage se trouve dans le second
volume du Jus Grœco-Romamim ,
de Leuuclavius. C — r.
Aï TA RDI (Bonaventure), de
l'ordre de St.-Augustin , né à St.-Phi-
iippc d'Agire, ou d'Argire, ancienne
ville de la Sicile , fut d'abord profes-
seur d'histoire sacrée à l'université de
Catane , et ensuite nommé, en 1 738 ,
provincial de son ordre , en Sicile et
à Malte. On a de lui : T. Bilancia délia
verilà , Palerme, 1708, iu-4''' C'est
une réponse au livre intitulé: Pauliis
aposlolus in Mari , qubd hune ve-
netus sinus dicitur , naufragus , par
le P. Ignace Giorgi , bénédictin de la
congrégation de Raguse. La question
était de savoir ce que c'était que l'île
appelée , en latin , Melita, ou aborda
S. Paul après son naufrage. L'opinion
la plus commune voulait que ce fût
l'île de Malte , entre la Sicde et l'Afri-
que, tandis que d'autres soutenaient
que c'était une île de la Dalmatie, dite
aujourd'hui Melada. Le P. Giorgi
avait écrit en faveur de cette dernière
opinion ; Attardi soutint victorieuse-
ment la première. II. Lettera scritta
ad un suo amico , in prova cke San
Filippo d'Ar^ira fu mandata dal
principe degli apostoli San Pielro ,
Palèrme, 1708 . in-4°.; III. la Ris-
posta senza maschera al sig. Lodo-
viç-Q /Intonio Muratori , Palerme,
AÎT
621
1742- C'est un des nombreux écrits
qui attaquèrent le sage Muratori, lors-
qu'il eut soutenu , sous le nom d'An-
tonio Lampidrio , que l'on n*était pas
obligé de défendre par l'effusion de
son sang , l'opinion de l'immaculée
conception de la vierge Marie ( Foy,
Muratori). G — e',
ATTAVANTl (Paul), de l'ordre
des frèi-es servîtes, et communément
appelé /rère Paul de Florence, na-
quit dans cette ville en 1 419; il entra
dans l'ordre dès sa première jeunesse,
et s'y distingua par ses vertus et par
son savoir. Le philosophe Marsile Ficin
l'ayant entendu prêcher, admira sou
éloquence , et la compara , dans une de
ses lettres, à celle d'Orphée. Attavanti
était lié avec tous les savants qui flo-
rissaieut alors, et se rendait souvent
aux assemblées de l'académie platoni-
cienne, qui se réunissait dans le pa-
lais de Laurent de Médicis. Après
avoir passé quelques années à Rome
dans un autre ordre , il revint à celui
des servîtes ; il contribua , par ses pré-
dications , à l'étendre en Piémont, en
Savoie et en Suisse. Il n'en fut point
général , comme on l'a écrit , mais
seulement provincial eu Toscane. Il
était revêtu de cette dignité , lorsqu'il
mourut à Florence, au mois de mai
1499, âgé de 80 ans. Ses ouvrage»
imprimés sont : I. Fita Beati Joa-
chimi ord. servorum , etc., insérée
dans les Actes des Saints , de Bol-
"landus , tom. II , sous la date du 1 6
avril j IL Quadragesimale de re-
ditu peccatoris ad Deum , Milan ,
1479, iu-4". L'auteur prêcha ce ca-
rême taudis qu'il était à Rome, dans
l'ordie du St. Esprit ; au lieu des
Pères , il y cite souvent Dante et Pé-
trarque. \l\. Breviarium totius juris
ca«omci, Milan, 1478, i479j iu-fol.j
Memmingen, i486;Bàle, i487,in-4*.
IV. Expositio in Psalmos poeniien ■
ôîi ATT
tiales, Milan, 1479, in-/^".; Y. De
Origine ordinis servorum Beaiœ Ma-
riœ dialogns. Cet opuscule, écrit eu
i 456, et dédie à Pierre de Médicis, fils
de Cosme et père de Laiireut-l'e-Ma-
gnifiqiie, n'a e'tc imprimé qu'en 1727,
à Parme, in-4°. Lami en a donne' de-
puis une édition meilleure et plus cor-
recte , Florence, 1741? in-S". , avec
une Vie de l'auteur. Ses piiucipaux
ouvrages , restes en manuscrit , sont :
des Serinons, une F^ie de Ste. Ca-
therine de Sienne , une Histoire et
des Eloges de l'ordre des frères ser-
vîtes , une Histoire de la maison de
Gonzague , des Commentaires sur
Dante et sur Pétrarque. Sassi parle
de ces derniers dans son Histoire ty-
pographique et littéraire de Milan ,
mais c'est la seule trace que l'on ait de
leur existence. On ne peut donc pas
dire qu'on les doit à Attavauti, non
plus que les autres ouvrages inédits que
nous venons de citer, et dont l'exact
JMazzuchelli avoue qu'il ne sait pas où
l'on conserve les manuscrits. G — É.
ATTEIUS CAPITO , jurisconsulte
romain , sous le règiie d'Auguste. Son
père avait clé tribun, et fut un de ceux,
(jui signèrent l'accusation contre Cas-
sius. Atteins Cipito , dit Tacite dans
le livre l**"^. de ses Annales , fut un
des plus habiles jurisconsultes de
Rome: il devint triliun avec Aquiiius
(îallus , et fut consul avec Germauicus,
l'an 740 de Ronif . 11 obtint , sous Ti-
tère,des emplois considérables. Ou
l'accuse de superstition , parce qu'il
prétendait, quoiqu'il fU très -versé
dans ce qu'on appelait alors le droit
des pontifes, qu'il n'était pas permis
de graver les images des Dieux dans
des anneaux. Flatteur adroit , il eut
pour Tibère une lionteusc complai-
sance. r.>t eiupereur s'clant servi ,
dans un édit , d'un mot peu usité ,
quoiqu'il se piquât de parler a\ ce élc-
ATT
gance , manda les personnes qui pas-
saient pour s'exprimer avec le plus
de pureté, et, entre autres, Atteins
Capito , pour les interroger sur cette
nouvelle expression. «Seigneur, lui
» dit celui-ci , personne à la vérité ne
» s'est encore servi de ce mot; mais
» nous nous en servirons à l'avenir ^
» paj.- le respect que nous avons pour
» ce qui vient de vous. » Pomponius
moins courtisan , prenant la parole,
dit : « Vous pouvez César , donner
» aux hommes le droit de bourgeoisie,
» mais non aux mots. » Disciple d'Of-
filius, Atléius suivit toujours les opi-
nions de son maître , et il a laissé des
ouviages qui sont cités avantageuse-
ment par Aulu-Gclle, Maorobe, Augus-
tin , etc. Ses écrits étaient : 1. Commen-
taria ad. XII tabulas ; II. Conjec-
taneorinn lib. CCLX, de ponti-
Jicio jure ; 111 De jure sacrificiorum
lib. X ; IV. De senatoris officio , et
un grand nombre de jugements. Il
mourut l'an -25 de J.-C. JM — x.
ATTENDOLO ( Dabius ), docteur
en droit, qui florissait vers l'an i56o,
était né (l'une famille noble et ancienne,
à Bagnacaval'o , entre Faenza et Fer-
rare. Après avoir fait ses études à Bo-
logne, il s'adonna pendant quelque
temps au métier des armes, et suivit le
])riucc de Salerne, capitaine-général de
l'infanterie de l'armée de l'empereur
Charles-(}uinl, d.ins son expédition
contre le Piémont. Dégoûté de la
guerre, il se retira pour se livrer entiè-
rement aux lettres. 11 a publié les ou-
vrages suivants : 1. Duello, diviso in
tre lïbri, Venise, i5(3o , in-8°. Cette
première édition fut suivie de trois
autres, (pii furent considéiablemenJ
augmentées; elles pariu'eut également
à Venise, 1 562 , 1 5G i et 1 5(35 , iu-b".
II. Dirrorso intorno alV oiiore e al
modo d'indurre le querele per ogni
sorta dUngiiiria allapace, Venise >
ATT
1 563 , réimprimé en » 564 et en 1 5G5,
in-8'\ III. 11 écrivit aussi eu vers. On
trouve un souuct de lui dans le re-
cueil intitulé : LaNlnfa Tiberhia, de
Molza, ainsi que dans les Rime scelte
de' poeti Ferraresi. G — e.
ATT ENDOLO (Jean Baptiste ),
iavaut littérateur du i6'=. siècle, fils
d'un habile ingénieur dumcmenom,
naquit à Capoue , fut prêtre séculier,
ctfloiissail vers i58o. Il se distingua
TiOn seulement par la connaissance des
diflerentes langues modernes , à la-
quelle il joignait celle deriiébreu, de
l'arabe et du grec ; mais encore par
ses poésies, et surtout par la part
qu'il prit dans la fameuse querelle
entre l'académie de la Crusca et Ca-
mille Pellegrino , au sujet de la Geru-
salemme Uberata du Tasse ; il prit
ouvertement le parti de ce gi'and
poète , quoiqu'il fût lui-même de l'aca-
démie , et qu'il y fût fort estimé. Il
mourut d'une manière funeste : il
sortait de Capoue pour aller rendre
visite à l'archevêque Costa , avec jilu-
sieurs de ses amis ; la voiture où ils
étaient fut renversée , les roues pas-
sèrent sur le corps d'Atteudolo ; il en
fut écrasé , et mouiut quelques heures
après. Cet accident arriva en 1 5y .i ,
ou au commencement de iSqd. Il a
laissé les ouvrages suivants : I Ora-
zione nelV essequie di Carlo d'Aus-
tria principe di Spagna , Naples,
1 57 1 , in-4". ; II. Orazione mililare,
alV allezza del serenissitno D. Gio-
vanni d'Austria , per la villoria
navale oltenuta dalla Santa Lega
neir Echinadij^ d\Àes y i5n3, ia-4"'>
lïl. Rime , publiées d'abord avec
celles de Benedetto deli' Uva et de
Camillo Pellegrino , Con un brève
discorso delV epicapoesia, Florence,
1 584 > iii-8''. , réimp. à Napîes , 1 588,
in-4°, , avec une augmentation de
vingt-deux sounets ; IV. Rozzo di
ATT G25
XII Lezioni sopra la canzone di
M. Francesco Petrarca : Fergine
bella, etc. , iNaples , a 604, in-4", >
ouvrage resté imparfait par la moit
de l'auteur j V, l' Unilà délia mate-
via poetica sotto dieci predicamentC
e sentimenti ne' due principi délia
Toscana e latinapoesia , Petrarctty
e Firgilio , Naples , 1724 , in-8". ,
seconde édition : la première est ex-
ces.sivement lare. Ce fut Attendolo
qui, après la mort du Tansillo, corri-
gea son poëme, intitulé: le Lacrime
diS. Pielro , qu'il avait laissé impar-
fait , et qui en donna la première édi-
tion. Il fut accusé d'avoir pris dans ce
travail beaucoup trop de licences ; et
les amis du Tausillo donnèrent dans
la suite d'autres éditions de ce poëme ,
où étaient rétablis un grand nomiue
de morceaux au' Attendolo avait re-
tranchés ( Fo;^'. Tansillo). G — é.
ATTENDULI ( Marguerite ). F.
Sforce.
ATTERBURY ( François ) , évê-
que anglais très-distingué par son es-
prit et ses talents , mais qui dut par-
ticulièrement sa célébrité aux événe-
ments de sa vie, naquit le 6 mars, 1 G(32.
Son père, ministre anghcan àMiddle-
ton,le destina à suivre la même carrière.
II commença ses études au collège de
Westmùister, et les acheva dans l'uni-
versité d'Oxford, où il montra de
bonne heure un goût très-vif pour la
littérature. Une Défense de ia religion
protestante , qu'il publia à Oxford eu
1687 ' **^"^ '*^ ^'^'''^ ^^ Réponse à des
Considérations sur l'Esprit de Mar-
tin Luther, et sur l'Origine de la
Reformations réimprimée à Londres,
in-8 '. , en 1 725, commença sa répu-
tation. H s'était chargé de diriger les
études du jeune Boyie à l'université
d'Oxford ; mais les détails de cette édu-
cation , et la vie de collège fatiguaient
UD esprit qui se sentait appelé à di:
624 ATT
plus hautes destinées. C'est ce qu'il
écrivait à son père, en 1690: a Je
» suis absolument las , lui disait - il ,
» de ce cercle dégoûtant de petites af-
» faires, qui ne peuvent plus ni me
» distraire ni m'instruire. J'étais fait
» assurément pour un autre théâtre
» et pour un autre genre de société. )>
Ce fut peu de temps après qu'il vint à
Londres , où il se livra à la prédica-
tion ^ avec un succès qui lui valut la
place d'aumônier du roi et quelques
bénéfices. En 1700 , il fit paraître une
lettre pour la défense des droits et des
priviiéges de la chambre basse de l'as-
semblée du clergé, nommée en an-
glais convocfition. Cette lettre occa-
sionna une controverse très - vive ,
dans laquelle plusieurs savants évè-
ques se déclarèrent contre lui ; d'un
autre côté , l'université d'Oxford le
yengea , en lui accordant des distinc-
tions honorables. La reine Anne ayant
succédé à Guillaume 111 , Attcrbury
jouit d'une grande faveur. 11 fut élu,
en 1 7 I o , président de la convocation,
«t obtint, en 1713, l'évêché de Ro-
chester et le doyenné de Westminster.
Il était au moment d'être nommé ar-
chevêque de Cantorbéry, lorsque la
mort de la reine vint meltie un terme
à sa fortune. George l°^ , qui lui suc-
céda, avait conçu contre l'évêque de
Rochester des préventions qui nuisi-
rent à son avancement. La rébellion
qui éclata en 1 7 1 5 , en faveur de la
maison de Stuait , donna heu à l'ar-
chevèque de Cantorbéry et à l'évêque
de Londres d'adresser à leurs diocé-
sains une exhortation pastor,^]e pour
exciter l'atTectiou et le dévouement du
clergé au roi et à la maison de Bruns-
wick. Jj'évèque de Rochester et celui
de Bristol refusèrent de signer cette
exhortation et de la publier dans leurs
diocèses. Ce relus r>mdit Attirbury
suspect à la cour , et sa conduite dans
ATT
la chambre des pairs , où il se montra
presque constamment dans le parti de
l'opposition , contribua à fortifier ces
soupçons. En 1 722 , on l'accusa d'être
entré dans une conjuration en faveur
du prétendant : il fût arrêté, traduit
devant uil comité du conseil privé ,
et , après avoir subi un interroga-
toire , envoyé prisonnier à la tour de
Londres. Ses liaisons avec quelques
partisans des Stuart , les sentiments
qu'il manifestait souvent dans la so-
ciété , et son opposition déclarée aux
mesures de la cour donnaient de la
probabilité à l'accusation , qui d'ail-
leurs n'a jamais paru fondée sur au-
cune preuve positive et légale. Là
chambre des communes n'en passa
pas moins, le 25 mars 1723, un bill
d'accusation contre l'évêque ; ce bill
ayant été admis par la chambre des
pairs , le 9 avril suivant , il fut amené
devant la chambre quelques jours
après , et il lui fut permis de se dé-
fendre lui-même. Il prononça un dis-
cours plein d'éloquence , de force et
de dignité , dans lequel il réfuta tous
les faits allégués contre lui , de ma-»
nière à convaincre la plus grande par-
tie du public; mais le parti du gou-
vernement l'emporta. La chambre des
pairs le destitua de toutes ses places,
le dépouilla de ses dignités , et le ban-
nit à perpétuité du territoire de la
Grande-Bretagne. La sentence eut sou
exécution, et le 18 juin suivant, il fut
débarqué à Calais , où il rencontra le
lord Bolingbroke, qui , après un long
exil , avait enfin obtetm là permission
de revenir dans sa patrie : « Il me pa-
» raît, milord, qu'on nous a échangés,
V lui dit gaîment Atterbury. w Pope dit
à cette occasion , dans une de ses let-
tres : ic Apparemment la nation a peur
)) d'être surchargée de mérite, puis-
» qu'elle ne peut regagner un grand
» homme saus en perdre un autre ».
ATT
Atterbury alla d'abord à Bruxelles, et
ensuite à Paris , où il se livra à la culture
des lettres dans une sociële' peu nom-
breuse, mais choisie, composée d'hom-
mes du monde distingues par leur es-
prit et leurs connaissances. M"'". Mor-
rice , sa fille unique , qu'il aimait ten-
drement, et qui le méritait par son es-
prit , ses grâces et ses vertus , alla le
joindre en France; mais elle n'y vint
que pour mourir dans les bras de son
père, privé, par ce nouveau malheur,
de la plus grande consolation qu'il pût
espérer dans son exil. Il exprime des
regrets fort touchants sur cette perte ,
dans une lettre adressée à Pope , avec
qui il entretenait une correspondance,
dans laquelle il montre autant d'esprit
que de goût , et autant d'attachement
pour ses amis , que de fermeté et de
noblesse dans sou caractère : u J'aime
» ma patrie , dit - il dans une de ses
» lettres , et je l'aime avec tous ses dé-
» fauts. J'aime jusqu'à cette partie de
» la constitution qui m'a blessé sans
» justice, et qui par -là s'est blessée
» elle - même. Mon dernier vœu sera
» le même que celui de fra Paolo : Esto
» perpétua ; et si je meurs en terre
» étrangère , j'expirerai comme le Pé-
» leponésien de Virgile :
Dulcet moTient reminiscitur Argos. »
Atterbury , en effet , ne revit point sa
patrie. Il mourut à Paris , le 1 5 fé-
vrier 1732. Son corps fut transporté
en Angleterre, et enterré dans l'ab-
baye de Westminster'. Il avait ordonné
que, sur une urne qui renfermerait son
cœur , on gravât cette simple inscrip-
tion :
In hâc urnâ depositi sunt cioeres
Francisci Atterbury, episcopi Koffensis,
Ses sermons , imprimés en 4 vol.
in-^". , sont le plus considérable de
ses ouvrages , et sont toujours fort es-
timés; mais ses écrits de controverse
sont oubliés. Ce qu'on lira toujours
ATT 625
avec plaisir , ce sont les lettres qu'il
écrivait à ses amis , et dont la plupart
ont été conservées parmi celles de
Pope et de Swift. On en a fait une
collection sous le titre de : Atterbury^ s
epistolary correspondence. Thiriot
a publié à Paris des lettres critiques
sur quelques écrivains français , sup-
posées écrites par le docteur Atter-
bury; mais on ne peut en garantir
l'authenticité. Le caractère d'Atter-
bury, soit dans sa conduite particu-
lière , soit dans sa vie politique , a été
jugé très-diversement, et c'est ce qui
arrive à tous les hommes de parti;
mais il est généralement convenu qu'il
réunissait beaucoup d'esprit à de gran-
des connaissances, et qu il fut un très-
bon écrivain et un excellent prédica-
teur. Après avoir été long - temps hé
d'amitié avec Pope, il finit p,u- se
brouiller avec lui. On prétend qu'il le
définissait : Mens curva in corpore
curvo. S — D.
ATTICUS ( Titus Pompomus),
était romain d'origine, et de l'ordre
des chevaliers. Son père , ami des
lettres , lui donna dans son enfance
toute l'instruction que comportait cet
âge. La douceur de sa physionomie et
de sa voix, sa facilité et sou intelligence
lui donnaient sur ses condisciples une
supériorité qui excitait leur émulation.
Il comptait parmi eux les fils de Ma-
rius et Cicéron , qui furent toujours
ses meilleurs amis. Il était très-jeune
quand il perdit son père. Sa parenté
avec le tribun Sulpicius , qui périt par
la proscription de Sylla, le mit eu
danger. Voyant dans Rome tous les
cœurs désunis, les uns étan t pour Syîla,
les autres pour Cinna , et ne sachant
pas comment y vivre avec dignité ,
sans blesser un des partis , il se ren-
dit à Athènes , emportant une grande
partie de sa fortune. Sylla, pendant
50» séjour dans cette ville, eut toujours
4o
626
ATT
auprès de lui le jeune Atticus, dont le
goût et le savoir le charmaient. Il
parlait grec à faire croire qu'il était né
à Athènes , et s'exprimait en latin
avec tant d'élégance, qu'on lui trouvait
une grâce native plutôt ({n'acquise,
comme dit Cornélius Népos. Sylla le
pressait de revenir avec lui : « En
» grâce, lui dit Atticus , ne me menez
» pas contre ceux que j'ai quittés pour
» ne pas porter les armes contre
» vous. » Il rentra dans sa patrie
quand tout y fut pacifié. 11 avait un
oncle , Q. Caecilius, chevalier romain ,
homme riche et dur , dont il sut con-
server la bienveillance jusqu'au terme
de sa longue carrière : il en fut récom-
pensé. CœciHus, en mourant, l'insti-
tua héritier des trois quarts de ses
biens , ce qui lui valut dix millions de
sesterces. En politique , il se trouvait
toujours du parti des meilleurs ci-
toyens , et ne laissait pas douter qu'il
«■n fût, sans cependant, comme dit son
historien , se risquer au milieu des
tempêtes civiles; il ne demanda point,
le pouvant ftire avec avantage , les
places qui donnaient du crédit ou de
l'illustration , parce qu'il n'était plus
possible d'y prétendre , sans blesser
les lois , ni de les remplir sans danger.
Il accepta des heutenanres de plusieurs
consuls et de plusieurs préteurs; mais
il n'en suivit aucun dans son gouver-
nement. 11 avait soixante ans quand
César porta la guerre dans son pays :
il profita du privilège de son âge , et
lie quitta point Rome. Il fit les frais de
tout ce qu'il fallait à ses amis pour aller
joindre Pompée , et ne crut point bles-
ser ce général en ne se rendant point
auprès de .lui : il ne lin' devait pas ,
comme les autres, des honneurs et
des richesses. Sa neutralité fut si
açfi'e'able à César , qu'après sa victoire ,
loin de l'inquiéter, il lui rendit son
neveu cl sou bcau-frcre , qui s'c'taient
ATT
trouvés dans le camp de Pompée.
Ainsi Atticus évita de nouveaux dan-
gers , en restant fidèle à son plan de
conduite : il y tint surtout à la mort de
César, quand la république parut être
entre les mains des deux Brutus et de
Cassius. M. Brutus, très-jeune encore,
trouva dans Atticus , plus que sexagé-
naire , un ami , avec lequel il vivait
aussi familièrement qu'avec ceux de
son âge; c'était l'ame de ses conseils,
et même de ses affaires domestiques.
Antoine ne tarda pas à devenir redou-
table au parti des conjurés , au point
que Brutus et Cassius, désespérant des
affaires , se retirèrent dans les gou-
veruemements qui leur avaient été'
donnés par le sénat. Atticus , qui n'a-
vait pas voulu donner d'argent à ce
parti pendant qu'il était puissant,
voyant Brutus dans la détresse, et
forcé de quitter l'Italie , lui envoya
cent mille sesterces , et donna ordre
que, pendant son absence, on lui eu fit
tenir trois cent mille en Épire. Il ne
devint pas l'adulateur d'Antoine, heu-
reux et puissaut, et il n'abandonna
pas ses adversaires que la fortune ac-
cablait. La guerre s'ouvrit entre An-
toine , D. Brutus et Octave. Dans cette
crise, Atticus se sauva encore par une
rare prudence. Antoine , battu , avait
quitte l'Italie, et ses ennemis poursui-
vaient son parti , et cherchaient à dé-
pouiller entièrement Fulvie sa femme :
ils se préparaient même à faire périr
ses enfants. Atticus, quoique vivant
dans la plus intime amitié avec Cicéron
et Brutus, ne servit en aucune nianièro
leur passion contre Antoine. Il cacha,
autant qu'il le put, ses amis fugitifs,
et les aida dans leurs besoins ; il mit ,
à obliger Fulvie, embarrassée dans
des procès, et en proie à des terreurs
de tous genres, tant d'empressement
et de soin , qu'elle ne contracta aucun
engagement sans lui, et l'eut pout
ATT
rcponrlant en tonte occasion. Il se
plaisait à faire voir qu'il était l'ajiii ,
non de !a fortnne, mais des personnes.
On ne pouvait lui supposer des vues
intéressées : car comment imaginer
qu'Antoine se retrouverait à latéte des
atî'aires ? La fortune chaniiea tout à
coup ; il reparut en It.iiir. Atticus
craignant la proscription qui menaçait
les amis de Cicéron et de Brutis, se
tint cache, Antoine se ressouvint des
services qu'il en avait reçus ; il lui
écrivit , de sa main , de ne rien crain-
dre, et devenir auprès de lui. Atticus,
rendu à la sécurité, étendit ses secours
et sa prcjteclion à tous les proscrits
qui en eurent besoin , présents ou
absents. Sauféius , cbevalier romain
de son âge , et son ami d'étude , avait
en Italie d'importantes propriétés ,
que les triumvirs avaient vendues ;
Atticus fit si bien que Sauféius apprit
en même temps qu'il avait perdu et
recouvré ses biens. Il ne profita point
de la faveur d'Antoine pour accroître
les siens. Quoiqu'il eut beaucoup d'ar-
gent, personne ne fit moins d'acquisi-
tions et ne bâtit moins. Son domesti-
que était nombreux et cboisi : il se
composait de jeunes gens lettrés, de
lecteurs et de copistes. Il se faisait
toujours une lecture à sa table , où il
conviait ceux dont les goûts se rap-
procLaicnt des siens. Il mettait à la
j)our'iuite d'une atfaire dont il s'était
chargé, un zirle qui aurait fait croire
que c'était la sien ne propre. C'était ainsi
qu'il gérait les alïliires des deux Gcé-
ron , de Caton , de Marius , d'Horten-
sius , etc. On peut juger de-la que ce
ne fut pas par paresse , mais par ré-
flexion qu'il s'éloigna des affaires pu-
bliques. Passionné pour tout ce qui
tenait à l'antiquité , il donna des preu-
ves de son savoir en ce genre , dans
sou livre des annales , ou plutôt ,
&jmme dit CicéroU; dans son Histoire
ATT 627
universelle , qui renfermait un espace
de «00 ans. Il avait écrit les généalo-
gies des plus illustres familles de
Rome; i! s'essaya aussi dans la poésie ,
et écrivit en grec les événements da
consulat de Gcéron. Sans être sorti du
rang de chevalier, il se trouvait alKë
par Agrippa , son gendre , à Auguste;
il en était l'ami , et avait avec lui un
commerce de lettres très-suivi : il cor-
respondait aussi d'une manière très-
active avec Antoine. On sent combien
il lui fallut de sagesse et de prudence
pour conserver la bienveillance de
deux pareils rivaux. C'est ainsi qu' At-
ticus arriva à sa ^"j". année , vovant
toujours accroître sa considération et
ses richesses. La bonté de son carac-
tère lui avait valu pîusiturs héritages
considérables. Il avait )t«ii d'une santë
si heureuse , que , pendant plus de
trente ans , il n'avait pas eu besoin
■des secours de la médecine : il eut une
maladie à laquelle les mé«lecins et loi
ne firent pas d'abord d'attention,
croyant que c'était le tenesme. Après
trois mois , sans autres souffrances
que celles des remèdes , Atticus sentant
son mal augmenter , et que la fièvre
le gagnait , fit appeler Agrippa, son
gendre , et quelques amis ; il lear dit
qu'après avoir tenté , sans succès,
pour sa guérison, tout ce qui était en
Son pouvoir , il ne voulait plus nour-
rir son mal; qu'il les priait d'approu-
ver sa résolution, du moins de ne pas
inutilement la combattre. Après qu'il
se fut abstenu deux jours de toute
nourriture , la fièvre tomba tout à
coup, et le mal devint plus supporta-
ble. Il ne persista pas moins dans son
dessein , et mourut le cinquième jour
de cette abstinence , l'an de Rome
711. Il n'est resté aucun de ses ou-
vrages : on n'a point de ses lettres. Il
doit le nom dH Atticus a son séjour à
Athènes , et sa réputation àsus la
40..
Ô28 ATT
postënte auT let'res de Gceroîi , et à
Coniélius Nepos , qui a efcrit sa vie.
Q— R— Y.
ATTICUS élait de l'une dc> princi-
pales familles d'Athènes; car il descen-
dait des Eacides ; ujais les biens d'Hip-
parcbus. son père, avant été confis-
qués , sous prétexte d'uneconspiration,
il se trouvait dans un état voisin de
l'indigence, lorsque la fortune vint à
son secours d'une minière ine>pérce,
en \\ù faisant trouver, dans une mai-
son qu'il possédait auprès du théâtre,
■un trésor immense. Cette découverte
lui inspira d'abord beaucoup plus de
crainte que de joie; et, voulant se
luctîrc à l'abri des dénonciateurs, il
écrivit à Nerva. alors empereur : « J'ai
» trouvé un trésor dans mon champ ,
» que dois-je en faire? — Uses, lui
"a répondit ?»crva, de ce que lu as
ï> trouvé, i) Il répliqua que ce trésor
passait de beaucoup la fortune à la*
quelle il pomait prétendre. « Eh bien !
» abuscs-*n, lui récrivit Ni n'a ; car il
» est à toi. » Se trouvant alors l'un
des particuliers les plus riches de l'em-
pire, il sut faire un noble usage de sa
fortune. Hcrodcs son liîs, avant élë
nommé intendant des villes libres de
lAsie. voulut faireconstniireaTroade
des bains. dont cetteville manquait, et
l'empereur Adrien lui accorda, pour
ceLi , trois millions de drachmes
( 0.700,000 fr. ';; il en dépensa sept
millions ;6,5oo.ooo fr. }. Les autres
villes . craignant qu'on ne leur fit sup
porter cette dépense, s'en plaignirent
à l'empereur, qui fit paît de leurs
plaintes à .Atticus ; il répondit que c'é-
tait lui qui avait donné le surplus à
t>on fils . qui en faisait présent à la ville.
11 lui an iva plusieurs fois de sacrifier
cent boeufs à .ALnerve . en un seul jour,
et de donner un npas à tous ks ci-
ti>}cns d'Athènes. Enfin, par son tes-
tament, il leur légua à chacun une
ATT
iTiiue i 90 fr. ; par an , ce qui , en sup-
posant qu'ils ne fussent que six mille,
faisait 54o.ooo fr. par an. C — r.
ATTKX'S. for. HÉRODEs.
ATTICUS, philosophe platonicien,
florissatt au a', siècle de notre ère ,
sous l'empereur ]\Iarc Aurèle. Il com-
batrit les dogmes d'.\ristote sur les
corps ccle:;tes , sur la Providence , sur
la dernière fin de Ihonime, sur la quin-
tessence des êtres, et s'attacha surtout
à fixer une ligue de démarcation entre
la philosophie péripatéticienne et celle
de Platon. — On compte, dans l'anti-
quité . plusieurs autres .4tticus : un,
rhéteur de Pei^ame. dont parle Stra-
bon, et un, évèquedeConstantinople,
célèbre par ses démêlés avec S. .lean
Chrvsostôme, et qui composa un traité
De fide et virpnitate , pour les filles
de l'einnercur .\rcadius. K.
ATTILA, fils de Mandras. tirait
son origine des Huns qui avaient
combattu les empereurs de la Chine.
Il succéda, en 4^4 5 «^ son oncle Roas,
et paitagea l'autorité souveraine avec
sou frère Bleda. Ces deux chefs bar-
bares, établis dans la Hongrie et dans
la Scvthie, menacèrent l'empiie d'O-
rient, et forcèrent deux fois le faible
Théodose II d'acheter la paix à des
conditions honteuses. Sous des chefs
qui réunissaient l'habileté au courage,
la puissance des Huns devint redou-
table aux peuples de l'Euiopc et de
l'Asie. Les Huns regardaient surtout
Atula comme le plus intrépide de leurs
guerriers , et comme leur guide le plus
expérimenté dans leurs excursions mi-
litaires. Leur amour et leur respect
pour sa personne, se convertirent bien-
tôt en un sentiment superstitieux. .\t-
ti'a feignit d'avoir trouvé l'épée de
leur divinité tutélaire; fier de posséder
cette arme qui donnait à sa puiss,<nce
un caractère sacré , il ne songea plus
qu'à faire valoir ses droits divius et
ATT
iucontestahles à l'empire de l'univers.
Avant fait mourir son frère Bleda, ce
fratricide fut attribué à une inspira-
tion du ciel, et célelDre comme une
victoire. Seul maître d'un peuple qui
adorait la Divinité sous le symbole
d'une épée, cliez laquelle, dit Tvlontes-
quieu , les enfants entraient en furour
au récit des beaux faits d'armes de
leurs pères, ou les pères verraient des
larmes de ne pouvoir suivre leurs
enfants à la guerre , Attila avec une
ambition sans bornes , devait faire
trembler tous les peuples et devenir,
comme il le disait lui-même , le ûc'au
d jut Dieu se servait pour châtier les
nations. Eu peu d'années, il étendit sa
dommatiou sur toutes les provinces
de ta Germanie et de la Scvthie ; les
empereurs d'Orient et d'Occident
étaient ses tributaires , les Vandales
ses alliés , les Ostrogotbs, les Gépides,
une partie des Francs se réunissaient
sous ses drapeaux: les peuples les plus
reculés du Nord le redoutaient comme
un guerrier qui commandait à la vic-
toire, et coinme un magicien qui ex-
citait à son gré les orages , dictait des
lois aux éléments, et faisait tomber les
étoiles. Devenu le monarque uni-
versel des Barbares , et chef d'une
armée dont les historiens font monter
le nombre à ^ 00,000 combattants , il
porta ses armes jusque dans le
royaume de Perse , dont il avait en-
tendu vanter la puissance et les ri-
chesses. Après une longue marche
dans laquelle aucun obstacle ne put
l'arrêter, il fut battu par l'armée des
Persans , dans les plaines d'Arménie,
et se retira avec le projet de venger sa
défaite sur l'empire d'Orient. Il ne
manqua pas de prétexte pour déclarer
la guerre. Tous les états qui promet-
taient un riche butin étiiieut ses
ennemis naturels , et tous les princes
qu'il espérait vaincre javaieat manqué
ATT 629
à la foi des traités. Les Huns , conduits
par Attila, pénétrèrent dans i'Illyrie ,
et ravagèrent toutes les provinces de
l'empire , depuis le Pont-Euxin jus-
qu'à la mer Adriatiqpie. L'empereur
Théodose rassembla une armée pour
s'opposer aux ravages d'un si redou-
table ennemi ; mais dans trois batailles
sanglantes , la fortune se déclara pour
les barbares. Coustantiuople ne dut
son salut qu'a la hauteur de ses mu-
railles, et à l'ignorance des compa-
gnons d'Attila dans l'art des sièges.
La Thrace, la Macédoine , la Grèce,
devinrent la proie du farouche con-
quérant , qui porta partout le fer et la
flamme, et ditruisit soixante-dix villes
florissantes. Théoduse fiit réduit à sol-
liciter la clémence d'Attila ; les séna-
teurs et les nobles de Bysauce vendi-
rent leurs biens pour satisfaire son
avidité et apaiser sa col-re. Pendant
les négociations , les ambassadeurs
d'Attila allèrent menacer 1 empereur
de Consîantinople jusque sur sou
trône, et ceux de Theodose vinrent
plusieurs fois se jeter aux pieds du roi
des Huns , qui avait établi sa cour
dans un village roval , bâti sur les
bords du Danube. Attila reçut les dé-
putés de Bvsance , assis sur une chaise
de bois , et reprochant à l'empereur
Théodose d'avoir manqué aux condi-
tions des traités r « Où est la forteresse,
» s'écria-t-il , où est la ville de l'empire
» romain qui peut prétendre à subsis-
» ter, lorsqu'il nous plaira de la dé-
» truire ? » Les députes ne parent
apaiser le monarque -des Huns qu'à
force de soumissions et de présents :
tandis qu'ils étaient encore auprès de
lui , Edécou , l'un de ses ambassa-
deurs envoyés à Constantinople . se
laissa corrompre par l'eunuque Cvj-
sapbius , et promit d'assassiner son
maître , à son retour sur les bords
du Danube. La vue des richesses qà
03o ATT
lui claicnt promises avait exalte la
tète de ce barbare ; mais en revoyant
Attila, il n'eut |)as le conrage d'ache-
ver son crime; il se jeta aux pieds du
monarque, avoua sa faute, et implora
son pardon. A la nouvelle d'une cons-
piration découverte , on s'attendait à
voir couler des flots de sang , et les
ambassadeurs de Thëodose trem-
blaient d'être immoles à la vengeance
d'Attila ; mais le roi des Huns se con-
tenta d'envoyer des députes à Coiis-
lantinoplc , ])our reprocher à The'o-
dose sa perfidie , et pour demander la
tête de (^rysaphius , dont l'empereur
racheta la vie par de nouveaux tributs.
La paix fut conclue et bientôt trou-
blée j Marcicn, qui succéda à Thc'o-
dose , sentit toute la honte des traitc's
faits avec Attila , et refusa de payer
le tribut accoutume' : « J'ai de l'or
5> pour mes amis , dit l'empereur , et
» du fer pour mes ennemis. » Atlila
fut irrité de celle réponse , et, dans sa
colère, il menaça à la fois l'empire de
Constantinojile et celui d'Occident.
Ses ambassadeurs envoyés à liysance
et à Ravenne , adressèrent aux deux
empereurs la même harangue : « At-
1) tila notre maître et le tien t'or-
•» donne de fiire préparer, sans dé-
» lai , un palais pour le recevoir. »
Os paroles portèrent la terreur dans
les deux cours impériales ; mais Attila
différa d'exécuter ses menaces , jiis-
«{u'an moment où il aurait achevé une
fintrepriseà laquelle il mettait une gran-
de importance. Depuis long -temps,
il avail le ])rojet de faire une invasion
dans les Gaules; au premier signal, les
nations de la Germanie et de la Scythie
accoururent sous ses drapeaux, et des
mvriadesdc barbares s'avancèrent vers
le Rhin et la Moselle. Aleurapproche, la
consternation fut universelle. Les peu-
ples désertaient les villes et fuvaient
«ians les forêts. Attila traversa laCliam-
ATT
pagne , qu'il trouva partout déserte sur
son passage. Il passa la Seine, attei-
gnit la Loire, et vint camper sous les
murs d'Orléans. Les habitants , encou-
ragés par xAnianus ou Agnan, leurévê-
que, arrêtèrent h s premiers efforts des
barbares, et virent bientôt arrivera
leur secours une armée comman'lée par
Aélius, général des Romains, et par
Théodoric, roi des Visigoths, étiiblis
à Toulouse. Cette armée réunissait sous
ses drapeaux , les Goths , les Ro-
mains, les Armoricains, les Alains , les
Bourguignons , et les Francs qui obéis-
saient à Mérovée; à leur arrivée, le
roi des Huns leva le siège, et, redou-
tant les suites d'une défaite au centre
de la Gaule, il abandonna les boids
de la Loire , et revint attendre ses
ennemis dans les plaines de Chàlons-
sur-Marne; bientôt les deux armées
se trouvèrent eu présence; Attila in-
quiet sur le sort du combat qu'il ne
pouvait éviter, consulta les Aruspices
qui lui annoncèrent sa défaite. Le r<>i
barbare , sans laisser voir ses inquié-
tudes, parcourut les rangs de son ar-
mée, rappela à ses soldats leurs an-
ciens exploits , et leur montra ( ce
sont ses propres expressions ) la joie
d'un nouveau combat comme la ré-
compense de leurs travaux. !l se servit
habilement de la doctrine de la pré-
destination , si familière à presque tous
les peuples guerriers , et montra à
ses compagnons la vengeance du ciel
prête à éclater sur la tête des lâches.
Enflammés par les discours et par la
présence de leur chef, les Huns étaient
impatients de combattre ; Attila rangea
son armée m bataille , et s'avança à
la tète de l'élite de ses guerriers. Après
avoir, selon le tangage des historiens ,
obscurci l'air d'un nuage de flèches et
de javelots, l'infanterie et la cavalerie
des deux armées se joignirent et coui-
bnttireut corps à corps. Les Huns en-
ATT
foncèrent le centre de l'armée enne-
mie , se'parèrent les deux, ailes , et
réunirent tous leurs efforts pour acca-
bler et détruire l'aile gauche. Attila se
croyait déjà sûr de la victoire , lors-
qu'un corps de réserve, commandé
par Thnrisraond, fils de Théodoric ,
descendit des hauteurs voisines, atta-
qua l'armée des Huns avec impétuo-
sité , porta le désordre et la mort dans
leurs rsiD^s ; Attila , pressé de toutes
parts , se retira avec peine dans son
camp, où la imit sauva les débris de
son armée. L'intrépide barbare se fît
des retranchements avec des chariots
et des bagages , et , dans son déses-
poir , il fît dresser un bûcher pour s'y
précipiter lui-même, plutôt que de
tomber vivant entre les mains de ses
ennemis. Les vainrpieurs et les vain-
cus passèrent la nuit dans les alar-
mes ; 160,000 morts, selon quelques
historiens , couvraient le champ de
^ bataille ; on avait vu dans l'une et
l'autre armée les enseignes des Goihs
et des Francs , divisés entre eux , et
combattant , les uns pour Rome , les
autres pour Attila. Les Romains du-
rent s'applaudir de voir les barbares
au\ prises avec les barbares , et mon-
trèrent peu d'ardeur à poursuivre les
avantages de cette journée. Les soldats
de Théodoric, mort dans la mêlée,
hésitaient d'attaquer Attila vaincu ; le
préfet Aétius semblait redouter que les
Gotbs et les Francs, ces dangereux
auxiliaires de Rome , n'eussent plus
d'ennemis à combattre. Au milieu de
ces hésitations , Attila se -préparait à
la retraite ; son historien le compare
au lion dans sa caverne , envii'onné
de chasseurs elTrayés à son aspect.
Tout porte à eroire qu'après sa dé-
faite , il conservait encore des forces
redoutables ; car il ne fut abandonné
par aucun de ses alliés. Les Goths se
i-etircrcnt dans les proviaces meridio-
ATT 05 1
nales de la Gaule. Aétius quitta les
bords de la Marne; Attila, touiours
enfermé dans i'enceinte de ses cha-
riots, s'étonna d'être resté seul dans^
les plaines de Chàions. Redoutant
quelques stratagèmes , et manquant
de vivres dans un pays qu'il avait
ravagé, il se retira vers le Rhin, et
sa retraite, qui ne fut troublée que
par les Francs de IMcrovée, apprit
enfin, aux peuples des Gaules , que le ''
Jléau de Z?/e« avait été vaincu. Attila,-
plus irrité que découragé, reçut bientôt
des renforts; et le monde se demanda
sur quel pays , sur quel trône allait
éclater sa colère, sur quel peuple il
allait venger la honte de sa défaite. H
résolut d'attaquer l'Italie. Pour la se-
conde fois , il réclamait, comme son
épouse, Honoria, sœur de Valenti-
nien IIL Cette princesse, après avoir
déshonoré son rang par sa conduite,
avait imploré l'appui d'Attila contre sa
propre famille, et demandé au mo-
narque barbare d'être admise au rang
de ses épouses ; le roi des Huns , peu
scrupuleux sur l'honneur des prin-
cesses , avait saisi cette occasion de se
déclarer le champion de la beauté
persécutée; mais, comme ses idées
chevaleresques n'étaient pas tout-à-
fait désintcressé?s, ce terrible cheva-
lier exigeait qu'on lui cédât , avec la
main d'Honoria. la moitié des provin-
ces de l'empire. Il entra en Italie, à la
tête d'une armée formidable; tandis
que feinpereur tremblant, envoyait
au roi des Huns des ambassades inu-
tiles, Attila prenait et détruisait Aqui-
lée ; il réduisait en cendres Padoue ,
\icence , Véronne et Bergame, et
ravageait les plaines de la Lombardie.
Tous les habitants des villes et des
campagnes fuyaient à son approche;
les uns se réfugiaient dans les Alpes ,
les autres dans les Apennins. Les peu-,
pies de la V enétis allèrent chercher um
632 ATT
asyle dans les laguues de la Taer Adria-
tique, et fondoiciit Veuise, qui doit
ainsi son origine à la terreur qu'inspi-
rait Attila. Eu entrant dans le p;ilais
de Milan , Atiila aperçut un tableau
qui reprc'sentait l'empereur des Ro-
mains assis sur son trône, et les prin-
ces de Scythic p rosier nc's à ses pieds;
il ordonna au peintre d'effacer ce ta-
l)lcau, et de représenter sur la même
toile le roi des Huus assis sur son
trône, et les empereurs romains dé-
^losant à ses picd> des sacs d'or. Les
spectateurs a})plaudirent sans doute
à ce changement , et l'Italie ne tarda
pas à s'apercevoir que le tableau
ordonné par le roi des Huns était
d'une effrayante vérité. L'empire d'Oc-
cident n'avait point d'armée pour
sa défense; remp,ereur, le sénat et le
peuple de Rome eurent recours aux
larmes et aux supplications; le pape
Léon 1 ''. exposa sa vie pour sauver
son troupeau , et se rendit dans le
c^mp d'Attila avec les ambassadeurs
romains; on proposa au roi des Huns
de lui abandonner tous les droits de
la princesse Honoria; cette proposi-
tion, la soumission des Romains, l'é-
loquence de Léon, son air vénérable,
apaisèrent la colère du prince bar-
l)are : il faut croire aussi que l'ariivée
d'Aélius , et le souvenir de la bataille
de Cliâions , purent contribuer à le
rendre moins inexorable. Comme il
ravageait tous les pays qu'il parcou-
rait, son armée manquait presque
toujours de vivres ; le beau ciel d'ifa-
lie commençait d'ailleurs à amollir les
patres du Nord; Attila accepta les
conditions de la paix , et revint en
Hongrie. Les Romains, qui n'avaient
eu pour défense que leurs prières ,
remercièrent le ciel , et crurent devoir
leur salut à un miracle. On racontait
qu'Attila avait été effrayé des menaces
de t). Pierre et de S. Paul, desccudiis
ATT
du ciel à la voix de S. Léon. C<rf(«
fable est reléguée aujourd'hui dans les
vieilles chroniques , et nous ne la ré-
pétons ici que parce qu'elle a été cou-
sacrée par le pinceau de Raphaël et le
ciseau de l'Algarde. Attila , de retour
de Hongrie , tenta , contre la Gaule ,
une nouvelle expédition , qui ne réus-
sit pas plus que la première ; il trouva ,
dans les Alains, les Francs et les Goîhs ,
ces ennemis invincibles. Obligé, pour
la seconde fois , de quitter la Gaule ,
il se ressouvint qu'on ne lui avait
point encore livré la princesse Ho-
noria , et résohit d'aller h redeman-
der le fer et la flamme à la main;
pondant qu'il faisait ses préparalifs
pour attaquer de nouveau l'Italie, et
qu'il répétait sans cesse le nom d'Ho-
noria dans ses terribles manifestes, il,
fut séduit ]iar la beauté d'une jeune fille
nommée Ildico , et l'ajouta à la nom-
breuse liste de ses épouses. Attila se
livra , eu cette occasion , à t'jus les
excès de la deTjauche et de l'amour.
Le lendemain de sou mariage, ses
courtisans et ses guerriers , impatients
de saluer leur maître , pénétrèrent
dans sa tente, et trouvèrent la jeune
Ildico couverte d'un voile, assise près
du coips glacé de sou époux. Pen-
dant la nuit, Attila avait été étouffé
par une hémorrhagie , l'an 4->5. Ou
soupçonna sa nouvelle épouse d'avoir
contribué à sa mort, et, dans les deux
cours de Rome et de Bjsancc, la jeune
Ildico fut célébrée comme une autre
Judith. On exposa le corps d'Attila au
milieu de ia plaine , sous un pavillon
de. soie, et ses guerriers en firent
plusieurs fois le tour en chantant
des vers à la louange de celui qui avait
été leur père et la terreur de l'uni-
vers; les barbares se coupèrent les
cheveux selon leur usage , et répau-
diront leur sang pour honorer la
poiûf c fuucbre de l'.iu' chef. Le corps
ATT
du roi des Huns fut enfermé dans
trois cercueils , le premier d'or , le
second d'argent , et le troisième de
fer; on égorgea les captifs qui avaient
creusé la fosse , et le corps d' Attila
fut enseveli pendant la nuit, comme
si on eût voulu dérober le secret de
sa tombe à tous les peuples qui de-
vaient maudire sa mémoire. Jornandes
nous a laissé un portrait de ce roi
barbare, qui rappelle son origine et
qui nous ofiVe des traits qu'on re-
trouve encore dans les Tartares K-il-
mouks. Il avait une grosse tète , un
nez aplali , de larges épaules , une
taille courte et carrée. Sa démarche
était ûcre , sa voix forte et sonore j
il roulait sans cesse des yeux féroces,
et les ffois qui suivaient sa cour di-
saient qu'ils ne pouvaient supporter
la majesté de ses regards. Corneille
a peint d'un seul trait la manière hau-
taine avec laquelle il traitait les princes
qui suivaient sa cour :
Ils ne sont pas venus nos deux rois ; qn'on leur dise
Qu'ils se font trop attendre , et fju'Altil.i s'ennuie.
Attila avait coutume de dire que
l'herbe ne pouvait croître ou son che-
val avait passé ; il mettait toute sa
gloire à inspirer la terreur, et ne
cherchait point à se distinguer par les
dehors de la magnificence. Sa table
était de bois, ainsi que ses coupes et
ses plats ; il ne se nourrissait que de
viande, et regardait le pain comme
un \u\e indigne des conquérants du
Nord. Maître de plusieurs royaumes ,
il n'eut jamais de capitale , et son pa-
lais n'était qu'une immense cabane
ornée des dépouilles des vaincus. Il ne
manquait point de talents militaires;
vaincu plusieurs fois , il fit sa retraite
avec habileté, et ne reparut que plus
redoutable sur le champ de bataille;
il mérita l'afTection de ses alliés qui
ne l'abandonnèrent point dans les
lieyers, et celle de ses sujets qui célé-
A T T 635
braient sa justice. Le modèle des hé-
ros barbares, il effriya le monde par
ses conquêtes , et l'étouua q;iclquci'uis
par sa générosité et sa clémence. Ne
connaissant d'autre politique que la
guerre , et d'autres lois que celic de la
victoire, il ne fit rien pour conserver
à sa fami'lc les A^astes étals qu'il avait
conquis; l'empire des Huns périt avec
lui, et les ruines de cinq cents villes
furent les seuls monuments de sa puis-
sance. Sa vie a été écrite , dans le 1 2".
siècle, par Juvencus Caicilius Calanus
Delmaticus , et dans le 1 6'. par Nicolas
Olaus, archevêque d'Upsal. M — D.
ATTINGHAUSEN ( Guerard \
land'imman du canton d'Uri , en i loG.
Il eut part, cette même année, tant
à la fondation , qu'au renouvellement
de la fédération entre les trois pays
d'Uri, de Schwitz et d'ÎJnderwald ,
fédération qui , renouvelée depuis de
dix ans en dix ans, a été l'origine de
la confédération des cantons suisses.
U— I.
ATTIRET (le frère Jean-Denis) ,
jésuite etpeintre français, delà mission
de Pékin, né k Dole, en Franche-
Comté, le 5i juillet 1703, reçut de
son père , qui professait la peinture ,
les premières leçons de cet art , pour
lequel il annonça les plus rares dispo-
sitions. Encouragé et secondé par la
marquis de Brossia, il se rendit à Rome
pour s'y perfectionner par la vue et
l'étude des chefs-d'œuvre. A son re-
tour , il passa par Lyon et y fit quel-
ques tableaux qui lui méritèrent une
première réputation. A l'âge de trente
ans , il entra chez les jésuites dans
l'humble et simple qualité de frère
convers. Quelques années après , les
missionnaires de Pékin avant fait la
demande d'un peintre français , il
sollicita cette destination , et partit:
pour la Chine, vers la fin de lyS^.
Le frère Aitiret ne fut pas plulôÇ
()"4 ATT
arrive à Pékin, qu'il offrit à l'empe-
reur Kien-long uu tnbleau repre.sen-
taut X Adoration des rois, et ce priuce
en fut si satisfait qu'il le fit placer dans
l'interii-ur de ses appartements. On
se figurerait difficilement les dégoûts
et les contrariétés qu'eut à essuyer le
talent de l'artiste français. Accoutumé ,
en Europe , a ne peindre que l'histoire
et le portrait, il fallut qu'il se liviât
à tous les genres, selon les ordres
qu'il recevait, et qu'il se conformât
à toutes les irrégularités du mauvais
goût chinois. L'empereur n'aimait pas
la peiuture à l'huile , à cause de
son vernis; les ombres, quand elles
étaient unpeu fortes , lui paraissaient
autant dt taches. Il fallut préférer la
détrempe, et se résoudre à ne plus
f.iire usage que d'ombres extrêmement
claiies et légères. Le frère Atliret se
vit forcé de recommencer, en quelque
iortc, un cours de peinture, et de
prendi-e des leçons des peintres chi-
nois. Ceux-ci, tout en reconnaissant
la supériorité de ses talents , lui firent
observer que les choses qu'il négligeait
comme des minuties daus l'exacte
représentation des fleurs, du feuille
des arbres , du poil des animaux , des
habillements, des mains chinoises aux
ongles longs , étaient , parmi eux ,
des détails dont la stricte précision
était exigée avec rigueur , et sans la-
quelle on ne pouvait plaire à des yeux
chinois. Le frère Attiret sentit qu'il ne
pourrait obtenir le suffrage du monar-
que qu'il seivail , qu'en gâtant ses
tableaux, et il eut le courage de s'y
résigner. Ses travaux n'eurent presque
point d'interruption ;ils furent souvent
excessifs depuis 1 755 jusqu'en i 760,
années les plus brd'antesdii règne de
l'empereur Kien -long, et dont pres-
que chaqut mois a été marqué par des
victoires, qui ont si considérablement
agrandi les limites de son empire. Ces
ATT
conquêtes , et les batailles qui les
avaient j)rocuiées , fournirent les su-
jets d'un grand nombre de tableaux
qui furent urdonnés au frère Attiret,
et dans l'exécution desquels la bizar-
rerie du goût chinois lui fit rencontrer
une foule de difficultés : l'extrême
célérité qu'il était forcé quelquefois de
mettre dans son travail , lui permettait
à peine de songer à la nourriture et
au sommeil. La modestie , la douceur
et la docilité de l'artiste français
l'avaient rendu cher à l'empereur, qui
ne laissait passer presque aucun jour
sans se rendre à son attelier, pour
l'entretenir et le voir peindre. Le
29 juillet 1 754 , étant entré au palais,
selon son usage , un des grands de la
cour lui annonça qu'il venai^ d'être
créé mandarin. Une si haute distinc-
tion aurait pu tenter un cœur moins
religieux. Le premier soin du frère
Attiret fut d'aller se jeter aux pieds
du comte-ministre, et de le conjurer
d'intci céder pour lui auprès de l'em-
pereur , afin qu'il lui fût permis de ne
pas accepter un honneur qui convenait
si peu à l'humble rang qu'il tenait dans
l'état religieux. Le ministre, étonné
d'un refus dont la Chine ne voit pas
d'exemple, fit tout ce qu'il put pour
lui persuader d'accepter cette faveur ;
et le voyant inébranlable dans sa ré-
solution : « Du moins , dit-il , vous
» accepterez les revenus , si vous ne
» voulez ])as accepter les marques de
« la dignité. » Le frère Attiret , aussi
désintéressé que modeste, refusa cons-
taminenl l'un et l'autre. Le lendemain ,
l'empereur l'ayant fait appeler, lui fit
un grand nombre de questions sur les
motifs de son refus. Le frère se ])ros-
terna à ses pieds , et sut employer des
expressions si touchantes pour justifier
et colorer sa résistance, qu'il eut le
bonheur de ne pas irriter le monarque,
et d'eu obtcnii' ce que désirait sou
ATT
extrême modestie. Le frère Attiret ,
au rapport des missionnaires , avait
du feu , de la vivacité , beaucoup
d'esprit , une piëte tendre , et le
plus aimable caractère. Nous n'avons
de lui qu'une seule lettre, très-inte'-
ressante et élégamment e'crite , inse'-
rée dans le Recueil des Lettres édi-
fiantes ,\ou\. XXVII. Il y donne la
description d'une des maisons de plai-
sance de l'empereur , et quelques
considérations sur le goût de l'architec-
ture chinoise. D'après le compte qu'il
y rend aussi de ses travaux les plus
habituels , on voit que, pendant les
premières années de son séjour à
Pékin , il était spécialement occupé à
peindre, soit à l'huile sur glaces, soit
à l'eau sur la soie , des arbres , des
fruits , des oiseaux , des poissons, des
aiiimaux de toute espèce , rarement
la figure. Les grands tableaux d'his-
toire, ordonnés à l'occasion des con-
quêtes de l'empereur , sont d'une
époque postérieure. Tous les ouvra-
ges de cet artiste sont renfermés dans
l'intérieur du palais de l'empereur ,
où personne n'est admis. Les mission-
naires eux-mêmes n'ont guère connu
d'autre production de son pinceau ,
que le beau tableau de l'Ange Gar-
dien , qui orne la chapelle des Néo-
pliites , dans l'église de la mission
française de Pékin. Le frère Attiret ,
épuisé de forces et consumé de travaux,
mourut à Pékin , le 8 décembre 1 768,
âgé de soixante-six ans. L'empereur
Kien4ong l'honora publicfuement de
ses regrets , et donna 200 onces
d'argent ( 1 5oo fr. ) pour concourir
aux frais de ses funérailles ( ^^ Lettre
du P. Amiot, Journal des Savants,
l'jni , mois de juin ). G — R.
ATTIRET ( Claude -François) ,
neveu du pi'écédent, né à Dole le
14 décembre i7'28, apprit la sculp-
ture à l'école de Pijal. Ayant rcm-
ATW
6^5
porte' un des grands prix annuels, il
fut envoyé à Rome pour se perfec-
tionner. De retour à Paris, il fut
reçu à l'académie de peinture et de
sculpture, et composa quelques ouvra-
ges qui lui firent une espèce de répu-
tation. Il demeura ensuite à Dijon,
où il trouva plusieurs occasions d'exer-
cer son ciseau , et revint enfin dans
sa ville natale. Les magistrats de
Dole lui confièjrent l'exécution de la
statue de Louis XVI, la première qui
ait été élevée à ce prince. Elle a été
brisée pendant la révolution. C'est
Attiret qui a fait les ornements de la
fontaine publique de Dole. Il est mort
à l'hôpital de cette ville , le 1 5 juillet
1804. W^_s.
ATWOOD ( George ) , physicien
anglais, né vers 174^, étudia à l'é-
cole de Westminster et au collège de
la Trinité de Cambridge, où il fut
ensuite professeur. Le célèbre Pitt ,
ayant assisté à un cours de physique
qu'il faisait , conçut une si grande idée
de ses talents, qu'il l'employa dans
le ministère des finances. Ce ministre
lui fit obtenir une pension qui s'étei-
gnit à sa mort , arrivée en 1 806 , ua
an avant celle d'Atv?ood. Ses ouvra-
ges , écrits en Anglais , sont : I. Traité
sur le mouvement recliligne et la
rotation des corps, avec une des-
cription d'expériences relatives à
ce sujet, 1784. On se servit, poux'
ces expériences, d'une machine très-
ingénieuse, inventée par Atwood, et
qui porte son nom. On la trouve dans
tous les cabinets de physique , où elle
sert à démontrer, par expérience, les
lois de la chute des corps. II. ^na-
lyse d'un cours sur les principes de
la physique fait à l'université de
Cambridge, m-8°. , 1 784. L'auteur ne
se montre pas moins savant dans cet
ouvrage que dans le précédent. III.
Recherches fondées sur la théorie
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du mowement pour déterminer les
temps de vibration des balanciers
des horh^'3s . dans les Transactions
philosophiques , et analysées dans la
Biblioth. Britann. de Genève, tom- II
des sciences et arts. B — r j".
ATZYZ , second prince de la dy-
nastie des Kharismiens , succéda, en
jv.'], à Cothbeddyn son père. Après
avoir rempli comme lui la charge d'é-
chanson du sultiiau Sandjar , il trahit
la confiance de son prince, en se ren-
dant indépendant dans le Kharisra,
qu'il possédait à titre de fief. Au bruit
de sa révolte, Sandiar marcha contre
lui , le vainquit, prit son fils , qu'il fit
périr, et donna le gouvernement du
Khaiism à Solyman son neveu. Le
sultiian etaii à peine de retour dans
ses ét.its, qu'A'zyz, secouru par les
Khifaiis , rentra dans le Kharism.
S 'ndpr , d'abord vaincu , leva une
nouvelle armée, battit encore une fois
Alzvz, le força à la paix; et, par un
trait de générosité déplacée , lui rendit
le Kharism. Loin d'être reconnais-
sant d'un si grand bienfait, ce rebelle
n'en devint que plus hardi. Il voulut
même attenter à la vie de son vain-
queur; mais les assassins qu'il avait
envoyés à la cour de Sandjar, furent
pris et condamnes à mort. Le sulthan
ATZ
rentra, en T147, dans le Kharism.
Atzvz, après avoir soutenu un long
siège dans Hézar-Asp , eut beaucoup
de peine à se sauver. Il imp'ora en-
core la clémence de Sandjar, qui con-
sentit à lui accorder le pardon de son
crime , s'il voulait venir se prosterner
devant lui et baiser la terre. Atzyz
promit ; mais, trop fier pour accomplir
une aussi humiliante condition , il
s'approcha monté sur son cheval , in-
clina la tête devant le prince , et s'en
retourna. Sandjar sacrifia son orgueil
au bien des peuples tourmentés par
la guerre , et se contenta de cette dé-
marche. Depuis ce temps , Atzyz vécut
avec lui en bonne intelligence, et porta
ses armes chez les peuples qui habi-
tent le long de la mer Caspienne. Il
conquit plusieurs provinces, et mourut
peu après .en 1 1 55 , dans la vallée de
Khabouschan, âgé de 61 ans. Atzyz
est représenté dans l'histoire comme
un prince très-courageux, savant dans
l'art militaire, et très-libéral envers les
hommes de lettres, au nombre des-
quels on pouvait le compter. 11 avait
régne ^^n2[t-neuf ans dans le Kha-
risui , que son père avait reçu a titre
de fief ( f^or. Cothbeddyn ). Son fils
Il-Axcelan , lui succéda. J — >'.
FIN DU SECOND VOLUMi:.
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BIOGRAPHIE UNIVERSELLE
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