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Full text of "Biographie universelle, ancienne et moderne; ou, Histoire"

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BIOGRAPHIE 

UNIVERSELLE, 

ANCIENNE  ET  MODERNE. 
LEI— LON. 


i  ^; 


DE  L'IMPRIMERIE  D'EVERAT, 

RUE    DU  CADRAN. 


^BIOGRAPHIE 

UNIVERSELLE, 

ANCIENNE  ET  MODERNE, 

OU 

HISTOIRE,  PAU  ORDRE  ALPHABETIQUE,  DE  LA  VIE  PUBLIQUE  ET  PRIVEE  DE 
TOUS  LES  HOMMES  QUI  SE  SONT  FAIT  REMARQUER  PAR  LEURS  ECRITS  , 
LEURS  ACTIONS,  LEURS  TALENTS,  LEURS  VERTUS  OU  LEURS  CRIMES. 

OUVRAGE    EUTIÈREMERT    KEUF, 

RÉDIGÉ  PAR  UNE  SOCIÉTÉ  DE  GENS  DE  LETTRES  ET  DE  SAVANTS. 


On  doit  des  égard*   «ai  vivaiU  {  on    <i*   doit,   aux  morii, 
que  la  rérilë.     f  Volt.  ,  pt4miirt  LtlUe  sur  Œdipe.  ) 


TOME  VINGT-QUATRIFME. 


490204 


'ZA.*?.^^ 


A   PARIS, 

CHEZ  L.  G,  MICHAUD,  LIBRAIRE-ÉDITE  UK, 

aÇE    DE    CLÉRT>    K°.   l3. 


1819. 


3^ 


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Ni 

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»'VV»WV^WVW»V»VS^M<»\\M»^»VW^%VWW^MrV^WWV^^^^W»WVWV^W^WV»W»M»^^^MMWMM<»^>^% 


SIGNATURES    DES    AUTEURS 


DU  VINGT-QUATRIEME  VOLUME. 


MM. 


MM. 


A. 

Baraiïti. 

H— Q-N. 

IlEWNEQUlIf. 

A.  B-T. 

Beuchot. 

H— KY. 

Henry. 

A—G— R. 

AUGER. 

J-B. 

Jacob-Kolb. 

A.  R—T. 

Abel-Rémusat. 

L. 

Lefebvre-Cadcht. 

A— T. 

H.  AODllFRET. 

L B E. 

Labouderie. 

B.j. 

Barbier  jeune. 

L— o. 

Léo, 

B— I. 

Bernardi. 

L-P-E. 

Hippolyte  ds  Laporte. 

B— L-T. 

BOL'CHARLAT. 

L— s— E. 

Lasalle. 

B— P. 

Beauchamp, 

L — u. 

Ledru. 

B-s. 

Bocous. 

L-Y. 

LÉCUY. 

B-.S5. 

BOISSONADE. 

M— D  j. 

MiCHAUD  jeune. 

B-u. 

Beaulieu. 

M— É. 

MONMERQUS. 

C — AD. 

CaTTEAU-CaLLE  VILLE, 

M — ON, 

Marron. 

C.G. 

CADET-GA^SlCOURT. 

P— c— T. 

Picot. 

c.  M.  P. 

PiLLET. 

P— E. 

POx>CE. 

C—y. 

Castellatt. 

p  et  L. 

Percy  et  Laurent. 

C.  T— r. 

Coquebert  de  Taizt. 

p.  p.  p. 

Prévost  (Pierre). 

C-V— R. 

CUVIER. 

p— s. 

PÉRIÈS. 

D— -B— «. 

Dubois  (Louis  ). 

R-D-N. 

Renauldin. 

D— c. 

Dellac, 

R— L. 

De  P«.ossel. 

D— c. 

Deppijcg. 

S.D.S— Y 

.  Silyestre  de  Sact« 

D-c-s. 

Desgexettes, 

s.  M— N. 

Saist-Màrtin. 

D— L. 

DuvAL  (  Henri.  ) 

S-R. 

Stapfer. 

D.  L. 

De  L'aulmate. 

s.  s— I. 

Simon  de  Sismoitdi,. 

D-L-P. 

Delaplace. 

St.S— N. 

Saint-Surin. 

D-8. 

DESPORTE8-Bo6CHKROÎf, 

St-t. 

Stassart. 

D-u. 

DOVAU. 

T— D. 

Tabaraud. 

D-V-L. 

Deville. 

U-i. 

USTÉRI. 

D-x. 

Decroix. 

V.  s.  L. 

Vincens-Saint-Lavrent, 

D-i-i. 

Dezos  de  la  Roquitts. 

W—R. 

WALCK.ENAER, 

E-.. 

Etriès. 

W— 8. 

Weiss. 

F-R. 

Fol'rkier. 

Y. 

Anonyme. 

c— CE. 

Ge.^ce. 

z. 

Anctnymc. 

c-> . 

CyiLLO."!  (  .limé). 

BIOGRAPHIE 

UNIVERSELLE. 


LeICH  (  Jk\n -Henri  ),  savant  et 
lal)oricux  jihilologiic  ,  ne  à  Leipzig 
en  iH'io  ,  annonça  fort  jcnne  d'heu- 
reuses dispositions  ,  et  lit  ses  études 
de  la  manière  la  plus  brillante.  Il 
passait  la  plus  grande  partie  de  son 
temps  à  la  bLl)liotliêque  publicpie,  oc- 
cupe à  coUationnerd'anciens  manus- 
crits, et  à  en  comparer  les  dilFerentes 
leçons.  Il  fut  nomnie'.en  1 7 4^,  profes- 
seur extraordinaire  de  philosophie , 
Pt  prit  possession  de  cette  chaire  par 
une  harangue,  DePhotii  Biblivthecd. 
Il  rétablit  plusieurs  passages  altères 
par  l'ignorance  des  copistes  ,  et  re- 
leva les  erreurs  échappées  à  Schott 
dans  sa  version  latine.  Il  venait  d'être 
désigne  pour  la  chaire  de  langue  grec- 
que ,  lorsqu'il  fut  enlevé  par  une 
mort  prématurée,  le  10  mai  1750, 
à  l'âge  de  trente  ans.  Leich  avait  des 
connaissances  très-profondes  dans  les 
langues  ei  dans  l'histoire.  Il  était  eu 
correspondance  avec  la  plupart  des 
savants  de  l'Allemagne  et  de  l'ItaUej 
et,  quoique  jeune,  il  comptait  au 
nombre  de  ses  amis  les  cardinaux 
Passionei  et Quirini,Gori, Bruckeret 
Weselius.  Il  avait  formé  une  collec- 
tion précieuse  de  tableaux  et  de  pier- 
res gravées.  On  a  de  lui  :  I.  T)e  Ori- 
gine et  incrément is  tjpne,raphiœ 
Lipsiensis  liber  sinf^iilaris  (  Leipzig, 
1 74o),  iM"*.  L'ouvrage  est  divisé  en 
ftix chapitres fjni  trnîcnt  de l'éfablib- 


sèment  de  Timprimerie  à  Leipzig, 
de  ses  progrès  jusqu'au  temps  delà 
réformation,  et  enfin  de  l'introduc- 
tion en  celte  ville  des  caractères  grecs 
et  arabes.  On  trouve  ensuite  une 
courte  notice  des  hommes  les  plus  cé- 
lèbres sortis  de  l'académie  de  Leip- 
zig ,  extraite  d'une  harangue  pro- 
noncée par  Conrad  Wimpina,  en 
i5o3  ;  et  le  catalogue  des  ouvrages 
imprimés  en  cette  ville,  depuis  1480 
jusqu'en  i5i7.  L'auteur  a  ajouté  a 
son  ouvrage  une  dissertation  sur  \es 
livres  imprimés  avec  des  planches 
de  bois;  une  note  sur  quelques  livres 
du  quinzième  siècle  ,  qui  ont  attiré 
plus  spécialement  l'attention  des  bi- 
bliographes ;  et  la  liste  d'un  grand 
nombre  d'éditions  inconnues  à  Maif- 
taire.  II.  Animadversiones  et  evien- 
dationes  ad  inscriplioms  ^œcas  à 
Mitratorio  in  Thesauro  éditas.  Ces 
observations  ont  été  insérées  dans  les 
Miscellan.Lipsiens.  nova  ann.  1 74'i. 
Le  sav.mt  Hagenbuch  ayant  com- 
battu quelques-unes  de  ses  conjec- 
tures,il  lui  réponditavcc  autant  d'é- 
rudition que  de  politesse  ,  par  une 
dissertation  imprimée  a  la  suite  des 
Sepulcralia.  (Voyez ci-dessous. ) III. 
De  Diptjrchis  veterum  et  de  Diptf- 
choEm.  Quiri  i cardinalis  diatriha , 
Leipzig,  1743,  in-4«.  L'ouvrage  est 
divisé  en  trois  parties  :  dans  la  pre- 
miue,rauleur  recherche  l'origine  des 


2  LEI 

diptyques,  leurusagecliezles  anciens, 
et  traite  des  diptyques  consulaires  j 
dans  la  seconde  ,  il  de'crit  le  dip- 
tyque de  Brescia,  connu  sous  le  nom 
de  Boëce,  parce  qu'il  est  orne  de  son 
portrait, et  il  parle  des  diptyques  ec- 
clésiastiques :  dans  la  troisième  ,  il 
rapporte  le  sentiment  des  savants  sur 
le  diptyque  du  cardinal  Quirini,dont 
il  donne  la  description.  IV.  Sepulcra- 
lia    cannlna  ex  Anthologid  mss. 
grœc.  epigram.selectacum  versione 
latlndet  notis,  Leipzig,  17 45, in-4'*. 
Ce  volume  renferme  vingt  -  deux 
pièces  extraites  d'un  précieux  manus- 
crit de  la  bibliothèque  de  cette  ville  j 
Leich  y  a  ajoute  une  double  traduc- 
tion latine  ,  Tune  en  vers  et  l'autre 
en  prose  ,  et  des  notes  :  mais  il  n'est 
pas  toujours  heureux  dans  ses  expli- 
cations ;  on  en  a  critiqué  justement 
quel  ques-unes  dans  les  Acta  eruditor. 
ann.  174^  7  page  3 19  et  suivantes. 
Y.Devitdetrebus  gesiis  Constantinl 
Forphjrogeneti  f  ib.  1746,  in-4^.j 
cette  dissertation  a  été  réimprimée 
dans  l'édition  qu'il  avait^commencée 
des  deux  livres  de  Constantin  Des 
Cérémonies  de  la  cour  Bjzantine,  et 
qui  fut  terminée  par  J.-J.  Reiske 
(  F  oyez  Constantin  ,  IX,  48 1  ). 
On  doit  encore  à  Leich  une  bonne 
édition  du    Thésaurus  eruditionis 
scholasticœ,  par  Basile  Fabcr,  Franc- 
fort ,  1749  ,  2  vol.  in-fol.  On  trou- 
vera un  éloge  de  ce  savant  dans  les 
Acta  eruditor.  aim,  in 5'2.     W-s. 

LEIDRADE,  46«.  archevêque  de 
Lyon ,  naquit  à  Nuremberg  ,  vers 
7  âô.Charlemagne  le  fit  son  bibliothé- 
caire ,  et  le  chargea ,  ainsi  que  Théo- 
dulphe  ,  évêque  d'Orléans  ,  de  par- 
courir la  Gaule  Narbonnaise ,  en 
qualité  de  Missi  dominici,  pour  en- 
tendre les  plaintes  des  peuples,  et  re- 
dresser les  écarts  des  magistrats  dans 
.l'administration  de  la  justice.  Déjà  , 


LEI 

eu  798,  Leidrade  ayait  été  nommé  à 
l'archevêché  de  Lyon  j  mais  il   ne 
s'était  pas  fait  sacrer  ,  comme  on  le 
voit    dans  une  lettre  d'Alaric  aux 
fidèles  de  celte  église.  Vers  le  même 
temps  ,  il  fut  envoyé  en  Espagne  , 
avec  Nébride  ,  archevêque  de  Nar- 
bonne  ,  pour  citer  Félix  d'Urgel,  qui 
vint  en  effet  rétracter  ses  erreurs  au 
concile  d'Aix-la-Chapelle.  Leidrade 
était  évêque  ,   puisque  Félix  s'ex- 
prime  ainsi  dans  la  profession  de 
foi  qu'il  envoya  au  diocèse  d'Urgel  : 
Secundwn  cjuod  et  'vetierabilis  do- 
minus  Leidradus  episcopus  nohis  in 
Orgello  pollicitus  est.  En  800 ,  il  fut 
encore  envoyé  en  Espagne ,  pour  ré- 
parer les  ravages  que  les  erreurs  de 
Félix    et   d'Elipand    de   Tolède  y 
avaient  causés.  Le  crédit  qu'il  avait 
auprès  de  Charlemagne  ,  fut  très- 
utile  à  l'église  de  Lyon.  Il  signala  son 
épiscopat  par  l'établissement  d'une 
école  de  chant  et  d'une  école  d'étude 
pour  l'instruction  des  clercs  de  sa 
cathédrale,  et  par  d'autres  établisse- 
ments dont  il  fait  l'énuméralion  dans 
une  lettre  à  l'empereur.  De  son  temps , 
le  rit  romain  remplaça,  dans  cette 
église,  le  rit  gallican.  En  81 4,  après 
avoir  rempli  avec  honneur  une  mis- 
sion importante   dont  il  avait  été 
chargépar  Louis  ledébonnaireauprès 
de  l'église  de  Màcon  ,  il  se  démit  de 
son  siège,  et  se  retira  dans  l'abbaye 
de  Saint-Médard  de  Soissons.  Ago- 
bard  ,  qui  était  déjà  son  coadjuteur  , 
lui    succéda.   Leidrade   mourut    en 
816.  On  a  de  lui:  I.  Liber  de  sacra- 
mento  baptismi,  ad  Karolum  mag- 
num imperatorem,  en  onze  chapitres 
et  une  dédicace  (  dans  les  Analectes. 
de  dom  Mabillon ,  pages  78-83  ).  IL 
Deux  lettres  à  Charlemagne  (  dans 
le   même  recueil  )  ,  et  deux  autres 
dans  le  tome  2  des  œuvres  d'Ago- 
bard^  domiées  par  Baluz;e.    L-b-e» 


LEI 

LEIGII  (  Edouard  )  ,  tlicologicu 
anj^lais  du  divscpticme  siècle, naquit 
à  ShawcU  ,  dans  le  comte  de  Lcices- 
ter ,  le  i4  ïïi«"**  i6o'2.  Après  avoir 
éltidié  les  éléments  de  la  grammaire 
sous  un  maître  parliculier  ,  il  passa 
au  colle«j;e  de  la  Madeiènc  d'Oxl'ord. 
En  i6*23,il  prit  le  degré  de  maître ès- 
arLs,  et  alla  étudier  les  loisàMiddle- 
tempie.Peudanlquela  peste  ravageait 
l'Angleterre  ,  en  iG-jS  ,  Leigli  visita 
la  France  pour  son  iustruclion.  A 
sou  retour  en  Angleterre ,  il  joignit  à 
Tetudc  des  lois  celle  de  la  théologie  et 
de  l'histoire  :  il  acquit  des  connaissan- 
ces très-ctcndues,  etdevinj,  disent  les 
écrivains  anglais,  une  espèce  de  théo- 
logien laie,  hien  supc'ricuràla  plupart 
des  théologiens  de  profession.  Vers 
i636,Leigh  représenta  le  bourg  de 
Staffordaulongparlement,etfutundc 
ses  membres  qui. dlèrent  trouver  le  roi 
à  Oxford.  Il  était  i^ortë  par  sentiment 
àappiiyertoutes  les  mesures  du  parti 
de  l'opposition  contre  la  cour.  Dans 
la  suite  on  le  choisit  pour  siéger  dans 
une  assemblée  ecclésiastique  :  il  ne  se 
montra  pas  moins  habile  qu'aucun 
des  théologiens  qui  la  composaient. 
Il  fut  aussi  colonel  d'un  régiment  au 
service  du  parlement,  et  custos  ro- 
tulonun,  pour  le  comte  de  Stafï'ord. 
Il  avait  alors  cessé  d'approuver  la 
conduite  du  parlement  et  de  l'ar- 
mée :  aussi  ayant  trouvé  les  conces- 
sions que  faisait  Charles  I^■^  ,  très- 
favorables  à  la  nation  ,  il  fut  chassé 
du  parlement,  en  i()48,  avec  quel- 
ques autres  membres  qui  avaient  em- 
brassé son  o])inion.  Dès  ce  mo- 
ment il  s'éloigna  des  allaires  publi- 
ques ,  et  ne  s'occupa  que  de  la  com- 
position de  ses  ouvrages.  11  mourut  le 
'À  juin  1 67 1 ,  à  Rushall  dans  le  comté 
de  Stalïbrd.  On  a  de  lui  :  II.  Select 
and  choice  observations  concertant 
iliefirst  twelve  Ctc^r*r5,Oifoi-d,i03  3, 


LEI  3 

in  8*^.  :  cet  ouvrage  eut  une  seconde 
édition  avec  des  additions  de  l'au- 
teur ,  et  quelques-unes  de  soîi  fils 
Henri ,  sous  le  titre  de  ,  Analecta 
Cœsarum  romanorum,  iCj^jin-S'^j 
une  troisième  en  iG(i4,  et  une  q  îa- 
trième  ,  en  1(570  ,  avec  de  nouvelles 
augmentations.  II.  TieaiiseoJ divine 
promises,  Londres,  i6'33  ;  ce  traite* 
a  servi  de  modèle  à  celui  de  Clarke 
et  à  quelquesaulrcssurleincmesujet. 
III.  Critica  sucra ,  or  thc  hehrew 
words  oj'the  old  and  oj't/tegreek  of 
thenew  Testament ^hondres,  ^^^0 
et  1646,  in-4^.  Cette  crilifpie  sacrée 
n'était  encoredi  visée  qu'en  deux  par- 
lies  ,  dont  la  première  contenait  des 
observations  philologiques  et  théo- 
logiques sur  toutes  les  racines  hé- 
braïques de  l'ancien  Testament ,  la 
seconde  sur  les  mots  grecs  du  nou- 
veau; mais  elle  fui  réimprimée  iu-fol. 
en  i65o,  et,  avec  un  supplément  du 
même  format ,  en  1662.  Henri  Mid- 
doch  ,  l'ayant  mise  en  lalin  ,  lui 
donna  une  forme  nouvelle  ,  sous  la- 
quelle elle  peut  être  regardée  et  com- 
me une  concordance  et  comme  un 
dictionnaire  :  elle  a  été  reimprimée 
plusieurs  fois  en  cet  état  à  Anister- 
dam,iG79,  àLeipzigeîailleurs.Louis 
de  Wokogue, professeur  de  Gronin- 
gue,  la  traduisit  en  français,  et  en  fit 
imprimer  une  partie  à  Amsterdam  en 
i7o3,in-4^.,souscelitre:i/Vt(fo/mtft- 
je  de  la  langue  sainte,  contenant  ses 
origines,  avec  des  observations;  cet 
ouvrage  est  estimé.  IV.  A  Treatise 
oj'divinily,  Londres,  1648  et  i65i, 
iii-80.  V.  7'/m?  SainCs  encourage- 
ment in  evil  times  ,  or  observations 
conceniing  the  martyrs  in  gênerai , 
Londres,  1648,  in-8".  \\.  Annotor- 
iions  on  ail  the  ne. v  Testament,  Lon- 
dres ,  i05o,  in-fol.  VIL  Annota- 
tions ou  tJieJivepoeticalboohsoJ  ihe 
old  testament  ;  xnz  :  Job,  Fsàlms, 


4  LEl 

Proverhs,Ecclesiaste,andCanticles, 
Londres,  1657  ,  iu-fol.  Le  pcre  Le- 
long  fait  menlioii  de  ces  deux  der- 
niers ouvrages  dans  sa  Bibliothèque 
sacrée.  VIIL  A  Philological  corn- 
mentarj;  or,  an  illustration  of  the 
most  obvions  and  uj'eful  words  in 
tlwlawy  Londres,  i6j'î,  in-fol.  IX. 
A  Sjstem  or  bodj  of  divinitf ,  Lon- 
dres ,  1G54  et  i()(3i  ,  in  -  fol.  X. 
Treatise  of  >eli<rion  and  learning  , 
Londres,  i(i5(),  in-fol.  ;  cet  ouvrage 
n'ayant  point  eu  de  succès,  rejwrut , 
eji  i6G3  ,  sons  ce  nouveau  litre: 
Fœlir  consortium  ,  or  a  fit  con- 
juncture  of  religion  and  learning. 
XL  Choi  V  de  proverbes  français  , 
Londres,  1657  et  i(i64,  in-4'^.  XIL 
Second  considérations  of  the  high 
court  of  chancery ,  Londres,  i658, 
\i\-l^^.W\\.Englanddescribed,\iQ\\- 
dres,  iGj9,in-8''. ,  Camhden  a  beau- 
coup servi  à  l'auteur.  XIV.  Choice 
observations  on  ail  the  kings  of  En- 
gland,  from  tlie  Saxons  to  the  death 
of  Charles  I,  Londres,  1661;,  in-S*^. 
W  XV.  Three  diatribes,  or  discourses ^ 
oftr'avel  ^  rnoney  ^  and  measuiTng, 
etc.  Londres,  167 1 ,  in-8**.  Dans  une 
autre  édition  ,  cet  ouvrage  porte  le 
titre  de  Gentleman  s  guide.  XVI. 
Two  sermons ,  07i  the  magistr^ate's 
anthority  ,  bf  Christ.  L-b-e. 

LEÏGHTON  (  Alexandre  ) ,  ne  à 
Edimbourg  en  t  587 , fut  depuis  1 6o3 
jusqu'en  161 3  ,  professeur  de  pluio- 
sophie  morale  à  l'université  de  cette 
ville:  il  donnait  des  leçons  publiques 
à  Londres  ,  lorsqu'on  i6.>-9  ,  ayant 
compose  deux  ouvrages  intitules  , 
Vwn  ^Défense  de  Sion  (Zion's  plea), 
l'autre  ,  Le  Mir-oir  de  la  guerre 
sainte,  il  fut  arrête  comme  ayant  at- 
taque l'autorité  royale  et  l'église  e'ta- 
blie  ,  se  vit  traduit  devant  la  cham- 
bre ëtuilée,  et  condamne'  à  avoir  'le 
uezfundu,  les  oreilles  coupées,  à  être 


LEI 

fouette'  une  fois  de  Ncwgate  à  Ald^ 
gâte  ,  et  une  seconde  fois  à  Tiburn  ; 
après  quoi  il  devait  être  emprisonne' 
pour  la  vie.  Leighton  parvint  à  s'é- 
chapper avant  le  jour  fixé  pour  l'exé- 
cution de  la  sentence;  mais,repris  dans 
le  comté  de  Bedford,  il  fut  ramené 
à  Londres,  où  il  subit  son  jugement 
avec  des  circonstances  d'une  cruauté 
raffinée.  Après  onze  ans  de  prison ,  il 
fut  mis  en  lij^erté  ,  en  i64o  ,  par  le 
long  parlement ,  et  nommé  gardien 
du  palais  épiscopal  de  Lambetb,dont 
on  avait  fait  une  prison  d'état  j  il  y 
mourut ,  en  i644  1  après  être  tombé 
en  démencp  par  suite  des  souffrances 
qu'il  avait  endurées.  L. 

LEISEWITZ  (  Jean-Antoine  \ 
littérateur  allemand ,  naquit  à  Ha- 
novre ,  le  9  mai  \n^i.  Pendant  qu'il 
faisait  ses  études  à  Gœttingue  ,  il  se 
lia  d'une  amitié  particulière  avec 
Hœlty,  Voss  ,  le  comte  de  Stolberg, 
qui  étaient  alors  à  la  même  univer- 
sité. Quoique  la  littérature  eût  pour 
lui  les  plus  grands  attraits  ,  il  entra 
dans  la  carrière  des  affaires,  et  rem- 
plit plusieurs  places  importantes 
dans  le  pays  de  Brunswick.  Ses  loi- 
sirs étaient  consacrés  aux  muses  ;  et 
l'Allemagne  reçut  avec  enthousiasme 
sa  tragédie  intitulée  Jules  de  Ta- 
rente,  où  l'on  trouve  des  beautés  du 
premier  ordre  :  elle  fut  imprimée  à 
Leipzig  ,  en  1776.  Cette  tragédie  est 
le  principal  titre  de  Leisewitz  au 
souvenir  de  la  postérité.  On  a  en- 
core, de  lui,  un  discours  adressé  à 
une  sociétédesavants, imprimé  dans 
le  Musée  allemand  ,  1776  ,  et  deux 
dialogues  imprimés  dans  l'Almanach 
des  Muses  de  Gœttingue,  1775.  Il 
avait  rassemblé  beaucoup  de  maté- 
riaux pour  une  histoire  de  la  guerre 
de  trente  ans;  mais  il  les  brûla  quel- 
ques jours  avant  sa  mort,  qui  eut  lieu 
le  10  septembre  180G.  Il  venait  de 


r(Mi};cr  un  projet  d'une  nouvelle  or- 
ganisation (les  établissements  de  cha- 
rité de  BrunsNvick.  C-au. 

LFITH,  surnomme  ABouLHARETn, 
fds  de  Saad  ,  et  doclenr  trcs-celèbrc, 
était  allranehi  de  Kais  ,  fils  de  Rcfaa, 
qui  lui-même  était  afTranclii  d'Abd- 
airahman  ,  (ils  de  Khaied  ,  mort  en 
l'année  45  de  rheg.  (645  ):  il  était  ori- 
ginaire d'Ispalian  ;  mais  sa  famille 
habitait, dit-on  ,Kalkaschiuda,  vil- 
lage de  la  Basse-Egypte.  Les  docteurs 
égyptiens  le  regardent  comme  leur 
imam  dans  la  science  de  la  jurispru- 
dence et  dans  celle  des  traditions. 
Plusieurs  même, suivant  en  cela  l'opi- 
nion du  célèbre  Schafe'i ,  lui  donnent 
la  préférence  sur  Malek  Bcn-Anas  , 
imamde  la  secte  orthodoxedes  Malé- 
kites.  Leilh  n'avait  encore fjue  dix  ans, 
lorsqu'il  fit  le  pèlerinage  de  la  Mec- 
que; il  y  reçut  les  leçons  de  Nafi,  af- 
franchi du  fds  du  khalife  Omar.  Sa 
naissance  est  fixée,  par  les  uns ,  à  l'an- 
née 91,  par  d'autres,  aux  années  1)3  ou 
g4. 11  mourut  au  mois  de  clial^an  1 75 
(  dëc.  791  de  J.  C.  )  ,  et  fut  enterre, 
au  lieu  nomme  la  petite  Karaja ,  qui 
est  dans  le  voisinage  du  Caire.  Son 
tombeau  est  du  nombre  de  ceux  oii 
l'on  va  en  pèlerinage.  Leith  était  d'un 
naturel  très  -  généreux  ,  et  dépensait 
presque  tout  son  revenu  en  aumônes, 
ou  en  libéralités  en  faveur  de  ceux 
qui  prenaient  ses  leçons.  Il  fut  cadhi 
dans  la  capitale  de  l'Egypte.  L'imam 
Malek, lui  ayant  envoyé  un  plat  rem- 
])li  de  dalles  ,  Leith  le  lui  renvoya 
j'Irindepiècesd'or.L'autorilédes  tra- 
ditions qui  remontent  à  Leith  est  très- 
grande,  parce  qu'il  les  tenait  de  Yézid, 
liis  d'Abou  -  Habib,  mort  en  l'an 
1 9.7  ou  I  .a8  de  l'hég.  (745),  et  d'Abd- 
Allah  ,  lils  d'Abou-Djafar ,  mort  en 
i35  ou  i30  (753).  Or,  cet  Abd-Allah 
n'était  lui-même  que  l'écho  d'Abou- 
Salaméh  Abd-Aliab^iUs  d'Abd-Alrah- 


LEJ  5 

man  ,  qui  avait ,  dit-on  ,  ét<?  nourri 
par  Ouim-Kellhoum,  fille  d'Abou- 
Lckr.  Abou-Salaméh,  mourut  en  l'an 
()4,  ou  selon  d'autres, en  io4  de  I  hég. 
(7i3ou  7'Jt3dcJ.  C.)  S.  de  S-y. 
LEITZ  (  Voyez  Yacoub.  ) 
LIUARS  (  Louis  ),  secrétaire  de 
la  chambre  du  roi  Henri  III ,  était 
de  la  même  famille  que  mademoi- 
selle de  Gournay,si  connue  par  son 
attachement  pourMonlaignc.il  cul- 
tivait la  litlcrature,et  comptait  parmi 
ses  amis  Ronsard  et  Dorât,  qui  jouis- 
saient tous  les  deux, à  cette  époque^ 
d'une  très-grande  réputation.  Lejars 
est  auteur  de  Lucelle ,  tragédie  en 
prose,  disposée  d'actes  et  de  scè- 
nes suivant  les  Grecs  et  les  Latins , 
Paris,  1676,  in-8^.  On  trouve  l'a- 
nalyse de  celte  pièce  dans  le  tome 
m  de  V Histoire  du  Théâtre  Fran- 
çais. L'auteur  soutient, dans  sa  pré- 
face, que  les  tragédies  doivent  être 
écrites  en  prose;  et  les  raisons  dont  il. 
appuie  ce  sentiment  ont  été  repro- 
duites par  Lamotte  (  Voyez  La- 
motte-  HouDARD  ).  J.  Duhamel, 
contemporain  de  Lejars ,  n'en  fut  pas 
convaincu,  puisqu'il  mit  en  vers  sa 
Lucelle,  avec  quelques  changements, 
Rouen,  i6o7,in-i2.  W-s. 

LEJAY  (  Claude  ) ,  en  latin 
Jaius ,  jésuite ,  l'un  des  premiers 
compagnonsdeSt-Ignace,naquiidans 
la  paroisse  d'Aise,  en  Faucigni,  dio- 
cèse de  Genève ,  au  commencement 
du  seizième  siècle.  Après  avoir  fait 
quelques  études  au  collège  de  la  Ro- 
che ,  il  alla  les  continuera  Paris,  où 
l'avait  appelé  Pierre Favre,soncom- 
])atriote  (  Voyez  Favre  ,  XIV  , 
u'23  )  ;  et  ce  fut  sans  doute  aussi  ce 
dernierquidéterminaLejay,en  1 535, 
à  s'adjoindre  ,  avec  deux  autres  no- 
vices, aux  six  premiers  compagnons 
de  Saint-Ignace  qui  formèrent  ainsi 
le  berceau  de  la  compagnie  de  Jésib- 


C  LEJ 

11  fut  envoyé  au  concile  de  Trente  , 
en  i54*>  ,  en  qualité'  de  the'ologien 
représentant  le  cardinal  Triichses  , 
cvèque  d'Augsl)ourg;  et  les  discours 
qu'il  prononça  dans  cette  assemblée 
furent  généralement  ad mire's.  Après 
avoir  gouverne  le  collège  de  Ferrare 
v,t  reçu  ..  Bologne  le  bonnet  de  doc- 
teur, le  P.  Lejay  fît  diverses  missions 
en  xillemagne  ,  réorganisa  l'univer- 
sité d'ingolstadt ,  et  fut  appelé'  au 
collège  de  Vienne  en  Autriche,  où  , 
après  avoir  enseigne'  avec  le  plus 
grand  éclat ,  il  mourut  le  6  août 
i55'i.  Le  P.  Ganisius  prononça  sou 
oraison  funèbre  j  et  un  monument 
fut  élevé  à  sa  mémoire  dans  la 
principale  salle  de  l'université  d'in- 
golstadt. Des  écrits  de  ce  savant  re- 
ligieux ,  non  moins  recommandable 
par  son  désintéressement  que  par 
son  zèle  (  Foyez  Ignace  ,  XXI  , 
189  )  ,  on  n'a  publié  que  son  Spé- 
culum -prœsulis ,  ex  sacra  Scriplurd, 
canonum  et  doctorum  verbis  de- 
firomptum,  Ingolstadt,  iGi5,in-4<'. 
Le  P.  Grelser  en  fut  l'éditeur  d'après 
le  manuscrit  original  conservé  dans 
la  bibliothèque  du  collège  d'Eich- 
stett  5  et  on  l'a  réimprimé  dans  le 
tome  17  des  œuvres  de  ce  dernier  , 
Ratisbonne,  1741.  Sotwel  a,  par 
inadvertance,  consacré  à  Lejay  deux 
articles,  dont  l'un  le  désigne  comme 
allobrox,  et  VsLutrecommesabaudus, 
C.  M.  P. 
LEJAY  (  Gui-Michel  ),  connu 
par  la  Polyglotte  qui  porte  son  nom, 
était  avocat  au  parlement  de  Paris  , 
cl  naquit  dans  cette  ville  ,  en  i588  , 
de  parents  nobles.  Il  étudia  les  lan- 
gues anciennes,  qu'il  ne  sut  néan- 
moins jamais  que  médiocrement. Eu 
161 5,  trois  hommes  d'un  rare  mé- 
rite,lecardinalDuperron,  Jacques  de 
Thou  et  François  de  Brèves ,  avaient 
conçu  le  projet  de  donner  une  Folj- 


LEJ 

glotte;  mais  diverses  circonstances 
firent  échouer  ce  projet.  L'avocat  Le- 
jay résolut  de  le  faire  revivre  et  de 
le  conduire  à  sa  fin  ;  il  avait  de  la 
fortune,  il  était  laborieux,  et  les  res- 
sources ne  manquaient  |)as  ;  il  s'ad- 
joignit les  hommes  les  plus  savants 
de  son  temps.  Le  père  Morin  de 
l'Oratoire,  Philippe  d'Aquin,  Juif 
couver li ,  Godefroi  Hermant,  cha- 
noine de  Beauvais,  et  trois  maro- 
nites du  Liban,  furent  chargés  de 
réviser  les  livres  de  l'Écriture  sainte, 
chacun  dans  la  langue  qu'il  enten- 
dait. Jacques  Saiilecque ,  fameux  ar- 
tiste, fondit  les  caractères ,  et  An- 
toine Vitré,  ou  Vitray,  imprimeur 
du  Roi,  entreprit  l'impression j  elle 
commença  en  1 628.  Mais,  d'un  cote', 
la  cour  de  Rome,  sollicitée  par  des 
savans  étrangers  qui  voulaient  aussi 
tenter  une  pareille  entreprise;  de 
l'autre,  les  tracasseries  de  Gabr.  Sio- 
nite,  l'un  des  collaborateurs,  arrêtè- 
rent souvent  la  marche  de  cette  opé- 
ration. Il  fallut  tout  Tascendant  que 
le  cardinal  de  Berulle  avait  sur  l'es- 
prit du  pape  et  des  cardinaux ,  pour 
lever  les  difficultés  qui  venaient  de 
cette  capitale  du  monde  chrétien. 
(  Voy.  VHist.  du  card.  de  Berulle, 
par  M.Tabaraud,  t.  2, 1.  vi,  ch.  iv.) 
Enfin  l'ouvrage  fut  terminé  en  i645. 
Il  est  intitulé  :  Biblia  hebrdicaf  sa- 
maritana,  chalddica,  grœca,  sj- 
riaca,  latina^  arabica,  qulbus  tex- 
tus  originales  totius  Scripturœ  sa- 
crée ,  quorum  pars  in  editione  Coni- 
plutensi,  deinde  in  Antuerpiensi  re- 
giis  sumpiibus  extat,  nunc  integri 
ex  manusi:riptis  toio  ferè  orbe 
quœsitis  exemplaribus  exhibentur. 
C'est  dans  l'inscription  en  style  la- 
pidaire, qu'il  est  question  de  Lejay, 
et  de  la  part  qu'il  y  a  eue  :  Be- 
gnante  Ludovico  XI T ,  j'elici , 
iriumphaiore ,  etc..  augustes  régis 


Sœcuîonim  immort alis  rndireSf  sa- 
crus  paginas  seplennidiomate  réso- 
nantes... œtenioimmortalitalis  tem- 
jtloappendit,summopercnnitatisau- 
iorifOlJerente  et  corisecante  Giiido- 
ne  Michaele  Lejay ,  dat,  dicat,  voi^et. 
Daiis  la  promière  des  deux  préfa- 
ces ,  qui  suivent  l'inscriplion ,  Le- 
jay rendnii  eompte  succinct  de  l'ou- 
vrage; elle  est  datée  du  premier  oc- 
tobre 1645.  Cette  Polyglotte  a  neuf 
loraes  en  10  volumes  ;  le  nombre 
des  langues  qu'elle  renferme  est  porté 
dans  le  litre  :  l'exécution  en  est  ma- 
gnifique; c'est  un  chef-d'œuvre  de  ty- 
pographie, mais  elle  fourmille  de 
fautes  qui  tiennent  des  éditeurs  et 
des  imprimeurs;  tout  le  monde  en 
convient  :  l'usage  en  est  incommode, 
tant  à  cause  de  l'énorme  grosseur 
des  volumes  que  de  la  n^auvaise  dis- 
tribution des  textes  et  des  versions. 
Richelieu,  jaloux  de  marcher  sur  les 
traces  de  Ximenès,  voulait  que  la 
Polyglotte  j)OTiàt  son  nom,  et  il  of- 
frait de  rembourser  tous  les  frais  , 
et  d'indemniser  Lejay  :  celui-ci  se 
refusa  constamment  à  toute  propo- 
sition; il  sacrifia, pour  immortaliser 
son  nom,  dix-sept  ans  de  travaux, 
et  trois  cent  mille  francs  qu'il  avait 
de  son  patrimoine,  sans  compter  les 
dettes  qu'il  contracta  et  dont  il  ne 
put  jamais  s'acquitter  entièrement. 
Il  aurait  encore  eu  le  moyen  de  re- 
tirer une  partie  des  frais ,  s'il  avait 
voulu  consentir  à  traiter  avec  les 
Anglais ,  pour  un  nombre  considé- 
ra]jlc  d'exemplaires  au-dessous  des 

})rix  ordinaires  ;  mais  il  fut  inflexi- 
)le,  et  les  Anglais  imprimèrent  leur 
Polyglotte  de  Waltou  ,  laquelle  fit 
tomber  celle  de  Lejay.  Pour  récom- 
pense des  services  qu'il  avait  rendus 
an  public  par  l'édition  de  la  grande 
Bible,  ouvrage  majestueux ,  corisor 
cré  à  la  gloire  du  règne  du  Roi  et 


LES  7 

de  la  régence  de  la  Heine  sa  mère , 
et  à  l'honneur  et  à  la  réputation 
singulière  de  la  France,  Lejay  ob- 
tint des  lettres  de  confirmation  de 
noblesse;  b;  Roi  le  nomma  conseil- 
ler en  son  conseil-d'état  'et  privé,  et 
lui  accorda  toutes  les  prérogatives  et 
appointements  altarbés  à  celte  di- 
gnité, pour  laquelle  il  prêta  serment 
au  mois  de  janvier  i(i4^).  Le  3o  oc- 
tobre de  l'année  suivante ,  Lejay,  qui 
aviiit  embrassé  l'état  ecclésiastique, 
fut  pourvu  du  doyenné  de  Sainte- 
Marie- Madelcne  de  Vezclay  ,  en 
Bourgogne.  Lorsque  le  conseil-d'état 
fut  réduit  à  vingt-quatre  membres 
en  1657, Lejay  se  trouva  du  nombre 
des  conseillers  réformés  :  il  paraît 
qu'à  celle  époque  le  cardinal  Maza- 
rin  lui  fit  accorder  une  somme  de 
19,000  livres.  Lejay  mourut  avec  la 
seule  qualité  de  doyen  de  Vezelay  , 
le  10  juillet  1674?  âgé  de  8G  ans. 
C'est  sans  fondement  qu'on  l'a  accu- 
sé, ainsi  que  l'imprimeur  Vitré,  d'a- 
voir détruit  les  caractères  orientaux 
qui  avaient  servi  à  l'impression  de 
\a Polyglotte^  afin  qu'on  ne  pût  rien 
imprimer  d'aussi  beau  en  ce  genre. 
(  roj.  Brèves,  Y, 56'].  )    L-b-e. 

LEJAY  (  Gabriel  -  François  )  , 
jésuite,  célèbre  professeur  d'éloquen- 
ce, naquit  à  Paris,  en  i6j7,ou  selon 
Fellcr ,  en  1662.  Il  était  petit-neveu 
de  Nicolas  Lejay ,  premier  président 
auparlement  de  Paris,  mort  en  1O40, 
et  dont  P.  Pellepral  publia  en  latiu 
l'oraison  funèbre,  Paris,  i64i,in- 
4"  (0*  I^c  P.  Lejay  passa  5^  ans 
dans  la  Société,  dont  il  en  employa 
dix-neuf  à  professer  la  rhétorique  , 


(0  Drcux-Diiradior,  d«n(  les  Tables  Ju  Jour- 
nal Je  Verdun,  tome  »,  p»ge  »6m  ,  Jit  que  le  P. 
Lojay  était  petit-fils  de  rédiieur  Jela  Polyglotte; 
mais  il  est  erident  qu'il  a  confotiJ»  re  Jjrnier 
«irec  Jocqiifli  L©iiijr,  couieillcr-d'elat,  et  aïeul  dt^ 
ptolcMvur. 


ft  LEJ 

princip.'jlement  à  P^iris  ,  et  toujours 
avec  la  plus  grande  dislinction.  S'il 
voulait  que  ses  élèves  dcTinsseiit  des 
savants  estimables  et  des  gens  d'es- 
prit ,  il  n'avait  pas  moins  à  cœur  d'en 
l'aire  de  i3ons  thrëtiens  et  de  bons  ci- 
toyens. Voltaire,  qui  l'eut  pour  pro- 
iesseur  d'éloquence  ,  au  collège  de 
Lov:is-le  -  Grand  ,  en  1 7o5  ,  goiitait 
davantage  les  leçons  et  les  entretiens 
du  P.  Porée  ,  qui  ne  lui  parlait  que 
de  littérature  ;  et  il  paraît  qu'il  eut 
sou.yent  avec  le  P.  Lejay  des  discus- 
sions assez  vives  :  un  jour  l'écolier  fit 
au  maître  une  réponse  tellement  im- 
pie ,  qu'elle  produisit  un  vrai  scan- 
dale dans  la  classe  ;  le  P.  Lejay ,  in- 
digné, descend  de  la  chaire,  court  à 
lui,  le  prend  au  collet,  et,  en  1  e  secouant 
rudemcntjlui  crieà  plusieurs  reprises: 
Malheureux  y  tu  seras  un  jour  Vé- 
tendard  du  déisme  en  France,  (i) 
Après  le  temps  de  son  professorat , 
le  P.  Lejay  fut  pj'éfet  de  la  congré- 
gation établie  daus  le  collège  de  Louis- 
le-Grand,oii  son  zèle  et  ses  manières 
engageantes  contribuèrent  beaucoup 
à  former  à  la  piété  les  meilleurs  su- 
jets qui  fréquentaient  cette  école  cé- 
lèbre. Il  se  livrait  en  même  temps  à 
la  composition  de  ses  ouvrages.  Il 
moiunit ,  sur  la  fin  de  sa  soixante  et 
dix  -  septième  année  ,  le  2 1  février 
1734.  On  a  de  lui  :  I.  Le  triomphe 
de  la  Religion  sous  Louis-le- Grand, 
représenté  par  des  inscriptions  et  des 
£?eme5,Paris,  1687  ,in-ri.  lï.  Gal- 
los  tamftdli  ah  hoste  nescios  qucim 
vinci ,  ôralio,  1G94.  IJÏ.  Régi  oh  de- 
Icctum  regiœiirhi  no^umprœsulem, 
schmnis  gratiarum  actio ,  1 696  j  et 
d'autres  baranguns  de  collège  du 
même  genre.  IV .  Trois  tragédies,  Jo- 
scphus  fratres  agnosccns  ;  Josephus 
venditus ,  et  Josephus  M gyptoprœ- 

(l)  Vie  de  Voltaûe  ,  par  DuvtJrneî,  p.  i6. 


feclus,  1690, 1699,  in-i5i.  V.  ^/o- 
ri  a  sœculi  Gallis  vindicata,  1699  , 
in-i'.i.  yi.  Daniel,  Damocles  ,  Jlh-- 
dolonjmus, dramata^ 1 7 o3.  V II.  Ti-- 
mandre ,  pastorale ,  en  l'bonneur  de 
Philippe  V, à  son  avènement  au  trône 
d'Espagne,  VIII.  Ludovico  Magno 
pacifico  wctori  gratulatio.  IX.  Ja-^ 
cohisecundi  Magnœ.  Britanniœ  régis 
laudaiio  funehris.  X.  La  véritahle 
sagesse  ou  considérations  pour  tous 
les  J ou  "S  de  la  semaine ,  livre  ascé- 
tique ,  traduit  de  l'italien  du  P.  Se- 
gneri.  XI.  Les  Devoirs  du  Chrétien 
sur  ce  qui  regarde  la  foi  et  les  mœurs, 
tirés  de  V Ecriture  et  des  Pères,  XII, 
In  natalihus  serenissimi  ducis  Bri-^ 
tanniœ  oratio  extemporalis ,  1704, 
in- 12.  XIII.  Les  Antiquités  romain 
nés  de  Denys  d*  Halle  amas  se ,  tra- 
duites du  grec,  avec  des  notes  his- 
toriques, critiques  et  géographiques, 
I7'>.3,  1  vol.  in-4°.  Cette  version  , 
écrite  d'un  style  naturel ,  clair  et  élé- 
gant ,  avait  été  annoncée  dans  les 
Mém.  de  Trévoux ,  dès  le  mois  de 
mars  1721^.  L'abbé  Bellenger,  qui, 
de  son  coté,  s'occupait  à  traduire  le 
même  historien ,  se  hâta  de  terminer 
son  travail,  et ,  suivant  l'usage,  de 
décrier  celui  de  son  concurrent.  Dans 
cinq  lettres  ,  insérées  au  Mercure  de 
/"/•«Tice  (  mars  -  mai,  i7'23);,  il  pré- 
tendit que  le  jésuite  avait  souvent 
défiguré  son  original  ;  que  ses  notes 
chronologiques  marginales  étaient 
servilement  copiées  de  l'édition d'Ox^ 
ford  ,  sans  en  corriger  même  les 
fautes  d'imjn'cssion  indiquées  dans 
l'crrata;  enfin,  que  la  traduction  du 
père  Lejay  semblait  le  plus  souvent 
faite ,  non  sur  le  grec ,  mais  sur  la 
version  latine  de  Portus.  Le  Père 
Hongnant,  jésuite,  répocdit  à  cette 
critique  ,  évidemment  exagérée  j 
Bellenger  avait  de  même  reproché  à 
EoUiu  do  ne  citer  le  grec  que  d'«i- 


près  des  Tersions  lalincs  on  fr.in- 
r.iiscs;  on  sait  que  celte  accusation  a 
itf  reconnue  calomnieuse  (  roft'Z 
|{kllknglr,  t.  IV  ,  p.  loç)"), et  qu'il 
n'a  eViit  contre  les  liduclious  d'He- 
rodole  que  parce  qu'il  en  préparait 
une  lui-même, (pi'il  laissa  imj)ari'aile, 
et  que  Larrlicr,  auquel  on  donna  le 
soin  de  la  retoucher,  trouva  si  deïec- 
lueuse  ,  qu'il  jugea  plus  court  de  la 
refaire  en  entier  (  Voyez  Lahcher  ). 
XIV.  Bibliotfieca  rlietoiiim  y  prce- 
ccpta  et  exempla  complectens  rpiœ 
tain  adoratoriam  facultatem  quàni 
tid  poèticam  pertinent  ,V ans ^  i7'^'^> 
'->.  vol.  in-4".  ;  Venise  ,  1747, '^  vo- 
lumes in-4'^.  ;  Ingolstadt,  1 765  ,  5  v. 
in-8^.  —  Jd.  enieiidamt  et  adjustio- 
rem  normam  revocavit  J.  A,  Amai-j 
Paris,  Delalain,  1809- 181 3,  3  vol. 
in-8".  Le  tome  i*^*".  de  cette  dernière 
édition  comprend  la  Bhetorica  ad 
Tidlianam  rationem  exacta  ;  le  1^, 
Ars  poètica  ;  le  3*^.  ,  Orationes  et 
dramata  :  outre  les  n^s.  II,  IV  ,  V  , 
VI,  VIII ,  IX  et  XII  ci-dessus  ,  on 
y  trouve  les  trage'dies  Eustachius 
martyr  ^  Crœsus,  avec  quelques  au- 
tres ])elits  drames  qui  avaient  proba- 
blement aussi  paru  séparément ,  et 
un  très-grand  nombre  de  pièces  du 
même  auteur,  en  prose  et  en  vers. 
Ce  grand  ouvrage  ,  dont  le  P.  Lejay 
avait  donné  un  prospectus  dans  les 
Mcm.  de  TréuouXy  juin  i7iG,peut 
€tre  considéré  comme  un  excellent 
cours  théorique  et  pratique  d'élo- 
quence et  de  poésie  latine.  C.  M.  P. 
LEJEUNL  (Paul),  jésuite,  mis- 
sionnaire pendant  dix-sept  ans  dans 
le  Canada ,  mort  en  France  le  7 
'2  ans  ,a  don- 


irJ 


^ 


août 


G64 ,  a^é  de 


né  :  I.  Briève  Belation  du  voyage 
de  la  Nouvelle-France,  Paris, ifB'i, 
in-8".  C'est  la  première  des  relations 
que  les  jésuites  ne  discontinuèrent 
pas  de  faire  imprimer  sur  la  Nou- 


velle-France,  depuis  ^C)'^1  jusqnlèd 
iG7'.t.  C'est  une  des  meilleures  sour- 
ces pour  connaître  les  sauvages  de 
cette  contrée.  II.  BeLitinn  de  ce  rpU 
s'est  passe  en  la  Nouvelle-France 
depuisVan  i  i\?*f\jusquen Van  1  f)39, 
Paris,  iG35-iGfO,  7  vol.  in-8". 
C.  T-v. 
LFJEUNE  (  Jean  ) ,  prêtre  de 
rOratoire,  surnommé  le  père  l'A- 
veugle, (ils  d'iui  conseiller  au  par- 
lement de  Dole,  naquit  en  iSqci  à 
Poligny,  où  ses  ancêtres  occupaient 
depuis  plus  d'un  siècle  les  premiè- 
res charges  de  la  magistrature.  Il  é- 
tait  chanoine  d'Atbois,lorsqu'allirc 
par  la  réputation  du  P.  de  Bcrulle  , 
il  entra,  en  iG'.ii ,  dans  la  nouvelle 
congrégation  de  l'Oratoire.  Ses  su- 
périeurs l'ayant  envoyé ,  au  l)out  de 
trois  ans,  pour  être  directeur  du  sé- 
minaire de  Langres,  M.  de  Zamet , 
évêque  de  cette  ville,  le  chargea,  con- 
jointement avec  le  P.  Bence,  d'éta- 
blir la  réforme  parmi  les  religieuses 
de  l'abbaye  du  Tard;  et  les  vues  du 
prélat  furent  parfaitement  remplies. 
Le  P.  Lejeune  avait  un  talent  par- 
ticulier pour  annoncer  la  parole  de 
Dieu, et  il  l'exerçait  de  préférence  en- 
vers les  pauvres  et  les  gens  delà  cam- 
pagne; mais  il  ne  put  se  refuser  aux 
vœux  d'un  grand  nombre  d'évêques 
et  aux  ordres  de  ses  suj)éricurs,  cpii 
l'obligèrent  d'aller  remplir  les  sta- 
tions d'avent  et  de  carême  dans  les 
principales  villes  du  rovaume.  La 
cour  ayant  voulu  Pentenâre,  au  lieu 
de  choisir  un  de  ses  plus  beaux  ser- 
mons pour  faire  briller  ses  talents  , 
il  se  contenta  de  faire  une  instruc- 
tion familière  sur  les  devoirs  des 
grands,  et  spécialement  sur  l'obli- 
gation où  ils  sont  de  veiller  à  l'éduca- 
tion de  leurs  en.fants,  à  la  conduite 
de  leurs  domestiques,  et  à  tout  ce 
«pii   peut   contribuer  au   maintien 


ïd  LEJ 

du  bon  or^rc  dans  leurs  familles.  Le 
sujet  était  nouveau  pour  les  cour- 
tisans. L'air  humble  et  mortifie  du 
prédicateur,  la  simplicité  de  son  dé- 
bit et  de  sa  composition,  les  surpri- 
rent encore  bien  davantage.  Il  trou- 
va le  moyen  de  les  attacher  par  des 
détails  qui  prêtaient  peu  à  l'éloquen- 
ce, mais  beaucoup  à  l'instruction. 
C'est  ainsi  qu'il  fit  goûter  à  la  cour 
des  vérités  nsuelles  et  élémentaires 
qu'on  n'était  guère  accoutumé  d'y 
entendre  prêcher,  et  qui  furent  écou- 
tées avec  intérêt.  Son  zèle  se  repro- 
duisait sous  toute  sorte  de  formes 
pour  détruire  les  abus ,  les  vices,  les 
erreurs  dont  les  désordres  des  guer- 
res civiles  et  religieuses  du  siècle  pré- 
cédent a  valent  inondé  nos  provinces. 
Ce  fut  pendant  que  le  P.  Lejeune  prê- 
chait le  carêmeàRouen, en  1 635, qu'il 
perdit  entièrement  la  vue.  Quel- 
que temps  après*,  une  fluxion  doulou- 
reuse l'ayant  privé  d'un  œil ,  il  di- 
sait plaisamment  qu'on  voyait  en  lui 
le  contraire  de  ce  qui  arrive  aux  au- 
tres hommes ,  qui  de  borgnes  de- 
viennent quelquefois  aveugles  ,  au 
lieu  que  d'aveugle  il  était  devenu 
borgne.  Ce  double  accident  ne  fut 
capab'e  ni  de  ralentir  son  zèle ,  ni 
de  lui  faire  suspendre  ses  travaux 
apostoliques.  Le  gouvernement,  qui 
était  alors  occupé  de  ramener  les 
protestants  parla  voie  de  la  persua- 
sion, ne  manqua  pas  de  l'y  employer. 
Les  missionnaires  de  ce  temps-là 
étaient  dans  l'usage  de  traiter  en 
chaire  les  matières  de  controverse; 
le  P.  Lejeune  crut  devoir  suivre  une 
méthode  opposée  :  il  s'attacha  à  ex- 
poser les  vérités  fondamentales  de  la 
religion  qui  nous  sont  communes 
avec  les  protestants  ,  et  à  les  éta- 
blir solidement.  Cette  méthode  nou- 
velle ,  dont  il  fit  le  premier  essai 
dans  la  mission  d'Orange  ,  eut  le 


LEJ 

plus  heureux  succès  :  elfe  inspnv'i 
une  grande  confiance  pour  le  mis- 
sionnaire. Sa  vie  exemplaire  contri- 
bua beaucoup  à  l'accroître  j  il  en  ré- 
sultait des  entrf^iens  familiers,  dans 
lesquels  il  lui  était  plus  facile  de  ga- 
gner les  cœurs  qu'il  avait  déjà  ébran- 
lés par  ses  discours  publics  :  tout 
cela  réuni  ramenait  insensiblement 
les  réformés  de  leurs  préventions 
contre  l'église  romaine ,  et  produisit 
de  nombreuses  conversions.  Dans  la 
mission  de  Grignan ,  qui  suivit  celle 
d'Orange ,  il  joignit  à  ses  travaux  or- 
dinaires, des  conférences  pour  l'ins- 
truction des  curés  et  de^  vicaires  ac- 
courus de  divers  endroits  afin  d'ap- 
prendre d'un  si  excellent  maître  à 
prêcher  l'évangile  aux  pauvres  et  aux 
habitants  des  campagnes.  Le  P.  Le- 
jeune consacra  les  vingt  dernières 
années  de  sa  vie  à  faire  des  missions 
dans  le  diocèse  de  Limoges.  Il  en 
parcourut  la  plupart  des  paroisses  , 
à  la  tête  d'une  société  de  mission- 
naires qu'il  avait  lui-même  formés, 
sans  être  efï'rayé  par  l'àpreté  du  cli- 
mat ,  par  les  difficultés  de  ce  pays 
montueux,  couvertdcbois, entrecou- 
pé de  torrents  et  de  ravins,  ni  par  la 
grossièreté  des  hal)itants.  Forcé  dans 
les  deux  dernières  années  de  sa  vie  y 
parle  poids  de  l'âge  et  des  infirmités, 
à  ne  pbis  sortir  de  sa  chambre,  il  se 
dédommagea  de  ne  pouvoir  plus  con- 
tinuer ses  courses  évangéliques ,  en 
rassemblant  autour  de  lui  tous  les  en- 
fants du  peuple  que  sa  charnière  pou- 
vait contenir,  pour  leur  expliquer  les 
vérités  élémentaires  de  la  religion  et 
leur  donner  toutes  les  instructions 
dont  ils  étaient  susceptibles.  Ce  fut 
dans  ce  saint  exercice  que  le  zélé 
missionnaire  termina  sa  carrière  à 
l'âge  de  80  ans,  le  19  août  1672.  A 
peine  eut-il  rendu  le  dernier  soupir, 
que  le  peuple  se  précipita  avec  une- 


LFJ 

Irllp  affluencc  dans  h  maison  de  l'O- 
ratoire, pour  vcncrcr  mort  celui 
qu'il  avait  tant  respecte  vivant,  qu'on 
fut  oblige  d'etaycr  la  s;; lie  dans  la- 
quelle il  était  expose,  de  peur  que  le 
plancher  ne  s'ecroulàt.  Chacun  cher- 
cliailàemporterdans  sa  famille,  com- 
me une  relique,  (pielques  lambeaux 
des  vêtements  du  pieux  mission- 
naire, quehjuc  meuble  qui  eût  servi 
à  son  usage.  Les  sermons  du  P.  Lejeu- 
ne  furent  imprimes  àToulouse,en  i  o 
volumes  in-S**. ,  1662 ,  et  années  sui- 
vantes. Les  deux  derniers  ne  paru- 
rent qu'après  sa  mort  ;  ils  sont  inti- 
tules :  Le  missionnaire  de  V  Ora- 
toire,  etc.  Le  docteur  Grandin,  cen- 
seur royal ,  s'ëtant  permis  de  faire 
des  changements  dans  le  cinquième 
volume,  sans  en  avertir  l'auteur  ,  cc- 
lui-<:i  s'en  plaignit  amèrement  dans 
Tavertissement  du  septième  volume, 
rétablit  ce  que  le  censeur  en  avait  re- 
tranche, réfuta  ce  qu'il  avait  ajoute,  et 
obtint  un  nouveau  censeur.  Il  y  a  deux 
autres  éditions  de  ce  recueil  ;  l'une  de 
Rouen ,  en  1 6(37  ;  l'autre  de  Paris ,  eu 
1669,  Il  ne  faut  chercher  dans  ces 
sermons  ni  la  richesse  des  expres- 
sions, ni  la  pureté  du  style ,  ni  le  su- 
blime des  pensées.  L'état  de  lachaire, 
à  l'époque  où  le  P.  Le  jeune  entra 
dans  cette  carrière ,  ne  comportait 
pas  encore  ces  ornements;  et  le  gen- 
re d'instruction  auquel  il  s'était 
spécialement  consacré  ,  ne  lui  per- 
mettait pas  de  s'élever  aux  grandes 
formes  de  l'éloquence  chrétienne. 
On  y  trouve  même  quelques  histoires 
qui  ne  résisteraient  pas  à  une  cri- 
tique jii  licii'use;  mais  elles  sont  ra- 
contées avec  tant  de  sim])licité,  elles 
s'adaptent  bi  bien  au  sujet,  elles  pa- 
raissent si  propres  à  faire  goûter  ses 
instruc:ions  aux  gens  du  peuple  et 
aux  gens  de  la  campagne  ,  qui  furent 
toujours  le  principal  objet  de  sou 


LFJ  II 

ministère,  qu'on  doit  les  lui  pardon- 
ner. Le  mérite  de  ses  discours  con- 
siste dans  l'attention  de  l'auteur   a 
en  bannir  ce  mélange  bi/arre  de  ci- 
tations profanes  et  de  passages  de  l'É- 
criture sainte,  qui  défigurent  les  ser- 
mons de  la  plu[iart  de  ses  contem- 
porains ;  dans  l'exposition  claire  et 
nette   du  sujet  ;  dans  ses  divisions 
tracées  avec  beaucoup  d'ordre,  et  dé- 
veloppées avec  une  juste  étendue  ; 
enfm ,  dans  la  solidité  des  preuves  de 
la  vérité  qu'il  veut  établir.  Massillon  , 
lorsqu'il  était  consulté  par  ceux  de 
ses  confrères  qui  se  proposaient  de 
suivre  la  carrière  de  la  prédication  , 
leur  conseibait  la  lecture  réfléchie 
du  P.  Lejeune  ,  disant  qu'il  le  re- 
gardait comme  un  excellent  modèle 
d'éloquence  chrétienne,  pourvu  qu'on 
eût  assez  de  goût  pour  savoir  dis- 
cerner ce  qu'il  fallait  y  prendre  de 
ce  qu'il  fallait  y  laisser;  que  quant  à 
lui  il  avait  tiré  de  grands  avantages 
de  cette  lecture.  On  aurait  désiré  que 
l'auteur,  avant  de  les  livrer  au  public, 
en  eût  corrigé  les  expressions  su- 
rannées. Il  en  avait  chargé  le  P.  de 
Lamirande;  maiscelui-cin'ayant  osé 
remplir  cette  commission  ,  le  P.  Lo- 
riot l'a  exécutée  d'une  manière  satis- 
faisante dans  une  édition  qu'il  a  pu- 
bliée en  1 695.  Les  sermons  choisis  du 
P.  Lejeune  furent  traduits  en  latin  , 
et  imprimés  en  un  volume  in-4**.  ,  à 
Maïence,  en  1667  ,  sous  ce  titre: 
Joannis   Jiirùi  deliciœ  pastorum  , 
5iVe  conciones.  Quelques  biographes, 
trompés  parla  ressemblance  du  nom , 
lui  onlattribuc  unctraducliondu  trai- 
té de  Grolius,  De  feritate  religio- 
jiis  christianœ,  qui  est  de  Pierre  Le- 
jeune, ministre  protestant.  Le  P.  Ru- 
Den,  disciple  du  1\  Lejeune, avaitpro- 
noucé  l'oraison  funèbre  de  son  maî- 
tre ,  eu  présence  de  l'évtkjue  de  Li- 
mogeb.  Quoiqu'elle  fût  dcja  fort  Ion- 


12r  LEK 

gue  ,  il  y  insera  depuis  plusieurs  cir- 
constances dont  il  avait  ëtë  Ini-même 
témoin  ,  et  la  donna  au  public  sous 
ce  titre  :  Discours  J'unèb'e  sur  la 
we  et  la  mort  du  R.  P.  Le  jeune  ,  ap- 
pelé  communément  V Aveugle ,  etc. 
Limoges,  1674,  in-8«.j  Toulouse, 
167c)  ,  même  format.  T-d. 

LEKAIN  (Henri-Louis  ) ,  come'- 
dien,  ne  à  Paris  ,  le  i4  avril  17^-^8  , 
fils  d'un  orfèvre  qui,  le  destinant  au 
même  ëtat ,  diri;^ea  ses  premiers  es- 
sais. Il  y  réussit  tellement ,  qii'à  râp;e 
de  16  ans,  il  e'tait  recherche'  pour  la 
perfection  de  son  travail.  Cependant 
il  ne  pouvait  donner  à  celte  occupa- 
tion  qu'une  partie   de  son  temps. 
Son  père  ,  qui  savait  que  la  culture 
de    l'esprit    peut   être   utile     dans 
toutes    les    professions  ,   le  faisait 
étudier  au  collège  Mazarin  ,   où ,  à 
la  fin  de  l'annëe  classique,  les  ëco- 
liers  représentaient  une   pièce  dra- 
matique ;  ce  qui  occasionnait  quel- 
que dépense    aux  parents  de  ceux 
qui  y  figuraient.  Ce  motif  empêcha 
Lekain  d'être  au  nomlDre  des    ac- 
teurs; mais  il  trouvait  moyen  d'as- 
sister aux  rëpëtilions ,  et  même  d'y 
avoir  un  emploi ,  dont  il  s'acquittait 
avec  beaucoup  d'intelligence*  c'était 
celui  de  souffleur.  Il  aurait  pu,  au  be- 
soin ,  se  passer  du  livre;  car  les  pièces 
se  gravaient  dans  sa  mëraoire  lorsqu'il 
les  avait  entendu  réciter  'plusieurs 
fois.  Après  1  a  classe,  les  j  eunes  ac teurs 
s'arrachaient   Lekaiu  poiu'  rëpëter 
leurs  rôles  avec  lui ,  non-seulement 
parce  qu'il  s'y  prêtait  avec  une  extrê- 
me complaisance,  mais  parce  qu'en 
exerçant  leur  mémoire  ,  il  leur  don- 
nait l'exemple  d'une  bonne  décla- 
mation. Quand  il  rentrait  dans  son 
atelier  ,  souvent ,  au   milieu  de  son 
travail  ,  il  se   mettait   à    déclamer 
quelques  tirades  de  tragédie;  et  lors- 
qu'il s'apercevait  que  les  ouvriers 


LEK 

rëcoutaient  et  paraissaient  y  pren- 
dre plaisir  ,  son  amour-propre  flat- 
té l'aiguillonnait  encore  et  augmen- 
tait sa  passion.  La  plus  grande  safis-        ,1 
faction  que  pouvait  lui  donner  son        || 
père ,  était  de  le  laisser  aller  le  di- 
manche   à  la   Comédie  française  * 
c'ëtait-là  son  unique  divertissement. 
A  la  paix  de    1748  ,  les  plaisirs  de 
tout  genre  se  ranimant  à  Paris  ,  des 
jeunes   gens  s'étaient  associés  pour 
jouer  la  comédie  chez  eux,  sans  au- 
tre dessein  que  de  se  divertir  et  d'a- 
muser leurs  familles.  Deux  de  ces  so- 
ciétés se  faisaient  alors  remarquer  :il 
vint  dans  l'idée  à  Lekain  d'en  for- 
mer une  troisième  ;  et  il   ne  larda 
point  à  fonder  un  théâtre  à  l'hôtel  de 
Jabacli ,  rue  Saint-Méry,  où  il  joua 
la  comédie  avec  quelques  jeunes  amis. 
Bientôt  après  son  début ,  sa  troupe 
balança  la  réputation  des  deux  au- 
tres ,  et  finit  même  par  l'emporter. 
Ces  amusements  de  société  réussi- 
rent au  point  que  les  Comédiensfran- 
cais  en  prirent  de   l'ombrage,  et 
qu'ils  en  demandèrent  l'interdiction^ 
qu'on    leur    accorda.    Mais    cette 
interdiction   fut   bientôt   levée  ;   et 
Lekain  ,    transporté  de  la    préfé- 
rence  qu'obtint   sa  petite   troupe  , 
autant     que  des    applaudissements 
qu'il  recevait  personnellement ,  re- 
doubla de  zèle  ,  et  se  passionna  de 
plus  en  plus  pour  ce  genre  d'amuse- 
ment. Son  talent  se  fortifia  par  l'exer- 
cice; et  ce  fut  alors  qu'Arnaud-Ba- 
culard,  voulant  juger  de  l'effet  de  sa 
comédie  du  Mauvais  BicJie,  engagea 
le  jeune  acteur  et  ses  compagnons  à  la 
jouer.  Arnaud,  élève  et  protégé  de 
Voltaire,  avait  invité  son  maître  à 
voir  cette  représentation.  Ce  dernier , 
au  premier  jcoup-d'œil ,  découvrit 
dans  Lekain    le   germe  d'un  grand 
talent;  et  aussitôt  après  le  spectacle , 
il  demanda  le  nom  de  celui  qui  avait 


LKK 

joue  le  rôle  de  l'amoureux,  et  l'invi- 
ta à  venir  le  voir  ;  c'était  en  février 
i- 3o.  Lckain,  en  cutraut  dans  l'ap- 
partcmcnt  du  poète,  est  saisi  de  res- 
pect et  de  crainte,  et  il  s'avance  en 
tremblant;  mais,  dès  qu'il  l'aperçoit, 
Voltaire  se  lève,  court  à  lui ,  et  dit  en 
le  serrant  dans  ses  bras  :  «  Dieu  soit 
»  béni  I  je  rencontre  enfin  un  être 
»  qui  m'a  èniu  et  attendji,même  en 
»  débitant  d'assez  mauvais  vers.  » 
Il  l'invita  aussitôt  à  lui   déclamer 
quelques  belles   scènes   de   Racine. 
Après  l'avoir  entendu,  il  le  question- 
na sur  sa  famille,  sur  ses  projets  ;  et 
apprenant  avec  surprise  qu'il  voulait 
se  faire  comédien ,  il  chercha  à  l'en 
dètonrncr  en  bii  montrant  tous  les 
désagréments  de  cet  état.  Il  lit  plus  : 
afin  de  le  dcterminerànc  point  aban- 
donner la  profession  de  son  père  , 
il  lui  offrit  sans  terme  de  rembour- 
sement, dix  mille  francs,  pour  l'exer- 
cer   avec    plus    d'aisance.    Lckain 
fut  touche  jusqu'aux  larmes  du  no- 
ble procédé   de    Voltaire.   Partagé 
entre  des   sentiments    opposés  ,  il 
eût  voulu,  par  reconnaissance,  sui- 
vre ses  conseils  ;  mais,  d'un  autre 
coté,  la  nature  l'entraînait  ,  malgré 
lui,  vers  son  but.  Il  relourna  chez 
sou  bienfaiteur ,  le  remercia  de  ses 
offres  généreuses,  et  lui  dit  qu'il  ne 
pouvait  résister  à  sa  vocation  ;  que 
sa  destinée  était  d'entrer  au  théâtre. 
Voltaire  alors  ,  convaincu  qu'il  ne 
changerait  rien  à  sa  résolution ,  lui 
dit  :  a  Puisque  vous  voulez  abso- 
»  lument  êlrc  comédien,  je  veux  que 
»  l'apprentissage ,  du  moins  ,  cesse 
»  de  vous  coûter  de  l'argent  :  venez 
»  chez  moi  ;  j'y  ferai  construire  un 
»  théâtre  où  vous  jouerezlacomédie 
n  etlatr;^r'die  lantque  vous  voudrez, 
»  avec  ceux  de  vos  camarades  que 
»  vciLs  choisirez  pour  vous  secon- 
j»  der.  lli  u'auroul aucune  dépense  à 


LEK  i3 

»  faire,  je  pourvoirai  à  tout.  »  Ce 

1)lan  reçut  bientôt  son  exécution.  Le- 
i.ain  se  rendit  aux  désirs  de  Vol- 
taire ,  et  alla  demeurer  chez  lui.  Le 
théâtre  achevé  ,  l'on  y  représenta 
des  pièces  dans  lesquelles  les  deux 
nièces  du  poète  ,  et  lui-mcmc  ,  pre- 
naient qiiel((uefois  des  rôles.  On  y 
essayait  ses  tragédies  nouvelles,  de- 
vant des  spectateurs  choisis.  Les  gens 
do  lettres  les  plus  distingués ,  des 
seigneurs  de  la  cour, briguaient  la  fa- 
veur d'être  admis  à  ces  représenta- 
tions. C'est  là  qu'on  vit,  dans  la  tra- 
gédie de  Home  sauvée  le  rôle  de 
Cicéron,  joué  par  Voltaire  avec  une 
énergie  et  une  vérité  dont  la  tradi- 
tion conserve  encore  le  souvenir. 
Enflammé  par  l'exemple  d'un  tel 
modèle  ,  Lekain  y  brillait  dans  le 
rôle  de  Titus.  Son  talent  fit  de  grands 
progrès  pendant  un  séjour  de  plus 
de  six  mois  chez  son  prolecteur, 
qui  le  chérissait  et  le  traitait  comme 
s'il  eût  été  son  fils.  Il  rapporte 
dans  ses  Mémoires,  que  c'est  la  qu'il 
apprit  les  secrets  de  son  art;  et  il 
attribue  tous  les  succès  qu'il  obtint 
dans  la  suite  ,  aux  conseils  qu'il  y  re- 
çut. Avant  de  quitter  Paris,  Voltaire, 
qui  allait  se  rendre  à  Berlin,  solli- 
cita pour  lui  un  ordre  de  début 
à  la  Comédie  française;  et  ce  début 
eut  lieu  en  septembre  1 7^0.  Le  jeune 
acteur  fut  très-applaudi  ;  mais  il 
comuit  bientôt  les  obstacles  que  les 
hommes  supérieurs  en  tout  genre 
rencontrent  dans  leur  carrière.  Une 
foule  de  rivaux  et  d'ennemis  se- 
crets réunirent  leurs  efforts  pour 
l'empêcher  d'être  admis  dans  la 
troupe  des  comédiens  du  Roi,  et  ils 
n'y  réussirent  que  trop  long-temps, 
puisque ,  raal;;ré  les  applaudisse- 
ments du  public  et  la  recomman- 
dation, de  Voltaire,  Lekain  ne  par- 
vint à  cette  âdniissiou  qu'après  dix- 


,4  LEK 

sept  mois  de  de'but.  Ses  ennemis  al- 
léguaient divers  prétextes  pour  Të- 
loigner  ;  et  tandis  qu'ils  exage'raient 
de    beaucoup  l'insuffisance   de    sa 
taille  et  de  ses  moyens  physiques,  ils 
dissimulaient  avec  soin  ce  qui  mani- 
festait en  liii  un  grand  acteur,  com- 
me Tëtude  approfondie  de  toutes  les 
parties  de  l'art,  la  justesse  d'esprit , 
et  surtout  la  plus  rare  sensibilité.  Au 
reste ,  tous  les  obstacles  que  rencon- 
tra Lekain,  ne  firent  qu'exciter  encore 
davantage  son  ardeur.  «  11  s'accoutu- 
))  ma,  dit  Labarpe,  à  donner  à  sa  phy- 
»  sionomieetà  ses  traits  une  expres- 
»  sion  vive  et  marquée  qui  en  faisait 
»  disparaître  les  désagréments.  Il  sut 
»  dompter  son  organe  naturellement 
»  un  peu  lourd,  et  le  pliera  la  faci- 
»  lité  du  débit  nécessaire  dans  les 
V  moments  tranquilles;  car^  dès  que 
»  son  rôle  le  permettait,  sa  voix, 
î)  en  se  passionnant ,  devenait  inté- 
■»  ressante  ,  et  portait  au  fond  de 
»  l'ame  les  accents  de  l'amour  mal- 
»  heureux,  de  la  vengeance,  de  la 
»  jalousie,  de  la  fureur,  du  déses- 
»  poir  :  ce  n'était  ni  des  cris  secs  , 
î)  ni  des  hurlements  odieux  ;  c'était 
î)  de  ces  cris  déchirants  que  la  dou- 
))  leur  arrête  au  passage ,  et  qui  n'en 
î)  vont  que  plus  avant  dans  le  cœur. 
»  C'était  de  ces  sanglots  tels  qu'on 
«  les  a  entendus  dans  Vendôme  avec 
»  tant  de  transport,  lorsqu'il  disait: 

Vous  avez  mis  la  mort  dans  ce  cœur  uiiti-ngé. 

»  Ces  grands  effets  n'ont  été  connus 
»  que  de  lui,  et  c'est  ainsi  qu'il  était 
))  parvenu,  non- seulement  à  faire 
î)  oublier  les  défauts  de  son  visage, 
))  mais  même  à  produire  une  telle 
»  illusion ,  que  rien  n'était  plus  com- 
»  mun  que  d'entendre  des  femmes 
))  s'écrier,  en  voyant  Orosniane  ou 
))  Tancrède  :  Comme  il  est  heaul...y> 
Lïmprcssion  que  son  talent  a  faite 
daus  l'ame  de  l'un  des  auteuis  de 


LEK 

cet  arlicle,  y  subsiste  encore  forte- 
ment ;  mais  ne  trouvant  point  d'ex- 
pressions pour   la  rendre,  il   em- 
prunte celles  du  baron  de  Grimm , 
qui   écrivait   en    1771,  après   une 
représentation  de  Tancrède  :  c  Que 
»  dirai  -  je    de  Lekain?  Il  semble 
»  qu'il  n'ait  employé  le  temps  de 
»  sa  maladie  et  de  sa  retraite  que 
î)  pour  porter  son  talent  à  un  degré 
»  de  sublimité  dont  il  est  impossible 
»  de  se  former  une  idée  quand  on  ne 
»  l'a  point  vu.   Hors  du  théâtre,  sa 
»  figure  est  laide ,  ignoble,  et  il  de- 
»  vient  au  théâtre  beau,  noble,  tou- 
»  chant,  pathétique  ,  et  dispose  de 
»  votre  ame  à  son  gré.  Dans  le  rôle 
»  de  Tancrède  il  ne  dit  pas  un  mot 
»  qui  ne  vous  ravisse  d'admiration 
»  ou  ne  vous  arrache  des  larmes.  Il 
»  faut  compter  cet  acteur  parmi  ces 
n  phénomènes  rares  que  la  nature  se 
))  plaît  à  former  de  temps  en  temps, 
»  mais  qu'elle  n'est  jamais  sûre  de 
»  produire  deux  fois...  Je  ne  crains 
»  pas  de  dire  que  ce  que  nous  avons 
»  vu  dans  la  salle  de  la  Comédie 
»  française,  le  16  mars  dernier,  est 
»  non-seulement  un  spectacle  unique 
»  en  Europe,  mais  que  c'est  une  mer- 
»  veille  de  notre  siècle,  qu'aucun  au- 
•ù  tre  siècle  ne  pourra  se  flatter  de 
»  voir  renaître.  Je  n'aurai  point  à 
»  me  reprocher  de  n'en  avoir  pas 
»  joui  délicieusement.  J'ai  senti  l'em- 
»  pire  de  l'art  lorsqu'il  a  atteint  la 
»  perfection;  et  mon  ame  en  a  été 
»  tellement  ébranlée  ,  qu'il  m'a  fallu 
V  plusieurs  jours  pour  la  calmer  et 
y>  la  remettre  dans  son  assiète....  Il 
»  faut  regarder  Lekain  comme  ar- 
»  rivé  au  plus  haut  degré  de  perfec- 
»  tion  depuis  sa  rentrée.  »  {Corr.  de 
Griimn,  t.  vu,  p.  47i-  )  Quoique 
d'après  ce  passage  on  piiî  croire  que 
le  talent  de  Lekain  avait  atteint  le 
dermçA'  degré,  cependant  iiest  cons- 


Ï.EK 

taiit  que  chaque  nouvelle  repre'sen- 
t.iJiou  siMublail  ajoulor  encore  à  la 
haute  idée  <[u'on  eu  avail.  Sans  cesse 
occupé  (le  son  art,  il  lui  consacrait 
tout  sou  temps  el  toutes  ses  facultés, 
inclue  iorsq.i  il  fut  parvenu  à  ses 
plus  beaux  triomphes.  Selon  le  j)ré- 
ccpte  du  sag  i  ,  il  croyait  toujours 
n'avoir  rien  fait  lors  qu'il  lui  res- 
tait quelque  chose  à  l'aire.  Ou  sait 
«ju'il  allait  souvent  au  jfelais ,  enten- 
dre les  meilleurs  orateurs  ,  et  qu'il 
ne  dissimula  jamais  le  profit  qu'il  eu 
avail  tiré.  «  Allez  voir  mon  maître, 
»  dil-il  un  jour  ,  à  un  acteur  métiio- 
»  cre;  c'est  lui  (pii  vous  apprendra  à 
»  mettre  dans  toutes  vos  expressions 
»  le  ton  et  la  dignité  convenables.  » 
Ce  maître  était  le  fameux  Gerbier 
(  F'ojez  Gerbiee  ).  Ce  n'est  que  par 
(des  soins  aussi  constants ,  par  des 
travaux,  aussi  pénibles  ,  que  Lekain 
parvint  à  surmonter  tous  les  obtacles 
que  la  nature  avait  mis  à  ses  succès. 
«  La  fatigue  de  ses  rôles ,  a  dit  eu- 
»  corc  Laharpc,  était  eu  proportion 
»  de  la  sensibilité  qu'il  y  mettait. 
»  Son  expression  n'était  })as  scide- 
»  meut  l'action  de  ses  organes,  c'é- 
»  tait  le  tourment  d'une  ameboule- 
»  versée  qui  retenait  encore  eu  dc- 
»  dans  plus  qu'elle  ne  produisait  au 
»  dehors  ;  ses  cris  et  ses  larmes  étaient 
»  des  souffrances  ;  le  feu  sombre  et 
»  terrible  de  ses  regards  ,  le  grand 
»  caractère  imprimé  sur  son  front , 
»  la  contraction  de  tous  ses  mus- 
»  clés,  le  tremblement  de  ses  lèvres, 
»  le  renversement  de  tous  ses  traits, 
»  tout  manifestait  un  cœur  trop 
»  plein  qui  avait  besoin  de  se  ré- 
»  pandre,  et  qui  se  répandait  sans 
»  se  soulager  :  ou  entendait  le  bruit 
»  intérieur  de  l'orage,  et  quaud  il 
«quittait  le  théâtre,  on  le  vovait 
)>  encore,  comme  l'ancienuc  Pythie, 
»  accablé  du  Dieu  q'i'il  portait  dani 


LEK  i5 

»  Aon  sein.  Il  lui  fallait  quelque 
«temps  pour  revenir  à  lui,  pour 
»  éloigner  lesfantomeset  sortir  de  la 
»  tragédie.  »  De  pareils  jugements,  d«. 
la  part  de  contemporains  aussi  éclai- 
rés que  l'étaient  Grimm  el  Laharpo, 
sont  le  mrillcurlémoiguagequc  l'on 
puisse  olïrir  à  la  postérité.  Cepen- 
dant il  convient  de  dire  que  ces  louan- 
ges ne  furent  pas  tcut-a-fait  unani- 
mes; et  l'on  ne  trouvera  pas  mau- 
vais qu'après  les  avoir  rapportées 
avec  autant  d'étendue ,  nous  présen- 
tions un  portrait  moins  flatteur,  fait 
par  un  contemporain, égaiemenl  célè- 
bre ,  mais  dont  on  peut  avec  beau- 
coup de  raison  suspecter  les  mo- 
tifs. Voici  comment  Marmontel  si- 
gnale, dans  l'Encyclopédie,  à  l'ar- 
ticle Déclamalion  ^  les  défauts  qu'il 
avait  cru  voir  dans  le  jeu  de  Le- 
kain :  «  Il  est  d'autres  causes 
»  d'une  déclamation  défectueuse  :  il 
»  eu  est  de  la  part  de  l'acteur,  de  la 
»  part  du  poète,  de  la  part  du  pu- 
»  blic  lui-même.  L'acteur  à  qui  la 
»  nature  a  refusé  les  avantages  de 
»  la  figure  et  de  l'organe ,  veut  y 
»  suppléer  à  force  d'art;  mais  q-iels 
»  sont  les  moyens  qu'il  emploie  ? 
w  Les  traits  de  son  visage  manquent 
V  de  noblesse  ;  il  les  charge  d'une 
»  expression  convulsive  :  sa  voix  est 
)>  sourde  ou  faible;  il  la  force  pour 
»  éclater  :  ses  positions  naturelles 
»  n'ont  rien  de  gpand;  il  se  met  à  la 
»  torture,  et  semble,  par  une  iresti- 
»  culation  outrée,  vouloir  se  cou- 
»  vrir  de  ses  bras.  Nous  dirons  à  cet 
»  acteur, quelques applaudisscmenti 
»  qu'il  arrache  au  public  :  Vous 
»  voulez  corriger  la  nature,  et  vous 
»  la  rendez  monstrueuse  :  vous  seu- 
»  tez  vivement;  parlez  de  même,  et 
»  ne  forcez  rien  :  que  votre  Hsage 
)>  soit  muet  ;  on  sera  moins  blesse 
»  de  son  silence  que  de  ses  contor- 


i6 


LEK 


»  sions  :  les  yeux  poiirrout  vous  cen- 
))  surer;   mais   les  cœurs  vous.ap- 
))  plaudirout ,   et   vous   arracherez 
1)  des  larmes  à  vos  critiques.  »  Le 
ressentiment  d'un  autear  me'content 
perce  trop  évidemment  dans  cette 
critique.  (  Foj-ezM ARMovhEh.  ) 
Quoique  l'acteur  qu'il  désignait  ain- 
si ne  fût  pas  nomme  ,  personne  ne 
put    s'y    me'prendre  ;    Lekain    ne 
douta   point  qu'il  n'en   fût  l'objet, 
et  il  se  vengea  dans  plusieurs   oc- 
casions ,    notamment  .à  la   repré- 
sentation de  Venceslas ,  qui  eut  lieu 
à  Versailles.  Marmontel   avait  été' 
cliargé  de  faire  à  cette  pièce  quel- 
ques changements  dans  les  expres- 
sions  vieillies  par  le  temps  j  mais 
Lekain     n'y     eut    point    d'égard  , 
et  il  récita  son  rôle  avec  d'autres 
changements  faits  par  Colardeau  , 
et  qui,  malheureusement  pour  Mar- 
montel, étaient   ])lus   heureux   que 
les  siens.  Cette  faible  opposition  qui 
se  manifesta  au  moment  où  Lekain 
semblait  parvenu  au  ])lus  haut  point 
de  sa  gloire  ,  fut  à  ])eine  remarquée 
du  public;  et  jusqu'aux  derniers  mo- 
ments de  ce  grand  acteur,  les  accents 
de  l'admiration  continuèrent  à  étouf- 
fer les  clameurs  de  l'envie.  Cepen- 
dant il  étudiait  encore  les  secrets  de 
son  art,  et  chaque  jour  il  découvrait 
de  nouveaux  moyens  d'exciter  l'en- 
thousiasme. Tous  les  contemporains 
se  sont  accordés  à  dire  que  sa  der- 
nière représentation  fut  la  plus  admi- 
rable; jamais  il  ne  s'était  montré  aussi 
étonnant,  aussi  sublime  que  ce  jour- 
là  dans  le  rôle  de  Vendôme  d'Adeiai- 
de  Duguesclin.  Il  paraît  même  certain 
que  l'ardeur  extraordinaire  qu'il  y 
déploya  fut  la  cause  première  de  sa 
mort.  Il  sortit  de  la  salle  fort  échauf- 
fé ,  par  un  temps  rude ,  sans  nulle 
précaution;  et  cette  imprudence  sui- 
vie, dit-ou,d'u4ie  plus  grande  encore, 


LEK 

lui  causa  une  inflammation  qui  le  mit 
en  peu  de  jours  au  tombeau,  le  8  fé- 
vrier ly^S,  à  l'âge  de  49  ans*  Il  fiit 
inhumé  le  jour  même  où  Voltaire  , 
qui  avait  ignoré  sa  maladie  ,  entrait 
à  Paris  après  une  absence  de  trente 
ans.  Ce  fut  la  première  nouvelle  qu'il 
apprit  à  son  arrivée  ;  qu'on  juge  de 
quelle  subite  et  profonde  affliction  il 
i\it  pénétré I  Avec  Lekain,  disparut 
son  talent  tout  entier,  sans  qu'il  lais- 
sât après  \vi  de  vestiges  qui  pussent 
le  signaler  à  la  postérité.  De  tous  les 
beaux  arts ,  la  déclamation  théâtrale 
est  à  cet  égard  le  plus  malheureux  : 
sa  production  la  plus  parfaite  n'y  sur- 
vit point  à  son  auteur;  et  les  chefs- 
d'œuvre  qui  dans  les  autres  arts  ins- 
truisent   et   charment  les    généra- 
tions suivantes  ,  disparaissent  avec 
l'homme  qui  les  a  produits, souvent 
même  avec  l'instant  qui  les  a  vus 
naître.  Lekain  a  dit  qu'il  lui  était  ve- 
nu quelquefois  des   mouvements  et 
des  inspirations  qu'il  n'avait  jamais 
])u  retrouver,  quels  qu'eussent  été  ses 
efforts  pour  y  parvenir.  Un  seul  co- 
médien ,  chez  les  modernes,  a  obte- 
nu une  réputation  égale  à  la  sienne  ; 
c'est  le  fameux  Garrick.  Il  est  vrai 
((ue  Linguet  qui  avait  vu  plusieurs 
fois  ce  dernier  au  théâtre  de  Lon- 
dres ,  ne  le  juge  pas  si  favorable- 
ment dans  sa  notice  sur  ces  deux 
acteurs  ;  il    estime  beaucoup    plus 
Lekain,  et  il  en  donne  d'assez  bon- 
nes raisons.  Voltaire ,  interrogé  un 
jour  par  le  marquis  de  Villette,  sur 
le   mérite  des    principaux    acteurs 
tragiques  qu'il   avait  vus  au  théâ- 
tre dans   sa  longue   carrière  ,    tels 
que  Baron  ,  Beaubourg  ,  Dufresne  , 
Sarrazin,  Lanoue  et  Grandval ,  lui 
dét-njla  les  qualités  diverses  par  les- 
quelles chacun  d'eux  avaif  brillé  ;  et 
il  conclut  en  disant  que  Lekain,  réu- 
nissant un  plus  grand  nombre  de  ces 


qnaHlr's,  les  surpassait  de  beaucoup 
et  iiuMUP qu'il  l'Iait,  à  ses  yeux,  lescul 
ficteun'raiment  tras^upte.  Peu  de  gens 
oui  eu  l'avantaj^c de  vivre  assezlonp;- 
teiups  pour  faire  uue  telle  comparai- 
son; mais  ou  peut  croire,  d'après  un 
juge  comme  Voltaire ,  que  l'art  de  la 
repre.seutatiou  théâtrale  a  ctc  porte 
par  Lckaiu  plus  loin  que  par  aucun  de 
ses  prcfdcccsseurs.  Depuis  quarante 
ans  qu'il  a  cessé  de  vivre ,  personne  ne 
lui  a  ete  compare  par  ceux  qui  Tout 
connu ,  et  personne  eu  effet  ne  lui  a 
ressemble.  L'acteur  était  tellement 
identifié  avec  le  caractère  des  person- 
nages, qu'il  était  tour  à  tour  Oreste, 
Néron,  Gengiskan,  Mahomet.  Sou 
entrée  sur  la  scène  ,  dans  ce  der- 
nier rôle ,  était  surtout  admirable.  Le 
I'eu  pautomime  dans  lequel  il  cxcel- 
ait ,  prolongeait:  l'illusion  :  il  était 
Tame  de  la  scène,  dès  qu'il  y  parais^ 
sait  ;    et    sa   déclamation   mesurée 
donnait  le  ton  aux  autres  acteurs. 
On    sait   que    Grétry  en    a    noté 
des  morceaux  dans  ses   Essais  sur 
la  Musique.   Sa    réputation   s'était 
étendue  dans  toute  l'Europe;  et  Fré- 
déric Il ,  qui  en  avait  entendu  par- 
ler par  Voltaire  avec  beaucoup  d'en- 
thousiasme ,  désira  voir  un  tel  pro- 
dige ,  et  le  fit  venir  à  Berlin  ,  où  il 
joua  plusieurs  fois  dans  les  dernières 
années  de  sa  vie.  Lekain  avait  acquis, 
dans  les  lettres,  toutes  les  connais- 
sances nécessaires  à  son  art.  Sen- 
sible à  la  poésie,  on  ne  l'a  jamais 
entendu  mutiler  les  vers  qu'il  réci- 
tait; et  fort  instruit  d^  s  usages   et 
des  costumes  de  tous  les  peuples, 
fl  se  montra  toujours  extrêmement 
scrupuleux  à  les  suivre.  Il  provo- 
!i  dilTérentes  réformes  utiles,  et 
lut  en  cela  très-bien  secondé  par 
idemoiselle  Clairon  ,  si  digne  de 
lier  la  tragédie  avec  lui.  Il  désira 
"(ablissemeut  d'une  école  de  décla- 


LEK  17 

mâlioft ,  et  quelques  araelioratiens 
dans  le  régime  intérieur  des  specta- 
cles. Tout  cela  est  rapporté  dans  di- 
vers écrits,  publiés  par  son  fils  (i). 
Il  lit  j)lusieurs  voyages  à  Ferney,  et 
conserva  pendant  toute  sa  vie  avec 
Voltaire  Qas  rapports  tiès-intimeS. 
Ces  rapports,  et  ceux  qu^il  eut  avec' 
d'autres  hommes  célèbres ,  l'environ- 
nèrent d'une  considération  à  laquelle 
la  noblesse  de  son  caractère  ne  con- 
tribua ])as  moins  que  son  talent.  Il 
n'est  personne  qui  ne  connût  dans  le 
temps  et  qui  n'applaudît  a  la  réponse 
aussi  noble  que  sensée  qu'il  fit  à  un 
chevalier  de  Saint-Louis ,  qui  s'était 
exprimé  en  sa  présence  dans  les  ter- 
mes les  plus  méprisants  sur  les  co- 
médiens ,  sur  leurs  pensions  et  leurs 
profits  excessifs,  taudis  que  lui,  ajou- 
tait-il ,  ancien  militaire  couvert  de 
blessures  ,  ne  recevait  du  Roi  que 
six  cents  francs  par  an  ,  après  avoir 
passé  la  moitié  de  sa  vie  à  le  ser- 
vir. Lekain,  cpii  l'avait  écoulé  sans 
rien  dire  ,  lui  répondit  froidement  : 
(c  Comptez-vous  pour  rien  le  droit 
»  que    vous   croyez  avoir  de    me 
))  dire  tout  cela?  »  Malgré  la  supé- 
riorité de  son  talent ,  ce  grand  ac- 
teur ne  fut  exempt  d'aucun  des  dé- 
sagréments de  son  état ,  et  trois  fois 
on  le  conduisit  en  prison.  La  probité, 
les  sentiments  élevés,  le  talent  su- 
périeur, ne  lui  firent  pas  trouver  au- 
près de  certains    dominateurs    des 
spectacles  plus  d'égards  et  de  considé- 
ration que  de  médiocres  comédiens. 
Il  se  rappela  souvent ,  dans  de  pa- 
reilles circonstances,  les  avis  de  Vol- 


(1)  Mémoires  de  H.  Lekain  ,  ptiblict  par  ion 
fili  aîoc,  luiviad^une  Correspondance  de  Vol- 
taire ^  Garrick  ,  CoîarJeau  ,  ILebrtm  ,  etc., 
i8oi  ,  in-8**.  Il  parut,  peu  apit»,  yàne  Notice  de 
F.  R.  Mole  sur  les  Mémoiret  de  I.ekain  ,  1801, 
in-S".  ,  «t  tiet  Jugements  sur  Lekain  ,  par  Mo- 
le ,  Linguet ,  etc.  On  a  publié  depuis  ;  Lekain 
dans  sa  jeunesse  ou  Détail  histori<iuede  setpre^ 
mi*ret  (innées  t  écrit  par  lui-même,  iSi6,  ia>^ 


XXIV 


tS 


LEK 


trfirc,  et  fut  quelquefois  tente'  d'aller 
chercher  le  repos  dans  une  petite 
retraite  qu'il  avait  à  Fontenai  près 
Vincennes;  mais  la  passion  de  son 
art  l'emporta  toujours  dans  son  cœur. 
La  plupart  des  Mémoires  et  des 
écrits  du  temps  sont  empreints  de 
Venlhousiasme  et  de  l'admiration 
que  Lekain  a  excités.  Cependant  on 
Ut  dans  plusieurs  passages  du  Jour- 
nal historique  de  Collé  (  Voyez  ce 
nom ,  tom.  ix,  pag.  255  ) ,  des  cri- 
tiques fort  sévères  et  même  grossie-' 
res  de  sa  manière  de  déclamer. 
Sa  taille  était  médiocre  et  un  peu 
lourde,  ses  membres  forts  et  sa  figure 
très-commune;  mais  tous  ses  traits 
étaient  fortement  prononcés  ;  une 
arae  de  feu  les  animait,  et  leur  mobi- 
lité était  un  véritable  phénomène. 
Son  portrait ,  gravé  par  Saint-Aubin 
d'après  Lenoir,  est  très-ressemblant. 
L'acteur  est  représenté  dans  une  si- 
tuation intéressante  du  rôle  d'Oros- 
Biane.  Lekain  a  été  éditeur  de  V  Ade- 
Idide  Duguesclinàe  Voltaire,  Paris, 
i';65,  in-8o.  D-x  et  M-d.  j. 

liELAÉ  (Claude-Marie), avocat 
let  poète  bas-breton ,  naquit  le  8  avril 
1745,  à  Lamiilis,  village  à  cinq 
lieues  de  Brest,  et  mourut  juge  au 
tribunal  civil  de  Landernau  ,  le 
1 1  juin  Ï791.  Il  a  composé  un  pe- 
tit poème  intitulé  ,  Michel-Morin , 
paiement  remarquable  par  le  style 
et  parla  gaîtéqui  y  règne,  et  imprimé 
k  Morlaix.  C'est  une  paraphrase  in- 
génieuse de  la  pièce  macaronique  qui 
porte  le  même  nom.  On  a  de  lui  un 
autre  poème  assez  plaisant  sur  la 
mort  d'un  chien,  des  chansons,  des 
satires,  et  surtout  des  épigrammes.  A 
certains  égards,  ce  poète  est,  tout-à- 
k-fois,  le  Scarron,  le  Vadé,  le  Pi- 
ron  et  pour  ainsi  dire  le  Boileau 
de  la  Basse-Bretagne.  Le  mérite  de 
st?s  ver*»  eftt  de  fair«  rir«  aux  éclats 


LEL 

tous  ceux  qui  les  entendent,  même 
les  femmes  ,  les  enfants  ,  et  jus- 
qu'aux paysans  les  plus  grossiers* 
Ce  mérite ,  fort  rare  dans  notre  siè- 
cle ,  a  bien  plus  de  prix  dans  la 
Basse-Bretagne,  dont  les  habitants, 
ceux  des  classes  inférieures  surtout, 
se  ressentent  de  leur  origine  ,  et  ne 
sont  rien  moins  que  rieurs.  Les  poé- 
sies de  Lelaé  ont  obtenu  les  suffrages 
de  tous  ses  compatriotes  :  mais  il 
est  impossible  d'en  donner  une  idée 
en  français  ;  car ,  la  traduction  leur 
ferait  perdre  tout  leur  sel.  On  doit 
regretter  qu'il  ait  écrit  dans  un  idio- 
me très-respectable  assurément,  puis- 
qu'il est  le  plus  pur  dérivé  de  la  lan- 
gue des  anciens  Celtes  ,  mais  qui 
est  à  peine  connu  aujourd'hui  dans 
la  moitié  de  la  Bretagne.       A-t. 

LEL  AND  (Jean),  antiquaire,  né  à 
Londres  au  commencement  du  sei- 
zième siècle,  resta  orphelin  fort  jeune, 
mais  trouva  un  appui  dans  Thomas 
Myles  ,  grand  protecteur  des  lettres, 
qui  lui  fit  faire  ses  premières  études 
sous  G.  Lily,fanieux  régentde  l'école 
de  St.-Paul.  Il  continua  ses  cours  à 
Cambridge  et  à  Oxford;  et,  après  y 
avoir  pris  ses  grades,  il  vint  à  Paris , 
attiré  par  la  réputation  des  profes- 
seurs du  Collège  royal.  De  retour  eu 
Angleterre,  il  embrassa  l'état  ecclé- 
siastique, reçut  les  ordres  sacrés,  et 
parvint  à  la  place  de  chapelain  du 
roi  Henri  VIII.  Ce  prince,  charmé  dé 
ses  talents  ,  créa  pour  lui  la  chargé 
d'antiquaire  de  la  couronne  ,  dont  le 
titre  s'éteignit  avec  lui,  le  nomma  son 
bibliothécaire ,  et  le  pourvut  de  ri- 
ches bénéfices.  Leland  visita  toutes  les 
provinces  d'Angleterre  dans  le  des- 
sein d'en  faire  la  description  topo 
graphique  ,  et,  muni  d'un  ordre  du 
roi ,  enleva ,  des  couvents  nouvelle- 
ment supprimés ,  tous  les  livres  et 
manuscrits  qu'il  jugea  dignes  d'aug- 


mcntrr  les  richesses  de  la  I)il)lîolll^- 
'jue  rovale.  Il  s'occupa  ensuilc  de 
lettre  en  ordre  les  matériaux  qu'il 
^vail  rassembles  avec  tant  de  soin; 
nuis  l'excès  du  travail  aflaiblit  ses 
organes  en  peu  de  temps,  au  point 
qu'on  fut  oblic;c  de  lui  donner  un  cu- 
r.itcur.  Comme  il  avait  abandonné 
la  religion  romaine  pour  plaire  au 
roi,  on  soupçonna  que  les  remords 
avaient  pu  contribuer  à  lui  troubler 
l'esprit.  Quoi  qu'il  en  soit  ,  après 
avoir  langui,  à  peu  près  deux  ans, 
dans  un  état  d'imbécillité  complète  , 
]l  mourut  à  Londres, le  1 8  avril  1 55 .4. 
L^laud,  nommé  aussi  quelquefois 
Laylonde,  était  un  fort  habile  hom- 
me, savant  dans  les  langues,  élo- 
quent orateur  et  bon  poète  :  mais  ou 
lui  a  reproché  une  excessive  vanité; 
défaut  que  ne  peuvent  faire  excuser 
les  plu»  grands  talents.  On  trouve  la 
liste  de  ses  ouvrages  dans  Fabricius, 
Bibl.  mediœ  et  infimœ  latinitat. 
tom.  iv,pag.  89);  dans  les  Mémoi- 
res de  Niceron ,  tom.  xxviii ,  et  dans 
le  Dictionnaire  de  Chaufepié.  Les 
principaux  sont  :  L  Principum  ac 
illustrium  aliquot  et  eruditorum  in 
u^nglid  virorum  encomia,  trophœa, 
genethliaca  et  epithalamia,  Lon- 
dres, 1589,  in-4.  C'est  un  recueil 
de  vers  ;  il  a  été  publié  par  Th. 
Newton  de  Gheshire.  IL  Commen- 
tarii  de  Scriptorib.  Britannicis,  Ox- 
ford, 1709,2  tom.  in-8. 1/éditeur,  le 
savant  Ant.  Hall,  a  fait  précéder  cet 
ouvrage  d'une  vie  de  Leîand,  exacte 
et  intéressante.  III.  Itinerarjrofg'eat 
Btitain.  Oxford,  1710  et  ann.  suiv. 
9  vol.  in-8.  Cette  édition  n'a  été  ti- 
rée qu'à  cent  vingt  exemplaires;  mais 
Touvrage,  qui  est  assez  curieux,  a 
été  réimprimé  en  1744  '  cnriclii  de 
notes  de  l'éditeur  Th.  Hi-arne.  IV. 
CoUectanea  de  rébus  Britannicis , 
Oxford,  1715,  6  vol  in-8. ,  édiliou 


LEL  <  tg 

tire'e  à  un  petit  nombre  d'exem- 
plaires. (  f^oj.  Th.  Hkarne  ,  t.  XIX , 
pag.  534.)  C'est  un  recueil  de  pièces 
extraites  des  dilïérentes  archives  du 
royaujne.  Th.  Hearne  y  a  ajouté  de* 
notes,  un  index  et  la  vie  de  Leiand. 
On  a  publié  sous  le  nom  de  celui-ci  des 
Questions  et  Héponses  concernant  le 
nijr stère  de  la  maçonnerie^  copiées 
par  lui  d'après  un  manuscrit  de  la 
main  du  roi  Henri  VI.  Cette  pièce  , 
tirée  de  la  bibliothèque  Bodléienne, 
en  1696,  et  accompagnée  des  notes 
de  Locke,  a  été  traduite  en  français 
dans  les  Acta  Latomorum  ,11,  6. 
C'est  un  morceau  assez  sin^a'ier ,  à 
la  vue  duquel  Locke  chercha  à  se 
faire  recevoir  franc-maçon  ,  comme 
le  roi  Henri  VI  lui  en  avait  donné 
l'exemple  d'après  l'effet  produit  sur 
lui  par  ces  réponses.Le  répondant  fai- 
sait remonter  l'origine  de  la  maçon- 
nerie jusqu'à  Peter  Gower  (Pytha- 
gore) ,  qui,  l'ayant  apprise  des  mar- 
cliands  vénitiens  (phéniciens),  l'in- 
troduisit à  Groton  en  Angleterre 
(  Crotone  dans  la  Grande  Grèce  ). 
Voyez  les  vies  de  Leiand  ,  Hearne 
et  Wood  par  Haddesford,  conser- 
vateur de  la  bibliothèque  Ashmo- 
léenne,  1772,  2  vol.  in-8.     VV-s. 

LEL  AND  (Jean),  ministre  presby- 
térien anglais,  naquit  àWigan  (Lan- 
caster  ),  i6()i.  Peu  de  temps  après, 
son  père  perdit  sh  fortune  ,  et  alla 
s'établir  à  Dublin.  Jean,  qui  avait  été 
laissé  en  Angleterre  pour  son  éduca- 
tion ,  étant  parvenu  à  l'age  de  six 
ans,  fut  attaqué  de  la  petite  vérole 
qui  le  conduisit  aux  portes  du  tom- 
beau ;  revenu  à  la  %*ie  ,  contre  toute 
espérance,  il  se  trouva  privé  de  ses 
facultés  morales  ,  n'ayant  plus  ni 
intelligence  ni  mémoire  :  cet  état 
dura  pendant  un  an,  et  alors  ses  fa- 
cultés revinrent;  mais  il  ne  lui  resta 
aucun  souvenir  d«  c«  q[u'il  avait  iu 
2.. 


fjLO  LEL 

avant  sa  maladie.  Cependant  son  in- 
telligence était  si  grande  et  sa  mé- 
moire si  heureuse  ,  qu'il  recouvra  , 
en  peu  de  temps,  ce  qu'il  avait  perdu. 
Dès  ce  moment,  ses  parents  le  desti- 
nèrent au  ministère  évange'lique  ;  il 
«ludia  parmi  les  dissidents  ;  et  après 
avoir  débuté  avec  succès  dans  une 
congrégation  qui  s'était  formée  àDu- 
blin  ,  il  fut  nommé  pasteur-adjoint , 
en  1716,  s'acquitta  de  ses  fonctions 
avec  la  plus  grande  exactitude,  et,  par 
son  infatigable  application ,  s'avança 
rapidement  dans  toutes  les  connais- 
sances utiles.  Témoin  des  attaques 
dirigées  contre  le  christianisme  par 
quelques  écrivains  audacieux ,  il  ap- 
profondit leurs  livres;  les  suivit  dans 
tous  leurs  subterfuges,  porta  le  même 
soin  dans  l'étude  des  preuves  de  la  ré- 
vélation ,  et  publia  successivement  ; 

I.  An  Answer  to  a  late  book  intitled: 
Christianitf  as  old  as  the  création , 
etc.,  1733,2  vol.  in-8*^.  C'est  une 
réponse  à  l' écrit  que  Tindal  avait  mis 
au  jour  en  1780,  intitulé  :  Le  Chris- 
tianisme aussi  ancien  que  le  monde. 

II.  The  divine  authoritf  oj  the  old 
andnew  Testament  asserted  against 
the  unjust  aspersions  and  f  aise  rea- 
sonings  ofabook  intitled  :  the  Mo- 
ral Philosopher,  1737 , 1  vol.  in-S". 
C'est  une  réfutation  du  Philosophe 
moral  de  Morgan  :  comme  celui-ci 
ajouta  ensuite  un  volume  à  son  livre 
en  réponse  àl'ouvragedu  docteur  Le- 
land,  celui-ci  ajouta  un  2^.  volumeà 
son  Autorité  divine,  etc. ,  en  réplique 
aux  nouvelles  impiétés  de  son  adver- 
.saire.  Le  savoir  et  l'habileté  que  dé- 
ploya Leland  dans  ces  productions  , 
lui  méritèrent  des  marques  d'estime 
et  de  respect  de  la  part  de  personnes 
du  plus  haut  rang  dans  l'église,  ainsi 
que  dans  les  communions  dissiden- 
tes :  l'université  d'Aberdeen  lui  en- 
voya, de  la  manière  la  plus  houo- 


LEL 

rable  ,  le  diplôme  de  docteur  en 
théologie  ,  pour  reconnaître  les  ser- 
vices qu'il  avait  rendus  à  la  religion. 
IIL  An  Answer  to  a  pamphlet  in- 
titled :  Christianitj  not  founded  on 
argument  ,  174'-*.  Ce  sont  deux 
lettres  contre  le  pamphlet  de  Henri 
Dodwell  fds.  (  Voyez  Dodwell.  ) 
IV.  Bejlections  on  the  late  lord 
Bolingbroke^s  letters  on  the  studf 
aud  use  of  historjr  •  especially  so 
far  as  thej  relate  to  christianitjr 
and  the  holy  scriptures,  1753.  Si  la 
publication  des  Lettres  sur  Vhistoire 
(  par  Bolingbroke  )  fit  plaisir  aux  sa- 
vants, elle  affligea  les  hommes  de  bien, 
qui  furent  révoltés  des  impiétés  dont 
elles  fourmillent.  (  F.  Bolingbrore.) 
Plusieurs  théologiens  prirent  la  plu- 
me pour  les  réfuter  ;  mais  aucun 
n'eut  autant  de  succès  que  le  docteur 
Leland.  11  avait  eu  d'abord  quelque 
peine  à  écrire  dans  cette  occasion  , 
«  parce  que  ,  disait-il ,  si  lorsque  la 
»  religion  est  attaquée  ouvertement, 
»  il  convient  de  ne  rien  négliger 
*)  pour  sa  défense  ,  on  doit  craindre 
»  néanmoins  de  montrer  trop  d'em- 
»  pressement ,  après  qu'on  a  payé 
»  son  tribut.  »  Ses  scrupules  se  dissi- 
pèrent par  les  conseils  de  ses  amis: il 
leur  fut  redevable  d'un  accroisse- 
ment de  renommée,  et  la  religion 
d'une  bonne  apologie.  V.  A  View 
of  the  principal  deistical  writers 
that  hâve  appeared  in  E n gland , 
in  the  last  and  présent  centurj  j^ 
with  observations  upon  them  ,  etc. 
1754,  2  vol.  in-8<^.  Cet  ouvrage ,  qui 
est  en  forme  de  lettres  (  adressées 
au  docteur  Wilson  )  eut  d'abord 
peu  de  succès;  mais  les  éditions  sui- 
vantes ,  plus  soignées  ,  furent  ven- 
dues rapidement  :  celle  de  1 798 , 
2  volumes  in-8^. ,  avec  un  View 
of  the  présent  time  with  regard 
to  religion  and  moralSj  and  otjier 


important  subjects  ,  par  le  doc- 
teur Brown  ,  est  plus  estimée  ;  l'ë- 
diteur  y  a  joint  une  continuation 
qui  va  jusqu'à  la  fin  du  dix-huitième 
siècle,  h' Histoire  critique  du  pfiilo- 
sophisme  anglais,  parM.  Tabaraud, 
'À  vol.  in-8**. ,  a  transporte  parmi 
nous  tout  ce  qu'il  y  a  de  meilleur 
dans  l'ouvrage  de  Lelaud.  VI.  Un 
Supplément  aux  homélies  de  Hume 
et  <le  Bolingbroke ,  et  une  nouvelle 
fdition  des  Réflexions  sur  les  Lettres 
de  ce  dernier,  considéraljlement  aug- 
mentée ,  2  vol.  in  -  8**.  VU.  Tfie 
Advantage  and  necessity  oj  the 
chiistian  révélation  ,  sliewn  front 
the  State  of  religion  in  the  ancient 
healhen  world  ,  especially  with 
respect  to  the  knowledge  and 
worship  of  tfie  one  true  god  ;  a 
rule  of  moral  duty  ^  and  a  state 
of  future  rewards  and  punishe- 
ment  s ,  etc.  1760,  2  vol.  in-4'*.  ; 
et  deuxième  édition,  2  vol  in-8<*. 
Quelques  amis  de  Leland  l'avaient 
pressé  de  revoir  les  livres  qu'il  avait 
composés,  d'en  faire  des  extraits,  et 
de  former  de  ces  extraits  un  traité  , 
où  les  meilleurs  arguments  en  faveur 
de  la  révélation  fussent  mis  dans 
un  ordre  méthodique  :  mais  ne  pou- 
vant se  résoudre  à  reproduire  les  ex- 
traits de  ses  propres  ouvrages  sous 
une  nouvelle  forme  ,  il  y  renonça  ; 
cependant  le  travail  auquel  il  s'était 
livré,  tournant  ses  pensées  vers  les 
disputes  des  chrétiens  et  des  déistes, 
donna  lieu  à  la  Nécessité  de  la  révé- 
lation chrétienne,  excellent  ouvrage 
traduit  en  français  sous  ce  titre  '.Nou- 
velle démonstration  évangélique  , 
où  l'on  prouve  l'utilité  et  la  néces- 
sité de  la  révélation  chrétienne,  par 
l'état  de  la  religion  dans  le  paga- 
nisme ,  relativement  à  la  connais- 
sance et  au  culte  d'un  seul  vrai  dieu  y 
à  une  règle  de  moralité ,  H  à  un 


LFX 


21 


état  de  récompenses  et  de  peines 
futures,  Liège,  1768,4  vol.  in- 12. 
Ce  livre,  dit  Laharpe  (  Introd.  à  la 
philosopfùe  du  1 8*^.  siècle  ) ,  est  le 
chef-d'œuvre  de  Leland  :  supérieur 
à  toutes  les  productions  que  le  même 
zèle  a  enfantées  dans  ce  siècle ,  et 
l'une  de  celles  où  les  profondeurs  de 
la  science  et  du  jugement,  n'ôtcnt 
rienà  l'agrémentdu  style,  c'est  un  des 
ouvrages  qui  ont  assuré  jusqu'ici  à 
l'esprit  anglais  la  palme  en  cette  es- 
pèce de  lutte  du  christianisme  con- 
tre l'incrédulité.  Le  docteur  Leland 
mourut  le  iG  janvier  1766,  à  l'aga 
de  75  ans.  11  est  généralement  re- 
gardé comme  un  des  plus  redoutable» 
adversaires  de  l'incrédulité;  ses  écrits 
sont  également  recommandablcs  par 
le  savoir  ,  la  sagesse  et  la  modéra- 
tion. Après  sa  mort,  on  recueillit  ses 
discours  en  4  vol.  in-8<*.  ,  précédés 
d'une  préface  ,  contenant  quelques 
détails  sur  sa  vie  ,  son  caractère  et 
ses  écrits, par  le  docteur  IsaacWeld, 
qui  prononça  son  oraison  funèbre  à 
Dublin ,  dans  une  congrégation  dont 
Leland  avait  été  le  pasteur.  L-b-e. 

LELAND  (Thomas)  ,  savant  théo- 
logien controvcrsiste  ,  et  historien 
anglais,  naquit  à  Dublin,  en  1722. 
Après  avoir  fait  ses  premières  élu- 
des dans  la  célèbre  école  que  tenait 
alors  dans  cette  ville  le  docteur  Shé- 
ridan,  il  entra  au  collège  de  la  Tri- 
nité, fut  promu  aux  ordres  sacrés 
en  1 748 ,  obtint ,  en  1 763  ,  dans  le 
même  collège  la  chaire  de  l'Oratoire, 
et  déploya  également  dans  ce  poste 
ses  talents  pour  l'enseignement ,  pour 
la  prédication  et  pour  la  controverse. 
En  1 7G8  ,  il  fut  nommé  chapelain 
de  lord  Towusend  ,  lord-lieutenant 
d'Irlande;  et  ses  amis  ne  doutaient 
pas  qu'il  n'obtînt  bientôt  un  évêché , 
lorsqu'il  mourut ,  en  1782.  On  a  do 
lui  :  ï.  (  Avec  U  doctciu'  J.  Slokc*  ) 


2a  LEL 

Demosthenis  orationes ,  gr.  et  lat. 
avec  notes  ,  1754,  'i  vol.  in- 12.  II. 
Les  Harangues  de  Demosthène , 
trad.  en  anglais,  avec  des  notes  cri- 
tiques et  historiques  ,  3  vol.  in-4''. , 
1756-61-70;  cette  traduction  est 
fort  estimée.  III.  Histoire  de  la  vie 
et  du  règne  de  Philippe ,  roi  de  Ma- 
cédoine, père  d'Alexandre ,  Dublin , 
1 758 ,  2  vol.  in-4*^.  ;  Londres ,  1 769, 
in-4**. ,  %.  ;  1806,  2  vol.  in-80.  j 
ouvrage  savant  et  rempli  de  recher- 
ches. IV.  Longue -Epée  (  Long- 
sword  )  comte  de  Salisbury ,  1 762  ; 
ingénieux  roman  historique  ,  pu- 
blie sous  le  voile  de  l'anonyme.  V. 
Dissertation  sur  les  principes  de  Vé- 
loquence  humaine ,  et  en  particulier 
sur  le  style  et  la  composition  du 
J^ouveau-Testament ,  1764,  in-4°. 
C'est  un  re'sumë  des  discours  que 
l'auteur  avait  prononce's  au  collège 
de  la  Trinité' (à  Dublin)  pour  reîu- 
ter  quelques  principes  hasardés  par 
i'évêque  de  Glocester  (  Warbur- 
ton  )  dans  son  Discours  sur  la  doc- 
trine de  la  grâce.  Quelque  modérée 
que  fût  cette  critique  ,  l'impétueux 
Richard  Hurd  ,  ami  dévoué  de  ce 
prélat  (  Fojez  Hurd  ),  y  fit ,  en  gar- 
dant l'anonyme,  une  réponse  rem- 
plie d'aigreur ,  à  laquelle  le  docteur 
I-eland  opposa  une  réplique  aussi  so- 
lide que  modeste,  et  qui  lui  concilia 
tous  les  suffrages.  VI.  Histoire  d'Ir- 
lande y  depuis  l'invasion  d'Henri  II, 
avec  un  discours  préliminaire  sur 
l'ancien  état  de  ce  royaume ,  Dublin , 
1773,  3  vol.  in-4<*.  ;  traduite  en 
français,  Maëstricht ,  1779  ,  7  vol. 
in-i  2  ;  ouvrage  plus  estimé  pour  l'é- 
légance du  style  que  pour  l'exac- 
titude :  l'auteur  n'avait  pas  assez  étu- 
dié les  sources  originales.  Yll.  Dis- 
cours et  Sermons ,  Dublin ,  1 788 ,  3 
vol.  in-8^.,  avec  une  notice  sur  la  vie 
de  Lcland.  G.  M.  P. 


LEL 

LÉLIEN  Voyez  L^elianus. 

LELLI  (Jean-Antoine), peintre, 
né  à  Rome,  en  iSgi  ,  fut  élève  de 
Civoli,  et  se  perfectionna  par  l'étude 
de  l'antique  et  des  chefs-d'œuvre 
modernes  que  renferme  cette  capitale. 
Il  fut  chargé  de  quelques  travaux 
publics,  tels  q^i'uhg  Annonciation , 
peinte  à  fresque  ,et  d'un  bon  ton  de 
couleur,  dans  l'église  de  Saint-Ma- 
thieu in  Marulana;- Jésus-Christ  au 
milieu  des  nues  ,  ayant  à  ses  côtés 
Saint-Pierre  et  Saint-Paul ,  appa- 
raissant à  Saint- Eloi ,  prosterné 
à  genoux,  tableau  peint  à  l'huile 
dans  l'église  de  Saint-Sauveur;  —  la. 
Vierge  et  V Enfant-Jésus  ,  présen- 
tant un  cœur  enflammé  à  Saint- 
Augustin,  dans  le  chœur  de  l'église 
de  Jésus-Marie; et  dans  un  des  cotés 
de  la  même  église,  un  jjetit  tableau 
monochrome ,  représentant  Jésus- 
Christ  donnant  les  clefs  à  Saint- 
Pierre.  Bams  le  cloître  de  la  Minerve, 
il  a  peint  à  fresque,  d'un  côté  un 
grand  tableau  delà  Visitation, dont 
le  paysage  et  la  perspective  sont  bien 
entendus  ;  de  l'autre  ,  une  figure  de 
la  Force,  plus  grande  que  nature  , 
exécutée  avec  un  soin  extrême.  Il 
fut  encore  chargé  de  plusieurs  au- 
tres travaux  publics; mais  un  carac- 
tère difficile  et  jaloux,  un  amour-pro- 
pre excessif  qui  lui  faisait  penser  et 
dire  hautement  que  lui  seul  méritait 
d'être  employé,  lui  suscitèrent  beau- 
coup d'ennemis  et  nuisirent  à  sa  ré- 
putation. Il  travailla  néanmoins  pour 
quelques  particuliers ,  et  fit  les  dessins 
pour  quelques  livres  imprimés  à 
Rome,  notamment  pour  le  poème 
d'Octave  Tronsarelli  ,  intitulé  la 
Catena  d'Adone.  Lelli  mourut  le  3 
août  i64o.  —  Hercule  Lelli,  pein- 
tre, architecte,  sculpteur  et  anato- 
miste  célèbre,  naquit  à  Bologne  , 
vers  raniiée  1 700.  Zanotti  lui  donna 


LEL 

Ips  premières  leçons  de  dessin.  Les 
iiombi*eux  ouvraj;c8  qu'il  a  exécutés 
en  pl.ître,  en  cire,  en  stuc,  en  bois, 
en  marbre,  etc. , prouvent  son  habi- 
leté comme  sculpteur.  Les  préj)ara- 
tions  anatomiques   en  cire  qu'il  fit 
pour  l'institut  de  Bologne,  et  qui 
coiLsistcnt  en  statues  et  en  tableaux, 
dans  lesquels  il  a  représente  tout  ce 
qui  est  relatif  à  l'anatomie,  ont  sur- 
tout illustré  son  nom.  Il  doit  la  bril- 
lante réputation  qu'il  consei*ve  en- 
core en  Italie  ,  à  la  grande  influence 
qu'il  exerça  long-temps  sur  l'instruc- 
tion des  jemies  gens  qui  se  desti- 
naient à  l'étude  des  arts.  Son  savoir 
ne  se  bornait  pas  à  la  peinture  et  à 
la  sculpture,  il  professait  l'architec- 
lure  avec  un  égal  succès.  Non  moins 
habile  dans  la  perspective  linéaire,  il 
inventa  une  machine,  au  moyen  de 
laquelle  il  réduisait  et  arrêtait  avec 
précision  les  contours  des  portraits 
qu'il  voulait  graver.  Un  pareil  pro- 
cédé avait  déjà  été  mis  eu  usage  par 
Léonard  de  Vinci  et  Albert  Durer  ; 
mais  les  améliorations  qu'y  apporta 
Leili ,  peuvent  faire  regarder  la  ma- 
chine qu'il  employa ,  comme  une  in- 
vention nouvelle.  On  a  reproduit  de 
nos  jours  un  moyen  analogue,  sous 
le  nom  de  Physionotrace.  (  Voyez 
G.  L.  CuRETiEN.  )  Au  reste Lelli  ser- 
vit bien  plus   la  peinture  par    ses 
préceptes  que  par  ses  exemples.  Cet 
ai*t,pour  y  cire  habile,  exige  im 
exercice  habituel  auquel  il  ne  put 
s'astreindre.   Cependant  les  Guides 
de  Bologne  et  de  Plaisance  (ont 
mention  de  quelques-uns  de  ses  ta- 
bleaux, et  ce  dernier  cite  avec  éloge, 
ua  Saint-Fidèle,  qu'on  voit  dans  le 
couvent  des  Capucins;  mais  les  au- 
teurs de  ces  deux  livres  sont  forcés 
de  convenir  que  ce  n'est  point  à  la 
peinture  que  Lelli  doit  sa  plus  grande 
jljire.  Il  a  gravé  et  publié  quçlquestjb- 


LEL 


'i> 


lampes.  Il  avait  composé,  pour  l'ins- 
truction des  élèves,  un  petit  ouvrage 
intitulé:  Coinpendio  anatoinico per 
uso  de*  Piitoii  e  scultori  ;  il  fut  pu 
blié  après  sa  mort ,  (jui  arriva  en 
1 7()().  Comme  graveur  ,  on  connaît 
de  lui  plusieurs  sujets  de  thèses,  d^» 
cartouches,  des  armoiries,  ainsi  (|uc 
les  sujets  historiques  suivants,d 'après 
ses  propres  compositions  :  A^ar  et 
Ismacl  dans  le  désert  ;  la  Vierge  , 
Saint  -  Joseph  et  V Enfant  -  Jésus  ; 
Saint  -  Philippe  JVéri ,  au  milieu 
d'une  gloire  d'Anges  ;  Sainte-Thé- 
rèse en  prière  ;  plusieurs  Portraits, 
parmi  lesquels  on  distingue  celui  d« 
J.  P.  Zanotti ,  son  maître.  Ses  gra- 
vures sont  marquées  des  lettres  E 
et  L.  P-s. 

LELLIS  (  Saint-Camille  de  )  , 
fondateur  des  clercs  réguliers  pour 
le  service  des  malades  ,  naquit  en 
i55o  ,  à  Bacchiano,  dans  l'.^JDruzze. 
11  était  fils  d'un  officier  qui  avait 
servi  dans  les  guerres  d'Italie.  Or- 

f)helin  à  l'âge  de  six  ans, il  embrassa 
a  profession  des  armes  dès  que  ses 
forces  le  lui  permirent.  Il  aimait  le 
jeu  avec  passion,  et  il  fit  des  pertes  qui 
le  réduisirent  à  la  plus  extrême  indi- 
gence: ])0ur  comble  de  malheur,  un 
ulcère  à  la  jamberayant  contraint  de 
quitter  le  service ,  il  se  rendit ,  vers 
1574  à  Rome  ,  à  l'hôpital  de  Saint- 
Jacques,  destiné  aux  maladies  incu- 
rables. Renvoyé  après  une  a])parencH 
de  guérison  ,  et  ne  sachant  que  de- 
venir ,  il  se  vit  obligé  de  travailler 
comme  manœuvre  à  un  bâtiment  que- 
faisaient  construire  des  capucins. 
Cette  misérable  situation  le  fit  réflé- 
chir sur  ses  erreurs;  une  lumière  in- 
térieure sembla  l'éclairer,  et  le  père 
gai-dien  du  couvent  lui  ayant  fait  nne 
exhortation  touchante  ,  il  changea 
tout-à-coup  de  sentiments.  ]N'a\aut 
aivis  q»ie  2J  aas,  il  désira  d'en- 


â4 


LEL 


trer  cliez  les  capucins ,  puis  chez 
les  cordcliers  où  il  commença  son 
noviciat  ;  mais  l'ulcère  dont  il  e'tait 
afflige,    s' étant   rouvert ,   empêcha 
son  admission  :  il  revint  à  l'hôpital 
de  Saint-Jacques  ,  où  on  l'employa 
au  service  des  salles.  Sa  conduite  y 
fut  si  exemplaire  ,  il  se  montra  si 
assidu  près  des  malades  ,  si  empres- 
se' à  leur  procurer  les  secours  spiri- 
tuels et  corporels  ,  qu'après  quatre 
ans    d'épreuve  ,    on   lui    confia  la 
charge  d'économe.  II  avait  pris  pour 
confesseur  St.r-Philippe  Nëri,  sous  la 
direction  duquel  il  marchait  à  grands 
pas  dans  la  voie  de  la  perfection  :  ce 
fut  alors  que ,  cherchant  les  moyens 
de  procurer  aux  pauvres  malades 
des  secours  mieux  entendus  et  plus 
Hssure's  que  ceux  qu'ils  obtenaient  de 
mains  mercenaires,  il  forma  le  projet 
de  fonder  une  congrëgalion  entière- 
ment de'vQue'e  à  cette  bonne  œuvre;  et 
afin  de  se  rendre  pi  us  utile  aux  man- 
des,il  résolutd'entrer  dans  les  ordres. 
Il  était  sans  lettres  :  quoiqu'il  eût  a- 
lors  32  ans  ,  il  fréquenta  les  basses 
classes  du  collège  des  Jésuites  ,  et 
quand  il  fut  assez  instruit ,  il  étudia 
la  théologie  avec  tant  d'ardeur  qu'il 
fut  bientôt  en  état  de  soutenir  les 
examens  nécessaires.  Une  personne 
pieuse  lui  fit  une  pension  qui  lui  ser- 
vit de  titre  clérical;  il  fut  ordonné 
prêtre  ,  et  préposé  ensuite  à  la  des- 
serte d'une  église.  Obligé  de  quitter 
son  emploi  d'économe,  il  n'abandon- 
na pas  son  projet;  et  bientôt  il  jeta  les 
fondements  de  sa  congrégation ,  sous 
la  protection  et  avec  l'aide  du  car- 
dinal de  Mondovi.  Par  le  crédit  de  ce 
prélat ,  il  obtint  de  Sixte  V  l'appro- 
bation du  nouvel  institut  :  Grégoire 
XIV  érigea  cet  établissement  en  or- 
dre religieux  ,  en  iSgi  ,  et  Clément 
VIII  le  confirma  en  1 5g'i.  Vers  ce 
temps,  le  card^^al  de  Mondovi  étant 


LEL 

mort ,  laissa  tous  ses  biens  à  Lellis , 
qui  dans  ce  legs  trouva  de  puissants 
moyens  d'étendre  son  œuvre,  et  d'ac- 
croître le  nombre  de  ses  établisse- 
ments. Bologne  ,  Milan  ,  Gènes  , 
Florence ,  Ferrare  ,  Messine  ,  Man- 
toue  ,  etc.  s'empressèrent  d'accueil- 
lir des  essaims  de  ces  serviteurs  des 
pauvres  malades.  Il  en  fut  envoyé 
en  Hongrie  et  dans  d'autres  lieux 
affligés  de  la  peste.  Ce  fléau  s'étant 
déclaré  à  Noie ,  en  1600  ,  Lellis  se 
dévoua  au  service  de  ceux  qui  en  é- 
taient  atteints.  Après  avoir,  pendant 
quelque  temps  ,  gouverné  son  ordre 
en  qualité  de  chef ,  il  se  démit  de 
cette  place.  Il  assista  ,  en  161 3  ,  au 
cinquième  chapitre  général ,  et  mou- 
rut le  4  juillet  161 4.  Benoît  XIV 
le  canonisa  en  1646.  C'est  ce  même 
jour,  1 4  juillet,  que  l'Église  honoro 
sa  mémoire.  Cicatello  son  disciple  a 
écrit  sa  Vie.  L-y. 

LELONG  (Jacques)  ,  prêtre  de  ^ 
l'Oratoire ,  né  à  Paris  en  1 665  ,  fut 
reçu  trcs-jeune  au  nombre  des  clercs, 
de  l'ordre  de  Malte  ,  et  n'était  âgo 
que  de  onze  ans,  lorsqu'il  passa  dans 
cette  île.  Peu  de  temps  après  son  ar- 
rivée, la  peste  s'y  étant  déclarée,  il 
eut  l'imprudence  de  suivre  le  con- 
voi d'un  homme  mort  de  la  conta- 
gion. A  peine  fut-il  rentré  dans  sa 
maison  ,  qu'on  en  mura  les  portes  , 
de  peur  qu'il  ne  communiquât  au- 
dehors  la  maladie  dont  on  le  suppo- 
sait attaqué.  Cette  espèce  de  prison 
lui  sauva  la  vie  ,  en  le  séquestrant 
de  la  société  des  pestiférés.  Un  tel 
accident ,  joint  à  la  dureté  du  maître 
des  clercs,  le  dégoûta  du  séjour  de 
l'île.  Il  prétexta  l'intérêt  de  sa  santé, 
pour  obtenir  la  permission  de  se 
rembarquer,  et  vint  à  Paris  repren^ 
dre  ses  études  à  l'Oratoire.  Ses  supé- 
rieurs l'envoyèrent  au  collège  de 
JuiUi  ^  pouç  enseigner  les  malhéma- 


tif]ufs,  et,  quoliucs  années  après  , 
i  séminaire  de  Nofre-Damc-<les- 
\  crins  ,  près  Paris,  afin  qu'il  pût  se 
livrer  plus  parliculicrcracnt  à  ce 
.,'i'nre  d'étude,  pour  lequel  il  avait  de 
j,randes  dispositions.  Devenu  biblio- 
tliccairc  de  cette  maison,  son  p;oiit 
pour  la  bibliographie  se  manifesta 
d'une  manière  si  décidée,  qu'il  fut 
appelé  à  Paris,  pour  y  remplir  le 
même  emploi  dans  la  maison  de 
Saint-Honore.  A  la  connaissance  des 
langues  orientales,  de  l'hebrcu  et  de 
ses  ditVcrents  dialectes ,  il  joignait 
celle  de  plusieurs  langues  modernes, 
telles  que  l'italien,  l'espagnol,  le  por- 
tngais  et  l'anglais.  Il  possédait  éga- 
lement l'histoire  littéraire  et  typo- 
graphique. Enfin ,  peu  de  savants 
pouvaient  lui  être  comparés  dans 
cette  partie.  Pendant  vingt-deux  ans 
qu'il  fut  chargéde  cette  bibliothèque, 
Tune  des  plus  riches  de  Paris,  surtout 
en  manuscrits  oiientaux,  ill'augmcn- 
ta  au  moins  d'un  tiers  avec  des  fonds 
très-modiques,  et  il  en  fit  trois  difïc- 
rents  catalogues.  Sa  passion  pour 
l'étude  était  inconcevable  :  il  ne  s'en 
distrayait  que  pour  l'accomplisse- 
ment des  devoirs  dé  son  état,  pour  sa 
correspondance  suivie  avec  la  plupart 
des  savants  de  l'Europe  ;  et  il  re- 
gardait ses  longues  et  fréquentes  in- 
somnies comme  un  avantage  qui 
lui  laissait  plus  de  temps  pour  s'y  li- 
Trer.  Une  vie  si  laborieuse  dut  alté- 
rer la  santéd'un  homme  dont  la  com- 
plexion  était  déjà  très-faible.  Il  éprou- 
va de  violents  maux  d'estomac  ac- 
compagnés d'une  fièvre  leute  qui  le 
consuma  peu  à  peu,  et  rendit  inu- 
tile tout  l'art  des  médecins.  Il  mou- 
rut chez  M.  Ogicr,  sou  neveu ,  rece- 
veur-général du  clei-gé,  le  i3  août 
1721,  âgé  de  cinquante-six  ans.  Ce 
savant  avait  une  piété  sincère  et  sans 
ostcûlaliyn,  ua  caractère  doux  et 


LEL 


^1> 


modeste  ,  des  manières  polies  et  en 
gageantes.  Rempli  de  cliarité  pour 
les  pauvres ,  il  se  félicita  d'avoir 
trouvé,  dans  un  riche  héritage,  des 
moyens  de  satisfaire  son  penchant 
pour  cette  vertu.  Le  P.  Alalebran- 
che,  son  intime  ami,  le  raillant  un 
jour  sur  toutes  les  peines  qu'il  se  don- 
nait pour  découvrir  une  date  ou  une 
anecdote  littéraire  :  «  La  vérité  est 
»  si  aimable,  lui  répondit-il,  qu'on 
»  ne  doit  rien  négliger  pour  la  dé- 
»  couvrir,  même  dans  les  plus  pe- 
»  tites  choses.  »  Ses  ouvrages  indi- 
quent des  recherches  immenses.  Ou 
désirerait  seulement  qu'il  se  fût  ap- 
pliqué à  en  rendre  le  style  plus  cor- 
rect. En  voici  la  liste  :  T.  Supplé- 
ment à  VHisloire  des  dictionnaires 
hébreux  de  JVolfius,  dans  le  Jour- 
nal des  Savans ,  de  janvier  1707. 

II.  Nouvelle  métliode  des  langues 
hébraïque  et  chaldàique  avec  un 
dictionnaire  de  ces  deux  langues, 
Paris,  1708,  in-8.  Cette  méthode, 
sui^-ie  d'un  dictionnaire  hébraïque 
en  vers  français  ,  fait  sur  le  modèle 
des  Racines  grecques  de  Port-Royal , 
est  du  P.  Renou  de  l'Oratoire.  Le  P. 
Lelong    n'en   a   été  que    l'éditeur. 

III.  Bibliotheca  sacra,  seu  Sjllabus 
omnium  fennè  sacrœ  Script  urœ  edi- 
tionum  ac  versiomim,  Paris,  1709, 
2  vol.  in-8.;  réimprimée  la  même 
année  à  Leipzig,  par  les  soins  de 
Boerner,  avec  des  augmentations  et 
des  notes  historiques  et  critiques,  ti- 
rées des  manuscrits  et  des  livres  im- 
primés en  Allemagne,  qui  n'avaient 
point  été  connus  du  P.  Lelong.  Ce- 
lui-cis'était  occupé,  danslesdernicrci 
années  de  sa  vie,  de  corriger  cet  ou- 
vrage, et  de  l'augmenter  d'une  se- 
conde partie  ,  contenant  le  calalogiio 
de  tous  les  auteurs  qui  ont  travaillé 
sur  les  livres  de  la  Bible.  Cette  fc-» 
condc  édition  était  prêle  à  être  ml-iu 


26 


LEL 


sous  presse,  lorsque  l'auleur  mourut. 
II  en  confia  le  soin  au  P.  Desmolets, 
son  ami,  qui  la  publia  en  1723,  in- 
folio, précédée  d'une  notice  sur  la 
vie  et  les  ouvrages  du  P.  Lelong. 
Cet  ouvrage,  d'un  travail  immense, 
est  le  plus  ample,  le  plus  méthodique 
et  le  plus  exact  qui  eût  paru  en  ce 
genre  :  une  nouvelle  édition  avait  éte*^ 
commencée  par  les  soins  de  A.  G. 
Marscli  ;  il  n'en  a  paru  que  deux  par- 
ties en  cinq  volumes  in-4**. ,  Halle , 
1 778-90.  IV.  Discours  historique  su7'^ 
les  principales  éditions  des  bibles 
polyglottes,  Paris,  1 7 1 3,  in-i  -î.  C'est 
le  fruit  des  recherches  que  le  P.  Le- 
long avait  été  obligé  de  faire  pour 
sa  Bibliothèque  sacrée.  Il  contientdes 
détails  curieux  siu-les  polyglottes,  et 
particulièrement  sur  celle  de  Paris 
(  F.  Lejay).  V.  Histoire  des  démêlés 
du  pape  Boniface  Fil  avec  Philip- 
pe-le-Bel,  Paris,  17 18, in- 12.  C'est 
un  ouvrage  posthume  d'Adrien  Bail- 
let  :  le  P.  Lelong  ^  en  le  donnant  au 
public,  l'augmenta  de  vingt-deux  piè- 
ces justificatives  qui  ne  se  trouvent 
pas  dans  les  ^ctes  de  Dupuy.  Il  eut 
deux  éditions  en  moins  de  trois  mois. 
YI.  Bibliothèque  historique  de  la 
France,  contenant  le  catalogue  des 
ouvrages  imprimés  et  manuscrits 
qui  traitent  de  Vhistoire  de  ce 
royaume ,  ou  qui  y  ont  rapport; 
avec  des  notes  critiques  et  histori- 
ques ^  Paris,  17 19,  in-folio.  L'objet 
de  cet  ouvrage  est  d'indiquer  dans 
tm  ordre  méthodique  l'usage  qu'où 
doit  faire  des  grandes  collections  des 
pièces  concernant  l'histoire  de  Fran- 
ce, et  de  faciliter  le  travail  de  ceux 
qui  entreprennent  de  l'écrire.  Ce  gros 
volume  fut  composé  dans  l'espace 
de  trois  ans ,  et  l'auteur  le  copia  trois 
fois  de  sa  propre  main.  Il  se  propo- 
i  ait  del'augmenter  considérablement 
dans  ime  seconde  éditioo.  Les  ma- 


LEL 

tériaux  qu'il  avait  rassemblés ,  et  un 
exemplaire  chargé  de  ses  notes ,  ont 
passé  entre  les  mains  de  Fevret  de 
Fontette ,  qui  s'en  est  servi  dans  son 
édition  en  5  vol.  in-folio,  Paris,  1 768. 
(  V.  Fevret,  xiv,  471.  )  VIL  Let- 
tre à  M.  Martin,  ministre d"  Utrecht, 
Paris,  1720,  dans  le  Journal  de» 
Savants ,  de  juin  de  la  même  an- 
née. Ce  ministre,  dans  sa  disserta- 
tion sur  le  fameux  passage  de  Saint- 
Jean  (  Ep.  1  ,cap.  5,  §.  7)  Très  sunt 
qui  testimonium,  etc.,  avait  dit  que 
Robert  Etienne  l'inséra  dans  son  édi- 
tion de  la  Bible,  d'après  plusieurs 
manuscrits  de  la  bibliothèque  du, 
Roi.  Le  P.  Lelong  soutient  que  ce 
passage  ne  se  trouve  dans  aucun  de» 
manuscrits  de  cette  bibliothèque. 
Cet  homme  infatigable  avait  entre- 
pris un  recueil  des  historiens  d» 
France  beaucoup  plus  ample  (pae  ce- 
lui de  Duchêne  j  il  se  proposait  d'en, 
faire  imprimer  deux  ou  trois  volu- 
mes chaque  année  :  ce  fut  ce  travail 
qui  abrégea  ses  jours.  Tous  les  ma- 
tériaux étaient  rassemblés  pour  les 
premières  livraisons  ;  il  ne  lui  res- 
tait plus  qu'à  les  collationner  avec 
les  manuscrits  et  les  imprimés,  pour 
les  publier  avec  des  notes  critiques^ 
chronologiques  et  géographiques.  Ce 
projet  a  été  exécuté  par  les  béné- 
dictins de  Saint-Maur  ,  et  la  conti- 
nuation en  est  confiée  aujourd'hui  à 
l'académie  des  inscriptions.    T-u. 

LELORRAIN.  Foyez  Lorrain 
et  Yallemont. 

LELORRAIN  (  Robert  ) ,  sculp- 
teur, naquit  à  Paris,  le  i5  novembre 
1 666.  Le  peintre  Lemonnier  lui  donna 
les  premiers  principes  du  dessin  ;  et 
à  l'âge  de  18  ans  ,  le  jeune  artiste 
entra  chez  Girardon,  qui  bientôt  lui 
confia  l'exécution  d'une  partie  du 
mausolée  du  cardinal  de  Richelieu, 
et  du  tombeau  qu'il  avait  composé 


LEL 

pour  lui-même.  Lebrun  sut  appré- 
cier les  talents  de  Lclorrain,  et  lui  fit 
obtenir  du  Roi  une  }>ension  qui  lui  l'ut 
ccuscrve'e  jusqu'à  sa  rcccpliou  à  Ta- 
cademie.  En  1(389, il  obtint  le  grand 

Î)rix,  et  partit  rannce  suivante  pour 
'Italie.  S'ctant  embarque  à  Marseille, 
une  teun>ele  écarta  son  vaisseau  de 
la  route  ;  ce  vaisseau  serait  tombé 
entre  les  mains  d'un  corsaire  levan- 
tin qui  lui  donna  la  chasse  ,  si  la 
contenance  des  passagers,  excités  par 
le  jeune  artiste  ,  n'avait  décidé  le 
corsaire  à  les  laisser  continuer  leur 
route.  Arrivé  à  Rome  ,  il  se  livra 
avec  ardeur  à  l'élude.  Malheureuse- 
ment l'école  du  Bernin  prévalait  à 
cette  époque  ,  et  Lelorrain  ne  put  se 
préserver  de  sa  funeste  influence. 
Quelques  essais  de  }>einlure  qu'il  ten- 
ta pendant  son  se'jour  à  Rome  ,  loin 
de  le  ramener  dans  la  bonne  roule,  ne 
servirent  qu'à  l'en  écarter  davantage, 
ai  lui  faisant  croire  que  les  procédés 
de  deux  arts  si  difTérents  pouvaient 
se  concilier.  Cependant  son  assiduité 
au  travail  était  sans  bornes.  Il  envoya 
en  France  plusieurs  copies  en  mar- 
bre qu'il  avait  faites  d'après  l'an- 
tique ;  et  il  se  disposait  à  exécuter 
un  grand  ouvrage  pour  les  Jésuites 
de  Rome  ,  quand  l'excès  du  travail , 
joint  à  la  chaleur  du  climat ,  le  jeta 
«lans  une  maladie  de  langueur,  dont 
il  ne  ])ut  guérir  qu'en  revenant  en 
France.  Dans  ce  voyage ,  il  visita  les 
principales  villes  d'Italie,  pour  y  étu- 
dier les  beaux  ouvrages  qu'elles  ren- 
iVrmaienl.  En  arrivant  à  Marseille,  il 
lut  chargé  de  terminer  quelques  pe- 
tites figures  de  marbre  que  la  mort 
n'avail  pas  permis  au  Puget  de  finir; 
ie  là,  il  vint  à  Paris, où  il  trouva  l'a- 
radémie  fermée  ,  et  les  travaux  pu- 
blics interrompus  par  le  malheur  des 
î^mps.  Cependant  des  hommes  dis- 
ugfir»,  dans  le»  lellres  et  les  arts  , 


LEL  a; 

parmi  lesquels  on  cileBoileau,Tour- 
neforl  et  de  Piles,  ir.  lirciit  travailler 
pour  de  riches  particuliers.  L'aca- 
démie ayant  été  rouverte  en  i-^oo  , 
il  fut  agréé  sur  le  modèle  d'une  Ga- 
lathée  ,  figure  demi-nature,  et  reçu, 
en  l'joi  ,sur  le  marbre  de  ce  modèle. 
Bientôt  il  exécuta, pour  la  cascade  de 
Marly,  un  Faune  en  marbre ,  et  un» 
Fierge  pour  la  paroisse  du  Roi  à 
Marly  j  un  Bacchus  pour  les  jardins 
de  Versailles  •  une  lîëbé  ;  un  Saint- 
Emilien  ,  aux  Invalides  ;  dans  l'é- 
glise de  Saint-  Sauveur  ,  un  Lutrin 
orné  d'enfants  en  bronze;  à  la  cha- 
pelle de  Versailles,  un  bas-relief  re- 
présentant /.  C.  devant  Cdiphe  , 
deux  ^Tiges  et  des  trophées  ;  à  la 
Chartreuse  de  Morfonlaine,  un  grand 
Christ  en  croix;  etc.  L'académie  le 
nomma  successivement  ad  joint,  pro- 
fesseur ,  et  enfin  ,  en  1787  ,  recteur 
à  la  place  de  Hallç.  Le  cardinal  de 
Rohan  lui  confia  l'exécution  de  quatr» 
statues  colossales,  destinées  à  orner  la 
façade  principale  de  l'hôtel  de  Sou- 
bise  ,  à  Paris  j  elles  représentent  les 
Quatre  Saisons  ;  la  plus  estimée  est 
celle  de  l'Hiver.  C'est  alors  que  le 
prélat  jeta  les  yeux  sur  Lelorrain 
poui-  les  sculptures  de  son  palais  de 
Strasbourg  ,  et  du  château  de  Sa- 
verne.  Les  quatre  statues  de  plus  dd 
huit  pieds  de  proportion  ,  qu'il  exé- 
cuta pour  le  premier  édifice,  sont  la 
Religion  ,  la  Clémence ,  la  Pru- 
dence et  la  Force;  elles  sont  accom- 
pagnées de  quatre  groupes  d'enfants 
analogues  à  chaque  statue  ,  et  de 
deux  vases  dans  le  génie  antique. 
Mais  c'est  principalement  dans  la 
décoration  du  palais  de  Saverne,  que 
Lelorrain  avait  déployé  tous  ses  ta- 
lents. Dans  un  salon , appelé  le  Salon 
des  Colonnes,  il  avait  sculpté  au-des- 
sus de  l'entablement  quatre  figures 
plus  grandes  que  nature ,  représeu- 


28 


LEL 


lantlaL  Beligion  j  la  Chajité ,\ai  Vé- 
rité et  la  Vigilance  ;  et  dans  les 
panneaux,  quatre  cariatides  en  ron- 
de-bosse ,  représentant  la  Prudence ^ 
la  Justice  ,  la  Tempérance  et  la 
Force.  Enfin ,  ce  salon  était  encore 
©rne'  de  quatre  bas-reliefs,  ayant  pour 
sujet  :  ^Ipollon  et  Daphné  ;  Mer- 
cure apportant  une  l/yre  à  Apollon 
qui  garde  les  troupeaux  d'Admète; 
le  Jugement  de  Midas,  et  Marsyas 
écorché  par  Apollon.  Ces  derniers 
ouvrages  ont  përi  dans  l'incendie 
du  château  de  Saverne  ,  en  1779. 
C'est  après  avoir  termine'  ces  tra- 
vaux, que  Lelorrain  entreprit  ceux 
du  palais  e'piscopal  ;  une  attaque 
d'apoplexie,  qu'il  essuya  en  1733, 
l'obligea  de  les  interrompre.  Il 
revint  à  Paris ,  où  on  lui  offrit  suc- 
eessivement  les  places  de  directeur 
de  l'académie  de  France  à  Rome ,  et 
celle  de  sculpteur  du  roi  d'Espagne. 
Il  les  refusa  toutes  deux ,  motivant 
son  refus  sur  la  chaleur  du  climat 
qui  lui  e'tait  contraire.  Parmi  les 
traits  qui  font  honneur  à  son  talent, 
on  rapporte  que  Van  Clève  ,  sculp- 
teur habile,  l'invita  un  jour  à  venir 
voir  une  tête  de  bacchante  qu'il  avait 
achete'e  comme  une  antique.  Lelor- 
rain, en  la  voyant,  reconnut  qu'elle 
était  son  ouvrage  j  et  après  en  avoir 
instruit  Van  Clève ,  il  lui  avoua  que 
rien  ne  l'avait  jamais  autant  flatte' 
que  cette  erreur.  Le  goût  qui  re'gnait 
à  cette  époque ,  explirpie  facilement 
une  erreur  que  l'on  ne  commettrait 
plus  aujourd'hui.  Lelorrain  avait  un 
véritable  talent  pour  le  ciseau  j  ses 
ouvrages  sont  d'un  dessin  facile,  mais 
maniéré;  il  est  dépourvu  de  noblesse 
et  d'idéal  :  c'est  le  principe  du  Ber- 
iiin,  et  c'est  celui  qu'ont  outré  Le- 
moyne  fils,  etPigalle  ses  élèves.  Ses 
bustes  de  jaunes  et  de  bacchante  s, ({m 
faisaient,  dans  le  siècle  dernier,  l'or- 


LEL 

nement  des  plus  riches  cabinets,  sont 
pleins  de  cette  grâce  affectée  qui  est 
si  loin  de  la  naïveté  antique ,  mais 
qui  devait  séduire  dans  un  temps  où 
tous  les  arts  du  dessin  avaient  aban- 
donné la  route  du  vrai  beau  et  de  la 
nature.  On  s'aperçoit  trop  d'ailleurs 
que  ses  ouvrages  sont  faits  en  géné- 
ral sans  élfide  et  de  pratique.  Lelor- 
rain mourut  à  Paris ,  le  premier  juin 
1743,  après  plusieurs  attaques  d'a- 
poplexie. Le  portrait  de  cet  artiste  a 
été  peint  par  Nonolte  et  par  Drouais 
père.  Le  premier  ,  qui  existe  encore 
chez  un  des  descendants  de  Lelor- 
rain ,  a  été  gravé  en  1749  ?  par  J. 
N.  Tardieu  ,  pour  sa  réception  à  l'a- 
cadémie; le  second,  qui  faisait  partie 
de  la  collection  des  morceaux  de  ré- 
ception des  académiciens,  a  été  gravé 
en  1741,  par  Ph.  Lebas.  —  Louis- 
Joseph  Lelorrain  ,  peintre  et  gra- 
veur à  l'eau-forte, d'une  autre  famille 
que  le  précédent ,  naquit  à  Paris,  en 
17 15.  Il  fut  élève  de  Diimont  le  Ro- 
main. C'est  en  Italie  qu'il  alla  se  per- 
fectionner. A  son  retour ,  il  fut  reçu 
académicien.  Il  a  exécuté  quelques 
tableaux  d'histoire  ,  qui  ne  lui  ont 
pas  fait  une  réputation  bien  étendue. 
Son  talent  consistait  principalement 
à  peindre  l'architecture  et  la  pers- 
pective. Ses  ouvrages  ,  en  ce  genre , 
se  font  remarquer  par  une  grande 
intelligence  dans  la  distribution  des 
lumières  ,  et  par  la  vigueur  de  la 
touche.  Cet  artiste  d'ailleurs  est  peu 
connu  en  France  ;  c'est  en  Russie  où 
il  était  allé  s'établir  ,  qu'existent  la 
plupart  de  ses  tableaux.  Il  s'était 
exercé  à  graver  à  l'eau  -  forte  ;  et 
plusieurs  de  ses  dessins  ont  été  repro- 
duits par  le  burin.  Parmi  les  estampes 
qu'il  a  gravées,  on  cite  le  Jugement 
de  Salomon;SalomonsacrifLant aux 
Idoles;  Esther  devant  Assuérus y  et 
la  Mort  de  Cléppdire  :  qualre  sujet» 


<VaprcsdcTroy.  M.  Bncqiioy  a  graye, 
d'après  les  dessins  de  Lelorraiu ,  le 
Prosffectus  d'une  souscription  pour 
le  poème  de  Roland- Furieux.  Ave- 
line a  grave  VAiuieau  d' Hfans  Carvely 
et  Sorniqiie ,  la  Chose  impossible  , 
sujets  tirés  des  contes  deLafontainc; 
(>annu,  la  Fue  du  Jeu  d'artifice  tiré 
à  Rome  par  ordre  du  prince  Colonne , 
et  le  Projet  d'une  place  pour  le  Roi. 
Lelorrain  est  mort  à  Pétersbourg  en 
17G0.  P-s. 

LELY  (Pierre  Vaw  der-FAES, 
surnommé /e  Cfievalier)^  ])eintre  de 
portraits,  naquit,  en  1618  ,  à  Soest 
en  Westphalie. Son  père,  Jean  Van- 
der  -  Faes  ,  capitaine  d'infanterie  , 
fut  appelé  Lely  ,  parce  qu'il  naquit  à 
la  Haie  dans  une  maison  dont  la  fa- 
çade était  ornée  d'une  fleur  de  lis. 
Voyant  les  dispositions  de  son  fils 
pourledessin,  il  le  mit  chez  Grelber, 
peintre  de  Harlem,  où  le  jeune  Lely 
ne  tarda  pas  à  se  distinguer;  il  déve- 
loppa surtout  beaucoup  de  talent 
I  dans  le  portrait  ,  et  tâcha  de  se 
rendre  propre  la  manière  de  \3Ln 
Oyck.  A  vingt-cinq  ans ,  sa  réputa- 
tion s'était  tellement  répandue,  que 
le  prince  d'Orange,  Guillaume  III, 
l'emmena  en  Angleterre  lorsqu'il 
alla  épouser  la  fille  de  Charles  I^'". 
Ce  dernier  prince  se  fit  peindre  ainsi 
que  toute  la  famille  royale  ;  et  les 
portraits  de  Lely  eurent  tant  de  suc- 
cès, que  l'artiste  obtint  le  titre  de 
premier  peintre  du  Roi.  Après  la 
mort  de  Charles  P"". ,  Lely  fut  em- 
ployé par  Cromvvel ,  dont  il  fit  le 
portrait.  Lorsque  Charles  II  remonta 
sur  le  trône,  il  nomma  Lely  che- 
valier et  gentilhomme  de  la  cham- 
bre, avec  une  pension  de  4,ooo  flo- 
rins. Cette  faveur  ,  qui  satisfit  son 
amour-propre,  ajouta  peu  de  chose  à 
sa  fortune  déjà  très-considérable,  et 
dont  il  faisait  l'usage  le  plus  noble. 


LEM 


^9 


Lely  aimait  le  faste;  mais  il  savait 
mesurer  sa  dépense  à  ses  revenus  , 
et ,  plus  sage  ([ue  Van  Dyck ,  son  pré- 
décesseur, il  ne  se  ruina  point  par 
des  prodigalités.  Il  tenait  table  ou- 
verte, et ,  pendant  le  repas,  une  mu- 
sique excellente  égayait  les  convives. 
Lely  aurait  pu  jouir,  jusqu'à  la  fin  de 
ses  jours  , d'un  bonheur  inaltérable; 
mais  les  succès  qu'obtint  Kneller,  à 
son  arrivée  en  Angleterre ,  lui  inspi- 
rèrent un  chagrin  tellement  pro- 
fond ,  qu'il  tomba  dans  une  mélan- 
colie dont  rien  ne  put  l'arracher. 
En  vain  son  médecin ,  ignorant  la 
cause  de  son  mal,  croyait  le  distraire 
en  lui  parlant  de  son  art  et  des  ou- 
vrages de  son  rival;  Lely,  de  plus 
en  plus  aigri  par  ces  discours,  mou- 
rut en  1680.  Son  portrait,  peint  par 
lui-même,  existe  dans  la  collection 
des  peintres  célèbres  qui  font  parti» 
de  la  galerie  de  Florence.  Le  musée 
du  Louvre  possède  de  lui  m\  Portrait 
d'homme  en  collet  hlajic  en  denteU 
les,  que  l'on  peut  comparer  à  un 
Van  Dyck.  On  voyait,  dans  la  mêm^ 
collection,  une  Tête  d'homme ,  tirée 
de  la  galerie  de  Vienne,  et  le  Por- 
trait de  Cromwell ,  provenant  du 
cabinet  du  Stathouder  ;  ce  deraier 
a  été  repris ,  en  1 8 1 5 ,  par  le  roi  des 
Pays-Bas  j  l'autre  l'a  été  par  l'Au- 
triche. P-s. 

LEMAINGRE.  ^qr.  Boucicaut. 

LEMAIRE  (  Jacques  ) ,  naviga- 
teur hollandais  ,  devenu  célèbre  par 
la  découverte  du  détroit  qui  porte 
son  nom  ,  était  fils  d'un  négociant 
très-entreprenant,  nommé  Isaac  Le- 
maire,  habitant  d'Égmont,  près 
d'Alkmar.  Les  lettres-patentes  ac- 
cordées par  les  États-Généraux  à  la 
compagnie  des  Indes  Orientales ,  dé» 
fendaient  à  tous  les  sujets  des  Pro- 
vinces-Unies ,  de  passer  au  sud  du 
cap  de  Bonne-Espérauce ,  et  même 


3o  LEM 

dans  le  de'lroit  de  Magellan ,  pour 
aller  aux  Indes ,  ou  dans  les  pays 
connus  et  non  connus  ,  silue's  hors 
des  limites  du  grand  Océan  Atlan- 
tique. Cette  défense,  au  lieu  d'ar- 
rêter les  spéculateurs  ,  donna  une 
nouvelle  a:  livité  a  leur  industrie. 
Les  esprits  se  tournèrent  d'abord  vers 
les  moyens  d'éiuder  la  loi  :  ensuite 
on  imagina  de  chercher  à  pénétrer 
par  ime  nouvelle  route  dans  le  grand 
Océan  ou  la  mer  du  Sud.  La  première 
idée  en  est  due  à  Isaac  Lemaire , 
père  de  celui  dont  il  s'agit.  Il  en  fit 
part  à  Gornelis  Schouten ,  naviga- 
teur très-expérimenté ,  qui  avait  fait 
plusieurs  voyages  aux  Indes  Orien- 
tales ,  et  qui  était  animé  du  désir 
de  faire  de  nouvelles  découvertes. 
Celui-ci  s'était  persuadé,  non  sans 
raison ,  que  le  continent  de  l'Amé- 
rique devait  se  terminer  au-delà  de 
la  terre  du  Feu ,  que  l'on  savait  en- 
trecoupée d'un  grand  nombre  de  ca- 
naux. Tous  les  deux  se  flattèrent  de 
pouvoir  éluder  le  privilège  de  la 
compagnie ,  en  prenant  cette  route 
nouvelle,  qui  n'avait  pu  être  spécifiée 
dans  les  lettres-patentes  de  leurs 
hautes-puissances.  Isaac  Lemaire 
se  chargea  de  la  moitié  des  frais  de 
l'expédition  ;  l'autre  moitié  fut  par- 
tagée entre  divers  négociants  dont 
les  noms  ont  été  conservés  ,  et  qui , 
la  plupart,  exerçaient  alors  les  pre- 
mières charges  municipales  de  la  ville 
de  Hoorn.  Ils  prirent  tous,  avec  Isaac 
Lemaire  et  Jacques  son  fils  ,  letitre^de 
directeurs  de  la  nouvelle  association. 
Schouten  s'intéressa  dans  cette  en- 
treprise ,  et  fut  chargé  d'équiper  le 
vaisseau  la  Concorde  de  trois  cent 
soixante  tonneaux,  avec  soixante- 
cinq  hommes  d'équipage ,  et  vingt- 
neuf  pièces  de  canon  de  petit  calibre. 
On  arma  également  un  petit  bâti- 
Hient  dont  on  nous  a  laissé  ignorer 


LEM 

le  tonnage  et  même  le  nom.  La  des- 
tination de  ces  bâtiments  fut  tenue 
secrète  ;  les  officiers  et  marins  qui 
voulurent  faire  cette  campagne  ,  pri- 
rent l'engagement  illimilé  d'aller 
pariy)ut  où  on  les  conduirait.  Schou- 
ten commanda  la  Concorde ,  et  Jac- 
ques Lemaire  s'y  embarqua  comme 
directeur-général  de  l'association.  Il 
devait  présider  en  cette  qualité  tous 
les  conseils.  La  prééminence  qu'elle 
lui  donnait ,  explique  pourquoi , 
n'étant  que  négociant ,  il  a  partagé 
avec  Schouten ,  une  gloire  qui  ne 
semble  réservée  qu'à  des  navigateurs 
de  profession.  Il  est  cependant  juste 
de  dire  que  Lemaire  passait  pour  un 
homme  expérimenté  et  d'une  grande 
intelligence  dans  l'art  de  la  naviga- 
tion. INous  ne  pouvons  donc  plus  le 
considérer  comme  un  simple  subré- 
cargue.  L'expédition  fut  armée  dans 
le  port  de  Hoorn  ;  elle  se  rendit  en- 
suite dans  la  rade  du  Texel  ;,  d'où 
l'on  mit  à  la  voile  ,  le  1 4  juin  i6i5. 
Les  vaisseaux  qui,  dans  ces  pre- 
miers temps ,  allaient  sur  les  cotes 
de  l'Amérique  méridionale ,  avaient 
coutume  de  filer  d'abord  le  long  des 
cotes  d'Afrique  ,  jusqu'à  la  rivière 
de  Sierra-Leone.  La  Concorde  suivit 
la  route  commune,  et  relâcha  près 
de  l'embouchure  de  cette  rivière. 
Elle  en  partit  le  i^*".  octobre,  et,  le 
6  décembre  suivant ,  prit  connais- 
sance du  port  Désiré,  situé  à  environ 
cent  lieues  au  nord  du  détroit  de 
Magellan.  Le  mauvais  temps  retint, 
pendant  plusieurs  jours ,  les  deux 
bâtiments  à  l'entrée  du  port  ;  ils  y 
coururent  de  grands  dangers.  Le 
plus  petit  faillit  se  perdre  ;  il  s'é- 
choua, et  demeura  pendant  toute  une 
marée  à  sec  et  couché  sur  le  côté. 
La  mer  montante  le  remit  à  flot  sans 
accident  ;  mais  il  n'y  resta  pas  long- 
temps. Tandis  que  ,  suivant  l'usage. 


on  chatifTailsari^rène,  avant  de  Ira- 
vaillerà  réparer  les  {loniniaj;es  qu'il 
avait  revus,  le  feu  se  conununiipia 
aii\  CT>rtlaj;es,  et  le  baliincnt  fut  cou- 
su nie  en  présence  des  ouvriers  et  des 
équipages  ,  qui  firent  de  vains  clVorts 
pour  le  sauver.  La  Concorde  qui  res- 
tait ainsi  seule,  avait  reçu  un  choc 
violent  près  delà  flottaison  ,  peu  de 
temps  après  qu'elle  eut  quittc'la  cote 
d'Afrique  ;  elle  laissa  le  port  Désire 
le  i3  janvier  1616  ,  et  se  dirigea 
vers  le  sud  sans  s'éloigner  de  la  cote. 
Le  '2\  ,ellc  avait  dépasse  le  détroit 
de  Magellan  ,  et  se  trouvait  près  de 
l'extrémité  orientale  de  la  terre  du 
Feu.  Enfin  ,  lorsqu'on  fut  parvenu  à 
cette  extrémité  ,  on  découvrit ,  dans 
l'est ,  une  autre  masse  de  terre  très- 
élevée  qui  reçut  le  nom  de  Tene  des 
Etats  ;  et  Ton  vit  un  beau  canal 
ouvert  au  sud ,  dans  lequel  la  Con- 
€ovd€  passa,  le  24  janv.  161 6.  On  vit 
aussi,  en  sortant  de  ce  canal ,  la  cote 
de  la  terre  du  Feu  se  diriger  vers 
l'ouest,  et  l'on  s'attendit  à  trouver  in- 
cessammentrextrémitédu  continent. 
Cette  terre  fut  prolongée  à  une  assez 
grande  distance  ,  mais  de  manière  à 
n'être  pas  perdue  de  vue.  Enfin,  après 
avoir  découvert  les  deux  îles  Bame- 
velty  la  Concorde doub\a\c  cap  le  plus 
avancé  vers  le  sud.  C'est  le  premier 
bâtiment  qui  soit  entré  dans  le  grand 
Océan,  après  avoir  contourné  le 
continent  entier  de  l'Amérique.  Le 
cap  qui  en  marque  l'extrémité  ,  est 
«onnu  sous  le  nom  de  cap  Horn , 
que  lui  donnèrent  alors  les  Hollan- 
«lais.  Le  conseil  de  l'expédition  s'as- 
sembla pour  consacrer,  par  un  acte, 
tin  si  heureux  succès.  Jacques  Le- 
maire  réclama  l'honneur  de  donner 
son  nom  au  détroit  dans  lequel  on 
avait  passé  avant  de  doubler  le  cap 
Horn;  ce  qui  lui  fut  accordé.  L'his- 
torico  du  voyage  s«  coulente  d'ob- 


1,5  \I 

server  que  re  détroit  aur.ut  cic 
nommé  avec  pins  de  raison  détroit 
de  Schouten  ,  du  nom  de  celui  qui 
avait  dirigé  la  navigation.  Au  reste 
cette  découverte  n'offre  de  remar- 
quable que  lu  conception  qui  l'a  fait 
entreprendre  ,  et  ne  peut  être  com- 
parée à  celle  de  Magellan  ;  mais  elle 
nous  a  montré  la  route  qui  mèno 
le  plus  promptement  et  avec  le 
moins  de  danger,  dans  la  mer  du 
Sud.  C'est  un  service  dont  l'influence 
se  fait  sentir  tous  les  jours  ,  et  s'of- 
fre à  chaque  instant  à  la  reconnais  ^ 
sance  des  navigateurs.  Le  nom  de 
Lemaire,  gravé  sur  ce  passage,  per- 
pétue la  gloire  qu'il  s'est  acquise; 
et  ce  nom  est  à  présent  consacré 
en  géographie.  Les  deux  naviga- 
teurs se  dirigèrent  ensuite  sur  l'île 
de, Juan  -  Fernandcs  ,  où  ils  tentè- 
rent de  relâcher  ;  mais  ayant  été 
repoussés  par  les  vents  et  les  cou- 
rants ,  ils  firent  route  pour  traverser 
le  grand  Océan.  La  première  terre 
dont  ils  eurent  connaissance  fut  une 
petite  île  déserte  que  Magellan  avait 
également  vue ,  et  qu'ils  nommèrent 
île  des  Cfiiens.  Il  est  à  remarquer 
que  les  Hollandais  et  ce  célèbre  na- 
vigateur ,  en  traversant  le  parage  où 
se  trouve  cette  suite  presque  conti- 
nue d'îles  et  d'écueils  qui ,  au  sud  de 
la  Ligne,  forment  une  espèce  de  cein- 
ture autour  du  globe,  aient  précisé- 
ment passé  entre  les  principaux  grou- 
pes où  les  îles  sont  le  plus  claii'-se- 
mées  ,  et  qu'ils  n'en  aient  découvert 
qu'un  bien  petit  nombre.  La  ton- 
corde  fit  route  à  l'ouest ,  en  quittant 
l'île  des  Chiens ,  et  passa  dans  la 
partie  nord  de  l'Archipel  dangereux, 
où  l'on  découvrit  les  WesSans-Fond, 
fVaterland  et  des  MoiLches.  La 
route  de  l'ouest  mena  ensuite  entre 
l'Archipel  des  îles  des  Amis ,  et  ce- 
lui des  îles  des  Nat^igateurs ,  où  Toh 


3';t 


LKM 


vit  quatre  autres  petites  îles  qui  con- 
servent les  noms  qui  leur  furent 
donne's.  Ce  sont  les  îles  des  Traî- 
tres,  de  Good  Hope  (  Bonne-Espe'- 
rance  ) ,  dos  Cocos  et  de  Boom.  On 
reconnaît  dans  les  habitants  qui  com- 
muniquèrent avec  les  Hollandais, 
(pielques-unes  des  habitudes  des  in- 
sidaires  des  îles  des  Amis ,  et  des 
traces  de  la  férocité'  de  ceux  des 
îles  des  Navigateurs.  Le  1 2  juin  1 6 1 6, 
Scliouten  se  croyait  à  mille  six  cent 
soixante  lieues  de  quinze  au  degré' , 
des  côtes  du  Pérou  ,  c'est-à-dire  par 
environ  i  -jo^  de  longitude  orientale, 
méridien  de  Paris.  Il  jugea  qu'il  se- 
rait dangereux  de  continuer  la  route 
de  l'ouest ,  et  qu'il  fallait  remonter 
vers  le  nord,  alin  de  passer  au  nord 
de  la  Nouvelle-Guinée.  Le  conseil 
s'assembla  ,  et  la  roule  qu'il  propo- 
sait fut  adoptée.  On  ne  tarda  pas  à 
voir  les  îles  qui  sont  aux  environs 
de  la  Nouvelle  -  Irlande  ;  on  passa 
dans  le  nord,  et  probablement  en 
vue  de  plusieurs  des  îles  de  l'Ami- 
rauté, des  Mille-Iles.  Enfin  la  terre 
de  la  Nouvelle  -  Guinée  fut  serrée 
d'assez  près,  jusqu'à  un  cap  peu 
éloigné  des  Moluques  ,  que  l'on  ap- 
pela cap  de  Bomie-E.spérance.  Le 
nom  de  Schouten  fut  donné  à  une 
île  assez  grande  située  à  l'est  de  ce 
cap ,  et  elle  le  conserve  encore  au- 
jourd'hui, La  Concorde  vint  ensuite 
dans  les  IVIoluques ,  en  faisant  le  tour 
de  Gilolo  par  le  nord.  Lemaire  et 
Schouten  y  furent  bien  accueillis  par 
leurs  compatriotes.  Ils  quittèrent 
bientôt  ces  îles,  et  vinrent  mouiller 
dans  la  rade  de  lacatra ,  aujourd'hui 
Batavia  ,  le  23  octobre  iGi6  ,  seize 
mois  après  avoir  quitté  le  Tcxel. 
C'est  ici  que  se  termine  cette  expédi- 
tion qui  a  ouvert  une  nouvelle  route 
à  la  navigation  j  le  succès  en  fut  si 
heureux ,  que  les  Hollandais  ne  per- 


LËM 

dirent  que  trois  hommes  pendant 
un  si  long  voyage.  L'un  était  le  frè- 
re de  Lemaire  ,  et  un  autre  celui  de 
Schouten.  La  suite  des  événements 
fît  connaître  que  l'on  s'était  flatté 
en  vain  d'éluder  le  privilège  de  la 
compagnie  des  Indes  Orientales.  Pe- 
ters  Coen  ^  qui  depuis  a  fondé  Ba- 
tavia ,  et  qui  était ,  à  leur  arrivée  , 
président  du  conseil  des  Indes,  mit 
leur  bâtiment  en  séquestre ,  et  leur 
donna  les  moyens  de  retourner  eu 
Hollande ,  et  d'y  aller  plaider  leur 
cause.  Lemaire  et  Schouten  s'embar- 
quèrent sur  le  vaisseau  V Amsterdam 
commandé  par  l'amiral  Spilberg,qui 
revenait  également  dans  sa  patrie  : 
cet  amiral  était  parti  du  Texel  le  8 
août  161 4,  avec  six  vaisseaux,  et 
les  avait  conduits  aux  Moluques  en 
traversant  le  grand  Océan  ;  mais  il 
avait  passé  par  le  détroit  de  Magel- 
lan ,  seule  route  qui  fût  alors  connue. 
La  flotte  mit  à  la  voile  le  1 4  décem- 
bre 1616.  Lemaire  mourut  le  3i  du 
même  mois.  On  ne  connaît  aucune 
particularité  de  sa  vie  privée.  La  seule 
relation  originale  que  nous  ayons  du 
voyage  qui  porte  son  nom  et  celui 
de  Schouten ,  a  été  écrite  par  Aris 
Classen,  embarqué  en  qualité  de 
commis  sur  le  petit  bâtiment,  et 
qui  passa  à  bord  de  la  Concorde^ 
après  que  celui-là  eût  été  brûlé.  L'au- 
teur du  voyage  de  Spilbei'g  dit  que 
Lemaire  fut  regretté  dans  sa  patrie. 
Nous  ignorons  aussi  les  circonstances 
particulières  de  la  vie  de  Schouten  ; 
mais  le  nom  de  ces  deux  navigateurs 
doit  être  conservé  dans  l'histoire. 
La  relation  de  Classen  a  été  Ira* 
duite  en  latin;  une  version  française 
se  trouve  dans  le  tome  viii  du  Re- 
cueil des  Voyages  de  la  compagnie 
des  Indes  Orientales  de  Hollande  :  de 
Brosses  en  a  donné  un  précis  dans 
l'Histoire  des  terres-australes.    R-i.. 


LEM 

LEMAIRE  DE  BELGES  (Jean), 
poète  et  historien  du  seizième  siècle, 
était  né  vers  147^,  en  la  cite' de 
Belpjes  (  Bavai  )  ,  dans  le  Hainaut. 
Jean  Molincl ,  chanoine  do  Valcn- 
ciennes,  son  parent,  prit  soin  de 
son  éducation  ,  lui  inspira  le  goût 
des  lettres  ,  et  lui  facilita  l'entrée 
dans  la  carrière  des  honneurs.  A 
r.ige  de  vingtn  inq  ans  ,  Lemaire  ob- 
tint la  charge  de  clerc  des  finances 
du  roi  ,  et  du  duc  Pierre  de  Bour- 
bon ,  et  il  alla  habiter  Villefranche  en 
Beaujolais ,  pour  être  plus  à  portée 
de  surveiller  la  rentrée  des  revenus  de 
ce  prince.  Guill.  Crestin  ,  en  passant 
par  Villefranche  ,  eut  l'occasitn  de 
voir  Lemaire  ;  il  conçut  pour  lui 
beaucoup  d'estime  ,  et  l'encouragea 
à  cultiver  son  talent  pour  la  poésie. 
Lemaire  reprit  donc  la  lecture  des 
anciens  auteurs  qu'il  avait  été  obligé 
de  négliger ,  et  il  paraît  même  qu'il 
se  démit  de  son  emploi  pour  se  livrer 
entièrement  à  l'étude.  Il  accepta  la 

f)lace  de  précepteur  de  MM.  de  Bal- 
eme  ,  le  père  et  l'oncle  de  Saint- 
Julieo  ,  lesquels  tous  deux  étaient 
alors  jeunes  enfants  (  Voy,  Sai5t- 
JuLiEW  )  ;  mais  il  ne  la  conserva  pas 
long-temps.  Après  la  mort  du  duc  de 
Bourbon  (  i5o3  ),  il  passa  au  ser- 
vice de  Marguerite  d'Autriche.  L'ab- 
bé Sallier  conjecture  qu'il  remplaça 
Molinpt ,  dans  l'emploi  de  biblio- 
thécaire de  cette  princesse.  Lemaire 
se  trouvait  à  Venise,  en  1 5 06 j  il  se 
rendit  à  Rome,  la  même  année,  et  il 
y  était  encore  en  i5o8.  Ce  fut  au 
retour  de  ce  voyage  qu'il  pulilia 
le  premier  livre  des  Illustrations 
des  Gaules  f  où  il  prend  la  qua- 
lité d'indiciaire  et  historiographe  de 
Tarchiduc  et  de  Marguerite  d'Au- 
triche. Le  zèlequ'ilavaitmontré  pour 
les  intérêts  de  Louis  XII ,  en  prenant 
'  <  défense  contre  le  pape  ^  lui  mérita 

XXIV. 


LEM  33 

rafTeclionde  ce  prince,  qni  l'attacha 
à  la  maison  de  la  reine  Anne  de'Bre- 
tagne.  Il  était  à  Nantes  ,  au  mois  de 
décembre  i  :3 1  à  ;  et  ce  fut  dans  cette 
ville  qu'il  mit  la  dernière  main  à  son 
histoire  des  Gaules.  La  mort  de  la 
reine, qui  fut  suivie  peu  de  temps 
après  de  celle  de  son  époux  ,  j)riva 
Lemaire  de  ses  emplois  ,  et  il  tomba 
dans  la  misère.  Il  n'eut  pas  assez  de 
courage  pour  supporter  l'indigence 
ni  pour  chercher  à  en  sortir  :  sa  tête 
s'afïaiblit  sensiblement  ;  mais  ,  dit 
Saint-Julien  ;  a  Ceux  qui  l'ont  par- 
»  liculièrement  connu  ,  savent  qu'à 
»  l'infirmité  de  la  cervelle  ,  le  viii 
»  ajouta  tant,  qu'enfin  il  mourut  fou 
»et  transporté  dans  un  hôpital.  » 
(  Origine  des  Bourguignons,  p.  38o.  ) 
On  n'est  pas  d'accord  sur  l'époque  de 
la  mort  de  Lemaire.  Lamonnoye  ne 
croit  pas  qu'il  ait  vécu  jusqu'en  i52o; 
mais l'abbéSalliercroit  qu'il  ne  mou- 
rut qu'en  i54B,  à  l'âge  de  75  ans. 
«  C'était, dit  encore  Saint- Julien,  ua 
homme  de  grande  lecture  et  de  très- 
diligent  labeur...  ;  mais  ces  hommes 
doctes  et  malcontents  (  i  ) ,  quand  ils 
ont  été  pauvres  ,  n'ont  pu  prendre 
leur  revanche ,  sinon  avec  la  plume 
et  le  papier  qui  souffre  tout;  aussi  est- 
il  dangereux  d'ajouter  foi  à  telles  ma- 
nières de  gens.»  Puis  il  ajoute  :  «  Si 
Lemaire  et  Agrippa  (2)  ont  été  amis , 
la  parité  de  condition  aurait  concilie' 
entre  eux  cette  amitié,  et  la  fin  de 
l'un  et  de  l'autre  a  découvert  que  leur 
savoir  avait  été  très-mal  erwcUsselé.^ 


(1)  CV«t  bien  à  tort  que  Saiiit-Jnlien  reproch* 
à  l.rrmair«  il'ètie  mal  content.  Il  n'avait  point 
tl'ambitioni  comme  le  proure  ladeviict  De  peu 
tuset, 

(3)  C'ett  Cornoille  Agrippa,  qu'on  accitta  d» 
nia^ie  ,  «t  qui  mourut  ds  mi«érft  dans  un  hApital 
(  Kl»)'.  Aa»if»*.  )  ;  Le  Traité  du  Srhisme  ,  par 
Loniaire,  dan»  lequel  il  attaque  «»nt  niénafre- 
ment  les  préteationa  de  la  cour  de  Rome,  cit 
aaui  doute  la  cause  de  la  mauvaise  humeur  de  V  . 
dvSaiut'Julieii  .tiche  béaéficier. 


34  I^EM 

(  Orig.  des  Bourguig. ,  pag.  38o.  ) 
La  langue  et  la  poésie  françaises 
ont  quelques  obligations  à  Leniaire. 
Avant  lui ,  on  n'avait  pas  remarqué 
que  la  césure  du  vers  ne  doit  jamais 
tomber  sur  un  e  muet.  Marot  avoue 
que  ce  fut  Lemaire  qui  lui  apprit  la 
règle ,  en  le  reprenant  d'y  avoir  man- 
que'dans  son  Eglogue  à  François  I*^*". 
Pasquier  dit  que  la  lecture  de  ses  ou- 
vrages n'avait  pas  e'ié  inutile  à  Ron- 
vSard.  On  a  de  Jean  Lemaire  :  L  Le 
Temple  dlionneur  et  de  vertus,  com- 
pose'  à  l'honneur  de  feu  monseigneur 
le  duc  de  Bourbon,  Paris  ,  i5o3  , 
in-8o.  Cet  ouvrage  est  mêlé  de  prose 
et  de  vers  j  et  l'on  y  reconnaît ,  dit 
Rallier  ,  que  l'auteur  ne  manquait  ni 
de  facilité  pour  se  faire  un  plan  ,  ni 
de  justesse  pour  arranger  les  parties 
d'un  sujet.  IL  La  légende  des  Féni- 
tiens  ,  ou  autrement  leur  Chronique 
abrégée ,  etc.  ,  Paris  ,  1009  ,  in-8". 
C'est  une  satire  très-vive  de  la  con- 
duite des  Vénitiens  ,  et  en  même 
temps  la  justification  de  la  ligue  de 
Cambrai  :  cet  ouvrage  est  en  prose. 
IIL  La  plainte  du  Désiré ,  Paris  , 
i5o9,  in-8^. ,  Lyon,  id.  C'est  un  dia- 
logue entre  les  deux  nymphes ,  Pein- 
ture et  Rhétorique  ,  sur  la  mort  de 
Louis  de  Luxembourg ,  dont  l'auteur 
se  dit  le  secrétaire  :  il  est  suivi  des 
Begrets  de  la  Dame  Marguerite-Au- 
guste ,  fille  de  l'emjiereur  Maximi- 
lien ,  sur  la  mort  de  son  frère  le  roi 
Philippe,  par  le  même  auteur.  IV. 
L^épître  du  Boi  àllector  de  Troyes, 
1 5  n .  C'est  mie  réponse  à  celle  que 
J.  Danton  avait  adressée  à  Louis Xîï, 
au  nom  d'Hector  :  cette  pièce  a  été 
réimprimée  à  la  suite  des  Illustrations 
des  Gaules.  V.  Le  Triomphe  de  Va- 
mant  vert  compris  en  deux  épîtres 
fort  joyeuses,  envoyées  à  M^^^,  Mar- 
guerite Auguste  y  1 5  T  o;  Paris,  1 535, 
in-i6 ,  et  ddos  plusieurs  cditious  des 


LEM 

Illustrations  des  Gaules.  Dans  la 
première  épître  ,  le  poète  exprime 
les  regrets  de  l'amant  vert  sur  le 
départ  de  cette  princesse  pour  l'Al- 
lemagne ,  où  elle  était  allée  visiter 
Perapereur  Maximilien  ,  son  père. 
Dans  la  seconde ,  il  suppose  que  l'a- 
mant est  mort  de  douleur  ,  et  il  ra- 
conte ce  qu'il  a  vu  dans  les  enfers. 
Sallier  avoue  qu'il  n'a  pas  pu  deviner 
qui  était  cet  amant  vert.  L'abbé 
Goujet  s'est  imaginé  qu'il  s'agissait 
là  de  Lemaire  lui-même, et  il  s'étonne 
qu'un  homme  de  si  basse  condition 
ait  eu  l'audace  de  se  vanter  d'avoir 
vécu  très- familièrement  avec  la  prin- 
cesse. Puis  il  ajoute:  «Ce  qui  me  sur- 
prend ,  c'est  que  non-seulement  il 
ait  pris  la  liberté  de  le  lui  écrire  à 
elle-même , mais  déplus  qu'il  se  soit 
persuadé  qu'il  lui  ferait  plaisir  en 
l'annonçant  à  tout  le  monde ,  par  la 
publication  de  son  épître.  Il  s'y  dit 
né  dans  la  Haute-Ethiopie  ;  mais  il 
est  aisé  de  voir  que  c'est  une  fiction,  o 
(  Foy.  la  Biblioth.  française ,  t.  x , 
page  83.  )  Eh  bien  I  cet  amant  vert , 
c'était  le  perroquet  de  la  princesse  , 
et  il  est  inconcevable  que  Sallier  ni 
Goujet  ne  l'aient  pas  devinéà  la  lecture 
des  premiers  vers  (  i  ).  VI.  Traités 
singuliers  ,  savoir  :  les  trois  Contes 
intitulés  de  Cupido  et  de  Atropos , 
etc.  Paris,  1 5^5,  in-8*5.,  rare.  Le  pre- 
mier est  traduit  de  l'italien  de  Séra- 
phino  y  les  deux  autres  sont  de  l'in- 
vention de  Lemaire.  Il  suppose  que 
l'Amour,  dans  une  rencontre  avec 
Atropos,  a  pris  l'arc  de  cette  déesse 
au  lieu  du  sien  ,  et  que  depuis  ce  mo- 

(1)  En  voici  quelques-uns  qui  paraissent  asse» 


cla 


Or,  plût  à  Dieu  que  mon  corps  assez  beau 
Fût  transformé  pour  cette  heure  en  corbeau  j 
Et  rann  collier  vermeil  et  purpurin, 
Fût  aussi  brun  qu'un  Maure  ouBarbarinj 
IjOis  te  plairais-je;  et  ma  triste  laideur 
Me  vaudrait  mieux  que  ma  belle  verdeur. 


menl-U  tous  ceux  qui  ont  été  blesses 
de  SCS  flcrhcs  sont  atteints  de  cette 
elVroyable  maladie  décrite  par  Fra- 
castôr.  {f'^o/.  FuACASTOR.)Le  poi*te 
termine  son  recil ,  en  annonçant  que 
Jupiter,  à  la  prière  de  Vénus,  a  indi- 
qué une  assemblée  des  états  pour  avi- 
ser aux  moyens  d'arrêter  les  progrès 
du  mal.  Vil.  La  Concorde  des  deux 
langages.   Il  y  relève  les  avantages 
particuliers  du  français  et  du  toscan, 
qui  ont  une  même  origine  ,  le  latin. 
Cet  ouvrage  est  divisé  en  deux  par- 
lies,  dont  Tune  est  rimée  par  tercets, 
genre  imité  des  italiens  ,  mais  que 
Lemaire  n'a  pu  introduire  dans  la 
poésie  française.  VIII.  Traité  de  la 
différence  (les  schhmes  et  des  con- 
ciles de  l'Église  ,  et  de  la  préémi- 
nence et  utilité  des  conciles  de  VÉ- 
f^lise  gallicant^,  Lyon,  i5i  i  ,  in-4°. 
!'iit  en  latin,  par  Sim.  Schard , 
npiimé  à  la  suite  de  l'histoire  de 
urrydc  Niem ,  Basle,    i56G, 
;:    fol.    Camerarius  en   donna    une 
'1   ;ivelle  traduction  en  i5'j'2.  Le  but 
'i    Lemairc,  dans  cet  ouvrage  ,  était 
'îiinetlrc  en  évidence  l'injustice  de 
!      onduite  de  Jules  II  à  l'égard  de 
is  XII:  mais  d'un  principe  vrai 
..  ..  tiré  des  coaséquences   qui   ont 
été  adoptées  par  les  protestants.  IX, 
Le  prompt u aire  des  conciles  de  V È- 
çlisc  catholique  avec  les  schismes 
?t    la     différence    d'iceux ,    plus 
['Histoire  du  prince  Sjach  Ismaël; 
lar  le  même  auteur,  Paris,  i5i2, 
n-S».  jLyon,  i532,in-i6j  Paris, 
7  ,  in-i6  :  il  y  a  encore  d'autres 
•ms.  X.   Trois  livres  des  Illus- 
ions des  Gaules  et  singularités 
Trojres ,  Paris ,  1 5 1  sx ,  in-folio  ; 
pra    i53i .  in-8o.,  iliid.    i54o, 
».,  ibid.  i548,  in-4°.,  et   plu- 
rs  autres  fois  de  même  formai; 
•vus  et  restitués  par  A.  ^  -       ' 
yon,  i549,Hi-fol.  :  r. 


Î.EM  33 

quoique  plus  arapic  ,  est  moins  re- 
cherchée que  les  éditions  de  format 
in-8".qui  sont  micjixexécjitées. Cette 
prétendue  histoire  est  un  tissu  de  fa- 
bles ,  tirées  la  ])Iupart  du  faux  Berose 
et  d'Annius  de  Vilcrbe.  L'auteur  fait 
descendreles  rois  de  France  de  Frau- 
eus  fils  d'Hector  ,  fable  répétée  par 
tous  nos  historiens,  jusfpi'à  la  (in  du 
i6^ siècle; il  cite,  parmi  les  autoiités 
dont  il  appuie  ses  récits ,  le  psautier 
de  Da\*id  ,  Homère,  Virgile,  TiLuIle 
et  Ovide.  Au  milieu  de  ce  fatras  ,  ou 
trouve  des  idées  singulières,  et  qui 
trouveraient  des  partisans; il  afllrme, 

Î)ar  exemple,  que  le  bas-  breton  est 
e  vrai  langage  troyen.  La  plupart  des 
éditions  de  cet  ouvrage  renferment 
les  fameuses  Epîtres  de  V amant  ^vert 
et  d'autres  poésies  de  Lemaire.  XL 
La  couronne  Margariliifue  ,  Lyon  , 
i549n  in-fol  :  elle  est  comprise  dans 
l'édition  de  Dumoulin  citée  plus 
haut.  Celle  pièce ,  d'une  assez 
grande  étendue  ,  contient  l'éloge  de 
Marguerite  de  Savoie;  elle  a  élé pu- 
bliée par  Pierre  de  Saint- Julien  de 
Balieurc.  On  a  attribué  à  Lemaire  : 
Le  Triomphe  de  très-haute  et  puis- 
sante dame  V ,  royne  de  Puits 

d'Amour ,  Lyon  ,  1 539,  i"-^"- ,  pe- 
tit ouvrage  très-rare  j  mais  Duver- 
dier,  dans  la  Bibliothèque  français*, 
en  désigne  comme  l'auteur,  un  cer- 
tain Martin  d'Orchesino  ,  nom  que 
Lampnnoye  croit  supposé,  et  que 
Mercier  de  Saint-Léger  ,  ni  M.  Bar- 
bier _,  u'ont  pu  expliquer.  (  Voy.  le 
Supplém.  à  la  table  du  Diction,  de^ 
Anonymes.  )  On  peut  consulter  les 
BechercJies  sur  la  vie  et  les  ouvrage» 
de  J.  Lemaire,  par  Sallier,  dans  le 
Recueil  de  Vacad.  des  inscript.  ^ 
tom.  xiii,  pag.  593-606.    W— s. 

LEMAISTaE  (Gilles)  ,  premier 
"Ment  au   parlement  de  Paris, 
.  fiiiuille   ancienne   et  illustre 
3.. 


36 


LEM 


dans  ]a  robe  ,  était  petit  fils  Je  Jean 
Leniaislre  ,  premier  avocat-général. 
Il  naquilàMonllhéri,vers  l'an  i499, 
et  fro([uenta  le  barreau  pendant  ses 
premières  années.  Il  s'y  acquit  la  ré- 
putation d'habile  jurisconsulte  ;  et 
François  I*''.  le  nomma  avocat-gé- 
nérnl  au  parlement,  en  ï54'>.  Hen- 
ri II ,  voulant  récompenser  les  ser- 
vices qu'il  avait  rendus  dans  cette 
cliarge,Ie  nomma  président  à  mor- 
tier en  i55o  ,  et ,  Tannée  d'après  il 
l'éleva  à  la  place  de  premier  prési- 
dent. Pendant  que  Leniaislre  remplis- 
sais cet  emploi ,  il  se  forma  des  fac- 
tions qui ,  sous  le  prétexte  de  reli- 
gion ,  désolaient  la  France  et  la  cou- 
vraient de  sang.  Les  promesses  , 
et  les  menaces  de  l'interdiction  et  de 
la  mort,  ne  purent  ébranler  l'héroïque 
fermeté  de  ce  magistrat ,  ni  l'empê- 
clicr  de  soutenir  les  intérêts  de  l'état. 
Il  mourut  le  5  décembre  i562 ,  et  fut 
enterré  aux  Cordeliers  de  Paris. 
Nous  avons  de  lui  :  Décisions  no- 
tables ,  Paris  ,  1 566 ,  in-4".  Jean 
Ramat  en  donna  uneédition augmen- 
tée d'un  plaidoyer  de  Bourdin,  pro- 
cureur-général ,  et  d'un  arrêt  tou- 
chant la  régale  de  Nantes ,  Paris  , 
i583  ,  in-8'\  ;  Lyon  ,  1593  ,  in- 16  ; 
Paris  ,  160 1  ,  in-iti.  Les  œuvres  de 
Lemaistre  furent  imprimées  après  sa 
mort.  Claude  Bernarl  en  donna  une 
édition  ,  en  ï653  ,  in  -  4**.  ,  et  une 
deuxième  ,  corrigée  et  augmentée 
de  plusieurs  décisions  et  arrêts  in- 
lervejms  depuis,  Paris,  1680,  in-4**. 
Eiles  sont  diAdsées  en  ciiiq  livres  : 
1".  Des  Criées  et  Saisies  réelles. 
*i^.  Des  amortissements  et  Francs- 
Fiefs.  30.  Des  Bégaies.  4».  Des 
Fiefs ,  Hommages  et  Vassaux.  5». 
Des  Appellations  comme  d'abus.  Du- 
moului  appelle  Lemaistre  inrum  Cru- 
ditissipmm;  mais  ce  magistrat  avait 
le  défaut  de  trop  abonder  eu  son  sens. 


LEM 

Taisand  (  Fie  des  Jurisconsultes  )  en 
rapporte  un  exemple  pris  dans  un 
procès  que  Lemaistre  eut  avec  son 
gendre  :  après  l'avoir  perdu  à  la 
chambre  des  requêtes  ,  il  en  appela 
au  parlement. Les  pièces  examinées, 
on  trouva  qu'il  avait  été  bien  jugé; 
mais  ,  par  égard ,  on  lui  envoya  le 
président  ïiennequin,  afin  de  le  faire 
consentir  à  ce  que  la  sentence  eût 
son eflét.  Comme  il  n'y  consentit  pas , 
le  parlement  la  confirma.  Z. 

LEMAISTRE  (  Jean  ),  neveu  du 
précédent,  était  avocat  au  parlement 
de  Paris,  lorsque,  forcé  parles  li- 
gueurs ,  il  accejita  d'eux  la  ])lace  d'a- 
vocat du  roi ,  et  jirêta  serment  à  la 
sainte  union,  \e  ii6  janvier  1589.  Le 
duc  de  Maïenne  et  les  autres  chefs  de 
la  Ligue  le  nommèrent ,  en  1 59 1 , 
premier  président  du  pailement  de 
Paris,  en  remplacement  de  Rrisson, 
que  les  Seize  avaient  assassiné  ,  et  le 
députèrent  aux  prétendus  «tats  du 
royaume  tenus  à  Paris.  Chargé  par 
cette  assemblée  d'examiner,  avec  le 
conseiller  aux  enquêtes  Duvair ,  la 
proposition  faite  par  le  légat,  de  pu- 
blier en  France  le  concile  de  Trente  , 
sans  réserve  ni  modification  ,  il  lit 
(  avec  son  collègue  )  un  rapport 
qui  mécontenta  le  légat ,  et  décon- 
certa ses  projets.  Lemaistre  s'étant 
procuré  secrètement  la  déclaration 
du  roi,  par  laquelle  ce  prince  s'en- 
gageait à  ne  plus  apporter  de  délais 
à  sa  conversion  ,  et  annonçait  qu'il 
se  faisait  instruire  et  qu'il  avait  même 
mandé  auprès  de  lui,  pour  cela  ,  les 
meilleurs  théologiens  et  les  évêques,  il 
en  fît  Iranscrii-e  un  grand  nombre 
d'exemplaires,  et  les  répanditdans  le 
public,  accompagnés  du  discours  que 
l'archevêque  de  Bourges  avait  pro- 
noncé à  cette  occasion  dans  les  con- 
férences de  Surêne.  La  bonne  foi  dui 
roi ,  les  espérances  qu'il  donnait. 


LEM 

Mirlout  la  tivvr  qu'il  offrit,  cau- 
. .  Kiil  une  iTVoliUion  loinarqiiablc 
dans  |)lu.>icurs  e.sjuils.  Opciidant , 
le  (lesir  île  repousser  JI<  nri  IV  du 
trône  ,  n  iVy  placer  l'infanle  li'l'^s- 
jjagne,  avait  fail  prop<)ser  i'al)olilion 
de  la  loi  salicpie.  La  doctiine  que 
rahoHlion  de  celte  lui  roiulainenlale 
pouvait  être  pronoiiece  p.ir  le:»  étals, 
comme  represculanls  de  la  nation , 
domina  bientôt  au  parlement  ;  et  la 
question  se  rcduisaitaurlioix  du  pré- 
tendant. La  eausi;  de  Henri  IV  lou- 
chait à  son  moment  critique;  mais  un 
dcfcnseur  se  présenta  :  ce  Ait  le  pré- 
sident Leraaistre.  D'après  le  résultat 
dedcliberationssecrèles, la  résolution 
d'expier ,  par  un  témoignage  éclatant 
de  patriotisme  ,  les  excès  de  fai- 
blesse auxquels  le  parlement  s'était 
prêté,  ayant  été  prise,  Lcm.ùstrc  con- 
voqua rassemblée  des  chambres  , 
sans  indiquer  le  motil'  de  la  convo- 
cation. Duvair  ,  après  un  exposé  du 
danger  qui  men.içait  la  France,  con- 
clut «  à  ce  qu'il  fût  rendu  arrêt ,  par 
letpiel  tons  traités  faits  ou  à  faire  pour 
l'établissement  de  princes  ou  prin- 
cesses étrangères  ,  seraient  déclares 
nuls  et  de  nulle  valeur,  comme  faits 
au  préjudice  de  la  loi  salique  et  aux 
lois  fondamentales  du  royaume  ;  et 
tous  ceux  qui  y  prêteraient  aide,  fa- 
veur et  consentement ,  déclarés  cri- 
minels de  lèzc-majesté  au  premier 
chef,  etc.  »  Ces  conclusions  furent 
accueillies  par  acclamation  de  la  part 
des  memlues  qui  étaient  initiés,  et  la 
minorité  n'opposant  qu'un  fai IjIc obs- 
tacle,l'arrêt  fut  rendu  le '.i8  juin  i5t)3: 
telle  est  l'histoire  de  ce  fameux  arrêt 
rapporté  par  Joly,  et  dont  il  attribue 
la  première  idée  à  Lemaistrc,  bien 
que  d'autres  assurent  qu'elle  apjjar- 
tient  au  procureur- général  Mole. 
Quoi  qu'il  en  soit,  cet  arrêt  fit 
tioud'hoaueui' au  parlement,  et  fut 


LETVf  ^7 

si  utile  à  la  rauso  de  Henri  IV  ,  qm? 
le  chancelier  de  Chiverny  l'attribue 
à  nue  inspiration  divine.  T,e  prési- 
dent Lem.dstre,  accompagné  de  plu- 
sieurs conseillers,  le  notifia  au  «luo 
de  Maienne  ,  lieulennnl-géneF'al  du 
royaume,  et  en  dé/endil  les  principes 
devant  lui  avec  beaucoup  de  b  nnclé. 
Ce  duc  ayant  forcé  le  comte  de  lielin 
qu'il  croyait  attaché  au  p.irtidu  roi, 
à  demander  sa  retraite,  le  ]»nsident 
Lemaislre  lui  adressa  ,  au  nom  du 
parlement  ,  de  vives  remontran- 
ces, et  lit  entendre  que  ce  corps 
était  disposé  à  prendre  une  connais- 
sance plus  exacte  de  toutes  les  af- 
faires: mais  Ma'iei  me  ne  rétablit  point 
Bclin  ,  et  mil  a  sa  place  le  comte  de 
Brissac  ,  qa'il  croyait  lui  être  plus 
dévoué.  Cependant  Lemaislre  et  les 
auîrcs  memjjres  les  plus  influents  du 
parlement  et  de  la  bourgeoi>ie  ga- 
gnèrent Brissac.  Le  19  mars  1 5f)4  , 
on  se  réunit  à  l'arsenal,  où  l'on  ar- 
rêta délinilivement  lès  articles  de  la 
capitulation  de  Paris,  et  Henri  entra 
dans  la  capitale  trois  jours  après. 
(  P".  Langlois.  )  Ce  prince  voulant 
récompenser  les  services  de  Lemais- 
tre,<|ui  perdait  sa  place  par  le  retour 
des  anciens  présidents, créa  en  sa  fa- 
veur un  othcede cinquième  président 
que  ce  magistrat  conserva  jusqu'à  sa 
mort  arrivée  en  1596.         D-z-s. 

LRMALSTRE  (Àntoinf),  avocat 
au  parlement  de  Paris,  né  dans  cette 
ville,  en  UioH.fils  dlsaac  I^emaislre, 
maître  des  comptes,  et  de  Catherine 
Arnauld,  so'ur  des  illustres  solitai- 
res de  Port-Royal,  dut  à  leurs  soins 
une  solide  et  brillante  éducation:  il 
commença  à  plaider  à  l'âge  de  2 1  ans, 
et  se  lit  une  grande  réputation  par 
son  éloquence  vive  et  animée,  mais 
presque  toujours  trop  chargée  de  ci- 
tations. Seguier  le  choisit,  en  i(>36, 
pour  prcseutcr  au  parlement  ses  Ici- 


38 


LEM 


très  de  cliancelier;  le  dise  ours  qiie  pro- 
nonça le  jeune  avocatàcette  occasion 
obtint  beaucoup  de  succès.  Ce  magis- 
trat qui  l'estimait  particulièrement 
le  fit  nommer  conseilier-d'état,  et  lui 
offrit  la  charge  d'avocat-gènëral  au 
parlement  de  Metz.  Lemaistre  ,  qui 
avait  forme  depuis  long  -  temps  le 
projet  d'abandonner  le  monde,  re- 
fusa celle  dignité.  Il  ne  tarda  pas  à 
effectuer  sa  résolution  :  après  avoir 
renvoyé  au  chancelier  ses  lettres  de 
conseiller-d'ëtat ,  il  se  retira  à  Port- 
Royal  de  Paris,  où  il  passa  plusieurs 
années  dans  les  exercices  d'une  péni- 
tence très-austère ,  qu'il  n'interrom- 
pait que  par  l'étude  des  Livres  saints 
et  des  Pères  de  l'église ,  qui  avait  tou- 
jours fait  ses  délices.  De  Paris  ,  Le- 
maistre chercha  une  retraite  à  Port- 
Royal-des-Champs,  avec  sou  frère 
Simon:  obligé  de  quitter  momenta- 
nément cette  retraite  ,  il  se  rendit  à 
Laferté-Milon;  en  1689,  il  revint  à 
Port-Royal-des-Champs,  où  il  mou- 
rut le  4  novembre  i658.  Lorsque  ce 
monastère  fut  démoli ,  on  exhuma  ce 
qui  restait  de  son  corps  j  et  on  l'ap- 
porta ,  en    17 10,  dans  l'église  de 
Saint-Elienne-du-Mont ,    où   il    fut 
enseveli  à  côté  de  Pascal,  son  ancien 
ami.  Lemaistre  ,  qui  avait  formé  le 
projet  de  publier  une  Vie  des  Saints 
purgée  de  toutes  les  fables  que  l'igno- 
rance   ou  le    peu  d'exactitude   de 
quelques  auteurs  avaient  laissé  glis- 
ser dans  les  anciennes  légendes,  ras- 
sembla dans  cette  vue ,  avec  D'Hé- 
rouval  son  ami ,  tout  ce  qu'ils  purent 
déterrer  d'actes  originaux  de  la  vie 
et  du  martyre  des  Saints  ;  mais  la 
mort  ne  lui  permit  pas  d'achever 
celte  entreprise ,  dont  il  avait  déjà 
fait  paraître  quelques  échantillons. 
Il  est  auteur   d'mi   grand   nombre 
d'ouvrages  dont  la  plupart  sont  ou- 
iUiévS.  On  en  peut  voir  le  détail  dans 


LEM 

Moréri  ;  nous  indiquerons  seulement  : 
I.  Becueil  de  divers  plaidoyers  et 
harangues  prononcées  au  parlement; 
deuxième  édition, Paris,  i65/^jin-^^.'y 
édition  donnée  par  Issali ,  1657  ,  in- 
fol.  ;  publiée  en  allemand  et  en  fran- 
çais^ Heidelberg,  1673.  Le  chance- 
lier d'Aguesseau  ,  dans  sa  quatrième 
instruction  à  son  fds,  l'engage  à  lire 
quelques-uns  des  discours  de  Lemais- 
tre ,  où  l'on  trouve  «  des  traits  qui 
»  font  regretter  que  l'éloquence   de 
»  l'auteur  n'ait  pas  eu  la  hardiesse 
»  de  marcher  seule  et  sans  ce  cor- 
»  tége  nombrcTix  d'orateurs,  d'his- 
»  torienselde  Pères  de  l'église,  qu'elle 
»  mène  toujours  à  sa  suite.»  Faiconet 
a  réimprimé,  depuis  peu ,  un  choix 
de  ces  plaidoyers, sous  le  titreà'  OEu- 
vres  choisies  de  Lemaistre ,  Paris, 
Buisson ,  1 806,  in-8^. ,  précédé  d'un 
morceau  sur  l'éloquence ,  par  M.  Ber- 
gasse.  On  peut  voir,  sur  ce  recueil  , 
l'article  donné  par  M.  Lacretelle  aîné 
dans  le  Puhliciste  du  if\  avril.  IL 
\j  Aumône  chrétienne ,  ou  la  tradi- 
tion de  V église,  touchant  la  charité 
envers  les  pauvres,  recueillie  de  VE~ 
criture  sainte  et  des  Saints- Pères; 
Paris  ,  Durand,  i()58,  in- 19.,  1  vol. 
Quelques  biographes  lui  attribuent  la 
Fie  fort  bien  faite  de  domfiarl  helemi 
des  martjrs  ;  mais  il  paraît  qu'elle- 
est  de  son  frère  Lemaistre  de  Sacy. 
La  traduction  du  Nouveau- 2' esta- 
mpent de  Port-Royal  ,  avait  été  com- 
mencée par  Ant.  Lemaistre.,   D-z-s. 
LEMAISTRE  (  PiEBP.E  ),  avocat 
distingué  au  parlement  de  Paris ,  où 
il  fut  reçu,  le  2G  novembre  1668, 
naquit  dans  cette  ville,  vers  i638. 
On  n'a  point  de  détails  sur  la  vie  de 
ce  jurisconsulte,  mort  le  17  octobre 
1728;  il  est  seulement  connu  par 
sa  Coutume  de  Paris,  rédigée  d'a- 
près l'ordre  naturel  et  la  disposition 
àe  SQS  articles ,  avec  la  résolution 


LEM 

fies  questions,  etc.,  Paris,  1700, 
in-f*'.;  rcimprimée  dans  le  même  for- 
mat, Paris,  1741  ,avec  des  notes  de 
M.  Si***,  avocat  au  parlement.  Ce 
«oramentaire  était  fort  estime  avatit 
)a  re'volution,pour  la  façon  dont  Vau- 
tpur  y  traite  les  matières,  pourPor- 
•Ire  qu'il  y  a  mis.  la  précision  et  la 
neltclede  ses  décisions, soit  quand 
il  balance  les  dillerents  sentiments  , 
soit  quand  il  ajiçile  des  questions  épi- 
neuses. Lemaislre  ,  qui  avait  puise' 
dans  les  ouvrages  d'autres  juriscon- 
s.iltes  ,  indique  ses  sources  avec  au- 
t  int  de  scrupule  que  de  modestie  , 
n'omet  aucune  des  opinions  qu'il  ne 
partage  pas,  et  laisse  le  lecteur  maî- 
tre de  cnoisir.  Le  chancelier  d'A- 
;;nesseau,dans  sa  quatrième  instruc- 
iionà  son  fils,  lui  recommande  la 
lecture  de  cet  ouvrage.  D-z-s. 
LEMAITKE   de  SACY.  Fojez 

ACY, 

LEMAITRE  (  Charles  -  Fran- 
çois) ,  sieur  de  Clai'ille  àams  la  Nor- 
mandie, e'iait  ne  à  Rouen,  vers  i  G7 o. 
Il  nous  apprend  lui-mcme  qu'il  fut 
•mployé,  pendant  quatre  ans  ,  pour 
les  affaires  du  roi ,  à  Ratisbonne ,  et 
jue  ce  fut  afin  de  remplir  utilement 
le  vide  de  ses  journées,  qu'il  se  fit 
auteur.  Il  acquit  une  charge  de  pré- 
sident au  bureau  des  finances  de 
Rouen  ,  et  mourut  doyen  de  sa  com- 
j^agnie,  en  1740,  dans  un  âge  avance'. 
On  a  de  lui  le  Traité  du  vrai  mérite 
de  l*  homme  dans  tous  lésâmes  et  dans 
toutes  les  conditions ,  Paris ,  1735,2 
vol.  in- 1  '2.  Cet  ouvrage ,  aujourd'hui 
oublie^ eut  une  vogue  extraordinaire, 
et  il  s'en  fit  huit  ou  dix  éditions  dans 
Tespace  de  quelques  années.  Ce  suc- 
cès ,  auquel  il  était  loin  de  s'attendre , 
flatta  singulièrement  Tauleur;  mais 
il  n'en  fut  que  plus  sensible  aux  cri- 
tiques trcs-modéréesdequelques  jour- 
fialisies.  C'était ,  dit  -  ii  ^  le  premier 


LEM 


3o 


bonheur  de  ma  vie  ;  on  n'aurait  p^i 
dArae  l'enlever.  Son  livre  est  destiné, 
comme  on  dit ,  à  former  l'esprit  et 
le  cœur  d'un  jeune  homme  ;  il  se  fé- 
licite  beaucoup  d'en    avoir  conçu 
l'idée  :  il  est  assez  singulier  ,  dit-il  , 
que  j'aie  formé,  en  Allemagne,  le  des- 
sein de  faire  d'un  Français  un  wr- 
tnosus  ;  et  c'était  à  ses  yeux  un  titre 
suffisant  pour  prendre  rang  parmi 
les  auteurs  du  second  ordre  :  mais  on 
ne  trouve  dans  son  ouvrage  ni  plan  , 
ni  méthode ,  ni  style;  c'est  un  ramas 
de  puérilités  ,  de  lieux  communs  de 
morale  ,^e  citations  entassées  sans 
discernement ,  et  de  jugements  erro- 
nés sur  nos  écrivains.  S'il  veut ,  par 
exemple,  vanter  les  charmes  de  la 
bienfaisance: «Le  plaisir  de  donner, 
dit-il ,  est  la  mère  -  goutte  de  la  vo- 
lupté. »  En  indiquant  à  son  élève  les 
lectures   qu'il  doit  faire  ,  il  accole , 
dans  un  même  paragraphe  ,  Marot , 
Ra])elais  et  MonJaigne.  «  Montaigne  , 
dit-il ,  plus  pur  et  plus  moral  que  les 
deux  autres,  était  trop  caustique  j 
c'était  un  misanthrope  poli  qui  pen- 
sait juste  ;  mais  je  lui  trouve  trop 
d'emphase  et  trop  peu  de  liaison  : 
l'agrément  de  Marot  durera  toujours  ; 
celui  de  Rabelais  a  perdu  son  crédit.» 
Pour  faire  entendre  qu'on  peut  pro- 
filer en  lisant  un  auteur,  quoiqu'il  ne 
soit  point  parfait  :  «  Balzac  ,  dit-il , 
par  exemple,  est  plein  d'esprit ,  mais 
empesé;  prenezl'esprit  et  laissezl'em- 
pois.  »  11  semblerait  (pi'un  écrivain 
si  peu  délicat  sur  le  choix  des  ter- 
mes, dut  être  fort  indifférent  à  toutes 
les  querelles  grammaticales  :  cepen- 
dant Lefmaître  de  (ila^ille  réunit  ses 
eflbrts  à  ceux  de  l'abbé  Desfontaines , 
contre  le  néologisme.  Il  déclare  qu'il 
ne   peut  souffrir  l'emploi  de  deux 
mots ,  déraison  et  inconduite  ,  qui 
lui  paraissent  barliares  ;  et  il  ajoute  , 
damj  le  incuie  chapitre ,  qu'il  serait 


4o  LLM 

bien  funeste  d'écrire  faisais  pour 
j'avais,  parce  que  l'étranger  ne  pour- 
rait de  lui-même  arriver  au  verbe 
m'oir ,  pour  le  bien  conjuguer.  En 
voilà  assez  sans  doute  pour  faire  ap- 
précier le  Traité  du  vrai  mérite  ; 
mais  on  doit  ajouter  que  Lemaître  de 
Claville  fut  un  honnête  homme  et  un 
excellent  citoyen  ,  deux  qualite's  qui 
doivent  lui  faire  pardonner  d'avoir 
lait  un  méchant  livre.  W-s. 

LEMARGHAND  (  Madame  ),  fdle 
de  Joseph-François  Duché  (  Voyez 
Dl  cuE ,  t.  XII 5  p.  1 06  ) ,  avait  épousé 
un  receveur-général  des  domaines  et 
bois  de  la  généralité  de  Soissons.  Sa 
maison  était  le  rendez-vous  des  per- 
sonnes célèbres  de  son  temps  ;  et 
c'était  là  que  C.  A.  Goypel  (  Voyez 
t.  X ,  p.  i63  )  récitait  ses  comédies. 
Ces  réunions  donnèrent  peut-être  à 
mesdames  de  Tencin  et  Geoffrin  , 
l'idée  de  leurs  soirées.EUe  avait  com- 
posé des  vers ,  des  comédies ,  des 
contes  ;  mais  elle  craignait  tant  la  ré- 
putation de  femme  bel-esprit,  qu'on 
ne  connaît  d'imprimé  d'elle  que  les 
Nouveau  x  contes  des  fées  ,  1 735  , 
in-i'i:  encore  la  plupart  des  exem- 
plaires furent-ils  supprimés  par  ses 
soins.  Ce  vohime  contenait  quatre 
contes  ,  le  Phénix  (  qui  est  de  la 
présidente  Dreuillet,  morte  en  1 780); 
Lisandre ,  Carline  et  Boca  :  ce  der- 
nier ayant  été  réimprimé ,  en  1756, 
sous  le  nom  de  madame  Husson , 
jeune  et  jolie  dame  de  ce  temps,  ma- 
dame Lemarchand  ne  fit  aucune  ré- 
clamation, étant  morte  d'aileurs  la 
même  année;  mais  un  anonyme  ayant 
fait  insérer  dans  le  t.  i^^".  de  VJ^nnée 
littéraire  ,  pour  1757  ,  une  lettre 
assez  aigre  contre  mad.  Husson  , 
celle-ci  n'hésita  pas  à  désavouer  l'o- 

Î)uscule  par  une  lettre  insérée  dans 
e  même  volume.  Celte  circonstance 
a  donné  naissance  à  la  cjbanson  de 


LEM 

l'abbé  de  rAltaignant,qui  commence 
par  ce  vers  : 

Un  jour  ,  Vémis  prit  à  Minerve  ,  etc. 

A.  B-T. 

LEMASCRIER  (Jean-Baptiste)  , 
abbé,  né  à  Gaen,  en  1 697,  fut  toute  sa 
vie  aux  gages  des  libraires  :  il  s'exer- 
çait ,  sans  égard  pour  son  état ,  sur 
le  sacré  et  le  profane ,  selon  le  sujet 
qu'on  lui  donnait.  Il  mourut  à  Paris  , 
le  j6  juin  1 760.  On  a  de  lui  :  I.  Le 
Caprice  et  la  ressource ,  prologue 
pour  la  reprise  de  la  Sœur  ridicule , 
comédie  de  Montfleury,  1 782,  in-i  'i, 
II.  Description  de  l'Egypte  ,  conte- 
nant plusieurs  remarques  curieuses 
sur  la  chronologie  ancienne  et  mo- 
derne de  ce  pays ,  composée  sur  les 
Mémoires  de  M.  de  Maillet ,  consul 
de  France  au  Caire,  1785  ,  in-4°. , 
avec  cartes  et  figures  ;  1740  ,  '>-  vol. 
in-i  2.  III.  Idée  du  gouvernement  an- 
cien et  moderne  de  V Egypte  ,  1 74*2, 
in- 1  a.  IV.  Mémoires  historiques  sur 
la  Louisiane  ,  composés  sw\  les 
mémoires  de  M.  Dumojit ,  1703, 
2  vol.  in-12.  V.  Histoire  de  la  der- 
nière révolution  des  Indes  orientales, 
1757  ,  2  vol.  in- 12.  YI.  Michaélis 
Mayeri  cantilenœ,  ou  Chansons  sur 
la  résurrection  du  phénix  ,  tradui- 
tes ,  1758 ,  in-i2.  VIT.  Tableau  des 
maladies  y  traduit  du  latin  de  Lom- 
mius  ,  1760  ,  in- 12  ;  réimprimé  en 
1765.  VIII.  La  traduction  des  deux 
premières  pièces  du  recueil  intitulé  : 
^vis  désintéressé  sur  les  derniers 
écrits  publiés  par  les  cours  de  Vienne 
et  de  3Iadrid ,  au  sujet  de  la  guerre 
présente  ,  1 785  ,  in-4*^.  IX.  La  pré- 
face seulement  de  l'édition  des  Mé- 
moires de  Feuquières,  1 786.  (Voyez 

GiLLET    DE    MOIVRE  ,  t.    XVII  ,     pag, 

881.)  X.  Poésies  diverses ,  latines 
et  françaises.  Lemascrier  a  en  outre 
coopéré  à  la  traduction  de  l'histoire 


LEM 

du  président  dv.  Thou ,  aux  Cêrè- 
Tfiomt's  et  cont urnes  religieuses  (  f. 
lÎAMER ,  t.  in ,  pag.  3 1 4  ),  et  a  donné 
SOS  soins  à  \it  quatrième  édition  de 
Touvrapie de  D.  Ca Imcl  sur  les appari' 
lions.  Il  a  ete  éditeur  des  Béjlexions 
chrétiennes  sur  les  grandes  ventes 
de  In  foi  (par  le  P.  Judde)  ;  de  Vl/is- 
toire  de  Louis  XIF  (  par  Pe'lisson  ) ; 
<les  OEuvres  de  Martial,  Paris,  Bar- 
bon ,  1754  ,^  vol.  in-i3;  de  la  nou- 
velle cdit.  de  TelUamed,  i  ^55  ,  2  v. 
in-ia ,  où  il  ajouta  une  vie  de  l'au- 
teur (  Foyez  Maillet  )  ;  des  Com- 
mentaires de  César  f  traduits  par 
Perrot  d\ïblancourt ,  i  -jS-j  :  il  avait 
revu  et  retouche  le  travail  de  Perrot 
d'A]>lancourt  ;  et ,  depuis ,  Wailly  a 
revu  encore  celui  de  Lemascrier.  Oa 
lui  doit  aussi  la  table  des  matières 
des  Rijîexions  critique  s  sur  l 'origine, 
l'Iiistoîre  et  la  succession  des  an- 
ciens peuples ,  par  Fourmont ,  avec 
la  vie  de  ce  savant.  A.  B-t. 

LEMASSON  (Innocent),  xlix«. 
géne'ral  de  l'ordre  des  Chartreux  , 
ne  le  10  mars  iG'iS  ,  à  Noyon  , 
outra,  à  l'âge  de  dix-neuf  ans,  dans 
il  chartreuse  de  celte  ville.  Il  s'y  dis- 
tingua tellement  par  sa  jnelë  et  par 
5(S  talents,  qu'il  fut  nommé  succès- 
«iveraent  aux  premiers  emplois  de 
cette  maison.  Il  remplissait  les  fonc- 
tions de  visiteur  de  la  province  de 
Picardie,  lorsqu'il  fut  élu  supérieur 
général  de  l'oixlre  ,  le  1 5  octobre 
16-5.  Ce  fut  dans  l'exercice  de  cette 
charge  importante  que  D.  Lemassou 
déploya  toute  l'activité  et  toutes  les 
ressources  de  son  esprit.  Un  incen- 
die ayant  détruit  presqu'cn  totalité 
les  bâtiments  de  la  grande  Char- 
treuse ,  il  les  fit  reconstruire  sur  un 
plan  nouveau.  Les  soins  qu'exigeait 
la  siureillance  des  ouvriers  ,  les  dé- 
tails journaUersdans  lesquels  il  était 
obligé  d'entrer ,  ne  ralentirent  point 


LEM  4« 

son  zèle  pour  la  conduite  de  son  or- 
dre ;  et  il  trouva  encore  du  temps 
pour  l'étude.  Il  fut  l'un  des  adver- 
saires les  plus  ardents  du  jansé- 
nisme; et  peu  de  temps  avant  sa 
mort ,  il  écrivit  au  P.  Letellicr,  con- 
fesseur du  Roi,  pour  le  supplier  de 
lui  procurerlc  pouvoir  de  punir  ceux 
de  son  ordre  qui  seraient  soupçonnés 
d'être  de  ce  parti.  D.  Lemasson  mou- 
rut le  8  mai  1 708 ,  dans  sa  soixante- 
seizième  année.  On  a  de  lui  :  I.  ^n- 
nales  ordinis  Carthusiensis  ,\à  Cor- 
rerie  (à  la  GrandeChartreuse),  1687, 
in  -  fol.  Cet  ouvrage  devait  avoir 
trois  volumes,  mais  il  n'en  a  paru 
que  le  premier;  le  second,  divisé  eu 
deux  parties ,  a  pourtant  été  imprimé, 
mais  on  ne  l'a  pas  rendu  public,  et  ii 
est  tellement  rare  que  le  P.  deTracy 
n'eu  connaissait  qu'un  seul  exem- 
plaire, conservé  à  la  chartreuse  deVal' 
Dieu  (voyez  le  Manuel  du  Libraire, 
par  M.  Brunct,  tome  ii,  page  160  ), 
Cet  ouvrage  a  reparu  sous  ce  litre  : 
Disciplina  seu  statuta  et  constitua 
tiones  ordinis  Carthusiensis ,  Paris  , 
1703,  in-fol.;  mais  ce  n'est  pas  une 
nouvelle  édition ,  comme  l'ont  cru 
quelques  bibliographes  ;  il  n'y  a  eu 
que  le  frontispice  et  les  premiers 
feuillets  de  réimprimes.  D'autres  , 
trompés  par  le  litre  ,  en  ont  fait  un 
ouvrage  difïérent.  II.  Explication  de 
quelque  endroits  des  anciens  sta- 
tuts de  l'ordre  des  Chartreui  ,  ai^ec 
des  échdrcissements  donnés  sur  le 
sujet  d'un  libelle  qui  a  été  composé 
contre  V ordre,  et  qui  s'est  divulgué 
secrètement ,  à  la  Gorrerie,  par  An- 
dré Galle,  in-4^.  de  16G  pages.  Cet 
ouvrage  est  sans  date  ;  mais  il  n'a 
pu  cire  imprimé  qu'en  1689,  puis- 
que D.  Lemassou  y  répond  aux  re- 
proches que  l'alibé  de  Kancé  ,  dans 
sa  Jjettre  à  un  Evcquc  (  datée  du  20 
juillet  1G89)  y  ^y^^  f^^ts  aux  char- 


42  LEM 

treux  d'avoir  miligé  leurs  anciens 
usages.  Il  est  exlrêm'ement  rare  ^  on 
trouve  ordinairement  à  la  suite,  une 
petite  pièce  inlilulée  :  Aux  vénéra- 
bles Pères  de  la  province  de  N.... 
C'est  une  circulaire  adressée  à  tous  les 
visiteurs  de  l'ordrej  III.  ViedeJean 
à'  Aranihon  d'yllex,  évcqued*  Anne- 
cy y  Lyon,  1697, in-8^  ^^ '  Eclair- 
cissements sur  la  vie  de  Jean  d'A- 
ranthon ,  avec  de  nouvelles  preuves 
de  son  zèle  contre  le  jansénisme  et  le 
quie'lisme  ,  Chamhéri,  1699,  "i-B°. 

V.  Introduction  à  la  nne  intérieure 
et  parfaite.  Lyon,  i677,in-8oj  4®. 
édition  ,  Paris,  1701  ,  'i  vol.  in-8". 
C'est  un  recueil  de  pensées  et  de 
maximes  extraites  de  V Imitation  de 
Jésus  -  Christ  et  des  OEuvres  de 
Saint-François  de  Sales.  D.  Lem as- 
son  y  donna, en  1691^, un  Appeiidioey 
qu'il  traduisit  ensuite  en  latin,  et  pa- 
bliasous  le  titre  <ï Enchiridion  salu- 
tis ,   etc.  la  Correrie  ,  1700  ,  in-8^. 

VI.  Une  Traduction  du  Cantique 
des  cantiques  ,  avec  des  noies  très- 
rechercliëes.  VIL  Une  Tkéologienw- 
rald;  le  Nouveau  directoire  pour  les 
novices  des  deux  sexes;  le  7)/7'<?^Aof>^ 
des  mourants  y  latin  et  français;  des 
J^ettres  contrele  système  de  la  grâce, 
par  ISicole,  et  enfin  quelques  ouvrages 
ascétiques  peu  importants.   W-s. 

LEMASSON  (L'aLbë  )  vivait  au 
commencement  du  dix-lniitièmc  siè- 
cle. On  a  de  lui  une  Nouvelle  traduc- 
tion de  S  alluste ,  i7i6,in~8^  La 
seconde  édition,  publiée  la  même 
année  ,  est  augmentée  d'une  préface 
qui  roule  surj  deux  points  :  le  pre- 
mier est  l'apologie  de  la  personne  de 
Sali uste,  qu'il  n'était  pas  aisé  de  jus- 
tifier sur  ses  concussions  en  Numi- 
die  ;  aussi  Leraasson  n'y  parvient-il 
pas  :  le  second  est  l'éloge  des  deux 
îiistoires  qui  nous  restent  de  Sallusîe; 
ce  qui  était  superflu.  Quant  à  la  tra- 


LEM 

duclion,  elle  est  oubliée  depuis  longr 
temps  ,  et  tellement  que  quelquefois 
on  l'a  confondue  avec  la  réimpres- 
sion faite  en  1718,  delà  traduc- 
tion de  Cassagne.  On  a  encore  de 
Lemasson  :  I.  De  la  nature  des 
Dieux  y  traduit  du  latin  de  Cicéron  , 
avec  des  remarques  ;  Paris,  1721  , 
trois  vol.  in  -  8^.  (  Le  texte  est  en 
regard.  )  IL  Lettre  à  M.  de  La- 
motte  sur  sa  tragédie  d'Inès^  1 7^3, 
in- 1  Qt.M.  Barbier ,  dans  son  Diction- 
naire des  anonymes ,  lui  attribue 
une  Lettre  à  M,  Grenan,  régent  de 
seconde  au  collège  d'Harcourt ,  au- 
teur de  V  Oraison  funèbre  (de Louis 
XIV)  prononcée  en  Sorbonne  ^  le  1 1 
déc.  1715,  Paris,  I7i6,in-i2.  {F. 
Grenan,  XVI ,  44^0     ^-  Ï^"T. 

LEMAURE(CATIlERTNE-NlCOLt), 

l'une  des  plus  célèbres  actrices  et 
cantatrices  de  l'Opéra  ,  naquit  a 
Paris  le  3  août  1704.  Reçue  dans  les 
cliœurs  en  1719,  elle  débuta,  en 
179.4,  par  le  rôle  de  Céphise^  dans 
V Europe  galante.  Petite  et  mal  faite, 
sans  esprit,  sans  réflexion,  sans  au- 
cune éducation,  mais  douée  d'un  ins- 
tinct naturel  auquel  elle  joignait  un 
superbe  organe,  les  plus  belles  ca- 
dences et  la  manière  de  chanter  la 
plus  imposante,  elle  avait  une  no- 
lîlesse  incroyable  sur  la  scène,  et  y 
faisait  une  si  complète  illusion  qu'elle 
produisait  les  impressions  les  plus 
vives  ,  et  arrachait  des  larmes  aux 
spectateurs.  Pvetirée  du  théâtre  ,  en 
17 '27  ,  elle  y  rentra  en  1780  ,  et  y 
resta  jusqu'en  1748,  après  l'avoir 
quitté  et  repris  plusieurs  fois.  En 
1745  ,  elle  joua  dans  les  spectacles 
donnés  à  l'occasion  du  mariage  du 
Dauphin,  fils  de  Louis  XV.  Elle 
exigea  qu'un  carosse  du  Roi  vînt 
la  prendre  et  la  conduisît  à  Ver- 
sailles ,  accompagnée  d'iui  gentil- 
homme de  la  chambre.  Mon  dieu. 


$'ecna-t-ellc ,  en  traversant  Paris, 
que  je  voudrais  bien  être  à  une  je- 
tte'ttvpour  me  voir  passer!  CenVlait 
plus  la  mcnip  personne  sur  la  scène. 
Elle  y  remonta  peu  de  temps  après  , 
et  Tabandonna  enfin  tout  à  fait,  en 
i^So.  Les  entrepreneurs  du  Colisc'e 
la  déterminèrent  à  chanter  deux  ou 
trois  fois  en  1 77 1.  Jamais  on  ne  Tit 
pareille  afllucnee;  Mademoiselle  Le- 
maurc  s'y  montra  supérieure  à  ce 
qu'on  avait  lieu  d'attendre  d'une 
femme  de  67  ans.  Quoique  mariée 
en  1762,  on  continua,  jusqu'à  sa 
mort,  arrivée  en  1788,  de  l'appeler 
par  son  ]îremier  nom.       A-t. 

LEMBKE  ( JiiAN-PniLTPPE),  pein- 
tre et  graveur  à  la  pointe  ,  ne'  à 
Nuremberg  ,  en  iG3i  ,  fut  élève  de 
Malli.  Weyer  et  de  George  Strauch. 
Vers  la  fin  de  l'année  i()53 ,  il  fit  un 
voyageen  Italie,  et  séjourna  à  Romeet 
à  Venise.  Porte  par  son  goût  vers  la 
peinture  des  batailles, il  étudia,  pour 
se  rendre  habile  dans  ce  genre  ,  les 
ouvrages  de  Bourguignon  et  de  Pierre 
de  Laar,  dit  Bamboche.  Doue'  d'un 
génie  fécond,  il  ne  prit  de  ces  deux 
artistes  que  ce  qu'ils  avaient  de  bon , 
et  sut  rester  original.  Ses  composi- 
tions sont  belles  et  savantes,  pleines 
de  mouvement  et  de  chaleur.  11  réus- 
sit également  dans  les  chasses  ,  les 
sièges  ,  les  marches  ,  les  escarmou- 
ches et  les  batailles.  Sur  sa  réputa- 
tion, il  fut  appelé  à  la  cour  de  Suède, 
où  il  reçut  de  Charles  XI  le  titre  de 
peintre  du  roi,  et  fit ,  pour  les  deux  ga- 
leries du  château  de  Drottningholm , 
les  grands  tableaux  de  batailles  qui 
attestent  ses  talents.  Cependant,  soit 
mauvaise  conduite ,  soit  mauvaise 
fortune,  Lembkc  mourut  à  Slock- 
holra ,  en  1721  ,  âgé  de  90  ans  , 
dans  la  plus  grande  indigence.  Cet 
artiste  s'est  également  fait  connaître 
par  quelques  estampes  à  Teau-forte  , 


LEM  43 

qu'il  a  gravées  d'une  poinl6  spiri- 
tuelle. P-s. 

LEMENE  (Le  comte  François), 
poète  italien,  né  à  Lodi  en  iG34  , 
fit  d'excellentes  études, et,  à  la  mort 
de  Philippe  IV,  roi  d'Espagne,  fut 
chargé  ac  prononcer  l'oraison  fimè- 
brc  de  ce  prince,  en  latin.  On  l'en- 
vova  quelque  temps  après  ,  comme 
ambassadeur,  auprès  del'impératrice 
Marguerite  d'Autriche;  et  ses  con- 
citoyens le  nommèrent  ensuite  mi- 
nistre résident  de  la  ville  de  Lodi  à 
Milan.  11  avait  étudié  avec  fruit  les 
sciences  et  les  arts  cultivés  de  son 
temps.  Il  avait  composé  un  grand 
nombre  de  vers  latins  pleins  d'élé- 
gance et  de  grâce;  mais  il  n'en  a  pu- 
blié qu'un  petit  nombre.  Son  étude 
favorite  était  la  poésie  itaîienne,à la- 
quelle il  s'était  livré  presqu'au  sor- 
tir de  l'enfance.  Doué  d'un  géni^  vif 
et  fécond ,  d'une  imagination  riche 
et  poétique,  il  travaillait  avec  une 
extrême  facilité.  Dans  sa  première 
jeunesse  il  s'abandonna  parfois  aux 
défauts  brillants  qu'on  admirait  alors 
dans  le  Marino  ;  mais  l'âge  éclaira 
son  goût,  et  son  admiration  pour 
Anacréon  acheva  de  le  corriger. 
Si  l'on  en  croit  Crescimbeni,  Cinelli 
et  Tiraboschi  ,  les  cantates  ,  les 
églogues  et  surtout  les  madrigaux 
qu'il  a  composés  dans  le  goût  du 
chantre  de  Téos  ,  respirent  l'anti- 
quité ;  mais  ce  jugement  paraît  un 
peu  suspect  de  partialité.  Sans  doute, 
si  l'on  compare  les  ouvrages  de  Le- 
mènc  à  ceux  de  la  ])lupart  de  ses 
contemjiorains  ,  notamment  à  ceux 
d'AchilIini,  que  l'on  peut  regarder 
comme  le  Cyrano  de  l'Italie,  il  est 
incontestable  qu'il  leur  est  bien  supé- 
rieur pour  la  pureté  du  goût  ;  mais 
en  le  jugeant  sans  prévention,  on 
doit  convenir  que  ses  idées  sont 
encore  pleines  de  recherche  et  de 


44  LEM 

rapprochements  bizarres  et  force's  : 
ce  sont  des  jeux  de  mots  conti- 
nuels qui  n'ont  rien  d'antique  j  et 
peut  être  pourrait-on  comparer  sans 
injus|ice  les  poésies  de  Leniène  à 
celles  de  notre  P.  Lemoyne  ,  au- 
quel même  ou  serait  force  de  re- 
connaître une  imagination  plus  é- 
tendue,  et  plus  de  profondeur  et  de 
force  dans  les  pensées.  Le  principal 
ouvrage  du  comte  de  Lemène  est  le 
Traité  de  Dieu,  ou  Dio  iino,  tiino^ 
creatore ,  uomo ,  figliiiolo  di  Ma- 
ria, paziente  e  tri  on  fan  te  ;  poème 
dans  lequel  il  a  su  expliquer  les  at- 
tributs les  plus  mystérieux  de  la  di- 
vinité, dans  une  suite  d'hymnes  et 
de  sonnets  qui  servent  d'explication 
aux  discours  en  prose,  dans  lesquels 
il  expose  d'abord  ces  mystères.  A 
cet  ouvrage  succédèrent  une  foule 
à*  Oratorio j  tels  qucceuxde.SV«/?fe- 
Cécile,  de  Jacob  ^  de  Saint- Joseph 
mourant,  àc  V Arion  sacré ^àn  Cœur 
de  Saint  -  Philippe  Néri,  etc.  ;  des 
Cantates,  des  Pastorales,  telles  que 
la  Njmphe  d' Apollon,  Endyinion^ 
représenté  sur  le  théâtre  de  Lodi; 
Narcisse,  qui  fut  joué  à  Vieune  en 
1699,  aux  applaudissements  des 
gens  de  lettres.  C'est, ])0ur  ainsi  dire, 
malgré  lui,  que  ses  ouvrages  ont  vu 
le  jour.  Ce  lut  sur  les  instances  du 
prince  Livio  Odescalchi,  neveu  du 
pape  Innocent  XI ,  qu'il  consentit  à 
^  laisser  paraître  son  Traité  de  Dieu, 
Bientôt  un  imprimeur  réunit  toutes 
les  poésies  de  Lemène  qu'il  put  dé- 
couvrir, et  les  pulilia.  L'auteur  ré- 
clama, et  prit  le  parti  de  donner 
lui-même  une  édition  de  ses  ouvrages, 
dont  le  dernier  et  le  plus  estimé, 
peut-être ,  fut  II  Bosario  di  Maria 
Térgine,  qu'il  dédia  à  la  princesse 
Éléonore  d'Autriche,  reine  de  Po- 
logne et  duchesse  de  Lorraine ,  et  qui 
fut  réimpriméséparémenîàMilan^  en 


LEM 

i736,in-32.LcP.  Ce  va,  jésuite,  dans 
un  éloge  très-estimé ,  qu'il  publia  en 
1706,  sous  Xq  ûir i'.(\.eMemorie  d'aï" 
cunevirtù  delsignorcontc  Francesco 
de  Lemène  ,  con  alcune  riflessioni 
sullesuepoesie,3L])\H'À\e  ce  petit  poème 
une  perle  d'un  prix  inestimable.  On 
ne  peut  disconvenir  que  Lemène  n'y 
ait  déployé  une  imagination  féconde 
et  gracieuse  ;  mais  on  regrette  qu'il 
y  ait  laissé  trop  de  traces  de  ce  iaux 
bel-esprit  que  les  Seicentisli  aLYnient 
mis  en  vogue.  Il  avait  composé  un 
bien  plus  grand  nombre  d'ouvrages: 
vers  la  fin  de  sa  vie  il  eut  quelques 
scrupules  sur  l'esprit  qui  les  avait 
dictés,  et  il  recommanda  à  son  confes- 
seur  de  !es  brûler,*  cette  disposition, 
qui  fut  trop  bien  exécutée,  afait per- 
dre plusieurs  productions  intéressan- 
tes. Ce  poète  mourut  à  Lodi,  le  24 
juillet  1  704.  Voici  les  litres deceqa'il 
a  publié  :  1.  Dio,  sonnettied  inni  cou- 
se f^rati  al  vicedio  Innocenzo  undeci- 
nio,pontifice  otiimomassimo,  i  vol. 
in- 1*2  ,  Milan  et  Parme  ,  1684.  H. 
Bosario  di  Maria  Vereine,  medi- 
tazioni  poeiiche,  presentate  alla 
sacra  maestà  di  Eleonora  d^Aus- 
tria,  etc.  ,  Milan,  1691,  in- 1 6.111. 
La  ninfa  Apollo ,  dramma  perniu- 
sica,  Venise,  1710,  in- 12;  et  avec 
ce  titre  Ij'  Inganno  Felice,  ibid.  in- 
12,  1780,  et  avec  celui  de  Tirsi  , 
ibid.  ,  in- 12,  1734.  IV.  Tous  ces 
ouvrages  se  trouvent  réunis  à  plu- 
sieurs aiitres  de  différents geni'es, que 
rauteurpu])lia  en  1698,  sous  letitrc 
àe  Poésie  diverse  del  signer  Frances- 
co de  Lemène, M'AiiG.  et  Parme,  2  vol. 
in-i2,  dont  le  premier  contient  les 
poésies  profanes,  et  le  second  les 
poésies  sacrées.  Y.  La  Sposa  Fran- 
ce sca,  commedia,  Lodi,  1709  ,  in- 
8".  VI.  Délia  discendenza  e  nobd- 
tà  de  M accaroni  y  poèma  eroico  , 
Milan  ;,  1675^  ia-8*^.j  Florence,  in- 


LEM 

la,  et  MoclJ'ur,  iii-8".  sans  ilalc.  Ce. 
poème, tlonl  ilire\istc(iiielc])rcini<  r 
ihaut,  ne  se  trouve  point  dans  les 
OKuvrcs  de  Leniène,  puhliecs  par 
lui-raème,  non  plus  que  la  comédie 
de  la  Sposa  francssca.  P-s. 

LEMERCIER  (  Jacques  ), arclii- 
tecle ,  naquit  à  Pontoise  ,  sur  la  fin 
du  seizième  siècle.  Un  long  séjour  en 
Italie  le  mit  à  portée  d'y  puiser  le 
goût  de  Pantique.  A  son  retour  en 
rraucc  (  iO>,c)  ),  le  cardinal  de  Ri- 
chelieu lui  conlia  l'exécution  du  col- 
li'\;o  delà  Sor'oonne,  et,six  ansaprès, 
< die  de  l'e^lise  du  mùue  nom.  Ce 
dernier  cdilice  passe  encore  pour 
un  des  plus  beaux  monuments  du 
siècle  où  il  fut  élevé.  Le  portail  de 
Pëglise  ,  du  côté  de  la  cour  ,  rap- 
pelle le  péristyle  du  Panthéon  de 
Rome  :  on  reç;rclte  seulement  que 
Partiste  ait  été  obligé  de  mutiler  l'ar- 
chitrave pour  y  placer  une  inscrip- 
tion qui  eût  été  beaucoup  mieux  dans 
la  fiise.  En  même  temps  qu'il  le  char- 
geait de  la  Sorboune  ,  le  cardinal  de 
Richelieu  lui  faisait  construire  le 
Palais  Cardinal,  (\\\\  prit  le  nom  de 
Palais  Royal,  lorsque  le  caidinal 
en  fit  don  au  Roi.  Il  ne  reste  plus  de 
ce  palais  que  l'aile  intérieure  qui  f.ùt 
face  auThéàtre  français  et  à  la  galerie 
vitrée.  L'architecture  en  est  lourde 
et  mal  proportionnée.  Vers  le  mèuje 
temps ,  Lemercier  acheva  Veglise  de 
l'Oratoire  delà  rue  Saiut-Honoré , 
commencée  sur  les  dessins  de  Met(>- 
zeau;  et  ce  fut  lui ,  qui  ,  pour  corri- 
ger les  défauts  du  plan  primitif,  ima- 
gina la  rotonde  qui  sert  de  chu'ur. 
Le  cardinal  de  Richelieu  lui  fit  oblc- 
ïiir  alors  le  titre  de  premier  archi- 
tecte du  Roi.  C'est  en  cette  qualité 
qu'il  fit  élever  le  corps  de  logis  du 
Vieux-Louvre  ,  qui  était  occu])é  par 
Pacadéraie  française  ,  ainsi  que  le 
grand  pavillou  de  Phorloge.  Les  ca- 


LEM  45 

1  iat  ides  gigantesques,  place'e.s  au  troi- 
sième élage  ,  les  trois  frontons  en- 
clavés les  uns  dans  les  autres,  la 
prodigalité  des  ornemens  ;  le  dôme 
carré,  ({ui  couronne  pesamment  cette 
composition  ,  sont  autant  d'abus  en 
architecture.  C"])endant  il  v  a  beau- 
cou  |)  d'art  dans  la  subdivision  des 
membres  d'architecture  ajoutés  à  cet 
avant-i:orps  j  et  l'ensemble  forme  une 
masse  imposante  et  d'une  vraie  beau- 
lé.  Bientôt  après,  Lemercier  eut  en- 
core à  diriger  la  construction  de  IV- 
gli se  paroissiale  et  du  château  de 
Richelieu,  travaux  dans  lesquels  il 
déploya  tout  son  talent.  Il  éleva  eu 
outre  le  portail  des  églises  de  Ruel 
et  de  Bagnolet  ;  et  on  lui  attribue 
['église  de  V Annonciade ,  à  Tours, 
disposée  en  rotonde,  et  qui  passe 
pour  un  chef-d'œuvre.  Lemercier  , 
en  sa  qualité  de  premier  architecte 
du  Roi,  avait  l'inspection  de  tous 
les  ouvrages  commandés  par  le  mo- 
narque. Il  avait  disposé  les  compar- 
timents de  la  voûte  de  la  grande  ga- 
lerie du  Louvre ,  ])Our  y  placer  des 
tableaux  que  devait  exécuter  le  Pous- 
sin. Cette  distribution  déplut  au 
peintre  ,  qui  fit  recommencer  tout 
l'ouvrage  de  Lemercier.  Ce  dernier 
s'en  plaignit  ;  Vouet  et  Fou([uières  , 
que  blessait  le  mérite  du  Poussin  , 
se  joignirent  à  lui,  et  les  tracasseries 
qu'ils  suscitèrent  à  un  rival  qui  leur 
était  si  supérieur  ,  firent  suspendre 
tous  les  travaux.  (  Voyez  Poussin.  ) 
Le  dernier  ouvrage  de  Lemercier  , 
fut  l'église  de  Saint  -  Rock,  com- 
mencée en  iG53.  Sa  mort,  arrivée 
en  1G60 ,  l'cmpécha  de  terminer  cet 
édifice.  11  n'avait  élevé  que  le  chœur 
et  une  partie  de  la  nef  ;  le  reste  fut 
achevé  sur  ses  plans.  Malgré  les  nom- 
breux travaux  dont  il  avait  été  oliar- 
gé,  Lemercier  mourut  dans  un  état 
voisin  de  la  pauvreté.  P-s. 


46  LEM 

LEMERRE  (  Pierre  ) ,  avocat  du 
cierge  et  au  parlement  de  Paris,  pro- 
fesseur royal  en  droit  canon  au  collè- 
ge de  France,  naquit  à  Cou  lances ,  en 
i644'  Après  avoir  fini  ses  classes,  il  se 
livra  sans  réserve  à  l'étude  des  Pères 
de  l'église ,  de  l'histoire  ecclésiasti- 
que, et  principalement  à  celle  du 
droit  canon.  En  1691  il  fut  nomraé 
professeur  en  cette  partie  ;  et  il  se 
démit  par  la  suite  en  faveur  de 
Pierre  Lemerre,  son  fils,  également 
avocat ,  et  à  qui  l'assemblée  de  i  -^y  1 5 
accorda  une  pension  de  mille  livres, 
comme  adjoint  de  son  père.  Après 
soixante  années  de  travaux ,  celui- 
ci  mourut  à  Paris ,  le  7  octobre 
1728  ,  âgé  de  quatre-vingt-quatre 
ans.  Son  fils  lui  succéda  dans  les 
affaires  du  clergé  en  1 780, et  mourut 
en  1 763.  L'un  et  l'autre  ,  quoique 
Hîstruits,  ne  sont  pas  toujours  exacts 
dans  leurs  décisions,  et  passent  pour 
avoir  été  attachés  au  parti  de  l'appel. 
Nous  avons  du  père  et  du  fils  ,  qui 
ont  presque  toujours  travaillé  ensem- 
ble :  I,  Justification  des  usages  de 
France  sur  les  mariages  des  enj'ans 
dej'amillej'aits  s  ans  le  consentement 
de  leurs  parents  ,Vâi'is ,  1 687 ,  in- 1 2. 
Ce  traité  approfondit  ce  que  peuvent 
les  princes  sur  les  empêchements  du 
mariage.  D'Aguesseau ,  dans  son  3o''. 
plaidoyer ,  en  parlant  de  cet  ouvrage, 
dit ,  «  que  cette  matière  (  des  empê- 
»  chements  du  mariage  )  y  est  trai- 
»  tée  avec  beaucoup  de  solidité  et  de 
»  science.  »  II.  Sommaire  touchant 
la  jurisdiction  pour  l'archevêque  de 
Tours ,  contre  le  chapitre  de  Saint- 
Martin.  Paris,  1709,  in-fol.  IIÏ.  Be- 
cueil  des  actes,  titres  et  mémoires 
concernant  les  affaires  du  Clergé 
de  France ,  augmenté  et  mis  en 
nouvel  ordre,  Paris,  de  1 7 16  à  1 750. 
1 3  vol.  in-fol.  ;  le  douzième  et  le 
treizième  sont  du  fils  seul  j  le  trei- 


LEM 

zième  n'est  point  tome,  quoique  por-» 
tant  le  même  titre  que  les  autres  ,  et 
faisant  partie  de  la  collection.  C'est 
probablement  pour  cela  ,  que  ceux 
qui  en  ont  parlé  ,  n'ont  annoncé  que 
douze  volumes.  On  y  joint  une  table 
(  de  l'abbé  Marc  du  Saulzet  ),  sons 
ce  litre  :  Abrégé  du  Recueil  des 
actes ,  etc.  ou  Table  raisonnée^  en 
forme  de  précis,  des  matières  con- 
tenues dans  ce  Becueil,  Paris  ,1752 
et  1764  ,  in-fol.  La  réimpression  du 
Recueil  de  Lemerre ,  à  Avignon,  1 7  7 1 , 
en  i4  vol.  in-4°. ,  est  regardée  comme 
moins  correcte  quel'éditionde  Paris. 
ÏV.  Mémoire  dans  lequelon  examine 
si  V appel  interjeté  au  futur  Concile 
général  de  la  Constitution  Unigeni- 
tus,  par  quatre  évéquesde  France  , 
auquel  plusieurs  facultés  etun^rarid 
nombre  dechanoines  et  de  curés  ont 
adhéré,  est  légitime  et  canonique , 
et  quels  sont  les  effets  de  cet  appel ^ 
1 7 1 7,in-4°.  L'auteur  y  est  favorable 
à  l'appel ,  et  soutient  que  cet  acte  est 
suspensif  et  a  même  un  effet  rétroac- 
tif.ïlya  uneréfutation  decemémoiie, 
imprimée  à  Bruxelles ,  1 7 18 ,  iii-i 2 , 
qui  a  été  supprimée  par  arrêt  du 
parlement  de  Paris  ,  du  1 4  février 
171g.  V.  Le  premier  des  Mémoires 
composés  par  les  plus  célèbres  juris- 
consultes et  théologiens  de  France , 
sur  la  demande  des  commissaires 
du  conseil  de  Régence ,  touchant 
les  moyens  de  se  pourvoir  contre 
le  refus  injuste  que  faisait  la  Cour 
de  Rome  d'accorder  les  bulles  aux 
évêques  et  abbés ,  nommés  par  la 
Cour  de  France,  Paris,  17 18; 
Utrecht ,  1767  ,  111-4*^.  ;  et  à  Paris  , 
sous  le  titre  à' Avis  aux  princes  ca- 
tholiques,  ou  Mémoires  de  cano- 
nistes  célèbres ,  etc. ,  1768  ,  in- 12. 
YL  Traité  des  dixmes,  Paris ,  1 732, 
'2\o]. in-ïi.Yll. Def Etejidue  de  la 
puissance  ecclésiastique  et  de  la  tem- 


•  oreUc  ,  et  de  leur  a    '  :ion  , 

uiv^antf  ordre  ff  lie  Di-  dans 

le  momie  pour  Id  u^ouvcnu-uicnt  des 
homtties  ,  Paris,  1754,  iu-ia.  VIII. 
OtI  r  ffu'on  doit  garder  dans  Vé- 
tudc  du  droit  canonique  français. 
Ce  petit  traite  se  trouve  à  la  fin  de 
L  Institution  au  droit  ecclésiastif/ua 
vie  l'abbé  Fleury,  Paris,  176^  et 
1  76(),  '1  V.  in- 1.2.  IX.  -^m  des  cen- 
.'urs  nommés  parla  cour  du  parle- 
ment de  Paris  ,  pour  l  examen  de 
la  nouvelle  collection  des  Conciles, 
faite  par  les  soins  du  P.  flardouin, 
avec  les  arrêts  du  parlement  ,  qui 
autonsent  ledit  avis ,  et  Vairét  du 
conseil ,  qui  en  a  empèclié  la  publi- 
cation  ,  Utrecht  ,  1780  ,  in  -  4°- 
Cet  Avis  ,  re'digé  conjointement  avec 
Bertin  ,  l'abbé  Gadry  et  autres  cen- 
seurs ,  sent  uu  peu  l'esprit  de  parti. 
Les  deux  Lemerre  ont  laissé  plu- 
sieurs manuscrits,  dont  une  par- 
ie a  été  insérée  dans  la  Collection 
lies  procès-verbaux  des  assemblées 
générales  du  clergé,  Paris ,  1 767  et 
anuéessuivantes.Les  principaux  sont: 
1°.  Traité  de  la  discipline  de  Vé- 
glise  de  France  et  de  ses  usages  par- 
ticuliers. D'Aguesseau  dans  sa  cin- 
quième instruction ,  en  recommande 
la  lectui-e  à  son  fils.  —  '2°.  Recueil 
d'exemples  sur  la  manière  dont  les 
évéques  de  Frarwe  ont  été  jugés 
sous  les  trois  races  de  nos  rois.  — 
3**.  Notes  sur  le  Concile  de  Trente. 
— 4**'  Remarques  sur  la  pragmatique 
sanction.  —  5^.  Résolutions  de  plu- 
sieurs questions  sur  le  Concordat  , 
avec  des  observations  sur  les  di- 
verses éditions  de  ce  Concordat. 
—  6**.  Réjlexions  sur  le  douzième 
canon  du  second  Concile  de  I^on  , 
qui  regarde  la  Régale.  D-c. 

LÉMERY  (  Nicolas)  médecin  et 
chimiste ,  naquit  à  Rouen ,  le  1 7  nov. 
x64j.  Son  père  tlait  procurear  au 


I.i.M 


47 


parlement  et  professait  la  religion  > 
réformée.  Après  avoir  fait  ses  éludes 
daiis  sa  patrie,  Lémciy  entra  comme 
élève  chez  un  pharmacien;  mais  ne 
trouvant  pas,  dans  son  maître  ,  des 
connaissances  assez  étendues,  il  vint, 
en  iG6(i,  se  mettre  en  pension  chez 
Gla'/er  ,  professeur  de  chimie ,  au 
jardin  du  Roi.  Ce  démonstrateurétait 
j)our  le  temps,  un  homme  fort  ha- 
bile ,  mais  il  croyait  encore  aux  rê- 
veries de  l'alchimie; efLémery,  qu'a- 
nimait un  ardent  amour  pour  la  vé- 
rité ,  le  trouvant  trop  obscur ,  le 
quitta  au  bout  de  deux  mois,  et  se 
mit  à  vovager.  11  séjourna  trois  ans  à 
Montpellier  ,  étudia  la  médecine  , 
l'histoire  naturelle ,  la  pharmacie  ; 
fit  son  tour  de  France ,  et  revint  à 
Paris  en  1672.  A  cette  époque  plu- 
sieurs savants  avaient  formé  des  so- 
ciétés particulières  qui  travaillaient 
aux  progrès  des  connaissances  phy- 
siques. Ils  accueillirent  Lémery,  lui 
prêtèrent  un  laboratoire ,  et  le  pré- 
sentèrent au  grand  Condé ,  qui  lui 
demanda  des  leçons  de  chimie.  Lé- 
mery se  fit  recevoir  apothicaire  ,  et 
ouvrit  un  cours  public  ,  où  se  ren- 
dirent les  hommçs  les  plus  dis- 
tingués dans  les  sciences.  Tourne- 
fort  fut  un  de  ses  élèves  ;  quarante 
Ecossais  vinrent  exprès  à  Paris  pour 
l'entendre,  tant  sa  réputation  fjit  ra- 
pide et  brillante  :  elle  était  méritée, 
car  le  langage  de  la  chimie  était  alors 
inintelligible,  et  il  sut  le  rendre  clair 
et  précis.  Lesexplications  des  phéno- 
mènes étaient  toutes  hypothétiques; 
mais  Lémery  ,  fondant  ses  théories 
sur  l'observation  ,  sembla  créer  un» 
science  nouvelle.  Il  publia  ,  en  1675, 
son  Cours  de  chimie^  qui  eut  la  plus 
grande  vogue,  et  fut  sur-le-champ 
traduit  eu  latin ,  en  allemand,  ^i  an- 
glais et  en  espaj^nol.  Lémery,  au  mi- 
lieu de«  succès  les  plus  llatleurs ,  fut 


48 


LEM 


arrêté  dans  sa  carrière  par  les  trou- 
bles religieux  qui  e'clatèrent  en  1 68 1 . 
Il  était  calviniste ,  et  ne  put  e'chapper 
à  la  persécution.  On  lui  retira  son 
diplôme  de  pharmacien  ;  et  l'élec- 
teur de  Brandebourg  ,  heureux  de 
pouvoir  recueillir  dans  ses  états  un 
savant  aussi  distingue',  lui  fit  propo- 
ser de  venir  occuper  à  Berlin  une 
chaire  de  chimie  crc'ëe  pour  lui. 
Ne  voulant  pas  renoncer  à  sa  patrie, 
Lemery  refusa  cette  offre  généreuse , 
et  crut,  par  ses  travaux  et  sa  gloire, 
obtenir  quelque  tolérance  j  mais  il 
ne  put  conjurer  l'orage  ,  et  il  passa 
en  Angleterre,  en  i685.  Il  présenta 
la  cinquième  édition  de  son  livre  à 
Charles  II ,  qui  le  reçut  avec  la  plus 
grande  distinction  et  lui  témoigna 
une  estime  toute  particulière.  Les 
temps  paraissant  plus  calmes  vers  la 
fin  de  l'année  ,  il  repassa  en  France, 
se  fit  recevoir  docteur  en  médecine 
à  l'université  de  Caen  ,  et  vint  exer- 
cer à  Paris  ;  mais  ,  deux  ans  après, 
la  révocation  de  l'édit  de  Nantes  le 
replongea  dans  de  nouveaux  mal- 
heurs. Privé  de  son  état ,  dépouillé 
de  sa  fortune,  obligé  de  se  cacher, Le- 
mery,  à  la  sollicitation  de  sa  famille, 
de  ses  amis  et  de  ses  nombreux  élèves, 
fit  abjuration  en  1686  et  se  réunit  à 
l'église  catholique.il  reprit  l'exercice 
de  la  médecine ,  le  professorat,  et  vou- 
lut y  joindre  le  commerce  de  la  phar- 
macie. Il  eut  besoin  pour  cela  de  let- 
tres-patentes du  Roi  ,  qu'il  obtint  ; 
mais  la  faculté  de  médecine  et  les 
maîtres  apothicaires  s'opposèrent  à 
leur  enregistrement  au  parlement. 
Ce  procès  pouvait  réduire  Lémery 
à  l'indigence  ;  ses  adversaires  senti- 
rent le  tort  qu'ils  se  feraient  à  eux- 
mêmes  en  affligeant  cet  homme  célè- 
bre, et  ils  se  désistèrent.  L'académie 
des  sciences  le  reçut  membre  asso- 
cié, le  4  février  1699,  et  pensionnaire, 


LEM 

le  28  novembre  de  la  même  année , 
après  la  mort  de  Bourdelin.  Lémery 
eut  deux  fds  ,  qui  devinrent  ses 
collègues  à  l'académie.  11  mourut 
d'une  attaque  d'apoplexie,  le  19  juin 
1715.  Le  travail  fut  la  passion  fa- 
vorite de  ce  savant  infatigable.  Ses 
principaux  ouvrages  sont  :  I.  Un 
Cours  de  chimie,  dont  la  meilleure 
édition  a  été  publiée  par  M.  Baron, 
en  1756,  iu-4".  IL  Pharmacopée 
universelle j  1697,  in-4".IIL  Traité 
universel  des  Drogues  simples,  1697, 
in-4°.  IV.  Traité  de  V Antimoine  y 
1707,  in-8<*.  Les  volumes  de  l'aca- 
démie renferment  plusieurs  mémoi- 
res de  Lémery;  savoir  :  Observation 
sur  une  extinction  de  voix  guérie 
par  des  herbes  vulnéraires,  1700, 
H.  43.  Observation  sur  une  font  aine 
pétrifiante  de  Clermont-en- Auver- 
gne, 1700,  H.  58. Explication  phy- 
sique des  feux  souterrains  y  des  trem- 
blements de  terre,  des  ouragans,  des 
éclairs  et  du  tonnen^e,  1700,1!.  5 1 . 
Examen  des  eaux  dePassj ,  1701 , 
H.  6*2.  Observation  sur  le  camphre, 
1705,  p.  38,  H.  59.  Du  miel  et  de 
son  analyse  chimique,  1706,  p. 
272,  H.  36.  De  l'urine  de  vache , 
de  ses  effets  en  médecine  et  de 
son  analyse  chimique,  1707,  p. 
33. Réflexions  sur  le  sublimé  corro- 
sif, 1 7 09,  p.  4^ ,  H.  34.  C.  G. 
'  LÉMERY  (  Louis  ) ,  fds  du  pré- 
cédent, naquit  à  Paris,  le  2 5  janvier 
1697.  ^^^^^  élève  de  son  père,  il  fit 
de  rapides  progrès  dans  les  sciences 
naturelles  ,  et  fut  reçu  docteur"à  la 
faculté  de  Paris  ,  à  l'âge  de  vingt 
et  un  ans.  Quoiqu'il  n'eût  que  huit 
jours  pour  se  préparer,  il  fît  le  cours 
de  chimie  au  jardin  du  Roi,  en  1708, 
aux  applaudissements  d'un  nom- 
breux auditoire.  Il  fut  nommé  dé- 
monstrateur royal,  en  1731;  fut  ^ 
pendant  33  ans,  médecin  de  l'hotel- 


<1i(Mi,  cl  aclieta  uiie  cîiargcde  mcfdc- 
cin  du  Roi.  Le  grand  exercice  lui  avait 
acquis  un  pronostic  sûr  dans  les  ma- 
ladies les  plus  co«nplJque>s  ,  el  uue 
connaissance  delicalc  du  pouls.  L'a- 
cademie  le  reçut  cKve  chijniste,  en 
'l^oi,  associe  en  1 7 1*2  ,  et  pension' 
'naire  en  i-yiS.  Il  mourut  le  9  juin 
1743.  Ses  ouvrages,  impiiraes  sépa- 
rément sont  :  I.  Un  Traité  des  Ali- 

•  mcntSy  170U,  i7o5,in-i'2.  II.  Trois 
JLettres  contre  le  Traité  de  la  géné- 
ration des  vers  dans  le  corps  de 
l'homme,  qu'Andry  avait  fait  im- 
primer ,  1704,  in- 12.  Ou  trouve, 
dans  les  Mémoires  de  l'académie  des 
sciences,  plusieurs  mémoires  de  lui, 
sur  le  cocnléaria,  le  cresson  aqua- 
tique, le  borax,  la  cire,  la  manne, 
la  laque,  les  cloportes,  le  nitre,  le 
sel  ammoniac,  l'alun,  les  vitriols, 
le  feu  ,  la  lumière ,  etc.  ,  etc.  ;  des 
analyses  d'eaux  minérales,  des  ob- 
servations anatomiqqes,  et  des  des- 
criptions physiologiques  intéressan- 
tes. —  LÉMERY  dit  le  jeune  ,  frère 
du  précédent,  suivit  la  même  car- 
|"ière  ,  fut  nommé  associé  de  l'aca- 
dcmic  des  sciences  en  1 7 1 5 ,  et  mou- 
rut en  l'j'ii.  Dn  a  de  lui  :  I.  Des 
reflexions  sur  un  nouvtau  phosphore, 
et  sur  un  grand  nombre  d'expérien- 
ces qui  ont  été  faites  à  son  occasion, 
Mémoires  de  l'académie  ,1715,  page 
•23,  H.  18.  II.  De  l'action  des  sels 
sur  différentes  matières  inflamma- 
bles ,  1713,  page  97  ,  II.  ni.  Expé- 
riences sur  la  diversité  des  matières 
(fui  sont  propres  à  faire  un  pfro- 
phore  avec  l'alun,  1714,  pag.  ^kO'i. 
C.  G. 
LEMERY  (Louis-RoBERT-JosEPH 
Gornelier),  astronome  ,  né  à  Ver- 
sailles le  5  novembre  1728,  avait 

j  ua   goût  singulier  pour   le   calcul. 

Lali^ijde  V^ayant  connu  dans  le  temp^ 

l'il  était  attaché  au   marquis  d« 

XXIV. 


LEM  49 

Puisieux  ,  le  détermina  k  consacrer 
ses  loiksirs  à  des  calculs  astronomi- 
ques. Il  publia,  daJLS  la  Connaissance 
des  temps  ,  pour  1779,  les  Tables 
de  la  lune  ,  par  Clairaut  ,  com]>a-» 
rées  avec  celles  de  Bradiey  ,  et  en- 
richies d'un  grand  nom])re  d'obse^- 
valions.  Il  a  fait  ,  depuis  1787,  les 
calciilsdela  Connaissance  des  temps, 
presque  en  entier  ,  avec  autant  de 
succès  que  d'assiduité.  (//it.îfk  de  Vas^ 
tronomie  ,  par  Lalande,  pag.  879.  ) 
Enfin  ,  il  a  eu  part  au  tome  vu  des 
Ephémerides  des  mouvements  cé^ 
lestes.  Lémery  est  mort  à  Paris  ,  le 
i^^.  mars  1802.  W-s. 

LEMIERRE  (  Antouve-Martn  )•, 
poète  dramatique ,  né  à  Paris  en 
1733  (i),  était  (ils  d'un  éperonnier, 
qui  s'imposa  des  sacrifices  pour  lui 
donner  une  bonne  éducation.  Ses 
triomphes  dans  les  concours  de  l'u- 
niversité sont  attestés  par  une  com- 
position latine  sur  le  Manchon  à 
ceinture,  insérée  sous  son  nom  dans 
le  recueil  intitulé  :  Musœ  rhetorices, 
2  vol.  in- 12.  Les  qualités  précieuses 
du  jeune  Lemierrecliarmèrent  M.  Du- 
win,  fermier-général,  qui  le  prit  chez 
lui  avec  le  titre  de  secrétaire,  afin 
de  lui  fournir,  sans  blesser  sa  déli- 
catesse ,  les  moyens  de  se  livrer  à  sa 
passion  pour  la  poésie;  il  paraît  qu'il 
conserva  long -temps  cet  emploi,' 
puisque  Rousseau ,  bien  des  années 
après ,  dans  ses  Confessions,  affecta, 
on  ne  sait  pourquoi ,  de  le  désigner' 
comme  un  scribe,  quoique  Lemierrè 
fût  alors  connu  par  des  succès  déplus 
d'un  genre.  L'académie  française, 
en  17.53,  couronuason  poème  sur  la 
Tendresse  de  Louis  XI  f^  pour  sa  fa- 
ix) Lf«  biographes  fout  naîire  Lemierr*  en 
17^3  ;  rëditeur  de  «et  atuvres  choisies,  l«  fiMt 
ji. titre  en  lyai.  Siiirant  l  Age  q'ie  Ini  Jouqo  L«- 
l'.upa,  il  dwvail  itr<-  né  à  la  dernière  époque; 
mai*  cFllo  <i.tl«  o°Mt  psi  coBforuie  a  1  opiui«a. 
i^tmmuue. 


59  LEM 

mille.  Celui  qu'il  fit  sur  V  Empire  de 
In  mode  obtint,  eu  1 754  ,  uu  pareil 
houneur.  A  celte  époque ,  on»  laissa 
le  choix  des  sujets  aux  concurrents  ; 
et  Lemierre  ne  l'ut  pas  inoins  hcu- 

.  reux  dans  son  poème  sur  ie  Com- 
merce ,   où   l'on  trouve  ce  vers  si 

.  connu, qu'il  appelait  le  vers  du  siècle: 

Le  trident  de  Neptune  est  le  gceptre  du  monde. 

Un  quatrième  prix  lui  fut,  en  t  7.57 , 
décerné  pour  un  nouvel  essai  :  Les 
.hommes  unis  par  les  talents.  Deux 
autres  essais  lui  valurent  également 
des  palmes  à  l'académie  de  Pau  :  le 
premier  est  V Elos;e  de  la  sincérité, 
I  754  ;  le  second  a  pour  objet  V  Uti- 
lité des  découvertes  faites  dans  les 
sciences  et  dans  les  arts  ,  sous  le 
résine  de  Louis  Xf^ ^  1756.  Ce  der- 
nier poème  commence  par  ces  vers 
iuçjénieux,  que  le  novateur  Mirabeau 
aimait  à  citer  : 

Croire  tout  découvert  est  «ne  erreur  profotK^fi  ; 
C'est  prendre  l'Iiorizon  pour  les  boiuw»  du  monde. 

^*5"  Si  les  morceaux  dont  nous  venons 
deparlersont  dépourvus  del'élégauce 
«cadémiquo,  du  moins  ils  annoncent 
de  la  vivacité,  de  l'esprit,  de  la 
pensée.  Après  s'être  ainsi  fait  con- 
naître par  six  prix  remjjortés  consé- 
cutivement, Lemierre  vit  jouer,  en 
1 7  58,  avec  un  suc«,ès  marqué,  sa  ira- 
.  ^édie  à'ifypermnestre  ^  sujet  qui  ap- 
partient à  la  mythologie ,  qui  en  a 
les  invraisemblances,  et  qui  fut;au- 
trefois  traité  par  Gombaud  ,  l'abbé 
Abeille  et  Riupéroux.  Lemierre  eut 
soin  de  dérober  aux  regards  un  amas 
d'horreurs  incroyables  ,  et  de  n'of- 
frir au  public  que  les  deux  époux  , 
dont  la  situation  produit  un  grand 
effet  de  terreur.  Sa  pièce  est  claire 
et  simple  ;  elle  captive  l'attention 
jusqu'à  la  fin  ,  et  passe  pour  la  mieux 
conduite  qu'il  ait  faite.  Un  jîlaisant 
néanmoins  en  fît  une  critique  spiri- 
tuelle, ca  s'écriajat  ;  «  C'est  une  tra- 


l 


LEM 

»  gcdie  à  peindre;  »  bon  mot  qui  fut 
appliqué  depuis  à  la  plupart  des  au- 
tres pièces  de  l'auteur.  Fréron  est 
injuste  lorsqu'il  ne  voit  dans  cet  heu- 
reux coup  d'essai  qu'ww  tissu  d'ah- 
surdités  gratuites ,  qu'wzi  tour  de 
gobelets,  qu'un  jeu  de  marionnettes. 
Térée  (  1761  )  ne  put  se  soutenir, 
mal*!jré  le  parti  qvxQ  la  célèbre  Clairoa 
tirait  de  la  tapisserie  sur  laquelle 
Philomcle  a  représenté  les  attentats  , 
dont  elle  est  victime.  Le  poète  repro- 
duisit vainement  ,  en  1787  ,  un  sujet 
aussi  malheureux  ,  après  avoir  eu  la 
précaution  de  diminuer  le  nombre 
clés  atrocités  qu'il  comporte.  Une 
femme  outragée  par  son  beau-frère^ 
qui  lui  coupe  la  langue  pour  s'assu- 
rer de  sonsilence,  est  une  monstruo- 
sité qui  doit  être  bannie  de  la  scène. 
Lemierre  s'abstint,  dans  Idoménée 
(  17(54  ),  de  recourir  aux  moyens 
qu'on  le  blâmait  d'employer  ordi- 
nairement :  il  ne  tomba  point  noi» 
plus  dans  l'erreur  de  Crébillon,  qui 
donne  de  l'amour  à  son  principal 
personnage,  quoique  déjà  vieux  ,  au. 
moment  d'ailleurs  où  cette  passion 
doit  être  étouffée  dans  un  cœur  que 
désespère  un  vœu  parricide.  Le  génie 
seul  aurait  pu  rompre  la  monotonie 
d'une  action  réduite  à  une  telle  sim- 
plicité. Les  trois  premiers  actes  fu- 
rent applaudis;  mais  le  grand-prêtre 
et  la  peste  qui  surviennent  ,  firent 
échouer  les  deux  actes  suivants.  Ar- 
taxerce ,  en  1766  ,  fut  loin  d'éprou- 
ver la  même  chute,  quoique  le  fond  en 
soit  vicieux  :  peut-ou  se  persuader  en 
ciFet  que  l'ambitieux  Artaban  s'aban- 
donne aux  plus  énormes  forfaits  , 
pour  placer  sur  le  trône  un  fils  qui 
repousse  ses  projets  avec  indignation? 
Le  poète  n'a  pu  réussir  à  déguiser 
cette  faute  capitale.  Il  en  commet 
une  seconde  ,  qu'on  bii  reproche  en 
général ,  mais  qui  est  moins   cho- 


LEM 

quAnte  c^ans  ses  autres  tragédies  :  c'est 

3u'il  se  contente,  pour  ainsi  dire, 
'indiquer  les  silualions.    Il   imite 
presque  cnlièreinenl  l'onera  de  Mé- 
tastase :  pour  aiïirmcr  le  contraire, 
il  fallait  qu'il  se  fît  une  étrange  il- 
lusion. Ce  sujet,  traité  plusieurs  fois 
dans  les  deux  siècles  derniers,  par 
des  hommes  à  peine  connus,  se  re- 
trouve dans  le  Stilicon  de  Th.  Cor- 
neille et  dans  le  Xerxès  de  Crébillon. 
(  rojrez  l'art.  Delrieu,  Biogr.  des 
hommes  vivants.)  Guillaume  Tell, 
joué  la  même  année  qu'Artaxerce  , 
ne  fut  pas  aussi  bien  accueilli,  moins 
peut-être  à  cause  de  la  faiblesse  de 
l'intrigue,  qu'à  cause  de  la  nouveauté 
du  spectacle.   D'agrestes    habitants 
de  la  Suisse ,  mis  pour  la  première 
fois  sur  la  scène  tragique,  et  raison- 
nant avec  une  indépendance  répu- 
blicaine ,  parurent  être  une  innova- 
tion dans  laquelle  il  entrait  plus  de 
hardiesse  que  de  bonheur.  Voltaire, 
qui  souvent  n'aime  à  saisir  que  le  côté 
ridicule  des  choses  ,  interrogé  sur  le 
mérite  de  l'ouvrage ,  répondit  :  «  11 
V  n'y  a  rien  à  dire;  il  est  écrit  en  lan- 
»  gue  du  pavs.  »  L'auteur  néanmoins 
le  fit  revivre  vingt  ans  après  avec  un 
succès  prodigieux ,  auquel  à  la  vérité 
contribuèrent  beaucoup  les  événe- 
ments, tristes  avant-coureurs  de  la  ré- 
volution. Il  necraignit  pas  de  mettre 
sous  les  yeux  le  tableau  déchirant 
qui  n'était  d'abord  qu'en  récit  :  il 
montra  un  père  réduit  à  l'allernative 
de  voir  immoler  son  (ils ,  ou  d'abat- 
tre, d'un  coup  de  flèche,  une  pomme 
placée  sur  sa  tête.  C'est  une  espèce  de 
pantomime;  mais  elle  tient  naturel- 


leraentau sujet;  elle  est  d'ailleurs  jus 
lifiée,  puisque  le  pathétique  s'y  réu- 
init  à  l  elFroi.  Malgré  la  rudesse  des 
noms  helvétiques  ,  jointe  à  la  dureté 
[trop  familière  au  poète,  la  versili- 
vA'êHion  de  Guillaume  Te// paraît  plus 


LEM  5i 

soutenue  que  celle  de  ses  autres  pièces. 
La  couleur  locale  est  observée,  et  1« 
dialogue  a  de  la  vigueur  et  de  la  pré- 
cision. La  Feuve  du  Malabar ^  écou- 
tée froidement  en  1 770  ,  fut  dix  ann 
après  reçue  avec  enthousiasme.  La- 
harpe  ,  dims  son  Cours  de  littéra- 
ture ,  la  icgarde  comme  a  une  très- 
)>  mauvaise  pièce  de  tout  point  ;  » 
il  attribue  les  trente  représentations 
qu'elle  eut  à  la  pompe  du  dénoue- 
ment qui  avait  été  changé.  Il  l'avait 
jugée  moins  sévèrement  dans  sa  Cor- 
respondance littéraire ,  et  dans   un 
numéro  du  3f(?rcMre(  1 5  juillet  1780}. 
Sans  doute  elle  donne  beaucoup  de 
prise  à  la  critique  :   on  s'étonne  que 
la  côte  du  Malabar  ait  été  choisie 
pour  le  lieu  de  la  scène  ,  quand  oa 
sait  que  l'usage  qui  condamne   les 
veuves  à  se  brûler  sur  le  bûcher  de 
leur  époux,  n'y  a  point  force  de  loi, 
comme  dans  certaines  parlies.de  l'In- 
dostan.  On  n'est  pas  moins  surpris 
d'entendre  parler  en  prêtres  sangui- 
naires les  braniincs,  qui  ne  répan- 
dent même  pas  le  sang  des  animaux: 
la  reconnaissance  de  Lanassa  et  du 
jeune  bramine  ,  son  frère,  est  roma- 
nesque. Il  fallait  imaginer  un  ressort 
qui  contraignît  la  première  à   voir 
Montalban  ,  dont  elle  ignore  la  des- 
tinée, et  qui ,  la  livrant  aux  combat» 
de  l'amouretdudevoir,  eûtexcitéune 
pitié  plus  vive  en  sa  faveur,  et  rempli 
le  but  que  se  propose  la  tragédie. 
Malgré  ces  fautes  et  plusieurs  autres, 
enfin  malgré  des  déclamations  assez 
nombreuses,  la  Feuve  du  Malabar 
qui  est  toute  d'invention ,  se  main- 
tient au   répertoire  ,  avec   Hjper- 
mnestre  et  Guillaume  Tell.  La  gé- 
néreuse indignation  de  Montalban  , 
la  sensibilité  du  jeune  bramine  inté- 
ressent :  ([uoique  le  rôle  de  Lanassa 
soit  indécis,  on   s'attendrit  sur   le 
sort  d'une  femme  belle  et  -vertueuse, 


5îi  LEM 

qui,  soiimiseà la  tyraniîie d'une  cou- 
tume si  contraire  à  nos  mœurs,  va  se 
jeter  dans  les  flammes  ,  pour  ne  pas 
survivre  à  un  mari  qu'elle  n'a  ja- 
mais aimé.  Cëramis,  tombe  en  1 780, 
n'est  pas  imprimé;  c'est  un  sujet  d'in- 
vention qui  a  du  rapport  avec  Héra- 
clius.  Nous  le  connaissons  par  le 
compte  que  Laliarpe  en  a  rendu  dans 
le  Mercure  de  janvier  ï'jSô.Barne- 
velt,  représenté  en  1 790 ,  n'avait  ja- 
mais pu  l'être  depuis  vingt-cinq  ans, 
suivant  toute  apparence, par  ménage- 
ment pour  la  maison  d'Orange.  Il  est 
rempli  de  discussions  politiques  et 
religieuses.  Laliarpe  prétend  (  Cor- 
resp.  litt.  )  que  le  poète  affaiblit  son 
action  en  s' écartant  de  l'iiistoire  , 
parce  qu'au  lieu  de  rendre  son  héros 
•victime  du  fanatisme  de  la  secte  des 
GomaristeSyàéNonéc:  à  l'ambition  du 
statliouder,  Maurice  de  Nassau,  il 
le  fait  succomber  sous  le  poids  d'une 
accusation  dont  son  patriotisme  dé- 
montrait l'absurdité.  11  paraît  avéré 
néanmoins  que  Barnevelt  fut  con- 
damné non-seulement  comme  enne- 
mi de  la  religion,  mais  comme  ayant 
trahi  sa  patrie  par  des  intelligences 
avec  le  roi  d'Espagne.  On  a  retenu 
nn  vers  admirable  de  cette  pièce  :  le 
fils  de  Barnevelt  lui  conseille  de  se 
soustraire  à  l'ignominie  du  supplice 
par  la  mort  j  il  lui  dit  ; 

*  ,^  Caton  se  ,1a  donna. 

Son  père  lui  répond  ; 

Socrate  l'attentlit. 

Virginie  devait  suivre  Barnevelt  ; 
elle  n'a  été  ni  jouée  ,  ni  imprimée  • 
l'auteur  la  retira  probablement  pour 
ne  pas  fournir  un  nouvel  aliment  à 
des  passions  déjà  trop  enflammées. 
Il  répondait  à  ceux  qui  se  plaignaient 
de  son  silence  :  «  La  tragédie  court 
«  les  rues.  »  Il  ne  se  consolait  pas 
d'avoir  comj)osé  Guillaume  r^Z/qui 


LEIVI 

avait  donné  lieu  a  de  fausses  applica- 
tions. Les  pièces  deLemierre  ont  de  la 
chaleur  et  de  la  rapidité;  elles  atta- 
chent le  spectateur  parla  magie  des 
coups  de  théâtre,ressource  dont  l'abus 
annonce  la  décadence  de  l'art.  Le  lec- 
teur instruit  est  plus  difficile  ;  il  ne 
jouit  guère  des  effets  ,  sans  analyser 
les  causes  :  un  intérêt  de  curiosité  ne 
lui  suffit  pas  ;  il  veut  un  plan  profon- 
dément conçu ,  des  situations  déve- 
loppées ,  une  diction  pure.  Quoique 
cette  dernière  partie  soit  la  plus  faible 
de  l'auteur ,  il  n'est  pas  une  de  ses 
tragédies  où  l'on  ne  rencontredcs  vers 
remarquables ,  soit  par  la  force  des 
pensées, soit  par  l'éloquence  del'ame; 
où,  parmi  des  négligences  impardon- 
nables ,  il  n'y  ait  des  tirades  d'une 
expression  noble,   harmonieuse  et 
touchante.   Lemierre ,    dégoûté   du 
théâtre ,  s'était  proposé  d'abord  de 
traduire   le   .petit    poème   latin   de 
l'abbé  de  Marsy  ,  sur  la  Peinture, 
Le  trouvant  trop  resserré  pour  la 
matière ,  il  en  fit  un  ouvrage  à  peu 
près  de  sa  composition ,  qu'il  accom- 
pagna de  notes;  un  vol.  in-12 ,  in-8^.. 
in-4". ,  avec  fig.  1 769.  En  dévelop- 
pant les  préceptes  et  les  images  de 
son  modèle  ,  il  forma  trois  chants  , 
dans  lesquels  il  traite  du  dessin  ,  du 
coloris  et  àeV invention.Son  but  n'est 
pas  d'instruire  les  peintres:  à  l'exem- 
ple des  vrais  poètes  didactiques,  il 
se  borne  à  faire  aimer  ce  qu'il  chante. 
Ses  idées  ne  sont  pas  toutes   égale- 
ment justes  ;  en  voici  la  preuve  :  il 
voudrait  effacer  dans  les  églises  les 
tableaux  des  martyrs ,  parce  qu'ils 
représentent  l'humanité  souffrante  ; 
comme  s'il  n'était  pas  utile  de  fami- 
liariser l'homme  avec  le  malheur  et 
la  persécution  I  Ses  transitions  sont 
brusques  ;  il  a  plus  de  verve  que  de 
grâce.  La  fréquence  des  apostrophes 
rend  sa  diction  heurtée  et  monotone  ; 


LEM 

tfialsaii  milieu  de  phrases scclies,  obs- 
cures, recherchées,  trivinles,  brillent 
presque  toujours  deséclairs  détalent. 
Plusieurs  morceaux,  pour  être  par- 
faits ,  n'auraient  besoin  que  d'clrc 
polis  parle  goût.  Quelques-uns  même 
ne  seraient  pas  désavoués  par  les  maî- 
tres de  l'art  :  pour  la  gloire  de  l'imi- 
t.iieur  ,  ce  sont  ceux  qu'il  doit  à  lui- 
mème,tels  que  V  Im'ocation  an  Soleily 
V  Origine  de  la  Chimie  ,  la  Fiction 

allégorique  de  V I^orance  ,  etc 

lies  Faites  ou  les  Usages  de  V  année , 
poème  en  16  chants,  i  vol.  in-8«., 
1779,  devaient  offrir  d'une  manière 
pbis  sensible  encore  les  mêmes  fautes 
que  le  poème  de  la  Pointure.  Ovide 
s'était  exercé  sur  un  fond  plus  favo- 
rable aux  riants  mensonges  de  la 
poésie.  Lemierre  ne  rencontrait  pas 
les  mêmes  avantages  dans  nos  anti- 
quités nationales  ;  d'ailleurs  ,  la  tour- 
nure vive  et  sautillante  de  son  esprit 
ne  lui  permettait  guère  de  joindre  , 
par  des  liaisons  imperceptibles  , 
tant  d'objets  opposés.  Le  talent  de 
les  choisir  et  de  les  encadrer  est  pré- 
cisément ce  qui  lui  manque.  Il  pro- 
cède trop  au  hasard  ;  il  ne  rejette 
presque  rien  de  ce  qui  plaît  à  son  ima- 
gination :  aussi  ,  le  fii  par  lequel  il 
attache  les  diverses  parties  du  poème 
est-il  souvent  rompu.  Nous  croyons , 
contre  l'opinion  de  l'auteur ,  que 
son  sujet  aurait  gagné  sous  le  rapport 
de  la  méthode  ,  si ,  comme  Ovide,  il 
l'eût  restreint  a  douze  chants,  d'après 
Tordre  des  mois.  Dans  cette  pro- 
duction ,  qui  pouvait  devenir  pour 
les  Français  d'un  intérêt  général ,  les 
fêtes  solennelles  n'occupent  pas  assez 
de  place ,  et  beaucoup  de  tableaux 
sont  de  véritables  grotesques.  Il  s'en 
faut  bien  cependant  qu'elle  mérite  le 
dédain  avec  lequel  Laharpe  la  juge. 
Il  en  cite  uniquement  les  deux  vers 
les  plus  baibares  :  il  n'excepte  d'une 


i:km  53 

entière  proscription  que  les  vers  sur 
un  Clairdelane.  Les  vœux  d'uneame 
homiête  se  manifestent  dans  le  cours 
de  ce  long  ouvrage  ;  on  y  lit  non-seu- 
lement des  vers  remarquables  dans 
tous  les  genres;  mais  on  y  trouve  des 
morceaux  étendus,  où  régnent  l'ins- 

f)i ration  la  plus  heureuse  et  l'origina- 
ité  la  plus  piquante.  Nous  indique- 
rons les  moi'ccaux  sur  St.-Antoine  , 
patron  de  Tau  leur,  sur  le  printemps, 
sur  les  jardins  anglais  ^surV  origine 
de  lajlùte,  etc..  A  ses  Poèmes  cou- 
ronnés, Lemierre  a  réuni  ses  Pièces 
fugitives,  I  vol.  in-8^. ,  1789..  Des 
choses  charmantes  y  sont  mêlées  aux 
choses  les  plus  bizarres.  On  a  peine 
à  concevoir  que  le  même  homme  ait 
pu  flatter  quelquefois  l'oreille  par  les 
accords  les  plus  doux ,  et  la  déchirer 
bien  plus  souvent  encore  par  les  sons 
les  plus  discordants.  Ne  doit-on  pas 
en  conclure  qu'à  ses  yeux  la  verve 
était  tout ,  et  que  la  correction,  fruit 
de  la  patience  et  du  goût ,  n'était  rien? 
Etranger  aux  manèges  de  l'intrigue, 
son  unique  ressource,  pour  la  décon- 
certer, était  de  donner  à  son  amour- 
propre  un  essor  plus  comique  qu'of- 
fensant, et  qui  en  faisait  un  homme 
à  part.  Voulant  justifier  la  liberté' 
qu'il  prenait  de  manifester  la  bonne 
opinion  qu'il  avait  de  lui-même  ,  il 
faisait  naïvement  ee  singulier  aveu  : 
«  Je  n'ai  point  de  proneurs  ;  il  faut 
»  bien  que  je  fasse  mes  affaires  tout 
»  seul.»  A  la  mort  de  Voltaire,  dési- 
rant le  remplacer  à  l'académie  fran- 
çaise ,  il  ne  cachait  point  ses  préten- 
tions.«  N'est-ce  pas  Ajax,  disait-il,  qui 
î)  doit  hériter  des  armes  d'Achille?  » 
Ducis  lui  fut  préféré;  et  deux  ans 
après,  Ghabanon  remporta  le  même 
avantage.  Blessé  de  ce  second  échec, 
il  s'en  vengeait  par  cette  ironie  :  «  Il 
»  n'est  pas  étonnant  qu'il  l'emporte  ; 
»  iljouc  du  violon,  et  jene  joue  quede 


54 


LEM 


»  la  lyre.  »  On  rapporte  de  lui  beau- 
coup de  mots  où  se  peint  la  vanité' 
la  plus  ingénue.  A  la  première  re- 
présentation de  Céramis ,  les  mur- 
mures du  public  ,  lui  donnant  de 
l'humeur  ,  il  répétait  :  «  Parbleu,  ne 
))  s'imaginent-ils  pas  qu'on  leur  don- 
»  nera  toujours  une  Feuue  du  Mala- 
»  bar?  »  Un  jour  que  cette  dernière 
pièce  était  représentée  devant  un  petit 
nombre  de  spectateurs,  on  lui  fit  re- 
marquer malignement  la  solitude  du 
parterre  et  des  loges  :  «  11  ne  manque 
î>  pas  de  monde  ,  répondit-il  ^  mais 
t)  la  salle  est  tellement  construite  , 
»  qu'elle  paraît  toujours  vide.  «Enfin, 
la  voix  publique  l'appelait  à  l'aca- 
démie; il  y  fut ,  en  1781  ,  nommé 
successenr  de  l'abbé  Batteux.  Voici 
comment  il  remercia  ses  nouveaux 
confrères:  «  Je  n'avais  guère  de  liai- 
»  sons  avec  vous  que  par  vos  ouvra- 
»  ges....  La  place  que  vous  m'accor- 
y>  dez  est  d'aulant  plus  flatteuse  pour 
«  moi ,  que  ne  l'ayant  sollicitée  que 
y)  par  mes  écrits ,  je  serais  presque 
î>  tenté  de  croire  que  je  n'ai  eu  affaire 
y>  qu'à  desjuges.  »  Il  avait  toutes  les 
vertus  domestiques  ;  sa  piété  filiale 
était  reconnue  ,  et  l'on  n'a  .jamais 
mis  en  doute  sa  candeur  ni  sa  bonté. 
Quoiqu'il  fût  petit  et  laid  ,  qu'il  eût 
les  travers  et  l'extérieur  d'un  métro- 
manc,  il  sut  captiver  une  épouse  ai- 
mable et  jeune  qui  le  rendit  heureux. 
Les  excès  de  la  révolution  le  jetè- 
rent dans  un  état  de  stupeur ,  qui  le 
conduisit  au  tombeau  ,  le  4  jniUet 
1793.  Ilmourutà  Saint-Gcrmain-en- 
Laye,  après  avoir  perdu  presque  tous 
ses  moyens  d'existence.  Ses  œuvres 
ont  été  recueillies  par  M.  René  Périn, 
3  vol.  in-8<*.,  181 G  j  elles  sont  pré- 
cédées d'une  notice  de  i5o  pages, 
dans  laquelle  on  apprend  fort  peu 
de  chose  siu'  l'auteur ,  mais  où  se 
k'ouve  un  long  plaidoyer  en  faveur 


LEM 

de  la  philosophie  moderne.  J)mx 
volumes  à' OEuvres  choisies  font 
paj'tie  de  la  collection  des  stéréoty- 
pes de  Didot.  St.  S-n. 

LEMIERRE  -  D'ARGY  (  A.-J.  ) , 
neveu  du  précédent,  né  vers  1760  , 
et  mort  à  Paris  le  12  novembre 
i8i5,  possédait  plusieurs  langues  , 
et  avait  été  interprète  près  de  diffé- 
rents ministères  et  tribunaux.  Mal- 
gré ses  talents  ,  son  peu  de  conduite 
le  réduisit  à  un  état  déplorable  ;  et 
ce  fut  dans  un  hôpital ,  où  il  s'était 
fait  inscrire  sous  un  antre  nom  que 
le  sien ,  qu'il  alla  mourir  d'une  ma- 
ladie honteuse.  On  a  de  lui  :  L  Oli- 
wa  ,  roman  traduit  de  l'anglais  , 
1  vol.  in-i'2.  IL  L'Élève  du  plaisir, 
traduit  de  l'anglais  ,  1787  ,  2  vol. 
in- 12.  III.  Nouveau  Code  criminel 
de  V empereur  ^  traduit  de  l'alle- 
mand ,  1788  ,  in-8°.  IV.  Calas  ou 
le  Fanatisme^  drame  en  quatre  actes 
et  en  prose  ;,  1791  ,  in-S*^.  ;  cette 
pièce  fut  représentée  pour  la  pre- 
mière fois  sur  le  théâtre  du  Palais- 
Royal(aujourd'huiTheatre  Français) 
le  17  décembre  1790.  Sept  mois 
après  (le  7  juillet  1  791  ),Chénicr  don- 
na sa  pièce  sur  le  même  sujet.  (  Foy. 
CnÉNiER,  t.  VIII,  p.  3'28. )  Mais  dès 
le  18  décembre  1790,  M.  Laya 
avait  fait  jouer  sur  un  autre  théâtre 
son  Jean  Calas.  V.  Les  cent  Pen- 
sées d'une  jeune  anglaise ,  publiées 
en  anglais  et  en  français  :  on  y 
a  joint  des  mélanges ,  des  apo- 
logues moraux  ,  et  une  descrip- 
tion allégorique  du  voyage  d'un 
jeune  homme  an  pays  du  bonheur  , 
1798,  in- 12.  VI.  Poésies  de  Gray. 
(  Voyez  Gray  ,  t.  xviii ,  p.  364-  ) 
VII.  Joscelina  ,  par  Isab.  Kelly  , 
traduit  de  l'anglais  sur  la  troisième 
édition  ,  1799,  2  voL  in-12.  VIIT. 
(  Avec  Brosselard  et  Wciss  )  Code 
général  pour  les  états  Prussiens  ^ 


LEM 

%r  Allait  en  français  ,  1801  ,  ti  toin. 
en  5  vol.  ïh-H".  I\.  Le  Château  de 
tituloUnce,  poème  en  deux  c/uiiits, 
far  Thomson,  siù\>i  de  deux  autres 
poèmes f  traduit  de  V anglais ^  1814, 
vi-iji.   X.   Mémoires  de  la   reine 

FAntrie ,  écrits  par  elle-même  , 
induits  de  V italien,  181 4  ,  iii-80. 
W.  ReLuion  autJientique  de  Vas- 
saut  donné  le  (i  juillet  i8of),  au 
palais  Quirinal,  et  de  Venlèvenient 
du  souverain  pontife  ,  traduite  de 
l'italien  ,  181 4,  iii-8«.  XII.  (Avec 
M.  lîreton  )  la  Femme  errante , 
par  miss  Burney  ,  traduit  de  l* an- 
glais ,  1814  ,  5  vol.  in- 12.  Il  avait 
projeté  une  traduction  de  Martial  ; 
il  a  laissé  en  manuscrit  une  tragédie 
îiitilulcc  Mazaniel.  A.  B-t. 

LEMIRE  (  AuBERT  ) ,  en  latin 
Mirceus,  historien,  ou  plutôt  com- 
pilateur laborieux  ,  naquit  le  3o  no- 
vembre 1573,  à  Bruxelles,  d'ime 
famille  originaire  de  Cambrai ,  qui 
a  produit  plusieurs  hommes  de  mé- 
rite. Il  commença  ses  e'tudes  à  Douai, 
et  les  termina  à  Louvain ,  où  il  en- 
seigna ensuite  les  belles-lettres  avec 
quelque  succès.  Il  rendait  de  fre'- 
quenlcs  visites  au  fameux  Juste 
Lipse ,  et  chercha  à  mettre  à  profit 
les  conseils  qu'il  en  reçut.  Son  oncle, 
evêque  d'Anvers,  l'ayant  détermine 
à  embrasser  l'état  eccle'siasticpîc ,  le 
Bomma,  en  i5()8,  à  l'un  des  cano- 
uicats  de  sa  cathédrale  ;  il  le  char- 
gea ensuite  de  diirércntes  fonctions 
qui  auraient  seules  rempli  tous 
tes  instants  d'un  homme  doué 
d'une  activité  moins  }];rande:  mais 
rien  n'était  capable  3e  diminuer  l'ar- 
deur de  Lerairc  pour  l'élude,  et  il 
prenait  sur  les  heures  de  son  som- 
meil pour  faire  des  extraits  de  ses 
lectures.  Eu  1620,  il  fut  envoyé  en 
France, afin  d'y  concerter  les  moyens 
de  s'opposer  aux  progrès  de  VÏnkt- 


LEM 


5^ 


s>e  qui  rommcn^ait  à  s'inlrnduirc- 
dans  le  diorè.se  d'Anvrr:^.  Son  oucle- 
mourut  r.Mmcfî  suivante  ;  et  il  s* 
rendit  à  Douai ,  pour  l'exécution 
du  teslamnit  de  ce  prélat  ,  qui 
avait  fondé  six  bourses  à  l'uni- 
versité de  celle  ville.  L'archidue 
Albert  d'Autriche,  gouverneur  des- 
Pays  -  Bas  ,  le  nomma  son  pre- 
mier aumônier;  et  il  succéda,  eu 
i624,à  JcanDclriOjdaus  la  place  de 
doyen  du  chapitre,  et  de  vicaire-gé- 
néral du  diocèse  d'Anvers.  Il  parta- 
gea le  reste  de  sa  vie  entre  ses  de- 
voirs et  les  recherches  histori([ues  , 
et  mourut  dans  la  même  ville ,  le 
19  octobre  iG4o.  Baillet  dit  que 
Lemire  dut  sa  réputation  plutôt  aux 
matières  qu'il  a  traitées  qu'à  la  for- 
me qu'il  leur  donna.  On  a  de  lui  un 
grand  nombre  d'ouvrages  relatifs  à 
l'histoire  politique  et  littéraire  des 
Pays-Bas.  Nous  nous  bornerons  à 
citer  ceux  qui  olfrent  encore  quelque 
intérêt  :  I.  Elogia  iïlustrium  Belgii 
scriptoruni,  Anvers,  1602  ,  in-8<*.; 
ibid.  1 6op ,  in-4''.  C'est  un  recueil  ex- 
cellent ,  dit  Prosper  Marchand  ;  et  il 
est  bon  d'avertir  que  n'ayant  été  in- 
séré que  par  extraits  dans  la  Biblio- 
thcca  Belfrica  (  F.  Foppens  ,  lom. 
XV ,  p.  233) ,  les  éditions  qu'on  vient 
de  citer  n'ont  rien  perdu  de  leur 
prix.  II.  Origines  equeslrium  sait 
miUtarium  ordinum  ,  Ubri  dan , 
Anvers,  i()o<),  in-8".  ,  traduit  en 
français  ,  la  même  année.  III. 
Originuin  monasticarum  lihri  iv, 
in  fjuibus  ordinum  omnium  reli- 
giosoruni  initia  et  progressas  hre- 
vitcr d^scribunUir  ,  Cologne,  1620 , 
iu-8'\  Il  avait  déjà  publié,  séparé- 
ment ,  les  Origines  de  l'ordre  de 
Saint-Benoit,  de  (ateaux ,  des  Car- 
mes ,  des  Chartreux ,  des  chanoine» 
de  Saint-Augustin,  etc.;  mais  tous 
ces  ouvrag'is  suut  supcriiti«ls  cl  pm 


56 


LEM 


exacts.  IV.  F  asti  Belgici  et  Bur- 
gujidici,  seu  Historia  rerum  Belgi- 
carum  juxta  dies  in  quihus  evene- 
runt ,  Bruxelles,  1622,  in-8°.  Ce 
sont  des  ëphéme'vides ,  et  elles  pré- 
sentent quelques  rapprochements  cu- 
rieux. V.  Annales  renim  Belgica- 
rum  ,  chronicon  à  Jul.  Cœsaris  in 
Galliam  adventu,'ih\à.  i624,in-8°,; 
avec  de  nombreuses  additions,  An- 
vers, i636,  in-folio.  VI.  Bihliotheca 
ecclesiastica  ,  Anvers  ,  i63c)-49  , 
deux  parties  in-folio.  C'est  le  recueil 
des  Vies  (ou  plutôt  de  courtes  noti- 
ces) des  écrivains  ecclésiastiques  par 
Saint  Jérôme  ,  Gennade  ,  Saint  Isi- 
dore de  Sëville  ,  Saint  Ildefonse , 
Honorius ,  Sigebert ,  Henri-de-Gand 
et  Tritheme.  Lemire  y  a  ajoute'  des 
notes  et  une  continuation  depuis  la 
fin  du  quinzième  jusqu'au  milieu  du 
dix-septième  siècle.3.  Al  b.Fabricius  a 
publie  une  édition  de  cet  utile  recueil 
avec  de  nouvelles  additions ,  Ham- 
bourg, 17 18,  in-folio.  {Voyez  Fa- 
BRICIUS  ,  t.  XIV  ,  p.  60.  )  VII.  Au- 
herti  Mirœi  opéra  diptomatica  et 
historica  ,  Bruxelles,  17*23-34-48, 
4  vol.  in-folio.  J.  F.  Foppens  a  réuni 
sous  ce  titre  tous  les  ouvrages  de  Le- 
mire relatifs  à  l'histoire  des  Pays- 
Bas.  Les  deux  premiers  volumes 
renferment  toutes  les  chartes  des 
fondations  jùeuses  faites  en  Belgique , 
avec  des  notes  géographiques  et  his- 
toriques ,  et  la  notice  des  églises 
belges  ;  les  deux  derniers  contiennent 
les  pièces  et  notes  qui  concernent 
l'histoire  civiledes  mêmes  provinces. 
Cette  collection  est  fort  estimée;  et 
l'éditeur  mérite  une  part  des  éloges, 
pour  l'ordre  qu'il  a  mis  dans  la  dis- 
tribution des  pièces  rassemblées  par- 
Lemire,  et  pour  ses  nombreuses  ad- 
ditions. On  renvoie,  pour  laliste  des 
autres  ouvrages  de  Lemire  ,  à  la  Bi- 
biioth.  Belgica  de  Foppçjis^  oji  peut 


LEM 

consulter  aussi  sur  cet  écrivain  les 
Mémoires  de  Niceron ,  tom.  vu ,  et 
le  Catalogue  des  historiens  pAY  Len- 
glet-Dufresnoy.  W-s. 

LEMIRE  (  Noël  ),  graveur  au 
burin,  naquit  à  Rouen,  en  179.4: 
élève  de  Lebas,  il  a  gravé  dans  dif- 
férents genres;  ses  paysages  et  ses 
marines  sont  estimés.  Sa  pointe  spi- 
rituelle a  su  parfaitement  rendre  les 
tableaux  de  Teniers,  d'après  lesquels, 
à  l'exemple  de  son  maître,  il  aimait 
à  s'exercer;  mais  il  a  surtout  réussi 
dans  les  vignettes,  particulièrement 
dans  celles  qu'il  a  gravées  pour  les 
Contes  de  La  font  aine  ,  les  Méta- 
morphoses d' Ovide  et  le  Temple  de 
Guide.  Il  serait  difficile  de  graver 
de  petits  sujets  avec  plus  d'esprit.Les 
portraits  dans  le  genre  de  vignett» 
que  l'on  doit  à  son  iDurin ,  et  parmi 
lesquels  on  estime  ceux  du  Grand- 
Frédéric  y  de  Henri  IF ,  de  Louis 
XV ,  et  de  Joseph  II,  sont  remar- 
quables par  un  fini  précieux;  le  der- 
nier fut  dessiné  et  gravé  d'après  une 
bague  qu^avail  donnée  cet  empereur. 
Les  autres  gravures  de  Lemire  ,  que 
Ton  recherche  ,  sont  le  portrait  de 
Piron,  fait  en  1773,  d'après  Lépi- 
cié;  celui  de  mademoiselle  Clairon, 
couronnée  par  Mclpomène,  d'après 
Gravelot  ;  ceux  du  général  /Wa- 
shington, en  pied,  et  du  marquis  de 
Lafo/yctte ,  après  la  conclusion  da 
la  campagne  de  Virginie  en  1781, 
tous  deux  d'après  Lepaon;  le  Far- 
tage de  la  Pologne,  ou  le  Gâteau 
des  Bois,aYec  l'anagramme  ErimeL 
Celte  gravure  que  l'on  peut  regarder 
comme  le  chef-d'œuvre  de  l'artiste, 
est  devenue  très-rare:  la  planche, 
dont  l'invention  et  l'exécution  lui 
appartiennent ,  fut  brisée  par  ordre 
supérieur  presque  immédiatement 
après  qu'elle  eut  été  terminée  ;  mais 
M.  de  Sartine,  qui  estimait  Lemire, 


LOT 

lui  permit  dVn  user  pondant  i\ 
licuros.  Lrrairc  a  encore  grave  : 
St. -Sébastien  ,  d'aprèjt  le  Parmesan, 
pour  la  galerie  de  Dresde  ;  Jupiter  et 
J)anaè y  d'après  le  Carrache  ;  La 
Mort  de  Lucrèce^  d'après  André  del 
Sartc;  Latone  vengée  ,  les  Noiwel- 
listes flamands  et  ['Étang  du  chd- 
tt'.m  de  Tcniers  ,  d'après  ce  der- 
nier; la  Curiosité  on  la  Lanterne 
magique,  d'ajirès  Reynicr  Rrake- 
1  en  hou  rj;  ;  la  /  'ue  du  Mont  -  Vésuve ^ 
t(l  qu'il  était  en  1757;  les  7?e5f<?5 
d'un  temple  devenus,  dans  l'île  de 
Nisida;et  W'érc  de  triomphe  de  Ti- 
tus y  trois  estampes  grand  in-fo.  d'a- 
près G.  de  la  Croix ,  etc.  Tous  ces 
onvrages  se  font  dislinguerpar  le  fini 
et  le  précieux  du  burin.  Lemire  mou- 
rut à  Paris,  eu  iHoi.  P~s. 

LKMKE.  rof.  Lembre.    C-au. 

LEMMUS  (Simon  ) ,  poète  latin, 
ne  dans  le  seizième  siècle,  à  Marga- 
dant,au  pays  des  Grisons,  et  dont  le 
Trai  nom  était  Lemc/ien  ,  mais  qui 
est  encore  connu  sous  le  surnom 
d'Emporius  ,  étudiait  ,  en  i533  ,  à 
Ingolstadt;cn  i538,  à  Wittembcrg, 
et  s'y  ëtait  fait  connaître  avantageu- 
sement par  quelques  pièces  de  vers 
et  par  deux  livres  d'epi grammes  , 
qu'il  dédia  à  l'archevêque  de  Maïence. 
l^e choix  d'un  Mécène  qui  ne  pouvait 
pas  être  agréable  aux  chefs  de  la  re- 
forme ,  les  indisposa  contre  lui.  On 
examina  son  recueil  avec  une  atten- 
tion scrupuleuse;  et  l'on  prétendit  y 
découvrir  quelques  epigrammes  con- 
tre TelecteurdeSaxe,  le  landgrave  de 
Hesse,  et  l'acade'mie  de  Wittembcrg. 
Le  fameux  Melanchthon ,  alors  rec- 
teur de  cette  université,  avec  le- 
quel il  vivait  depuis  quelques  années 
dans  une  espèce  d'inlimite  ,  lui  fit 
défense  d'y  reparaître  avant  de  s'être 
jusliiie  ;  et,  quelques  jours  après  ,  il 
y  cul  ordre  de  l'arrêter  ;  mais  Lem- 


LEM  57 

niu5,  preVenuà  temps,  s'c^tanl enfui, 
on  lui  accorda  un  délai  ])our  compa- 
raître; sur  son  refus,  il  fut  condamne' 
a  un  bannissement  perpétuel,  et  sa 
bibliothèque  fut  confisquée.  On  ne 
peut ,  quoi  qu'en  dise  Schcnner,  ap- 
j)rouverla  rigueur  dont  on  usa  envers 
Lemnius;  l'accusation  portée  contre 
lui ,  n'était  pas  fondée  :  l'électeur  de 
Saxe  qu'on  lui  reproche  d'avoir  in- 
sulte' ,  n'est  pas  nomme  une  seule 
fois  dans  ses  epigrammes  j  et  il  n'y 
a  que  l'esprit  de  parti  qui  ait  pu 
aveugler  ses  juges  au  point  de  leur 
faire  reconnaître  l'électeur  dans  le 
portrriil  de  l'ignorant  Midas.  Lem- 
nius, aigri  par  l'injustice  dont  il  était 
victime ,  se  relira  à  Baie  ,  où  il  se 
hnla  de  faire  réimprimer  ses  épi- 
grammes  avec  des  additions.  II  pu- 
blia, peu  après  ,  son  apologie  contre 
le  décret  de  l'académie  ,  qui  l'éloi- 
gnait  pour  jamais  de  Wittembcrg  , 
annonçantquesi  ce  décretn'était  pas 
rapporté  ,  il  vouerait  sans  cesse  au 
mépris  ses  odieux  persécuteurs.  Celte 
menace  ne  produisit  aucun  elï'ct  ;  et 
le  malheureux  Lemnius,  après  avoir 
erré  quelque  temps  sur  les  frontières 
d'îlalie  et  de  Suisse  ,  ou  il  paraît 
même  qu'il  fut  correcteur  d'épreu- 
ves dans  l'imprimerie  d'Oporin  à 
Bâic  ,  se  relira  enfui  à  Coirc  ,  au 
sein  de  sa  famille.  On  le  nomma  , 
en  i54o,  recteur  de  l'école  établie  en 
cette  ville  ;  et  le  9.4  novembre  i55o, 
il  y  mourut  de  la  peste,  dans  un  âge 
peu  avancé.  On  a  de  lui:  L  Episodia 
de  Joachimo  marchione  Brande- 
burgensi  et  ejus  conjuge  ,  i53i, 
IL  Epigrammalum  libn  duo  ,  Wit- 
tembcrg ,  Nich.  Scirlenz  ,  i538, 
in-S**.  ;  cette  édition, ayant  été  sup- 
primée avec  soin  ,  est  très-rare  :  la 
seconde  ,  Baie,  i538,  in-8".  ,  est 
augmentée  d'un  troisième  livre  qui 
renferme  plusieurs   traits  sanglant» 


5S 


LEM 


contre  Luther  ,  qu'il  ne  se  croyait 
plus  oblige  de  ménager ,  et  qu'il 
regardait  comme  le  véritable  au- 
teur de  tontes  les  persécutions 
qu'on  lui  faisait  e'prouver.  III.  u4po- 
■logia  contra  decretum  quod  iuipcrio 
et  t/yrannide  Mart.  Luthevi  et  Justi 
Jonœ  Pritemb.  universitas  coacta 
iniquissimè  et  mendacissimè  evul- 
gavit  y  Cologne  ,  1 54o  ,  in  -  8^.  ;  le 
titre  de  l'ouvrage  prouve  que  Tau- 
leur  n'était  guère  dispose  à  faire 
l'aveu  de  ses  premiers  torts ,  réels 
ou  imaginaires.  Ce  petit  écrit  est  ex- 
trêmement rare  ]  Scbelhorn  en  a 
donne  une  notice  détaillée  dans  ses 
Amœnit.  hist.  eccles.  et  litterar. 
tom.  i«r^,  pag.  85o.  IV.  Lutii  Pi- 
sœi  Juvenalis  (  c'est  le  masque  de 
Sim.  Lemnius  )  Munacho-pornoma- 
chia,  1 538,  in-8<^. ,  de  trois  feuilles , 
sans  pagination.  Cette  pièce  est  si 
rare  que  Scbelhorn  ne  l'avait  jamais 
vue  :  c'est  une  comédie  licencieuse  j 
Gottsched  en  a  donné  une  notice 
dans  son  Histoire  du  théâtre  alle- 
mand ,  seconde  partie  ,  page  ig'i. 
Y.  Amonnn  libriiY,  i54'-i  ,  in-è*^. 
"VI.  Odjsseœ  Homeri  lihri  xxiv  , 
heroicolatino  carminé  translati,(iui- 
hus  accessit  Batracliomyomachia , 
etc. ,Bâle,  1 549,  in-S'^.  ;  Paris ,  1 58 1, 
in-S*^.  de  699  pages.  VII.  Eclogce 
quinque,  ibid.  i55i  ,  in-4o.  VIII. 
Ethica  sii^e  de  virtutibus  morali- 
hus ,  libri  iv.  Conr.  Gesner  nous  ap- 
prend que  cet  ouvrage  était  entre 
les  mains  d'Oporin  ;  mais  on  ne  sait 
s'il  a  été  publié.  Lemnius  a  encore 
laissé ,  en  manuscrit  :  Bellum  sue- 
mcum  y  anno  i499  ?  gestum  ;  et 
jRhœtheis  ,  sive  de  bello  rhœthico 
libri  IX.  J.  Georg.  Pbil.  Thiele  a 
donné  de  ce  dernier  une  version  poé- 
tique en  allem.  Zizers,  i  'jÇ)'i,  in-8^. 
—  lier  helveticum y  ecloga  carminé 
hexamtiro  ,  imprimé  à  k  suite  de 


LEM 

y Ilodœporicum  de  Jcrem.  Reusitfr^ 
Baie,  i58o,  iSg-i,  in-S*^. — Quelques 
épigrammes  dans  les  Deliciœ  poë-' 
tarum  germanoium.  Voyez  Fie  et 
Ecrits  de  Simon  Lemntus  ,  par  C. 
R.  Strobel ,  (  au  tome  3  de  ses 
NeueBeitrcege,)  Nuremberg,  179'^, 
in-8". ,  et  le  dict.de  Rotcrmund, 
su])plcm.  de  Joecher.  W-s. 

LEMNIUS  ou  LEMMENS  (LiÉ- 
vm),  médecin,  naquit  en  i5o5  à 
Ziriczée  ,  dans  la  Zélande.  Après 
avoir  achevé  ses  humanités,  il  se  ren- 
ditàLouvain  pour  y  suivre  des  cours 
d'un  ordre  supérieur;  et,  par  le 
conseil  de  Pierre  Curlius,  curé  de 
cette  ville  ,  et  depuis  évêque  de  Bru- 
ges, il  s'appliqua  en  même  temps  à 
l'étude  de  la  médecine  et  de  la  théo- 
logie. Il  eut  pour  maîtres  dans  l'ait 
de  guérir ,  André  Vcsale  ,  Rembert 
Dodouée,  Conrad  Gesner.  Il  était  de 
retour  à  Ziriczée  en  i5'27  ;  et  il 
y  pratiqua  son  art  avec  un  tel  suc- 
cès, que  sa  réputation  s'étendit  bien- 
tôt dans  toute  l'Europe.  Cependant, 
ayant  eu  le  chagrin  de  perdre  sa. 
femme,  il  abandonna  l'exercice  de  sa 
profession  pour  embrasser  l'état  ec- 
clésiastique ;  il  fut  pourvu  d'un  ca- 
nonicat  de  l'église  de  Saint  -  Lié- 
vin  sa  paroisse ,  et  mourut  peu 
de  temps  après,  le  i^^  juillet  i568.. 
Il  a  laissé  plusieurs  ouvrages  ,  dont 
le  style ,  suivant  Eloy  (  Dict,  de 
médecine)  ,  n'est  dépourvu  ni  de 
force  ,  ni  d'élégance  ,  et  qui  tous 
ont  eu  un  grand  succès  ,  comme  on 
peut  en  juger  par  leurs  nombreuses 
réimpressions.  I.  De  Astrologid ,  li- 
ber unus,  etc.  Anvers,  i554,  ih-8^.; 
ïéna,  1587,  in-8^j  Leyde,  i638  , 
iu-i(3  (i).  IL  De  occultis  naturœ 
miraculis  libri  duo,  Anvers,  i559,. 

(1)  On  i."ost  borné  à  indic^ner  les  primiiii^ 
]es,etoiielm!efûisl<-s  premières  éditions  pour 
ne  pns  laliguct  le  Icitf ur  ,  sun^  nlilih-- 


li:m 

in-ia  ;  —  Uhri  iv ,  ihid. ,  i5G  » ,  in- 
vi;  ibid.,  Piaiitin,  i58i ,  in-8^  I-es 
deux  premiers  livres  ont  cte  traduits 
en  franc,  pr  Anl.  Diipinct  et  par  J. 
Gohorry,  Paris,  i:)(i'7,  in-8". ;  en 
ail.  par};Horstius:ils  ront  aussi  cte' 
i'u  italien.  Cet  ouvrage  contient  des 
remarques  assez  curieuses  sur  la  gé- 
nération ;  mais  on  v  trouve  aussi 
beaucoup  de  fables,  lll.  De  hahitu 
et  constitutione  corporis  qiiain  Grec- 
ci  krasin ,  t  riviales  complexionem  vo- 
cant,  Uhri  duo,  Anvers,  i56i, 
in-i 2;  trad.cn  italien,  Venise,  1567, 
m-\i.W .Similitudiniim  et  paraho- 
lariim  quœ  in  Bibliis  ex  herbis  atque 
arboribus  desuniuntur,  dilucida  ex- 
plication Anvers,  1 506, 1 569,  in-8^.; 
Erfurt  ,  i58i  ,  in  -  8«.  Cet  ou- 
vrage ,  dans  lequel  l'auteur  traite  de 
l'utilité  des  plantes  et  de  leur  usage 
allégorique  dans  les  cérémonies  reli- 
gieuses, a  eu  beaucoup  d'éditions:  il 
a  été  traduit  en  français,  Paris,  1 577, 
in-i2;  et  en  anglais,  Oxford,  1587, 
in-i'i.  V.  De  Vitd  animi  et  corporis 
rectè  instituendd,  Cologne,  i58i, 
in-8*.  VI.  De  Zelandis  suis  com- 
ment ariolus,  imprimé  à  la  suite  de 
la  Batavia  illiistrata  de  P.  Scrive- 
rius.  MI.  Dionj'siiis  libyens  poët a, 
de  situ  habit abilis  oibis,  à  Simo- 
ne Lemnio,  poëtd  laureato,  nuper 
latimisj'actus,  Venise,  i543,  in-12. 
C'est  le  poème  de  Dcnys,  communé- 
ment appelé  le  Periégète.  (  Voyez 
le  tome  XI  de  la  Biog.  univ. ,  pag. 
ii5  et  suivantes. )  ^'iFoppens,  ni 
Paquot  n'ont  fait  mention  de  celte 
traduction,  et  elle  n'est  point  in- 
diquée dans  l'article  cité  ae  la  Bio- 
grapliie.  Elle  est  dédiée  à  Hercule 
d'Esté, deuxième  du  nom,  quatrième 
duc  de  Ferrarc.  La  dédicace  en  vers 
est  fort  étendue  et  fort  belle.  Lem- 
iiius  a  laissé  imparfaits  une  Descrip- 
tion dt'  l'algue  H  un  Dictionnaire 


LEM  59 

abrégé  des  poissons.  —  Lf.mi»il'9 
(Guillaume),  (ils  du  précédent,  né 
à  Ziriczée,  vers  i53o,  suivit  les  tra- 
ces de  son  père  ,  et  devint  un  méde- 
cin très-habile.  Il  fut  appelé  à  la 
cour  de  Suède  par  le  roi  Eric  XIV, 
qui  le  combla  de  bontés  et  lui  ac- 
corda toute  sa  confiance;  mais  ce 
prince,  ayant  été  ])récipitédu  trône, 
Lemnius   fut    victime  de   celte  ré- 
volution. Jeté  dans  une  prison,  il  y 
fut  étranglé  en   i5G8,  sans  doute 
quelques  mois  après  la  mort  de  son 
père  ,  puisqu'"on  ne  voit  pas  que  ce 
dernier  ait  eu  connaissance  de  ce  dé- 
plorable événement.  On  a  de  Guil- 
laume une  Lettre  à  son  père,  dans 
laquelle  il   prouve  que  le  climat  a 
moins   d'influence  que   l'éducation 
sur  le  développement  des  facultés  in- 
tellectuelles. Anvers  ,  i554,  in-8^.  ; 
Leydc,  i638,in-i6.  Il  avait  compo- 
sé un  Traité  de  l'estomach  ,  qu'on 
croit  perdu.-LzMJVius (And.),  méde- 
cin zclandaiSjSans  doute  de  la  même 
famille,  est  auteur  d'une  Lettre  sur 
l'utilité  qu'on  peut  tirer  de  l'examen 
des  urines,  imprimée  avec  le  traité 
de  Urinis,  d'Actuarius,  Paris,  1 548; 
Lyon,  1 556,  in-S».    W-s  et  M-on. 

LEMOINE( Jean),  cardinal,  fon- 
dateur du  collège  de  son  nom,  à  Pa- 
ris ,  était  né  au  treizième  siècle  ,  à 
Cressi  dans  le  Ponthieu.  Après  avoir 
terminé  ses  études  et  reçu  le  bonnet 
de  docteur  en  théologie  à  l'univer- 
sité de  Paris,  il  fit  un  voyage  à  Ro- 
me, où  ses  talents  lui  méritèrent  un 
accueil  distingué.  Il  fut  nommé  au- 
diteur de  Rote,  et  s'ojccupa  de  com- 
menter le  sixième  livre  des  Décré- 
tâtes ,  travail  qui  fut  accueilli  par 
tous  les  savants,  et  lui  valut  la  pour- 
pre. Le  pape  Boniface  VIII,  qui 
avait  beaucoup  d'estime  pour  lui , 
l'envoya  comme  son  légat  en  France, 
m    1  Soi.  Il  theruha  à  rétablir  la 


6o 


LEM 


paix  entre  le  roi  Pliilippe-le-Bel  et 
Je  Saiut-Sie'ge ,  et  se  conduisit  avec 
tant.de  prudence  dans  cette  ne'gocia- 
iion  ,  qu'il  se  concilia  la  bienveil- 
lance du  roi ,  sans  rien  perdre  de  son 
crédit  à  la  cour  de  Rome.  Il  assista, 
en  1 3o5 ,  au  conclave  qui  se  tint  à 
Pe'rousepourrélecliondeCle'mentV, 
et  le  suivit  à  Avignon,  où  le  pontife 
avait  re'solu  de  fixer  sa  résidence.  Il 
y  mourut  le  22  août  1 3 1 3.  Son  corps 
fut  transporte'  à  Paris,  et  inhume', 
comme  il  en  avait  te'moignë  le  désir, 
dans  l'ëglise  du  collège  qu'il  avait 
fonde.  C'est  par  erreur  que,  dans  le 
Dictionnaire  de  Morëri ,  on  annonce 
que  le  cardinal  Lemoine  avait  occu- 
pé le  siège  ëpiscopal  de  Meaux.  — 
André  ,  son  frère,  ëvêque  de  Noyon, 
contribua  de  sa  fortune  à  l'ëtaLlis- 
sement  du  collëge  du  cardinal;  il 
mourut  en  1 3 15,  et  fut  inhume  dans 
le  même  tombeau  que  son  frère.  On 
y  lisait ,  il  y  a  quelques  années  ,  leur 
double  ëpitaphe.  W-s. 

LEMOINE  (  François  ),  peintre 
d'histoire  ,  ne  à  Paris ,  en  1 688 ,  de 
parents  fort  pauvres,  fut  confie  d'a- 
bord aux  soins  de  PiobertTouruièrcs, 
qui  avait  ëpousë  sa  mère  en  secondes 
noces.  A  l'âge  de  1 3  ans  ,  on  le  mit 
sous  la  conduite  de  Galloche  ,  chez 
lequel  il  demeura  \i  ans.  Il  ëtudia 
de  prëfërence  les  ouvrages  du  Guide, 
de  Carie  Maratte ,  et  de  Piètre  de 
Cortone.  Ses  progrès  furent  rapides, 
et  il  obtint  le  grand  prix  de  peinture 
en  171  ij  mais  les  malheurs  de  la 
guerre  ne  permettant  pas  d'envoyer 
des  pensionnaires  à  Rome  ,  il  ne 
put  aller  perfectionner  ses  talents 
en  Italie.  En  1 7 1 8 ,  il  fut  reçu 
membre  de  Tacadëmie,  sur  son  ta- 
bleau A' Hercule  et  Cacus  ;  quel- 
que temps  après,  il  peignit  son  tableau 
de  Persée  délivrant  Andromède. 
Lemoine  regrettait    cependant    de 


LEM 

n'avoir  pas  vu  l'Italie.  Un  amateur 
riche  et  ëclairë ,  nomme  Bergier , 
avec  lequel  il  ëtait  lie ,  voulut  répa- 
rer ce  malheur ,  et  en  1 7-^3,  il  l'em- 
mena avec  lui  dans  ce  pays  :  mais  un 
tel  voyage  fait  dans  l'espace  de  six 
mois,  et  lorsque  son  talent  était  déjà 
formé,  ne  fut  pas  aussi  utile  pour  lui 
qu'aurait  pu  l'être  un  séjour  plus 
prolongé  ,  et  qui  lui  eût  permis  de  se 
livrer  à  une  étude  sérieuse  des  chefs- 
d'œuvre  de  l'art.  Son  tableau  repré- 
sentant une  Femme  entrant  au  bain^ 
fut  commencé  à  Bologne,  continué  à 
Venise,  et  fini  à  Rome.  Il  passe  pour 
un  de  ses  meilleurs  ouvi*ages.  Avant 
son   départ  pour  l'Italie,  Lemoine 
avait  entrepris  la  peinture  du  chœur 
de  l'église  des  Jacobins  de  la  rue  du 
Bac  :  il  le  termina  lorsqu'il  fut  de  re- 
tour. C'est  alors  qu'il  fut  nommé 
professeur    de   racadémie.    Il   eut 
bientôt  l'occasion  de  déployer  tous 
ses  talents  dans  la  peinture  du  pla- 
fond de  la  chapelle  de  la  Vierge , 
à  Saint -Sulpice,   où  il  représenta 
V  Assomption.  On   se    plut  ,  dans 
le  temps,  à  y  reconnaître  une  ma- 
nière de  peindre  aussi  ferme  que  vi- 
goureuse, qui  n'excluait  pas  cepen- 
dant un  coloris  frais  et  suave  :  mais 
la  composition  laisse  beaucoup  à  dé- 
sirer; les  groupes  en  sont  mal  dis- 
posés et  mal  agencés  ;  l'exécution 
est  faible,  et  les  figures,  n'étant  point 
en  perspective  ,  paraissent  tomber. 
Ce  plafond  a  tellement  souffert  que, 
malheureusement  pour  la  gloire  de 
Lemoine  ,  toutes  les  qualités  qu'on 
pouvait  y  remarquer  ont  disparu  , 
et  qu'on  n'aperçoit  plus  que  les  dé- 
fauts. Il  a  d'ailleurs  été  entièrement 
restauré  en  1780,  par  Callet ,  et  ce 
n'est  plus  Touvrage  de  Lemoine.  Ce- 
pendant une  occasion  plus  favorable 
encore  vint  s'offrir  à  l'artiste;  il  fut 
chargé  de  peindre  le  FlaJ'ond  du 


LEM 

salon  d'îfercule  ,  a  Versailles.  Cette 
1  oiuposition,  la  plus  vaste  qui  existe 
en  hiirope,  ^niisqu'clle  a  04  pieda 
de  long  sur  54  de  large,  et  8  pieds  et 
demi  de  renfoncement,  sans  cire  in- 
terrompue par  aucun  corps  d'archi- 
tecture ,  coûta  quatre  années  de  tra- 
vail h  Lcmoine.  Cet  ouvrage  en  en- 
tier de  sa  main,  est  peint  à  Tliuile; 
le  nombre  des  figures  est  de  i^'Jl.  Il 
cftait  sur  le  point  de  le  terminer , 
iorsqii'il  s'aperçut  que  le  groupe 
principal  était  trop  peu  e'Ievc:  il  ne 
balança  point  à  l'effacer  et  à  le  re- 
monter de  trois  pieds  ;  ce  qui  l'obli- 
gea de  faire  des  changements  dans  la 
plupart  des  groupes  voisins.  Celte 
opération  lui  coûta  une  année  de  tra- 
vail de  plus.  Les  fatigues  qu'il  res- 
sentit ,  la  gêne  que  lui  causait  la  né- 
cessité d'avoir  le  corps  renverse, 
]>endant  sept  années  qu'il  mit  à 
)'♦•  Indre  ce  plafond  et  celui  de 
.Saint -Sulpice,  altérèrent  sa  santé 
qui  avait  toujours  été  très-faible. 
D'ailleurs  ,  il  était  d'une  humeur 
mélancolique  ,  et  4ooo  liv.  de  pen- 
sion avec  le  titre  de  premier  pemtre 
du  Roi,  que  ses  travaux  du  salon 
d'Hercule  lui  avaient  valus  ,  ne 
purent  le  satisfaire.  Des  chagrins 
domestiques  augmentèrent  encore 
sa  mélancolie  habituelle  •  il  perdit 
«ne  épouse  qu'il  aimait  avec  ten- 
dresse; et  sa  raison  ne  put  résister  à 
tant  de  tourments.  Irrité  des  faveurs 
qu'on  accordait  à  des  peintres  moins 
habiles  que  lui,  il  ne  put  disî>imulcr 
la  haine  qu'il  leur  portait;  et  celle 
qu'ils  lui  rendaient  ne  fit  que  l'aigrir 
davantage  :  son  esprit  s'aliéna,  et 
un  matin  que  M.  Bcrgier  venait  le 
chercher  pour  le  mener  à  la  cam- 

Eagne  où  il  voulait  le  faire  traiter , 
eraoine ,  entendant  frapper ,  et  s'i- 
maginant  qu'on  venait  l'arrêter ,  se 
âonuc  neuf  coups  d'cpéc^se  traîne 


LEM  6i 

jusqu'à  sa  porte,  et  en  l'ouvrant, 
tombe  mort  aux  pieds  de  son 
ami  (  4  j»»i»  1737  ).  Lemoine  avait 
alors  49  ans  ;  et  il  était  de]»uis 
dix  mois,  premier  peintre  du  Koi. 
Si  l'on  examine  impartialement  les 
travaux  de  cet  artiste ,  on  est  forcé 
de  reconnaître  en  lui  le  premier  fau- 
teui-  de  la  décadence  de  l'école  fran- 
çaise. Il  entendait  bien  une  vaste  ma- 
chine ;  il  disposait  ses  groupes  avec 
intelligence,  variait  sans  affectation 
les  mouvements  de  ses  figures;  il 
avait  d'ailleurs  de  l'ame  et  du  feu  , 
et  son  coloris,  sans  être  d'une  grande 
vérité,  séduisait  par  un  air  de  fraî- 
cheur et  de  suavité  ,  né  de  l'adresse 
avec  laquelle  il  savait  dégrader  les 
lumières.  Mais  il  peignait  avec  peine, 
son  exécution  était  lente  j  et  c'est  à 
force  de  revenir  sur  ses  ouvrages  , 
qu'il  leur  donnait  l'apparence  de  la 
facilité.  Son  dessin  est  incorrect  et 
mouj  il  manque  de  finesse  dans  les 
attaches;  ses  formes  sont  maniérées. 
Dénuédu  vrai  sentiment  delà  beauté, 
il  donne  à  ses  têtes  de  femmes  un  air 
de  minauderie, qui  n'est  que  l'affecta- 
tion de  la  grâce  ;  ses  têtes  d'hommes 
manquent  de  caractère.  Enfin  il  n'at- 
teignit que  rarement  à  la  noblesse 
dans  les  figures  ;  mais  il  possédait 
celle  de  la  composition.  Il  avait 
peint  au  réfectoire  des  Cordeliers 
d'Amiens  ,  six  tableaux  de  Cènes 
et  d'autres  sujets  analogues ,  dont 
celui  de  la  Cananée  était  un  des 
plus  estimés.  Ses  principaux  élèves 
sont  Natoire,  Boucher  et  Nonolte. 
Sqs  dessins  étaient  presque  toujours 
légèrement  faits  à  la  pierre  noire , 
sur  du  papier  bleu  ,  rehaussés  de 
blanc.  Ses  études  pour  le  salon  d'Hor- 
cule,ne  sont  ni  plus  soignées  ni  plus 
chargées d'ouvrage.Les  graveurs  qui 
ont  travaillé  d'après  lui,  sont  Tho- 
massin,S)lveslrc,L.  Cars,Cochin  et 


69.  LEM 

Larmessin.  C'est  Cars  qui  a  gravële 
tableau  à' Hercule  assommant  Ca- 
eus.  L'esquisse  colorie'e  du  plafond 
qu'il  avait  peinte  pour  la  banque,  et 
qui  n'a  point  été  exc'cutee,  a  été  gra- 
vée par  Sylvestre.  Lui-même  a  grave 
à  r eau-forte  une  Annonciation,  pe- 
tite estampe  ovale ,  en  hauteur  ,  et 
un  Paysage,  petite  pièce  en  largeur. 
^  Lemoine  ,  peintre,  naquit  à  Rouen 
en  1740.  Il  apprit  d'abord  sans 
maître  à  manier  le  pinceau,  et  fut 
ensuite  élève  de  Descamps.  Maigre' 
sa  faible  santé,  il  se  livra  au  travail 
avec  ardeur  j  et  la  ville  de  Rouen 
possède  un  grand  nombre  de  ses  ou- 
vrages. Celui  qui  lui  fait  le  plus 
d'honneur ,  est  le  plafond  du  théâtre 
des  Arts ,  représentant  V Apothéose 
du  grand  Corneille.  Il  a  déployé, 
dans  cette  composition ,  un  gran- 
diose qui  prouve  du  génie.  Cet  artiste 
mourut  à  Rouen ,  en  i8o3.    P-s. 

LEMOINE-D'ESSOIES  (  Edme- 
Marie- Joseph  ) ,  né  en  i-jSi  à  Es- 
§oies ,  bourg  de  la  Champagne ,  près 
de  Chàlons,  fit  d'excellentes  études, 
prit  ses  degrés  en  droit  et  fréquenta 
le  barreau  ;  mais  il  renonça  pres- 
que aussitôt  à  cette  carrière  ,  ou  ses 
talents  lui  promettaient  des  succès  , 
pour  se  consacrer  à  l'éducation  de  la 
jeune  noblesse.  Il  publia  quelques 
livres  élémentaires  ,  remarquables 
par  une  grande  clarté  jointe  à  une 
bonne  méthode,  et  qui ,  accueillis  par 
l'université  de  Paris,  devinrent  clas- 
siques dans  plusieurs  collèges.  Il  se 
proposait  de  donner  un  traité  de 
physique  qui  aurait  offert  les  mêmes 
avantages  j  mais  les  soins  qu'il  de- 
vait à  ses  élèves  le  détournèrent  de 
l'exécution  de  ce  projet.  Nommé 
professeur  de  mathématiques  et  de 
physique  ,  il  devint  membre  du  jury 
d'instruction  publique  de  Paris  ;  et 
ee  fut  à  ses  soins  qu'on  dut  en  par!i« 


LEM 

la  conservation,  pendant  nos  orages 
politiques  ,  des  traditions  les  plus 
estimées  de  l'université  et  du  goût 
des  bonnes  études.  Il  avait  fondé  une 
école  connue  sous  le  nom  d'institu- 
tion polytechnique  ,  qui  a  produit 
une  foule  de  bons  élèves.  Ce  profes- 
seur mourut  à  Paris,  le  17  août  1816. 
Le  Moniteur  ,  du  1*='.  sept,  même 
année  ,  contient  une  Notice  sur  lui. 
Il  a  publié:  I.  Principes  de  géogra- 
phie^ Paris,   1780,  in-i2,  '2^  édi- 
tion, 1784.  Il  en  donna,  la  même       1 
année,  un  Abrégé  in- 12.  II.  Traité 
du  globe,  rédigé  d'une  manière  nou- 
velle, à  la  portée  des  enfants,  ibid. 
1780,   in- 12.  III.  Traité  élémen- 
taire de  mathématiques  ,  ou  Prin- 
cipes d'arithmétique  ,   de   géomé- 
trie ,   de   trigonométrie  ,   avec  les 
sections  coniques ,  Paris,  1778,  in- 
8<*.jib.  1790,  1793,  même  format; 
4*^.  édition  ,  revue  et  augmentée ,  ib. 
1797  ,   '1  volumes  in-8".  L'ouvrage 
est  termine  par  une  bonne  histoire 
abrégée  des  mathématiques.  IV.  Prin- 
cipes d'arithmétique  décimale,  Pa- 
ris ,  1801  et  1804,  in- 19..    W-s. 

LEMONNIER  (  Pierre  )  ,  né  a 
vSaint-Sever  près  de  Vire  ,  en  167.5  , 
fut  professeur  de  philosophie  au  col- 
lège d'Harcourt ,  à  Paris, en  17^5  , 
et  fut  élu,  en  1757,  à  l'académie  des 
sciences.  Il  mourut  le  27  novembre 
même  année.  On  a  de  lui  :  I.  Cursus 
philosophiœ  ,  1760  ,  6  vol.  in-12  , 
long  -  temps  enseigné  dans  quelques 
collèges,  a  On  y  trouve ,  dit  Lalande , 
))  plus  de  géométrie  qu'on  n'en  met- 
»  tait  alors  dans  les  écoles  ;  le  carté- 
»  sianisme,  dans  lequel  il  avait  été 
w  élevé  ,  y  était  modifié  et  corrigé.  » 
II.  Premiers  traités  élémentaires  de 
mathématiques  dictés  en  l'université 
de  Paris,  1758  ,  in -8^.;  ouvrage 
posthume  et  anonvme.      A.  B— t. 

LEMOMIER  (PIBRRE-CUARLES)^ 


ï^sironoine  ,  fils  du  pn-rcdiMil ,  n.iqiiit 
«Paris,  le  5t3  novembre  1715.  La- 
landc ,  son  élève,  que  J)ese.ssaiis  (Siè- 
cles littéraires  )  ot  MM.  Cliaudon 
'  t  Delandiiie  (  iY.  Dict.  historiijue  ) 
.'lit  aljrrji«*  et  copie  ,  sans  le  ciler , 
lu'onte  (jtie])ainii  toutes  les  sciences 
«lont  il  pouvait  avoir  pris  une  ideo 
près  de  son  ])cre,  liCmonnier  sentit  et 
il  nnonça  de  bonne  heure  son  p;oAt  pour 
l'aslrononiie.  li  n'avait  pas  seize  ans, 
lorsqu'en  i-jSi  ,  il  fit  ses  premières 
observations  sur  l'opposition  de  Sa- 
turne. II  fut  le  premier  qui  donna  des 
•Icments  du  soleil;  et  soixante  ans 
d'observations  et  de  recherches  de 
théorie  ne  firent  trouver  que  87  se- 
condes à  ôter  de  son  calcnl.  Reçu  à 
l'acade'raie  des  sciences  ,  le  21  avril 
173(1,  lorsqu'il  n'avait  pas  encore 
vingt  et  un  ans ,  il  fut  choisi  par 
elle  pour  être  (  avec  Maupertuis  et 
Clairaul)  l'un  des  trois  commissaires 
charges  d'aller  sous  le  cercle  polaire 
Biesurer  un  degré'  du  méridien.  Il 
passa  ainsi  à  Torne'o  l'hiver  de  1 73(3- 
ô".^  et  contribua  plus  qu'aucun  d'eux 
à  la  grande  et  pénible  entreprise  qui 
leur  était  confiée.  Dans  les  Mémoires 
de  l'académie  pour  1 788 ,  il  remit  en 
honneur  la  méthode  de  Flamsteed, 
méthode  ingénieuse  à  laquelle  est  duc 
toute  la  précision  qui  existe  mainte^ 
liant  dans  les  tables  du  soleil  et  dans 
les  positions  des  étoiles.  En  1738  et 
1741A ,  Lemonnier  vérifia  l'obliquité 
de  l'écliptique  :  les  premières  obser- 
\ations ,  en  1 740  ,  turent  faites  dans 
la  tour  de  Pascal,  qui  est  de  l'ancienne 
enceinte  de  Paris  ,  au  nord  du  col- 
lège d'Harcourt.  Le  1 1  novembre 
J741  ,  il  lut,  à  la  rentrée  publique 
de  l'académie  des  sciences ,  le  projet 
<i*im  nouveau  catalogue  d'étoiles  zo- 
diacales ;  et  il  grésenla  à  l'académie 
une  nouvelle  carte  du  zodiaque ,  qu'il 
fit  graver  quatorze  ajis  plus   tard. 


LEM  63 

(  /^'o^/îz  ci-après  n".  VI.  )  Il  fut  en- 
core le  premier  qui  détermina  les 
changements  des  réfractions  en  hiver 
et  en  été  ;  le  premier  qui  entreprit 
de  corriger  les  catalogues  des  étoiles, 
et  de  bien  déterminer  la  hauteur  du 
pôle  de  Paris.  Kn  1 74 1 ,  il  introduisit 
en  France  l'instrument  des  passages  , 
dont  on  n'avait  point  encore  fait 
usage  à  l'Observatoire ,  et  que  Gra- 
ham ,  célèbre  horloger  de  Londres  , 
avait  exécuté.  En  1 74^  ,  il  entreprit 
de  dissiper  le  préjugé  qui  régnait  en- 
core en  l'rance  ,  sur  les  comètes  ;  il 
annonça ,  dans  une  séance  publique  de 
l'académie,  que  la  comète  qui  parais- 
sait alors  avait  un  mouvement  rétro- 
grade. En  1743,  il  fit  à  Saint-Sul- 
pice  une  grande  et  belle  méridienne  ; 
trois  ans  après  ,  il  détermina  \qs  iné- 
galités de  Saturne,  causées  par  l'at- 
traction de  Jupiter.  Ce  fut  aussi  le 
sujet  du  prix  que  l'académie  proposa 
et  qui  fut  remporté  par  Euler  ,  dont 
le  mémoire  justifia  le  travail  de  Le- 
monnier. Lié  de  correspondance  avec 
les  astronomes  d'Angleterre, il  trans- 
porta en  France  leurs  mélhodes^leurs 
instruments.  Lors  du  voyage  qu'il 
fit  dans  la  Grande-Bretagne  en  1 748, 
il  alla  jusqu'en  Ecosse,  pour  obser- 
ver l'éclipsé  du  ^5  juillet ,  qui  devait 
y  être  presque  annulaire;  et ,  le  pre- 
mier ,  il  mesura  le  diamètre  de  la 
lune  sur  le  disque  même  du  soleil. 
Ce  fut  en  1753  ,  qu'il  fit  à  Bel!evu« 
uneméridienne  quilui valut  i5,ooof. 
de  gratification  ,  qu'il  employa  à 
acheter  des  instruments.  Il  était,  de- 
puis long-temps,  professeur  de  phy- 
sique au  collège  de  France.  D'abord 
maître  de  Lalande,il  eut  ensuite  avec 
lui  de  vifs  démêlés  (  F.  L  alawde).  Sa 
vie  entière  avait  été  consacrée  aux 
sciences  :  la  révolution  ne  l'en  détour- 
na poinl;niais  une  attaque  de paraly- 
si«  viat  le  surprendre,  le  lonovem» 


04 


LEM 


bre  1 791 ,  et  il  lui  fallut  abandonner 
ses  utiles  occupations.  On  ne  l'oublia 
cependant  pas  lors  de  la  formation 
de  l'Institut j  et  il  fat  (Section  d'As- 
tronomie )  ,  l'un  des  cent  quarante 
quatre    premiers    membres    de    ce 
corps  illustre.  Une  seconde  attaque 
de  paralysie  l'enleva  à  He'ril  ,  près 
de  Baieux  ,  le  2  avril  1799.  Il  fut 
remplace'  à  l'institut  par  M.  Gassini. 
M.  Lefèvre-Gineau  y  lut  son  éloge , 
imprime'  dans  le  tome  m  des  Mé- 
moires de  V Institut  (  Sciences  phy- 
siques et   matbëmatiques  ).  De  trois 
filles  qu'il   avait  eues  ,  la   seconde 
avait  épouse  l'illustre  Lagrange;  la 
troisième  épousa  son  oncle  le  mé- 
decin. (  Foy.  l'article  suivant.  )P.  G. 
Lemonnier  a  composé  un  grand  nom- 
bre d'ouvrages  :  I.  Histoire  céleste  , 
1741,  in-4**.  II.  La  théorie  des  comè- 
tes, où  Von  traite  du  progrès  de  celte 
partie  de  l'astronomie ,  1743,  in-8". 
On  y  trouve  la  cométographiede  Hal- 
ley.  III.  Institutions  astronomiques  , 
1 746,  in-4°.  ;  un  des  meilleurs  ou- 
vrages ,  dit  Lalande  ,  qu'on  ait  faits 
en  français  sur  l'astronomie  élémen- 
taire; c'est  une  traduction  de  Keill 
{F oyez  Keill  ,  tom.  xxii,  p.  '270), 
mais  très-améliorée.  IV.    Observa- 
tions de  la  lune ,  du  soleil  et  des 
étoiles  fixes  ,  1761  ,  in-folio  ;  livre 
II,  1754;  livre  III,  1759;  livre  IV, 
1775;  le  reste  n'a  pas  été  imprimé. 
Y.  Lettre  sur  la  théorie  des  vents , 
spécialement  sur  le  vent  de  Véqui- 
noxe,  (dans  la  seconde  édition  des 
Tables  astronomiques  de  Halley  , 
donnée  par  Gbappe  d'Auterocbe  , 
1754,  iii-8°.)  YI.  Nouveau  zodia- 
que réduit  à  Vannée    1755,  Paris  , 
T  755  ,  in-80.  Ge  livre  ,  fait  par  Le- 
monnier ,  ou  sous  ses  yeux  par  M. 
de  Seligny ,  contient ,  dit  Lalande , 
îe  catalogue  des  étoiles  zodiacales  de 
Flamsteecl  ^  gravé  eu  trente  et  une 


LEM 

pages  en  taille-douce ,  les  cartes  des 
pléiades  et  des  liyades  à  l'échelle  de 
la  grande  carte  du  zodiaque  ,  exécu- 
tée la  même  année.  YH.  Premières 
observations  faites  par  ordre  du  roi 
pour  la  mesure  du  degré  entre  Pa- 
ris et  Amiens,   1757  ,  in-8°.  YIII. 
Une  édition  augmentée  de  V Abrégé 
du  pilotage  par  Goubert ,  1 766,  in- 
4*^.    IX.    Astronomie  nautique  lu- 
naire où  Von  traite  de  la  latitude 
et  de  la  longitude  en  mer ,  1771  , 
in-8^.  X.   Exposition   des  moyens 
les  plus  faciles  de  résoudre  plu- 
sieurs questions  dans  Vart  de  la  na- 
vigation, '  77'^  ,  in-8''.  On  y  trouve 
l'usage  de  l'échelle  des  logarithmes 
de  Gunter  {F oyez  Gunter  ,  t.  xix, 
p.  :îi4)  XI.  Essais  sur  les  marées 
et  leurs  effets  aux  grèves  du  mont 
Saint-Michel,    1774?  in-S^-   XII. 
Description  et  usage  des  principaux 
instruments  d'astronomie,    1774? 
in-folio.  G'est  un  des  cahiers  de  la 
grande  Description  des  arts  et  mé- 
tiers. XIII.  Lois  du  magnétisme, 
1776,  in-8**.  sec.  partie ,  1778, in-8". 
fig.  XI Y.    Traité  de  la   construc- 
tion des  vaisseaux  par  Chapman  , 
trad.  du  suédois,   1779?  in-folio 
{Foy.  Ghapman,  t.  viii,p.  62).  XY. 
Mémoires  conceiTiajit  diverses  ques- 
tions d'astronomie  et  de  physique, 
1781  ^  et  1784111-4*^.  (  F.  le  Jour- 
nal des  savants,  août  1781,  p.  569. 
déc.i784,p.8i4.)  Id.  1786. /J.4\ 
part.  i788in-4''.  XYI.  De  la  cor- 
rection  introduite  pour  accourcir  la 
ligne  sèche  du  lock  de  dix  -  huit 
pieds  ,   1 790  ,  in  -  8^.  Ge  Mémoire 
est  suivi  de  plusieurs  articles  d'as- 
tronomie. Lalande  dit  que  c'est  le 
dernier  ouvrage  de  Lemonnier  ;  et 
cependant  il  indique  lui-même  dans 
le  Journal  des  savants,  de  179 1  , 
une  Lettre  de  Lemonnier ,  au  sujet 
d'une  éclipse  observée  en  Chine ,  le 


LEM 

nnvemhre  1789,  pnr  M.  de 
Oiiipws  ,fils.  Il  avait  revu  la  re- 
«lur lion  dos  praiulrs  cartes  des  cons- 
tellations de  Flanistccd ,  faite  et  pu- 
bliée par  M.  J.  Fortin ,  sous  le  titre 
à! Atlas  céleste  de  Flamsteecl^  1 7n6, 
in-4'*.  On  peut,  pour  plus  de  de'tails, 
consulter  la  Bibîioe,raphie  astron.  de 
Lalnnde ,  p.  Siq-ëiG.        A.  B-r. 

LEMONNIÈR  (  Louis  -  Guil- 
laume )  frère  du  precc'dent,  naquit  en 
1717  :il  s'adonna  à  la  me'decine,et, 
âpres  avoir  ëte  reçu  docteur,  fut,  dès 
1 738 ,  attache'  à  rinfirmerie  de  Saint- 
Gcrmain-cn-Laye.  Les  circonstances 
cl  sa  position  développèrent  son  goût 
pour  la  botanique,  science  à  laquelle 
il  rendit  beaucoup  de  services.  Appelé 
à  la  cour ,  il  se  trouva  en  même 
temps  nomme'  à  la  chaire  de  bota- 
nique du  jardin  du  Roi  ,  que  la  mort 
de  Jussieu  l'aîne  laissait  vacante; 
et  il  obtint  la  survivance  de  la 
charge  de  premier  rae'decin  ordi- 
naire du  roi.  Il  fut  aussi  médecin 
en  chef  des  arme'es ,  et  premier  me'- 
dccin  des  enfants  de  France.  Plus 
tard  il  eut  le  titre  de  premier  me'de- 
cin  du  roi.  Ses  relations,  ses  corres- 
pondances ,  lui  donnaient  les  moyens 
de  satisfaire  sa  passion  pour  la  bo- 
tanique, soit  par  les  envois  de  grai- 
nes ou  plants  étrangers  qu'il  rece- 
vait, soit  par  les  plantations  qu'il 
fit  faire  dans  les  jardins  deTriaiion, 
et  dans  celui  que  Madame  Elisabeth, 
sœur  de  Louis  XVI ,  avait  à  Mon- 
trcuil  sous  Versailles.  Lors  de  la 
formation  de  l'Institut, il  fut  nommé 
associé  seulement,  son  séjour  hors 
de  Paris  n'ayant  pas  permis  de  le 
déclarer  membre  résidant.  Depuis 
1791,  retiré  à  Montrcuil ,  il  visitait 
peu  de  malades;  mais  il  donnait  des 
consultations  gratuites, et  cela  le  plus 
souvent  dans  ime  modeste  boutique 
d'herboriste,  qu'il  ne  dédaignait  pas 

XXIV. 


LEM  65 

de  diriger.  Il  est  mort  le  a  i  fructi- 
dor an  vil  (7  septembre  1799)  (x). 
On  a  de  lui  :  \J)issertatio  :  ergo  can- 
cer ulceratiis  cîculam  eludit,  1 763 , 
in  -  4'^«  ÎI«  Leçons  de  physique  ex- 
périmentale sur  V équilibre  des  li- 
queurs ,  et  sur  la  nature  et  les  pro- 
priétés de  l'air  ;  traduit  de  V an- 
glais de  B.  Cotes,  1742,  in-8^  III. 
Observations  d'histoire  naturelle  , 
1744»  iu-4°*  IV.  Une  édition  de  la 
Pharmacopée ,  de  Cliaras.  (  Voyez 
CuARAS  ,  VII ,  72.  )  V.  Lettre  sur 
la  culture  du  café,  ^77^,  in- 12. 
VI.  Beaucoup  de  Mémoires  dans  le 
recueil  de  l'académie  des  sciences  : 
l'un  d'eux  sur  V électricité  de  Vair, 
est  d'autant  plus  remarqual)Ie  qu'il 
contient  les  détails  de  plusieurs  ex- 
périences faites  par  Lemonnier ,  à 
Saint-Germain-en-Laye,  au  mois  de 
juin  1752  ,  qui,  jointes  à  celles  que 
Dalibard  venait  de  faire  à  Marlv-la- 
Ville,  ont  démontré  pour  la  première 
fois  à  l'Europe,  l'idenlitî  uu  fluide 
électrique  et  de  la  foudre.  VII.  Des 
articles  dans  V Encyclopédie  ,  en- 
tre autres  les  articles  Aimant^  Ai- 
guille aimantée,  Electricité ,  etc.  ; 
mais  il  n'a  pas  écrit  tout  ce  qu'il 
savait ,  et  n'a  pas  publié  tout  ce  qu'il 
avait  écrit.  Son  Eloge  par  Duchesne^ 
a  été  imprimé  dans  le  Magasin  en- 
cyclopédique,ciuquicme  année ,  tome 
m  ,  p.  489-500.  M.  Challan  a  lu  à 
la  société  d'Agriculture  de  Versailles, 
un  Essai  historique  sur  la  vie  de  L. 
G.  Lemonnier,  1 799,  in-8<*.  Les  bo- 
tanistes ont  consacré  à  sa  mémoire , 
sous  le  nom  de  Monneria  trij'olia , 
une  plante  équinoxiale,  découverte 
dans  la  Guiane  par  Lœfling.    AiB-T. 


(1)  challan  met  sa  mort  au   17  fiurtidor 
an  VII.  et  le  fait  âge  de  «4  ans  ;  cela  reporte- 
rait sa  naissance  à  1715.  ce  ([ui  n'''»   •■■   r. 
possible,  puisque  c'est  l>Dné«  où  i 
fiwre  PiciTc-CUaiks. 


m 


LEM 


LEMONNIER  (  Guillaume-An- 
toine ),  naquit  en  l'J'^i ,  à  Saint- 
Sauveiir-le-Vicomte  ,  d'une  famille 
peu  fortune'e,mais  qui  du  moins  con- 
naissait le  prix  de  l'éducation  et  de 
l'instruction.  Le  jeune  Lemonnicr  fit 
de  bonnes  e'tudes  au  colle'ge  de  Gou- 
tances  j  et  vint  ensuite  à  Paris ,  où  il 
fut  place'  au  colle'ge  d'Harcourt.  Ses 
loisirs   e'taient  consacre's  à  la  mu- 
sique. On   le   nomma  ,  en   1743  , 
chapelain  de  la  Sainte  -  CKapelle  ;  il 
cultivait  et  enseignait  en  même  temps 
la  litte'rature  latine  et  la  musique  : 
plus  tard ,  il  obtint ,  en  basse  Nor- 
mandie, une  cure  dont  la  re'volution 
le  priva.  Pendant  la  terreur ,  il  fut 
conduit  dans  les  prisons  de  Sainte- 
Marie-du-Mont ,  puis  amené  à  Paris 
dans  celle  de  Sainte-Pélagie.  Gomme 
tant  d'autres,  il  ne  dut  sa  liberté  et 
la  vie  qu'au  neuf  thermidor.  Il  était 
sans  ressource  ,  lorsque  la  Gonven- 
tion  le  comprit  dans  la  liste  des  gens 
de  lettres  ^  qui  elle  accorda  des  se- 
cours. Quelque  temps  après  ,   son 
compatriote  Letourneur  de  la  Man- 
che le  fit  nommer  bibliothécaire  du 
Panthéon  (  Sainte  -  Geneviève  ) ,  où 
il  succédait  à  Pingre.  L'abbé  Lemon- 
nier  avait  compté  parmi  ses  amis , 
Diderot  ,  Grétry  ,  Raynal ,  Greuze  , 
Elie  de  Beaumont ,  Cochin  et  M^^^. 
Arnoult.  Il  est  mort  à  Paris  ,  le  4 
avril  1 797.  Ou  a  de  lui  :  ï.  Des  pièces 
de  théâtre  qui  sont  restées  manus- 
crites :  une  seule  (  le  Bon  Fils  ou 
Antoine  Masson  ) ,  dont  Philidor 
avait  fait  la  musique,  fut  représentée 
au  théâtre  Italien,  le  1 1  janVier  1773, 
sous  le  nom  de  Devaux ,  et  a  été 
imprimée  dans  la  même  année.  IL 
Coinédlcs  de  Térence ,  traduites  en 
français,  1770,  3  vol.in-8o.,fig.  avec 
le  texte  eu   regard  j   la  traduction 
est  fidèle ,  élégante  ,  à  quelques  ex- 
pressions près,  qui  ont  paru  triviales, 


LEM 

mais  qu'il  était  peut-être  impossible 
de   ne   pas  employer  pour   rendre 
le  langage  familier  de  la  comédie. 
III.    Satires  de  Pêne  ,    traduites 
en  français  ,  1771 ,  in  -  8°.  L'abbé 
Sélis  publia  une  autre  traduction  de 
ce  poète  ,  en  177^);  et  long  -  temps 
les  opinions  des  latinistes  furent  par- 
tagées sur  le  mérite  des  deux  traduc* 
teurs  :  elles  le  sont  peut-être  encore. 
M.  Aug.  Delalain  a  fait  imprimer  ré- 
cemment les  Satires  de  Perse,  avec 
les  deux  traductions  et  les  notes 
réunies  de  MM.  Leinonnier  et  SéliSy 
181 7,  in- 12.  IV.  Fables,  Contes  et 
Epitres,  1773,  in-8°.  L'abbé  Lcmon- 
nier  s'est  fait  distinguer  dans  un  genre 
où  a  excellé  le  seul  La  Fontaine.  On 
cite  comme  son  chef-d'œuvre  V En- 
fant bien  corrigé ,  qui  nous  semble 
devoir  être  rangé  parmi  les  contes. 
L'auteur  se  préparait  à  donner  un 
second  volume,  qui  eut  été  composé, 
en  grande  partie  ,  des  fables  qu'avec 
une  bonhomie  toute  particulière  ,  il 
avait  lues  au  Lycée  des  arts  dont 
il  était  membre.  V.  Fête  des  bonnes 
gens  de  Canon  et  des  Rosières  de 
Briquehec  et  de  Saint-Sauveur-le- 
Vicomte,   1778,  in-S'*.  avec  sup- 
plément.  Il  avait  commencé    une 
traduction  de  Plaute ,  dont   il  n'a 
rien  paru.  Parmi  quelques  morceaux 
qu'il  a  fait  imprimer  ,  nous  citerons 
encore  le  Discours  d'un  Nègre  mar- 
ron près  de  subir  le  dernier  supplice, 
et  des  Observations  sur  le  pronom 
SOI  (insérées  dans  Isl  Décade  philoso- 
phique ,  tom.  x  ,  pag.  337  ).  Mulot 
a  donné  une  Notice  sur  la  vie  de 
Lemonnier,  i797,in-8».    A.  B-t. 

LEMONNIER  (  Pierre  -  René  ) , 
qu'on  a  quelquefois  confondu  avec 
l'abbé  Lemonnier  ,  naquit  à  Parisien 
1 781  ,  y  fît  d'excellentes  études,  fut 
secrétaire  du  maréchal  de  Maille- 
bois,  puis  commissaire  des^uerreR^ 


4t  hiom-'il  à  Metz  ,  le  B  janvier  1 796. 
Ou  a  de  lui:  I.  Le  Mariage  clan- 
deMn,  comédie  en  trois  actes  et  en 
vers  libres ,  imitée  de  l'anglais  de 
Garrick,  et  représentée  le  ri  août 
17^5  ,  non  imprimée.  II.  Les  J^êle- 
tins  tic  la  Court ille,  parodie  des 
Paladins,  i^Cio.  111.  Le  Maître  en 
droit  y  opéra  comicpic  en  deux  actes, 
l'j6o,ia-8**.,dontMarconvillefilunc 

rarodie  iulitnle'e  Le  Maître  d'école, 
V.  Le  Cadi  dupé  y  opéra  comi({iie 
en  uu  acte,  i7(3i,  in-8<».  V.  La 
Matjvne  clUnoise ,  comédie  en  deux 
«ctcs,  mcleed'arielles,  i7()4,in-8**. 

VI.  La  Meunière  de  Gentilly,  opé- 
ra comique  en  un  acte,  1768  ,in-8". 

VII.  L  Union  de  V Amour  et  des 
Arts  y  ballet  héroïque  à  trois  entrées , 
1773,  in-4*'.  VIII.  Azolan  ou  le 
Serment  indiscret,  ballet  héroïque 
en  trois  actes,  177^1  iu-4".  :  le  su- 
jet est  liic  d'un  coule  en  vers  de 
\oltaire.  IX.  Renaud  d'Ast^  co- 
médie en  deux  actes,  mèlc'c d'ariettes, 
1765,  iu-8**.  ;  Icî  sujet  ,  pris  dans 
V Oraison  de  Saint-Julien,  conte 
de  La  Fontaine ,  a  ëtë  traite  de  nou- 
veau, en  1787  ,  par  M.  Radct.  Plu- 
sieurs des  pièces  de  Lcmonnier  eu- 
rent du  succès  :  elles  sont  écrites 
avec  clëgancc.  A.  B-t. 

LEMOS  (  Thomas  )  ,  théologien 
espagnol  ,  qui  s'est  rendu  fameux 
dans  les  disputes  sur  la  jj;ràce  ,  était 
né  vers  le  milieu  du  seizième  siècle, 
à  Rivadavia  ,  petite  ville  de  la  Ga- 
lice ,  d'une  famille  noble.  Il  entra 
fort  jeune  dans  l'ordre  de  Saint- 
Dominique,  et  acquit  des  connaissan- 
ces étendues  en  théologie  ,  et  en 
même  temps  la  facilité  de  parler  sur 
les  matières  les  plus  abstraites.  Il 
était  professeur  à  Valladolid  ,  eo 
1594  >  lors<piele*  jésuites  commen- 
cèrent «i  faire  soutenir ,  par  leurs 
dères ,  le  scoûmcul  de  Moliua,  lou- 


LEM  67 

chant  l'accord  du  libre  arbitre  et  de 
la  grâce.  Les  dominicains  attaquèrent 
cette  opinion  comme  contraire  à  l«i 
doctrine  reçue  et  enseignée  par  l'É- 
glise ;  les  jésuites  répliquèrent  ,  et 
les  théologiens  des  deux  ordres  fu- 
rent bientôt  divisés  en  molinistes  et 
en  thomistes  {f^qy.  Mol^a,  Saint 
Thomas  d'Aquin).  Le  talent  que  Le- 
mos  déploya  dans  cette  circonstance, 
fixa  sur  lui  l'attention  de  ses  confrè- 
res ;  et  il  fut  député,  en  1 600,  au  cha- 
pitre général  de  l'ordre  ,  à  Naples. 
Pendant  son  séjour  dans  cette  ville, il 
présenta  au  cardinal  d'Avila  une  thèse 
où  la  doctrine  de  Saint  Thomas  sur 
la  grâce  parut  exposée  d'une  manière 
si  lumineuse  ,  qu'on  le  chargea  de  la 
défendre  devant  la  congrégation  dite 
de  Auxiliis,  formée  à  Rome  par  1« 
pape, pour  mettre  un  terme  à  des  dis- 
jiutes  qui  troublaient  l'Eglise.  Lemos 
parla  dans  cette  assemblée  avec  son 
confrère  Alvarez;  et  il  y  soutint  avec 
éloquence  l'opinion  qu'il  avait  em- 
brassée. Cependant  l'assemblée  se  sé- 
para sans  rien  décider  ;  les  domini- 
cains et  les  jésuites  furent  autorisés 
défendre  l'opinion  qu'ils  regardaient 
comme  la  meilleure  ,  pourvu  qu'ils 
respectassent  celle  de  leurs  adversai- 
res (  F.  Paul  V  ).  Le  roi  d'Espagne 
offrit  à  Lemos  un  évêché  qu'il  refu* 
sa.  Il  fut  nommé,  en  1607,  con- 
sulteur  général  de  l'inquisition ,  et  sq 
retira  au  couvent  de  la  Minerve ,  ou 
il  mourut,  le  uS  août  16^9 ,  à  Page 
de  70  ans,  suivant  le  P.  Quetif,  mais 
à  84  ans ,  selon  Moréri.  On  trouve 
la  liste  de  ses  nombreux  ouvrages 
dans  l'Histoire  de  la  congrégation  de 
Auiiliis,  par  le  P.  Serry,  et  dans 
la  JJiblioth,  prœdicatoT'wn ,  tome  11 , 
page  4^3  et  suivantes.  Les  princi- 
paux sont  :  I.  Patwplia  ^ratiœ, 
Liège  (  Beziers  ),  167G,  u  vol.  in-f**. 
C'est  le  recueil  des  thèses  et  des  au-r 


08  LEM 

1res  ëcrlts  qu'il  avait  publies  sur  la 
grâce.  II.  Acta  congre gationum  et 
disputationum  de  Auxiliis  dwince 
gratiœ,  Louvain  ,  i-joa,  in-fol.  C'est 
un  journal  de  ces  assemblées.  L'e'di- 
teur  (  peut  -  être  le  P.  Serry  )  a  fait 
précéder  cet  ouvrage  d'une  Fie  de 
Lemos ,  à  laquelle  on  renvoie  les 
curieux.  W  -  s. 

LEMOS  (  Don  Pedro-Juan  comte 
de), vice-roi  de  Naples,  de  la  même 
famille  que  le  précédent,  naquit  en 
i564.  Dès  sa  première  jeunesse  il 
cultiva  les  lettres ,  et  y  fit  des  pro- 
grès rapides  ;  mais  il  dut  interrom- 
pre ses  études  pour  suivre  la  car- 
rière des  armes  à  laquelle  sa  nais- 
sance le  destinait.  Il  fit  ses  premières 
armes  en  Flandre  ,  et  se  distingua 
ensuite  dans  toutes  les  guerres  qu'en- 
treprirent les  rois  Philippe  II ,  III  et 
IV.  Il  se  trouva  en  1 6o4  à  la  prise 
d'Ostende,et  fut  un  des  premiers  qui 
montèrent  sur  la  brèche ,  à  la  tête 
d'un  corps  d'élite.  Nommé  président 
du  conseil  des  Indes  en  i6o3  ,  il  se 
fit  remarquer  par  les  sages  mesures 
qu'il  prit  pour  établir  un  commerce 
utile  à  l'Espagne  avec  ses  colonies. 
L'année  suivante,  il  devint  capitai- 
ne -  général,  et  passa  ,  en  1612,  à 
Naples  avec  le  titre  de  vice-roi. Son 
exacte  justice  et  l'affabilité  de  son 
caractère  parvinrent  à  y  faire  aimer 
la  domination  espagnole  ;  et  l'on 
croit  assez  généralement  que  la  ré- 
volte de  1647  ,  excitée  par  Maza- 
niello  ,  n'aurait  pas  eu  lieu  sous  son 
gouvernement.  Ami  des  lettres ,  il  les 
protégea  dans  ceux  qui  les  profes- 
saient. Il  avait  amené  avec  lui,  à  Na- 
ples, les  frères  Argensola*  et  c'est  à 
son  invitation  que  l'un  d'eux  écrivit 
son  excellente  histoire  de  la  con- 
quête des  Moluques.  Néanmoins  les 
Argensola,  ainsi  que  Villegas,  Saa- 
vedra-Faxarde^  et  autres  littérateurs , 


LEM 

qui  se  glorifiaient  de  mettre  à  la  tête 
de  leurs  ouvrages  le  nom  du  comte 
de  Lemos ,  aspirèrent  plutôt  à  sa 
protection  qu'à  ses  libéralités;  et 
malgré  les  éloges  que  fait  de  sa  gé- 
nérosité don  Vicente  de  Los-Rios, 
dans  la  Vie  de  Cervantes,  il  est  trop 
vrai  que  l'immortel  auteur  de  Don- 
Quichote,  tandis  qu'on  l'appelait  le 
protégé  du  comte  de  Lemos  ,  vécut 
pauvre  ,  et  se  vit  réduit , pour  subsis-  m 
ter,àvendreà  vil  prix  ses  meilleures  ;|| 
comédies  :  cependant,  avant  de  mou-  ' 
rir,  il  dédia  à  son  protecteur  son  ro- 
man de  Persiles  et  Sigismonde ,  en 
lui  adressant  l'épître  qui  commence 
ainsi  : 

Puesto  ya  el  pie  en  cl  estrivo 
Con  las  ansias  de  la  miierte 
Gran  Scnor  esta  te  escrivo  ; 

€t  qui  est  remplie  des  expressions  de 
sa  reconnaissance.  (  Voyez  Cervan- 
tes. )  Le  comte  de  Lemos  demeura 
plusieurs  années  à  Naples  ;  et,  de  re- 
tour en  Espagne,  il  mourut  à  Val-  i 
ladolid,  en  décembre  1634.   ^"S* 

LEMOYNE  (  Pierre  ),  poète 
français ,  naquit  en  1 6osi ,  à  Chau- 
mont  en  Bassigny,  de  parents  riches 


1: 


et  considérés.  A  l'âge  de  dix-sept  ans 
il  entra  dans  la  compagnie  de  Jé- 
sus ,  et  fut  chargé  d'enseigner  la 
philosophie  au  collège  de  Dijon.  Il 
s'appliqua  ensuite  à  la  prédication  , 
et  obtint  de  faciles  succès  ,  à  une 
époque  où  l'on  ignorait  encore  le  bon 
goût  de  l'éloquence.  Il  composait  dès-  1 
lors  des  pièces  de  vers  qui  annon-  1 
çaient  une  imagination  prodigieuse; 
et  il  est  permis  de  croire  que  s'il  se 
fût  borné  à  cultiver  la  poésie,  il  au- 
rait acquis  une  réputation  durable; 
mais  l'idée  exagérée  qu'il  avait  de 
ses  talents(  i  )  hii  persuada  qu'il  pour- 


(i)  On  justifiera  ce  reproche  par  les  ver»  sui- 
vant* ,  extraits  d'une  épîire  au  nsartiuii  do  Luu- 
vill<  ,  «ur  ia  Ticillcste  : 


LEM 

!  .lit  missir  dans  plusieurs  genres  ; 
»  f  on  le  vit  occupe  en  mènic-lemps 
d'ouvrages  ascétiques  ,  de  traites  de 
MioraIe,et  de  riiistoiro.  II  prit  eu 
Mitre  parti  dans  les  disputes  du  jan- 
(  nisrac,  et  il  se  chargea  de  rcpous- 
>'  r  les  attaques  des  ennemis  de  sa 
.société'.  Ce  fut  donc  au  milieu  de 
tlislraclions  continuelles  qu'il  enlre- 
})ril  de    donner    à   la   France    un 
)»ocme  épique;  mais  il  rclioua  dans 
lui  projet  dont  il  n'avait  pas  connu 
toutes  les  diflicultés.  Son  poème  de 
Saint  Louis  f  prôné  d'avance  comme 
un  chef-d'œuvre,n'obtinl  presque  au- 
cun succès.  Costar  fut  peut-être  le 
seul  qui  osa  lui  donner  publiquement 
des  éloges  ,  qu'il  retracta  dans  la 
suite (i);  mais  le  P.  Mambrun,  con- 
frère de  Lemoyne,  en  fil  une  crili- 
;  îc  aussi  sévère  que  judicieuse  (  /^. 
"ÎAMBRUN  ),  et  Boilcau  sembla  de'- 
«I.iigncr  de  grossir  du  nom  de  ce  je- 
Mu'tc,  la  liste  des  poètes  malheureux 
dont  h  posteiilë  ne  connaîtra  I'cilIs- 
lîce  que  par  ses  satires  (3).   Le  P. 
I  moyne  mourut  ,  dans  la   maison 
rofesse  de  son  ordre  à  Paris,  le 


J'ai  changé  comme  TOUS;  «t  r-ctte  riclie  loiirre 
D'au  mei  \eri  (l?»ceutlaicDt  dune  si  pronipi*  cours* 
El  tramaient  en  roulant  •l'un  bruit  harmuaieux  , 
Perits,  or,  diama/its,  et  rubis  curieux, 
Maiuteuant  d«*téciiée 

^a)  Coitar  ,  qui  arait  loue  dam  sei  îettrrt,  le 
potTTio  de  St  Louit  ,  aT"c  exagération,  écrirait 
ttiiauile  :  •  La  P.  {•eiuoyae  lait  de  bons  ver»,  mai» 
a  de  mauvais  pciinea.  Il  a  tait  un  po^nie  épique 

•  lie  Saint  Louis,  contre  leqii-l  le  P.  Mambruu, 

•  jeauite,  a  écrit  le  traité  du  poème  «pique.  Scr 

•  vers  sont   »i  fiour<'i  ,   quijj  en  sont   rxtrava- 

•  girilsm  '^Mémoire  de  Co'iar,  inscré  duic  I» 
' '11*  Il  à*»  Mémoires  de  littérature  du  P.Det- 

-lc!«.) 

'^)  On   atinre  que  Boileaii ,   intarrog^  aur  la 

CAuse  du  «ilenco  qu'H  avait  X**^^^  **"  '*  ^'-  ^-~ 
aiajne,  répondit  eu  parodiant  deux  vert  do  Cor- 
neille I 

Il  s'est  trop  élevé  paur  en  dire  du  mal  ; 
Il  a'eat  trop  égara  pour  en  diro  du  bien. 

,  ]l  aat  asaes  singulitr  que  cette  anecdote  ait  été 

•ubl  ée  dana  le   BolcKona,  qui  en  contient  tant 

>U  raoïna  intéressaulea  j   et  qu'elle  ait   -aliappii 

<«  recbcrcheasi  miuutieuaef  d«  LelèTiedvSatot- 


aa  avril  1671.  De  tous  ses  ouvrages 
le  seul  qui  mérite  une  attention  par- 
ticidière  est  son  poème  j  il  est  inti- 
tule :  Saint  Louis ,  ou  la  Sainte 
Couronne  râcoriquise  sur  les  infidè- 
les ,  poème  héroïque  en  xviii  livres; 
les  sept  premiers  furent  imprimes  à 
Paris,  en  i65i  ,  in-f";  mais  l'ou- 
vrage entier  ne  fut  publié  qu'en  1 653, 
in-f<>,  précédé  d'une  dissertation  dans 
laquelle  l'auteur  cherche  à  justifier 
le  choix  de  son  sujet,  et  la  manière 
dont  il  l'a  traité  (4).  Sautreau  de 
Marsy ,  qui  a  consacré  un  long  ar- 
ticle au  P.  Lemoyne,  dans  les  an- 
nales poétiques ,  tome  xxi ,  y  entre 
dans  de  grands  détails  sur  le  poème 
de  Saint  Louis ,  dont  il  fait  une 
exacte  analyse  en  citant  les  meilleurs 
morceaux  de  chaque  chant  :  mais 
sans  contredit  aucun  critique  n'a 
mieux  apprécié  cet  ouvrage  que  La- 
harpe.  L'auteur  du  Lycée  convient 
que  le  P.  Lemoyne  avait  plus  d'ima- 
gination que  tous  les  poètes  épiques 
do  son  temps  :  «  Mais,  dit-il ,  son  ou- 
»  vrage  n'est  pas  fait  pour  attacher 
»  par  la  construction  générale,  ni  par 
»  le  choix  des  épisodes;  il  invente 
»  beaucoup ,  mais  le  plus  souvent 
»  mal;  son  merveilleux  n'est  le  plus 
»  souvent  que  bizarre;  sa  fable  n'est 
»  point  liée ,  n'est  point  suivie;  il  ne 
»  sait  ni  fonder,  ni  graduer  l'intérêt 
»  des  événements  et  des  situations  : 
»  c'est  un  chaos  d'où  sortent  quel- 
»  ques  traits  de  lumière  qui  meu- 
))  rent  dans  la  nuit.  Mais  dans  ses 
»  vers  il  a  de  la  verve ,  des  morceaux 


(4)  La  P.  Lemoyne  arait  dédié  sou  poterne  au 
lîuc  d'Kngliien  (  le  grand  Condc  )  Mais  la  dis- 
grâce de  ce  prince  lui  fit  changer  d'iatcntion  ;  il 
supprima  son  épîtrr  qui  était  'Irj*  imprimée,  et  re- 
trancha differenti  passages.  L'abbé  de  Marollea 
avait  Mn*  copia  de  l'épître  j  et  l'on  asinru  qu'on 
troiiv  dans  les  cabinets  de  quelques  curieux,  dea 
exemplaire*  du  poème,  tel  qu'il  rtait  avant  la* 
rrtranchcnients.  Le*  éditions  de  Paria,  i6'>8  ou 
rrtM,  in-i9,  avec  de  joUcB  figure*,  sont  raabet- 
rhee*  des  «toâtcuri. 


70  LEM 

»  dont  l'intention  est  forte ,  qiioicpie 
»  l'exécution  soit  très  -  imparfaite, 
»  Voilà  ce  qu'on  aperçoit, quand  on 
ï)  a  le  courage  ,  à  la  vérité'  difilcile , 
»  de  lire  dix-huit  cïiauts  remplis  de 
»  f  atras,d'enf]  ure  et  d'extravagance.  » 
Laharpe  montre  ensuite ,  avec  cette 
supériorité  de  raison  cpii  lui  est  ordi- 
naire, que  c'est  l'abus  du  style  figure, 
la  recherche  des  alliances  de  mots 
qui  ont  égaré  le  P.  Lemoyne,  né  avec 
du  talent ,  mais  qui  n'avait  «  ni  goût, 
m  connaissance  du  génie  de  sa  lan- 
gue, ni  des  amis  sévères»  (5)  :1e 
développement  de  cette  obser^^raion 
forme  un  des  meilleurs  morceaux  de 
son  Cours    de  littérature.  H  y  a 
quelques   années    qu'un  professeur 
de  province  a   essayé  de  rappeler 
l'attention  du  public  sur  l'ouvrage 
du  P.  Lemoyne.  Il  dit  y  avoir  porté 
largement  et  sans  hésiter,  la  hache 
d'i  retranchement ,  et  avoir  fait  une 
abondante  épuration  dans  le  choix 
des  pensées,  des  tournures  et  des  ex- 
pressions. En  un  mot  il  a  réduit  le 
Poème  de  Saint  Louis  à  8  chants, 
et  l'a  fait  paraître  ainsi  mutilé ,  Be- 
sançon, i8i6,in~8''.  :  mais  malgré 
l'intérêt  de  l'ouvrage  qui  était  encore 
augmenté  par  la  circonstance  de  la 
restauration,  il  n'a  point  eu  de  suc- 
cès,   (  Voyez  E.    T.  Simon.  )  On 
tixïuve  le  poème   de  Saint  Louis  , 
d'însle  recueil  des  OEu^res  poétiques 
du  P.  Lemojne ,  publié  par  un  de 
ses  neveux,  Paris,  1672,  in-f**. :1e 
volume  est  orné  d'un  beau  portrait 
de  l'auteur ,  et  chaq  je  chant  est  dé- 
coré d'une  estampe  ;  ce  recueil  con- 
tient  en   outre  :   Le  Triomphe    de 
Louis  XIII;  la  France  guérie  dans 
le  rétablissement  de  la  santé  du 
Boi  ;  les  Hymnes  de  la  sagesse  et  de 
V amour  de  Dieu  ;   les   Peintures 

{h)  Voltaire,  ^'«•«/^  de  Louh  XIV, 


LEM 

morales;  les  Entretiens  et  lettres 
poétiques,  et  des  Fers  théologiques , 
héroïques  et  moraux.  On  citera  en- 
core de  lui  :  L  La  Galerie  desjeni' 
mes  fortes,  Paris,  1647,  ^^~^^-  ^^g-J 
Leyde  ,  Elzevir,  1660,  petit  in- 12, 
(G)joîie  édition, fort  recherchée.  Le 
P.  Lemo)aie  avait  réussi  par  cet  ou- 
vrage à  gagner  la  confiance  d'un 
grand  nombre  de  dévotes  qui  le  choi- 
sirent pour  directeur.  On  lit  dans  le 
Ménagiana  ,    qu'un   jour  le  frère 
portier  des  Jésuites  alla  dire  au  P. 
Sirmond  que  des  dames  le  deman- 
daient. «  Mon  frère,  répondit  le  P. 
Sirmond,  songez  vous  bien  à  ce  que 
vous  dites  ?  des  femmes  me  deman- 
der !  sans  doute  vous  vous  méprenez  : 
il  faut  nécessairement  que  ce  soit  le 
P.  Lemoyne,  que  ces  dames  deman- 
dent. »  IL  La  Dévotion  aisée,  Paris, 
i652,  in-8<^.  Pascal  a  critiqué  vive- 
ment cet  ouvrage  d'une  morale  relâ- 
chée, dans  la  onzième  de  ses  Lettres 
provinciales,    lïl.  Une    Lettre  sur 
les  Mémoires  de  la  régence  de  Ma- 
rie de  Médiat,  Paris ,  i  G66 ,  in- 1  'Js. 
Elle  contient  un  jugement  sur  l'ou- 
vrage   et   sur    l'auteur    (    François 
Anijibal  duc  d'Estrées  ).   IV.  De 
l'Histoire,  Paris,  1670,  in- 1*2.  Ce 
traité,  dit  Lenglet  Dafresnoy,  ren- 
ferme des  traits  curieux  et  singuliers. 
Le  P.  Lemoyne  avait  composé,  sur 
les   mémoires  que  lui  avait  rerais 
madame   d'Aiguillon,  une  Histoire 
du   cardinal   de    Bichelieu  ,   dont 
Patin  annonçait  l'impression  ,   en 
1667;  mais  quelques  raisons  s'op- 
posèrent à  sa  publication,  et  l'on 
ignore   ce  qu'est  devenu  le  manus- 

W-3. 


crit. 


(6)  On  Joit  avertir  les  nmateurs  ,  qii'U  y  a  <le« 
exRtnplairfS  de  cu'te  f-tlition  avec  mi  nouveitn 
frontispice  :  Lfyde  ,  Etteinr  ,  el  se  vend  m 
Paris,  chez  Cà.Âng<it  ,  i6i>i,  (  Vov.  le  Jfa"- 
miel  à^^\.  Biwiiot  ,  toni.  it  ,  j[>«g.  3y4>- 


LEM 

LËMOYNE  (Jean-Louis),  sculp- 
teur, ne  à  Paris  en  iG()5,  fut  élève 
de  Covsevox.  On  lui  doit  un  assez 

Înud  nombre  d'ouvrages  estimes. 
iCs  plus  remarquables  sont  :  Deux 
.■in^es  adorateurs  y  dans  l'église  des 
Invalides;  une  Statue  de  Vian», 
dans  le  parc  de  la  Muette;  un  Por- 
tement de  croix  ,  bas-relief  qui  dé- 
core la  chapelle  de  Versailles.  Mais 
c'est  siirlout  par  ses  portraits  que 
Lcmovnc  sut   mériter  l'estime  des 
connaisseurs.  Les  meilleurs  sont  ceux 
du  duc  d'Orléans,  régent ,  de  Man- 
sard  ,  et  de  Largilliere.  Ces  deux 
derniers  avaient  été  faits  pour  être 
placés  dans  les  salles  de  l'acadé- 
mie ,  dont  il  était  membre ,  et  qui 
lui  décerna  même  le  grade  de  rec- 
teur. Il  mourut  à  Paris,  en  1735. 
— Lemoyne  (  Jean-Baptiste  ),rds  du 
précédent,  naquit  à  Paris,  en  1704, 
cl  fut  éfcve  de  son  père  et  d'un  de  ses 
oncles  ,  également  sculpteur  ,  nom- 
mé comme  lui  Jean-Baptiste.  Robert 
Lelorrain  fut  son  dernier  maître.  A 
l'âge  de  20  ans ,  Lemoyne  remporta 
le  grand  prix  de  sculpture,  par  un 
bas-relief  représentant  le  Sacrifce  de 
l'olixene.  Ce  succès  lui  avait  obtenu 
le  droit  d'aller  à  Rome,  en  qualité  de 
pensionnaire  du  roi;  mais  sou  père  , 
aveuglé  par  sa  tendresse  ,  demanda 
tomme  une  grâce  ,  que  le  jeune  Le- 
moyne fût  dispensé  de  faire  ce  voya- 
ge. Cinq  ans  après ,  celui-ci  acheva  , 
pom*  l'église  de  Saint-Jean  en  Grève  , 
un  groupe  de  Saint  Jeun  baptisant 
Jésus-Christ  y  dont  sou  oncle  avait 
à  peine  ébauché  la  première  figure. 
Cet  ouvrage  lui  fit  tant  d'honneur, 
qu'il  fut  chargé  de  la  statue  équestre 
en  bron/.e,que  la  ville  de  Bordeaux 
érigea,  à  Louis  XV,  en  1743.  Celte 
«talue  a  été  renversée  en  1 793.  Le 
monarque  y  était  représenté  vctu  à 
la  rumaioe^etdAnsratlitudc  ducomt- 


LEM  7t 

manrb  ment.  Quand  le  roi  vint  voir 
le  modèle  dans  l'alelier  de  l'artiste, 
le  prince  Charles  de  Rohan  ,  grand- 
écuver  ,  blàraa  cette  attitude,  et  pré- 
tendit que  le  geste  devait  ctre  d'ac- 
cord avec  le  regard.  lyc  roi  se  posa 
alors  dans  l'attitude  du  modèle,  re- 
gardant le  grand-écuyer,  et  dirigeant 
son  geste  du  coté  opposé  rC^eif  ainsi, 
dit-il,  que  je  commande.  Ajn-ès  avoir 
de  cette  manière  justifié  l'artiste,  Louis 
XV  lui  accorda  une  pension  de  i5oo 
livres.  Lorsqu'il  fallut  fondre  cette 
statue,  l'opération  manqua  en  partie  j 
la  moitié  de  la  figure  ne  réussit  pas. 
Cet  accident  fut  réparé  par  un  pro- 
cédé ingénieux  qu'imagina  le  fondeur 
Varin.  Les  états  de  Bretagne  vou- 
lant  consacrer  par   un   monument 
la  convalescence  de  Louis  XV  ,  Le- 
moyne   fut   chargé  de   son  exécu- 
tion. Il  représenta  le  monarque  élevé 
sur  un  trône  orné  de  drapeaux  et  de 
trophées.  La  province  de  Bretagne  , 
fléchissant  le  genou  ,  indiquait  à  ses 
citoyens  la  protection  que  le  monar- 
que leur  accordait.  La  santé,  placée 
à  la  droite  du  roi ,  tenait  un  serpcnr 
buvant  dans  une  patèrc  qu'elle   lui 
présentait;  près  d'elle  était  un  aiitel 
couvert  de  fruits.  Quand  Louis  XV 
vint  voir  ce  monument,  qui  a  clé 
détruit  eu   1793,  il  accueillit  aver 
bonté  la  femme  de  l'artiste  ,  promit 
de  faire  tenir  en  son  nom  ,  sur  les» 
fonts  de  baptême,  l'enfant  dont  elU 
était  enceinte,  et  auquel  il  assura  un<* 

Î)ension.  Lcraojiie  a  encore  exécuté 
e  Mausolée  du  cardinal  de  Fleury; 
le  Tombeau  de  Mi^nard ,  qu'on 
voyait  dans  l'église  des  Jacobins  dt 
la  rue  Sainl-Honoré ,  et  celui  d« 
Crébillon ,  qui  devait  être  placé  dans 
l'église  Saint-Gervais,  mais  que  le 
curé  refjisa  d'admettre  dans  son 
église  à  cause  de  la  figure  de  Melpo- 
mène,  qui  ornait  ce  tombeau.  Ce  mu  « 


72  LEM 

miment  et  le  précèdent  ont  e'ie  trans- 
fères au  Muse'e  des  monuments  fran- 
çais ,  ainsi  qu'une  Statue  en  pied  de 
Louis  XF  ^  que  Lemoyne  avait  faite 
pour  l'Ecole  militaire.  On  connaît  en- 
core de  lui  les  Statues  de  St.  Grégoire 
et  de  Sainte  Thérèse  aux  Invalides, 
et,  dans  le  salon  de  Thotel  de  Sou- 
Lise,  les  figures  de  la  Politique,  de 
la  Prudence  ;,  de  la  Géométrie^  de 
Y  Astronomie,  de  la  Poésie  épique, 
et  de  la  Poésie  dramatique.  Le 
nombre  des  portraits  qu'il  a  faits 
est  très-considerable;  on  voit  dans 
le  Musée  des  monuments  français  , 
celui  de  Coysevox  ,  qu'il  exécuta 
pour  l'académie.  Lemoyne  mourut 
à  Paris,  le  ^5  mai  1778.  Cet  artiste 
crut  pouvoir  introduire  dans  la  sculp- 
ture les  procédés  de  la  peinture.  Son 
pèrel'ayant  erapêchéd'aller  àRome, 
l'étude  de  l'antique  ne  putéclairer  son 
goût  et  retenir  son  imagination  déré- 
glée. Il  affectait  même  beaucoup  de 
mépris  pour  les  cbefs-d'œuvre  de 
la  Grèce.  La  sagesse  des  anciens 
n'était  à  ses  yeux  que  de  la  faiblesse, 
et  leur  simplicité  de  l'impuissance. 
C'est  avec  de  telles  idées  qu'il  mit  en 
vogue  ces  poses  théâtrales,  ces  com- 
positions symétriques  et  guindées , 
ces  airs  de  tête  maniérés  qu'on  était 
convenu  d'appeler  de  la  chaleur  et 
de  l'effet.  Il  semble  fuir  la  simplicité 
antique  :  lors  même  qu'il  doit  rendre 
une  action  tranquille,  il  tourmente 
sa  figure ,  il  l'enveloppe ,  il  la  perd 
sous  d'amples  draperies ,  dont  les 
plis  anguleux  et  multipliés  cachent 
entièrement  le  nu  ,  et  ne  laissent  à 
l'artiste  que  le  mérite  du  ciseau. 
Ainsi  Lemoyne  ne  doit  être  consi- 
déré que  comme  un  exemple  de  la 
dégradation  où  tomba  la  sculpture 
en  France ,  à  l'époque  où  il  vécut , 
et  comme  un  écueil  à  signaler  aux 
jeunes  artistes,  P-s. 


LEM 

LEMOYNE  (  Jean  -  Baptiste 
MoYNE  ,  dit) ,  musicien  et  compo- 
siteur, né  le  3  avril  1 7 5 1  ,  à  Eymet, 
petite  ville  du  Périgord,  apprit  la 
musique  sous  son  oncle,  maître  de 
chapelle  de  la  cathédrale  de  Péri- 
gueux.  Il  partit  à  quatorze  ans  pour 
l'Allemagne,  où  il  étudia  la  compo- 
sition sous  Graun  et  Kirnberger.  Il 
y  composa  plusieurs  morceaux  de 
circonstance  ,  entre  autres,  à  Berlin, 
un  Chant  d'orage ,  qui  eut  le  plus 
grand  succès ,  dans  l'ancien  opéra  de 
Toinon  et  Toinette ,  et  qui  lui  valut 
un  riche  cadeau  du  prince-royal  de 
Prusse ,  la  place  de  second  maître  de 
musique  de  son  théâtre,  enfin  l'hon- 
neur d'être  admis  aux  concerts  du 
grand  Frédéric.  Étant  allé  à  Varso- 
vie ,  il  y  donna  le  Bouquet  de  Co- 
lette ,  opéra  en  un  acte,  dans  lequel 
débuta  Madame  Saint-Huberti,  dont  il 
entreprit  l'éducation  théâtrale.  (  F. 
Saint-Huberti. )En  1 782,  Lemoyne, 
de  retour  en  France  ,  fit  jouer  a 
l'Opéra  ^/^cfre, paroles  de  Guillard. 
On  applaudit ,  dans  ce  coup  d'essai , 
quchpics  chœurs  ,  une  belle  scène  , 
trois  ou  quatre  morceaux  de  chant; 
mais  des  cris  continuels  et  déchi- 
rants ,  de  lourds  effets  d'harmonie  , 
ne  parurent  qu'une  exagération  des 
principes  de  Gluck  ;  et  Lemoyne  , 
qui  s'était  annoncé  comme  un  élève 
de  ce  grand  maître ,  fut  désavoué 
par  lui.  Il  profita  de  la  critique  ; 
et  ,  pour  adoucir  cette  âprcté  de 
style  qu'un  long  séjour  en  Alle- 
magne lui  avait  fait  contracter,  il 
médita ,  pendant  trois  ans  ,  les  par- 
titions de  Sacchini  et  de  Piccini, 
et  donna  Phèdre,  à  la  fin  de  1786. 
Cet  opéra,  dont  le  poème  est  de  M. 
Hoffinan  ,  eut  un  brillant  succès, 
a  La  facture  des  airs  et  des  acccm- 
w  pagnements,  dit  Grimm ,  le  ré- 
»  citatif,  sensiblement  imité  de  celui 


liEW 

»  lie  Didan,  tout  prouve  que  le  com- 
»  posileur  ,  abjuraut  sou  syslènje 
»  ludcsquc, s'est  rapproche, dans  eel 
»  ouvrage  ,  de  l'école  ilalieune ,  au- 
V  tant  qu'il   avait  cru    devoir  s'en 
»  eloiguer  dans  Electre.  »  Pour  so 
perfectiouner  encore  dans   la   mé- 
thode qui  lui  avait  si  bien  réussi, 
Lemoj-ne  fit  un  voyage  en  Italie  ; 
et ,  à  son  retour,  il  donna  ,  en  i  "jSgj 
les  Prétendus  et  Nejjhté.  Le  succès 
constant  du  premier  de  ces  ouvrages, 
qui   est  dans  le  genre  bouffon ,  et 
dont  les  paroles  sont  de  Roclion  de 
Chabannes,  a  désarme   la  critique. 
Aucun  opéra,  depuis  trente  ans,  n'a 
été  plus  souvent  représenté.  Le  se- 
cond qui  est  une  tragédie  lyrique  dont 
M.  Hoff'man  a  composé  le  j)oème  , 
dut  sa  réussite  à  la  pompe  du  spec- 
Uclc  et  à  l'intérêt  du  dénouement , 
plus  qu'à  la  musique,  où  l'on  trouva 
liioios  de  chant  que   dans  Phèdre. 
En    1790,   Lemoync  fit  jouer  au 
même  théâtre  :  (  avec  Forgeot)  les 
J^ommiers  et  le  Moulin,  composi- 
tion agréable ,  qui  cependant  n'a  pas 
-ez  de  gaîlé  ni  d'originalité  ;  (avec 
■■  I illard   et   1\L   Andricux  )  Louis 
IX  en  E^yle,  dont  la  musique,  à 
l'exceplion  des  airs  de  ballet,  panit 
presque  aussi  froide  que  le  poème. 
En  1 79i,  il  donna  au  théâtre  Fa  varf , 
El f rida,  paroles  de  Guiliard,  sur 
le  refus  de  l'Opéra,  où  il  fit  jouer, 
eu  1  793  et  1 794 ,  deux  pièces  de 
circonstance,  MiUiade  à  Maralhon, 
ci  Toute  la  Grèce.  Eiilin  ,  il  donna 
au  théâtre  Feydcau  \c  Petit  Batelier, 
le  Mensonge  oficieux  et  le  Corn- 
père   Liic,  dont  le  ])eu  de  succès 
semble  prouver  que  l'imagination  de 
Lemoyne  commençait  à  s'épuiser.  Il 
a  néanrnoius  la  gloire  d'être  le  seul 
Français  ,   parmi  les   compositeurs 
morts  ,  dont  les  ouvrages  se  soient 
soutenus  au  théâtre  de  l'Opéra ,  à 


LEM  7^? 

côté  des  chefs-d'œuvre  de  nos  troii 
grands  maîties.  Lemoyne  mourut  à 
Paris  le  3o  décembre  179O,  laissant 
trois  ouvrages  manuscrits  :  Nadir . 
ou  le  Dormeur  éveillé,  paroles  de 
Patrat ,  qui  aurait  été  représenté  à 
rOpéra,  si  la  piincipale  décoraliou 
n'eut  pas  été  consumée,  en  1787, 
dans  l'incendie  des  Menus-Plaisirs; 
Sjhius  Nen>a ,  ou  la  Malédiction 
paternelle ,  paroles  de  Béfroy  de 
Regny  (  dit  le  Cousin  Jacques  ) , 
pièce  répétée  en  179'i,  et  non  re- 
jirésentée,  parce  qu'elle  n'était  pas 
selon  les  circonstances  ;  et  Vile  des 
Femmes ,  paroles  de  Rochon  de 
Chabannes,  dont  les  répétitions  fu- 
rent interrompues  par  la  mort  du 
compositeur. —  Lemoy  ne  (Gabriel), 
fils  aîné  du  précédent,  héritier  d'une 
partie  de  ses  talents,  et  bon  pianiste, 
a  laissé  des  sonates,  des  romances, 
et  l'opéra-comique  de  V Entresol, 
qui  fut  joué  au  théâtre  des  Variétés. 
Né  à  Berlin  ,  en  1 77"^ ,  d'un  premier 
mariage  que  son  père  avait  contracté , 
il  est  mort  comme  lui  à  Paris,  le 
1  juillet  181 5.  A-T. 

LEMPEREUR  (  CoNSTAifTi:*  ,. 
Voyez  Empereur. 

LElVrUET  (  Pierre,  )  architecte, 
naquit  à  Dijon  ,  en  1591.  Après 
avoir  appris  les  mathématiques  dans 
sa  ville  natale,  il  étudia  l'architec- 
ture civile  et  militaire,  et  donna  des 
preuves  de  sa  capacité  dans  cette 
dernière  science  ,  en  fortifiant,  par 
ordre  du  cardinal  Maza ri n ,  plusieurs 
villes  de  la  Picardie.  Il  fut  chargé 
d'achever  l'église  du  Val-de-Grâce 
à  Paris,  depuis  le  premier  ent;J)le- 
ment  jusqu'au  sommet  de  l'édifice. 
C'est  de  lui  qu'est  la  façade,  formée 
des  deux  ordres  corinthien  et  c*)m- 
posite,  ainsi  que  les  fenêtres  ornées 
de  balustres,  séparées  par  des  niches 
de  coloimes  auxquelles  ou  reproche 


:4 


LEM 


un  goût  trop  mesquin.  Il  donha  en- 
suite les  plans  de  l'église  des  Petits- 
Pères  ,  près  la  place  des  Victoires; 
elle  fut  commencée  eu  i658,  par  Li- 
béral Bruant,  et  terminée  par  Gabriel 
Leduc.  Lemuet  donna  également  les 
plans  du  grand  château  de  Luynes  et 
de  ceux  de  Laigle  et  de  Beauvilliers. 
Il  mourut  à  Paris,  le  28  septembre 
1669.  On  a  de  lui  :  I.  La  Manière  de 
lien  bâtir  pour  toutes  sortes  de  per- 
sonnes, dédiée  au  Boi,  iG^S;  réim- 
primée en  i663,  in-fol. ,  avec  plu- 
sieurs fîg.,  plans  et  élévations  des  plus 
beaux  bâtiments  et  édifices  de  France. 
II.  Traité  des  cinq  Ordres  d* Archi- 
tecture dont  se  sont  servis  les  anciens, 
traduit  de  Palladio,  augmenté  de 
nouvelles  inventions  pour  l'art  de 
bâtir,  avec  des  observations  du  tra- 
ducteur, Paris,  1626;  réimprimé  en 
iG4i.  III.  Les  Règles  des  cinq  Or- 
dres d'Architecture  de  Fignole , 
augmentées  et  réduites  de  grand 
en  petit,  Paris,  163*2,  in-4°.  P-s. 

LENjEUS  (Jean-Canut),  arche- 
vêque d'Upsal ,  naqiiit  en  1578,  à 
Lenna, bourgade  à  deux  lieues  d'Up- 
sal,  et  se  distingua,  dès  sa  jeunesse, 
par  son  ardeur  pour  Fétude.  Ayant 
fait  plusieurs  voyages,  il  obtint  d'a- 
bord la  chaire  de  professeur  de  lo- 
gique, et,  peu  après,  celle  de  profes- 
seur de  théologie  àUjJsal.Le  prince 
palatin  Charles  Gustave,  depuis  roi 
de  Suède ,  passa  deux  années  dans 
sa  maison  pour  faire  un  cours  d'é- 
tudes; et  les  parents  de  ce  prince 
furent  si  satisfaits  des  soins  que  lui 
avait  donnés  le  professeur,  qu'ils  en 
exprimèrent  à  celui-ci  leur  recon- 
naissance de  la  manière  la  plus  flat- 
teuse. Devenu  archevêque  d'Upsal, 
m  1 047  ,  Lcnaeus  occupa  ce  siège 
]>endant  vingt-deux  années,  et  mou- 
rut le  2.5  avril  1669,  ^géde  p6  ans. 
11  couronna  Christine  :  peu  après  il 


fut  appelé  à  placer  la  couronne  sur 
la  tête  du  prince  dont  il  avait  dirige' 
l'éducation;  et  ce  prince  étant  mort 
en  1660 ,  il  fît  la  cérémonie  de  ses 
obsèques.  Parmi  ses  ouvrages ,  nous 
citerons  :  I.  Logica  peripatetica  , 
Upsal,  i633.  II.  Tractalus  de  veri- 
tate  et  excellentid  christianœ  reli- 
gionis ,  ibid.  i638.  III.  Trois  orai- 
sons junehre  s  en  suédois.  IV.  Com- 
ment aria  in  Evangelium  Johannis, 
et  iuActa  apostolorum, donl  J .  Alb. 
Fabricius  donna  une  nouvelle  édi- 
tion ,  en  T  7  T  3.  C  -  AU. 

LENAIN  (  Louis  et  Antoine  ), 
frères  ,  tous  deux  peintres  ,  naqui- 
rent à  Laon,vers  la  fin  du  xvi®.  siè- 
cle. Ils  travaillaient  toujours  ensem- 
ble, et  ils  s'exercèrent  avec  succès 
dans  tous  les  genres  de  peinture; 
mais  ils  préféraient  traiter  des  scè- 
nes familières,  telles  que  des  tabagies, 
des  cabarets,  des  mendiants,  etc.  Le 
talent  qu'ils  déployèrent  dans  ce 
genre,  les  place  au  nombre  des  ar- 
tistes qui  l'ont  cultivé  avec  le  plus  de 
succès.  Le  tableau  de  leur  composi- 
tion que  possède  le  Musée  du  Lourre, 
et  qui  représente  le  Maréchal  fer- 
rant et  saj'amille,yie\it  soutenir  le 
parallèle  avec  ce  que  l'école  flamande 
a  produit  de  mieux  dans  le  même  geur 
re.  C'est  une  scène  d'intérieur  éclairée 
par  le  foyer  ardent  d'une  forge  j  l'ef- 
fet en  est  très-piquant  et  très-juste: les 
Fersonnages  ont  tout  le  naturel  que 
on  aime  à  remarquer  dans  ces  sortes 
de  tableaux,  et  celui-ci  est  peint  avec 
vigueur  et  transparence.  Ant.  et  Louis 
Lenain  furent  admis  à  l'académie  de 
peinture,  l'année  même  de  sa  fou- 
dation.  Plusieurs  églises  de  Paris 
possédaient  autrefois  un  assez  grand 
nombre  de  leurs  tableaux  ;  la  plu- 
part ont  ])éri ,  parce  qu'ils  étaient 
peints  sur  des  impressions  de  glaise, 
et  que  les  coulenss  peu  empâtées, 


surtout  dans  leurs  (Irriiurs  temps , 
t'eiilcvaifint  comn  •*  si  elles  eussent 
été  en  détrempe.  Le  Musée  du  Louvre 
possédait  encore  un  de  leurs  tablçaux 
peint  sur  bois ,  et  représentant  un 
homme  tenant  une  chandelle  ;  il 
avait  été  tire  de  la  galerie  de  Mec- 
klenbourg-Schnerin,  et  il  nous  a 
été  repris  ,  en  ï8i5.  L'amitié  avait 
uni  les  deux  frères  pendant  toute 
leur  vie:  la  mort  ne  put  les  séparer; 
ils  expirèrent  à  deux  jours  de  dis- 
lance ,  au  mois  de  mai  1648.  — *• 
Mathieu  LKSAirf  ,  frcrc  des  précé- 
dents, s'adonna  comme  eux  à  la  pein- 
ture. On  a  peu  de  détails  sur  sa  vie  ; 
on  sait  seulement  qu'il  fut  reçu  mem- 
bre de  l'académie  de  peinture ,  en 
même  temps  que  ses  deux  aînés,  et 
qu'il  cultiva  comme  eux  tous  les 
genres  de  peinture.  Le  Portrait  du 
cardinal  Mazaiin ,  que  l'on  voyait 
autrefois  dans  les  ailles  de  l'acadé- 
mie ,  était  de  lui.  Il  mourut  en 
1677.  P—  s. 

LENAIN  (DoM  Pierre  ),  né  à 
Paris  ,  le  9.5  mars  \Çt\o  ,  était  frère 
cadet  du  savant  Tillemont;  il  fut 
élevé  sous  les  yeux  de  son  aïeul ,  sous- 
doyen  du  parlement ,  et  se  fit  remar- 
quer dans  sa  jeunesse  par  la  viva- 
cité de  son  esprit,  et  surtout  par  une 
piété  tendre  et  sincère.  Après  avoir 
terminé  ses  études  ,  il  entra  dans  la 
congrégation  de  Saint-Victor ,  où  il 
parut  comme  un  modèle  de  péni- 
tence. Cependant  il  ne  se  croyait  pas 
digne  de  recevoir  les  ordres  sacrés  , 
tt  ses  supérieurs  furent  obligés  d'em- 
ployer l'autorité  pour  vaincre  sa  ré- 
sistance. 11  sortit  peu  de  temps  après 
de  l'abbaye  de  Saint-Victor  pour  en- 
trer dans  celle  de  la  Tra])pe  ,  où 
l'abbé  de  Rancé  venaitd'établir  cette 
re'forme  devenue  .si  fameuse.  L'ar- 
chevêque de  Paris  (  Péréfixc  )  tenta 
de  s'oppospr  à  son   dessein;  m.iis 


LEN  :  > 

Lon.iin  y  persista  ,  cl  pionnn^a  svs 
vœux  en  \&m;).  Il  avait  une  pro- 
fonde vénération  pour  l'abbé  de 
Rancé  ;  et  ce  grand  réformateur  lui 
donna  souvent  des  maïqiics  de  son 
estime  particulière  ;  il  le  nomma 
sous-prieur,  et  le  chargea  de  présider 
les  conférences  du  chajùtre.  Le  suc- 
cesseur de  Rancé  Aoulut  apporter 
quelques  changements  à  la  règle  :  D. 
Lcnain  5\n  plaignit ,  et  le  nouvel 
abbé  lui  ota  le  droit  de  parler  dans 
les  assemblées  des  religieux.  L'hum- 
ble et  docte  solitaire  partageait  son 
temps  entre  la  p!  ière  ,  l'étude  et 
la  pratique  des  austérités;  ni  l'âge  ni 
des  maladies  fréquentes  ne  purent 
diminuer  son  zèle.  A  la  suite  d'une 
indisposition  grave ,  il  se  rendit  à 
l'église  pour  remercier  Dieu  de  sa 
guérison  ;  mais  tandis  qu'il  était  en 
prières  ,  il  fut  saisi  d'un  vomisse- 
ment de  sang.  On  le  transporta 
dans  sa  chambre,  et  il  y  expira  quel- 
ques heures  après ,  le  12  décembre 
1 7 1 3.  On  a  de  lui  :  I.  Essai  de  Vhis- 
taire  de  V ordre  de  Citeaux,  tiré  des 
annale  s  de  V  ordre  et  de  divers  autres 
historiens,  Paris,  1 696  et  années  suiv, 
9  vol.  in-i2.  Cette  histoire ,  écrite 
avec  simplicité  et  onction  ,  remplit 
le  dessein  qu'avait  formé  D.  Lenain, 
de  procurer  à  ses  confrères  une  lec- 
ture instructive  et  édifiante.  IL  Ho- 
mélies sur  plusieurs  chapitres  du 
prophète  Jérémie  ,  Paris  ,  1697  , 
1705,  2  vol.  in-S».  Il  avait  laisse' 
en  manuscrit  une  suite  à  cet  ou^Tagej 
elle  n'a  point  étépubliée.III.  fie  de 
J,  Le  Boutitliar  de  Rancé ,  abbé  de 
la  Trappe  ,  i\o\wu  ,  1715  ,  3  vol. 
in- 19..  Cette  vie  n'a  point  été  publiée 
telle  qu'elle  était  sortie  de  la  plume 
de  D.  Lenain  ;  l'éditeur  y  a  ajouté 
différents  traits  satiriques  ,  très -in- 
convenants dans  un  ouvrage  de  ce 
^'vnrc.lX.PcH rpetitstraités, l'im  sur 


i6 


LEN 


l'état  du  inonde  après  le  jugement 
dernier  ;  et  l'autre  sur  le  scandale 
qui  peut  arriver  même  dans  les  mo- 
nastères les  mieux  réglés  ;  Paris  , 
I  -j  1 5  ,  in-8^.  L'éditeur  est  d' Arnau- 
din,  moine  et  docteur  de  Sorbonne  , 
qui  a  fait  précéder  ces  deux  opuscules, 
d'une  Vie  de  l'auteur.  Lenglct  Du- 
fresnoy  lui  attribue  encore  les  Re- 
lations de  la  "vie  et  de  la  mort  ds 
quelques  religieux  de  la  Trappe; 
Paris  ,  1 704 ,  4  vol.  in-i  2  j  mais  on 
sait  que  ces  relations  sont  de  l'abbé 
de  Pvancé.  D.  Lenain  a  laissé  en  ma- 
nuscrit une  Histoire  des  martyrs 
des  premiers  siècles  ,  et  des  Eleva- 
tiens  à  Dieu  ,  pour  se  préparer  h  la 
mort.  La  Fie  de  D.  Lenain  ,  qu'on 
vient  de  citer  ,  est  superficielle  et 
écrite  d'un  style  diffus;  elle  est  suivie 
d'un  Catalogue  des  religieux  morts  à 
la  Trappe  ,  depuis  16Ô7  jusqu'en 
1714.  On  peut  consulter  les  Mémoires 
de  Nicéron  ,  t.  ix  et  x  ,  et  le  Moréri 
de  1759.  W-s. 

LENAIN  (  Sebastien  ).    Fojez 

TlELEMO?JT. 

LEN  CLOS  (  Anne  de  ) ,  plus  or- 
dinairement appelée  Ninon  ,  naquit 
à  Paris  ,1e  i5  mai  1616,  de  M.  de 
Lenclos  ,  gcntilbomme  de  ïouraine  , 
et  de  M^^'^.  de  Raconis,  son  épouse  , 
d'une  famille  noble  de  l'Orléanais. 
M«i«.  de  Lenclos  voulait  faire  de 
Ninon  une  dévote;  mais  M.  de  Len- 
clos ,  homme  d'esprit  et  de  plaisir , 
se  chargea  lui-même  de  l'éducation 
de  sa  fdle ,  et  donna  une  direction 
toute  différente  à  ses  inclinations. 
Ninon  perdit  ses  parents  de  bonne 
heure  :  dès  l'âge  de  quinze  ans  ,  elle 
se  trouva  maîtresse  d'elle-même  ,  et 
d'une  fortune  que  les  dissipations  de 
son  père  avaient  considérablement 
réduite.  Elle  mit  son  bien  à  fonds 
perdu ,  et  se  fît ,  par  ce  moyen  ,  un 
revenu  suîHsanl  pour  vivre  dans  l'ai- 


LEN 

sance  ,  et  même  pour  aider ,  au  be* 
soin  ,  ses  amis  :  elle  sut  économiser 
sans  avarice ,  et  dépenser  sans  pro- 
fusion. Plusieurs  fois  elle  fut  recher- 
chée en  mariage  ;  mais  elle  chéris- 
sait trop  l'indépendance  pour  con- 
tracter un  engagement.  Elevée  dans 
les  principes  les  moins  sévères,  et  née 
avec  des  sens  fort  vifs ,  elle  se  livra 
toute  entière  aux  plaisirs  de  l'amour. 
Nous  n'entreprendrons  point  ici 
l'apologie  d'une  conduite  si  peu  re- 
tenue. En  renonçant  à  la  principale 
vertu  de  son  sexe,  Ninon  a  sans 
doute  perdu  une  grande  partie  de  ses 
droits  à  l'estime  ;  mais  s'il  n'est  pas 
permis  de  chercher  à  excuser  ses 
torts, il  doit  l'être  au  moins  démet- 
tre sous  les  yeux  du  lecteur  tout  ce 
qui  peut  contribuer  à  les  faire  juger 
moins  rigoureusement.  M.  de  Len- 
clos ,  professant  ouvertement  l'épi- 
curéisnie  le  plus  relâché,  avait  donné 
à  sa  fille  des  préceptes  de  volupté 
qu'il  ne  confirmait  que  trop  par  sa 
manière  de  vivre  ;  et  l'on  sait  quelle 
influence  exercent  sur  nos  idées  et  nos 
actions  de  toute  la  vie ,  les  discours 
et  l'exemple  des  personnes  qui  ont 
présidé  à  notre  éducation  ,  surtout 
lorsque  ces  personnes  nous  ont  été 
chères  ,  et  que  leur  doctrine  a  caressé 
nos  goûts  ,  au  lieu  de  les  contrarier. 
Abandonnée  fort  jeune  à  sa  propre 
volonté ,  entourée  de  mille  adora- 
teurs que  lui  attiraient  ses  charmes  , 
flattée  d'inspirer  de  l'amour ,  ne 
pouvant  s'empêcher  d'en  ressentir 
elle  -  même  pour  des  hommes  qui 
réunissaient  presque  tous,  aux  grâces 
de  l'esprit  et  du  corps ^  l'éclat  d'une 
grande  fortune  ou  d'une  haute  nais- 
sance ,  comment  Ninon  se  serait-elle 
défendue  contre  tant  de  séductions  ? 
Elle  y  céda  sans  résistance  ;  mais ,  si 
elle  fut  faible,  elle  ne  fut  point  vile. 
(Quoiqu'elle  eût  le  tort  très-grand  de 


ronsi(!crcr  l'amour,  non  comme  un 
.sentiment ,  mais  comme  nne  sensa- 
tion ,  on  ne  voit  point  qne  cette  espèce 
de  malcrialisme ,  qui  aurait  pu  l'cn- 
traîner  aux  choix  les  plus  honteux, 
lui  en  ail  jamais  fait  faire  un  seul 
que  l'ame  la  plus  délicate  eût  pu  dc- 
saTouer.  La  liste  de  ses  amants  est 
nombreuse;  mais  il  n'y  (igure  aucim 
nom  que ,  pour  son  honneur,  on  soit 
fâché  d'y  voir  inscrit  :  ce  sont  les 
Condé  ,  les  La  Hochcfoucauld  ,  les 
Longucville,lcs  Coli^y  ,  les  Villar- 
ceaux ,  les  Sevigne ,  les  d' Albret ,  les 
d'Estre'cs  ,  les  Gersey ,  les  d'Efliat , 
les  Cilérambault ,  les  La  Châtre ,  les 
Bannier  ,  les  Gourville  ,  etc.  Ce  qui 
établit  surtout  une  prodigieuse  dif- 
férence  entre  Ninon   et   les  autres 
femmes  qui ,  comme  elle  ,  ont  fait 
de  l'amour  une  sorte  de  profession  , 
c'est  qu'elle  ne  trafiqua  point  de  ses 
Caveurs.  Par  inclination  ,  par  ca- 
price ,  ou  même  par  vanile  ,  elle  les 
accordait  en  pur  don  à  l'amabilité, 
au  mérite ,  à  la  célébrité  ;  mais  ja- 
mais elle  ne  les  rendit  à  la  richesse. 
Elle  poussait ,  dit-on  ,  les  scrupules 
du  désintéressement  jusque-là  ,  que 
ceux   dont   elle  avait    satisfait   les 
désirs  ,  perdaient  le  droit    de   lui 
faire  accepter  les  dons  les  plus  lé- 
%evs.  Celle  qui  rejetait  les  présents  de 
l'amour  comme  un  salaire  oiVcnsant, 
n'élait  pas  faite  pour  retenir  les  dé- 
pôts de  l'amitié;  et  tout  le  moîide 
connaît  le  tr.iit  de  probité  relatif  au 
dépôt  de  Gourville.  (  Foyez  Gour- 
ville ,  XVIII ,  iio5  ,  note  'i.  )  Ni- 
non ne  trahissait  point  ses  amants  : 
elle  cessait  de  les  aimer  ,  et  le  leur 
disait.  Ce  ne  fut  que  pour  se  sous- 
traire  aux  fatigantes   importunilés 
de  la  Châtre  ,  qu'elle  lui  signa  ce  fa- 
meux l*illet ,  où  elle  faisait  de  tous 
les  serments   celui   qu'elle  était  le 
moins  en  étal  de  tenir  ,  le  serment 


de  nVn  jamais  aimer  d'autre  de  sa 
vie  ;  et  elle  ne  se  crut  pas  liée  un  seul 
instant  par  un  engagement  si  témé- 
raire. On  sait  que ,  dans  le  moment 
même  où  elle  manquait  à  la  foi  jurée 
de  la  manière  la  moins  équivoque , 
elle  s'éciia  ])lusieurs  fois  :  Ah  !  le 
bon  billet  qua  La  Cfuitre!  \o\a^e 
en  amour  ,  mais  non  point  perfide  , 
Ninon  était   en  amitié  d'une   cons- 
tance à  toute  épreuve.  Ses  amants , 
en  cessant  de  l'être  ,  devenaient  ses 
amis  ;  et  c'était  pour  toujours.  L'a- 
mitié était  le  seul  senlimcnt  respjec- 
table  a  ses  yeux  ,  et  elle  en  remplis- 
sait religieusement  tous  les  devoirs. 
Tous  ses  contemporains  s'accordent 
à  la  peindre  comme  la  plus  sédt.i- 
saule  des  femmes.  Sa  taille  ,  disent- 
ils  ,   était    pleine  de  noblesse ,  de 
grâce  et  de  volupté:  sa  figure  n'était 
pas  parfaitement  régulière,  et  n'avait 
pas    ce  grand  éclat  de  beauté  qui 
frappe  d'abord  ;  mais   l'examen  y 
faisait    découvrir   une    foule    d'à  - 
gréments  et  de  finesses  qui  la  ren- 
daient préférable  aux  figures  les  plus 
correctes  et  les  plus   éblouissante5. 
Les  charmes  de  sa  jiersonne  se  con- 
servèrent si  long-temps  ,  ils  dimi- 
nuèrent d'une  manière  si  lente  et  si 
j)eu  sensible, qu'elle  prolongea  le  don 
de  plaire  et  d'exciter  le  dcsir  jusqu'à 
un  âge  où   les  autres  femmes  sont 
fort  heureuses    de  ne    pas  exciter 
le  dégoût.  On  prétend  qu'à  quatre- 
vingts  ans  elle  inspira  une  forte  pas- 
sion à  rabl)é  Gédoyn.  Voltaire  ne 
rejette  pas  entièrement  celle  anec- 
dote ,  comme  quelques  autres  ont 
fait  ;  mais  à  l'abbé  Gédoyn  il  subs- 
titue l'abbé  de  Chàleauneuf  ,  et  il 
rabat  dix  années  de  l'âge  attribué  à 
Ninon  quand  elle  fit  sa  dernière  folie. 
Au  compte  même  de  Voltaire,  c'est 
encore  avoir  poussé  bien  loin  sa  car- 
rière amoureuse.  L'abbé  Fraguier  , 


n3  LKN 

qui  n'avait  connu  Ninon  que  dans  un 
âge  trcs-avancë,  disait  que  «  qui- 
»  copque  voulait  l'aire  attention  à  ses 
w  yeux ,  pouvait  y  lire  encore  toute 
))  son  histoire.  »  Chaulieu  exprime 
autrement  la  même  idée  :  »  L'amour, 
î)  disait-il ,  s'était  retiré  jusque  dans 
»  les  rides  de  son  front.  »  L'esprit  de 
Ninon  ,  aussi  agréable  que  solide , 
n'était  pas  moins  célèbre   que  ses 
charmes.    Elle   s'était   formée   de 
bonne    heure    par    la    lecture    de 
nos  meilleurs  écrivains  :  à  dix  ans  , 
Montaigne  et  Charron  étaient  ses 
livres   favoris.    Elle    parlait    avec 
facilité  l'italien  et  l'espagnol.  Elle 
évitait  avec  un  soin  extrême  le  ridi- 
cule ^  si  commun  parmi  les  femmes 
qui  croient  être ,  ou  qui  sont  en  effet, 
plus  instruites  que  les  autres,  celuide 
faire  parade  de  leur  savoir.  Mignard 
se  plaignait  de  ce  que  sa  fille ,  depuis 
comtesse  de  Feuquières  ,  manquait 
de  mémoire.   Vous  êtes  trop  heu- 
reux ,  lui  dit  Ninon ,  elle  ne  citera 
point.    «  Son  entretien  était  doux 
»  et  léger ,  dit  l'abbé  Fraguier  :  la 
»  contrariété  la  blessait ,  mais  il  n'y 
)>  paraissait  pas.  »  Elle  n'avait  pas 
négligé  les  arls  agréables  ;  elle  dan- 
sait avec  grâce ,  chantait  avec  goût, 
et  jouait  très  -  bien  du  clavecin ,  du 
luth ,  du  téorbe  et  de  la  guitare.  Tant 
d'agréments  réunis  ne  pouvaient  man- 
quer d'attirer  chez  elle  l'élite  de  la 
cour  et  de  la  ville.  Les  homnaes  les 
plus  distingués  par  la  naissance,  l'es- 
prit et  les  talents  ,  lui  faisaient  une 
cour  assidue.  Des  mères  ambition- 
naient pour  leurs  fds  l'avantage  d'être 
admis  chez  Ninon,  près  de  qui  ils  se 
formaient  aux  manières  et  au  ton  de 
la  bonne  compagnie. Cette  faveur  n'é- 
tait pas  accordée  indistinctement  à 
tous  ceux  qui  la  sollicitaient;  un  mé- 
rite reconnu,  ou  d'heureuses  disposi- 
tions pour  eu  acquérii-y  étaient ,  avec 


la  probité,  les  seuls  titres  qui  pussent 
la  faire  obtenir.  Ninon  n'y  fut  trom- 
pée qu'une  fois.  Ala  sollicitation  d'uu 
de  ses  meilleurs  amis,  elle  avait  con- 
senti à  recevoir  chez  elle  un  M.  Ré- 
mond,  dont  l'éducation  ne  lui  fit 
point  honneur.  Il  se  signala  bientôt 
dans  le  monde  par  tous  les  genres  de 
ridicules.  On  apprit  à  Ninon  qu'il 
allait  se  vantant  partout  d'avoir  été 
formé  par  elle.  Je  suis  comme  Dieu, 
dit-elle  ,  qui  s^est  repenti   d'avoir 
formé  l'homme.  Dégoûtée  de  l'ivro- 
gnerie de  Chapelle, qu'elle  avait  inu- 
tilement voulu  corriger  de  cet  ignoble 
défaut ,  elle  finit  par  l'exclure  de  sa 
maison.  Chapelle  offensé  jura  que, 
pendant  un  mois  entier  ,  il  ne  se  cou- 
cherait pas  sans   être  ivre ,  et  sans 
avoir  fait  une  chanson  contre  Ninon. 
Il  tint  parole.  On  conçoit  sans  peine 
que  les  hommes ,  moins  scrupuleux 
dans  leurs  liaisons  de  tout  genre, 
aient  recherché  avec  empressement 
la  société  d'uue  femme ,   disons  la 
mot ,  d'une  courtisane  charmante  , 
et  se  soient ,  en  quelque  sorte  ,  fait 
un  honneur  d'y  être  admis  :  mais  que 
des  femmes ,  à  qui  le  soin  de  leur 
réputation  commandait  à  cet  égard 
la  plus  grande  réserve ,  n'aient  pas 
rougi  d'être  ouvertement  les  amies 
de  Ninon  ,  voilà  ce  qui  étonne  avec 
raison,  voilà  ce  qu'on  ne  peut  expli- 
quer que  par  un  mérite  vraiment  ex- 
traordinaire dans  la  personne  qui  les 
faisait  ainsi  passer  par-dessus  les  con- 
seils du  pbis  sage  préjugé.  Cela  fait 
supposer  aussi  que  Ninon  mettait  dans 
sa  conduite  autant  de  décence  exté- 
rieure qu'il  en  fallait  pour  que  des 
femmes  honnêtes  ne  fussent  point  em- 
barrassées chez  elle  de  leur  conte- 
nance.M^^s.de  laSuze,de  Castelnau, 
de  la  Ferté ,  de  Sully ,  de  Fiesque  , 
de  la  Fayette,  etc. ,  furent  liées  avec 
elle  d'une  véritable  amitié.  Elle  eu 


nvait  contracte  une  ])ln$  cftroite  et 
nliis  intime  encore  avec  M'"'',  de 
Mainlcnon ,  lorsque  œlle-ci  n'clait 
que  madame  Scarron.  Parvenue 
au  faîte  des  grandeurs ,  celle  dame 
fît  proposer  à  son  ancienne  ainie  de^ 
changer  de  vie ,  et  de  venir  auprès 
d'elle  à  la  cour.  Ninon  refusa.  Ce  ne 
fut  pas  la  seule  fois  qu'elle  sacrifia 
la  fortune  cl  la  faveur  à  son  amour 
pour  le  repos  et  la  liberté.  La  reine 
Cihrisline  fit  en  vain  mille  efforts  pour 
remmener  avec  elleà  Rome.  Elle  dit, 
en  partant,  qu'elle  n'avait  trouvé  au- 
cune femme  en  France  qui  lui  plût 
autant  que  17//// Jire  Ninon.  C'est  dans 
une  conversation  avec  celte  reine,  que 
Ninon  qualifia  les  précieuses,  de  jan- 
sénistes de  V amour.  Plusieurs  beaux- 
esprits  du  temps  ,  plusieurs  écrivains 
assez  distingués  ,  la  célébrèrent  en 
prose  et  en  vers.  De  ce  nombre  furent 
Scarron  ,  Regnier-Dcsmarais  ,  l'abbé 
de  Châteauneuf  et  Saint- Evremont. 
Ce  dernier  2)artageait  ses  adorations 
entre  elle  et  la  fameuse  duchesse  de 
Mazarin  ;  tout  le  monde  connaît  son 
joli  quatrain  : 

L'inJulffentc  et  tape  nature 
A  formé  l'ame  de  Ninon  , 
Delà  roliipté  il'Epicuie, 
Et  d«  la  T«rtu  de  Ca*on. 

tJn  hommage  plus  flatteur  encore 
pour  elle ,  c'est  le  cas  que  Molière 
faisait  de  son  esprit  et  de  son  goût  • 
il  la  consultait,  dit-on  ,  sur  tous  ses 
ouvrages.  Gomme  il  lui  avait  lu  un 
jour  sou  Tartuffe,  elle  lui  raconta 
une  aventure  qui  lui  était  arrivée  avec 
un  scélérat  à  peu  près  de  la  même  es- 
pèce.Molière  rapporte  qu'elle  lui  avait 
tracé  le  porlralt  de  cet  homme  avec 
des  couleurs  si  naturelles  et  si  vives, 
que ,  si  sa  pièce  n'eût  pas  élé  faite , 
il  ne  l'aurait  jamais  entreprise  ,  tant 
il  se  serait  cru  incapable  de  rien 
mettre  sur  le  théâtre  d'aussi  parfait 
(ia%  le  Tarlufï'e  de  M"«.  de  Lcudos. 


LEN  7(j 

Tout  porte  à  croire  queNinon  appar- 
tenait à  la  secte  d'Epicure,  non-seu- 
lement par  son  amour  j)our  la  vo- 
lupté, mais  encore  ])ar  son  indifTc- 
rence  pour  la  relidon,  si  toutefois 
ce  n'était  que  de  l'indifférence.  «  Si 
»  vous  saviez,  dit  M"»*^.  de  Sévigné , 
»  comme  elle  dogmatise  sur  l^reli- 
»  giou  ,  cela  vous  ferait  horreur.  » 
Un  jésuite,  ayant,  dit-on,  essayé  de  lui 

Iirouver  quelques-unes  des  vérités  d« 
a  foi,  et  n'ayant  pu  en  venir  à  bout, 
finit  par  lui  dire  :  Eh  bien  !  Made- 
moiselle ,  en  attendant  que  vous 
soyez  convaincue  ,  ojfrez  toujours 
à  Dieu  vot'e  incrédulité.  Rousseau 
a  mis  ce  mot  en  épigramrae.  Il  paraît 
que  Port  -  Royal  entreprit  aussi  sa 
conversion  ,  sans  plus  de  succès. 
Fous  savez,  dit-elle  à  Fontenelle  , 
le  parti  que  j^ aurais  pu  tirer  de  mon 
corps: je  pourrais  encore  mieux  ven- 
dre mon  ame  ;  les  Jansénistes  et  les 
Molinistes  se  la  disputent.  Un  de  ses 
amis  refusant  de  voir  son  curé  dans 
une  maladie,  elle  lui  mena  ce  prêti'e, 
à  qui  elle  dit  :  Monsieur,  faites  votre 
devoir; je  vous  assure  que, quoiqu'il 
raisonne ,  il  n'en  sait  pas  pins  que 
vous  et  moi.  On  cite  d'elle  plusieurs 
réflexions  profondes  ou  ingénieuses. 
Elle  eut ,  à  l'âge  de  vingt-deux  ans , 
une  maladie  qui  la  mit  au  bord  du 
tombeau.  Ses  amis  déploraient  cette 
rigueur  du  destin  qui  la  faisait  périr 
dans  son  printemps.  Ah  !  leur  dit- 
elle  ,  je  ne  laisse  au  monde  que  des 
mourants.  Elle  disait  quelquefois  : 
La  beauté  sans  ^rdce ,  est  un  hame- 
çon sans  appdt.  —  Je  rends  grdcc  à 
Dieu  tous  les  soirs  de  mon  esprit  , 
disait-elle  un  jour  à  St.-Evremont , 
et  je  le  prie  tous  les  matins  de  me 
préserver  des  sottises  de  mon  cœur. 
Elle  prétendait  «  qu'une  femme  sen- 
»  sec  ne  devait  jamais  prendre  d'a- 
>i  manl  sans  l'aveu  de  son  cœur ,  ni^ 


Sa  LEN 

»  de  mari  sans  le  consentement  de 
«  sa  raison.  »  Ninon  avait  le  talent 
des  vers  ;  mais  elle  en  faisait  rare- 
ment usage.  Le  grand-prieur  de  Ven- 
dôme avait  tente  inutilement  de  se 
faire  aimer  d'elle;  outre  de  ses  refus, 
il  mit  ce  quatrain  sur  sa  toilette  : 

Indigne  lie  mes  feux,  indigne  Je  mes  larmes, 
Je  r/iionce  «ans  peine  à  Us  faibles  appas  : 

M»n  aftiom  te  prêtait  des  charmes, 

Ingrate  ,  que  tu  n'avais  pas. 

Elle  y  repondit  par  cette  parodie  : 

Insensible  à  tes  fpux  ,  insensible  à  tes  larmef. 
Je  te  vois  renoncer  à  mes  faibles  appas; 
Mais  si  l'amonr  prête  des  charmes  , 
Pourquoi  n'en  empruntais-tu  pas  ? 

Le  bonheur  dont  jouissait  Ninon 
fut  trouble   par  l'accident  le   plus 
affreux.  Un  fds  qu'elle  avait  eu  de 
Yillarceaux,  ignorant  qu'elle   était 
sa  mère ,  devint  ëperdument  amou- 
reux d'elle;  et  lorsque  voulant  mettre 
fin  à  cette  fatale  passion ,  elle  lui  eut 
rëvëlele  secret  de  sa  naissance, l'in- 
forluné  jeune  homme  alla  se  poi- 
gnarder de  désespoir.  Son  autre  fils, 
nommé  la  Boissière ,  fit  une  espèce 
(de  fortune;  il  devint  capitaine  de  vais- 
seau ,  et  mourut  à  Toulon  en  1 73'2  , 
âge  de  75  ans.  Tout  le  monde  sait 
que  Voltaire  fut  présente  à  Ninon  , 
au  sortir  du  collège  ,  par  ra])Lé  de 
Châteauneuf ,  el  qu'elle  lui  laissa  par 
son  îestamentdeux  mille  francs  pour 
acheter  des  livres.  Ninon  mourut  à 
Paris ,  dans  sa  maison  de  la  rue  des 
Tourneîles  ,  au  Marais  (  i  ) ,  le    17 
octobre    1706,  à   l'âge   de  quatre- 
vingt-dix  ans  et  cinq  mois.  On  a  écrit 
plusieurs  fois  sa  vie.  (  Fojez  Bret  et 
Damours.  )  Voltaire  ,  impatienté  de 
voir  paroîlre  tant  de  mémoires  sur 
elle ,  dit  ;  «  Si  cette  mode  continue  , 
»  il  y  aura  jjientôt  autant  d'histoires 
»  de  Ninon  que  de  Louis  XIV.  »  H 
reste  d'elle  un  petit  nombre  de  lettres 


(i)  Son  appartement  a  éti  conservé  t«I  qu'elle 
l'avait  arr&iigé. 


LEN 

adressées  à  St.-Evremont ,  qui  sont 
ensevelies  dans  le  volumineux  re- 
cueil des  œuvres  de  cet  auteur ,  et 
qu'on  en  a  extraites  pour  les  impri- 
mer à  part ,  d'abord  en  1761  ,  pré- 
cédées de  Mémoires  sur  Ninon,  attri- 
bués à  Dourxménil ,  ensuite  dans  la 
collection  des  lettres  de  femmes  cé- 
lèbres ,  ])ubliée  en  1 8o5  par  Léopold 
Collin.  Les  lettres  de  Ninon  sont  re-  , 
marquablcs  par  le  naturel  etl' élégante 
simplicité  du  style.  On  lui  attribue, 
sur  la  foi  de  l'abbé  de  St.-Léger,  un 
petit  écrit,  intitulé  La  Coquette  ven- 
gée ^  qui  a  été  inséré  dans  la  collec- 
tion de  Léopold  Collin ,  ensuite  dans 
une  réimpression,  faite  en  1806  ,  des 
prétendues  Lettres  de  Ninon  de  l'En- 
clos au  marquis  de  Sé^igné ,  dont 
l'auteur  est  Damours.  M.  de  Ségur 
jeune  a  publié,  en  1789  ,  in-S».  ,  ou 
2  vol.  in-  12  ,  une  Correspondance 
secrète  entre  Ninon  de  V  Enclos  , 
M.  de  Villarceaux  et  Madame  de 
Maintenon  :  c'est  encore  un  ouvrage 


supposé.  Voltaire  a  mis  en  comédie 
sous  le  titre  du  Dépositaire  ,  le  trait 
de  la  cassette  rendue  à  Gourville  ;  et 
il  a  consigné  plusieurs  anecdotes  re- 
latives à  Ninon  ,  dans  une  Lettre  qui 
fait  partie  de  ses  Mélange*  litté- 
raires. A-G-R. 

LENET  (Pierre)  succéda  ,  le  23 
septembre  1607  ,  à  son  père,  Claude 
Lenet,  conseiller  au  parlement  de 
Bourgogne,  efdevint  en  1641 ,  pro- 
cureur-général près  le  même  parle- 
ment. Il  y  réunit,  en  i (340,  la  charge 
de  procureur-général  à  la   table  de 
marbre   de  Dijon.  -Cenet   était   lié 
particulièrement  avec  le  comte  de 
Bussy-Kalmlin ,  qui  nous  a  conservé 
une  joUe  épîtrede  leur  composition 
adressée  à  M.  et  à  M"»^  de  Sévignc  , 
dans  le  mois  de  mars  1646.  Cette 
dernière  parlant  de  Lenet  à  sa  fille, 
dans  sa   lettre  du  5  juin  1689,  dit 


T.EN 

^uil  avait  de  l'esprit  comme  douze; 
et  elle  écrivait  à  Biissy,  le  \i  juillet 
1691  :  «  J'ai  vil  M.  de  Larre,  fils 
»  de  notre  pauvre  ami  Lcnet,aycc 
»  qui  nous  avons  tant  ri;  car  jamais 
«  il  ne  fut  une  jeunesse  si  liante 
»  que  la  nôtre,  de  toutes  les  façons.» 
liCnet  abandonna  Bussy  -  Kabutin 
dans  sa  dis|»ràce,  comme  on  le  voit 
dans  un  fragment  des  mémoires  de 
celui-ii,  inséré  dans  une  note  de  la 
lettre  634  de  Tédition  que  l'auteur 
de  cet  article  donna  ,  en  i8i8  ,  des 
Lettres  de  M™*,  de  Sévigné.  Devenu 
cnnemijBussynepardonnait  pas;  aus- 
si ne  se  réconcilièrent-ils  jamais.  Con- 
sidéré sous  un  autre  point  de  vue,  Le- 
net  n'est  pas  étranger  à  l'histoire.  Sa 
famille  était  depuis  long-temps  at- 
tachée à  la  maison  de  Condé  ;  et  ce 
fut  à  cette  recommandation  puis- 
sante, qu'il  dut , sous  la  régence , sa 
Sromotion  à  la  place  de  conseiller- 
*état.  Anne  d'Autriche  le  choisit 
pour  être  l'un  des  intendants  de  jus- 
tice ,  police  et  finances  ,  pendant 
ie  siège  de  Paris  ,  en  1649.  Les 
princes  de  Condé  et  de  Conti ,  ayant 
été  arrêtés  avec  le  duc  de  Longue- 
ville,  leur  beau-frère,  le  18  janvier 
i65o,Lenet,qui  était  alors  en  Bour- 
gogne,  commença  à  travailler  sour- 
dement pour  leurs  intérêts  ;  puis 
étant  vctiu  à  Paris,  il  eut  ordre  de 
la  régente  de  quitter  cette  ville.  Il  se 
rendit  à  Chantiili,  où  les  deux  prin- 
cesses de  Condé  s'étaient  retirées 
avec  le  jeune  duc  de  Bourbon.  Le- 
nct  devint  le  chef  de  leur  conseil; 
et  ce  fut  lui  qui  détermina  la  jeune 
princesse  de  Condé  à  se  rendre  avec 
son  fils  à  Montrond,  château-fort  du 
Berri,qui  appartenait  au  prince  son 
mari.  Le  récil  des  événements  aux- 
quels celte  retraite  donna  lieu  ,  et 
de  Tempire  que  l'épouse  du  grand 
Gondé  exerça  dans  la  ville  de  Bor- 

3LXIV. 


li:n 


8t 


deaux,  appartient  tout  entier  à  l'his- 
toire de  cette  princesse  ;  Lenct  eu  a 
tracé  le  tableau,  dans  les  Mémoires 
qu'il  nous  a  laissés  sur  l'histoire  dei 
guerres  civiles  Aas  années  1649  et 
suivantes  ,  et  qui  ont  été  publiés  , 
en  i'J'-i9,  en  deux  volumes  in  -  la , 
sans  indication  de  lieu.  On  lit  dans 
la  Bibliothèque  des  auteurs  de  Bour- 
gogne, qu'un  parent  de  ce  magistrat, 
conservait  une  copie  de  ces  mémoi* 
res,  qui  était  plus  ample  que  l'im* 
primé.  Lenet  n'est  pas  un  écrivain 
élégant  ;  mais  son  récit  porte  le  ca- 
ractère de  la  franchise,  et  il  rapporte 
beaucoup  de  circonstances  qui  sans 
lui  seraient  restées  inconnues.  Ilmou* 
rut  à  Paris  ,  le  3  juillet  167 1.  Un  de 
ses  frères  ,  mort  en  1676  ,  était 
connu  sous  le  nom  de  Xabbé  de  la 
Fictoire;  c'était  un  homme  d'esprit 
dont  M"**=.  de  Sévigné  nous  a  con- 
servé quelques  mots  heureux.  Il 
avait  un  autre  frère  nommé  Phi-- 
lippe,  qui  était  général  de  l'ordre  du 
A/ al  -des-Choux  ,  en  Bourgogne.  — 
Philibert-Bernard  Lenet,  chanoine 
régulier  de  Sainte-Geneviève,  profes- 
seur en  théologie,  dans  l'abbaye  dô 
Saint-Jacques  de  Provins,  et  anciea 
abbé  du  Val-des-Écoliers, parent  des 
précédents,  naquit  à  Dijon,  le  24 
août  1677;  il  était  fils  de  Philibert 
Lenet,  conseiller  au  parlement  de 
Bourgogne.  On  a  de  lui  V  Oraison 
funèbre  de  François  d'Aligre,  abbé 
commandataire  de  Saint-Jacques  de 
Provins,  Paris,  1712  ,  in-1.2.  Il  est 
auteur  de  l'Avertissement  qui  est  à 
la  tête  du  traité  des  Principes  de  la 
foi  chrétienne ,  par  Duguet ,  Paris  , 
1736,  in- 12  ,  ainsi  que  du  Témoi- 
gnage au  sujet  de  M.  Dumiet,  qui 
se  trouve  dans  le  recueil  des  letties 
que  M*"*^.  Mol  fit  imprimer  en  1 734, 
et  qui  est  dédié  au  père  Lenet.  Il 
flioiiiul  eu  174s.  M-i. 

6 


6a  LEN 

LENFANT  (Jacques)  ;  ministre 
protestant,  ne  eu  1661 ,  à  Bazoclies 
dans  la  Beauce  ,  commença  sou 
cours  de  théologie  à  Saumur,  sous 
Jacques  Cappel,  et  alla  le  continuer 
à  Genève.  Il  passa,  en  1684,  à 
Heidelberg  ;  et  l'année  suivante,  il 
fut  nommé  chapelain  de  l'electrice 
douairière  palatine,  et  pasteur  ordi- 
naire de  l'église  française.  Dans  le 
mois  d'octobre  1688,  il  sortit  pré- 
cipitamment de  Heidelberg,  parce 
qu'il  craignait  les  troupes  françaises 
qui  venaient  d'entrer  dans  le  Palati- 
iiat ,  sous  le  commandement  de  Tu- 
renne  ,  et  se  rendit  à  Berlin,  où  il 
commença  ,  en  1689  ,  .à  exercer  les 
fonctions  de  pasteur  ,  qu'il  continua 
de  remplir  pendant  près  de  qua- 
rante ans.  En  1707,  il  fit  un  voyage 
en  Angleterre ,  et  prêcha  devant  la 
reine  Anne  ,  qui  l'aurait  pris  pour 
chapelain  s'il  avait  pu  se  résoudre 
à  renoncer  à  Berlin.  En  1 7 1  o ,  il  fut 
agrégé  à  la  société  de  la  propaga- 
tion de  la  foi,  établie  en  Angleterre. 
Il  visita  Helmstadt  en  171'^  ,  et 
Leipzig  en  1 7 1 5,  dans  le  dessein  de 
compulser  les  bibliothèques  ,  et  d'y 
découvrir  les  livres  rares  et  les  ma- 
nuscrits dont  il  avait  besoin  pour 
composer  ses  ouvrages  historiques. 
Le  2  mars  l'j'^i,  l'académie  des 
sciences  de  Berlin  le  reçut  parmi 
ses  membres.  Il  mourut  d'une  at- 
taque de  paralysie  ,  le  7  août  1728. 
La  reine  Sophie  Charlotte  l'avait 
nommé  son  prédicateur;  et  à  la  mort 
de  cette  princesse,  en  1705,  le  roi 
Frédéric  -  Guillaume  le  prit  en  la 
même  qualité.  Lenfant  fut  aussi 
membre  du  consistoire  supérieur  et 
du  conseil  français,  chargé  de  diri- 
ger les  affaires  des  réfugiés.  On  a  dit 
ue,dans  ses  écrits,  l'on  trouvait  plus 
e  modération  que  dans  ceux  de  ses 
confrères.  Il  est  vrai  que  l'impar- 


I 


LEN 

tialité  la  plus  étudiée  règne  dans  sel 
histoires  ;  mais  dans  ses  controver- 
ses ,  il  n'est  ni  plus  juste ,  ni  plus 
modéré  que  les  autres  ministres.  On 

f>eut  voir  dans  Niceron ,  tome  ix  , 
a  liste  de  ses  ouvrages  ,  au  nom- 
bre de  trente-cinq.  Nous  indiquerons 
les  suivants  :  I.  Considérations  géné- 
rales sur  le  Livre  de  M,  Bnieys , 
intitulé  :  Examen  des  raisons  qui 
ont  donné  lieu  à  la  séparation  des 
protestants,  Rotterdam  ,  1684  ■>  i^- 
8**.  L'auteur  n'avait  alors  que  vingt- 
trois  ans.  II.  Lettres  choisies  de 
Saint  Cyprien  aux  confesseurs  et 
aux  martyrs  ,  avec  des  remarques 
historiques  et  morales,  Amsterdam» 
1688,  in- 12.  \\\.  De  inquirendd 
veritate,  Genève,  1691 ,  in-4''.  C'est 
une  traduction  latine  du  livre  de 
Malebranche.  IV.  Histoire  de  la 
papesse  Jeanne  ,  fidèlement  tirée 
de  la  dissertation  latine  de  M. 
Spanheim,  Cologne,  Amsterdam, 
1694  ,  in-12.  Desvignoles,  qui  avait 
eu  beaucoup  de  part  à  cette  édition , 
en  donna  une  seconde,  La  Haye, 
17*20  ,  in- 12,  2  vol.,  et  y  fit  quel- 
ques additions ,  avec  le  consente- 
ment de  Lenfant.  (Avertiss.  du  li- 
braire. )  V.  Histoire  du  concile  de 
<7on5f«nce,  Amsterdam,  1 7 1 4,  in-4''. 
fig.  Leclerc  écrivait  à  l'abbé  Bi- 
gnon  ,  à  l'occasion  de  cet  ouvrage  : 
«  M.  Lenfant  vient  de  publier  l'his- 
»  toire  du  concile  de  Constance,  que 
»  l'on  verra  bientôt  à  Paris.  On  y 
«trouvera,  non -seulement  beau- 
î>  coup  de  travail  et  d'exactitude, 
»  mais  encore  de  sincérité  et  de 
»  modération.  S'il  n'y  avait  pas 
»  mis  son  nom,  on  ne  devinerait 
»  assurément  pas  qu'un  ministre  est 
»  l'auteur  de  cet  ouvrage.  Il  serait 
»  à  souhaiter  que  toutes  les  histoi- 
»  res  s'écrivissent  avec  le  meraa 
»  calme  et  la  même  retenue.  »  Cepen- 


LEN 

dant  l'aljbc  Bignon  ne  pensait  pas 
tout-à-fait  de  nicnic.  Il  accuse  Len- 
fanf,  dans  une  lettre  qu'il  lui  adresse, 
d'avoir  laisse  trop  paraître  l'esprit 
de  parti  et  sa  haine  contre  l'église 
catholique.  (  Gorresp.  Mss.  )  L'édi- 
tion de  1727,  Amst.,  u  vol.  in-4". , 
quoique  plus  soignée,  est  loin  d'être 
parfaite.  VI.  Apologie  pour  l'auteur 
de  l'Histoire  du  concile  de  Cons- 
tance contre  le  journal  de  Trévoux, 
du  mois  de  décembre  1 7 1 4  »  Ams- 
terdam ,  1716  ,  in-4<*.  VII.  Histoire 
du  concile  de  Pise  ,  et  de  ce  qui 
s^est  passé  de  plus  mémorable  de- 
puis ce  concile  jusqu'au  concile  de 
Constance^  Amst.,  1724;  Utrecht, 
1731,2  vol.  in-4°.  Il  y  a,  à  la  fin, 
une  déclaration  de  Charles  VI  con- 
tre le  duc  de  Bourgogne,  et  une  justi- 
fication de  ce  prince.  VIII.  Histoire 
de  la  guerre  des  Hussites  et  du  con- 
cile de  Baie  ,  Amsterdam  ,  l'J'if)  ; 
Utrecht ,  1731  ,  a  vol.  in-4°.  La 
veuve  de  l'auteur  ayant  préside  à 
l'impression  de  cette  édition  ,  y  joi- 
gnit, d'après  la  volonté  deLeufant, 
la  dissertation  de  Beausobre  sur  les 
Adamites  de  Bohème.  IX.  Traduc- 
tion du  Nouveau-Testament ,  avec 
des  remarques  et  d'amples  pré  far- 
ces (avec  Beausobre) ,  Amsterdam, 
171G,  '2  vol.  in-4".  X.  Pojj^gianay 
ou  la  vie  ,  le  caractère ,  les  senti- 
ments et  les  bons  mots  de  Pos^e^ 
Florentin ,  avec  l'histoire  de  Flo- 
rence, édite  par  le  Pogge  ,  et  un 
supplément  de  diverses  pièces  im- 
port- nies.  Amsterdam,  179.0,  9.  vol. 
in- 12.  On  trouve  quelques  lettres  de, 
Lcnfant,  au  sujet  de  cet  ouvrage, 
dans  des  journaux  littéraires.  XI. 
Seize  sermons  sur  divers  textes , 
Amsterdam,  17-28,  in-S».  XII.  Bi- 
bliothèque germanique^  ou  Histoire 
littéraire  de  l'Allemagne  et  des 
pays  du  Nord  depuis  i  yio  jusqu'en 


LEN 


85 


1740  (avec  Beausobre,  Larroze, 
Mauclerc  et  Formey),  5o  vol.  in- 1 'i. 
XIII.  Journal  littéraire  d'Allema- 
gne ,  de  Suisse  et  du  Nord  (  avec 
les  mêmes),  •?.  vol.  in-S^.  Lenfant  a 
aussi  donné  beaucouj)  de  pièces  dans 
la  Bibliothèque  rAoïA/e  de  Leclerc, 
et  dans  les  Nouvelles  de  la  Bépu- 
blique  des  Lettres.  11  était  en  cor- 
respondance avec  les  principaux  per- 
sonnages de  sou  temps,  d'Aguesseau, 
l'abbé  Bignon  ,  dont  nous  avons  eu 
occasion  de  voir  le  Mss. ,  Bayle,  Cu- 
per,  etc.  Leibnitz  l'avait  soupçonné, 
mais  injustement,  d'avoir  écrit  con- 
tre V  Harmonie  préétablie.  On  trou- 
ve un  Mémoire  historique  sur  Len- 
fant ,  en  tcte  de  la  deuxième  édi- 
tion de  V Histoire  du  concile  de 
Bdle  et  dans  la  Bibliothèque  ger- 


manique,  tome  XVI. 


L-B-E. 


LE^fFANT  (  Alexandre-Char- 
les-Anne),  jésuite,  célèbre  pré- 
dicateur ,  naquit  à  Lyon ,  le  6  sep- 
tembre 17'iO,  d'une  famille  noble  , 
originaire  du  Maine.  Il  fit  ses  pre- 
mières études  chez  les  jésuites  de 
cette  ville  ,  qui  développèrent  ses 
heureuses  dispositions  pour  les  scien- 
ces et  pour  la  piété.  En  T741  ,  il  fut 
admis  au  noviciat  d'Avignon, et,  peu 
d'années  après ,  envoyé  à  Marseille 
pour  y  professer  la  rhétorique.  Son 
début  dans  la  carrière  de  la  prédi- 
cation eut  tant  de  succès  ,  que  ses 
supéiieurs  résolurent  de  l'y  fixer 
exclusivement.  Les  principales  villes 
de  France  l'entendirent  avec  la  plus 
grande  salisiaction,  et  surtout  arec 
beaucoup  de  fruit.  A  MaUnes,il  con- 
quit, par  ses  prédications  ,  à  l'église 
catholique  ,  un  ministre  anglican  , 
ami  d'Young.  La  suppression  de  sa 
soriélé,  consommée  en  1773,  lança 
dans  une  nouvelle  sphère  le  père 
^jcnfant,  alors  âgé  de  quarante-sept 
aûs  :  il  était  l'ornemeut  du  cloître  ; 


84  Ï^EN 

il  ne  fut  pas  déplacé  dans  le  monde, 
où  ilconlinua  le  cours  de  ses  bonnes 
œuvres  et  les  fonctions  de  son  apos- 
tolat. Plusieurs  souverains  s'empres- 
sèrent de  l'attirer  auprès  d'eux.  Les 
philosophes  eux-mêmes  assistèrent 
à  ses  discours.  Le  père  Lenfant  prê- 
cha plusieurs  stations  à  Lunëville,  à 
Vienne  et  à  Yersailles.Bideroî  et  d' A- 
lembert  le  suivirent  pendant  un  ca- 
rême entier  à  Saint-Sulpice  ;  et  après 
un  Seimon  sur  la  foi,  le  premier  dit 
à  l'autre  ;  «  Quand  on  a  entendu  un 
»  discours  semblable,  il  devient  dif- 
:)  ficile  de  rester  incrédule.  »  Ceux  qui 
ont  entendu  i'abbé Lenfant,  convien- 
nent qu'il  électrisait  son  auditoire, 
«00  parla  pompe  du  débit,  mais  par 
i'harmonie  de  sa  voix,  par  sOn  air 
de  conviction ,  et  par  la  force  de  sa 
composition.  En  1791 ,  il  prêchait 
le  carême  à  la  cour;  mais  il  fut  obligé 
d'interrompre  la  station  par  suite  de 
son  refus  du  serment  à  la  constitu- 
tion civile  du  clergé.  Le  3o  août, 
1 792  ,  il  fut  conduit  à  la  prison  de 
l'A-bbaye;  et  le  lendemain  ,  il  com- 
mença ,  pour  ainsi  dire ,  ses  dispo- 
sitions testamentaires ,  en  remettant 
à  un  huissier  l'argent  qu'il  avait  sur 
lui.  «  Le  3  septembre, à  dix  heures 
i)  du  malin, dit  un  témoin  échappé  au 
»  massacre ,  i'abbé  Lenfant  et  l'abbé 
»  de  Rastignac  ,  parurent  dans  la 
*»  tribune  de  la  chapelle  qui  nous 
»  servait  de  prison  j  ils  annoncèrent 
;>  que  notre  dernière  heure  arrivait, 
»  et  nous  invitèrent  à  nous  recueillir, 
5)  pour  recevoir  leur  bénédiction. 
»  Un  mouvement  électrique ,  qu'on 
»  ne  peut  défmir ,  nous  précipita 
»  tous  à  genoux  ,  et  les  mains  join- 
»  tes  ,  nous  la  reçûmes.  »  Après  re- 
gorgement de  plusieurs  prêtres  ,  du 
comte  de  Montmorinet  des  Suisses, 
Tabbé  Lenfant  fut  appelé  devant 
^espèc^de  tribunal  que  les  meui- 


LÊN 

triers  avaient  établi.  En  le  voyant 
paraître  ,  le  peuple  demanda  qu'il 
fût  épargné.  Les  bourreaiix  le  lâ- 
chèrent ;  on  lui  criait  de  tout  coté  : 
Sauvez-vous,  Il  était  hors  de  la 
foule,  et  déjà  même  dans  la  rue  de 
Bussy  ,  lorsque  des  femmes  le  tra- 
hirent ,  en  disant  indiscrètement  : 
C'est  le  confesseur  du  Roi  î  II  est 
saisi  de  nouveau  et  ramené  à  l'Ab- 
baye ;  il  lève  les  mains  au  ciel  et 
profère  ces  paroles  évaugéiiques ,  les 
dernières  qui  sortirent  de  sa  bouche  : 
Mon  dieu,  je  vous  remercie  de  pou- 
voir vous  offrir  ma  vie ,  comme  vous 
avez  offert  la  vôtre  pour  moi.  Il  se 
met  à  genoux ,  et  il  expire  sous  les 
coups  des  assassins.  Quelque  temps 
auparavant,  les  administrateurs  de 
police  et  de  surveillance ,  consultés 
par  Maillard  sur  le  sort  destiné  à 
l'abbé  Lenfant,  répondaient  de  la 
Mairie :«  Nous  déclarons  au  peuple, 
»  qu'il  importe  beaucoup  à  l'intérêt 
»  public  que  l'abbé  Lenfant  soit  con- 
»  serve  ;  mais  qu'il  ne  soit  pas  mis 
»  en  liberté  ;  au  contraire  ,  très- 
»  étroitement  gardé.  »  Voulait-on  le 
sauver  ?  cela  est  vraisemblable.  Mais 
le  délire  dans  lequel  étaient  plongés 
ces  cannibales,  ne  leur  permit  pas  d« 
prendre  des  mesures  pour  parvenir 
à  ce  but.  Nous  avons  de  l'abbé  Len- 
fant :  I.  Oraison  funèbre  du  Dau- 
phin y  père  du  Roi  Louis  XVIII  , 
prononcée  à  Nanci ,  en  176G.  II. 
Sermons  pour  VAveîit  et  pour  le  Cu' 
rémCy  Paris,  i8i8,in-i2,  8  vol. 
III.  Oraison  funèbre  de  M.  de 
Belzunce  ,  évêque  de  Marseille^ 
prononcée  en  latin  ,  et  imprimée 
avec  une  traduction  française,  1 756, 
in-8^.  Quelques  personnes  lui  attri- 
buent le  Discours  à  lire  au  conseil, 
sur  le  projet  d'accorder  Vétat  civil 
aux  protestants i  mais  c'est  à  tort,  il 
est  du  P.  Bomieau.  Le  P.  Lenfant  était 


T.RN 

fcrtnincmcnt  run  des  }>lns  p;ran(ls 
pivdiratcurs  île  son  temps  :  ses  ser- 
mons paraissent  n'avoir  pas  cepen- 
dant obtenn  ,  après  rini])ression,  le 
5uccès  que  semblait  annoncer  sa  ré- 
putation. Sa  famille  en  conserve 
près  de  4o ,  et  une  correspondance 
avec  son  frère.  L-b--e. 

LENGLET  DUFRESNOY  (INico- 
LAs),  ne  à  Beauvais ,  le  5  octobre 
i(i'j4  '  fi'  SCS  études  à  Paris.  Il  e'tait 
encore  sur  les  bancs  de  rc'colc  et 
dans  sa  seconde  année  de  tlie'ologie, 
lorstp'à  l'âge  de  vingt-deux  ans,  il 
débuta  dans  la  carrière  des  lettres 
par  un  opuscule  qui  fit  quelque  bruit. 
D'autres  écrits  qu'il  publia  sur  des 
"lalières  analogues  donnaient  lieu 
'  croire  qu'il  se  livrerait  à  la  the'o- 
ii)gie,  quand  les  circonstances  le  lan- 
cèrent dans  la  carrière  diplomatique. 
Kn  1705,  il  fut  premier  secrétaire , 
pour  les  langues  latine  et  française, 
♦le  la  cour  de  l'électeur  de  Cologne, 
Joseph  Clément  de  Bavière,  qui  re- 
niait à  Lille.  Se  trouvant  dans  cette 
>  lUe  lorsqu'elle  fut  prise  par  le  prince 
l'-iigène,  Lenglet  lui  demanda  et  en 
obtint  un  sauf-conduit  pour  tout  ce 
I  li  appartenait  à  la  couronne  élec- 
rale.  Sa  position  lui  donna  occa- 
!on  de  déjouer  les  projets  de  quel- 
ques ennemis  de  la  France,  a  La  dé- 
w  couverte  la  plus  importante  qu'il 
»  fit,  dit  Michault,  fut  celle  d'un 
»  capitaine  des  portos  de  Mons,  qui 
»  devait  Irvrer  aux  ennemis,  non- 
»  seulement  la  ville  (Lille),  mais 
»  encore  les  électeurs  de  Cologne  et 
»  de  Bavière  qui  s'y  étaient  reti- 
»  rés....  Le  traître  fut  convaincu  et 
«  rompu  vif.  »  Le  même  Michault 
raconte  qu'en  1718,  lors  de  la  cons- 
piration de Cellamare  {Voyez  (.kl- 
LAMARK,  tOra.  VII,  ])ag. '>o'iet5o3  ) , 
Lenglet  Dufresnoy  fut  choisi  pr  le 
aijiiîîcri?  pour  pénétrer  cjltf  inlii- 


gue.  Il  ne  voulut  se  charger,  dit-on , 
de  cette  commission  jjeu  délicate  | 
qne  sur  la  promesse  qui  lui  fut  faite 
qu'aucun  de  ceux  qu'il  décou\  rirait 
ne  serait  puni  de  mort.  Ce  serait 
donc  en  qualité  de  mouton  qu'il  au*- 
rait  été  mis  à  la  Bastille  dès  le  mois 
de  seplembre  1 7 1 8,  comme  prévenrt 
d'avoir  fabriqué,  au  nom  du  parle- 
ment, nn  Mémoire  au  duc  du  Maine. 
C'était  la  première  fois  qu'il  habi- 
tait celte  prison.  On  raconte  qu'il  y 
fut  mis  dix  ou  douze  fois;  il  y  a 
erreur  au  moins  de  moitié.  L'ab- 
bé Lenglet  fut  conduit  à  la  Bastille 
pour  la  seconde  fois  en  172^  ;  pour 
la  troisième  ,  en  1 743  j  pour  la  qua- 
trième, en  1 760 ,  à  cause  de  son 
Calendrier  historique;  pour  la  cin- 
quième et  dernière  fois ,  en  17,51  , 
parce  qu'il  avait  écrit  au  contrôleur- 
général  une  lettre  qu'on  trouva  inso- 
lente(  i  ).  Sur  la  fm  de  l'année  1 7^2 1  ,il 
était  allé  à  Vienne  ;ily  vil  J.-B.  Rous- 
seau, et  le  prince  Eugène,  à  la  biblio- 
thèque duquel  il  fit  quelque  augmen- 
tation. Son  séjour  eu  Autriche  avait 
offusqué  la  cour  de  France  ;  et  à  son 
retour  ,  en  1 7'23  ,  il  fut  arrêté  et  dé- 
tenu six  mois  dans  la  citadelle  de 
Strasbourg.  Il  paraît  qu'en  17*24  ?  if 
fut  pendant  quelque  temps  enfermé 
à  Yinrcnnes.  Toutes  ces  coiitrariétés 
ne  l'empcchèrent  pas  de  se  livrer  au 
travail  et  à  des  recherches  minu- 
tieuses. Sa  fécondité  a  de  qiioi  éton- 
ner. «  Il  eût,  dit  Michault,  joui  d'un^ 
»  destin  plus  heureux  ,  selon  notre 
»  façon  de  penser ,  et  non  selon  k 
»  jnenne,  s'il  eût  voulu  ou  plutfU  s'il 
»  eût  pu  profiter  des  circonstances 


i^i)  Ou  ajoute  qifarcwulumf'  aux  yisitrs 
(les  ofTioiors  «le  la  police  ,  «'t  "»i  romiai»s»nî 
d'avance  les  motifs,  il  demandait  Iranquiile-" 
ment  à  sjf  serviintc  .  sa  boite  de  tabac  et  une 
chtniiso,  puis  s»?  vetouinaul  yirs  l'atgna«il  ' 
«  M.  Tapui,  diïiitt-il,  ic  suis  à  xdb  oiiU«.  •■ 


86  LEN 

1)  heureuses  Q^i  il  s'était  trouve',  et 
«  des  protecteurs  puissants  que  son 
»  mérite  et  ses  services  lui  avaient 
»  acquis;  mais  son  amour  pour  l'iu- 
)>  dépendance  étouffa  dans  son  cœur 
»  la  voix  de  l'ambition....  Tl  voulait 
»  écrire,  penser,  agir  et  vivre  libre- 
»  ment.  Il  dépendait  de  lui  de  s'at- 
»  tacher  ou  au  prince  Eugène^  ou  au 
»  cardinal  Passionéi ,  qui  aurait  de- 
»  sire  de  l'attirer  à  Rome  ,  ou  à  M. 
»  Leblanc,  ministre  de  la  guerre.  11 
))  refusa  tous  les  partis  qui  ^ui  furent 
»  proposes  :  Liberté,  liberté,  telle 
î)  était  sa  devise.  Dans  ses  dernières 
»  années  même ,  où  son  grand  âge 
»  sollicitait  pour  lui  un  loisir  doux 
»  et  tranquille,  il  aima  mieux  travail- 
»  1er  et  rester  seul  dans  un  logement 
»  obscur,  que  d'aller  demeurer  avec 
î)  une  sœur  opulente  qui  l'aimait ,  et 
))  qui  lui  offrait  chez  elle,  à  Paris, 
»  un  appartement ,  la  table  et  des  do- 
»  mestiques  pour  le  servir....  Toutes 
))  ses  études  étaient  tournées  du  côté 
1)  des  siècles  passés;  il  en  affectait  jus  - 
»  qu'au  langage  gothique  :  Je  veux , 
»  disait-il,  eV/'^/'mrec  Gaulois  dans 
y>  mon  stjle  comme  dans  mes  ac- 
TD  lions.  Malgré  sa  vaste  érudition  , 
»  il  est  tombé  dans  des  erreurs  gros- 
y>  sières.  On  l'accuse  même  d*avoir 
»  trompé  aussi  souvent  qu'il  se  trom- 
»  pait ,  ne  se  faisant  aucun  scrupule 
»  d'écrire  le  contraire  de  sa  pensée 
»  et  de  la  vérité  qu'il  connaissait 
»  parfaitement ,  lorsqu'il  était  poussé 
»  par  quelque  motif  particulier.  On 
w  retrouve  dans  ses  notes  et  dans  ses 
»  jugements  la  mordante  causticité 
»  de  Guy  Patin;  et,  comme  rien  ne 
»  pouvait  réprimer  la  pétulance  de 
»  sa  plume,  on  le  voyait  sans  cesse 
»  aux  prises  avec  les  censeurs.  S'il  ar- 
»  rivait  qu'on  lui  rayât  quelque  en- 
»  droit  auquel  il  fût  attaché,  il  le  ré- 
»  tablissait  à  l'impression.  Depuis 


LEN 

»  quelques  années ,  il  s'appliquait  k 
»  la  chimie  :  on  prétend  même  qu'il 
»  cherchait  la  pierre  philosophale. 
»  Parvenu  à  l'âge  de  quatre-vingt- 
»  deux  ans  ,  il  périt  d'une  manière 
»  funeste,  le  i6  janvier  1755.  En 
»  rentrant  chez  lui,  sur  les  six  heures 
»  du  soir,  il  prit  un  livre  nouveau 
))  qu'on  lui  avait  envoyé.  C'étaient  les 
»  Considérations  sur  les  révolutions 
î>  des  arts,  parle  chevalier  de  Mehe- 
D  gan;  il  en  lut  quelques  pages ,  s'en- 
»  dormit  et  tomba  dans  le  feu.  Ses 
»  voisins  accoururent  trop  tard  pour 
»  le  secourir  ;  il  avait  la  tête  presque 
)>  toute  brûlée,  lorsqu'on  le  retira 
»  du  feu.  »  Voici  le  catalogue  de  ses 
ouvrages  :  I.  Lettre  à  MM.  les 
doyen ,  syndics  et  docteurs  en  théo- 
logie  de  la  faculté  de  Paris,  1 696  : 
elle  est  signée  des  lettres  E.  E.  T.  S. 
MM.  D.  L.  et  P. ,  c'est-à-dire  étudiant 
en  théologie  sous  MM.  de  Lestocqet 
Pirot^  et  est  relative  à  la  dénoncia- 
tion faite  à  la  faculté  de  théologie  de 
Paris ,  du  premier  volume  de  la  Fid 
de  la  Sainte  Vierge ,  trad,  de  l'ori- 
ginal espagnol,  attribuéà  la  mère  Ma- 
rie-de-Jésus. II.  Le  P.  Glouseil  ayant 
répondu  à  cette  Lettre,  qui  d'ailleurs 
fut  censurée  par  la  Sorljonne,  Lcn- 
glet  publia  un  nouveau  Mémoire  sur 
le  même  sujet,  et  écrivit ,  le  So  juin 
1697  ,  une  Lettre  en  latin  au  P.  Ma- 
thieu, prieur  des  Carmes  déchaussés 
de  Madrid.  III.  Traité  historique  et 
dogmatique  du  secret  inviolable  de 
la  confession,  1708,  in- 12  ,  de  3^8 
pages,\ion  compris  la  préface.  L'au- 
teur y  a  joint  une  addition  de  109 
pages.  Une  seconde  édition  du  tout 
parut  en  1713,  in- 12.  On  y  mit  un 
nouveau  frontispice  en  1 7 1 5.  L'abbé 
Lenglet  parle  d'une  édition  de  1 733. 
IV.  Mémoires  sur  la  collation  des 
canonicats  de  l'église  de  Tournay , 
1 7 1 1 ,  1 7 1 2  et  1 7 1 3  ^  in-8'^.  V.  Mé- 


LEN 

ir  et  ml  ter  l'histoire ,  mec 
...i'm4e  (les  principaux  histo- 
riens, 171^,  '2  vol.  in- 1 '2;  cinquième 
édition ,  1 7  29  ,  4  vol.  in-4".  On  exi- 
gea un  si  grand  nombre  de  cartons  , 
que  le  recueil  des  morceaux  suppri- 
mées formait  un  in-4*'.  assez  épais. 
Le  marquis  d'Argens'dit  que  tous  ces 
cartons  sont  conserves  dans  l'ouvrage 
de  Beyer  intitule  :  Memoriœ  histo- 
rico-criticœ  librorum  rariorum.  Cette 
editi(yi  in-4°. ,  de  1 729 ,  est  préférée 
à  celles  du  même  format  qui  paru- 
rent en  1  73.5  et  en  1 737.  Il  faut  join- 
dre à  toutes  les  trois  un  Supplément, 
!  740,  3  vol.  in-4**.  ;  mais  on  préfère 
l'édition  de  cet  ouvrage  en  1  5  vol. 
in-r2 ,  Paris,  1772;  elle  est  sans 
cartes ,  mais  Drouet  a  fait  des  aug- 
mentations au  Catalogue  des  his- 
toriens, qiii  en  occupe  les  cinq  der- 
niers volumes ,  et  qui  est  encore  le 
plus  complet  que  nous  ayons  en  fran- 
çais ;  quant  à  la  Méthode ,  etc.  elle 
a  vieilli,  comme  cela  devait  être;  on 
peut  néanmoins  encore^a  consulter 
3 vcc  fruit.  VI.  Méthode  pour  étudier 
la  géographie  j  avec  un  catalogue 
des  cartes  géographiques ,  des  re- 
lations ,  vojages  et  descriptions  les 
plus  nécessaires  pour  la  géographie, 
1716,  4  vol.  in- 1  '1  •  réimprimés  à 
Amsterdam,  17 18,  4  volumes  in- 
1 2 ,  avec  diverses  remarques  con- 
ire  le  réviseur  :  c'était  ainsi  qu'on 
désignait  l'abbé  Lenglet,  dont  l'ou- 
vrage en  effet  n'était ,  dans  la  pre- 
mière édition ,  du  moins  pour  le 
fonds ,  que  la  Nouvelle  GéograpJiie 
du  P.  Marlineau-du-Plessis.  Deuxiè- 
me édition,  173G,  5  vol.  in-r2; 
troisième  édition ,  174?,  7  vol.  in- 
I  '2.  Enfin ,  Drouet  et  Barbeau-La- 
bruyère  en  donnèrent  une  édition 
dans  laquelle  ils  firent  des  augmen- 
tations au  Catalogue,  1 768,  i  o  vol. 
iu- 1-2  j  et  c'est  la  plus  estimée.  VII. 


LEN  87 

Tables  chronologiques  de  l'iiistoire 
universelle  y  1729,  quatre  grandes 
feuilles  ouvertes  ,  réimpr.  en  1733. 
Vllï.  Description  de  la  fête  et  du 
feu  d'artifice  tiré  sur  la  rivière  au 
sujet  de  (g,  naissance  du  Dauphin , 
1 73o ,  in-Zf'^.  IX.  De  l'usage  des  ro- 
mans, avec  une  bibliothèque  des  ro- 
mans, 1734,  '2  vol.  iu-i2,  publiéf 
sous  le  nom  de  Gordon  de  PerceL 
On  trouve  à  la  fin  du  premier  volume, 
1°.  l'Epilre  dédicaloire  de  la  nou- 
velle édition  des  poésies  de  Régnier, 
sous  le  titre  ôi  Eloge  historique  de 
W.  (J.-B.)  Bous  se  au  ,  satire  si  vio- 
lente contre  ce  grand  poète,  que  les 
états-généraux  en  ordonnèrent  la  sup- 
pression •  20.  Lettre  au  marquis  de 
Fénélon  ,  à  l'occasion  de  la  suppres- 
sion de  la  pièce  précédente.  X.  VHiS' 
toire  justifiée  contre  les  romans , 
1735,  m-ii.  Lorsque  Lenglet  ap- 
prit qu'on  lui  attribuait  V  Usage  des 
romans ,  et  qu'on  le  blâmait,  il  prit 
le  parti  de  travailler  contre  son  pro- 
pre ouvrage.  Hérault,  lieutenant  de 
police,  lui  ayant  dit  qu'im  libraire 
de  Rouen,  détenu  à  la  Bastille,  l'avait 
âssuréqnel'abbéLenglet  étaitle  véri- 
table auteur  de  l' Usage  des  romans; 
qu'on  ne  pouvait  se  dispenser  de  flé- 
trir cet  ouvrage  scandaleux ,  et  d'en 
punir  l'écrivain  :  «Comment  se  pour- 
))  rait-il.  Monsieur,  répondit  Len- 
♦»  glet ,  que  ce  livre  fût  sorti  de  ma 
»  plume ,  puisque  je  suis  actuclle- 
»  meut  occupé  à  le  réfuter  ?  »  Dans 
V Histoire  justifiée ,  il  fait  en  effet 
d'assez  bonnes  sorties  contre  l'au- 
teur de  V  Usage  des  romans.  Les 
journalistes  de  Hollande  furent  du- 
pes de  cette  finesse.  «  \J  Usage  des 
»  romans,  disent-ils,  amuse  ;  la  sin- 
»  gularité  des  pensées,  la  liberté, 
))  l'enjouement  du  style  plaît  ;  VHis- 
»  toire  justifiée  csi  une  source  d'en- 
»  nui.   Ou    comparerait  volouli^rs 


8S 


LEN 


»  le  premier  aux  Lettres  -provin- 
y>  cialeSj  et  le  second  aux  j^nfrefien^ 
»  d'Eudoxe  et  de  Cléanthe..,.  En- 
y>  fin ,  au  libertinage  près ,  on  aimc- 
»  rait  mieux  avoir  e'crit  une  seule 
y>  page  de  l' Usa^e  des  romans  que 
»  toute  r  Histoire  justifiée,  »  Ces  deux 
ouvrages  ont  e'të  rëimprime's  en  Hol- 
lande. XI.  De  l'usage  et  du  choix 
des  livres  pour  l'étude  des  belles^ 
lettres,  avec  des  catalogues  raison- 
nes des  auteurs  utiles  et  nécessaires 
pour  se  former  dans  les  diverses 
parties  de  la  littérature,  1736,  in- 
3  2  de  vingt-deux  pages.  Ce  n*est 
que  le  plan  ou  prospectus  d'un  grand 
ouvrage  que  l'auteur  pre'paraît.  XII. 
Géographie  des  Enfants  ,1736,  in- 
J2 ,  rëiraprimëe  dans  les  dernières 
c'ditions  de  sa  Méthode  pour  étudier 
!a  géographie.  XIII.  Principes  de 
V  HistoirepourVéducationde  la  Jew- 
jiesse ,  par  année  et  par  leçon ,  1 7  36, 
1737  ,  5  vol.  in- 12;  le  sixième  a 
paru  en  1735  ;  réimprimé  en  1737  , 
1743  et  en  1752,  6  vol.  in- 12.  XIV. 
Zettre  à  r  auteur  des  Observations 
sur  les  écrits  modernes ,  au  sujet  de 
ïa  Méthode  pour  étudier  la  géogra- 
phie ,  1 739  ,  in-i 2  de  2 1  pages.  C'est 
«ne  réponse  ironique  aux  journalistes 
de  Trévoux ,  qui  critiquaient  sévère- 
ment tous  les  ouvrages  de  l'auteur. 
XV.  Histoire  de  la  Philosophie  her- 
métique, accompagnée  d'un  Cata- 
logue raisonné  des  écrivains  de  cette 
science  ;  avec  le  véritable  Philalète, 
revu  sur  les  originaux ,  1 742,  3  vol. 
in- 1 2.  L'auteur  met  Moïse  au  rang  des 
souffleurs.  On  ne  sait  au  reste  s'il 
parle  sérieusement.  Il  eut  toutefois  de 
rudes  critiques  à  essuyer.  XVI.  Ta- 
blettes chronologiques  de  Vhistoire 
universelle  ,  sacrée  et  profane^i^j^/^^ 
2  vol.  in-S*».;  Barbeau  -  Labruyère 
eu  donna  une  nouvelle  édition  ,  en 
^778,  2  Yol.  iiî-8«'.  M.  Picot  a  pu- 


LEN 

bliéà  Genève,en  1808,  des  Tablettes 
chronologiques,  3  vol.  in-S*'. ,  qu'il  a 
rédigées  d'après  le  travail  de  Lenglet 
Dufresnoy,  en  les  continuant  jusqu'à 
nos  jours;  mais  elles  ne  dispensent 
pas  de  l'édition  de  1778  :  il  y  a  plus 
d'une  erreur  dans  les  additions  de 
M.  Picot.  XVII.  Lettî^es  d'un  pair  de 
la  Grande-Bretagne  sur  les  affaires 
présentes  de  V Europe,  17  45,  in-12, 
XVIII.  Calendrier  historique  pour 
V année  \^So  avec  l'origine  de  toutes 
les  maisons  souveraiîies ,  l'j^o  ,  in- 
12.  Ce  petit  ouvrage  fut  supprimé 
par  arrêt  du  conseil,  du  3  janvier 
1750  ,  parce  que  l'auteur  y  faisait 
l'éloge  de  la  maison  des  Stuart ,  éta- 
blissant que  le  prince  Edouard  était 
le  légitime  propriétaire  de  la  cou- 
ronne d'Angleterre ,  et  le  roi  George 
un  usurpateur.  Au  reste,  on  ne  se  con- 
tenta pas  de  sévir  contre  le  livre;  le 
7  janvier  on  arrêta  l'auteur ,  et,  pour 
la  quatrième  fois ,  on  le  conduisit  à 
la  Bastille.  XIX.  Traité  historique  et 
dogmat  ique  sur  les  apparitions,  les  vi-^ 
sions  et  les  révélations  particulières.; 
avec  des  observations  sur  tes  Disser- 
tations du  R.  P.  Dom  Calmet ,  sur 
les  apparitions  et  les  revenants,  1 7  5 1 , 
2  vol.  in-i  2.  Il  y  avait  cinquante-cinq 
ans  que  cet  ouvrage  était  fait,  lorsque 
l'auteur, à  l'occasion  de  celui  de  Dom 
Calmet,  présenta  le  sien  au  public.  Il  y 
reproduisit  les  deux  brochures  qu'il 
avait  imprimées  en  1696  ,  et  divers 
morceaux  curieux,  soit  de  lui,  soit 
d'autres  auteurs.  La  préface  du  Trai- 
té des  apparitions  est  une  des  meil- 
leures qu'il  ait  composées.  XX.  Re- 
cueil de  dissertations  anciennes  et 
nouvelles  sur  les  apparitions  ,  les 
visions  et  les  songes  ;  avec  une  pré-! 
face  historique ,  et  un  catalogue  des 
auteurs  qui  ont  écrit  sur  les  esprits  , 
les  visions ,  les  apparitions ,  les  son- 
ges et  les  sortilèges  y  1752,  /\  \qI^ 


LEN 

in-il.  Dans  sa  j)réface,  qui  a  lôa 
pages ,  et  fornir  un  supplément  à 
l'ouvrage  précèdent ,  il  discute  le 
pour  et  le  contre  sur  les  visions  et  les 
sonces ,  moins  cependant  en  pliilo- 
sopliequ'en  historien.  XXI.  Histoire 
de  Jeanne  d'Arc ,  vierge ,  héroïne 
et  marijre  d'Etat ,  suscitée  par  la 
Prwidence  pour  rétablir  la  monar- 
chie française  :  tirée  des  procès  et 
autres  pièces  originales  ulu  temps , 
I  7 5 3, in- lu, divisée  en  deux. parties. 
L'abhë  d'Artigny  ayant  eu  commu- 
nication d'une  vie  manuscrite  de  la 
Pucelle  d'Orléans  ,  par  Edmond  Ri- 
cher,  eu  4  vol.  in-folio,  voulait  la 
réduire  à  deux  volumes  in-ia.  Il 
fut  prévenu  par  l'abbë  Lenglet,  qui 
avait  eu  l'ouvrage  de  Richer  à  sa 
disposition  pendant  trois  ou  quatre 
mois.  XXII.  Plan  d^  V Histoire  gé- 
nérale et  particulière  de  la  Monar- 
chie française  ,  1 7.54  ,  3  vol.  in-i2. 
L'auteur  devait  donner  une  suite  en 
sept  autres  volumes;  on  en  a  même 
trouvé  la  plus  grande  partie  dans  ses 
ppiers.  XXIÏI.  Nouveau  traité  de 
Géographie  (  faisant  partie  de  la 
Science  de  la  Cour  ),  1 762 , 2  v.  in-12. 
XXIV.  Lettres  d'un  Chanoine  de 
Lille  à  un  docteur  de  Sorhonne,  au  su- 
jet d'une  prière  hérétique,  l'jo'^^m-n. 
L'abbé  Lenglet  a  été  éditeur  d'un 
grand  nombre  d'ouvrages.  I.  Novum 
Testamentum  notis  historicis  illus- 
trât um  ;  suhjuncta  est  Chronologia 
et  Geographia  sacra,  1703,2  tom. 
in-24  'j  réimprimés  à  Anvers ,  puis 
à  Paris  ,  en  1733  ,  et  encore  à  An- 
vers ,  en  1735  ,  2  vol.  in-16.  II, 
Ljionjsii  Petavii  Bationarium  tem- 
ponwi ,  editio  novissima  ,  1703  , 
4  tome^  in- 1  i  ;  édition  qui  fourmille 
de  fautes. 1 1 1.  Diurnal  romain  traduit 
en  français,  avec  le  latin  à  côté  , 
170),  .V  vol.  in-r>,  ;  la  traduction 
tst  de  Leuglct.  IV.  Histoire  de  la 


LEN 


^ 


Floride  y  traduite  de  l'espagnol  de 
Garcilasso  de  la  f^ega,  par  Pierre 
Biclielct,  1707,  2  vol.  in  -  12.  V, 
Commentaire  de  M.  Dupuy  sur  le 
traité  des  libertés  de  l'église  galli~ 
cane  de  P.  Pithou,  1715,  2  vol. 
in-4°Xette édition  est  précieuse  par 
le  catalogue  des  canonistes  et  la  pré- 
face de  l'éditeur  j  mais  celte  dernière 
pièce,  supprimée  par  ordre  du  pro- 
cureur-général, ne  se  trouve  plus  cpie 
dans  très  peu  d'exemplaires.  V I.  Imi- 
tation de  J.  C.  traduite  et  revue  sur 
l'ancien  original  français ,  Anvers 
(Paris  ),i73i,in-i2;ibid.,  i735,in- 
8"^'.;  cette  édit.  est  la  meilleure.  La  tra- 
duction reproduit  le  xx\  r.  chapitre 
du  3^.  livre  de  Vlnternelle  Consola- 
tion française,  ajoute  par  l'éditeur 
au  i*'.  livre  de  1' /mi7 ai ioAi,  laquelle, 
selon  lui,  n'en  aurait  été  que  la  version 
latine  faite  par  Kempis.  Une  autre 
édition  de  la  même  tradirction  a 
paru  en  1737,  Paris,  in- 12;  et 
en  1 764 ,  avec  des  Prières  à  la  fm 
de  cnaque  chapitre.  VIL  Arrêts 
d'amour  J  avec  les  commentaires 
jde  Benoist  de  Court ,  et  l'Amant 
pendu  cordelier  à  l'observance  d'a- 
mour ,  par  Martial  d' Auvergne  , 
avec  notes  et  glossaire ,  1 73 1  ,2  vol. 
in- 12.  VIII.  Béfutation  des  erreurs 
de  Benoît  Spinosa  ,  par  Fénélon , 
Lami  et  le  comte  de  Boulainvilliers, 
1731  ,  in- 12.  IX.  OEuvres  de  Clé- 
ment Marot,  revues  sur  plusieurs  ma- 
nuscrits et  sur  plus  de  quarante  édi- 
tions ;  avec  les  œuvres  de  Jean  Ma- 
rot ,  son  père ,  et  de  Michel  Marot , 
son  fds,  etc.  1731  ,  4  vol.  in-4*^.  ou 
(3  vol.  in- 1 2.  X.  LjCs  Satires  et  OEu- 
vres de  Bégnier ,  1733,  in  -  4"- 
(  A^oj.  pag.  87  ,  n».  IX  ,  De  l'usage 
des  Bomans.  )  XL  Le  Boman  de 
la  Bose  ^  '735,  3  vol.  in-  12. 
(  f^ojez  Lantin  de  Damkrey.  ) 
XII.  La  Me^sc  des  fidèles ,  avec 


99 


LEN 


V ordinaire  de  la  Messe,  l'jf^^^m-Ji. 

XIII.  Catulli,  Tibidli  et  Propertii 
opéra,  Leyde  (  Paris,  Coiistelier  ) , 
1  -j/j-S,  iii-i  'l'y  édition  belle  et  correcte*. 

XIV.  Mémoires  de  Condé,  tom.  vi, 
ou  supplém.,  I  -^43,  in-4".  C'est  un  re- 
cueil de  vingt-une  pièces  curieuses  ou 
rares.  On  l'a  réimprimé  en   174^, 
sous  le  litre  de  Mémoires  pour  servir 
à  l'histoire  de  Charles  IX  et  de 
Henri  IF,  in-4°  :  on  y  a  fait  beau- 
coup d'additions.  XV.  Lettres  et  Né- 
gociations secrètes,  sur  les  affaires 
présentes  ,  1 744?  ^^- 1  '^'  C'est  la  suite 
des  lettres  de  Van  Hoë ,  ambassadeur 
de  Hollande  en  France  ,  dont  la  pre- 
mière partie  parut  en  1743.  XVI. 
Journal  de  Henri  III,parVEstoile, 
1 744  ?  5  vol.  in-8^.  ;  édition  belle  el 
bonne,  enrichie  de  notes.  (/^.Étoile, 
tome  XIII ,  page  449  )•  XVII.  Troi- 
sième édition  de  la  Guisiade  y  tra- 
gédie de  Pierre  Ma  thieu  ,1744?  in-S*^ . 
XVIII.  La  tragédie  de  jeu  Gaspard 
Coligny ,  par  Fr.  de  Chantelouve, 
l'jl^f^^m-^^.  Ces  deux  pièces  font 
partie  de  l'édition  rappelée  ci-dessus 
du  Journal  de  Henri  III;  mais  l'édi- 
teur  en  a  fait  tirer  quelques  exera^ 
plaires  à  part.  XIX.  L  Europe  pa- 
cifiée par  l'équité  de  la  reine  de 
Hongrie  ,pai^Alhert  Fan  Heussen, 
1 745 ,  in-i  2,  XX.  Mémoires  de  Co- 
mines ,  1747,  4  vol.  in-4^.  C'est  la 
meilleure  édition  :  elle  fut  dédiée  au 
marécbaldeSaxe;  mais  la  dédicace 
a  été  supprimée  ,  et  ne  se  trouve  que 
dans  quelques  exemplaires.  XXI.  Lu- 
cii  Cœcilii  Firmiani  Lactantii  opéra 
omnia ,  t  748  /2  vol.  in-4".  (  F  oyez 
J.  B.  Lebrun  et  Lactance.  )  XXII. 
Mémoires  de  la  Régence  de  S,  A.  S, 
le  duc  d' Orléans,  par  Piossens ,  nou- 
velle édition  ,  1749?  2  vol.  in-i!î. 
%Xlll.  Métallurgie  d' Alphonse  Bar- 
ba ,  traduite  par  Gosfort  ,   1751  , 
'J.  vol.  iu-i2.  XXIV.  Cours  de  Chj- 


LEN 

mie ,  par  Nicolas  Le  Fèvre ,  cin- 
quième édition  ,  1751 ,  5  vol.  in-iîî. 
XXV.  Bibliothèque  des  Philosophes 
chimiques ,  nouvelle  édition  avec  des 
notes,  17401  3  vol.  in- 12.  André- 
Charles  Cailleau  pujjlia ,  en  1 754 ,  le 
tome  4®.  de  cette  collection.  XXVI, 
Becueil de  Borna ns historiques ^  1 7  46, 
8  vol.  in- 13.  XXVII.  L'abbé  Len- 
glet  a  été  éditeur  jlu  premier  vobime 
des  Nouveaux  Mémoires  d'histoire ^ 
de  critique  et  de  littér.  de  d'Artigny, 
et  y  a  mis  une  préface  singulière. 
Il  a  fourni  des  extraits  à  divers  jour- 
naux; il  a  fait  V Avertissement  des 
Lettres  choisies  de  La  Rivière,  pu- 
bliées par  Michault,  et  a  ajouté  dans 
le  corps  de  l'ouvrage  ,  quelques-unes 
de  ses  exclamations  favorites.  On  at- 
Jribue  à  notre  auteur  beaucoup  d'ou- 
vrages: T.  La  Catanoise ,  ouhistoire 
secrète  des  mouvements  arrivés  au 
royaume  de  Naples  sous  la  reine 
Jeanne ,  1 73 1  ,  in-i  2.  Il  pourrait  en 
être  l'auteur.  II.  Histoire  de  la  Phi- 
losophie païenne ,  1724.  Ce  livre  est 
de  Bnrigny.  III.  Une  édition  de  V  An- 
ti-Rousseau ,  par  Gacon.  IV.  His- 
toire des  Papes,  5  vol.  in-4''.  C'est 
Bruys  qui  en  est  l'auteur.  V.  Les  Prin- 
cesses Malahares ,  1734,  in- 1 2 ,  dont 
l'auteur  est  Pierre  de  Longuerue.  VI. 
Une  édition  du  Journal  de  Henri  IF, 
par  l'Étoile ,  1741  ,  4  vol.  in-S». 
L'éditeur  fut  P.  Bouge,  augustin.  Mi- 
chault de  Dijon  a  donné  des  Mémoi- 
res pour  servira  l'histoire  de  la  vieet 
des  ouvrages  de  M.  l'abbé  Lenglet 
i?M/"r<?wo/,  ï  76 1  ,in-i  2.    A.  B-T. 

LENGNICH  (  GoDEFRoi  ),  savant 
historien  et  publiciste  prussien  ,  na- 
quit à  Dantzig  ,  vers  1690  ;  il  s'ap- 
pliqua ,  fort  jeune ,  à  l'étude  de  la 
jurisprudence ,  et  fréquenta  les  plus 
fameuses  universités  d'Allemagne.  Il 
fut  nommé  professeur  d'histoire  au 
gymnase  de  Dantzig ,  et  s'acquitta  de 


Î.KN 

cet  emploi  avec  une  r.iredifilinrlion. 
li  parvint  ensuite  là  la  dignité  de 
.svndic  ,  et  mourut  ,  en  1774  ,  dans 
un  âge  avancé.  On  a  de  lui:  I.  Nach- 
ri  chien  und  ,  etc.  ,  c'est  -  à  -  dire  , 
IVlails  et  jugements  sur  les  auteurs 
<lassi(jues  latins,  année  1 7 1 3  ,  in-i  '2. 
Il  n'avait  pas  encore  terminé  ses 
éludes  ,  lorsqu'il  publia  cet  ouvrage, 
qui  n'est  guère  qu'un  extrait  de  la 
nibliothèque  lajinedc  J.  Alb.  Fabri- 
«  i us.  II.  Die  Preussiche  Bihliolhek , 
etc.^  c'est-à-dire  ,  Bil)liotlicque  de  la 
Prusse  polonaise  ,  Daiitzig  ,  1718  , 
in-8".  :  c  est  un  recueil  de  pièces  his- 
toriques avec  des  notes  intéressantes, 
et  àcs  notices  sur  les  hommes  célè- 
bres qu'a  produits  cette  contrée  ;  il 
vn  A  paru  dix  cahiers,  terminés  par 
une  table  générale  des  matières.  III. 
Geschichte  ,  etc. ,  c'est-à-dire  ,  His- 
toire de  la  Prusse  polonaise  ,  depuis 
l'année  i5'i6  jusqu'au  règne  d'Au- 
guste II ,  Dantzig  ,  17^3-48,  9  vol. 
in -fol.;  c'est  une  continuation  de 
l'histoire  de  Gaspard  Schlitz  :  elle 
est  fort  estimée  ;  on  trouve  une  bonne 
inalyse  des  premiers  volumes  c^ns 
l'^s  Actaeruilit.  Lipsensium,  années 
17*24  et  1726.  IV.  Polnische  Ges~ 
rJUchte ,  etc. ,  c'est-à-dire  ,  Histoire 
ie  Pologne,  depuis  l'origine  de  la 
monarchie  jusqu'à  la  mort  d'Au- 
guste II  ,  Leipzig,  1 74 1 ,  in-80.  V.  Jus 
publicum  regni  Poloniœ  ,  Dantzig , 
I74'2,  '?.  vol.  in-8".;  ibid.  i7(->j-0r>, 
a  vol.  in-8°.  ;  traduit  eu  français  , 
par  Forniey  ,  sous  le  titre  de  Mé- 
moires pour  servir  à  l'histoire  et  au 
droit  public  de  Pologne  ,  La  Hâve  , 
1 7 4 1 ,  in- 1 2.  V I.  Jus puhlicum  Prus- 
tiœpolonicœ ,  ibid.  1 7.58,  in-8«.  VII. 
Pacla  contenta  Au^usti  III ,  régis 
Polonianim ,  commentario  perpétua 
illustrata  ,  ibid.  1 703  ,  in^".  ;  ou- 
vrage savant  ctestimé.  Ou  doit  encore 
à  Lengnichrédilioû  de  kajdlubcrk  et 


LEN  0» 

de  Marlinns  Gallu» ,  ibid.  1769, 
et  celle  de  l'Histoire  de  Prusse  ,  par 
Gasp.  Schiilz  ,  ibid.  W-s. 

LENGNICH  (  Charles-  IkNjjiY 
MIN  ),  numismate  et  antiquaire,  de 
la  même  famille  que  le  précédent , 
naquit  à  Dantzig  ,  eu  174'-'"  Après 
avoir  terminé  ses  études,  il  fut  promu 
au  saint-ministère,  et  devint  archi- 
diacre de  l'église  de  Sainte-Marie  : 
c'était  un  homme  très-instruit,  et  qui 
se  plaisait  à  communiquer. aux  cu- 
ficux  le  résultat  de  ses  recherches. 
Il  fut  l'un  des  rédacteurs  de  la  Ga- 
zette littéraire  de  léna  ,  depuis  son 
établissement  en  1785,  et  y  inséra 
un  grand  nombre  d'excellents  arti- 
cles. La  société  allemande  de  Kœnics- 
berg  lui  expédia  ,  en  1 790  ,  un  di- 
plôme de  membre  honoraire.  Il  mou- 
nit  à  Dantzig ,  le  5  novembre  1 795. 
On  a  de  lui  :  I.  Bejtrag  zur  Kent- 
niss ,  c'est-à-dire ,  Mémoires  pour  la 
connaissance  des  livres  rares  ,  et  p.u- 
ticulièremcnt  de  ceux  qui  traitent  de 
la  numismatique  ,  Dantzig,  177O  , 
2  part.  in-S*'.  II.  Nachrichten  zur 
Biicher  und  Miins  Kunde ,  c'est  -  à- 
dirc  ,  Renseignements  pour  la  con- 
naissance des  livres  et  des  médailles, 
ibid.  1780,  1782,  1  vol.  in-8^.,fig. 
III.  Neue  Nachrichten ,  c'est-à-dire , 
Nouveaux  renseignements  pour  la 
connaissance  des  livres  et  des  mé- 
dailles, ibid.  1 78*2,  2  part.  in-S^.  IV. 
Hevelius  oderAnekdoten  und  Nach- 
richten ,  etc.  c'est-à-dire  ,  Hevelius, 
ou  Anecdotes  pour  servir  à  l'histoire 
de  ce  grand  homme  ,  ibid.  1780, 
in-8^.  Cet  ouvrage  fait  très  -  bien 
connaître  cet  illustre  astronome.  La 
Fie  de  C.  B.  Lengnich  ,  écrite  par 
lui-même ,  a  été  insérée  dans  le  \  3^ 
cahier  du  Recueil  de  portraits  par 
Bock  et  Moser.  W-s. 

LENNEP  (  Jean-Daniel  Van  ), 
né  eu  1724  >  à  Leuwaidc  ,  dans  U 


92 


LEN 


Frise,  publia  ,  en  1747?  comme  te'- 
moignage  de  ses   prop;rès  dans  les 
lettres  savantes,  une  édition  du  poème 
de  Colutlius  ,  auquel  il  joignit  des 
notes  pleines  de  goût  et  d'une  éru- 
dition élégante  et  choisie.  II  obtint, 
Tcrs   175^  ,  la  chaire  de  littérature 
grecque  et  latine  dans,  l'université'  de 
Groningue,  qu'il  quitta,  en   1768, 
pour  passer  dans  celle  de  Franeker, 
où  il  succe'dait  à  Gisbert  Kocn.  Yal- 
kenaer,qui  avait  e'tc  son  maître,  et 
qui   a   consacre'  quelques   pages   à 
sa  me'moire,  dit  qu'il  fut    pendant 
quinze  ans  professeur  à  Groningue, 
ma^nd  cum  laucle.  11  faut  peut-être 
diminuer  quelque  chose  de  cet  e'ioge 
donne'  par  î'amitië  dans  les  premiers 
moments  d'une  perte  douloureuse. 
Leunepe'tait  un  homme  fort  instruit  : 
ses  ouvrages  le  prouvent*  mais  il  ne 
paraît  pas   avoir  etë  un  excellent 
professeur  :  c'était  (nous  e'crit-on,  sur 
la  foi  d'un  professeur  qui  avait  ëte'son 
confrère  à  Groningue  ) ,  «  c'était  un 
î)  homme  fort  aimable  (  i  ) ,  un  sa- 
»  vant  fort  instruit;  mais  donner  des 
î)  leçons  e'tait  pour  lui  un  supplice, 
î)  Il  soupirait   toujours  après  le  re- 
»  tour  des  vacances ,   et  en  voyait 
»  arriver  la  fin  avec  regret.  Avec  de 
«  telles  dispositions,  qui,  peut-être, 
»  étaient  l'effet  de  sa   constitution 
»  faible  et  valétudinaire,  tout  savant 
»  qu'il  e'tait,  il  ne  pouvait  guère  for- 
»  mer  de  bons  disciples  :  aussi  pas  un 
w  homme  tant  soit  peu  célèbre  n'est 
r>  sorti  de  son  école,  excepté  Schei- 
y>  dius.  y>  Et  encore  faut-il  observer 
que    Scheidius    est   surtout   connu 
comme  orientaliste.  Lennep  ,  à  qui 
ce  mauvais  état  de  sa  santé  avait 
rendu  nécessaire  l'usage   des   eaux 
d'Aix-la-Chapelle,  y  mourut  le  6 


(i)  Suivant  les  auteurs  du  Dictionnaire  Jiis- 
iorique  de.'  musi'iens  ,  il  était  renommé  pour 
•ea  habileté  exttaordiuaite  sui:  i»  flirte. 


LEN 

février  1771  ,  sans  avoir  pu  mettra 
la  dernière  maiiî  à  une  édition  des 
lettres  de  Phalaris ,  que  Valckenaer 
acheva   avec    les    matériaux    qu'il' 
avait  laissés ,  dont  N.  G.  Schroeder^ 
fit  les  tables ,  et  qui ,  après  de  longs 
délais,  parut  enfin  en   1777.   Celte 
édition  fait  le  plus  grand  honneur  à 
Lennep,  et  nous  paraît  son  véritable 
titre  de  gloire,  toutefois  après  ses 
Observations  sur  l'analogie  de  la. 
langue  grecque  et  ses  Étjmologies 
grecques ,  que  Scheidius  a  publiées 
après  sa  mort,(Utrecht,  1790,  3  vol. 
ift-S^.)  Quoique  la  doctrine  de  l'ana- 
logie ait  reçu  ,  sous  la   plume   de 
Lennep  ,  une  extension  abusive,  ce» 
deux  traités  n'en   sont  pas  moins; 
des  productions  très- marquantes  et 
d'une  utilité  réelle.  Lennep  avait, dès 
1752,  fait  connaître  quelques-unes 
de  ses  pensées  sur  cette  matière,  dans 
un  discours  académique  sur  l'ana- 
logie des  langues  prouvée  par  les  ac- 
tes analogiques  de  l'esprit.  Un  autre- 
discours  académique  de  Lennep ,  sur 
la  sublimité  de  style  dans   les  écri- 
vaijis    du  Nouveau -Testament  ,    a- 
fourni  à  Klotz  ,  le  sujet  d'une  criti-      ,, 
que  sévère,  mais  juste,  ^wt  Ton  peut    ï 
chercher  dans  le  second  volume  de-    ^ 
ses  Acta  litteraria.  B-ss. 

LENNOX  (  Charlotte  )  ,  An-- 
glaise,  distinguée  dans  les  lettres,, 
et  très-cstimée  de  Johnson  et  de 
Ri chai-dson,  naquit  en  1720.  Son 
père,  le  colonel  .Tames  Ramsay ,  lieu-  À 
tenant-gouverneur  de  New-York,  | 
l'envoya,  à  l'âge  de  i5  ans,  chez  une 
de  ses  tantes  qui  demeurait  en  An- 
gleterre, et  qu'elle  trouva,  à  son  ar- 
rivée, dans  un  état  de  folie  incura- 
ble. Le  colonel  Ramsay  mourut  bien- 
tôt après,laissantsansmoyensd' exis- 
tence ,  une  veuve,  qui  mourut  elle- 
même  à  New-York  en  1765,  et  sa 
fdl-e  Ghaiiotte.  Ou  ignore  l'époqu» 


xin  mariage  de  celle-ci  avec  Lcnnox, 
«iiisi  que  la  prolVssion  do  sou  mari: 
il  paraît  ccpciulanl  qu'elle  IVpousa 
Joijg-tcmps  après  avoir  perdu  son 
^>crc,  et  qu'clK*  pourvut  à  son  entre- 
tien pendant  cet  espace  do  temps 
avec  le  produit  de  ses  compositions 
littéraires.  Elle  a  publie  :  I.  En  1751, 
les  Mémoires  d'IIariiot  Stuavt.  II. 
Le  Don  Qiùclwtte  femelle  y  175^5 
dans  ce  dernier  roman, qui  fut  très- 
favorablement  accueilli ,  le  person- 
nage d'ArabelIa  est  le  pendant  de 
Don  Quichotte.  Le  docteur  Johnson 
écrivit  la  dédicace  au  comte  de  Mid- 
dlesex.  \\\. Shakespeare  éclairci,  en 
ti  vol.  in- l'Ji;  l'auteur  y  en  a  joint  en- 
suite un  S'^.Cet  ouvrage  renferme  les 
nouveQes  ou  histoires  sur  lesquelles 
les  pièces  de  Shakespeare  sont  fon- 
dées, recueillies  et  traduites  des  au- 
teurs originaux;  avec  des  notes  cri- 
tiques, dans  lesquelles  M™*^.  Lennox 
censure  les  libertés  que  Shakespeare 
a  prises  en  dénaturant  beaucoup  de 
faits  historiques,  1753-54,  3  vol. 
in- 12.  IV.  Mémoires  de  la  comtesse 
de  Bercj,  traduits  du  français,  1 755, 
1  vol.  in- 11. \ .  Mémoires  de  Sully ^ 
également  traduits  du  français  ,  3 
vol.  in-4°.,  1756;  réimprimés  plu- 
sieurs fois,  in-8*^.  VI.  Mémoires  de 
Madame  de  Maintenons  ^7^7- 
VIL  Fhilandre ,  drame  pastoral  , 
i757,in-8o.  VIII.  Henriette ,  TO- 
raau  estimé,  en  1  vol.  in- 12,  1758. 
IX.  Théâtre  des  Grecs^àxi  P.  Bru- 
moy,  en  3  vol.  in-4°.,  1 7 59-Go;  tra- 
duit sous  les  noms  du  comte  de  Cork 
«t  Orrery  et  du  docteur  Johnson. 
1^.  Musée  des  Dames  ^  espèce  de  ma- 
gasin ou  recueil  terminé  en  1761  , 
1  vol.  in-8°.,  qui  semble  plutôt  un 
ouvrage  entrepris  par  nécessité  que 
par  choix.  XL  Sophie,  roman  eu  1 
vol.  in-12 ,  inférieur  à  sa  i"^^.  pro- 
ducÙQa  dans  ce  geofe  ,  1763.  XIL 


LW 


» 


Z<x»Sc»iir,  comédie,  dontlesujet  était 
tiré  de  son  roman  iV  Henriette  :  la 
pièce  tomba^lès  la  i"'.  représenta- 
tion. XI IL  Les  Mœurs  de  la  vieille 
Cité,  comédie  représentée  en  1773, 
au  ihéàtredeDrury-Lane  (  f^.  Chap- 
MANN,  t.  vni,  p.Cii).  XIV.Lc  roman 
à^Eupliémie,  1790,4  vol.  in-8".  Ce 
dernier  ouvrage  est  le  meilleur  que 
M'»*^.  Lennox  ait  publié.  Johnson  a- 
vait  une  telle  opinion  de  ses  Lilents 
que  ,  peu  de  temps  avant  sa  mort , 
il  déclara  qu'il  la  regardait  comme 
infiniment  supérieure  à  madame  Car- 
ter, à  miss  Hannah  Moore  et  à  miss 
Burney.  M.  Hawkins  a  fait  un  récit 
plaisant  de  la  célébration,  par  John- 
son, de  la  naissance  du  premier  en- 
fant de  madame  Lennox,  sa  f^ie de 
Harriot  Stuart:  mais  ce  n'est  certai- 
nement pas  son  premier  ouvrage;  car, 
en  1747,  elle  publia  des  Poèmes  sur 
divers  sujets.  Cette  dame  passa  ses 
derniers  jours  dans  la  misère  et  les 
maladies;  et  elle  reçut,  peu  de  temps 
avant  sa  mort ,  du  Littéral  ,  fund 
Society  des  secours  qui  la  mirent  à 
l'abri  du  besoin.  Elle  mourut  le  4 
janvier  1804.  D-z-s. 

LENOBLE  (  EusTACHE  ) ,  baron 
de  Saint  -  George  et  de  Tenelière , 
s'était  fait  une  a§sez  grande  réputa- 
tion vers  la  fin  du  xvii^.  siècle  par 
ses  talents  et  par  les  désagrcmeuts 
que  lui  attira  sa  mauvaise  conduite. 
Il  naquit  à  Troyes ,  en  iG43 ,  d'une 
bonne  famille  de  robe , et  fut  pourvu, 
jeune,de  la  charge  de  procureur  géné- 
ral au  parlement  de  Metz.  Son  goût 
excessii'pourleplaisirrentraînadans 
des  dépenses  considérables,  et,  au 
bout  de  quelques  années  ,  il  eut  dis- 
sipé toute  sa  fortune.  Il  vendit  sa 
charge  pour  payer  ses  dettes  ;  et 
comme  cette  ressource  ne  suffisait 
pas, il  eut  recours  à  des  moyens  hon- 
leia  pour   se  débarrasser   d«   ses 


94 


LEN 


créanciers.  Accuse  d'avoir  fabrique 
de  faux  actes,  il  fut  mis  en  prison  au 
Châtelet ,  et  condamne  à  un  bannis- 
sement de  neuf  anne'es.  Il  appela  de 
ce  jugement ,  et  fut  transféré  à  la 
Conciergerie  ,  où  se  trouvait  Ga- 
brielle  Perreau ,  connue  sous  le  nom 
de  la  Belle  Epicière ,  que  son  mari 
avait  fait  enfermer  pour  ses  désor- 
dres. Lenoble  parvint  à  se  faire  ai- 
mer de  celte  femme,  qu'il  s'offrit  à 
défendre  devant  les  tribunaux. 
Cette  intrigue  eut  des  suitesj  la  belle 
Epicière  demanda  d'être  enfermée 
dans  un  couvent,  où  Lenoble  fit  en- 
trer, comme  pensionnaire, une  sage- 
femme  pour  accoucher  secrètement 
sa  maîtresse  et  soustraire  l'enfant. 
Toutes  ces  précautions  furent  inu- 
tiles :  on  découvrit  la  faute  de  la 
belle  Epicière,  et  son  mari  obtint  un 
ordre  pour  la  faire  transférer  dans 
un  autre  couvent  j  mais  elle  parvint 
à  s'échapper  au  bout  de  quelques 
mois,  e^Lenoble  s'évada  de  la  Con- 
ciergerie pour  aller  la  rejoindre.  Ils 
vécurent  ensemble  ,  pendant  trois 
ans  ,  changeant  souvent  de  noms  et 
de  quartier  pour  se  dérober  aux  re- 
cherches de  la  police;  mais  enfin  ils 
furent  surpris  et  ramenés  en  prison. 
Le  jugement  rendu  par  le  Châtelet , 
contre  Lenoble ,  fut  confirmé,  et  il 
se  vit  chargé  de  trois  enfants,  dont 
«n  arrêt  flétrissait  la  mère.  Au  milieu 
de  ces  revers,  il  conservait  sa  gaîlé; 
et  ce  fut  en  prison  qu'il  composa 
la  plus  grande  partie  de  ses  ou- 
vrages. «  Les  malheurs  ,  dit  -  il , 
î)  qui  me  persécutent  depuis  quinze 
»  ans  ,  auraient  peine  à  trouver  leur 
»  exemple:  j'ai  tout  perdu,  hors  une 
»  parfaite  tranquillité  d'esprit,  insé- 
»  parable  de  l'innocence.  La  mau- 
»  vaise  fortune  m'a  tout  oté,  hors 
»  ma  constancc,etle  désir  de  tirer  de 
»  mes  propres  peines  de  quoi  être 


LEN 

»  utile  à  ma  patrie.  »  (  Préfacé 
de  V Ecole  du  Monde.  )  L'arrêt  qui 
le  condamnait  à  sortir  de  France,  ne 
fut  point  exécuté  à  la  rigueur  ;  il  ob- 
tint la  permission  de  vivre  obscur 
dans  Paris  ,  où  il  se  mit  aux  gages 
des  libraires.  Il  recevait  jusqu'à  cent 
pisloles  par  mois  ,  qu'il  dépensait  en 
repas  et  en  fêtes.  Pendant  ses  der- 
nières années,  il  subsista  de  la  cha- 
rité de  M.  d'Argenson ,  lieutenant  de 
police,  et  depuis  garde-des-sceaux  , 
qui  lui  envoyait  un  louis  tous  les 
dimanches.  Il  mourut  à  l'âge  de 
soixante  -  huit  ans  ,  le  3i  janvier 
I  -^  1 1 ,  dans  un  tel  état  de  misère  , 
que  la  fabrique  de  la  paroisse  Saint- 
Séverin  fut  obligée  de  payer  les  frais 
de  son  convoi.  Bayle  faisait  assez  de 
cas  des  talents  de  Lenoble.  «  Il  a ,  dit- 
il  ,  infiniment  d'esprit  et  beaucoup  de 
lecture  ;  il  sait  traiter  une  matière 
galamment,  cavalièrement;  il  con- 
naît l'ancienne  et  la  nouvelle  philo- 
sophie: cependant  il  se  vante  d'avoir 
fait  beaucoup  d'horoscopes  qui  ont 
réussi ,  et  il  s'attache  avec  soin  à 
maintenir  le  crédit  de  l'astrologie 
judiciaire.  î)(Pen5^>^  diverses  sur  la 
comète,  )  On  a  de  lui  un  grand 
nombre  d'ouvrages  ,  dont  quelques- 
uns  sont  curieux  et  méritent  d'ê- 
tre recherchés  :  I.  Histoire  de  Vé- 
tahli  s  sèment  de  la  république  de 
Hollande,  Paris,  1689-90  ,  9- voL 
in- 1 2  :  c'est  un  extrait  de  l'Histoire 
de  Gratins;  mais  il  se  ressent  de  la 
précipitation  avec  laquelle  travail- 
lait l'auteur  :  l'ouvrage  fut  défendu 
en  Hollande.  IL  Relation  de  Vétat 
de  Gènes ,  avec  le  traité  par  le- 
quel les  Génois  se  sont  donnés  à 
Charles  VI,  roi  de  France,  et  à  ses 
successeurs,  ib.  i685  ,  in- 12.  III. 
Traité  de  la  monnoje  de  Metz, 
avec  un  tarif  de  sa  réduction  en 
monnaie  de  France,  ib.    1675  ,  in- 


11.  IV.  Dissertation  sur  la  nais- 
sance de  Jèsiis-Christ ,  ib.  i()93, 
in-i'i.  V.  Le  Bouclier dt  la  France , 
ou  Sentiments  de  Gerson  et  des  c.i- 
nonisles,  touchant  les  différends  des 
rois  de  France  avec  les  papes,  Colo- 
p;ne,  i(>9o;  reimprime'  sous  le  titre 
(le  :  L* Esprit  de  Gerson,  ib.  i6()i, 
et  enfin  sous  celui  de  :  La  Doctrine 
catholique  touchant  l'autorité  des 
papes  (  Amsterdam  ,  1727  ,  in-iit), 
à  la  suite  d'un  Dialogue  entre  Saint- 
Pierre  et  Jules  II  k  la  porte  du  para- 
dis (  traduit  d'un  ouvrap;c  latin  q^ue  le 
traducteur  attribue  au  fameux  Ulric 
de  Hutten,  et  Prosper  Marchand  â 
Publ.  Faust.  Andrelini  ).  VI.  Dialo- 
gues politiques  sur  les  affaires  du 
temps  :  le  Cibisme  ;  le  Singe  de 
Pasquin  sur  l'e'tat  de  l'Europe  au 
bal  de  Montecavallo  ;  le  Couronne- 
ment de  Guillemot  et  de  Guille- 
mette,  avec  le  sermon  du  grand 
docteur  Burnet  ;  la  Chambre  des 
comptes  d'Innocent  XI ,  dialogue 
entre  Saint-Pierre  et  le  pape,  à  la 
porte  du  paradis;  Dialogue  d'Esope 
et  de  Mercure ,  sur  les  afi'aires  de 
Hollande,  etc.,  1689-91,  in-19.. 
Ces  dialogues,  qui  paraissaient  pé- 
riodiquement avec  une  permission 
tacite  delà  direction  de  la  librairie, 
eurent  un  grand  succès  :  il  y  a  beau- 
coup d'ëpigrarames  et  de  saillies  heu- 
reuses. Le  Couronnement  de  Guille- 
mot est  une  satire  violente  contre 
le  roi  Guillaume  ;  mais  l'auteur  se 
trompa  en  annonçant  le  prochain 
re'tablissement  de  Jacques  II  sur  le 
trône  d'Angleterre.  Le  Dialogue 
à^ Esope  et  de  Mercure  fut  brûle  à 
Amsterdam ,  par  ordre  des  Étits- 
Gënëraux.  Vlï.  1/ Esprit  de  David, 
ou  traduction  de  ses  psaumes  en 
prose  et  en  vers  français ,  avec  des 
réflexions  sur  chrtjue  verset ,  in- ri, 
imprime'  sur  tiOR  colonnes  :  cette 


traduction  n'eutaucun  succès,  et  n'en 
méritait  point.  VIII.  Des  Homans 
historiques  :  la  conjuration  d'Épi- 
caris  contre  Nëron;  celle  des  Pazzi 
contre  les  Mcdicisj  Ildergète,  reine 
de  Norvège  ;  Abramole'  ou  l'histoire 
du  dëtronement  de  Mahomet  iv  ; 
Zulima  ;  Miloid  Courtenay,  Paris 
(  Hollande  )  1698,  etc. ,  in-i'2.  IX. 
1/ Ecole  du  monde,  ou  Entretiens 
d'un  père  avec  son  fils  ;  les  Prome- 
nades; les  Aventures  provinciales,  ou 
le  voyage  de  Falaise;  l'École  des  sa- 
ges ,  dialogue  ;  Uranie  ,  ou  le  tableau 
des  philosophes, Paris,  1698,  in- 12. 
Tous  ces  ouvrages  sont  écrits  d'un 
style  vif  et  léger.  Vignacourt  a  pu- 
blie un  choix  des  Nouvelles  de  Le- 
noble  sous  ce  titre  :  Amusements  de 
la  campagne ,  Paris  ,  1743  ,  8  vol. 
in-i2;  et  il  en  a  paru  un  autre  recueil 
intitule:  Le  Gage  touché ,  histoires 
galantes  et  comiques  ,  Liège,  1771 , 
2  vol.  in-12.  (  Voyez  le  Diction- 
naire d  s  Anonjmes,  par  M.  Bar- 
bier. )  X.  Des  Contes  en  vers  ;  des 
Fables  en  vers  ,  1695,  I707,in-i'2, 
fig.  ;  il  a  donne  une  grande  preu- 
ve de  vanité  eu  traitant  plusieurs 
des  sujets  dont  La  Fontaine  s'était 
de'jà  emparé.  XI.  L'Hérésie  délmite^ 
poème  en  quatre  chants  :  c'est  un 
éloge  de  la  révocation  de  l'édit  de 
Nantes.  XII.  Le  triomphe  de  mad. 
Deshoulières,  poème.  XIII.  L'Al- 
lée de  la  Seringue  ,  ou  les  Noyers, 
poème  héroï-satirique,  en  4  chants, 
Francheville  (Hollande),  1677- 
90 ,  in-8<*.  ;  édition  peu  commune. 
Titon  du  ïillet  dit  que  Boilean  fai- 
sait beaucoup  de  cas  de  cette  pièce. 
XÏV.  Fradine,  ou  les  ongles  cou- 
vés, poème  dans  le  même  genre  cpie 
le  précédent.  XV.  De^  Poésies  di- 
verses. XVI.  La  traduction  en  vers 
des  Satires  de  Perse,  Amsterdam, 
i7o6,in-ia.  L'auteur  annonce  qu'il 


c)6  LEN 

les  a  accommodées  au  goût  pre'sént: 
il  se  donne  la  liberté'  de  substituer 
nos  usages  à  ceux  des  Romains  ;  de 
mettre  l'ëloge  ou  la  sottise  de  ses 
contemporains  dans  la  bouche  de 
Perse.  Qui  ne  sera  étonne  ,  par 
exemple ,  d'entendre  Perse  célébrer 
legrandBossuet?A  la  fin  du  volume 
on  trouve  deux  Satires  sur  le  théâtre 
contre  Lafosse,  Boursault,Dancourt 
et  Régnard  ;  mais  Lenoble  avait  fait 
des  comédies ,  et  leur  peu  de  succès 
explique  son  humeur  contre  les  écri- 
vains qui  étaient  en  possession  de 
plaire  au  public.  XVII.  Talestris , 
reine  des  Amazones,  tragédie  ,  im- 
primée avec  une  préface,  1 7 1 7  ,in-8^.  j 
Les  deux  Arlequins,  com.  en  3  actes, 
1691  ;  elle  dut  son  succès  unique- 
ment au  jeu  de  Gherardi  ;  Le  Fourbe, 
comédie  en  trois  actes,  1698^  la 
représentation  n'en  fut  pas  achevée. 
Les  OEuvres  de  Lenoble  ont  été  re- 
cueillies en  'lo  vol.  in- 12  ,  Paris  , 
1 7 1 8  ;  cette  édition  a  été  faite  sans 
soin  :  tous  les  genres  y  sont  confon- 
dus ;  et ,  faute  d'une  table  générale  , 
il  est  très-difficile  de  retrouver  les 
pièces  qu'on  désire.  On  attribue  en- 
core à  cet  écrivain  la  Traduction 
d'un  Fojage autour  du  monde,  par 
Gemelli-Careri,  Paris,  17 19,  6  vol. 
in- 12.  W-s. 

LE  NOIR(Jean-Gharles-Pierre), 
ancien  lieutenant  de  police  de  Paris , 
naquit  en  1 789.,  dans  celte  capitale , 
où  son  père  était  lieutenant  particu- 
lier au  Châtelet.  Allié  à  des  familles 
anciennes  dans  la  magistrature  et 
considérées  dans  l'administration  ou 
dans  la  haute  finance,  et  destiné  à  la 
carrière  judiciaire  ,  il  fut  conseiller 
au  Châtelet  en  175^,  lieutenant  par- 
ticulier en  1754,  lieutenant  criminel 
en  1759,  maître  des  requêtes  en 
1 765  ,  nommé  à  l'intendance  de  Li- 
moges^ lieutenant  de  police  en  1 7  7  4? 


LEN 

désigné  pour  être  lieutenant  civil  ^ 
conseiller- d'état  en  1775,  enfin  bi- 
bliothécaire du  Roi  en  1783  ,  et  pré-» 
sident  de  la  commission  des  finances. 
Il  fut  chargé,  au  conseil  du  Roi,  d'une 
fonction  délicate  ,  celle  de  rappor- 
teur de  la  commission  nommée  pour 
juger  La  Ghalotais.  M.  Le  Noir  ne 
s'étudia, dans  toute  celte  affaire,  qu'à 
calmer  les  ressentiments  d'un  minis- 
tre irrité,  en  atténuant  les  torts  d'un 
magistrat  imprudent  ;  et  son  opi- 
nion particulière  ne  contribua  pas 
peu  à  déterminer  celte  décision  mo-- 
dérée  qui  conserva  à  l'accusé  sou 
honneur,  sa  fortune  et  sa  vie.(  Foj\ 
les  articles  Galonné,  et  Giïalotais.) 
Ses  talents  n'eurent  pas  moins  de 
succès  dans  d'autres  opérations  en- 
core plus  honorables  ,  ou  plus  dif- 
ficiles. On  l'envoya  en  mission  pour 
rétablir  le  parlement  de  Pau ,  et 
sévir  contre  celui  de  Provence, 
Dans  des  intérêts  si  différents,  il  ne 
trahit  point  les  devoirs  qui  lui  étaient 
imposés  :  il  fit  valoir  ce  que  l'un 
avait  de  consolant  ;  il  sut  adoucir 
ce  que  l'autre  avait  de  rigoureux. 
A  peine  nommé  à  la  place  de  lieu- 
tenant de  police  ,  il  fut  obligé  de 
combattreles  opinions  deTurgotsur 
les  approvisionnements  de  Paris:  les 
deux  systèmes  opposés  ,  auxquels 
l'un  et  l'autre  étaient  attachés,embar- 
rassaient  la  marche  des  opérations  ; 
il  fallait  que  l'un  des  deux  cédât  :  le 
ministre  dut  l'emporter.  Turgot  ne 
se  détermina  cependant  qu'avec 
peine  à  déplacer  un  magistra,t  qui 
jouissait  de  l'affection  publique.  Il 
décida  même  Louis  XVI  à  écrire 
à  M.  Le  Noir  une  lettre  remplie  de 
bonté.  Ge  fut  dans  le  cours  de  cette 
honorable  disgrâce  qu'on  lui  offrit 
la  place  de  lieutenant  civil ,  que  des 
considérations  particulières  l'empê- 
chèrent d'accepter.  L'essai  que  l'on 


It   lin  plan  de  Turj;ot ,  ne  l'ut  j)a$ 
lu'iiieux.  M.  Le  Noir  fut  ra])|)clc  à  l.i 
police  ;  et  le  public  apnlaudit  avec 
transport  à  cet  acte  de  ]ustice.  Pour 
bien  apprécier  son  administration, 
il  faut  consuller  un   ouvrage  com- 
pose par  lui^  ou  du  moin^  rcMligc' 
soiis  ses  yeux,  et  qui  a  pour  titre  : 
Détail  sur  quelques  établissements 
delà  viVe  de  Paris  y  demandé  par 
S.  M.  I.  la  reine  de  Hongrie ,  à  M, 
Le  Noir ,  conseiller-d'état ,  lieute- 
nant-général  de  police ,  Paris,  1 780, 
in-8'*.  Ce  mc'moire  donne  un  aperçu 
très-exact  de  toutes  les  branches  de 
cette  vaste   administration  :  le   ré- 
gime des  hôpitaux  ;   celui  des  pri- 
sons ;    les   soulagements    procurés 
aux    incurables  ;  le  traitement  des 
aliénés  ;  les    précautions  contre  les 
incendies  ;  les  secours  préparés  aux 
blessés  par  accidents;  le  perfection- 
nement de  tous  les  moyens  de  salu- 
brité ;   l'éducation  des  enfants   du 
peuple  ,  rallaitemcnt  de  ceux   qui 
sont  abandonnés,  l'administration  du 
bureau  des  nourrices  :  en  un  mot , 
tout  ce  qui  peut  intéresser  la   desti- 
née de  l'homnie.  Tout  ce  qui  tient  à 
la  pitié  pour  les  coupabIes,à  la  bien- 
faisance pour  les  infortunés,  à  l'hu- 
manité pour   les  infirmes  ;  tout  ce 
qu'une  philosophie  orgueilleuse  pré- 
tend avoir  créé  par  le  moyen  d'une 
révolution  violente ,  avait  été  dès 
long-temps  médité,  ordonné  ,  insti- 
tué par  un  roi  vertueux,  véritable- 
ment père  de  ses  sujets,  et  confié  par 
lui  aux  soius  de  magistrats  dignes 
de  son  estime,  parmi  lesquels  M. 
Le  Noir  occupait  une  des  premiè- 
res   places.    On   doit  égaleiient   à 
•es  travaux   particuliers  rétablisse- 
ment d'une  école  de  boulangerie,  la 
couverture  des  halles  au  blé  et  aux 
toiles,  l'institution  du  Mont-de-Picté, 
l'éclairage  non  interrompu  des  rues 

XXIV. 


LEN  97 

de  la  capitale(  i  ),  la  suppression  des 
vaisseaux  de  cuivre  des  laitières  ,  et 
des  cojnj)loirs  de  plomb  des  mar- 
chands de  vin  ,  la  construction  des 
halles  aux  veaux,  aux  cuirs  ,  et  à  la 
marée  ,  la  suppression  du  cimetière 
des  Innocents  ,  enfin  l'établissement 
des  piliers  dans  les  carrières  qui  ré- 
gnent principalement  sous  la  partie 
sud  de  Paris.  La  police  intérieure  et 
secrète  était ,  entre  les  mains  de  M, 
Le  Noir,  un  refuge  de  paix,  et  non 
pas  un  tribunal  d'inquisition:  les  dé- 
sordres qu'il  a  prévenus  par  sa  pru- 
dence, les  larjnes  qu'il  a  taries  par  sa 
bonté ,  en  ua   mot  ,  tous  les  servi- 
ces q»i'il  a  rendus  aux  familles,  soLt 
restés  pour  la  plupart  ,    ainsi  que 
cela  devait  être  ,  ensevelis  dans  les 
ombres  du  silence  ;  car  la  meilleure 
police  est  celle  qui  veille,  ordonne  , 
agit ,  gouverne  ,  et  dont  on  ne  parle 
pas.  Quelques  années  après  qu'il  eut 
quitté     la    police  ,    ce     magistrat 
éprouva  des    chagrins   jiersonnels. 
Sou  nom  fut  indignement  compro- 
mis dans  un    procès   scandaleux  , 
qui  amusa  quelque  temps  la  mali- 
gnité des  oisifs  de  la  capitale  ;  mais 
il  fut  pleinement  justifié  ,  et  consolé 
par  l'intérêt  que   les  gens    de  bien 
prirent  à  son  triomphe.  (  Fqyez  les 
Mémoires  imprimés  dans   l'affaire 
Kornmann  ,    l'article    Beaumar- 
chais dans   la   Biogr.  universelle , 
et  les  noms  de  MM.   Blrgasse  et 


(i)  ArantlVr.  Leaoir,  on  faiiait  A  Pentrepr«- 
neur  de  IVclairage  Jea  rue*  d«  Pari*  quelques 
retenues  pour  lt:i  raonieiiu  d'interruption  ou  la 
luoe  devait  éclairer  sufruamment  ;  ca  qui  n'arri- 
vait pa»  toujours,  surtout  dans  loi  nuits  bru- 
meuses et  sombres.  C'est  à  cette  occsiioa  qu'un 
personnage  de  comédie  disait  assexplaisamniant^ 
«•  La  lune  comptait  sur  les  réTerbùres,  les  rérer- 
n  bières  CKRiptaient  sur  la  lune;  il  n'y*  ni  réver- 
n  Utres,  ni  lune,  et  ce  qu'il  y  a  de  plus  clair  c>«» 
n  qu'on  n'y  voit  goutte.  «  Au  reste,  ces  retenue» 
formaient  un  fonds  de  gratifications  ou  do  trai- 
fiucnts  ,  qu'on  appelait  les  pemiont  sur  le  clair 
de  il/ne.  M.  Lenoir  supprima  ces  ridicules  éci<- 
noniics  ,  «t  la  ville  y  gagna  d'être  eclair*<«  «n 
tout  teaipt. 


98  LEN 

D  AMBRA  Y  ,  dans  celle  des  liommes 
vivants.  )  La  nomination  de  M.  Le 
r^oir  à  la  place  de  bililiotliecaije  du 
roi  lui  suscita  d'autres  ennemis,  et 
fit  eclorc  de  mo'prisaLlcs  pamphlets, 
entièrement  ouLlies  aujourd'hui.  Il 
prévit  de  loin  les  orages  de  la  révo- 
lution, sentit  la  faiblesse  du  p;ouver- 
iiement ,  et  donna  sa  démission  en 
1790.  Il  se  retira  d'abord  en  Suisse  , 
puis  à  Vienne.  Lorsque  le  progrès 
des  armes  françaises  l'obligea  de 
changer  d'asile,  il  trouva  partout 
un  accueil  dislingue  :  un  mariage  ho- 
norable ((u'il  contracta  avec  une 
veuve  française  ,  digne  du  plus  ver- 
tueux attachement,  et  ((ui  lui  a  ferme' 
les  yeux  ,  ajoutait  à  ses  consola- 
tions. Pendant  son  séjour  en  Autri- 
che ,  l'empereur  de  Russie ,  Paul  I«»'. 
lui  fit  proposer  de  venir  s'établir 
dans  ses  états ,  pour  l'aider  de  ses 
conseils.  M.  Le  Noir  réj^ondit  cpi'il 
n'avait  point  renonce'  à  revoir  sou 
pays  natal,  mais  qu'il  oiï'rail  à  l'em- 
pereur de  lui  consacrer  une  ou  deux 
années  de  sa  vie  ;  cette  négociation 
fut  rompue  p  irla  mort  de  Paul  pi'.jet 
M.  Le  Noir  rentra  dans  sa  ])alrie  en 
ïBo'.i.  Les  ministres  d'alors  le  con- 
sultèrent sur  plusieurs  points  de  l'ad- 
ministration :  Fouché  eut  peine  à  le 
croire ,  quand  il  apprit  de  lui  à  quelle 
somme  modique  se  montaient  de  son 
temps  les  dépenses  d'une  police  si 
bien  faite.  M.  Le  Noir  ne  possédait 
plus  rien  ;  le  gouvernement  permit 
au  Mont -de-Piété  de  lui  faire  une 
pension  de  4ooo  francs  ;  un  homme 
à  qui  il  avait  rendu  service ,  et  qui 
était  devenu  riche ,  lui  olfrit  une  i)e- 
tite  maison  de  campagne,  où  il  trouva 
du  moins  les  douceurs  de  la  retraite 
et  de  la  tranquillité.  Il  revenait  sou- 
vent à  Paris  ,  où  il  mourut,  en  1807, 
à  Page  de  75  ans.  M.  Le  Noir  avait 
reçu  de  la  nature  «ue  physioaoïaie 


LEN 

spirituelle ,  noble  et  pleine  de  dou- 
ceur; son  organe  était  agréable,  et 
son  élocution  facile  :  il  avait  une 
grande  netteté  dans  les  idées ,  uu 
ordre  admirable  dans  la  discussion, 
le  tact  fin ,  et  le  jugement  exquis. 
Aux  études  profondes  qui  forment 
un  crirainaliste  éclairé,  il  joignait, 
dans  l'exercice  de  ses  fonctions  ,  une 
pénétration  qui  n'appartient  qu'au 
magistrat  habitué.!  porter  le  flambeau 
dans  les  replis  du  cœur  humain;  il  fut 
consulté  sur  l'abolition  de  la  torture , 
et  contribua  beaucoup  à  faire  dis- 
paraître cette  page  déshonorante  du 
code  criminel.  Son  ambition  ,  qui  le 
porta  au  point  le  plus  élevé  dans  la 
splière  où  il  s'était  attaché,  fut  en  lui 
le  désir  de  se  distinguer ,  et  non  le 
projet  de  s'enrichir  :  sa  dépense 
personnelle  fut  toujours  modeste; 
sa  fortune  était  médiocre ,  et  la  ré- 
volution eut  peu  de  chose  à  faire 
pour  le  dépouiller.  Ses  détracteurs 
lui  ont  reproché  peu  de  fermeté  dans 
le  caractère ,  sans  articuler  un  seul 
fait  qui  prouve  qu'il  ait  jamais  man- 
qué à  la  sévérité,  ou  à  la  délicatesse 
de  ses  devoirs.  D-s. 

LENOIR  (  Nicolas  ) ,  architecte, 
naquit  à  Paris  ,  en  17^26:  élève  de 
Blondel  ,  après  avoir  remporté  le 
premier  prix  aux  concours  de  l'aca- 
démie, il  fut  envoyé  à  Rome,  où  l'as- 
siduité qu'il  mit  à  étudier  les  restes 
des  monuments  de  l'antiquité ,  lui 
mérita  ,  de  la  part  de  ses  condisci- 
ples ,  le  surnom  de  Romain.  A  son 
retour  en  France ,  on  lui  confia  plu- 
sieurs travaux  importants.  Voltaire, 
qui  estimait  ses  talents  et  qui  aimait 
sa  personne,  le  chargea  de  construire 
quelques-uns  des  édifices  qu'il  faisait 
élever  à  Ferney.  L'incendie  de*  1 787 , 
ayant  détruit  la  salle  de  l'Opéra  au 
Palai-*f  -Royal ,  Lenoir  éleva  ,  en  six 
semaines  ,  le  théâtre  de  la  Porte 


LEN 

S.iint-M.irtin.  Cet  édifice,  qui  n'avait 
qu'une  licslination  provisoire  ,  a 
ctc  bâti  avec  laut  de  soin ,  maigre 
Textrême  rapidité  des  travaux,  qu'il 
ne  peut  que  faire  houiieur  au  génie 
de  l  artiste.  La  salle  est  vaste,  et  bien 
distribuée  ;  cl  les  dégagemvnls  ont 
toutes  les  facilités  que  pouvait  per- 
mettre l'emplacement  sur  lequel  elle 
est  élevée.  En  1 790 ,  Lenoir  cons- 
truisit à  SCS  frais  le  théâtre  de  la 
Cité  ;  cette  salle  ayant  été  supprimée 
quelques  années  après ,  l'architecte 
eti  changea  les  dispositions, et  en  fit 
une  salle  de  bal ,  qui  prit  le  nom  de 
PiWo.  Enfin  le  faubpurg  St.-Antoiue 
manquaitd'un  marchépomlcsappro- 
▼isionnemeiits  de  ses  nomlireux  ha- 
bitants.- Lenoir  fut  chargé  d'en  cons- 
truire un  sur  l'emplacement  de  l'an- 
cien hôtel  de  Bcauvau.  On  y  aborde 
par  une  rue  large  et  bien  bâtie ,  à 
laquelle  on  a  donné  le  nom  de  l'ar- 
tiste :  le  marché  s'appelle  marché 
Beauvau.  Lenoir  mourut  à  Paris  , 
}••  3i  juin  1810.  P-s. 

LENONCOURT  ,  l'une  des  plus 
anciennes  familles  de  Lorraine,  a 
donné  à  l'état  et  à  l'église  plusieurs 
hommes  recommandables  par  leur 
vertu  et  par  leurs  services  ,  entre 
autres  Robert  DE  Lenoncourt  ,  ar- 
chevêque de  Reims  ,  mort  en  i53i , 
en  odeur  de  sainteté  :  il  avait  sacré 
François  I***.  —  Robert  de  Lenon- 
couRT,  son  neveu,  d'abord  évê((uede 
Chàlons-sur-Marne  ,  puis  de  Metz  , 
qu'il  contribua  beaucoup  à  faire  ren- 
trer sous  l'obéissance  du  roi  de 
France  en  i55'2,  fut  successivement 
archevê(|ue  d'Embrun  et  d'Arles. 
En  sa  qualité  d'abbé  de  Saint-Remi, 
il  y  fTt  achever  le  superbe  tombeau 
de  ce  saint.  Paul  III  l'avait  créé  car- 
dinal en  i538.  Il  assista  à  quatre 
conclaves  pour  l'élection  de  Jules 
m,  Maixel  II  Paid  IV,  Pie  IV  ,  «t 


LEN  99 

mourut  en  i56i  ,  à  la  Charité^sur- 
Loire  ,  dont  il  était  abbé.  Ou  trouve 
de  la  monnaie  frappée  à  son  coin 
lorsqu'il  était  évc(|ue  de  Metz  ,  sui- 
vant le  droit  dont  jouissaient  les  évo- 
ques de  cette  ville.  On  vanle  sa  bon- 
lé  ,  sa  modestie  et  sa  sagesse.  — 
Philippe  DE  Lenoncourt  ,  sou  ne- 
veu ,  fait  cardinal  par  Sixte  V  en 
1 58(3,  archevêque  de  Reims  en  1589, 
mourut  en  i59i,agéde(i5  ans.  Henri 
III  l'avait  honoré  de  sa  confiance  et 
de  son  amitié.  Il  se  fit  estimer  par 
sa  douceur  et  sa  piété.  T-d. 

LENOTRE  (  André  ),  architecte 
et  dessinateur  des  jardins  du  Roi , 
naquit  à  Paris,  en  161 3.  Son  père, 
surintendant  des  jardins  des  Tuile- 
ries, voulut  qu'il  se  fit  un  nom  dans 
les  arts,  et  le  mit  chez  Simon  Vouct, 
où  le  jeune  Lenotre  se  lia  avec  Le- 
brun, d'une  amitié  qui  dura  toute 
leur  vie.  Il  se  serait  distingué  dans 
la  peinture  j  mais  doué  d'un  génie  fé- 
cond et  tl'unc  imagination  riante,  il 
étudia  particulièrement  et  perfec- 
tionna l'art  des  jardins.  Il  développa 
dans  ses  plans  une  abondance  d'idées 
et  une  magnificence  d'ornements 
propres  à  embellir  le  séjour  des  rois. 
C'est  alors  qu'on  vit  pour  la  première 
fois  des  portiques ,  des  berceaux,  des 
grottes ,  des  treillages  ,  des  labyrin- 
thes orner  et  varier  le  spectacle 
des  jardins.  Le  désir  de  se  rappro- 
cher de  la  nature  a  introduit  ea 
France ,  depuis  Lenôtre ,  le  goût  des 
jardins  anglais;  mais  si  ce  nouveau 
genre  ofïie  plus  d'agréments,  il  est 
loin  d'avoir  la  majesté  et  la  gran- 
deur que  l'on  admire  dans  les  jar- 
dins des  Tuileries  et  de  Versailles, 
qui  seront  toujours  les  chefs-d'œuvre 
et  les  modèles  du  genre  inventé  par 
Lenôtre  (i).   C'est  d'abord  dans  le 

(i)  Dci  ctianf;«mentt  ilaii*  Ut   il'coratioui  ou 
Ici  aligaemtota  n'ont  pu  d«itgur«r,    m«i«  out 


100  LEN 

château  de  Vaux,  que  cet  habile  ar- 
tiste fit  connaître  son  ge'nie  j  mais  il 
sembla  se  surpasser  dans  les  plans  du 
parc  de  Versailles.  Louis  XIV,  ayant 
choisi  ce  se'jour  pour  y  fixer  sa  rési- 
dence, confia  aux  artistes  les  plus 
célèbres  les  embellissements  qu'il  y 
desirait.  Lenôtrc  fut  charge  de  la 
distribution  des  jardins,  et  il  ne  s'ef- 
fraya pas  des  obstacles  que  lui  pre'- 
sentait  le  terrain.  Lorsqu'il  eut  arrête 
ses  plans,  il  pria  le  Roi  de  venir  sur 
les  lieux,  pour  juger  de  la  distribu- 
tion des  principales  parties.  Il  com- 
mença par  les  deux  pièces  d'eau  qui 
sont  sur  la  terrasse  au  pied  du  châ- 
teau j  il  lui  expliqua  ensuite  son  des- 
sein pour  la  double  rampe.  Le  Roi, 
à  chaque  grande  pièce  dont  Lenôtre 
lui  indiquait  la  position,  l'interrom- 
pait en  disant  :  «  Lenôtre^  je  vous 
donne  10,000 francs,  »  Cette  appro- 
bation fut  répétée  plusieurs  fois  ; 
mais  Lenôtre ,  aussi  désintéressé  que 
touché  de  cette  munificence ,  arrêta 
le  monarque  à  la  quatrième  inter- 
ruption ,  et  lui  dit  brusquement  : 
«  Sire,  fotre  Majesté  n'en  saura 
»  pas  davantage;  je  la  ruinerais.  » 
La  plaine  aride  où  Versailles  est 
situé,  manquait  d'eau;  il  n'y  avait 
k  proximité  du  château  qu'un  ma- 
rais mal-sain  et  croupissant  ;  on  pro- 
posait de  le  dessécher  :  Lenôtre  s'y 
opposa  ,  et  rassembla  toutes  ces 
eaux  dans  le  vaste  canal  qui  termine 
le  parc  de  Versailles.  C'est  après 
ces  beaux  et  vastes  travaux,  qu'il 
çmbellit  ou  qu'il  créa  les  jardins  de 
Clagny,  de  Gliantilly ,  de  St.-Cloud, 
de  Meudon,  de  Sceaux,  des  Tuile- 


«Uéré  l'économie  du  plan  tlu  jardin  des  Tuile- 
ries ,  dont  ou  a  fait  disparaître  les  treillages  qui 
/Mnraient  de  fond  aux  statues  du  coté  du  fer  à 
cheval,  supprimé  les  dessins  des  parterres, 
élargi  la  grande  allée  autrefois  moins  décou- 
Torte,  et  multiplié  le  nombre  des  statues  dont 
plusieurs  us  sout  point  dVocord  avee  le  plau 
général. 


LEN 

ries;  le  parterï-e  du  Tibre  ,  à  Fon- 
tainebleau, et  l'admirable  terrasse  de 
St.-Germain.  Amiens  lui  doit  aussi 
la  belle  promenade  appelée  YAutoiy 
si  chérie  de  Gresset.  Lenôtre  obtint 
du  Roi,  la  permission  de  voyager  en 
Italie,  pour  y  accpiérir  de  nouvelles 
connaissances;  et  en  1678,  il  se  ren- 
dit à  Rome,  où  le  pape  Innocent  XI 
lui  fit  l'accueil  le  plus  distingué.  Ce 
pontife  lui  accorda  une  audience  par- 
ticulière, dans  laquelle  il  se  fît  mon- 
trer tous  les  plans  de  Versailles , 
dont  il  ne  put  s'empêcher  d'admirer 
la  richesse.  Sur  la  fin  de  l'audience , 
Lenôtre,  transporté  d'un  tel  accueil, 
s'écria  :  «  Je  ne  me  soucie  plus  de 
»  mourir;    j'ai  vu    les    deux    plus 
M  grands  hommes  du  monde ,  votre 
))  Sainteté  et  le  Roi  mon  maître.  — 
»  Il  y  a  une  grande  différence ,  ré- 
»  pondit  le  Pape  :  le  Roi  est  un  grand 
»  prince  victorieux;  je  suis  un  pau- 
»  vre  prêtre,  serviteur  des  serviteurs 
»  de  Dieu;  il  est  jeune,  et  je  suis 
»  vieux.  »  A  cette  réponse, Lenôtre, 
oul^lianl  à  qui  il  parlait,  frappa  sur 
l'épaule  du   Pape,  en  lui  disant  : 
<i  Mon  révérend  père,  vous   vous 
»  portez  bien  ,  et  vous   enterrerez 
»  tout  le  sacré  collège.»  Innocent  XI 
ne  put  s'empêcher  de  rire;  alors  Le- 
nôtre, n'étant  plus  maître  de  ses  trans- 
ports, se  jeta  au  cou  du  Saint-Père, 
et  l'embrassa.  De  retour  chez  lui,  il 
se  hâta  d'écrire  ce  qui  venait  de  se 
passer  à  Bontemps  ,  premier  valet 
de  chambre  du  Roi.  La  lettre  fut  lu© 
à  Louis  XIV,  à  son  lever.  Le  duc  de 
Créqui,  présent  à  cette  lecture,  vou-^ 
lut  gager  mille  louis ,  que  la  vivacité 
de  Lenôtre  n'avait  pu  aller  jusqu'aux 
embrassements.  «  Ne  pariez  pas,  ré- 
»  pondit  le  Roi  ;  quand  je  reviens 
»  d'une  campagne,  Lenôtre  m'em- 
»  brasse  ;  il  a  bien  pu  embrasser  le 
»  Pape.   »  Lenôtre  ,  à  son  retour 


LEN 

fl'îtalie,  dirigea  le  bosqxict  de  la 
salle  de  bal ,  et  ?iil  employer  avec 
mi  art  indiii ,  dans  ce  morceau,  ce 
qu'il  avait  vu  de  plus  remarquable 
jiendant  son  voyage.  Eu  1G75  ,  le 
Roi  lui  accorda  des  lettres  de  no- 
blesse, avec  la  croix  de  St.-Micbel, 
et  voulut  lui  donner  des  armes;  mais 
maigre  tant  de  faveurs ,  Lenôtre  avait 
consciTc  sa  modestie  :  il  repondit 
qu'il  avait  les  siennes,  qui  étaient 
trois  limaçons  ,  couronnés  d'une 
pomme  de  chou.  «  Sire,  ajouta-t-il, 
»  pourrais -je  oublier  ma  bêche  ? 
»  Combien  elle  doit  m'ctre  chère  ! 
>»  N'est-ce  pas  à  elle  que  je  dois  les 
»  bontés  dont  Votre  Majesté  m'ho- 
»  nore  ?  »  Accablé  d'années ,  il  de- 
manda la  permission  de  goûter  enfin 
le  repos.  Louis  le  combla  de  mar- 
ques de  sa  bienveillance ,  et  ne  lui 
accorda  la  faveur  qu'il  sollicitait, 
qu'a  condition  qu'il  viendrait  le  voir 
de  temps  en  temps.  Deux  ou  trois 
ans  après,  Lenotrcétant  allé  à  Marly, 
dont  Mansard  avait  dessiné  les  nou- 
veaux jardins ,  le  monarque  l'aper- 
çut ,  et  lui  dit  qu'il  voulait  lui  faire 
les  honneurs  de  son  jardin;  il  monta 
dans  sa  chaise  couverte,  et  obligea 
le  vieillard  à  y  prendre  place.  Lenô- 
tre, touché  de  tant  de  bonté  ,  et  re- 
marquant Mansard,  surin  fendant  des 
bâtiments, qui  suivait  le  Roi,  s'écria, 
les  larmes  aux  yeux  :  «  Sire ,  en  vé- 
»  rite,  mon  bonhomme  de  père  ou- 
»  vrirait  de  grands  yeux,  s'il  me 
»  voyait  dans  unchar,auprèsduplus 
»  grand  Roi  de  la  terre  :  il  faut  a- 
»  vouer  que  V.  M.  traite  bien  son 
))  maçon  et  son  jardinier.  »  Quels 
que  soient  les  changements  surve- 
nus dans  le  genre  cultivé  par  Le- 
nôtre ,  il  sera  difficile  d'v  mettre 
plus  de  grandeur  et  de  noblesse,  et  le 
litre  de  jardinier  des  rois  lui  restera 
toujours.il  mourut  à  Pari*,  eu  1700, 


LEN  lot 

âge'  de  90  ans.  Son  buste,  sculplé 
j)ar  Coysevox,  est  placé  au  Musée 
des  moiHimeuts  français.       P— s. 

LENOURRY  (  Denis-Nicolas  )  , 
savant  bénédictin,  né  à  Dieppe,  en 
1647  ,  fit  ses  premières  études  au 
collège  de  cette  ville,  dirigé  par  les 
PP.  de  l'Oratoire.  11  prit  l'habit  re- 
ligieux à  l'âge  de  dix-nuit  ans  ,  dans 
l'abbaye  de  Jumiéges,  où  il  acheva 
ses  cours  de  philosophie  et  de  théo- 
logie. Envoyé,  quelque  temps  après, 
au  monastère  de  Bonne  -  Nouvelle  , 
il  fut  chargé  de  rédiger  la  préface 
de  l'édition  que  D.  Garet  préparait 
des  OEuvres  ^tQ'AsûoàoTc.  Il  passa 
ensuite  à  l'abbaye  de  Saint-Ouen  de 
Rouen,  et  y  travailla  à  l'édition  des 
OEuvres  de  Saint-x^mbroise,  qui  fut 
publiée  par  D.  Jacques  Dufrische  , 
Paris,  1686,  i69o,2vol.in-f".Ilvint 
enfin  à  Paris ,  appelé  par  ses  supé- 
rieurs ,  et  y  passa,  près  de  quarante 
ans ,  uniquement  occupé  d'un  travail 
important  sur  les  Pères ,  et  qui  a  mis 
le  sceau  à  sa  réputation.  Il  mourut  à 
l'abbaye  Saint-Germain-d es-Prés,  le 
24  mars  1 7^4.  Son  grand  ouvrageest 
intitulé  :  Apparatus  ad  Bihliothe- 
cam  maxinuna  Patrum  Telennn  et 
scriptorum  ecclesiasticorum  Liigdu- 
ni  éditant  :  in  quo  quidipiid  ad  eo- 
rum  scripta  et  doctrinam  ,  varios- 
que  scribendi  modos  et  docendiper- 
iinet ,  dissertationibus  criticis  exa- 
minatur  et  illicstratur.  D.  Lcnourry 
en  avait  d'abord  publié  deux  volumes 
in-8°. ,  Paris  ,  1694  et  i(k)-)  ;  mais 
l'abondanccdes  matériauxlui  faisant 
craindre  de  trop  multiplier  les  volu- 
mes,il  refondit  son  travail  etle  publia 
en  2  vol.in-fol.,Paris,  1703  et  1 715. 
C'est ,  comme  le  litre  l'apprend  ,  un 
recueil  de  dissertations  sur  les  ou- 
vrages des  Saints-Pères,  dont  l'au- 
thenticité y  est  discutée  et  démontrée 
avec   une  raie  érudition.  L'auteur 


102  LEN 

traite  aussi  plusieurs  questions  qui 
se  rattaclient  à  son  sujet ,  telles  que 
l'origine  des  hcre'sies ,  l'établissement 
des  écoles  chrétiennes  ,  dont  la  pre- 
mière fut  celle  d'Alexandrie,  etc.  Cet 
ouvrage  ne  comprend  que  les  quatre 
premiers  siècles  de  l'Eglise ,  et  l'on  ne 
peut  trop  regretter  que  personne  n'ait 
songe  à  en  donner  la  suite.  On  trou- 
vera l'analyse  des  deux  premiers  vo- 
lumes dans  la  Bibliothèque  de  la  con- 
grégation de  Saint-Maur,  parD.  Le- 
cert'.  \J y4j)paratus  s'ajoute  à  la  Bibl. 
maxima  Patrinn  ,  publiée  par  Ph. 
Despont ,  Lyon,  1677  ,  27  vol.  in-f^. 
(  /^ojez  Despont  )  ;  mais  il  est  beau- 
coup plus  rare.  D.  Lenourry a  publié, 
d'ajirès  un  manuscrit  de  la  Biblio- 
thèque de  Colbert ,  le  traité  De  Mor- 
tihus  persecuîonim  ,  Paris  ,  1710, 
in-80.  ;  etil  l'a  fait  précéder  d'une  dis- 
sertation ,  dans  laquelle  il  s'elForce  de 
prouver  que  ce  traité  n'est  point  de 
Lac  tance ,  mais  de  Lucius  Caecilius  : 
ce  sentiment ,  combattu  par  Lacroze 
et  Heumann  n'a  point  été  adopté. 
(  /^q/ez Lactance.  )  On  attribueen- 
core  à  D.  Lenourry  ,  la  Préface  gé- 
nérale de  l'édition  des  OEuvres  de 
St.  Chrysostome, publiée  par  Mont- 
faucon;  et  Ton  sait ,  qu'au  moment  de 
sa  mort ,  il  préparait  une  nouvelle 
édition  des  OEiwres  de  Saint  -  Am- 
broise.  On  peut  consulter  ,  pour 
plus  de  détail  ,  outre  les  bibliothé- 
caires de  son  ordre,  les  Mémoires  de 
JNiceron  ,  tom.  i  et  x.  W-s. 

LENS  (  Jean  de  ) ,  en  latin  Len- 
sœus,  né  en  i54i  à  Bailleul,  dans  le 
Hainaut ,  et  mort  le  2  juillet  iSgS 
à  Louvain  ,  où  il  était  professeur  de 
théologie,  possédait  à  fond  les  matiè- 
res théologiques,  et  écrivait  en  latin 
avec  beaucoup  d'élégance  ;  il  a  com- 
posé un  grand  nombre  d'ouvrages 
sur  les  différentes  questions  de  con- 
troverse eutre  les  catholiques  et  les 


LEN 

protestants.  La  faculté  de  Louvaia 
le  chargea  de  rédiger  sa  déclaration 
sur  les  articles  condamnés  dans  la 
bulle  de  Pic  Y  contre  Baius.  Il  tra- 
vailla aussi  à  la  censure  de  la  même 
faculté  contre  Lessius ,  sur  la  doc- 
trine de  la  grâce. — Arnoul  de  Lens  , 
ou  Lensaeus ,  son  frère ,  périt  à  Mos- 
cou ,  dans  l'incendie  de  i575  ,  étant 
alors  médecin  du  Czar.  Nous  avons 
de  lui  une  introduction  aux  Élé- 
ments de  géométrie  d'Euclide ,  sous 
ce  titre  :  Isagoge  in  geometrica 
elementa  Euclidis ,  Anvers.  T-d. 

LEjNTI( Joseph),  biographe,  né  en 
i6o5,àAscoli ,  d'une  famille  noble  , 
a  mérité  une  place  dans  le  catalogue 
assez  étendu  des  savants  précoces.  Il 
n'avait  que  dix-sept  ans  ,  lorsqu'il 
publia  un  ouvrage  intitulé  .Prœclara 
facinora  clarorum  Asculanorum  ex- 
posita  ,  Rome,  1622  ,  in  -  8''.  Ce 
volume  ,  devenu  très-rare  (  i  ) ,  con- 
tient les  éloges  de  quinze  des  plus 
illustres  citoyens  d'Ascoli.  Lcnti  , 
après  avoir  terminé  ses  études  ,  vint 
établir  sa  résidence  à  Venise  ,  où  il 
ne  tarda  pas  à  se  faire  estimer  par 
ses  talents  et  par  ses  qualités  per- 
sonnelles. On  dit  qu'il  était  doué  de 
tant  d'agréments  physiques  ,  que  les 
peintres  se  plaisaient  à  copier  sa 
ligure,  comme  objet  d'étude.  Une 
mort  prématurée  l'enleva  en  i64o., 
à  l'âge  de  trente-cinq  ans.  Léon  Al- 
latius  lui  a  consacré  un  article  dans 
ses  u^pes  urhanœ.  W-s. 

LENTILIUS  [  RosiNUS  ) ,  méde- 
cin allemand  ,  membre  de  l'acadé- 
mie impériale  des  Curieux  de  la  na- 
ture ,  sous  le  nom  à' Oribase ,  et 
dont  le  nom  de  famille  en  allemand 
était  Linsenbahrdt ,  qu'il  latinisa  | 
suivant  l'usage  de  ce  temps  là ,  naquit 
le  3  février  1657  ,  à  Waldcnbourg  , 

(i)'Cineni  l'appelle  :  Dolto  ed  élégante  opuf-* 
cuJq,  (  Jiil>itQt.  vul«ui«;,  tom.  ui,  p*  i6g.  ) 


LEN 

dans  le  comte  de  Ilolienlohc.  Il  fit 
SCS  hiiiiMniles  à  Hci(U'li)erp;  ,  puis  à 
lona.  Après  les  avoir  leruiinées  ,  et 
se  trouv.<nt  sans  fortune  ,  il  remplit 
sueccssivcment  les  foiiclions  de  pré- 
cepteur près  de  Leij»/>ig,  à  llosfoek  , 
Wisniar  ,  Mietau  et   autres   villes  ; 
mais  lasse  d'une  profession  si  peu  lu- 
crative, il  essaya  d'exercer  la  mcde- 
cine,cf  le  lit  avec  assez  de  succès  pour 
que  le  margrave  d'Anspach  lui  accor- 
dât la  place  de  physicien  de  la  ville 
de  Creilsbeim  en  Franconie ,  où  il  se 
rendit  en  i(38o  ,  après  avoir  pris  le 
degré  de  licence  en  médecine  à  Allorf. 
F     II  alla  ensuite  s'établir  à  Nordlingen , 
puis  à  Stuttgard,  où  il  remplit  la 
charge  de  physicien  ,  et  devint ,  en 
1 7 1 1 ,  ])remier  médecin  du  duc  de 
Wurtemberg.  Lentiliusalla  rejoindre 
À  Turin,  le  fds  de  ce  duc,  et  l'ac- 
compagna dans  les  voyages  qu'il  lit 
en    Espagne  ,  dans  les  Pays-Bas   et 
en  France.  De  retour  à  Sluttgard  , 
il  se  livra  à  l'exercice  de  la  méde- 
cine jusqu'à  la  fm   de  sa  carrière  , 
qui  arriva  le   12  février    1733.  Il 
avait  fait  une  étude  approfondie  de  la 
matière  médicale  ,  qu'il  considérait 
comme  la  partie  fondamentale  de  la 
médecine.  Il  fut  ui?  des  plus  ardents 
propagateurs  du   système    chimia- 
trique  ,  et  conseilla  le  premier  l'u- 
sage de  l'arsenic  pour  la  cure  des 
fièvres   intermittentes.  Il  ne  faisait 
aucun   cas   de  l'anatomie  ;  et  il  re- 
gardait les  observations  des  anciens, 
et  les  faits  recueillis  dans  d'autres 
climats  que  celui  de   l'Allemagne  , 
comme  inutiles  et  même  d'une  ap- 
plication dangereuse.  Ennemi  de  la 
saignée,  il  se  récria  contre  l'habi- 
tude trop  généralement  adoptée  alors 
par  ses   compatriotes  ,  de  se  faire 
tirer  du  sang  à  l'époque  des  équi- 
noxes,  et  publia  sur  ce  sujet,  en  alle- 
mand ,  un  livre  qui  fut  imprimé  à 


LEN  îo3 

Ulm  ,  en  iOq-a,  in-8".  On  a  encore 
de  lui  :  I.  Tabula  cnnsultatoiia  me- 
dica  ,  in-8**.,  Ulm,  1  (><)().  11  donne  , 
dans  cet  opuscule  ,  des  conseils  aux 
médecins  surla  manièredeconsuller, 
et  il  indique  le  fruit  que  l'on  peut 
tirer  de  ces  consultations.  II.  De 
hydwphohiœ  causa  et  curd,  diss. 
in-8°. ,  Ulm  ,  1700.  III.  Etcodro- 
THus  medico-practiciis  y  anni  1701), 
Sluttgard  ,  1 7 1 1  ,  in-4".  ;  c'est  \\n 
journal  dans  lequel  Lentilius  a  con- 
signé tout  ce  que  lui  a  oflèrt  sa 
pratique  pendant  l'année  1709.  IV. 
latwmnemata  theorelico-practica , 
Sluttgard  ,  1712  ,  in-S^.  ;  cet  ou- 
vrage dans  lequel  il  indique  les  de- 
voirs des  médecins  pensionnés  p.ir 
les  villes  d'Allemagne  ,  est  rempli 
d'obseiTations  dans  lesquelles  on  re- 
trouve sa  méthode  curalive  ,  fondée 
sur  la  théorie  la  plus  erronée  et  la 
plus  dangereuse.  P.  et  L. 

LENTULUS  est  le  nom  d'une 
des  familles  les  plus  illustres  de 
Rome,  qui  a  fourni,  dans  les  beaux 
temps  de  la  république ,  plusieurs 
personnages  recommandables  par 
leur  vertu  et  par  leurs  services  : 
d'autres  jouèrent  un  grand  rôle  dans 
les  derniers  troubles  et  sous  les  pre- 
miers empereurs.  Les  plus  fameux 
de  ceux-ci  sont  :  Publius  Lentulus 
Sura  ,  qui ,  après  avoir  rempli  les 
principales  charges  de  l'étal,  devint 
complice  de  Gatilina  ,  et  fut  étran- 
glé en  prison.  —  Lentulus  Spin- 
ther  ,  l'un  des  hommes  les  plus  fas- 
tueux de  son  temps  ,  étala  ,  dans  les 
jeux  publi<:s  ,  pendant  son  édilitc 
et  sa  préture  ,  un  luxe  inconnu  jus- 
qu'alors. Ayant  embrassé  le  parti 
de  Pompée ,  il  tomba  entre  les 
mains  de  César  qui  lui  lit  grâce  ;  il 
rejoignit  Pompée  et  prit  la  fuite  avec 
lui  après  la  bataille  de  Pharsale.  — 
Cossus  Cornélius  Lentulus^   suc- 


to4  LEN 

nomme  Getulicus ,  à  cause  de  ses 
victoires  sur  les  Gëtules  ,  se  distin- 
gua sous  Tibère  par  ses  talents,  ses 
vertus  et  ses  services.  —  Cneïus 
Lentulus  ,  fds  du  précèdent ,  com- 
mandait dans  la  Haute- Germanie  , 
lorsqu'on  l'accusa  d'être  complice 
de  Sëjan  :  il  confondit  son  calom- 
niateur par  une  leltre  pleine  d'une 
noble  fermeté',  et  le  fit  punir  ;  mais 
étant  entre,  par  la  suite,  dans  une 
conspiration  contre  Galigula  ,  il  en 
fut  la  victime.  Il  avait  composé 
quelques  ouvrages  d'histoire  et  de 
poésie,  qui  sont  perdus.         T-d. 

LENTULUS  (Gyriaque)  ,  publi- 
ciste ,  était  né  à  Lentz  ,  vers  1620  ; 
il  fut  nommé  professeur  d'histoire 
et  de  philosophie  à  Herborn  dans  le 
comté  de  Nassau  ,  et  se  fit  une  répu- 
tation assez  étendue  par  les  écrits  qu^il 
publia  sur  des  matières  de  politique. 
De  tous  les  auteurs  de  l'antiquité/Ta- 
cite  était  celui  qu'il  estimait  davan- 
tage; il  le  lisait  continuellement,  et  ne, 
cessait  d'en  recommander  la  lecture 
à  ses  élèves.  Il  ne  fut  pas  aussi  juste 
envers  ses  contemporains; il  attaqua 
Grotius  ,  dont  il  ne  soupçonnait  pas 
k  supériorité,  et  réfuta  le  système 
de  Descartes  ,  avec  une  aigreur  d'au- 
tant plus  blâmable,  que  cet  illus- 
tre philosophe  était  alors  persécuté. 
Lentulus  mourut  vers  la  fin  du  dix- 
septième  siècle  ,  dans  un  âge  avancé. 
On  connaît  de  lui  :  I.  yiugustiis  swe 
de  cowertendd  in  nionarchiain  re~ 
publicd,  Amsterdam,  Eizevir,  i645, 
in- 12  ;  rare  et  curieux.  Il  dédia  ce 
traité  aux  magistrats  d'Utrecht,  par 
une  épître  dans  laquelle  il  les  loue 
du  zèle  qu'ils  ont  montré  pour  le 
progrès  des  lettres.  G' est  propre- 
ment, dit  Gaspar  de  Real,  le  projet 
et  le  préliminaire  de  VArcana  re- 
gnorum.  (  Voyez  la  Science  du  gou- 
vernement ,  tome  8.  )  II.  Eurcpa , 


LEN 

Carmen ,  Herborn  ,   i65o  ,  in-S^.  ; 
c'est  un  poème  en  vers  héroïques. 

III.  Nova  Ren.  Descartes  sapientia 
détecta,  Herborn  ,  i65i  ,   in-  12, 

IV.  Cartesius  triumphatus  et  de-- 
creta  academianimBelgicarum  con- 
tra Canesii  scripta  ,  Francfort  , 
i653  ,  in-4°.  En  lisant  ces  deux  ou- 
vrages ,  on  est  tenté  de  croire  que 
Lentulus  était  jaloux  de  la  gloire  de 
Descartes  •  l'amour  seul  de  la  vérité' 
n'aurait  pas  pu  lui  inspirer  tant 
d'expressions  injurieuses.  V.  Arcana 
regnorum  et  rerumpuhlicarum,  , 
Herborn  ,  i653  ,  i655  ,  1666  , 
in-8**.  VI.  Aula  Tiherina  et  solcr- 
tissimi  ad  imperandum  principis 
idea  ,  Herborn  ,  1662  ,  in  -  12; 
Wurtzbourg,  i663  ,  in-S».  VII. 
Princeps  ahsolutus, l^crhorn^  iG63, 
in-S»^.  VIII.  Janus  reseratus  poli- 
ficus  et  militaris  ,  ibid.  ,  i665  , 
in-8°.  IX.  Qermania  y  cum  vitd 
Jul.  Agricolce  ,  Marbourg  ,  1666  , 
in-S*'.  Il  faut  réunir  ces  cinq  derniers 
traités  qui  forment  un  commentaire 
très-ample  sur  les  œuvres  de  Tacite. 
Amelot  de  la  Houssaye  en  faisait 
beaucoup  de  cas.  X.  Imperator  sive 
de  jure  circà  hella  et  pacem  ohser- 
vando  ,  Herborn  ,  iG6^  ,  in-8''.  ; 
c'est  une  espèce  de  réfutation  du 
fameux  ouvrage  de  Grotius  :  De 
Jure  helli  et  pacis;  et  Lentulus  n'y 
parle  pas  de  ce  grand  publiciste  avec 
tous  les  égards  qu'il  mérite.  XI. 
Pnidentia  militaris  prisci  ac  recen- 
tioris  œvi  ac  imperatoris  ahsoluti 
partes  duce  ,  Marbourg,  iG(54  ,  in- 
4".XII.  Apex  gloriœ  Bomanœ,  slve 
de  statu  rei  Bomana^  summd  in 
potestate  ,  magistratihus ,  jurisdic- 
tione  y  militid ,  civium  prœrogativd, 
sacris  et  sacerdotilms ,  Margbourg, 
1668,  in-4*'.XIII.  Ymp'XfnztTiio;  pro 
scriptis  Cyriaci  Lentuli  :  adversus 
novum  criticum    judicia  de  poli- 


LF.N 

(icis  eerehrow  è  Parnasso  prnf<^- 
rcntem  ,  Marbourg  ,  1669  ,  in-4".  ; 
cVsl  une  .'jpologie  que  Lnituliis  pii- 
j  blia  liù-méine  de  ses  écrits  ,  contre 
le  faux  Euhultts  Tlwodatus  Sarck- 
masiiis  (  Conrad  -  Samuel  Schurlz- 
flcLsch).  XIV.  Outre  les  ouvrages  de 
politique  qu'on  vient  de  citer  ,  on 
'  encore  de  lui  :  Parncissi  latialis 
tristarchus,  Herborn,  T663,in-4®.; 
et  quelques  trailës  de  droit  :  Instilu- 
tioîies  juris ,  cites  par  Koenig  {Bibl. 
vêtus  et  TKH'a  ); — Memoriale  jwi~ 
dicum,  Francfort ,  1659 ,  in-8'\  — 
i)uid  consilii  7  seu  ^\o  dubia  , 
Herborn  ,  1 67 1  ,  in-8".  ;  —  Censura 
{lutorum.  ad  civilem  prudentiam  et 
huic  annexant  movalcm  consequfin- 
him  legendorum  ,  seu  Dissertatio 
de  autorihus  le  pendis  ;  —  Mnemo- 
nica  libronan  ,  capitum  et  rerum 
sacrcp  Scripturœ  ,  etc.         W-s. 

LLNTULUS  (  Scipiopr  )  ,  napo- 
litain, se  retira  dans  le  pays  des  Gri- 
sons ,  ])our  y  embrasser  la  reforme  , 
et  fut  ministre  à  Chiavenne.  Il  avait 
compose  une  Grammaire  italienne  , 
Genève,  i568;  une  /)^"/i?«56^  de  l'ëdit 
des  Ligues-Griscscontre  les  nouveaux 
\ riens,  Genève,  1592  ,  in-B».  Cette 
tpologie  ,  dit  Bayle  ,  ne  doit  point 
irprendre  ,  quoique  l'auteur  eût  ete 
'lutrefois  persécute';  car  il  ny  a 
rien  de  plus  ordinaire  que  de  voir 
des  g,ens  fugitif  s  pour  la  religion  , 
sonner  le  tocsin  contre  les  sectes, 

III  est  encore  auteur  d'une  réponse  à 
Possevin,  qui  avait  ëfë  charge,  par  la 
cour  de  Savoie  ,  d'aller  faire  une 
mission  dans  les  vallées  et  d'y  e'tablir 
les  pasteurs  catholiques.       T-d. 

LENTULUS(  Paul  ),  probable- 
ment fils  du  précédent ,  fut  reçu 
bourgeois  de  Berne,  et  nommd  mé- 
decin de  la  ville,  en  1 593.  Il  mourut 
de  la  ix-ste  en  161 3.  Il  a  public: 
Historia    de    prodigiosd     inedid 


LEN 


io5 


Apolloniœ  Schregerœ^  Berne ,  1  Go4, 
in-4°. — Son  arrière  petit-lils,Cësar- 
Joseph(i),në  à  Berne,  en  i(i83, 
servit  en  Autriche ,  obtint  le  grade 
de  maréchal-lieutenant ,  et  prit  part 
aux  campagnes  de  1^34  et  1735  sur 
le  Rhin ,  à  différentes  guerres  contre 
les  Turcs  ,  et  à  la  première  guerre 
de  Silësie  ;  en  \')f\i  ,  il  fut  nomme' 
commandant  de  Cronstadt,  en  Tran- 
sylvanie,où  il  mourut  en  \']f\\.  T-p. 
LENTULUS(RoBEr.T-Scirio!v  dk), 
fds  de  César-Joseph,  naquit  àV  ieniie, 
en  1 714,  et  mourut  en  sa  maison  de 
campagne  de  Monrepos  ,  près  de 
Lausanne,  le  9.0  décembre  178G.  H 
suivit  la  carrière  militaire,  et  entra, 
dès  sa  quatorzième  année,  au  ser- 
vice de  l'Autriche.  Il  eut  part  aux 
difTérentes  guerres  de  cette  puissance 
contre  les  Turcs  et  en  Silésie.  A  la 
prise  de  Prague  en  1744  >  il  ^"t  fait 
prisonnier  avec  sa  compagnie  :  il 
avait  refusé  de  signer  la  capitulation, 
disant  sèchement  au  général  prussien 
Einsiedel  ,  qu'on  l'avait  envoyé  à 
Prague  pour  se  battre  ,  et  non  pour 
rendre  ses  armes.  Forcé  néanmoins 
de  suivre  le  sort  de  la  garnison ,  il 
brisa  son  épée.  Le  roi  de  Prusse , 
informé  de  ces  détails ,  le  fit  venir  à 
sa  table,  fut  frappé  de  son  air  mar- 
tial ,  de  sa  taille  gigantesque,  lui  té- 
moigna le  désir  qu'il  aurait  de  l'a- 
voir à  son  service,  et  le  renvoya  sur 
sa  parole  d'honneur;  il  avait,dit-on, 
environ  sept  pieds,  et  il  était  si  bien 
j)roportionné  que,  dans  sa  jeunesse, 
on  l'appelait  le  beau  Lentulus.l/an-- 
née  suivante,  il  quitta  le  sei'vice  de 
l'Autriche ,  se  rendit  en  Suisse;  et  ct> 


(i)  Il  se  disait  issu  de  l'ancienne  familîrt 
des  Lentulus,  d'une  branche  de  la  noldo  fi- 
ftp  des  Cornélius.  Toui.  les  membres  de  «  eUte 
famille  ,  transplantée  à  Berne,  ont  rons«iv» 
des  noms  Romains ,  «t  s'appellent  Cksak  o» 
Scwum.  •  i 


io6 


LEN 


1746,  sur  les  instances  du  prince 
Léopold  de  Dcssau ,  il  entra  au  ser- 
vice de  Prusse.  Il  s'y  distingua  pen- 
dant la  guerre  de  sept  ans  ,  et  il  sut 
mériter  la  faveur  de  Frédéric  TI,  qui 
le  combla  d'honneurs  et  de  distinc- 
tions. En  1 768,  il  fut  nomme'  par  ce 
prince  gouverneur  de  la  principauté' 
ae  Ncuchatel,  et,  par  les  Cantons  , 
commandant  de  la  garnison  qui  y 
dut  apaiser  quelques  troubles.  En 
1773,  Lentulus  était  à  la  tcte  de 
l'armëe  prussienne  qui  prit  posses- 
sion des  provinces  de  Pologne  , 
dévolues  à  la  Prusse  par  le  pre- 
mier partage  du  royaume.  A  Tou- 
rerture  de  la  guerre  de  1778,  il 
obtint  sa  démission  ,  se  rendit  à 
Berne  ,  devint  baillif  de  Koniz  ,  et 
commanda,  en  1782, les  troupes  de 
son  canton  ,  que  les  troubles  de  Ge- 
nève y  avaient  appelées.  Il  est  remar- 
quable que  cet  otilcier,  en  cinquante 
ans  de  service,  s'étant  trouvé  à  onze 
ou  douze  batailles,  dans  lesquelles  il 
ne  s'était  point  épargné  et  avait  eu 
souvent  des  chevaux  tués  sous  lui , 
n'avait  cependant  jamais  été  blessé. 
Il  a  laisse  deux  fils  de  son  épouse  , 
née  comtesse  de  Schwerin.  Sa  fa- 
mille conserve  ses  manuscrits,  con- 
cernant la  guerre  de  sept  ans  ,  ainsi 
que  sa  correspondance.  La  Fie  du 
général  Lentulus  par  F.  L.  Hallcr, 
a  été  traduite  en  français,  par  Hedel 
Hoker,  Lausanne,  1787,  in-8».  Id. 
revue  et  augmentée ,  avec  son  por- 
trait ,  Berne  ,  1 788 ,  in-80.      U-i. 

LENZ  (  Charles  -  Goïthold  )  , 
philologue  et  littérateur  allemand , 
naquit  a  Géra  ,  le  6  juillet  17*63.  Il 
y  fit  de  très-bonnes  études ,  ainsi  qu'à 
léna  et  à  Gœtlingue.  En  1799,  il 
fut  nommé  professeur  au  gymnase 
de  Gotha,  où  il  enseigna  ,  avec  un 
succès  distingué  ,  l'histoire  de  la 
philosophie  et  de  la  littérature.  Pea- 


LEO 

dant  deux  ans ,  il  eut  l'intendance 
du  cabinet  de  médailles  du  duc  de 
Gotha,  un  des  plus  riches  de  l'Alle- 
magne ,  et  il  y  acquit  des  connais- 
sances profondes  en  numismatique. 
Il  mourut  le  27  mars  1809.  On  a  de 
lui  en  allemand  divers  ouvrages  dont 
les  principaux  sont  ;  I.  Histoire  des 
femmes,  dans  les  temps  héroïques, 
Hanovre,  1 799,in-8^.  W.Surles  rap- 
ports de  J.-J.  Rousseau  avec  les 
femmes,  Leipzig  ,  2  vol.  in-8".  III. 
Foj-age  à  la  Troade  ,  d'après  Le- 
chevalicr,  Altembourg,  1800,  in-8<'. 
IV.  La  Déesse  de  Paphos,  d'après 
les  antiques.  Gotha  ,  1808  ,  in-4°., 
avec  1  estampes.  On  trouve  un  grand 
nombre  de  mémoires  ,  de  disserta- 
tions et  extraits  de  Lenz ,  dans  les 
journaux  et  les  recueils  les  plus  re- 
nommés de  l'Allemagne.  Il  a  laisse' 
des  matériaux  pour  une  nouvelle 
édition  de  Stace.  C-au. 

LÉO  (  Léonard  )  ,  l'un  des  plus 
grands  compositeurs -harmonistes  , 
naquit  à  Naples  en  1694  (ou  ,  selon 
Piccini ,  en  1701  ).  On  croit  qu'il 
fit  ses  premières  études  sous  Alexan- 
dre Scarlatti.  Les  talents  de  Léo 
le  firent  bientôt  distinguer  ;  et  il 
devint  l'un  des  maîtres  du  conser- 
vatoire de  Santa- Onufrio ,  et  com- 
positeur particulier  de  la  chapelle 
du  roi  de  Naples.  Un  grand  nombre 
d'élèves  d'un  mérite  supérieur  se 
formèrent  sous  lui ,  tels  que  les  Pic- 
cini, les  Traetta;  et  il  partage,  avec 
Durante  et  Pergolèse ,  la  gloire  d'a- 
voir contribué  à  élever  l'école  de 
Naples  au  plus  haut  rang  parmi  les 
difîérentes  écoles  d'Italie.  C'est  lui 
qui ,  le  premier  ,  a  employé  dans  la 
composition ,  ces  accompagnements 
expressifs  et  variés  ,  ce  style  gran- 
diose et  plein  d'effet ,  qui  carac- 
térisent sa  musique,  et  qui  ont  servi 
de  modèles  à  ses  successeurs.  Toutes 


LEO 

h's  passions  et  tous  les  seiïtiments 
I  II  claicnl  également  familiers  ;  son 
i.«iiieu\  air  du  morceau  si  connu 
cl'A|>ostolo  Zeuo  :  Ombra  diletta 
del  cai-o  sposo  ,  frapjïo  et  saisit 
dVtonnemcnt  ;  son  opéra  comicpie  , 
Jl  Cioè  ,  respire  an  contraire  une 
paîle  naive.  (l'est  à  lui  (pi'on  attribue 
la  lorme  du  rondeau,  qu'il  a  intro- 
duite dans  ce  dernier  opéra.  La  mul- 
titude de  ses  ouvrages  ,  dont  on  se 
borne  à  indiquer  les  plus  connus  ,  a 
prouve  qu'aucun  genre  de  composi- 
tion ne  lui  était  étranger  ;  il  les  em- 
brassait tous  avec  le  même  talent  : 
mais  c'est  surtout  sa  musique  d'e- 
glisc  qui  l'emporte  sur  toutes  ses  au- 
tres prodirctions  ;  son  Miserere  ne 
le  cède  ni  au  Stabat  de  Pergolèse  , 
son  contemporain, ni  à  aucune  autre 
composition  du  même  genre.  C'est 
là  qu'il  a  dépose  tout  ce  que  l'ima- 
gination ,  animée  parle  génie,  peut 
exprimer  de  grand  et  de  sublime. 
La  musique  dramatique  a  éprouvé 
depuis  et  peut  éprouver  encore  de 
très-grands  changements;  mais  tant 
qu'il  y  aura  de  la  musique  d'église  , 
ce  Miserere  sera  un  chef-d'œuvre  , 
remarquable  à  la  fois  par  la  science 
del'harmonie  et  par  la  clarté  du  style. 
Ici  les  combinaisons  savantes  ,  loin 
de  nuire  à  l'expression, sont  en  quel- 
que sorte  calculées  sur  les  sentiments 
les  plus  profonds  et  les  plus  vrais  du 
cœur  humain.  Il  attachait  tant  d'in- 
térêt à  l'exactitude  d'exécution ,  qu'il 
préparait  les  répétitions  du  Miserere 
dès  le  mercreai  des  Cendres ,  et  les 
continuait  jusqu'à  la  Semaine  Sainte, 
où  ce  morceau  devait  être  exécuté. 
Léo  mourut  en  \'-jl\'i  selon  Burney, 
en  1-143  selon  Piccini,  ou,  selon  Ger- 
ber,en  1 745(i). Ses  principaux  ou- 

(1'  CeUc  incertitude  a  de  quoi  surprendre; 
«t  il  est  probable  qu'elle  lient  à  quelques 
fci)te6  d'iuiprsttioD.  Eu  comparaol  le»  «j>u- 


LKO  107 

vragcssont:  L  0|)éras:  Sophonishe, 
1781,50111*"^.  opéra.  Olimpiadttf^ 
dont  on  lemarque  le  duo:  Nei  giorni 
tuoij'elici ,  et  l'air  :  Non  so  d'onde 
vinne. — Vemofonte ,  dont  l'air, 3/t- 
sero  pargoletto,  esl  devenu  célèbre. 
Cajo  Gracco,  \']io;  Tnmerlanc , 
^''j'i'À'j  Timocrate,  \yïS  ;Catoneiti 
Utica,  l'j'xQ'y  la  Clenumza  di  Tito, 
1735;  Ciro  riconosciuto ,  1739;  A' 
chille  in  S  ciro,  174^;  Fologese  , 
1 744- lï-  Opéras  comiques: Z«  Con^ 
tesa  delV  amore  e  délia  virtà.  —  Il 
Cioè.  in.  Musique  d'église  :  deux  ora- 
torio ,  Santa-Elena  et  la  Morte  di 
Ahele  ;  Miserere  à  huit  voix  en  deux 
chœurs  ,  inséré  par  Choron  dans  la 
collection  des  classiques;  Ave  maris 
Stella,  gravé  par  Porta.  IV.  Plu- 
sieurs Motets  et  Cantates  ,  conser- 
vés en  manuscrit  à  Berlin  et  à  Na- 
ples.  L-o. 

LÉOCHARÈS ,  sculpteur  grec  , 
a  fleuri  dans  le  iv*'.  siècle  avant 
notre  ère  :  il  fut  l'émule  et  le  con- 
temporain de  Policlès,  de  Cephiso- 
dore,  d'Hypatodore ,  de  Scopas, 
de  Briaxis  et  de  Timolhée;  ce  fut 
avec  ces  trois  derniers  ,  et  même  , 
selon  Vitruve,  avec  Praxitèle,  qu'il 
travailla  au  tombeau  de  Mausole, 
dont  le  côté  occidental  fut  son  ou- 
vrage (  Vcyy.  Briaxis  ).  Léocharès 
fit  ensuite  la  statue  de  bronze  élevée 
à  Isocrate,  dans  le  vestibule  du  tem- 
ple d'Eleusis ,  par  son  ami  Timo- 
thée,  fils  de  Conon,  et  les  statues 
de  Jupiter  et  du  peuple  athénien  , 
placées  au  Pvrée.  On  attribuait  en- 
core à  Léoclliarès ,  un  colosse  dit 
Acrolithe  qui  décorait  le  temple  de 
Mars  à  Halicarnasse.  Il  exécuta, 
vers   la  cent  onzième   olympiade  , 


qties  donne'es  par  Ginçuenc',  dans  sa  Notice 
sur  Piccini  ,  enverra  (jue  la  date  de  174» 
est  évidcniment  fausse,  et  qu'on  ne  peutad- 
inelUcquc  i;43  ou  1744» 


io8  LEO 

les  statues  en  or  et  ivoire,  d'Amyn- 
las  ,  de  Philippe ,  d'Alexandre,  d'O- 
lympias  et  d'Euridice ,  qui  furent 
consacrées  dans  un  temple  élevé'  à 
Olyrapie,  par  Philippe,  après  la  ba- 
taille de  Chéronée.  Mais  les  chefs- 
d'œuvre  de  ce  sculpteur  furent  un 
Ganyraède  enlevé  par  l'aigle  ,  qui 
semblait  épargner  de  ses  serres  une 
proie  destinée  au  maître  des  dieux  , 
ji,roupe  admiré  dans  l'antiquité  et 
dont  on  croit  avoir  quelques  répéti- 
tions antiques  ;  la  statue  du  jeune 
Autolycus,  qui  fut  vainqueur  dans 
les  combats  du  pancrace, et  en  l'hon- 
neur de  qui  Xénophon  a  écrit  son 
Banquet; une  statue  de  Jupiter  ton- 
nant ,  placée  depuis  dans  le  Capi- 
tole  ;  enfin  un  Apollon  onié  d'un 
diadème.  Dans  quelques  éditions  de 
Pline ,  ces  ouvrages  sont  attribués  à 
Léocras  ;  mais  un  passage  de  Ta- 
tien ,  qui  reproche  à  Léocharès 
celte  même  statue  de  Ganymède 
dont  on  vient  de  parler  ,  prouve  que 
le  nom  de  Léocras,  d'ailleurs  incon- 
nu ,  n'est  que  le  résultat  d'une  er- 
reur de  copiste.  L—s-e. 

LÉON  l«r.  (Saint  Léon),  dit  le 
Grand, élu  pape  le  Ig septembre  44o, 
succéda  à  Sixte  IIL  On  ne  sait  rien 
de  sa  famille  ,  sinon  que  son  père 
s'appelait  Quintien  ,  qu'il  était  ori- 
ginaire de  Toscane  ,  et  qu'il  naquit 
à  Rome.  Ses  talents  et  ses  vertus  l'a- 
vaient fait  remarquer  dans  des  mis- 
sions importantes.  L'empire  d'O- 
rient était  alors  gouverné  par  Théo- 
dose II,  et  celui  d'Occident  par  Va- 
lentinienlll.  Les  Francs,  commany 
dés  par  Clodion,  étaient  à  peine  éta- 
blis dans  les  Gaules,  et  n'étaient  pas 
encore  chrétiens.  Genseric  ,  roi  des 
Vandales  ,  désolait  l'Afrique  ,  et  se 
préparait  à  passer  en  Sicile.  Attila 
menaçait  l'Ilalie-Supérieure  ,  après 
avoir  ravagé  la  Thrace  et  l'Illyrie  ) 


LEO 

mais  ces  ennemis  ne  furent  pas  Ici 
premiers  qui  occupèrent  les  soins  du 
nouveau pontife.Saint  Léon,  sous  les 
papes  ses  prédécesseurs  ,  avait  déjà 
combattu  les  différentes  hérésies  qui 
infestaient  le  sein  de  l'Église.  Il  tra- 
vailla d'abord  à  chasser  de  Rome  les 
Manichéens  qui  s'y  tenaient  cachés. 
C'était  le  sujet  de  sa  prédication 
accoutumée.  Il  désigne  ces  hérésiar- 
ques en  disant  que  ,  «  lorsqu'ils 
»  communient  avec  les  fidèles,  ils 
»  ne  prennent  que  le  corps  de  Notre- 
»  Seigneur  ,  et  non  point  le  sang  , 
»  parce  qu'ils  abhorrent  le  vin(  i).» 
Saint  Léon  s'attacha  surtout  à  dé- 
truire les  erreurs  de  Nestorius  et 
d'Eutychès  sur  le  mystère  de  l'in- 
carnation (  Fox.  Nestorius  et  Eu- 
tychÈs)  :  le  premier  avait  été  con- 
damné dans  le  concile  d'Ephèse,  en 
43 1 .  Eutychès,  qui  l'avait  combattu, 
soutenait  une  doctrine  non  moins 
hétérodoxe  dans  un  excès  contraire. 
Ce  fut  dans  un  concile  tenu  à  Cons- 
tantinople  ,  l'an  44^  ?  que  les  er- 
reurs d'Eutychès  furent  dénoncées 
par  Eusèbe,évêquede  Dorilée.  Elles 
furent  condamnées;  et  saint  Fia  vien, 
évêque  de  Constanlinoplc  ,  qui  pré- 
sidait l'assemblée  ,  prononça  la  sen- 
tence. Eutychès  fît  entendre  qu'il 
appellerait  de  ce  jugement  j  et  il  j 
en  écrivit  en  effet  à  saint  Léon  ,  qui  j 
crut  un  moment  que  les  actes  du  j 
concile  étaient  frappés  de  quelque  I 
irrégularité.  L'empereur  Théodose 
fut  encore  plus  aisément  persuadé  1 
par  les  instances  de  l'eunuque  Chry-  1 
saphius  ,  et  par  les  insinuations  de  j| 
l'impératrice  Eudoxie.  Il  convoqua  | 


(l)  Ce  passage  des  sermons  de  saint  Le'on 
prouve  que,  de  sou  temps,  on  communiait 
encore  sous  les  deux  espèces.  Le  calice  , 
dont  les  protestants  ont  repris  l'usage  ,  pa- 
raît n'avoir  été  interdit  aus  laïc*  que  dans 
ie  treizième  siècle. 


LEO 

^ct'onil  coucilc,  connu  dan»  l'his- 
ire  sous  le   nom  de  Brigandage 
l'.phèse.   Tout  en  cfl'et  s'y  passa 
\«c  violence;  Eutychcs  à  son  tour 
louipha  de  Flavieu  et  d'Eusèbe  de 
L'oriléc,  qui  furent  déposes.  Les  légats 
•  lu  pape  refusèrent  de  signer  les  ac- 
>  de  cette  assemblée.  Ils  s'en  échap- 
rent  avec  peine  pour  venir  ren- 
'  «'  compte  à  saint  Léon  de  ces  af- 
I géantes  nouvelles.  Depuis  leur  dé- 
part, Flavieu,  exilé  en  Lydie,  était 
mort  des  suites  des  mauvais  traite- 
monts  dont  il  avait  été  accablé.  Ce 
prétendu  concile  d'Ephèse  fut  con- 
i  tmné  à  Rome  ;  et  saint  Léon  écri- 
vit à  Tcmpcreur   d'Orient   pour  le 
Mipplier  de  réparer  ces   désordres  î 
maisThéodose,au  contraire,  approu- 
va hautement  tous  les  actes  d'Ephèse. 
Marcien  ,   son   successeur ,   adopta 
un   autre   système,   parce   que   les 
courtisans   et  les  favoris  avaient  été 
éloignes  du  trône.  La  vertueuse  Pul- 
chérie  ,  sœur  de  Théodose  ,  épouse 
du  nouvel  empereur, contribua  puis- 
samment à  cette  révolution.  Le  corps 
de  St.  Flavienfut  exhumé  et  rapporté 
avec  honneur  à  Gonstantinople  ;   et 
1  on  convoqua  un  3^.  concile  à  Chalcé- 
(loine  (  en  45i).  Les  lettres  de  saint 
Léon,  et  surtout  celle  qu'il  avait  écrite 
à  saint  Flavien  avant  d'avoir  appris 
sa  mort ,  servirent  de  base  à  la  doc- 
trine  que  le  concile  ûxa  d'une  ma- 
nière irrévocable  ,  d'après  les  actes 
du  concile  de  Nicée  et  du  premier 
concile  d'Ephèse.  Ainsi  furent  pros- 
crites  les  erreurs   de  Nestorius  et 
<l'Eutychès.  (  royez  EutychÈs  et 
Nestorius.  )   Saint  Léon  approuva 
tous  les  actes  du  concile  de  Chalcé- 
doine,  excepté  celui  qui  donnait  au 
siège  de  Gonstantinople  la    préémi- 
'uce  sur  ceux  d'Antioche  et  d'A- 
\andrie.  Pendant  le  cours  de    ces 
!  andes  contestatious^uoc  discussiou 


LEO  «^ 

j>arliculièrc  s'était  élevée  entre  saint 
iiéon  et  St.  liilaire,  évèque  d'Arles, 
qui  avait, de  son  autorité, déposé  l'é- 
véqiieCélidonius,  sous  prétexte  qu'il 
avait  épousé  une  veuve.  Cette  allaire 
ayant  été  portée  dans  un  conciir 
tenu  à  Rome  ,  en  44^  >  saint  Hilaire 
vint  s'y  défendre  ,  et  le  lit  avec  une 
certaine  hauteur  qui  déplut:  le  crime 
imputé  à  Célidonius  ne  fut  pas  prou- 
vé; il  fut  rétabli  dans  son  église.  Le 
siège  métropolitain  fut  transféie 
d'Arles  à  Vienne;  mais  saint  Hilaire 
ne  fut  point  déposé  :  il  reprit  ses 
fonctions  épiscopales  ,  et  mourut  en 
odeur  de  sainteté ,  comme  saint  Léon 
eu  convient  lui-même  (//e^re  2  aun 
évéques  des  Gaules).  Au  reste  il  ne 
fut  pas  question,  dans  celte  allaire  , 
de  disputer  à  la  cour  de  Rome  le 
droit  de  juger  une  contestation  éle- 
vée entre  deux  évêques  au  sujet  d'un 
droit  de  juridiction  métropolitaine. 
Saint  Hilaire  lui-même  vint  au  con- 
cile pour  se  justifier ,  et  se  soumit 
au  jugement  sans  protestation.  Dans 
une  pareille  matière  ,  qui  ne  tou- 
che point  au  dogme  ,  et  n'intéresse 
que  la  discipline ,  l'autorité  d'un 
homme  tel  que  saint  Léon  est  tel- 
lement imposante,  que  le  sage  Fleii- 
ry  a  gardé  ,  à  cet  égard,  un  silence 
respectueux.  H  obseive  seulement 
que  le  système  de  saint  Léon  était 
d'attacher  l'autorité  métropolitaine 
au  plus  ancien  évêquc,  et  non  pas 
à  un  siège  en  particulier  ;  que  tel 
était  l'usage  de  l'Église  d'Afrique, 
mais  que  celle  des  Gaules  refusait 
de  s'y  soumettre.  Ges  grandes  affai- 
res ecclésiastiques  terminées  ,  saint 
Léon  eut  à  s'occuper  de  soins  bien 
différents.  Le  terrible  Attila  ,  après 
avoir  ravagé  la  Pannonie  ,  et  s'être 
emparé  d'Aqiiilée  ,  de  Pavie  et  de 
Milan  ,  semblait  prêt  à  fondre  sur 
Rome  (  en  4^^  ).  Le  faible  Vaki*- 


110  LEO 

tinicn  demeurait  renferme'  dans  Ra- 
venne.  Aëlius  ,  général  des  troupes 
romaines  ,  se  trouvait  hors  d'clat 
de  résister  à  l'irruption  des  bar- 
bares. L'empereur  implora  la  mé- 
diation de  saint  Léon  ,  et  Rome  fut 
sauvée  par  un  de  ces  événements 
extraordinaires  ,  que  la  sagesse  hu- 
maine ne  peut  pas  seule  expliquer. 
{F.  Attila.)  Le  saint  pape,  accom- 
pagné uniquement  de  deux  person- 
nages consulaires,  alla  au  -  devant 
du  roi  des  Hnns, qu'ils  rencontrèrent 
dans  la  Vénétie,  à  Ambuleium  près 
du  passage  du  Miucio.  L'aspect  du 
vénérable  pontife  désarma  la  colère 
d'un  vainqueur  farouche  ,  accoutu- 
mé à  d'autres  résistances.  Il  pro- 
mit la  paix ,  et  se  retira  au-delà  du 
Danube.  Saint  Léon  revint  à  Rome, 
où  les  bénédictions  du  peuple  furent 
le  seul  triomphe  qu'accciHa  sa  mo- 
destie. Après  avoir  rétabli  quelque 
tranquillité  dans  l'Église  d'Orient , 
grâce  à  la  piété  de  Marcien  et  de 
la  vertueuse  impératrice  Pulchérie, 
saint  Léon  dut  encore  s'occuper  de 
détourner  ,  ou  du  moins  d'adoucir 
les  nouveaux  malheurs  dont  Rome 
était  menacée.  Valentinien  était  mort 
en  44^  7  assassiné  par  des  gens  de 
Maxime ,  qui  lui  succéda  et  contrai- 
gnit sa  veuve  de  l'épouser.  Eudoxie 
ignorait  qu'il  fût  un  des  meurtriers 
de  son  premier  époux.  Quand  elle 
l'appiit ,  son  ressentiment  fut  tel 
qu'elle  invita  Genseric  à  venir  la  ven- 
ger en  s^emparant  de  la  ville  de 
Rome.  Saint  Léon  fut  appelé  de 
nouveau  pour  traiter  avec  les  enne- 
mis. Il  obtint  qu'on  épargnât  à  ses 
Bialheureux  concitoyens  les  incen- 
dies, les  meurtres  et  les  supplices,  et 
qu'on  ne  touchât  point  aux  ptinci- 
pales  basiliques; mais  il  ne  put  sauver 
la  capitale  du  monde  d'un  jùllagequi 
dura  quatorze  jours  {F,  GfiiysERic  ). 


LEO 

Haxime  fut  tué  :  Eudoxie  et  ses  deux 
fdles  furent  emmenées  à  Garthage; 
et  ce  fut  ainsi  que  l'avilissement  de 
l'autorité  impériale  prépara  la  puis- 
sance temporelle  des  papes.  Cepen- 
dant le  parti  de  l'hérésiarque  Euty- 
chès  se  relevait  en  Afrique.  Dioscore , 
évêque  d'Alexandrie  ,  un  de  ses 
sectateurs  les  plus  zélés,  avait  été 
condamné  par  le  concile  de  Chalcé- 
doine ,  déposé  et  relégué  à  Gangres. 
Protère  lui  avait  succédé;  mais  il 
fut  massacré  de  la  manière  la  plus 
cruelle  par  les  schismatiques  ;  et 
le  moine  Timolliée  Elure  fut  nom- 
mé à  sa  place.  Le  pape ,  instruit  de 
ces  désordres  ,  réclama  l'appui  de 
l'empereur  Léon ,  qui  avait  re^nplace' 
Marcien ,  et  fut  puissamment  se- 
condé par  lui.  Timothée  Elure  fut 
chassé  d'Alexandrie  et  relégué  dans 
la  Chersonnèse  en  46o.  Un  autre 
Timothée  ,  surnommé  Solofaciole , 
partisan  des  saines  doctrines  ,fut  élu 
à  l'évêché ,  et  saint  Léon  eut  ainsi  la 
satisfaction  de  voir  s'afïermir  davan- 
tage l'autorité  du  concile  de  Chalcé- 
doinc.  Tels  furent  les  principaux  ac- 
tes du  pontiJicat  de  saint  Léon  ,  qui 
occupe  une  place  si  mémorable  dans 
l'histoire.  Aucune  des  hérésies  qui 
désolaient  l'église  catholique  n'é- 
chappait à  sa  vigilance.  Il  combattit 
les  Priscillianistes  et  les  Pélagiens 
avec  autant  d'ardeur  et  de  succès  que 
les  sectaires  de  Nestorius  et  d'Euty- 
chès.  La  discipline  était  aussi  négli- 
gée que  le  dogme  était  méconnu  ; 
on  ordonnait  comme  évêques  des 
laïcs  ,  et  même  des  bigames  ;  les 
élections  étaient  le  fruit  des  brigues 
ou  des  émeutes  populaires.  Saint 
Léon  eut  à  détruire  tous  ces  abus  :  il 
avait  pour  coopérateur  le  célèbre 
saint  Prosper ,  auquel  certains  écri- 
vains attribuent  les  lettres  de  saint 
Léon  sur  les  erreurs  d'Eutychès.  Ce* 


LEO 

pcncUnt  dom  Ceillier ,  dans  son  His- 
toire des  écrivains  sacres  ,nc  confond 
point  le  style  de  l'nn  et  de  l'aulre. 
Quoiqu'il  pre'fhe  évidemment  celui 
de  St.  Pros})cr ,  il  n'oie  point  au  pon- 
tife le  mérite  de  ses  ouvrages  contre 
l'hérésiarque  d'Orient.  Saint  Léon 
mourut  à  Uome  ,  à  ce  qu'on  croit ,  le 
1 G  novembre  40 1  ;  la  i  '  ®.  translation 
de  ses  reliffues  se  fit  le  1 1  avril , 
jour  où  l'Église  honore  sa  mémoire. 
C'est  le  premier  pape  dont  nous 
ayons  un  corps  d'ouvrages  ;  il  se  com- 
pose de  quatre-vingt-seize  sermons 
sur  les  principales  fètcs  de  l'année  , 
de  1 4 1  lettres ,  des  livres  sur  la  voca- 
tion des  gentils ,  et  d'un  code  des  an- 
ciens canons.  L'édition  qu'en  avait 
domie'e  le  P.  Quesnel ,  en  167 5  ,  en  1 
volumes  in-4".,était  regardée  comme 
la  plus  complète  et  la  plus  estimée. 
Les  frères  Ballerini  l'ont  réimprimée 
•avec  des  augmentations  ,  Venise, 
1753,  3  vol.  in-fol.  ;  et  le  P.  Th.  Cac- 
ciari,  professeur  à  la  Propagande, 
en  a  donné  une  autre,  aussi  en  3  vol. 
'in-folio  ,  revue  et  corrigée  sur  les 
manuscrits  du  Vatican,  Ces  trois 
volumes  ont  paru  en  1 751,  53  et  55. 
Dans  sa  préface ,  Cacciari  reproche 
vivement  à  Quesnel  des  infidélités  et 
'des  altérations  considérables.  La  pre- 
mière édition  des  sermons  et  des 
opuscules  est  celle  de  Rome  ,  1470  , 
in-fol.  Le  Sacramentaire  (  Codex sa- 
cramentorum  vêtus  romance  Eccle- 
siœ  ,à  Sancto  Leone  papd  Iconfec- 
tus  ) ,  a  été  piAlié  par  J.  Bianchîni  à 
la  tête  du  tome  iv  d*Anastase  le  bi- 
bliothécaire ,  en  1 735  ;  et  par  Mura- 
tori,  dans  le  tome  i  de  sa  Liturg.  rom, 
vet. ,  Venise ,  1 74H.  Les  sermons  de 
saint  Léon  ont  été  traduits  en  français 
]iar l'abbé  de  Bel legarde,  Paris,  1 70 1. 
"^on  style  est  élégant  et  noble.  Il  avait 
•  Dunu  saint  Augtistin  dans  sa  jen- 
uesse  jet  l'on  doit  penser  qu'il  avait 


LEO  iii 

bien  profité  des  leçons  d*im  Ici  maître. 
Après  le  pillage  exercé  par  les  Van- 
dales ,il  (it  rétablir  l'argenterie  dans 
toutes  les  églises  de  Rome.  Il  répara 
1rs  basiliques  de  St.-PicrreetdcSt.- 
Paul,  et  institua  des  gardiens  aux 
tombeaux  des  SS.  Apôtres.  Il  fit  tra- 
vailler à  un  nouveau  canon  pascal  , 
d'après  la  base  fixée  par  le  concile 
de  Nicée.  Sous  tous  les  rapports  ,  ses 
nobles  qualités  et  ses  éminentcs  ver- 
tus l'ont  placé  au  premier  rang  des 
papes  dont  se  gloril i(;nt  les  plus  beaux 
siècles  de  l'Église.  Dans  ses  discours, 
dans  ses  écrits  ,  dans  ses  actions  ,  on 
remarque  toujours  la  beauté  de  son 
éloquencQ ,  la  pureté  de  sa  doctrine  , 
la  sainteté  de  ses  mœurs ,  et  la  gran- 
deur de  son  courage.  Il  eut  pour  suo 
cesseur  Hilairc  ou  Hilarius.     D-s. 

LÉON  II  (  Saint  ) ,  élu  pape,  le 
16  avril,  et  ordonné  le  17  août 
6Sjt.  ,  successeur  d'Agatlion  ,  était 
sicilien  de  naissance.  Son  père  se 
nommait  Paul.  Son  éducation  avait 
été  dirigée  avec  soin  ,  et  fut  achevée 
avec  fruit.  Il  était  instruit,  éloquent 
et  charitable.  Comme  il  savait  par- 
faitement le'grecil  traduisit  le  -  actes 
du  dernier  concile  en  latin,  afin  de 
les  faire  connaître  en  Occident.  Son 
ordination  fut  difieréc  jusqu'à  ce 
qu'on  eût  reçu  le  consentement  de 
l'empereur  Constantin  Pogonat ,  qui 
régnait  alors  à  Constantinople.  Les 
légats ,  qui  avaient  assisté  au  concile 
(le  6^.  œcuménique  )  ,  revinrent  à 
Rome,  chargés  des  bienfaits  de  l'em- 
pereur, et  apportant  sa  déférence  au 
jugement  du  pape  sur  la  validité  des 
actes  de  cette  assemblée  ,  et  sur  la 
punition  encourue  par  fpielqucs  dis- 
sidents. Le  pontife  sanctionna  la  dé- 
finition du  concile  ,  et  anathéma- 
tisa  ceux  qui  avaient  prolesté.  Il  sou- 
tint aussi  avec  fermeté  ses  droits  con- 
tre l'exarque  deRaYenne,(piinevou- 


n'A  lf:o 

lait  pas  reconnaître  son  autorité.  Il 
Ht  divers  règlements  très-sages  pour 
le  maintien  de  la  discipline  ,  perfec- 
tionna le  chant  Grégorien  ,  et  com- 
posa plusieurs  hymnes  pour  les  offi- 
ces de  l'Eglise.  Ses  vertus,  ses  bien- 
faits, le  rendaient  cher  au  peuple  ro- 
jnain  ,  qui  ne  jouit  pas  long-temps 
du  Lonhcur  qu'il  goûtait  sous  son 
gouvernement.  Léon  II  mourut  le 
'23  mai  684,  et  fut  enterré  le  28 
juin  ,  jour  auquel  l'Église  honore  sa 
mémoire.  Il  eut  pour  successeur  Be- 
noît II.  D-s. 

LÉON  III  ,  élu  pape  le  Si6  dé- 
cembre 795  ,  succéda  à  Adrien  l^^. 
Né  à  Rome  ,  instruit  comme  la  plu- 
part de  ses  prédécesseurs  au  palais  de 
Latran,  il  avait  été  ordonné  sous- 
diacre  ,  et  ensuite  prêtre  du  titre  de 
Sainte  -  Susanne.  On  remarquait  en 
lui  des  mœurs  ,  de   l'éloquence  et 
du  courage.  Il  était  aimé  et  fat  élu 
d'une  voix  générale.  Son  premier 
soin  fut  de  faire   assurer  Gharle- 
magne  de  son  obéissance  :  ce  prince 
lui   répondit  par  des  présents  pro- 
venant des  dépouilles  conquises  sur 
les  Huns.  Quatre  ans  après  ces  heu- 
reux commencements,  le  23  avril 
799,  une  conspiration  affreuse  éclata 
contre  les  jours  du  pontife.  Au  milieu 
d'une  procession  qui  se  rendait  à  l'é- 
glise de  St.-Laurent ,  des  gens  armés 
fondirent  tout  à  coup  sur  Léon  qui 
était  à  cheval ,  le  terrassèrent ,  le 
dépouillèrent  de  ses  habits  ,  et  en- 
suite l'abandonnèrent,  croyant  l'a- 
voir rendu  aveugle   et  muet.   Les 
chefs  de  cet  horrible  complot  étaient 
Pascal,  primicier, et  Campule,  sacel- 
laire  ou  sacristain,  qui  avait   été 
tout-puissant  sous  le  pape  Adrien 
son  onclej  ils  s'emparèrent  en  ce  mo- 
ment de  la  personne  de  Léon,  et  vou- 
lurent achever  le  forfait  qu'ils  avaient 
médité.  Ib  le  traînèreut  vers  l'autel 


LEO 

du  monastère  de  Saint-Etienne,  Tac- 
cablcrent  de  coups  ,  s'efforcèrent  de 
lui  arracher  la  langue  et  les  yeux,  et 
l'emmenèrent  tout  ensanglanté  dans 
l'intérieur  du  couvent.  Il  n,'avait  ce- 
pendant perdu  ni  les  yeux,  ni  la  lan- 
gue; ce  qui  fut  regardé  comme  un 
miracle.  Dans  la  nuit,  on  vint  à  sou 
secours  ;  Albin  ,  son  camérier  ,  et 
quelques  gens  fidèles,  l'enlevèrent  du 
monastère  où  il  était   confiné  ,   le 
firent  descendre  par  la  muraille  de  la 
ville  et  le  ramenèrent  à  Saint-Pierre, 
où  se  trouvait  l'abbé  de  Stavelo,  en- 
voyé du  roi  Charles.  Le  duc  de  Spo- 
lète  vint  l'y  joindre  ;  et  la  résolu- 
tion fut  prise  de  se  réfugier  auprès 
du  roi.  Charlemagne ,  instruit  de  ces 
événements  ,   envoya  au-devant  du 
pape;  ils  se  joignirent  à  Paderborn  , 
où  des  honneurs  ,  des  cantiques,  et 
des  expressions  des  sentiments  les 
plus  affectueux,  célébrèrent  cet  heu- 
reux événement.  On  informa  contre 
Pascal  et   Campule  ;  Léon  revint  à 
Rome ,  et   sa  marche   fut   une  es- 
pèce   de    triomphe.    Charlemagne 
quitta  bientôt  Aix  -  la  -  Chapelle  , 
et  alla  dans  la  capitale  de  la  chré- 
tienté recueillir  le  fruit  de  ses  ex- 
ploits. Ce  fut  le  jour  de  Noël ,  l'an 
800,  que  ce  prince  reçut  la  couronne 
impériale  des  mains  du  pape ,  avec 
des  circonstances   que  l'histoire  a 
conservées ,  et  qui  font  encore  douter 
des  intentions   secrètes  des  grands 
personnages  intéressés  à  cet  événe- 
ment mémorable.   (   Foyez  Char- 
lemagne. )  Quoi  qu'il  en  soit ,  après 
3^4  ans  d'extinction,  l'empire  d'Oc- 
cident fut  rétabli  dans  la  personne 
du  monarque  français ,  qui  fut  salué 
du  nom  d'empereur  et  d'auguste. 
Après  cette  cérémonie ,  le  pape  l'oi- 
gnit de  l'huile  sainte  ,  ainsi  que  son 
fils  ,  le  roi  Pépin.  Pendant  le  séjour 
de  Charlemagne  à  Rome ,  ou  acheva 


LEO 

Ir  procès  des  deux  principaux  as- 
sassins du  pontife.  Cette  alla  ire  avait 
été  roinmenree  à  Rome,  par  un  tri- 
bunal compose'  d'après  les  ordres  de 
Charlemagne;  et  les  accuses  avaient 
été  renvoyés  en  France.  De  nouveau 
ramenés  à  Rome  ,  ils  y  furent  con- 
damnés à  mort ,  suivant  la  loi  ro- 
maine. Léon  intercéda  pour  eux  , 
et  leur  sauva  la  vie  et  la  mutilation 
des  membres;  ils  furent  exilés  en 
France.  L'empereur  passa  tout  l'hi- 
ver à  Rome,  d'où  il  ne  sortit  qu'a- 
près Pàq\ies  ,  le  '25  avril  80 1.  Deux 
ans  après  ,  le  pajîc  vint  une  seconde 
fois  trouver  l'cmpeteur  en  France  : 
on  ignore  par  quel  motif.  Leur  en- 
trevue eut  lieu  à  Quiercy  ,  où  l'on  (cé- 
lébra la  fête  de  Noël ,  et  le  pape  fut 
renvoyé  ensuite  avec  de  magnifiques 
présents.  En  809,  Cbarlemagne  ayant 
tenu  à  Aix-la-Chapelle  un  grand  con- 
cile, où  fut  agitée  la  question  de  sa- 
voir si  l'on  ajouterait  dans  le  sym- 
bole les  mois  fiUoque  ,  envoya  con- 
sulter le  pape  sur  cette  matière  :  Léon 
répondit  que  sa  croyance  à  cet  égard 
n'était  pas  diflérente  de  celle  du  con- 
cile ;  mais  que  cette  addition  étant 
un   sujet  de   contestation  avec   les 
Grecs,  il  serait  plus  sage  de  s'en  abs- 
tenir. Les  Français  persistèrent  dans 
leur  opinion  ,  et  ne  déférèrent  point 
au   sentiment  du    pontife   romain. 
En  81 5,  une  nouvelle  conspiration 
contre  les  jours  du  pape  fut  décou- 
verte ,  et  Léon  en  lit  condamner  les 
auteurs  à  la  peine  capitale.  L'empe- 
reur Louis-le-Débonnaire ,  qui  avait 
succédé  à  Charlemagne ,  trouva  mau- 
vais  que  le    souverain  pontife  eût 
exercé  un  tel  acte  de  juridiction.  Léon 
envoya  des  députés  à  l'empereur,  ({ui 
se  contenta  des  raisons  que  le  pape 
allégua  pour  sa  justification.  Ce  fut  à 
peu  prc«  le  deniier  acte  de  son  pon- 
^cat ,  qui  avait  duré  vingt  ^^ixs  et 


LEO  ii3 

Sept  mois.  II  mourut  le  1 1  juin  81  G. 
Outre  ses  Lettres  qu'où  trouve  dans 
les  Collections  des  conciles  r t  dans 
les  Recueils  de  Sirnioud  ,  d'Ughdli 
et  de  Baluze  ,  on  a  imprimé  ,  souS  le 
nom  de  ce  pontife  ,  un  livre  de  ca- 
bale et  de  magie ,  intitulé  :  Eiichi^ 
ridion  contra  omma  miindi pericula 
Cftrolo  magnn  in  munus  datum  ; 
production  évidemment  apocryphe 
et  aussi  insignitlante  que  le  prétendu 
Grimoire  du  pape  Honorius.  Lesbi- 
bliomanes  en  recherchent  l'édition 
originale,  Rome,  15^5  ,  in-3'2  (i). 
Léon  m  eut  pour  successeur  Etienne 
IV.  D  -  s. 

LÉON  IV,  élu  pape  le  1 9.  avril  84^, 
succéda  à  Sergius  II:  il  était  romain  de 
naissance,  fils  de  Rodalde,et  fut  élevé 
d'abord  dans  le  monastère  de  Saint- 
Martin  ,  d'où  le  pape  Grégoire  IV 
le  tira  pour  le   placer  près  de  lui 
dans  le  palais  de  «Latran.  Ses  vertus  , 
ses  hautes  qualités  le  firent  nommer 
d'une  voix  imanime  ;  mais  son  or- 
dination fut  différée ,  parce   qu'on 
attendait  le  consentement  de  l'empe- 
reur Lothaire ,  qui  ne  l'envoya  point 
sur-le-champ,  attendu  que  les  Sarra- 
sins étaient  maîtres  de  la  campagne. 
Les  circonstances  l'ayant  trop  long- 
temps rétardé,  on  se  détermina  enfin 
à  consacrer  le  nouveau  pontife,  mais 
avec  cette  clause  expresse  ,  qu'on  ne 
prétendait  point  déroger  aux  droits 
de  rempereuj-.  Léon  IV  justifia  plei- 
nement la  confiance  des  Romains.  Il 
défendit  vaillamment  sa  patrie  contre 
les  Sarrasins,  a  11  se  montra  digne, 
»  en   défendant  Rome  ,  d'y   com- 
»  mander  en  souverain.  Il  était  ne 
»  romain  :  le  courage  des  premiei"S 
»  âges  de  la  république  revivait  en 


(1)  T.ei  rditiont  de  Lyon  ,  iGor  j  in-36  ;  i6oi  ; 
(n-34 -,  ,6i'3,  iii-24  ;  et  U  traduction  Irao^Ai»* 
il*  Ljroti ,  i:>S4  ,  iii-x4  ,  •«  trouvent  «uiai  <iaa> 
la  £iù  'iothiçvû  d'itn  amaltiir. 


fi4  LEO 

»  lui ,  dans  un  temps  de  lâcheté  et 
»  de  corruption;  semblable  à  un  de 
T>  cesbeauxmonumenls  de  l'ancienne 
»  Rome  ,  que  l'on  trouve  quelque- 
»  fois  dans  les  ruines  de  la  nouvelle.  » 
{Ahr.chron.  de  V  Histoire  de  France 
par  le  P.  Henault.  )  II  ne  put  cependant 
empêcher  le  pillage  de  l'ëglise  de 
Sl.-Pierre;  mais  il  la  fit  réparer  avec 
une  grande  magnificence,  et  la  revê- 
tit d'ornements  en  or, qu'on  estima 
être  du  poids  de  deux  cent  seize 
hvresjet  ceux  d'argent  furent  éva- 
lués à  plus  de  5791  marcs.  11  ne  fut 
pas  moins  libéral  envers  d'autres 
églises  également  ruinées.  Il  fit  balir 
une  ville,  enfermer  de  murs  le  bourg 
de  Saint-Pierre  ,  d'après  les  projets 
de  Léon  III  ;  et  ce  quartier  de  Rome 
porte  encore  le  nom  de  Cité  léonine. 
Il  surveillait  lui-même  les  travaux, 
qui  durèrent  plus  de  quatre  ans  ,  sans 
que  l'intempérie  des  saisons  fût  ca- 
pable de  ralentir  son  zèle.  Léon  IV 
ne  se  rendit  pas  moins  recoraman- 
dable  dans  ses  travaux  spirituels.  Il 
assembla  un  concile  ,  où  l'on  s'oc- 
cupa de  la  réformation  des  mœurs. 
Semblable  à  Saint  Grégoire  le  Grand, 
qu'il  avait  pris  pour  modèle,  il  s'ap- 
pliqua surtout  à  instruire  les  pasteurs 
de  leurs  devoirs.  On  a  encore  sur  ce 
sujet  un  discours  qu'il  fit  aux  prêtres 
et  aux  diacres  ,  rempli  d'élégance  et 
de  piété.  Il  mourut  le  17  juillet  855  , 
après  un  pontificat  de  8  ans.  C'est 
eprès  sa  mort,  et  avant  la  nomination 
de  Benoît  III,  son  successeur, qu'on 
a  placé  la  fable  ridicule  de  la  papesse 
Jeanne ,  dont  nous  avons  donné  une 
réfutation  assez  motivée.  (  Fojez 
Benoît  III.  )  D  -  s. 

LÉON  V ,  élu  pape  le  1^  octobre 
903  ,  après  la  mort  de  Benoît  IV  , 
était  natif  d'Ardée;  il  ne  tint  le  saint- 
siége  que  deux  mois,  fut  chassé  par 
Christophe,  fils  d'un  autre- Léon,  mis 


LEO 

en  prison,  et  y  mourut  de  chagrin  , 
le  6  décembre  de  la  même  année 
903.  D-s. 

LÉON  VI ,  élu  pape  ,  le  6  juillet 
928,  succéda  à  Jean  X,  et  n'occupa 
le  saint-siège  que  sept  mois.  11  était 
romain  de  naissance.  Platine  fait  l'é- 
loge de  ses  mœurs ,  de  son  intégrité, 
du  soin  qu'il  prit  pour  réformer  l'E- 
glise ,  autant  que  cela  était  possible 
à  cette  déplorable  époque ,  et  pour 
pacifier  les  troubles  de  l'Italie;  mais 
il  n'apporte  aucune  preuve  à  l'appui 
de  cet  éloge.  Léon  VI  eut  pour  suc- 
cesseur Etienne  VIL  D-s. 

LÉON  VII,  élu  pape,  en  jan- 
vier 986  ,  succéda  à  Jean  XL 
L'histoire  ne  dit  rien  de  sa  famille  ; 
mais  on  loue  sa  piété,  sa  modestie  , 
sa  sagesse  et  son  affabilité.  C'est  le 
témoignage  que  lui  rend  Flodoard  , 
qui  avait  vécu  avec  lui.  Rome  gémis- 
sait toujours  de  la  division  qui  exis- 
tait entre  Alberic  et  le  roi  Hugues 
(  V^of.  Jean  XI  ).  Léon  VII  résolut 
de  les  réconcilier^  et  il  y  parvint  par 
la  médiation  d'Odon  ,  abbé  de  Glu- 
ny,  qui  lui  donna  aussi  d'excellenfi 
conseils  pour  la  réforme  de  la  dis- 
cipline monastique.  Léon  VII  écrivit 
au  clergé  de  Bavière ,  pour  approu- 
ver quelques  indulgences  qu'on  accor- 
dait aux  devins  et  aux  sorciers,  lors 
qu'ils  faisaient  pénitence.  Dans  I 
même  lettre  ,  il  se  déclare  contre  Ii 
mariage  public  des  prêtres ,  mais 
veut  point  que  les  enfants  nés  d'ui 
tel  mariage  soient  déchus  de  la  f; 
culte  d'être  promus  aux  ordres.  G 
pape  ,  dont  l'histoire  ne  rapporte 
plus  aucun  acte  mémorable,  mourut 
en  juillet  989 ,  après  un  pontificat 
de  trois  ans  et  demi  ;  il  eut  pour 
successeur  Etienne  VIII.        D-s. 

LÉON  YIII  avait  été  élu  pape  au 
concile  de  Rome  ,  en  963,  à  la  place 
de  Jean  XII  (  Foyez  cet  article  > 


CeUii-ci  Tavait  cliasscà  son  lour  (ce 
qiii  a  fait  quelquefois  placer  Leou 
dans  la  liste  des  anti-papes  )  ;  et  (lès 
\que  Jeau  XU  fut  mort  ,  le  i4  mai 
de  l'année  suivante,  Léon  se  présenta 

](^  nouveau  pour  rentrer  dans  sa 
j^lace.  Mais  les  Romains, ouhli.HJt  les 
sernicnts  ([u'ils  avaient  faits  à  Othon, 
élurent  u«  intrus,  qui  prit  le  nom  de 
Henoît  V  (  roy.  ce  nom  ).  L'empe- 
reur, ainsi  que  nous  l'avons  déjà  dit, 
irrité  de  la  déloyauté  des  Romains  , 
rentra  dans  la  ville  à  main  armée,  et 
létablit  le  pape  légitime.  Léon  était 
rom.dn  ,  fils  de  Jean  ,  et  protoscri- 
niairedc  l'éj^lise  ,  ainsi  que  son  père 
l'avait  été.  C'était,  dit  le  concile  qui 
l'avait  nommé,  un  homme  d'un  mé- 
rite éprouvé.  On  lui  attribue  une 
bulle  que  les  ultramontains  regardent 
comme  apocryphe,  et  qui  doimait  à 
remj)ereur  un  pouvoir  absolu  pour 
l'institution  du  pape  et  des  évcques 

Voy.  iu^i't  de  vérifier  les  dates  ). 
1  leury  parle  d'un  décret  du  concile 
ou  Benoit  fut  jugé ,  et  qui  aurait 
(onlenu  des  dispositions  à  peu  près 
<f'mblables;  mais  il  ajoute  que  ce  dé- 

I  et  n'est  r.ipportédans  aucun  auteur 
de  ce  temps-là ,  quoiqu'il  soit  certain 
que  depuis  Charlemagne  ,  comme 
auparavant  ,  le  consentement  des 
empereurs  fut  nécessaire  pour  l'or- 
dination du  pape.  Léon  YllI  mourut 
en  avril  965,  après  un  an  et  quatre 
mois  de  pontifical;  il  eut  pour  suc- 
cesseur Jean  XIIL  D-s. 

LÉON  L\  (  St.  ),  élu  pape ,  le 
1  I   février    1  o49  ,  succéda  à  Da- 

lase  IL  II  portait  le  nom  de  Bru- 
non  ,  étant  fils  de  Hugues  ,  comte 
d'Egisheim, cousin  germain  de  l'em- 
pereur Conrad  le  Salique,  et  il  na- 
quitTn  Alsace ,  le  2 1  juin  1 002  (  1  ). 


(t)  L'abbé  Gran 
!•  RWat  ,  •  étabt* 
êimê  d«  aaiiit  L«on 


DdiJUr  ,  d'aprit  le*  Mcmoir 
li  que  Gérard  J'ANace,  frt 
I  IJC,4tdil  Uuidiii«^<t«  Btra 


moirea 

f 

raid 


LKO  i,:-> 

Sa  mère,  héritière  des  comtes  do 
Dagsbourc; ,  ou  Dabo  ,  le  fil  élever 
avec  distinction.  Le  jeune  Bnmon 
devint  un  prodige  de  science,  un  mo- 
dèle de  j)iété,  et  se  fit  remanpier 
autant  par  sa  modestie  et  sa  dou- 
ceur ,  que  par  les  grâces  dont  la  na- 
ture l'avait  orné.  L'évèque  dcToul, 
BL*rthold,quiavailfurmé sa  jeunesse, 
étant  venu  à  mourir,  le  clergé  et  le 
peuj)Ie  l'élurent  en  sa  place  ,  tout 
d'iuie  voix.  Ses  mœurs,  sa  charité,  sa 
conduite,  répondirent  à  cet  honora- 
ble choix.  Il  aim.ut  les  j)anvres ,  leur 
donnait  de  ses  biens  ,  cl  les  servait 
lui-mcme.  Il  avait  pris  l'habitude  de 
faire  tons  les  ans  un  pèlerinage  à 
Rome,  où  il  était  accompagné  quel- 
quefois de  cinq  cents  persoi.nes. 
Après  la  mort  de  Damase  II ,  l'em- 
pereur Henri  indiqua  une  assem  - 
Liée  de  prélats  et  des  grands  de 
l'empire  de  Rome ,  où  l'évèque  de 
Toul  fut  appelé  et  nommé  au  pon- 
tificat. Bruuon  se  défendit  de  cet 
honneur ,  et  demanda ,  pour  déli- 
bérer ,  trois  jours  ,  qu'il  passa  eu 
prières.  Vaincu  par  les  instances  des 
grands  et  du  clergé ,  il  accepta ,  et 
partit  pour  Rome ,  où  il  voulut  en- 
trer pieds  nus.  Le  lendemain  de 
son  arrivée,  il  monta  en  chaire,  et 
harangua  le  clergé  et  le  j^euplc ,  aux- 
quels il  annonça  son  élection  faite 
par  les  états  d'Allemagne ,  en  dé- 
clarant (ju'il  ne  regardait  comme 
canonique  que  celle  de  la  capitale  de 
la  chrétienté.  Il  fut  accueilli  par  une 
approbation  générale ,  et  installé  aus- 
sitôt sur  le  siège  apostolique.  Peu  de 
temps  après  les  fêtes  de  Pâques  de 


ou  Bt-rold  :  tijje  de  la  maiton  do  Savoi<>.  Il  dea- 
c«ii(l»il  d'Ktiiico  1er.  duc  d'Alttce  ,  qui  mourut 
Ter*  6po  ,  et  qui  fut  la  tige  H»*  niaitoii*  de  Z«- 
riageii  (  Badu  )  et  de  Hab*bourK  (  Autriche  ;. 
Voyr*  Vuàrl  </<•  v'njir^  l^s  datei .  troiti^iue 
édition,  l'^^T  ,  in-fol.  tome  itt  ,  p.  Çia-3,etlA 
Vie  de  «.linl  Liou  I  X  ,  dan*  G<>deac«rd  ,  aa  i^ 
nvril ,  note  d,  • 

a. 


ii6  LEO 

cette  même  année  io49,  il  tint  à 
Home  un  concile,  où  l'on  déclara  nul- 
les plusieurs  ])romoti()ns  simonia- 
ques ,  dont  l'abns  était  alors  très- 
fréquent.  II  se  rendit  ensuite  à  Pavie 
où  il  tint  un  autre  concile.  Il  alla  plus 
tard  à  Cologne, et  repassa  en  France, 
pour  visiter  son  ancienne  e'glise.  Tous 
les  peuples  accouraient  en  foule  sur 
son  passage  ;  et  partout  il  répan- 
dait la  lumière  et  les  bienfaits.  Son 
retour  à  Rome  fut  un  sujet  d'allé- 
gresse publique*  mais  sa  sollici- 
tude pastorale  ne  l'y  laissa  pas  long- 
temps. L'Italie  méridionale ,  ravagée 
par  les  Normands  ,  réclamait  ses 
soins.  Il  visita  la  Fouille ,  où  il  ré- 
forma les  mœurs  :  il  retourna  bien- 
tôt en  Allemagne ,  afin  d'obtenir  des 
secours  contre  l'incursion  des  hom- 
mes du  Nord,  Au  milieu  de  toutes 
ces  occupations  ,  Léon  travaillait  à 
la  réconciliation  du  roi  de  Hongrie 
et  de  l'empereur.  Enfin  ,  il  revint  en 
Italie  avec  les  troupes  destinées  à 
repousser  les  ennemis.  Leurs  efforts 
ne  furent  pas  heureux  :  le  pape  les 
accompagna;  mais  ,  après  une  dé- 
faite complète,  lui-même  tomba  au 
pouvoir  de  l'ennemi ,  qui  cependant 
respecta  son  m^dheur  et  sa  digm'îé. 
Le  comte  Humfroy  le  fit  conduire 
avec  honneur  à  Bénévent  :  il  y  passa 
près  de  dix  mois  ,  dans  les  prières  , 
les  jeûnes  et  les  austérités,  couchant 
sur  le  ])lancher  de  sa  chambre  ,  re- 
couvert d'un  seul  tapis ,  et  la  tête 
appuyée  sur  une  pierre,  q'ûbii  ser- 
vait d'oreiller.  Aa  mois  de  mars 
io54,  une  maladie,  qii  lui  ôta  la  fa- 
culté de  prendre  aucune  nourriture 
solide,  épuisa  ses  forces  ,  et  l'obli- 
gea de  retourner  à  Rome,  où  il  ter- 
mina, par  la  mort  la  plus  édifiante  , 
une  vie  remplie  de  bonnes  œuvres. 
La  veille  de  ce  jour  fatal ,  il  s'était 
fait  porter  dans  l'église  deSt.-Pierre, 


LEO 

où  il  avait  passé  toute  la  journée 
à  prier.  Remis  dans  son  lit,  il  en- 
lendit  la  messe,  reçut  les  derniers 
sacrements  ,  et  expira  sans  douleur , 
le  19  avril,  âgé  de  5*2  années  j  il  y 
en  avait  cinq ,  deux  mois  et  neuf 
jours  qu'il  occupait  le  saint -siège. 
Ses  travaux  apostoliques ,  pendant  ce 
court'  espace  ,  prouvent  un  zèle  et 
une  activité  admirables.  Il  fit,  dans 
plusieurs  conciles ,  réprouver  les  er- 
reurs de  Bérenger  et  de  Scot  sur 
l'eucharistie,  et  condamner  des  clercs 
schismatiques  ,  qui  blâmaient  les 
usages  de  l'église  latine,  au  sujet  des 
azymes.  L'empereur  d'Orient ,  Cons- 
tantin IMonomaque  ,  le  favorisa 
dans  ses  ])ieux  travaux  ,  en  recevant 
avec  bienveillance  ses  nonces  à  Cons- 
tantinople.  Le  moine  Nicetas  abjura 
sa  doctrine  5  mais  la  division  dura 
plus  long-temps  entre  Léon  IX  et  le 
patriarche  Michel  Cerulaire.  Les 
lettres  qu'ils  s'écrivirent  à  ce  sujet , 
en  contiennent  les  détails.  Dans 
sa  réponse  ,  le  pape  invoque  l'auto- 
rité de  la  prétendue  donation  do 
Const.intin  ;  ce  qui  étonne  avec  rai- 
son le  président  lïénsiult  {^dbr.chron. 
de  l'hist.  de  France ,  années  ^53, 
54  ,  55.  )  Au  reste ,  cette  lettre  est 
si  aigre,  si  hautaine  et  si  éloignée 
du  caractère  connu  de  ce  pontife, 
qu'on  est  tenté  de  la  croire  supposée, 
ou  altérée.  Plusieurs  miracles  s'opé 
rèrent  sur  le  tombeau  de  Léon  IX.' 
L'Église  honore  sa  mémoire  ,  le  19 
avril ,  et  son  nom  est  inscrit  au  mar- 
tyrologe. Outre  plusieurs  décrélales 
et  lettres  insérées  dans  les  collec- 
tions des  Conciles ,  il  nous  reste  de 
lui  une  Fie  de  Saint  Hidulphe ,  dans 
le  Tkesaur.  anecdot.  de  D.  Martène. 
La  vie  de  Léon  IX  se  trouve  au  tome 
VII  de  Vllist.  littér.  de  la  France , 
par  les  bénédictins.  Son  successeur 
fut  Victor  IL  D-s. 


i 


T.ro 

îiÉON  X  (Jf.an  nt  Mr.nins, pape 
sous  le  nom  de), successeur  (ici nies 
Il  ,  ne  à  Florence,  le  1 1  décembre 
!  f -y:) ,  était  fils  de  Laurent  de  Medi- 
!N  ,  surnoninie  le  Macnijlaue.  Son 
liicalion  repondit  à  ropulenee ,  à 
1  rrlat  de  sa  famille,   et   fut  con- 
!  '(•  à  Chalcondyle ,  Ange  Polilien  , 
V  finette    et    Bernard   de   Dibiena. 
(.  elaicnl  les  hommes  les  plus  hahi- 
Ifs  de  leur  temps;  et  le  jeune  Me- 
dicis  se  montra  digne  de  recevoir 
leurs  leçons.  S^s  progrès  furent  ra- 
;  i  les  et  brillants  dans  tous  les  genres 
instnjction  ;  mais  ses  études  paru- 
ut  s'attacher  plus  volontiers  aux 
I  ils  des  anciens  philosophes fpi'aux 
i^nies  austères  de  TEvangile.   Le 
le  et  les  honneurs  dont  on  envi- 
nna  ses  premiers  ans  ,   lui  inspi- 
rent   un    goût  de  luxe  et  de  de- 
nse qu'il  manifesta  dans  tout  le 
Mirs  de  sa  vie.  11  n'avait  que  treize 
s,  en  1 488,  lorsqu'Innocent  VIII 
<      nomma   cardinal.     Quatre    ans 
après,  il  reçut  les  premiers  ordres 
avec   une   grande   solennité  ;   et   il 
p  irut  bientôt  à  Rome  ,  où  les  grâces 
de  son  esprit ,  raméniîé  de  ses  ma- 
nières ,  et  la  variété  de  ses  connais- 
sances ,   lui   concilièrent  ran'ection 
des  grands  et  Teslime  des  gens   de 
lires.  11  perdit  son  père,  et  revint 
Florence ,  pour  y  combler  de  bien- 
:t6  les  amis  de  sa  famille  ,  et  don- 
r  des  témoignages  de  reconnais- 
iiice  à  ses  instituteurs  ,  surtout  à 
''alconHylc.  La   mort  d'Innocent 
III  rappela  Mé<Ucis  à  Uome;  mais 
pendant  le  pontificat  d'Alexandre  VI 
et  l'invasion  de  Charles  VIII  ,  il  ro 
vint  â   Florence  avec  Pierre  ,  soa 
frire.  D?s  disgrâces   y  attendaient 
cette  maison  naguère  si  puissante  et 
si  honorée.  Le  cardinal  fut  obligé  de 
?"  retirer  a  Castelb» ,  ou  les  Vifelli  lui 
donaèrent  uaasUe. De luj^il  partit  pour 


LFO  117 

voyager  en  Allemagne,  en  Flandre, 
en  France,  et  partout  il  eut  des  admi- 
rateurs et  des  amis.  Parmi  les  liaisons 
qu'il  contracta  dans  sa  jeunesse ,  il 
faut  remarquer  celle  d'Érasme ,  qu'il 
considéra  toujours, et  qu'il  consulta 
dans  les  circonstances  les  plus  dif- 
ficiles. Revenu  à  Rome  avec  le  des- 
sein de  relever  sa  famille, il  entre])rit 
de  se  réconcilier  avec  celle  de  la  Ro- 
vère,qui  en  avait  été  l'ennemie.  (  F. 
SixteIV.  )11  obtint  l'amitié  de  Jules 
II,  et  rechercha  p'irticulièrement  le 
neveu  du  pape ,  Galcolo  ,  dont'  la 
mort  prématurée  lui  causa  les  plu» 
vifs  regrets.  Ses  vues  politiques  ne  le 
détournaient  point  de  ses  travaux  lit- 
téraires ,  ni  surtout  de  son  goût  pour 
la  chasse ,  à  laquelle  il  se  livrait  avec 
passion.  Les  sciences, les  beaux-arts , 
la  musique  même  ,  occupaient  aussi 
une  partie  de  ses  moments.  Dans  ces 
entrefaites ,  il  perdit  son  frère  :  sa 
fortune  en  soufT'rit  ;  mais  le  mal- 
heur n'abattit  point  son  courage. 
Jules  II  lui  donna  le  commandement 
de  Pérouse  ,  dont  il  venait  de  s'em- 
parer ,  et  forma  le  dessein  de  réta- 
blir les  Médicis  dans  Florence.  Les 
hasards  de  la  guerre  en  disposèrent 
autrement.  Le  cardinal  fut  fait  pri- 
sonnier à  la  bataille  de  Ravennc , 
et  transféré  à  Milan  ,  en  attendant 
qu'il  le  fût  en  France.  Sa  liberté  lui 
fut  rendue  ,  lorsque  les  Français  éva- 
cuèrent le  IMilanez.  Le  cardinal  ren- 
tra dans  sa  patrie;  et  sa  vie  y  fut  me- 
nacée par  une  conjuration ,  à  laquelle 
il  eut  le  bonheur  d'échapper.  Bien- 
tôt après  ,  Jules  II  mourut  ;  Médicis 
revint  à  Rome ,  où  il  fut  élu  pape  le 
II  mars  i5i3.  Son  couronnement 
fut  magnifique.  Ses  discours,  remplis 
de  grâce  ,  de  bonté  et  d'éloquence , 
enchantèrent  les  Romains.  Il  par- 
donna aux  conjurés  qui  avaient  at- 
tente à  SCS  jours  :  parmi  eux  se  trou- 


1^8  LEO 

vail  Macliiàvel,  dont  la  fidclile  ne  se 
dcmenlit  point  par  la  suite.  Il  an- 
nonça,  dès  \e.s  premiers  moments, 
sa  haute  protection  pour  les  lettres, 
en  choisissant  Bcmho  et  Sadoict  pour 
secrétaires  intimes.  Ce  fut  sous  ces 
heureux  auspices  que  commença  son 

f)ontificat,  s'il  est  permis  d'appe- 
er  ainsi  un  règne  qui  fut  plus  occu])e' 
des  intérêts  du  monde  que  de  ceux  de 
la  religion.  Le  gouvernement  de  Léon 
X  est  le  laLleau  d'un  siècle  entier  , 
auquel  il  eut  la  gloire  d'imposer  son 
nom.  Il  se  partage  eu  trois  parties 
importantes  et  séparées ,  que  nous 
distinguerons  sans  négliger  l'ordre  de 
la  chronologie  générale  et  relative. 
L'elat  ,  la  religion  ,  les  lettres,  en 
mettant  successivement  en  scène  le 
prince,  le  pontife,  et  le  protecteur  des 
lettres,  placeront  dans  un  jour  plus 
clair  et  plus  méthodique,  les  projets, 
les  fautes  et  les  succès  qui  ont  rendu 
Léon  X  si  digne  de  l'attention  de  la 
la  postérité.  —  JJf'aires  politiques, 
—  Les  Français  ,  ainsi  qu'on  l'a  vu 
dans  l'article  de  Jules  II ,  avaient  été 
obligés  d'évacuer  leMilanez  ,  et  n'a- 
vaient laissé  que  des  garnisons  dans 
les  citadelles  principales.  Louis  XII, 
comptant  su r  l'inacti  n  de  Ferdinand, 
avec  lequel  il  avait  conclu  une  trêve 
d'un  an  ,  en  1 5 1 3 ,  et  sûr  de  la  fidé- 
lité des  Vénitiens,  rassembla  de  nou- 
velles forces,  et  repassa  les  Alpes 
5)our  venir  combattre  Maximilien 
Sforce ,  qui  était  rentré  dans  son 
héritage.  LéonX  voyait  avec  chagrin 
ces  préparatifs;  et  malgré  les  cares- 
ses que  le  roi  de  France  avait  faites 
a  Julien  de  Médicis  ,  il  résolut  d'em- 
Ipêcher  cette  invasion.  Il  se  servit,  a 
cet  effet,  du  secours  des  Suisses  , 
suivant  en  cela  l'exemple  de  son 
"prédécesseur.  Les  Français  perdirent 
la  bataille  de  î^ovare  (6  juin  i5 13), 
•€l  fuient  obligés  encore  une  fois  ^e 


LEO 

rentrer  dans  leurs  foyers.  Raimohd 
de  Cardonne  s'empara  de  Gènes  ;  et 
Louis  XII  futainsi  dépouillé  de  tout 
ce  qu'il  possédait  en  Italie.  Henri 
YIII  harcelait  ce  monarque  en  Fran- 
ce :  Léon  X  s'était  ligué  avec  le 
roi  d'Angleterre.  Les  Vénitiens  ne 
furent  pas  plus  heureux  que  leur  allié. 
Battus  à  Vicence  ,  ils  consentirent  à 
remettre  leurs  différends  à  l'arbi- 
trage du  pape.  Léon  X  fit  rouvrir  le 
concile  de  Latran.  Louis  XII ,  ac- 
cablé de  revers,  résolut  alors  de 
faire  sa  paix  avec  la  cour  de  Ro- 
me ,  autant  pour  se  débarrasser  des 
attaques  de  l'Angleterre  ,  que  pour 
prévenir  les  desseins  de  Ferdinand, 
qui  voulait  faire  passer  le  duché  de 
Milan  sur  la  tête  clc  l'archiduc,  petit- 
fils  de  l'empereur  Maximilien  ,  et 
connu  depuis  sous  le  nom  de  Char- 
les-Quint. Le  roi  de  France  donna 
donc  son  adhésion  aux  actes  du 
concile  de  Latran ,  et  reçut  l'ab- 
solution des  censures  lancées  contre 
lui  par  Jules  II.  Cette  réconciliation 
comblait  les  vœux  du  pape ,  en  fai- 
sant cesser  l'opposition  des  deux 
conciles.  Sa  joie  fut  augmentée 
par  la  nouvelle  de  la  victoire  des  rois 
de  Hongrie  et  de  Pologne  sur  les 
Turcs,  par  celle  de  l'heureuse  et  célè- 
bre découverte  de  Vasco  de  Gama,  e! 
enfin  ,  par  l'ambassade  solennelh 
que  lui  envoya  Emanuel-le-Grand, 
pour  obtenir  de  lui  la  donation  deé 
terres  conquises  par  les  navigateur! 
portugais.  Il  consacra  cesévénementi 
par  des  fêtes  magnifiques  ;  mais  bien- 
tôt la  situation  de  l'Italie  exigea  de 
lui  d'autres  soins.  Louis  XII,  qui  ne 
renonçait,  pas  au  duché  de  Milan, 
essayait  de  traiter  avec  la  Suisse.  Cç 
projet  ayant  échoué,  il  tenta  de 
former  une  alliance  plus  étroite  avec 
les  maisons  d'Autriche  et  d'Espa- 
gne ,  par  une  nouvelle  union  de  U- 


LEO 

mille.  Lcon  X  sVflTorça  de  traverser 
CCS  négociations,  dont  le  rësult.it  pou- 
vait être  le  partage  de  l'Italie  entre 
ros  trois  puissances.  Il  oflVit  an  Roi 
sa  nuûiiation  auprès  des  cantons 
helvétiques;  mais  ce  futiinuilement. 
II  réussit  mieux  avec  Henri  VIII  , 
dont  la  sœur  épousa  Louis  Xll  , 
lequel  venait  de  perdre  Anne  de  Bre- 
tagne. Cclcvénement  fui  un  des  traits 
les  plus  habiles  de  la  politique  du 
pa{>e  ,  qui  conjura  ainsi  un  orage 
tornùdablc  prêt  à  fondre  sur  l'I- 
talie. Cet  état  de  choses  lui  procu- 
rait d'ailleurs  une  parfaite  tranquil- 
lité ,  dont  il  profita  pour  établir , 
d'une  manière  plus  durable,  l'autori- 
té de  sa  famille  à  Florence.  Des  fêtes 
somptueuses  accoutumaient  les  ha- 
bitants aux  jouissances  du  luxe  ,  et 
disposaient  les  esprits  à  subir  le  joug 
d'une  maison  qui  jadis  leur  avait 
été  chère  à  plus  d'un  titre.  Léon  X 
avait  encore  de  plus  hauts  desseins. 
II  prévoyait  la  mort  prochaine  de 
Ferdinand ,  et  destinait  le  royaume 
de  Naplcs  à  Julien  de  Médicis  ,  son 
frère ,  tandis  que  Laurent ,  sou  ne- 
veu, eût  été  souverain  de  la  Tos- 
cane. Ainsi  tous  les  trônes  du  raidi  de 
l'Italie  eussent  été  occupés  par  ses 
pioches.  Ce  fut  dans  la  perspective 
de  ces  grands  événements  que  le  pa})e 
se  rapprocha  de  Louis  XII  ,  qu'il 
pressait  vivement  de  faire  une  nou- 
velle tentative  sur  le  Milanez.  Le 
traité  conclu  dans  ces  circonstances, 
n'eut  point  d'exécution.  Le  bon  roi , 
captivé  par  les  charmes  de  sa  jeune 
épouse ,  ne  vivait  plus  pour  la  gloire, 
et  se  livrait  tout  entier  à  des  plai- 
sirs qui  devaient  le  conduire  rapide- 
ment au  tombeau.  Léon  X  sentit  qu'il 
ne  lui  restait  d'autre  parti  que  do  dé- 
fendre ses  possessions  en  Lombar- 
die.  Ce  fut  dans  ce  «lesscin  qu'il  lit 
r^cquisition  ^c  Modènc,  dont  la  si- 


LEO  ti() 

tu.it ion  liait  la  communication  avec 
les  états  de  l'Église,  et  les  villes  do 
Reggio  ,  de  Parme  et  de  Plaisance. 
Cejiendant  l'empereur  Maximilien 
et  Ferdinand  poussaient  vivement 
leurs  préparatifs  contre  les  Vénitiens. 
Les  Turcs ,  réconciliés  avec  la  for- 
tune, avaient  obtenu  quelques  avan- 
tages. Le  paj)e,  alarmé  des  suite» 
fâcheuses  qui  pouvaient  naître  de 
ces  incidents  ,  résolut  de  tout  ten- 
ter pour  rétablir  la  paix,  du  moins 
entre  les  puissances  de  l'Italie.  A  cet 
ellét ,  il  envoya  le  cardinal  Dcrabo 
négocier  avec  les  Vénitiens  ;  il  vou- 
lait leur  persuader  de  faire  des  sa- 
ciiiices  à  l'empereur  et  à  Ferdinand , 
et  de  renoncer  à  leur  alliance  avec 
Louis  XII.  L'éloquence  de  Bembo 
ne  réussit  point  en  cette  occasion  : 
la  répid3liqae  resta  fidèle  au  roi  de 
France ,  qui  sut  mauvais  gré  au  pape 
d'avoir  voulu  lui  enlever  ses  allies, 
tandis  qu'il  le  faisait  assurer  d'autre 
part  qu  il  avait  le  cœur  et  le  génie 
tout  français.  (  Voyez  l'Histoiie  de 
la  ligue  de  Camhray.  )  Teb  furent 
les  événements  qui  occupèrent  la  fin 
de  l'année  i5i4,  et  les  comraen- 
cemculsde  i5i5.  Louis  XII  mourut 
le  premier  janvier,  et  François  I'^^ 
hérita  de  sa  couronne  et  de  ses  pro- 
jets de  rentrer  en  Italie.  Appuyé, 
comme  son  prédécesseur  ,  de  l'al- 
liance des  Vénitiens;  redevenu  maître- 
dans  Gènes ,  où  la  faction  des  Fre- 
gose  avait  vaincu  celle  des  Fiesque 
et  des  Adorne,  il  se  préparait  à  passer 
les  Alpes.  Léon  X  eût  bien  voulu 
garder  la  neutralité  ;  elle  était  im- 
possible. Il  fut  donc  obligé  de  se 
liguer  avec  Sforce,  Ferdinand ,  et  les 
Suisses,  que  François  I^».  n'avait  pu 
attirer  à  son  parti.  Malgré  tous  les 
obstacles ,  François  I*' .  pénétra  en 
Ualie;  et  la  victoire  de  jMarignau 
remit  de  nouveau  les  Français   eu 


120  LKO 

possession  de  Milan  ,  rie  Parme  , 
de  Plaisance  ,  et  de  la  personne 
de  Sforce  ,  qui  (it  an  Roi  une  ces- 
sion entière  de  ses  états ,  et  se 
relira  en  France ,  où  il  mourut. 
Léon  X  ,  déconcerte  par  ces  revers, 
prit  le  j)arti  de  traiter  avec  François 
1er,  ^  par  l'entremise  du  duc  de  Sa- 
voie ,  dont  Julien  de  Mëdicis  avait 
épouse'  la  sœur ,  Philiberte  ,  tante 
du  monarque  français.  Les  négo- 
ciations commencèrent,  et  Ton  con- 
vint d'une  entrevue  à  Bologne.  Le 
pape  s'y  rendit ,  après  avoir  vi- 
vvité  le  tombeau  de  son  père,  à  Flo- 
rence. Les  Bolonais  ,  regrettant  tou- 
jours leur  ancien  gouvernwnent  , 
accueillirent  froidemenl  Léon  X.  Ce- 
pendant l'entrevue  se  fit  le  9  novem- 
bre i5i5.  Tout  se  reunissait  pour  la 
rendre  mémorable  ,  et  la  nature  des 
intérêts  politiques  et  religieux  qui 
devaient  y  être  traites  ,  et  la  dignité 
des  deux  arbitres  qui  allaient  pro- 
noncer. C'étaient  les  deux  souverains 
les  plus  remarquables  alors  en  Eu- 
rope ,  l'un  brillant  de  jeunesse ,  de 
vaillance ,  de  gloire  ,  de  magnani- 
mité chevaleresque  ;  l'autre  dans  la 
maturité  de  l'âge,  et  dans  tout  l'éclat 
de  ces  belles  qualités  qui  relevaient 
en  lui  la  grandeur  du  prince ,  par 
les  talents  de  l'homme  d'esprit ,  et 
par  l'habileté  de  l'homme  d'état. 
François  I<=r.  signa  la  paix  de  l'I- 
talie ,  et  revint  à  Milan,  au  bout  de 
trois  jours  ,  laissant  à  son  ministre 
(  Fojez  DupRAT  )  le  soin  d'ache- 
ver ce  fameux  concordat ,  qui  re- 
çut,  l'année  suivante  ,  une  sanction 
définitive.  Léon  X  regagna  Rome  , 
où  il  apprit  la  mort  de  Julien,  son 
frère ,  auquel  il  fit  élever ,  par  Mi- 
chel-Ange, un  superbe  monument 
à  Saint -Laurent  de  Florence.  Le 
pape,  dans  les  premiers  moments 
de  sa  douleur^  sç  letii-^àÇivita-Lavi- 


LEO 

nia  ,  entre  Ostie  et  Anlium.  Il  faillit 
être  enlevé  par  des  Barbaresques  dé- 
barqués sur  les  côtes  ,  et  n'eut  que  le 
temps  de  se  sauver  à  Rome.  Cepen- 
dant l'alliance  entre  François  1*^''.  et 
Léon    X    inquiétait    l'Autriche   et 
l'Espagne ,  qui  cherchèrent  à  se  for- 
tifier de  l'appui  d'Henri  VIII.   Le 
cardinal  Wolsey  engagea  son  maî- 
tre à  contracter  cette  nouvelle  al- 
liance, dont  la  conclusion  fut  sus- 
pendue par  la  mort  de  Ferdinand 
(  janvier  i5i6  ).  François  l^^.  forma 
aussitôt  des  desseins  sur  le  royaume 
de  N  a  pies.  Mais  Léon  X,  qui  redou- 
tait l'extension  de  la  puissance  des 
Français ,  chercha  à  leur   susciter 
un    ennemi    puissant.    L'empereur 
Maximilien, sortant  pour  la  première 
fois  de  son  indolence  accoutumée, 
fondit  à  l'improviste  sur  le  Milanez. 
Léon  X  ordonna  en  même  temps  à 
Marc-Antoine  Colonne  de  joindre  ses 
troupes  aux  forces  impériales.  Mais 
le  général  français  ,  Lautrec  ,  opposa 
à  toutes  ces  forces  une  résistance  in- 
vincible. François  I^^  ne  douta  point 
alors  qu'il  ne  fût  trahi  par  le  pape. 
Celui-ci  n'en  fit  pas  moins  des  dé- 
monstrations de  fidélité  au  Roi,  qui 
parut  y  croire  :  tous  deux  dissimulè- 
rent ,  en  épiant  réciproquement  des 
conjonctures   plus  décisives.    Dans 
cette  hésitation  ,  qui  laissait  respirer 
Léon  X  ,  il  songea  de  nouveau  à  éta- 
blir sa  famille  d'une  manière  digne 
de  ses  ambitieuses  pensées.  Depuis  la 
mort  de  son  frère  Julien  ,  toutes 
ses  alTections   s'étaient  réunies   sur 
Laurent ,  son  neveu  ,  auquel  il  des- 
tinait le  duché  d'Urbin.  La  Rovère , 
n^veu  de  Julien  ,  en  était  en  posses- 
sion. On  lui  reprochait ,  ainsi  qu'on 
Ta  déjà  dit  (  Foj.  Jules  II)  le  meur- 
tre du  cardinal  de  Pavie.  Il  avait  en 
outre  fort  maltraité  les  troupes  de 
l'EgUç^  dans  les  dernières  occasiopâ. 


LEO 

Lf  pape  rcxcommiiiiia  ,  fit  marcher 
des  troupes  coulrc  lui ,  s'cnij)ara<Ju 
duché,  dont  il  donna  l'investiture  à 
Laurent (  i5i6).  L'année  suivante, 
La  Rovèrc  essaya  de  rentrer  dans  son 
l»eritage;inais  après  d'assez, grandes 
.ilternatives  de  reverset  de  succès, 
il  fut  oblige  de  céder  au  vainqueur. 
Cependant  on  leva  les  censures,  et 
on  voulut  bien  lui  accorder  cpielques 
légers  dédommagements.  «  On  doit 
1)  convenir ,  dit  Will.  Roscoë ,  que , 
1)  dans  cette  afiaiic ,  la  conduite  du 
«  pape  fut  aussi  rcprehcnsible  ,  que 
»  celle  de  ses  généraux  fut  honteuse, 
)>  et  que  les  sommes  prodigieuses 
»  qu'elle  coûta , épuisèrent  le  trésor, 
»  et  portèrent  le  pontife  à  des  rae- 
)>  sures  qui  ne  tardèrent  pas  à  pro- 
«  dnire  des  effets  si  fâcheux  pour  le 
îi  Saint-Siège.  »  Au  milieu  de  ces 
soins  de  famille ,  Lëon  X  avait  les 
yeux  ouverts  sur  la  conduite  des  au- 
tres  cours.  Il  apprit  avec  chagrin  le 
traite  conclu  à  Noyon  entre  François 
!'■'■.  et  le  jeune  archiduc  Charles  ;  et , 
voulant  le  contrarier,  il  proposa  uu 
rontre-traile'  entre  lui ,  Maximilien , 
Henri  VllI ,  et  même  le  roi  d'Es- 
j)agne.  L'acte  en  fut  signe  à  Lon- 
dres,  le  a5  octobre  iTnô;  mais  il 
ne  fut  point  exe'cute' ,  parce  que  l'em- 
pereur s'en  désista,  pour  acce'der  à 
ceJnidc  Noyon.  Vers  celte  même  épo- 
que ,  Léon  X  faillit  être  la  victime 
d'un  complot  trame'  contre  sa  vie.  Le 
chef  principal  était  le  cardinal  Al- 
phonse Petrucci ,  frère  de  celui  que  le 
]>ontife  avait  dépouillé  de  Sienne. 
Son  premier  dessein  était  de  tuer  le 
])ape  de  sa  propre  main;  il  résolut  de- 
puis de  s'en  défaire  par  le  poison,  et 
mit  dans  ses  intérêts  Vercelli,  chirur- 
gien de  Léon, qui  ne  put  pas  eu  trou- 
ver l'occasion.  Des  lettres  intercep- 
tées révélèrent  cesdesseins  criminels. 
Petrucci  était  abscjitj  le  pape  lui 


LEO  lat 

manda  de  venir  à  Rome,  et  le  fit  arrê- 
ter, malgré  les  réclamations  de  l'am- 
bassadeur d'Espagne  ,  sous  la  pro- 
tection duquel  Petrucci  s'était  mis. 
On  le  conduisit  au  château  Saint- 
Ange,  avec  le  cardinal  Sauli,  que  l'on 
soupçonnait  de  complic  ité.  La  procé- 
dure ayant  été  régulièrement  instrui- 
te ,  les  preuves  accablèrent  Vercelli, 
Petrucci  et  Sauli.  Il  fut  prouvé  que 
d'autres  membres  du  sacré  collège 
avaient  trempé  dans  le  complot. 
Petrucci,  Vercelli,  et  un  autre  indi- 
vidu, nommé  Nino,  subirent  la  peine 
capitale.  Sauli  eut  grâce  de  la  vie; 
mais  il  fut  dégradé  et  ses  biens  furent 
confisqués  ;  deux  autres  paj  èrent  une 
amende  de  vingt-cinq  mille  ducats. 
(  Fojez  Guichardin  et  Fabroni.  ) 
Léon  X  ,  qui  ne  se  dissimulait  pas  le 
nombre  d'ennemis  qu'il  venait  de 
s'attirer  par  ces  actes  de  justice  et  de 
sévérité,  eut  recours  à  des  compen- 
sations ,  qui  effacèrent  en  partie  la 
trace  de  ces  chagrins.  Il  fit  une  pro- 
motion de  trente  et  un  cardinaux , 
qu'il  eut  soin  de  choisir  parmi  ses 
parents,  ses  amis,  et  les  gens  les 
plus  distingués  par  leur  mérite,  et 
les  plus  considérables  par  leur  nais- 
sance et  parleurs  richesses.  Un  luxe 
de  dépense  et  de  splendeur  ,  où  le 
bon  goût  s'alliait  à  la  magnificence; 
un  ton  recherché  d'élégance  et  de 
politesse ,  répandirent  l'aisance  et  les 
agréments  de  la  vie  dans  toutes  les 
classes  de  la  société.  La  liberté  du 
commerce  ,  la  protection  accordée 
aux  beaux-arts ,  la  sagesse  de  l'ad- 
ministration, la  sécurité  de  la  police , 
ajoutèrent  à  la  pros2)érilé  générale, 
et  rendirent  le  pontificat  de  Léon  X 
à  jamais  mémorable.  Celte  brillante 
époque  fut  consacrée  par  un  décret 
solennel ,  qui  lui  décerna  une  statue 
dont  l'exécution  fut  confiée  à  Michel- 
Augc.  On  la  voit  encore  au  Capilole , 


t'î'î 


i;eo 


avec  une  inscription  qui  rappelle  aux 
siècles  futurs  le  nom  de  l'illustre  pon- 
tife ,  l'cclat  de  son  administration,  et 
la  grandeur  de  ses  bienfaits  (  1 5 1 7  ). 
Cependant  le  nouveau  souverain  de 
Ry/ance ,  Se'lim  ,  vainqueur  de  la 
Perse ,  et  conque'rant  de  l'Egypte  , 
inquiétait  l'Europe  sur  sa  propre 
siirete'.  Léon  X ,  pour  prévenir  de 
tels   malheurs  ,    aurait  désiré  en- 
gager   tous    les   princes    chrétiens 
dans  une  confédération  contre  l'en- 
nemi commun;   mais   ils  ne  pro- 
mirent qu'une  alliance  défensive,  en 
donnant  au  pape  le  vain  titre  de  chef 
de  la  ligue.  Léon  X  continua  donc 
à  s'occuper  de  l'élévation  de  ses  pa- 
rents. Il  demanda  et  obtint ,  pour  le 
nouveau  duc  d'Urbin  ,  son  neveu ,  la 
main  de  Madelène  de  la  Tour ,  al- 
liée au  sang  royal  de  France.  Les 
noces  se  firent  en  1 5 1 8 ,  avec  une  so- 
lennité où  le  pape  et  le  roi  rivali- 
sèrent de  magnificence  ;  et  cet  événe- 
ment amena  un  moment  de  réunion 
politique.  Léon  X  abandonna  à  Fran- 
çois pi',  le  montant  des  décimes  per- 
çues à  l'occasion  de  la  croisade  contre 
les  Turcs  ;  et  le  roi  rendit  Modène  au 
pape,  et  Reggio  au  duc  de  Ferrare. 
Des  événements  d'une  plus  haute  im- 
portance devaient  bientôt  agiter  l'Eu- 
rope entière.  Le  jeune  Charles  d'Au- 
triche aspirait  au  titre  de  roi  des  Ro- 
mains, et  à  l'investiture  du  royaume 
de  Naples.  Le  pape  se  refusait  à  ces 
demandes,  sous  prétexte  d'incompa- 
tibilité. Maximilieu  vint  à  mourir  ; 
Charles  ne  dissimula  point  ses  pré- 
tentions à  l'Empire  ,  et  François  l^^. 
se  présenta  pour  concurrent.  Le  pape, 
qui  n'aurait  voulu  ni  des  Français  , 
ni  des  Espagnols  en  Italie,  favori- 
sait le  duc  de   Saxe.  Les  électeurs 
ecclésiastiques  balançaient,  François 
I'^'".  envoya  des  présents;  Charles  fit 
approcher  une  armée  ,  et  il  fut  élu 


LEO 

(  i5i9  ).  Le  pape  fut  atléré  de  celte 
nouvelle.  Un  nouveau  chagrin  domes- 
tique ajouta  à  ses  peines  :  le  duc  d'Ur- 
bin mourut,  à  peine  jouissant  des  hon- 
neurs de  la  souveraineté  et  veuf  de- 
puis mielques  mois.  (  Foj.  Me'dicis.) 
Léon  A,  après  avoir  pris  quelques  ar- 
rangements pour  la  Toscane ,  réunit 
le  duché  d'Urbin  au  domaine  de  l'É- 
glise ,  avec  Pesaro  et  Sinigaglia ,  qui 
en  dépendaient.  Pendant  tout  le  cours 
de  cette  année  (  i  S'io)  l'Italie  fut  tran- 
quille. Charles-Quint  avait  été  occupé 
à  pacifier  les  troubles  de  l'Espagne. 
François  I*"".  voulait  nouer  des  liai- 
sons avec  Henri  VIII ,  et  ne  desirait 
autre  chose  que  de  se  maintenir  dans 
la  paisible  possession  du  Milanez  ,  et 
dans  l'alliance  des  Vénitiens.  Léon 
X  paraissait  livré  à  des  amusements 
frivoles ,  que  ses  détracteurs  lui  ont 
reprochés  avec   beaucoup   d'amer- 
tume. Il  se  réveilla  de  ce  sommeil  ap- 
parent par  des  actes  qui  démentirent 
tien  le  reproche  d'une  honteuse  in- 
dolence. Quelques  villes  d'Italie,  voi- 
sines du  Saint-Siège,  étaient  encore 
dominées  par  des  usurpateurs ,  qui 
pouvaient  être  appelés  de  véritables 
tyrans.  L'un  des  plus  odieux  était 
Jean-Paul  Baglioni ,  qui  tenait  sous 
le  joug  la  ville  de  Pérouse,  d'où  Ju- 
les II  l'avait  autrefois  chassé.  Il  y 
était  rentré,  après  avoir  servi  dans 
l'armée  vénitienne ,  et  avoir  figuré 
parmi  les  Condottieri.  Muratori  le 
peint  comme  un  impie ,  un  misérable 
sans  foi  ,  sans  honneur.  Le  pape, 
l'ayant  attiré  à  Rome,  le  fit  arrêter  , 
et  juger.  Les  tribunaux ,  après  avoir 
obtenu  l'aveu  de  tous  ses  crimes , 
le   condamnèrent  à   être   décapité. 
Léon  X  s'empara  de  Pérouse.  Le 
fils  de  Baglioni  trouva  un  asile  à 
Padoue  ;  le  pape ,  sous  ce  prétexte  , 
fit  attaquer  la  ville  de  Fermo ,  ap- 
partenant aux  Vénitiens.  Sestroupç,s 


\ 


h  nnrcnt ,  ainsi  t\uc  plusieurs  autre» 
villes  de  la  Marclie-d'Ancônr,  dont 
les  princes  subirent  le  même  sort 
<j\ic  Baglioni.  LeonX  diiigca  ensuite 
ses  attaques  contre  la  maison d'Kstc, 
qu'il  avait  le  projet  de  dépouiller  de 
Ferrare.  Cette  tentative  c'clioua,et  ne 
éit  p(ùnt  d'honneur  à  la  conduite  du 
pape.  Guicbardin  n'a  pas  essavede 
l'excuser  :  Muratori  a  cteplusîoin, 
tn  accusant  Léon  X  d'avoir  voulu  at- 
tenter aux  jours  du  duc.  Roscoc,  plus 
modéré  et  plus  impartial ,  se  range  à 
l'opinion  de^uichardin.  Quelques- 
uns  des  actes  d'hostilité  que  le  pape 
Venait  d'exercer  ,    avaient  réveillé 
d'anciennes   inimitiés  et  blessé  les 
intérêts    de     certaines     puissances 
étrangères  en  Italie.  Léon  X  ,  fidèle 
au  système  de  les  chasser  toutes,  en 
les  opposant  les  unes  aux  autres, 
fe'occupa  encore  de  les  tromper  par 
des  négociations  doubles ,   dont  le 
i)ut  constant   devait  être  la  libéra- 
tion de  son  pays.  En  conséquence,  il 
engagea  d'abord  François  I^'".  à  se 
liguer  avec  lui  pour  expulser  les  Es- 
pagnols du  royaume  de  Naplcs.  Il 
lui  promit  la  plus  grande  part  dans  la 
conquête ,  et  s'obligea  à  lever  six  mille 
Suisses ,  qui  devaient  traverser  le  Mi- 
lanez  et  prendre  des  cantojmemenls 
dans  les  places  de  la  Romagne  et  de 
la  Marche-d'Anconc.  François  T^'^. 
peu  confiant  dans  les  démonstrations 
du  souverain-pontife ,  demanda  des 
délais  qui  ressemblaient  à  des  refus  , 
et  surtout  ne  parla  point  de  restituer 
Parme  et  Plaisance.  Léon  X  se  tour- 
tia  dès-lors  du  coté  de  l'empereur , 
'et  conclut  avec  lui,  le  8  mai  i^yjLi  , 
\in  traité ,  dont  le  but  était  de  rétablir 
Fr.  Sforce  dans  le  diulié  de  Milan  , 
et  d'assurer  divers  apanages  auxMé- 
dicis.  Dans  tout  cela ,  rien  ne  pa- 
raissait stipulé  pour  les  intérêts  du 
jcimc  souverain.  Mais  aussi   polili- 


Lt^O 


sA 


que  qu^am'bilicux ,  Charles ,  ^i  te- 
nait de  rompre  avec  François  I"''. 
au  sujet  du  duché  de  Bouillon ,  saisit 
avidement  l'occasion  de  se  mesurer 
avec  son  magnanime  rival, bien  sûr 
de   reprendre  tous    ses   avantages, 
quand  il  voudrait  user  de  sa  puis- 
sance pour  s'indemniser  aux  dépens 
de  ses  alliés.  Ces  conventions  une  fois 
arrêtées  ,  les  galères  pontificales  eu- 
rent ordre  de  se  joindre  à  la  flotte  de 
Tempereur ,  qui  devait  partir  de  Na- 
ples ,  se  porter  sur  Gènes  et  enlever 
cette  ville  à  rinfluence  des  Français. 
L'entreprise  échoua.  Mais  des  soulè- 
vements éclatèrent  dans  la  Lombar- 
die.  Lescun,  qui  commandait  en  l'ab- 
sence de  Laulrec,faillit  être  fait  pri- 
sonnier dans  un  coup  de  main  qu'il 
tenta  sur  Keggio.  Dès-lors,  l'incendie 
devint  général.  Lautrec  revint  pren- 
dre le  commandement  du  Milanez. 
Le  siège  de  Parme  fut  la  première 
tentative  des  alliés  du  pape  ;  ils  péné- 
t  lièrent  dans  la  ville  ;  mais  une  diver- 
sion opérée  par  le  duc  de  Ferrare  les 
obligea  d'abandonner  le  siège  de  la 
citadelle.  Léon  X  ,  vivement  affligé 
de  cet  échec,  employa  les  derniers 
eflbrls  pour  le  réparer.  Toute  la  des- 
tinée de  cette  campagne  semblait  te- 
nir au  parti  que  les  Suisses  se  dé- 
termineraient à  prendre.  Le  pape 
envoya  auprès  d'eux  les  cardinaux 
de  Sion  et  Jules  de  Médicis ,  qui 
les  gagnèrent  à  force  de  caresses  et 
de  présents.  Cette  défection  décon- 
certa les  Français.  (  Fqy.  Lautrlc.) 
Ils  perdirent  Milan,  dont  Prosper 
Colonne  s'empara,  le  10  novembre 
1 5*2 1 .  La  Lonibardie  d'un  autre  côté, 
presque  toute  entière  ,  se  soumit  au 
vainqueur,  ainsi  que  Parme  et  Plai- 
sance. Ces  heureuses  nouvelles  par- 
vinrent ,  le  '24»  •'*"  P^P^  7  ^'i  mourut 
peu  de  jours  après,  sans  jouir  du  suc- 
cès de  SCS  armes.  —  JJJ'qircs  ecdé- 


I2i  LEO 

siastiques.  —  Deux  actes  célèbres 
ont  signale  le  pontificat  Ae  Le'on  X, 
le  concordat  et  les  indulgences.  Nous 
avons  vu  qu'il  desirait  terminer  le 
concile  de  Latran ,  auquel  venaient 
d'adhérer  successivement  toutes  les 
puissances  opposantes,  principale- 
ment la  France  et  l'Empire.  Un  des 
derniers  actes  de  ce  concile,  fut  l'ap- 
probation du  concordai  conclu  entre 
S.  S.  et  le  roi  de  France.  Ce  traite' 
prit  alors  le  caractère  d'une  loi  eccié- 
siastique  :  une  convention  pareille 
avait  déjà  été  conclue  entre  Nicolas  V 
et  Frédéric  III,  pour  les  églises  d'Al- 
lemagne, sans  exciter  de  réclamation. 
11  n'en  fut  pas  de  même  par  rapport 
au  concordat  français;  tous  les  corps 
de  l'État  opposèrent  de  vives  résis- 
tances. Le  roi  demeui'a  inel;ranlable 
dans  les  termes  de  son  traité ,  et  en 
maintint  l'exécution  de  toute  sa 
puissance.  Ainsi  le  concordat  a  été , 
pendant  trois  siècles ,  la  loi  com- 
mune des  élections  ecclésiastiques  ;  il 
a  été  défendu  par  des  théologiens , 
des  jurisconsultes ,  des  historiens  , 
très-recommandables  par  leur  savoir 
et  très-purs  dans  leur  doctrine  (  i  ). 
Ils  ont  observé  que  cet  acte,  loin  de 
détruire  la  pragmatique,  en  avait  con- 
servé des  parties  essentielles ,  telles 
que  l'abolition  des  expectatives  ,  le 
rétablissement  de  la  hiérarchie  dans 
les  tribunaux  ecclésiastiques,  et  la  ré- 
vocation des  anciennes  annates,  «  qui 
y>  n'ont  plus  subsisté  depuis  lors  que 
»  comme  une  subvention  volontaire 
»  pour  fournir  aux  dépenses  du 
»  Saint-Siège.  »  (  Ployez  les  Frais 
Principes  de  Véglise  gallicane,  par 
M.  l'abbé  Frayssinous.  )  Il  n'y  avait 


(.1)  De  îilaica.Van-Espen,  d'Hericourt , 
Tbomassin,  ti'Aguesneaii,  Gaillard,  le  Fère 
Hc'nault,  MM.  Bernard! ,  l'abbé  Frayssi- 
nous ,  Cl.-nisrl  ,  etc.  Voyez  aussi  Tordon- 
nance  de  Blois,  art.  i,  i58o. 


LEO 

de  véritable  innovation  que  la  nomi- 
nation des  évêques ,  attribuée  au  roi 
et  au  pape ,  et  retirée  aux  chapitres 
métropolitains  par  suite  des  désor- 
dres qui  nécessitaient  sans  cesse  le 
recours  au  Saint-Siège.  D'autres  écri- 
vains   ont  soutenu   très  -  vivement 
une  opinion  contraire ,  en  rappelant 
les  principes  et  les  usages  des  pre- 
miers siècles  de  l'Église.  Nous  nous 
hâtons  de  passer  à  l'alïaire  des  indul- 
gences. Depuis  long-temps,  et  surtout 
à  la  fin  du  schisme  d'Occident ,  tous 
les  états  de  la  chrétienté  demandaient 
la  réforme  de  l'Église,  dans  son  chef 
et  dans  ses  membres.  Tel  avait  été  le 
but  des  conciles  de  Constance  et  de 
Bàle,  et  dernièrement  encore  du  con- 
cile de  Pise ,  dont  les  décrets  avaient 
été  annulés  par  celui  de  Latran.  Les 
réformateurs  se  divisaient  en  deux 
partis,  l'un  de  gens   animés  d'un 
zèle  sincère ,  mais  pacifique  ,  vrais 
enfants  de  lumière  (  Voyez  VHis- 
t(  ire  des  K  ariaiions)\\h  déploraient 
les  abus  sans  amertume,  en  propo- 
saient avec  respect  le  redressement , 
et  ne  voulaient  point  de  destruction. 
L'autre  parti  était  composé  d'esprits 
superbes ,  pleins  de  chagrin  et  (Mai- 
greur ,  qui ,  sous  prétexte  de  rétablir 
la  pureté  des  principes ,  ne  tendaient 
en  effet  qu'à  renverser  une  hiérar- 
chie dont  l'autorité  blessait  leur  or- 
gueil. Tels  avaient  été  les  Vaudois  , 
les  Albigeois,  Wiclef,  Jean  Hus  et  Jé- 
rôme de  Prague.  Des  guerres  atro- 
ces, des  supplices  effrayants  avaient 
comprimé,  et  n'avaient   point  dé- 
truit le  germe  de  ces  fatales  divisions. 
Pendant  le  siècle  précédent ,  les  pa- 
pes, obligés  de  recourir  à  la  voie  de» 
armes ,  et  de  s'appliquer  aux  intri- 
gues politiques  pour  recouvrer  les 
domaines  de   l'Eglise   envahis  par 
des  usurpateurs ,  avaient  contracté 
des  mœurs  plus  mondaines  que  reli- 


LEO 

Çipuses;  et  le  respect  attache  an  sa- 
cerdoce suprême  s*élait  conside'ra- 
Llcmcnl  allaihli.  D'un  autre  côté ,  les 
]iremit'res  prociuclious  de  la  littéra- 
ture n'iiaissanle  n'avaient  pas  peu 
contribue ,  de  l'aveu  même  des  e'cri- 
vains  protestants,  tels  (picRol)erlson, 
Hume  et  William  Roscoë,  à  dèconsi- 
t/fVvrles  pontifes  de  Rome,  et  tout  le 
oorps  ecclésiastique.  Le  Dante,  Pé- 
trarque, Boccace,et  plusieurs  de  leurs 
compatriotes,  satiriques  du  même 
genre,  en  mêlant  aux  sarcasmes  les 
plus  amers  ,  d'ingénieuses  facéties , 
avaient  laissé  des  impressions  qui 
préparaient  depuis  long- temps  les 
esprits  à  l'éclat  d'une  rupture.  L'iui- 
primerie  nouvellement  découverte , 
et  déjà  toute  puissante  pour  le  mal 
comme  pour  le  bien ,  révélait  les 
abus,  disséminait  la  calomnie,  et 
tendait  a  propager  avec  les  saines 
maximes  les  doctrines  révolution- 
naires jusque  dans  les  dernières 
classes  de  la  société.  Ce  fut  dans  ces 
circonstances  critiques  (  1517),  que 
Léon  X  publia  des  indulgences  par 
tofite  I  Europe,  à  l'occasion  de  la 
croisade  qu'il  voulait  former  contre 
les  Turcs.  Il  suivait  en  cela  l'exemple 
de  ses  prédécesseurs.  Mais  il  fit  an- 
noncer que  l'argent  de  ces  indul- 
gences serait  employé  à  l'achèvement 
de  la  basilique  de  St.-Pierre.  Celte 
destination,  sans  être  répréhensihle 
en  soi,  tendait  à  détourner  le  produit 
des  aumônes,  qui  doit  appartenir  à 
tous  les  pauvres  ,  sans  distinction  , 
conformément  au  dogme  de  TEvan- 
gile  et  à  la  doctruic  de  l'Eglise. 
Avec  le  penchant  au  luxe  et  à  la  ma- 
gnificence, si  naturel  aux  Médicis,  il 
était  facile  de  rendre  odieux  ou  ridi- 
cule l'emploi  de  ces  tributs.  Cepen- 
dant les  indulgences  furent  rcçies  et 
prêchées  sans  réclamation  et  sans 
troubles,  eu  France ,  en  Angleterre , 


LEO  laS 

en  Autriche  et  dans  presque  tous  les 
royaumes  du  Nord.  Mais  dans  une 
petite  ville  de  la  Basse-Saxe,  à  Tom- 
bre  d'un  cloître,  et  sur  les  bancs  de 
l'école,  il  existait  un  de  ces  hommes 
audacieux ,    remuants  ,  ojûniatres  , 
prêts  à  tout  tenter,  à  tout  souflrir, 
que  la  boulé  enhardit,  que  les  op- 
positions irritent,  et  qu'il  est  éga- 
lement dangereux  de   traiter   avec 
trop  de  douceur  on  trop  de  sévérité. 
Tel  était  Lulher,  moine  augustin , 
professeur  de  théologie  dans  l'uni- 
versité de  WillcmLerg,  qui  donna 
la  première  impulsion  à  la  rcvulle 
contre  l'Ej^lise  catholique.  Un  inté- 
rêt de  position  se  joignait  encore  aux 
motifs    personnels  qui    l'animaient 
contre  la  cour  de  Rome.  «  Qui  ne 
»  sait,  dil  Bossuet,  la  jalousie  des 
»  augustins  contre  les  jacoliius  qu'où 
»  leur  avait  préférés  en  cette  occa- 
»  sion?  »  Le  chef  de  ces  derniers, 
nommé  Telzel,  inquisiteur  de  la  foi , 
se  déclara  donc  l'antagoniste  de  Lu- 
ther. En  prêchant  les  indulgences,  il 
défigura  la  doctrine  de  l'Eglise  ;  et 
ses  disciples,  en  exagérant  encore  les 
leçons  du  maître,  poussèrent  les  con- 
séquences   jusqu'à    l'absurdilé.    Ils 
avaient  imaginé  de  mettre  un  tarif 
au  salut  des  âmes  du  purgatoire, 
et  d'imposer ,  en  conséquence ,  des 
aumônes    proportionnelles.  (  F.   le 
Décret  de  la  faculté  de  théologie  de 
Paris,  cité  par  d'Argenlré,D  ipin  , 
et  le  continuateur  de  Fleury.  )  C'est 
aiusique  des  commissavcs  iinpni- 
dents,  suivant  l'expression  de  Gui- 
chardin,  ou  plutôt  des  zélateurs  igno- 
rants, trahissaient  les  intérêts  de  ceux 
qu'ils  prétendaient  servir.  Il  ét.ut  fa- 
cile à  Lu;her  de  prou|W"  les  abus, 
et  même  d'en  obteniiHe  redresse- 
ment;car  jamais  la  cour  de  Rome  n'a- 
vait montré  plus  de  tolérance  et  de 
douceur  :  mais  il  voulait  renverser 


i26  LEO 

l'édifice  par  sa  base  ,  et  de'triiire  la 
chose  dans  son  principe.  Ainsi, 
pour  anéantir  les  indulgences  qui 
renferment  les  pratiques  les  plus  res- 
pectables de  la  religion  ^savoir  ,  Fau- 
inône  ,  la  pénitence,  et  la  prière  ,  il 
entrait  dans  son  système  d'afïaiblir 
le  mérite  des  œuvres,  de  décrier  l'ef- 
ficace du  sacrement , d'attribuer  toute 
la  justification  à  une  certaine  foi  inac- 
tive ,  de  rejeter  le  libre  arbitre  ,  et 
d'établir  une  espèce  de  fatalisme  aus- 
si avilissant  pour  la  raison  humaine 
*pi'injurieux  pour  la  bonté  divine. 
Toutes  ces  prédications  de  Luther 
ne  parurent  d'abord ,  à  Rome  ,  que 
de  vaines  arguties  scolastiques  sur 
des  questions  secondaires ,  où  chaque 
parti  ne  mettait  qu'une  exagéra- 
tion et  une  chaleur  de  vanité  per- 
sonnelles. Le  pape  pouvait  s'y  trom- 
per j  d'autant  mieux  que  Luther  ne 
cessait  de  protester  que  ses  opinions 
«taient  subordonnées  à  l'autorité  de 
l'Église.  Il  écrivait  même  à  S.  S.  dans 
les  termes  les  plus  respectueux.  (  Let- 
tre du  dimanche  de  la  Trinité,  i5i8  )  : 
<i  Donnez  la  vie  ou  la  mort ,  disait-il, 
»  approuvez,  ou  réprouvez,  comme 
»  il  vous  plaira  •  j'écouterai  votre 
»  voix,  comme  celle  de  J.  C.  même, 
»  qui  préside  en  vous ,  et  qui  parle 
»  par  votre  bouche;  et  si  j*ai  mérité 
w  la  mort ,  je  ne  refuse  point  de  mou- 
»  rir.  î)  Tant  d'humilité  et  de  respect 
annonçait  des  dispositions  pacifi- 
ques ,  et  retenait  les  foudres  de 
Kome.Mais  les  faits  qui  s'étaient  pas- 
sés au  milieu  de  ces  hésitations  peut- 
être  trop  indulgentes  ,  avaient  pris 
un  caractère  de  gravité  qui  ne  lais- 
sait plus  lieu  ,ni  à  la  sagesse,  ni  à  la 
dignité  du  pape,  de  garder  aucun  mé- 
îiagement.Tètzel  avait  fait  brûler  pu- 
bliquement les  thèses  de  Luther;  et 
celui-ci  avait  traitéde  même  les  thèses 
4e  Tetzel.  Les  Dominicains  elles  Au- 


LEO 

gustins  avaient  augmenté ,  çhs^cun  d^ 
leur  coté ,  le  nombre  de  leurs  com- 
battants. La  dispute  entre  deux  in- 
dividus ,  était  devenue  ime  guerre 
générale.  L'électeur  de  Saxe  proté- 
geait Luther ,  par  vengeance  contrç 
le  pape  ,  qui  avait  refusé  à  son  fils 
naturel  des  bulles  gratuites  pour  un 
bénéfice;  et  le  peuple  manifestait  hau- 
tement son  affection  pour  les  nou- 
velles doctrines.  Léon  X  résolut  donc 
d'agir  ouvertement  contre  Luther.  Il 
le  fit  citer  à  Rome  ,  par  une  lettre 
datée  du  7  août  i5i8,  dans  le  mo- 
ment où  l'empereur  Maximilien  sol- 
licitait lui-même  des  mesures  contre 
le  perturbateur  de  la  Saxe.  Mais  l'é- 
lecteur écrivit  au  pape  ,  et  obtint  que 
son  protégé  ne  sortirait  point  de  l'Al- 
lemagne ,  et  se  présenterait  à  Augs- 
bourg  devant  le  cardinal  Cajetan,  lé- 
gat de  S.  S.  Luther  comparut  le  12 
octobre  ;  et  deux  conférences  ,  qui 
eurent  lieu  ce  jour-là  même  et  le  len- 
demain, ne  produisirent  aucun  résul- 
tat. Le  légat ,  qui  n'avait  d'autre  mis^ 
sion  que  de  recevoir  la  rétractation 
de  Luther  sur  des  hérésies  évidentes 
et  déjà  condamnées,  l'accueillit  avec 
douceur  (  i  ) ,  mais  exigea  avec  fer- 
meté les  actes  de  docilité  et  de  sou- 
mission que  Luther  avait  promis. 
Celui-ci ,  par  une  inconséquence  dif- 
ficile à  prévoir,  après  avoir  écrit  au 
pape ,  ainsi  qu'on  vient  de  le  voir  , 
fjuil  écouterait  sa  voix  comme  celles 
de  J.  C.  même ,  refusa  de  se  rétrac- 
ter ,  et  même  offrit  de  justifier  tout 
ce  qu'il  avait  avancé ,  soit  dans  ses 
discours  soit  dans  ses  écrits.  Le  légat 
fit  de  vains  efforts  auprès  du  géné- 
ral des  Auguslins ,  qui  avait  accom- 
pagné Luther  ,  pour  obtenir  du  ré- 


(t)  V^oici  les  propres  paroles  de  Luilier  ,  en 
readant  compte  de  cette  entrevue  :  <■  Susceptn» 
»  fui  H  reveiendl«i-.I).  cardinale  legato  sati»  cle- 
»  monter,  ac  propc  reTerentiùs.  »  Luih     Opéra, 


LEO 

fr.irldjre  la  rehactalion  demandée. 
Olui-ciquilla  Augsbourg,  après  en 
.ivoir  appelé  tht  pape  mal  informé , 
au'pape  mieiuv  informé.  Le  légat  res- 
pecta le    sauf-eonduil  dont  Luther 
j'iail  muni  ;  mais  il  adressa  des  plain- 
tes à  l'électeur  de  Saxe  ,  qui  n'en  tint 
aucun  compte.  Il  est  difticilc  de  re- 
connaître, dans  la  conduite  du  Icgat, 
<  es  traits  de  dureté  et  de  hauteur  qui 
lui  ont  e'ic  imputes  par  des  écrivains 
protestants,  et  même  par  des  catho- 
liques. Roscoë  a  ëtë  plus   juste;  et 
son  témoignage  paraît  d'autant  plus 
vrai  ,  qu'il  puise  dans  les  sources  et 
cite  surtout  l'aveu  de    Luther   lui- 
mcrae.  (  Voy.  Vie  et  Pontificat  de 
Léon  JTjlom.  m,  p.  171.)  Au  reste, 
on  ne  jugea  pas  à  propos  y  à  Rome , 
d'user  de  se'vcritë.  Le  souverain  pon- 
life,dil  Roscoë,  ne  devait  point  entrer 
en  controverse  avec  un  argumcnta- 
teurde  collège.  Il  aima  mieuxdëclarcr 
authenliquement  sa  doctrine  et  celle 
de  l'Église   sur  la  question    en  li- 
tige.  C'est  ce  qu'il  (it  dans  sa  bulle 
du  9  décembre  1 5 1 8,  où ,  après  avoir 
rappelé  les  véritables  principes  sur 
la  nature  des  indulgences  ,  il  menaça 
d'excommunication  ,  sans  nommer 
ni   désigner    j^ersonne  ,  quiconque 
croirait  ou  prêcherait  le  contraire. 
Cette  explication  ,  il  faut  en  conve- 
nir,  quoique  très-louable  en  soi ,  était 
tardive  ,  surtout  insulUsante  ,  parce 
qu'elle  ne   sévissait  pas  contre   les 
zélateurs  imprudents  qui  déshono- 
raient ,  par   leur  ignorance  ou  leur 
cupidité  ,   les  grâces  qu'ils   étaient 
chargés  de  dispenser.Ces  considéra- 
tions ne  devaient  pas  influer  sur  la 
conduite  de  Luther  ;  la  voie  lui  était 
ouverte  au  repentir  :  il  préféra  celle 
de  la  résistance;  et,  s'appli<îuantsdns 
motifs  suffisants,  les  menaces  de  cen- 
sures exprimées  dans  la  bulle  ,  il  se 
déclara  appelant  au  futur  concile , 


LEO 


tàt 


toujours  au  mé])ris  de  sa  promesse 
d'obéissance  au  pape   lui   seul  :  et 
cependant  ,  profitant  avec  habUet« 
des  ménagements  (jue  l'on  gardait 
encore  avec  lui ,  ce  fut  à  cette  épo- 
que (  i5i()  )  qu'il  forma  des  atla([uesi 
nouvelles  contre  la  cour  de  Rome , 
dans  les  points  les  plus  importants 
et  les  plus  délicats    qui    pouvaient 
blesser  sou  autorité,  tels  que  le  pur- 
gatoire ,  la  primauté  du  pape,  la  con- 
fession, la  pénitence  ,  les  vœux,  etc. 
Ses    partisans ,  ses  protecteurs  ,  U 
secondaient  puissamment  enpidjliant 
que  la  cour  de  Rome ,  ennemie  des 
lumières  et  des    sciences ,  refusait 
d'entrer  en  lice  avec  lui.  Parmi  ses 
sectateurs ,  l'un  des  plus  distingués^ 
était  Mélanchthon,  qui  rougit  par 
la  suite  de  s'être  associé  avec   un 
novateur ,  dont  néanmoins  il  adop- 
tait en  partie  la  doctrine.  Erasme 
fut  plus  prudent ,  et  refusa  de  pren- 
dre parti  dans  ces  malheureuses  dis- 
putes. Mais,  d'un  autre  côté,  Lulhcr 
trouva  des  antagonistes  redoutables: 
Henri  VIII  écrivit  contre  lui;  l'évê- 
que  de  Misnie  le  censura  vivement  j 
les  universités ,  des  ordres  religieux, 
les  Auguslins  eux-mêmes  s'élevèrent 
contre  leur  confrère ,  et  toute  l'Eu- 
rope retentit  d'un  cri  général  d'in- 
dignation. On  conseillait  à  Léon  X 
les  moyens  les  plus  violents  (  i  ).  Ou 
citait  l'exemple  de  Jean  Hus   et  de 
Jérôme  de  Prague.  Au  milieu  de  ces 
disputes,  Luther  adressait  encore  une 
lettre  de    soumission  au  |>ape;   et 
l'électeur  de  Saxe  ne  rougissait  pas 
de  mentir  à  l'Europe  entière  et  à  sa 
propre   conscience ,  en   écrivant  à 
Léon  X,  qu'il  ne  protégeait  pas  cet 


(1)  Fr«-Pâolo  t'exprime  aiini  :  «  l'iu  oppoti- 
<•  tameiite  Ji  tutti  icriite  cantr^  Martino  Luthero 
»  Fra-GiacomoO(;o(trato  (Hoogttmatan  )  clomi- 
•»  nicano  iuqnisitorei  ilquale  ecortà  il  pont»fic« 
»  a  rourinrer  iVI«rtino  con  farro.  fuaco,  iianiiua* 
(  r»  el  Pontijicai  de  Létn  X,  t.  it,  p.  3;  >.; 


ii8 


LEO 


hérésiarque.  Le  pape  se  de'termina 
enfin  à  des  mesures  plus  directes, 
sans  adopter  la  rigueur  qu'on  lui  sug- 
ge'rait.  Il  s'adressa  à  Charles-Quint , 
et  le  pria  de  faire  arrêter  Luther. 
Charles  s'y  refusa,  parce  qu'il  ne  vou- 
lait point  déplaire  à  l'électeur  ,  au- 
quel il  était  redevable  de  sa  voix  pour 
l'Empire,  et  répondit  au  pape,  que 
n'étant  encore  que  roi  des  Romains , 
il  ne  lui  appartenait  pas  d'exercer  un 
tel  acte  d'autorité.  Léon  X  fut  donc 
obligé  d'avoir  recours  aux  armes 
spirituelles  ;  et,  dajis  sa  bulle  du  i5 
juin  i5'20 ,  il  anathémalisa  les  ^i  ar- 
ticles de  la  doctrine  de  Luther ,  le 
somma  de  comparaître  à  Rome  dans 
l'espace  de  soixante  jours ,  et  enfin 
l'excommunia,  lui  et  tous  ses  adhé- 
rents. Il  semblait  que  celui-ci  n'at- 
tendît qu'une  telle  résolution  pour 
éclater  et  se  livrer  à  toutes  les  vio- 
lences. Son  emportement  alla  jus- 
qu'au délire.  Il  maudit  le  pape  ^ 
il  exhorta  à  le  tuer  ,  accusa  le 
ciel,  appela  la  vengeance;  et  dans 
ce  ramas  d'injures,  de  blasphèmes 
et  de  menaces ,  on  ne  sait  ce  qu'il 
y  eut  de  plus  grossier  et  de  plus 
ridicule.  Enfin  ,  il  mit  au  jour  son 
livre  de  la  captivité  d*^  Babylone  , 
dans  lequel  il  déploya  toute  la 
perversité  de  sa  doctrine.  Il  y  ré- 
duit les  sacrements  à  trois,  savoir  : 
le  baptême  ,  la  pénitence  et  le  pain. 
Il  termine  en  attaquant  le  dogme 
de  la  transsuLstanliation  ,  qu'il  au- 
rait bien  voulu  ancantir  entièrement, 
ainsi  qu'il  l'exprime  dans  sa  lettre 
à  ses  disciples  de  Strasbourg  ;  ce  qui 
fut  par  la  suite  un  sujet  de  division 
irréconciliable  entre  lui  et  Zuin- 
gle,Melanchlhon  ,  OEcolampade,  et 
enfin  l'école  de  Calvin.  Léon  X, 
de  son  coté  ,  ne  négligeait  rien 
pour  l'exécuiion  de  sa  bulle.  Il 
envoya    les    nonces  Alexandre    et 


LÉO 

Caraccioli  vers  l'électeur  de  Saxe^ 
afin  d'obtenir  qu'il  imposât  silence 
à  Luther  ,  qu'il  le  fît  enfermer  ,  ou 
que  du  moins  il  le  chassât  de  ses 
états.  L'électeur  ne  dorlna  que  des 
réponses  évasives.  Charles-Quint , 
sollicité  de  nouveau  par  le  pape , 
parut  y  mettre  plus  de  vigueur  ;  il 
indiqua  une  diète  à  Worms ,  où  Lu- 
ther comparut.  Ses  erreurs  y  fu- 
rent condamnées;  mais  on  respecta 
sa  personne.  Ses  partisans  n'en  fei- 
gnirent pas  moins  de  craindre  pour 
sa  sûreté.  Il  fut  enlevé ,  comme  il 
retournait  en  Saxe,  et  caché  jusqu'au 
moment  où  l'on  jugea  à  propos  de 
le  faire  reparaître.  Toutes  ces  entre- 
prises manquées  ne  servirent  qu'à 
redoubler  son  audace.  Cependant  les 
bulles  de  Rome  avaient  excité  le  zèle 
des  catholiques  dans  toute  l'Allema- 
gne ,  excepté  en  Saxe.  Les  universi- 
tés de  Cologne  et  de  Louvain  firent 
brûler  publiquement  les  écrits  de  Lu- 
ther. On  usa  de  la  même  rigueur  à 
Trêves  et  à  Maience  :  par  représail- 
les ,  Luther  fit  brûler,  à  Wittemberg, 
les  bulles  de  Léon  X  et  les  décrétalcs 
de  ses  prédécesseurs.  Pour  rendre 
celles-ci  odieuses ,  on  en  avait  al- 
téré le  texte  ou  exagéré  les  doctri- 
nes {Fojez  le  continuateur  de  Fleu- 
ry,  tome  xxv,page  Q'-j'i  );  et  mal- 
heureusement pour  la  cour  de  Rome, 
quelques  actes  de  certains  papes 
autorisaient  ces  interprétations  mal- 
veillantes. Les  esprits  étaient  trop 
irrités  pour  démêler  le  faux  et  ie 
vrai  ;  car  la  haine  n'examine  rien. 
Au  milieu  de  toutes  ces  agitations, 
la  France  ne  resta  pas  indiiïè'rente: 
quciqu'eile  eût  des  reproches  à  faire 
à  la  cour  de  Rome  ,  elle  ne  s'en 
prononça  pas  moins  avec  fermeté 
contre  les  erreurs  de  Luther.  L'u- 
niversité de  Paris  émit  un  déci'et 
énergique  contre  les  nouvelles  doc- 


LEO 

tunes.  Leoii  \  miillipliait  ses  aiia- 
thèmcs(|ui('lairiiltk'j)uislon^-U'ni]>s 
des  armi'S  iimlilcs,  et  (|ui  (levaient 
être  les  ilernit  r^  actes  de  son  aulo- 
.  rite  dans  cette  funeste  querelle  dont 
la  destinée    était  de    se   prolonger 
loug-temps  encore  après  lui.  (  yoy^ 
LuTDLR.  ) — Reytanralion  des  lettres 
€t  des  sciences.  —  Dans  les  temps 
antérieurs  ,  on  avait  pu   remarquer 
cette  impatience  générale  de  sortir 
des  ténèbres  de  l'ignorance  et  de  la 
barbarie.  Les  croisades  ,  en  ouvrant 
de  nouvelles  routes  commerciales, 
avaient  commence  celte  mémorable 
révolution  :  la  chute  de  l'empire  grec 
l'acheva,  en  chassant  tous  les  savants 
en  Italie.  Cette  tendance  des  esprits 
Ttrs  le  progrès  des  lumières  et  de 
la  civilisation ,  ne  demandait  qu'à 
ctre  protégée  pour  recevoir  tous  ses 
dévelopjKMnents.  On  se  jetait  avec 
avidité    sur  les    ouvrages  des  an- 
ciens ,  dont  les  manuscrits  venaient 
enfin  d'être  retrouvés.  C'était  en  Ita- 
lie surtout  que  ces  premiers  elForts 
avaient  été  tentés  avec  quelque  suc- 
cès. Des  littérateurs  ,   des  savants  , 
des  artistes  du  premier  ordre  étaient 
disséminés  dans  la  plupart  des  gran- 
des villes  :  Rome ,  Naples  ,  Florence  , 
Ferrare,  Venise ,  Milan  ,  possédaient 
des  hommes  de  génie  ;  mais  les  dis- 
cordes civiles,  les  guerres  extérieures 
les  privaient  trop  souvent  de  cette 
tranquillité  si  nécessaireà  l'étude  ,  et 
de  ces  communications  si  utiles  aux 
talents.  Léon  X  conçut  le  projet  de 
rassembler  dans  un  seul  foyer  tous  ces 
rayons  épars,  et  déformer  un  dépôt 
immense  ,  où  les  éléments  de  toutes 
les  connaissances   humaines  ,  con- 
servés avec  soin,  deviendraient  unrf 
êouree  intarissable  de  liuuières  et  d'é- 
mulation. Ce  fut  dans  ce  dessein  qu'il 
rétablit  le  gymnase  ou  l'université, 
à  laquelle  il  rendit  ses  revenus,  qui 

XXIV. 


LEO  i  ^ 

avaient  depuis  long  -temps  été  em- 
ployés à  d  autres  usages.  Il  y  appela 
des  professeurs  de  tîntes  les  parties 
de  l'Europe  :  la  théolojiie ,  le  droit 
canon,  le  droit  civil,  la  médec.ne^ 
lu  philosophie  morale ,  la  logique  , 
la  rhétoriipic  ,  les  mathématique»  , 
eurent  des  chaires  richement  dotée* 
parle  pape  lui-même.  Il  établit  des 
privilèges  pour  les  étudiants.  La  lan- 
gue grecque  futl'objet  de  ses  premiers 
soins.  Jean  de  Lastaris  (pi'il  fit  venir 
de  Venise,  et  Marc  Musurus ,  lui  ame- 
nèrent  une  colonie  de  jeunes  hellé- 
nistes, qtd  servit  a  propager  le  goût 
de  cette  antique  littérature,  sans  la- 
quelle il  n'y  en  a  point  d'autres  daas 
les   nations   modernes.   Bientôt  les 
presses  d'Aide  Manuce  produisirent 
une  édition  des  œuvres  de  Platon 
surveillée  par  Marc  Musurus,  qui  fut 
nommé  archevêque    de    Malvoisie. 
Homère  et  Sophocle  furent  exhumée 
de  l'obscurité  où  ils  restaient  ense- 
velis. L'exemple  du  pape  enflamma 
le  zèle  des  particuliers.  Un   simple 
négociant,  nommé  Chigi ,  surpassant 
tous  ses  émules  par  sa  munilicence, 
acheta   une   maison   superbe    dan» 
le  quartier  de  ïranstevère  ,  et  en  fit 
un  muséum  orné  des  tableaux  et  des 
statues  des  plus  grands  maîtres.  Il 
perfectionna  aussi  l'imprimerie  grec- 
que. Pindarc  et  Théocrite  parurent 
par  ses  soins ,  et  sortirent  des  presses 
de  Zacharie  Gallicrgi ,  qui  rivalisa 
bientôt  de  talents  avec  Aide  Manuce. 
Léon  X  nomma,  pour  son  bibliothé- 
caire particulier,  Favorinus,  qui  s<» 
montra  constamment  digne  de  sa 
confiance  et  de  son  estime.  D'auti'es 
savants  ,  tels  que  Garleromaco  (  P^. 
FoRTEGUtAi  )   et  Bolzani ,    p«jrta- 
gèrent  encore  l'amitié  et  les  bienfaits 
du  pontifç.  La  langue  latine  attira 
également  son  attention  et  ses  libé- 
ralités. Il  acheta  cinq  cents  scqinus 

9 


tSo 


LEO 


un  exemplaire  des  cinq  premiers 
tivres  de  Tacite  ,  qui  furent  lires 
de  l'abbaye  de  Corwey,  enWest- 
phalie,  et  que  lui  apporta  Ange  Ar- 
comboldo.  Il  en  confia  l'impression  à 
Bëroald  le  jeune  ,  par  un  bref  qui 
prononçait  contre  tout  contrefacteur 
la  peine  d'excommunication  latœ 
sententiœ,  une  amende  de  deux  cents 
ducats  et  la  confiscation  de  l'ouvrage. 
Un  imprimeur  imprudent,  nomme' 
Minutianus ,  encourut  ces  peines  ,  et 
fut  oblige'  de  transiger  avec  Béroald. 
Le'on  X  prote'gea  également  l'e'tude 
des  langues  orientales,  pour  lesquelles 
il  employa  les  veilles  et  les  talents  de 
Tbe'sëe  Ambrosio  :  la  langue  hébraï- 
que fut  enseigne'e  par  Agacio  Gui- 
dacerio ,  et  par  Santés  Pagnini,  qui 
traduisit  les  livres  saints  ;  une  édition 
polyglotte  du  psautier ,  la  traduction 
d'un  manuscrit  arabe,  intitulé PMo- 
sophie  mystique  d'Aristote ,  furent 
aussi  le  fruit  des  veilles  de  ces  ^a^ 
vantsérudits.La  poésie  nationale  s'en- 
richit de  tous  les  trésors  de  la  litté- 
rature classique  ;  ce  fut  surtout  dans 
la  versification  latine  que  s'exercè- 
rent les  écrivains  du  premier  mérite; 
et  quelques-uns  d'entr'eux  obtinrent 
«ne  double  couronne  dans  des  pro- 
ductions en  l'une  et  en  l'autre  langue. 
Il  serait  impossible ,  dans  le  court  es- 
pace d'un  article ,  d'en  donner  même 
la  plus  simple  analyse  :  c'est  surtout 
dans  les  excellents  ouvrages  de  Tira- 
boschi ,  de  William  Roscoë ,  et  de 
feu  M.  Ginguené,  qu'il  faut  la  cher- 
cher, indépendamment  de  la  men- 
tion exacte  qui  se  trouve  dans  la 
Biographie  Universelle ,  a  mesure 
que  ces  noms  célèbres  arrivent  à 
leur  rang  (  i  ).  Des  femmes  de  la  plus 

(i)  Accolti  {  Bernard  )  —  Alamanni  (  Louis) 
—  Arioste  (L')  —  ArsîMi  (Fiancoisi  JL  Auau- 
reUo  (  Jean  -  Aurèl^)  —  Barah'allo  de  Gaete 
-.  Bembo  —  Benù  (  FiahcoU  )  __  Brauiloliai 
VliaphaSi  j  ~  Braajano  —  FUruini»  (  Anad) 


LEO 

haute  distinction  partagèrent  ces  pal- 
mes littéraires  (i).  De  plus  hautes 
sciences  occupèrent  bientôt  les  es- 
prits. Les  ouvrages  d'Aristote  et  de 
Platon  trouvèrent  des  commenta- 
teurs éclairés.  On  étudia  la  philo- 
sophie rationnelle  :  on  rechercha  les 
principes  de  la  philosophie  morale. 
La  philosophie  qui  s'applique  aux 
études  de  la  nature ,  fit  aussi  de  sen- 
sibles progrès  :  l'astrologie  judiciaire 
commença  à  perdre  de  son  crédit , 
et  à  s'effacer  devant  les  calculs  d'une 
astronomie  méthodique  :  le  système 
de  Copernic  fut  dès-lors  soupçonné 
par  Gelio  Galcagnini ,  qui  tenta  au 
moins  de  démontrer  le  mouvement 
diurne  de  la  terre.  Ces  nouvelles  dé- 
couvertes inspirèrent  à  Léon  X  le 
dessein  de  réformer  le  calendrier  ; 
mais  le  succès  en  était  réservé  à 
un  autre  temps.  (  Voyez  Grégoire 
Xin.  )  L'art  de  la  navigation ,  qui 
devait  tant  de  gloire  à  deux  Ita- 
liens ,  Christophe  Colomb  et  Amé- 
ric  Vespuce,  venait  d'étendre  l'em- 
pire des  Européens  sur  la  moitié  du 
globe ,  jusque  -  là  restée  inconnue. 
Cette  grande  révolution  ne  pouvait 
être  indifférente  à  un  homme  tel  que 
Léon  X.  Il  n'y  prit  pas  seulement 
unepartdevanité,  en  faisant  des  con- 
cessions imaginaires  aux  princes 
conquérants  ,  à  l'exemple  de  ses  pré- 
décesseurs. (  Voyez  Alexandre 
VI  et  Jules  II.  )  Il  fit  un  plus  géné- 
reux emploi  de  sa  puissance ,  eu  pro- 
tégeant les  malheureux  Indiens  con- 
tre la  cruelle  avidité  des  Espagnols. 


—  Folengi    (  Théophile)  —  Fraca«tor    (Jean  ) 

—  Gorizio  (  Jean  )  —  Maroni  (  André)  -.- 
Moitza  —  RIozzarello  (  Jean  )  —  Navaççer» 
(  André  )  —   Querno   (  Camille  )   —  Kuccelial 

—  Saclolet  —  Sannazar  —  Silvestri  (  GniJo 
Poiiumo  )  _  Tebaldo  —  TrisHiio  —  Vid» 
(  Jérôme  ). 

(i)  Aralos  (  Constance  d')  —  Arragon  (Tnl  - 
lie)  — Baltifua  (  Laure  )  —  Colonne  (  Victoire) 

—  Gambara  (  Vérouicm»  )  —  Sti.nij>ra  (  Ga*-. 
para  ). 


LEO 

Les  Dominicains  s'élevaient  avec 
force  contre  les  persc'cutions  et  les 
outrages  dont  on  accablait  ces  peii- 
j)lcs  ignorants  et  faibles.  Les  Fran- 
ciscains ,  au  contraire,  pensaient  que 
l'espèce  de  servitude  à  laquelle  on 
les  avait  soumis  ,  était  le  meilleur 
moyen  de  les  tirer  des  ténèbres  de 
l'idolâtrie.  La  cause  ayant  cte  portée 
à  Rome ,  Léon  X  ,  animé  du  même 
zèle  que  le  vertueux  Las -Casas ,  se 
déclara  le  protecteur  des  droits  de 
la  nature  et  le  vengeur  des  opprimés. 
Ses  libéralités  animaient  partout  les 
1^  travaux  des  littérateurs  et  des  sa- 
Wm  Tants.  On  est  fâché  seulement  de  voir 
dans  la  liste  de  ses  dons  le  licencieux 
Arctin  ,  qui  déchira  et  caressa  suc- 
cessivement tous  les  princes  auxquels 
il  vendit  ses  talents,  osa  aspirer  au 
chapeau  de  cardinal ,  et  reçut  des  ré- 
compenses dont  les  pi  us  beaux  génies 
depuis  Homère  n'avaicut  pas  obtenu 
la  moitié.  Léon  X  n'oublia  point  de 
recueillir  dans  des  dépots  publics 
tous  les  monuments  dont  il  avait  en- 
richi son  siècle.  Ce  projet  avait  été 
conçu  dès  le  temps  où  il  n'était  en- 
core que  cardinal.  La  bibliothèque 
commencée  par  ses  soins ,  était  des- 
tinée pour  Florence ,  sa  patrie.  Il 
suivit  ce  projet  avec  ardeur;  et  l'éten- 
due qu'il  donnait  à  cet  établissement 
l'obligea  de  faire  construire  un  édi- 
fice particulier  ,  dont  il  confia  l'exé- 
cution à  Michel-  Ange.  Telle  fut  l'o- 
rigine de  la  bibliothèque  Lauren- 
ticnne,  dont  la  garde  fut  confiée  à 
Laurent  Parmenio  et  à  Fausto 
Sabeo.  Celle  du  Vatican  jouit  des 
mêmes  avantages  ,  et  fut  dirigée 
par  Fedro  Inghirami  ,  Philippe 
Bëroald,  Zenobio  Acciaduoli  et  Jé- 
rôme Aléandre.  Les  beaux-arts  s'em- 
pressèrent à  l'envi  d'apporter  le  tri- 
but de  leurs  chefs-d'auvre  dans  le 
«anciuaire  des  sciences.  Léon  X  en- 


LEO  t3t 

conragea  la  recherche  des  antiques 
qui  peuvent  seules  fixer  les  règles  dii 
bon  goût  par  l'imitation  de  la  belle 
nature.  Il  composa  lui-même,  pour 
la  découverte  d'une  statue  de  Lu- 
crèce, une  pièce  de  vers  qui  est  raj)- 
portée  par  Roscoè.  Le  palais  du  Va- 
tican fut  décoré  ])ar  les  tal)leaux  et 
les  fresques  de  Raphaël,  qui  était 
alors  dans  toute  la  vigueur  de  son 
génie.  Michel-Ange  orna  de  ses  plus 
beaux  ouvrages  la  chapelle  Sixline, 
et  Léon  X  le  chargea  de  rebâtir  l'é- 
glise de  Saint -Laurent  à  Florence. 
Les  élèves  de  ces  hommes  de  génie 
devinrent  dignes  de  leurs  maîtres  (i). 
La  gravure  au  burin  et  la  gravure  à 
l'eau-forte  naquirent  dans  le  même 
temps  pour  multiplier  les  subli- 
mes illusions  de  la  peinture.  Léon 
X  aimait  la  musique  j  il  en  con- 
naissait parfaitement  la  théorie. 
Son  oreille  était  juste,  et  sa  voix 
mélodieuse.  Le  chant ,  dans  l'église 
romaine ,  ajoute  infiniment  d'éclat  à 
ses  cérémonies  :  c'est  pour  cette  rai- 
son que  Léon  encourageait  l'élude 
de  l'art  musical.  Deux  professeurs 
distingués  dans  ce  genre  ,  Gabriel 
Merino  et  Brançois  Paoloso  ,  furent 
récompensés ,  l'un, par  l'archevêché 
de  Bari ,  et  l'autre,  par  un  titre  d'ar- 
chidiacre (  1  ).  Pour  que  rien  ne 
manquât  à  la  gloire  qwi  environnait 
Léon  X,  les  historiens  les  plus  célè- 
bres écrivirent  de  son  temps  :  Ma- 
chiavel ,  et  Giiichardiu  ,  ont  sur- 
tout illustré  celte  époque  ;  et  l'Italie 
citera  toujours  avec  orgueil  leurs 
immorteiles  productions.  Tant  d'é- 
clat ,  d'agréments  et  de  prospérité , 


(i)  Fanl  C«r.>v«ose,  Jiiiei  Boroain,  I.iicc« 
cl«lla  Ri.bhid  ,  Amir'i  Coiitiicci  ,  Fraiicia  Bips'O» 
AuA'.c  Jcl  Sario,  Jncquir»  île  l'oatoi  me.  {f^ojr. 
Ion»  cet  artic!'*!  à  leiir*  l«Mti«)>.  ) 

(a  U.icîo  Baldini,  Antlro  Maiiteon» ,  Marc. 
Antoine  Raimontli  ,  loul  li  a  (.rrinier»  ioaJaUur* 
de  c«l  art.  (  ^v^.  laura  anicle*.  ) 


i32  LEO 

avaient  fait  de  la  capitale  du  monde 
chre'tien  ,  l'asile  de  la  paix  ,  et  le 
rendez-vpus  de  tous  les  hommes  ai- 
mables et  instruits ,  dont  les  ou- 
vrages ou  les  entretiens  faisaient 
l'admiration  des  connaisseurs ,  et  le 
charme  de  la  société'.  Le'on  X  aimait 
à  se  trouver  parmi  eux.  Les  sujets 
les  plus  se'rieux,  les  matières  les  plus 
graves  ,  il  les  traitait  avec  la  dignité 
convenable  ;  mais  d'autres  fois  aussi 
il  s'abandonnait  à  des  conversa- 
tions frivoles,  et  quelques  censeurs 
lui  ont  reproché  un  penchant  assez 
bizarre  pour  les  bouffonneries.  C'é- 
tait un  goût  de  famille,  qui  n'avait 
point  déshonoré  ses  ancêtres  ;  mais , 
dans  un  pape  ,  cette  légèreté  l'ex- 
posait aux  critiques  les  plus  sévères. 
Cependant  il  soutenait  parfaitement 
la  plaisanterie ,  et  s'en  tirait  avec 
grâce.  Un  poète  lui  ayant  récité  des 
vers  latins  à  sa  louange,  il  répondit 
sur-le-champ  par  le  même  nombre 
et  les  mêmes  terminaisons.  Le  poète, 
piqué ,  s'écria  à  son  tour  : 

Si  tibi  pro  numeris  numéro»  fortana  deditset  , 
Won  eiset  capiti  tant»  corona  tuo. 

Le  pape  ,  loin  de  paraître  offensé, 
ouvrit  sa  bourse ,  et  récompensa  le 
poète  avec  sa  libéralité  accoutumée. 
Cette  anecdote  ,  et  celle  de  l'archi- 
poète  Querno ,  attestent  que  dès-lors 
les  improvisatori  étaient  en  vogue , 
et  qu'on  aimait  à  s'exercer  dans  un 
genre  qui  étonna  d'abord,  mais  qui , 
peut-être,  est  moins  la  preuve  que 
l'abus  du  talent.  Léon  X  provoquait 
lui-même  ces  luttes  ingénieuses  au 
jnilieu  des  repas  splendides  qu'il 
donnait  aux  gens  de  lettres,  et  dont 
on  n'a  pas  manqué  de  lui  reprocher 
la  profusion,  la  délicatesse  et  la 
familiarité.  Cependant  il  était  très- 
sobre  lui-même,  ainsi  que  l'assurent 
plusieurs  écrivains  dignes  de  foi  ;  il 
jcûiaait  assez  fréquemment.  On  fai- 


LEO 

sait  des  lectures  pendant  son  dîner? 
ou  bien  il  traitait  lui-même  des  su- 
jets ,  non  pas  légers  ,  mais  d'une 
haute  importance,  et  qui  n'exigeaient 
pas  moins  de  sagacité  que  d'érudi- 
tion. (  Math.  Hcrculan.  ap.  Fabron. 
in  adn.  83.  )  Tel  est  le  témoignage 
d'un  homme  qui  avait  vécu  dans 
l'intimité  du  pontife  ;  et  ce  qu'il  at- 
teste doit  au  moins  faire  suspendre 
un  jugement  trop  rigoureux.  —  La 
mort  de  ce  pape  fut  un  de  ces  évé- 
nements inopinés ,  dont  la  cause  ^ 
n'étant  pas  parfaitement  connue , 
ouvrit  le  champ  aux  phis  sinistres 
conjectures.  Ce  fut  à  Malliana  ,  sa 
maison  de  plaisance,  que  Léon  X 
reçut  la  nouvelle  de  la  conquête  du 
Milanez.  Il  revint  sur-le-champ  à 
Rome,  le  24  novembre  iSai  ;  il 
indiqua  ,  pour  le  27 ,  un  consis- 
toire, qui  n'eut  pas  lieu,  parce  qu'il 
s'était  senti  indisposé.  Les  méde- 
cins déclarèrent  que  c'était  un  rhume 
qu'il  avait  gagné  à  la  campagne  :  le 
dimanche  ,  i  ^r.  décembre  ,  il  ex- 
pira, sans  avoir  pu  être  administré. 
Il  n'y  a  point  d'autres  détails  authen- 
tiques sur  un  tel  événement.  On  a 
supposé  ,  très-ridiculement ,  que  ce 
fut  l'excès  de  la  joie  qui  le  fit  mou- 
rir, lorsqu'il  apprit  la  nouvelle  de  la 
victoire  ,  sans  réfléchir  qu'un  efiêt 
aussi  rare ,  et  qui  ne  frappe  que  des 
êtres  faibles  ,  doit  être  subit  ,  et  ne 
se  prolonge  point  pendant  l'espace 
de  huit  jours.  On  a  aussitôt  cherché 
une  autre  cause;  et  le  soupçon  d'em- 
poisonnement s'est  établi  dans  l'esprit 
de  la  multitude.  On  arrêta  l'échan- 
son  du  pape  ,  qui  fut  mis  en  liberté, 
faute  de  preuves.  Le  maître  du  palais, 
Paris  de  Grassis,  dit  dans  son  jour- 
nal ,  qu'ayant  trouvé  le  corps  extrê- 
mement enflé ,  il  l'avait  fait  ouvrir  , 
avec  la  permission  du  consistoire , 
et  que  les  médecins  avaient  déclaré 


LEO 

<ju.'  l,'  j).»j)e  calait  mon  rmpoisonne. 
\\  illiarn  Hoscoc  paraît  ]>oiu'licr  vers 
co\t€  opinion,  (hioi  qu'il  m  soit  ,  le 
cardinal  fie    Mcdicis  ,   depuis    Clë- 
jnont  VII,  fit  cesser  toutes  les  pour- 
suites judiciaires  ;  et  ce  fut  lui  qui 
annonça  la  mort  du  papu   à   Henri 
V III ,  par  »nie  lettre  dont  l'original 
est  conserve  dans  les  manuscrits  Cot- 
toniens  du  musée  Britannique.  (  F. 
Roscoc  ,  tome  IV,  p»p;e  35  ï.  )  On 
voulut  deviner  les  auteurs  secrets  de 
cet  attentat  suppose.   Une  rumeur 
sourde  accus  • ,  tantôt  le  duc  d'Ur- 
bin, tantôt  le  plus  loyal  des  hommes, 
le  plus  généreux  des  princes ,  Fran- 
çois I*''".  De  toutes  ces  suppositions  , 
il  faut  conclure  que  les  observations 
physiologiques  de  ce  temps  -  là  n'é- 
taient pas  assez  avancées  pour  donner 
des  lumières  certaines  sur  un  événe- 
ment qui  peut-être  aujourd'hui  n'of- 
frirait rien  que  de  naturel.  Le  tom- 
beau de  Léon  X,  placé  dans  l'église 
de   Sainte -Marie   de   la  Minerve, 
avait  été  esquissé  par  Michel-Ange, 
continué  par  Alphonse  Lomliardi, 
et  fut  achevé  par  Baccio  Bandinelii: 
la  statue  est  de  Raphaël  Monte-Lu- 
po.  La  célcbriîé  qui  s'est  attachée 
à  la  mémoire  de  ce  pontife,  a  fait 
rechercher  avec  curiosité  tout  ce  qui 
constituait  ses  qualités  phvsiques  et 
morales.   Les  traits  de  son  visage 
nous  ont  été  transmis  par  le  pinceau 
de  Raphaël,  et  c'est  un  des  plus  beaux 
ouvrages  de  ce  grand  pcintre.LéonX 
était  d'une  stature assczhaute.il avait 
de  l'embonpoint ,  mais  sans  excès. 
S&  tête  était  un  peu  grosse  ,  et  ses 
membres  un  peu  minces  pour  le  reste 
de  sa  taille  ,  quoique  élégamment 
tournés.  Ses  mains  étaient  blanches 
€t  délicates  ;  il  se  plaisait  à  les  orner 
de  pierres  précieuses.  Son  teint  était 
haut  en  couleur  ;  ses  yeux  étaient 
t;ros  cl  kaillauls  •  son  organe  était 


LKO 


M 


doux  et  sonore  ;  il  y  av.iit  de  la  di- 
gnité dans  sa  personne  ,  de  la  grâce 
et  de  r:»niénitédans  ses  manières,  li 
était  habituellement  affable  ;  mais  ^ 
quelquefois,  son  goût  passionné  pour 
la  chasse ,  jetait  sur  son  himieur  des 
nuages  passagers,  lorsque  le  ])l.'iisir 
ou  le  succès  n'avait  pas  répondu  à 
son  attente.  Si  l'on  considère  tant 
■de  choses  importantes ,  méditées  ^ 
entreprises  ,  exécutées  dans  le  court 
espace   d'un  pontificat  qui  n'a  pas 
duré  neuf  ans ,  on  ne  peut  s'cm- 
pcchcr  de  concevoir  la  plus  haute 
idée  du  caractère  qui  présida  à  ces 
grands   intérêts  ,   dont  le  ressort  , 
placé  dans  un  point  de  l'Italie, donna 
le  mouvement  à  l'Europe  entière. 
Formé  de  bonne  heure  au  grand  art 
de  gouverner  ,    Léon  X   ne  man- 
qua point  à  sa  destinée.  Cependant 
s'il  possédait  dan'>  un  degré  éminent 
les  qualités  que  le  «nonde  admire , 
on  eût  désiré  d'autres  vertus  dans^ 
le  chef  suprême  de  la  religion.  Au 
reste,  dans  sa  conduite  extérieure, 
il  se  montra  rigide  observateur  de» 
bienséances.  On  a  déjà  vu  qu'il  ai- 
mait les  Cérémonies  du  culte   ca- 
tholique; quelque  longues,  quelque 
fatigantes  {pi'elles  fussent,  il  se  fai- 
sait un  devoir  de  n'y  jamais  man- 
quer.   Ses    ornements    pontificaux 
étaient  de  la  plus  grande  magnifi- 
cence. Il  mettait  dans  la  célébration 
des  offices  une  pompe  ,  une  dignité , 
dont  il  se  plaisait  à  régler  lui-même  les 
détails.  Ses  mœurs  privées  ont  été  vi- 
vement décriées  par  des  ennemis  de 
sa  croyance ,  et  par  des  auteurs  tels 
que  Paul  Jovc ,  si  connus  pour  leur 
propre  turpitude  qu'on  doit  rougir  de 
les  citer.  Léon  X  a  trouvé  des  dé- 
fenseurs parmi  des  biographes  mo- 
dernes, tels  que  Matheus  Ilerculanin» 
et   Fabroni  ,  que  nous  avons  déjà 
cité;  Fra-Paolo  et  Pallaviciui  j  iiu'uu 


iS4  Ï^EO 

ne  peut  pas  soupçonner  de  vains  me'- 
nagements  ,  ont  parle'  de  ce  pape 
avec  une  sorte  de  sévérité  ,  mais  ne 
ï'ont  point  accusé  de  ces  honteux 
dérèglements  dont  on  a  voulu  flé- 
trir sa  mémoire.  Enfin  ,  un  auteur 
moderne  ,  calviniste  anglican  ,  aussi 
distingué  par  la  vaste  étendue  de  sou 
érudition ,  que  par  l'exactitude  de  ses 
recherches  et  l'imparlialité  de  ses  ju- 
gements ,  après  avoir  balancé  toutes 
les  opinions  ,  et  discwlé  le  mérite  de 
tous  les  historiens  ,  se  prononce  en 
ces  termes  :  «  II  nous  reste  les  témoi- 
»  gnages  les  plus  satisfaisants  sur  la 
»  pureté  de  mœurs  qui  distingua  ce 
^  pape  ,  tant  dans  sa  première  jeu- 
»  nesse  ,  que  lorsqu'il  parvint  au 
»  souverain  pontificat  •  et  l'exemple 
i)  de  chasteté  et  de  décence  ,  qu'il  a 
»  donné ,  est  d'autant  plus  remar- 
»  quable  qu'il  était  plus  rare  dans  le 

V  siècle  où  il  a  vécu.  Mais  en  reje- 

V  tant  des  accusations  scandaleuses 
»  et  sans  fondement ,  on  doit  con- 
»  venir  que  les  occupations  aux- 
•»  quelles  se  livrait  Léon  X ,  et  les 
»  amusements  qu'il  prenait ,  n'étaient 
»  pas  toujours  conformes  à  sa  haute 
»  dignité.  y>  Ainsi  s'exprime  W.  Ros- 
coë,  dont  la  sagesse  et  la  bonne  foi 
forment  une  autorité  imposante. 
La  juste  mesure  qu'il  a  constam- 
ment observée  entre  les  excès  de 
la  louange  et  du  blâme,  ne  se  trouve 
jamais  que  dans  un  historien  pas- 
sionné pour  la  vérité.  C'est  en  exa- 
minant ainsi  Léon  X ,  qu'on  doit  le 
juger  sous  tous  les  rapports  de  sa 
conduite  extérieure  et  secrète.  Sa 
politique  fut  habile ,  mais  remplie 
d'arfifice.  En  animant  la  discorde 
entre  les  maisons  de  France  et  d'Au- 
triche ,  il  tenta  de  les  chasser  toutes 
deux  de  l'Italie.  Son  but  apparent 
était  l'afïranchisscmenl  de  son  pays  ; 
«ou  motif  réel  fut  l'élévation   de 


LEO 

sa  famille.  Son  gouvernement  était 
ferme ,  et  sa  justice  fut  sévère.  Mais 
ses  ennemis  étaient  ceux  de  l'état.  Il 
pardonna  aux  premiers  ,  qui  conspi- 
rèrent contre  lui  j  et  tous  les  autres  , 
excepté  l'exécrable  Baglioni ,  furent 
punis  par  des  voies  légitimes.  Pres- 
que tous  les  actes  de  son  pontificat 
ont  trouvé  beaucoup  de  détracteurs 
et  très-peu  d'apologistes.  Quant  au 
concordat ,  il  était  nécessaire  ;  il  a 
été  jugé  par  trois  cents  ans  d'exécu- 
tion. Mais  la  publication  intempes- 
tive des  indulgences  fut  une  faute 
capitale  :  leur  destination  était  in- 
certaine; leur  distribution  fut  en- 
core plus  répréhensible  ,  et  les  abus 
qu'il  y  laissa  introduire  portèrent 
un  préjudice  irréparable  à  la  jouis- 
sance des  clés.  C'est  un  problème 
de  savoir  s'il  mit  trop  de  modéra- 
tion ou  trop  de  sévérité  dans  sa  con- 
duite avec  Luther.  Les  protestants 
et  les  catholiques  l'ont  accusé  tour  à 
tour  en  sens  contraire.  William  Ros- 
coë  en  conclut  que  ces  contradictions 
elles-mêmes  le  justifient.  11  est  cer- 
tain du  moins  que  ses  successeurs  ne 
furent  pas  plus  heureux.  (  Vojez 
Luther.  )  La  protection  des  lettres  , 
la  faveur  qu'il  accorda  aux  jjrogrès 
des  connaissances  humaines  ,  lui  ont 
acquis  une  gloire  plus  éclatante  et 
moins  contestée.  Léon  X  eut  pour 
successeur  Adrien  VI.  D-s. 

LÉON  XI  (  Alexandre  -  Octa- 
viEN  ) ,  cardinal  de  Florence ,  de  la 
maison  de  Médicis ,  employé  par 
Clément  VIII ,  son  prédécesseur , 
dans  les  négociations  les  plus  impor- 
tantes ,  estimé  des  puissances  par  la 
conduite  pleine  de  sagesse  qu'il  avait 
tenue  pendant  sa  légation  en  France  , 
parla  protection  que  les  savants  trou- 
vaient auprès  de  lui ,  par  sa  droiture, 
sa  modération,  son  éloignementpour 
le  népotisme ,  fut  élevé  sur  le  saint- 


LEO 

siège  le  l•^  avril  i6o5.Soii  élévation 
ne  changea  pas  ses  mœurs; elle  cora- 
moiçait  à  ilonncr  un  plus  grand  éclat 
à  ses  verlusct  à  ses  heureuses  qualités, 
lorsqu'il  fut  enlevé  de  ce  monde,  le 
^7  du  même  mois  ,  universellement 
regrette.  Ou  trouve  son  éloge  dans 
le  tome  m  (p.  3-20  )  des  Elogj  degli 
uomini  ilhistri  Toscani.  Paul  V  lui 
succéda.  T  -  d. 

LÉON  ou  GRÉGOIRE,  anti-pape. 
;  rayez  Benoit  YIII  ). 

LEON  V^.  ,  empereur  d'Orient , 
dit  le  Grand, naquit  en  Thrace,  d'une 
famille  ol)SCure  ,  et  dut  son  avance- 
ment daiis  les  grades  militaires  de 
l'armée  romaine  ,  à  la  faveur  toute 
j)uissante  du  général  Aspar  et  de  son 
iils  Ardaburius.  (  Foyez  Aspar.  ) 
Léon  commandait  un  corps  de  trou- 
pes campé  à  Selymbiia,  lorsque  ses 
unbilieux  protecteurs  le  firent  mon- 
t-r  sur  le  trône  ,  vacant  par  la  mort 
lu  v«M-tueux  Marcien  :  le  sénat  con- 
firma ce  choix;  et  I^éon  fut  recoimu 
empereur  à  la  tcte  des  troupes  ,  le  7 
février  4^7  ,  et  couronné  par  Ana- 
tole ,  patriarche  de  Coiistanlinople  ; 
on  croit  que  ce  fut  le  premier  exem- 
ple de  cette  sanction  sacrée  donnée 
à  l'élévation  d'un  souverain.  Aspar 
s'aprçut  bientôt  que  Léon  ne  por- 
terait pas  long-temps  le  joug  qu'il 
avait  voulu  lui  imposer:  les  Euty- 
chiens  ayant  excité  une  sédition  dans 
Alexandrie,  massacré  J.  Protère  leur 
évèque  légitime  ,  et  rais  à  sa  pkce 
Tiraothée  Elure  ,  Léon  renouvela 
toutes  les  dispositions  prises  par  l'em- 
pereur M;ircien  contre  ces  hérétiques. 
Cependant  Aspar  se  déclara  en  fa- 
veur d'Elure  ,  et  parvint  à  le  main- 
tenir dans  sou  épiscopat  jusqu'en 
460 ,  où  ,  malgré  les  instances  de 
l'impérieux  général ,  Léon  chassa  et 
exila  Elure,  et  fit  nommer  à  sa  place 
uu  evêc^ue  orthodoxe.  Léou  avait 


LEO  i35 

précédemment  obtenu  des  succès 
éclatants  contre  les  barbares  ,  et 
rendu  la  j)aix  à  l'empire  d'Orient. 
11  voulait  aussi  mettre  un  terme  aux 
malheurs  de  l'empire  d'Occident , 
déchiré  par  l'ambition  et  les  fureurs 
de  Riciraer  ,  dévasté  par  Geuseric  , 
et  gouverné  par  des  fantômes  d'em- 
pereurs. Geuseric  brava  les  menaces 
de  Léon  ,  auquel  il  renvoya  cepen- 
dant l'impératrice  Eudoxie  ,  veuve 
de  Valentinien  ,  et  sa  fille  Placidie , 
qu'il  retenait  captives  depuis  sept 
ans.  (  F  oyez  Eudoxie.  )  Léon,  dont 
les  armées  venaient  de  repousser  les 
Huns  et  de  tuer  un  des  fils  d'Attila , 
nommé  Dengizic  ,  réunit  toutes  ses 
troupes  et  les  envoya  en  Afrique ,  sous 
la  conduite  de  son  beau-frère  Basi- 
lisque  ;  Genseric  crut  sa  j>erte  as- 
surée. L'inexpérience ,  ou  ,  suivant 
Procope  ,  la  trahison  de  Basihsque 
lui  donna  le  temps  de  reprendre 
courage  (  Foyez  Genseric  )  ;  et  les 
Romains,  après  avoir  perdu  la  moi- 
tié de  leur  flotte  et  de  leur  armée  , 
retournèrent  honteusement  en  Orient. 
On  soupçonnaAspar  et  son  fils  d'avoir 
contribué  par  leurs  intrigues  à  ces 
revers.  Léon ,  fatigué  de  leur  audace , 
résolut  enfin  d'y  mettre  un  terme  ; 
mais  effrayé  de  leur  puissance  ,  il 
leur  tendit  des  pièges  peu  dignes 
d'un  souverain  :  il  flatta  d'abord. 
Aspar  de  l'espoir  d'unir  son  fils  Pa- 
tricolc  à  la  princesse  Ariadne^  fille  de 
l'empereur.  Cette  nouvelle  ,  semée  à 
dessein,  excita  l'indignation  du  peu- 
ple, qui  haïssait  la  famille  d'Aspar, 
à  cause  de  son  arianisrae  :  une  sé- 
dition força  Aspar  et  ses  fils  à  cher- 
cher un  asile  dans  l'église  de  Ste.- 
Euphémie.  Les  serments  et  les  invi- 
tations pressantes  de  Léon  les  eu 
firent  sortir  pour  se  rendre  au  palais, 
où  Aspar  et  Ardaburius  eurent,  à  l'ins- 
taut  j  la  tête  tranchée.  Un  Isaurieu , 


ï3G 


LEO 


iioiumé  Trascalsëe ,  charge  de  cette 
éxecution,  e'poiisa,  pourre'compense, 
la  princesse  Ariadnc  ,  promise  d'a- 
bord à  Patricole:  ce  fut  lui  qui  régna 
dans  la  suite  sous  le  nom  de  Zenon. 
(  Foj'ez  AniADNE  et  ZtNoiv.  )  Les 
ariens  ,  furieux  de  îa  mort  de  leur 
protecteur  ,  excitèrent  Ricimer  à 
troubler  de  nouveau  l'empire  d'Oc- 
cident ^  et  engagèrent  les  Gotlis  à 
attaquer  Constantinople  même.  Les 
environs  de  la  ville  impériale  furent 
dévastes  pendant  deux  ans  ,  avant 
<pie  Léon  pût  repousser  les  barbares 
et  conclure  la  paix  avec  eux.  Il  mou- 
rut, en  474  7  3u  mois  de  janvier  , 
laissant  l'empire  au  jeune  Léon  ,  fils 
d'Ariqifce  et  de  Zenon  ,  que  l'em- 
pereur mourant  essaya  vainement 
de  faire  reconnaîtte  pour  s<wi  succes- 
seur. Léon  a  conserve'  la  réputation 
d'un  prince  actif ,  éclaire' ,  vigilant 
et  sage  ,  qui  ne  négligea  rien  j^our 
rendre  à  l'empire  son  éclat  et  sa 
force-  il  promulgua  des  lois  sages  , 
éleva  des  monuments,  donna  Texem- 
ple  de  la  modération  et  de  l'écono- 
mie :  mais  ce  n'est  point  assez  ponr 
justifier  le  titre  de  grand  que  la  va- 
nité des  Grecs  lui  donna.  Il  paraît 
qu'il  ne  fut  pas  exempt  d'avarice  ; 
enfin  ,  on  peut  lui  reprocher  la  fai- 
blesse qu'il  eut  de  souffrir  l'ambition 
d'Aspar  et  de  Basilisque  ,  auxquels 
on  doit  imputer  tous  les  malheurs 
qu'éprouva  l'empire  ftendant  lerègne 
de  Léon.  Des  fléaux  terribles  en  si- 
gnalèrent aussi  diverses  époques  :  en 
458  ,  4a  ville  d'Antioche  fut  ren- 
versée par  un  tremblement  de  terrej 
en  465  ,  Constantinople  fut  pres- 
qu'entièrement  dévorée  par  les  Gam- 
mes ;  en  469  ,  des  pluies  excessives 
tl  des  torrents  causèrent  de  grands 
ravages  ;  en  472  ,  une  terrible  érup- 
tion du  Vésuve  ,  s'il  en  faut  croire 
les  historiens ,  couvrit  Gonstantiuo- 


LEO 

pie  de  cendres ,  et  plongea  cette  ville 
dans  l'obscurité  et  dans  l'effroi  :  ce 
fait,  attesté  par  de  nombreux  témoi- 
gnages ,  paraîtra  toujours  peu  vrai- 
semblable. Léon  eut  pour  femme 
Vcriiie ,  qui  ne  parut  livrée  ,  pendant 
le  règne  de  ce  prince  ,  qu'aux  vertus 
pieuses  et  modestes  de  son  sexe  , 
mais  à  qui  l'ambition  et  des  passions 
violentes  firent  jouer  dans  la  suite 
un  rôle  moins  honorable.  (  F  oyez 
Veuine.  )  Elle  n'eut  de  Léon  que 
deux  filles  ,  Ariadne  dont  il  a  été 
parlé ,  et  Léoncie ,  mariée  à  Marcien 
fils  d'Anthemius.  On  a  des  médailles 
en  or  du  règne  de  Léon.      L-s-e. 

LÉON  II  ,  empereur  d'Orient , 
petit-fils  de  Léon  P"-.  ,  et  fils  de 
Zenon  et  d' Ariadne  ,  fut  déclaré  au- 
guste au  moment  de  la  mort  de  son 
grand-père  :  il  avait  à  peine  quatre 
ans  ;  mais  ce  choix  fut  agréable  au 
peuple ,  qui  détestait  Zenon  à  cause 
de  son  arianisme  et  de  son  origine 
saurienne.  Cependant  Verine,  veuve 
du  dernier  empereur  ,  et  sa  fille 
Ariadne ,  femme  de  Zenon  ,  ne  né- 
gligèrent ni  intrigues  ,  ni  séductions 
pour  ramener  les  esprits  en  faveur 
de  Zenon,  qu'elles  voulaient  associer 
à  l'empire.  Quand  elles  crurent  avoir 
aplani  les  plus  grandes  difficultés, 
Ariadne  conduisit  le  jeune  Léon  à 
l'hippodrome  et  le  plaça  sur  un  trône 
élevé.  Cet  enfant,  faible  jouet  des 
volontés  de  deux  femmes  ambitieuses, 
appela  Zenon  près  de  lui,  et,  lui  met- 
tant sa  couronne  sur  la  tête ,  le  dé- 
clara son  collègue  et  le  nomma  au- 
guste. Léon  ne  vécut  pas  long-temps 
après  ;  et  l'on  soupçonna  Zenon  d'a- 
voir hâté,  par  le  poison  ,  la  fin  de 
son  propre  fils  ,  dont  le  règne  ne 
dura  que  dix  mois.  L-s-£. 

LÉON  III ,  l'Isaupjen  ,  empe- 
reur d'Orient ,  naquit  en  Isaurie  , 
dans  l'état  le  plus  obscur -.il  por- 


t^iit  le  nom  de  Conon  ,  et  faisait  lîii 
l»rril  trafic  de  bestiaux  .  lorsque  des 
iuifs,  poursuivis  pour  des  escroque- 
ries et  des  impostures,  le  reneon- 
trèrcnt  et  lui  prédirent  une  fortune 
éclatante  ,  s'il  chanç;cait  de  nom  ,  et 
s'il  prenait  le  ]>arti  des  armes;  ils 
lui  demandèrent  ensuite  de  leur  pro- 
mettre, par  serment ,  une  faveur 
(pj'ils  se  réservaient  de  réclamer  plus 
tanl.  La  fortune  voulut ,  pour  le 
malheur  de  l'Empire  ,«iuc  Léon  put 
iMi  jour  accomplir  cet  engaj:;cment. 
Il  servit  comme  simple  soldat  dans 
l'armée  de  Justinien  JI;  son  zèle  et 
quelques  services  le  firent  remar- 
quer de  l'empereur,  qui  l'admit  dans 
ses  gardes,  et  i 'éleva  rapidement  aux 
j)lus  hauts  grades.  Justinien  ,  ayant 
conçu  quelque  crainte  de  son  am- 
Itition  ,  le  chargea  d'une  expédition 
diilicile  contre  les  ])euplcs  du  Cau- 
case. Léon  ,  après  y  avoij'  signale' 
sa  bravoure  et  son  adresse,  revint  a 
Cunslanlinople,  sous  le  règne  d'A- 
nastase,  qui  lui  donna  le  comman- 
dement des  troupes  d'Asie.  A  la  nou- 
velle de  la  déposition  d'Anastase  ,  il 
refusa  de  reconnaître  The'odose  lïl, 

fuc  la  flotte  révoltée  venait  de  pro- 
'  lamer  empereur.  Les  Sarrasins,  qui 

Itfvastaient  l'empircjcxcitèrent  Léon 
ri  prendre  le  sceptre,  en  lui  promet- 
tant de  l'aider  de  toutes  leurs  for- 
ces. Il  eut  besoin  d'adresse  et  de  pru- 
«lence  pour  maintenir  ces  dangereux 

imis.  Oblige  de  les  tromper  et  de  les 
intimider  alternativement,  il  trouva 
enfin  le  moment  de  marcher  vers 
Constantinople  ,  où  Theodosc  lui 
eeda  le  sceptre  presque  sans  coup 
fcrir.  Le'on  fut  couronne  le  9.5  mars 
717,  dans  l'église  de  vSainte-vSophic  : 
rfn<ndanl  les  Sarrasins  ,  qu'il  avait 
•  s  par  de  fausses  promesses  , 
'■i.unt  assiéger  Gonstantinople  par 
terre  et  par  mer.  Dans   ce  danger 


hT/^  »37 

extrême ,  Le'on  redoubla  de  vigueur 
et  de  courage.  Un  ouragan  ayant 
rompu  un  instant  les  lignes  des  vais- 
seaux assiégeants ,  l'empereur  prit 
aussitôt  quelques  brûlots  ;  moulé 
sur  un  léger  bâtiment  ,  il  les  con- 
duisit au  milieu  de  la  flotte  enne- 
mie, en  détruisit  une  partie  et  força 
l'autre  à  la  retraite.  Il  soutint ,  avec 
le  même  courage,  les  attaques  diri- 
gées sur  la  terre-ferme,  jusqu'à  ce 
qu'un  hiver  rigoureux  réduisît  les 
Sarrasins  à  l'inaction  et  leur  enlevât 
leurs  chevaux etleurs bêles  desomme. 
Au  printemps  ,  Léon  parvint  à  dé- 
truire deux  flottes  nouvelles  i\m  ve- 
naient ravitailler  les  assiégeants;  et 
le  soin  de  défendre  sa  capitale  ne 
l'empêcha  pas  d'envoyer  ,  en  Sicile, 
réprimer  les  entreprises  du  gf)uver- 
neurScrgius;  celui-ci  regardant  l'em- 
jïire  comme  perdu  ,  avait  voulu  éri- 
ger un  royaume  dans  celte  province, 
et  venait  de  faire  couronner ,  sous 
le  nom  de  Tibère ,  un  de  ses  lieute- 
nants nommé  Basile  ,  qui  paya  de 
sa  tête,  sa  révolte  ambitieuse.  Les 
Sarrasins ,  s'étant  obstinés  à  conti- 
nuer le  siège  de  Gonstantinople,  eu- 
rent tellement  à  soufT'rir  de  l'activité 
de  Léon  ,  qu'ils  furent  enfin  obligés 
de  songer  à  la  retraite.  Elle  leur  fut 
encore  plus  funeste  et  les  restes  de 
leur  armée  y  furent  anéantis.  La  joie 
des  Romains  parut  au  comble;  elle 
augmenta  encore  par  la  naissance 
d'un  fils  de  Léon.  O  prince,  destiné 
à  être  un  jour  la  honte  du  trône  et 
le  fléau  de  l'empire ,  fut  nommé 
Constantin  Copronyrae.  En  719, 
une  tentative  que  fit  Anastase  pour 
remonter  sur  le  trône  ,  échoua  par 
l'activité  de  Léon  ,  qui  se  fit  livrer 
son  compétiteur  et  lui  fit  trancher 
la  tête  :  il  soutint  également ,  avec 
des  succès  divers  ,  en  Sicile ,  en  Ita- 
lie et  en    Sardaigne ,  les    attaques 


i38 


LEO 


rëpëlccs  des  Sarrasins.  Tant  d'elï'orts 
glorieux  et  de  seiTices  rendus  à  l'em- 
pire auraient  place  Léon  au  rang 
des  plus  grands  princes  ,  si  la  pas- 
sion des  querelles  theologicfues,  trop 
commune  dans  ces  siècles  d'igno- 
rancc,n'ëtait  venue  l'agiter  d'une  cou- 
pable frénésie  et  plonger  l'empire 
dans  une  longue  et  déplorable  crise. 
Des  zélateurs  indiscrets  avaient ,  de- 
puis quelques  années,  déclamé  con- 
tre le  culte  rendu  aux  saintes  iraa- 
jçes  'y  cette  opinion  ,  qui  n'avait  d'a- 
bord trouvé  d'appui  que  chez  les 
Sarrasins  ,  fut  inculquée  à  Léon ,  par 
im  Syrien  renégat,  et  par  un  évêque 
phrygien  plongé  dans  la  débauche 
et  dans  l'ignorance.  Les  historiens 
rapportent  aussi  que  les  deux  juifs 
qui  avaient,  en  Isauric,  promis  l'em- 
pire à  ce  prince ,  vinrent  le  sommer 
d'accomplir  le  serment  qu'il  leur 
avait  fait,  et  lui  demandèrent  l'abo- 
lition des  images.  Quoi  qu'il  en  soit, 
Léon  suivit  ces  funestes  conseils ,  avec 
zèle  et  bientôt  avec  fureur.  Le  pape 
Grégoire  II,  Germain  patriarche 
de  Gonstantinople ,  et  Jean  Damas- 
cène  ,  la  lumière  de  l'Orient ,  combat- 
tirent en  vain  les  erreurs  el  la  cruauté 
de  l'empereur.  Il  envoya  des  assas- 
sins poui-  trancher  les  jours  du  pon- 
tife j  mais ,  arrivés  à  Rome  ,  ils  furent 
découverts  et  punis.  JeanDamascène, 
persécuté  cruellement  ,  se  réfugia 
dans  le.  monastère  de  Saint-Sabas  , 
en  Palestine  •  les  habitants  de  l'Ar- 
chipel ,  alarmés  pour  leur  foi ,  se 
révoltèrent,  et  menacèrent  Gonstan- 
tinople. Le  feu  grégeois  rendit  cette 
attaque  inutile ,  et  Léon  montra  quel- 
que clémence  envers  des  sujets  dont 
son  imprudence  avait  causé  la  ré- 
bellion. Mais  en  vain  le  trouble  crois- 
sait dans  l'Empire  j  en  vain  les  Sar- 
rasins ,  témoins  de  ces  discordes , 
cherchaient  à  en  profiter ,  et  avaient 


LEO 

tenté  de  sui-prendre  Nicée;  l'empe- 
reur ,  irrité  j)ar  les  obstacles ,  agi- 
tait encore  l'Italie,  et  renouvelait 
ses  entreprises  contre  la  vie  du  pape. 
Ce  saint  pontife  fit  de  vains  efforts 
pour  contenir  l'indignation  des  Ita- 
liens ;  elle  éclata  enfin  :  l'ambitieux 
Luilprand,  roi  des  Lombards,  crut 
devoir  en  profiter  pour  s'emparer  de 
Rome ,  et  de  l'exarcat  de  Ravenue; 
des  troubles  sanglants  et  prolongés 
furent  sur  le  point  d'enlever  à  Léon 
ses  dernières  possessions  en  Italie: 
l'adresse  et  la  fermeté  généreuse  du 
pape  les  lui  conservèrent.  Cependant 
le  patriarche  Germain  venait  d'être 
déposé,  à  Gonstantinople,  et  rem- 
placé par  le  diacre  Anastase.  (  Voyez 
Anastase.  )  Des  savants ,  chargés 
du  soin  delà  bibliothèque  publique, 
et  des  manuscrits  qu'on  y  rassem- 
blait ,  luttaient  encore  contre  l'hé- 
résie de  l'empereur  ;  sa  barbare 
Ignorance ,  désespérant  de  les  con- 
vaincre ,  lui  suggéra  l'affreuse  idée 
de  les  faire  brûler  avec  le  précieux 
dépôt  dont  ils  avaient  la  garde  : 
cette  atrocité  révolta  tout  Tempire  ; 
une  émeute  eut  lieu  dans  Gonstan- 
tinople :  alors  rien  n'arrêta  plus  la 
férocité  de  Léon  ;  et  la  persécution 
qu'il  ordonna  ,  surpassa  ,  par  la 
rage  du  persécuteur ,  par  la  barba- 
rie ,  le  nombie  et  la  diversité  des 
supplices ,  toutes  celles  qui  avaient 
affligé  l'Église  et  l'Empire.  Le  pape 
Grégoire  ÎII  ,  successeur  de  Gré- 
goire II ,  fit  de  nouvelles  tentatives 
auprès  de  Léon  pour  le  ramener  à 
la  raison,  et  assembla  à  Rome  un 
concile ,  qui  consacra  de  nouveau  le 
culte  des  images  ;  l'empereur  ré- 
pondit à  ces  saintes  remontrances 
par  de  nouveaux  attentats  et  par  des 
entreprises  contre  l'Italie ,  qui  tour- 
nèrent à  sa  confusion.  Il  fut  plus 
heureux  contre  les  Sarrasins  que  le& 


'ù 


Î.KO 

troubles  de  l'era pire  avaient  engage's 
de  nouveau  à  y  prnetrcr.  A  peine  ces 
dangereux  ennemis  se  furent-ils  reli- 
ns  en  Syrie,  qu'un  atVreux  tremblc- 
Bietitde  terre,  dont  les  secousses  durè- 
rent presque  continuellement  pen- 
dant toute  l'année  "j^o.  porta  la  ruine 
et  la  désolation  depuis  Constantino- 
ple  jusqu'au  fond  de  l'Egypte.  Enfin , 
après  un  règne  de  vingt-quatre  ans  , 
dont  il  avait ,  par  ses  excès  ,  terni  la 
gloire  première ,  Léon  mourut  en 
\i  ,  et  fut  enterre  dans  l'église  des 
lints-Apôtres.  11  laissa ,  de  l'impé- 
ratrice Marie,  dont  on  ne  sait  que 
le  nom,  un  fils,  Constantin  Copro- 
nyme  qui  lui  succéda,  et  une  fille 
mariée  à  Artabasde.  On  a  des  mé- 
dailles en  or  de  Léon  III;  elles  at- 
testent l'anëanlissemcnt  total  des  arts 
du  dessin.  L-s-e. 

LÉON  IV^  (  Chazare  ),  empereur 
d'Orient,  fils  de  Constantin  Copro- 
nyme,  naquit  à  Constantinople ,  le 
a5  janvier  75 1  ,  monta  sur  le  trône 
en  775  ,  et  mourut  en  780 ,  après 
un  règne  qui  ne  présente  ,  en  évé- 
nements remarquables,  que  l'asso- 
ciation à  rerapire,de  Constantin Por- 
phyrogenète  ,  fils  de  Léon  ,  alors 
âgé  de  cinq  ans;  une  conjuration  du 
césar  Nicéphore,  frère  de  l'empe- 
reur, qui  fut  découverte,  et  qui  se 
termina  par  la  punition  et  l'exil  de 
Nicéphore  et  des  autres  conjurés; 
l'arrivée  à  Constantinople  d'un  roi 
des  Bulgares,  Teléric ,  qui ,  intimidé 
par  la  haine  de  ses  sujets  ,  se  réfu- 
gia près  de  Léon,  se  fit  baptiser,  et 
s'unit  à  la  famille  impériale;  et  en- 
fin quelques  opérations  militaires 
peu  importantes  contre  les  Sarrasins 
qui  furent  défaits,  à  plusieurs  rej)ri- 
»es,  dans  l'Asie  Mineure.  Léon  avait 
montré  quelques  talents  au  commen- 
cement de  son  règne.  Sa  générosité 
et  sa  douceur  réparèrent  d'abord  les 


LEO  i39 

maux  qu'avaient  causés  l'avarice  et 
la  cruauté  de  Copronyme;  mais  bien- 
tôt l'esprit  fanatique  qui  dominait 
son  siècle,  s'empara  de  lui  :  il  adopta 
avec  fureur  l'iconoclastie;  et  les  pre- 
miers accès  de  sa  colère  furent  di- 
rigés contre  Irène  ,  sa  femme,  qu'il 
éloigna  de  lui ,  pour  avoir  consei-vé 
des  images  saintes.  Il  persécuta 
cruellement  ceux  qui  partageaient 
les  sentiments  de  cette  princesse; 
mais  une  maladie  pestilentielle ,  que 
quelques  écrivains  ont  présentée 
comme  une  punition  céleste ,  vint 
piellre  un  terme  à  une  intolérance 
qui  paraissait  devoir  égaler  les  ex- 
cès des  prédécesseurs  de  Léon.  Cons- 
tantin M  lui  succéda,  sous  la  tutelle 
de  la  célèbre  et  cruelle  Irène. 

L-S-E. 

LÉON  V,  l'Arménien  ,  empereur 
d'Orient ,  était  fils  d'un  Arménien 
nommé  Bardas,  et  commandait  un 
corps  d'armée ,  sous  le  règne  de 
Nicéphore ,  lorsqu'il  fut  accusé  de 
trahison,  battu  de  verges,  exilé  et 
forcé  de  prendre  l'habit  monastique. 
Michel  Rangabé ,  en  montant  sur  le 
trône ,  prononça  la  grâce  de  Léon ,  et 
lui  rendit  ses  honneurs  et  le  comman- 
ment  des  armées.  Léon  tira  parti 
de  cette  faveur  pour  employer  des 
intrigants  obscurs  qui ,  par  des  pré- 
dictions et  des  bruits  ridicules ,  dis- 
posaient le  peuple  à  le  voir  monter 
sur  le  trône.  Cependant,  en  81 '2,  il 
aida  Michel  à  réprimer  les  icono- 
clastesx^ui  causaient  du  trouble  dans 
Constantinople ,  et  battit  une  armée 
de  Sarrasins,  qui  ravageaient  l'Asie. 
Mais  il  profita  de  l'ascendant  que 
ces  succès  lui  donnèrent  sur  l'esprit 
des  soldats  ,  pour  décrier  l'empereur 
et  le  rendre  méprisable  à  leurs  yeux; 
et  lorsqu'en  81 3,  Michel  marcha 
contre  les  Bulgares  qui  venaient  d'i- 
uoudcr  la  Thrace  et  la  Macédoine, 


i\f>  LEO 

Lron  fit  ccliouer  ses  plans ,  et  le  con- 
traignit à  livrer  la  bataille  d'Adria- 
nople ,  où  Michel  fut  battu  par  une 
trahison ,  dont  Le'on  est  encore  ac- 
cuse'par  plusieurs  historiens.  Charge' 
de  recueillir  dans  Adrianople,  les 
de'brisde  l'arme'e  que  Michel  venait 
d'abandonner,  licon  acheva  de  la 
corrompre  par  ses  menées  se'ditieii- 
ses  :  les  soldats  revolte's  lui  ofïrircnt 
la  couronne  qu'il  feignit  d'abord  de 
refuser  ;  mais  bientôt ,  ce'dant  aux 
instances  des  rebelles  ,  il  marcha  à 
leur  tête,  vers  Constantinople.  Mi- 
chel ,  sans  essayer  la  moindre  résis- 
tance ,  lui  fit  remettre  les  ornements 
impériaux,  et  se  retira  dans  une 
église.  Lëon  fit  son  efitre'e  dans  la 
capitale ,  et  fut  couronne'  le  1 1  juil- 
let 8i3,  par  le  patriarche  Nicc- 
phore  ,  dans  Sainte  -  Sophie.  Il 
**ele'gua  Michel  Rangabe,  et  sa  fa- 
mille ,  dans  des  monastères  ,  et 
récompensa  ceux  qui  avaient  con- 
tribue' à  son  élévation ,  entre  au- 
tres ,  Michel  le  Bègue  ,  qu'il  nomma 
patrice.  Cependant  les  Bulgares  , 
vainqueurs  à  Adrianople ,  s'avancè- 
rent jusqu'aux  portes  de  Constanti- 
nople. Léon  feignit  de  traiter  avec 
eux,  et  chercha  à  faire  assassiner 
Crem  ou  Grumnus,  leur  roi,  qui,  ou- 
tré de  cette  perfidie ,  et  percé  de  plu- 
sieurs coups ,  dont  aucun  ne  se  trouva 
mortel ,  se  vengea  en  commettant 
d'horribles  ravages  dans  les  provin- 
ces voisines,  dévasta  Adrianople, 
forcée  de  se  rendre  par  le  défaut 
de  vivres  ,  et  emmena  ses  habi- 
tants en  esclavage.  Léon,  pour  s'af- 
fermir sur  le  trône ,  fit  couronner  son 
fds ,  et  rechercha  l'alliance  des  Fran- 
çais, gouvernés ^t^s  par  Louis  le 
Débonnaire.  Eii^i4,  Grumnus  et  ses 
Bulgares  menacèrent  de  nouveau 
Constantinople;  mais  le  roi  barbare 
niourut  ayant  d'avoir  pu  l'attaquer. 


LEO 

Léon,  profitant  de  cette  circonstance^ 
marcha  contre  ces  ennemis  dange- 
reux ,  les  vainquit  auprès  de  Mesem- 
brie,  et ,  l'année  suivante,  les  défit  si 
complètement ,  qu'il  les  contraignit  à 
la  paix,  après  avoir  mis  leur  pays  à 
feu  et  à  sang.  Léon ,  ivre  d'orgueil , 
et  entouré  de  devins  et  de  fourbes, 
voulut  aussi  dompter  1  es  consciences , 
et  soumettre  la  religion  à  ses  fou- 
gueux caprices  :  il  réveilla  l'hérésie 
orageuse  des  iconoclastes ,  et  tenta 
d'abord  inutilement  de  vaincre ,  par 
l'appareil  de  sa  puissance,  la  résis- 
tance que  lui  opposaient  le  patriar- 
che Nicéphore  et  les  évêques  réu- 
nis dans  un  concile  que  Léon  avait 
convoqué.  Nicéphore  fut  condamné 
à  l'exil  j  une  maladie  dangereuse  vint 
le  soustraire  momentanément  à  cette 
punition  :  à  peine  guéri ,  il  allait  être 
enlevé  par  l'ordre  de  Léon,  lorsque 
le  peuple  se  souleva ,  et  prit  sa  dé- 
fense. Léon ,  efTrayé ,  désavoua  d'a- 
bord la  violence  exercée  contre  Ni- 
céphore ;  mais ,  dès  la  nuit  même ,  il 
le  fit  enlever  sans  bruit ,  et  reléguer 
dans  un  couvent,  sur  les  rives  du 
Bosphore.  Il  nomma  ensuite ,  pour 
patriarche ,  un  officier  de  sa  garde  , 
iconoclaste  décidé ,  qui  reçut  la  ton- 
sure ,  et  fut  sacré  peu  de  jours  après. 
Un  nouveau  concile  ,  composé  d'ico- 
noclastes ,  condamna  tous  les  prélats 
orthodoxes  ,  et  ouvrit  la  persécutiort|l| 
que  Léon  étendit  sur  tous  ceux  qui  re-d 
fusèrent  de  se  soumettre  à  ses  capri- 
ces fanatiques.  Cette  rigueur  que  Léon 
déploya  contre  les  orthodoxes ,  il 
l'exerça  avec  plus  de  raison  dans 
l'administration  de  ses  états  ,  et  dans 
l'exécution  des  lois  ;  et ,  sous  ce  rap- 
port ,  il  mérita  de  justes  éloges.  Mi- 
chel le  Bègue,  le  même  qui  avait 
contribué  à  son  élévation ,  fut  ac- 
cusé de  plusieurs  crimes,  et  surtout 
d'aspirer  à  i'çmpirc.  Léon  avait  fer- 


LEO 

inc  les  yeux  sur  ses  proiniors  de- 
sortiri's;  mais  ciidn  il  lo  lit  juger  pu- 
blicjueincnl.  Les  preuves  de  la  perli- 
clic  de  Michel  ne  furent  pas  ccpiivo- 
ques  :  condamne  à  être  brûle  vit',  il 
obtient  un  délai  de  quelques  jours , 
en  profile  pour  faire  craindre  à  plu- 
sieurs de  ses  amis  de  partaj^er  son 
sort,  et  pour  les  enj^agcr  à  se  défaire 
de  Léon.  Les  conjures  se  déguisent 
en  prêtres  et  en  clercs  ,  cl  se  rendent 
au  point  du  jour  à  la  chapelle  du 
palais ,  où  Léon  assistait  habituelle- 
ment aux  matines  :  il  entonnait  lui- 
même  les  psaumes,  lorsque  les  as- 
sassins se  j)récipitent  sur  lui.  Réfu- 
gié sous  l'autel,  il  s'y  défend  quel- 
que temps  avec  fureur,  au  moyen  du 
bâton  de  la  croix;  mais  enfin ,  il  e\- 

!  pire  percé  de  coups.  Eu  apprenant 
sa  mort,  le  patriarche  Niccphore 
porta  ce  jugement ,  dont  l'histoire 
a  confirmé  la  justesse  :  «  La  reli;:ion, 
^'  dit-il ,  est  délivrée  d'un  grand  en- 
nemi; mais  l'état  perd  un  prince 
utile.  »  Les  restes  de  Léon  furent 
cou()és  en  morceaux  ,  et  transportés 
dans  une  barque  avec  sa  famille,  dans 

I  l'île  de  Proie.  Sa  mort  arriva  en  8'>.o. 
Miciiel  le  Bègue ,  sou  assassin ,  lui 
succéda.  L-s-e. 

\  LÉON  VI  ,  dit  le  Philosophe, 
empereur  d'Orient ,  était  fils  d'Eu- 

î  doxie ,  femme  de  Basile  le  Macédo- 
nien. Les  dérèglements  de  cette  prin- 
cesse ont  laissé  quelques  doutes  sur 
la  légitimité  de  Léon  ,  qui  fut  cepen- 
dant élevé  par  Basile  comme  son  fils 
et  son  successeur.  A  peine  âgé  de  dix- 
neuf  ans ,  le  jeune  prince  s'était  fait 
aimer  de  tout  l'empire;  mais  Santa- 
baren,  favori  de  Basile,  homme  four- 
be et  dangereux ,  impiiet  du  mépris 
et  de  la  haine  que  Léon  lui  témoi- 
gnait ,  chercha  tous  les  moyens  de 
p«rdre  ce  prince.  Il  fit  d'abord  tous 
ses  efforts  pour  gagner  sa  confiance  ; 


LEO  i4« 

et  essayant  ensuite  de  l'alarmer  sur 
les  dangers  <pie  Basile  pouvait  courir 
à  la  chasse  ,  sa  passion   favoi  ite  ,  il 
engagea  I^éon  à  suivre  son  père,  avec 
une  arme  ciichéc  sous  ses  habits. 
Le  jeune  prince  goûta  cet  avis  ,  et 
mit  un    poignard  dans  une  de  ses 
bottes.  Le  perfide  Santabarcn  sup- 
pose sur-le-champ  un  coinjjlol  con- 
tre Basile,  etrenaverlit  à  la  chasse 
même  ;  remjicreur  fait  arrêter  son 
fils,  qu'on  trouve  muni  du  poignard. 
Le  prince  est  aussitôt  dépouillé  des 
signes  impériaux ,  et  jeté  dans  ime 
prison  ,  que  partagent  ses  plus  fidèles 
serviteurs.  Santabareu  excitait  Ba- 
sile à  une  vengeance  plus   cruelle  : 
mais  les  larmes  de  tout  l'empire  ,  et , 
disent  les  historiens ,  la  voix  d'un 
perroquet  accoutumé  à  répéter ,  Fou- 
vie  Léon  ,  changèrent  les  disposi- 
tions du  monarque;  il  permit  à  son 
fils  de  se  justifier,  lui  rendit  ses  hon- 
neurs ,  et  chassa  ses  ennemis.  Peu  de 
temps  après  ,  la  mort  de  Basile  laissa 
Léon  maître  de  l'empire  ;  û  monta 
sur  le  trône  avec  son  frère  Alexan- 
dre,  en  886  :  mais  ce  dernier ,  livré 
à  ses  plaisirs,  lui  abandonna  tout  le 
poids   de    l'autorilé.   Peut  -  être  la 
mollesse  d'Alexandre  valut  -  elle  à 
Léon ,  par  une  comparaison  favorar 
ble  ,  le  litre  de  Philosophe ,  que  sa 
vie  ne  justifie  nullement.  A  peine  cou- 
ronné ,  il  déposa  Photius ,  ce  célèbre 
et  dangereux  patriarche  (  /^.  Pho- 
tius), qui  s'était  lié  secrètement  avec 
Sautabaren  pour  le  perdre.  Santaba- 
reu fut  aussi  recherché,  mis  en  juge- 
ment, fouetté  publiquement,  et  enfin 
exilé  au  fond  d'iuie  province  ,  après 
avoir  eu  les  yeux  crevé»-  Léon  fit  en- 
suite rendre  des  honneurs  funèbre» 
aux  restes  de  Michel ,  assassiné  par 
Basile  ,  en  867.  (  F  oyez  Basile  et 
Michel.  )  Les  premières  années  de 
sou  règne  furent  marquées  par  quel- 


fil 


LEO 


ques  guerres  peu  importantes  et  peu 
honorables  pour  les  armées  romai- 
nes :  les  Sarrasins  les  battirent  dans 
l'Asie  Mineure  ,   en   Italie  et  dans 
l'Archipel ,  et  les  Bulgares  dans  la 
Macédoine.  Le'on ,  irrite  de  cette  der- 
nière défaite  ,  chercha  aux  Bulgares 
de  nouveaux  ennemis  chez  les  Hon- 
grois ,  qui  paraissent  dans  l'histoire 
pour  la  première  fois  sous  ce  nom. 
Ceux-ci  furent  d'abord  victorieux  j 
mais  les  Bulgares  les  ayant  écrasés 
à  leur  tour ,   Léon  se  vit  réduit  à 
payer  inutilement  ses  alliés ,  et  à  flé- 
chir ses  ennemis  par  de  honteuses 
soumissions.  En  891 ,  il  recouvra  une 
partie  de  l'Italie  méridionale,  qu'il 
perdit  quatre  ans  après ,  par  suite 
de  la  mauvaise  et  tyrannique  admi- 
nistration des  gouverneurs  grecs  qu'il 
y  envoya.  Les  Bulgares  ,  cependant , 
envahissaient  de  nouveau  les  fron- 
tières ,  et  moissonnaient  les  armées 
romaines;  l'intérieur  du  palais  n'était 
pas  plus  tranquille  que  l'empire  ;  les 
intrigues  des  courtisans  et  les  mœurs 
déréglées  de  Léon  y  multipliaient  le 
trouble  et  les  complots.  En  vain  l'im- 
pératrice Théophane  donnait  -  elle 
l'exemple  des  vertus  et  de  la  piété  ; 
Zoé ,  fille  de  Stylien,  favori  de  l'em- 
pereur ,  gouvernait  ce  prince  ,  qui 
faillit  être  tué  entre  ses  bras  ,  dans 
une  maison  de  campagne,  où  il  pas- 
sait la  nuit  avec  elle.  Le  fils  et  les  pa- 
rents de   Stylien  furent  soupçonnés 
d'avoir  pris  part  à  cet  attentat.  Théo- 
phane étant   morte  peu  de   temps 
après ,  Léon  épousa  Zoé ,  au  grand 
scandale  de  tout  l'empire:  elle  mou- 
rut au  bout  de  vingt  mois.  En  896  , 
l'empereur  se  remaria  ,  pour  la  troi- 
sième fois  ,  à  une  jeune  phrygienne 
nommée  Eudocie ,  qui  mourut  aussi 
avant  la  fin  de  Tannée  ,en  accouchant 
de  son  premier  enfant.  Le  voluptueux 
Léon  s'attacha,  sur-le-champ  ,  à 


LEO 

une  nouvelle  Zoé ,  surnommée  Car- 
bonopsine ,  qui  devint  sa  maîtresse 
déclarée  :  le  jour  où  elle  s'établit  au 
palais  ,  un  assassin  attenta  aux  jour» 
de  Léon ,  au  milieu  d'une  procession; 
l'empereur  fut  grièvement  blessé ,  et 
le  coupable  brûlé  vif.  En  904, 1  es  Sar- 
rasins prirent ,  et  saccagèrent  Thes- 
salonique  ,  une  des  villes  les  plus  flo- 
rissantes de  l'empire,  et  dont  la  po- 
l)ulation  fut  emmenée  en  esclavage. 
Tous  ces  désastres  étaient ,  en  grande 
partie ,  la  suite  des  intrigues  et  des 
perfidies  des  courtisans  et  des  géné- 
raux de  Léon.  Zoé  étant  accouchée 
d'un  fils  qui  fut  nommé  Constantin 
Porphyrogenète ,  l'empereur  épousa 
la  mère  ,  et  la  couronna  ,  malgré  les 
lois  canoniques  qui  défendaient  les 
quatrièmes  noces.  Cependant  le  pa- 
riarche  Nicolas  refusa  de  consacrer 
cette  union  ,  et  excommunia  le  clerc 
qui  l'avait  bénie.  Léon  fît  arrêter  et 
enfermer  le  patriarche ,  et  lui  donna 
un  successeur  plus  complaisant.  De 
nouvelles  intrigues  agitèrent  la  cour  , 
et  de  nouvelles  invasions  dévastèrent 
les  frontières.  Léon  ,  faible  contre 
tous  ses  ennemis  ,  pardonna  souvent 
à  ceux  de  l'intérieur ,  et  ne  sut  pas 
combattre  ceux  du  dehors.  Enfin , 
après  un  règne  de  vingt -cinq  ans, 
sans  gloire   et   sans  tranquillité,  il 
mourut  d'une  dyssenterie  ,  en  911  , 
aj^rès  avoir  désigné  pour  ses  succes- 
seurs son  frère  Alexandre  et  son  fils 
Constantin  Prophyrogenète.  Il  était 
âgé  de  quarante  -  six  ans  :  il  avait 
la  prétention  de  prédire   l'avenir, 
et  les  Grecs  superstitieux  lui  accor- 
daient cet  avantage.  Il  est  j^arvenu 
jusqu'à  nous  dix-sept  oracles  de  ce 
prétendu  prophète  :  ce  sont  des  phra- 
ses sans    suite  et  sans    raison,  en 
vers  iarabiques  (i);    mais  Léqn   a 


(t)  RittgcTsius  a  publié  las  aeiz"  premiers  ave« 
une  rersion  Utiue.  Leuaclavius  y  «tiouta  la  dU-> 


i 


I.KO 

I.iissc  (les  ouvr.i|;os  pins  iTComm.iii- 
(l.iMos  et  plus  utiles.  Il  retoucha  et 
n-ili^ea  dans  une  meilleure  forme , 
le  corps  de  droit  commence  par 
Rasile,  et  qui  prit  le  nom  de  Basi- 
liques (i\  Il  publia  cent  treize  iVb- 
velles  et  des  ej)ilonies  assez,  bien 
redij;cs.  L'ouvraj;edo  Léon  le  plus  es- 
time, est  sa  Tactique^  Ficydc ,  i G 1 3, 
iu-4*'.  trad.  en  français,  par  Maizeroy, 
Paris,  1 7  7 1 ,  •^.  v.  in-B^.;  elle  renferme 
de  rcnseif^neraents  curieux  sur  les 
usac;es  militaires  de  ce  temps.  Les  bi- 
hliothcquesde Florence  et  du  Vatican 
doivent  renfermer  encore  d'auli'es  ou- 
vrages militaires  de  Le'on ,  en  ma- 
nuscrit ,  et  des  discours  religieux 
et  moraux  ;  car  ce  prince  débauche' 
Mimait  assez  à  prêcher  les  vertus  qu'il 
ne  pratiquait  pas.  Il  avait  en  outre 
compose'  un  cantique  sur  le  jugement 
dernier  ,  et  un  poème  sur  le  triste 
état  de  la  Grèce.  Ce  prince  avait  eu 
un  enf.int  de  chacune  de  ses  trois 
premières  femmes  ,  mais  ils  mou- 
rurent tous  trois  en  bas  âge  ;  il  laissa 
de  Zoé Carbonoj)sine,  Constantin  qui 
lui  succéda ,  et  Eudocie  dont  on  ne 
connaît  que  le  nom.  L-s-e. 

LKON  I*^"". ,  quatrième  prince  de 
la  race  des  Rhoupenians  ,  qui  ré- 
gnaient sur  les  Arméniens  établis  en 
Cilicie,  était  fils  de  Constantin  l^r. , 
et  succéda,  en  1 1^3,3  son  frère  aîné, 
rhorosou  Théodore.  Avant  de  mon- 
ter sur  le  troue,  il  s'était  déjà  acquis 
une  grande  célébrité  par  les  victoires 
qu'il  avait  remportées  sur  les  Musul- 
mans. En  l'an  iiio,  les  Turcs  de 
l'Asie-Mineure  firent   une  invasion 

•cpliime  qui  était  Jern<;iiië  in^ilit  Iluuii*rc«t« 
Jimi  <l«  l'empereur  Ijfon  ,  rin^t-iept  *itr«  rélro- 
k'a.le»  ,  en  çrtc,  dans  les  Excerpla  grcec  rhet, 
I'  Léo  Ar*'iiu,  Rome,  1641,  in-8'.  ,  pag.  398. 
(i")  De*  •oi«ante  lirrei  de»  Baiilt^uii*  ,  P«- 
bfût  en  publia  quarante-sept,  «n  1G47  (  F'ojte 
Fasrot  ).  On  en  a  depuis  retrouré  quatre  (  d« 
♦9  *  **);  Reili  le*  a  publics  arec  la  rertion  d« 
R<it>,,k«nius  ,  sous  ce  titre:  Operis  basilic  fi- 
*r9timrH  tmppUmentum,  l^j<iê ,  176S,  in-fel. 


I-KO  143 

dans  la  Cilicie;  Theros ,  elfrayc  de 
leur  grand  nombre,  se  retira  dans 
une  (le  ses  forteresses ,  laissant  à 
son  frère  le  soin  de  les  combattre. 
Léon  se  joignit  alors  à  deux  autres 
princes  arméniens,  Tigrane  et  Abla- 
sath  ,  et  marcha  au  -  devant  des 
ennemis  avec  des  forces  bien  infé- 
rieures. Le  combat  fut  long  et  opi- 
niâtre j  les  deux  princes  alliés  de 
Léon  restèrent  sur  le  champ  de 
bataille;  mais  à  la  fin  les  infidèles 
furent  vaincus  et  contraints  de  sortir 
de  la  Cilicie ,  d'où  ils  se  portèrent 
vers  la  wSyrie.  Son  frère  étant  mort 
sans  enfants,  il  lui  succéda  sans  con- 
testation, et  il  s'empressa  de  signaler 
le  commencement  de  son  règne  par 
des  victoires  sur  les  Grecs ,  éter- 
nels ennemis  des  Arméniens.  Il  le'jr 
prit  d'abord  Messis  ou  Mopsueste; 
puis  il  s'avança  jusqu'à  Tarse,  et 
reconquit  toutes  les  forteresses  qui 
avaient  été  enlevées  à  son  frère.  Il 
passa  de  là  en  Syrie ,  où  il  joignit 
ses  forces  à  celles  de  Roger ,  régent 
d'Anlioche  ,  qui  assiégeait  Azaz.  La 
ville  fut  bient(3t  prise,  et  Léon  revint 
dans  ses  états  chargé  d'un  grand  bu- 
tin. Ce  prince  continua  ,  pendant  le 
reste  de  son  règne  ,  à  prendre  une 
part  très-aclive  dans  les  démêlés  de 
ses  voisins;  il  porta  plusieurs  fois 
ses  armes  dans  la  principauté  d'An- 
tioche,  où  il  fit  la  guerre  à  Baudouin, 
roi  de  .férusalem  ,  qui  en  était  le 
maître.  La  paix  ne  fut  rétablie  en- 
tre eux  que  par  la  médiation  de 
Joscelin,  comte  d'Edesse;  et  ils  fi- 
rent, de  concert,  la  guerre  contre 
les  Grecs.  Les  nouvelles  conquêtes 
de  Léon  le  rendirent  de  plus  en  pFus 
redoutable  à  ces  derniers  ,  qui  crai- 
gnirent de  se  voir  chassés  de  la  Ci- 
licie et  de  risaurie.  L'empereur 
J.  Comnèue  leva  une  puissante  ar- 
mée ,  et  se  mit  eu  marche  pour  l'ai- 


i44 


LEO 


1er  combaltre  en  personne.  Le'on  se 
sentant  trop  faible  pour  lui  résister, 
et  étant  d'ailleurs  abandonne  par 
tons  ses  allies  ,  prit  le  parti  de  se 
réfugier  dans  les  montagnes  :  l'em- 
pereur se  rendit  donc  ,  presque  sans 
coup  férir  ,  maître  des  principales 
villes  de  laCilicie.  Anazarbe,  seule, 
lui  résista  pendant  plus  de  deux 
mois.  Peu  après  ,  Léon ,  poursuivi 
jusque  dans  le  sein  des  montagnes  , 
fut  amené  à  l'empereur  ,  avec  sa 
femme  et  deux  de  ses  fils;  les  autres 
e'taient  à  Edesse.  Quand  ce  prince 
l'eut  en  sa  puissance  (  1 1 87),  il  laissa 
en  Cilicie  un  corps  de  douze  mille 
hommes,  et  emmena  toutes  les  trou- 
pes arméniennes,  avec  Léon  qu'il 
conduisit  à  Gonstantinople  :  Léon  fut 
traité  avec  beaucoup  d'égards  dans 
sa.  captivité ,  où  il  mourut  en  1 1 4 1. 
Son  fils  aîné  ,  Théodore  ou  ïhoros , 
parvint  à  s'échapper,  et  remonta  sur 
le  trône ,  en  1 1 44-  S.  M-n. 

LÉON  II,  surnommé  le  Grand, 
petit-fils  du  précédent ,  succéda  ,  en 
1 185 ,  à  son  frère  aîné  Rhoupen  II. 
A  peine  fut-il  monté  sur  le  troue , 
qu'il  déclara  la  guerre  à  un  émir 
Turcomau  appelé  Roustam.  Les  ré- 
sultats en  furent  heureux  pour  les  Ar- 
méniens ;  car  une  grande  quantité  de 
forteresses  ,  sur  les  côtes  de  la  mer , 
dans  les  montagnes  duïaurus,  etsur 
les  frontières  de  Syrie,  restèrent  en- 
treleurs mains.  Peu  de  temps  après, 
l'empereur  Frédéric  Barberousse,  àla 
tête  d'une  armée  de  croisés  qui  mar- 
chait pour  reconquérir  Jérusalem,  pé- 
nétra dansl' Asie  Mineure  :  épuisé  par 
les  nombreux  combats  qu'il  avait  été 
obligé  de  soutenir  contre  les  Turcs  , 
il  ne  put  parvenir  qu'avec  une  armée 
bien  affaiblie  sur  les  frontières  de  la 
Cilicie.  Léon  II  se  hâta  de  se  mettre 
à  la  tête  de  ses  forces  pour  aller  se 
JQJQclre  à  ce  prince  j  mais  U  fut  pré- 


LEO 

venu  par  la  mort  de  l'empereur  qui 
se  noya  dans  la  rivière  de  Seleucie. 
Léon  s'empressa  de  prodiguer  à 
Conrad  ,  fils  du  malheureux  Fré- 
déric, toutes  les  consolations  qui 
étaient  en  son  pouvoir.  Conrad  sé- 
journa quelque  temps  à  Tarse  ,  et 
continua  ensuite  sa  marche  vers  la 
Palestine ,  avec  les  débris  de  son 
armée.  En  1197  ,  Léon  qui  avait 
considérablement  agrandi  la  sou- 
veraineté qu'il  avait  reçue  de  ses 
pères ,  envoya  des  ambassadeurs  au 
pape  Célestin  III ,  et  à  l'empereur 
Henri  VI ,  pour  leur  demander  la 
permission  de  porter  le  titre  de  Roi , 
qui  lui  avait  été  promis  par  l'empe- 
reur Frédéric  Barberousse.  On  le  lui 
accorda  sans  difficulté.  Conrad, ar- 
chevêque de  Maience  ,  fut  charge 
de  lui  porter  le  diadème  et  de  le  cou- 
ronner en  présence  des  grands  de  la 
nation.  Le  patriarche  Grégoire  le 
sacra  ensuite,  le  6  janvier  1198. 
Pour  augmenter  encore  sa  puissance , 
comme  il  était  veuf,  il  épousa  la 
sœur  de  Gui  de  Lusignan  ,  roi  de 
Cypre.  Peu  après,  en  1201  ,  Kaï- 
kaous  ,  sulthan  d'Iconium  ,  fit  une 
invasion  dans  la  Cdicie,  où  il  s'em- 
para de  quelques  châteaux  ;  mais 
bientôt  Léon  reprit  l'avantage,  pé- 
nétra dans  la  Lycaonie ,  et  força 
Kaikaous  de  faire  la  paix.  Ce  prince, 
pour  éviter  le  ressentiment  d'un  de 
ses  frères  ,  vint  ensuite  chercher  un 
asile  à  la  cour  de  Léon,  et  implora  sa 
médiation.  Ce  roi  joignit  à  ses  états 
la  principauté  de  Lampron,  possédée 
depuis  plus  d'un  siècle  par  une  fa- 
mille arménienne ,  rivale  de  la  sienne 
et  toujours  alhéedes  Grecs  :  le  res- 
te du  règne  de  Léon  est  rempli  par 
ses  guerres  avec  les  musulmans  de 
Syrie  et  de  l'Asie-Mineure,  ainsi  que 
par  celles  qu'il  soutint  contre  le 
comtede  Tripoli  et  d'autres  seigneurs 


Î.EO 

.^ncs  qui  TonUieut  l'empêcher  de 
•intrnirduis  L  prinrijiaulp  d'An- 
ii:he,  Khoupon  ,  (ils  d'une  lille  de 
Ml  frère.  Le  rcsullat  de  cetle  der- 
1  re  c\pe«lition  fut  heureux   pour 
Léon,  et  Rlioiipen  ri^^iia  dans  Antio- 
•  lie.  Léon  mourut  après   un  règne 
uloricux  de  trcntc-cpiatre  ans  ,   en 
i  >.  1 9,  ne  laissant  pour  hèriticrcprunc 
lille,  appelée  Zabel  (  ou  Isabelle  )  , 
(lui  fut  proclamée  reiuc  à  sa  place. 
S.  M-if. 
LÉON  III ,  roi  d'Arménie  ,  fils  de 
Haython  ou  Hethoun  P'. ,  monta 
>ur  le  trône  d'Arménie  en  r^tiç).  Pen- 
dant le  rcf;ne  de  son  père  il  avait  eu  le 
commandement  de  toutes  les  forces 
du  royaume.  En  l'an  12GG  ,  les  INla- 
meloucks  d'Egypte  (ireut  une  inva- 
sion en  Cilicie,  où  ils    mirent  tout 
feu   et    à   sang.  Léon   rassembla 
loutesles  troupes  qu'il  put  trouver, 
et  vint  attaquer  les  ennemis  charges 
des  dépouilles  de  ses  sujets.  Ses  forces 
étaient  bien  inférieures;   ce  prince 
voulut  y  suppléer  par  sou  courage; 
plusieurs  fois  il  fut  sur  le  point  de 
mettre  les  Mamelouks  en  fuite  :  il  leur 
disputa  la  victoire  avec  le  plus^  grand 
acharnement  ;  mais  à  la  fin  ses  trou- 
pes avant  ëtè  mises  on  déroute  ,  et 
son  frère  Théodore  ayant  été  tué ,  il 
fut  forcé  de  se  rendre  prisonnier.  Les 
vainqueurs  l'emmenèrent  en  Egypte, 
où  ils  le  traitèrent  avec  distinction. 
Sou  père,  pour  obtenir  sa  délivrance, 
fut  obligé  de  céder ,  l'an  i  '268 ,  tou- 
tes  les  forteresses   de  ses  états  si- 
tuées entre  le  fleuve  Djéhan   et  la 
^vrie.  Peu  après,  eu  laOQ,  Haythoa 
al)diqua  la  couronne  eufaveur  de  son 
(ils,  it  se  rôtira  dans  un  monastère. 
V     'lit  les  premières  années  de  son 
i  ,  L  annc  s  occupa  quederé- 

['      ■  Li  maux  causés  par  l'invasion 
1!  v|  '.cns  ;  il  fit  rebâtir  les  mo- 

i;  les  église»  qwi  ayaicut  ttf? 


LEO  145 

ruine's,  fit  environner  de  murs  la  ville 

de  Sis  ,  sa  capitale,  pour  la  mrltre  à 
l'abri  d'un  coup  do  main  ,  et  y  fit 
construire  de  magnifiques  palais.  Eu 
i'274>  les  Égyptiens,  appelés  par 
quelques  rebelles ,  revinrent  en  Cili- 
cie, où  ils  commirent  encore  beau- 
coup de  ravages;  mais  ils  lurent 
bientôt  chassés,  et  contraints  de  fairo 
une  paix  honorable  pour  les  Armé- 
niens. En  i'27f),  Léon  alla  à  Tau- 
riz  ,  à  la  cour  d'Abagha ,  empereur 
des  Mongols  ,  et  y  renouvela  les 
traités  faits  avec  son  père.  En 
i^.-jy,  Abagha  envoya  son  frère 
Mangou-Teraour ,  avec  une  puissante 
armée,  pour  combattre  le  sultan 
d'Egypte  Kelaoun  ,  et  faire  la  con- 
quête de  la  Syrie.  Le  roi  de  Géorgie 
Démétrius  II  ,  le  roi  d'Arménie, 
et  un  grand  nombre  de  princes  de 
la  grande  Arménie ,  se  trouvèrent  à 
cette  expédition.  Les  alliés ,  d'abord 
vainqueurs ,  pénétrèrent  jusqu'à  E- 
messe  ,  où  ils  furent  défaits  j)ar  suite 
de  l'incapacité  de  Mangou-Teraour, 
qui  fut  réduit  à  repasser  honteuse- 
ment l'Euphrate.  Léon ,  après  s'être 
distingué  par  son  courage ,  ramena 
avec  peine,  dans  son  royaume,  les  dé- 
bris de  son  armée;  et  il  s'occupa  aus- 
sitôt de  mettre  ses  états  en  défense 
contre  les  Mameloucks,  dont  il  avait 
à  redoulci'  la  vengeance  ,  et  qui ,  ce- 
pendant, le  laissèrent  en  paix  jusqu'à 
sa  mort ,  arrivée  au  commencement 
de  l'an  1289.  Son  fils  Haytbon  II 
lui  succéda.  S.  M-n. 

LEON  IV,  fds  de  Théodore  III, 
succéda  eu  1 3o5  ,  à  son  oncle  Hay- 
thon II,  qui  abdiqua  en  sa  faveur,  et 
qui  continua  de  dliiger  les  affaires , 
parce  que  son  neveu  était  enoorc 
fort  jeune.  Ce  prince  n'en  montra 
pas  moins  une  sagesse  et  une  matu- 
rité qui  lui  concilièrent  l'amour  de 
iQi  sujets  ;  I9ais  il  o'cut  pas  le  temps 


ï45  LEO 

de  rendre  à  sa  patrie  tous  les  services 
qu'elle  avait  droit  d'en  attendre.  Bi- 
larghou  ,  gênerai  mongol ,  qui  com- 
mandait dans  l'Asie-Mineure ,  entra 
dans  la  Cilicic  en  i3o8,  se  rendit 
maître  de  la  personne  du  roi ,  ainsi 
que  de  son  tuteur  Haython  ^  et  les  fît 
massacrer  tous  deux.      S.  M-n. 

LEON  V ,  fils  d'Oschin  ,  trère  de 
Haytlion  II ,  monta  sur  le  trône  en 
l'an  i3:io,  après  la  mort  de  son  père, 
n'étant  âge  que  de  dix  ans  ;  Oschin  , 
prince  de  Gorigos,  qui  épousa  la 
veuve  du  dernier  roi ,  filte  du  roi  de 
Cypre,  fut  déclaré re'gent  du  royaume. 
Le  règne  de  Léon  V  ne  fut  qu'un 
long  enchaînement  de  malheurs.  Les 
discordes  civiles  ,  les  invasions  des 
Mameloucks,  des  Tatars  et  des 
Turkomans,  réduisirent  à  la  der- 
nière extrémité  les  Arméniens,  qui  ne 
cessaient  d'appeler  vainement  à  leur 
aide  les  chrétiens  de  l'Occident.  Ils 
s'adressèrent  aussi  aux  princes  des 
Mongols  de  Perse ,  leurs  anciens 
alliés  ;  et  en  \Z'iZ  ,  le  sultan  Abou- 
Said  renouvela  les  traités  faits  autre- 
fois avec  eux  ,  et  leur  fournit  contre 
les  Égyptiens ,  quelques  faibles  se- 
cours ,  qui  ne  leur  furent  pas  d'une 
grande  utilité.  En  i33o,  Léon  se 
Brouilla  avec  son  tuteur  :  soutenu  par 
les  Lusignan  ,  ses  parents  du  côté  de 
sa  mère  ,  il  attaqua  Oschin  ,  le  vain- 
quit, et  le  fit  mourir  ainsi  que  beau- 
coup d'autres  Arméniens  :  il  donna 
leurs  biens  à  ceux  qui  l'avaient  se- 
couru ;  ce  qui  mécontenta  beaucoup 
ses  sujets.  En  i335  ,  les  Égyptiens 
firent  une  invasion  en  Câlicie  :  sans 
moyens  de  leur  résister,  Léon  fut 
obligé  de  se  réfugier  dans  des  mon- 
tagnes inaccessibles ,  pendant  que 
l'on  ravageait  son  royaume  presque 
sous  ses  yeux.  Vainement  il  envoya 
une  ambassade  au  pape  pour  lui  de- 
mander de  l'appui  j  il  ne  put  rie« 


LEO 

en  obtenir ,  et  il  ne  revint  dans  ses 
états ,  que  quand  les  infidèles ,  las  de 
pillage  ,  s'en  retournèrent  en  Syrie. 
Léon  mourut  en  \ol\'i ,  après  un  rè- 
gne malheureux  de  vingt-deux  ans. 
Il  ne  laissa  pas  d'enfants  ,  et  il  fut  le 
dernier  prince  delà  ligne  masculine 
desRhoupenians.  Les  grands  de  l'Ar- 
ménie choisirent  Jean  de  Lusignan 
pour  le  remplacer.  S    M-n. 

LEON  yi ,  prince  de  la  maison 
des  Lusignan  de  Cypre ,  fut  procla- 
mé, en  1 365  ,  roi  d'Arménie  ,  après 
un  interrègne  de  deux  ans.  Il  fut  le 
dernier  monarque  qui  porta  la  cou- 
ronne d'Arménie.  A  peine  était-il  sur 
le  trône  que  les  Egyptiens  entrèrent 
dans  la  Cilicie  :  pour  s'opposer  à 
leur  marche ,  il  envoya  à  leur  ren- 
contre son  connétable  Libarid,  qui 
fut  vaincu  et  tué, après  avoir  com- 
battu avec  beaucoup  de  courage. 
Léon  demanda  la  paix  au  sultan  des 
Mameloucks ,  qui  ne  la  lui  accorda 
qu'au  prix  de  grandes  sommes  d'ar- 
gent :  mais  ensuite ,  informé  que 
Léon  avait  envoyé  des  ambassadeurs 
en  Europe,  pour  en  tirer  du  secours , 
le  sultan  résolut  d'anéantir  le  royau- 
me d'Arménie.  Le  général  Schahor- 
Oghli  entra  aussitôt  dans  la  Cilicie , 
avec  ordre  de  poursuivre  le  roi  jus- 
qu'à la  dernière  extrémité;  il  pénétra 
sans  difficulté  dans  ce  royaume  ;  la 
capitale  Sis  fut  prise  et  brûlée  en 
1 3^  ijLéon,  et  son  connétable  Scha- 
han ,  prince  de  Gorigos,  furent  vain- 
cus j  le  roi ,  qui  avait  été  blessé  dan* 
cette  bataille ,  se  réfugia  dans  des 
montagnes  inaccessibles ,  où  il  se  tint 
long-temps  caché,  et  on  le  crut  mort  : 
mais  en  1 3-^3  ,  il  revint  dans  la  ville 
de  Tarse ,  dans  le  temps  quesa  femme 
Marie  allait  épouser  Othon ,  duc  de 
Brunswick ,  qui  devait  être  couronné 
roi  d'Arménie.  Léon,  rétabli  dans 
ses  drpits,  chercha  encore  à  entamer 


^t%  négociations  «vec  le  sultan  d'E- 
ç;vptc,qin  ,  sûr  du  rosidtal  de  celte 
lutte  inégale  ,  ne  voulut  entendre  au- 
rune  proposition.  La  guerre  reeorn- 
inenva  ,  en  i374>  ^^ec  une  nouvelle 
fureur  :  toutes  les  villes  et  les  châ- 
teaux qui  restaient  au  roi  furent  pris 
successivement ,  et  ce  prince  fut  con- 
traint de  s'enfermer  dans  la  forteresse 
de  Gabar ,  avec  sa  femme ,  sa  fille  et 
le  connétable  Schahan.  Ils  y  soutin- 
rent un  siège  de  neuf  mois ,  et  furent 
obliges ,  par  le  manque  de  vivres ,  de 
se  rendre  prisonniers,  en  1 375.  Léon 
fut  conduit ,  avec  sa  famille ,  à  Jéru- 
salem ,  et  de  là  au  Caire ,  où  il  resta 
(■aptif  environ  six  ans.  En  i38i  ,  il 
obtint  sa  délivrance  parla  mc'diation 
de  Jean  I*'".,  roideCastille;  il  passa 
alors  en  Europe,  alla  d'abord  à  Rome, 
nuis  en  Espagne ,  à  la  cour  de  son  li- 
bérateur ,  d'où  il  vint  en  France  au- 
près de  Charles  V^  Il  tenta  d'engager 
ce  prince ,  ainsi  que  le  roi  d'Angle- 
terre ,  à  le  rétablir  dans  ses  états ,  et 
fit ,  dans  cette  vue,  plusieurs  voya- 
ges en  Angleterre  ,  pour  négocier  la 
paix  entre  les  deux  rois.  Il  ne  put 
réussirdans  son  projet.  Le  roi  d'An- 
gleterre lui  accorda  une  pension  de 
vingt  mille  marcs  ,  tandis  que  le 
roi  de  France  lui  donnait  cinq 
(  ents  livres  par  mois.  La  plupart 
les  autres  princes  de  l'Europe  en 
agirent  de  même  à  son  égard ,  de 
sorte  qu'il  devint  plus  riche  qu'il  ne 
l'avait  jamais  été  sur  son  trône.  Il 
avait  fixé  sa  résidence  à  Paris ,  où 
il  mourut  le  9.9  novembre  i393, 
*t  il  fut  enterré  dans  l'église  desCé- 
lestius;  son  tombeau  se  voyait  encore 
il  y  a  peu  de  temps  au  Musée  des 
Pelits-.'Vugustins.  S.  M-w. 

LEON  (  Jean  ),  surnommé  l'A- 
fricain ,  géographe  arabe  du  seiziè- 
me siècle,  étiit  né  à  Grenade ,  où  sa 
f«<millc  tenait  un  rang  distingué  par- 


LEO  li^ 

ta'i  les  Maures.  Son  nom  ëtait  j^Uia-' 
San  ehn  Mohammed  alvazas  alfasi. 
Quand  sa  patrie  ,  dernier  boulevard 
de  la  puissance  des  Maures  en  Es« 
pagne,  fut  assiégée,  en  1 491,  ses 
parents  l'emmenèrent  encore  enfant 
en  Afrique.  11  reçut  une  éducation 
soignée  à  Fez,  qui  était  alors  la  mé- 
tropole des  sciences  dans  cette  par- 
tie du  monde.  A  l'âge  de  seize  ans  , 
il  suivit  son  oncle,  qui  alla,  comme 
envoyé  du  roi  de  Fez,  vers  le  roi  de 
Tombut,  et  ne  revint  que  quatre  ans 
après.  Il  fit  ensuite  d'autres  voyages 
dans  la  partie  occidentale  du  nord  de 
l'Afrique  et  en  Barbarie,  tantôt  com- 
me chargéd'aflàircs  de  différents  prin- 
ces ,  tantôt  comme  voyageur  curieux  : 
il  traversa  l'Atlas,  le  grand  désert;  vit 
aussi  l'Arabie ,  la  Perse,  la  Tartarie, 
l'Arménie ,  la  Syrie  et  l'Egypte.  Il 
revenait  de  ce  dernier  pays  pour  la 
seconde  fois  ,  après  être  allé  de  Fez 
à  Constantinople  :  le  navire  sur  le- 
quel il  était  embarqué  fut  pris  par 
des  corsaires  chrétiens  près  de  l'île 
de  Zerbi ,  sur  la  côte  de  Tripoli ,  en 
i5 17.  Mené  à  Rome,  on  fit  don  de 
sa  personne  au  pape  Léon  X.  Ce  pon- 
tife, ami  des  lettres,  n'eut  pas  plu- 
tôt reconnu  dans  l'esclave  arabe  un 
homme  savant  et  d'un  caractère  ai- 
mable ,  qu'il  l'accueillit  avec  une 
bienveillance  distinguée ,  et  lui  ac- 
corda une  pension  considérable.  Il 
le  fit  instruire  dans  la  religion  chré- 
tienne ,  fut  son  parrain  ,  et  lui  donna 
ses  deux  noms.  Jean  Léon  fit  ensuite 
son  principal  séjour  à  Rome,  et  fré- 
quenta aussi  Bologne;il  apprit  l'italien 
et  le  latin,  et  ouvrit  un  cours  de  langue 
arabe.  Son  disciple  le  plus  célèbre 
fut  Gille  Anlonini ,  cardinal ,  évéque 
de  Vilerbe  et  général  des  Auguslins. 
On  n'a  rien  de  bien  certain  sur  ce 
(fu'il  devint  après  la  mort  de  Léon X, 
Il  paraît  que,  négligé  parles  succès- 
10.. 


i48  LEO 

seurs  de  ce  ponlife ,  il  forma  le  des- 
sein de  retourner  eu  Afrique,  On  lit, 
il  est  vrai ,  dans  Ramusio ,  qu'il  resta 
à  Rome,  et  qu'il  y  mourut  j  mais  ce 
passage  ne  se  trouve  que  dans  la 
quatrième  édition  ,  pid)liee  en  1 588, 
trente  ans  après  la  mort  de  l'auteurj 
tandis  que  dans  la  seconde  e'dilion , 
qui  parut  en  1 554 ,  Ramusio  dit  sim- 
plement que  Jean  Le'ou  vécut  long- 
temps à  Rome.  D'ailleurs,  J.  A.Wid- 
mandsladt ,  savant  orientaliste  alle- 
mand ,  du  seizième  siècle ,  atlirme 
que  Jean  Léon  s'était  retiré  à  Tunis, 
où  il  avait  fait  de  nouveau  profes- 
sion du  mahométisme.  «  J'ai  eu 
»  deux  fois  l'intention,  ajoute  Wid- 
î)  manstadt,  d'entreprendre  le  voya- 
»  ge  d'Afrique  ,  pour/  profiter  de 
»  l'entretien  et  des  lumières  d'un 
ï)  li^mme  si  docte  ;  mais  des  évé' 
»  nements  inattendus  m'ont  empê- 
))  elle  d'elfectuer  ce  projet.  »  On  peut 
s'en  rapporter  sur  ce  fait  au  témoi- 
gnage d'un  lîomme  aussi  grave  j  et 
l'on  doit  regretter  de  ne  rien  appren- 
dre de  plus.  Voici  les  ouvrages  de 
Jean  Léon  ,  dont  on  a  connaissance  : 
L  Description  de  V Afrique.  Elle 
avait  d'abord  été  composée  en  arabe; 
et ,  suivant  Ramusio,  l'auteur  la  por- 
tait  avec  lui  quand  il  fut  pris.  On  lit 
quelque  part,  que  le  manuscrit  arabe 
se  trouvait  dans  la  bibliothèque  de 
Vincent  Piiielli  ;  mais  on  ignore  ce 
qu'il  est  devenu.  Ramusio  nous  ap- 

})rend  que  ce  fut  ce  livre  qui  attira 
'attention  de  Léon  X  sur  Jean  Léon, 
et  que  ce  pontife  l'invita  à  le  traduire 
en  Italien.  Celui-ci  se  mit  à  l'ouvrage 
dès  qu'il  eut  acquis  une  connaissance 
sullisante  de  cette  langue;  mais  il 
ne  l'acheva  qu'en  15^6,  quatre  ans 
après  la  mort  de  son  bienfaiteur. 
Jean  Léon  traduisit  aussi  bien  qu'il 
put ,  dit  naïvement  Ramusio  ;  mal- 
gré ses  efforts,  sa  version  est  remplie 


LEO 

de  fautes  de  grammaire.  Le  raanus-^ 
crit  s'égara,  et  resta  inconnu  jus- 
qu'en i55o.  Un  heureux  hasard  le 
fit  tomber  alors  entre  les  maius  de 
Ramusio,  qui  pensa  avec  raison  qu'il 
ne  pouvait  mettre  un  morceau  plus 
précieux  en  tête  du  Recueil  dévoya^ 
ges  et  de  navigations  dont  il  allait 
publier  le  premier  volume.  Il  fil  tous 
ses  elforts  pour  corriger  les  fautes  j 
mais  il  en  est  resté  beaucoup.  C'est 
cette  description  qui  a  fait  surnom- 
mer Jean  héon^V  Africain.  L'éditeur 
annonça  qu'aucun  écrivain  n'avait 
décrit  cette  partie  du  monde  avec 
autant  de  détails,  d'exactitude  et  de 
vérité.  Ce  jugement  ne  fut  contredit 
par  personne  :  on  désirerait  pour- 
tant que  cet  ouvrage  offrît  plus  de 
liaison  et  d'enchaînement  dans  le 
récit  des  faits,  et  plus  de  précision 
sur  les  lieux  et  leurs  distances.  Mai- 
gré  ces  défauts,  c'est  un  monument 
d'un  prix  mfini.  Tous  les  auteurs  qui 
ont  parlé  de  l'Afrique  après  J.  Léon, 
ont  profité  de  son  livre.  De  nos  jours 
même ,  il  n'a  guère  perdu  dans  l'opi- 
nion des  géographes;  car  pour  plu-' 
sieurs  pays  de  l'intérieur  de  cette 
partie  du  monde,  il  est  le  seul  écrit 
original  auquel  on  puisse  avoir  re- 
cours. Marmol  l'a  copié  le  plus  sou- 
vent sans  le  citer  ;  Dapper ,  au  con- 
traire, reconnaît  hautement  qu'il  a 
été  pour  lid  d'un  grand  secours  ;  en- 
fin Bruns  ,  dans  sa  description  de 
l'Afrique,  et  Hartman,  dans  son  ex- 
cellent travail  sur  Edrisi ,  ont  em- 
ployé avec  succès  les  matériaux 
que  leur  a  fournis  Jean  Léon  ,  et 
rendu  justice  à  son  mérite.  «  Il 
»  connaît  parfaitement ,  dit  Bruns  , 
»  la  langue  ,  les  mœurs  ,  l'histoire^ 
»  la  géographie ,  l'histoire  naturelle 
»  des  pays  qu'il  décrit;  on  en  est  dans 
»  l'admiration  ,  et  l'on  ne  peut  que 
»  lui  assignei'  mi  rang  honorable 


LEO 

»  parmi  les  bonîs  voyageurs  ;  il  an- 
»  nonce  plus  triustruclion  ,  cl  bien 
w  inuius  lie  penchant  à  la  supersli- 
w  tion  el  à  la  creiiulite ,  que  la  plu- 
»  pari  des  écrivains  de  son  tcinj>s.  » 
Jean  Léon  promit  qu'à  son  retour 
d'Europe  en  Afrique,  il  écrirait  ses 
voyaj;es  dans  les  autres  parties  du 
monde  ;  il  paraît  que  les  circons- 
tances l'ont  empêche  de  tenir  sa  pa- 
role. Jean  Florins ,  recteur  à  Anvers, 
traduisit  sou  ouvrage  en  latin  ,  sous 
ce  titre:  Joanms  Leonis  Africain  de 
iotius  Africœ  descriplione  ,  lib.  ix; 
Anvers ,  1 55(j ,  in- 1 2  ;  ibid.  1 558 , 
in- 1  i;  Zurich  ,  1 559  >  ^^" ' '^j  Leyde, 
El7.evir,  i63'i:  celte  édition,  la  plus 
jolie  de  toutes, est  la  plus  souvent  ci- 
tée. Florins  a  mal  compris  le  sens  de 
beaucoup  d'expressions   italiennes. 
Il  a  rendu  plus  obscur  ce  qui  l'était 
déjà  ;    enfin ,    son    style   latin    est 
rempli  de  fautes ,  dont  on  n'aurait 
p^s  cru  capable  un  recteur  du  sci- 
rièrae  siècle.  La  traduction  française 
est  meilleure  ;  elle  est  intitulée  :  Des- 
cription  de  l'Afrique ,  tierce  partie 
du  monde  ,  écrite  de  notre  temps  , 
pur  Jean  Léon  Africain,  première- 
ment en  languie  arabe ,  puis  en  tos^ 
cane,  et  à  présent  mise  en  français. 
Elle  se  trouve  en  tête  d'un  Recueil  de 
voyages,  traduits  de  l'italien    par 
Jean  Temporal,  et  tires  ,  la  plupart, 
du    premier   volume  de    Ramusio. 
Lyon,  i556,  i  vol.  in-folio.  Cette 
traduction  parut   séparément ,  An- 
vers,  i556,  in-isi.    V Afrique  de 
Jean  Léon  a  aussi  ëtë  traduite  en 
anglais,  Londres  ,  1600  ,  iji-4**» ,  et 
eu  hollandais  ,  Rotterdam  ,  i6(i5  , 
in  -  4**.   :  ^G  n'est    qu'un    extrait. 
Lorsbach   a    traduit   ce    livre     en 
allemand  ,  Herborn  ,    i8o5  ,   in-S'*, 
Celle  version  est  faite  sur  l'original 
italien  ,  enrichie  de  notes,  et  précé- 
dée d'une  préface  que  l'on  peut  cou- 


LEO  î49 

sidérer  comme  un  très-bon  mémoire 
sur  Jean  Léon  et  ses  ouvrages. 
Ce  volume  a  un  premier  titre 
qui  l'annonce  comme  le  commence- 
ment d'un  recueil  d'anciens  voyages. 
IL  Ln  petit  livre  en  trente  cha- 
pitres sur  les  savants  célèbres , 
c' est-à-dire  yles  médecins  et  les  phi- 
losophes qui  ont  écrit  en  arabe.  C  et 
opuscule  était  sans  doute  en  arabe  ; 
on  n'eu  a  qu'une  version  en  latin  bar- 
bare et  souvent  inintelligible.  Elle  a 
clé  publiée  par  J.  H.  Holtinger  sur 
une  copie  de  Florence ,  dans  son  Bi- 
hliotliecarium  quadripartitum  ,   et 

ÏfarFabriciusdaus  le  tome  xiii  de  sa 
)iblioibèquegrecquc.Gasiri  attribue, 
on  ne  sait  par  quel  motif ,  cette  ver- 
sion à  Holtinger.  li'extreme  incor- 
rection du  style  fait  croire  qu'elle 
est  plutôt  de  Jean  Léon  lui-même. 
IIL  Vocabulaire  arabe  et  espagnol; 
les  trois  premières  feuilles  contien- 
nent des  mots  hébreux  et  arabes  ;  les 
sept  suivantes ,  des  mots  arabes  et 
latins.  Jean  Léon  récri\'it  à  Bologne, 
pour  un  médecin  juif  :  c'est  bien  peu 
de  chose.  Il  est  coté  n».  59  parmi 
les  manuscrits  de  l'Escurial.  \\.  Ex- 
trait des  chronifjues  mahométanes , 
souvent  cité  dans  la  Description  d» 
l'Afrique.    Ramusio    dit    que  Léon 
avait  composé  beaucoup  d'ouvrages 
historiques.  V.  De  la  religion  ma- 
hométane.  \  I.  Grammaire  arabe, 
Ramusio  nous  apprend  qu'un  Juif  de 
sa  connaissance  en  avait  un  exem- 
plaire. \IL  Un  traité  de  la  rhéto- 
rique arabe.  VÏII.  Poésies  arabes. 
IX.    Becueil    d*épitaphes   arabes, 
Jean   Léon   les  rassembla  dans  ses 
voyages  en  Barbarie  ,  et  fit  présent 
de  ce  livre  à  un  prince  de  Fez,  poiu* 
le  consoler  de  la  mort  du  roi,  son 
père.  On  ne  connaît  ces  divers  ou- 
vrages que  par  le  témoignage  de  l'au- 
teur, qui  les  cite  daus  sa  Description 


[5o 


LEO 


de  l'Afrique.  On  peut  voir  Casiri , 
Blblioih.  arah.  flisp.  tom.  i,p.  17*2, 
et  la  notice  sur  Jean  Léon  par  Bruns, 
ddiisles Ephémérid.  géogr.  deZach, 
1801  ,  toni.  I,  p.  309.  E-s. 

LÉON  (  Pierre  Gieça  de  ) 
passa  d'Espagne  en  Amérique  ,  à 
î'age  de  treize  ans ,  y  e'tudia  avec 
soin  les  mœurs  des  habitants  du 
Pérou ,  et  en  composa  une  histoire 
curieuse,  dont  la  première  partie 
parut  à  Sëville  ,  en  i553  ,  in-f».  , 
en  espagnol;  et  à  Venise,  i555  et 
en  1557,  i'^'^^"  ^^  italien.  Cet  ou- 
vrage estime'  nous  donne  une  étran- 
ge ide'e  des  mœurs  corrompues  des 
peuples  dont  il  contient  l'histoire. 
—  LÉON  (  Louis  de  ) ,  Aloysius  Le- 
gionensis  ,  fils  d'un  gentilhomme 
castillan,  naquit  en  1527,  proba- 
blement à  Grenade ,  et  entra  ,  en  1 543, 
dans  l'ordre  des  Augustins  ,  dont  il 
devint  vicaire-géne'ral  et  provincial. 
Il  dressa  les  statuts  pour  la  réforme 
qu'il  fut  un  des  premiers  à  y  intro- 
duire ,  et  mourut  à  Madrigal ,  le  '2 3 
août  1591.  Il  était  très-savant  dans 
le  grec  et  dans  l'hébreu.  Un  de  ses 
amis ,  qui  n'entendait  pas  le  latin  , 
l'ayant  prié  de  lui  traduire  en  langue 
vulgaire  le  Cantique  des  cantiques  , 
les  inquisiteurs  en  saisirent  une  co- 
pie ,  et  arrêtèrent  l'auteur  ,  qui  fut 
détenu  pendant  cinq  ans  dans  les  pri- 
sons du  Saint-Office ,  où  il  donna  des 
exemples  héroïques  de  patience  et 
de  grandeur  d'ame.  Son  innocence 
fut  enfin  reconnue ,  et  il  rentra  dans 
sa  chaire  de  professeur  à  Salamanque. 
Ses  ouvrages  sont:L  La  Traduction 
du  Cantique  des  Cantiques^  avec  un 
petit  Commentaire  dont  il  l'avait 
-accompagnée,  le  tout  traduit  en  latin 
par  lui-même,  Salamanque,  1589. 
ÎL  De  utriusque  agni  tfpici  ac  veri 
immolationis  legitimo  tempore ,  ib. 
l^i^o ,  Madrid ,  i6o4 ,  in-4«.  Le  P. 


LEO 

Daniel  a  traduit  cet  ouvrage  en  fran- 
çais ,  sous  ce  titre  :  Traduction  du 
système  d'un  docteur  espagnol  y  sur 
la  dernière  pdque  de  J.-C. ,  avec 
une  dissertation  sur  la  discipline 
des  quarto-décimans ,  Paris  ,  1693 , 
in- 12.  IIL  De  prohœ  matris-fami- 
liœ  officio.  IV.  De  diuinis  nomi- 
niuus.  V.  Un  Commentaire  sur  le 
psaume  xxvi.  VL  Uji  recueil  de 
poésies  espagnoles ,  foît  estimées, 
Fr.  de  Quevedo  les  pulîlia  le  premier 
à  Madrid ,  1 63 1 ,  in- 1 6 ,  sous  ce  titre  : 
Obras  proprias  y  tradnciones  la- 
tinas ,  griegasy  italianas  ;  mais  la 
meilleure  édition  est  celle  qu'a  don- 
nécD. Grég.  Mayans,  Valence ,  1 76 1 , 
in-S'*. ,  précédée  d'une  Vie  de  l'au- 
teur. T-D. 

LÉON  de  Byzance  ,  né  dans 
cette  ville  ,  se  forma  à  l'école  de 
Platon.  Ses  talents  pour  la  politique 
et  pour  les  affaires  ,  le  firent  choisir 
par  ses  compatriotes  pour  aller  vers 
les  Athéniens  et  vers  Philippe  ,  roi 
de  Macédoine ,  en  qualité  d'ambas- 
sadeur. Ce  monarque  ambitieux  ,  dé- 
sespérant de  se  rendre  maître  de 
Byzance  ,  tant  que  Léon  serait  à  la 
tête  du  gouvernement ,  fit  parvenir 
aux  Byzantins  une  lettre  supposée  , 
par  laquelle  ce  philosophe  promet- 
tait de  lui  livrer  sa  patrie.  Le  peu- 
ple ,  sans  examiner  ,  courut  furieux 
à  la  maison  de  Léon  ,  qui  s'étrangla 
pour  échapper  à  la  frénésie  de  la  po- 
pulace. Cet  illustre  infortuné  laissa 
plusieurs  écrits  d'histoire  et  de  phy- 
sique ;  mais  ils  ne  sont  pas  parvenus 
jusqu'à  nous.  Il  florissait ,  vers  l'an 
35o ,  avant  J.-G.  On  l'a  confondu 
quelquefois  avec  un  Léon  de  Carie , 
auteur  de  divers  ouvrages  d'histoire, 
qui  sont  perdus.  T-d. 

LÉON  de  Marsi,  en  Italie  ,  dans 
le  douzième  siècle  ,  moine  du  Mont-- 
Gassin  ,  cardinal ,  évêque  d'Oslie  , 


T.EO 

m  m  posa  les  Chroniques  du  Mont- 
l'nssin,  qui,  m  ycompiTiianl  le  qiia- 
Irièmr  livre  fait  par  Pierre  Diacre, 
vont  depuis  saint  Benoît  jusqu'en 
1 1 38.  Cet  ouvrage  est  trcs-cstimc  , 
parée  que  les  faits  en  sont  tirés  des 
archives  de  ce  célèbre  monastère;  il 
a  été  imprime  à  Paris  ,  en  i6o3  et 
if)68,  in-fol.  ,  avec  la  Chronique 
d'Aimoin.  Ou  le  trouve  aussi  dans 
Muratori.  T-d. 

LÉOX  de'  ModÈne,  dont  le  nom 

Îiroprcest  .îuda  .^n<?,rilsd'Isaac,cé- 
èbrc  rabbin,  néàModcnc  vers  l'an 
1.574^  se  distingua  dans  la  poésie  hé- 
braïque et  dans  la  poésie  italienne. 
Dès  rage  de  quatorze  ans ,  il  com- 

Sosa  un  poème  hébreu  en  l'honneur 
e  sou  maître,  le  rabbin  Moïse.  De- 
puis cette  épr»qiie  ,  ses  compatriotes 
n*ont  rien  fait  de  remarquable  qu'il  ne 
l'ait  chanté  dans  ses  vers.  Il  alla  se 
fixer  à  Venise ,  dont  il  dirigea  long- 
temps la  synagogue.  Les  ouvrages 
imprimés  et  manuscrits  qu'il  a  laissés 
sont  en  grand  nombre,  ainsi  que  les 
éditions  qu'il  a  soignées.  Il  mourut 
à  Venise,  en  i654,  âgé  de  80  ans.  On 
a  de  lui  :  I.  Biblia  hebrœa  rahbinica, 
Venise,  1610,  4  vol.  in-fol.  Cette 
édition  renferme  le  Targum  ,  la 
grande  et  la  petite  Massore,  les  com- 
mentaires des  Rabbins,  et  toutïce  qui 
se  trouve  dans  les  premières  éditions 
de  Bomberg;  mais  il  y  a  plus  de 
trois  cents  corrections.  Elle  fut  sou- 
mise à  la  censure  des -inquisiteurs.  II. 
Novo  Dittionario  hehraico  et  ita- 
//ano, Venise,  161 2,  in-4**. ;  seconde 
édition,  plus  correcte  et  plus  ample, 
Padoue,  i04o,  in-4''.  Léon  de  Mo- 
dène  s'était  proposé  de  donner  une 
traduction  italienne  de  l'ancien  Tes- 
tament à  l'usage  des  juifs  et  des 
chrétiens;  mais  l'inquisition  s'étant 
opposée  à  son  dessein  ,  il  tâcha  d'y 
suppléer  parce  diclionuaire.  (  rojr. 


LEO 


i5i 


sur  les  deux  éditions  qui  sont  égale- 
ment rares,  Richard  Si  m  ou ^  Lettres 
choisies  ,  tome  r»^.  et  Bibliothèque 
choisie,  t.  v.  )  III.  Pi  Ariè  (Bou- 
che de  lion  );  c'est  un  supplément  à 
l'ouvrage  précédent ,  imprimé  dans 
l'édition  de  Padoue.  IV.  Désert  de 
Juda,  Venise,  1598  ,  et  1602  ,  in- 
4**.  C'est  un  recueil  de  discours  qui 
ne  manquent  pas  d'élégance.  V.  //is- 
toire  de  la  Pdque ,  en  italien,  carac- 
tères hébraïques  avec  le  texte  he'breu 
à  coté;  suivie  de  quelques  hymnes  , 
Venise ,  1609 ,  in-fol.  \  I.  Caph  na- 
chath,  Mischna ,  avec  de  courtes  ro- 
tes, et  une  lettre,  Venise,  i6'25,in-8». 
et  Constantinople ,  avec  les  points- 
voyelles.  VIL  Éviter  le  mal:  c'est 
le  titre  d'un  dialogue  sur  les  jeux  de 
hasard;  un  des  interlocuteurs  les  ap- 
prouve, et  l'autre  les  condamne,  Ve- 
nise, 1 59.5,  in-80.  ;  ibid. ,  1 0 1 5  ;  Wit- 
temberg,  1 665 ,  in-4*'. ,  avec  une  ver- 
sion latine  et  des  notes  d'Auguste 
Pfeiffer;  enfin,  Leipzig,  i656,  in-S*»., 
avec  une  traduction  allemande  d'un 
juif  devenu  chrétien ,  nommé  Fré- 
déric-Albert, sous  ce  titre  :  Lusor 
doctiis  sed  non  conversus.  VIII.  Re- 
jeton de  justice, Yenisey  1 585,in-8<*.  : 
livre  de  morale  oii  sont  contenus  des 
préceptes  excellents  pour  bien  A-ivre, 
avec  des  apologues  et  des  figures. 
IX.  Secret  des  justes  :  cet  ouvrage 
renferme  cent  secrets  de  la  nature,  et 
quarante  énigmes  avec  leur  expo- 
sition et  explication,  Venise ,  169^  , 
in-4''.  ;  Francfort  sur  le  Mein  ,  i6r)'t , 
et  ailleurs.  X.  Maisonde  Juda,  table 
des  matières  du  livre  intitulé  ;  En 
Israël,  Venise,  1625,  in-fol.;  mutilé 
par  Josias  Pinto  dans  le  Sepher 
Mèor  enàim,  i643.  XL  Maison  du 
pain  de  Juda ,  table  des  matières 
par  ordre  alphabétique ,  du  livre  in- 
titulé ZiccaronthorahMoscfte,  Ve- 
nise, 1O28,  in-foL  XI L   Cœur  de 


l52 


LEO 


lion,  par  allusion  à  son  nom  (i), 
"Venise ,  i6i7,in-4°.  Dans  œt  ou- 
vrage ,  Léon  deModcne  traite  de  la 
mémoire  aiiifirielle  et  de  la  manière 
d'apprendre  tonte  sorte  de  sciences. 
Xlîf.   Historia  clegli  riti  hehraici, 
dove  si  ha   brei^e  e  total  relatlone 
di  lutta   la   vita^,  costumi,  riti,  e 
osservanze  degli   hehrei  di  questi 
tenipi ,  Paris,  1637  >  P^"^  ^^^  soins 
dcGafïarel,  mais  remplie  de  fautes; 
1 638 ,  par  les  soins  de  l'auteur,  avec 
beaucoup  d'augmentations  et  de  cor- 
rections. Cette  histoire  fut  traduite 
eu  anglais  ,  et  imprimée  à  Londres, 
i65o  ,  in-8^.  Richard  Simon  la  tra- 
duisit en  français;  et  son  ami,Frémont 
d'Ablancourt ,  la  fit  imprimer  avec 
ime  préface  de  sa  façon,  Paris,  1674, 
in- 1^2.  R.  Simon  donna  une  seconde 
édition  de  sa  traduction,  plus  ample 
et  plus  correcte,  Paris,  i68r,  in- 12. 
Elle  est   préférable  à  l'original,  à 
cause  du  Supplément   touchant  les 
sectes  des  Car  dite  s  et  des  Samari- 
tains, qui  étaient  presque  inconnues, 
et  à  cause  d'une  seconde  partie  ,  qui 
a  pour  titre:  Comparaisoji  des  céré- 
monies des  juifs,  et  de  la  discipline 
de  l'Église  ;  ai^'cc  un  Discours  tou- 
chant les  dijferentes  messes  ou  litur- 
gies qui  sont  en  usage  dans  tout  le 
monde.    Elle    est    dédiée    à    Bos- 
suet.  L'Histoire  des  coutumes  des 
juifs,  traduite  en  flamand  ,  a  été  im- 
primée à  Amsterdam ,  i683,  in-S^.  : 
la  traduction  latine  est  de  Francfort, 
1 693,  in-i  2.  Cet  ouvrage  n'a  pas  été 
Inutile  à  Biixtorf,  fils  ,  pour  donner 
à  sa  Synagogue  des  juifs  de  plus 
grands  développements  ;  et  s'il   est 
vrai  que  Léon  de  Modcne  se  soit 
proposé  de  relever  les  défauts  des 
premières  éditions  de  la  Synagogue, 


(i)  La  tribu  de  Tnda  aTait  un  Jion  pour  em- 
Vi»n«-  Léon  tl«  IVIodène  se  nommiiiit  Juda  ,  «e 
^ai^it  a.u(^*i  appeler  Lioa  (^Ari^). 


LEO 

et  d'y  suppléer,  ses  peines  n*ont  pas 
été  perdues.  Les  critiques  ont  remar- 
qué quelques  différences  notables  en- 
tre les  diverses  traductions  de  Y  His- 
toire des  coutumes  des  juifs.  Cela 
n'est  pas  étonnant  ;  les  auteurs  de 
ces  traductions  n'avaient  ni  la  même 
croyance ,  ni  les  mêmes  opinions. 
XIV.  Lehusèim  ou  Sjntagviata  de 
Mardochée  Japhé ,  avec  des  notes  , 
à  la  suite  de  la  Misclina,  n".  YL 
Voyez  Bartolocci ,  Bibliot.  Rahh. , 
et  Wolf ,  Bihliot.  Héb.       L-b-e. 

LÉON  DE  Saint  -  Jean  ,  carme 
réformé,  et  provincial  de  son  ordre, 
mourut  en  1 67 1 ,  après  avoir  com- 
posé plusieurs  ouvrages  de  piété 
et  d'histoire  ecclésiastique  ,  dont  les 
principaux  sont  :  Des  Méditations  du 
saint  amour  de  D.eu^  i6a3,  in- 12. 
—  Vies  et  éloges  du  P.  Yvon;  de 
Françoise  d'Amboise  ,  duchesse  de 
Bretagne;  de  la  mère  Marie  de 
Saint-Charles  etc.  —  Journal  de  la 
maladie  et  de  la  mort  du  cardinal  de 
Richelieu,  i643.  ■--  Histoire  de 
l'hostie  miraculeuse  de  Paris  ,  i653, 
1-660.  — Delineatio  Eedonensis  Car- 
melitarum  observantice,  in-4*'.  —  La 
France  convertie ,  ou  la  Vie  de  St.- 
Denis  l'aréopagite,  avec  un  Abrégé 
des  antiquités  de  Montmartre ,  1661, 
in-8«.  Ï-D. 

LEON,  diacre,  né  à  Caloë,  village 
d'Ionie,  vers  le  milieu  du  x^.  siècle, 
fut  envoyé  fort  jeuneà  Constantinople 
pour  y  faire  ses  études.  11  s'y  trouva 
en  966 ,  le  jour  même  que  la  popu-. 
lace  se  révolta  contre  Nicéphore 
Phocas,et  il  admira  la  fermeté  que  ce 
prince  opposa  aux  clameurs  de  la 
multitude.  Il  paraît  qu'il  se  destina 
de  bonne  heure  à  l'état  ecclésiasti- 
que ;  et  il  nous  apprend  lui  -  même 
qu'il  suivit  l'empereur  Basile  II  , 
dans  la  guerre  contre  les  Bulgares  , 
et  (ju'il  çtait  diacvc  iQrsque  ce  priuçç 


LEO 

pssnva, PII  981 ,  une  dcfaito  totale,  en 
M-  rrtirant  de  la  ville  de  Friaditza  , 
ipi'il  venait  d'assiéger.  Léon  ne  dut 
liii-niènie  son  saluf  qu'à  la  vitesse  de 
>ou  elieval.  Nous  lui  devons  une  liis- 
toiiT  raisonncc  des  événements  qui 
>e  sont  passes  sous  ses  yeu\  (  de 
|)  H)  à  9'j5  ),  et  qui  donne  de  grands 
iLUaiIssurla  jjncrrc  que  Sviatoslav, 
u;rand-duc  de  Russie,  fil  aux  Grecs 
vers  9"!  :  c'est  un  supplément  im- 
]>orlint  pour  l'Histoire  byzantine. 
On  y  trouve  des  descriptions  ani- 
mées, des  portraits  qui  ne  manquent 
p.jsde  vcVilc;  mais  quand  on  en  con- 
^ld^re  l'ensemble,  on  ne  voit  plus 
que  le  style  diffus  et  affecte'  des  rhé- 
teurs du  siècle  de  Thcodose.  Il  n'a  ni 
rclegancedeProcope,  ni  la  clarté  de 
Jean  d'Epiphanie,  ses  contempo- 
rains, ni  le  style  plein  de  chaleur  de 
VMeiiade.  Son  ouvrage  est  du 
nombre  des  manuscrits  grecs  de  la 
bibliothèque  royale  de  Paris.  L'im- 
]>ression  qui  en  avait  été  commen- 
rce  sons  Louis  XIV,  fut  arrêtée  par 
la  mort  de  l'éditeur  (le  P.  Çombefis). 
IM.  Hase  vient ,  de  nouveau  ,  d'eu 
entreprendre  la  publication  à  l'im- 
])riiiR'rie  royale,  en  un  vol.  in-fol. , 
qui  contiendra  aussi  le  Traité  de 
Tactique,  composé  jwr  ordre  de 
Niccphorc  Phocas ,  un  fragment  de 
l'Histoire  de  Jean  d'Epi pbanie,  et 
le  texte  grec  de  la  Lettre  de  Théo- 
dose le  grammairien  sur  la  prise  de 
S^rracuc  par  les  Sarrasins.  L'im- 
pression de  ce  volume  était  déjà 
fort  avajicée  en  181 7.  L'éditeur  en 
a  donné  une  savante  analyse  dans 
le  lonii'  VIII  des  Notices  et  Extr. 
des  1/.VJ.  C.  T-Y. 

TiÉON  t>'Or'.  iKTE,  né  dans  cette 
ville  ,  au  treizième  siècle  ,  domini- 
cain suivant  les  uns,  franciscain  sui- 
vaiil  les  autres,  laissa  deux  Chroiii- 
^iies  ;  l'une  des  papes  ,  ^ui  finit  en 


LEO  i53 

i3i4;  Pantrc  des  empereurs,  qu'il 
avait  termi^iée  en  i3o8.  Il  abrège 
Martin  le  Polonais  ,  et  y  ajoute  plu- 
sieurs faits  tirés  de  divers  autre» 
écrivains.  Son  style  se  sent  de  la 
barbarie  du  sii;cle,  et  sa  critique,  de 
l'ignorance  qui  régnait  alors  ;  cenen- 
dant  l'ouvrage  est  utile  pour  1  his- 
toire de  son  temps.  Jean  Lami  l'a 
tiré  de  la  poussière  des  bibliothè- 
ques, et  l'a  fait  imprimer  à  Florence, 
en  1737  ,  dans  ses  Deliciœ  eriidi- 
toruni ,  avec  l'abrégé  de  Jean  de  l'Islc 
De  Gestis  Francorum;  il  y  a  joint 
de  très-bonnes  notes,  des  corrections, 
et  diverses  pièces  qui  n'avaient  pas 
encore  paru.  T-d. 

LÉON  HÉBREU, autrement  R.  Juda, 
fils  d'Isaac  Abarbanel ,  savant  rab- 
bin, naquit  dans  le  royaume  de  Cas- 
tille,  aju'ès  le  milieu  du  quinzième 
siècle.  Chassé  d'Espagne,  par  Ferdi- 
nand et  Lsabelle,  en  i^^i  ^  il  se 
réfugia  à  Naples  avec  son  père.  L'an- 
née suivante ,  Charles  YIII ,  roi  de 
France,  s'étant  emparé  de  cette  ville, 
Léon  alla  fixer  son  séjour  à  Gènes  , 
où  il  exerça  long-temps  la  médecine 
avec  honneur.  Nous  avons  de  lui  trois 
dialogues ,  composés  en  italien  ,  et 
imprimés  pour  la  première  fois  à 
Rome,  i535,  in-4". ;  et  V'enise , 
i54i,  sous  ce  titre  :  Dialo^hi  de 
amore  composli  per  Leone,  medico, 
di  natione  liebreo  et  di  poi  falto 
christiano.  Les  interlocuteurs  sont 
Philon  et  Sophie  qui  se  débitent 
force  idées  alambiquées  et  cabalis- 
tiques. Ces  dialogues  ,  traduits  en 
latin ,  par  Sarrazin  ,  suivant  Chr. 
Wolf ,  furent  d'abord  imprimés  à 
Venise  ,  1 5()4  ,  et  ensuite  insérés 
dans  le  premier  volume  de  la  Col- 
lection des  écrivains  cabalistiques. 
Cette  traduction  est  très  -  élégance. 
L'ouvrage  de  Léon  hébreu  a  été  tra- 
duit deux  fois  eu  espagnol  (  F.  le 


t54  LEO 

(litalogue  de  La  Serna  Santander  ). 
(les  dialogues  ont  aussi  trouve'  deux 
traducteurs  français  ,  Pontus  de 
Thiard  ,  et  le  seigneur  du  Parc,  dont 
les  traductions  lurent  imprime'es  à 
Paris  ,  en  i58o  ,  in  -  i6.  André 
Carautiusaecrit  contre  ces  dialogues, 
lÂhro  i^.de  amore  ^  cap.  3.  Barto- 
Jocci  et  d'autres  pensent  que  les  Dia- 
logues iV  amour  oniélé  d'abord  com- 
pose'sen  latin  ;  mais  l'italien  offre  des 
marques  certaines  d'originalité.  Q. 
Bartolocci,  qui  connaissait  Léon  Hé- 
breu, et  qui  était  lié  avec  lui ,  faisait 
un  grand  éloge  de  son  esprit  et  de 
son  cœur.  L-b-e. 

LÉON  le  Grammairien^  l'un  des 
auteurs  de  l'Histoire  Byzantine,  n'est 
connu  que  par  l'ouvrage  qui  porte  son 
nom.  Le  P.  Labbe  conjecture  que 
c'est  le  même  que  Léon  Asianus  dont 
parle  Scylitzès  (  Fojez  la  Biblioth. 
Coisliniana ,  p.  iio8  ),  et  que  Léon 
de  Carie  nommé  par  Gedrenus  dans 
la  préface  de  sa  chronique.  Fabricius 
partage  ce  sentiment, et  il  ajoute  que 
l'écrivain  qui  fait  le  sujet  de  cet  ar- 
ticle, pourrait  être  le  même  que  Léon 
le  Grammairien ,  archevêque  de  Ga- 
labre ,  dont  on  a  une  épître  canonique 
à  un  prêtre,  nommé  Jean,  De  u  rore 
antè  ordinationem  ducendd.  Cette 
épître  a  été  publiée  en  grec  et  en  latin, 
par  Cotelier,  dans  le  tome  m  de  ses 
Ecclesiœ  grœcce  monument  a.  Quoi 
qu'il  en  soit  ,  il  est  certain  ,  par  la 
inscription  même  de  son  ouvrage  , 
que  Léon  le  Grammairien  le  ter- 
îtiinaPan  ioi3.  Son  histoire  est  in- 
titulée :  Chronographia  res  à  recen- 
lioribus  Imperatoribus  gestas  com- 
pîectens.  Elle  comprend  les  vies  de 
Léon  l'Arménien,  de  Michel  le  Bègue, 
de  Théophile,  de  Michel  III,  de  Ba- 
sile le  Macédonien  ,  de  Léon  le  Phi- 
I  osophe,d' Alexandre  et  de  Constantin 
Porphyrogencte,  et  s'étend  par  con- 


LEO 

scqucnt ,  de  l'anSiS  â  929.  Cette 
histoire  est  e'crite  d'une  manière  très^ 
succincte  et  avec  beaucoup  de  simpli- 
cité. Elle  a  été  traduite  en  latin,  par 
Jacques  Goar,  et  publiée  à  la  suite  de 
l'histoire  de  Théophane ,  dont  elle 
est  une  continuation,  Paris  ,  impri- 
merie royale,  i655,in-fol.  Cousin  a 
traduit  en  français  l'ouvrage  de  Léon. 
On  a  trouvé  tant  de  ressemblance 
entre  l'histoire  qui  porte  le  nom  de 
Léon  le  Grammairien,  et  celle  d'un 
anonyme,  continuateur  de  Théopha- 
ne, que  les  critiques  en  ont  conclu 
que  l'un  de  ces  deux  écrivains  avait 
fait  son  profit  du  travail  de  l'autre. 
L'histoirede  l'anonyme  est  intitulée: 
Chronicon  jussu  Constantini  Por- 
phjrog.  conscriptum.  ;  elle  a  été  trad. 
en  latin,  et  publiée  par  le  P.  Franc. 
Combefis,dans  le  Recueil  qui  a  pour 
titre  :  Historiée  Byzantinœ  Scripto- 
res  post  Theophanem^  Paris ,  1 685  , 
iu-fol.  W-s. 

LÉON  -  PINELO   (  Antoiive  ). 

F^OJ'.  PiNF.LO. 

LÉONARD  (  Frédéric  ) ,  impri- 
meur à  Paris  ,  fut  d'abord  associé 
de  Sébastien  Huré,  auquel  il  succéda 
depuis  dans  la  charge  d'imprimeur 
ordinaire  du  Roi:  reçu  le  27  février 
i653  ,  il  fut  syndic  de  sa  commu- 
nauté eu  1 666 ,  et  e^it  aussi  le  titre 
d'imprimeur  du  clergé.  Il  imprima 
un  grand  nombre  de  livres ,  et  par- 
ticulièrement plus  de  trente  volumes 
de  la  collection  des  auteurs  latins  in 
usum  Delphini  :  l'un  de  ses  enfants 
nommé  aussi  Frédéric  ,  fut  reçu  li- 
braire en  1 688. — Marc- Antoine  Léo- 
nard DE  Malpeines,  fils  de  ce  der- 
nier, naquit  à  Parisiens  avril  1700, 
fut  conseiller  au  Châtelet,  et  mourut 
le  5  mai  1768.  On  a  de  lui  .Essai  sur 
les  hiéroglyphes  des  Egyptiens  y  tr^ 
de  V anglais  de  TVarhurtoii,  1744» 
2  vol.  in- 12.  Ses  autres  travaux  sont 


Li:o 

tes  manuscrits. — Llonard  (Mar- 
liii-Auguslin),  autre  (îls  de  Frédéric, 
îi«  à  Paris  le  iS  août  i6<)6,  em- 
brassa IVlat  ccclcMaslique,  et  mou- 
rut le  4  janvier  iri)S.  11  avait  pu- 
blié: \.Ilëfu(aUon  du  livredes  Eègles 
pour  i intelligence  des  saintes  Ecri- 
tures ^  i-ji^,  in- l'i.  II.  Traité  du 
fTts  littéral  et  du  sens  mystique  des 
intes  Ecritures ,  17.^7  ,  in  -  i'^^ 

A.  B-T. 
LÉONARD  (  Nicolas-Germain  ) 
naquit,  en  1744»  ^  ^^  Guadeloupe,  et 
■vint  fort  jeune  en  France,  où  il  fit  ses 
études.  Il  dut  son  talent  pour  la  poé- 
sie ,  et  ses  succè*  dans  le  genre  qu'il 
adopta  ,  à    l'élude    constante   des 
élégiaques  latins  ,  et  des  poèmes  de 
Gesner ,  qui  venaient  d'être  traduits 
en  français  et  se   trouvaient  alors 
entre  les  mains  de  tout  le  monde.  Ses 
idylles  ,  seul  titre  qu'il  ait  à  une  ré- 
putation durable  et  non  contestée  , 
sont  remplies  de  passages  imités  de 
Tibulle  ,  de  Properce  et  surtout  de 
Gesner ,  qu'il  sut  mcler  avec  beau- 
coup d'art  à  ses  propres  idées.  L'a- 
[     mour  des  lettres  n'étouffa  point  en 
lui  l'esprit  des  affaires.  Le  ministre 
Chauvelin ,  son  protecteur,  le  fit  en- 
'     trerdans  la  carrière  diplomatique,  où 
*     il  obtint,  en  1 778,  la  place  de  charge 
d'affaires  de  France  à  Liège.  Ce  fut 
I  us  cette  résidence  qu'il  composa  les 
Lettres  de  deux  amans  de  Ljon,  ro- 
\     man  qui  eut  beaucoup  de  vogue  et  fut 
ï     traduit  en  anglais  et  en  italien.  Il  écri- 
i     vil  aussi ,  pendant  son  séjour  à  Liège, 
des  Mémoires  historiques  sur  les  ré- 
volutions de  ce  petit  état  ;  ces  mé- 
moires n'ont  pas  été  imprimés ,  et 
Ton  assure  qu'ils  ne  méritaient  pas 
de  l'être.  Léonard  ,  entraîné  par  le 
désir  de  revoir  la  France,  ou  plutôt 
par  ce  besoin  de  changement  qui  le 
i>oursuivit  toute  sa  vie,  quitta  Liège 
'    U  diplomatie  eu  même  temps , 


LEO 


i55 


et  revint  à  Pads,  qu'il  quitta  bien- 
tôt aussi  pour  retourner  à  la  Gua- 
deloupe, où  il  ne  put  rester  que  peu 
d'années.  A  son  arrivée  en  France , 
en  1787  ,  il  publia  la  quatrième  et 
la  meilleure  édition  de  ses  ouvrages, 
augmentée  de  la  relation  d'un  Voya- 
ge aux  Antilles,  du  roman  pastoral 
iV  Alexis,  et  d'un  poème  des  Saisons^ 
3  vol.  in-8°.  Peu  de  temps  après  ,  il 
repartit  encore  pour  la  Guadeloupe , 
avec  le  titre  de  lieutenant-général  de 
l'amirauté  et  de  vice-sénéchal  de  la 
colonie.  11   se  dirigea   de   nouveau 
vers  la  France,  en  1792,  et  termina 
ses  jours  à    Nantes ,  le  26  janvier 
1793,  le  jour  même  où  il    devait 
s'embarquer    pour    revoir    sa    pa- 
trie. Léonard   était   d'un  caractère 
doux:  son  humeur  mélancolique  et 
paresseuse   se  fait  sentir ,  non  sans 
charme,  dans  tous  ses  ouvrages  j  mais 
elle  exerça  une  influence  malheureuse 
sur  le  cours  entier  de  sa  vie.  M.  Gam- 
penon,  son  neveu  ,  a  donné  une  édi- 
tion complètede  ses  œuvres, en  3  vol. 
in-80.,  Paris  ,  1798.  Toutes  les  pro- 
ductions qu'elle  renferme  ne  sont  pas 
égales:  quelques-unes,  échappées  à  la 
première  jeunesse  de  l'auteur ,  ou  en- 
fantées pendant  la  maladie  de  lan- 
gueur qui  le  conduisit  au  tombeau  , 
annoncent  un  talent  qui   n'est  pas 
mûr  encore  ou  qui  est  déjà  affaibli.  Le 
reste  est  remarquable  par  la  douceur 
des  sentiments  ,  la  grâce  des  images 
et  l'harmonieuse  élégance  de  la  ver- 
sification. A-O-R. 

LÉONARD  ARÉTIN.roj.  Bruni, 
VI,  120. 

LÉONARD  DE  PISE.  Voye» 

FlDONACCI. 

LÉONARD  DE   VINCI.  Foy^z. 
Vinci. 

LÉONARD  (  I  )  D'UDINE  ,  ou  de 

'  1)  Fiit«rJ  ajoiitw  à  «en   nom    ç«lui  Je  iVii- 


i50  LEO 

Utino  ,  l'un  des  plus  fameux  prëdi- 
ca leurs  de  son  temps  ,   ëlait   ne  à 
Udine  ,  capitale  du  Frioul ,  au  com- 
mencement du  quinzième  siècle.  Il 
prit ,   fort  jeune  ,  l'habit  de  Saint- 
Dominique  ;  et  un  acte  du  chapitre 
gênerai  de  Tordre  ,  tenu  à  Cologne  , 
en  i4-i8  ,  le  cite  comme  un  savant 
professeur  de  the'ologie.  Il  eut  l'hon- 
neur de  prêchera  Florence, en  i435, 
devant  le  pape  Eugène  IV  et  les  car- 
dinaux ,  et  parut  ensuite  avec  e'clat  à 
Venise,  à  Milan  ,  à  Rome  et  dans  les 
principales  villes  d'Italie.  Il  fut  élu 
prieur  du  couvent  des  Dominicains 
de  Bologne  ;  quelque  temps  après  , 
provincial  de  toute  la  Lombardie^  et 
mourut ,  suivant  le  P.  Echard  ,  vei-s 
1470.  Les  sermons  de  Léonard    de 
i/7mo  tiennent  beaucoup  de  ceux  de 
Barlelteet  de  Menot:  ils  ont  été  réim- 
primes plusieurs  fois  dansle  cours  du 
xv^.  siècle.  On  recherche  les  éditions 
des  divers  sermons  qui  suivent  :  I. 
Quadragesimale  aureum,  1 47 1  ?  "!■ 
4*^., première  édition,  de  202  feuilles 
à  longues  lignes,  que  l'on  croit  sortie 
des  presses  de  Franç.deHailbrun,à  Ve- 
nise; elle  est  excessivement  rare,  et  a 
été  vendue  quelquefois  à  des  prix  très- 
élevés.  La  seconde  édit.  est  intitulée: 
Sermones  quadragesimales  de  legi- 
bus  animœ    implicis  et  sermo  pri- 
mus  de  pecca'.o  gidce ,  Venise,  F.  de 
Hailbrun  ,  i473,  in-folio  ;  elle  con- 
tient un  plus  grand  nombre  de  ser- 
mons que  la  première,  et  pour  cette 
raison  est  moins  recherchée  des  ama- 
teurs. On  en  cite  une  troisième  ,  in- 
folio ,  imprimée  sur  deux  colonnes  , 
que  l'on  conjecture  avoir  été  exécu- 
tée par  Ulric  Zel  de  Hanau  ,    vers 
l'année  i473j  une  quatrième,  Ulm, 
Jean  Zainer  ,  1478,  in-folio  ;  et  une 
cinquième,  Paris ,  Ulric  Gcring,  1478, 
que  Debure  crovait  être  la  première 
de  toutes.  (  Vo/.  la  Bibliogr.  instruct. 


LEO 

n<».  5 1 3.)  Les  éditions  postérieures  de 
Vicence  ,  de  Lyon ,  etc.  n'ont  aucune 
valeur.  II.  Sermones  aureide  sanclis 
per  totum  annuiii  ,  Venise ,  F.  de 
Hailbrun,!  473, in-fol.  On  en  cite  une 
autre  édition  plus  rare  ,  imprimée 
in-folio  sur  deux  colonnes  ,  et  qu'on 
attribue  à  Ulric  Zel  de  Hanau.  Quant 
à  l'édition  prétendue  de  1 44^  •,  on 
a  démontré  que  cette  date  était  celle 
de  l'ouvrage  :  l'édition  d'Udine,  1 466, 
citée  par  plusieurs   bibliographes  , 
est  imaginaire.  III.  Sermones jloridi 
de  dominicis  et  quihusdain  festis  j 
Ulm ,  J.  Zainer  de  Reutlingen,  1 47B , 
in-folio;  Vicence,  i479  1  in-fol.  ;  im- 
primés plusieurs  fois  depuis  à  Lyon  , 
à  Paris ,  etc.  On  a  encore ,  sous  le 
nom  de  Léonard  de  Utino  ,   deux 
recueils  de  sermons  pour  le  carême  ; 
Sermones  quadragesim.  de  jlagellis 
peccatorum  ,  Lyon  ,   1 5 1 8  ,  in-8°. 
de  petitionibus ,  ibid. ,  1 5 1 8 ,  in-8^. 
goth.  Pierre  Tardif  ,  dominicain  et 
professeur  en  théologie  ,  à  Cham- 


béry  ,  est  l'éditeur  de  ces  sermons , 
que  le  P.  Echard  attribue  à  Léonard 
de  Datis,  religieux  du  même  ordre  , 
mort  en  i4i4-  Le  P.  Marc-Antoine 
Séraphini  ayant  découvert  au  com- 
mencement   du    xvii*^.    siècle,    un 
ouvrage  inédit  de  Léonard  de  Utino 
le  corrigea,  et  le  fit  imprimer  sous^ 
le  titre  suivant  :  Tractatus  mi  ahi- 
lis   de  sanguine    Christi  in  triduO 
mortis  effaso  :  an  fuerit  unitus  Di^ 
nnitati?  Nem.se,  1627  ,  in-4''.  (1] 
Cette  question  théologique  occupai 
les  écoles  d'Italie  en  i463.  Prosp 
Marchand  a  donné    un   article  ou' 
rieux  sur  Léonard  de  Utino ,  dan 
lequel  il  relève  les  inexactitudes  dt 
bibliographes  antérieurs  ;  mais  lui 


(i)  L'édîtion  fie  1473,  citée    dans  le  Kouvei 
Dioiiannaire  ujiiverself  n'a  jamais  existé. 


LEO 

t' me  n'a  pas  connu  toutes  les  edi- 
•  iis  des  ouvraccs  de  Léonard.  W-s. 
LÉONARD  le  Limousin,  peintre- 
.  iuailleur,na(juit  à  Limoges  en  i48o. 
I  lan^'ois  l*'.  lui  donna  la  direction 
lie  la  manufactured'cmaux  qu'il  avait 
tondee  à  Linio|;es  ,   avec  le  titre  de 
IM'iulre  -  cmailleur  ordinaire  de  la 
t  luimbre  du  Roi.   Léonard  lit  exë- 
( nier  une  quantité  considérable  de 
<i>upcs,  de   vases,  d'aiguières,   de 
plats  d'une  grandeur  extraordinaire, 
tl  d'une fonne  ])leiue d'élégance. Ces 
objets  sont  eurichisd'excellentes  pein- 
tures ,  faites  sur  les  dessins  de  Ra- 
phaël ,  de  Jules-Romain  ,  de   Jean 
Ciousin  ,  et  toutes  remarquables  par 
la  beauté  des  formes  ,  la  pureté  du 
dessin  et  la  richesse  des  composi- 
tions. Au  moyen  de  procédés  qu'il 
avait  inventés ,   Léonard  était  j)ar- 
venu  à  donnera  ses  coideurs  un  éclat 
et  une  transparence  inconnus  jusqu'à 
lui.  Cependant  les  découvertes  plus 
récentes  de  la  chimie  ont  permis  de 
porter  ce  genre  de  peinture  à  un  de- 
gré de  force  et  d'éclat  bien  supérieur 
à  toutceque  l'on  connaît  des  produits 
de  la  manufacture  de  Limoges,  que 
l'on  peut  plutôt  considérer  comme  de 
belles  faïences  que  comme  de  véri- 
tables émaux.  Les  ouvrages  de  Léo- 
nard les  plus  remarquables  sont  les 
quatre  tableaux  qui  ornent  le  tombeau 
de  Diane  de  Poitiers,  et  dont  on  peut 
voir  la  description  dans  le  tome  iv 
du  A  [usée  des  Afonuments  français , 
par   M.    Lenoir,p.  8i  et  suiv.  Le 
Musée  du   Louvre  en  possède  deux 
autresdoutl'uu  représente  le  Portrait 
è(juestre  de  Henri  II  ,    et   l'autre, 
le  Connétable    de    Montmorencjr. 
Après  la  mort  de  Léonard  ,  la  direc- 
tion delà   manufacture  de  Limoges 
passa  entre  les  mains  de   Courtois  , 
»on  disciple ,  qui  sut  maintenir  dans 
sa  perfecliou  ce  bel  établissement. 


57 


LEO 

C'est  ce  dernier  .irtistc  qui  exécuta 
neuf  tableaux  ,  ayant  chacun  f\  pieds 
8  pouces  de  haut,sur>ipiedsO  pouces 
de  large, etdeformeovale,  représen- 
tant tous  les  dieux  de  la  fable.  Ces  ta- 
bleatix ,  les  plus  grands  de  ce  genre 
que  l'on  connaisse,  avaient  été  peint» 
sur  les  dessins  dePrimatice,par  ordre 
de  François  L'. ,  qui  voulait  en  dé- 
corer le  château  de  Madrid,  dans  lo 
bois  de  Boulogne.  Ils  irtf  furent  ache- 
vés qu'en  i559  ,  l'année  de  la  mort 
de  Henri  IL  Ils  ont  été  gravés  par 
Sadeler,  format  in-8".    On  ignore 
comment  ces  chefs-d'œuvre ,  qui  de- 
vaient appartenir  au  gouvernement , 
avaient  passé  dans  le  commerce  ;  un 
étranger  ,  qui  les  a  acquis  ,  en  a  mal- 
heureusement privé  la  France.  Mais 
il  est  certain  que  ces  peinliu'cs  n'é- 
taient pas  de  Léonard;  et  c'est  à  tort 
que  dans  le  Dictionnaire  fiistoriijue 
elles  lui  sont  attribuées.         P-s. 

LÉONARDI,  (Le  vénérable  Jean) 
instituteur  des  clercs  réguliers  de  la 
Mère  de  Dieu  ,  naquit  à  Decimo  , 
bourg  du  territoire  de  Lucques.  S(  s 
parents ,  qui  jouissaient  d'un  peu 
d'aisance  ,  confièrent  son  éducation 
au  curé  de  Villa-Basilica ,  sous  le- 
quel il  Gt  moins  de  progrès  dans  les 
sciences  que  dans  la  vie  spirituelle. 
11  entra  ensuite  chez  un  apothicaire 
de  Lucques ,  pour  apprendre  la  phar- 
macie. Il  se  fit  remarquer  dès-lors  par 
sa  douceur,  son  application  ,  et  sur- 
tout par  une  piété  vive  et  sincère.  En 
sortant  d'apprentissage,  il  s'associa  à 
un  artisan  (jui  consacrait  le  produit 
de  sou  travail  au  soulagement  des 
pauvres  religieux  et  des  pèlerins  ;  il 
partagea  pendant  dix  années  les  soins 
que  cet  homme  charitable  donnait 
aux  étrangers.  Au  bout  de  ce  teni])s, 
il  résolut  de  renoncer  au  monde  ;  et 
n'ayant  pu  obtenir  de  ses  parents  la 
permission  de  s'cuâcvelii*  dans  un 


8 


LEO 


cloître ,  il  pria  son  confesseur  de  le 
diriger  dans  le  choix  d'un  état  :  il 
avait  alors  'l'j  ans.  Il  n'hésila  pas  à 
recommencer  ses  premières  études  ; 
et  ayant  aclievé  ses  cours  de  philoso- 
phie et  de  théologie  ,  il  fut  ordonné, 
prêtre,  en  1571.  11  entreprit  aussitôt 
des  conférences ,  qui  attirèrent  un 
^rand  nombre  d'auditeurs ,  et  eui-ent 
les  plus  heureux  résultats.  On  lui  as- 
signa, en  ilj'j^jïaLncicmie  chapelle 
de  Notre-Dame  de  la  Rose,  pour  te- 
nir ses  assemblées  ;  et  cette  église  de- 
vint lé  berceau  de  l'institut  dont  il 
avait  déjà  conçu  le  plan,  et  qui  devait 
avoir  pour  but  spécial  l'instruction 
des  pauvres.  Les  compagnons  qu'il 
s'associa  dans  ce  pieux  dessein ,  le 
reconnurent  pour  le  chef  de  celle 
sainte  entreprise ,  et  le  prièrent  de 
leur  donner  une  règle,  à  l'exemple 
des  premiers  fondateurs  ;  mais  Léo- 
nardi   se  contenta  d'écrire  sur  un 
morceau  de  papier  :  Obéissance,  et 
leur  dit  que  ce  mot  renfermait  toute 
la  règle.  L'établissement  de   cette 
congrégation  éprouva ,  surtout  de  la 
part  du  clergé,  des  obstacles  qu'il 
vint  à  bout  de  surmonter ,  et ,  avec 
l'autorisation  de  l'évêque  de  Lucques, 
il  tint,  en  1 583,  le  premier  chapitre, 
dans  lequel  il  fut  élu  supérieur-géné- 
rai ,  sous  le  titre  modeste  de  recteur. 
lise  rendit  aussitôt  après  à  Rome, 
pour  faire  approuver  par  le  Saint- 
Siège,  les  statuts  de  la  congrégation, 
qu'il  avait  rédigés  ;  mais ,  pendant 
son  absence ,  ses  ennemis  obtinrent 
du  sénat  un  décret  qui  le  bannissait 
à  perpétuité,  sous  des  peines   sé- 
vères. Tandis  qu'il  recevait  cet  af- 
front de  ses  concitoyens ,  la  réputa- 
tion de  ses  vertus  augmentait  cha- 
que jour  le  nombre  de  ses  disciples. 
Le  pape  lui  donna ,  dans  le  même 
temps,  une  preuve  de  son  estime,  en 
l'envoyant  à  Naples ,  avec  le  titre  de 


LEO 

commissaire  apostolique , pour  apai- 
ser les  troubles  excités  par  les  pré- 
tentions  de  différents  ordres  reli- 
gieux. A  son  retour  de  cette  mission, 
il  présenta  ses  constitutions  au  sou- 
verain pontife ,  qui  les  approuva  de 
la  manière  la  plus  flatteuse.  Le  sacré 
collège  écrivit  au  sénat  de  Lucques, 
en  faveur  de  Léonardi,  dont  les  inten- 
tions n'avaient  pu  qu'être  mal  inter- 
prêtées, et  il  lui  fut  permis  de  reve- 
nir dans  celte  ville  :  il  n'y  resta  que 
peu  de  mois ,  parce   qu'il  reçut  la 
commission  d'établir  la  réforme  dans 
les  couvents  de  Monte- P^ergine  et 
de  Vall ombreuse.  Il  fut  élu  une  se- 
conde fois  ,  en  1 597  ,  recteur  de  la 
congrégation  :  mais  cette  nouvelle  fut 
le  signal  d'un  soulèvement  général; 
et  pour  l'apaiser,  on  fut  obligé  d'an- 
nuler l'élection.  Le  pape  ,  instruit 
des  menées  qui  avaient  eu  lieu  contre 
Léonardi,  le  nomma  visiteur  aposto- 
lique, et  l'envoya  à  LucqueS;,  avec  des 
pouvoirs  très-étendus.  Léonardi  fit 
agréer  au  cardinal  Baronius ,  le  titre 
de  protecteur  de  la  congrégation  ;  et 
ce  prélat  l'en  désigna  supérieur-géné- 
ral. Il  revint  encore  une  fois  à  Luc- 
ques, en  i6o5:  il  avait  été  précédé 
par  le  bruit  qu'il  était  chargé  d'y  éta- 
blir l'inquisition;  et  il  eut  beaucoup 
de   peine   à    détromper    le   peuple 
ameuté  devant  la  porte  de  son  cou- 
vent. Il  tint,  en  1608,  à  Rome,  le  se- 
cond chapitre  général  de  la  congré- 
gation ,  et  il  employa  le  reste  de  sa 
vie  à  l'affermir  contre  les  efforts  de 
ses  nombreux  ennemis.  Le  P.  Léo- 
nardi mourut  à  Rome,  le  8  octobre 
1609, à  l'âge  de  69  ans.  Le  P.  Louis 
Maracci,  l'un  de  ses  disciples,    a 
écrit  en  italien  la  vie  de  ce  fondateur; 
on  en  trouve  l'abrégé  dans  l'Histoire 
des   Ordres  Religieux,   par  le  P. 
Helyot,  tome  iv,  ch.  xxxvi.  Il  en 
existe  une  plus  récente  et  plus  esti- 


I.EO 

incc,parle  P.  Ch.  Ant.  Erra,  mila- 
inis ,  home ,  1 7^9  ,  in-8<».  On  trouve 
Il  listodc  SCS  ouvrages,  au  nombre  de 
>(^  (  dont  six  seulement  ont  etc  im- 
j  rimes  ),  dans  l'ouvrage  du  P.  Sar- 
irsrlii  ,  De  scriptoribus  conççreg. 
clenconim  reguL  Matris  Dei,  Koinc, 
i753,in-4o.  W-s. 

LEOx\ARDO(LefrèreAuGusTm), 
peintre  d'histoire  ,  de  genre  et  de 
portraits ,  naquit  dans  le  royaume 
de  Valence,  vers  l'annc'e  i58o.  Il 
embrassa  l'état  de  religieux  de  la 
Merci ,  et  s'adonna  avec  ardeur  à 
l'étude  de  la  peinture.  Il  décora  la 
cliapelle  majeure  du  couvent  de 
Noire-Dame  del  Puig ,  d'une  collec- 
tion de  petits  tableaux  très-estime's, 

»  et  (it ,  pour  le  même  couvent ,  quatre 
grands  tableaux, représentant  la  Dé- 
coui'erte  de  Notre-Dame  del  Puig  ; 
le  Blocus  de  Faïence  ,  par  le  roi 
Don  Jayme  ;  la  Reddition  de  cette 
ville;  et  le  Combat  livré  aux  Sar- 
rasins sous  les  murs  de  Puig ,  dans 
lequel  Saint  -  Jacques  secourut  les 
chrétiens.  Ces  tableaux  furent  trans- 
porte's  à  Valence,  en  1788,  et  déco- 
rèrent la  façade  du  couvent  de   la 

.  Merci ,  lorsque  cette  ville  ce'lébra  la 
quatrième  époque  se'culaire  de  sa 
conquête  sur  les  Maures.  En  iGaS , 
Leonardo  se  rendit  à  Se'ville ,  où  il 
peignit  un  tableau  de  la  Samari- 
taine. Appelé  ensuite  à  Madrid  ,  par 
le  supérieur  de  son  ordre  ,  il  fut 
chargé  de  tous  les  embellissements 
du  couvent  de  la  Merci.  Il  peignit 
les  tableaux  que  l'on  voit  dans  le 
grand  escalier,  et  dont  l'un  repré- 
sente la  Fierge  apparaissant  à  St.- 
Rajmond ,  et  l'autre ,  les  Cheva- 
liers de  l'ordre  perdant,  en  présence 
du  pape ,  un  defi  quils  avaient  porté 
aux  religieux  réguliers.  Tous  deux 
sont  exécutes  avec  talent.  Il  existe 
^c  lui ,  à  Tolède,  dans  U  couTcnt 


LEO  15») 

de  la  Merci ,  un  tableau  du  Miracle 
de  la  multiplication  des  pains  ,  où, 
malgré  la  quantité  innombrable  des 

f)ersonnages,  le  peintre  a  su  éviter 
a  confusion  et  introduire  une  variété 
d'expression  admirable.  Le  frère  kn- 
gustin  faisait  des  portraits  d'un  égal 
mérite  ;  et  il  n'est  pas  d'amateur  eu 
Espagne  qui  ne  les  reclicrche  avet 
le  plus  grand  soin.  Cet  artiste  dessi- 
nait avec  correction  ;  il  était  verse 
dans  la  perspective ,  et  ses  composi- 
tions étaient  parfaitement  entendues. 
Quoique  Palomino  Velasco  prétende 
que  Leonardo  soit  mort  à  Madrid  , 
en  1G40  ,  il  est  certain  qu'il  mourut 
à  Valence, sa  patrie.  —  Joseph  Leo- 
nardo, peintre  d'histoire  et  de  batail- 
les, né  à  Madrid  en  1616  ,  fut  élève 
de  Pierre  de  las  Cuevas ,  se  distingua 
des  disciples  de  cet  habile  maître 
par  une  grande  fraîcheur  de  coloris  , 
et  obtint  le  titre  de  peintre  du  Roi.  Il 
existe,  dans  le  palais  du  Retiro,  deux 
tableaux  de  Leonardo ,  dignes  d'être 
connus.  L'un  représente  Brcda,  as- 
siégé par  les  marquis  de  Leganès  et 
de  Spinola;  l'autre ,  une  Marche  mi- 
litaire où  Von  voit  le  duc  de  Fiias 
parlant  à  un  soldat.  Ces  deux  ta- 
bleaux,d'une  très-grande  dimension, 
sont  du  premier  mérite.  La  collection 
des  portraits  des  rois  d'Espagne  ren- 
ferme celui  du  roi  goth  Alaric ,  peint 
par  Leonardo ,  et  qui  passe  pour  un 
des  plus  beaux  de  celte  collection. 
Ce  maître  se  serait  mis  au  premier 
rang  des  peintres  de  son  pays  j  mais 
des  rivaux  jaloux  de  ses  succès  lui 
donnèrent  un  breuvage  qui  lui  fit 
perdre  le  jugement.  Il  était  alors 
dans  toute  la  force  de  son  âge  et  de 
son  talent;  il  fut  forcé  d'abandonner 
son  art,  et  après  avoir  langui  quel- 
ques années ,  il  mourut  à  Sarragosse 
en  ifiSB,  âgé  de  4o  ans.  P-s. 

LÉONCE  (  Saint  )  naquit  à  M 


i<5o 


LEO 


mes ,  au  quatrième  siècle ,  quelques 
aniic'es  après  Saint-Castor  ,  son  frère, 
et  mourut  dans  la  ville  de  Fréjus 
dont  il  était  evcque  ,  le  premier  de'- 
cembre  ^3'2.  Ce  fut  à  sa  ])rière  que 
Saint-Honorat  choisit  sa  retraite  dans 
l'ile  de  Lerins  et  fonda  le  célèbre  mo- 
nastère de  ce  nom,  qui  a  fourni  tant 
de  saints  à  l'Eglise.  Le  savoir ,  les 
vertus ,  la  sainteté  des  mœurs  de 
Le'once,  lui  acquirent  l'estime  de 
l'illustre  e'vêque  d'Arles,  Saint-Hdai- 
re ,  et  l'amitié  de  Cassien  ,  qui  lui 
dédia  ,  après  la  mort  de  Castor ,  les 
lo  premiers  livres  de  ses  Conféren- 
ces ,  composées  à  la  prière  de  ce 
saint.  Toutefois  le  pape  saint  Cé- 
lestin  lui  reprocha  d'autoriser  ,  par 
son  silence ,  l'enseignement  que  se 
permettaient  quelques  prêtres  de  son 
diocèse,  de  la  doctrine  des  semi- 
pélagiens  sur  la  grâce.        Y.  S.  L. 

LEONCE  ,  patrice  d'Orient ,  était 
né  à  Chalcis  ,  dans  la  Syrie,  vers  le 
milieu  du  v*^.  siècle.  Comme  général 
des  Thraces,il  avait  donné  des  preu- 
ves de  son  courage  et  de  son  habi- 
leté ;  et  il  était  fort  instruit  dans 
toutes  les  sciences  cultivées  de  son 
temps.  Une  place  au  sénat  avait  été 
la  récompense  de  ses  services.  Il  se 
lia  avec  lUus  ,  chef  des  ofïices ,  et 
favori  de  l'empereur  Zenon  jet,  de 
concert  avec  un  imposteur  nommé 
Panéprépius  ,  ils  formèrent  le  des- 
sein, non  moins  insensé  que  hardi, 
de  rétablir  les  croyances  du  paga- 
nisme. Illus,  que  le  désir  de  maîtri- 
ser seul  le  faible  Zenon  avait  brouillé 
avec  l'impératrice  Ariadne,  voulut 
achever  de  la  perdre  dans  l'esprit 
de  ce  prince ,  en  l'accusant  d'une 
intrigue  criminelle  ;  mais  instruite 
que  l'ordre  avait  été  donné  de  la 
faire  mourir ,  elle  se  tint  cachée  pen- 
dant la  nuit ,  et  le  lendemain  se  pré- 
senta inopiueiftent  à  l'audience  de 


LEO 

l'empereur,  qui  croyait  ses  ordres, 
exécutés.  Elle  profita  habilement  de 
sasurj)rise  pour  lui  montrer  qu'Ilhis 
était  le  seul  coupable.  Peu  de  jours 
après,  Illus  reçut   un    coup  d'épée 
sur  la  tête  ,  en  montant  l'escalier 
du  cirque;  mais,  un  de  ses  gardes 
ayant  détourné  le  fer,  il  eut  seule- 
ment F  oreille  droite  coupée.  L'empe- 
reur, pour  se  justifier  d'avoir  eu  con- 
naissance du  complot ,  fît  périr  l'as- 
sassin dans  les  supplices  ;  mais  Illus , 
qui  ne  se  croyait  plus  en  sûreté  à 
Constantinople ,  demanda  la  permis- 
sion de  passer  dans  l'Orient,  pour  y 
rétablir  sa  santé.  Plusieurs  sénateurs 
l'accompagnèrent  dans   ce   voyage. 
Arrivé  en  Syrie ,  et  se  voyant  maître 
d'une  armée  considérable ,  il  cessa  de 
dissimuler  ses  projets  ambitieux.  11 
lit  proclamer  Léonce  empereur  ,  at- 
tendant pour  faire  passer  la  couronne 
sur  sa  tetCj  l'issue  des  événements.  Ve- 
rine.  belle-mère  de  Zenon,  et  qu'Illus 
avait  fait  confiner  dans  le  château  de 
Papyre,  fut  tirée  de  sa  prison  et  ame- 
née à  Tarse:  séduite  parles  promes- 
ses des  rebelles,  elle  consentit  a  placer 
elle-même  la  couronne  sur  la  tête  de 
Léonce  ,  en  présence   de   l'armée  , 
qu  elle  harangua  dans  les  termes  les 
plus  énergiques  ;  elle  adressa  ensuite 
aux  gouverneurs  des  provinces  de  l'O- 
rient une  lettre  que  l'histoire  a  con- 
servée. (  Y.  V Histoire  de  Théopha- 
nes  ;,  et  V Histoire  du  Bas^Empire  , 
liv.  XXXVI.  )  Elle  leur  annonça  ,dc.'i]S 
cette  lettre,  qu'elle  avait  confié  l'exer- 
cice de  la  souveraine  puissance  à  Ze- 
non; mais  que  celui-ci  en  ayant  abusé^ 
elle  lui  reprenait  la  couronne  pour  la 
donner  à  Léonce  qui  devait  être  re- 
connu empereur  (  i  ).  La  plupart  des 


(i)  De  pureilies  prétentions  de  la  part  irmia 
femme,  ilit  Gibliciii,  auraient  éloin.é  les  escU- 
vcsd''S  premiers  Césai».  Hist-  d«  la  déctideniit 
d*  l' Empire  ,  toia.  xx,  p.  206. 


\A\cs  (le  Syrie  se  .soumirent  .lussitôt. 
Ldonec  partit  pour  Antioche,  où  il 
s'occupa  de  grossir  son  armce;  il 
avait  tire  du  château  de  Papyrc  les 
trésors  que  Zenon  y  avait  caci)es;  et 
il  s'en  servit  pour  gagner  les  petits 

S  rinces  de  l' Arménie,  et  les  Isaures 
ont  il  augmenta  la  solde.  11  s'em- 
para de  la  ville  de  C.halcis,  sa  patrie, 
restée  fidèle  à  Zenon;  et  il  remporta, 
quelques  mois  après ,  une  victoire 
complète  sur  Longin, frère  de  l'em- 
pereur ,  près  d'Aulioclie.  Mais  l'an- 
née suivante (  4H5  ) ,  le  fameux  Théo- 
do  rie  fut  envoyé  contre  Léonce  ,  le 
défit  dans  plusieurs  rencontres,  et 
l'obligea  de  se  renfermer  avec  Illus, 
dans  le  chîleau  de  Papyre,  que  sa 
position    rendait   inexpugnable  ;   il 
laissa  un  de  ses  lieutenants  devant 
ce  château  pour  en  continuer  le  blo- 
cus ,  qui  dura  trois  années.  Léonce, 
attendait  toujours   les  secours  que 
devait  lui  amener  Troconde ,  frère 
d'IUus  ,  et  cela  d'après  les  prédic- 
tions de  Pancprépius  ;  mais  s'aper- 
ccvant  enfin  qu'il  était  trompé  par 
cet  imposteur ,  il  le  fit  massacrer,  et 
jeter  SCS  membres  par-dessu»  les  mu- 
railles  du  château.  Quelques  jours 
après,  la  trahison  d'un  beau-frère  de 
Troconde  introduisit  les  assiégeants 
dans  la  place  :  Léonce  et  Illus  furent 
mis  à  mort  ( 4B8  ), et  leurs  tètes  en- 
voyées à  Constautinople,  où  ellesdon- 
Tièrent  au  peuple,  pendant  plusieurs 
lu-s  ,  un  alVreux  spectacle.    W-s. 
LÉONCE  ,  LtoNTius  ),  empereur 
:  Orient ,  naquit  au  milieu  du  vu®, 
siècle,  d'une  famille  patricienne ori- 

f;inaire  de  l'Lsauiie.  Son  penchant 
'avait  déterminé  à  embrasser  la  pro- 
fession des  armes;  et  parvenu  aux 
premiers  grades  militaires, il  obtint 
des  succès  éclatants.  Victime  de  soup- 
çons injustes,  il  fut  privé  de  ses  em- 
plois ^  et  jeté  dans  un  cachot,  où  il 

XXIV. 


LEO 


i(,> 


gémit  trois  ans:  au  bout  de  ce  temps, 
Justinien  II  le  tira  de  sa  prison,  et 
lui  donna   le    gouvernement  de   U 
Grèce.  Cette  faveur  ,  dit  Gibbon  , 
accordée  à  un  homme  qu'on  venait 
d'outrager  si  cruellement, annonçait 
le  mépris  plutôt  que  la  confiance.  Sta 
amis  l'accompagnèrent  jusqu'au  port 
où  il  devait  s'embarquer  ;  il  leui'  dit 
en  soupirant,  qu'on  ornait  la  vic- 
time pour  la  sacrifier  ,  et  que  sa  mort 
suivrait  de  j)rès  ce  retour  de  for- 
tune. Ils  osèrent  lui  répondre  que  la 
gloire  et  l'Empire  seraient  peut-être 
la   récompense  d'une  action  géné- 
reuse ;  ils  coururent  aux  armes  et  se 
rendirent  au  palais  de  Justinien.  Le 
préfet  de  Constautinople  fut  égorgé 
dans    le  tumulte,  et  l'on  forya  les 
prisons.  Les  amis  de  Léonce  criaient 
dans  toutes  les  rues  :  «  Chrétiens,  à 
Sainte-Sophie  !  »  Le  patriarche  s'y 
rendit,  et  acheva  d'enflammer  les  sé- 
ditieux par  ses  discours.  Le  peuple  , 
quittant  l'église  ,  indiqua  une  assem- 
blée dans  l'hippodrome.  Justinien  y 
fut  traîné  devant  des  juges  furieux, 
qui  demandaient  sa  mort.  Léonce, 
déjà  revêtu  de  la  pourpre,  fut  touché 
de  compassion  à  la  vue  du  rejeton 
de  tant  de  rois  ;  il  épargna  la  vie  du 
fils  de  son  bienfaiteur  (  Constantin 
Pogouat  ) ,  et  se   contenta  de  l'exi- 
ler à  Cherson  (  i  ).  Léonce  pensa  aus- 
sitôt à  recouvrer  l'Afrique,  et  y  en- 
voya une  armée  commandée  par  le 
patrice  Jean.  Ce  général  battit  d'a- 
bord les   Sarrasins ,  et  leur  enleva 
même  Carthage  ;  mais  l'année  sui- 
vante ,  ils  reparurent  avec  des  forces 
supérieures  ,  défirent  à  leur  tour  les 
Grecs  et  les  forcèrent  à  quitter  l'A- 
frique. Jean  ,  humilié  de  sa  défaite, 

(»)  Co  ricit  de  la  conjuratiou  de  Léonce  ap- 
partient tout  entier  à  Gibbon,  Hist.  de  la  dé~ 
Cad.  de  l'Empire,  ch.  xx>iu.  Kou»  n'avoui  pu 
•ooger  à  lutter  contre  un  %\   grand  écii vain. 


IÙ2 


LEO 


se  retira  dans  l'île  de  Crète  ,  avec 
les  débris  de  son  arrace  :  les  soldats 
redoutant  la   colère  de  Léonce  ,  se 
rëvollèrent  et  proclamèrent  empe- 
reur Absimarc  (  698  ).  Ce  rcbel'e 
marcha  aussitôt  i.ur  Gonstantinople, 
dont  il  s'empara  malgré  les  efforts 
de  Léonce  ;  et  lui  ayant  fait  couper  le 
nez,  il  l'enferma  dans  le  monastère 
de  Dalmate.  Cependant  Justinien , 
aidé  par  les  Bulgares  ,  parvint ,  en 
705  ,  à  reconquérir  l'empire  dont  il 
avait  été  privé  dix  ans.  H  fit  aussitôt 
tirer  Léonce  de  sa  prison,  et  Absi- 
mare,  de  son  palais  j  et  avant  de  les 
livrer  tous  les  deux,  au  bourreau  ,  il 
les  tint  étendus  sous  ses  pieds, tandis 
que  le  peuple  inconstant  répétait  ces 
]»aroles  du  Psalmisle  :  «  Tu  marche- 
ras sur  l'aspic  et  le  Ijasilic ,  et  tu  fou- 
leras aux  pieds  le  lion    et  le  dra- 
j^on.  »  Léonce  avait  occupé  le  trône 
pendant  trois  années.  W-s. 

LÉONI(  Louis  )  ,  peintre ,  sculp- 
teur et  graveur ,  est  surnommé  le  Pa- 
dovano^  de  la  ville  de  Padoue  ,  où  il 
était  né  en  1 53 1.  C'est  à  Rome  qu'il 
exerça  presque  tous  les  arts  du  des- 
sin avec  un  égal  succès  ;  aussi  habile 
sculpteur  que  peintre  distingué ,  il 
se  fit  remarquer  encore  dans  la  gra- 
vure au  burin  et  dans  celle  des  mé- 
dailles. On  a  de  lui  des  coins  de  mé- 
dailles et  des  modèles  de  figures  très- 
estimés.  Mais  comme  modeleur,  c'est 
surtout  par  ses  portraits  en  cire  qu'il 
a  mérité  sa  réputation  :  ils  étaient  re- 
marquables par  la  ressemblance  ;  et 
sa  facilité  pour  ce  genre  de  travail 
«tait  telle  qu'il  lui  suffisait  d'avoir  vu 
son  modèle  un  seul  instant.  Ses  ta- 
bleaux consistent  en  paysages  et  en 
tableaux  d'histoire  ,   qu'il  peignait 
également  à  l'huile  et  à  la  fresque.  Il 
mourut  à  Rome, en  160G. — Le  che- 
valier Octave  LÉoNi ,  son  fds ,  sur- 
laommé  le   Fadovamno  ,  naquit  à 


LKO 

Borne,  vers   iS^S.  Élève  de  son 
père,    il    devint  un   des  plus  ha- 
biles peintres  de  portraits   de   sou 
temps  ,  et  traita  aussi  avec  quelque 
mérite  des  sujets  historiques.  On  voit 
de  lui,  dans  diverses  églises  de  Rome, 
des  tableaux  de  ce  genre  ,  qui  prou- 
vent qu'il  aurait  pu  s'y  livrer  avec  suc- 
cès. Ayant  été  nommé  prince  de  l'a- 
cadémie de  Rome, il  peignit  \meSte.- 
Martine ,  martjre ,  dans  l'église  de 
Saint-Luc ,  et  une  Ascension  dont  il 
fit  présent  à  l'académie.  Ses  tableaux 
sedistingnent  en  général  par  un  assez 
bon  goiit  de  coloris  ,  qu'il  avait  ac-   «ji 
quis  en  copiarit  les  ouvrages  du  Ti-  ■ 
tien.   Une  copie  qu'il  fit  du  tableau 
de  Bacchiis  consolant  Ariane,  peint 
par  ce  dernier  maître  pour  le  duc  de 
Ferrare  ,  fut  acquise  par  lord  Hug- 
ford  ,  et  transportée  en  Angleterre. 
Mais  les  plus  recherchées  des  pro- 
ductions d'Octave  sont  ses  portraits. 
Le  dessin  en  est  correct  et  facile  ;  ils 
sont  peints  d'un  fini  précieux,  parti- 
culièrement ceux  de  proportion    de 
demi-nature.  Le  pape  Grégoire  XY  le 
créa  chevalier  du  Christ,  et  l'honora 
de  son  estime  et  de  sa  bienveillance.  Il 
jouit  delà  même  faveur  auprès  de  di- 
vers princes  d'Italie.  Il  avait  fait  les 
portraits  de    phisieurs   peintres  et 
hommes   célèbres  ,   ses   contempo 
rains;  il  conçut  le  projet  de  les  gra 
ver.  La  suite  qu'il  publia,  au  nombre 
de  32  ,  est  recherchée  de  tous   le 
amateurs.  Ce  sont  des  bustes  ,  for 
mat  in-8°.  ,  gravés  d'un  goût  aussi 
singulier  que  piquant.  Les  cheveu^ 
et  les  draperies  sont  exécutés  avec 
des  tailles  ;  les  chairs  et  les  parties 
claires  sont  rendues  avec  des  points, 
et  les  ombres  sont  gravées  avec  des 
hachures  et  des  carrés.  Toutes   les 
têtes  sont  finement  dessinées  et  d'un 
effet  agréable,  et  l'exécution  de  cha- 
que gravure  est  remarquable  par  sa 


i 


LEO 

licautc'.  Voici,  parmi  cette  suite,  les 
i)Oiiraits  dont  les  personnages  sont 
les  plus  connus  :  Octm'c  Ltioni , 
point  par  lui-inènie  ;  Louis  Léuni , 
son  père  ;  J.- franc.  Barhicri  da 
Cent o  ,  (Ut  le  Gnerchin  ;  Christ. 
Roncoli ,  dit  le  Pomerancio;  le  Jo- 
seyin;  Pieire  Ternpesta  ;  Thomas 
Solino;  Simon  fouet;  Jean  lia- 
'^lioni  ;  An 'ré  Barbarini  ;  le  Ber- 
nin  ,  tous  peintres,  sculpteurs  ou  ar- 
cliitcctes  ;  (7«Vi/>r<?r^;  Galilée;  Fan 
llel  mont;  Pierre-Jacques  Martello, 
poète  ,  entoure  d'attributs  relatifs  à 
la  poésie  pastorale ,  etc.  Parmi  les 
nutres  portraits,ilyen  a  seize  qui  sont 
inconnus.  L'ardeur  avec  laquelle 
Le'oni  se  livrait  à  ce  travail, détruisit 
sa  saute  ;  il  fut  atteint  d'un  asthme, 
et  mourut  à  Rome,  en  iG3o  ,  âge  de 
cinquante-deux  ans.  —  Leone  Li'om, 
orfèvre,  sculpteur  et  graveur  en  mé- 
dailles ,  natif  d'Arezzo,  en  Toscane  , 
dans  le  seizième  siècle,  exe'cuta ,  sur 
les  dessins  deMicheI-Ange,Iesuperi3e 
mausolée  eVic;è  dans  l'e'gliseduDome, 
à  Milan,  à  Jacques  de  Mcdicis,  mar- 
quis de  Marignan  ,  frère  du  pape 
PielV. L'habit  militaire  dont  est  re- 
vêtu le  marquis  ,  est  peu  favorable 
à  la  sculpture  ;  mais  les  statues  de 
la  Paix  f  de  la  Guen'e  ,  de  la  Pro- 
vidence et  de  la  Benommée ,  assises 
dins  les  entre-col oimes  ,  permirent  à 
ret  habile  artiste  de  développer  tout 
son  talent.  Toutes  ces  figures  sont 
en  bronze:  on  y  remarque  bien  une 
certaine  grâce  un  peu  étudiée;  mais 
cette  grâce  est  pleine  d'élégance ,  et 
le  dessin  en  est  reradi  de  fierté.  On 
n'admire  pas  moins  le  bas-relief  re- 
présentant la  Nativité  de  J.-C,  qui 
orne  également  ce  mausolée.  Le  long 
séjour  que  Léoni  fit  à  Milan  contri- 
bua beaucoup  à  introduire,  dans 
celte  partie  de  l'Italie,  le  goût  de 
l'école  florentine  ,  et  la  grande  ma- 


nière  de  Michel- Ange.  Sur  sa  re- 
nommée, Charles-Quint  le  prit  à  son 
service,  le  logea  dans  son  palais  à 
Bruxelles ,  et  se  plaisait  à  le  voir  tra- 
vailler. Léoni  fit  alors  les  statues  en 
marbre  de  l'empereur,  de  l'impéra- 
trice et  du  roi  Philippe  IL  II  exécuta 
encore,duranl  son  séjouren  Flandre, 
nombre  d'ouvrages  qui  ont  péri  dans 
les  guerres  dont  cette  contrée  a  été' 
le  théâtre:  qq\\\  que  Ton  a  sauvés, 
furent  transpo?  tés  en  Espagne  ,  oii 
Léoni,  s'étant  rendu  par  ordre  de 
Charles-Quint, fonditla  statue  colos- 
sale en  bronze  de  cet  empereur,  que 
l'on  voit  à  Madrid.  Cette  statue  repré- 
sente le  Monarque  debout ,  foulant 
aux  pieds  la  Discorde.lJnc  particula- 
rité très-remarquable,  c'est  que  l'ar- 
mure de  cette  statue  a  été  fondue  h. 
part ,  de  manière  qu'on  peut  à  volonté' 
représenter  l'empereur  nu  ou  armé. 
C'est  après  avoir  terminé  ce  bel  ou- 
vrage, que  Léoni  grava  une  médaille 
où  l'on  voit  d'un  coté  l'effigie  de 
Charles-  Quint,  et  au  revers  Jupiter 
foudroyant  les  Titans.  Cette  mé- 
daille fut  regardée  ,  quand  elle  pa- 
rut ,  comme  un  des  ouvrages  les 
plus  admirables  en  ce  genre.  Il  en 
reçut  pour  récompense  une  pension 
de  i5o  ducats,  une  maison  à  Mi- 
lan, et  des  lettres  de  noblesse.  On  cite 
encore  la  médaille  qu'il  grava  pour 
Hippolyte  Gonzague ,  fille  du  duc 
Ferrante  ,  et  au  revers  de  laquelle 
on  voit  Diane  donnant  du  cor ,  et 
entourée  de  chiens  de  chasse ,  aA'ec 
l'inscription: Par  ubique  potestas. Il 
exécuta  encore  à  l'Escurial  plusieurs 
statues  en  bronze  ;  il  fut  aidé  dans  ce 
travail  par  Pompée  son  fils,  son  élève 
et  l'héritier  de  ses  talents ,  qui  s'ap- 
pliqua particulièrement  à  la  gravure 
en  pierres  fines  et  en  médailles,  et  le 
disputa  au  fameux  Paul  Poggi.  La  mé- 
daille qu'il  grava  en  l'honneur  de  doa 
1 1.. 


i64  LEO 

Carlos,  fils  de  Philippe  II,  et  sur  la- 
quelle on  voit  d'un  côté  l'effigie  du 
f)rince,  et  de  l'autre  un  Apollon  avec  ^ 
'épigraphe  :  In  benigfiUatem  piomp- 
tior,  prouve  qu'il  avait  hérite  des  ta- 
lents de  son  pore.  Outre  ses  médailles 
on  voit  de  Pompée  Leoni,    dans  le 
palais  de  l'Escurial ,  plusieurs  statues 
tant  en  marbre  qu'en  métal ,  où  l'on 
remarque  un  grand  goût  de  dessin  et 
une  belle  composition.  Enrichi  par 
les  bienfaits  de  Philippe  II,  il  revint 
à  Milan,  sa  ])atrie,oii  son  père  existait 
encore  ,  et  il  y  mourut  en   1 660.  — 
Guillaume  daLeoni,  dessinateur  et 
graveur  à  l'eau-forte ,  naquit  à  Par- 
me,  vers  1 664.  On  n'a  point  de  détail, 
sur  sa  vie.  On  sait  seulement  qu'il 
étudia  la  peinture,  quoique  aucun  de 
ses    ouvrages   en  ce  genre   ne   soit 
connu.  Les  pièces  qu'il  a  gravées  à 
l'eau-forte ,  d'après  ses  dessins ,  sont 
touchées   avec    goût  et  finesse.    Ou 
distingue  particulièrement  deux  Sui- 
tes d'animaux,  reni])\ies  d'esprit, 
un  Passage  montagneux;  un  Pay- 
sage avec  des  chèvres,  une  Vache 
et  une  bergère;  des   Moutons  en 
marche;  des  Chèvres  en  repos;  Fé- 
nus  mettant  un  bandeauàV Amour, 
d'après  le  Titien.  P-s. 

LEONIGENUS( Nicolas)  naquit 
en  1 4-i8,  à  Lonigo  dans  le  Vicentin, 
en  latin  Leonicum  ;  et  suivant  l'u- 
sage des  savants  de  son  temps  ,  il 
ajouta  à  son  nom  celui  du  lieu  de  sa 
naissance  ,  le  seul  sous  lequel  il  soit 
connu  maintenant.  Les  fréquents  ac- 
cès d'épilepsie,  dont  il  fut  tourmenté 
dès  son  enfance ,  et  auxquels  il  pensa 
souvent  mettre  fin  par  un  suicide, 
l'engagèrent  à  étudier  la  médecine. 
Ses  progrès  rapides  dans  cet  art 
lui  devinrent  doublement  avan- 
tageux: d'abord  il  parvint,  à  force 
de  soins  et  de  persévérance,  à  se 
guérir,   vers   l'âge  de   trente  ans, 


LEO 

de  la  maladie  déplorable  qui  empoi- 
sonnait sa  viej  ensuite  il  s'acquit 
une  très-grande  réputation ,  soit  par 
ses  écrits  ,  soit  par  l'enseignement 
public.  C'est  à  Padoue  qu'il  entra 
dans   la    carrière     médicale;    puis 
étant  passé  à  Ferrare,  il  y  professa 
l'art  de  guérir  pendant  plus  de  Go 
ans.  Tout  occupé  des  devoirs  de  sa 
chaire,  il  se  livra  peu  a  la  pratique; 
il  employait  de  préférence  ses  loisirs 
à  l'étude  des  belles-lettres  et  de  l'an- 
tiquité. Il  faisait  des  vers  avec  faci- 
lité; et  l'on  a  de  lui  une  traduction 
italienne  de  l'histoire  de  Dion  et  des 
dialogues  de  Lucien.  Tiès-profond 
dans  les  langues  anciennes,  Leonice- 
nus  est  le  premier  qui  se  soit  occupé 
de  traduire  en  latin  les  œuvres  de 
Galien.  Il  a  aussi  beaucoup  travaillé 
sur  Pline  le  naturaliste,  et  s'est  sur- 
tout attaché  à  en  relever  les  erreurs 
relatives  à  la  médecine.  Le  régime  sa- 
lubre  auquel  il  s'était  assujéli  lui  réus- 
sit tellement  qu'il  fut  exem])t  d'infir- 
mités jusqu'à  une  extrême  vieillesse: 
il  mourut  en    i524,  âge  de  96  ans. 
Le  duc  et  le  sénat  de  Ferrare, dont  il 
emporta  les  regrets,  firent  élever  à 
sa   mémoire  un  monument ,  sur  le- 
quel on  grava  une  inscription  latin© 
fort  honorable,  que  sa  longueur  nous 
empêche  de  rapporter  ici.  Voici  les 
ouvrages  de  Leonicenus  :  I.  De  Plinii 
et  plurium  aliorum  medicorum  m 
medicind  erroribus.  Epistola  ad  H, 
Barbarum  in  primi  operis  dejen- 
sionem.  De  Plinii  aliorumque  me- 
dicorumerroribus,novum  opus.  Epis- 
tola de  multis  simplicibus  medica- 
mentis,  Ferrave,  149'-^?  iSoq,  in-4^.; 
Bâle,    1529,  in "4".,   i532,  in-fol. 
Il  accuse  Pline  d'avoir   souvent  lu 
avec  peu  d'attention  les  livres  grecs. 
Sa  dernière  lettre  prouve  qu'il  est  le 
premier  qui  ait  attaqué  la  doctrine 
des  Arabes,  auxquels   il  reproche 


I 


LEO 

ir.jvoir  mal  compris  les  ouvrages 
(les  anciens.  IL  ijbt'v  de  epidemid 
i^uam  Itali  morbuiii  ^aUiciun,  GalLi 
vcrô  neapolUaniiin  vocant,  \  cnisc, 
i4<)7,  i'>o),in-4'\;Piivi(',  i  jo(i,in- 
fol.;souvont  reiniprime.  II  paraît  in- 
conlcsUblcquc  personne  avant  Leo- 
niconus  n'avait  eVrit  sur  la  malarlic 
véncrionnc  ;  c'est  le  sentiment  d'As- 
trnc.  L'nsage  du  mercure  n'était  pas 
encore  connu  à  celte  époque;  car  le 
professeur  ferrarais  n'en  fait  aucune 
mention.  Il  attribue  le  (fcVeloppc- 
ment  de  la  maladie,  non  pas  à  l'in- 
lluence  des  astres,  ni  à  la  colère  ce- 
leste,  mais  aux  pluies  abondantes 
et  aux  grandes  inondations  qui  cou- 
vrirent le  sol  de  l'Italie.  III.  In 
libros  Galeni  à  se  translutos  ad 
artem  médicinale  ni  prœjatio.  De 
tribus  doctrinis  ordinal is  secwidùm 
(raleni  sentent iam  prœ  fat  iu  et  opiis 
ipsum.  Galeni  in  Ilippocratis  apho- 
risnws    commenlarius  ,     Ferrare  , 

I  r>o9,  in-fol.  Ici  Leonicenus  corrige 
beaucoup  de  passages  des  anciens, 
et  réfute  Avicenne  et  les  barbares 
commentateurs  des  Grecs.  IV.  Ubri 
duo  Galeni  de  curandi  ratione  ad 
Glauconem  latine  versi ,  Pavie, 
1 5 1 4  ,  in-4°. ,  I  ^  ^7 ,  in-8".  ;  Lyon , 
ijM,  in-iï.  Leonicenus  a  encore 
traduit  en  latin  d'autres  livres  de 
Galien ,  tels  que  :  De  puero  epilep- 
tico ,  De  crisibus  ,  De  dijferentiis 
febritiin  ,  De  dijferentiis  et  causis 
morborum ,  De  motu  miiscidoruni. 

II  a  aussi  donne'  une  e'dilion  grecque- 
latine  des  apborismcs  d'Hippocrale; 
plusieurs  fois  reimpriraëe.  Apres  sa 
iiiorl,  on  a  publie':  V.  De  dipsade 
et  plurihus  aliis  serpentibus ,  Bàle, 
1  3^9, in-4".  \  L  Opuscula  medica, 
Hàlc,  i53-2,  in-fol.,  où  l'on  trouve 
une  mâle  apologie  de  l'auteur  contre 
ceux  qui  critiquaient  ses  traductions. 
VU.  Comersio  et  explanatio  primi 


LKO  i65 

Ubri  Jristotelis  de  partihiis  anima- 
lium;  Bdlc,  i54i ,  in-8**.;  i54'^, 
iu-(ol.  R-n-^. 

Li:ONICENUS  (  Omnihonis  ), 
mi  des  plus  célèbres  grammairiens 
du  quinzième  siècle  ,  était  de  même 
que  le  ])récédcnt  ,  avec  lequel 
on  l'a  souvent  confondu  ,  d'une  fa- 
mille du  \icciitin,  nommée  Ogni- 
bene ,  et  naquit  vers  l'an  i5uo, 
à  Lonigo  :  Leonicenus  fréquenta , 
d'abord  ,  l'école  de  Viclorin  de 
Feltre,  l'un  des  restaurateurs  des 
sciences  éteintes  en  Italie  ;  et  il  alla 
ensuite  étudier  le  grec  à  Venise ,  sous 
le  fameux  Emanuel  Chrysoloras.  Ou 
croit  qu'il  enseigna  plus  tard  les  belles- 
lettres  dans  cette  ville.  Le  P.  Lairc, 
(  Spécimen  tjrp.  Roman,  p.  'l'iS  > 
conjecture  qu'il  devint  le  directeur 
de  l'imprijucrie  de  Nicolas  Jcnson  , 
à  Venise  ,  et  qu'il  mourut  au  com- 
mencement du  xvi^  siècle  (  i  ).  On  a 
de  ce  savant:!.  Plusieurs  traites, 
1°.  Liber  de  octopartibus  orationisy 
ad  Frédéric,  de  Gonzagd,  Venise, 
i473,in-4°.  j  (Ferrare)  per  August. 
Carneriuni,  i474î  iH-4"'?  ^'dit.  très- 
rare  ;  c'est  le  premier  ouvrage  im- 
primé à  Ferrare;  Padoue,  i474> 
in-4".  ;  réimprimé  la  même  année  et 
dans  la  même  ville  par  Albert  de 
Stendal,  petit  in-4°.  ;  cette  seconde 
édit.esl  plus  rare  que  la  j)récédente; 
Rome,  Pbil.  deLignamine,  147^  , 
in-4".  — 2°.  De  versu  heroïco  liber. 
Milan,  i473,iu-4°.  très-rare. — S**.' 
Tractalus  ad  scandcndum  ,  in-4°. 
de   i4  feuillets  ,  imprimé  en  carac- 


(i)  Ant.  OrliinJi  ,  dans  »on  Origine  e  pro^ 
grtssi  délia  stanipit  .  hxe  la  mort  dOtnnibAiius 
I>eoniceniit  A  i'aiiiiie  iSi4>  niai*  c'est  nue  er- 
reur ,  et  Oilantli  l'a  éviilemment  confoiiju  avec 
le  médecin  Nicolas  Leonicenus,  qui  rKO^nit  cette 
m£m«  année.  On  a  nue  lettte  d  Oniniboniis. ,  da- 
tée de  \\\\  ,  par  laquelle  on  apprend  qu'il  avait 
terminé  set  études  ,  et  qu'il  s'occupait  déjà  d« 
traduire  Us /(//'/''r  d'Jisope;  on  peut  lOiiicctu- 
riT  qu'il  aroit  alors  au  moins  vinf^t  aus ,  «t  il  ei» 
aurait  eu  plus  de  cent  en  \'ùz\. 


i66  LEO 

tères  ronds,  de  1470  a  1480  (  Foy. 
le  P.  La  ire,  Index  libroram  ah.  in- 
vent, f/p. ,tom.  i^r.  ^  p.  16.4.)  Ces 
trois  ouvrap;es  ont  ctc  réunis  sous 
ce  titre  :  Grammatices  rudiment  a, 
cum  libella  de  arte  metricd^  Vi- 
cence ,  1 5o5.  IL  Des  Commentaires 
sur  Lucain  ,  imprimes  séparément , 
Venise  ,  i475  ,  in -fol ,  et  à  la  suite 
de  la  Pharsale  ,  ibid.  i5o5.  —  Sur 
le  Traité  de  V orateur ,  de  Giceron , 
Vicence,  ^47^?  in-foL,avec  un  dis- 
cours De  Laudibus  eloquentiœ. — 
Sur  Falère  Maxime,  Venise ,  1 482  ; 
Milan  ,  1487  ,  in-fol.  ,  et  plusieurs 
fois  depuis.  —  Sur  la  Conjuration 
de  Catilina  ,  par  Salluste  ,  Venise , 
i5oo,  1539,  1 546;  Baie,  i564, 
in-fol.  —  Sur  les  Offices  de  Gice- 
ron. IIL  Une  édition  très-estime'e 
des  IF  libres  de  la  Rhétorique  et 
des  II  Usures  de  V Invention  de  Gi- 
ceron ,  Venise,  Nie.  Jenson,  1470, 
très-grand  in-4°.  ]  c'est  la  première  de 
ces  deux  ouvrages;  et  une  édition 
des  Institutions  oratoires  de  Quinti- 
lien,  ibid.  i47 1 ,  in-fol.  :  elle  avait 
paru  d'abordsansdate  d'impression. 
IV.  Des  Traductions  latines ,  d'une 
partie  des  Fables  d'Ésope  ;~de  l'ou- 
vrage de  St.Athanase  contre  les  Gen- 
tils et  les  hérétiques, Yicence,  1 48^2, 
ÏD-fol.;  —  du  livre  de  Xénoplion  , 
de  Fenatione^  insérée  dans  l'édition 
de  Bàle,  i545.  Enfin  on  trouve 
quelques  Lettres  de  Leonicenus  avec 
celles  de  François  Barbaro,  publiées 
par  le  cardinal  Quirini  ,  Brescia, 
1741, ,  2  vol.  in-4^.       W-s. 

LEONIDAS ,  l'un  des  rois  les  plus 
célèbres  de  Sparte ,  était  de  la  famille 
des  Agides ,  et  florissait  dans  le  qua- 
trième siècle  a  vaut  J.  G.  Les  premières 
années  de  sa  vie,  et  le  commencement 
de  son  règne,  nous  sont  tout-à-fait  in- 
connus ;  nous  savons  seulement  qu'il 
était  fils  d'Anaxandridas  ^  et  qu'a- 


LEO 

près  la  mort  de  ses  frères,  Clcomènes 
et  Doriée,  il  monta  sur  le  trône,  l'an 
493  avant  J.  G.  L'action  qui  a  im- 
mortalisé son  nom,estsans  contredit 
un  des  plus  beaux  faits  de  l'antiquité. 
Xerxès  marchait  contre  la  Grèce  avec 
une  armée  ,  qui ,  si  l'on  en  croit  Hé- 
rodote, s'élevait  à  plus  de  deux  mil- 
lions de  soldats.  La  ïbessalic  avait 
succombé  sous  le  joug  des  barbares; 
etdéjà leurs  innombrables  phalanges, 
campées  dans  la  Trachinie  ,  étaient 
près  d'envahir  la  Grèce:  mais  le  dé- 
filé des  Thermopylesles  en  séparait 
encore ,  et  c'était  le  seul  point  par 
lequel  on  pût  y  pénétrer.  La  défense 
en  fut  confiée  à  Léonidas  ;  et  ce  gé- 
néral se  décida  aussitôt  à  l'occuper 
avec  un  corps  de  3oo  hommes  seu- 
lement. Les  Ephores,  étonnés,  vou- 
lurent le  contraindre  d'en  emmener 
un  plus  grand  nombre;  mais  Léoni- 
das ,  sans  révéler  ses  projets,  leur 
répondit  qu'il  avait  assez  de  soldats 
pour  l'entreprise  qu'il  projetait. 
Les  Ephores,  plus  surpris  encore 
par  cette  réponse  énigmatique ,  et 
croyant  qu'il  n'avait  d'autre  but 
que  celui  d'une  petite  expédition  , 
cherchèrent  à  l'en  dissuader.  Alors , 
il  leur  dit  sans  détour  ,  que  ,  déses- 
pérant du  salut  de  Sparte,  il  voulait, 
avant  de  voir  sa  patrie  sous  la  puis- 
sance des  barbares  ,  lui  donner  un 
grand  exemple  de  dévouement;  qu'il 
allait  s'immoler  avec  ses  compagnons 
d'armes,  et  que  par-là  il  étonnerait  les 
Perses  ,  et  exciterait  le  courage  des 
Grecs.  Les  Ephores  n'eurent  plus 
rien  à  opposer  à  une  telle  résolution, 
et  ils  ne  purent  s'empêcher  d'y  ap- 
plaudir. Avant  le  départ  des  soldats 
de  Léonidas,  Lacédémone  fut  témoin 
du  spectacle  le  plus  attendrissant. 
Victimes  vouées  à  une  mort  certaine, 
ils  célébrèrent  d'avance  leurs  funé- 
railles j  et  j  après  celte  triste  céré- 


I 


LEO 

monie,  Us  partirent  en  recevant  les 
rternclsadicuxdc  leurs  compatriotes. 
Lcoiiidas  ,  empresse  d'arriver  à  son 
poste,  passa  dans  plusieurs  villes,  et 
contribua  ,  par  son  exemple,  à  rete- 
nir dans  ledevoir  les  Tlicbains,prèlsà 
se  déclarer  pour  les  Perses.  Sa  troupe 
s'augmenta  en  route  ,  et,  lorsqu'il  fut 
aux  Thermop\lcs,  il  commandait 
à  peu  près  sept  mille  hommes.  Bien- 
tôt après  son  arrivée  ,  Xerxès  ,  ins- 
truit deses  projets,  ne  put  s'empêcher 
d'en  redouter  les  suites  ;  et  avant 
d'avoir  recours  aux  armes  ,  il  tenta 
de  le  séduire  par  des  promesses.  Il 
lui  ofii'it  la  possession  de  toute  la 
(irèce ,  s'il  voulait  se  ranger  sous  ses 
drapeaux:  Léonidas, indij];né,  rejette 
de  telles  propositions.  Alors ,  Xerxès 
croyant  lui  imposer  par  un  ton  de 
fermeté  et  de  commandement ,  lui 
ordonne  de  livrer  ses  armes  entre  ses 
mains.  Le  roi  de  Sparte  se  contenta 
de  répondre  à  cette  première  insulte, 
avec  l'énergie  et  le  laconisme  d'un 
Spartiate  :  Fiens  les  prendre.  En- 
fin ,  après  être  resté  quatre  jours 
dans  l'inaction  ,  le  roi  de  Perse , 
renonçant  à  séduire  un  tel  homme , 
songea  à  l'attaquer.  Il  envoya  d'abord 
une  avant-garde,  avec  ordre  de  faire 
prisonniers  les  défenseurs  des  Ther- 
mopyles  :  mais  cette  première  atta- 
que fut  sans  succès  ;  et  ce  combat , 
qui  dura  toutlc  jom-,  apprit  à  Xerxès, 
comme  le  dit  Hérodote  ,  qu'il  avait 
beaucoup  d'hommes ,  mais  peu  de 
soldats.  Le  lendemain,  il  revint  à  la 
chargeavecloutce  qu'il  avait  de  plus 
aguerri ,  promettant  de  grandes  ré- 
comj>enses  aux  vainqueurs,  et  mena- 
çant de  la  mort  ceux  qui  prendraient 
la  fuite.  Tous  se  précipitent  à  la-fois 
sur  les  Grecs  )  mais  cette  tentative 
lui  fut  aussi  funeste  que  la  première  ; 
et,  pour  la  seconde  fois,  les  soldats 
de  Xerxès  furent  mis  eu  fuite  |«ai  la 


LEO  167 

petite  tronpc  de  LéonidaR.  Ce  fut 
alors  que  la  trahison  d'un  Grec  vint 
tirer  le  roi  de  Perse  de  l'embarras 
où  il  se  trouvait.  Un  haliitant  de  la 
Trachinie,  nommé  Ephiaites,  lui  in- 
diqua un  sentier  par  lequel  il  pouvait 
entrer  dans  la  Phocide  sans  être  obligé 
dépasser  par  le  défilé  des  Thermo- 
pyles.  Xerxès  reçoit  avec  joie  cetti» 
nouvelle  ;  et  après  avoir  chargé  de 
présents  celui  qui  livrait  ainsi  sa  pa- 
trie ,  il  le  mit  à  la  tête  de  dix  '-ulle 
hommes  ,  et  lui  donna  l'ordre  de  les 
conduire ,  pendant  la  nuit  ,  par  ce 
chemin  secret.  Mais  Léonidas  en  fut 
instruit  par  des  transfuges  :  alors  il  as- 
sembla les  oillciersde  sa  petite  armée; 
et ,  ^'apercevant  qu'ils  redoutaient 
l'approche  de  l'ennemi,  il  en  renvoya 
un  grand  nombre ,  et  ne  retint  avec 
lui  que  trois  cents  Spartiates ,  tous 
disposés  à  mourir  ,  et  regardant  les 
Tliermopyles  comme  leur  tombeau. 
Ils  ne  tardèrent  pas  à  apercevoir  les 
dix  mille  hommes,  commandés  par 
le  Grec  perfide  :  aussitôt  ils  deman- 
dent à  aller  au  combat ,  et  ne  veulent 
pas  attendre  que  ces  barbares  les  aient 
entourés.  Léonidas,  voyant  leur  noble 
ardeur,  leur  fait  prendre  un  dernier 
repas ,  disant  que  dans  peu  ils  iront 
manger  chez  Piulon.  Ils  partent  ;  et, 
après  avoir  reçu  l'ordre  de  se  jeter 
tous  à-la-fois  sur  les  Perses ,  ils  mar- 
chent, en  poussant  des  cris  de  joie  , 
comme  ^i,  dit  un  historien, //^  eussent 
été  invités  à  un  festin.  Ils  se  dis- 
posent en  col  on  ne  serrée,  et  attaquent 
ainsi  les  barbares  :  sûrs  de  mourir 
au  milieu  des  ennemis  ,  ils  veulent  au 
moins  faire  payer  cher  leur  trépas. 
Léonidas ,  qui  marche  à  leur  tête  ,  est 
un  des  premiers  qui  succombe.  Alors 
ses  soldats  combattent  encore  avec 

S  lus  d'acharnement  ;  ils  s'efforcent 
e défendre  le  corps  de  leur  roi,  et 
tunibcut  ,  les  mis  après  les  autres  , 


i68  LEO 

sur  son  cadavre  sanglant.  Un  seul 
d'entre  eux  survécut ,  et  il  alla  porter 
cette  nouvelle  h  Lacedenione  5  mais 
bientôt  honteux  de  sa  lâcheté'  et  ac- 
cable' des  reproches  que  lui  firent  ses 
concitoyens  ,  il  fut  oblige'  d'aller 
chercher  la  mort  à  Platée.  On  con- 
naît les  résultats  de  rhe'ro'ique  de'- 
vouement  de  Lëonidas;  il  porta  l'ef- 
froi dans  le  cœur  des  Perses;  il  inspira 
aux  Grecs  la  plus  heureuse  con- 
fiance ,  et  il  leur  donna  le  temps  de 
se  pre'parer  aux  victoires  de  Platée 
et  de  Marathon.  Xerxès  eut  la  lâcheté 
de  faire  attacher  son  cadavre  à  une 
potence,  et  il  fit  ainsi  voir  aux  hommes 
les  plus  courageux  le  sort  qui  les  at- 
tendait. Les  Lacédémoniens  ne  per- 
dirent pas  la  mémoire  de  ces  j];uer- 
riers  malheureux  ;  ils  leur  élevèrent 
un  monument  à  l'endroit  même  où 
ils  avaient  combattu  et  expiré  :  deux 
inscriptions  annoncèrent  leur  valeur 
et  leur  fin.  L'une  d'elles  regardait 
tous  ceux  qui  étaient  morts  aux  ïher- 
mopyies;  l'autre,  composée  par  Si- 
raonide,  n'ayant  rapport  qu'aux  trois 
cents  Spartiates  immolés  avec  Léoni- 
das ,  était  ainsi  conçue  :  «  Passant , 
»  va  dire  à  Sparte  que  nous  sommes 
^  morts  ici  pour  obéir  à  ses  saintes 
))  lois.  »  Le  vainqueur  de  Platée,  Pau- 
sànias ,  fit  transporter  à  Lacédémone 
quarante  ans  après  (  i  ) ,  les  ossements 
de  Léonidas  ;  il  lui  fit  élever  un 
temple,  et  il  institua  une  fête ,  appelée 
Léonidée,que  l'on  célébrait  chaque 
année,  et  011  les  jeunes  gens  se  dispu- 
taient le  prix  de  la  force  et  du  cou- 
rage.Les  Lacédémoniens  seuls  avaient 
droit  d'y  assister;  parce  qu'eux  seuls 
avaient  pris  part  à  l'affaire  des  Ther- 
mopyles.  Le  sdcnce  de  l'histoire  sur 


(i)  11  paraît  qu'il  y  a  eu  erreur  dans  les  chif- 
fres, ou  que  ce  n'est  pas  le  vainqueur  de  Platée 
qui  transporta  le  corps  de  L.éonidas  :  carPausa- 
iiias  mourut  l'an  4-17  avant  J.-C.  ,  et  le  combat 
'         !  do 


d«fs  Tlierniopyle»  se  donna  l'an  4^0. 


LEO 

les  premières  années  du  règne  Je  Le'o- 
nidas  indique  assez  qu'il  rendit  ses 
sujets  heureux.  Quand  il  partit  pour 
les  Thermopyles,  sa  femme  lui  de- 
manda quelles  étaient  ses  dernières 
volontés  dans  le  cas  où  il  viendrait  à 
mourir  :  «  Je  ne  te  demande  rien , 
»  dit  -  il ,  sinon  qu'après  ma  mort 
))  tu  épouses  quelque  homme  brave 
»  et  vertueux  qui  puisse  donner  à 
»  Sparte  des  enfants  dignes  de  moi.  » 
La  mort  de  Léonidas  a  été  le  sujet 
de  plusieurs  productions  remarqua- 
bles dans  les  arts  :  un  Anglais  en  a  fait 
un  poème  épique  (  P'oj.  Glower  ); 
et  M.  deFontanes  a  t rai  télé  même  su- 
jet dans  un  poème  encore  inédit , 
mais  dont  plusieurs  fragments  sont 
connus.  Tout  le  monde  a  vu  le  tableau 
des  Thermopyles,  par  David  :  enfin  la 
statue  de  Léonidas ,  par  Lemot ,  est 
un  des  plus  beaux  ornements  de  la 
galerie  du  Luxembourg.  —  Léonidas 
II ,  roi  de  Sparte  ,  était  petit  fils  de 
Cléomène  II ,  et  succéda  à  Arée  II , 
l'an  '2,56  avant  J.  G.  Il  fut  renversé 
du  trône  par  Gléombrote,son  gendre, 
et  rétabli  ensuite.(  F.  Cuilonis  ).  Z. 

LEONIO  (  Vincent)  ,  littérateur 
italien,  naquit  en  i65o  d'une  fa- 
mille noble  de  Spolète.  Après  avoir 
étudié  le  droit  à  Macerala ,  il  se 
rendit  à  Rome ,  où  il  exerça  la  pro- 
fession d'avocat  ;  mais  cette  carrière 
ne  lui  fit  point  abandoimer  celle  des 
lettres.  Il  fut  au  contraire  un  desf 
premiers  à  rappeler  le  bon  goût  dans 
la  poésie  italienne,  en  contribuant  à 
la  fondation  de  l'académie  des  Ar- 
cadiens  établie  en  1 690  ,  unique- 
ment dans  la  vue  d'extirper  le  mau- 
vais goût  et  la  bizarrerie  qui  s'étaient 
glissés  dans  la  langue  poétique  (  F» 
Crescimbeni  ).  Mais  ses  conseils  et 
les  ouvrages  de  ses  élèves  contri- 
buèrent plus  encore  que  l'établisse- 
ment de  l'académie^  à  cette  heureuse 


LEO 

rovoliitiou.  Ses  poésies,  après  avoir 
ttr  publiées  dans  divi'i-sescoîlections, 
ont  été  réunies  dans  le  ^rahd  Reeucil 
tUlle  lime  e  (Icllc  pi  ose  (legli  Ar- 
cadi.  Ou  trouve  queiques-unes  de 
.ses  élégies  dins  Wlrcadnm  Carmi- 
iia,parsprior,  Rome,  i']^^').  Leonio 
avait  rassemblé  un  grand  nombre 
d'observations,  de  rerlierehes,  et  de 
notices  pour  un  Traité  complet  delà 
poésie  pastorale  ,  qu'il  se  proposait 
de  publier.  Cet  ouvraj:;e,  que  la  mort 
ne  lui  permit  pas  d'achever,  existe 
en  manuscrit  dans  la  belle  biblio- 
thèque de  Campello,  à  Spoicte.  On 
a  inséré  dans  le  tome  ii  délie  f'ite 
de^li  Arcadiillustri^  l'éloge  du  pré- 
lat Justin  Ciampini  ,par  Leonio.  Ce 
littérateur  mourut  a  Rome  ,  le  'lij 
juin  i-jiOjdans  les  sentiraenis de  re- 
ligion les  plus  édifiants.        P-s. 

LEONIUS ,  poète  latin  du  xn«. 
siècle,  n'est  nas,  comme  on  l'a  dit, 
l'inventeur  des  vers  rimes  connus 
sous  le  nom  de  Léonins  :  on  croit 
qu'd  était  chanoine  de  Saint-Benoît 
de  Paris  ,  et  que ,  sur  la  fin  de  ses 
jours,  il  se  retira  à  l'abbaye  de  St.- 
V  ictor.  Mais  l'abbé  Lebeuf  pense 
que  Leonius  était  chanoine  de  Notre- 
Dame  ,  et  il  s'appuie  sur  un  passage 
d'un  nécrologe  de  celte  église,  qui 
rappelle  un  Leonius,  chanoine, qua- 
lifié magister ,  titre  qui  désignait 
alors  un  homme  connu  par  son  sa- 
voir; il  fortifie  cette  conjectiu'e  de 
plusieurs  autres  raisons  ,  qu'on  peut 
voir  dans  ses  Dissertations  suri  his- 
toire ecclésiastique  et  civile  de  Pa- 
ris, tom.  Il,  pag.  oÀ)"!  et  suiv.  Quoi 
qu'il  en  soit,  ou  attribue  à  Leonius: 
Historia  veteris  et  novi  Testamenti 
hexametris  versibus.  II  avait  entre- 
pris cet  ouvrage  à  la  prière  de  Gue- 
rin  abbé  de  St.-Victor.  Le  P.  Echard 
en  a  inséré  le  prologue  dans  la  Bi- 
hlioth,  ord.  prœdicat,  (tom.  I«^a^^. 


LEO  i6g 

Guido  ou  Gui  de  Viccncc).  On  con- 
serve à  la  Bibliothèque  du  Roi  un 
manuscrit  de  cet  ouvrage ,  divisé  en 
XII  livres,  qui  renferment  la  para- 
phrase de  la  premièr(î  partie  de 
l'ancien  Testament  jusqu'à  Riith.  Ca- 
simir Oudin  regarde  Leonius  comme 
l'auteur  d'un  P.saiiticr  à  la  louante 
de  la  rierç^e,  dont  il  avait  vu  une 
copie  à  l'abbaye  de  Bucilly,  diocèse 
de  Laon  :  ce  psautier  n'était  pas 
écrit  en  vers,  mais  sur  un  mètre  en 
usage  dans  ce  temps-là.  (Voy.  Com- 
ment, de  scfiptorib.  ecclesiasticis.) 
La  coutume  de  faire  rimer  les  vers 
latins  était  déjà  très-ancienne.  Le- 
beuf, dans  sa  Dissertation  sur  Vé- 
tat  des  sciences  en  France  depuis 
le  roi  Robert  (  pag.  (54  )  ,  cite  le 
Micrologue  sur  la  décadence  du 
monde ,  ouvrage  composé  ,  vers 
l'an  "720,  par  St.-Théofride ,  qui 
avait  la  réputation  d'un  très-habile 
riraeur  (  summè  rjthniicus  ).  On  a 
des  chants  rimes  d'Abailard,  de 
Hilaire,  sou  disciple,  et  d'un  grand 
nombre  de  personnages  distingues 
dans  le  xi*'.  et  le  xii^.  siècles;  mais 
on  nomme  vers  léonins  ,  les  vers 
pentamètres  et  hexamètres  qui  ri- 
ment, non-seulement  à  la  fin,  mais 
encore  à  l'hémistiche:  cette  espèce 
de  vers  était  en  vogue  avant  Leo- 
nius. Oberlin  a  publié  une  disser- 
tation :  Bythmologia  leonina  ex 
Godefridi  //agenoensis  codiceMs., 
où  l'on  trouvera  les  renseignements 
les  plus  curieux  sur  la  poésie  léo- 
nine et  ses  différents  genres  :  on  peut 
voir  aussi  là-dessus  la  Metametnca. 
de  Caramuel.  W— s. 

LEOMIEF  (  Alexis  Léontié- 
viTCHi  ) ,  membre  de  l'académie  d 
sciences  de  Pétersbourg,  et  secr 
taire  impérial  du  collège  des  rela- 
tions extérieures,  obtint,  en  1^79, 1« 
titre  de  conseiller  aidique  et  enstut* 


170  LEO 

celui  de  conseiller  de  la  cliancellerie. 
II  mourut  à  Petersbourg,cn  raai  1 786. 
Ce  savant  avait  ctiidië  partieuiière- 
mcnt  la  littérature  chinoise  ;  et  aucun 
de  ses  compatriotes  n'avait  encore 
pousse  aussi  loin  ses  connaissances 
en  ce  genre.  On  cite  de  lui ,  dans  la 
Bibliothècjue  russe,   de    Bacmcis- 
ter  :  I.  Depej  Kitaetz'  etc. ,  Pëters- 
lîourg,    1771 ,  in-S".  de  5o  pages. 
Cest  la  traduction  ,   de  chinois  en 
russe  ,  d'un  traite  philosophique  et 
psychologique  ,    que  l'auteur  ,  De- 
pej ,  natif  de  Zisi ,  paraît ,  suivant 
Je  traducteur,  avoir  écrit  l'an  1786 
de  notre  ère.  II.  Pensées  chin  nses, 
traduites  du  langage  mandchou  , 
ibid.  1775^,  in-8'\  III.  Uwjedom- 
lenie  o  tschaje ,  etc.  ibid.  1775, 
in-S».  de  48  pages.  C'est  une  traduc- 
tion russe  de  l'instruction  sur  la  cul- 
ture du  thë  et  de  la  soie ,  intitulée  en 
chinois:  IFang-pou- Kouang;  une 
partie  des  préceptes  sont  en  vers  chi- 
nois dans  l'original ,  et  sont  ici  tra- 
duits en  vers  russes.   On  y  trouve 
aussi  des  aphorisraes  d'r.griculture 
et  de  matière  médicale.  IV.  Uwje- 
domlenie  o  l/'ùwschej  etc. ,  c'est-à- 
dire,  Notice  de  la  guerre  des  Chi- 
nois contre  les  Songaris  (de  1O77 
a  1698  ) ,  tirée  de  l'histoire  chinoise, 
ibid.  1777,  in-8'\  de  1 08  pag.  Cette 
relation  de   la    guerre  contre    les 
Songaris  ou  Djoun  -  gar  (  Voyez 
KuANG-ni,  t.  XXII,  p.  355)est  pous- 
sée jusqu'à  la  mort  de  Galdan ,  évé- 
nement que  le  traducteur  attribue 
au  poison.  V.  Krattschajsche  opi- 
sanie  etc.,  ibid.    1778,  in-S**.   de 
332  pag.  Cette  description  succincte 
des   villes  ,  revenus  ,  etc. ,  etc.  de 
l'empire  de  la  Chine  et  des  autres 
pays  connus  des  Chinois ,  est  un  ex- 
trait de  la  grande  géographie  pu- 
bliée en  chinois  ,  sous  Khian-loung  , 
eu  24  volumes  ou  1 07  cahiers ,  sous 


LEO 

ce  titre  :  Tdi-thsing  i  thoung  tchi  , 
avec  un  allas  de  496  feuilles.  VI. 
Bukwarj  kitajskoi  etc. ,  ibid.  1 779, 
iu-S**.  de  49  pag.  C'est  une  traduc- 
tion ,  du  chinois  et  du  mandchou , 
d'un  pelil  livre  de  lecture  pour  les 
enfants ,  qui  n'est  guère  qu'un  re- 
cueil de  sentences  et  de  proverbes  : 
l'original  est  en  vers,  mais  la  version 
russe  e%l  en  prose.  V II.  Sse  chou 
kiài,  ibid.  1780,  in-8*'.  de  12,5  pag. 
C'est  une  version  russe  du  Ta-hio  , 
l'un  des  livies  classiques  de  la  Chine 
(  F.  CoNFucius,  tom.IX,  p.  4*^  )• 
Deux  autres  volumes  comprennent 
le  Tchoung-joung  et  une  partie  de 
Lun-yu  (  i  ).  C.  M.  P. 

LEONTIUM  était  une  courtisane 
athénienne ,  à  qui  son  goût  pour  la 
philosophie, et  surtout  pour  les  phi- 
losophes, a  donné  de  la  célébrité. 
Elle  fut  successivement ,  ou  à-la-fois 
peut-être,  la  maîtresse  d'Epicure,  et 
celle  de  Métrodore ,  le  plus  fameux 
des  disciples  d'Epicure.  On  a  dit  mê- 
me qu'elle  ne  se  montra  cruelle  pour 
aucun  des   jeunes  gens  qui  fréquen- 
taient cette  école  de  morale  relâ- 
chée.  Quelques    mots  presque  pas- 
sionnés d'une  lettre  que  lui  écrivait 
Epicure, peuvent  faire  croire  qu'elle 
lui  avait  inspiré  une  tendresse  assez 
vive  ;  les   voici  ,   comme   Diogène 
de   Laërte   les   rapporte   :    «    Par 
»  Apollon  I    chère    Léontium  ,    de 
»  quelle  admiration  m'a   rempli  la 
»  lecture  de   ton   billet  I  »  On  sait 
aussi  qu'd  parlait  d'elle  avec  un  ex- 
trême intérêt  dans  sa  correspondan- 
ce  avec  Hermarchus.   Pour  plaire 
beaucoup ,  malgré   ses  désordres  et 
reffronterie  de  son  libertinage ,  à  un 


(i)  A  ces  divers  écrits  tî«  Léontli^T,  il  faut 
a)oi>ter  «a  Description  des  huit  bannières  qui 
composent  la  naiion  rnandchoTe ,  S;ii"t-l'<'ters- 
boiirs,  170},  16  fol.  iu-b''.  C'est  le  pi"»  'n>i»..i- 
tayl  lie  ics  ouvrage».  A.  ll-ï. 


Î.KO 

!:.»ininc  cl'un  esprit  aussi  distingué 
qu'Kpiruic,  il  fallait  un  mérite  peu 
vulgaire;  et  l'on  petit  croire  ,  sans 
trop  courir  le  risque  de  se  tromper, 
que  Le'outium  joignait  à  une  grande 
beauté  les  grâces  d'un  esprit  très- 
orne.  Elle  avait  même  écrit  un  livre 
de  philosophie;  et,  si  le  fonds  n'en 
e'tail  pas  bien  fort,  au  moins  la 
forme  en  était  excellente  :  «  Une 
^  petite  courtisane  a  bien  ose'  écrire 

contre  Theophrastc  !  son  style 
-  est  ingénieux  et  plein  d'atticisme  ; 

mais  pourtant....  »  C'est  Ciceron 
qui  s'exprime  de  la  sorte;  et,  si  le 
mot  de  petite  courtisane  (  mere- 
tricula  )  est  un  peu  dur ,  si  la  réti- 
cence est  un  ])eu  desobligeante ,  l'c- 
loge  donne'  au  stylô-adoucit  jusqu'à 
lin  cerlain  point  l'amertume  de  la 

ii tique.  IMine  a  etc  beaucoup  moins 
l'Ai.  11  dit  qu'une  femme  même,  et 
il  ne  daigne  pas  la  nommer,  qu'une 
f<»mme  même  écrivit  contre  l'clo- 
)  lent  Thcophraste ,  et  que  de  là  na- 

lit  le  proverbe,  choisir  un  arbre 

ntr  se  pendre ,  voulant  sans  doute 
I  lire  entendre,  qu'après  un  tel  ren- 
versement de  toutes  les  convenan- 
ces, il  y  avait  trop  de  honte  à  vivre, 
puisque  la  vie  exposait  à  de  tels  ou- 
trages. Parmi  les  lettres  du  rhéteur 
Alciphron ,  il  y  en  a  une  de  Lcon- 
tiiim  à  Lamia.  Cette  lettre  est  in- 
«ontestablement  supposée  ;  mais  , 
romrae  elle  a  certainement  été  écrite 
'l'après  les  données  que  présentaient 

histoire  philosophique  et  les  tradi- 

ons,  on  en  peut  tirer  quelques  faits; 
;  ir  exemple,  qu'Epicure  était  déjà 

\trcmeraent  âgé  quand  il  se  lia  avec 
i  r^ontium;  qu'il  avait,  avec  toutes 
Ifs  infirmités  delà  vieillesse ,  tous  les 
ridicules  d'un  vieillard  amoureux; 
qu'il  envoyait  à  Léontium  beaucoup 
de  billets  ,  qui  sans  doute  lui  sem- 
blaient les  plus  galants  du  mondC;  et 


LEO  171 

qu'il  écrivait  du  même  style  énigma- 
tiqueetdécousu  que  SCS  rêveries  méta- 
physiques. Avant  d'être  admise  dan* 
les  jardins  d'Epicure,  Léontium  a- 
vait  plu  au  porte  Ilermésianax,  qiii, 
par  une  galanterie  tout-à-fait  poéti- 
que ,  avait  donné  le  nom  de  Léon- 
tium à  ses  trois  livres  d'élégies.  C'est 
ainsi  que  pins  tard,  et  peut-être  à 
l'exemple  d'Ilerraésianax,  Propercc 
intitula  son  premier  livre  rinfA/a , 
du  nom  de  sa  maîtresse.  L'inter- 
prète récent  d'Athénée  ne  croit  pas 
que  la  Léontium  d'Hermésianax  soit 
la  même  que  celle  d'Epicure.  11  ne 
nous  a  pas  paru  que  la  chronologie 
exclût  absolument  cette  identité  ;  ce 
que  nous  tâcherions  de  morilrer,  si 
la  nature  de  cet  ouvrage  permettait 
de  semblables  discussions.  Léontium 
eut  une  fille  nommée  Danaé ,  qui 
ne  fut  guère  plus  sage  que  sa  mère  , 
etqui  mourut  victime  de  son  dévoue- 
ment  pour  un  gouverneur  de  Syrie, 
appelé  Sophron ,  dont  elle  avait  été 
la  maîtresse.  Danaé  était  devenue  la 
favorite  et  la  confidente  de  Laodicé, 
veuve  du  roi  Antiochus/?i>M.  Ayant 
su  que  Laodicé  voulait  faire  périr 
Sophron,  elle  l'en  avertit,  et  il  eut 
le  temps  de  fuir.  Furieuse  d'une  in- 
discrétion qui  lui  avait  peut-être  é- 
pargué  un  crime,  et  ne  se  souvenant 
plus  que  Danaé  était  son  amie,  la 
reine  ordonna  qu'elle  fût  précipitée. 
Comme  on  la  conduisait  au  préci- 
pice :  a  Que  les  hommes ,  dit-elle  , 
»  ont  bien  raison  de  mépriser  la  di- 
»  vinitéî  j'ai  sauvé  mon  amant,  et 
»  voila  comme  le  ciel  m'en  récom- 
»  pense!  Laodicé  a  tué  son  époux  , 
»  et  elle  est  au  comble  de  la  pros- 
»  périlé!  »  On  voit  que  Danaé  avait 
dans  la  tête  un  peu  de  la  philoso- 
phie d'Epicure  :  elle  tenait  cela  de 
sa  mère.  Mais  l'intérêt  qu'inspire 
une  fin  si  tragique  et  «  peu  méritée 


172  LEO 

ue  laisse  pas  la  force  de  la  juger  sé- 
vèrement. B-ss. 

LEOPARDI  (  Alexandre  ),  sculp- 
teur et  architecte,  naquit  à  Venise  vers 
le  milieu  du  xv*^.  siècle.  Il  sortait  de 
l'école  de  Lombardie  ;  et ,  quoiqu'il 
soit  peu  connu  hors  de  l'Italie  ,  les 
ouvrages  qu'il  a   exe'cute's  dans   sa 
ville  natale  offrent  un  tel  caractère  de 
perfection  et  d'élégance,  que  l'on  ne 
])eut  concevoir  comment  tant  d'au- 
tres sculpteurs  moins  habiles  ont  ob- 
tenu plus  de  renommée.  Un  des  mo- 
numents les  plus  remarquables  de 
Venise  est  dû  à  son  ciseau  :  c'est  le 
mausolée  du  doge  André  Vendra- 
min,  érigé  dans  l'ancienne  église  des 
Servitcs.  Ce  monument,  aussi  admi- 
rable parla  beauté  de  l'architecture 
que   par  la  perfection  de  la  sculp- 
ture, est  enrichi  d'un  grand  nombre 
de  statues   et  de   bas-reliefs  de  la 
main  de  Leopardi ,  excepté  deux  fi- 
gures  à' Adam  et  à' Eve ,  r^wi  sont 
dues  à  Tullio  Lombarde,  sculpteur 
également  habile  de  cette  époque  :  le 
travail  du  premier  est  remarquable 
par  la  simplicité  et  le  goût.  Ce  n'est 
point  la  fierté  de  l'école  florentine  ; 
c'est  un  style  plus  simple  et  plus  gra- 
cieux, et  qui  semble  le  type  de  celui 
qu'adoptèrent  parmi  nous  Jean  Gou- 
jon et  Germain  Pilon.  Oa  est  frappé 
de   l'analogie  qui  existe  entre   les 
bas-reliefs   de  ce  mausolée  repré- 
sentant des  Enfants  jouant  avec  des 
animaux  marins ,  et  ceux  du  même 
genre  qui  ornent  la  fontaine  des  In- 
nocents à  Paris.  Les  statues  de  pe- 
tite proportion  qui  sont  placées  au- 
tour du  sarcophage,  semblent,  pai? 
l'invention  et  la  perfection  du  tra- 
vail, avoir   été  copiées  d'après  les 
pierres  antiques  les  plus  parfaites  : 
les   ornements   d'architecture   sont 
de  même  d'un   excdlent  goût.  Ce 
monument  n'avait  jamais  été  gravé  j 


LEO 

et  l'on  a  l'obligation  de  le  connaître 
à  M.  le  chevalier  Cicognara,  qui  en 
a  inséré  le  trait  dans  son  Histoire 
de  la  sculpture  moderne  :  il  suffit 
pour  montrer  à  quel  point  de  per- 
fection ce  bel  art  s'était  élevé  à  Ve- 
nise.  C'est   encore  à  Leopardi  que 
l'on  doit  les  trois  piliers  de  bronze 
de  la  place  Saint-Marc,  sur  lesquels 
étaient  arborés  les  étendards  de  la 
république  :  l'élégance  et  la  justesse 
des  proportions  y   sont  également 
admirables.  C'est  Leopardi  qui  fon- 
dit la  statue  équestre  en  bronze  du 
général   Colleoni ,  dont  le   modèle 
avait  été  exécuté  par  André  da  Ve- 
rocchio.  Il  fit  en  outre  le  piédestal 
de  celte   statue  ;   et  cet  ouvrage  a 
toujours  été  regardé  comme  le  plus 
parfait  modèle  de  ce  genre.  On  peut 
en  voir  le  plan ,  l'élévation   et  les 
détails  dans  l'ouvrage  intitulé  :  Le 
Fahbriche    Veneziane  illustrate  e 
misurate.  On  a  reproché  à  Leopardi 
d'avoir  voulu  s'approprier  entière- 
ment l'ouvrage,  en  gravant  sous  le 
ventre  du  cheval  l'inscription  sui- 
vante :  Alexander  Leop ardus  fecit 
opus ,   qu'il    recouvrit  de  bitume  , 
afin  qu'au  bout  de  quelque  temps  la 
pluie  et  le  soleil  faisant  disparaître 
l'enduit,  l'inscription  reparût  :  c'est 
une    erreur.    L'inscription     placée 
sous  le  ventre  du  cheval  ne  porte 
point    le  mot  fecit;  il  n'y  a  que 
la  lettre  F  qui  signifie  aussi  bien 
fudit  ([ue  fecit;  et  une  preuve  que 
j-amais  il  n'a  voulu  s'approprier  ce 
bel  ouvrage ,  c'est  que,  dans  l'cpita- 
phe  qu'il  fit   placer  lui-même  sur 
sou  tombeau,  il  ne  se  reconnaît  que 
comme  l'auteur  du  piédestal,  disant 
en   propres  termes  :  Bartlwlomœi 
Colœi  slatiue    basis  opifex.   Leo- 
pardi  avait   été  chargé,  conjointe- 
ment avec  Antoine   Lombar.lo  ,  de 
la  coastruotioa  de  la  chapelle  Zen , 


I 


IJ'O 

(\i\us  lV;;liM'  S.iint-Mnrc.  Des  en- 
\icux  cheichcrent  à  lui  susciter 
i\vs  ilcgoîils  :  on  le  remplaça  par 
tiaulres  artistes;  mais  l'ouvrage  res- 
ta suspendu  jusqu'à  ce  qu'enfin  Pier- 

10  Lombardo  le  Vieux  fVit  charge 
(le  la  direction  des  travaux.  Outre 
les  ouvrages  qu'on  vient  de  rappor- 
ter, Leopardi  en  avait  exécuté,  pour 
(liirércnts  particuliers  et  pour  des 
clablissements  qui  n'existent  plus  , 
un  grand  nombre  de  moins  inipor- 
Umts  :  quoiqu'il  n'y  eût  pas  mis  son 
nom ,  l'empreinte  de  son  talent  s'y 
remarque  toujours,  et  ils  n'ont  pas 

■ssé  d'être  recherchés  ,  comme  les 
:  'stes  précieux  de  la  perfection  des 
.»rts  à  Venise  dans  le  xv*^.  siècle. 

11  mourut  dans  cette  ville  en  t5io, 
et  fut  enterré  dans  le  cloître  de 
Sainte-Marie  dell'  Orto.  P--s. 

LÉOPOLD  (  Saint  },  dit  le  Pieux, 
margrave  d'Autriche ,  de  la  maison 
de  Bamberg,  ou  Babenberg ,  était  fils 
de  Léopold  III,  dit  Icbeau ,  et  d'Itha, 
fille  de  l'empereur  Henri  III,  ou  plus 
vraisemblablement  de  Welphe  î^i.  ^ 
duc  de  Bavière.  Il  était  encore  fort 
une,  lorsqu'en  1096,  la  mort  de 
m  père  le  rendit  souverain  du  mar- 
-  aviat.  L'empereur  Henri  IV,  s'é- 
tiit  brouillé  avec  le  Saint-  Siège  , 
1  iusieurs  princes  d'Allemagne  le  li- 
ât déposer  ,  et  mirent  à  sa   place 
lenri,   son   propre   fils.    (  Vojez 
Hemu  IV  et  HE^RI  V.  )   Léopold  , 
malgré  toute  sa  sagesse  et  toute  sa 
piété  ,  embrassa  le  parti  de   ce  iîls 
dénaturé,dout,  en  1 106  ,  il  épousa 
la  sœur  ,  nommée  Agnès.  On  croit 
toutefois  qu'il  ne  contracta  ce   ma- 
riage qu'après  la  mort  de  Henri  IV; 
ce  qui  rend  sa  conduite  moins  blâ- 
mable. L'opinion  qu'on  avait  de  son 
équité,  de  sa    prudence  et  de  sa 
•  leur  ,    fit    jeter    les    yeux    sm* 
'«  ,    pour  succéder  à  îlenri  V  ; 


LEO 


1-3 


Uiais  jugeant  que  Lothaire  réunirait 
en  sa  faveur  la  pluralité  des  suf- 
frages ,  Léopold  se  lit  un  devoir  de 
lui  céder.  Il  repoussa  ,  avec  le  se* 
cours  du  duc  de  Bohème  ,  les  alla- 

3ues  d'Etienne  II  ,  roi  de  Hongrie  , 
ont ,  par  représailles  ,  il  ravagea 
les  étals.  On  j)arle  aussi  d'une  au- 
tre victoire  qu'il  remporta  sur  le 
même  priiu  e.  Léoj)old  eut  d'abord 
à  gouvernei-  des  sujets  intraitables , 
que  la  religion  et  les  lois  n'avaient 
encore  pu  ])olir.  Il  sut  les  adoucii- 
par  sa  prudence  et  sa  modération  ; 
et  bientôt  il  se  vit  l'objet  de  leur  vé- 
nération et  de  leur  amour.  De  con- 
cert avec  Agnès,  son  épouse,  il  fon- 
da plusieurs  monastères  ;  mais  loin 
de  fouler  ses  sujets  pour  fournil-  à 
ces  établissements  pieux ,  il  diminua 
les  impots ,  et  versa  d'abondantes 
aumônes  dans  le  sein  des  pauvres. 
Il  mérita  aussi  la  reconnaissance 
publique  par  son  exactitude  à  ren- 
dre la  justice.  Léopold  mourut  le 
1 5  novembre  1 1 36.  Il  eut  d'Agnès 
dix-huit  enfants.  Le  bruit  des  mi- 
racles qu'on  disait  s'opérer  sur  sa 
tombe,  et  dont  il  se  fit  d'amples  re- 
cueils ,  porta  plusieurs  papes  à  or- 
donner des  recherches  sur  sa  vie. 
Ce  fut  Innocent  VIII  qui  ,  à  la  de- 
mande de  Frédéric  III,  le  canonisa, 
le  i4  janvier  i48j.  H-ry. 

LEOPOLD  I*^'.  ou  II,  dit  le  Glo. 
rieux ,  duc  d'Autriche  (  i  ) ,  était  le 
troLsièmefilsde  l'empereur  Albert  \^^ 
qui  fut  assassiné  à  l'instigation  de 
Jean  de  Hapsbourg ,  son  neveji.  Le 


(t)  CVit  •etilement  dppuit  l'anut^e  i|52,  que 
les  ptincet  de  la  ntAÏton  d'Autiicliu  ptciineiit 
«ans  conleaiation  le  titre  d'archiduc  qui  leur  a 
été  accordé  ou  plutiit  rendu  par  Tenipereur  Fré- 
déric III  ,  chef  de  leur  maisoa.  Ce  monarque 
leur  contera  ,  en  conaéqiiencv  ,  plutieura  préro- 
gatiret ,  tellet  entre  auirtt  qur>  ie  droit  de  porter 
dam  leuti  propret  était  ,  le  manteau  royal,  et  la 
couronne  ducale  ,  turniontée  du  diadénid  impe. 
rial  et  de  la  croÏK  ,  et  de  leni*  lui  bâton  de  com- 
uiandemeut  à  la.  oi^iu. 


174  I^EO 

premier  soin  des  enfants  d'Albert  , 
fut  de  venger  sa  mort  sur  tous  ceux 
qui  avaient  eu  part  au  crime  ,  et 
même  jusque  sur  leurs  vassaux.  Plus 
de  mille  personnes  furent  sacrifiées, 
dit-on  ,  aux  mânes  du  monarque 
autrichien.  Albert  laissa  cinq  fils, 
qui  succe'dèrent,  par  indivis,  à  toutes 
les  possessions  de  leur  famille.  Trois 
d'entre  eux  étant  encore  fort  jeunes, 
l'administration  des  provinces  autri- 
chiennes fut  dévolue  aux  aînës,  Fré- 
déric et  Léopold.  En  conséquence 
du  partage  qu'ils  en  firent  entre 
eux  ,  ce  dernier  prince  prit  en  main 
le  gouvernement  des  états  que  sa 
maison  possédait  en  Souabe ,  en  Al- 
sace et  en  Suisse.  Léopold  suivit  en 
Italie ,  à  la  tctc  de  quinze  cents  hom- 
mes d'armes  ,  l'empereur  Henri  de 
Luxembourg  ,  qui ,  pour  le  récom- 
penser de  ce  signalé  service,  le  fiança 
à  Catherine  de  Savoie ,  nièce  de  l'im- 
pératrice. Comme  cette  dernière  prin- 
cesse n'existait  plus  ,  et  que  Henri 
désirait  établir  une  union  encore 
plus  intime  entre  lui  et  les  princes 
autrichiens  ,  il  choisit  pour  seconde 
femme  ,  Catherine  leur  sœur.  La 
future  impératrice  était  à  peine  ar- 
rivée en  Italie ,  que  l'empereur  mou- 
rut ,  événement  qui  fit  concevoir 
aux  ducs  d'Autriche ,  l'espérance  de 
placer  l'un  d'eux  sur  le  trône  im- 
périal ;  et  ils  usèrent  de  toute  leur 
influence  pour  assurer  la  nomination 
de  Frédéric.  Il  y  eut  double  élection. 
Une  partie  des  électeurs  nommèrent 
le  duc  d'Autriche  ,  et  l'autre  Louis 
de  Bavière ,  qui  toutefois  obtint  la 
plurabté  des  suffrages  de  tout  le  col- 
lège électoral.  Des  deux  côtés  on 
courut  aux  armes.  Durant  le  cours 
des  hostihtés,  les  deux  princes  au- 
trichiens céleTirèrcnt  leurs  noces  , 
l'un  avec  Elisabetb  d'Aragon  ,  et 
l'autre  avec  Catherine  de  Savoie  j 


LEO 

et  ils  perdirent  un  temps  précieux  , 
en  fêtes  et  en  tournois.  A  la  fin  ce- 
pendant ,  Frédéric  marcha  contre 
Louis  ,  et  Léopold  attaqua  les  can- 
tons d'Uri  ,  d'Underwald  et  de 
Switzch,qui  avaient  épousé  les  inté- 
rêts du  prince  bavarois.  Ayant  ras- 
semblé une  armée  de  vingt  mille 
hommes ,  le  duc  d'Autriche  s'ava-nça 
vers  la  ville  de  Schwitz.  A  son  ap- 
proche, quatorze  cents  hommes,  la 
fleur  de  la  jeunesse  suisse,  saisissent 
leurs  armes  ,  et  volent  au  secours 
de  la  ville  menacée.  Ils  passent  un 
jour  entier,  livrés  à  des  exercices  de 
piété,  à  chanter  des  hymnes  ,  et  à 
demander  à  Dieu ,  agenouillés  dans 
les  rues  et  dans  les  places  publiques, 
d'exaucer  leurs  humbles  prières  et 
d'abaisser  l'insolence  de  leurs  enne- 
mis. Ayant  pris  ])oste  sur  les  hau- 
teurs de  Morgarten,  et  enflammés 
du  même  courage  que  les  Grecs  aux 
Thermopyles ,  ils  attendent  de  pied 
ferme  l'armée  autrichienne.  Quinze 
cents  bannis  font  solliciter,  près  des 
magistrats  ,  la  faveur  de  partager 
les  dangers  de  leurs  compatriotes  ;  et 
quoique  refusés,  ils  occupent  une 
hauteur  qui  commande  l'entrée  du 
défilé.  Le  lendemain ,  au  point  du 
jour  (  ï  6  novembre  1 3 1 5  ) ,  on  vit  pa- 
raître les  Autrichiens,  qui  se  croyaient 
assurés  de  la  victoire.  A  peine  sont- 
ils  engagés  dans  le  défilé,  que  les 
bannis,  poussant  de  grands  cris,  font 
rouler  sur  eux  des  troncs  d'arbre  et 
des  quartiers  de  rocher.  Les  Suisses 
quittent  les  hauteurs,  et  cliargent  les 
Autrichiens  ,  qui ,  gênés  par  le  peu 
d'espace  du  terrain ,  ne  peuvent  faire 
aucun  mouvement  ,  et  sont  bientôt 
culbutés.  Léopold  lui  même  ne  par- 
vient qu'avec  peine  à  se  sauver.  Les 
ducs  d'Autriche  profitèrent  d'un 
armistice  qu'ils  conclurent  avec  les 
Suisses ,  pour  dirig^er  tout  l'effort  de 


I.EO 

|f!urs  arînc5  roiitrcT-ouis  (IrRavii'ie; 
vt  il  so  livra  mir  infiiiifc  de  combats 
li  (lesolèrent  rAlleînaj];ne,  de  rime 
.4  l'autre  extrémité.  I/artion  la  plus 
célèbre  fut  celle  de  Muhldorf,   où 
Frédéric   fut  fait    prisonnier    avec 
Henri  son  frère.  Cette  défaite  fut  due 
':  l'imprudence  de  Frédéric,  qui  li- 
ra la  bataille  sans  attendre  1  arri- 
\  ce  de  fiéopold.  Ce  prince  ,  qui  se 
trouvait  à  la  tète  de  forces  conside- 
:  t blés,  était  entre  en  Bavi're;  mais 
vaut  appris  le  funeste  résultat  de 
Il  journée  de  Muhldorf ,  il  se  retira 
eu  Alsace.  Après  avoir  tenté  vaine- 
ment de  faire  rendre  la  liberté  à  ses 
deux  frères,  il   redoubla    d'eATorls 
pour   réparer   les    nialhcui*s  de   sa 
maison ,  il  gagna  le  roide  Bohème ,  et 
en  obtint, moyennant  une  rançon,  la 
liberté  de  Henri,  H  s'unit  étroitement 
avec  le  pape  Jean  XXII ,  qui  avait 
fulminé  contre  Louis   une  sentence 
d'excommunication  et  de  déposition  • 
et  il  promit  de  favoriser  l'élection 
du  roi  de  France  (  Charles  IV ,  dit 
le  Bel  )  à  l'empire.  Ayant  levé  beau- 
coup de  troupes  ,  il  ravagea  la  Ba- 
vière ,  et  insulta  les  villes  impériales 
de  Souabc.  Louis,  pour  arrêter  cette 
incursion ,  se  mit  en  marche  au  cœur 
de  l'hiver.  Altaqnépar  Léopold  ,  il 
fut  complètement  défait.  Cette  vic- 
toire accrut  l'influence  du  parti  au- 
trichien.  Léopold   eut  ,  à    Bar-sur- 
Aube ,  une  entrevue  avec  le  roi  de 
France.  Il  se  réunit  ensuite  aux  élec- 
teurs de  Maïence  et   de  Cologne  , 
aux    amlwssadeurs    du    monarque 
français  et  au  légat ,  pour  concerter 
la  déposition  formelle  de  Louis  ,  et 
réleclion  de  Charles  IV.  Réduit  à 
cette  extrémité,  Louis  de  Bavière  ne 
vit  d'autre  parti  à  prendre  que  de 
t.-îcher  de  se  récoucdier  avec  les 
princes  autrichiens  ,  et  il   rendit  la 
liberté  à  Frédéric  :  ce  ne  fut  toutc- 


LEO  17  > 

fois  qu*à  des  conditions  fort  dures. 
Le  duc  d'Autriche  promit  de  renon- 
cer à  la  dignité  impériale  ,  de  resti- 
tuer toutes  les  places  qu'il  avait  en- 
levées à  l'Empire,  de  soutenir  l'em- 
pereur contre  tous  ses  ennemis  ,  et 
de  reprendre  ses  fers  s'il  ne  pouvait 
exécuter  tous  les  articles  de  la  con- 
vention. Mais  les  autres  princes  au- 
trichiens, et  particulièrement  le  fier 
Léopold  ,  refusèrent  d'accéder  à  ce 
traité  ,  que  de  son  côté  le  pape  dé- 
clara nul.  Frédéric  tint  sa  parole 
avec  une  fidélité  dont  on  trouve  peu 
d'exemi>lcs  dans  l'histoire.  Il  se  re- 
mit en  la  puissance  de  Louis  ,  qui  , 
touché  d'une  telle  grandeur  d'à  me  , 
traita  son  prisonnier  avec  générosi- 
té. Selon  1  usage  du  temps ,  ils  n'eu- 
rent qu'une  table  et  qu'un  lilj   et 
lorsque  Louis   fut  appelé  dans  le 
Brandebourg ,  pour  y  étouffer  une 
révolte  contre  son  fils ,  il  confia  le 
gouvernement  de  la  Bavière  à  Fré- 
déric. A  la  fin ,  fatigué  des  attaques 
impétueuses  et  terribles  de  Léopold , 
et  redoutant  la  haine  du  pape,  Louis 
ofTrit  des   conditions  moins  dures. 
On  conclut  un  traité  (  8  septembre 
1 3^25), portant  que  les  deux  compé- 
titeurs  régneraient   conjointement  ; 
qu'il  prendraient ,  l'un  et  l'autre  ,  le 
titre  de  roi  des  Romains,  qu'ils  con- 
féreraient de  concert  les  fiefs  impé- 
riaux ,  et  que  chacun  d'eux  aurait 
alternativement  la  préséance.  Léo- 
pold se  montra  satisfait  de  cet  ac- 
cord :  mais  les  électeurs  et  les  princes 
del'Empire  soutinrent  quec'était  une 
violation  de  leurs  privilèges  ;  et  le 
traitéfut  censuré  par  le  pape ,  comme 
attentatoire  aux  droits  de  l'Eglise. 
En  conséquence ,  il  fut  arrêté,  entre 
Louis  et  Frédéric,  que  le  premier 
se  rendrait  en  Italie ,  accompagne  de 
Léopold  ,  en  qualité  de  vicaire-géné- 
ral de  l'Empire,   et  (jue   Frédéric 


176  LEO 

tiendrait  les  renés  du  gouvernement 
en  Allemagne.  Malgré  tous  les  efforts 
du  pape  pour  soulever ,  contre  cet 
arrangement ,  le  roi  de  France  et  les 
électeurs ,  Louis  et  Frédéric  demeu- 
rèrent unis.  Léopold  ,  avec  son  ac- 
tivité accoutumée ,  rassemblait  sur 
le  Rhin  une  armée  destinée  à  forcer 
le  consentement  des  princes  de  l'Em- 
pire,  lorsque  sa  mort  vint  frustrer 
de  nouveau  les  espérances  de  sa  mai- 
son. En  apprenant  la  perte  de  la  ba- 
taille de  Muhldorf ,  ce  prince  s'était 
livré  au  désespoir  le  plus  violent  j 
et  ce  n'avait  pas  été  sans  peine  qu'on 
l'avait  empêché  de  mettre  un  terme 
à  ses  jours.  Depuis  cette  époque  ,  ja- 
mais on  ne  l'avait  vu  sourire  :  il  dé- 
plorait continuellement  l'abaisse- 
ment de  sa  maison  •  et  les  émotions 
que  lui  faisait  éprouver  un  esprit  in- 
domptable et  ardent ,  jointes  aux 
grands  eflbrts qu'il  avait  faits  durant 
la  guerre  contre  Louis  de  Bavière  , 
allumèrent  son  sang,  et  lui  causèrent 
une  fièvre  qui  le  conduisit  promp- 
tement  au  tombeau.  Il  mourut  à 
Strasbourg ,  dans  un  accès  dedélire, 
à  l'âge  de  35  ans.  Léopold  eut  de 
Catherine  de  Savoie ,  deux  filles , 
Catherine  et  Agnès.  Catherine  épou- 
sa ,  en  premières  noces  ,Enguerrand 
VT ,  sire  de  Coucy  ,  dont  elle  eut  le 
célèbre  Enguerrand  de  Coucy,  et  en 
secondes  noces  ,  Conrad  ,  comte  de 
Hardeck.  Agnès  eii^  pour  époux  Bo- 
leslas  j  duc  de  Schweidnitz  et  de 
Gawer.  H-ry. 

LÉOPOLD  II  ou  III,  dit  le  Preux, 
duc  d'Autriche  ,  troisième  fils  d'Al- 
bert II,  dit  le  Sa§e,  fut  chargé 
de  l'administration  des  états  que  sa 
maison  possédait  dans  la  Souabe, 
et  partagea  le  gouvernement  du  ïy- 
rol  avec  Albert  III,  son  frère.  Mais, 
avide  de  pouvoir,  il  arracha  à  ce 
dernier  mi  nouvel  acte  de  partage, 


LEO 

par  lequel  il  ne  lui  laissa  que  l'Au- 
triche, et  acquit  lui-même,  outre  les 
possessions  de  Souabe  et  d'Alsace_, 
le  Tyrôl ,  la  Styrie ,  la  Carinlhie  et 
leurs  dépendances.  Comme  l'hidivisi- 
bilité  des  états  Autrichiens  était  éta- 
blie par  un  ancien  pacte  de  famille  , 
Léopold  pria  l'empereur  Charles  IV 
de  consentir  à  l'arrangement  qu'il 
venait  de  faire  avec  Albert.  «  Nous 
»  avons  long-temps  travaillé  vaine- 
»  ment  à  abaisser  la  maison  d'Au- 
»  triche  ,   »  dit  le  monarque  ,   en 
donnant   à  l'acte  sa  sanction  avec 
joie;  «  et  voilà  qu'elle  s'abaisse  elle- 
y>  même.  »  Léopold  s'efforçait  d'é- 
tendre ses  états  par  différentes  ac- 
quisitions ,  lorsque  ses   possessions 
d'Alsace  et  de  Suisse  furent  envahies 
par  Enguerrand  VII, sire  de  Coucy, 
son  cousin  ,  qui  réclamait  plusieurs 
terres,  commela  dot  de  sa  mère,  et 
dont  la  demande  fut  rejetée  comme 
contraire   à  l'ordre   de   succession 
établi  dans  la  maison  d'Autriche. 
Enguerrand  éprouva  en  Suisse  plu- 
sieurs défaites,  qui  le  forcèrent  à  se  re- 
tirer en  Alsace.  Après  avoir  dévasté  ce 
pays,  il  abandonna  ses  prétentions  , 
soit   parce   qu'il  se    trouvait    hors 
d'état  de  les    soutenir,   soit  parce 
quç  Léopold  lui  céda   les   seigneu- 
ries  de  Buren  et   de  Nidau.  Cette 
contestation  était  à  peine  terminée  , 
lorsque  Léopold   se  vit  enveloppé 
dans  les  guerres  que  se  firent  en  Ita- 
lie, la  république  de  Venise,  le  roi 
de  Hongrie,  et  François  de  Carrare, 
qui  engagea  le  duc  d'Autriche  à  tenter 
une  invasion  dans  les  états  Vénitiens. 
Après  des  succès  divers,  Léopold 
conclut  avec  la  répu]jlique  une  trêve 
de   deux  ans,   durant  lesquels  une 
nouvelle  ligue  ,  où  il  ne  voulut  point 
entrer ,  mit  Venise  sur  le  penchant 
de  sa  ruine.  Les  Vénitiens  aciietèrent 
ensuite  la  neutralité  de  ce 


I 


LEO 

lui   cêilant  la   marche  de  Trcvise, 
l'il  ne  put  conserver  cl  qu'il  vendit 
l'iaiiçois  do  Carr;«re.  Vers  le  mê- 
me   temps ,   il   fit   l'arquisition   de 
ïriestc  ,  dont  les  habitants  ,  fatigues 
de  leurs  propres  dissensions,  hii  of- 
frirent de  se  soumettre  à  sa  domina- 
tion ;  ce  qui  donna  un  port  de  mer 
à  la   maison  d'Autriche  ,  avantage 
dont  elle  était   privée.   Guillaume, 
fils  aînc  de   Leppold  ,   était    doué 
de  qualités  extérieures  si  sëduisan- 
♦'"s,  qu'elles  lui  avaient  acquis  le 
irnom  de  Merveille  du  monde.  Sou 
père  s'était  flatté  de  lui  procurer  la 
couronne  de  Pologne  ,  en  lui  faisant 
épouser  la  belle  Hedwige ,  fdle  du 
monarque   polonais ,   Louis    dit  le 
Graml;  mais  le  jeune  duc  d'Autri- 
che, malgré  l'amour  qu'il  avait  su 
inspirer  à  la  princesse,  fut  supplanté 
par  Jagellon,duc  de  Lithuanie. Cette 
disgrâce,  jointe  au  mauvais  état  de  ses 
finanecs,  et  au  peu   de  succès  de  la 
guerre  qu'il  avait  soutenue  en  Italie, 
et  durant  laquelle  il  avait  été  un  ins- 
tant prisonnier ,!  affligèrent  Léopuld 
au  point   qu'il  devint  incapable  de 
tout  exercice  de  corps  et  d'esprit.  Il 
négligea  l'administration  des  alfa  ires; 
et  ses  baiihs   et  seigneurs,   afVran- 
*his  de  toute  contrainte,  se  livrèrent 
<dx  plus  grands  excès.  Le  mécon- 
tentement  étant  parvenu    au   plus 
haut  degré ,  il  se  forma  une  confé- 
dération de  ])luh  de  quarante  villes  de 
Souabe,  à  laquelle  accédèrent  Stras- 
bour;:;,  M^ticnce,  ainsi  que  les  autres 
villes   principales    du  Rhin,  et  les 
cantons  de  Berne,  de  Zug,  de  Zurich 
et  de  Soleure.  Léopold,  cfl'rayé,  sor- 
tit de  son  aj)alhie,  et  détacha  Zurich 
de  l'alhance  des  autres  cantons  con- 
fédérés contre  lui  :  il  parvint  à  dis- 
soudre la  ligue  des  villes  du  Rhin;  et, 
<  u  réprimant  ses  baillis ,  il  apaisa  les 
mécontentements  dans  la   Souabe. 
xxiv. 


LEO  177 

Mais  les  infjuiétudes  ayant  cessé,  les 
exactions  recommencèrent.  La  haine 
que  les  Suisses  portaient  à  l'Aulrif  he 
se  réveilla,  cl  une  querelle  légère  oc- 
casionna bientôt  une  rupture.  Les  ha- 
bitants de  quelques  villes  qui  faisaient 
partie  des  possessions  de  la  maison 
de  Hapsbourg ,  et  que  Léopold  avait 
engagées  à  plusieurs  seigneurs  ,  s'é- 
tant  mis  sous  la  protecliou  de  Lu- 
cerne  ,  il  s'ensuivit  une  guerre  cruelle 
entre   le  duc   d'Autriche  ,  et  plu- 
sieurs   cantons  Helvétiques.   Après 
Aqs  succès  divers,  fut  livrée  la  cé- 
lèbre bataille  de  Sempach  (  9  juil- 
let i38fi  ),  où  treize  cents  Suisses 
délirent  l'armée  autrichienne,  forte 
de  quatre  raille  chevaux  ,  et  de  qua- 
torze cents  hommes  de  pied.  Le  suc- 
cès fut  dû  au  dévouement  héroïque 
d'Arnold  de  Winkciried,  chevalier 
du  canton  d'Underwald.  Voyant  les 
Autrichiens  sur  le  point  d'envelop- 
per les  Suisses,  Arnold,  après  avoir' 
recommandé  sa  femme  et  ses  en- 
fants à  ses  compatriotes,  sort  des 
rangs,  se  jette  sur  les  ennemis,  et 
saisit  autant  de  leurs  lances  qu'il  peut 
en  embrasser.  Sa  poitrine  en  est  per^ 
cée,  et  il  les  entraîne  en  lombanf. 
Ses  concitoyens  s'avancent  sur  son 
corps  expirant,  et  rompent  la  ligne 
des  Autrichiens.   D'autres  Suisses  , 
avec  non  moins  d'intrépidité,  péné- 
trent dans  les  intervalles  causés  par 
ce  mouvement,  et  toute  la  phalange 
est  mise  en  désordre.  Deux  mille  Au- 
trichiens, dont  un  tiers  était  compose 
de  comtes ,  de  barons  et  de  cheva- 
liers ,    furent    comptés    parmi    les 
morts.  Léopold  y  déploya  la  plus 
grande  bravoure.  L'olHcier  qui  por- 
tait l'étendard  autrichien  ayant  été 
renversé,   un   autre   olHciev   releva 
l'enseigne;  mais  bientôt,  mortelle- 
ment blessé ,  il  tombe  en  s'écriant  : 
tt  Au  secours  ,  Autrichiens!  au  s«- 

VÀ 


LEO 

»  cours!  »  Léopold  accourt,  reçoit 
rétendard  ensanglanté ,  et  l'agite  en 
l'air.  Ses  chevaliers  se  pressent  au- 
tour de  lui;   l'action  s'engage  avec 
une  nouvelle  fureur,  et  la  plupart 
des  compagnons  d'armes  du  prince 
sont  tués  à  ses  côtés.  Lui  -  même , 
voyant  'tout  perdu  ,  se  jette  au  plus 
fort  de  la  mêlée;  et  une  main  incon- 
nue met  un  terme  à  son  existence. 
Son  corps,  percé  de  coups,  fut  trou- 
vé sous  un  tas  de  morts.  Ainsi  périt 
Léopold,  âgé  de  36  ans,  après  un 
règne  fort  agité  qui  en  avait  duré  20. 
Ce  prince  montra  plutôt  les  qualités 
d'un  chevalier  errant ,  que  celles  d'un 
souverain.   Il  ne  laissa  point  d'en- 
fants  de   Catherine ,    sa    première 
femme ,  qui  était  fille  de  Meinhard  , 
comte  de  Gorice.  Sa  seconde  femme ,' 
Virida,  fille  de  Bernaho  Yisconti, 
seigneur  de  Milan ,  qu'il  épousa  en 
1 366,  lui  donna  quatre  fils,  Guil- 
laume, Léopold ,  Ernest  et  Frédéric , 
et  une  fille  nommée  Elisabeth.  H-ry. 
LEOPOLD  I«r.,  empereur  d'Al- 
lemagne, second  fils  de  Ferdinand  III, 
naquit  le  9  juin  1640  ,  et  se  signala 
dans  sa  jeunesse  par  des  talents  mi- 
litaires. Ferdinand ,  son  frère  aîné  , 
étant  mort,  il  fut  reconnu  héritier 
présomptif  des  deux  couronnes  de 
Hongrie  et  de  Bohème;  et  les  états 
d'Autriche  lui  prêtèrent  foi  et  hom- 
mage en  la  même  qualité.  Il  n'avait 
pas  18  ans,  lorsque  son  père  mourut. 
La  régence  fut  déférée  à  l'archiduc 
Léopold,  frère  de  Ferdinand  III;  et 
le  premier  soin  de  ce  prince  fut  de 
faire  poser  sur  la  tête  de  son  neveu , 
la  couromie  impériale,  qui  lui  fut 
offerte  à  lui-même ,  et  qu'il  eut  la 
générosité  de  refuser.  Léopold  fut 
élu  empereur,  le  18  juillet  i658,  et 
couronné  à  Francfort,  le  i^^  du  mois 
suivant.  On  lui  fit  signer  une  capitu- 
Utiga  qui  u'ayait  pas  moins  de  qua- 


LEO 

rante-cinq  articles,  l'un  desquels  lui 
interdisait  la  faculté  de  secourirTEs- 
pagne  dans  les  guerres  d'Italie.  On 
voulut  étendre  cette  interdiction  à  la 
guerre  qui  se  faisait  dans  le  Nord  ; 
mais   Léopold   eut  assez  de   force 
pour  en  faire  rejeter  la  proposition , 
ainsi  qu'un  autre  article  portant  que 
s'il  violait  sa  capitulation,  il  serait 
censé  avoir  abdiqué.  Ne  pouvant  ainsi 
prendre  part  à  la  guerre   entre  la 
France  et  l'Espagne,  l'empereur  di- 
rigea ,  mais  sans  de  grands  succès , 
tous  ses  efforts  contre  la  Suède.  La 
Hongrie  et  la  Transsylvanie  attirè- 
rent ensuite  son  attention  ;  et  bientôt 
la  guerre  se  ralluma  entre  la  maison 
d'Autriche  et  la  Porte  Ottomane.  Les 
troupes  impériales,  commandées  par 
Montécucutli,  remportèrent  d'abord 
quelques  avantages ,   dont  elles  ne 
purent  profiter, les  Hongrois  n'ayant 
point  envoyé  les  secours  qu'ils  avaient 
promis.  Léopold  n'obtint  rien  non 
plus  d'une  nouvelle  diète  qu'il  avait 
assemblée  à    Presbourg  :    en   con- 
séquence,  il  entra    en    négociation 
avec    les    Turcs  ;    mais    le    grand 
visir  Achmet    Koproli ,   qui ,   sous 
Mahomet  IV;,  gouvernait  l'empire 
Ottoman,  ayant  vu  la  Hongrie  sans 
défense  et  en  proie  à  des  dissensions 
intestines,  fondit   sur   ce  royaume 
avec  une  armée  de  cent  mille  hom- 
mes, passa  la  Drave  et  le  Danube, 
et  détacha  des  hordes  de  Turcs  et  de 
Tatars,   qui,  après   avoir   menacé 
Vienne  ,  portèrent  le  ravage  jusqu'à 
Olmutz.  Dans  ce  danger  pressant, 
Léopold  fut  attaqué  de  la  petite  vé- 
role ,  et  cet  accident  ne  fit  qu'augmen- 
terl'embarrasoiîrinvasion  des  Turcs 
avait  jeté  ses  ministres.  Montécuculli 
eut  beaucoup  de  peine  à  se  main- 
tenir dans  la  position  qu'offre  l'île 
de  Schiitt;  et  la  présence  de  l'ennc- 
Uki  rendit  inutile  un  effort  tardif 


I 


LEO 

qu'on  fit  pour  lever  l'Armée  d'insur- 
rerlion.  N'ayant  plus  d'ospoir  qu'eu 
des  secours  étrangers ,  Lcopold ,  alors 
relevé  de  sa  maladie ,  se  rendit  à  Ra- 
tisbonnCf  où   se  tenait   la   diète  de 
l'Empire.  On  lui  fit  essuyer  une  foule 
de   contrariétés;  et  ce   ne   fut  que 
lorsque  la  prise   de  Ncuhausel  eut 
découvert  toute  l'étendue  du  danger, 
qu'on  lui  accorda  les  continccnls  et 
les  contributions  dont  il  avait  un  si 
pressant  besoin.    Les    autres    états 
prêtèrent  aussi   des  secours  à  Léo- 
pold;  et  le  roi  de  France  lui  envoya 
six  raille  hommes,  sous  la  conduite 
du  comte  de  Coligny  et  du  marquis 
de  la  Feuilladc.    On    réunit    ainsi 
une  armée  de  trente  mille  hommes 
qui  s'avança   vers  le  théâtre  de  la 
guerre.  Les   commencements  de   la 
campagne   furent  marqués  par  des 
succès  et  des  revers;  mais  la  journée 
de  St.-Gothard  (i*"-.  août  i664),  où 
le  choc  des  troupes  allemandes  et  la 
valeur  des   Français  rompirent  les 
rangs  des  janissaires  ,  la  décida  en 
faveur  des  chrétiens.  Dans  les  pre- 
miers transports  de  joie  qu'excita 
cette  victoire ,  on  se  flatta  de  chas- 
ser pour  jamais  de  la  Hongrie  les  in- 
fidèles. Toutefois  la  division  se  mit 
sur-le-champ  parmi  les  vainqueurs  ; 
ce  qui,  joint  à  d'autres  considérations, 
porta  Léopold  à  souscrire  aux  pro- 
positions   du   grand-visir  :  et ,   au 
grand  étonueroent  de  l'Europe,  il 
conclut  avec  la  Porte  Ottomane  (  i  o 
août  id.),  une  trêve  de  ào  ans.  Louis 
XIV  ayant  envahi  les  Pays-Bas  ,  la 
cour  de  Madrid  réclama  le  secours 
de    Léopold  ,    comme   empereur  , 
et  comme  le  plus  proche  héritier  de 
la  couronne  a' Espagne.  Traversé  par 
les  princes  d'Allemagne  et  inquiété 
par  des  troubles  qui  commençaient  à 
s'élever  en  Hongrie  ,  il  fut  contraint 
de  garder  la  neutralité ,  qu'il  rompij 


LEO  179 

néanmoins ,  lorsqu'il  vit  les  Proviu- 
ces-Uniessurlepuintd'etrcronnuises 
parles  troupes  françaises.  D'aLord, 
il  tenta  vainement  de  soulever  l'Em- 
pire contre  la  France  :  mais   l'em- 
brasement du  Palatinat  et  l'invasion 
de  Trêves,  de  la  Lorraine  et  des  villes 
impériales  d'Alsace,  concoururent, 
avec  plusieurs  déclarations  hautaines 
de  Louis  XIV,  à  donner  du  poids  aux: 
représentations  de  Léopold;   et  ,  eu 
16741  toute  la  dicte  se  réunit  pour 
déclarer  la  guerre  au  monarque  fran- 
çais. Durant  les   deux  aimées   sui- 
vantes ,  les  opérations  militaires  en- 
tre la  France  et  l'empereur ,  ne  s'é- 
tendirent pas  au-delà  des  bords  du 
Pihin.  La  lenteur  calculée  de  Monté- 
cuculli ,  et  l'activité  de  Turennc  ,  se 
balancèrent  tellement ,  qu'il  n'y  eut 
point  d'avantage  décisif  de  l'un  ni  de 
l'autre  côté:  mais  peu  de  temps  après 
la  mort  du  dernier  et  la  retraite  du 
premier,  les  choses  changèrent  de 
face;  et  la  fortune  se  déclara  pres- 
que toujours  en  faveur  de  la  France. 
Celte  guerre  fut  terminée  par  la  paix; 
de  Nimègue(  1679), qui,  à  l'égard  de 
l'Allemagne ,  laissa   les  choses  dans 
l'état  où  le  traité  de  Wcstphabe  les 
avait  mises.  La  paix  conclue,  Léo- 
pold, qui  pouvait  prévoir  qu'elle  ne 
serait  pas  de  longue  durée,  engagea 
la  diète  à  mieux  ordonner  l'organi- 
sation de  l'armée  de  l'Empire.  En 
même  temps, il  excita  les  états  d'Alle- 
magne à  former  des  ligues  défensi- 
ves, soit  entre  eux,  soit  avec  des 
puissances  étrangères.  Il  accéda  à 
celle  des  quatre  cercles  du  Rhin ,  et 
conclut  des  traités  d'alliance  avec 
les  ducs  de  Brunswick  -  Luuebourg 
et  l'électeur  de  Bavière.  La  saisie  du 
duché  de  Deux-Ponts ,  en  vertu  d'un 
arrêt  rendu  par  une  des    célèbres 
chambres  de  réunion  que  Louis  XIV 
arait  instituées,  ayant  irrité  le  roi  de 


8o 


LEO 


I 


Suède,  qui  en  e'tait  souverain,  Fempe- 
reur  profita  de  son  mécontentement, 
et  conclut  avec  ce  prince,  l'Espagne  et 
les  Provinces-Unies,  une  ligue  défen- 
sive de  10  ans.  Il  se  flattait  de  porter 
le  corps  germanique  à  déclarer  la 
guerre  à  la  France  ;  et  il  espérait  que 
le  prince  d'Orange  engagerait  l'An- 
gleterre dans  la  querelle:  mais  l'in- 
fluence de  Louis  XIV  l'emporta. 
Les  troiipes  françaises  ,  e'tant  en- 
trées dans  les  Pays-Bas ,  s'emparèrent 
de  plusieurs  places.  La  division  des 
'^rinces  d'Allemagne,  l'insouciance 
es  Hollandais  ,1a  neutralité'  de  l'An- 
gleterre, et  surtout  l'embarras  où  les 
troubles  de  Hongrie  jetaient  Le'opold, 
permirent  au  roi  de  France  de  con- 
server la  plus  grande  partie  de 
ses  conquêtes  ;  et  il  fut  conclu,  à 
Ratisboune  (26  avril  i684),  entre 
ce  prince  ,  le  roi  d'Espagne  et  l'em- 
pereur ,  une  trêve  de  vingt  ans ,  qui 
en  dura  tout  au  plus  trois.  Lëopold. 
renferma  son  indignation  dans  son 
sein ,  et  il  épia  l'occasion  de  la  faire 
e'clater.  H  trouva  de  semblables  dis- 
positions dans  Guillaume  ,  prince 
d'Orange ,  qui  opéra  une  révolution 
dans  les  sentiments  des  Hollandais,  et 
qui  n'usa  pas  avec  moins  de  succès  du 
Crédit  qu'il  avait  sur  l'esprit  du  roi 
de  Suède  ,  et  sur  celui  de  pb.isieurs 
membres  du  corps  germanique.  Léo- 
pold  gagna  ensuite  l'électeur  de 
Brandebourg,  et  s'assura  du  con- 
cours des  princes  de  Brunswick- 
Lunebourg.  Le  prétexte  que  l'em- 
pereur et  le  pri]ice  d'Orange  cber- 
ciiaient  pour  soulever  l'Emjiire  con- 
tre la  France  ,  leur  fut  ofîert  à  la 
mort  de  Gharks-Louis ,  électeur  pa- 
latin, et  dernier  reielon  eu  ligne  mas- 
culine de  la  branche  de  Simmeren. 
Les  brandies  deNeubourg  et  de  Wel- 
dentz  s'en  disputèrent  la  succession; 
et  les  propriétés  allodiales  fuient  ré- 


LEO 

clamées  par  la  sœur  du  feu  prince , 
Elisabeth-Charlotte,  femme  du  duc 
d'Orléans ,  frère  de  Louis  XIV.  La 
contestation  au  sujet  des  fiefs  fut  dé- 
cidée promptement  en  faveur  du  duc 
deNeubourg,  beau-frère  de  Léopold , 
quilui  accorda  l'investiture; décision 
que  la  diète  approuva.  Sous  le  titre 
d'allodiaux,  f*  duchesse  d'Orléans 
demandait  toutes  les  propriétés  mo- 
bilières; et,  de  façon  ou  d'autre,  elle 
revendiquait  la  plus  grande  partie 
des  terres  qui  avaient  appartenu  à  la 
maison  de  Simmeren.  Louis  XIV, 
qui  soutenait  les  prétentions  de  la 
princesse  ,  menaça  de  faire  entrer 
ses  troupes  dans  le  Palatinat.  L'em- 
pereur et  le  prince  d'Orange  se  pré- 
valurent de  l'alarme  que  répandit 
cette  menace.  Par  leur  intervention, 
les  Provinces -Unies  ,  l'électeur  de 
Brandebourg  et  le  roi  de  Suède  con- 
clurent un^traité  d'alliance;  et  enfin, 
Léopold ,  le  monarque  Suédois  et  hs 
principaux  membres  de  l'Empire  ger- 
manique formèrent  la  célèbre  ligue 
d'Augsbourg.  Louis  XIV  ,  alors  , 
proposa  de  convertir  en  paix  la 
trêve  de  Ralisbonnc  ,  et  permit  à  la 
duchesse  d'Orléans  d'accepter  une 
somme  d'argent  pour  équivalent  de 
ses  prélentions.Le  corps  germanique, 
à  l'instigation  de  Léopold ,  refusa 
d'accéder  à  ces  propositions.  Ce  re- 
fus ,  joint  à  l'aspect  guerrier  que  pre- 
nait rAllemagne,  aux  succès  àvs 
armes  de  l'Autriche  en  Hongrie,  et 
aux  préparatifs  que  faisait  le  prince 
d'Orange  pour  détrôner  Jacques  II , 
porta  Louis  XIV  à  prévenir  ses  en- 
nemis. Avant  la  fin  de  l'année,  les 
Français  avaient  pris  Philipsbourg 
et  conquis  tout  le  Palatinat.  Cepen-r 
dant  Léopold,  qui  poursuivait  ses 
avantages  contre  les  Turcs  et  les 
rebelles  de  Hongrie,  s'était  borné  à. 
renvoyer  de  Vienne  et  de  Ratisboime^ 


les  ambassadeurs  de  France.  Par 
bonheur  |>our  la  maison  fVAutrirhe, 
liOiiis  XIV  ([vn  voulait  faire  diver- 
sion en  faveur  de  la  Porte», repaudit 
se5  troupes  en  Allemagne,  au  lieu  de 
les  faire  marcher  contre  la  Hollande; 
et  le  prince  d'Orange  eut  le  temps 
d'achever  cette  révolution  d'Angle- 
terre dont  les  résultats  ont  etc  si  con- 
traires à  la  France.  Le  corps  germa- 
nique se  réunit  à  l'Espagne  pour 
protéger,  pendant  l'absence  de  Guil- 
laume, les  Provinces-Unies;  et  même 
l'empereur  et  le  pape  (Innocent  XI), 
préférant  leurs  intérêts  jrirticulicrs  à 
relui  de  leur  religion,  favorisèrent 
l'expulsion  d'un  prince  catholique  et 
l'avcnement  d'un  prince  protestant. 
La  révolution  d'Angleterre  produi- 
sit un  changement  aussi  prompt 
qu'important  en  faveur  des  allies. 
L'Empire,  sur  les  instances  de  Leo- 
pold  ,  déclara  la  guerre  à  la  France  ; 
les  membres  de  la  ligue  d'Augsbourg 
reunirent  leurs  contingents;  et,  au 
commencement  du  printemps  ,  les 
troupes  allemandes  s'avancèrent  de 
toutes  parts  vers  le  Rhin.  Louis  XIV, 
renonçant  au  dessein  de  se  maintenir 
en  Allemagne  ,  retira  ses  troupes,  et 
donna  l'ordre  de  dévaster  de  nou- 
veau le  Palatinat  et  les  provinces 
voisines,  pour  mieux  garantir  ses 
frontières.  Cet  ordre  cruel,  qui  ne  fut 
cxëciite  que  trop  fidèlement,  accrut 
l'influence  de  l'empereur,  et  porta 
les  allies  k  redoubler  d'efforts.  Ils  ne 
mirent  pas  moins  d'activité  dans  les 
néçociations  qne  dans  les  opérations 
militaires;  et  Lcopold  parvint  a  po- 
ser les  bases  d'une  alliance  qui  reunit 
toute  l'Europe  contre  la  France , 
dont  la  ruine  parut  aloi*s  inévita- 
ble, mais  qui  finit  par  triompher  de 
tous  ses  ennemis.  (Fo/.Loui s  XIV.) 
Le'opold ,  pour  reconnaître  les  servi- 
ces des  ducs  de  Bruns  wick ,  avait  rëso- 


LKO  i8r 

lu  de  créer,  en  faveur  de  l'un  d'eux, 
un  neuvième  electorat.  Lorsqu'il 
rn  fit  la  proposition  à  la  dii-to, 
il  éprouva  une  forte  opposition, 
malgré  laquelle  néanmoins  il  accor- 
da l  investiture.  liC  collège  des  prin- 
ces protesta,  et  ses  membres  formè- 
rent une  ligue  ,  qui  leur  fit  don»;:  r  In 
nom  de  Princes-correspondants.  Le 
roi  de  Danemark  saisit  un  prétexte 
pour  déclarer  la  guerreà  la  maison  de 
Brunswick;  et  la  querelle  prenant  une 
tournure  fâcheuse,  Léopold  annonça , 
du  consentement  du  nouvel  électeur, 
qu'il  suspendait  l'efTot  de  l'investi- 
ture jusqu'à  ce  qu'il  eût  obtenu  le 
consentement  de  tous  les  membres 
de  l'Empire.  Il  ne  fut  pas  plus  heu- 
reux dans  ses  eiTorts  pour  rendre  à 
la  Bohème  tous  les  droits  attachés  à 
la  dignité  électorale.  La  proposition 
qu'il  en  fit,  fut  combattue  vivement. 
L'empereur,  pour  ne  point  exciter 
de  nouveaux  troubles  ,  la  retira,  et 
remit  à  untemps  plus  opportun  l'exé- 
cution de  son  dessein.  Cette  condes- 
cendance rétablit  l'accord  dans  l'Em- 
f)ire;cequi  n'empêcha  pas  que  tout** 
'Allemagne  ne  demandât  la  paix  à 
grands  cris.  De  son  coté,  la  France 
n'avait  plus  la  même  supériorité.  Se^ 
généraux  gagnaient  encore  des  ba- 
tailles et  prenaient  des  places  dans  les 
Pays-Bas;  mais  leurs  progrès  n'é- 
taient pas  aussi  rapides  que  dans  les 
guerres  précédentes,  et  ils  nVtaient 
complètement  heureux  qu'en  Italie. 
Louis  XIV,  parvenu  à  détacher  de  la 
ligue  le  duc  de  Savoie ,  profita  de 
la  défiance  que  cette  défection  ins- 
pira aux  alliés,  et  leur  proposa  des 
préliminaires  de  paix.  Il  offrit  d'aii- 
nider  les  réunions  qu'il  avait  faites  , 
de  restituer  la  Lorraine ,  de  recon- 
naître GuiQaume  III ,  et  de  ne  point 
soutenir  les  prétentions  de  la  du- 
chesse d'Orléans.  L'Angleterre  et  les 


fi82  LEO 

Provinces  -  Unies ,  satisfaites  (3e  ces 
propositions,  vainquirent  la  répu- 
gnance de  l'Espagne,  de  l'empereur  et 
de  l'Empire;  et  il  se  tint,  à  Riswick,  un 
congrèsqui,  après  six  mois  de  négocia- 
tions et  après  que  Le'opold  se  fut  vu 
abandonne  de  tous  ses  allie's,  rétablit 
la  paix  entre  la  France  et  l'empereur. 
(  3o  octobre  1697.  )  L'Empire  re- 
couvra tout  ce  qu'il   avait  perdu  , 
excepte  l'Alsace.  Fribourg  et  Brisacb 
furent  rendus  à  Léopold.  Mais  des 
«ve'nements    d'une  importance  en- 
core plus  grande  nous  forcent  d'at- 
tirer de  nouveau,   sur  les  troubles 
de  la  Hongrie ,  l'attention  du  lecteur. 
La  trêve  conclue  avec  les  Turcs  ne 
fit  que  redoubler  le  mécontentement 
des  Hongrois  qui  soupçonnèrent  l'era» 
pereur  de  vouloir  attenter  à  leurs  pri- 
vilèges. De  son  côte',  Lëopold  attribua 
aux  plus  violents  d'entre  eux ,  un 
complot  tramé  pour  l'assassiner ,  et 
il  s'était  formé  réellement  une  ligue 
secrète ,  à  la  tête  de  laquelle  on  re- 
marquait les  comptes  Zriui ,  Frangi- 
pani,  Tattenbach,  Nadasty  et  le  jeu- 
ïie  Ragoczky ,  et  à  laquelle  le  refus 
de  Léopold  de  convoquer  une  diète 
et  de  conférer  la  dignité  de  palatin , 
alors  vacante,  avait  donné  beaucoup 
de  force.  Des   mesures   avaient   été 
prises  pour  lever  des  troupes;  et  trei- 
ze comtés  s'étaient  réunis  par  une 
associatic^  formelle.  Léopold  ,  ins- 
truit du  complot  ,  lit  marclier  des 
troupes;  et  bientôt  les  chefs  de  la  li- 
gue furent  arrêtés ,  condamnés  et  mis 
à  mort.  Ce  complot   lui  servit  de 
prétexte  pour  rendre  héréditaire  , 
dans  sa  maison ,  la  couronne  de  Hon- 
grie. H  déclara  que  toute  la  nation 
étant  coupable  avait  forfait  ses  privi- 
lèges, et  il  institua  un  conseil  de  gou- 
Terneraent  dont  il  se  réserva  la  nomi- 
nation. Des  cours  de  justice  furent  éta- 
t4ies  pour  punir  les  hérétiques;  ^t  la 


LEO 

Hongrie  fut  livrée  à  tous  les  excès^ 
du  despotisme  militaire  et  d'une  in- 
quisition   cruelle.    Tant   de    maux 
poussèrent  à  bout  un  peuple  coura- 
geux. Catholiques  et  protestants  ou- 
blièrent leur  ancienne  inimitié ,  et  le 
danger  commun  les  réunit.  Les  in- 
surgents  étant  appuyés  par  le  prince 
de  Transsylvanie  ,   par  les  pachas 
voisins  et  par  la  France ,  soutinrent 
une  lutte  terrible  contre  les  troupes 
allemandes  ,  qui  avaient  sur  eux  l'a- 
vantage de  la  discipline.  Ils  allaient 
succomber  ,  lorsqu'ils  trouA'èrent  un 
chef  habile  dans  Émeric  ,  comte  de 
Tékély,  ou  plutôt  Tokoly  ,  de  qui  le 
père  avait  aussi  été  exécuté.  Léopold 
ne  pouvant  recruter  son  armée ,  dont 
le  fer  de  l'ennemi  et  la   déserti  on 
avaient  éclairci  les  rangs ,  renonça  à 
son  système  de  rigueur.  Il  offrit  de  ré- 
tablir la  constitution  dans  toute  son 
intégrité ,  et  de  rendre  à  la  nation 
ses  privilèges.  Une  diète  fut  con- 
voquée à  OEdenbourg;  et  l'empe- 
reur abolit  la   nouvelle  forme  de 
gouvernement.  Il   publia  une  am- 
nistie générale,  abrogea  les  impôts 
établis  illégalement ,  accorda  la  li- 
berté de  conscience  aux  protestants, 
et  promit  de  rendre  à  leurs  héri- 
tiers les  biens    des   seigneurs  qui 
avaient  été  mis  à  mort.  Tékély,  se 
déliant   de   la  cour   impériale,  ou 
comptant  sur  l'appui  des  Turcs  ,  ne 
voulut  point  accepter  les  conditions 
qui  lui  furent  offertes.  Toutefois  la 
diète  le  fît  consentir  à  prolonger  de 
SIX  mois  un  armistice  qid  avait  été 
conclu.  Léopold,  dans  l'inleryalle, 
envoya  à   Constautinople   un  am- 
bassadeur proposer  le  renouvelle- 
ment de  la  trêve  ;  mais  on  voulut  lui 
imposer  des  conditions  si  dures ,  qu'il 
les  rejeta.  Tékéli ,  qui  avait  tempo- 
risé jusqu'à   ce  qu'il   eût   pu  rece- 
voir des  secours  ;  reprit  le^  armes , 


LEO 

Jorsqiic  la  Ircve  fut  expirée.  Ap.ifTy 
on  AbalVy,  prince  de  Transsylvaiiie, 
;         .%'etant  rcuui  à  lui,  ils  rcduisireiit  les 
1         impériaux  à  se  tenir  surladcfensivc. 
Peu  de  tcmj>s  après  ,  Tckely  épousa 
la  veuve  de  Ragoczky;  ec  qui  le  mit 
en  possession  de    la  forteresse   de 
iNïongalz.  11  fit  ensuite  une  entrée 
triomphante  dans  la  ville  de  Bude  , 
et  fut  inaugure  prince  de  la  Haute- 
Hongrie  ,  par  le  pacha.  Bientôt  il 
fut  joint  par  un  grand  nombre  de 
protestants ,  indignes  des  elForls  que 
taisait  l'empereur  pour  éluder  les  ef- 
fets de  ses  promesses.  Soutenu   par 
les  paclias  de  Bude  et  de  Waradin, 
Tékély  s'empara  de  diverses  places; 
et  au  commencement  de  l'anncfe  sui- 
vante ,  le  grand-visir  ,  Kara-lNïus- 
lapha  ,  s'avança ,  à  la  tête  de  deux 
cent  mille  hommes,  jusqu'à  Pesth , 
où  il  fit  sa  jonction  avec  les  insur- 
gents.  Cependant  Léopold  se  prépa- 
rait à  tenir  tête  à  l'orage.   H  obtint 
des  secours  de  la  diète  de  l'Empire, 
et  conclut  un  traité  d'alliance  avec 
les  électeurs  de  Bavière  et  de  Saxe , 
et  un  autre  traité  (  3i  mars   i683  ) 
avec  Jean  Sobieski ,  roi  de  Pologne, 
qui  s'engagea  de  lui  fournir  une  ar- 
mée de  Quarante  mille  hommes.  Le 
Salatin  Esterhazy  fut  aussi  chargé 
e  lever  une  armée  d'insurrection  en 
K      Hongrie.  Toutefois  la  lenteur  des  Al- 
1^      lemands  et  la  désertion  des  soldats 
fui'ent  telles  que  l'armée  de  l'empe- 
reur n'était  pas  forte  de  plus  de  qua- 
rante  mille  hommes,   lorsqu'il  en 
passa  la  revue  (  7  mai  )  à  Presbourg. 
Le  duc  de  Lorraine  (  Charles  V  ),  son 
beau-frère,  qui  en  avait  le  comman- 
dement ,  tenta  d'ouvrir  la  campagne 
par  le  siège  de  Neuhausel  •  mais  l'ap- 
proche de  l'armée  ottomane  le  cour 
traiguit  à  faire  une  prompte  retraite. 
H  jeta ,  dans  Raab  et   Comore  ,   la 
m^eure  partie  de  son  infanterie, 


LEO  i8$ 

et  ,  se  repliant  avec  sa  cavalerie , 
il  dévasta  le   pays  jusqu'aux  por- 
tes de  Vienne  ,  dont  les  habitants 
étaient  dans  la  plus  profonde  cons- 
ternation. La  nuit  précédente,  l'cm- 
pereur  et  toute  sa  cour  étaient  sortis 
de  celte  capitale  ,  au  milieu  des  cris 
d'un  p(^uple  indigné.  De  concert  avec 
l'intrépide  gouverneur  ,  Rudiger  ,  le 
duc  de  Lorraine  mit  la  place  en  étal 
de  défense  ;  et  Ton  enrégimenta  les 
citoyens  et  les  étudiants  pour  secon- 
der la  garnison.  Le  grand-visir  parut 
le  i4j«illet,  et,  en  quelques  jours, il 
acheva  l'investissemenlj  puis  il  com- 
mença l'attaque.  Le  duc  de  Lorraine, 
après  s'être  efforcé  vainement  de  trou- 
bler les  opérations  du  siège,  se  porta 
rapidement  jusqu'à  Presbourg,  etde'- 
lit  Tékéli,  quiavaitété  chargé  de  gar- 
der ce  poste  important.  l\  arrêta  aussi 
les  incursions  que  les  Tatars  et  les 
miconteuts  faisaient  dans  la  Mora- 
vie. Cependant  la  ville  de  Vienne  était 
réduite  à  la  plus  grande  détresse  , 
faute  de  vivres  ;  la  maladie  et  le  fer 
de  l'ennemi  en  avaient  considérable- 
ment affaibli  la  garnison  j  les  Turcs 
étaient  en  possession  de  tous  les  ou- 
vrages  extérieurs,  et  l'on   s'atten- 
dait journellement  à  voir  la  placé 
emportée  d'assaut:  les  secours  d'Alle- 
magne n'arrivaient  point,  et  l'armée 
polonaise  commençait  seulement  à 
se  rassembler  sur  les  frontières  de  la 
Silésie.  Le  duc  de  Lorraine  envoyait 
message  sur  message  pour  en  accélérer 
les  mouvements;  et  l'empereur  ,  lui- 
même,  réduit  au  désespoir,  écrivit 
au  roi  de  Pologne,  pour  l'inviter  à 
venir  à  son  secours ,  sans  attendre 
son  armée.  «  Mes  troupes  se  rassem- 
»  blent ,    lui    dit -il,    venez   vous 
»  mettre  à  leur  tête;  quelque  infé- 
»  rieures  en  nombre  qu'elles  soient, 
)>  votre  nom  suffira  pour  leur  dou- 
)>  ncr  lâTÎctoire.  »  Sobieski,  se  reu^ 


t84  I-EO 

dant  à  ces  instances ,  prit  les  devants 
avec  trois  mille  hommes-,  n'empor- 
tant aucun  bagage  ,  et  il  traversa  la 
SiJ  esie  et  la  Mara  vie  avec  une  extrême 
rapidité'.  ArriveàTuln,mi  pont  qu'il 
devait  y  trouver  n'e'lait  point  encore 
achevé;  et  il  n'y  avait  de  troupes  que 
celles  du  duc  de  Lorraine.  Trompe' 
dans  son  attente,  le  monarque  polo- 
nais en  témoigna  tout  son  méconten- 
tement. Le  duc  l'ayant  apaisé,  So- 
bieski  attendit  sa  propre  armée,  qui 
atteignit  le  Danube  le  5  septembre;  et 
toutes  les  troupes  allemandes  furent 
réunies  le  7.  L'armée  impériale  se 
montant  ainsi  à  plus  de  soixante 
mille  hommes ,  le  roi  de  Pologne  et 
le  duc  de  Lorraine  la  conduisirent 
contre  les  Turcs.  Dans  la  nuit  du  1 1 , 
des  signaux  convenus  ranimèrent  le 
Courage  des  assiégés ,  qui ,  le  lende- 
main matin,  virent  avec  ravissement 
les  drapeaux  autrichiens  flotter  sur  le 
Kalemberg.  L'approche  inopinée  de 
cette  armée  confondit  le  grand-visir, 
dont  les  troupes  étaient  découragées 
et  considérablement  réduites.  Il  ve- 
nait d'être  repoussé  dans  un  furieux 
effort  qu'il  avait  fait  pour  emporter 
la  place,  lorsque  sa  consternation 
redoubla  par  une  attaque  vigoureuse 
de  l'armée  chrétienne.  Kara  -  Mus- 
tapha décampa  de  nuit,  et  se  retira 
avec  une  telle  précipitation  que  son 
avant-garde  arriva  sur  le  bord  du 
Raab  le  lendemain  au  soir.  Les  trou- 
pes chrétiennes  entrèrent  à  la  pointe 
du  jour  dans  le  camp  de  l'ennemi  , 
et  furent  extrêmement  surprises  d'y 
trouver  les  tentes,  les  bagages,  les 
munitions  de  guerre  et  de  bouche  ^ 
cent  quatre-vingts  pièces  de  canon  , 
les  marques  de  la  dignité  de  ^rand- 
visir,  et  un  étendard  qu'on  supposa 
être  celui  de  Mahomet.  Sobieski ,  à 
qui  l'on  atti'ibua  principalement  la 
victoire ,  reçut  les  plus  vives  et^  les 


LEO 

plus  sincères^  félicitations  sur  le 
champ  de  bataille  même.  Le  lende- 
main il  lit  son  entrée  dans  Vienne , 
dont  les  habitants  se  portèrent  en 
foule  à  sa  rencontre ,  le  saluant  des 
noms  de  père  et  de  libérateur.  (  Foy. 
Sobieski.  )  L'entrée  de  Léopold 
fut  loin  de  répondre  à  celle  du  héros 
polonais.  Point  d'honneurs,  point  de 
foule  ,  point  d'acclamations  ;  rien 
n'annonça  son  retour.  A  l'approche 
de  sa  capitale,  il  entendit  les  salves 
qu'on  y  faisait  en  l'hoimeur  de  la 
victoire  remportée  par  Sobieski  ; 
et  il  alla  ,  non  comme  un  monar- 
que victorieux  ,  mais  à  pied  ,  un 
flambeau  à  la  main ,  et  donnant  toute 
sorte  de  marques  d'humilité  ,  ren- 
dre grâces  à  Dieu  d'une  délivrance 
qui  semblait  être  un  miracle.  Sentant 
vivement  la  différence  qu'il  y  avait 
entre  les  transports  de  joie  qui 
avaient  signalé  l'entrée  du  roi  de  Po- 
logne, et  l'hommage  étudié  et  froid 
qu'on  lui  rendit  à  lui-même ,  il  exhala 
sa  colère  contre  le  comte  de  Sinzen- 
dorf,  aux  funestes  avis  duquel  il 
attribuait  ses  malheurs^  et  il  mit 
tant  d'amertume  dans  les  repro- 
ches qu'il  lui  adressa ,  que  l'infor- 
tuné ministre  en  mourut  de  déses- 
poir, en  quelques  heures.  L'humilia- 
tion de  Léopold  étouffa  en  lui  la 
reconnaissance;  au  lieu  de  voler  au 
camp  des  Polonais,  pour  en  presser 
le  monarque  contre  son  sein ,  il  fit 
des  recherches  pour  savoir  si  un 
roi  qui  ne  devait  la  couronne  qu'à 
une  élection  ,  avait  jamais  été  admis 
en  présence  d'un  empereur.  Ayant 
demandé  de  quelle  manière  il  devait 
recevoir  Sobieski:  a  A  bras  ouverts,» 
lui  répondit  le  duc  de  Lorraine  , 
indigné  de  tant  d'indifférence  et 
d'orgueil.  Mais  ,  dit  l'historien  de 
la  maison  d'Autriche  (  M.  Goxe  )  , 
Léopold  n'avait  pas  cette  grandeur 


Î.EO 

d'ame  qui  fait  supporter  1rs  birn- 
l'.iits;  et  il  rcj;la,aver  le  soin  le  plus 
minutieux,  le  cérémonial  de  l'en- 
trevue ,  qui  eut  lieu  entre  les  deux 
ranips.  L'empereur  ,  vêtii  simple- 
ment et  monté  sur  un  rlieval  de 
médiorre  apj>arenre,  avait  l'air  em- 
barrassé et  chagrin.  Sobieski  ,  por- 
tant le  même  habit  que  le  jour  du 
combat  ,  montait  un  sujierbe  cour- 
ber ,  richement  caparaçonné.  La 
-race  naturelle  de  son  maintien  était 
relevée  par  l'air  d'assurance  et  de 
dignité  qiie  lui  donnaient  ses  succès. 
Au  signal  convenu,  les  deux  monar- 
ques s'avancèrent  au  devant  l'un  de 
l'autre;  ils  se  saluèrent  au  même  ins- 
tant ,  et  s'embrassèrent  froidement. 
Sobieski  s'empressa  d'interrompre 
l'empereur  ,  au  mot  de  reconnais- 
sance ,  que  Lcopold  balbutia;  et  après 
l'avoir  embrassé  une  seconde  fois  , 
il  rentra  dans  sa  tente ,  lui  laissant 
Zaluski ,  son  chancelier  ,  pour  l'ac- 
compacuerdans  Ja  revue  qu'il  allait 
faire  de  ces  troupes  qui  avaient 
sauvé  la  monarchie  autrichienne. 
Le  mécontentement  que  la  conduite 
])eu  généreuse  de  Léopold  inspi- 
ra aux  princes  allemands  qui  lui 
avaient  amené  des  secours ,  joint 
au  désir  qu'eurent  les  Polonais  de 
mettre  à  couvert  leur  butin ,  em- 
pêcln  les  vainqueurs  de  suivre  l'en- 
nemi l'épée  dans  les  reins.  Ce  fut 
seulement  cinq  jours  après  la  ba- 
taille, qu'ils  reprirent  le  cours  de 
leurs  opérations.  Le  9  octobre,  ils 
remportèrent  ,  près  de  Parkan,  une 
victoire  signalée;  et,  le  118 ,  ils  inves- 
tirent Gran,  dont  ils  se  rendirent 
maîtres  après  un  siège  de  peu  de  du- 
rée. Cette  conquête  fut  sni\ne  de  la 
reddition  de  plusieurs  autres  places; 
et,  en  même  temps,  l'armée  otto- 
mane. q\ii  s'était  retirée  avec  préci- 
inJaiioa  vers  Belgrade,  évacua  la 


LEO 


85 


Hongrie.  Les  alliés  ne  tardèrent  pas 
alors  à  se  séparer.  Sobieski  s'élant     ^ 
efforcé  de  négocier  un  raccommode- 
ment entre  Léopold  et  les  mécon- 
tents ,  l'empereur  le  soupçoima  de 
songer  à  procurer  à  son  fds  la  cou- 
ronne de  Hongrie.  Ce  héros  indigné 
retira  ses  troupes  ,  et  déclara  qu'il 
continuerait  à  combattre  les  Turcs, 
mais  qu'il  ne  tournerait  point  ses  ar- 
mes contre  les  insurgents.  Cependant 
la  plupart  de  ceux-ci  implorèrent  la 
clémence  de  Léopold  ,  qui  parut  leur 
pardonner;  et  insensiblement    Té- 
kéli  se  vit  abandonné  de  ses  prin- 
cipaux partisans.  La  reddition  de 
Cassovie    lit   recouvrer  à    l'empe- 
reur la  plus  grande  partie  de  la  Hon- 
grie septentrionale.  Les  impériaux 
prirent  ensuite  Neuhausel,  Agria  ,  et 
Bude ,  qui  était  depuis  longtemps  le 
siège  de  la  puissance  ottomane  en 
Hongrie.  La  victoire  que  le  duc  de 
Lorraine  remporta  sur  les  Turcs  à 
Mohatz  (  12  août  1687  ),  lava  la 
honte  qui  avait  souillé  les   armées 
hongroises  sur  le  même   champ  de 
bataille  en   1^16.   Les  Turcs   per- 
dirent vingt  mille   hommes  ,   et  le 
butin  fut  immense.  Au  milieu  de  ces 
succès ,  l'empereur  reprit  le  dessein 
de  rendre  la  couronne  de  Hongrie  hé- 
réditaire. On  découvrit ,  ou  l'on  fei- 
gnit de  découvrir  une  nouvelle  cons- 
piration :  l'on  institua ,  à  Kpcries ,  uq 
tribunal  présidé  par  Ca rafle,  étran- 
ger sanguinaire,  et  dont  les  autres 
membres  étaient  des  officiers  dévoués 
à  la  cour;  trente  bourreaux  et  leurs 
valets  furent  occupés  long-temps  à 
exécuter  le.s  jugements  de  cet  atroce 
tribunal.  Ou  pressa  Léopold  de  pro- 
fiter de  la  terreur  qu'inspiraient  ces 
actes  de  cruauté ,  pour  établir  un  gou- 
vernement arbitraire  et  abobr  l'exer- 
cice du  culte  protestant  ;  mais  crai- 
gnant de  réduire  la  Hongrois  audcscs' 


i86  LEO 

poir,  il  se  contenta  d'abolir  le  droit 
d'élection  et  celui  de  résistance  aux 
ordres  du  souverain.  Il  rendit  à  une 
députation  de  la   noblesse  la  cou- 
ronne de  Saint-Etienne ,  et  convoqua 
une  diète  pour  le  couronnement  de 
l'archiduc  Joseph  son  fds.  Les  Hon- 
grois  e'taient  si   attache's   au  droit 
d'élire  leur  roi,  que  malgré  l'état 
d'abaissement  où  ils  étaient  réduits ,  ils 
eurent  recours  à  toute  sorte  d'expé- 
dients pour  le  conserver.  Ce  fut  vaine- 
ment :  mais  ni  menaces ,  ni  promesses , 
ne  purent  les  faire  consenti  r  pour  lors  à 
rendre  la  couronne  héréditaire  dans 
la  ligne  féminine.   Les  états  confir- 
mèrent le  droit  de  succession  dans 
la  ligne  masculine ,  tant  de  la  branche 
espagnole  que  de  la  branche  alle- 
mande; et  ils  réservèrent  à  la  nation 
le  droit  d'élection  lorsque  cette  ligne 
serait  éteinte,  La  chose  ainsi  réglée, 
on  procéda  au  couronnement  du  jeune 
prince  qui  n'avait  pas  encore  dix  ans. 
Les  changem'ents  qui  venaient  de  s'o- 
pérer, ayant  augmenté  le  pouvoir  du 
souverain, procurèrent  de  nouveaux 
avantages    aux    armes   impériales. 
Leurs  succès  furent  facilités  par  le 
grand  nombre  d'ennemis  que  la  cour 
de  \  ienne  suscita  contre  les  Turcs  :  les 
Vénitiens  conquirent  la  Morée  et  la 
Dalmatie  ;  le  roi  de  Pologne  consen- 
tit à  reprendre  les  armes  en  faveur 
de  la  maison  d'Autriche;  enfin  la 
Russie  attaqua  la  Grimée.   Les   ef- 
fets de  ces  diversions  furent  la  dé- 
faite totale  de  Tékéli,  la  soumission 
de  tout  le  pays  qui  s'étend  jusqu'à 
la  Save  ,  la  réduction  de  Belgrade, 
d'Orsova  et  de  Viddin ,  et  même  la 
conquête  de  la  Bosnie  et  de  la  Servie. 
Le  prince  de  Transsylvanie  rompit 
ses  liaisons  avec  les  f  urcs ,  et  reçut 
dans  ses  places  fortes  des  garnisons 
impériales.  A  la  fin  de  l'année  1689, 
les  infidèles  ne  possédaient  plus  au 


LEO 

nord  du  Danube  que  Témeswar 
et  le  grand  Waradin.  Cette  suite 
de  revers  ébranla  l'empire  otto- 
man. Le  mauvais  succès  du  siège 
de  Vienne  avait  entraîné  la  déposi- 
tion du  Kan  de  Crimée  ,  et  fait 
mettre  à  mort  quatre  pachas  et  le 
grand- visir  lui-même,  Kara-Mousta- 
pha  ,  qui  était  neveu  du  célèbre 
Koproli  et  gendre  du  sultan.  La 
perte  de  la  bataille  de  Mohatz  occa- 
sionna la  chute  d'un  autre  grand- 
visir;  et  le  mécontentement  qu'exci- 
tèrent les  derniers  désastres  ,  ajouta 
une  nouvelle  révolution  à  celles  dont 
Constantinople  avait  été  le  théâtre. 
Mahomet  IV  fut  déposé,  et  Soli- 
man II ,  son  frère ,  mis  sur  le  trône. 
L'orgueil  ottoman  était  abaissé  ,  et 
le  nouveau  sultan  fit  connaître,  par 
ses  instances  réitérées  ,  l'extrémité 
où  il  était  réduit.  Léopold  ,  enflé 
par  ses  succès  ,  proposa  des  con- 
ditions si  dures  qu'elles  annonçaient 
le  dessein  de  chasser  les  Turcs  d'Eu- 
rope. Il  seconda  ainsi  les  efforts  de 
Louis  XIV  pour  ranimer  le  cou- 
rage de  la  Porte  ;  et  les  Français , 
étant  entrés  en  Allemagne,  y  atti- 
rèrent une  grande  partie  des  trou- 
pes autrichiennes  qui  étaient  en  Hon- 
grie. L'empereur  ne  pouvant  plus  y 
soutenir  la  guerre  avec  la  même  vi- 
gueur, le  nouveau  grand- visir,  qui 
avait  rassemblé  une  armée  nom- 
breuse ,  reprit  Semendria,  Viddin, 
Belgrade,  et  les  comtés  situés  au  sud 
du  Danube.  Dans  le  même  temps, 
Tékely ,  à  la  tête  d'un  corps  de  trou- 
pes turques ,  fondit  sur  la  Transsyl- 
vanie ,  dont  il  se  fit  reconnaître  prin-» 
ce.  Mais  le  prince  Louis  de  Bade, 
qui  commandait  les  troupes  impé- 
riales, le  repoussa  bientôt  dans  la 
Moldavie.  L'année  suivante ,  le  mê- 
me général  remporta  le  19  août 
1691J  à  Salankemeii,  une  victoire 


LEO 

signaloc ,  où  vinct  raille  Turcs  pc- 
rirrnt;  et  dans  les    trois   campa  - 
mie.s   suivantes,  les   iuiperlaii\   ré- 
duisirent les  Cinq-Eglises  ,  le  grand 
Waradiu  ,  et  Giula.  Plus  tard  ,  An- 
j;usle ,  électeur  de  Saxe  ,   qui   fut 
mis  à  la  Ictc  de  l'armée  impériale, 
eut  à  se  soutenir  contre  les  ellbrts 
(lu    nouveau  sultan  ,  Mustapha  II. 
Maigre'   quelques  revers,   l'électeiu* 
contint   les  ennemis;  et  en     1697, 
la   neutralité   de   l'Italie   permit  à 
Léopold  d'envoyer  des  renforts  en 
Hongrie.  De  leur  côté,  les  Turcs  se 
préparairent  à  soutenir  la  lutte  avec 
force.  Les  partisans  de  Tëkély  exci- 
tèrent un  soulèvement ,  et  se  rendi- 
rent maîtres  de  Novi-Bazar,  et  de 
Tokai;ce  qui  fit  entrer,  à  une  époque 
peu  avancée, les  deux  armées  en  cam- 
pagne.  Le  Grand-Seigneur   prit  de 
nouveau  le  commandement    de  la 
sienne  j  et  le  prince  Eugène  de  Sa- 
voie, qui, pour  la  première  fois,  fut 
mis  à  la  tête  d'une  puissante  armée, 
commanda  celle  de  l'empereur.  Sou 
coup  d'essai  fut  le  gain  de  la  bataille 
de  Zenta ,  qu'il  livra  contre  l'ordre 
positif  de  Léopold.  Eugène  répandit 
ensuite  ses  troupes  dans  la  Bosnie , 
et  s'empara  de  Serai.  Après  avoir 
mis  le  pays  à  contribution ,  il  donna 
à  son  armée  des  quartiers  d'hiver;  et 
il  alla  à  Vienne,  recevoir  d'un  mo- 
narque sévère  le  reproche  de  déso- 
béissance ,  pour  le  service  qu'il  lui 
avait   rendu.    (  Foyez  Eugène.   ) 
Le  traité  de  Riswick  ayant  délivre 
Léopold  de  toute  inquiétude  du  côté 
de  1  Allemagne  ,  ce  prince  semblait 
être  le  maître  de  pousser  ses  avan- 
tages contre  les  Turcs;  mais  l'cpui- 
semeîit  de  ses  finances,  et  surtout  la 
succession  à  la  couronne  d'Espagne, 
qui  paraissait  prochaine ,  le  détermi- 
nèrent à  mettre  fin  à  la  guerre  de 
Hongrie,  pour  porter  toute  son  at- 


LEO  187  ^ 

tcntion  vers  rOccidcnt.  Après  une 
campagne  insignifiante,  il  écouta  les 
propositions  des  Turcs;  et  la  ville  de 
Carlowitz  fut  choisie  pour  les  con- 
férences. L'Angleterre  et  la  Hollande 
fiuent  médiatrices,  et  tout  fut  réglé 
en  moins  de  deux  mois  (  viO  janvier 
1699).  La  trêve  avec  la  maison  d'Au- 
triche  fut  renouvelée   pour  vingt- 
cinq  ans.  Léopold  conserva  laTrans- 
sylvanic ,  ainsi  que  toute  cette  par- 
tie de  la   Hongrie,  qui  est  au  nord 
de  la  Maros  ,  et  à  l'occident  de  la 
Teysse,  et  presque  toutel'Esclavonie. 
La  Porte  prit  T'eugagcment  de  ne  plus 
secourir  les  mécontents;  et  l'on  pro- 
mit, de  chaque  côté,  de  rendre  les 
sujets  rebelles  qui  chercheraient  un 
refuge  dans  les  états  de  l'une  ou  de 
l'autre  puissance.  La  paix  de  Carlo- 
witz  forme  une  ère  mémorable  dans 
l'histoire.   La  puissance  Ottomane 
perdit  alors  la  moitié  de   ses   états 
d'Europe;  et  elle  cessa  d'être  formi- 
dable à  la  chrétienté  qu'elle  avait  me- 
nacée d'une  ruine  totale.  Léopold 
s'était  toujours  flatté  de  succéder  à  la 
couronne  d'Espagne,  et  il  s'était  oc- 
cupé fréquemment  des   moyens  d'y 
parvenir.   Il  avait  épousé  l'infante 
Marguerite-Thérèse  ,  dont  il  n'avait 
eu  qu'une  fille.  Pour   empêcher  que 
celte  princesse  ne  portât  ses   droits 
dans  une  autre  maison,   son   père 
l'y  avait  fait  renoncer  en  l'uiii.cïaiit 
à  l'électeur  de  Bavière.  Il  avait  au.>si 
engagé  les  membr'^s  de   la    grande 
alliance  à  sbutenir  ses  propres  pré- 
tentions ;  et  pour  qu'on  ne  craignit 
pas  que  les  états  des  deux  branches 
de  la  maison  d'Autriche  fussent  pos- 
sédés par   un   même  souverain  ,  il 
avait  promis detransmettre  sesdroits 
à  l'archiducCharles,  son  second  fil;^. 
II  fut  trompé  dans  sou  attenta  p  tr 
la  naissance  d'un  prince  électoral  de 
Bavière,  dont  l'éWvation  parut  moius 


ï88 


LEO 


dangereuse  que  celle  d'un  archiduc. 
Lëopold  réclamait  la  succession 
d'Espagne:  i^.  comme  seul  descen- 
dant en  ligne  masculine  de  Philippe, 
archiduc  d'Autriche  ,  et  de  Jeanne 
d'Aragon  ;u«.  comme  fds  de  Marie- 
Annc,Vdle  de  Philippe  IV,  et  héritière 
de  la  monarchie  espagnole,  en  vertu 
de  la  renonciation  de  Marie-Thérèse, 
femme  de  Louis  XIV,  et  de  celle  de 
l'électrice  de  Bavière,  propre  fille  de 
Tempe,  eur.  Sa  cause  était  soutenue 
par  les  deux  reines  ,  mère  et  épouse 
du  roi  d'Espagne ,  Charles  II ,  et 
par  presque  tous  les  membres  du 
cabinet.  Cependant  la  naissance  du 
prince  de  Bavière  avait  produit, 
à  la  cour  de  Madrid  ,  le  même 
changement  que  parmi  les  puis- 
sances de  l'Europe.  La  reine  douai- 
rière elle-même  avait  reconnu  les 
droits  de  ce  prince  mieux  fondés  que 
ceux  de  l'archiduc,  la  renonciation 
de  la  mère  du  premier  n'ayant  pas 
été  sanctionnée  par  le  roi  d'Espagne, 
ci  par  les  cortès  :  mais  la  mort  de 
cette  princesse  ayant  laissé  un  libre 
cours  à  l'influence  de  la  reine  sa  belle- 
fille  ,  Léopold  fit  partir  pour  Ma- 
drid le  comte  de  Harrach ,  un  de 
ses  principaux  ministres.  Après  avoir 
consumé  beaucoup  de  temps  et  sur- 
monté une  foule  de  difficultés  ,  le 
comte  tira  du  roi  la  promesse  de 
nommer  ,  pour  son  successeur ,  l'ar- 
chiduc ,  à  condition  que  l'empereur 
enverrait  ce  jeune  prince  en  Espagne 
avec  dix  raille  hommes.  Léopold  , 
qui  manquait  de  troupes  et  d'argent, 
et  qui  craignait  d'exposer  son  (ils , 
opposa  des  difficultés ,  et  finit  par 
s'aliéner  les  esprits  de  ses  partisans 
en  demandant  pour  Charles ,  le  gou- 
vernement du  Milanez  ;  ce  qui  fit 
juger  qu'il  se  proposait  plutôt  de  dé- 
membrer la  monarchie  espagnole, 
que  d'en  assurer  J' unité.  La  négocia- 


LEO 

tion  sVtànt  prolongée  jusqu'à  la  fin 
de  la   guerre  ,  Louis  XIV  dirigea 
toute  son  attention  vers  ce  point. 
Il  envoya  le  marquis  d'Harcourt , 
un  de   ses    plus    habiles  négocia- 
teurs ,  traverser  à  Madrid  les  intri- 
gues du  parti  autrichien  ;  et ,  s'étant 
assuré  que  les  puissances  maritimes 
n'étaient  pas  plus  disposées  à  voir  la 
monarchie  espagnole  unie  aux  états 
de  la  maison  d'Autriche  qu'à  ceux 
de  la  maison  de  Bourbon  ,  il  s'a- 
dressa  en  secret  à  Guillaume  III , 
et  lui  proposa  un  expédient  qui  sem- 
blait de  nature  à  empêcher  que  Tune 
ou  l'autre  n'acquît  une  supériorité 
dangereuse.  Après  quelques  négocia- 
tions, il  fut  conclu  entre  la  France, 
l'Angleterre  et  les  Provinces-Unies, 
un  traité  par  lequel  on  partageait  ia 
monarchie  espagnole  entre  les  trois 
prétendants.  Ce  traité  fit  la  sensation 
la  plus  vive  à  Madrid.  Le  courroux 
de  Charles  II  alla  jusqu'à  la  fréné- 
sie ;  et  ce  prince  résolut  de  nommer 
un  successeur  ,  pour  prévenir  l'efïet 
d'un  traité  qu'il  considérait  comme 
aussi  injurieux  à  son  honneur  que 
contraire  à   ses  sentiments.    Louis 
XIV,  qui  s'attendait  à  ce  qui  ar- 
riva, ne    rappela  point  ses  droits  j 
et  ses  partisans  appuyèrent  les  pré- 
tentions de  la  maison  de  Bavière  , 
comme  l'unique  moyen  d'exclure  l'ar- 
chiduc. On  persuadl  au  roi  de  con- 
sulter son  conseil ,  le  pape ,'  et  les 
jurisconsultes  les  plus  célèbres  d'Es- 
pagne et  d'Italie  :  toutes  les  réponses 
furent  telles  qu'on  les  desirait.  Cette 
unanimité  mit  fin  à  l'indécision  de 
Charles  II,  qui  fit  dresser,  en  présence 
du  conseil, un  testament,  oh  il  nomma 
pour  son  successeur  le  prince  ba- 
varois. Cet  événement  produisit  à 
Vienne  une  impression  plus  doulou- 
reuse encore  que  le  traité  de  partage. 
Léopold  fit  à  la  cour  d'Espagne  des 


LF.O 

prcscntalioiis  tr«s  -  fortes  ;  et  ses 
'  tiiitos  ri'lrntircnt  dans  toutes  1rs 
iirs:  uiaisla  mort  du  prince  de  Ba- 
\  I'  re,  qui  arriva  sur  ces  entrefaites, 
11!  rendit  l'espérance.  Plus  les  con- 
nclures  devinrent  délicates,  plus  la 
ur  de  France  redoubla  de  soins. 
I  Ile  avait  irouyédans  Pcrto-Carrero 
M  agent  aussi  actif  qu'infatigable  , 
li  parvint  à  écarter  tout  ce  qui  pou- 
lit  faire  ombrage  au  parti  français, 
!  ellclemit  à  la  tète  des  affaires.  Eu 
i:iciue  temps  le  roideFrance  ouvrit, 
avec  Guillaume  III ,  une  nouvelle 
négociation  pour  un  autre  traite  de 
})artage.L'archiducdcvaitavoir  l'Es- 
pagne, les  Pays-Bas  et  les  colonies  ; 
et  le  Dauphin,  outre  ce  qui  lui  avait 
etc  assigne  par  le  premier  traite,  ac- 
(juérait le  Milanez,  ou  les  duchés  de 
Lorraine  et  de  Bar  comme  équiva- 
lents. On  accorda  trois  mois  à  l'em- 
j»ereur   pour   accéder    à   ce  traité. 
(Quoiqu'il  se  trouvât  dans  une  posi- 
tion critique,  l.éopold  ne  voulut  point 
a("cepter  l'offre  ,  en  apparence  très- 
avantageuse,  qui  lui  était  faite.  Il  dou- 
;  lit  de  la  sincérité  de  la  France ,  et  il 
■  voulait  pas  renoncer  au  Milanez. 
i  1  crainte  d'offenser  le  roi  d'Es])agne 
I  la  nation  espagnole  à  qui  le  traité 
tait  odicu\  ,  donna  plus  de  poids 
iicore  ^ccs  motifs -et d'ailleurs  son 
j).irti  venait  de  se  relever  à  la  cour 
de  Madrid.  Ce  ne  fut  pas  pour  long- 
temps. Le  parti  français  parvint  à 
exciter  contre  les  puissances  mari- 
times le  courroux  de  la  nation  ,  à  la 
voix  de  laquelle  il  joignit  la  sienne 

Î)0ur  demander  la  nomination  d'un 
léritier  du  trône.  L'incertitude  de 
Charles  II  rcdoubîant,  Porto-Car- 
'f-ro  lui  mit  sous  les  ycuxles  opinions 
ics partis  contraires,  et  le  jeta  dans 
une  plus  grande  perplexité.  Il  lui 
persuada  ensuite  de  recourir  de  nou- 
veau au  pape ,  dont  la  répuuse  fu( . 


LEO  i8<> 

conforme  aux  vœux  de  Porto-Car- 
rero.  Après  une  nouvelle  hésitation  , 
(jharles  II  fit  son  testament  en 
faveur  de  la  maison  de  France. 
A  j)eino  l'acte  fut  -  il  signé  ,  que 
le  roi  parut  moins  mal ,  et  que  son 
afiection  pour  la  maison  d'Autriche 
se  ranima.  Il  exhala  sa  colèrecontre 
ceux  qui  avaient  alarmésa  conscience, 
et  envoya  vers  l'f  mpereur  un  courrier 
pour  lui  annoncer  qu'il  avait  pris  la 
résolution  de  nommer  Tarcfiiduc  son 
héritier.  Mais  il  ne  put  exécuter  ce 
dessein  :  le  changement  qui  s'était 
opéré  en  lui  ne  se  soutint  point  ,  et 
il  expira  le  i*''.  novembre  de  l'année 
1700.  La  cour  de  Vienne,  qui  s'était 
reposée  sur  la  force  de  son  parti  et 
sur  l'attachement  de  Charles  II  pour 
sa  famille ,  fut  confondue  en  appre- 
nant que  ce  monarque  avait  fait,  en 
faveur  d'un  prince  de  la  maison  de 
Bourbon  ,  un  testament  qui  venait 
d'être  accepté  par  Louis  XIV.  Léo- 
pold  renonçant  à  sa  circonspection 
accoutumée,  et  oubliant  ses  embar- 
ras ,  résolut  de  soutenir  ses  préten- 
tions par  la  force  des  armes.  Il  fit 
partir  des  commissaires  ,  chargés 
de  prendre  possession  des  états  que 
l'Espagne  possédait  en  Italie  ;  et  il 
envoya  des  ambassadeurs  à  toutes  les 
cours ,  pour  les  soulever  contre  la 
France  :  mais  l'entrée  du  Milanez 
fut  interdite  à  tous  ses  agents  ;  et  un 
de  ceux  qui  s'étaient  rendus  à  Naples, 
ayant  tenté  de  soulever  le  peuple  , 
fut  décapité.  L'empereur  ne  çéussit 
pas  mieux  à  persuader  à  la  diète  de 
Ratlsbonne,  de  chercher  les  moyens 
deratlacheràrempireleduchéde  Mi- 
lan; et  il  échoua  complètement  dans 
ses  efforts  près  des  autres  puissances 
de  l'Europe.  Des  apparences  si  décou- 
raç^eantes  n'influèrent  point  sur  la 
résolution  de  Léopold  ,  qui  rassem- 
bla quatre- vingt  mille  hoimues ,  d«s- 


IQO 


LEO 


tiiiés  à  protéger  les  états  liero'ditaires, 
et  à  agir  sur  le  Rhin  et  en  Italie.  Il 
prévint  toute  révolte  de  la  part  des 
Hongrois ,  en  faisant  arrêter  le  jeune 
Ragocsky;  et  il  tira  des  Vénitiens  la 
promesse  de  lui  fournir  des  vivres  , 
et  de  ne  pas  s'opposer  au  passage 
de  ses  troupes.   Le  commandement 
de  son  armée  fut  confié  au  prince 
Eugène,  qui,  au  commencement  du 
mois   d'avril    1701  ,   rassembla    à 
Roveredo  trente  mille     hommes  , 
pénétra  en  Italie,  et  força  l'armée 
française  à  la  retraite.    Louis  XIV 
étonné  ôta  le  commandement    au 
maréchal  de  Catinat ,  et  envoya  en 
Italie  ,  avec   un   renfort   de   vingt 
mille  hommes  ,  le  duc  de  Villeroi, 
auquel  il  donna  l'ordre  de  livrer  ba- 
taille j  mais,  si  Catinat,  n'avait  pu  se 
soutenir  contre  Eugène,  le  présomp- 
tueux Villeroi  le  pouvait  bien  moins 
encore  (  Voy.  Eugène}.  Les  succès 
qui,  dans  cette  campagne,  couronnè- 
rent les  armes  de  Léopold ,  attachè- 
rent à  ses  intérêts  les  petits  états  d'I- 
talie, et  relevèrent  le  courage  des  puis- 
sances maritimes.  L'alliance  entre 
l'Autriche,  la  Grande-Bretagne  et 
les  Provinces-Unies ,  fut  renouvelée; 
Xéopold  gagna  Frédéric ,  électeur  de 
Brandebourg,  en  le  reconnaissant  roi 
fie  Prusse*  il  apaisa  les  méconten- 
tements de  l'Allemagne  en  réitérant 
les  concessions  qu'il  avait  faites  au 
sujet  du  neuvième  électoral  •  il  flatta 
les  protestants  de  l'espoir  de  faire 
révoquer  un  article  du  traité  de  Ris- 
■vvick,  qui  les  blessait;  il  força  les 
maisons  de  Saxe-Gotha  et  de  Bruns- 
wick-Wolfenbuttel  à  rompre  toute 
relation   avec  la    France;  enfin  il 
«btint  de  la  diète  de  RatisLonne  une 
déclaration  de  guerre  contre  Louis 
XIV  et  contre  le  nouveau  roi  d'Es- 
pagne ,  Philippe  V.  Les  alliés  négo- 
ciaient entre  eux,  lorsque  la  campa- 


LEO 

gne  s'ouvrit  dans  les  Pays  -  Bas ,  eu 
Allemagne  et  en  Italie.  Marlborough 
prit  alors  le  commandement  de  l'ar- 
mée combinée  d'Angleterre  et  de  Hol- 
lande :   ayant  rassemblé    soixante 
raille  hommes ,  il  passa  la  Meuse  à 
Grave ,  et  força  l'armée  française  à 
s'éloigner  du  Brabant.  Secondé  par 
Cohorn  ,  il  prit ,  en  moins  de  deux 
mois  ,  Venloo  ,  Ruremonde  ,  Ste- 
venswert  et  Maseyck  ,  et  il  termina 
la    campagne  par  la  réduction  de 
Liège.  Tandis  que  l'armée  des  puis- 
sances maritimes  poussait  ainsi  ses 
conquêtes   sur  la   Meuse,  le  prince 
Louis  de   Bade  rassemblait  sur  le 
Rhin  une  armée  de  40,000  hommes, 
forçait  les  lignes  de  la  Lauter ,  et  as- 
siégeait Landau  ,  qui  se  rendit  le  10 
septembre.  Les  deux  armées  étaient 
sur  le  point  de  faire  leur  jonction  , 
lorsque  l'exécution  du  plan  de  cam- 
pagne fut  suspendue  par  l'apparition 
d'un  nouvel   ennemi.  L'électeur  de 
Bavière  ,  Maximilien-Emanuel,  qui 
jusque-là  avait  gardé  la  neutralité,  se 
déclara  en  faveur  de  la  maison  de 
Bourbon  ,  surprit  Ulra ,  et  envoya 
dix  raille  hommes  ,  commandés  par 
D'Arco,  ouvrir  une  communication 
avec  une  armée  française  qui  avait 
pour  chef  le  maréchal  de  Villars  , 
et  devait   pénétrer   dans  la    Forêt- 
Noire.  L'intervention  des  Etats-Hel- 
vétiques et  l'habileté  du  général  alle- 
mand détournèrent  ce  danger  .D'Arco 
fut  arrêté  près  de  Schaffouse  par  un 
corps  de  troupes  suisses ,  et  forcé  de 
se  replier  sur  la  Bavière  :  le  prince  de 
Bade  empêcha  les  Français  de  pous- 
ser plus  loin,  quoi  qu'ils  l'eussent  dé- 
fait à  Friedlingen.  Après  divers  mou- 
vements ,  Villars  repassa  le  Rhin  , 
s'empara  de  Trêves  et  de  Trarbach , 
s'assura  de  la  Lorraine ,  et  prit  ses 
quartiers  en  Alsace  ,  tandis  que  les 
Autrichie»s  pr^-ent  les  leuis  sur  la 


LEO 

Ouincîie.  En  Italie,  If  prince  ^u^^ue 
bloqua  Mantoiifî,  et  tenta  vainement 
de  surprendre  Crémone  ;  mai»  il  fit 
prisonnier  le  maréchal  de  Villeroi , 
oui  fut  remplace  par  le  duc  de  Ven- 
dôme. La  campagne  de  1703  fut 
j>eu  fertile  en  événements  ;  et  le 
principal  théâtre  des  opérations  mi- 
litaires fut  rAUema^ne.  Léopold  , 
autant  pour  mettre  à  couvert  ses  états 
héréditaires  ,  que  pour  punir  la  dé- 
fection de  l'électeur,  résolut  de  con- 
quérir la  Bavière  ,  qui  fut  attaquée 
sur  divers  points.  Mais  Louis  XIV 
donna  l'ordre  de  faire  les  plus  grands 
eiforts  pour  la  défendre  ;  et  le  maré- 
chal de  Villars  exécuta  cet  ordre  avec 
autant  depromptitude  que  d'habileté. 
Les  Français  et  les  Bavarois  ayant 
opéré  leur  jonction  ,  les  états  autri- 
chiens se  trouvèrent  exposés  à  une  at- 
taque à  laquelle  ils  n'étaient  point  pré- 
parés. Villars  voulait  marcher  contre 
Vienne  ;  mais  son  avis  ne  prévalut 
point.  Il  fut  arrêté  qu'il  demeurerait 
dans  la  Bavière  pour  surveiller  les 
mouvements  du  prince  de  Bade,  qui 
était  à  Stolhoffen  ,  et  qu'en  même 
temps  Télecteur  pénétrerait,  dans  le 
Tyrol ,  pour  établir  une  communi- 
cation avec  le  duc  de  Vendôme.  Maxi- 
milien  -  flmanuel  entra  triomphant 
dans  Inspruck,  et  s'avança  rapide- 
ment vers  le  Trentin;  mais  les  fidèles 
Tyroliens  prirent  les  armes, et,  sou- 
tenus par  un  corps  de  troupes  ré- 
f;lées  et  par  les  Grisons, ils  forcèrent 
Télecteiu*  à  la  retraite.  Il  revint  se 
réunir  à  Villars  pour  défendre  ses 
propres  états  ,  qui  furent  sauvés  une 
seconde  fois  par  le  maréchal.  Cepen- 
dant la  mésintelligence  s' étant  mise 
entre  Maximilien-Ëmanuel  et  Villars, 
ce  dernier  fut  rappelé  et  remplacé 
parle  maréchal  Tallard,qui  mitfmà 
la  campagne, en  reprenant  Augsbourg 
et  en  soumettant  Passau.  Les  Impé- 


LEO  Ï91 

riaux  étaient  j)arvrnusonItalic  à  em- 
pêcher le  duc  de  Vendôme  de  soute- 
nir eilicacement  l'expédition  de  Teler. 
leur.  Vers  le  commencement  du  mois 
d'août,  le  général  français  parut  de- 
vant Trente,  dont  il  se  serait  empare 
en  peu  de  temps,  si  la  défection 
du  duc  de  Savoie,  Victor- Amédée, 
ne  l'avait  forcé  à  lever  le  siège.  Ce- 
pendant la  division  s'était  glissée 
dans  le  conseil  d'Espagne.  En  con- 
séquence, le  comte  de  Melgar,  ami- 
rauté de  Castille  ,  et  le  comte  de 
Moles  ,  ambassadeur  de  l'ancienne 
cour  de  Madrid  près  de  celle  de 
Vienne,  pressèrent  Léopold  de  s'em- 
parer d'un  royaume  dont  les  peu- 
ples ,  lui  disaient-ils  ,  accueilleraien  t 
avec  joie  un  prince  autrichien.  L'em- 
pereur ,  avec  le  concours  des  puis- 
sances maritimes  réussit  à  gagner 
Pierre  II,  roi  de  Portugal,  qui  voyait 
avec  inquiétude  le  trône  d'Espagne 
occupé  par  un  prince  de  la  maison 
de  Bourbon,  et  qui  accéda  à  la  grande 
alliance.  Léopold ,  et  Joseph  son  fils , 
renoncèrent  à  toute  prétention  per- 
sonnelle à  la  monarchie  espagnole  ; 
et  Charles  fut  proclamé  solennelle- 
ment roi  d'Espagne,  à  Vienne.  Après 
avoir  été  reconnu  par  tous  les  al- 
liés ,  il  passa  en  Angleterre  ,  d'où 
une  flotte  le  transporta  à  Lis- 
bonne. {Voyez  Charles  VL  )  Le* 
affaires  de  Léopold  n'étaient  pas 
toutefois  dans  une  situation  moins 
inquiétante.  Les  troupes  qu'il  avait 
en  Italie  ne  résistaient  qu'avec  peine 
aux  Français.  La  ville  de  Passau  se 
trouvait  au  pouvoir  de  l'ennemi  ;  et 
une  armée  gallo-bavaroise  était  sur  le 
point  de  pénétrer  dans  les  états  héré- 
ditaires ,  pour  agir  avec  les  mécon- 
tents de  Hongrie  qui  venaient  de  se  ré- 
volter de  nouveau.  Ils  avaient  pour 
chef  Ragocsky ,  qui,  parvenu  à  s'é- 
chapper de  sa  prison ,  s'était  ré- 


liyi 


LEO 


fugie  en  Pologne.  Lorsqne  l'erape- 
reiir  avait  rappelé  la  plus  grande 
partie  de  ses  troupes  pour  détendre 
ses  étals  héréditaires  ,  Ragocsky 
était  descendu  des  monts  Krapacks 
dans  la  plaine  de  Mongalz ,  à  la  tête 
d'une  multitude  mal  armée.  Là  ,  il 
avait  publié  un  manifeste,  où  il  invi- 
tait ses  concitoyens  à  secouer  le  joug 
de  l'Autriche.  Cette  tentative  fut 
prématurée.  Ragoczky  se  vit  enve- 
loppé par  les  troupes  impériales  ; 
mais  il  eut  le  bonheur  de  se  retirer 
snr  les  frontières  de  Pologne.  Ayant 
reçu  des  secours  de  la  France ,  il 
descendit  une  seconde  fois  en  Hon- 
grie, et  y  fut  bientôt  à  la  tête  d'une 
armée  de  vingt  mille  hommes.  La 
révolte  étant  devenue  générale  ,  la 
cour  de  Vienne  se  trouva  dans  le 
plus  grand  embarras.  On  négocia 
avec  les  rebelles  qui,  entre  autres 
conditions  très-dures ,  demandèrent 
que  Léopold  reconnût  Piagocsky 
prince  de  Transsylvanie,  et  qu'il  re- 
nojiçât  à  l'hérédité  du  royaume  de 
Hongrie.  La  négociation  n'avait  donc 
produit  qu'une  suspension  d'armes. 
Les  rebelles  s'étaient  assurés  des  pas- 
sages sur  le  Danube ,  sur  la  Morave 
et  sur  le  Waag.  Hs  avaient  concerté 
avec  les  Français  une  attaque  contre 
Vienne;  et  à  l'instant  où  une  armée 
gallo  -  bavaroise  avait  menacé  l'Au- 
triche du  côté  de  l'Inn  ,  un  de  leurs 
corps  s'était  avancé  jusqu'aux  portes 
de  la  capitale ,  où  il  avait  jeté  la 
terreur.  Léopold  ,  suivant  l'avis 
du  prince  Eugène  ,  conc^entra  ses 
forces  en  Allemagne  ;  et  Marlbo- 
rough  porta  la  cour  de  Londres  à 
lui  fournir  des  secours  devenus  bien 
nécessaires.  Quinze  mille  Français 
avaient  pénétré  dans  la  Bavière  par 
les  défilés  de  la  Forêt -Noire.  Ils 
s'étaient  réunis  à  Pélecteur,  qui ,  à  la 
lêle  de  quarante    miJle   hommes  , 


LEO 

avait  pris  position  près  d'Ulra  , 
tandis  que  le  maréchal  de  Tal- 
lard  se  tenait,  avec  45,ooo  hommes 
sur  les  bords  du  Rhin  ,  prêt ,  soit  à 
s'avancer  vers  la  Moselle,  soit  à  entrer 
dans  le  Wiirtemberg,  soit  à  soutenir 
l'attaque  qui  serait  faite  du  côté  de  la 
Bavière.  Ce  fut  en  cet  état  de  choses 
que  le  prince  Eugène  prit  le/  com- 
mandement des  troupes  postées  sur  le 
Rhin  ,  et  que  Mariborough  com- 
mença cette  mémorable  marche  qui, 
des  environs  de  Maestricht, l'amena 
dans  les  plaines  de  la  Bavière  ,  et 
dont  le  résultat  fut  la  bataille  de 
Hochstedt  ou  de  Bleinheim,  si  fatale 
à  la  France.  (  Ployez  Eugène  et 
M  ARLBORouGH.  )  La  conquête  de  toute 
la  Bavière  en  fut  la  suite  immédiate  ; 
et  l'electrice ,  entre  les  mains  de  la- 
quelle son  époux,  en  se  retirant  avec 
les  troupes  françaises,  avait  remis 
l'administration  de  ses  états,  fut  obli- 
gée de  souscrire  aux  dures  conditions 
que  lui  imposa  l'empereur.  La  jour- 
née deBleinheim  ayant  permis  d'en- 
voyer des  renforts  au  feld-maréchal 
Heister,  il  battit  les  insurgents  con- 
duits par  Ragoczky,  et  il  resserra  en- 
tre des  bornes  étroites,  le  théâtre  de 
leurs  opérations.  Les  alliés  firent  du- 
rant l'hiver  les  plus  grands  prépara- 
tifs pour  profiter  de  leurs  avantages. 
Léopold  tira  de  ses  états  héréditai- 
res des  sommes  considérables  et 
des  munitions  ;  mais  il  ne  vécut  ])as 
assez  pour  être  témoin  de  nouveaux 
succès;  une  maladie  de  langueur  le 
mit  au  tombeau,  le  6  mai  1703, 
dans  la  soixante-cinquième  année  de 
son  âge,  et  la  quarante-neuvième  de 
son  règne,  qui,  après  celui  de  Fré- 
déric III ,  est  le  plus  long  que  pré- 
sentent les  annales  de  la  maison 
d'Autriche.  Léopold  I*^»*.  était  petit 
de  taille, et  d'une  constitution  faible; 
il  avait  le  teint  sombre,  et  il  était 


lî:o 

marquahlc  parcelle  Icvrc  avancée, 
qu'on  a  coutume  (raj)|)clcr  la  Icvre 
autrirliicnne;  sa  dcinarclicptail  lente; 
il  avait  Tair  pensif, s'exprimait  avec 
ne};lij;ence,  et  ses  manières  étaient 
peu  polies.  La  reirailc  où  il  vivait 
clait  si  ^^aIK^e,  qu'à  sa  cour  même  , 
il  n'était  «j;uère  connu  qlic  des  oill- 
ciers  atlaclies  à  sa  personne.  Epoux 
fidèle  ,  père  tendre  ,  et  bon  maître; 
quoicpie  réserve  en  ])ublic  et  devant 
les  étrangers  ,  il  se  montrait  enjoué 
avccles  personnes  qu'il  admeltaitàsa 
familiarité.  Redevable  de  son  éduca- 
tion aux  Jésuites ,  il  avait  une  dé- 
votion minutieuse;  mais  il  était  verse 
dans  la  métaphysique  ,  la  théologie 
et  la  jurisprudence;  ce  qui  le  faisait 
passer  pour  le  prince  le  plus  savant 
de  son  siècle  :  toutefois  il  était  fort 
adonné  à  l'astrologie  judiciaire  et  à 
l'alchimie.  Enfin  il  se  plaisait  à 
faire  voir  qu'il  savait  bien  le  latin,  et 
il  composait  des  épigrammes  et  des 
fables.  On  peut  aussi  le  considérer 
comme  uu  des  plus  généreux  protec- 
teurs des  sciences  et  des  arts  (  i  ).  Il 
fonda  les  universités  d'Inspruck  et 
de  Breslau,  et  il  perfectionna  celle 
d'Olmutz.  Il  encouragea  l'établisse- 
ment de  plusieurs  collèges  et  sociétés 
littéraires  à  Vienne,  etaugraenla  con- 
sidérablement la  bibliothèque  impé- 
riale. Sa  chanté  était  sans  bornes,  et 
ii  donnait  audience  aux  personnes  de 
la  plus  basse  extraction ,  même  à  des 
mendiants,  auxquels  il  distribuait  de 
sa  propre  main  des  aumônes  con- 
sidérables. Le  surnom  de  Grand  a  été 
donné  de  son  vivant  à  Léopold  Icr.  ; 
mais  la  postérité  ne  le  lui  a  pas  con- 


(i)LéopolJ  aimait  paaaionnémqnt  la  mufiqii-, 
•I  nAme  en  compotait  d'agiéable,  tell-  que  le 
Xéauet  p^todié,  Quel  capnce,  etc.  EUtit  pH  •  de 
ttioiirir,  dit  Duclr>i,et  apr^a  «»oir  prié  Dieu 
p«ur  la  dernière  foi»  a»cc  ton  coiifcfteur,  il  fit 
'*nir  »A  muaique,  et  eipira  au  milieu  d'un 
coBocrt. 

XilV. 


firme.  Cependant ,  favorisé  par  un 
concours  d'événements  heureux  ,  et 
à  l'aide  de  ministres  habiles  et  de 
grands  capitaines, ccsouveiain  J'un 
des  moins  actifs  rpi'il  y  ait  eu  ca 
Allemagne  ,  parvint  à  relever  l'au- 
torité impériale,  et  à  faire  revivre 
l'éclat  de  la  maison  d'Autriche,  qui 
commençait  à  s'éclipser.  Le  même 
prince  mérite  des  éloges  pour  l'at- 
tention qu'il  a  portée  sur  l'ordre 
judiciaire ,  et  pour  les  règlements 
qu'il  a  faits,  tant  en  matière  civile 
qu'en  matière  criminelle.  Il  suppri- 
ma le  code  Carolin,  beaucoup  trop  ri- 
goureux; il  défendit  l'appel  à  des  tri- 
bunaux étrangers  ,  substitua  l'alle- 
mand au  latin  dans  les  cours  de  justi- 
ce, (it  un  digeste  pour  l'Autriche,  eu- 
coiiragea  l'élude  des  lois,  et  corrigea 
plusieurs  abus  dans  les  tribunaux  in- 
férieurs. Il  fut  marié  trois  fois  : 
d'abord  à  l'infante  d'Espagne,  Mar- 
guerite-Thérèse ,  qui  mourut  eu  cou- 
che de  son  quatrième  enfant;  ensuite 
à  une  princesse  autrichienne ,  de  la 
plus  grande  beauté,  ayant  de  l'es- 
prit et  de  la  vivacité,  chantant  et 
jouant  de  plusieurs  instruments  en 
perfection  :  cette  princesse  aimait  si 
passionnément  la  chasse  qu'elle  y 
ruina  son  tempérament  ,  ce  qui  la 
mit  au  tombeau,  le  8  avril  1676. 
Eléonorc-Madelènc-Thérèse  ,  troi- 
sième femme  de  Léopold,  qui  l'é- 
pousa le  14  décembre  lOyO,  était 
une  princesse  palatine,  de  la  bran- 
che de  Neubourg,  Sa  dévotion  était 
si  extrême,  qu'elle  portait  des  bra- 
celets armés  de  pointes  de  fer,  mar- 
chait nus-])ieds  dans  les  processions, 
et  se  donnait  la  discipline  jusqu'au 
sang.  Douée  d'un  génie  très-actif, 
cette  princesse  possédait  à  fond , 
outre  sa  langue  maternelle ,  le  la- 
tin, le  français  et  l'italien,  et  était 
grande  musicienne  :  elle  traduisit 
i3 


194 


LEO 


les  psaumes  en  vers  allemands  ,  et 
les  mit  en  musique.  Enfin  elle  donna 
un  grand  nombre  de  traductions 
d'ouvrages  ascétiques,  composes  en 
français,  et  parmi  lesquels  se  trouve 
le  livre  intitule'  :  Eéjlexions  pieuses 
pour  tous  les  jours  du  mois.  A  la 
mort  de  Joseph  P"".,  son  fils,  elle 
fut  régente  jusqu'à  l'arrivée  de  Char- 
les VI jet  elle  tint  d'une  main  ferme 
les  rênes  du  gouvernement.  Elle  re- 
nonça ensuite  à  toute  occupation 
mondaine,  et  suivit,  jusqu'à  sa  mort, 
le  genre  de  vie  austère  et  contem- 
platif qui  avait  fait  les  délices  de  ses 
jeunes  années.  Elle  fut  inhumée  sans 
pompe,  comme  elle  l'avait  ordonné  ; 
et  son  cercueil  ne  porte  que  cette  sim- 
ple inscription  :  Eléonore ,  pmwre 
pécheresse ^morte  le  i  Ç)j unifier  i  -y  9.0. 
On  a  la  Fie  de  cette  princesse, 
(  in-8°.  )  Des  dix  enfants  qu'eut  Léo- 
pold ,  5  seulement  lui  survécurent. 
Ce  furent,  ses  deux  fils  Joseph  P»". 
et  Charles  VT;  et  trois  filles  :  Marie- 
Élisaheth  ,  Marie-Anne  ,  et  Marie- 
Madelène.  La  première  fut  gouver- 
nante des  Pays-Bas  ;  la  seconde  , 
épousa  Jean  V,  roi  de  Portugal  j  et 
la  troisième  paraît  avoir  vécu  dans 
la  retraite.  H-ry. 

LÉOPOLD  II  (  Pierre -Léo - 
ï»0LD- Joseph  )  ,  empereur  d'Alle- 
magne ,  second  fils  de  François  l^^. , 
et  de  Marie-Thérèse ,  naquit  le  5 
mai  1747  7  et  fut  d'abord  grand- 
duc  de  Toscane  (  1765  ).  La  ma- 
nière dont  il  gouverna  cet  état,  est 
digne  d'éloge  à  plusieurs  égards.  Son 
premier  soin  fut  de  diminuer  les  im- 
pôts, de  mettre  de  l'ordre  dans  les  fi- 
nances; et,pour  y  parvenir,  il  licencia 
presque  toutes  ses  troupes.  Il  établit 
des  manufactures  ,  et  accorda  la  li- 
berté la  plus  entière  au  commerce.  On 
peut  toutefois  douter  qu'il  l'ait  servi 
réellement,  en  défendant  d'emprisou- 


LEO 

ner  pour  dettes  ;  mais  en  même  temps 
il  supprima  le  droit  d'asile ,  fit  ou- 
vrir des  chemins  dans  toute  la  Tos- 
cane, et  fonda  de  nombreux  hôpitaux 
qu'il  visitait  fréquemment.  Il  consa- 
crait trois  jours  de  la  semaine  aux 
affaires  des  malheureux  ;  et  souvent 
il  allait  les  voir  lui-même  dans  leurs 
humbles  demeures.  Avant  lui  les  lois 
étaient  très  -  compliquées  ;  il  les 
simplifia ,  et  abolit  la  peine  de  mort, 
même  pour  le  parricide  et  le  crime 
de  lèse-majesté.  Son  code  est  encore 
en  vigueur  ;  et  le  grand-duc  actuel 
n'y  a  fait  qu'une  exception ,  pour 
les  vols  de  crands  cliemins.  Le  sou- 
vernement  de  ce  prince  a  cepen- 
dant donné  lieu  à  divers  repro- 
ches. II  entretenait  un  grand  nom- 
bre d'espions  ;  mais,  pour  se  justifier 
à  cet  égard,  il  disait  :  «  Je  n'ai  pas 
»  de  troupes,  w  C'était  peut  -  être 
assez  d'avoir  fait  pratiquer ,  dans  ses 
palais  ,  des  ouvertures  par  lesquelles 
les  jîlaintes  les  plus  timides  pou- 
vaient parvenir  jusqu'à  lui.  On  l'ac- 
cuse encore  d'avoir  trop  aimé  le  ré- 
gime réglementaire  ,  et  surtout  d'a- 
voir signalé  son  gouvernement  par 
cette  sorte  de  despotisme  ,  qui  est 
un  des  caractères  de  la  philosophie 
moderne  dont  on  ne  peut  nier  qu'il  ne^ 
se  soit  montré  un  des  adeptes  dans 
plusieurs  occasions  ,  par  exemple 
en  favorisant  ouvertement  les  efforts 
du  fameux  Ricci,  évêque  de  Pis- 
toie,  pour  changer  la  discipline  de 
l'Église.  Le  mécontentement  fut  ex- 
trême parmi  le  peuple,  qui  se  révolta 
dans  beaucoup  d'endroits.  Le  grand- 
duc  poursuivit  sévèrement  les  révol- 
tés ,  et  plus  de  six  cents  d'entre  eux 
furent  envoyés  aux  galères.  Il  ne  pa- 
raît pas  cependant  que  Léopold  ait 
approuvé  toutes  les  innovations  faites 
par  Joseph  II ,  dans  les  états  au- 
tiichieasj  et  peut-être  faut-il  al- 


LEO 

fnbiicr  à  cette  contradiction,  la  divi- 
sa qui  se  mit  entre  les  deux  frères. 
Ile  fut  poussée  au  point  que  Jo- 
(>h  voulut  priver  Leopold  de  la 
iiiironne  impériale,   en  faisant  rc- 
«  onnaîtrc  roi  des  romains ,  son  neveu 
(Il  cri ,  l'archiduc    François.   Long- 
trinps  rcrapcrcur  et   le  grand  duc 
n'eurent  aucune  communication  en- 
tre eux;  mais  Joseph, se  sentant  près 
de  sa  fin ,  écrivit  à   Leopold   pour 
l'inviter  à  se  rendre  à  Vienne.  Ce 
dernier  ne  partit  toutefois  qu'après 
la  mort  de  son  frère  ,  qui  arriva  le 
20  février  1 790.  La  monarchie  au- 
trichienne ,    à   cette  époque ,   était 
eliranlée   jusqu'en  ses    fondements. 
Les  provinces  bclgiques  venaient  de 
s'ériger  en  république.  La  Bohème 
et  la  Basse-Autriche  avaient   fait  , 
contre  un  nouvel  impôt ,  des  repré- 
sentations que  devait  suivre  la  liste 
do  leurs  nombreux  griefs.  Enfin  les 
Hongrois  donnaient  les  plus   vives 
inquiétudes  ;  ils  soutenaient  que  Jo- 
seph II  avant  violé  les  lois  fonda- 
mentales du  royaume  ,  celle  qui  éta- 
blissait la  succession  à  la  couronne 
(tait    abrogée  ;  qu'en    conséquence 
Leopold  n'avait  aucun  droit  au  trô- 
ne ,  et  qne  la  nation  avait  recouvré 
le   privilège  d'élire  son  monarque. 
D'un  autre  côté  la  guerre  se  conti- 
nuait encore  contre  les  Turcs.  Tan- 
dis que  la  Grande-Bretagne,  pour 
former  un  contre-poids  à  l'union  des 
maisons  d'Autriche  et  de  Bourbon  , 
avait ,  en  1  -jSS ,  contracté  avec  la 
Prusse  une  étroite  alliance  ,  Frédé- 
ric-Guillaume avait  aussi  conclu  avec 
la    Porte    un    traité    dont    l'objet 
était  de  faire  restituer  à  la  Turquie 
toutes   les    provinces   qui   venaient 
de  lui  être  enlevées,  et  d'obtenir  son 
appui   pour  arracher   la  Galicie  à 
l'Autriche.  Enfin  le  monarque  prus- 
5ieu   fomentait  des   troubles  dans 


LEO  1^5 

tous  les  états  autrichiens.  Ses  offi- 
ciers secondaient  les  insurgcnts  des 
Pays-Bas  ;   et   il   permettait  à    des 
Hongrois  mécontents  ,  de    tenir  un 
comité  à  Berlin.   La   révolution  de 
France  ayant  rompu  les  nœuds  que 
le   traité  de    i-j  j(i    avait    formés  , 
Leopold    n'avait   à   opposer  à  cette 
ligue  puissante  ,  d'autre  allié  que  la 
Russie ,  qui ,  pour  lui  prêter  des  se- 
cours elîicaccs  ,  était  trop  occupée 
de  la   guerre    qu'elle   faisait    à    la 
Turquie.    Calmer  les    mécontente- 
ments qui  agitaient  ses  provinces ,  re- 
couvrer les  Pays-Bas ,  conclure  une 
jjaix  honorable  avec  la   Porte  ,  ré- 
concilier l'Autriche  avec  la  Prusse, 
obtenir  la  couronne  impériale,  et  sui- 
vre les  négociations  occasionnées  jjar 
les  décrets  de  l'assemblée  nationale 
de  France  ;  tels  sont  les  objets  im- 
portants  qui   durent   fixer   l'atten- 
tion de  Leopold  ,  lorsqu'il  prit  les 
rênes   du   gouvernement.  Les  pro- 
vinces qui  avaient  fait  des  représen- 
tations sous  le   dernier  règne ,  s'é- 
taient empressées  d'envoyer  des  dé- 
putés au  nouvel  empereur;  il  les  ac- 
cueillit de  la  manière  la  plus  affable,  et 
leur  déclara  qu'il  considérait  les  états 
provinciaux  comme  les  colonnes  de 
la  monarchie  ,  et   qu'il  voulait   se 
concerter  avec  eux  pour  concilier  les 
intérêts  du  monarque  et  ceux  des  peu- 
ples. Dès  qu'il  fut  arrivé  dans  sa  ca- 
pitale, il  rétablit,  avec  des  modifica- 
tions salutaires ,  la  forme  de  gouter- 
nement  qui  subsistait  du  temps  de 
Marie -Thérèse  ,  et  principalement 
les    audiences   hebdomadaires  ,  au 
moyen    desquelles   tous    les    sujets 
peuvent  adresser  eu  personne  leurs 
requêtes   au    souverain.   Cet   usage 
paternel ,  qu'a  maintenu  l'empereur 
régnant  ,   avait    été    aboli   par    le 
despotisme    philosophique   de   Jo- 
sepn  IL  Les  «ntjaycs  que  ce  prince 
i3.. 


iç)C)  LEO 

avait  mises  au  commerce,  furent  le- 
vées par  le  nouveau  souverain  j 
mais  l'ëdit  de  tolérance  fut  conserve' 
et  même  étendu  ;  et  les  règle- 
ments qui  avaient  e'te'  faits  en  fa- 
veur des  juifs  furent  perfection- 
nes. Par  ces  mesures  sages ,  Le'o- 
pold  gag^na  tous  les  cœurs  ;  et  bien- 
tôt il  rétablit  la  tranquillité  dans 
ses  états.  Dès  le  commencement  de 
son  règne ,  il  avait  offert  à  Fré- 
déric-Guillaume ,  de  remettre  tout 
sur  le  pied  du  traité  de  Passarowilz; 
mais  en  même  temps  ^  pour  résister 
à  une  attaque  soudaine  de  la  part  delà 
Pmsse ,  il  avait  fait  passer  des  troupes 
en  Bolième  et  en  Moravie.  Frédéric- 
Guillaume  proposa  l'état  des  choses 
tel  qu'il  se  trouvait  avant  la  guerre , 
promettant  de  ne  point  contrarier  les 
efforts  de  Léopold  po«r  recouvrer 
les  Pays-Bas,  et  s'eugageant  à  lui 
donner  son  suffrage  pour  l'élection 
à  l'Empire.  L'Angleterre  suggéra 
l'idée  d'une  trèvej  mais  cette  propo- 
sitioji  fut  rejetée  par  Léopold ,  cpù 
d-esirait  pousser  ses  avantages  contre 
les  Turcs ,  avant  que  les  Prussiens 
fussent  prêts  à  entrer  en  campagne. 
Il  confia  au  prince  de  Gobourg  le 
commandement  de  son  armée  du 
Danube.  Après  un  long  blocus,  la 
|î;arnison  d'Orsova  ,  effrayée  par  un 
tremblement  de  terre,  abandonna  la 
place,  et  les  Autrichiens  mirent  le 
siège  devant  Widdin  et  Giorgevo  ; 
mais  les  menaces  de  Frédéric-Guil- 
laume les  empêchèrent  de  s'en  rendre 
maîtres.  Les  Turcs  passèrent  le  Da- 
imbe  dans  le  dessein  de  livrer  bataille 
au  prince  de  Gobourg.  Ce  général 
les  prévint  en  les  faisant  attaquer 
(  26  juin)  par  Glairfait,  qui  les  con- 
traignit à  se  retirer  (  F.  Glairfait,  et 
CoBOURG  au  Supplément  ).  Ce  fut  la 
dernière  action  de  la  guerre  ,  les 
mouvements  qui  se  faisaient  du  côté 


LEO 

de  la  Prusse  ayant  amené  une  trèvf. 
Frédéric-Guillaume ,  après  avoir  dé- 
taché des  troupes  vers  la  Pologne  , 
avait  conduit  en  Silésie  une  armée 
formidable  et  établi  son  quartier  gé- 
néral à  Reichenbach.  Tandis  que  les 
armées  étaient  en  présence,  il  s'ou- 
vrit, dans  cette  ville ,  un  congrès 
que  termina  une  convention  (  5 
août  )par  laquelle  Léopold  prit  l'en- 
gagement d'entamer  des  négocia- 
tions de  paix  et  de  donner  un  équiva- 
lent à  la  Prusse,  si  la  Porte-Ottomane 
lui  faisait  à  lui-même  quelque  cession. 
Il  promit  aussi  de  ne  prêter  aucun  se- 
cours à  la  Russie,  dans  le  cas  ou  cette 
puissance  refuserait  de  faire  la  paix 
avec  la  Turquie.  F^nfin ,  il  consentit 
à  rendre  aux  Pays-Bas  leur  ancienne 
constitution,  sous  la  garantie  des 
puissances  alliées.  Après  la  signa- 
ture de  cette  convention ,  l'Autriche 
et  la  Turquie  conclurent  à  Gior- 
gevo ,  par  l'entremise  de  la  Prusse  , 
un  armistice  de  neuf  mois  (  i  o  sep- 
tembre 1790).  Les  plénipotentiaires 
autrichien  et  ottoman  se  réunirent 
ensuite  à  ceux  des  puissances  média- 
trices à  Sistove,  et  tout  allait  être  ré- 
glé, lorsque  la  demande  du  Vi  cil  Orso- 
va  et  d'un  territoire  situé  sur  l'Unna  , 
qui  fut  faite  par  Léopold ,  arrêta  la 
négociation.  Durant  la  tenue  du  con- 
grès ,  les  alliés  s'étaient  disposés  à 
prescrire  des  conditions  de  paix  à 
Catherine  II;  et  ils  s'étaient  efforcés 
d'engager  Léopold  à  joindre  ses 
armes  aux  leurs,  si  la  médiation  était 
vaine.  Ce  prince  connaissait  trop 
bien  le  prix  de  son  alliance  avec  la 
Russie  pour  délaisser  cette  puissance 
et  surtout  pour  l'attaquer.  Tout 
ce  qu'on  put  obtenir  de  lui ,  fut  une 
promesse  de  neutralité.  Catherine 
redoubla  d'efforts  ;  et  ses  troupes  bat- 
tirent les  Turcs  en  plusieurs  rencon- 
tres (  For.  PoTEMIvmet  SUWAROW.  ) 


LKO 

\V.  Pitt  n'ayant  pu  ileciJcr  la  nation 
.uij^Iaisc  à  entrer,  pour  des  intcrcls 
<|iii  no  la  conrornaiciit  pas  imnic- 
iiiat(Mncnt,on  garrre  contre  ta  Russie, 
le  cabinet  britannique  sévit  réduit  à 
manquer  aux  eugageineutsqu'il  avait 
pris  envers  la  Prusse.  Dans  son  ein- 
Ktrras  ,  Frcdcric-Guiilaume  se  rap- 
proclia  des  puissances  auxquelles  il 
avaif  prétendu  faire  la  loi;  et  il  s'é- 
tablit une  correspondance  particu- 
lière entre  les  cours  de  Vienne  et  de 
Berlin.  Les  conférences  de  Sistove  fu- 
rent reprises  ;  et  le  plénipotentiaire 
prussien  s'y  réunit  à  celui  de  l'Autri- 
che pour  exiger  cette  même  cession 
qui  avait  été  sur  le  point  d'occasion- 
ner une  rupture.  Frédéric-Guillaume 
s'étant  désisté  de  la  demande  d'un 
équivalent,  la  négociation  fut  bientôt 
conduite  à  sa  fin;  et  le  mémorable 
traité  de  Sistove  fut  signé  le  4  août 
i-^^i.  De  toutes  ses  conquêtes,  Léo- 
pold  ne  conserva  que  Clioczin  ;  et  ce  ne 
fut  même  qu'à  titre  de  dépôt ,  jusqu'à 
la  conclusion  de  la  paixentre  la  Porte- 
Ottomane  et  la  Russie  :  cependant , 
par  une  convention  qui  fut  conclue 
séparément ,  la  Porte  céda  à  l'Au- 
triche le  Vieil  Orsova  et  le  terri- 
toire situé  sur  rUnna.  La  j)aix  de 
Sistove  fut  suivie  de  l'élection  de 
Léopold  à  l'Empire;  et  sa  capitula- 
tion ne  dilTcra  de  celle  de  ses  pré- 
décesseurs qu'en  ce  qu'il  y  ajouta  une 
promesse  de  réclamer  pour  les  droits 
des  princes  allemands  qui  avaient  des 
])ossessions  en  France.  Ce  fut  là,  en 
qiiclquesorte,  la  preraièreétincellede 
Tincendie  qui  de^'ait  embraser  si  long- 
temps rKuro[)e.  Vers  la  même  époque 
les  Hongrois,  qui  avaient  arraché  à 
Joseph  il  quelques  concessions,  se 
]>roposèrent  d'en  obtenir  deplusira- 
poUantes  de  son  successeur;  et  ils  se 
livrèrent,  dans  leurs  diètes  particu- 
lières, à  des  plaintes  et  à  des  ddcla- 


LEO  197 

mations  très-vives.  Lcopold  convo- 
qua ,  pour  la  cérémonie  de  son  cou- 
ronnement ,  une  di(  te  générale;  ce 
qui  était  d'autant  plus  remarquable 
qu'il  ne  s'en  était  point  tenu  depuis 
le  couronnement  de  Marie-Thérès». 
La  plupart  des  seigneurs,  fiers  d'a- 
voir forcé  Joseph  11  à  révoquer  ses 
édits  de  réforme,  accoururent  à  l'as- 
semblée et  rédigèrent  un  nouveau  ser- 
ment par  lequel  le  monarque  consen- 
tait à  ce  que  les  Hongrois  eussent  des 
délégués  dans  toutes  les  négociations^ 
de  paix  et  de  guerre  ;  ce  projet  fut  pré- 
senté à  Léopold,  qui,  sans  le  rejeter 
positivement,  en  restreignit  le  droit 
au  cas  d'une  négociation  avec  la 
Porte  Ottomane  ,  comme  le  pres- 
crivaient les  lois  du  royaume.  En- 
fin il  fit  remettre  à  la  diète  une  dé- 
claration portant  qu'il  ne  souffri- 
rait pas  qu'on  mît  en  question  ses 
droits  de  succession  à  la  couronne  , 
qu'il  n'acquiesctTait  pas  à  la  moindre 
innovation  dans  les  prérogatives  du 
pouvoir  souverain  ,  et  qu'il  ne 
consentirait  à  aucune  violation  des 
privilèges  accordés  aux  non  -  catho- 
liques.Pourappuyerccttedéclarati(ui, 
ilfitcaiitonnersoixanteinillehommes 
aux  environs  de  Bude.  Vainement 
les  états  proposèrent- ils  quelques 
modifications  :  Léopold  ne  voulut 
recevoir  la  couronne  que  comme 
CharlesVI  et  Marie-Thérèse  l'avaient 
reçue ,  et  il  désigna  Presbourg  au 
lieu  de  Bude  pour  la  cérémonie  de 
son  couronnement.  Accompagné  de 
cinq  de  ses  fils  ,  il  fit  son  entrée  dans 
la  première  de  ces  villes ,  le  3  no- 
vembre 1 79 1 ,  y  fut  courounéle  1 5 du 
même  mois ,  et  après  la  cérémonie  dé- 
clara qu'il  consentait  à  ce  qu'on  pro- 
mulguât une  loi  qui  obligeât  ses  suc- 
cesseurs au  trône  de  Hongrie  à  ne  pas 
dilï'éier  deplusdesix  mois  après  leur 
avènement,  la  cérémomc  de  leur  cou-- 


igB  LEO 

ronnemcnt.  Cette  déclaration  inopi- 
née excita  un  eiîtbousiasme  gênerai  j 
et  la  diète  offrit  à  Leopold  toutes  les 
ressources  de  la  nation  pour  obtenir 
de  la  Turquie  uiic  paix  honorable. 
LcopoM  fut  moins  heureux  dans  ses 
efforts  pour  faire  rentrer  dans  le  de- 
voir les  peuples  de  la  Belgique.  Il 
avait  publie,  le  3  mars  1 790,  un  mani- 
feste où  il  iraprouvaitles  innovations 
faites  par  son  prcde'cesseur ,  et  offrait 
de  tout  rétablir  sur  l'ancien  pied.  Les 
insurgents  étaient  alors  divise's  en 
deuxpartis,  dits  des  aristocrates  et  des 
démocrates.  Le  premier  était  dirige' 
par  le  célèbre  Vander-Noot  et  le  cha- 
noine Van-Eupen  Le  second  parti  l'é- 
tait par  l'avocat  V  onck  et  le  gênerai 
Vander  Mersch ,  qui ,  par  une  singula- 
rité remarquable,  mirent  en  avant  les 
plus  grands  seigneurs  du  pays,  c'est- 
à-dire  les  ducs  d'Aremberg  et  d'Ur- 
sel  et  le  comte  de  la  Marck.  Les  deux 
partis  s'étant  réunis  pour  rejeter 
avec  beaucoup  de  fierté  les  offres 
de  Leopold  ,  ce  monarque  fit  mar- 
cher une  armée  de  trente  mille 
hommes ,  et  fixa  pour  dernier  terme 
de  soumission  le  21  novembre  1790. 
Ce  terme  étant  expiré ,  les  troupes 
impériales,  sous  les  ordres  de  Bsncler, 
passèrent  la  Meuse,  et  parurent 
sous  les  murs  de  Bruxelles.  "Van- 
der-Noot ,  Van  -  Eupen  et  d'autres 
chefs  de  la  révolte  prirent  la  fuite. 
Le  3  décembre,  les  Autrichiens  en- 
trèrent dans  la  ville,  et,  avant  la 
fin  de  l'année  ,  toutes  les  provinces 
belgiques  furent  remises  sous  la  do- 
mination de  l'Autriche.  Mais  dès- 
lors  le  nouvel  empereur  eut  à  s'oc- 
cuper d'une  révolution  plus  dange- 
reuse encore  ;  et  toute  son  attention 
dut  se  porler  sur  la  France,  où 
sa  sœur  ,  épouse  de  Louis  XVI , 
gémissait  abreuvée  de  toutes  sortes 
d'outrages.  Sa  qualité  d'empereur 


LEO 

lui  imposait  l'obligation  de  soute- 
nir les  droits  de  ceux  des  princes 
de  l'Empire  que  lésaient  les  décrets 
de  l'Assemblée  nationale.  Dès  le  mois 
de  janvier  1 790,  ces  princes  s'étaient 
adressés  à  la  dicte;  et  Joseph  II,  qui 
vivait  encore  ,  avait  fait  en  leur  fa- 
veur des  représentations  au  gouver- 
nement français.  Le  collège  électoral 
pria  l'empereur  défaire  de  nouvelles 
démarches;  ce  qui  eut  lieu,  L'Assem- 
blée nationale,  convaincue  que  pour 
achever  son  ouvrage  elle  avait  be- 
soin de  la  paix ,  invita  le  roi  à  né- 
gocier avec  les  princes  possession- 
nés  une  renonciation  à  leurs  droits 
moyennant  une  indemnité  :  mais  ils 
déclarèient  qu'ils  n'accepteraient 
pour  dédommagement  que  des  biens- 
fonds.  Les  choses  en  étaient  à  ce 
point ,  lorsque  Joseph  II  mourut  : 
Leopold  écrivit ,  le  1 4  décembre , 
au  roi  de  France ,  pour  lui  deman- 
der le  rapport  de  toutes  les  lois 
contraires  aux  traités.  Maîtrisé  par 
les  circonstances,  Louis  XVI  répon- 
dit que  l'affaire  était  étrangère  à 
l'Empire  ;  qu'elle  ne  concernait  les 
princes  possessionnés  qu'en  leur  qua- 
lité de  vassaux  de  la  France,  et 
qu'au  surplus  on  leur  avait  offert  des 
indemnités.  L'empereur  communi- 
qua cette  réponse  à  la  diète ,  qui  l'in- 
vita à  prendre  les  mesures  néces- 
saires pour  le  maintien  des  droits 
des  princes  et  étals  de  l'Empire.  En 
même  temps  on  déclara  qu'on  leur 
devait  toute  protection  et  assistance; 
on  réclama  l'intervention  des  puis- 
sances garantes  du  traité  de  West- 
phalie  ;  enfin  l'on  ordonna  des  ar- 
mements. Le  premier  février  1 792, 
Koch  fit ,  au  nom  du  comité  diplo- 
matique de  l'assemblée  législative , 
un  rapport  sur  le  conclusuin  de  la 
dicte.  Se  fondant  sur  l'acte  de  ces- 
sion de  l'Alsace ,  il  posa  eu  principe 


«fiip  1.1  souveraineté  en  avait  c'tc  cé- 
dera la  couronne  de  Franee,ctqucpar 
conséquent  les  princes  de  l'Empire, 
posscssionncs  dans  cette  province  , 
riaient  obliges  de  se  soumettre  aux 
décrets  de  l'Assemblée  nationale.  Ce- 
pendant il  convint  qu'il  leur  était  dû 
des  inderanitcspour  les  droits  et  reve- 
nus dont  les  décrets  les  privaient ,  et 
([u'il  fallait  inviter  le  roi  à  traiter 
avec  eux.  En  repondant  ,  le  i5  fé- 
vrier, à  la  lettre  de  l'empereur  en 
date  du  3  décembre  1791,  Louis 
XVI  renouvela  rollre  de  négocier 
des  indemnités.  Cette  offre  tentaquel- 
ques  princes  de  l'Empire,  qui  aimè- 
rent mieux  s'arranger  avec  la  France 
(pie  d'attendre  des  secours  incertains. 
En  conséquence  ,  ils  conclurent  dif- 
férents traités  ,  dont  les  événements 
ne  tardèrent  pas  à  empêcher  l'exécu- 
tion. Léopold  avait  fait ,  au  mois  de 
mai  1791  ,  un  voyage  en  Italie;  et 
il  avait  eu  à  Mantoue  une  entrevue 
avec  le  comte  d'Artois,  qui  cher- 
chait partout  des  libérateurs  pour 
Louis  XVI.  On  traça  dans  cette  en- 
trevue un  plan,  d'après  lequel  l'em- 
pereur devait  faire  marcher  35, 000 
hommes  eu  Flandre  ,  tandis  que' 
1 5,000  de  troupes  des  cercles  au- 
raient attaqué  l'Alsace  j  que  i5,ooo 
Suisses  se  seraient  emparés  de  Lyon, 
et  que  les  Sardes  auraient  pénétré  eu 
France  par  la  Savoie  ,  et  les  Espa- 
gnols par  le  Roussillon.  On  ne  dou- 
tait pas  que  cent  mille  hommes  réu- 
nis aux  Français  restés  fidèles  ne  fus- 
sent suflisants  pour  rétablir  la  mo- 
narchie; et  l'on  conseillait  à  Louis 
XVI  de  renoncer  à  s'éloigner  de  sa 
capitale.  Cette  dernière  condition 
fut  cause  qu'il  rejeta  ce  plan  ,  dont 
probablement  le  succès  n'aurait  pas 
répondu  à  l'attente  de  ceux  qui  Ta- 
vaieut  conçu.  L'état  déplorable  où 
la  famille  royale  de  France  se  vil 


LEO  19^ 

réduite  après  son  voyage  de  Varen- 
nes ,  porta  Léopold  à  publier  une 
déclaration  par  la(pielle  il  invita  les 
autres  puissances  à  déclarer  qu'elles 
se  réuniraient  pour  venger  toute 
injure  qui  pourrait  lui  être  faite ,  et 

f)our  réprimer  une  reliellion  dont 
'exemple  compromettait  la  sûreté 
de  tous  les  gouvernements.  Dix-neuf 
jours  après,  un  traité  préliminaire 
d'alliance  convenu  entre  l'Autriche 
et  la  Prusse  fut  signé  à  Vienne  (  25 
juillet  1701  ).  Quoiqu'il  n'ait  pas  été 
publié  olUcicllement,  on  sait  qu'il  fut 
arrêté  de  former  une  alliance  dé- 
fensive à  laquell e  la  Russie,  la  Grande- 
Bretagne  ,  les  Provinces-Unies  et  l'é- 
lecteur de  Saxe  seraient  invités  d'ac- 
céder. Vers  la  même  ^oque  ,  l'cm* 
pcreur  et  le  roi  de  Prusse  eurent 
une  entrevue  à  Pilnilz  ;  mais  déjà  il 
s'était  opéré  un  grand  changement 
dans  l'esprit  du  premier.  La  répu- 
gnance qu'il  avait  à  s'engager  dans 
des  hostilités  s'accrut  par  les  repré- 
sentations de  ses  ministres,  surtout 
du  feld-maréchal  Lascy ,  qui  jugeait 
que  la  guerre  entraînerait  la  perte 
immédiate  des  Pays-Bas.  Cependant 
le  roi  de  Prusse ,  persistant  dans  sa 
résolution  ,  invita  le  marquis  de 
Bouille  à  tracer  un  plan  d'atta- 
que. Tandis  qu'on  discutait  ce  plan  ^ 
le  comte  d'Artois  arriva  ,  accompa- 
gné de  M.  de  Calonne.  Les  exhor- 
tations de  ce  prince  enflammèrent 
aisément  l'imagination  de  Frédéric- 
Guillaume  :  mais  rien  ne  put  vaincre 
la  répugnance  de  Léopold  ;  et  ce  ne 
fut  qu'à  force  d'importunités  qu'on 
parvint  à  lui  faire  sij^ner  une  déclara- 
tion assez  vague  pour  le  rétablisse- 
ment de  l'autorité  du  roi  de  France. 
Cette  pièce  ,  la  seule  qui  ait  été  pu- 
bliée sur  les  conférences  de  Pilnitz, 
fut  insérée  dans  tous  les  journaux; 
et  elle  servit  long-temps  de  texte 


9.00  LEO 

aux  déclamations  des  ennemis  de 
Louis  XVI.  Lcopold,  espe'rant  que 
celte   publication   subirait  pour  les 
calmer,  ou  pour  faire  ëcliouer  leurs 
clTorls  ,  saisit  la  première  occasion 
de  rompre  ses  engagements;  et  lors- 
que   Louis     XVI    eut    accepte'    la 
nouvelle  constitution  et  qu'il  parut 
jouir  d'une  sorte  de  liberté,  l'empe- 
reur leva  la  défense  qu'il  avait  faite 
à  l'ambassadeur  de  France  de  pa- 
raître à  sa  cour.Il  révoqua  en  même 
temps  sa  déclaration  de  Mantoue  : 
il  fut  même  le  premier  souverain  de 
l'Europe  qui  reçut  dans  ses  ports  le 
pavillon  tricolore  ;  enfin  il  défendit 
aux  émigrés  français  qui  s'étaient 
réfugiés  dans  ses  états  ,  d'y  former 
des  rassemblements  militaires.  Tant 
de  circonspection  ne  fit  qu'accroître 
le  danger  que  Léopold  se  proposait 
de  détourner  :  chaque  jour  la  tribune 
de  l'assemblée  législative  de  France 
retentissait    de  nouvelles    menaces 
contre  l'Empire  ;  et ,  le  i5  janvier 
1792,  cette  assemblée  rendit  un  dé- 
cret par  lequel  Louis  XVI  fut  requis 
de  demander,  si ,  comme  chef  de  la 
maison  d'Autriche  ,  Léopold  vivait 
en  paix  avec  la  France,  et  si  ce  prince 
renoncerait  à  tout  traité  ,  a  toute 
convention  contre  la  sûreté  et  la  sou- 
veraineté de  la  nation  française.  Le 
refus  d'une  satisfaction .  avant  le  i  ^^, 
mars  ,  devait  être  considéré  comme 
une  déclaration  de  guerre;  et  l'ordre 
fut  donné  de  tout   disposer    pour 
que  les  troupes  se  missent  en  cam- 
pagne.   Cette  espèce    de    somma  - 
tion  ayant  été  transmise  à   la  cour 
de   Vienne    par    l'ambassadeur   de 
France  ,  l'empereur  ne  put  se  dissi- 
muler que  la  guerre  était  inévitable, 
et  il  ratifia  l'alliance  conclue  avec 
le  roi  de  Prusse.  Le  prince  de  Kaunitz 
fit  cependant,  au  nom  de  l'empe- 
reur ,  une  réponse  à  la  demande 


LEO 

de  la  France.   Mais  lorsque   cette 
espèce  de  justification  fut  commu- 
niquée à  l'assemblée  nationale,  la 
lecture  en  fut  plusieurs  fois  inter- 
rompue par  ce  cri  :  «  La  guerre  l  la 
guerre!  »  Tandis  que  cet  orage  était 
près  d'éclater  ,  Léopold  rendait  le 
dernier  soupir.  Une  dyssenterie  le 
mit  au  tombeau  en  trois  jours, dans 
la  quarante-cinquième  année  de  son 
âge  ,  le  2  mars  1792.  Par  les  effets 
de  la  révolution  de  France,  ce  prince 
laissa  la  monarchie  autrichiennedans 
une  situation   plus  critique  encore 
que  celle  où  il  l'avait  trouvée.  L'as- 
sassinat qui  venait  d'être  commis  sur 
la  personne  du  roi  de  Suède,  et  les 
projets  que    ne    dissimulait  plus  la 
faction  révolutionnaire,  ont  fait,  très- 
mal  à  propos,  attribuer  au  poison  la 
mort  prématurée  de  cet  empereur.  Ce 
prince  avait  épousé^eni  7 65, l'infante 
Marie-Louise,  fdie  du  roi  d'Espagne, 
Charles  III.  La  mort  d'un  époux, 
tendrement  aimé ,  qui  expira  entre 
ses  bras, fit  une  telle  impression  sur 
son  ame  sensible,  qu'elle  le  suivit  au 
tombeau  ,  en  moins  de  trois  mois. 
La  fécondité  de  cette  princesse  fut 
si  grande,  qu'elle  donna  à  Léopold, 
seize  enfants  ,  dont  quatorze  lui  ont 
survécu;  l'aîné  lui  a  succédé  sous  le 
nom  de  François  l^^\  H-ry. 

LEOPOLD  P^oy^z  Brunswici^ 
VI,  i55;  Lorraine-  et  Anualt  , 
au  Supplément. 

LEOPOLD  (  Achille-Daniel  ) , 
savant  aveugle  -  né,  et  l'un  des  plus 
remarquables  que  nous  présente 
l'histoire  moderne  (i)  ,  naquit  à 
Lubeck ,  en  1 69 1 .  Un  de  ses  frères, 
plus  jeune  que  lui ,  vint  aussi  au 
monde,  privé  de  la  vue.  Leur  père, 
avocat  distingué,  prit  le  plus  grand 

(l)  Blacklock   et  Saiindeison  ,    plu»   étoiinattJ» 
ou  plus  célèbre»  que  Lcopoltl ,  u'éuJunt  pan  uéi 


TJ'.0 

•  •iii  de  leur  éducation  ,  leur  donna 
l«\s  plus  habiles  maîtres  ,  et  n'eut 
pas  de  pins  doux  dclasscnicnt    ([iic 

'    sertuidor  leurs  efTorts  ,   de  culli- 
.  «r  l'intelli genre  naissante  de  ces  en- 
lints  ,  et  d'exercer  leur   mémoire, 
<|iii   devint    prodipjieuse.    F.e    cadet 
lourut  jeune;  mais  Achille-Daniel, 
j'ii  parvint  à   Vn^c  de  6'i  ans  ,  ap- 
l>rit  les  langues, la  jurisprudence  ,  la 
philosophie,  la  théologie  ,  et  s'at- 
tu  ha  surtout  à  la  littérature  et  à  la 
j»oesie.  L'histoire  ancienne  et  mo- 
derne lui  devint    très-familière  ;  et 
u'me  ,  peu  de  semaines    avant  sa 
lort  ,  on  ne  pouvait  lui  citer  au- 
iri   des  cve'nemcnts  passe's  de  son 

•  tnps  ,  qu'il  n'en  indirpiat ,  sur-le- 
(liamp,  les  circonstances  les  pluS 
détaillées,  et  la  date  pre'cise.  Il  avait 

iissi  cultive  la  musique,  et  jouait 
.ni  bien  de  divers  iustnimcnls.  Cet 
liomrac  extraordinaire  mourut  le  1 1 
mars   17^3.  On  connaît  de  lui  :    I. 
Collyre  spirituel  (  Geistliche  Augen- 
ilbe  ) ,  ou  Recueil  de   trois  cents 
^'»nnets  sur  des  passages  choisis  de 
!  lùriture-  Sainte  ,  Lubeck  ,  1784  , 
in-8**.  11.  Poésies  diverses,  publiées 
ir  J.  P.  Kohi,  Hambourg,  173*2  , 
i-H".,  en  allemand  ,  ainsi  que  l'ou- 
>  ra;^p  précèdent,  llf.   Epislola  lu- 
j^uhris  ad  Georg.  Tauschium,  prœ- 
iaturumjilii  sui  Simonis  Tauschii 
i  bitum  œgrè  ferentem  ,  insérée  dans 
)<'s  Hcliqua  Tristia  que  ce  père  af- 
liigé  (  G.  Tausch  )  publia  en  17  18 , 
t  la  mémoire  de  son  Hh.  IV.  60m- 
mentatio  de  cœcis  ita  natis  ,  varia 
tJu^olof^ico-juridico-  moralia  exhi- 
'  !'ns ,  Lubeck  ,  i7*.iO  ,  '\\\-\".  de  54 
l'tg.  V.  Epistola  lugubris  ad  Casp. 
ilenr.   Starkium    primce    conjugis 
nœ  ex  fuie  vild  discessum  dolen- 
w,ibid.  17*29,  in-4".  VI.  Epis- 
'  >la  ad  J.  //.  à  Seelen ,  dans    le 
Pœeile  d'Heumaon ,  tom.  i ,  lib.  a , 


LKO  U..1 

pi  g.  \çyi.  L'auteur  y  donne  quel- 
ques détails  assez,  ciu'icux  ,  tant  sur 
lui  que  sur  s(ui  frère.     C,  M.  P. 

LEORIKK  de  rislf,  fabricant 
de  papiers  à  Langlée,  près  de  Mon- 
targis ,  soumit  à  la  fabrication  du 
papier,  toutes  les  plantes,  les écorces 
et  les  végétaux  les  plus  communs. 
Le  Supplément  aux  Loisirs  des 
bords  du  £om^ ,  petit  volume  in- 18, 
imprimé  en  1784  ,  contient  un  essai 
de  papiers  fabriqués  avec  de  l'herbe, 
de  la  soie  ,  du  tilleul,  et  des  papiers 
de  chiflbns ,  mais  de  deux  couleurs 
dilïérentes  et  teints  en  matière.  Leô-» 
rier  annonça  ses  découvertes  dans 
l'Eprlrc  dédicaloirc,  qu'il  composa 
lui-même  et  adressa  à  M.  Ducrest , 
des  OEuvres  du  marquis  de  Fil- 
lette ,  1786^  in-i6.  Les  i56  pre- 
mières pages  sont  imprimées  sur  pa- 
pier de  guimauve;  après  (juoi,  l'on 
trouve  20  feuillets  composés  chacun 
d'une  substance  difTércnte,  savoir; 
ortie,  houblon,  mousse,  roseaux  , 
écorce  d'osier,  de  saule,  de  peuplier, 
de  chcne  ,  racine  de  chiendent ,  bois 
de  fusain  ,  bois  de  coudrier ,  écorce 
d'orme ,  de  tilleul  ,  feuilles  de 
bardane  et  de  pas-d'âne  ,  de  char- 
dons ,  etc.  Z, 

LEOSTHENE,  général  athénien, 
fut  mis  à  la  tête  de  l'armée  qui  de- 
vait affranchir  la  Grèce  de  la  tyran- 
nie des  Macédoniens  ,  après  la  mort 
d'Alexandre -le- Grand  ,  3^4  ^n* 
avant  J.-C.  Discijde  de  Démosthène, 
Léosthène  avait  puisé  ,  dans  les  en- 
tretiens de  ce  fougueux  orateur,  des 
sentiments  démocratiques.  En  so 
chargeant  de  l'expédition  qui  lui  fut 
contiée  ,  il  consulta  plus  scu  amour 
pour  sa  patrie  ,  et  le  dej.ir  de  la 
rendre  indépendante ,  que  les  res- 
sources qu'il  avait  en  Ir.i  -  mcnis 
pour  une  aussi  grande  entreprise. 
De  là  vint  que  Phocion ,  entendant 


202  LEO 

les  Atliëniens  prendre  cette*  déli- 
bération, dont  ils  se  proracUaient 
les  plus  grands  succès  ,  leur  dit  : 
Vos  discours  ressemblent  aux  cy- 
jyrès  ;  ce  sont  des  arbres  grands 
et  superbes  ,  mais  qui  ne  por- 
tent point  de  fruits.  Cependant  , 
Le'oslliène  ,  plein  d'ardeur  ,  se  mit 
en  marche,  et  dirigea  ses  troupes 
vers  la  Tliessalie,  cette  province 
de  la  Mace'doine ,  qui  e'tait  tou- 
jours dispose'e  à  en  secouer  le  joug. 
A  la  nouvelle  de  cet  envahissement, 
Antipaler ,  qui  gouvernait  la  Macé- 
doine, se  hâta  d'avertir  Cratère, 
qui  était  encore  en  Glicie  avec  les 
vieilles  bandes  qu'Alexandre  avait 
renvoyées  en  Grèce.  Après  avoir  re- 
mis le  gouvernement  entre  les  mains 
de  Sillas ,  il  marcha  au  secours 
de  la  Thessalie ,  à  la  tête  de  qua- 
torze mille  hommes ,  tandis  que 
Clitus  mettait  à  la  voile  une  flotte 
de  cent  dix  galères.  Léosthène, 
après  s'être  emparé  de  tous  les  pas- 
sages ,  vint  offrir  le  combat  à  An- 
tipaler ,  qui  ne  craignit  pas  de 
l'attaquer;  mais  la  fortune  trahit 
les  armes ,  jusqu'alors  victorieuses  , 
des  Macédoniens  :  ils  furent  com- 
plètement battus.  Malgré  sa  défaite, 
Anli2)ater ,  ne  perdant  pas  courage  , 
rasseml)la  les  débris  de  son  armée 
(  Voyez  Antipater  ,  tome  II. , 
page  262  ) ,  et  s'enferma  avec  eux 
dans  Lamia,  ville  de  Thessalie,  ré- 
solu de.  vaincre  ou  de  mourir  en 
combattant.  Il  fit  voir ,  dans  cette 
occasion ,  combien  le  courage  et 
l'habileté  peuvent  fournir  de  res- 
sources. Léosthène,  ne  pouvant  em- 
porter la  ville  d'assaut ,  se  mit  à 
en  faire  le  siège.  Les  fréquentes  sor- 
ties des  assiégés  rompirent  plus 
d'une  fois  ses  mesures.  Enfin, ayant 
eu  l'imprudence  de  s'avancer  trop 
près  de  la  place,  il  fut  tué  d'un 


LEO 

coup  de  pierre.  Antiphile  prit  le 
commandement  j  mais  il  ne  put  em- 
pêcher l'évasion  d'Antipater  ,  qui 
profita ,  pour  s'échapper ,  du  désor- 
dre que  la  mort  inopinée  de  Léos- 
thène occasionna  dans  l'armée  en- 
nemie. Celte  mort  fut  suivie  de  la- 
défaite  des  Athéniens,  l'an  32 3  avant 
J.-C.  Son  oraison  funèbre  fut  pro- 
noncée dans  Athènes ,  par  l'orateur 
Hypéride,  en  l'absence  de  Démos- 
thène,  qui  avait  été  exilé,  Z. 

LÉOTAUD  (  VmcENT  ),  jésuite, 
a  mérité  une  place  distinguée  parmi 
les  géomètres  de  son  temps.  Il  naquit 
en  1 595 ,  à  la  Yal-Louise  ,  dans  le 
diocèse  d'Embrun  ,  contrée  célèbre 
par  les  prédications  de  St.  Vincent 
Ferrier.  Après  avoir  terminé  ses  pre- 
mières études  ,  il  entra  dans  la  So- 
ciété ,  où  il  ne  tarda  pas  à  se  faire 
connaître  avantageusement.il  ensei- 
gna les  mathématiques  pendant  qua- 
torze ans  au  collège  de  Dole  ,  qui 
jouissait  d'une  grande  célébrité;  et  il 
contribua  à  en  étendre  la  réputation.. 
Il  passa  ensuite  au  collège  de  Lyon  ; 
et  surla  fin  de  sa  vie ,  il  se  retira  dans 
la  maison  de  son  ordre  à  Embrun,  où 
il  mourut  en  1672.  On  a  de  lui  :  I. 
Geometricœ  practicœ  élément  a,  ubi 
de  sectionibus  conicis  habet  quœdam 
insignia,  Dole,  i63i ,  in- 16.  Il  dé- 
dia cet  ouvrage  à  JeanBoyvin ,  alors 
conseiller  au  parlement,  h«mme  d'un 
rare  mérite.  (  Voyez  J.  Boyvin.  ) 
IL  Magnetologia  sivenovademag- 
neticis  philosophia ,  Lyon  ,  in-4^. , 
1648,  suiv.  Lalande  (  Bibliogr.  as- 
tron.),  et  i6(38,  suiv.  le  P.  Sotwel 
(  Bihl.soc.  Jesu  ).  III.  Etymon  qua- 
draturœ  circuli  hactenùs  editorum 
celeberrimœ,  etc.  Lyon ,  1 653  ,in-4*'. 
C'est  une  réfutation  de  l'ouvrage  pu- 
blié quelques  années  auparavant,  par 
le  P.  Grégoire  de  St.  Vincent ,  fa- 
meux jésuite  flamand,  qui  se  flattait 


I.KO 

«l'avoir  Irouvc  le  moyen  de  rësoiirîre 
\c  problômc  de  la  quadrature  du 
i  (  rrle.  Quelques  -  uns  des  disciples 
il  II  P.  de  Saint -Vincent  répondi- 
rent au  Père  Lëotaud  ,  qui  leur 
répliqua  par  l'ouvrage  suivant  : 
IV.  Cjclomattiia  seu  de  muUiplici 
circiiU contemplât ione libriux^  ibid. 
I  ()(33  ,  in-4°.  Cet  ouvrage  est  suivi 
d'un  traite  étendu  sur  la  quadra- 
tricc  de  Diuostrate,  où  l'auteur  déve- 
loppe quelques  propriétés  non  en- 
core a  j>erçues  de  cette  courbe,  {f^oy. 
Montucla  ,  Hist.  des  Mathémat. 
toin.  •!  ,  pag.  77.  )  V.  Institutionum 
arithmeticarum  libri  i v,  ibid.  1 660, 
in-4**.  Il  a  laissé  en  manuscrit  :  Ana- 
îemmata  seii  planisphœria  midti' 
plicia,  et  quelques  ouvrages  moins 
importants.  W-s. 

LÉOÏ  YCHIDES ,  fds  de  Menarès, 
de  la  race  des  Proclides ,  conçut  une 
baine  violente  contre  Demarate ,  son 
cousin  ,  roi  de  Sparte ,  qui  lui  avait 
enlevé  ,  par  artifice ,  Percale  ,  fdle 
de  Chilon  ,  sa  fiancée.  11  soutint  de- 
vant le  peuple  que  Demarate  n'était 
point  le  {ils  d'Ariston,  et  qu'il  n'avait 
par  conséquent  aucun  droit  à  la  cou- 
ronne. On  ordonna  que  l'alTaire  se- 
rait portée  à  la  décision  de  l'oracle 
de  Delphes  ;  et  la  Pythie  ,  séduite 
par  Cféomène  ,  collègue  de  Dema- 
rate ,  prononça  son  exclusion  du 
trône.  Léotychides  lui  succéda  par 
le  droit  de  sa  naissance  ;  il  fit  avec 
Cléomcnc  la  guerre  aux  Eginètes  , 
qui ,  trop  faibles  pour  résister  ,  se 
soumirent  aux  conditions  qu'on  leur 
imposa ,  et  remirent  des  otages  dont 
la  garde  fut  donnée  aux  Athéniens  , 
leurs  plus  grands  ennemis.  Il  obtint 
'  MS'iitele  commandement  d'une  par- 
e  des  forces  navales  des  Grecs  ;  et 
il  partagea  avec  Xanlippe,  général 
«ihénien ,  la  gloire  du  combat  de 
Mycale,  où  la  flotte  des  Perses  fui 


LEO  io3 

détruite,  Pan  479  avant  Jésus-Christ, 
le  jour  même  de  la  mémorable  ba- 
taille de  Platée.  (  Fojez  Aristide  , 
Pausanias  et  XercÈs.  )  De  retour  à 
Sparte, il  assistait  aux  jeux  publics, 
et  ayant  aperçu  Demarate  assis  sur 
nn  banc  inférieur  ,  il  lui  envoya  de- 
mander ,  par  dérision  ,  s'il  se  trou- 
vait placé  commodément.  Demarate 
cul  peine  à  contenir  son  indignation , 
et  sortit  se  cachant  le  visage  de  son 
manteau.  (  Hérodote ,  liv.  vi.  )  Léo- 
tychides porta ,  peu  de  temps  après , 
la  guerre  dans  la  Thessalie  ;  et  il  s'en 
serait  emparé  facilement  :  mais  gagné 
par  les  présents  des  Alyades,il  revint 
à  Sparte,  abandonnant  ses  conquêtes. 
Suivant  Hérodote,  on  l'avait  surpris 
dans  son  camp  même  ,  assis  sur  un 
sac  d'argent  ;  il  fut  accusé  de  trahi- 
son ,  et  condamné  au  bannissement. 
Son  fils  Zeuxidamc  étant  mort ,  Ar- 
chidamus  ,  son  petit-fils  ,  fut  appelé 
au  trône.  Léotychides  mourut  vers 
l'an  475  avant  J.-C. ,  à  Tégée ,  où  il 
avait  trouvé  un  asyle.  W-s, 

LÉOVIGILDE.   Voyez  Leuvi  - 

GILDE. 

LEOWITZ  (Cyprien),  en  latin 
Lenvitius  ,  fameux  astronome  ou 
plutôt  astrologue  ,  naquit  dans  le 
seizième  siècle ,  à  Lconicia  ,  près  de 
Hradisch  en  Bohème.  Il  se  fit  une 
réputation  très-étendue ,  par  des  pré- 
dictions qui ,  dans  un  autre  temps  , 
l'auraient  couvert  de  ridicule  ;  et 
il  obtint  le  titre  de  mathématicien 
d'Othon-Henri ,  électeur  palatin.  Il 
avait  annoncé  ,  par  exemple  ,  que 
l'empereur  Maximihen  serait  un  jour 
monarque  de  toute  l'Europe  ;  et  , 
suivant  la  remarque  de  Bodin  ,  il 
n'eut  pas  assez,  de  perspicacité  pour 
deviner  que,  l'année  qui  suivit  cette 
belle  prédiction  ,  Soliman  pénétre- 
rait en  Alleiuagiie  ,  et  s'emparerait 
de  Sigeth,  l'une  des  [>lus  fortes  places 


*>M 


LEO 


de  la  Hongi'ie  ,  sous  les  yeux  de 
Maximilien  lui-même  ,  qui  ne  pour- 
rait pas  l'en  empêcher.Il  prédit  aussi 
que  Tannée  i584  verrait  finir  le 
monde  par  un  nouveau  déluge.  Leo- 
\\itz  n'était  pas  le  premier  qui  eût 
fait  une  semblable  menace.  Jean 
Stoéffler  avait  déjà  effrayé  l'AUema- 
£^ne  par  l'annonce  d'un  déluge  qui 
devait  infailliblement  la  noyer  en 
i524  ;  mais  ,  au  contraire  ,  jamais 
année  ne  fut  plus  sccbe.  Un  dé- 
menti si  formel  donné  aux  astrolo- 
gues ,  n'empêcha  pas  Leowitz  de 
trouver  la  mcme  crédulité ,  non- 
seulement  dans  le  peuple  ,  mais 
parmi  les  personnes  d'une  condition 
relevée.  Louis  Guyon  ,  auteur  con- 
temporain ,  rapporte  que  la  frayeur 
fut  si  grande  en  France^  que  les  égli- 
ses ne  pouvaient  pas  contenir  ceux 
qui  y  cbercbaient  un  refuge  ;  un 
grand  nombre  faisaient  leur  testa- 
ment ,  sans  réfléchir  que  c'était 
une  chose  inulde  ,  si  tout  le  monde 
devait  périr  ;  et  d'autres  donnaient 
leurs  biens  aux  ecclésiastiques ,  dans 
l'espoir  que  leurs  prières  retarde- 
raient le  jour  du  jugement.  Leowitz 
ne  vit  pas  le  terme  qu'il  avait  fixe'^ 
pour  la  submersion  du  globe  :  il 
était  mort  dès  l'année  i574,  à  La- 
wingen  e'.i  Souabe  (  i  ).  Il  v  avait 
reçu,  en  1 569 ,  la  visite  de  Tycho- 
Brahé ,  qui  avait  fait  ce  voyage  pour 
s'entretenir  avec  lui  de  choses  rela- 
tives à  l'astronomie.  On  a  de  Leo- 
>vitz  :  L  Tabulœ  ascensionum  om- 
nium ohliquarum  ad  plures  altitu- 
dmis  gradus  productœ ,  Aiigsbourg, 
1 55 1  ,  in-4°.  IL  Eclipsium  ah  anno 
1554  usque  adamiwn  1606  des- 
criptio  ,  ibid.  1554  ;  avec  des 
additions,  i556,  in-fol.  ÏII.  EpJie- 


(1)  Teissier   dit  qn'il  mourut  à  AiJo;»b<iiirg  ,  !• 
s»  mai  ,  c'e»t  une  erreur. 


LEP 

meridum  noimm  alque  insigne  optts 
ab  anno  i556  ad  annum  1G06  ac~ 
curatissimè  supputatii.n,  ibid.  i557, 
in-fol.  IV.  De  conjunctionibus  mag- 
nis  insigniojmm  superiorum,  plans- 
tarum,  solis  defectionihus  etcomctis 
prognosticon  ,  Lawingen  ,  1 564  > 
in-40.  ;  Londres^  i>^73,  in-4^.;  Wit- 
temberg  ,  1 586  ,  in-8^.  ;  Marpurg , 
i6î8,  in-4*'.  ;  traduit  en  français  , 
i568,  in- 19-.  C'est  dans  cet  ouvrage 
que  Leowitz  prédit  la  fin  du  monde, 
qui  devait  avoir  lieu  par  la  conjonc- 
tion des  planètes. Teissier  cite  encore 
de  lui  quelques  autres  productions 
moins  connues.  (  Vojez  Teissier , 
Eloges  des  hommes  savants  ,  tome 
III ,  pages  3o  et  3i.  )  W-s. 

LEPAIGE  (  Jean  ) ,  chanoine  ré- 
gulier de  l'abbaye  de  Prémontré, 
et  docteur  de  Sorbonne  ,  prit  le  bon- 
net le  7  août  1604.  Il  était  prieur 
du  collège  de  Prémontré  dans  l'uni- 
versité de  Paris,  et  procureur-général 
de  l'ordre.  On  travaillait  alors  à  la 
réforme  des  ordres  religieux.  Les 
abbés-généraux  de  Prémontré  char- 
gèrent Lepaige,  en  qualité  de  leur  vi- 
caire-général, de  visiter  les  maisons 
de  France  ;,  et  de  rétablir  la  règle 
dans  celles  qui  s'en  étaient  écartées. 
Il  s'acquitta  de  cette  mission  à  la  sa- 
tisfaction des  supérieurs.  Le  goût 
de  Lepaige  le  portait  à  rechercher 
et  à  recueillir  les  monuments  anciens, 
surtout  ceux  de  son  ordre.  Il  était 
fort  laborieux^  il  avait  même  de  l'é- 
rudition; mais  peut-être  point  assez 
de  critique  pour  donner  du  prix  à  ses 
recueils.  Il  jouissait  néanmoins,  dans 
son  ordre ,  de  l'estime  et  de  la  con- 
sidération qu'on  doit  au  mérite  et  à 
des  services.  Une  circonstance  lui 
fit  perdre  ces  avantages.  A  la  mort 
de  l'abbé-général  Gosset,  en  i635  , 
il  vint  en  pensée  au  cardinal  de 
Richelieu ,  par  des  vues ,  sans  doute, 


LEP 

plu^  nniblticuses  que  celle  d'avoir 
tics  n'Ii^ioux  sous  sa  juridiction  , 
<l«'  se  faire  élire  ahhe  de  Prcnioiitrc  , 
wnnie  il  avait  déjà  e'tc  du  ahbc 
:  (.luiii.  Lepaige  favorisa  de  tout 
.;  M)n  j)ouvoir  ce  projet ,  au(|uel  s'op- 
[j  posaient  et  le  chapitre  (ie  raShaye  de 
Preniontrc,ettous  les  abbes  des  pays 
étrangers.  On  le  déposa  de  sa  place 
de  prieur  du  collège ,  et  on  lui  ofa  la 
procure-ge'ne'rale.  Ne  pouvant  plus 
trouver  que  des  desagrcjnents  dans 
ses  rappoi*ts  avec  son  ordre ,  il  se 
fit  pourvoir  du  prieure-cure,  non  de 
Nanteuil ,  comme  le  dit  Moréri , 
mais  de  Nantouillet ,  village  de 
Brie  ,  où  il  mourut  vers  i(i3o.  On  a 
de  lui  :  Bihliotlieca  Prœmonstraten- 
sis  ordim's,  Paris ,  i  ()33 ,  vol.  in-fol. , 
divisé  en  deux  parties  ,  dont  la  pre- 
mière est  dédiée  à  Urbain  VIII  ,  et 
la  deuxième  ,  au  cardinal  de  Riche- 
Keu.  Ce  que  ce  livre  contient  de  plus 
curieux,  sont  les  anciens  statuts  de 
Tordre,  et  les  privilèges  qui  lui  ont 
ëte*  accordés  par  les  papes  et  les  rois. 
Il  fut  imprimé  sans  la  participa- 
tion de  l'ordre  et  sans  avoir  été  sou- 
mis à  la  censure  des  supérieurs; 
aussi  est-il  plein  de  fautes.  On  arrêta 
dans  plusieurs  chapitres  généraux, 
de  le  réimprimer  avec  les  correc- 
tions convenables.  l\  fut  alors  ques- 
tion d'un  ouvrage  sous  le  titre  dCAnti- 
Paif^ius ,  fait  tout  exprès  pour  le 
réfuter  :  mais  ces  projets  n'ont  point 
PU  de  suite.  L-y. 

LEPAUTE  (  Jean  -  André  )  , 
c*  ièbre  horloger,  né  en  1709,  à 
Montmédi ,  vint  fort  jeune  à  Paris, 
où  il  ne  tarda  pas  de  se  faire  con- 
naître par  la  perfection  de  ses  ouvra- 
ges. Il  fit,  en  1753,  pour  le  palais 
du  Luxembourg,  la  première  hor- 
loge horizontale  qu'on  ait  vue  à  Pa- 
ris ;  et  ce  travail  lui  valut  un  loge- 
nt dans  le  palais, où  Lalande  avait 


LEP  ao5 

alors  son  observatoire.  Il  présenta  , 
la  même  année ,  h  l'académie  de» 
sciences  ,  une  pendule  à  une  seule 
roue,  de  son  invention.  I^alande  fiii 
l'un  des  commissaires  chargés  de 
l'examiner  ;  et  celte  circonstance 
établit  entre  eux  une  amitié  durable, 
qui  tourna  au  profit  de  tous  les 
deux  ;  «  car  ,  dit  Lalande ,  si  j'ai 
»  contribué  à  la  perfection  des  tra- 
»  vaux  de  Lepaute  en  horlogerie, 
»  Lepaute  a  été  utile  à  la  science 
»  qi>e  je  cultivais ,  par  les  pcn- 
»  dules  d'une  grande  perfection 
»  qu'il  a  faites  pour  la  plupart  des 
»  observatoires  de  l'Europe.  »  Le- 
paute fut  honoré  de  la  confiance  du 
roi  et  des  princes  ;  et  il  s'en  montra 
digne  ,  autant  par  sa  probité  que 
par  ses  talents.  C'est  à  cet  artiste 
qu'on  doit  la  plupart  des  hor- 
loges qui  décorent  les  édifices  pu- 
blics de  Paris  ,  entre  autres  celles 
des  Tuileries  ,  du  Palais  -  Royal 
et  du  Jardin  du  Roi.  Il  avait 
eu  le  bonheur  de  trouver  une 
épouse  qui  partagea  ses  travaux  et 
embellit  sa  vie  ;  elle  le  soigna  avec 
une  patience  angélique  pendant  les 
sept  ans  que  dura  sa  dernière  mala- 
die :  mais  les  veilles  continuelles  af- 
faiblirent sa  santé  ,  et  elle  précéda 
de  quelques  mois  au  tombeau ,  sou 
mari  ,  qui  mourut  octogénaire ,  et 
sans  av»ir  connu  cette  perte ,  à  Sl.- 
Cloud ,  le  1 1  avril  1 789.  On  a  de 
Lepaute  :  I.  Traité  d'horlogerie , 
contenant  tout  ce  qui  est  nécessaire 
pour  bien  connaître  et  bien  régler 
les  montres  ;  la  description  des  piè- 
ces d'horlogerie  les  plus  utiles  ,  des 
répétitions ,  des  équations  ,  des  pen- 
dules à  une  roue,  etc. ,  Paris  ,  1755 
in-4**.  avec  dix-sept  planches.  La 
préface  contient  l'histoire  des  diffé- 
rentes tentatives  faites  pour  mesurer 
le  temps  et  eu  déterminer  la  mar- 


aoô 


LEP 


rjie  ,  ayant  l'invention  des  horloges 
à*  roues  et  à  poids  ,  et  celle  des  per- 
fectionnements qu'ont  reçus  les  hor- 
loges depuis  le  xjv^.  siècle  jusqu'à 
Sully ,  fameux  artiste ,  dont  il  décrit 
les  travaux  d'une  manière  très-inté- 
ressante. L'ouvrage  est  divisé  en 
deux  parties  :  la  première  contient 
la  description  d'une  pendule  à  se- 
condes et  d'une  montre  ordinaire , 
comparées   dans    leurs    difierentes 

})ièces,  avec  la  manière  de  juger  de 
eur  fini  et  de  les  régler  ;  la  seconde 
partie  traite  des  diverses  sortes  de 
pendules  à  sonnerie ,  à  répétition  ,  à 
une  roue  ^  à  équation  ,  à  réveil ,  etc. , 
des  différents  échappements  ,  et  en 
particulier  de  celui  dont  il  est  l'in- 
venteur. On  trouve ,  à  la  fin  du  vo- 
lume ,  un  traité  des  engrenages  ,  et 
un  autre  du  mouvement  d'oscillation , 
par  Lalande.  II.  Supplément  au 
Traité  d'horlogerie  ,  etc. ,  Paris  , 
1760.  Il  renferme  la  description 
d'une  pendule  polycamératique  , 
ainsi  nommée  parce  qu'elle  peut 
marquer  l'heure  dans  dificrentes 
pièces  d'un  palais  ou  d'un  château  ; 
d'une  pendule  à  secondes  qui  mar- 
que le  temps  moyen  et  le  temps  vrai 
avec  plus  de  justesse  que  les  pen- 
dules à  équation.  Lalande  a  eu  beau- 
coup de  part  à  la  rédaction  de  cet 
ouvrage  ,  dont  il  existe  des  exem- 
plaires avec  un  nouveau  frontispice 
portant  la  date  de  1768.  III.  Des- 
cription de  plusieurs  Ouvrages  d'hor- 
logerie,  1764,  in-  12.  —  Jean- 
Baptiste  Lepaute,  horloger  du  roi , 
frère  du  précédent,  se  distingua  aussi 
par  ses  talents  dans  cette  branche 
importante  des  arts  mécaniques  ,  et 
mourut  à  Paris  ,  en  i  Soi ,  dans  un 
âge  avancé.  Il  a  eu  part  aux  princi- 
paux ouvrages  de  son  frère ,  qui 
l'avait  associé  à  son  commerce.  On 
cite  de  lui  la  belle  horloge  de  l'hôtel 


LEP 

-de-ville  de  Paris  ,  qui  fut  posée  en 
1786.  W-s. 

LEPAUTE  (  Madame  )  née  Ni- 
cole-Reine Étable  de  Labrière  , 
tient  un  rang  distingué  dans  le  petit 
nombre  des  femmes  qui  se  sont  si- 
gnalées   dans  l'astronomie.  Née   à 
Paris  le  5  janvier  1728,  elle  an- 
nonça, dès  son  enfance,  des  disposi- 
tions peu  communes  pour  les  scien- 
ces. Elle  épousa,  à  l'âge  de  25  ans_,Le- 
paute  l'aîné,  et ,  dès  ce  moment ,  par- 
tagea ses  travaux.  Elle  devint  l'amie 
de  Clairaut  et  de  Lalande,   et  elle 
leur  communiquait  le  résultat  de  ses 
études,  qu'ils  se  plaisaient  à  encoura- 
ger :  elle  leur  fut  très-utile  à  tous  les 
deux  par  ses  calculs  sur  la  fameuse 
comète  dont  le  retour  était  p-édit 
pour  1767  ,  mais  qui  ne  fut  aperçue 
que  sur  la  fin  de  l'année  suivante. 
Clairaut  a  gardé  le  silence  sur  les 
obligations  qu'il  avait  à  M™^.  Le- 
paute,  et  cela  par  ménagement  pour 
une  femme  jalouse  de  son  mérite  ; 
mais  Lalande  lui    a  donné  la  part 
d'éloges  qu'elle    méritait ,  dans  sa 
Théorie  des   Comètes,  page   11  o. 
M™^.   Lepaute,   douée  de  tous  les 
avantages  extérieurs,   portait  dans 
la  société    cette  politesse  et   cette 
fleur  d'esprit ,  que  semblent  exclure 
les  éludes  profondes  :  elle  ne  cessa  de 
combler  de  bienfaits  les  parents  de 
son  mari  ;  c'est  à  elle  que  les  sciences      ' 
doivent  Lepaute  d'Agelet,  qu'elle  lit |l| 
venir  de  Montmédi,àrâge  de  quinze  "■ 
ans,  pour  lui  faire  étudier  l'astrono- 
mie, et  qui  périt  dans  l'expédition 
de  la  Pérouse(  /^q^.  Ageeet).  Une 
trop  grande  assiduité  au  travail  af- 
faiblit sa  vue  ,  et  elle  fut  forcée  de 
discontinuer  ses  calculs.  Son   mari 
étant  tombé  malade ,  elle  le  soigna 
pendant  sept  ans  avec  un  zèle  et  une 
patience  au-dessus  de  tous  les  éloges  : 
elle  le  suivit  k  Saiut-Cloud ,  où  on  le 


LEP 

lTaii5porla  pour  lui  faire  respirer  un 
meilleur  air;  et  elle  y  mourut  quel- 
ques mois  avant  lui ,  le  G  dé- 
cembre 1788,  à  rage  (le  G5  ans. 
M™*'.  Lepaulc  était  assoriee  de  l'a- 
cadeinic  de  Bexiers,  houueur  (ju'cllc 
dut  à  l'amitié  de  Mairau.  Le  na- 
turaliste Commcrsou  lui  a  dédié 
la  rose  du  Japon ,  qu'il  nomma 
f.fpautia[  I  ).  On  doit  à  celte  dame  : 
1.  La  Table  des  longticurs  des  pen- 
dules, dans  le  Traité  d'horlogerie, 
de  son  mari.  II.  Des  Obseivations 
ilans  la  (xtnnaissance  des  temps ,  de- 

Suis  1759  jusqu'à  1774*  ï^^  volume 
e  l'année  1763  conlieut  d'elle  ,  une 
Table  des  angles  parallactiques  , 
utile  pour  les  navigateurs  ;  et  celui 
<le  l'année  17G4,  les  Calculs  de 
V éclipse  annulaire  du  soleil,  an- 
noncée pour  le  ^*^^  avril,  avec  une 
carte  qui  en  présente  la  marche  et 
tes  différentes  phases  pour  tous  les 
pays  de  l'Europe  (i).  III.  Des  Tables 
du  soleil ,  de  la  lune  et  des  autres 
planètes ,  dans  les  Ephémérides  des 
mouvements  célestes ,  toni.  vn  et 
VIII.  IV.  Des  Mémoires  d'astrono- 
mie ,  communiques  à  l'académie  de 
Béziers ,  et  imprimés  par  extraits 
dans  le  Mercure.  Lalande  a  inséré 
V Eloge  de  cette  dame  dans  son  His- 
toire de  l'Astronomie ,  année  1 788. 
(  y  or.  Lalam)e.  )  W-s. 

LÈPAUTRE  ou  LEPOTRE  (  An- 
toine ),  né  à  Paris,  en  161 4  ,  était 
premier  architecte  du  roi ,  et  de 


(i)  Madame  Briquet  (  Diel.  Uttf.r.  des  fem- 
mes sav.  )  ajoute  aux  prénnmi  de  madame 
Z<«paiit«,  c*lui  J'Hortente  ,  et  prétend  que  Com- 
ntirri-in  trouTant  que  soD  pr-mier  hommaga 
n'était   pa*    a«t»z   tli  "  " 


iirect,    cha 


ngea 


!•>   nom   <!« 


Z.*/' jv//a  eu  celui  à'  Hortensia"  \l^\%  Lalande, 
mieux  instruit  de  toutes  ce*  particnlaiitrt  ,  dit 
one  ce  fut  Ju«tieu,  qui  appela  cette  belle  plante 
Hortensitt,  nom  aoua  lequel  elle  a  eu  beaucoup 
à.e  »"»  le  il  y  a  quvlqtie«   année*. 

(j  Cette  carte,  imprimée  en  roiige,  et!  gra- 
ïc'  f  I'  ntadamv  Lattre  pour  le  trait  ;  et  pour  la 
letitf ,  par  madame  Tardieu,  Elle  ett  (ort  bien 
•M«Ml««,  ttlM  curieux  la  «oaaerTeal  «v«c  «oia. 


LEP  «07 

Monsieur,  frcrc  de  Louis  XîV.C*«l 
pour  ce  prince  qu'il  construisit  le» 
deux  ailes  du  château  de  St.-(iioiid; 
elles  sont  couronnées  d'une  halus- 
trade  et  n'ont  qu'un  étage.  Un  ordre 
ionique  avec  un  avant-corps  toscan, 
surmonté  d'un  fronton ,  et  des  figu- 
res placées  dans  des  niches,  sont  l' or- 
nement de  CCS  ailes.  Eu  167  i  ,  épo- 
que à  laquelle  l'académie  de  sculji- 
ture  reçut  son  institution  ,  il  en  fut 
nommé  membre.  Les  OEuvres  d'ar- 
chitecture d'Antoine  Lepautre^  dont 
la  première  édition  parut  en  i().53  , 
sont  encore  estimées  des  artistes. 
Daviler  y  ajouta  dans  la  suite  huit 
discours,  qui  en  expliquent  les  plan- 
ches. Lepautre  avait  un  véritable 
talent  pour  la  décoration  des  édi- 
fices. Son  goût  de  dessin,  enlière- 
nient  à  lui,  est  plein  de  grandeur: 
et  de  majesté  :  sa  manière  est  ce- 
pendant un  peu  lourde  ;  mais  comme 
elle  n'est  jamais  dépouiTue  de  goût, 
elle  donne  à  ses  ouvrages  un  air  de 
solidité  qui  marque  le  grand  maître. 
Il  abonde  en  inventions  nouvelles  ; 
les  planches  qui  composent  son  li- 
vre d'architecture,  sont  d'un  excel- 
lent dessin  et  d'une  composition 
aussi  mâle  qu'ingénieuse.  L'église  de 
Port-Royal ,  au  faubourg  Saint-Jac- 
ques,est  le  seul  bâtiment  gravé  dans 
ses  œuvres,  qui  ait  été  exécuté.  Il 
avait  été  désigné  par  M'»'',  de  Mon- 
tespan  pour  bâtir  le  château  de  Cla- 
gny  ;  mais  Lenôtre ,  qui  favorisait 
Mansard  ,  ayant  fait  préférer  les  des- 
sins de  ce  jeune  artiste,  Le]>autre  en 
conçut  un  tel  chagrin,  qu'il  en  mou- 
rut en  1691.  — Jean  Lepautre  ,  frè- 
re du  précédent,  dessinateur  et  gra- 
veur à  l'eau-forteen  architecture,  na- 
quit à  Paris,  en  161 7.  Il  apprit  les 
premiers  éléments  de  son  art  chez 
un  menuisier  ,  et  devint  un  ex- 
cellent dessinateur.  U  résolut  alors 


2oS  LEP 

de  cultiver  la  gravure  à  l'eau-forte , 
ci  se  mit  à  graver  une  multitude  de 
•sujets  ,  qui  ont  servi  et  serviront 
toujours  de  modèles  aux  artistes  qui 
se  dévouent  à  l'arcliitecture  et  à  l'or- 
nement. Son  goût,  il  est  vrai,  est 
un  peu  lourd  ;  et  l'ëtude  de  l'an- 
tique ,  adoptée  de  nos  jours  ,  laisse 
apercevoir  dans  Lepautrc  une  ma- 
nière un  peu  surannée;  mais  comme 
il  fut  toujours  dirigé  par  d'excel- 
lents principes  ,  ses  ouvrages  ne 
peuvent  être  que  profitables  aux 
jeunes  artistes.  A  l'exception  de 
quelques  pièces  qu'il  a  gravées  d'a- 
près Farinati,  il  n'a  rien  exécuté 
que  sur  ses  propices  dessins;  ce  sont 
en  général  des  décorations  d'archi- 
tecture ,  des  vases  ,  des  plafonds  , 
des  ornements  de  toute  espèce.  Son 
ceuvre  est  très-considérable  ;  le  ca- 
talogue de  Mariette  le  porte  à  i/\f^o 
pièces ,  dont  voici  les  principales  : 

I.  Son  Portrait ,  dans  une  bordure 
de  fleurs  ,  soutenue  par  des  génies. 

II.  Louis  XI F,  habillé  à  la  ro- 
maine,  assis  dans  son  cabinet.  III. 
Dix  feuilles  in-f».  de  V Histoire  de 
Moïse.  IV.  Vingt-deux  feuilles  de 
Sujets  tirés  de  la  Mythologie  ,  et 
six  feuilles  de  Frises  ,  avec  des  su- 
jets également  mythologiques,  in-f». 
V.  Douze  feuilles  de  Paysages  avec 
des  Dues  de  jardins  et  de  grottes, 
et  six  feuilles  de  Fontaines  et  jets 
d'eau  à  Vitalienne ,  in-f**.  VI.  Six 
feuilles  représentant  Les  visions  de 
Quevedo ,  avec  la  désignation  de 
chaque  sujet ,  et  huit  vers  français 
au  bas  de  chacun.  VII.  Le  sacre  de 
Louis  XI F,  dans  la  cathédrale  de 
Reims,  trois  grandes  feuilles  avec 
huit  vers  français  au  bas  de  chacune. 
VIII.  Fues  perspectives  de  Fon- 
tainebleau ,  avec  le  baptême  du 
Dauphin,  trois  pièces  grand  in-fo.en 
U'avers  ^  etc.  Lepautrc  avait  été  reçu 


LÏÏ.P 

membre  de  l'académie,  en  1677  ;  il 
mourut  à  Paris  ,  en  iGHi.  —  Pierre 
Lepautre,  fils  d'Antoine,  naquit 
à  Paris  ,  en  i  G60.  Son  père  le  des- 
tina d'abord  à  l'architecture  :  mais 
le  goût  du  jeune  artiste  l'entraî- 
nait vers  la  sculpture  ;  et  les  leçons 
de  Magnier  développèrent  ses  dis- 
positions. A  l'exemple  de  son  oncle 
Jean,  il  grava  à  l'eau-forte  ;  et  il 
aurait  pu  acquérir  un  nom  dans  cet 
art,  si  l'on  en  juge  par  quelques-unes 
de  ses  estampes.  La  plus  estimée , 
est  celle  qui  représente  la  Statue 
pédestre  de  Louis  XI  F,  exécutée 
par  Goysevox,  et  que  la  ville  de 
Paris  fît  ériger  ,  en  1689  :  cette 
grande  pièce,  haute  de  plus  de  3i 
pouces,  est  ornée  de  médaillons  et 
de  5  G  bas-reliefs  ,  représentant  les 
actions  les  plus  éclatantes  du  règne 
de  ce  roi.  Après  avoir  remporté  le 
grand  prix  de  sculpture,  Lepautre 
se  rendit  à  Rome,  où  il  demeura 
pendant  i5  ans.  C'est  dans  cette 
ville,  qu'en  1716,  il  exécuta  le 
Groupe  d'Enée  et  d^Anchise,  que 
l'on  voit  dans  le  jardin  des  Tuile- 
ries ;  cet  ouvrage  est  le  chef-d'œuvre 
de  Lepautre  :  il  le  composa,  dit-on, 
d'après  un  modèle  en  cire  de  Le- 
brun; et  quoiqu'on  puisse  en  louer 
l'exécution ,  il  a  tous  les  défauts 
auxquels  le  désir  de  faire  mieux  , 
en  faisant  autrement  que  les  an- 
ciens ,  peut  entraîner  un  artiste  dé- 
nué de  bon  goût.  Dans  les  figures  de 
ce  groupe ,  le  choix  de  nature  est 
pauvre,  l'expression  manque  de  no- 
blesse et  surtout  de  simplicité  ;  les 
poses  sont  tourmentées  ;  rien  n'y 
rappelle  des  demi-dieux.  Il  en  est 
de  même  du  Groupe  d^'Arie  et  de 
Pœtus,  ou  de  la  Mort  dé  Lucrèce  , 
qui  est  placé  en  regard  de  celui 
à'Enée  et  Anchise.  Oe  groupe  avait 
été  commencé  à  Rome,  par  Théo- 


ëon  ;  Lrpautre ,  après  la  mort  de 
cet  artiste,  vint  l'achever  à  Marly, 
en  i<M)i.  Ces  vastes  draperies  qui 
volent  ,  Taclion  exagérée  des   per- 
sonnages, appartiennent    plutôt  au 
théâtre  qu'à  la  sculpture.  Une  autre 
preuve  de  mauvais  goût  est  cette  li- 
gure allégorique  de  l'Amour,  intro- 
duite, dans  un  sujet  historique.  On 
voit  encore,  au  jardin  des  Tuileries  , 
deux  statues  de   cet    artiste.  L'une 
est  une  Atalanle  ,  co])iec  de  l'an- 
tique, placée  dans  un  des  parterres 
du  grand  bois,  du  côte'  de  l'allée  des 
!   orangers;  l'autre  le  Faune  à  la  bi- 
che y  ëgalcmeut  copie*  de  l'antique, 
dans  le  parterre  situe  du  côte  op- 
posé. Cette  dernière  figure,  que  Le- 
!    pautre  lit  à  l'âge  de  19  ans,  peut  être 
regardée  ,  ainsi  que  la  précédente  , 
comme  ce  qu'il  a  fait  de  plus  irré- 
prochable. On   voyait  de   lui ,    au 
château  de  la  Muette,  Cljtie  chan- 
!   gee  en  tournesol  y  et  une  Nymphe 
airosant  des  fleurs  que  lui  présente 
l'Amour.  Les  sculptures  eu  bois  de 
l'œuvre  de  Saint-Eustache,  à  Paris, 
ne  lui  font  pas  moins  d'honneur 
\   qu'à  l'architecte  qui  en  a  donné  les 
!    dessins.  Quoique  Lepautre  n'eût  pas 
i    moins  de  talent  que  la  plupart  des 
sculpteurs  contemporains,  son  ex- 
trême modestie  l'empêcha  toujours 
de  se  mettre  sur  les  rangs  pourcntrer 
à  l'académie  ;  et  ce  qui  semble  dilllcile 
à  concilier  avec  cette  modestie,  c'est 
qu'iui  des  motifs  qui  le  portèrent  à 
résister  aux  avances  que  l'académie 
elle-même  fit  auprès  de  lui ,  fut  une 
répugnance  invincible  à  travailler 
sur  les  dessins  de  Lebrun,  qui,  à 
cette  époque  ,  exerçait  une  sorte  de 
dictature  sur  les  arts;  aussi  fut-il  ra- 
rement employé  dans  les   travaux 
exécutés  pour  le  roi.  Ses  derniers 
ouvrages  se  ressententdela  faiblesse 
de  l'âge.  11  mourut  en  i744«    P"S. 

XXIV. 


LEP  201) 

LEPAYS(RiÎN^)(i),sieHrDu 
Plessis-Vili.lneuve,  poète  et  bel- 
esprit,  naquit  en  i()3(>,  à  Nantes 
suivant  les  uns,  à  Fougères  selon 
les  autres  {'x)  ,  dans  une  famille 
assez  distinguée  ,  puisqu'il  eut  uu 
oncle  lieutenant-général  au  bailliage 
d'Ernée.  Peu  favorise  de  la  fortune, 
il  vint  de  bonne  heure  à  Paris  pour 
y  chercher  de  l'emploi,  entra  dans 
la  finance,  et  fut  placé  d'abord  à 
l'armée  d'Espagne.  Il  se  trouvait 
à  Fontarabie  en  iGSq,  lorsque  la 
trêve  qui  précéda  la  paix  des  Pyré- 
nées et  le  mariage  de  Louis  XIV,  le 
ramena  sur  la  frontière.  Il  voyagea , 
peu  de  temps  après,  en  Angleterre, 
en  Flandre ,  et  en  Hollande  ;  et  l'on 
trouve  ,  dans  ses  œuvres  ,  des  rela- 
tions de  ces  pays ,  très-superficielles, 
un  peu  exagérées  ,  et  pourtant  assez 
vraies,  quoiqu'écrites  sur  le  ton  de 
la  plaisanterie ,  style  habituel  et  ca- 
ractéristique de  l'auteur.  Il  revint 
ensuite  en  Bretagne  voir  sa  famille , 
qui , pendant  une  maladie  assez  grave 
dont  il  fut  atteint,  voulut  le  marier. 
11  y  avait  presque  consenti ,  par  suite 
de  l'affaissement  de  ses  organes  ; 
mais  dès  que  sa  santé  fut  rétablie , 
il  se  ravisa,  et  partit  brusquement 
pour  Paris,  où  il  ne  tarda  pas  à 
être  nommé  directeur-général  des 
gabelles  du  Dauphiné  et  de  la  Pro- 
vence. Ce  fut  dans  ces  deux  provinces 
qu'il  passa  une  grande  partie  de  sa 
vie;  et  la  plupart  de  ses  ouvrages 
ont  été  composés  à  Grenoble  et  à 
Valence.   C'est  pourquoi   Allard  le 


(1)  CV(t  AÎnii  qu»  nom  le  troiiTOiia  déligné 
dans  (OU  acte  mortuaire!  mail  dans  la  dédicaco 
dr  tes  Nouvelles  (Euvres, et  daiic  uue  piéc?  de 
Tcri  qui  t'y  trouve,  il  «If^ne  L.  C.  Jjk  Faxi. 

(a)  Cette  dernière  opinion  paraît  plui  preha- 
hle.  Le  Pays,  dan*  une  lettre  au  marquis  d« 
])>it-FéTrier  ,  qu'il  appelle  son  Toitin  ,  annoac* 
Je  projet  de  ae  retirer  dans  ■&  petite  maiicfti  4 
Bauisé  (ou  Beaucé);  or  ce  bourg  n'eat  qu'A 
troit-quarta  â«  ii«M<leFou{èret. 

Il 


oio  LEP 

compte  parmi  les  e'crivaîns  au  Dau- 
pliiiie'.  Le  Pays  avait  fait  d'assez  bon- 
nes études  au  collège  de  La  Flèche  : 
il  parlait  et  écrivait  sa  langue  avec 
autant  de  correction  que  de  facilité  j 
et  l'on  voit ,  par  ses  citations  ,  que 
les  langues  latine  et  italienne  ne  lui 
étaient  pas  moins  familières.  Ce  n'était 
pas  un  savant ,   mais  un  homme  ai- 
mable ,  qui  faisait  le  charme  des  so- 
ciétés par  l'enjouement  et  la  vivacité 
de  son  esprit ,  non  moins  que  par  la 
variété  de  ses  connaissances.  Il  était 
surtout  agréable  conteur ,  et  brillait 
par  ses  bons  mots.    Ses  amitiés' , 
amours  et  Amourettes  que  Piganiol 
appelait  le  rudiment  des  amoureux 
de  province ,  parurent  pour  la  pre- 
mière fois  en  1664.  Cet  ouvrage  ne 
contient  point  de  fadeurs ,  comme 
son  titre  pourrait  le  faire  croire.  Il 
se  compose  de  Lettres  dont  quelques- 
unes  sont  entremêlées  de  vers,  sur 
différents  sujets  plus  ou  moins  plai- 
sants 5  car  Le  Pays  a  le  talent  d'égayer 
les  matières  les  plus  tristes,  et  jus- 
ques  aux  compliments  de  condo- 
léance. Ce  recueil  eut  le  plus  grand 
succès.  Quelques  dames  ,  après  l'a- 
voir lu,   prirent,  dit-  on,  du  goût 
pour  l'auteur,  et  s'informèrent,  ciiez 
son  libraire  ,  comment  il  était  fait. 
Le  Pays  ayant  su  que  la  duchesse 
de  Nemours  avait  eu  cette  curiosité, 
lui  adressa  son  propre  Portrait  y  en 
prose  et  en  vers.  Cette  pièce,  malgré 
quelques  longueurs ,  est  sans  contre- 
dit, une  des  plus  gaies  et  des  plus 
ingénieuses  qu'il  ait  faites.  Il  s'y  peint 
tant  au  physique  qu'au  moral  ;   et 
quoiqu'il  ne  s'y  flatte  point,  on  ne 
peut  s'enipêcheif  de  sentir  pour  lui 
de  l'estime  et  de  l'intérêt.  Les  rail- 
leurs l'appelèrent  alors  le  Sin^e  de 
Voiture,  s'imagina nt  qn'iî avait  eu 
la  prétention  de  marcher  sur  les  traces 
de  ce  bel-esprit.  Boileau,  lui-même, 


LEP 

encore  el^loui  de  la  réputation  dt 
Voiture ,  manifesta  cette  opinion 
dans  sa  troisième  satire  ;  toutefois  eu 
mettant  dans  la  bouche  de  son  cam- 
pagnard, cette  contre-vérité  : 

Le  Pays  ,  «ans  mentir,  est  un  bouffon  plaisant  ; 
Mais  jo  ne  trouve  rien  de  beau  dauit  ca  F'oilufe  , 

il  lui  a  réellement  fait  dire  la  vérité  ; 
car  l'enjouement  simple,  aisé,  de  Le 
Pays,  sa  gaîté  franche  et  naturelle,  ne 
ressemblent  en  rien  aux  jeux  de  mots 
apprêtés,  au  style  froid,  précieux  et 
guindé  de  Voiture.  Rien  ne  fait  plus 
d'honneur  à  Le  Pays,  rien  ne  le  dis- 
tingue davantage  de  cette  foule  d'au- 
teurs  médiocres  qui  nous  seraient 
inconnus  sans  les  vers  de  Boileau , 
que  la  manière  dont  il  reçut  le  trait 
décoché    contre,  lui   par  ce  grand 
poète.  Loin  d'en  témoigner  de  l'hu- 
meur ,  dans  sa  réponse  à  l'ami  qui 
lui  avait  envoyé  de  Paris  la  satire 
d  u  repas ,  ou  d'en  plaisanter ,  comme 
l'ont  avancé  quelques  biographes ,  il 
y  montre  pour  Boileau  l'estime   la 
mieux  sentie ,  fait  le  plus  grand  éloge 
de  ses  ouvrages,  peu  nombreux  à 
cette  époque,   le  met  au-dessus  de 
tous  les  faiseurs  de  gros  volumes ,  et 
ne  parle  qu'avec  une  extrême  mo- 
destie de  ses  propres  écrits,  auxquels 
il  parait  attacher  peu  d'importance. 
Dans  un  voyage  à  Paris,  il  alla  voir 
Boileau,  qui,  embarrassé  d'une  pa- 
reille visite,  ne  put  s'excuser  qu'en 
disant  qu'il  l'avait  nommé  dans  sa 
satire ,   parce  que  bien  des  gens  le 
préféraient  à  Voiture.  Le  Pays  prit 
cette  excuse  pour  argent  comptant, 
et  ils  se  quittèrent    sans    rancune. 
Le   Pays ,    par    les    agréments  de 
son  esprit  et  de  son  caractère,  se 
fit  des  amis  à  la  cour  et  parmi  les 
gens  de  lettres  ;  mais  il  n'aimait  pas 
Lini'res  :  Vous  êtes  un  sot  en  trois 
lettres  ,  lui  dit-il  un  jour;  Et  vous , 
répondit  Linières,  en  mille  que  vous 


LEP 

.  ^t»ez  ècriies.  Lorsque  Loiiis  XIV, 
faisant  rciherrhrr  ics  faux  nobles  , 
cutchargé  leconseiller-d'ctal  Dii{i;ué, 
intendant  du  LyoïiuAis  et  du  Dau- 
pliinc,  de  vérifier  les  titres  des  p;en- 
tiLslionnnes  de  ces  deux  provinees  , 
LePays  écrivit  à  ee  deriiieriuie  lettre 
badine  pour  etaMirranciennetc  de  la 
noblesse  de  sa  iKuseqirildciivc  d'Ho- 
mère par  la  braucbedc  Voiture.  Dans 
cette  pièce,  où  il  prouve  autant  de 
govlt  que  d'erudilien,  il  passe  eu 
revue  la  plupart  des  poètes  français, 
italiens ,  latins  et  grecs ,  enremoiitant 
jusqu'à  Hoiiièrc.  Il  n'y  parle  ni  de 
tlaeine,  ni  de  La  Fontaine,  peu  con- 
nus alors  ;  mais  il  y  appu^-ie  judi- 
cieusement Malherbe,  Gonycille,  Mo- 
lière et  Boilcau.  C^^ttc  lettre  en  prose 
et  en  vers ,  la  plus  lonj!;ue  et  la  plus 
importante  de  tontes  celles  de  l'au- 
teur, est  une  iniitali(*ii  d'un  e'pisodede 
la Cle'lie. LePays  jouissait  de  îa  plus 
granâc  considération  dans  le  midi 
de  la  France.  L'académie  d'Arles, 
Jaseulequ'ilyeût  alors  en  Provence, 
i'admil  an  nombre  de  ses  membres, 
ea  i()()8;  et  le  duc  de  Savoie  le  dé- 
cora de  1  ordredeSaint-Mauîice,  en 
1670.  L'amour  des  plaisirs  et  des 
let.res  n'était  j>as  incompalibie  chez 
lui  avec  l'esprit  des  afTiires,  et  ne 
lui  fit  jamais  udglii^er  les  inté- 
rêts de  l'État.  Fidèfc  a"  l'honneur  e». 
â  ses  devoirs,  il  était  incapal>Ie  de 
la  moindre  bassesse  pour  s'enrichir; 
maison  excès  de  oonfiancelui  devint 
funcsle  dans  ses  dernières  années. 
Un  de  ses  associe's  ayant  malverse', 
on  s'en  prit  a  lui.  Il  vint  a  Pans  pour 
se  délVulre,  el  présenta  a  Louis  XIV 
un  placet  qui  liniisait  aie»!  : 


M*«  p«tit  bien  ii'««»  p.i»  nn  fi"' inp^rial) 
N*«lt<iqiirit  jani<iit  ils    biroqiie 
liidign-»   ci  lin    •tfr»  roy«I. 

Atthiugiiex  lotit  le  RlÙD.  \n  ((U.ire  e    terii  {;r«Titl*. 

L*  l'jctice  le  veiil;  votre  droit  l.i   Jommule: 
C«  «ont  dtscoup*  Jigue*  <l°iia  iloi. 


LEP  au 

Pr«*nr«  tnr  l'aoïpamir  ,  pr«ni>i  «tir  U  HolUnd*. 
]M«i«, Sir«  ,«u  nom  JvDicn, Il  «prouva  ri<  ■■•■■r  tnoU 

La  prose  des  (inaneicrs  qui  ponr- 
suivaient  Le  Pays  l'emporta  sur  ses 
vers  :  il  fut  condamne.  li  adressa  un 
nouveau  placet  r.u  roi:  mais  il  n'en 
fui  pas  moins  force  eue  payer  pour 
le  fripon.  Le  chaj^rin  n'était  point 
fai»  pour  uahommedcsoncaraclère, 
comme -^  ('c  dit  lui  racnnr  dans  son 
Purirait.  Celui  qu'il  ressentit  de  la 
perte  de  ce  procès, eluc l'échec  con- 
sidérable qu'en  éprouva  sa  fortune, 
le  conduisit  au  tombeau.  Il  mourut 
dans  une  maison  de  la  nie  du  Bou- 
loy,  le  3o  avril  1O90,  suivant  la 
vérilication  que  nous  en  avons 
faite ,  et  fut  eutcn  é  à  S.diit-F^us- 
tache,  où  Voilure  avait  été  inhumé 
q  aranle-deux  ans  auparavant.  La 
prose  de  Le  Pays,  suivant  Boileau, 
valait  mieux  que  ses  vers  :  ses  poésies, 
à  force  d'être  naturelles, sont  prosaï- 
ques et  manquent  d'images.  Ou  a  de 
lui  :  I.  AinitiéSy  Amows  et  .amou- 
rettes^ Grenoble,  1 664,  in-i 2 ,  réim- 
primées presque  aussitôt  à  Paris  , 
Lyon,  Genève,  Cologne,  Leyde,  Ams- 
lerd.Mii,  etc.  IL  Zélotule ,  histoire 
galante  ,  Paris ,  1 065 ,  in- 1 'x ,  et 
insérée  dans  les  réimpressions  de 
l'oïivrage  précédent.  III.  Noiufelles 
OEuçres,  contenait  des  lettres  et 
des  pièces  de  poésie,  églogiies,  son- 
nets ,  élégies ,  stances ,  etc. ,  Paris  ^ 
1672,  '2.  vol.  in- isè;  Leipzig,  1738^ 
2  vol.  in-8«*.  Il  existe  aussi  un  re- 
cueil intitidé  :  Pièces  choisies  des 
OEwresde  Ze/^ar^,lnHaye,  1G80. 
Ony  a  réduit  à  1  vol.  in- 12,  les  trois 
précédemment  imprimés;  ir'ais  ony 
a  interverti  l'ordre  cJiroîinlogique, 
IV.  Le  déinéU  de  Ve^ptit  et  du 
cœw.  Pa^i^  ,  !()88,in-rj.    A — t. 

LEPECHIN  (IwAN)  ,  savant 
russe  ,  né  vers  le  milieu  du  dix- 
huitièuue  siècle ,  reçut  sa  première 

1/,.. 


212  LEP 

éducation  à  Pëtersbourg.  Il  se  rendit 
ensuite  à  l'université  de  Strasbourg , 
où  il  fut  promu  au  grade  de  doc- 
teur en  médecine.  A  son  retour  ,  il 
fut  nommé ,  en  1 77 1 ,  membre  ordi- 
naire de  l'académie  de  Pëtersbourg , 
dans  la  classe  d'histoire  naturelle. 
Ses  connaissances  étendues  dans 
cette  partie  lui  avaient  fait  obtenir 
la  direction  d'une  des  sociétés  de  sa- 
vants qui  furent  chargés  de  parcou- 
rir l'empire  de  Russie  ,  pour  en  dé- 
crire les  productions  et  les  phé- 
nomènes physiques.  En  1783  ,  il 
devint  secrétaire  perpétuel  de  l'aca- 
démie russe ,  et  reçut  de  l'impératrice 
Catherine  II  une  médaille  d'honneur. 
La  société  des  scrutateurs  de  la  na- 
ture de  Berhn  l'admit  parmi  ses 
membres.  Peu  de  temps  avant  de 
mourir,  il  obtint  le  titre  de  conseiller 
d'état.  Sa  mort  arriva  le  18  avril 
î8o2.Ilestpriucipalementconnupar 
le  Journal  des  vojages  en  plusieurs 
parties  de  la  Russie  ^  écrit  en  russe, 
et  traduit  en  allemand  ,  par  Hase  , 
Altenbourg  ,  1774  ?  3  vol.  in-4°.  , 
fig.  On  trouve  plusieurs  Mémoires 
de  Lepechin  dans  les  collections  de 
l'académie  des  sciences  de  Pélers- 
bourg  •  et  il  avait  publié  quelques 
opuscules  séparés.  G- au. 

LEPEGQ  DE  LA  CLOTURE 
(  Louis  )  ,  médecin  ,  né  à  Caen  en 
1736,  fit  ses  études  dans  l'université 
de  cette  ville  ,  et  y  devint ,  jeune 
encore  ,  docteur-régent  de  la  faculté 
de  médecine  ,  et  professeur  royal  de 
chirurgie.  Au  bout  de  quelques  an- 
nées, il  alla  se  fixer  à  Rouen.  On  a 
de  lui  :  I.  Observations  sur  les  ma- 
ladies épidéniiques  ,  d'après  le  ta- 
bleau des  Epidémiques  d'ffippo- 
cmte;  Paris  ,1776,  in-40.  Ces  Ob- 
servations furent  publiées  par  ordre 
du  gouvernement  et  aux  frais  du 
roi.   II.   Collection  d'oJiservations 


LEP 

sur  les  maladies  et  constitutions 
epidémiques  ^  etc.  ;  Rouen  et  Paris  , 
1778,  en  trois  parties  ,  in-4".  III. 
Plusieurs  Observations  particulières, 
dans  les  divers  journaux  de  méde- 
cine. Les  travaux  de  Lépecq  furent 
récompensés  par  des  lettres  de  no- 
blesse ,  que  Louis  XVI  lui  accorda 
en  1781  ;  cette  distinction  fut  dans 
la  suite  pour  lui  une  source  de  dé- 
sagréments ,  et  le  força  de  s'éloigner 
de  Rouen  :  il  se  retira  à  Saint- 
Pierre- Asifs  j  propriété  rurale ,  ber- 
ceau de  ses  ancêtres ,  oii  il  employa 
les  dernières  années  de  sa  vie  à  ré- 
pandre gratuitement  dans  les  cam- 
pagnes les  secours  et  les  consolations 
de  l'art  qu'il  possédait  dans  un  degré 
très  éminent.  Il  mourut  dans  cette 
retraite  en  1804.  —  Lépecq  ,  son 
neveu ,  chirurgien  -  major  au  48*^. 
régiment,  mourut  en  Pologne,  en 
1807 ,  à  l'âge  de  trente  -  cinq  ans. 
On  a  de  lui  un  Rapport  sur  Vinsalu^ 
brité  du  camp  près  d' Ostende ,  et 
sur  les  maladies  qui  ont  régné  pen- 
dant la  fin  de  Van  xii  et  le  com- 
mencement de  Van  xiii  ,  pubhef 
en  1809 ,  par  l'auteur  de  cet  article, 
dans  le  Journal  de  médecine,  ré- 
digé par  MM.  Gorvisart ,  Le  Roux 
et  Boyer.  D-g-s. 

LEPÉE.  (L'abbé  de)  Fojez 
EpÉe. 

LEPELLETIER  (  Jean  ),  négo^ 
ciant ,  naquit  à  Rouen  ,  le  29  dé- 
cembre i633.  Sa  première  éduca- 
tion fut  très -négligée  :  son  père  lui 
laissa  la  liberté  de  suivre  ses  goûts  j 
et  quoiqu'il  n'eût  aucune  disposition 
pour  la  peinture ,  il  s'amusa  jusqu'à 
l'âge  de  vingt  ans  avec  des  crayons 
et  des  pinceaux.  Il  lui  prit  alors  fan- 
taisie d'apprendre  le  latin,  et  ayant 
fait  emplette  d'un  rudiment ,  il  es- 
saya de  traduire  sans  autre  secours  r 
mais  comme  ses  progrès  n'étaient 


^  a$5cz  rapides,  il  fil  venir  un 
tîtrc;  cl,  au  boni  d'un  mois,  il  fut 
ctat  de  lire  Tarilc.  Ce  premier 
.  rès  l'encouragea  ;  et  il  apprit  avec 
nieniefacilite  l'espagnol,  ritalien , 

I  anglais  ,  et,  quehpies  années  après, 
I'  ,;ree  et  riiehreu.  Il  s'appliqua  cn- 
Miitc  à  l'étude  des  mathématiques  , 

K  l'astronomie ,  de  rarcliitecturc  , 
même  de  la  médecine  ;  il  acquit 
...uis  ces  difFerentes  sciences  des  con- 
naissances asscz-e'tcnducs.  Un  de  ses 
amis  ayant  parle  un  jour  ,  devant 
lui,  de  i'alcliimie  ,  de  manière  à  pi- 
quer sa  curiosité ,  il  se  procura  des 
livres  et  des  instruments,  et  il  sutbien- 
tot  à  quoi  s'en  tenir  sur  les  décou- 
vertes merveilleuses  des  adeptes.  A 
l'4^e  de  quarante  ans,  il  abandonna 
nioutes  les  sciences  frivoles  ,  pour 
ne  plus  s'occuper  que  de  son  com- 
merce et  d'études  sérieuses.  Il  était 
fort  lié  avec  le  P.  Lami ,  de  l'Ora- 
toire ;  et  ce  fut  à  sa  demande  qu'il 
traduisit  de  l'anglais  de  Creavcs 
et  de  Cumberland  ,  quelques  opus- 
cules sur  les  poids  et  les  mesures 
des  Hébreux.  11  mourut  à  Rouen 
en  1711.  On  a  de  lui  :  I.  Mé- 
moires pour  le  rétablissement  du 
commerce  en  France ,  Rouen,  1 7 01 , 
in-ia.  II.  Dissertations  sur  V Arche 
de  Noë, et  sur  Vhémine  et  lalivre  de 
St.-Benoity  ibid. ,  1 704, 1 7 1  o,  in-i  .j. 

II  avertit  dans  la  préface  que  ces  dis- 
sertations faisaient  partie  d'un  plus 
grand  ouvrage  qu'il  n'a  pas  voulu 
risquer,  dans  un  siècle ddJicat  et  dif- 
ficile, afin  de  ne  pas  oecasioner  de 
pertes  au  libraire.  Il  commence  la 
première  dissertation  par  détermi- 
ner la  grandeur  et  la  capacité  de 
Tarche  ;  et  il  eu  donne  le  plan  inté- 
rieur et  extérieur  avec  une  exacti- 
tude minutieuse.  Il  soutient  ensuite 
que  l'homme  ,  avant  le  déluge  ,  n'a- 

■'il  pas  reçu  la  permission  de  se 


LEP  11 3 

nounir  de  la  chair  des  animaux  :  il 
répond  aux  objections  qui  s'élèvent 
contre  ce  sentiment ,  en  cherchant  à 
démontrer  que  les  habits  des  pre- 
miers hommes  n'étaient  pas  faits  de 
peaux ,  comme  on  l'a  prétendu ,  mais 
d'écorces  d'arbre  ou  de  poils  ,  et 
que  la  distinction  des  animaux  en 
mondes  et  immondes  ne  concernait 
que  les  sacrifices.  Il  fait  ciLsuite  le 
dénombrement  des  animaux  qui  en- 
trèrent dans  l'arche;  il  détermine  la. 
place  que  chaque  couple  y  occupait, 
et  prouve  que  les  huit  personnes  dont 
se  composait  la  famille  de  Noé  suf- 
fisaient pour  en  prendre  soin  et  leur 
distribuer  la  nourriture.  Il  termine 
enfin  par  établir  l'universalité  du 
déluge ,  et  fait  voir  que  celte  grande 
catastrophe  arriva  par  la  volonté 
expresse  de  Dieu ,  et  non  par  le  con^ 
cours  de  circonstances  qui  pourraient 
se  reproduire  encore.  La  seconde  dis- 
sertation est  moins  intéressante.  Le- 
pclletier  y  réfute  le  sentiment  de  D. 
Lancelot  sur  la  livre  dont  se  servit 
St.  Benoît  pour  régler  le  poids  des 
aliments  distribués  journellement  à 
chaque  religieux ,  et  s'attache  à  prou- 
ver que  cette  livre  était  de  vingt  onces 
romaines (  P'aj.  Claude  Lancelot), 
III.  VMkaést  ou  le  dissolvant  uni- 
versel de  J^an  Helniont,  révélé  dans 
plusieurs  traités  qui  en  découvrent  le 
J^<?r6t,  Rouen,  1704,  in- 12.  Cet  al- 
kaëst  (  de  deux  mots  allemands  aU. 
f^eist  ,  tout  esprit),  n*est  qu'uu  ex- 
trait d'urine.  .Suite  du  traité  de  l'Ai- 
kaésty  où  l'on  rapporte  ])lusieurs  en- 
droits des  ouvrages  de  George  Star- 
key.  qui  découvrent  la  manière  de  vo^ 
latiliser  les  alkalis  ,  etc.  ibid.  1706^ 
in- 12.  IV.  Tableau  des  monnoies, 
des  poids  et  des  mesures  des  Hé- 
breux ,  réduites  à  celles  de  France , 
imprimé  en  tête  du  Commentaire  sur 
la  Genèse,  par  D.  Calmct,  V,  LeltrQ 


s(4 


LEP 


touchant  la  pesanteur  des  cheveux 
d' Aùsalom  Mein.  fie  Trev.  avril 
1 702.  — Lettre  sur  l'explication  du 
mot  Kesitah  qui  se  trouve  dans  la 
Genèse. ch.  iî\xni,vers.  ig^erc^ib. 
mai  1704. — jL'iscours  contre  Voni- 
mon  f^ue  Socrate  a  ouffert  lemar- 
iyre  pour  It  défense  de  Vanité  de 
J)ieu ,  ibid. ,  scplernbre  1 7 04. — f(e- 
viarques  sur  les  erreurs  des  paintjcs 
dans  la  représeniation  de  nos  mys- 
tères et  dans  des  sujets  tirés  de  rhlj^ 
toire  sac  éi^,ihid  nov.  clec.  1704; 
janv.  mars,  avril  et  septemL.  1705. 
Jean  Moianus  avait  déjà  pubiit'  dans 
le  même  but  :  Jistoria  SS.  imagi- 
7iM7n^;el l'abbé  Merya'ionnësur  celle 
matière ,  im  tr.iite  complet,  inîitule'  : 
J/a  Théologie  des  peint  ^^js,  de,,  sculp- 
teurs, etc.  —  Explication  du  temple 
d'Ezechiel,  avec  des  observations 
sur  celui  de  Salomon  ;  dans  les  Essais 
de  littévitture  de  l'abbe  Tficaud  , 
mai  1703.  —  Tra'té  des  poids,  des 
mesures  et  des  monnoies  des  an- 
ciens y  ibid.  On  en  trouve  le  plan 
dans  les  Mémoires  de  Trévoux,  no- 
vembrp  même  année.  Lepelletier  a 
trad.  de  l'anglais ,  de  Robert  Naun- 
ton  :  Fragmenta  regalia ,  ou  Fé~ 
ritahle  caractère  de  la  reine  Elisa- 
beth, Kouen,  1 683,  in- 12.  Cette  tra- 
duction a  été  réimprimée  avec  le 
Secret  des  cours  ,  traduit  de  Tan- 
^d\s  de  Walsingham ,  Lyon  ,  1,695 , 
in- 12  ,  et  à  la  suite  de  la  Fie  de  la 
Heine  Elisabeth  ,  trad.  de  l'ital.  de 
Leti,  Amsterdam,  1703;  la  Haye, 
3741,  1753,2  vol.  in-T2.  Mais 
c'est  par  erreur  que  dans  lo  Piction. 
universel  on  lui  attribue  lo  tr^du^^tion 
de  la  Fie  de  Sixte  F,  par  le  même 
Leti.  Elle  est  de  L.  A.  Lepelletier , 
prêtre,  prieur  de  St.-Gemme  et  de 
Pouancé.  (  Fof.  Grég.  Leti.  )  W-s. 
LEPELLETIER  (  Claude  ) ,  doc- 
leiu*  en  théologie  et  ctanoine  de 


LEP 

Reims  ,  e'tait  né  vers  1670,  dans 
un  hameau  près  de  Faucogney ,  en 
Franche-Comté.  Il  exerça  d'abord 
les  fonctions  du  saiut-mimslèrc  dans 
Ic^  diocèse  de  Lyon  ,  à  Glandève  ,  et 
ailleurs.  Le  zèle  (pi'il  montra  contre 
le  jansénisme, lui  mérita  la  bienveil- 
lance de  M.  de  Mailiy,  archevêque 
de  Reims ,  qui  le  nomma,  en  17 19, 
cure  de  Saint  -  Pierre  de  la  même 
TÏlle,  et  chanoine  de  la  métropole. 
J-jps  ennemis  qu'il  s'était  faits  par 
ses  ouvrages  ,  eurent  recours  ,  pour 
le  perdie ,  à  des  moyens  odieux. 
tJne  Juive  de  mauvaises  mœurs  l'ac- 
cysa  d'avoir  eu  avec  cile  un  com- 
merce doublement  criminel ,  puis- 
qu'elle se  déclarait  en  même  temps 
sa  sœur;  mais  elle  fut  co)î vaincue 
de  calomnie,  et  bannie  du  royaume. 
(  Voyez  les  Mémoires  de  Trévoux , 
3iovcmbre  1 730.)  L'abbé  Lepelletier, 
imj)liqué  drUis  quelques  allaires  dé- 
sagréables, n'en  fut  pas  moins  éloigné 
de  Reims  par  une  lettre  de  cachet , 
subit  divers  exils,  et  obtint  enfin  de 
venir  à  Paris  :  il  avait  conservé  son 


canonicat;  et  l'assemblée  du  cl 


ge 


de  1730  lui  accorda  une  pension 
de  5ooliv.  Il  se  démit  de  son  bé- 
nciice,  vers  17-'^,  et  se  retira  dans 
la  solitude  de  SepC  -  Fonts  ,  pour  y 
vaquer  plus  tranquillement  à  la 
prière  et  aux  exercices  de  piété  ^ 
ma\s  les  infirmités  dont  il  était  ac-  m 
câblé  ne  lu\  ayant  pas  permis  de  ■ 
continuer  un  gcnic  de  vie  si  austère, 
il  iieviiit  dans  sa  famille  ,  et  mourut 
à  Faucogney,  le  12  juin  1743.  On 
a  de  ce  pie.i  ;  e.xlésiastique  un  grand 
nombre  d'ouvrages  ,  parmi  lesquels 
Gu  kï  contentera  de  citer  :  I.  La 
Pratique  et  les  régies  des  vertus 
chrétiennes  ,  tirées  de  l'Ecriture- 
Sainte,  Lyon,  1713,  in- 12.  IL 
Traité  dogmatir.ue  et  moral  de  la 
grâce  universelle  ,  tiré  du  Nouveau- 


Trsl.imcTit  ,  Luxnnbourp;  ,  tTaf), 
in-8'.  On  trouve  à  la  iiii  ilu  volume 
une  liste  de  vingt  ouvraj^cs  qu'il 
nvait  dcjà  publics  conlro  Quesnel  , 
Hure,  Dupin  ,  l'abbc  Margon,  le 
t.uxliiial  de  Noaillcs  et  les  autres 
prinri|)«iux  jansénistes  ;  et  celle  de 
vingt  autres  ouvrages  prêts  à  cire 
livres  à  l'ini pression.  III.  Traité  de 
la  pureté  chrétienne,  tire  de  l'E- 
crilure-vSaiutc,  Liège,  I7'i1>,  in-S**. 
IV.  Traité  ilo^mAtique  de  la  messe, 
contre  le  P.  Le  Gouraycr  et  les  An- 
glais, Paris,  i7'A7,iu-i2.  V.  Ma- 
nière d'entendre  la  messe,  selon 
l'esprit  de  Jésus-Christ  et  de  TE- 
^ise  ,  ib.  17A7,  in- 16.  VI.  Traité 
dogmatique  et  moral  de  la  péni- 
tence ,  tire  des  Livres  saints  ,  ibid , 
1728,  in- 12.  VII.  Traité  de  la 
charité  evuers  le  prochain  ,  et  de 
ses  tuais  ca  actè^es ,  ib.  1 728  ,  in- 
1*2.  VHI.  Traité  de  la  charité  en- 
vers Dieu,  ou  de  l'amour  de  Dieu, 
ib.  17.29,  in- 12.  Cet  ouvrage  fut 
supprime  par  arrêt  du  conseil  du 
3i  août  1782.  IX.  \J Imitation 
de  Jésus-Chnst  ,  traduction  nou- 
velle ,  fidèle  et  littérale ,  ib.  1731, 
in-i2.  Quoique  l'auteur  prétende  que 
sa  traduction  est  supérieure  par 
l'exactitude,  à  toutes  les  autres  ,  mê- 
me à  celle  qu'il  attribue  faussement 
au  jésuite  GonneUeu  (  Fnj'.  ce  nom  ) 
H  qu'il  cite  comme  l'une  des  meil- 
Irurc;  traductions ,  tandis  qu'il  traite 
celle  de  Sacy  comme  l'une  des  plus 
infidèles  ,  il  est  lui-même  très-infé- 
rieur ,  soit  pour  l'onction ,  soit  même 
}>our  la  lidebté  ,  au\  traducteurs 
dont  il  n'a  évité  la  paraphrase  ou  la 
sécheresse  que  pour  tomiier  dans  la 
dureté  et  renfiure,  X.  Traité  de  ladé- 
volion  au  St-E  prit ,  tiré  des  Livres 
saints  ,  par  un  solitaire  de  Se  t- 
jFort/5,nouvelleédition,  Paris,  1788, 
in- 1 2.  XI.  Traité  des  récompenses  ei 


LEP 


ii5 


des  peines  éternelles,  ib.  1738,  iii" 
12.  Cet  ouvrage,  distribué  avec  mé- 
thode, se  distingue  encore  par  l'é- 
nergie du  style  ,  qui  est  enrichi  des 
plus  belles  expressions  des  prophè- 
tes. XII.  Traité  de  la  mort  et  de 
sa  préparation,  ib.  1 7^0 ,  in-i  2.  Cet 
ouvrage,  solide  et  instructif,  n'est 

Sas  dépourvu  d'onction.  On  doit 
istingucr  parmi  les  manuscrits  de 
Lepellclicr,  une  Traduction  du  Nou- 
veau-Testament,  a^ecdes  notes,  et 
un  Commentaire  sur  toutes  les  épi- 
tres  des  Apôtres.  L'abbc  Fleury  es- 
timait Lepellctier  et  ses  ouvrages, 
comme  on  le  voit  par  une  lettre  in- 
sérée pag.  4^4  ^^  5^^  Nouveaux 
Opuscules ,  1 8 1 8 ,  in- 1 2.     W-s. 

LEPELLETIER  de  SAINT- 
FARGEAU  (  Louis-MicntL  )  ,  né  a 
Paris  ,  le  29  mai  1 760  ,  dans  une 
famille  de  robe  des  plus  distinguées , 
fut  successivement  avocat-général  et 
président  à  mortier  au  parlement  de 
Paris.  Lors  de  la  convocation  des 
états  généraux  de  1 789 ,  il  fut  nommé 
député  par  l'ordre  de  la  noblesse  de 
cette  ville.  Ce  magistrat ,  qui  n'était 
pas  sans  mérite ,  ne  parut  néanmoins 
qu'au  second  rang  dans  celte  fameuse 
assemblée.  Jusqu'à  cette  époque  ,  il 
ne  s'était  gucres  fait  connaître  que 
comme  un  jeune  homme  lirré  à  tous 
les  plaisirs  et  à  tous  les  goûts  que  son 
immense  fortune  (il  avait  cinq  cent 
mille  livres  de  rentes  )  lui  donnait 
tous  les  moyens  de  satisfaire.  On  ne 
l'avait  pas  vu  néanmoins  s'associer 
aux  jeunes  parlementaires  qu'un  zèle 
inconsidéré  avait  placés  dans  une  es- 

Sèce  de  révolte  contre  le  trône,  peu 
'années  avant  la  révolution.  Admis 
le  6  mai  1 78(1  dans  la  chambre  delà 
noblesse  ,  il  y  suivit  le  système  de  la 
majorité  ,  qui  se  montrait  attachée  à 
la  monarchie ,  et  vota  constamment 
avec  elle  ,  bien  que  ses  collègues  de 


2i6  LEP 

la  même  députation  ,  qu'il  devait 
bientôt  laisser  fort  loin  derrière 
lui  dans  la  carrière  de  la  révolu- 
tion y  eussent  embrasse  le  parti  con- 
traire. Le  'l'j  juin  1 789  ,  époque  de 
la  réunion  de  la  noblesse  au  tiers- 
état  par  ordre  exprès  du  Roi , 
Lcpclletier  n'obéit  point  à  cette  in- 
jonction; il  resta  dans  la  chambre 
de  la  noblesse  ,  avec  le  seul  comte 
de  Mirepoix.  Les  3  ,  9  et  1 1  juillet, 
il  se  rendit  aux  séances  particulières 
que  son  ordre  tint  encore  après  la 
réunion  ,  et  signa  la  protestation  qui 
fut  faite  contre  tout  ce  qui  s'était 
passé  depuis  l'ouverture  des  états  j 
mais  il  ne  persista  pas  long  -  temps 
dans  cette  énergique  opposition  :  les 
événements  précurseurs  d'une  révolu- 
tion immédiate ,  qui  se  manifestèrent 
à  Paris  le  12  juillet  1789,  et,  si 
l'on  veut ,  les  sollicitations  et  les  me- 
naces d'un  parti  auquel  on  donnait 
le  duc  d'Orléans  pour  chef,  le  firent 
changer  brusquement  de  système  , 
et,  sans  aucune  transition  prépara- 
toire ,  sans  même  qu'il  parût  se 
souvenir  de  sa  protestation  de  la 
veille ,  on  le  vit  tout-à-coup  dans  les 
rangs  des  révolutionnaires  les  plus 
ardents.  Le  t3  ,  on  l'entendit  ap- 
puyer avec  force  le  rappel  du  mi- 
nistre Necker,  dont  le  renvoi  n'avait 
cté  connu  que  dans  la  soirée  du  1 2 , 
et  s'écrier  :  «  Représentons  le  peu- 
»  pie  ,  si  nous  ne  voulons  pas  qu'il 
»  se  représente  lui-même.  )>  Depuis 
cette  époque  ,  ses  opinions  furent 
constamment  populaires  ;  cependant 
il  les  manifesta  toujours  ayec  une 
sorte  de  modération  ,  et  on  ne  le  vit 
jamais  employer  ces  violentes  apos- 
trophes que  ses  partisans  ne  ména- 
geaient pas  à  ceux  qui  leur  étaient 
opposés  ;  Lepelletier  avait ,  au  con- 
traire, les  plus  grands  égards  pour 
tout  le  mo»de  ,  même  pour  les  der- 


LEP 

nières  classes  de  la  socie'té.  Lorsqu'il 
était  question,  dans  l'assemblée,  du 
soulagement  des  pauvres  ,  il  offrit 
l'exemple  d'un  des  hommes  les  plus 
riches  de  France,  ne  se  servant  jamais 
du  mot  pauvres;  il  disait  toujours /ioa* 
frères  indigents.  Le  24  août,  veille  de 
la  fêle  du  Roi,  il  fit  adopter  une  adres- 
se de  compliments  pour  ce  prince  , 
qu'un  peu  plus  tard  il  devait  traiter 
si  cruellement.  Au  mois  de  septembre 
il  proposa  de  renouveler  tous  les  ans 
les  assemblées  nationales.  A  la  même 
époque  ,  il  fit  encore  une  motion  qui 
fut  également  écartée  :  c'était  d'éta- 
blir un  nouveau  pouvoir  qui  serait 
chargé  de  connaître  des  difficultés 
politiques  qui  pourraient  survenir. 
Au  mois  de  janvier  1790  ,  il  devint 
membre  du  comité  de  jurisprudence 
criminelle  ,  ou  il  travailla  beaucoup. 
Les  7  avril  et  28  mai  1791  ,  il  pré- 
senta, au  nom  de  ce  comité,  une 
espèce  de  code  pénal,  où  étaient 
classés,  avec  assez  de  méthode  et  de 
précision,  tous  les  genres  de  délits. 
Adversaire  très-prononcé  de  la  peine 
de  mort,  il  voulait  qu'elle  fût  à  ja- 
mais abohe  ,  et  que  le  coupable  qui 
l'aurait  méritée  ,  fût  condamné  à 
vingt  -  quatre  années  de  cachot. 
N'ayant  pu  faire  supprimer  l'ancien 
supplice  ,  il  obtint  qu'au  moins  la 
décapitation  seule  terminerait  les 
jours  des  criminels  :  il  voulait  aussi 
que  la  peine  des  galères  ,  ainsi  que 
toutes  les  autres  peines  infamantes  , 
fussent  remplacées  par  les  travaux 
publics  j  mais  que  ceux  qui  tente- 
raient de  dissoudre  une  simple  assem- 
blée primaire,  fussent  condamnés  à 
quinze  années  de  fers.  Cette  motion 
adulatrice  de  la  souveraineté  du  peu- 
ple,lui  valut  alors  une  grande  popula- 
rité.Ilest  assez  remarquable  qu'à  celte 
époque  on  vit  la  suppression  de  h 
peine  de  mort  demandée  par  les  plu» 


LEP 

foiij;ncuTr«fvolutionnaircs,parRobc5- 
pirrrc  rt  par  tous  ceux -là  mêmes 
qui  dcvaiont  bientôt  faire  eoulcr  des 
torrents  de  sang.  Le  marquis  de 
I  .amhel,  dans  la  séance  du  soir  du  i  c) 
juin  1790  ,  ayant  provoque  la  sup- 

i)rcssion  de  tous  titres  nobiliaires  , 
-lepellclierdenianda  qu'il  fut  défendu 
de  prendre  d'autre  nom  que  le  nom 
j).»tronym!quc  et  celui  delà  famille; 
vt  il  déposa  sa  motion  ,  qu'il  signa 
Louis- Micliel  Lepelletier.  Celte  mo- 
tion fut  aussitôt  décrétée  ;  et  celui 
qui  l'avait  faite  devint  président  de 
l'assemblée.  Dans  la  discussion  sur 
le  droit  de  faire  la  guerre  et  la  paix , 
il  fut  en  op|iosition  avec  Mirabeau , 
et  soutint  que  ce  droit  devait  être 
réservé  à  la  nation  ;  mais  il  se  montra 
moins  populaire  dans  une  autre  cir- 
t  onstancc  ,  où  il  combattit  encore 
Mirabeau,  qui  ,  le  si8  juillet  1790  , 
vivait  demandé  que  le  prince  de 
Coudé  fût  mis  en  accusation ,  s'il  ne 
desavouait  pas  un  manifeste  hostile 
qui  lui  était  attribué.(^.  Mirabeau.) 
I  .cpelletier  ,  de  concert  avec  Robes- 
pierre ,  défendit  le  prince  de  Condé. 
N  oilà  à  peu  près  tout  ce  qui  mérite 
d'être  remarqué  dans  la  conduite  de 
ce  député  à  l'assemblée  constituante. 
Après  la  session  ,  il  fut  membre  de 
l'administration  du  département  de 
Paris  ,  et  ensuite  président  de  celui 
de  l'Yonne,  oii  il  possédait  de  grands 
biens.  Les  électeurs  de  ce  dernier 
déparlement  le  nommèrent  député  à 
la  Convention  ,  en  septembre  1 79'i  ; 
et,  le  3o  octobre  ,  il  prononça  dans 
cette  assemblée  un  long  discours  sur 
la  liberté  de  la  presse  :  il  voulait 
(ju'clle  fût  indéfinie ,  et  fit  rejeter  un 
projet  de  son  collègue  liailleul  qui 
demandait  qu'on  y  apporta  l  quelques 
restrictions.  Dans  la  première  séance 
où  il  fut  question  du  procès  de 
J>oiùs  XVI,  il  soutint  que  ce  prises 


LU' 


517 


devait  être  juçé  par  la  Conircnlion  ; 
et  il  est  certain  qu'il  contribua  beau- 
coup à  faire  adopter  cell(!  première 
détermination.  Quant  à  la  peine  à  in- 
fliger,on  a  dit  et  même  écrit  que  vou- 
lant être  fidèle  à  un  serment  qu'il 
avait  fait  de  ne  jamais  opiner  pour  la 
peinedemort,  il  avait  d'abord  réso- 
lu de  ne  prononcer  que  la  réclusion; 
mais  que  les  mêmes  terreurs  qui  l'a- 
vaient fait  changer  si  brusquement  de 
système  le  11  juillet  1789,  l'ayant 
encore  poursuivi  dans  ce  moment, 
dictèrent  l'arrêt  de  mort  qu'il  pro- 
nonça. Cette  conjecture  paraît  très- 
probable  lorsqu'on  se  rap})elle  la 
réponse  qu'il  fit  à  un  de  ses  amis 
qui  témoignait  son  étonnemcnt  de 
la  violence  qu'il  avait  montrée  dans 
ce  terrible  procès  :  Que  voulez- 
vous  ,  lui  dit-il  ,  quand  on  a  six 
cent  mille  Hures  de  rentes ,  il 
faut  être  à  Coblentz  ou  au  faite 
\de  la  Montagne.  Il  n'avait  pas  seu- 
lement voté  pour  la  mort  :  il  s'était 
encore  montré  un  des  adversaires  les 
plus  acharnés  de  l'appel  au  peuple  ; 
et  il  avait  fait  imprimer,  contre  cette 
mesure  qui  pouvait  sauver  le  mal- 
heureux Louis  XVI ,  un  pamphlet 
dans  lequel  il  mcnaçaitd'une  insurrec- 
tion populaire  ceux  de  ses  collègues 
qui  voulaient  faire  adopter  l'appel. 
Pétion  ,  qui  sans  doute  était  plus 
ennemide  Louis  XVIque  Lepclletier, 
dénonça  cet  écrit  à  la  Convenlion  , 
comme  un  acte  séditieux  ,  tendant  à 
dissoudre  la  représentation  nationale. 
Dans  sa  réponse, le  député  de  l'Yonne 
soutint  son  pamphlet  et  les  principes 
qui  y  étaient  développés  ,  pérora  de 
nouveau  contre  l'appd  au  j)cuple  , 
et  détermiua  le  vote  de  plusieurs  de 
ses  collègues  qui  hésitaient  encore. 
Le  10  janvier,  veille  de  l'exécution , 
il  alla  dîner  au  Palais-Royal ,  chez 
un    rcslauralcttr  nommé  Février  , 


2l8 


mp 


moins  pour  prendre  un  repas  ,  qui 
eût  cte  beaucoup  meilleur  dans  son 
opulente  maison  ,  que  pour  savoir 
ce  qu'on  pensaii  de  cet  horrible  ju- 
gement. Au  moment  où  il  allait  payer 
sa  dépense  au  comptoir  du  restau- 
rateur ,  un  inconnu  s'approcha  de 
lui,  et  lui  demanda  s'il  ne  se  nom- 
mait pas  M.  Lepelîetier ,  et  s'il  n'a- 
vait pas  vote  la  mort  du  Roi  ?  Il  re- 
pondit affirmativement  à  ces  deux 
questions,  et  à  la  seconde  il  ajouta, 
qu'il  avait  vote  d'après  sa  eonscicnce  : 
u4u  surplus  ,  ajoi-,ia-t-il,  {juest  -ce 
^ue  cela  vous  fart  ?  eî  il  repoussa 
l'interrogateur  avec  violence.  Pour 
réplique,  celui-ci  tire  un  large  coute- 
las de  dessous  ses  vêtements,  et  le  lui 
plonge  tout  entier  dans  le  sein  :  Le- 
pelîetier expira  presque  immédiate- 
ment, et  ne  prononça  point  les  pa- 
roles qu'on  lui  a  prêtées.  Le  meur- 
trier se  nommait  Paris ,  et  avait  été 
garde  du  Roi  On  a  prétendu  que 
toute  la  journée  il  avait  cherché  à 
s'introduire  auprès  du  duc  d'Or- 
léans pour  lui  porter  le  coup  dont 
Lepelîetier  fut  victime.  Ceux  qui  ont 
observé  la  marche  des  événements 
et  les  dispositions  des  hommes  à 
cette  époque ,  (  et  le  rédacteur  de  cet 
article  est  de  ce  nombre,  )  nedouLcnt 
millement  que  l'action  de  Paris  n'ait 
été  très-utile  à  l'exécution  de  l'odieux 
arrêt  et  n'ait  détruit  l'espérance  de 
sauver  le  Roi,  que  ses  amis  conser- 
vaient encore.  En  effet  ,  pendant 
toute  la  journée  du  ^o,  jusqu'à  8  h. 
du  soir ,  les  nombreux  cafés  de  Pa- 
ris et  tous  les  lieux  où  se  forment 
les  grandes  réunions,  furent  rejnpiis 
de  monde ,  et  l'on  s'y  élevait  haute- 
ment contre  l'attentat  décrété  :  il  n'y 
avait  qu'un  mot  à  dire,  yJuv  armes , 
et  toute  la  ville  était  en  mouvement; 
mais  à  la  nouvelle  de  l'assassinat , 
une  armée  de  brigands  qui  parais- 


LEP 

saient  sortis  des  enfers,  furent  dissé- 
minés par  le  gouvernement  sur  toute 
la  surface  de  la  capitale,  et,  par  leurs 
cris  forcenés  et  la  menace  des  armes 
de  toute  espèce  dont  ils  étaient  char- 
gés ,  répandirent  partout  une  terreur 
dont  les  plus  intrépides  ne  purent  se 
défendre.  Chacun  se  retira  au  fond 
de  son  domicile, et  n'osa  plus  en  sor- 
tir. La  nuit  fut  affreuse;  et  le  lende- 
main à  neuf  heures  le  sacrifice  fut  ^ 
consommé  sans  aucune  résistance. 
La  mort  de  Lepeilelier  devint  le  si- 
gnal de  la  persécution  ,  non -seule- 
ment des  royalistes,  mais  encore  des 
républicains  qui  avaient  voulu  l'ap- 
pel au  peuple.  Un  décret  ordonna 
que  ses  restes  mortels  seraient  portés 
en  grande  pompe  au  Panthéon.  La 
cérémonie  fut  réglée  sur  le  rapport 
du  poè:e  Ghénier,  et  eut  lieu,  le  ^4 
janvier  1793,  de  la  manière  sui- 
vante. On  avait  enveloppé  de  feuil- 
lages et  de  couronnes  civiques  la  base 
rjiinée  sur  laquelle  on  voyait  avant 
le  10  août  la  statue  équestre  de  Louis 
XIV,  au  milieu  delà  place  Vendôme  : 
là  fut  exposé,  sur  une  espèce  de  lit 
de  parade,  le  corps  de  Lepelîetier 
DU,  livide;  et  l'on  avait  pris  soin 
surtout  d'exposer  aux  yeux  du  pu- 
blic la  large  blessure  que  lui  avait 
faite  Paris.  Sur  les  quatre  côtés  de  la 
base,  oji  lisait  les  paroles  suivantes, 
que  le  dépuié  Maure  (  P\  ce  nom)  pré- 
tendit qi>e  Lepelîetier  avait  proférées 
après  avoir  été  poignardé  :  «  Je  suis 
»  salisl'ait  de  verser  mon  sang  pour 
»  la  patrie  ;  j'espère  qu'il  servira  à 
»  consolider  la  liberté  et  l'égalité,  et 
))  à  faire  reconnaître  ses  ennemis,  v 
Pour  transporterie  corps,  on  le  plaça 
dans  la  même  situation  sur  un  char 
sépulcral  très-élevé,  afin  qu'il  pût 
être  vu  de  loin  par  le  pubhc  ;  on  le 
conduisit  de  cette  manière  au  Pan- 
théon, en  traversant  les  rues  les 


I 


plus  pa<»sagcrcs  do  Paris,  sur  «ne 
l'icnduc  (le  pros  d'iiiir  lieiic.  I-.e  cor- 
tc'^p  était  pioVode  de  la  riOiivenlion 
on  corps,  rie  la  socie'lë  des  Jacobins, 
des  seotious  de  Paiis  ou  plutôt  de 
leurs  priiicijwux  habilue^i,  et  de* 
antres  autorités.  Cha4]uc  corporation 
était  précédée  de  sa  bannière  :  au 
milieu  de  ccUc  multitude  de  petites 
bannières,  on  en  distinguait  nu«  qui 
était  formée  de  la  culotte,  de  la  veste 
et  de  ia  clteinise  du  mon  encore  tou- 
tes dé^outuittcs  de  son  s.'.ug.  Avant 
cette  apothéose  ,  ie  célèbre  peintre 
David  avait  représente  Lepelleticr 
dans  la  sitnaliou  qu'on  vient  de  dé- 
crire. Ce  tableau  lut  déposé  dans  la 
salle  des  séances  de  la  Goiv.  ciuion  ; 
il  eu  fut  retiré  quelques  mois  après, 
le  9  lhc-i'mid(U'  (i),  ou  14  i^iHet 
1794  ,  ci  le  décret  ;ui  lui  avait  dé- 
cerné les  honneurs  du  P  nthéon  fut 
rapporté  le  S  féviier  1795.  Ou  a 
donné  k  une  des  rues  de  Paris  le  nom 
de  Micliel  Lepelletier  qu'elle  a  con- 
servé pend.tnt  1 3  ans  ;  m  1 806 ,  elle 
a  repris  son  ancien  nom  de  Piric  Mi- 
cheUeCoi^te.  La  fdlc  unique  de  ce 
député ,  âgée  de  8  ans ,  fut  présentée 
le  25,  par  M.  Félix  Lepellctier  son 
oncle,  a  la  C.onveution ,  qui  l'adopta 
au  nom  vu  la  nation.  Barèie  saisit 
cette  occa>ion  pour  faire  pasivr  l'a- 
doption d^nsJcfc  lois  françaises;  et  le 
Code  civil  aclueli'a  couservée.  J^ 
fille  de  Lc.}c]lctier  de  Saint-Fargc  iu 
est  .lujou;  J'I.ui  veufetie  M.  Lej  cllc- 
lier  de  7ȕorfoi  tainc.  h^v. 

LÉPICiÉ  (  Berna j;D  ) ,  graveur  , 
né  à  Paris  eu  il}i)3,  aimouva  dt* 
bonne  heure  d'heureuses  di^positious 
et  eut  pour  premier  m.iîtrc  Marioltc, 
qui   lui    enseigna   les   éléments   du 

fi)  r!<iiieiiri  Lop  "»  .<«•  ce  ;.<bl«aii  rurenl  en- 
vnyeei  4uk  to.  ielL*  p4>|iuti)ii<:t  ^  et  lo  bii«t«  m 
pJilro  Je  I-i  Fcllelter,  joint  a  celui  .le  VlAtat, 
à  qui  Toa  acc«rB4  Ui  mômes  h«iiM««is,  ••  iroura 
r«ft«at. 


LEP  010 

dessin.  A  l'âge  de  quinze  ans ,  il 
entra  dans  l'école  de  (iaspar  I)u- 
change,  où  il  fit  des  progrès  rapides. 
Né  avec  du  génie  et  de  l'activité, 
il  SMt  ré|)8rer  ce  qui  avait  manqué  à 
«oa  cducatioii  primitive,  et  partagea 
sorv  t;'mps  entre  l'élude  des  beaux- 
nrts  et  colle  des  belles-lettres.  Il  se 
livra  à  la  lecture  des  meilleurs  poètes 
anciens  et  modernes  :  bientôt  même 
il  fut  eu  état  de  composer  des  odes 
et  d'autres  poésies  ,  qui  lui  méritè- 
rent les  éloges  des  hommes  de  let- 
tres les  plus  distingués.  Malheureux 
dans  ses  premières  amours  ,  il  s'exi- 
la lûomentju;'.  .cnt,  afin  de  n'être 
pas  témoin  du  triomphe  d'un  rival 
plus  heureux  que  lui  parce  qu'il  é- 
ta;l  plus  riche ,  et  ^passa  en  Angle- 
terre, où  il  fut  occupé  à  la  gravure 
des  cartons  de  Raphaël ,  qui  ornent 
le  palais  d'IIamptoncourl.  L'amour 
de  ia  patrie  l'ayant  rappeléen  France, 
il  fit ,  à  Reuues  ,  l'acquisition  d'une 
chargti,  (pi'iJ  n'exerça  qu'un  an.  Son 
goût  naturel  k;  ramena  bientôt  au 
culte  des  Muses;  il  revint  à  Paris  , 
et  se  fit  agréer  à  l'académie  royale 
de  peinture,  eu  1737.  Trois  ans 
après ,  cette  compagnie  le  nomma 
son  secréuiuc-historiographe.  Les 
soins  {^dc  cette  place  exigeait ,  joints 
à  l^  rédaction  du  Catalogue  raison- 
né  des  tnbleaux  du  Hoi ,  dont  il  fut 
chargé,  le  détournèrent  de  la  gra- 
vure :  aussi  a-t-il  très-peu  produit 
depuis  cette  époque.  Ce])endant  il 
existe  beaucoup  d'estampes  de  ce 
maître  ;  nous  citerons  :  la  Circon^ 
Ciôiun,  d'après  Jules  Romain;  Tu- 
piler  et  lo  ,  et  Jupiter  et  Junon  , 
d'après  le  même ,  pour  la  collectiou 
de  Croiat  ;  rertumne  et  Pumone  , 
d'après  Rembraiit  ;  le  Philosophe 
flamand  ^  d'après  Tcniers;  le  Jeu 
de  piquet,  d'ii\nhs  Netscher;  W^- 
mour précepteur ,  d'après  Coypel; 


320  LEP 

le  Bâcha  faisant  peindre  sa  maî- 
tresse j  d'après  Carie  Vaiiloo  ;  et  le 
roi  Charles  pr.  prenant  congé  de 
ses  enfants  ,  d'après  Raoux.  II  a 
aussi  fait  quelques  portraits  ,  entre 
autres  ceux  de  Madame  de  Main- 
tenon,  d'après  Mignard  j  de  Mo- 
lière, d'après  Coypel,  etc.  Son  faire 
est  large  et  moelleux  ,  son  dessin  , 
correct  sans  se'clieresse.  On  a  de 
lui  :  I.  Le  Catalogue  des  tableaux 
du  Roi,  1752,  '1  vol.  in-4^  II. 
Fies  des  premiers  Peintres  du  Roi^ 
17.52,  2  part,  in-80.  Ce  recueil  ne 
contient  que  cinq  Vies ,  savoir  :  celle 
de  Lebrun  (  par  Desportes  )  ,  de 
Coyjîel ,  Mignard  et  Lemoyne  (  par 
Caylus  ) ,  et  de  Boulogne  (  par  Wa- 
telet.  Lëpicië  mourut  à  Paris  ,  le  17 
janvier  1755  ,  d'une  attaque  d'apo- 
plexie. —  Rene'e-Elisabeth  Marlie  , 
son  e'pouse ,  qui  s'occupait  aussi  des 
arts,  a  grave  plusieurs  sujets,  entre 
autres  la  Mère  laborieuse ,  le  Béné- 
dicité,  d'après  Chardin  ,  et  le  Cui- 
sinier flamand ,  d'après    Teniers. 

P-E. 

LEPICIÉ  (  Nicolas-Bernard  )  , 
fils  du  précèdent ,  fut  peintre  du  Roi 
et  professeur  à  l'académie  de  pein- 
ture :  il  naquit  à  Paris  en  1 785.  Son 
père  le  destinait  à  la  gravure  ;  mais 
la  faiblesse  de  sa  vue  le  força  d'aban- 
donner cet  art ,  et  de  se  livrer  en- 
tièrement à  la  peinture  ,  sous  la  di- 
rection de  Carie  Vanloo.  Il  se  fit 
connaître  de  bonne  heure  par  un 
grand  tableau  de  Guillaume  le  Con- 
quérant ,  qu'il  composa  pour  l'ab- 
baye de  Caen,  et  sur  la  présentation 
duquel  l'académie  de  peinture  l'ad- 
mit comme  agréé.  En  1 768 ,  il  fut 
reçu  académicien  sur  son  tableau  d'^- 
chille  instruit  dans  la  musique  par 
le  centaure  Chiron.  A  cette  même 
époque  ,  il  exécuta  ,  pour  le  chœur 
de  la  cathédrale  de  Baionne  ,  un  ta- 


LEP 

bl eau  de  la  Visitation,  et,  pour  le 
nouveau  pavillon  de  Trianon ,  Ado- 
nis changé  en  anémone  par  Vé- 
nus. En  1769,  il  fut  nommé  adjoint 
à  professeur  ;  et ,  en  1770,  il  exposa 
au  salon  plusieurs  tableaux,  parmi 
lesquels  on  remarquait  :  Narcisse 
changé  en  fleur;  le  Martyre  de  St." 
André  ;  celui  de  Saint-Denis  ;  et 
Sainte-Elisabeth  et  Saint  Jean.  En 
1773  ,  il  peignit,  pour  l'Ecole  mili- 
taire ,  Saint-Louis  rendant  la  jus- 
tice ,  sous  un  chêne  ,  à  Vincennes. 
Quelque  temps  après  il  exécuta  deux 
grands  tableaux  pour  le  Roi ,  l'un 
représentant  le  Courage  de  Porcia, 
fille  de  Caton  ,  femme  de  Brutus , 
et  l'autre ,  Régulus  se  séparant  de 
sa  famille  pour  retourner  à  Car- 
thage.  On  voit  encore  de  lui ,  dans 
une  des  chapelles  de  la  cathédrale  de 
Challon-sur-Saone,  une  Descente 
de  croix.  Lépicié  peignait  aussi  lo 
portrait  et  les  scènes  familières.  Par- 
mi les  tableaux  de  ce  dernier  genre, 
on  citait ,  dans  le  temps ,  laDouaTie, 
la  Halle  ,  le  Repos  d'un  vieillard  , 
le  Braconnier ,  etc.  Sur  la  fin  de  sa 
vie,  se  trouvant  à  la  campagne, 
il  entreprit  de  peindre  des  animaux. 
S'étant  livré  avec  ardeur  à  cette  nou- 
velle étude  ,  il  fit,  sans  relâche,  d'a- 
près nature ,  une  grande  quantité  de 
dessins.  L'assiduité  avec  laquelle  il 
se  livrait  au  travail,  jointe  à  une  sen- 
sibibté  excessive,  abrégea  ses  jours. 
Il  mourut  le  1 7  septembre  1 784.  L'é' 
poque  à  laquelle  Lépicié  naquit ,  les 
maîtres  dontil  suivit  les  leçons,  indi- 
quent assez  ses  qualités  et  ses  défauts . 
Un  dessin  sans  étude  et  sans  nature, 
un  coloris  faux  et  de  convention  ,  si- 
gnalent en  général  l'école  française  de 
cette  époque  j  et  l'on  doit  avouer 
que  Lépicié  ne  s'en  est  point  éloi-« 
gué.  Levasseur  a  gravé ,  d'après  lui, 
un  Quos  ego ,  et  le  tableau  d«  NOir^ 


LEP 

'  tsse  ;  Lctcllicr,  la  Nourrice  cl  T/T- 
,litcatwn  ;  Bcrvic,  le  Repos  et  la 
/ >emandt!  acceptée ,  etc.         P-s. 

I.KPIDUS  (  M.  Mmiuvs  )  ,  le 
liiiimvir,  était  d'une  famille  consu- 
I  lire:  il  occupait,  l'an  de  Rome  705, 
ji|  ans  avant  J.  C. ,  la  place  de  pré- 
k'ur;  et  César, partant  pour  l'Espa- 
gne ,  lui  laissa  le  commandement  de 
la  ville.  Lepidus, reconnaissant,  pro- 
litade  l'eUroi  (pi'avait  inspire'  la  de- 
faite  de  Varus,  pour  faire  créer  César 
dictateur.  C'était  une  atteinte  portée 
aux  droits  des  consuls  alors  absents; 
mais  on  ne  voit  pas  que  personne 
ait  ose  reclamer  contre  cette  usurpa- 
tion. César  ,  maître  du  pouvoir,  le 
retint  sous  différents  prétextes  ,  et , 
ayant  réuni  à  la  dictature  le  consu- 
lat (  707-47  ),  choisit  pour  col- 
lègue Lepidus  ,  et  le  nomma  maître 
de  la  cavalerie.  Après  l'assassinat  de 
César ,  Lepidus  s'enfuit  de  Rome  ; 
mais  rassuré  bientôt  par  l'inaction 
des  conjurés,  il  alla  prendre  une  lé- 
p;ion  stationnée  dans  l'île  du  Tibre  et 
.s'avança  dans  le  champ  de  Mars. 
Lepidus  et  Antoine  ,  couvrant  leurs 
\  lies  ambitieuses  du  prétexte  de  ven- 
ger César ,  n'aspiraient  qu'à  s'empa- 
rer du  pouvoir;  mais  l'incertitude 
du  succès  les  obligea  de  dissimuler. 
Ils  feignirent  même  de  se  réconci- 
lier atcc  les  conjurés  ;  Lepidus  em- 
mena chez  lui  Brutus ,  son  gendre  , 
et  le  pria  à  souper  avec  quelques 
amis.  Le  sénat,  connaissant  son  hu- 
meur légère,  et  cherchant  à  l'attacher 
irrévocablement  au  parti  républi- 
cain ,  lui  décerna  ,  sous  quelques 
prétextes  assez  frivoles  ,  une  statue 
dorée  ,  en  l'autorisant  à  la  faire 
placer  lui-même  dans  le  lieu  qu'il 
jugerait  le  plus  convenable.  Cet  hon- 
neur inattendu  l'obligea  de  feindre 
de  l'éloigneraent  pour  les  projets 
d'Aaloiae  ,  dput  l'ambiiion  s'était 


LEP 

trahie;  mais  il  continua  d'entretenir 
avec  lui  des  intelligences  secrètes  ,  et 
il  lui  fournit  même  j)lusieur5  légions 
pour  faire  la  guerre  au  sénat,  dans  1« 
même  temps  qu'il  en|;agcait  le  sénat 
à  écouler  ses  propositions  de  paix. 
Antoine, forcé  d'abandonner  l'Italie , 
pouvait  facilement  être  arrêté  dans 
les  défilés  des  Alpes;  mais  Lepidus, 
alors  propréteur  dans  la  Gaule  Nar- 
bonnaise,  loin  de  s'opposer  à  sa  re- 
traite, lui  livra  tous  les  passages,  et 
le  vit  tranquillement  établir  un  camp 
près  du  sien.  Cependant ,  comme  il 
croyait  devoir  conserver  encore  quel- 
ques ménagements  avec  le  sénat ,  il 
refusa  d'aller  trouver  Antoine  dans 
son  camp;  et  lorsque  les  deux  armées 
se  furent  réunies ,  il  écrivit  qu'il  avait 
tout  fait  pour  l'empêcher.  Mais  le 
sénat  ne  pouvait  être  trompé  par  cet 
artifice  grossier;  il  déclara  Lepi- 
dus ennemi  de  la  patrie,  et  fit  abattre 
sa  statue.  Octave  ,  parveuu  au  con- 
sulat, fit  rapporter  les  décrets  rendus 
contre  Antoine  et  Lepidus  ,  dont  il 
avait  besoin  pour  détruire  les  restes 
du  parti  républicain.  Il  eut  avec  eux 
une  entrevue  dans  une  île  du  Reno, 
où  furent  décidés  le  partage  des  pro- 
vinces et  la  proscription  de  tous  les 
Romains  dont  les  talents  ou  les  ri- 
chesses pouvaient  leur  inspirer  quel- 
que ombrage.  (  /^oj^.  Antoine  et  Au- 
guste. )  Lepidus  obtint  pour  sa  part 
l'Espagne  et  la  Gaule  Narbonnaise  ^ 
et  il  abandonna  Paulus,  son  frère,  à 
la  vengeance  d'Octave  (  i  ).  Ce  fut  au 
milieu  du  massacre  des  plus  illustres 
citoyens,  que  les  triumvirs  firent  leur 
entrée  dans  Rome.  Lepidus,  chargé 
de  maintenir  l'Italie ,  tandis  que  ses 
deux  collègues  marchaient  contre 
Brutus  etCassius,  eut  l'insolence  de 
se  faire  décerner  les   honneurs  du 


(1)  r&ulu*  eut  la  iionheur  (l'éafaapper  aux  r** 
clierchea  dea  mcuttriar*. 


aa2  LEP 

triomphe  pour  quelques  succès  qu'il 
avait  obîenus  dans  les  Gaules,  et 
d'ordonner  des  rëjouissances  publi- 
ques, dans  un  moment  où  il  n'y  avait 
personne  qui  n'eût  à  pleurer  la  mort 
de  ses  proches.  Après  ]a  victoire  de 
Philippes,  les  triumvirs  firent  un 
nouveau  partage  :  Octave  et  Antoine 
s'accordèrent  pour  dépouiller  Le'pi- 
dus  ,  reste'  sans  partisans ,  el  lui  lais- 
sèrent, par  grâce,  l'Afrique ,  où  il  se 
retira  ,  devenant  étranger  aux  trou- 
bles qui  agitaient  le  monde.  Mais  , 
quelque  temps  ap^ès,  Octave  l'ayant 
sommé  de  lui  fournir  des  troupes 
pour  combattre  Sextus  Pompée  , 
(  Foj.  Sext.  Pompée  ) ,  ii  se  rendit 
en  Sicile  avec  une  armée  nombreuse, 
et  contribua  à  la  défaite  de  Sextus  eu 
l'obligeant  à  diviser  ses  forces.  Lc- 
pidus  prétendit  ensuite  rester  maître 
de  la  Sicile  .  parce  qu'il  y  était  en- 
tré le  premier  ;  mais  abandonné  de 
ses  soldats  qui  le  méprisaient ,  il  se 
vit  contraint  de  paraître  devant 
Octave,  dépouillé  de  ses  orncmcjits, 
et  dans  la  posture  d'un  suppliant. 
Octave  lui  laissa  la  vie  et  la  digiiité 
de  grand  -  pontife  ,  et  le  relégua  à 
Circeies,  petite  ville  d'Italie.  (718- 
36,  )  Quelques  années  awès  (  ']'2^- 
3o  ),  M.  jÊm.  Lépidus  ,  soif  tils  , 
ayant  conspiré  contre  Auguste  ,  fut 
découvert  el  mis  à  mort  ;  et  le  vieux 
triumvir  fut  obligé  d'implorer  la 
pitié  du  consul  dont  il  avait  jadis 
inscrit  le  nom  sur  les  Mbles  de  pros- 
cription ,  en  faveur  de  Junie  ,  sa 
femme, soupçonnée  d'avoir  pris  part 
à  cette  conspiration.  Labéon,  ayant 
fait  entrer  Lépidus  au  sénat  , 
(  786-18  )  malgré  Auguste ,  ce  prince 
le  força  de  revenir  à  Rome  el  de  se 
trouver  dans  les  assemblées ,  où  il  ne 
cessa  de  l'accabler  de  mépris.  Il 
mourut  l'an  741  ,  i3  ans  avant  J.  G. 
^(  C'était,  dit  Montesquieu,  le  plus 


LEP 

méchant  citoyen  qui  fût  dans  la  repu- 
blique ,  et  l'on  est  bien  aise  de  voir 
son  humiliation.  Il  manquait  de  fer- 
meté et  de  talent  ;  et  il  dut  unique- 
ment aux  circonstances  la  place  im- 
portante où  la  fortune  ne  semble 
l'avoir  élevé  un  instant  que  pour 
rendre  sa  chute  plus  éclatante.  »  Pa- 
tercule  dit  qu'il  n'avait  mérité  ,  par 
aucune  ver  lu  ,  la  longue  indulgence 
de  la  fortune  à  son  égard.        W-s. 

LÉPINE.  f^oj.  EriNE  et  Espine. 

LEPLAT  ou  LEPLAET(  Josse), 
docteur  en  droit,  naquit  à  Malines  , 
en  1733.  En  1768,  il  obtint  une 
chaire  de  droit  à  l'université  de  Lou- 
vain,  etilp'ssa,  en  1776,  à  une 
chaire  de  droit  canon.  Deux  thèses 
qu'il  fit  soutenir  en  1770,  com- 
mencèrent à  le  faire  connaître.  Il  s*y 
déclarait  pour  l'indissolubilité  du 
mariaoe  de  l'infidèle  converti.  Gette 
question  avait  dcja  ete  agitée  en 
France,  en  1 7:55;  et  un  arrêt  du  par- 
lement de  Paris ,  du  2  janvier  1 708, 
l'avait  décidée,  contre  le  sentiment 
deBenoitXIV  etd'ungrand  nombre 
de  théologiens.  Le  père  Maugis.  pro- 
fesseur de  théologie  àl'uriversité  de 
Louvain,  ayant  réfuté  les  assertions 
de  Leplat ,  celui-ci  répendit ,  en  1771], 
par  une  Dissertation  historico-ca- 
nonigiie ,  oii  il  attribuait  l'origine  du 
sentiment  commun,  aux  idées  ré- 
pandues par  les  décretales.  Leplat 
fit  imprimer,  la  même  année,  une 
autre  dissertation  dans  le  même 
sens,  extraite  des  écrits  de  Gervasio. 
Ce  docteur  publia  successivement 
une  édition  du  Commentaire  de  Van- 
Espen  su:'  le  nouveau  droit  canoni- 
que, avec  une  longue  préface,  Lou- 
vain ,  1777  ,  '1  voi.  in-8'^;  une  édi- 
tion latine  àes  Canons  et  décrets  du 
concile  de  Trente,  in-4^.  1779;  une 
édition  des  Institutions  de  jurispru- 
dence  ecclésiastique  ^  de  Riegger, 


l'jSo  ,  5  vol.  iii-8^;  une  édition  la- 
tine tics  Discours   de  FIcury    sur 
l'hiitoire  ecclésiastique ,  même  an- 
née, a  vol.  in-i'i;  une  Dissertation 
contre  rautorilc  des  ivglos  de  Vln- 
dfx,  pour  défendre  ce  qu'il  avait 
dit  à  ce  sujet  dans  sa  prdfaee  des  ca- 
nons du  conciJe  de  Trente,  ()•».  pages 
in-4<*.;  une  Dissertation  sur  les  fian- 
çailles et  les  empêchements  du  ma- 
nage,  Louvain,  i']S'i;  une  Coiiec- 
lion  de  pièces  relatives  à  l'histoire 
du  concile  de  Trente,  en  latin,  7  vol. 
in-4''.  en  1784.  I^e  docteur  V.m-de- 
Velde  ,  professeur  de  the'oloijie  à 
Louvain,  attaqua  la  doctrine  de  Le- 
plat  sur  les  empêchements  du  ma- 
riage; mais  celui-ci  e'tait  protège,  et 
Joseph  II   suspendit   Y.in-dc-VcIde 
de  toute  fonction  académique.  Le- 
[     plat  ne  se  contenta  même  pas  de 
(      cette  vengeance,  et  donna  une  dë- 
,     fense  de  sa  dissertation  contre  un 
j      adversaire  qui  ne  pouvait  lui  répon- 
dre. Un  tel  homme  ne  devait  pas 
être  oublie'  daus  les  projets  de  re'- 
forme  que  suivait  alors  le  gouver- 
nement   autrichien.    Il   servit    les 
vues  du  prince  lors  de  la  formation 
du  séminaire  cénéral  :  celte  complai- 
sance le  reuait  odieux   à  tous  les 
Belges.  Les  cvequcs  s'étaient  décla- 
rés  contre  la  nouvelle   école  ;  les 
étudiants  insultèrent  pins  d'une  fois 
les  professeurs.  En  1787,  Leplat fut 
forcé  de  quitter  Louvajn ,  et  de  se 
retirer  à  Maestrichl.  Ayant  voulu 
reprendre  ses  leçons  en  1788,  une 
nouvelle  émeute  se  forma  contre  lui , 
tt  il  ne  montait  plus  en  chaire  qu'es- 
corte de   soldats.  Ou  sait  que   les 
Pays-Bas  étaient  alors  en  proie  à 
des  troubles  causés   pir  de    nou- 
veaux édits  (  rofez  JosEPu  II  ). 
Leplat,  qui  y  avait  pris   part,  se 
relira  en  Albmagne, après  le  retour 
des  Autrichiens.  Le  cardinal  de  Fran- 


LEP  aa3 

kembcrg,  arclievcqncdcMalines,!'a 
vail  <lési;];né  comme  un  propagateur 
de  doctrines  nouvelles,  et  avait  de- 
mandé sa  destitution;  le  docteur  es- 
saya de  se  justifier  par  une  lettre 
adressée  au  <arvlinal,  en  date  du  3i 
janvier  1788,  et  ({.l'il  b't  imprimer. 
Depuis  il  pujjlia  contre  le  prélat  des 
Observations  sur  la  déclaration  et 
le  supplément  au  catéchisme  de  Ma- 
lines.  Le  17  juillet  1788,  il  pro- 
nonça à  l'université  de  Ma'ience,  et 
depuis  à  celle  de  Bonn,  un  discours 
latin  sur  la  primauté  du  pipe  ,  dont 
on  peut  croire  qu'il  n'exagéra  pas 
les  droits.  Mais  d  passa  tontes  les 
bornes  dans  les  Lettres  d'un  théolO' 
g;ien  canonlste  à  Pie  FI  sur  la  hui- 
le Au  ctorem  FiDKi,  i79:"ï,  in-125 
elles  sont  écrites  avec  beaucoup  d'a- 
mertume. Leplat  était  alors  en  Hol- 
lande,  aujncs  de  l'abbé  Mouton  ,  le 
chef  du  parti  janséniste;  et  il  le  se- 
condait dans  la  rédaction  des  Nou- 
celles  ecclésiastiques ,  qui  s'impri- 
maient à  Utrecht.  En  1806,  il  fut 
nommé  directeur  de  l'école  de  droit 
de  Coblentz,  011  il  mourut  le  G  août 
1810.  P-c-T. 

LEPRINGE  (Jean),  peintre,  né  à 
Metz  en  1733,  fut  placé  des  son  en- 
fance chez  un  habile  maître  de  cette 
ville,  dont  M.  de  Belli.sle  était  alors 
gouverneur.  Ce  maréchal ,  aucpiel  il 
fut  présenté,  clKtrmé  de  son  esprit 
et  de  ses  dispositions  ,  lui  procura 
les  moyens  d'aller  à  Paris,  et  de 
se  livrer  tout  entier  à  son  art,  en 
lui  assurant  une  pension  pour  tout 
le  temps  qu'il  étudierait  dans  la  ca- 
pitale. Le  jeune  homme  entra  chez 
Boucher;  mais  il  eut  le  bon  esprit 
d'adopter  un  genre  dincrent  de  celui 
de  ce  maître;  et  il  s'appliqua  d'une 
manière  spéciale  au  paysage,  dans 
lequel  il  se  fît  bientôt  distinguer.  Il  se 
mil  eu  même  temps  à  graver  à  la  poin- 


214 


LEP 


te  les  dessins  qu'il  avait  compose's. 
Sa  réputation  commençant  à  s'éten- 
dre ,  il  crut  devoir  cesser  de  recourir 
aux  bienfaits  de  son  protecteur.  Ce- 
pendant ,  le  désir  de  se  distinguer 
rempêchant  de  songer  à  son  intérêt, 
il  se  vit  bientôt  réduit  au  plus  ex- 
trême besoin.  Il  e'pousa  alors  une 
femme  plus  âgée  que  lui ,  et  qui  pos- 
sédait quelque  fortune  :  il  espérait 
pouvoir  se  livrer,  sans  obstacle ,  à 
son  goût  favori  j  mais  les  ressources 
des  deux  époux  étaient  trop  faibles 
pour  suiïire  à  l'imprévoyance  de 
l'artiste.  La  paix  du  ménage  fut 
troublée,  et  Leprince  partit  pour 
la  Russie  ,  où  ses  frères  étaient 
établis.  Le  vaisseau  sur  lequel  il 
s'embarqua  ,  ayant  été  pris  par  un 
corsaire  anglais,  les  matelots  allaient 
s'emparer  de  ses  effets  ,  lorsque 
prenant  son  violon,  dont  il  joi«iit 
fort  bien ,  il  leur  fit  entendre  quel- 
ques airs  qui  les  mirent  en  bonne 
humeur  ;  ce  qui  sauva  le  peintre 
du  pillage.  Ils  le  prièrent  de  les 
faire  danser  ,  et  continuèrent  d'a- 
voir pour  lui  beaucoup^  d'égards 
pendant  toute  la  navigation.  Au  pre- 
mier port,  le  vaisseau  fut  déclaré 
n'être  pas  de  bonne  prise,  et  Leprince 
put  continuer  sa  route.  Arrivé  à  Pé- 
tersbourg  ,  il  fut  accueilli  par  le 
marquis  de  l'Hôpital ,  ambassadeur 
de  France,  auquel  il  avait  été  re- 
commandé par  le  maréchal  de  Bel- 
lisle.  Il  peignit ,  dans  le  palais  im- 
périal ,  quelques  plafonds  à  la 
manière  de  son  maître,  puis  une 
Vue  de  Pétersbourg ,  qui  a  été  fort 
bien  gravée  par  Lebas  ;  il  se  mit  en- 
suite à  dessiner  d'après  nature  une 
grande  quantité  de  costumes,  de 
maisons,  de  voitures,  detrameaux, 
en  usage  chez  les  divers  peuples  de 
la  Russie;  ce  qui  lui  fit  uns  assez 
grande  réputation.  Mais  le  climat 


LEP 

de  ce  pays  lui  étant  contraire,  il 
fut  obligé,  après  cinq  ans  d'absence, 
de  revenir  dans  sa  patrie,  où  il  fut 
agréé  à  l'académie  en  1 764 ,  et  reçu , 
l'année  suivante ,  académicien ,  sur 
son  tableau  représentant  un  Baptême 
dans  le  Ht  gjec.  Doué  d'une  extrême 
facilité ,  Leprince  se  fît  remarquer 
à  toutes  les  expositions  du  Louvre 
par  une  foule  de  tableaux  ,  dans  les- 
quels on  apercevait  chaque  année  des 
progrès  sous  le  rapport  de  la  touche, 
de  la  transparence ,  et  de  la  solidité 
du  coloris.  Mais  on  peut  reprocher 
à  la  plupart  d'être  peints  de  pra- 
tique ,  ou  sur  de  simples  souve- 
nirs, qui  ne  conservent  ni  la  teinte 
locale ,  ni  la  vérité  du  site.  S'étant 
appliqué  dans  sa  jeunesse  à  la  gra- 
vure à  la  pointe,  il  chercha  un  moyen 
de  reproduire  ses  dessins  sur  le  cui- 
vre, de  la  même  manière  que  sur  le 
papier,  c'est-à-dire,  avec  le  pinceau. 
Les  essais  qu'il  présenta  ,  en  1769,  à 
l'académie,  furent  unanimement  ap- 
prouvés. En  17 72,  il  fut  nommé 
conseiller  de  l'académie.  Mais  depuis 
son  retour  de  Russie  sa  santé  s'altérait 
de  plus  en  plus  :  convaincu  qu'il  ne  lui 
restait  que  peu  d*  jours  à  vivre,  il 
se  faisait  apporter  son  chevalet  sur 
son  lit,  et  travaillait  à  terminer  le  der- 
nier tableau  qu'il  a  exposé  au  salon 
de  1781  ,  et  qui  représente  des  Frè- 
res quêteurs  distribuant  des  agnus 
à  la  porte  d'un  cabaret.  Leprince 
mourut  à  Saint-Denis-du-Port ,  près 
Lagny,  le  3 o  sept.  1781.     P — s. 

LE  PRINCE  DE  BEAUMONT 
(Marie  ),  sœur  du  précédent,  naquit 
à  Rouen  ,  le  26  avril  1 7 1 1 .  Son  ma- 
riage, contracté  à  Lunéville ,  avec  un 
M.  de  Beaumont ,  fut,  peu  de  temps 
après,  déclaré  nul,  en  174^?  poui* 
plusieurs  vices  de  forme ,  qui  n'é- 
taient pas  les  seuls  motifs  qu'elle  eût 
pour  faire  rompre  une  union  funeste; 


LEP 

mais  ce  furent  les  seuls  que  sa  drli- 
catcsse  lui  permit  de  présenter  à  ses 
juges.  «  Son  mari  (dit-elle,  dans 
»  une  des  lettres  inédites,  dont  la 
»  eollection  est  entre  K-s  mains  de 
»  l'auteur  de  cet  article  )  ne  nuu- 
)>  vait  produire  que  des  victimes 
'^  destinées  au\  plus  alVreuses  inlir- 
»  mites.  »  Elle  ajoute  :  «  Dieu  pour- 
»  rait-il  me  faire  un  crime  de  mon 
»  divorce?  Pourrait-il  exiger  que  je 
»  remplisse  un  engagement  plus  af- 
1^  frcu\  que  la  mort?  »  M'"**,  de 
Heaumont  débuta,  en  1748,  dans  la 
carrière  littéraire  par  un  roman  in- 
titule :  Le  Triomphe  de  la  rérité , 
ou  Mémoires  de  M.  de  La  \  illelte. 
Ce  roman  fut  imprimé  à  Nancy , 
où  l'auteur  se  trouvait  encore;  et 
elle  eut  l'honneur  de  le  présenter 
elle-même  au  roi  de  Pologne,  à  Com- 
merci  ,  ainsi  que  quelques  autres 
ouvrages  qui  n'avaient  pas  encore 
vu  le  jour.  Il  paraît  que  ce  monar- 
que lui  donna  plus  d'ëloges  que 
d'encouragements  solides  ;  car  ce 
fut  à  cette  époque  qu'elle  passa  en 
Angleterre.  M'"*',  de  Beaumont  se 
ti\a  à  Londres ,  et  s'y  chargea  de 
plusieurs  éducations  qui  firent  sa  ré- 
putation ,  et  pour  lesquelles  elle  com- 
posa plusieurs  de  ses  ouvrages.  Ceux, 
(jui  ont  eu  le  plus  de  succès  ,  sont  le 
Magasin  des  Enfants ,  et  ses  au- 
tres Magasins.  La  réputation  de 
quelques  ouvrages  périodiques  an- 
glais lui  fournit  l'idée  du  titre  et 
du  fonds  de  son  Nouveau  Magasin 
français ,  ou  Bibliothèque  instruc- 
tive ,  qui ,  commencé  en  1 7 5o ,  sus- 
pendu en  175-2,  fut  repris  en  1 755 
t^  n'alla  pas  au-delà.  Ce  sont  les 
meilleurs  articles  de  cette  collection, 
qu'F^iàous  rassembla  depuis  en  6 
volumes,  sous  le  titre  à' OEuvres 
mêlées  de  M»'^.  le  Prince  de  Beau- 
mont,  On  vit  paraître  successive- 

XS.1V. 


.EP 


225 


ment,  soit  anonymes,  soit  sous  son 
nom  ,  pendant  les  quinze  années 
qu'elle  vécut  à  Londres,  des  livres 
d'histoire  ,  de  géographie,  un  roman 
sur  l'éducation  des  princes  ,  des  let- 
tres, et  plusieurs  de  ses  Magasins.  Le 
plus  coniui  de  tous ,  et  assurément 
le  meil  leur,  le  Ma^Ubin  des  EnJ'ants^ 
fut  publié  en  1757,  et  fut  bientôt 
traduit  dans  la  plupart  des  langues  de 
l'Europe.  Très-souvent  réiiuprimé, 
il  n'a  pas  cessé  d'avoir  la  faveur  du 
public.  En  elFet ,  ce  livre  ofîrc  une 
instruction  variée  et  convenable  a 
l'âge  pour  lequel  il  a  été  composé;  il 
est  écrit  avec  sim])Iicité  ;  le  dialogue 
en  est  naturel  ;  les  historiettes  et 
les  contes  sont  très-propres  à  plai- 
re aux  enfants  ,  et  ont  même  four- 
ni divers  sujets  de  comédie.  Plu- 
sieurs de  ces  contes,  ainsi  que 
quelques  autres  qu'on  lit  avec  plai- 
sir dans  les  ouvrages  de  l'auteur  ^ 
ne  sont,  à  la  vérité,  que  des  tra- 
ductions ou  des  extraits  ,  tels  que  la 
Belle  et  la  Bête ,  le  prince  Titi ,  Fi- 
délia,  etc.  :  mais  elle  se  les  est  appro- 
priés par  la  manière  dont  elle  les  a 
traités.  Un  style  simple  et  facile ,  une 
morale  attachante  et  douce ,  des 
traits  historiques  bien  choisis ,  une 
imagination  heureuse ,  font  de  ses 
écrits  ,  le  charme  de  la  jeunesse  ,  et 
ne  sont  ])oint  indignes  des  regards  de 
l'hommede  goût.  Le  succès  bien  mé- 
rité du  Magasin  des  Enfants  qwcow- 
ragea  M'"*=.  de  Beaumont  à  faire  de 
nouveaux  pas  dans  la  même  carrière. 
Peu  de  temps  après  avoir  donné  au 
public  \eMagasin  des  Adolescentes, 
1 7G0,  qui  fournit  à  Alletz  l'idée  d'un 
Magasin  des  Adolescents,  et  dont  le 
succès  ne  fut  guère  moindre  que  celui 
du  Magasin  des  Enfants ,  l'auteur  se 
décida  à  quitter  l'Angleterre,  dont  le 
climat  était  peu  favorable  à  sa  santé  : 
elle  avait  cinquante  ans.  Sa  jdumc 
i5 


S126 


LEP 


avait  déjà  produit  une  quarantaine  de 
volumes  •  elle  avait  honorablement 
consacre  à  l'éducation  théorique  et 
})ratiq!ie  de  l'enfance  et  de  la  jeu- 
nesse ,  les  dix-sept  années  qu'elle  a- 
vait  passe'es  à  Londres.  Mariée  ,  en 
secondes  noces  ,  à  un  de  ses  compa- 
triotes (  Thomas  Piciion  ) ,  et  deve- 
nue mère  de  six  enfants ,  elle  sen- 
tit le  besoin  de  la  retraite  ])Our  se  dé- 
vouera leur  éducation,  et  à  la  compo- 
sition  de  quelques  livres  dont  elle 
avait  conçu  l'idée.  Sourde  à  la  voixde 
plusieurs  grands  seigneurs ,  et  même 
de  quelques  princes  (pii  cherchèrent 
à  la  fixer  auprès  d'eux ,  elle  eut  le  bon 
esprit  et  le  courage  de  résister  à  la 
séduction  de  promesses  brillantes  , 
que  peut-être  on  n'eût  qu'en  partie 
réalisées.  Elle  acheta ,  en   i  768  ,  du 
fruit  très-modique  de  ses  longues  éco- 
nomies ,  une  petite  terre ,  dans  les 
environs  d'Anneci ,  en  Savoie ,  où 
elle  s'était  retirée  dès  1764.  Ce  fut 
dans   cette   retraite   (  Chavanod    ) 
qu'elle    rédigea    ses    derniers    ou- 
vrages.   Le    soin    de    sa   famille , 
et  les  travaux  agricoles ,  ne  l'em- 
pêchaient pas  de  trouver  du  temps 
pour  cultiver  les  lettres  et  travail- 
ler à  des  ouvrages  d'imagination , 
à  des  traités  d'éducation  ,  de  morale 
et  d'histoire,  a  des  traités  de  gram- 
maire et  même  de  théologie.  Cette 
femme  si  judicieuse  ne   s'occupait 
pas  moins  des  pauvres   et  des  arti- 
sans que  des  riches  et  des  princes  , 
des  jeunes  garçons  que  des  femmes , 
des  gens  de  campagne  que  des  habi- 
tants des  cités  :  elle  composa  ,  pour 
les  ])remiers ,  un  Magasin  qui  est  re- 
gardé avec  raison  ,  comme  l'un  des 
plus  estimables  de  ses  ouvrages.  Sa 
mort,  qui  eut  lieu   à  Chavanod, 
en   1780  ,    a  privé  le    public   de 
quelques  Eléments  d'histoire  ,  et  de 
plusieurs    Traités    de    grammaire 


LEP 

qu'elle  avait  commencés.  Sa'  longue 
et  laborieuse  carrière  fut  traversée 
par  quelques  chagrins  (  comme  l'ap- 
prend   la    correspondance    inédite 
mentionnée  plus  haut.  )  Cette  fem- 
me  sensible,   insti-uite  ,   active  et 
pieuse  ,  vécut  soixante-dix  années  , 
et  fit  imprimer  soixante-dix  volu- 
mes. Nul  homme  de  lettres  n'a  fait, 
de  ses  talents  ,  un  ph?s  sage  et  plus 
utile  emploi.    Tout  en    observant, 
avec  raison  ,  que  le  style  de  M™^.  de 
Beaumontest  négligé,  décoloré,  fai- 
ble  et  dépourvu  de  noblesse  ,  nos 
meilleurs  critiques  ont  fait  l'éloge  des 
sujets  qu'elle  a  choisis,  du  naturel 
de  son  style,  de  sa  clarté  et  de  sa 
convenance.  Ses  romans  pèchent  du 
côté  de  l'imagination  ;  on  peut  y  re- 
prendre l'embarras  dans  le  dévelop- 
])ement  de  l'intrigue,  et  le  peu  de  nou- 
veauté des  incidents;  mais  ils  sont  sa- 
gement conduits,  et  ils  sont  tous  très- 
moraux.  On  ne  peut  que  louer  tant  de 
veilles  laborieuses  consacrées  à  l'édu- 
cation, à  l'instruction  de  la  jeunesse, 
de  l'âge  mûr,  et  de  toutes  les  classes 
de  la  société.  Aussi  plusieurs  de  ces 
pi'oductions  si  estimables  sont-elles 
fréquemment    réimprimées ,    mises 
entre  les  mains  des  enfants  ,  placées 
dans  toutes  les  bibliothèques  des  pè- 
res de  famille.  Quelques-unes  ont  été 
retouchées  pour  être  amenées ,  sous 
le  rapport  de  l'histoire  et  de  la  géo- 
graphie, au  niveau  des  connaissances 
actuelles.  Presque  toutes  ont  été  tra- 
duites en  anglais  ,  en  allemand ,  en 
russe ,  en  suédois ,  en  italien  et  en 
espagnol,  souvent   même  par  plu- 
sieurs auteurs  dans  un  même  pays. 
Voici  la  liste  la  plus  complète  et  1a 
plus  exacte  qui  ait  paru  de  se.'  di- 
vers ouvrages.  Nous  nous  bo^neronis 
toutefois  à  citer  les  écbnons   origi- 
nales et  quelques  réimpressions  :  L 
Le  Triomphe  de  la  Vérité,  ou  Mé- 


I 


LEP 

moi'-es  de  M.  th  La  rUlette ,  Nanri, 
I -48,  a  vol.  iii-i'i.  ir.  Lettres  di- 
verses  et  critiques  ,  17^0,  x  vol.  in- 
lu.  m.  Lp  yoweauMaffasinfran' 
ca'S  y  ou  Bibliothèque  instructive, 
Lonilres  ,  1750,  1751  et  i7)>,  3 
vol.  in-8'*.  Cet  oiivnfî^e   pcriodi([uc 

1)araissail  tous  les  mois ,  par  cahiers. 
\^  Education  complète  ,  ou  Abré- 
gé de  Vliistoire  ancienne  ,  mêlée  de 
géograpfiie  et  de  chronologie ,  à  l'u- 
saj;c  rie  la  famille  royale  de  la  ]>rin- 
ccsse  de  Galles  ,  Londres  ,   1753,3 
vol.  in-r»;  reimprime  en  1785,  3 
vol.  in-i'j»,eten  i8o3,  4  vol.  in-i'2. 
V.  Ciwan ,  roi  de  Bungo ,  histoire 
japonaise ,  ou  Tableau  de  V éduca- 
tion d'un  prince  (  publie  anonyme) , 
17.54,  ^-  vol.   iivi'2,  et  ijOiidres  , 
1758,  9.  vol  in-i'2.  VT.  Lettres  de 
3/'"*=.  du  Montier  à  la  marquise 
de  ***  ,  sa  fdle  ,  (wec  les  Réponses 
(piiLlieesanonyFnes),  Lyon,  1756,  'i 
v.  in- 1  '2  ;  réimprimées  en  1 750  et  en 
1 766.  VTÎ.  Magasin  ne  ^  Enfants ,  ou 
DialiQucs  entre  une  sage  gouver- 
nante et  ses  éU;ves,  Londres,  1757, 
4  V.  in-r«  ;  fréquemment  reimprime', 
quelquefois  avec  des  cartes   et  des 
gravures.  Cet  ouvrage  est  le  plus 
connu  et  le  plus  rerherche'  de  ceux 
que  l'on  doit  \  la  plume  active    et 
féconde  do  M^ne.  de  Beaumont  ;  il  a 
ete  traduit  dans  toutes  les  lanf;ues  de 
l'Europe.  Vin.    Inecd^des  du  qua- 
to'zifme  siècle  ,  pour  servir  à  l  his- 
toire des  Femmes  illustres  de  ce 
fer/i?>5  ,  Londres ,  1759,  i  vol.  in- 
\'x   IX.  Lettres  curieuses  y  instruc- 
tives et  amusantes ,  ou  Correspon- 
dance Jûstnrique  ,  galante  ,   etc.  , 
entre  une  dame  dp  Paris  et  une  dame 
dp  province  (publiées  anonymes),  la 
Hiyp,  1759,  4 parties  in  8°.  X.  Ma- 
gasin des  Adolescentes ,  ou  Dialo- 
gu'<:  entre  une  sage  gouvernante  et 
SCS  élèves ,  Londres ,  1 760 ,  4  vol. 


LEP 


«7 


in-i9.  Ce  Magasin  n'a  pas  eu  moins 
de  succès  que  le  Magasin  des  En- 
fants: les  éditions  et  les  traductions 
n'en  sont  guère  moins  nombreuses. 
X î .  Principes  de  V llist oirc-Saintey 
Londres,  17O1  ,  3  vol.  in-i'2.  XU. 
Instructions  pour  les  jeunes  Dames 
qui  ent  eut  dans  le  monde  et  qui  se 
marient ,  pour  faire  suite  au  Maga- 
sin   des    Adolescentes  ,  Londres  , 
(  Lyon) ,  1764,  4  vol.  in-iu  :  sou- 
vent réimprimé,  et  traduit  en  plu- 
sieurs langues,  mais  fort  inférieur  aux 
Magasins  des  Enfants  et  des  Adoles- 
centes. XIIL  Lettres d' Emérance à 
Lucie,  Lyon,  1763,  1  vol.  in-12; 
Leyde,  1 766,  id.  XIV.  Mémoires  de 
la  baronne  de  Battevilley  ou  la  Veu- 
ve parfaite  y  Lyon  ,  17G6,  i  vol.  in- 
i  u.  X  V .  La  nouvelle  Claisse,  Lyon, 
1767  ,  i  vol.  in-i'i.  XVI.  Magasin 
des    Pauvres,   des   Art -sans,  des 
Domestiques  et  des  Gens  de  la  cam- 
pagne ,  Lyon  ,  1 768,  2  vol.  in-12  ; 
Leyde,    1769;    Lyon,    1775,  id. 
XV  II.    Les  Américaines ,    ou   la. 
preuve  de  la  Religion   chrétienne 
par  les  lumières  naturelles  ,  Lyon  , 
1770,6  vol.  in-12.  Quelques  lon- 
gueurs y  sont  rachetées  par  la  force 
des  raisonnements,  et  par  des  traits 
lumineux   et    frappants    de    vérilé 
qui  caractérisent  tous  \f^s  ouvrages 
de   l'auteur.    L'ouvrage ,   pour    la 
partie  théologique  ,  fut  revu  par  un 
des  grands-vicaires  du  diocèse  de  Ge- 
nève. XVIII.  Le  Mentor  moderne , 
ou  Instruction  pour  les  garçons  et 
pour  ceux  qui  les  élvent ,  Paris, 
1772  ,  12  parties  en  1 1  vol.  XIX. 
Mamieldela  Jeunesse,  ou  Instruc- 
tions familières .  en  dialogues.XX. 
Contes  moraux,  Lyon ,  1 774,  2  vol. 
in-12.  Ce  sont  quatre  petits  rj.mans 
fort  me'diocres ,  ainsi  que  ceux  qui 
se  trouvent  dans  l'ouvrage  suivant. 
XXI.  Nouveaux  Contes  moraux, 
i5.. 


sia8 


LEP 


Lyon  ,  1776/i  parties  iu-S^.  XXII. 
La  Déi'otion  éclairée  ,  ou  Magasin 
des  Dévotes,  Paris,  1779,  i  vol. 
in- 12.  Telle  est  la  collection  com- 
plète des  ouvrages  publies  par 
M"^^.  de  Beaumont.  Eidous  rassem- 
bla, du  vivant  de  l'auteur,  le  mé- 
lange suivant  :  OEuvres  mêlées  de 
M^*^.  Le  Prince  de  Beaumont, 
extraites  des  journaux  et  des  feuille  s 
périodiques  qui  ont  paîu  en  Angle- 
terre pendant  le  séjour  quelle  y  a 
fait ,  Maestricht ,  1 7  7  5 ,  G  vol.  in- 1 2  ; 
traduit  en  allemand ,  Leipzig,  1776, 
:a  vol.  in-8*^.  C'est ,  à  peu  de  chose 
près ,  la  réimpression  du  Nouveau 
Magasin,  n».  m ,  ci-dessus.    D-b-s» 

LEQUEUX  (Claude),  prieur  de 
Saint-Yves,  à  Paris,  fut  un  éditeur 
exact  et  laborieux.  On  connaît  aussi 
quelques  ouvrages  de  sa  composition, 
comme  :  Les  Dignes  fruits  de  Péni. 
tence ,  1 74*^  ,  in- 1 2  ;  Tableau  d'un 
'vrai  Chrétien^  174^  ,  in- 12  j  Le 
Chrétien  fidèle  à  savocation ,  1748 
in-iu;  Le  F erhe  incarné^  ^7^9,  in- 
12.  Il  se  rendit  éditeur  des  livres 
suivants  :  Instructions  chrétiennes  de 
Singlin,  1 786, 6  vol.  in-i  2;  —  Abré- 
gé de  V  Année  chrétienne  de  Le  Tour- 
iieux ,  1 746 ,  6  vol.  in-12  ;  —  Let- 
tres de  la  duchesse  de  la  Fallière , 
avec  un  Abrégé  de  sa  vie  péni- 
tente ;  —  Traités  choisis  de  St.- 
Augustin  sur  la  grâce ,  le  libre  ar- 
bitre et  la  prédestination ,  traduits 
du  latin  de  Foggini ,  1757  ,  1  vol. 
ïn-vi'y  Sancti  Aurelii  Augustini  de 
gratid  Dei ,  1758,  2  vol.  in- 12 
(c'est  l'édition  latine  des  Traitéschoi- 
sis  qui  précèdent  )  ;  —  Sancti  Pros- 
peri  Aquitani ,  Sancti  Leonis  magni 
de  gratid  Dei ,  imprimés  également 
sur  l'édition  faite  à  Rome  par  le  pré- 
lat Foggini ,  1760 ,  in-i2  ;  OEuvres 
de  saint  Prosper  sur  lagrdce,  1761, 
in- 1  a  [c'est  la  traduct.  du  volume pré- 


LEQ 

cèdent  )  ;  —  Patrumecclesiœ  depau- 
citate  adultorum  salvandorum  (on- 
sensio  ,  sur  l'édition  du  même  Fog- 
gini à  Rome  ,  1 759,  in- 12  ;  —  Traité 
sur  le  petit  nombre  des  Elus ,  tra- 
duction du  Consensio^  ï  7^0 ,  in- 1 2  ; 
— Sancti  Yyonis  Presbjteri  officium 
proprium,    1761  ,  in- 12.    Lequeux 
s'occupa  aussi  de  l'édition  de  plu- 
sieurs  ouvrages  de   Bossuet  ;  il  fit 
paraître  V Exposition  de  la  Doctrine 
de  V Eglise  catholique  ,    avec  une 
])réface  historique  ,  1761  ,  in-T2  ,  et 
les  Oraisons  funèbres ,  1 762 ,  in-i  2 , 
avec  un  Eloge  historique  de  Bossuet 
et  un  catalogue   bien    fait  de  ses 
ouvrages.  Il  avait  préparé  une  édi- 
tion de  V Histoire  des  Variations  ; 
mais  elle  ne  parut  qu'après  sa  mort, 
par  les  soins  de  Leroi.  Lequeux  fut 
chargé .   conjointement  avec    dom 
Déforis  ,  d'une  édition  générale  des 
OEuvres  de  Tévêque  de  Meaux;  il  en 
donna  le  Prospectus  en  1766,  et  il 
eût  été  à  désirer  qu'il  eût  pu  conti- 
nuer cette  entreprise.  Quels  que  fus- 
sent ses  préjugés  ,  il  était  laborieux 
et  avait  de  l'instruction  et  de  la  cri- 
tique; mais  il  ne  fit  que  préparer 
l'impression  de  quelques  volumes. 
On  a  trouvé  de  lui  des  notes  manus- 
crites sur  différents  ouvrages  de  Bos- 
suet. Il  avait  rassemblé  des  brouillons 
écrits  de  la  main  de  ce  grand  évêque , 
et  d'après  lesquels  la  Défense  de  la 
déclaration  se  trouvait  corrigée  et 
refondue    presque   en   entier  ;   ces 
brouillons  n'existent  plus,  soit  qu'on 
les  ait  fait  disparaître  à  dessein,  soit 
qu'ils  aient  été  perdus  par  l'effet  de 
la  révolution.  C'est  d'après  une  copie 
de  Lequeux  que  l'on  a  conservé  1«? 
précis  d'un   ouvrage  manuscrit  de 
Bossuet ,  De  l'autorité  des  Juge- 
ments ecclésiastiques  ,  dont  l'ori- 
ginal est  aussi  égaré.  Cet  éditeur  est 
accusé  d'avoir  anéanti  ce  manuscrit , 


LEQ 

'•t  l'on  prétend  qu'il  se  vAiita  devant 
rabhcRih.dlicr  de  l'avoir  jctca.  feu. 
(ielU'  anccdole  n'est  pas  absoliiinciit 
incroyable  pour  quiconcpic  sait  quels 
étaient  les  scntimenls  et  les  liaisons 
de  Lequeux.  Il  poussa  le  zèle  jusqu'à 
prendre  part  aux  folies  des  convul- 
sions. 11  paraît  du  moins  que  c'est  de 
lui  qu'il  est  parle  dans  les  Nouvel- 
les ecclésiastiques  du  6  décembre 
1737.  Il  fut  trouve'  chez  une  con- 
\ndsionnairc,  et  conduit  à  la  Bastille, 
ou  il  passa  fort  peu  de  temps.  En 
1 76 3  il  publia  un  Mémoire  abrégé 
sur  la  vie  et  les  ouvrages  de  Mesen- 
f^uy  y  in-ia  ,  et  un  Mémoire  justifi- 
catif de  V Exposition  de  la  Doctrine 
chrétienne^  ouvraj;e  posthume  du 
même,  in-19..  Il  mourut  le  3  avril 
1 768;  et  l'cdilion  de  Bossuet  fut  con- 
fie à  dom  Dëforis  seul ,  qui  la  gâta  par 
son  défaut  absolu  d'ordre,  de  critique 
et  de  mesure  ;  par  ses  notes  fastidieu- 
ses; par  ses  digressions  inutiles,  cl  par 
ses  sorties  contre  tous  ceux  qui  ne  pen- 
saient pas  comme  lui  :  il  est  certain 
que  ce  l>cncdictin  eut  défense  de  con- 
tinuer. Ou  peut  voir  ce  qui  qsX  dit  de 
l'un  et  de  l'autre  dans  la  préface  de 
Ja  nouvelle  édition  des  OEnvres  de 
Bossuet  /imprimée  hi  Versailles;  l'é- 
diteur y  parle  avec  éloge  des  soins 
et  de  la  capacité  de  Lequeux ,  tout 
en  déplorant  les  préjuj;cs  et  le  man- 
que de  goût  et  de  modération  de  son 
successeur.  P-c-t. 

LEQUIEN  (Michel),  savant 
dominicain,  naquit  à  Boulogne-sur- 
Mer  en  1661  :  à  l'âge  de  vingt  ans 
il  entra  dans  l'ordre  de  Saint-Domi- 
nique. Le  père  Marsolier  lui  ensei- 
gna les  premiers  éléments  de  la  lan- 
gue hébraïque,  qu'il  sut  parfaite- 
ment dans  la  suite,  et  à  laquelle  il 
joignit  des  connaissances  profondes 
dans  l'arabe,  le  grec,  et  les  saintes 
lettres.  Il  se  lia  avec  dom  de  Mont- 


LEQ  2.iy 

faucon ,  l'abbé  de  liongucruc  et  les 
savants  les  plus  distingués  de  son 
temps.  Ses  vertus  égalaient  ses  ta- 
IcMits  et  la  douceur  de  son  commerce. 
11  mourut  le  \'x  mars 1 733,  dans  la 
maison  de  la  rue  St.-Iiouoré  qu'il  ha- 
bitait depuis  long-temps.  On  a  de  lui> 
I.  Défense  du  texte  hébreu  et  de  la 
version  vulgate^  sentant  de  réponse 
au  livre  (  de  D.  Pezron  ) ,  intitulé  : 
V Antùpùté  des  temps  rétablie^  etc. 
Paris,  I G90,  un  vol.  in- 1 1.  II.  \j  An- 
tiquité des  temps  détruite  (  contre 
la  Défense  de  l'Antiquité  des  temps, 
que  dom  Pezron  fit  paraître  en  1691); 
Paris,  i6()3, 1  vol.  in-i'2.  Ces  deux 
ouvrages  du  père  Lequicn  commen- 
cèrent sa  réputation;  on  trouva  que 
son  antagoniste  était  complètement 
battu.  III.  Pœmarqucs  sur  l'Essai 
du  Commentaire  sur  les  Prophètes 
(de  dom  Pezron),  fî^-asjes  Mémoires 
de  Trévoux  du  mois  de  mars  1711.^ 
IV.  Nullité  des  Ordinations  angli- 
canes ou  Réfutation  du  lii^re  (  du  P. 
Courayer)  intitulé  :D[sserla\ion  sur 
la  validité  des  ordinations  des  An- 
glais, Paris,  1725,  2  vol.  in- 12.  V. 
La  Nullité  des  ordinations  angli- 
canes, démontrée  de  nouveau  y  tant 
par  les  faits  que  par  le  droit , 
contre  la  Défense  du  R.  P.  le  Cou- 
rayer, Paris,  1730,  2  vol.  in-12. 
Sans  tomber  d'accord  sur  l'infidélité 
dans  les  citations  ni  sur  l'ignorance 
ou  la  ])révcnlion  que  le  P.  Courayer 
reprochait  au  P.  Lequien ,  on  peus.» 
généralement  que  ce  dernier  sortait 
trop  souvent  des  bornes  de  la  mo- 
dération envers  son  adversaire  ,  et 
s'oj)iniàtrait  à  vouloir  lui  faire  con- 
fesser comme  article  de  foi  ce  qui 
ne  l'était  })oint.  On  attri])ue  à  Pierre 
Badoire  une  grande  part  aux  deux 
juemiers  volumes  du  P.  Lequien. 
VI.  Lettre  sur  les  Ordinations  an- 
glicancs^  dans  le  Mercure  du  mois 


a3o  LEQ 

d'avril  i-ySi.VII.  Dissertation  sur 
&aint  Nicolas  j  évèijiie  de  Mjre  ; 
dans  les  Mémoire.^  de  Utléiature  et 
d'histoire  du  P.  DesraoîeJs,  lomp 
vu  ,  preraicre  partie.  VlII.  Visser- 
iation  surlepo^t  Icius,  qu'il  prétend 
être  le  j)orl  de  Boulogne;  ib.,  tome 
VII,  part.  9.*^.  IX.  Histoire  abrégée 
de  la  ville  de  Ùoulogne-sur-Mer  et 
de  ses  comtes ,  ibid.  tome  x,  partie 
i*'. ,  et  a  la  tête  de  la  Coutume  de 
Boulogne,  dans  le  Coutumier  géné- 
ral. X.  Dissertation  sur  Annius  de 
Viteibe  ;  dans  les  Voyages  d'Es- 
pagne et  d'Italie,  par  le  P.  Labat , 
et  dans  le  Berose  et  VAnnius  de  Vi- 
terbe  (  page  2,46  )  de  M.  de  Fortia 
d'Urban,  formant  le  tome  vu  de  ses 
Mémoires  pour  servir  à  V histoire 
du  globe,  1808,  in- 12.  XI.  Obser- 
vations sur  le  livre  intitulé  ,  Fetra 
Fideij  d'Etienne  Javorski,  patriar- 
xîhc  moscovite,  sur  une  Réponse  cpii 
fut  faite  à  ce  livre  par  F  ancois 
Buddœus ,  et  sur  une  Réplique  à  ce 
dernier,  par  le  P.  Ribéra,  insérées 
dans  le  Mercure  de  mars  i  -jSS.  XII. 
Stephani  de  Altamura  Ponticensis 
contra  schisma  Grœcorum  Pano- 
plia  qud  Romana  et  occidentaUs  ec- 
clesia  défendit ur  adversus  crinnna- 
tionesNec  tarii  nuperi  patria^  chœhie 
rosoljmitani  quas  congessit  in  libro 

DEPRINCIPATU  PAP.F.,  Paiis,  I718, 

in-4*'.;  ouvrage  solide  et  estimé.  Les 
dangereuses  subtilités  du  patriarche 
3Vec  taire  y  sont  victorieusement  ré- 
futées.XIII.  SanctiJoannis  Damas- 
çeni  Opéra  omnia  gr.  lat.  ,  Paris , 
1 7 1  -2 ,  9.  vol.  in-fol.  Cette  édition  est 
enrichie  de  plusieurs  dissertations, 
remplies  d'érudition  ecclésiastique. 
Le  P.  Lequien  avait  préparé  un  troi- 
sième volume,  qui  devait  contenir 
les  ouvrages  faussement  attribués  à 
Saint- Jean  Damascène,  et  qui  n'a 
point  été  mis  au  jour.  XI Y.  Oriens 


LEQ 

Christianus ,  in  quatuor  patriar- 
cluh'{s  digestus  ;  quo  exhibentur 
ecclesiœ  ,  patriarchœ  ,  cœte'ique 
prœsules  totius  Orient is ,  Paris,  à 
l'imprimerie  royale,  174^7  3  vol. 
in-fol.  Cet  ouvrage  était  en  grande 
partie  imprimé,  quand  le  P.  Lequien 
mourut.  Ses  confrères  en  continuè- 
rent l'impression,  et  y  firent  des  amé- 
liorations qui  sont  indiquées  dans  la 
préface.  C'est  une  imitation  du  (xa//m 
christ/ ana,  bien  exécutée  et  pleine 
de  choses  curieuses,  avec  les  cartes 
des  4  pat!  iarcals  dressées  par  d'An- 
ville.  Le  P.  Lequien  a  concouru  à 
la  Byzantine  (  Voy.  Léon  de  By- 

ZANCE  ).  L-B-E. 

LEQUIEN  DE  LA  NEUVILLE 

(  Jacques)  ,  historien,  naquit  à  Pa- 
ris ,  en  1647  '  ^'"^^^  ancienne  famille 
du  Boulonnais  ,  et  entra  à  l'âge  de 
quinze  ans ,  comme  cadet  dans  les 
Gardes-françaises.  La  faiblesse  de 
sa  santé  ne  lui  permettant  pas  de 
supporter  les  fatigues  d'une  seconde 
campagne,  il  quitta  le  service  pour 
étudier  le  droit;  mais  au  moment 
qu'il  venait  d'acheter  la  charge  d'a- 
vocal-général  de  la  cour  des  mon- 
naies ,  une  banqueroute  qu'essuya 
son  père  le  força  encore  une  fois  de 
renoncer  à  ses  projets.  Il  résolut 
alors  de  chercher  dans  la  culture 
des  lettres  la  consolation  d'une  vie 
obscure  et  privée.  Ce  fut  d'après 
l'avis  de  Pelisson  ,  qu'il  entreprit 
l'histoire  du  Portugal,  dont  le  suc- 
cès lui  ouvrit,  eu  1706,  les  portes 
de  l'académie  des  inscriptions.  Quel- 
que temps  après  il  publia  un  Traité 
de  l'origine  des  postes,  qui  lui  valut 
la  direction  de  celles  d'une  parlie 
de  la  Flandre-française.  Il  alla  en 
conséquence  habiter  le  Quesnoy.  En 
1713,  après  la  paix  d'Utrecht ,  il 
accompagna  l'abbé  de  Mornay  , 
nommé  à  l'ambassade  de  Portugal^ 


fl  il  fut  .irnirilli  a  Lisbonne  de  l.i 
niaiiiôrc  I.»  |)liis  llattcusc.  Le  roi  de 
Portujjal ,  voulant  Ir  fixer  dans,  ses 
r'tal.s,  le  nomma  chevalier  de  l'ordre 
de  Christ  ,  et  lui  accorda  une 
|>ension  de  quinze  cents  livres.  Lc- 
quieu  s'elVorva  de  repondre  aux  bon- 
tés de  ce  prince,  en  travaillant  à  con- 
tinuer et  perfectionner  son  histoire 
de  ce  royaume;  et  il  s'en  occupait 
avec  ai-dcur,  lorsqu'il  mourut  à  Lis- 
bonne, le  o.o  mai  i -j'iS.  On  a  de  lui: 
I.  Histoire  de  Portugal ,  Paris  , 
17*20,  1  vol.  în-4'*.  Lequien,  à 
l'exemple  des  historiens  espagnols 
portugais,  remonte  à  Tubal  ,  cin- 
quième fils  de  Japhet,  dont  les  des- 
cendants ,  suivant  la  tradition  ,  se 
sont  établis  dans  le  Portugal  ;  il  de'- 
crit  ensuite  les  diircrentcs  révolu- 
tions de  ce  pays,  jusqu'au  règne  de 
Jean  IL  La  seconde  partie  comprend 
l'histoire  de  ce  royaume  jusqu'en 
i5'2i,  époque  de  la  mort  d'Ema- 
nucl  P"".  Laclède  lui  reproche  d'a- 
voir omis  un  grand  nombre  de  faits 
importants ,  et  d'en  avoir  indique' 
d'autres  trop  superficiellcincnt  :  ce 
furent  les  raisons  qui  déterminèrent 
ce  dernier  à  publier  une  nouvelle 
histoire  de  Portugal.  (/^.  LaclÈde.) 
Lequien  a  ,  sur  lui ,  l'avantage  de  ci- 
ter constamment  ses  autorités;  mais 
on  prétend  qu'il  ne  les  a  pas  tou- 
jours bien  comprises, et  que  sa  chro- 
nologie n'est  pas  sûre  :  l'ouvrage  est 
d'ailleurs  écrit  d'un  style  coulant  et 
agréable.  IL  L' Origine  des  postes, 
citez  les  anciens  et  les  modernes  y 
Paris,  1 7 08, in- r2.  Lequien  en  attri- 
bue à  Auguste  le  rétablissement  ou 
l'institution  chez  les  Romains.  Cvt 
ouvrage  curieux  est  terminé  par  le 
Recueil  des  ordonnances  sur  les  pos- 
tes, alors  en  vigueur  ,  avec  le  précis 
des  motifs  qui  les  avaient  dictées.  Il  a 
clé  réimprimé  sous  ce  litre;  L'usage 


LKR  9.',i 

défi  postes  chez  les  ancien*:  et  les 
THoda  nés,  Paris  ,  1 7  3(i ,  in- 1 'x.  Gel  le 
édition  est  augmentée  des  ordonnan- 
ces et  règlements  publiés  depuis  U 
première,  lll.  Histoire  des  Dau- 
phins du  Fiennois  ,  d' Auvergne  et 
de  France,  Paris,  1 759,  -2  vol. in-r2. 
C#t  ouvrage ,  resté  manuscrit ,  fut 
publié  par  le  petit-fils  de  Lequien, 
augmenté  de  la  vie  de  Louis  IX  , 
vingl-<  inqiiième  Dauphin  de  France. 
Le  style  en  est  facile  et  simple, «tel 
que  le  demande  le  sujet:  on  y  trouve 
des  recherches  utiles;  mais  il  y  a 
beaucoup  de  fautes  de  chronologie. 
L'éloge  de  Lequien  de  la  Neuville, 
par  de  Boze ,  est  imprimé  dans  le 
lom.  vu  des  Mémoires  de  V acadé- 
mie des  inscriptions.  Chaufepié  lui 
a  consacré  un  article  dans  son  Dic- 
tionnaire. (  I  )  VV-s. 

LERANBERT  (  Louis  ),  statuai- 
re, naquit  à  Paris,  en  i6i4.  Son 
père  était  garde  des  figures  antiques 
et  des  marbres  du  roi  Louis  XIII, 
qui  consentit  à  être  le  parrain  du  jeune 
Leranbert.  Il  entra  d'abord  dans  l'é- 
cole deVouet,et  se  lia  avec  Lebrun 
et  Lenôtre  ,  d'une  amitié  qui  dura 
toute  leur  vie.  Son  goût  pour  la 
sculpture  le  fit  entrer  chez  Sar- 
razin,  où  sa  facilité,  la  grâce  de 
ses  manières,  la  beauté  de  sa  figure, 
le  firent  bientôt  distinguer.  L'em- 
ploi de  son  père  lui  facilitait  l'entrée 
de  la  cour:  après  la  mort  de  Louis 
Xlll,  il  s'attacha  à  mériter  les  bon- 
nes grâces  du  jeune  roi.  Poète  et 
musicien  ,  il  réunissait  tous  les  agré- 
ments ,  et  il  fut  admis  à  figurer  aans 
toutes  les  fêtes  des  premières  années 
du  règne  de  Louis  XIV.  Il  se  fit 
d'abord  connaître  comme  peintre 
par  les  Portraits  en  médaillon  du 

(1)  Chaurepié  jr  fait   iiti«    lonpne    digretsioa 
•ur  Vapparilion  du  iabarum  k  CuOttantia. 


233 


LER 


carilinal  Mazarin,  du  maréchal  de 
la  Meilleraie ,  de  i^f.  et  M""^.  Ja- 
back ,  etc.  Bientôt  après  il  fut  cliar- 
gë  du  Tombeau  du  marquis  de 
VampieîTe,  qui  fut  cleye'  à  trois 
lieues  de  Gien,  dans  les  terres  de  ce 
seigneur.  L'architecture  de  ce  tom- 
beau est  riche;  et  tout,  jusqu'à  l'épi- 
laphe  envers,  est  de  la  composition 
de  Leranbert.  La  garde  des  antiques 
et  des  marbres  du  roi  lui  avait  ëte' 
donnée  après  la  mort  de  son  père  : 
elle  lui  fut  otëe  en  i663.  Il  se  con- 
sola de  cette  disgrâce  en  redoublant 
d'ardeur  pour  le  travail.  Il  se  pré- 
senta cette  même  anne'e  pour  être 
membre  de  l'acadëraie,  et  fut  reçu, 
sur  un  buste  du  cardinal  Mazarin, 
En  i665,  Leranbert  avait  exécute  , 
pour  les  jardins  de  Versailles ,  quatre 
statues  représentant  le  Dieu  Pan, 
une  Hamadryade  dansant ,  une 
Nymphe  jouant  du  tambour  de 
basque  ,  et  un  Faune  :  on  faisait 
im  cas  particulier  de  VHamadrya- 
de.  On  voit  de  lui, dans  le  parc 
de  Versailles,  deux  Sphjnx  en  mar- 
bre blanc ,  montés  par  d,?s  enfants 
de  bronze ,  qui  les  retiennent  avec 
des  guirlandes  dejleurs.  Le  travail 
de  ces  groupes  est  digne  d'estime  ; 
mais  ils  manquent  de  style ,  et  n'ont 
rien  de  la  simplicité  que  les  anciens 
savaient  donner  à  ces  sortes  d'ou- 
vrages. La  cathédrale  de  Blois,  pos- 
sède deux  bas-reliefs  de  Leranbert , 
en  marbre  blanc;  l'un  représente  la 
Mémoire,  l'autre  la  Méditation;  il 
les  avait  faits  en  lôGo ,  pour  le  tom- 
beau de  Jean  Courtois ,  président  au 
présidial  de  Blois.  Leranbert  mou- 
rut à  Paris,  en  1670.  P-s 

LERCARI  (  Nicolas-Marik  )  , 
cardinal,  était  né  dans  l'état  de  Gè- 
ïies,  en  1675,  d'une  famille  ancienne, 
et  qui  a  produit  plusieurs  hommes 
distingues  par  la  protection  qu'ils 


LER 

ont  accordée  aux  lettres  ,  et  par  les 
hautes  fonctions  dont  ils  ont  été  re- 
vêtus. JNicolas,  ayant  terminé  ses 
études  d'une  manière  brillante,  reçut 
les  ordres  sacrés,  et  vint  à  Rome  , 
où  son  mérite  le  fît  bientôt  remar- 
quer. Pourvu  successivement  des 
gouvernements  de  Todi  ,  de  Béné- 
vent,  de  Camerino  ,  d'Ancone ,  de 
Civita-Vecchia  et  de  Pérouse  ,  il 
montra,  dans  l'exercice  de  ses  fonc- 
tions ,  autant  de  capacité  que  de  dé- 
sintéressement. Pendant  qu'il  était  à 
Bénévent ,  il  avait  su  se  concilier  la 
faveur  du  cardinal  Orsini ,  archevê- 
que de  cette  ville.  Ce  prélat ,  ayant 
été  élu  pape,  en  1724,  sous  le  nom 
de  Benoît  XIII ,  se  hâta  de  rappeler 
à  Rome  Lercari,  qu'il  combla  de 
témoignages  de  son  estime.  Il  lui 
conféra  le  titre  de  maître  de  la 
chambre  (  Maestro  di  caméra  )  ^  et 
l'éleva  à  la  dignité  d'archevêque  de 
Nazianze.  Deux  ans  après  (  1726  ), 
il  le  nomma  son  premier  ministre, 
et  enfin  le  décora  de  la  pourpre  ro- 
maine. Lercari  continua  de  jouir  de 
la  plus  haute  faveur  pendant  la  vie 
de  Benoît  XIII  ;  mais  son  successeur 
l'éloigna  du  ministère  pour  y  appe- 
ler un  de  ses  favoris.  Lercari  parta- 
gea ses  dernières  années  entre  ses  de- 
voirs religieux  et  la  société  des  ar- 
tistes dont  il  s'était  toujours  montré 
le  protecteur.  Il  mourut  à  Rome  ,  le 
23  mars  1757.  W-s. 

LERCARO  ou  Lercari.    Fojez 

ImPERI  ALI ,  XXI ,  2,08. 

LERI.  Voyez  Lery. 

LERIDANT  (Pierre),  avocat  au 
parlement  de  Paris, né  en  Bretagne, 
mort  le  28  novembre  1768  ,  a  pu- 
blié :  I.  Examen  de  deux  questions 
importantes  sur  le  mariage,  17-53, 
in-4^.  II.  Dissertation  théologique 
et  historique  sur  la  conception  de 
la  Vierge,  1756^ in- 12.  lîî.  Con- 


suUation  sur  le  marin f^f  du  Juif 
liorach  /.n'i,  i7'irt,in-4".  IV.  Insti- 
tutiones  phlosophicœ  in  novam  ihe- 
tfioduui  di^estœ,  17^)1,  '^  vol.  in- 1 'X, 
V.  Le  Code  matrimonial ,  176O  , 
in-i'2,  rr'imprimë  en  1770  (  par  les 
5oins  (le  Camus  ) ,  avec  nés  augmen- 
tations. VI.  On  lui  attribue  aussi 
W'intifinancicr,  17O4  ,  in-i?.  ;  ou- 
vrage (|ue  Voltaire  trouvait  violent 
et  portant  à  faux  d'un  bout  à  Vautre. 
D'autres  le  croient  d'un  avocat 
Darigrand  ,  mort  en  1771.  Leri- 
(lanl  soutenait  que  le  droit  d'apposer 
des  empêchements  dirimants  au  ma- 
riage appartient  exclusivement  à  la 
puissance  temporelle  ;  et  dans  la 
question  sur  le  mariage  de  l'infidèle 
converti,  il  se  de'clara  pour  l'indis- 
solubilité absolue,  comme  lit  aussi  le 
parlement  de  Paris  ,  par  son  arrêt 
du  -2  janvier  1758 ,  dans  la  même 
affairedeBorach  Levi.  Leridant avait 
encore  e'te'  ])lus  hardi  dans  sa  Dis- 
sertation théologiffue  sur  la  concep- 
tion de  la  fierté.  P-c-t. 

LERTGET.  ^or.  Lafaye. 

LERIS  (  Antoine  de  ),  compila- 
teur médiocre,  était  né  le  '28  février 
1 7*23,àMontlouis  danslcRoussillon. 
11  fut  envoyé  à  Paris  pour  v  faire 
ses  études,  et  il  s'y  fixa  par  l'acqui- 
sition d'une  charge  de  premier  huis- 
sier de  la  chambre  des  comptes.  Il 
passa  sa  vie  au  milieu  des  gens  de 
lettres  ,  dont  il  se  faisait  aimer  par 
son  caractère  modeste  et  serviable. 
Il  mourut  en  i79'>.  On  a  de  lui  : 
T.  La  Géographie  rendue  aisée, 
Paris,  1753,  in-8^.  II.  Dictionnaire 
portatif,  historique  et  littéraire  des 
théâtres  ,  contenant  l'origine  des 
différents  théâtres  de  Paris ,  etc. , 
Paris,  1754  ,  réimprimé  avec  des 
additions  ,  1765;  in-80.  C'est  une 
compilation  assez  bien  faite  ,  et 
qui  jieut  tenir  lieu  de  la  volumineuse 


I.ER  a33 

Histoire  du  tliéâtre  français,  des 
frères  Parfait.  Cet  ouvrage  est  tou- 
jours recherché,  quoiqu'il  en  ait  paru 
depuis  plusieurs  dans  le  même  genre. 
C'est  Léris  qui  est  l'éditeur  du  Sen- 
timent d'un  harmoniphile  sur  dif- 
férents ouvrages  de  musirpie  {  ])ar 
i'abhéde  Morambert),  Paris,  '756, 
in-i'2  ,  et  des  Après-soupers  de  la 
campagne  (  par  Bruix  ).      W-s. 

LKIRME  (  François  de  Roxas, 
DE  Sandovat,  ,  duc  DE  ),  premier 
ministre  de  Philippe  III ,  roi  d'Es- 
j)agne,  est  un  des  exemples  les  plus 
frappants  de  l'inconstance  de  la 
fortune  et  du  néant  des  grandeurs. 
N'étant  encore  que  marquis  de  Dé- 
nia ,  il  fut  nommé  écuyer  de  l'in- 
fant don  Philippe ,  et  prit  sur  lui 
un  tel  ascendant, que  ce  prince,  en 
arrivant  au  trône  (  1S98  ),  le  créa 
premier  ministre ,  malgré  la  recom- 
mandation expresse  que  son  père  lui 
avait  faite  en  mourant  de  le  tenir 
éloigné  des  affaires.  Son  élévation 
excita  le  mécontentement  des  grands, 
jaloux  de  la  préférence  accordée  à 
un  homme  d'une  naissance  médio- 
cre ;  et,  dès  ce  moment,  il  fut  en- 
touré d'ennemis  prêts  à  profiter  de 
SCS  fautes  pour  le  renverser.  Le  duc 
de  Lerme  voulut  signaler  les  com- 
mencements, de  son  ministère  par 
un  acte  de  vigueur  :  il  équipa  une 
flotte  de  cinquante  voiles,  destinée 
à  croiser  sur  les  côtes  de  l'Angle- 
terre ;  mais  elle  fut  détniile  par  une 
tempête  ,  presqu'en  sortant  du  port, 
et  cet  échec  le  détermina  à  recourir 
k  des  voies  de  concibation.  Il  traita 
de  la  paix  avec  les  Anglais ,  moyen- 
nant quelqjies  sacrifices;  ei, en  1608, 
il  fit  une  trêve  avec  la  Hollande. 
Ces  deux  actes  déplurent  assez  gé- 
néralement ,  et  augmentèrent  les 
plaintes  contre  le  ministre,  accuse 
de  ne  pas  se  montrer  assez  jaloux 


n.U 


LER 


de  la  gloire  de  TEspagne.  La  situa- 
tion des  (inances  devait  l'engager  à 
provoquer  la  siippression d'une  foule 
de  charges  créées  sous  les  règnes 
pre'ccdents  et  devenues  inutiles  : 
mais  la  crainte  d'accroître  par  cette 
mesure  le  nombre  de  ses  ennemis , 
lui  fit  adopter  un  système  oppose  ; 
et  il  multiplia  tellement  les  emplois 
que  toutes  les  ressources  du  tre'sor 
suffisaient  à  peine  pour  les  payer. 
Il  chercha  à  cacher  au  roi  l'embar- 
ras des  finances ,  en  l'occupant  sans 
cesse  par  de  nouvelles  fêtes  ;  cepen- 
dant il  souhaitait  sérieusement  de 
mettre  un  terme  à  cet  embarras  ,  et 
son  projet  e'tait  de  rendre  à  l'Espagne 
son  ancienne  splendeur.  11  voulut 
encourager  l'agriculture  trop  négli- 
gée depuis  la  découverte  des  Indes  j 
mais  ne  pouvant  adoucir  le  sort  des 
cultivateurs  par  la  diminution  des 
impots  ,  il  fît  instituer  un  ordre  de 
chevalerie  ,  pour  récompenser  ceux 
qui  se  distingueraient:  il  exempta 
du  service  militaire  tous  les  ou- 
vriers 'y  fausse  mesure  qui  nuisit 
âu  recrutement  de  l'armée  ,  sans 
rendre  de  l'activité  aux  manufac- 
tures. L'Espagne  ,  tributaire  de 
tous  ses  voisins ,  ne  se  soutenait  que 
par  les  sommes  énormes  qu'elle  ti- 
rait chaque  année  de  ses  colonies  et 
de  la  Siciie.  De  nombreuses  réfor- 
mes étaient  indispensables  j  le  mi- 
nistre les  voyait  sans  oser  les  entre- 
prendre-. Cette  hésitation,  cette  fai- 
blesse ,  est  le  plus  grand  reproche 
que  l'histoire  puisse  faire  au  duc  de 
Lerme  :  il  avait  toutes  les  qualités 
d'un  partieuHcr;  il  était  doux  et 
affable,  très-généreux,  et  ne  fit  usage 
de  son  autorité  que  pour  rendre  ser- 
vice sans  distinction  à  tous  ceux  qui 
s'adressaient  à  lui.  Il  acheva  par  sa 
douceur  la  pacification  de  l'Arra- 
gon,  et    fit   disparaître  jusqu'aux. 


LER 

traces  des  troubles  qui  avaient  agite 
ce  royaume.  Sa  faveur  semblait 
croître  chaque  jour  j  et  songeant  a 
la  faire  partager  à  son  fils,  le  duc 
d'Uzeda  ,  il  le  présenta  au  roi ,  en  le 
recommandant  à  ses  bontés  avec 
toute  la  tendresse  d'un  père.  Quel- 
que temps  aj)rès  ,  le  vieux  ministre 
perdit  sa  femme  (  Félicité  Henri- 
quez  de  Cabrera);  et  ayant  embrassé 
l'état  ecclésiastique ,  il  se  persuada 
que  s'il  pouvait  obtenir  la  pourpre  , 
il  imposerait  pour  jamais  silence  à 
ses  ennemis  :  mais  il  se  trompa ,  et 
le  titre  qu'il  avait  ambitionné  pour 
se  maintenir  au  ministère ,  précipita 
sa  chute.  Il  s'établit  entre  le  roi  et  le 
cardinal  une  étiquette  que  le  prince 
trouva  gênante  ;  ses  ennemis  ,  à  la 
tête  desquels  on  est  indigné  de  trou- 
ver son  propre  fds,  le  duc  d'Uzeda, 
profitèrent  de  cette  circonstance, 
pour  achever  de  le  perdre  dans  l'es- 
prit de  Philippe  :  on  rappela  toutes 
les  fautes  de  son  ministère  ;  on  osa 
même  Taccuser  d'avoir  fait  empoi- 
sonner la  reine  Marguerite  ,  par  son 
favori  D.  Rodrigue  Galderon.  Le  roi 
consentit  enfin  au  renvoi  de  son  mi- 
nistre :  celui-ci  quitta  l'Escurial,  le 
2  octobre  1618,  jour  anniversaire  de 
la  mort  de  la  re.ne  ,  et  se  retira  dans 
une  de  ses  terres.  Le  duc  d'Uzeda  , 
qui  lui  succéda  au  ministère  ,  vou- 
lait faire  instruire  son  procès  ;  et  il 
fallut  que  le  roi  interposât  son  auto- 
rité pour  empêcher  ce  scandale  : 
mais ,  après  la  mort  de  ce  prince , 
Philippe  IV  laissa  agir  les  ennemis 
du  duc  de  Lerme  :  Galderon  ,  son 
favori ,  eut  la  tête  tranchée  (  Voy. 
Galderon  ,  VI,  5o  )  ;  et  les  biens  de 
l'ancien  ministre  furent  saisis  pour 
l'obliger  à  restituer  une  somme  de 
quatorze  cent  mille  écus ,  qui  lui 
avait  été  donnée  par  le  feu  roi  sur 
le  produit  des  bleds  et  des  marchan- 


LER 

fliscs  delà  Sicile.  Flétri  pard'odieii- 

Ms  arrusati()ns,dr])oniIlif  de  sa  for- 
Mur,  le  iliic  de  Lerine  inoiiru!  de 
(  liagrin,  en  Uvif).  D.  Juan  Vilri.ui 
flil ,  dans  son  Commentaire  sur  les 
^le'moires  de  Philippe  de  Comines, 
ijue,»  pour  un  favori,  le  duc  de 
•»  Lcrine  est  un  des  meilleurs  et  des 
V  plus  modères  qu*il  y  ait  jamais 
^  eus.  ))  Puis  il  ajoute  :  «  Il  uvait 

un  esprit  mcdiorre  ;  mais  sa  con- 
^  duite  a  montre  combien  est  vrai 
»  le  dire  de  Thucydide  ,  que  les 
»  génies  médiocres  sont  les  plus 
»  propres  au  gouvernement  ;  son 
»  ministère  est  et  sera  cite  partout, 
■j»  pour  avoir  cte  sans  guerre,  sans 
»  tribut  et  sans  impôt  odieux  :  c'ë- 
»  tait  la  suite  de  sou  esprit  doux  et 
))  pacifique  ,  et  de  l'humeur  du  roi 
»  qui  ne  cherchait  qu'à  re'gner  en 
»  paix.  »  W--S. 

LERNOUT  (  Jean  ) ,  en  latin 
Janus  Lemutius  ,  poète  lalin  ,  vit 
le  jour  à  Bruges  en  i545.  Ne  avec 
de  la  fortune  ,  il  fit  d'excellentes 
(ludcs  littéraires  à  Gand,à  Anvers, 

I  Louvain  ;  il  employa  ensuite  plu- 
Mcurs  années  à  voyager  avec  Justc- 
Lipse  et  Victor  Gisclin.  Il  visila 
le^  principales  académies  de  France, 
(rilalie  et  d'Allcmagne,et  se  lia  par- 
tout avec  les  savants  les  plus  distin- 
gues. Il  semble  s'être  occupe'  à  Paris 
de  recueillir  une  espèce  d'anthologie 
française.  (  F<rf-.  P.  Burmann ,  Sjll. 
Epist.  tom.  I  ,  page  8.  )  En  Italie  , 
il  se  livra  à  l'archéologie  ,  et  enfin  , 
après  plus  de  vingt  ans  d'absence, 
r( vint  dans  ses  fovers.  Divenu  père 
(l'une  famille  nombreuse,  il  conserva 
.vrsauciens  goûts,  et  se  montra  cons- 
tamment étranger  à  toute  ambition. 

II  ne  put  éviter  cependant  d'être 
cchevin  de  sa  ville  natale  ;  et  l'em- 
pereur Rodolphe  II  le  gratifia  ,  en 
i58i  ,  de  lettres  de  noblesse  pour 


LER  a35 

lui  et  ses  descendants.  Dans  les  trou- 
bles des  Pays-Bas,  il  fut  fait  prison- 
nier de  guerre  par  les  Anglais  (i  587); 
et  il  ne  parvint  qu'ail  bout  de  cinq 
ans  d'un  traitement  assez  dur,  à  re- 
couvrer sa  liberté  ,  au  moyen  d'iuie 
rançon  exorbitante.  Il  mourut  à  Bru- 
ges, le  ig  septembre  1619.  On  a  de 
lui  :  I.  Carmina ,  Anvers  ,  i  .'>7t)  , 
in-12,  et  Lignitz  ,  i(3o3.  Ce  recueil 
est  composé  iV  Ocelli ,  Elegiœ  (  au 
(  nomljre  de  4  )  >  Oda  ad  bonam 
valetudinem  et  Epi^rammata.  Ler- 
nutius  n'eut  point  de  ])art  à  l'édition 
de  Lignitz  :  ceux  qui  l'ont  publiée  le 
croyaient  mort;  mais  il  donna  encore 
en  1614  7  à  Leyde  ,  chez  Elzevier  , 
in-i^i,une  3"'«.  édilionfort  augmen- 
tée, surtout  de  poésies  sacrées  et  d'au- 
tres sur  les  événements  politiques  et 
militaires  du  temps ,  de  quelques  tra- 
ductions de  morceaux  du  7™*^.  livre  de 
l'Anthologie  grecque,  sous  le  titre  de 
Basia  Grœcorum, cl  d'une  trentaine 
de  Basia  de  sa  propre  composition. 
Toutes  les  productions  poétiques  de 
Lcrnout  paraissent  avoir  été  réunies 
par  Grutcr  dans  les  Deliciœ  po'éla- 
rum  Belgicoruîii ,  tom.  m ,  p.  1 1 4- 
29.5.  Lernutius  mérite  certaine- 
meni  une  place  distinguée  parmi  les 

f)oètes  latins  modernes  ,  principa- 
ement  dans  le  genre  erotique;  mais 
il  est  fort  inégal.  Il  paraît  s'être  sur- 
tout proposé  pour  modèle  Catulle  , 
qu'il  imite  jusque  dans  ses  défauts. 
IL  Comment arius  de nalurd et cultu 
Caroli  Flandriœ  comitis ,  necnon 
de  cœde  ipsiiis ,  et  vindictd  in  per- 
cussores  mox  secutd,  Bruges ,  1 62 1 , 
in-8".  Paquot  estime  qu'on  a  eu  tort 
de  publier  cette  production  de  sa 
jeunesse.  Elle  est  en  l'honneur  de 
S.  Charles  le  Bon  (  f^of.  Charles  , 
t.  VIII ,  p.  i4'^  )  »  et  n'annonce  ni 
critique  ni  goût.  On  peut  reprocher 
ce  trait  de  piété  filiale  mal  entendue 


0.36  LER 

à  l'un  de  ses  fils ,  nomme'  Jac- 
ques ,  qui  a  aussi  publie  à  Bruges , 
en  1616,  m-\i:  Preces  metricœ ^ 
à  Salomone  Macrino ,  Petro  Au- 
rato,  Petro  Bucherio  et  Fictore  Gi- 
selino  exercitiis  christianœ  pietatis 
(«rpfrtfcp.  Pierre  Burraann,  dans  sa  ^Sy/- 
loge  Epistolarum ,  tom.  i  ,  pag.  8- 
27  ,  a  recueilli  une  suite  de  Lettres 
entre  Juste-Lipse  et  Lernutius. 

M-ON. 

LEROI  (  Charles  -  François  ) , 
ancien  Oratorien ,  naquit  à  Orléans 
en  1 6g8 ,  et  fit  ses  e'tudes  à  Saumur 
et  à  Juilly.  Il  entra  à  l'institution  de 
l'Oratoire,  à  Paris  ,  en  17 16,  c'est- 
à-dire,  dans  le  temps  de  la  plus 
grande  chaleur  des  disputes  sur  la 
bulle  Unigenitus.  Il  était  difficile 
qu'il  se  garantît  des  opinions  qui  ré- 
gnaient alors  dans  ce  corps;  et  pour 
achever  de  l'en  remplir,  on  l'envoya 
étudier  en  théologie  à  Saumur  ,  sous 
un  des  plus  zélés  appelants ,  le  père 
de  Gennes.  Leroi  fut  un  de  ceux 
qui  soutinrent,  en  1718,  des  thèses 
sur  la  grâce,  que  M.  Poncet,  évêque 
d'Angers,  censura,  et  que  le  P.de  Gen- 
nes essaya  de  justifier.  Après  avoir 
professé  dans  plusieurs  collèges,  sui- 
vant l'usage  de  la  congrégation ,  Le- 
roi ,  qui  avait  adhéré  au  réappel  en 
1 721,  se  livra  à  l'étude  du  grec  et 
de  l'hébreu,  et  fut  associé  aux  tra- 
vaux du  père  Houbigant  qui ,  retiré 
à  Notre-Dame-des-Vertus ,  s'occu- 
pait d'une  édition  du  texte  hébreu  , 
revu  et  corrigé  sur  les  manuscrits  , 
et  d'une  traduction  latine  de  ce  texte. 
Leroi  se  forma  sous  lui  aux  recher- 
ches de  critique  et  d'érudition  ,  et 
ne  se  détourna  de  cette  étude  que 
pour  publier  quelques  écrits  fort 
courts  sur  les  controverses  qui  agi- 
taient alors  les  esprits.  Nous  con- 
naissons de  lui  dans  ce  genre ,  une 
lettre  de  M.**'*  à  un  de  ses  amis 


LER 

de  province ,  au  sujet  de  V écrit  sur 
les  compulsions j  intitulé  Coup-d'œil , 
in-4°.  ;  un  Examen  du  Jigurisme 
moderne ,  sous  la  date  du  7  juillet 
1 736;  et  une  Lettre  du  1 3  mars  1 738, 
à  V auteur  des  Nouvelles,  où  il  fait 
un  portrait  de  ce  gazetier,  et  des  en-  - 
thousiastes  de  ce  parti;  on  y  voit 
qu'il  n'approuvait  pas  les  excès  et 
les  folies  qui  déshonoraient  cette 
cause.  Vers  1736,  il  fut  chargé  par 
Bossuet,  l'évêque  de  Troies,  de  re- 
voir plusieurs  ouvrages  manuscrits 
de  l'évêque  de  Meaux ,  et  d'en  pré- 
parer de  nouvelles  éditions.  On  avait 
publié  à  Luxembourg ,  en  1 73o ,  une 
édition  fort  défectueuse  de  la  Dé- 
fense de  la  déclaration  du  clergé. 
Leroi  en  donna  une  plus  complète  et 
plus  soignée,  d'après  les  manuscrits 
originaux  que  l'évêque  de  Troies 
lui  remit.  Jjdi  Défense  parut  en  1 7  45, 
5  volumes  in-4*'.,  dont  deux  pour  le 
latin  et  trois  pour  le  français.  L'édi- 
teur y  joignit  une  préface  rédigée 
avec  beaucoup  de  soin:  dans  la  suite 
il  fit  réimprimer  sa  traduction  de  la 
Défense  y  avec  des  notes  et  une  table 
des  matières.  En  1753, il  donna  les 
Œuvres  posthumes  de  Bossuet , 
pour  faire  suite  à  l'édition  en  1 2  vo- 
lumes ,  de  Pérau;  ces  OEuvres  pos- 
thumes sont  en  3  vol.  in-4''. ,  et  sont 
accompagnées  d'une  assez  longue 
préface.  Leroi  songeait  même  à 
faire  une  édition  complète  des  OEu- 
vres  de  l'évêque  de  Meaux;  et  il  y 
eût  été  aidé  par  l'abbé  de  la  Motte, 
ancien  grand  vicaire  de  Troies  ,  qui 
possédait  des  manuscrits  précieux  : 
mais  cette  entreprise  fut  confiée  à 
un  autre.  Leroi  se  contenta  de  faire 
imprimer,  en  l'j'jo,  Y  Histoire  des 
variations  des  Eglises  protestantes , 
5  vol.  in-i2  ,  avec  des  notes  de  lui 
et  de  Lequeux ,  qui  avait  d'abord 
préparé  cette  édition;  et  en  1775, 


^  Dissertations  surles  Psau  mes^  et 
-  Préfaces  sur  chacun  des  ciruf  li- 
(•s  supientiau.v  ,    coinposccs  par 
ssiict,  et  traduites    cm  français  , 
I  a  ;  c'est,  à  ce  qu'il  paraît,  le  seul 
vragc  où  il  ait  mis  son  nom.  On  a 
(  ore  de  lui  des  Réflexions  théolo- 
ijues  sur  le  premier  volume  des 
litres  de  l'abbé  de  Fillefroy  à  ses 
t  hves ,   l'jSiy  in-S**.;  une   édition 
(les  Conférences  ecclésiastiques  du 
pore  le  Seraelier,  sur  la  Morale  et 
U  Décalogue ,  1 7.55  et  1 769 , 8  vol. 
in- 12  (  c'est  la  partie  de  ces  Confé- 
rences que  le  Semolier  n'avait  pas  eu 
le  temps  de  pid)lier  );  une  édition 
des  Conférences  du  père  Laborde , 

I  -^57  ;  une  autre  des  Conférences  du 
père  Bizault,  sur  V  Oraison  domini- 
cale, 1766;  et  une  Lettre  sur  le  ju-^ 
gement  qu'ont  porte  des  Jésuites  les 
cardinaux  de  Bérulleet  le  Camus ,  M. 
Bossuet  et  M.  Letellier.  Leroy  avait 
quitté  l'Oratoire,  en  1 746,  lorsqu'on 
y  fit  recevoir  la  bulle  l/nigenitus ;  et 
il  rédigea  une  protestation  et  une 
lettre  au  père  de  la  Valette,  au  nom 
de  tous  les  opposants.  Il  n'avait  que 
le  titre  de  confrère  de  l'Oratoire , 
n'étant  jamais  entré  dans  les  ordres. 

II  mourut  à  Paris,  le  i3  juin  1787. 
i  .'était  un  homme  instruit ,  laborieux 
<  t  propre  par  son  exactitude  aux 
fonctions  d'éditeur.  P-c-t. 

LEROI.  ro)'.  Leroy. 

LEROUX  (  Philibert-Joseph  ), 
Français  réfugié  à  Amsterdam ,  y 
j)ublia  un  Dictionnaire  comique , 
satirique,  critique ,  burlesque,  libre 
et  proverbial,  17 18,  in-8''.  ;  1750, 
111-8'*.  deux  éditions;  175*2,  'i  vol. 
in-8<*.;  réimprimé  encore  à  Paris, 
sous  la  rubrique  de  Pampelune , 
i'787, 1  vol.  in-8°.;  cette  dernière 
édition  contient  beaucoup  d'augmen- 
tations. Les  nombreuses  réimpres- 
siçns  de  ce  livre  ne  prouvent  pas 


LER  ;; 

que  le  goût  de  la  bonne  compagnie 
soit    le    plus   répandu.    (îe)>en(rant 
il  ne   faut  pas  croire   que   l'auteur 
soit  descendu  jusqu'à  certains  mots 
qui    révoltent   l' homme    bien   éle- 
vé. Leroux,  et   ses   conlinualcurs, 
ont  eu  l'intention  de  donner  un  dic- 
tionnaire, non  du  vieux  langage,  mais 
du  bas  langage  ;  et  loin  de  les  blâ- 
mer de  leur  licence,  on  doit ,  malgré 
les  critiques,  leur  savoir  gré  d'être 
resté  dans  de  certaines  limites.    Z. 
LEROUX,  y.  Desuautesrayes. 
LEROY  (Pierre),  l'un  des  prin- 
cipaux auteurs  de  la  Satjre  Ménip- 
pée  ,   était  chanoine   de  la  cathé- 
drale de  Rouen  ,  et  devint  aumônier 
du  jeune  cardinal  de  Bourbon.  C'est 
à  ce   peu  de  détails  que  se  borne 
ce  qu'on  sait  de  la  vie  d'un  homme 
qui  joignit  à  beaucoup  d'esprit  toutes 
les  qualités  d'un  excellent  citoyen. 
De   Thou  dit,   dans   son  Histoire 
(  liv.  cv  ) ,  que  c'était  un  honnête 
h  omme,  étranger  à  toutes  les  factions. 
(  Fir  bonus  et  à  factiorw  summè 
alienus.  )  L'ouvrage  qui  a  fait  passer 
son  nom  jusqu'à  nous  est  intitulé  : 
Satyre  Ménippée  de  la  vertu  du 
Catholicon  d' Espagne ,  ou  de  la 
tenue    des     Etats    à    Paris    en 
1 5()3 ,  par  MM.  de  la  Ste.  Union. 
Il  fut    imprimé    la    même    année 
à  Tours  ,  in-8^.  et  in- 12,  par  Ja- 
met  Métayer,  imprimeur ,  attaché 
à  la  cause  royale ,  et  à  Paris ,  eu 
1594,  in-8°.  Ce   sont-là   incontes- 
tablement les  premières  éditions  de 
cette  ingénieuse  satire  ;  et,  outre  le 
mérite  d'une  crande  rareté,  elles  ont 
encore  celui  de  renfermer  quelques 
particularités  qui  ont  été  retranchées 
des  éditions  suivantes.  Le  succès  de 
cette  pièce  fut  si  grand  ,  qu'il  s'en  fit 
quatre  réimpressions  dans  un  mois  ; 
et  la  chute  du  parti  qui  avait  inuti- 
lement tenté  d'éloigner  les  Bourbons 


!i38  LER 

du  trône ,  ne  diminua  pas  l'inte'rêt  de 
l'ouvrage.   Il  en    a  pari  un  grand 
nombre  d'éditions, à  la  fin  du  seiziè- 
me siècle,  et  dans  le  cours  du  dix-sep- 
tième ;  mais  on  doit  se  borner  à  citer 
ici  les  principales.  L'une  des  plus  jo- 
lies est  celle  de  Ratisbonne ,  Kerner 
(  Bruxelles,  Fjppens  ),  1664,  in- 12, 
^vec  un  avertissement  et  des  remar- 
ques de  P.  Diipuy.  Celte  édition,  qui 
a  été  contrefaite  sous  la  même  date 
(  Foj,  M.  Brunet ,  Man.  du  lih  aire  ), 
fait  partie  de  la  collection  des  livres 
français  imprimés  par  les  Elzevirs  : 
elle  est  ornée  d'uue  grande  estampe 
qui  représente  la  procession  de  la 
ligue; et  de  deux  portraits  ,  l'un,  du 
cardinal  de  Plaisance,  légat  du  pape, 
en  robe  fourrée,  tenant  un  sachet  de 
drogues,  l'autre,  du  cardinal  de  Pel- 
levé  en  costume  espagnol ,  assis  de- 
vant une  épinetle.  Les  éditions  ,  avec 
la  même  rubrique,  Ratisbonne,  Ker- 
ner( Amsterdam,  Desbordes) ,  1O9G, 
iw-i'i  ,  et  1699,  in-8". ,  sont  aug- 
mentées de  nouvelles  Remarques,  par 
Jacob  Le  I)uchat.  (  Voy.  Duchat.  ) 
Fo])pens  en  publia  enfin  (  toujours 
sous  la  rubrique   de  Ratisbonne  ) , 
1709,  3  vol.  in-8«.  fig.,  une  édition 
qui  a  servi  de  base  à  toutes  les  sui 
vantes,  et  à  laquelle  on  donne  assez 
généralement  la  préférence  ,  pour  la 
beauté  de  son  exécution  (i);  elle  est 
due  aux  soins  de  Le  Ducliat  ,  qui  l'a 
augmentée  de  la  Fatalité  de  Saint 
Cloud  y   et  d'un  grand  nombre  de 
pièces  qui  servent  de  preuves  à  la 
Satyre.  La  Satyre  Ménippée  est  un 
chef  -  d' œuvre  d'enjouement  et  de 
bonne  plaisanterie  y  et  Voltaire  dit 
qu'elle  ne  fut  pas  moins  utile  à  Henri 


LER 

IV  que  la  bataille  d'Ivry.  Elle  fut 
aussi  nommée  le  Catholico?id' Espa^ 
gne ,  parce  que  le  roi  d'Espagne  , 
Philippe  II,  chef  de  la  Ligue,  cachait 
ses  projets  sous  le  voile  de  l'intérêt 
de  la  religion  catholique  (  i  ).  Ce  fut 
P.  Leroy  qui  conçut  la  première  idée 
de  cette  pièce;  mais  elle  a  été  ter- 
minée et  mise  dans  l'état  où  nous 
la  voyons  ,  parle  fameux  P.  Pithou. 
D'autres  beaux-esprits  coopérèrent 
encore  à  la  composition  de  cet 
ouvrage  ;  et  l'on  croit  faire  plaisir  aux 
amateurs  de  l'histoire  littéraire,  en 
indiquant  la  part  qu'on  y  attribue  à 
chacun  d'eux.  L'idée,  le  titre  et  la 
disposition  de  l'ouvrage  appartien- 
nent incontestablement  à  P.  Leroy  , 
à  qui  l'on  donne  encore  la  harangue 
du  duc  de  Maïenne ,  et  celle  du  sieur 
de  Rieux,  qui  fut  pendu.  La  harangue 
du  légat  est  de  Jacq.  Gillot;  celle  du 
cardinal  de  Pel  I  e  vé ,  de  FI  orent  Chres- 
tien; celles  de  l'archevêque  de  Lyon, 
et  de  Rose ,  évêquc  de  Senlis,  sont  de 
Nicol.  Rapin,  et  enlin  celle  du  tiers- 
état,  de  P.  Pithou.  Les  regrets  sur  la 
mort  de  l'àne  ligueur  sont  de  Gilles 
Durand  :  on  attribue  les  autres  vers 
répandus  dans  l'ouvrage  à  Jean  Pas- 
serai et  à  Nicol.  Rapin.  Les  curieux 
trouveront  d'autres  détails  sur  la  Sa- 
tyre Ménippée  dans  la  Bibliothèque 
historique  de  France  _,  n^.  1 945 1  et 
suiv.  W-  s. 

LEROY  (  Louis  ) ,  en  latin  Begius, 
excellent  humaniste,  né  à  Goutances 
au  commencement  du  xvi^.  siècle , 
essaya  de  transporter  dans  le  fran- 
çais les  beautés  des  langues  anciennes 
dont  il  avait  fait  une  étude  apro- 
fondie.  Ou  n'a  pas  assez  remarqué 
qu'il  est  un  de  nos  premiers  écrivains 


(i)  Quelques  ciirif.M s  doniiiMit  î.v  -piéféif^nce  à 
l'édition  (lt>  Ratisbonne  (  lloucn  )  171!,  aug- 
nienlëe  de  nouveUes  remarquer  de  J.  Goilofroy; 
ou  à  celle  de  IJ26  ,  publiée  par  Frosper  Mar- 
cliaad,  qui  y  lit  même  quelques  additions. 


(i)On  nomme  Ca/.ho?icOn\in  éiectunire  ,ain»» 
appelé  parce  qu'où  le  dit  boD  contre  toute* 
soites  vl«  rualaditts. 


LEft 

qui   soient  parvenus  h   donner  du 
nombre  et  de  rharmonieà  la  prose, 
il  parcourut,  dans  sa  jeunesse,  l'I- 
talie, l'Angleterre  et  l'Alleniagne, 
♦    pour  visiter  les  savants  et  nroliter  de 
leurs   lumières;  il   s'appliquait    en 
même  temps  à  observer  les  mœurs 
et  les  habitudes  des  peuples.   Son 
désir  d'apprendre   était   tel ,    qu'il 
suivit   plusieurs  fois  les  armées  eu 
marche,  pour  converser   avec    des 
soldats  sur  les  difle'rentes  parties  de 
l'ctat  militaire:  mais  il  avait  toujours 
avec  lui  quelques-uns  de  ses  auteurs 
favoris  ;  et,  lorsqu'il  était  fatigue,  il 
s'asseyait  près  du  chemin,  et  se  dé- 
lassait en  lisant  quelques  morceaux 
de  Cicéron ,  de  Platon  ou  de  Démos- 
tUène.  De  retour  en  France ,  il   se 
fit  bientôt  connaître  parla  traduction 
des  OhîUhiaques  et  des  Philippiqiies, 
qui  fut  très-bien  accueillie.   On  lui 
procura  un  emploi  fort  honorable 
i\\\\  l'attachait  au  chancelier;  et  il 
so  vit  obligé  «  de  \\\tq  en  courtisan, 
»  distrait  par  aft'aires,  obligé  de  se 
»  trouver  près  des  grands  ,  à  leur 
»  lever ,  coucher  et  manger  ,  sans 
»  pouvoir    étudier   sinon  par  em- 
»  blées.  »  Cependant  la  pension  qu'il 
recevait ,  sulîlsait  à  peine  à  ses  be- 
soins ;  et  il  avoue  qu'il  fut  souvent 
tenté  de  renoncer  aux  lettres  pour 
choisir  une  occupation  plus  lucra- 
tive.  C'était  à  lui-même  que  Leroy 
devait  s'en  prendre  de  sa  mauvaise 
fortune  :  il  avait  éloigne  par  sa  hau- 
teur tous  ceux  qui  étaient  le  plus  dis- 
posés à  lui  être  utiles;  et  il  s'était  fait 
desennemis  irréconciliables  de  pres- 
que tous  les  écrivains  contemporains, 
par  le  mépris  avec  lequel  il  parlait 
de   leurs     ouvra^'cs.     Joachim    du 
Bellay  ,    qu'il   avait  critiqué  amè- 
rement ,    se    vengea   par  des   épi- 
crammes  dans  lesquelles  il  le  raille 
de  iOTi  savoir  pédaniesque  ^  et  un 


LER  a39 

peut  croire  qtic  le  poète  irrit<?  ne  s*en 
tint  ])a5  là.   Leroy  fut  nommé  ,  en 
i^tyx  ,  à  la  chaire  de  langue  grecque 
du  (iollége  royal  :  mais  l'àgo  et  les 
inlirmités  avaient  accru  ses  besoins; 
son   traitement  devint    insulVisaut, 
et  cet  homme  d'un  caractère  si  fier, 
fut  forcé  plus  d'une  fois  de  recourir 
à   la  générosité  des  amis  qui  pou- 
vaient lui  rester  encore.  Il  mourut  à 
Paris,  le  i  juillet  1^77  ,  sans  regret, 
dit  de  Thou  ;  mais  sa  mort  fut  très- 
sensible  à  tous  les  savants.  On  voit 
que  Leroy  aurait  mérité  d'augmenter 
la    liste  que  Pierius    Valerianus    a 
donnée  des  hommes  de  lettres  mal- 
heureux. On  a  de  lui  :  I.  Guill.  Budœi 
liita  ,  cuTïi  doctorum  epigratumati- 
bus  in  ejus  laudem ,  Paris  ,    i54o  , 
in-4**;  réimprimée  avec  quelques  ad- 
ditions ,    1575  ;   ciim  efùslold   de 
Francisco  Connano  ,  ibid. ,   1^77  , 
in-4".  ;  dans  les^iV^p  sélect,  viror, 
eruditor.  ,  par   Guill.  Bâtes ,  Lon- 
dres ,  i68'2 ,  in-4*^.  ;  et  dans  les  f^itœ 
jurisconsultoriim ,  parLeiker,  Leip- 
zig, iG86,in-8".  Cette  vie  de  Budé 
est  écrite  avec  tant  de  pureté  et  d'é- 
légance, qu'elle  sullit  pour  conserver 
à   Tauteur  la   réputation   d'un  des 
meilleurs  latinistes  de  son   siècle. 
II.  Oratio  infunere  Caroli  Falesii^ 
Aureliorum    diicis ,    Bnle  ,    i55'2  , 
in-8".    III.  Oratio  ad  Ifenricum  II 
Franciœ ,  et  Philippwn  Ifispaniœ , 
reges ,  de  pace  et  concordid  nuper 
inter  eos  initd ,  etc. ,  Paris  ,  i!)5g^ 
in-4°.    IV.    Ad    prœstantrs  hujus 
œtatis  viros  Epistolœ,  ibid.,  !').')() , 
in-'fO.  Y.  Ad  reginain  Catharinam 
cnnsolatio   in   morte  ejus  mariti , 
ibid.,  iSfio,  inVjO.   VI.  Trois /)/i- 
cours  en  latin  et  deux  en  français  , 
prononcés  à  l'ouverture  des  leçons 
du  Collège  royal.  VIL  Considéra- 
tions  sur   l'Histoire    française   et 
universelle  de  ce  temps,  dvitt  les 


'i^O 


LER 


merveilles  sont  succinctement  rap- 
poitéesy  Paris,  1 562,  in-8<*.  VIII.  De 
l'origine  et  excellence  de  l'Art  poli- 
tique ,  et  des  auteurs  qui  en  ont  e'crit, 
spécialement  de  Platon  et  d' Arislole , 
ii^id.,  1 567, in-8'',  ouvrage  intéressant 
ctqui  mérite  d'êtrelu.  IX.  Des  trou- 
bles et  difjérends  advenus  entre  les 
hommes  par  la  diversité  des  reli- 
gions ,ihid. ,  1567,  in  8°.  X.  Ex' 
hortation  aux  Français  pour  vivre 
en  concorde  et  jouir  des  biens  de  la 
paixyihïà.^  i570,in-8o.  XI.  Ze^ 
Monarchiques  ou  De  la  Monarchie 
et  des  choses  acquises  à  son  établis- 
sement et  conservation,  ibid. ,  1570, 
in-8<^.  XII.  De  V excellence  du  Gou- 
vernement rojalf  avec  exhortation 
aux  Français  de  persévérer  en  icelui 
sans  chercher  mutations  pernicieu- 
ies,'ih.  1576,  in-4".  Tous  ces  diffé- 
rents ouvrages  prouvent  un  penseur 
exercé  et  un  excellent  citoyen. 
XIII.  De  la  vicissitude  et  variété 
des  choses  en  V Univers,  ibid.  ,1576, 
in-fol.  ;  1 583 ,  in-4".  C'est  un  recueil 
d'anecdotes  ,  et  de  traits  singuliers  , 
fruit  d'une  lecture  immense.  Les  cu- 
rieux recherchent  encore  cet  ou- 
vrage. XIV.  Des  Traductions  du 
Timée ,  du  Phédon ,  de  la  Républi- 
que ,  du  Symposium  de  Platon  j  de 
la  Politique  d'Aristote  ,  avec  des 
commentaires ,  loués  par  Gabriel 
Naudé  ,  et  qui  ont  été  très -utiles 
aux  nouveaux  traducteurs  d'Aristote 
(  F.  Arisïote  )  ;  des  Oljnthiaques 
et  des  Philippiques  de  Démosthène , 
de  plusieurs  Discours  d'Isocrate  j  et 
de  Morceaux  choisis  de  Xénophon» 
Lacroix  du  Maine  lui  attribue  encore 
une  ti-aduction  du  Traité  d'Hippo- 
crate  des  eaux  et  des  lieux  ;  et  une 
du  Livre  de  Théophraste ,  touchant 
le  feu  et  les  vents.  On  peut  consulter 
sur  Leroy  les  Mémoires  de  Niceron, 
Wm.  XXIV  'f  et  Y  Histoire  du  Collège 


LER 

rojal ,  par  l'abbé  Goujet,  qui  a  ré- 
paré les  erreurs  et  les  omissions  de 
Niceron.  W — s. 

LEROY  (  Jacques  ) ,  baron  du 
Saint-Empire  ,  naquit  à  Bruxelles  , 
le  9.9  octobre  i633  (i).  Sa  famille, 
originaire  de  France,  avait  suivi  en 
Flandre  le  duc  de  Bourgogne  Phi- 
lippe le  Bon  ,  lorsque  ce  prince  y 
établit  sa  cour,  au  quinzième  siècle. 
Il  fréquenta  dans  sa  jeunesse  les  plus 
fameuses  universités  de  l'Europe  jet 
après  avoir  terminé  ses  études  d'une 
manière  brillante,  il  s'empressa  de 
revenir  dans  sa  patrie,  où  le  bruit  de 
ses  succès  l'avait  devancé.  Son  père 
lui  résigna  aussitôt  la  charge  de  con- 
seiller des  finances;  et  il  y  joignit, 
quelque-temps  après,  celle  de  surin- 
tendant du  commerce.  Le  marquis 
de  Garacène,  gouverneur  des  Pays- 
Bas,  l'envoya  en  Espagne  auprès  du 
roi  Philippe  IV ,  pour  lui  rendre 
compte  de  la  situation  de  ces  provin- 
ces; et  Leroy  s'acquitta  de  cette  com- 
mission délicate  avec  beaucoup  de 
prudence.  Quelques  désagréments  que 
lui  fit  éprouver  dans  la  suite  le  nou- 
veau gouverneur,  le  marquis  de  Gas- 
tel-Rodrigo,  le  déterminèrent  à  se 
démettre  de  ses  emplois;  et  il  se  re- 
lira près  d'Anvers  dans  une  de  ses 
terres,  oii  il  consacra  ses  loisirs 
à  la  culture  des  lettres.  Il  mourut  à 
Liere ,  dans  le  Brabant ,  le  7  octobre 
1719,  âgé  de  86  ans.  On  a  de  lui 
plusieurs  ouvrages  estimables,  pres- 
que tous  relatifs  à  l'histoire  des 
Pays-Bas, dont  il  avait  fait  une  étude 
aprofondie.  Les  prhicipaux  sont  : 
I. Notitiamarchionatûs  S.  Rom.  im- 
perii ,  hoc  est,urbis  et  agri  Antuer- 
piensis,  oppidorum,  dominiorum , 


(i)  Bayle  (  Dîcl.  hitt.)  dît  que  Leroy  naquit 
à  AuTers  le  z8  octobre;  mais  on  a  préféré  suivre 
Niceron,  dont  l'article  est  extrait  d'un  Mémoir» 
que  lui  avait  adressé  un  savant  de  Bruxelles. 


LER 

monasleriorum  castellonimque  suh 
«(»,rti\  Amsterdam,   i<)78,  in-fol. 
avec  lij;.  II.  Topoç^raphia  historica 
(l allô- Brabantina  ijiui  vomanorum 
offfùdu  ,  m  uni  ci  pi  a  et  doiuiniaillus- 
trantuVy  ibiil. ,  i(À)'« ,  iii-l".  avec  de 
1)1  Iles     {gravures.     111.     Chnmicon 
l'alduini  A^Hinncnsis,  sive  Ilistoria 
iimealoaica    comilum     Hannouias 
I      alionumpie    principum  ,    primùin 
édita  et  notis  historicis  illustrata, 
\nvers,  i(k)3,  in-f<*.  Cette  chroni- 
.j(ie  de  Baudouin  d'Avesnes  est  im- 
portante, et  les  notes  du  savant  édi- 
teur y  ajoutent  un  nouveau  prix. 
]\.  Castella  et  prœtoria  nobiiium 
Brabantiœ,  cœnobiaque  celebriora, 
ibid.,  1G96,  iu-f".  max.  Ce  rare  vo- 
1      lume  se  compose  de  onze  feuillets  de 
'      texte,  en  comprenant  le  titre  et  le 
faux-litre,  et  de  gravures  au  nom- 
Ijre  de  cent  dix-huit,  en  comptant 
un  frontispice  grave',  sur  autant  de 
feuilles  ou  de  demi-feuilles.  Il  y  a  des 
exemplaires  ,  avec  l'indication  ;  An- 
vers, H.  Tliieullier,  i6()4;  ils  doi- 
^  ont  cire  préfères  pour  la  beauté  des 
(preuves.  On  peut  consulter  sur  cet 
ouvrage,  dont  il  a  été  fait  plusieurs 
éditions  ou  tirages ,  le  Manuel  du 
libraire,  par  M.  Brunet,   tom.  m, 
p.  I  J7.  V.  L* Erection  de  toutes  les 
terres ,  seigneuries  et  familles  ti- 
i  rées  du  Brabant ,  prouvée  par  des 
i  traits  des  Uttres-patentes ,  tirés 
lies  originaux  ,  Leyde  ,   i6()9,  ou 
Amsterdam,  1705,  in-f''.;  très-bon 
ouvrage  généalogique.  Bayle  aurait 
désiré  que  chaque  province  en  eût 
un  pareil.  \I.    Le  grand  théâtre 
sacré  du  duché  de  Brabant ,  conte- 
nant  la  description  de  toutes  icségli- 
ses ,  etc.  la  Haye,  1729  ou  1734,^8 
tom.  en  4  parties  in-f».,  et  Le  grand 
théâtre  profane  contenant  la  des- 
cription du  pays  de  Brabant /\h\à. 
J730,  in-f^.  Ces  deux  ouvrages  qui 
xwv. 


LER  a4r 

ne  doivent  pas  être  sépares,  sont 
encore  recherchés  pour  les  gravures. 
On  ne  citera  plus  du  baron  Leroy, 
que  la  Description  d'une  agatlie , 
du  cabinet  du  roi  de  France  ,  rej)rc- 
scntant  rapothéose  d'Auguste  ,  Ams- 
terdam, iG83,  in-f*^.  en  latin.  On 
peut  consulter  pour  p'us  de  dé- 
tails les  Mémoires  de  Kiceron  ,  tom, 
xxxvii.  W-s. 

LEROY  (Guillaume),  d'abord 
chanoine  de  Notre-Dame  de  Paris, 
puis  abbé  commcndalairc  de  Haute- 
fontaine  et  de  Saint-Nicolas  de  Ver- 
dun ,  était  né  à  Cacn ,  le  10  janvier 
iGio.  H  se  livra  à  l'étude  de  l'Ecri- 
ture-Saintc  et  des  Pères  ,  fut  uni  d'a- 
mitié avec  le  docteur  Arnauld,et 
défendit  avec  zèle  la  doctrine  de 
Saint-Augustin.  Vers  i653,il  se  re- 
lira dans  la  solitude  pour  vaquer 
plus  librement  au  travail;  et  il  se 
fixa  dans  la  suite  à  son  abbaye  de 
Hautefontainc ,  diocèse  de  Châlons. 
11  y  reçut  souvent  Arnauld,  Nicole  , 
de  Pontchâteau,  etc.,  cl  fut  tou- 
jours lié  avec  Port-Royal,  et  les 
amis  de  cette  maison.  Il  mourut 
à  Hautefontainc  ,  le  î6  mars  iC>84  -> 
après  s'être  démis  de  son  abbaye  de 
St.-Nicolas.  C'était  un  homme  ins- 
truit ,  laborieux  et  charitable.  Il  pu- 
blia plusieurs  livres  de  piété,  entre 
autres  des  Instructions  recueillies 
des  Sermons  de  Saint-Augustin  sur 
les  Psaumes  y  7  vol.  in-12,  et  des 
traductions  d'écrits  des  Pères  ;  de 
plus  ,  des  ouvrages  de  controverse  , 
en  faveur  des  cinq  propositions  , 
contre  les  casuistes  et  contre  les  Jé- 
suites en  général.  Il  eut  une  discus- 
sion avec  l'abbé  de  Rancé ,  sur  un 
point  delà  règle  de  la  Trappe;  mais 
il  s'abstint  de  rien  publier,  par  dé- 
férence pour  ra\4s  de  Bossuet ,  qui 
lui  écrivit  sur  ce  sujet,  le  10  août 
1(577.  H  était  eu  relation  de  lettres 
16 


avec  Arnauld  ,  Nicole,  Conrart,  etc. 
Parmi  les  opuscules  qu'il  a  laisses, 
et  qu'on  ne  lit  plus  ,  il  faut  compter 
la  Traduction  d^un  discours  de  St.- 
Athanase,  contre  ceux  qui  jugent 
de  la  venté  par  la  seule  autorité  de 
la  multitude;  écrit  qui  a  ëtë  quel- 
quefois attribué,  à  Charles-François 
Leroi.  Tous  les  deux  appartenaient 
à  la  même  école.  P-c-t. 

LEROY  (Charles  -  George  ) , 
lieutenant  des  chasses  du  parc  de 
Versailles,  né  en  1723,  mort  en 
1789,  a  fourni  plusieurs  morceaux 
à  l'Encyclopédie  ;  notamment  les 
articles  Fermier,  Forêt  et  Garenne. 
On  connaît  de  lui  :  I.  Examen  des 
Critiques  du  livre  intitulé:  De  V Es- 
prit, Londres  ,  1760  ,  in- 12.  Leroy, 
intime  ami  d'Helvétius ,  y  prend  sa 
défense  contre  les  censeurs  de  ce  livre 
(  F.  Helvétius).  il  Réjlexions  sur 
la  Jalousie  ,  pour  servir  de  Com- 
mentaire aux  derniers  ouvrages  de 
J^oltaire ,  Amsterdam,  177*2,  in- 
8^.  de  29  pag.;  c'est  une  défense  de 
Buffon,de  Montesquieu,  d'Helvétius, 
contre  les  critiques  que  Voltaire 
avait  faites  de  passages  de  «es 
auteurs  ,  dans  plusieurs  de  ses 
écrits.  Voltaire  y  répondit  par  sa 
Lettre  sur  un  Ecrit  anonyme ,  (  da- 
tée de  Ferney  ,  10  avril  1772)  qui , 
dans  les  OEuvres  de  ce  fécond  écri- 
vain, fait  partie  des  Mélanges  litté- 
raires. IIL  Lettres surles  Animaux, 
nouvelle  édition  augmentée  ,  Nu- 
remberg (  Paris  ,  Saugrain  ) ,  1781, 
in- 12.  Ces  Lettres  avaient  d'abord 
paru,  les  deux  premières,  dans  le 
Journal  étranger,  août  et  septembre 
1762  ;  et  les  suivantes  ,  en  1764  et 
1765  ,  dans  la  Gazette  littéraire  de 
MM.  Suard  et  Arnaud ,  et  en  1 769 
dans  le  troisième  vol.  des  Fariétés 
littéraires,  des  mêmes  auteurs,  avec 
we  répoiise  à  mie  critique  faite  par 


LER 

le  Journal  des  Savants ,  de  janvicp 
1 765.  L'auteur, qui  ne  s'y  désigneque 
sous  le  tilre  d'ua  Physicien  de  Nu- 
remberg ,  clierclie  à  s'y  laver  du  re- 
proche ou  au  moins  du  soupçon  de 
matérialisme.  M.  Roux-Fazillac  ei> 
a  donné  une  nouvelle  édition  sous 
ce  tilre  :  Lettres  philosophiques 
sur  Vintelligence  et  la  perfectibi- 
lité des  Animaux  ;  suivies  de  Let- 
très  posthumes  sur  V Homme,  du 
même  auteur  ,  Paris,  1802  ,  in-8**. 
Ces  Lettres  ,  adressées  à  madame 
d'Angivilliers  ,  offrent  quelques  re- 
marques assez  curieuses.  L'auteur  y 
cite  une  expérience  répétée  plu- 
sieurs fois  ,  qui  paraît  prouver  que 
les  pics  ne  savent  compter  que  jus- 
qu'à cinq.  IV.  Portraits  de  Louis 
XF ,  et  de  M^"".  de  Pompadour  , 
publiés  en  1802.  Leroy  avait  com- 
posé ,  dans  sa  jeunesse ,  une  pièce 
dramatique  ,  qu'il  eut  ensuite  ,  di- 
sait-il ,  le  bon  esprit  de  brûler,  ainsi 
que  d'autres  productions  manus- 
crites. C.  M.  P. 

LEROY  (Julien  ),  fameux  hor- 
loger, né  à  Tours  en  1686,  annonça 
fort  jeune  des  dispositions  extraor- 
dinaires pour  la  mécanique,  et  en 
particulier  pour  l'horlogerie.  A  l'âge 
de  treize  ans  ,  il  fabriquait  de  pe- 
tits ouvrages  de  son  invention  ,  qui 
supposaient  une  rare  intelligence. 
S'étant  fixé  à  Paris ,  il  se  fit  agréger  , 
en  1 7 1 3, au  corps  des  horlogers.  Les 
Anglais  avaient  alors  en  ce  genre  une 
supériorité  incontestable;  Leroy  ré- 
solut de  la  leur  enlever,  et  il  y  parvint. 
Il  imagina  d'appliquer  les  expérien- 
ces de  Newton  sur  les  fluides  à  fixer 
l'huile  aux  pivots  des  roues  et  du 
balancier  des  montres  ;  et  par-là  il 
diminua  considérablement  l'usure  et 
le  frottement  de  ces  parties  ;  il  trouva 
le  moyen  de  réduire  de  beaucouji  le 
volume  des  montres  à  répétition,  en 


anç;mentant  la  solidité  des  pièces  et 
vu  assurant  davant.«p;e  la  précision 
(|p  leur  uiarchc.ll  présonla,c'ii  i']M), 
à  l'acadcuiie  clos  sciences,  une  pen- 
dule d'cquation,  garnie  d'un  cadran 
mobile,  (jui  marrpiait  le  temps  vrai, 
le  lever  du  soleil  et  la  déclinaison. 
I/aradémiedéclara  qu'il  était  lUl'ficile 
de  rien  imaginer  de  plus  simple,  de 
plus  exact  et  de  plus  commode.  La 
réputation  de  Julien  Leroy  s'étendit 
bientôt  dans  toute  l'Europe  :  cepen- 
dant personne  ne  rendait  plus  de  jus- 
tice au  mérite  des  artistes  étrangers; 
il  estimait  beaucoup  Graliam,  et  il 
fit  venir  à  Paris, en  i-y'^SjUne  de  ses 
montres  à  cylindre ,  la  première 
qu'on  y  ait  vue.  Graham  appréciait 
aussi  le  talent  de  Leroy.  Un  jour 
qu'on  lui  avait  porté  une  de  ses 
montres  à  répétition,  après  l'avoir 
examinée  attentivement  :  Je  souhai- 
terais, dit-il,  être  moins  âgé,  afin  de 
pouvoir  en  faire  sur  ce  modèle.  Les 
j)erfectionnements  de  Julien  Leroy 
turent  adoptés  par  tous  les  horlo- 
gers; et  sou  nom  remplaça,  sur  les 
montres  de  Genève,  ceux  des  ar- 
tistes anglais ,  dont  les  ouvrages  ces- 
sèrent dès -lors  d'être  recherchés. 
C'est  â  cette  occasion  que  Voltaire 
dit  à  un  des  fils  de  cet  artiste ,  quel- 
que temps  après  la  bataille  de  Fon- 
tenoy:  Le  maréchal  de  Saxe  et 
votre  père  ont  battu  les  Anglais. 
Julien  était,  depuis  1739,  horloger 
du  roi,  et  avait  son  logement  au  Lou- 
vre; il  adapta  bientôt  aux  pendules 
une  partie  de  ses  perfectionnements; 
il  en  établit  à  secondes  et  à  équation 
de  toute  espèce,  d'une  exactitude 
étonnante.  Il  trouva  un  moyen  fort 
ingénieux  de  rendre  nuls  les  effets 
de  la  chaleur  et  du  froid  sur  le  pen- 
dule, à  l'aide  d'un  très-bon  méca- 
nisme de  compensation.  Il  a  inventé 
les  horloges  publit^ues  qn*oa  aomwc 


LKR  a43 

horiKonlales,  plus  faciles  à  faire , 
moins  roûteuses  et  bien  plus  par- 
faites :  il  a  enrichi  la  gnomoniijue  de 
plusieurs  découvertes ,  telles  que  le 
eadran  universel  à  boussole  et  à  pin- 
mdes;  le  cadran  horizontal  univer- 
sel, propre  à  tracer  des  méridiennes, 
ete.  Julien  Leroy  joignit  à  des  talents 
des  qualités  plus  rares  eneore.  C'é- 
tait, dit  Lepaute  (  Traité  d'horlo. 
gerie),  un  vrai  citoyen^  exempt  de 
toute  jalousie,  et  qui  a  toujours  cher- 
ché à  mettre  ses  confrères  à  portée 
de  voir  ses  ouvrages,  de  se  servir 
de  ses  lumières  et  d'y  ajouter  les 
leurs.  Il  était  si  désintéressé  qu'il 
augmentait  le  prix  de  ses  ouvriers 
lorsqu'ils  avaient  réussi;  et  très- 
souvent  il  le  portait  fort  au-delà  de 
leur  allenle:  aussi,  malgré  de  longs 
travaux ,  ne  laissa-l-il  qu'une  fortune 
médiocre.  Cet  habile  artiste  mourut 
à  Paris  en  1759.  Il  avait  quatre  fils 
dont  il  soigna  lui-même  l'éducation, 
et  qui  se  sont  distingués,  chacun  dans 
la  partiequ'il  avait  embrassée  :  Fierrs 
Leroy,  son  successeur;  Jean^  P^J" 
sicien  ,  de  l'académie  des  sciences  ; 
Julien David^  architecte,  et  Charles, 
médecin.  On  trouve  des  détails  sur 
les  différentes  inventions  de  Julieu 
Leroy,  dans  les  ouvrages  suivants: 
Nouvelle  manière  de  construire  les 
grosses  horloges  y  Mercure  de  juin 
1737..  —  Mémoire  sw  un  moyen 
défaire  marquer  et  sonnerie  temps 
vrai  aux  horloges  publiques,  ibitl. , 
septembre  1734.  —  Usage  d'un 
iwu\>e au  cadran  universel  à  boussole 
et  pwpre  à  tracer  des  méridiennes, 
Paris,  1734;  ce  cadran  a  plusieurs 
avantages  sur  ceux  de  Butterfieid. 
—  liègle  artificielle  des  temps,  par 
H. Sullv( f^q^. SuLLv) ,  nouvelle  éd. 
corrigée  et  augmentée  de  quelque* 
mémoires  sur  l'hoilogerie,  par  Ju- 
lie» Leroy,  ibid.  1737. —  Lettre  an 


a44  Ï^ER 

réponse  à  la  critique  que  Thiout 
aidait  faite  d*une  horloge  établie 
sur  les  ordres  de  Leroy  pour  les  Mis- 
sions étrangères.  (  Mëm.  de  Tré- 
voux, mars  174'^.  )  On  trouve  un 
Eloge  de  J.  Leroy  dans  les  Etren- 
nés  chronométriques  publiées  par 
son  fils,  en  1760.  (  Foj.  l'art,  sui- 
vant. )  W--S. 

LEROY  (  Pierre  ) ,  fils  aîné  du 
pre'cëdent,  naquit  à  Paris  en  17 17. 
On  lui  doit  plusieurs  inventions  re- 
marquables, entre  autres  celle  d'une 
pendule  à  sonnerie  à  une  seule  roue  , 
et  un  e'chappement  à  détente ,  décrit 
dans  le  tome  vu  du  Recueildesma- 
chines  de  Tacadëmie  j  mais  il  est 
principalement  connu  par  le  per- 
fectionnement des  montres  marines. 
Il  avait  remis,le  18 décembre  1754, 
»î  l'académie  des  sciences  ,  un  billet 
cacheté  ,  contenant  la  description 
d'une  montre  marine  qu'il  se  propo- 
sait d'exe'cuter  ;  et ,  dans  le  courant 
de  décembre  1763,  il  lui  adressa 
cette  pièce  ,  qui  mérita  les  éloges  de 
l'académie.  Le  marquis  de  Courtan- 
vaux  se  chargea  d'en  faire  lui-même 
l'épreuve  à  la  raerj  et  ayant  fait  cons- 
truire, à  ses  frais,  une  frégate  légère 
et  propre  à  cette  expédition,  il  s'cm- 
Kirqua  avec  Pingre ,  Messier,  et  Le- 
roy, qui  avait  désiré  faire  ce  voyage. 
Cette  frégate,  à  laquelle  on  donna 
le  nom  de  V Aurore,  partit  du  Havre 
dans  le  mois  de  mai  1 767  ,  et  y  rentra 
au  bout  de  quarante-six  jours  ,  em- 
ployés à  parcourir  la  Manche  et  la 
mer  de  Hollande.  W  résulta  de  celte 
première  épreuve ,  qu'une  des  mon- 
tres de  Leroy  ne  s'était  écartée  que  de 
n  minutes  ,  et  l'autre ,  de  38  minutes 
au  mouvement  constaté  à  terre  , 
pialgré  les  roulisviolents  et  beaucoup 
plus  sensibles  sur  une  frégate  qu'ils 
ne  l'auraient  été  sur  un  vaisseau  de 
haut  bowi.  L'année  suivante  (  1 7 68), 


L£R 

Cassini  s'embarqua  avec  les  montres 
de  Leroy,  et  trouva  que,  dans  un  trajet 
de  quarante  jours  ,  une  de  ces  mon- 
tres n'avait  donné  qu'un  huitième  de 
degro  d'erreur  sur  la  longitude.  D'a- 
près cette  double  expérience,  l'acadé- 
mie décerna  en  1 769,  à  Leroy,  le  prix 
double  proposé  pour  la  meilleure  ma- 
nière de  mesurer  le  temps  à  la  mer  : 
mais  elle  l'invita  à  ne  regarder  cette 
récompense  que  comme  un  encoura- 
gement à  perfectionner  ses  montres^ 
et  il  parvint  en  QÏÏet  à  leur  donner  la 
plus  grande  régularité  possible  ,  par 
la  découverte  de  l'isochronisme  du 
ressort  spiral  ^  que  lui  disputa  Ber- 
thoud,  mais  il  est  juste  d'en  laisser  la 
gloire  à  P.  Leroy ,  puisqu'il  la  publia 
le  premier.  L'académie  lui  décerna 
une  seconde  fois  le  prix  double,  en 
1773(1).  Cet  habile  artiste  mourut 
dans  sa  maison  de  campagne,  à  Vitry, 
près  de  Paris,  le  25  août  1785. 
On  a  de  lui  quelques  écrits  remar- 
quables sur  l'art  qu'il  avait  cultivée 
avec  tant  de  succès.  Ce  sont  :  L  Mé- 
moire pour  les  Horlogers  de  Paris, 
1750,  in-4**.  H  y  attaque  le  privilège 
exclusif  accordé  à  de  Rivaz  pour  les 
pendules  de  son  invention,  et  cherche 
à  démontrer  qu'ellesne  sont  pas  supé- 
rieures aux  ouvrages  du  même  genre 
exécutés  paries  ouvriers  de  Paris  (2). 
IL  Lettre  sur  la  construction 
d'une  montre  présentée  Ze  18  août 
1751a  V académie  royale  des  scien- 
ces-^ dans  les  Mem.  de  Trévoux ^  juin 
1 7  5'Ji.  H  y  rend  compte  des  motifs  qui 
l'ont  déterminé  à  augmenter  la  grau- 


(i)  Pour  les  expériences  faites  des  montre» 
marines  de  Ijeroy ,  on  petit  consulter  le  Voyag» 
de  Coiirtanvaux,  mis  en  ordre  par  Pingié,  Pa- 
ri», 1761",  in-4*^- i  le  /^oya^/?  fait  par  Cassini ,  en 
1760  ,  etc.  ,  1770  ,  in-4°-;  le  Voyage  de  Fleurie  h, 
en  1768  et  17^9,  etc.  ,   1773,  a  vol.  in-4°. 

(3)  Rivaz  publia  :  Réponse  à  un  Mémoire 
contre  les  découvertes  en  horlogerie  ,  ia-^". 
On  en  troiire  un  extrait  assez  étendu  daus  le» 
Mémoires  de  Tréyoux  ,  déccmbte  lyi». 


LER 

(leur  (!•  la  roue  de  rencontre  dans  les 
montres  demi -plates.  III.  Etrennes 
chronoinétri(jUcs  pour  l'année  i  -jOo, 
l\iris  ,  in  -  i?..  Cet  ouvrage  aUcjucI 
Herthoud  regrettait  que  l'auteur  eût 
donne  la  l'orme  d'un  almanarli  ,  est 
p.'îrlageenhuit|>artie.s,dansles«inrllès 
il  traite  ,  des  divisions  naturelles  du 
temps  ;  de  ses  divisions  arlilieiellcs 
et  du  calendrier;  delà  chronologie  ; 
des  instruments  propres  à  mesurer 
le  tcm])s,  et  de  leurs  usages;  des  mon- 
tres et  des  pendules  ;  des  niclliodes 
pour  les    régler    par  les   mesures 
naturelles  du  temps  ,  et  cnfîu   des 
progrès  de  l'horlogerie  dans  le  dix- 
Iiuitième  siècle.  C'est  dans  cette  der- 
nière partie  qu'est  renferme  l'éloge 
de  Julien  Leroy.  Cet  ouvrage  était 
devenu  si  rare, que  M.  Antide  Jan- 
vier   (  Voyez    la    Lîographie   des 
hommes  vivants  ),  qui  avait  habité 
vingt  ans  Paris  saiîs   pouvoir   s'en 
procurer  un  exemplaire ,  s'est  déter- 
miné à  lefaire  reparaître  pour  l'année 
i8i  I  ,  avec  les  changements  et  addi- 
tions que  les  progrès  des  arts  rendaient 
indispensables.  IV.  Exposé  succinct 
des  travaux  de  IJarrison  et  de  Leroy 
dans  la  recherclie  des  longitudes  en 
mer,  et  des  épreuves  faites  de  leurs 
ouvrages,  Paris,  1767,  in-4^.  de  5o 
pages  (  I  ).  V.  Mémoire  sur  la  meil- 
leure manière  de  mesurer  le  temps 
en  mer  ,  couronné  par  l'académie 
des  sciences;  imprimé  à  la  suite  du 
Fojrage  de  Cassini.  VI.  Précis  des 
reclierches  faites  en  France  depuis 
1730,  pour  la  détermination  des 


(1)  r'i-«f  contre  cet  AtiTMge  que  Fleiirieu  «V- 
lètre  tl4i>aiin  «.trit  anonyme  ■ntitnl*'  :  Exa'nfn 
crillqiir  d'itn  "Mèmnl r^  r''^'^' ''  V'^'' ^^ ■  ^^roy^ 
horto^i't  (tu  roi  .  sur  1  ■'  '    •    horloges 

propres  /i  délerwi ner  i ■  f"  rnrr  , 

ft  Mur  tei    prhiciprs  (i.  ruclior.  ,  k 

l.ftn.îrM  ,  «t  te  tionrc  «  i'.iiM  cuti  t  ente,  17^8, 
'"•4".  <!•■  xi|  et  73  p-i^ot.  Kleiiricu  ne  mil  pat 
»■">  liTie  vn  cirritUtiuti ,  et  en  ilétrnitit  tout  !«■■ 
•  xenipUitet  :  <.«lui  <^u«  j'ai  vu  t.*t  peiitvtia 
«■•«(U*.  A.   Ji-T. 


LER 


!i45 


longitudes  en  mer  par  la  mesttrô 
artificielle  du  temps  ,  Paris  ,  1 773, 
in-'i".  de  !)\  pages.  VIL  SuUe  du 
Précis  sur  les  montres  marines , 
ibid.  ,  1774  ,  in-4«.  VIIL  Lettre 
au  baron  de  Marlvetz ,  1 785 ,  in -8**. 
W-§. 
LEROY  (  Cu ARLES  )  ,  frère  du 
])récédent,  chimiste  et  médecin  dis- 
tingué,né  à  Paris  en  1 7^6, apporta 
en  naissant  une  constitution  délicate 
qui  paraissait  devoir  l'éloigner  de  la 
profession  dans  laquelle  il  s'est  illus- 
tré. Après  qu'il  eut  fait  avec  distinc- 
tion ses  humanités,  et  pris  des  inscrip- 
tions en  médecine  à  Paris  ,  l'état 
chancelant  de  sa  santé  l'engagea  à 
se  rendre  à  Montpellier,  où  il  fut 
doublement  attiré  par  la  beauté  du 
climat  et  par  la  juste  célébrité  de 
l'école.  Charles  Leroy  vit  ^a  santé 
s'améliorer,  et  il  résolut  de  rester  à 
Monlpcllier  au  moins  le  temps  néces- 
saire pour  y  prendre  ses  grades.  Eu 
1780  il  fit  un  voyage  en  Italie,  qui 
lui  procura  une  diversion  agréable, 
en  même  temps  qu'il  put  mettre  à 

Î)rofit  et  en  quelque  sorte  à  contrî- 
Hition  celte  terre  classique.  Il  ob- 
serva ,  pour  ne  parler  que  de  ce  qui 
faisait  l'objet  spécial  de  ses  études, 
les  asphyxies  et  les  phénomènes  pro- 
duits dans  la  grotte  du  Chien,  près 
de  Naples ,  par  le  dégagement  du  gaz 
carbonique.  Il  décrivit  aussi  et  tenta 
d'expliquer  la  phosphorescence  des 
eaux  de  la  Méditerranée.  Leroy  re- 
vint à  Paris  au  milieu  de  sa  famille, 
et  lit  part  de  plusieurs  observations  in- 
téressantes à  l'académie  des  sciences. 
Il  retourna  en  1 532  à  Montpellier  ou 
il  fut  reçu  docteur ,  et  devint  profes- 
seur en  1  "ôy.  Il  avait  donné,  dans  un 
concours  solennel ,  des  preuves  dû 
son  savoir, de  sa  méthode  sévère,  et 
de  l'excelleut  esprit  avec  lequel  il 
appliquait  et  rapportait  toutes  ses 


246  LER 

connaissances  à  la  médecine  prati- 
que. Il  porta  donc  dans  sa  chaire 
les  qualités  les  plus  essentielles  à  un 
professeur.  On  l'entendit  traiter  tour 
à  tour,  et  avec  une  égale  profondeur, 
de  la  suspension  de  l'eau  dans  l'at- 
mosplière,  doctrine  encore  admirée 
aujourd'hui,  et  de  l'analyse  de  plu- 
sieurs   eaux   minérales    naturelles, 
ainsi  que  des  procédés  à  suivre  pour 
en  imiter  quelques-unes,  entre  autres 
les  sulfureuses.  Deux  Mémoires  sur 
la  respiration  de  la  tortue  et  sur  la 
structure  de  l'organe  de  l'ouie,  permi- 
rent d'apprécier  les   connaissances 
étendues  et  exactes  de  Charles  Leroy- 
sur  l'anatomie  de  l'homme  et  des  ani- 
maux. On  applaudit  moins  unanime- 
ment au  Mémoire  sur  le  mécanisme 
par  lequel  l'œil  s'accommode  aux  dif- 
férentes distances  des  objets.  Charles 
Leroy,     singulièrement     considéré 
comme  professeur,  jouit  de  bonne 
heure  de  la  réputation  d'un  habile 
praticien.  Ce  double  succès  se  trouve 
justifié  par  les  idées  qu'émit  ce  savant 
médecin  sur  le  scorbut,  sur  le  pro- 
nostic, et  sur  les  fièvres  aiguës  qu'il 
décrivit  admirablement  d'après  la 
nature.  Très-versé  dans  la  lecture  et 
dans  la  méditation  des  anciens,  il 
n'enseignait ,  d'après  eux ,  que  ce  que 
la  raison  et  l'expérience  avouaient 
et  confirmaient;  c'est    ainsi,   pour 
ne  citer  qu'un   exemple,  qu'en   re- 
connaissant   l'existence   et  l'utilité 
de  la  belle  doctrine  des  crises ,  il 
s'éleva  un  des  premiers  contre  celle 
des  jours  décrétoires ,  qui  présente 
en  effet  tant  d'obscurités  et  d'incer- 
titude. Sa  réputation  et  les  intérêts 
de  sa  famille  l'appelèrent,  en  1777, 
à  Paris,  où  il  fut ,  dès  son  arrivée ,  l'un 
des  médecins  les  plus  recherchés. 
Epuisé  de  fatigues ,  il  mourut  des 
suites  d'un  skirrhe  au  pilore ,  le  1 2 
décembre  1 779.  Ce  médecin  a  publié 


LER 

plusieurs  écrits  que  le  progrès  des 
scieuces  fera  oublier;  mais  la  pos- 
térité admirera  ceux  dont  les  titres 
suivent  :  I.  Mémoires  et  Observa- 
tions de  médecine ,  \^^.  partie  con- 
tenant deux  Mémoires surlesfièvres 
m'gM.95,  Montpellier,  1766,  in-S». 
II.  Mélanges  de  physique,  de  chi- 
mie et  de  médecine ,  Paris,  1771, 
in-8^.  m.  Mélanges  de  médecine, 
0.^.  partie  y  id.  Paris,  1776,  in-8*'. 
Voyez  son  éloge  par  DeRatte  (àMont- 
peliier);  (  àParis),  par  Vicq-d^Azir, 
et  par  Castilhon  dans  le  Nécrologe 
de  1781.  D-G-s. 

LEROY  (Jean -David),  frère 
des  précédents  ,  membre  de  l'acadé- 
mie des  inscriptions  ,  naquit  à  Paris 
en  17  28.  Il  se  livra  à  l'architecture, 
et  voulut  aller  en  étudier  les  plus 
beaux  modèles  dans  les  lieux  mêmes 
où  cet   art  s'est  élevé    à  son  plus 
haut  point  de  perfection.  Il  se  ren- 
dit d'abord  dans  la  Grèce  ,  et  pu- 
blia le  résultat  de   ses  recherches , 
dans  l'ouvrage  qu'il  fit  paraître  en 
1758,  sous  le  titre  de  Ruines  des 
plus  beaux  monumejits  de  la  G  rèee. 
Malgré  les  erreurs  assez  nombreuses 
que  renfermait  la  première  édition, 
et  qui  furent  relevées  avec  un  peu 
d'aigreur  par  Stuart ,  dans  ses  An- 
tiquités d'Athènes,  l'ouvrage  obtint 
du  succès ,  et  il  le  dut  surtout  aux  no- 
tions neuves ,  et  aux  excellents  prin- 
cipes qui  y   sont  développés.  Une 
seconde  édition  que  Leroy  donna  en 
1770,  et  dans  laquelle  il  rectifia  les 
erreurs  qu'on  lui  avait  reprochées , 
assura  le  succès  de  ce  livre ,  que  les 
amateurs    rechercheront    toujours. 
C'est  à  dater  de  sa  publication  que 
disparut,  de  l'architecture ,  le  mau- 
vais goût  introduit  en  France  ,  par 
les    Daviler   et  les  Oppenord ,    et 
qu'on  vit  renaître  celui  des  Grecs  , 
le  seul  qui  puisse  servii'  de  modèle. 


I.ER 

T.e$  leçons  qu*il  donna  pendant 
4o  ans,  à  l'aratlcinie,  comme  pro- 
fesseur d'an  liiUMtme,  arlievÎTcnt  la 
rc'volnlionqne  son  livre  avait  com- 
mciiree.  L'académie  des  belles-let- 
tres de  Paris  et  rinslitnt  de  )>oloj];nc 
s'empressèrent  de  l'admettre  dans 
leur  sein  ;  et  lors  de  la  formation 
de  rinslitnt,  il  fut  un  des  premiers 
membres  de  la  classe  des  beaux- 
arts.  Il  avait  étudie  et  aprofondi 
tout  ce  qui  est  relatif  à  la  marine.  Il 
fit  jilusieurs  tentatives  infructuotises 
])our  construire,  sur  la  Seine,  des  ba- 
teaux insubmersibles.  Leroy  mou- 
rut à  Paris,  le  'iS  janvier  i8o3, 
également  regrette  pour  ses  vertus 
privées  et  pour  ses  talents.  Une  mc'- 
daille  fut  frappée  ,  en  sou  honneur  , 
par  ses  élèves;  elle  porte  son  effigie 
sur  une  face ,  et  au  revers  une  co- 
lonne dorique  surmonte'e  de  l'oiseau 
de  Minerve ,  accompagnée  d'une 
galère  antique  ,  et  d'un  compas , 
avec  l'inscription  suivante  :  f^oté 
par  les  architectes  ses  élèves.  Voici 
la  liste  de  ses  ouvrages:  \.  Les  ruines 
des  plus  beaux  monuments  de  la 
Grèce  y  Paris,  i7')8,  'i  tom.  en  i 
vol.in-fol.  max., ligures.  La  seconde 
édition  ,  publiée  en  1770  ,  contient 
des  changements,  des  augmentations 
considérables  et  une  nouvelle  plan- 
che. II.  Histoire  de  la  disponiion 
et  des  formes  di/Jé rentes  que  les 
chrétiens  ont  données  à  lews  tem- 
ples,  17O4  ,  in-8".  ;  traduite  en  al- 
lemand ,  avec  les  remarques  de  l'ab- 
bé Laugier,  sur  l'architecture^ 
1778,  in-8".  III.  Obseivat ions  sur 
les  éditées  des  anciens  peuples  j 
Amsterdam  et  Paris ,  1 767  ,  in-8'^. 
IV.  La  marine  des  anciens  peuples 
expliquée  et  considérée  par  rapport 
aux  lumières  quon  peut  en  tirer 
pour  perfectionner  la  marine  mo- 
derne ,  I  vol. ia-80.  figures,  1777. 


LKR  «47 

V.  Les  navires  des  anciens  considé* 
rés  par  rapport  à  leurs  voiles  et  tt 
l'usaç^e  qu'on  pourrait  en  faire  dans 
notre  marine,  1783,  in-8".  L'auteur 
y  a  joint  des  observations  relatives 
à  la  marine  et  a  la  géographie.  Vî. 
Recherches  sur  le  vaisseau  l'ng 
des  anciens,  sur  les  vciles  latines,  et 
sur  les  moyens  de  dindnuer  les  dan- 
gers  que  courent  les  navigateurs. , 
178.5  ,  in-8°.  VIL  Mémoire  sur  les 
travaur  qui  ont  rapport  à  Vexploi" 
tation  de  la  mâture  dans  les  Pyré- 
nées ,  in-4°. ,  1778;  réimprimé  en 
i770,in-4^.  VllI.  Canaux  de  la 
Manche  a  Paris,  pour  ouvrir  deux 
débouchés  à  la  mer ,  et  faire  de  la 
capitale  une  ville  maritime ,  sui- 
vant  le  vœu  de  V .-issemblée  natio- 
nale ,  par  M.  D.  Leroy ,  projet  pu- 
blié par  Dupain-  Triel ,  pour  servir 
d'addition  à  sa  car'te  de  la  naviga- 
tion intérieure  du  royaume ,  1791  , 
in-8^.  IX.  Nouvelle  voilure  propo- 
sée  pour  les  vaisseaux  de  toutes 
grandeurs^  et  particulièrement  pour 
ceux  qui  seraient  employés  au  com- 
merce; précédée  de  Lettres  à  Frank- 
lin sur  la  marine ,  écrit  se:  van'  de 
suite  à  ceux queV auteur  aj/ubliéssur 
la  marine  ancierme,  iSao^inS^^Ajes 
Mémoires  qui  composent  l'ouvrage 
de  Leroy  sur  la  marine  des  anciens, 
ont  été  insérés  dans  le  Recueil 
de  l'académie  des  inscriptions  et 
belles-lettres.  Les  Mémoires  de  l'Ins- 
titut, classe  de  la  littérature  et  des 
beaux-arts,  renferment  encore  de 
Leroy:  Tome  i*^''.  Nouvelles  recher- 
ches sur  les  navires  employés  par 
les  anciens  ,  depins  l'origine  des 
guerres  puniques  ,  jusqu'à  la  ba- 
taille d'Actium,  et  suri  usage  qu'on 
en  pourrait  faire  dans  notre  mari- 
ne. Tome  II  :  Un  Mémoirv  sur  le  lac 
Mœris  (  imprimé  aussi  à  part ,  in- 
8*.  )  Tome  m  :  Second  Mémoiro 


24S 


LER 


sur  la  marine.  —  Des  petits  navires 
des  anciens ,  et  de  Vu, âge  que  nous 
en  pourrionsfaire  daîis  notre  marine 
militaire.  —  Troisième  et  dernier 
Mémoire  sur  la  marine  des  anciens, 
et  particulièrement  sur  n/i  bas-relief 
jfubliépar  ïVinkelmann,  et  représen- 
tant le  fragment  d'une  galère.    P-s. 
LEROY   (  Louis  )  ,   ne   dans  la 
îsormandie  ,  cil  janvier    17 '27,  fut 
reçu  avocat  au  parlement  de  Paris  , 
en  1 754  :  il  fut  lieutenant-général  du 
bailliage  du  Palais  à  Paris  ,  de  1760 
à    1766  ;  et    ensuite   membre   du 
Conseil  du  duc  de  Penthièvre.  Il  est 
mort  en   181 1,  à  St.-Germain-en- 
Laye,  laissant  manuscrit  un  Voyage 
en  Italie  dans  le  genre  du  Voyage 
d'Anacharsis  en  Grèce.  Il  a  publie  les 
Pensées  de  Cicéron,  trad.  nouvelle, 
ï8o'2  ,  3  vol.  in- 18.  — Leroy  de 
LozEMBRUNE   (  Frauçois  )  ,   né    en 
1751  ,  après  avoir  habité  succes- 
sivement Manheim  etLandsbut,  s'é- 
tablit à  Vienne,  où  il  devint  conseil- 
ler et  instituteur  des  archiducs  d'Au- 
triche. Il  est  mort  en   1801.  On  a 
de  lui  les  ouvrages  suivants  ,  tous 
en  français  r  I.    Lettres  et   contes 
sentimentaux  de  G.  TFandersum  , 
1777,  in-8".  IL  Matinées  de  Land- 
éckitz^  Vienne,  1779,  in-8^.  III. 
Essai  sur  l'abus  du  bien  moral, 
première  et  seconde  parties  ,  1 780  , 
in-8*^.  IV.  L' Ordre  moral  ou  déi>e- 
loppement  des  principales  lois  de  la 
nature  ,  Augsbourg  ,    1780  ,  in-4^. 
V.  Situation  politique  actuelle  de 
l'Europe  ,  considérée  relativement 
à  l'ordre  moral ,  pour   servir  de 
supplément  à  L' Ordre  moral ,  etc., 
1781 ,  in-8^.  VI.  Essai  de  morale, 
Bude  ,  1782  ,  '1  vol.  in  -  8^.  VIL 
Anecdotes  et  Remarques  sur  l'édu- 
cation publique  ,  Manheim,  1788  , 
in-8*'.  VIÎI.    OEuvres  mêlées  ,  en 
vers  et  en  prose  ,  Manheim  ,  1 788  , 


LER 

1  vol.  in- 16  ;  le  second  volume  est 
rempli  par  une  farce  en  trois  acte» 
et  en  prose,  intitulée  :  La  Statue  de 
Henri  IF,  ou  V ylllemand  à  Paris. 
IX.  Emire  et  ylgathée ,  Mirson  et 
Celide  ,  Cléophir  et  Sjrka ,  \  ienne , 
1 784  ,  in-8".  X.  Justine  de  Saint- 
Fal,  1786,  2  vol.  in-8«>.  XL  Ob~ 
serv avions  historiques  surles  progrès 
et  la  décadence  de  l'agriculture 
chez  diJJ'érents  peuples ,  par  M.  le 
comte  de  Hartig  ,  traduit  de  l'alle- 
mand ,  1790,  in-8*^.  A.  B-T. 

LEROY  (  Jacques-Agatdange  ), 
médecin  ,  né  à  Maubeuge  en   1 784, 
mort  à  Paris  le  11  février  181 2, ma- 
nifesta de  Irès-bonne  heure  sa  voca- 
tion pour  l'art  de  guérir  j  mais  une 
circonstance     singulière    faillit     la 
rendre  stérile.    Etudiant  la  chimie, 
le  jeune  Leroy  ,    trahi    dans    un 
attachement  qui  ne  méritait  pas  ce 
nom ,   et   privé  ,   presque  dans    le 
même    instant ,  d'un  frère  tendre- 
ment aimé  ,  se  crut  le  plus  malheu- 
reux de  tous  les  hommes  ,  et,  se  li- 
vrant au  délire  d'une  imagination 
très-ardente  ,  il  alla  s'ensevelir  à  la 
Trappe ,  oii  il   resta  une  année  en- 
tière. Cependant  ses  parents  ne  per- 
mirent pas  qu'il  y  fît  profession;  et 
cédant  à  leurs  instances  ,  il  revint  à 
ses    premières    études.    Ayant   été 
nommé  ,  à  l'âge  de  vingt-cinq  ans  , 
pharmacien   en  chef   des   armées, 
ce  fut  à  celte  époque ,  seulement  y 
qu'il  put  faire  l'application  de  ses 
connaissances   théoriques.  Le  grand 
nombre    de  maladies   qu'il  était  à 
portée  d'étudier ,  lui  donna  ce  coup- 
d'œil  sûr  et  cet  à-plomb  dans  l'ob- 
servation, qui  ne  sont  ordinairement 
dus  qu'à  une  longue  pratique.  A  son 
retour  de  l'Allemagne  ,  le  désir  de 
voyager  pour  étendre  ses  connais- 
sances,  le  détermina  à   faire  partie 
d'une  expédition  pour  Caïcnne.  Mais 


TER 

1.1  roloni»'  qu'il  suivit ,  devint  ,  en 
1  arrivant,  la  ])r()ic  de  maladies  Icr- 
libles  par  rinsalulirile  du  eliniat ,  et 
les  médecins  en  l'urenl  tous  atteints: 
Leroy  resta  seul ,  et,  après  avoir 
donne'  tous  ses  soins  aux  malades , 
avec  le  plus  p;rand  dévouement 
}>endant  une  anucc  entière ,  il  dut 
>'eloi^ner  d'un  pays  dont  il  avait  ètc 
'('  sauveur.  Aussitôt  après  son  re- 
!our  en  France  ,  il  fixa  son  séjour 
.1  Paris.  Ayant  essuyé  des  perles 
(  onside'rables  au  commencement  de 
la  révolution  ,  il  se  rendit  à  Lille , 
])uis  à  Dimkerquc  ,  et  y  mérita  le 
.surnom  de  médecin  des  pauvres. 
Dès  que  les  ora<res  révolutionnaires 
V  lurent  dissipes,  il  vint  reprendre 
•n  Paris  son  ancienne  profession,  qu'il 
\crça  jusqu'à  la  lin  de  sa  carricrc. 
il  avait  e'te'  agre'ge  à  plusieurs  so- 
«  ie'tès  savantes  ,  et  lie  avec  les  hom- 
mes de  lettres  les  plus  célèbres  de  la 
lin  du  dernier  siècle,  tels  que  J.  J. 
Rousseau,  Franklin,  Laharpe,  Mar- 
montel  ,  etc.  On  a  de  lui  ;  L  Essai 
nr  l'usage  et  les  ejfets  de  Vécorce 
^//f^rtrow,  Paris,  1767,  i774,in-rj. 
H.  fraité  des  maladies  aiguës  y  trad. 
du  latin  d'Eller^  Paris ,  1 774,  in-i 'j. 
IIL  Histoire  raisonvée  de  la  fièvre 
gangreneuse  qui  a  régné  à  Boche- 
fort  en  irGd;  IV.  Des  Moyens  de 
rendre  la  petite  vérole  bénigne  dans 
tous  les  cas.  Ces  deux  derniers  ou- 
vrages sont  inédits.  J-d. 

LEROY  (  Alphonse  -  Vincent- 
Louis  )  ,  professeur  d'accouché  - 
ment  à  la  faculté  de  Paris  ,  naquit  à 
Rouen  ,  le  u3  août  1741.  Doue  de 
l>paucoup  d'esprit ,  et  possédant  une 
vaste  érudition ,  il  ne  fit  ])as  toujours 
preuve  d'un  bon  jugement ,  cl  il 
"lopta  souvent  avec  opiniâtreté  les 
j»aradoxcs  les  moins  soulenables.  Il 
f'it  partisan  exagère  de  l'opération 
de  la  symphise  du  pubis  dans  ccr- 


LER 


a4o 


tains  cas  d'accouchemonl  ;  il  s'op- 
posa avec  ardeur  à  la  vaccine  qu'il 
atla(pia  dans  divers  écrits  ,  et ,  mai- 
gre les  succès  de  celte  pratique ,  il 
s'en  déclara  constamment  l'adver- 
saire. Leroy  était  anime  par  cet  cf- 
prit  de  controverse  dont  tous  ses 
écrits  sont  empreints  ,  et  qui  prési- 
dait à  toutes  ;*es  discussions.  Cepen- 
dant il  oblint  beaucoup  de  succis 
dans  les  maladies  des  femmes  eldan.s 
celles  des  enfants.  L'esprit  de  sys- 
tème nuisit  souvent  en  lui  au  savoir 
le  plus  étendu  ,  et  fit  même  tort 
aux  excellentes  qualités  de  son  cœur  : 
car  c'était  le  meilleur  des  hommes  ; 
et  l'on  peut  dire  ,  sans  exagération  , 
que  son  ame  était  dévorée  de  l'a- 
mour du  Lien  public.  Il  avait  des 
connaissances  aprofondies  sur  tou- 
tes les  parties  de  la  médecine  hu- 
maine et  vétérinaire  ;  mais  la  tour- 
nure paradoxale  de  ses  idées  se  faif 
trop  apercevoir  dans  les  nombreuses 
productions  de  sa  plume.  Leroy  a 
fini  sa  carrière  de  la  manière  la  plu* 
déplorable.  Il  habitait  seul  une 
maison  située  à  l'extrémité  d'un 
quartier  isolé.  Des  misérables  qu'on 
suppose  avoir  été  à  son  service  ,  et 
qui  connaissaient  ses  habitudes,  s'in- 
troduisirent chez  lui  pendant  la 
nuit  ,  le  surprirent  dans  son  som- 
meil et  regorgèrent  pour  le  voler , 
le  16  janvier  i8i(i.  Voici  la  liste  de 
ses  principaux  ouvrages  :  I.  Mala- 
dies des  femmes  et  des  enfants , 
avec  un  Traité  des  accouchements; 
tirés  des  aphorisme  s  de  Boerhaave, 
commentés  par  ran-Siviéten,  tra- 
duits et  augmentés  de  quelques 
notes  et  obsen'ations ,  1 768  ,  'i  vol. 
in-8*>.  IL  lîecherches  sur  les  habil- 
lements des  femmes  et  des  enfants , 
ou  Examen  de  la  manière  dont  il 
faut  vêtir  Vun  et  Vautre  sexe , 
1772,  in- 12.  III.  Lettre  sur  la  ma-^ 


95*  LER 

nière  de  terminer  l'a^'couchement 
dans  lequel  le  h  as  de  V enfant  e  t 
sorti  de  la  matrice ,  et  ex  amen  de 
topinion  du  sieur  Levret  sur   ce 
sujets  177^7  in-H'*.  IV.  La  Pra- 
tique dr  Vart  des  accouchements  , 
1776,  m-8''.  V.  M.  Alphon'-e  Le- 
roy à  son  critique,  in-8'^.  Cet  opus- 
cule est  une  réponse  à  Tauteur  des 
Lettres  de  31*** ,  étudiant  en  chi- 
rurgie ,  sur  la  Pratique  des  accou- 
chemens   de   M.    L^eroj,    L'auteur 
anonyme    était  le   chirurgien  -  ac- 
coucheur Piet.  VI.  Recherches  his- 
toriques ,  etc. ,  sur  la  section  de  la 
sympHse  du  pubis  ,    1778,  in-8". 
VU.  O  sensation  et  Béjlexions  sur 
l'opération  de  Ici  symphise   et  les 
accouchements  laborieux  ,   1780  , 
in-8".  VIII.  Consultation  chimico- 
légale  sur  la  question  :  L'approche 
de  certaines  personnes  nuit-elle  à 
la  fermentation  des  liqueurs  ?  1 780, 
in-B».  ÏX.  Essai  sur  l'histoire  na- 
turelle de  la  grossesse  et  de  l'ac- 
couchement,  1787  ,  in-8°.  X.  Mo- 
tifs et  plan  de  l'établissement,  dans 
l  hôpital  de  la  Salpétrière ,    d'un 
sémin  dre  de  médecine  pour  l'ensei- 
gnement des  maladies  des  femmes 
et  la  conservation  des  enfants^  1 790, 
in-8**.  XI.  L'enfant  qui  naît  à  cinq 
mois  peut-il  conserver  la  vie  ?  Ques- 
tion médico-légale ,  dans  laquelle 
on  expose  quelques  lois  de  la  na- 
ture  propres    à   donner    quelques 
éclaircissements  sur  ce  qu'est  la  rfie, 
X  790,  in-4°.  XII.  De  la  nutrition  et 
de  son  influence  sur  la  forme  et 
lafécondité  des  animaux ,  etc. ,  et  de 
l'influence  de  la  lumière  sur  l'éco- 
nomie animale  ,  1 798  ,  in-B**.  XIII. 
Leçons  sur  les  pertes  de  sang  pen- 
dant la  grossesse,  lors  et  ensuite 
des  accouchements ,  sur  les  fausses 
coucJies  et  sur  toutes  les  hémor- 
ragies,  publiées  par  J.  F.  Lobstein, 


LER 

iSoi,iSo3,in-S'>.X\\.  Manuel  des 
gmtteux  et  des  rhumatiques  ;  Re- 
cueil desprincp aux  remèdes  ration- 
nels, empiriques,  eu  atifs  et  préser- 
vatifs de  ces  maladies,  1 8o3,  in- 18; 
seconde  édition  ,  i8o5  ,  in-S"*.  ;  elle 
est  augmentée  de  la  traduction  de 
l'ouvrage  du  D,  Tavarès  :  Sur  un 
art  nouveau  de  guérirles paroiismes 
de  la  goutte, et  de  la  preuve  qu'elle 
siège  primitivement  dans  les  nerfs, 
XV.  Médecine  maternelle,  ou  L'art 
d'élever  et  de  conserver  les  enfants, 
i8o3  ,  in-8«.  XVI.  Manuel  de  la 
saignée  ;  utilité  de  celle  du  pied  ; 
dangers  de  celle  du  bras  ,  etc.  , 
1807  ,  iu-TCi.  XVI [.  De  la  conser- 
vation des  femmes  ,  1 8 1 1  ;,  in-8^. 

XVIII.  De  la  contagion  régnante 
sur  les  vaches  ,  sur  les  bœufs  ,  et 
sur  l'homme,  en  quelques  contrées 
de  la  France  ,  etc.  ,   1 8 1 4  ■>   iu-8°. 

XIX.  De  la  contagion  sur  l'homme, 
sur  les  vaches  et  sur  les  bœufs  ,  de 
ses  moyens  préservatif',  et  curatifs, 
etc. ,  181 5,  in-80.  Il  suffit  de  lire  les 
différents  litres  qui viennert  d'être  ci- 
tés ,  pour  apprécier  la  bizarrerie  des 
idées  de  Leroy  et  l'incorrection  de 
son  style.  Ce  médecin  appartenait  à 
la  Faculté  de  Paris  ,  avant  la  révolu- 
tion, et  il  s'était  déjà  signalé  dans  sa 
compagnie  parl'abus  dusavoiretpar 
la  singularité  de  son  esprit.  Il  ne  dut 
son  admissionaux nouvelles  écoles  de 
médecine  qu'à  ces  mêmes  travers,  qui 
l'en  auraient  fait  exclure  dans  des 
temps  plus  calmes  :  aussi ,  pendant 
plus  de  vingt-deux  années  de  pro- 
fessorat, Leroy  n'a  rien  fait  pour 
l'avancement  de  son  art.  Les  élèves 
désertaient  ses  leçons  ;  ses  collègues 
redoutaient  ses  controverses  intermi- 
nables ,  et  son  caractère  désappro- 
bateur des  idées  d'autrui.  Nul  d'entre 
eux  n'a  payé  à  sa  cendre  le  tribut 
d'usaçîe.  E-R. 


LER 

LKRY  (  Jean  DE  ),  voya^piir,  ne 
153/1  ^  ^^  Miirj^elle,  pris  Saint- 
vue  eu  Bour«;opnr,  ctiuli.nt  la 
lologie  à  (iriirve,  lorsque  l'on  y 
lit  (les  lettres  du  chevalier  de  Viî- 
i'^agnou,  qui  demandait  qu'o!i  lui 
«nvoyàt  au  Brésil,  où  il  venait  de 
londer  une  colonie  prolestante,  des 
juinistr^'s  ])our  l'aider  à  répandre 
1  Iwanple.  Quatorze,  tant  ministres 
qu'étudiants,  du  nombre  desquels 
était  Léry,  se  pre'sentèrenl  pour  le 
\oyage  du  Nouveau-Monde, et  par- 
tirent de  Genève  le  10  septembre 
1^56.  Us  virent  en  passant  l'amiral 
de  Goligny  à  Cliâtillon-sur-Loing,  et 
s'embarquèrent  à  Honf^eur ,  le  19 
novembre.  Leur  petite  flotte,  com- 
posée de  trois  bâtiments  ,  après 
avoir  reconnu  le  cap  de  Frie(Frio) 
où  l'on  ne  fît  pas  ,  dit  Léry  ,  aussi 
long  séjour  que  l'on  aurait  voulu , 
entra,  le  7  mars  i557,  dans  le 
bras  de  mer  nommé  Ganabara  ])ar 
les  Sauvages  ,  et  par  les  Portugais 
Genevre ,  parce  qu'ils  le  découvri- 
rent le  I  «r.  janvier.  On  voit  que  c'est 
Rio-Janéiro.  Villcgagnon  accueillit 
les  nouveaux-venus  dans  la  j)ctite 
île  de  Goligny,  où  il  avait  bàli  un 
fort;  et  dès  le  lendemain ,  sans  égard 
pour  leurs  fatigues  et  pou'  l'exces- 
sive chaleur,  il  les  employa  à  por- 
ter des  pierres  et  de  la  terre  au  fort, 
et  poussa  la  cruauté  jusqu'à  ne  leur 
donner  qu'une  très-mauvaise  nour- 
riture. Mais  le  désir  d'achever  les 
édifices  qui  devaient  servir  de  re- 
trai»e  aux  fidèles,  et  les  exhortations 
du  plus  ancien  ministre  ,  leur  firent 
supporter  assez  gaîment  pendant  uu 
mois  toutes  les  privations.  Cepen- 
dant des  dissensions  religieuses  s'é- 
levèrent ensuite  entre  les  protestants 
et  Villegagnon;  et  celui-ci  leur  signi- 
fia l'ordre  de  quitter  le  fort.  Ils  se 
ûrèrent  sur  le  coulincut  à   une 


LER  afïf 

demi-lioue  de  distance.  La  conduite 
arbitraire  du  couverncur  fit  pas- 
ser beaucoup  de  monde  avec  eux. 
Les  mêmes  incidents  firent,  quelques 
années  plus  tard,  manquer  l'établis- 
sement de  la  colonie  que  les  calvi- 
nistes français  voulurent  former 
dans  rAmérique-Septrntrionale  (  f^. 
LaudoniÈre).  La  crainte  d'une  plus 
grande  désertion  fil  prendre  à  Ville- 
gagnon le  parti  de  permettre  aux  dis- 
sidents de  retourner  en  France.  Ils 
s'embarquèrent  donc  ,  le  4  janvier 
i558,  sur  \e  Jacques,  qui  entra  dans 
le  port  de  Blavet  en  Bretagne ,  après 
avoir  échappé  aux  plus  grands  dan- 
gers et  éprouvé  les  horreurs  de  la  fa- 
mine. On  pense  que  Léry  exerça  en- 
suite son  ministère  en  France  dans 
les  environs  de  la  Charilé-sur-Loire. 
Contraint  de  se  réfugier  à  San- 
cerre  en  1578,  il  resta  dans  cette 
ville  durant  le  siège  qu'elle  soutint. 
La  famine  horrible  à  laquelle  on  j 
fut  réduit ,  affaibUt  de  nouveau  sa 
santé  ,  qui  ne  s'était  jamais  bien 
rétablie  depuis  sou  voyage  ;  il 
mourut  en  161 1.  On  a  de  lui:  I. 
Histoire  d'un  vojage  fait  en  la 
tf^rre  du  Brésil,  autrement  dite 
Amérique,  Rouen,  1578,  in-8<*.  fig. 
en  bois;  la  Rochelle,  même  année, 
édition  revue  et  corrigée  par  l'au- 
teur; Genève  ,  i58o,  iu-8^.;  la  Ro- 
chelle, 1 585,  in-8".;  Paris,  1600, 
in-8**.  Léry  avait  écrit  la  plupart  de 
SCS  Mémoires  en  Amérique  même, 
et,  comme  il  le  dit,  d'encre  du  Brésil, 
Il  les  mit  en  ordre  en  i563.  Son 
manuscrit  s'égara  :  un  heureux  ha- 
sard le  lui  fit  recouvrer  en  1576. 
«  Voilà  comme  jusqu'à  présent,  dit» 
»  il,  ce  que  j'avais  écrit  sur  l'Araé- 
»  rique  m'ctant  toujours  échappé  des 
»  mains,  n'avait  pu  venir  en  lu- 
w  mière.  »  11  retoucha  ensuite  sou 
livre  ;  et  le  traduisit  eu  latin  sous  ce 


952  LER 

titre  :  Historia  navigationis  in  Bra- 
sillain  y  gallicè  scripta ,  nunc  jyri- 
rnùm  lanititate  ilonata ,  Gencye, 
j58G,  in-8«.;ibid.  iSq/j,  iii-8^  fjg. 
C'est  une  des  bonnes  relations  de 
voyages  que  nous  ayons  en  français. 
Léry  fait  connaître  les  mœurs  et  les 
coutumes  des  peuples  qui  habitent 
le  Brésil,  les  productions  du  pays, 
et  les  établissements  que  les  Euro- 
péens venaient  d'y  former.  Un  des 
chapitres  les  plus  curieux  est  le  dix- 
neuvième,  dans  lequel  il  donne  un 
dialogue  en  langue  brasiliennc,  et 
ensuite  quelques  notions  sur  la  gram- 
maire de  celte  langue.  «  Ce  qui  ins- 
»  pire,  dit  Camus,  de  la  confiance 
»  pour  les  observations  de  Lëry, 
»  c'est  que  non-seulement  il  a  été 
))  témoin  des  faits  qu'il  rapporte: 
î)  de  plus  il  paraît  avoir  pris  les 
))  moyens  de  s'assurer  de  la  vérité, 
y>  avoir  observé  avec  attention  et 
y>  l'esprit  dégagé  de  préjugés.  II  a 
»  été  aidé  dans  ses  observations  sur 
»  la  langue  brasilienne  par  un  inter- 
»  prèle  qui  avait  vécu  sept  ans  chez 
»  les  Indiens,  et  qui  savait  aussi  le 
»  grec^  il  prétendait  trouver  dans  la 
»  langue  des  Brasiliens  plusieurs  ex- 
»  pressions  venues  du  grec.  »  Léry  dé- 
clare que  tout  ce  qui  se  voit  en  Améri- 
que ,  soit  pour  la  façon  de  vivre  des 
habitants,  soit  pour  la  forme  des  ani- 
maux et  en  général  pour  ce  que  la  terre 
produit,  est  différent  de  ce  qu'on  a 
dans  l'ancien  monde.  Il  a  fait  dans 
ses  éditions  successives  des  augmen- 
tations et  changements,  et  a  indiqué 
dans  l'édit.  latine  plusieurs  suppres- 
sions ,  qui  portent  principalement 
sur  des  diatribes  contre  Thevet  et 
des  plaintes  fort  étendues  contre 
Villegagnon.  La  relation  de  Léry  est 
insérée  en  latin  dans  le  troisième  vo- 
lume des  grands  Voyages  de  DeBry. 
Les  planches  que  cet  éditeur  a  jointes 


LES 

au  texte  sont  pour  la  plupart  dc« 
répétitions  de  celles  qu'il  avait  déjà 
insérées  dans  la  relation  de  Stade  et 
ailleurs.  Purchas  a  fait  entrer  le 
Voyage  de  Léry  dans  le  tome  iv  de 
son  recueil;  il  se  trouve  aussi  dans 
d'autres  collections.  Les  aventures 
rapportées  danssondernier  chapitre, 
qui  contient  l'histoire  de  sa  naviga- 
tion pour  revenir  en  France ,  l'ont 
fait  insérer  dans  l'histoire  des  Nau- 
frages. IL  Histoire  mémorable  de 
la  wlle  de  Sancerre ,  contenant  les 
entreprises,  sièges,  approches,  bat- 
teries ,  assauts  et  autres  ejforts  des 
assiégeants  ;  les  résistances ,  la  fa- 
mine extrême  et  la  délii^rance  des 
assiégés,  ^5'jf^,  in-8^. ;  publiée  en 
latin  sous  ce  titre  :  De  Sacro-Cœsa- 
rei  quod  Sancerrum  vocant ,  obsi- 
dione ,  famé ,  deditione ,  Historia, 
Heidelberg,  layG,  in-S''.        E-s. 

LE  SAGE  (  Alain-Rene)  ,  auteur 
du  meilleur  de  nos  romans ,  et  de 
l'une  de  nos  plus  eslimables  comé- 
dies, a  été  négligé  par  les  biographes, 
au  point  que  l'année  et  le  lieu  de  sa 
naissance  et  de  sa  mort  ont  été  jus- 
qu'à ce  jour  des  sujets  d'incertitude 
et  de  contradiction;  que  son  origine, 
la  profession  de  ses  parents,  l'épo-» 
que  de  son  mariage,  ont  été  abso- 
lument ignorées,  et  que  l'on  n'a  guère 
mieux  connu  les  noms  et  la  deslinée 
de  ses  enfants.  L'intérêt  que  nous  a 
semblé  mériter  la  mémoire  de  Le  Sa- 
ge, et  l'exactitude  scrupuleuse  dont 
nous  nous  sommes  imposé  l'obli- 
gation ,  nous  ont  délerminés  à  faire 
sur  sa  personne,  sa  famille  et  ses 
ouvrages  des  recherches  qui  n'ont 
pas  été  infructueuses   (  i  ).  Unique 


(i)  Outre  les  renseignements  qne  nons  avon» 
puisés  noîis-niènius,  tant  aux  archives  du  royau- 
me, «{u'à  celles  du  Ministère  des  affaires  etran- 
f  ères  et  de  l'elat  civil  à  l'avis,  le  JMiiiislre  <l« 
iutfilvui'  a  biuu  vuulu  nous  commuuiquvt  W» 


LE5 

fruit  (lu  mariage  de  Claude  Le  Sage 
'  de  demoiselle  Jeanne  Brenugat , 
liin-Rciic  naquit  le  8  mai  i(i08,  à 
Il  Ae«u,  petite  ville  de  la  presqu'île 
Rhuys,à  quatre  lieues  de  Vannes, 
n  père ,  avocat ,  notaire  et  greilier 
la  cour  royale  de  Rhuys, était  rcpu- 
ic  richc,daus  un  pays oùla simplicité 
les  mœurs  exclut  les  besoins  et  les 
lissances  du  luxe.  Mais  Le  Sage, 
.<  vant  perdu  sa  mère  en  1677  et  son 
]>î  re  en  iG8i,  resta  sous  la  tutelle 
(l'un  oncle,  qui  laissa  dëpërirla  for- 
tune de  sou  pupille.  Place  au  collège 
s  Jésuites  de  Vannes ,  il  y  fit  d'cx- 
!  lentes  études  ;  sa  vie  offre  ensuite 
nue  lacune  de  cinq  à  six  ans.  C'est 
|irobablement   dans    cet  intervalle 
"il  fut  employé  dans  les  fermes  , 
I  Bretagne  (i).  Ou  ignore  par  quel 
ïiiotif  et  à  quelle  époque  il  perdit 
un  poste   si  peu   convenable  à  ses 
ùts  et  à  son  caractère.  S'il  eut  à  se 
I  iaindre  d'une  injustice  ,  comme  00 
1<  pense  généralement,  la  haine  qu'il 
m  conçut  contre  les  traitants,  laissa 
flans  son  cœur  de  profondes  racines, 
rt  dicta  l'éclatante  vengeance  qu'il  en 
lira   quinze  ans  plus  tard.  Le  Sage 
vint  à  Paris, en  i(k)'2,dans  le  double 
but  d'y  faire  sa  philosophie  et  son 
droit,  et  d'y  postuler  un  nouvel  em- 
jtloi.  Avec  une  figure  agréable  ,  une 
t  iille  avantageuse,  beaucoup  d'es- 
}u  it  naturel  et  un  goût  exquis  pour 
il  belle  littérature,  il  fut  bientôt  ré- 

Jjandu  et  recherché  dans  les  meil- 
cures sociétési  II  eut,  dit-on ,  mie  in- 
trigue avec  une  ferarae  de  qualité , 
qui  lui  offrit  sa  main  et  sa  fortune  ; 
mais  cette  aventure  n'eut  ni  éclat  ni 


LES  :i.i 

suite  ,  et  Ton  ignore  jusqn^ati  nom 
de  la  personne  qui  en  fut  l'héroïne. 
H  est  certain,  d'ailleurs,  que  vers  lo 
même  temps.  Le  Sage  devint  amou- 
reux d'une  tri^s-jolie  personne,  plus 
aimable  que  riche  ,  nommée  Marie- 
Klisabelh  Huyard  (  i  ),  fille  d'un 
bourgeois  de  Paris ,  qui  demeurait 
sur  la  paroisse  de  St.  liarthélemi  ea 
la  Cité,  et  non  d'un  maître  menui* 
sier,  rue  de  la  Mortellerie  (  comme, 
l'ont  dit  ses  biographes).  Le  17  août 
1  Gç)4  j  il  obtint  de  l'archevêque  de 
Paris  une  dispense  de  publication  de 
bansj  mais  son  mariage  fut  célèbre' 
seulement  le  28  septembre  suivant 
dans  l'église  de  Saint-Sulpice.  Si 
l'amour  et  l'hymen  ne  purent  dé- 
tourner Le  Saige  de  son  penchant  pour 
les  lettres ,  une  circonstance  qui  fait 
honneur  a  son  cœur  ,  c'est  que  l'a- 
mitié influa  beaucoup  sur  ses  tra- 
vaux littéraires.  Danchet ,  avec  le- 
quel il  s'était  intimement  lié  à  l'uni- 
versité de  Paris  ,  lui  conseilla  de 
traduire  les  Lettres  galantes  à'A- 
ristenète  ,  et  se  chargea  de  les  faire 
imprimer  à  Chartres,  où  il  était 
alors  professeur  de  rhétorique.  Cet 
ouvrage,  fait  d'après  une  version  la- 
tine, parut  en  1(395,  I  vol.  in-i2  , 
sous  l'indication  de  Rotterdam  (  F, 
ApjsteivÈte,  tom.  II,  pag.  438  ,  et 
Dancuet  ,  tom.  X,  p.  4^5),  et  fut 
aussi  froidement  accueilli  des  sa- 
vants que  des  gens  du  monde  (2). 
Fixé  désormais  dans  la  capitale»  Le 
Sage  s'était  fait  recevoir  avocat  au 
parlement  j  il  n'en  prenait  déjà  plus 
le  titre  à  la  naissance  de  son  second 
fils,  en  iG<)8,  et  ne  se  quabfiait  ipie 


B«te»  ofltcielles  «]oe,  d'après  notre  <lemanil«  ,  il 
•  piioMM.  le*  !Srlett  du  Qiorbilian  «t  du  Pai. 
<!«  Cdiaia,  de  recutillir  lur  Ira  {ireuiiirus  «t  lea 
dMuièrca  années  d«  l'auteur  de  Gil-ltlas. 

(1)  Let  rrgiftrei  det  Fermea  n'eiiit^nt    y\w% 
■J-;»!!»»  la  révolution  ,  l'on  «'a  riea  pu  dévauvrir 
plu*  pre«ta  4  ce  «MJ*!. 


(i)  Ce  nom  o»t  «crit  Wy.iit  »ur  les  ifgi«tret 
ni4>rtiiair<**  de  Boulogno-aur-Mer  ;  mai*  nou* 
lavon*  écrit  Huyard  ,  lomoie  il  est  porté  «ur 
lea  registre*  de  Saïul  Snlpice  et  de  St.-lluiiacli«. 

(a)  De*qHarante-Jaux  lettre»  que  contient  cettv 
traduction  paraphrase*)  ,  1  Auteur  eu  fit  eiitrur 
tlepiiis.  Tin;>t-(|u«tr«,  aToc  de»  corrcvtiuu»,  Uau^ 
aa  f^mtis»  lr9t*v*t. 


1254  I^î^S 

bourgeois  de  Paris.  Quoiqu'il  eût 
beaucoup  d'amis ,  comme  il  n'était 
lii  intrigant ,  ni  pressant  dans  ses 
sollicitations,  il  vécut  quelque  temps 
dans  un  état  au-dessous  de  la  mé- 
diocrité', avant  d'obtenir  un  emploi 
peu  lucratif,  auquel  il  renonça  bien- 
tôt pour  se  consacrer  entièrement 
aux  Muses.  Le  mare'clial  de  Villars, 
qui  connaissait  son  mérite,  voulut 
inutilement  s€  l'attacher  :  Le  Sage 
résista  aux  propositions  les  plus 
flatteuses,  et  prêtera  toujours  son 
indépendance.  Prive  des  faveurs  de 
la  fortune ,  il  en  fut  dédommage'  par 
la  sincère  et  constante  amitié  d'un 
bomme  puissant.  L'abbé  de  Lyonne 
ne  se  borna  pas  à  le  combler  de 
présents  ,  et  à  lui  assurer  une  rente 
de  600  livres  :  passionné  pour  la 
langue  espagnole  ,  il  l'apprit  à  son 
ami,  et  lui  fit  goûter  les  beautés  de 
la  littérature  castillane.  Trois  comé- 
dies en  cinq  actes  ,  le  Traître 
puni,  de  D.  Francesco  de  Roxas, 
Don  Félix  de  Mendoce ,  de  Lopez 
de  Vega,  elle  Point  d^ honneur  du 
même  Roxas,  furent  les  premiers 
ouvrages  que  Le  Sage  traduisit  ou 
plutôt  imita  de  l'espagnol.  Les  deux 
premières  pièces,  non  représentées, 
furent  imprimées  en  i  -j 00  ;  et  la  troi- 
sième, jouée  avec  peu  de  succès  au 
Théâtre  français  le  3  février  170*2, 
réduite  depuis  en  trois  actes  par 
l'auteur,  et  donnée  en  i7'25,  au 
Théâtre  italien,  sous  le  titre  de  V ar- 
bitre des  différends,  avec  un  prolo- 
gue, n'y  obtint  que  deux  représenta- 
tions, et  fut  imprimée  en  1739,  sous 
son  premier  titre.  Le  Sage  publia,  de 
1704  à  17  06 ,  les  Nouvelles  aventures 
de  Don  Quichotte,  traduites  d'Avel- 
laneda,  1  vol.  in-12,  qui  ne  réussi- 
rent pas  mieux  que  l'original  espa- 
gnol du  froid  continuateur  de  Ger- 
Yantes(F.  Ayella^eda,  III,  108}. 


LES 

L'année  1707  assura  enfin  à  LeSage 
un  nom  dans  la  littérature  ,  en  lui 
procurant  un  double  triomphe,  d'au- 
tant plus  flatteur  ,  qu'il  fut  précédé 
d'une  chute.  Sa  comédie  de  Don 
César  Ursin,umléQ  de  Galderon  ,  et 
applaudie  àla  cour,  tomba  auThéâtre 
français,  le  i5  mars,  et  ne  fut  impri- 
mée qu'en  1 739;  tandis  que  la  petite 
pièce  de  Crispin  rival  de  son  maître, 
qui  n'avait  paru  aux  courtisans  qu'une 
misérable  farce ,  était  jouée  à  Paris  le 
même  jour  avec  le  plus  brillant  suc- 
cès. Lesage,  qui  connaissait  l'esprit 
et  les  mœurs  des  deux  aréopages,  n« 
s'étonna  pas  de  la  contradiction  de 
leurs  arrêts;  et  la  postérité  a  confirmé 
celui  de  la  ville.  Regnard  ,  suivant  | 
Palissot  ,  n'a  rien  produit  de  plus 
gai  que  la  jolie  pièce  de  Crispin  ri- 
val, dont  Laharpe  semble  avoir  fait 
trop  peu  de  cas.  Elle  ne  roule  vé- 
ritablement que  sur  une  fourberie 
de  valets;  mais  la  vérité  du  dialogue, 
qualité  qui  distingue  éminemment 
Lesage ,  et  qui  le  rapproche  le  plus 
de  Molière  ,  le  sel  des  plaisanteries 
toujours  amenées  par  le  sujet ,  l'heu- 
reux enchaînement  et  la  rapidité  des 
scènes,  provoquent  le  rire  et  entraî- 
nent le  spectateur.  Peu  de  temps 
après  parut  le  Diable  Boiteuc ,  im- 
primé en  1707  ,  dont  Le  Sage  a 
pris  le  nom  et  l'idée  dans  El  Dia- 
blo  Cojuelo ,  de  Louis  Vêlez  de 
Guevara.  (  F'oyez  ce  nom ,  tome 
XIX  ,  pag.  41.)  Cet  ouvrage  est  la 
satire  de  tous  les  états.  Quoique  le 
merveilleux  qui  en  fait  le  fonds  ,  ne 
donne  lieu  qu'à  des  récits  épisodi- 
ques, cependant  la  diversité  des  aven-, 
tures,  une  critique  vive  et  ingénieuse  , 
la  vérité  des  portraits,  un  style  ner- 
veux et  correct ,  des  anecdotes  pi- 
quantes,relatives  à  quelques  contem- 
porains ,  entre  autres  ,  celles  qui  ont 
trait  à  Ninon,  à  Baron ,  au  mariage 


LES 

dr  Dufrcsny ,  ont  conserve  à  ce  ro- 
inaii  une  reputalion  mcVitce.  Il  eut, 
dans  le  temps  ,   une   vo^ue  prodi- 

§i(nise  ,  et  occasionna  un  duel  entre 
eux  jeunes  seigneurs,  qui  se  dispu- 
taient  le  dernier   exemplaire  de  la 
seconde  édition.  Dix-neuf  ans  après, 
Le  Sage  en  donna  une  troisième  , 
augmentée  d'un  volume ,  ixjur  lequel 
il  dit  avoir  erapn;ntë  clés  vers  et 
quelques  images  à  Francisco  Santos, 
!     auteur  de  Dia^y  noche,  de  Madrid: 
I    en  1737,  il  pulilia  la  4^.  édition  ,  à 
laquelle  il  ajouta  V  Entretien  des  clie- 
miriées  de  Madrid ,  et  les  Béq  lilles 
dit  Diable  hoteuxy  opuscules  dont 
Fun  est  une  suite  du  roman,  et  l'autre 
(parrabbeBordelon)enesireloge,  Il 
avail  presenteaux  comédiens  une  piè- 
ce en  un  acte,  intitulée,  les  EtrenneSj 
pour  être  joue'e  le  r  '^.  janvier  1708: 
sur  leur  refus,  il  la  refit  en  5  actes,sous 
te  titre  de  Turcaret;  mais  il  eut  moins 
de  peine  à  la  faire  recevoir  qu'a  la  faire 
représenter.  Celte  comédie,  l'un  des 
plus  beaux  titres  de  gloire  de  l'au- 
teur, parut  a  une  époque  oii  les  mal- 
heurs et  les  besoins  de  la  France 
avaient  multiplié  les  traitants  et  les 
maltotiers,  dont  les  noms  abolis  par 
l'usage  et  devenus  presqu'injurieux 
ont  été  remplacés  par  ceux  d.e  four- 
nisseur et  d'agioteur,  qui  nesont  guère 
plus  honorables.  Voulant  signaler  sa 
haine  contre  ces  vampires,  Le  Sage 
avait  lu  sa  pièce  dans  plusieurs  so- 
ciétés. Le  bruit  des  applaudissements 
Qu'elle  y  avait  obtenus  ,  alarma  les 
nanciers.  Ils  cabalèrent  parmi  les 
actrices  pour  empêcher  la  représen- 
Tition  de  la  satire  la  plus  amère  à-la- 
is et  la  plus  g^iequiait  été  dirigée 
<  ontre  eux.  La  duchesse  de  Bouillon, 
ijui  tenait  chez  elle  un  bureau  d'es- 
prit, promit  sa  proleclion  à  l'auteur, 
et  lui  lit  demander  une  lecture  de  sa 
pièce.  Au  jour  coaveuu,  Le  Sage  ve- 


LES  2^5 

tenu  au  Palais  par  le  jugement  d'un 

I)rocès  important,  qu'il  eut  le  mal- 
leur  de  perdre  ,  ne  put  ctre  exact  au 
rendez-vous.  En  entrant  chez  la  prin- 
cesse ,  il  raconte  sa  disgrâce  rt  se 
confond  en  excuses.  On  le  reçoilavec 
hauteur;  on  lui  reproche  aigrement 
d'avoir  fait  perdre  deux  heures  à  la 
compagnie.  «  Madame,  dit  Le  Sage, 
avec  autant  de  sang-froid  que  de  di- 
gnité: u  Je  vous  ai  fait  perdre  deux 
»  heures: il  est  justede  vous  les  faire 
»  regagner;  je  n'aurai  point  l'hon- 
»  neur  de  vous  lire  ma  pièce.  »  On 
s'eiïbrça  de  le  retenir,  on  courut  après 
lui;  mais  il  ne  voulut  ni  rentrer,  ni 
remettre  les  pieds  dans  cet  hôtel.  A 
un  grand  caractère ,  avantage  qui  ac- 
compagne toujours  le  vrai  talent , 
Le  Sage  joignait  une  ame  fière  et  dé- 
sintéressée. Les  financiers  lui  offrirent 
cent  mille  francs  pour  l'engager  à 
retirer  du  théâtre  une  comédie  qui 
devait  mettre  au  grand  jour  les  se- 
crets et  les  turpituclesde  leur  métier; 
mais  ,  malgré  sa  pauvreté  ,  il  rejeta 
leurs  oflres  ,  et  sacrifia  sa  fortune 
au  plaisir  d'une  vengeance  légitime. 
Furieux  de  son  refus  ,  ils  redoublè- 
rent leurs  intrigues  ;  et  il  ne  fallut 
rien  moins  qu'un  ordre  de  Monsei- 
gneur, daté  du  1 3  octobre  1708,  et 
consigné  sur  le  registre  de  la  Comé- 
die française,  pour  forcer  les  comé- 
diens d'apprendre  et  de  jouer  7'«r- 
caref.  Celte  j)lèce  fut  enfin  représen- 
tée le  1 4  février  1 709  ;  et  malgré  les 
efforts  delà  cabale,  malgré  les  mur- 
mures des  gens  qui  avaient  cru  s'y 
reconnaître,  malgré  le  froid  excessif 
qui  olligea  de  fermer  les  spectacles, 
elle  obtint  la  plus  brillante  réussite. 
L'auteur  y  avait  joint  une  sorte  de 
critique  en  forme  de  prologue  et  d'é- 
pilogue, dialoguée  entre  dom  Cléo- 
phas  et  Asmodéc ,  les  deux  princi- 
paux personnages  du  Diable  Boiteux  ; 


256 


LES 


mais  on  la  supprima  dès  la  première 
reprise.  Cette  comcclie  est  bien 
superiem'e  à  toutes  celles  que  Le 
Sage  a  imitées  de  l'espagnol  ;  et 
son  succès  ne  s'est  jamais  dëmenli. 
On  a  reproche  à  cet  ouvrage  de  trop 
mauvaises  mœurs  ;  mais  si  la  comé- 
die doit  peindre  le  vice,  et  le  présen- 
ter sous  le  point  de  vue  ridicule  , 
Le  Sage  a  parfaitement  atteint  ce  but. 
Ecrivain  très-moral ,  il  n'a  jioint  eu 
Ictort  de  rendre  le  vice  séduisant  ;  re- 
proche mérite  par  quelques  -  uns  de 
nos  auteurs  comiques.  Tous  les  per- 
sonnages de  Turcaret  ,  excepte  le 
marquis  ,  sont  plus  ou  moins  fri- 
pons ,  mais  aussi  ils  sont  tous  plus 
ou  moins  méprisables  :  et  si ,  par  ce 
motif,  la  pièce  manque  d'intérêt  , 
défaut  moins  sensible  dans  la  come'- 
die  que  dans  la  tragédie;  si  l'action 
en  est  faible  et  presque  nulle ,  ces 
défauts  sont  amplement  rachele's  par 
un  grand  nombre  de  scènes  excel- 
lentes ,  par  des  peintures  vraies  ,  un 
dialogue  vif  et  naturel ,  luie  gaîtë 
piquante  et  satirique  ,  par  la  finesse 
des  détails  ,  par  une  liberté ,  une 
force  d'expressions ,  qui  décèlent 
l'homme  de  génie  pénétré  de  son 
sujet,  et  par  une  verve  comique  qui 
étincèîe  à  tel  point,  qu'il  y  a  peu  de 
pièces  dont  la  représentation  soit 
plus  amusante.  Tous  les  incidents  , 
tous  les  accessoires  en  so;;t  heureux: 
chaque  mot  de  Turcant  est  un 
ti-ait  de  caractère  ;  chaque  mot  du 
marquis  est  une  saillie.  Ce  rôle  , 
supérieur  à  celui  du  Retour  imprévu 
(deRegnard) ,  est  le  meilleur  modèle 
qu'il  y  ait  au  théâtre  ,  des  libertins 
de  bonne  compagnie  ,  qui  ,  suivant 
la  mode  de  ce  temps  -  là ,  passaient 
leur  vie  au  cabaret.  Quoique  cette 
comédie  soit  écrite  en  prose,  elle  est 
si  fertile  en  bons  mots,  qu'on  en  re- 
tient presque  autant  que  des  pièces 


LES 

les  mieux  versifiées.  Enfin ,  si  elle 
avait  le  mérite  d'être  en  vers  ,  et 
qu'elle  ne  présentât  })as  plutôt  une 
suite  d'incidents  très-]daisants  qu'iuie 
véritable  intrigue  ,  elle  serait  placée 
au  premier  rang  de  nos  comédies  : 
mais  c'est  du  moins  une  des  pre- 
mières de  la  seconde  classe.  Nous  ter- 
minerons cet  éloge  ,  dont  Laharpe 
nous  a  fourni  plusieurs  traits  , 
par  une  observation  qui  lui  a  échap- 
pé j  c'est  que  Le  Sage  a  eu  un  avan- 
tage que  n'a  obtenu  aucun  auteur  co- 
mique depuis  Molière:  sa  leçon  était 
si  bonne ,  qu'elle  corrigea  les  finan- 
ciers;ceux  qui  sont  venus  après  lui  ont 
mis  tous  leurs  soins  à  ne  pas  ressem- 
bler au  portrait  qu'il  avait  tracé.  Un 
mérite  aussi  rare  donne  lieu  de  re- 
gretter qu'il  n'ait  pas  uniquement 
consacré  ses  talents  au  théâtre  fran- 
çais. Il  y  avait  fait  recevoir,  en  1 708^ 
la  Tontine ,  petite  comédie  de  cir- 
constance ,  assez  gaie,  qui, pour  des 
raisons  d'état,  ou  par  des  intrigues 
de  coulisse  ,  ne  put  être  jouée  qu'eu 
1 73*2,  et  ne  fut  pas  alors  aussi  applau- 
die qu'elle  l'aurait  été  dans  le  temps. 
Ce  retard  le  dégoûta  d'une  car- 
rière si  épineuse.  Dédaignant  la  fa- 
veur des  grands,  il  n'était  pas  homme 
à  mendier  celle  des  comédiens  ;  les 
railleries  qu'il  s'est  permises  contre 
eux  ,  dans  tous  ses  écrits ,  autori- 
sent à  croire  qu'il  eut  càs'en  plaindre. 
Il  disait  à  cette  occasion:  «  Je  cher- 
»  che  à  satisfaire  le  public;  qu'il 
»  permette  aussi  que  je  me  satis- 
»  fasse.  »  Vers  le  même  temps , 
Le  Sage  travailla  plus  pour  l'amitië 
que  pour  la  gloire.  François  Pétis  de 
la  Croix,  interprète  des  langues  orien- 
tales ,  se  méfiant  de  son  talent  pour 
écrire  en  français, emprunta  la  plume 
de  son  ami, pour  corriger  le  style  de 
sa  traduction  des  Mille  et  un  jours ^ 
<^ui  parut  eu  1 7  x  0  et  les,  aoaéest  sui- 


LES 

v.inlcs.  TiC  Sage  profila  clos  richesses 

qui  lui   furent   confiées ,  et    trouva 

bientôt  l'orciision  de  niellrc  Sur  la 

scène  plusieurs  contes  persans.  (iU- 

Blasde  Sant illane ,  (\ui  parut,  en 

1  7i5,  2  vol.  in-ii,  augmentes  d'un 

'  .  en  i'7'i4^  et  d'un  4''.  en  1735  , 

m  il  enfin  le  sceau  à  sa  réputation.  On 

lui  a  conteste    l'invention  et  la  pa- 

/( mite   de   cet    immortel   roman  : 

r.i  uzen  de  la  Martinièrc,  et  Voltaire 

|)rcs  lui ,  ont  avancé  que  Gil-BIas 

.  (lit  entièrement  tire  de  l'espagnol; 

^  oltairc  assurait  même  que  c'était 

une  traduction  de  la  Fie  de  Vécuyer 

()hregon  y  i^ar  Vincent  Espinel  (  /\ 

Espi>EL,  t.  XIII ,  p.  332 ,  et  le  même 

nom  au  Sup.  Plus  récemment  le  P. 

]^ia  a  prétendu   aussi  que  Gil-Blas 

e^t   un  ouvrage  volé  à  l'Espagne 

]Mr  un  Français  (  i  ).  Au  surplus  ,  il 

importe  assez  peu  que  Le  Sage  aitin- 

uté  le  fonds  de  son  roman,  ou  qu'il 

ait  pris  l'idée  chez  nos  voisins,  se- 

!i  les  uns ,  ou  bien  suivant  d'autres, 

iiis  notre  ancien  roman  de  Fran- 

>n;  ce  qu'assurément  il  n'a  dérobé 

personnne,  c'est  cette  touche  ori- 

iiale  ,  cette    admirable    peinture 

s  mœurs,  ces  caractères  si  bien 

icés  ,  cette  foule  de  traits  et  de  dé- 

ils  qui  ne  se  trouvent  avec  la  même 

•jfusion  dans  aucun  autre  ouvracre 

o 


(1)  l)«ni  une  I)i««ertation  lue  en  i8i8  à  l'a- 
CAilcRiic  franraiie  ,  et  irnprimce  eu  tète  cl«  l'é- 
diiioii  d«  GH  ~  Blas  ,  Uoiinee  par  M.  Didot 
raillé  «D  i<)i9,  le  comte  Françoit  Je  NeurdiAieau 
•  réfiilé  Tictorieuvenient  ce*  deux  acciitations  , 
flont  la  clitcorJance  démontre  la  iautteté.  Il  a 
■■■hord  que  le»  Relations  de  ta  vie  de 
Don  Marc  de  Obregon  n'ont  aucune 
irec  Gil-Blas,  pour  le  fonda,  la  for- 
nii-  ,  it  mit  et  •iiitoiit  le  itrlo  ;  et  qu»  Le  Sa^e 
■'a  emprunté  <^iie  5  à  6  paasaget  à  Vincent  Vt- 
finel  il  détruit  cniuite  let  «ophUmcs  du  iésiiile 
eapa^nol,  en  etahliitant  que  •  il  eiiitait  tin  Git- 
Blas  conipoié  en  i^tpagne  par  un  Abogado 
Constant ini  y  1»  Pfre  Iila  rautait  publié  a»ec 
taalr*  lei  pmiTri  d'authenticilé,  au  lieu  de  ira- 
«iuire  le  GH-BloJ  français  en  «•paguol.  Ct?t 
•rf>iicnrnt  est  tant  réplique,  et  donna  gain  da 
<"i«a   à    notrn  nation    dans  ce  ainenlior  procès. 

'  'oj.  If  LA ,  XXI ,  393  ,«t  au  ifupprcoieot-  ) 

XXIV. 


du  même  genre.  «  Gil-Blas,  dit  La- 
harpe  ,  est  un  thef  -  d*œtivrc  :'  il 
est  du  petit  nombre  des  romans 
qu'on  relit  toujours  avec  plaisir  ; 
c'est  un  tableau  moral  et  anime* 
de  la  vie  humaine;  toutes  les  con- 
ditions y  paraissent  pour  rece- 
voir ou  pour  donner  une  leçon.... 
Utile  dulci  devrait  cire  la  devise 
»  de  cet  excellent  livre,  que  la  bonne 
»  plaisanterie  assaisonne  partout. 
»  Plusieurs  traits  ont  passé  en  pro- 
»  verbe ,  comme ,  par  exemple  :  les 
»  homélies  de  l'archevêque  de  Gre- 
»  nadel...  Quelle  sanglante  satire 
»  de  l'inquisition  î...  Quelle  peinture 
»  de  l'audience  d'un  premier  com- 
»  mis,  de  l'impertinence  des  comé- 
»  dieus  ,  de  la  vanité  d'un  parve- 
»  nu... du  caractère  des  grands,  des 
»  mœurs  de  leurs  domestiques  î  C'est 
»  l'école  du  monde.  On  reproche  à 
»  l'auteur  de  n'avoir  peint  presque 
»  jamais  que  des  fripons;  qu'importe, 
»  si  les  portraits  sont  reconnaissa- 
»  blés  ?...  On  lui  reproche  trop  de 
détails  subalternes  ;  mais  ils  sont 
tous  vrais  ,  et  aucun  n'est  indiffé- 
rent ni  minutieux On  connaît 

tous  les  personnages  de  Gil-BIas; 
on  croit  avoir  vécu  avec  eux.... 
»  parce  que  ,  dans  la  peinture  qu'il 
»  en  fait ,  il  n'y  a  pas  un  trait  sans 
»  dessein  et  sans  elFet.  Lesage  avait 
»  bien  de  l'esprit  ;  mais  il  met  tant 
»  de  talent...  à  se  cacher  derrière 
»  ses  personnages...  qu'il  faut  avoir 
»  de  bons  yeux  pour  voir  l'auteur 
»  dans  l'ouvrage...  Un  autre  avau- 
»  tage  de  Gil-Blas ,  c'est  qu'il  n'est 
»  pas  ,  comme  tant  de  romans  , 
))  guindé  sur  une  morale  stoïque  et 
»  désespérante  ,  qui  n'offre  jamais 
»  de  la  vertu  et  de  l'humanité  qu'un 
»  modèle  idéal  que  personne  ne  peut 
î>  se  flatter  d'atteindre.  L'auteur  y 
»  peint  les  hommes  tels  qu'ils  sont , 

»7 


358  LES 

»  capables  de  fautes  et  de  repentir, 

»  de  faiblesses   et  de  retour » 

Gilblas  nous  semble  avoir  un  intérêt 
plus  ge'ne'ral ,  un  but  plus  moral  , 
que  Don  Quichotte  ,  qui  n'est  que  la 
satire  d'un  ridicule  particulier  à  une 
nation ,  et  d'un  ridicule  qui  ji'existe 
plus  :  Gll-BlaSy  au  contraire,  con- 
vient aux  hommes  de  tous  les  e'tats, 
de  tous  les  temps,  de  tous  les  pays. 
Les  Anglais  en  font  le  plus  grand 
cas;  et  Molière  lui-même  ,  s'il  eût 
fait  un  roman  ,  n'en  eût  pas  fait  un 
plus  vrai,  comme  l'a  fort  bien  dit 
Palissot.  Le  ressentiment  de  Le  Sage 
contre  les  come'diens  français  ,  et 
surtout  la  nécessite'  de  faire  subsis- 
ter sa  famille ,  l'avaient  jeté'  depuis 
quelque  temps  dans  un  genre  dont 
il  s'occupa  durant  vingt-six  amie'es 
de  sa  vie,  et  qu'il  avait  d'abord  paru 
dédaigner  ,  si  l'on  en  juge  par  ce 
qu'il  dit  lui-même  dans  le  prologue 
de  Turcaret  :  il  s'agit  des  spectacles 
des  foires  Saint-Germain  et  Saint- 
Laurent.  C'est  à  tort  que  Palissot 
regarde  Le  Sage  comme  le  créateur 
de  l'opëra- comique,  et  que,  dans 
les  deux  e'ditions  des  œuvi'es  de  ce 
dernier ,  on  met  en  problème  si  ce 
spectacle  date  de  l'année  17 12,  où 
parurent  la  pièce  d^ Arlequin  empe- 
reur dans  la  lune,  par  Remy  et  Ch ail- 
lot  ,  et  celle  dC  Arlequin  baron  alle- 
mand ^  Sittiihuée  par  Desboulmiers , 
tantôt  à  Le  Sage ,  Fuzelier  et  Dor- 
neval ,  tantôt  à  Le  Sage  seul.  Sans 
rechercher  quel  fut  le  ve'ritable  au- 
teur de  cette  dernière  pièce  ,  et  en 
supposant  même  qu'elle  soit  de  Le 
Sage ,  il  est  certain  qu'avant  1712, 
les  spectacles  forains  avaient  joué 
des  parodies  et  des  farces  en  vaude- 
villes, soit  en  monologues,  soit  par 
écriteaux  (  i  )  :  Desboulmiers  en  cite 

(t)  Les  trûif  grands  théâtres  de  Paris,  jalouc 


LES 

quatorze ,  dont  l'une  (  Sancho  Pan^ 
ça  opéra  en  trois  actes  ,  par  Bella- 
vaine,  )  fut  jouée  dès  1705.  Il  est 
donc  clair  que  l'établissement  de 
l'opéra-comique  ne  peut  être  attri- 
bué à  Le  Sage  dont  le  premier  ouvra- 
ge non  contesté,  pour  les  spec- 
tacles forains,  fut  Arlequin  roi  de 
Serendib,  en  1713,  Ce  qui  a  pu  in- 
duire en  erreur ,  c'est  que  la  collec- 
tion qu'il  a  publiée  sous  le  titre  de 
Théâtre  delà  Foire ,  commence  par 
les  pièces  qu'il  a  composées.  Mais  s'il 
n'a  pas  été  l'inventeur  de  ce  genre  , 
on  peut  dire  qu'il  lui  a  donné  la  for- 
me qui  lui  est  propre ,  et  qu'il  en  a 
été  l'un  des  auteurs  les  plus  féconds.. 
Le  catalogue  le  plus  complet  de  ses 
pièces  se  \xo\xYeA.Ans\di  Petite  Biblio- 
thèque des  théâtres ,  et  lui  attribue 
ICI  opéras-comiques,  prologues  et 
divertissements ,  dont  vingt-quatre 
composés  par  lui  seul  ,  et  les  autres 
en  société  avec  Fuzelier ,  d'Orneval, 
Autreau,Lafont,  Piron  et  Fromaget. 
La  plupart  eurent  une  vogue  éton- 
nante ;  et  quelques  -  uns  obtinrent 
l'honneur  d'être  joués  au  Palais- 
Royal  devant  le  Régent.  La  variété' 
de  ces  compositions  ne  pouvait 
manquer  d'attirer  la  foule  :  mytho- 
logie ,  féerie  ,  travers  de  la  société , 
anecdotes  du  jour ,  tout  était  mis  à 
contribution.  Aucune  de  ces  pièces 
n'éprouva  d'échec  marqué  j  mais 
nous  observons  que  les  douze  der- 
nières ,  qui  sont  presque  toutes  de 
Le  Sage  seul,  le  doyen  de  ces  hommes 

des  spectacles  forains,  leur  firent  interdire  les 
■cènes  dialo^uccs,  et  eurent  mètne  le  crédit  de  iea 
empêcher  de  parler  et  de  chanter.  Pour  éluder 
cette  défense,  chaque  acteur  se  présentait  arec  «a 
gra^d  rouleau  de  carton  ,  sur  lequel  ou  Usait 
son  nom  et  son  rôle  ,  d'abord  cq  prose  ,  puis  ea 
couplets.  Comme  ces  cartouches  embarrassaient 
iascèue,on  imagina  de  les  faire  descendre  du 
cintre  ,  portés  par  deus  amours.  L'orchestr» 
jouait  les  airs,  le  public  chantait  les  eoMpleis^, 
et  les  acteurs  faisaient  les  gestes  analo2u<:»- 
C'est  ce  qu'on  appelait  a,  cette  «^ai|tjce,  t^nude^ 
viUei  par  écriteaux. 


LES 

Ii'llrcs  ,  fiircnl  acciieilHos  prn  fa- 
viM«iblcment,  soit  que  le  pul)lir  com- 
mençât à  s'ennuyer  de  ce  genre  de 
spectacle  ,  soit  que  Vàç^c  eût  affaibli 
rnnagiîiation  et  la  ç;aite  de  l'auteur. 
On  ne  doit  pas  seulement  regretter 
le  temps  que  Le  Sage  employa   à 
CCS  productions  éphémères  ;  on  doit 
encore  déplorer  la  peine  qu'il  a  prise 
de    faire    imprimer    la    collection 
intitulée  :  Théâtre  de  la  Foire,  qui 
comprend  la  plus  grande  partie  de  ces 
bluettes  auxquelles  il  aurait  dû  atta- 
cher moins  d'importance.  Nous  ne 
•    partageons  pas  néanmoins  toute  la 
t    rigueur  du  jugement  qu'en  porte  La- 
harpe  :  seulement  nous  conviendrons 
avec  lui  qu'on  n'y  voit  point  de  carac- 
tères ;  que  malgré  la  diversité'  des  su- 
t    jets,  la  variété  ne  s'y  fait  point  assez 
sentir  dans  le  plan,  dans  la  marche, 
:    dans  les  incidents  ;  mais  nous  ne  di- 
i     rons  pas  qu'il  n'y  a  ni  plaisant ,  ni 
'    naturel.  Si  ce  plaisant  dégénère  quel- 
quefois en  trivialité  ,  c'est  la  faute 
du  genre ,  des  personnages ,  du  temps 
et  du  lieu;  et  du  moins  les  couplets 
"f"  sont    point  défigurés   par  cette 
it'terie  ,  ces  madrigaux ,   ces   ca- 
mbourgs  ,  qui  font  tout  le  mérite 
certains  vaudevilles  modernes. 
1  reste ,  le  grand  nombre  d'opéras- 
iniques  qtie  Le  Sage  donnait  aux 
kjM'ctacles  forains,   ne  l'empêchait 
ji  is  de  se  livrer  à  d'autres  composi- 
tions. Il  s'était  proposé  de  traduire 
rArioste,et  il  cratdevoir  commencer 
p  «rie  Bojardo;car  la  lecturede  l' Or- 
lando  innumorato  est  indispensable 
l'on  veut  lire  avec  intérêt  l' Orlando 
jorinso,  qui  en  est  la  suite.  Son  Ro- 
land V amoureux  j  publié  par  livrai- 
sons en  I  -y  1 7-'2o-2 1 ,  forme  i  vol.  in- 
'  i.  C'est  moins  une  version  qu'une 
uitation  agréable  et  soignée  de  l'ori- 
nal.  Il  en  a  fait  disparaître  le  mau- 
viu»  goût^  les  iucouyefiâiice»  et  le* 


LES 


i^)<^ 


exagérations  :   mais    c'est  un  peu 
aux  dépens  du  génie  et  de  l'enthou- 
siasme. Le  Sage  était  trop  penseur  , 
trop  observateur  pour  avoir  l'imagi- 
nation poétique.  Il  ne  traduisit  plus 
de  poèmes,  et  revint  aux  romans.  En 
1732,  il    publia  les  Aventures  de 
Guzman  d'Âlfarache,  1  vol.  in- 
12  ;  imitation  fort  abrégée  et  très- 
amusante  de  l'ouvrage  de  Mathieu 
Aleman  (  Voyez  ce  nom ,  tom.  I , 
pag.  480  ),  et  supérieure  à  l'original 
espagnol,  dont  elle  a  fait  oublier  tou- 
tes les   traductions  antérieures.  La 
même  année,  il  mit  au  jour  les  Aven- 
tures de  Robert,  dit  le  cliev aller  de 
Beauchesne ,  2  vol.  in- 12.  Ce  n'est 
point  une  liction,mais  l'histoire  sin- 
gulière d'un  capitaine  de  flil>ustiers, 
qui  fut  t'ué  à  Tours,  j)ardcs  Anglais,  en 
1731,  rédigée  d'après  les  Mémoi- 
res fournis  par  la  veuve.  En  1734  , 
il  donna  les  deux  premières  parties 
de   V Histoire  d'Estevanille    Gon^ 
zalès,sumomméle  Garconde  bonne 
humeur  ,  2  vol.  in- 12.  C'est  encore 
de  l'aveu  de  Le  Sage  ,  une  imitation 
de  l'espagnol,  d'après  la  Fie  de  Vé- 
cujer  Ob'-egon ,  par  Vincent  Espi- 
nel,  dont  on  a  parlé  ci-dessus;  mais 
il  n'en  a  pris  que  quelques  traits , 
tels  que  l'aventure  du  nécromancien 
démasqué.   Ce  roman,  modelé  sur 
Gil-Blas,  en  rappelle  parfois  la  gaîté, 
l'esprit  et  les  situations  ;  cependant 
il  est  moins  varié,  moins  fortement 
dessiné  ;  et  les  deux  dernières  par- 
ties sont  fort  inférieures  aux  pré- 
cédentes.   Le  Sage,  en  vieillissant, 
S araissait néanmoins  redoubler  d'ar- 
eur  et  de  fécondité.  En  1 735 ,  il  pu- 
blia Une  journée  des  Parques  ,  in- 
12  ,  dialogue  plein  de  sel,  de  philo- 
sophie, de  pensées  fortes  et  hardies, 
rendues  avec  une  vigueur  étonnante. 
La  même  année  il  compléta  Gilblas. 
Il  fit  aussi  représtSiitcr,  au  Théâtr» 
17.. 


îi6o  LES 

italien  ,  le  21  novembre,  et  devant 
la  cour  ,  le  '.16  du  même  mois  ,  les 
u4mants  jaloux  ,  conic'dic  en  trois 
actes  et  en  prose ,  imprimée  en  1 786, 
in- 12.  Cette  pièce  eut  peu  de  suc- 
cès ;  on  en  trouva  ,  dit  D'Origny  , 
l'intrigue   trop   compliquée  ,    l'ac- 
tion confuse,  les  scènes  trop  peu 
filées  ,  les  motifs  trop  peu  dévelop    ' 
pés ,  et  (  ce  qu'il  y  a  de  plus  éton- 
nant )   le  dialogue  trop  serré,   le 
style   trop  concis.  Nous  n'y  avons 
rien  vu  qui  puisse  justifier  cette  es- 
pèce d'éloge ,  ou  qui  nous  ait  paru 
digne  de  l'auteur  de  Turcaret.  Il  l'a 
désavouée  indirectement  en  ne  l'insé- 
rant paà  dans  son  Théâtre  ;  et  si  elle 
est  réellement  de  lui ,  on  est  fâché 
que  l'anonyme  ait  été  levé  après  sa 
mort  parles  frères  Parfaict.  En  1 7  56 
et  1738,  Le  Sage  fit  jouer  ses  qua- 
tre  derniers   opéras-comiques  .    et 
donna  le  Bachelier  de  Salmnanfjue, 
Si  vol.  in-i  2 ,  regardé  par  Laharpe, 
comme  le  plus  médiocre  de  tous  ses 
romans.  En  accordant  qu'il  est  plus 
pauvre  d'invention ,  nous  ne  conve- 
nons pas  qu'il  roule  tout  entier  sur 
les  désagréments  du  métier  d'insti- 
tuteur :  cette  matière  en  fait  à  peine 
la  cinquième  partie.  Moins  plaisant , 
moins  épisodique  (  et  en  cela  plus 
intéressant  peut-être  )  que  les  autres 
romans  de  Le  Sage  ,  celui-ci  se  dis- 
tingue par  une  teinte  plus  sombre  et 
plus  mélancolique  j  on  y  reconnaît 
d'ailleurs  cette  marche  simple,  ce 
style  dégagé  de  sentences  et  de  pré- 
tentions, qui  caractérisent  l'auteur. 
On  a  dit ,  et  nous  croyons  sans  peine, 
que  Le  Sage  avait  une  prédilection 
marquée  pour  cet  ouvrage  ,  le  der- 
nier de  ses  romans  et  le  fruit  de  sa 
'  vieillesse.  Il  en  a  pris  aussi  quelques 
idées  dans  les  inéi^msablcs  Relations 
fie  Vécujer  Obregon.  En  cessant  de 
composer  des  romans  et  des  pièces 


LES 

de  théâtre  il  ne  renonça  pas  à  e'crirc; 
mais  il  s'exerça  dans  un  genre  plus 
facile  et  plus  proportionné  à  ses 
forces.  En  1740,  il  publia  ,  sous  le 
voile  de  l'anonyme  ,  la  Falise  trou- 
vée, un  V.  in-ï2,  où  dans  un  cadre 
assez  simple,  il  a  renfermé  une  tren- 
taine de  lettres  qu'il  suppose  écrites 
par  divers  personnages ,  sur  diffé- 
rents sujets  satiriques  j  ce  sont  au- 
tant d'esquisses  ou  d'extraits  d'un 
roman  de  caractère.  Enfin  ,  en 
1743,  il  donna  un  Mélange  amu- 
sant de  saillies  d^ esprit  et  de  traits 
historiques  des  plusfrappants,  i  vol. 
in-i2.  La  plupart  de  ces  anecdotes  , 
alors  nouvelles  ou  peu  connues  ,  n'ont 
rien  de  piquant  aujourd'hui.  Le- 
Sage  travaillait  beaucoup,  et  soi- 
gnait tous  ses  ouvrages.  Des  mœurs 
pures  ,  le  goût  de  l'étude ,  de  vrais 
amis  ,  une  femme  qui ,  remplie  d'at- 
tentions pour  lui  et  de  tendresse  pour 
ses  enfants  ,  le  secondait  dans  leur 
éducation  ;  enfin,  toutes  les  jouis- 
sances que  procurent  la  littérature 
et  la  paix  d'un  bon  ménage  :  telle  fut 
long-temps  la  vie  de  cet  auteur  ; 
mais  sa  vieillesse  ne  fut  pas  exempte 
de  chagrins.  Il  avait  eu  trois  fils  et 
une  fille  :  quand  il  fallut  songer  à 
les  établir  ,  l'aîné ,  qu'il  destinait  au 
barreau,  et  qui  avait  mcme  plaidé 
quelques  causes  avec  succès ,  se  fit 
comédien,  et  se  rendit  célèbre  dans 
la  suite  sous  le  nom  de  Montménil 
Le  troisième  choisit  la  même  pro 
fession;  c'était  celle  pour  laquelle  I 
Sage  avait  le  plus  d'aversion.  Il  fu 
dédommagé  de  ces  contrariétés  pa 
la  tendresse  constante  de  sa  fille,  e 
par  la  conduite  exemplaire  du  se 
condde  ses  fils,  qui,  ayant  embrass 
l'état  ecclésiastique,  avait  obtem 
un  canonicat  à  Boulogne-sur-Mer 
Le  Sage  avait  cessé  de  voir  Mont- 
me'nil  ;  mais  lorsque  cet  acteur  eut 


LES 

;  (juis  de  la  reputalion ,  il  le  re- 
^ut  vn  grâce,  soit  que  leur  rcconci- 
I  liatioii  se  iVit  oixfree  a  Boulogne,  par 
'  IVlIcl  (l'une  ingénieuse  et  louchaulc 
iMcklialion  du  chanoine  Le  Sage,  soit 
<|ncdes  amis  communs  ayant  entraî- 
ne le  vieillard  au  iheàlre Français,  il 
N  vil  son  fils  dans  Turcaret,  ra])plau- 
tlil  en  pleurant  de  joie,  l'embrassa 
ri  lui  rendit  toute  son  alleclion.  Ce 
(ju'il  Y  a  de  sûr  ,  c'est  tpie  Montnie- 
nil  devint  le  plus  intime  ami  de 
son  pre. Lorsque  cet  acteur  était  au 
tljcàlre,  Le  Sage  allait  passer  la  soi- 
rée dans  uucafcde  la  rue  St. -Jacques, 
voisin  de  sa  demeure.  On  y  faisait  cer- 
cle autour  de  lui ,  on  montait  sur  les 
chaises ,  sur  les  tables  pour  l'écou- 
ter ,  et  pour  applaudir  la  justesse  , 
la  clarté,  la  variété  de  son  éloculion, 
relevée  par  un  organe  sonore.  La 
mort  de  ce  lîls  chéri ,  l'espoir  ,  le 
soutien  de  sa  vieillesse,  fut  pour  lui 
un  coup  de  foudre.  Sur  la  fin  de  1 743, 
il  se  retira  à  Boulogne  avec  sa  femme 
et  sa  fille  ,  .auprès  de  son  fils  le  cha- 
noine ,  dont  les  soins  délicats  adou- 
cirent l'amertume  d'une  perle  si 
cruelle.  Il  y  passa  ses  dernières  an- 
nées dans  un  état  d'affaissement  as- 
sci  triste.  Le  cours  du  soleil  influait 
singulièrement  sur  les  organes  de  ce 
vieillard  :  il  s'animait  par  degrés  à 
mesure  qiie  cet  astre  approchait  du 
méridien,  et  il  semblait  alors  avoir 
conservé  la  gaîté  ,  l'urbanité  de  ses 
beaux  ans  cl  la  vivacité  de  son  ima- 
gination ;  mais,  au  décUn  du  jour, 
Pactivité  de  son  esprit  et  de  ses  sens  di- 
minuait  graduellement,  et  il  tombait 
hientôt  dans  une  sorte  de  léihargie 
qui  durait  jusqu'au  lendemain.  Il 
mourut  octogénaireà  Boulogne,  le  1 7 
nov.  1 747.  Le  comte  de  Tressan,  qui 
commandait  alors  dans  leBoulonais, 
se  fit  un  devoir  d'assister ,  avec  tout 
i^ou  éUt-major,  aux  oh&ètiuçs  de  Le- 


LES  2Gt 

Sage;  et,  par  l'éclat  de  cette  pompo 
funèbre  ,  il  rendit  un  hommage  pu- 
blic à  la  mémoire  de  l'un  des  meil- 
leurs écrivains  dont  la  France  s'ho- 
nore. Sa  veuve  lui  survécut  peti ,  et 
mourut  au  même  âge  que  lui,  le 
7  avril  i7:")'i.  Le  Sage  avait  eu,  dès 
sa  jeunesse ,  des  symptômes  de  sur- 
dité. On  voit,  dans  le  prologue  de 
Turcaret ,  qu'à  celle  époque  il  n'en- 
tendait déjà  que  très -difficilement. 
Il  devint  bientôt  tellement  sourd  , 
qu'il  faisait  usage  d'un  cornet  acous- 
tique. Cette  infirmité  fut ,  dit-on  ,  la 
principale  cause  quiTempècha  d'être 
reçu  à  l'académie  française, quoiqu'il 
y  eût  plus  de  litres  que  la  plupart 
de  ceux  qui  en  faisaient  alors  partie. 
L'un  d'eux  ,  Danchet ,  plus  recom- 
mandable  par  ses  qualités  sociales 
que  par  ses  écrits  ,  sollicita  souvent 
son  vieil  ami  de  se  mettre  sur  les 
rangs;  mais  la  franchise  et  l'indépen- 
dance du  caractère  de  Le  Sa  ge  ne  pou- 
vaient se  plier  à  des  démarches  d'éti- 
quette auprès  de  certains  person- 
nages dont  il  avait  tracé  des  por- 
traits satiriques  trop  ressemblants. 
Quoiqu'il  joignît  aux  vertus  domes- 
tiques la  plus  sévère  probité  ,  la 
douceur  de  son  commerce  n'excluait 
point  en  lui  cette  causticité  d'esprit 
qui  perce  dans  tous  ses  orvrages  , 
et  qui  dut  lui  attirer  des  détracteurs 
et  des  ennemis.  Voltaire  a  été  sobre 
d'éloges  envers  Le  Sage;  il  ne  parle 
(  Siècle  de  Louis  XIF  )  que  de  son 
Gil-Blas,  dont  il  loue  le  naturel .  Celte 
réticence  n'étonnera  pas  ,"  si  l'on  se 
rappelle  combien  était  irascible  le 
])hilosophe  de  Ferney.  L'auteur  de 
Gil-Rlas ,  à  qui  aucun  travers  ne  pou-, 
vait  échapper ,  s'était  permis,  dausZd 
Temple  de  Mémoire  ,  l'un  de  ses 
opéras-comiques ,  de  ridicvdiser  les 
admirateurs  oulrésd'un  poète  qui  n'é- 
tais abf  S  coimu  que  par  les  tragédie* 


963 


LES 


d' Œdipe ,  à^^rtémire  et  de  Ma-* 
rianne,  et  par  le  poème  de  la  Ligue  , 
faible  et  première  esquisse  de  la  Hen- 
riade.  Les  sarcasmes  de  Le  Sage  con- 
tre les  comédiens  lui  valurent  une 
ëpigramme  de  Tacteur  Legrand  ;  et 
Piron  ,  l'un  de  ses  rivaux  aux  spec- 
tacles forains,  décocha  quelques  traits 
satiriques  contre  lui.  On  ne  peut 
s'empêcher  d  estimer  Le  Sage  ,  en 
lisant  ses  écrits ,  où  la  langue  et  les 
mœurs  sont  également  respectées.  De 
ce  que  ,  dans  ses  romans  et  dans  ses 
comédies  ,  il  n'a  presque  jamais  mis 
en  scène  que  des  fripons,  on  aurait 
tort  de  concevoir  une  idée  peu  avan- 
tageuse de  ses  principes.  Rien  ne 
prouve  mieux  ,  au  contraire ,  com- 
bien il  était  véritablement  honnête 
Lomme  ;  car ,  pour  s'indigner  des 
vices  de  la  société ,  et  pour  en  retra- 
cer énergiquement  le  tableau,  il  faut 
posséder  les  vertus  qui  leur  sont  dia- 
métralement opposées.  C'est  pour  cela 
que  Molière  a  si  bien  peint  les  avares 
et  les  hypocrites.  Le  Sage  eut  avec  ce 
grand  homme  un  autre  trait  de  ressem- 
blance: comme  chez  lui,  ses  talents  ne 
se  développèrent  que  dans  l'age  mûr, 
et  s'accrurent  avec  les  années.  Il  avait 
environ  quarante  ans ,  lorsqu'il  donna 
Crispin  rwal,  le  Diable  boiteux  et 
Turcaret  :  il  en  avait  quarante-sept , 
quand  il  publia  Gil-Blas ,  qu'il  ter- 
mina à  soixante-sept  ans  ;  preuve 
que  pour  composer  des  comédies  et 
des  romans  de  caractère  ,  genres  qui 
ont  entre  eux  une  parfaite  analogie, 
il  faut  moins  d'esprit  et  d'imagina- 
tion qu'une  grande  habitude  de  ré- 
fléchir, d'observer  et  de  juger;  et 
cette  habitude ,  qui  ne  s'acquiert  que 
par  l'expérience ,  est  rarement  le 
partage  de  la  jeunesse.  L'écriture 
de  Le  Sage  était  aussi  soignée  que 
son  style.  Malgré  la  supériorité 
de  SCS  talents  et  le  succès  d«  ses 


LES 

nombreux   ouvrages  ,   l'auteur    de 
Gil-Blas   ne   parvint    jamais   à   la 
fortune  :  il  assure  qu'il  avait  refuse' 
des  postes  où  d'autres  moins  scrupu- 
leux que  lui  se  seraient  enrichis.  In- 
différent sur  l'avenir  ,  il  fut  toujours 
bienfaisant  et  libéral  au  sein  de  la 
médiocrité,  et  ne  laissa  d'autre  hé- 
ritage à  ses  enfants  que  l'exemple  de 
ses  vertus  et  la  renommée  de  ses 
travaux.   Outre  les   éditions  qu'il  a 
données  de  ses  ouvrages  ,  il  publia , 
avec  d'Orneval,  la  collection  intitulée; 
Théâtre  de  la  Joire  ,  9  vol.  in-12  , 
dont  nous  avons  fait  mention.  Les 
3  premiers  vol.  parurent  en  \'^i\  ,  le 
quatrième  et  le  cinquième  en  1724, 
le  sixième  en  1781  ,  et  les  trois  der- 
niers en  1737.  Un  autre  neuvième 
volume,  imprimé  en   1734,  et  qui 
forme  le  dixième  de  cette  édition ,  a 
été  donn&par  Carolet ,  et  ne  contient 
que  des  pièces  de  sa  composition. 
{Voj.  CAiioLET,tom.  VII , p.  176.  ) 
En  1 787,  Le  Sage  en  publia  une  nou- 
velle édition  en  8  vol.  in-12,  dans 
laquelle  il  n'a  pas  compris  les  pièces 
deCarolet.  En  1789,  il  fit  imprimer 
son  Théâtre  français  ,  2t  vol.  in-i^  , 
réimprimé  en  1774-  Des  sept  co- 
médies qu'on  y  trouve ,  deux  seule- 
ment,   Turcaret  et   Crispin  rival 
de  son  maître  ,   ont  été    insérées 
dans   la    Petite    Bibliothèque   des 
Théâtres  et  dans  le  Répertoire  du 
Théâtre  Français.  Quant  aux  ro- 
mans de  Le  Sage ,  ils  ont  été  très- 
souvent  réimprimés,  snxioxïV  le  Dia- 
ble boiteux,    Gil-Blas  et   le   Ba- 
chelier de  Salaman<jue.  Mais  Gil- 
Blas  est  le  seul  qui  ait  obtenu  l'hon- 
neur de  l'être  avec  le  plus  de  luxe  et 
de  soin.  Les  meilleures  éditionsde  ce 
roiiian  étaient  celles  de  Didot  jeune, 
Paris,  1 794, 4  vol.  in-8**.  fig.,  et  1 80 1, 
8  vol.  in- 1 8 ,  fig. ,  avant  que  M.  Didot 
Taîne'  eût  donné  l'édition  qu'il  vient 


LES 

Ir publier, Paris,  1819, 3\o\.  in-8<>., 
t  usant  priir  de  sa  collection  des 
..iiteurs    classiques    français.    Cette 

ilition,  la  seule  conforme  à  celle 
!(•  1747»  *!'"  avait  été  corrigée  par 
l'auteur  ,  est  précédée  du  Me'moi- 
re  de  M.  François  de  Neufchâ- 
tcau ,  dont  nous  avons  rendu  compte 
ci-tlessus  ,  et  quiest intitule' :  ^.ramen 
tit;  la  question  de  savoir  si  LeSa^e 
tist  auteur  de  G  il- B  las ,  ou  s'il  fa 
'ris  de  V espagnol.  Ce  litte'rateur  dis- 
tingué a  de  plus  note' eu  marge  et  au 
li.isdes  pages  d'un  exemplaire  de  Gil- 
iilas ,  plusieurs  allusions  qu'il  avait 
recueillies  dans  ses  entretiens  avec  le 
comte  de  Tressan  son  compatriote , 
qui  les  tenait  de  la  bouche  même  de 
Le  Sage.  Ces  notes  extrêmement  cu- 
rieuses pourraient  servir  decommen- 
taire  et  de  clef  pour  expliquer  diver- 
ses anecdotes  de  cet  excellent  roman, 
rt  pour  en  faire  connaître  quelques 
personnages  sous  leurs  ve'ritables 
noms.  Tous  ceux  qui  ont  connais- 
sance de  ce  travail,  en  désirent  vi- 
vement la  pubbcalion.  Plusieurs  des 
romans  de  Le  Sage  ont  e'te'  traduits  en 
différentes  langues  de  l'Europe.  L'I- 

i lie  possède  deux  traductions  àeGil- 
l'das  :  la  première  a  eu  six  éditions  4 
\  enise,  depuis  174©  jusqu'en  1767, 
*>  vol.  in-1'2,  et  a  été  réimprimée  à 
liome,en  1788,6  vol. in  8».  fig.  Le 
chanoine  Monti ,  qui  en  est  l'auteur, 
a  fait  des  suppressions  à  roriginal , 
auquel  il  a  ajoute  une  suite  qui  forme 
5('sdeux  derniers  volumes.  La  secon- 
de traduction,  plus  littérale,  est  du 
docteiu-CrocchideSienne,ColleAme- 
no ,  1 773 ,  4  vol.  in-80.,  et  Londres , 
1806.  M.  Smollett  en  a  donne  une 
en  anglais ,  dont  la  cinquième  édi- 
tion est  de  178'!,  4  vol.  in-i9.,rig. 
I.es  allemands  et  les  hollandais  ont 
jussi  des  traductions  de  GilBlas. 
<^ll€  que  le  père  Isla  a  publivs  en  «»- 


LK5 


263 


pagnol ,  est  intitulée  :  Les  Âçenture$ 
de  Gil-lihis de Santillane j  volées  à 
V  Espaç^nc ,  et  adoptées  en  France , 
par  M.  Le  Sa^e  ,  restituées  à  leur 
patrie  et  à  leur  langue  naturelle  ; 
par  un  espagnol  zélé  qui  ne  soujfr» 
pas  qu'on  se  moque  de  sa  nation. 
Madrid,  1787  ,  4  vol. ,  petit  in-4^. , 
et  i8o5,  5  vol.  iiM'i.  Gil-Blas  a 
donné  lieu  à  plusieurs  imitations  jet 
copies  ,  tant  en  France  que  dans  les 
pays  étrangers  ;  mais  aucune  n'ap- 
proche de  l'original.  On  a  deux  Gil- 
Blas allemands  :  l'un  par  M.  Hertz- 
berg ,  sous  le  titre  du  Nouveau  Gil- 
Blas, ou  Mémoires  d'un  homme  qui 
a  passé  par  les  épreuves  les  plus 
dures  de  la  vertu  ;  traduit  en  fran- 
çais par  G.  H.  Nirel , Francfort,  1 778^ 

2  part.,  I  vol.  in-12;  réimprimca  Lil- 
le. Le  second  est  intitulé  :  le  GiUBlas 
allemand ,  ou  Aventures  de  Pierre 
Clous,  par  le  baron  de  Kniegge; 
traduction  française,  Paris,  1789, 

3  vol-  in-12.  Il  y  a  aussi  le  Gil-Blas 
anglais,  ou  Hugues  Trevor ,  par 
Thomas  Holcroft  j  trad.  en  français , 
Paris ,  1 798 ,  4  vol.  iii-i  2.  On  a  pu- 
blié à  Amsterdam ,  la  Fie  de  don 
Alphonse  Bios  de  Lirias ,  fils  de 
Gil-Blas  de  Santillane ,  1 754 ,  in-i  2  j 
traduite  en  italien,  Venise,  1759, 
in-1'2  ,  et  réimprimée  en  1802  , 
sous  le  titre  de  Suite  de  Gil-Blas, 
ou  Mémoires  de  don  Alphonse , 
etc.  Ouvrage  posthume  de  Le  Sage, 
Enfin  on  a  aonné  Les  Trois  Gil- 
Blas.  La  plus  grande  partie  dei 
ouvrages  de  cet  auteur  a  été  re- 
cueillie sous  le  titre  à^  OEuvres 
choisies  de  Le  Sage,  Paris,  1788  , 
i5  vol.  in-8<». ,  fig.,  et  1810,  16 
vol.  in-8<'.  ,(ig.  Celte  seconde  édition, 
plus  ample  que  la  précédente,  con- 
tient de  plus  :  un  catalogue  des  pièces 
qu'il  a  données  aux  Théâtres  ae  la 
foire  f  un  abrégé  de  rUi<»toire  de  ces 


3,Gj  LES 

spectacles  {i),Le  Traître  puni,  Don 
Félix  de  Mendoce ,  et  Don  César 
Ursin,  comëdies  traduites  de  l'es- 
pap;no] ,  La  Falise  trouvée  ,  et  le 
Mélange  amusant  de  saillies  et  de 
traits  historiques.  Mais  on  ne  trou- 
ve dans  aucune  des  deux  éditions 
les  Nouvelles  Aventures  de  don 
Quichotte ,  ni  la  comédie  des ^m«w£.s . 
jaloux.  La  plupart  des  préfaces 
qui  pre'cédaient  les  éditions  don- 
nées par  l'auteur ,  y  ont  été  suppri- 
mées :  tout  ordre  chronologique, 
dans  l'arrangement  des  ouvrages  ,  a 
été  interverti;  et  outre  un  grand  nom- 
tre  d'erreurs  dans  la  INotice  historié 
que  sur  Le  Sage ,  nous  avons  cru 
reconnaître  que  ces  deux  éditions 
n'ont  été  faites  que  d'après  des  ré- 
impressions. Op  y  a  inséré  cinquante 
de  ses  opéras  comiques,  choisis  parmi 
les  soixante  et  douze  fjue  contient  le 
Théâtre  de  la  foire.  Deux ,  imprimés 
en  17 12,  et  devenus  rares,  n'ont 
été  compris  dans  aucune  collec- 
tion ,  et  vingt-sept  n'ont  jamais  été 
publiés.  De  ces  derniers ,  s'il  faut 
en  croire  les  éditeurs  de  la  Petite 
Bibliothèque  des  Théâtres,  quinze 
doivent  se  trouver  dans  un  manuscrit 
iu-4°.  de  la  Bibliothèque  du  roi ,  in- 
titulé :  Pièces  du  Théâtre  de  la  foire 
qui  nont  point  été  imprimées  ,  par 
MM,  Le  Sage  et  d'Orneval,  avec 
cette  épigraphe  :  In  memoriam  ca~ 
rissimi  amici  d'Orneval ,  de  Chas- 
seloup  scripsit,  1 731,  à  Paris.  Ce 
manuscrit  doit  contenir  aussi  Ar- 
lequin prologue  ,  suivi  de  V Arbitre 
des  différends ,  comédie  en  trois  ac- 
tes ,  en  prose ,  représentés  l'un  et 
l'autre  sur  le  Théâtre  Italien  ,  en 
1725  ;  mais  nous  n'avons   pu   le 


(i)Oii  a  grossi  ce  catalogue,  de»  titres  de 
quatre  pièces  iai.sgemerit  attribuées  à  Le  Sage, 
et  de  q.atre  autres  qui  ne  sont  <jue  de«  renùsse» 
•ous  des  tili«s  iiOuv«AUX. 


LES 

découvrir  au  cabinet  des  manuscrits 
de  la  Bibliothèque  du  roi.  11  est  à 
désirer  ,  pour  la  gloire  de  Le  Sage  , 
que  l'on  donne  de  ses  œuvres  une  édi- 
tion plus  correcte  et  plus  régulière. 
Une  Lettre  autographe  et  inédite  de 
cet  auteur,  datée  du  18  juin  1715, 
nous  apprend  qu'il  s'occupa  d'écrire 
des  Mémoires  d'une  femme  nommée 
Petit,  que  ses  aventures  et  ses  voya- 
ges avaient  rendue  fameuse j  mais, 
par  égard  pour  des  hommes  puis- 
sants, ces  mémoires  ne  furent  pas  pu- 
bliés. (  Voyez  Marie  Petit.  )  A-t. 
LESAGE  DE  MONTMENIL 
(  René-Amdré  ),  fils  aîné  du  pré- 
cédent ,  né  à  Paris  ,  le  3o  juillet 
169.5 ,  débuta  sur  la  scène  française 
le  28  mai  1 726,  par  le  rôle  de  Mas- 
carille  dans  V Etourdi,  où  il  fut  très- 
applaudi  :  mais  comme  son  talent 
n'était  pas  encore  assez  formé,  il 
alla  jouer  deux  ans  en  province,  et 
revint  débuter  une  seconde  fois  à 
Paris,  le  18  mai  1728,  par  le  rôle 
d'Hector  dans  le  Joueur  :  il  y  obtint 
le  plus  grand  succès,  ainsi  que  dans 
ceux  de  Dave  de  VAndrienne,  et  de 
Lahranche  dans  Crispin  rival;  fut 
reçu  à  demi-part  le  7  juin  suivant , 
et  devint  bientôt  un  des  plus  célè- 
bres acteurs  du  Théâtre  Français.  On 
s'est  souvenu  long-temps  de  la  su- 
périorité avec  laquelle  il  jouait  les 
valets ,  les  paysans ,  les  financiers,  et 
même  quelques  premiers  rôles  :  il 
excellait  dans  Turcaret,  dans  l'A- 
vocat Patelin;  et  par  le  parti  qu'il 
tira  du  rôle  de  Lé andre  àoLiis  le  Dis- 
trait, en  1 781 ,  il  fixa  au  répertoire 
cette  pièce  qui  avait  peu  réussi  dans 
sa  nouveauté.  Montmenil  ne  pro- 
duisait pas  autant  d'elfet  dans  cer- 
tains rôles  du  haut-comique,  qui  exi- 
gent plus  de  finesse  que  de  naturel 
et  de  vérité,  tels  que  ceux  du  Phi- 
losophe marié,  de    Théodon  dans 


LES 

Mèlanide\  il  ne  laissait  pas  toute- 
fois (l'v  t^trc  également  applaudi, 
parce  «pi'il  jouissait  de  la  faveur 
du  public  :  il  en  était  dij;ue  par  la 
noblesse  de  ses  senlimenls,  la  l)onle 
(le  son  caraclère,  l'honnèletedc  ses 
MuiMus,  autant  (pic  par  ses  talents. 
Heconcilic  avec  son  père,  il  elfaça 
le  chagrin  qu'il  lui  avait  cause,  et  se 
montra  le  lils  le  jilus  tendre  et  le 
plus  soumis.  Il  se  concentra  dans  sa 
limilledont  il  devint  le  soutien,  et 
n'eut  pas  de  sociclc  plus  intime  que 
celle  de  son  père,  de  sa  mère  et  de 
>a'sœur,quile  perdirent  trop  tôt.  At- 
taque d'un  mal  violent  dans  une 
jiartic  de  chasse  qu'il  fil  aux  envi- 
rons de  Paris,  cet  acteur  fut  porte' 
à  la  Villctte,  chez  un  invalide  des 
(jardes-F'rançaises,où  l'on  n'eut  que 
le  temps  de  lui  administrer  les  sa- 
crements; il  y  expira  le  8  septembre 
1743,  àgc  de  48  ans.  —  Lesage 
(Julien  -  François  ),  son  frère,  né 
à  Paris,  le  ^4  avril  1698,  et  cha- 
noine à  la  cathédrale  de  Boulo- 
gne-sur-Mcr,  joignait  aux  vertus  de 
son  état,  les  qualités  les  plus  esti- 
mables ,  et  une  partie  des  talents  de 
Montmenil ,  avec  lequel  il  avait  une 
ressemblance  frappante.  Il  brillait 
par  son  esprit ,  et  lisait  parfaitement 
les  vers.  Comme  les  revenus  de  sa 
prébende  suftisaient  à  peine  pour 
soutenir  sa  famille,  il  obtint  de  la 
reine  (  Marie  Leczinska  )  à  la  de- 
mande du  comte  de  Trcssan,  une 
])cnsion  sur  un  bénéfice.  Il  mourut 
a  Boulogne  ,  le  '25  avril  i^ii'i. 
—  Lesage  de  Pitténec  (  Fran- 
çois -  Antoine  ) ,  troisième  Cls  de 
Le  Sage  ,  oé  à  Paris  le  'n  fé- 
vrier 1700  ,  eut  Dancliet  pour 
])arrain.  Séduit  par  b's  succès  de 
son  frère  Montmenil  ,  il  se  fit  co- 
médien, et  joua  plusieurs  années 
eu  province  sous  le  nom  de  Pittéuec. 


LES  ac; 

Il  revint  à  Paris  en  1734,  et  fit 
représenter  à  la  foire  Saint-Germain 
deux  opéras  -  comicpies  :  le  7'wirt- 
ment  de  la  Foire  et  le  Miroir  ma- 
gi'/n(^\  qui  ne  sont  autre  chose  qu'une 
remise,  avcccorrectionsetcoupures , 
des  Funérailles  de  la  Foire  et  de 
la  Statue  me/veilleuse ,  données  par 
son  père  en  i7i8et  i7Sio. Nous  igno- 
rons si  Pittéuec  a  composé  d'au- 
tres ouvrages;  il  est  vraisemblable 
que  n'ayant  pu  ,  comme  auteur 
ni  comme  acteur,  acquérir  de  la 
fortune  et  de  la  réputation,  il  (piitta 
le  tliéâtrc  après  la  mort  de  son 
père,  et  se  relira  à  Boulogne;  mais 
nous  ne  pouvons  dire  si  c'est  lui ,  ou 
son  fils  ,  qui  signa  ,  en  17.52,  sous 
le  titre  de  clerc  tonsuré,  l'acte  de 
décès  de  sa  mère ,  comme  témoin 
avec  son  frère  le  chanoine,  et  qui 
en  i'j6î^  signa  encore  l'acte  mor- 
tuaire de  ce  dernier.  —  Llsage 
(  Marie-Elisal)eth  ) ,  leur  sœur,  née 
à  Paris,  le  9  août  1702,  vécut 
dans  le  célibat ,  et  fut  toujours  la 
compagne  et  la  consolation  de  son 
père  et  de  sa  mère.  Elle  survécut  à 
son  frère  le  chanoine,  après  la  mort 
duquel  se  trouvant  sans  ressources, 
elle  alla  mourir  à  l'hôpital  de  Bou- 
logne. A-T. 

LESAGE(George-Louis)  naquit 
le  1 3  juin  1 724  ,  à  Genève  ,  où  son 
père ,  né  à  Couches ,  en  Bourgogne  , 
s'était  retiré  quelques  années  au-pa- 
ravant,  et  où  il  enseignait  les  malhé- 
matiques  et  la  physi(pie.  Il  cultivait 
les  sciences  et  les  lettres  ,  et  occup;4 
de  bonne  heure  Georges  -  Louis  , 
des  objets  de  ses  propr(»s  études.  Il 
lut  avec  lui  les  auteurs  latins ,  et  en 
particulier  quelques  morceaux  choi- 
sis de  Lucrèce,  dont  la  phvsique 
excita  la  curiosité  du  jeune  disciple. 
Ces  premières  leçons  eurent  quelque 
iuûucûce  sur  le  dcvcloppcmcut  dest 


'iCS 


LES 


coûts  et  du  génie  de  celui-ci.  A'  d'an- 
tres égards ,  renseignement  du  père 
n'e'tait  pas  d'accord  avec  les  disposi- 
tions naturelles  du  fils,  qui  avait  sur- 
tout besoin  de  méthode  et  de  suite. 
On  comprendra  ,  par  un  seul  trait , 
combien  la  marche  de  son  maître 
était  irrégulière.  Le  jeune  Le  Sage, 
ayant  témoigné  à  son  père  le  désir 
de  connaître  un  peu  l'histoire  mo- 
derne ,  ne  reçut  de  lui  d'autre  indi- 
cation pour  ce  genre  d'étude ,  que  le 
Dictionnaire  deMoréri.  La  prédilec- 
tion du  père  pour  tout  ce  qui  était  in- 
cohérent ,  son  aversion  pour  toute 
espèce  de  méthode  régulière,  allaient 
si  loin ,  que  le  fils  ne  put  se  dissimu- 
ler les  inconvénients  de  cette  tournure 
d'esprit.  En  cherchant  à  les  éviter , 
il  se  jeta  même  dans  une  sorte  d'ex- 
ti-ême  ,  et  devint  plus  attentif  à  l' or- 
dre et  à  la  liaison  des  idées  ,  qu'il 
n'eût  fait  s'il  eût  été  moins  frappé 
du  spectacle  habituel  du  désordre. 
Du  raste,  quoique  ennemi  des  longs 
raisonnements,  son  père  se  plaisait 
à  lui  indiquer  les  raisons  prochaines 
des    petites    choses   qui    s'offraient 
aisément  et  familièrement  à  l'obser- 
vation. Cette  habitude  excita  la  cu- 
riosité du  jeune  Le  Sage ,  et  déter- 
mina en  partie  son  goût  pour  la  re- 
cherche des  causes.  Mais  cette  re- 
cherche n'était  pas  favorisée  par  les 
circonstances  dans  lesquelles  sa  fa- 
mille était  placée;  et  ses  petits  ap- 
pareils d'expériences  enfantines  n'é- 
taient pas  fort  respectés  au  milieu 
des  soins  du  ménage.  On  n'avait  pas 
encore  ,  à  cette  époque,  des  princi- 
pes bien  raisonnes  sur   l'éducation 
physique;  et  Le  Sage  ,  dans  son  en- 
lance  ,  fut  constamment  condamné 
à  une  sorte  d'immobilité ,  qui  nuisit 
a^u  développement  de  ses  forces  ,  et 
lui  laissa  toujours,  dans  la  suite,  un 
peu  de  gène  et  de  maladresse.  On  lui 


LES  ï 

f)rescrivait ,  en  même  temps ,  le  si-  lï 
ence  ;  et  il  en  résulta  pour  lui  quel- 
que difficulté  et  quelque  lenteur  à 
s'exprimer.   Mais   cette  contrainte, 
en  le  forçant  à  se  replier  sur  lui- 
même  ,  tourna  peut-être  avec  plus 
d'énergie  son  esprit  vers  la  médita- 
tion. Au  sortir  du  collège,  qui  per- 
met ,  à  Genève ,  d'allier  aux  avan- 
tages de  l'éducation  publique  ceux 
de  l'éducation  particulière,  Le  Sage 
entra  successivement  dans  les  audi- 
toires de  belles-lettres  et  de  philo- 
sophie.  Dans  ce  dernier  ,   qui  était 
le  plus  assorti  à  ses  goûts  ,  il  étudia 
la  physique  sous  Calandrini  et  les 
mathématiques  sous  Cramer.  A  cette 
époque  ;,  il  eut  occasion  de  démour 
trer  la  fausseté  d'une  prétendue  qua- 
drature du  cercle.  Ce  fut  aussi  dans 
le  même  auditoire ,  qu'il  contracta 
des  liaisons  studieuses  ^  qui ,   pen- 
dant tout  le  cours  de  sa  vie,  lui  ont 
été  chères  ;  en  particulier  celle  de 
J.  A.  Deluc ,  devenu  depuis  juste- 
ment célèbre.  Ce  physicien  a  rap- 
pelé quelque  part  une  conversation , 
dans  laquelle  Le  Sage ,  encore  jeune 
étudiant,  alléguait  à  ses  condisci- 
ples l'exemple  familier  d'un  cheval, 
qui    paraît     tirer  une   charrette  , 
mais  qui  la  pousse  avec  son  poi- 
trail. Dès-lors,  Le  Sage  avait  essayé 
d'expliquer  la  chute  des  corps  par 
le  choc  d'atomes  rapides  ;  mais  il  fut 
arrêté  par  des  difficultés  qu'il  ne  put 
réussir  à   dénouer   qu'au  bout   de 
quelques  années.    Cette  recherche  , 
qui  fut  toujours  pour  lui  une  occu- 
pation favorite,  ne  l'empêcha  pas  de 
tenter  la  solution  de  quelques  pro- 
blèmes de  physique  et  de  mécani- 
que, et  d'obtenir,  dans    ces   pre- 
mières études  ,  des  succès  propres  à 
l'encourager.  Mais  quand  il  fut  ques- 
tion   d'embrasser  un   état ,  il   fut 
en  proie  à  de  longues  et  pénibles 


LES 

hésitations.  Ce  temps ,  toutefois  , 
ne  fut  pas  perdu  ;  il  l'employa  à 
quelques  lectures  philosophiques  , 
eu  ayant  toujours  en  vue  son  but 

1)rinripal,  la  cause  delà  gravitation. 
1  se  détermina  enfin  à  étudier  la 
médecine,  et  se  rendit  à  Bàle ,  à  cet 
effet  ;  mais  il  n'exerça  jamais  cette 
profession ,  et  ce  genre  d'ëtude  eut 
()eu  d'attrait  pour  lui.  Cependant  Le 
Sage  eut  l'avantage  de  voir  et  d'en- 
tendre Daniel  BernouUi  ;  et  il  se 
rappelait  encore  dans  sa  vieillesse, 
avec  satisfaction  ,  l'impression  qu'a- 
vait faite  sur  lui  un  discours  de  cet 
liomme  de  génie,  sur  la  possibilité 
de  certaines  grandeurs  et  petitesses 
qui  révoltent  l'imagination.  Ce  sujet 
l'avait,  lui-même,  beaucoup  oc- 
cupé ;  et  le  poids  d'une  autorité  si 
respectable  contribua  à  l'élever  au- 
dessus  d'un  genre  de  diflicultés  qui 
aurait  pu  l'arrêter  dans  le  cours  de 
ses  méditations.  Après  un  séjour 
d'un  an  à  Bàle ,  que  la  modicité  de 
ses  ressources  pécuniaires  rendait 
pénible ,  il  alla  continuer  ses  éludes 
à  Paris.  Celles  de  médecine  ne  ser- 
virent guère  qu'à  entraver  sa  mar- 
rhe  ,  et  retarder  ses  succès.  Il  ne  fut 
pas  long-temps  à  s'apercevoir  de  ce 
qui  lui  manquait  en  d'autres  genres  j 
et  il  écrivait  à  son  père  ,  que  plu- 
sieurs choses  quil  ignorait  n'étaient 
que  VA,  B  f  C  des  mathématiques. 
Mais  son  père  ne  voulait  pas  qu'il 
se  détournât  de  sa  vocation  en  se 
livrant  à  d'autres  travaux.  Cette 
contrariété,  jointe  à  l'extrême  épar- 
gne qu'il  devait  se  presc  rire ,  et  k 
l'embarras  qu'il  éprouvait  dans  le 
monde  par  une  suite  de  sa  timidité 
et  de  l'éiducation  qu'il  avait  reçue  , 
l'empêcha  de  retirer,  de  son  sé- 
jour dans  la  capitale,  tout  le  fruit 
qu'il  en  avait  sans  doute  espéré.  Il 
tionnait  an»  leçoos ,  et  fut  ^elque 


LES  567 

temps  pre'cepleur  dans  une  maLson 
où  il  par.  ît  que  son  mérite  fut  mal 
apprécié.  Il  la  quitta  à  la  suite  de 
quelques  dégoûts  ,  et  fut  remplace 
par  Marraontel.  Rendu  à  ses  travaux 
et  à  sa  pauvreté,  il  reprit  ses  médi- 
tations favorites,  et  parvint  à  la  so- 
lution de  deux  diflicultés  ,  qui  l'a- 
vaient arrêté  jusque-là.  Il  écrivait  à 
son  pire  ,  en  date  du  i5  janvier ,  à 
onzeheurcs  et  demie  du  soir  [  1 747  ]: 
«  E'jpnxa ,  6U|3»3xa  (  i  ).  Jamais   je 
»  n'ai  eu  tant  de  satisfaction  que 
»  dans  ce  moment ,  où  je  viens  d'ex- 
»  pliqucr  rigoureusement ,  par  les 
î)  simples  lois  du  mouvement  recti- 
»  ligne ,  celles  de  la  gravitation  uni- 
»  verselle,  qui  décroît  dans  la  même 
»  proportion    que    les   carrés  des 
»  distances  augmentent.  »  Enflammé 
par  ce  succès ,  il  termine  sa  lettre 
en  disant  :  «  Peut-être  cela  meprocu- 
»  rera-t-il  le  prix  proposé  par  l'aca- 
»  demie  de  Paris ,  sur  la  théorie  de 
»  Jupiter  et    de  Saturne.   »   Voici 
quelle  fut  l'occasion  de  la  décou- 
verte qui  excitait  son  enthousiasme. 
Vers  la  fin  de  l'année  précédente  , 
Le  Sage  trouva  ,  par  hasard  ,  sur 
une  cheminée  ,  les  Leçons  élémen- 
taires d'astronomie,  de  La  Caille  ; 
et  après  en  avoir  parcouru  quelques 
articles  ,  il  lut  la  conclusion ,   où  il 
apprit  enfin  fortuitement  à  quoi  se 
réduisait  l'obligation  du  physicien 
qui  voudrait  expliquer  mécanique- 
ment toute  l'astronomie.    Pendant 
quelques  semaines  consécutives  ;,  il 
roula  dans  sa  tête  ce  grand  problè- 
me ,  et  atteignit  enfin  son  but.  «  Dès 
»  ce    moment-là  ,  dit -il   dans  ses 
»  notes,  je  me  prorais  bien  de  ne  pas 
»  lâcher  prise.  »  Et ,  en  effet ,  il  s» 
dévoua  ,  tout  entier,  à  cette  inteie»- 
santc  recherche.  Forcé  d'abréger  sou 


i68 


LES 


séjour  à  Paris,  il  revint  dans  sa 
patrie,  où  quelques  défauts  de  forme 
l'arrêtèrent  dans  la  pratique  de  la 
médecine.  Sou  père  lui  rendit  sa 
liberté  ;  et  il  l'employa  à  suivre  des 
«tudes  plus  conformes  ci  ses  goûts. 
Il  composa,  pour  le  prix  académi- 
que qu'il  avait  en  vue  ,  un  Essai 
sur  l'origine  des  forces  mortes , 
dans  lequel  il  s'occupait  peu  de  la 
question  principale ,  et  donnait  le 
développement  de  son  explication 
mécanique  de  la  gravitation.  Aussi 
ii'eut-il  aucune  part  au  prix.  En 
attendant  son  jugement ,  il  s'occupa 
de  diverses  éludes  accessoires  ;  et 
enfin,  lorsque  son  sort,  à  cet  égard, 
fut  décidé  en  mai  1700,  il  entreprit 
renseignement  des  mathématiques , 
comme  le  seul  moyen  de  se  procu- 
rer un  petit  revenu ,  et  même  à  la 
longue  une  petite  fortuue  indépen- 
dante. Le  travail  auquel  il  s'était 
livré  avec  trop  d'ardeur,  avait  dé- 
rangé sa  santé,  et  l'avait  rendu  sujet 
à  des  insomnies ,  qui  durèrent  toute  sa 
vie  et quiluiôtaient  souvent  lafaculté 
de  suivre  ses  méditations  habituelles. 
Pou  après  son  retour  à  Genève ,  il  se 
lia  avec  Charles  Bonnet,  qui,  dans  sa 
Contemplation  de  la  nature  ^  saisit 
l'occasion  de  parler  de  Le  Sage 
avec  estime.  Ce  tut  aussi  a  celte  épo- 
que qu'il  apprit  du  professeur  Cra- 
mer, que  Nicolas  Fatio  avait  conçu 
l'idée  d'un  mécanisme  propre  à  pro- 
duire la  pesanteur.  Dès-lors  il  ne  né- 
gligea rien  pour  obtenir  des  rensei- 
gnements à  ce  sujet,  et  parvint  enfin 
a  se  procurer  quelques  manuscrits  de 
Fatio, qu'ila  fait  déposer ,  à  sa  mort , 
dan^  la  bibliothèque  publique  de 
Genève.  Tout  en  donnant  des  leçons, 
Le  Sage  travaillait  sur  divers  sujets. 
Dans  une  lettre  à  d'Alembert,  en 
date  du  3  août  1753  ,  il  lui  donnait 
ks  titi'es  de  trente-huit  Mémoires 


LES 

qu'il  avait  ébauchés  ,  dont  neuf  de 
calcul ,  douze  de  géométrie  et  dix- 
sept  de  physique.  Nous  indiquerons , 
à  la  fin  de  cet  article ,  ceux  de  ces 
opuscules  qui  offrent  le  plus  d'inté- 
rêt. C'est  cependant  cette  époque  que 
Le  Sage  envisageait  comme  une  es- 
pèce de  suspension  de  travail ,  parce 
qu'il  avançait  peu  celui  auquel  il 
mettait  le  plus  d'importance.  Il  com- 
posait beaucoup,  et  ne  publiait  point. 
Cette  réserve  n'était  pas  seulement 
l'effet  de  sa  timidité  ou  de  sa  modes- 
tie ,  mais  bien  plus  encore  du  goût 
qu'il  prenait  à  entasser  des  matériaux 
et  de  sa  lenteur  à  les  rédiger.  Il  avait 
adopté ,  pour  ses  recueils  scientifi- 
ques ,  une  méthode  digne  d'être  imi- 
tée. Ses  pensées  et  celles  des  autres 
étaient  écrites  sur  des  papiers  ou  sur 
des  cartes  détachées ,  rangées  et  éti- 
quetées par  paquets ,  de  manière  à 
présenter  sous  des  chefs  distincts  , 
dans  le  meilleur  ordre ,  la  suite  de 
ses  méditations  et  de  ses  lectures.  En 
1701  ,  il  eut  connaissance  delà  dis- 
sertation du  médecin  Rcdeker  (  i  )  , 
qui  avait  eu,  sur  la  cause  de  la  pe- 
santeur, des  idées  analogues  aux 
siennes  {'i).  En  1756,  il  envoya  au 
Mercure  de  France ;,  une  Lettre  à 
un  académicien  de  Dijon  y  où  il  ré- 
futait une  explication  absurde  de  la 
pesanteur.  Bientôt  un  prix  proposé 
par  l'académie  de  Rouen,  sur  la 
cause  des  affinités  ,  offrit  à  Le  Sage 
une  nouvelle  occasion  de  travail.  Il 
en  résulta  un  Mémoire  qui  fut  cou- 
ronné en  1758,  et  imprimé,   mai$ 

(i)  De  causagravitalis  meditalio  ,  ij^ô. 

(2)  Outre  Nie.  Fatio  et  Rbdek.ek  qui  on» 
attribué  la  gravité  à  une  cause  analogue  k  ceUa 
que  LiESAGE  a  exposée  ,  il  i'aiit  nommer  Gabriel 
Cramer  ,  qiii ,  en  x^3i  ,  fit  soutenir  sous  sa  pré- 
sidence, à  GeiiAve,  une  thèse,  où  il  proposa  un»» 
liypollièse  en  apparence  semblable  ,  mai»  au 
l'ond  tort  difféi ente  ,  que  en  grand  géomètre  n» 
développa   point,   »l  >|it'il   yaïut  eusait*    abau-» 


LES 

non  pnMic  ,  sous  le  litre  à'J^ssal  (Je 
chimie  mècatùqtœ.  Il  y  rappoilait 
les  aninilc's  à  son  nu'ianisnic  j;ene- 
ral ,  et  expliquait  en  particulier  l'af- 
finilc  (les  substances  homogènes  en- 
tre elles,  par  l'impulsion  de  deux 
<  ouranls  de  particules  de  grandeurs 
inégales. Il  fil,  dans  la  suite ,  diverses 
corrections  à  cet  écrit,  cl  les  joignit 
soigneusement  à  tous  les  exemplaires 
qu'il  olVrit  à  ses  amis  et  à  plu- 
sieurs savants,  dont  il  ambitionnait 
les  critiques  au  moins  autant  que  le 
siidrage.  Le  Sage  forma  des  liaisons 
et  soutint  des  correspondances  nom- 
breuses avec  des  savants  de  diverses 
nations,  tels  queMairan ,  d'Alembert, 
Haillv,  Laplace,  Frisi ,  Boscowicli, 
Lambert ,  Euler ,  etc.  Il  fut  nom- 
me membre  de  la  société  royale 
«le  Londres  ,  et  correspondant  de 
l'académie  des  sciences.  Il  compta 
Senebier  au  nombre  de  ses  disciples. 
II.  B.  de  Saussure  avait  coutume 
d'exposer  dans  ses  cours  le  système 
de  Le  Sage.  Ses  successeurs  en  ont 
souvent  use  de  même.  M.  Lhuilier , 
actuellement  professeur  à  Genève , 
a  souvent  nomme  Le  Sage  comme 
un  maître  auquel  il  était  tendrement 
aitacbe.  En  1 759 ,  Le  Sage  conçut , 
pour  la  première  fois  ,  la  the'orie  des 
Uuides  ëlasli(pies ,  sous  une  forme 
qu'il  a  toujours  envisagée  depuis 
comme  pleinement  satisfaisante.  Des 
travaux  si  soutenus  furent,  sans 
doute,  la  cause  d'un  accident  dont 
il  fut  bien  péniblement  aflecté  :  eu 
17(3-2,  il  perdit  presque  la  vue.  Des 
ménagements  et  quelques  remèdes 
lui  en  rendirent  insensiblement  l'u- 
sage ;  mais  il  fut  dès-lors  assujéti  à 
toutes  les  précautions  qu'exige  un 
organe  fatigué  et  délicat.  Celte  cir- 
constance ,  jointe  à  d'autres  ,  lui  (il 
prendre  la  résolution  de  concentrer 
>C3  forces  sur  un  seul  objet.  Ainsi, 


LES  369 

loin  de  refroidir  son  ardeur  pour 
ses  éludes  favorites  ,  elle  tendit  plu- 
tôt à  l'accroître.  Apres  diverses  hé- 
sitations ,  il  renonça  au  mariage, 
cl  ne  songea  plus  qu'à  terminer  le 
grand  ouvrage  qu'il  avait  entrepris» 
L'Histoire  de  l'académie  des  sciences, 
pour  i7')6,  contient  \mc  Remarque 
de  Le  Sage,  sur  la  vingt  et  unième 
proposition  du  livre xi  des  Elénienls 
d'Euclide.  Les  Mémoires  de  Berlin, 
pour  1782,  oflrent,  dans  une  dis- 
sertation intitulée  Lucrèce  Neuto- 
iiien ,  le  syslèhie  de  Le  Sage ,  pré- 
senté par  lui-même  sous  une  forme 
indirecte  et  ingénieuse.  iS^ous  avons 
déjà  dit  qu'il  a  très-peu  publié.  Il 
projetait  une  Histoire  des  reclierches 
faites  sur  la  pesanteur,  et  nombre 
d'autres  ouvrages  plus  ou  moins  liés 
à  l'objet  principal  de  ses  travaux.  La 
Notice  de  la  vie  et  des  écrits  de  G. 
L.  Le  Sage,  publiée  à  Genève  en 
i8o5  ,fail  connaître  un  assez  grand 
nombre  d'écrits  de  cet  auteur  ,  pu- 
bliés, ou  dont  la  publication  est  en 
quelque  sorte  promise.  Voici  les  plus 
importants  :  Fragments  sur  les 
causes  finales  (  publiés  à  la  suite 
de  la  même  Notice  ).  —  Extiaits 
de  la  Correspondance  de  I^e  Sage , 
(  publiés  de  même  ).  —  Sur  les  al- 
véoles des  abeilles  {  dont  un  frag- 
ment a  été  publié  par  M.  F.  Huber  , 
dans  ses  Observations  sur  les  Abeil-^ 
les,  tome  11  ).  —  Loi  qui  comprend 
toutes  les  attractions  et  répulsions 
(Journal  des  savants  ,  aviil  1764  ). 
—  Quelques  Mémoires  sur  de  pré- 
tendues expériences  de  MM.  Coul- 
taud  et  Mercier  (Journal  de  physique, 
177-2  et  1773  ).  —  Suffrages  bri- 
tanniques favorables  à  la  physique 
spéculative  (  Biblioth.  britannique  , 
tom.  8  et  Q  )  (i).  Ses  ouvrages  non 

(1)  Nom  indiqiteron*  ici  quelque*  opuaciilea 
œwins   impoiUu» ,  pour  u«  ric«  oowiua  «la  c« 


27^  LES 

publies  sont  de  divers  genres.  Nous 
nous  bornerons  à  menlionner  son 
grand  Trailé  des  corpuscules  ultra- 
mondains ,  et  à  en  donner  une  idée 
en  deux  mots.  Des  corpuscules  durs, 
très-pelits  et  très-rapides,  arrivant 
sans  cesse  en  tout  sens  des  régions 
les  plus  reculées  de  l'espace,  pous- 
sent les  corps  les  uns  contre  les  au- 
tres. Pour  juger  ce  système,  il  faut 
Toir  s'il  explique  les  lois  de  l'attrac- 
tion ;  et  afin  de  mettre  les  savants  en 
ëtat  de  prononcer ,  l'auteur  a  pre'- 
sente'  ses  conceptions  sur  la  porosité 
des  corps  ,  et  sur  la  nature  des  cor- 
puscules ultramondains  ,  dans  un 
court  résume' ,  placé  à  la  suite  de  son 
Lucrèce  iV<?Mfonien,  réimprimé  dans 
la  Notice  citée  ci-dessus.  (  i  )  Cet  ex- 
posé suffit  pour  montrer  aux  mathé- 
maticiens que  les  phénomènes  sont 
explicables  par  ces  suppositions. 
Dans  l'astronomie  physique  on  a  pu 
se  passer  jusqu'ici  de  considérer  l'at- 

\u\  a  été  publié  :  Réjlexions  sur  la  distinrlion 
tntre  l' esprit  et  le  jugdinenl ,  signées  X  (  Jour- 
nal Helvétique  ,  novembre  1^43  ).  ...  Deux  let- 
tres sur  un  principe  evroné  de  définition  {Jouni. 
Uelf/éi. ,  1744  et  1745  ).  — -  L'article  Inverse  de 
l'Encyclopédie.  ---  Remarques  sur  les  dijjé- 
■renies  mélhodes  de  préserver  les  édiji-es  des 
incendies ,  in-8».  ,  177b.  -—  Lettre  sur  le  rap- 
port du  vide  au  plein  ,  etc.  (  Journ.  Ëncyclop., 
»uar«  17S2.  )  —  Réflexions  sur  la  loi  de  conti- 
tiuité  {  Opuse.  scelli  ,  1784).  A  ces  opuscules 
publiés  du  vivant  de  l'auteur  ^  il  faut  ajouter  les 
écrits  posthumes  suivants  :    —  Sur  le  contant  des 

éléments  (Ann.  de'chimie,  n".  148). Sur  le 

style  des  ouvrages  philosophiques.  (Archives 
littéraires ,  t.  iv  ,  p.  54  ). Quelques  opuscu- 
les relatifs  à  la  méthode  (  imprimés  à  la 
•uîte  des  J'.ssais  de  philosophie  de  P.  Prévost, 
Genive  ,  «804  ),  et  Deux  traités  de  physic,ue- 
méçanique,  publiés  par  P.  Prévost,  comme 
éditeur  du  premier,  et  auteur  du  second ,  Ge- 
ntve,  Ptischoud,  1818.  Le  premier  de  ces  trai- 
té», rédigé  d'apris  le»  notes  de  Lesage  ,  contient 
Texposé  de  son  sfsttme  et  les  applications  qu'il 
en  avait  faites  aux  fluides  élastiques  et  aux  at- 
linitcs.  Le  second  offre  de  nouvelles  applications 
■  ux  gaz  et  à  la  lumière.  Cet  écrit  est  destiné  à 
faire  connaître  en  son  entier  le  système  de  l'au- 
teur,  et  il  indiquer  des  conséquences  qui  sem- 
blent, du  moins  par  leur  objet,  aevoir  être  de 
quelque  intérêt  aux  yeux  des  physiciens. 

(t)  Voyez  Notice  de  la  Vie  et  des  éeritt  de 
J.eta^c  ,  p.  699-604.  Ce  résumé  a  pour  titre  :  ^p- 
peniUce.  Constitutions  que  7  'assigne  aux  graves 
tt  au  fluide  graviflque  ;  suivies  d'un  eoneeot 
Tuathémuihique  ,  etc. 


LES 

traction  dans  sa  cause.  Dans  quel- 
ques recherches  de  physique  parti- 
culière ,  il  pourra  bien  arriver  qu'il 
en  aille  autrement ,  et  que  certains 
phénomènes  dépendent  de  la  cause 
même  de  cette  force ,  envisagée  jus- 
qu'ici comme  un  fait.  En  ce  cas  ,  les 
recherches  de  Le  Sage  acquerraient 
beaucoup  d'importance.  Nous  nous 
sommes  bornés ,  dans  cet  article  ,  à 
envisager  Le  Sage  sous  le  point  de 
vue  de  la  science.  Son  caractère  et 
la  constitution  particulière  de  son 
esprit  offrent  des  traits  assez  remar- 
quables. Nous  en  citerons  un  très- 
petit  nombre,  renvoyant  nos  lecteurs 
pour  d'autres  détails  à  la  Notice  de 
sa  Fie.  La  faiblesse  de  sa  santé, 
et  sa  lenteur  à  rédiger ,  avaient  sou- 
vent engagé  ses  amis  à  le  presser 
d'accepter  leur  secours.  Mais  après 
y  avoir  réfléchi ,  et  avoir  fait  même 
en  ce  genre  quelques  tentatives,  il 
avait  fini  par  y  renoncer  ;  et  l'on  a 
trouvé  dans  ses  notes  un  paquet  de 
cartes  sous  ce  titre  :  Sur  Vimmis- 
cihilité  de  mes  pensées  avec  celles 
d'autrui.  Le  Sage  reconnaissait  en 
lui  deux  facultés  faibles  ,  l'attention 
et  la  mémoire.  Celle-ci  était  ingrate 
et  capricieuse  :  il  ne  pouvait  pas  la, 
diriger  sans  user  de  certains  artifices. 
Il  se  comparait  à  un  peintre  qui 
voudrait  travailler  de  nuit ,  sans  au- 
cune autre  clarté  que  la  lueur  inat- 
tendue et  instantanée  des  éclairs.  In- 
capable par-là  même  de  diriger  son 
travail  vers  un  objet  constant  et  dé- 
terminé ,  il  avait  pris  le  parti  de  lais- 
ser aller  sa  pensée  au  gré  de  son  ca- 
price, et  prenait  chaque  jour  ,  pour 
objet  de  travail  et  d'application, 
celui  que  lui  suggérait  le  moment.  II 
manquait  de  présence  d'esprit,  qu'il 
appelait  présence  de  mémoire.  Aussi 
sa  parole  était-elle  lente  et  composée. 
Il  fallait  qu'on  le  suivît  sans  le  pr»»- 


Î.KS 

An  ni  rinl<M  rompre  ;  rt  mhne  rn 

vitant  (rôtrc  Ioiij;  ,  il  s'aj)])li(iuail  le 

tôt  des  Spartiates  à  un  orateur  Hc 
>,tnios  :  «  La  longueur  du  milieu  de 
»  volrc  discours  nous  a  fait  oublier 
»  le  commencement,  et  par  conse'- 
•  quent  nous  a  empêches  d'en  com- 
»  prendre  la  (in.  «  Son  imagination 
lui  représentant  faiblement  l'avenir, 
il  Y  nieltait  moins  d'intcrct  que  d'au- 
tres; et  il  avait  coutume  de  dire  lui- 
'îiènie,   qu'il  n'y  prenait  part  que 

onirae  à  l'ex-isleuce  de  ses  proches, 
(.('la  lui  paraissait  surtout  vrai  durant 
les  jours  où  l'insomnie  avait  abâtardi 
toutes  ses  facultés;  en  sorte  que, 
pour  s'informer  de  son  état ,  une  de 
ses  amies  bii  demandait  à  quel  degré' 
de  parente  il  était  allie  de  lui-même. 
On  peut  dire  ,  eu  général ,  qu'il  eut 
toujours  le  bien  en  vue ,  et  qu'il  le 
pratiqua  autant  qu'il  le  putconnaître. 
Mais ,  de  toutes  ses  inclinations  loua- 
bles ,  aucune  ne  l'a  plus  constam- 
ment dominé  que  l'amour  de  la  vé- 
rité; c'était  chez  lui  une  vraie  passion. 
Il  fut  sensible  aux  charmes  de  l'a- 
mitié ;  il  en  connut  les  lois ,  et  en 
remplit  les  devoirs.  Ses  actesde  bien- 
faisance étaiejît  fort  supérieurs  à  sa 
fortune.  Peu  d'hommes  ont  poussé 
plus  loin  que  lui  la  complaisance  et 
les  bons  olUces  ,  dans  les  objets  sur- 
tout qui  pouvaient  intéresser  le  tra- 
vail des  gens  de  lettres  et  des  jeunes 
gens  voués  à  l'étude.  Du  reste ,  ses 
goûts  étaient  simples  et  sa  vie  uni- 
forme et  laborieuse.  Il  supporta 
patiemment  les  infirmités  jusque 
dans  une  vieillesse  avancée;  mais 

f'S  infirmités  s'accrurent  tout  à  coup 
'  l  se  changèrent  en  uue  maladie  lon- 
-  ue  et  douloureuse ,  pendant  laquelle 
il  conserva  ,  presque  jusqu'à  la  fio  , 

T  présence  d'esprit.  Il  mourut  à 
'icnive,  âgé  de  près  de  80  ans,  le 

io  novembre  i8o3.       P.  P.  P. 


LES  271 

LES  AGE  (  Bernard -M  ABiE  ), 
député  à  la  Convention  en  i^tp  par 
le  département  d'Kure-ct-Loir,  TOta 
le  plus  ordinairement  dans  cette  as- 
semblée avec  le  parti  girondin  (  f^, 
GuADET  ) ,  et  s'y  Ht  remarquer  par 
rexlrêmc  mobilité  de  ses  jr)rincij>cs. 
Dans  le  procès  de  Louis  XVI ,  il  s« 
prononça  pour  l'appel  au  peuple  du 
jugement  à  intervenir;  et  sur  la  ques- 
tion de  la  peine,  il  vota  la  mort, 
sans  y  joindre  la  condition  du  sursis. 
Il  se  trouve  par  conséquent  placr' 
dans  la  catégorie  des  régicides, puis- 
que dans  le  recensement  des  xqWm 
le  sien  fut  compté  pour  la  mort, 
quoique  dans  le  dernier  appel  il  ait 
réellement  volé  pour  le  sursis.  On 
fait  ici  cette  remarque  pour  rectifier 
des  erreurs  auxquelles,  dans  les  temp* 
où  nous  écrivons ,  l'application  de 
la  loi  sur  le  bannissement  des  régi- 
cidcs  a  souvent  donné  lieu.  Dans  les 
premiers  mois  de  la  session  conven- 
tionnelle ,  Lesage,  épouvanté  sans 
doute  des  suites  de  ce  terrible  arrêt, 
se  rangea  parmi  les  révolutionnaires 
les  plus  violents;  il  proposa,  le  10 
mars  1 798 ,  le  projet  d'un  tribunal 
révolutionnaire  très-expéditif,  mais 
auquel  on  préféra  celui  du  comité  de 
législation.  Ce  fut  inutilement  qu'il 
essaya,  par  cette  apparence  d'exa- 
gération qui  n'était  pas  dans  sou 
caractère,  de  faire  oublier  l'hésita- 
tion qu'il  avait  montrée  dans  les  pre- 
mières délibérations,  et  surtout  dang 
le  procès  de  Louis  XVI.  La  nouvelle 
faction  des  montagnards  ne  cessait 
alors  d'attaquer  les  hommes  timide» 
qui  nes'étaient  pas  jetés  ouvertement 
et  de  prime  abord  dans  la  carrière  de 
sang  qu'elle  venait  de  s'ouvrir;  et 
elle  les  vouait  à  la  persécution  et  à 
la  mort,  en  leur  donnant,  par  allu- 
sion au  procès  du  roi,  le  nom  à'ap' 
pelants.  Lesage  avait  d'autant  plus 


^'^1  LES 

de  raisons  de  redouter  la  fureur  de 
ce,:,  hommes  féroces,  qu'il  s'était  fait 
remarquer  plusieurs  fois  par  sa  mo- 
dération. Le  i4  décembre  I79vi,  il 
s'était  opposé  à  l'impression  de  la 
liste  des  pétitions  dites  des  'io  mille 
et  des  8  mille,  dans  lesquelles  on 
avait  demandé  vengeance  des  at- 
tentats commis  contre  Louis  XVI , 
le  20  juin  précédent  ;  par  la  raison, 
avait-il  dit,  qu'il  ne  fallait  pas  mul- 
tiplier les  causes  de  proscription. 
Un  tel  langage  ne  pouvait  convenir 
à  ceux  qui  voulaient  gouverner  par 
la  terreur  et  la  destruction  •  et  Le- 
sage  fut  lui  -  même  un  des  pre- 
miers proscrits  après  la  révolution 
du  3 1  mai ,  où  il  s'était  montré  l'un 
des  plus  ardents  à  combattre  le  parti 
de  Robespierre.  Le  iS  juillet  1798, 
il  fut  déclaré  traître  à  la  jiatrie,  et 
mis  hors  la  loi-  mais  ayant  échappé 
à  ses  bourreaux  par  la  fuite,  il  fut 
rappelé  clans  la  Convention  avec 
ceux  de  son  parti ,  après  le  9  ther- 
midor ( 27  juillet  1 794  ).  Pendant  le 
reste  de  la  session  ,  il  voulut  se 
venger  des  terroristes  ses  proscrip- 
teurs,  les  poursuivit  avec  beaucoup 
de  constance,  et  demanda  l'arresta- 
tion de  plusieurs,  notamment  de 
Robert-Lindet  et  de  Fouché,  dont 
il  avait  à  se  plaindre  plus  particu- 
lièrement. Il  combattit  la  loi  du  1 7 
nivôse  relative  au  partage  des  suc- 
cessions des  émigrés ,  et  devint 
membre  du  comité  de  salut  public  : 
il  n'y  aurait  véritablement  point  de 
reproches  à  lui  faire  depuis  sa  pros- 
cription, si  on  ne  l'avait  entendu 
Annoncer  à  la  tribune  avec  enthou- 
siasme la  funeste  victoire  de  Quibe- 
ron,  où  venaient  de  périr  les  meil- 
leurs officiers  de  l'ancienne  marine 
de  France.  Il  fut  ensuite  membre  de 
la  commission  qui  rédigea  la  cons- 
ijtutioa  directoriale ,  et  fut  chargé 


LES 

concurremment  avec  M.  Daunou 
d'en  faire  le  rapport.  Le  Si3  juin 
1 795 ,  il  proposa  une  proclamation 
aux  habitants  de  Paris ,  et  fit  décré- 
ter qu'ils  étaient  garants  envers  la 
nation  de  la  sûreté  des  membres  de 
la  Convention  nationale.  Depuis  cette 
époque  il  se  fit  peu  remarquer;  et  il 
mourut  le  9  juin  1796  dans  un  âge 
peu  avancé.  B-u. 

LESBONAX,  philosophe  et  ora- 
teur grec ,  était  né  à  Milylène ,  et 
florissait  sous  l'empire  d'Auguste. 
Il  eut  pour  maître Timocrate;  mais 
il  corrigea  ce  qu'il  pouvait  y  avoir 
de  trop  sévère  dans  ses  principes. 
Lucien,  qui  l'appelle  un  homme  d'es- 
prit et  de  mérite  ,  nous  apprend  qu'il 
fréquentait  les  spectacles,  même  ceux 
des  danseurs,  et  qu'il  regardait  le 
théâtre  comme  une  école  de  vertu. 
(  Fojez  Lucien,  De  la  danse, 
trad.  de  Bellin  de  Ballu  ,  tom.  m  , 
p.  99,  )  Il  enseigna  dans  sa  patrie  avec 
un  tel  succès,  qu'on  a  cru  que  c'était 
pour  lui  décerner  une  récompense 
publique,  que  les  magistrats  de  sa 
ville  natale  avaient  fait  frapper  en 
son  honneur  une  médaille,  échappée 
long -temps  aux  recherches  des  an- 
tiquaires ,  et  retrouvée,  dans  le  der- 
nier siècle,  par  Cary,  académicien 
de  Marseille,  qui  l'a  publiée  en  1744, 
avec  une  explication.  (  F,  Cary,  \  II, 
p.  247.)  Elle  porte  une  tête  de  jeune 
homme,  couronné  de  fleurs  ,  avec 
les  mots  AECBONAS  HPHC  NEOC, 
et  au  revers  une  figure  debout ,  cou- 
verte d'un  manteau ,  qui  tient  de  la 
main  droite  un  bâton,  et  de  la  gau- 
che un  instrument  qu'on  n'a  pas  pu 
déterminer.  Cary  conjecture  que  la 
tête  est  celle  du  dieu  Bacchus ,  ho- 
noré d'un  culte  particulier  à  Mi- 
tylène  :  cette  opinion  est  com  - 
battue  dans  les  Mémoires  de  Tré- 
voux (  juin  1745  )  où  l'on  prétend 


LES 

i  M'  riUlP  lôl<*  »<^  pcul-cire  que  celle 
fie  Krsl>oiia\  lui-iiièmp.   Le  sarant 
VisroîUi  a  l'ail  voir  «Icpiiis  (  Icuiio^r. 
grectf.  sii(>|>l.  nul.  (11.  iv  )  que  la  tète, 
liguree  sur  celle  médaille  est  celle 
(VAulinoiis,  auquel  les  Lesbiens  y 
•Iruinciit,  par  flatlerie,  le  titre  de  ue- 
>s  ^tos  LESBO>Ax,c.a.d.  lehévs, 
u\>eau  Leshonac  ou  nouvel  Annv 
(Mgiieur  )  lie  Lesbos.  (  Tom.  TIl , 
cdit.   in -4".  p.   319.  )    Suidas  as- 
sure que  ce  Lesbonax  avait  compose' 
{îlusieurs  ouvrages  de  philosophie, 
^holius  avait  fait  l'analyse  de  seize 
de  ses  harangif(R;  mais  par  une  fa- 
talité qui  semble  avoir  poursuivi  les 
productions  de  Lesbonax  ,  ce  pas- 
sage de  la  Bibliothèque  i[(i  Photius  , 
est  un  de  ceux  dont  on  re^^relte  la 
perte.  Quelques  critiques  ont  distin- 
gué Lesbonax  le  philosophe,  de  l'o- 
rateur :  Fabricius  [^ense  que  c'est  le 
même  personnage  j   mais   il  avoue 
qu'il  serait  embarrassé  d'en  donner 
de  bonnes  preuves.  Quoi  qu'il  eu 
soit ,  on  a ,  sous  le  nom  de  Lesbonax, 
deux  Harangues ,  imprimées  dans 
les  Orationes  rhetor.  grœc.  Venise, 
Aide  ,  i5i3;  H.  Estienne,  1.575, et 
plusieui-s  fois  avec  les  Discours  d'Rs- 
chine ,  de  Lvsias  et  des  autres  oïa- 
tcurs grecs. Dans  la  première,  il  ex- 
horte les  Athéniens  à  se  vciïger  des 
injures  des  Thébains  ;  la  seconde ,  a- 
dresséc  aux  Athéniens,  a  pour  but  de 
les  engager  à  faire  la  guerre  aux  La- 
ccdéraoiîiens.  Si  ces  discours  avaient 
t   été  réellement  prononcés,  il  faudrait 
«i  conclure  que  l'auteur  vivait   au 
t«mps  de  la  guerre  du  Péloponnèse 
^i3  ans  avant  J.-C.  ),  et  par  con- 
ifjiienl  plusieurs  siècles  avant  Les- 
bonax le  philosophe;  mais  on  sait 
que  les  rhéteurs  prenaient  souvent 
les  sujets  de  leurs  déclamalions  dans 
les  temps  reculés.  Ces  deux  /faran- 
gués  oui  été  traduites  en  latin,  la 

XXIV, 


LF.S 


173 


prCTnière  par  André  Scholt  ou  Jean  j 
Gruter  ,  cl  la  seconde  par  (iuil- 
lamne  (janlcr  ,  et  imprimées  à  Ha- 
nau,  i()M),  in-8".  avec  les  Discours 
de  Dinanpie.  Lesbonax  eut  un  fils 
nommé  Potamou,qiji  l'égala  dans 
l'art  de  l'éloquence.  On  a  confondu 
Lesbonax  ,  dont  on  vient  de  parler, 
avec  un  grammairien  de  même  nom, 
qui  lui  est  postérieur,  et  qui  floris- 
sait  à  Constanlinople.  On  a  de  ce- 
lui-ci :  De  figuris  grammaticis.Jjéon. 
Allalius  promettait  une  édition  grec- 
que et  latine  de  cet  ouvrage,  en 
1G43  ;  mais  il  a  été  publié  pour  la 
première  fois,  à  la  suite  du  traité 
d'Ammoiiius  ,  De  adjimum  vocabu- 
lorum  dijferenlid,  ^r. ,  par  Valke- 
uaer  ,  Lcyde,  1739  ,  in-40.    W-s. 

LESBROUSSART  (Jean-Bap- 
TTSTK  )  naquit  le  21  janvier  17^7  7  à 
Ully-St.-George,  en  Picardie.  A  peine 
âgé  de  '20  ans,  il  obtint  la  chaire  de 
rhétorique,  au  collège  de  Bcauvais, 
où  d'excellentes  études  l'avaient  de'ja 
fait  connaître  avantageusement.  Sa 
réputation  pénétra  bientôt  dans  laBel.. 
gique;  et  le  gouvernement  autrichien 
lui  lit,  en  1 778,  des  propositions  qui 
furent  acceptées.  II  devint  successi- 
sivement  professeur  à  Gand  et  à 
Bruxelles  :  nommé  membre  de  Ta- 
démie  royale  de  cette  dernière  ^âlle, 
il  ne  tarda  pas  à  justifier  cette  laveur 
par  des  Dissertations  historiques  , 
qu'un  style  pur  et  l'esprit  d'analyse 
font  distinguer  dans  la  collection  des 
Mémoires  de  cette  société.  Il  publia, 
en  1783  ,  sous  le  litre  à' Education 
littéraire,  ou  Réjîexions  sur  le  plan 
d'études  adopté  par  S.  M.  VEmpe- 
reurpour  les  collèges  des  Pays-Bas 
autrichiens,  vol.  in-r2.,un  ouvrage 
qui  lui  valut  les  encouragements  les 
j)lus  flatteurs  11  cultivait  ainsi  pai- 
siblement la  littérature ,  lorsque  les 
révolutions  de  la   Belgique  et  de  la 

1^ 


î>74 


LES 


France  vinrent  troubler  son  repos. 
Victime  d'une  intrigue  que  sa  loyau- 
té l'empêcha  de  déjouer,  Lesbrous- 
sart  y  après  avoir  professé  les  lan- 
gues anciennes  à  l'ëcole  centrale  du 
département  de  la  Dyle ,  ne  se  trou- 
va point  compris  dans  l'organisation 
du  lycée  :  mais  la  ville  d'Alost  prit  le 
soin  de  l'en  dédommager ,  en  lui  con- 
fiant la  chaire  de  belles-lettres  à  son 
école  secondaire.  Bientôt  après  ,  en 
i8i  0,1e  grand-maître  de  l'université 
bii  donna  la  chaire  de  rhétorique  au 
lycée  de  Bruxelles  ,  qui  vit  dès-lors 
le  nombre  de  ses  élèves  s'accroître 
de  plus  d'un  tiers.  L'Institut  royal 
des  Pays-Bas  le  mit  au  nombre  de 
ses  membres  ,  en  1816;  et  il  venait 
d'obtenir  sa  retraite  ,  lorsqu'il  mou- 
rut le  1 0  décembre  1 8 1 8,  laissant  un 
fils  dont  s'honore  déjà  la  littérature 
bolgique.  Outre  les  ouvrages  dont 
nous  avons  fait  mention,  Lesbrous- 
sart  a  publié:  L  Annales  de  Flandre 
du  P.  d' Oudegherstf  enrichies  de 
notes  historiques  ,  grammaticales 
et  critiques  ,  ainsi  que  de  plusieurs 
chartes  et  diplômes  qui  n'avaient  ja- 
mais été  imprimés,  Gand,  2  vol. 
in -8».  IL  Eloge  historique  du 
jirince  Charles  de  Lorraine ,  Bruxel- 
les ,  1781.  III.  Un  Mémoire  qui 
remporta  le  prix  proposé  par  l'aca- 
démie de  Châlons ,  sur  cette  ques- 
tion :  Quels  sont  les  moyens  de 
-perfectionner  Véducation  dans  les 
collèges  de  France  ?  1 78 1 .    St-t. 

LB^SC  AILLE  (CATiiERmE),  Gene- 
voise d'origine,  née  vers  1649  ^ 
Amsterdam  ,  où  son  père  était  asso- 
cié dans  la  célèbre  imprimerie  de 
Blaeu  (  I  ) ,  cultiva  avec  distinction 


(i)  Il  avait  lui-même  du  talent  pour  la  poésie  } 
Wajs  il  perdit  tous  ses  papiers  dans  l'incendie 
qui  consuma  l'imptimerie  de  Blaeu,  en  16-,. 
I/empereur  Léopold  l'avait  créé  poète -lauréat 
par  des  lettres-patentes  du  ler.  mai  i6(»3.  Il  mou- 
tHtea  1677, à  l'âge  de  67  an«. 


LES 

la  poésie  hollandaise,  et  fut  surnom- 
mée la  dixième  Muse ,  la  Sapho 
Hollandaise,  etc.  Bien  qu'il  y  ait 
de  l'exagération  dans  ces  éloges,  on 
ne  peut  lui  contester  un  véritable 
talent,  que  Vondel  avait  signalé  dès 
l'enfance  de  Catherine.  Elle  succéda 
à  son  père  dans  le  commerce  de  la 
librairie*  et  les  poètes  de  son  temps 
n'eurent  pas  moins  à  se  louer  d'elle 
pour  les  conseils  de  sa  critique  éclai- 
rée, que  pour  l'exécution  typogra- 
phique de  leurs  œuvres.  Les  siennes 
ont  été  recueillies  en  3  vol.  in-4®. , 
par  son  beau-frère  Rânk  ,  à  Ams- 
terdam, en  1728.  On  y  trouve  sept 
tragédies,  traduites  du  français,  et 
jouées  à  Amsterdam;  savoir  :  Gen- 
séric ,  Wenceslas ,  Hérode  et  Ma- 
rianne, Hercule  et  Dé j antre,  Ni-. 
comède ,  Ariane,  et  Cassandre. 
Catherine  Lescaille  mourut  le  8 
juin  171 1.  M-ON. 

LESCALE.   Voyez  Scaliger. 

LESCALOPIER  (  Pierre  ) ,  néâ 
Paris  en  1 608 ,  se  fit  jésuite  le  .  1 2 
septembre  i6si5,  prononça  ses  qua- 
tre vœux  en  i643,  professa  la  rhé- 
torique pendant  douze  ans ,  à  Reims, 
et  l'Ecriture-sainte  ,  pendant  treize 
ans,  à  Dijon.  Il  mourut  dans  cette 
dernière  ville,  le  6  août  1678.  On 
a  de  lui  :  Humanitas  theologica  in 
qud  M.  r.  Cicero ,  de  Naturd  Deo- 
rum ,  argumentis,  expositionihus ,  il- 
lustrationibus  nunc  primùm  insi^ 
guis  in  lucem  prodit ,  1 660  ,  in-f*^. 
L'abbé  d'Olivet  dit  que  le  P.  Lesca- 
lopier  a  incorporé  dans  ses  notes  les 
commentaires  sur  le  même  ouvrage 
par  Pietro  Marso ,  et  par  Sixte  Betu- 
leius;  il  ajoute  que,  si  ce  que  le  P, 
Lescalopier  a  pris  à  ses  prédéces- 
seurs était  retranché  de  son  livre  , 
ainsi  que  tout  ce  qu'il  y  a  mis  de 
superflu  et  de  puéril ,  son  in-folio  se- 
rait réduit  à  un  volume  très-portatif. 


LES 

î  .\  BibliotJiâca  scriplorwn  societa- 
(is  Jt'sn  n'allrihnr  pas  d'autres  ou- 
vrages à  Lfscalopior;  mais  Morcri 
(  cdiliou  fie  l 'j'ji)  )  dit  qu'où  lui  doit 
rnrorr  :  Scholia  seit  brèves  clucida- 
tiones  in  libnim  Psalmoruiriy  1 7*27 , 
iu-8«.  Z. 

LESCALOPIER  de  NOURAR 
(  CuARL»  s  -Armand  ) ,  ne  à  Paris 
le  24  i^iHet  1709,  fut  luâîlre  des 
rcf|uèles;  ce  qui  ne  renipccha  pas 
de  cultiver  les  lettres  :  il  mourut  à 
Paris  ,  le  7  mars  1779.  Ou  a  de 
lui:I.  VAininte  du  Tasse,  pasto- 
rale y  1735,  iu-1.2;  traduction  en 
prose.  II.  Traité  du  pouvoir  du 
magistrat  politique  sw  les  choses 
sacrées,  traduit  du  latin  de  Gro- 
tius  ,  1 75 1 ,  in- 1 2.  III.  Histoire  des 
capilulaires  des  rois  de  France. 
(Voyez  Baluze  ,  III ,  297.)  IV.  De 
la  république,  traité  de  J.  Bodin  ; 
ou  Traité  du  gouvernement ,  revu 
sur  l'édition  latine  de  Francfort , 
1591, Londres  etParis,  I756,in-iu. 
V.  Les  écueils  du  sentiment ,  1 756, 
in- 12.  VI.  Ministère  du  négocia^ 
teur,  1763  ,  iu-8«.  VII.  Beclierches 
sur  l'origine  du  conseil  du  roi, 
1765  ,  in-i2.  VIII.  Eloge  hi  tori- 
que de  Vahbé  Oliva  (  à  la  tête  des 
OEu^res  diversesde  M,  l'abbé  Oliva^ 
1758,  in-8^.,  dont  il  avait  été  édi- 
teur ).  —  Lescalopier  a  donne  un 
Précis  sur  Véducation  des  vers  à 
soie,  1763  ,  in-80.  A.  B-T. 

LESCARBOT  (  Marc  ) ,  littéra- 
teur, était  né  à  Vervins  dans  le 
seizième  siècle,  d'une  famille  no- 
Me  (  I  ).  Il  se  fit  recevoir  avocat  au 
parlement  de  Paris;  mais  entraîné 
par  son  caractère  aventureux,  il  ne 
tarda  pas  à  quitter  le  barreau ,  et 
s'embarqua  sur  une  flotille  destinée 


(1)  l\  prend  ,  k  la  tète  «le  •«■  oiivrai;e*,  le  titre 
Je  leigneiir  d-  Saint-Audabcrt  du  Pr«*ie  U««m- 
moue  «a  ttoutonnaii. 


LES  'i7'; 

{>our  la  Nouvelle-France.  Il  contri- 
ma  à  former  les  j)remiers  établisse- 
ments (lau6  le  Can.!da,et  raj)p()rta, 
sur  les  productions  de  ce  p,»vs,  des 
renseignements  très-uli.'cs.  ïl  con- 
sentit ensuite  à  accoinj)iiç;i:er  Pierre 
de  Castille,  nommé  ambassadeur  en 
Suisse  ;  et  il  proiita  de  ses  loisirs 
pour  vi^iter  dans  le  plus  grand  dé 
tail  une  des  contiécs  de  l'Europe  les 
j)lus  intéressantes  aux  }eU5.  du  na- 
turaliste. On  ij:;nore  les  autres  par- 
ticularités de  la  vie  de  Lescarbotj 
et  ce  n'est  que  par  conjecture  qr.'on 
place  sa  mort  vera  l'an  i63o.  On  a 
de  lui  :  I.  Histoire  de  la  JSouvclle- 
France,  contenant  les  navigations , 
découvertes  et  habitat  i  m  s  faites 
par  les  Français  es  Indes- Occi- 
dentales, etc.,  Paris,  1609,  in  8°.- 
seconde  édition  augmentée,  iGri; 
avec  de  nouvelles  additions,  1618, 
in-8^.  Cet  ouvrage  est  rare  et  cu- 
rieux. L'auteur  y  donne  d'abord  Ja 
relation  du  voyage  de  Jean  Veraz- 
zani,  envoyé  le  premier  par  les  Fran- 
çais en  Amérique  :  il  parle  ensuite 
des  établissements  français  dans  la 
Floride;  de  Texpédilion  de  Viliega- 
gnon  dans  le  Brésil;  et  de  la  colonie 
ifondée  dans  l'Acadie  par  De  Monts. 
Lescarbot  paraît  sincère,  sensé  et 
impartial.  C'est  le  témoignage  que 
lui  rend  le  P.  Charlevoix,  dont  l'au- 
torilé  est  ici  d'un  grand  poids.  Il 
entremêle  ses  récits  d'anecdotes  et  de 
remarques  littéraires; et  il  a  fait  im- 
primera la  suite  de  la  3*^. édition  d© 
son  ouvrage,  un  recueil  de  Vers  qu'il 
a  intitulé,  Les  Muses  de  la  Aou- 
velle-France ,  parce  qu'il  les  avait 
composés  pendant  son  voyage  en 
Amérique.  II.  Le  Tableau  de  la 
Suisse,  auquel  sont  décrites  les  sin- 
gularités des  Alpes,  Paris,  1618, 
in-4'^.  de  79  pages.  Cet  ouvrage  est 
écrit  en  ver*  fort  plats  et  fort  ea- 


^"C,  LES 

rmvnux;  mais  on  y  trouve  des  p:\r- 
ticiilarités  inlcrcssantes  et  qui  le  font 
l'ccherclier  des  amateurs.  L'auteur 
y  réfute  ropiuion ,  déjà  répandue  de 
son  temps ,  que  le  Rhône  traverse 
le  lac  de  Genève  sans  y  mêler  ses 
eaux.  La  deseription  des  bains  de 
Pfeffers,  qui  fait  partie  de  ce  livre  , 
avait  paru  séparément  sous  ce  titre  : 
Les  Bains  de  Fewer,  etc. ,  sans 
date,  in-4°.,  et  Lyon,  Détournes, 
i6i3,in-4o.  de  8  pages.  IIL  La 
Chasse  aux  Anglais  dans  Visîe  de 
Bhé  et  au  sié.^  de  La  Rochelle, 
et  la  réduction  de  cette  ville  en 
16^8;  Paris,  1629,  in-8«.  W-s. 
LESGÈNE  DESMAISONS 
(Jacques)  ,  né  à  Granville  en  1750, 
était  fils  d'un  officier  de  marine  peu 
favorisé  de  la  fortune.  Après  avoir 
achevé  ses  études  à  Paris  ,  au  col- 
lège d'Harcourt,  où  un  de  ses  parents 
l'avait  fait  recevoir  boursier  ,  il  fut 
chargé  de  l'éducation  d'un  jeune 
lord ,  passa  plusieurs  années  en  An- 
gleterre ,  et  visita  l'Italie  avec  son 
élève.  Attaché  ensuite  à  quelques 
légations  françaises  en  diverses  cours 
du  Nord ,  il  était  de  retour  à  Paris 
depuis  peu  d'années  ,  lorsque  la  ré- 
volution éclata.  N'y  voyant  que  le 
4'ésultat  des  principes  qu'il  avait  con- 
tribué à  propager  par  ses  écrits  ,  il 
s'en  montra  le  zélé  partisan  ;  mais 
jamais  il  n'en  approuva  les  excès. 
Sa  réputation  ,  ses  ouvrages  ,  fruits 
de  vingt  ans  de  voyages  et  d'études 
sur  les  lois  et  les  gouvernements  des 
Etats  qu'il  avait  parcourus,  le  firent 
distinguer  parmi  les  électeurs  de 
1 789  et  1 790.  Nommé,  par  le  district 
de  St.-Josephdont  il  était  président, 
Tun  des  administrateurs  de  la  police 
en  1789,  il  eut  quelques  démêlés 
avec  le  maire  Bailly,  qui  voulait 
s'attribuer  exclusivement  la  police 
di'i  spectacles;  et  il  mit  dans  cette 


LES 

afTaîreunemodérationcligned'éloges. 
Elu  ,  à  la  fin  de  1 790  ,  juge  de  pai  < 
du  faubourg  Montmartre  ,  ce  fut  lui 
qui ,  le  premier,  fit  adopter,  dans  sa 
section,  la  suppression  des  barrières 
et  du  droit  d'octroi.  Chargé  d'en  ré- 
diger la  délibération  et  de  la  porter 
au  conseil  de  la  commune  ,  qui  l'ap- 
prouva ,  il  le  fut  aussi  de  la  rédac- 
tion de  l'adresse  qui ,  présentée  à 
l'assemblée  constituante  ,  donna  lieu 
au  décret  du  19  février  1 791.  Lors- 
que la  guerre  civile  qui  désolait  le 
Comtat  Venaissin  ,  eut  déterminé 
l'envoi  d'une  commission  média- 
trice dans  ce  pays  ,  le  ministre  delà 
justice ,  Duport-Dutertre ,  le  fit  nom- 
mer par  Louis  X.VT,  l'un  des  mem- 
bres de  cette  commission  avec  l'abbe 
Mulot  et  M.  Veruinac.  Arrivés  à 
Orange,  les  médiateurs  y  reçurent 
les  députés  d'Avignon,  de  Carpen- 
tras  ,  de  l'assemblée  électorale  dç 
Vaucluse,  et  de  cette  armée  de  Mon- 
teux  dont  le  trop  fameux  Jourdan 
n'était  que  le  général  ostensible.  Ils 
parvinrent  à  leur  faire  signer  la  paix  , 
le  1 4  juin  1791  ,  à  renvoyer  dans 
leurs  foyers  les  détachements  fournis 
par  les  communes  qui  avaient  pris 
parti  pour  Avignon  ou  pour  Gar- 
pentras,  et  à  rendre  la  liberté  à  tous 
les  prisonniers.  Mais  cette  paix  illu- 
soire, quoique  garantiepar  la  France, 
fut  bientôt  la  source  de  nouveaux 
malheurs  ;  car ,  tandis  que  les  anti- 
révolutionnaires de  Garomb,  dans  le 
Haut-Gomtat ,  égorgeaient  le  détache* 
ment  qui  rentrait  sur  la  foi  du  traité  , 
les  révolutionnaires  d'Avignon  ,  fu- 
rieux contre  la  municipalité  qui  s'é* 
tait  opposée  à  leurs  excès ,  se  prépa- 
raient à  la  vengeance,  et  désignaient 
leurs  victimes.  Des  troupes  de  ligne^ 
des  gardes  nationales  de  France  furent 
successivement  appelées  par  les  meV 
dialeurs,  sans  pouvoir  empêcliCT  i^ 


I 


LES 

m«il. On  ajustement  reproche' à  Vitn 
d'eux  d'avoir  ferme  les  yeu\  sur  les 
jirnjt'ts  des  agitateurs,  (jiii  d(\s-lors, 
se  rroyaul  appuyés  ,  redoublèrent 
d'audaec  ,  dcsarnièrent  tout  ce  qui 
leur  portait  ombrage,  s'emparèrent 
de  l'arsenal,  violèrent  la  maison  com- 
mune ,  et  traînèrent  en  prison  plu- 
sieurs membres  de  la  municipalité', 
ainsi  qu'un  grand  nombre  de  ses  par- 
tisans. Leseène  Desmaisons,  ar- 
rive depuis  peu  de  jours  du  llaut- 
Comtat ,  n'avait  pu  ni  prévenir  ,  ni 
arrêter  ces  desordres  ;  mais  il  aurait 
du  désabuser  ou  dénoncer  son  col- 
lègue. Les  médiateurs  quittèrent  Avi- 
gnon ,  où  leur  caractère  n'était  plus 
respecte.  Leseène  partit,  le  'i5  août, 
j)0ur  Paris,  avec  le  maire  et  quelques 
ofl'iciers  municipaux,  et  il  rendit 
compte,  le  i o  septembre,  à  l'assem- 
blée nationale  de  l'issue  de  la  média- 
tion. Quoique  l'un  de  ses  collègues , 
arrivé  aussi  à  Paris  avec  Rovèreet 
Duprat  jeune  ,  ne  lui  eût  succédé  à 
la  barre  que  pour  justifier  en  quel- 
que sorte  la  faction  qu'd  semblait 
protéger  ,  le  discours  de  Leseène  , 
appuyé  par  les  délibérations  de  la 
majeure  partie  des  communes  du 
Comtat ,  qui  demandaient  à  être  réu- 
nies à  la  France,  fut  suivi  d'une  der- 
nière discussion  sur  cette  affaire ,  et 
du  décret  de  réunion ,  qui  fut  pro- 
noncé le  i4  septembre  1791.  Une 
nouvelle  commission  devait  être  en- 
voyée dans  le  Comtat;  elle  fut  com- 
posée de  Leseène  Desmaisons,  de 
M.  Champion  de  Villeneuve  et  du 
général  Beauregard  :  mais  ,  par  une 
fatalité  remarquable  ,  ces  commis- 
saires ne  furent  nommés  que  le  6 
octobre  ,  et  ils  ne  reçurent  leurs 
provisions  que  le  1 1.  Ce  fatal  délai 
lut  cause  des  massacres  qui  eurent 
lieu  les  1 G  et  l'j  octobre.  (  Voirez 
JoLRDAN  €l  Maikyielle  )  ;  H  les 


LES  -«77 

regards  des  commissaires  eh  furent 
presque  souillés  en  arrivant  d»1ns  une 
ville  où  régnaient  le  deuil  et  la  cons- 
ternation. Secondés  par  une  force 
armée  imposante,  ils  brcnt'.^onslatcr 
ces  forfaits  par  un  procès  -  verbal 
d'exhumation  des  cadavres  ,  arrêter 
tous  ceux  que  la  voix  publique  accu- 
sait d'y  avoir  pris  part,  et  ils  ins- 
tallèrent un  tribunal  spécialement 
créé  pour  juger  ces  assassins  :  mais 
ce  triomphe  sur  le  crime  devait 
être  de  courte  durée  ;  et  ce  fut  peu 
de  mois  après  ce  commencement 
de  justice,  que,  le  19  mars  179*2, 
l'assemblée  législative  rendit,  en  fa- 
veur des  assassins  de  la  Glacière ^ 
ce  honteux  décret  d'amnistie  qui  a 
été  le  prélude  de  l'impunité  si  sou- 
vent accordée  depuis  à  tous  les  for- 
faits de  la  révolution.  Les  commis- 
saires osèrent  reprocher  à  l'assem- 
blée son  aveuglement  ;  et  ils  firent 
entendre  si  énergiqucment  le  langage 
de  la  vérité  ,  qu'ils  arrachèrent  im 
nouveau  décret ,  expliquant  et  modi- 
fiant le  premier,  et  ordonnant  la  trans- 
lation des  prévenus  dans  les  prisons 
de  Beaucaire;  mais  il  était  trop  tard. 
Peu  de  jours  après,  quatre-vingts  in- 
dividus ,  revêtus  de  l'uniforme  na- 
tional,  enlevèrent  des  prisons  d'Avi- 
gnon 56  détenus  dont  ^5  étaient 
décrétés  de  prise-de-corps,  à  raison 
des  crimes  des  16  et  17  octobre. 
Aussitôt  le  tribunal  provisoire,  éta- 
bli pour  les  juger,  se  dispersa;  3oo 
témoins  quiavaientdéposécontreeux 
prirent  la  fuite;  les  commissaires  des 
départements  se  retirèrent ,  et  Les- 
eène se  rendit  à  Paris  ,  où  il  lit  à 
l'assemblée  ,  les  16  et  18  avril,  uu 
nouveau  rapport  dans  lequel  il  si- 
gnalales  fautes  qu'on  avait  commises 
et  les  malheurs  qui  devaient  enré.sul- 
ter.Mais  il  prêcha  dans  le  désertion 
touchait  dans  la  capitale  à  des  mal- 


278  LES 

heurs  plus  grands  encore;  et  la  faction 
qui  préparait  les  massacres  de  Sep- 
temjjre,  ue  pouvait  pas  permettre  que 
l'on  punit  ceuxqni  en  avaient  donne' 
l'exemple.  Les    assassins  ayant  été 
ramènes  en  triomphe  à  Avignon  par 
les  Marseillais,  MM.  Champion  de 
Villeneuve  el  Beauregard  furent  for- 
cés de  revenir  à  Pn'is,  où  ils  ne  pu- 
rent  obtenir  d'êlre  entendus  ;  et  ce 
fut  ainsi  que  finit  celte  triste  et  péni- 
He  mission.   Lescène    Desmaisons 
fut  poursuivi,  et  obligé  de  se  cacher 
pendant  le  règne  de  la  terreur.  Avec 
de  l'esprit ,  des  connaissances  et  une 
€loculiou  facile,  il  était  fait  pour  se 
distirguer  à  la  tribune  ,  et  servir  uti- 
lement son  pays.  Cependant  il  resta 
long-temps  sans  emploi  et  sans  for- 
tune :  ce  ne  fut  qu'en  i8o4  que  M.  de 
Fleuiieu, ayant  été  nommé  intendant 
de  la  liste  civile,  lui  procura  la  place 
de  chef  du  secrétariat ,  qu'il  rem- 
plit avec  autant  d'intelligence  que  de 
probité  jusqu'à  sa  mort  ,  arrivée  le 
j'2  octobre  1808.  On  a  de  lui  :   I. 
Histoire  dti  la  dernière  révolution  de 
Suède ,  précédée  d'une  analyse  de 
l'histoire  de  ce  pajs  pour  déi^cdop- 
per  les  causes  de  cet  événement  ; 
Paris^  1781 ,  et  Amsterdam  1782  , 
I  vol.  in- 1*2.  Cette  histoire  est  exacte, 
mais  elle  ne  vaut  pas  celle  de  Sheri- 
dan,qai  a  été  traduite  en  français;  et 
l'analyse  qui  la  précède,  trop  longue 
pour  un  précis,  puisqu'elle  comprend 
les  deux  tiers  du  volume,  offre  néan- 
moins des  omissions  essentielles.  Plu- 
sieurs lettres  et  discours  de  Gustave 
III,  insérés  à  la  fin  de  l'ouvrage,  en 
forraeiJt   la  partie  la  plus  intéres- 
sante. II.  Le  contrat  conjugal ,  ou 
Lois  du  mariage ,  de  la  répudiation 
et  du  divorce ,    Neuchâtel ,  i  ^83  , 
in-S**. ,  de  3 1 6  pages.  Celivre ,  agréa- 
i>lement  écrit  ,   renferme   quelques 
fyreurs  de  faits  et  quelques  para- 


LES 

doxes,  parmi  un  grand  nombix;  de 
vues  utiles.  III.  Essai  sur  les  tra- 
vaux publics  ,  Paris  ,  1786  ,  in-8". 
"iY.L/istije  secrète  des  amours d' E- 
lisabethet  du  comte  d'Essex, tirée  de 
l'anglais  des  Mémoires  d'un  homme 
de  qualité,   Paris,   1787,   in-80.  ; 
sorte  de  roman  historique  dont  le 
sujet  est  un  peu  rebattu.  V.  Qu  est- 
ce  que  les  Parlements  en  France  ? 
La  Haye  ,  1788,  in-80.  de  73  pages. 
Cet  ouvrage,  qui  offre  des  recherches 
exactes ,   a    été    refondu  dans  une 
partie  du  suivant.  NI.  Histoire  poli- 
tique de  la  révolution  de  France  , 
eu  Conespondance  entre  lord  L)*** 
et   lord  T***. ,  Londres  (  Paris  )  , 
1 789  ;,  il  vol.  in  -  8<^.  C'est  la  meil- 
leure production  de  Lescène  :  il  y 
développe   avec  sagacité  les    cau- 
ses de  la  révolution.  VII.    Lettre 
aux   Représentants   de  la  nation, 
sur    la  vérification    des   pouvoirs 
et  la  forme  des  délibérations ,  Paris, 
1 789 ,  in-8«.  de  43  pages  VIII  et  IX. 
Deux  Comptes  rendus  aux  Assem- 
blées   Constituante  et  Législative;, 
de  ses  missions  dans  le  Comtat  Ve- 
naissin,  Paris,  1791  et  1792,  in-8**. 
Quoiqtie  rédigés  à  la  hâte  et  écrits 
avec  chaleur,  ils  présentent  les  faits 
avec  exactitude  et  impartialité.  Les- 
cène a  fourni  divers  articles  au  Mo- 
niteur. Outre  une  Tragédie  en  cinq 
actes   refusée  par  les  comédiens,  et 
dont  on  trouve  une  analyse  et  des 
extraits  dans  le  premier  volume  de 
son    LListoire  de  la  Révolution,  il 
a  donné  :  X.  \JLle  des  Amis  ,  ou  le 
retour  du  capitaine  Cook,  opéra  en 
deux  actes ,  en  vers  ,  parodié  sur  la 
musique  de  plusieurs  opéras  italiens, 
et  représenté  au  théâtre  Feydeau,  les 
3o  novembre  et  1  décembre  1 790  , 
sans  murmures  et  sans  enthousias- 
me y  dit  un  journal  du  temps  ,  par 
estime  pour  fauteur.  Des  chagrins 


LES 

(^)nlr.sli(plrs  fmpoisnnnoront  In  moi- 
tié dv  la  vie  de  Lcscènc  Dosmaisons  , 
et  nuisirent  à  ses  travaux  littéraires 
comineàson  avancement.  Uncfemme 
espagnole  qu'il  avait  eu  le  malheur 
de  rencontrer  dans  ses  voyages  ,  et 
qu'il  avait  unie  à  son  sort ,  sans  lui 
donner  sa  main  ,  le  tourmenta  par 
des  violences,  cl  l'avilit  par  des  scènes 
scandaleuses  ;  il  éloigna  de  lui  tous 
ses  amis  ,  et  se  laissa  mourir  dans 
l'isolement.  A-t. 

LESCHASSIER  (  Jacques  ),  sa- 
vant jurisconsulte  ,  fds  de  Philippe 
Leschassier ,  secrétaire  du  Roi ,  na- 
<|uit  à  Paris,  en  i55o.  Destine' par 
son  père  au  barreau ,  il  passa  de  l'é- 
tude des  humanités  et  de  la  philoso- 
phie à  celle  du  droit,  et  il  y  joignit 
la  connaissance  de  l'histoire.  Le  zèle 
éclairé  avec  lequel  il  remplit  ensuite 
la  profession  d'avocat  au  parlement 
de  Paris,  le  fit  bientôt  distinguer  de 
la  cour.  Il  fut  désigné  au  président  de 
Pibrac ,  pour  accompagner  ce  magis- 
trat,  chargé  d'une  mission  en  Polo- 
gne pour  le  service  du  duc  d'Anjou 
(  depuis,  Henri  III  ).  A  son  retour, 
il  rentra  dans  le  barreau;  et  son  mé- 
lile  le  fit  choisir  pour  l'un  des  subs- 
tituts du  procureur-général,  dont  il 
partagea  l'emploi  avec  les  célèbres 
Pierre  et  François  Pithou  et  Antoine 
Loisel.  C'est  mal  à  propos  que  l'au- 
teur de  son  Eloge  latin  lui  attribue 
ces  fonctions  avant  l'époque  de  son 
voyage  j  il  était  trop  jeune  pour  les 
exercer  alors.  La  faction  de  la  Ligue 
ayant  éclaté,  il  quitta  Paris,  et  sui- 
vit  le  monarque  ,  en  manifestant , 
dans  ses  discours  comme  dans  ses 
écrits,  le  sentiment  que  l'ambition 
des  chefs  de  la  Ligue  était  cachée 
sous  le  masque  de  la  religion,  et 
cherchait  à  s'ouvrir  une  voie  à  la 
royauté;  que  dans  cette  vue  on  avait 
érigé  eu  art  la  doctrine  de  l'assassi- 


LES  i7r> 

n/it ,  dont  Tlonri  III  devint  en  effet 
la  première  victime.  En  i(3o5,  Hen- 
ri IV,  auquel  le  duc  de  vSuIly,  par 
un  esprit  d'économie  ,  conseillait  de 
réduire  les  rentes  constituées  sur  la 
ville  de  Paris,  en  fut  détourné  par 
une  supplique  de  Leschassier,  ap- 
puyée de  la  remontrance  du  prévôt 
des  marchands  ,  François  Miron ,  en 
faveur  des  habitants  de  sa  bonne 
^âlle.  Ce  docte  jurisconsulte  n'était 
pas  moins  versé  dans  le  droit  cano- 
nique. La  république  de  Venise  lui 
fit  demander  son  avis  au  sujet  des 
différends  élevés  entre  elle  et  Paul  V, 
sur  le  jugement  déféré  aux  tribu- 
naux des  crimes  publics  des  clercs , 
et  sur  la  défense  de  bâtir  des  églises 
et  de  transmettre  des  immeubles  aux 
ecclésiastiques  sans  le  consentement 
du  sénat.  Entre  autres  marques  de 
gratitude  ,  il  reçut ,  de  ce  gouverne- 
ment ,  une  chaîne  d'or  en  reconnais- 
sance de  sa  Consultation ,  où  il  op- 
posait les  anciens  canons  de  l'Eglise 
universelle  aux  excommunications 
de  la  cour  de  Rome.  La  défense  qu'il 
entreprit  aussi  avec  succès  des  droits 
du  chapitre  de  Senlis  contre  l'évêque 
de  cette  ville  relativement,  à  l'ordi- 
nation des  prêtres ,  témoigne  son  élo- 
quence et  son  habileté;  de  même  que 
ce  qu'il  a  écrit  sur  les  libertés  de 
l'Eglise  gallicane  ,  montre  l'étendue 
de  ses  connaissances ,  puisées  dans 
une  source  i>lus  haute  que  les  décré- 
tales  et  les  gloses  du  droit  canon.  Il 
ne  cessa  d'être  consulté  sur  les  ma- 
tières politiques  et  ecclésiastiques  ; 
et  il  entretenait  avec  Fra-Paolo,  Ni- 
colas Contarini,  Casaubon,  Gode- 
froy,  Dumoulin ,  Justel  et  autres 
personnages  ou  savants  distingués  , 
une  correspondance  ,  restée  dans  sa 
famille,  etipi'il  est  à  regretter  qu'on 
n'ait  jioint  fait  connaître.  Jacques 
LeschassicrmonrutàParis,lc?.8aviil 


a8o  LES 

1625.  Ses  principaux  écrits  sont  :  I. 
De  la  représentation  aux  lignes  su- 
périeures ^  Paris,  1598.  II.   De  la 
clause  de  renonciation  au  sénatus- 
consulte  Velléien  insérée  dans  les 
Contrais,  iLid.  169 8.  L'ouvrage  de 
Lcscliassier  fit  abolir  celte  clause. 
III.  Du  droit  de  nature;  De  la  loi 
salique  ;  De  la  dot  naturelle  des 
Jémmes  ;  De  la  conclusion  de  la 
partie  civile  en  un  procès  criminel; 
De  la  confiscation  des  biens;  Des 
baux  à  rente  perpétuelle  ;  Du  cas 
de  simple   saisine,  Paris ^    1601. 
iV.  De  la  maladie  de  la  France 
(  la  vénalité  et  l'hërcdile'  des  char- 
ges )  ;  présente'  au  roi  en  1 60 1 ,  et 
publié  en  161 7.  V.  De  t ancienne 
et    canonique   liberté  de  V Eglise 
gallicane,  Paris,   1606:  les   deux 
chefs  dont  traite  l'auteur  sont  les 
entreprises  sur  Tancienue  discijîline 
de  l'Eglise  etsur  la  police  temporelle. 
VI.     Consultatio   de   controversid 
inter  sanctitatem  Pauli  quinti  et 
serenissimam  Eempublicam  Kene- 
tflm^  Paris,  1607.  ^^^*^  consulta- 
tion ,  citée  dans  le  Codex  canoniim 
Ecclesiœ  unhersœ,  est  rapportée 
avec  éloge  ,  ainsi  que  le  précédent 
écrit,   dans  les  Libertés   de  tE- 
glise  gallicane  de  M.  Durand  de  Mail- 
lane,  Lyon,  1770-6,  5   vol.  in-4*'. 
Plusieurs  autres  écrits  non  moins  re- 
marquables de  l'auteur ,  ont  été  réu- 
nis avec  les  premiers  ,  dans  la  col- 
lection mentionnée  à  l'article  suivant. 
G-CE  et  D-c. 
LESCHASSIER  (  Christophe  ) , 
neveu  du  précédent ,  conseiller  e?.i 
la  cour  des  comptes  ^  possesseur  des 
lettres  et  des  manuscrits  de  son  oncle, 
a  recueilli  et  publié  ses  OEuvres  en  un 
vol.  in-4^, Paris  ,  1649;  la  deuxième 
édition  ,  la  plus  ample  ,  est  de  i65gt. 
Ce  recueil  contient  entre  autres  opus- 
cules, indépendamment  d-e  ceux  déjà 


LES 

indiqués  ,  et  qu  ont  paru  du  vivant 
de  l'aulcur  ;  T.  De  l'ordination  des 
prêtres  pour  le  chapitre  de  Senlis , 
contre  Antoine  Rose ,  évéque  de 
cette  "ville.  La  procédure  ,  ainsi  que 
l'arrêt  de  condamnation  relatif  à 
un  libelle  fait  à  l'occasion  de  l'écrit 
de  Jacques  Lcscliassier ,  se  trouvent 
à  la  suite  de  cet  écrit  ,  et  ont  été  in- 
sérés dans  le  Corps  des  ordonnances 
imprimé  en  161 1.  II.  Requête  pré- 
sentée au  Roi,  et  Remontrances  du 
Prévôt  des  marchands  contre  la 
réduction  des  rentes  constituées  sur 
VHôtel-de-Ville  de  Paris.  (  Voyez 
l'article  précédent.  )  IIL  Des  Ré- 
gences de  F  ronce,  composéen  1G02. 
L'ouvrage  avait  pour  objet  d'écarter 
les  femmes  de  la  régence,  si  une  cons- 
piration ,  telle  que  celle  de  Biron, 
venait  à  se  renouveler.  A  la  tête  des 
pièces  qui  composent  ce  recueil ,  et 
qui,  malgré  leur  peu  d'étendue ,  sont 
estimées  pour  le  fond  et  l'impor- 
tance des  questions ,  est  une  Vie  de 
l'auteur  en  français ,  qui  paraît  avoir 
été  rédigée  par  l'éditeur  même  :  elle 
est  suivie  d'un  Eloge  latin, anonyme. 
On  y  remarque  aussi  lui  témoignage 
de  Juslel,  qui  avoue  devoir  à  Jac- 
ques Leschassier  la  partie  relative  à 
l'ordre  ,  à  l'autorité  et  au  nombre 
des  canons  des  anciens  conciles, 
dans  son  Codex  canonum  Ecclesiœ 
universœ ,  pul>lié  à  Paris  en  1610, 
et  qu'il  lui  dédie  nominativement  ;  ce 
qui  prouve  que  l'on  s'est  trompé  en 
donnant  en  Codex  à  François  Pi- 
thou.  (  Voy.  C.  JusTEL.  )  Christophe 
Leschassier  était  possesseur  d'un 
manuscrit  célèbre  de  Vbnitaiion  de 
Jésus-Christ ,  sous  le  nom  de  Jean 
Gsrson  ,  chancelier  de  Paris.  La. 
desrriplion  en  a  été  donnée  jiar 
J.  de  Launoy  ,  dans  la  Dissertation 
même  où  il  prend  parti  contre  Gcr- 
son  ,  dont  l'effigie  ancienae  est  dé- 


LES 

juinlc  on  tôle  du  manuscrit ,  cl  pa- 
,1  laît  oïre  un  portrait  de  fauiille.  Ce 
I  manuscrit, in-fol.,  aurait  etc  traiis- 
'  (lit  vers  147'^^  P*"»!'  "û  iipveu  du 
.  liancclicr.  (  Fojez  Th.  Oerson  , 
XIX,  'i3i  ).  11  est  aujourd'hui  en  la 
possession  de  l'autcjr  de  cet  ar- 
liclc.  Ci-CE. 

LESCIIKVIN  i.i  l^KÉCOCR 
(  Philippe-Xavier  ) ,  \\6  à  Ver- 
sailles,  le  16  novembre  1771  ,  d'un 
premier  commis  du  contrôle  de  la 
maison  du  roi,  et  mort  à  Dijon  le  0 
juin  181 4 ,  était  commissaire  en  chef 
des  poudres  et  salpêtres,  et  membre 
de  plusieurs  académies.  Plein  d'ar- 
deur et  de  talent  pour  la  minéra- 
logie ,  il  suivit  les  cours  de  chimie 
de  Sage  ,  de  Darcet  et  de  Fourcroy  , 
et  ne  profita  pas  moins  des  leçons  de 

fdivsirpic  de  Brisson  ,  et  de  minera- 
ogie  de  Daubenton.  En  1794,  il  fut 
attache  aux  poudres  et  salpêtres  , 
dont  il  devint  contrôleur  à  Golmar  , 
puis  commissaire  à  Vincennes  ,  à 
Luxembourg  ,  à  Trêves  ,  et  enfin  à 
Dijon.  Doué  d'une  grande  activité  , 
Leschevin  ,  sans  négliger  les  de- 
voirs de  sa  place  ,  trouvait  les 
moyens  de  satisfaire  son  goût  pour 
les  sciences  et  pour  la  littérature  , 
et  de  suivre  la  correspondance 
qu'il  entretenait  avec  plusieurs  sa- 
vants de  la  capitale  et  des  départe- 
ments. Parmi  les  nombreuses  pro- 
ductions qu'il  a  laissées  ,  on  re- 
marque :  I.  Instruction  sur  les  nou- 
veaux poids  et  mesures  ,  l 'jçjS  , 
in-S**.  II.  Exposition  des  acides , 
des  alKalis  ,  des  terres  el  des  mé- 
taux ,  de  leurs  combinaisons ,  etc. , 
en  I  '}.  tableaux  ;  traduite  d^  l'alle- 
niand  de  Trommsdorff ,  avec  des 
notes  ,  1802  ,  in-l**.  III.  Lettre  à 
M.  Patiin  ,  sur  les  roches  glan- 
duleuses du  pays  de  Veux-Ponts , 
iBoi.   IV.   Plusieurs  Rapports   à 


LVS 


v.S. 


V Académie  de  Dijon.   V.    iVotircs 
sur  fjuehfues  recherches  art  héulo" 
giffues  et   agronami/ptes.   \  I.  Sur 
l'emploi  de  la  stéatile  dans  la  gra- 
vure en  pierres  fines  ,    traduit  de 
l'allemand  de   Dalberg    (  le  prince 
primat    )  ,    i8o3.     VU.     L'Ecole 
du  phinnacien  ,  traduite  de  l'alle- 
mand  de   Trommsdorff  ,  avec  des 
notes  ,  1807.    VllI.    Observations 
sur  la  y.  classe  du  système  biblio- 
graphique de  Debure,    1808.   IX. 
Notice  sur  la  Lithographia  \  icl- 
BURGENSis  et  sur   la   mystification 
qui    y  a    donné    lieu  ,   1808.    X. 
Mémoire  sur  le  cltrome  oxidé  na- 
tif, du  département  de  Saone-et" 
Loire ,    1810.   XI.   Notice  sur  la 
présence  du  zinc  et  du  plomb  dans 
quelques  mines  de  fer  en  grain  de 
la  Bourgogne   et  de  la  Franche- 
Comté  ,    i8i'2.    XII.     Foyage  à 
Genève  ,  en  Savoie ,  elc.  ,  1812  , 
in-8'^.  Leschevin  a  terminé  sa  car- 
rière littéraire  par  la  publication  , 
en  181 3,    de  la   Table  analytique 
des  matières  contenues  dans  les  '28 
premiers  volumes  du  Journal  des 
mines  ,  travail  ingrat  et  pénible,  qui 
consuma  quatre  années  de  sa  vie.  Ya\ 
1807  ,    il  avait  donné  une  nouvelle 
édition  du  Chef-d'œuvre  d'un  in- 
connu y  qu'il  enrichit  de  notes  cu- 
rieuses ,  et  d'une  Notice  sur  la  ^  ie  et 
les  ouvrages  de  l'auteur  (  Theniiseul 
de  Saint-Hyacinthe  ),  a  vol.  in-i7.. 
11  avait  eu  la  principale  part  à   la 
rédaction  des  Annales  ds  la  répu- 
blique française  ,  depuis  la  constitu- 
tion de  l'an  m  ,  desquelles   M.  La- 
vcanx  fut  l'éditetir  en  1 79<) ,  6  voj. 
in-S*».  Leschf'vin  se  disposait  à  don- 
nerune  nouvelle  traduction  du  Traittî 
des  pierres  de  Théophraste,  avec  les 
notes  de  llill ,  auxquelles  il  eût  joint 
d'excellentes  observations.  Ses  con- 
naissances profondes  et  vaFic<.'sr  va- 


28'2  LES 

laient  mieux  que  son  style ,  qui  toute- 
fois ne  manque  ni  de  clarté'  ni  d'ëlé- 
jiçance.  Il  avait  fourni  plusieurs  no- 
tices au  Magasin  encyclopédique  : 
on  y  trouve  (i8i4,  ^v  ,  349  )  une 
Notice  sur  sa  vie  et  ses  ouvrages  , 
par  M.  Amanton  ,  insérée  aussi  dans 
le  Journal  de  la  Cote-d'or,  des  27 
et  3o  juillet  et  0.8  sept.  1814.  D-b-s. 
LESGLACHE  (  Louis  de  ) ,  ins- 
tituteur ,  ne  vers  1620  ,  dans  un  vil- 
lage près  de  Clermont  en  Auvergne  , 
après  avoir  fait  d'assez  bonnes  étu- 
des ,  vint  à  Paris  ,  où  il  ouvrit   une 
école  de  grammaire  et  de  philoso- 
phie ,  qui  eut  d'abord  un  succès  pro- 
digieux ,  parce  que  la  forme  synopti- 
que de  ses  tableaux  en  rendait  l'étude 
extrêmement  facile.    Il  avait  eu  le 
malheur  de  contracter  un  mariage 
mal  assorti  ;  et  sa  femme  dissipa  en 
peu  de  temps   les  économies    qu'il 
avait  pu  faire.  Les  progrès  de  la 
philosophie  de  Descartes  firent  dé- 
serter son  école  ;   et  il  se  vit  forcé 
de  quitter  Paris,  pour  aller  enseigner 
dans  les  provinces.  Il  s'établit  d'a- 
bord à  Lyon  ,  et  ensuite  à  Grenoble  ; 
mais  sa  méthode  ne  réussit  ni  dans 
l'une  ni  dans  l'autre  de  ces  villes.  Il 
revint  à  Lyon  j  et  il  y  mourut  de 
chagrin  ,  le  17  août  167 1  ,  dans  un 
âge  peu  avancé.  On  a  de  lui  :  I.  Cours 
de  philosophie  expliquée  en  tardes  , 
et  divisée  en  cinq  parties  :  logique  , 
science  générale  ,  physique ,  morale 
et  théologie  naturelle ,  in-4''.    Les 
exemplaires  de  cet  ouvrage  ,  gravé 
par  Richer  ,  de  i65o  à  165^  ,  sont 
rarement  complets.  IL  Abrégé  de  la 
philosophie  ,  en  tables  ,  sans    date 
(  en   1 665  ) ,    in-4<*.  ,  texte   gravé 
par  Richer  ;  rare.  Quelques  parties 
de  ce    Cours  de   philosophie    ont 
été  imprimées  avec  des    dévelop- 
pements fort  étendus ,  Paris  ,  1664  -, 
W-4**.  ,    et    années   suivantes.    liL 


LES 

L'ordre  des  principales  choses 
dont  il  est  parlé  dans  la  Philoso- 
phie qui  est  divisée  en  cinq  parties  , 
I  vol.  in- 16.  IV.  Les  avantages 
que  les  femmes  peuvent  retirer  de  la 
philosophie,  Paris,  ^667,  in -12. 
V.  I^es  fondements  de  la  religion 
chrétienne ,  ou  les  ordres  de  Dieu 
qui  font  reluire  sa  sagesse  et  sa 
bonté,  Paris,  i663  ,  in-4^.  VL 
Les  véritables  règles  de  Vortografe 
francèze ,  ou  Vart  d'aprandre  en 
peu  de  temps  à  écrire  corectement, 
Paris,  1668,  in- 12.  Rien  de  ])lus 
ridicule  ,  dit  Goujet ,  que  l'ortho- 
gra])he  de  cet  auteur  ,  comme  rien 
de  plus  faible  que  les  raisons  sur 
lesquelles  il  prétend  s'appuyer.  Ce 
n'est  qu'un  réchauffé  de  ce  que 
Meygret ,  Pelletier  et  Ramus  avaient 
inutilement  essayé  d'introduire.  Lcs- 
clache  a  été  réfuté  rolidement  par 
Mauconduit.  Sa  philosophie  avait 
aussi  essuyé  des  contradictions  •  et 
l'on  avait  vu  paraître  la  Philosophie 
particulière  combattue  par  celle  de 
VEscole  ,  contre  Lesclache ,  Paris  , 
Sommaville  ,  i65o  ,  in-8^.     W-s. 

LE  SCO  I«r.  (i)  roi  de  Polo- 
gne dans  le  septième  siècle  ,  né 
dans  une  condition  obscure ,  dut 
son  élévation  aux  services  qu'il  ren- 
dit à  sa  patrie.  Les  Hongrois  profi- 
taient de  la  facilité  qu'ils  avaient  de 
pénétrer  dans  un  pays  sans  défense  , 
pour  y  exercer  de  fréquents  ravages. 
Przemyslas  ,  aidé  de  quelques  hom- 
mes également  dévoués ,  osa  entre- 
prendre de  délivrer  la  Pologne  de 
ces  bandes  étrangères  :  il  attira  quel- 
ques Hongrois  dans  une  embuscade, 


(1)  Il  y  avait  Jéjà  eu  deux  ducs  ou  rois  Polo- 
nais nommés  Lesco  ou  Lesko.  Le  premier  na- 
quit en  55o,  et  est  regardé  connue  le  i'oudatcue 
(le  la  Poiogue.  Le  second  usurpa  le  trône  ver» 
l'an  700;  mais  les  ciironiqufS  polouaines  sont  tel- 
lement remplies  de  fables  cju'an  ne  &ait  riKU  de* 
poïitit  sur  ve»  deux  primiss. 


LES 

rf .  les  ayant  oporgps,  fil  vc'tir  de  leurs 
'    lutsses  coin])apiions,  qui,  h  la  fa- 
ir  de  ce  de^uisemcul ,  culrèrent 
is  le  camp  de«»  Honfjrois,  et  les 
ssacrcrcMt.    Ce  succès  inattendu 
iuia  le  courage  des  Polonais;  et 
ileferèrcnt  la   couronne  à  Prze- 
Nslas,  persuades  que  personne  ne 
lait  mieux  la  faire  respecter.  Il 
it,cu  montant  sur  le  trùne,lcnom 
r.esco  ,  premier  duc  de  Pologne  , 
lit  le  souvenir  était  encore  cher  à 
^  sujets.  Il  régna,  disent  les  histo- 
MS,  avec  autant  de  bonheur  quedc 
ire  ,  et  mourut  en  8o4  -,  sans  en- 
ts.  I — liEsco  II.  Les  palatins  se 
putaient  la   couronne;  et,  pour 
venir  une  guerre  civile ,  on  con- 
ît  de    reconnaître  roi  celui    qui 
lit  vainqueur  dans  une  course  de 
chcvaux.Un  des  concurrents  nomme' 
Leszeck  sema  la  carrière  de  pointes 
de  fer ,  en  laissant  vide  un  espace 
suffisant  pour  son  cheval.  L'artifice 
fut  découvert  par  un  jeune  homme 
qui  s'exerçait  à  pied  dans  la  lice  ;  le 
peuple  transporte  de  fureur  mit  en 
pièces  Leszcck  ,  et  décerna  la  cou- 
ronne au  jeune  inconnu  ,  qui  prit  le 
nom  de  Lesco,  devenu  plus  que  ja- 
mais agréable  à  la  Pologne.  Les  an- 
ciennes chroniques  disentque  le  nou- 
veau roi,  loin  de  chercher  à  cacher 
sa  première  condition,  conserva  tou- 
jours les  habits  qu'il  portait  au  mo- 
ment de  son  élection,  et  que  la  vue 
lui  en  était  aussi  agréable  qu'elle  eût 
été    odieuse    à   tout   autre    prince 
né    comme   lui    dans    l'obscurité. 
11  gouverna  avec  beaucoup  de  sa- 
gesse ,  et  se  fit  respecter  des  peuples 
voisins ,   qu'il   contint    par   sa   va- 
leur, mais  qu'il  ne  chercha  point  à 
subjuguer.   Il   mourut   vers   8io  , 
après  un  règne  de  six  ans ,  et  eut 
pour  successetir  son  fils  ,  qui  prit  le 
nom  de  Lesco  IIL  Trois  autres  ducs 


LES 


283 


de  Pologne  ont  porté  le  même  nom, 
sans  mériter  une  mention  plus  dé- 
taillée dans  cet  ouvrage.  Lesco  IV 
mourut  en  91 3  ;  Lesco  V  ,  dit  le 
Blanc,  en  \ii']  (  ^o^v. Boleslas  \  , 
tom.  V  ,  p.  49  )  ;  et  Lesco  VI ,  dit 
le]Voir,en  1^89.  W-s. 

LESCONVKL  (Pierre  de  ), gen- 
til homme  breton,  historien,  roman- 
cier, et  poète  médiocre  dans  tous  les 
genres  ,  était  né  vers  le  milieu  du 
dix-septième  siècle  ,  au  château  de 
Lesconvel  ,  diocèse  de  St.  -  Pol  de 
Léon.  Il  nous  apprend  lui-même  que, 
rebuté  de  n'avoir  pu  parvenir  à  au- 
cun emploi  déconsidération  ,  il  prit 
la  plume  pour  remplir  quelques-unes 
des  heures  de  la  grande  oisiveté  où 
il  languissait  à  Paris.  La  rapidité 
avec  laquelle  se  succédaient  ses 
ouvrages ,  ne  put  lui  faire  ob- 
tenir une  réputation  même  éphé- 
mère; et  il  mourut  obscur  à  Pans  , 
en  1722.  Voici  la  liste  des  écrits 
qu'il  a  composés  ,  ou  qui  lui  sont 
attribués  ;  car  ils  ont  presque  tous 
paru  sous  h  voile  de  l'anonyme. 
I.  Abrégé  de  l'histoire  de  JJretaf^rie, 
de  Bertrand D'Argentré, Paris,  i(385, 
in- 12.  Ce  livre  est  très-superficiel  ; 
et  l'auteur  n'avait  pas  assez  d'ins- 
truction pour  corriger  les  erreurs 
dont  foiirmille  V Histoire  de  D'Ar- 
gentré. II.  La  comtesse  de  Château^ 
b  liant ,  ou  les  ejjetsde  la  jalousie  ^ 
Paris  ,  I G95 ,  in-i  '2  ;  réimprimé  sous 
le  litre  d'Intrigues  amrureuses  de 
François  I«r.  ou  Histoire  tragique 
de  la  comtesse  de  Chdteauhriant. 
Amsterdam,  1695,  iii-i'2.  C'est  un 
roman  dont  il  avait  pris  le  sujet 
dans  V Histoire  de  François  I«r. ,  par 
Varillas,  et  qu'il  acheva  de  dénatu- 
rer, en  y  ajoutant  beaucoup  de  cir- 
constances fabuleuses  :  elles  ont  été 
réfutées  dans  une  Lettre  touchant  la 
comtesse  de  Ckdteaubriant  ,  par 


0.84  LES 

Pierre  Hëvin ,  avocat  de  Rennes  , 
i(>86  ,  in-8''.  Ce  roman  n'en  a  pas 
moins  e'te' réimprime' en  169G  et  eu 
«7'24î  et  comme  c'est  le  mieux  écrit 
<le  ceux  de  Lesconvel ,  on  l'a  quel- 
«piefois  attribue'  à  la  comtesse  de 
Murât.  III.  Ai^entures  de  Jules- 
César  et  de  Murcie  dans  les  Gau- 
les y  Paris,  i6j)5  ,  iu-iLi,  IV.  Ju- 
nie  ou  Les  sentiments  romains , 
i  bid.  I  GqJ;  in- 1 'i.  V.  Anne  de  Mont- 
morency ,  connétable  de  France  , 
nouvelle  histoiicfue ,  ib.  i  O96 ,  in- 1 2. 
VI.  Le  Prince  de  Longueville  et 
Anne  de  Bretagne ^  Nouvelle  histo^ 
rique,  ib.  1697  ?  i^^-i'-*-  ^H-  Le  Sire 
d' Auhignj ,  nouvelle  historique ,  ib. 
i698;,iû-i2;Amsterd.  1700,  in-i:2. 
(7est  une  histoire  a])regëe  des  guerres 
d'Italie,  sous  les  règnes  de  Charles 
Mil  et  de  Louis  XII ,  entremêlée 
de  quelques  aventures  galantes  de  ces 
tleux  princes  et  des  seigneurs  de  la 
cour.  YIII.  Nouvelle  Idstoire  de 
France,  depuis  F karaniond  jusquà 
présent  ,  extraite  de  tous  les  meil- 
leurs historiens,  Paris,  1698  ,  '2  vol. 
rn-ii.  Elle  a  été  supprimée  par  arrêt 
du  parlement  ;  et  ce  fut ,  suivant 
l'abbé  Lenglet,  un  vrai  service  rendu 
k  l'auteur.  IX.  Recueil  de  contes  des 
Fées,  ih.  1698, in- 12  :  il  n'eut  aucun 
succès  ,  quoique  ce  genre  d ^ouvrages 
fut  alors  fort  à  la  mode.  X.  Obser- 
vations critiques  sur  l'Histoire  de 
France  par  Mézeraj  ,  ibid.  1700, 
iu-i  2.  L'auteur  avertit  dans  la  préface 
que  ce  n'est  que  par  amusement  qu'il 
a  rédigé  ces  observations  :  elles  sont 
très-minu lieuses ,  et  la  plupart  mal 
fondées.  XI.  Idée  d'un  règne  heu- 
reux ou  Relation  du  voyage  du 
prince  de  Moniheraud  dans  Visle  de 
Naudely,  Gasères  (  Paris  ),  1703, 
in-i  2  ;  réimprimée  sous  ce  titre  ;  Re- 
lation du  Prince  de  Moniberaud  , 
Mcriudc (Paris ) ,  1 7  o5,  1 706 ,  iu-i  2. 


LES 

De  tous  lés  ouvrages  de  Lesconvel 
c'est  celui  qui  paraît  avoir  obtenu  le 
plus  de  succès  ,  quoiqu'il  ne  le  mé- 
lite  guère.  Il  n'en  a  publié  que  la 
première  partie  ,  en  annonçant 
toujours  la  seconde,  qui  n'a  jamais 
paru.  C'est  une  espèce  de  satire 
j)late  et  ennuyeuse  contre  les  mœurs 
de  la  fin  du  règne  de  Louis  XIV,  et 
plus  particulièrement  contre  le  faste 
des  prélats.  La  préface  roule  pres- 
que uniquement  sur  cet  objet;  et  as- 
surément il  n'y  a  rien  là  qui  semble 
dirigé  contre  Fénélon.  Sur  quel  fon- 
dement l'éditeur  du  Cabinet  des 
Fées,  (Mayer),  et  d'autres,  avant  et 
apès  lui ,  ont  ils  accusé  Lesconvel 
d'avoir  eu  la  prétention  de  lutter 
contre  le  Télémaque  ?  C'est  parce 
que  toutes  les  éditions  du  Voyage 
dans  Vile  de  Naudely  sont  déco- 
rées d'une  longue  épître  dédicatoire 
au  duc  de  Bourgogne  ;  et  parce  i\\\ç, 
celle  de  1709,  parmi  de  nouvelles 
et  de  nombreuses  variations  dans  le 
titre,  suivant  la  coutume  de  Lescon- 
vel ,  ofire  ces  mots  :  par  l'auteur 
des  Aventures  de  Télémaque.  Du 
reste ,  nulle  analogie  entre  les  deux 
ouvrages  ,  quant  à  riiivcntion  à  la 
marclie  et  au  style  ;  celui  du  roman- 
cier breton  est  absolument, dénué 
de  fiction  et  d'intérêt;  il  est  évi- 
dent que  l'auteur  s'est  étayé  de  deux 
noms  illustres,  moins  par  jalousie 
contre  l'un  que  par  s}>éculation , 
moins  pour  nuire  au  succès  du  Télé- 
maque, que  pour  en  profiter.  Nous 
ne  voyons  pas  plus  clairement  où 
Mayer  a  pris  que  Lesconvel  s'est 
joint  à  l'abbé  Faydit,  pour  critiquer 
ce  chef-d'œuvre.  (  Voyez  Faydit.  ) 
Lesconvel  a  composé  un  grand  nom- 
bre de  pièces  de  poésie  insérées  dans 
les  journaux  du  temps.  L'éditeur 
du  Cabinet  des  Fées  l'a  ,  mal-a- 
propos  ,  comparé  sous  ce  rapport 


Li:s 

iLilnmond  de  la  VivScïMp,  auquel 
■••oiivel  ct.ùf  irrs-iiifciirur.  A-r. 
IICSCOT  (  Pn.KRi:  ),  célèbre  ar- 
icrte,  naquit  à  Paris,  en  i.^io. 
it  ce  (jii'on  a  j>u  rerneillir  sur  sa 
>e  borne  à  savoir  qu'il  elait  delà 
ilje  d'Alcs.sv,  et  abbe  eomnienda- 
r  de  Claj»ny.  Mais  les  uiojuiinents 
il  ^  laisses,  suiîlseut  pour  im- 
I  laliser  son  nom.  Avant  lui  l'ar- 
iioeturc    était    un     mclanîje    in- 


l.l^S 


v.8> 


mélange 
1  me  du  gollii(|ue  ,  du  mauresque 


m  saxon,  an  milieu  du(juel  prë- 
liuait  eiu'ore  la  grossicretc  des 
'|)S  de  barbarie.  Pénètre  de  la 
>  riorife  des  monuments  de  l'an- 
tj'jiiite,  Lcscot  s'efforça  de  substi- 
tiur  leurs  belles  proportions  aux 
fitinies  gothiques.  Le  premier  ou 
viage  par  lequel  il  se  fit  connaître 
suflirait  pour  assurer  sa  gloire  :  ce 
sont  les  dessins  du  Louvre  qui  fut 
commence  en  i54i,  sous  le  règne 
de  François  I*^"*.  Lescot  n'avait  alors 
que  trente  ans;  et  ce  qui  subsiste 
encore  de  son  ouvrage  est  au-dessus 
de  ce  qu'on  a  voulu  depuis  mettre 
à  la  place  ;  c'est  la  f.tçade  inte'- 
ricure  de  la  cour ,  appelée  Façade  de 
l'horloge,  qui  est  un  vciitable  chef- 
d'œuvre.  A  la  pureté'  de  l'architec- 
ture ,  à  la  perfection  des  profd^s  , 
elle  réunit  les  ornements  du  meil- 
leur goût  et  de  la  plus  grande  ri- 
chesse. Les  monuments  de  l'anti- 
quité offrent  sans  doute  plus  de 
simplicité  dans  les  lignes;  on  y  re- 
marque moins  de  profusion  dans  la 
distribution  des  ornements  ;  mais  ici 
toutes  ces  richesses  sont  prodigue'es 
avec  tant  de  discernement  et  de  goût, 
et  l'ensemble  en  est  si  bien  en- 
tendu ,  qu'il  n'a  pu  même  être  gâté 
par  les  additions  que  Lemercier 
(  Forez  ce  nom  )  fit  au  pavillon 
clu  milieu ,  sous  le  règne  de  Louis 
XI U.   Cgst  eocoie  .sur   les   des- 


sins   de    Lcscot  ,   que    fut    cons  - 

truite  la  Salle  des  cent-stdsses  du 
liouvre  ,  j)lus  sj)écialement  connue 
sous  le  nom  de  Salle  des  rariatidej, 
h  caiise  de  la  belle  tribune  dont  U 
sculj)ture  est  due  au  ciseau  de  .Iran 
(ioujou.  Cette  salle  qi:i  fait  aujour- 
d'hui partie  du  Musée  des  anli({iics, 
est  décorée  d'un  ordre  dorique,  dof»t 
les  colonnes  sont  accou])lées  et  élr- 
vées  sur  un  seul  socle.  La  pureté  des 
profils,  et  l'élégance  noble  et  sim- 
ple de  la  décoration ,  font  l'oriu*- 
raent  de  ce  palais  déjà  si  niagni ti- 
que. Un  des  ouvra«jes  les  plus  célè- 
bres de  Lcscot  est  la  Fontaine  dex 
Innocents^  où  le  génie  de  Jean  Gou- 
jon a  si  bien  secondé  celui  de  l'ar- 
chitecte. (  Voyez  Goujon, XVIII , 
i8o.  )  Les  artistes  du  temps  de 
Louis  XIV  reprochaient  à  cette  fon 
taiue  sa  trop  grande  simplicité  :  ceux 
du  siècle  suivant  la  dédaigninerif. 
parce  qu'ils  n'y  voyaient  point  l'em- 
ploi de  ces  ornements  recherchés  et 
contournés,  de  cette  manière  pré- 
tendue gracieuse  ,  qui  infestait  alors 
tous  les  arts.  Mais  à  mesure  que  le 
goût  du  simple  et  du  beau  a  été  re- 
mis en  hoimeur ,  cet  ouvrage  de  Les- 
cot a  été  de  plus  en  plr^  apprécié  ; 
et  cet  habile  artiste  sera  toujours 
regardé  comme  un  des  plus  grauds 
architectes  dont  puisse  s'honorer  la 
France.  Il  mourut  en  iSti.  P-s. 
LEiSCOT  (  Simon  )  ,  chirurgien, 
né  à  Paris  au  commencement  du 
xvii".  siècle,  se  livra  à  l'étude  cle 
la  philosophie  de  Descartes  ,  et  de 
la  mécanique,  puisa  l'anatomie, 
et  devint  un  des  plus  habiles  dissec- 
teurs de  son  temps.  Il  introduisit  en 
France  l'art  des  injections  avec  la 
cire  et  les  li(|ueurs  colorées, d'après 
la  méthode  de  Swammerdam  ,  el 
s'en  servit  pour  démontrer  tous  les 
vaisseaux  du  corp»  huinaio.  L'ba- 


iSG  LES 

Litude  des  dissections  le  rendit  un 
des  meilleurs  operateurs  de  cette 
époque;  elles  succès  qu'il  obtint  dans 
plusieurs  opérations  difliciles  ,  et 
dont  l'issue  semblait  devoir  être 
funeste  ,  lui  acquirent  une  telle  ré- 
putation, que  la  ville  de  Gènes  le 
nomma  chirurgien  en  chef  de  son 
grand  hôpital ,  et  lui  assigna  des 
appointements  considérables  pour 
le  décider  à  quitter  sa  patrie.  Il  ac- 
cepta cette  offre  ;  et  il  éprouva  tant 
de  fatigues  en  donnant  ses  soins  aux 
blessés ,  pendant  le  bombardement 
de  Gènes  par  les  Français,  en  1684? 
que  sa  santé  en  fut  très-altérée.  Il 
mourut  dans  cette  ville,  le  7  septem- 
bre 1690.  On  n'a  de  ce  chirurgien 
qu'une  Dissertation  peu  estimée  sur 
la  Myologie,  insérée  dans  le  Be- 
^num  animale  ,  d'Emanuel  Kônig^ 
in-40. ,  Baie ,  i68'2  et  1698.  P.  et  L. 
LESGUN  (  ïnoMASDE  Foix,  sei- 
jiçneur  de  ),  connu  aussi  sous  le  nom 
de  maréchal  de  Foix  ,  était  frère 
puîné  de  Lautrec  (  Voyez  ce  nom  ). 
t)ans  sa  jeunesse  ,  dit  Brantôme  ,  il 
avait  été  destiné  (c  à  la  robe  longue  , 
«  et  il  étudia  un  long-temps  à  Paris , 
»  du  temps  du  grand  -  maître  de 
»  Chaumont,  que  nous  tenions  l'état 
»  de  Milan  paisible  ,  et  l' appelait-on 
»  le  protonotaire  de  Foix  ; . . . .  mais 
»  je  pense  que  c'était  un  lettré  qui 
»  n'avait  pas  beaucoup  de  lettres, 
»  comme  c'était  la  coutume  des  pro- 
»  tonotaires  de  ce  temps -là.  »  Il 
accompagna,  en  i5i5 ,  le  roi  Fran- 
çois pi^.  en  Italie ,  et  eut  le  bonheur 
de  faire  ses  premières  armes  sous  les 
yeux  d'un  prince ,  si  digne  apprécia- 
teur du  courage.  Il  était ,  en  i5i6  , 
enfermé  dans  Milan  ,  assiégé  par 
Maximilien  :  la  crainte  d'être  atta- 
qué à  l'improviste ,  ayant  déterminé 
l'empereur  à  lever  le  siège ,  Lescun 
demanda  de  poursuivre  l'ennemi  dans 


LES 

sa  retraite.  II  conduisit  trois  çtiiii 
lances  au  pape  Léon  X ,  pour  l'aider 
à  s'emparer  du  duché  d'Urbin  sur  la 
Rovère.  Ce  prince,  abandonné  de  ses 
troupes  ,  se  réfugia  dans  le  quartier 
de  Lescun, qui,  touché  de  ses  mal- 
heurs ,  lui  fit  obtenir  la  liberté  de  se 
retirer  à  Mantoue.  Lescun  fut  nommé 
maréchal  de  France  en  i5'2i  ,  et 
chargé  du  gouvernement  du  Mila- 
nez ,  pendant  l'absence  de  Lautrec. 
La  sévérité  qu'il  montra  dans  son 
administration  ,  excita  des  mécon- 
tentements. Informé  que  les  rebelles 
se  proposaient  d'enlever  par  surprise 
quelques  places-fortes  ,  il  rassembla  , 
à  la  hâte ,  quatre  cents  lances ,  se 
rendit  à  Parme  dont  il  fit  relever  les 
fortifications  ,  et  s'avança  jusqu'à 
Reggio.  Il  était  instruit  que  Fr.  Gui- 
chardin  ,  alors  gouverneur  de  cette 
ville  ,  y  donnait  asyle  aux  ennemis 
des  Français  (  F.  Guichardin  ).  Il 
lui  fît  demander  une  conférence  sous 
les  murs  :  mais  pendant  ce  temps-là , 
des  gendarmes  français  ayant  cher- 
ché à  s'emparer  de  la  porte  de  la 
ville,  l'alarme  s'y  répandit  aussitôt; 
et  Lescun  fut  obligé  de  se  retirer 
précipitamment.  Il  se  hâta  d'écrire 
au  pape  pour  tâcher  de  détruire  les 
fâcheuses  impressions  que  pouvait 
lui  donner  l'apparence  d'une  tenta- 
tive sur  une  ville  des  états  de  l'Eglise: 
mais  le  pape,  qui  ne  cherchait  qu'un 
prétexte  pour  se  déclarer  contre  les 
Français  ,  rejeta  les  excuses  de  Les- 
cun, et  l'excommunia  ainsi  que  tous 
ceux  qui  l'avaient  accompagné  dans 
son  expédition.  La  guerre  se  ralluma 
aussitôt  ;  et  Lescun ,  enfermé  dans 
Parme  ,  avec  quelques  soldats  mal 
armés,  était  décidé  à  s'ensevelir  sous 
les  remparts  de  cette  ville.  Lautrec, 
accouru  à  la  défense  du  Milanez , 
n'avait  pas  de  forces  sufïîsautes  pour 
résister  aux  armées  réunies  del'em- 


LES 

pcrcnr  et  tUi  Sf.-Sicgc.  La  défection 
tics  Vriiîlicns  ajoutait  encore  à  son 
nnbarras.  Le  peu  de  villes  occu- 
|KTS  par  les  Français ,  arborèrent 
les  étendards  des  allies;  cl  Lescun, 
lorctf  par  les  habitants  d'ouvrir  les 
portes  de  Parme,  repassa  en  France 
|M)ur  annoncer  au  roi  la  perle  du 
Milancz,  et  demander  des  secours. 
11  rentra  en  Italie  en  ï5ii  ,  suivi 
(le  quelcpies  compagnies  d'aventu- 
riers gascons,  qu'il  avait  dc'cidcs  a 
partager  son  sort  :  il  opéra  lieureu- 
seuicnt  sa  jonction  avec  un  corps 
(pic  Lautrec  avait  envoyé  à  sa  rcii- 
(  outre  ,  emporta  d'assaut  Novarre 
dont  la  citadelle  tenait  encore  pour 
la  France,  et  fit  pendre  la  garnison 
(  omposee  cnlièrement  deliandits  de 
diircreutes  nations:  il  s'empara  en- 
suite de  Vigevano,  lit  des  prodiges  de 
valeur  à  l'attaque  malheureuse  de  la 
Bicoque  ,  et  soutint  jusqu'au  dernier 
moment  les  eflforts  de  reimcmi.  Il 
e  retira  ensuite  dans  Crémone  avec 
quelques  braves  échappés  au  car- 
nage; mais  voyant  que  celte  place 
ne  tarderait  pas  d'être  enlevée,  il 
accepta  une  capitulation  ,  sans  con- 
sulter les  ofticiers  de  la  garnison. 
La  reddition  de  Crémone  délermina 
révacuation  de  Milan;  et  Lescun 
rentra  en  France.  Il  retourna  en- 
core en  Italie  avec  François  I*^»'.  ,  et 
il  se  trouvait  à  la  bataille  de  Pavie 
i,  a4  ^cV.  1 5*25  )  :  il  y  combattit  toute 
la  journée  près  du  roi,  et  tomba 
couvert  de  blessures.  Mené  prison- 
nier à  Milan,  i^y  mourut  le  3  mars 
suivant.  «  Celait,  dit  Brantôme  ,  un 
»  bon  capit^ne,  mais  pourtant  plus 
»  hardi  et  vaillant  que  sage  et  de 
»  conduite.  »  Il  faut  s'en  tenir  à  ce 
jugement  sur  Lescun  :  car  Guichar- 
din ,  qui  l'accuse  de  concussions  et 
d'avarice,  était  son  ennemi  person- 
nel ;  et  d'ailleurs  il  est  prouvé  que 


LES  287 

Lescun  vécut  et  mourut  pauvre. 
(  V.  V  Histoire  de  François  !*"•.  ^  par 
Gaillard.  )  '        W-s. 

LESCUN  (  Jean-Paul  de  ) ,  gcn- 
lilhomme  de  Gascogne  ,  né  dans  le 
xvi*^.  siècle  ,  s'appliqua  à  rétude 
de  la  jurisprudence,  et  fut  fait  con- 
seiller à  la  cour  souveraine  du  Béarn. 
Il  parvint  ensuite  à  la  dignité  de 
conseillcr-d'état  du  royaume  de  Na- 
varre. C'était  un  zélé  protestant  ; 
et  il  s'opposa  de  tout  son  pouvoir  à 
la  réunion  du  Béarn  à  la  France  , 
et  surtout  au  rélablisscment  des 
évèchés  de  Lescar  et  d'Olcron ,  dont 
les  dotations  étaient  assignées  sur 
les  biens  ecclésiastiques  confisqués  , 
lors  de  l'introduction  de  la  réforme. 
Il  publia  à  ce  sujet  plusieurs  écrits 
qui  furent  déférés  ,  comme  sédi- 
tieux ,  au  parlement  de  Bordeanx. 
L'auteur  fut  arrêté  ,  et  condamné  k 
avoir  la  tête  et  les  quatre  membres 
coupés  :  ce  jugement  fut  exécuté  à 
Bordeaux,  le  i8  mai  1622.  On  con- 
naît de  Lescun  ;  I.  Requête  contre 
le  livre  intitulé  Le  Moine  ,  Paris, 
i6i6,in-8".  Ce  livre  était  une  satire 
yiolente  contre  les  protestants  ,  pu- 
bliée par  un  prêtre  catholique,  qui 
s'était  caché  sous  le  nom  d'un  fonde 
Pau, appelé  Bunère.  IL  Généalogie 
des  seigneurs  souverains  de  Béarn  , 
empereurs  ,  rois  ,  et  autres  j)rinces 
qui  en  sont  descendus,  depuis  Gaston 
de  Moncade  jusqu'à  Louis  XI U  , 
roi  de  France  ,  contre  un  livre  inti- 
tulé :  Le  Moine  ,  tendant  à  assujétir 
la  principauté  de  Béarn  au  royaume 
d'Arragon  ,  avec  les  preuves,  ibid.  , 
1616  ,  in-4".  IIL  Avis  d'un  gentil- 
homme à  MM.  des  états-généraux  du 
royaume  de  Navarre  et  de  la  souve- 
raineté de  Béarn  ,  sur  la  main-levée 
des  biens  ecclésiastiques  ,  etc.  ,  ob- 
tenue par  les  évêques  d'OIeron  et  de 
Lescar  (  Paris  ) ,  1O17  ,  in-8<».  IV. 


>>M 


LES 


i)féinoircà  sur  les  opp.ositions  aux. 
poursuites  des  cvê(jues  ,  et  les  de- 
lu  indes  faites  par  les  églises  refor- 
mées du  Bcarn  ,  ibid.,  1617,  iu-8'\ 
V.  Les  Demandes  des  églises  de  Na- 
varre ,  présentées  au  Roi ,  ibid.  , 
1618,  in  -  8^.  VL  apologie  des 
églises  reformées ,  de  l'obéissance 
du  Roi  cl  des  états  de  Béarn  ,  pour 
•justifier  les  oppositions  par  eux  for- 
mées contre  la  main-levée  des  biens 
ecclésiastiques  ,  Ortliez,  1618  ,  in- 
8'\  VIL  Défense  contre  les  im- 
postures, idiussciés  et  calomnies  pu- 
bliées contre  le  service  du  Roi  et  la 
souveraineté  de  Béarn,  par  l'auteur 
des  deux  libelles  intitulés  :  Le  Moiine 
et  LA  Mouche, ibid. ,  1619  ,  in-8». 
VIIL  La  persécution  des  églises  de 
Béarn,  Montauban,  1620,  in-8". 
IX.  Calamité  des  églises  de  la  sou- 
i'eraineté  de  Béarn ,  La  Rochelle, 
iGii,in-8'^.  W-s. 

LESCURE  (  Le  marquis  Louis- 
Marie  DE  ) ,  naquit  le  1 3  oct.  1 76G 
de  Marie-Louis-Joseph  de  Lescure 
et  de  Jeanne  de  Durfort  de  Givra c. 
La  famille  de  Lescure  est  originaire 
de  l'Albigeois  ,  où  l'on  voyait  encore 
avant  la  révolution  son  château 
s!.r  les  bords  du  Tarn.  Au  commen- 
cement du  dix-huitième  siècle ,  un 
abbé  de  Lescure ,  évêque  de  Luçon  , 
attira  près  de  lui  son  neveu,  qui 
épousa  M^^^.  de  Surgères  ;  le  fils  de 
celui-ci  se  maria  aussi  en  Poitou,  et 
fut  tué  à  la  bataille  de  Plaisance  , 
étant  encore  fort  jeune.  Son  fils  , 
père  de  l'illustre  chef  de  la  Vendée, 
mourut  en  1784;  c'était  un  homme 
fort  dissipé ,  qui  laissa  sa  fortune 
en  grand  désordre.  Louis-Marie  de 
Lescure  fut  élevé  à  l'Ecole-mili- 
taire.  En  entrant  dans  le  monde  à 
l'âge  de  seize  ans  ,  il  y  parut  bien 
diiféreiit  de  ce  qu'étaient  alors  les 
jeunes  gens  de   son  rang  et  de  son 


LES 

état.  Il  était  gauche,  timirle  et  taci- 
turncjil  vivait, pour  ainsi  dire,  isolé 
au  milieu  d'une  société  brillante , 
frivole  et  animée  :  sa  piété  était 
grande  et])resque  austère,  sans  nulle 
ostentation  ;  ce  qui  était  le  contraire 
de  la  mode  de  ce  temps-là  :  aussi  le 
mérite  de  son  caractère  et  l'étendue 
de  son  savoir  étaient-ils  fort  mé- 
connus. On  le  trouvait  bizarre  et 
sauvage  ;  ses  manières  et  jusqu'à  sa 
toilette  le  faisaient  taxer  d'ime  sin- 
gularité qu'on  lui  pardonnait  cej'on- 
dant  à  cause  de  son  inaltérable  dou- 
ceur et  de  la  bienveillance  qu'il 
mettait  dans  toutes  ses  relations- 
seulement  on  regrettait  qu'un  hom- 
me de  sa  naissance  et  dans  sa 
position  ,  fait  ,  comme  on  disait 
alors  ,  pour  aller  à  tout,  s'écar- 
tât de  la  route  qui  menait  aux  suc- 
cès. Après  avoir  commandé  pendant 
peu  de  temps  une  compagnie  de  ca- 
valerie du  régiment  de  Royal-Pié- 
mont, il  épousa  ,  en  1791  ,  M^^^.  de 
Donnissan,  sa  cousine.  Déjà,  à  cette 
époque ,  la  révolution  prenait  un 
aspect  triste  et  menaçant  ;  déjà  l'é- 
migration avait  commencé.  M.  de 
Lescure  et  beaucoup  de  gentils- 
hommes du  Bas-Poitou  ne  trou- 
vaient pas  à  propos  de  suivre  cet 
exemple.  Dans  cette  province  ,  dis- 
tinguée de  toutes  les  autres  par  des 
mœurs  particulières  ,  les  seigneurs  , 
loin  d'avoir  pour  ennemis  les  pay- 
sans ,  jouissaient  de  leur  confiance 
et  de  leur  affection  :  la  douceur  et  la 
familiarité  du  patronage  des  gentils- 
hommes ,  l'habitude  de  vivre  dans 
leurs  terres,  la  franchise  et  la  rusti- 
cité de  leurs  manières  campagnar- 
des, avaient  laissé  subsister  ces  liens 
antiques  et  salutaires ,  rompus  dans 
presque  tout  le  reste  du  royaume.  Ne 
se  sentant  chassés  de  France  ni  par 
la  persécution,  ni  par  la  vanité  blés* 


I.FS 

• ,  et  compivnant  .m  contrairt^ 
.jti'ils  seraient  phis  forts  et  plus 
utiles  par  leur  inllueiiccctau  milieu 
lit  eeu\  qui  les  entouraient,  les  geii- 
iilshoinmes  poitevins  ne  voulaient 
j^oinl  oniigrer.  La  tyrannie  d'une 
opinion  aveugle  ne  leur  permit  pas 
tlf  suivre,  eomme  ils  Taur.jient  vou- 
lu ,  la  voi\  de  la  raison.  Beaucoup 
quittèrent  la  France.  Lescure,  après 
N  (»ir  un  instant  passe  la  frontière  , 
j,ea  qu'un  tel  }>arti  était  au  moins 

I  mature  :  il  revint.  Cependant  il 
t   j>eut-étre  émigré  plus  tard ,  si 

i.uuis  XVI  ,  qui  voyait  de  plus 
(Il  plus  combien  le  trône  avait  be- 
soin de  rester  entoure  de  serviteurs 
'^  !èles  et  de'voue's,  n'eût  exige  que 
:.  de  Lescure  demeurât  à  Paris. 

II  de'vouement   fut  su])erflu  :  il 
t    le    spectateur    impuissant    de 

sanglante  se'dilioa  du  lo  août; 
>  dangers    qu'il    brava  ,    lui    et 
.'Iques-uns  de  ses  amis,  demeure- 
nt inaperçus  au  milieu  de  cette 
t  astrophe.  Après  avoir  passe  quel- 
ics  jours  caché  à  Paris,  tandis  que 
^  massacres  s'y  prolongeaient,  M. 
Lescure  parvint  à  se  rendre  en 
Mlou  avec  sa  famille  :  il  trouva  un 
v.>vle  dans  son  château  de  Clisson 
l>rès  de  Bressuire ,  au  milieu  d'une 
population  dont  il  était  aimé  et  rcs- 

{)ectc.  Cependant  la  tyrannie  révo- 
utionnaire  étendait  chaque  jour  son 
joug; bientôt  les  paysans  de  ces  con- 
trées, déjà  blessés  dans  leur  opinion 
religieuse  ,  inquiets  de  voir  la  per- 
sécution qu'éprouvaient  les  grands 
propriétaires ,  se  trouvèrent  atteints 
à  leur  tour  par  un  recrutement  de 
3oo  mille  hommes.  Ils  ne  voulu- 
rent point  obéir,  et  se  révoltèrent  ; 
leur  première  pensée  fut  de  prendre 
'  pour  chefs  leurs  seigneurs  :  les  pay- 
sans des  environs  de  Châliilon  vin- 
I    reut  à  Clisson  chez  M.  de  Lescure 

M  .  XXIV. 


LES  'xSg 

chercher  M.  de  la  Rochc-Jaqiielein  ^ 

son  cousin,  qui  avait  ses  pr(i[)nétés 
dans  une  de  leurs  paroisses.  11  n'hc- 
sita  point  sur  le  parti  qu'il  devait 
prendre;  et  M.  de  Lescure  l'y  en- 
couragea. M.  de  la  Uoche-Jaquelein 
se  rendit  vers  Châtillon  ;  mais  les 
paysans  des  environs  de  Clisson 
ayant  commencé  par  se  soumettre , 
M.  de  Lescure ,  qui  ne  pouvait  s'é- 
loigner du  canton  où  son  influence 
devait  être  utile,  resta  exposé  aux 
poursuites  des  autorités  républi- 
caines :  il  fut,  avec  toute  s:<  famille, 
emmené  en  prison  à  Bressuire.  Quoi- 
qu'il fût  vénéré  des  habitants  de  cette 
bourgade  ,  et  que  les  principaux 
d'entre  eux  n'eussent  d'autre  désir 
que  de  le  sauver,  ce  fut  par  une 
sorte  de  miracle  qu'il  échappa  aux 
violences  d'une  soldatesque  accou- 
rue à  la  hâte  pour  combattre  les 
insurgés  :  au  bout  de  quelques  jours , 
il  fut  délivré  par  l'armée  vendéenne 
qui  s'empara  de  Bressuire.  Dès-lors 
il  fut  compté  parmi  les  premiers 
chefs  de  cette  armée ,  à  laquelle  se 
joignirent  les  paysans  de  sou  can- 
ton. Il  prit  la  pari  la  plus  active  aux 
travaux  et  aux  dangers  de  cette 
vaste  insurrection.  Dès  les  premiers 
jours,  il  étonna  les  Vendéens  par 
son  intrépidité,  en  se  précipitant  / 
le  premier  et  seul,  sur  un  pont  bar- 
ricadé et  gardé  par  les  troupes  ré- 
])ublicaiues  devant  Thouars  :  à  Fon- 
tcnay,  il  entra  aussi  dans  la  ville  , 
sans  que  personne  osât  d'abordie  sui- 
vre, tant  il  était  pressé  d'aller  déli- 
vrer des  prisonniers  vendéens,  qui 
y  étaient  renfermés.  A  Saumin- ,  ii 
fut  blessé  :  enfin  ,  en  toute  aflaire  , 
nul  ne  fut  plus  empressé  et  plus  dé- 
voué que  lui.  Au  combat  de  Torfou, 
qui  fut  le  dernier  succès  des  Ven- 
déens sur  la  rive  gauche  de  la  Loire, 
et  où  leurs  etibrts  héroïques  parna- 


ayo  LES 

/ent  à  repousser  ,  pour  quelques 
jours ,  les  troupes  aguerries  du  ge'- 
ne'ral  Klcber  ,  on  vit  M.  de  Lcscure 
mettre  pied  à  terre,  et  crier  aux  pay- 
sans décourages  :  «  Y  a-t-il  quatre 
»  cents  hommes  assez  braves  pour 
»  venir  périr  avec  moi  ?  »  —  Oui  ;, 
monsieur  le  marquis,  repondirent 
les  gens  de  la  paroisse  des  Echau- 
broigues  ;  et ,  à  leur  tête ,  il  se  main- 
tint pendant  deux  heures.  Peu  de 
i'ours  après,  au  combat  de  la  Trem- 
>laye ,  il  fut  atteint  d'une  balle  à  la 
tête ,  et    laissé  pour   mort  sur  la 

f)lace.  Un  fidèle  domestique  le  re- 
eva;  il  respirait  encore:  on  le  se- 
courut ,  et  il  fut  porté  à  la  suite  de 
l'armée  vendéenne,  qui ,  pressée  de 
toutes  parts  ,  se  vit ,  après  la  ba- 
taille de  Chollet  ,  contrainte  de 
passer  la  Loire,  emmenant  avec  elle 
une  population  éplorée  et  fugitive. 
M.  de  Lescure,  dont  la  blessure  lais- 
sait quelque  espérance  ,  aida  en- 
core de  ses  conseils  et  de  sa  cons- 
tance ses  braves  compagnons.  Il 
contribua  à  faire  nommer  M.  de 
la  Roche-Jaquelcin  chef  de  l'armée. 
Après  le  passage  de  la  Loire  ,  il 
suivit  la  marche  pénible  des  Ven- 
déens ,  à  travers  l'Anjou  et  la  Bre- 
tagne. Les  soins  touchants  de  sa 
femme,  les  hommages  de  l'armée, 
ne  pouvaient  empêcher  l'effet  de  tant 
de  douleurs  accablantes  qui  venaient 
à  chaque  instant  envenimer  sa  bles- 
sure. Il  faut  lire  ,  dans  les  Mémoires 
de  sa  veuve  ,  la  peinture  déchirante 
de  cette  lente  agonie ,  de  cette  mort 
si  noble  et  si  sainte  :  aucun  récit  n'est 
plus  attendrissant,  et  ne  manifeste 
des  sentiments  plus  purs,  et  une 
patience  plus  courageuse.  Il  mourut, 
pendant  une  marche  de  l'armée ,  en- 
tre Ernée  et  Fougères ,  le  3  novem- 
bre 1793.  M.  de  Lescure, au  milieu 
des   cheh  célèbres  de  la  Vendée  ^ 


LES 

mérite  une  place  à  part  :  sa  bra- 
voure était  extrême,  mais  lui  lais- 
sait toujours  son  calme  accoutumé  ; 
et  même ,  lorsqu'il  se  montrait  té- 
méraire ,  il  ne  cessait  pas  d'être  de 
sang-froid.  Il  était  l'officier  le  plus 
instruit  de  son  armée  :  lui  seul  à- 
peu-près  avait  étudié  les  livres  de 
tactique  et  de  fortification.  D'autres 
entraînaient  les  soldats  et  l'armée 
parleur  impétuosité:  pour  lui,  il 
exerçait  luie  autorité  fondée  sur  le 
respect  et  sur  la  force  tranquille  de 
sa  volonté.  Son  humanité  avait  quel- 
que chose  de  merveilleux.  Dans  une 
guerre  où  les  généraux  étaient  sol- 
dats et  combattaient  sans  cesse  corps 
à  corps,  pas  un  homme  n'a  reçu  la 
mort  de  la  main  de  M.  de  Lescure  : 
jamais  il  n'a  laissé  périr  ou  maltrai- 
ter un  prisonnier ,  tant  qu'il  a  pu 
s'y  op])oser  ,  même  dans  un  temps 
où  les  deux  armées  exerçaient  l'une 
contre  l'autre  d'horribles  repré^ 
saillcs.  Un  jour  un  homme  lira  sur 
lui  à  bout  portant  ;  il  écarta  le  fusil, 
et  dit  aux  paysans  :  a  Emmenez  ce 
malheureux  î  «Les  paysans  indignés 
le  massacrèrent  derrière  lui  :  il  y 
courut  sur-le-champ,  et  s'emporta 
avec  une  colère  qu'on  ne  lui  avait 
jamais  vue  :  c'est  la  seule  fois ,  di-r. 
sait-il,  qu'il  eût  proféré  des  jure- 
ments. M.  de  Lescure  a  laissé  une 
mémoire  vénérée  de  tous  les  partis 
dans  la  Vendée  :  parmi  les  hommes 
qui  se  sont  illustrés  dans  cette  guerre, 
aucun  n'a  acquis  une  gloire  aussi 
pure.  A. 

LESDIGUIERES  (  François  de 
Bonne,  duc  de),  né  à  Saint-Bonnet 
de  Ghampsaur,  dans  le  Haut-Dau- 
phiné,  fut  un  des  capitaines  de  Henri 
IV  qui  aida  le  plus  efficacement  ce 
pi'ince  à  monter  sur  le  trône;  et  de- 
puis contribua  encore  beaucoup  à 
défendre   sa    puissance   eoulre    lc« 


LES 

ennemis   de    la  Franco.   Ne  (rune 
famille  noble    très  -  ancienne  mais 
p,ujvre  ,  il  joignait    à  d'einincntes 
qnalitcs  l'avantage  d'nne  belle  taille, 
d'une  force  et  d'une  agilité  remar- 
quables. Destine'  à  la  magistrature 
par  un  oncle  qui  faisait  les  frais  de 
son  éducation ,  il  avait  commence' 
l'ctude  du  droit;  mais  la  mort  de 
ce  parent  l'obligea  de  chercher  des 
ressources  dans  son  epee.  Toutefois 
•'  ronserva  le  coût  de  ses  premières 
les  j  et  les  lettres  furent  toujours 
'Il   de   ses  plus  agre'ables   de'lasse- 
nuMts.  D'abord  sinijde  archer  dans 
une  compagnie  en  i56i  ,  il  devint 
eu  peu  de  temps  un  des  chefs  du 
jiirli  reforme.    Dès    1575   il  e'tait 
jurvenu   à  une  grande   réputation 
militaire;  et  il  fut  choisi  pour  rem- 
i!  icer,  à  la  tête  de  Tarmcc  des  pro- 
mts,  Montbrun,  qui  avait  payé 
sa  tête  le  tort  d'être  vaincu  et 
:  prisonnier  dausuneguerre  civile. 
11  »  ommença  par  une  opération  bien 
ditlicile  à  cette  e'poque  de  de'sordrej 
fut  d'e'tablir  une  se'vère  discipline 
lis  son  armée.  L'édit  de  Poitiers 
"i'yt)  )  avait  fait  poser  les  armes  ; 
is   cette  paix  factice  était  plus 
l'ste  aux  protestants  qu'un  vcri- 
le  état  de  guerre.  La  reine-mère 
lit  venue  à  Nérac  pour  négocier 
0  le  roi  de  Navarre.  On  sait  com- 
iit  les  dames  de  cette  cour,  éle- 
s  pour  la  plupart  à  l'école  de 
iherine,  employèrent  le  pouvoir 
leurs  charmes  et  jusqu'aux  res- 
irccs  d'une  galanterie  plus  que 
luptueuse,  pour  enlever  au  roi  de 
varre  ses  plus  braves  défenseurs. 
V^uelques-uns  ne  furent  pas  à  l'é- 
preuve de  ces  puissantes  armes;  et 
Henri  lui-même   ne  put  résister  à 
tous  les  pièges  qui  lui  furent  tendus. 
■  is  ouvrant  enfin  les  yeux  sur  le 
rJ  du  précipice,  ce  priucc  sçulit  la 


nécessité  de  défendre  sa  cause  d'une 
manière  plus  digne  de  lui;  et  il  se 
mit  à  la  tête  de  son  année.  Cette 
guerre  fut  appelée  la  guerre  des 
amoureux,  parce  que  l'amour,  si 
l'on  peut  se  servir  ici  de  cette  ex- 
pression, avait  masqué  les  premières 
hostilités.  Non -seulement  Lesdi- 
guières  y  paya  de  sa  j)crsonne  avec 
succès,  en  rej)renant  des  places  que 
la  cour  avait  surprises  dans  le  Dau- 
phiné;  mais  il  founiit  encore  de  l'ar- 
gent et  des  équipages  pour  l'armé*, 
et  il  s'acquit  dans  les  fréquents  com- 
bats qui  signalèrent  cette  déplorable 
époque,  une  gloire  qu'il  dut  autant 
à  ses  talents  militaires,  qu'à  sa  pru- 
dence et  à  sa  géiiérosilé.  L'arche- 
vêque d'Embrun,  l'un  des  plus  for- 
cenés ligueurs,  détermina  un  domes- 
tique de  confiance  de  Lcsdiguières, 
nommé  Platel,  à  tuer  son  maître. 
Lcsdiguières,  averti  de  ce  projet, 
ordonne  à  Platel  de  s'armer,  et  s'ar- 
mant  à  son  tour  :  «  Puisque  tu  as 
»  promis  de  me  tuer,  lui  dit-il,  es- 
»  saie  de  le  faire,  et  ne  perds  pas, 
»  par  une  lâcheté,  la  réputation  d& 
»  valeur  que  tu  t^es  acquise.  »  Platel 
confondu  se  jette  aux  pieds  de  son 
maître,  qui  lui  pardonne.  Quelqu'un 
l'ayant  blâmé  de  cet  excès  de  géné- 
rosité, il  répondit  •*  «  Puisque  ca 
»  valet  a  été  retenu  par  l'horreur 
»  du  crime ,  il  le  sera  bien  davan- 
»  tage  par  la  grandeur  du  bienfait.  » 
Quelque  temps  après,  Lcsdiguières 
ayant  pris  Grenoble,  on  remit  entre 
ses  mains  l'archevêque  d'Embnau, 
Il  calma  ses  frayeurs,  le  consola, 
lui  fit  rendre  ses  biens,  et  se  l'atta- 
cha pour  la  vie.  De  grandes  richesses 
et  une  influence  prodigieuse  dans 
l'armée  furent  le  résultat  de  ses  ef- 
forts pour  la  cause  du  roi  de  Navarre; 
mais  il  excita  la  jalousie  des  grands. 
L'iiu  d'eux  ayant  dit  à  ce  prince  qnt 

ï9.. 


licsdiguières  se  A^antait  de  desccnclre 
du  premier  Dauphin  Viennois^  et 
qu'il  voulait  recouvrer  la  souverai- 
neté de  ce  pays ,  le  roi  parut  en 
concevoir  une  inquiétude  d'autant 
plus  naturelle,  que  la  plupart  de 
ses  généraux  cachaient  à  peine  leur 
projet  de  se  rendre  indépendants , 
el  que  plusieurs  d'entre  eux  n'avaient 
pas  craint  de  joindre  leurs  armes  à 
celles  des  Espagnols.  Cependant  la 
de'fiance  du  roi  sur  le  compte  de 
Lesdiguières  ne  paraît  pas  avoir  été 
fondée  :  Sully  assure  que  ce  capitaine 
fut  toujours  attaché  à  son  souverain. 
«  On  ne  lui  reproche  point,  dit-il, 
y>  d'avoir  songé  à  s'approprier  ses 
))  succès ,  ni  d'avoir  convoité  la  sou- 
»  veraineté  du  Dauphiné.  Peut-être 
»  souhaita-t-il  que  le  roi  eût  long- 
»  temps  besoin  de  ses  services,  et 
»  ne  vînt  jamais  dans  cette  province.  » 
Quoi  qu'il  en  soit,  Lesdiguières  fut 
envoyé  en  Provence,  comme  lieu- 
tenant du  duc  de  Guise  ;  et  il  y  mon- 
tra le  même  attachement  au  roi^ 
en  repoussant  le  duc  d'Epernon  qui 
combattait  toujours  pour  les  ennemis 
de  la  France.  Sa  conduite  dissipa 
sans  doute  toutes  les  défiances, 
puisque  le  gouvernement  du  Dau- 
phiné. lui  fut  rendu.  Sa  présence 
dans  cette  contrée  contribua  beau- 
coup à  préserver  la  France  d'une  in- 
vasion.   Non  -  seulement  il  contint 


les 


ennemis,  mais  il  porta   même 


la  guerre  en  Savoie.  On  cite 
fait  de  la  même  campagne  qui  carac- 
térise bien  la  sagacité  de  ce  capitaine. 
Le  duc  de  Savoie  construisait  le  fort 
de  Barraux  sur  les  terres  de  France 
à  la  vue  de  notre  armée.  Lesdiguières 
n'y  mettait  aucun  obstacle ,  et  les  of- 
ficiers en  murmuraient  j  il  reçut 
même  des  reproches  de  la  cour. 
Votre  Majesté  y  répondit-il  au  roi,  a 
besoin  d'une  bonne  JorterQSSC  pour 


LES 

tenir  en  bride  celle  de  Montméllan, 
Puisque  le  duc  de  Savoie  en  veut 
faire  la  dépense ,  il  faut  le  laisser 
faire;  dès  que  la  place  sera  siijfi- 
samment  garnie,  je  me  charge  de 
la  prendre.  En  effet,  il  la  prit  en 
moins  de  deux  heures,  quoique  la 
garnison  fût  préparée  à  une  attaque. 
Il  fut  nommé  maréchal  de  France 
en  1608,  et  sa  terre  fut  érigée  en 
duché-pairie.  Le  roi  lui  ayant  con- 
fié le  commandement  de  l'armée 
d'Itc*lie,  la  Savoie  fut  bientôt  con- 
quise. On  a  pensé  que  dès  ce  mo- 
ment elle,  serait  devenue  province  de 
France^  sans  la  puissante  interven- 
tion du  pape,  qui  craignait  de  don- 
ner aux  Français  la  clef  de  i'ïtalie. 
Après  la  mort  de  Henri  ï V ,  Lesdi- 
guières ne  démentit  point  son  carac- 
tère au  milieu  des  brigues  et  des  cou- 
pables projets  dont  cette  perte  fut  l'oc- 
casion et  le  prétexte.  Il  se  maintint 
en  Savoie,  où  il  suppléait  à  la  fai- 
blesse de  son  armée  et  au  vice  des 
plans  de  la  cour  par  une  tactique 
habile  et  une  activité  sans  égale.  S'il 
n'obtint  pas  la  confiance  entière 
de  la  régente,  elle  ne  crut  pas  du 
moins  prudent  de  lui  en  refuser  des 
témoignages.  Sa  réputation  et  son 
crédit  ne  permettaient  pas  qu'on  k 
tînt  dans  une  apparence  de  défaveur 
et  l'on  en  vit  une  preuve  remarqua- 
ble dans  la  seule  occasion  où  il  ai 
cru  pouvoir  manquer  de  soumissior 
à  une  cour  sans  force  et  sans  dignité 
Il  s'était  engagé,  d'après  les  ordre 
de  Henri,  à  soutenir  le  duc  de  Savoi 
contre  les  Espagnols.  Mais  le  faibl 
gouvernement  qui  succédait  à  celi 
de  Henri  IV ,  ayant  changé  ces  prc 
jets ,  Lesdiguières  reçut  des  ordre 
contraires.  Il  n'en  persista  pas  moir 
à  remp'ir  ses  engagements ,  pass 
les  monls ,  et  battit  les  Espagne 
wir  totiTles  points.  Sa  conduite  fi 


ij|H)rouvoc;  mais  celle  qu'il  tiut  dans 
lcs(iiicrellpsdc  religion  qui  agitaient 
encore  la  France,  ne  pouvait,  qnoi- 

2UC  dirigée  par  une  grande  pru- 
encc,  avoir  1  approbation  des  deux 
prtis.  On  sait  que  les  princes  me'- 
M lents  et  quelques  seigneurs  am- 
uMi\  profitaient  des  alarmes  du 
j  rti  protestant,  pour  le  faire  entrer 
(Iaus  leurs  projets.  Sully  prétend 
(]Ho  Lesdiguières  prit  part  à  ces  me- 
Jif  «s,  et  qu'il  fut  même  au  nombre  des 
chefs  protestants  qu'on  accusa  de  vou- 
loir e'tablir  une  re'publique.  Ce  qu'il 
Y  a  de  certain,  c'est  que  ce  gênerai 
refusa  de  servir  la  cause  du  parti 
prot«îstant  arme'  contre  la  cour,  soit 
qu'il  ne  vît  pas  un  inle'rêt  assez  puis- 
.sant  à  le  soutenir,  soit  qu'en  effet  il 
le  trouvât  blâmable.  Il  devint  même 
tout-à-fait  suspect  aux  calvinistes  ,  et 
finit  par  abjurer  leur  religion  en 
i()i2.  Quelques  historiens  font  hon- 
neur de  sa  conversion  au  zèle  per- 
suasif de  De'ageant  envoyé'  près  de 
bii  par  la  cour,  pour  sonder  ses  in- 
tentions ;  mais  De'ageant  lui-même, 
dans  ses  Mémoires,  est  loin  de  s'at- 
trijjuer  le  mérite  de  cette  conver- 
sion. On  a  lieu  de  croire,  d'après 
beaucoup  d'écrivains  contemporains, 
que  Lesdiguières  fut  conduit  à  cette 
resolution  par  le  désir  d'obtenir  la 
place  de  connétable,  qui  ne  lui  était 
offerte  qu'à  cette  seule  condition. 
En  elVet,  il  reçut  les  lettres  de  con- 
nétable après  la  cérémonie  de  son 
alijuration.  Mais  on  n'est  pas,  pour 

*  cela ,  fondé  à  penser  ,  comme  Sully  , 
que  la  seule  religion  capable  de  le 
fixer,  était  celle  qui  pouvait  lui  pro- 
curer des  richesses  et  de  l'autorité. 
Il  mourut  le  iS  sept.  iG'26  ,  ayant 
'  "îiservé  jusqu'à  la  fin  son  grand 
u-age  et  son  étonnante  activité.  Sa 

j  vif  ne  fut  pas  exempte  de  taches. 

'!'  Les  historiens  du  temps,  et  l'auteur 


LES  ao3 

Biêrac  de  sa  Vie,  n'ont  pas  dissimule, 
par  exemple,  qu'il  enleva  une  femme 
à  son  mari,  et  vécut  publiquement 
avec  elle;  qu'il  ambitionna  le  pt)u- 
Toir  et  les  richesses,  sans  examiner 
avec  assez  de  scrupule  les  moyens 
de  se  les  procurer.  Mais  il  a  trans- 
mis un  grand  nom  à  la  postérité; 
et  l'histoire  a  dîi  mettre  au  premier 
Tiiuz  des  héros  dont  la  France  s'ho- 
nore,  un  capitanic  qui  ji  a  jamais 
élé  vaincu  j  et  qui  a  toujours  été 
vainqueur  (  i  ).  Henri  IV  disait  qu'il 
ne  voudrait  céder  quà  Lesdiguières 
le  titre  de  premier  capitaine  de  V Eu- 
rope.— (t  S'ilj'  avait  en  France  deux 
Lesdigiùères ,  a  dit  la  reine  Elisa- 
beth, j'en  demanderais  un  au  roi.  » 
La  vie  de  Lesdiguières  a  été  écrite 
par  Louis  Videl  ,  son  secrétaire , 
in-fol.  ,    i638.  D-l. 

LESEUR  (  Thomas  )  habile  géo- 
mètre, né  en  1703,  à  Relhel ,  avait 
un  goût  naturel  pour  la  retraite  ;  un 
de  ses  oncles  ,  religieux  minime  , 
acheva  de  décider  sa  vocation,  et  il 
prit  l'habit  de  cet  ordre  à  l'âge  de 
dix-huit  ans.  Ses  supérieurs  l'en- 
voyèrent à  Rome  terminer  ses  étu- 
des. Ou  enseignait  alors  dans  tous 
les  collèges  le  système  des  tourbil- 
lons. Le  P.  Leseur  le  jugea  un  ro- 
man sans  intérêt  et  sans  vmisem- 
blance  ;  et  il  était  près  de  renoncer 
à  la  philosophie,  pour  laquelle  il  ne 
se  croyait  nulle  aptitude,  lorsque  le 
hasard  lui  ulïrit  un  li^Te  de  géomé- 
trie. Dès  ce  moment  il  se  livra  à 
l'étude  de  cette  science  dont  la  mar- 
che certaine  plaisait  à  son  esprit 
juste  et  méthodiqsie.  Après  avoir  ter- 
miné ses  coure  ,  il  revint  en  France , 
et  fut  placé  dans  une  petite  ville,  où- 
il  resta  cinq  ans  ,  privé  de  toutes  les 

(1)  Tellei  «ont  !<••  exprei»ion«  i\t>  it-t  lettreiJ»- 
nomin.ition  i  la  plMC«  de  Conii-<table  ,  qui ,  »{>'k^ 
lui ,  u'a  ctc  doniiéu  à  auciui  autra, 


5g4 


LES 


ressources  nécessaires  a  son  instruc- 
tion. Mais  ayant  appris  que  le  P. 
Jacquier  ,  qui  lui  avait  succède'  à 
Rome ,  osait  y  attaquer  publique- 
ment le  cartésianisme ,  il  demanda 
la  permission  d'aller  le  joindre.  Dès 
qu'ils  se  furent  vus,  ils  s'aimèrent; 
tout  devint  commun  entre  eux  , 
peines,  plaisirs  ,  travaux  ,  la  gloire 
même  ;  celui  de  tous  les  Liens  peut- 
être,  dit  Condorcet,  qu'il  est  plus 
rare  que  deux  hommes  aient  par- 
tage' de  bonne  foi.  Le  P.  Leseur 
fut  nomme  professeur  de  mathéma- 
tiques au  collège  de  la  Sapience;  et 
il  donnait  alternativement ,  avec  le 
P.  Jacquier ,  des  leçons  de  théologie , 
au  collège  de  la  Propagande.  Celte 
double  tâche  et  le  travail  du  cabi- 
net occupaient  tous  ses  instants.  Il 
suivit  à  Parme  son  ami ,  nommé 
instituteur  de  l'infant,  et  il  ne  vou- 
lut point  le  quitter  tant  que  dura 
cette  éducation.  De  retour  à  Rome, 
il  tomba  majade,  et  mourut  au  bout 
de  quelques  mois  de  souffrances,  le 
22  septembre  1770.  Le  P.  Leseur  a 
eu  part  au  Commentaire  sur  les 
principes  de  Newton ,  et  aux  Elé- 
ments de  calcul  intégral  (  i  )  ^  deux 
des  ouvrages  les  plus  importants  du 
dernier  siècle.  (  F  oyez  Jacquier, 
XXI,  573  et  suiv.  )  Les  deux  amis 
travaillaient  chacun  de  leur  côté , 
et  se  communiquaient  ensuite  le  ré- 
sultat de  leurs  méditations  ;  mais 
jamais  on  n'a  su  auquel  des  deux 
appartenait  la  leçon  préférée,  et 
eux-mêmes  l'avaient  oublié.  Tous 
deux  aussi  modestes  que  savants, ils 
ne  se  proposaient  aucune  gloire  de 
la  publication  de  leurs  ouvrages.  On 
les  avertit  un  jour,  qu'un  géomètre 

(1)  lie  P.  Lcieur  avaît  publié  «enl  :  Mt^moire 
sur  le  calcul  intégral ,  Rome,  1748.  Montiula 
l'a  analysé  daui  son  Hinoirs  il«aMaihéuia»iqin;«, 
Mui.iii, p.  4t  eUuir. 


LES 

Italien  avait  copié  une  partie  des 
Eléments  du  calcul  intégral ,  sansr 
citer  l'ouvrage.  C'est  une  preuve , 
répondirent -ils  ,  qu'on  a  trouvé 
notre  travail  utile ,  et  ils  ne  firent 
aucune  réclamation.  Le  P.  Leseur 
n'avait  aucune  ambition  j  mais  il 
aurait  souhaité  que  le  P.  Jacquier 
obtînt  les  récompenses  les  plus  écla- 
tantes. Un  jour  ,  celui-ci  disait  dans 
un  cercle  nombreux  :  Le  cardinalat 
est  un  beau  problème. — Je  voudrais 
bien ,  répondit  Leseur ,  le  résoudre 
pour  vous.  Quelques  instants  avant 
sa  mort ,  son  ami  tremblant  s'ap- 
procha de  son  lit,  et  lui  demanda 
s'il  le  reconnaissait? Oui, répondit-il, 
vous  êtes  celui  avec  qui  je  viens  d'in- 
tégrer une  équation  très-difficile. 
Le  P.  Leseur  était  correspondant  de 
l'académie  des  sciences  de  Paris. 
Condorcet  y  l«t  son  Eloge  ^  le  i3 
nov.  177^.  On  en  trouve  une  ana- 
lyse dans  le  Journal  de  physique^ 
de  l'abbé  Rozier,  janvier  1777.  W-s. 
LESFARGUES  (Bernard),  impri- 
meur et  traducteur  du  dix-septième 
siècle,  était  Toulousain*  on  ne  con- 
naît ni  la  date  de  sa  naissance ,  ni 
celle  de  sa  mort  •  mais  on  a  de  lui: 
I.  Histoire  d" Alex andre-le"- Grand , 
tirée  de  Quinte-Curce  et  autres  au- 
teurs ,  1 689  ,  in-80.  II.  Les  Orai- 
sons de  Cicéron  contre  Verres,  tra- 
duites en  français,  1640  ,  in-4°.  III. 
Les  Controverses  de  Séneque  ,  père 
de  Séneque  le  philosophe ,  traduites 
en  français,  i(356,  in-fol.;  1689,  iit* 
4".  Le  P.  Niceron  ,  tom.  xxii ,  pag. 
349,  dît  queDuryera  mis  en  français 
les  OEuvres  de  Séneque  ,  à  l'excep- 
tion de  ce  que  Malherbe  et  Lesfargues 
en  avaient  traduit.  Or ,  Lesfargues 
ne  s'était  exercé  que  sur  les  Contro- 
verses. Nicéron  a  confondu  le  père 
avec  le  fds.  (  Voyez  Duryer  ,  Mal- 
niiiREE  et  SÉ^NÈQUE.  )  IV.  Bernai  di 


LK5 

•sfargues  rtpologia  pro  se,  i^îGo, 

j".  V.  Dtwid  y  poètiie  hèrouiue  y 

<i(io,  in- ri  ;  iG85  ,  in-iu  ;  ouvraçe 

li  ,  maigre  ces  deux  e'ditio us,  n  a 

tTc  elc  connu  que  par  ce  vers  de 

ii.iilcau  (Satire  i\  )  : 

I.»  David  imprimé  n'«  poiut  vuIa  Iiiiniire. 

L'abbr   Goujcl    (  Bihlioth,   fr.  , 
tom.   XMi,  paL^  44^)  dit  que  ce 
\   rs  porte  sur  le  David  de  Coras , 
liljlie    en    i()Gj;  mais   Brossette, 
ii.i'is  sesElclaircissements  historiques 
(jiril  tenait  de  lîoileau  lui-même, 
•i^sure  formellement  que  le  satirique 
li.uirais  avait  en   vue  le  poème  de 
l.isfargucs  et  non  celui  de   Goras. 
(,>iielque  médiocres   que  soient   les 
productions  de  Lest'^r'j^aes,  J.  Ray- 
il  aurait  du  l'admettre  dans  la  No- 
e  des  Hommes  illustres ,  qui  est  à 
suite  de  son  Histoire  de  la  Fille 
Toulouse,    1759,  in-40.    Celte 
mission  donne  à  penser quil  pour- 
ut  se  faire  que  Lesfargues  ne  fût 
pis  de  ce  pays.  A.  B-t. 

LESKO.  /^o^^zLesco. 
LESLEV  (  Je  An  ) ,  ëvêque  ecos- 
lis,  ne  en  159.7,  était  à  Tage  de 
)  ans  chanoine  de  l'église  calhé- 
rde  d'Aberdecn  et  de  Murrav.  Il 
•yagca  ensuite  en  France  ,   et  prit 
le  degré  de  docteur  en  droit  à  l'uni- 
versité de  Paris.  En  i554  ,  la  reine 
régente  le  raj)pela  en  Ecosse  ,   et  le 
nomma  oflicial  et  vicaire-général  du 
diocèse  d' ALerdeen.  Les  progrès  de  la 
réforraalion  allumèrent  le  zèle  et  dé- 
veloppèrent les  talentsdeLesley.il  se 
montra  l'un  des  plus  habiles  défen- 
seurs de  la  doctrine  catholique ,  dans 
une  controverse  solennelle  qui  eut 
lieu  entre  les  deux  partis  à  Edim- 
bourg ,   en    i56o.    La  reine  Marie 
vStuart  était  allée  en  France,  et  plcu- 
riit   à  Vitry    la  mort    du   roi    de 
France ,  «on  mari ,  lorsque  les  trou- 
bles religieux  qui  agitaient  rEcoss« 


LES  2<>5 

engagcrcnt  catholiques  et  protestants 
à  désirer  et  à  demander  le  retour 
d«  cette  princesse.  Lesley  fut  char- 
gé de    la   ramener  ;    et   ils  parti- 
rent de  Calais  en  août  i56i.  Aus- 
sitôt après  son  arrivée ,  il  fut  élu 
l'un  des  sénateurs  du  collège  de  jus- 
tice, conseiller-privé,  et  dc])uis  al>bé 
de  Lundores  et  évêque  de  Ross.  Ma- 
rie  ayant    cherché   un    refuge   en 
Angleterre  contre  la  fureur  de  ses 
sujets ,  Elisabeth  la  retint   prison- 
nière, et  nomma  des  commissaires  à 
York ,  pour  examiner  leurs  diffé- 
rends. Marie  ,  de  son  côté,  nomma 
aussi  des  commissaires  :  Lesley  fut 
du  nombre  et  se  distingua  dans  sa 
défense  ;  mais  toute  son  éloquence 
et  ses  efforts  furent  inutiles.  Il  ne 
réussit  pas  davantage  comme  am- 
bassadeur ;  ses    plaintes  ne  furent 
pas  écoutées.   Résolu  cependant  de 
délivrer  sa  souveraine  ,    il  négocia 
pour  elle  im  projet  de  mariage  avec 
le  duc    de  Norfolk  ,  espérant  lui 
procurer  par-là  les  moyens  de  s'é- 
chapper secrètement.  Mais  le  projet 
fut    découvert  :  le  duc  ,  convaincu 
de  trahison  ,  fut  exécuté  ;  et  le  né- 
gociateur fut  renfermé  successive- 
ment dans  l'île  d'Ely  et  à  la  tour  de 
Londres.  Mis  en  liberté  en  1578  , 
sous  la  condition  de  quitter  l'Angle- 
terre ,  Lesley  alla  implorer  en  vain 
l'assistance  des  rois  d'Espagne  et  de 
France,  de  tous  les  princes  d'Al- 
lemagne et  du  i^ape,  en  faveur  de 
Marie.  Ayant  eVélu,  en  i57f),  suf- 
fragant  et  vi<airc-général  de  l'ar- 
chevêché de  Rouen  ,  à   peine  était- 
il   arrivé  dans  son   diocèse  ,  qu'il 
fut  arrêté  et  mis  en  prison  ,  d'où 
il  ne  sortit  qu'en  payant  3oo(>  pis- 
toles  pour  sa    rançon.  Emprisonné 
une  seconde  fois  en  i5*jo,  il  ne  fut 
délivré  qu'à  la  même  condition.  Eu 
i5g3,  il  fut  élevé  k  l'avêcLc  de 


içp  LES 

Constance;  mais  il  ne  put  en  prendre 
possession.  Il  apprit  à  Bruxelles  la 
mort  de  la  malheureuse  Marie  j 
et  l'établissement  de  la  reformation 
en  Ecosse^  vint  lui  ravir  toute  espé- 
rance de  recouvrer  l'evêclié  de  Ross. 
Il  se  retira  dans  un  monastère  ,  à 
Guirleubourg,  près  de  Bruxelles,  et 
y  mourut  en  i5g6.  Leslcy  fonda, 
pour  les  Ecossais  ,  trois  séminaires 
(  à  Rome ,  à  Paris  et  à  Douai  )  ;  et  il 
exerça  pendant  sept  ans  les  fonctions 
e'piscopales  dans  le  diocèse  de  Ma- 
lines.  Indépendamment  des  écrits 
qu'il  puUia  pour  la  défense  de  Marie 
Stuart ,  ouvrages  savants  ,  éloquents 
et  dictés  par  le  plus  courageux  dé- 
vouement ,  c'est  à  lui  que  les  Ecos- 
sais doivent  le  premier  recueil  de 
leurs  lois.  Ayant  obsédé  que  toute 
l'ancienne  jurisprudence  tombait  en 
désuétude  ,  faute  d'être  réunie  en  un 
corps  ,  il  représenta  cet  inconvé- 
nient à  la  reine  Marie  ,  qui  lui  ad- 
joignit quinze  autres  commissaires 
autorisés  à  ordonner  et  faire  impri- 
mer ce  Recueil ,  qui  parut  à  Edim- 
bourg ,  en  1 566 ,  et  qui ,  étant  im- 
primé en  caractères  gotliiques  saxons, 
est  vulgairement  appelé  \es  Actes 
gothiques  du  parlement.  Les  prin- 
cipaux ouvrages  de  Lesley  sont  : 
I.  AJflicli  animi  consolationes  et 
tranquilli  animi  consolatio ,  Paris  , 
1574,  in-8«.  ;  compose  pour  la  con- 
solation de  la  reine  captive.  II. 
De  origine ,  moribus  et  rébus  gestis 
Scotorum ,  Rome ,  1578  ,  in-4**.  La 
dernière  moitié  du  volume  est  con- 
sacrée à  l'apologie  de  la  reine  Marie. 
III.  Défense  de  V honneur  de  Marie, 
reine  d^ Ecosse ,  Liège  ,1571^  in-8^. 
I\.  Traité  où  Von  démontre  que  le 
gomemement  des  femmes  est  con- 
forme à  la  loi  de  Dieu  et  de  la 
nature.  Le  jésuite  Parsons  attribue 
les  deux  ouvrages  j)récédents  à  Mois 


LES 

gan  Philips.  Le  dernier  paraît  sur- 
tout composé  pour  réfuter  les  inso- 
lentes déclamations  deKnox,  contre 
Marie  Stuart.  (  Foy.  Knox,  XXII, 
5oo.  )  V.  De  titulo  et  jure  Mariœ 
Scotorum  reginœ  ,  quo  Angliœ  suc- 
cessionem  jure  sibi  vindicat,  Reims, 
1 58o ,  in-4°.  On  cite  encore  de  Les- 
ley des  lettres  et  autres  ouvrages 
restés  inédits.  L.' 

LESLEY  (  Alexandre  ) ,  savant 
jésuite  écossais  ,  naquit  dans  le 
comté  d'Aberdeen  ,  en  1 694.  Après" 
avoir  fait  ses  humanités  à  Douai ,  il 
acheva  ses  études  à  Rome  ,  fut  ad- 
mis au  noviciat ,  en  1 7 1 3  ,  et  en- 
seigna les  belles-lettres  à  Sora  et  à 
Anconc.  Ayant  ensuite  fait  sa  théo- 
logie au  Collège  romain^  où  il  don- 
nait des  leçons  de  langue  grecque  ,  : 
il  fut  destiné  à  professer  la  philo- 
sophie au  collège  II  lyrique  de  Lo- 
rette  ;  mais  il  n'y  resta  que  l'année 
1728  ,  ayant  été  appelé  en  Ecosse 
pour  faire  des  missions.  En  1734, 
il  retourna  en  Italie  ,  et  enseigna 
dans  les  collèges  d'Ancone  et  de 
Tivoli  :  il  repassa  la  mer  en  1738, 
d'après  les  instances  de  lord  Pètre, 
qui  voulait  avoir  auprès  de  lui  un 
homme  instruit  sur  l'antiquité.  Lesley 
revint,  en  1744  ?  à  Rome,  y  fut 
nommé  préfet  des  études  au  collège 
des  Ecossais ,  et  en  remplit  les  fonc- 
tions jusqu'en  1746.  Il  professa  pen- 
dant deux  ans  la  théologie  morale  au 
collège  des  Anglais,  et  fut  associé  en 
1749  au  savant  jésuite  Emanuel  de 
Azevedo  ,  pour  la  publication  du 
Trésor  liturgique  ,  dont  il  avait 
imprimé  un  magnifique  Prospectus. 
Il  fixa  sa  demeure  au  Collège  romain , 
où  il  mourut  le  27  mars  1 758,  après 
avoir  publié  ,  comme  essai  de  ce 
travail ,  le  Missale  mixtum  secun- 
dùm  regulam  heati  Isidori,  dictum 
Mozarabes  ;  prœfatione  ,  nous  ,  et 


LES 

fteruiice  ornatum.  Rome,  1755, 

jKiiiios,  en  i  vol.  in-/|«>.  C'est  une 

iinpressiunilu  INlissrl  niozarabiquc , 

iiunriiiiéà  Tolède  ,  en  i5oo,  parles 

ordres  du  cardinal  Xiincnès.  On  y  a 

'iiserve   la   dédicace  à  ce  célèbre 

rdinal,  comme  pièce  historique. 

i  j)rèfacedu  nouvel  éditeur  est  Tort 

iporlanlepour  quiconque  veut  re- 

.mter  à  l'origine  du  rit  mozarabi- 

^  ic,  et  en  connaitrclcs  variations.  Les 

notes  qui  sont  à  la  fui,  indiquent  dans 

I  rsley  un  homme  iuslniit  et  d'un  goût 

urc;  elles  comprennent  depuis  la 
ige  475  jusqu'à  la  page  610.  On  les 
garde  comme  des  modèles  en  ce 
ure.  Lesley  se  proposait  de  faire  le 
uhnc  travail  sur  le  Bréviaire  moza- 
i.ibique,  et  de  le  donner  au  public. 

II  avait  aussi  commencé  un  ouvrage 
qiiidevail  avoir  pourtitre:2?e  Legio- 
TiJbus  y  dans  lequel  ,  par  le  moyeu 
(les  inscriptions  ,  il  aurait  distingué 
tous  les  grades  de  la  milice  romaine  j 

'.  un  amlrc  y  De  prœstantidveterum 
ipidum ,  à  l'iniilatiou  de  celui  de 
jianheim.  De  prœstantid  numis- 
.latum.  On  a  trouvé  dans  ses  pa- 
lmiers une  espèce  de  Fojage  litté- 
mire ,  et  deux  Recueils  d'inscrip- 
tions, Lapides  tiburtini,  et  Lapides 
britannici.  Il  entretint  un  commerce 
cpistolaire  avec  ses  confrères  Con- 
tuccio  Contucci  et  Antoine  -  Marie 
Lupi.  Foyez ,  sur  Alexandre  Lesley 
cl  son  ouvrage,  les  Annali  lilteraii 
d'Italia  ,   tome   m  ,    2''.  partie  , 

p.  494*  L-B-E. 

LES  LIE  (  Jeapi  ),  éveque  de 

(logher,  eu    Irlande,  ne   dans  le 

i"»rd  de  l'Ecosse  ,  jouit  d'une  grande 

■  veur  à  la  cour  de  Charles  ^^, 

jut  il  fut  conseiller-privé,  d'abord 

I  Ecosse,  puis  en  Irlande  en  i633. 

:  passa  en  même  temps  de  l'évêché 

>  Orcades  a  celui  cie  Raphoc  en 

iilaLdc^où  il  bâtit;  eu  forme  de 


LES  597 

forteresse  ,  un  superbe  palais  ppis- 
copal  qui, dans  la  rébellion  de  i64i, 
fut  utile  aux  royalistes.  L'évêque 
y  soutint  un  siège  ;  et  ce  fut  de 
tous  les  forts  d'Irlande  celui  qui 
se  rendit  le  dernier  à  Cromwell. 
Retiré  à  Dublin  ,  Leslie  continua 
de  se  livrer  aux  exercices  de  la  re- 
ligion dans  sa  famille  suivant  l'an- 
cienne liturgie.  A  l'époque  de  la 
restauration ,  il  fut  nommé  éveque 
de  Cloghcr  en  1661  ,  rentra  dans  le 
conseil,  et  mourut  en  1671  ,  âgé  de 
plus  de  cent  ans  ,  regardé,  après  5o 
ans  d'épiscopat,  comme  le  plus  an- 
cien éveque  qui  existât  alors  dans  le 
monde.  L. 

LESLIE  (  Charles  ),  second  fils 
du  précédent  ,  naquit  en  Irlande  , 
vers  le  milieu  du  dix-septième  siècle. 
Il  entra  dans  les  ordres  sacrés  ,  en 
1680  ,  et ,  en  1687  ,  fut  nomme 
cliauccHcr  de  l'église  cathédrale  de 
Connor.  Leslie  se  rendit  a  cette  épo- 
que (extrêmement  odieux  aux  catho- 
liques d'Irlande  ,  par  l'opposition 
qu'il  manifesta  contre  eux  ,  Cha- 
que parti,  comme  il  arrive  souvent, 
s'attribua  la  victoire  et  conser- 
va son  opinion.  Les  talents  que  dé- 
ploya Lesliele  mirent  en  grand  crédit 
auprès  des  protestants  ,  qui  le  con- 
sultaient sur  tous  les  cas  diiîlriles. 
Jacques  II  ayant  nommé  un  catho-  ' 
lique  grand  -  shcriâ'  du  comté  de- 
Mouaghan  ,  Leslie  qui ,  depuis  quel- 
que temps,  était  retenu  dans  sa  cham- 
bre par  la  goutte,  se  lit  porter  à 
la  cour  d'assises,  d'après  les  instan- 
ces des  prolestants  ;  et  il  détermina 
la  cour  à  faire  arrêter  et  metlre  en 
prison  le  i^herifl'.  Mais  quoiqu'il 
se  crut  autorisé  à  résister  aux  or-  ' 
drcs  illégaux  du  souverain,  il  éJait 
loin  d'approuver  qu'on  portât  ces 
piincipes  de  résistance  jusqu'à  pri- 
ver le  roi  du    pouvoii*    suprême. 


295 


LES 


En  persévérant  avec  fermeté  dans 
cette  opinion ,  il  demeura  fidèle  à 
Jacques  II,  même  après  la  révolution 
qui  le  priva  du  trône  ;  et  il  refusa 
de  prêter  aucun   nouveau  serment 
contraire  à  l'obéissance  qu'il  croyait 
lui  devoir  :  aussi  fut-il  prive  de  tous 
ses  emplois.  Les  troubles  qui  s'ële- 
vcrent  en  Irlande  ,  en  1689^  le  for- 
cèrent à  se  retirer  en  Angleterre  avec 
sa  famille.  Il  passa  tout  son  temps 
à  mettre  au  jour  des  écrits  polémi- 
ques en  faveur  de  la  cause  qu'il  avait 
embrasse'e  ;  son  esprit  et  ses  vastes 
connaissances  le  rendaient  un  cliam- 
pion  redoutable  aux  non-jureurs.  Le 
premier  ouvrage  qu'il  fit  paraître  à 
ce  sujet,  fut  une  réponse  à  l'écrit  de 
Tarchevêque  King  ,  sur  Vétat  des 
protestants  en  Irlande  sous  le  gou- 
vernement de  Jacques  II.  Leslie  se 
montra  dans  sa  réfutation  aussi  op- 
posé aux  principes  des  catholiques  , 
qu'à  ceux  de  l'auteur  qu'il  réfutait. 
Il  écrivit  aussi  contre  la  secte  des 
quakers ,  et  employa  en  même  temps 
sa  plume  à  défendre  la  religion  cliré- 
tienne  en  général  contre  les  déistes , 
les  Juifs  et  les  Sociniens,  Ses  divers 
«fcrits  et  ses  fréquentes  visites  aux 
cours  de  St.-Germain  et  de  Bar-le- 
Duc  le  rendirent  suspect  au  gouver- 
nement ;  mais  il  le  devint  encore  da- 
vantage après  la  publication  de  l'ou- 
vrage sur  le  droit  héréditaire  à  la 
couronne  d"" Angleterre ,  dont  on  le 
croyait  auteur  :  craignant  pour  sa  sû- 
reté, il  quitta  l'Angleterre,  et  vint  se 
réfugier  à  la  cour  du  prétendant ,  à 
Bar-le-Duc,  où  onlui  permit  d'officier 
dans  une  cKapelle  privée,  suivant  les 
rites  de  l'église  anglicane.  Il  paraît 
certain  qu'il  fit  de  grands  efforts  pour 
convertir  le  prétendant  à  la  religion 
protestante  ;  mais  ses  efforts  furent 
vains.  Néanmoins ,  pour  soutenir  les 
iûtérêts  de  ce  prince ,  tandis  que  son 


LES 

parti  en   Angleterre  conservait  et 
cherchait  à  répandre  l'espoir  de  son 
rétablissement,  il  écrivit  de  Bar-le- 
Duc  ,  sous  la  date  du  2v3  avril  i  -j  i/^, 
une  lettre  dans  laquelle  il  faisait  le 
plus    giand  éloge  du  prétendant  : 
elle  fut  imprimée  et  répandue  avec 
profusion   parmi  les  royalistes.  Il 
suivit  ce  prince  en  Italie,  malgré  le 
p'^n  d'égards  qu'on  avait  pour  lui  à 
s;>  cour.  En  1 7*2 1  ,  désirant  finir  ses 
jours  dans  sa  patrie  ,  il  se  délermi- 
lia  enfin  à  se  rendre  en  Angleterre, 
quelques  risques  qu'il  pût  y  courir. 
Ses  amis  ayant  fait  connaître  son 
dessein  à  lord  Sunderlandetsollicilé 
sa  protection ,   celui  -  ci  l'accorda 
avec  beaucoup  de  générosité;  il  em- 
pêcha que  Leslie  ne  fût  inquiété,  et 
reçut   même  fort   mal  l'avis  qu'un 
membre  de  la  chambre  des  commu- 
nes  crut  devoir  lui  donner  de  son 
arrivée.  Leslie  se  retira  en  Irlande , 
où  il  mourut  le  i3  avril  1722.  Les 
écrivains  protestants  qui  ont  parlé 
de  lui ,  le  représentent  comme  un 
homme  rempli  de  fermeté  et  de  sa- 
voir.   Invariablement  attaché  à   la 
cause  de  son  roi  légitime  ,  il  ne  l'a- 
bandonna jamais  ,  partagea  tous  ses 
revers  ,  et  lui  fut  même  fidèle  après 
sa  mort ,  en  défendant  avec  chaleur 
les  intérêts  et  les  droits  de  son  fils. 
Il  a  publié  un  grand  nombre  d'ou- 
vrages sur  la  politique  jt  la  théolo- 
gie. Nous  indiquerons  seulement  :  I. 
Récits  ou  Répétitions  (  Reliearsals). 
Commencé  en  1 704  et  continué  pen- 
dant six  à  sept  ans ,  ce  fut  d'abord  un 
journal  hebdomadaire ,  qui  fut  publié 
ensuite  deux  fois   la  semaine  ,  en 
forme  de  dialogue  sur  les  affaires 
du  temps ,   IL    La.  bonne    vieille 
Cause  ,   ou  le  Mensonge  dans  la 
vérité,    contre    Vévêijue    Bumet , 
1 7 1  o.  Ce  pamphlet  irrita  tellement 
la  chambre  des  communes ,  qu'elle 


LES 

lança  un  warrant  contre  l'autcnr  ; 
r  <|ni  \o  força  «le  cpiiltor  l'Anglc- 
iro.  III.  Le  Serj)cnt  sous  l' herbe, 
i'M>7,  in-8'*.  Bayle  estimait  beau- 
u»p  cet  ouvrage,  dirige  contre  les 
lakers.  IV.  Etat  présent  du  qua- 
•  ris  me    en    cingle  terre  ,     1701. 
\  .  Essai  sur  le   droit   divin    des 
"fmes  ,    1700  ,   in-8^   VI.    Mé- 
hode  courte  et  aisée ,  pour  com- 
uttre  les  déiste^i,  iGt)4 ,  in-S'*.  Cet 
iivrage,  qui  passe  pour  ce  qu'il  a 
i  lit  de  mieux,  lui  a  ete  conteste'.  Le 
ilocteur  GIcigh  a  fait  de  grands  ef- 
iorts  pour  prouver  qu'il  appartenait 
à  Leslie,  quoiqu'il  fut  publie  parmi 
les  ouvrages  de  l'abbe  ae  Saint-Real, 
mort  en  1699..  Vil.  La  Vérité  du 
Christianisme  démontrée  dans  un 
dialogue  entre   un  chrétien   et   un 
déiste,  1711,  in-8«.  V III.  Méthode 
courte  et  aisée  pour  combattre  les 
Juifs,  \(S^Ç)\  lirëe  principalement 
du  Traite  de  Limborch ,  intitule'  : 
Arnica  collatio.  Le   P.  Houbigant 
l'a  traduite  en  français  sur  la  septième 
édition  avec  quelques  autres  ouvrages 
de  Leslie,  Paris,  1770,  in-S».  ÏX. 
Le  Socinianisme  discuté  y  1708.  X. 
Examen  de  l'accusation  de    soci- 
nianisme portée  contre  le  docteur 
Tillotson ,  par  un  vrai  fds  de  l'E- 
glise. XL  Du  Jugement  privé  et  de 
l'autorité  en  madère  de  foi;  et  plu- 
sieurs autres  écrits  contre  les  catho- 
liques. Tous  ces  ouvrages  ,  excepte' 
celui  contre  Tillotson ,  ont  ëlé  pu- 
blies par  Leslie   en  2  vol.   in-fol. 
1721.  D-z-s. 

LESPAGNANDEL  (  Mathieu  ). 

Fqy.    EsPAr.NAIVDF.L 

LESPARRE  (  AnDRÉ  de  Foix, 
^^igneur  de  ),  frère  cadet  de  Lautrec 
(  du  maréchal  de  Foix,  fut  charge', 
en  i5'2i,  de  repousser  les  Espagnols 
qui  s'étaient  empares  de  la  Navarre, 
ti  était,  dit  Robcrtson ,   un  jeune 


LES  100 

homme  sans  talent  et  sans  expérien- 
ce ,  et  qui  n'avait  de  litre  pour  ob- 
tenir cette  distinction  importante 
qued'ctre  allié  de  Henri  d'Albret,et 
surtout  d'être  frère  de  la  comtesse  de 
Chateaubriand,  maîtresse  de  Fran- 
çois I*^''.  Il  se  rendit  maître  de  Saint- 
Jeau-Pied-de-Port,  et  vint  assiéger  la 
citadelle  de  Pampelune ,  la  seule 
place  de  toute  la  Navarre ,  qui  tînt 
encore  pour  les  Espagnols.  Ignace 
de  Loyola ,  devenu  depuis  si  célèbre, 
faisait  partie  de  la  garnison,  et  ani- 
mait seul  le  courage  des  soldats  ; 
mais  ayant  été  blessé  d'un  coup  de 
pierre,  cet  accident,  si  peu  intéres- 
sant en  apparence ,  détermiiiaie  gou- 
verneur a  capituler.  Lesprirre ,  ne 
pouvant  faire  sid)sister  ses  lrouj)es 
dans  un  pays  que  les  Espagnols 
avaient  ruiné  en  l'abandonnant,  li- 
cencia une  partie  de  ses  soldais,  et 
avec  l'autre  s'avança  dans  la  Castil- 
le ,  passa  l'Ebre ,  et  vint  mettre  le 
siège  devant  Logrono.  Celte  petite 
ville  lui  opposa  une  résistance  opi- 
niâtre ;  et  les  Castillans  divisés  en 
deux  partis ,  mais  réunis  ]iar  le  dan- 
ger commun  ,  se  hâtèrent  de  la  se- 
courir. Lesparre,  forcé  de  rétrcgra- 
der,  rentra  dans  la  Navarre,  espé- 
rant y  être  joint  par  de  nouvelles 
levées.  Cependant ,  pressé  par  les 
Castillans  ,  et  ne  voulant  pas  s'en- 
fermer dans  Pampelune ,  il  résolut 
de  les  attendre  et  de  les  combattre, 
quoiqu'ils  fussent  beaucoup  plus  nom- 
breux. Il  rangea  donc  sa  petite  trou- 
pe dans  le  meilleur  ordre ,  et  donra 
le  signal  de  l'attaque.  Les  cavaliers 
castillans  furent  enfoncés  par  la 
gendarmerie  française  :  mais  l'infan- 
terie plia; et  Lesparre,  occupé  de  la 
rallier,  fut  enveloppé  par  l'ennemi. 
Il  reçut  sur  son  casque  tant  de  coup* 
de  sabre  qu'il  en  eut  le  crâne  fra- 
cassé, et  perdit  pour  loujoiurs  l'uM.- 


3oo 


LES 


gc  des  yeux.  Il  fut  renvoyé'  en  Fran- 
ce ,  où  il  mourut  en  1 547.    W-s. 
LESPINASSE  (Mii^  de).  Foy. 

ESPINASSE. 

LESPINE    DE    GRAINVILLE. 

V.  Gr  AINVILLE  ,  t.  XVIII ,  p.  27  1 . 

LESSART  (Antoine  de  Valdec 

DE  ) ,  ministre  des  affaires  e'trangè- 
tes  de  France,  dans  les  années  1 791 
et  1 79'^  ,  né  en  1 74^ ,  dans  une  fa- 
mille peu  connue  de  la  province  de 
Guieune,  devint  rhëritier  du  pré- 
sident de  Gasq ,  magistrat  renom- 
me' du  parlement  de  Bordeaux,  dont 
on  a  prétendu  qu'il  était  le  fils. 
Etant  venu  à  Paris  dans  sa  jeunesse  , 
il  fut  admis  dans  la  société  de  Nec- 
ker  ,  qui  lui  reconnut  quelque  habi- 
leté ,  et  en  fit  le  confident  de  sa  po- 
litique. Pourvu  en  1 768  d'une  charge 
de  maître  des  requêtes  ,  De  Lessart 
lut,  en  cette  qualité,  l'un  des  com- 
missaires conciliateurs,  dans  les  se- 
condes conférences ,  que  Necker 
imagina,  anrès  l'inutilité  des  premiè- 
res ,  pour  rapprocher  les  trois  or- 
dres des  états-généraux ,  sur  le  point 
de  se  dissoudre.  Ces  commissaires  au 
lieude  concilier  les  esprits,  ne  firent 
que  les  aigrir.  Du  reste  on  ne  parla 
point  de  Lessart  jusqu'au  mois  de 
décembre  1790.  Alors  il  remplaça 
le  conseiller  d'état  Lambert  au  con- 
trôle général  des  finances  ;  mais  il 
n'occupa  cette  place  qu'un  mois,  et 
passa  au  ministère  de  l'intérieur  , 
qu'il  conserva  jusqu'au  3o  novembre 
1791.  L'assemblée  législative  ve- 
nait de  succéder  à  la  constituante  ; 
et  le  parti  républicain  ,  qui  avait  la 
plus  grande  influence ,  dénonçait 
avec  fureur  et  le  ministre  de  la 
guerre  et  celui  des  affaires  étran- 
gères ,  qui,  effrayés  de  ces  attaques  , 
donnèrent  leur  démission.  C'est  ainsi 
que  De  Lessart  fut  chargé  du  porle- 
feuille  des  affaires  étrangères ,  que 


LES 

quittait  le  comte  de  Montraorin. 
Dès-lors  le  parti  républicain  avait 
résolu  la  guerre  :  par  ses  intrigues  et 
par  ses  cris  il  forçait  les  ministres 
à  délibérer  sur  cet  objet  ;  et,  comme 
il  arrive  presque  toujours  dans  les 
délibérations  d'une  grande  impor- 
tance,  la  division  s'établit  parmi 
eux.  Le  comte  de  Narbonne ,  qui 
avait  le  département  de  la  guerre 
(  Voy.  Narbonne  ) ,  insistait  pour 
qu'elle  fiât  déclarée  ;  mais  De  Lessart, 
par  un  sincère  attachement  pour  le 
roi ,  à  qui  elle  était  odieuse  ,  la  re- 
poussait de  toutes  ses  forces.  Louis 
XVI  voulant  rétablir  l'union  dans 
son  ministère  et  la  paix  dans  ses 
états ,  renvoya  le  comte  de  Narbon- 
ne ;  mais  cette  décision,  loin  d'éloi- 
gner la  guerre ,  ne  la  rendit  que  plus 
instante  :  les  ré])ublicains  furieux  fi- 
rent décréter  que  le  ministre  dis- 
gracié emportait  les  regrets  de  la 
nation.  La  perle  de  Lessart  fut  ju- 
rée ,  et  la  déclaration  de  guerre  ar- 
rêtée. Tous  les  démagogues  se  liguè- 
rent contre  le  malheureux  ministre: 
on  répandit  que  les  pièces  diplomati- 
ques qui  attestaient  que  l'empereur 
Léopold  desirait  la  paix,  étaient  sup- 
posées  ;  et  un  comité  de  l'assemblée 
qui  prenait  la  dénomination  de  Di- 
plomatique, fut  chargé  d'examiner 
ces  pièces ,  sur  lesquelles  Biissot  fît 
un  rapport.  Ce  député  fut ,  dès  son 
début ,  l'accusateur  du  pacifique  De 
Lessart ,  que  Ton  accabla  d'injures 
dans  toute  la  discussion.  M.  Becqiiey 
seul  eut  le  courage  de  le  défendre  j 
mais  il  ne  put  empêcher  le  décret 
d'accusation  ,  qui  fut  prononcé  le 
10  mars  179*2.  A  peine  cet  ar- 
rêt était-il  rendu ,  que  de  nombreux 
rassemblements  entourèrent  l'hôtel 
du  ministère,  proférant  les  cris  et  les 
menaces  les  plus  sinistres.  Lessart 
était  absent  :  dès  qu'il  fut  ijistruit 


TES 

ilo  son  sort ,  il  vint  se  livrer  aux 
lul.irmcs  envoyés  pour  le  saisir. 
1  putant  pour  Orlc'.ins,  on  sic- 
lit  la  haule-cour  (pii  devait  le  ju- 
r,  il  adressa  des  plaintes  touclian- 
N  et  respeetneuses  à  rassemblée 
ir  la  précipitation  qu'on  avait  mise 
le  derrclcr  d'accusation.   Après 

ijuelques  mois  de  détention  ,  il  fut 

assassiuc'  à  Versailles,  le  9  septeni- 
rc  179*2,  avec  les  autres  pri- 
(uiiers  de  la  haute-cour.  (  Voy, 

inUSSAC.  )  B-u. 

LESSER  (Frederic-Christian  ), 
tliëologien  et  naturaliste,   membre 
tic  l'académie  des  sciences  de  Berlin, 
t  delà  société  allemande  de  Gottiu- 
^ue,  naquit  le  9.9  mai  1692  ,  à  Nord- 
hausen  r'son  père,  Philippe  Jacob 
I.esser ,  était  dans  cette  ville  diacre 
de  l'église  do  St.  -  Nicolas.  Frédéric 
l.esser  montra,  dès  son  plus  jeune 
j^c,  une  inclination  pronon^c'e  pour 
1  liistoirc  naturelle;  et  n'étant  encore 
qu'écolier  ,  il  rassembla  une  collec- 
tion assez  considérable  de  pierres , 
de  plantes  et  d'insectes.   Il  était  à 
l'université  de  Halle  ,  où  il  étudiait 
la  théologie,  la  médecine  et  l'histoire 
naturelle ,  lorqu'il  apprit ,  en  1 7 1 21 , 
qu'un  incendie  avait  consumé  à  Nord- 
tausen  ,   le  21  août,  670  maisons, 
parmi  lesquelles  se  trouvait  celle  de 
son  père.  Toute  la  collection  d'his- 
toire naturelle  qu'il  avait  été  plu- 
sieurs années   à  former  ,  fut  aussi 
consumée  par  les  flammes  ;  et  celte 
perte  ne  lui  fut  pas  moins  sensible 
■  juc  celle  de  sa  fortune.  Il  en  fut  pcn- 
lant  quelque  temps  accablé.  Gepeu- 
ilant  il  se  rendit  à  Leipzig,  et  ensuite 
.1  Berlin  pom- se  procnrerdes moyens 
d'existence  ;  mais  il  fut  rappelé  dans 
sa  ville  natale  par  son  p  re  ,  qui  , 
devenu  infirme  ,  avait  besoin  de  lui 
pour  l'aider  dans  la  prédication.  Lui- 
aièmc  fut  nommé,  ca  1 7 16 ,  desser- 


LES 


3di 


vantdelVglisc  de  Fraucnberc.  Lors- 
((lUî  Lesser  s'adonna  Ma  prédication, 
une  maladie  de  foie  ,  qu'il  avait  ap- 
portée en  naissant  ,  fil  des  progrès 
rapides,  et  résista  à  tous  les  ciVorts  de 
la  médecine:  il  fut  obligé  de  la  com- 
battre par  toute  sorte  d'exercices  vio- 
lents. Son   ardeur   pour  l'étude  se 
trouva  contrariée  par  la  nécessité  où 
il  était  de  sacrifier  un  tcmi)s  considé- 
rable à  sa  santé.  Cependant  il  faisait 
servir  ses  promenades  aux  progrès 
de  l'histoire  naturelle.   Il  se  forma 
une  belle  collection  et  une  bibliothè- 
que curieuse ,  surtout  par  les  livres 
rares  imprimés  peu  de  temps  après 
la    réformation.    Bientôt    il   se  fit 
connaître  par  son  savoir  et  son  éru- 
dition ;  et  déjà ,  respecté  par   ses 
vertus,   il   fut   nommé  pasteur  de 
l'église  de  Saint-Martin  en   1789, 
puis  ,  en  1741  ,  de  celle  de  Saint- 
Jacques  ,  et,  en  1743  ,  administra- 
teur de  l'hospice  des  Orphelin».  II 
parvint  à  faire  rebâtir  à  neuf  l'église 
de  Saint  -  Jacques  ;  et  dans  un  petit 
écrit,  qu'il  publia  en  174*2,  il   fixa 
l'attention  de  ses  compatriotes  sur  la 
nécessité  des  réunions  chrétiennes  , 
et  sur  les  avantages  qu'il  y  avait  à 
donner  de  la  pompe  et  de  la  dignité' 
au  culte  public.  Il  mourut  le  1 7  sept. 
1754.  C'était  un  homme  instruit  dans 
rhistoireetles  antiquités  de  son  pays; 
mais  il  est  plus  connu  comme  natu- 
raliste. Il  a  surtout  le  mérite  d'avoir 
su  faire  toiuner  l'histoire  n  <turelle 
au  profit  de  l'économie  domestique 
et  de  l'utilité  pratique.  Il  a  aussi,  par 
des  compilations  savantes, contribué 
à  répandre  le  goût  de  cette  science 
et  à  la  mettre  à  la  portée  de  tous 
les  esprits.  Ses  principaux  ouvrages , 
tous  écrits  en  allemand  ou  en  la- 
tin ,  sont  :   I.   Observations  sur  la 
cax'erne  de  Baiimann ,  Nordhausen , 
1740  ,  iu-8''.  j  4^«  €<lil.  augmemée , 


3oî 


LES 


1745.  II.  Lithothéologie  ou  Théo- 
lome  des  Pierres,  etc.  publiée  d'a- 
bord en  1 7  35;  la  dernière  édition  est 
de  175 1.  iïl.  De  sapientid  ,  omni^ 
poteniid  etprovidenliddivindex  par'- 
tibus  insectorum  cognoscendd,  epis- 
tolaris  Disqulsitio  ad  Alh.  Seham, 
Nordhauscn,  1735  ,  in-40.  Cet  ou- 
vi*age  était,  en  quelque  sorte,  l'avant- 
coureur  du  suivant ,  qui  est  le  meil- 
leur et  le  plus  connu  de  ceux  que 
l'auteur  a  publiés.IY.  Théologie  des 
insectes.  Il  y  eu  a  eu  trois  éditions 
allemandes,  à  Francfort  et  à  Leipzig; 
îa   première  est   de  l'an   1738,  la 
dernière,  de    1757.  Il  en  fut  pu- 
blié   une    traduction    française    à 
la  Haye,    174'^,   îî   vol.  in  -  8».  , 
avec  des  notes  de  Lyonnet.  Uiie  tra- 
duction italienne  parut  à  Venise  en 
1751.  (  ^of.  Lyonnet.  )  Myliusa 
traduit  les  observations  de  Lyonnet, 
dans  la  dernière  édition  allemande, 
et  y  en  a  joint  de  nouvelles.  C'est 
donc  cette  édition  qu'on  doit  préfé- 
rer. Le  plan  de  ce  livre  est  excellent, 
et   pouvait  admettre    une   histoire 
abrégée, mais  complète  des  insectes, 
sous  une  forme  savante  et  plidoso- 
pbique.  Mais  la  science  entomologi- 
que  était  trop  peu  avancée  du  temps 
de  Lcsser  pour  l'exécution  d'un  tel 
plan  ;   et  l'art  de  décrire  avec  pré- 
cision,  de  narrer   avec    élégance, 
ne    se   trouve    pas  dans   son    ou- 
vrage.  Il  fallait   une   plume    plus 
exercée  que  celle   de    cet  auteur  , 
pour  peindre  avec  des  couleurs  dignes 
du  suîet,les  formes  si  variées  de  ces 
petits  animaux ,  leurs  éclatantes  pa- 
rures ,  leurs  morts  et  leurs  résurrec- 
tions apparentes  ,  leurs  métamor- 
phoses brillantes  et  singulières  ,  l'é- 
tonnante perfection  de  leur  organi- 
sation ,  la  finesse  extrême  de  quel- 
ques-uns de  leurs  sens  ,  la  rapidité 
kiexprimable  de  leurs  mouvements , 


LES 

leurs  amours  et  leurs  accouplements 
si  divers  ,  leur  dextérité  ,  leur  sa- 
vante industrie  ,  leur  tendre  sollici- 
tude pour  la  conservation  de  leur 
postérité,  etc.  Il  fallait  des  vues 
plus  vastes  ,  et  une  connaissance 
plus  aprofondie  de  ce  beau  sujet, 
pour  donner  une  idée  ,  même  im- 
parfaite ,  de  la  place  que  tien-  1 
nent  dans  l'ordre  de  la  création 
ces  innombrables  animalcules  ,  qui, 
malgré  leur  apparente  faiblesse , 
sont  les  plus  puissants  agents  de  des- 
truction et  de  rénovation  ,•  qui  dévo- 
rent nos  fruits ,  nos  moissons ,  nos 
vêtements,  et  se  nourrissent  de  notre 
propre  substance  ;  qui  nous  four- 
nissent le  miel ,  la  cire ,  et  la  soie 
brillante;  qui  prêtent  à  la  teinture  sa  > 
plus  éclatante  couleur  ,  et  à  la  me-' 
decine  la  vertu  corrosivQ  de  leurs 
cadavres  desséchés  ;  qui  nous  entou- 
rent et  s'agitent  perpétuellement  au- 
tour de  nous  ;  et  qui  enfin ,  malgré 
nous  ,,  attirent  ou  distraient  notre 
attention  dans  tous  les  lieux  de  la 
terre  et  dans  tous  les  instants  du  jour. 

V.  Testaceo'theologia.  (  Théologie 
des  testacés  ). —  Il  y  a  eu  trois  édi- 
tions allemandes  de  cet  ouvrage  :  la 
dernière,  Francfort  et  Leipzig, in  8". 
1770^  renferme  probablement  aussi 
la  traductiondes  rejnarques  deLyon- 
net ,  qui  accompagnent  la  traduction 
française ,  Paris ,  1 748,  !2  vol.  in-S^. 

VI.  Tjpographia  jubilans ,  Leipzig , 
i74o,m-4".  C'est  une  courte  histoire 
de  l'imprimerie.  VIL  Sur  quelques 
médailles  frappées  à  lamé  moire  de 
Luther,  Leipzig ,  1 739 ,  in-80.  VIII. 
Essai  historique  sur  les  monnoies 
deSchwarzburg,eXc,  1741,  in-8".IX. 
Description  historique  de  la  princi- 
pauté de  Nordhausen  Jjei^zi^,  l'J^O, 
in-4*^.  Cet  ouvrage  parut  sans  nom 
d'auteur.  X .  Brèves  observationes  de 
Sigillis  quibusdam  j  Nordhauseu  , 


1 7*58  ;dans  les  Jctaenidit.  1 788,  J. 

4(»^  \  \l.  Description  d'un  inarbre 

vtHjuilUer  rèrrnunt'nl  découvert  près 

■  n  château  de  Strausherfr  dans  la 

incipautè  de  Schwaiizburg-  l'u- 

Istadl  ,  etc.,  Nordhansen,  iii-4*'. 
1  ;  5'^.  XII.  Epistola  ad  D.  F.  Haus- 
matuim  de  lajiidihus  curiosis  circa 
/Yordhusam  ejusque  canjinia  ijwe- 
mri  solitis  ,  il)i(l.  179.7,  m-^".  XIII. 
Mélanges  d'histoire  naturelle  et  de 
hysico-thênlogie,  Leipzig  cl  Nord- 
auscn,  1754^1  1770,  in-8".  XIV. 
Description  des  curiosités  naturelles 
ile  la  principauté  de  Budolstadt,  etc. 
Nordhauseii ,  iii-8'^. ,  1754.  (  Voyez 
la  Notice  de  sa  vie  et  de  ses  écrits  , 
publiée  par  son  fils  ,  Jcan-Pliilippe- 
r  rëderic  Lesser  ,  pasteur  de  l'église 
de  St.-Blaise  à  Nordhausen.)  W-r. 

LESSING  (  Goïthold-Ephkaïm), 
célèbre  litte'rateur  allemand  ,  ne 
en  janvier  I7'.i9,à  Kamcnz ,  petite 
Tille  de  Lusace ,  a  laisse' ,  dans  plu- 
lieurs  parties ,  des  préceptes  et  des 
modèles,  et  peut  être  regarde  comme 
celui  des  écrivains  de  cette  époque 
qui  a  rendu  le  plus  de  services  à  la 
littérature  de  son  pays.  Il  n'eut, 
dans  son  enfance,  d'autre  guide  que 
ion  père ,  ministre  lutbcrien ,  et  sa- 
vant estimabl«k  Mais ,  à  l'âge  de  1 1 
jins,  il  fut  admis  dans  l'école  pu- 
blique de  Meissen,  où  il  reçut  une 
éducation  presque  gratuite.  Il  s'y 
livra  à  l'étude  des  langues  an- 
ciennes ,  des  |>rinci pales  langues 
modernes,  et  à  celle  de  la  pbilo- 
iophie  et  des  mathématiques  ,  avec 
ime  telle  ardeur ,  qu'il  y  consacrait 
jouveut  jusqu'aux  heures  de  re'crca- 
tion  et  de  repos.  Il  alla  ,  en  1746  , 
à  Leipzig,  pour  y  achever  ses  études. 
Tourmenté  par  le  désir  d'apprendre, 
juais  mécontent,  pour  le  fond  et  la 
ft)rme,  des  cours  de  presque  toutes 
Us  scicucM ,  f^u'il  OiMiaya  »ucco6sivo- 


LES 


3oî 


ment,  il  dut  ses  rapides  progrès, 
dans  la  plupart  des  coimaissancii 
humaines,  beaucoup  moins  à  l'uni- 
versité qu'à  ses  études  particulières  , 
à  ses  liaisons  avec  J.  Ad.  Schlcgel , 
Mylius,Zarharia;,et  surtout  Weissr, 
enfin  aux  conférences  dirigées  par  le 
célèbre  Ka^stner,  qui  contribuaient  à 
développer  ,  dans  plusieurs  él(;ves  , 
le  germe  de   talents  distingués.  Un 
penchant  secret  l'entraïuait  vers  le 
théâtre  ;  et  il  acquit  dans  le  com- 
merce des  comédiens  qui  étaient  à 
Leipzig,  la  connaissance  de  plusieurs 
détails  matériels  de  leur  art ,  qu'un 
auteur  dramatique  ne  peut  ignorer 
sans  nuire  au  succès  de  ses  compo- 
sitions.  C'est  dans  une  feuille  heb- 
domadaire, publiée  par  M.  Agricola, 
que  parurent  les  premiers  essais  de 
Lessing,  dont  quelques-uns  seule- 
ment ,  et  probablement   avec   des 
changements,  ont  été  conservés  dans 
l'édition  complète  de  ses  œuvres.  La 
première  pièce  de  théâtre  qui  fut 
imprimée  sous  son  nom ,  est  le  Jeuru 
Savant.  Le  succès  qu'elle  obtint  à  la 
représentation ,  venant  à  l'appui  de 
son  goût  naturel  et  des  encourage- 
ments de  Weisse,  il  s'abandonna 
presque  exclusivement  à  cette  partie, 
et  étudia  surtout  la  théorie  de  l'art 
dramatique.   Un  premier  se'jour   à 
Berlin  fut  marqué  par  la  publication 
d'un  ouvrageintitulé:  Mémoirespcur 
servir  à  Vhistoire  et  aux  progrès  d:i 
tliédtre.  (Beytraege  zur Historié  und 
Aufnahmc  des  TJieaters.  )  Il  n*cn 
parut  que  quatre  numéros,  qui  Grent 
quelque  sensation  ;  et  ils  furent  sui- 
vis des  Bagatelles  (  Kleinigkeiten  ) 
titre  modeste,  qui  cachait  plusieurs 
compositions    remarquables.    C'est 
pendant  son  séjour  à  Wittemberg , 
où  il  fut  reçu  maître-ès-arts,  que  com- 
mença sa  querelle  avec  Lange,  au 
sujet  de  la  traduction  d'Horace  dou- 


3o4  LÏ^S 

née  par  celui-ci.  Lessin^  eut  presque 
toujours  raison  pour  le  fond  et  même 
pour  la  forme,  car  ses  sarcasmes 
étaient  excuse's  par  les  grossièretés  de 
Lange;  et  il  annonçait,  dans  ses  cri- 
tiques, d'excellentes  études  classi- 
ques et  un  grand  talent  pour  la 
discussion.  Il  se  dégoùla  bientôt  de 
Wittemberg,  et  alla  de  nouveau  ha- 
biter Berlin.  C'est  là  que  s'établit 
entre  lui,  Muses  Mendelssolin  et  le 
libraire  Nicolaï  ,  une  liaison  qui 
contribua  puissamment  à  donner  à 
laliltérature  allemande  une  meilleure 
direction,  sous  le  rapport  du  goût  et 
de  la  critique.  Mais  Lcssing,  privé 
de  la  souplesse  nécessaire  pour  sol- 
liciter et  pour  parvenir  ,  n'avait 
presque  d'autres  ressources  que  les 
produits  encore  bornés  de  sa  plu- 
me. Il  espérait  en  trouver  à  Leip- 
zig. En  elïét^  à  peine  y  était-il  ren- 
du, qu'il  en  partit  pour  accompagner 
dans  ses  voyages  le  fds  d'un  riche 
négociant.  Après  avoir  visité  ensem- 
ble la  Basse-Saxe ,  et  une  partie  de 
la  Hollande,  ils  se  proposaient  de 
parcourir  le  reste  de  ce  pays ,  et  de 
passer  en  Angleterre ,  lorsque  l'in- 
vasion de  la  Saxe ,  par  Frédéric  II , 
et  l'occupation  de  Leipzig  par  les 
troupes  prussiennes ,  forcèrent  nos 
voyageurs  à  revenir  dans  cette  ville. 
La  fortune  dédommagea  Lessing  en 
lui  faisant  retrouver  Kleist,  qu'il 
avait  déjà  vu  à  Berlin.  Il  devint  ami 
de  ce  grand  poète,  dont  l'imagina- 
tion ,  la  sensibilité  et  l'expérience 
lui  furent  très-utiles ,  et  à  la  généro- 
sité duquel  il  dut  aussi  un  appui , 
dont  il  se  montra  fort  reconnaissant. 
Après  le  départ  de  Kleist ,  Lessing 
alla  pour  la  troisième  fois  à  Ber- 
lin ,  où  il  retrouva  Mendelssolin, 
Nicolaï ,  Ramier  et  ses  autres  amis. 
Moins  occupé  du  théâtre ,  il  publia, 
sur  d'autres  objets ,  quelques  écrits 


LES 

importants  :  I.  Ses  fables  en  prose, 
et  sa  Théorie  de  l'apologue.  II.  Une 
édition  des  épigramracs  de  Logau , 
de  concert  avec  Ramier.  III.  La 
Fie  de  Sophocle.  IV.  Enfin  les  Let- 
tres sur  la  littérature  (  Litteratur- 
hriefe.  )  Ces  ouvrages  ,  les  Lettres 
sur  la  littérature  du  jour  (  Briefe , 
die  neueste  Litteratur  hêtre fjend  ); 
la  Bibliothèque  des  béliers  lettres 
et  la  Bibliothèque  allemande  univer- 
selle (  Bibliothek  der  schœnen  Wis- 
senschaften  et  Allgemeine  deut- 
sche  Bibliothek  (  Yoy.  Nicolaï  ), 
pour  lesquelles  il  ne  fournit  qu'une 
critique  insérée  dans  la  première  , 
mais  dont  il  partagea  la  direction  , 
pendant  plusieurs  années ,  avec  zèle  et 
discernement  ;  son  Théâtre  et  celui 
de  Weisse  -,  enfin ,  ses  Apologies  elles- 
mêmes  (  Rettungen  )|,  qui  respirent 
un  grand  esprit  de  justice ,  et  ren- 
ferment d'excellentes  observations , 
quoique  mêlées  parfois  ,  comme 
celles  d'Horace  ,  de  raisonnements 
plus  spécieux  que  solides  ;  tous  ces 
ouvrages  ,  disons -nous  ,  et  ceux  d'un 
petit  nombre  d'autres  auteurs ,  opé- 
rèrent la  renaissance  du  goût  na- 
tional en  Allemagne.  La  nomination 
de  Lessing  à  la  place  de  membre 
honoraire  de  l'académie  des  scien- 
ces de  Berlin,  en  1760,  fut  la  ré- 
compense de  SQS  travaux.  Lors- 
qu'il fit  paraître  ses  premiers  ou- 
vrages ,  la  littérature  allemande  était 
encore  au  berceau  sous  plusieurs 
rapports.  Depuis  Opitz ,  Logau  et 
leurs  contemporains,  elle  avait  pro- 
duit peu  d'ouvrages  remarquables. 
Les  Alpes  de  Haller,  le  Messie  de 
Klopstock  ,  le  Printemps  de  Kleist, 
avaient  jeté  lui  grand  éclat  dans  l'é- 
popée; et  dans  quelques  genres  légers, 
Lichtwehr  ,  Hagedorn  ,  Gellert  ,  le 
même  Kleist,  Huz,  Zachariœ,  Gers- 
tenberg ,  et  autres ,  avaient  rempli 


quelques  lacunes.  Mais  tout  cela  ne 
(    lurniait  point  une  lirtoratiirp.  La  pré- 
dilection  exclusive  (le  Fredcric  II 
j   pour  celle  des  Français,  avait  bcau- 
•   coup  retarde  les  progrès  de  la  langue 
aileniandc.  Goltsclied  avait,  il  est 
-""H  ,  rendu  de  très-grands  services 
faisant  revivre  les  bonnes  doctri- 
nes ,  et   en  recommandant    rchide 
I    des  modèles  des  anciens  et  dçs  Fran- 
iis.   Mais,  trop  exclusif  dans  ses 
i*s,  il  n'avait  point  senti  cetpi'exi- 
u<'ait  le  génie  particulier  de  sa  nation, 
«Il  voulant,  pour  ainsi  dire,  l'asservir 
la  littérature  française.  Celle  des 
iiglais,  au  contraire,  dont  le  génie  à 
iicaucoup  plus  de  rapport  avec  l'ai- 
' -mande,  était  si  peu  connue  ,  que 
xistencc  de  Shakespeare  fut  pres- 
■  jic  rcvëlëe  au  public  par  la  traduc- 
tion deWielana,etpar  les  éloges  que 
fit  Lessing  de  cette  traduction.  De'- 
]d  Bodmer  et  Breitiuger  avaient  at- 
-|ue'  sans  ménagement  Gotlsched 
son  école  :  mais  les  vues  et  les 
juoyens   de   l'école    suisse    e'iaient 
trop  bornés  pour  opérer  une  réfor- 
me. Lessing  acheva  ce  qu'ils  avaient 
'  bauché.  Ce  fut  sur  le  théâtre  que 
Il  influence  se  fit  d'abord  sentir. 
Un  a  peine  à  concevoir ,  il  est  vrai , 
comment  ses  premières  pièces  ont 
pu  obtenir  beaucoup  de  succès  ,  et 
même  les  éloges  de  plusieurs  q^ili- 
ques   allemands  de  nos  jours.    Le 
Jeune  Savant ,  les  Juifs ,  le  Miso- 
yne  { V Ennemi  des  femmes],  VEs- 
rit-J'ort ,  sont  les  essais  d'un  jeune 
jmme  de  20  et  2  Jt  ans ,  sortant  des 
mes  de   l'école,   et  étranger  à  la 
liipart  des  usages  et  des  idées  de 
I  société.  Il  est  difficile  de  réunir 
'lis  de   plaisanteries  ignobles  ,   de 
latitudes  et  d'absurdités;   et  nous 
••  pensons  pas  qu'aucun  poète  dra- 
:atique  célèbre  ait  eu  un  deTjutaus- 
i  médiocre.  Ce  jugement  est,  au 

XXJV. 


LES  3o5 

fond  ,  îc  même  que  Lessing  (  Dra- 
mat.  tom.   11,  pag.  33b-t)  )  porte 
sur    les    jeunes    auteurs    comiques 
de  la  même  époque.   Qnoi  qu'il  eu 
soit  ,  on  y    rencontrait   des  traits 
ingénieux  ;  le    dialogue  était   soii- 
vent  assez  naturel;  le  style  même 
plus  correct   que    celui  auquel   on 
était   accoutumé;  qualités   qui  tou- 
tefois   n'avaient   qu'un    mérite   re- 
latif :  enfin,  dans  ses  peintures  de 
mœurs,  si  imparfaites  qu'elles  fussent, 
on  retrouvait  celles    de    l'Allema- 
gne. Le   Trésor,  imité  dcPlaute, 
est  déjà   sans  doute  à  une  grande 
dislance  des  essais  ;  Lessing  s'était 
appuyé  sur  un  modèle.  On  aperçoit 
de  grands  progrès   dans  Aliss  Sa^ 
rah  Samson ,    la    première  tragë- 
gie  bourgeoise  allemande  que  Ton 
connaisse,  et  qui  parut  en  1755.  Il 
y  a  du  pathétique  ,  de  la  connais- 
sance du  monde  ;  et  sous  plusieurs 
rapports  on  y  trouve  le  g«rme  d'E" 
milia    Galotti.  Mais  beaucoup  de 
longueurs,  et  des  invraisemblances 
choquantes  ,  l'ont  reléguée  avec  rai- 
son parmi  les  pièces  du  second  or- 
dre. Fhilutas ,  tragédie  en  un  acte 
et  en  prose,  parut  en  17 59.  C'est 
un  essai  qu'il  est  difficile  de  juger 
diaprés  une  théorie  dramatique  quel- 
conque ,  mais  auquel  des  sentiments 
héroïques  ,  et  des  beautés  de  style  , 
peu^  eut  faire  pardonner  la  nouveau- 
té du  genre  et  quelques  défauts.  Les 
succès  de  Lessing,  satisfaisants  pour 
son  amour-propre ,  n'avaient  pu  suf- 
fire qu'aux  Desoins  du  moment,  sans 
assurer  ceux  de  l'avenir.  D'ailleurs  , 
le  repos-  était  également  nécessaire 
à  son  corps  et  a   son  esprit.   Ces 
raisons  le  déterminèrent  à  accep- 
ter la  place  de  secrétaire  du  gou- 
vernement auprès  du   général  Tau- 
enzieu,  qui    résidait  à  Breslau;  et 
il  partit,  sans  eu  avoir  rien  dit  à 
uo 


3o6  LES 

ses  amis  les  plus  intimes.   Il  ne  né- 
gligea point   toutefois   ses  travaux 
littéraires  ;  et   il  fit   même,   dans 
la    bibliothèque    de    Breslau  ,    la 
découverte  d'un  manuscrit  des  poé- 
sies de  Scultetus  ,  poète  du  dix-sep- 
tième siècle ,    qu'il    fit  imprimer. 
Mais   ses  amis  furent  étrangement 
surpris  en  apprenant  que  sa  princi- 
pale occupation  e'tait  le  jeu,  dont  il 
ne  faisait  rien  moins  qu'un  délasse- 
ment ,  puisqu'il  s'y  livrait  avec  une 
telle  passion ,  que  son  visage  e'tait 
quelquefois  tout  en  sueur.   Ce   que 
l'on  conçoit    encore  moins ,   c'est 
la  manière  dont  il  justifia  cet  égare- 
ment, auprès  d'un  de  ses  amis,  qui 
lui  témoignait  la  crainte  que  sa  santé 
en  fût  altérée  :  celte  passion ,  disait- 
il  ,  n'était  que  factice,  et  il  l'excitait  à 
dessein ,  afin  de  mettre  les  humeurs 
en  mouvement ,  et  se  délivrer  par-là 
des  angoisses  physiques  qu'il  éprou- 
vait souvent.  Tant  il  est  vrai  qu'il  n'y 
a  point  d'absurdité  dont  l'esprit  le 
plus  droit  se  puisse  garantir  !  Soit 
inconstance,  soit  plutôt  désir  de  re- 
couvrer son  indépendance ,  et  de  se 
livrer  avec  plus  de  suite  à  ses  travaux 
littéraires ,  Lessing  quitta  Breslau  en 
1765  ,  et  revint  à  Berlin.  Il  y  avait 
cinq  ans  qu'il  n'avait  rien  publié  , 
lorsqu'il  fit  paraître  son  Laocoon,  ou 
Des  limites  respectives  de  la  Pein- 
ture et  de  la  Poésie.  Ce  mot  de 
peinture  n'est  ici  qu'un  terme  géné- 
rique pour  désigner  les  arts  d'imita- 
lion ,  et  par  conséquent,  la  sculpture, 
aussi  bien  que  la  peinture.  Cet  ou- 
vrage n'est  point ,   comme  le  titre 
•  semble  le  promettre ,  une  théorie  de 
la  poésie  et  des  arts,  mais  simplement 
un  recueil  d'observations  et  de  dis- 
sertations sur  ces  deux  objets ,  et  sur 
leurs  différences  essentielles,  sous  le 
double  rapport dubut  et  des  moyens 
iVeX€cution,  Oay  trouve  réunis,  dans. 


LES 

un  degré  éminent,  les  nombreuses 

et  diflérentes  qualités  de  Lessing;  et 

il  plaça   son  auteur  sur  la  ligne  de 

ses  contemporains  les  plus  distingués 

dans  la  critique  de  la  théorie  des 

beaux-arts.  La  littérature  française 

est  redevable  à  M.  Vanderbourg  d'une 

excellente  traduction  du  Laocoon  , 

publiée  en  1S02.  Nous  placerons  ici 

un  Traité,  qui  ne  parut  que  quatre 

ans  plus  tard  y  mais  qui  est ,  après 

le  Laocoon j  le  plus  remarquable  de 

ses  écrits  sur  la  théorie  du  beau  dans 

les  arts.  Il  est  intitulé ,  Des  images 

de  la  mort  chez  les  anciens  (  Pf^ie  die 

Alten  den  Tod  gebildet  ).  Lessing 

cherche  entre  autres  à  prouver  que  le^ 

anciens  n'ont  jamais  représenté  h 

mort  sous  des  formes  eflfrayantcs ,  e 

notammentsouscelle  d'un  squelète.lj 

attribue  cette  idée  pénible  et  les  lei 

reurs  de  la  mort  à  une  fausse  intec 

prétalion  de  la  religion  chrétiennt 

»  En  effet,  dit-il,  cette  même  rçligio 

»  nous  enseigne  que  la  mort  du  just 

»  est  douce...  L'Ecriture  parle  elle 

»  même  d'un  ange  de  la  mort.  Qu> 

V  est    l'artiste    qui   n'aimât   mien 

))  peindre  un  ange  qu'un  squelètc  [^ 

Il  a  paru  une  traduction  de  ce  trai 

dans  un  Recueil  de  pièces  intére 

santés  concernant  les  Antiquités 

Paris,  1786.  Parmi  les  Alleman 

qui  ont  écrit  sur  ces  deux  ouvrage 

il  f5ut  mettre  hors  de  ligne  Herde 

qui ,  dans  ses  réflexions  sur  le  p: 

mier  {Kritische  ïVœlder,  i»^'^.  p 

et  sur  le  deuxième  {Zerstreute  BL 

ter ,  t.  î2  ,  p.  391  et  suiv.  ) ,  réf 

ou    modifie    souvent   les  idées 

assertions  de  Lessing.  Il  n'a  point 

précision  et  la  logique  serrée  de  ce  * 

ci;  mais ,  en  revanche ,  il  a  cette  ij  i- 

gination  si  noble ,  ces  sentiment;  i 

élevés  ,  qui  font  le  charme  de  t  it 

ce  qu'il  a  écrit  ;  et  ces  deux  ou^  - 

ces  peuvett^  être  considérés^  con  ic 


LES 

U  rcrlificilion  ou  le  complément 
dp  ceux  de  notre  auteur  que  nous  vo- 
uons de  citer.  La  marche  pro- 
gressive du  talent  que  nous  avons 
fait  remarquer  dans  les  pièces  de 
tliratre  prcrëdentrs  ,  est  encore  plus 
sensible  dans  Minna  de  Barnlwlm , 
unedie  en  prose,  écrite  en  1763, 
iniprimée  en  17(37.  On  y  trouve 
<  s  niaiseries  ,  des  inutilités,  une 
lisibilité'  un  peu  recherchée  ,  un 
langage  quelquefois  subtil  :  mais 
des  caractères  mieux  traces  que  tout 
ce  qu*on  avait  vu  jusqu'alors ,  des 
situations  attachantes ,  quelques  in- 
tentions comiques,  et  surtout  la  pein- 
ture des  mœurs  allemandes  ,  en  ont 
fait  une  pièce  vraiment  nationale. 
Elle  a  été  imitée  par  Rochon  de  Cha- 
bannes  sous  le  titre  des  Amaiiisgéné- 
reiLv,  comédie  représentée  à  Paris  en 
1774.  La  réputation  toujours  crois- 
sante de  Lessing  fixait  déjà  tous  les 
regards.  Une  société  d'amis  du  théâ- 
tre desirait  donner  à  celui  de  Ham- 
bourg une  nouvelle  direction  plus 
utile  et  plus  conforme  aux  besoins 
de  la  nation.  Lessing  ayant  le  plus 
contribué  à  faire  naître  dans  le  pu- 
blic (les  idées  saines  à  cet  égard,  et 
le  vœu  d'un  meilleur  ordre  de  choses, 
les  entrepreneurs  conçurent  très-natu- 
rellement l'idée  de  recourir  à  ses  lu- 
mières. Ils  lui  offrirent  des  conditions 
fort  avantageuses  j  et  il  alla  s'établir 
à  Hambourg  en  1767.  11  s'était  en- 
gagé à  communiquer  au  public  ses 
réflexions  sur  le  jeu  des  acteurs  ,  et 
sur  les  pièces  représentées  ;  mais  il 
paraît  que  les  comédiens  sont ,  dans 
tous  les  pays,  d'une  nature  irritable  : 
ceux  de  Hambourg  s'offensèrent  des 
avis  de  Lessing, qui  fut  bientôt  obligé 
de  se  borner  à  parler  de  leur  art  en 
termes  généraux.  Son  travail  en  de- 
vint moins  piquant  pour  le  public  de 
cette  ville;  mais  rAllem^igue  n'en  eut 


LES  307 

pas  moins  la  Dramaturgie  de  Ham" 
bourg,  imprimée  par  numéros  sé- 
parés, en  1757  et  1768.  Dans  cette 
partie,  comme  dans  plusieurs  de  cel- 
les auxquelles  il  a  fait  faire  de  grands 
progrès  en  Allemagne  ,  Lessing  a 
sans  doute  été  surpassé  par  quel- 
ques écrivains  postérieurs.  Weisse 
partage  même  avec  lui  la  gloire  d'of- 
frir les  premiers  modèles.  (  Voyez 
Weisse.  )  Toutefois ,  en  nous  repor- 
tant à  l'époque  dont  il  est  question  , 
nous  verrons  que  Lessing  influa  sur 
le  théâtre  allemand  ,  peut-être  plus 
encore  par  ses  préceptes  que  par  ses 
exemples.  Le  premier,  dans  son  pays, 
qui  ait  attaqué  la  théorie  dramatique 
des  Français,  il  cherche  à  prouver 
qu'ils  avaient  mal  compris ,  ou  du 
moins  mal  appliqué  celle  des  Grecs. 
SaZ?rflmflfwrg-/e  renferme  une  grande 
érudition,  et  une  foule  de  vues  alors 
neuves  pour  l'Allemagne,  puisées  en 
partie  dans  Diderot ,  auquel  Lessing 
reconnaît  avoir  les  plus  grandes  obli- 
gations. La  critique  très-sévère  des 
principales  tragédies  de  Voltaire  et 
de  quelques  autres  pièces  françaises 
est  appuyée  de  développements  fort 
curieux,  et  soutenue  par  une  dia- 
lectique entraînante.  Lessing ,  dans 
cette  discussion ,  ne  sut  pas  se  ga- 
rantir de  toute  passion ,  du  moins 
en  apparence.  Cet  esprit  néanmoins 
était  trop  supérieur  pour  mécon- 
naître ,  même  dans  ses  idées ,  le 
mérite  de  cpielques  parties  au  moin» 
de  la  littérature  française.  Mais  ^ 
dans  sa  Dramaturgie  ,  commv 
dans  ses  autres  écrits  ,  il  ne  loue 
que  les  auteurs  du  second  ordre  ; 
et  il  est  clair  que  sa  grande  admi- 
ration pour  Diderot,  comme  dra- 
maturge, prend  sa  source  dan> 
l'analogie  de  leurs  idées  sur  i*ar£ 
dramatique.  H  n'attaque  pas,  il  est 
▼rai,  Racine  de  front,  cl  il  n'a  fait 


3o8  LES 

l'analyse  d'aucune  de  ses  pièces;  mais 
il  parle  plusieurs  fois  de  sa  correc- 
tion ,   en  ayant  l'air  de  l'indiquer 
comme   la    qualité  dominante  ,  si- 
non unique  ,  de  ce  grand  poète  ;  et 
l'on  voit  clairement  qu'il  le  com- 
prend dans  la  proscription  générale 
du  théâtre  tragique  français.  Néan- 
moins il  lui  rend  un  hommage  as- 
sez  remai-quable   dans  sa    bouche 
pour   être   cité.    Une    de    ses   fa- 
bles est  ainsi  conçue  :  «  Je  fais  sept 
•»  tragédies  par  an  ,  disait   un  ri- 
»  meur  à  un  poète  ;  et  toi ,  tu  mets 
«  sept  ans  à  en  faire  une!  —  «  Oui, 
»  répondit  le  poète  ,  mais  c'est  une 
«  Atlialie.  »  Son  explication  du  pas- 
sage dans  lequel  Aristote  parle  de 
la  pitié  et  de  la  terreur,  comme  des 
seuls  ressorts  admis  dans  la  tragé- 
die, et  ses  raisonnements  pour  prou- 
ver que  la  terreur ,  ou ,  selon  son 
interprétation ,  la   crainte  ,  rentre 
dans  la  pitié ,  sont  très  spécieux , 
mais  sont  loin  d'être  convaincants  ; 
et  il  faut  voir ,  dans  sa  correspon- 
dance avec  Moses  Mendelssohn  ,quel 
abus  Lessing  fait  de  sa  dialectique 
pour  démontrer  que  Giisman  ,  Au- 
guste ,  Milhridate ,  n'excitent  point 
l'admiration,  et   que    l'admiration 
elle-même  doit  être  reléguée  dans 
l'épopée  :  mais ,  d'un  autre  côté , 
quel  avantage  donnent  à  Moses   la 
candeur  extraordinaire  de  son  carac- 
tère et  la  justesse  de  son  esprit  !  Les- 
sing pensait  en  général  que  quelques 
tragédies  françaises  (  car  le  théâtre 
comique  avait  trouvé  grâce  devant 
lui  ) ,  étaient  des  ouvrages  fort  re- 
marquables ,   et  leurs  auteurs   des 
hommes  d'un  grand  talent  ^   mais 
que  ce  n'étaient  point  des  tragédies. 
Shakespeare,  au  contraire,  marchait 
selon  lui  à  côté  des  Grecs  ;  en  un 
mot,  ses  principes  sur  la  tragédie  , 
çomm^  suf  b  drame  et  la  comédie 


LES 

larmoyante  ,  sont  devenus  ,  en  * 
grande  partie ,  ceux  de  l'école  ro- 
mantique ,  dont  un  article  tel  que 
celui-ci  n'admet  point  la  discussion. 
Toutefois ,  d'après  plusieurs  passa- 
ges de  ses  ouvrages,  et  une  des  lettres 
deGarveà  Weisse(Tom.  i,p.  ii5), 
mais  surtout  en  raison  de  la  j  ustesse  de 
son  esprit,  il  est  permis  de  supposer 
qu'il  n'aurait  pas  adopté  la  doctrine 
romantique  dans  toute  sa  latitude , 
et  qu'il  eût  pu  poser  les  bases  d'un 
traité  entre  les  deux  écoles.  La  Dra- 
maturgie a  été  traduite  en  français  , 
par  Mercier  et  Junker ,  en  1785. 
Soit  que  les  travaux  de  Lessing  ne 
lui  procurassent  pas  une  aisance  suf- 
fisante ,  soit  plutôt,  ce  qui  paraît 
assez  prouvé  ,  qu'il  eût  moins  d'or- 
dre dans  ses  affaires  que  de  précision 
dans  les  idées  ,  il  éprouvait  une  gêne 
extrême  :  aussi  accueillit-il  avec  em-  . 
pressement  la  proposition  que  lui  | 
lit  Bode ,  de  l'associer  à  une  entre- 
prise de  librairie  et  d'imprimerie  , 
que  celui-ci  avait  faite  à  Hambourg. 
Tous  deux  ,  indépendamment  des 
avantages  pécuniaires  qu'ils  s'en  pro- 
mettaient ,  avaient  le  noble  but  de 
travailler  à  affranchir  les  savants  de 
la  dépendance  des  libraires,  souvent 
nuisible  à  l'intérêt  de  la  littérature. 
On  peut  voir  ,  dans  ses  lettres  à  Ni- 
colaï ,  avec  quelle  ardeur  il  s'était 
livré  à  ces  nouvelles  occupations  ,  et 
dans  les  réponses  de  son  ami^  com- 
bien Lessing  s'était  fait  illusion  sur 
la  facilité  du  succès.  Aussi  fut-il 
forcé  ,  dès  1769  ,  de  renoncer  à 
cette  association.  Sa  position  allait 
devenir  d'autant  plus  embarras- 
sante, que  la  gêne  dans  laquelle 
il  se  trouvait ,  augmentait  considé- 
rablement la  lenteur  et  la  difficulté 
naturelles  avec  lesquelles  il  travail- 
lait. A  une  époque  postérieure  ,  il 
*youg  à  son  frère  que  ;  quand  il  est 


;  ieoccup<^,  son  esprit  ne  peut  rien 
tiicr  de  son  propre  fonds  ,  et  qu'il 
CNt  obli{;c  de  recourir  à  des  travaux 
.jiii  n'exi};ent  aucune   imagination, 
l.essing  avait  recueilli  avec  avidité 
•  bruit  qui  circulait  que  Joseph  II 
,.vait  le  projet  de  créer   à  Vienne 
une  académie  composée  des  prin- 
'paux    savants     de     l'Allemagne, 
était  une  vraie  Utopie  en  perspcc- 
îive.  KIopstock  avait  dédié  sa  Ba- 
tiille  d'Hermann  à  Jostph  ,  qui  lui 
avait  envoyé  Son   portrait  enrichi 
de  diamants:  peu  de  temps  après, 
les  gazettes  apprirent  que  la  même 
laveur  venait  d'être  accordée  à  un 
juif  du  Holstcin,  en  récompense  de 
la  ponctualité  avec  laquelle  il  avait 
fait  une  livraison  de  chevaux.  Les- 
^     sing  ,  témoin  de  ces  inconséquen- 
ces ,  affligé  de  la  non-réussite  de  ce 
plan  et  de  son  entreprise  de  librairie, 
mécontent  delà  manièredontses  piè- 
ces étaient  jouées,  et  du  peu  de  pro- 
•grès  de  la  bonne  littérature  dans  sa 
patrie,  projeta  d'aller  se  fixer  en  Ita- 
lie, et  d'y  écrire  eu  latin  sur  les  chefs- 
d'œuvre   de  l'antiquité  :  un  événe- 
.ment  heureux  vint  le  conserver  à 
son  pays.  Ebcrt ,  un  de  ses  amis  , 
.avait  souvent  parlé  de  lui  au  prince 
.héréditaire  de  Brunswick  :  ce  prince, 
4jui  a   honoré  sa   carrière   par   la 
protection   qu'il  accorda  constam- 
ment aux  lettres  et  à  l'infortune, 
t  proposer  à  Lessing  la  place  de 
ijibliothécaire  à  Wolfenbultel.  Les- 
sing alla  s'établir  dans  cette  ville 
au  printemps  de  i  •-  7 o ,  et  il  y  reçut , 
^     je  titre  de  conseiller  aulique.  Mal- 
heureusement ,  cette  époipie  ,  qui , 
eTi  fixant   son  sort  d'une  manière 
!  onorable  et  avantageuse,  semblait 
u  promettre  une  existence  agréa- 
!e,  fut  aussi  celle  qui  vit  s'accroître 
•s  chagrins.  Vers  la  fin  de  son  sé- 
•ur  à  Hambourg ,  avaient  eu  lieu 


Li:s 


3o() 


ses  discussions  avec  Klotz,  sur  plu- 
sieurs points  d'archéologie,  au  sujet 
du  Laocoon.  Ses  réponses  parurent 
sous  le  titre  de  Lettres  archéologi- 
ques (  Antiquarische  Briefe  ).  Dans 
cette  nouvelle  lutte,  Lessing,  sans 
s'inquiéter  de  la  réputation  un  peu 
usurpée  de  son  adversaire,  répondit 
à  des  attaques  inconsidérées,  avec 
toute  la  force  de  sa  dialectique,  et 
peut-être  avec  trop  d'aigreur.  Klolz 
répliqua  avec  toute  la  virulence  et 
la  grossièreté  de  l'arrogance  humi- 
liée; et  Lessing  eut  le  tort  de  les 
repousser  pardes sarcasmes, mérités 
sans  doute,  mais  qui  n'ajoutaient 
point  à  la  puissance  de  ses  armes ^ 
Peu  de  jours  après  son  entrée  en 
fonctions,  il  avait  découvert,  dans 
la  très -riche  bibliothèque  qui  lui 
était  confiée,  un  manuscrit  de  Bé- 
renger,  dans  lequel  ce  fameux  ar- 
chidiacre d'Angers  expose  sa  doc- 
trine sur  l'Eucharistie:  Pour  le  mo- 
ment, Lessing  se  contenta  de  l'an- 
noncer au  public  ,  avec  le  projet 
de  le  faire  imprimer  ;  ce  qui  toute- 
fois ne  put  avoir  lieu.  C'est  dans  la 
dissertation  même  qu'il  faut  voir 
quelle  érudition  et  quelle  force  de 
raisonnement  il  déploie  pour  ex- 
pliquer les  nombreuses  variations 
de  Bérenger;  pour  infirmer  l'auto- 
rité des  anathèmes  prononcés  con- 
tre lui .  pour  attaquer  l'existencp 
même  «de  quelques  conciles  ou  sy- 
nodes tenus  à  son  sujet ,  enfin  pour 
prouver  que  cet  ouvrage  de  Bérenger 
est  postérieur  à  tous  les  autres ,  et 
doit  par  conséquent  être  considéré 
comme  contenant  sa  véritable  opi- 
nion. Cette  pubUcation  fit  une  telle 
sensation  en  Allemagne ,  que  le  célè- 
bre Ernesti  déclara  Lessing  digne 
du  bonnet  de  docteur  en  théologie. 
Elle  fut  suivie  de  celle  de  la  tra- 
gédie d'Emiliu  Calottij  qui  fut  re- 


3io 


LES 


présentée  pour  la  première  fois  à 
ferunsviick,  en  1-^72.  Le  me'rite  tou- 
jours croissant  des  pièces  de  Lessing 
n'avait  rien  fait  présager  d'aussi  re- 
marquable que  cette  tragédie;  et,  sous 
quelques  rapports ,  elle  n'a  point 
été  surpassée  depuis  par  des  chefs- 
d'œuvre  qui  lui  sont  supérieurs  à 
d'autres  titres.  Elle  est,  au  reste, 
tellement  dénuée  de  cette  inspira- 
tion brillante  et  sublime,  mais  sou* 
vent  vague  et  désordonnée ,  qiù  est 
un  des  caractères  de  !a  littérature 
allemande,  qu'elle  semblerait  avoir 
pris  naissance  chez  une  autre  nation. 
Peu  de  pièces  ont  autant  exercé  la 
critique;  et  les  Allemands  en  ont  eux- 
mêmes  signalé  plusieurs  défauts , 
qu'il  paraît  difficile  de  justifier.  Mais 
la  vérité  de  la  plupart  des  caractères, 
l'intérêt  des  situations,  la  vivacité 
du  dialogue,  et,  par  dessus  tout ,  la  ra- 
re précision  du  style,  qui  ne  permet 
jamais  de  s'apercevoir  de  l'absence 
des  vers,  font  de  cette  pièce  un  mo- 
dèle classique.  Beaucoup  de  scènes 
mériteraient  d'être  citées.  Nous  indi- 
querons seulement  ici  la  première  et 
la  dernière  du  premier  acte  ,  toutes 
deux  fort  courtes,  et  qui,  par  leur 
effet  ,  paraissent  comparables  à 
ce  qu'il  y  a  de  mieux  dans  au- 
cun théâtre.  Emilia  Galotti  fut  tra- 
duite en  latin  ;  entreprise  malheu- 
reuse, et  dans  laquelle  les  meilleurs 
latinistes  modernes  auraient  pro- 
bablement échoué.  Le  Laocoon , 
la  Dramaturgie ,  Emilia  Galotti 
et  Nathan,  sont  certainement  au 
nombre  des  modèles  qui  ont  le  plus 
contribué  à  rendre  à  la  langue  alle- 
mande cette  précision  dont  on  ne 
la  croyait  pas  susceptible.  Les- 
sing l'a  dégagée  de  cette  foule  de 
membres  incidents ,  dont  elle  était 
encombrée;  ses  phrases  sont  moins 
longues  :  sa  diction  est  nette  com- 


LES 

me  ses  idées,  dont  la  marche  est 
rapide,  très  -philosophique  et  pro- 
pre à  la  discussion.  S'il  est  par- 
fois difficile  à  comprendre,  comme 
dans  Ernest  et  Falk,  et  dans  quel- 
ques fragments  théologiques,  cela 
provient,  non  de  l'obscurité  de  l'ex- 
pression, mais  de  la  concision  du 
style  et  de  l'omission  de  pensées  in- 
termédiaires. Enfin,  ennemi  du  néo- 
logisme, quoique  des  mots  français 
inutiles  aient  encore  par  fois  trompé 
sa  vigilance;  toujours  riche  de  sa 
propre  langue ,  qu'il  a  su  ramener 
à  son  caractère,  il  a  été,  pour  son 
époque ,  comme  Luther  pour  la 
sienne,  le  vrai  modèle  classique.  11 
n'a  été  surpassé  par  aucun  de  ses 
contemporains  ;  très-peu  de  ses  suc- 
cesseurs l'ont  égalé,  et  son  style  est 
celui  qui  a  le  plus  d'analogie  avec  la 
prose  de  nos  meilleurs  écrivains. 
Lessing,  ayant  obtenu,  en  i'ji73,  U 
permission  de  voyager  pour  sa  santé, 
trouva  à  Vienne  le  prince  Léopold 
de  Brunswick,  qui  lui  proposa  de 
l'accompagner  en  Italie.  Mais  il  no 
put  visiter  que  le  nord  de  cette  terre 
classique  des  arts,  et  revint  à  Wol- 
fenbuttel  au  bout  de  8  mois.  Il  avait, 
avant  son  départ,  commencé  la  pu- 
blication de  ses  Mémoires  histori- 
ques et  littéraires ^  tirés  des  trésors: 
de  la  bibliothèque  ducale  de  Pf^oî- 
fenbuttel  (  Bejtrœ^e  zur  Geschich^ 
te  und  Litteratur,  etc.  )  A  son  re 
tour ,  il  continua  cette  entreprise 
et,  après  avoir  fait  imprimer  queb 
ques  morceaux  sur  des  sujets  variésj 
il  se  jeta  tout-à-fait  dans  la  théolo^ 
gie ,  et  publia  les  premiers  Frag- 
ments  iVun  inconnu  (  Fragments 
eines  Ungenannten  ).  Les  désagré- 
ments que  lui  attira  cette  publica-'î 
tion,  la  vivacité  même  avec  laquelle 
il  se  crut  obligé  de  repousser  les  in- 
jures et  les  calonînies  atroces  de  se,s 


LES 

acïvcrsaircs ,  iic  lircnt  qu'accroîhc 
M)n  hypocondrie  et  son  irrilabilile, 
I    atlaimir  encore  une  santo*  déjà 
»rt  altérée.  A  ces  sources  de  cha- 
lin  se  joif^nait  nnc  genc  extrême. 
Il  avait  contracte  beaucoup  de  det- 
tes :  ses  appointements    n'avaient 
))U  suflire  à  remplir    ses    engage- 
ments ;    et   il   était    surtout  vive- 
lent  affecte  de  ne  pouvoir  adoucir 
1 1  position  de  ses  parents.  Enfin  il 
tut,  en  1778  ,  fi^appe  par  le  coup  le 
plus  terrible,  en  perdant  sa  com- 
pagne, qu'il  avait  épousée  à  Ham- 
bourg, à  la  fin  de  1776,  et  pour 
l.iquelle  il  avait  un  grand   attache- 
mont.  «  Ma  femme  est  morte ,  ccrit- 
il  à  Eschenburg  ,  et  j'ai  fait  aussi 
cette  triste  expérience.  Je  me  rë- 
'  jouis  de  ce  qu'il  ne  m'en  reste  plus 
^>  beaucoup  de  semblables  à  faire; 
»  et  cette  idée  me  soulage.  »  Cette 
réflexion  pourrait  paraître  e'trange , 
et  faire  douter  de  sa  sensibilité' ,  si 
k     l'on  ne  savait  pas  combien  sont  va- 
riées les  expressions  de  la  douleur  , 
t  si  ses  lettres  à  son  frère  dans  la 
même  circonstance  ,    les  me'nage- 
menls    qu'il    lui   recommande    de 
])rcndre  pour  annoncer  ce  malheur 
tison  beau-fds  alors  à  Berlin,  enfin 
le  chagrin  profond  que  lui  avaient 
causé  pre'ce'demment  le  malheur  et 
la  mort  de  Kleist ,  n'étaient  des  té- 
moignages de  la  bonté  de  son  cœur , 
attestée  d'ailleurs  par  ses  amis.  Ce 
fut  néanmoins  au  milieu  de  cette  vie 
agitée  par  des  chagrins  si  multipliés, 
que  parut,  en  1779,  son  Nathan  le 
ige  (  Nathan  der  JVeise  ).  La  pa- 
1  ibole  de  la  bague  ,  qui  doit  être 
regardée  comme  la  base  principale 
de  la  pièce ,  est  ,  comme  on  sait , 
tirée  d'une  nouvelle  de  Boccace  ;  et 
le  but  du  poète  est  de  faire  sentir 
qu'on  doit  accorder  son  estime  à  tous 
ê«s  hommes  qui  la  mériieut .  sans 


LES 


.wi 


«^gard  à  la  religion  qu'ils  professent. 
Ce  drame,  ou,  selon  Engel ,  ce  poème 
didactique,  est  une  composition  d'iui 
genre  tout-à-fait  original  ,  et  qui 
semble  ne  pouvoir  rentrer  dans  au- 
cune classification  de  nos  poétiques. 
Nul  ouvrage  allemand ,  si  l'on  en 
excepte  le  j}fessie  (  l' Obéron  ne  pa- 
rut que  l'année  vSui vante  ,  dans  le 
Mercure  allemand)  n'avait  encore 
excitéen  Allemagne  une  aussi  grande 
admiration.  Trop  long  et  trop  dé- 
pourvu d'action  pour  être  repré- 
senté ,  Nathan  produit  ,  à  la  lec- 
ture ,  un  effet  extraordinaire.  Le 
calme  et  la  noblesse  du  principal 
caractère, la  véritéde  tous  les  autres, 
à  l'exception  peut-être  de  celui  de 
Saladin ,  qui  n'a  guère  que  de  lu 
bonhomie ,  et  qui  était  trop  grand 
dans  l'histoire  pour  cire  sacrifié  k 
un  être  d'imagination  ;  l'attrait  inex- 
primable de  celui  de  Rccha  ;  la  douce 
}>hilantropie  qui  respire  dans  tout: 
'ouvrage  ;  enfin  ,  la  perfection  des 
vers'iambiques  ,  trop  peu  imitée  par 
la  plupart  des  poètes  allemands  de 
la  même  époque  et  de  la  suivante  , 
semblent  devoir  désarmer  la  cri- 
tique ,  et  font  de  Nathan  un  des 
monuments  littéraires  modernes  les 
plus  imposants.  Toutes  les  pièces 
dont  nous  avons  fait  mention  ,  sauf 
le  Jeune  Sa^*ant  et  Emilia  Galotti  , 
ont  clé  traduites  dans  le  Tfiédtre  al- 
lemand de  5  unkcv  et  liiebault,  ou 
dans  le  Nouveau  Théâtre  allemand 
de  Friedel.  On  a  aussi  une  imitation  de 
Nathan  par  Chcnier.  Ce  fut  comme 
le  chant  du  cygne  pour  Lessing.  Sa 
faiblesse  devint  extrême  ;  sa  gaîté  , 
sa  vivacité  ,  furent  remplacées  par 
l'insouciance,  l'.ipathic,  et  une  dis- 
position continuelle  au  sommeil  r 
il  pei'dit  bientôt  toute  son  énergie 
morale.  L'asthme  vint  aggraver  ses 
maux  ;  et  il  tecmiua  sa  carrière ,  le 


3iî  LES 

i5  février  1781 ,  dans  la  53*^.  année 
de  son  âge.   Lessing  avait  heaucoiip 
de  liaisons  littéraires  ;  il  eut  aussi 
Ijeaucoup  d'amis  ,  et  il  mc'ritait  leur 
altaclicmcnt  par  la  franchise  de  son 
commerce  dans  tous  les  détails,  quoi- 
qu'il eut,  il  faut  en  convenir,  une  al- 
lure, pour  ainsi  dire  ,  particulière. 
Ennemi  de  tout  étalage  de  sentiment, 
il  faisait  et  recevait  le  bien  presque 
comme   l'acquit   d'une   dette ,   que 
tous  les  hommes  contractent  les  uns 
envers  les  autres.  Cette  disposition  se 
faisait  remarquer  dans  toutes  ses  con- 
versations Il  accueillait  franchement 
les  idées  vraies  et  utiles  ,  et  commu- 
niquait les  siennes  ,  sans  paraître  y 
attacher  aucune  importance  :  bien 
différent  ,    dit    Mendelssohn ,    de 
ces    riches    qui  font    sentir   d'une 
manière  humiliante  l'aumône  qu'ils 
distribuent,  il  communiquait  ses  ob- 
servations avec  une  telle  simplicité, 
qu'on  était  souvent  tenté  de  s'en  at- 
tribuer le  mérite.  L'amour  de  la  vé- 
rité et  de  la  justice  était  sa  passion 
dominante.  Révolté  par  la  moindre 
injustice  ,  comme  par  une  irrégula- 
rité   qui  dérangeait  l'ordre  de   la 
nature,  il  se  montrait  toujours  prêt 
à  embrasser  la  défense  des  oppri- 
més ,  avec  une  chaleur  qui  le  fit 
souvent  paraître  animé  de  l'esprit  de 
contradiction.  C'est  ainsi  que  ,  pen- 
dant la  guerre  de  sept    ans  ,  on  le 
vit  partisan  des  Prussiens  à  Leipzig  , 
et  des  Saxons  à  Berlin.  Il  est  peu  de 
genres  de  poésie  dans  lesquels  Les- 
sing ne  se  soit   exercé.  Il  a  même 
fait  des  odes.  On  n'y  trouve  point  le 
génie  lyrique  ;  mais  elles  renferment 
des  sentiments  nobles  et  élevés.  On 
fait  plus  de  cas  de  ses  chansons,  qui 
respirent  la  gaîté  ,  et  sont  fréquem- 
ment aiguisées  par  une  légère  ironie. 
Il  suffira  ,  pour  en  faire  l'éloge  ,  de 
dire  qu'ayant  été  souvent  mises  eu 


LES 

musique  ,  elles  sont  très-répandués 
en  Allemagne.  ïoutetois  ,  elles  nous 
paraissent  ,  pour  les  idées  morales 
et   pliiloso])hiques  ,     inférieures    à 
celles  de  Gleim ,  Hôlty  ,   et  quel- 
ques autres.  Ses  Epi^rammes ,  dont 
plusieurs  sont  des  imitations  d'au- 
teurs anciens  et  modernes ,  offrent 
des  traits  piquants  ,  et  sont  remar- 
quables ,    souvent   pour  le    fond  , 
toujours  par   une  grande  précision 
de  langage.  Elles  oift  été,  ainsi  que 
beaucou])  de  ses  poésies  fugitives  , 
revues   par  son  ami  Ramier  ,  aux 
corrections  duquel  Lessing  se  sou- 
mettait  presque   aveuglément.     Ssk 
Dissertation  sur  VEpigramme  est 
pleine  d'observations   fines    sur  ce 
poème  ;   et   ses  jugements  sur   les 
principaux  épigraramatistes  ont  mé- 
rité    l'attention     des    philologues. 
Notre  jugement  sur  ses  Fables  est 
à -peu -près    conforme   à  celui   de 
Mendelssohn,  qui  n'en  cite  qu'un  petit 
nombre  comme  vraiment  dignes  de 
Lessing  :  ramenées  à  la  simplicité 
d'Esope  ,  mais  écrites  avec  toute  la 
précision   que  l'auteur  a  su  donner 
à  la  prose  allemande ,  elles  présentent 
en  général  d'excellents  principes  ;  la 
morale  néanmoins  en  est  quelquefois 
trop  reclierchée  et  trop  peu  naturelle 
pour  être  frappante  ,  et  par  consé- 
quent utile.  Nous  ajouterons  que  la 
meilleure  prose  ne  paraît  pas  pou- 
voir, dans  cegenre,  remplacer  la  poé- 
sie. Tout  le  monde  lit  les  Fables  de 
Lessing;  personne  ne  les  retient.  Les 
vieillards  et  les  enfants  savent  par 
cœur  celles  de  Gellert.  Au  reste,  I^es- 
sing  avait  prévu  ce  jugement  :  «  J'ai 
»  mieux  aimé  ,  écrit  -  il  à  Gleim  , 
»  prendre    une  route  différente   et 
»  plus  mauvaise ,  que  de  m'exposer 
»  au  danger  d'une  comparaison  dé- 
»  favorable  avec  les  Gleim  et  les 
»  La  Fontaine.  »  Sa  Dissertation  sur 


LIS 

U  caractère  de  la  Fable  (  ï^on  dent 
frestn  lier  Fabvl  )  est  un  morceau 
d'une  excellente  critique,  tant  nar  la 
fixation  des  princ  incs  que  par  î'exa- 
men  des  théories  ues  diliercnts  au- 
teurs. ^fai§  on  lui  a  rej)rocbc  ,  avec 
raison  ,  d'avoir  un  peu  subtilise  dans 
cette  dissertation  ,  comme  dans  la 
précédente  et  dans  plusieurs  de  ses 
<^uvraj!;es,  et  entreaulres  d'avoir  rem- 
place les  deTniitions  de  ses  prédéces- 
seurs ,  par  une  (léfinitiou  qui  ,  pour 
être  plus  juste,  n'est  pas  d'un  usage 
plus  commode  (  i  \  Nous  ne  ferons 
point  l'énumération  de  ses  écrits 
pliilolop;iques  ,  dans  lesquels  il  dé- 
loie  une  très  grande  connaissance 


l 


es  auteurs  anciens  ,  présentée  sous 
une    forme    agréable    et    piquante. 
Aucun  de  ses  nombreux  rivaux  n'a 
su    mieux    que   lui    allier  l'une   à 
l'autre;  et,  sous  ce  rapport,  il  pour- 
rait être  regardé  comme  le  père  de 
cette  critique  éclairée  que  les  Alle- 
mands ap))liqucnt  aux  ouvrages  des 
anciens.  On  trouve  encore  dans  notre 
auteur  une  foule  demorceaux  de  litté- 
rature ,  dont  aucun  n'est  sans  intérêt. 
Ceux  que  nous  avons  cités  suflisent 
pourexpliquerrinfluencequ'ila  exer- 
cée. Lessing  vécut  assez  pour  sa  gloi- 
re ;  mais  vingt  ans  plus  tard  il  eût 
peut-être  épargné  à  sa  patrie  les  scan- 
dales littéraires  qui  l'ont  affligée.  Si  la 
uouvelle  philosophie  a  rectifié  quel- 
ques idées,  et  agrandi  la  sphère  de  la 
pensée  ,  on  ne  peut  nier  qu'elle  n'ait 
1  urté,  dans  toutes  les  branches  de  la 
littérature  ,  l'influence   pernicieuse 
de  son  néologisme,  et  de  ce  genre 
vague  souvent  honoré  du  nom   de 
Traïucendant ait sme, et  qu'elle  n'ait 
Ktnduil  à  ridiculiser  et  attaquer  quel- 


<  FaUlrad«Le««inf;  ont  ^té  trailiiitei  en 

..•r   (l'Autelmy,  t*ari»,  1764  ,  in-n.  M. 

i  a  redonné  cette  traduction  «v^c  \r  text« 

:  une  tr-riinn  littérole  intfrliné*ire  ,    niaU  tau* 

•  Di'sirriaWon,  ibid.  1799,  iu-8*. 


LES  3i3 

ques-uncs  des  réputation»  littéraires 
lesmieuxélalilies.  Il  est  possible  que 
d'autres  Lettres  sur  la  littérature 
du  jour  eussent  fait  justice  de  ce» 
excès.   Parmi  1rs  ouvrages  philoso- 
phiques de  lessing  ,  nous  n'en  cite- 
rons (pie  deux  :    Pope  métaphysi- 
cien est  un  examen  du  système  de  ce 
poète-philosophe  ,  dans  le(|uel  Les- 
sing et  Moses  Mendeissohn   (  car 
cette  dissertation  est  l'ouvrage  des 
deux  amis  )  prouvent ,  d'une   ma- 
nière assez  claire,  que  les  pnncipales 
idées  de  Pope  sont  tirées  de  W.Hing, 
auteur  anglais  ,  qui  écrivit  en  i-jo^  5 
et  ils  font,  à  ce  sujet ,  des  rappro- 
chements très-curieux.    Le  second 
est  beaucoup  plus  important  ;  il  est 
intitulé  :  Ernest  et  Falk  ,  Dialoç^ue 
pour  les  Francs-Maçons.    Lessing 
cherche  à  établir  que  la  franc-ma- 
çonnerie n'est  autre   chose  que    le 
désir  et  les  eflTorls  de  tous  les  gens 
de  bien  pour  faire  disrparaître  les 
obstacles  qui  s'opposent  à   l'union 
et  à  la  bonne  intelligence  entre  tous 
les    hommes.    Ces    dialogues    sont, 
écrits   avec   toute  la   précision   de 
style  qu^on  admire  dans  ses  meilleur» 
ouvrages.  Lessing  a  fait  aussi  plu* 
sieurs  traductions,  dont  les  princi- 
pales sont  celles  de  Y  Examen  de  in- 
génias para  las  sciencias  (  Examen 
des  esprits  propres  aux  sciences  ) 
par  l'Espagnol  Jean  Huarte;derZ^w- 
toire  desyérabessousles  Califes  y  par 
Tabbé  de  Marigny  ;  du  Système  de 
Philosophie  morale^Y'^r  Hutrheson; 
du  Théâtre  de  Diderot.  La  collection 
de  ses  Œuvres  se  termine  par  sa  cor- 
respondance avec  Ramier ,  Eschcn- 
burg  ,  Nirolai,  Mos.  Mendeissohn  , 
Reiske ,  (ileim  ,    Schmid  ,   Ebert , 
Heyne  ,  Campe,  Michaèlis,  Herder 
et  son  frère.  Nohs  l'avouerons  fran- 
chement :  si   celte   correspondance 
nous    fait  connaître    l)eaucoup  de 


3i4 


LES 


particularités  de  la  vie  de  Lessing  , 
die  est ,  en  gênerai ,  d'un  médiocre 
intérêt  littéraire.  Les  lettres  de  Les- 
sing lui-même  sont  peu  piquantes 
sous  ce  rapport.  Celles  de  la  plu- 
part de  ses  correspondants  sont  assez 
insignifiantes.  Glcim  y  paraît  peu 
digne  de  la  réputation  du  Tyrtée 
allemand.  Celles  de  Nicolai  et  ses 
notes, quoique  délayées, contiennent, 
du  moins  ,  des  faits  littéraires  cu- 
rieux. Mais  celles  de  Moses  Mendel- 
ssohnnous  semblent  se  distinguer  de 
toutes  par  une  grande  bonhomie,  une 
simplicité  très-attachante,  une  extrê- 
me droiture  de  jugement  et  beaucoup 
de  netteté  dans  les  idées.  Il  nous 
reste  à  parler  des  ouvrages  théolo- 
giques. Nous  avons  déjà  fait  men- 
tion du  manuscrit  de  Bérenger. 
JNous  ne  citerons,  en  particulier, 
que  ce  qui  a  rapport  aux  fameux 
Fragments  d^iin  inconnu.  Ses  amis 
de  Berlin  firent  les  plus  grands 
efforts  pour  l'empêcher  de  les  pu- 
blier :  mais  quand  il  s'était  pénétré 
d'une  idée ,  il  y  tenait  avec  une  opi- 
niâtreté insurmontable.  Il  était  con- 
vaincu que  la  publication  de  ces 
fragments  devait  être  utile  à  la  reli- 
gion, en  provoquant  l'examen  et  la 
réfutation  des  oÎ3Jections  qu'ils  con- 
tenaient contre  plusieurs  points  du 
christianisme,  telsque  la  révélation, 
la  résurrection ,  le  but  de  Jésus  et 
de  ses  disciples  ,  etc.  Lessing  l'a  ré- 
pété jusqu'à  satiété  ;  et  c'est  l'opi- 
nion très-prononcée  de  Nicolaï  et  de 
Herder.  Il  résista  donc  à  toutes  les 
représentations  ;  et  les  premiers 
fragments  furent  imprimés.  Ils  cau- 
sèrent un  scandale  général  parmi 
les  théologiens.  Bientôt  la  cour  de 
Brunswick  lui  défendit  de  publier  la 
suite  des  fragments:  ceux  qui  avaient 
paru  ,  furent  confisqués  ;  et  Lessing 
en  fut  enchanté ,  espétant  que  cette 


LES 

mesure  les  ferait  connaître  davan- 
tage ;  ce  qui  eut  lieu  en  effet.  Une 
foule  de  réfutations  parurent  dans  le 
public.  Quelques-unes,  telles  que 
celles  de  Semler,  Dœderlein,  etc. , 
furent  très-décentes  pour  la  forme  : 
d'autres  furent  moins  ménagées. 
Mais  le  pasteur  Goeze,  de  Ham- 
bourg ,  attaquant  moins  l'auteur  que 
l'éditeur  des  fragments,  accabla  Les- 
sing des  invectives  les  plus  outra- 
geantes et  des  imputations  les  plus 
calomnieuses.  Celui-ci  répondit  avec 
aigreur,  mais  avec  une  grande  supé- 
riorité de  talent  :  cette  déplorabla 
polémique  empoisonna  les  dernières 
années  de  sa  vie.  Plusieurs  personnes 
ont  pensé  que  Lessing,était  coupable 
den'avoir  pas  senti  quel  mal  pouvait, 
dii  moins  pour  le  moment,  résulter 
de  cette  publication.  Au  reste  s'il  est 
permis  de  concevoir  quelques  doutes 
sur  son  orthodoxie  (  luthérienne  )  , 
quoique  Nicolaï  assure,  de  la  ma- 
nière la  plus  positive  ,  qu'il  repous- 
sait tout  changement  dans  les  dog- 
mes ,  nombre  de  passages  dans  ses 
écrits  attestent  son  respect  pour  la 
religion  ,  la  morale,  et  le  senti- 
ment qu'il  avait  de  leur  nécessité.  Il 
regarde  comme  un  homme  malhon- 
nête ,  celui  qui ,  par  des  plaisanteries 
sur  la  religion  ,  trouble  le  repos  de 
l'homme  faible  (  tom.  ::i6,  p.  3^i4  )• 
Il  s'indigne  contre  un  vers  d'une  tra- 
gédie, dont  le  sens  est  que  le  ciel  par- 
donne, mais  qu'un  prêtre  ne  pardon- 
ne jamais.  «  Dans  toutes  les  religions,  | 
))  dit-il,  des  prêtres  ont  fait  du  mal,' 
»  non  comme  prêtres ,  mais  comme  [ 
î)  scélérats;  et  ils  auraient  pi'ofité 
»  pour  satisfaire  leurs  passions,  des 
»  privilèges  de  tout  autre  état.  » 
(  Dramat.  i»'^  part.  p.  'à^.  )  Enfin, 
tout  en  reprochant  aux  orthodoxes 
leur  intolérance,  il  est  convaincu  que 
les  the'ologiens  de  la  nouvelle  école, 


si  on  leur  pernicl  de  preiulre  le  des- 
sus ,  finiront  par  tyranniser  plus 
[lie  n'ont  jam.ùs  fait  lt\s  premiers 
P.  3o,  p.  337  ).  Il  admire  fVer- 
iher:  mais  il  pense  que  l'auteur  au- 
nit  dû  fuiir  par  un  chapitre  qui  eût 
explique  comment  s'était  opère,  et 
j)ar  quels  moyens  eût  pu  ctre  pré- 
venu le  développement  du  caractère 
de  ce  personnage  (  T.  27 ,  p.  (55  ). 
Diderot,  selon  Lessing ,  fait  arriver 
.1  la  vérité  par  ses  discussions  et  ses 
doutes  ;  mais  il  ne  regarde  pas  moins 
cet  écrivain  a  comme  un  de  ces  phi- 
»  losophes  qui  cherchent  beaucoup 
»  plus  à  rassembler  qu'à  dissiper 
»  des  nuages:  partout  où  ils  portent 
»  leurs  yeux  ,  on  voit  s'ébranler  les 
»  bases  àes  vérités  les  mieux  établies , 
»  etc.  »  (  T.  4,  p.  74-  )  I^'auteur  de 
cet  article  a  eu  sous  les  yeux  l'édit. 
des  œuvres  de  Lessing  en  3o  vol.  in- 
1 8 ,  imprimés  chez  Voss ,  à  Berlin, 
en  1771-1794'  I-'G  célèbre  philolo- 
gue Se  h  lit  z  a  fait  des  ouvrages  de 
Lessing  l'objet  d'un  cours  particulier. 
Garve  a  inséré  dans  la  Bibliothèque 
des  Belles- Lettres  des  observations 
très-sages  sur  le  Laocoon,  impri- 
mées depuis  dans  un  recueil  séparé. 
On  trouve  des  critiques  de  ses  diffé- 
rents ouviages  dans  les  deux  Biblio- 
thèques citéaB  ci-dessus,  et  dans  la 
Gazette  universelle  de  Littérature  y 
dans  les  Caractères  des  poètes  et 
prosateurs  allemands,  ])arCh.  Aug. 
Kiittncr  ,  et  dans  plusieiirs  ouvrages 
d'Aug.  Guill.  et  de  Frédéric  Schle- 
gel  ;  —  un  Jugement  sur  Lessing  con- 
sidéré comme  homme  et  comme 
écrivain,  par  Herder,  inséré  d'abord 
dans  le  Mercure  allemand ,  puis 
!ans  le  a*,  vol.  des  Feuilhs  déta- 
ihées}  — quatre  Lettres  sur  Emilia 
Galotli ,  dans  le  Pliilosophe  Jiomme 
du  monde  y  par  Engel  ;  — un  arti- 
cle succinct  dans  le  Nécrologie  de 


LKS 


3i5 


Schmid  ;  —  enfin  uiW  Notice  très- 
detaillée  sur  sa  vie,  son  caractère  ri 
ses  écrits ,  dans  le  4''.  vol.  du  Diê- 
tionnaire  des  poètes  et  prosateurs' 
allemamls ,  de  Joerdens ,  qui  est 
elle-même  ,  en  grande  partie  ,  un 
abrégé  de  la  Vie  de  Lessing,  écrite 
par  son  frère.  D-u. 

LESSIUS  (  LÉONARD  ) ,  célèbre 
jésuite,  naquit  à  Brechtan  ,  ancien 
bourg  du  Brabant,  le  i*"".  octobre 
i554,  d'une  famille  distinguée.  Dès 
l'âge  le  plus  tendre,  il  manifesta  une 
telle  piété,  que  ses  condisciples  lui 
donnèrent  le  nom  de  Prophète.  Il 
avait  un  goût  si  décidé  pour  l'étude, 
qu'il  oubliait  souvent  l'heure  du  re- 
pas,qu'il  se  privait  du  sommeil  néces- 
saire, et  que,  pour  ne  pas  perdre 
de  temps,  il  réchauffait  à  la  hâte  ses 
mains  engourdies ,  à  la  lumière  de  la 
lampe.  Devenu  orphelin  à  six  ans , 
il  se  vit  obligé  d'interrompre  ses 
études  ;  et  ce  ne  fut  qu'avec  beau- 
coup de  peine  que  son  tuteur  lui  per- 
mit de  les  reprendre.  Ayant  obtenu 
une  bourse  au  collège  à'Arras  à 
Louvain  ,  Lessius  y  fit  ses  cours  avec 
le  plus  grand  éclat ,  et  fut  proclamé 
Prince  des  Philosophes.  A  l'âge  de  1 7 
ans,  il  entra  dans  la  compagnie  de  Jé- 
sus, le^Sjuin  1579.. Deux  ans  aprèsil 
alla  professer  la  philosophie  à  Douai. 
En  1578,  les  troubles  religieux  qui 
désolèrent  les  Pays-Bas,  l'ayant  con- 
traint de  voyager  incopiito  pour  se 
soustraire  à  la  fureur  des  réformés, 
il  contracta  ,  dans  une  auberge ,  une 
douloureuse  infirmité  qui  ne  l'aban- 
donna point  le  reste  de  ses  jours. 
Les  troubles  s'a]>aisèrent  enfin;  et 
Lessius  revint  à  son  poste.  Après  qu'il 
eut  professé  pendant  sept  ans  la  phi- 
losophie à  Douai,  il  fnt  ordonné 
prêtre  ,  et  il  partit  pour  Home  ,  où 
il  fit  deux  ans  de  théologie  sous  les 
PP.  Augustin  GiiLstiniaQi  et  Fra» 


3i6  LES 

çois  Siiarez.  En  i585 ,  il  se  rendit  à 
Louvain,  comme  professeur  de  théo- 
logie. .Six  Propositions  extraites  de 
SCS  cahiers ,  et  renfermant  tout  Je 
fonds  de  sa  doctrine  sur  l'Ecriture- 
Sainte ,  la  prédestination  et  la  grâce , 
furen  t  amèrement  censurées,  ainsi  que 
quelques  propositions  d'Hamélius , 
par  les  universités  de  Louvain  et  de 
Douai,  en  1587  ^^  i588,  comme 
étant  contraires  à  la  doctrine  de  Saint 
Thomas  ,  et  sentant  le  scmi-péiagia- 
iiisme.  Sixte  V  ,  qui  occupait  alors 
le  Saint-Siège,  voulant  prévenir  les 
«uites  d'une  pareille  dissension ,  or- 
donna à  son  nonce  dans  les  Pays- 
Bas  ,  de  se  transporter  à  Louvain , 
et  d'imposer  silence  aux  deux  par- 
tis. Le  nonce  défendit ,  par  un  bref 
du  10  juillet  i588,  de  traiter  des 
matières  de  la  grâce ,  sous  peine  d'ex- 
communication, etn'imprima  aucune 
Tîote  aux  Propositions  de  Lessius.  Les 
théologiens  de  Louvain  ,  crovant 
avoir  été  condamnés  parce  qu'ils  n'a- 
Taient  pas  obtenu  gain  de  cause,  in- 
sistèrent; les  jésuites  répondirent  aux 
tenseurs  de  Lessius,  et  firent  déclarer 
pour  le  système  de  leur  confrère  les 
uniA^crsités  de  Maïence  ,  de  Trêves  , 
d'Ingolstadt  et  de  Louvain ,  en  1 61 3. 
On  peut  voir  le  détail  de  ces  dis- 
cussions dans  le  chap.  xiv  ,  §.  m, 
de  la  Défense  de  la  Foi,  eic.  par 
Habert ,  évêque  de  Vabre ,  et  dans  les 
Réponses  d'Arnauld ,  tom.  xvi  et 
xvn.  Lessius  avait  assisté  à  la  sixiè- 
me congrégation  générale  de  sou 
ordre;  il  assista  encore  à  la  sep- 
tième, qui  se  tint  à  Rome.  Il  mou- 
rut à  Louvain ,  le  i5  janvier  1623, 
et  fut  généralement  regretté.  Cha- 
cun voulut  avoir  quelque  chose  de 
lui ,  par  la  bonne  opinion  qu'on 
avait  de  ses  vertus.  On  se  disputa 
ses  cheveux ,  ses  ongles  et  les  doigts 
dont  il  s^était  servi  pour  écrire  ses 


LES 
admirables  ouvrages.  Il  fut  enter- 
ré devant  le  maître-autel  de  l'église 
du  collège  de  Louvain,  où  il  avait  pro- 
fessé pendant  38  ans  avec  tant  d'éclat. 
Il  avait  rempli  avec  honneur  la  char- 
gé de  visiteur  et  celle  de  définiteur  de 
la  société .  dans  sa  province.  Ses  con- 
frères les  plus  éclairés  se  faisaient 
un  devoir  d'agir  d'après  ses  conseils. 
Le  pape  voulut  le  faire  grand-péni- 
tencier ;  et,  après  sa  mort,  Urbain 
VIII  rendit  à  son  mérite  le  plus 
éclatant  témoignage.  Ulmago  pri- 
mi  sœculi  Soc.  Jesu ,  en  fait  un 
éloge  pompeux,  et  rapporte  (  pag. 
877  )  qu'il  s'opérait,  par  son  in- 
tercession ,  un  grand  nombre  de  mi- 
racles. Mais  aucun  écrivain  n'en  a 
parlé  avec  plus  d'emphase,  que  l'au- 
teur du  livre  De  vitd  et  rnorihus 
B.  P.  Leonardi  Lessii ,  réimprimé 
à  Paris  ,  i644?  in- 16.  Ses  princi- 
paux ouvrages  ont  été  réunis  en  2  vo- 
lumes in-fol. ,  Anvers,  iG'iS  et  1 63 o; 
Paris,  i655.  On  en  trouve  le  dé- 
tail dans  Sotwel  ;  nous  indiquerons 
seulement  :  I.  JDe  Jusiitid  et  jure 
actionwn  humanarum  ,  cœterisque  , 
virtutihus  cardinalihus  ,  lihri  qua- 
tuor ,  réimprimé  sept  fois.  Les  édi- 
tions d'Anvers,  16*21  ,  et  de  Lyon, 
16.53  ,  in-fol. ,  sont  les  meilleures  : 
plusieurs  propositions  sur  le  vol , 
l'homicide,  le  régicide,  l'adultère^ 
le  mensonge  ,  l'usure  ,  le  contrat 
mohatra,  etc. ,  extraites  de  ce  livre  , 
ont  été  signalées  dans  les  Provin- 
ciales, et  censurées  par  les  facultés 
de  théologie,  les  évêques  de  France 
et  les  souverains  pontifes.  IL  Dis- 
sertatio  de  Montihus  pietatis  ^im- 
primée à  Paris  et  à  Lyon  ;  l'édition 
de  i63o,dans  celte  dernière  ville, 
est  la  plus  estimée.  III.  Appendix 
de  licito  usu  œquivocationum ,  et 
mentalium  restrictionmn ,  contre 
Jean  Barnès.  Ces  trois  articles  for- 


LES 

mrnt  le  premier  volume  des  npuvres 
'.'  Lessius.  IV.  De  Gracia  ejficaci , 
cretis  dwinis  ,  Uhcrtate  arhitrii  et 
prœscientid   Dei  conditionali  dis- 
jmtatio  apologetica.Q\\o\(\\ic\  A'ssnis 
if  un  de  ceux  qui  outrent  le  moins 
Ilicace  de  la  j;ràce,  il  la  reconnaît 
(US  le  fond,  dit  Bossuet.  (Défense 
,'  la    Tradition  des   SS.    Pères  ^ 
liv.  X  ,  27.  )  V.  De  Prœdestinatione 
't  reprobatione  ajigeloruin ,  et  ho- 
iimm  ,    item  de  prœdestinatione 
h'isti  disputationesu.  Saint-Fran- 
is   de    Sales  écrivait  à  Lessius  , 
l'occasion  de  ce  traite':  «  J'ai  vu  , 
dans  la  bibliothèque  du  collège 
de  Lyon  ,  votre  Traite  de  la  pré- 
destination :   il    est   vrai  que  je 
»   n'ai  fait  que  le  parcourir  à  la  hâte, 
»  et  assez  lege'rement;  cependant  je 
»  n'ai  pas  laisse  de  remarquer  que 
'  votre  paternité  était  de  cette  opi- 
nion si  ancienne,  si  consolante, 
..  et  si  autorisée  par  le  témoignage 
»  même  des  Ecritures  prises  dans 
«  leur   sens    naturel,    savoir:  que 
»  Dieu  prédestine  les  hommes  à  la 
»  gloire  en  conséquence  de  leurs  mé- 
»  rites  prévus  ;  ce  qui  a  été  pour  moi 
»  le  sujet  d'une  grande  joie  ,  avant 
»  toujours   regaiilé  cette    doctrine 
1»  comme  la    plus  conforme  à    la 
»  miséricorde  de  Dieu  et  à  sa  grâce , 
»  comme  la  plus  approchante  de  la 
o  vérité ,  et  comme  la  plus  propre  à 
»  nous  porter  à  aimer  Dieu ,  ainsi 
-  que  je  l'ai  insinué  dans  mon  petit 
livre  de  V Amour  de  Dieu  (  i  ).  » 
I .  Quœfides  et  religio  sit   capes- 
ida,  consultatio;  cum  appendice, 


(1)  Cette  lettre,  tUtée  dAnneci  ,  a6  «oùt  i6r4, 
•••  écrit-  en  latin.  L'original  en  a  étcconter»é  au 
ewUéjçe  d'An»eri,  juiqu'en  1773.  L'aiitlieiiticité 
en  ayant  été  réroquéeen  doute  Ae»  BoIUndiitea 
•n  fcr»nt  graver,  en  1719,  ua  JFac-Simile  qii« 
iMii»  «Tont  eu  loiit  le»  yeux,  et  d'apré»  l'qu»! 
î-'lloren  a  donné  le  texte  daut  ion  DUiiunnair» 


qud  quœstionihus  quibusdam  quat 
ipsam  consultât ionem  spectanl ,  res- 
pomletur ,  Anvers,  i(iio.  (>t  ou-» 
vrage  .  selon  St.-François  de  Sales, 
est  moins  celui  de  Lessius,  que  celui 
de  l'Ange  du  grand  conseil.  Nous 
en  avons  deux  traductions  fran- 
çaises :  celle  de  Marlin  C^hristophe 
et  celle  de  Drouet  de  Mauperluy. 
VII.  Ilvgiasticon  seu  de  verd  ratio- 
fie  valetudinis  borne  et  vitcn ,  und 
cum  sensuum  ,  judicii  et  memoriœ 
integritate ,  ad  extremam  seneclu^ 
tem  conservandœ ,  Anvers,  161 3  et 
1614,  in-8*».  avec  le  Traité  intitulé: 
Luigi  Cornaro ,  o  vero  discorsi  dél- 
ia vita  sobria,  traduit  en  latin  par 
Lessius.  Sébastien  Hardy  les  traduisit 
en  français  l'un  et  l'autre,  sous  ce  ti- 
tre :  Le  vrai  Régime  de  vivre  pour 
la  conseivation  du  corj?s  et  de 
VamCy  Paris,  i64t>,  iii-8<*.  La  Bon- 
nodière  les  enrichit  de  notes  ,  et  les 
reproduisit  en  français  avec  ce  ti- 
tre :  De  la  sobriété  et  de  ses  avan- 
tages y  Paris,  1701  ,  in-i'2.  Les- 
sius, encore  à  la  fleur  de  son 
âge,  ayant  été  condamné  par  les 
médecins  à  n'avoir  })as  deux  ans 
à  vivre,  étudia  lui-même  les  prin- 
cipes de  l'hygiène,  fut  frappé  de 
l'exemple  de  Cornaro  ,  résolut  de 
l'imiter,  et  s'en  trouva  si  bien  qu'il 
traduisit  son  livre  en  y  joignant  le 
résultat  de  sa  propre  expérience, 
à  laquelle  il  dut  une  prolongation  de 
quarante  ans  de  vie.  VllL  Discus- 
sio  magni  Concilii  l.ateranensis  de 
potestate  ecclesiœ  in  temporalibus  , 
imprimé  sous  le  pseudonyme  de 
Guill.  Singleton  ,  Maience,  i6i3, 
in  -  8^.  IX.  De  potestate  summi 
Pontificis,  imprimé,  à  la  vérité,  dit 
Ribadeneira  (  Biblioth.  Scrip,  Soc, 
JesUy  pag.  3o5),  mais  supprimé  jus- 
qu'à présent  jiour  de  bonnes  raisons. 
Le  catalogue  des  ouvrages  de  Lessius 

I 


3i8 


LES 


qui  n'ont  point  été  imprimés ,  se 
trouve  dans  Sotwel  et  dans  la  Vie 
de  ce  jésuite  ,  pag.  4^.  et  suiv.  Il  est 
aisé  de  voir  que  Lessius  savait  très- 
bien  le  grec  ,  l'histoire  ,  le  droit  ca- 
non ,  le  droit  civil ,  les  mathémati- 
ques, et  la  médecine.  Juste-Lipse  re- 
connaît et  célèbre  en  lui  ces  divers 
talents  dans  de  beaux  vers  ,  rappor- 
tés par  Sotwel  et  par  Foppens.  (  Bi- 
bliotk.  Belg.  )  L-B-E. 

LESTANG  (  Antoine  de  )  (i) 
était  fils  d'Etienne  de  Guillon  ,  sei- 
gneur de  Lestang ,  président  au  pré- 
sidial  de  Brives.  Baluze ,  qui  a  donné 
la  généalogie  de  cette  famille  dans 
ses  Vies  des  papes  d'Avignon ,  la  fait 
descendre  d'un  frère  du  cardinal  de 
Monteluco,  neveu  d'Innocent  YI. 
Antoine  de  Lestang  succéda  à  son 
père  ,  fut  député  par  sa  province  aux 
états-généraux  de  Blois  en  i5'j6 ,  s'y 
acquit  l'estime  du  duc  de  Maienne  , 
qui  le  fit  intendant  de  justice  dans 
l'armée  de  la  Ligue,  et  devint  prési- 
dent à  mortier  au  parlement  de  Tou- 
louse. Henri  lY  ayant  eu  occasion 
d'apprécier  le  mérite  de  Lestang, 
dans  plusieurs  missions  que  ce  sei- 
gneur avait  remplies  auprès  de  lui, 
le  nomma  premier  président  de  la 
chambre  de  l'édit ,  établie  à  Castres , 
en  1595.  Lestang  développa, dans  ce 
poste  important,  autant  de  lumières 
que  d'intégrité.  Il  eut  la  confiance  du 
chancelier  de  Birague  ,  fut  lié  avec 
les  cardinaux  d'Ossat ,  Duperron  , 
et  la  plupart  des  savants  et  gens  de 
lettres  de  son  temps.  On  a  de  lui  : 
I,  Traité  de  la  réalité  du  Saint* 
Sacrement  de  V autel.  II.  Traité  de 
V orthographe  francoise.  III.  His- 
toire des  Gaules  et  conquêtes  des 
Gaulois  en  Italie  ,  en  Grèce  et 
Jsie  ,  avec   ce  qui    s'est  passé  de 

(1)  îVteréri  l'appelle  Françoisj  maisla  chrv>ui. 
«jue  d«  G*nji»«^  <*e  Vie,  l'appuie  Antoîççt 


LES 

plus  recommandable  ès-dites  Gaules, 
du  temps  que  les  Romains  commen- 
cèrent à  les  assujétir  à  leur  empire, 
jusqu'au  règne  du  roi  Jean,  Bor- 
deaux ,  161 7  ,  in  -  4^.  C'est  sans 
doute  cette  Histoire  des  Gaules 
qui,  dans  le  Moreri  de  1 759  et  dans 
V Histoire  de  Toulouse,  par  J.  Ray- 
nal,  se  trouve  métamorphosée  en 
une  Histoire  des  Goths  et  Fisigoths. 
On  lit  ces  quatre  vers  au  bas  du 
portrait  de  Lestang ,  qui  est  au  com- 
mencement de  l'ouvrage  : 

J.e  Limousin  eut  sa    naissance; 
Toulouse  date  son  séjour, 
Li'élat  (.le  France  sou  amour  j 
L.;  ciel  sera  sa  récompense. 

L'histoire  des  Gaules  est  divisée  en 
six  liv.  :  le  premier  traite  de  la  pre- 
mière descente  des  Gaulois  au-delà 
des  Alpes ,  sous  la  conduite  de  Sigo- 
vèse  et  de  Bellovèse  ,  du  temps  de 
Tarquiu  l'Ancien,  600  ans  avant 
l'ère  chrétienne  ;  et  de  la  seconde 
descente  sous  Brennus ,  200  ans 
après  la  première.  Le  second  livre 
traite  de  la  religion,  de  la  justice ,  de 
la  police  et  des  mœurs  des  anciens 
Gaulois  ;  le  troisième ,  de  l'état  des 
Gaules  sous  la  domination  des  Ro- 
mains ;  le  quatrième ,  de  l'empire 
des  Yisigoths  dans  les  Gaules  j  le 
cinquième  ,  des  rois  et  ducs  d'A- 
quitaine 'y  le  sixième ,  de  l'état  de  la 
France  sous  Hugues  Capet  et  ses 
successeurs  ,  jusqu'au  roi  Jean.  L'ou- 
vrage est  assez  bien  écrit  pour  le 
temps  ;  mais  il  est  trop  abrégé  ,  et 
n'est  intéressant  que  pour  le  Langue- 
doc et  la  Gascogne.  IV.  Jrréts  et 
Discours  prononcés  en  robe  rouge  , 
Toulouse  ,  ï6i2,  in-80.  Ce  magistrat 
mourut  à  Toulouse  ,  en  iGi3  selon 
les  uns,  en  161 7  selon  les  autres. — 
Son  frère ,  Christophe  de  Lestang  , 
né  en  1 56o  ,  fut  élevé  auprès  du 
cardinal  Birague,  auquel  il  succéda 
m  i58q  dans  l'évêché  de  Lodève, 


♦jAioiqu'il  n'eût  encore  que  vingt  ans  ; 
mais  le  iwpo,  à   la  prière  du  car- 
dinal démissionnaire  ,  lui    accorda 
les  dispenses   requises.   Le  duc  de 
Montmorency  ,  gouverneur  de  Lan- 
puedoc  ,  ayant  pris  les  armes  contre 
Henri  111 ,  licstang  leva  des  troupes 
pour    maintenir  son   diocèse   dans 
T'oLeissance  à  son  prince  legilime. 
duc  mit  le  siège ,  en  1 585  ,  de- 
aiit  Lodève:  la  ville  se  rendit  par 
capitulation^  l'cvèque  en  sortit  avec 
ses  troupes.  Le  duc  fit  raser  le  pa- 
lais épiscopal  ,  que  le  prélat  avait 
fait  bâtir  deux  ans  auparavant ,  et 
le  priva  de  ses  revenus  ,  jusqu'après 
ledit  de   pacification.  Le  roi  l'en 
dédommagea   par   les  abbayes    de 
Montolicu  et  d'Uzerche.  Il  devint 
ensuite  maître  de  la  chapelle  du  roi, 
memlDre  du  conseil-prive' ,  comman- 
deur du  Saint-Esprit ,  et  evêque  de 
Carcassone  ,  où  il  mourut  le  1 1  août 
1 62 1 .  C'était  un  homme  rempli  d'ex- 
cellentes qualités  :  il  avait  été  ques- 
tion de  le  faire  chancelier.     T-d. 

LESTERP-BEAUVAIS  (  B.  ),  né 
à  Florac  en  i^So  ,  était  avocat  au 
Dorât ,  avant  la  révolution  ,   et  fut 
député  aux  états-généraux ,  par  ras- 
semblée bailliagcre  de  ce  pays.  II  ne 
se  lit  point  remarquer  à  l'Assemblée 
constituante,  ou  du  reste  il  vola  avec 
le  parti  révolutionnaire.  Le  rédacteur 
de  cet  article,  qui  en  a  constamment 
suivi  les  séances,  ne  se  rappelle  pas 
l'y  avoir  entendu  une  seule  fois.  En 
septembre  i  ^Q'i  ,  il  devint  membre 
de  la  Convention  :  dans  le  procès 
de  Louis  XVI,  il  vota  contre  rap}>el 
au  peuple  ,  pour  la  mort  et  pour  le 
sursis ,  et  s'attacha  au  parti  giron- 
din. (  Voyez  GuADET.  )  Envoyé  en 
mission  dans  les   départements  de 
l'Est ,  il  fut  accusé  d'avoir  imprimé 
■qu*a près  les  événements  du  3^  mai 
1 793  y  les  décret*  d&  la  Courcutiou 


LES  319 

ne  devaient  plus  être  reconnus ,  et 
d'avoir  laissé  enlever  par  les  Lyon- 
nais insurgés  les  fusils  qui  se  trou- 
vaient dans  la  manufacture  d'armei 
de  Sainl-Elienne.  C'en  était  assez 
pour  être  proscrit.  Lesterp  fut  dé- 
crété d'accusation  comme  fédéra- 
liste ,  et  envoyé  à  Paiis ,  au  tribunal 
révolutionnaire,  qui  le  condamna  à 
mort,  le  3o  oct.  1 793,  avec  les  chefs 
du  parti  girondin.  B-u. 

LESTIBOUDOIS  (Jean  -  Bap  - 
TiSTE  ) ,  médecin ,  né  à  Douai  ,  en 
1715,   cultiva  la  botanique    avec 
succès.  Pharmacien  en  chef  de  l'ar- 
mée française  en  1 739,  il  décrivit  les 
plantes  qui  croissent  dans  les  pays  de 
Brunswick    et  de   Cologne.   11  fut 
nommé,  en  1 770,  professeur  de  bo- 
tanique ,  à  Lille ,  oii  il  mourut ,  le 
20  mars   1H04.   Ce  médecin  avait 
donné,  en  1737,  un  mémoire  sur  \k. 
pomme  de  terre  (  Solarium  tiihero' 
sum  ).  L'ignorance  avait  attribué  à 
l'usage  de  celte  plante  une  épidémie 
qui  était  survenue.  Lestiboudois  fut 
le  premier  qui  indiqua  tous  les  avan^ 
tages  que  l'on  pouvait  tirer  de  ce 
précieux  végétal.  Il  fut,  en  177*2  ,  le 
principal  rédacteur  de  la  Nouvelle 
Pharmacopée  de  Lille,  et  composa, 
en  1774»  u"c  Carte  de  Botanique , 
qui  oli're  la  combinaison  de  la  mé- 
thode de  Touruefort  avec  le  systè- 
me de  Linné.  Cette  carte  est  accom- 
pagnée d'un  Abrégé  élémentaire  dç 
botanique.  M.  Valmont  de  Boraare 
s'en  est  servi  pour  la  partie  phytolo- 
gique  de  son  Dictionnaire  d'histoire 
naturelle — Lestiboudois  (François- 
Joseph  )  fut  comme  son  père  ,  mé- 
decin et  professeur  de  botanique  à 
Lille ,  et   publia  la  Botaiwgraphie, 
Belgique,  i  vol.  in-8^. ,  1781  ;  se- 
conde édition  ,  179O  ,  4  vol.  in-8^. 
La  Botanographie  est  divisée  dank 
ce  recueil  eu  trois  parties  :   la  pre- 


3cîo  LES 

rnirre  renferme  les  éléments  de  la 
botanique ,  l'exposition  des  divers 
systèmes,  et  un  dictionnaire  des 
termes  usités  en  pliytologie;  la 
deuxième  offre  sa  méthode  divisée 
en  vingt-trois  tableaux  synoptiques, 
la  description  des  plantes  cultivées 
dans  le  nord  delà  France,  avec 
leurs  usages;  enfin,  la  troisième  par- 
tie comprend  la  nomenclature  de 
tous  les  végétaux.  Lestiboudois  a  pu- 
}3lië  encore  un  Jbj/fégé  élémentaire 
de  l'Histoire  naturelle  des  animaux, 
I  vol.  in-8^.  :il  est  mort,  en  i8i5, 
à  Lille  ,  sa  patrie.  Z. 

LESTOCQ  ou  L'ESTOCQ  (  Jean 
Herman),   ne  en     1697,   ^^^^    ^^ 
pays  d'Hanovre,  de  parents  français , 
qui  avaient  quitte  leur  pays  pour 
cause  de  religion ,   embrassa  l'état 
de  son  père,  qui  était  chirurgien. 
Ne  avec  un  génie  entreprenant,  il 
trouva  le  théâtre  de  son  activité  trop 
étroit.    Ayant    entendu   parler  des 
moyens  de  fortune  que  les  étrangers 
trouvaient  en  Russie ,  il  se  rendit  à 
Pétersbourg  en  171 3.  Pierre  pi'.  le 
nomma  son  chirurgien.    Appelé  à 
suivre  ce  monarque  dans   tous    ses 
voyages  ,  il  eut  occasion  de  gagner 
sa  confiance ,  et   de  s'entretenir  fa- 
milièrement avec  lui;  mais,  au  bout 
de  quelque  temps ,  il  tomba  en  dis- 
grâce ,  et  fiit  relégué  à  Kasan  ,  où  il 
resta  jusqu'à  la  mort  de  l'empereur. 
Catherine  I ,  dont  il    avait  soigné 
la  santé  pendant  son  voyage  en  Hol- 
lande ,  le  rappela,  en  17.^5,  et  le 
nomma  chirurgien  de  sa  fdle  Elisa- 
beth. Lestocq   s'attacha   dès  lors  à 
la  fortune  de  cette  princesse.  Déjà  il 
eut ,  à  la  mort  de  l'empereur  Pierre 
II,  le  projet  de  la  faire    parvenir 
au  trône;  mais   elle  ne   put  encore 
se    déterminer  à    tenter    une    telle 
entreprise.  Onze  ans  plus  tard ,  en 
J741 ,  il  renouvela  sa  proposition , 


LES 

et  parvint  à  décider  la  jjrincesse.  On 
a  dit  ailleurs   comment  le  plan  de 
cette  révolution  fut  conduit.  (  Foj-, 
Elisabeth  ,  tom.  XllI,  pag.  65.) 
Lestocq  fut  l'arae  de»  négocîsH^ns 
et  des  intrigues  qui  précédèrent  le 
dénouement,  et  montra  autant  de 
fermeté  que  d'adresse  :  ce  fut  lui  qui 
conduisit  Elisabeth  à  la  caserne  des 
gardes  ,  et  qui  la  fit  proclamer  impé- 
ratrice. Parvenue  à  régner,  cette  prin- 
cesse se  montra  pénétrée  de  recon- 
naissance envers  celui  qui  avait  tra- 
vaillé si  heureusement  à  son  éléva- 
tion. Lestocq ,  avec  le  ton  de  fran- 
chise qui  lui  était  naturel ,  dit  à  la 
souveraine  qu'il  pressentait  que  les 
choses  pourraient  changer,  et  que  , 
peut-être  un  jour ,  oubliant  ses  ser- 
vices, elle  le  sacrifierait  à  ses  ennemis. 
Cependant  les  premières  années  n'a- 
menèrent aucun  changement  sensible 
dans  les  dispositions  d'Elisabeth  :  on 
observa  seulement  qu'en  accordant 
à  Lestocq  la  charge  de  son  premier 
médecin ,  et  en  lui  donnant  même 
son  portrait  entouré  de  diamants , 
elle  alïècta  de  ne  lui  conférer  aucun 
ordre    de    chevalerie  ;    distinction 
qu'avaient  obtenue  beaucoup  d'au- 
tres sans  être  d'une  naissance  plus 
illustre ,  ni  avoir  rendu  de  plus  im- 
portants services.  Ayant  été  appelé 
à  prendre  part  aux  aiïàires  d'elat, 
Lestocq  y  travailla  avec  une  grande 
légèreté ,    et  en  prenant ,   selon  sa 
coutume ,  le  ton  de  la  plaisanterie 
dans  les  occasions  les  plus  sérieuses. 
Ses  mœurs  n'étaient  pas  non  plus 
très  -  régulières  ;  et  l'on  pouvait  lui 
reprocher  plus  d'un  genre  d'excès. 
Après  le  mariage  de  Paul,  depuis 
empereur ,  il  témoigna  un  grand  in- 
térêt à  la  jeune  cour,  où  l'attirait 
surtout  la  conversation  spirituelle  de 
la  grande-duchesse.  Son  assiduité  à 
cette  cour ,  sa  manière  de  traiter  les 


aff.iiiTS,  Pt  les  irrpgiilarilos  de  sa 
coiultiito,  founiiiTnlà  ses  oiiiioniislcs 
moYPns  de  lui  nuire  auprès  de  l'iiu- 
peiftlricc;  et  l'orage  comuiença  à 
gronder  sur  sa  tèle.  Beslucheir  et 
Apraxin ,  qui  étaient  surtout  irrites 
contre  lui ,  le  représentèrent  comme 
un  homme  dangereux,  dont  les  liai- 
sons à  la  cour  du  grand-duc  pou- 
vaient avoir  des  suites  fâcheuses  ,  et 
qui  entretenait  avec  les  cours  de  Ber- 
lin ,  de  Stockholm  et  de  Vienne,  des 
relations  contraires  au  système  po- 
liti(pie  de  la  Russie.  Elisabeth  prêta 
l'oreille  aux  discours  de  la  jalousie 
et  de  la  haine.  En  in48,Lestocq  fut 
arrêté  et  conduit  à  la  citadelle  de 
Pelersbour«».  Son  procès  fut  instruit  : 
pour  lui  faire  avouer  ses  prétendus 
délits  ,  on  le  menaça  de  la  question; 
mais  quelques  coups  de  fouet  qu'on 
lui  appliqua  ,  suffirent  pour  lui  ar- 
racher des  aveux  sans  fondement, 
et  qu'il  ne  faisait  que  pour  échapper 
à  des  douleurs  plus  cruelles.  En 
1 7.50 ,  le  procès  fut  terminé  ;  l'arrêt 
fjue  l'impératrice  signa ,  sans  peut- 
^tre  l'avoir  lu ,  condamnait  Lestocq 
à  perdre  toutes  ses  charges ,  ses 
litres  et  ses  possessions ,  à  recevoir 
le  knout,  et  à  être  exilé.  Il  écrivit 
à  Elisabeth  une  lettre  touchante, 
pour  lui  rappeler  les  services  qu'il 
avait  rendus;  mais  soit  que  la  lettre 
ne  fut  point  remise,  soit  qu'Elisabeth 
voulût  être  insensible  à  la  voix  de  la 
reconnaissance ,  il  ne  reçut  point  de 
réponse.  Après  avoir  subi ,  dans  la 
citadelle,  le  supplice  ignominieux  du 
knout,  Lestocq  fut  envoyé  à  Ouglitz 
sur  le  Volga ,  et  y  resta  jusqu'en 
17'j3;  on  Te  transporta  ensuite  à 
Oustioug-Veliki ,  dans  le  gouverne- 
••'^nt  d'Archangel.  En  i']Ôi ,  il  fut 

pelé  à  Pétersbourg  par  Pierre  ÏII. 

'  ccouvra  ses  titres  et  son  hôtel  ; 

is  ses  richesses  Çu  bijoux  et  meu- 
xuv. 


LES  3j, 

bics  avaicntpassé  partant  de  mains, 
qu'il  fnf  dillicile  de  les  lui  faire 
rendre.  CiOiuuie  il  s'en  plaignait  a 
Pierre  ,  ce  j)rince  lui  dit,  en  plaisan- 
tant,  qu'il  n'avait  (pi'à  chercher  les 
objets  qu'il  pourrait  reconnaîtredans 
les  maisons  particulières  ,  et  les 
enlever  où  il  les  Irouver.dt.  Lestocq 
prit  cet  avis  à  la  lettre,  d'autant 
plus  qu'il  y  voyait  une  occasion  de 
s'égayer  ,  et  de  faire  rire  ses  amis. 
Arrivant  au  moment  ou  on  l'attendait 
le  moins,  chez,  ceux  qu'il  savait  avoir 
eu  part  au  pillage  ,  il  emportait  les 
tableaux  ,  l'argenterie,  les  bijoux 
qu'il  recoiuiaissait  lui  avoir  autre- 
fois appartenu  ,  alléguant  que  c'é- 
tait par  ordre  de  l'empereur.  Pierre 
eut  néanmoins  rétabli  sa  fortune 
d'une  autre  manière  ;  mais  il  en  fut 
empêché  par  une  mort  inattendue. 
Catherine  II  ,  s'étant  souvenue  de 
Lestocq  ,  lui  fit  une  pension  de  7000 
roubles.  Dans  les  derniers  temps  de 
sa  vie  ,  il  ne  fréquenta  plus  la  cour  : 
parvenu  à  un  âge  avancé,  il  se  laissa 
aller  à  une  malpropreté  dégoûtante , 
qui  augmenta  ses  infirmités.  Il  mou- 
rut en  1767.  Le  roi  de  Pologne, 
Auguste  II ,  lui  avait  donné  ,  en 
173*2  ,  le  titre  de  comte  ,  qu'il  con- 
serva dans  toutes  les  vicissitudes  de 
son  sort.  Quoiqu'il  eût  été  marié 
trois  fois  ,  il  ne  laissa  point  d'en- 
fants ;  mais  son  nom  et  sa  mémoire 
se  sont  conservés  dans  la  postérité 
de  ses  deux  frères  en  Russie,  eu 
Prusse,  en  Saxe  et  en  Pologne.  G-au. 

LESTOILE.  ro/ez  Etoile. 

LESTONAC  (  Jeanne  de  ) ,  fon- 
datrice des  religieuses  de  la  Congré- 
gation de  Notre-Dame,  née  à  Bor- 
deaux en  i55(i,  était  fille  de  Ri- 
chard de  Lestonac,  conseiller  a\\ 
parlement  de  Guienne ,  et  nièce  de 
Michel  de  Montaigne  ,  par  s»  mère. 
Cette  dernière  avait  embrassé  la  reli- 
ai 


32  a  LES 

gion  reformée ,  et  elle  essaya  d'y 
amener  sa  fille  ;  mais  celle-ci,  pleine 
de  respect  et  de  tendresse  pour  sa 
mère,  eut  cependant  la  force  de  ré- 
sister à  ses  sollicitations.  Dirigée  par 
son  frère ,  admis  depuis  peu  chez  les 
Jésuites,  elle  se  disposait  à  suivre 
son  exemple  en  se  consacrant  à  Dieu, 
lorsque  son  père  l'avertit  qu'il  avait 
promis  sa  main.  Elle  épousa, à  l'âge 
de  dix-sept  ans ,  le  fils  du  marquis 
de  Montferrant ,  gouverneur  de  Bor- 
deaux ;  et  pendant  vingt-quatre  ans 
que  dura  leur  union  ,  elle  fut  le  mo- 
dèle des  épouses  par  sa  douceur,  sa 
patience  et  son  attention  à  remplir 
tous   ses  devoirs.  Devenue  veuve, 
elle  sentit  renaître  son  goût  pour  la 
retraite.  Deux  de  ses  filles  avaient 
déjà  pris  le  voile  :  elle  confia  la  der- 
nière  aux  soins    d'un   parent  ;   et 
ayant  fait  part  de  sa  résolution  à 
son  fds  ,  qui  tenta  inutilement  de  la 
dissuader,  elle  se  rendit  à  Toulouse  , 
et  y  entra  dans  le  couvent  des  Feuil- 
lantines ,  où  l'avait  précédée  de  quel- 
ques   mois    Antoinette   d'Orléans  , 
marquise  de   BcUe-Isle.  Elle  reçut 
riiabit  le  II  juin   i6o3;  mais  les 
austérités  auxquelles  elle  se  soumit , 
affaiblirent  sa  santé ,  et  elle  tomba 
malade.  Les  médecins    déclarèrent 
qu'ils  ne  répondaient  pas  de  sa  vie  , 
»i  elle  persistait  à    rester  dans  ce 
couvent  ;  et  elle  fut  obligée  de  reve- 
nir à  Bordeaux,  au  commencement 
de  l'année  i6o4.  Son  retour  inat- 
tendu causa  la  plus  grande  joie  à 
toute  sa  famille  ;  et  chacun  ne  son- 
gea qu'à  la  féliciter  d'un  accident 
qui  manifestait  visiblement  l'inten- 
tion de  la  Providence.  Mais  elle  mé- 
ditait déjà  un  nouveau  projet  de  re- 
traite :  après  avoir  pourvu  a  l'éta- 
blissement de  sa  fille  cadette ,  qu'elle 
maria  au   baron  d' Arpaillant ,  elle 
aila  habiter  sa  torre  de  La  Motte, 


LES 

n'emmenant  avec  elle  qu'un  ou  deux 
domestiques  d'une  fidélité  éprouvée. 
Ce  fut  dans  cette  solitude,  qu'elle 
conçut  le  plan  d'un  institut  formé 
sur  celui  des  Jésuites  ,  (  i  )  et  destiné 
à  fournir  aux  jeunes  filles  une  ins- 
truction solide  et  religieuse.  Elle  le 
soumit  au  P.  de  Borde,  son  direc- 
teur ,  qui  rédigea  les  règlements  et 
statuts  ,  et  les  fit  approuver  par  le 
Saint  -  Siège.  La  pieuse  fondatrice 
avait  fait  préparer   une  maison  à 
Bordeaux;  et  elle  y  entra   le  i®'*.' 
mai   1608,  avec  quatre  jeunes  de- 
moiselles qu'elle  avait  associées  à  ses 
projets.   Ses  deux  filles  religieuses 
obtinrent  la  permission  de  se  réu- 
nir à  leur   mère;  elle  consacra  le 
reste  de  ses  jours  à  étendre  ce  nouvel 
institut ,  qui  comptait  déjà  vingt- 
neuf  maisons  dans  les  provinces  mé- 
ridionales de  la  France,  lorsqu'elle 
mourut  à  Bordeaux,  le  'i  février 
1640 ,  à  l'âge  de  quatre-vingt  quatre 
ans.  La  Fie  de  la  vénérable  mère  J. 
de  Lestonac  ,  a  été  publiée  par  le  P. 
François,  capucin;  Toulouse ,  167 1 , 
in-4". ,  et  par  le  P.  Beaufils ,  jésuite , 
ibid.  ï'j^'i ,  in-i'i.  W-s. 

LESTRANGE  ou  LÉTRANGE 
(  René  d'Hautefort  ,  vicomte  de  ] 
et  de  Cheylane, baron  de  Bologne  en 
Vivarais ,  avait  été  nommé ,  en  i  Sg  i , 
gouverneur  du  Puy  ,  par  le  conseil 
des  ligueurs  de  cette  ville  ,  compose 
des  dignitaires  de  l'église  cathédrale 
des  officiers  de  justice  et  du  corp; 
municipal  ,  et  présidé  alors  pai 
Charles  -  Emanuel  de  Savoie ,  du( 
de  Nemours.  Après  avoir  pourvu  i 
la  sûreté  de  la  place ,  il  fit  diverse; 


(i)  Ces  ruli«ieuses  furent  d"abord  nommée 
Jésuilines  ;  elles  avaient  les  mêmes  règles  e 
les  mêmes  constitutions  que  les  jésuites.  Leu 
rùgle  fut  modifi-e  par  le  pape  Paul  V,  et  flic 
furent  agrégées  li  Tordre  de  Saint-Bencjt  Voye 
VHistoiie  des  Religieusef  de  Notre-Dame 
parle  i? .  Bouitonpieri  Foitiers,  1697,  in-4". 


IFS 

expéditions  dans  le  Velay ,  et  s>m- 

fara   du   château   de    Monllmiiiirt. 
rifonnc  que  René'  de  la  Toui-(iou- 
veiiiet  -  Chanibaud  ,    commandant 
pour  le  roi  en  Vivaiais  ,  s'avançait 
à  la  tète  de   i5oo   hommes,  pour 
surprendre  la  ville  ,  il  redoubla  de 
surveillant   pour   sa  défense  ,    en 
fit   creuser  les  fosses  ,  et  en    aug- 
menta les  fortifications.  En    iSqj, 
ce  gouverneur  surprit  le  château  de 
la  Valette,  le  pilla  ,  et  en  fit  ruiner 
les  fortrtications.  Deux  ans  après  ,  il 
s'empara   du   château  de  Bouzol  , 
situe  à  une  lieue  du  Puy ,  et  fit  re- 
prendre les  travaux  des  fossés  de 
cette  ville ,  dans   la   crainte   d'un 
siège.  Le  5  août  i594  >  ^^  duc  de 
Ventadour ,  lieutenant   du   duc   de 
Montmorenci ,  à   la  tcte  de  quatre 
(mille  hommes  ,    s'approcha  de  la 
ville  pour  la  soumettre  au  roi ,  et 
la  fit  sommer  ;    mais  l'oLstinalion 
des  ligueurs  et  du  gouverneur  Les- 
trangc  donna   lieu  au  duc  de  juger 
qu'il  ne  parviendrait  pas  à  les  ré- 
duire. Le   i6  octobre,  Lestrange , 
informé  que  la  nuit  suivante  la  ville 
devait  être  surprise  par  les  royalistes 
du    Velay ,   à  la  faveur  des  intelli- 
ences  pratiquées  avec  des  royalistes 
du  Puy ,  qui  devaient  leur  livrer  la 
|)orle   Saint  -  Gilles ,  mit  aux  fers 
es  principaux  des  conjurés,  et  dans 
iue  sortie  brusque,  à  la  tête  des  li- 
gueurs, fit   un  grand  carnage   des 
issaillants.  En  i595,  il  fut  nomné 
lar  les  ligueurs  ,  sénéchal  du  Puy. 
^ors  de  l'accommodement  du  duc  de 
^  loyeuse  avec  Henri  IV  (  24  janvier 
I  .'396  ) ,  ce  duc  le  fit  comprendre 
lans  l'édit  de  pacification  ,  et  obtint 
>our  lui  le  gouvernement  du  Puy. 
^estrange  mourut  vers   i6*ai.    Z. 

L'ESTRANGE  (SirRoger)  ,  écri- 
rain  anglais,  naquit  en  i0i6,àHuns- 
auton-Hully  d-ms  le  comté  de  Nor- 


LES  3i3 

fulk.  Son  père  ,  ardent  royaliste  , 
était  gouverneur  de  Lynn  au  com- 
nuMK  cmcnt  de  la  guerre  civile.  Le 
fils  accomj)agna  Charles  l".  danssou 
expédition  en  Ecosse,  en  1 639,  et  se 
montra  constamment  fidèle  à  la  cause 
de  ce  prince ,  pour  laquelle  il  eut 
beaucoup  à  souffrir.  Arrêté,  en  i6/|4, 
par  des  émissaires  du  parlement, 
il  fut  amené  à  Londres,  et  livré 
à  une  cour  martiale,  qui  le  condamna 
à  mort  comme  espion  :  mais  il 
obtint  un  délai,  parut  ensuite  oublié, 
et ,  après  quatre  ans  d'emprisonne- 
ment ,  parvint  à  s'échapper  ,  eu 
1648.  Le  mauvais  succès  d'une  in- 
surrection qu'il  avait  provoquée 
dans  le  comté  de  Kent ,  l'obligea  de 
s'expatrier  :  il  revint  en  Aiîgleterre 
en  i653,  se  flattant  d'être  compris 
dans  l'acte  d'amnistie  qui  venait 
d'être  rendu.  Il  adressa  d'abord  sa 
réclamation  au  conseil  rassemblé  à 
Whitehall,quin'y  eut  point  d'égard; 
mais  Cromwell  fit  droit  à  sa  deman- 
de, moyennant  une  caution  de  aooo  I . 
C'est  vers  ce  temps  qu'on  l'accuse 
d'avoir  joué  sa  partie  dans  un  con- 
cert auquel  assistait  l'usurpateur; 
ce  qui ,  à  la  restauration ,  le  fit  sur- 
nommer par  les  royalistes,  le  violon 
de  Cromwell.  Quoiqu'il  en  soit ,  le 
parti  dominant  le  laissa  depuis  traii- 
quille.  Charles  II,  rétabli  sur  le  trôno, 
oublia  ce  qu'avait  souffert  pour  lui 
Lestrange,  qui  s'en  plaignit  dans  ses 
écrits.  Ce  ne  fut  que  quelques  années 
après  la  restauration,  qu'il  fut  nommé 
censeur  de  la  presse  ,  et  membre  de 
la  commission  de  la  paix.  II  com- 
mença, en  it>()3,  un  journal  miiris- 
tériel,  qu'il  continua  jusqu'en  i6G5, 
sous  le  titre  du  Public  intelligencer 
and  the  news.  Il  publia  ,  en  1679  , 
r  Observateur ,  rédigé  dans  le  même 
esprit,  et  qui  forme  3  vol.  jusqu'en 
1O87,  où  ce  journal  fut  siippriiné. 


3^4  LES 

Son  dévouement  à  la  cour  lui  attira 
un  grand  nombre  d'ennemis  :  soup- 
çonne de  penchant  au  papisme  et  d'e'- 
loigneracnl  pour  le  prince  d'Orange , 
il  perdit  ses  places  à  l'approche  de 
la  révolution  de  1688,  et  mourut 
presque  imbëciile  ,  en  1704,  âge  de 
88  ans.  On  a  de  lui  un  grand  nombre 
d'écrits  politiques  ,  et  quelques  tra- 
ductions du  grec  ,  du  latin  et  de  l'es- 
pagnol. Il  a  traduit  les  OEuvres 
de  Josèphe  ,  les  Offices  de  Cicéroji, 
la  Morale  de  Séneque,\e?,  Colloques 
d'Erasme  ,  les  Fables  d'Esope,  les 
prisions  de  Quevedo  ;  le  Guide  à 
V Eternité  (deBona),  etcinq  Lettres 
d'une  Beligieuse  à  un  Officier  (Ca- 
valier).  Lestrange  a  joui  long-temps 
d'une  grande  re'putation.  Il  avait  du 
talent  pour  la  plaisanterie,  mais  sans 
délicatesse  :  son  style  est  facile  et 
fleuri  ;  mais  Gordon  a  démontre  que 
c'était  une  facilité  étudiée*  on  l'a  re- 
gardé même  comme  un  réformateur 
dé  la  langue  anglaise.  Le  même  écri- 
vain a  prouvé  que  ses  innovations 
consistaient  en  des  expressions  et 
des  maximes  prises  dans  le  langage 
des  rues, et  il  en  cite  plusieurs  exem- 
ples. Ses  traductions,  ajoute-t-il ,  sont 
remplies  de  contresens.  Il  est  juste 
^'avouer  ici  que  Lestrange  avait  un 
tort  plus  grand  que  tout  cela  aux 
yeux  de  Gordon  ,  c'est  d'avoir  été 
royaliste.  L. 

XESUEUR  (  Nicolas  ) ,  en  latin 
Sudojius ,  naquit  à  Paris  ,  vers  l'an 
1 54o,d'une  famille  déjà  connue  dans 
la  magistrature.  Destiné  à  suivre  la 
même  carrière ,  il  reçut  une  éduca- 
cation  conforme  aux  vues  de  ses  pa- 
rents; il  fut  pourvu  d'une  charge  de 
conseiller  ,  et  ensuite  de  président  à 
la  chambre  des  enquêtes  du  parle- 
ment. Les  devoirs  de  sa  place  ne  le 
détournèrent  point  de  son  goût  pour 
ï§s  lettres  5  il  avait  fait  une  étude 


LÉS 

aprofondie  des  langues  anciennes,  et 
il  passait  pour  un  des  plus  habiles 
hellénistes  de  son  temps.  Il  fut  assas- 
siné par  des  voleurs  ,  en  revenant  de 
la  campagne  à  Paris  ,  le  2  mai  i594. 
«  Ce  jour,  dit  Lestoile  ,  on  eut  nou- 
velles de  la  mort  du  président  Le- 
sueur ,  qui  avait  été  tué ,  comme  il 
pensait  revenir  à  Paris  :  homme  qui 
était  un  des  plus  doctes  du  parle- 
ment, mais  assez  mal  famé.»  (  Journ. 
de  Henri  IF ,  tome  11  ,  page  63.  ) 
Il  est  particulièrement  connu  par 
sa  traduction  en  vers  lyriques  latins 
des    Odes  de  Pindare  :  elle  a  été 


imprimée  à  Paris  , 


575 


58l 


in-8°.  'y  Venise ,  1 58-2 ,  in-i 2  ;  Paris, 
iSga  ,  in-i2;  et  insérée  dans  la 
belle  édition  de  Pindare  ,  Oxford  , 
1697,  "T'-fol.  Dans  cette  traduction , 
Lesueur  a  cherché  à  imiter  la  ma- 
nière d'Horace j  et  quoiqu'il  lui  soit 
très-inférieur,  son  travail  est  estima- 
ble. On  a  encore  de  lui,  comme  ju- 
risconsulte :  Disputationum  civilium 
liber,  in  quojuris  cinlis  quœstiones 
complures ,  difficiles  atque  ohscurœ, 
accuratè  tractantur y  Paris  ,  1678  y 
in-4^.  W-s. 

LESUEUR  (  EusTAcuE  ),  l'un 
des  plus  grands  peintres  du  xvii«. 
siècle ,  et  surnommé  le  Raphaëlfran- 
çais  ,  naquit  à  Paris,  en  1G17.  Fils 
d'un  sculpteur  originaire  de  Mont- 
didier,  il  montra,  de  bonne  heure  , 
pour  le  dessin  ,  des  dispositions  qui 
le  firent  placer  dans  l'école  de 
Simon  Vouet,  peiutre  habile  dans 
la  pratique  des  diverses  parties  de 
Part  qu'il  avait  puisé  en  Italie, 
mais ,  comme  le  Pérugin ,  moins 
célèbre  par  son  propre  mérite  que 
par  celui  de  ses  élèves,  dont  Le- 
brun fut  un  des  principaux.  Le- 
sueur devint  bientôt  l'émule  du 
maître  avec  lequel  il  partageait ,  à 
l'époque  de  la  renaissance  de  la  pein- 


LES 

i„.t  ou  Franco,  les  nombreux  ira- 
vaux  conini.mtlcs  par  le  cardinal  de 
Richelieu  au  premier  peintre  du 
Koi.  Une  exécution  séduisante  et  fa- 
cile ,  qui  était  commune  aux  deux 
|HMntres,  les  (it  d'abord  confondre  ; 
mais  le  talent  de  l'expression  dont 
Vouet  manquait ,  ne  tarda  pas  à  se 
développer  chez  Lesucur  ,  à  la 
Tue  de  quelques  ouvrages  de  Ra- 
phaël ;  et  ce  fut  peut-être  le  germe 
de  cette  envieuse  rivalité,  de  la  part, 
non  du  maître,  dont  il  secondait  trop 
bien  la  manière  cxpcditivc,  mais  de 
l'autre  ])rincipal  e'iève,  dont  le  pin- 
ceau était  moins  agréable.  Huit  com- 
positions de  sujets  romanesques  , 
destinées  à  être  exe'cutées  eu  tapis- 
series ,  telles  que  le  Songe  de  Poli- 
]}hile,  ou  plutôt  les  Visions  lire'es 
du  poème  de  ce  nom  (  F'oj.  Franc. 
CjOloîvna),  durent  contribuer  sans 
doute  à  le  faire  connaître;  mais  leur 
auteur  annonçait, dans  ces  sujets  mê- 
;nes,u!i  génie  sa^c  autant  qu'expres- 
sif, et  chez  qui  la  grâce  n'otait  rien 
à  la  dignité'  qu'il  mettait  dans  les  su- 
jets religieux.  Reçu  maître  à  l'an- 
cienne académie  de  Saint-Luc  ,  il 
peignit  pour  elle  un  Saint-Paul  im- 
posant les  mains  aux  malades , 
morceau  d'expression  qui  attira  l'at- 
tention du  Poussin.  Malheureuse- 
ment ce  grand  artiste,  nommé  alors 
pfemicr  peintre  du  Roi,  ne  fit  qu'un 
court  séjour  à  Paris.  Mais  de  retour 
à  Rome,  il  prenait  la  peine  de  des- 
siner des  croquis  de  modèles  du 
meilleur  style  ,  qu'il  envovait  à  Le- 
sneur.  Depuis  la  mort  de  Vouet , 
d'après  les  conseils  du  Poussin,  Le- 
sueur  ne  s'était  plus  occupé  que  d'é- 
tndier  les  bons  maîtres  italiens,  et 
surtout  l'antiqtie,  mais  d'après  un 
petit  nombre  de  copies  et  encore 
moins  d'originaux.  S'élant  marié  eu 
it»4'i  ,  sans  autre  ressource  priiici 


I.KS 


3i' 


pale  que  son  travail ,  ni  d'autre  re- 
commandation (|ue  son  talent ,  il  se 
trouvait  (ixé  à  Paris  ;  et  il  dut  tirer 
en  grande  partie  de  son  propre  fonds 
tout  ce  qu'il  acquit  dans  la  composi- 
tion et  le  dessin,  sans  aller  à  Rome, 
('cpendant  on  voit ,  par  l'espèce  des 
sujets  et  l'époque  des  gravures,  qu'il 
dessina  d'abord  des  Thèses  de  théo- 
logie ,  dont  une  gravée  à  la  date  de 
1G45,  des  Frontispices  de  livres, 
entre  autres  une  ^Annonciation  pour 
un  ollJcc  à  l'usage  des  Chartreux  ; 
qu'il  peignit  des  portraits  de  Vierge 
en  médaillon  pour  des  religieuses  ; 
qu'il  grava  lui-même  une  Sainte-Fa- 
mille de  sa  composition;  enfin,  qu'il 
conlposa  quehjues  sujets  moraux  ou 
allégoriques  de  circonstance  :  Mi- 
neive  et  la  Reine  Anne  d' Autriche  ^ 
Louis  XIV  et  le  cardinal  Mazarin; 
la  Fertu  au  Roi,  etc.  Mais  la  s\m- 
plicité  et  la  candeur  de  son  carac- 
tère le  rendaient  peu  propre  à  se 
produire  à  la  cour.  Si  la  Reine-mère 
le  nomma  son  peintre  ,  et  le  chargea 
de  décorer  le  cloître  de  la  Chartreuse 
de  Paris,  ce  que  Félibieu  et  Perrault 
ne  disent  point, la  collection  des  ta- 
bleaux de  l'histoire  de  Saint-Brui:») , 
qu'il  peignit  en  trois  années  ,  Ipi  fut 
payée  bien  médiocrement  ;  tandis 
qu'une  Fision  de  Saint  -  Bi  uno  y 
peinte  dans  le  même  temps  par  le 
Guerchin  pour  les  Chartreux  de 
Bologne ,  valut  à  celui-ci  3:">oo  fr. 
de  notre  monnaie.  La  galerie  de  la 
Chartreuse  ,  peinte  par  Lesueur,  of- 
frait, des  les  premiers  tableaux, 
bien  moins  un  élève  de  Vouet,  qu'un 
disciple  de  Raphaël,  dont  e!le  lui  a 
mérit(?  le  nom  ;  mais ,  dans  les  sui- 
vants ainsi  que  dans  les  derniers, 
sous  le  rapport  d«  l'expression  des 
sentiments  et  des  afléctions  les  plus 
infimes  ,  il  u'esl  comparable  qu'à 
lui- même  :  son  génie,  suu  goût,  c  cit 


'<'26 


LES 


son  ame;  il  n'a  pris  ni  l'un  ni  l'antre 
clans  Raphaël.  Les  tableaux  nom- 
breux de  cette  galerie  n'ont  pu  être 
tous  exëcute's  par  lui  ;  tous  l'ont  été 
sur  ses  dessins  :  mais  ceux  qu'il  a 
lui-même  termines ,  se  distinguent 
non-seulement  par  leur  disposition 
grande  et  simple  ,  par  la  justesse  et 
la  naivetë  des  expressions,  la  vëritë 
et  la  grâce  naturelle  des  attitudes , 
le  jet  aise  et  noble  des  draperies  j 
mais  par  une  délicatesse  de  correc- 
tion ,  une  sua  vite  de  ton ,  et  une  vë- 
ritë de  clair-obscur ,  analogues  au 
genre  et  au  mode  de  la  composition. 
Lors  de  la  création  de  l'académie 
de  peinture,  en  i648  ,  époque  de 
l'achèvement  de  cette  galerie  ,  Le- 
sueur  fut  du  nombre  des  douze  an- 
ciens membres  ou  professeurs  ,  et 
charge  de  peindre  le  tableau  que 
présentait  au  i^"*.  mai  le  corps  des  or- 
fèvres de  Paris  à  l'ëglise  Notre-Dame. 
Lebrun,  à  son  retour  d'Italie,  s'ë- 
tait  signale  en  peignant  le  tableau  du 
mai.  L'émulation  ,  plutôt  que  le  mo- 
dique prix  de  4oafr.  attache  à  ce  tra- 
vail, fît  produire  à  Lesueur,  en  1 649, 
le  Saint-Paul  préchant  à  Ephèse , 
où  il  mit  son  nom;  véritable  chef- 
d'œuvre  de  poésie  et  de  mouvement, 
d'invention  et  de  style  ,  à  cote  du- 
quel ni  le  Saint-André  et  le  Saint- 
Etienne  de  Lebrun  ,  pour  le  dessin, 
rii  la  Descente  du  Saint-Esprit  de 
Blanchard,  pour  le  clair- obscur , 
n'ont  pu  prévaloir.  La  réputation 
de  Lesueur  s'ëtendait ,  mais  sans 
sortir  de  la  sphère  des  communau- 
tés et  des  églises ,  ou  des  hôtels  et 
des  maisons  particulières.  Il  acheva, 
en  i65i  ,  pour  le  monast^e  de 
Marmoutier  ,  plusieurs  tableaux  , 
dont  ceux  qui  nous  restent ,  expri- 
ment ,  par  leur  caractère  touchant 
et  ascëtique,  la  perfection  du  geni^ 
qu'il  avait  embrassé.  Entre  autres 


LES 

e'glises  de  Pans  qu'enrichit  si  di- 
gnement son  pinceau  religieux,  celle 
de  Saint-Gervais  possédait,  comme 
la  métropole  de  Notre-Dame ,  un 
grand  tableau  ,  le  plus  capital  de  la 
nef ,  où  ,  dans  la  peinture  des  deux 
frères  Gervais  et  Protais ,  entraînes 
pour  sacrifier  aux  idoles ,  Lesueur 
s'est  ëlevë  au  plus  haut  degrë  de  son 
talent.  Maigre  la  sëvërilë  de  la  com- 
position ,  rien  n'ëgale  la  grâce  ini- 
mitable des  têtes  des  deux  saints. 
C'est  cette  même  grâce  aimable  , 
mais  noble  ,  qui  lui  a  fait  traiter , 
dans  un  genre  bien  différent ,  les  su- 
jets les  moins  graves  de  la  mytholo- 
gie, en  peignant  avec  autant  d'ama- 
bilité que  de  décence ,  les  Amours , 
les  Nymphes  et  les  Muses,  dans 
l'hôtel  du  président  do  Thorigny  , 
connu  depuis  sous  le  nom  de  l'hôtel 
Lambert.  L'auteur  s'y  trouva  en 
concurrence  avec  Lebrun  ;  et ,  quoi- 
que celui-ci  visitant  un  jour  le  cloître 
des  Chartreux,  et  se  croyant  sans 
témoin  ,  se  fût  récrié  d'admiration 
à  chaque  tableau,  le  peintre  de  la 
galerie  de  l'hôtel  Lambert  put  bien 
devenir  jaloux  de  celui  du  salon  des 
Muses ^  lorsqu'il  le  vit  préféré ,  en 
sa  présence,  dans  le  genre  même 
d'invention  allégorique  où  il  pré- 
tendait exceller.  On  rapporte  que  le 
nonce  du  pape  étant  venu  voir  les 
peintures  de  l'hôtel  Lambert  com- 
mencées depuis  plusieurs  années , 
Lebrun  s'empressa  de  lui  montrer 
en  détail  la  galerie  et  le  plafond  de 
V  Apothéose  a  Hercule.  Ils  passèrent 
ensuite  dans  la  salle  où  étaient  peints 
au  plafond  V Apollon  et  le  Phaéton 
de  Lesueur.  Le  nonce,  frappé  des 
beautés  du  plafond ,  s'écria  :  «  Celui- 
»  ci  est  d'un  maître  italien  j  mais 
»  l'autre  est  una  coglioneria  »  ;  et 
il  ajouta  que  c'était  dommage  qu'ils 
ne  fussent  pas  tous  les  deux  de  la 


LES 

même  main.  Il  est  bion  difluilo  ilc 
croire  qu'un  nonce  cul  traite  avec  un 
pareil  mépris  une  coniposilion  vi- 
goureuse ,   mais  moins  expressive 
j>eut-rtre   que   celle  de  la  Cai'erne 
tCKole  dans  le  Phaéton  de  TiCsueur. 
Une   tradition  plus  vraisemblable , 
reçue  à  l'hôtel  Lambert ,  était  que 
Lebrun,  avant  accompagne  le  nonce 
dans  la  galerie,  doublait  le  pas  en 
traversant  les  pièces  peintes  ])ar  Le- 
sueur ,  et  qu'alors  le  nonce  l'arrêta  , 
en  lui  disant  :  a  Voilà  pourtant  de 
»  bien  belles  peintures  î  »  Quoi  qu'il 
en  soit ,  une  prëfe'rence  quelconque 
de  la  part  d'un  grand,  dut  choquer 
celui  qui  cherchait  à  fixer  l'atten- 
tion delà  cour,  et  à  s'attirer  exclusi- 
vement, par  l'allégorie  de  ses  louan- 
ges ,  les  bienfaits  de  l^ouis  XIV  , 
auxquels  on  sait  qu'en  effet  Lesueur, 
comme  le  bon  La   Fontaine,  n'eut 
point  de  part.  Le  caractère  noble  et 
simple  ,  spirituel  et  na'if  qui  distin- 
guait   Lesueur  dans   ses    ouvrages 
comme  dans  sa  personne  ,  excitait 
contre  lui  l'envie  ,  et  le  laissait  sans 
défense.  Modeste  et  sans  ambition  , 
mais   sensible    à   l'injustice,   il  se 
permit   une  seule  allégorie,  où  il 
s'est  représenté  triomphant  de  ses 
rivaux ,  comme  le  Poussin,   a  J'ai 
»)  toujours  tout  fait ,  disait-il ,  et  je 
»  ferai  tout  encore   pour  en   être 
»  aimé.  »  En  effet ,  il  fallait  être  bien 
fortement  prévenu  pour  ne  pas  ai- 
mer l'auteur  en  voyant  ses  ouvrages. 
Mais  les   compositions  qui  l'occu- 
paient à  l'hôtel  Lambert ,  quoique 
dans  le  genre  gracieux,  fatiguaient 
SCS  organes ,  épuisaient  ses  forces. 
Persécuté ,  resté  veuf  et  seul ,  une 
maladie  de  langueur  détermina  sa 
u  retraite  chez  les  Chartreux  ,  oîi  la 
et  reconnaissance  l'avait  souvent  ac- 
1$  cueilli.  Ce  fut  dans   ce  pieux  asile 
Il  qu'il  mourut  eu  i655 ,  à  Tàgc  de 


LKS  37.7 

trente-huit   ans.   S'il  est  vrai   que 
Lebrun  ,  l'étant  venu  voir  à  ses  der- 
niers moments ,  ail  dit  avec  une  joie 
secrète,  après  avoir  fermé  les  yeux 
à  Lesueur,  que  la  mon  venait  de 
lui  uter  une  grande  épine  du  pied , 
ce  trait  ainsi  raconté  par  un  char- 
treux  même  (  Bonaventurc  d'Ar- 
gonne),  témoignerait  à  quel  point  l'a- 
mour-propre  cl  l'envie  peuvent  met- 
tre un  homme  honnête  en  02)j)osilioii 
avec  ses  sentiments.  Lesueurfutinhu- 
mé  à  Saiut-Elienne-du-Mont  ,  où  la 
simple  épitaphe  qui  fut  gravée  sur 
sa  tombe ,  est  aujourd'hui  effacée(  i  \ 
tandis  qu'un  plus  digne  monument  a 
reçu  la  cendre  de  Lebrun  à  Saint- 
Nicolas -du- Chardonnet,  et  qu'un 
autre  a  été  érigé  au  Poussin  dans  le 
Panthéon  romain,  à  côté  de  Raphaël. 
Mort  sans  enfants,  Lesueur  n'a  laissé 
que  des  neveux,  dont  un  des  descen- 
dants directs  est  aujourd'hui  célèbre 
dans  la  composition  musicale.  (Voyez 
Lesueur  ,  BiograpJUe  des  Hommes 
vivants.  )   Secondé  par  ses    frères 
Pierre  ,  Philippe  et  x4ntoine  ,  cl  par 
son  beau-frère  Goulay  ,  il  ne  forma 
point  d'école.  Laurent  Colombel  et 
Claude  Lefèvre,  furent  ses  seuls  élèves 
tandis  que  l'école  de  Lebrun  complaît 
de  nombreux  disciples.  C'est  ce  qui 
peut  expliquer  comment  Lesueur  ne 
fut  point  épargné  ,  même  après  sa 
mort ,  et  comment  une  main  jalouse 
ayant  endommagé  plusieurs  peintures 
du  cloître  desChartreux,  les  religieux 
furent  obligés  de  les  couvrir  de  vo- 
lets fermant  à  clef.  Ses  figures  d'une 


(1)  Le  rôublUtemcnt  cli*  cette  épitapbe  t$X 
iiigénitutemont  iiinpoté  tla.ni  un  tableau  r«»pr*- 
•  enlant  l'inleriear  df  cett"  rpli»e ,  e«po«^  au  «n* 
Ion  4»  Louvre,  eu  iSv^  (par  mAiiamr  «le  Manne). 
Cepenilant,  puisqu'on  a  rétabli  en  iftiS  à  Saint- 
Kiienne,  le»  picrrci  tnmulaire»  de  Racine  tt  de 
Patcal  ,  on  devrait  placer  la  tombe  de  Lesueur 
à  côté  do  celle  de  Racine,  coirme  on  eut  Jù 
reporter  pr*i  de  Pa«cal  celle  de  Detcailc»,  (*o»it 
une  r^e  roiùiie  gaxdv  encore  le  nom. 


32» 


LES 


expression  si  vraie  et  en  même  temps 
si  gracieuse  ,  opposées  aux  figures 
de  Lebrun  ,  faisaient  paraître  celles- 
ci  dures  et  moins  naturelles  ,  quoi- 
que expressives.  Les  talr-lcaux  de  Le- 
sueur  inspiraient,  ainsi  que  ceux  du 
Poussin  ,  la  vertu  ,  mais  une  vertu 
'  douce ,  et  de  plus  une  aimable  me'- 
lancolie  ,  qui  rappelait  trop  un  ar- 
tiste mort  comme  Raphaël  au  milieu 
de  sa  carrière.  Pour  achever  défaire 
connaître  l'homme  aussi-bien  que  le 
peintre  ,  nous  allons  indiquer  ,  en  y 
joignant  quelques  remarques  ,  ceux 
de  ses  ouvrages  dont  le  caractère 
exprime  le  mieux  l'esprit  qui  les  a 
produits.  L  Saint-Paul  guérissant 
les  malades ,  et  délmant  un  pos- 
sédé ,  devant  Vempereur  Néron. 
C'est  le  tableau  d'admission  de  l'au- 
teur à  l'académie  de  Saint-Luc.  On 
yvoit  dès-lors  cette  unité  d'intention 
qui  fait  concourir  diversement  les 
traits  ,  les  gestes ,  les  attitudes  des 
différents  personnages ,  à  l'action  et 
à  l'expression  générale.  Dès  avant 
la  révolution  qui ,  en  i  -^qS  ,  a  dis- 
persé les  tableaux  des  églises  et  des 
établissements  particuliers ,  plusieurs 
des  ouvrages  de  Lesueur  ont  été  , 
comme  lui,  méconnus  ou  peu  res- 
pectés. Celui-ci  fut  acquis  par  un 
particulier.  Depuis  ,  il  a  fait  partie 
!  du  Musée  du  Louvre ,  et  ensuite  de 
la  collection  de  Lucien  Buonaparte. 
On  le  trouve  gravé  par  Massard 
père  ,  dans  le  Musée  français  de 
Robillard.  IL  La  Salutation  angé- 
lique  ,  ou  V Annonciation.  A  la  dif- 
férence de  la  Vierge  du  Guide ,  qui , 
saluée  par  l'ange,  joint  ses  belles 
mains  ,  et  plaît  par  la  douceur 
attachante  de  ses  regards,  la  Vierge 
modeste  de  Lesueur  baisse  les  yeux  , 
en  croisant  les  mains  sur  sa  poi- 
trine, signe  expressif  de  l'humilité 
et  du  recueillement.  L'artiste  a  ré- 


LES 

pété  ce  geste  dans  le  Saint  Bruno  en 
prières  ,  et  dans  la  Sainte  Scolasti- 
que  peinte  pour  Marmouticr  ,  où 
d'Argenville  dit  qu'il  existait  une 
Annonciation  de  Lesueur,  ainsi  qu'à 
Paris ,  dans  la  chapelle  du  président 
Turgot.  La  Salutation  angélique  est 
annoncée  dans  la  notice  du  Musée  du 
Louvre  comme  gravée  par  Bosse  j 
cependant  Landon  la  donne  comme 
inédite ,  et  la  distingue  d'une  autre 
Salutation ,  gravée ,  en  effet ,  par 
Bosse  ,  pour  un  office  de  la  Vierge, 
ainsi  qu'on  l'a  dit  plus  haut.  IIL  La 
F^ie  de  saint  Bruno ,  en  vingt-deux 
tableaux  ,  peints  sur  bois  ,  et  ter- 
minés en  1 648.  Le  petit  cloître  des 
Chartreux  où  fut  retracée  cette  his- 
toire, avait  déjà  été  peint  en  i35o  , 
à  fresque,  et  sur  toile  en  i5o8.  Le 
prieur  de  cette  maison ,  ayant  fait 
l'offre,  en  1 7-^6,  des  tableaux  de  Le- 
sueur pour  la  galerie  du  Louvre ,  ils 
furent  enlevés  ,  mis  sur  toile  et  re- 
touchés dans  les  parties  dégradées. 
Mais  ils  n*ont  été  pleinement  restau- 
rés que  plusieurs  années  après ,  au 
palais  du  Luxembourg  ,  d'où  ils  ont 
passé  ,  suivant  leur  destination  ,  au 
MuiSée  du  Louvre.  Cette  collection  a 
été  gravée  par  Chauveau,  ou  d'après, 
ses  dessins  ,  en  un  volume  in-fol. , 
avec  des  vers  latins  et  français  ,  les 
mêmes  qui  avaient  été  tracés  sur  les 
murs  du  cloître  (  Voyez  François 
Jarry).  a.  Villerey  a  publié,  en  petit,, 
la  gravure  de  la  même  galerie  avec 
des  explications,  Paris ,  Didot ,  1 808. 
Parmi  cette  suite  de  tableaux  que 
Lesueur  appelait  modestement  des 
esquisses ,  moins  parce  qu'il  avait  été 
aidé  dans  Fexécution  de  quelques- 
uns  ,  que  parce  qu'il  voyait  la  per- 
fection au-delà  ,  on  remarque  prin- 
cipalement :  1  '^.  le  Saint  Bruno , 
prosterné  devant  un  crucifix.  Cette 
figure,  profondément  recueillie ,  ex- 


LES 

prime  ,  sous  les  replis  du  vêtement 

3ui  l'enveloppe,  le  seiitiineiit  intime 
ont  eile  paraît  jHMietree.  C'est  ici 
que  coninience  véritablement  l'his- 
toire du  saint;  caria  résurrection  du 
chanoine  damne  qui  opère  la  cou- 
version  de  saint  Bruno  ,  est  une 
fable  :  mais  à  l'époque  de  la  contro- 
verse clevce  à  ce  sujet ,  l'artiste  n'a- 
vait pu  que  se  conformer  aux  join- 
tures consacrées  par  la  tradition  et  les 
chroniques  de  l'ordre.  —  *2".  Saint 
Bnino  distribuant  ses  biens  aux 
pauvres.  Dans  l'esquisse  qui  avait 
appartenu  à  d'Argenville  et  qui  se 
trouve  au  Musée ,  la  ligne  de  compo- 
sition paraît  sous  un  angle  plus  aigu 
que  dans  le  tableau ,  où,  moins  res- 
serrée ,  elle  est  plus  favorable  au 
mouvement  des  figures ,  qui  se  pres- 
>-'.nt  sans  se  confondre.  Au  reste, 
cette  disposition  du  plan  semble 
retracer  une  fabrique  du  Poussin. 
3^.  Saint  Bruno  lisant  une  missive 
du  pape,  La  physionomie  du  saint 
et  celle  de  ses  religieux ,  son  air  de 
piéle  et  d'attention ,  leur  contenance 
humble  et  respectueuse ,  expriment 
et  produisent  ce  calme  de  l'ame  qui 
att.iche  et  qui  prête  des  charmes 
à  la  solitude  simple  du  lieu.  Le  ton 
de  la  couleur,  et  la  disposition 
des  ligues  ,  concourent  à  l'effet 
paisible  de  la  composition.  Elle 
a  ete  gravée  par  Sebastien  Le- 
clcrc  ,  dans  la  collection  de  Chau- 
vcau.— 40.  La  Mort  de  saint  Bruno, 
entouré  de  ses  religieux.  On  a  repro- 
ché au  pinceau  de  Lesueur  de  man- 
quer d'énergie ,  parce  que  son  ton  est 
assorti  au  caractère  de  ses  composi- 
tions, presque  toujours  gracieuses. 
La  vigueur  du  clair-obscur  est  ici  en 
harmonie  avec  le  pathétique  du  su- 
jet :  mais  ce  sont  les  diverses  expres- 
sions répandues  sur  tous  ces  visages, 
dans  toutes  ces  attitudes  ;  et  sous  ces 


LES  32f) 

vêlements  uniformes  et  sans  cou- 
leur, qui ,  rapportées  à  une  même  in- 
tention, à  un  même  objet ,  frappent 
le  plus  vivement  .parleur  ensemble, 
les  spectateurs  de  cette  scène.  Des 
études  faites  d'après  nature  sur  les 
religieux  eux-mêmes ,  ont  dû  seules 
contribuer  à  produire  cette  vérité 
d'effets ,  que  des  raanequins  et  les 
modèles  de  l'école  n'eussent  jamais 
pu  rendre.  —  5°.  UApotJiéose  de 
saint  Bruno  excite  un  autre  senti- 
ment ,  celui  de  l'admiration,  i^c 
groupe  d'anges  qui  porte  le  saint , 
peut  bien  rappeler  le  RavissenienC 
de  saint  Paul  du  Dominiquin  ;  mais 
la  pose  hardie  et  gracieuse  de  la 
figure  principale  s'élcvant  douce- 
ment dans  les  airs  sur  un  plan  in- 
cliné, appartient  à  Lesueur.  Cette 
dernière  pièce  de  la  collection  est 
gravée  par  Leclerc  ,  sur  les  dessins 
de  Chauveau;  elle  l'a  aussi  été  par 
François  Poilly.  IV.  Prédication  de 
saint  Paul  à  Ephèse.  Le  style 
animé  de  la  composition,  le  ton  lu- 
mineux de  la  couleur ,  tout  tend  à 
rendre  plus  frappante  l'action  de  l'é- 
loquence de  l'Apôtre,  dont  le  front 
élevé  (  os  sublime  )  semble  porter 
l'empreinte  du  Ciel  que  ses  yeux  ont 
vu  j  disposition  que  Raphaël  a  sou- 
vent cherché  à  exprimer.  Les  audi- 
teurs admirent,  recueillent  les  paro- 
les de  saint  Paul.  Dans  leur  enthou- 
siasme ,  les  jeunes  gens ,  les  femmes  , 
les  vieillards ,  apportent  les  livres: 
profanes,  les  déchirent  et  les  brûlent. 
Ce  tableau,  le  premier  de  l'école 
française  par  la  dignité  de  la  com- 
position et  du  sujet ,  a  passé  de  l'é- 
glise de  Notre-Dame  au  Musée  du 
Louvre  :  il  est  gravé  par  Picart  le 
Romain.  Un  autre  tableau  de  Saint 
Paul  prêchant  à  Ephèse  était  une 
pande  et  première  conception  de 
l'auteur,  La  gravure  qu'en  a  faite 


33o 


LES 


Benoît  Audran,  y  montre  plusieurs 
circonstances  accessoires ,  tirées  du 
récit  des  Actes  des  Apôtres  ;  mais  ces 
épisodes  compliquent  et  partagent 
l'action  principale.  Fëlibien, qui  avait 
vu  ce  tableau  chez  M.  le  Normand , 
secrétaire  du  roi ,  l'a  décrit  et  en  par- 
le avec  ëloge  :  on  ignore  ce  qu'il  est 
devenu.  V.  Tableaux  de  V histoire  de 
saint  Martin ,  et  de  celle  de  saint 
Benoit,  peints  pour  le  monastère  de 
Marmoulier:  i^.La  Messe  de  Saint- 
Martin.  Une  hostie  rayonnante  pa- 
raît sur  la  tête  du  prêtre  qui  officie, 
et  fait  éprouver  par  degré^fi  plusieurs 
des  assistants,  divers  sentiments  de 
surprise,  d'ëtonnement  et  d'admira- 
tion. Les  différentes  nuances  de  la 
même  expression  générale  y  sont 
rendues  par  le  trait  le  plus  simple,  et 
les  figures  y  semblent  faites  au  pre- 
mier coup.  Maigre  l'impression  pro- 
duite sur  une  partie  des  fidèles,  un 
caractère  de  recueillement  et  de  paix, 
fait  le  charme  de  cette  scène  reli- 
gieuse des  premiers  siècles.  Lors  de 
la  révolution ,  le  cabinet  de  M.  d'An- 
givilliers  recueillit  cette  pièce,  qui 
passa  ensuite  au  Musée.  Landon  ne 
l'a  point  comprise  dans  l'œuvre  de 
Lesueur  ,  quoiqu'il  l'eût  publiée  dans 
ses  Annales:  mais  elle  a  ëtë  gravée 
depuis  par  Laurent,  dans  le  Musée 
Français, —  •2<*.  La  Vision  de  saint 
Benoît,  auquel  apparaît Sainte-Sco- 
laslique ,  accompagnée  de  deux  vier- 
ges couronnées  de  fleurs  ,  etc.  Les 
Annales  du  Musée  avaient  donné 
comme  une  apparition  de  la  Vierge 
à  saint  Martin,  celle  de  la  sœur  de 
saint  Benoît  à  son  frère  :  l'erreur , 
rectifiée  dans  l' Oeuvre,  annonce  qu'il 
existait  un  autre  tableau  de  saint 
Martin  à  Marmoutier  ;  celui  -  ci  ne 
s'est  pas  retrouvé ,  et  aura  péri  avec 
une  Gène  du  même  auteur ,  que  la 
ïëvolution  a  détruite,  suivant  la  Vie 


LES 

qui  est  en  tête  de  son  œuvre.  La  Fh 
sien  de  saint  Benoît ,  conservée  au 
Musée  de  Tours ,  d'où  elle  a  passé  à 
celui  de  Paris  ,  a  été  gravée  par  Guë- 
rin.  Celte  composition  mystique  , 
mais  d'une  exécution  gracieuse,  réu- 
nit la  suavité  et  l'harmonie  de  la 
couleur  à  la  vivacité  et  à  la  finesse  de 
l'expression.  Le  svelte  des  figures  des 
deux  vierges  y  est  favorable  à  la 
légèreté;  mais  la  proportion  en  est 
un  peu  alongëe.  Au  reste,  l'artiste 
n'a  guère  employé  ce  mode  qu'en 
cherchant  l'idéal  de  l'antique ,  dans 
les  figures  auxquelles  il  voulait  don- 
ner une  grâce  plus  élégante  ou  plus 
délicate. — "i^.  Un  tableau  de  UMojt 
de  saint  Benoît,  où  le  saint ,  debout , 
appuyé  sur  ses  religieux ,  rend  l'es- 
prit ,  et  dont  le  dernier  souffle  est  indi- 
qué par  un  trait  lumineux  qui  se  di- 
rige vers  le  ciel  :  ce  tableau  se  trouve 
dans  lecabinetdeM.de  L**  à  Paris.  Il 
n'a  été  ni  mentionné  ni  gravé.  VL  Le 
Martyre  de  saint  Laurent ,  et  Jésus 
chez  Marthe  et  Marie,  peints  pour 
l'église  de  Saint-Germain  l' Auxerrois. 
Dès  avant  1 75o,  ces  tableaux ,  qui  ne 
le  cédaient  point  aux  plus  beaux  du 
même  maître  ,  avaient  été  vendus 
et  remplacés  par  des  copies.  Le 
premier  fut  vu  dans  le  cabinet  de 
M.  Pasquier  ,  et  ensuite  dans  celui 
de  M.  de  Lalive  ;  mais  on  croit  qu'il 
périt  depuis  par  un  incendie.  Gérard 
Audran  en  a  reproduit  le  caractère 
et  l'expression.  La  composition  du 
second  ,  qui  a  aussi  disparu  ,  nous 
est  conservée  dans  les  gravures  de 
Leclerc  ,  de  Benoît  Audran  ,  de  Pi- 
cart-le-Romain  et  de  Drevet.  VIL 
La  Mort  de  Tabithe ,  peinte  pour 
la  chapelle  de  Saint-Pierre  à  Saint- 
Etienne-du-Mont  :  elle  fut ,  malgré 
le  respect  dû  aux  cendres  de  Lesueur, 
vendue  par  les  marguilliers  à  un 
marchand  de  tableaux,  suivant  ce 


LES 

rytic  nipporle  Papillon  de  U  Fcrtc 
M  177(1  ;  et  cil  circt  ou  ne  l'a  pas 
I  <  viir  dqniis.  11  nous  en  reste  une 
gravure  faite  par  Duflos.  VllI. 
Saint  Geivûis  et  saint  Protais  , 
nduits  dtvant  le  consul  Astase  , 
jioiir  sacrifier  aux  idoles.  C'est  le 

Srincipal  des  six  grands  tableaux 
e  l'histoire  de  leur  martyre  ,  qui 
dccoraîcnt  la  nef  de  l'église  Saint- 
GeiTais  ,  et  dont  deux  furent  peints, 
le  premier  en  totalité  par  Lesueur  , 
et  le  second  ,  eu  partie  par  sou 
beau-frère.  La  grandeur  et  la  sim- 
plicité de  la  composition  ,  la  vcrire' 
des  caractères  et  des  attitudes  ,  et 
smtout  l'expression  touchante  des 
deux  frères ,  la  fermeté  du, plus  âge  , 
qui  baisse  la  vue  ,  la  candeur  du  plus 
jeune  qui  détourne  la  léte  ,  con- 
trastant avec  l'audace  et  la  violence 
des  licteurs  ,  laissent  à  peine  aper- 
< cvoir  quelques  parties  moins  ter- 
minées de  cette  composition  ,  l'une 
des  plus  capitales  du  Musée  du 
T^ouvre.  Elle  avait  été  gravée  en 
forme  de  thèse  ;  et  M.  Baquoy  l'a 
reproduile  avec  beaucoup  de  succès. 
Le  deuxième  tableau  ,  représentant 
le  Martyre  de  saint  Gervais  et  de 
saint  Protais  .  avait  été  composé 

ir  Lcsuciu*;  mais  la  mort  empêcha 
ce  grand  peintre  de  le  terminer.  Il  a 
passé  au  Musée  de  Versailles.  Deux 
MartjrresAt  chacun  des  mêmes  saints, 
ont  été  graves  ,  l'un  par  Picart-le- 
Romain,  l'autre  par  Gérard  Audran. 
Deux  autres  sujets  semblables,  peints 
«ur  les  vitraux  de  la  même  église ,  par 
PerriUjSur  les  dessins  de  Lesueur,  ont 
«té  conservés  au  Musée  des  monu- 
ments franç<'iis.  Enfin ,  une  Descente 
de  croix  ,  qui  était  dans  cette  église  , 
composition  remarquable parlasim- 
plicitéde  l'ordonnance  et  le  caractère 
touchant  et  divers  des  expressions, 

î  au  Musée  de  Paris ,  cl  a  été  gravée 


LES 


33 1 


par  Duflos.  IX.  La  Confiance  d'Â' 
lexandre,  prônant  un  breuvage  des 
mains  de  son  médecin  Philippe  , 
auquel  il  fait  lire  une  lettre  où  on 
l'accuse  d'avoir  voulu  l'empoison- 
ner. Ce  tableau  de  chevalet ,  comme 
le  précédent  ,  et  distingué  de  même 
par  la  variété  et  la  délicatesse  des 
expressions,  appartenait  à  la  galerie 
d'Orléans  :  il  a  passé  en  Angleterre. 
Benoît  Audran  l'a  gravé.  X.  Sujets 
mythologiques.  Galerie  de  l'hôtel 
Lambert,  composée  de  dix-neuf  ta- 
bleaux ,  dont  sept  décoraient  le  Sa' 
Ion  de  l'Amour  ;  sept ,  le  Cabinet 
des  Muses  :  les  cinq  autres  avaient 
été  peints  en  camaïeux  dans  V Appar- 
tement des  bains.  L'artiste  ,  sage  et 
fécond ,  a  su  ,  sans  s'écarter  de  la 
mythologie ,  créer  des  allégories  in- 
génieuses et  toujours  claires  ,  telles 
que  y  Amour  réprimande  par  sa 
mère  ,  et  se  réfugiant  dans  les  bra^ 
de  Cérès  ;  V  Amour  dérobant  le  feu 
du  ciel  à  Jupiter  y  pour  venir  ani- 
mer la  terre  ,  etc.  On  a  déjà  parlé 
du  Phaéton  demandant  à  conduire 
le  char  d'Afwllon ,  composition  de 
la  plus  grande  richesse ,  011  la  force 
et  la  grâce  se  trouvent  réunies  ,  et 
où,  comme  dans  les  autres  ouvrages 
de  l'auteur ,  toutes  les  parties  ,  tous 
les  détails  concourent  à  l'intelli- 
gence de  l'ensemble  ,  ainsi  qu'à  l'ex- 
pression et  au  développement  du 
sujet.  Elle  n'a  pu  être  terminée  par 
Lesueur ,  qui  fut  aidé  dans  ce  travail 
par  son  beau-frère.  La  marquisp  du 
Châtelet  ayant  acquis  l'hôtel  Lam- 
bert en  1 7  39 ,  le  cabinet  de  V Apollon 
et  des  Muses  ,  dont  les  figures 
sont  si  agréablement  disposées  et 
d'une  harmonie  si  douce  ,  devint 
celui  de  Voltaire,  de  1745  à  I749' 
M.  d'Angivillicrs  acheta  ,  pour  le 
Roi  ,  en  1777,  les  tableaux  de  ce 
cabiuet  et  ceux  du  salon  de  l'Amour; 


:î3^ 


LES 


et  ils  ornent  aujourd'hui  le  Mase'e.  lia 
galerie  de  l'hôtel  Lambert  a  e'të  gra- 
ve'e  par  Desplaces ,  Diipuis ,  Beau- 
Tais  et  Duchange ,  sous  la  direction 
de  Bernard  Picart ,  en  un  vol.  in- 
fo!. XL  Plusieurs  autres  tableaux  et 
dessins  ,  dignes  de  remarque,  se  trou- 
vent indiques  dans  V  OEuvre  de  Le- 
sueur,  grave'  au  trait  et  publie  par 
M.  Laudon  ,  Paris ,  i8i  i  ,  en  2  vol. 
in-4**. ,  comprenant  cent  dix  pièces  ; 
mais  comme  la  collection  ,  quoique 
nombreuse  ,  contient  seulement  les 
pièces  qu'on  a  pu  connaître  pour  les 
graver ,  il  faut  y  joindre  celles  qui 
ont  été  désignées  dans  les  Voyages 
pittoresques  ,  comme  existantes  à 
l'ancien  cabinet  du  Roi ,  à  la  troi- 
sième chambre  de  la  Cour  des  aides, 
dans  la  chapelle  du  président  Turgot, 
et  à  l'ancien  hôtel  de  Bouillon ,  parmi 
lesquelles  il  en  est  qui  formaient  des 
collections  plus  ou  moins  remarqua- 
bles. On  a  attribué  à  Lesiieur  une  sui  te 
dessins,  au  nombre  de  dix-huit ,  la- 
vés à  l'encre  de  la  Chine  ,  et  qu'on 
voyait  dans  la  salle  des  marguilliers 
à  Saint-Etienne-du-Mont  :  mais  ils 
ont  été  reconnus  pour  être  de  La 
Hyre.  Un  des  frères  de  Lesueur  les 
avait  seulement  peints  en  grand  pour 
être  exécutés  en  tapisseries.  Les  des- 
sins de  Lesueur  sont  la  plupart  à  la 
pierre  noire  avec  un  léger  lavis  re- 
haussé de  blanc  :  les  contours  en 
sont  purs,  élégants  ,  et  la  touche  lé- 
gère. Il  a  fait  aussi  des  esquisses  à 
la  gouache  ou  à  l'huile ,  où  l'on  re- 
trouve ces  airs  de  tête  fins  et  gra- 
cieux, ces  expressions  douces  et 
naïves ,  ce  jet  de  draperies  élégant  et 
naturel,  qui  le  font  partout  aisément 
reconnaître.  Lesueur  a  fait  lui-même 
son  portrait,  qui  a  été  gravé  par 
Van-Schuppen,  en  1696  ,  et  depuis 
par  Cochin ,  pour  sa  réception  à  l'a- 
cadémie. Sou  buste,  sculpté  par  Rô- 


les 

land  ,  décore  la  galerie  française  du 
Musée.  Enfin,  dans  un  tableau  du 
cabinet  de  M.  de  L*"*".,  et  qui  mérite- 
rait d'être  gravé,  Lesueur  s'est  peint 
tranquillement  assis,  demi-couché, 
sur  un  lit  de  repos ,  tandis  que  son 
seul  génie  terrasse  la  calomnie ,  et 
met  en  fuite  l'envie.  Le  fond  repré- 
sente un  vaste  jardin  d'une  perspec- 
tive riante  :  image  paisible  de  l'ave- 
nir, qui  a  rendu  enfin  une  justice 
éclatante  au  génie  modeste  ,  en  réu- 
nissant dans  le  palais  de  nos  Rois  qua- 
rante de  ses  productions  les  plus 
belles,  échappées  à  l'injure  des  hom- 
mes et  aux  révolutions.        G-ce. 

LESUEUR  (Jean),  historien, 
naquit  en  France  ,  dans  le  xvii^. 
siècle ,  de  parents  réformés.  x4près 
avoir  terminé  ses  études  à  l'acadé- 
mie de  Genève,il  fut  nommé  pasteur 
de  l'église  de  la  Ferté-sous-Jouarre. 
Il  employait  tous  ses  loisirs  à  l'étu- 
de; et  il  entreprit  une  histoire  ecclé- 
siastique dont  les  premières  parties 
reçurent  un  accueil  très-favorable  des 
différents  synodes  de  France,  et 
lui  méritèrent  des  encouragements. 
Les  infirmités  dont  il  fut  accable' 
l'obligèrent  de  suspendre  son  tra- 
vail; mais  il  le  reprit  avec  beaucoup 
d'ardeur,  et  il  venait  de  terminer 
le  dixième  siècle,  lors  qu'il  mourut 
en  1681.  L'ouvrage  de  Lesueur  est 
intitulé:  Histoire  de  l^ Eglise  et  de 
V Empire,  depuis  la  naissance  de 
Jésus  -  Christ  y  Genève,  1672,  et 
ann.  suiv.,  6  vol.  in-4*^.,  ou  8  vol. 
in-i2;ibid.  1714,111-4°.;  nouvelle 
édition ,  revue ,  corrigée ,  augmentée 
de  quantité  de  remarques  et  des  au- 
torités, Amsterdam,  1780  ,  8  tomes 
formant  4vol.  in-4°.  On  doity  joindre 
la  Continuation]usc[iik  la  fin  du  xii®. 
siècle  ,  par  Bénédict  Pictet ,  pas- 
teur de  Genève,  Amsterdam,  lySs, 
3  vol.  iii-4°.  JJ Histoire  de  Lesueur 


rs!  rVrito  avec  candrurcf  siinplicito; 
Irs  faits  y  sont  rapporfes  d'niir  ma- 
nière .  en  gênerai,  assez  impartiale. 
On  eile  encore  de  lui  nn  Traité  de  la 
dwinité  de  V Ecriture  sainte.  W-s. 
LESUEUR  (Pierre)  ,  ne  à  Rouen, 
en  i()36 ,  se  distingna  dans  la  gra- 
vure en  bois  par  la  hardiesse  de  sa 
manière ,  et  mourut ,  en  1 7  iG ,  lais- 
saut  deux  fils  ,  qui  cultivèrent  le 
même  art.  —  L'aine ,  Pierre ,  ne'  en 
i663 ,  se  serait  fait  un  nom  dans  la 
gravure,  s'il  ncfiit  mort  prémature'- 
ment ,  en  1 698.  —  Le  second  , 
Vincent ,  reçut  les  premières  le- 
çons de  son  père,  et  vint  se  per- 
fectionner à  Paris ,  sous  la  direc- 
tion de  Papillon,  qu'il  surpassa  bien- 
tôt dans  la  pratique  des  entre-tail- 
les. Il  fut  marie  trois  foisj  et  le 
dernier  de  ces  mariages  lui  donna 
beaucoup  de  chagrin ,  sa  femme 
étant  déjà  mariée  sans  qu'il  pût  le  sa- 
voir lorsquclle  l'épousa.  Il  mourut 
en  1743. — Nicolas  Lesueur, neveu 
des  deux  précédents  ,  naquit  à  Paris  , 
en  1690.  Quelque  talent  que  ses  on- 
cles aient  manifeste'  dans  la  gravure  , 
il  les  a  surpasses  en  prenant  une 
autre  route.  Il  porta  à  sa  perfec- 
tion le  genre  dit  en  camaïeu  ^  et 
ses  ouvrages  en  ce  genre  sont  nom- 
breux; ils  imitent  les  dessins  au 
lavis ,  rehausses  de  blanc.  L'ancien- 
ne édition  du  Recueil  de  Crozat 
«n  renferme  im  certain  nombre  d'a- 
près plusieurs  grands  maîtres.  On 
peut  voir  une  description  de  seize 
de  ces  gravures,  dans  le  Manuel 
des  amateurs  de  l'art ,  par  Huber 
et  Rost.  Lesueur  gravait  également 
au  burin  ;  et  l'édition  in-f».  des  Fa- 
bles de  La  Fontaine,  d'après  les  des- 
sins de  Bachelier  ,  est  enrichie  de 
vignettes  et  de  fleurons  ,  qu'il  a  gra- 
ves avec  autant  de  goût  que  de  deii- 
catciise.  il  mourut  à  Paris ^  en  17O4. 


LES 


333 


— Sa  sœur, Elisabeth,  cultiva  avec 
succès  la  gravure  en  bois.  Ln  ville 
de  Rouen  la  chargea  de  graver  le» 
estanij)iiles  ou  manpies  des  toiles 
pour  les  halles  ;  Elisabeth  s'acquitta 
de  cette  commission  avec  un  tel  suc- 
cès ,  que  le  corps  municipal  lui  fit 
une  pension  de  u,ooo  livres.  P-s. 
LESUIRE  (  RoBEnT  -  Martin  ) , 
littérateur,  naquit  à  Rouen  en  1737. 
Après  avoir  termine  ses  éludes  ,  il 
vint  à  Paris ,  et  obtint  la  place  de 
lecteur  de  l'Infant  duc  de  Parme  : 
il  profita  de  celte  circonstanco 
pour  visiter  l'Italie  ;  et  il  paraît , 
d'après  différents  passages  de  ses 
ouvrages  _,  qu'il  fit  plusieurs  voyages 
en  Angleterre.  De  retour  à  Paris  ,  il 
se  mit  aux  gages  des  libraires ,  et 
publia ,  chaque  année ,  de  nouvelles 
productions ,  dont  quelques-unes  eu- 
rent du  succèsdansuuecertaineclass© 
de  lecteurs.  Pendant  la  révolution  , 
il  fut  nommé  professeur  de  législa- 
tion à  l'école  centrale  de  Moulins  ; 
il  perdit  cette  place  à  l'organisatioa 
des  lycées,et  revint  à  Paris ,  oij  ilmou- 
rut  le  ti7  avril  1 8 1 5.  Lesuire  avait  de 
l'esprit  et  de  l'imagination;  mais  il 
manquait  de  goût  etde  jugement.  Sou 
style  est  incorrect  et  trivial ,  rempli 
d'expressions  choquantes  et  de  mau- 
vais ton.  Plein  d'une  vanité  insup- 
portable ,  il  parle  souvent  de  lui 
dans  ses  ouvrages ,  et  il  avoue  qu'il 
se  regardait  comme  un  homme  d*un 
génie  extraordinaire.  On  a  de  lui  : 
I.  Epitre  à  Voltaire  y  Paris,  1761, 
in-8".  ;  elle  lui  valut  une  réponse 
anonyme  très-spiriluelle  ,  et  dans 
laquelle  Voltaire  lui  donna  des. 
conseils  dont  il  aurait  dû  profiter. 
IL  La  Festale  Clodia  à  Titus f 
hérdide  y  iXnà.  1767,  in-S».  111. 
Coup  d'œil  sur  le  Salon  de  177^, 
par  un  aveugle,  ibid.  in -8°.  IV. 
Eloge  du  maréchal  de  Câlinât,  de- 


334 


LES 


dié  à  lui-même ,  ibid.  1775,  in-S^. 
Ce  discours  n'avait  point  cte  envoyé 
au  concours  de  l'académie  française. 
V.  Isaac  et  Rehecca ,  ou  les  Noces 
patriarcales ,  poème  en  prose  e  t 
en  cinq  chants  ,  Paris ,  1 7  7  7 ,  in- 1 2  j 
ibid.  1780.  La  simplicité  des  récits 
de  l'Histoire  sainte  y  est  défigurée 
par  des  épisodes  qui  ne  tiennent  que 
de  loin  au  sujet  ;  et ,  pour  le  style , 
comme  pour  l'invention  ,  Lesuire 
est  resté  à  une  distance  infinie  de 
Gesner  qu'il  avait  pris  pour  modèle. 
\  L  Lettre  de  M.  Camille  Trillo  , 
fausset  de  la  cathédrale  d' Auch ,  sur 
la  musique  dramatiq  ue ,  ibid.  1777, 
in-r2.  Yiï.  Histoire  de  la  Bépubli- 
que  des  lettres  et  arts  en  France , 
pour  les  années  1779,1780,  1781  et 
1 782,  quatre  parties  in- 1 1.  C'est  une 
gazette  que  l'auteur  semble  n'avoir 
entreprise  que  pour  louer  ses  propres 
ouvrages.  VIIL  Les  Amants  fran- 
çais à  Londres  y  ou  les  Délices 
de  l'Angleterre  ,  Londres  ,  1780  , 
in- 12"  mauvais  roman.  IX.  Aux 
Mdnes  de  J.  J.  Rousseau ,  poème , 
Paris,  i78o,in-8o.  X.  Le  Nou- 
veau Monde  y  poème  en  vingt-six 
chants,  ibid.  1782,  1  vol.  in-12; 
nouvelle  édition  refondue  et  cor- 
rigée, ibid.  1800  ,  '1  vol.  in-8".  Il 
est  impossible  de  rien  imaginer  de 
plus  bizarre  et  de  plus  extravagant 
que  la  conception  de  ce  poème  , 
dont  le  sujet  est  la  découverte  de  l'A- 
mérique. XI.  V Aventurier  fran- 
çais, ou  Mémoires  de  Grégoire  Mer- 
veil ,  Paris  ,  1782,  2  vol.  in- 12.  — 
Première  suite ,  ou  Mémoires  de  Gré- 
goire Merveil,  marquis  d'Erbeuil , 
ibid.  1783  ,  1  vol.  in- 12.  —  Se- 
conde suite  ^  contenant  les  Mémoires 
de  Cataudin  ,  prince  de  Rosamine  , 
fds  de  Grégoire  Merveil ,  ibid.  1 784, 
2  vol.  in- 12.  —  Dernière  suite ^  con- 
tenant les  Mémoires  de  Ninettc,  fille 


LES 

de  Merveil ,  ibid.  1788,  2  vol.  in- 
12.  Ce  roman  est  de  tous  les  ou- 
vrages de  Lesuire ,  celui  qui  a  eu 
le  plus  de  vogue  ;  il  a  été  traduit  en 
anglais  et  en  allemand.  C'est  un  amas 
de  folies  incohérentes  ;  mais  il  y  a 
de  l'imagination ,  et  Ton  n'est  pas 
étonné  qu'il  ait  fait  quelque  temps  les 
délices  des  lecteurs  frivoles.  Le- 
suire a  essayé,  au  bout  de  quinze 
ans ,  de  ranimer  le  goût  du  public 
pour  cet  ouvrage,  en  donnant  la 
Courtisane  amoureuse  et  vierge , 
ou  Mémoires  de  hucrhcG  .pour servir 
de  suite  à  l'Aventurier  français  , 
Paris  ,  1802  ,  2  vol.  in- 12.  Mais  le 
froid  accueil  que  reçut  ce  roman  ,  lui 
prouva  que  le  bon  sens  et  la  correc- 
tion du  style  sont  absolument  néces- 
saires au  succès  d'un  livre,  et  peuvent 
seuls  le  rendre  durable.  XII.  LaMor- 
te  de  mille  ans  au  salon  de  1 788 , 
1783,  in-8«.  XIII.  Le  Philosophe 
parvenu ,  ou  Lettres  et  Pièces  origi- 
nales contenant  les  Aventures  d'Eu- 
gène sans  pair,  Paris,  1788,  6  vol.  in- 
1 2  ;  trad.  en  allemand.  Il  a  fait  pré- 
céder cet  ouvrage  d'une  Lettre  (vraie 
ou  supposée)  de  J.  J.  Rousseau,  qui  lui 
donne  les  plus  grands  éloges.  XI V.  Le 
Crime,  ou  Lettres  originales  de  César 
de  Perlencourt,  ibid.  1789,  4  vol. 
in- 12.  —  Le  Repentir  ou  suite  du 
Crime,  ibid.,  1789,  4  vol.  in- 12. 

XV.  Les  Confessions  de  Rabelais  ; 
—  de  Marot  ;  —  de  Mich.  de  Mon- 
taigne ,  ibid.  1 796-98  ,  3  vol.  in-18. 

XVI.  Le  Secret  d'être  heureux,  ou 
Mémoires  d'un  Philosophe ,  ibid. 
1797  ,  2  vol.  in-18.  Ce  roman  de- 
vait avoir  une  suite  qui  n'a  point 
paru.  XVII.  Charmansage,  ou  Mé- 
moires d'un  jeune  citoyen  faisant 
l'éducation  d'un  ci -devant  noble, 
Paris ,  1 792 ,  4  vol.  in-i  2.  XVIIl.  Le 
Législateur  des  chrétiens,  oul'évan- 
giltr  des  déicoles  ^  1 798^  in- 18.  XIX, 


/  rï  Quatre  yiventures /ihid. ,  1 799 , 
4  vol.  iu-ii,  XX.  Artf</me/rt  /'/««- 
Crt*i^  ou  Lettres  d'une  jeune  pay.sanu(% 
etc.  ibiil.,  i8o3,4  vol.  in- iJi.  Parmi 
les  manuscrits  que  Lesuirc  a  laisses, 
on  a  remarque  celui  qui  est  intitule  : 
^fcs  Confessions,  W-s. 

LESZCZINSKI.  ro>. Stanislas. 
LETA]NDUERP:(Henri-Fran<^ois 
Desherbiers  ,  marquis  de  ),  l'un  des 
olUcicrsqui  ontlepius  rontribueàla 
réputation  de  notre  marine,  dans  le 
dix-huitième  siècle,  naquit  à  Angers, 
en  i68'2,  d'une  famille  ancienne, 
originaire  du  Poitou.  Son  père  ,  ca- 
pitaine de  vaisseau  ,  lui  fit  faire  sa 
première  campagne  en  qualité  de 
mousse,  dès  l'âge  de  dix  ans  :  l'année 
suivante  il  servit  en  qualité' de  volon- 
taire ,  sous  les  ordres  de  M.  de  Mon- 
beault ,  son  oncle  ,  qui  prit  un  soin 
particulier  de  son  éducation.  En 
1703  il  fut  embarqué  comme  ensei- 
gne sous  hs  ordres  de  M.d'Osraont, 
connu  par  son  extrême  sévérité  dans 
le  service ,  et  mérita  sa  bienveillance 
au  point  que  le  comte  de  Toulouse, 
à  la  recommandation  de  ce  capi- 
taine ,  n'hésita  pas  à  lui  confier 
une  expédition  aussi  importante  que 
périlleuse  :  c'était  d'aller  secourir  le 
Saint-Michel,  qui  se  perdait.  Létan- 
duère  manœuvra  avec  tant  d'habi- 
leté et  de  courage,  qu'il  sauva  le  vais- 
seau du  péril  le  plus  imminent  :  on 
demanda  pour  lui  le  grade  de  lieute- 
nant ,  auquel  il  ne  fut  cependant  éle- 
vé qu'eu  170.5.  Blessé  au  siège  de 
Malaga  ,  par  un  éclat  de  bombe  qui 
lui  fracassa  la  mâchoire ,  il  était  à 
peine  rétabli  qu'il  s'embarqua  sur  la 
frégate  V Etrille,  destinée  à  faire 
partie  de  l'expédition  contre  Gibral- 
tar. Ayant  été  chargé  de  s'approcher 
de  la  côte  de  Garthagène  pour  re- 
connaître les  dispositions  de  l'eune- 
iui,il  se  trouva  tel I emwil engagé eu- 


LET  335 

tre  la  flotte  anglaise  et  la  terre ,  qu'il 
ne  pouvait  échapjwr.  Il  fit  alors  dé- 
barquer tout  son  équipage.  Resté  seul 
à  bord  avec  son  maître  canonnier,  il 
mit  le  feu  à  la  frégate,  et  s'éloigna 
dans  sou  canot.  Mais  s'ajKircevant 
que  le  feu  ne  faisait  aucun  progrès; 
et  craignant  qu'il  ne  fût  éteint ,  il  &e 
rapprochait  pour  le  rallumer  lorsque 
la  frégate  sauta  en  l'air.  A  son  re- 
tour de  cette  expédition,  se  trou- 
vant à  bord  de  W^ragon,  comman- 
dé pfir  M.  Desherbiers  ,  son  oncle , 
il  tomba  au  pouvoir  des  Anglais, 
et  fut  conduit  prisonnier  à  Lisbonne 
où  il  resta  plusieurs  mois  sur  parole. 
Il  profita  de  cette  occasion  pour 
prendre  connaissance  des  forces  na- 
vales anglaises  et  hollandaises  qui  de- 
vaient porter  l'archiduc  à  Barcelone , 
et  il  en  envoya  au  ministère  un 
compte  très-exact.  Revenu  en  Fran- 
ce ,  après  un  échange  ,  il  fut  de- 
mandé pour  lieutenant  par  divers  ca- 
pitaines, et  fit  sous  leurs  ordres-plu- 
sieuis  campagnes,  notamment  celle 
de  1709  dans  l'escadre  de  Dugay- 
Trouin.  En  1 7 1 8 ,  il  fit  le  voyage  des 
Grandes-Indes,  leva  la  carte  de  l'era- 
l)ouchure  du  Gange ,  et  revint  en 
1721,  rapportant  d'utiles  renseigne- 
ments pour  la  navigation.  Nommé  ca- 
pitaine de  vaisseau  en  17  27,  il  fut  en- 
voyé eni  730  au  Canada ,  remonta  le 
fleuve  St.-Laurent  jusqu'à  Québec,  et 
rectifia, par  ses  observations,  les  car- 
tes dont  on  s'était  servi  jusqu'alors. 
Il  fut  récompensé  de  ses  services ,  en 
1736,  par  la  charge  de  commis- 
saire-général de  l'artillerie  de  Roche- 
fort.  Il  fit  partie,  en  1740,  d'une 
expédition  pour  les  Antilles ,  sous 
les  ordres  de  M.  d'Espinay.  Dans  les 
parages  de  Saint-Domingue  il  fut 
attaqué  par  six  vaisseaux  anglais , 
qui  feignirent  de  le  prendre  pour  une 
escadre  espagnole  :  le  combat  ayant 


336 


LET 


cté  à  Tavantage  des  Français ,  et  \e 
commandant  anglais  étant  venu  le 
lendemain  s'excuser  de  sa  prétendue 
méprise,  Lëlanduère  lui  demanda 
s'il  voulait  recommencer.  Il  passa  , 
en  174'-*  7  à  la  place  de  directeur  de 
l'artillerie  de  Dunkerque,  et  com- 
manda les  batteries  de  la  marine  au 
siège  de  Furnes.  Nomme'  chef  d'es- 
cadre en  1745 ,  il  mit  aussitôt  à  la 
voile  pour  l'Amérique ,  et  s'empara 
de  quatre  frégates  anglaises,  à  la  vue 
du  port  de  Brest.  Il  fut  chargé  ,  en 
1747?  d'escorter,  avec  huit  vais- 
seaux, un  convoi  de  25o  bâtiments 
destine  pour  les  Colonies  :  arrivé  le 
îi5  octobre,  à  la  hauteur  de  Belle- 
Ile  ,  il  signala  une  flotte  ennemie 
de  dix-neuf  vaisseaux  ;  fît  aussitôt 
des  dispositions  pour  garantir  le 
convoi,  et  attendit  le  combat:  il  sou- 
tint ,  pendant  le  reste  de  la  journée, 
les  efforts  de  toute  l'escadre  anglaise. 
Le  Tonnant  qu'il  montait  combattit 
successivement  contre  quatorze  vais- 
seaux, et  eut  affaire  à  cinq  à-la-fois  : 
il  perdit  sa  voilure ,  et  son  artil- 
lerie fut  démontée  ;  mais  avec  le 
secours  de  Vaudreuil ,  qui  s'avança 
pour  le  dégager ,  il  parvint  à  gagner 
le  port  de  Brest ,  à  la  faveur  de  la 
nuit.  Cette  action  d'éclat ,  désignée 
sous  le  nom  de  Combat  du  Ton- 
nant ,  valut  à  Létanduère  le  titre  de 
commandeur  de  Saint-Louis.  Il  fut 
nommé ,  l'année  suivante,  comman- 
dant de  la  marine ,  à  Rocliefort,  où  il 
mourut  en  1750.     H-q-n  et  W-s. 

LETELLIER,  peintre,  naquit  à 
R.ouen ,  en  1 6 1 4.  Il  était  neveu  du  cé- 
lèbre Poussin,  qui  le  nomma  son  lé- 
gataire. C'est  aux  leçons  d'un  maî- 
tre aussi  habile,  qu'il  dut  la  belle  imi- 
tation de  la  nature  ,  la  simplicité  de 
style,  et  la  noblesse  que  l'on  remar- 
que dans  ses  tableaux.  Les  ouvrages 
de  Letellier  sont  faibles  de  couleur  j 


LET 

mais  ils  se  distinguent  par  la  perspec- 
tive linéaire,  et  surtout  par  l'expres- 
sion :  les  accessoires  sont  bien  choi- 
sis ;  mais  le  dessin  est  quelquefois 
mou ,  et  les  formesdes  figures  rondes 
et  sans  fermeté.  Il  peignait  de  pré- 
dilection les  sujets  de  dévotion.  Ses 
têtes  de  vierge  sont  pleines  de  can- 
deur,  et  d'une  grâce  qui  n'est  jamais 
dépourvue  de  noblesse.  Avant  la  ré- 
volution ,  il  y  avait  peu  de  couvents 
ou  d'églises  à  Rouen  ,  qui  ne  fussent 
ornés  de  ses  tableaux.  Le  Musée 
de  cette  ville  en  possède  dix-sept , 
parmi  lesquels  on  doit  citer  Les 
adieux  de  saint  Paul  et  de  Si- 
las ,  allant  au  martyre  :  toutes 
les  parties  de  l'art  s'y  font  remar- 
quer. On  distingue  encore  une 
Sainte-Famille ,  d'un  fini  précieux , 
et  d'une  vérité  de  coulsur  qui  prouve 
que  Letellier  aurait  pu  se  signaler 
dans  cette  partie  de  l'art.  Parmi 
SCS  autres  tableaux  ,  on  remarque 
encore  deux  Ascensions  ,  deux  As- 
somptions^ une  Annonciation,  et 
une  Punficalion,à'\m  excellent  style 
et  du  plus  beau  fini;  enfin  saint 
Joseph  portant  V  Enfant- Jésus  dans 
ses  bras,  tableau  de  grandeur  natu- 
relle ,  remarquable  par  l'entente  de 
la  perspective ,  et  la  pureté  du  style. 
Vers  la  fin  de  sa  vie ,  Letellier  chan- 
gea de  manière ,  et  peignit  avec  une 
mollesse  ,  un  fini  que  l'on  ne  trouve 
pas  dans  ses  premiers  ouvrages.  Il 
mourut  en  1676.  P-s. 

LETELLIER  (Michel),  chan- 
celier de  France,  néle  19  avril  i6o3, 
d'un  conseillera  la  cour  des  aides,  sei- 
gn(^ur  de  Châville ,  fut  d'abord  con- 
seiller au  grand-conseil ,  puis  procu- 
reur du  Roi  au  châtelet  de  Paris ,  eu 
t63i.  Il  fut  nommé  ensuite  maître 
des  requêtes ,  et  eut  l'avantage  de  tra- 
vailler, avec  le  chancelier  Séguier  et 
M.  Talon,  aux  procédures  instruites 


t.CT 

contre  les  séditieux  de  Normandie. 
l/liaMlele  qu'il   montra  dans  celte 
alïaire  lui  valut  sa  nomination  à  Tin- 
Icniiaui'e  de  Pic'mont  en    i64o.  Ce 
lui  alors  (|u'il  eut  occasion  d'ctrc 
connu  du  cardinal     iNfazarin  ,   qui 
le  prcscnta  à  Louis  XIII,  et  le  fit 
nommer  secrétaire  d'état  an  de])ar- 
lemenl  delà  guerre,  lors  de  Teloi- 
pnenicnt  de  M.  Desnoyers.  i\(tachcà 
la  fortune  de  ce  cardinal,! il  snivit 
fidèlement  son  parti  dans  les  troubles 
de  la  fronde.  Tout  ce  qui  fut  ne^^ocie' 
avec  le  duc  d'Orléans  et  M.  le  Prince, 
passa  par  ses  mains.  Il  eut  la  plus 
pande  part  au  traite  de  Ruel ,  par- 
tagea la  première  disgrâce  ,  vraie  ou 
supposée,  de  IMazarin,  et  s'e'tablit  à 
la  campagne  pendant  l'absenccde  son 
protecteur.  Mais,  lorsque  le  cardinal 
se   retira    pour  la  seconde  fois    et 
sortit  du  royaume  ,  la  régente  retint 
auprès  d'elle  Letellier,  qui  fut  charge' 
du  ministère  dans  ces  occasions  dif- 
ficiles. C'est  k  cela  que  Bossuct  fait 
allusion  dans  son  oraison  funèbre , 
en  ces  termes  ;  «  Deux  fois ,  en  grand 
»  politique,  ce  judicieux  favori  (Ma- 
»  zarin  )   sut  céder  au    temps ,   et 
.  »  s'éloigner  de  la  cour.  Mais  ,  il  le 
»'  faut  avouer,  toujours  il  voulait  y 
î>  revenir  trop  lot.  Letellier  s'op- 
»  posait  à  ses  impatiences  jusqu'à  se 
»  rendre  suspect,  et,  sans  craindre 
»  ni  ses  envieux  ,  ni  les  me'fiances 
»  d'un  ministre  également  sonpçon- 
-  neux  et  ennuyé'  ueson  état,  il  allait 
l'un   pas  intrépide  où  la  raison 
»  d'état  le  déterminait,  w  Letellier 
\    contribua  puissamment  à  l'extinction 
*-;  troubles  et  au  re'tablissement  de 
ivtorilé  royale.  Le  co-adjutcur  en 
lie  Meuvent  dans  ses  Mémoires  ,' 
lis   sans   former   aucune    plainte 
.    contre  lui  ,  quoiqu'il   fût  constam- 
ment attaché  au  paiti  de  la  cour  ; 
.  ijui  prouve  que  LctcUicr  mçttàit 


LET  337 

dans  SCS  proccklcs  autant  de  mode- 
ration  a\w  de  franchise.  En  i()54, 
il  fut  chargé  de  pleins-pouvoirs  ,  et 
envoyé  pour  enijurher  (pie  IVronnç 
ne  tombât  entre  les  mains  des  eiuie- 
mis.  Pendant  les  négociations  rela- 
tives au  mariage  du  Roi,   il   eut  U 
correspondance    du    cardinal ,   qui 
l'instruisait  exactement  de  tout  ce 
qui  se     passait    entre    lui  et    Don 
Louis  de  Haro.  Après  la  mort  de 
Mazarin  ,  il  continua  d'exercer  sa 
(  harge  de  secrélaire-d'éfat  ,  dont  il 
lui  fut  permis ,  en  iGG(i ,  de  donner 
la  survivance  au  marquis  de  Louvois, 
son  fds.    Louis  XIV ,  qui  voulait 
récompenser  ses  services,  lui  cou» 
ser\'a  le  titre  et  les  fonctions  de  mi- 
nistre ,  et  le  fit  ,  en   1077  ,  chance- 
lier et  garde  des  sceaflx  ,  après  la. 
mort  de  d'Aligrc.  Letellier ,   dans 
cette  dignité  suprême  ,  donna  des 
règlements  utiles  et  pleins  de  sages- 
se. Il  exigea   ])lus  de  régularité  et 
d'instruction   de  la  part  des  jeunes^ 
magistrats  ,    qui    se  pressaient   eii! 
foule  pour  entrer  au  conseil.  Chef 
intègre  de  la  justice,  politirpie  ])ru- 
dent,  ami  invariable  ,  sujet  fidèle  ^ 
père  de  famille  vénérable  ,  il  est  di- 
gne de  prendre  place  parmi  les  grands 
hommes    du   siècle    oii  il  a   vécu. 
Sa  vie  eût  été  exempte  de  tous  re- 
proches ,  si  la  révocation  de  l'édit 
de  ISanlcs  n'eût  pas  tiouvéen  lui  uu 
de  ses  plus  zélés  ])arlisans.  Egaré  par 
des  opinions  que  l'ambition  de  Lou- 
vois et  le  despotisme  consciencieux 
du  Père    Lachaisc    fortifiaient    de 
tout  leur  ascendant  sur  l'esprit  da 
monanpie,  il  partagea  le  blâme  de 
ces  opérations  aussi  violentes  qu'im- 
politi<|ues.  Il  scella  lui-même  le  fatal 
édil  ,  cl  remercia  le  Ciel,  en  répé- 
tant le   cantique  de  Saint-Siméon, 
de  lui  avoir  conservé  encore  assez 
de  force  pour'  sau'ctionucr  cet  acte 


338  T.ET 

nu'il  regardait  comme  la  dernicre 
vicloire  remportée  sur  l'hërésie.  Le- 
tellier  eut  l'honneur  d'être  ccle'brc 

Sar  les  deux  plus  grands  oratcui's 
e  son  temps ,  Bossuet  (  i  )  et  Flo- 
chier.  Il  mourut  en  1 685 ,  âge  de  83 
ans.  Sa  fin  e'diliante  est  peinte  d'une 
manière  admirable  par  l'ëvêque  de 
Meaux;  et  c'est  un  des  plus  beaux 
traits  de  son  discours.  D-s. 

LETELLIER  (  Charles  -  Mau- 
rice )  ,  archevè(pie  de  Reiras  ,  fiJs 
du  pre'ce'dent,  et  frère  puîné  deLou- 
vois  ,  naquit,  à  Turin,  en  1642. 
Après  avoir  fait  d'excellentes  études , 
il  prit  ses  grades  en  Sorbonne ,  et 
voyagea  en  Italie,  cnHollande,  en  An- 
gleterre, d'où  il  rapporta  un  grand 
nombre  de  livr,isprëcieuxparlenr  ra- 
reté', Ou  par  la»corrcction  et  la  beauté 
des  éditions.  François  Barberini ,  ar- 
chevêque de  Reims  ,lc  nomma  son  co- 
adjiîteiir  en  1668;  et  Leteïlier  lui 
succéda  ,  en  1671.  Le  nouveau  pré- 
lat prit  part  à  presque  toutes  les  af- 
faires de  l'égUse  de  son  temps.  Ce 
fut  lui  q^Liifit  le  rapport  dans  l'assem- 
blée du  clergé,  le  i*^^.  mai  1681  , 
sur  la  régale  et  sur  les  autres  sujets 
de  contestation  entre  Injiocent  XI 
et  Louis  XIV  j  et  il  conclut  à  de- 


(1)  Beaucoup  d'ccriïaiiis  du  dix-liiiitièiiie  »iè- 
tle  ,  et  de  celui-ci,  ont  blâmé  Bossuet,  d'av^oi» 
fait  dans  son  oraisoa  funôbre  ,  rélojîe  d^  la  révo- 
cation de  redit  do  Nantes.  Un  historien  judi- 
cieux ,  RuUiiereg  ,  dans  ses  Eclaîreissernfnis  sur 
leseauses  de  cette  révocation,  a  essayé  de  justi- 
ftei  Tévèque  de  M«aux,  de  ce  ïeprochej  et  son  opl- 
iiion  mérite  d'âlie  examinée.  Il  pite  les  propres 
mots  de  l'orateur  sacré,  et  les  voici  ;  o  Comment 
»>  pouvous-nousincorporer/o«/  à-fait k  l'éjj,lisede 
«  J.  C.  taut  de  peuples  iiouTcl!«tiM:nl  convertis,  et 
»  porter  avec  contiance  un  si  giaaiK  accroissemuut 
»  de  notre  fardeau?...  IS«  laissdn»  pas  icepeudaiit 
»  de  publier  ce  miracle  de  nos  jours;  faisoii',  en 

•  passer  le  récit  au»  »iècle»  iiiturs.  »  Pou/"  Appré- 
cier toute  la  mesure  de  ces  expressions,  il  n'est 
pas  inutile  de  mettr»  en  parallèle  cUes  de  Flé- 
çhier,8url«  ;mfen:o  sujet;  «  Il  »e  lejitait,  du 
»  l'ev^qiie  de  .Niuie»,  qu'à  porterie  dernier  coup 
n  à  cette  secte  mourauta  i  qui  méritait  mieux  que 

•  ce  sage  chancelier  d'acliever  Toeuvre  du  prince  , 
w  ou  pour  mieux  dire  ,  l'oeuvro  do  Dieu  ,  eu  scel- 
m  lant  la  révocation  de  ce  fameux  édi»,  qui  avait 

•  c»âl«  taut  4«  sang  et  d»  Urines  à  uos  père»"?  a 


LET 

mander  au  roi  la  convocation  d'un 
concile  national  ou  d'une  assemblée 
générale  du  clergé.  Celte  assemblée 
fut  en  eirct  convoquée  peu  après ,  et 
M.  Leteïlier  en  fut  aussi  membre. 
On  voit,  par  quelques  détails  rap- 
portés dans  les  Opuscules  de  Fleu- 
i\Y ^  1808,  iii-i'J,pag.  2i3,  qu'il 
n'y  était  pas  toujours  pour  les  avis 
modérés^  et  que  Bossuet  empêcha 
qu'on  ne;  poussât  les  choses  plus  loin. 
L'archevêque  de  Reims  signa  la  dé- 
claration des  évêques  ,du  3o  sepîem- 
tcmbre  i688  ,  sur  les  diiréreuds  d« 
Louis  XIV  avec  Rome.  On  crut  qu'il 
avait  éié,excilé  dans  ces  diverses  cir- 
constances ,  par  l'abbé  Faure,  doc- 
teur de  Sorbonne  ,  son  commensal 
et  son  grand-vicaire  ,  sur  lequel  il  se 
reposait  de  presque  tout  le  gouver- 
nement du  diocèse.  Cet  abbé,  qui  de- 
vint doyen  de  l'église  de  Reims  ,  é- 
tait  d'un  caractère  un  peu  vif  et  fort 
prononcé  contre  les  doctrines  ultra- 
montaines.  Il  n'était  pas  favorable 
aux  religieux  et  surtout  aux  jésuites, 
et  il  entraîna  l'archevêque  dans  quel- 
ques démarches  qui  n'eurent  pas  l'ap- 
probation générale.  La  sentence  ren- 
due par  le  prélat^ le  9.2  mars  1687, 
sur  la  confession  pascale  ,  parut  peu 
mesurée  pour  la  forme  et  pour  le 
fond  ;  son  ordonnance,  du  i5  juil- 
let 1(^97  ,  contre  deux  thèses  soute- 
nues chez  les  jésuites  ,  fut  attaquée 
dai\s  quelques  écrits ,  et  faillit  don- 
ner lieu  à  un  procès  :  on  peut  voir 
sur  cela  les  Mémoires  chronologiques 
et  dogmatiques  du  P  d'Avrigny  , 
tora.  IV,  pag.  3i.  Une  autre  ordon- 
nance, du  ^4  "ïi^i  ^^  ^^  même  an- 
née ,  sur  les  réguliers ,  ne  lit  pas 
Fioins  d,c  bruit,  et  fut  à  peu  près  ré- 
formée par  l'assemblée  du  clergé, 
de  1700  ,  sur  le  rapport  de  Bossuet. 
M,  Leteïlier  présida  cette  assemblée  : 
il  ue  paraît  pas  s'être  acquitté  de 


relie  fonriion  avec  la  prudence  cl 
l'adrrvso  (le.siral)les  ,  cl  on  l'arciisa 
d'aircrU'i'  les  manières  absolues  et 
Iranelianles  du  niarqiiis  de  Louvois 
sonfivre,  sans  les  racheter  par  ses  ta- 
lents. D'Aj^uesseau  ,  dans  ses  Mé- 
moires sur  les  ajjuuvs  de  l'église 
de  son  temps  ,  et  M.  le  eardinal  de 
Baussel  dans  V Histoire  de  Bossuet , 
lom.  IV ,  pag.  () ,  donnent  à  ce  sujet 
quelcpies  dét:»ils.  L'arehcveque  de 
Reims  souscrivit  la  lettre  écrite  h 
Innocent  XI,  le  'iZ  février  i(h)'j, 
contre  le  livre  du  cardinal  Sfondratc, 
lettre  qui  ])araîl  avoir  été  rédij^ée 
par  Bossuet.  Il  e'tablit  des  sémi- 
naires dans  son  diocèse,  et  puljlia 
un  uoiivcau  catéchisme.  Fils  d'un 
chancelier  de  France ,  il  possédait 
plusieurs  bénéfices  et  aimait  assez  la 
ma{];nilicence  (  i  ).  On  cite  dans  les 
Lettres  de  M™*^.  de  Sévigné  (i),  plu- 
sieurs traits  de  caractère  de  ce  pré- 
lat ,  qui  s'était  fait  exempter  du  paie- 
ment des  décimes  dans  l'assemblée  du 
clergé,  de  1680,  et  qui  ne  fut  point 
favora]>leà  Fénélon  lors  delà  dispute 
du  quiélisme.  Le  roi  l'avait  nommé 
i  conseiller-d'étal.  Il  mourut  d'une  at- 
taque d'apoplexie  ,  à  Paris  ,  le  'ii 
février  1 7  i  o  ,  et  fut  inhumé  dans  le 


(i)  On  r»pporto  ,  dan*  le  Boîœana,  que  Dos- 
^éaiiz  ditait  que  l'archevêque  de  Reims  l'arait 
une  foi*  plu*  eitiiuo  ,  depiiia  qu'il  lu  «jvait 
riche  :  mai»  qui  pourra  croire  ,  «ar  le  témoi- 
ftia^>?  de  Lefebvre- de  -  Saint  -  iVlarc,  que  Le- 
Icllier  ditHit  ne  pa*  conceroir  comment  on 
poutait  vivre  tan*  avoir  cent  mille  écus  de  reo- 
te  1  Le»  aut'Min  du  Dictionnaire  histotique  la 
font  moina  exigeant;  suivant  eux,  Lelcllier 
ptéteodait  qu'on  ne  pouvait  dire  honnête  homme, 
•i  on  n'avait  d'x  mille  litfrej  de  r«nle.  Ce  fut, 
•joutent-ils  ,  d'après  un  tarif  «i  oeu  apostolique, 

3u^  Despreaux,  questionné  par  lui  sur  la  probité 
e  quelqu'un,  lui  rvpondît  :  Monseigneur,  il 
•  «n  faut  Je  quatre  raille  liTr<;s  de  renie  qu'il 
•oit  littanète  hanime.  Ce  mot  est  plaisant;  maia 
4. coup  st.»,  il  est  invanté. 

(»)  y<»7«*#  P»»  «xeniple  dans  sa  lettre  du  5 
réTriertG74.  l'anecdote  de  riiomme  n-aversé  par 
U  voiture  de  l'archevêque  de  Reims.  Madame 
••  Is  Fayrtte,  dans  «es  Mémoires  de  la  «tour  de 
France  .  présente  aus«i  ce  prélat  so-.s  un  jour 
f«a  UvotabU.  H-k. 


LET  339 

tombeau  de  son  père  ,  en  l'église 
vSaint-Gerv.iis.  11  avait  défendu  qu'on 
fit  son  oraison  funèbre.  Il  lé^ua  & 
l'abbaye  de  Sainte-Geneviève  sa  bi- 
bliothèque ,  composée  de  cinquan- 
te mille  volumes ,  dont  il  avait 
fait  dresser  le  catalogue  par  Ni- 
colas Clément  ,  bibliographe  fort 
instruit.  Ce  catalogue  a  paru  sous 
ce  titre  :  Bihliotheca  Tellenana, 
Paris  ,  im])rimerie  royale,  î^mj3^ 
in-folio.  L'avertissement  rédigé  j)ar 
Lelellier,  renferme  quelques  détails 
intéressants  sur  les  soins  qu'il  s'étnij 
donnés  pour  rassembler  une  si  grande 
quantité  de  livres.  On  y  remarque 
l'éloge  qu'il  fait  d'Antoine  Faure,  sou 
précepteur  ,  et  son  vicaire-génér.d  , 
qui  lui  avait  légué  en  mourant  une 
partie  de  ses  livres  pour  les  ajouter 
à  sa  collecliou  déjà  si  considéraldc. 
W-s  et  P-c-T. 
LETELLIER.  roj.BARBEsiEux, 

COURTANVAUX   ,    EsTRLES    (    Xïlï  , 

4i3  )  et  Louvois. 

LETELLIER(  Micni: l  ) ,  jésuite, 
dernier  confesseur  de  Louis  XIV , 
et  chargé  de  la  feuille  des  bénéfi- 
ces ,  naquit  auprès  de  Vire  eu  Basse- 
Normandie ,  le  i6  décembre  kG43. 
11  fît  ses  études  chez  les  Jésuites 
à  Gaen ,  et  entra  dans  leur  £Ociétc 
en  iGGi.  Après  avoir  enseigné  les 
humanités  et  la  philosophie,  il  fut 
chargé  de  donner  une  édition  de 
Quinte-Curce  ,  pour  l'usage  du  Dau- 
phin.Son  travail,  qui  parut  en  if>7H, 
in-4". ,  et  qui  est  estimé,  le  fit  choi- 
sir, avec  quelques  autres  jésuites  dis- 
tingués par  leur  mérite,  pour  former, 
dans  le  collège  de  Louis-le-Grand  à 
Paris,  une  société  de  savants  qui  suc- 
cédât aux  Sirmoudet  aux  Pétau.  Mais 
Letcllicr  se  consacra  bientôt  à  un  au- 
tre genre  d'écrits.  Il  fut  un  des  prin- 
cipaux adversaires  de  la  version  du 
Nouveau-Testament^  dite  de  Mens 
'11., 


et  il  l'attaqua  dans  trois  oiivi^ages 
diflerents,  en  i6']'2-'j5  et  t684.  H 
prit  ensuite  beaucoup  de  part  à  la 
controverse  sur  les  cérémonies  chi- 
noises.  Sa  Défense  des  nouveaux 
chrétiens  j  et  des  missionnaires  de 
la  Chine,  du  Japon  et  des  Indes  ^ 
qui  parut  en  1687  ,  'i  vol.  in-iJ,  fut 
vivement  attaquée  par  Arnauld  et  du 
Vaucel ,  et  de'iérëe  à  Rome ,  où  elle 
lie  fut  point  condamnée  j  Letellier  y 
donna  depuis  une  suite,  et  répondit 
à  ses  ennemis.  Il  contribua  ,  avec  le 
P>  Besnier,à  la  traduction  du  Nou- 
veau-Testament de  Boubours,  qui 
parut  en  1697  et  en  i7o3.  {Voyez 
ËounouRS.)  Ayant  cte'  choisi  pour 
continuer  les  Dogmes  théologiques 
du  P.  Petau,  il  s'attacha  au  traite  de 
la  pénitence,  qu'il  acheva  j  mais  qui 
n'a  pas  e'te'  imprime.  Dans  la  querelle 
faite  aux  Jésuites  sur  ce  qu'on  appe- 
lait le  pëcbé  philosophique,  il  publia 
quelques   petits   écrits  ,  en    i  G9 1 , 
pour  la  iustification  de  ses  confrères, 
il  fut  un  des  premiers  coopérateurs 
des  Mémoires  de  Trévoux.  Letellier 
est  encore  auteur  de  quelques  ou- 
vrages contre  ceux  qui  prenaient  le 
nom  de  disciples  de  Saint-Augustin, 
comme  :  Recueil  de  bulles  sur  les 
erreurs  des  deux  derniers  siècles  , 
1697J  "^  Histoire  des  cinq  proposi- 
tions de  Jansénius  (  sous  le  nom  de 
Dumas  ) ,  Liège ,  1 699 ,  in- 1 'i. —  Le 
F,   Quesnel  séditieux  et  hérétique, 
1705,  in-i'i,  etc.  Ces  écrits  cxpo' 
sèrent   Letellier  à  l'aniraadversion 
d'un  parti  nombreux  et  puissant, 
qiri  l'a  peint  ensuite  comiine   ayant 
horriblement  abuse  de  la  confiance  de 
Louis  XIV.  Ce  fut  après  la  mortduP. 
Lachaise,  en  1 7  09,  que  Letellier,  alors 
provincial  dans  sa  compagnie,  fut 
nommé  confesseur  du  roi  ;  place  d'au- 
tant plus  importante  ,  que  la  présen- 
tation des  sujets  pour  les  Jjénélices 


LET 

y  était  alors  attachée.  On   assure, 
dans  beaucoup  de  libelles  et  même 
dans  quelques  histoires,  que  le  jé- 
suite fut  dès-lors  l'ame  de  toutes  les 
affaires  ,  et  qu'il  se  montra  violent  et 
persécuteur.  Mais  LouisXIV  ne  sui- 
vit pas,  depuis  1709,  une  conduite 
différente  de  celle  qu'il  avait  tenue 
jusque-là;  il  regardait  les  jansénistes 
comme  dangereux ,  et  il  les  contint 
arec  fermeté.  L'acte  le  plus  sévère  de 
cette  partie  de  sou  règne  fut  la  des- 
truction de  Port-Royal-des-Ghamps, 
en  1709;  mesure  qui  fut  accompa- 
gnée de  circonstances  propres  à  la 
faire  paraître  plus  rigoureuse  encore. 
Un  historien  récent ,  dit  que  le  P.  Le- 
tellier neut  point  de  repos  quil  ne  se 
fût  assuré  de  la  condamnation  du 
livre  de  Quesnel  :  le  simple  rappro- 
chement des  dates  démontre  la  faus- 
seté de  cette  allégation.  Letellier  ne 
devint  confesseur  du  roi  qu'en  1 709, 
et   les   Réjlexions   morales  avaient 
été  condamnées  à  Rome  par  un  dé- 
cret du  i3  juillet  1708.  D'Alerabert 
est  tombé  dans  un  anachronisme  plu? 
choquant  encore  :  dans  ses  notes  sui 
l'Eloge  de  Bossuet,  il  accuse  Letellie 
d'avoir  donné  à  LouisXIV  le  consei 
perfide  et  punissable  d'écrire  au  pap 
une  lettre  oil  il  promettait  de  fair 
rétracter  les  évéques  de  la  sanctio 
solennelle  qu  ils  avaient  donnée  au 
quatre  articles;  et  là-dessus  l'aca 
démicien  s' échauffant  déplore ,  dar 
une  tirade  véhémente ,  la  faibles^ 
du  roi  ,et  V audacieuse  impudence  0 
V  imposteur  qui  dirige  ail  sa  conscie 
ce.  Cette  bouffée  de  colère  annom 
autant  d'ignorance  que  de  passioi 
la  lettre  dont  d'Alembert  veut  pa 
1er ,  ne  peut  être  que  celle  que  Loii 
XÏV  écrivit,  le  iX^ej^tcmhvc  169 
à  Innocent  XII,  et  Letellier  ne  f 
confesseur  que  seize  ans  plus  tai 
Un  e^j^amea  des  faits  dissiperait  aii 


1,1   plupart  flos  reproches  que  des 
écrivains  j)assioiines    ou  inaltentifs 
ont  adresses  au  P.  Letellier.  Ceux  nui 
l'ont  le  jilus  maltraite,  sont ,  le  duc 
de  St. -Simon  ,  dans  ses  Aféjiwires  ; 
Dorsannedansson./ir)M/7i<î/,etdcVil- 
lefore  dans  ses  Anecdotes  sur  la 
coTistilution  i^uigcnitus.  Tous  trois 
favorisaient  nn  parti  que  LelcUicr 
avait   combattu  :  tous  trois  ramas- 
saient avec  soin,  et  citent  comme  des 
aut 0 rites  ,  de  petites  anecdotes,  des 
propos,  et  des  conversations.  Saint- 
Simon,  caiLslique  et  haineux,  comme 
l'avouent  ses  éditeurs,  dit  du  mal  de 
tout  ic  monde,  et  n'épargne  pas  Le- 
tellier. îl  2'arlc  aussi  du  bruit  qui 
courut  que  ce  jésuite  avait  fait  faire 
au  roi  mourant  les  vœux  de  sa  so- 
ciélé  ;  mais  il  ajoute  que  le  chirur- 
gien du  roi ,  Maréchal,  qui  n'aimait 
pas  non  plus  Letellier,  lui  a  certifie 
que  le  fait  c'iait  faux  :  ce  conte  ridi- 
cule n'en  est  pas  moins  répété  dans 
d'autres   recueils.   Si  l'on  en  croit 
Dorsanne  et  Villefore ,  c'est  le  père 
Letellier  qui  a  tout  fait  dans  l'affaire 
de  la  bulle  Unigenitiis  :  il  a  fatigué 
Louis  XI V'^ de  ses  sollicitations;  il  a 
forcé  la  main  au  pape  ;  les  cardi- 
naux comme  les  évêques  étaient  ses 
agents  serviles,  et  sacrifiaient  leur 
devoir  à   la  politique.  Fénélon  lui- 
même  n'a  pas  été  à  l'abri  de  cette 
•uitation   aussi   ridicule  en   elle- 
ine  qu'elle  est    outrageante  pour 
;)rélats  qui  en  étaient  l'objet.  C'est 
l'autorité  des  mêmes  écrivains 
Duclos   a  rédigé  ses  Mémoi- 
sec  cts ,  et  il  y  a  peint  Letellier 
ime  un  homme  dur, orgueilleux , 
lont ,  qui  dirigeait  tout  et  dont  les 
(ues   suivaient  aveuglément   les 
Tes.  A  l'entendre,  le  cardinal  de 
uan  était  un  de  ses  instruments  les 
s  dociles,  quoiipu'  le  nom  de  ce 
lat ,  son  rang  dans  l'église  et  à  la 


LET  341 

cour  ,€l  ses  qualités  aimables  et  gé- 
néreuses ,  repoussent  la  supposition 
d'un  rôle  si  peu  fait  pour  lui.  Le 
cardinal  deBissy  ,  évêque  de  Meaux, 
n'est  pas  mieux  traité.  Au  reste, Du- 
clos reconnaît  qu'il  suit,  pour  guides, 
les  auteurs  déjà  cités  :  dans  un  seul 
endroit  il  paraît  rougir  de  les  copier. 
On  avait  produit  une  lettre  que  l'on 
attribuait  au  père  Letellier ,  et  dans 
laquelle  il  exposait ,  à  M.  de  Chau- 
velin  ,  le  plan  de  la  persécution  qu'il 
se  proposait  de  faire  essuyer  au 
cardinal  de  Noailles.  Il  est  à  croire 
(pie  si  Letellier  eût  été  capable  d« 
ce  procédé,  il  était  du  moins  assez 
adroit  pour  ne  j)as  s'afficher ,  en 
écrivant  à  un  magistrat.  Aussi  Du- 
clos convient  qu'ayant  confronté 
la  lettre  avec  d'autres  de  ce  jésuite , 
la  signature  ne  lui  a  point  paru  la 
même;  et  il  soupçonne,  avec  beau- 
coup de  fondement,  que  c'est  une 
fraude  du  parti  contraire.  Il  est  pos- 
sible qu'avec  de  bonnes  vues  ,  dans 
le  fond,  Letellier  ait  été,  ei>  quelques 
Occasions,  entraîné  trop  loin  par  l'ar- 
deur de  son  zèle  ;  mais  il  y  a  loin  de 
là  au  caractère  odieux  qu'on  lui  prêle 
et  au  rôle  violent  qu'on  lui  fait  jouei . 
Des  écrivains  non  suspects  citent  de 
lui  des  traits  honorables.  Louis XIV, 
dit  Duclos  lui-même ,  lui  ayant  de- 
mandé s'il  était  parent  des  Letellier 
de  Louvois,  il  répondit,  comme 
l'avait  fait,  en  pareille  occasion, 
saint  Vincent  de  Paul,  qu'il  n'était 
que  le  fils  d'un  paysan.  Le  chance- 
lier d'Aguesseau  rapporte,  dans  le 
Discours  sur  la  vie  et  la  mort  ds 
M.  d*Aguesseau ,  son  père ,  que  le 
roi  ayant  demandé  un  jour  au  pèro 
Letellier  pourquoi  il  ne  se  servait 
pas,  pour  ses  voyages,  d'un  carrosse 
à  six  chevaux ,  comme  son  prédé- 
cesseur ;  le  confesseur  répondit  que 
cela  ne   convenait    point    à    son 


34^ 


LET 


état  ,  et  qu'il  aurait  été  encore 
plus  honteux  de  le  faire  depuis 
quil  avait  rencontré,  dans  une 
chaise  à  deux  chevaux ,  sur  le  che- 
min  de  Versailles ,  un  homme  de 
Vdge ,  des  services  et  de  la  dignité 
de  M.  d\4guesseau.  On  voit ,  dans 
le  Dictionnaire  de  Moiëri  à  Tar- 
ticlc  Fahre ,  que  Lclcllier  rendit  des 
services  à  cet  oratorien ,  et  qu'il  lui 
envoya  de  l'argent  dans  un  moment 
où  celui-ci  en  avait  un  très-grand  be- 
soin. Après  la  mort  de  Louis  XIV , 
le  jésuite  se  trouva  en  butte  à  toute 
la  haine  du  parti  triomphant.  Il 
était  particulièrement  odieux  au  car- 
dinal de  Noailles  :  il  fut  exile'  à 
Amiens ,  puis  à  La  Flèche,  où  il 
mourut  le  i  septembre  1 7 1 9 ,  à  l'âge 
de  76  ans.  P-c-t. 

LETI  (  Gregorio  )  ,  historien  , 
que  son  inexactitude  et  son  goût 
pour  le  merveilleux  ,  ont  fait  sur- 
nommer le  Varillas  italien ,  naquit 
à  Milan  ,  le  29  mai  i63o,  d'une 
famille  originaire  de  Bologne.  Il  fit 
ses  premières  e'iudes  à  Cosenza  ,  et 
fut  appelé'  ensuite  à  Rome,  par  son 
oncle,  qui ,  étant  pre'lat,  voulait  l'a- 
vancer dans  la  magistrature,  ou 
dans  l'ëtat  eccle'siastique;  maisLeti, 
d'un  naturel  dissipe'  et  de  mœurs 
très-libres ,  rejeta  bien  loin  ces  pro- 
positions ,  et  revint  à  Milan  attendre 
l'âge  de  sa  majorité'.  Une  fois  maître 
de  sa  petite  fortune,  il  se  hâta  de  sa- 
tisfaire son  goût  pour  les  voyages ,  et 
consuma  rapidement  son  patrimoine. 
Son  oncle ,  nommé  depuis  peu  évé- 
que  d' Aquapendente ,  le  rappela  près 
de  bii  ;  et  songea  ,  par  ses  sages  con- 
seils, à  le  faire  changer  de  conduite* 
mais  le  voyant  sonrd  à  ses  remon- 
trances ,  il  le  chassa  de  sa  présence. 
Leti  quitta  Aquapendenfe  ,  très-mé- 
content de  son  oncle,  dont  il  avait 
espéré  tirer  de  l'axgent ,  et  continua 


LET 

de  se  livrer  à  toute  sorte  de  dissipa- 
tions. Il  parvint  à  se  procurer  quel  - 
ques  ouvrages  dont  la  lecture  lui  ins- 
pira du  goût  pour  la  réforme  ;  et  il 
fut  confirmé  dans  ses  sentiments  par 
les  conversations  qu'il  eut  avec  un 
gentilhomme  protestant.  Il  se  rendit 
donc  à  Genève, et  s'y  arrêta  quelques 
mois  pour  s'instruire  à  fond  des  prin- 
cipes des  réformés  ;  de  là  il  vint  à  Lau- 
sanne, où  il  fît  profession  de  calvinis- 
me, et  épousa  la  fille  de  J.  A.  Guérin, 
habile  médecin  chez  lequel  il  était 
logé.  Retourné  à  Genève,  en  16G0, 
il   y   ouvrit    une    école   pour  l'en- 
seignement de  l'italien.  Il  commen- 
ça, vers  le  même  temps,  à  publier 
quelques  écrits  satiriques  contre  l'E- 
glise romaine ,    et  mérita  ainsi    la 
protection  des    magistrats.  Il   ob- 
tint ,  en  167.4  ,  des  lettres  de  bour- 
geoisie qui  lui  furent  expédiées  gra- 
tuitement ;  et  l'on  a  remarqué  que 
cette  faveur  n'avait  été  accordée  à 
personne  avant  lui.  Quelques  désa- 
gréments que  lui  attira  son  penchant 
pour  la  satire ,  l'obligèrent  de  quit- 
ter Genève  en  1679  (  i  ).  Il  vint  à 
Paris  ;  et  il  eut  l'honneur  de  présenter 
à  Louis  XIV  ,  un  panégyrique ,  dé- 
coré de  ce  titre  pompeux:  La  Fama 
gelosa  délia  Fortuna  ,  etc. ,  Gex  , 
1 680  ,  in-4^.  ;  mais  il  ne  crut  pas 
devoir    prolonger   son    séjour    en 
France ,  où  les  protestants  étaient 
déjà  inquiétés ,  et  il  passa  en  Angle- 
terre.   Charles   II  l'accueillit  avec 
bonté,  lui  fit  don  d'une  somme  de 
mille  écus,   et  lui  permit  d'écrire 


(1)  I/intcmpérance  de  sa  langue  et  de  sa  plu- 
me, son  goût  pour  l'iiivention,  lui  firent  accuser 
iit;iislenient  plusieurs  lainiMes  Genevoises  j  son 
JAvtllo  polilico  ,  VIlinerario,  et  le  Vaticano 
langvenLe ,  furent  condamnés  an  f*^»»  conirn» 
contenant  d's  propobitions  cojffi'res  a  1  iitat,  à 
la  Teiigion  et  aux  itioeur*....  I«;ti  lut  en  outre 
cendainné  à  nne  amende  de  cent  éciis  ,  etroMé 
de  Ja  bouru-oisîe.  Scnebier,  HiSl.  hH.  de  Ge» 
nêpe,  toiu.  ii,  f  ag.  o'io. 


LET 

l'histoire  d'Angleterre  :  il  se  li/lta  de 
profiterdccette]>erini.s.si()n;  maisson 
ouvragecontenaildcstraitssaliriqiics 

3ui    dcpliuenl  /  et    il  revul   l'onlre 
e  sortir  du  royaume.  11  se  réfugia 
'     eu  i()8*2,  à  Amsterdam  ;  et  il  obtint 
I     dans  la  suite  le  titre  d'iiistoriogra plie 
i     de  cette  ville,  où  il  mourut  subife- 
h     ment,  le  9  juin  i-^oi.  C'était  un  ceri- 
^     vain  infatigable;  il  travaillait  douze 
Retires  par  jour,  et  à  plusieurs  ou- 
I  iges  à-la-fois  (i)  :  il  ii*est  donc 
j»as   étonnant  que  ses    productions 
se   ressentent   de    la    précipitation 
avec  laquelle  il   les   composait.  Il 
avait  l'esprit   vif  et  une  imagina- 
tion ardente  ;  cependant  son  style 
est  dilbis  et  si  traînant,  que  Tira- 
boschi   conseille  la  lecture  de   ses 
écrits   aux    personnes  tourmentées 
d'insomnie.  On  ne  doit  point  y  cher- 
cher  d'ailleurs  la  sincérité'  ni  Texac- 
titudc  ;  les  traits  satiriques  qu'il  s'est 
permis  contre  la  cour  de  Rome  et  la 
religion ,  sont  la  seule  cause  du  prix 
que  quelques  amateurs  mettent  encore 
a  des  écrits  si  dignes  de  l'oubli  (  Ti- 
rahoschi   Istor,  letter, ,  tora.  viii , 

f>age  387  ).  Bayle  ,  qui  a  beaucoup 
oué  Leti  dans  son  Journal  (2) ,  ne 
le  ménage  pas  dans  sa  corres2)on- 
dance  ;  il  le  représente  comme  un 
nouvel  Arétin  ,  cherchant  à  se  rendre 
redoutable  par  ses  satires  ,  et  trafi- 
qtiantdu  blâme  et  de  la  louange  (3). 

(1)  •  J'ai  toujours,  dit-U  Ini  niême,  troitou- 
»  »f«e»-»  "fn  ni*me  tempa  aiir  le  tp«tier  5  Je  Ira- 
a  raiilu  à  un  oiirra^a  d<*ii>  joiira  Je  suit'*  ,  et 
n  j'emploie  le  trni»ièiiie  à  deux  autiea  prodiic- 
n  tien*.  Lorcqiie  ju  manque  de  Méaioirei  (>oiir 
n  UN  oiiTtage,  je  troure  d«:i»  le*  aiilret  Je  quoi 
•  m'otcuper  en  attendant.  »  Faut-il  ôtre  aur- 
f  ria ,  J'«pr>^f  cela  ,  qu'il  ait  mia  au  jour  plua  de 
cent  Toluniti'} 

(a)  Bayle  le  rroyait  oblif;*^  Je  minapeT  Leti, 
nomme  tri^a-Jnnot  teiix  ,  il  eit  tout  «inipl  •  aiiiti 
^ti'il  ait  eu  dea  é^aida  pour  lui  À  U  tonaidc- 
»*iion    de   «on    griidre ,    Leclrrc. 

>>M  Leii  ,  dit  Baylf,  fit  pliiticura  Toyagea  en 

m»piie,    dont    il    ne    retint  pat    xaiia  a»oir 

•iimc    qiielqu"a     priniea  (   L<tlr.n    MluuloU  ) 

À'   raaaeuWt*  daJ    piécM  inutile*  j    il    ne  aoMge 


tRT  3|3 

lia  liste  de  ses  ouvrages  remplirait 
plusieurs  colonne»  ;  on  la  trouvera 
dans  les  MéinoircsiViNiceronA^tis  I© 
])ict. de Cliaufepié,dans  la  llibl. script 
toi\Medi()lanens.  d'Argelati,  et  dans 
Vllist,  liUéraire  de  Genève.  Notis 
citerons  seulement  :  1.  La  rie  de 
Sixte-  Quint ,  Lausanne ,  i  (Àk)  ,  i 
loin,  in-i'j;  Amslcrd.  1O93,  17111  , 
3  vol.  in- 1*2  :  elle  a  été  traduite  en 
français  par  l'abbé  L.  A.  Lepelletier, 
Paris,  i685,  'i  vol.  in- 12.  C'est  le 
plus  répandu  des  ouvrages  de  Leti; 
mais  il  y  a  inséré  beaucoup  d'anec- 
dotes suspectes. (  rojez  Sixte  V.  ) 
Leti  rapporte  lui-même,  dans  une 
de  ses  letties,  que  madame  la  Dau- 
phiiie  lui  ayant  demandé,  lorsqu'il 
était  en  France,  si  tout  ce  qu'il 
avait  écrit  dans  ce  livre ,  était  vrai , 
il  lui  avait  répondn  qu'une  chose 
bien  imaginée  faisait  beaucoup  plus 
de  plaisir  que  la  vérité  quand  ello 
n'était  pas  mise  dans  un  beau  jour. 
IL  Vltalia  régnante  overo  Descrit- 
tione  dello  stuto  présente  di  tutti 
principaii  e  republiche  d^Italia, 
Genève,  1675,  4  vol.  in-iii.  III.  La 
Plta,  etc.  (  La  vie  de  Philippe  II,  roi 
d'Espagne,  )  Cologne,  1679,  2  voL 
in "4".  ;  traduite  en  français  par  de 
Chevrières ,  Amstei'dam,  1734,  & 
vol.  in-i'2.  Elle  est  curieuse  :  mai» 
on  ne  doit  pas  compter  sur  la  vé- 
racité de  l'auteur,  et  il  entremêla 
ses  récils  de  digressions  fatigan- 
tes. IV.    Teatro   Britannico  overo 


qit'i  groifir  l«a  «nlume* ,  et  A  multiplier  le* 
F  pitres  drdicaioir^s  Au  MiAme  ).  luf  Teatro  Oal- 
lico  de  I^eti  parlât  dcpuia  quelque  tenip*.  J« 
ne  l'ai  point  pu  encore  parcourir  :  mai*  je  «aia, 
par  *e»  autre*  ouvrai;ea  ,quecVal  un  rapsodfiur 
et  une  plume  tant  Jicli  prai>t<fue  tenar ,  çnàrm 
nwitia  vert,  à  l'iiiattr  du  la  Renommée  II  • 
bi  Ml  eu  tc<-our.ige,  danaiou  Teatro  Br/gt'ro,  d* 
dira  que  rkiscaut  et  le  Rhin  p«M*ut  par  Rnttur 
dam.  {Lttire  au  uitiine.  )  •  Co  darnitr  trait  aufTit 
pour  luire  juger  le  >I«git>  du  cnoiiarice  que  l'«n 
doit  à  t.iti  :  il  ^tait  aiir  le*  lieui  ;  il  habtait  l« 
Uollandi  quand  il  publiait  uno  beru  ■  géograplii- 
qme  ,  que  M  U)*»i>dr«  euLutt  aurait  ^m*  uii<-v«r« 


344 


LET 


Jstorla  délia  grande  Britannla,  Lon- 
dres, 1682,  12  vol.  in-4".  ;  Amstcrd. 
3684,  5  vol.  in- 12.  L'édition  de  Lon- 
dres est  très-rare  par  la  sévère  sup- 
pression qui  en  fut  ordonnée.  Bayle 
dit  que  le  style  de  cet  ouvrage  est 
aise  et  sans  affectation  j  et  que  les 
choses  y  sont  racontées  avec  une  si 
grande  naivete',  qu'on  aura  peut-être 
de  la  peine  à  s'imaginer  un  jour  que 
l'auteur  a  fait  imprimer  cet  ouvrage 
pendant  sa  vie  (  Now.  de  la  Rép. 
des  lettres ,  avril  iG84).  V.  //  cere- 
monlale  historico  et  polit ico  :  opéra 
utilissima  à  tutti  gli  amhasciatori, 
Amsterd.  i685  ,  6  vol.  in-12.  L'in- 
troduction contient  des  réflexions  sar 
les  e'crits  satiriques ,  et  sur  la   ma- 
nière dont  les  ambassadeurs  doivent 
les  appre'cier.  L'ouvrage  commence 
par  un  abrège  d'histoire  universelle , 
suivi  de  remarques  sur  les  états  mo- 
dernes de  l'Europe ,  leur  population , 
leurs  revenus ,  et  enfin  sur  le  ce'ré- 
monial  des  diiïe'rentes  cours.  Bayle 
en  a  donné  une  analyse  très-piquante 
dans  son  Journal,  mars  iG85.  YL 
Historia   Genevrina ,  o  sia  historia 
délia  città  e  repuhlica  di  Ginevra, 
Amsterd.  1686 ,  5  vol.  in-12.  Sene- 
Lier  lui  reproche  de  fabriquer  des 
pièces ,  et  d'avoir  supposé  un  ma- 
nuscrit qu'il  nomme  de  Frangins  , 
qui  sert  de  base  à  cette  histoire  pleine 
de  Irails  satiriques.  YII.  La  Monar- 
chia  universale  del  Re  Luigi  XIV, 
ibid.,  1689,  '-*  vol.  in-12;  trad.  en 
français  la  même  année,  2  vol.  in-i  2. 
Il  y  exagère  les  forces  et  les  dispo- 
sitions de  Louis  XIV,qu'il  représente 
prct  à  envahir  l'Europe  ;  c'était  un 
tort  commun  aux  réfugiés.  Un  ano- 
nyme lui  répondit  par  :  V Europe 
ressuscitée  du  tombeau  de  M.  Leii, 
Utrecht,  1G90,  in-12.  VITL  Teatro 
Belgico^  overo  Ritratti  historici,  po- 
liticie  geografici  delîe  setteProvin- 


LET 

cie  unité,  Amsterd.  1690^2  v.  in-4°', 
fi^.;  ouvrage  inexact  et  superficiel. 
JX.  Teatro  Gallico^overo  la  Monar- 
chia  délia  Real  casa  di  Borhone  in 
Francia,dal  1 57 2 ,  Amsterd.  1691- 
97  ,  7  vol.  iii-4".  Cette  histoire  ne 
mérite  pas  d'être  lue;  mais  elle  est 
ornée  de  belles  gravures  qui  la  font 
rechercher  des  curieux.  X.  La  vie 
d' Olivier  Cromuell ,  ibid. ,  1G92  , 
2  tom.  in-8^.  ;  trad.  en  français,  1 694, 

2  tom.  in-12  :  elle  est  pleine  de  faus- 
setés. XL  fie  d' Elizaheth  ,  reine 
d'Angleterre,  ib.  i  (393, 2  vol.  in- 1 2  ; 
traduiteenfrançais,ib.,  1696, 1703. 
XII.  Vie  de  Pierre  Giron,  duc  d  Os~ 
sonne ,  PiMisi. ,  1699,  3  vol.  in-12  ; 
traduite  en  français  ,  Paris ,  1 7  00  , 

3  vol.  in-12  :  elle  est  surchargée  de 
digressions  inutiles.  XIII.  Vie  de 
V empereur  Charles-  Quint ,  Amster- 
dam ,  1700  ,  4  tom.  in-12  ;  trad. 
en  français  par  les  filles  de  Leti, 
Amsterdam,  1 702;  Bruxelles,  1 740, 

4  vol.  in-12,  et  en  allemand  par 
Kabener,  avec  des  notes  intéressantes, 
Leipzig  ,  1 7 1 2  ,  3  vol.  in-8".  Pour 
compléter  cet  article,  on  ne  peut  se 
dispenser  de  faire  connaître  encore 
quelques-unes  des  productions  sati- 
riques ou  purementlittéraires  de  Leti  ; 
nous  commencerons  par  les,satires: 
I.  Roma  piangente,  overo  Dialogi 
trà  il  Tevere  e  Roma  Jjejde,  i66(>, 
in-i  2  ;  traduit  en  français ,  Avignon  , 
(  GenèA^e  ) ,  1 666 ,  in- 1 2.  II.  Vita  di 
donna  Olympia  Maldachini,  Raguse 
(  Genève  ),  166G  ,  in-12  :  il  publia  , 
sous  le  nom  supposédel'abbéGualdi, 
cette  satire  écrite  avec  un  emporte- 
ment inexcusable;,  lors  même  que  les 
faits  qu'il  raconte  seraient  authenti- 
ques. Elle  a  été  traduite  en  français, 
par  Renoult,Leyde,  16GG,  in'i2,  et 
par  Jourdan  ,  avec  des  notes,  Paris, 
1770, 2  vol.  in- 1 2.  III.  Il  Nipotismo 
di  Roma  (  Amsterd.  )  16G7  ,  in-12  ; 


traduit  en  français  ,  1669 ,  a  tom. 
Uïri'x  ;  vt  en  laliii,wSln|n;.«r(l  ,  i^>(m)  , 
il»- l".l\  .  UCivdinalismodiS.  Chic- 
i(i<>H,3voI.  'n\-\'}..  \.llSuuH- 
",  etc.  ,  ou  !<•  SMulicat  d'Alexan- 
dre Vil,  avec  son  voyage  dansl'autre 
nu  Mille,  i()(>8,in-i-j  ;  traduit  enfran- 
^    I ()()(),  in- 1 '2.  \\.  Il  putani  mo 
nano  ,  con  il  nuovo  parlutorin 
c  nwnac/ie, satîracomicadi Bal- 
Sidianim,  Bresciano,  Londres 
uève  ),  1G75,  in-i'i;  rare.  VII. 
.  imbasciata  ,  etc.  (  li'ainbassadc  de 
Ronudus  aux  Romains  j)endant  les 
inccs  du  siège  ),  Bruxelles  (  Gc- 
),  1(371,  167(5,  in- 1 '2.  C'est  un 
'il  de  dillérentes  pièces  satiri- 
>  publiées  pendant  la  tenue  du 
conclave  qui  suivit  la  mort  de  Clé- 
ment IX.  Ch.  Grvphe  attribue  en- 
core à  Leti  la  continuation  du  Divor- 
tio  céleste  de  Ferrante  Pallavicino. 
(  Foyez  Pallavicino.  )  Parmi  ses 
productions  purement  litte'raircs,  on 
citera  :  I.  R.  Bandila ,  Bologne,  1 653, 
in-i'.i.  C'est  un  discours  présente  à 
racadcniic  des  humoristes  à  Rome, 
et  dans  lequel  il  n'a  point  liiit  en- 
i  Irer  la  lettre  R.  Deux  Italiens  s'e- 
[  taient  de'jà  exerce's  sur  le  même  jeu 
i  d'esprit ,  l'un  en  i6i4  (  Voy.  Car- 
I  Dom:  ),   l'autre  en  i633  (  Voyez 
!  Fidèle  ).  L'ouvrage  de  ce  deruierest 
en  vers.  II.  Stragge   di  Riformati 
innoceTit i,Gcnc\c,  166 1  ,in-4°.  III. 
//  prodigio  délia  natura  e  délia  gra- 
'  lia,  poèma  eroïco  ,   Amsterdam  , 
;  169 >,   iu-fol.  Ce  poème,  compose' 
i  en  l'honneur  du  prince  d'Orange  , 
I  est  orne  de  cinquante  gravures ,  qui 
en  font  le  principal  mérite.  W,  Gli 
amori,  etc.  (  Les  amours  de  Charles 
de  Gonzague  duc  de  Mantouc,  et  de 
Marguerite,  comtesse  de  Rovere  ), 
Raguse,  i6(36,  in- 1*2.  Il  a  publié  ce 
roman  licencieux  ,  sous  le  nom  de 
Giulio  Gapocada;  traduit  eu  français 


LKT  34s 

C  Hollande  )  ,  iei()6,  in-ic».  V.  Cii- 
tifpte  historitpir , ptdititpie ,  morale^ 
économitpic  cl  cnviiqin'  sur  les  lote- 
ries anciennes  et  niod^^rncs  ,  spiri- 
tuelles et  temporelles  des  FAuts  et 
des  Eglises.  Amstcrd.,  i()97,  2  v«)l. 
in-i'jt.  Ol  ouvrage  a  d'abord  paru 
en  italien  ;  mais  la  traduction  frafi- 
çaise  est  plus  recherchée  que  l'origi- 
nal, [jcti  ,  en  traitant  un  sujet  qui 
paraît  être  purement  spéculatif ,  a 
trouvé  le  moyen  de  distribuer  des 
injures  à  un  grand  nombre  de  per- 
sonnes et  d'accroître  encore  ses  enne- 
mis. Ricotier  ])ublia  une  réfuta- 
tion de  cet  ouvrage  sous  le  titre  de 
Considérations  sur  la  Critirpie  des 
loteries^  etc.  (  Voy.  Ricotier.  )  Elle 
fut  réimprimée  à  la  suite  de  l'ouvrage 
de  Leti  ,  auquel  on  ajouta  un  por- 
trait de  l'auteur  ,  habillé  en  moine  ; 
])laisaiiterie  qui  l'affligea  beaucouj>. 
Vl.  Lettere  sopra  dijjcrente  matericy 
Amsterd.  1700  ,  9.  loin.  in-8^.  ("/est 
un  recueil  de  lettres  qui  lui  avaient 
été  écrites  par  plusieurs  persomics 
de  distinction  ,  et  qu'd  publia  en  y 
joignant  une  préface  dans  laquelle  il 
s'efforce  de  se  justifier  des  reprocln*5 
que  Ricotier  lui  avait  faits.  CA'lui-ci 
lui  répliqua  à  son  t(»ur  par  des  Rè- 
jlexions  sur  la  dernière  Préface  de 
Leti,  etc.  On  peut  consulter,  pour 
plus  de  détails,  V Eloge  de  Leti  , 
par  J.  Leclerc  ,  sou  gendre  ,  dans 
le  Dictionn.  de  Moréri,  édition  de 
Hollande;  les  Mémoires  de  Niceron, 
tomes  '2  et  10,  ou  le  Dictionn.  de 
Chanfepié.  W-s. 

LRÏO  (  GiuuoPoMPONio.  )  Foy, 

PoMPONIUS. 

LÉTOÎLE.  Foyez  Eron^E. 

LETOURNEUR( Pierre).  Foy. 
Tourneur  (  Le  ) 

LETOURxNEUR  CHARLEs-Louir- 
François-Hongré  ).néà  (iranville, 
eu  Basse  -  Normandie  ,  eu  1731  , 


346  LET 

dans  une  famille  bourgeoise,  fit  de 
bonnes  études,  surtout  dans  les  scien- 
ces mathématiques  ,  et  entra  ,  en 
1768,  dans  le  génie  militaire.  Il  y 
avait  obtenu  le  grade  de  capitaine 
avec  la  croix  de  Saint  -  Louis ,  et 
était  employé  à  Cherbourg ,  lors- 
que la  révolution  commença  :  il  s'en 
déclara  partisan ,  et  fut  député ,  en 
1791,  à  l'assemblée  législative,  et 
en  ï  792  ,  à  la  Convention ,  par  le 
département  de  la  Manche.  On  le 
remarqua  peu  dans  la  première  de 
ces  assemblées,  où  il  fit  quelques  rap- 
ports sur  la  marine.  Après  le  10 
août,  on  le  chargea  des  travaux  du 
camp  sous  Paris.  Il  s'occupa  ensuite, 
dansles  comités  dontil  était  membre, 
de  divers  rappoi-ts  et  projets  de  lois 
militaires  ;  et  fut  regardé  dans  cette 
partie  comme  l'auxiliaire  de  Garnot , 
son  camarade  et  son  collègue.  En- 
voyé en  mission  à  l'armée  des  Py- 
rénées, au  commencement  de  la 
guerre  ,  il  parvint  à  la  réorganiser  , 
et  Ini  fit  reprendre  l'offensive.  Dans 
le  procès  de  Louis  XVI  ,  il  vota 
avec  les  Girondins  (  /^o/.Guadet  ), 
pour  l'appel  au  peuple,  pour  la 
mort ,  et  contre  le  sursis.  Il  est  per- 
mis de  croire ,  d'après  son  caractère 
connu  ,  que  la  crainte  eut  beaucoup 
de  part  à  ces  deux  derniers  vo- 
tes. On  n'a  reproché  à  Letourneur 
dans  ses  missions,  aucune  des  cruau- 
tés dont  un  si  grand  nombre  de  ses 
collègues  se  rendirent  coupables.  Il 
carda  le  silence  pendant  la  tyrannie 
de  Robespierre  ;  et  ,  après  le  9 
thermidor,  il  reprit  ses  travaux,  et 
fit  adopter,  au  mois  de  janvier  1795, 
un  nouveau  système  pour  l'arme  du 
génie  militaire.  Il  paraissait  suivre 
alors  des  principes  modérés:  mais 
la  réaction  qui  poursuivait  les  con- 
ventionnels, le  rejeta  dans  le  parti 
de  cette  assemblée.  Lors  de  l'iusur- 


LET 

rection  des  habitants  de  Paris,  à 
l'époque  du  i3  vendémiaire  (  4  oc- 
tobre 1795  ),  il  fit  décréter  que  qui- 
conque sortirait  de  sa  commune 
avec  un  passeport  des  sections ,  se- 
rait considéré  comme  un  de  leurs 
agents ,  et  puni  de  mort.  Au  mois 
d'octobre  suivant,  il  fut  nomme- 
membre  du  directoire  exécutif  •  et 
sur  ce  nouveau  théâtre ,  il  ne  fit 
guère  parler  de  lui  qu'au  momeni 
où  il  s'en  éloigna,  en  1797.  On  a 
dit  que,  séduit  par  les  dédommage- 
ments que  ses  collègues  lui  offrirent, 
il  voulut  bien  consentir  à  ce  que  h 
sort  qui  devait  faire  rentrer  l'un  d'eu^i 
dans  la  vie  privée  portât  sur  lui 
telle  fut,  au  moins  alors  ,  l'opinioi 
générale.  Ses  collègues  le  nomme 
rent  inspecteur- général  de  l'artil 
lerie,  et,  plus  tard,  l'un  des  pléni 
potentiaires  ,  pour  négocier  la  pal: 
avec  l'Angleterre.  Après  la  révo 
lution  du  18  fructidor  (  4  septem 
bre  1 797  ) ,  ses  liaisons  avec  Carno 
le  firent  rappeler  ;  et ,  comme  mili 
taire  ,  il  cessa  d'être  en  activité.  Ei 
t8oo,  lors  de  l'établissement  de 
préfectures ,  le  gouvernement  consu 
laire  le  nomma  à  celle  de  la  Loire 
Inférieure;  mais  Buonaparte,deven 
empereur,  l'éloigna  de  cette  plac 
à  la  suite  de  quelques  discussion 
d'intérêt  particulier.  En  1810,  il  d( 
vint  maître  des  comptes,  et  en  reml 
plit  les  fonctions  jusqu'à  la  premier  | 
restauration.  Il  fut  destitué  à  cetlj; 
époque;  mais  le  Roi  lui  fit  une  peiiji 
sion  de  8000  fr.  Au  retour  de  Buci 
naparte,  il  s'empressa  de  reprendi» 
sa  place  de  maître  des  comptes ,  <| 
fut  banni ,  en  1 8 1 6 ,  comme  régicid  j; 
Letourneur  est  mort  à  Lncken,  prcl 
Bruxelles,  le  4  octobre  181 7.  B-i 
LETOURJN  EUX  (  Nicolas  ) 
prieur  de  Villers-sur-Fère ,  naquit  « 
Rouen  ^le  3o  avril  i64o ,  de  pareui 


Î.ET 

pauvres ,  et  dut  le  bienfait  de  son 
'      itiuiià  M.  Dufossr,  inailrc  des 
ptcs  à  Rouen  ,(jui  l'envoya  e'iu- 
.1  Paris  au  eollege  des  Jésuites, 
s  avoir  aelieve  sa  pliilosopliic 
uuv  (irassins  ,  il  retourna  à  Rouen  , 
où  il  fut  oi*donne  pritre  à  wà  ans, 
nuis  employé  dans  le  niinisli  re  de 
M    prédication  ,   dont  il   s'acquitta 
succès.    On  lui  i)rocura  deux 
s  bénéfices  ,    et  il    obtint    une 
ion  du   roi.  Au  bout  de  quel- 
années,  il  quitta  la  place  de 
ne  ,   qu'il    occupait   dans  une 
j-didisse  de  Rouen,  et  vint  vivre  à 
Paris  dans  la  retraite.  11  paraît  qu'il 
uissi  à  Port-Royal,  où  il  avait 
oites  liaisons.  Son  dessein  était 
r  condamner  pour  toujours  au 
c  :  mais    Lemaistre  de  Sacy 
.  igca  à  reparaître  dans  la  chaire, 
urneux  prêcha  donc  dans  plu- 
s  églises,  où   il  fut   très-suivi. 
uût  de  la  retraite  le  conduisit 
-  le  Maine,  et  enfin  à  son  prieuré 
illers,  où  il  passa  ses  dernières 
os  :  il  mourut  à  Paris,  en  iG8(). 
iirneui    avait  composé    entre 
s  ouvrages  :  Le  Catéchisme  de 
riitence^  1 676,  in-i  2;  —  Princi- 
t  règles  de  la  vie  chrétienne  y 
S,  in-i  2  ;  -Explication  littéraire 
>rale  de  V Epitre  de  Saint-Paul 
Romains  ,  1  (V)  j  ,  in- 1  u  ;  —  La 
de  Jésus-Christ  ;  —  La  meil- 
Manière  d'entendre  la  Mes- 
,    et  une    Traduction    du   Bre- 
\viaire  :  cette  traduction  fut  censurée 
'^"-  une  sentence  de  l'ofRcial  de  Pa- 
in 10  avril  i088,et  Arnauld  en 
M'iiL   la   défense.  Mais  le  principal 
I  ouvTage  de  Letourneux  est  son  Jkn- 
cltrétienne,  qu'il  faisait  impri- 
lorsqu'il  momut ,  et   dont  le» 
iors  volumes  sont  du  flamand 
il  d'Ans.  Ce  livre  a  été  condamné 
ë  Komç  sous  InooocntXII,  le  17 


III  3ii 

septembre   iGpi ,  et  par  plusieurs 

évècpirs  français  ;  et  les  amis  de  l'au- 
teur (onviennenl  «jue  sa  doctrine  est 
la  même  (pie  celle  d<'(hiesnel.  On  a 
de  Lelourneux  une  lettre  pour  sa 
justification, datée  du  19  mai  ^i\H(\, 
Il  y  disait  qu'il  n'était  |)oint  re- 
tourné à  Port-Royal  depuis  sa  sortie 
de  cette  mais{;n,  et  qu'il  ne  s'était 
point  servi ,  dans  son  y/nnée  chré- 
tienne ,  de  I.T  \ersion  du  Missel  d© 
Voisin ,  ni  de  relie  du  Nouveau- 
Testament  de  Mons.  Toutefois  son 
ouvrage  renferme  beaucoup  de  cho- 
ses inexactes;  et  c'est  pour  le  faire 
oublier  que  Griflet  a  composé  sou 
Année  du  ch-étim.  P-c-t. 

LETOURNOIS  (  Nicolas  ) ,  bé- 
nédictin ,  naquit  au  Havre ,  le  11 
février  1677.  vSon  goût  pour  la  navi- 
gation le  détermina  d'abt)rd  à  em- 
brasser cet  état;  mais  à  l'âge  de 
vingt-cinq  ans,  il  s'en  dégoûta  ,  d'a- 
près les  dangers  imminents  auxquels 
il  fut  exposé  dans  son  dernier  voya- 
ge. A  son  retour,  ayant  repris  ses 
humanités ,  il  réalisa  le  vœu  qu'il 
avait  formé  de  se  faire  religieux  de 
la  congrégation  de  St.-Manr,  et  se 
rendit  à  l'abbaye  de  Lire.  Ses  progrès 
furent  si  rapidcs^  dans  l'étude  des 
langues  ,  qu'il  forma  le  projet  d'un 
Dictionnaire  des  langues  hébraïque, 
chaldaique  ,  syriaque,  ^rabe  ,  grec- 
que, latine  eWrançaise,  qu'il  n'a  pas 
terminé,  et  qui  est  resté  manuscrit , 
peut-être  par  une  obéissance  trop 
illimitée  envers  ses  supérieurs  ,  qui 
désirèrent  qu'il  achevât  le  Lexicon 
hehrdicum  et  chaldœo  -  biblicum  , 
commencé  par  dom  Pierre  Guarin, 
et  qui  n'était  encore  qu'à  la  lettie 
Meni  inclusivement.  D.  liCtournois 
termina  ce  savant  ouvrage,  qui  for- 
me 2  vol.  'ïu-\".  ;  mais  il  ne  put 
en  voir  la  publication  (  r,  Gibab- 
DET  ) ,  élant  mort  à  l'abbaye  de  St.- 


345 


LET 


Denis,  le  3i  dëceinLre  174 t.  La 
connaissance  des  langues  anciennes 
avait  mis  ce  religienx  en  état  d'ex- 
pliquer d'une  manière  satisfaisante 
Jes  deux  versets  du  psaume  G"] 
Ejcurgat  Deas ,  sur  lesquels  les 
interprètes  se  sont  tant  exercés.  Z. 
LETROSNE  (  Glill  a  itme-Fr  an- 
cois  ),  ancien  avocat  du  roi,  et  son 
conseiller  honoraire  au  bailliage  et 
pre'sidial  d'Orléans,  membre  de  la 
société  d'agriculture  de  la  même 
ville,  et  honoraire  de  celle  de  Berne, 
îiaquit  à  Orléans  le  1 3  octobre  j'j'iS. 
Son  père ,  homme  recommandable  , 
était  conseiller  à  la  même  cour.  Le 
jeune  Letrosne  manifesta  de  bonne 
heure  beaucoup  de  justesse  d'esprit , 
un  penchant  naturel  à  la  bienfai- 
sance et  à  l'équité,  Poîhier  fut  le 
modèle  qu'il  se  proposa  ;  et  l 'exem- 
ple, plus  encore  que  les  leçons  de  ce 
«avant  jurisconsulte  ,  l'enflamma 
d'ime  noble  émulation.  Il  fut  instal- 
lé, en  1753  ,  dans  l'office  d'avocat 
du  roi;  magistrature  qu'il  exerça 
d'une  manière  brillante  pendant 
vijigt-deux  années.  Parmi  plusieurs 
de  ses  ouvrages ,  où  l'on  remarque 
«ne  connaissance  très -étendue  du 
droit  naturel ,  du  droit  civil  et  du 
droit  public,  on  distingue  surtout 
un  Discours  publié  en  1777,  qui  a 
nn  rapport  pUis  intime  avec  les  de- 
voirs de  sa  charge  :  fl  y  faisait 
voir  les  inconvénients  de  la  juris- 
prudence alors  existante  sur  la  pu- 
nition des  crimes  ,  et  il  indiquait 
les  moyens  de  corriger  cette  partie 
importante  de  notre  législation.  A- 
vant  lui ,  Servan  avait  démontré  la 
nécessité  de  cette  réforme  ;  et  l'on 
sait  que  plus  tard  l'usage  barbare 
de  la  question  fut  aboli  par  Louis 
XVI,  ainsi  que  la  loi  portant  peine 
de  mort  contre  les  déserteurs.  Les 
administrations  provinciales  étaijlies 


LET 

ou  plutôt  essayées  avec  succjîs  clans 
quelques  provinces  ,  avant  que  l'ou- 
vrage de  M.  Letrosne  sur  ce  sujet 
eut  paru,  n'avaient  pas  été  conçues 
sur  un  plan  aussi  vaste  que  le  sien. 
Ilfait  un  tableau  séduisant  de  ces 
conseils  d'administration  ,  «  qui 
»  trouveraient,  dit-il,  leur  intérêt 
»  particulier  dans  l'intérêt  jmblic  et 
»  commun.  »  Quoiqu'on  ait  accusé 
les  économistes  de  dédaigner  les  ta- 
lents agréables  et  les  beaux-arts, 
le  style  élégant  et  fleuri  de  M.  Le- 
trosne prouve  qu'il  avait  aimé  et 
cultivé  les  lettres.  Lié  avec  Turgot 
et  Gondillac,  dont  il  a  quelquefois 
combattu  les  opinions;  avec  Ger- 
bier  ,  l'abbé  Beaudeau  ,  etc. ,  il 
avait  conçu  pour  l'abbé  de  Reyrac  , 
son  compatriote ,  une  amitié  parti- 
culière ;  et  l'auteur  de  V Hymne  au 
Soleil  venait  souvent  consulter  le 
magistrat  sur  ses  compositions  lit- 
téraires. Letrosne  mourut  à  Paris,  le 
26  mai  1 780.  On  a  de  lui  :  I.  Me- 
thodica  juris  naturalis  cum  jure 
civilicMatio,  1700,  in-4^.  IL  Dis- 
cours sur  le  droit  des  gens  et  sur 
Vétat  politique  de  V Euroj)e ,  Ams- 
terdam (  Paris  ) ,  1 762 ,  in- 1 1,  III. 
Discours  sur  l'état  actuel  de  la  ma- 
gistrature ,  Paris  (  Orléans  ),  1 764  , 
in-i'2.  IV.  Mémoire  sur  les  va- 
gabonds et  sur  les  mendiants , 
Soissons  (Paris),  1764,  in-S**.  Y. 
La  liberté  du  commerce  des  grains, 
toujours  utile  et  jamais  nuisible  , 
Paris,  i764;ibid.,  1765,  in-12.  VI. 
Suite  de  la  dispute  sur  la  concur- 
rence de  la  navigation  étrangère 
pour  la  voiture  de  nos  grains,  Paris , 
1765,  in- 12.  VIL  Recueil  de  plu- 
sieurs morceaux  économiques ,  etc. 
Amsterdam  (  Paris  ) ,  1 768 ,  in-i 2. 
On  y  trouve  une  Leltve  à  M.  Roux^- 
lin ,  sur  l'utilité  des  discussions  écor 
nomiques.  VUI.    Lettre  à  un  ami 


LET 

snr  hs  avantages  de  la  liberté  du 
des  grains  ,  et  le  Jauger 
itions^  Anislml.  (Paris), 
».   iii-ri.    ly^.  Df!  l' Ordre  so- 
l*aris,  1777,  iii-8^.  —  De  l'in- 
socmly  suile  du  mcnie  ouvrnp;c, 
,  i(>l    il   est  ordinaireiiu'iit  rciiiii  : 
rautnir  y  (iisrutc  qiiolquos  principes 
de  Coiuliilac.  X.  Mémoire  contre  la 
caisse  de   Poi.ji/,  (  Paris  )  1770, 
iu-i!2.  XI.  Eloge  Idstnriqiœ  de  M. 
Pot  hier,  1773,  in- 1  '2.  XII.  f^ues  sur 
'      Ktice  criminelle ,  Paris,  1777, 
.   XIII.    Les  Effets  de  l'im- 
indirect  prouvés  par  les  deux 
iples  de  la.  gabelle  et  du  tabac, 
yParis)    1770,   in-i7.;   reimprinjc 
en  1777   sous  co  titre:  E.iamen  de 
ce  que  coûtent  an  roi  et  à  la  nation 
la    iiabelle  et   le  tabac.  XIV.  Hé- 
ins  politiques  sur  la  guerre  ac- 
.'  de  V Angleterre  avec  ses  co- 
V ,  et  sur  l'état  de  la  Russie  , 
iiis,   1777,  in-8°.  XV.  lAitti^ 
les   laboureiues  de  Noisj  près 
ailles  ,    (  Paris  )  1777  ,  in-B'^. 
I.  De  V Administration  provin- 
,  et  de  la  Héforme  de  l'impôt, 
I  d'une  Dissertation  sur  la  Jéo- 
'é,  Bàle,  1779,  in-4".;  ouvrage 
ortant,  composé  en  1775,  cou- 
ironiié  par  l'académie  de  Toulouse  , 
'et  lunt  l'iiuteur  avait  publié  ie  Dis- 
s préliminaire  à  Orléans,  1777, 
'.  :  il  y  donna  ensuite  des  addi- 
> .  XV i I.  Mémoires  ,  consulta- 
^ ,   actes  de  notoriété  et  délibé- 
>n  sur  la   question  du  jeu  de 
et  le  sens  tfc,  l'article  7  de  la 
lime  d'Orléans,  Orléans,  1780, 
'    Letrosnc  fut  avec  Roubaud, 
illion,  etc.,   un  des  coUabora- 
>  du  Journal  d'ugiicuiture,  com- 
<c  et  fuuniccs ,    Paris,     1779, 
vol.   iu-r>,.    l\  a  fourni  beaii- 
i>  d'articles  aux  Ephéméridcs  du 

^^/l(V.B4U0EAL     .       D-l    J. 


LErrSOMf  .Tr  AN  Coaklf.y),  mé- 
decin  anglais  ,  d'une  famille  de  qua- 
kers ,  onp;inaire  du  (llirshire  ,  qui 
émip;ra  j)endant  \os  gueriTs  rivilcs  , 
naquit  vers  17/17  f^^"s  une  pelilc  îlo 
située  près  de  la  Tortola,  dans  le» 
parap;es  de  Saint  -  Domiiic;ue.  De» 
i'àgc  de  six  ans,  il  fut  envoyé'  en 
Angleterre  ,  pour  son  éducation, 
La  mort  de  son  père  le  força  de  se 
rendre  dans  son  ])aysnatTl,  afin  d'y 
régler  les  affaires  d'une  succession , 
qui  lui  devint  onéreuse  par  son  ex- 
cessif désintéressement.  Firièle  aux 
généreux  principes  des  quakers ,  il 
donna  la  liberté  à  totîs  sf»s  nègres-, 
revint  en  Europe  à  I  \ingt- 

troisans,  etcompléf-  ^dans 

les  universités  d'Ediml)our^  ,  de 
Paris  et  de  Leyde.  Reçu  doct/?nr  daris 
cette  dernière  ville,  il  voyagea  danis 
une  grande  jwrfie  de  l'Europe  ,  et 
revint ,  en  1 7fk) ,  s'e'lablir  à  Lond rrs, 
où  ses  talents  ,  l'appui  du  doc'our 
Fothergill  ,  et  son  attachement  aux 
quakers  ,  avec  lesquels  cepèttda.it  il 
se  brouilla  vers  la  fin  de  sa  vie,  Uii 
firent  obtenir  une  ])ratique  nom- 
breuse. Il  fut  reçu  .  à  celle  <^])Oquo  , 
membre  delà  Société  des  antiquaires, 
et  admis  ,  en  1771,3  la  Soriélé 
royale.  Il  devint ,  dans  la  suite , 
mcmbie  honoraire  de  ])resque  toute* 
les  Sociétés  de  médecine  anglaises 
ou  étrangères.  L'étude  de  la  mé- 
decine ,  de  la  botanique  et  de  la 
chimie ,  occupait  tour-à-tour  les 
moments  qu'il  ne  consacrait  pas  à  U 
pratique.  Aussi  acquit -il  ,  en  peu 
de  temps  ,  une  grande  résiliation  et 
une  fortune  cou  '  '  • ,  qu'il  em- 
ployait au  soûl.  (Sjnalheu- 
reux  ,  soit  en  ks  traitant  gratuite» 
ment,  et  en  Uv>  secourant  même  de 
sa  bourse,  soit  en  formant  des  ins- 
titutions de  charité.  Hélait  eu  cor- 
icspoudauce   avec  les  snviiuti    lc< 


35o 


LET 


plus  distingués  d'Europe  et  d'Amé- 
rique ,  et  reçut ,  en  1 8 1 5  ,  de  la  cour 
dé  chancellerie ,  des  domaines  consi- 
dérables situés  dans  l'île  de  Tortola , 
et  évalués  à  un  revenu  de  vingt  mille 
Iivressterling.il  mourut,  à  Londres, 
le  i^"^.  novembre  de  la  même  année. 
Onadelui : I.  Obseivalionesadhisto- 
riamtheœ pertinentes.  Leyde,  1769, 
in-4".  Il-  Histoire  naturelle  de  V ar- 
bre à  thé,  avec  des  observations  sur 
les  qualités  médicales  du  thé ,  et  sur 
les  eZ/ef^;  Londres,  177*2  ,  in-4"., 
fig. ,  en  Angl, ,  tr.  en  français ,  Paris , 
1773,  in- 1  '2.  Cet  ouvrage  est  estimé  ; 
l'auteur  s'y  élève  avec  force  contre 
l'usage  du  thé.  La  dernière  édition 
est  accompagnée  de  gravures  colo- 
riées, in.  Le  Compagnon  du  natu- 
raliste et  du  voyageur  ;  contenant 
des  instructions  pour  recueillir  et 
conserver  les  objets  d'histoire  na- 
turelle, in-8**. ,  1772;  il  en  a  été 
publié  une  troisième  édition  en  1 800 , 
et  une  trad.  française  intitulée  :  Le 
P^ojageur naturaliste.  {F.  Lezay.  ) 
IV.  Réflexions  surletî'aitement  géné- 
ral et  la  guérison  des  fièvres,  in-8^. , 
1772.  V.  Mémoires  sur  la  médecine 
du  dispensaire  général  de  Londres , 
in-8<*. ,  1 7  7  4  ;  trad.  en  français,  Haris, 
1787  ,in-8o.  VI.  Améliorations  de 
la  médecine  à  Londres ,  basée  sur 
le  bien  public,  in-8<^. ,  1 775.VII.  Ob^ 
servations  préparatoires  à  l'usage 
des  remèdes  du  docteur  Mayerbach, 
in-8^. ,  1 776.  Ce  docteur  eut  de  vio- 
lentes discussions  avec  Lettsora ,  sur 
la  manière  de  traiter  certaines  ma- 
ladies. VIII.  Lettre  à  sir  Robert 
Barker  et  à  George  Stackpoole  sur 
V inoculation  générale,  in-8^.  ,1778. 
ÏX,  Histoire  de  V  Origine  de  la  mé- 
decine ,  et  de  son  état  avant  la 
guerre  de  Troie:  Discours  prononcé 
devant  la  Sociétéroyale  de  Londres, 
in-4**.,  17 78.  X.    Observations  sur 


LET 

les  Remarques  faites  par  le  baron 
Dimsdale  suri  inoculation,  in-8'\ , 

1779.  XL  Réponse  à  l'Examen  des 
Observations  du  docteur  Lettsom , 

p^r  M.  le  ba^on  Dimsdale  ,  in-8^. 
l'j'jg.Wl.ConsidérationsurleFlari 
proposé  pour  inoculer  chez  eux  la 
pauv 'es  de  Londres ,  in-8''.,  1779 
XIII.  Observations  sur  le  Plan  p^o 
posé  pour  établir  une  société  du  dis 
pensai^e ,  et  une  société  médicale 
et  des  formules  de  médicaments  par 
ticulièrement  appropriés  à  l'usagi 
des  pauvres,  in-S**. ,  1779.  XIV 
Hortus  W/tommsis,  ou  Catalogue  de 
plantes  du  docteur  Fotlicrgill ,  in-8'\ 

1780.  XV.  Lettre  au  Roi,  ausuje 
de  la  proposition  d'une  nouvell 
Institution  dans  le  départemen 
médical,  in-4*'. ,  1 78 1 .  XVI.  Nolic 
biograpldque  sur  le  capitaine  J.  Cai 
ver,  in-8«. ,  1781.  XVII.  Wotic 
sur  le  docteur  j.  Fotherglll,  in-8^. 
1783.  XVIII.  Défense  de  la  cor 
duite  du  docteur  Lettsom,  relative 
ment  à  V administration  élective  d 
dispensaire   de  Finsburg ,    in-S**. 

1786.  XIX.  Sur  la  culture  i 
l'usage  de  la  racine  de  diseti 
(  Mangel  JVurzel  ) ,  traduit  du  frar 
çais  de  l'abbé  Commerell ,  in-8'*. 

1787.  XX .  Observations  sur  les  di. 
sections  humaines  ,  in-S^. ,  178^ 
XXL  Histoire  de  quelques-uns  di 
effets  de  l'ivrognerie  J  m-/\^. ,  178^ 
XXII.  Essai  sur'  les  malheurs  d 
pauvre ,  in-8<*. ,  i794-  XXIIL  E 
sai  sur  la  jaunisse  des  écoles 
in-80. ,  1795.  XXIV.  Essai  poL 
la  Fondation  d'une  Société  de  biei 
faisance,  in-S**. ,  1 796.  XXV.  Essi 
ou  Projet  pour  répandre  la  bier\ 

faisance,  la  tempérance  et  lasciena 
médicale,  in-8'^.  j,  de  1797  à  i8oij 

XXVI.  Observations  sur  la  Pers 
cation    religieuse  ,    in-8^.  ,    iSod 

XXVII.  La  Société  de  village  ^  E 


ir»i 

bns 


T.Frr 

,iu^^,  1800.  XXVIII.  Ohser- 
">ns  SU'  la  petite  vérole. 'ii\-S*\ , 
.  Lcttsoiua  fail,  en  outre,  iu- 
|>liisiciirs  morceaux  nirieux 
les  Tr.insaclioiis  |)hiloM)jihi- 
(l  dans  les  Recueils  des  sociétés 
Iccine ,  de  Londres  ,  de  Bat  h  , 
afin  ,  il  a  publie  une  Echelle 
i(é(on  singulière,  pour  faire 
itre  les  elfets  des  liquides  sur 
lie  de  riionnne,  et  les  suites 

[ui  résultent  des  excès  de  boisson. 

I  rc>.iilait    une    partie   de    l'année 
>a  cliarmautc  terre  de  Grove- 

près  Camberwcll ,   «pli  a   été 

'hante'c  par   M.    Maurice  dans  un 
^  lequi  porte  ce  nom.  Les  beau- 
ce  lieu ,  et  les  vertus  du  pro- 
i  re,  ont  encore  été'  célébrées  par 
^cot  et  Joncs  Boswell.   D-z-s, 
LEU  (Thomas  de  ),  dcssîjiateur 

■t  2;raveur  au  burin ,  né  à  Paris  vers 

.a  gravé  une  quantité  considé- 

dc  portraits  des  personnages 

:  l'S   de   son    temps ,    exécutés 

ie  goût  de  Wicrix.  Ils  sont  en 

le   partie   d'après  ses  dessins; 

I  es  sont  d'après  les  peintres  de 

laps  ,  tels  que  Bunel ,  Garon  , 

.  Quenel ,  etc.  Tous  les  acces- 

sonl  exécutés  avec  une  extrême 

1  ii(^>e  et  une  ])ropreté  exquise.  La 

l'lu^>art  de  ses  pièces  sont  marquées 
tas  ou  Thom.  de  Leu  fec.  et 
i'irmiles  portraits  qu'il  a  gra- 
après  ses  propres  dessins,  on 
;j,ue  Henri  de  Bourbon ,  prince 
;idéj  âgé  de  9  ans  ,  1 59  j  ;  Ce- 
^lonsieur^  âgé  de  5  ans  ;  Hen- 
l  ;  Marie  Stuari  ;  Charles  de 
''on ,  comte  de  Soissons  ;  Fran- 
/<?  Bourbon ,  prince  de  Conli  ; 
,  duc  de  Jojeuse^  1087  ; 
cois  de  Lesdi^uières  f  159O; 
lesde  Biron;  Charles  de  Gon- 
' ,  duc  de  Nivernois  ;  Charles 

^^e  Lorraine ,  duc  de  Maicnne  ;  le 


T.ET  35 1 

connétable  Henri  de  Mnntmorenci, 
<;t  Louise  de  Biules,  sa  femme;  J. 
Passerat,  représenté  de  profil,  parce 
qu'il  était  borgne  ;  Marie  de  Médicis, 
etc.  11  a  gravé,  d'après  Bunel  ,  un 
buste  de  Henri  IT;  et  d'après!  Lio- 
nel ,  un  buste  accouple  de  Henri  IK 
et  de  Marie  de  Médicis,  etc.  Kn- 
(in,  on  lui  doit  une  f'ie  de  Sainl- 
Francois,  en  vingt-cinq  pièces.  P-s. 
LEU  (  Jean-Jacques  ) ,  né  à  Zu- 
ricjle  'M)  janvier  1G89,  y  mourut 
le  I  o  novembre  1 768.  Il  fit  ses  éludes 
dans  sa  patrie,  et  ensuite  à  Mar- 
bourg.  Après  avoir  accompagne  le 
célèbre  Schcuchzer  dans  son  qua- 
trième voyage  de  Suisse ,  il  voya- 
gea en  France,  en  Allemagne  et 
dans  les  Pays-Bas.  De  retour  dans 
sa  patrie,  il  fut  nommé  chancelier  , 
en  1729.  Ayant  parcouru  les  dilïé- 
rents  degrés  de  magistrature,  et  scr\  i 
l'état,  dans  SCS  relations  fédérales  non 
moins  que  dans  différentes  négocia- 
tions avec  les  états  voisins ,  U  fut 
nommé,  en  1759,  bourguemestre  de 
Zurich.  Pendant  son  séjour  à  Mar- 
bourg ,  il  publia  sa  Dissertation  De 
pluralitate  su/fragiorum  in  cousis 
religionis,  1708,  in-4"^.  En  17'2'Jt, 
il  fit  paraître  un  Commentaire 
sur  la  Hèpublique  des  SiUsses  ,  de 
Simler ,  le  meilleur  abrégé  qu'on 
ait  eu  sur  les  constitutions  de  l'an- 
cienne confédération  helvétique.  De 
17U7  à  I7'|6,  parut  son  ouvrage  (en 
4  vol.  in-4^.)  jSur  les  loi$  desdijfé- 
rents  cantons  suisses,  rangées  dljns 
l'ordre  des  Institutcs  de  Justinien. 
L'ouvrage  le  plus  considérable  et 
le  plus  im])ortant  qu'il  ait  donné, 
est  son  Dictionnaire  uni\>ersel  de 
la  Suisse  y  publié  en  20  vol.  in- 
4**.,  depuis  174^  juscpi'en  17(33. 
(>etle  collçction  renferme  les  ?naté- 
riaux  les  plus  riches  sur  l'histoire 
civile,  eccUsiastique,  naturelle  ,  to- 


;j2 


LET 


pographique  ,  littéraire  ,  généalo- 
gique, etc.  des  différentes  parties  de 
cette  contrée.  Elle  a  ëtc  augmentée  , 
depuis ,  de  cinq  volumes  de  supplé- 
ment, rédiges  par  Holsbak,  qui  se 
terminent  à  la  lettre  S,  et  qui  ont 
paru  à  Zurich,  en  allemand,  comme 
le  grand  ouvrage  lui-même,  de  1 786  a 
1791.  Leu  a  encore  laissé  un  nom- 
bre considérable  de  manuscrits  re- 
latifs à  riiistoire  de  sa  patrie.  Cette 
collection  a  été'  conliniiëe  et  augmen- 
tée par  son  fils ,  Jean  Leu,  qui  l'a  lé- 
guée à  la  bibliothèque  de  la  ville  de 
Zurich.  Ce  dernier  fut  conseiller  et 
mourut  en  178'^.  U-i. 

LEUCHT  (  Christian  (i)  -LÉo- 
WARD  ) ,  jurisconsulte  ,  né  en  i645  , 
à  Arnstadt ,  dans  la  Thuringe ,  fré- 
quenta successivement  les  universités 
de  Leipzig ,  de  Giessen  et  de  léna  , 
et  reçut  ses  degrés  avec  beaucoup  de 
distinction.  11  se  fixa  ensuite  à  Dresde , 
où  il  acquit  bientôt  une  grande  répu- 
tation dans  la  pratique  du  droit.  Il 
devint,  en  1 683, conseiller ducomte 
do  Reus  ;  et ,  cinq  ans  après ,  il  ob- 
tint le  même  titre  de  l'ortlre  éques- 
tre de  Franconic  et  du  comte  de  Lim- 
bourg.L'empereurLéopoldrhonora^, 
en  1690  ,  delà  dignité  de  comte  pa- 
latin ,  pour  le  récompenser  de  la 
description  qu'il  avait  faite  de  la  cé- 
rémonie de  son  couronnement  ;  et , 
peu  de  temps  après  ,  Leucht  fut  ap- 
jielé  à  Nuremberg  ,  pour  y  remplir 
les  fonctions  de  conseiller  et  d'asses- 
seur au  tribunal  civil.  Il  se  démit  de 
cet  emploi ,  en  i  G99  ,  à  raison  de  sa 
mauvaise  santé  :  mais  il  continua  de 
se  livrer  avec  beaucoup  d'ardeur  au 
travail  du  cabinet,  et  moment  à 
Nuremberg,  le  24  novembre  17 16. 
C'était  un  homme  instruit  et 
laborieux  j  on  lui   doit  de  bonnes 

(i)  Quelques  bioç>r«plies  le  nomment  Cbisto- 
pbe;  mais  il  paraît  que  c'est  une  erreur  occa- 
ftiouéeparla  resseuibUnce  de  l'abrévialion. 


LEÎ 

éditions  de  plusieurs  ouvrages  de  ju- 
risprudence, et  des  recueils  très-inté- 
ressants pour  l'histoire  du  droit  pu 
blic  de  l'Allemagne.  On  se  conteiUen 
de  citer  ;    I.    Electio  jiiris  publid 
curiosa,    Francfort,    1694,  in-4<* 
Il  a  publié  ce  volume  sous  le  nom  di 
Cassandre  Thucelius, anagrammedi 
Leuchîius.  11.  Europœïsche  Staais 
canzley ,  c'est-à-dire,  Chancollerii 
des  états  européens.  C'est  une  coUcc 
tion  de  tous  les  actes  importants  pu 
bliésparles  ditFérentes  cours.  Leuch 
en  lit  paraître  le  premier  volume 
à  Nuremberg ,  en  1697  ,  in-S*'.  sou 
le  nom  di  Antoine  Faber;  et  elle  , 
été  continuée  jusqu'en    1760,  pa 
Paul  -  Laurent  Widmann  et   Jean 
Charles  Kœnig  ,  prolesseurs  à  Mai 
bourg.    Cette    première    coUectio 
forme  ii5  vohimcs  in-8°.,dont  le 
1 6  premiers  seulementapparlienner 
a  Leucht.   Le  sénateur  Gritsch  , 
Ratisljonnc ,  à  donné ,  en  55  vol. 
une  première  continuation,  jusqn' 
1782  •  la  deuxième  suite ,  publiée 
Ulm ,  par  J.-A.  Reuss  ,  depuis  1 78" 
a  déjà  plus  de  5o  volumes.  III.  Al 
dorjina  consilia   sive  responsa  ji 
ris  y  Nuremberg  ,  1 704  ,  /-i  volum< 
in-fol.  C'est  le  recueil  des  consult; 
lions  des  plus  fameux  jurisconsult< 
de   l'académie   d'Altdorf  :   Conré 
Riltershus  ,   André  Dinner ,   Hen 
Linckens ,  etc.  IV.  Des  heil.  Roi 
Reichs  Staatsacta,  etc.,  c'est-à-di 
les  Actes  publics  du  Saint-  Empi 
romain  pendant  le  dix-huitième  si 
cle ,  Francfort,    1715-17,  3    vc 
in-fol.  ,  sous  le  nom  de  Cass.  Thi 
celius.  Leucht  mourut  pendant  l'ii 
pression  du  troisième  volume  ,  q 
fut  terminé  par  Bielck ,  de  qui  l't 
attendait  une  continuation.  W-s. 
LEUCIPPE ,  fameux  philosopl 
grec  ,  était  né  à  Abdère  (  i  )  vers  1' 


(1)  Un  ue   s'accord&it    pas  sur   le  U«;u   d« 


LRTÎ 

Vo  nvnnt   Jrsiis-rjirisl.    Il   avait 
suivant   l.mil»li(iHr  ,  mtoiulrc, 
^  S.1  jonnrssc ,  les  leçons  do  Py- 
iha^orr:  il  fut  le  disriplcdo  Mclisse 
♦  t  (le  Zenon  (l'F.lcV  ;  mais  il  se  rle- 
t  bientôt  des  sopliisnies  de  ses 
I  es  ,  et  il  s'appli<jua  entièrement 
idede  la  nature.  ()nlerep;arde, 
i;eneralement,  comme  l'inven- 
lii  système  des  atomes  ,  qui  fut 
jxMicrlionne'    par    Dc'mocrite ,   sou 
dis(  iple,  el  ensuite  parEjùcnre.  Pos- 
lius  s'cfi'orça  de  lui  ravir  cette 
<  pour  en  faire  honneur  à  Mos- 
.    philosophe    phénicien ,    qui 
it,  dit-on,    avant  le  siège    de 
•;  et  E])icure,  bien  loin   d'a- 
r  qu'il  avait  profite  de  ses  idées , 
liait  que  Leiicippe  était  nu  per- 
iÇ!;e  imaginaire.  Les  livres  que 
'  i  ilosophe  avait  composés  ne  sont 
|;m,,iI  parvenus  jusqu'à  nous  ;  et  leur 
perte  empêchera  qu'on  puisse  jamais 
bien  connaître  rensembic  de  son  sys- 
tème :  ce  que  nous  en  savons  ,  nous 
aéfé  transmis  parDiogènedcLaercc, 
et  peut  se  réduire  à  un  petit  nom- 
bre de  propositions  :  Le  monde  est 
infini  ,  et  sujet  à  des  modifications 
continuelles.  —  L'Univers  est  vide  , 
c\   les   globes  sont  formés  par  les 
ics  ou  corpuscules  qui  s  accro- 

!...  lenten  tombant  dans  l'espace. — 
Le  soleil  parcourt  le  plus  grand  cer- 
'  '  lutour  de  la  lune.  —  La  terre  , 
M-e  comme  dans  un    charriot , 
Moiirne   autour  du    centre  (i),etc. 


mce  Diogi'n*  de  Lierc*  dit  que  Leucippe 
i  hiée,  d'Abdère  ou  de  Milet. 
Moiitncla  a  été  frappé  do  cette  idée  de 
;ipc  qui  lemble  atoir  deviné  le  monvem-nt 
t!ire  autour  de  «on  axe.  A  la  vérité,  ajoute- 
»  il  «Mit  dei  leotimenti  austi  abiurdet  que 
;u'on  lui  impute  (iir  d'autre*  point*  attro- 
q'ie»  ,  c'e«t  un  •uftraf'e  dont  le  «ratéme  py- 
■ricien    doit  peti  «'honorer;  car  ou    lui  fait 

',ue    la  terre   arait  la  forme  d'un  tambour, 
■  «oleil  était  le  plu*  éloigné  du*  a*trc*,  etc. 

•  û  nous  avion*  le*  ouvrage*   de  Le  pliili>*o- 

,   non*  trouverion*  pi-ut-étre  ce  récit    peu  fi- 
(  Hist  dei  Mathtmat.  toia.  ler.  paj;.  i47-  ; 


X*IV. 


LEU  3J3 

Lactance  a  réfuté,  avec  benuroup 
de  ft»rce  l'hypothèse  de  Leucippe 
sur  la  formation  des  globes  au 
moyen  des  atomes  (Institut.  (Inûrinr, 
Vu),  m  ,  ch.  xvii  ).  Fi'abbé  Halteux. 
en  a  fait  sentir  les  incoiiséipiences 
et  l'absurdité  dans  un  Mémoire  sur 
le  j)iincipe  actif  de  l'univers  (  Re- 
cueil (le  l\'1cad.  des  inscript.  Tom. 
XXIX  ),  qu'il  a  refondu  ensuite  dans 
son  Histoire  des  causes  premières. 
Bayle ,  suivant  sa  méthode ,  a  re- 
cueilli les  arguments  pour  et  contre 
le  système  de  Leucippe,  cl  en  propose 
de  nouveaux  en  sa  faveur.  (  Voy.  le 
Dict.  de  Bayle.  )  W— s. 

LEUCKFELD  (  Jean-Gkoroe  ) , 
historien  allemand  ,  né  en  i(>(J8  ,  à 
Hcringen    dans  la  Thuringe,  de  cul- 
tivateurs aisés,  mais  qui  n'attachaient 
aucun  prix  à  l'instruction  ,   savait  à 
peine  lire  à  l'agc  de  quinze  ans.  Son 
père  étant  mort ,  il  obtint  ,  à  force 
d'instaurés  ,  la  permission  de  com- 
mencer ses  études.  Il  apprit  en  foit 
peu  de  temps  le  latin;  et  il  fréquenta 
ensuite  les  cours  des  académies  de 
Quedlinbourg  et  de  Leipzig, où  il  ga- 
gnait sa  vie  en  corrigeant  des  épreu- 
ves  pour  les  imprimeurs.    Il   prit, 
enfin  ,  ses  degrés  en  théologie.  L'ab- 
besse  de  Gandersheim  le  choisit  pour 
son  chapelain  en  i7oo,et  le  chargea 
de  mettre  en  ordre  les  archives  de 
l'abbaye.  Son  goût  naturel  le  por- 
tait à  l'étude  de  l'histoire  du  moyen 
âge;  et  il  s'estima  très-heureux  d'être 
obligé  de   déchilïrer  et   d'analyser 
de  vieilles  chartes ,  échapj)ées  aux: 
recherches  de  tous  les  compilateurs. 
Il  fut  appelé,  en  170.4 ,  au  pastoral 
de  (ïrœningen ,  dans  la  principauté 
de  Halberstadt  ;  et  dès-lors  il  parta- 
gea son  temps  entre  les  devoirs  de  sa 
charge  et  l'élude  des  monuments his- 
tori(pies.  Il  mourut  le  '2^  avril  1 7'i6. 
Lcuckfcld  a  beaucoup  contribué,  par 
.*3 


3'->4  LEU 

ses  reclierclies ,  à  ëclaircir  l'Histoire 
«cclësiastique d'Allemagne;  mais  ses 
ouvrages  ne  sont  guère  connus  dans 
les  autres  pays ,  parce  qu'ils  sont 
écrits  en   allemand.   On  a  de  lui  : 

I.  Les  Antiquités  de  Walckenred , 
du  monastère  de  Poëld ,  de  rab]3aye 
de  Gandersheim ,  d'IIseburg,  de  Mi- 
di aelstein  ,  de  Grœningen,  de  Burs- 
felden,  de  Ringelheimen  ,  de  Nor- 
tlifiimen ,  de  Katelenbourg ,  Kalten- 
born  et  Wienhus ,  de  Halbcrstadt , 
de  Blankenbourg  ,  etc. ,  en  i5  vol. 
in-4^. ,   publies  de   1705  à    1721. 

II.  Les  Fies  de  Tileman  Hesbus  , 
de  Cyriaque  et  de  Jean  Spangen- 
berg,  de  Henri  Meibom,  savants 
tbe'ologiens  allemands. in.  La  Notice 
de  cinquante-cinq  théologiens,  morts 
dans  la  cinquante-cinquième  année 
de  leur  âge  ;  et  de  soixante  dix-neuf 
autres  qui  ont  vécu  de  quatre-vingt  à 
quatre-vingt-dix  ans.  IV.  Les  Antiqui- 
tés numismatiques ,  Leipzig,  1721- 
Si3  ,  3  vol.  in-^**.  Cet  ouvrage  n'est 
relatif  qu'aux  anciennes  monnaies  de 
l'Allemagne.  Leuckfeld  a  c'tëen  outre 
l'ëditeur  de  Y  Itinéraire  de  l'Ecriture 
SMinte  (  en  allemand  ) ,  par  Henri 
Bunting,Magdebourg,  1 7 18,  in-fol.; 
d'une  Chronique  de  Hcnr.  Meibom, 
etc.  11  a  eu  part  à  la  collection  des 
Scriptores  rerumgermanicarum,  pu- 
bliée par  J.  Micb.  Heineccius,  Franc 
fort ,  1707,  in-fol.;  enfin  ,  il  a  laisse 
plusieurs  ouvrages  manuscrits  qu'on 
trouve  cites  dans  les  Acta  eruditor. 
lips., àim.  1728, pag.  437.,  et  à  la 
suite  de  sa  Fie,  écrite  en  allemand, 
parïobie  Eckard,  recteur  de  l'aca- 
dëmie  de  Quedbnbourg.  Leuckfeld 
«tait  de  la  Sociëtë  royale  de  Berlin. 

W— s. 
LEULTETTE  (  Jean-Jacques  ) 
naquit  le  3o  novembre  1 767,  à  Bou- 
logne sur  mer,  de  parents  pauvres. 
Sutt  wlucatiou  fut  flëgligëe ,  et  il  tra- 


LEU 

vailla  même  quelque  temps  de  î'ëta 
de  serrurier  ;  mais  il  surmonta  tou 
les  obstacles  ,  et  apprit  seul  le  latii 
et  l'anglais.  Il  vint  ensuite  à  Paris,  01 
il  se  lia  avec  Mercier ,  qui  lui  procur 
une  place  subalterne  dans  les  bureau: 
d'une  administration.  Il  avait  adopt 
tous  les  principes  de  la  rëvolutioi 
avec  leurs  conséquences  les  plus  ri 
goureuses ,  puisqu'à  une  époque  01 
les  passions  commençaient  à  s'a 
paiser ,  il  osa  mettre  son  nom  à  ui 
ëcrit  destine  à  atténuer  l'effet  qu'avai 
produit  l'ëloquent  plaidoyer  de  M 
de  Lally  -  Toilendal  en  faveur  de 
ëmigrës.  Il  travailla  ensuite  à  la  rë 
daction  de  quelques  journaux,  entr 
autres  ,  de  la  Sentinelle  (  Voye 
LouvET  ) ,  et  fut  récompense  de  soi 
dévouement  par  une  place  de  pro 
fesseur  de  littérature  à  l'ëcole  ccn 
traledudëpartement  de  Seineet  Ois( 
Il  mourut  à  Versailles,  d'un  acciden 
le  2  3  décembre  1808.  On  a  de  lui 
I.  Des  Emigrés  français  ou  rëponji 
auMëmoiredeM.  deLally-Tollenda 
Paris,  1 797,  in-8<*  (  i  ).  II.  Réjlexioi 
sur  la  journée  du  iS  fructidor,  e 
réponse  à  Richer  Serisy,ibid.  179! 
in-8°.  Ces  deux  ouvrages  furent  ëcri 
sous  l'influence  de  la  police.  III.  E 
sai  sur  les  causes  de  la  supériorité  d  ' 
Grecs  dans  les  arts  de  V  imaginât  io  : 
ibid. ,  1 8o5 ,  in-8^.  IV.  Discours  s  | 
V  abolit  ion  de  la  seri'itude  j'in-H^.  ' 
Discours  sur  cette  question:  Que  1 
a  ëtc  l'influence  de  Luther  sur 
lumières  et  la  situation  politique  dj 
diifëreuts  ctats  de  l'Europe?  Parii 
1804  ,  in-8».  Ce  discours  obtint  uj 
mention  honorable  au  concours 
rinstitut;  celui  de  Villers  fut  c(j 


(1)  Jos.   Rosiiy   tlit  que  cette  Réponse  esj 
Mercier  le  dramaturge  i  que  Leiiliette  consejt 
à  la   laisser  paraître  sous  son    nom,   luoyeuilt 
quelques  avantages  pécuniaires.  Voy.  le  TV/j 
wa7  /{'Apollon,   Pans,  an  viii  (  1800  ),   " 


LEU 

^onnc.  (  Foyez  Cli.  Villers.  )  L'ou- 
vrage de  Lculiclte  est  divise  eu  deux 
p.Trties  ;  laseroudrcst  intituler  :  Coup- 
d'œil  sur  l'état  del'Eurofw  juscju'au 
seizième  siècle ,  cl  sur  les  chaugc- 
mcnts  qui  y  sont  survenus  depuis  celle 
e'poque.  I/auleur  annonce  dans  la  pré- 
face qu'il  reserve  ,  pour  supplément 
d'une  nouvelle  édition ,  une  Histoire 
impartiale  de  V Edit  de  Nantes ,  de 
sa  revocation  et  des  suites  qu'elle  en- 
traîna. VI.  Fie  de  Richardson ,  tra- 
duite de  l'anglais  de  mad.  A.  L.  Bar- 
bauld  (  F.  la  Bios^r.  des  hom.  im\ 
t.I,p.  189),  ibi'd.,  1808,  in-8». 
Lculiette  a  revu  et  corrige'  V Histoire 
i  de  la  Grèce,  traduite  deVanglais  (de 
Hillies ,  Goldsmitli  elGast,  par  Mad. 
\  illcroy  ) ,  Paris ,  1808,  2  vol. 
I.,  S^>.  W-s. 

LEUNCLAVIUS  (Jean),  gen- 
til !  1  o  mmc  allemand ,  plus  connu  sous 
'  '   Mojn  latinise  ,  que  sous  son  vrai 
1  qui  était  Loewenklaa,\\di(\m\.  en 
) ,  à  Amelbeuern  en  Westphalie. 
■  )yagea  beaucoup  et  avec  fruit, 
tant  le  séjour  qu'il  fit  en  Turquie, 
il  apprit  la  langue  de   cet  empire  , 
et  recueillit  des  matériaux,  précieux 
pour  l'Histoire  ottomane  ,  que  pcr- 
ionnene  connut  mieux  et  ne  fit  mieux 
:onnaître  avant  lui.  Il  savait  à  fond 
e  grec  et  le  latin  ,  la  jurisprudence 
!t  le  droit  public.  La  pureté  de  son 
'  était  égale  à  l'étendue  et  à  la 
litédeson  érudition.  De  Thou  , 
iqcr,  Bayle,  Huet ,  Baillct,  lui 
lonné  de  grands  éloges  comme 
icteur  et  comme  jurisconsulte, 
unclavius  ,  disent-ils  ,  est  un  des 
meilleurs  traducteurs  que  l'Allema- 
laone  ait  produits.  Son  latin  répond 
'  nt  au  grec  ,    mot  pour  mot  ; 
rde  la  même  construction  et  le 
c  arrangement  que  l'original  , 
.  <ii  ^urte  qu'on  retrouve  son  auteur 
|jvu  Cûtitr  daos  une  autre  langue. 


LEU 


35J 


Outre  cela  ,  on  remarque  dans  son 
style  beaucoup  de  netteté ,  et  cel  air 
naturel  qui  est  si  rare  dans  les  autres 
traducteurs.  »  Il  passa  une  partie  de 
sa  vie  à  la  suite  des  grands  ou  à  la 
cour  des  souverains  ,  notamment  à 
celle  du  duc  de  Savoie  ,  pour 'des 
affaires  dont  ses  prolecteurs  le  char- 
geaient. Il  fut  nommé,  par  le  prince 
Casimir ,  professeur  de  grec  a  Hci- 
delberg;mais  il  n'occupa  jamais  cette 
chaire.  Il  mourut  à  Vienne  en  1593, 
Ses  ouvrages  ont  trouvé  des  censeurs, 
et  ses  mœurs  n'ont  pas  été  sans  re» 
proche.  Nous  avons  de  lui  :  I,  Jpo~ 
masaris  apotele smala, sive  de  signi- 
ficatis  et  euentisinsomniorum,  ex  In- 
dorum,  Fersarum,  yEgyptionimquQ 
disciplina,  ex  hihliothecd  J,  Sam^ 
buci;  Francfort,  1577,  iw-B"*.  ;  ou- 
vrage rare  et  singulier ,  suivant  la 
Serna  Santander.  II.  Fersioet  notce 
ad  Sjnopsiin  lx   librorum  hasili- 
cou ,  seii  umversijuris  Romani,  et  ad 
Novellas  imperatorum,  Bàle  ,1575, 
in-fol.  ;  Leyde,  161 7,  in-S».  (  Fuj. 
Fabroï  ,  et  LÉON  VI,  suprà  p.  1 43.  ) 
Charles  Labbé  donna,  en  160G,  des 
observations  et  des  corrections  sur 
l'édition    de    Leunclavius.  III.  Ze- 
gatio  imperaloris  Manuelis  Corn- 
nenl  ad  Armenos,  gr.  et  lat.  Bàle 
1 578 ,  in-8".  IV.  Jus  Grœco-Roma^ 
num  ,  tam  canonicum  quàm  civile^ 
latine  redditum ,  Francfort,  1596, 
2  vol.  in-fol.  V.  Zosimi ,  Procopii, 
Agathiœ  et  Jornandis  historiœ  ,  gr. 
et  lat.  cum  notis,  Bàle ,  1 579,  in-8°. 
VI.  Manuelis  Palœologi  imperato- 
ris  prœcepta  educationis  regiœ ,  ad 
Joannem  filium  ,  gr.  et  lat.  Bàle, 
1.578 ,  in-8".  VIL  Dioms  Cassii  his- 
toria  Romana  ,  gr.  et  lat. ,  Hanau  , 
1606,  in-fol.  C'est  la  version  de  Xy- 
lander ,  revue  et  annotée  par  Leun- 
clavius :  on  avait  publié  séparément 
U  versivB  latiue  et  les  notes  sous  cç 

33.. 


355  LEU 

titre  :  VIII.  Nolœ  in  Dionem  Cas- 
siuni ,    latine  ,    Francfort ,    i  Sgci , 
iii-8*'.  IX.  Xenopliontis  opéra  ^  gr. 
et  lat.  cum  notis  et  appendice,  Baie, 
1 569  ;  Paris ,  1 6'2 2 ,  1 62 5 ,  in-f ol . , 
tjpis  regiis ;  cette  édition  de  ï6'z5 
est  très-estimee.  Au  sujet  de  cette 
traduction  ,  Leunclavius  eut  ,  avec 
Henri  Estienne,de  vifs  démêlés,  dont 
on  peut  voir  l'histoire  dans  Baillet. 
M.  Gail,  dans  son  édition  des  OEu- 
vres  de  Xénophon,  en  grec,  latin  et 
français,  s'est   servi  de   la  version 
de  Leunclavius  ,   qu'il    a  corrigée. 
X.  Xenopliontis  prœcept a  Bei  eques- 
tris,  gr.  et  lat. ,  iSgS  ,  in-S'^. ,  avec 
des  notes  et  des  améliorations.  XI. 
Micliaelis  Gljcœ  annales, gr.  et  lat. 
i572,in-8**.  XII.  Joannis  Damas- 
ceni  dialogus  inter  orthodoxinn  et 
ManicluBum  de  duohus  rerum  prin- 
cipiis,  gr.  et  lat.,  Baie,  1578,  in-8°.' 
dans  l'édition  de  St.-Jean  Damascène 
du  P.  Lequien ,  et  dans  la  Bibliothè- 
que des  Pères.  XIII.  Cœsarii  (  Gre- 
gorii  Nazianzeni  fratris  )    dialogi 
quatuor  ,  seu  quœstionum  quamm- 
dam  gravissimarum  explicationes  ; 
dans  la  Bibliothèque  des  Pères  de 
1 6  ï  o  et  ailleurs  :1a  publication  de  ces 
dialogues  mit  fort  en  colère  Jacques 
de  Billi.  Lambecius  prit  le  parti  de 
l^eunclavius  contre  lui.  XTV.   Gre~ 
gorii  Nysseni  opus  de  hominis  opi~ 
ficio ,  cum  notis ,  gr.  et  lat. ,  Baie  , 
ï567  ,  in-8^.  ,  et  dans  la  collection 
des  œuvres  de  ce  Père.  XV.  Gregorii 
Nazianzeni  definitianes  rerum  sim- 
plices,  gr.  et  lat.  ;  dans  le  Voyage 
d'Italie  de  Jacques  Tollius  et  ailleurs. 
XVI.    Gregorii  Nazianzeni  oratio 
in  laudem  martyrum  et  adversùs 
Arianos,  167 1,  in-S».  Cette  traduc- 
tion n'a  point  été  mise  dans  la  col- 
lection des  œuvres  de  St.-Grégoire  ; 
Tabbé  de  Billi  en   a  fait  une.  XVII. 
■Notes  adparalitla  seu  ad  Constiîu- 


I.EU 

tionum  ecclesiaslicarwn  Collrciio- 
nem ,  Francfort,  i  JCjo,  in-S^.  X\  HT. 
F  oelli  Notât  arum  libri  duo ,  quibus 
nomina,  locajurisCivilis  restituun- 
tur  et  illustrantur ;  dans  la  Biblio- 
thèque du  droit  canonique  ancien. 
XIX.    Constanlini    Manassis    an- 
nales ,   grœcè    et    latine  ,    Paris  , 
tjpis  regiisy  i655,  in-fol.  XX.  Com- 
mentatio  de  Moscorum  hellis  adver- 
sus  Jinitimos  gestis ;  dans  le  Recueil 
des  Historiens  polonais  de  Pistoriiis, 
Baie,  i58i ,  3  vol.  fol.  XXI.  Musul- 
manicœ  Idstoriœ  libri  xviii ,  Franc- 
fort, iSgS,  in-fol.  XXII.  ^/z/ifitZe^iSzfZ- 
tanorum  Othomanidarum ,  Franc- 
fort ,  1 596,  in-fol. ,  et  dans  l'histoire 
des  Sultans  par  Chalcondyle.  Leun- 
clavius   traduisit  de  l'allemand  en 
latin ,  ces  annales  que  Jean  Gaudier 
(  Spiegel  )  avait  traduites  du  turc  en 
a\\emaii\à.^W\\.Pandectœhistoria 
Turcicœ ,  suite  de  l'ouvrage  précé- 
dent ,  jusqu'à  1 588  ;  à  la  fin  du  Ghal 
condyle  du  Louvre.  XXIV.  Com 
mentarii  duo ,  prior  est  libitinariu. 
index  Othmanidarum,posteriorcon 
tinet   epistolas  de  rébus    Turcicis 
Leunclavius  a  composé  encore  quel 
ques  opuscules,  traduit  quelques  ou 
vrages  des  Pères  ,  et  quelques  partie 
de  l'Histoire  byzantine.  Mais  il  m 
faut  pas  s'en  rapporter  uniquemer 
là-dessus  aux  faiseurs  de  catalogue- 
qui  se  copient  les  uns  les  autres ,  < 
qui  ne  consultent  jamais  les  livrt 
dont  ils  parlent  :  il  leur  est  arrivé  ( 
multiplier  les  ouvrages  de  Leuncl; 
vins  en  donnant  le  même  ,  plusieu 
fois,  sous  différents  titres.  Ou  trouv 
sur  Leunclavius  ,  une  Notice  ass 
mal  faite  dans  Melchior  Adam,  P^ii 
germanorumphilosophorum,  et d 
Taisand  {Fies  des  plus  célèbres  « 
risconsultes).  Bayle  n'est  guère  pljl 
instructif.  (  /  ojr^z  Marq.  Freher^ 

HarmENOPULE   ).  L-E-E. 


LEU 

TEUPOLD  (  Jacques  ) ,  ingénieux 
mécanicien  saxon  ,  naquit  en  1674  > 
à  PlanitA  pivs  de  Zwickau.  II  mon- 
tra «le  bonne  licure  un  goîiî  remar- 
quable pour  le  dessin  des  machines. 
Mis  en  apprentissage  chez,  un  menui- 
sier et  un  tourneur,  il  ne  fut  pas  juge' 
assez,  robuste  pour  suivre  avec  fruit 
ces  ])rofessions  mecanitpies.  S'ctant 
I  donc  détermine'  à  embrasser  la  car- 
rière ecclésiastique,  il  étudia  la  the'o- 
'  logie  à  lena ,  puis  à  VVittenberg ,  et 
I  pourvoyait  a  son  cntretie.'i  eu  fabri- 
"    Mit  des  instruments  de  géométrie, 
lie  ses  professeurs  lui  ayant  donne' 
i\iilre'cdesabibliothèque,il  y  trouva 
i  de  bous  livres  de  mathématiques ,  et 
finit  par  faire  de  celte  science  son 
!  «nique  occupation.  Il  imagina  une 
mite,  plus  simple  que  celle  de 
.lin,  et  pouvant  la  remplacer  avan- 
i.i censément;  il  perfectionna  la  pom- 
p(  pneumatique  de  Hauksbce  ,  et  il 
a  fciit  beaucoup  d'expériences  iuge'- 
nieuses  sur  les  miroirs  ;  il  excellait 
dans  la  fabrication  des  instruments 
de  physique  et  de   mathématiques. 
L'électeur  de  Saxe  le  nomma  con- 
!!cr  aux  mines;  et  plusieurs  socié- 
saviutes  d'Allemagne  s'cmpres- 
ut  d'ajouter  son  nom  à  la  bste 
.    leurs  membres.  Il  mourut  le  12 
ier  1727.  On  lui  doit:  I.  Deut- 
Beschreibung  der  sogenannten 
'    Tt-pompe,  c'est-à-dire  la  Pompe 
,      umatique  expliquée,  etc.  Leipzig, 
1707-12  et   1715  ,  trois    parties 
in-4**.  Cet  ouvrage  contient  la  des- 
cription de  l'appareil  pneumatique, 
inventé    par    Otto    de    Guericke  , 
et  des  perfcctioimemcnts  qu'y  ont 
«cessivement  ajoutés  Boyie  et  dif- 
nts  physiciens  hollandais  ;  Tau- 
1  indique  ensuite  la  manière  de  se 
vir  de  cet  appareil  ,et  rend  compte 
lie  dillcrentes  ex|)ériences  curieuses. 
U.    Theatrum   mac/Unarum  oder 


LEU  357 

Schauplatz  ,  etc.  ,  c'est  -  à  -  dire  , 
Théâtre  universel  de»  machines  et 
des  Sciences  mécaniques  ,  Leipzig, 
1723-27  ,  7  vol.  in-fol. ,  fig.  Le  pre- 
mier volume  de  cet  important  ou- 
vrage contient  la  description  des 
machines  (jui  servent  à  élever  ou  à 
transporter  des  fardeaux  ;  le  second 
traite  de  la  statique  miiverselle ,  de 
l'équilibre  ,  des  j)oids  et  des  contre- 
poids ,  etc.  ;  le  troisième  de  l'hydros- 
tatique ;  le  quatrième  ,  de  l'aérosta- 
tique et  des  instruments  qui  servent 
à  calculerla  pesanteur  de  l'air  ;  le  cin- 
quième de  la  statique  universelle  ;  le 
sixième  ,  de  la  construction  des 
ponts;  et  enfin,  le  septième,  des 
machines  arithmétiques  et  des  ins- 
truments de  géométrie.  Un  volume 
de  supplément  fut  publié  en  1739J 
et  Scheftler  (  J.  E.  )  donna  ,  en  1 74 », 
un  nouveau  supplément  avec  une 
table  gé^iérale  de  tout  l'ouvrage.  Jean 
Math.  Beyer  a  publié  (en  allemand) 
le  Théâtre  de  l'architecture  des  mou- 
lins,  Leipzig,  1735,  2.  vol.  in-fol. , 
fig.  ;  reproduit  avec  un  nouveau  titre, 
à  Dresde,  en  17G7.  Ce  livre  fait 
suite  à  l'ouvrage  de  Lcupold ,  qu'on 
regrette  qu'il  n'ait  pu  terminer.  W-s. 
LEUSDEN  (Jean  ) ,  célèbre  phi- 
lologue hollandais  ,  né  à  Utrecht  ea 
1 624,  étudia  d'abord ,  dans  sa  patrie, 
les  langues  orientales  et  les  mathé- 
matiques, et  se  rendit  à  Amsterdam 
pour  s*y  perfectionner.  La  société 
des  rabbins  et  des  savants,  autant 
que  la  faculté  de  se  procurer  toutes 
sortes  de  livres  et  des  manuscrits 

fnécieux ,  servirent  à  le  fortifier  dans 
a  connaissance  de  la  langue  et  des 
cérémonies  de  la  nation  juive.  En 
i64ç)  ,il  obtint  à  Utrecht  la  chaire 
d'hébreu  ,  qu'il  occupa  jusqu'à  sa 
mort,  avec  beaucoup  de  distinction. 
Pendant  qu'il  professait  les  antiquités 
hébraïques  daju»  sa  \iUe  natale,  il  fit 


558  LEU 

le  voyage  de  France  et  d'Angle- 
terre, pour  consulter  les  savants  qui 
habitaient  ces  royaumes ,  et  pour 
recueillir  des  renseignements  indis- 
pensables pour  ses  ouvrages  :  il 
mourut  en  1699.  Nous  avons  de 
lui  :  I.  Prœcepta  hehrdica  et  chai- 
dàica,  i655,  in-8<*.;  1667  ,  in-12. 
ÎI.  Jonas  illustratus  ,  tltrecht  , 
i6j6,  in-8°.  III.  Jo'él  explicatus , 
etc.,  cum  Obadia f  ibid.  ,  1657, 
in-8°.  IV.  Schola  syriaca^  i658  et 
1672,  in-8°.  y.  Onomasticum  sa- 
truni,  i665 ,  in-80.  YI.  Pfdlologus 
hebrœus,  continens  quœstiones  he- 
hrdicas  quœ  circa  Fétus  Testa- 
tnentum  hebrœumferè  inoveri  so- 
ient, 37  dissert. ,  Utreclit ,  i656, 
1672,  1695;  Amsterdam,  1686, 
10-4°.  VII.  Fhilologus  hchrœo-mix- 
tus,  m  quo  quœstiones  mixtœ,  scili- 
cet  de  Fersione  vulgatd,  de  Fer- 
sione  70  interpretum^de  Paraphra- 
sihus  chalddicis,  de  variis  Judœo- 
rum  sectis ,  et  de  aliis  multis  rébus 
proponuntur,  44  dissert. ,  Utrecht , 
i663,  in-40. .  Leyde,  i68'2  et  1699, 
în-4*'.  VIII.  Philulogus  hebrœo- 
^rœcus ,  in  quo  quœstiones  hebrœo- 
gracœ,  circa  Nonim  Testamentum 
grœcum  moveri  solitœ  enodantur, 
24  dissert. ,  Utrecht,  1670  ;  Leyde, 
i685  et  1695,  in-40.  :  ces  trois  der- 
niers ouvrages  forment  une  série  de 
réponses  aux  questions  les  plus  cu- 
rieuses sur  toute  la  Bible ,  d'après 
les  hommes  instruits  dans  les  lan- 
gues originales,  et  principalement 
d'après  l'autoitëde  Buxtorf,  dans 
ses  Dissertations^  et  de  Hottinger  , 
dans  son  Trésor  philologique,  aux- 
quels Leusden  a  soin  de  renvoyer  : 
lis  ont  ëtë  rèimprime's  ensemble  en 
3  volumes  in-40.,  Baie,  1739.  IX. 
Pirke  abhoth ,  sive  Tract atus  tal- 
mudicus  cum  versione  hebrdicd 
àuorum  capitum  chalddicorum  Da- 


LEU 

nielis ,  Utrecht,  i665,  in-4*^.  ;  1^. 
édition  ,  augmentée  de  plusieurs  au- 
tres chapitres  chaldaiques  de  Daniel 
et  d'Esdras  ,  traduits  en  hébreu  ,  et 
de  six  cents  treize  Chapitres ,  ou 
Préceptes  négatifs  et  affirmatifs , 
Utrecht,  1675,10-4^.  ^.  Manuale 
hebrœo -latino- helgicum ,  Utrecht , 
1668,  in-12.  XL  Grammatica  he- 
brœo-belgica,  Utrecht ,  1668,  in-12. 
XII.  Joannis  Buxtorfd  Epitome 
grammaticœ  hebrœœ ,  breviter  et 
methodicè  ad  publicum  schoîarum 
usum  proposita,  Utrecht,  1673; 
Leyde,  1701  ,  in-8<'.  XIII.  Clavis 
hehrdica  et  philologica  Feteris 
Testamenti,  Utrecht,  i683,in-8°. 
XIV.  Clavis  grœca  Novi  Testa- 
menti ,  in  qud  et  themata  Novi 
Testamenti  secundàm  ordinem  li- 
brorum  referuntur,  et  ejusdem  dia- 
lecti,  hebrdismi  ac  rariores  cons- 
trucliones  explicantur ,  necnon  va- 
riœ  observationesphilologicœ ,  anti- 
quitates  item  sacrœ  ac  profanée 
annotantur ,  Utrecht,  1672.  XV. 
Libellus  de  dialectis  Noi>i  Testa- 
menti,  singulatim  hebraïsmis  ;  ce 
n'est  qu'une  dissertation  détachée  du 
Philologus  hebrœo-grœcus  ,  par  J. 
F.  Fischer ,  Leipzig,  1754  et  1792 
in-S'*.  XVI.  Compendium  grœcum^ 
Novi  Testamenti ,  in  quo  1 829  ver- 
siculi  qui  continent  omnes  et  singu 
las  totius  Novi  Testamenti  voces 
astericis  sunt  annotati ,  et  à  cœteris 
versiculis  distincti,  Utrecht,  1674 
in-8<*.  5  1677,  in-12 
l'édition  de  1762 
pour  la  plus  correcte.  XVII.  Com-i 
pendium  biblicum ,  in  quo  ex  verd- 
culis  23202  totius  Feteris  Test 
menti,  circiter  bis  nulle  tantiim 
Dersiculi  hebraïcè  et  latine  sum 
annotati  et  allegati ,  in  quibus  om 
nés  universi  Feteris  Testament 
voces  primitivœ  et  derivatœ ,  tàn 


et  i682,in-8o.: 
,  in-8°.  ,   pas» 


LKU 

:  ràicœ  qitàm  chaUîàicœ  ,  occur- 

mut  ;  qw>s  omnex ,    suh    I.eusdcm 
prœsidio  et  ductu ,  maono  et  inde- 
u)  lahme  collerait  oniatissimus 
Daniel  fan  rianen  ultrajccli- 
.  UtiTrht,  1(374;  Halle,  I73(>, 
S\  XV m.  Psalterium   liebraï- 
1  Jicbrœo-latinum,  hchrœo-brlgi- 
n  ,  Uirecht ,  i()G7,in-i2.  XIX. 
^utn      Testamenium    f;rœcuni  y 
i  iiocht,  1675,  iri-'24.  XX.  Biblia 
}i  hraïcacuni  prœfatione,  Arastcr- 
I  II ,  chez  Jos.  Atïi  ias,  1 66 1 ,  iii-8'*.  ; 
édition  ,  ibid. ,  cum  lemmatibus 
nis,  1667.  Le  juif  Athias  reçut, 
la  part  des  Etats  de  Hollande, 
une  chaîne  d'or  avec  une  belle  rae- 
diille,  en  reconnaissance  desontra- 
\ail  et  du  soin  qu'il  avait  mis  dans 
MO  réimpression.  Leusden   acquit 
ucoup  de  réputation,  par  la  pré- 
i.i.  e  latine  et  par  les  sommaires  la- 
tins dont  il  l'enrichit  ;  cependant  ces 
deux  éditions  sont  tombées  dans  le 
discrédit, depuis  qu'Everard  Van  der 
Hooght  a  donné  la   sienne  sur  le 
même  plan ,  mais  avec  des  correc- 
tions et  des  améliorations  considé- 
rables,   170.5,  1  vol.  in-80.  XXI. 
Samuelis  Bocharti  Opéra  omnia , 
de  concert  avec  Pierre  Villemandi; 
Leyde  ,1675  ,  2  vol.  in-fol.  et  1692, 
3  vol.  in  -  fol.    Ces   éditions   sont 
belles;  mais  elles  ne  valent  pas  celle 
de    1712,  à   laquelle  Leusden  n'a 
pas   présidé.   XXII.  Synopsis  cri- 
ticorum,  etc.  1684  >  ^  vol.  in  -  fol. 
Quoique  l'édition  de  Londres  soit 
plus  belle  que  celle  d'Utrecht ,  celle 
dernière  est  préférable  à   cause  des 
corrections    et    des    augmentations 
faites  par  Leusden.  XXIII.  Joannis 
Lightfoot  opéra  omnia,  Utrecht  , 
i6t)9  ,  3  vol.  in-fol.  Leusden  ajouta 
à  l'édition  de  1686  ,  un  assez  j:;rand 
nombre  de  pièces  et  une  savante  pré- 
£acc.  XXIV.  No^um  Tesiainenlum 


LEU  y>iy 

Syriacum,aimversione  latind  Tre- 
mellii  paululum  recofçnitd ,  Leyde, 
1708,  in-4".  Leusden  avait  corn* 
mencé  cet  ouvrage  :  Charles  Srhaaf 
le  continua  et  le  mit  au  jour, 
Leusden  est  Irès-estimé  comme  phi- 
lologue ;  cependant  Richard  Siinoa 
ne  s'exprime  pas  favorablement  sur 
son  compte  ,  et  lui  reproche  de  n'a- 
voir guère  fait  que  reproduire  les  tra- 
vaux des  Buxlorf.  Dans  d'autres  en- 
droits ,  il  le  taxe  d'une  grande  igno- 
rance dans  le  discernement  des  bons 
manuscrits.  (  I/ist.  crit.  du  V.  T. 
pag.  122.  ) — Rodolphe  Leusden, 
fils  du  précédent ,  lui  succéda  dan« 
la  chaire  d'hébreu,  à  Ulrecht.  On  lui 
doit  :  Nouum  Testamentumgrœcum^ 
in  que  non  tantàni  selecti  versicuU 
1900  continentes  omnes  vocesN.  T, 
astericis  notanlur ,  sed  etiam  om^ 
nés  et  singulcp  voces  semel  vel  sœ* 
piùsoccurrentes,peculiaribiis  in  tex^ 
tu  signisdistinguuntur^et  in  margina 
latine  transfenintur  ,  Francfort  > 
1692  ,  in-8'^.  L — B — E. 

LEUTINGER (  Nicolas  ),  histo 
rien  estimable,  né  en  i547,a  Pollich, 
dans  la  Moyenne-Marche  de  Bran- 
debourg ,  fit  ses  premières  éludes 
sous  les  plus  habiles  maîtres  que  put 
trouver  son  père ,  préleur  de  cette 
ville  ,  et ,  à  l'âge  de  quatorze  ans  , 
fut  admis  gratuitement  à  l'école  de 
Meissen  ,  dirigée  alors  par  le  savant 
George  Fabricius.  Il  profita  si  bien 
de  ses  leçons,  qu'au  bout  de  quelque 
temps  il  suppléa  son  maître  dans 
l'enseignement  de  la  langue  grec- 
que. àSon  père  l'envoya  continuer 
ses  cours  à  Witteraberg  ;  mais  l'é- 
lecleur  de  Brandebourg  ayant  dé- 
fendu à  ses  sujets  de  fréquenter  des 
académies  étrangères ,  il  >e  rendit  à 
Francfort  sur  l'Oder,  et  y  pi  il  ses  de- 
grés. Il  se  chargea  ensriite  de  l'éduca- 
iiou  de  quelques  jeunes  gens  jet,  eu 


SGo  LEO 

3  57  I  ,  fut  nomme  rerteur  de  IV'coîe 
dcCrossen.  Il  sedej:;oiita  bientôt  d'mi 
emploi  qu'il  n'avait  accepte  que  par 
deTercnce  pour  son  père.  Cependant 
il  ne  put  refuser  la  direction  de  Te'- 
colc  de  Spandau  :  mais  il  l'abandonna 
au  bout  de  quel(jues  mois;  et  entraî- 
ne' par  un  goût  très-vif  pour   les 
voyages  ,  il  partit  à  l'insu  de  ses  pa- 
rents ,  visita  une  partie  de  l'Allema- 
gne et  de  l'Italie ,  et  revint  à  Wit- 
temberg,  en    i58o.   L'électeur    de 
Brandebourg,  dont  il  s'était  attire  la 
bienveillance  par  quelques  pièces  de 
vers  ,  le  nomma  pasteur  du  vieux 
Xandsberg  :  il  se  démit  aii  bout  de 
trois  ans  de  ce  bcne'fice,  dont  le  reve- 
nu e'tait  considérable  ;  et  sans  autre 
but  que  de  satisfaire  sa  curiosité,  il 
parcourut  l'Italie  ,  la  France  ,  l'An- 
gleterre, les  Pays-Bas,  et  les  dif- 
férents Etats  du  Nord.  Le  roi  de  Da- 
nemark, à  son  passage  à   Copen- 
liague,  lui  décerna  publiquement  la 
couronne  poétique,  et  le  créa  cheva- 
lier; mais  il  eût  échangé  volontiers 
ces  stériles  honneurs  contre  une  mo- 
dique somme  dont  il  avait  le  plus 
pressant  besoin.   Il  était  de  retour  , 
en  1 587  ,  à  Wittemberg  ;  et  la  né- 
cessité de  couvrir  les  dépenses  que 
lui  avait  occasionnées  son  humeur 
vagabonde,  lui  inspira  le  dessein  d'é- 
crire l'histoire cle  Brandebourg  :i!  en 
publia  séparément  quelques  livres , 
X> récédés  chacun  de  plusieurs  épî très 
dédicatoires ,  adressées  à  autant  de 
seigneurs  dont  il  implorait  les  bontés 
avec  une  bassesse  qui  devait  bien  fai- 
re souffrir  sa  vanité.  Il  fit,  en  i5g'i, 
nn  troisième  voyage  en  Italie  :  pen- 
dant qu'il  était  à  Si^ije,  il  apprit 
que  sa  bibliothèque  ^ait  été  pillée 
par    les  religionnaires.  Il   se  hâta 
de   regagner  Wittemberg;  et   il  y 
passa  plusieurs  années ,  occupé  de 
la  continuation  de  son  histoire  :  mais 


LEU 

la  passion  des  voyages  le  reprit ,  et, 
malgré  son  âge  avancé,  il  parcourut 
encore  mie  fois  la  France  ,  la  Prusse, 
le  duché  de  Juliers  et  le  Danemark. 
Enfin ,  il  tomba  malade  à  Osterburg, 
dans  la  Vieille-Marche  de  Brande- 
bourg ,  et  il  y  mourut ,  en  avril  1 0 1  u . 
Leulinger  est  un  historien   instruit 
et  judicieux ,  et  son  style  est  assez 
agréable  ;  mais  sa  vanité  perce  dans 
toutes  ses  productions.  On  a  de  lui  , 
des  Harangues  ;  cinq  livres  de  Poé- 
sies ;  et  une  Histoire  de  la  Marche 
de  Brandebourg ,  en  trente  livres  , 
imprimés  en  différents  temps  et  en 
divers  lieux ,  de  format  in-8".  L'édi- 
tion originale  de  cette  histoire  est  ex- 
trêmement rare.  Ern.  Martin  Plac- 
cius ,  conseiller   du  roi   de  Prusse  , 
était  parvenu  à  en  réunir  les  diffé- 
rentes parties ,  et  il  se  proposait  de 
les  faire  réimprimer,  lorsqu'il  reçu» 
la  défense  de  donner  suite  à  ce  pro 
jet  (  Voy.  V Histoire  des  ombrages 
des  Savants  ,  septembre   1706   )  ; 
mais  enfin,  il  en  a  paru  deux  édi 
tions    dans    la  même    année.  Jeai 
Gottlieb  Kraus  a  publié  les  ouvra 
ges  de  Leutinger,  avec  une  savante 
préface ,  sous  ce  titre  :  Scriptoruiu 
historiœ  Marchiœ  Brandenburgen 
sis  voîumen,  Francfort,  1 7^9,  in-4".; 
et    George-Godefroi    Kuster  les    a 
reproduits    dans    la   même    ville  , 
ï  7 29-30  ,  '2  vol  in-4^.  (  I  )  L'édition 
de  Kuster  contient  :  De  Marchid 
Brandeburgensi  ejusque  statu  corn- 
mentarii;  cette  histoire  s'étend  de- 
puis l'an  1499  7  jusqu'en  1694  ;  les 
Epures  dédicatoires  ou  préfaces  des 
différentes  parties  de  l'histoire  ;  Qua- 
tre Harangues ;\3i  première  renferme 
l'éloge  de  son  père;  la  seconde  est 

(1)  Voici  le  titre  Je  cette  édition  :  Nie.  Leu- 
tingeri  Opéra  O'nnia  quotquot  reperiri  poiue- 
rii.nl.  Creorg  Golihafred.  Kuster  recerisuh  , 
epilomen  singulis  lihris  et  lemrnata  uhi  d«e- 
rant ,  addidit,  indiceiiujue  adjecH. 


•  raison  funèbre  de  la  princesse 
Anne  ,  opouvsc  «l' Auguste,  électeur  de 
Srtxc  ;  la  troisième  est  une  fèlieita- 
tion  à  <'e  prince  siu'  sun  mariage 
:jv<'i  lledvigc,  princesse   d'Anhalt, 

l.(  quatrième  est  adressée  à  Jua- 
t  iani-Fredèric  ,  nomme  administra- 
teur de  rarcbcvcchcde  Magdebourg; 
—  enfin, lescinq  livresdc  Poésies.  On 

1>eul  consulter  pour  plus  de  détails 
es  Dissertations  des  deux  éditeurs 
sur  la  vie  et  les  écrits  de  Leutinger. 
On  trouve  l'éloge  de  cet  écrivain 
dans  les  Icônes  et  Elo^ia  de  Mart. 
Fred.  Seidels,  dans  la  Biblioth.  Ger- 
rnan, ,  toni.  xxi ,  et  dans  les  Ménioi- 
N  de  Niceron  ,  tom.  xlii.  W-s. 
LEUVIGILDE ,  XVK  roi  des 
Visigoths  ,  fut  d'abord  associe  au 
trône,  en  5G7 ,  par  son  frère  Liuva, 
I  ni  de  la  Gaule  Gothique  ,  et  chargé 
de  gouverner  seul  l'Espagne ,  alors 
déchirée  par  les  factions  :  il  l'eut 
bientôt  pacifiée,  et,  pour  aUbrmir  la 
couronne  sur  sa  tète,  il  épousa  Go- 
suinthe  ,  veuve  d'Alhanagilde  son 
prédécesseur.  Le  premier  exploit  de 
Leuvigilde  fut  de  reprendre  aux 
empereurs  de  Constantinople  ,  Mé- 
dina -  Sidonia,  Cordoue,  et  toutes 
les  villes  dont  les  Grecs  s'étaient  em- 
parés à  la  faveur  des  troubles.  Ce 
prince  avait  eu  deux  fils  de  sa  pre- 
mière épouse,  Hermenegilde  et  Re- 
carède ,  qu'il  associa  au  trône  et  dé- 
clara héritiers ,  du  consentement  de 
la  nation,  en  07 3,  afin  de  perpétuer 
la  couronne  dans  sa  famille.  Les  lia- 
it! tants  de  la  Biscaye  et  de  l' Aragon 
>'t'tant  soulevés, Leuvigilde, à  force 
•  le  persévérance  et  de  courage,  par- 
\int  à  les  soumettre.  II  s'appliquait 
faire  jouir  ses  sujets  des  avanta- 
>  de  la  paix ,  à  rétablir  des  villes 
iinées,  à  en  fonder  de  nouvelles, 
1  usquc  les  divisions  des  catholiques 
rî  des  ariens  lui  suscitèrent  dcnou- 


LEU  36 1 

veaux  embarras.  Leuvigilde  clait 
arien  :  il  assembla  un  comité  d*cvê- 
ques ,  afin  de  réunir  les  deux  par- 
tis ;  mais  ce  fut  inutilement.  Le  roi 
voulut  alors  réduire  les  catholiques 

})ar  la  force,  et  il  alluma  le  feu  de 
a  persécution.  Les  Vascons ,  habi- 
tants de  la  Navarre ,  se  soulevèrent 
par  zèle  pour  la  religion  orthodoxe  : 
Leuvigilde  les  soumit  en  moins  de 
deux  mois ,  et  bàlit  la  ville  de  Vit- 
toria  poiu-  les  contenir.  Il  eut  ensuite 
à  combattre  Hermenegilde, son  pro- 
pre fils,  ligué  contre  lui  avec  les  ca- 
tholiques ;  il  le  vainquit  devant  Me- 
rida  ,  et,  l'ayant  fait  prisonnier  ,  il 
lui  donna  l'alternative  de  renoncer 
à  la  religion  catholique,  ou  de  se  ré- 
soudre à  la  mort.  Le  jeune  prince 
n'hésita  point ,  et  présenta  sa  tctc 
aux  bourreaux,  qui  reçurent  ordre 
de  le  décapiter.  11  paraît  que  dans 
cette  circonstance  Leuvigilde, entraî- 
né parles  sollicitations  d'ujie  épouse 
cruelle,  belle-mère d'Hcrmenegilde, 
sacrifia  son  fils  à  son  repos  et  à  ce- 
lui de  l'Eltat.  Peu  de  temps  après ,  il 
défit,  dans  une  grande  bataille,  le  roi 
des  Suèves ,  et  réunit  à  la  monar- 
chie des  Visigoths  toute  la  Galice , 
qui ,  pendant  1 46  ans  ,  était  restée 
sous  la  domination  des  Suèves. 
Leuvigilde,  accablé  d'amiées ,  parut 
revenir  de  sa  haine  contre  les  catho- 
liques; il  rappela  les  éveques,  et  ren- 
dit les  biens  à  ceux  qu'il  en  avait 
dépouillés.  Il  mourut  à  Tolède ,  en 
58'j  ,  réconcilié ,  dit-on  ,  avec  l'é- 
glise orthodoxe.  Quoi  qu'il  en  soit , 
ce  prince  ne  mérite  pas  moins  d'é- 
loges pour  son  administration  politi- 
que ,  que  pour  ses  talents  guerriers. 
Il  fonda  plusieurs  villes  ,  et  travailla 
pendant  la  paix  à  faire  fleurir  ses 
états ,  introduisit  la  discipline  dans 
ses  armées  ,  mit  de  l'ordre  dans  ses 
finances ,  révisa  les  lois,  rpii,  depuis 


362 


LEU 


la  mort  d'Alaric,  avaient  été  négli- 
gées, et  veilla  soigneusement  à  ce  que 
la  dignité'  royale  ne  reçût  aucune  at- 
teinte. Il  fut  le  premier  des  rois  Vi- 
sigoths  qui  se  para  des  attributs  de 
la  royauté.  Sa  fermeté',  son  courage, 
SA  politique  supérieure ,  et  le  succès 
de  toutes  ses  entreprises ,  le  placent 
au  premier  rang  parmi  les  rois  de 
son  siècle  ;  mais  l'e'clat  de  son  règne 
fut  terni  par  son  avarice,  sa  dure- 
té, et  surtout  par  le  supplice  de  son 
fils.  (  Fojez  Hermenegilde.  )  B-p. 
LEUW  ou  LEEUW  (Guil- 
laume DE  ) ,  graveur  à  l'eau-forte  , 
naquit  à  Anvers,  en  1600. Il  fut  ëlcve 
de  Soutman  ;  mais  il  n'adopta  point 
la  manière  pointille'e  de  son  maître  ; 
il  remplaça  les  points  par  des  tailles 
courtes  et  méplates  qui  donnent  à 
ses  gravures  Teffet  le  plus  pittores- 
que ,  avec  une  force  et  une  couleur 
propres  à  reproduire  les  peintres  co- 
loristes ;  aussi  a  - 1  -  il  consacre'  en 
grande  partie  son  burin  àRubens  et 
à  Rembrandt.  Cependant  il  savait 
changer  de  procédé  suivant  l'artiste 
qu'il  avait  à  traduire  ;  ainsi ,  quand 
il  voulut  graver  une  suite  de  grands 
paysages  d'après  Adrien  Nieulant, 
il  grava  les  fonds  et  les  ciels  d'une 
pointe  si  fine  ,  que  sa  gravure  imite 
le  lavis.  Il  marquait  ses  estampes  des 
lettres  initiales  de  son  nom  ,  ou  de 
son  chiffre  composé  d'un  W  et  d'une 
L  entrelacés.  Les  pièces  qu'il  a  gra- 
vées, d'après  Rubens,  sont  :  I.  Loth 
et  ses  filles.  II.  Daniel  dans  la  fosse 
aux  lions.  Les  belles  épreuves  cle  ces 
deux  estampes  ,  grand  in-folio  ,  en 
travers  ,  sont  avant  le  nom  de 
Daniel.  III.  La  Vierge  de  dou- 
leurs. TV.  Le  martyre  de  sainte 
Catherine  ,  deux  belles  gravures  in- 
folio ,  très-rares.  V.  Les  quatre  gran- 
des chasses  de  Rubens  ,  les  mêmes 
qu'a  gravées  Soutman  ;  savoir  :  La 


LETJ 

Chasse  au  lion  ^  au  loup  ,  au 
sanglier ,  au  crocodile  et  à  Vhip- 
popotame  ,  très-grand  in-folio.  Il  a 
gravé ,  d'après  Rembrandt ,  le  vieux 
Tobie  et  sa  femme,  morceau  d'un 
très-bon  goût  et  d'un  grand  effet  ;  les 
premières  épreuves  ne  portent  pas 
l'adresse  de  Clément  de  Jongh; — Da- 
vid jouant  de  la  harpe  devant  Saûl; 
les  premières  épreuves  sont  sous 
l'adresse  de  F.  de  Wit.  —  Portrait 
de  la  femme  de  Rembrandt ,  etc. 
Tous  ces  morceaux  sont  très-recher- 
chés, et  de  la  plus  grande  rareté. 
Les  quatre  grands  paysages  qu'il  a 
gravés,  d'après  Nieulant,  représen- 
tent des  vues  du  Tyrol  :  ils  sont 
également  rares  et  se  font  remarquer 
par  leur  savante  exécution.  —  Jean 
de  Leeuw  ,  graveur  à  la  pointe  et 
au  burin,  né  à  la  Haye  ,  vers  1660  , 
grava  ,  de  concert  avec  Jean  Lams- 
welt,  les  portraits  qui  se  trouvent 
dans  l'histoire  de  Louis  XIII ,  par 
Levassor.  On  ne  croit  pas  qu'il 
ait  gravé  autre  chose  que  des  por- 
traits. On  cite  de  lui  en  ce  genre 
ceux  de  Ch.  Nieïlius ,  docteur  en 
théologie,  remarquable  parla  finesse 
du  burin  j  de  Jacques- Guillaume 
Himhof ,  sénateur  de  Nuremberg  , 
de  Joseph  -  Jules  Scaliger ,  et  du 
duc  de  Marlhorough,  avec  la  devise  : 
Veni,  vidi ,  vici ;  grand  in-folio. 
—  Deux  peintres  hollandais  ,  du 
même  nom  ,  acquirent  quelque  cé- 
lébrité vers  la  fin  du  dix-septièmp 
siècle  P-s 

LEUWENHOECK  ,  (  Antoine  ), 
ou  LEEUWENHOECK  ,  comme 
l'écrivent  les  Hollandais  ,  natu  - 
raliste  célèbre ,  naquit  à  Delft ,  ca 
i632  ,  et  mourut  le  2(3  août  1723. 
Le  talent ,  tout  particulier ,  qu'il 
avait  pour  tailler  des  verres  propres 
à  la  fabrication  des  microscopes 
et  des  limettes ,  lui  fit  d'abord  uue 


LFXT 

putalion parla  supc'rioritc  iIm  ins- 
iiicnts  qu'il  conslrnisait  :  il  en 
|iiil  ensuite  inicpliLsgrandrcomnie 
plivsiologiste  et  comme  anatomisle, 
M  la  variété  de  ses  recherches  sur 
structure  intime  des  diverses  par- 
>  du  corps  humain.  Ses  travaux  et 
nervations  microscopiques  sont  en 
^rand  nombre  qu'il  serait  impos- 
Ic  d'en  donner  un  détail  exact  : 
nous  ne  ferons  mention  que  de  ses 
principales  recherches.  Les  antago- 
uistes  de  Harvey ,  auteur  de  la  dé- 
couverte de  la  circulation  du  sang , 
opposaient  à  la  doctrine  de  ce  grand 
homme,  que  si  ce  fluide  passait  direc- 
tement des  artères  dans  les  veines , 
il  ne  pouvait  nourrir  les  parties  qu'il 
traverse.  La  question  e'iait  indëcisej 
et  Leuwenhocck,  communiqua,  en 
i68G,à  la  société  royale  de  Lon- 
dres ,  un  mémoire  dans  lequel  il 
croyait  avoir  découvert  ,  contre 
l'opinion  de  Harvey  ,  que  le  pas- 
sage du  sang  n'était  pas  immédiat 
des  artères  aux  veines.  Cependant  , 
en  1  (x)o ,  ayant  scrupuleusement  exa- 
miné les  parties  avec  son  microscope 
perfectionné,  il  découvrit  et  démon- 
tra ,  jusqu'à  l'évidence,  la  continuité 
'Vs  artères  avec  les  veines  ;  il  se  re- 
a  même  d'admettre  aucune  divi- 
sion entre  les  vaisseaux  capillaires  , 
parce  que,  disait-il,  il  est  impos- 
sible de  déterminer  où  finissent  les 
artères,  et  où  commencent  les  veines. 
A  cette  époque ,  la  théorie  chimique 
qui  dominait  en  médecine  ,  établis- 
sait comme  certaine  la  fermentation 
du  sang  :  Leuwenhoeck  combattit 
victorieusement  cette  hypothèse,  en 
lui  opposant  ses  expériences  micros- 
copiques ,  d'où  il  résultait  qu'il 
n'existe  point  de  bulles  d'air  dans 
les  vaisseaux  sanguins  ,  phénomène 
qui  devrait  avoir  lieu ,  si  le  sang  fer- 
tacnl.iit.Cct  expériiaentatcur  dirigea 


LEU  3(53 

anssi  .ses  recherches  sur  la  forme  des 
globules  sanguins 'que  Malpighi  avait 
déjà  aperçus  ;  Lcuwenlioeck  cons- 
tata que  ces  globules  sont  ovales, 
aplatis,  composés  de  six  petits  cones 
qui  nagent  dans  le  sérum  y  et  qui , 
pris   sé])aiément ,    ne  réfléchissent 

f>as  la  couleur  rouge  ;  mais  qui ,  par 
eur  réimion ,  communiquent  au 
sang  les  qualités  physiques  qu'on 
lui  connaît.  Cette  découverte  servit 
de  base  à  la  théorie  de  Boerhaave 
sur  l'inflammation.  Leuwenhoeck 
établissait, pour  justifier  son  système, 
que  les  vaisseaux  capillaires  rouges 
partent  d'autres  vaisseaux  ,  ou  la 
circulation  du  sang  a  lieu  hors  de 
l'influence  du  cœur,  et  où  ce  liquide 
paraît  blanc,  parce  que  ses  globules 
sont  divisés  ,  pour  s'accommoder  à 
la  ténuité  des  canaux  dont  il  s'agit. 
L'expérience  ultérieure  a  fait  justice 
de  ses  idées  sur  la  composition  phy- 
sique du  sang;  mais  ses  observations 
sur  la  structure  des  vaisseaux  capil- 
laires ont  été  reconnues  exactes  par 
les  analomistes  les  plus  éclairés.  Le 
cerveau  et  les  nerfs  furent  aussi  le 
sujet  des  recherchcsde  Leuwenhoeck; 
il  prélendit  que  la  substance  corti- 
cale est  entièrement  vasculaire ,  qu« 
les  vaisseaux  qui  la  composent,  sont 
cinq  cent  douze  fois  plus  petits  qu« 
les  vaisseaux  capillaires  les  plus  de'- 
liés  ;  et  que  les  globules  qui  compo- 
sent le  fluide  contenu  dans  les  vais- 
seaux de  la  substance  corticale,  sont 
trente-six  fois  plus  petits  que  ceux 
dont  le  saug  rouge  est  formé.  Enfin , 
il  crut  voir,  dans  ses  recherches 
microscopiques  ,  que  chacun  de  ces 
globules  est  entouré  d'un  réseau  très- 
fin  de  vaisseaux  et  défibres.  De  nou- 
velles expériences  lui  firent  modifier 
ses  idées  ,  en  1 7 1  "j  ;  et  il  prétendit 
alors  que  le  cerveau  est  d'une  struc- 
tJU-c  Gbiciibc,  et  que  les  vaisseau* 


m  LEU 

sanguins  serpentent  entre  les  fibres 
qui  composent  cet  organe.  La  science 
ïi'a  tire  aucun  profit  de  ces  derniers 
travaux  ,  plus  propres  à  l'embrouil- 
ler iju'à  Tëclairer.  Leuwenlioeck  étu- 
dia la  structure  du  cristallin  ,  et  de'- 
crivit ,  avec  exactitude,  la  disposi- 
tion des  lames  qui  composent  cette 
partie  de  l'organe  de  la  vue  ;  il  joi- 
gnit d'assez  bonnes  figures  à  sa  des- 
cription. On  a  beaucoup  parle  de  sa 
découverte  des  animalcules  qu'il 
aperçut  dans  le  sperme.  Il  décrivit 
longuement  ces  petits  corps ,  et  sup- 
posa que, parvenus  dans  l'utérus, ils 
irritent  cet  organe ,  attirent  l'œuf,  et 
communiquent  la  vie  à  l'embrion 
qu'il  renferme.  Benj.  Martin  a  con- 
testé ces  observations  ,  dont  on  peut 
voir  le  détail  dans  V Histoire  natu- 
relle de  BufTon.  Leuwenhoeck  em- 
ploya toute  sa  vie  ,  qui  fut  fort  lon- 
gue ,  à  faire  des  observations  et  des 
expériences  anatomiques  ;  et  il  ne 
lui  manqua ,  pour  en  obtenir  des  ré- 
sultats plus  nombreux ,  que  cette  éru- 
dition et  cette  sagacité  convenables  , 
pour  discerner  ce  qui  est  vrai  de 
ce  qui  n'est  qu'apparent.  C'est  ainsi 
que  souvent  il  crut  voir  ce  qui  n'exis- 
tait point,  et  qu'il  persista  dans  son 
erreur.  On  peut  citer  ,  parmi  ses  pa- 
radoxes ,  l'opinion  qu'il  a  soutenue 
que  la  tunique  des  intestins ,  que  les 
anatomistes  de  son  temps  nommaient 
villosa,  est  musculeuse.  Il  a  aussi 
soutenu  que  la  pulsation  était  due 
aux  veines  et  non  pas  aux  artères. 
Le  czar  Pierre-le-Grand  se  montra 
l'admirateur  de  Leuwenhoeck.  Ce 
prince  ,  passant  devant  Delft  en 
1698,  lui  envoya  deux  de  ses  gen- 
tiishommes  le  prier  de  venir  le  visi- 
ter, et  d'apporter  ses  admirables 
microscopes.  Il  lui  fit  même  dire 
qu'il  serait  allé  le  voir  dans  sa  de- 
meure, s'il  n'avait  voulu  se  dérober 


LEU 

à  la  foule.  Le  physicien  ,  après  avoir 
montréses  instruments  à  l'empereur, 
lui  fît  voir  le  phénomène  curieux  de 
la  circulation  du  sang,  dans  la  queue 
d'une  anguille.  Leuwenhoeck  com- 
muniquait tous  ses  Mémoires  à  1^ 
société  royale  de  Londres ,  qui  ea 
enrichisssait  les  Transactions  philo- 
sophiques. Ils  ont  aussi  été  impri- 
més ,  pour  la  plupart ,  séparément, 
en  hollandais  ,  à  Delft  et  à  Leyde. 
Une  main  étrangère  a  traduit  en  la- 
tin toutes  les  compositions  de  cet 
homme  célèbre  ,  sous  le  titre  d'^r- 
cana  naturœ  détecta  ,  Delft ,  1 695- 
96-97  et  99,  4  vol.  in-4^.  ;  réim- 
primés à  Leyde,  en  1719,  et  avec 
les  épîtres  de  l'auteur,  1722.  F-r. 

LEUZE  (  De  ).  Foy.  Fraxinis. 

LEVACHER  (  Gilles  ) ,  chirur- 
gien distingué ,  naquit ,  le  29  mars 
1693  ,  au  château  de  Ghaseules ,  en 
Bourbonnais.  Il  fut  interrompu  dans 
ses  éludes  par  une  ophtalmie  ;  mais 
ayant  recouvré  la  vue  au  bout  de 
trois  ans  ,  il  alla  suivre  à  Montpellier 
les  cours  des  plus  fameux  profes- 
seurs. Il  eut  bientôt  épuisé  ses  faibles 
revenus ,  et  fut  obligé  de  revenir 
dans  sa  famille  ,  sans  avoir  pris  ses 
grades.  L'abbé  Pouget ,  prieur  de 
St.-Germain-des-Fossés  ,  s'intéres- 
sa pour  ce  jeune  homme  modeste  et 
laborieux,  et  fit  les  frais  de  son  voya- 
ge à  Paris,  où  il  obtint,  bientôt  après, 
une  place  d'élève  en  chirurgie  à  l'hô- 
pital de  la  Charité.  Il  suivit  les  le- 
çons de  Duverney  ,  de  Morand  et  de 
La  Peyronie  ,  et  fit  de  rapides  pro- 
grès sous  ces  habiles  maîtres.  Le  duc 
de  Levis,  ayant  été  nommé,  en  171 9, 
commandant  delà  province  de  Fran- 
che-Comté, demanda  à  La  Peyronie 
un  chirurgien  de  confiance  ;  et  ce- 
lui-ci n'hésita  pas  à  lui  donner  Le- 
vacher.  Sur  la  demande  de  l'univer- 
sité, Levacher  ouvrit  ,  en  17'^'^, 


Î.EV 

nn  murs  puMir  (ranatoniic  à  Rosnn- 
'•'>M;ct  raiince  suivante  il  fut  nomme 
rur};ipn-major  do  l'Iiùpilal  Saiiit- 
|ucs  de  cette  ville.  Les  talents 
1  développa    dans  cette  place, 
portèrent  bientôt  sa  réputation  au- 
delà  des  bornes  de  la  province;  et  le 
roi  lui  accorda  ,  en  i  •j/jo  ,  le  titre  de 
chirurgien  consultant  de  l'armée  du 
Rhin.  Il  joignait  à  des  connaissances 
très-ctendues  dans  son  art,  une  rare 
probité  et  beaucoup  de  desinleresse- 
iiunt.  11   moin-ut  subitement  le  i8 
)bre  1760,   dans  sa  maison  de 
npapjnc  ,  près  de  Besançon.  Leva- 
(  lier  avait  forme'   un  beau  cabinet 
d  liistoire  naturelle,  qu'il  légua  à  un 
de  ses  confrères  digne  d'apprécier 
uu   pareil  présent.    Il  était  corres- 
pondant de  l'académie  des  sciences 
et  de  celle  de  chirurgie  de  Pari^  •  et 
il  fut  désigne',  en  1 7,52 ,  l'un  des  pre- 

i  micrs  membres  de  l'académie  de 
Besançon.  Il  était  en  correspondance 
avecRëaumur ,  Mauperluis, Ciairaut, 

I    Winslow  ,  Jussieu ,  etc.  On  a  de  lui  : 

',  I.  Observation  de  Cliirurgie  sur  une 
espèce detnpyème  au  bas-ventre.  Pa- 

I  ris,  1 737,in-i  2.  Petit  l'a  insérée  dans 
son  Mémoire  sur  les  Epandiements. 
II.  Dissertation  sur  le  cancer  des 
mamelles ,  Besançon  ,  l'^jf^o/in-i'x. 
Il  V  prouve  (pie  le  seul  moyen  cura- 
tif  est  l'extraction  de  la  partie  ma- 
lade, m.  Histoire  de  frère  Jacques, 
lithotomiste  de  Franche  -  Comté  ^ 
ibid. ,  in5(i  ,  in-i5t.  Elle  est  inlëres- 
*ante,mais  moins  exacte  (  i  )  que  celle 
qu'a  publiée  Morand  dans  le  tome  11 
de  ses  Opuscules.  ÏV.  Des  Observa- 
tions de  Chinir^ie,  inscrc'es  dans  les 

,^i)  CeftJ°apr^•LeTacller, que  l'on  dcyait  croire 
bi -n  inatruit  de  toiile*  le*  parti)  ulari  tôt  qui  coti- 
t«ruaieiit  le  Cr^re  Jncqiio*  ,  qii'nn  n  «lit  À  l'art. 
B»ri.OT  (  III,  pae  '«ôô),  qu'il  était  mort  <^ii  1730. 
Mai»  il  teaiilte  «le  vt-rtiicHtioiia  fsitef  p«ntéri»-n- 
remcel  ilaiic  I  »  re^iatrct  de  la  par<n««e  M .-Ji-H'>- 
Baptitte  rie  Ueia iit nn,  que  ret  liabile  iitboloiuitt« 
«>«(  luort  le  7  décembre  17 14- 


LEV 

Mémoires  del'acad.  des  sciences  et  d« 
cellcde  Cliirurfrie; on  en  trouvela  lis- 
te dans r /notoire de l'anatome,  par 
M.  Portai ,  tom.  v,  pag.  i>.3.  V.  Plu- 
sieurs Dissertations  dans  les  recueil» 
manuscrits  de  l'acad.  de  Besançon. 
Il  a  eu  outre  laisse  un  Corps  d'obser^ 
valions  pratiques ,  en  8  vol.  in-/|. 
etc.  Levacher  avait  e'pousë  une  sœur 
du  fameux  chinngien  Morand  ,  et  il 
en  eut  un  fils  qui  s'est  distingue'  dans 
la  même  profession,  h' Elofre  de  Le- 
vacher ,  par  Lebas  de  Cle'rcncc ,  a 
etc  lu  à  l'acad.  de  Besançon,  et  il  est 
conserA'c  dans  les  Registres  de  cette 
compagnie ,  tom.  n.  W-s. 

LEV  ASSOR  (  MiCHKL  )  historien, 
ne'a  Orléans  dans  le  dix-septième  siè- 
cle, entradansla  congrëgationdel'O- 
ratoire,  et  publia,  en  1(788,  un  Traité 
de  la  véritable  religion,  dans  lequel 
on  trouve  quelques  opinions  singuliè- 
res, qui  lui  attirèrent  des  reproches 
de  la  part  de  ses  supérieurs.  Il  quit- 
ta la  congrégation ,  deux  ans  après  , 
et  sollicita  un  bénéfice  dont  les  re- 
venus le  missent  à  même  de  s'appli- 
quer entièrement  à  la  culture  des  let- 
tres :  fâché  de  n'avoir  pu  réussir  dans 
ses  démarches  ,  il  sortit  de  France  , 
en  1675,  et  se  relira  en  Hollande, 
où  il  se  lia  étroitement  avec  B.ivle, 
Basnage  ,  Jaquelot  et  les  autres  chefs 
du  parti  protestant.  Il  passa  ensuite 
en  Angleterre,  et  il  y  fit  profession 
de  la  réforme,  en  iG<)7.  Il  obtint  ime 
pension  du  prince  d'Orange  à  la  de- 
mande du  docteur  Burnet;  et  lord 
Portiand  lui  donna  un  logement  dans 
son  hôtel ,  et  le  combla  de  marques 
d'amitié  :  mais  la  publication  de  soa 
Histoire  de  Louis  XTII  lui  fit  per- 
dre tous  ses  amis  et  ses  protecteurs; 
lord  Portiand,  indigné,  le  chassa  de 
chez.  lui.  Levassor  eut  depuis  ce  rao* 
nient  une  existence  malheureuse:  il 
mourut  à  Londres,  en  1-^18,  àgô 


366  LEV 

de  soixante-dix  ans.  C'était  un  hom- 
me laborieux ,  d'un  commerce  sûr  ^ 
d'une  conversation  agréable  et  ins- 
tructive; mais  les  injustices  dont  il 
croyait  avoir  à  se  plaindre ,  l'avaient 
aigri,  a  II  est  fâclieux,  dit  Laliarpe, 
»  que  Levassor ,  fait  pour  valoir 
»  mieux  que  cette  foule  de  libell  istes, 
»  aujourd'hui  confondus  dans  le 
»  même  oubli ,  les  ait  imite's  dans 
»  leurs  emportements ,  et  qu'il  ait 
»  cru  faire  assez  de  ne  pas  les  imi- 
»  ter  dans  leurs  mensonges.  »  On  a 
de  lui  :  I.  De  la  véritable  Religion , 
Paris,  i688,in-4°.  II.  Paraphrase 
sur  V Evangile  de  Saint  -  Mathieu , 
avec  des  Réflexions  sur  l'Histoire 
critique  du  Nouveau-Testament  par 
Ricli. Simon,  ibid.,  1688,  in- 12.  Les 
Réflexions  annonce'es  sur  le  titre  ne 
«e  trouvent  pas  dans  le  volume.  III. 
Paraphrase  sur  V Evangile  de  St.- 
Jean,  sur  Vépître  de  St. -Paul  aux 
Romains,  sur  celle  aux  Galates,  et 
sur  Vépître  catholique  de  Saint- 
Jacques,  ibid.,  i689,in-i2.  Levas- 
sor se  montre,  dans  tous  ces  ouvrages, 
très-zèle'  pour  la  religion  catholique, 
et  ne  ménage  pas  les  e'crivains  pro- 
testants. IV.  Traité  de  la  manière 
d'examiner  les  différends  de  reli- 
gion,  Amsterdam,  1697,  in- 12. 
C'est  une  apologie  des  principes  de 
l'église  anglicane.  V.  Histoire  géné- 
rale de  V Europe  sous  le  règne  de 
Louis  XIII f  Amsterdam ,  1 700-1 1 , 
10  tomes  relie's  ordinairement  en  10 
vol.  in- 1 2;  nouvelle  ëdit.,  Amsterdam 
(Paris),  1757,7  vol.  in-40.  «  Cettehis- 
»  toire,  dit  Voltaire,  diffuse,  pesante 
»  et  satirique ,  a  e'të  recherchée  pour 
»  beaucoup  de  faits  singuliers  qui 
»  s'y  trouvent  ;  mais  Levassor  est 
»  un  déclamateur  odieux ,  qui,  dans 
»  l'histoire  de  Louis  XIII ,  ne  cher- 
»  che  qu'à  décrier  Louis  XIV  ;  qui 
»  attaque  le*  mort*  et  les  vivants  : 


LEV 

»  il  ne  se  trompe  que  sur  peu  de 
»  faits,  et  passe  pour  s'être  trompé 
»  dans  presque  tous  ses  jugements.  » 
Le  père  Griffet  a  réfuté  Levassor 
dans  la  préface  de  son  Histoire  de 
Louis  XIII.  On  a  encore  de  lui  une 
traduction  de  l'espagnol  des  Lettres 
et  Mémoires  touchant  le  concile  de 
Trente ,  par  Fr.  de  Vargas ,  avec  des 
remarques  ,  Amsterdam  ,  1 700  ,  in- 
8°.  On  trouve  un  Eloge  de  Levassor 
dans  les  Nouvelles  littéraires ,  de 
la  Haye,  tom.  viii,  p.  3q'2.  W — s. 
LEV  AU  (  Louis  ),  architecte,  né 
en  16 1 2 ,  n'est  connu  que  par  ses  ou- 
vrages ,  dont  le  premier  fut  le  Châ- 
teau de  Vaux  y  qu'il  construisit ,  en 
1 653, pour  le  surintendant  Fouquet. 
Celui  de  Livry,  nommé  depuis  le 
Rainci  j  fut  élevé  à  peu  près  dans 
le  même  temps  pour  Bordier,  inten- 
dant des  finances.  Il  a  été  démoli  au 
commencement  de  la  révolution.  En 
1 655,  Levau  fut  chargé  de  continuer 
V Eglise  de  St.-Sulpice,  et  donna  les 
dessins  de  la  Chapelle  de  la  Vierge , 
qu'il  éleva  jusqu'à  la  corniche.  Après 
ces  travaux ,  il  construisit ,  dans  l'île 
Saint-Louis,  V Hôtel  Lambert ,  que 
les  chefs-d'œuvre  de  Lesueur  et  de 
Lebrun  ont  rendu  si  célèbre  :  il  fut 
ensuite  chargé  de  la  construction  des 
Hôtels  de  Pons  j  de  Colbert ,  et  de 
Lionne  (  devenu  depuis  Hôtel  de 
Pontchartrain  ).  En  1 660 ,  le  cardi- 
nal Mazarin  lui  confia  l'exécution 
des  changements  qu'il  voulait  faire 
au  château  de  Vincennes,  des  an- 
ciennes constructions  duquel  il  ne 
voulait  conserver  que  huit  tours  et 
le  Donjon.  Levau  éleva  deux  ai- 
les nouvelles  et  le  portique  du  châ^- 
teau  qui  regarde  le  parc.  Quatre  ans 
après ,  Louis  XIV  ordonna  jîlusieurs 
travaux  pour  l'embellissement  du 
Château  des  Tuileries.  Le  pavillon 
du  milieu  n'avait  été  jusqu'alors  d«- 


LEV 

r(^ff«jc  des  deux  ordres  ,  ionique  et 
liiithicn;  Levaii  y  ajouta   le  corn- 
site  et  un   atti(jiic   surmonte'   du 
ine    quadrangulairp.     Les    deux 
inds  corps  de  bâtiments,  nommes 
.  ui'illons  de  Flore  et  de  Marsan , 
tjiii  terminent  cette  façade,  et  qu'il 
'    ajouta,  sont  de'corcs  de  pilastres 
iiiieles,  d'ordre  composite,  sur- 
I  Miute's    d'un    altique.   La   manière 
ilont  l'artiste  a  restaure'  le  pavillon 
I  milieu,  et  les  deux  ailes  qui  vont 
iidre  les  deux  grands   pavillons 
Mines  aux  extrémités  de  la  façade  , 
ist  ingénieuse  et  en  harmonie  avec 
le  dessin  primitif;  mais  la  décora- 
tion des  deux  grands  pavillons  est 
lourde  et  gigantesque ,  et  forme  une 
disparate  sans  goût  et  sans  mesure 
avec  le  reste  de  l'édifice.  C'est  sur 
ses  dessins  que,quelques  années  après 
*a  mort,  François d'Orbay,  son  élève, 
dirigea  la  construction  du  Collège 
des  Qitatre-Nations.  Levau  fut  pre- 
ujier  architecte  de  Louis  XIV,  et 
conserva  la  direction  des  bâtiments 
du  Roi,  depuis  l'année   iG53  jus- 
ou'en   1670  ,  époque   de  sa  mort. 
Éoileau,  dans  ses  démêlés  avec  Per- 
rault ,  prétendit  enlever  à  ce  dernier 
l'invention  de  la  fameuse  colonnade 
du  Louvre  ,  en  disant  qu'elle  se  trou- 
vait dans  les  dessins  de  Levau  et  de 
Ratabon  ;  mais  il  n'a  pu  en  fournir 
aucune  preuve.  P — s. 

LEVAYER.  Fojez  Boutigivy  et 

MOTUE. 

LEVE  ou  LEYVA  (Antoine  duc 
De  ) ,  le  plus  habile  des  généraux  de 
Charles  -  Quint,  était  né  vers  1 480  , 
dans  la  Navarre,  d'une  famille  obs- 
cure (i).  Enrôle  dans  les  milices 
qu'on  envoyaitauroyaumedeNaples, 
il  ne  parvint  au  commandement  qu'a- 

(t)  Aucun*    le    dicoient  fîia  d'un    cordonnier; 
■  «i«   cVtai«nt    «!••    iiSPOJturef    «(    calomaioj. 


LET  3C7 

près  avoir  passé  par  tons  les  grade» 
inférieurs.  Il  assistait  à  la  balaillcdc 
Ravenne  ,en  1 5 1  j  ;  et  si  l'on  en  croit 
Brantôme,  «  il  n'y  fit  ])as  moins qiie 
»  les  autres  qui  s'enfuirent  ;  mais  il 
»  se  peina  ,  travailla ,   et  mania  si 
»  bien  les  armes  depuis  en  tous  lieux, 
»  combats  ,  rencontres    et  sièges  , 
»  qu'oncqucs  on  ne  lui  sut  reprocher 
»  sa  faute  passée.  »  11  chassa ,  en 
i523  ,  l'amiral  Bonnivet  de  devant 
Milan  ,  et  reprit  Valence  sur  le  Pô  , 
dont  Galéas  s'était  emparé  par  sur^ 
prise.  Il  se  distingua  l'année  suivante 
à  la  bataille  de  Rebec  ;  il  se  jeta  eu- 
suite  dans  Pavie ,  avec  six  mille  vieux 
soldats ,  résolu  de  s'ensevelir  sous  les 
ruines  de  cette  place ,  assiégée  par 
François  P'".  Les  Suisses  qu'il  avait 
sous  ses  ordres  s'étant  mutinés,  parce 
que  l'argent  manquait ,  il  fit  porter 
à  la  monnaie  les  ornements  et  les  re- 
liquaires des  églises  ,  promettant  de 
leur  rendre  plus  qu'il    n'enlevait  ; 
mais  il  s'en  excusa  ,  disant  que  ce 
qu'il  avait  pris,  c'était  pour  le  ser- 
vice de  l'empereur  Charles  -  Quint , 
et  que  c'était  à  lui  de  le  rendre.  Lève 
retardait  les   approches  des   assié- 
geants par  des  sorties  fréquentes  et 
vigoureuses  ;  il  élevait  de  nouveaux 
ouvrages  derrière  les  brèches  que  fai- 
saitleur  artillerie,  les  repoussait  dans 
tous  les  assauts ,  et  donnait  l'exemple 
du  courage  et  de  la  patience  à  sup- 
porter les  privations.  Sa  résistance 
opiniâtre  amena  la  fameuse  batadie 
de  Pavie  ,  si  funeste  à  la  France. 
Pendant  l'action ,  Lève  fit  une  sortie 
avec  l'élite  de  la  garnison ,  et  loni- 
bantàl'improvistesnrl'arrière-garde 
des  Français,  la  mit  dans  un  désordre 
qui  détermina  la  perle  de  la  journée. 
Il  fut  nommé  gouverneur  du  Mila- 
nez  ,  et  maintint  le  pays  sous  la  do- 
mination espagnole.   «  Il  était ,  dit 
»  Brautômc,  goutteux^  maladif ,  tOM^ 


;g8 


LEV 


»  jours  en  douleurs  et  langueurs  ; 
5)  mais  il  combattait  porte  en  chaise, 
V  comme  s'il  eût  e'te'  à  cheval.  »  En 
1,527, il  chassa  de  Marignan  le  duc 
Franc.  Sforce,  et  prit  sur  Jacques  de 
Me'dicis  la  forte  place  de  Casai ,  dont 
la  garnison  fut  egorge'e.  Il  repoussa  , 
en  15^9  ,  avec  une  poigne'e  d'hom- 
mes, les  attaques  du  comte  de  Saint- 
Pol ,  jeune  officier  très-brave  mais 
sans  expérience ,  le  surprit  par  une 
marche  forcc'e  ,  le  fit  prisonnier  ^  et 
acheva  de  chasser  tous  les  Français 
du  Milanez.  Il  fut  nomme' ,  en  1 532 , 
généralissime  de  la  ligue  formée 
contre  la  France  ,  et  suivit  Charles- 
Quint  dans  son  expédition  d'Afrique. 
Il  fut,  dit-on,  le  seul  des  généraux 
de  l'empereur  qui  lui  conseillât  de 
pénétrer  dans  la  Provence,  disant 
qu'il  espérait  le  mener  à  Paris  (  i  )  , 
et  ne  demandant ,  pour  toute  récom- 
pense, que  l'honneur  d'être  enterré  à 
Saint-Denis.  Quoi  qu'il  en  soit ,  Lève 
fut  victime  de  la  fièvre  qui  ravageait 
l'armée  espagnole  (  1 536).  Son  corps 
fut  rapporté  à  Milan ,  et  inhumé 
dans  une  église  dédiée  à  Saint-Denis. 
Il  avait  étécréé  successivement  prince 
d'Ascoli,duc  de  Terra-Nova,  primat 
des  Iles  Canaries ,  etc.  Mais  on  as- 
sure que  sa  plus  grande  ambition 
était  d'obtenir  le  privilège  d'avoir  la 
tête  couverte  devant  l'empereur.  On 
raconte  à  ce  sujet ,  qu'un  jour  à  l'au- 
dience de  Charles-Quint ,  quelqu'un 
lui  demandant  comment  se  portaient 
ses  jambes  :  Hélas  ,  répondit  -  il,  ce 
ne  sont  pas  les  jambes  qui  me  font 
mal,  c'est  la  tête  (2).  W-s. 


(1)  D'autres  au  contraire  assurent  que  L^yva 
fut  entiùreraent  opposé  à  ce  dessein,  jusque-là 
gu'il  se  jiîtaaux  pieds  de  l'empereur,  et  le  con- 
jura de  ne  point  pass-.r  les  Alpes  ,  mais  de  re- 
Vûuvrer  les  places  que  les  Français  occupaient 
dans  le  Piémont.  (  Ferreras  ,  trad.'de  d'Hermilly, 
tom.  IX,  pag.  iSq.  ) 

(2)Xes  auteurs  du  Dictionnaire  universel  rap- 
portent uue  anecdote  qui  démentirait  celle-là  : 


LEV 

LEVEN  (  Joseph  de  Templert  , 
seigneur  de  ) ,  grammairien  et  littéra- 
teur provençal^  naquit  à  Aix,  vers  le 
milieu  du  dix-septième  siècle.  Fils 
d'un  receveur-général  des  finances ,  il 
étudia  en  droit,  et  fut  pourvu,  vers 
1 680 ,  d'une  charge  d'auditeur  à  la 
chambre  des  comptes.  C'était  un  des 
beaux-esprits  de  la  Provence.  Il  cul- 
tiva la  poésie,  et s'apjiliqua  particu- 
lièrement à  l'étude  de  la  langue  fran- 
çaise, peu  familière  alors  au  plus 
grand  nombre  de  ses  compatriotes  : 
on  peut  le  regarder  comme  le  Fau- 
gelas  de  la  Proveuce  et  le  précur- 
seur de  Dumarsais.  II  savait  éga- 
lement bien  l'histoire;  et  Pitton  lui 
ayant  adressé,  en  1682,  ses  Sen-* 
timents  sur  les  historiens  Proi^en- 
caux,  Leven  retoucha  cet  ouvrage, 
et  le  mit  en  état  d'être  lu  avec  plaisir. 
On  a  de  lui  :  I.  Jephté,  ou  la  mort 
de  Seïla  ,  Paris,  1676.  Bcauchamp, 
dans  ses  recherches  sur  les  théâtres 
de  France  ,  semble  attribuer  cette 
pièce  à  Vend  ,  parce  que  l'auteur  Fa 
dédiée  à  la  femuie  de  ce  dernier. 
II.  Relation  des  réjouissances  faites 
à  Aix  ^par  le  parlement ,  la  cham- 
h^e  des  comptes ,  les  trésoriers  de 
France  j  etc.,  pour  la  santé  de  Louis 
XIF,   17  février    1G87.    Ï^I-   Des 


«  Charles-Quint  ,  «'étant    rendu  eu  Italie  .  iit  a 
»  seoir  Lève   à  côté  de  lui  ,  et  ,  le  voyant  obstin 
»   à   ne  pas  se  couvrir,  lui   mit  lui-même  le  ch 
»   peau  sur  la  tête,    en  disant  ,  qu'un    capital] 
»  qui  avait  fait  soixante  cainpagijes,    niérit; 
»    bien  d  être  assis  et  couvert  devant  un  emperei; 
•)   de  trente  ans.»  C'est  en    i5''>o  ,  que  celte  stèm 
a  dû  Se  passer  :  Lcyva   avait  alors  environ    cin 
q liante    ans,    et    il    était  tlifiicile    qu'il   compi 
déjà    cinquante    campa<^nes     Cette   anecdote  e 
cependant  beaucoup   plus    vraisemblable  que 
suivante,  racontée  parles  mêmes  auteurs  :  «  \.th 
«   entretenant  un  jour    l'empereur    des    aft'air 
1)    d'Italie,  il  osa  lui  proposer  de  se  détaire,  pi 
»  des  assassinats  ,  tie  tous  les  princes  qui  avai 
»  des  possessions  dans  ce  pays.  Eh  '  que  devi 
»  diait  mon  anie  1  lui  dît  Cliarles-Quint 
vous  avez  une  anie,  repartit" 


Lt^ve  ,  abandonne 
»  l'empire.»  On  croirait  faire  injure  à  la  péiiéi 
tration  du  lecteur  ,  si  Ton  s'attaclu.it  A  r:!  'ver 
1  absurdité  de  cette  historiette  ,  destinée  cepen- 
dant à  se  perpétuer  dan»  toutes  les  compilation» 
historiques. 


LEV 

Ma.iirfKrs  galantes  ,  i6t)0.  IV. 
i' honneur  y  le  Jeu  et  l'eau  ^  fable, 
idem.  V.  Satire  morale ,  sur  ce  que 
personne  n'est  exempt  d'imperfec- 
tions ^  i(k)i  ;  et  un  gnud  nombre 
d*aulres  poésies  ,  sur  divers  sujets  , 
insérées  dans  le  Mercure.  Les  vers 
de  eel  aule\ir  sont  corrects ,  mais 
froids  en  gênerai,  et  dépourvus  d'i- 
maj^ination.Les  suivants  qu'il  adressa 
À  madame  Gaufridi,  ont  ete  cites  , 
apparemment  comme  les  meilleurs  : 

Vou»  et  Totre  m  »t\ ,  •!  ili^nci  de  mémoire  , 

('ontFiltiiet  ég.tlemeiit 
A  parer  U  Frnvrnce  ,  k  relever  •«  eloire  i 

Vntte  ^prttix  rii  a  fait  DiiKoire, 

Et  ton»  en  ète«  l'ornement. 

VI.  Entretiens  sur  la  langue  fran- 
eoi^e,  in-1'2,  1697.  VII.  Nouvelles 
remarques  sur  la  langue  française ^ 
Paris,  i()i)8  ,  in-i2;  réimprimées  en 
1703  ,  Paris  ,  in-isi ,  sous  ce  titre  : 
Le  ^énie  ,  la  politesse ,  V esprit  et  la 
délicatesse  de  la  langue  française. 
C'était  l'ouvrage  de  prédilection  de 
Leven  de  Templcri,  qui  s'en  occupa 
exclusivement  pendant  ses  dernières 
années.  Quoique  ce  livre  ,  très-peu 
connu,  renferme  quelques  paradoxes, 
auxquels  Fontc'.icllc  n'a  pas  souscrit 
dans  son  approbation  comme  censeur, 
il  est  écrit  d'un  style  agréable  et  pi- 
quant ;  et  il  peut  avoir  fourni  à  l'abbé 
Girard  le  premier  canevas  de  ses 
Synonymes  français ,  et  à  Demous- 
lier  ,  l'idée  et  le  plan  de  ses  Lettres 
à  Emilie.  Les  auteurs  du  Diction- 
naire de  Provence  attribuent  encore 
à  Leven  de  Templeri  trois  ouvrages 
dont  ils  ne  doujient  pas  les  dates  : 
Rhétorique  française;  A  malhonte; 
Grammaire  française.  Pitton  parle 
de  ce  dernier ,  qui  n'était  pas  encore 
publié  eu  i68vi.  Nous  pensons  en 
t  qu  écrivant  pour  Tinstruclion 
-  Provençaux ,  Templeri  dut  leur 
iiner  les  éléments  et  les  règles 
notre  langue,  avant  de  Ic:ir  eu 

XXIV, 


LEV  369 

faire  connaître  les  finesses.  Il  mou- 
rut à  Aix ,  en  1 70G,  dans  un  âge  peu 
avancé.  Les  savants  dont  il  empnrt.i 
les  regrets,  honorèrent  sa  mémoire 
])ar  une  épitapbe  qu'on  lisait  sur  sou 
tombeau ,  dans  l'église  des  Grands- 
Augustins.  A- T. 

LÉVÉQUE  (DoM  Prosper  ),  ne 
à  Besançon,  vers  171 3,  après  avoir 
tenninc  ses  études  ,  embrassa  la  vie 
religieuse  dans  l'ordre  de  Saint - 
benoît ,  et  fut  chargé  par  ses  supé- 
rieurs de  l'enseignement  des  novices. 
Nommé  ensuite  conservateur  de  la 
Bibliothèque  de  Saint- Vincent ,  il 
profita  de  celte  circonstance  pour 
lire  et  extraire  les  manuscrits  de 
Granvclle  ,  rassemblés  par  l'abbe' 
Boisot.  Il  publia  le  fruit  de  ses  re- 
cherches sous  le  titre  :  Mémoires 
pour  seivir  à  l'histoire  du  cadinal 
de  Granvelle  y  premier  ministre  de 
Philippe  II y  Paris,  1753,  'i  vol. 
in-i'2.  C'est  moins  l'histoire  que  l'a- 
pologie du  cardinal  ,  que  l'auteur 
cherche  à  justifier ,  même  du  repro- 
che d'ambition.  L'introduction  qui 
fait  bien  connaître  les  principaux 
personnages  de  la  cour  d'Espagjie , 
est  très -intéressante;  mais  ce  mor- 
ceau appartient  en  entier  à  l'abbé 
Boisot,  et  il  est  extrait  presque  litté- 
ralement de  sa  lettre  à  Pclisson,  im- 
primée dans  le  iv*-".  vol.  de  la  Con- 
tinuation des  Mémoires  de  littéra- 
ture. (Voyez  Boisot  et  Desmolets.) 
Le  second  volume  renferme  un  grand 
nombre  de  pièces  originales,  fpii 
peuvent  être  consultées  avec  fruit. 
D.  Lévêque  a  laissé  en  manuscrit: 
Vhistoire  du  siècle  de  Charles - 
Quint,  avec  des  pièces  justificati- 
ves,  eu  ieuses  et  originales ,  3  vol. 
in-fol.  Cet  ouvrage ,  pour  l'impres- 
sion duquel  l'auteur  avait  déjà  ob- 
tenu un  privilège ,  a  été  acquis  par 
la  bIbliolhèquedeBesauçon.  n.Prog- 


370  LEV 

Î)er  mourut  à  Luxeuil,  le  i5  decern- 
)re  1781.  W-s. 

LÉVÊQUE  (Pierre),  mathéma- 
ticien, ne  à  Nantes,  le  3  septembre 
174^,  y  fit  ses  études  chez  les  jé- 
suites ,  et  annonça  de  bonne  heure 
ce  qu'il  devait  être  un  jour.  Des  pro- 
grès rapides  dans  les  langues  an- 
ciennes et  dans  les  belles-lettres,  ne 
furent  que  le  prélude  d'un  penchant 
décidé  qui  l'entraîna  vers  les  mathé- 
matiques. Voulant  aprofondir  tout 
ce  qui  concerne  la  navigation ,  et 
joindre  la  pratique  à  la  théorie ,  il 
s'embarqua  sur  un  vaisseau  de  l'État , 
à  l'âge  de  dix-huit  ans ,  avec  un  titre 
et  des  fonctions  qui  ne  pouvaient 
flatter  son  amour-propre  ni  éveiller 
son  ambition  j  et  il  acquit ,  en  moins 
de  deux  ans ,  cette  parfaite  connais- 
sance de  la  construction  et  de  la 
manœuvre  navale,  qui  ne  s'obtient 
ordinairement  que  par  une  longue 
expérience.  Il  enseigna  les  mal)- Ai/zia- 
tiques  d'abord  à  Mortagne,  puis  à  Bre- 
teuil ,  ensuite  à  Nantes,  et  s'en  acquitta 
d'une  manière  si  distinguée  qu'il  ob- 
tint, en  1772,  la  chaire  royale  d'hy- 
drographie. Il  donna  le  premier  , 
dans  celte  ville,  le  spectacle  d'un 
aérostat;  et  Nantes  lui  doit  aussi  une 
machine  à  vapeur ,  l'une  des  premiè- 
res qui  aient  été  exécutées  en  France. 
Lévêque  fut  nommé  ,  en  1786  , 
examinateur  de  la  marine.  La  sa- 
gesse de  ses  principes  dans  la  révolu- 
tion ,  l'exposa  souvent  à  la  haine  des 
démagogues  ;  et  il  ne  dut  son  salut 
qu'à  la  vénération  qu'il  inspirait 
même  à  ses  ennemis.  A  un  jugemeut 
sûr  et  profond  ,  à  des  vues  saines  et 
justes  ,  il  joignait  l'érudition  la  plus 
vaste  et  les  connaissances  les  plus 
variées.  Langues  anciennes  et  mo- 
dernes, histoire,  sciences  naturelles;, 
manufactures,  commerce,  aduiinis- 
tratiou  ,  il  parlait  de  tout  avec  aulaat 


LEV 

de  facilité  que  s'il  ne  se  fût  occupé 
toute  sa  vie  que  d'un  seul  de  ces 
objets.  Lévêque  fut  député  à  la  lé- 
gislature de  1797:  proscrit  au  18 
fructidor ,  il  fut  encore  réduit  à  se 
cacher,  jusqu'à  ce  que  son  mérite 
reconnu  lui  eût  fait  obtenir  la  place 
d'examinateur  de  l'école  polytechni- 
que, à  laquelle  il  renonça  cinq  ans 
après ,  pour  se  borner  à  celle  qu'il 
occupait  déjà.  Il  s'était  ûxé  à  Pa- 
ris, lorsque  sa  réputation  comme 
savant ,  et  les  ouvrages  qu'il  avait 
trouvé  le  temps  de  composer  au 
milieu  de  ses  pénibles  fonctions , 
lui  ouvrirent  les  portes  de  l'Institut  ^ 
dont  il  fut  élu  membre  en  1801,  à  la 
place  de  Cousin  ,  et  lui  méritèrent  la 
décoration  de  la  Légion-d'honneur. 
La  perte  de  son  fils,  mort  à  l'âge  de 
vingt-sept  ans  ,  et  que  le  génie  mili- 
taire comptait  déjà  au  rang  de  ses 
meilleurs  ofiicicrs,  lui  causa  la  plus 
vive  douleur.  La  santé  de  Leveque, 
altérée  par  ce  coup  funeste  ,  reçut 
une  nouvelle  atteinte  par  l'émotion 
qne  lui  fiî  éprouver  le  retour  du  Roi. 
iï  se  trouvait  au  Havre,  et  venait 
d'achever  l'examen  des  élèves  de  la 
marine,  lorsqu'il  fut  frappé  d'une 
apoplexie  foudroyante, le  16  octûbrei. 
181 4.  On  a  de  lui  :  I.  Tables  géné- 
rales de  la  hauteur  et  de  la  longi- 
tude du  nonagésîme,  Avignon,  1770, 
'2  vol. in-8*^., imprimés  en  partie  aux 
frais  du  gouvernement.  Lalande  y  a 
ajouté  des  tables  de  hauteur  et  d'azi- 
mut ,  calculées  parTrébuchet.  Lévêi 
que  a  étendu  à  tout  le  globe  l'usaj^ 
desTablesquePtoléméen'avaitcalci 
lées  que  pour  7  climats  j  et  elles  oifrei 
quelques  avantages  sur  celles  de  La^ 
grange.  IL  Le  Guide  du  navigateui 
Nantes,  1779,  i  voLin-S».  fig.CetouJ 
vrage,  au  jugement  de  Lalande,  est  I< 
plus  étendu,  le  plus  complet  et  le  plus 
commode  qu'on  ait  doané  jusqii'ici 


LEV 

^nr  los  méthodes  des  longitudes  en 
mer  et  les  autres  objets  rel.itifs  aux 
I  vations.Ouy  trouvcaussi  toutes 
il)les  dont  l'astronome  a  besoin 
sur  la  mer.  III.  Examen  maritime ^ 
ou  Traité  de  la  mécanique  appliquée 
à  la  construction  et  à  la  manœuvre 
des  vaisseaux ylSantes,  1782,  a  vol. 
in-4*\  C'est  une  traduction  entreprise 

ordre  du  ministre  de  la  marine, 

os  la  première  édition  de  l'on- 

vr.i^e  espagnol  de  Don  George  Juan. 

(  r.  Juan  y  Santacilia  ,t.  XXII, 

8G.  )  Levêque  l'a  enrichie  de 

^  ,  y  a  fait  des  additions  impor- 

^,  et  en  a  donne  une  2*=.  édition 

ce  titre  :  De  la  construction  et 

de  la  manœuvre  des  vaisseaux, etc. 

ou  Examen  maritime  théorique  et 

pratique,  Paris,  179** ,  2  vol.  in-4**. 

IV,    Rapport  à  l'Institut   sur  les 

Observations  astronomiques  et  nau- 

li.iu^s  de  Don  Joseph  Joachim   de 

i'r,   1798.   V.    Mémoire  lu  à 

I  institut,  à  V occasion  d'un  ouvrage 

de  Maingon ,  ajant  pour  titre  :  Më- 

'le    contenant    des   explications 

riques  et  pratiques  sur  une  carte 

iiométrique, servant  à  re'duirela 

îice  apparente  de  la  lune  au  so- 

til  ou  à  une  étoile,  en  dislance  vraie, 

•t  à  re'soudre  d'autres  questions  de 

Pilotage.  Ce  rapport,  suivant  Lalande, 

ontient  une  grande  érudition  et  des 

éflexionsimporlantessurla  méthode 

ije'nieuse,  exacte  et  facile,  proposée 

i  auteur  du  Mémoire,  pour  faire 

•  d'une  seule  carte  ,  au  lieu  du 

•  1  nombre  de  celles  qui  ont  été 
lees  par  Margelts  ,   1798.  VI. 

'>rf  à  l'Institut  sur  un  nouveau 
me  de  mats  d'assemblage  pour 
aisseaux,  1799.  VII.  Mémoire 
usage  quonpeut faire  des  cartes 
lires  de  M argett s,  \)our  résoudre 
problèmes  que  l'auteur  n'avait 
»  «^us  eu  vue, et  qui  les  rendent  plus 


Î.EV  371 

intéressantes  qu'on  ne  croyait,  Ct 
Mémoire,  loué  par  Lalande ,  est  in- 
séré dans  la  Connaissanrcdcs  temps , 
i8o'A.  VIII.  Mémoire  sur  les  obseï' 
valions  qu'il  est  important  de  faire 
sur  les  marées  dans  les  divers  ports 
de  France ,  i8o3.  IX.  Description 
nautique  des  cotes  orientales  de  la 
Grande-Bretagne,  et  des  côtes  de 
Hollande,  du  Jutland  et  de  Nor- 
wège,  extraite  et  traduite  de  l'an- 
glais,et  publiée  par  le  dépôt  général 
(le  la  marine,  Paris,  an  xii  (i8o4), 
in-4**.  Cet  ouvrage,  moins  fait  pour 
être  lu  que  pour  être  consulté  ,  et 
demandé  par  le  ministre  de  la  ma- 
rine, se  dislingue  par  l'exactitude  et 
la  clarté.  Lévcque  travaillait  depuis 
1801  à  une  nouvelle  édition  de  son 
Guide  du  navigateur^àont  le  mérite 
et  l'utilité  reconnue  ont  assuré  le  suc- 
cès; mais  ses  diverses  occupations 
l'empêchèrent  d'y  mettre  la  dernière 
main  :  elle  doit  être  publiée  par  un  de 
ses  amis.  Il  a  laissé  presque  achevés, 
un  Traité  théorique  et  pratique  de  la 
constmction  et  de  l'usage  de  tous 
les  instniments  nautiques ,  qui  de- 
vait former  2  volumes,  et  un  Abrégé 
historique  de  l'origine  ct  des  pro- 
grès de  la  navigation,  en  i  volume. 
Il  avait  conçu  le  plan  et  rassemblé 
les  matériaux  d'un  Dictionnaire 
polyglotte  de  tous  les  termes  de 
marine}  il  préparait  aussi  un  Traité 
pratique  de  la  manœuvre,  auquel  il 
avait  joint  ce  qu'ofTre  de  plus  inté- 
ressant la  tactique  de  Mazzaredo  , 
de  Clarke  et  autres  auteurs  peu 
connus  en  France.  Enfin  il  a  laissé 
beaucoup  de  notes  pour  un  ouvrage 
sur  les  Marées ,  et  un  grand  travail 
sur  le  Jaugeage  des  vaisseaux  ,  de- 
mandé en  178(3  par  le  ministre  de 
la  marine.  LaJande,  dans  son  As- 
tronomie, t.  IV,  p.  761 ,  2®.  édil. , 
attribue  encore  à  Lé\eque,  un  Traité 


3-2 


LEV 


de  la  perspective ,  par  Fergusson  , 
trad.  de  l'anglais,  et  des  Opuscules 
nautiques,  que,  selon  lui ,  on  impri- 
mait en  i8o3.  Levêque  a 'ite' rem- 
))lacc  en  i8i5,  à  l'Institut,  par  M. 
Girard.  Son  éloge  a  été  lu  par  M. 
Pelambre ,  à  la  première  classe  de 
l'Institut  (  académie  des  sciences  ) , 
le  B  janvier  i8i5;  il  est  imprimé 
dans  le  volume  de  1 8 1 6  des  il/éf- 
moires  de  cette  classe  de  l'Institut  , 
publié  en  i8i 8.  A — t. 

LÉVESQUE  (Louise  Cavelier, 
dame  ),  née  à  Rouen ,  le  aS  novembre 
i-yoS  ,  fille  d'un. procureur  au  par- 
lement de  Normandie ,  reçut  une 
éducation  très-soignée,  et,  à  l'âge  de 
vingt  ans,  épousa  M.  Lévesque,  gen- 
darme de  la  garde  du  Roi.  Elle  vint 
«lors  habiter  Paris,  où  elle  ne  tarda 
pas  à  se  faire  remarquer  par  la 
vivacité  de  son  esprit  et  les  char- 
mes de  sa  figure.  Elle  préférait 
AUX  plaisirs  de  son  âge ,  la  société 
de  quelques  littérateurs  ,  et  con- 
sacrait tous  ses  loisirs  à  la  lec- 
ture ,  ou  à*  la  culture  de  la  poé- 
sie. Cette  dame  mourut  à  Paris , 
le  i8  mai  174^  ;  on  cite  d'elle  quel- 
ques ouvrages  qui  ne  lui  ont  pas 
survécu  :  I.  Lettres  et  chansons  de 
Céphise  et  d'un  ami,  Paris  ,  1731, 
in-8^.II.  Célénie^\o\nsin  allégorique, 
ibid.  1733,4  part. in- 112.  lll.  Minet, 
poème,  Paris  ,  1736  ,  in-isi.  IV,  le 
Siècle  ou  les  Mémoires  du  comte  de 
Solimille^  la  Haye  (Paris),  1736^ 
1741  ,  in-ia.  V.  Lilia  ,  histoire  de 
Carthage,  Amsterd.  (  Paris  ),  1736, 
in-1'2,  et  dans  le  tome  iv  des  Amu- 
sements du  cœur  et  de  V esprit. 
VI.  Sancho  Pansa,  gouverneur , 
]»oème  burlesque,  Amsterd.  1738, 
jn-8^.  VII.  Le  Prince  des  Aiguës 
marines  et  le  Prince  invisible,  contes, 
Paris  ,  1 744»  in- 12  ,  et  dans  le  tome 
xrjv  an  CaJunet  des  F  des.  VI  ïî» 


LEV 

U Augustin,  poème  sérieux  ;  et  plu- 
sieurs pièces  devers  dans  les  Amu- 
sements du  cœur  et  de  V esprit ,  re- 
cueil dont  PhilippedePrétot  est  l'édi- 
teur. Lorsque  le  recueil  des  poésies 
de  Louise  Cavelier  parut ,  en  1 737  , 
cette  dame  avait  déjà  donné  ,  une 
année  auparavant ,  Judith ,  opéra  en 
cinq  actes.  Il  n'a  jamais  été  joué, 
parce  que  la  faiblesse  du  style  et  les 
vices  (lu  plan  rebutèrent  tellement 
les  compositeurs,  qu'aucun  ne  voulut 
en  faille  la  musique.  Cette  disgrâce  ne 
put  convaincre  madame  Lévesque 
qu'elle  n'avait  pas  assez  de  force 
de  tête  pour  concevoir  le  plan 
d'un  ouvrage  dramatique.  Elle  essaya 
d'écrire  une  comédie  ,  qui  n'a  pas 
été  jouée,  mais  qu'on  a  fait  imprimeij 
en  1740,  sous  ce  titre  :  VAmoui 
fortuné.  C'est  une  pièce  à  tiroir 
composée  de  treize  scènes ,  sans  in- 
trigue et  sans  comique  ,  dans  les- 
quelles on  trouve  cependant  quelque;  j 
idées  ingénieuses.  M.  Mayer  lui  attri  | 
bue  une  comédie  intitulée,  Z'^(?ifr^Mj  j 
Auteur;  msiis  on  croit  que  cette  pièci 
n'a  point  été  imprimée.  (  Fojez\i\ 
Notice  sur  les  auteurs  des  Contes  dij 
Fées.)Titon  du  Tillet,àqui  elle  avaii 
adressé  quelques  compliments  su! 
ridée  de  son  Parnasse  français ,  \\\ 
a  consacré  un  article  dans  le  Sujrpl 
mefit.  Son  portrait  a  été  gravé 
Audran  le  fils.  W — s. 

LEVESQUE  (Pierre-CuarleI 
historien  et  traducteur,  naquit 
Paris,  en  1736.  Les  auteurs  de  se 
jours,  trompés  sur  ses  véritables  dis 
positions ,  lui  firent  apprendre  I 
dessin  et  la  gravure •  mais ,  à  lag 
de  douze  ans,  il  les  sollicita  ave; 
tant  d'instance,  qu'ils  consentirpn 
à  le  placer  dans  une  école  pou 
y  apprendre  le  latin  :  ses  progrc 
dans  cette  langue  furent  très-rapi} 
des  ,  et  il  Acheva  se»  études  au  col 


.lui 

il 


LEV 

Irgr  M.i7.nrin,  d'une  manière  bril- 
lante. L'n  revers  de  fortune  obli^ca 
ses  parents  de  quitter  Paris  ,   pour 
aller  sVtahlir  dans  une  des  provinces 
méridionales  de  la  France  ;  mais  il 
olitint  de  ne  pas  les  suivre  dans  cette 
espèce  d'e\il  commande  par  la  ne'- 
cessitc  ;  et  il  vécut  quelques  années 
du    produit  de  son  talent  dans  la 
gravure.  Au  milieu  de  ses  travaux  , 
Il  savait  se  ménager  les  loisirs  né- 
cessaires ]>our  continuer  ses  études 
et   perfectionner   ses   connaissances 
dans  les  arts.  Quoiqu'il  n'eût  pas  un 
goAt  décide  pour  les  doctrines  phi- 
losophiques, Levesque  ne  put  cepen- 
dant échapper  à  l'influence  de  la 
mode  ;  et  ses  premiers  ouvrages  lui 
concilièrent  l'estime  de  Diderot,  qui 
le  recominanda  si   puissamment  à 
l'impératrice  de  Russie  ,   qu'elle  le 
nomma,  en    1773,   professeur  de 
belles  -  lettres  à  l'e'cole  des  cadets 
I   nobles.  A  peine  arrive  à  Saint-Pe'- 
lersbourg  ,  Levesque  prit  la  résolu- 
tion d'écrire  l'histoire  de  l'empire 
des  Czars  :  il   consacra  ,  en  consé- 
'   quence  ,  tout  le  temps  que  lui  lais- 
'   saient  ses  fonctions  ,  à  apprendre  le 
'    russe  ,  et  l'ancien  dialecte  slavon  , 
dans  lequel  sont  écrites   toutes   les 
i    chroniques  nationales.  Muni  de  ces 
'    connaissances   qu'il   avait    acquises 
•   assez  promptement ,  il  commença  à 
débrouiller  les  documents  historiques 
mis  à  sa  disposition  ,  et  surmonta  , 
non  sans  peine,  toiis  les  dégoûts  d'un 
pareil  travail.  Après  sept  années  d'une 
élude  opiniâtre ,  il  eut  terminé  son 
ouvrage  ;  et ,  fermant    l'oreille   aux 
propositions  honorables   qu'on  lui 
faisait  pour  le  retenir  ,  il  revint  en 
France  ,  en  1780,   pressé  du  désir 
'    de  raetire  son  histoire   en  état  de 
'    paraître.  Tandis  qu'il  en  surveillait 
f    Timprcssion ,  il  fut  engagé  de  fournir 
(    quelques  morceaux  à  la  Collection 


LEV  373 

des  moralistes  anciens  (  foyez'^ki- 
Gi:opï  )  ;  et  ses  traductions  de  Xéno- 
phon  et  de  Plutarque  annoncèrent 
à  la  France  un  nouvel  helléniste,  ijv- 
pendant  le  succès  de  son  Histoire  de 
Russie  lui  ouvrit  les  portes  de  l'aca- 
dte'mic  des  inscriptions  ;  et  quelques 
années  après,  il  fut  nommé  profes- 
seur au  Collège  royal.  La  révolution  , 
qui  le  priva  ae  son  traitement  d'aca- 
démicien, nelui  ôta  pasdu  moins  une 
chaire  qu'il  remplissait  avec  autant 
de  zèle  que  d'exactitude.  Dans   les 
moments  d'orage  ,   les   lettres  qui 
avaient  occupé  sa  vie,  deviurenl  sa 
consolation  •  et  ce  fut  pour  se  dis- 
traire du  spectacle  des  calamités  pu- 
bliques, qu'il  entreprit  la  traduction 
de  Thucydide,  l'un  de  ses  premiers 
titres  à  l'estime  de  la  postérité.  Dé- 
signé l'un  des  membres  de  l'Institut 
en  1795  ,  il  se  montra  fort  assidu  à 
ses  séances  où  il  lut  un  grand  nombre 
de  mémoires.  Ce  fut  au  milieu  de  ces 
douces  occupations  qui  partageaient 
son  temps  avec  l'éducation  ae  son 
petit-lils  ,  qu'il  parvint  au  terme  de 
sa  carrière.  Levesque  mourut  à  Paris, 
le  \'i  mai    181 '2.  Son   Eloge  a  été 
prononcé  à  l'Institut  ,  par  M.  Da- 
cier.  On  peut  diviser  ses  ouvrages  en 
trois  classes  :  morale  ,   traductions 
et  histoire  ;  et  c'est  dans  cet  ordre 
qu'on  les  indiquera  successivement. 
Morale  :  1.  Les  Rêves  d'Aristobule^ 
phi'osophe  grec  ,  suivis  d'un  abrégé 
de  la  vie  de  Formo.se  ,  philosophe 
français  ,  Paris  ,  1761  ,  iu-r.>.  ;  Ir.»- 
duils  en  italien  ,   par  la   comtesse 
Guillelmiue  d' Anhalt ,  B<*rlin  ,  1 768. 
On  y  reconnaît ,  dit  M.  Dacier  ,  mi 
homme  nourri  des  préceptes  des  an- 
ciens philosophes  et  de  leurs  théories. 
La  solidité  des  pensées  et  la  facilité 
du  style  tirent  distinguer  cet  ouvrage 
de  la  foule  des  productions  littérai- 
res qui  papureut  à  la  même  époque. 


374  Lf^V 

11.  If  Homme  moral ,  ou  l'Homme 
considéré  tant  dans  l'ëlat  de  pure 
nature  que  dans  la  société  ,  Ams- 
terdam ,  177.5  ,  in- 12  ;  quatrième 
édition  corrigée ,  Paris,  1 784 ,  in- 1  2  ; 
traduit  en  allemand,  Nuremberg  , 
1776,  in-8**.  îll.  L'Homme  pensant^ 
ou  Essai  sur  l'histoire  de  l'esprit 
Jiumain  ,  Amsterdam  ,  1779,  in-12. 
J  V.  Considérations  sur  i  homme  , 
observé  dans  la  vie  sauvage,  dans  la 
vie  pastorale  et  dans  la  vie  policée; — 
Considérations  sur  les  obstacles  que 
les  anciens  philosophes  ont  apportés 
aux  progrès  de  la  saine  philosophie^ 
— Sur  quelques  acceptions  du  mot 
Nature:  dans  le  tom.  i^"".  des  Mé- 
moires de  l'Institut  ,  classe  des 
sciences  morales.  Traductions  :  I. 
Choix  de  poésies  de  Pétrarque,  tra- 
duit de  l'italien.  Levesque  n'avait 
guère  que  vingt-cinq  ans  ,  lorsqu'il 
publia  cette  traduction  qui  a  été  réim- 
})rimée  plusieurs  fois,  mais  qui  n'est 
guère  supportable  poiu'  quiconque 
peut  lire  l'original.  L'auteur  en  a 
donné  une  nouvelle  édition  en  fran- 
çais et  en  italien, Paris,  1787, 1  vol. 
in- 18.  IL  Les  Pensées  morales 
de  Gonfucius  et  des  auteurs  chi- 
nois, traduites  du  latin,  d'après  la 
paraphrase  des  pères  jésuites  (  Fojez 
Gonfucius)  ;  —  les  Entretiens  mé- 
vwrables  deSocrate,  traduits  du  grec 
de  Xénophon  ;  —  les  Caractères  de 
Théophraste  j  —  les  Pensées  mo- 
rales de  Menandre  ; — les  Sentences 
de  Theognjs  ,  de  PJiocylide  ,  de  Py- 
thagore  et  des  sages  de  la  Grèce  ^  — 
les  Pensées  morales  extraites  des 
ouvrages  de  Cicéron  ;  —  les  ^ipo- 
phfdgmes  des  Lacédémoniens  ; — les 
l'ensées  morales  de  Plularque  j — les 
Vies  et  les  Apophtegmes  des  philo- 
sophes grecs.  Ges  différents  ouvrages 
font  partie  de  la  Collection  des  an^ 
i;iens  moralistes.  \\\.  L'Histoire  de 


! 


LEV 

Thucydide ,  traduite  du  grec,  Paris, 
1 795 — 97  ,  4  vol.  in-8*\  ou  iu-4^ 
c'est  la  seule  traduction  de  cet  hist 
rien,  qui  ait  été  distinguée  parle  ju 
institué  pour  les  prix  décennaux":  el 
est  écrite  avec  facilité  et  élégance 
les  notes  qui  l'accompagnent  so 
d'un  excellent  choix  j  maisM.Daci 
la  juge  moins  exacte  que  celle  de  IV! 
(iail ,  qui  convient  au  surplus  que 
travail  de  Levesque  lui  a  été  fort  util 
— Histoire  :  I. Histoire  de  Russie} 
tirée  des  chroniques  originales  et  des 
meilleurs  historiens  de  la  nation  j 
suivie  de  V Histoire  des  différente 
peuples  soumis  à  la  domination  des 
Russes  j  Yverdun  ,  1 782-88  , 8  vol, 
in-  12.  —  Nouvelle  édition  cor- 
rigée ,  et  conduite  jusqu'à  la  fin  de 
Gatherine  II  ,  Hambourg  et  Paris  , 
1800  ,  8  vol.  in-8^.  —  Quatrième 
édition  continuée  jusqu'à  la  mort  de 
Paul  \^^. ,  et  publiée  avec  des  notes 
parMM.MalteBrunetDepping,Paris, 
1812  ,  8  vol.  in-8^. ,  et  atlas  de  60 
pi.  La  composition  de  cette  histoire, 
dit  M.  Dacier  ,  est  sage  et  savante  ; 
le  style  en  est  facile  et  naturel  ;  les 
faits  y  sont  bien  enchaînés  et  racontés 
avec  tant  d'exactitude,  que  l'ouvrage 
est  resté  classique  en  Russie.  IL  La 
France  sous  les  cinq  premiers  Va-> 
lois,  ou  Histoire  de  France  ,  depuis 
la  mort  de  Philippe  de  Valois  jus" 
qu'à  celle  de  Gharles  VII  ,  Paris , 
1787 ,  4  V0^«  in-i'^  :  on  y  remarqua, 
dit  le  même  critique  ,  une  touche 
plus  ferme,  un  pinceau  plus  brillant, 
et  une  ordonnance  plus  régulière  que 
dans  l'histoire  de  Piussie  ;  et  elle  n'est 
pas  moins  recommandable  que  celle- 
ci  par  l'exactitude  et  la  solidité  des 
recherches.  III.  1/ Histoire  critique 
de  la  République  liomaine  ,  Paris  , 
1807  ,  3  vol.  in-8«.  :  c'est  ,  comme 
l'indique  le  titre  ,  un  examen  des  his- 
toriens latins;  mais  eu  signalant  les 


erreurs  dans  lesquelles  ils  sont  tom- 
bes, on  trouvcqncLevesque  est  tombe' 
lui-même  dans  une  espèce  de  sccpti- 
inc  bistorique,  non  moins  ennemi 
1.1  veritc  qu'une  confiance  trop 
aveugU\  On  savait  déjà  tout  ce  qu'il 
repète  de  l'incertitude  des  premiers 
siècles  de  Rome  ;  mais  personne  avant 
lui  n'avait  ose  révoquer  en  doute  la 
vertu  ,  le  courage  et  les  autres  qua- 
lités qui  font  des  Romains  un  peuple 
à  part.  IV.  Etudes  de  Vhistoire  an- 
cienne  et  de  l'h  stoire  de  la  Grèce, 
Paris ,  1 8 1 1 ,  5  vol.  in-8°.  ;  c'est  un 
tableau  moins  brillant  que  fidèle  des 
mœurs  des  anciens  peuples  ,  de  leurs 
usages  ,  de  leurs  institutions  et  de 
leurs  arts.  On  doit  regarder  cet  ou- 
vrage comme  une  bonne  introduction 
à  l'étude  de  l'histoire.  On  a  encore 
de  Levesque  :  Un  Eloge  de  Vahbé 
Mably ,  qui  partagea  le  prix  extraor- 
dinaire proposé  par  l'académie  des 
inscriptions  (  F.  Brizard  et  Mably  ), 
Paris  ,  1 787  ,  in  -  8". ,  et  qui  a  été 
réimprimé  par  M.  Bérenger  à  la  tête 
de  V  Esprit  de  Mablj  et  de  Con- 
dillac ,  relativement  à  la  morale  et 
à  la  politique  ,  Grenoble  (  Paris) , 
1789,  2  vol.  in-8°.  —  La  Continua- 
tion du  Dictionnaire  des  arts  de 
|>einture  ,  sculpture  et  gravure  ,  par 
Walelet(  ^o/ez  Watelet  ).  — Des 
Extraits  dans  le  Journal  des  Sa- 
vants.— U  Eloge  de  Lcgrand  d'Aus- 
sy,  et  différents  Mémoires  dans  le 
recueil  de  l'Institut. — Des  Analjses 
dans  les  Notices  des  manuscrits  de 
U  bibliothèque  du  Roi.  Enfin  ,  Le- 
vesque était  un  des  collaborateurs  de 
la  Biographie  universelle  ^  et  il  y  a 
fourni  l'arlicle  de  Catherine  V^. , 
impératrice  de  Russie ,  et  quelques 
Autres.  W-s. 

f  EVESQUE  DE  BURIGNYCJ.) 
yez  BuRiGWY. 


LEV  37  j 

LEVESQUE  DE  LA  RAVA- 
LIÈRE  (  PiKRRK  Alfxandre  )  (i)  , 
savant  littérateur,  naquit  à  Troyes  , 
le  6  janvier  1097.  Destiné  à  rem- 
placer son  père  ,  greflier  en  chef  do 
l'élection  de  cette  ville,  il  alla  faire 
soncoursdedroit  à  Orléans.  De  retour 
dans  ses  foyers ,  en  1 7'2(i,  il  ne  tarda 
pas  à  éprouver  de  la  répugnance 
pour  le  tiavail  du  grc(Té.  Une  passion 
naissante  et  dont  les  suites  pouvaient 
troubler  la  trancpiillité  de  sa  vie , 
acheva  de  le  déterminer  à  s'établira 
Paris ,  où  il  espérait  trouver  plus  de 
motifs  d'émulation ,  et  plus  de  se- 
cours pour  s'instruire.  Il  se  montra 
d'abord  fort  assidu  aux  spectacles  ; 
et  il  publia  un  Essai  sur  la  Poésie 
dramatique ,  qu'il  critiqua  lui-même 
dans  le  Mercure  (2) ,  irrité  du  silence 
que  les  journalistes  gardaient  sur 
cette  production.  Mais  il  renonça, 
bientôt  aux  succès  de  société  ,  pour 
s'appliquer  entièrement  à  l'étude  de 
l'histoire.  Ses  premiers  travaux  eu 
ce  genre  lui  méritèrent  l'estime  des 
savants  ;  et  l'académie  des  inscrip- 
tions lui  ouvrit  ses  portes  en  1743. 
Il  lut ,  dans  les  séances  de  cette  rom- 
pagnip,  un  grand  nombre  de  Mé- 
moires qui  ajoutèrent  encore  à  l'opi- 
nion qu'il  avait  déjà  donnée  de  son 
érudition.  Un  tempérameui  robuste 
semblait  lui  promettre  une  vieilles.se 
exempte  d'infirmités ,  lorsqu'il  fut 
enlevé  par  un  rhume  négligé  ,  le  4 
février  1 762.  II  avait  épousé  la  fille 
d'un  conseiller  au  parlement  de  Metz; 
et  c'est  d'un  fief  qu'elle  lui  apporta  en 
mariage ,  qu'il  prit  le  surnom  de 
La  Havalière.  II  était  doué  des 
qualités  les  plus  estimables  ;  et  il  eut 


(i)  Oft  par  erreor  qii'U  est  nommé  J.ou'n 
Alexandre,  Jant  le  lyirjionnaire  unipersel. 

(ï)  Du  rooit  lie  mai  173».  h^ Essai  df  eompo' 
raison  mire  la  drc/nmaiion  rt  ta  poési*  dru- 
matiçu»  ,  avait  été  impiim* ,  Tari*,  i'^';] 
ia-is  I  d«  Sa  pages. 


376  LEV 

heaucoiip  d'amis ,  parmi  lesquels  on 
doit  citer  LebeufjLancelot,  Sainte- 
Palaye,  Bouhier  ,  d'Olivet,  Fonce- 
magiie,  etc.  Levesqiieest  particuliè- 
rement connu  par  l'excellente  édition 
qu'il  a  donnée  des  Poésies  du  roi 
de  Naif.irre  (  Thibault  ,  comte  de 
Champagne),  Paris,  174^5  21  vol. 
in- 1 2.  L'examen  de  ces  poésies  ap- 
J)artient  à  l'art.  Ïhicaulï  ;  mais  on 
doit  faire  connaître  les  pièces  vrai- 
ment intéressantes  dont  le  savant  édi- 
teur les  a  accompagnées:  I.  Lettre 
dans  laquelle  on  examine  s'il  est  vrai 
que  Thibault  ait  composé  ses  chan- 
sons pour  la  reine  Blanche,  mère  de 
St.-Louis.  Letesque  y  démontre  que 
les  éloges  donnés  par  Thibault  à  sa 
clame  ne  peuvent  convenir  à  Blan- 
che ,  plus  âgée  que  lui  de  quinze  ans  ; 
et  que  toutes  les  conjectures  prouvent 
que  cette  dame  inconnue  était  la  fille 
de  Perron  ou  Pierre,  chambellan  de 
wSaint-Louis.  11  réfute  aussi  la  fable 
des  amours  de  Blanche  et  de  Thi- 
bault, dont  l'inventeur  paraît  être 
Mathieu  Paris  ,  grand  ennemi  de  la 
maison  de  France.  Le  père  Lepelle- 
ticr ,  chanoine  régulier  de  la  congré- 
gation de  Sainte -Geneviève ,  com- 
battit l'opinion  de  Levesque  par  deux 
lettres  qu'il  réunit  à  la  sienne  avec 
l's  réponses.  IL  Précis  des  ré\>olu- 
tions  delà  languefrancaise ,  depuis 
Charlemagne  jusqu'à  Saint -Louis. 
Cette  dissertation  donna  lieu  à  de 
longues  controverses  entre  La  Rava- 
Hère  et  les  Bénédictins,  auteurs  de 
V Histoire  littéraire  de  France.  Il 
cherche  à  y  établir  que,  sousCharle- 
magne  on  parlait,  en  France,  unelan- 
gue  différente  du  latin  et  que  les  au- 
teurs contemporains  nomment  Jmn- 
coise, francisque  ou  romance  rusti- 
t]ue.  Charlemagne  ayant  donné  la  pré- 
férence a  u  latin ,  la  langue  vulgaire  fut 
prcsqu'entièremeat  anéantie  ^  et  ne 


LEV 


f 


reparut  que  sous  les  règnes  deHugues- 
Capet  et  de  Robert ,  mais  tellement 
changée,  dit-il, qu'on  a  peineà  recon- 
naître son  origine.  Celte  deuxième 
langue  ,  qu'il    regarde    comme  la 
mère  de  celle  que  nous  parlons  ,  a 
été  employée  par  quelques  auteurs 
dès  le  règne  de  Louis  VII  ;  cependant 
elle  n'a  été  d'un  usage  presque  général 
que  sous  saint  Louis.    Amené  natu- 
rellement à  parler  de  l'origine  de  lai 
poésie  ,   Levesque    reconnaît ,  avec  j 
Fauchet ,  que  le  premier  poème  écril 
en  langue  romance  est  le  livre  des \ 
Bretons,    composé  en    1 155 
Wistace  ou   Euslache ,  auquel  suc 
céda  Wasse  ou  Gace,  auteur  du  Rc 
des  Normands.  Il  en  tire  la  con* 
quence  que  la  poésie  fut  cultivée  ei 
Normandie  avant  de  l'être  en  France 
où  elle  ne  commença  à  briller  d'uu 
certain  éclat  que  sous  Philippe-Au- 
guste. III.  Discours  surf  ancienneté 
de  la  chanson  française  :  il  y  prouve 
que  le  genre  de  la  chanson  était  cul- 
tivé en  France  «  avant  qu'on  ait  eu 
»  commerce  avec  les  poètes  proven- 
"î>  çaux  ;  qu'ainsi  la  rime  ni  les  chan- 
»  sons  ne  leur  doivent  point  leur 
p  établissement   parmi   nous  j  que 
w  nous  leur  sommes  seulement  rede- 
»  vables  de  nous  avoir  montré  une 
»  forme  de  chansons  ,  plus  agréable 
»  et  plus  régulière  que  celle  des  lais  » 
(  pag.  218  ).  Mais  il  ne  croit  cepen- 
dant pas  que  les  chansons  en  langue 
française  soient  aussi  anciennes  qu'on 
se  l'était  persuadé.  Il  estime  que  «  les 
»  premières  qu'on  entendit  à  Paris  y 
»  parurent,  au  plutôt ,  vers  lecom- 
1)  mencement  du  règne  de  Philippe- 
«  Auguste  »  (  p.  2'23  ).  Il  donne  en- 
suite quelques  détails  sur  les  instru- 
ments de  musique  avec  lesquels  s'ac- 
compagnaient alors  les  poètes  ,  tels 
que  la  harpe  ,  le  violon  ,  la  gui  • 
Ui  e ,  etc.  Levesque  a  fait  suivre  les 


LEV 

li.iiisoiKs  du  roitlc  Navarre,  do  notes 
N(*i  étendues  ,  d'un  {glossaire  pour 
(itellip;en(c  des  mots  les  plus  aiffi- 
it's,  et  rnlin  de  quelques  airs  notés 
pour  faire  connaître  l'clat  de  noire 
musique  dans  le  \iii^-.  siècle.  Ou 
citera  encore  de  lui  :  I.  Doute  pro- 
posé sur  les  auteurs  des  Annales  de 
St.  J5erf m ,  Paris  ,  lySO,  in-12;  et 
dans  le  Mercure  du  mois  de  dé- 
cembre, même  année.  L'abbc  Le- 
beuf  en  a  porte  un  jugement  avanta- 
geux. II.  Remarques  sur  la  langue 
'vulgaire  de  la  Gaule,  depuis  J. 
César  jusqu'à  Philippe  •  Auguste, 
(Mém.  de  l'Acad.  des  Inscriptions, 
tom.  XXIII.)  Il  y  établit  que  le  lan- 
gage celtique  des  Gaulois  s'est  con- 
serve jusqu'à  nous  ;  que  le  français 
i'.i  rien  emprunté  du  latin  ;  et  que 
il  existe  quelques  rapports  entre  les 
deux  langues  ,  c'est  que  les  Romains 
ont  enrichi  la  leur  d'une  foule  de 
mots  dérobés  au  celtique.  Ce  système 
fut  viAcment  attaqué  par  plusieurs 
des  confrères  de  Levesque:  mais  rien 
ne  put  le  lui  faire  abandonner;  et  il 
conserve  encore  quelques  partisans. 
Maisles  Iravauxdc  M.  Rayiiouard  ont 
!(•  un  bien  plus  grand  jour  sur  l'ori- 
gine de  notre  lan";ue  cl  de  notre  poé- 
sie, ill.  La  Fie  de  saint  Grégoire  de 
Tours  ;  celle  du  sire  de  Joinville;  — 
d'Etienne, comte  de  Sancerrc; —  des 
Pithou;  et  un  grand  nombre  de  Mé- 
moires dans  les  Recueils  de  l'acadé- 
mie ou  dans  les  journaux.  Levesque  .1 
publié,  avec  une  préface,  V Histoire 
des  comtes  de  Champatçieet  de  Brie^ 
parRob.  Mart.  Lepelletier,chanoiue 
.,'ulier.  Enfin  il  a  laissé  lui-même, 
Il  manuscrit,  une  Histoire  des  corn- 
v  de  Champagne, qui  pourrait  for- 
iacr  3  vol.  in-4".  U Eloge  de  Leves- 
que, par  Le  Beau, est  imprimé  dans  le 
^oine  XXXI  des  Mémoires  de  VAcad. 


inscriptions. 


W-«. 


LEV  377 

LEVESQUE  DE  POUILLY 

(Loi'is-.TEAN),néà  Reims,en  1691  , 
d'une  famille  dont  l'origine  est  com- 
mune avec  celle  de  Colbcrt,  fit  ses 
premières  études  à  l'université  de 
cette  ville,  et  cJit  j)Oiir  condisciple 
l'abbé  Plucbe,  qui  resta  son  ami.  Le 
dcsir  d'étendre  le  cercle  de  sescon 
naissances  le  conduisit  à  Paris  ,  où 
il  étudia  la  philosophie  et  les  bellcs- 
leltres.  Newton  venait  de  publier  son 
immortel  ouvrage  des  Princiies  de 
la  philosophie  naturelle  (  Foyez 
Jacquier,  t.  XXI,  p.  573);  et  per- 
sonne en  France  n'avait  encore  es- 
sayé d'éclaircir  les  dillicullés  dont 
cet  admirable  génie  semblait  avoir 
voulu  s'entourer  comme  pour  déro  - 
bcr  sa  marche  au  vulgaire.  Ce  fut 
Levesque  ,  âgé  de  vingt-deux  ans , 
qui  entreprit  le  premier  d'expliquer 
ce  livre;  et  ses  elTorts  lui  méritèrent 
l'estime  du  savant  Fréret.Mais  l'excès 
du  travail  altéra  sa  santé,  et  les  mé- 
decins l'envoyèrent  se  rétablir  dans 
sa  famille.  Il  revint  l'année  suivante 
à  Paris;  il  renonça  cejiendant  a  l'é- 
tude des  mathématiques  pour  s'ap- 
pliquer entièrement  à  la  littérature. 
L'académie  des  inscriptions  lui  ou  - 
vrit  ses  portes  en  1 7'22  ,el  il  fut  très- 
assidu  à  ses  séances ,  où  il  lut  diflfé 
rents  mémoires  (  i  ).  Il  éprouva  bien- 
tôlde  nouveaux  accidents  occasionnés 
par  une  apj)lication  trop  soutenue , 
et  les  médecins  lui  conseillèrent  de 
voyager.  Après  avoir  parcouru  les 
provinces  méri  lionales  de  la  France, 
il  passa  en  Angleterre,  où  il  reçut  un 
accueil  distinguédc  lord  Bolingbrokc, 
qu'il  avait  connu  à  Paris.  Newton, à 
qui  il  tut  présenté,  lui  donna  dès  la 
première  visite  le  nom  de  son  ami  ; 

(1)  On  n«  trotife  point  l'élA^a  Je  L«Tiqii«  il« 
PoitiUj,Ji«n(lM  R«cii«Ud«  l'ncatltrniie  Je*  iii«cri|>- 
tiurit,  parce  qu'il  c«t«a  Je  fair-  pi«Tti«  au  c«tl« 
•cAilémi*  «n  t-97,  •irsa  dtclar*tioa  qui!  «tui 


:\ny. 


LEV 


et  il  n'eut  pas  moins  à  se  louer  des 
plus  illustres  Anglais.  Apres  un  an 
d'absence,  il  revint  dans  sa  patrie, 
re'solu  de  passer  le  reste  de  ses  jours 
dans  une  maison  de  campagne  qu'il 
possédait  près  de  Reims,  et  où  il  se 
proposaitde partager  ses  loisirs  entre 
la  lecture  et  les  soins  qu'il  devait 
à  sa   famille  :  mais  le  vœu   ge'ne'ral 
de  ses  concitoyens   vint  l'arracher 
de   sa  retraite  j   il    fut   eiu  lieute- 
nant-ge'ne'ral  de  Reims.  Aide   d'un 
respectab'e  citoyen,  le  chanoine  Go- 
dinot,  il  procura  à  cette  ville,  des 
fontaines  publiques,  et  des  écoles  spé- 
ciales pour  l'enseignement  des  ma- 
thématiques  et    du  dessin.  (  Foj-, 
André  Ferry  ,  et  Jean  Godinot.  )  Il 
établit  une  promenade,  l'une   des 
plus  belles  du  royaume;  et  il  médi- 
tait encore  d'autres  projets  non  moins 
utiles,  lorsqu'il  fut  enlevé  à  sa  patrie, 
le  4  mars  1760,  par  une  fièvre  vio- 
lente, suite  d'une   travail  excessif* 
laissant  un  fils  très-jeune  et  qui  a 
marché  depuis  sur  ses  traces.  Leves- 
que  était  en  correspondance  avec  un 
grand  nombre  de  savants,  le  P.  Har- 
douin  ,  Longuerue  ,  d'Olivet ,  Fon- 
leneile.  Voltaire,  etc.  Bolingbrokc 
lui  écrivait  :  a  Je  n'ai  encore  vu  que 
trois  hommes  qui  m'aient  paru  di- 
gnes qu'on  leur  confiât  le  gouverne- 
ment des  nations...  Ces  trois  hommes 
sont  vous ,  Pope  et  moi.  »  Comme 
littérateur,  Levesque  de  Pouilly  est 
principalement  connu  par  sa  Théorie 
des  sentiments  agréables.  Cet  ou- 
vrage n'était  dans  l'origine  qu'une 
lettre  à  milord  Bolingbroke ,  qui  fut 
imprimée  dans  un  Becueil  de  divers 
écrits  sur  l'Amour  et  l'Amitié,  etc. , 
Paris,  1736,  in- 12.  (  Fbjr ^5  Saint- 
Hyacinthe.  )  Gauffecourt,  qui  avait 
à  Montbrillant,  dans  sa  maison  de 
campagne  près  de  Genève,  une  im- 
primerie doiîl  il  faisait  son  amuse- 


LEV 

ment  ,  en  donna  une  assez  belle 
édition,  en  174^,  in-8°. ,  sous  ce 
titre  ;  Béjlexions  sur  les  sentiments 
agréables,  et  sur  le  plaisir  attaché 
à  la  vertu  (  1  ).  Levesque,  pressé  par 
ses  amis,  revit  enfin  son  livre,  y 
fit  de  nombreuses  additions,  et  le 
publia  sous  le  titre  qu'il  a  conservé 
depuis,  Genève,  1747,  in-8*'. ;  il  en 
donna  une  seconde  édition,  Paris, 
1748,  et  une  troisième  ,  revue  et 
augmentée,  ibid.  ,  i749,in-8°.  Le 
dessein  de  Levesque  est  de  prouver 
que  le  bonheur  est  dans  ia  pratique 
des  devoirs.  On  a  encore  de  lui  :  L 
Deux  Discours ,  prononcés  pendant 
l'exercice  de  sa  magistrature;  le  pre- 
mier à  l'inauguration  des  écoles  pu- 
bliques, et  le  second  aux  obsèques 
du  chanoine  Godinot.  IL  Descrip- 
tion d'un  monument  découvert  à 
Reims,  en  1788,  avec  deux  planch. 
Ces  trois  pièces  ont  été  réimprimées 
à  la  suite  de  la  Théorie  des  senti- 
ments agréables ,  édition  de  1 774  > 
in-8^. ,  en  tête  de  laquelle  on  trouve 
V Eloge  historique  de  l'auteur,  par 
le  chanoine  De  Saulx,  pièce  qui 
avait  déjà  paru,  in-4°.  ,  Reims, 
17.51.  Il  légua  à  son  frère, Levesque 
de  Burigny,  plusieurs  volumes  in- 
fol. ,  de  notes  et  d'extraits  de  ses  lec- 
tures. W — s. 

LEVI,  patriarche,  troisième  fils 
de  Jacob  et  de  Lia,  naquit  en  Méso- 
potamie, l'an  1748  avant  J.  C.  Pen- 
dant que  les  habitants  de  Sichem, 
trop  confiants  sur  la  foi  d'un  traité, 
étaient  le  plus  accablés  de  douleur  par 
suite  de  la  circoncision  à  laquelle  ils 
s'étaient  soumis ,  Levi,  d'accord  avec 
Siméon,  entra  hardiment  dans  la 
ville ,  l'épée  à  la  main ,  tua  tous  les 
mâles,  massacra  Hémor  et  son  père 


(1)  Tout  les  exemplaires  de  cette  édition  fureut 
distribués  en  présent,  et  il  est  très-rare  d'clî 
voir  passer  daii»  les  ventes. 


Sifhcm  ,  délivra  Dina  ,  sa  sœur ,  et 
donna  le  signal  de  la  dévastation  et 
du  pillage.  Jacob  mourant  reproelia 
ret  abomina  Me  massacre  à  Levi  ,  et 
)ui  prédit  qu'en  punition  de  sa  cruau- 
té, ses  descendants  n'auraient  point 
^c  partage  fixe,  et  seraient  disperses 
dans  Israël.  I^t  j)rëdiclion  de  Jacob 
«'accomplit  ;  et  les  lévites  n'eurent 
point  d'autre  lot  que  des  villes  au 
milieu  des  tribus.  Quand  Levi  alla 
en  Egypte  avec  ses  frères ,  pour  ha- 
biter la  terre  de  Gessen,  il  avait  de'jà 
ses  trois  fils,  Gerson,  Caath  et  Me- 
rari,  dont  le  second  fut  l'aïeul  de 
Moise.  Il  y  mourut,  l'an  i6i2avant 
J.C.  Dans  le  testament  qui  porte  son 
nom,  Levi  cherche  à  excuser  le 
meurtre  desSichemites,  par  son  ex- 
trême jeunesse,  par  l'horreur  que 
lui  inspirait  le  rapt  de  Dina,  et  par 
des  visions  chimc'riques.  Il  prophé- 
tise que  le  Messie  naîtra  de  lui  et  de 
Juda ,  et  que  les  prêtres ,  ses  descen- 
dants, le  feront  mettre  à  mort.  Le 
scandale  du  sanctuaire  y  est  montre' 
dans  toutes  ses  horreurs.  Le  sacer- 
doce de  Jesus-Christ  y  est  représente' 
avec  tous  ses  attributs.  Ce  morceau 
est  fort  beau.  L-b-e. 

LEVI  BEN  GERSON.  Fqy.  Ger- 
•ON,  tom.  XVII,  pag.  223,  col.  i. 

LEVIEIL  (Pierre)  naquit  à  Pa^ 
ris, en  l'y 08.  Son  père, nommé  Guil- 
laume, habile  peintre  sur  verre,  était 
Bé  à  Rouen,  d'une  famille  qui  de- 
puis plus  de  deux  siècles  s'était  dis^ 
tinguée  dans  la  peinture  sur  verre. 
Il  vint  à  Paris,  où  Jouvenet,  sou 
compatriote,  le  présenta  à  Mansard, 
qui  lui  confia  la  peinture  des  frises 
des  vitraux  de  la  Chapelle  de  Ver-r 
sailles  et  du  dôme  des  Invalides.  Le 
jeune  artiste  épousa,  en  i^oi,  Hen- 
,  rjette  Favier ,  fille  d'un  hatile  vi- 
trier, de  laquelle  il  eut  onze  enfants, 
4pQt  l'aîné,  Pierre,  fait  l'objet  de 


LEV  3,9 

cet  article.  Celui-ci  annonça  de  bonne 
heure  d'heureuses  dispositions  pour 
les  lettres:  au  sortir  du  collège  de  U 
Marche,  où  il  avait  fait  de  brillan- 
tes études,  il  se  rendit  à  l'abbaye  de 
Saint- Vaiidrille,  où  il  voulait  pren- 
dre l'habit  de  Saint-Benoit;  mais  le 
besoin  de  veiller  à  l'éducation  de  ses 
frères,  et  de  remplacer  son  pire  et 
sa  mère,  que  l'âge  et  les  infirmités 
empêchaient  de  se  livrera  cessoins , 
le  détourna  de  son  projet;  et  il 
revint  à  Paris,  où  il  se  mit  à  la  tête 
des  ateliers  que  dirigeait  son  père.  Il 
n'avait  point  appris  le  dessin  ;  aus- 
si n'a-t-il  jamais  peint  sur  verre  : 
mais  les  conseils  de  son  père,  et  l'ha- 
bitude de  voir  peindre  Jean  Levieil, 
un  de  ses  plus  jeunes  frères, lui  don- 
nèrent une  connaissance  aprofoiidie 
de  ce  genre  de  peinture.  C'était  lui 
qui  avait  le  soin  de  préparer  et  de 
calciner  les  émaux  pour  les  couleurs. 
En  1734,  il  fut  chargé  de  rétablir 
les  vitrages  du  charnier  de  Saiut- 
Etienne-du-Mont  ;  il  exécuta  ces  tra- 
vaux avec  autant  d'habileté  que  de 
goût.  Il  restaura ,  quelques  années 
après,  les  vitraux  de  l'église  de 
Notre-Dame;  et  l'on  a  long-temps 
admiré  la  manière  dont  il  avait 
refait  le  rond  du  haut  du  principal 
vitrail  du  sanctuaire.  Il  montra 
le  même  talent  dans  l'église  de 
Saint-Victor.  Non  content  d'avoir 
maintenu  l'art  de  la  peinture  sur 
verre  par  ses  travaux  ,  il  voulut  en 
prouver  l'excellence  par  ses  écrits. 
Jusque-là  on  n'avait  que  des  notions 
incertaines  sur  les  procédéj»  em- 
ployés dans  ce  genre;  on  le  croyait 
même  perdu.  On  n'avait  que  quelques 
notions  éparses  sur  la  manière  de 
composer  les  couleurs  et  de  les  em- 
plo\cr,  et  sur  la  recuisson  du  verrt 
p<iut.  Levieil  résolut  d'aprofondir 
toutes  ces  parties  de  Tari,  et4l«  rcuuir 


38o  LEV 

dans  un  traite  riiistoire  et  la  prati- 
que de  la  peinture  sur  verre.  Il  em- 
ploya quinze  anne'es  entières  à  ras- 
sembler  les   matériaux  nécessaires 
pour  la  composition  de  son  ouvrage. 
Il  crut  voir  dans  la  mosaïque,  l'ori- 
gine de  la  peinture  sur  verre  ;  et  il 
développa  ses  idées  dans  un  traité 
particulier  qu'il  publia  sous  le  litre 
d'Essai  sur  la  peinture  en  mosaïque, 
Paris,  17O8,  in- 12.    Ce  traité   est 
suivi    d'une   savante    Dissertation 
sur   la  pierre    spéculaire  des  an- 
ciens. Ayant  terminé,  en  177*^;,  son 
grand  traité,  et  se  sentant  proche 
de  sa  fin ,  il  l'adressa  à  l'académie 
des   sciences,   pour  qu'il   fût   im- 
primé à  la  suite  des  Descriptions 
des  Arts  et  Métiers ,  que  cette  com- 
pagnie avait  commencé  à  meltre  au 
jour.  L'académie  s'empressa  d'ac- 
cueillir cette  demande  ;  et  l'ouvrage 
de  Levieil  fait  partie  du  tome  xi  de 
l'édition  in-4^.  de  ce  recueil ,  impri- 
mée à  Y  Verdun.  Cet  ouvrage  est  in- 
titulé: Traité  historique  et  pratique 
de  la  peinture  sur  verre.  Il  est  dis- 
tribué en  deux  parties.  Dans  la  pre- 
mière ,  l'auteur  n'oublie  rien  de  ce 
qui  est  essentiel  ou  même  accessoire 
à  l'histoire  de  l'art.  Dans  la  seconde, 
il  présente  les  procédés  et  les  détails 
les  plus  circonstanciés  de  la  pratique, 
tels  que  la  cuisson  du  verre,  la  pré- 
paration des  émaux,  et  leur  emploi 
dans  les  couleurs.  Ce  traité  est  suivi 
d'une  troisième   partie  ,  intitulée  : 
\Art  du  Fitrier.    C'est   un    livre 
absolument  technique  ,  et  qui  con- 
tient la  description  de  tous  les  pro- 
cédés usités  par  les  vitriers.  Quel- 
ques recherches  que  la  composition 
de  ces  divers  ouvrages  exigeât  de 
Levieil,  elles  n'avaient  pu  le  détour- 
ner delà  culture  des  lettres.  Il  com- 
posa ,  pour  les  Ursulines  de  Crespi  , 
eu  deux  de  ses  nièces  e'taient  pen- 


LEV 

sionnaires,  une  tragédie  en  trois  ac- 
tes et  en  prose,  dont  le  sujet  était  le 
Martyre  de  Saint-Romain ,  et  qui 
f'it  représentée  avec  succès.  Enfin  J 
Levieil  a  laissé  en  manuscrit  :  1.  Urt^ 
Essai  sur  la  peinture  ,  divisé  en 
deux  parties.  La  première  traite  de 
l'histoire  et  des  révolutions  de  cet 
art  :  la  seconde  renferme  la  descrip- 
tion des  divers  genres  de  peinture  , 
et  lenrs  rapports  avec  celle  sur  ver- 
re. II.  Des  Recherches  sur  l'art  de 
la  Verrerie:  elles  ont  pour  objet  de 
faire  connaître  l'époque  à  laquelle 
les  grandes  verreries  ont  été  établies 
en  France  ;  l'état  actuel  de  la  fabri- 
que du  verre,  les  règlements  faits 
pour  la  vente  du  verre  à  vitres.  III. 
Enfin  un  Mémoire  sur  la  conj'réne 
des  peintres-vitriers.  Ces  ouvrages 
ont  été  légués  par  Levieil,  à  son  ne- 
veu Louis,  fils  de  Jean  Levieil,  pein- 
tre sur  verre  du  roi.  Levieil  ne  s'é- 
tait point  marié^  il  mourut  le  '^3  fé- 
vrier 1772.  P — s. 

LEVIEUX  (Renaud  ),  fils  d'un 
orfèvre  de  Nîmes  ,  floriss.iit  comme 
peintre  d'histoire  ,  dans  les  beaux 
jours  du  règne  de  Louis  XIV.  Il  fit 
un  long  séjour  à  Rome ,  et  y  perfec- 
tionna son  talent  par  l'étude  apro- 
fondie  des  chefs  -  d'œuvre  des  plus 
grands  maîtres  de  l'Italie.  Sans  s'être 
élevé  au  premier  rang  des  peintres 
français,  il  doit  tenir  une  place  dis- 
tinguée parmi  ceux  du  second ,  par 
la  correction  du  dessin  ,  la  vérité  et 
l'éclat  du  coloris.  Il  rendait  surtout 
les  chairs  avec  un  art  admirable.  Ses 
principaux  ouvrages  sont  une  suite 
de  tableaux  faits  pour  l'église  des 
Pénitents  d'Avignon,  et  représentant 
l'histoire  de  saint  Jean-Baptiste.  Ils 
ji'ont  pas  tous  un  égal  degré  de  mé- 
rite j  mais  quelques-uns  d'entre  eux  se 
recommandent  par  de  grandes  beau- 
lis  d'eUvSemWe  et  de  deîail.  Le*  deux 


LEV 

unllours  furent  envoyé»  à  Paris  en 
',  par  les  commissaires  de  la 
ilionrIiarges(lerecucillir,(lans 
Ici  églises  (les  (IcpartemenLs^les  ol)jets 
d*art  dignes  d'être  conserves.  Deux 
autres  ,  donnés  à  l'école  centrale  du 
département  du  Gard  ,  décorent  la 
SaUe  de  l'académie  royale  de  Nîmes: 
le  surplus  est  resté  au  musée  d'Avi- 
gnon. D'autres  productions  ,  moins 
importantes,  du  pinceau  de  Lcvieux, 
trouvent  à  Uzès  ,  dans  sa  famille, 
jui  habite  cette  ville.      V.  S.  L. 

LEVIS  (François  duc  de  ),  ma- 
réchal de  France  ,  né  en  }'jio  ,  au 
château  d'Ajac  ,  en  Languedoc ,  de 
Tune  des  plus  anciennes  maisons  de 
France  (  Foy.  Mi repoix  ) ,  entra  de 
bonne  heure  au  service,  sous  le  nom 
de  chevalier  de  Levis ,  s'y  fit  remar- 
quer par  une  bravoure  calme  et  un 
sang-froid  qui  contrastaient  singuliè- 
rement avec  la  vivacité  de  son  carac- 
tire.  Il  était  aide-de-camj)  du  maré- 
hal  de  Levis-Mirepoix ,  son  cousin, 
t ,  seul  avec  lui ,  lit  deux  bataillons 
prisonniers.  Ce  général  ayant  im- 
prudemment devancé  ses  troupes 
«juigravissaientla  raontagnede  Mon- 
talban ,  se  trouva  ,  en  arrivant  sur  le 
plateau,  à  cent  pas  de  deux  bataillons 
ennerais;aulieudechercherà  s'échap- 
per, les  deux  olliciers  français  courent 
a  eux  en  criant  :  «  Bas  les  armes,  vous 
»  êtes  entourés.  »  On  les  crut  sans 
discussion,  et  l'on  se  rendit.  Dans  la 
suite ,  la  fortune  sembla  demander 
compte  auchevaher  de  Levis  de  cette 
faveur  inespérée  :  elle  fit  manquer  , 
})ar  le  contre-temps  le  moins  vrai- 
semblable, une  expédition  qu'il  avait 
concertée  avec  autant  de  prudence 
que  de  hardiesse.  C'était  en  Canada  • 
iJ  avait  succédéau  malheureux  Mont- 
'  ilm  :  la  perte  de  Québec  ,  qui  était 
me  conséquence  de  la  bataille  où 
colui-ci  fut  tué,  avait  oblijié  le*  Fraa- 


J.EV  38^ 

çais  de  se  retirer  à  Montréal, capitale 
du  Haut  -  Canada.  Le  chevalier  de 
Levis  y  passa  l'hiver.  Au  commcfi- 
ceraent  au  printemps  ,  ayant  a])pris 
que  les  Anglais  se  cardaient  mal  dans 
Queljec,il  résolutde  les  y  surprendre. 
Ses  préparatifs  se  font  dans  le  plus 
grand  secret  ;  et  dès  que  le  dégel  le 
permet  ,  il  embarque  son  artillerie 
sur  le  fleuve  St.-Laurent ,  et  côtoie 
la  rivière  avec  l'élite  de  ses  troupes. 
11  parvient  ainsi, sans  être  découvert, 
jusqu'à  peu  de  distance  de  Québec. 
Là,  im  des  glaçons  que  le  fleuve  cha- 
riait  encore ,  fait  chavirer  l'un  des 
bateaux  qui  portait  les  canons.  Tout 
l'équipage  se  noie,  à  l'exception  d'un 
sergent  qui  s'accroche  au  glaçon  ,  et 
qui  arrive  transi  de  froid  sous  les  murs 
delà  place.  La  sentinelle  du  quai  re- 
connaît avec  étonnement  l'uniforme 
français ,  appelle  du  secours  ;  on 
amène  sur  le  rivage  cet  homme  mou- 
rant; on  lui  demande  d'où  il  vient  : 
il  ne  peut  répondre  que  par  quelques 
mots  entrecoupés.  Enfin ,  il  reprend 
assez  de  force  pour  dire  qu'il  appar- 
tient au  corps  du  chevalier  de  Levis 
que  l'on  croyait  tranquille  dans  ses 
quartiers  d'hiver,  et  qui  marche  sui* 
Québec  dont  il  n'est  plus  qu'à  quel- 
ques lieues.  A  peine  le  sergent  a-t-il 
achevé,  qu'il  expire.  Le  gouverneur 
anglais  renforce  aussitôt  ses  postes, 
se  met  en  défense,  et  envoie  à  la  dé- 
couverte. L'expédition  du  chevalier 
de  Levis  est  manquée  ;  mais  le  sort 
luU  réservait  d'autres  tribulations. 
Ses  troupes  s'étaient  emparées  de 
deux  navires  marchands ,  qui  étaient 
chargés  de  rhum  et  d'eau-dc-vie.  Le 
soldat  venait  de  faire  une  marche 
forcée  de  plusieurs  jours  en  suppor- 
tant des  privations  de  tout  genre  ;  il 
ne  put  être  contenu  :  les  bar  ri  «pies 
furent  enfoncées,  et ,  en  moins  d'une 
keure,  toute  celte  petite armiée  était 


382  LEV 

ivre  à  ne  pas  bouger  :  elle  e'tait  perdue 
si  remiemi  eût  été'  instruit  de  cet 
accident.  Dans  cette  terrible  position, 
le  général  français  ordonne  à  tous  les 
ofticiers  de  prendre  les  armes  ,  de 
faire  des  patrouilles  autour  du  camp, 
et  de  ne  laisser  approcher  qui  que 
ce  soit  ;  il  écrit  en  même  temps  au 
gouverneur  de  Quebec,que ,  se  voyant 
de'couvert ,   il  va  se  retirer ,  mais 
qu'il  recommande  à   son  humanité' 
deux  cents  malades  qu'il  ne  peut  em- 
mener, et  qu'il  laisse  à  l'hôpital  établi 
par  les  Anglais  à  quelque  distance  de 
la  ville ,  et  dont  il  avait  pris  posses- 
sion. Le  gouverneur  ne  doutant  point 
que  les  Français  ne  fussent  sur  leurs 
gardes, ne  songe  point  à  les  attaquer  j 
et,  bientôt  après ,  ils  se  retirent  sans 
perte ,  grâce  à  l'inge'nieux  expédient 
de  leur  chef.  Le  chevalier  de  Levis 
réussit  à  défendre  encore  long-temps 
l'importante  colonie  qui  lui  était  con- 
fiée, llbattit  même  complètement  les 
Anglaisdansunebataillerangéejmais 
eet  événement  glorieux  ne  put  sauver 
le  Canada.  Le  dénuement  total  de 
munitions  toujours  interceptées,  tan- 
dis que  l'ennemi  recevait  continuel- 
lement des  renforts  ,  obligea  enfin  le 
chevalier  de  Levis  de  se  rendre  aux 
vaincus.  Il  partit ,  emportant  les  re- 
grets des  colons  et  même  des  tribus 
sauvages.  A  son  retour  en  Europe  , 
il  fut  employé  en  Allemagne  comme 
lieutenant  -  général ,  et  se  distingua 
en  plusieurs  occasions.  Il  comman- 
dait l'avant-garde  du  prince  deCondc 
au  combat  de  Johannisberg;et  ce  fut 
luiqui  prit  les  canons  que  l'on  voyait 
avant  la  révolution  ,  à  Chantilly.  La 
paix  de  Versailles  termina  sa  carrière 
militaire,  mais  non  pas  ses  services. 
Promu  au  gouvernement  de  la  pro- 
vince d'Artois  ,  il  sut  se  concilier 
l'alFection  des  troupes  et  celle  des 
citoyens.  Toujours  juste,  toujours 


I 


LEV 

a  ffable ,  et  empressé  à  rendre  service ,     j 
il  eut  la  première  qualité  de  l'homme     ■ 
public;  partout  il  se  fit  aimer.  Lors*     i 
que  l'on  forma ,  en  1 77 1  ,  la  maison 
militaire  de  Monsieur  ,  (  aujourd'hui     , 
Louis  XVill  ) ,  le  chevalier  de  Levis 
eut  le  commandement  d'une  compa- 
gnie de  ses  gardes.  En  i-jSS  ,  il  fut 
créé  maréchal  de  France ,  et  duc  eu 
1784.  Il  mourut  en  1787,  à  Arras, 
où  il  s'était  rendu  ,  quoique  malade  , 
pour  tenir  les  états  d'Artois.  Cette 
assemblée ,  organe  fidèle  de  la  pro^ 
vince  où  il  était  respecté  et  chéri       1 
depuis  tant  d'années ,  lui  décerna  de 
magnifiques  obsèques,  et  lui  fit  ériger 
un    monument  dans   la   cathédrale 
d' Arras.  Les  fureurs  révolutionnaires 
ont  détruit  l'église  et  le  monument  j 
sa  mémoire  leur  a  survécu  (  i  ).  L-p-e. 

LEVITA.  To/.  Elias,  tom.  XÏII, 
pag.  1*2. 

LEVIZAG  (  Jean-Pons -Victor 
Lecoutz  de),  d'une  famille  noble, 
d' Alby  en  Languedoc ,  fut  destiné  à 
l'état  ecclésiasti({ue  ,  et  pourvu  d'un 
canonicat  du  chapitre  de  Vabres. 
Faisant  de  la  poésie  un  délasse- 
ment à  des  études  plus  sérieuses, 
il  obtint  ,  en  1776,  le  prix  de 
l'idylle  à  l'académie  des  jeux  flo- 
raux ,  par  une  pièce  intitulée  :  Le 
Bienfait  rendu.  Obligé,  par  suite  de 
la  révolution  ,  de  quitter  la  France  , 
il  se  réfugia  d'abord  en  Hollande  , 
puis  en  Angleterre  ,  où  il  se  livra 
avec  beaucoup  de  succès  à  l'ensei- 
gnement de  la  langue  française.  Il 
est  mort  à  Londres  ,  en  181 3.  On 
connaît  de  lui  :  I.  Discours  sur  V ar- 
ticle,honàres,  1 797, in-8«.II.  VJrt 
de  parler  et  d'écrire  correctement 
la  langue  française ,  ou  Grammaire 


(i)  Cet  article  est  en  partie  extrait  <l'iin  livra 
intitulé  Souvenirs  et  Portraits  ,  (\\i\  a  été  pu- 
blic en  i8i3  ,  in-8°.  ,  par  le  duc  île  Levis  ,  pair 
de  Frauce  «t  ministre  d  état ,  fil»  du  luaréchaL 


LEV 

|)hilosophiqiie  et  Iillfr.iirc  de  cette 
'         .  /à  l'usngc  des  Français  et  des 
•rs  ,    ibid.    1797  ,    u    vol., 
1  .^'•.  ;  sixième  édition  revue   par 
\ .  DiTvet ,  censeur  adjoint  du  collège 
a.'  Henri  IV,  Paris,   1818,  u  vol. 
i  11-8**. iiCltc grammaire  ,  ditG.  Henry 
Hist.  de  la  lansçiie  française ,  tom. 
i ,  p.  36  )  j  est  extrêmement  utile 
pour  la  connaissancede  notre  langue, 
par  le  soin  que  l'auteur  a  pris  d'y 
insérer  tout    ce  qui   pouvait  faire 
difficulté  pour  les  personnes  qui  ne 
lit  pas  nées  en  France.  L'ouvrage 
-t  terminé  par  trois  lettres  à  une 
uie  dame  anglaise  :  sur  l'applica- 
iion  des  principes  de  la  grammaire 
au  récit  de  la  mort  d'HippoIyte;  sur 
les  tropes  et  les  figures;  et  enfin,  sur 
la  versification  française.  III.  abrégé 
'''  la  grammaire,  etc. ,  Londres  , 
798 ,  in-i'j.  ;  réimprimé  plusieurs 
fois.  IV.  Traité  des  sons  de  la  lan- 
gue française  j  suivi  du  Traité  de 
rorthographe  et  de  la  ponctuation  ; 
ibid.   1800  ,  in-8*'.  V.  (  Avec  Moy- 
sant  )   Bibliothèque  portative   des 
'''<^rii>ains  français  y   ou  Choix  des 
ailleurs    morceaux    extraits   de 
urs  ouvrages,  Londres,  1800,  3 
Lin-8'*.  ;  a®,   édition  considéra- 
Nment   augmentée,  ibid.,   i8o3, 
vol.  in-S^.  :  il  a  eu  la  principale 

S  art  à  cette  seconde  édition,  à  cause 
e  l'absence  de   Moysant,  qui  était 
■Mtré  en   France.   C'est  un  choix, 
vcellent  :  quatre  volumes  sont  cou- 
res à  la  prose,  et  deux  à  la  poé- 
H'.  Cet  ouvrage  imprimé  à  deux  co- 
ionues  et  à  très-longue  justification , 
contient   la  matière  de  plus  de  20 
lûmes  in-8°.,  tels  qu'on  les  im- 
ime  eu   France;   aussi    n'est-ce 
une   petite  portion  de  cette  Bi- 
nhèque  qui  a  été  imprimée  en 
ince,  sous  le  titre  de  Cous  de 
i-itiéruture,  etc. ,  1 8 1 1 , 4  vol.  iu-8<*. , 


LEV 


383 


puis  sous  celui  kV  Etudes  de  littéra- 
ture, d* histoire   et  de  philosopfUe , 
i8ri,  1  vol.  in-8°. ,  qui,  sans  avoir 
été  réimprimés ,  ont  été  reproduits 
sous  le  titre  de  Cours  de  littérature, 
1814,  u  vol.  in-8«.  VI.  Theoretical 
and  practical   Grammar  nf  i/i^ 
French  Tongue,  réimj)rimé  à  Paris 
en  181')  et  encore  en    181G,  par 
les  soins    de    M.   G.   Ilamonière, 
qui    y    a    fait   des    améliorations. 
VII.  Dictionnaire  français  et  an- 
glais,    1808,   in-8".    VlIL    Dic- 
tionnaire des  sjnonjmes  ,   1809, 
In- 12.  On  doit  encore  à  l'abbé  da 
Lcvizac  ,  une  édition  des  Fables  de 
La  Fontaine ,  Londres ,    1 798  ,   'i 
vol.  in-8«.;  —  des   Lettres  choisies 
de  madame  deSévigné  et  de  madame 
de  Maintenon  ,  avec  une  préface  et 
des  notes,  ibid.,  1798,  1801,  in-i'i; 
—  des  Leçons  de  Fénélon;  ^—  des 
Poé.ies  de  Boileau ,  avec  des  notes 
historiques  et  grammaticales  ^  et 

un  Essai  sur  sa  vie  et  ses  écrits 

réimprimes   en    1809,  in-i-ï;  — 
des   Pièces  choisies  de  l'Ami  des 

Enfants ,  181 1,  in- 12;  —  des 

OEuvres  de  Bacine ,  avec  les  juge- 
ments de  Laharpe  et  de  nouvelles 

notes  grammaticales 181 1, 

3  vol.  in-i'i.  W — s. 

LEVRET  (  André  ) ,  cbinirgien- 
accoucbeur ,  né  à  Paris,  en  i7o3, 
moiurut  dans  cette  ville,  le  22  janvier 
1780.  Sa  haute renomméelefitappe- 
1er  à  la  cour,en  qualité  d'accoucheur 
de  Madame  la  Dauphine ,  mère  de 
Louis  XVI.  Il  était  membre  de  l'a- 
cadémie royale  de  chirurgie  de 
Paris.  Il  a  fait,  pendant  long-temps, 
des  cours  d'accouchement ,  que  sui- 
vait un  nombreux  concoars  d'é- 
lèves. Quoique  appelé  par  les  femmes 
les  plus  considérables  delà  capital»', 
il  exerçait  les  autres  branches  de  la 
chirurgieavecunegrandedistinctiun. 


384  l'EV 

Le  fameux  Samuel  Bernard  lui  donna 
100,000  fr.,  pour  les  soins  qu'il  en 
avait  reçus.  Les  principauxouvrages 
de  Lcvret  sont  :  I.  Obse.vations  sur 
les  causes  et  les  accidents  de  plu 
sieurs  accouchements  laborieux  , 
in-8''.^  Paris,  i747«  I^^  quatrième 
édition  de  cet  ouvrage  ,  qui  eut  lieu 
en  1770  ,  contient  des  remarques 
fort  judicieuses  sur  le  levier  deRoon- 
huizenz.  On  a  joint  à  cette  édition  , 
un  opuscule  intitulé  ,  Suite  des  Ob- 
servations sur  les  causes  et  les  acci- 
dents des  accouchements  laborieux  ^ 
etc. ,  et  qui  avait  été  publié  en  1751, 
in-8<*.  C'est  une  réponse  péremptoire 
à  la  critique  qui  avait  été  faite  en 
1749,  du  premier  ouvrage  de  l'au- 
teur, dans  le  Journal  des  savants. 
IL  Observations  sur  la  cure  radicale 
de  plusieurs  polypes  de  la  matrice, 
de  la  gorge  et  du  nez,  opérée  par 
de  nouveaux  moyens ,  m-^^. ,  fig. 
Paris,  1749-  III*  Explication  de 
plusieurs  figures  ,  sur  le  mécani  me 
delà  grossesse  et  de  V  accouche  ment, 
in-8<*.,  Paris,  1752.  Dans  ces  figures, 
l'auteur  représente  ,  avec  autant 
d'exactitude  qu'il  est  possible,  les 
différents  degrés  de  dilatation  de 
l'utérus.  lY.  L'Art  des  accouche- 
ments démontré  par  des  principes 
de  physique  et  de  mécanique,  in-8*'., 
l]g.,  Paris,  1753,  1761,  1766.  Cet 
.excellent  livre  qui,  avant  celui  de 
Baudeloque ,  était  le  meilleur  que 
l'on  possédât  sur  l'art  des  accouche- 
ments, a  eu  plusieurs  éditions  ,  et  a 
été  traduit  en  différentes  langues.  V. 
Essai  sur  V abus  des  règles  générales 
et  contre  les  préjugés  qui  s'opposent 
aux  progrès  de  l'art  des  accouche- 
ment s, m-S^.,l?iiris^  176G.VL  Trai- 
té des  accouchements  laborieux, 
in-8^.,  Paris,  1770.  G' estdans  ce  trai- 
té que  Levret  a  exposé  une  doctrine 
iaiifiiBient  judicieuse  ,  relative  à  la 


iditi 

'4 


LEV 

forme  du  forceps ,  et  aux  occurrences 
où  il  convient  d'appliquer  cet  instru- 
ment, qu'il  a  perfectionné.  Celui-ci, 
qui  est  encore  fort  usité ,  porte  le 
titre  de  forceps  de  Levret.  VIL  Ob- 
servations sur  V allaitement  des  en- 
fants, Paris,  1781  ,  in-80.  ;  trad.  en 
a!lcmand,  Leipzig,  1785,  in-80. 
de  56  pages.  F — r. 

LEWE.NHAUPÏ  (  Adam-Louis, 
comte  DE  ) ,  général  suédois  ,  qui 
partagea  les  exploits  et  les  revers  de 
Charles  XIT ,  naquit',  en  1659  ?  ^^"S 
le  camp  de  Charles-Gustave,  qui  as- 
siégeait alors  Copenhague.  II  perdit  | 
de  lonne  heure  son  père,  général 
cavalerie,  et  sa  mère  comtesse  d'e  _ 
pire  ,  de  la  maison  de  Hohenlohe» 
Mais  le  grand  sénéchal  de  Suède  , 
Pierre  Brahé ,  allié  à  sa  famille , 
donna  les  plus  grands  soins  à  son  édu- 
cation, et  lui  fit  suivre  un  cours  d'étu- 
des nonseulemenlà  Upsal,mais  dans 
plusieurs  universités  d'Allemagne. 
Lewenliaupt  fit  ses  premières  armes 
au  service  d'Autriche,  et  comLaltit 
contre  les  Turcs  en  Hongrie.  Il  servit, 
peu  aprè'S,  sous  Guillaume ÎII,  dans 
un  corps  auxiliaire  envoyé  par  la 
Suède  en  Hollande.  Charles  XII 
étant  monté  sur  le  trône ,  Lewen- 
haupt  fut  bientôt  distingue  par  ce 
prince  ,  qui  le  nomma  généi  al ,  et 
lui  confia  des  expéditions  impor- 
tantes. Lorsque  l'armée  suédoise  eut 
passé  en  Courlande  pour  aller  à  la 
rencontre  des  Russes  ,  ce  général 
livra  plusieurs  combats ,  où  il  dé- 
ploya autant  de  courage  que  de  tac- 
tique ;  et  ,  en  1706  ,  U  fut  nomme 
gouverneur  de  la  forteresse  de  Riga, 
ainsi  que  de  toutes  les  places  voi- 
sines, i^amème  année,  Charles  fit  la 
paix  avec  Auguste  ,  roi  de  Pologne , 
et  enl reprit  cette  marche  fameuse 
qui  devait  le  conduire  à  Moscou. 
Pierre  l'attendait  ,  et   ne  négligeait 


M>\V 

anrnn  moyen  de  dofense.  ïj^arméc 
.  qui   devait    pe'iietrer    au 
M  SCS  étals  ,  ayant  hosoin  de 
renforts  ,  le  roi  ordonna  à  Lcvscn- 
haupt  de  le  joindre  avec  un  corps  de 
dou/.e  mille  hommes,  et  de  lui  ame- 
ner ,  en  nu^me  temps,  des  munitions 
et de5  vivres.  En  attendant, il  s'avan- 
ça dans  la  Pologne ,  repoussant    les 
Russes, et,  après  avoir  remporté  une 
victoire  à  Holofziu  ,  il  arriva  à  Mo- 
hilow,oùil  s'arrêta   pour  attendre 
Lewenhaupt.  Celui-ci  fut  attaquédans 
sa  marche  par  le  czar  ,  à  Liesna  ,  le 
ig  septembre  1708.  Le  combat  fut 
sanglant  ;    et    quoique  les   Suédois 
restassent  vainqueurs  ,  ils  perdirent 
quatre  à  cinq  mille  hommes  ,  et  une 
grande  partie  des  vivres.  Ou  prétend 
que  les  ennemis  du  général ,  qui  crai- 
gnaient son  influence  auprès  du  roi , 
retardèrent  sa  marche  par  de  faux 
avis  ,  et  entravèrent  sa  correspon- 
dance. Il  arriva  enQn  avec  un  corps 
de  six  mille  hommes,  et  une  faible 
partie  des  vivres  qu'il  avait  eus  à  sa 
suite.  Peu  après, Charles  résolut  de 
livrer,  près  de  Pultava ,  celte  bataille 
qui  eut  des  suites  si  désastreuses  2)our 
la  'Suède.  Blessé  dès  le  commence- 
ment de  l'action  ,  il  fut  obligé  de 
>er  le  commandement  à  ses  géné- 
ra. Lewenhaupt  et  son  corps  firent 
^  prodiges  de  bravoure;  mais  ils 
turent  point  secondés  par  le  gé- 
d  Reinschild;  et  les  Russes  rem- 
itèrent une  victoire  complète.  Il 
resta   que  seize  mille  Suédois  , 
lit  Lewenhaupt  prit  le  comman- 
dent, pendant  que  le  roi  cherchait 
asile  chez  les  Tartares  de  l'U- 
'ine.  Il  tenta  les  plus  grands  efibrts 
ir  ranimer  le  courage  des  soldats; 
M  s  ne  voyant  plus  le  héros  qu'ils 
.ardaient  comme  leur  génie  tuté- 
c  ,    ne  pouvant   espérer  aucun 
ours  de  leur  palrie,el  se  trouvant 

XXiV. 


LEW  385 

épuisés  parla  fatigue  et  lafaim, ils  de- 
mandèrent à  cauitider.  Lewenhaupt 
signa  la  capitulation  sur  \cs  bords 
du  Borysthèuc  ,  le  2()  juin  i70().  Il 
fut  conduit  comme  prisonnier  de 
guerre  dans  l'intérieur  de  la  Russie, 
et  ne  revit  plus  sa  |>atric ,  étant  mort 
en  1719,  deux  ans  avant  la  conclu- 
sion de  la  paix.  Pendant  sa  capti- 
vité, il  rédigea,  en  suédois,  des  Mé- 
moires qui  ont  été  imprimés  à  Stoc- 
kholm (  1757  ) ,  et  qui  contiennent 
un  grand  nombre  d'anecdotes  sur 
Charles  XII ,  et  donnent  la  clef  de 
plusieurs  événements  de  sou  règne. 

LEWENHAUPT  (Charles-Emile 

comte  DE  ) ,  général  suédois ,  de  la 
même  famille  que  le  précédent,  na- 
quit le  28  mars  iGg^  :  il  n'avait  que 
onze  ans ,  lorsqu'il  perdit  son  père , 
et  fut  élevé  avec  beaucoup  de  soin 
par  sa  mère  ,  née  comtesse  de 
Kœnigsmark,  tante  du  maréchal  de 
Saxe.  Il  se  distingua  dans  la  carrière 
des  armes ,  en  Norvège  et  en  Pomé- 
ranie,  sous  les  ordres  du  comte  de 
Steinbock ,  son  parent.  Il  accom- 
pagna Charles  XII  en  Norvège  ,  et 
se  trouvait  au  siège  de  Friderikshall 
où  ce  monarque  fut  tué.  Sous  les 
règnes  suivants,  il  fit  preuve  de  ta- 
lents et  de  dévouement  patriotique. 
Nommé  lieutenant-général  en  173-2, 
il  fut  choisi  à  une  grande  majorité 
pour  maréchal  de  la  diète  eu  173/1. , 
et  le  même  honneur  lui  fut  encore 
déféré  en  174^;  mais  là  devaient 
commencer  ses  malheurs.  La  Suède 
était  alors  en  proie  aux  factions  : 
un  parti ,  croyant  avoir  trouvé  le 
moment  favorable  d'attaquer  la  Rus- 
sie, et  de  réparer  les  pertes  qu'a- 
vaient entrainées  les  malheurs  de 
Charles  XII,  opinait  pour  la  guerre 
contre  la  Russie  ;  Lewenhaupt  con- 
tribua beaucoup  à  la  faire  déclarer. 
2S 


386 


LEW 


11  fut  nommé  j  en  1742,  général  en 
chef  de  l'armée  suédoise  envoyée 
en  Finlande.  L'armée  arriva  avant 
le  général  ;  et  quand  celui  -  ci  la 
joignit ,  elle  était  déjà  en  pleine  re- 
traite ,  à  la  suite  d'un  échec  qu'elle 
avait  éprouvé  à  Wilmanstrandt.  Ce- 
pendant Lewenhaupt  la  fit  avancer 
de  nouveau,  et  ordonna  une  inva- 
sion en  Russie.  Une  révolution  se 
préparait  dans  le  même  temps  à 
Pétersbourg,  et  le  général  suédois 
déclara  qu'il  était  venu  pour  ap- 
puyer l'élection  d'Elisabeth.  Une 
espèce  d'armistice  eut  lieu*  mais 
aussitôt  qu'EUsabeth  eût  été  assurée 
du  trône  par  un  parti  puissant ,  elle 
fit  recommencer  la  guerre.  L'armée 
suédoise  mal  dirigée  par  des  officiers 
d'opinions  différentes  en  tactique  et 
en  politique,  et  dont  Lewenhaupt 
ne  put  contenir  la  rivalité,  se  retira, 
et  fut  poursuivie  si  vivement  jiar  les 
Russes,  que  n'ayant  plus  d'autre 
ressource,  elle  capitula  le  4  septem- 
bre 1742  a  Helsingfors.  Les  auteurs 
de  cette  guerre  malheureuse  devin- 
rent l'objet  de  l'animosité  générale. 
Les  états  ,  où  dominait  le  parti  qui 
l'avait  désapprouvée ,  firent  arrêter 
le  comte  de  Lewenhaupt  et  le  général 
Budderabrock,  qui  partageait  ses 
torts  et  ses  revers.  Ils  furent  tra- 
duits devant  une  commision  établie 
par  les  états ,  et  condamnés  à  perdre 
la  tête.  La  veille  du  jour  fixé  pour 
leur  exécution,  Lewenhaupt  parvint 
à  s'échapper  de  sa  prison.  Déjà  il 
s'était  embarqué  sur  un  yacht  pour 
Dantzig;  mais  l'yacht  retenu  par  un 
vent  contraire ,  fut  atteint  à  deux 
lieues  des  côtes ,  et  Lewenhaupt  fut 
*ti"ouvé  caché  sous  un  chargement  de 
planches  ,  et  ramené  à  Stockholm , 
où  il  fut  décapité  le  i5  août  174^. 
Victime  plus  iftalheureuse  que  cou- 
pable des  dissenisions  civiles  et  des 


LEW 

chances  de  la  guerre ,  il  périt  sur 
l'échafaud,  sans  que  son  supplice 
ait  flétri  sa  mémoire,  ni  terni  l'illus- 
tration de  sa  race.  Il  laissa  un  fils 
et  deux  filles.  D — z — s. 

LEWIS  (  John  ) ,  théologien  an- 
glican ,  et  antiquaire  ,  né  à  Bristol , 
en  1675  ,  se  livra  d'abord  à  l'ensei-  j 
gnement ,  et  devint  successivement  î 
ministre  de  plusieurs  paroisses,  où  sa  \ 
modération,  au  milieu  de  la  violence  > 
des  partis,  exposa  fréquemment  son  j 
repos.  Il  était  très-savant  et  surtout  | 
très-laborieux  :  outre  ceux  de  ses  ou-  j 
vrages  qui  sont  restes  ,.  il  avait ,  dit- 
on,  écrit  plus   de  mille   sermons; 
et  comme  il  pensait  qu'un  sermon- 
naire  doit  composer  lui-même  ses 
discours,  il  ordonna  à  son  exécuteur 
testamentaire  de   détruire  tous  les 
siens, de  peur  de  favoriser  la  paresse 
des   autres   prédicateurs.   Il   eut  de 
vives  controverses,  particulièrement 
avec  le  docteur  Galamy,  qu'il  avait 
accusé  de  mauvaise  foi  comme  his- 
torien des  non-conformistes.  Lewis 
était ,   depuis   3o   ans ,   vicaire  de 
Margate,  lorsqu'il    mourut,  le   16 
janvier  174^-  Voici  les  titres  de  ses 
principaux  ouvrages  :  I.  Catéchisme 
de  VégUse ,  expliqué ,  1700  ,  in-12  , 
rédigé  pour  l'usage  des  écoles  de  cha- 
rité ,  à  l'invitation  de  la  société  in 
tituée  pour  propager  la  connaissan 
du  christianisme  ;  très-souvent  réi 
primé.  IL  Histoire  de  J.  Wicli 
1720  ,  in-8^.  III.  Histoire  et  Jln\ 
quités  de  Vile  de  Thanet ,  dans 
comté  de  Kent,  1728,  in-4°., 
avec  des  additions,  1786.  IV.  His 
toire  et  Antiquités  de  l'église  abba- 
tiale de  Faversham.  V.  Le  Nou- 
veau-Testament ,  traduit  de  la  vul- 
gate  latine,  par  J.  Wicliffe,  précédé 
d'une  Histoire  des  différentes  tra- 
ductions de  la  Bible ,  1781,  in-fol.  ; 
réimprimé  par  M.  Barber,  in-4''' 


'  ■   Mc    Jc\>    J  itiiiin  iii)ns  a  fie 

(C  aussi  separifinciU  ,  1789, 
lU-^".  VI.  rie  de  Caxton  ,   173^, 
'   iii-8**.  VII.  Précis  (le  la  naissance 
H  des  progrès  de  l'anabaptismc ^ 
1738.  VIII.  Dissertation  sur  l'an- 
tiquité et  V usage  des  sceaux  en  An- 
gleterre ^  •74^«  ^^'  ^ '^  ^l^  /?^.>- 
I  nolà  Pocnck  ,  évèque  de  St.-Asaph 
!  el  de  Chicliester  ,  1744,  iii-8".  Le- 
I  yns  a  laissé  beaucoup  de  manuscrits 
'['il  ont  été  conservés.  L. 

LEWIS  (  Matuieu-Gregoire  ) , 
tour  de  romans  et  de  pièces  de 
r.itre  ,  souvent  désigné  eu  Angle- 
terre sous  le  nom  de  Monk-Lcwis  , 
à  cause  de  son  principal  ouvra<^e  , 
était  fils  d'un  sous-secrélaire  au  dé- 
partement de  la  guerre  ,  et  naquit  en 
-73.  Après  avoir  fait  ses  premières 
iides  à  l'école  de  Westminster  ,  il 
iiit  envoyé  en  Allemagne,  pour  y  élu- 
!  dier  la  langue  du  pays  ,  et  se  rendre 
propre  à  un  emploi  diplomatique; 
mais  le  séjour  qu'il  fit  dans  cette 
ntrée,  donna  à  son  esprit  une  di- 
(  tion  opposée  à  l'intention  de  ses 
irents.  Au  lieu  d'étudier  à  l'uni- 
versité où  il  avair  été  envoyé  ,    il 
prit  un  goût  si  vif  pour  les  romans 
'  '  jour ,  qu'il  n'écrivit  dans  la  suite 
.e  des   romans  et  des   pièces   de 
théâtre.  Le  bourg  de  Hindou  l'élut 
pour  son  représentant  au  parlement  ; 
'  e  wis  ne  s'y  fit  pas  entendre  une 
tuis.  La  fortune  que  lui  avait 
laissée  S9n  père, le  dispensait  de  sol- 
îitit.T  un  emploi.  Ses  productions 
Msques  et  dramatiques  se  suc- 
*ticut  rapidement:  la  première  , 
t  celle  qui  fit  sa  réputation  ,  fut  le 
^foine  [  1795,3  vol.  in- 1*2),  roman 
I  les  sombres  horreurs  et  les  pein- 
voluptueuses  forment  un  en- 
monstrueux.  Ce  mélange  bi- 
iire  eut  une  vogue  extraordinaire  , 
'Ui-tout  daiu  les  classes  dç  la  soçiité 


LEW 


I 


dont  h',  goût  n*cst  pa.s  ioimi-.   Lu 
conte  d'Addison ,  intitulé  liarsida , 
en  avait  fourni  le  sujet  à  l'auteur. 
La  publication  du  Moine  fit  un  grand 
scandale  à  Londres  ;  il  fut  qucstiua 
de  citer  l'auteur  eu  justice,  comme 
corrupteur  de  la  morale  publique.  Te- 
nant à  une  famille  considérée,  Lewis 
<hcrclia  à  prévenir  une  poursuite  qui 
aurait  flétri  sou  nom  ,  et  engagea  sa 
parole  de   faire   retirer  les  exem- 
plaires qui  avaient  été  distribués ,  et 
de  refondre  l'ouvrage  dans  une  nou- 
velle édition.  Il  crut  devoir  se  justi- 
fier aussi  auprès  de  son  père  parun« 
lettre  qui  n'a  été  publiée  qu'après  sa 
mort,  et  dans  laquelle  il  proteste  de 
sou   respect  pour   la  religion  et  la 
morale,  en  ajoutant  qu'à  l'âge  de 
vingt   ans   il  s'était  imaginé  qu'eu 
chargeant  les  couleurs  il  augmente- 
rait l'etlèt  de  son  tableau ,  et  que  la 
punition   définitive   du  vice  ferait 
toujours   plus  d'impression  que  la 
peinture  de  ses  excès.  Le  Moine  fut 
réimprimé  plusieurs  fois,  et  traduit 
en  français  (  sous  le  titre  du  Moine; 
et  avec  des  altérations  sous  celui  du 
Jacobin  espagnol),  et  dans  d'autres 
langues  du  continent;  il  donna  lieu 
aussi  à  plusieurs  imitations ,  où  la 
licence  n'est  pas   rachetée  par  la 
verve  et  l'imagination.  Lewis  publia 
encore  des   Contes  d'hiver  (  Taies 
of  fi^inter  ) ,  1801  ,  2  vol.  in-8°.  j 
—  le  Bandit  de  Fenise  (  Tlie  bravo 
of  Fenice),  1804,111-8^,  traduit 
de  l'allemand  ;  il  a   été   réimprimé 
six   fois;  —  les    Tjrrans  féodaux. 
{Feudal  Tarants),  t8o6  ,  4  voL 
in-i'2.  ;  les  Contes  effrayants  {  Ta- 
lcs ofterror),  3  vol.  ;  —  et  les  Con- 
tes  romanesques  {Bornant ic  Taies), 
4  vol.   in-i!2,   qui  n'eurent  pas  le 
succès  du  Moine,  Un  de  ces  dernier» 
ouvrages    vient    d'être    traduit   en 
françaii^  sg^s-  le  litre  de  Mj  stères 


3BS 


LEW 


de  la  Tour  Saint-Jean.  Lewis  avait 
débuté  dans  la  carrière  dramatique, 
en  1*^96 ,  par  un  drame  intitulé ,  les 
Fertus  de  village ,  auquel  il  fit  suc- 
céder ,  l'année  suivante ,  le  Minisire , 
tragédie  imitée  de  Schiller  ,  et  le 
Spectre  du  château  y  opéra  ou  drame 
en  musique:  dans  cette  pièce,  l'au- 
teur était  sur  son  terrain  ;  aussi 
de  toutes  ses  pièces  de  théâtre,  est-ce 
celle  qui  a  eu  le  plus  de  vogue;  elle 
s'est  conservée  au  répertoire  de  Dru- 
rylane ,  et  s'y  joue  assez  fréquem- 
ment, (c  Dépourvue  de  poésie,  et 
»  même  de  style ,  dit  un  critique  an- 
»  glais,  cette  production  porte  néan- 
»  moins  l'empreinte  d'une  imagina- 
»  tion  forte  et  originale  ;  et  Lewis  a 
»  eu  le  talent  si  rare  de  rendre  les 
»  spectres  intéressants  sur  la  scène.  » 
La  pièce  qui ,  après  celle-ci,  eut  le  plus 
de  succès  ,  et  qui  s'est  pareillement 
maintenue  sur  la  scène  de  Drurylaue, 
est  sa  tragédie  à'Adelgitha,  publiée 
en  1806.  En  France  un  sujet  comme 
celui-là  paraîtrait  le  comble  de  l'ex- 
travagance. Qu'on  imagine  une  prin- 
cesse, modèle  de  toutes  Us  vertus,  et 
femme  de  Guiscard,  duc  d'Apulie, 
tuant  de  sa  main  Michel  Ducas,  empe- 
reur grec,  qui,  après  son  expulsion  de 
I3yzance,a  trouvé  un  asile  en  Apulie, 
et  a  forcé  la  femme  de  son  bienfaiteur 
à  lui  accorder  un  rendez-vous  :  qu'on 
se  figure  ensuite  cette  femme  recon- 
naissant dans  un  inconnu  ,  qu'on  a 
saisi  comme  meurtrier  de  Michel,  un 
fils  qu'elle  a  eu  autrefois  à\m  fidèle 
amant,  et  enfin,  cette  même  Adelgi- 
tha  se  donnant  la  tfiort  pour  se  tirer 
d'embarras  ,  et  sauver  la  délicatesse 
de  son  mari  prêt  à  la  reprendre.  Voici 
les  titres  des  autres  pièces  de  Lewis  : 
i?oZZ«f,  tragédie  imitée  de  l'allemand, 
^199  7^' ^^^'^^^{East-Indian), iSoo; 
Adelmorn,  drame,  1801  ; Mfonzo, 
lragé<^e  ;  1801  ;  PiU^antiiio)  melo 


LEY 

drame  ,    i8o5  ;    P^enoni  ,  drame  , 
1 809  ;  Une  Heure  ,  ou  le  CJievalier 
et  le  Démondes  bois,  pièce  roman- 
tique ,  avec  de  la  musique  ,  181 1  ; 
Timour  le    Tartare ,  mélodrame, 
1812;  Riche  et  Pauvre  ^  opéra-co- 
mique, t8i2.  Lewis  a  encore  publié 
le  poème  de  V  Amour  du  gain,  i  -ygQ, 
in-4^.,ct  un  recueil  de  Poe^/e^,  1812, 
in- 12.  Depuis   1812,  il  fit  quelques 
voyages  ,  entre  autres  un  aux  Indes- 
Occidentales,  où  était  située  une  par- 
tie de  ses  propriétés;  ce  fut  en  reve- 
nant delà  Jamaïque,  qu'il  mourut  et 
raer,dans  l'été  de  i8i8.Parsontes 
tament  il  laissa  sa  collection  de  cari- 
catures à  lord  Holland,  et  légua  cent] 
livres  sterling  à  une  jeune  actrice 
condition  d'employer  cette  somme 
un  bijou  et  de  le  porter  à  son  cou 
comme  souvenir.  D-g. 

LEYBURN  (  George  )  descen- 
dait d'une  ancienne  famille  du  nord 
de  l'Angleterre ,  qui  avait  été  ruinée 
sous  le  règne  d'Elisabeth,  par  la 
saisie  des  biens  de  Jacques  Leyburn, 
mort  sur  l'échafaud ,  à  cause  de  son 
opposition  à  la  suprématie  royale. 
George  naquit  en  iSgS  ,  dans  la 
Westmoreland  :  il  fut  d'abord  élève, 
puis  professeur  d'humanités  dans  le 
collège  anglais  de  Douai  ;  il  alla  en- 
suite prendre  le  bonnet  de  doc- 
teur à  Reiras ,  et  de  là  se  rendit  à 
Paris,  dans  le  collège  d'Arras ,  ouj 
plusieurs  de  ses  compatriotes  s'é- 
taient réunis  pour  composer  des  ou- 
vrages polémiques  contre  les  angli- 
cans. Son  zèle  pour  les  fonctions  de 
missionnaire  l'ayant  ramené  dans 
sa  patrie,  il  fut  arrêté  en  débarquant 
à  Douvres,  renfermé  dans  le  château 
de  cette  ville,  mais  bientôt  après  re- 
lâché à  la  recommandation  de  la 
reine  Henriette ,  qui  le  nomma  un  de 
ses  chapelains  ,  et  l'admit  dans  son 
intiraité.  Un  ordre  du  conseil-privéj^ 


I.KV 

alarnir  du  nombre  des  ratholiqucs 
I    ^i  formaient  la   maison   de  cette 
princesse ,  l'ayant  force  de  s'e'loi- 
j    gncr,ilfnt   arrête    de  nouvean ,  et 
confine  dans  une  prison,  où  l'on  se 
disposait  à  lui  faire  son  procès,  lors- 
,    qu'Henriette  ohlint  encore  sa  liberté , 
;    tous  la  condition  (pi'il  sortirait  du 
-nanme.  8'etant  relire  à  Douai ,  il 
professa  pendant  queNpies  années 
irf  philosophie  et  la  théologie  ,   et 
repassa     ensuite    en     Angleterre  ; 
mais  il  ne  tarda  pas  à  être  dëcou- 
rert,  et  renferme  à  la  Tour  de  Lon- 
dres. Il  se  lia  dans  cette  prison  avec 
le  célèbre  Monk,  alors  simple  officier 
de  l'arme'e  royale ,  et  détenu  pour 
la  même  cause  que  lui.  Gumbie ,  dans 
la  vie  de  ce  général ,  rapporte  une 
conversation   curieuse  qu'ils  eurent 
ensemble ,  d'où  il  résulte  que  le  doc- 
teur crut  apercevoir  dans  la  figure, 
dans  les  discours  et  dans  les  senti- 
ments de  son  com j)agnon  d'infortune 
des  traits  qui  lui   firent   pressentir 
qu'il  deviendrait  un   jour   l'instru- 
ment de  la  Providence  pour  rétablir 
le  fils  du  malheureux  Charles  I«i". 
sur  le  trône  de  ses  pères,  et  qu'il  lui 
fit  part  de  ce  pressentiment,  dont 
ils  se  rappelèrent  les  circonstanceg 
après  l'événement.  Leyburn  ,  étant 
sorti  de  la  Tour,se  rendit  en  France 
où  il  servit   efficacement  la   cause 
royale  d' Anj-leterre.  En  i  G47, le prin- 
cede Galles  l'envoya  en  Irlande,  pour 
rattacher  à   son  parti  les  trois  ar- 
mées catholiques  de  ce  pays ,  qui  ne 
voulaient  se  déclarer  qu'après  qu*on 
leur  aurait  fait  certaines  concessions 
en  faveur  de  leur  religion.  Cette  né- 
gociation n'eut  point  le  succès  qu'on 
s'en  était  promis.  Peu  de  temps  après, 
Richard  Smith  ,  évcque  de  Calcé- 
doine, qui  résidait  à  Paris,  le  nomma 
son  vicaire- général  en  Angleterre, 
emploi  que  Leyburn  quitta  depuis 


Ll'.V  3fto 

pour  la  place  de  président  du  collège 
anglais  de  Douai.  Après  avoir  gou- 
verné ce  collège  penibint  18  ans  ,  i( 
se  rendit  à  Rome, d'où,  après  un  sé- 
jour d'un  an  ,  il  fut  rappelé  dans  sa 
patrie  par  $cs  alTaires  particulièrcii. 
i)ès  qti'elles  furent  terminées,  il  vint 
à  Chàlons-sur- Marne,  où  il  termina 
sa   carrière  ,  en    1677.    C'était    un 
homme  plein  de  zèle,  de  bonnes  in- 
tentions, et  menant  une  vie  très-régu. 
licre;  mais  on  lui  reproche  d'avoir 
manqué  de  prudence  en  quelques  oc- 
casions. On  a  de  lui:  1.  Iléponseen- 
cjclique  à  la  Lettre  cncj  clique  du 
doyen  et  du  chapitre,  Douai ,  iu-4*'. 
iCiGi  :  elle  regarde  les  disputes  qui 
existaient  dans  le  clergé  catholique 
d'Angleterre.  II.  Le  Saint  caractère, 
Douai,  in-8^,  i(J62.  III.  rindiciœ 
censurœ  Duacenœ  ,    sous  le  nom 
de  Jonas  ïhamon  ,  contre  Thomas 
Withe,  in^''.  i65i  :  cet  ouvrage  a 
été  attribué  à  Jean  Warner.  IV.  Re- 
lation de  son  agence  en  Irlande 
composée  en  i  G48,  publiée  en  1 7 '^2 , 
Londres,  in-8^.  Elle  contient  tous 
les  détails  de  sa  mission  auprès  du 
duc  d'Ormond ,  chef  des  armées  ca- 
tholiques d'Irlande.  —  Jean  Ley- 
burn, neveu  du  précédent,  succéda 
en  1670 ,  à  son  oncle ,  dans  la  plac< 
de  président  du  collège  de  Douai. 
Attiré  six  ans  après  à  nome,  j)ar  le 
cardinal  Howard  ,  ])our  être  son  se- 
crétaire et  son  auditeur,  il  s'y  fit  es- 
timer par  ses  talents,  et  par  les  con- 
naissances   variées  que  lui  avaient 
procurées   ses    voyages  dans  tonte 
l'Europe  avec   le  fils  aîné  de  lord 
Montaigu.  L'église  catholique  d'An- 
gleterre ,  privée  du  gouvernement 
episcopal  depuis  la  mort  de  Richard 
Smith  eu  i(ij7  ,  le  désigna  pour  en 
remplir  les  fonctions  ;  et  il  y  fut 
envoyé,  en  i685,en  qualité  de  vicaire 
apostolique ,  ayoc  le  titre  d'cvcqui; 


3c|o  LEY 

d'Adruraet.  (  in  partibus.  )  Jacques 
II  le  logea  dans  le  palais  de  Saint- 
James,  et  lui  assura  un  traitement 
annuel  de  mille  livres  sterling.  La 
révolution  de  t688,  qui  précipita  ce 
prince  de  son  trône,  causa  quelques 
changements    dans   la   position  de 
Leyburn  ;  il  fut  même  mis  à  la  Tour 
de  Londres  :  mais  les  ministres  de 
Guillaume    III ,  rassure's    sur    son 
caractère ,  lui  rendirent  bientôt  la  li- 
berté, et  le  laissèrent  exercer  paisible- 
ment les  fonctions  de  son  e'iat ,  jus- 
qu'à sa  mort  arrivée  en  i-joS.  Outre 
«ne  Lettre  pastorale  y  adresse'e  aux 
catholiques  d'Angleterre,  on  a  de  ce 
prélat  une  élégante  traduction  latine 
du  Traité  de  la  nature  des  coiys  ^ 
et  de  Vimmortalité  de  Vame ,  com- 
pose en  anglais,  parKcnelm  Digby, 
Paris,  i65i,  in-fol.  Ou  conservait 
au  collège  de  Douai,  un  manuscrit 
in-4'*. ,  de  ses  Lettres,  faites  pour  ser- 
vir de  modèles  dans  ce  genre  d'é- 
crire en  latin.  —  Nicolas  LEYBurxW, 
autre  neveu  de  George ,  et  dernier 
frère  de  Jean  ,  après  s'être  acquis 
l'estime  de  ses  compatriotes  catho- 
liques^.  comme  missionnaire,  comme 
procureur  et  vice-président  du  col- 
lège de  Douai,  mourut  en  i-joj.  Il 
est  auteur  d'une  traduction  anglaise 
des  histructions  pour  la  jeunesse , 
par  Gobi  net ,  si  vol.  in-8^'.        T-d. 
LEYDE(  Jeani>e).  ï\y.  Eyck. 
LEYDE  (Jean  de  ) ,  roi  des  Ana- 
baptistes, naquit  vers  la  fin  du  xv*^. 
siècle.    Le    véritable    nom   de  cet 
bomme  extraordinaire ,  qui  ,  né  de 
parents  obscurs, sut  secréeruntrônC;, 
était  Bockels  ou  Bockelson.  FiUd'im 
bailli  de  la  Haye,  mais  ayant  perdu 
.ses  parents  dans  son  enfance  ,  il  fut 
élevé  à  Leyde,  et  forcé  d'apprendre 
le  métier  de  tailleur.  Cependant  ses 
dispositions    naturelles  suppléèrent 
au  défaut  d'instruction^  il  se   dé- 


LEY 

goûta  d'un  état  pour  lequel  il  ne  se 
sentait  pas  né,  entra  dans  le  corn-  | 
merce  ,  passa  quatre  ans  en  Angle- 
terre ,  visita  la  Flandre  ,  Lisbonne  , 
Lubeck  ,  revint  à  Leyde  ,  y  épousa 
la  veuve  d'un  batelier ,  et  établit  une 
petite  auberge.  Ses  goûts  continuè- 
rent de  rcntraîncr  vers  une  carrière 
plus  élevée.  Tout  en  faisant  le  métier 
d'aubergiste  ,  il  se  livrait  à  la  litté- 
rature, composait  des  pièces  devers 
et  de  théâtre ,  tenait  école  de  poésie , 
jouait  la  comédie  ,  et  disputait  sur 
la  Bible  avec  une  érudition  et  une  fa- 
cilité surprenantes.  Sa  petite  auberge 
fut  le  rendez-vous  des  poètes  et  d'une 
société  fort  joyeuse.   On  y  jouait 
riait ,  dansait  et  disputait  sans  cesse. 
Ce  fut  une  école  de  plaisirs  et  peut- 
êti:e  d'instruction;  mais  elle  n'enri- 
chit pas  le  maître  de  la  maison  ,  qui , 
portait  ses  vues  plus  loin ,  et  voulait 
jouer  un  rôle  plus  sérieux.  L'espri' 
de  la  réformation  avait  fait  fermen-^ 


ter  les  tètes  en  Allemagne  et  en  Hol- 
lande: le  vertige  réformateur  s'était 
emparé  de  la  secte  des  Anabaptistes, 
qui ,  non  contents  de  propager  leur 
doctrine,  décriaient  celle  des  autres 
cul  les  ,  et  déclamaient  en  fanatiques 
contre  les  dogmes  des  catholiques  et 
des  protestants.  Ils  soulevèrent  plu- 
sj'3urs  villes  de  la  Hollande,  etcora-îj 
mencèrent  à  gagner  de  l'influenc* 
dans  la  Westphalie.  A  Munster  ,  o^ 
les  autorités  municipales  ,  depuis 
long-temps  en  querelle  avec  leur  évt 
que, s'étaient  déclarées  en  faveur  di 
protestantisme,  quelques  prédicateurs 
anabaptistes  ,  d'abord  réduits  au 
silence  à  cause  de  leur  hardiesse , 
finiront  par  l'emporter  sur  les  prédi- 
cateurs protestants  ,  et  par  entraîner 
plusieurs  magistrats.  Bockels,  ayant 
entendu  vanter  leurs  talents  comme 
orateurs  ,  voulut  les  entendre  :  la 
curiosité  et  U  mobilité  naturelle  de 


LKY 

5on  esprit  furent  probablement  les 
!ils  inotirsijni  lui  firent  abandonner 
I  iVinme  et  son  auberf;e  ,  pour  se 

,  rcndreà  Mimstor.  11  yarriva  en  i  )33, 
écouta  les  pmlicn leurs  anabaptistes  ; 
leur  fanatisme  le  gagna  ;  il  étudia 
îi^nr  doctrine,  cl  la  prêcha  ensuite 
^  ce  toute  la  chaleur  d'un  fervent 
iÉ<  ophite.  Il  ne  revint  en   Hollande 

■■  que  pour  prêcher  et  disputer  ;  et  dès 
lecommencenientde  l'année  suivante, 
ii  reparut  à  Munster  avec  l'anabap- 
tiste Mathison.  Tous  deux  revêtus 
d'un  costume  étrange,  furent  annon- 

'    CCS  par  les  prédicateurs  de  leur  secte 

•  comme  des  prophètes  envoyés  de 
Dieu  pour  déjouer  les  projets  des 
iiifidèles.  Quelques  jours  après,  Jean 
de  Lcyde  et  Tanabapliste  Knipper- 
dolling  parcoururent  les  rues  ,  en 
criant  :  Faites  pénitence  !  la  ven- 
f^eance  du  pc^re  céleste  approche  ! 
EtîVaye  de  ces  cris  lugubres  ,  le  peu- 
ple accourut  en  foule  pour  se  faire 
nebaptiscrrle  nombre  des  fanatiques 
augmenta  de  jour  en  jour;  il  y  etit 
des  inspirations  ,  des  visions  ,  des 
scènes  convnlsionnaires.  Les  catho- 
liques et  les  prolestants  ,  voyant  la 
frénésie  de  la  secte  rivale,  se  tinrent 
sur  leurs  gardes  ,  et  se  fortifièrent 
dans  un  quartier  de  la  ville.  Le 
prince-evêque,  de  son  côte  ,  ayant 
perdu  toute  son  autorité,  rassera- 
nlait  des  troupes  pour  assiéger  les 
habitants  et  réduire  les  protestants 
cl  les  anabaptistes.  Les  prédicalions 
Ainislres  redoublèrent  dans  la  ville 
à  mesure  que  le  danger  croissait  •  les 
femmes  prêchèrent  la  pénitence 
avec  plus  de  fanatisme  encore  que 
les  hommes  :  tous  les  cerveaux 
étaient  ébranles ,  et  l'autorité  de  Jean 
d«  Leyde,  qui  se  distinguait  par  une 
eloeuliou  facile  ,  et  imposait  par 
'ni  maintien  théâtral  ,  augmentait 
tque  jour.  Le  priuc«  de  Waldeck  , 


Ll'Y  3g  I 

evéque  de  Munster, yint  mettre  le  si^- 
ge  devant  la  ville,  après  avoir  enrôU 
des  troupesau\quelles  il  avait  promis 
la  moitiédubutin  lorsdu  sacdeMuns- 
ter,  en  se  réservant  l'autre  moitié. 
Ceux  des  habitants  qui  lui  étaient  le 
plus  dévoués  ,   quittèrent  la    ville. 
Les  anabaptistes  étant  alors  maîtres 
de  la  place,  se  préparèrent  à  une  vi- 
goureuse résistance.  Dans  la  première 
fureur,  ils  pillèrent  les  églises, et  brû- 
lèrent tous  les  livres  et  manuscrits 
qu'ils  purent  saisir.  Apri  s  ces  actes  de 
violence,  ils  préparèrent  les  moyens 
de  défense ,  formèrent  un  gouverne- 
ment composé  de  douze  vieillards, 
qu'ils  nommèrent  les  anciens  du  nou- 
vel Israël,  et  d'un  prophète  charge' 
d'annoncer  leurs  ordres  au  peuple.  Ce 
rôle  échut  à  Jean  de  Leyde.  Les  douze 
anciens  publièrent  une  sorte  de  cons- 
titution. Les  vivres  furent  tous  dépo- 
sés dans  des  magasins  communs ,  les 
habitants  furent  armés  ,  les  fortifi- 
cations furent  reparées  et  améliorées; 
et  quelques-uns  de  ceux  qui  désap' 
prouvèrent  les  mesures  prises  par  ces 
fanatiques  ,  furent  mis  à  mort.  Les 
assiégeants,  de  leur  côté,  ne  firent 
grâce  à  aucun  des  anabaptistes  qui 
tombèrent  en  leur  pouvoir.  Tout  en 
se  défendant   avec   courage  ,   Jean 
et  ses  collègues  prêchaient  la  péni- 
tence; ils  prescrivaient  la  plus  grande 
sobriété ,  et  en  même  temps  ils  auto- 
risaient la  polygamie ,  au  grand  scan- 
dale  des  vrais  fidèles.    Bientôt   un 
prophète  anabaptiste   annonça  que 
Dieu  avait   élu   Jean    poiur   roi  du 
nouvel  Israël  ;  et  le  fils  de  Bockels 
fut  oint,  et  proclamé  roi  des  Ana- 
}>aptistes.  Le  nouveau  souverain  se 
forma  une  garde  de  vingt-huit  tra- 
bans  ,  une  cour  ,  et  même  un  sérail. 
Après  la  mort  de  sa  première  femme, 
oui  avait  été  exécutée  dans  une  émeute 
de  la  nouvelle  secte  à  Leyde, il  arait 


Sgct 


LEY 


épouse  la  veuve  du  prophète  Matlii- 
son.  Celle-ci  fut  proclamée  reine  •  et 
douze  à  quinze  autres  femmes  lui  fu- 
rent subordonnées.  Un  téméraire, 
ayant  osé  blâmer  cette  polygamie  , 
eutaussitôtlatête tranchée.  Les  armes 
du  nouveau  roi  étaient  un  globe  percé 
par  deux  glaives,  et  surmonté  d'une 
croix.  On  frappa  plusieurs  médailles  ; 
Tune  représentant  le  roi  en  grand 
costume  ;  une  autre  avec  celte  légende: 
Un  seul  Dieu ,  une  seule  foi ,  un  seul 
hapttme  ;  1 534;,  ^  Munster.  En  vain 
le  prince-évcque  chercha-t-il  à  sou- 
lever le  peuple  contre  ce  nouveau  maî- 
tre :  vigilant  et  actif,  Jean  de  Leyde 
déjoua  tous  ses  efforts.  Au  milieu  des 
plaisirs  auxquels  il  se  livrait ,  il  sut 
contenir,  par  la  terreur,  le  peuple  que 
la  famine  commençait  à  pousser  au 
désespoir;  le  moindre  signe  de  défec- 
tion était  puni  de  mort  :  on  prétend 
qu'il  fit  même  subir  le  dernier  sup- 
plice à  une  de  ses  femmes  pour  s'être 
refusée  à  cohabiter  plus  long-temps 
avec  lui.  Il  envoya  des  missionnaires 
dans  les  autres  villes  de  l'évêché  afin 
de  les  gagner  pour  la  nouvelle  secte; 
maisWaldeck  les  fit  saisir  et  exécuter 
avec  tous  ceux  qui  s'étaient  fait  reba- 
tiser.  Jean  de  Leyde  envoya  enfin 
des  émissaires  en  Hollande  pour  ob- 
tenir des  secours.  Plusieurs  tentatives 
furent  faites  parles  anabaptistes  hol- 
landais afin  de  saisir  Tautorité  et  de 
faire  cause  commune  avec  leurs  frères 
de  Munster  ;  mais  elles  échouèrent 
entièrement.  Depuis  plus  de  six  mois 
le  siège  traînait  en  longueur ,  lorsque 
dans  une  nuit  orageuse  du  mois  de 
juin  1 5 35,  une  partie  des  troupes 
épiscopales  fut  introduite  par  trahi- 
son dans  la  ville.  Les  anabaptistes  se 
retranchèrent  derrière  des  poutres 
et  des  chariots  dans  la  place  publi- 
que ,  et  périrent  la  plupart  en  com- 
battant. Jean  de  Levdefut  arrêtédans 


LEY 

une  tour.  Deux  de  ses  compagnons, 
furent  également  pris  \ivants,et  con- 
duits dans  un  des  forts  de  Tévêché.  La 
ville  fut  abandonnée  au  pillage  ;  et 
pendant  huit  jours ,  les  soldats  s'y  li- 
vrèrent aux  plus  affreux  excès  :  tous 
les  habitants  que  l'on  soupçonnait 
d'avoir  penché  pour  la  nouvelle  doc- 
trine ,  furent  massacrés  ;  et  comme 
les  anabaptistes  passaient  pour  avoir 
généralement  le  teint  blême,  il  suffi- 
sait d'être  pâle  pour  devenir  victime 
de  la  soldatesque.  La  vengeance  de 
Waldeck  fut  si  cruelle ,  que  la  diète 
de  Worms  s'intéressa  pour  les  mal- 
heureux habitants  de  Munster,  et  prit 
des  mesures  pour  mettre  fin  aux  exé- 
cutions. Au  mois  de  janvier  i536  , 
Jean  de  Leyde  et  ses  deux  complices 
furent  tirés  de  la  prison,  et  conduits 
sur  la  place  publique  :  après  avoir 
été  tenaillés  ,  pendant  plus  d'une 
heure  ,  avec  des  tenailles  ardentes  , 
on  leur  plongea  un  poignard  dans  le 
cœurjensuite  on  suspendit  leurs  corps 
dans  des  cages  de  fer  au  clocher  de 
l'église  Saiut-Lambert.  Ces  cages  y 
sont  encore;  jctlcs  instruments  du  sup- 
plice sont  demeurés  suspendus  de- 
vant l'hôtel-dc-ville.  Telle  fut  la  fin 
d'une  révolution  qui ,  chez  un  peuple 
d'un  caractère  plus  enthousiaste  que 
les  habitants  de  la  Westphalie ,  au- 
rait pu  changer  la  face  de  l'Allema- 
gne ,  et  fonder  l'empire  d'une  secte 
qui  depuis  est  tombée  dans  l'obs- 
curité. Jean  de  Leyde  avait  proba- 
blement, comme  Ma  homet,  commen- 
cé à  se  faire  illusion  à  lui-même 
avant  de  séduire  les  autres  :  il  croyait 
à  l'inspiration  divine ,  et  en  vertu  de  sa 
mission,  il  voulut  s'élever  un  trône. 
Dévot  et  voluptueux,  humble  et  rem- 
pli d'ambition  ,  ce  fut  par  le  fana- 
tisme, pins  que  par  ses  talents,  qu'il 
s'empara  du  pouvoir  :  cependarit  il 
fit  preuve  d'un  caractère  peu  com- 


I.EY 

muii  en  parvenant  à  dirij^cr  ainsi 
ce  fanatisme  dans  son  intérêt,  et  à 
s'ëriger  en  despote  sur  une  secte  qui 
était  née  dans  le  républicanisme.  On 
montre  encore  à  Munster  le  lieu  où 
était  son  harem  :  son  portrait  est  à 
la  bibliothèque  du  chapitre  de  la  ca- 
thédrale ;  il  y  a  aussi  deux  portraits 
de  Jean  de  Leyde  et  de  sa  femme  , 
peints  par  Floris.  Tous  les  ans  une 
procession  du  clergé  de  la  cathé- 
drale rappelle  à  celte  ville  la  chute 
de  Tanabaptisme  et  le  triomphe  de 
l'autorité  épiscopale.  On  joue,  de 
temps  à  autre ,  sur  le  théâtre  de 
^fullster ,  une  mauvaise  tragédie  dont 
Jean  est  le  héros.  Ses  aventures  font 
aussi  le  fonds  d'un  roman  médiocre, 
im])riraé  à  Leip/ig.  Kcrsscnbroick  a 
écrit  en  latin,  et  Catrou  en  français, 
l'histoire  des  troubles  de  l'auabap- 
tisme.  D-G. 

LEYDE  (Lucas  Dammesz,  dit 
Lucas  de  ) ,  célèbre  graveur  et  pein- 
tre ,  né  à  Leyde,  en  i494  ,  reçut  les 
premières  leçons  de  dessin ,  de  son 

S  ère  Hugues  Jacobs,  peintre  assez  raé- 
iorre,  et  passa  dans  l'école  de  Cor- 
neille Engelbrechtsen.  Mais  Lucas 
était  né  pour  ne  rien  devoir  qu'à  lui- 
même.  11  n'avait  que  neuf  ans  ,  et  il 
s'était  rendu  familiers  tous  les  genres 
de  peinture  ,  sur  verre ,  en  détrempe 
et  a  l'huile.  Il  peignait  avec  un  égal 
talent  le  paysage  et  le  portrait.  En 
vain  sa  mère ,  craignant  pour  sa 
santé,  voulait  le  détourner  du  tra- 
vail; il  passait  les  nuits  entières  à 
étudier.  Il  ne  faisait  rien  sans  co- 
pier la  nature,  et  ne  fréquentait,  des 
jeunes  gens  de  son  âge,  que  ceux 
qui  avaient  les  mêmes  goûts  que  lui. 
A  douze  ans ,  il  peignit,  en  détrempe, 
y IlisUire  de  Saint- Hubert  ;  et  ce 
tableau  eut  un  succès  universel. 
Ne  se  bornant  pas  à  la  peinture , 
il  apprit  la  gravure  à  la  pointe  cbei 


LEY 


3î)J 


un  armurier  qui  faisait  mordre  à 
l'eau-forte  des  ornements  sur  des 
cuirasses  ;  et  c'est  chez  un  orfèvre 
qu'il  se  perfectionna  dans  la  gravure 
au  burin.  Bientôt  il  surpassa  tous  les 
artistes  en  ce  genre,  et  rivalisa  avec 
Albert  Durer  lui-même.  A  l'âge  de 
quatorze  ans  ,  il  grava  une  estampe 
représentant  Mahomet  dans  un  étal 
d'ivresse  ,  égorgeant  le  moine  Ser- 
fr»//^.  Cette  estampe,  datée  de  1 5  08,  est 
la  première  pièce  de  Lucas  dont  l'é- 
poque soit  déterminée;  mais  comme 
elle  est  très-bien  gravée,  et  que  le 
dessin  même  en  est  assez  correct,  il 
y  a  lieu  de  croire  qu'il  en  avait  gravé 
beaucoup  d'autres  avant  d'en  venir 
à  ce  point.  L'art  de  la  gravure  lui 
doit  une  de  ses  parties  les  plus  essen- 
tielles ,  la  magie  du  clair-obscur,  H 
est  vrai  qu'il  a  depuis  été  surpassé 
dans  cette  même  partie  ;  mais  d  lui 
reste  le  mérite  d'avoir  conçu  le  pre- 
mier l'idée  d'affaiblir  les  teintes  re- 
lativement aux  distances.  C'est  une 
époque  remarquable  dans  l'art  ;  et 
Vasari  a  dit:  «  Ses  sujets  historiques 
»  sont  d'une  grande  variété  ,  et  il  a 
»  su  éviter  la  confusion  ;  il  a  sur- 
»  passé  Albert  Durer  dans  la  compo 
»  sition  ;  il  a  plus  aprofoudi  que  ce 
1)  dernier  toutes  les  règles  qui  tien- 
»  nent  à  celte  partie  de  l'art.  A  peine 
»  la  peinture  pourrait-elle ,  par  ses 
»  couleurs  ,  faire  mieux  seutir  la 
»  perspective  aérienne.  Les  peintres 
»  mêmes  ontpuisé,dans  sesgravures, 
»  les  principes  de  leur  art.  »  Lu- 
cas prenait  un  soin  particulier  de  ses 
épreuves,  et  la  tache  la  plus  légère 
suffisait  |>our  les  lui  faire  détruire. 
I^  réputation  de  cet  artiste  s'étendit 
surtout  en  Italie.  A  peine  Albert 
Durer  eut-il  vu  les  premières  pro- 
ductions du  graveur  hollaiid.iis  , 
qu'il  conçut  pour  lui  la  plus  haute  es- 
time :  il  lit  le  vuyagt  de  Le)  de  pour 


3ç)4  LEY 

le  connaître  ;  et ,  dès  qu'ils  se  furent 
vus ,  ces  deux  artistes  se  lièrent  d'une 
amitié  qui  ne  fut  interrompue  que  par 
la  mort.  Animes  d'une  noble  e'mula- 
tion  ,  Albert  et  Lucas  se  communi- 
quaient leurs  lumières,  choisissaient 
quelquefois  les  mêmes  sujets ,  et  les 
traitaient  chacun  à  leur  manière. 
Pendant  qu'Albert  était  à  Leyde  , 
les  deux  amis  ,  en  te'moignage  de  Ta- 
niitië  et  de  l'estime  qu'ils  s'étaient 
vouées ,  se  peignirent  réciproque- 
ment sur  un  même  panneau.  Tou- 
jours jaloux  d'acquérir  de  nouvelles 
connaissances  ,  Lucas  conçut  le  pro- 
jet de  visiter  les  artistes  les  plus  re- 
nommés des  Pays-Bas.  Il  fît  ce  voyage 
à  grands  frais,  donnant  des  fêtes  aux 
peintres  dans  toutes  les  villes  qu'il 
traversait.  Il  avait  fait  équiper  un 
vaisseau  à  ses  dépens  ;  et  attiré  par 
la  réputation  dont  jouissait  alors 
Jean  de  Mabnse ,  il  se  rendit  à  Mid- 
delbourg,  où  résidait  ce  peintre  ,  et 
se  lia  avec  lui  d'une  étroite  amitié. 
Ils  visitèrent  ensemble  les  villes 
de  Gand  ,  de  Malines  ,  d'Anvers  ; 
et  tous  deux  rivalisèrent  de  dépense 
et  de  générosité.  Mais  ce  voyage  fut 
loin  d'être  heureux  pour  Lucas.  Il 
revint  malade  à  Leyde ,  non  sans 
soupçon  d'avoir  été  empoisonné  par 
des  rivaux  jaloux.  Frappé  de  cette 
idée,  il  ne  jouit  plus  d'un  seul  ins- 
tant de  repos;  toujours  accablé  de 
son  mfl ,  il  ne  quitta  presque  point 
le  lit  pendant  les  dernières  années  de 
sa  vie.  Toutefois ,  il  avait  trouvé  le 
moyen  d'y  peindre  et  d'y  graver  ,♦  et 
c'est  dans  ce  travail  seulement  qu'il 
trouvait  quelque  distraction  à  ses 
maux.  Cependant,  l'opinion  la  plus 
générale  n'attribue  les  infirmités  et 
la  mort  prématurée  de  Lucas,  qu'à  la 
délicatesse  de  son  tempérament ,  en- 
core augmentée  par  son  extrême  ap- 
plication au  travail.  Quelques  heures 


LEY 

avant  sa  mort  il  travaillait  encore  à 
sa  dernière  planche  qui  représente  une 
P allas.  Sentant  approcher  sa  fin ,  il 
voulut  jouir  encore  une  fois  de  la 
vue  du  soleil ,  se  fît  transporter  à 
l'air, et  mourut  en  i533,  âgé  de 89 
ans.  Il  s'était  marié  fort  jeune, et  n'eut 
de  son  mariage  qu'une  fdie.  Quand  on 
réfléchit  au  peu  de  temps  qu'a  vécu 
cet  artiste ,  et  à  la  maladie  qui  le  ré- 
duisit à  garder  le  lit  pendant  les  der- 
niers temps  de  sa  vie ,  on  est  étonné 
de  la  quantité  de  tableaux  qu'il  a 
laissés  en  tout  genre ,  sur  verre ,  en 
détrempe  ,  à  l'huile; et  l'étonnement 
redouble,  lorsque  l'on  considère  que 
le  nombre  de  planches  qu'il  a  gra- 
vées ,  soit  au  burin ,  soit  àl'eau-forte, 
monte  à  cent  soixante-douze ,  sans 
compter  une  vingtaine  de  tailles  de 
bois,  gravées  sur  ses  dessins,  et  qui 
portent  son  chiffre.  Comme  pein- 
tre ,  Lucas  de  Leyde  ,  peut  passer 
pour  le  plus  grand  artiste  que  la 
Flandre  ait  eu  de  son  temps.  Ses  ta- 
bleaux sont  bien  peints,  et  d'une  tou- 
che large,  quoique  finie  ;  la  couleur 
en  est  d'une  extrême  fraîcheur.  C'est 
surtout  dans  la  peinture  des  femmes 
qu'il  déploie  toute  la  délicatesse  de 
son  pinceau.  Dans  le  paysage,  les 
arbres ,  les  ciels  et  les  fabriques  sont 
peints  avec  finesse  et  légèreté.  En 
général,  ses  compositions  sont  bel- 
les ,  riches ,  variées  et  sans  confu- 
sion. Cependant  son  dessin,  quoique 
correct ,  manque  de  moelleux ,  et 
pèche  par  une  imitation  trop  mi- 
nutieuse de  la  nature.  D'un  autre 
côté,  ses  figures  se  détachent  trop 
sèchement  sur  les  fonds  ;  ce  qui 
leur  donne  un  air  un  peu  dur.  Les 
teintes  ne  se  fondant  pas  d'un  ton 
assez  dégradé  ,  les  couleurs  sem- 
blent parfois  trop  crues;  mais  ce 
défaut  doit  être  plutôt  attribué  a 
la   manière   dont   on   peignait    du 


LEY 

temps  (Ir  Lucas,  qu'à  la  nalurrtnomp 
de  son  talent.  Le  Musée  du  liouvrc 
possède  deux  tableaux  de  ce  maître  : 
l'un  représente  la  Descente  de  Croix, 
j    Composition  de  neuf  figures ,  l'autre 
une  Saint atlon  An^èlujue.  11  possé- 
dait aussi  un  Portrait  de  Lucas  de 
Le^de,  peint  par  lui-même  ;  — Saint 
Jén'fmc  dans  le  disert; — Hérodiade 
portant  dans  un  bassin  la  tête  de 
Saint -Jean-  Baptiste  ;  —  un  Po'.  trait 
de  Femme  en  prière  ;  —  un  Por- 
trait d'Homme  dans  la  même  at- 
titude, tous  deux  peints  sur  bois; 
»     •~-  la  Fontaine  de  Jouvence,  pay- 
!     sage  avec   figures.  Les  deux,   pre- 
miers ont  e'të  rendus  à  la  Prusse ,  eu 
l8i4;  les  quatre  autres  ont  été  rc- 
•     pris  en  i8i5,  par  le  duc  de  Bruns- 
1     wiclL,  ainsi  que  les  trois  dessins  sui- 
vants :  le  Dévouement  de  Curtius  ; 
]a   Femme   adultère;  un  Homme 
armé  d'un  arc  et  d'une  flèche.  Les 
dessins  de  Lucas  de  Leyde  sont  ter- 
'     tninés  à  la  plume  :  le  travail  en  est 
fin  et  délicat  ;  les  hachuressont  croi- 
sées en  ditïérents  sens.  Il  y  en  a  quel- 
ques-uns laves  au  bistre ,  relevés  avec 
j     ou  blanc  au  pinceau  ,  hachés  de  la 
î^ème  manière  que  s'ils  étaient  faits 
ia  plumée.  On  les  reconnaît  facile- 
ment au  caraclèredcs  draperies ,  aux 
'    airs  de  tête,  à  l'art  et  à  l'esprit  de  la 
;     touche.  Ses  estampes  ,   déjà  payées 
fort  cher  de  son  vivant,  n'ont  fait 
qu'augmenter  de  valeur.  Il  est  très- 
rare  d'eu  rencontrer  de  bonnes  épreu- 
ves; et  elles  sont  encore  plusdifïiciles 
à  réunir,  que  celles  d'Albert  Durer. 
M.Bartsch,  garde  de  la  bibliothèque 
impériale  de'^Yicnne  ,  a  publié  un 
talogiic  raisonné  des  centsoixiinte- 
-'»u7,f-  pi<  ces  dont  se  compose  l'œu- 
vre de  Lucas  de  Leyde.  On  peut  y 
'^>ir  le  détail  et  le  prix  des  divers 
ivrages  de  cet  artiste.   Le  Manuel 
ff^s  amateurs  de  l'art  y  de  Uuber  et 


LEY  395 

Rosi,  en  contient  une  nomenclature 
assc7.  étendue  :  on  se  bornera  ici  à 
parlerdes pièces  qui,  par  la  perfection 
du  travail,oules  anecdotes  auxquelles 
elles  ont  donné  lieu,  méritent  une 
attention  particulière.  I.  Abraham 
renvoyant  Agar,  in-fol.  Celte  pièce, 
une  des  premières  de  l'artiste,  est 
d'une  extrême  rareté;  on  la  croit 
gravée  en    i5o8.  IL   ]J Adoration 
des  Mages  ,  grand  in-fol.  Cette  es- 
lampe  ,  une  des  plus  considérable» 
de  l'œuvre  de  Lucas ,  est  datée  de 
1 5 1 3  ;  elle  a  été  regravée  par  H.  Golt- 
zius ,  avec  peu  de  diflTérencc  ;  et  on 
la  met  au  nombre  des  six  chefs-d'œu- 
vre de  ce  dernier  graveur.  III.  Jé- 
sus-Christ présenté  au  peuple ,  oir 
le  grand  Ecce  homo  ,  grand  in-fol. 
en  travers.  Cette  riche  composition 
contient  plus  de  cent  figures.  C'est 
une  des  pièces  capitales  de  Lucas  ; 
on  y  admire  la  convenance  des  ca- 
ractères, l'ordonnance  de  la  compo- 
sition ,  et  surtout  rinlelligcncc  avec 
laquelle  les  diOerents  plans  sont  dé- 
gradés :  elle  porte  la  date  de  i5io  ; 
l'artiste  n'avait  alors  que  seize  ans, 
IV.  Jésus-Christ  entr^  les  deux  lar^ 
Tons;  très-belle  estampe  grand  in- 
fol.  en  travers  ,  presque  aussi  riche 
de  composition  que  la  précédente, 
puisqu'elle  coulieîit  quatre-vingt-dix 
figures.  Les  bonnes  épreuves  de  cette 
pièce,  une  des  plus  parfaites  de  l'œu- 
vre de  Lucas ,  sont  excessivement 
rares;  elle  est  datée  de  iSi-y.  V.  /.« 
Betour  de  l'Enfant  prodigue  :  cette 
pièce,  que  l'on  croit  gravée  en  i5io, 
est  admirable  par  riutelligence  avec 
laquelle  les  lointains  sont  exécutés. 
VI.  Saint-Christophe  dans  Veau , 
portant  l'Enfant- Jésus  sur  ses  épau- 
les ,  en  s' appuyant  avec  force  sur 
une  grosse  branche  d'arbre.  Celle 

{)elilr  estampe  in- 12  ,  une  des  meil- 
eures  de  l'arlLste,  paraît  avoir  «le 


3o6 


LEY 


gravée  en  1 5*21.  La  même  année  Al- 
bert Durer  avait  exe'cuté  \e  même  su- 
jet ;  et  Ton  présume  que  les  deux 
estampes  ont  été  faites  en  concur- 
rence. VII.  Marie-Madelène  se  li- 
vrant aux  plaisirs  du  monde  :  cette 
estampe  est  célèbre  sous  le  nom  de 
la  Danse  de  la  Madelène.  La  scène 
se  passe  dans  un  riche  paysage,  et 
l'action  cnesttriple.  Au  milieu  est  la 
Madelène,  la  tête  ceinte  de  l'auréole, 
donnant  la  main  à  un  homme  avec 
lequel  elle  danse  au  son  d'une  flûte 
et  d'un  tambourin  j  elle  est  environ- 
née de  plusieurs  groupes  des  deux 
sexes.  Vers  le  fond,  la  Madelène, 
la  tête  toujours  ceinte  de  l'auréole, 
poursuit  un  cerf  à  la  tête  d'une  troupe 
de  chasseurs  à  pied  et  à  cheval  :  en- 
fin, vers  le  sommet  d'un  roc  élevé, 
on  voit  l'ame  de  la  Madelène  ravie 
au  ciel  par  quatre  anges.  Celte  belle 
pièce,  qui  date  de  1 5 19,  est  une  des 

F  lus  recherchées  et  des  plus  rares  de 
œuvre  de  Lucas.  VIII.  Le  poète 
Virgile  suspendu  '  dans  un  panier 
hors  d'une  fenêtre,  par  une  courti- 
sanne,  qui,  pour  se  venger  de  quel- 
ques propos  quil  avait  tenus  sur 
son  compte ,  V expose  ainsi  à  la  ri- 
sée des  passants.  Ce  sujet  est  tiré 
d'une  vie  apocryphe  de  Virgile,  fort 
goûtée  du  temps  de  Lucas.  L'estampe 
est  gravée  avec  le  plus  grand  art  ;  la 
manière  en  est  plus  vive  et  plus  bril- 
lante que  dans  les  autres  ouvrages 
de  l'artiste.  Albert  Durer  fut  telle- 
ment frappé  de  sa  perfection,  qu'il 
conçut  le  dessein  d'en  publier  une 
qui  pût  rivaliser  avec  celle  de  Lucas; 
et  c'est  à  cette  concurrence  que  l'on 
doit  sa  fameuse  estam|>e  connue 
sous  le  nom  du  Ches^al  de  la  Mort. 
IX.  Ujlenspiegel  ou  V Espiègle  ; 
estampe  fameuse,  dont  on  ne  connaît 
que  cinq  ou  six  éprem^es  X.  Por- 
trait  de    V empereur    Maximilien 


LEY 

P»".  à  mi-corps.  11  est  ajusté  à  la 
mode  du  temps ,  en  cheveux  plats, 
et  coiffé  d'un  grand  chapeau.  Lucas 
le  peignit ,  lorsque  cet  empereur 
vint  à  Leyde  ;  mais  il  ne  grava  ce 
portrait  qu'en  1 5'io ,  un  an  après  la 
mort  du  prince.  C'est  la  pièce  la  plus 
considérable  qu'il  ait  gravée  de  la 
sorte;  c'est  aussi  undeses  plus  beaux 
ouvrages  et  un  des  plus  rares.  Lucas 
marquait  ses  estampes  de  la  lettre  L, 
quelquefois  à  rebours  ,  et  les  datait 
le  plus  souvent  de  l'année  de  leur 
composition.  La  galerie  de  Florence 
possède  le  Portrait  de  cet  Artiste, 
peint  par  lui-même  ;  il  l'a  gravé  à 
î'eau-forle,  et  on  lit  au  bas  :  Effigies 
Lucae  Leidensis ,  proprid  manu 
incid.  P-s. 

LEYDECKER  (  Melchior  ) ,  théo- 
logieu  calviniste ,  né  à  Middelbourg , 
le  3  mars  164^,  f"t  établi  pasteur 
dans  la  province  deZélande  en  1662, 
et  occupa,  en  1678,  une  chaire 
de  professeur  à  Ulrecht  :  quelque 
temps  après  ,  il  prit  le  degré  de 
docteur  à  Leyde ,  et  se  prononça,  sui- 
vant Moreri,d'une  manière  Irès-A^ve 
contre  les  systèmes  de  Cocceius  et 
de  Descartes,  qu'il  regardait  comme 
des  innovations  dangereuses  ,  quoi- 
qu'il n'eu  eût  qu'une  connaissance  in- 
suffisante pour  les  condamner.  Celte 
vivacité  de  caractère  et  cette  légèreté 
de  jugement  lui  firent  commettre 
beaucoup  d'imprudences  et  defautes, 
durant  le  cours  de  sa  vie.  On  le  vit 
s'opposer  à  la  réimpression  des 
Grands  critiques;  et  il  ne  tint  pas 
à  lui  que  l'excellente  édition  d'Ams- 
terdam n'eût  pas  beu.  On  le  vit 
aussi  se  déchaîner  ,  avec  fureur , 
contre  les  ouvrages  de  Drusius,  et 
contre  celui  de  Spencer  ,  intitulé  De 
legihus  ritualibus  hehrœorum ,  qu'il 
croyait  n'avoir  été  entrepris  que  pour 
favoriser  le  sociniànisme.    Ccpen- 


LEY 

dant ,  totit  intolérant  quVtail  Lcy- 
deckcr,  il  desirait  beaucoun  un  rap- 

firochemcnt  entre  les  calvinislesel  les 
iithëriens  :  il  fit  même  qiiehjncs  ef- 
forts pour  l'opérer.  Du  reste,  il  était 
savant  dans  le  rabbinisme  ,  dans  la 
théologie  et  dans  l'histoire  ecelc- 
siastique.  Ses  nombreux  écrits  abon- 
dent en  recherehes  curieuses  et  in- 
téressantes ;  et  s'ils  manquent  de  cri- 
tique et  de  modération ,  ils  sont 
utiles  par  le  savoir.  Il  mourut  en 
1711.  Nous  avons  de  lui  :  I.  De 
Idstorid  jansenismi  libri  sex ,  quibus 
de  Cornelii  Jansenii  vitd  et  morte 
necnon  de  ipsius  et  sequacium  dog- 
matibus  disseritur,  Utrecht,  169:), 
inS^.  Cet  ouvrage,  où  l'on  trouve 
des  faits  curieux,  a  été  reTuté  par 
le  père  Quesnel ,  sous  ce  titre  :  La 
souveraineté  des  rois  défendue , 
contre  l'histoire  latine  de  Melchior 
Lefdecker,etc.,P3ins,  1704  et  17 12, 
I  vol.  in- 12.  La  réfutation  renferme 
quelques  principes  excellents.  On 
y  lit ,  page  4  :  Le  mépris  de  la  puis- 
sance souveraine  et  la  révolte  contre 
l'Eglise  ne  marchent  guère  Vune 
sans  Vautre.  Jean  Ylack ,  ministre 
protestant,  attaqua  aussi  V Histoire 
du  jansénisme  :  Leydecker  répondit 
par  une  Lettre  datée  de  1696,  et  par 
un  Livre  où  étaient  relevées  les  er- 
reurs de  Vlack,  Utrecht,  1698, 
in-8<».  IL  De  republicd  hebrœorum , 
libri  XII  ;  subjicitur  archatologia 
sacra  qud  historia  creationis  el  dilu- 
vii  mosaica  contra  Burneti  profa- 
nam  telluris  theoriam  asseritur. 
Amsterdam  ,  1704,  in-fol.  IlL  De 
varia  reipuhlicœ  hehrœorum  statu 
libri  lï,  thenlogico-politico-historici, 
formant  le  tome  deuxième  de  l'ou- 
vrage précédent ,  Amsterdam,  1 7 1  o, 
in-fol.  Ce  volume  renferme  des  anec- 
dotes singulières,  et  un  grand  nom- 
de  traits  curieux  sur  le  judai5.7ic, 


LEY  3t)7 

depuis  la  captivité  de  Babylonc  jus- 
qu'à Jésus-Ci hrisl.  IV.  rcrsioacno- 
tœ  in  Màimonidis  libnim  de  regibtis 
hebrœonim  eurunupiejuribuSy  Rotcr- 
dam,  1^)9,  in-B".;  inséré  ensuite 
dans  le  tome  dernierde  la  République 
des  HébreiLX.  Leydecker  avait  com- 
posé un  troisième  tome,  qui  com- 
mençait à  la  naissance  de  Jésus- 
Christ  ;  mais  il  demeura  manuscrit 
entre  les  mains  de  Charles  Thuin- 
man,  élève  de  Leydecker,  et  pasteur 
de  Middelbourg  :  il  est  encore  inédit, 
V.  Continuatio  historiée  eccleùas* 
ticœ  G.  Horniiy  Francfort ,  1 704  , 
in-8«.  (  Foj.  Georg.  Hon>,)  VI.  Jna- 
Ijsis  Scripturœ  et  de  ejus  interprcta- 
tione  in  concionibus  ,  ac  de  me- 
thodo  concionandi ,  Utrecht,  i683  , 
iu-8».  VIL  Historia  Ecclesiœ  Afri- 
canœ  illustrata ,  Utrecht  et  Leijûig , 
1690  ,  in-40.  VIII.  Fax  veritatis  , 
seu  exercilationes  adnonnullas  con- 
troversias ,  etc.  Leyde,  1677  '  •"-4*** 
IX.  Fisverilatis,seu  disquisitionian 
ad  nonnullas  conti oversias  ,  etc. , 
Utrecht,  1679,  in-4°.  Ces  deux  ou- 
vrages sont  dirigés  dans  le  même 
sens  contre  la  philosophie  de  Des- 
cartes. X.  Dissertatio  historico-thec- 
logica  de  vulgato  nuper  Cl.  Bekkerl 
volumiue,  et  Sciipturarum  autho- 
ritate  ac  veritate  pro  christiand  re» 
ligione  apologctica y  Utrecht,  1692^ 
in-B®.  Cette  dissertation  contre  le 
Monde  enchanté  de  Bekker ,  est  un 
des  meilleurs  ouvrages  qui  aient  pani 
à  cette  occasion.  Bayle  approuve  l'au- 
teur d'avoir  fait  voir  qu'il  n'y  aurait 
point  de  principe  plus  pernicieux 
à  la  religion  chrétienne  que  de  pré- 
tendre qu'il  ne  faut  pas  croire  ce 
qui  surpasse  la  comprélieusion  de 
notre  esprit ,  ou  ce  qui  n'est  point 
conforme  aux  notions  de  la  raison 
humaine  (  Béponse  ttiLt  questions 
d'un  provincial  ).  Comme  dacs  sa 


398 


LEY 


dissertation,  Leydecter  avait  alla* 
que  Louis  de  Wolzogue ,  Yzarii ,  mi- 
nistre réfugié  d'Amsterdam ,  publia 
contre  lui  :  uépologiaparentalis  Lu' 
dovici  ffolzogenii ,  1 69*2 .  XI.  Exer- 
citationes  selectœ  historico-theolo- 
gicœ ,  quibiis  antiqua  christiance 
ecclesiœ  doctrina  ex  monument is 
Patnim,  etc.  exponitur,  Amsterdam , 
171^2,  in-4**?  2  vol.  On  attribue  à 
Leydecker  :  Oratio  de  usa  linguœ 
hehraicœ  et  de  utilitatehumaniorum. 
litterarum  in  studio  theologico.  Ce 
laborieux  écrivain  a  donné  un  grand 
nombre  d'autres  ouvrages  tant  en  latin 
qu'en  hollandais.  On  en  trouve  la 
liste  dans  le  Trajectum  eruditum  de 
Burmann ,  pag.  i  -j  5- 1 83.  Leydecker 
a  été  placé  au  rang  des  savants  pré- 
coces par  Klefeker  j  et  ce  n'est  pas 
sans  litre  ,  puisqu'il  avait  lu  les  écrits 
des  rabbins  à  dix-sept  ans.  Ce  théolo- 
gien avait  refusé  la  chaire  de  Gro- 
ningue,  en  1689.  La  ville  d'Utrecht 
le  dédommagea  de  ce  sacrifice  en  aug- 
mentant son  traitement.       L-b-e. 

LEYSER  (Polycarpe),  en  latin 
Lj  seras ,  théologien  de  la  confes- 
sion d'Augsbourg  ,  naquit  en  i552  , 
à  Wynenden  dans  le  Wurtemberg. 
Ses  dispositions  lui  méritèrent  la 
protection  d'Auguste  ,  duc  de  Saxe , 
qui  le  fit  élever  dans  l'université  de 
Tubingue.  En  1578  ,  il  fut  appelé  à 
GoUersdorf ,  pour  remjDlir  les  fonc- 
tions de  ministre.  En  1576,  il  obtint 
le  degré  de  docteur  et  le  titre  de  pro- 
fesseur en  théologie  à  l'université  de 
Wittemberg,  et  ensuite  celui  de  sur- 
intendant. II  travailla,  eu  1579  ,  à 
la  rédaction  du  Formula  concordiœ 
entre  les  luthériens  cl  les  calvinistes , 
et  en  devint  le  plus  zélé  défenseur. 
Député ,  avec  le  ministre  Jacques 
André  ,  pour  obtenir  l'adhésion  des 
théologiens  et  des  ministres  de  l'élec- 
torat  de  Saxe ,  il  s'acquitta  de  §a 


LEY 

ne  vig 

il  assista  ,  dit  Bayle  ,  à  toutes   les 
assemblées  qui  furent  tenues  à  l'oc- 
casion de  ce  livre ,  et  pour  la  réunion 
des  calvinistes  et  des  luthériens ,  qui 
était  négociée  par  les  agents   du  roi 
de  Navarre.  En  j  588,  il  fut  nommé 
coadjuteur  de  Brunswick,  et  obligé 
d'accepter  cette  charge,  au  grand  re- 
gret de  ses  partisans  saxons.   Peu 
après  ,  il  devint  surintendant  des 
éghses  du  même  pays.  On  le  rappela  , 
en  1 593  ,  à  Wittemberg  ;  et  l'année 
suivante  ,  il  fut  nommé  à  la  charge 
de  premier  prtjdicateur  de  la  cour 
de  Dresde  ,  qu'il  occupa  le  reste  de 
sa  vie  ,  avec  celle  de  précepteur  des 
jeunes  princes  :  il  mourut  a  Wittem- 
berg ,  en  1601  ,  laissant ,  par  testa- 
ment ,  une  somme  pour  être  distri- 
buée ,  tous  les  ans  ,  le  jour  de  Saint- 
Polycarpe  et  de  Sainte  -  Elisabeth  , 
aux  élèves  de  la  communauté  de  cette 
ville.  On  porte  à  treize  le  nombre 
de  ses  enfants.  Les  longues  et  vives 
querelles  qu'il  eut  à  soutenir  contre 
le  jésuite  Gretser  ,  le  ministre  suisse 
Samuel  Huber  et  le  poète  Jean  Ma- 
jor,nerempêchèrent  pasde  composer 
beaucoup  d'ouvrages  :  on  peut  voir 
les  titres  de  quelques-uns  dans  Moréri  • 
nous  indiquerons  seulement  :  I.  Co-. 
lossus  Babjlonicus ,  quatuor  mundl 
monarchias  reprœ sent  ans  ;,  seu  Ex- 
positio    secundi  capitis   Danielis , 
Darmstadt,  1607  et  1609J  Leipzig, 
1608  et  161 0  ;  Francfort  ,  1609  et 
1 6 1 0 ,  in-4^.  II.  Schola  Bahjlonica, 
seu  Commentarius  in  primum  caput 
Danielis  ,  Darmstadt ,  1609,  in-4'*. 
III.  Expositio  primœ  partis  Gene- 
seos ,  seu  Historia  Adami ,  Leipzig , 
ï6o4,  in-4^.  ]  il  a  traité  de  même 
le  reste  de  la  Genèse ,  en  cinq  autres 
ouvrages.  IV.  Chrisiianismus  ,  Pa- 
pismus  _,  Calvinismus  ,  Wittemberg, 
1608  et  J620 ,  in-8^.  j  eu  allemand , 


M  V 

l6oa  ;  Wiltenibcrg  ,  i()i3  ,  in-S*., 
tn  latin.  V.  Hannuma  CK'anç^lka  à 
Martini)  Chemnitio  inchoata  ,  à 
J*oljcarfto  l/ysero  contimiaia  ,  et 
à  Joanne  Gherardo  absolut  a  ,  iii- 
4**.;  irapriracc  un  crand  nombre  de 
fois.  (  Voyez  Bibliot.  sacr.  du  P. 
Lelong.  )  VI.  Historia  ordinis  jesiii- 
tici  (  auctore  HaseninuUer  ) ,  cum 
duplici  Poljc.  Lj^seri  prœj'atione, 
Francfort,  i5()4  et  iGo5.  Le  P. 
Grelser  réfuta  cette  histoire  ;  et 
Lcyscr  répliqua  ,  Leipzig  ,  1607  , 
iu-8^.  Les  ouvrages  que  Leyser  a 
laisses  en  allemand  ,  ne  sont  guère 
moins  nombreux  :  ce  sont  des  dis- 
coirs,  des  sermons,  des  apologies 
des  dissertations  ,  etc.  On  peut  en 
voir  la  liste  dans  le  Dictionnaire  des 
savants,  par  Jœcher,  et  dans  Spize- 
lius  :  Templum  honoris  reseratum , 
jiag.  i(3.  Melchior  Adam  a  joint  sa 
Notice  biographique  à  celles  destheo- 
logiens.  Bjyle  bii  a  consacre  un  ar- 
ticle. —  Trois  autres  Leyser  ,  por- 
tant le  même  prénom  ,  se  sont  fait 
connaître  par  divers  ouvrages.  Poly- 
carpe  II ,  fils  du  précèdent  ,  ne'  à 
Wittemberg  ,  en  i586,  fut  aussi 
professeur  de  théologie  à  Leipzig  et 
à  Wittemberg ,  et  mourut  le  i  îj 
janvier  i  (533.  —  Son  neveu  ,  Poly- 
carpc  III ,  ne  à  Halle  ,  en  1(356,  fut 
pasteur  à  Magdcbourg, surintendant 
de  la  principauté  de  Galeuberg  ,  et, 
en  1708  ,  surintendant  général  à 
ZcU  :  il  mourut  le  1 1  octobre  i  ^'^5 , 
après  avoir  publié  divers  ouvrages 
ihéologiques.  —  Polycarpc  IV  ,  lils 
dePolycarpe  111, naquit  àWunstorp, 
en  1690,  fut  nommé  professeur  de 
philosophie  en  17 18,  de  poésie  en 
1 7 1 9  ,  et  d'histoire  en  1 7*26 ,  à  l'uni- 
Yersitéde  Hclrastadt  ;  il  avait  aussi 
reçu  le  bonnet  de  docteur  en  droit 
et  en  médecine  ,  à  Strasbourg,  et 
codant  il  utait  l«i  circulatiou  du 


LEY 

sang  :  il  mourut  .1  llelmstadt ,  le  7 
avril  i-jiS.  Parmi  ses  nombreux 
ouvrages  ou  opuscules  ,  nous  indi- 
querons :  I.  iJe  Cautionibus  circa 
bibliothecas  ,  Wittemberg  ,  1714  , 
in-4".  11.  Meditationes  de  genuind 
historia  literarià,  ibid.  1713,  in-4". 
III.  f'^indiciœ  générales  scriptorum 
(pli  vulgo  supposititii  habentur  , 
ibid.  1715,  in4o.  IV.  Selecta  île 
vitd  et  scriptis  Joh.  Bodini ,  ibid. 
1715,  in-4'*.  (  réimprimé  dans  Y^p- 
paratus,  n».  10  ci-après.  )  V.  Dis- 
sert atio  de  origine  eruditionis  non 
ad  Judœos  setl  ad  Indos  referendd, 
ibid.  1716,  in-4*'.  VI.  Animadver- 
siones  criticœinEpfiemeridum  lite- 
rat  arum  inprimis  hodiernarum  me- 
thodum,  ibid.  17 16,  in-4".  VIL 
Dissertatio  de  fictd  medii  œvi  bar- 
barie inprimis  circà  poësin  latinani, 
Helmstadt  ,  1719  ,  in-40.  MIL  De 
po'ési  disciplinariim  principe  ,  ibid. 
1720  ,  in  -  4**.  IX.  Historia  poëta- 
rum  et  poëmatum  medii  œi^i,  Halle, 
1721 ,  in-8".  ;  ouvrage  curieux ,  mais 
bien  incomplet  :  on  y  trouve  pliitàt 
la  liste  des  productions  des  poètes 
du  moyen  âge  (  du  quatrième  au 
quatorzième  siècle  )  que  des  notices 
Inographiques  sur  leur  vie.  Quelques 
petits  poèmes  y  sont  insérés  en  en- 
tier. A.  u4pparatus  litterarius  socie- 
tatis  Colligentium  ,  Wittemberg  , 
1717,  in-S*^.  j  reproduit  en  1 7 -2  2  , 
sous  le  titre  d'/con  omnis  generis 
doctrinœ ,  et  en  1729,  sous  celui 
à\4mœnitates  litterariœ.  XL  De 
salute  Augusti  ex  numis,  Helmstadt, 
I7'23  ,  in-4**.  XII.  De  principum 
profëctione  et  adventu  ex  munis  , 
ibicl.  in-fol.  XlII.  De  primis  Juris 
gennanici  scriuti  incunabulis  ,  ibid. 
1 7*23 ,  in-4'*  aIV.  De  verd  geogra- 
phiœ  methodo  ,  cum  specimine  ai- 
lantis  ,  ibid.  i7'26,  in  -  4**.  XV. 
Historia    comitum    fVunstorpien- 


/lOO 


LEY 


sium  y  ibid.  1716,  in  -  4*^-  XVÏ. 
Observata  diplomatico  -  historica 
de  iis  quœ  Justiniano  imperatori 
in  proœmio  Institutionum  imperitè 
supposita  sunt ,  îbid.  17^27  ,  iii-4^. 
XVII.  De  jwe  Justinianeo  à  Lo- 
thario  imperatore  in  Germaniam 
minime  introducto  ,  ibid.  17^27  , 
in-4^.  Leyser  avait  donné  lui-même 
un  aperçu  de  ses  travaux  ,  sous  ce 
titre  :  Conspectus  script orum  edito- 
rum  et  edendorum,  Ilelmstadt,  1 7 1 9, 
in-4''.  L-B-E. 

LEYSER  (  Jean  ) ,  fils  de  Poly- 
carpe  II,  naquit  à  Leipzig  en  i63i, 
e'tudia  dans  l'université  de  cette 
ville  ,  et  y  fut  reçu  bachelier  ,  vers 
1 G54  y  dix  ans  plus  tard,  on  le  nomma 
pasteur  d'une  paroisse,  à  quelques 
lieues  de  Leipzig.  Dans  ce  temps-là , 
il  lit  connaissance  avec  un  comte  sué- 
dois, qui  lui  persuada  <ywg7îo/2-5ez/Ze- 
jnent  il  était  permis  à  un  homme 
d'épouser  plusieurs  femmes  à  -  la- 
fois  ,  mais  encore  que  cela  lui  était 
ordonné  dans  certains  cas ,  par  les 
lois  divines  et  humaines ,  pour  son 
intérêt  ici-bas  ,  et  pour  son  salut 
éternel.  L'entêtement  de  Leyser  pour 
cette  opinion  extravagante  lui  fit  per- 
dre son  emploi. Obligé  de  s'expatrier, 
ce  théologien  porta  son  système 
dans  les  villes  voisines  de  Leipzig,  et 
partout  il  excita  l'indignation.  Tant 
que  le  comte  suédois  vécut ,  Leyser 
.eut  de  quoi  subsister  par  la  pension 
qu'il  en  recevait;  mais,  après  la  mort 
de  son  protecteur,  l'apôtre  de  la  po- 
lygamie se  réfugia  en  Danemark,  où 
il  devint  aumônier  d'un  régiment. 
Ses  opinions  ne  furent  pas  plutôt 
connues,  qu'il  fut  destitué  et  con- 
traint de  prendre  la  fuite.  Il  dirigea 
ses  pas  vers  la  Suède  ,  où  le  même 
sort  l'attendait.  Repoussé  des  états 
du  Nord  ,  Leyser  voyagea  en  Italie, 
en  Angleterre  ,  en  Hollande.  Fortifié 


LEY 

dans  sa  manie  parla  persécution, 
il  ne  s'occupait  que  de  la  commu- 
niquer aux  autres ,  et  du  soin  d'aug- 
menter l'illusion  par  toute  sorte  de 
raisons  et  d'autorités.  A  la  fin ,  il 
vint  se  fixer  en  France.  Le  docteur 
Masius,  ministre  de  l'envoyé  de  Da- 
nemark à  Paris,  lui  donna  quelques 
secours  sans  le  connaître;  mais  étant 
tombé  malade,  Leyser  fut  réduit  à  la 
plus  affreuse  misère.  «  Quand  il  fut 
»  un  peu  guéri  (  i684) ,  il  s'en  alla  à 
»  pied  à  Versailles,  pour  yvoirquel- 
î)  ques  patrons  qu'il  avait  eus  autre- 
»  fois  à  la  cour.  A  tout  le  moins  il 
»  espérait  quelque  chose  par  le  jeu 
»  des  échecs  ,  qu'il  entendait ,  à  ce 
»  qu'on  dit  ,  mieux  qu'homme  du 
»  monde  et  d'une  manière  étonnante, 
î)  Il  se  trompa  :  ses  amis  l'abandon- 
w  nèrent  et  se  moquèrent  de  lui.  Se 
»  trouvant  malade  et  dépourvu  de 
w  tout ,  il  voulut  regagner  Paris  ;  mais 
w  les  forces  lui  manquèrent  en  che- 
»  min ,  et  son  mal  s'augmenta  de  telle 
»  sorte  ,  qu'il  ne  put  achever  son 
»  voyage.  On  le  porta  dans  une  mai- 
»  son  voisine ,  où  il  rendit  l'ame.  » 
(  Lettre  de  Masius  au  ministre 
Allix.)  Leyser  n'a  jamais  été  marié; 
et  il  était  bâti  de  telle  sorte  ,  dit 
Masius  ,  que,  loin  d'avoir  besoin  de 
plusieurs  femmes ,  il  lui  eût  été  im- 
possible d'en  épouser  une  seule.  «  G'é- 
w  tait ,  dit  Bayle  ,  un  petit  homme 
»  bossu  ,  maigre  ,  pâle  ,  inquiet  et 
»  rêveur,  w  Nous  connaissons  de  lui: 
I.  Court  dialogue  sur  la  Polj garnie, 
en  allemand;  Tauteur  s'est  caché  sous 
le  faux  nom  de  Sincerus  Wahren- 
berg.  IL  Moelle  rojale  de  tous  les 
pays ,  1676,  in-4'^.  ,  en  allemand. 
IIÏ.  Discursus  politicus  de  Polyga- 
inid ,  1676  ,  in-8^.,  sous  le  nom  de 
Theophilus  Alethœus.  Cet  ouvrage 
fut  brûlé  par  la  main  du  bourreau  à 
Stockholm  et  à  Copenhague.  Leyser 


LEY 

\c  fit  reimprimer  à  Lima  ,  16B1  , 
in-i*^.  ,  avec  nn  roinincntairc  bcan- 
toup  plus  ample  que  le  texte  ,  sons 
ce  titre  :  Polrf^amia  triiimphatrix . 
On  trouve  à  l.i  (in  du  volume,  en 
forme  d'appendirc ,  dos  thèses  en 
i4o  articles,  contre  le  sentiment  do 
Luther, sur Zrt  Diç^amiedes  Ei'èques, 
cl  des  notes  marj:;inak's  de  ce  refor- 
mateur. Ce  traité,  le  p'us  considé- 
rable de  Lcvser ,  a  etc  réfute  par 
Louis  Jean  Diecmanu  ,  Scliediasma 
de  NtUuralismo,  lena ,  1 700 ,  in-4". 
et  pa  r  Brausmaun ,  ministre  dcGopcn- 
haj^uc,  Monos^amia  victrix,  Franc- 
fort ,  1679  ,  in-8*'. ,  et  Pol/gamia 
triumphata  ,  28  Dissertât.  1689, 
iu-4°.  Le  docteur  Masius  ,  qui  avait 
en  son  pouvoir  les  papiers  et  les  re- 
cueilsde Leyseï* assure  que  cepaiwie 
homme  s'était  étranjijement  fati|:i;ué 
lur  celte  matière  ;  qu'il  avait  fouillé 
dans  les  meilleures  bibliothèques  , 
avec  un  travail  incroyable  ,  pour  en 
tirer  tout  ce  qui  pourrait  être  propre 
à  son  sujet ,  et  qu'il  avait  encore  en 
tète  un  nouvel  ouvrage  subtil  et  per- 
nicieux. Baylc  dit  avoir  appris  d'un 
espagnol  ,  nommé  Carrera  ,  qu'on 
avait  trouvé  dans  les  paj)iersde  Ley- 
scr  ,  un  livre  contenant  les  noms  de 
tous  les  polygames  de  son  siècle, 
et  la  narration  des  maux  et  des  coups 
qu'il  avait  soufTerts  à  cause  de  son 
opinion.  (  Nouvelles  de  la  Répuh. 
des  Lett.^an.  i68j.)Lcyser  se  plai- 
gnait souvent  avec  amertume  des 
persécutions  qu'onlui  faisait  éprouver 
pour  ses  sentiments;  et  il  ne  craignait 
pas  de  dire  ,  qu'on  aurait  dû  plutôt 
le  p  u-ter  en  triomphe  pour  avoir 
cherché  à  de'barrasser  les  hommes 
de  la  tyrannie  des  femmes  ,  en  leur 
indiquant  la  ressource  de  la  poly, .  - 
mie.  Au  reste ,  cet  homme  y  si  porté 
a  se  plaindre  des  contradictions  qu'il 
:ontrait  ,  n'était  guère  tolérant 

XJLIV. 


LKY  401 

h  regard  de  ses  adversaire*  :  on  en 
jugera  par  une  épitaphc,  qu'il  com- 
posa pour  un  d'entre  eux,  et  qti'on 
peut  lire  à  la  fin  de  la  préface  du 
Poly^amia  triumpfiatrix  ;  on  ▼ 
remarque  ces  expressions  :  Sub  hoc 
lapide  diaholns  incamatus ,  homi- 
num  nudtiplicationiinvidcns...  Hor- 
rendum  raonstrum  ac  ingens ,  ciii  lu- 
men adcmptum  ,  asini  sepultiwà 
dignissiinum  ,  et  si  vi^eret ,  in  asi- 
nariam  aut  Utopiam  relegandum. 
L'analyse  du  traité ,  intitulé  :  Polj- 

famia  triiimphatiix  ,  que  Bayle  a 
onnée  dans  les  Nouvelles  de  la  Ré- 
publique des  Lettres,  année  iG8j  , 
ne  nous  paraît  pas  exacte.     L-b-e. 

LEYSER  (  Augustin  ),  célèbre 
jurisconsulte  allemand ,  naquit  a 
Wittenberg  ,  en  i663.  Après  avoir 
fait  ses  études  de  la  manière  la  plus 
brillante,  voyagé  en  Hollande  ,  va 
Angleterre  et  en  Italie  ,  et  servi 
comme  volontaire  dans  l'armée  au- 
trichienne (contre  les  Turcs  ),  il  re- 
vint dans  sa  patrie  en  1 70G,  y  exerça 
divers  emplois,  fut  nomméprofesseur 
de  droit  à  Wittenberg ,  eu  1 708 ,  et 
à  Helmstadt ,  en  1 7 1 2.  Il  remplit  en- 
core  d'autres  charges  importantes, 
et  la  place  de  président  Ju  consis- 
toire ecclésiastique  de  la  principauté. 
Ces  diverses  fonctions,etla  rédaction 
de  ses  ouvrages,  remplirent  sa  vie. 
Il  mourut  à  Wittenberg,  le  3  mai 
1752.  On  citera  de  lui  :  ï.  De  logo^ 
machiis  injure  Dissertatio,  Wit- 
tenberg, 1707,  in-4**.  ;  ibid. ,  1724. 
Leyser  se  proposait  d'en  donner  une 
troisième  édition  fort  augmentée ,  et 
l'impression  même  en  était  déjà  com- 
mencée; mais  l'afFaiblisscmcnt  de 
ses  forces  l'empêcha  de  la  terminer. 
IL  De  asscntatinnibus  jurisconsul 
torum ,  Dissertatio,  ibid. ,  171a, 
in-4**.  ;  Helmstadt,  iniG'^ct  Leij>fig; 
1741  ,  in  4®'  Celte  dernière  éditiou 
u6 


40-2  LEY 

a  été  puLliée  par  Henri  -  Giittlob 
Franck, qui  y  a  joint  des  notes ;,  lïn 
Index  très-ample  et  dilïercntes  piè- 
ces inte'ressantes.  Quelques  expres- 
sions e'chappees  à  Leyser,  blessèrent 
les  professeurs  de  Wittcnbcrg  ;  ils  se 
reunirent  contre  l'ouvrage,  et  ^isci- 
tcrenl  à  l'auteur  des  tracasseries  si 
violentes,  que  Gotllob- Auguste  lëni- 
cben  a  cru  devoir  lui  donner  une 
place  parmi  les  martyrs  du  droit, 
dans  son  édition  de  la  Biblioth.  jari- 
dica  de  Lipenius.  Leyser  a  rendu  un 
compte  Irès-detaillé  de  cette  persé- 
cution ,  dans  une  lettre  à  ses  amis , 
insérée  dans  la  dernière  édition  de 
son  ouvrage.  ÏII.  Jurisconsuliorum 
variationesetretractalionesjlclms' 
tadt,  1 7 1 3,  in-4^.  ;  nouvelle  édition, 
augmentée  et  publiée  avec  une  sa- 
vante préface,  par  Gottlob- Auguste 
léniclien,  Leipzig,  1737  ,  in-4*'.  IV. 
De  Feuclis  Brunsvicensibus  et  Lu- 
neburgensibus,  ihià.  1720;  nouvelle 
édit.  augmentée  ,  1735.  V.  De  jure-^ 
Jurando purgatorio ,  ibidem,  l'j'i^. 
VL  Dissertatio  de  mutatione  mo- 
netœ ,  ibid.  17 '^9,  in-4*'.  VIL  Z>e 
lus  qui  ex  mentis  imbecillitate  de- 
linquunt,  Dissert.,  ibid.  1 73si,  in-4^. 
VIII.  De  inculpât d  tuteldy  1737, 
in-4^.  IX.  De  discrimine  jurisju- 
randi  affeclionis  in  infmitum  ac 
immensum,  ibid.  1737,  in-4'*.  X. 
De  sahoconducto ,  i74f*.  XL  Dis- 
sertatio de  pugnis  jurisconsulio- 
rum, Wittenberg ,  1 749.  XII. Medi- 
tationes  ad  Pandectas ^  quibus  prœ- 
cipua  juris  capita  ex  antiquitate 
explicantur,  etc.  Leipzig  ,171 7-47  , 
1 1  vol.  in-4°.; nouvelle  édition,  aug- 
mentée d'une  table  générale  par  lé- 
niclien ,  Wolffenbutel ,  1 7  4  ï  -62 ,  1 1 
vol. in-4*'.; réimprimée  à  Hall,  1 772- 

Î5  ,  1 2  vol.  in-B°.  Les  décisions  de 
jcyser  sur  les  Pandectes  sont  re- 
gardées couime  d«s  oracles  par  les 


1 


LEZ 

jurisconsultes  allemands.  (  Camus, 
Bibl.  d'un  a^focat.)  Plusieurs  d'entre 
eux  ,  parmi  lesquels  on  citera  le  pro- 
fesseur Hartleben ,  Louis-Jul.  Fred, 
Hoëpfker ,  Ernest-Juste  MuUer ,  ont 
commenté,  éclairci,  expliqué,  abrégé 
cet  ouvrage  ,  resté  classique  dans 
toutes  les  universités  d'au  delà  du 
Rhin,  et  qui  est  cependant  à  peine 
connu  en  France.  W-s. 

LEZAY-MARNESIA  (  Claude- 
François- Adrien,  marquis  de  ) ,  na- 
quit à  Metz,  le  i/{  août  1735.  Il  eut 
pour  précepteur,  C.  M.  Giraud  ,  qui 
aimait  les  vers  et  qui  en  inspira  1 
goût  à  son  élève.  (  /^.Giraud, XVI 
459.  )  Destiné  par  sa  naissance  à 
profession  des  armes ,  à  peine  ses  et 
des  étaient-elles  terminées,  qu'il  entra 
dans  le  régiment  du  Roi  (  i  )  ,  où  il 
obtint  ,  quelque  temps   après  ,  un» 
compagnie.  Les  nouveaux  règlements 
sur  le  service  lui  déplurent  ,  et  il 
donna  sa  démission.  Ayant  époustf 
une  demoiselle  de  l'ancienne  famill* 
de  Nettancourt,eu  Lorraine,  il  se  re- 
tira avec  elle  dans  sa  terre  de  Saint- 
Julien  ,  près  de  Lons-le-Saunier;  et 
il  partagea  dès-lors  ses  loisirs  entre 
l'embellissement  de   ses  jardins  et 
la  culture   des  lettres.  Il  s'occupa 
d'adoucir  le  sort  de  ses  vassaux;  et 
long -temps  avant  qu'il  fût  question 
de  réforme  ,  il  avait  aboli  la  main- 
morte et  la  corvée  dans  ses  domaines. 
Il  habitait  Paris  pendant  l'hiver , 
pendant  l'été  ,  la  campagne ,  où 
faisait  sans  cesse  de  nouvelles  exp 
riences  qui  tournaient  à  l'avantai 
de  l'agriculture.  Il  recevait ,  à  Sain 
Julien  ,  les  hommes  les  plus  disti 
gués  par  leur  naissance  ou  par  leu: 
talents  •  il  avait  pour  amis  ,  Saint- 

/i)  On  ne  ce*»s  de  répéter  que  JLezay  imit 
lié  avec  Vaiivenargitcs  ,  capitaine  dang  le  tnèin* 
régiment;  mais  ctt  ing^nicuK  nior»liste  était 
mort  plusieurs  ann-^es  aT«.ut  qui;  L.eaay  fût  e« 
fige  d'evtier  au  «ervice. 


tambcrt ,  Cliamfort ,  ï^oulïlcrs ,  Dii- 
pUv  ,  M.  de  Fontaiics ,  clc.  Ce  fut 
lui  qui  fit  imprimer  ,  en  1788  ,  le 
Mémoire  pour  le  Peiijde  français , 
compose  dans  son  château  par  l'ahhe 
Ccnitti;  et  il  fut  l'un  des  membres  de 
la  noblesse  de  Franche-Comte,  qui  se 

Srononcèrent  pour  rcgalereparlition 
e  l'impôt,  et  la  suppression  des  re- 
devances féodales.  Elu  députe  au\ 
ctats-gcncraux  parle  bailliage  d'Aval, 
il  se  réunit  aux  députes  du  tiers  ,  et 
siégea  d'abord  avec  le  cote  gauche  de 
rassemblée  constituante  :  mais  il  ne 
tarda  pas  à  s'apercevoir  qu'il  deve- 
nait impossible  de  diriger  le  mouve- 
ment révolutionnaire  ;  et  il  ne  parut 
qu'une  seidc  fois  à  la  tribune  pour 
combattre  la  proposition  tendant  à 
^rrorderauxcomedienslesdroitsdes 
vens  actifs.  Prévoyant  les  maux 
.£ut  allaient  fondre  sur  sa  patrie  ,  il 
sortit  de  France  vers  la  fin  de  l'année 
-  )0  ,  emmenant  avec  lui   des  ou- 
rs ,  des  cultivateurs  et  des  artistes, 
pour  former  un  établissement  dans 
l'Amérique  septentrionale.  Il  avait 
acquis  de  la  compagnie  du  Scioto  un 
vaste  terrain  qu'il  se  proposait  de 
mettre  en  culture  ;  mais  la  compagnie 
ne  put  pas  remplir  les  conditions  de 
son  marché  :  ses  compagnons  se  dis- 
T^Tsèrent  ;  et,  après  avoir  demeuré 
an  dans  la  Pensylvanie ,  il  se  dé- 
i  à  repasser  en  Europe.  11  s'ar- 
i  quelques  mois  en  Angleterre , 
Cl  revit  la  France  en  i  '](^i.  II  se  hâta 
de  regagner  sa  terre  de  St.-Julien  ,où 
il  espérait  vivre  tranquille  et  ignoré 
au  milieu  d'habitants  dont  il  avait 
été  constamment  l'ami  et  le  bienfai- 
teur :   mais  son  asile  fut  découvert 
pendant  le  régime  odieux  de  la  ter- 
reur.   Arrêté    et  conduit  dans   les 
'  prisons  de  Besançon  ,  il  y  languit 
\  pendant  onze  mois ,  ne  subsistant 
que  des  faibles  secours  qu'il  recevait 


LEZ  4o3 

d'amis  presque  aussi  malhenreux  que 
lui.  La  chute  de  Robespierre  le  sauva 
d'une  mort  inévitable,  et  il  retourna 
à  la  campagne  reprendre  ses  an- 
ciennes et  douces  habitudes;  mais, 
après  la  journée  du  18  fructidor 
({septembre  1797  ),  voyant  son  fils 
aîné  proscrit,  et  craignant  d'être  ar- 
rêté de  nouveau  ,  il  se  réfugia  dan» 
le  pays  de  Vaud  ,  où  il  reçut  beau- 
coupdepreuvesd'amitiédeM.Necker 
et  de  sa  famille.  Il  habita  Lau- 
sanne jusqu'au  moment  où  il  crut 
pouvoir  rentrer  dans  sa  patrie  sans 
danger.  Il  s'établit  alors  à  Besançon , 
où  il  comptait  trouver  des  secours 
pour  un  grand  ouvrage  qu'il  médi- 
tait sur  \ accord  des  principes  de  la 
Religion  et  de  la  véritable  philo  So- 
phie ;  il  venait  d'en  arrêter  le  plan  , 
lorsqu'il  mourut  le  9  novembre  1 800. 
Il  était  membre  des  académies  de 
Nanci ,  de  Lyon  et  de  Besançon,  où 
M.  Grappin  a  \\\  son  Eloge  ev\  181  !X. 
On  a  du  marquis  de  Lezay  :  I.  Essai 
sur  la  minéralogie  dubailliage  d' Or- 
gelet en  Franche  -  Comté ,  Besan- 
çon, 1778,  in-8<>.  Il  y  rend  compte 
des  différentes  espèces  de  terres  qu'il 
a  reconnues  et  analysées ,  et  dont 
quelques-unes  lui  paraissent  propres 
à  la  fabrication  des  briques ,  et  d'au- 
tres à  être  converties  en  faïence  d'une 
quaUté  ,  sinon  supérieure ,  du  moins 
égale  à  celle  qu'on  tirait  alors  d'An- 
gleterre. Il  indique  ensuite  plusieurs 
carrières  de  beau  marbre,  et  ter- 
mine par  une  notice  des  pierres ,  des 
cristaux  et  des  fossiles  qu'il  a  recueil- 
lis dans  ses  excursions.  IL  Le  bon- 
heur dans  les  campagnes,  Neufcha- 
tel ,  1784  ,  in-8'*.;  nouv.  édit.  aug- 
mentée, ibid. ,  1788 ,  1790  ,  iM-8'*. 
Il  y  réclame  avec  force  la  suppres- 
sion des  corvées ,  l'établissement  des 
états  provinciaux,  et  le  partage  des 
bicus  des  communes,  moyennant  ud« 


4o4  LEZ 

redevance  dont  le  produit  annuel 
serait  employé  à  donner  des  secours 
aux  familles  pauvres.  Il  engage  aussi 
les  grands  seigneurs  à  séjourner  dans 
leurs  terres ,  persuade  qu'ils  s'em- 
presseront de  soulager  les  mauxdont 
ils  seront  les  témoins.  III.  Plan  de 
lecture  pour  une  jeune  dame,  Paris, 
in84,  in-i2  ;  nouv.  édit.  Lausanne, 
1800  ,  in-8°.  La  seconde  édition  est 
augmentée:  i^.d'un  Foyageaupays 
de  Faud,  en  1 797  ;  •^°.  d'une  Lettre 
surla  Bresse;  3^.  de  Pensées  Uttérai- 
res,morales  et  religieuses;  4**.  d'une 
nouvelle  intitulée:  V Héroïsme  de  la 
Charité  ;  d'une  Lettre  à  M.  Audrain, 
négociant  à  Pittsbourg ,  contenant  des 
détails  intéressants  sursonséjourau 
Scioto  ;  d'un  Dialogue  enti^  Buffon 
^t  Baillf;  et  enfin  du  Discours  de 
réception  de  l'auteur  à  l'académie  de 
Nanci  (  I  ).  IV.  Essais  sur  la  nature 
champêtre ,  poème  en  cinq  chants  , 
suivi  de  notes,  Paris,  1^87  ,  in-8*^.; 
traduit  en  allemand ,  par  J.  God. 
Grohmann  ,  Leipzig  ,  1 79  i ,  in  8<*.  ; 
réimprimé  sous  ce  titre  :   Les  pay- 
sages ou  Essais  sur  la  nature,  etc. 
Paris  ,1800  ,'in-8«.  Le  style  de  ce 
poème,  un  peu  faible,  est  toujours 
naturel  et  quelquefois  élégant  :  mais 
le  défaut   de  coloris   est   bien  ra- 
cheté par  des  vers  que  le  cœur  seul 
a  pu  inspirer ,  et  par  ces  tableaux  de 
sentiment  qui  semblent  être  réservés 
plus  particulièrement  pour  les  ou- 
vrages destinés  ,  comme  "celui-ci,  à 
faire  aimer  la  nature.  Le  discours 
préliminaire  contient  des  détails  in- 
téressants sur  les  progrès  de  l'art  des 
jardins ,  sur  les  poètes  qui  les  ont 
célébrés  ,  et  enfin  sur  les  écrivains 
qui  en  ont  traité  particulièrement. 
M.  Marron,aujourd'hui  pasteurd'une 


LEZ 

des  églises  réformées  de  Paris ,  sc 
plaignit  par  une  Lettre,  insérée  clans 
l'Année  littéraire,  1787  (tom.  vi , 
pag.  1 1 2  et  suiv.  ) ,  que  le  poète  eût  j 
parlé  trop  superficiellement  des  jar-  j 
dins  hollandais  ;  Lezay  -  Marnesia  a 
réparé  ce  tort  dans  la  seconde  édition, 
à  laquelle  il  a  joint  les  morceaux  sui- 
vants :  Apelle  et  Campaspe ,  ballet 
héroïque  en  trois  actes  ;  la  destinée 
de  cet  opéra  mérite  d'être  remarquée  : 
entrepris  à  la  prière  de  Chamfort,  il 
a  été  mis  en  musique  ,  successive- 
ment ,  par  Laborde  ,  Piccini  et  M. 
de  Lacépède  ,  et  il  n'a  jamais  été  re-  ; 
présenté.  — Pièces  fugitive  s  ;  on  doit  j 
distinguer  dans  le  nombre  ,  VEpitre\ 
à  mon  curé ,  imprimée  dans  l'Aima- 1 
nach  des  Muses  ,   et  dont  tous  1"^ 
amateurs  ont  retenu  ce  vers  : 

L'Age  d'or  était  l'âge  où  Vax  ne  régnait  pa». 

— V  Heureuse  Famille,  conte  moral; 
et  les  Lampes,  allégorie  en  rhouncur! 
de  Montesquieu,  Voltaire,  Rousseau} 
clBufTon.  V.  Lettres  écrites  des  rives\ 
de  Z'O/iio,  Paris  ,  1792  ,  in-8^.  Ces! 
lettres  ,  ayant  été  arrêtées  par  la  po-j 
lice,  sont  très-rares.  La  première  est 
adressée  à  Boufflers  j  la  seconde  à 
Bernardin  de  St.-Pierre,  auquel  il  an-, 
nonce  son  projet  de  lui  dédier  la  ville  j 
qu'il  se  propose  de  bâtir  ;  et  enfin  la; 
troisième,  à  son  fils  Adrien,  do^ 
l'article  est  ci-après.  On  lui  att| 
bue  encore  la  Traduction  de  V 
vrage  de  John  CoakleyLetlsom, 
titulé  :  Le  Foyageur naturaliste. 
Instructions  sur  les  moyens  de 
masser  les  objets  d'histoire  nati 
relie  et  de  les  bien  conserver,  Ams-: 
lerdam  (  Paris  )  ,  1775  ,  in-12  ,  et 
les  Lettres  pubbées  sous  le  nom  de 
Sherbck  ,  Londres  (  Paris  ),  1779» 
1 780,  2  vol.  in-80.  (  I  )  Voy.  les  Mé- 


(t)  Ce  dtscoiii»  fut  imprimé  en  1757,  et  Fréroa 
ea  pa.i'ieaTeo«l«i£o  «Ua*rauué«  litteiair». 


(t)  Qiielquas  personne»  lui    attribuent  encore 
ua  Discours  vou.X9uaé  ^u  l'académie  de  Besan 


ITZ 

moires  de  Varadêmie  tîê  Besançon^ 
(  année  t8iu  ,  page  ^5  ).  Lozay  a 
fntirni  quelques  morceaux  à  l'Ency- 
•  "die ,  entre  autres  l'art.  Marait- 
W-s. 
!     LEZAY-MARNESIA  (Char- 

I^TTK  -  AnTOINFTTK    DE     IÎRKSSFY  , 

marquise  de  ) ,  mère  du  preVédent , 
était  lille  d'un  cliambcll.in  ûe  Lëo- 
pold  ,  duc  de  Lorraine.  Elle  habitait 
Nanci ,  où  sa  maison  était  le  rendez- 
vous  des  personnes  les  plus  aimal)les 
et  les  plus  spirituelles.  Saiiit-Lam- 
l>ert ,  Boufllers ,  Ccrutti ,  alors  je- 
"  ,  le  père  Leslic  ,  son  confrère  , 

irae  de  génie,  mais  sans  i»out  et 

^  grâce  (  Voy.  Flan  de  lecture 
une  jeune   dame  ,   deuxième 

ion,  page  io'2  ),  formaient  sa 
1  téla  plus  habituelle.  Elle  culti- 
vait en  secret  la  littérature;  età  l'ex- 
'f^ntion  de  deux  ou  trois  amis  in- 

^ ,  personne  ne  la  soupçonnait 
vi  viie  l'auteur  des  Lettres  de  Julie 
à  Oi*ide,  Paris,  17.53;  ibid.,  1774  y 
in-i  i,  (pii  ont  e'te  insérées  dans  divers 
recueils.  Le  succès  de  ces  lettres  , 
attribuées  dans  le  temps  à  Marmou- 
tH ,   ne    put  pas  la   déterminer   a 

if.T  son  ouvrage.  C'est  son  (ils 

*  re'vclë  ce  secret ,  plusieurs  au- 
après  la  mort  de  l'auteur.  La 

juise  de  Lezay-Marncsia  mourut 
fu  1 785 ,   au  cnàteau   de  Conde , 


-n  i^-S.fur  catte  question  :  Cammrnt  î'é- 

a  "-iiion    d'S  fnnnies   peut-elle    lontrlb'ufr    à 

rendre  les  hommes  meilleurs  ?  iniptim-   aont 

!'  rnm  (lu  comte  Co»ia  ,  et  dédie  ati  marquia  ila 

.-tia ,  liii-niiine.  On  aiippoterait  qiia  c*  der- 

,  ocaità  du  coiicoiiri  par  ■«  qualité  d'acade- 

n  ,    pT<>*enta    son    oiiTTa;>e    aoiia    un    nom 

.'ir,  et*»  le  lit  dediur  pour  mieux    éloij{net 

iprona   Quoi  qu'il  «rn  toit,  il  eit  certain  qi!)* 

d<-  Mjruéiia    était  eu   liaiion    tré*  intima 

M'.K,     aujoiiril'iiui    matqiiit,    Joaepli» 

<  de  Btauregaid  ,  counii  anttunt  par 

lit*  wi^im^e»  Mt'moires  historiques 

■    "1,11  tnn  royale  de  Savoi»  ,   1816.   i  »ol. 

,  et  Mélanges  tir/ f  d'un  porie  feuille  mi~ 

",  fil?,   a  »ol.  in-li'*.  )  ,  et  qu'il  allait  «ou- 

palier  dc«   moi*  piitiara,   clirs  cet  Aiui,  Ait 

'*u  deBaauiagatd  pr*«  da  Gcuif  «. 


maison  de  campagne  de  IVvêmie  d'K- 
vreux ,  son  beau-frère  (  i  ).     W-s. 

LEZAY-MARNEZIA  (  AoRiKit 
comte  de)  ,  publiciste  distingue',  né 
en  1770,  à  Saint  Julien,  bailliage 
d'Orgelet, annonça  de  bonne  heure  un 
goût  très-vif  pour  l'histoire  naturelle 
et  la  littérature.  Apres  avoir  termine 
ses  études  classiques ,  il  entra  dans  le 
régiment  du  Roi,  où  son  père,  le 
marquis  de  Marnesia,  avait  servi.  Il 
alla  ensuite  étudier  la  diplomatie  à 
l'école  de  Brunswick  ,  la  seule  de  ce 
genre  qu'il  y  eût  alors  en  Europe. 
La  révolution  l'empêcha  de  rentrer 
en  France;  et  en  attendant  des  mo- 
ments plus  calmes  ,  il  visita  l'Alle- 
magne et  l'Angleterre.  Après  la  ré- 
volution du  9  thermidor,  il  vint  à 
Paris ,  et  publia  quelques  écrits  dans 
lesquels  il  attaquait  avec  énergie  les 
démagogues  qui  s'cfrorçaicut  Je  res- 
saisir le  pouvoir;  il  inséra  aussi  de 
nombreux  articles  dans  le  Journal  de 
Paris ,  dont  M.  Rœderer  était  un  des 

{)ropriétaires ,  et  fut  du  nombre  des 
lommes  de  lettres  proscrits  au  mois 
de  vendémiaire  an  iv  (  1 795  ),  comme 
opposés  au  gouvernement  d'alors.  Il 
se  tint  caché  quelque  temps  à  Bret- 
tcville,  dans  la  Normandie,  et  y  em- 
ploya ses  loisirs  à  la  traductiou  de 
la  tragédie  de  Don  Carlos,  de  Schil- 
ler ,  dout  •]  était  l'admirateur.  De 
retour  à  Paris  ,  il  osa  prédire  haute- 
ment que  la  constitution  directoriale 
ne  larderait  pas  à  éprouver  le  sort 
detoutescellesqui  l'avaient  précédée: 
celte  franchise  imprudente  lui  attira 
la  haine  de  Chéuier,qui  chercha  à  l« 


(1)  Louit-Mbert  da  Laxay-Maniétia ,  doyen 
dit  cliapitredu  Saint-Jean  de  Ljon  ,éTéque  d'K- 
Treux  ,  mourut  «  Loat'U-Saulniar ,  le  4  !■•'<* 
1790  ,  à  l'<)ga  d'euvitou  A3  ana.  Son  tombaau  • 
ete  violé  pendaat  la  ié>oUitton  ;  et  il  aert  ani.or* 
aiijounrhui  (iHiy;  da  baatku  A  la  funtaine  cona- 
triii'.a  dau«  la  cour  du  couvant  dat  Capucina  d« 
Lont-le<2>aulniar.  (  Note  rommuniqu<><>  par  M. 
Pionnier,  cenaerTAttut  4u  Alu*4«  4u  «lapait*» 
meut  du  JJMia.  ) 


4o6  LEZ 

tourner  en  ridicule  dans  une  satire 
où  it  le  fait  l'interlocuteur  de  M.  Rœ- 
derer,  qui  est  désigne'  par  le  nom  de 
docteur  Pancrace.  Proscrit  une  se- 
conde fois  au  1 8 fructidor,  le  comte 
Lezay-Marnesia  fut  oblige'  de  cher- 
cher un  asile  hors  de  France  ,  et  il 
se  réfugia  dans  le  pays  de  Vaud  avec 
son  pèrej  ils  y  reçurent  ,  tous  les 
deux,  un  accueil  très-distingué'  de 
M.  Necker  et  de  Madame  de  Staël. 
Kentré  en  France,  après  la  chute  du 
directoire,  il  trouva  une  protection 

Î)uissante    dans  madame   de  Beau- 
larnais  ,    depuis  madame  Buona- 
parle  ,    dont  sa  sœur  e'tait  allic'e  , 
ayant  e'pousë  M.  Claude  de  Beauhar- 
nais  ,  père  de  la  princesse  de  Bade , 
et  cousin  d'Alexandre  de  Beauhar- 
harnais.  Il  fut  envoyé  ambassadeur 
près  de  l'électeur  de  Saltzbourg  ,  au- 
jourd'hui grand-duc  de  Toscane  ,  et 
passa  ensuite  dans  le  Valais,  avec  la 
mission  de  préparer  la  réunion  de  ce 
pays  à  la  France.  Il  fut  nommé  ,  en 
ï  806  ,  à  la  préfecture  de  Rhin-et- 
Moselle  (Coblentz),  et  transféré,  en 
181 G  ,  à  celle  du  Bas-Rhin.  Il  se  fit 
chérir  de  ses  administrés  par  sa  dou- 
ceur et  son  intégrité ,  et  contribua 
beaucoup  à  la  prospéritéde  la  ville  de 
Strasbourg.  Maintenu  par  le  roi  dans 
ses  fonctions  ,  il  était  allé  au  devant 
de   monseigneur  le  duc  de    Berri 
pour  raccompagner  dans  la  visite 
que  le  prince  devait  faire  de  ce  dé- 
partement ;  les  chevaux  effrayés  du 
bruit  de  la  mousqueterie  ne  purent 
être  retenus  par  celui  qui  les  guidait  : 
le  comte  de  Lezay  fut  précipité  de  sa 
voiture ,  et  rapporté  à  Strasbourg, 
où  il  expira,  le  9  octobre  181 4.  On 
connaît  de  lui  :  I.  Les  Ruines^  ou 
Voyage  en  France  pour  servir  de 
suite  à  celui  de  la   Grèce ,  Paris , 
1794  ,   in-8°.   C'est  une  peinture 
énergique  des  épouvaatables  excès 


LEZ 

de  cette  faction  qui  détruisit  ,  eai 
quelques  mois ,  tout  ce  que  la  sagesse 
et  l'expérience  avaient  créé  durant 
quatorze  siècles.  Il  se  fit  quatre  édi- 
tions de  ce  petit  ouvrage ,  en  moins 
d'un  an  jet  il  en  parut  des  traductions 
en  allemand  et  en  anglais.  II.  Qu  est- 
ce  que  la  constitution  de  1 798  ?  ibid. 
1 795,  in-8^.  Ce  livre  fut  arrêté  par  la 
police  •  mais  l'auteur  le  fit  reparaître 
sous  ce  titre  :  Considérations  sur  les 
états  de  Massachuset  et  de  Pensylva- 
nie  ,  ou  Parallèle  de  deux  constitu- 
tions, dont  l'une  est  fondée  sur  la  di- 
vision, et  l'autre  sur  l'Mmïedelalé-j 
gislature,  ibid.,  in-S».  III.  De  U 
constitution  de  1 796;  ibid.  in-B».  IVJ 
De  la  faiblesse  d'un  gouvernemej 
qui  commence  j  et  de  la  nécessité  oJ 
il  est  de  se  raUier  à  la  majorité  nati( 
nale,  ibid.   1796,  in-S'*.;  traduit  e^ 
allemand  dans  le  Journal  nomi 
Klio,   C'est  la  réfutation  de 
vrage  de  M.  Benjamin  Constant  :  D\ 
la  force   d'un   gouvernement   qi 
commence ,  etc.  V.  Des  causes 
la  révolution  et  de  ses  résultats' 
ibidem,  1797,  in-B".  YI,  PenséeT' 
choisies  du  cardinal  de  Retz,  ibid. , 
1 797 ,  in- 1 8.  Le  choix  de  ces  pensées, 
au  nombre  de  cent  dix-neuf ,  est  bien 
fait.  La  préface  est  un  des  meilleui*s 
morceaux  sortis  de   la  plume    di 
comte  de  Lezay.  VII.  Lettrées  à 
Suisse,  sur  la  nouvelle  constitutic 
helvétique,  Neufchâtel,  1797  ,  iu-8j 
VIII.  Don  Carlos,  infant  d'Espt 
gne,  tragédie ,  traduite  de  l'allem^ 
de  Schiller  ,  Paris ,  1 799 ,  in-B"^. 
392  pag.  Cette  traduction  est  trc 
estimée:  l'auteury  a  joint  des  not« 
critiques ,  et  l'a  fait  précéder  par  des 
observations    intéressantes    sur    la 
langue  et  le  théâtre  français  ;  mais 
on  doit  avouer  qu'il  s'y  montre  trop 
favorable  au  genre  romantique.  — 
Son  frère,  le  comte  Albert  Ljkzay  D£ 


LEZ 

Mar^ïf.sia  est  préfet  tlii  Rhonc  ft 
membre  de  la  Chambre  des  députes. 
—  Lezay-Mabnksia  (  Claude  Gas- 

i»ar),  son  oncle,  chanoine  cl  comte 
le  Lyon,  mort  en  1818,  dans  un 
ige    très  -  avance'  ,    se    distingua 
dans  les  assemblées  provinciales  qui 
précédèrent  les  états  -  généraux  de 
1789.  lia  public:  1.  Réflexions  sur 
.  l'Histoire  de  France ,  Paris ,  1 760  : 
Kl  les  ne  concernent  que  les  rois  de 
première  race.  Cet  ouvrage  devait 
oir  une  suite ,  qui  u'a  point  paru. 
11.  Oraison  funèbre  de  Louis  XF, 
\  \on,  \nj^\\n-^°.  W — s. 

[.EZCZINSKI  (Stanislas),  ^o^. 

.^i  AMSLAS, 

LHÉRITIER    DE    BRUTELLE 

(Chaules-Louis),  savant  botaniste, 
né  à  Paris  ,  en   174^,  d'une  famille 
qui  tenait  un   rang  distingue  dans 
le    commerce  ,    et  jouissait   d'une 
fortune  assez  considérable,  aclieta 
,  une  charge  de  secrétaire,  et  fut  reçu, 
en    1772  ,   procureur  du   roi  à  la 
maîtrise  des  eaux-et-forêts  de  la  gé- 
néralité de  Paris.  Piqué  de  n'avoir 
pu  nommer  un  des  arbres  exotiques , 
•  cultivés  en  pleine  terre  au  jardin  des 
Plantes  (  c'était  un  micocoulier  ) ,  il 
I  commença  aussitôt  un  cours  de  bo- 
,  tanique  ,  se  lia  avec  les  naturalistes 
les  plus  célèbres  ,  et  devint  ,  en  peu 
de  temps  ,  un  excellent  nomcncla* 
teur.  Il  entra  ,  en  1775  ,  à  la  cour 
des  aides  ;  et  ses  rapports  avec  l'il- 
lustre Malesherbes  accrurent  encore 
sa  passion  pour  l'histoire  naturelle: 
il  ne  tarda  pas   à   publier  quelques 
essais  sur  les  espèces  de  plantes  dont 
il  avait  fait  une  étude  plus  paiticu- 
Hère  ;  et  ces  essais  lui  firent  asser 
d'honneur  pour  lui  inspirer  le  désir 
i   d'attacher  son  nom  à  des  ouvrage» 
(   plus  considérables.Informé  que  Dora- 
,    Dey  sollicitait  vainement  les  avances 
^   Bécessaires  pour  publier  les  ob&ei  va- 


LHE  407 

tions  qu'il  avait  recueillies  pendant 
son  voyage  au  Pérou  et  au  Chili,  il  of- 
frit de  rédiger  et  imprimer  à  ses  frais 
la  partie  bot.uiique.  On  lui  remit  cj 
conséquence  l'herbier  de  Dombey  ; 
et  son  travail  c'tait  déjà  fort  avance', 
lorsque,  sur  les  instances  de  l'ambas- 
sadeur d'Espagne  ,  on  lui  enjoignit 
de  suspendre  la  publication  de  la 
Flore  du  Pérou  ,  jusqu'à  ce  que  Ici 
naturalistes  espagnols  qui  avaient 
exploré  la  même  contrée,  eussent 
fait  paraître  le  résultat  de  leurs  re- 
cherches. Oa  ordonna  en  mcnie> 
temps  à  Lhériticr  de  remettre  à  M. 
de  liuffon  l'herbier  de  Dombey.  Au 
lieu  d'obéir,  il  se  hâte  d'emballer  le 
précieux  herbier  ,  part  ,  avec  sou 
trésor  ,  pour  Calais  ,  et  n'est  tran- 
quille que  lorsqu'il  est  arrive  en  An- 
gleterre. (  rOjeZ  DOMBFT,  t.  XI, 
p.  5o3  et  suiv.  )  Il  passa  quinze  mois 
à  Londres  ,  vivant  dans  la  retraite 
la  plus  absolue  ,  et  uniquement  oc- 
cupé d'un  travail  pour  lequel  il 
trouva  des  ressources  importante» 
dans  la  riche  bibliothèque  de  AL 
Banks.  Il  ne  rentra  en  France,  qu'à 
l'époque  ûij  la  révolution  lui  assurait 
Ja  possession  tranquUle  de  ce  trésor, 
qui  ne  devait  pourtant  jamais  èlr« 
publié.  Il  était  en  octobre  1 78c)  l'un 
des  commandants  de  la  garde  natio- 
nale de  Paris  :  se  trouvant  à  Ver- 
sailles à  la  tcte  de  son  bataillon 
(  celui  des  Lombards  )  à  la  fatalç 
journée  du  6  octobre,  il  eut  le  bon- 
heur d'arracher  d'entre  les  mains 
d'une  populace  effrénée  onze  gardes- 
du-corps  qu'elle  allait  mettre  eu 
pièces ,  se  les  fit  livrer  sous  sa  res- 
ponsabilité pour  les  conduire  à  Pa^ 
ris,  et  leur  procura  des  habits  bour- 
geois à  la  faveur  desquels  ils  purent 
s'évader.  I>a  diminution desa  fortune 
l'obligea  d'accepter,  comme  une  res- 
source, les  places  qu'on  s'empressa 


4o8  LHE 

de  !ui  offiir  :  il  fut  employé  quelque 
temps  au  ministère  de  la  justice  ,  et 
nomme  deux  fois  juge  au  tribunal 
civil  de  Paris  j  il  en  remplit  les  fonc- 
tions avec  cette  droiture  qui  avait 
cte'  toute  sa  vie  la  règle  de  ses  ac- 
tions. Lherilier  partageait  ses  loisirs 
entre  les  soins  qu'il  devait  à  ses  en- 
fants ,  l'histoire  naturelle,  et  les  li- 
vres, dont  il  avait  forme  ,  en  peu  de 
temps,  une  collection  beaucoup  plus 
considérable  que  ne  devait  le  lui  per- 
mettre sa  fortune.  11  se  proposait 
d'ejîiployer  à  régler  ses  affaires  et  à 
terminer  ses  ouvrages ,  les  années 
que  lui  promettaient  encore  sa  vi- 
gueur et  sa  tempérance ,  lorsqu'il 
fut  assassine  à  coups  de  sabre ,  à 
quelques  pas  de  son  domicile, le  i6 
avril  1800.  «  Les  motifs  et  les  au- 
î)  teurs  de  ce  crime  sont  restés 
»  couverts  d'un  voile  impëne'trable.)) 
Lliéritier  ,  naturellement  bon,  était 
d'un  caractère  difficile  et  impatient; 
il  eut  des  discussions  très-vives  avec 
Gavanilles  sur  l'antériorité  de  la  dé- 
couverte de  quelques  plantes,  et  il  ne 
paraît  pas  que  le  droit  fût  de  son  côté. 
{Foyez  Gavanilles, t.  VI,  p.  447-) 
11  était  membre  de  l'académie  des 
sciences,  et  il  fit  partie  de  l'Institut, 
dès  l'organisation  de  ce  corps  sa- 
vant. Son  Éloge,  par  M.  Guvier,  est 
imprimé  dans  le  tome  iv  des  Mé' 
moires  de  la  classe  des  sciences 
physiques  et  mathématiques.  «  Les 
»  ouvrages  de  botanique  de  Lliéri- 
»  lier ,  dit  son  éloquent  panégyriste, 
»  sont  estimés  de  toute  l'Europe , 
»  pour  l'exactitude  des  descriptions , 
j»  la  minutieuse  recherche  des  ca- 
»  ractères  ,  la  grandeur  et  le  fini  des 
if  planches.  »  On  ne  doit  pas  oublier 
que  MM.  Redouté  et  Sellier  ,  qui  ont 
acquis  une  si  grande  célébrité  par  la 
perfection  à  laquelle  ils  ont  porté 
fart  de  peindre  les  plantes  ,  doivent 


LHE  ^ 

en  partie  à  Lhéritier  le  développe- 
ment de  leurs  talents.  Les  ouvrage* 
qu'on  a  de  lui,  sont  :  I  Stiiyes  navœ 
€iut  minas  cognitœ,  descripiionihiis 
illuslratœ  ,  Paris  ,  1 784  ,  et  années 
suivantes  ,  in-fol.  ,  contenant  sept 
fascicules  ou  cahiers  et  quatre-vingt-, 
seize  planches,  a  II  publia  ,  en  1 787, 
»  quarante  -  quatre  autres  planches 
»  qui  devaient  faire  suite  aux  pre- 
»  mières,et  qui  représentent  des  ge- 
»  ranium;  mais  le  texte,  quoiqu'im- 
»  primédepuis  long-temps,  n'a  point 
»  été  mis  en  vente.  »  (  Eloge  de 
Lhéritier.)  IL  Cornus,  spécimen  bo- 
ianicum  sj  stens  descriptiones  et  icô- 
nes specieium  corni  minus  eogniia- 
rum  ,  Paris  ,  1788,  in-fol,  avec  six 
planches  :  c'est  l'histoire  parti cidière 
des  cornouillers.  III.  Sertum  angli- 
cwn  (le  bouquet  anglais  )  seuplantœ 
rariores  quœ  inhortis  juxtà  Londi-^ 
numimprimii  inhorto  reg'o  Kewensi 
excoZ«wfMr,Paris,i788,infol.max., 
avec  trente-quatre  planches  •  c'est  le 
plus  beau  et  le  dernier  des  ouvrages 
qu'il  ail  mis  au  jour;  il  a  donné  aux 
nouvelles  plantes  qui  y  sont  décrites, 
les  noms  des  botanistes  anglais  , 
pour  leur  témoigner  sa  reconnais- 
sance de  l'accueil  qu'il  en  avait  reçu,_ 
IV.  Sept  Plssertations  latines:  Ka- 
kile,  1 788,  in-fol.,  avec  une  planche; 
on  n'en  conuait  qu'un  seul  exemplai- 
re;—  Hymenopappus  ;  —  Oxjba- 
phusj —  Firgilia;  —  Michauxia  ; 
Buchoziaii),  in-fol.  :  il  ne  lésa 
fait  imprimei 
exemplaires , 

mérite  d'une  excessive  rareté  ;  et  il 
les  a  distribuées  à  des  personnes 
diîïérentes ,  de  manière  que  nul  n'eu 
pût  posséder  la  collection  complète. 


r   chacune  qu'à   cinq 
pour    leur  donner  le 


1)  J.liAiillcr  tl    iiiia  ce  iiOMi  à  nue   pUiif^J'imo 

iir  iiifVcl'-  pour  i  Xprim-r  son  inépvis  lies  coui- 

de    i  iuf.'itinahle    But'lioz,  contre  Uqiiel 

il  avait  peiit-Ctre  alorg  quelque  motif  particuiiej; 

de  resteiitimeut. 


o.le 
pilatioii 


LHE 

î«a  sq^tirmr  ,  inlitulcc  Cadia,  a  cte 
insc'ic»^  tlau-s  le  Magasin  encj  dopé- 
JiifU€  ,  et  on  en  a  liro  ,  à  part ,  qucl- 
MMPs  exemplaires  in-8".  La  rollcclion 
iplèlc  tics  ouvrages  de  Llicriticr , 
ornpris  le  texte  des  géranium, 
inplaire  grand  papier,  planches 
nulles  et  coloriées,  a  cte'  vendue  5  aOf, 
Outre  la  Flore  du  Pérou  ^  il  a  lais- 
ru  manuscrit ,  la   Flore  de  la 
•  ce  f'erulôme  ;  c'est  le  catalogue 
plusieurs  centaines  d'espèces  de 
lies  herbes  ou  plantes  qu'il  avait 
.sorvees  en  entrant  ou  en  sortant 
ik'  son  bureau.  Le  Catalogue  de  sa 
bibliothèque   a   cte   public    par  M. 
Drbnre  l'aîné  ,  Paris,  1802,  in-8'\ 
I  lit ,   suivant  M.  Cuvier,  la  plus 
nplèle   qui   existât   en  Europe, 
iV  la  botanique ,  sans  en  excepter 
\-  de  M.  Banks.  W-s. 

I/HÉRITIER  DE  VILLANDON , 
t -Mari e-Je ANNE  ),  fille  de  Nicolas 
Lhériticr,  poète  tragique,  historio- 
graphe de  France  ,  et  traducteur  des 
Amuilesàe  Grotius,  naquit  à  Paris  en 
novcmbie  ,  1GG4.  Mademoiselle  de 
Vi  landon  hérita  du  goût  de  son 
père  j)our  la  poésie.  L'académie 
dis  jeux  floraux  se  l'associa  en  1696, 
f'ile  des  Ricovrali  de  Padoue  en 
.  >ip.  Elle  mourut,  à  Paris,  le  if^ 
février  1734.  Ses  ouvrages  ,  la  plu- 

rrl mêlés  de  prose  et  de  vers,  sont: 
OEuvres  mêlées  ,  contenant  V In- 
nocente tromperie ,  V Avare puni^  les 
Enchantements  de  l'élofjuence  ,  les 
Aventures  de  Finette ,  nouvelle;  et 
autres  ouvrages  en  vers  et  en  prose, 
1695,   in- 12.    IL    Bigarrures    in- 
^^nieuses,  ou  recueil  de  dillcrentes 
fs  eu  prose  et  en  vers ,  Paris , 
)(i ,  in- 1-2  ;  on  y  trouve  le  triom- 
de  madame  Deshoulières ,  reçue 
lème  Muse  du  Parnasse.  IIL  VA- 
'téuse  de  mademoiselle  de  Scu- 
' ,  Paiis,  i"02  ,  in-i'2.  IV.  £n*- 


LHE 


W 


âition  enjouée,  Paris,  i-o3  ,  3  vol. 
in-ia.  V.  La  Tour  ténébreuse  ^  trad. 
de  l'anglais,  conte  ,  Paris  ,  i-joS  , 
in-ix  VL  La  Pompe  dauphine^en 
vers,  171 1,  in-1'2,  faite  pour  la 
mort  du  premier  dauphin,  fds  de 
Louis  XIV.  VII.  Caprices  du  Des- 
(in,  Paris,  1718,  in- 1 '2.  VIII.  Les 
Epi  très  héroïques  d'Ovide ,  Paris  , 
1 73-2 ,  in-i  a  ;  il  y  en  a  seize  eu  vers. 
C'est  le  seul  de  ses  ouvrages  ou  elle 
ait  mis  son  nom.  La  vcrsilicalion  en 
est  coulante  et  aisée;  maisles  endroits 
trop  libres  de  l'auteur  latin  y  sont 
gazés  et  adoucis.  M^^'^.  Lhérilier 
avait  été  fort  aimée  de  la  duchesse 
de  Longucville  :  celte  princesse  lui 
laissa  ses  MJicoires  qu'elle  publia 
avec  des  notes,  Cologne ,  1709,  in- 
I  '2  ;  réimprimés  bien  des  fois  depuis, 
à  la  suite  des  IMémoircs  de  Retz  et  de 
Joly.  Voyez  sou  Eloge  dans  le 
Journal  des  savants ,  décembre 
1734.  C.  T— T. 

LHERMINIER  (  Nicolas  ),  né 
en  1G57,  à  Saint-Ulphacc,  diocèse 
du  Mans, commença  ses  études  dans 
celte  ville,  et  vint  les  terminer  à 
Paris.  Il  prit  les  ordres  sacrés,  et 
fut  reçu  ,  en  1689,  docteur  de  Sor- 
bonne  ;  livré  par  goût  à  l'étude  de 
la  théologie,  il  ouvrit  dans  sa  mai- 
son,  un  cours  pid)!ic  de  cette  science, 
qu'il  enseigna  pendar.t  i5  ans  avec 
succès.  Lherminicr  fut  rap|)elé  au 
Mans,  en  1707,  par  l'évèquc  Mon- 
tenard  de  Tressao  ,  qui  le  nomma 
chanoine  théologal  et  archidiacre  de 
son  église.  Il  y  exerça  ,  en  17*23  , 
les  fonctions  de  vicaire-général  da 
diocèse ,  pendant  la  vacance  du 
siège  épiscof^al.  Ce  docteur  revint , 
eu  I7'2j,  à  Paris,  où  il  mourut,  le 
6  mai  1735.  Il  a  laissé:  I.  Summa 
theologiœ  ad  usum  scholarum  ac- 
commodala,  Paris,  1701-11  ,  7  V. 
iu-8  *.;  plusieurs  fuis  réimprimée  :  le 


r^ 


4io 


LHE 


traite  de  la  grâce ,  qui  en  fait  partie, 
fît  beaucoup  de  bruit ,  dans  un  temps 
où  l'Eglise  gallicane  e'tait  agitée  par 
les  querelles  du  jansénisme.  Un  ano- 
nyme le  dénonça  aux  ëvêques  de 
France,  et  le je'suiteColonia l'inscri- 
vit dans  son  Dictionnaire  des  livres 
janse'nistes.  II.  Tractatus  de  sacra- 
mentis,  Paris  ,  1736,  3  vol.  in- 12. 
L'e'diteur  a  inséré,  en  lête  de  cette 
œuvre  posthume,  une  vie  abrégée 
de  l'auteur.  Lherminier  avait  des 
mœurs  douces  et  de  l'érudition;  ses 
ouvrages  sont  méthodiques;  mais 
on  y  chercherait  en  vain  l'élégance 
et  la  précision  du  style.         L-u. 

LHERMIÏE  (  Jacques  ) ,  navi- 
gateur hollandais  ,  commandait  la 
flotte  de  onze  vaisseaux  expédiés 
par  les  Etats-Généraux,  le  29  avril 
i6'i3,  pour  attaquer  le  Pérou.  La 
traversée  fut  longue  et  pénible  :  le 
séjour  que  l'on  fit  dans  une  baie  de 
la  Terre-du-Feu,  donna  occasion  de 
reconnaître  que  cette  terre  est  cou- 
pée par  un  grand  nombre  de  canaux. 
Lhermite,  épuisé  par  une  maladie 
de  langueur ,  qui  depuis  plusieurs 
mois  le  mettait  hors  d'état  d'agir  , 
mourut  devant  le  Gallao,  le  2  juil- 
let i6'2^.  On  avait  donné  son  nom 
à  une  petite  île  du  sud  de  la  Terre- 
du-Feu  ,  et  dont  le  fameux  Gip 
Horn  forme  la  pointe  la  plus  méri- 
dionale. (  Foj.  Adolphe  Decker  , 
lora.  X  ,  pag.  637  ),  E — s. 

L'HEUREUX  (  Jean  ) ,  suivant  un 
usage  assez  ordinaire  de  son  temps  , 
traduisit  son  nom  en  grec  ,  et  prit 
celui  de  Macarius,  sous  lequel  il  est 
beaucoup  plus  souvent  désigné.  Il 
naquit  à  Gravelines ,  vers  le  milieu 
du  xvi«.  siècle ,  fit  ses  études  à  Berg- 
Saint-Winoc,  sous  Paul  Leopardus , 
et  se  rendit  très-habile  dans  les  lan- 
gues grecque  et  latine.  Il  alla  étudier 
la  philosophie  à  Louvain,  embrassa 


LHE    - 

l'état  ecclésiastique,  et  se  rendit  k 
Rome,  où  il  demeura  plus  de  vingt 
années  ,  occupé  de  la  recherche  des 
anciens  monuments ,  et  principale- 
ment des  antiquités  chrétiennes.  A  la 
recommandation  de  plusieurs  pro- 
tecteurs distingués  que  lui  avaient 
mérités  ses  travaux,  il  fut  nommé, 
par  le  pape  ,  chanoine  d'Aire  en 
Artois.  Il  mourut  dans  cette  ville,  le 
1 1  juin  161 4,  âgé  de  soixante  trois 
ans.  Il  avait  composé  plusieurs  ou- 
vrages savants  ;  mais  sa  modestie 
l'empêcha  de  les  publier.  En  mou- 
rant ,  il  légua  ses  manuscrits  à  la  bi- 
bliothèque d'un  des  collèges  de  Lou- 
vain.  Une  seule  de  ses  productions 
a  vu  le  jour  après  sa  mort ,  par  les 
soins  de  Jean  Ghifflet  ,  chanoine  de 
Tournai.  G'est  une  dissertation  qui 
a  pour  litre:  Joan,  Macarii canonici 
Ariensis  Abraxas  seu  Apistopistus  ^ 
quœ  est  antiquaria  de  gemmis  Ba- 
silidianis  disquisitio.  L'auteur  dé- 
signe, sous  le  nom  d'Apistopistus 
{infidelisfidelis;  infidèle  qui  usurpe 
le  titre  de  fidèle  ) ,  ces  divers  sec- 
taires qui  s'élevèrent  dans  les  pre- 
miers siècles  du  christianisme,  et  qui, 
par  l'alliance  la  plus  monstrueuse  , 
mêlèrent  dans  leur  croyance,  à  quel- 
ques dogmes  chrétiens  ,  les  supers- 
titions des  Egyptiens  ,  le  sabéïsme 
des  Perses  ,  les  rêveries  de  l'astro- 
logie et  de  la  magie ,  etc.  Il  fait  con- 
naître leur  dieu  Abraxas  et  unefoul^" 
de  monuments  sur  lesquels  cette  di-j 
vinité  est  représentée  sous  les  forme 
les  plus  bizarres.  A  k  suite  de  cett 
dissertation,  l'éditeur,  Jean  Ghifflet  i 
en  a  placé  une  autre  sur  le  mêra< 
sujet  ;  elle  est  intitulée  :  Ahraxi 
Proteus,  seu  muliifarmis  gemme 
Basilidianœ  varietas.  Il  y  a  joini 
vingt-deux  planches  ,  représentant 
environ  cent  vingt  pierres  gravées  , 
qu'il  a  expliquées  dans  un  commen- 


LHE 

tairrqtii  tfrrainc l'ouvra gf,  imprimé 
Anvers,   iCij^ ,  in-4".  ïihnireux 

ut  été  chargé  d'achever  le*  Ila- 
L  i:l'*pt(i,  ouvrage  sur  les  pein- 
tiK  V  1 1  sculptures  des  monuments 

I liions,  commencé  par  Alphonse 

iicon,  et  continué  par  Philippe 
nghiusdc  Louvain.  La  mort  vint 

noter  dans  cette  eatrcprisc.  L'ou- 
*  I  .<j;e  n*a  point  paru  ;  on  en  trouve 
U's  fragments  cians  diverses  disser- 
tations (le  Jean-Jacques  et, de  Jean 
Chilflet ,  De  linteis  sepidcralibits  Do- 
mini ,  ch.  ^28,  et  dans  VJnasiasis 
fhilperici  I.  Il  est  encore  cité  dans 

lies  de  Jean  Ghifflct  DeSocrate,et 
lie  veteri  imagine  Deiparœ,  Les 
autres  ouvrages  qu'il  laissa  en  ma- 
uuscrit,  sont  :  De  antiqud  scribendi 
ratione.  —  De  nalurd  verbi  medii 
ac  ferè  de  totd  naturd  verborum 
grœcorum.  —  Inscriptiones  grœcœ 
cum  interpret.  et  notis.  —  Emen- 
datio  Bibliorum  romana. — BasiUus 
Seleuciœ  episcopus  de  vitd  Sanctœ 
Tlieclœ  ,  interprète  Macario  ;  et 
quelques  autres  traductions  du  même 
genre.  Z. 

LHOMOND(Charles-Frinçois), 
professeur  émérite  de  l'université  de 
Paris  ,  né  en  1727  ,  à  Chaulnes , 
diocèse  de  Noyon  ,  fit  ses  études  au 
collège  d'Invillc  ,  en  qualité  de 
boursier  ,  et  en  devint  principal. 
Nommé  professeur  au  collège  du 
cardinal  Lemoiue  ,  il  interrompit  sa 
licence,  et  renonça  à  tout  projet  d'a- 
yancement.  11  s'attacha  ,  de  préfé- 
rence ,  aux  plus  jeunes  enfants  ;  on 
eut  beau  lui  offrir  des  places  et  des 
chaires  plus  honorables ,  il  répondit 
constamment  qu'il  n'abandonnerait 
jamais  ses  sixièmes.  Pendant  plus  de 
▼ingt  ans  qu'il  enseigna ,  le  désir 
qu'il  avait  de  se  rendre  utile  à  l'en- 
fance, lit  le  bonheur  de  sa  vie,  et  lui 
inspira  ce^  livres  cléoieutaijre^  ou 


LHO  \  I  r 

brillent  tout  ensemble ,  une  saini» 
littérature  ,  un  bon  jugement  et  une 
piété  solide.  Arrêté  au  commenco- 
ment  d'août  179s»,  et  enfermé  à 
Saint -Firmin  avec  une  multitude 
d'ecclésiastiques  insermentés  ,  il  fui 
mis  m  liberté ,  peu  de  jours  après  , 
par  la  protection  de  Tallicn,  dont  il 
avait  été  le  maître,  et  qui  avait  con- 
servé pour  lui  une  profonde  vénéra- 
tion. Quelques  mois  s'étaient  à  peine 
écoulés,  qu'il  crut  devoir  sortir  de 
Paris  pour  mettre  sa  vie  en  sûreté.  Il 
était  déjà  sur  le  boulevard  de  la  Sal- 
pétrièrc,  quand  il  fut  attaqué  par  deux 
militaires,qui  le  laissèrent  pour  mort, 
et  lui  enlevèrent  une  partie  de  l'argent 
dont  il  avait  pu  se  munir.  L'un  des 
deux  voleursayant  été  pris,  Lhomond 
recouvra  son  argent  par  les  bon» 
offices  de  M.  Guyot  ;  et  comme  on 
le  pressait  de  ne  pas  laisser  le  crimt 
impuni,  et  d'en  poursuivre  la  ven- 
geance devant  les  tribunaux  ,  il  ré- 
pondit :  Je  n'en  ferai  rien  ;  si  vous 
vouliez  lui  faire  tenir  lu  moitié  dm 
la  somme  qu'il  m'a  laissée  y  vous 
m  obligeriez  ;  il  peut  en  avoir  be- 
soin. Il  mourut  le  3 1  décembre  1 794. 
Lhomond  était  très-habile  dans  la 
botanique,  qu'il  cultiva  toujours  avec 
beaucoup  de  soin  ,  et  dont  il  inspira 
le  goût  à  quelques-uns  de  ses  a  mis. 
C'est  lui  qui  donna  les  premières  le- 
çons de  cette  science  à  M.  Haiiy,  et 
qui  l'encouragea  dans  des  études  aux- 
quelles ce  savant  doit  sa  cele'brité.  Sa 
conversation  étaitaimablc,  spirituelle 
et  assaisonnée  de  bons  mots,  que 
ceux  qui  l'ont  connu  se  plaisent  à 
répéter  encore.  11  était  dans  l'usage 
de  faire  ,  tous  les  jours  ,  une  pro- 
menade jusqu'à  Sceaux  ,  quelque 
temps  qu'il  fît;  et  c'est  à  cet  exer- 
cice qu'il  fut  redevable  de  sa 
sajité.  Nous  avons  de  lui  :  I.  />• 
viris illusiribtu urbis  Koms,  mi^. 


ii^  LHO 

II.  Eléments  de  la  Grammaire  la- 
tine ,  in-i'x.  III.  Eléments  de  la 
Grammaire   française  ,    in-  12. 

IV.  Efiiome  historiée  sacrœ,  in-12. 

V.  Doctrine  chrétienne  y  en  forme 
de  lectures  de  piété ,  où  Von  expose 
les  pjeuves  de  la  religion ,  les  dog- 
mes de  la  foi,  les  règles  de  la  mO' 
raie ,  ce  qui  concerne  les  sacrements 
^t  la  prière ,  in- 12.  VI.  Histoire 
abrégée  de  V Eglise,  où  Von  expose 
ses  combats  et  ses  victoires  dans 
les  temps  de  persécutions ,  d'héré- 
sies et  de  scandales ,  et  où  Von 
montre  que  sa  conservation  est  une 
œuvre  divine ,  ainsi  que  son  établis- 
sement ,  in- 1 1.  VII.  Histoire  abrégée 
de  la  Religion ,  avant  la  vejuie  de 
Jésus -Christ  ;  où  Von  expose  les 
promesses  que  Dieu  a  faites  d'un 
rédempteur,  les  figures  qui  Vont 
représenté ,  les  prophéties  qui  Vont 
annoncé  y  et  la  suite  des  événements 
temporels  qui  lui  ont  préparé  les 
voies  ;  et  où  Von  démontre  V anti- 
quité et  la  divinité  de  la  Religion 
chrétienne  ,  i^e.  e'dit.,  1 791,  in- 12. 
Ces  ouvrages, qui  sontentreles  mains 
de  tout  le  monde,  ont  eu  un  grand 
nombre  d'éditions ,  à  Paris  et  ail- 
leurs. Les  additions  que  l'on  a  faites 
dans  quelques-unes,  ne  sont  pas 
toutes  heureuses.  L — b — e. 

LHOPITAL  ( Michel  de),  chan- 
celier de  France,  est  un  des  magis- 
trats les  plus  illustres  des  temps 
modernes.  Montaigne  et  Brantôme 
le  placèrent ,  de  son  vivant  même ,  à 
côté  des  sages  les  plus  renommés 
de  V antiquité  ;  et  Etienne  Pasquier 
desirait  que  tous  les  chanceliers  et 
gardes  des  sceaux  moulassent  leur 
vie  sur  la  sienne.  La  postérité  a 
confirmé  ce  jugement  des  contem- 
porains de  Lhopital  ;  cependant  on 
ne  l'a  encore  jugé  que  confusément 
et  d'après  ses  actions  publiques,  que 


LHO 

la  malignité  a  cherché  quelquefois  k 
dénigrer.  Pour  le  faire  connaître  tel 
qu'il  était,  nous  puiserons  ce  que 
nous  avons  à  en  dire,  dans  ses  Epî- 
tres  ,  source  précieuse ,  mais  négli- 
gée par  la  plupart  de  ceux  qui  se 
sont  occupés  de  ce  grand  homme, et 
dans  son  Testament,  où  il  a  retracé 
lui-même  les  principaux  événements 
de  sa  vie.  Michel  de  Lhopital  na- 
quit à  Aigueperse  en  Auvergne ,  en 
i5o5,de  Jean  de  Lhopital,  médecin, 
et  de  Marguerite  de  Ladiot  :  c'est 
sans  fondement  que  quelques  auteurs 
ont  supposé  qu'il  était  le  petit-fils 
d'un  juif  d'Avignon.  Son  aïeul,  Char- 
les de  Lhopital,  seigneur  de  Bellebat 
et  de  Laroche,  avait  épousé  Margue- 
rite Duprat.  Jean  de  Lhopital  son 
père,  s'attacha  en  qualité  de  médecii 
au  connétable  de  Bourbon,  qui  se  ser- 
vait de  lui  plus  de  conseiller  que  dt 
médecin  ,  n  ayant  affaire  de  si 
grande  importance,  quil  ne  la  lui 
communiquât ,  et  ne  la  passât  par 
son  avis,{  Testament  )  «  Il  était,  an 
»  témoignage  de  son  fils ,  constant 
i)  dans  ses  affections,  inébranlablci 
»  dans  ses  desseins,  et  prêt  à  les 
»  soutenir  au  péril  de  sa  vie.  L'hon- 
)>  nête  l'emporta  toujours  en  lui  sur 
»  l'utile  :  il  ne  s'occupa  jamais  de 
»  sa  fortune,  w  Lorsque  le  connéta- 
ble ,  chassé  de  France  par  envie  et 
privé  de  tous  ses  biens ,  se  retira 
auprès  de  Charles- Quint ,  Jean  de 
Lhopital  ne  l'abandonna  point  dans 
sa  disgrâce;  il  le  suivit,  laissant  en 
France  sa  famille  et  le  peu  de  biens 
qu'il  y  possédait.  Michel  de  Lhopi- 
tal, son  fils,  étudiait  alors  en  droit  à 
Toulouse  :  il  fut  arrêté  et  jeté  en 
prison  par  l'ordre  des  commissaires 
qui  instruisaient  le  procès  du  conné- 
table; mais  le  roi  lui-même  ordonna 
de  le  mettre  en  liberté  ;  on  lui  per- 
mit, deux  ou  trois  aas  après,  d'aller 


LHO 

trouTcr  son  p^^e  en  Italie.  François 
l«f. ,  revenu  de  saranlivile,  et  li;;ue 
avec  les  orinnvs  d'Italie,  faisait  alors 
le  $iej;c  lie  Milan.  Jean  de  Lhopil^i, 
voyant  que  ce  siège  traînerait  m 
lun{;ueur,  et  que  son  fils  qui  était 
enfermé  avec  lui  dans  cette  ville  y 
perdrait  ini  temps  qu'il  pouvait 
mieux  emplover  ailleurs  pour  son 

,  instruction  ,   l'en  Ht  sortir  dégiiisé 
eo  muletier,  et  l'envoya  continuer, 

,  à  Padoue  ,  ses  études  de  droit. 
L'école  de  cette  ville  jouissait  d'une 
grande  célébrité  :  on  y  accourait 
de  toutes  les  parties  de  l'Europe. 
La  jurisprudence  était  dans  ce 
siècle  la  science  principale  :  on  ne 
pouvait  aspirer  à  aucun  emploi,  sans 
en  avoir  fait  une  étude  aprofondie. 
Quoique  Lhopital  eu  eût  déjà  appris 
les  premiers  éléments  en  France,  il 
employa  encore  six  ans  à  Padoue 
pour  s'y  perfectionner.  Il  est  vrai 
qu'il  s'appliqua  aussi  aux  belles- 
lettres  :  le  grec  et  le  latin  lui  devin- 
rent trcs-famdiers.  Lorsqu'il  eut  fini 
SCS  études ,  Lhopital  alla  joindre 
son  père ,  qui  s'était  rendu  à  Rome 
après  la  mort  du  connétable.  Son 
mérite  ne  tarda  pas  à  se  fiiire 
connaître  dans  cette  ville  ;  et ,  quoi- 
que étranger  et  jeune  encore,  il  y 
obtint  une  place  d'auditeur  de  rote. 
Cependant  le  souvenir  de  sa  patrie 
n'était  point  efiacé  de  son  cœur  ;  et 
il  ne  balança  pas  à  renoncer  à  de 
grandes  espérances  de  fortune  , 
quand  le  cardinal  de  Grammont 
l'engagea  (  en  i'534  )  à  revenir  en 
France ,  où  il  lui  promit  de  l'avan- 
cer par  son  crédit  :  mais  ce  prélat 
mourut,  et  Lhopital,  dénué  de  toute 
ressource,  fut  obligé  de  suivre  le 
barreau  de  Paris.  La  modique  for- 

'  tune  de  son  père  avait  été  confisquée 
lors  de  i'aliaire  du  connétable  ;  et 
elle  ne  fut  rendue  à  son  ùls  que  long- 


LHO 


4i5 


temps  après  l'cpomie  dout  nous  par- 
lons. La  vertu  et  le  mérite  avaient 
alors  quelque  prix  en  France  ,  et 
Lho])ital  y  fut  bientôt  apprécié. 
Au  bout  de  trois  ans  ,  Jean  Morin, 
lieutenant  criminel,  lui  donna  sa 
fille,  avec  une  charge  de  conseil- 
ler au  parlement  ,  pour  dot.  Ce 
Jean  Morin  est  très -fameux  dans 
le  martyrologe  des  protestants  ,  par 
la  sévérité  qu  il  mettait  dans  l'exécu- 
tion des  lois  rendues  contre  eux  ;  et 
elle  forme  un  contraste  remarquable 
avec  la  tolérance  que  le  gendre  mon- 
tra dans  la  suite  à  leur  égard.  Lors- 
que Lliopital  entra  au  parlement , 
celte  illustre  compagnie  avait  beau- 
coup dégénéré  de  son  ancien  éclat , 
par  l'effet  de  la  vénalité  que  les 
malheurs  des  temps  avaient  force' 
François  V^.  d'y  introduire.  Lho- 
pital ,  témoin  de  cette  innovation , 
en  déplore  les  suites ,  dans  une  épître 
au  cardinal  de  Tounion.  De  concert 
avec  quelques  anciens  magistrats  qui 
existaient  encore  ,  il  tachait  de  don- 
ner l'exemple  de  l'assiduité  et  de 
l'application  à  cette  foule  de  jeunes 
gens  sans  expérience ,  auxquels  la  vé- 
nalité avait  ouvert  l'accès  du  parle- 
ment,  et  qui  n'avaient  d'autre  titre 
à  cet  honneur  ,  comme  il  le  dit  lui- 
même  ,  que  l'argent  qu'ils  avaient 
donné.  Lhopital  fut  long-temps  cite 
comme  un  modèle  dans  la  magis- 
trature. Les  vacances  ne  changeaient 
pas  beaucoup  sa  manière  de  vivre  : 
il  mettait  à  l'écart  toute  affaire  liti- 
gieuse ;  et  la  lecture  des  grands  écri- 
vains de  l'antiquité ,  de  l'histoire  de 
France  et  de  l'Ecriture  sainte,  occu- 
pait alternativement  ses  loisirs.  Ce- 
pendant la  carrière  de  la  magistra- 
ture lui  devenait  insupportable  :  soa 
génie  se  trouvait  à  l'étroit  dans  les 
fonctions  minutieuses  et  monotones 
d'uD  juge  ;  il  avait  eu  aversion  les 


4^4 


LHO 


débats  des  plaideurs  et  les  ciiaillenes 
des  avocats.  «  Cette  pierre  qu'd  était 
»  oblige',  disait-il,  de  rouler,  comme 
j»  un  autre  Sisyphe  ,  depuis  le  lever 
»  du  soleil  jusqu'à  son  coucher  ,  et 
)»  que  le  lendemain  il  retrouvait  en- 
>»  core  au  bas  de  son  rocher  ,  Tac- 
»  câblait  de  sa  pesanteur.  »  Mais  un 
obstacle  invincible  s'opposait  à  son 
avancement  ,  tant  que  re'gna  Fran- 
çois P''.  Quoique  ce  prince,  dans 
un  traite  avec  Charles-Quint ,  se  fût 
engage'  à  faire  grâce  à  tous  les  par- 
tisans du  connétable ,  il  fut  inexora- 
ble à  l'égard  de  ses  principaux  con- 
fidents :  le  père  de  Lhopital  était  de 
ce  nombre  ;  il  avait  été  nommément 
compris  dans  l'arrêt  rendu  contre 
ce  prince  :  il  ne  put  jamais  obtenir 
la  restitution  de  ses  biens  ,  ni  même 
la  permission  de  rentrer  en  France. 
La  défaveur  du  père  s'étendit  jusque 
sur  le  fils ,  qui  s'en  plaint  amèrement 
dans  une  épître  adressée  à  Pierre 
Duchatel,  son  ami  :  le  crédit  de  Du- 
chatel  ne  put  calmer  le  ressentiment 
du  roi.  D'autres  causes  rendaient  en- 
core difficile  pour  Lhopital  le  che- 
min de  la  fortune  :  il  était  craintif  et 
timide  ;  sa  grande  arae  ne  savait  ni 
.se  plier  aux  sollicitations ,  ni  s'élever 
'à  ce  ton  de  hardiesse  et  d'impudence 
qui  ,  dès-lors  comme  aujourd'hui , 
était  un  des  moyens  les  plus  sûrs  de 
parvenir.  Cependant  la  vertu  ,  dans 
le  siècle  de  Lhopital ,  n'était  pas 
dépourvue  de  toute  ressource  :  il  y 
avait ,  parmi  les  grands  mêmes,  beau- 
coup d'hommes  capables  de  la  dis- 
cerner ,  et  qui  se  faisaient  une  gloire 
de  la  protéger.  Lorsque  Lhopital 
n'était  encore  que  simple  particulier , 
on  le  vit  en  relation  avec  les  person- 
nages les  plus  distingués  par  leur  rang 
ou  par  leur  mérite:  dans  ce  nombre, 
on  comptaitbeaucoup  de  femmes.  Le 
i6^.  siècle,  si  fertile  en  grands  hom^ 


LHO 

mes,  ne  le  fut  pas  moins  en  femmes  il- 
lustres  :  elles  valaient  même  en  géné- 
ral mieux  que  les  hommes.  La  protec- 
tion de  quelques-unes  d'entre  elles ,  fut 
très-utile  à  Lhopital.  Mais  les  premiè- 
res faveurs  delà  fortune  qu'il  éprouva  j 
lui  vinrent  du  chancelier  Olivier.  Cet' 
illustre  magistrat ,  que ,  pour  la  suffi- 
sance et  la  'Vertu  non  commune , 
Montaigne  met  sur  la  même  ligne  j 
que  Lhopital,  était  parvenu,  par  son  j 
seul  mérite  à  la  haute  dignité  qu'il 
occupait  :  il  avait  connu  Lhopital  au 
parlement.  La  conformité  de  leurs 
principes  et  de  leur  caractère  les  unit 
l3ient6t  de  la  plus  étroite  amitié.  Tant 
que  François  I^^.  vécut ,  les  bonnes 
intentions  d'Olivier  pour  Lhopital 
furent  impuissantes  :  mais  à  peine  ce 
prince  fut-il  moi^ ,  qu'il  songea  à  tirer 
son  ami  de  l'état  obscur  où  il  lan- 
guissait. Il  le  fit  elivoyer,  en  qualité 
d'ambassadeur,  au  concile  de  Trente: 
le  pape  venait  de  transférer  ce  concile 
à  Bologne;  mais  les  évêquesd'Italiefu- 
rent  les  seuls  qui  consentirent  à  cette 
translation  :  les  autres  s'obstinèrent 
à  rester  à  Trente.  La  France  reconnut 
le  concile  de  Bologne  ,  par  la  raison 
que  Charles-Quint,  son  ennemi,  était 
resté  attaché  â  celui  de  Trente.  Lho- 
pital sortit  de  Paris  vers  la  fin  d'août 
1547. Les  eVêques, réunis  à  Bologne^ 
ne  tinrent  qu'une  seule  session,  êtres» 
tèrent  ensuite  dans  une  inaction  abso- 
lue. Ceux  de  Trente  n'en  faisaient  pas 
davantage.  Lhopital  éprouvait  beau- 
coup d'ennui  de  l'oisiveté  où  il  était 
réduit  à  Bologne.  lia  décrit  le  genre  de 
vie  qu'd  y  menait ,  dans  deux  épîtres 
adressées, l'une  au  chancelier  Olivier, 
et  l'autre  au  cardinal  du  Bellay.  Pour 
employer  son  temps  d'une  manière 
utile,  ilreprit  un  ouvrage  sur  le  droit, 
qu'il  avait  commencé  dans  sa  jeu- 
nesse ,  et  où  il  voulait  ranger  toutes 
les  matières  dans  ua  ordre  métlio- 


(liqiie.  Malheureusement  «a  santé  ne 
lui  peruiit  pas  de  se  livrer  à  ce  travail. 
Dans  son  épître  à  Olivier  y  il  fait  une 
lungnc  description  drt  maux  qu'il 
éprouvait;  mais  celui  qu'il  paraissait 
rcflouler  davantage  ,  c'était  d'être 
<»bligé,  à  son  retour  en  France,  de 
reprendre  les  fonctions  de  juge, pour 
lesquelles  il  avait  plus  d'aversiou  que 
jamais.  Il  prie  instamment  Olivier 
de  lui  épargner  ce  tourment.  Cepen- 
dant le  pape  Paid  III ,  n'ayant  pu 
réunir  les  évêqucs  de  Trente  à  ceux 
de  Bolocne ,  prit  le  parti  de  suspendre 
le  concile.  La  mission  de  Lhopital 
devenait  par-là  inutile  ;  il  retourna 
en  France  ,  après  un  séjour  de  seize 
mois  en  Italie.  La  cour  avait  bien 
changé  pendant  sou  absence  :  Diane 
de  Poitiers,  maîtresse  de  Henri  II , 
y  exerçait  un  pouvoir  absolu.  Elle 
fit  renvoyer  le  chancelier  Olivier  , 
et  donner  les  sceaux  à  Bertrandi , 
président  au  parlement,  et  depuis 
cardinal  et  archevêque  de  Sens.  Lho- 
pital perdit,  dans  Olivier  ,  un  ami 
»ûr,  un  protecteur  éclairé.  Ou  lui  fit  à 
la  cour  beaucoup  de  promesses  , 
dont  on  ne  tint  aucune.  Il  se  voyait 
réduiwà  reprendre  les  fonctions  de 
juge ,  pour  lesquelles  il  avait  tant  de 
dégoijt ,  lorsqu'une  protection  à  la- 
quelle il  ne  s'attendait  pas  ,  vint  lui 
ouvrir  une  plus  noble  carrière.  Sa 
réputation  avait  pénétré  jusqu'à  Mar- 
guerite de  Valois,  duchesse  de  Bcrri. 
François  I^'".,  pèrede  dette  princesse , 
l'avait  chargée  en  mourant,  de  conti- 
nuer aux  cens  de  lettres  ,  la  protec- 
tion qu'il  leur  avait  accordée.  Il  ne 
pouvait  mieux  choisir  pour  remplir 
cette  disposition  :  Marguerite  con- 
naissait à  fond  la  littérature  ancienne, 
dont  les  écrits  faisaient  sa  lecture  ha- 
bituelle; et  elle  ne  quittait  les  poètes 
et  les  orateurs  ,  que  pour  se  livrer  à 
des  études  plus  sérieuses ,  telles  que 


Lno  4i5 

celle  des  philosophes  ou  des  livres 
saints.  Cette  j)r incesse  désira  de  con- 
naître Lhopital,  sur  le  bien  qu'elle 
en  entendait  dire;  et  quand  elle  eut 
vu  que  la  renommée  ne  lui  en  avait 

f)oint  imposé,  elle  se  l'attacha  ,  eu 
e  faisant  son  chancelier  particulier, 
et  en  lui  donnant,  sur  sa  maison,  une 
autorité  souveraine.  L'iutimilé  qui 
s'établit  entre  eux,  dura  autant  que 
leur  vie.  Lhopital  forma  aussi  à  cette 
époque',  avec  la  maison  de  Lorraine, 
des  liaisons  qui  subsistèrent  trè.s- 
long-temps.  Le  cardinal ,  qui  jouis- 
sait à  la  cour  d'un  grand  crédit  , 
chercha  à  le  justifier  aux  yeux  du 
public  en  prenant  sous  sa  protec- 
tion un  homme  de  ce  mérite.  De 
concert  avec  la  duchesse  de  Berri , 
il  le  fit  ordonner  chef  et  surinten- 
dant des  finances  du  roi  en  la 
chambre  des  Comptes.  (  Testament.  ) 
Les  finances  avaient  besoin  d'un  gar- 
dien aussi  fidèle.  Des  abus  intoléra- 
bles régnaient  dans  leur  administra- 
tion. D'un  côté ,  des  dissipations 
sans  bornes  ;  de  l'autre  des  malver- 
sations sans  pudeur.  A  peine,  dit -il 
lui-même,  le  tiers  ou  le  quart  de  ce 
qu'on  percevait  entrait-ildans  le  tré- 
sor public.  Pour  mettre  au  terme 
à  ces  désordres,  Lhopital  fit  revivre 
les  anciennes  lois  tombées  en  désué- 
tude :  il  contint  les  prévaricateurs, 
par  des  exemples  de  sévérité;  et  il 
refusa  d'acquitter  les  dépenses  qui  ne 
tournaient  point  au  profit  de  l'état. 
On  peut  imaginer  combien  de  pas- 
sions une  telle  conduite  dut  soulever. 
Ces  passions  trouvèrent  l'occasion 
de  se  satisfaire  dans  une  affaire  étran- 
gère à  ses  fonctions,  et  à  laquelle  il 
eut  l'imprudence  de  prendre  part. 
On  n'a  jamais  bien  su  les  motifs  qui 
portèrent  les  ministres  de  Henri  II 
à  bouleverser  la  constitution  du  par- 
leuicotj  et  à  le  diviser  eo  deux  sec- 


4i6 


Lto 


lions,  qui  devaient  servir  alternati- 
vement pendant  six  mois  :  c'est  ce 
qu'on  appela  les  semestres.  Pour  lé- 
gitimer cette  mesure  aux  yeux  du  pu- 
blic ,  on  employa  un  leurre ,  dont 
l'usage  s'est  renouvelé  depuis  plu- 
sieurs fois.  On  voulut  que  la  justice 
fût  rendue  gratuitement  j  et  Ton  sup- 
prima les  épices ,  en  augmentant  les 
gages  des  juges.  Lhopital,  qui  avait 
été  choqué  pendant  qu'il  était  au 
parlement ,  de  la  cupidité  de  quel- 
ques magistrats  ,  crut  voir  le  remède 
à  cet  abus  dans  le  nouvel  édit  ;  et 
quoiqu'il  n'en  fût  pas  l'auteur,  il 
s'en  montra  hautement  le  défenseur , 
et  se  chargea  même  de  répisndre  aux 
remontrances  du  parlement ,  que  le 
premier  président  Lemaître  avait 
présentées.  Ceux  qui,  irrités  de  sa 
sévérité  dans  l'administration  des  fi- 
nances ,  n'osaient  lui  en  faire  ouver- 
tement un  reproche,  saisirent  cette 
occasion  d'éclater  contre  lui.  Ce  fut 
un  déchaînement  général;  et  il  en 
éprouva  un  chagrin  très-vif,  comme 
on  peut  en  juger  par  une  épître  qu'il 
adressa  au  chancelier  Olivier.  Celui- 
ci,  dans  sa  réponse,  garde  le  plus 
profond  silence  sur  l'affaire  des  se- 
mestres, qu'il  n'approuvait  pas.  Il 
loue  beaucoup  la  beauté  des  vers  de 
son  ami,  et  il  cherche  à  le  consoler  du 
chagrin  que  lui  causaient  les  traits 
de  l'envie.  Mais  Lhopital  était  ré- 
servé à  des  épreuves  encore  plus  dif- 
ficiles. La  France  se  trouvait  dans  la 
situation  la  plus  critique,  après  l'ac- 
cident funeste  qui  lui  enleva  Henri  II. 
Des  factions  s'étaient  formées,  et 
s'agitaient  en  tout  sens  sous  son  fai- 
ble successeur.  Les  nouvelles  héré- 
sies avaient  fait  de  grands  progrès  ; 
et  les  rigueurs  exercées  sous  Fran- 
çois pr.  ,  et  sous  Henri  II ,  con- 
tre les  calvinistes  ,  n'avaient  servi, 
comme  il  arrive  pour  l'ordinaire  , 


qu'à  en  accroître  le  nomWe.  Les 
mécontents  n'attendaient  que  des 
chefs  pour  devenir  formidables.  Le» 
princes  lorrains  ,  appuyés  du  cr^ 
dit  de  la  reine  Marie  Stuart ,  leur 
nièce,  se  mirent  à  la  tête  du  gouver- 
nement, et  se  déclarèrent  les  protec- 
teurs de  l'ancienne  religion;  et  pourî 
gagner  encore  mieux  l'opinion  publiJ 
que,  ils  n'appelèrent  à  l'administra-! 
lion  que  des  hommes  qu'elle  hono* 
rait.  Le  chancelier  Olivier  reprit  les 
fonctions  dont  il  était  dépouillé  de- 

f)uis  si  longtemps.  D'un  autre  côte', 
es  princes  de  la  maison  de  Bourbon, 
le  roi  de  Navarre  et  le  prince  dei 
Condé,  indignés  de  voir,  dans  des! 
mains  étrangères , une  autorité  qu'ils' 
croyaient  leur  appartenir  par  le 
droit  de  la  naissance ,  se  mirent  à  la 
tête  du  parti  protestant  :  mais  la  con- 
juration d'Amboise,  dont  ils  pas- 
saient pour  être  les  principaux  au- 
teurs, échoua  complètement  ;  et  cet 
événement  offrit  un  prétexte  pour  les 
perdre.  Cependant,  le  cardinal  de 
Lorraine  avait  fait  entrer  Lhopital 
au  conseil-privé.  Mais  par  un  des  ar- 
ticles du  traité  de  Cateau-Cambrésis, 
la  duchesse  de  Berri,  sa  bienfaitrice, 
devant  épouser  Emanuel  Philibert, 
duc  de  Savoie,  il  fut  chargé  d'aller 
conduire  cette  princesse  en  Piémont 
Il  a  tracé  la  description  de  ce  voya- 
ge, depuis  Blois  jusqu'à  Nice  ,dans 
une  longue  épître  à  Jacques  Dufaur. 
Pendant  l'absence  de  Lhopital ,  le 
chancelier  Olivier ,  désolé  de  n'être 
que  l'instrument  dont  les  Guises  se 
servaient  pour  perdre  ceux  qui  leur 
faisaient  ombrage,  fut  saisi  d'une 
maladie  qui  le  conduisit  au  tombeau. 
Lorsqu'il  fut  question  de  lui  donner 
un  successeur,  Catherine  de  Médicis 
se  trouva  dans  une  grande  perplexi* 
té.  Les  anciennes  liaisons  de  Lho 


tal  avec  la  maison  de  Lorraine  le  lui 


hopi- 
le  lui 


i.n(f 

uUient  suspect:  mais  ia  duchesse 
de  Montnfiisier,  IViniiie  (i'uu  rarac- 
^e  et  d  un  esprit  aiiHlcssus  de  son 
\<' ,  qui  l'avait  connu  chez  la  du- 
isse  de  Cerri ,  dissipa    toutes  les 
àuccrtitiidi's  ,  en   peignant  Lliopital 
couiuic  un  homme  en  qui  l'amour 
de  son  pays  doinnuait  toutes  les  au- 
tres a  llections.  A  son  arri  vcfc  à  la  cour, 
ce  magistrat  trouva  qu'on   y   agi- 
tait les  projets  \cb  plus  Junestes.  La 
perte  des  protestants  était  jurée  :  on 
lie  devait  leur  laisser  que  l'alterna- 
tive de  l'abjuration   ou  de  la  mort. 
I  II  était  même  ([uestion  d'établir  en 
!  France  le  redoutable  tribunal  de  l'in- 
quisition. Le  nouveau  chancelier  ne 
pouvait  attaquer  de  front  un  tel  pro- 
jet,  sans  se  compromettre  avec  ceux 
qui  gouvernaient.  Il  chercha  à  l'é- 
carter par  des  voies  détournées ,  en 
taisant  rendre  un  édit  qui  ôtait  aux 
tribunaux  laies  la  connaissance  du 
(rime  d'hérésie,  et  l'attribuait  aux 
s  ecclésiastiques  :  il  décida  ainsi 
.^  V  lergé  à  repousser  l'établissement 
de  l'inquisition.  Ceux  qui  ne   péné- 
traient pas  les  vues  de  Lhopital ,  ne 
,  pouvaient  concevoir  qu'un  magistrat 
qui  avait  montré  tant  de  zèle  pour 
le  maiutien  de  nos   maximes,  s'en 
fut  écarté  à  ce  point  :  mais  on  trouva 
le  moyen  d'éluder   l'exécution    de 
lit ,  et  l'ou  ne  parla  plus  de  l'in- 
ilioD.  Il  n'aurait  pu  lutter  long- 
[is  tout  seul  contre  la  faction  clo- 
uinte  :  pour  la   combattre  avec 
>  d'avantage,  il  réunit  autour  de 
.  -.   tous  ceux  qui  partageaient  ses 
principes  de  modération  et  de  jus- 
♦■'^^;  ainsi ,  il  se  forma  un  tiers  par- 
lai se  montrant,  sous  sa  direc- 
iiuu, étranger  a  toutes  les  factions,  ne 
voulut  reconnaître  d'autres  ennemis 
bien  public,  que  ceux  qui  trou- 
ut  le  repos  de  l'état  et  eu  vio- 
i.t  les  lois  et  la  coostitutiou.  On 
x\iv. 


LHO  4,7 

vit  c\\  peu  de  temps  s'attacher  k  r« 
parti  des  prélats  célèbres  par  leur 
savoir  et  leur  pieté ,  de  sages  théo- 
logiens et  de  vertueux  magi.str.it-;. 
Lhopital  voulut  s'appuyer  en«ore 
de  l'opinion  de  la  nation  entière. 
Dans  nue  assemblée  de  notables  tr- 
n'je  en  ij(io,  à  Fontainebleau,  et 
où  il  avait  eu  le  soin  de  n'appeler 
que  des  hommes  dont  les  intentions 
et  la  sagesse  lui  étaient  connues  ,  il 
fit  ordonner  la  convocation  des  états 
généraux,  celle  d'un  concile  national, 
et  la  suppression  des  poursuites 
contre  les  protestants.  Mais  ceux-ci , 
liers  d'un  avantage  qu'ils  n'auraient 
osé  se  promettre  quelques  mois  au- 
paravant, dérangèrent  tous  les  plans 
du  chancelier,  en  levant  l'étendard  de 
la  révolte.  On  attira  à  la  cour,  sous  un 
prétexte  spécieux,  le  roi  de  Navarre 
et  le  prince  de  Gondé,  qui  avaient  eu 
l'imprudence  d'y  exciter  les  protes- 
tants :  ils  furent  arrêtés  à  leur  arri- 
vée- et  un  arrêt  de  mort  rendu  con- 
tre le  prince  de  Gondé,  dont  on  re- 
doutait le  caractère  énergique,  allait 
être  exécuté,  si  Lhopital  ne  l'avait 
empêché  ,  en  en  retardant  la  signa- 
ture. La  mort  de  François  II  chan- 
gea l'état  des  choses.  La  puissance 
des  Guises  tomba  avec  lui;  mais  les 
factions  n'en  devinrent  que  plus  har- 
dies sous  un  roi  mineur.  La  France, 
suivant  les  expressions  de  Lhopital , 
se  trouva  avoir  autant  de  rois,  pour 
ne  pas  dire  de  tyrans,  qu'elle  renfer- 
mait d'hommes  puissants.  Le  chan- 
celier poursuivait  toujours  son  sys- 
tème de  rapprochement  et  de  conci- 
liation. Le  colloque  de  Poissy,où  les 
catholiques  et  les  protestants  s'attri- 
buèrent également  la  victoire,  n'a- 
vait fait  qu'aigrir  les  esprits ,  et  les 
rendre  ])lus  fermes  dans  leurs  opi- 
nions. La  guerre  civile  était  sur  le 
point  d'éclatei*.  (ibopital  aut  qu'il 


4.8 


LHO 


n'y  avait  plus  (l'autre  moyen  de  cal- 
mer les  protestants  ,  que  de  leur  ac- 
corder une    tolérance   qu'il   n'était 
plus  possible  de  leur  refuser.  L'edit 
de  janvier ,  ainsi  nomme  du  mois  où 
il  fut  publie,  permit,  sous  certaines 
restrictions ,  la  profession  publique 
de  la  religion  protestante.   Mais- cet 
e'dit  aigrit  les  catholiques  et  enhar- 
dit les  protestants, qui,  de  persécutes 
devenus  persécuteurs ,  se  soulevèrent 
dans  plusieurs  endroits  et  se  livrèrent 
aux  plus  coupables  excès.  Le  désir 
de  la  vengeance  s'était  emparé  de 
tous  les  cœurs  j  ou  attendait  avec 
impatiencele  signal  de  la  guerre  :  mais 
Lhopital  indigné  tonnait  con're  tous 
ces  furieux  ;  et  sa  présence  au  con- 
seil suspendit  toules  les  délibérations. 
Le  connétable  de  Montmorency  lui 
dit  im  jour ,  qu'un  homme  de  robe 
ne  devait  pas  se  mêler  de  ce  qui 
concerne  la  guerre  :  Si  je  ne  sais  pas 
la  faire  ,  lui  répondit-il ,  au  moins 
sais-je  quand  elle  est  nécessaire.  Il 
fut  exclus  du  conseil,  et  les  hostilités 
commencèrent.   La   France  fut  en 
proie  aux  plus  horribles  dévastations; 
et  Lhopital  en  fut  pénétré  de  la  plus 
vive  affliction  :  il  a  fait  dans  ses  épî- 
tres   les  descriptions  les  plus  tou- 
chantes de  ces  calamités.  Euiîn  la 
mort  du  duc  de  Guise ,  assassiné  au 
siège  d'Orléans,  amena  la  paix,  dont 
Lhopital  régla  les  conditions.  Cette 
paix  ayant  mécontenté  ies  deux  par- 
tis;,le  chancelier  pensa  qu'une  guerre 
étrangère ,  en  les  réunissant  contre 
un  ennemi  commun,  était  le   seul 
moyen  de  faire  diversion  à  leurs  fu- 
reurs 'j  et  il  fit  déclarer  la  guerre  aux 
Anglais  ,  qui  avaient  profité  de  nos 
troubles  pour  s'emparer  du  Havre. 
Charles   IX  avait   atteint  sa   qua- 
torzième année  :  le    chancelier  fit 
revivre  une  ancienrie  loi, qui  fixait  à 
cet  âge  U  m;^juriîé  du  roi.  11  voulut 


LHO 

ôter  par-là  aux  chefs  de  parti ,  toute 
prétention    au     pouvoir    suprême. 
Mais  Charles  IX,quoique  majeur,  n'eu 
était  pas  plus  capable  de  tenir  les 
rênes  du  gouvernement  ;  et  de  nou- 
veaux orages  menaçaient  la  France. 
Malgré  la  fermeté  avec  laquelle  Lho- 
pital faisait  exécuter    les  édits   de 
pacification,  les  protestants  autant 
que  les  catholiques  traversaient  sans 
cesse  ses  intentions  pacifiques.  Pour 
imposer   aux  factieux  par  la  pré- 
sence de   la  majesté  royale  ,  il  en- 
gagea   le    roi  à   parcourir  tout   le 
royaume.  Mais  ce  dessein  ,  dont  lefl 
résultats  furent  d'abord  très  -  heu 
reux  ,  eut  des  suites  auxquelles  oi 
ne  s'était  pas  attendu.  Dans  une  coi 
férence    que  le    duc  d'Albe   eut 
Baionne  avec  Catherine  de  Médici 
il  parvint  à  réveiller  l'ambition 
cette  princesse ,  à  lui  rendre    suî 
pects  tous  ceux  qui  voulaient  rétabli 
la  tranquillité  par  une  sage  toléranc( 
il   lui  persuada  qu'elle    ne   régne 
rait  paisiblement  que  par  la  destrui 
tion  entière  du  parti  protestant,   0 
croit  que  c'est  de  cette  époque  qi 
datent  ces  complots  sanguinaires 
dont  on  ne  différa  l'exécution  qi 
pour  attendre  une  occasion   fav( 
rable.   Le  chancelier  ne  tarda  pas  a" 
s'apercevoir   qu'il   avait    perdu    la, 
confiance  de  la  reine.    Ses  avis 
furent  plus  écoutés  ;  et  l'on  finit  p 


I 


'exclure  des  conseils  oii  l'on  dé 
bérait  si  l'on  ferait  ou  non  la  guer; 
aux  protestants.  La  reine  et  le  roij 
s'étant  absentés ,  il  ne  fut  point  de  ce 
voyage  ;  et  il  se  retira  ,  pendant  ce 
temps,  dans  sa  terre  de  Vignay ,  près 
d'Etampes.  Ce  fut  alors  qu'il  se  répan- 
dit contre  lui  beaucoup  de  bruits , 
dont  il  fut  très-affecté ,  et  dont  il  se 
plaint  amèrement  dans  une  invective 
adressée  aux  habitants  de  Paris.  Ce- 
pendant, après.le  retour  du  roi,  il  rc- 


LÎIO 

|>ri  lies  fonctions  de  sa  place:  mais  ce 
uc  fnl  pas  pour  lonp;-lcinps.  Il  rtail 
assez,  évident ,  que  l  iiit  qu'il  l'orru- 
pcr.iil,oniic  pourrait  violer  les  lois  , 
tlissi|)cr   les   liiiances   et   inrllre    le 
rojauuie  (Ml  roiubustion  :  on  redou- 
bla donc  les  intrigues  pour  le  rendre 
suspect  et  pour  lui  donner  des  de'- 
goûts  ;  de  sorte  que  voyant  que  sa 
présence   n'était   plus  agréable  ,  et 
que  le  roi ,  oI)sc(lé  de  toutes  parts  , 
n'avait  réellement  pi  us  de  puissance  et 
n'osait  même  dire  ce  qu'il  pensait,  il 
jugea />/«.«  expédient  de  céder  volon- 
laiivment  à  la  nécessité  de  la  ré.>u- 
blique ,  et  au  i  nouveaux  gouverneurs 
que  de  débattre  avec  eux  (Testa- 
ment). Lhopitai  alla  donc  de  nou- 
veau se  fi\er  à  Vignay.  Nous  avons 
de  lui  plusieurs  épitrcs ,  écrites  pen- 
dant sa  retraite.  On  y  remarque  la 
même  fermeté  d'ame,  la  même  vi- 
gueur, que  lorsqu'il  occupait  la  pre- 
[    micre  dignité  de  l'état.  On  y  voit 
aussi  que  ce  digne  magistrat  sentit 
alors, dans  les  douceurs  du  repos,  un 
charme  qu'il  neconiiaissait  point  en- 
core. L'étude, la  prière, l'éducation  de 
'  t    sespelils-fds,lacultnredescschamps, 
la  société  d'une  femme  qui  se  mon- 
^     Irait  en  tout  point  digne  de  lui ,  par- 
I     tageaient  sa  journée.   Le  seul  regret 
)     qu'il  éprouvât,  était  de  ne  pouvoir 
plus  donner  au  roi  des  preuves  ('«e  sa 
îidélité  ,  ni  contribuer  à  détourner 
•     les     nouveaux    malheurs     dont    il 
voyait  la  France  menacée.    Il  con  - 
naissait  trop  bien  la  cour  et  les  chefs 
des  partis  qui  la  divisaient ,  pour 
croirequ'ils  vécussent  jamais  en  paix. 
Leurs  rapprochements  momentanés 
lui  étaient  suspects;  et  personne  ne 
fut  moins  que  lui  trompé  par  cette 
perfide   paix  qui  précéda  la    Saint 
!emi.  Il  s'aperçut  qu'elle  ne 
>\i  qu'un  piège,  ainsi  qu'il  ré- 
crivait à  Arnoul  Ferricr.  On  sait  qu'il 


LliO  419 

faillit  être  une  des  TÎctimes  de  cette 
terrible  journée.  Les  habitants  de  la 
campagne  s'ameutèrent  :  ih  df'V  is- 
tèrcnt  ses  champs,  et  tr  I  » 

ville  ses  fermiers  enchaiiM         1       i,i 
rcino  ,  inquiète  sur  son  sort,  envoya  , 
pour  le   protéger,  un  détachement 
de  cavalerie.  L'apjiarition   de  cette 
troupe,  dont  on  ignorait  la  destina- 
lion  ,  causa  de  l'effroi  dans  sa  maison 
ouverte  de  toutes  paris.  On  lui  de- 
manda ,  s'il  voulait  qu'on  fermât  la 
porte  :  Non,  non  ,  dit-il  ;  si  la  petite 
n'est  Instante  pour  les  faire  entrer, 
que  Von  ouvre  la  grande.  Mais  ce 
qui  afiecta  le  plus  Lhopitai ,   dans 
ces  tristes  circonstances  ,  fut  le  dan- 
ger qjic  courut  sa  (ille  ,  que  le  hasard 
avaitconduiteà  Paris.  Ellefut  sauvée 
par  Anne  d'Esté,  duchesse  de  Guise. 
Lhopitai  remercia  de  ceserviçe  si gna- 
1  é  sa  bienfaitrice  par  une  épître  où  res- 
pire la  plus  vive  sensibilité.  Ces  cruels 
événements  pénétrèrent  Lhopitai d'uu 
chagrin  qu'il  ne  lui  fut  plus  possible 
de  dissiper.  Il  mourut  à  Vignay,  le 
i3  mars  i573,  et  fut  enterré  dans 
l'église  deChampmoteux,  sa  paroisse, 
où  on  lui  éleva  un  mausolée  dans  la 
chapelle   seigneuriale.   Ses   cendres 
ont  été  violées  par  les  factieux  de 
notre  temps,  comme  sa  vie  avait  été 
troublée  par  ceux  du  seizième  siècle. 
Son  mausolée  a  été  transporté  au 
Musée  des  Pelits-Auguslins.  Lhopitai 
ne  s'était  occupé  en  aucun  temps  du 
soin  de  sa   fortune  :   après   avoir 
passé  neuf  ans  au  parlement ,  et  six 
dans  l'administration  des  finances, 
on  le  voit  réduit  à  demander  des  ali- 
ments pour  lui  (  ce  sont  ses  termes  ), 
et  une  dot  pour  sa  fille  unique.  Lcl 
roi  promit  la  dot;  mais  cette  pro- 
messe tarda  long-temps  à  s'ellectuer. 
Cette  dot,  si  long-temps  attendue  et 
sollicitée ,  vint  enfin  :  il  paraît  que 
ce  fut  une  charge  de  maître  des  rc- 

^7- 


420 


LHO 


quêtes ,  dont  on  pourvut  Robert  Hu- 
rault,  seigneur  de  Belesbat,  conseil- 
ler au  grand-conseil ,  qui  devint  son 
gendre.  Lhopital  avait  aussi  obtenu , 
on  ne  sait  à  quelle  époque  ^  la  terre 
deVignay,  près  d'Etampes  ,  qui  dé- 
pendait du  domaine  ,  et  qui  fut  sou- 
mise à  une  forte  redevance.  C'était 
un  cbamp  stérile ,  dont  il  fait  lui- 
même  une  bien  triste  peinture  :  une 
inscription  qu'on  voyait  dans  le  châ- 
teau ,  indiquait  qu'il  avait  ëtc  bâti 
par  Lhopital  et  sa  femme  ,  en  1 562  , 
au  milieu  des  désordres  auxquels  la 
France  était  en  proie.  On  lui  rendit 
aussi  les  biens  qui  avaient  été  confis- 
qués sur  son  pbre  :  mais  c'était  peu 
de  chose.  Ses  mœurs  furent  toujours 
austères  et  ses  goûts  simples.  Sa  so- 
briété était  extrême.  Branlome  ra- 
conte qu'étant  allé  lui  faire  une  visite 
avec  le  maréchal  Strozzi,  Lhopital 
les  fit  dîner  dans  sa  chambre  avec  du 
bouilli  seulement;  car  c'était,  ajoute 
l'historien ,  son  ordinaire  pour  le  dî- 
ner. Il  était  cependant  alors  chance- 
lier. Sa  vaisselle  consistait  en  une 
salière  d'argent ,  qui  servait  à  la 
ville  et  à  la  campagne.  Il  regardait 
le  luxe  qui  s'était  introduit  de  son 
temps  ,  comme  une  des  plaies  les 
plus  funestes  qui  affligeaient  la 
France.  Il  y  voyait  la  source  de 
cette  cupidité ,  qui ,  en  détruisant 
les  mœurs  anciennes,  portait  ceux 
dont  elle  s'était  emparée,  à  boule- 
verser le  royaume ,  pour  se  satis- 
faire. Il  nous  reste  de  lui  une  satire 
contre  le  luxe  ,  adressée  au  président 
deThou,  et  qui  estune  des  pièces  les 
plus  énergiques  et  les  plus  éloquentes 
qui  soient  sorties  de  sa  plume.  Il 
s'irritait  surtout  contre  les  vices  des 
grands  ,  dont  l'exemple  a  tant  d'in- 
fluence sur  la  multitude.  Il  n'oublia 
rien  pour  ramener  les  magistrats 
à  la  pureté  primitive  de  leur  prG- 


LHO 

fcssion.  On  voit  avec  quelle  force 
il  s'exprime  sur  les  désordres  qui 
s'étaient  introduits  parmi  eux ,  dans 
les  discoursqu'ii  eut  occasion  d'adreS" 
ser  à  différentes  cours  souveraines. 
Brantôme  rapporte  un  exemple  de 
la  sévérité  que  mettait  Lhopital  dans 
l'examen  de  ceux  qui  se  présentaient 
pour  remplir  une  place  de  magis- 
trature. Pendant  qu'il  exerçait  les 
fonctions  de  juge  ,  il  avait  vu  tant 
de  contestations  injustes  et  de  mau- 
vaise foi ,  qu'il  en  prit  les  procès  en 
horreur.  Il  exprime  toute  son  in- 
dignation à  ce  sujet ,  dans  une  satire 
qu'il  publia  en  i549,  ^^"^  y  lîiettre 
son  nom.  Des  savants  de  son  temps  ^ 
tels  que  Barthius  et  Boxhornius  ,  la 
])rirent  pour  l'ouvrage  d'un  ancien  , 
nouvellement  découvert  ,  et  s'em- 
pressèrent d'y  faire  des  notes  et  des 
scolies.  Leur  méprise  était  d'autant 
plus  inexcusable  ,  qu'on  trouve  dans 
cette  satire  des  indices  qu'elle  avait 
été  récemment  composée  en  France , 
et  même  à  Paris.  Lhopital  ne  voyait 
de  remède  ,  aux  maux  de  la  nation\^ 
que  dans  la  réformation  des  mœurs. 
Il  tenta   d'arrêter  le  torrent  de  la 


corruption 


en 


faisant  parler   le^ 


lois  ,  qui  se  taisent  d'ordinaire  dans 
les  temps  d'orages  et  de  tempêtes. 
D'Aguesseau  regarde  les  lois  dont 
nous- sommes  redevables  à  Lhopital, 
comme  le  fond  d^s  plus  utiles] 
qui  aient  été  faites  dans  la  suite 
par  nos  rois,  et  qui  ne  sont  guèr^ 
que  des  conséquences  de  ces  h 
fondamentales.  Malgré  les  secours' 
que  Lhopital  aurait  pu  trouver  dans 
les  lumières  de  soii  siècle ,  il  fut  le 
seul  auteur  des  ordonnances  qui 
parurent  sous  son  ministère ,  et  qui , 
suivant  les  expressions  de  Pasquier  , 
passent,  d'un  long  entre  jet ,  celles 
qui  les  avaient  précédées.  Lhopital 
était   très-savant  dans  le  droit  ;  il 


i.no 

^l'uLiit  rimport.mre  de  rrltC5cirnrc, 

il   s'a|ij)liqna   à    en  faire  fleurir 

Unie.    IVmiant  qtril  était  cliaiice- 

r  (le  la  (lnchessr  de  Herri ,  il  sc- 

Mida  avcr  z.Me  le  projet  qu'avait 

ire  prineesse,  de  faire  de  l'erolcde 

droit  de  lîourj^cs,  la  plus  florissante 

1     qui  eût  existe.  11  y  appela  les  phis 

célèbres  professeurs,  et  entre  autres 

j    le  fameux  Cnjas.  dont  il  découvrit  le 

i     mérite  délaisse  au  fond  d'une  pro- 

'     viucc,    et  qu'il   protc}:;e.l   consfam- 

•     ment.    Aussi  instruit  dans  le  droit 

public  que  dans  le  droit  prive  ,    il 

gardait  le  gouvernement  monar- 

.liiquc   comme  le  plus   parfait   de 

tous  :  mais  il  ne  prétendait  pas  pour 

^•»la  que  l'autorité  du  monarque  dût 

vc  absolue.  Ses  principes  politi- 

los  sont  consigncsdans  deux  poèmes 

Mus,  dont  l'un  fut  fait  à  roccasion 

1  sacre  de  François  II ,  et  l'autre 

;it  comme  un  tableau  des  quatre 

ils  de  la  France.  Le  premier  poème 

'.  un  traité  com])let  de  l'art  de  p;ou- 

•rncr.  Il  produisit  une  ^raixlc  sen- 

uion  dans  le  temps  ;  et  il  contribua 

iH?aucoup  à  la  fortune  de  son  auteur. 

François  II  l'apprit  par  cœur ,  pour 

;  avoir  toujours  les  maximes  pre'- 

Mtcs  à   la  mémoire.  Joachim  du 

ilay  le  traduisit  en  vers  français. 

•  second  roule  à-pcu-près  sur  les 

•mes  idées  que  l'autre,  avec  cette 

fercnce,  qu'outre  les  devoirs  du 

i  ,  l'auteur  trace  aussi  les  devoirs 

>;  quatre  ordres  de  l'état  :  la  magis- 

iture  commençait  alors  à  être  con- 

Ic'rée  commcforra.uitun  quatrième 

<lre.  Du  Bellay  traduisit  aussi,  ou, 

MU- mieux  dire,  paraphrasa  ce  der- 

r  poème  en  vers  français:  on  ne  le 

uiaît  m«*rae  que  par  celte  traduc-' 

u,  l'original  n'ayant  point  étéim- 

nné.  Lliopital  regardait  la  divisioa 

tr  ordres ,  comme  iidiércntc  à  la 

onarcliie;mais  pour  que  ces  ordres 


UIO 

fussent  les  appuis  du  trône.  *,  .,e 
pussent  le  combattre,  il  acheva  d'a- 
battre la  puissance  dc5  grands  ,  et 
il  leur  enleva  de»  droits  et  des  pré- 
rogatives dont  ils  abusaient  souvent , 
et  qu'il  rendit  à  l'autorité  royale.  Il 
assigna  des  bornes  à  la  puissance  de» 
j)arlements,et  fut  le  premier  qui  fixa 
le  poini  où  leur  résistance  devait  s'ar- 
rêter. Ainsi  l'on  |)cut  dire  que  Char- 
lemagne  ,  Saint  -  Louis  et  Lhoj)ital 
ont  été  les  principaux  législateurs  de 
la  France.  Il  montra  ,  à  l'exemple 
de  ces  deux  souverains  ,  un  grand 
zèle  pour  le  maintien  de  nos  maxi- 
mes ,  contre  les  entreprises  de  la 
puissance  ecclésiastique  ;  cl  il  /il  pour- 
suivre avec  sévérité  ceux  qui  ten- 
tèrent d'y  porter  atteinte.  Son  projet 
était  de  diviser  les  ordres  religieux 
en  quatre  classes,  et  de  les  employer 
à  des  occupations  d'un  intérrt  public. 
Dans  le  procès  que  l'université  in- 
tenta contre  les  jésuites  ,  en  1 504  ^  d 
les  appuya  de  son  crédit ,  parce  qu'il 
les  regardait  comme  plus  propres 
que  les  aiitres  religieux  à  l'éducation 
delà  jeunesse. On  a  voulu  cependant 
faire  suspecter  ses  senlimeiïts  en  ma- 
tière de  religion.  Les  uns  ont  pré- 
tendu qu'il  était  protestant  dans  le 
cœur  j  d'autres  ont  été  jusqu'à  l'ac- 
cuser d'athéisme.  Lhopital  était  émi- 
nemment religieux  ,  comme  on  en 
voit  la  preuve  à  chaque  page  de  ses 
épîircs.  Lorsque  le  (ardinal  d'Kstc 
vint  en  France,  en  ij(i-2,  il  était 
spécialement  chargé  par  le  p.âpc  de 
faire  renvoyer  Lhupital,quc  le  pon- 
tife suspectarid'bcrcsie.  ptrce  qu'aux 
étals  d'Orléans,  il  av.ii  ire 

abolir  le  concordat  etrtt  ,  '  «g- 

matique,  loi  long-temps  m  chère  aux 
Français.  Tfule  accusation  tt'hêré- 
sie  conti'e  le  cluincelier,  écrivait  au 
conlraire  ce  légat  au  cardinal  Boi»- 
romée,  serait  mal  fondée,  puis<]u'ou 


4?/A  LHO 

le  voit  ordinairement  aller  à  la 
messe,  se  corifesser  et  communier. 
Lhopital  n'était  pas  seulement  un  ju- 
risconsulte profond  et  un  homme 
d'ëtat  du  premier  rang  j  les  belles- 
leltrcs  faisaient  encore  ses  délices. 
Nous  avons  vu  plus  haut  avec  quel 
plaisir  il  savourait  les  écrits  des  an- 
ciens, quand  ses  occupations  lui  en 
laissaient  le  loisir.  Il  avait  surtout  un 
talent  particulier  pour  la  poésie  ;  et 
telle  était  sa  facilité  à  faire  des  vers, 
qu'il  n'employait  pas  d'autre  langage 
dans  sa  correspondance  familière, 
ou  quand  il  voulait  discuter  quelque 
question  soit  de  morale  soit  de  poli- 
tique. Ou  a  beaucoup  varié  dans  les 
jugements  qiie  l'on  a  portés  sur  son 
talent  poétique  5  les  uns  l'ont  extrê- 
mement déprécié  5  d'autres  l'ont 
exalté  outre  mesure,  et  ont  voulu  le 
placer  même  à  coté  d'Horace  :  mais 
pour  le  bien  apprécier,  il  ne  faut  re- 
courir qu'à  lui-même  ;  sa  candeur 
et  sa  franchise  étaient  telles  ,  qu'il 
indique  les  défauts  de  ses  vers  ,, 
comme  aurait  pu  le  faire  le  censeur 
le  plus  sévère.  Il  ne  faut  pas  néan- 
moins prendre  à  la  lettre  le  jugement 
rigoureux  qu'il  en  porte  :  il  est  vrai 
que  l'extrême  facilité  avec  laquelle  il 
les  composait,  et  le  peu  de  soin  qu'il 
mettait  à  les  corriger,  font  qu'il  est 
quelquefois  diffus  ,  traînant ,  qu'il 
revient  souvent  sur  la  même  idée,  et 
ne  voit  pas  toujours  où  il  faudrait 
s'arrêter  j  mais  son  style  est  cons- 
tamment pur,  élégant  ,  quelquefois 
gracieux,  noble,  énergique.  Son  ame 
s'agrandit  et  s'élève  avec  le  sujet  qu'il 
traite.  On  a  prétendu  que  le  manus- 
crit des  poésies  de  Lhopital  avait  été 
recouvré  par  Pierre  Pithou ,  chez  un 
passementier ,  qui  s'en  servait  pour 
envelopper  sa  marchandise.  Le  pré- 
sident de  Thou  dit  cependant,  dans 
ses  Mémoires,  que  Pibrac  en  était 


LHO 

lpdépositaire:celni-cilcsmitau  jour 
avec  le  secours  de  ï)e  Thou  et  de  Scé- 
volc  de  Sainte-Marthe.  Cette  pre- 
mière édition,  qui  est  de  i584  ,  fut 
dédiée  à  Henri  III  ,par  Michel  Hu- 
rault  de  Lhopital,  petit-fils  du  chan- 
celier. De  Thou  convient  qu'elle  était 
ti  ès-incomplète  :  il  se  proposait  d'en 
donner  une  plus  étendue  ,  et  où  les 
épîtres  seraient  rangées  par  ordre  de 
date  ;  mais  les  circonstances  ne  lui 
permirent  pas  d'exécuter  ce  projet. 
On  fit  plusieurs  éditions  des  poésies 
de  Lhopital,  d'après  celle  de  i584  ,- 
en  France  et  même  chez  l'étranger " 
Le  manuscrit  de  PiLrac  passa ,  on  n 
sait  comment  ,  au  pouvoir  du  célè 
bre  Jean  de  Witt,  grand-pensionair 
de  Hollande;  et  un  de  ses  petits-fil 
le  communiqua  à  Pierre  \lamiug 
qui  donna,  en  i73ti,  à  Amsterdam, 
une  édition  in-S*'.  de  ces  poésies, 
plus  complète  et  plus  correcte  que 
celles  qui  l'avaient  précédée,  mais 
où  les  épi  très  ne  sont  pas  rangées 
dans  un  meilleur  ordre.  Il  y  a 
quelques  pièces  nouvelles  qui  ne 
sont  la  plupart  que  des  fragments. 
Outre  ses  poésies ,  il  nous  reste  de 
Lhopital  des  discours  qu'il  pronon- 
ça en  diverses  occasions,  et  qui  n'ont 
jamais  été  recueillis  :  ils  sont  forts  de 
pensée  et  d'expression;  mais  il 
tombe  souvent  dans  la  familiarité 
vice  ordinaire  de  son  temps.  So 
Testament  ,  qu'on  trouve  dans  l 
Bibliothèque  choisie  de  Colomiès 
dans  la  Bibliothèque  du  droit  fran 
çais  de  Bouchel ,  dans  Castelnau ,  et 
dans  Brantôme  (  article  du  conné- 
table de  Montmorenci  ) ,  est  curieux 
par  les  particularités  qu'il  renferme. 
On  lui  attribue  des  Mémoires,  conte- 
nant plusieurs  traités  depaix  ,apj)a- 
nages ,  mariages ,  reconnaissances , 
foi  et  hommages  (  de  1 55 1  à  1 556  ); 
Gqlogne,  16']'^  ^  ia-i2.  L'ouvrage 


le 

i 


LHO 

jii'il  avait  entrepris  sur  le  droit  s'est 
juitlii  :  on  pn'trnd  qu'il  avait  eu  le 
ItrojctdVcriiTriiisloircdosontpmjj.s, 
iir  le  niodMc  des  anciens  hisloriens; 
nisil  no  rcxmita  point.  Lacroix  du 
Maine  avait  promis  une  Vie  de  Llio- 
pital  ,  cl  Secousse  en  ]>reparail  une  ; 
!!cs  n'ont  paru  ni  l'une  ni  l'autre. 
I  (vestpie  de  Pouilly  en   publia  une 
1  1 704  ,  Londres  [  Paris  ),  iu- 12, 
vcc  un  portrait  du  chancelier,  gra- 
(    par  Tiiliard  d'après  un  portrait 
1  i^inal  (  par  Zucclicro  ) ,  conserve 
lus  le  cabinet  de  Maupeou.  Cette 
\  ic  est  écrite  avec  le  ton  de  no- 
blesse et  de   dignité  qui  convenait 
lU  sujet;   mais    l'homme  public  y 
irhe   un    ]x;u    trop  l'homme  pri- 
vt>  :  dans  Jjhopital ,  le  dernier  est 
le  plus  curieux  à  connaître.  L'aca- 
.      demie  de  Toulouse  mit  ,  en  1776  , 
i      au   concours,  l'éloge  de  Lhopil'al  ; 
'      l'académie  française  ,  jugeant  sans 
'      doute  qu'un  pareil   sujet  lui  appar- 
iiait  plutôt  qu'à  une  académie  de 
!0vince,le  proposa   aussi  de  sou 
>lé.  Ou  voulut ,  à  cette  occasion  , 
lire  du  plus  religieux  des  hommes 
!  du  magistrat  le  plus  attache  aux 
i(»is  deson  pays, l'un  des  coriphccs  de 
l'impiété  et  de  l'anarchie.  Ce  con- 
(  ours  (il  éclore  un  grand  nombre 
'i'ouvragcs  presque  tous  écrits  dans 
'  sens  ,  et  où  le  caractère  de   ce 
^land  homme  fut  entièrement  déna- 
tiué.  Le  discours  de  l'abbé  Pami , 
(jui  remporta  le  prix,  est  un  des  plus 
mauvais  qui  ait  jamais  été  présenté  à 
un  concours   académique.  Voltaire 
ougissaitdu  jugement  qui  l'avait  cou- 
luné.  L'intention  des  Quarante  au- 
lit  étédcdonuer  le  prix  à  un  dis- 
<  ours  de  Condorcet,  qui ,  à  cause  des 
jM'incipes  qu'il  renfermait  ,  n'avait 
pu  être  soumis  à  la  censure  ;  l'aradé- 
niic  en  témoigna  ses  regrets  par  une 
uicntion   particulière  .   et   elle  ex- 


LHO  ii^ 

horla  Pautour  à  le  faire  imprimer. 
iSelon  Laharpe ,  cet  éloge  est  sec  et 
ennuyeux  ,  à  une  ou  deux  pages 
près.  Un  autre  discours  dont  on 
parla  dans  le  temps,  est  relui  de 
Guibcrt.  La  doctrine  que  les  jeunes 
magistrats  firent  adopter  ,  onze  ans 
j)lus  tard  ,  dans  le  parlement,  cl  qui 
amena  la  destruction  de  la  monar* 
chie  ,  y  est  mise  dans  tout  son  jour. 
L'auteur  va  jusqu'à  dire  que  les  états- 
généraux  étaient  le  \éritable  conseil 
de  la  nation  ,  le  palladium  de  ses 
droits  ,  la  ressout-ce  qui  pouvait  un 
jour  tout  réparer  ,  en  tout  boule- 
versant. Ce  discours  est  en  outre 
rempli  de  bévues  et  d'erreurs  sur  les 
faits.  Un  auteur  anonyme  publia  , 
en  1778,  un  Essai  de  traduction  des 
poésies  de  Lhopital,  9.  vol.  in-8°.  ; 
mais  cet  auteur  que  l'on  sait  être 
J.  M.  L.  Coupé ,  avec  des  intentions 
plus  pures  que  celles  des  auteurs  des 
Eloges ,  ne  se  tira  pas  bien  de  son 
entreprise  ;  il  tombe  dans  des  con- 
tresens continuels  ,  et  manque  d'ail- 
leurs de  goût  et  d'élégance.  M.  de 
Langeac  a  fait  paraître,  en  181 7  , 
un  livre  intitulé  :  Du  bonheur  que 
procure  l'étude  ,  par  le  chancelier 
de  Lhopital,  in-o^.  de  240  p.  ;  ce 
recueil  ,  dont  3o  iwges  seulement 
appartiennent  au  chancelier,  paraît 
être  le  fruit  des  études  et  des  recher- 
ches que  Péditeur  avait  faites  pour 
traiter  le  sujet  proposé  par  l'acadé- 
mie. Le  reste  de  ce  volume  ,  fort 
intéressant  d'ailleurs,  est  extrait  avec 
beaucoup  de  goût ,  d'un  grand  nom- 
bre d'écrivains  tant  anciens  que  mo- 
dernes. L'auteur  de  cet  article  fit 
insérer  dans  les  Archives  littéraires, 
un  Essai  sw  la  vie ,  les  écrits  et  les 
lois  de  Michel  de  Lhopital  ;  ce  mor- 
ceau fut  réimprimé  à  part,  en  1807, 
in-8*^.  M.  G.  H  aller  a  fait  imprimer 
en  anglais  ^  à  Loudics  ^  uu  Essai  sur 


4^4 


I.HO 


la  vie  de  Michel  de  Lhopiial,  1 8 1 4; 
I  vol.  in-i'i,  dedië  à  M.  G.  Canning. 
C'est  un  abrégé  ,  très-inexact  et  sans 
ordre,  des  ouvrages  français  qui  con- 
cernent Lliopital.  B-i. 

LHOPITAL  (  Guillaume-Fran- 
çois-Antotne  ) ,  inarqiiis  de  Sainte- 
Mesrae  et  comte  d'Entremont,  con- 
nu sous  le  nom  de  marquis  de  Llio- 
pital ,  et  fils  d'Anne  de  Lliopital , 
Jieutcnant-géne'ral des  arme'es  d u  roi , 
naquit  à  Paris,  en  i66i.  ïl  annonça, 
dans  sa  jeunesse,  peu  de  dispositions 
pour  le  latin  ;  mais  il  était  appelé  à 
des  succès  d'un  autre  genre.  Ayant 
aperçu  un  livre  de  géométrie  entre 
les  mains  de  son  précepteur  ,  sa  cu- 
riosité fut  vivement  es^citée  à  la  vue 
des  figures  singulières  qu'offre  cette 
science;  il  voulut  l'étudier,  et  bientôt 
il  eut  besoin  d'un  maître  pkis  habile. 
Celui-ci  ne  tarda  pas  encore  à  être 
surpassé  par  son  élève  ;  et  Lliopital 
ne  dut  plus  ses  progrès  qu'à  lui-ra  ême. 
On  rapporte  qu'un  jour,  se  trouvant 
chez  le  duc  de  Roannès  ,  dans  une 
société  de  savants  ,  au  nombre  des- 
quels était  le  grand  Arnauld,  on  par- 
la ,  avec  admiration  ,  de  la  solution 
donnée  par  Pascal,  d'un  problème  re- 
latif à  la  cycloïde  :  Lhopital  seul  ne 
s'en  étonna  pas,  et  dit  qu'il  se  croyait 
capable  de  le  résoudre.  Si  l'on  fut 
surpris  de  cette  étrange  prétention 
d'un  jeune  homme  de  quinze  ans  ,  on 
le  fut  bien  davant/jge  ,  lorsqu'au 
bout  de  deux  jours,  il  apporta  la  so- 
lution qu'il  avait  promise.  A  l'exem- 
ple de  ses  ancêtres,  il  embrassa  la 
profession  des  armes,  et  servit,  eu 
qu  dite  de  capitaine  de  cavalerie , 
dans  lerégiment  Colonel-général.  Là, 
îe  goût  des  mathématiques  ne  l'a- 
bandonna point.  Solitaire  au  milieu 
des  camps  ,  il  se  retirait  sous  la  tente 
pour  y  étudier  la  géométrie.  Cepen- 
ilaut  il  s'efforçait  d'allier  lesdevoii's 


LHO 

de  sa  place  à  la  culture  de  cette 
science.  Mais  il  tenta  vainement  de> 
surmonter  les  obstacles  qu'opposait 
à  ses  fonctions  militaires  une  vue 
extrêmement  basse,  et  il  se  trouva 
forcé  d'abandonner  le  service  à  la 
fleur  de  l'âge.  Dès-lors,  rien  ne  con- 
traignit plus  son  rnclinalion  pour  les 
mathématiques.  Le  livre  de  la  Be  ■ 
cherche  de  la  Véité  étant  tombé 
entre  ses  mains  ,  il  jugea  que  Maîe- 
branche  devait  être  un  grand  mathé- 
maticien j  et  il  n'en  fallut  pas  da- 
vantage pour  qu'il  se  liât  d'amitié 
avec  cet  homme  célèbre.  Il  apprit 
bientôt  qu'il  existait  une  nouvelle 
géométrie  avec  laquelle  on  résolvait, 
en  se  jouant ,  les  problèmes  les  plus 
difficiles.  Lcibnitz  en  avait  publié 
les  éléments  dans  les  Actes  de  Leip- 
zig, mais  d'une  manière  si  obscure, 
qu'a  peine  les  premiers  savants  pou- 
vaient l'entendre.  Jean  Bernoulli , 
par  la  force  de  son  génie ,  en  avait 
déjà  pénétré  toute  la  profondeur. 
Quelle  fut  donc  la  satisfaction 
du  marquis  de  Lhopital,  lorsqu'en 
i(>9'i  il  vit  arriver  cet  illustre 
géomètre  à  Paris  î  II  le  reçut  avec 
l'accued  le  plus  flatteur,  l'emmena 
dans  sa  terre  d'Oucques  (  près  de 
Vendôme  )  ;  et  pendant  quatre  mois 
il  étudia,  sous  lui,  la  nouvelle  géo- 
métrie ,  cette  géométrie  si  extraordi- 
naire et  si  sublime,  que  Fontenelle 
s'écriait  :  Là  ,  furent  dévoilés  tous 
les  secrets  de  l'infini  î^éorn  étriqué  , 
en  un  mot  de  tous  ces  différents 
ordres  d'infinis  qui  s^ élèvent  les  uns 
au-dessus  des  autres ,  et  forment 
Védlfice  le  plus  étonnant  que  l  es- 
prit humain  ait  jamais  osé  imagi- 
ner. Lhopital  ne  tarda  pas  de  mettre 
en  usage  les  hautes  connaissances  qu'il 
venait  d'acquérir.  Bernoulli ,  de  re- 
tour à  Groningîie,  où  il  professait  les 
mathématiques,  proposa,  eu  1693., 


i.no 

r^nns  les  journ.mx  de  Leipzig,  de  dr- 

iiior  la  n.iturc   et  de  donnrr  l.i 

îriirtion    d'une    r()nrl)e    lelle  , 

,que  la  partie  de  l'.ixe  des  ahsei.sses 

Vnîiijiri.se  entre  le  point   d'infersee- 

e'I    la  tangente,    soit    toujours 

^  un  ra|>port  donne  avec  celte 
i-nte.  Lliopital  résolut  ce  pro- 
ue, mèmedaus  riiypothèse  où  le 

Morl  coi'Mant  serait  incommen- 
!>le;  el  il  n'y  eut  que  trois  gco- 
os  en  Europe  qui  purent  joindre 

s  solutions  à  la  sienne.  Ces  ge'o- 

I  es  étaient  Jacques  Bernoulli , 
iiitz  et  Huyghens.  C'est  dans 
année  que  le  marquis  de  Lho- 

I  l'ut  reçu  à  l'académie  des  sciences 
memembrchouoraire.  Jean  Bcr- 

i;i  lit,  en  1G96,  un  nouveau  défi 
u;ëomèlres  de  l'Europe  ,  el  leur 
Mjsa  le  problème  de  la  bracliys- 
lone,  ou  ligne  de  la  plus  vite 

rnte,  problème  si  singulier  qu'on 

rendrait  pour  un  paradoxe  ;  car 
::;it  de  trouver  la  ligne  que  doit 
•jirir  un  corps  pour  aller  d'un 
t  à  un  autre  dans  le  temps  le 

^  court ,  en  supposant  que  ces 
:s  ne  soient  pas  situes  sur  la 
!e  vcrlicale.  Ou  croirait  que  c'est 
ligne  droite;  mais  la  nouvelle 
le'trie  a  découvert  que  celte  ligne 

jue  courbe  (  la  cycloide  ).  Jean 
oiilli  n'avait  d'abord  accorde 
géomètres  de  l'Europe,  que  six 

> ,  pour  résoudre  ce  j)roblème  : 
')longea  ensuite  le  délai  jusqu'à 

mois ,  au  bout  desquels  on  ne  vit 
itre  que  quatre  solutions,  dont 

•  iteurs  étaient  Newton  eu  An- 
rre,  Leihnitz,   en  Allemagne, 

;'ies  Bcrnotdii ,  en  Siisse,  et 
pital,   en    France  :  ce   dernier 

.:ra  encoi-e  une  grande  sagacité' 
Ifilerminant  la  forme  qu'il  faut 
1er  à  un  corj)s  plongé  dans  un 

a-  ^  pour  qu'il  éprouve  la  moindre 


résistance.  Newton ,  Anni  son  livre 
des  Prineij^es  ,  avait  déterminé  la 
forme  de  ce  corps,  sans  faire  con- 
naître le  procédé  qui  l'avait  conduit 
à  ce  résultat.  Fatio  ,  géomètre  de 
(ienèvc,  le  trouva  ;  et  à  ce  sujet, 
ayant  envoyé  au  marquis  de  Lliopi- 
tal ,  cinq  pages  cbnrgées  de  calculs  , 
celui-ci  trouva  ces  calculs  si  com- 
plicpiés ,  qu'au  lieu  de  les  vérifier , 
il  aima  mieux  clierclier  à  priori  la 
so'ulion  du  problème  :  il  réussit 
complètement , et  il  oarvint ,  en  deux 
jours,  aune  solution  aussi  simple 
qu'élégante.  Nous  remarquerons  que 
liliopital  ne  fit  que  satisfaire  à  l'énon- 
cé de  Newton,  modifie  par  l'hypo- 
thèse que  le  solide  soit  de  révolu- 
tion-, et  se  meuve  imiformémenf. 
Bouguer  et  d'autres  géomètres  ont 
donné  depuis  plus  de  généralité  à 
ce  problème  ;  mais  ce  que  Lho- 
piLal  ne  partagea  certainement  avec 
personne  ,  ce  fut  la  gloire  d'avoir  ré- 
solu ,  dans  le  temps  prescrit  par 
Jean  Bernoulli ,  le  problème  que  ce 
géoraètrcavait  proposé, de  détermi- 
ner la  courbe  d'égale  pression,  ('c 
problème  oflVait  d'autant  plus  de  dif- 
ficultés, que  Lhopital  ,  pour  le  ré- 
soudre, se  vit  obligé  de  trouver  pré- 
liminairement  une  théorie  complète 
de  la  force  centrifuge  de  lacpielle  il 
dépend.  En  1696,  il  mit  au  jour 
son  winalyse  des  infiniment-petits  , 
de  l'imprimerie  royale,  in-4*^.  Ja- 
mais ouvrage  ne  fut  reçu  des  sa- 
vants avec  autant  d'empressement. 
Il  renfermait  cette  géométrie  mysté- 
rieuse qui  promettait  tant  de  mer- 
veilles aux  modernes  ,  et  avec  la- 
quelle on  obtenait  la  solution  de  pro- 
blèmes qui,  dans  toute  l'antiquité , 
avaient  fait  le  tourment  des  giomè- 
trcs.  Ce  livre  marqua  donc  l'époque 
d'iuie  grande  révolution  dans  U 
science.  Les  mathénaticieiis  > 


i-iCy 


LHO 


pressèrent  de  s'initier  dans  le  calcul 
de  l'infini  :  quelques-uns  seulement , 
trop  attaclics  à  leurs  anciennes  habi- 
tudes ,  élevèrent  des  douces   sur  la 
justesse  de  la   nouvelle  géométrie. 
Elle  avait  cela  de  propre  ,  que  tout 
paraissait  marqué  du  sceau  de  l'évi- 
dence ,  pourvu  qu'on  s'astreignît  à 
suivre  un  certain  cercle  d'idées  ;  mais 
si  l'on  s'en  écartait ,  une  foule  de 
contradictions    semblaient  se  pré- 
senter à  l'esprit.  C'est  de  ce  côté-là 
que  les  détracteurs   des    nouvelles 
méthodes  dirigèrent  leurs  attaques. 
Ils  s'introduisirent  jusque  dansle  sein 
de  l'académie  des  sciences.  L'abbé 
Gallois,  qui  avait  étélong-temps  l'un 
des  rédacteurs  du  Journaldes  savants, 
et  qui  était  ennemi  des  nouveautés  et 
passionné  pour  les  discussions  polé- 
miques ,  se  déclara  contre  les  Infini- 
ment-petits ;  mais  trop  faible  pour 
attaquer  ;,  seul  ,  une  doctrine  fondée 
sur  des  considérations  très-subtiles , 
il  eut  rcv^ours  au  géomètre  Rolle  , 
qui  jouissait  d'une  certaine  réputa^ 
lion.  Rolle  lui  fournissait  des  objec- 
tions contre  les  nouvelles  méthodes: 
l'abbé  Gallois  les  proposait  comme 
des  doutes  dans  les  séances  acadé- 
miques; et  ces  doutes  étaient  appuyés 
sur  des  démonstrations  préparées  à 
dessein.  Varignon  défendit  avec  cha- 
leur la  cause  de  la  nouvelle  géomé- 
trie. Accoutumé  dès  l'enfance  à  dis- 
puter dans  les  écoles ,  et  doué  d'une 
grande  facilité  à  s'énoncer  ,  Vari- 
gnon était  l'homme  qui  pouvait  le 
mieux  soutenir  cette  lutte.  Quant  à 
Lhopital,  il  se  contentait  d'observer, 
attendant  toujours  que  du  choc  des 
opinions  il  sortît  des  traits  de  lu- 
mière don!  la  science  pourrait  pro- 
fiter. Mais  loin  de  s'éclairer  mutuel- 
lement ,  les  deux  partis  s'irritèrent 
de  plus  en  plus  j  et  ils  en  vinrent 
même  aux  personnalités.  L'académie 


LHO 

se  vit  forcée  de  mettre  un  terme  à 
ces    discussions  ;   elle   nomma   des 
commissaires  pour  juger  la  question, 
et  défendit  à  ses  membres  de  s'en 
occuper  clans  les  séances.  Depuis  ce 
temps  le  prestige  attaché  à  des  idéef 
qui  paraissaient  au-dessus  de  la  na- 
ture humaine ,  s'est  évanoui.  D'Alem- 
bert ,  dans  l'Encyclopédie  ,  d'après 
Newton,  et  Lagrange  dans  sa  Théo- 
rie et  dans  son  Calcul  des  fonctions 
analytiques,  ontéclairci  la  métaphy- 
sique du  calcul  de  l'infini ,  et  l'ont 
fait   rentrer   dans  le  domaine   des 
sciences  naturelles.  Lhopital  survé-' 
eut  peu  à  la  publication  de  son  ou- 
vrage. Jean  Bernoulli ,  qui  en  avait  vu 
le  succès  avec  une  jalousie  secrète , 
cessa  de  dissimuler  à  la  mort  de  l'au- 
teur, et  commença  par  critiquer  une 
des  méthodes  les  plus  imporlantesde 
l'ouvrage:  celle  oùil  est  parlé  (sect.  9) 
des  fractions  dont  les  deux  termes 
s'évanouissent    par   la    substitution 
d'une  même  valeur  de  la  variable. 
Il  prouva  que  cette  méthode,  qu'ilij 
appelait  sa  propriété,  était  insuffi- 1 
santé  ;  et  il  en  donna  une  autre  beau- ^ 
coup  plus  générale.  Il  ne  fit  pas  en-î| 
suite  difficulté  de  revendiquer  suc-; 
cessivement  toutes  les  autres  décou-i 
vertes  importantes ,  renfermées  dans 
VJtnalfse  des  Infiniment-petits.  Les 
géomètres  français  repoussèrent  des 
récriminations  d'autant  plus  dépla- 
cées ,  qu'elles  étaient  faites  après  la 
mort  d'im  homme  auquel  Bernoulli 
avait  toujours   prodigué  publique- 
ment toute  sorte  d'adulations.  Ce 
n'est  pas  ])Ourtant  ce  que  dit  Mon- 
tucla;  car  il  prétend  que  Lhopital 
ne  fit  pas  assez  connaître  les  obliga- 
tions qiiil  avait  à  Bernoulli;  et  il 
ajoute:   a   M.   Bernoulli  en  fut  un 
»  peu  indisposé,  lorsque  parut  l'ou- 
»  vrage  de  M.  de  Lhopital  ;  et  ce  ne 
»  furenî  auc  des  motifs  de  reconnais- 


ÎJIO 

Mrf»(1o  II  manière  dont  il  av.iir 
;  ;i  l\iris,({t)i  otouOrront  srs 
>.  Il  so  conlrnt.i  i\c  les  faire 
nliiiciitirllcmnit    à   Lribnil/..    » 
; 'luiaul   on   |ipiil  ']n'^cr   si    elles 
'iunt  bien   fondées,  lorsque  î^lio- 
!  il ,  d.ins  sa  pr-'ïiec  de  l'Analyse 
infiniment  petits  ,  s'exprime  en 
.  >  (ormes  :  «  Je  reeonnais  devoir 
"  Ix.inroup  anx  lumières  de  M.  Ber- 
l'illi ,  surtout  à  relies  du  jeune, 
csentement  professeur  à  Oronin- 
u\  Je  me  suis  servi,  sans  façon, 
leurs  découvertes  et  de  celles 
M.  de  Leibnitz.  C'est  pourquoi 
consens  qu'ils  en  revendiquent 
ut  ce  qu'il  leur  plaira  ,  me  con- 
ntant  de  ce  qu'ils  voudront  bien 
('  laisser.  »  La  seconde  ediîiou 
Injïniment  petits  parut  en  i  -y  1 5. 
s  quoiqu'elle  ait   été'  imprimée 
>  les  yeux  de  l'auteur,  elle  est 
plie  de  fautes  typoç;raphiques. 
isaz.en  i^^i  ,  mit  au  jour  des 
rvations  sur  le  livre  du  mar- 
-  de  lihopilal  ,  et   envova  son 
imcntaire  à  Jean  Bernoulli  :  ce 
id  géomètre  y  trouva  des  fautes 
n  ne  pardonnerait  pas  à  un  cco- 
iii,  et  le  renvoya    à  l'auteur,  au- 
<;!'!   il  aurait    pu,   lui  écrivail-il , 
muniquer    des    choses    utiles, 
tant  qu'il  craignait  bien  que  ce 
imentairc  ne  donnât  aux  enne- 
de  la  nouvelle  géométrie  occa- 
!  de  la  décrier.  D'un  autre  côté, 
I  in  ,  dans  les  Mémoires  de  l'aca- 
nie,  attaqua  le  commentaire  de 
v>!ousaz,  et  fit  voir,   entre  autres 
clioses,  que,  dans  la  délicate  question 
de  maximis et  minimis,  croyant  rec- 
tifier une  règle  donnée  parGuisnée, 
il  était  toral>é  dans  des  erreurs  fort 
graves.  Un  autre  commenta  i re  trouvé 
parmi  lesœuvres  posthumes  de  Vari- 
'  pnon ,  a  été  imprimé  sous  le  titre 
'  à* EclaircissemaHs  sur  VAnil^se 


LHO  <i7 

des  tnfniment'pftits.   Paulian  ,  ju- 
geant ce  commentaire  liopsavant,eii 
publia  un  nouveau  à  la  suite  delà  troi- 
sième édition  de  l'Analyse  des  Infini- 
ment-petits ,  imprimée  à  Avignon  , 
en  i'j(J8,in-8''.  ;  maisce  (ommenla- 
teur  est  tombé  lui-mcmc  dans  des 
méprises  inconcevables.  Lcfî-^re  a 
donné,  en  i7Bi,in-4'*. ,  uneétlilion 
de  W^nnlyse  des  Infiniment -jKlil^, 
avec   des  augmentations.    î.hopital 
se  proposait  de  faire  succéder  à  ctt 
ouvrage    nu    traité  de    calcul    in- 
tégral; mais  Leibnilz  lui  ayant  écrit 
qu'il  s'occupait  d'un   ouvrage  inti- 
tulé De  la  Science  de  V  infini, \c  géo- 
raclre  français  abandonna  son  ])rn- 
jet ,  étant  jK-rsuadé  qu'un  si  grand 
céomètre    s'acquitterait  mieux   que 
bii  d'une  tache  aussi  importante;  et 
il  se  hâta,  d'après  l'invitation  par 
écrit  de  Leibnitz ,  d'annoncer  au  pu- 
blic cet  ouvrage, qui  n'a  jamais  paru. 
Stone  ,   géomètre   anglais  ,  voulut 
Y  suppléer  (  Vojez  Stoîve  )  en  pn- 
l'Iiant  un  traité  de  Calcul  intégral, 
qui  a  été  traduit  en  1735,  par  Ron- 
dct.  Stonc  fait  un  usage  fn^iuent  des 
séries  ;   mais    dans    les    nombrcr.x 
exemples  d'intégration  qu'il  donne  . 
il  ne  parle  pas  des  constantes  qui 
doivent  compléter  les  intégrales;  ce 
qui  est  une  source  d'erreurs.  Sans 
cela  il  n'eût  pas  dit  que  l'intégrale 
du  rapport  de  la  diflérenlielle  à  la 
variable  est  infinie.  Bernoulli  avait 
déjà  relevé   plusieurs  méprises   de 
cet  auteur.   Un   ouvrage  posthume 
du  marquis  dcLhopital  a  joui  d'une 
grande  réputation;  c'est  son  Trai- 
té analytique  des  sections  coniques  ^ 
publié  en  1 707 ,  in-4**.  On  ignorait 
alors   l'art  de  déduire  immédiate- 
ment toutes  les  propriétés  des  sec- 
tions coniques  de  Téquation  géné- 
rale des  courbes  du  second  ordre; 
et  Ton  ne  connaissait  pas  ces  for- 


4^8  lilO 

milles  dégantes  de  la  j^eome'lrîe 
analytique,  à  l'aide  desquelles  on 
démontre  d'une  manière  si  satis- 
faisante tontes  les  propriétés  de 
res  courbes.  Le  Traité  des  sections 
coniques  du  marquis  de  Lhopital 
ne  peut  donc  être  considéré  com- 
me un  ouvrage  excellent  que  pour 
le  temps  où  il  écrivait.  Quoique 
Lbopital  eût  reçu  de  la  nature  une 
constitution  robuste,  tant  de  travaux 
finirent  par  altérer  sa  santé.  Il  es- 
saya de  renoncer  aux  mathémati- 
ques :  mais,  sans  cesse  ramené  à  ses 
idées  favorites  ,  il  ne  put  jamais  les 
abandonner  pendant  ])lus  de  quatre 
jours.  Lorsqu'en  1704,  il  mettait  la 
dernière  main  à  son  Traité  des  sec- 
lions  coniques  ,  il  fut  atteint  d'une 
(lèvre  que  l'on  crut  d'abord  peu  dan- 
fi^ereuse  ,  le  mal  ayant  augmenté , 
il  se  prépara  c\ la  mort  avec  les  sen- 
timents de  la  plus  grande  piété ,  et 
fut  enlevé  aux  sciences,  le  'i  février 
i';o4,  à  l'âge  de  43  ans,  par  une  at- 
irique  d'ajioplexie.  Il  s'était  marié  à 
Charlotte  de  Romilley  de  la  Chenc- 
iaye,  à  laquelle  il  inspira  son  goût 
pour  les  mathématiques.     B-l-t. 

I.HWYD.  Voyez  Llwyd. 

LIAISGOURT  (Jeanne  de  Schom- 
BERG,  duchesse  de  ),  dame  célèbre 
par  son  esprit  et  par  sa  piété,  était 
lilic  de  Henri  de  Schomberg,  maré- 
chal deFrance.  (  /^^Of.  ScnOMBERC.) 

Elle  naquit  en  1600 ,  et  fut  élevée 
par  son  père,  qui  prit  un  soin  parti- 
culier de  son  éducation.  Douée  des 
dispositions  les  plus  heureuses  ,  elle 
apprit  avec  une  égale  facilité  tout 
ce  qu'on  voulut  lui  enseigner.  Elle 
possédait  plusieurs  langues,  chantait 
et  dessinait  agréablement,  et  compo- 
sait des  vers  français  pleins  de  natu- 
rel :  à  des  connaissances  très-éten- 
dues en  littérature  et  en  histoire , 
elle  joignait  celle  des  mathématiques 


LIA  '^ 

et  de  la  géométrie;  et  son  père  l'a- 
vait initiée  lui-même  dans  les  secrets 
de  la  diplomatie.  A  l'âge  de  vingt 
ans ,  elle  épousa  le  duc  de  Liancourt , 
jeune  seigneur  fort  aimable,   mais 
livré  entièrement  aux   plaisirs  et  à 
la    dissipation.    PJIe  avait  trop  de 
prudence  pour  lui  faire  le  moindre 
reproche  sur  sa  conduite;  mais  elle 
profitait  adroitement  de  toutes  les 
circonstances  pour  lui  rendre  sa  mai- 
son agréable.De  temps  en  temps  elle 
se  permettait  quelques  observations 
pleines  de  douceur,  et  qui  ne  lais- 
saient   pas  de  faire  impression  s 
son  mari;  enfin  elle  eut  la  satisf 
tion  de  le  voir  revenir  franchement 
à  ses  devoirs.  Elle   avait  •  embelli 
son    château    d'après    ses  propres 
plans,  et  elle  était  parvenue  à  en 
faire  une  habitation  qui  ne  le  cédait 
qu'aux  maisons  royales  :  elle  y  attira 
une    société  choisie   de   personnes 
pieuses  et  éclairées,  et  en  fit  l'asile 
de  tous  le^  plaisirs  honnêtes.  Le  doc- 
teur Arnauld ,  Pascal , et  les  solitaires 
de  Port-Royal,  venaient  souvent  auj 
château  de  Liancourt;  et  c'était  suri 
leurs  avis  que   la  duchesse  et  son! 
mari   régiaiient  leur  conduite.    Ellej 
]>erdit   successivement  son  iils  uni-; 
que,  tué  à  la  tranchée  devant  une 
place  de  Flandre;  sa  fille,  mariée  au 
prince  de  Marcillac,  et  enfin  le  mar 
réchal   de  Schomberg ,  son  frère , 
qu'elle  aimaittendrement.  Au  chagrin 
de  l'avoir  perdu  se  joignit  pour  elle 
celui  d'être  obUgée  de  soutenir ,  con- 
tre sa  veuve  ,  un  procès  qu'e'le  ne 
vit  pas  terminer.  Madame  de  Lian- 
court mourut  le  i4  juin  1674,  deux 
mois  avant  son  mari.  Elle  conserva 
jusqu'au  dernier  moment,  cette  dou- 
ceur inaltérable  et  cette   angélique 
bonté  qui  l'avaient  distinguée  pen- 
dant   tout  le  cours  de  sa   vie.  On 
trouva  dans  ses   papiers   plusieurs 


LIA 

(S  lie  vers  qii'cM'.-  avait  roinpo- 
siir  (les  .siijpls  pieux  ,ct  a(i\(|iiL'l- 
(lit  Vnhhc  Jacques  Huileaii ,  les 
res  lie  I  art  ne  j>iacii  Ire  fuser  leur 
iiralion.  C'est  ce  dernier  qui  lut 
iir  (l'un  des  ouvrages  de  inada- 
i.Iii.incourl, intitule:  Bellement 
:r  une  dame  de  haute  qua- 
"'.  ***  sa  petite  fille,  pmr 
te  et  pour  celle  de  sa  mai- 
s,  i(h)8,  in- 1-2;  réimprimé 
in-i'2.  I/editenr  y  a  joint 
ment  qu'elle  avait  compo- 
uir  elle-même,  et  a  fait  pre'cc- 
(  et  écrit  d'un  A\>ertissement , 
(  onticnt  la  vie  de  madame  de 
i-iuiicourt.  L'abbé  Leclerc  a  inséré 
me  autre  Fie  de  cette  dame  dans  le 
nier  volume  des   Fies   intéres- 
i  v  et  édifiantes  des  religieuses 
l'ort-Rojal,{  CologHC  )  1750, 
1.  in- 12.  W-s. 

l.IBAMUS,  l'un  des  plus  fameux 
sophistes   de   ranli({uilé,    naquit   à 
)che,  l'an    3 14.  Il  était   d'une 
lilc  distinguée  :  Suidas  dit  que 
>on  père  se  nommait  Phasgamus  ; 
mais  Libanius  nous    apprend,   lui- 
ic,  que  c'était   le  nom  de  son 
'.  Son   bisaicul  avait  acquis  la 
lation  d'un  des  hommes  les  plus 
ilt'S  de  son  temj>s    ])our  prédire 
(lir  ,  et  avait  composé  quelques 
^  en  latin;  ce  qui  a  fait  coujec- 
qu  il  était  né  en  Italie.    Son 
!    paternel  ,    qui   avait    rempli 
remicrs  emplois  de  sa  province, 
lis  à  mort  avec  Brasidas  ,  son 
,  par  ordre  de  Dioclétien ,  après 
ia  révolte  d'Eugène  (  3o3).  Libanius 
ivait  deux  frères  plus  âgés  que  lui  : 
a  l'âge  de  quinze  ans ,  il  entra  dans 
'"<•  école  de  sophistes  ;  mais  il  s'a- 
it bientôt  (pi'il  perdait  un  temps 
leux  à  écouter  des  hommes  qui 
(iaienln'cuiplover  leur  éloquence 
i  *  a  obscurcir  la  vérité  ;  il  choisit 


LIB 


429 


tlonc  un  meilleur  maître,  et,  aidé  de 
ses  leçons,  il  commença  à  étudier  les 
ouvrages  des  anciens.  Il  partit  en- 
suite jniur  Athènes,  où  il  passa  quatre 
ans  ,  partageant  ses  loisirs  entre  les 
leçons  d«  Diophante  et  la  société  de 
Crispin  d'iléraclée .  qui  lui  procura 
la  lecture  de  plusieurs  livres  pré- 
cieux. Au  bout  de  ce  temps,  il  se 
rendit  à  ConslantinoiJe  ,  et  il  s'y  lia 
d'une  étroite  amitié  avec  le  sophiste 
Bemarchus  et  le  grammairien  Nico- 
iilès,  qui  devint  l'un  des  instituteurs 
de  l'empereur  Julien.  Rappelé  dans 
Athènes ,  sur  l'invitation  du  pro- 
consul ,  pour  y  remplir  une  chaire 
d'éloquence ,  il  eut  le  ciiagrin  de  se 
voir  préférer  un  habitant  de  la 
Cappadoce.  Il  revint  a  Constanti- 
nople  ,  et  encouragé  par  Dionysius  , 
préfet  de  Syrie  ,  il  y  ouvrit  une 
école  ,  qui  compta  bientôt  plus  de 
quatre-vingts  élèves.  Deux  sophistes, 
jaloux  de  ses  succès  ,  osèrent  lui 
proposer  un  défi;  et,  vaincus  dans 
cette  lulîe  publique,  ils  n'eurent  pas 
honte  de  recourir  à  l'accusation  de 
magie  contre  un  rival  dont  ils  étaient 
forcés  d'avouer  la  supériorité.  Li- 
banius, banni  de  Conslantiuople  ,  se 
relira  d'abordàNicéect  à  Nicomédie; 
mais  Athènes  bii  parut  un  thé^lrc 
plus  convenable  à  ses  talents,  et  il  y 
ouvrit  un  cours  d'éloquence  qui 
ajouta  )>eaucoup  à  la  réputation  dont 
il  jouissait  déjà.  Il  passa,  dans  cette 
ville  ,  cinq  années  qui  furent  les  plus 
heureuse»  de  sa  vie ,  par  les  soin.s 
que  prit  Arislcnèle  d'écarter  de  lui 
jusqu'à  l'apparence  d'un  chagrin.  U 
retourna  ensuite  à  Constantino]>le  , 

Suis  à  Nicomédie  ;  mais  la  crainte 
es  sophistes  l'empêcha  de  donner 
des  cours  publics  dans  ces  deux  villes; 
et  ce  fut  par  la  même  raison  qu'il 
refusa  les  o lires  honorables  que  lui 
iiixïxX   Ui  Athcnie]is.   il   obtint  de 


43o 


LIB 


l'empercùr  Gai  lus  ,  la   permission 
d'aller  passer  quatre  mois  à  Antioche, 
d'où  ses  ennemis  le  tenaient  éloigné  ; 
et  la  mort  de  Galkis,  arrivée  dans  le 
même  temps  (354),  Un  laissa  la  liber- 
té' de  rester  dans  sa  patrie,  où  il  ëta- 
Llit  une  école,  qui  devint  bientôt  cé- 
lèbre cbns  tout  l'Orient.  L'empereur 
Julien  n'avait  ])u  suivre  les  leçons 
deLibanius;  mais  il  s'était  procuré 
ses  écrits  ,  qui  lui  avaient  inspiré  la 
plus  grande  estime  pour   l'auteur. 
Ce  prince,  en  montant  sur  le  trône  , 
parut  très-empressé  d'embrasser  et 
de  récompenser  le  sophiste  de  Syrie, 
qui ,  dans  un  siècle  dégénéré  ,  avait 
maintenu  la  pureté  du  goût  ,  des 
mœurs  et  de  la  religion  des  Grecs. 
Mais  Libanius ,  loin  de  se  rendre  à 
Constantin ople  avec  la  foule ,  atten- 
dit l'empereur  dans  Antioclie.  Il  ne 
profita  de  l'ascendant  qu'il  avait  sur 
Julien  que  pour  ses  concitoyens  ;  il 
refusa  la  place  de  préfet  du  prétoire, 
préférant ,  à  ce  titre ,  celui  de  so- 
pliiste ,  auquel  il  devait  son  illustra- 
tion :  mais  il  paraît  cependant  qu'il 
accepta  la  charge  de  questeur.  Julien 
le  consultait  de  loin  comme  de  près; 
et  l'on  conserve  la  lettre  que  ce  prince 
lui  écrivit  pendant  sa  dernière  expé- 
dition   contre  les   Perses.   Sous  le 
règne  de  Yalcns  ,   l'accusation    de 
magie  se  renouvela  contre  Libanius; 
et  ce  ne  fut  pas  sans  peine  qu'il  par- 
vint à  en  démontrer  l'absurdité.  Ses 
ennemis,  toujours  acharnés  à  sa  perte, 
l'accusèrent  ensuite  d'avoir  composé 
l'éloge  du  tyran  Procope  ;  mais  il 
réussit  encore  à  prouver  son  inno- 
cence. Aussi  Libanius  ne  fut  pas  en- 
tièrement privé  des  bonnes  grâces 
de  Valens;  il  fit  le  panégyrique  de  ce 
prince,  et  lui  adressa  une  harangue 
dans  la  quelle  il  bù  demandela  confir- 
mation de  la  loi  qui  accordait  aux  en» 
fa nts  naturels  une  part  dans  la  succes- 


LIB 

sion  de  leur  père.  Cette  loi  l'intérr 
sait,  puisqu'il  vivait  avec  une  cou( 
bine,  el  qu'il  n'avait  jamais  été  mai  : 
Libanius  ,  sur  la  fin  de  sa  vie ,  ei 
beaucoup    à     soufirir    de    l'inJHsl 
agression  des  sophistes  ,  et  même  < 
ses    concitoyens   auxquels   il   av 
pourtant  rendu  des  services  signah' 
il  avait  résolu  ,  malgré  son  grau 
âge  ,  d'aller  chercher  un  autre  asili 
pour  ses  derniers  jours  ;  mais  il  c 
paraît  pas  qu'il  ait  exécuté  ce  proje 
On  sait  que  Libanius  parviiit  à  Tâ^ 
de  soixante-seize  ans;  etconséquem! 
ment  on  peut  placer  sa  mort  vci^ 
l'année  3go.  Ce  que  quelques  autcui 
ont  rapporté  de  son  baptême  et  c 
son  attachement  au  christianisme 
n'a  d'autre  fondement  que  le  térao 
gnage  de  Vincent  de  Beauvais ,  coDJ 
pila  leur  d'une   crédulité  excessivj 
Parmi  les  disciples  de  ce  fameux  scj 
phiste,  on  se  contentera  de  citer  S 
Basile  et    St.  Jean   Chrysostônie 
deux    des    plus     éloquents  défen! 
seurs    des    vérités  que  leur  maîtij 
eut  le  malheurde  méconnaître  :  mal 
cette  différence  d'opinions  n'altéi! 
point  les  sentiments  de  reconnaii 
sauce  qu'ils  lui  devaient  ;  et  Lib;i 
nius  ,  de  son  côté ,  eut  toujours  poij 
eux  le  plus  tendre  attachement  (  Foj  ' 
S.  Basile  et  S.  Chrysostôme  ).  Li; 
ouvrages  de  Libanius  ont  été  coij 
serves.  «  La  plupart ,  dit  Gibbor; 
ofïrent  les  vaines  compositions  d'uj 
orateur  qui  cultivait  la  science  d(! 
mots,  ouïes  productions  d'un  pei; 
seur  solitaire  ,  qui ,  au  lieu  d'étudi(i 
ses  contemporains,  avait  les  yeu' 
toujours  fixés  sur  la  guerre  de  Tro  i 
oula  république  d'Athènes.  »  Cejugi 
ment   est  trop  sévère  ;  et  tout  e 
convenant  que  Libanius  est  resté  foi' 
au-dessous  des   grands   modèles  è 
l'antiquité ,  on  doit  reconnaître  qu' 
a  une  imagination  brillante ,  que  so 


LIB 

style  a  tlu  nombre  et  tic  Teclat,  et 

iu'il  fait  souvent  un  rinplui  hrurrux 
es  images  rcsorvccs  au\  poètes.  Les 
^  oratoiivs  de  Libanius  ont 
s  ,  j)our  la  première  fois , 
ce  ,  avec  une  préface  de  vSole- 
1  s   Ca  ps  a  1  i  s  ,    Fe  r  ra  re  ,    i  '>  1 7  , 
.  Fred.  Mori'l  en  a  donne  une 
()n  plus  coniplèle,  avec  une  tra- 
lou  latine ,  sous  ce  lilre  :  l.ibanii 
'ustœ  prceludia  oratoria  ,  decla- 
mationeset  dissertationes  morales, 
gr.  et  lai.  ;  adjeclœ  sunt  notœ  et 
varip    leciones,    Paris,     lOoG - 
-.  a  vol.  in-fol.  Celte  édition  est 
:iefe;  mais  la  traduction  de  Morel 
!  rail  cire  meilleure  (  f^oj.  Fred. 
KL  ).  Le  premier  vol  urne  contient 
,  r'.   les  Progrinnasmnta ,   c'est-à- 
-dire les  exercices  compose's  pour  les 
jeunes  rlietoriciens.  Joach.  Camera- 
rius  en  avait  déjà  publié  une  partie  , 
à  la  suite  de  ceux  de  Théon ,  Baie  , 
1 54 1  ,  in-8**.  ;  et  Morel  a  conserve 
sa  version ,  à  laquelle  il  s'est  contenté 
de    faire    de    lcp;ers    changements. 
Erasme  en  a  traduit  aussi  quelques- 
uns  en  latin  ;  et  Morel   avait  déjà 
,  donné  avec  une  double  version  latine 
et  française,  les  Eloges  d'Ulysse,  de 
l'agriculture,  de  la  justice ,   elc.   11 
avait  aussi  publié  LibaniiPara  itis 
ob  cœnam  occisam  se  ipsum  defe- 
?S  gr.  lat. ,  1601.  —  '1^.  Qua- 
le-quatre  Déclamation",  —  3°. 
lire  Dissertations  morales.  —  4°* 
enfin  des  Progrmnasmata  que 
manuscrits  altribucnt  à  Nicolas  , 
pliiste,  qu'on  croit  être  le  disciple 
*  '  ProclèsetdeLacharès.  Le  second 
lume  renferme  trente -sept  Dis- 
irs  de  Libanius  ,  précédés  de  sa 
',  qu'il  avait  composée  lui-même 
îge  de  soixante  ans.   Celte  érli- 
I  est  loin  d'être  complète.   Léon 
imi  en  promettait  une  en  171^  , 
1  devait  former  six  vol.  in-ful.  , 


TJB 


4SI 


et  qui  .aurait  e'ié  augmentée  de  plu- 
sieurs  discours,    déclamations   rt 
lettres  inédites,  ri  enrielue  de  noUn 
cl  d'une  version  latine  plus  corrcrfe 
et   plus  exacte  (jue  les  précédente*. 
J.  .).  Keiske  en  a  doimé  une  édition 
grecque  ,  très-eslimée  ,  Allenbourjj, 
1791-1)7  ,  4  vol.  in-H^\  (i)  Fabri- 
cius   a   inséré   quatre   discours    de 
Libanius  ,   avec    ^i   version    latine 
d'Oleariur.  ,  dans  le  tome  vu  de  sa 
fiibl.  gra'ca.  Ant.  "Bongiovanni  en 
a  publié  dix-buit  d'après  d'anciens 
manuscrits  delà  bibliothèque  de  Sî.- 
Marc,  avec  une  version  latine  eldcs 
notes  ,  Venise  ,  1 751  ,  in-4**.  Enfin  , 
le  savant  J.  Chr.  Wolf  a  donné  une 
excellente  édition    des    lettres    de 
Libanius  ,  sous  ce  litre  :  Epistnl^ 
quas  nufic  piimàm  maximam  par- 
tem    e    codicihus    manu    cxaratis 
edidit  ,  lat.  convertit  et  notis  illus- 
trât J.  Chr.  IFolf,  Amst. ,  1 788  , 
in-fol.  Ce  volume  contient  plus  de 
1  (ioo  lettres ,  dont  à  peine  trois  cents 
avaient  déjà  été  imprimées  (2)  :  il 
est   terminé   par  cinq   tables  d'un 
usage    très -commode.    On   trouve 
k  la  suite  les  corrections  faites  sur 
les  manuscrits   envoyés  à  l'éditeur 
pendant  l'impression  ,  cl  les  obser- 
vations critiques  de  D'Orvillc  ,  sa- 
vant professeur   d'Amsterdam.   Ce 
recueil  est   très-précieiix    pour   les 
lumières  qu'il  répartd  sur  plusieurs 
points  de  l'antiquité.  Outre  la  Fie  de 
Libanius  écrite  par  lui-même  et  im- 
primée ,  comme  on  l'a  dit ,  en  tète 
du  second  vol.  de  ses  œuvres  (  Paris , 
iG'27  ),  on  peut  consulter  la  fie  de 
ce  sophiste  par  Ennape,  qui  ne  le 
juge  pas  favorablement,  cl  la  !h- 

(i''Reiikea  ajouta  à  ••n  éditi«n  |pt  ili*r«Mr« 
|iiibli«t  par  A .  Boogiovanni ,  rt  c.i  vulra  %t^t  au» 
trct  diiO'iterti  pitta  râcamm^nt. 

(j)  Quelque*  •tinra  aTaient  M  Amftntt»  *^ 
ftifr  ««T  crlle*  <le^  Il«iil« ,  «U. ,  Viiiiae, 
Aide  ,  1499»  '"•4'- 


432 


LIB 


hlloth.  grecq.  deFabriciiis,  lom.  vir, 
qui  y  a  rassemble  beaucoup  de  de'- 
tails  pleins  d'intéiél.  La  Dissert atio 
devitd  Lihanii,  par  God.  Olearius, 
n'est  ])as  imprimée.  W-s. 

LIBARID  ,  célèbre  gênerai  géor- 
gien ,  de  la  puissante  famille  des  Or- 
pelians ,  originaire  de  la  Chine  , 
était  fils  de  Rliad ,  et  petit-fils  d'un 
autre  Libarid ,  qui  étaient  morts  tous 
deux  en  combattant  contre  l'empe- 
reur Basile  II ,  en  l'an  1 02 1 .  Libarid 
eut ,  comme  héritage  de  ses  ancêtres, 
la  plus  grande  partie  de  la  Géorgie 
méridionale ,  et  la  dignité  de  conné- 
table. Ainsi  qu'eux,  il  se  rendit  cé- 
lèbre par  sa  valeur.  La  Géorgie 
était  alors  gouvernée  par  Bagrat  ou 
Pakarad  IV,  de  la  race  des  Pagra- 
tides  ,  prince  sans  courage  et  généra- 
lement détesté  de  ses  sujets  ,  à  cause 
de  sa  tyrannie  et  de  la  dissolution 
de  §es  mœurs.  Libarid  avait  une 
femme  dont  la  beauté  fit  impression 
sur  le  roi,  qui  parvint  à  la  ra\ir  à 
son  époux ,  et  lui  fit  un  outrage  que 
les  Orientaux  pardonnent  rarement. 
Le  prince  Orpélian,  trauspoité  du 
désir  de  se  venger,  prit  les  armes 
et  se  révolta,  vainquit  Bagrat,  s'em- 
para de  sa  capitale  ,  où  il  trouva  la 
mère  du  roi,  qu'il  viola.  Bagrat, 
n'osant  plus  venir  le  combattre,  fut 
réduit  à  fuir  à  travers  le  Caucase, 
jusque  chez  les  Abkhaz  :  ce  qui  eut 
lieu  vers  l'an  io45.  Quand  Libarid 
fut  maître  de  toute  la  Géorgie,  il  en- 
voya une  ambassade  à  Constantino- 
pie  ,  demanda  et  obtint  l'alliance  de 
l'empereur.  Dans  le  même  temps  , 
Bagrat  vint  par  le  pays  des  Souanes 
et  la  Colchide^  puis  descendit  le 
Phase,  pour  se  retirer  à  Trébisonde  , 
d'où  il  envoya  un  message  à  Cons- 
tantinople  ,  pour  se  plaindre  de  ce 
qu'on  avait  traité  avec  son  sujet  re- 
belle. Coiistaiitiii  Moiioiuaqucy  qui 


LÎB 

régnait  alors,  lui  ofTrit  sa  médiation 
pour  rentrer  dans  ses  états.  Bagrat 
l'accepta ,  et  consentit  à  céder  à  Li- 
barid ,  toute  la  partie  de  la  Géorgie, 
située  au  sud  et  au  sud-ouest,  qui  est! 
connue  sous  le  nomdeMeschie.  Liba"! 
rid,au  prix  de  cette  cession,  consentit' 
à  le  considérer  comme  son  suzerain.  | 
Peu  après   il  trouva  une   occasion! 
d'augmenter  sa  célébrité  :  les  Turcs  | 
Seldjoukides ,  qui  avaient  fait  ré-i 
cemment  la  conquête  de  la  Perse  ^| 
voulurent  y  joindre  celle  de  l'Armé-' 
nie.  IbL-ahim-Inal  et  Koutoulmisch  , 
frères   du  sultan  Thoghroul-Begh  , 
vinrent ,  avec  une  puissante  armée  , 
fondre  sur  le  Vasbouragan  ,  qu'ils 
traversèrent  en  vainqueurs.  Ardzen, 
ville  grande  et  commerçante  ,  voi- 
sine de  ïhéodosiopolis,  fut  prise  et 
détruite  :  i5o  mille  de  ses  habitants! 
furent  passés  au  fil  de  l'épée  ,  après  j 
une  opiniâtre    résistance,  sans  que| 
les    gouverneurs    et    les    généraux! 
grecs  en  Arménie  eussent  rien  tenté 
pour  les  sauver.  Aaron  Vestes  ,  duc 
'du  Vasbouragan  ,  et  Catacalon  ,  duc 
d'Ani,  s'étaient  retirés  dans  les  plai- 
nes de  Vanant,  au  nord  d'Ani ,  atten- 
dant du  renfort  et  épiant  une  occasion 
favorable  pour  attaquer  les  ennemis, 
l^empereur ,  informé  du  péril  qui 
menaçait  l'Arménie,  écrivit  aussitôt 
à  Libarid  pour  l'engager  à  se  join 
avec  ses  troupes  à  l'armée  impéria 
il  y  exhorta  aussi  Grégoire  Arsaci 
fils  de  Vasag  ,  qui  était  duc  de 
sopotamic  j  et  il  fit  partir  en  même 
temps  Isaac  Comnène,  maître  de  la 
milice  d'Orient,  avec  les  troupes  de 
Trébizonde  et  de  la  Chaldée.  Toutes 
ces   forces    se  réunirent  à  Cabou- 
drou  ,  dans  le  pays  d'Ardchovid.  Li- 
barid vint  les  y  joindre  avec  ses  j)ro- 
pres  troupes,  et  celles  de  Bagrat ,  roi 
de  Géorgie,  et  de  Kakig,roi  de  Kars. 
Les  généraux  grecs  voulurent  iinmé- 


sitût.. 
ndfll 
iall 

m 


LIB 

«lîitf» ment  en  venir  aux  main»  ;  mai» 
il!  rerusa  do  conihaltre  ce  jour- 
iiTcqucc'elaituii  samedi, le  18 
libre  10  5(),  el  qu'il  ne  voulait  pas 
;udrc  l'usage  «le  sa  nation.  Pen- 
dant la  nuit,  son  neveu  Tchordova- 
ncl,  qui  f.iisait  la  garde  du  camp, 
se  laissa  emporter  par  son  courage 
rt  attaqua  les  Turcs.  H  fut  tue  au  mo- 
ment où  il  obtenait  Tavautage.  Li- 
b  irid  fut  trcs-sensible  à  cette  perte , 
cl  il  se  prépara  aussitôt  à  comliattrc. 
la  bataille  il  déploya  le  plus 
l.int   courage  ;  la  victoire  fut 
temps  disputée  ;  mais  enfin  elle 
rcida   pour  les  chrétiens.   Les 
>  étaient  en  pleine  déroute,  et 
.  ecs  se  retiraient  dans  leur  camp  : 
I  id  combattait  encore.  Se  lais- 
emporler  par  son  ardeur  ,  il 
De  s'aperçut  pas  que  les  guerriers 
TÎ  l'accompagnaient  étaient  en  trop 
■  nombre:  sou  cheval  fut  tue,  et 
nba  entre  les  mains  des  ennemis, 
lim-lual  l'emmena  en  Perse, 
ju  il  le  présenta  au  snlthan  Tho- 
jhroul-Begh,   qui  traita  le  prince 
r^ien  avec  les  plus  grands  hon- 
s.  Quelque  temps  après,  en  i  o5o, 
ithan  se  brouilla  avec  son  frère, 
'  ilexigeait  la  cession  deHamadan 
i^s  forteresses  que  celui-ci  pos- 
it  dans  le  Courdistan.  Ibrahim 
volta ,  et  se  retira, dans  le  fort  de 
indj  :  pour  mettre  son  prisou- 
en  lien  de  sûrele' ,  il  le  couda  à 
!-Eddaulah,  fils  de  Merwaa, 
'e  musulman  qui  régnait  dans 
Diarbelo*,  et  de'pendait  de  l'em- 
tvur  grec.  Bientôt  après,  le  sul- 
1  envoya  sommer  le  roi  du  Diar- 
r,  de  faire  faire  les  prières  pii- 
1  son  nom,etdereconnaitre 
ire.   Pour  lui  prouver   sa 
:ic    volonté  ,  Nasir- Eddaulah 
lit  Libarid  à  ïhoghroul  :  vers  le 
ne  temps ,  TcmjKîreur  Cooslan- 

XXJV. 


MB 


433 


tin  ëiprivit  an  roi  du  Diarbekr,  pour 
obtenir,  par  sa  medi  ition  ,  la  déli- 
vrance de  Libarid.  Abou-Abdallah , 
docteur  de  la  loi ,  fut  charge  de  né- 
gocier cette  afl'aire;  le  sulthan  y 
parut  dispose'  :  alors  George  Dro- 
sus  partit  au  nom  de  rempcrenr, 
pour  la  conclure.  Les  deux  princes 
rivalisèrent  de  générosité.  Le  sul- 
than renvoya  Libarid  ,  sans  rançon 
et  sans  échange,  et  lui  fit  encore 
de  grands    présents.    L'empereur, 

f>our  lui  marquer  sa  gratitude,  releva 
es  ruines  de  la  mosquée  que  les  mu- 
sulmans avaient  eue  autrefois  à  Cons- 
tanlinople ,  y  fit  faire  les  prières  pu- 
bliques, auiuom  de  Thoghroul-Begh , 
et  paya  même  les  hommes  qui  la  des- 
servaient. Libarid  avait  été  deux  an$ 
prisonnier;  il  s'empressa  de  venir  i 
Constantinople ,  remercier  l'empe- 
reur, qui  le  renvoya  dans  sa  pa- 
trie avec  honneur.  Nous   ignorons 
les    circonstances   du   reste   de    S4 
vie.  Il  paraît  seulement  qu'il  con- 
tinua de  servir  les  empereurs;  car 
on  voit,  par  le  témoignage   d'un 
historien  ,  qu'il  était  attaché  au  parti 
de  Michel  Stratiotiquc,  et  il  lui  resta 
fidèle  jusqu'à  la  dernière  extrêrailé. 
Et  quand  ce  prince  eut <îté forcé  d'al)- 
diqucr ,  le  8  juin  loS-y  ,  son  compé- 
titeur Isaac  Comnène  traita  les  gé- 
néraux qui  lui  étaient  restés  fidèles  , 
avec  la  plus  grande  distinction,  et  Li- 
barid eut,  à  ce  titre,  part  à  ses  bontés. 
Ppu  apès ,  quand  il  fut  de  retour  ea 
Géorgie  ,  Libarid  fut  assassiné  par 
des  émissaires  du  roi  Bagrat.  On  l'en- 
terra à  Bcthania ,  auprès  de  Teflis  , 
dans  la  sépulture  dosa  famille.  Son 
fils,  Ivané,  chercha  vainement  k  se 
rendre  indépendant,  (/^o/tfc  Ivane, 
tora.XXI,pag.3o3.)        S.  M-n. 

LIBAVIUS  (André)  ,  docteur  on 
médecine,  naquit  à  Halle  en  Saxe  :  il 
professa  l'histoire  de  Li  poésie ,  à 
08 


434  LIB 

lena,  en  1 588,  et  fut  nomme  en 
i6o5,  recteur  du  gymnase  de  Co- 
bourg ,  dans  la  Franconie ,  où  il 
mourut,  en  1616.  Ce  médecin  est 
le  premier  qui  ait  parlé  de  la  trans- 
fusion du  sang.  On  prétend  que  la 
fable  du  rajeunissement  d'Eson  lui 
en  donna  l'idée,  «  Ayez ,  dit-il ,  un 
»  homme  sain  et  vigoureux ,  et  un 
»  homme  sec  et  décharné,  qui  pos- 
»  sède  à  peine  un  souffle  de  vie.  Ou- 
»  vrez  l'artère  de  l'homme  en  par- 
»  faite  santé  j  insinuez-y  un  tuyau 
»  d'argent;  ouvrez  ensuite  une  artère 
»  de  l'homme  malade  ,  placez  un 
»  autre  tuyau  dans  ce  vaisseau ,  et 
»  bouchez  si  exactement  les  deux  tu- 
»  bes  que  le  sang  de  l'homme  sain 
»  s'introduise  dans  le  corps  malade: 
»  il  y  portera  la  source  de  la  vie ,  et 
»  toute  infirmité  disparaîtra.  »  Une 
expérience  annoncée  avec  tant  d'assu- 
rance ne  pouvait  manquer  de  séduire. 
Un  bénédictin  l'essaya  sur  un  de  ses 
amis  (  Fojez  Desgabets  ).  Lower, 
anatomiste  anglais,  la  perfectionna; 
et  Denis ,  médecin  français ,  qui  mar- 
cha sur  ses  traces ;,  publia  en  1668  , 
deux  lettres  relatives  à  plusieurs  ex- 
périences curieuses  de  la  transfusion 
du  sang.  On  regardait  alors  cette 
opération  comme  une  ressource  con- 
tre les  maladies  et  comme  un  moyen 
de  rajeunir  les  vieillards  ;  mais  elle 
fut  défendue  par  un  arrêt  du  parle- 
jnent ,  informé  des  mauvais  effets 
qu'elle  avait  produits.  Libavius  se 
fit  une  réputation  par  ses  ouvrages 
de  chimie  ,  dans  lesquels  il  s'ef- 
força de  réfuter  les  rêveries  de  Pa- 
racelse  et  de  ses  sectateurs.  On  con- 
serve dans  les  pharmacopées  ,  sous 
le  nom  de  Liqueur  fumante  de  Li- 
bavius, la  composition  d'un  puissant 
caustique  ,  qui  n'est  autre  chose  que 
du  n]uriate  suroxigéné  d'étain.  Son 
Histoire  des  métaux  le  fit  placer  sur 


LIB 

la  même  ligne  que  George  Agricola  ; 
mais  la  métallurgie  et  la  chimie  ont 
fait  tant  de  progrès  depuis  Libavius, 
que  ses  ouvrages  ne  sont  plus  esti- 
més. Sur  une  vingtaine  qu'il  a  com 
posés ,  nous  ne  citerons  que  :  I  Epis- 
tolarum  chjmicarum    libri    très, 
Francfort,  iSqo  et  iSgg,  in-S^.,  3 
vol. IL  Alchjmia,  Francfort,  1 606 , 
in-fol.,f]g.  m.  Sjntagma  selecto- 
rum  alchjmiœ  arcanonim  ,  ii  id. . 
161 3  j  1  tom.  in-fol.  en  i  vol.  IV. 
Appendix  Sjntagniatis  arcanoruin 
chjmicorum ,  ibid. ,  i  G 1 5 ,  in-fol.  ^ 
Comment.  Alchjmiœ  et  varia  opi 
cula,  ac  ejusdem  Anal/ sis  confe, 
sionis  j'raterrdtatis  de  Eosed-Crui 
ibid. ,  1 6  T  5 ,  1  vol.  in-fol.    D-v-l^ 
LIBERALE ,   peintre  de  l'écc 
vénitienne  ,  né  à  Vérone  ,  en  i45] 
fut  élève  d'Etienne  de  Zevio  ,  el 
plaça,  de  bonne  heure,  au  premii 
rc.ng  des  artistes  de   son  pays, 
s'appropria  la  manière  de  Jacqi 
Bellin ,    qui   avait  enrichi    de 
peintures  la  chapelle  du  dôme 
Vérone.   Vasari    prétend    qu'il  - 
reçut  même  des  leçons  ;  mais  il 
trompe  ,  puisque  les  peintures  doi 
il  s'agit,  ont   été  faites   en  i43f 
comme    le     prouve    l'inscriptioi 
Libérale    avait    peint     un     grant 
nombre   de  tableaux  :  parmi  cei 
qui  existent  encore ,  on  fait  un  ci 
particulier  d'une  Epiphanie  ,  ai 
l'église  du  Dôme  à  Vérone.  Ce  ta 
bleau,de  proportion  plus  petite  qu 
nature,  contient  un  nombre  immens' 
de  figures,  de  chevaux  et  d'animaux 
on  y  admire  surtout  un  groupe  d 
séraphins  qui  entourent  la  Vierge 
et  dont  les  draperies  et  la  pose  son 
tellement  dans  la  manière  de  Man 
tégna,  qu'on  croirait  ce  tableau  de  ej 
maître.  Ainsi  que  Jacques   Bel  lin  j 
Libérale  réussit  à  rendre  avec  vérit 
les  divers  seiUiments  de  l'amc.  L 


MB 

\  illc  de  Sicuue  l'appela  pour  lui  con- 
licr  la  |>einture  îles  livres  tic  cliœur 
du  Doinc.  De  retour  dans  sa  patrie  , 
et  déjà  allaibli  par  l'âge,  il  réclama 
les  soins  d'une  de  ^cs  fdles,  mariée  à 
Vérone; mais  il  eut  tellemonl  à  souf- 
frir de  SCS  procèdes ,  ipi'il  l'abandon- 
na pour  se  refup;ier  chez  François 
Torcido ,  surnommé  il  Moro,  son 
clcve,qni  eut  pour  lui  les  plus  grands 
égards.  Libérale  ,  pour  l  en  récom- 
penser, le  fil  héritier  d'une  maison  et 
d'un  jardin  qu'il  possédait  à  San  Gio- 
v.uuii  in  Valle.  Il  mourut  quelques 
jours  après,  le  1 2  août  1 530. — Gen- 
lio  ou  Gennesio  Libi.uale,  peintre 
de  genre,  né  à  Udine,dans  le  Frioul , 
vers  le  milieu  du  seizième  siècle , 
fut  élève  de  PellegrLno  da  San  Da- 
niello,  condisciple  et  émule  de  Jean 
Bellin,  et  s'adonna  surtout  à  peindre 
des  poissons.  Sa  manière  se  rappro- 
che beaucoup  de  celle  des  Bassans. 

P-s. 
LIBERALIS  (  Antomus  ).  roj. 
\ntoiMkus  ,  tom.  11,  pag.  '293. 

LIBERE  (  Saint  ) ,  élu  pape  le 
24  mai  35-2  ,  succéda  à  saint  Jules. 
11  était  Romain  de  naissance;  et  la 
fidélité  avec  laquelle  il  avait  rempli 
tous  les  ministères  qui  lui  avaient 
été  successivement  confiés  ,  le  fit 
nommer  à  la  papauté  ,  d'une  com- 
mune voix,  malgré  la  résistance  qu'il 
y  opposa.  Les  temps  étaient  diflici- 
les  :  on  avait  vu, sous  le  pontificat  de 
saint  Jules  ,  toutes  les  persécutions 
(les  sectateurs  d'Arius  contre  saint 
Athanase  :  elles  se  renouvelèrent  sous 
celui  de  Libère.  Les  évêques  orien- 
taux, tant  Ariens  que  semi-Ariens, 
écrivirent  au  nouveau  pape,  pour 
l'engager  à  refuser  sa  communion  à 
saint  Athanase.  Libère  convo(pia  un 
concile  à  Rome  :  soixante-cinq  évê- 
ques d'Italie  se  déclarèrent  en  faveur 
du  saint  patriarcale,  et  approuvé- 


LIB 


43: 


rent  sa  doctrine.  Le  pape  en  rendit 
compte  àrempereurConstanre,  et  te 
pria  d'assembler  un  concile  général , 
qui  se  tint  dans  la  ville  d'Arles;  mais 
les  Ariens  y  triomphe  rent.  Le  légat 
du  pape,  Vincent  de  Capoue,  céda 
à  leurs  violence^, et  signa  la  condam- 
nation du  saint  Athanase.  Libère,  pé- 
nétré de  douleur ,  porta  de  nouveau 
ses  plaintes  aux  pieds  du  trône.  Un 
autre  concile  fiit  assemblé  à  Milan 
(  355  ).  Les  Ariens,  quoiqu'on  nom- 
bre inférieur,  y  furent  encore  yicto- 
rieux.  Ils  engagèrent  même  l'empe- 
reur à  forcer  Libère  de  souscrire  à 
leurs  sentiments  et  a  leurs  résolu- 
tions ;  mais  le  pape  ne  put  être  ga- 
gné par  des  présents,  ni  intimidé  par 
des  menaces.  Appelé  à  Milan,  il  eut 
une  longue  conférence  avec  l'empe- 
reur, auquel  il  résista  avec  fermeté, 
et  qui  l'exila  à  Bcrée  en  Thrace.  Il  y 
resta  deux  ans,  exposé  à  des  persécu- 
tions de  la  part  de  l'évêque,  qui  était 
Arien.  Pendant  ce  temps , l'empereur 
avait  forcé  les   Romains  de  placer 
sur  le  Saint-Siège  un  intrus  (  f^o/. 
Félix  II  ) ,  qui  avait  la  complaisance 
de  communiquer  avec  les  Ariens , 
quoiqu'U  gardât  la  foi  de  Nicée.Cons- 
tantius  vint  à  Rome (357),  ^^  ^"^  ^^^^ 
de  juger  quelle  aversion  l'on  avait 
conçue  pour  cet  anti-pape.  Le  peuple 
redemandait  Libère;  les  dames  ro- 
maines firent  entendre  elles-mêmes 
leurs  supplications  pour  son  retour. 
Libère,  de  son  côté,  fatigué  de  son 
exil,  ou  peut-être  cédant  à  des  solli- 
citations dont  il  espérait  plusde  fruit 
par  la  suite,  pour  le  bien  de  la  paix , 
démentit  sa  fermeté ,  en  adoptant  la 
formuledeSirmium  qui  était  unecon- 
séquence  de  la  doctrine  d'Arius.  On 
sait  que  celte  hérésie  consistait  à 
nier  la  divinité  de  Jésus-Christ,  et  à 
n'envisager  en  lui  qu'un  homme  doué 
de  talents  extraordinaires,  qui  na 
28.. 


436 


tIB 


pouvait  être  appelé  Dieu  que  par 
une  espèce  de  participation.  (  Voyez 
Arius.  )  Cette  he'rësie  occasionna  la 
tenue  du  concile  de  Nicëe,  qui  reta- 
h\il  le  dogme  de  la  consuLstantialité 
du  Verbe,  dans  toute  la  force  du  ter^ 
ïne.  Arius  mit  ensuite  quelques  restric- 
tions à  sa  doctrine j  et  ses  disciples, 
jge  partageant  en  diverses  nuances(  i  )^ 
prirent  le  nom  d'Ariens  outres  , 
ou  Anoméens ,  et  de  semi-Ariens.  Ce 
fut  l'une  de  ces  modifications  de 
dogmes ,  qui  servit  de  base  à  la  for- 
mule de  Sirmium ,  dans  laquelle  on 
évita  le  mot  de  substance,  mais 
dont  il  re'sultait  ne'ammoins  que  le 
fils  était  d'une  nature  différente  de 
celle  du  père;  ce  qui  était  bien  éloi^ 
gué  de  la  foi  de  Nicée.  Ce  fut  cette 
formule  que  Libère  eut  la  faiblesse 
de  signer;  et  celte  condescendance 
lui  fit  obtenir  son  raj)pel  à  Rome 
(  358  ).  Cependant  son  retour  fut  un 
triomplie.  L'anti-pape  fut  cliassé: 
Libère  fit  une  espèce  de  protestation 
en  excommuniant  les  Anoméens ,  et 
en  déclarant  anatbèmes  ceux  qui 
disaient  que  le  fils  n'était  pas  sem- 
blable au  père  en  substance  ,  et  en 
toutes  clioses.  Cette  profession  de 
foi  était  encore  insuffisante,  parce 
que,  suivant  le  concile  de  Nicée ,  il  ne 
s'agit  point  de  substance  semblable, 
mais  de  la  même  substance.  Dans  un 
concile  assemblé  à  Rimini  (359)  ?  ^^ 
agita  de  nouveau  celte  question;  mai$ 
à  force  de  subtilités  et  d'inlrigues  , 
les  Ariens  l'emportèrent  encore  ,  et 
firent  triompher  le  principe  d'affi- 
nité ou  de  ressemblance  ,  et  rejeter 
celui  de  l'identité.  Constantius,  qui 
les  protégeait,  força  presque  tous  les 
évêques  d'adhérer  aux  actes  de  Ri- 
mini. Les  uns  cédèrent  par  la  crainte 


(i)0n  compte  jusqu'à  sei/s  piofts^rï  on  s  <în  Hù 
ditl'érentes  des  Aiiôn».  (  /-'<?/.  yoti*;»»,  trihit 
Atiiaause  •»  Fleui 7.  ) 


LTB 

de  perdre  leurs  places  ;  d'autres  n'a^ 
perçurent  point  le  piège  dans  lequel 
on  les  avait  attirés,  c'est-à-dire  ,  les 
termes  qui  contenaient  l'erreur.  Li- 
bère refusa  de  souscrire  cette  for- 
mule. Cependant,  saint  Athanase 
exilé  dans  le  désert ,  et  conservant 
toujours  la  pureté  de  la  doctrine , 
écrivait  sans  cesse  pour  combattre 
les  hérétiques  ;  mais,  en  distinguant 
la  perversité  des  principes  et  des  in- 
tentions ,  il  fut  d'avis  que  l'on  par- 
donnât à  ceux  qui  reviendraient  de 
leurs  erreurs  en  professant  la  foi  de 
Nicée,  et  en  anathémalisant  les  héré- 
tiques ,  qui  faisaient  du  fils  de  Diei^ 
une  créature.  Ce  fut  en  conséquence 
de  cet  avis,  que  Libère  ordonna  de  re 
cevoir  les  évêques  tombés  à  Rimini  À 
qui  ajouteraient  à  la  profession  de  foij 
de  Nicée  la  condamnation  des  chef! 
de  parti.  Les  Ariens  se  divisèrent. 
Ceux  qui  avaient  adopté  une  doctrine' 
mitigée  se  séparèrent  enfin  des  parti- 
sans outrés  de  l'hérésie  primitive 
(366).  Les  Orientaux,  qui  compo* 
saient  le  plus  grand  nombre,  se  réu- 
nirent à  l'église  romaine,  et  vinrent 
trouver  Libère,  auquel  ils  déclarèrent 
qu'ils  se  séparaient  de  la  créance  des 
Anoméens ,  en  confessant  que  le  fils 
était  semblable  au  père  en  toutes  cho- 
ses, et  qu'il  n'y  avait  point  de  différent 
ce  entre  le  semblable  et  le  consubstan- 
tiel.  Libère  mourut  le  24  septembre 
366  y  après  un  pontificat  de  qua- 
torze ans  et  quelques  mois.  Sa  chuta 
a  toujours  servi  d'argument  contre 
l'infaillibilité  ,  telle  qu'elle  a  été  sou- 
tenue par  quelques  ultramontaius  ;  ce 
qui  n'a  pas  empêché  que  sa  mémoire 
n'ait  été  en  vénération.  Les  évêques 
les  plus  illustres  de  ces  temps-là,  tels 
que  saint  Epiphane,  saint  Basile  et 
saint  Ambroise,  l'ont  nommé  avec 
les  marques  ordinaires  de  respect. 
Yoy,  Dissertation  ciitiqiie  et  histo- 


MB 

nV/7/r  sur  U  pape  Libère ,  dans  la- 
mtellc  on  lait  voir  qu  il  n'est  jamais 
tombe ,  |).»r  l'abbc  Corgiic  ,  P.iris  , 
1  Tit),  et  le  Commentaire  critique  et 
^islorh|nc  sur  S.  Libère,  pape,  par 
le  P.  Stilliug  ,  dans  les  Acta  sanc- 
torum  (  des  Bollaiidistes  )  au  'iS  sep- 
♦'•mbre.  Ou  trouve  un  Dialogue  de 
hère  avec  Constautio  ou  Conslan- 
< ,  et  douze  Lettres  de  ce  pape ,  iu* 
ees  dans  le  tome  II  de  la  Collec- 
tion des  conciles.  Libère  cul  pour 
•uccesseur  saint  Damase  I.     D-s. 
LIBERGE(  Marin  ),  savant  ju- 
M ensuite,  naquit  à  Belon-ie-ïri- 
cliard  ,  village  près  du  Mans,  pro- 
fessa le  droit  à  Poitiers,  et  ensuite  à 
Angers.  Il  avait  tellenienl  gap;ue  la 
confiance  des  halDitanlsde  cette  der- 
nière ville ,  qu'il  y  apaisa  deux  fois 
f^fs  séditions  populaires ,  au  com- 
ncementdc  la  Ligue.  Sa  présence 
I lisait  pour  calmer  le  peuple  ré- 
Ité.Le  maréchal  d'Aumont,  après 
oir  réduit  la  ville  sous  l'obéissance 
roi, le  nomma  échevin  perpétuel , 
'>iqu'il  changeât  tous  les  autres 
liciers  municipaux.  En  cette  qua- 
>,  Liberge  harangua  Henri  ÏV,en 
>  )S  ,  lorsque  ce  prince  passa  par 
.  Le  roi  fut  si  content  du  dis- 
1 1  des  belles  manières  de  l'o- 
tcur,  qu'il  l'embrassa, le  loua  pu- 
iquement  ,  répondit    à    tous   les 
ints  de  la  harangue,  et  donna  à 
Miiversité  d'Angers   le  droit  d'rt- 
lissement  des  pintes ,  pour  servir 
•  gages  aux  professeurs  en  droit; 
livilége  dont  elle  a  joui  jusqu'à  la 
I  volution.  Liberge  fut  député  aux 
«ut s  de  Biois,  et  y  composa  les  ca- 
'*  la  province  d'Anjou.  Il  y 
ppait  à  peu  près  les  mêmes 
\f  celles  qu'il  proposa  depuis 
i  ÏV,  pour  subvenir  aux  gages 
fcsscurs  en  droit.  Il  mourut 
^  is,  en  i^)()().  Ou  a  de  lui  :  1. 


un  437 

Vm\f:r5œ  juri^  histnrir  Descriptio  , 
ex  variis  mithoribus  collecta ,  et  in 
Pictaviensi  ^ymnasio  et  pus  it  a,  Poi- 
liers  ,  i5()7  ,  in-4*».  II.  De  prœsen- 
lis  t empestât is  et  sœculi  calamitate 
Orarzo,  Poitiers,  1567,  in-4".  III. 
De  calamitatum  Galliœcausis  Ora- 
(10,  iSGq  ,  iji-4".  IV.  Ample  dis- 
cours  de  ce  qui  s'est  fait  et  passé 
nu  siège  de  Poitiers  ,  écrit  durant 
icelui,  par  un  homme  qui  était  de^ 
*irtn5, Rouen, le  1 1  septembre  i569^ 
in-S»*.  ;  réimprime, "avec  quelques 
augmentations ,  la  même  anuée  à  Pa- 
ris, in-8'*.;à  Poitiers,  i57o,iu-4**. ; 
cl  avec  les  Epitaphes  latines  et  fran- 
çaises de  qiwlques  uns  des  occis , 
îloucn,  i6'25,  in- 12.  V.  De  justitik 
et  jure  Oratio,  inAndegavensi  juris 
auditorio  habita,  anno  1 574»  Paris, 
I  574  ,  in-4**.  VI.  De  artihus  et  dis- 
ciplinis  quihus  juris  studiosum  i/w- 
tructum  et  omatum  esse  oporlet; 
Oratio  habita  in  schnld  Andegaven" 
si,  i59i,in-8".VII.Unelonguc  Épt^ 
tr^  latine  à  Gui  Delesrat,  lieute^ 
nant-géneral  d'Angers:  elle  est  im- 
primée en  tcte  des  harangues  de  ce 
magistrat.  D-c. 

LIBERGIER  ou  LE  BERGER 
(Hugues)  ,  architecte  de  Reims ,  né 
vers  le  commencement  du  treizièmo 
siècle, s'illustra  par  la  constructioa 
du  portail ,  des  deux  tours ,  de  1^ 
nef  el  des  deux  ailes  de  la  belle  cfgli- 
se,  aujourd'hui  détruite,  de  Saint- 
Nicaise  de  Reims ,  à  laquelle  il  tra- 
vailla depuis  1219,  jusqu'à  sa  mort, 
arrivée  1  an  riôS.  Robert  de  Coucy 
acheva  cet  édifice.  Libergier  fut  eu- 
terré  devant  l'église  qu'il  avait  ba- 
lie  ,  sous  une  pierre  blanche  qui  fut 
mise  ensuite  à  l'entrée  de  la  nef  de  la 
cathédrale.  On  y  voyait  sa  figure  ci- 
selée en  plomb;  ii  portail  dans  sa 
main  gauche  la  moitié  de  l'église  do 
Saiol-Nicai&e,ct  tcu^iit  duiis  i^  droite 


438 


LÎB 


une  règle  et  un  compas  :  autour  de 
celte  pierre,  on  Usait  son  cpita- 
phe.  «  C'est  la  preuve  d'une  intel- 
»  ligence  peu  commune  dans  Hugue 
»  Liljergier  ,  dit  l'aLbë  Pluche ,  d'a- 
î)  voir  risque  avec  succès,  sur  des  ap- 
»  puis  aussi  délicats  que  l'étaient  les 
»  deux  tours  de  celte  magnifique 
»  e'glise,  dix  pyramides  en  pierres, 
î)  dont  les  deux  grandes  avaient 
»  cinquante  pieds  de  hauteur  sur  une 
î)  base  de  seize  pieds  ;  comme  c'est 
»  une  sage  réserve  dans  l'architecte 
»  de  la  cathédrale ,  Robert  de  Cou- 
»  cy  ,  de  n'avoir  pas  chargé  ses  deux 
»  tours  du  fardeau  fort  supérieur  des 
»  deux  pyramides  qui  auraient  pu  les 
»  terminer.  Ce  que  Libergier  a  fait 
»  de  plus  beau  n'était  peut-être  pas 
»  son  portail ,  où  les  ornements  a- 
»  vaient  été  jetés  à  pleines  mains: 
»  l'ordonnance,  également  simple 
»  et  majestueuse  des  dehors  de  son 
»  église,  attachait  bien  autrement 
»  les  yeux  attenlifs;  la  justesse  des 
»  proportions  ,  la  hardiesse  du  des- 
»  sin  et  de  l'exécution  ,  la  délicatesse 
»  et  la  noble  simplicité ,  étaient  les 
»  principales  beautés  qu'on  y  admi- 
»  rail.  Les  deux  architectes  avaient 
»  employé  tout  ce  que  l'art  j»int  à 
»  l'expérience  leur  avait  appris  de 
»  plus  délicat  et  de  plus  achevé  pour 
»  en  faire  un  des  plus  beaux  monu- 
»  ments  de  France  et  peut-être  de 
y>  l'Europe.  »  Y. 

LIBERI  (  Le  chevalier  Pierre  ), 
peintre  d'histoire ,  né  à  Padoue,  en 
i6o5  ,  fut  élève  d'Alexandre  Vora- 
tori,  surnommé  le  Padovaiiino. 
Grand  peintre ,  et  regardé  comme  le 
plus  savant  dessinateur  de  l'école 
vénitienne,  Liberi  succéda  à  son 
maître  dans  l'honneiu*  de  maintenir 
la  gloire  de  cette  école.  Il  parcourut 
successivement  les  villes  de  l'Italie  : 
à  Rome;  il  étudia  l'antique , Michel- 


LtB 

Ange  et  Raphaël;  à  Parme, le  Corré- 
ge;  à  Bologne,lesCarrache,età  Veni- 
se, les  habiiescoloristesquecelleville 
a  produits.  De  toutes  ses  études ,  il 
se  forma  un  slylequi  tienl  de  chaque 
école  ,   qui  ne  fr.t  pas  aprécié    en 
Italie ,  maisqui  charma  l'Allemagne , 
où  il  fut  appelé,  et  d'où  il  retint 
avec  les  titres  de  comte  et  de  cheva- 
lier, et  des  biens  considérables  qui 
lui  permirent  de  vivre   à  Venise , 
d'une  manière  brillante.  Quant  à  sa 
manière  de  peindre  ,  on  pourrait  di- 
re qu'il  a  un  style  varié.   Lorsqu'il 
travaillait  pour  des  connaisseurs  ,  il 
employait  un  pinceau  expéditif  et 
plein  de  franchise.  Pour  les  autres  , 
au  contraire  ,  il   terminait  chaque 
partie  de  ses  tableaux  avec  le  plus 
grand  soin;  les  cheveux  mêmes  sont 
exécutés    avec    tant   d'exactitude  , 
qu'on  pourrait  presque  les  compter. 
Il  peignait    ordinairement    les  ta- 
bleaux de  ce  genre  sur  du  bois  de 
cyprès.  Il  semble  ,   cependant ,  que 
cette  manière  si  exacte  ait  refroidi 
son  imagination  ;  car  les  ouvrages 
qu'il  a    exécutés    ainsi ,  n'ont    pas 
la  perfection  de  ceux  qu'il  peignait 
d'une    manière    plus  libre.   Il    est 
tanlôt  grandiose,  et  tantôt  gracieux •• 
et  quoiqu'il  ait  produit  peu  de  ta- 
bleaux dans  la  première  manière,  on 
en  connaît  pourtant  quelques-uns  d'un 
grand  mérite ,  tels  que  le  Massacre 
des  Innocents ,  à  Venise;  Noé  sor- 
tant de  l'Arche  ,  à  Venise  ;  le  Dé- 
luge uni^rsel ,  à  Bergame.  Ce  sont 
des  tableaux  d'église  d'un  dessin  vi- 
goureux, remplis  des   plus  beaux 
raccourcis  ,  pleins  de  mouvement, 
et  dont  les  nus  d'un  grand  caractère 
rappellent  cependant  bien  plus  les 
Carra  che  que  Michel -Ange.  Il  abusa 
surtout  dei'imitaliondes  premiers  de 
ces  maîtres,  en  paignant,  contre  l'u- 
sage le  Père  Eternel  entièrement  nu, 


I 


LIB 

'église  de  S«intc-ratîicrine  de 
(•;  erreur  de  jugement  qui  di- 
Ic   mérite  de  cette  peinture, 
irs  très-belle  dans  toutes  ses 
-.  Mais  ce  sont  les  tableaux  de 
t  de  liiberi  qui  ont  fonde  sa 
tion.  Tantôt  ses  sujets  sont  ti- 
la  fable,  tantôt  ce  sont  des  ca- 
lices ou  des  allégories  e'nigmatiqnes. 
•  plus  souvent,  à  l'imitation  du  Ti- 
'  n ,  il  a  peint  des  remis  nues  y  que 
1  on  peut  regarder  comme  des  chefs- 
d'œuvre  ,  et  qui  lui    ont  mérité  le 
surnom  de  libertin.  II  existe  peu  de 
galeries  où  l'on  n'en  trouve  ;  et  lors- 
l'on  en  a  vu  une,  il  est  facile  de  les 
i  onnaître  toutes,  soit  aux  airs  de 
'e,  qu'il   répète  souvent,  soit  au 
M  général  de  ses  tableaux ,  et  aux 
intes  rosées  de  ses  chairs.  Du  reste, 
M  coloris  est  suave  et  bien  empâté, 
^  ombres   délicates ,   et  dans   le 
^uiit  du  Corrége:  ses  profils  sont 
tirés  en  général  de  l'antique,  et  le 
maniement  de  son  pinceau  est  plein 
de  franchise  et  de  liberté.  Le  che- 
valier Liberi  mourut  à  Venise,  en 
1687.  —  Marc  Liberi,   son   fils, 
reçut  des  leçons  de  Iui;maisilnepeut 
lui  être  comparé  dans  les  ouvrages 
de  son  invention ,  ni  pour  le  gran- 
diose, ni  par  la  beauté.  Cependant, 
il  montre  de  l'habileté  dans  les  co- 
pies qu'il  a  exécutées  d'après  les  ta- 
bleaux de  son  père.  Les  connaisseurs 
même  les  plus  exercés  ont  peine  à 
discerner  la  copie  de  l'original.  On 
connaît  de  lui  plusieurs  tableaux  si- 
gnés Per  ilji^lio  ciel  Liberi.      P-s. 
LIBERTAT(  Pierre),  né  à 
Marseille  vers  le  milieu  du  seizième 
siècle,  dans  l'obscurité,  suivant  les 
uns ,  descendait,  selon  d'autres  ,  de 
la  famille  de  Bayon  ,  originaire  de 
Corse,  où  l'un  de  ses  ancêtres ,  Jean 
de  Bayon ,  avait  obtenu   le  surnom 
de  Libertat ,  à  cause  de  ses  exploits 


I  m 


4^0 


en  Sicile  et  en  (Glabre.  Ce  qui  pa- 
raît certain,  c'est  qu'en  1 39^,  An- 
toine de  Bayon  de  Libertaf  riait  ju(»c 
du  palais  à  Marseille,  chargr  qui 
n'était  accordée  qu'à  la  noblesse. 
Pierre,  dont  il  s'agit  ici  ,  se  sij;naU 
long-temnsdans  le  parti  de  la  Ligue; 
mais  l'abjuration  de  Henri  IV  lui  fit 
désirer  de  rentrer  sous  les  lois  du 
légitime  souverain.  Depuis  cinq  ans, 
Charles  Casaulx  ,  oflicier  et  agent 
de  la  comtesse  de  Sault ,  qui  s'était 
unie  ail  duc  de  Savoie  pour  attiser 
en  Provence  les  feux  de  la  discorde, 
avait  usurpé  le  consulat  à  Mar-'^^ille, 
où  il  secondait  les  derniers  eflbrts 
de  la  rébellion,  soutenu  par  un  se- 
cours de  quatre  galères  et  de  1200 
Espagnols  ,  que  Philippe  II  avait 
envoyés.  Cependant  le  duc  de  Guise 
marchait  pour  réduire  Marseille,  la 
seule  ville  de  Provence  qui  résistât 
encore.  Casaulx  avait  confié  la  garde 
de  la  Porte-Royale  à  Libertat  :  ce  ca- 
pitaine, plein  ae  courage  et  d'ambi- 
tion ,  brûlait  de  s'illustrer  par  quel- 
que action  d'éclat  ;  les  brillantes 
promesses  du  duc  de  Guise  lui  en 
fournirent  l'occasion  :  il  s'obligea  de 
donner  la  mort  à  Casaulx,  et  de 
soumettre  Marseille.  L'entreprise 
était  périlleuse;  mais  le  dcsir  de  la 
gloire,  et  surtout  l'espoir  des  ré- 
compenses, déterminèrent  Libertat. 
Il  se  concerte  a\ec  le  duc,  qui  fait 
avancer  ses  troupes.  Casaulx ,  in- 
formé de  leur  approche ,  charge 
Louis  Daix ,  son  collègue  ,  d'ob- 
server leurs  mouvements  autour  des 
remparts ,  et  se  rend  lui-même  à  la 
Porte-Royale,  avec  une  nombreuse 
escorte j  mais,  en  arrivant ,.  il  est 
renversé  d'un  coup  d'épée  par  Li- 
bertat, dont  un  des  frères  achève 
de  le  tuer.  Aussitôt  les  cris  de  /^<»e 
le  Hoi  se  font  entendre  :  les  soldats 
ligueurs  se  dispersent  après  une  lé- 


44o 


LIB 


gère  résistance  ;  leurs  chefs  se  sau- 
vent sur  les  galères  espagnoles  , 
qui  lèvent  l'ancre  :  les  troupes  du 
duc  de  Guise  entrent  dans  la  ville  , 
et  Libertat,  à  leur  tête,  affranchit 
ses  concitoyens,  dont  la  terreur  avait 
seule  retarde  la  soumission.  Ce  coup 
hardi  eut  lieu  le  17  février  iSgG. 
Henri  IV,  en  apprenant  la  reddition 
de  Marseille,  s'écria  :  Cest  mainte- 
nant que  je  suis  roi  !  Il  écrivit  à 
Libertat  pour  lui  témoigner  sa  re- 
connaissance ,  le  nomma  viguier 
perpétuel  de  sa  patrie ,  lui  fit  comp- 
ter 5o  mille  écus,  et  lui  accorda  , 
tant  pour  lui  que  pour  ses  frères  , 
d'autres  distinctions.  La  ville  de 
Marseille  fit  ériger  à  son  libérateur 
une  statue  décorée  d'une  inscription 
latine  ;  et  l'on  grava  sur  la  Porlc- 
Royale  ces  deux  vers  latins  : 

Occisiis  juslè  Libéria  Casahis  armis  ; 
Xaiif  Chriato^  urbs  régi,  Liber  tas  sic  datur  urbi, 

Libertat  mourut  sans  enfants,  le  1 1 
avril  1697  •>  empoisonné,  dit-on  , 
avec  des  bas  de  soie  ;  et  ses  frères  , 
Barthelerai  et  Antoine  ,  héritèrent 
de  ses  biens  et  de  ses  emplois  : 
c'est  du  dernier  que  descend  la 
famille  de  Libertat ,  qui  existe  en- 
core en  Provence.  (  Voy.  Guise  ,  t. 
XIX,  p.  198 ,  et  Henri  iv  ,  t.  XX, 
p.  94.  )  A-T. 

LIBICKI  (Jean),  poète  polo- 
nais du  dix-septième  siècle ,  a  laissé 
une  Traduction  des  Odes  d^ Horace 
en  vers  polonais ,  qui  fut  imprimée 
à  Gracovie  ,  16,47,  iii-4^'  de  128  p. 
On  a  du  même,  en  latin  et  en  polo- 
nais :  Somnium  de  vino  et  aqud  in- 
terse  litigantibus  pro  prœcedentid^ 
1647  ^^  1684,  ^^^^^  heu  d'impres- 
sion et  sans  nom  d'auteur  ;  —  Bac- 
€hus  mîraculosus,  poème  en  polo- 
nais ,  imprimé  plusieurs  fois  ,  mais 
es:ça!ement  sans  indication  du  nom 
de  l'auteur.  G-iu. 


IIB 

LIBON,  architecte  grec,  ne'  dan»; 
l'Elide,  florissaitvers  la  quatre-ving- 
tième olympiade,  4^^  ^^^^  av.  J.  G. 
Il  construisit  auprès  dePise,  ce- tem- 
ple de  Jupiter  olympien ,  si  célèbre 
par  les  cérémonies  des  jeux  olym- 
piques ,  et  oi^i  s'accumulèrent ,  pen- 
dant tant  de  siècles,  les  chefs-d'œu- 
vre des  arts  et  les  offrandes  de  tous 
les  peuples.  Le  temple  était  d'ordre 
dorique-  il  était  entièrement  entouré 
de  colonnes,  construit  en  pierres  de 
l'Elide,  et  couvert  avec  ces  espèces 
de  tuiles  de  marbre  pcntelique,  ii 
ventées  par  Bysès  de  Naxos  ,  vers 
55°.  olympiade(56o  ans  avant  J.  G. 
sa  hauteur  étaitdesoixante-hfîitpiec 
et  sa  largeur  de  quatre-vingt-quinze 
sa  longueur  de  deux  cent-trente:  les^^ 
sculptures  du  fronton  antérieur  é- 
taient  l'ouvrage  de  Pœonius  de  Mcn- 
de  (  en  Thrace  ),  et  celles  du  fron- 
ton postérieur  étaient  d'x4.1camenes. 
G'élait  dans  le  sanctuaire  que  s'éle- 
vait la  fameuse  statue  d'or  et  d'ivoi- 
re, chef-d'œuvre  de  Phidias,  et  la 
merveille  de  la  sculpture  chrysele- 
phantine.  On  peut  voir  dans  Pausa- 
nias ,  la  description  qu'il  donne  de 
ce  superbe  édifice  ,  dont  il  ne  reste 
pas  la  moindre  trace.  On  croit  qu'il 
fut  détruit  vers  la  fin  du  quatrième 
siècle.  M.  Quatremère  de  Quiiicy  a 
donné,  dans  son  Jupiter  Olympie\ 
une  excellente  hypothèse  sur  ce  te 
pie  et  ses  ornements,  L-s-e, 

LIBRI  (  François  Dai  ) ,  dit 
Vieux,  peintre  en  miniature  ,  né 
Vérone,  vers  le  milieu  du  xv**.  siècle^ 
se  rendit  célèbre  par  le  talent  avec 
lequel  il  peignait  les  livres  de  chœur 
et  d'office.  L'imprimerie  était  encore 
à  sou  berceau  ^  et  les  plus  riches 
chapitres  mettaient  leur  honneur  a 
posséder  les  plus  beaux  livres  de 
chœur.  François  en  peignit  un  grand 
«ombre,  dont  plusieurs  sont  encore 


I 


MB 

conserves  ivcc  soin  à  V<froncctdanf 
itros  villes  d'Italie;  mais  le  plui 
te  lie  ses  ouvrages  est   un  petit 
.  où  il  peignit ,  avec  une  extrême 
.n^ualessc  ,  <ieux  miniatures  ,  dont 
l'une  représente  saint  jW'ume ,  et 
l'autre  saint  Jean  dans  ViU  de  Pa- 
thmo^y  écrivant  VApocalyjjse.  C'est 
Il  talent  dans  ce  genre ,  qu'il  dut 
irnom  Dai  Lib'i,  qu'il  transmit, 
~  i  que  SCS  talents, à  son  fds  Jérôme, 
(  Vérone,  en  147^.  — Jérôme  ne 
iu)rna  pas  à  la  peinture  des  livres 
.lise  ;  il  reçut  des  leçons  de  Domi- 
ic  Moronc,ct  devint  un  des  pcin- 
les  plus  habiles  de  son  temps.  A 
.'  de  seize  ans,  il  j)cignitune  Dépo- 
nde  croi  i;  et  lorsqu'on  découvrit 
.ibleau,  tous  les  spectateurs  cou- 
.  .u  ont  en  foule  chez  le  père  du  jeune 
artiste,  pour  le  féliciter  d'avoir  un  fds 
aussi  habile.  Toutes  les  figures  en 
sont  remarquables  ;  mais  les  artistes 
î  un  cas  particulier  d'une  Vierge 
i'un  Saint-Benoît  que  Jérôme  a 
uilroduits  dans  sa  composition.  On 
conserve  encore  à  Vérone ,  dans  l'c'- 
<'  de  Saint  -  George ,  un  tableau 
lia  peint  en  1 5*29;  c'est  uno  Vierge 
entre  deux  saints  Evéques  et  trois 
ytn^es.  Ce  tableau  ,  de   petite  di- 
iision ,   réunit  tous  les  suffrages. 
Jise  de  Saint -George  en   con- 
it  un  grand  nombre  de  ce  genre  ; 
is  celui  de  Jérôme  peut  en  être 
,ardé  comme  le  chef-d'œuvre,  tant 
^ippe  par  la  grâce,  le  brillant  et 
lini.  Après  avoir  exécute  ce  ta- 
lu  ,  Libri  se  livra  exclusivement 
'ï  peinture  des  livres  de  chœur: 
IX  que  l'on  connait  de  lui,  sont 
«  ieux  par  la  perfection  du  travail; 
IS  VAdam  et  Eve  chassés  du  Pa- 
lis terrestre,  qu'il  fit  encore  pour 
^lise  de  Saint  -  George ,  snq>a.sse 
s  les  autres:  cette  belle  miniature 
depub  été  trausporice  à  Rome. 


itc 


«I 


Ost  en  allant  {)eindre  des  livres  de 
chœur  dans  le  couvent  des  chanoines 
de  Saint  -  Sauveur  ,  que  Dai  Libri 
connut  D.  Giulio   Clovio  (   Voyez 
Ci.ovio  ),  auquel  il  eut  la  gloire  de 
donner  les  premières  leçons  de  son 
art.  11  mourut  en  i555,  à  Vérone, 
laissant  deux  fils,  dont  l'aîné,  nom- 
mé  François  Dai  Libri  le  jeune, 
hérita  de  son  talent  pour  la  peinture 
des  livres  d'église  ;  mais  un  de  ses 
oncles,  riche  et  sans  enfants,  l'atti- 
ra près  de  lui,  et  lui  confia  la  direc- 
tion d'une  manufacture  de  verrerie , 
où  il  perdit  les  années  les  plus  pré- 
cieuses de  sa  jeunesse  :  son  oncle , 
étant  devenu  veuf,  se  remaria  ,  eut 
des  enfants  ,  et  lui  ôta  tout  espoir 
d'être  son  héritier.  François  reprit 
donc  le  pinceau  ,  et  entreprit,  soui 
la  direction  de  Fracastor  et  de  Be- 
raldi ,  médecins  fameux  et  géogra- 
phes, un  globe  terrestre,  dont  Na- 
vagero    voulait   faire    hommage    à 
François  P*".  ;  mais  ce  poète  étant 
mort  à  son  arrivée  en  France  ,  le 
globe  ,  commencé  par  François  Li- 
bri, demeura  imparfait.  Cet  artiste 
étudia  aussi  la  peinture  à  l'huile  et 
l'architecture;  mais  il  vécut  pu  de 
temps.  Son  frère  s'était  fait  prêtre; 
et  ce  fut  en  lui  que  s'éteignit  la  fa- 
mille Dai  Libri,  qui  a  fourni  trois  ar- 
tistes d'un  talent  remarquable.     P-s. 
LIÇARRAGUE  (  Jeaw  dl  }  ,  mi- 
nistre de  la  religion  réformée,  était 
né  dans  !e  seizième  siècle ,  à  Bris- 
cons  ,  petit  village  de  Béani ,  et  y 
remplissait  les  fonctions  du  pastoral. 
Il  fut  arrêté  à  l'époque  des  premiers 
troubles  qui   éclatèrent  dans   cette 
province,  et  j^'té  dans   un   cachot 
d'où  il  ne  sortit  que  sur  les  instances 
de  Jeanne  d'Albret ,  reine  de  Na- 
varre, mère  de  Henri  IV.  Cette  prin- 
cesse le  retint  à  sou  service ,  et  le 
chargea  de  traduire  le    i\ouved»' 


442  Liç 

Testament ,  dans  la  langue  basque 
que  parlait  le  plus  grand  nombre 
de  ses  sujets.  Il  fut  ensuite  nomme 

Fasteur  de  la  Bastide  de  Clarence  ;  et 
illustre  de  Thou,  qui  alla  lui  rendre 
visite  en  iSS'i,  rapporte  comme 
ime  preuve  de  l'esprit  de  charité'  qui 
unissait  les  habitants  de  ce  village , 
que  les  catholiques  et  les  protestants 
y  faisaient  l'office  dans  la  même 
église,  mais  à  des  heures  différentes. 
On  ignore  les  autres  particularite's  de 
la  vie  de  Liçarrague*  et  Prosper  Mar- 
chand ,  qui  lui  a  consacre'  un  curieux 
article ,  dans  son  Dictionnaire,  avait 
fait  d'inutiles  recherches  sur  i'e'po- 
que  de  sa  mort.  Le  seul  ouvrage 
que  Ton  connaisse  de  lui ,  est  le  Nou- 
veau-Testament, traduit  en  langue 
basque,  La  Rochelle,  1571 ,  in-S**. 
Cette  traduction  est  très-rare ,  et  si 
bien  imprimée  ,  qu'on  la  regarde 
comme  un  chef-d'œuvre  de  typogra- 
phie. Elle  est  précédée  d'une  épître, 
en  français ,  adressée  à  Jeanne  d'Al- 
bret.  W-s. 

LIGETI  (  FoRTUNio  )  ;,  fameux 
péripatéticien ,  et  l'un  des  plus  cé- 
lèbres professeurs  de  son  temps  , 
naquit  le  3  octobre  1577,  à  Rapallo 
dans  l'état  de  Gènes.  Sa  mère,  dans 
un  voyage  qu'elle  fit  de  Rcco  à  Ra- 
pallo ,  par  mer,  fut  tellement  incom- 
modée qu'elle  accoucha  avant  terme: 
ce  ne  fut  qu'en  prenant  des  précau- 
tions extrêmes  (  i  ) ,  qu'on  parvint  à 


(i)  Vigneul-Maryille  (  D.  Bonav.  d'Argonn«  ) 
se  contente  de  dire  «•  qu'il  fallut  l'élever  dans  du 
»  coton,  o  (  Mélanges  de  Httérat.  ii ,  »46.)  Mais 
Baillet,  d'après  Michel  GiustiniaRi  ,  «jou- 
te des  circonstances  si  mervt'illeug«8  ,  qu'il  est 
bien  étonnant  qu'un  critique  aussi  judicieux 
que  Lauionnoye  n'en  ait  pas  fait  sentir  le  ri- 
dicule. «  Le  fœtus,  dit  Baillet ,  n'était  pas  plus 
»  grand  que  la  paume  de  la  main.  Son  père  cn- 
»  treprit  d'achever  l'ouvrage  de  la  nature  ,  et  d« 
»  travailler  à  la  formation  de  l'enfant  avec  l» 
»  même  artifice  que  celui  dont  on  se  sert  pour 
»  faire  élever  les  poulets  en  Egypte.  Il  fit  donc 
»  mettre  son  fils  dan»  un  four,  proprement  accom- 
»  mode  ;  il  réussit  à  l'élever  et  à  lui  faire  pren- 
»  «lie  tes  accroissements  uécetsaires  par  l'unie 


Lie 

sauver  Tenfant;  et  on  lui  donna  I^ 
nom  de  Fortunio,  pour  lui  rappelé» 
qu'il  devait  la  vie  à  un  bonheur  ines» 
péré.  Il  montra  dès  son  enfance  d< 
dispositions  extraordinaires  que  si 
père  prit  soin   de    cultiver  ;  il  a 
ensuite  continuer   ses  études  à  BqÎ 
logne ,  et  il  y  suivit  pendant  qua 
ans  les  cours  de  médecine  et  de  p 
losophie.  Il  n'avait  pas  encore  di" 
neuf  ans,  lorsqu'il  publia  un   tra 
De  Ortu  animœ  humanœ ,  réimpi 
mé  à  Francfort,  1600,  in-8^., qui 
trouve  si  beau  qu'on  refusa  de  l 
croire  auteur.  Le  père  de  Liccti  et 
tombé  malade,  le  fils  se  hâta  de  re 
nir  à  Gènes  en  1  Sgg  ;  mais  il  eut 
chagrin  de   n'y    arriver    qu'apr 
l'enterrement    de    l'auteur    de 
jours  (  I  ).  L'année  suivante ,  il  pi 
le  doctorat  en  philosophie  et  en 
decine;  et  il  alla  prendre  possessi 
de  la  chaire  de  logique  ,  à  Pise;  î 
la  remplit  pendant  cinq  ans ,  et  fu 
ensuite  chargé  d'expliquer  la  phii 
losophie   d'Aristote.  En    1609,  ij 
fut  nommé  professeur  de  philoso 
phie  à  l'université  de  Padoue  :  s; 
réputation  y  attira  un  grand  nombn 
d'élèves  jet  son  traitement  fut  succès 
sivemcnt  porté  jusqu'à  mille  florins 
Il  se  mit  sur  les  rangs  pour  la  placi 
de  premier  professeur ,  après  la  mor 
de  Crémonini  ;  mais  ayant  échou( 
deux  fois  dans  sa  demande ,  il  quitt; 
Padoue,  où  il  demeurait  depuis  vingt- 
quatre  ans  ,  et  passa  à  Bologne,  oî 
on  lui  offrit  des  appointements  con- 
sidérables. L'université  de  Padoue  n« 


»  formité  d'une  chaleur  étrangère  mesurée  exac 
•»  tement  sur  les  degrés  d'un  thermomètre.  »  (  J« 
^e/n.  rfe.î  5a»/.  VI ,  i3b.  ) 

(i)  Joseph  LiCBTi ,  père  de  Fortunio,  était  ui 
habile  médecin.  On  a  de  lui  =  La  Nobiltà  de 
principale  niembri  dell'uomo  ,  dialogo  ne 
auaîe  si  traita  dcll'ufo  ed  ecce.llenza  di  et.< 
membri  ,  Bologne  ,  .599  .  i°-f  ,  f  «"  *"*%'7" 
teurs  sont  le  cœur,  le  cerveau  ,  le  foie  ,  etc.  ¥ortu 
riio  pari»  encore  d'un  autre  dialogue  de  son  p^re 
intitulé,   Ctva,  sut  le  même  sujet. 


MC 

,1  pas  à  rcçrc'ttcr  un  s'ijet  si  dis- 
»jguc.  On  sollicita  Liceti  d'arcoplcr 
'  |>l.iro  de  premier  prolcsseur  de 
,   alors  vacanlc,  et  il  en 
-siou  en  i(>45.  11  mourut 
e  à  Padoue,  le    17  mai 
'  ^'.  gj"^^'  Patasf.y  1, 1G8.  ) 
11  elail  un  homme  d'une  erudi- 
jjrodigiensc  ;  mais  son  entèlc- 
'  pour  la  doctrine  d'Arislote, 
vénérait  à  l'e-^al  d'un  dieu,  fut 
qu'il  ne  lit  faire  aucun  prop;rès 
!,i  iiitdrcine,  ni  à  la  philosophie. 
i-  iiilcM  onlestationstrès-vivcsavec 
n^^ucz  de  Castro, sur  la  possihi- 
!cs  diètes  prolongées  au-rlelà  des 
es  ordinaires;  avec  Glorioso, 
\\  formation  des  comètes;   et 
Ant.  Ponce  Santacruz,  sur  les 
rations  spontanées  :  dans  toutes 
>  querelles,  à  défaut  de  raisons  , 
'  rodigiiait  les  injures  à  ses  ad- 
irés. On  a  de  lui  un  très-grand 
Ijre  d'ouvrages  (i);raais  com- 
I a  plupart  sont  justement  tom- 
lans  l'oubli,  on  se  contentera 
iter  ceux  qui   peuvent  encore 
i  quelque  intérêt  :  I.  De  his  qui 
U'untsine  aliment o  lihri  ir;  in 
us  diutumœ  inediœ  observatio- 
opiniones   et   causœ ,  summd 
(UUgentid  explicantur,  Padoue , 
-    i-i,  in-fol.  Il  composa  cet  ouvra- 
ge à  l'occasion  d'une  jeune  fille  de 
lorence  ,  dont  les  diètes  excessives 
nt  fixé  Ta ttenti  on  des  médecins  : 
"  )  soutient  la  possibilité  de  vivre 
plusieurs  mois  sans  prendre  aucune 
'liture,  et  cite  plusic»;rs  faits  à 
;iiii  de  ce  sentiment.  Etienne  Ro- 
lez  de  Castro  combattit   celte 
ion  par  un  traité  De  asitid,  Flo- 
rence, iG3o,in-8°.  II.  De  mofis- 
tromm  couds  ,  natwd  et  dijjeren- 


(»;  N'iceroQ  en  compte  il,  el  la  luui  b'»»I  »«• 
•aipUu.  r       •»•  r 


LÎC  443 

tiîSy  /•*n//,Padouc,  1616,  in-4«.; 
réimprimé, ibid.,  i()34,in-4<».,avec 
des  additions,  et  des  j;ravures:  maii 
l'cnlition  la  plus   complète  est  celle 
qu'a  donnée  Gérard  Blasins  ,  avec 
un  supplément,  Amsterdam,  iG()5, 
in  -  4'*. ,  lig.    Jean    Palfjn   a    tra- 
duit cet  ouvrage  en  français,  à  la 
suite  de  sa  Description  anatomi' 
fftte,  etc.,  Leyde,   1708,  petit  in- 
4'\  ,  fig. ,  trî^s-recherché.   111.  De 
spontaneo   viventium   ortu  ,    libii 
7/',Yicence,   i()  18,  in-fol.   Liceti 
traite  ,  dans  cet  ouvrage ,  de  la  gé- 
nération spontanécde  j)lu.sieurs  sortes 
d'insectes,  que  l'on  supposait  alors 
engendrés   de  la  putréfaction;  des 
fungus,  des  champignons  ,  des  zoo- 
phites,  dont  la  reproduction  mysté- 
rieuse était  encore  un  secret ,  et  dont 
on  n'a  reconnu  les  fleurs  el  les  graines 
que  près  d'un  siècle  plus  tard.  IV. 
De  liicenùs  antiquoinm  reconditis 
lihri  VI  y  Verise  ,    \('ri\  ,  in  -  4".  ; 
Dine,  i659. ,  in-fol.  ,  fig.  Cette  se- 
conde édition  est  recherchée.  Liceti 
se  proposait  de  prouver  dans  cet 
ouvrage  que   les  anciens   plaçaient 
dans    leurs    sépulcres    des   hirajjcs 
inextinguibles  ;  mais    Ottavio  Fer- 
rari  a  fait   voir  dans   son  traité  , 
De  'vet^rum  litcernis  sepiilchrali- 
hus ,  Pador.e  ,  1686  ,  in  -  4°. ,  q"C 
ces  prétendues  lampes  qu*on  a  cru 
trouver  allumées  en  découvrantd'au- 
ciens    tombeaux ,    n'étaient    autre 
chose  que  des  phosphores  qui  bril- 
laient quelques  instants,  exposés  à 
l'air,   el  s'éteignaient   aussitôt.   Ce 
traité  est  inséré  presque  en  entier 
dans  les  anciennes  écfitions  des    Ré- 
créations mat  hém  ati(ptes  d 'Ozana  ni . 
Il  y  a  beaucoup  d'érudition   dans- 
l'ouvrage  de  Liceti  ;  et  le  sixième 
livre  contient  des  reman|ues  curieu- 
ses sur  les  anciens  rits  reUgicux.  V. 
De  proptiorum  operum  histund,  lU- 


444  Lie 

hri  11  f  Padoue,  i634,  in-4^.  Cet 
ouvrage  est  adressé  au  savant  Gabr. 
îsaudë;  Liceti  y  donne  le  catalogue 
raisonné  des  différents  écrits  qu'il 
avait  déjà  publiés,  avec  l'iiisloiredes 
disputes  qu'ils  avaient  occasionnées, 
et  la  liste  de  ceux  qu'il  se  proposait 
de  mettre  au  jour.  VI.  De  quœsilis 
per  epistolas  à  clarissimis  vins  res- 
ponsa  f  Bologne  ,  i64o  ,  in-40.  Ce 
volume  renferme  trente-sept  lettres 
de  plusieurs  savants^  et  autant  de  ré- 
ponses de  Liceti  ;  il  publia  successi- 
vement à  Udine,  de  1646a  i653,  six 
autres  recueils  de  ses  réponses  aux 
questions  qui  lui  avaient  étéadressées 
sur  des  sujets  de  médecine,  de  phy- 
sique ,  d'histoire  naturelle ,  de  ])hi- 
losophie  et  d'érudition.  Cette  collec- 
tion ,  assez  curieuse ,  est  fort  rare. 
Gaudence  Roberti  en  a  inséré  des 
extraits  dans  le  tom.  11  des  Miscel- 
lanea  italicaerudita.  VII.  Litheos- 
phorus ,  sive  de  lapide  Bononiensi , 
lucem  in  se  conceptani  ab  ambienU 
claro ,  mox  in  tenebris  mire  con- 
servante, liber,  Udine,  1620,  in-4^. 
C'est  une  expbcation  du  phénomène 
de  la  pierre  àt  Bologne,  qui  a  la  pro- 
priété de  luire  dans  l'obscurité  au 
moyen  de  quelques  préparations. 
VÏII.  De  annulis  antiquis,  liber 
singidaris,  ibid. ,  i64>  ,in-4*'.;  rare 
et  plein  d'érudition.  IX.  Hieroglf- 
phica,  sivs  antiqua  schemata  gem- 
marum  annulariiun,  avec  figures , 
ï()53,  in-fol.  On  peut  consulter, 
pour  plus  de  détails,  Mich.  Gius- 
tiniani ,  Scrittor.  Ligur.;  les  Mémoi- 
res de  Niceron ,  tom.  xxvii ,  et  le 
Dictionnaire  de  Chaufepié.     W-s. 

LICHTENAÛ.  Fojez  Conrad  , 
tom.  IX,  p.  434. 

LICHTENAU  (  Comtesse  de  )  , 
Voyez  ce  nom  dans  la  Biographie 
des  honunes  vivants ,  tome  IV  y 
pag.  2'i8. 


[OU 

1 


Lie 

LÎCHTENBERG(Georgk-Chri  i 

tophe),  célèbre  physicien  et  mort 
liste,  naquit  le   i*^"".  juillet  \'](\'i^ 
Ober-Ramstaedt,  près  deDarrastad 
Il  était  le  dix-huitième  enfant  d, 
pasteur  de  ce  village  ,  qui  fut  ensuit 
envoyé  dans  la   capitale  du  land 
graviat  pour  y  remplir  les  fonctioc 
de  premier  prédicateur  de  la  ville  e 
celles  de  surintendant-général  du  clei 
gé.  Les  soins  et  l'instruction  varie 
de  ce  digne  ecclésiastique ,  la  dou 
ceur ,  les  vertus  et  la  piété  de  si 
épouse,  exercèrent  une  heureuse 
fluence  sur  les  facultés  et  le  car 
tère  de  leur  fils.   «  Le  souvenir 
»  ma  mère  (  dit  Lichtcnberg  ,  d 
»  une  espèce  de  journal  de  ses  pens 
^)  les  plus  secrètes,  OEuvres  poslhu 
»  mes,  vol.  II ,  pag.  4  ),  est  un  préser 
»  vatifquejen'aijamais  employésaii; 
»  succès  dans  les  moments  de  ten 
»  tations  dangereuses.  »  —  «  J'invo- 
»  que  souvent  (  dit-il  ailleurs ,  vol.  i 
»  pag.  Il),  l'assistance  de  ma  mèr( 
»  que  j'adore  comme  une  sainte.  ' 
On  ne  peut  vraiment  pas  douter  que 
ce  ne  soit  à  l'influence  de  l'éduca-i 
tion  que  sont  dus  ces  sentiments  re-| 
ligieux,  qui  font,  dans  quelques  unsj 
des  écrits  de  Lichtenberg  ,  un  véri- 
table  contraste  avec  le    tour  d'es- 
prit sceptique  qui  y  règne  générale- 
ment. Il  avait   du   penchant   à  la 
superstition ,  il  interrogeait  les  astres J 
et  tâchait  de   se   mettre  en   com-| 
munication  avec  les  intelligences  cé-i 
lestes.  Il  raconte  (  vol.  1 ,  pag.  26),' 
qu'un  soir  il   déposa   sous  le   toit 
de  la  maison  de  son  père ,  un  bil- 
let qu'il  adressait  à  un  des  esprits 
dont  il  se  croyait  environné ,  et  où 
il  avait  écrit  cette  question  :  Qa  est- 
ce  que  V aurore  boréale  ?  Etant  en 
bas  âge  ,  il  fit  une  chute,  qui  en  lui 
courbant  l'épine  du  dos,  devint  la 
cause  d'une  difformité  à  laquelle  on 


Lie 

.ittrilnicr  en  pr.indc  partie,  le 
\  lie  Tctat  qu'il  embrassa,  ainsi 
>ùt  pour  la  solitude.  Bien 
!  cUsposcde  lui-même  à  rire 
,  et  que  dans  ladcscriptiou 
;  ii'il  a  laissée  de  sa  pcrsouue 
diverses f  toI.  i,  pag.  a  ), 
MU  qu'un  mauvais  dcssiuatcur 
.  ourrait  manquer  sou   portrait 
l'obscurité  ;  il  se  montra  si  vi- 
'iit  aftecte  d'une  plaisanterie  de 
lucr,  son  ancien  maître, qu'il  en 
t.t  presque  une  brouillcrie  avec 
li  qu'il  vénérait  autant  qu'il  lui 
attacbë  par  la  reconnaissance, 
liblcsse  de  sa  constitution  l'é- 
mt  de  toute  carrière  qui  exige 
saute  robuste,  Licbtenberg  se 
na  dès   l'enfance  à  la  culture 
sciences.  Etant    encore  écolier 
imait   des  leçons   de   malhé- 
|ues  à  quelques-uns  de  ses  con- 
fies. Il  aimait  à  se  rappeler  ces 
iers  essais  de  son  talent  pour 
eiiitii;nomeut,et  l'attacbement  que 
•li  téiiiuignaient    s^s   jeunes   audi- 
>.   Un   discours  en    vers   alle- 
Is   sur   la  véritable   philoso- 
ct  le  fanatisme  pïiilosophique , 
j^rononça  en  quittant  le  gym- 
le  Darmstadt,  et  qui  semblait 
--^iier  l'objet  des  recherches  de 
oute  sa  vie ,  ayant  fait  une  grande 
"""'^tion  et  attiré  sur  lui  les  regards 
Tsonnes  éclairées ,  sou  souve- 
^iu,lc  landgrave  Louis  VIII, lui  ac- 
corda sa  protection  particulière,  et 
es  secours  qui  lui  étaient  nécessaires 
)our  se  vouer  entièrement  à  l'étude 
les  sciences.  En  17G3,  il  se  rendit 
i  Gocttingue ,  et  suivit  les  cours  des 
>rofesscurs  HoUmanu,  Heyne,  Gat- 
Tcr,  Kœstner  et  Meister ,  qui  démé- 
J  bientôt  ses  heureuses  disposi- 
f't  l'admirent  dans  leur  intimité. 
♦  oici  le  jugement  qu'il  porte  dans 
--'  !"urn«d  sur  l'emploi  de  son  temps 


Lie  445 

i  runircrsilé ,  et  qu'il  peut  elrr  ulilo 
de  faire  connaître  aux  esprits  de  la 
trempe  de  Lichlcnbcrg  :  «  Je  com- 

*  mis  imt  grande  erreur  en  for- 
»  mant  le  plan  de  mes  études  sur 
t  fine  trop  vaste  échelle....  Entraiiiii 
»  par  mon  avidité  de  connaître,  à 
»  me  laisser  successivement  domi- 

•  ner  par  tous  les  objets  de  rccher- 
»  ches  incideulelles  que  le  hasard 
»  offrait  sur  ma  roule ,  et  qui  m'é- 
»  carlèreut  souvent  de  mon  véritable 
»  but ,  je  me  voyais  sans  cesse  dans 
»  la  nécessité  de  revenir  sur  me» 
»  pas.  J'ai  fait  le  chemin  qui  mène 
»  à  la  science,  comme  les  chiens 
»  qui  accompagnent  leur  maître  à  la 
»  promenade  ;  je  l'ai  fait  et  refait 
»  cent  fois  dans  toutes  les  directions, 
»  et,  lorsque  j'arrivai  enfin,  je  me 
»  sentis  excédé  de  fatigue.  »  (  Vol. 
I ,  pag.  34  et  89.  )  Il  ne  resta  donc 
étranger  à  aucune  partie  du  domaine 
des  sciences  :  revenant  toutefois  avec 
prédilection  à  la  physique  et  aux  ob- 
servations astronomiques  ,  il  se  fit 
tellement  remarquer  des  juges  com- 
pétents, que  le  célèbre  baron  d« 
Mùnchhausen ,  curateur  éclairé  de 
l'université  de  Goetlingue,  lui  ofl'rit 
une  chaire  de  professeur  extraordi- 
naire dans  la  faculté  consacrée  aux  * 
sciences  exactes  et  philosophiques. 

Il  était  à  Londres  lorsqu'il  reçut  cette 
nomination ,  qu'il  ne  voulut  accepter 
que  du  consentement  de  son  souve- 
rain et  bienfaiteur  ,  le  landgrave  de 
Hesse-Darmstadt.  Pendant  son  séjour 
en  Angleterre,  où  il  avait  conduit  le 
lilsde  l'amiral  Swanson,  et  M.  Yrby, 
(ils  de  lord  Boston, il  fut  traite  avec 
distinction  par  la  famille  royale.  Le 
roi  George  III,  auquel  l'astronome 
Demainbray  ,  inspecteur  de  son  ob- 
servatoire prive',  avait  communique 
]çs  observations  de  Lichlcnbcrg  sur 
le  passage  de  \  ému  du  nj  juiu  1 7(59, 


446  Lie 

prit  beaucoup  de  goût  à  sa  conver- 
sation ,  et  lui  doiuia  par  la  suite 
des  preuves  nombreuses  de  son  es- 
time. De  retour  à  Goellingue ,  en 
1770  ,  il  annonça  l'ouverture  de  ses 
cours  par  un    programme   offrant 
des  CGnsidévations  sur  quelques  mé- 
thodes appliquées  à  la  solution  des 
difficultés  que  présente  le  calcul  des 
probabilités  dans  les   chances  des 
jeux  de  hasard.  Il  parut  aux  savants 
avoir,  dans  ce  mémoire ,  simplifié  et 
suffisamment  éclairci  des  queslions 
que  d'Alembert  et  Beguelin  avaient 
inutilement  compliquées  et  mal  réso- 
lues. Dans  les  années  1 772-7,5,  il  fat 
occupé  à  déterminer,  par  ordre  du 
roi  d'Angleterre ,  la  latitude  des  villes 
principales  de  l'électorat  d'Hanovre , 
et  à  mettre  en  ordre  les  papiers  du 
célèbre  Tobie  Mayer,  dont  il  donna 
un  premier  volume  en   1775.  {T. 
M,  opéra  inedita,  vol.  i,  Gœtt.,  in- 
4*^.  )  La  suite  n'a  point  paru.  Un  se- 
cond voyage  en  Angleterre  vint  ajou- 
ter à  sa  prédilection  pour  ce  pays  : 
il  en  rapporta  une  connaissance  de 
la  langue  ,  des  mœurs  et  de  la  litté- 
rature de  ses  habitants,  j)lus  pro- 
tonde qu'aucun  étranger  n'a  peut- 
cire  acquise ,  et  que  la  plupart  des 
indigènes  eux-mêmes  ne  possèdent. 
En  1 777  ,  il  succéda  à  son  ami  Erx- 
Jeben  dans  la  chaire  de  physique  ex- 
périmentale :  par  déférence  pour  la 
mémoire  de  ce  savant,  il  conserva 
son  Traité  élémentaire  de  physique, 
pour  servir  de  texte  à  ses  leçons , 
quoique  ce   manuel  fût  très-défec- 
tueux ,  et  que  les  augmentations  dont 
l'enrichit  Lichtcnberg  dans  quatre 
éditions  successives,  en  eussent  fait 
un  ouvrage  très-supérieur  à  ce  qu'il 
était  dans  sa  forme  primitive.  Depuis 
son  entrée  dans  ses  nouvelles  fonc- 
tions ,  il  ne  sortit  plus  de  Goettingue 
«t  quitta  bien  rarement  sa  chambre , 


Lie 

où  son  goût  pour  le  travail ,  la  f, 
blesse  de  sa  santé  et  une  susceptil 
lité  née  de  sa  conformation  physiq 
et  fortifiée  par  l'hypocondrie,  le  co 
fmèrent  de  plus  en  plus.  Sa  conver 
tion  enjouée,  et  pleine  de  traits  au 
gais  que  spirituels  ,  faisait  ,non  moi 
qaesonenseignement  académique( 
étincelait  de  saillies  origiuales  et 
quantes  ,  un  singulier  contraste  a\ 
la  tristesse  qui  régnait  au  fond 
son  ame  sans  en  troubler  la  se 
nité  ou  en  aiïaiblir  l'énergie.  Oi; 
lieu  d'être  surpris  de  la  vigueur 
raie  et  de  la  fécondité  littéraire 
esprit  habitant  une  aussi  frêle 
chine ,  et  rongé  par  tant  de  so 
La  collection  de  l'académie  ro 
des  sciences   de  Goettingue  n 
de  lui  qu'un  petit  nombre  de  Mém» 
res  ,  parmi  lesquels  ceux  que  co 
tiennent  les  tomes  viii  des  JYoi^.  coi 
mentarii,  et  i  des  Commentât. 
cette  compagnie,  sont  les  seuls  vr; 
ment  remarquables  :  il  y  expose 
découverte  des  figures  que  forme 
poussière  répandue   sur  la  surfa 
des  corps  électrisés  et  qu'on  a  apf 
lées  de  son  nom.  Ces  figures ,  à  c 
ractère  diiFérent,  et  rayonnantes  v 
nuageuses  ,  selon  qu'elles  sont  pr 
duites  par  réleclricité  positive  - 
négative,  servent  à  montrer  à  1 
ces  deux  modifications  du  raêra^i 
gent  :  elles  sont  représentées  en  dfl 
dans  les  gravures  jointes  aux  toni|; 
des  Mémoires  de  Goettingue,  qi| 
nous  avons  cités.  Lichtenberg  s'i 
tait  intimement  lié  avec  De   Lu< 
et  son  amitié  pour  ce  physicien  1 
fit  embrasser  avec  trop  de  chaleui 
et  défendre,  avec  une   opiniâtre j 
étrangère  à  son  caractère  ,  les  thé| 
ries  de   ce  dernier  sur  l'hjgrom' 
tre  et  sur  la  pluie.  Oi:  doit  attribut' 
à  la  même  cause ,  ses  préventioi 
contre  les  principes  de  la  nouvel 


Lie  ^ 

iiiic,  qu'il  ne  cessa  de  comhatlre 
• 'ms  d'esprit  et  d'aigreur  que 
11  et  d'impartialité.  Son  Ex- 
■unn  apologétique  des  idées  de 
Deluc  sur  la  formation  de  la 
.,'(',  rédigée  eu   179G,  n'a  paru 
iprcs  sa  mort ,  en  1800 ,  par  les 
is  de  son  frère  et  de  M.   Kriès 
ott.,in-8o.,deau8pag.  )Ce  me- 
né est  un  chef-d'œuvre  de  dia- 
1  ique,  et  sera  probablement  encore 
(p.iand  les  meilleurs  ouvrages  des 
liseurs  de  la  doctrine  que  Lich- 
i  erg  y  a  combattue  sans  succès, 
Mit  entièrement  oubliés  :  tant  il 
vrai  que  l'agrément  des  formes , 
itiiu  plus  que  la  solidité'  du  fonds  , 
fait  vivre  les  productions  de  l'es- 
it  humain.   Le  même  charme  de 
:e  se  fait  remarquer  dans  les  nom- 
breux articles  consacrés  aux  décou- 
vertes astronomiques  et  physiques , 
qu'il  inséra  dans  deux  ouvrages  pé- 
j  riodiques  qui  durent  principalement 
à  sa  plume  leur  prodigieux  succès, 
le  Magasin  de  Goettingue  pour  les 
sâences  et  la  littérature ,  rédigés 
par  lui  conjointement  avec  le  célè- 
>  Dre  voyageur  G.  Forster  (  il  en  a  paru 
depuis  1780  jusqu'en  1785,  dix-huit 
parties  en  sept  volumes  ) ,  et  la  série 
des   Almanachs    publiés   dans    la 
même  ville,  de  1778  à  1799.  Ces 
articles  contribuèrent  beaucoup  à  ré- 
pandre le  goût  des  sciences  les  plus 
élevées",  et  des  notions  exactes  sur 
leurs    patties    les    moins    accessi  - 
blés  à  l'intelligence  commune.  On 
peut  dire  qu'ils  furent  pour  l'Alle- 
magne, ce  que  les  écrits  de  Fonte- 
nelle,  de  D'Alembert,  de  Bailly ,  ont 
été  pour  la  bonne  compagnie   en 
France  ,  un  moyen  d'acquérir ,  avec 
•  un   médiocre  degré  d'application , 
»  des  idées  justes  et  assez  étendues  sur 
,  les  objets  les  plus  ardus  des  hautes 
sciences.  Ou  trouve  dans  ces  résumé* 


Lie 


<47 


d'un  genre  lout-àfait  partiiriilier ,  un 
mélange  d'analyse  lumineuse  cl  quel- 
quefois profonde  ,  de  rapprochr- 
ments  aussi  instructifs  qu'iii.(ti<i  ' 
de  malice  gaie  et  souvent  tn 
tique ,  mais  toujours  d'une  tciul.iiu  c 
parfaitement  morale,  qu'il  serait  dif- 
ficile de  caractériser ,  et  à  laquelle  il 
ne  suffirait  pas  de  comparer  la  ma- 
nière des  humoristes  anglais,  tels  que 
Swift, Fielding,  Sterne,  etc. ,  pour  en 
faire  concevoir  la  nature  et  t'effèl  à 
ceux  qui  ne  peuvent  lire  Lichtenbcrg 
dans  sa  langue.  Mais  c'est  surtout 
quand  il  est  directement  et,  pour  ainsi 
àxra, ex-prof esso  moraliste,  que  Lich- 
tenbcrg fait  classe  à  part.  Il  est  enjoué 
et  jamais  grotesque,  neuf  sans  ef- 
fort ,  gai  sans  la  moindre  trace  de 
légèreté  ,  varié  et  profond  sans  ces- 
ser d'être  solide  et  clair.  Ce  n'est 
qu'une  justice  d'ajouter  ,  qu'excepte 
quelques  parties  de  son  commen- 
taire sur  Hogarth ,  où  il  abuse  de 
sa  facilité  à  trouver  des  combinai- 
sons ingénieuses  ,  des  rapproche- 
ments comiques ,  il  tombe  moins 
dans  la  recherche  ,  il  est  plus  natu- 
rellement gai  et  original  que  la  plu- 
part des  humoristes  anglais.  On  n'est 
pas  d'accord  sur  l'idée  précise  qu'où 
doit  se  faire  de  cette  disposition  d'es- 
prit qui,  dans  l'expression  des  pen- 
sées et  des  sentiments,  se  manifesta 
par  un  mélange  piquant  et  tout  par- 
ticulier d'enjouement,  et  que  les 
Anglais  désignent  par  humour ,  \ci 
Allemands  par  laune.  Nous  osons 
afllrmer  que  la  lecture  attentive  des 
ouvrages  de  Lichtenberg  ,  par  la 
variété  des  matières  traitées  avec  U 
même  verve  iatarissable  de  plaisan- 
terie amusante  et  instructive,  est 
singulièrement  propre  à  fournir  les 
données  des  solutions  d'un  grand 
nombre  de  diflicultés  qui  ont  désuni 
ou  embarrasse  des  critiques  tels  que 


44B  Lie 

Suker,  Lessingj  lord  Monboddo , 
Campbell  et  Eberhard.  Les  impres- 
sions qu'il  recevait  du  spectacle  delà 
nature ,  des  affaires  humaines^  de  ses 
lectures,  de  ses  propres  pensées  et 
qu'il  rendait  dans  un  langage  pitto- 
resque  avec    l'empreinte    de    yues 
neuves,  de  contrastes  plaisants  ,  de 
rapprochements  instructifs,  subis- 
saient, en  entrant  dans  sou  ame,  des 
combinaisons  ,  et  se  coloraient  de 
teintes  qui  n'altéraient  ni  la  pureté' 
du  trait,  ni  le  fonds  de  données  ma- 
térielles qu'elles  offraient  au  sévère 
observateur.  Sa  manière  de  recevoir 
et  de  rendre  l'impression  des  choses 
extérieures,  qui  lui  faisait  considérer 
le  monde  physique  et  visible  comme 
une  grande  allégorie  des  mystères 
de  l'ordre  moral,  suppose  sans  doigte 
beaucoup  d'originalité  dans  les  cok- 
ceptions.  d'indépendance  dans  l'exer- 
cice des  facultés  intellectuelles  et  un 
penchant  à  se  placer  dans  les  points 
de  vue  de  l'idéaliste  et  du  pyrrho- 
nien.  Mais  on  ne  saurait  sans  injus- 
tice, au  moins  dans  l'écrivain  dont 
il  s'agit  et  qu'on  peut  regarder  com- 
pie  le  modèle  des  humoristes,  sépa- 
rer de  ces  qualités  de  l'esprit  une 
parfaite  vérité  d'observation  et  de 
pinceau,  une  rectitude  de  jugement 
égale  à  sa  finesse, un  goût  sûr  qui  évite 
les  contrastes  révoltants  ou  infruc- 
tueusement bizarres,  et  surtout  un  res- 
pect pour  les  grandes  fins  de  la  des- 
tinée humaine  ,qui  se  garde  de  faire 
de  la  vie  une  farce  ignoble  ,  et  de  la 
scène  du  monde  un  jeu  sans  but,  une 
énigme  dépourvue  de  sens.  Aussi , 
bien  loin  d'éprouver  le  vide  du  cœur 
et  l'ennui  qui  succèdent  aux  accès 
d'une  folle  gaieté;  tandis  que  le  sou- 
rire quise  place  involontairement  sur 
ïès  lèvres  du  lecteur  de  Candide  et 
des  Mémoires  de  Gr amont,  n'era- 
pêche  pas  que  l'indignation ,  le  dé- 


go^t-  le  mépris  ne  s'emparent  de  lui 
presque  aussitôt,  les  saillies  de  Lich-  ! 
tenberg,  ses  comparaisons  ingénieu-  : 
ses  et  plaisantes ,  réveillent  des  idées 
non  moins  consolantes  qu'agréables, 
remontent  les  ressorts  de  l'ame  au 
lieu  de  la  dégrader  ou  de  l'engourdir. 
Nous  allons  indiquer  ses  principaux 
écrits;  ils  portent  tous,  dans  l'ensem- 
ble comme  dans  les  détails,  le  cacliet 
de  cette  tournure  d'esprit  originale 
et  piquante  que  nous  avons  cherché 
à  caractériser.  Les  premiers  eurent 
une  tendance  toute  polémique.  Lar 
vater  avait  dédié  sa  traduction  d( 
Recherches  de  Ch.  Bonnet  sur  It^ 
preuves  du  christianisme  au  célèbi 
juif  Moïse  Mendelssohn ,  en  le  soi 
mant  de  se  convertir  à  la  religion  Ai 
Christ ,  ou  de  réfuter  publiquement 
les  arguments  de  Bonnet.  Cette  dé- 
marche indiscrète  de  Lavater  donna 
naissance  à  une  satire  de  Lichten- 
berg ,  intitulée  Timorus ,  i']73  ,  qui 
a  été  réimprimée  dans  le  troisième 
volume  de  ses  œuvres.  Peu  de  temps 
après  ,  il  s'occupa  encore  du  célèbre 
din\.e\\vàc\APhYsio^nomoni(fue.Y\^i- 
lant  redresseur  de  torts  scientifiques 
et  d'opinions  hasardées  qui  portaient 
préjudice  à  la   saine   philosophie, 
Liclitenberg  ne  put  voir ,  sans  indi- 
gnation ,  l'abus  que  les  admirateurs 
enthousiastes  des  règles  physiogno- 
miques  du  théologien  Zuricois  fa 
saient  de  son  système  au  détrirae^ 
de  la  morale  et  en  dépit  de  la  chi 
rite  chrétienne.  Il  prit  la  plume 
plutôt   le   fouet ,  et   publia  en  tête' 
de  l'Almanach  de  Goettingue  pour 
l'an  1778,  un  traité  de  la  Phfsio- 
gnosique  contre  les  Phfisiognomei 
(  ibid. ,  pag.  4oi  ?  ss.  ) ,  où  il  établit, 
par  des  réflexions  et  des  observations 
d'une  vérité  frappante ,  qu'on  peut 
bien  concevoir  une  patho^nomiqiie , 
une  séméiotique  des  passions,  q\x  lui 


MC 

corps  de  principes  q<ti  nous  serront 
à  reconnu ilre  à  des  Mgues  visiî>les 
les  mouvcuieiits  àv  l'ame  ,  mais  que 
l'art  de  jui^er  des  qualités  de  l'esprit 

!  et  du  cœur  par  la  foruîe  et  la  dis- 
position des  parlirs  extérieures  du 
corps  et  surtout  des  parties  solides 
delà  fip;ure,est  cliiuierique;  que  c'est 
l'eusemblcde  l'expression, le  rcgaixl, 
les  modifications  fuj;itivcs  de  nos 
traits,  qui  peuvent  oflnr,à  l'oljserva- 
teur  exerce  des  lionimes  ,  quelques 
moyens,  toujours  peu  sûrs  à  la  vé- 
rité', de  se  former  une  idée  de  leur 
caractère  et  de  leurs  habitudes,  mais 
que  ce  talent  est  le  fruit  d'une  longue 
expeViencc  et  d'un  tact  qu'il  est  im- 
possible d'acquérir  par  l'élude  d'une 
prétendue  iheoric  pliysiognoniique. 

.  «  J'ai  vu  ,  dit  Lichtenberg  qui,  lui- 
»  même ,  possédait  ce  tact  à  un  haut 
1»  degré,  des  exemples  extraordi- 
f  naires  de  dissimulation  dans  les 

I  V  cours ,  surtout  dans  celle  d'Angle- 

'  »  terre  ,  où  le  spleen  semble  élen- 
»  dre  un  voile  sur  tous  les  visages. 
Les  muscles  de  la  face,  chez  les 
..  «  ourlisans  et  chez  les  grands;,  sont 
»  comme  une  gelée  dans  laquelle  on 
»  chercherait  aussi  vainement  une 
»  empreinte  durable,  que  des  si- 
»  cnes  d'organisation  dans  un  verre 
»  a'eau.  »  Lavater  répondit  faible- 
ment et  eu  professant  une  admiration 
sincère  pour  la  sagacité  de  son  anta- 
goniste ,  dans  le  quatrième  volume 
de  ses  Essais  phjsiogn.  Lichteidierg 
eut  le  tort,  très-grave,  après  un 
procédé  aussi  noble,  de  publier  une 
parodie  de  l'ouvrage  de  Lavater, 
sous  le  titre  de  Phjsiognomie  des 
queues ,  où  des  cadenettes  de  diffé- 
rentes formes,  copiées  iur  des  por- 
traits d'écrivains  allemands  célcDres, 
cl  des  queues  de  diverses  espèces  d'a- 
nimaux, étaient  soumises  à  une  pro- 
'»de   analyse  physiognomique  en 

XMV. 


I.IC  449 

terme»  ridiculement  bounoufflcs , 
empruntes  au  langage  ncologiquedq 
Lavater.  Ce  qui  explique  ,  mais  ne 
justifie  pas  cette  inderente  atta«pie  d« 
Lichtenberg,est  une  salire  pleine  de 
personnalités  que  puiijia  l'un  des 
amis  et  des  apologi>.te.s  1rs  pins  /niés 
de  Lavalor,  et  dans  laquelle  le  doc- 
teur Zimmermann,  en  faisant  dlu- 
sion  à  la  difformité  du  professeur  de 
Gocllingue,  avait  dit  qu'il  n'était 
pas  surj)renanl  que  Lichlenbcrg  fût 
l'adversaire  d'une  doctrine  qui  éta- 
blissait dc6  rapports  intimes  entre  la 
beauté  du  corps  et  la  vertu. —  Les  ex- 
plications de  quelques  planches  de 
Hogarth,que  Lichlenberg  avait  don- 
nées dans  ralmanach  de  (joetlingue 
ayant  eu  beaucoup  de  succès ,  il  en- 
treprit de  faire  regraver,  sous  ses 
yeux,  l'œuvre  de  ce  grand  peintre  , 
et  de  l'accompagner  d'un  commen- 
taire. Cet  ouvrage  a  paru  en  neuf  li- 
vraisons de  1794-  '^"7  1  in-fol.  et 
in-8\  Malheureusement  ia  mort  surr 
prit  le  commentateur,  en  1799,  pen- 
dant rimj)ression  de  la  5".  livrai- 
son ;  les  suivantes  sont  d'une  au- 
tre plume:  mais  tel  qu'il  est ,  le  tra- 
vail de  Lichtenberg  vivra  aussi  long- 
temps que  la  langue  allemande.  On 
a  dit  que  Fielding,  Garrick  et  Ho- 
garth,  unis  par  les  liens  de  la  plus 
tendre  amitié,  avaient  réussi  à  pein- 
dre avec  le  plus  de  fidélité  la  nature 
humaine  sous  ses  divers  aspects,  avec 
la  plume,  la  pantomime  et  lecrayon. 
Lichtenberg  a  contiibué,  j)ar  ses  let- 
tres sur  Garrick  dont  il  avait  éludicf 
le  jeu  pendant  ses  deux  séjours  à 
Londres ,  et  par  son  explication  de 
liogarlh  ,  à  transmettre  à  la  post«- 
rité  une  appréciation  de  leur  talent, 
plus  juste  et  plus  détaillée  qu'elle  ne 
lui  serait  parvenue  sans  le  secours  de 
sa  plume.  Mais,  indépendamment  du 
mérite  du  travail  de  Li'^hteiiberg  siir 

?9 


45o 


Lie 


Hogartli,  comme  texte  descriptif, 
c'est  un  véritable  cours  pratique  de 
connaissance  des  hommes  dans  tous 
les  états  et  à  tous  les  échelons  de  la 
culture  ou  de  la  dégradation  morale: 
les  excellents  conseils  et  les  remar- 
ques fines  dont  il  abonde ,  produi- 
sent un  effet  d'autant  plus  grand, 
que  c'est  en  se  jouant  (  quasi  aliud 
agendo) ,  que  le  commentateur  sem- 
ble les  offrir.  Le  seul  défaut  de  ces 
tableaux  de  mœurs  est  un  luxe  d'al- 
lusions spirituelles  et  malignes  qui 
ne  sont  pas  suffisamment  motivées 
par  la  matière.  L'écrivain  prête  visi- 
blement des  vues  trop  prof^?»des,  des 
aperçus  trop  ingénieux  ,  à  l'artiste  j 
et  l'on  ne  peut  nier  qu'd  ne  tombe 
fréquemment  dans  la  recherche,  sur- 
tout dans  les  dernières  livraisons. 
L'originalité  est  un  écueil  pour  celui 
qui  en  est  doué.  L'accueil  extraordi- 
nairement  flatteur  que  toutes  les 
classes  du  public  allemand  firent  aux 
premières  parties  de  ce  commentaire , 
parut  imposer  à  l'auteur  l'obliga- 
tion de  ne  pas  y  ajouter  une  ligne 
qui  n'offrît  quelque  trait  piquant  :  sa 
plaisanterie  en  perd  parfois  ce  na- 
turel ,  cette  grâce  qu'elle  a  dans  se* 
autres  écrits  j  là  elle  jaillit,  comme 
un  trait ,  d'un  espl'it  animé  par  la 
gaîté,  passe  comme  un  éclair  sur  les 
objets  qu'elle  colore  d'un  jour  parti- 
culier, réveille  une  foule  d'idées,  et 
lie  fait  qu'effleurer  des  rapproche- 
ments imprévus,  piquants^  féconds 
en  résultats  ,  sur  lesquels  on  désire- 
rait s'arrêter,  et  qu'il  dédaigne  d'ex- 
ploiter. Le  dernier  des  ouvrages  de 
Lichtenberg  ,  dont  nous  parlerons  , 
a  été  publié  après  sa  mort ,  par  son 
frère  :  ce  sont  des  observations  sur 
lui-même ,  des  aveux  d'une  naïveté 
rare ,  des  vues  paradoxales  ,  extraits 
d'un  journal  où  il  écrivait  toutes  ses 
pensées  avec  plus  d'abandon  et  de 


Lie 

bonne  foi  que  J.-J.  Rousseau  n'en  a 
mis  dans  ses  Confessions.  Il  s'y  rend 
compte  non-seulement  de  ses  projets 
et  des  réflexions  nées  de  ses  obser- 
vations sur  les  phénomènes  du  sens 
intérieur  ;  mais  encore  des  rêves  les 
plus  étranges  ,  lorsqu'ils  lui  promet- 
tent quelque  révélation  sur  le  prin- 
cipe de  ses  défauts  ,  et  sur  les  causes 
secrètes  de  ses  penchants,  ou  qu'ils  lui  { 
offrent  un  moyen  de  découvrir  un 
commencement  de  mauvaise  habi- 
tude et  d'en  prévenir  le  développe- 
ment ou  d'étouffer  le  germe  d'illu- 
sions nuisibles  :  il  prend  note  des  mo 
vements  fugitifs  qui  n'ont  fait  que  tri 
verser  son  ame,  des  idées  qui  ont 
repoussées  aussitôt  qu'admises  , 
qu'un  homme  supérieurpeut  seul  osi 
s'avouera  lui-même.  Jamais  homme, 
doué  d'une  imagination  aussi  vive 
et  d'une  sensibilité  aussi  profonde , 
ne  s'est  jugé  avec  autant  de  calme  et 
de  sévérité;  il  se  voit  passer  ,  pour 
ainsi  dire  j  il  s'écoute  sentir,  penser, 
désirer  ,  espérer.  Il  n'existe  pas  de 
recueil  plus  riche  en  observations 
psychologiques  ,  en  données  égale- 
ment importantes  pour  le  moraliste 
et  le  littérateur.  On  assiste  au  comba! 
que  se  livrent  l'esprit  scrutateur  du 
savant  et  le  penchant  de  l'hommî 
pour  le  merveilleux  ;  on  voit  aux 
prises  les  deux  inoi ,  le  moi-sujet  et 
le  moi-objet.  L'éducation  de  Lichten 
berg  s'était  faite  dans  des  circonst 
ces  très-défavorables  au  sentiment 
ligicux,  sous  le  règne  du  grand  F; 
déric  :  un  scepticisme  moral ,  fr 
et  dédaigneux  ,  un  besoin  excl 
d'analyse  sèche  et  rigoureuse , 
laient  emparés  des  meilleurs  esprits 
On  voit  Lichtenberg,  dans  la  plupar; 
de  ses  écrits,  dominé  par  cette  ten 
dance  de  son  siècle  ,  et  n'apercevani 
]c  danger  ou  l'erreur  que  dans  le  zeh 
imprudent  de  La vater  y  ou  dans  l'ei 


ten- 
tafll 

i 


Lie 

>  de  visionnaires  te!$  que 
le  Ziehcn(  I  ).Mais  dans  srs 
lussions  l'homme,  observateur 
....j.irlialde  la  nature  morale,  repa- 
raît avec  tout  le  sentiment  des  besoins 
•rjucls  les  sciences  exactes  nesau- 
it  satisfaire.  «  Quelle  difîerencc, 
aii-il(  p.  i55du  i**".  t.  de  ses  œuvres 
posthumes), lorsque  c'est  dans  ma 
libre  que  je  recite  le  verset  du  Ps. 
i\^antque  les  mont  agnes  fussent 
,  ,  et  que  tu  eusses  formé  la 
.'  et  l'unhers,  tu  es  le  Dieu  fort 
d'étermté  en  éternité  ;  ou  lorsque 
c'est  sous  les  voûtes  de  l'abbaye  de 
Westminster  ,  que  je  le  redis,  envi- 
ronné des  trophe'es  de  la  mort, éclaire 
de  ce  demi-jour  dont  la  sainte  et 
faible  clarté  guide  les  pas  qui  foulent 
'  la  poussière  des  rois  I  Je  l'ai  répété 
partout  et  à  toutes  les  époques  de 
ma  vie  ,  jamais  sans  être  profondé- 
ment louché  :  mais  à  Westminster  , 
j'éprouvais  ,  en  le  prononçant ,  un 
'  frisson  ineffable  ,  plein  d'épouvante 
et  de  douceur.  Je  sentais  la  présence 
du  juge  auquel  les  ailes  de  V aurore 
ne  peuvent  me  dérober;  je  versais 
des  larmes  ,  non  de  douleur  ,  non 
'  de  joie  ,  mais  d'une  confiance  inex- 
primable en  ce  juge.  »  Ou  trouvera 
de  pareils  aveux,  tirés  du  journal  de 
'  Lien Icnberg,  dans  un  article  des  Ar- 
-^  vesliltér.  (tom.  i ,  p.  29.8-2,5 1  ); 
iteur  l'y  peint  d'après  lui-même  , 
et  entremêle  ses  extraits  d'obser- 
vations  très-fines.    Voici    quelques 
!  liions   de   cette  auto-biographie 
plus  sincère  et  la  plus  piquante 
qui  ait  été  jamais  écrite.  «  Je  me  plai- 


^   Ziieh'în  ,  •urinteii Jant  «ccli^Mattique  h  'Z.9\' 

'■\à  ,  «Tait  ttitmyé  J«a  peuple*   <lu    N«rd  de 

«n-«»iie  ,  p»r  de»  préciictioti»  iViine  ^ponv«a- 

•  trophe  qni  devait  caiiter  la  ruine  pro- 

i»   grande     purtie    de    ceUe    eoairéc. 

;iamphleti  ila  Lichtenberf^  ,   pitrtnt  d« 

iiioii  ,  coniribiiérent  principalement  à 

ite    turreur    p«Ki<iur.    On    lei     lrou»e 

i'«    daa*   la   qMatriim*   voluM*   <U  M* 


Lie 

.^aîs(  œuvres,  1,9)1 


45i 


i  '  om- 

ment  je  pourrai»,  san  ,    içu  , 

mettre  le  f«Mi  «pjolquc  )>art  ,  ou  tuer 
telle  ou  tel  le  personne.  Je  cherchais  à 
m'idcntificr  avec  un  athéc(ib.  p.  28), 
et  j'en  jouais  le  rôle  en  société,  cxer- 
citii  gratid;  j'adoptais  parfois  celui 
d'un  homme  que  les  idées  d'une  su- 
perstition puérile  tourmentent  ;  j'ai- 
mais à  me  livrer  aux  suppositions  les 
plus  téméraires. (Dans  ce  nombre  ,  il 
faut  sans  doute  ranger  celte  prédic- 
tion, p.  iGG  :  «  Il  deviendra  un  jour, 
sous  l'empire  des  derniers  progrès  de 
notre  raiHnemcnt  social  ,  aussi  ridi- 
cule de  croire  en  Dieu  ,  qu'il  l'est 
maintenant  de  croire  aux  spectres).» 
tt  Je  pense  qu'il  serait  instructif  d'é- 
crire l'histoire  d'un   professeur  de 
philosophie  (  selon  Platon,  Locke, 
Kant ,  etc.  )  qui  demanderait  à  Dieu , 
avec  instance  ,  de  créer  un  homme 
d'après  l'image  de  sa  psychologie  : 
il   est  exaucé  ,  et  dès   le   premier 
jour  ,  on  est  obligé  de  conduire  cette 
créature    aux   petites  -  maisons.   » 
«  Dans  l'enfance  des  lâlonnemcnts 
d'explications  pliysiqucs,  on  avait 
recours  à  l'hypothèse  d'esprits  dont 
on   peuplait  la  nature;   l'ame  hu- 
maine est  un  reliquat  de  celte  opi- 
nion ;  c'est    le  spectre    qui  hante 
encore   les   ruines   de  notre  habi- 
tation corporelle,  p.   i56.  —  Il  me 
semble  que  le  monde  entier  soit  un 
appareil  uniquement  destiné  à  me 
faire  sentir  mes  maux  de  toutes  les 
manières  possibles, p.  29.5) — «Undes 
traits  les  plus  remarquables  de  moii 
caractère ,  est  la  manie  de  voir  des 
pronostics  partout;  je  lis  mon  sort 
dans  le  mouvement  d'un  iasecte.  » 
«Unelumière,presqucaussitôtélcinte 
qu'allumée  ,  m'a  fait  désespérer  de 
monvoyaged'Italie,p.'26.»-«J'aiété 
souvent  douloureusement  affecte'  de 
ii'avoir   pu  élçfuuer  trois   fois  de 
ai;. 


45-i  Lie 

i5uite  depuis 'io ans, p.  27.)) — «Lors- 
que j'crit'once  un  clou  ,  je  ne  puis 
ïn'crnpccher  de  chercher  ce  qui  ar- 
rivera jusqu'à  ce  que  ]e  le  relire.  En 
novembre,  j'attachai  à  mon  lit  un 
nouveau  carton  (  i  )  :  lorsque  j'ôtai 

le   clou j'avais   perdu    l'un    de 

mes  eiifants  ,  et  mon  excellent 
ami  Schernliageri  d'Hanovre  ,  (  p. 
5  du  second  volume.  )  »  Lichleji- 
berg  était  sans  doute  pre'ocupe'  de 
l'idée  de  cette  correspondance  mu- 
tuclie  de  toute  chose  avec  toute 
chose  ,  qui,  dans  l'esprit  d'un  Leib- 
liitz  ,  produit  îe  système  de  l'h  r- 
monie  préétablie,  mais  qui,  dans  les 
hommes  d'une  imagination  mal  gou- 
vernée ,  dégénère  en  superstition  ri- 
dicule.-» Que  ne  puis-je  creuser  dans 
ma  tcte  des  canaux  de  communica- 
tion qui  établissent  entre  mes  idées  , 
stérilement  disséminées  par  cen  - 
taines ,  un  commerce  intérieur  qui 
les  féconde  mutuellement,  p.  4^  !  » 
«Le chagrin  causé  parla  découverte 
d'un  défaut  en  moi ,  a  souvent  été 
plus  que  compensé  par  le  plaisir  que 
me  procure  l'accroissement  de  con- 
naissances qui  en  résulte  ;  tant 
l'homme  est  emporté  par  le  pro- 
fesseur.» a- Je  ne  puis  me  débarrasser 
de  l'idée  que  j'ai  passé  par  la  mort 
avant  de  naître ,  et  qu'une  seconde 
mort  doit  me  rendre  à  mon  ancien 
état,  p.  16  du  second  volume. »-«Le 
«pinosisme  et  le  déisme  conduisent 
«n  esprit  pénétrant  nécessairement 
au  même  résultat.  Le  point  de  vue  du 
théiste  sert  à  s'orienter  dans  la  doc- 
trine du  panthéisme,  comme  on  se 
sert  quelquefois  du  coup-d'œil,  com- 
me moyen  de  mettre  à  l'épreuve  les 
opérations  de  mesurage  les  plus 
exactes  ,   tome    II  ,     page    32.  — 


(1)  Pci.r   y  itrrro  tvf   ié(2«xiet]|  ,«iTWnd   il    il« 


Lie 

«  Eulerdit,  daas  ses  lettres  à  une 
»  princesse  d'Allemagne  (  vol.  n  , 
»  page   '2'iS  ) ,   qu'il  y     aurait  des 
»  orages,  et  que  la  foudre  tombe- 1 
))  rail, lors  même  qu'il  n'exisleraiti 
»  pas  d'hommes  qu'elle  pût  écraser.! 
»  J'avoue  qu'il  ne  m'a  jamais    étéj 
»  possible   d'attacher  un  véritable: 
»  sens   à   l'opinion  reçue  qu'Euleri 
»  exprime  ici.  Il  m'a  toujours  paru  , 
»  que  la  notion  d'exister  était  eiu- 
»  pruntée  à  notre  activité  intellec-i 
»  tuclle ,  et   qu'en  anéantissant  les: 
»  êtres  qui  sentent  et  qui  pensent 
»  on  anéantit  par-là  l'exislence  eli 
»  même.  Ce  que  j'éprouve ,  lorsc 
»  je  réfléchis  à  cette  dépendance  n 
»  tuelle  de  la  pensée  humaine  et 
»  l'être  eu  général ,  a  si  peu  d'ai 
»  logie   avec  les  principes  qui 
))  présidéàla  fonnationdu  langai 
»  qu'il  m'est  impossible  de  renc 
»  clairement  mes  idées  là  -  dessii 
»  Dieu  veuille  que  je  n'en  deviei 
»  pas  fou  I  »  (  Pages  i3   et   i4 
second   volume.  )   «  Je    crois 
»  fond  de  mon  ame  et  par  suite 
»  plus  mûres  réflexions,  que  la  de 
»  triiic  de  l'Evangile  est  le  moyen 
»  plus  sûr  et  le  plus  efficace  de 
»  pandre  un  re[)OS  et   un  bonh( 
»  durables  sur  la  terre.  Combien^ 
w  aurait  été  facile  à  un  être  comi 
»  Jésus  ,  d'imaginer  un  système  ij 
»  tionnel  qui  aurait  satisfait  les  pf 
»  losophes  les  plus  exigeants  I  Mi 
»  des  siècles    se    seraient  écouh 
»  avant  qu'il  eût  été  bien  compri 
»  le  beau  profit  qu'en  auraient  retî 
))  les  hommes  faibles  et  souffrants 
»  dans  le  trouble  des  passions  et  î 
»  l'heure  de  la  mort,  sans  parler  d( 
»  tout  ce  qu'en  auraient  fait  les  je 
»  suites  de  tous  les  temps  et  de  tou 
»  tes  les  nations!  (  Ibid. ,  p.  33.  )  >; 
En  voilà  assez  sur  la  lutte  pénible 
dans  laquelle  cet  esprit  vaste  et  pro 


Lie 

fond,  »c  vii  cnç;a<;;«'  toute  $n  vif,  par 
If5   aperçus   ilivcr^cuts   que  lui  of- 
iit  les  besoins  de  la  spcVuKitiun 
ii\  du  cœur, des  nerfs  malades  et 
une  raison  forte,  les  intérêts  de  la 
science  et  les  méditations  du  specta- 
teur impartial  des  alfaires  humaines. 
î^s  suites  désastreuses  de  la  révolu- 
tion française,  et  les  craintes  qu'elle 
lui  inspirait  pour  T^ivenir  de  l'Eu- 
rope ,  ne  furent  pas  les  moins  péni- 
bles sujets  de  ses  pensées,  vers  la  (in 
de  sa  vie.  La  mort  ne  parait  jamais 
il  ëtc   pour  Lichtenijer}» ,  autre 
('    qu'un    objet    de    méditation 
:al;ue  et  de  curiosité  ,  ou  même  de 
Jesir.  «  Que  n'ai-jc,  s'ecrie-l-il  (  ibid. 
0.8,  second  volume  ) ,  déjà  franchi 
a  bgne  de  séparation  I  Mon  Dieu, 
'ombicn   il   me   tarde  de    toucher 
m    moment  où  le   temps    cessera 
>our   moi  d'être    le  temps,  où   je 
}«rai  reçu  dans  le  sein  maternel  où 
e  dormais ,  lorsque  le  Hcinberg  (  i  ) 
tait  battu    par    l'Océan ,    lorsque 
"^picure  ,  César  ,     Lucrèce  ,  écri- 
raient, et    que  Spinosa    concevait 
'a   plus   grande   pensée  qui  jamais 
oit  entrée  dans  la  tête  d'un  hom- 
ncT  »  Ce  vœu  fut  exaucé  le    9.4 
?mer  1  •^()9 ,  après  six  jours  d'une 
laladie  inflammatoire.  La  coljcc- 
on  des  œuvres  de  Lichtenbcrgaété 
iihhée ,  au  profit  de  sa  veuve  et  de 
jnatre  enfants  ,  par  les  soins  de 
'u  Irère  et  de  M.  Kries,  à  Gôttingue, 
800-1806,  9  vol.  in-8<>.  Klteren- 
!rmc  le  journal   dont  nous  avons 
arlé,  et  tous  les  écrits  qu'il  avait 
■s  dans  les  Almanachs  et  dans 
igasinde  Gdltingue,a  l'excep- 
'  le  deux  morceaux  (2)  un  peu 

,vO  ^loatagn*  pr^t  (la  Gâttingne. 

(a)  Il   •'■|(it««it  Ja  la   manière  de  Tif^iirar   en 

i-m»  ,,l  I,  .(,,1  de  l'ela  ercc;  !M     V.ia»  «criraic 

r    aoat  Uioi  ,   Heré  (  Juiioa  )  ,  et 

t  JélenJu  *on  orthographe.  La  tatira 

:g,  ptaina  d'ciuditieu  ctdcnjoua* 


UC. 


i>î 


pais,  où  il  avait  fait  rire  Ir  11 
allemand  aux  dc|)ens  de  l'illu  h  • 
traducteur  d'IIomrre,  et  que  les  nli- 
teurs  du  recueil  n'ont  pa»  réiin- 
juimés  par  égard  pour  M.  \  ous. 
Le  premier  volume  offre  son  por- 
trait. Il  avait  conçu  Tidée  de  plu- 
sieurs romans,  entre  autres,  d'un 
ouvrage  où  il  aurait  fait  figurer, 
comme  héros  ,  un  prince  double , 
c'est-à-dire  un  monstre  composé 
de  deux  individus  réunis  dos-à-dog. 
V.  son  £loge  par  Ka^stner  (Mémoi- 
res de  l'académie  de  doitingue  , 
1799  ,  in-4''.  );  et  sa  rie,  par  un 
anonyme,  dans  le  IVecrologe  de 
Schlichtegroll  (  .>/.  vol.  de  la  10*. 
année,  tome  1  ,  Gotha  ,  i8o5, 
in-ia.  )  S-R. 

LlCHTENStEÎN  (Josepo-Wei^- 
CESLAS  prince  de  ) ,  feld  -  maréchal 
des  armées  autrichiennes  ,  naquit  à 
Vienne,  le  10  août  i6c)C^  :  destiné 
par  sa  naissance  à  la  carrière  des 
armes  ,  il  y  entra  dès  l'âge  de  18 
ans  ,  après  avoir  fait  de  bonnes 
études  j  sous  un  gouverneur  fort  ins- 
truit,  et  parvint  ,  eu  i-jîS  ,  au 
grade  do  colonel  ;  il  justifia  cette 
laveur ,  pendant  les  campagnes  de 
1733  et  1734  y  par  des  actions 
d'éclat  ,  qpie  récompensèrent  succes- 
sivement le  brevet  de  général-major 
etcelui  de  lieutenant-général. Ambas- 
sadeur en  France,  depuis  1738  jus- 
qu'en 1 74 1 ,  il  y  fit  aditirer  ses  con- 
naissances variées-**l'^crir  ses  quali- 
tés aimables.  Nomrîrê  feld-maréchal, 
il  alla  prendre  le  commandement  de 
l'armée  d'Italie  ,  en  1746,  et  rem- 
porta  une  victoire  ,  le  10  juin  ,  à 


ment,  ét*it  intiltilre  i  De  I*  ptononciatioo  4#« 
nw>tilont  da  ranrirnne  Gti  «a,  <  otnpatea  •  caU«  tl« 
laiin  n9iiTr4it«  fi^rat  dra  boiJa  da  l'Blba.rt 
poilaitcellr  cpicraphe  parodier  du  monnlojl«i«  d« 
Haralet;  To  lirh  or  noi  to  b<rh,  ihai  i$  iht 
ÇU€sUon  (Troi»itnianun»<»'o  de  la  •I»iiw«-ii4«  a« 
iiaa,  cl  piiOiur  nMH«(e  d«  la  ttaitiènia.) 


454 


LÎC 


Plaisance.  Depuis  il   partagea   son 
temps  entre  les  affaires  diplomatiques 
et  les  fonctions  de  directeur-général 
de  l'artillerie,  et  conduisit  avec  beau- 
coup d'habileté  l'élection  du  roi  des 
Romains,  à  Francfort ,  en  1 764.  Le 
prince   de   Lichtcnstein   mourut    à 
Vienne,  le  9  février  1772.   Marie- 
Thérèse,  qui  le  décora  de  la  Toison- 
d'or  et  de  la  grande  croix  du  nouvel 
ordre  de  son  nom,  le  regardant  com- 
me un  des  plus  dignes  soutiens  de  son 
trônC;,  lui  confia  la  direction  d'une 
école  d'artillerie  qu'il  porta  à  six  ba- 
taillons j  c'est  à  lui  qu'est  dû  le  per- 
fectionnement de  cette  arme   dans 
l'armée   autrichienne  :   il  dépensa  , 
pour  cet  objet,  au-delà  de  cent  mille 
c'cus  de  son  propre  bien.  Cette  prm- 
cesse  lui  fit  élever  un  monument  en 
bronze  dans  l'arsenal  de  Vienne.  Le 
prince  de  Lichtcnstein  aimait  les  arts; 
il  est  ,  pour  ainsi  dire  ,  le  créateur 
de  la  belle  galerie  de  tableaux  qui 
porte  son  nom,  et  qui  est  devenue  , 
dans  sa  famille  ,  comme  un  fidéi- 
commis ,  ou  un  majorât.     St-t. 

LÏCHTWER  (  Magnus  -  Gode- 
FROi),  né  à  Wurzen  dans  le  Brande- 
bourg, le  I  fév.  17 19,  fit  ses  études  à 
Leipzig,  et  tenta  ensuite  la  fortune  à 
Dresde  ;  mais  les  espérances  dont  il 
«'était  flatté  ne  se  réalisant  pas  ,  il 
prit  le  bonnet  de  docteur  en  droit  à 
Wittenberg  ^n  1744  ?  et  y  fut  pro- 
fesseur de  lo^vgt^e ,  de  philosophie 
morale  et  de  jjpioit  civil  :  sa  santé 
ne  pouvant  résister  aux  fatigues  de 
l'enseignement  public  ,  il  alla  se  fixer 
à  Quedlinbourg ,  puis  à  Halberstadt, 
où  ses  amis  lui  procurèrent  un  cano- 
nicat,  et  peu  de  temps  après  une  place 
de  conseiller  à  la  régence  de  cette 
ville.  Il  partagea  dès-lors  tous  ses 
moments  entre  les  afTaires  et  l'étude. 
Ses  Fables^  qui  parurent  pour  la  pre- 
^lïière  fois,  non  pas  en  1740?  comme 


Lie 

le  prétend  l'abbé  Denina ,  maiseï 
1 7  48 ,  n'obtinrent  d'abord  qu'un  suc  ' 
ces  médiocre  :  la  2®.  édition,  publié' 
en  1 758,  fut  mieux  reçue  du  public  1 
Ramier  en  donna,  trois  ans  après,  un' 
édition  abrégée  et  réduite  aux  6.i 
meilleures  fables,  avec  des  corrccj 
lions.  L'auteur,   mécontent  de  cj 
procédé,  désavoua   ces   prétendue! 
améliorations,  et  donna  une  édiîioj 
revue  et  augmentée  de  quatre  noij 
velles  fables  (  Berlin,  1762,  in-8o.| 
Les    critiques    allemands    placeul} 
aujourd'hui  Lichtwer  sur  la  mêrej 
ligne  que  Gellert  et  Lessing  ,  cons' 
dérés  comme  fabulistes  ;  s'il  leur  c 
inférieur  sous  le  rapport  du  goût 
du  jugement ,  il  les  surpasse  par 
talent  de  la  narration,  par  des  tou 
mires  plus  piquantes  et  par  des  ap( 
Çus  plus  philosophiques.  Il  y  a  u 
traduction  libre  de  ses  Fables  , 
français,  Strasbourg,  1763,  in-6 
Lichtwer  mourut  à  HaiJjerstadt , 
6  juillet  1 78.3.  Son  poème  du  Dr* 
wrtfî<7'eZ(  Leipzig,    1758,  in-4''. 
sur  lequel  il  paraissait  compter  bcc 
coup  pour  sa   réputation,   n'a  [ 
réussi  j  c'est  un  ouvrage  médiocre 
totalement  dépourvu  de  verve.  St 
LÏCINIUS  (Caius),  surnom 
Slolo  (i) ,  de  l'une  des  familles 
béieunes  de  Rome   les   plus  c 
dcrables ,  était  gendre  de  M.  F 
Anibustus,  patricien.  Ce  dernier 
marié  l'aînée  de  ses  filles  à  Ser 
Sulpicius  ,   noble    Romain  ,  tril  1 
militaire,  l'an  de  Rome  379.  Un  j(  ' 
que  les  deux  sœurs   s'entretenait 
ensemble  dans  la  maison  de  Sul  • 


(i)  Ce  mot  latin  signifia  ordinairement  ce!  ■ 
jetons  qui  sortent  <ie8  racines  ou  qui  crois- 
ait pieJ  des  aibies  ,  et  qui  dérobent  une  pa « 
de  la  s{ve.  Varron,  liv.  tv,  De  Re  rusli  > 
rapporte  que  los  soins  et  l'attention  de  Lien  • 
h  taire  énionder  ses  arbres  ,  lui  fit  donner  le 
nom  de  Stolo.  Pline,  Jiv.  xvn  ,  prétend  qu  « 
surnom  fut  affecté  à  cpnx  de  la  famille  Lr  » 
parce  qii'nu  Liciniiu  arait  trouvé  l'art  debi  - 
geonuer  le»  vigntr.. 


Lie 

tins ,  les  licteurs  de  ce  magi.strat  , 

I  qiii  se  retirait  chez  lui ,  frappèrent  k 
sa  î>orlc  avec  leurs  faisceaux  ,  sui- 

:  vant  la  coutume.  La  jeune  Fabia  , 
surprise  de  ce  bruit  nouveau  pour 

;  elle,  ayant  témoigne  quelque  frayeur, 

,  sa  sœur  étonnée  de  son  ignorance  se 

mit  à  rire,  l^es  moindres  choses  font 

"'^♦•Iqucfois  impression  sur   l'esprit 

iiilc  des  femmes  ;  l'ëpousc  de  Li- 

nmiis    fut   vivement   piquée  de  ce 

,  sourire,  qui  lui  parut  ironique.  Il  est 
pre'sumable  aussi  que  la  foule  d'offi- 
ciers qui  accompagnaient  le  tribun 

i  militaii^  et  qui  venaient  recevoir  ses 
ordres  ,  lui  fit  paraître  le  mariage  de 
sa  soeur  plus  considérable  que  le  sien. 
Celte  femme  fière  et  amltilieuse  ne 
put  supporter  cette  comparaison 
humiliante  ,  qui  lui  donna  du  dé- 
goût pour  son  état ,  et  la  plongea 
dam»  une  sombre  mélancolie.  Sou 
père  et  son  mari,  en  ayant  connu  la 

I  cause ,  la  consolèrent  en  lui  promet- 
tant qu'avant  peu  elle  verrait  dans  sa 
maison  les  mêmes  honneurs.  Leur 
première  démarche  ,  pour  parvenir 
a  ce  but,  fut  de  faire  nommer  tri- 

'  buns  du  peuple  (  l'an  38 1  de  Rome, 
C.  Licinius  et  Sextius  ,  jeune  plé- 
béien ,  d'un  rare  mérite ,  afin  qu'à 

,  l'aide    de    cette    magistrature  ,  ils 

{lussent  ouvrir   aux   membres    de 
eur  ordre  l'entrée  à  toutes  les  au- 
♦tps  dignités.  Les  deux  tribuns  dé- 
terenten  proposant  plusieurs  lois 
ites  favorables  au  peuple  et  con- 
lires  au  sénat.  La  première  concer- 
it  les  débiteurs,  et  portait    quon 
f  ranc lierait  de  la  somme  princi- 
pale de  la  dette  les  intérêts  (jui 
auraient  déjà  été  pajés  ,  et  qu  on 
irait  trois  ans  pour  acquitter  le 
sle  ,  en  trois  paiements  éf^aux.  La 
onde  défendait  à  tout  particulier 
/<•/  qu'il  fut ,  de  posséder  plus  de 
oo  journaux   de  terre,   et  or- 


Lie  455 

donnait  que  ce  qui  te  trouverait 
excéder  cette  quantité  serait  été 
aux  riches  ,  et  distribué  à  ceux  qu 
n'avaient  aucune  propriété.  La  troi- 
sième   staiuail   qu'on   ne    nomme- 
rait plus  à  l'avenir  de  tribuns  mi- 
litaires ;  mais  qu'on  procéderait , 
comme  autrefois ,   à  Vélection  tle 
consuls  ,  dont  un  serait  nécessaire- 
ment tiré  du  corps  des  plébéiens.  Ces 
projets  de  loi  produisirent  une  vive 
sensation  p.;rmi  les  sénateurs.    Oa 
en  voulait  a-la-fois  à  leurs  rentes  ,  a 
leurs  domaines  et  à  leurs  dignités  ; 
aussi  employèrent  -  ils   toui    leurs 
elTorls  pour  les  faire  repousser.  lU 
y  pary'inrent  en  cagnant  quelques- 
uns  des  tribuns  qui ,  par  leur  veto, 
arrêtèrent  toute  délibération.  Sex- 
tius et  Licinius,  de  leur  côté,  em- 
pêchèrent ,  l'année  suivante  ,  qu'on 
n'élût  des  tribuns  militaires  et  autres 
magistratures  curules  ,  et  ne  laissè- 
rent nommer   que  des   tribuns  da 
peuple  au  nombre  desquels  ils  s» 
trouvèrent  compris.  Cet  état  d'anar- 
chie dura  cinq  ans,  pendant  lesquels 
Liciîiius  et  Sextius  furent  continués 
dans  le  tribunat  du  peuple,  et  se 
trouvèrent  ainsi  à  la  tête  de  la  répu- 
blique ,  puisqu'elle  était  privée  des 
charges  supérieures.  La  sixième  an- 
née, les  habitants  de  Vélitres  s'étanl 
déclarés  contre  Rome  ,  et  ayant  mis 
le  siège  devant  Tusculum  ,  il  devint 
indispensable  de  lever  des  troupes 
pour  les  combattre  ;  alors  Liciniiis 
et  Sextius,  réélus  tribuns  du  peuple, 
furent  forcés  de  se  départir  de  leur 
opposition,   et  de  laisser  noduner 
des    tribuns  militaires.    Le  |)euplc 
continua  d'accorder  ses  faveurs  a  ses 
tribuns ,  et  les  choisit  pendant  dix 
ans  de  suite  ,  quoiqu'ils  feignissent^ 

Slusicurs  fois,  de  vouloir  s'éloigner 
e  ces  fonctions  ,  sous  prétexte  que 
leur  dcvouemenl  ii  sa  cau>«  deyenait 


456 


LÎG 


Lld 


inutile  puisqu'il  s'opposait  lui-même 
aux  succès  de  leurs  efibrls.  Loin  de 
renoncer   cependant    aux  premiers 
projets    qu'ils    avaient  conçus  ,  ils 
mirent ,  au  contraire ,  une  audace 
et    une     perseVe'rance    incroyables 
à    les    soutenir  ,    profitant  ,    avec 
adresse  ,   de  toutes    les    occasions 
qui  se  présentaient  d'enflammer  la 
haine  du  peuple  contre  les  patriciens, 
et  de  reproduire  leurs  lois  ,  qu'ils 
"Voulaient  faire  accepter  toutes  en- 
semble. Ces  tentatives  furent  long- 
temps rendues  vaines  par  les  menées 
des  patriciens  *.  néanmoins  l'an  36-^ 
avant  J.  C. ,  les  comices  acceptèrent 
l'une  des   trois  lois  qui  réglait  que 
nul  citoyen   ne    pourrait  posséder 
plus  de  cinq  cents  journaux  de  terre  ; 
et  l'anne'e  suivante  ,  ils  firent  passer 
la  loi  pour  décharger  les  débiteurs 
de  l'obligation  de  payer  les  intérêts 
de    leurs   emprunts  ,   et    obtinrent 
également  que  le  soin  des  livres  si- 
byllins ,  confie  à  dei;x  commissaires 
choisis  parmi  les  patriciens  ,  le  se- 
rait à  l'avenir  à  dix  commissaires 
moitié  de  l'ordre  de  la  noblesse  et 
moitié  de  l'ordre  des  plébéiens.  L'a- 
doption de  cette  dernière  loi ,  sur- 
tout ,  leur  parut  l'annonce  prochaine 
d'une  victoire  complète.  En   effet , 
l'an  365  avant  notre  ère ,  les  deux 
fougueux  tribuns ,  déterminés  à  vain- 
cre ou  à  périr ,  appellent  les  tribus 
pour  porter  leurs  suffrages   sur  le 
dernier  de  leurs  projets  de  loi.  Le 
dictateur  Camille,  environné  de  tout 
le  sénat,  s'oppose  envain  à  la  déli- 
bération, et  veut  empêcher  qu'on 
n'aille  aux  voix.  Sextius  et  Licinius, 
he  respectant  plus  ni  les  lois  ,  ni  la 
première  dignité  de  la  république , 
envoient  un  huissier  pour  le  saisir 
sur  son  tribunal.  Un  bruit  et  im  tu- 
multe horrible  s'élèvent  dans  la  place, 
où  tout  semble  annoncer  qu'on  va 


À 


en  vêiiit  aux  mains.  Ce  fut  dans  c 
circonstances  ,  que  le  sénat  crut  de- 
voir céder  au  peuple  ,  en  consentant 
qu'on  piit  choisir  un  consul  parmi  les 
plébéiens.  Sextius  occupa  le  premier 
Fune  des  places  de  consul  accordées 
à  son  ordre ,  l'an   363  avant  J,  C. 
Licinius  y  parvint  deux  ans  après, 
et  fut  nommé  pour  la  deuxième  foii 
en36i .  Aucun  événement  remarqua- 
ble n'eut  lieu  pendant  son  premiei» 
consulat,  si  l'on  exceptela  cérémonie 
du  lectisternium  (i)  ordonnée  pou 
apaiser  les  dieux ,  et  qu'on  n'avai 
vue  encore  que  deux  fois  depuis  1 
fondation  de  Rome.  Sous  son  deuxi 
me  consulat,  Rome  eut  à  soutenir  l 
guerre  contre  les  Berniques  et  1 
Tiburtins  ,  et  nomma  un  dictatev 
pour  s'opposer  aux  Gaulois  qui  s'é* 
taient  approchés  de  leur  ville  :  mais 
il  n'y  eut  point  de  combat ,  les  Gau- 
lois s'étant  retirés  ,  effrayés  de  l'ac- 
tion hardie  du  jeune  ManliusTor- 
quatus  (  P'^oy.  ce  nom  ).  Ce  fut  l'an 
356  avant  Jésus-Christ,  que  C.  Lici- 
nius Stolofutcondamnéàuneamende 
de  I  o,ooo  asses  (  environ  6,700  fr.  ) 
pour  avoir  transgressé  l'une  des  lois 
dont  il  avait  été  le  provocateur ,  en 
possédant  jusqu'à  mille  journaux  de 
terre ,  tant  en  son  nom  ,  que  sous 
celui  de  son  fds  qu'il  avait  fait  éman- 
ciper pour  colorer  sa  contraventio 
Ce  jugement  d'un  homme  flétri  po 
avoir  enfreint  sa  propre  loi ,  par 
si  extraordinaire  aux  Romains  ,  qu 
tous  leurs  historiens  l'ont  rapporté 
comme  un  événement  insolite  et  d'un 
exemple  pernicieux^   Moréri   et  le 

(1)  .Elle  consistait  en  repa»  faits  dans  les  tem- 
ple» ,  sur  d«§  lits  placés  pi*-»  <l«s  aIlt<^J»  ,  et  pa- 
ie» il?  ffciiiHagt!  et  il'lierbes  odoriférantes.  Let 
statues  tl«  Jtipiltir  et  dos  antres  dieux  étaient 
également  «teuduts  sur  des  lits  autour  desmé* 
mes  tabifs,  comme  si  «ll>s»  eussent  dit  pr«ndr4 
part  an  fostin.  Pour-les  déesses  tomme  Jimon, 
Ivi iiierve,  on  le»  mettait  sur  des  siège»  A  la  ma- 
nière des  dames  romaines  j  cette  po«tut«  pa- 
Téti«9ait  plut  décente  pour  leur  suse. 


i 


nouveau  Dictionnaire  historique 
ont  dit  que  C.  Licinius  Stolo  fut 
choisi  par  lo  dictateur  Manlius  pour 

'  comuiaiider  la  cavalerie;  c'est  une 
erreur.  Titc-Livc(  liv.  (> ,  ^i))  parle 
dans  le  uièinc  paragraphe  de  deux 
Licinius,  et  appelle  celui  qui  fut  mis 
à  Ja  tctc  de  la  cavalerie  y  C.  IJcinius 
Cal  vus.  D-z-s. 

'  LICINIUS  (  Flavius  Valf.rius 
LiciMAWUs  ) ,  empereur,  naquit  vers 
Tan  •j()3,dans  nu  village  de  Dacic  , 
d'une  famille  de  paysans  :  il  fut  en- 
levé à  la  charrue  pour  être  conduit  à 
l'armée  ,  avec  les  jeunes  gens  de  son 
âge ,  et  il  parvint  assez  rapidement 
aux  premiers  emplois  militaires.  L'af- 
fection de  l'empereur  Galerius  ,  son 
compatriote,  favorisa  beaucoup  son 
avancement.  Licinius  se  distingua  , 
d'aillenrs  ,  dans  la  guerre  contre 
Narscs  ,  roi  des  Perses;  et  l'on  con- 

'  vient  qu'il  joignait  à  beaucoup  de 
xourage  les  talents  d'un  général ,  et 
qu'il  savait  maintenir  la  discipline 
oans  les  troupes  :  mais  c'cHait  son 
seul  mérite.  Une  certaine  conformité 
d'humeur  et  de  caractère  le  rendit 
de  plus  en  plus  cher  à  Galerius  ,  qui 
le  déclara  auguste  ,  le  1 1  novembre 
Sc] ,  à  Carnonte ,  en  présence  de 
Dioclétien  et  de  Maxiraien  ,  et  lui 
abandonna  la  Pannonie  et  la  Rhélie. 
Galerius  mourant  (3i  i  )  lui  recom- 
manda son  épouse  et  son  fils  ;  et  l'on 

<  croit  que  l'intention  de  ce  prince 
était  de  désigner  Licinius  pour  son 
successeur.  Maximien  ,  craignant 
qu'il  n'eût  fait  des  dispositions  pré' 
jndicia})les  à  ses  intérêts  ,  entra  aus- 
sitôt dans  l'Asie  miDeure,et  s'avança 
jusque  dans  la  Bithynic  ,  aux  aecla- 

;    mations  des  peuples  dont  il  captivait 

'  la  bienveillance  par  l'abolition  des 
impôts  et  la  remise  des  sommes  dues 

*    au  fisc.  Licinius, sortantjenfiu  de  l'in- 
î     acUou  ou  il  était  resté  juscpi'alors , 


i.io  457 

marcha  an  devant  de  son  ri  val;  mais 
arrivé  au  Bosphore  deThrace,  il 
conclut  le   traité  que  Maximien  lui 
proposa,  et  ])ar  lequel  les  deux  prin- 
ces se  cédaient  réciproquement  les 
pro vlnces occupes  par  leurs  trou |>e$. 
Ainsi  Licinius  joignit  à  ses  deux  pro- 
vinces rillyrie,  à  laquelle  la  Thrace, 
la   Macédoine   et  la   Grèce  clairnt 
comme  annexées.  Pour  airerrair  son 
autorité  ,  il  rechercha  l'alliance  de 
Constantin ,  qui  lui  donna  en  ma- 
riage sa  sœur  Constantia  :  la  céré- 
monie eut  lieu  à  Milan  ,  en  3i3;  et 
Constantin  ,  voulant  que  le  peuple 
prît  part   à  la  joie  que  lui-  causait 
cette  union  ,  rendit ,  de  concert  avec 
Licinius ,  un  édit  favorable  aux  chré- 
tiens. Taudis  que  les  deux  princes 
étaient  retenus  à  Milan  par  les  fêtes 
qui  se  succédaient , l'ambitieux  Maxi- 
mien  pénètre  à  l'improviste  dans  la 
Thrace  à  la  tête  de  soixante-dix  mille 
hommes  ;  il  s'empare  de  Byzance  , 
après  un  siège  d'onze  jours  ,  enlève 
Héraclée  ,  et  poursuit   ses  rapides 
conquêtes.  Licinius  ,  averti  enfin  du 
danger  ,  court  à  Andrinople ,  ras- 
semble à  la  hâte  quelques  troupes  , 
et  marche  au-devant  de  son  ennemi, 
moins  pour  le  combattre  que  pour 
arrêter  ses  progrès.  Il  rencontre  dans 
la  plaine  de  Sésène(près  d'Héraclée), 
Maximien  ,  qui  s'avançait  plein  de 
coniiance  ;  et   forcé   d'accepter   le 
combat ,  il  remporte  une  victoire  si 

f)eu  espérée  ,  que  tous  les  hi.storiens 
a  regardent  comme  un  prodige.  Li- 
cinius, étonné  lui-même,  ne  songe» 
pas  à  en  profiter  :  lorsqu'il  passa 
dans  la  Bitnynie  ,  Maximien  avait 
déjà  une  nouvelle  armée.  Cepen- 
dant le  sort  le  favorisa  une  se- 
conde (ois;  et  son  rival  qui  comp- 
tait peu  sur  sa  clémence  ,  se  voyant 
abandonné  de  ses  soldats  ,  s'ôta  la 
vie,  Licinius  ,  vaiûqucur ,  lit  mettre 


458  Lie 

à  mort  la  femme  et  les  enfants  de 
Maximien  ,  restes  en  son  pouvoir  : 
la  veuve  cleGalerius  qu'il  av?-it  for- 
cée par  ses  indignes  traitements  de 
clierclier  un  asile  dans  le  camp  de 
sou  rival ,  périt  par  l'ordre  de  ce 
même  Licinius  à  qui  son  époux  mou- 
rant l'avait  confiée.  L'empire  ne  re- 
connaissait plus  que  deux  maîtres. 
Constantin  se  crut  fondé  à  demander 
à  Licinius  un  nouveau  partage  :  mais 
celui-ci  dont  les  succès  avaient  accru 
l'ambition  ,  rejeta  fièrement  celte 
demande.  Toujours  lent  dans  ses 
expéditions,  il  se  laissa  prévenir  par 
Constantin,  qui  entra  dans  la  Pan- 
nonie  avec  une  puissante  armée.  Un 
combat,  dont  l'issue  paraissait  de- 
voir être  décisive  ,  fut  donné  entre 
la  DravG  et  la  Save  près  de  Giljalis. 
Licinius  vaincu  s'enfuit  à  Sirraiura  , 
et ,  ayant  fait  couper  les  ponts  der- 
rière lui  pour  relarder  la  marche 
de  Constantin  ,  il  se  dirigea  sur 
Adrianople  ,  et  se  hâta  d'y  rassem- 
bler de  nouvelles  forces ,  résolu  de 
tenter  encore  le  sort  des  armes.  Un 
second  combat  fut  livré  près  de 
Mardio  (  3 1 3  )  ;  le  résultat  en  fut 
incertain  :  mais  Licinius  ,  qui  avait 
appris  à  ne  plus  compter  sur  la  for- 
tune, accepta  le  traité  fort  onéreux 
que  lui  offrait  Constantin.  La  paix 
fut  plus  durable  qu'on  ne  devait 
l'espérer.  Ce  fut  vers  3^  i  ,  que  Li- 
cinius commença  de  persécuter  les 
chrétiens  dont  il  se  croyait  haï  ;  il 
défendit  aux  évèqucs  toute  commu- 
nication entre  eux,leur  interdit  toutes 
assemblées  publiques  ou  secrètes,  et 
chassa  de  son  palais  toutes  les  per- 
sonnes qu'il  soupçonnait  de  profes- 
ser le  christianisme.  Il  défendit  en 
même-temps  aux  femmes  d'assister 
aux  exercices  du  cul  te  dans  les  mêmes 
lieux  que  les  hommes  ;  et  la  moindre 
infraction  à  ces  ordonnances  fut  pii- 


LIC 


i 


nie  de  la  confiscation  des  biens 
l'exil  et  de  la  mort.Constantin  avertit 
plusieurs  fois  Licinius  d'user  de  plus 
de  modération  envers  les  chrétiens  : 
mais  voyant  qu'il  méprisait  ses  avis  , 
il  se  décida  enfin  à  prendre  leur  dé- 
fense ,  et  lui  déclara  la  guerre  en 
3.i3.  Licinius  vint  camper,  avec  son 
armée  ^  sur  les  bords  de  l'Hébre  qui 
le  séparait  de  son  ennemi;  mais  Cons- 
tantin ayant  découvert  un  gué  ,  tra- 
versa le  fleuve ,  et  attaqua  Licinius. 
Celui-ci  courut  s'enfermer  dans  By- 
zance  :  il  y  fut  bloqué  aussitôt  par 
terre  et  par  mer  ;  ne  s'y  croyant  p 
en  sûreté,  il  parvint  à  s'échapper , 
se  rendit  à  Chalcédoine,  où  Con 
tantin  le  suivit.  Une  bataille  que  livr, 
Licinius  sous  les  murs  de  Chryso 
polis,  acheva  la  destruction  de  soQi 
armée  épuisée  par  les  fatigues  ;  dt 
il  s'enfuit  à  Nicomédie ,  sans  autre 
espoir  que  celui  de  fléchir  son 
vainqueur.  Constantin  lui  accordaki 
la  vie ,  en  le  reléguant  à  Thessa- 
lonique  ;  mais  il  le  fit  étrangler 
l'année  suivante  (  324  )>  ^ous  le 
prétexte  qu'il  tramait  une  conspira- 
tion. Il  annula  toutes  les  ordon- 
nances de  ce  persécuteur  et  flétrit  sa 
mémoire.  Licinius ,  habitué  dans  son 
enfance  aux  travaux  de  la  campagne , 
avait  toujours  conservé  de  l'ailéctio 
pour  les  cultivateurs  qu'il  favori: 
en  différentes  occasions  :  mais  il  éta 
avare  ,  cruel  et  livré  à  la  débauch 
il  baissait  tous  les  hommes  instruit 
et  souvent  il  condamna  des  philos^ 
phes  ,  qui  n'avaient  d'autre  tort  q 
leur  profession  ,  à  des  supplices  r 
serves  aux  esclaves.  Les  médailles  de 
ce  prince,  en  moyen  et  petit  bronze , 
sont  communes;  mais  celles  en  or 
sont  très-rares. — Licinius (F/mw^ 
Falerius  Licinianus  ) ,  fils  du  pré- 
cédent et  de  Constantia  sœur  de 
Constantin,  naquit  en  3 


rhrr  césav  Ip  i*""".  innrs  i^i^,  dans 
(  ville  de  vSanliquc  ,  et  honore 
1  consulat  par  Constantin,  qui  le 
tmma  son  collègue, en  3 19.  Après 
1  défaite  de  son  père ,  il  suivit  sa 
(Te  à  Ryzancc ,  et  partagea  les 
ins  qu'on  donnait  aux  fi\s  de  Cons- 
ntin  ;  mais  ce  prince,  alarme  des 
I  ililps  qu'annonçait  le  jeune  I^ici- 
lus,  le  fit  étrangler  en  3*26,  et,  par 
^  crime,  assura  l'empire  à  ses  deux 
Is.  Il  y  a  des  médailles  en  or  du 
tuic  Licinius  ;  elles  sont  de  la  plus 
landc  rareté.  W-s. 

LICINIUS -CALVUS  (  Caius  ) , 
t  un  des  plus  célèbres  oralcurs  de  son 
t  inps,  naquit  l'an  de  Rome  680(1) 
7  \  avant  Jesus-Cbrist.  Il  était  fils 
de  Licinius-Macer ,  qui  avait  laisse' 
des  annales,  citées  par  Titc-Live  et 
y:\r  Denis  d'Halicarnasse.  Macer  fut 

cusc  d'une  action  infâme;  mais, 
,  (Tsuadéde  son  innocence,  il  sortit 
Ml  tribunal,  pendant  que  les  juges 
•l'aient  aux  opinions  ;  et  ayant  mis 
"ne  robe  blanche  ,  il  revint  sur  la 
place  publique  se  mêler  à  la  foule 
«les  citoyens.  Un  de  ses  amis  lui 
nant  annonce  qu'il  venait  d'être 
ondamnë,  il  se  hâta  de  retourner 
chez  lui ,  et  mourut  sur-Ie-charap  de 
douleur.  Calvus  ,  par  les  conseils  de 
^on  père ,  s'était  appliqué  à  l'étude 
de  l'éloquence  ,  et  il  y  avait  fait  de 
très -grands  progrès.  Il  était  fort 
jeune  lorsqu'il  accusa  Vatinius  de 
s'être  rendu  coupable  de  brigue  dans 
les  dernières  élections.  Il  porta  deux 
fois  la  parole  dans  cette  occasion,  et 
avec  une  telle  véhémence,  que  Vati- 
nius ,  voyant  l'effet  de  ses  discours  , 
^'écria  ,  en  s'adressant  aux  juges  : 
«  Eh  quoi  î  citoyens  ,  serai  -  je  con- 
damné parce  que  mon  accusateur  est 


'  1  (Mine  l'ancien  remarque  que  C«l»ii»  *int  an 
rr  r,  '-  te  même  jour  que  C«ctliii«  Kufu«,  il»«t 
Il  cl.  ttiaee  fut  ai  dilféirate.  (  LU.  tu,  p.  4f-  ) 


l.V 


»9 


un  homme  éloquent!  »  ilrnrru^riurr.t 
pour  Vatinius  ,  iJ  avait  des  protec- 
teurs puissants,  et  il  fut  renvoyé  ab- 
sous. Calms  cultivait  la  poésie  avec 
non  moins  de  succès.  Cicéron  parle 
d'une    satire  qu'il  avait  composée 
contre  Tigellius  Herraogènes  (  Lettre 
à  F  ah.  G  allus,  vu,  a  ^  )  ;  et  Suétone 
a  rapporté  le  commencement  d'une 
pièce   satirique    que   CaKus    avait 
faite  contre  César  (   P'ie  de  César, 
ch.  XLix  ).  Ce  n'élait  pourtant  pas 
un  méchant  homme;  il  était  a  un 
naturel  fort  gai,  et  aimait  beaucoup 
les  plaisirs.   Il  déplora  la  mort  de 
Quintilie  ,  sa   maîtresse  ,  dans  des 
élégies ,  citées  par  Properce  ,  (  liv. 
II,  nC^  );  et  il  fut  moissonné  lui-même, 
à    la   fleur  de  l'âge ,  l'an  44  avant 
Jésus-Christ.  Cahnis  comme  orateur 
a  été  diversement  apprécié.  Cicéron 
convient  qu'il  avait  de  l'esprit ,  des 
mots  heureux  ,  du  jugement  et  beau- 
coup d'érudition;  mais  il  lui  repro- 
che de  trop  soigner  son  style  ,  et  de 
perdre  à   arrondir  ses  phrases  un 
temps  qu'il   aurait  du  employer  * 
porter  l'émotion  dans  l'ame  de  ses 
auditeurs.  (  Fojez  Brutis  ,  seu  de 
clans  oratoribuSf  lxxxii  ;  epist.  ad 
Trebonium  xi v  ,21).  Dans  le  Dialo- 
gue sur  les  orateurs  (  i  ) ,  Apcr ,  uu 
des  interlocuteurs  ,  admet  la  vérité 
des  reproches  que  Cicéron  fait  à  Cal- 
vus  (  ch.  XXI  )  ;  mais ,  Messala  ,  qui 
prend  la  parole  après  lui,  place  Gal- 
vns  comme  orateur  peu  au-dessous 
de  Cicéron  ,  cl  trouve  son  style  plus 
plein ,  plus  serré  (  ch.  xxv  ).  Sui- 
vant Pline  le  jeune,  on  s'apercevait 
aisément  que  Gilvus  avait  pris  le» 
Grec»  pour  modèles,  et  il  s'était  ap- 
proché de  Démosthène  ,  plus  que 
('icéron  n'en  aurait  voulu  convenir. 

(1;  L'atttenr  de  r.m  aieUgU*  «•«    ••c««a«.  «»• 
«na  l'«Ufiba«atè  Tm»!»,  et  datnr««  *  Q"'»- 

ttilM. 


4Ga  LIG 

Enfin  Qulntilien  le  cite  souvent ,  et 
toiijours  avec  ëloge  :  «  J'en  ai  vu , 
»  dit-il,  qui  p'eferaient  Culvus  à  tous 
î>  les  orateurs  ;  et  d'autres  qui  ,  le 
»  jugeant  d'après  les  critiques,  étaient 
»  persuadés  qu'il  n'avait  pas  de  ve'ri- 
»  table  chaleur  :  quant  à  moi  je 
»  trouve  que  son  style  est  grave , 
»  châtie'  et  souvent  aussi  très-vëhé- 
»  ment.  »  (  Institut,  orator.  x  ,  i  ) 
Nous  ne  pouvons,  malheureusement, 
nous  faire  une  opinion  des  talents 
oratoires  de  Galvus  ,  d'après  ses  ou- 
vrages :  de  vingt  et  un  discours  qu'il 
avait  composes  ,  il  ne  reste  pas  îe 
moindre  fragment.  Comme  poète  , 
Horace  le  met  a  côte  de  Catulle ,  et 
personne  n'oserait  re'cuser  un  pareil 
juge.  Calvus  était  lié  avec  ce  dernier 
poète  ;  et  nous  a  vous  la  preuve  de  l'in- 
timité qui  régnait  entre  eux,  dans  trois 
petites  pièces  que  Catulle  lui  a  adres- 
sées. Dans  la  première  ,  il  se  plaint 
amicalement  de  ce  que  Galviis  lui 
avait  envoyé  un  recueil  de  mauvais 
vers;  dans  la  seconde, il  lui  témoi- 
gne le  regret  d'avoir  vu  s'écouler  si 
rapidement  une  journée  qu'ils  avaient 
passée  ensemble  au  milieu  des  plai- 
sirs; et  dans  la  troisième,  il  l'invite 
à  chercher  dans  le  commerce  des 
Muses  ,  des  consolations  au  chagrin 
que  lui  causait  la  mort  de  la  belle 
Quinlilie.  Catulle  fait  encore  mention 
de  Calvus  dans  une  épigramme  oii  il 
le  nomme  Salaputiiis  disertus  (  i  ) , 
par  olx  l'on  apprend  qu'il  était  d'une 
petite  taille.  On  trouve  quelques^mg^- 
ments  des  poésies  de  Calvus,  dans 
les  recueils  publiés  par  les  Es  tienne, 
i564,in-8o.,  parPilhou,  i59o,par 
Almeloveen,  1686;  dans  VAppendix 
du  Pétrone  des  Farioruin,  et  enfin 
dans  le  Corpus  poétarum,  édition  de 

(1)  Oh  peut  voir  l'ezpUcation  que  M.  No«l 
donne  du  mot  salaputius  dans  8«s  acte»  sur  les 
poésies  do  Caiulls. 


LIG 

Genève ,  ou  dans  la  belle  édition  dt 
Maittaire.  Funck  a  réuni  des  détails 
intéressants  sur  Calvus,  dans  son 
ouvrage  De  viiili  œtate  linguce  la- 
tinœ,  W-s. 

LICINIUS-TEGULA  (PuBLius), 
poète  latin  ,  fiorissait  l'an  de  Rome 
55'2  ,  deux  siècles  avant  J.  G.  Tite- 
liivc  rapporte  que  cette  année  diffé- 
rents prodiges  ayant  jeté  l'effroi  dans 
Rome,  les  décemvirs ,  après  avoir 
consulté  les  livres  des  sibylles,  or- 
donnèrent une  fête  expiatoire.  Li- 
ciniiis  composa  pour  cette  cérémonie 
une  hymne  qui  fut  chantée  par  trois 
chœurs  de  jeunes  filles  ,  chargées 
de  porter  les  offrandes  au  temple  de 
Junon ,  invoquée  sous  le  nom  de 
reine  (Liv.  xxxi ,  ch.  \i).  On  croit 
que  ce  poète  est  le  même  que  Lici- 
Nius  Lmbrex  ;  et  la  ressemblance  de 
leurs  stirnoms  (  i  )  semble  autoriser 
cette  conjecture.  Aulu-Gelle  cite  une 
comédie  de  ce  poète  intitulée:  Aerea^ 
et  il  en  rapporte  deux  vers,  les  seuls 
qu'on  ait  de  [ni{Noct.  attic.  lib.  xiii, 
cap.  9  ).  H  paraît  qu'il  jouissait,  de 
son  temps,  d'une  très-grande  répu- 
tation. Vulcatius  Sedigitius,  dans  un 
fragment  que  nous  a  conservé  Aulu- 
Gelle  (  Lib.  XV,  cap.  24  ),  lui  assigne 
le  quatrième  rang  parmi  les  poètes 
dramatiques  : 

Si  quid  quart»  detiir,  dabitnr  Licinlo. 

Ainsi  il  lui  donne  la  préférence  non- 
seulement  sur  Attilius  et  Ennius , 
mais  encore  sur  Turpilius  et  Térence. 
Quels  regrets  ne  doit  donc  pas  exci- 
ter la  perte  ^d  ses  ouvrages!  W-s. 
LIGïNIUS  DE  SAINTE -SCO- 
LASTIQUE.  Fofez  YiRBov. 

LIGIO (Robert  de)  r.GARAcciou. 
>  '  ~ 

(i)  Te;^ula  «t  iti'brex  sont  deux  mots  synony- 
me! ,  et  qui  df^îsignent  un  habillement  onfr- 
la  pluie.  Mais  Tite-Live  doune  à  Tegtila  le  «ur- 
nom  de  PubUus,  et  Fausius  nomme  tmorex, 
Caïuf;de  sorte  quil  deriftiit  impossible  d«détet- 
ciiutr  t'ï  c'est  le  mime  perjonuags. 


I 


LID 

MDKN  (Ji:a?i-Henri),  litlcra- 
Icur  suédois  ,  vivait  an  milieu  du 
dmiier  siècle.  Une  forliiue  asser. 
cou.si<lerablc  lui  donna  le  movcn  de 
parro(»rir  rAllema^nc  ,  la  France  , 
rAu^IcleiTc  et  l'Italie.  Revenu  eu 
Suède  ,  il  fut  frappe  ,  à  la  fleur  de 
50U  âj;e ,  d'une  paralysie  qui  lui 
ôta  enlièreinent  rusaf;e  de  ses  mem- 
bres ,  et  le  réduisit  à  un  e'ial  de  souf- 
france cantinuel.  Il  n'en  conserva 
pas  moins  une  grande  activité  d'es- 
prit ,  rassembla  une  bibliothèqic 
considérable  ,  cl  dicta  plusieurs  ou- 
'  vrages  ,  résultats  des  recherches 
!  qu'il  faisait  faire  sous  ses  yeux.  On 
a  de  lui  une  Histoire  des  poètes  sué- 
dois ,  et  des  poètes  latins  nés  en 
Suède  ,  pbisieurs  Mémoires  histo- 
riques et  littéraires  ,  et  une  éditicm 
du  Journal  de  la  diète  de  i  (iSi  ^ 
par  Diiros ,  précédée  d'une  Intro- 
duction relative  aux  événements  de 
celte  diète,  qui  changea  entièrement 
la  constitution  de  la  Suède  ,  et  fit 
obtenir  à  Charles  XI  un  pouvoir 
illimité.  Liden  mourut  à  Norkoe- 
ping ,  lieu  de  sa  naissance ,  après 
avoir  disposé  de  sa  bibliothèque  et 
d'une  partie  de  sa  fortune ,  en  fa- 
▼cur  de  l'université  d'Upsal.  C-AU. 
LIDNER  (  Bengt  )  ,  poète  sué- 
dois ,  mort  à  l'âge  de  trente-quatre 
ans, le  4  )i*»vier  1793,  avait  résidé 
quelque  temps  à  Paris,  et  s'était  fdt 
connaître  de  l'ambassadeur  de  Suèilc, 
le  comte  de  Gentz,  qui  lui  doima  des 
encouragements  et  des  conseils  utiles. 
Il  aurait  pu  fournir  une  carrière 
brillante;  mais  des  moeurs  peu 
réglées ,  et  une  fougue  de  carac- 
tère, qu'il  ne  put  jamais  domp- 
ter, nuisirent  à  sa  fortune,  lui  at- 
tirèrent des  chagrins,  et  abrégèrent 
ses  jours  II  a  composé  plusieurs  poè- 
nies  ,  qui  décèlent  une  imagination 
f ^rte  et  kardic  .  ime  amc  profonde- 


LIE 


|(M 


ment  sensible ,  mais  aiii  pèrhetit 
p-ir  le  plan,  et  dont  plusieurs  dclailj 
sont  contraires  au  bon  grult.  Non$ 
inditpierons  :  I.  lA //!/><-<•  1783,011  le 
poète  chante  la  rév(»lution  d'Améri- 
que ,  le  siège  de  Gibraltar  ,  la  sup- 
pression des  couvents  par  Jose|)hIi  , 
la  découverte  des  ballons  aérostati- 
que. II.  La  Comtesse Spastara,^^\v:{^. 
d'œuvrc  de  l'auteur,  où  il  peint  avec 
l'abandon  le  plus  touchant  et  l'élo- 
quence la  plus  pathétique  le  sort 
de  cette  femme  intéressante,  qui  fut 
victime  de  l'amour  maternel  pendant 
le  tremblement  de  terre  de  la  Cala- 
bre.  L'édition  complète  des  œuvre» 
de  Lidner  a  paru  à  Stockholm ,  ca 
1789.  1  vol.  in-H*».  C-AU. 

LÏEBAULT  (  Jean  ) ,  méderin  et 
agronome,  né  à  Dijon  dans  le  sei- 
zième siècle,  vint  fort  jeune  à  Paris, 
et ,  après  avoir  suivi  quelque  temps 
les  cours  du  savant  L.  Durct  ,  prit 
ses  grades  en  médecine.  Il  pratiqua 
son  art  avec  bcaucouj)  de  succès  ,  et 
se  conciUa  cependant  l'amitié  de  ses 
confrères.  Ayant  épousé  Nicole  (  i  ) , 
fille  de  Ch.  Estiennc,  fameux  impri- 
meur, qui  le  préféra  à  Jacques  Gre- 
vin  ,  il  compléta  le  Théâtre  d'ugri- 
cidture  de  son  beau  -  père  ,  et  le 
traduisit  en  français.  Cette  spécula- 
tion ne  put  qu'être  très-avantageuse 
à  Liébault;  mais  le  revers  de  fortune 
qu'éprouva  Charles  Estie/me,  rejaillit 
sur  lui  :  il  ])assa  sa  vie  dans  un  éliil 
voisin  de  l'indigence ,  et  mourut  le 
9. 1  juin  1 5()f),à  Paris,  sur  une  pierre 
où  il  avait  été  contraint  de  s'asseoir 
dans  la  rue  Gervais-Laurent.  (  f^ojez 


(1)  A  r<«ri  N  cols  bina*  «a,  <  -  t<^« 

Lacrois    «l4t  M^in*  .    «qu'aucun    't  y'« 

n'avait  «lé   imprimr.  On  trourc  <  r  •>.< 

le  C4lalof<ia  Je  U  llibl.  <Im  Koi  .-  /.rj  M.>ejtt 
de  lu  Jemme  mari^f  ,  mise$  en  f-rm«  é€ 
//a/X-^f  f«r  Mail4me  Lt>ii  41  ir,  Piiii.,P.  AIe«- 
niwr.lii-fi".;   ti  Ji.l>  l* 

B«)l«  )  ,«u  cÏM,  J  >n 

d  IIoli«iiUurtt  ,  uae  .  ,;, 


462 


LIE 


L'Estoile,3fe7/i.  de  ffennlF.)On  a 
lui  :  I.  L'agriculture  et  maison 
rustique  de  Charles  Estienne ,  pa- 
rachevée premièrement ,  puis  aug- 
mentée par  Jean  Liébault ,  Paris  , 
1570  ,  in-4".  (O-  Cet  ouvrage  est 
divisé  en  sept  livres  ,  qui  traitent 
de  la  ferme  et  de  ses  dépendances  j 
des  jardins  à  fleurs  et  parterres  ; 
des    vercers  ;    des    prés    et   prai  - 


I 


ries 


vergers  j 
;  des   terres 


labourables  ;  des 


vignes  ;  et  enfin  des  garennes  et  des 
oiseaux.  Il  s'en  fit  une  foule  d'édi- 
tions successivement  augmentées  et 
perfectionnées  {'2)'^  et  cet  ouvrage  a 
servi  de  modèle  à  toutes  les  compo- 
sitions françaises  du  même  genre. 
(  Foyez  Liger.  )  II.  Quatre  livres 
des  secrets  de  médecine  et  de  la 
vhilosophie  chymique  ,  èsquels  sont 
décrits  plusieurs  remèdes  singuliers 
pour  toutes  maladies,  etc. ,  traduits 
du  latin  (  de  Gasp.  Wolf  )  ,  Paris , 
1573,  1579,  i58si,  in-S*».  ;  Lyon, 
iSgS  ;  Rouen  ,  i6'i8,  i645,  même 
format.  Les  dernières  éditions  sont 
encore  recherchées.  III.  Thésaurus 
sanitatis  paratufacilis ,  selectusex 
'variis  auctoribus,  etc. ,  Paris,  ï  ^77, 
in- 16  ;  seconde  édition  revue  et  aug- 
mentée, par  A.  Scribonius ,  Franc- 
fort, 1578,  in-S''.  IV.  Scholia 
m  Jac.  Hallerii  connnentaria  in 
libr.  VII  Aphorismorum  Hippo - 
Gratis ,  Paris ,  1 679  ,  1 583  ,  in-8'^.  ; 
il  y  a  plusieurs  autres  éditions.  V.  De 
sanitate ,  fœcujiditate  et  morbis  mu- 
lierum,  ibid.  i582  ,  in-8^\  ,  traduit 


(i)  La  trad.  Je  V^gricitlture  ,  etc.,  avait  paru 
di's  i56.i,  année  de  la  mort  <Ie  Cli-  Estir-nne;  et 
elle  avait  eu  plusieurs  éditions  avant  1670.  Mais 
ceUe  de  cette  année  est  meilleure  qn«  les  prect 


dentés  ,  quoiqu'elle  contienne  beaucoup  d'absur- 
dité». (  V/)y.  la  Bibliogr.  agronom.  n".  a5.) 

(2)  L'édition  de  Lunévill^,  iS-;,  in-8».  ,  fui 
augmentés  par  Tiiebault  ,  d'un  Bfrf  recueil  des 
chasses  du  cerf  y  du  sanglUr  ,  du  Viè-re,  du 
renard^  du  blaireau,  du  cor: il  et  du  loup.hn 
Chasse  au  loup  avait  déjà  paru  dan»  l'éditioa  de 
1S66.  ^f^oyet  Ci.iLMoivoAir.) 


LIE 

en  français  :  Trois  livres  de  la  santé, 
Jécondité  et    maladies    des   fem*^ 
mes  ,  Paris  ,  même  année ,  in-8*^.  : 
ce  livre  n'est  point  une  traduction 
de  celui  de  Marinello  ,  comme  on  l'a 
prétendu  ;  mais  il  n'est  pas  extraor- 
dinaire que  Liébault  se  soit  souvent 
rencontré  avec  le  médecin  italien  , 
puisqu'il  traitait  le  même  sujet.  Le 
traducteur  français  de  l'ouvrage  de 
Liébault ,  en  a  retranché  plusieurs 
détails  que  la  décence  ne  permet  pas 
d'exprimer  en  notre  langue.  En  1er 
minant  cet   ouvrage ,   Liébault   en 
promettait  un  autre,  qui  n'a  pas  vu 
le  jour ,  Sur  la  manière  de  noun 
et  élever  les  enfants  (  Joly  ,  Re 
sur  le  Dictionnaire  de  Bayle  ).  V 
De  cosmeticd  seu  ornât u  et  décor 
tione  ,  etc. ,  Paris  ,  1 58^  ,  in-8o. 
traduit  eu  français  ,  sous  ce  titr 
Trois  livres  de  V embellissement 
ornement  du  coiys  humain,   ibii 
i58.i  ,  in-S*'.  ;  la  traduction  est  rc 
cherchée  des  curieux.  Duverdier  atf 
Iribue  encore  à  Liébault  :  Le  trésm{ 
et  remède  de  la  'vraie  guéris  on  de  i 
peste ,  avec  plusieurs  déclaraiioi 
dont   elle  procède ,   Lyon,    i54v^ 
in-8**.  ;  et  Bayle  :  De  prœcaven 
curandisque  venenis.  W-s. 

LIEBE  (  Ghristian-Sigismondj 
savant  numismate,  né  en  1687, 
Frauenstein  ,  petite  ville  de  la  Ml 
nie,  commença   ses  études  à  F 
berg  ,  où  son  oncle  Thomas  Li( 
était  recteur,  et  alla  fréquenter 
suite  les  cours  de  l'académie  de  Leij 
zig  ;  il  y  reçut  le  doctorat ,  en  1 7 1 41 
et  publia, à  ce  sujet ,  une  dissertation  ' 
De    Romd  Babjlone  ex  nununis 
Il  prit ,  en  1 7 1 7,  ses  degrés  en  théo 
logie  ,  et  fut  nommé  au  double  eml 
ploi  de  prédicateur  à  l'église  St.-Paalj 
et  de  bibliothécaire  adjoint  de  l'acaj 
demie.  Le  duc  de  Saxe-Gotha  lui  fi  ; 
offrir  uû  traitement  honorable  ;  e 


ME 

tn  I7'2î  ,  il  visita  ,  par  ort\re  de  ce 

priiuT  ,  les  Pay-B.ts  ,  rAi»j»ielcrrc 

et  la  Fraïue,  pour  acheter  (le.s  livres 

rares  cl  des  médailles.  De  retour  à 

Gotha,  il  l'ut  noniinc  à  la  place  de 

conservateur  du  cabinet  des  antitpies, 

Tarante  par  la  mortde  Chr.Sclilegel, 

lia  remplit  d'une  manière  très- 

in«;Mee.  11  mourut  d'une  maladie 

uisemeut ,  causée  par  l'excès  du 

.ùl  ,  le  7  avril  173G,  âgé  seulc- 

t  de  quarante  -  neuf  ans.  LieLe 

r  brancoup  d'esprit;  il  écrivait 

uice  en  latin  et  en  allemand: 

:  la  poésie  ,  et  il  a  publié , 

'50US  le  titre  de  Canninajuveuilia, 

lin  recmil  d'élégies  ,  dont  quelques- 

^  rappellent  la  douceur  et  la  sen- 

.   iiité  de  Tibulle.  On  a  de  lui  :  I. 

l-u'ina  Bahylon ex  nummis  adversàs 

Hardidnuin  y  Leipzig,   1714, 

I  \  ;  nouvelle  édition  sous  ce  titre: 

nmi  Ludovici  XII  G  ail.  régis 

raphe  :  Perdam  Babylonis  no- 

^  vel  PERDAM  Babylonem  ,  insî- 

i  ,  illustrati  ac  contra  Hardui  ■> 

num   defensi ,  ibid.  17  17  ,  in  -  8". 

Il  y  soutient ,  contre  le  P.  Hardouin, 

que  ces  médailles  turent  frappées  par 

niilre  de   Louis    XII  ,    eu    i5r2  , 

lant    la   guerre    avec    le    pape 

0  ios  II  ;  et  que  Rome  y  est  désignée 

1  ir  le  nom  de  Babylone  :  mais  il  ne 

tend  pas ,  comme  d'autres  écri- 

is ,  eu  tirer  la  conséquence  que 

I    I  ui  était  favorable  aux.  principes 

1'  la  réforme  ,  puisqu'elles  sont  an- 

! -ures  de  plusieurs  années  au  sys- 

i''  de  Luther.  IL  Epistola  ad  D. 

tnonem  Dejling  ijud  consilium 

lovd  Bibliothecàlut/ierand  cons- 

ndd  aperit,  ibid.,  i7iG,in-8°. 

De  pseudonomid  J.   Calvini  , 

^lerdam,  i7'23,in-8°.  L'auteur 

iscule  ce  que  Bayle,  Baillet  et 

I  es  ont  écrit  à  cet  égard.  lY.  Les 

'  -tii  des  principaux  Oieologiens  ré- 


MË 


463 


formes  et  cathtUiijucs ,  qui  assis» 
tirent  ,  en  1 13o  ,  à  l assemblée 
d'.'Iugsbourg  ,  Gotha  ,  17'Jo.  Gel 
ouvrage  est  écrit  en  allemand,  ainsi 
que  le  suivant  :  V.  ^ie  abrégée  de 
J/enri l'illustre f  Altenhourg,  1731. 
VI.  Gotha  mimmaiia  sistens  The- 
sauri  Fiidericiani  numismata  anti^ 
ijua  ,  ed  ratione  descripta  ,  ut  gê- 
nerait eorum  notitiœ  singularia 
suhjimgantnr  ;  accedunt  ex  /tmlr. 
Monllii specimine  univers,  rei nuni- 
mariœ  antiquœ  excerpta  ;  et  Epis^ 
tolœ  très  Ez.  Spanhemii  quibus  fa- 
riores  ejusdem  The  sauri  numnii  il- 
lustrantur,  cuni  iconibuSy  Amsterd. 
1730  ,  in-fol.  C'est  le  plus  connu  de 
tous  les  ouvrages  de  Liebe  :  il  cou  • 
tient,  comme  on  voit ,  la  description 
des  médailles  du  cabinet  du  dur  de 
Saxe-Gotha ,  et  différentes  pièces  in- 
téressantes pour  la  science  numisma- 
tique. L'auteur  se  plaint  dans  la  pré- 
face d'avoir  été  obligé  de  faire  paraî- 
tre son  travail  avant  de  l'avoir  revu 
avec  assez  d'attention  ;  et  il  promet 
de  réparer  les  fautes  qui  lui  seraient 
échappées, dans  une  seconde  édilior, 
qu'il  n'eut  pas  le  loisir  de  préparer. 
Il  travaillait  dans  le  même  temps  à 
une  édition  des  Césars  de  Julien;  et 
son  manuscrit  passa  ,  après  sa  mort , 
à  Jean-Michel  Heusinger,  qui  publia 
cet  ouvrage  ,  Gotha  ,  I73t>,  in-8**. 
Enfin  ,  Liebe  a  été ,  pendant  trente 
ans,  l'un  des  collaborateurs  des  ^cta 
eruditor.  Lipsensium  ,  et  il  y  a  in- 
séré un  grand  nombre  d'extraits  et 
d'analyses  très-bien  faites.     W-s. 

LIÊBERKLHN  (  Jea5-Natua- 
NAEL  ) ,  anatomi&te ,  né  à  Berlin  le 
5  septembre  171 1 ,  après  avoir  fait 
de  bonnes  éludes  ,  se  fit  recevoir 
docteur  en  médecine  à  Leyde,  et  re- 
vint à  Berlin  ,  où  il  fut  admis  dans 
le  collège  des  médecins.  11  se  livra 
p«rticidièr«aieDt   à  l'étud«  de  l'a- 


464  LIE 

natomie.  Entre  autres  recliercîies , 
il  tacha  de  constater  par  des  expe'- 
riencc'^  faites  sur  des  chiens,  dont  il 
ouvrait  le  thorax  sous  l'eau,  qu'il 
n'existe  pas  d'air  entre  la  plèvre  et 
le  poumon.  Personne  n'a  peut-être 
déployé  autant  d'habileté  que  lui, 
dans  l'art  de  préparer  et  d'injeeter 
les  diverses  parties  du  corps  humain, 
lia  porté  ses  observations  microsco- 
piques au  plus  haut  degré  de  perfec- 
tion ;  et  il  a  surtout  complètement 
réussi  à  démontrer  la  structure  vas- 
culaire  de  tous  nos  organes ,  jus- 
qu'aux ramifications  les  plus  tenues. 
Il  fit  exécuter  un  microscope  solaire, 
perfectionné ,  qui  lui  servit  à  démon- 
trer aux  yeux ,  la  circulation  du 
sang ,  et  qui  ouvrit  la  voie  à  un  plus 
grand  nombre  de  découvertes.  Il  de- 
vint membre  de  la  société  royale  de 
Berlin  ,  de  celle  de  Londres ,  de  l'a- 
cadémie des  curieux  de  la  nature;  et 
il  mourut  le  7  décembre  1756,  lais- 
sant un  cabinet  anatomique  compo- 
sé de  phis  de  quatre  cents  pièces  très- 
bien  préparées.  Les  plus  belles  ont 
été  achetées  par  le  professeur  Bereis 
(  F.  Bereis  ).  On  a  de  Lieberkuhn, 
plusieurs  Mémoires  qui  sont  insérés 
dans  le  recueil  de  l'académie  de 
Berlin,  et  deux  Dissertations  impri- 
mées à  Leyde  ,  la  première  ayant 
pour  titre  ,  Disputatio  de  valvuld 
coli,  1739,  in^"*. ,  et  la  deuxième, 
Dissertatio  de  fahricd  et  actione 
villorum  inteslinorum  teiiuium  ho- 
minis,  1744^  in-4°.  C'est  surtout 
dans  cette  dissertation  que  l'auteur  a 
fait  preuve  du  plus  rare  talent  dans 
Tart  des  injections.  P.  et  L. 

LIEBKNEGHï  (  Jean  George  ) , 
mathématicien  et  antiquaire  ,  na- 
quit à  Wassungen  ,  dans  le  land- 
graviat  de  Hesse,  vers  1680  :  après 
avoir  terminé  ses  études  classiques, 
il  prit    ses   grades   en  théologie  j 


LIE 

mais  il  préféra  aux  fonctions  du 
pastorat  celles  de  l'enseignemeut , 
et  fut  nommé  ,  en  1 7  i  o  ,  professeur 
de  mathématiques  à  l'académie  de 
Giessen.  Il  s'acquitta  de  cet  emploi 
d'une  manière  distinguée,  et  encou- 
ragea surtout  la  culture  de  l'astro- 
nomie ,  science  alors  assez  négligée. 
En  17'23  ,  il  crut  découvrir  une  nou- 
velle étoile  dans  la  grande  Ourse ,  cl 
il  la  nomma  sidiis  Ludovlcianum,  ci: 
l'honneur  du  prince  Louis  de  Hesse- 
Darmstadt,son  souverain.  "Weidler  i. 
publié  des  réflexions  (Comme«/«fto 
sur  cette  étoile.  (Voy.  la  Biblingi 
astronomique,  p.  877.  )Liebknec" 
après  une  vie  entièrement  pas: 
dans  des  travaux  utiles ,  mourut 
Giessen^  le  17  septembre  l'J'^g 
était  membre  des  sociétés  royales 
Londres  ,  de  Berlin  ,  de  la  soci 
des  curieux  de  la  nature,  et  de  l'a 
demie  de  Pélersbourg.  On  citera 
lui  :  I.  Elementa  geographiœ  ge 
ralisy  Francfort,  171*2,  in-8°.  G 
un  ouvrage  destiné  à  ses  élèves  : 
partie  mathématique  et  astronomique 
est  assez  estimable  ;  mais  les  autre; 
sont  traitées  trop  superficiellement 
II.  Dissertatio  cosmographica  di 
harmonid  corporum  mundi  tota 
liiim  y^  novd  ratione  in  numeri. 
perjectis  generatim  defmitd  ,  Gies 
sen  ,  17  18,  in-4°.  lïl.  Luculœ  h(^ 
realis  die'iônowembr.  1 7 10,  Giesi 
Hassorum  ohservatœ  ;  dans  les  Ai 
enulitor.  Lips.  ann.  1 7 1 1  ,  p.  3î 
IV.  Jccurata  Descriptio  Luci 
horealis  in  observatorio  Giessœ 
februar.  et  i  inartis  1721  obsi 
vatœ ,  ibid.  ann.  1724,  p.  i 
avec  une  planche.  V.  Mira  met 
morphoùs  ligiii  in  mineram  fi 
per  expérimenta  comprobat a,  ihil 
ann.  1710,  p.  4^5.  VI.  Viscursu. 
de  Diluvio  maximo  ,  occasione  in 
venti  nuper  in  comitatu  Laubacens 


Ï.IR 
f  ex  mird  mrlnmorpfiosi  in  mine- 

mt   f.rri  nuilutl  ligtli ,  CUm  obsCV- 

HiciSytic.  Accessit 
>.i,lfusii  de  terra  sigil- 
lœnsi  ,  Francfort ,  1 70.^ , 


;  Mussen  ,  i7i.>>  l'i 


•80.  licl). 
it  y  rend   compte  de   la   de- 
rte    d'un    morceau    de    bois 
alise,  trouve  à  une  profondeur 
vautc-<lou/.e  pietls  ,  en  creusant 
ils  près  de  Laubach  ;  il  en  tire 
1  net  ions  en  faveur  de  la  ve'rité 
•  luge    universel  ,  opinion   que 
Iward  et  Sclieuchzer  (  /^.  ces 
^  )  avaient  déjà  établie  et  sou- 
par  des   preuves   du   même 
.  VI  ï.  De  nonnullis  bracteatis 
V   Ilassiacis  ;    deque  istorum 
/  locis  ftheno  et  Franconiœ  vi- 
ibus,  Dissertatio  epistolica  ad 
I.   Schmid  ,   abbatem   Mariœ 
n  em  cum  ejusdem  responso. 
^tadt,  1716,  m-4".  Celte  dis- 
lion est  fort  curieuse.  VIII.  Gb- 
it iories  de    antiqidtaiibus  qid- 
im  Solmensibus ,  f^eteraviam 
rraneam  illiistrantibus  ,  dans 
'  taeriid.  Lipsens. ,  ann.  1727, 
373,  avec  une  planche.  Il  y 
nce  son  projet  de  publier  l'his- 
minéralogique   de  la   Hesse  ; 
ige  dont  il  était  occupé  depuis 
rurs  années.   IX.  Hassiœ  siib- 
ifieœ  spécimen,  clarissima  testi- 
i(i  diliivii  univers ali s  ,  h'c  et  in 
vicinioribus    occurrentia ,  ex 
'ici  re^no,  minerali,  vegetabili, 
ninerali     petit  a  ,    figurisque 
^  exposita,  etc.  Gicssen,  1730, 
.  Cet  ouvrage  est  très-intéres- 
;  on  en  trouve  une  analyse  assez 
inlue  dans  les  Acta  eruditor.{Prc- 
r  supplément,  tora.  x.  )X.  Bina 
l'Mzabetharum  ,   veluti  illus- 
imariim  sœc.  \ii  et  xiii  testium 
uitis  evangelicœ in  Hassid.me- 
LU  y  momimentis  ac  numis  de- 

X5HV. 


ME  465 

e/rtrrtfrt.  Gicssen  ,  i7i<),  in-4".   Ou 
a   encore  «le   liiebknerht  un  grand 
nombre  de  Dissertations   insérées 
dans   les  mémoires ^des  différentes 
académies  dont    il   était   membre. 
Gab.  Guill.  Goctten  a  publié  la  Fie 
de   ce    savant    professeur  dans  la 
Gelehrte  lùiropa ,  ]yairt,  11".  W-». 
LIEBLE  (  Pu I Li PPE-Louis  ),  bé- 
nédictin ,  né  à  Paris,  en  1784 ,  fit 
profession,  le  'i8  octobre    1752, 
dans    Tabbaye   de  St.    Faron     de 
Meaux.  En  1  n6^  il  remporta  le  prix 
proposé  par  ratadémic  des  inscrip* 
tions  et  belles-lettres.  II  était  biblio- 
thécaire de  l'abbaye  de  Sainl-Ger- 
main-des-Prés  ;  et  après  la  destruc- 
tion des  couvents,  il  resta  à  son  poste 
jusqu'à  l'incendie  du  ui  août  17^4» 
qui  dévora  l'établissement  confié  à 
ses  soins.  Lieble  y  perdit  le  maiius- 
crit  d'un  ouvrage  sur  les  Gaules  du 
moyen dge,  qui  lui  avait  coûté  trente 
ans  de  travail.  Il  était  sans  fortune  ; 
et  la  Convention  le  comprit  parmi 
les  gens  de  lettres  à  qui  elle  accorda 
des  secours  en  1 795.  Il  est  mort  à 
Paris,  à  la  fin  de  181 3.  Les  béné- 
dictins envoyèrent  aux  derniers  édi- 
teurs d'Alcuin  (V.  Alcuin,  1, 4^7» et 
FoRSTER,XV,28i  )  les  notes  qu'ils 
avaient    recueillies   relativement   k 
cet  auteur  :  elles  étaient  principale- 
ment le  travail  de  D.  Lieble.    Le 
même  service  fut  rendu  à  Cliiniac 
de  la  Bastide,  pour  son  édition  des 
Capitulait  es  de  Baluze  (  V.  Baluze 
III,  297  )  ;  et  Lieble  a  encore  ici  sa 
part  à  réclamer.  Il  a  aussi  coopéré  au 
Dictionnaite  raisonné  de  diploma- 
tique de  son  confrère  D.  de  Vaines , 
et  a  donné,   en  outre  :  I.  Observa- 
tions sur  les  deux  litres  adressées 
à  un  supérieur  général  à  l'occasion 
de  la  reformedes  réguliers.  II.  Suite 
des  Observations.  lïl.  Mémoire  {tl 
non  Dissertation)  sur  Us  limites  de 


4^  LIE 

l'empire  de  Charlemagne ,  1765, 
in- 19..  C'est  le  mémoire  qui  avait 
remporté  le  prix  en  1764.  IV.  jYou- 
"velle  Rhétorique  française  à  V  usage 
des  jeunes  personnes  de  l'un  et  de 
Vautre  sexe  avec  des  exemples  tirés 
des  meilleurs  auteurs  latins  et 
français ,  i8o3,  in- 12.      A.  B-t. 

LIENHARÏ  (  George  ),  abbë 
de  Roggenburgh ,  ordre  de  Prémon- 
tre', et,  en  cette  qualité,  prélat  du 
collège  impérial  des  abbés  deSouabe, 
naquit  en  1717,3  Uberliughen , 
d'une  famille  sénatoriale.  Il  fit  pro- 
fession en  1741 ,  et,  après  avoir  en- 
seigné la  philosophie  et  la  théologie, 
occupa  différents  offices,  et  fut  élu 
abbé  en  1753.  Il  favorisa  et  en- 
couragea les  études ,  maintint  la 
discipline  régulière,  se  fit  aimer 
des  siens ,  et  honorer  du  public  par 
ses  vertus.  Il  a  laissé  différents  ou- 
vrages ,  dont  les  principaux  sont  :  I. 
JSxhortator  domesticus  religiosam, 
animam  ad  perfectionem  excitans, 
II.  Ephemerides  hagiologicœ  ordi- 
nis  Prœmonstratensis  f  Augsbourg  , 
1764.  L'auteur  y  donna  un  Supplé- 
ment, en  1767.  III.  Des  Sermons, 
des  Panégyriques ,  des  Oraisons 
funèbres  et  autres  Discours  d'appa- 
rat. IW.Spiritus  litterarius  Norber- 
tinus  à  scabiosis  Casimiri  Oudini 
calumniis  vindicatus,  seu  Syïloge  w- 
ros  ex  ordine  prœmonstratensi  scrip- 
tis  et  doctrine  célèbres  necnon  eo- 
rumdem  vit  as,  res  gestas ,  opéra 
et  scripta  tum  édita  tum  inedita 
perspicuè  exhibens  ,  Augsbourg  , 
i77i,in-4°.  On  voit,  par  le  titre  de 
cet  ouvrage ,  que  le  but  de  Lienhart 
n'est  pas  seulement  de  donner  un 
catalogue  d'écrivains  de  son  ordre. 
Casimir  Oudin,  prémontré  de  l'ob- 
servance réformée ,  après  avoir 
quitté  l'habit  de  sa  profession,  et 
abjuré  la  religion  catholique  en  Hol- 


LIE 

lande ,  avait  ajouté  l'outrage  à  ; 
défection  :  il  avait  insulté,  dans  s* 
écrits  ,  Golbert ,  son   abbé-généra 
qui  pourtant  avait  été  son  Méccn 
Il  imputait  une  profonde  ignorani 
et  l'abandon  des  bonnes  études, 
une  société  dans  laquelle  il  avait  é 
nourri,  et  où  lui-même  avait  pui; 
ce  qu'il  avait  de  connaissances.  Ce 
pour  répondre  à  ces  calomnies ,  q- 
l'abbé    de    Roggenburgh    prit 
plume.  Il  ne  se  borna  point  à  iv 
liste,  ni  à  de  simples  récits  et  à  ui 
nomenclature;  plusieurs   Disserti 
lions  critiques,  presque  toutes  d 
rigées  contre  Oudin,   forment  ui 
partie  notable  du  Spiritus  litter 
rius.  On  y  trouve  aussi  l'hisloi 
de  beaucoup  de   chroniqueurs,  ( 
biographes,  numismates  et  généal 
gistes,etc.  L'auteur  mourut  en  1 78 
L-y. 
LIEOU-PANG,  empereur  cl 
nois ,  chef  et  fondateur  de  la  dyna 
tie  des  Han,  né  vers  Tan  aSo,  avai 
l'ère  chrétienne  ,  dans    le  Kian 
nan  ,  était  chef  du  village  de  Pe 
Un   jour  qu'il  conduisait  des  ci 
minels  à  la   montagne  de  Léchai 
lieu  d'exil  déterminé  par  l'empereu 
plusieurs  d'entre  eux  parvinrent 
s'échapper. «Si  cela  continue^  dit-i 
»  je  serai  bientôt  tout  seul.  »  Lor; 
qu'il  fut  arrivé  à  l'ouest  du  pays 
Furg  ,  il  chercha  à  dissiper  ses 
quiétudes  en  buvant  quelques  vei 
de  vin  j  puis  il  commanda  aux 
des  de  délier  les  criminels  qui 
talent,  et  les  renvoya, en  leurdisj 
«  Vous  n'êtes  pas  de  pire  condif 
que  ceux  qui  se  sont  sauvés;  p^ 
quoi  vous  retenir?  Allez, retirez-voi 
de  votre  côté  ,  et  moi  du  mien. 
Il  y  en  eut  quelques-uns  qui  s'éloj 
gnèrent ,  mais  les  plus  détermine, 
ne  voulurent  point  l'abandonner  j  < 
Lieou-pang  les   emmena  dans  1< 


LIE 

montagnes   Maiig  -  cban  et   T.ing« 

n,  où  il  se  proposait  de  rester 

c,'pour  se  detolier  au\  poiirsiii- 

•  liroii  ne  pouvait  manquer  de 

or  eonirc  lui.  Cependant  legow- 

<'ur,  ne  voyant  pas  revenir  liieou- 

; ,  et  redoutant  les  cil'ets  de  la 

rtî  de  l'empereur  £ui-chi  ,  se 

la  à  entrer  dans  Je   parti  de 

iii-chinç,  son  rival  :  il  rappela 

les  exiles  en   leur  promettant 

tjràce  et  des  emplois  ;  et  il  en- 

chercher  Licou-pan^!; ,  dans  les 

îagncs.  Mais  lorsqu'il    le    sut 

0  près  de  la  ville,  il  en  fit  fer- 
les portes  ,  et  ne  voulut  plus  le, 

parce  qu'il  craignait  sa  trop 

;  opularitë.  Lieou-pang  ,  ir- 

le  ce  manque  de  foi,  écrivit  une 

t  sur  une  pièce  de  soie  blanche^ 

lyant  attachée  à  une  flèche  ,1a 

1  par-dessus  les  remparts.  La 
iielle  l'ayant  lue  la'communiqua 
1  sieurs  habitants.  Ceux-ci  cou- 
>ur  le  champ  aux  armes,  for- 
la  maison  du  gouverneur,  le 

' ,  et  ouvrent  les  portes  de  la 

.1  Lieou-pang,  qui  est  proclame' 

e  de  Pev.   11   profita  habile- 

!  des  troubles  qui  agitaient  l'em- 

.  et  du  mécontentement  presque 

al  des  peuples,  pour  se  faire 

)  artisans.  Il  joignit  successive- 

i  ses  troupes  à  celles  des  diiïe- 

>  chefs  de  révolte  ,  et  parvint 

il>lir  une   telle  discipline  dans 

irmce,  qu'elle  ne  causait  pas 

I oindre   désordre,  même  dans 

vdles  dont   elle  s'emparait  de 

force.  Lorsqu'Eul-chi  fut  mort, 

inier  prince  de  la  famille  des 

11,  prévoyant  qu'il  ne  pourrait 

e  maintenir  sur  le  trône,    et 

|)tantsur  la  générosité  de  Lieou- 

, ,  vint  lui  offrir  les  marques  de 

K;nilé  impériale,  à  son  passage 

chi-^ao  (  Tan  :io6  ayant  l'ère 


ME  HGj 

chrctteiine  ).  Lieou  -  panjj  r»»rtit  le 

j>rince  avec  bonté,  inipo 

aux  courtisans  qui  lui  rm 

de  le  faire  mourir,  et  prit  U  route 

de  Hien-yang,  capitale  de  l'empire  , 

3u'il  abandonna  au  pillage,  en  or- 
onn.int  toutefois  d'énargncr  la  vie 
des  habitants.  11  alla  loger  au  palais 
irn|>ériai  ;  et  tandis  que  les  autres  ofli- 
ciers  s'emparaient  des  bijoux  et  des 
autres  objets  précieux  qu'ils  trou- 
vaient dans  les  maisons  abandonnées , 
il  s'assura  des  registres  pour  l'his- 
toire, des  cartes  géographiques,  et 
de  ce  qu'on  peut  nommer  les  archi- 
ves du  gouvernement.  La  beauté  du 
palais  le  séduisit  au  point  qu'il  ne 
voulait  plus  en  sortir:  mais  les  con- 
seils du  sage  Tchang-  leang,  Tarra- 
chèrcnt  à  cette  vie  oisive  ;  et  il  se 
rendit  avec  son  armée  à  Pa-chang , 
où  il  réunit  les  vieillards  les  plus  con- 
sidérables, pour  leur  faire  part  des  in- 
tentions qu'il  avait  pour  le  bonheur 
du  pays.  Bientôt  après  ,  il  reçut  la 
nouvelle  que  Hiang-yu  ,  le  premier 
des  généraux  de  l'empereur  Y-ty , 
s'avançait  pour  lui  disputer  la  pos- 
session du  trône  :  il  dépêcha  un 
homme  de  confiance  près  du  général 

fiour  lui  demander  un  accord;  mais 
liang-yu  le  renvoya  avec  ces  mots: 
«Dites  à  votre  maître, que  je  suis  son 
ennemi,  et  qu'il  me  trouvera  partout 
sur  son  chemin,  avec  une  armée  de 
quatre  cent  mille  hommes.  »  Lieou- 
pang  prit  le  parti  de  se  rendre  lui- 
même  au  camp  de  Hiang-yu ,  pour 
lui  faire  des  propositions  de  paix; 
mais  voyant  que  sa  vie  éUiit. mena- 
cée, il  regagna  Pa-chang  pendant  U 
nuit.  Hiang-yu  furieux  d'avoir  laisse 
échapper  cette  occasion  de  faire  pé- 
rir le  seul  concurrent  qu'il  eût  à  re- 
douter, livra  au  pillage  la  ville  de 
Hien-yang,  capitale  du  pays,  et  en 
lit  massacrer  tous  les  habitants.  Il 
3o- 


468  LIE 

partagea  ensuite  l'empire  à  ses  lieu- 
tenants; mais  il  n'osa  pas  exclure 
du  partage  Lieou-pang  ,  et  il  con- 
sentit   à  lui  laisser   les   provinces 
dont  il  e'tait  en  possession ,  sous  le 
titre  de  royaume  de    Han.  Lieou 
pang  ,  quoique  mécontent  d'un  par- 
tage fait  sans  qu'il  eût  e'te'  consulte', 
accepta  les  conditions  de  Hiang-yu, 
par    le    conseil  de   Siao-ho,  qu'il 
nomma  son  premier  ministre.  Ce  fut 
ce  sage  conseiller  qui  retint  à  son 
service  Han-sin,  officier  d'un  rare 
me'rite ,  dont  Lieou-pang  avait  mé- 
connu les  talents,  et  qui  contribua 
plus  que  personne  à  lui  assurer  l'em- 
pire. Cependant  la  sagesse  de  Lieou- 
pang  continuait  à  lui  gagner  l'affec- 
tion des  peuples  :  il  lui  avait  suffi 
de  se  présenter  en  armes  sur  leurs 
frontières ,  pour  obliger  les  princes 
voisins  à  se  reconnaître  ses  tributai- 
res jet  d'autres  plus  éloignes ,  d'après 
sa  réputation,  lui    avaient   envoyé 
offrir  leurs  états  et  leurs  personnes. 
Il  s'attachait  ses  officiers  par  sa  li- 
béralité j  et  il  maintenait  une  exacte 
discipline  dans  son  armée,  qui  pre- 
nait chaque  jour  un  nouvel  accrois- 
sement. Enfin  Lieou-pang  n'atten- 
dait plus  qu'une  occasion  favorable 
pour   attaquer   Hiang-yu  :   elle   ne 
tarda  pas  à  se  présenter.  Ce  général, 
après  avoir  cliassé  du  trône  l'empe- 
reur Y-ti ,  son  maître  ,  le  fît  assas- 
siner. Lieou-pang,  à  cette  nouvelle, 
fit  prendre  des  habits  de  deuil  à 
toute  sa  cour,  et  déclara  qu'il  ne 
poserait  pas  les  armes ,  avant  d'avoir 
puni  le  meurtrier  de  son  souverain. 
La  guerre  fut  longue  et  sanglante; 
tuais  elle  se  termina  enfin  par  la 
mort  de  Hiang-yu ,  qui  se  tua  lui- 
même    pour  échapper  à  son  rival 
(  l'an  101  avant  l'ère  chrétienne  ). 
Lieou-pang  fut  aussitôt  proclamé 
empereur*  Il  ordanna  des  obsèques 


LIE 

magnifiques  pour  Hiang-yu  ,  et  crr 
prince   son   père  ,   sous  le  titre  d 
Hiang-pé;  il  récompensa  magnifi 
quement  tous  ses  officiers, 'et  cl 
va  au  rang  de  princes  les  trois  ^ 
néraux  qui    lui    avaient   rendu   ! 
plus  de  services  dans  la  deniici 
guerre.  Il  accorda  une  amnistie  gt 
nérale  à  tous  ceux  qui  avaient  por 
les  armes  contre  lui ,  et  une  enliè 
remise  de  leurs  peines,  même  ai 
criminels  qui  avaient  mérité  la  moî 
voulant,  disait-il,  que  tout  le  raoïK 
participât  aux  avantages  que  la  pa 
devait    ramener.   Il  abandonna  ; 
peuple  tout  ce  qui  restait  dû  sur  l 
anciens  tributs,  exempta  les  ma 
chandises  de  tout  droit,  et  décla 
qu'il  ne  serait  levé  aucun  impo 
avant  que  les  laboureurs  fussent 
état  de  le  payer  sans  se  gêner.  T 
règne  commencé  sous  de  tels  aus] 
ces,  semblait  devoir  être  heurei 
mais  le  nouvel  empereur  était  d' 
caractère  violent  et  emporté:  ri 
ne  l'obligeant  plus  à  se  contraiud 
il  fit  périr  successivement  les  ti 
généraux  auxquels  il  devait  la  ce 
ronne ,  dans  la  crainte  qu'ils  ne  s( 
geassent  à  la  lui  ravir.  La  premi» 
victime  de  ses  injustes  soupçons 
le  brave  et   malheureux  Han- s 
Après  l'avoir  dépouillé  du  titre 
roi ,  et  retenu  quelque-temps  à 
cour  pour  éclairer  sa  conduite,  il 
fit  assassiner.  Pong-youci  éproi. 
bientôt  après  le  même  sort  ;  et  Ki 
pou ,  effrayé  de  la  mort  de  ses  d(  : 
amis  ,  leva  l'étendard  de  la  révo  . 
Vers  l'an  lào  (  av.  l'ère  chrét.  )  • 
Tartares  firent  une  irruption  d.  • 
l'empire;  Lieou-pang  marcha  au  - 
tôt  à  leur  rencontre ,  et  trompé  i 
une  ruse  de  Mété  leur  chef,  qui  a^  t 
mis  en  avant  des  vieillards  et   > 
soldats  infirmes  ou  estropiés ,  il  ;  - 
vaiîçait  avec  un  détaçheincut  de .  ^ 


av.mt-^r.irdc  contre  un  ennemi  ou'il 

prisable.  Mdi.s  investi  dans 

1^  |wr  deux  cent  raille  ca- 

'  s,  il  fut  obligt'  de  souscrire  aux 

liions  que  lui  imposa  le  prince 

1  e  ;  et ,  peu  Je  temps  après  ,  il 

.)nna  sa  fîllc  eu  mariage  pour 

inir  la  paix.  Lieou-pang,  cpidse' 

ligues,  était  convalescent, lors- 

jj>|)iit  la  révolte  de  Kiug-pou  : 

1  son  fils  aiuë,r  héritier  de 

de  marcher  contre  ce  re- 

;  mais  rimpéralrice   s'opposa 

i(  part  d'un  jeune  homme  sans 

rieuce ,  et  Lieou-pang,  cédant  à 

lisons,  se  mit  à  la  tête  de  son 

i*.   Il  livra  une  bataille   géné- 

i  King-pou  ;  et  ce  malheureux 

e , trahi  par  la  fortune,  fut  as- 

iié  par  un  de  ses  officiers,  qui 

ta  son  pardon  par  cette  lâche- 

in  i86  (  avant  l'ère  chrétienne). 

!-pang  avait  reçu  dans  la  mêlée 

i)lessure  qu'il  négligea  d'abord: 

ju'on  voulut  l'examiner,  il  n'é- 

j>lus  temps  ,  et  il  mourut,  l'an 

.  à  l'âge  de  cinquante  trois  ans. 

;  incc  n'avait  aucune  instruction; 

>  il  y  suppléait  par  une  grande 

ité  d'esprit  et  une  pénétration 

•  oraraune.  Quoique  d'un  naturel 
f't  affable,  il  commit  des  crimes 
>cs  emportements  et  ses  soup- 
.  Il  avait  ordonné  à  Siao-ho ,  de 

ii^er  un  code  de  lois  j  à  Han-sin , 

1 1  raité  de  lactique  ;  à  Tchang-tsang, 

'laité  de  musique,  et  à  Sun-tong, 

*  cucil  des  cérémonies  et  usages: 
I  ivres  enfermés  dans  une  cassette 

furent  déposés ,  par  ses  ordres, 

la  salle  des  ancêtres.  Le  titre  sous 

I  en  prince  est  compris  dans  la 

inpereurs  de  sa  dynastie  , 

I        (»u-kao-hoang-li ,   c'est  -  à- 

:  V  Empereur  élevé  ,  fondateur 

cl  race.  La  dynastie  des  Han  sub- 

-  jusqu'à  Tan  th.       W — s. 


LÎESGANIG  (  JostPa  ),  astro- 
nome ,  naquit  à  Gralz  en  Slirie  ,  le 
a4  jui"  1718.  Apres  avoir  termine 
ses  éludes  ,  il  entra  chez,  les  jésuites  » 
cl  fut  charge  de  l'enseignement  des 
mathématiques  dans  diftérenls  col- 
lèges. A  la  suppression  de  celte  so- 
ciclc,  ses  talents  le  firent  employer 
par  la  cour  d'Autriche.  Il  avait  fait, 
en  1765  ,  le  voyai^e  de  Venise,  pour 
voir  à  son  passage  dans  celle  ville , 
le  célèbre  LalanJc,  qui  admira  son 
esprit  et  son  zèle.  (  Histoire  de  l'as 
ironomie ,  pag.  8'26.  )  Liesganig  fut 
nommé  directeur  des  bâtiments  et 
de  la  navigation,  dans  la  province 
de  Gallicie;  et  il  mourut  à  Lemberg, 
le  4  mars  1 799.  On  a  de  lui  :  Dimen- 
sio  graduum  meridiani  F'iennensis 
et  Ilungarici,  Vienne,  1770,  in-4**. 
Cet  ouvrage  contient  les  détails  dt 
la  mesure  d'un  degré  du  méridien , 
qu'il  avait  exécutée  sur  les  froiilières 
de  la  Hongrie  et  de  l'Autriche  (1). 
Le  P.  Liesganig  avait  déjà  rendu 
compte  de  sa  méthode,  dans  un  raé- 
moiie  dont  le  Journal  des  savants ^ 
année  1 767 ,  a  donné  l'analyse.  Le 
baron  de  Zach  a  publié  les  Obser* 
valions  faites  à  Vienne ,  par  Liesga- 
nig, depuis  1755  jusqu'en  1774» 
dans  son  Journal  d'astrouomie,  ann. 
1801.  On  doit  encore  à  ce  savant 
religieux  une  bonne  Carte  de  la  Gal- 
licie orientale.  W-s 

IJEUTAUD  (  Jacques  )  astro- 
nome ,  né  à  Arles  ,  vers  i6(5o  ,  était 
fils  d'un  armurier;  il  vint  à  Paris,  où 
il  enseigna  les  mathcmali(jues  avec 
succès.  Lors  du  renouvellement  de  l'a- 
cadémie des  sciences  en  i6<)*),  il  fut 
adjoint  à  la  classe  d'astronomie ,  et 

(1)  L«  P.  LiatKaaif  «sécuU  4«ax  meiiir<:t  •!■• 
m^riilien  ,  l'un*  en  Hoogtic,  ilppiii*  U  lâ^ui  i  • 
K.  4j»  S-'i  il  trouTB  U  Secré  Am  S6,8*4, ,  I  .u... 
ro  Atiiricha  ,  p«r  48*  4^'  ,  «t  •«  tlrgir  ,  • 
:»;.o86  (aiMS,  t'élMgavpaM  4m   Ia   mvii  c  ti.i* 

•  M    Fl|IM««. 


470  LIE 

charge  de  la  rc'dactiondek  Connais- 
sance des  temps,  ouvrage  utile, dont 
il  a  publié  de  1708  à  17 '-^Q,  27  vol. 
in- ri.  Il  succc'da,  pour  la  rédaction 
des  Ephémérides ,  «i  Lahirc  le  fds  , 
et  en  donna  huit  années,  de  1704  à 
i7ii,in-4**.  Il  avait  pour  coopé- 
rateurs  dans  ce  travail  ,  Desplaces  , 
Bomie  ,  et  Cbarles  Desforges ,  vi- 
caire de  la  paroisse  de  Saint-Ger- 
rais ,  mort  en  17 14  >  q"i  prenait  le 
nom  de  Beaulicu  ,  connu  par  des 
calculs  du  même  genre.  (  Voyez  la 
JBibliogr.  astronomique  de  Lalandc , 
page  349.  )  Lieutaud  ,  parvenu  à  un 
âge  avancé,  et  ne  pouvant  plus  con- 
tinuer ses  observations ,  demanda  la 
véterance.  Il  mourut  à  Paris,  en  1 733. 
On  a  remarqué  que  FontcncUe  s'est 
dispensé  de  prononcer  son  Eloge  à 
l'académip.  W-s. 

LIEUTAUD  (  Joseph  ) ,  né  à  Aix 
en  Provence,  en  1703,  était  le  plus 
jeune  de  douze  frères.  Formé  par  les 
conseils  de  son  oncle  Garidcl,  cé- 
lèbre botaniste,  il  étudia  la  méde- 
cine à  Montpellier  ,  et  se  fit  une  ré- 
putation en  province ,  avant  de  se 
produire  dans  la  capitale.  Appelé  à 
Versailles,  en  i']^Ç)y]}0\^ry  remplir 
la  place  de  médecin  de  l'infirmerie 
royale ,  il  fut  reçu  à  l'académie  des 
sciences,  en  \']5'i.  Ayant  été  nommé 
médecin  des  enfants  de  France  en 
1 755 ,  il  devint  premier  médecin  du 
roi^  à  l'avènement  de  Louis  XVI. 
Gît  habile  praticien  mourut  à  Ver- 
sailles, le  G  décembre  1 780.  Des  con- 
frères rassemblés  autour  de  son  lit , 
lui  proposaient  dilFérents  remèdes... 
^h  !  leur  dit-il  ,  je  mourrai  bien 
sans  tout  cela.  Cependant  le  mou- 
rant croyait  à  la  médecine  j  mais  il 
ne  pensait  pas  qu'elle  pût  faire  des 
miracles:  sage  et  prudent,  il  ne  se 
passionnait  pour  aucun  système  ;  et 
Quoique   sou  coup-d'œil  fût  aussi 


LIE 

pénélranl  que  juste,  il  savait  atten- 
dre, et  disait  souy eut  :J\'atur a  mer- 
borum   medicatrix.  Plus  attaché  , 
l'observationde  la  nature  qu'à  l'étude 
des  livres ,  il  n'aimait  pas  à  cher- 
cher dans  les  ouvrages  des  autres  cj 
que  la  pratique  pouvait  lui  apprcn 
are.  Le  nombre  des  corps  qu'il  avai 
disséqués  avant  l'âge  de  quarante  an 
était  si  grand,  que  dans  une  critiqu 
de  son  Exposition   anatomique ,  01 
calcule  que   ce  nombre  exigeait  à 
peu-près  cent   quatre   ans   de   dis- 
sections.   On    ignorait  sans   doute_ 
dit    l'Histoire   de  l'académie  , 
le    secret  de   ne  point    perdre 
temps  ,  est  plus  que  le  secret  de 
doubler.  Lieutaud  trouva  des  ai 
zélés  dans  ceux-mêmes  dont  il  ni 
dopta  pas  les  idées ,  ou  même  d( 
il  critiqua  les  opinions ,  tels  que 
nac  et  Winslow  j  et  c'est  une  preuj 
que  la  bonté  de  son  caractère  égali 
ses  luniicres.On  a  de  lui  :  I.  ElemenU 
physiologiœ ,  1749?  in-8".  L'autein 
y  a  recueilli  les  expériences  et  le; 
observations  nouvelles  des    physi 
ciens  et  des  anatomistes  les  plus  h 
biles.   II.  Anatomie  lùstorique  < 
pratique^  Paris,   1750,  in-8'\  1 
meilleure  édition  est  celle  qui  rcii 
ferme  les  notes  et  les  observations  de 
M.  Portai ,  Paris  ,  1776/2  volumAi 
in-8".  Wl.Synopsis  universœpiax^jX 
medicœ,  1765  et  1770,9.  vol.  in-4" 
Cet    ouvrage  est  remarquable   par 
l'exactitude  ,  l'ordre   et  la   clarté. 

IV.  Précis  de  la  matière  médicale, 
1770,  1781  ,  li  vol.  in-S»^.  C'est  une 
ttaduction  du  second  vol.  de  la  Sj>- 
Tiopsis:  elle  peut  suilire  aux  médecii 
qui  veulent  se  borner  à  des  idées  su( 
cinctes,  mais  claires  et  justes ,  sur  1rs 
vertus  et  les  doses  des  médicamcnis. 

V.  Précis  de  la  médecine  prali(fue , 
1776,  2  vol.  in-S**.  Cet  abrégé, 
justement  critiqué  par  Gillen,  cou- 


ME 

ient  rhistoirc  des  maladies  ,  dans 

m  ordre  lire  de  leur    sirçc.    Ce 

.'^t  .'lire  qu'une    traduction  du 

le  la  Sxrwpsis.  VI.  ffisto- 

rùco-medicayPàriSy  1767, 

So.  Yll.  Un  grand  nom 

issertations  séparées  ,  im- 

i   Aix;  cl  des  Mémoires  ^ 

'  '  l'acad,  Ai 

_%parV; 

ires  de  la  société  de 

79,Hist.  p.  94),  el 

•rcet  (  Acad.  des  sciences, 

t.  p.46.  )  D-V-L. 

N  (  Jein-Heî»ri  comte 

.  y.  ..eral  et  sénateur  suédois, 

it  en  Livonie ,  en  1670,  lorsque 

province  faisait  partie  du  ler- 

:  e  suédois  ;  il  entra  très-jeune 

'       trrière  militaire,  et  s'étant 

u  fortune  de  Charles  XII, 

m    1700  à  la  bataille  de 

passa  ensuite  avec  l'armée 

• ,  où  il  eut  part  à  plusieurs 

iporlantcs.  Le  roi  aimait 

^a  société ,  et  se  plaisait  à 

1    avec  lui  en  bas  allemand 

ploLt  deulsch),  dialecte  prêtant 

1  un  çenre  de  plaisanterie  qui  ne 

d'ailleurs  guère  avoir  lieu  en- 

;i  souverain  et  un  sujet.  Lors 

rès  la  malheureuse  bataille  de 

wa  ,  le  conseil    de    régence, 

nt  le  royaume  menace  de  tout 

eut  engagé  la  princesse  Ulrique, 

Ju  roi,  a  prendre  part  au  gou- 

lenl,  et  que  les  états  eurent  été 

lés,  Lieven  ,  qui  se  îro:n  lit 

iolm,fut  envoyé  • 

rendre  compte  à  < 

prises  en  Suède.  Le  député 

de  sa  familiarité  3L\ec  le  mo- 

;,  pour  lui  faire  entendre  des 

assez  dures ,  et  que  nul  autre 

it  osé  mettre  en    avant.    II 

invraisemblable  qu'il  ait  dit 

,  que  si  sa  Majesté  ne  se  \\à- 


ME  ^-t 

tait  de  PPtOUrnrr  fî.iii<   <n«  rnvinm- 

il  pourrait  1 

ncr  un  suce*  ^. * , ,  ,  c-u  ,  „  , ...  t 

le  dessein  d'un  certain  parti  :  mais 
î'   •  '-'it  pas  croyable  que  le  roi  ait 
lu,  qu*il    enverrait  sa  botte 
présider  le  ^  '"      ' 

surc.el  In 

'■   li   ^  ..  -     .: 

lÀlle    anecdote  =. 

mise    sur   son    <  ;    , 

n'est  rapportée  que  par  Voltaire; 
el  l'on  voit  par  le  récit  que  fait  cet 
historien  de  ce  qui  se  passait  dans 
ce  moment,  qu'il  n'était  pas  bien 
instruit ,  et  que  la  mission  dont  le 
comte  Lieven  fut  charc  •- '  ■  était 
pas  connue.  Le  rési  A'  de 

cette  mission  fut,qucCn^i  ic- ,  ayant 
pris  de  l'humeur,  ordonna  de  dis- 
soudre l'assemblée  des  états,  et  n'ac- 
corda d'antre  prérogative  à  sa  «o^r 
que   (î  dans   le    - 

voix    "  .\e.     En     i  l 

Lieven  en  Suéde,  il  le  nomma  lieu- 
tenant-général,  et  lui  donna  la 
direction  de  l'amirauté  à  Carlscrona. 
Pendant  le  se'jour  que  bt  Charles , 
après  son  retour  dans  le  royaume , 
à  Lund  en  Scanie,  il  appela  Lieven 
auprès  de  lui,et  le  ût  loger  dans  une 
maison  voisine  de  celle  qu'il  occu- 
pait lui-même.  L'hôte  du  général , 
qui  savait  le  bas  allemand ,  et  qui 
était  une  es|)èce  de  bouffon  ,  fut  ad- 
mis à  parler  au  roi,  et  V  t 
tîr  lui  dire  en  plaisantant 

qu'on  était  bien  aiM?  de  lui 
onnaltre.  l^e  roi  ne  s'offensa 
point  des  propos  du  bourgeois  de 
Lund,  el  conserva  sa  faveur  a  Lie- 
ven. Les  aÛ'aires  de  Suède  ayant  en- 
tièrement changé  de  face  après  la 
mort  de  Charles  XII ,  Lieven  entra 
(\        1  .    »|   mourut  en  1733: 

>.  encore  en  Li^onic. 


472  LIE 

(  V,  Lagerbring  ,  Abrégé  de  Vhist. 
de  Suède,  tora.  2,  p.  70;  Gezelius? 
Dict.  des  hommes  illustres  de  Suè- 
de,  art.  LiEVENy  etc.  )         G- au. 

LIEVENS  ou  LIVENS  ou  LY- 
VYNS  (  Jean  ),  peintre  et  graveur, 
né  à  Leyde,en  lôon  ,  fut  successive- 
ment élève  de  George  Van  Scliooten 
et  de  Pierre  Lustman  :  à  douze  ans , 
il  copia  si  parfaitement  deux  ta- 
bleaux de  Corn.  Van  Harlem,  re- 
présentant Heraclite  et  Démocrite , 
qu'on  eut  de  la  peine  à  distinguer  les 
copies   des   originaux.   A  l'âge   de 
20  ans,  il  fît  un  tableau  de   gran- 
deur naturelle ,  représentant  un  Eco- 
lier qui  lit  a  la  clarté  d'un  feu 
de  tourbes.  Ce  tableau  fut  admiré. 
Le  prince  d'Orange  l'acheta ,  et  en 
fit  don  à   l'ambassadeur  d'Angle- 
terre ,  qui  le  présenta  au  Roi.  Lievens 
ayant  appris  le  cas  qu'on  faisait  de 
ses  talents  en  Angleterre ,  s'y  rendit 
vers  l'année  i63o,  et  ,'y  fut  chargé 
de  peindre  toute  la  famille  royale. 
A  son  retour  sur  le  continent,  il  s'é- 
tablit à  Anvers ,  oi^i  il  épousa  la  fille 
de  Michel  Collins,  habile  sculpteur. 
Alors  il  s'adonna  entièrement   au 
genre  historique  j  composa  un  nom- 
bre considérable  de  grands  tableaux, 
et  réussit  également  dans  le  portrait. 
Parmi  les  tableaux  de  ce  dernier 
genre  qu'on  lui  doit,  on  cite  ceux  de 
Mujteret  de  Troinp,  qu'il  avait  faits 
pour  la  maison  de  ville  d'Amster- 
dam. On  voit  dans  le  Musée  du  Lou- 
vre ,  un  tableau  de  Lievens ,  repré- 
sentant la  Visitation  de  la  Vierge, 
qui  est  un  des  plus  précieux  mor- 
ceaux de  cette  belle  collection.  Ce 
Musée    possédait  encore  du  même 
maître  une  Tête  de  Vieillard  à  lon- 
gue barbe;  le  Sacrifice  d'Abraham^ 
tableau  vraiment  admirable,  d'un 
eifet  et  d'une  vérité  magiques ,  qui , 
ainsi  que  le  précédent,  avait  été  tiré 


LIE 

de  la  galerie  de  Brunswick  ;  et  un< 
autre  Tête  de  Vieillard  portant  ut 
longue  barbe, une  toque  noire,  eti 
mains  appuyées  sur  un  bâton  :  c|| 
dernier  provenait  du  Piémont.  Toi 
trois  ontété  repris  en  t  8 1 5.  Tl  y  ava 
dans  la  galerie  de  Saint-Cloud,  ui 
seconde  Visitation  de  Lievens ,  qui, 
été  volée  à  la  même  époque.  Lievej 
ne  s'est  pas  moins  distingué  dans 
gravure  au  burin,  et  dans  celle 
l'eau-forte ,  où  il  s'est  montré  le  di^ 
émule  de  Rembrandt ,  son  contei 
porain.  Sa  manière  de  graver  obtiei 
par  des  procédés  différents  que  cen 
de  ce  maître,  des  effets  égaleme 
pittoresques  ;  il  sait  ménager  ave?' 
tant  d'habileté  le  clair-obscur,  qu'il 
en  résulte  toujours  TefFet  le  plus  pi- 
quant. Lievens  dessine  plus  correc 
tement  que  Rembrandt ,  mais  ce  der- 
nier a  une  manière  de  graver  qui  a 
plus  de  couleur.  Les  hachures  de 
Lievens  sont  ordinairement  si  ser- 
rées ,  quel'eau-forte  en  confond  quel- 
quefois les  traits,  comme  on  peut 
le  remarquer  dans  les  devants  de  sa 
gravure  représentant  la  Résurrec- 
tion du  Lazare.  Il  ne  paraît  pas 
s'être  jamais  servi  de  la  pointe  sèche;] 
mais  il  faisait  un  fréquent  usage  duj 
burin  ,  pour  donner  plus  de  force  àj 
ses  gravures.  C'est  avec  le  burin  qu'il! 
a  entièrement  retouché  sa  planche  | 
de  Saint -Jérôme  y   nu.,  assis  dans\ 
une  grotte,  dont  on  connaît  trois | 
épreuves  ,  qui  diffèrent  entre  elles,! 
soit  par  la  grandeur  ,  soit  par  les  re-i 
touches.  Deux  de  ses  plus  belles  piè-| 
ces  ,  les  Portraits  de  Daniel  Hein- 
sius,elàe  Jacques  Goûter,  musi- 
cien anglais,  sont  presque  entière- 
ment gravées  au  burin.  La  manière 
dont  elles  sont  exécutées  est  pleine 
d'effet ,  et  parfaitement  dans  le  goût 
de  l'eau-forte.  M.  Adam  BarLsch,  à 
la  îiu  de  son  Catalogue  raisonné  de 


l  OEuiTc  de  Rembrandt  f  a  donni^ 
lai  ilr  l'œuvre  de  Licvcns.  Il  porte 
iioiiil»re  fl(\s  pièces  à  GG  ,  iloiit  G 
ut  douteuses.  P — s. 

lilGARIO  (PiETRo),  peintre  iu- 
ti.uaquità  Sondrio,  dans  la  Valte- 
c,  en  iGvSG,  de  ranriennc  famille 
Li^ario  ,  ainsi  appelée  d'un  vil- 
j,e  voisin  qui  porte  ce  nom.  Comme 
(iiOMlrait  un  génie  vif  et  du  goût 
nr  les  beaux-arts  ,  il  fut  envoyé  à 
'>uie,  dans  sa  première  jeunesse, 
ur  étudier  sous  Laxaro  Baldi  :  il 
acquit  cette  exactitude  de  dessin 
iiii  caracteVise  l'e'cole  de  Rome.  Dc- 
l.(  il  se  rendit  à  Venise ,  où  il  passa 
(juelquc  temps  à  apprendre,  sous  les 
maîtres  de  cette  école ,  l'art  de  pra- 
ti(iuer  le  coloris  ,  par  lequel  ils  sont 
principalement  distingués.  Il  se  fit 
connaître   d'abord   à  Milan  ,  où  il 
trouva  quelque  encouragement,  et  re- 
tourna ,  en  1 727  ,  dans  la  Valteline  , 
jusqu'à  ce  que  le  comte  de  Sabs  , 
envoyé  de  la  Grande-Bretagne  vers 
l'T  république  des  Grisons  ,  l'honora 
sa  protection.  Sa  réputation  s'é- 
iidant  de  jour  en  jour  ,    tout  le 
onde  voulait  avoir  de  ses  tableaux  ; 
1  fis ,  comme  il  fut  toujours  pauvre, 
<   nécessité  l'empêcha  souvent  de 
)nner  à  ses  ouvrages  le  degré  de 
rfection  dont  ils  étaient  suscepti- 
cs.  Apeincy  a-t-il  dans  la  Valteline 
le  seule  église  où  il  ne  s'en  trouve 
1  moins  un.  Ses  chefs-d'œuvre  sont 
Martjre  de  St.  Grégoire,  que  l'on 
^  oit  dans  une  des  églises  de  Sondrio, 
*  t  un  Saint  Benoit  dans  la  chapelle 
un  couvent  près  de  la  ville.  Quel- 
les jours  après  avoir  fini  son  Saint 
■l'noii ,  il  fut  saisi  d'un  fièvre  vio- 


LIO 


473 


uute,  et  mourut  en  itS'a. 


Z. 


LIGAIUUS  (QuiNTUs),  lieute- 
int  de  Gains  Cousidius,  proconsul 

Vfrique ,  s'était  rendu  si  agréable 
ix    habitants  de  cette  province^ 


qirà  leur  sollicitation ,  Connidius 
lui  en  confia  le  gouvernement ,  lors- 
qu'il revint  à  Uome  solliciter  le 
consulat.  La  guerre  ayant  ëclal<$ 
quelque  temps  après  entre  César  cl 
Pompée,  Ligarius  refusa  de  prendre 
aucun  parti  j  mais  l'arrivée  de  P.  At- 
tiusVarus, nomme  préleurd'Afriquc, 
Tempècha  de  suivre  le  dessein  qu'il 
avait  de  repasser  en  Italie  :  il  se 
trouva  donc  engagé  malgré  lui  dans 
le  parti  de  Pompée  ;  mais  il  le  servit 
ensuite  avec  beaucoup  de  zèle  ,  et  il 
fut  un  de  ceux  qui  renouvelèrent  la 
guerre  en  Afrique  pour  la  cause  que 
Pompée  avait  soutenue.  Après  la 
bataille  de  Thapsus  où  César  acheva 
d'anéantir  le  parti  républicain  ,  Li- 
garius obtint  la  vie  de  la  clémence 
du  vainqueur;  mais  il  lui  fut  défendu 
de  rentrer  en  Italie.  Cependant  ses 
deux  frères  et  ses  amis  faisaient  des 
démarches  pour  obtenir  son  rappel, 
lorsque  Q.  TiJjeron  ,  appuyé  de  G. 
Pansa  j  se  porta  publiquement  Tac* 
cusateur  de  Ligarius.  L'examen  de 
sa  conduite  fut  renvoyé  a  un  tribunal 
présidé  par  César  lui-même;  et  ce  fut 
dans  cette  circonstance  que  Cicéron 
prononça  cet  admirable  Discours 
pour  Ligarius j  dont  le  dictateur  fut 
tellement  ému  que  toutes  ses  réso- 
lutions s'évanouirent  ,  et  qu'il  par- 
donna à  Ligarius.  Celui-ci  n'en  resta 
pas  moins  l'eunerai  de  César  :  il 
entra  dans  la  conjuration  de  Brutus 
etdeCassius  contre  lui; mais  comme 
il  était  retenu  dans  son  lit  par  une 
maladie  lors  de  l'assassinat  an  dicta- 
teur, il  paraît  qu'il  n'y  eut  aucune 
part ,  et  qu'il  ne  survécut  pas  long- 
temps à  ce  grand  événement  (f^ox- 
PïuUrqxw^yiedeBrutus.)  W-s. 

LIGER  (  Louis  ) ,  agronome ,  né 
à  Auxcrre,cn  i658,  et  mortàGuer- 
chi ,  près  de  cette  ville  en  1 7  1 7  ,  a 
publié  un  grand  nombre  d'ouvrages 


4:4 


LIG 


miles ,  quoique  médiocres ,  sur  les 
différentes  parties  de  l'agriculture 
et  de  l'économie  domestique.  L'abbé 
Papillon  et  l'abbé  Lebeuf  en  ont 
donné  la  liste  (  Bibliothèque  de 
Bourgogne^  et  Histoire  d'Auxerre  ) 
qu'on  retrouve  encore  dans  le  grand 
Dictionn.  de  Morerij  on  se  conten- 
tera d'indiquer  ici  les  principaux  : 
I.  Economie  générale  de  la  cam- 
pagne  ,Vaiis^  1700,  2  vol.  in-4^. 
Liger  a  refondu  dans  cet  ouvrage 
la  Maison  rustique  de  Ch.  Estienne 
(  F.  Cil.  Estienne  et  J.  Liebault), 
en  y  ajoutant  beaucoup  d'articles  et 
de  réflexions.  La  Bretonnière  a  ra- 
jeuni à  son  tour  l'ouvrage  de  Liger  , 
Et  l'a  publié  sous  ce  titre  :  La  nouvelle 
Maison  lustique onl^cowovaiQ  géné- 
rale des  biens  delà  campagne,  7^^. 
cdit.  Paris,  1 7-55 ,  'i  vol.  in-4^. ,  dont 
il  s'est  fait  plusieurs  éditions ,  aug- 
mentées et  améliorées  :  celle  de  Pa- 
ris, 1 790,  est  la  onzième.  Enfin  M.  J. 
F.  Baslien  a  donné  la  JVoui>elle Mai^ 
son  rustique,  Paris  ,  1 798  -  i8o4 , 
3  vol.  in  4^  7  dans  laquelle  il  a  re- 
fondu entièrement  le  travail  de  Liger 
et  de  ses  continuateurs  :  de  tout 
cela  il  résulte  encore  aujourd'hui  un 
ouvrage  fort  incomplet ,  souvent 
inexact, et  bien  éloigné  d'être  au  ni- 
veau des  découvertes  qui  ont  été  faites 
dans  cette  scien-e  importante.  IL 
Dictionnaire  général  des  termes  pro- 
pres à  V agriculture,  avec  leurs  difi- 
nitions  et  étymologies,  ibid.,  1708, 
in-i'2.  IIL  Le  jardinier  Jleuriste  et 
historiographe ,  Paris,  1703,  in- 12  j 
réimprimé  plusieurs  fois.  IV.  Le 
jardinier  Jleuriste  y  ou  Culture  univer- 
selle des  fleurs  ,  arbres  ,  arbustes  et 
arbrisseaux  servant  à  l'embellisse- 
ment des  jardins,  ibid.,  1704,  in- 12. 
Cet  ouvrage  qui  a  eu  beaucoup  de 
succès,  est  oublié  depuis  long-temps. 
V.  La  culture  parfaite  des  jardins 


LIG 

fruitiers  et  potagers,  avec  un  traité 
facile  pour  apprendre  à  élever  des 
figuiers,  in-i2j  souvent  réimprimé. 
VI.  Mojens  faciles  pour  rétablir 
en  peu  de  temps  l'abondance  de 
toutes  sortes  de  grains  et  de  fruits 
dans  le  royaume  et  de  Vy  maintenir 
toujours  ,  par  le  secours  de  l'agri- 
culture ,^ains  ,  j'jog  y  i-i2.  VIL 
Les  amusements  de  la  campagne 
ou  Nouvelles  ruses  innocentes  qui 
enseignent  la  manière  de  prendre 
aux  pièges  toutes  sortes  d'oiseaux  , 
quadrupèdes ,  etc.  Paris  ,  1709  ,  '2 
vol.  in-i2,  fîg.  ;  augmenté  d'un  cin- 
quième livre,  ibid. ,  1734  ,  i74<^  > 
1753,  '2  vol.  in-i2,  fig.  VIII.  La 
connaissance  parfaite  des  chevaux , 
suivie  de  Mémoires  inédits  de  Del- 
campes  sur  la  même  matière  ,  Paris , 
17 12,  in- 12.  IX.  Nouveau  théâtre 
d'agriculture  et  ménage  des  champs, 
Paris ,  1 7 1 2  ,  in-8**.  ;  1713,2  vol. 
in-12;  1721  ,  in-4*'.  Liger  y  a  re- 
fondu les  préceptes  qu'il  avait  don- 
nés dans  ses  ouvrages  précédents  :  il 
y  a,  de  plus,  ajouté  un  traité  de  la 
pêche;  et  un  de  la  chasse,  tiré  de 
la  fauconnerie  de  Du  Fouilloux  et 
de  Morais.  X.  Dictionnaire  pra- 
tique du  bon  ménager  de  cam- 
pagne et  de  ville,  Paris,  1715, 
2  vol.  in-4^.  La  Chesnaye  Uesbois 
en  a  donné  une  édition  considérable- 
ment augmentée  sous  le  litre  de  Dic- 
tionnaire universel  d'agriculture  et 
de  jardinage ,  etc.  Paris  ,  i75i  , 
2  vol.  in-4".  On  a  remarqué  que  le 
titre  d'universel  ne  convient  nulle- 
ment à  ce  dictionnaire ,  puisque  l'on 
y  chercherait  en  vain  beaucoup 
d'articles  essentiels.  (  Voy.  la  Biblio- 
graphie agronomique,  n*'.454.)  Les 
ouvrages  de  Liger  ne  peuvent  plus 
servir  qu'à  faire  connaître  l'état  de 
la  culture  en  France  au  commence- 
ment du    dix  -  huitième  siècle.  — 


I 


I 


Lîf. 

fharlr^  Louis  Licer  ,  RK^dccin  ,  de 
f<irnillc  ,  ne  à  Aiixrrre  vers 
.  ^  t  SCS  éluder  à  runiversilë  de 

;Paris,  «  t  y  reçut  le  doctorat  en  1 74'i. 
TJ  obtint ,  peu  après,  le  litre  houori- 
,(•  de  médecin  du  roi ,  cl  se  retira 
!s  sa  patrie,  où  l'on   croit  qu'il 
iirul  vers  17G0,  dans  un  âge  peu 
ncc.  On  â  de  lui  :  Traité  de  la 
ilte  ,   dans  lequel  ,  après  avoir 
connaître  le  caractère  propre  et 
vraies  causes  de  cette  maladie , 
il  inditpie   les  moyens  de  lu  bien 
traiter  et  de  la  guérir raMcalement. 
is,   1753,  iu-r2,  de  387  pag. 
yr  pense  que  la  véritable  cause  de 
.'  maladie  est  l'usage  immodéré' 
boissons  et  des  aliments  qui  con- 
iieut  beaucoup  de  parties  de  mu- 
-e.  Quant  aux  moyens  curalifs ,  il 
dique  que  l'emploi  à  petites  doses 
au  savon  médicinal ,  dont  on  trouve 
'  la  romposiîiojj  dans  le    Traité  de 
niie  de  r3oerhaave.  W-s. 

iJGHTFOOT  (  Jean  ),  célèbre 
litbraisant,  ne  à  Stoke,  dans  le  comte' 
dcStafford,  en  1602,  fit  ses  premiè- 
,  res  éludes  à  Morton-Green ,  et  passa, 
en  161 7,  à  Gimbridge,  au  collège 
de  Christ.  Dès  qu'il  eut  pris  le  degré 
de  bachelier,  il  devint  collaborateur 
de  Whilchcad  son  premier  maître, 
qui  tenait  l'école  de  Rapton,  dans 
le  comté  de  Derby  ,  et  il  y  enseigna 
pendant  deux  ans  ,  la  langue  grec- 
que. Au  bout  de  ce  temps ,  il  rc 
çut  les  ordres  sacres ,  et  fut  placé 
à  Norton.  Le  chevalier  Rolland  Got- 
Ion,  qui  demeurait  dans  les  envi- 
rons, le  prit  en  amitié,  et  se  l'attacha 
en  qu.iiité  de  chapelain.  Ce  fut  par 
les  conseils  et  sous  la  direction  de 
>  ce  lurd  ,qiie  Lighifoot  se  mil  à  l'clu- 
,  de  de  l'hébreu  ,  qu'il  apprit  à  fond. 
En  ir)>,(i,il  accepta  la  cure  de  Stone: 
deux  6u  trois  ans  après, Rolland  Cot- 
ton  lui  doima  une  meilleure  place  , 


MO  475 

tout  près  de  Londres;  et  fn  ifij  1 , 
il  obtint  dans  rrtte  ville  m^'uir  ta 
cure  de  Saint-Barthèlcmi.  Celait  le 
temps  où  se  réunissaient  à  Westmins- 
ter les  théologiens  de  redise  angli- 
cane, pour  réformer  les  anus  :  Lighi- 
foot fut  nommé  membre  de  celte  as- 
semblée, et  s'y  distingua  par  sa  noble 
franchise  et  par  son  eru(iition.  On  le 
vit  conslamment  s'oj)poser  aux  il- 
lusions fanatiques  de  quelques  pres- 
bytériens, et  les  combattre  avec  le» 
armes  du  savoir  et  de  la  raison.  Ku 
1G43,  il  devint  curé  de  Much-Muu- 
den  dans  le  Hcrtfordshire ,  docteur 
en  théologie  en  i(ija,  et  chanceUer 
de  l'université  de  Cambridge  m 
i655.  Il  mourut  à  Ëly,dont  il  était 
chanoine,  le  0  décembre  167.5.  H- 
a  laissé  sur  la  Bible ,  un  assez  grand 
nombred'ouvrages,  où  l'on  remarque 
des  connaissanccs^profondes,  surtout 
dans  le  talmud,  dans  les  écrits  des 
rabbins  ,  et  dans  les  usages  et  céré- 
monies hébraïques.  La  plupart  ont 
clé  d'abord  recueillis  eu  deux  volu' 
mesin-fol.  Rolteulam ,  1O8O.  Leus- 
den  en  donna  une  édition  plus  am- 
ple, en  1G99 ,  à  Utrecht.  Dans  ces 
diflercntes  éditions ,  les  ouvrages 
éciits  en  anglais  par  l'auleur,  ont 
été  traduits  eu  lalin.  Enfin  J.  Slrypc 
donna  une  collection  dequeiqucs  piè- 
ces inédites,  sous  ce  titre  :  Some  ge- 
jiidne  leinains  ofthelatepioiis  and 
leanied  dr,  John  Liglitjoot ,  1700, 
in-8°.  Celte  collection  renferme  des 
j)artiadarilés  fort  curieuses  sur  la  vie 
de  ce  docteur.  Ses  principaux  ou- 
vrages sont:  1.  Haunonia  ,  chro- 
nica  et  ordu  feteris  Teslamenti. 
II.  Paucœac  ri<  vellœ  ohscn'atioiws 
super  lihrum  CeneiCos.  111.  Mani- 
pulas s/ncilegiorum  è  lihro  JCjtifdi. 
\y .Krabhim,si%'e  Miscellanea  chris- 
tiana  et  judaica.\ .  flarmonia  (fiui- 
tuor  Ei'an^clistantm  tàm  interse, 


476  LîG 

tîim  cum  Veteri  Testamento  ,  en  v'5 
parties. VI.  Descriftio  templi  Hiero- 
soljmitani,  prœseriim  quale  erat 
tempore  Servaloris  nostri.  VII.  Mi- 
nisterium  templi  quale  erat  tem- 
pore Servatoris.  VIII.  Dissert atio 
in  articulum  symholi  apostolici  : 
Descendit  in  infernum.  IX.  Harmo- 
nia ,  chronica  et  orclo  Novi  Testa- 
mentij  quihus  subjungiîur  Disser- 
tatio  de  Hierosolymoriim  excidio  et 
sequente  Judaeorum  statu.  X.  Ilorœ 
liebrdicce  et  thalmudicœ  in  Evan- 
gelium  S,  Matthœi  ,  Cambridge  , 
i658,in-4^.  Quand  ce  livre  parut, 
quelques  moines  ignorants  le  prirent 
pour  le  bréviaire  donne  aux  carmes 
par  le  propliëte  Elie.  Liglitfoot  a 
iait  le  même  travail  sur  presque  tous 
les  livres  du  Nouveau  Testament. 
Ces  commentaires  sont  généralement 
estimés  des  protestants,  et  même  des 
catholiques ,  quoiqu'ils  y  aient  re- 
marqué de  grandes  préventions 
contre  la  doctrine  de  l'Eglise.  {Foj. 
Richard  Simon,  Hist.  des  comment, 
du  N.  T.  )  Lightfoot  a  eu  beaucoup 
de  part  à  quelques  entreprises  utiles, 
et  notamment  à  la  polyglotte  de 
Londres,  et  au  Lexicon  hepta^lot- 
ton  d'Edmond  Castel.  La  vie  de  ce 
docteur  se  trouve  à  la  tête  de  la  col- 
lection de  ses  œuvres  de  1686  et 
1689:  outre  Nicéron  et  Chauffepié, 
on  peut  consulter  les  Nouvelles  de  la 
rép.  des  Lettres ,  3iimée  1686  ,  mois 
d'avril ,  art.  iv.        L-b-e  et  W-s. 

LIGHTFOOT  (  Jean  ) ,  botaniste , 
né  en  1785  ,  dans  le  comté  de  Glo- 
cester ,  lit  ses  études  à  Oxford  ,  et 
s'étant  consacré  à  l'état  ecclésiasti- 
que ,  fut  nommé  chapelain  de  la  du- 
chesse de  Portland,  et  obtint  plu- 
sieurs bénéfices.  Il  consacra  beau- 
coup de  soins  à  l'arrangement  des 
magnifiques  collections  de  coquilles 
et  de  plantes  de  sa  bienfaitrice  j  mais 


LIG 

il  s'adonna  plus  spécialement  à  la 
botanique.  Fort  lié  avec  le  célèbre 
zoologiste  Pennant,  il  entreprit ,  en 
1772,  avec  lui,  un  voyage  dans  les 
Hébiides  ou  Hébrides  ,  dont  l'his- 
toire naturelle  n'était  encore  connue 
qu'imparfaitement  ;  et ,  pendant  que 
Pennant  y  faisait  de  nombreuses  ob- 
servations sur  le  règne  animal,  Light- 
foot y  recueillit  une  ample  moisson 
de  plantes.  C'est  surtout  de  ce  voyage 
et  de  ses  nombreuses  excursions  dans 
l'Ecosse ,  que  résulta  le  bel  ouvrage 
intitulé  Flora  Scotica,  qui  parut  e; 
1777,  à  Londres,  'i  vol.  in-8<» 
ornés  de  figures  :  les  66  première 
pages  sont  une  esquisse  de  Zoo 
logie  calédonienne  y  par  Pennant 
à  l'usage  des  naturalistes  qui  de 
sirent  connaître  les  animaux  du 
nord  de  l'Angleterre.  Cette  Flore  est 
rédigée  selon  le  système  de  Linné  : 
mais  on  n'y  trouve  point  de  synony- 
mie, excepté  pour  les  algues  et  un 
petit  nombre  d'autres  cryptogames. 
Il  est  vrai  que  Lightfoot  destinait 
son  ouvrage  principalement  à  ses 
compatriotes.  Aussi  ne  donne-t-il  en 
latin  que  la  phrase  botanique,  tan- 
dis que  la  description  est  en  anglais. 
Elle  est  en  général  fort  claire ,  et 
souvent  très-étendue.  L'auteur  y  a 
joint  les  noms  vulgaires  en  an- 
glais et  en  erse  j  et  il  ne  néglig( 
jamais  de  faire  mention  des  usagei 
indiqués  par  Linné  ,  Haller  ou  d'au- 
tres grands  botanistes,  et  de  ceux  au 
quels  la  plante  est  employée  par  les 
Ecossais  en  particulier.  La  Flore  d'E- 
cosse ne  peut  être  regardée  comme 
très-riche;  elle  ne  contient  pas  i3oo 
plantes,  dont  45*0  environ  appar- 
tiennent à  la  cryptogamie.  On  re- 
proche à  l'auteur  de  n'avoir  pas 
assez  souvent  indiqué  les  sources 
auxquelles  il  a  puisé  ,  et ,  ce  q-ii  est 
beaucoup  plus  grave,  d'avoir  rap- 


IS 


1 


1  "*, 

proche  (V^  synonymies  qui  ne  se  M]v 

»>'Mtpiit  point  au  nicme  objet.  C'est 

i  que  dans  la  cryptogamic  il  cite 

ir  une  seule  plante  des  synonymes 

Dilleu  et  de  Limic  qui  ne  con- 

lUUMilqu'àdeuxplanlesdiflrifrenles, 

;  ouvrage,  maigre  ses  défauts,  a 

fort  utile,  lors  de  sa  publication  , 

(Ut  encore  être  consulte  avec  fruit, 

lout  pour  les  algues  ,  et  les  genres 

lix  et  Carex.  Les  fimires  sont , 

;;e'ncral  ,   remarquables  par  leur 

!<  tilude  et  la  finesse  deTexécution. 

Jitfoot  mourut  à  Uxi)ridge,  en 

;S8:  il  était  de  la  socie'tc  royale,et 

lut  un  des  premiers  membres  de  la 

lociëté  liunéenne.  Son  riche  herbier 

fut  acheté  par  le  roi  d'Angleterre , 

qui  en  fit  présent  à  la  reine  :  confie 

au  bout  de  quelques  années  aux  soins 

d(^  sir  J.  Ed.  Smith,  il  a  etë  consulte' 

jvec  fruit  par  cet  auteur  et  pard'au- 

s    botanistes  ,    notamment    par 

odenough ,  qui  en  a  profite  pour 

*ou  excellente  dissertation  sur  les 

Carex  d'Angleterre  ,  insérée  dans  le 

deuxième  volume  des  Transactions 

de  la  société  Unnéenne.  Le  nom  de 

\;htfootia  a  été  donné  à  plusieurs 

iules  :  mais  ce  genre  ne  paraît  pas 

oir  été  établi ,  dans  aucun  cas  , 

«  une  manière  solide.         D — u. 

LIGNAG  (  Joseph  -  Adrien  le 
Large  de  )  ,  d'une  famille  noble  de 
Poitiers ,  passa  quelque  temps  chez 
les  jésuites ,  qu'il  quitta  pour  entrer 
dans  la  congrégation  de  l'Oratoire  , 
où  il  s'attacha  aux  principes  philo- 
sophiques de  Descartes  et  de  Male- 
branche.  Dans  un  voyage  qu'il  fit  à 
Rome, il  reçut  de  Benoit  XIV,  et  du 
cardinal  Passionei ,  un  accueil  distin- 
cué.  Il  mourutâ  Paris,  en  juin  i76'Jt. 
C'était  uo  homme  honnête  ,  aimable 
et  intéressant  dans  la  société.  Tous 
les  ouvrages  annoncent  un  craud 
xèle  pour  la  religion,  des  connausau- 


ces  yariécs,  cl  un  talent  peu  commun 
pour  traiter  les  sujets  de  inétapîivri 
quc.Nousavousdelui:I.Unex«rl|,  lit 
Mémoire  pour  servir  à  corn  m 
VfUstoire  des  araignées  aijunti 
i748,in-8«>.  ;  i7()f),  in-ia  (  puUj« 
par  Licutand  de  Trois  villes  ).    II. 
Lettres  à  un  .américain  stirVhistmre 
naturelle  de  M,  de  Bujfm  ,  Ham- 
bourg ,  1751  ,  itSG,  <>  vol.  in-ia. 
Elles  roulent  sur  les  principes  hvpo- 
théliqucsde  cet  auteur;  sur  sa  méta- 
physique ;  sur  la  configuration  et  la 
cause  du  mouvement  des  planètes  ; 
sur  la  constitution  animale  et  sur 
celle  de  la  terre;  sur  l'histoire  natu- 
relle de  l'homme,  et  la  manière  de 
traiter  l'histoire  naturelle  en  général; 
sur  la  description  du  cabinet  du  roi , 
par  d'Aubentou  ;  sur  les  observa- 
tions   de  BufTon  et  de  Needhara  ; 
enfin  ,  sur  la  métaphysique  de  ce 
dernier.   Ces   Lettres ,  écrites  avec 
beaucoup  d'imagination ,  d'un  style 
clair ,  et  où  les  matières  sont  bien 
discutées,  furent  assez  bien  accueil  lie» 
du  public.  III.  Eléments  de  méta- 
physique tirés  de  l'expérience.  Fa  ris, 
1753,  in- 19..  ly.  Possibilité  de  la 
présence  corporelle  de  V homme  en 
plusieurs  lieux ,  1 7  54 ,  in- 1 2  ;  contre 
Boullier    (   ministre  protestant    et 
auteur    d'un  Essai  sur  Vame  des 
bêtes  ) ,  qui  avait  fait  un  défi  à  l'au- 
teur dans  un  journal  hollandais.  Cet 
ouvrage  profond  a   pour  objet  de 
faire  voir  que  ,  si  la  raison  toute 
seule  peut  montrer  une  manière  sui- 
vant laquelle  le  mystère  de  la  pre'- 
sence  réelle  est  possible,  à  plus  forte 
raison   l'entendement  divin   doit-il 
avoir  dans  les  ressources  de  sa  sa- 
gesse et  de  sa  fécondité ,  une  infinité 
d'autres  moyens  pour  eftéctner  ce 
qui  ne  nous  parait  impossible ,  au 
premier  coup-d'œil,  que  par  de'- 
faut    de    couuaissauces    et   de   lu- 


47S  LÎG 

mières.  V.  Examen  sérieux  et  co- 
mique du  livre  De  V  Esprit ,  1759, 
SI  vol.  in-ri.  YI.  Le  Témoignage 
du  sens  intime  et  de  V expérience 
opposé  à  la  foi  profane  et  ridicule 
des  fatalistes  modernes,  1760,  3 
vol.  in- 1 2.  VII.  yivis  paternels  d'un 
militaire  à  son  (ils,  jésuite,  1760;, 
.in-i!2.  L'abbe  de  Lig-nac  laissa  en 
manuscrit  une  Analyse  des  sensa- 
tions; et  Ton  pre'tend  que  la  mort  a 
empêche'  cet  auteur  de  remplir  le 
plan  des  preuves  de  la  religion  trace' 
dans  les  pensées  de  Pascal.  T — d. 

LIGNE  (Charles-Joseph  prince 
de),  né  à  Bruxelles,  en  1 785,  d'une  fa- 
railledes Pays-Bas, dont  l'illustration 
remonte  au  quinzième  siècle  (  t  ) ,  et 
qui  depuis  ce  temps  n'a  pas  cesse  de 
se  distinguer  dans  les  armes ,  eut 
pour  père  et  pour  aieul  deux  feld- 
maréchaux  au  service  d'Autriche. 
Son  goût ,  autant  que  l'exemple  de 
ses  ancêtres ,  l'entraîna  dès  sa  plus 
tendre  jeunesse  dans  la  même  car- 
rière. Il  rapporte  qu'à  huit  ans  il 
avait  déjà  été  témoin  d'une  bataille, 
qu'il  s'était  trouvé  dans  une  ville  as- 
siégée ,  et  que ,  des  fenêtres  du  châ- 
teau de  Belœil,  il  avait  vu  trois 
sièges.  A  un  âge  encore  plus  tendre, 
les  vieux  dragons  du  régiment  de 
son  père, le  portant  sur  leurs  genoux, 
lui  avaient  raconté  les  campagnes  du 
prince  Eugène;  et  leurs  récits  ne 
s'effacèrent  jamais  de  sa  mémoire. 
A  quinze  ans  ,  il  était  convenu  avec 
un  capitaine  du  régiment  français 
de  Royal-Vaisseau,  en  garnison  à 
Condé,  que  si  la  guerre  éclatait,  il 
s'échapperait  delà  maison  paternelle 
et  s'enrôlerait  dans   sa   compagnie 


LIG 

sous  un  nom  supposé,  ne  voulant 
devoir  sa  fortune  qu'a  son  propre 
mérite;  et  dans  son  impatience  il 
répétait  sans  cesse  ce  vers  de  Vol- 
taire : 

Rose  et  Fabert  ont  ainsi  commencé. 

Enfin  on  lui  permit  d'entrer  au  ser- 
vice, en  1 75,*  :  il  obtint  un  drapeau 
dans  le  régiment  de  son  père,  et  le 
brevet  de  capitaine  au  bout  de  qua- 
tre ans.  Ce  fut  en  cette  qualité  qu'il  fit 
sa  première  campagne,  en  1 757.  Son 
enthousiasme  militaire  était  alors  au 
plus  haut  degré.  Il  se  distingua  dai 
plusieurs  occasions  ,  notamment 
Breslau  et  à  Leuthen ,  rù  il  prit  U 
commandement  de  son  bataillon,  ei 
l'absence  du  major,  quoiqu'il  fût 
plus  jeune  cajùtaine.  Il  se  trouva  ei 
1 768,  à  la  victoire  de  Hochkirchen, 
s'empara  d'un  poste  important ,  et 
reçut  pour  récompense  le  grade  de 
colonel  :  ce  fut  en  celte  qualité  que  le 
jeune  prince  de  Ligne  déploya  la  va- 
leur la  plus  brillante  dans  les  derniè- 
res campagnes  de  cette  guerre  de  sept 
ans,  dont  il  a  peint  les  principaux  évé- 
nements à  sa  manière  avec  des  cou- 
leurs toujours  piquantes  et  origina- 
les (  1  ). Devenu  général-major  à  l'épo- 
que du  couronnement  de  Joseph  II, 
il  inspira  une  grande  confiance  à  ce 
prince  aimable  et  spirituel  ;  et  il  eut 
l'honneur  de  l'accompagner  à  son 
entrevue  avec  Frédéric  II,  en  1770. 
On  trouve  dans  sa  Correspondance 
des  détails  très-curieux  sur  le  carac- 
tère des  deux  souverains  ,  et  sur  les 
différentes  circonstances  de  cette  en- 
trevue. L'année  suivante,  il  devint 
lieutenant  -  général  et  propriétaire 


(i)  ,Te;«n  de  Ligne  fut  reçu  cli«valier  de  la  Toi- 
son d'or  avec  flii lippe  d'Autriche  ,  en  1481.  Il 
était  chamLeUan  deCliarles,  duc  de  Bonrgo£»ne, 
seigneur  de  Barbfcnçon  ,  et  maréchal  difllai- 
naut.  Sa  famille  a  conservé  ces  dernicTS  titre» 
jusqu'à  l'époqu*  d«  la  tévolution. 


(l)  Le  courage  du  prince  de  Ligne  allait  ju»- 
qu'à  la  témérité;  c'est  ce  qui  fit  dire  un  jour  à 
Marie-Therése,  qui  lui  annonçait  «a  nomma- 
tion  à  un  nouveau  grade  :  «  En  prodiguant  votre 
«  vie  vous  ni'avez  lait  tuer  une  biigade  la  cara- 
»  pagne  dernièrej  n'allez  pas  ,  pendant  celle-et 
»  m'en  faire  tuer  deux.  Coiiiervez-vwu»  pour  l  e- 
»  tat  et  poui  moi.  n 


Mr. 

d'un  rrj;imfnt  d'infanlcrir.  Dans  la 
\  guerre  ilo  la  succession  de  Bavière  , 
I  en  177B,  il  commaiula  Tavaiil-gar- 
!  de  de  Laudon  ;  et  cette  campagne 
I  qiioitjirellc   n'ait  pas  ctc'  marquée 
par  de  grands  événements ,  ajouta 
t)eaucoup  à  sa  réputation  militaire  : 
:  mais    la    pai\   qui  devint    ensuite 
!  presque  générale ,   ne  lui   pcrmct- 
î   plus  de  se  livrer  à  son  hu- 
ir  guerrière,  il  tourna  d'un  au- 
tre côté  l'activité  de  son  esprit ,  et 
'  Vrrfcclionna  ses  études  parlalcclu- 
ct  par  des  voyages  en  Italie,  en 
nsc,  et  surtout  en  France.  Son 
ictère  aimable  et  chevaleresque 
venait  parfaitement  aux  mœurs 
c  dernier  pays;  et  il  eut  de  grands 
es  à  Versailles,  où  il  avait  déjà 
i  avec   beaucoup    d'éclat ,    en 
i<)  ,  lorsqu'il  y  fut  envoyé  pour 
(  part  à  Louis  XV  de  la  victoire 
de  Maxeu.  Dans  ce  dernier  voyage, 
■  la  reine  Marie- Antoinette  l'accueillit 
■■r  beaucoup  de  bonté;  et,  dans 
rieurs    passages    de   ses  écrits , 
il  a  rendu  nommage,  de  la  manière 
la  plus    louchante  aux  vertus   de 
cette  princesse.  Ce  fut  à  cette  cour  qu'il 
connut  la  marquise  de  Coigny,  l'une 
femmes  les  plus  spirituelles  de 
t  mps-là  ;  et  il  lui  adressa  ensuite , 
rives  du  Borysthène ,  des  lettres 
forment  une  des  parties  les  plus 
arquables  de  la  Correspondance 
j) limée  dans   ses  OEuvres.  On  y 
iive  a  chaque  ligne  l'expression 
du  regret  qu'il    éprouve   de  vivre 
loin  des  Français;  et  lorsque  les  pre- 
mières nouvelles  de  leurs  désordres 
politiques  lui  parviennent,  il  s'en 
afflige  sincèrement ,  et  redoute  pour 
eux  des  malheurs  plus  grands,  avec 
une  prévoyance  que  l'avenir  n'a  que 
trop  justifiée.  Le  prince  de  Ligne 
était  alors  chargé  d'une  mission  im- 
portante en  Russie.  Dès  l'aimée  1 78a , 


LÎG  479 

il  avait  <^té  envoyé  auprès  de  Cathe- 
rine; cl  le»  grâces  d<-  •^<.i>  '-^Lrii  .... 
tant  (lue  sa  belle  et  1 
mie,  lui  avaientfail  *..  ,,  ,1,.  ,,,  -.  ^u,  - 
ces  de  plus  d'un  genre  auprès  de 
celte  souveraine.  ?'lle  le  nomma 
feld-maréchal ,  lui  donna  une  terre 
en  Kriméc,  et  lui  permit  de  l'ac- 
compagner ,  lorsqu'elle  se  rendit 
dans  celle  contrée  avec  Joseph  II 
(  Fojez  Catueriwe  ).  La  descrip- 
tion de  ce  fameux  voyage,  qu'il  a 
consignée  dans  sa  Correspondan- 
ce ,  les  portraits  qu'il  y  a  tracés  des 
grands  personnages  qu'il  vit  alors 
de  si  près, sont  d'une  originalité  aus- 
si ingénieuse  que  piquante.  En  1 788, 
Joseph  II  lui  donna  le  grade  de  gé- 
néral d'artillerie  ,  et  l'envoya,  muni 
d'instructions  militaires  et  diploma- 
tiques ,  auprès  du  prince  Potemkiu  , 
qui  faisait  le  siège  d'Oczakov\'.  Il  eut 
une  grande  part  aux  périls  de  cette 
difficile  opération;  et  les  rapports 
qu'il  en  transmit  à  son  souverain  ,  le 
portrait  du  général  russe  qu'il  traça 
dans  sa  correspondance,  sont  re- 
gardés comme  une  des  parties  les 
plus  curieuses  de  ses  écrits.  L'année 
suivante  ,  il  vint  prendre  le  com- 
mandement d'un  corps  de  l'armec 
autrichienne  ,  et  partager  avec  Lau- 
don  la  gloire  delà  prise  de  Belgrade. 
Ce  ful-là  le  terme  de  ses  travaux 
militaires  :  la  mort  de  Joseph  II 
l'éloigna  pour  toujours  du  com- 
mandement, auquel  l'appelaient  son 
rang  ,  son  expérience,  autant  que  sa 
valeur.  Ce  monarque  l'avait  traité 
avec  une  confiance  extrême ,  et  dont 
il  se  montra  fort  reconnaissant.  Per- 
sonne n'a  répandu  sur  la  tombe  de 
Joseph  II ,  plus  de  larmes  que  le 
prince  de  Ligne  :  il  ne  se  dissiinula 
pas  la  perle  qu'il  avait  faite  ;  et 
les  regrets  qu'il  témoigna  ,  ne  durent 
pas  contribuer  à  le  rendie  agréable 


4Bo  LÎG 

à  Leopold,  dont  le  système  e'tait 
d'écarter  tous  ceux  que  son  prédé- 
cesseur avait  le  plus  estimes  et  fa- 
vorise's.  La  révolte  des  Pays  -  Bas 
servit  encore  de  motif  ou  de  prétexte 
pour   éloigner  de  plus  en    plus   le 
prince  de  Ligne.  Toute  sa  fortune  et 
toutes  ses  afreclions  devaient  le  lier 
à  cette  contrée  ,  où  l'un  de  ses  fils 
s'était  rangé  du  parti  des  rebelles. 
Joseph  II  ,  qui  l'avait  d'abord  fort 
injustement  soupçonné  ,  appréciait 
si  bien  son  généreux  dévouement , 
€t  sentait  tellement  les  motifs  qu'il 
aurait  eus  pour  abandonner  sa  cause , 
qu'il  lui  dit ,  à  son  lit  de  mort  :  a  Je 
»  vous  remercie   de  votre  fidélité  ; 
»  allez  aux  Pays-Bas  ;  faites-les  re- 
»  venir  à  leur  souverain  ,  et  si  vous 
»  ne  le  pouvez ,  restez-y  :  ne  me  sacri- 
»  fiez  pas  vos  intérêts  j  vous  avez  des 
»  enfants.  »Le  prince  de  Ligne  n'était 
nullement  disposé  à  suivre  un  pareil 
avis;  car  aucun  grand  seigneur  de  la 
Belgique  ne  montra  plus  d'éloigne- 
mentpourlcparti  delà  rébellion,  dont 
on  sait  d'ailleurs  que  les  opinions  re- 
ligieuses furent  un  des  principaux 
motifs  :  sa  ferveur ,  sous  ce  rapport, 
n'était  pas  assez  grande  pour  lui  met- 
tre les  armes  à  la  main,  et  d'un  autre 
côté  son  caractère  connu  eût  inspiré 
peu    de  confiance  aux  Flamands. 
Cependant  leur  chef  Vandernoot  lui 
écrivit  pour  le  déterminer  à  se  réu- 
nir à  eux.  La  réponse  du  prince  ne 
fut  pas  équivoque;  il  lui  conseilla  de 
se  soumettre  à  l'instant,  pour  évi- 
ter une  mauvaise  fin  ;  et  lorsqu'il 
se  rendit  dans  cette  contrée,  après 
la  répression   des    troubles  ,   pour 
y   présider  les    états   du  Hainaut , 
il  parla  encore  plus    clairement   à 
cette  assemblée,  dans  une  séance  qu'il 
a   ainsi  racontée  lui  -  même  :  «  Je 
»  trouvai  encore  un  reste  d'aigreur 
»  et  d'indépendance  qui  me  donna 


LIG 

»  de  l'humeur  :  j'en  témoignai  u 
»  jour  plus  qu'à  l'ordinaire  dans  uni 
»  assemblée  de  mes  pères  conscrits 
»  et  voyant  qu'on  me  la  rendait 
w  leur  dis  que  si  je  n'avais  pas  et 
»  enKrimée  avec  l'empereur  Joseplf 
»  et  l'impératrice  de  Russie ,  lorsque 
»  leur  sotte  rébellion  éclata ,  je  l'au- 
»  rais  arrêtée ,  d'abord  en  leur  par- 
»  lant  en  concitoyen  fidèle,  zélé  et 
))  raisonnable ,  et  ensuite, si  je  n'avais 
»  pas  réussi,  en  général  autrichien, 
»  à  coups  de  canon  sans  boulet  j,  mais 
»  qui   les   eussent    fait   mourir    d 
»  peur.    »  Le  prince  de  Ligne  m 


i 


rentra  pas  alors   pour  long-temp 
dans  la  jouissanee  de  ses  biens  e 
Belgique:  l'invasion  des  Français  vint 
presque  aussitôt  l'en  priver  encore  ; 
et  cette  perte  de  la  plus  grande  partie 
de  sa  fortune  ,  que  ses  prodigalités 
avaient  déjà  fort  altérée ,  fut  précé- 
dée d'un  chagrin  encore  plus  cuisant, 
occasionné  par  la  mort  de  son  fils 
aîné ,  jeune  homme  si  distingué  par 
sa  valeur  et  par  son  noble  caractère; 
qu'il  aimait  si  tendrement ,  et  qui 
périt  sur  le  champ  de  bataille  ,  dans 
la  fameuse  expédition  des  Prussiens 
en   Champagne,   le   i4   septembre 
1792.    Rien    ne    put    consoler    le 
prince  de  Ligne  de  cette  perte  cruel- 
le ;  et  on  l'y  voit  revenir  à  chaque 
page  de  ses  écrits.  Depuis  cette  ft 
taie  époque ,  où  il  perdit  en  mêmi 
temps  sa  fortune  et  l'objet  de  s 
plus  tendres  affections ,  il  reçut  d'à: 
leurs  bien  peu  de  consolations 
de  dédommagements.  Après  la  mo 
de  Laudon  et  de  Lascy,  il  se  tro 
vait ,  sans   aucun   doute ,   au  pre 
mier  rang  de  l'armée  autrichienne  : 
aucun  de  ceux  qui  l'ont  commandée 
après  lui ,  n'avait  autant  de  droits  à  j 
la  confiance    du   souverain;  et  les  | 
revers    qu'elle    a    éprouvés,  n'ont  j 
pas  justifié  l'oubli  dans  lequel  il  fut  j 


LIQ 

laissa.  Cet  oubli  empoisonna  les 
Heiniircs  «luiiccs  de  sa  vie;  et  il 
n*a  pas  pu  dissimuler  le  cliagriu 
qu'il  en  ressentit  :  u  Je  suis  mort 
!»  avec  Joseph  II ,  »  disait -il  sou- 
vent. Cependant  l'empereur  Fran- 
çois le  nomma  ,  en  \Son  ,  capitaine 
des  trahans  de  sa  garde,  et  feld- 
mareVhal  en  1808.  On  le  consulta 
qucliiucfois  sur  les  opérations  mili- 
taires ;  et  il  ne  cessa  pas  de  présider 
le  conseilde  Tordre  de  Marie-Tlicrèse 
dont  il  avait  été  nomme'  commandeur 
après  la  prise  de  Belgrade.  Il  reçut 
-^^  nrc,  vers  la  même  époque ,  qucl- 
>  dédommagements  de  fortune; 
u  Ks  dut  surtout  à  son  mérite  per- 
sonnel et  à  l'intervention  de  la  Fran- 
ce, qu'il  affectionna  toujours  avec 
•tant  de  prédilection  (  1  )•  Ne  pou- 
?anl  plus  mettre  à  profit,  dans  le 
:oniniandement  des  armées  ,  ses 
longues  observations  sur  l'art  de 
a  guerre,  il  s'était  mis  à  compo- 
îcr  des  livres  où  se  peint  admi- 
rablement sa  passion  pour  les  ar- 
mes. On  y  trouve ,  comme  dans 
:outes  ses  productions  ,  un  mai]({ue 
ibsolu  d'ordre  et  de  méthode  ;  car  , 
linsi  qu'il  le  dit  lui-même,  «  il 
•»  écrit  les  choses  à  mesure  qu'elles 
•  lui  viennent  dans  la  pensée  »  : 
nais  ses  pensées  lui  viennent  sou- 
vent d'une  manière  fort  irrégulière, 
Iccousue,  incohérente  ;  et  il  les  rend 
ivcc  une  excessive  prolixité ,  sans 


(t)L4tei^eurie  (la  FagnoUei  prèi  de  Philip- 
•evilU  ,  araitëtéériftéc  en  1770,  en  comté  d'em- 
)tT«  ,  coui  le  nom  de  Liene  ,  en  faveur  du  prince 
:harUt.Joieph  i  ^t  «•fie  arait  rté  «grécée  an 
;86,aucoi:égc  dua  comt**  Je  Wettp'iahe.  Lot» 
lu  r«f;leineiit  dct  ind^^uinitca  germanique!  ,  an 
<o3,  !•  priricB  d  •  Lijti»  obtint  pour  indemnité 
i- ce  comte,  l'abbaye  d'KdaIttetten  .  et  un  rota 
'".'  ^  !*  "^  ^"^  coliép*  A"*  princea  de  l'empire; 
laaia  il  rendit  eu  iH«4,  mojraunanl  1, 4^^0,000 
lorini ,  ton  nouveau  cntnté,  au  prince  d  £«ter> 
"'>Ti  *'<c  le  droit  da  tiéger  dana  le  collrga  det 
tiacaa^ui  j  «•tait   attaclié.^FagnoUea   na   pro- 

uitait  que  S'ko  florina  da  revenu  {  «t  £del. 
teUaa  eu  rapportait  pltu  d«  |6,09*. 

XklY, 


LIG 


48i 


même  se  donner  la  peine  d'élrc  cor- 
rect et  d'éviter  les  Unies  de  langue. 
Si  l'on  ne  consulte  que  ses  écrits , 
ses  princi{)es  de  tactique  ne  parais- 
sent pas  fort  positifs  ,  ni  bien  déier- 
niinés  :  mais  il  avait  fail  la  guerre  si 
long-temps  et  dans  tant  de  |)ays  ,  il 
avait  été  témoin  d'un  si  grand  nom- 
bre d'événements,  que  les  militaires 
f)cuvcnt  puiser  dans  ses  ouvraj^cs  des 
eçons  très-utiles  ;  ces  leçons  leur 
sont  d'ailleurs  présentées  sous  une 
forme  toujours  piquante  et  originale. 
Aucun  général  en  Autriche  n'a  su 
inspirer  plus  d'enthousiasme  à  ses 
troupes  ;  et  il  dut  surtout  cet  avan- 
tage à  son  humeur  chevaleresque,  à 
sa  valeur  brillante,  à  ses  libéralités, 
et  à  ses  bons  mots  qui  étaient  répé- 
tés de  rang  en  rang  ,  et  qui  le  ren- 
daient l'idole  du  peuple  et  des  sol- 
dats. Ces  avantages  eussent  été  bien 
précieux  dans  les  dernières  guerres  ; 
et  la  cour  de  Vienne  avait  enfin  paru 
le  comprendre, lorsqu'U  fut  question, 
en  i-^ijG,  delui  donner  le  commande- 
ment de  l'armée  d'ItaUe;  mais  le  res- 
sentiment de  Thuguf  parvint  encore 
à  l'en  éloigner.  Ce  ministre  avait  été 
souvent  l'objet  de  ses  épigrammcs  ; 
et  cette  manie  des  beaux-esprits  fut 
plus  d'une  fois  nuisible  au  prince  de 
Ligne.  On  rencontre  dans  \a  col- 
lection trop  volumineuse  de  ses 
œuvres  ,  beaucoup  de  traits  pi- 
quants ,  et  d'anecdotes  curieuses  ; 
mais  tout  cela  est  noyé  dans  un  dé- 
luge de  réflexions  inutiles.  Il  n'a  pas 
prétendu  écrire  sa  rie  ni  ses  mémoi- 
res: cependant  ce  n'estguèrequesous 
ce  rapport  que  l'on  peut  trouver  de 
l'intérêt  dans  ses  écrits  ;  et  l'on  ne 
doit  pas  y  chercher  autre  chose 
que  des  anecdotes  relatives  aux  évé- 
nements dont  il  fut  le  témoin  ,  et  à 
tant  de  grands  personnages  qu'il  a 
vus  de  si  près.  Quel  homme  aurait  pu 
3i 


48i  LTG 

dire  comme  lui?  «  Les  bonte's  pa- 
»  tefnelles  du  bon  ,  du  respectable 
»  empereur  François  P'.  ,   raater- 
yt  nelles  de  la  grande  Marie-Thërcse , 
»  et  quelquefois  presque  fraternelles 
»  de  l'immortel  Joseph  II  ;  la  con- 
»  fiance  entière  du  maréchal  Lascy , 
»  et  presque   entière   du   maréchal 
»  Laudon  ;  la  société  intime  de  l'a- 
*  dorable  reine  de  France  j  l'intimitë 
»  de  Catherine  le  grand,  mon  accès 
»  chez  elle  presque  à  toutes  les  heu- 
»  res  ;   les   bontés    distinguées    du 
»  grand  Frédéric ,  rendraient  mes  më- 
»  moires  bien  inte'ressants.  »  Ainsi 
le  prince  de  Ligne  ne  croyait  pas 
avoir  écrit  des  mémoires;  et  cepen- 
dant   la  collection  de    ses  œuvres 
militaires  et  senti  ment  aires,  comme 
il  les  appelle ,  ne  peut  guère  être  con- 
sidérée comme  autre  chose.  Il  a  fait 
des  vers  dans  beaucoup  de  circons- 
tances de  sa  vie  ,  et  surtout  pour  ses 
nombreuses  aventures  de  galanterie 
qui  se  prolongèrent  bien  au-delà  du 
terme  ordinaire,  et  portèrent  quel- 
quefois atteinte  à  sa  dignité.  Ses  poé- 
sies ,  tout  au  plus  supportables  (  i  ) 
dans  les  circonstances  où  elles  furent 
composées  ,   n'auraient  pas  du  être 


(H  Four  donner  une  idéa  de  la  poe<ie  du 
tirioce  de  Ligne,  aaui  citerons  des  vers  qu'il 
i^dresxA  huit  )ours  avant  ta  mort  à  M.  le  buton 
Ha  Statsart ,  ancien  piéiut  de  Vaiiclu^a  ,  «on 
•;oir)patr't>te  »  po'T  l*^  r<;nii(;rci<"r  de  1  envoi  de» 
pensées  de  Circd^  chiçnne  célèbre.  Ce  sont  d«s 
moins  mauvais.  quUl  ail  composés  : 

» O'unBel^e  la  IMuse 

•  Fit  légère  et  profonde  ,  aimable  comme  lui , 

n  Â  la.  Sambre  apovté  la  belle  eau  de  Va;iclus«. 

»  Jel>ri  félicita  ,  aujourd'hui. 
9  D&iHicetheuieiix  pays  les  v«rsroul<;ut  de  spurc»  : 

»  Tiojibadours  ,  improvisateurs, 

•  Dans  letir  cceur  ,  pour  l'esprit,  tiouvaicnt  de  la 

»  ressDiiroe; 
»  Dire  amants ,  c'était  dire  auteurs, 
a  De  Pétrarque  liériiier,  ave«-vous  une  Laure  ? 
ft  Bn  cela  vous  pourriez  lui  rf^tstnibler  encore. 
wCircé,  moins  prude,  a  bien  plus  de  raison  ; 
^  Se»  écrits  ,  que  jai  lus  ,  g»nt  d'un  excellent  too, 
«  Le  bou  Jean  Lafontaine  a  fait  parler  les  b^loj  ; 

•  Vauâles  faites  éciire  ;  et  p:ir  von»  et  par  lui  , 

»  Ou  leur  voit  d'excellente»  tètes  , 
•  Qui  jamais  u'entaut&«t  l'ejuuù. 


>      LIO  *• 

publiées.  Son  Essai  sur  les  jardini^ 
et  sur  sa  terre  de  Bel-œil,  est  une 
des  parties  les  plus  soignées  de  ses 
écrits.   Le  caractère  du   prince  de 
Ligne  devait  être  moins  apprécié  ea 
Allemagne,  et  surtout  en  Autriche, 
que  dans  tout  autre  pays  :  cependant, 
il  s'y  était  fait  de  nombreux  amis  , 
et  il  y  eut  des  admirateurs  enthou- 
siastes. Les  étrangers  les  plus  dis- 
tingués par  leur  rang  et  leur  esprit  ^ 
ne  manquèrent  jamais  de  le  visiter; 
et  tous  le  quittaient  pénétrés  d'à 
miralion  pour  la  grâce  ,  Tesprit 
la   politesse  qui  donnaient  tant 
charme  à  sa  société.  Les  Franc, 
surtout  lerecherchaientavec  empr 
sèment ,  séduits  par  l'aimable  p 
vention  qu'il  montra  toujours  po 
eux.  Il  vivait  encore  à  la  finde  18 r 
dans  le  moment  où  Vienne  vit  se  réu 
nir  dans  ses  murs  le  congrès  des  rois 
de  l'Europe  :  tous  se  firent  un  devoir 
de  lui  rendre  hommage;  et  quoiqu'il 
fût  arrivé  près  du  terme  de  sa  vie , 
quoique  dès-lors  sa  santé  parût  très- 
chancelante  ,  on  retrouvait  encore  en 
lui  celte  vivacité  d'esprit ,  cette  in- 
tarissable gaîté  qui    n'avaient   pas 
cessé  de  le  distinguer  ;  et   à  cette 
époque  ,  comme  autrefois  ,  ses  sail- 
lies et  ses  bons  mots  furent  partout 
répétés.  Vovant  les  souverains  oc- 
cupés de  bals  et  de  fêtes  de  tous  le^i 
genres,  il  disait  :  a  Le  congrès  danse, \ 
»  il  ne  marche  pas  ;  quand   il  aura 
»  épuisétouslcs  genres  de  spectacles, 
»  je  lui  donnerai  celui  de  l'enterre- 
»  ment  d'un  feld-maréchal.  w  CeVUi 
promesse  ne  fut  que  trop  fidèlement 
accomplie  ;  et  le   prince  de   Ligne 
termina  sa  longue  carrière  le  1 3  dé- 
cembre 1 8 1 4.  Mourant  sans  fortune^ 
et  voulant  néanmoins,  selon  l'usage 
laisser  un  legs  à  sa  compagnie  de  tra- 
bans ,  il  lui  donna  la  collection  de  ses 
aoauuscrits,  qu'il  évaluait  à  cent  mille 


ÎJG 

lori!»!*.Scshrri!iers,(ï»in*ymcttaient 
rnt-nic  prl\  ,  la  voiuliinit  à  un 
te  pour  une  somme  modique; 
le   comte  de  Collorcdo  ,   son 
>sciir  dans  !c  commandement 
I  .ibans  ,  réclama  contre  celte 
.  dans  les  inlercts  de  sa  com- 
1  '.  On  crut  d'abord  que  cet  inci- 
\  lierait  la  publicalionde  ces 
>  ;  cependant  les  OKuvrcs 
imios  du  prince  de  Licne  ont 
en  1817  ,  à  Vienne  et  à  Dresde, 
»  vol.  in-8".  La  colleclion  de  ses 
eiivres  avait  cle'  publiée  par  lui  dans 
es  mêmes  villes  ,  en  1807  ,  3o  vol. 
n-ia  ,  divisés  en  deux  pirties,  dont 
\  première  comprend  le  Coup-d'œil 
"••  fiel-œil  et  sur  une  grande  par  lie 
I  dins  de  l'Europe;  —  Dialogues 
o  iiwrls; —  Lettres  à  Eutalie  surle 
hédtre;  —  Mes  Ecarts  ou  Ma  tète 
"  herté  ;  —  Mélange  de  poésies , 
s  de  tliédtre; —  Mémdlres  sur 
,;  comte  de  Boniieval,  sur  la  cor- 
•.spoiidance  de  Laharpe ,  etc.  La 
?conde  partie  sous  le  titre  d' OEu- 
res  militaires  et  sentimenlaires , 
amprend  :  Préjugés  et  fantaisies 
Ulitaires;  — Mémoires  sur  lescam- 
agnes  du  prince  Louis  de  Bade  ; 
tr   les  campagnes  du  comte   de 
iussy-Rabutin  ;  sur  la  guerre  des 
'urcs  ;  sur  les  deux  maréchaux  de 
ascjr;  sur  Frédéric  II;  —  Instruc- 
on  du  roi  de  Prusse  à  ses  officiers; 
-Journal  de  la  guerre  de  sept  ans; 
e  sept  mois  en  1778,  et  de  sqn 
furs  aux   Pays-  Bas    en  1784  ; 
-  Mémoire  sur  les  généraux  de  la 
lierre  de  trente  ans;  —  Relation  de 
wa  campagne  de  1788  à  1789;  — 
'atalogue  raisonné  des  libres  mili- 
lires  de  ma  bibliothèque.  Les  deux 
emiers    volumes    coutiennent  des 
^WUvres  mêlées  en  prose  et  en  vers. 
^'espèce  de  culte  que  le  prince  de 
igné  avait  voue  à  la  ine'raoirc  da 


priuro  Eugène,  lui  fit  publier,  en 
iHoy  ,  un  ouvrage  de  sa  compo- 
sition ,  wus  le  litre  de  Fie  du 
prince  Eugène  de  Savoie ,  écrite 
par  lui  -  même.  Ceux  des  lecteurs 
qui  connaissaient  la  manière  du 
prince  de  Ligne ,  ne  j)urent  se  mé- 
prendre à  celte  petite  fraude  :  mais 
ils  admirèrent  I  esprit  et  l'art  avec 
lesquels  il  avait  su  se  mettre  à  la 
place  d'un  grand  homme.  Impri- 
mé d'abord  en  Allemagne  ,  cet  ou- 
vrage le  fut  deux  fois  à  I*aris  , 
dans  la  même  année.  On  a  beau- 
coup écrit  sur  le  prince  de  Li- 
gne ,  même  de  son  vivant.  M"»«. 
de  Staél ,  qui  avait  été  singulièrement 
frappée  des  grâces  de  son  esprit,  pu- 
blia ,  en  1809  :  Lettres  et  Pensées 
du  maréchal  prince  de  Ligne ,  i  vol. 
in-8**.  Ce  recueil  est  princip.ilcmeni 
extrait  de  la  Correspondanrc ,  où 
M™^.  de  Staël  a  irouvé  facilemc.it 
de  quoi  justifier  son  admiration.  Ou 
peut  seulement  lui  reprocher  d'y 
avoir  placé  des  opinions  et  des  ju- 
gements que  l'auteur  avait  dès-lors 
retractés.  MM.  de  Propiac  et  Malte- 
Brun  outaussi  donnédes  extraits  des 
ouvrages  du  prince  de  Ligne.  Il  fut 
si  mécontent  de  tous  ces  recueils  ou 
extraits,  qu'il  s'en  plaignit  haute- 
ment, et  qu'il  voulait  en  faire  impri- 
mer un  autre  lui-racme;  mais  \i 
mort  ne  lui  donna  pas  le  temps  d(f 
réaliser  ce  projet.  M — d  j. 

LIGNY  (  François  de  ) ,  ne  4 
Amiens ,  le  4  mai  1709,  la  mcme 
année  que  Gresset ,  son  compatriote, 
entra  comme  lui  ,à  l'âge  de  lOans, 
dans  la  société  des  jésuites,  mais  pour 
s'y  fixer  tout-à-fail.  11  professa  d'a- 
bord les  humanités ,  el  se  livra  en- 
suite au  ministère  de  la  prédication. 
Quoique  son  extérieur  ne  prévînt  pas 
en  sa  faveur ,  un  Ion  de  candeur  cl  de 
persuasion^  joint  à  unccloquenceawi- 
3i.. 


484 


LIG 


mëe ,  soutenue  par  l'instruction  ,  lui 
Talutdes  succès ,  même  dans  les  chai- 
res de  la  capitale  ;  ce  qui  le  fit  appe- 
ler à  la  maison  professe  de  Paris. 
Il  avait  cte  nomme'  pour  prêcher  à 
la  cour,  et  il  aurait  pu  dcyenir  un 
orateur  distingué  ;  mais  la  suppres- 
sion de  la  Société'  lui  fit  quitter  la 
France  ;  et  Avignon  ,  où  il  se  relira , 
le  vit ,  malgré  son  âge  et  une  santé 
délicate,  s'occuper  tour-à-tour  de 
la  prédication,  du  soin  des  âmes ,  et 
d'études  littéraires.  Il  ne  manquait 
pas  de  connaissances  historiques  ;  et 
il  avait  été  chargé  d'écrire  l'histoire 
de  la  province  du  Nivernais.  Ou  a  de 
lui  :  I  La  V^ie  de  saint  Ferdi  land, 
roi  de  Castille  et  de  Léon ,  dédiée  à 
Ferdinand  ,  prince  de  Parme  ,  Paris , 
1 759,  in- 1*2.  Celte  Vie,  citée  par 
Albau  Butler  ,  donne  des  détails  sur 
les  relations  de  la  France  et  de  l'Es- 
pagne  ,  occasionnées  par  les  liens  de 
parenté  qui  unissaient  saint  Ferdi- 
nand à  saint  Louis.  IL  Histoire  de 
la  vie  ce  J é sus- Christ ,  oh  l'on  a 
conservé  et  distingué  les  paroles  du 
texte  sacré  selon  la  Vulgate ,  Avi- 
gnon, i774)3vol. in-8''. ;  i77G,in- 
4**.  ;  Paris  ,  i8o4  ,  1  vol.  in-4**.  fig. 
Cet  ouvrage  est  une  ample  Concorde, 
à-la-fois  historique  et  ascétique,  où 
Fauteur  a  formé ,  du  texte  des  évan- 
gélistes  ,  une  seule  histoire  suivie,  en 
y  mêlant ,  sans  les  confondre ,  les 
explications  ou  les  réflexions  qui  s'y 
lient  naturellement.  Celles  qui  ser- 
vent à  éclaircir  les  difficultés  ,  ou  a 
développer  le  sens  prophétique,  dog- 
matique ou  moral,  sont  répanduef 
dans  des  notes  ,  «  oi!i  les  choses  ex- 
»  cellentes  ,  dit  le  père  Daire ,  font 
»  passer  quelques  saillies  d'un  zèle 
»  parfois  un  peu  ardent,  qu'on  a  cru 
»  pouvoir  reprocher  à  l'auteur.  »  Le 
pcixj  de  Ligny   mourut    en    1788. 

G — CE. 


LIG 

LIGORIO  (PiRRo),  peintre  e 
antiquaire  du  seizième    siècle  ,  ni 
à  Naples ,  de  l'une  des  familles  ins 
cri  tes  au    Sedile   di  porta   nova 
reçut  une  belle  éducation ,  dont  i 
profita  moins  cependant  que  de  l'é, 
tude  des  arts  du  dessin.   Il  devin 
peintre,  architecte,  ingénieur ,  et  sur 
tout  patient  et  laborieux  investiga 
teur  des  chefs-d'œuvre  de  l'antiquitél 
Comme  peintre  on  cite  de  lui  plusieurj 
tableaux  à   fresque,    qu'il   exécut 
dans  l'oratoire  de  la  compagnie 
la  Miséricorde  à  Rome ,  et  un  grs 
nombre  d'ouvrages  de  clair-obs 
en  couleur  jaune  imitant  le  broi 
Ce  sont  des  frises  et  des  trophj 
dont  on  ornait  pour  lors  les  faça< 
des  maisons  ;  il  en  reste  encore 
traces  dans  le   quartier   de  Camp\ 
Marzo,  à  la  montée  de  S.  Silvestr 
et  à  Campa  di  Fiore.  Ligorio  donn 
de  plus  grandes  preuves  de  taleUj 
comme  architecte  :  le   palais  Laci 
cellotfi  situé  sur  la   place  Navone| 
le  joli  Casin  du  pape  dans  les  jardin 
du  Belvédère ,  sont  considérés  comm 
des  modèles  d'élégance  et  de  bon  goû 
Paul  IV  ;<vail  nommé  Ligorio  arcb 
tecte  du  Vatican  et  de  la  fabrique  d 
S, -Pierre  :  Michel  Ange,   âgé  di 
quatrevingt-un  ans,  qui  avait occupj 
jusqu'alors  et  si  honorablement  celt 
place,  ne  voulut  point  la  partagerj 
quitta  Rome.   Ligorio  donna  ai 
des  dégoûts  à  Salviati,  et  le  foj 
d'abandonner  les  peintures  qu'il  ai 
commencées  au  Vatican.    Après  1 
mort  de  Michel  Ange,  Vignole  1 
remplaça  ,  et  fut  adjoint  à  Ligoric 
On  leur  ordonna  de  ne  s'écarter  e 
rien  des  dessins  de  leur  célèbre  de 
vancier  :  le  présomptueux  Ligori 
n'ayant  pas  obéi  à  cette  injonction 
perdit  son  emploi.  C'est  alors,  ei 
1 568  ,  qu'il  passa  au  service  d'A! 
phouse  II ,  duc  de  Ferrare.  Nom 


LIG 

)n4  son  architecte  avec  un  traite- 
hicnt  de  vingt -cinq  cens  d'or  par 
mois ,  il  5c  maria  dans  cette  ville  , 
5*y  fi\a  pour  le  reste  de  ses  jours,  et 
V  mourut  en  i583 ,  aime  et  estime 
^c$ princes  de  la  maison  d'Esté, qui 
lui  avaient  fourni  souvent  l'occasiou 
iie  faire  briller  ses  talents.  Il  avait 
'"-irc  les  dommages  que  la  ville 
irit  dans  uue  inondation  du  Pô  , 
p[  donné  le  plan  de  plusieurs  édifices; 
mais  il  s'était  livré, surtout,  comme 
îl  l'avait  déjà  fait  à  Naples,  à  Rome 
!ct  dans  le  reste  de  l'Italie  ,  à  la  re- 
therche  des  monuments  antiques , 
«t  avait  formé  de  ces  objets  uue  ri- 
che collection  qu'on  voyait  encore 
vers  la  fin  du  xvii®.  siècle  chez  ses 
ux.  Il  leur  avait  aussi  laissé 
manuscrits  sur  l'architecture  et 
les  antiquités ,  ornés  d'tme  grande 
'^"-'iitité  de  beaux  dessins  ,  qui 
-orent  successivement  dans  les 
ijuiliolhcques  des  Sig,  Gardellini  et 
Crispi  de  Ferra re  ,  et  furent  en  uile 
achetés,  pour  le  prix  de  18,000  du- 
cats ,  par  Gharlcs-Emanuel  I ,  duc 
de  Savoie  :  le  sort  des  armes  les 
ayant  fait  tomber  entre  nos  mains  , 
ils  y  restèrent  jusqu'en  181 5.  Les 
artistes  et  les  aixhéolcgues  y  pui- 
iit  des  éclaircissements  sur  divers 
tsd'antiquité;  et  quoiqu'on  ne  dût 
as  accorder  une  grande  confiance  à 
érudition  et  à  la  véracité  de  Ligorio , 
cependant  comme  il  paHe  d'objets 
qui  n'existent  déjà  i>lus  ,  ou  qui  de- 
puis deux  siècles  ont  beaucoup  souf- 
tert  des  outrages  du  temps  et  de 
l'incurie  des  hommes,  on  trouve  dans 
ses  manuscrits  des  faits  précieux , 
des  rapprochements ,  des  analogies 
ingénieuses  ,  et  le  dessin  d'objets 
qui,  pour  être  inexactement  copiés, 
n'en  sont  pas  moins  dans  le  goût 
antique ,  et  ont  toujours  pour  motif 
de  belles  idées  puisées  à  uue  source 


I; 


MG  \n-i 

dont  la  p<irft«?  nV^t  pas  enfi.  re- 
nient corrompue.  On  ne  po»jt  mer 
cependant  que  dans  un  au!>«i  vaste 
recueil  il  n'y  ait  b<>ahcoupd'erretirt; 
car  Pirro  Ligorio  n'était  pan  fort 
savant ,  et  Ant.  Agostino  ,  «pioiqut 
son  ami,  aiUrme  ,  dans  son  ouvrage 
De  antiq.  dial.  4  ,  qti'il  "c  savait 
pas  même  le  latin  :  d'où  il  résulte 
que  souvent  IJgorio  n'a  pas  compris 
les  inscriptions  tracées  sur  les  mo- 
numents ,  et  qu'il  a  donné  de  bonne 
foi  des  inscriptions  supposées.  Néan- 
moins plusieurs  antiquaires  ,$pan* 
heim  [  De  prœstarUidct  usu  nnniism.) 
Maft'ei(  Giorn.  d'Ital.  ),et  Muratori 
(  Tliesaitr.  y  et.  inscr.  )  ont  loué  ces 
manuscrits  sans  en  dissimuler  les  de* 
fauts  ;  et  le  dernier  absout  Ligorio  de 
l'imputation  d'avoir  sciemment  fal- 
sifié les  inscriptions  et  les  médailles. 
Nous  pouvons  joindre  à  ces  témoi- 
gnages l'autorité  deTiraboschi  (Slor. 
lett.  )  et  celle  dcT.tfuri  (  Scrittoiidel 
Regrw  di  Nap.  )  Knfin  Gio-Malteo 
Toscauo ,  qui  se  glorifiait  d'avoir 
connu  Pirro  Ligorio  à  Rome  ,  le 
désigne  comme  un  homme  totius 
anlif^uitalis  peritfssimn^  nuUiu^que 
borifu  a'ts  igriarus.  ( Fejtlus  liai,  ) 
Ces  manuscrits  sont  au  nombre  de 
3o  vol  imes  in-fol.,  dont  plusieurs 
étaient  dédiés  au  duc  Alnhonse  de 
Ferrare.  On  peut  en  voir  la  descrip- 
tion dans  le  CatàL  des  Manuscrits  de 
la  hiblioth. de  Turin,  yo\.  1.  Suivant 
quelques  Toyageurs ,  le  nombre  de 
ces  manuscrits  s'élevait  à  4^  vol.j 
et  les  10  qui  inan«iuaicnt  à  Tuiin  se 
trouvaient  à  la  biljliothcque  rovafe 
de  Naples  :  on  en  conserve  1  x  oan» 
celle  du  Vatican  ;  mais  ce  sont  des 
copies  f.iit«»s  sur  les  originaux  par 
ordre  de  Christine  de  Sucdc.  Les  18 

Sremiers    volumes    contiennent    U 
esci  iption  des  royaumes ,  provinces, 
villes ,  mers ,  fleuves ,  nwiiUgncs^, 


486 


LIG 


connus  des  anciens  ;  les  autres  traitent 
des  héros  et  ries  hommes  illustres , 
des  familles  romaines  ,  des  thermes, 
de  la  navigation ,  des  médailles  ,  des 
arts  libéraux,  des  poids  et  mesures  , 
des  statues,  des  funérailles^  et  autres 
sujets  relatifs  aux  arts  et  aux  usages 
des  anciens.  On  n'a  imprimé  qu'une 
légère  portion  de  cet  imiuense  re- 
cueil :  I.  Un  vol.  sur  les  antiquités 
de  Rome,  Délie  antichitàdi  Roma 
nel  quale  si  traita  de^  circhi,  teatri 
€  anfUeatri  con  le  par  adosse ,  Ve- 
nise, i553,  in-B*'.  II.  Un  opuscule 
De  Fehlculis,  traduit  en  latin,  et 
publié  par  SchefTer,  avec  des  notes, 
dans  son  traité  De  re  vehiculari , 
Francfort,  1671 ,  in4".,  et  dans  le 
tome  V  du  Thesaur.  anliq.  Rom.  III. 
Unfragment  de  l'histoire  de  Fcrrare, 
imprimé  en  1676,  traduit  enlatin  (par 
Bernardin  Morct),  inséréautom.  vii 
du  TJies.  antiq.  Roman,  de  Graevins; 
mal  à  propos  attribué  à  Cagnaccini, 
car  l'original  de  Pirro  Ligorio  existe 
encore  à  Ferrare.  (  Poj.  BarufTaldi , 
Apolog.  etc.  chnslaRaccoltad'opus- 
coli  scientijici  (  de  Calogerà  ) ,  tom. 
VII,  pag.  489-517.  )  On  dit  aussi 
que  le  bel  ouvrage  de  Fulvio  Orsini, 
Délie  famigUe  Romane,  eu  médail- 
les ,  a  été  fait  d'après  les  recherches 
de  Pirro  Ligorio. — Tous  les  artistes 
connaissent  son  grand  plan  de  Rome 
antique  dont  on  a  fait  plusieurs  co- 
pies et  réductions.  Franc.  Contini  a 
fait  graver  le  plan  de  la  villa  Adriana , 
levé  par  Pirro  Ligorio  (  Rome,  1 76 1 , 
in-fol.  )  La  description  imprimée  est 
succincte  et  par  lettres  de  renvoi , 
tandis  que  celle  de  l'habile  anti- 
quaire napolitain  est  fort  étendue  et 
pleine  de  recherches  et  de  faits  cu- 
rieux :  on  doit  regretter  qu'elle 
n'ait  pas  été  publiée  ainsi  que  plu- 
sieirs  autres  de  ses  manuscrits.  On 
«oiiiiaît  encore  de  lui  une  carte  du 


LIG 

royaume  de  Naples  ,  insérée  dani 
recueil  d'Ortelius.  G — w. 

LIGOZZI    (  Jacques  ),  peinti 
d'histoire ,  né  à  Vérone  en   i543 
fut  élève  de  Paul  Véronèse.  Aprî 
avoir  exécuté ,  dans  sa  patrie  ,  que 
qiîes  ouvrages  pleins  de  mérite, 
étendit  saréputationdans  toute  Tlta 
lie  ;  et  le  grand  duc  Ferdinand  II  1 
nomma  peintre  de  la  cour  et  sur-ii 
tendant  de  la  galerie  de  Florence.  C 
choix  fut  justitié  parles  travaux  qu 
Ligozzi  exécuta.  On  estime  surtout  le 
dix-sept  lunettes  qu'il  peignit  dans  1 
cloître  (V  Ognissa/iti y  entre    autre 
celle  qui  représente  la  CoTifér^rajÊ 
des  deux  saints  fondateurs ,  Fr^^ 
cois  et  Dominique.  Il  a  beaucou] 
travaillé  à  l'huile.  Le  Saint  Raj 
juond  ressuscitant  un  enfant ,  qu 
l'on  voit  à  Sainte-Marie-Nouvelle 
et  les  Quatre  Saints  couronnés  qu'i 
peignit  pour  le  couvent  des  Carme 
déchaussés ,   à  Imola ,   sont    deu: 
grandes  machines  du  plus  bel  effet 
et  où  l'on  reconnaît  un  élève  de  Pau 
Véronèse.    Au   couvent    de    Pe«cii 
l'on  admire  son  Martyre  de  sainb 
Dorothée.  L'échafaiid,le bourreau 
le  préfet ,  qui  du  haut  de  son  cheva., 
donne  l'ordre  de  frapper  ,  la  fouit i 
des  spectateurs  qui  témoignent  leur*  1 
sentiments  par  des  expressions  dif- 
férentes , l'appareil  d'un  supplice 
blic  ,  tout ,  dans  ce  tableau ,  fraj 
également  les  ignorants  et  les  col 
naisseurs.  L'artiste  s'est  surtout  sui*-! 
passé  dans  la  figure  de  la  Sainte,  qui,! 
agenouillée  et  les  mainsliées  derrière' 
le  dos,  attend,  avec  un  calme  céleste, 
la  couronne  du  martyre  qu'un  chœur 
d'anges  lui  apporte.  Tous  les  ou- 
vrages de  Ligoz/i  ne  présentent  pas 
la  même  force  d'imagination;  mais 
dans  tous  ii  émeut  le  spectateur ,  et 
fait  voir  qu'il  sent  ce  qu'il  a  peint.  II 
avait  le  talent  le  plus  distingué  ponr 


LIG 

,  la  miniaturr.  Ses  prtits  ubicanx  à 
'linilc  5ont  d'un  fini  prcricux.  Aug. 
I  rArhc,cl  d'aulrcs  habiles  artistes^ 
I  grnvp  plusieurs  de  ses  produc- 
iis.  Le  Musce  du  Louvre  possédait 
or  ce  maître  :  Jésus  an  jardin  dt's 
Oliviers.  Ce  tableau,  qui  provenait  de 
calorie  de    Florence ,  a  ctc  cn- 
<•  eu  septembre  i8i5.  Le  même 
sec   renferme  encore  ,   dans    la 
rie  d'Apollon,  les  cinq  dessins 
vanls    de    Ligozzi    :    L   L*£n- 
Jtt  Jésus  sur  les  genoux  de  la 
I  lerge ,  donnant  l'anneau  nuptial 
mainte  Catlierine.  Ce  dessin  est 
(Ute'  à  la    plume,  lavé   et  re- 
issé  d'or  ,  ainsi  qu'un  autre  frag- 
iit  de  dessin  représentant  :  II. 
Martyre   de  sainte  Catlierine 
Uexandrie.  III.  Le  Dante  y  ac- 
compagné de  Béatrix,  rencontre , 
dans  la  planète  de  Fénas ,  Cunizza 
nrd'Eccelino ,  tyran  de  Fadoue , 
/c  troubadour  Foulques  de  Mar- 
lle  (  Paradis  ,  chant  ix  )  ;  dessin 
!  I  plume,  lave,  rehaussé  de  blanc, 
que  quelques  personnes  ont  cru 
(■  d'André  Solari.  —  Deux  allé- 
:ies  ,  dessinées  à  la  plume  ,  lavées 
bistre  et  rehaussées  d'or  ,  repré- 
!itant,  la  première ,  une  Femme 
^    ne-bout ,  vue  par  le  dos;  et  l'autre 
nne  Femme  assise,  légèrement  voi- 
;    Ue  par  une  gaze  transparente,  se 
peignant  les  cheveux,  etc.  LicozLi 
mourut  à  Florence,  en  16:^7.  P-s. 
LÏGUORÏ  (  Alphokse-Marie  de  ), 
('que  et  fondateur  d'une  congréga- 
11  de  missionnaires  ,  naquit  à  Na- 
"S  ,  le  26  septembre  1(396.   Son 
le  était  noble,  et  capitaine  dans 
>  galères  du  royaume;  sa  mère  se 
mmaitCaA'alieri.  Liguori  annonça 
bonne  heure  un  esprit  vif,  un  ca- 
ractère aimable ,  et  d'Iieurcuses  dis- 
;    positions  pour   l'étude  et  la  piété. 
Ayant  uni  son  coucs  d'humanités  à 


XIG  487 

l'igc de  dix-scni  «ru,  il  entra  dans 
la  carrière  du  barreau.   Son  r'  «    t 
à  Naples  eut  beaucoup  de   i>i 
mais  un  accident  désagréable  (t  im- 
prévu ,  qui  lui  arriva  en  1722. dans 
une  cause,  le  déconcerta, et  1." 
Icllcment,  que  renonçant  à  la  p( 
tive  brillante  qu'on  lui  oflrait ,  il  put 
l'haLil  ecclésiastique  Ie3i  août  i7'J«'», 
et  se  livra  sur-le-champ  aux  < 
et  aux  exercicesdc  cette  nouvel  1 
rière.  Quand  il  eut  reçu  le  sacerdoce, 
il  s'unit  à  la  congrégation  pour  U 
propagation  de  la  foi,  érigée  àN*» 
pics  ,  et  à  d'autres  associations  pieu^ 
ses.  Il  annonça  la  parole  divine  dans 
plusieurs   villes  et    campagnes   du 
royaume,âvec  le  titre  de  missionnaire 
apostolique.  Affligédc  l'ignoram  c drs 
gens  de  campagne  ,  il  résolut  d'i  (.1- 
blir  une  congrégatioa  destinée  spé- 
cialement à  les  instruire,  et  se  retira 
avec  quelques  missionnaires  ,  dans 
l'ermilage  de  Sainte- Marie,  de  la 
ville  de  Scala ,  dans  la  Principauté 
citérieurej  là  il  jeta,  en  i73'.i  ,  les 
fondements  de  son  institut  sous  le  ti- 
tre du  Très-Saint  Rédempteur.  Il  eut 
dans  cet  établissement  quelques  obs- 
tacles à  vaincre;  mais  sa  congréga- 
tion obtint   l'approbation  du  che£ 
de  l'Eglise ,  et  se   répandit  dans  le 
royaume  de  Naples ,  eu  Sicile  et  dans 
l'état  pontifical.  L(>  osnMtt- 

sons  furent  établies  liocèsfli 

de  Saleme ,  de  Cou/a  ,  de  ÎNocera  «1 
de  Bovino  ;  et  plusieurs  évêquc* 
sollicitèrent  de  pareilles  foudationf 
pour  leius  diocèses.  L'ordre  a  com- 
mcucé  il  y  a  peu  d'a&ooes  à  s'éteil» 
drc  hors  de  l'Italie;  et  une  ce»* 
lonie  de  ces  rcli^eux  s'établit  en 
181 1,  à  la  Foi -Sainte  y  aacieuM 
chartreuse  du  cautou  de  Fribourg, 
occupée  i>endanl  la  révolution  par 
d€,s  trapistes,  qui  furrul  forces  d« 
l'abandonBer  eu    1810.  Au  milieu 


488  ÎJG 

de  ces  soins  et  de  l'exercice  continuel 
du  ministère,  Liguori  trouvait  en- 
core le  temy)s  de  composer  des  livres 
de  théologie  et  de  piété  5  l'âge  et  les 
maladies  semblaient  ne  rien  dimi- 
mier  de  son  zèle.  Clément  XIII  le 
fit  évêque  de  Sainte  -  Agathe  des 
Golhs  ,  dans  la  Principauté  ulté- 
rieure ,  entre  Bénévent  et  Capoue. 
Liguori  refusa  plusieurs  fois  une  di- 
gnité dont  il  connaissait  tous  les  de- 
voirs, et  ne  se  rendit  qu'au  com- 
mandement exprès  du  pape.  Il  y  fut 
promu  le  i4  juin  1762.  Le  soin  de 
la  discipline  ecclésiastique ,  l'instruc- 
tion de  son  troupeau ,  les  visites  pas- 
torales ,  les  bons  exemples,  la  fonda- 
tion d'établissements  pieux  et  chari- 
tables, signalèrent  son  épiscopat.  Au 
bout  de  treize  ans  de  gouvernement, 
affaibli  par  les  travaux ,  les  péniten- 
ces et  les  maladies ,  devenu  sourd  et 
presque  aveugle  ,  incommodé  d'une 
courbuie  de  l'épine  dorsale  qui  le 
gênait  beaucoup  pour  toutes  ses  fonc- 
tions ,  il  obtint  de  Pie  VI ,  en  juillet 
1775,  la  permission  de  se  démettre j 
et  à  l'âge  de  79  ans,  il  se  retira,  au 
milieu  de  sa  chère  congrégation ,  à 
Nocera-de'-Pagani  ,  où  il  passa  le 
reste  de  ses  jours  dans  la  méditation 
et  les  exercices  de  la  péuilence.  Il  y 
mourut  saintement  le  i^^ août  1787, 
âgé  de  go  ans.  Ses  vertus  furent  re- 
tracées dans  plusieurs  oraisons  fu- 
nèbres ;  et  l'on  a  rapporté  des  choses 
étonnantes  sur  sa  vie  et  sur  sa  mort. 
Ses  principaux  ouvrages  sont  :  I. 
Dissertation  sur  l'usage  modéré 
de  V opinion  probable  (  en  italien  ), 
Naples,  1754.  II.  Théologie  morale 
rédigée  par  appendice  à  celle  de  Bu- 
sembaum  (  en  latin  ), Naples,  1 755, 
1  vol.  in- 40.;  elle  est  dédiée  à  Be- 
noît XIV, qui  répondit  à  l'auteur  par 
une  lettre  flatteuse  :  cet  ouvrage  a  été 
réimprimé  plusieurs  fois;  la  onzième 


LIG 


édition  a  paru  à  Bassano ,  en  1816, j 
3  vol.  in-4^.  G'est-la  que  Liguori 
développe  son  système  sur  le  pro- 
babilismej  opinion  qu'il  soutenait 
avec  quelques  modifications ,  et  sur 
laquelle  il  a  beaucoup  écrit.  Il  fut 
attaqué  sur  ce  sujet  par  le  père  Pa- 
tuzzi,  dominicain,  qui  publia  ,  en 
1764,  sous  le  nom  cî' Adelphe  Do^ 
siihée  :  La  cause  du  probabilisme 
reproduite  par  M.  Liguori,  et  con- 
vaincue de  fausseté  ;  celui-ci  y  ré- 
pondit par  une  Apologie  de  sa  Dis- 
sertation ,  qui  fut  depuis  refondue 
dans  sa  Théologie  morale.  Le  senti' 
ment  de  Liguori  peut  être  invraisem- 
blable  et  même  faux;  mais  il  n'ai 
point  été  censuré.  Dans  l'examen  d 
ses  écrits  qui  a  eu  lieu  avant  de  pro- 
céder à  sa  béatification,  on  n'y  a 
rien  trouvé  qui  fût  un  obstacle  au 
jugement  du  Saint-Siège  en  son  hon- 
neur. III.  Le  guide  des  ordinands, 
en  latin ,  1758.  IV.  Instruction  au 
peuple,  en  forme  de  catéchisme,  sur 
les  préceptes  du  décalogue,en  latin, 
1 768.  V.  OEuvres  dogmatiques  con- 
tre les  prétendus  réformés  (  en  ita- 
lien), Venise,  1770.  VI.  Histoire  de 
toutes  les  hérésies  avec  leur  réfuta- 
tion ,  Venise,  1773,  3  vol.  in-80. 
VII.  Victoire  des  martyrs,  ou  Fie 
de  plusieurs  saints  martyrs,  Venise, 
1777,2  vol.  in- 12.  VIII.  Becueil  de, 
prédications  et  d'instructions  ,  Ve 
nise,  1 779,  2  vol.in-8^.  IX.  Instruc-\ 
tionet  pratique  pour  les  confesseurs^ 
(en italien  ainsi  que  les  précédents  ), 
Bassano,  1 780,  3  v.  in- 1 2  ;  c'est  l'an- 
tidote de  V Instruction  des  confes- 
seurs et  des  pénitents  ,  imprimée  à 
Venise  ,  chez  Occhi ,  en  1753.  De- 
puis ,  Liguori  la  publia  en  latin  sous 
le  litre  de  Pratique  du  confesseur, 
Venise,  1781.  X.  La  vraie  éjouse 
de  J.  C. ,  vu  la  sainte  religieuse, 
Venise,  1781 , 3  vol.  in-i2.XI.  Dis- 


ï 


-y 

1 

sm 


LtG 

smfs  sacrés  et  moraux  pour  tous 
es  dimancfies  de  Vannée  y  Venise  , 
1781 ,  111-4°.  XII.  ré:ité  (le  la  foi 
M  réfutation  des  matérialistes ,  des 
iéistes  et  des  sectaires,  Venise, 
i-jSi  ,aTol.  in-8''.  (  Ces  trois  ouvra- 
ges sont  en  italien.  )  XIII.  L'homme 
tpost  clique  dirigé  pour  entendre  les 
:onf  estions  (  en  la  lin  ) ,  Venise  , 
178U,  3  vol.  in-40.  XIV.La  Gloire 
ie  Marie  y  Venise,  1784,  a  vol.  in- 
6*.;  cet  ouvrage  fut  attaque  dans 
anc  Lettre  qui  parut  sous  le  nom  de 
Laminde  Prilaniiis  ressuscité,  (i) 
tori  se  défendit  par  une  courte 
^•nie ,  publiée  à  Naplcs.  XV. 
OEui^res  spirituelles ,  ou  Vam^ur  de 
de  Vaine  et  la  visite  au  SaintSa- 
vrement ,  Venise ,  1 788 ,  '2  vol.  in- 1 2; 
trad.  en  français  ,  Rouen  ,  1 792  ,in- 
la.  (2)  Il  e:dstc encore,  deLiguori, 
plusieurs  livres  de  piélc  fort  cstirac's. 
On  lui  a  reproche'  de  favoriser  le  re- 
lâchement ;  mais  sa  vie  si  pure  et  si 
sainte  plaide  en  faveur  de  sa  doc- 
trine. Loin  d'être  attaché  obstiné- 
ment à  son  sentiment,  il  n'hésita  pas 
PD  plusieurs  occasions  à  rétracter 
publiquement  ce  qui  lui  était  échappé 
de  peu  exact.  Dans  les  controverses 
qu'il  eut  à  soutenir  avec  Patuzzi , 
et  avec  quelques  anonymes  ,  il  mon- 
tra toujours  une  extrême  modéra- 
lion.  Ou  en  voit  uue  preuve  dans 
an  petit  écrit  intitulé ,  Expiatio  , 
qu'il  publia  en  1767,  pour  se  justi- 
her,  lui  et  sa  congrégation ,  contre 
une  lettre  où  l'on  rendait  leur  doc- 
trine suspecte.  Dans  les  dernières 
éditions  cle  sa  Théologie  mx)ralc,'\\ 


Jl)  lAiTtinde  Pritaniut.  ««t  le  nom  ({u'aTait 

fns  âutrrfoi*  le  c*Ulire  Mnrat*ri  .  daat  ua  «n- 

vra|;«  tnutr"  !'«  prrtett^at  LccUic. 

(j'  Non»    ne  citons  prci<}<i«  dan»  c«tte  Iittoqii« 

Utioii*  ilnnnért  a  VeuÏM  .  Y*x  K  «monditii, 

•  t -u  relation  ilc  l.-llm«  avrc   lu  •-«!    I  pié- 

[.   ndaat  il  e»t  prob-ibl*  qn^  la  plupart  J« 

r^t  4ii«ra«i»tfitr*ni  iuiprimét   d'al 


*■  dans  Iv  rayaucBC. 


ibord  ji  Naplea, 


Lit  i% 

n*a  pas  craint  de  revenir  wr  \m  n!i- 
scz  grand  nombre  <!••  I 

avait  données  dans  1".  , 
pies,  et  il  le  fait  avec  une  simj»!  wr- 
qui  ne  cherche  aucune  exruse  :  si  i  < 
pulation  de  sainteté  était  tellrment 
établie,  que  l'on  commença,  peu  après 
sa  mort ,  des  informations  sur  ses 
vertus.  Elles  ont  eu  le  résultat  le 
jJus  satisfaisant; et,  le  i5  septembre 
1816,  Pie  VII  a  public  un  décret 
de  béatification  en  l'honneur  du  pré- 
lat. La  cérémonie  a  eu  lieu  le  mcme 
jour  dans  la  basilique  du  Vatican  ;  et 
le  pape,  accompagné  des  cardinaux > 
Y  a  offert  le  prcauer  culte  au  bien- 
ncureux.  Le  recueil  imprimé  des 
procès-verbaux  et  autres  pièces  re- 
latives à  celle  béatification  ,  forme 
5  vol.  in-fol.  P — c — T. 

LILBURNE  (  Jean  ),  républi- 
cain an«»lais  du  temps  de  Charles  1*^., 
descendait  d'une  ancienne  famille 
du  comté  de  Durham,  où  il  naqiut 
en  1618.  Destiné  au  commerce,  il 
entra,  à  l'âge  de  12  ans  ,  chez  un  fa- 
bricant de  draps  de  Londres,  q»ii 
était  très-opposé  à  la  hiérarchie  ec- 
clésiastique. D'une  imagination  ar- 
dente et  d'un  caractère  inquiet  et  en- 
nemi de  toute  espèce  de  pouvoir  ,  il 
puisa  chez  ce  fabricant  des  idées  de 
liberté  ou  plutôt  de  licence  qui  s'aug- 
mentèrent encore  par  la  leclure  des 
écritsqui  paraissaient  \  cette  époque. 
Le  livre  oes  Martyrs  en  particulier 
Ini  inspira  un  grand  rnlhtmsiasmc. 
Encore  jeune  et  apprenli ,  il  se  vit 
consulté  par  tous  les  cnnenais  de  la 
hiérarchie.  Sa  vanité  fut  flattée  de 
cette  déférence;  et  il  crut  q»ic  la 
profession  qu'il  avait  embrasser  é- 
tait  au  -  des:>ous  de  lui.  En  iG'^C, 
il  Ht  connaissance  avec  le  do»  leur 
RjslNvirk ,  alors  enferme  comme 
auteur  d'écrits  séditieux ,  et  se  char- 
gea d'aller  Caû«  imprimer  en  Hul- 


490 


LÎL 


lande  ,  im  ouvrage  que  celui-ci  ve- 
nait de  terminer  contre  les  evêques. 
Après  avoir  rempli  cette  mission , 
il  revint  en  Angleterre  avec  ce  pam- 
phlet et  quelques  autres  du  même 
genre ,  qu'il  répandit  dans  le  public. 
Trahi  par  un  de  ses  associes  ,  il  fut 
arrête  et  condamne'  en  février  1687 , 
par  la  chambre  étoilëe  ,  à  la  prison, 
au  pilori  et  à  une  amende  de  5ooliv. 
sterl.  II  subit  sa  peine  avec  une  au- 
dace incroyable,  jetant  des  pamphlets 
au  peuple,  et  proférant  pendant  son 
exposition  des  invectives  tellement 
violentes  contre  les  e'vêques  ,  qu'on 
fut  obligé  de  lui  mettre  un  bâillon  ; 
ce  qui  ne  l'empêcha  pas  de  gesticu- 
ler avec  une  sorte  de  rage,  jusqu'à  ce 
qu'on  le  détachât  du  pilori.  Il  reçut 
à  cette  occasion  le  surnom  de  Free- 
horn  John  (  Jean  V Indépendant  ) , 
qui  lui  fut  donné  par  les  amis  du 
gouvernement ,  tandis  que  ses  parti- 
sans le  regardèrent  comme  un  saint 
persécuté.  Pour  punir  les  nouveaux 
effets  de  sa  frénésie,  ses  juges  le  firent 
enfermer  dans  un  cachot  étroit  avec 
les  fers  aux  pieds  et  aux  mains.  On 
avait  une  telle  opinion  de  son  carac- 
tère audacieux  ,  qu'il  fut  soupçonné 
d'avoir  mis  le  feu  à  sa  prison  pour 
s'évader;  et  à   la   sollicitation  des 
détenus,  on  le  transféra  dans  une  au- 
tre ,  où  il  fut  moins  resserré,  et  où  il 
put  écrire  encore  diverses  brochures 
contre  l'épiscopat.  En  1640,  le  long 
parlement  lui  accorda  sa  liberté,  dont 
ilabusa  en  demandant,  à  la  tête  d'une 
populace  furieuse ,  que  le  comte  de 
Sîralï'ord  fîit  mis  en  accusation.  Le 
jour  suivant ,  il  fut  arrête  et  con- 
duit devant  la  chambre  des  lords  ; 
mais ,  par  suite  de  l'esprit  du  temps, 
il  fut  déclaré  non  coupable,  et  la 
chambre  des  communes  décida  que 
la  sentence   rendue   contre  hii  par 
la    chambre    étoilée    était    illégale 


LIL 

et  tyran  ni  que  ,  et  que  l'on  devaîi 
lui    allouer    un    dédommagement 
Ce    dédommagement    fut  fixé  pai 
la   chambre   des  lords  à  deux  mii 
le  livres  sterling  ,    à  prendre   sui 
les  biens  de  ses  adversaires.  Grom 
well ,   à   son  retour   d'Irlaiide  ,  cr 
mai  i65o ,    lui   fit   encore   accor- 
der une  autre  somme.  Lorsque  U 
parlement  eut  voté  une  armée  à  op 
poser  au  roi,  Lilburne  y  entra  com- 
me  volontaire.    Il    était    capitaine 
d'infanterie  à   la   bataille    d'Edgc 
Hill ,  et  se  distingua  à  celle  de  Bre 
ford  ,  où  il  fut  fait  prisonnier.  Co] 
damné  comme  coupable   de  hai 
trahison  ,  il  eût  subi  la  peine  ca 
taie  ,  si  le  parlement  n'eut  décl 
qu'il  userait  de  représailles.  Il  fi 
bientôt  après  ,  échangé   et  reçu 
triomphe  par  son  parti,  qui  lui 
présent  d'une  bourse  de  trois  cents 
livres  sterling.  Il  abandonna  son  gé 
néral,  le  comte  d'Essex  ,  lorsqu'ils 
vit  s'opposer  aux  indépendants, el, 
fut  fait  lieutenant-colonel  de  dragousl 
dans  la  nouvelle  armée,  levée  parle 
comte  de  Manchester  :  il  devait  à 
Cromwcll  le  grade  de  major  ,  qu'il 
avait  obtenu  quelques  mois  aupara- 
vant (  octobre  i643  ).  Lilburne  se 
conduisit  avec  bravoure  pendant  le 
cours  de  sa  carrière  militaire  ,  qu'il 
quitta  lorsqu'il  eut  acquis  la  cerl 
tude   que  les  principes  de  l'ég 
presbytérienne  qu'il  abhorrait , 
minaient  dans  l'armée.  Son  es 
irascible  et  querelleur  lui  fit  aci 
ser  tour-à-tour    ses   divers   cLefs  , 
contre  lesquels  il  écrivait  des  pam- 
phlets furibonds.  Le  comte  de  Man- 
chester et    Cromwell  ,  quoique  ses 
protecteurs  ,   ne  purent    échapper 
à    ses   attaques.    La   chambre    des 
lords  ,  elle-même ,  fut  souvent  trai- 
tée par  lui  avec   un  extrême  mé- 
pris ;  aussi  fut-il  mis  plusieurs  foi» 


u'il 


LIL 

prison.  Se  voyaut  ab.indonn(^  y  il 
tcuU  de  faire  déclarer  l'armec  eu 
M  faveur ,  et  accusa  CromNvcII  de 
TOuloiruMirperlo  pouvoir  souverain, 
et  Irelou,  de  l'aider  dans  ce  dessein. 
Traduit  devant  la  clianibre  des  com- 
munes en  lOfS,  comme  coupable 
de  manœuvres  séditieuses,  il  avait 
tant  d'amis  parmi  la  populace,  que  la 
chambre  crut  devoir  le  renvoyer  de 
ra«cusation  portée  contre  lui.  A  la 
mort  du  roi ,  il  s'opposa  avec  beau- 
coup de  violence  à  ce  que  les  chefs  de 
rarniee  concentrassent  le  pouvoir 
dans  leurs  mains,  et  soutint  que  le  peu- 
ple avait  seul  le  droit  de  se  donner 
une  constitution.  Enfin,  cet  enthou- 
siaste parut  si  dangereux  à  Crom- 
v?cli  lui-mcmc,  qu'd  le  fit  enfermer 
de  nouveau  à  la  Tour,  et  traduire  de- 
vant une  commission;  mais  il  fut  en- 
core acquitte  par  le  jury  ,  au  grand 
contentement  de  la  populace.  Ou 
frappa  même, à  celte  occasion,  une 
médaille  qui  le  représentait  avec  cette 
'"^riptiou;  «  Jean  Lilburney  sauvé 
ir  le  pouvoir  de  Dieu  et  l'inté- 
»  grité  de  ses  jurés  qui  sont  juges 
•  aussi  bien  t  u  droit  que  du  fait  ;  » 
et  de  l'autre  côte'  le  iToni  des  jures. 
Knfin  une  nouvelle  insulte  qu'il  fit 
parlement ,  détermina  ce  corps 
1 0  condamner  à  une  amende  et 
i'anuissemcnt.  Avant  que  le  ju- 
iicnt  pût  être  mis  li  exécution , 
il  s'était  retiré  à  Amsterdam ,  d'où 
il  écnvait  contre  Cromvall,  qu'il 
accusait  d'être  son  persécuteur.  U 
eut  en  Hollamle  des  conférences  avec 
les  royalistes ,  et  propo.«'a  de  rétablir 
' 'nries  II ,  sur  son  troue,  moycii- 
if  dix  mi!le  livres  sterling  ;  mai* 
on  ne  jugea  pas  à  propos  descfici'à 
un  tel  homme.  Il  resta  dan*  l'exil 
jusqu'à  la  dis^olulion  du  Xon^  paric- 
»nf>nl  ;  puis  il  rentra  en  Angleterre, 
i>  autorisation.  Arrête  et  Uudait 


deranl  un  jury,  iJ  fat  acquitté  pour 
la  troisième  fois  ;  ce  oui  irrita  virc- 
mrnt  Cronnvrll ,  qui  le  fil  de  noti- 
vrau  arrêter ,  et  voulut  mcmr  le  fair* 
déporter  :  mais  un  frère  de  Ijlbnnie, 
alors  major-général .  obtint  la  lil)ertt 
du  prisonnier, qui  se  retira  à  KIthem , 
dans  le  comté  de  Kent,  où  il  passa 
le  reste  de  sa  vie  dans  le  repos. 
Lilburne  prouva  cependant  de  nou- 
veau la  versatilité  de  son  caractère, 
en  adoptant  la  religion  des  qua- 
kers ,  *aont  il  devint  un  des  prédi- 
cateurs jusqu'à  sa  mort,  arrivée  le 
ag  août  i(»57.  Jean  Wood  le  peint 
((  comme  un  homme  habitué  des 
»  sa  jeunesse  ,  aux  disputes ,  aux 
))  nouveautés,  à  l'opposition  envers 
»  le  gouvernement  ,  et  aux  exprrs- 
»  sions  les  plus  violentes  et  1<>  j>Iu5 
»  amèrcs  ;  idole  d'un  peuple  fac- 
»  ticux,  disposé  à  troubler  tontgou- 
»  vernement  régulier  ,  faisant  un 
»  mélange  de  toutes  les  religions, 
»  chef  de  niveleurs,  faiseur  de  pro- 
»  jets  de  toute  espèce,  et  auteur  de 
»  pamphlets  séditieux,  ayant  unca- 
»  ractèrc  tellement  qucrcilcur ,  cpic 
»  le  jugeJcnkins  disait  de  lui ,  »////<? 
s* il  était  le  seul  être  vivant  sur  la 
terre ,  Lilburne  serait  en  dispute 
avec  Jean ,  et  Jean  avec  Lilburne. 
Clarendon  et  Hume  n'en  font  pas  un 
portrait  plus  ilalteur.  Les  biogra- 
j)hes  anglais  citent  de  lui  une  vir:;; 
taille  de  pamphlets,  tous  ex? 
ment  virulents,  écrits  d'une  m 
très-commune,  mais  quclq>iefoi$  in- 
génieuse, et  où  l'on  trouve  les  mo- 
dèles de  tous  les  projets  extra va- 
gantsdontlcs  hommes  du  même  ca- 
ractère ont  fatigue  l'attention  pu- 
Uiq  '"      nies  ér»oques.    D-r-s. 

1,  ,  M.  k  orez  Villu.rv. 

suédois, nccn  lÛJi, 

U  d'abord  le  nom  de  Â^vfnt^crf  i^nd 


492 


LIL 


changea  en  celui  de  Lilieblad ,  quand 
il  eut  obtenu  des  lettres  de  noblesse. 
Il  voyagea  pendant  dix  années  ;,  et 
profita  de  ses  voyages  pour  augmen- 
ter ses  connaissances  ,  et  surtout 
pour  se  perfectionner  dans  les  lan- 
gues orientales.  Il  apprit  à  fond 
rhëbreu  ,  le  chalde'en  ,  le  syriaque, 
l'arabe ,  le  turc  ,  l'e'tliiopien.  En 
1681  ,  il  retourna  en  Suède ,  et  fut 
nomme  professeur  des  langues  orien- 
tales à  Upsal.  Quelque  temps. après, 
Charles  XI  l'envoya  en  Pologne  pour 
s'instruire  de  la  doctrine  ,  des  ce'ré- 
monies  et  des  usages  de  la  secte  des 
Karaites  ;  il  rendit  compte  au  roi  de 
son  voyage ,  et  publia  peu  après  : 
Epistola  de  Karditis  Lithuaniœ 
ad  Johan.  Ludolphuin  (  1691  ). 
Après  avoir  professe  long-temps  les 
langues  orientales  à  Upsal ,  Lilieblad 
fut  nomme  censeur  des  livres  ,  et 
bibliothécaire  de  la  cour.  Il  mourut 
en  1710.  Outre  la  lettre  sur  les  Ca- 
raites  que  nous  venons  d'indiquer , 
on  a  de  lui  :  Concio  laudibus  nohi- 
lium  in  orbe  Eoo  idiomatum  dicta, 
Stockholm,  1674'  —  Duo  codices 
Talmudici  avoda  sacra  et  Tainid 
cum  paraphrasi  latind,  Altdorf , 
1680.  —  Mos.  Maimonidœ  tractât, 
de  primitiis,  cum  vers.  Anal.  Upsal, 
1694-95.  — Delemplo  Herculis  Ga- 
ditano,  Stockholm,  1695.  —  ffis- 
toria  rerum  jEgyptiacarum  ah  ini- 
tiis  cultœ  religionis  ad  ann.  Hegirœ 
953,  Stockholm,  1698.     C — AU. 

LILIEGRANTZ  (  Jean  comte 
DE  ),  ministre  des  finances  en  Suède, 
sous  le  règne  de  Gustave  III ,  était 
né  dans  ce  pays  vers  l'année  1730, 
d'une  condition  obscure,  sous  le  nom 
de  Westerman.  Ayant  montré  de 
bonne  heure  des  dispositions  pour  les 
sciences  économiques  ,  il  obtint  des 
états  du  royaume  une  somme  pour 
voyager  dans  les  principaux  pays  de 


LIL 

l'Europe  ,  et  recueillir  des  rcr 
seigneraents  sur  les  manufactures 
le  commerce.  Il  parcourut  l'Ailemî 
gne,  l'Angleterre,  la  France,  l'Italie 
et  revint  avec  un  recueil  d'observs 
tions  importantes,  qu'il  fit  paraître  en 
suédois  dans  une  suite  de  mémoires. 
Gustave  III  étant  monté  sur  le  trô- 
ne ,  et  voulant  régénérer  les  finan- 
ces ,  jetables  yeux  sur  Westerman ,  et 
lui  confia  l'exécution  de  son  plan. 
Anobli  sous  le  nom  de  Liliecrantz, 
il  fut  nommé  secrétaire  d'état  poi 
les  finances.  Il  sut  profiter  habih 
ment  des  circonstances  de  la  gueri 
d'Amérique  ,  pendant  laquelle 
Suède  ,  sous  les  auspices  de  la  nei 
tralité  armée,  fit  un  commerce  trèi 
lucratif,  pour  procurer  au  gouvei 
nement  les  matières  d'or  et  d'argent 
et  il  vint  à  bout  d'opérer  la  réali- 
sation au  moyen  de  laquelle  les  an- 
ciens papiers  furent  retirés  de  la  cir- 
culation. Le  crédit  des  nouveaux 
billets  de  la  banque  de  Stockholm 
obtint  une  base  solide,  qui  n'a  été 
depuis  eljranlce  que  par  les  guer- 
res dispendieuses  survenues  dans 
les  derniers  temps.  S'élant  retiré 
du  ministère  des  finances,  le  comte 
de  Liliecrantz  fut  revêtu  de  la  di- 
gnité de  sénateur  ;  et  quand  le  sénat 
eut  été  supprimé,  il  devint  prési- 
dent au  conseil  de  commerce, 
conservant  néanmoins  le  litre 
sénateur  et  le  rang  attaché  à  ce  titi 
Il  fut  aussi  nommé  commandeur 
chancelier  des  ordres  du  roi.  L'ac^ 
demie  des  sciences  de  Stockholm 
comptait  parmi  ses  membres  ;  et 
a  fourni  ]>lusieurs  mémoires  à  cetfl 
société  savante.  Une  physionomie  j 
pleine  de  douceur ,  des  manièrei  \ 
agréables  ,  une  mémoire  richement  i 
meuldée  ,  et  une  grande  coanaissauce 
des  hommes ,  rendaient  la  société  du 
comte  de  Liliecrantz  aussi  intéres- 


LIL 

santc  qirinstrurlive.  Il  parlait  avec 
une  grande  facilite  le  fraiiyais, 
l'anglais  et  rallcmaiid.  Ce  ne  fut  que 
dans  les  dernières  années  de  sa  vie, 
(qu'il  se  retira  des  atiaires.  II  est  mort 
en  iBiT),  laissant  des  fils  engages 
dans  la  carrière  militaire.    C — au. 

LILIENBERG  (  JtAN-OEOROK 
comte  ue),  ne  en  Finlande,  et  mort 
dans  sa  terre  de  Herreslad ,  vers  la 
■fin  du  di\-liuitième  siècle  ,  à  l'âge  de 
qualre-vingt-cinq  ans ,  fut  cham- 
bellan du  roi  de  Suède  Frédéric  V^.y 
puis  uomme'  successivement  gouver- 
neur d'Abo  et  d'Upsal ,  et  enfin  prë- 
Isident  au  conseil  des  mines.  Ce  fut 
en  celte  qualité  qu'il  porta  la  parole 
dans  une  circonstance  critique  ,  au 
nom  de  tout  le  corps  des  présidents. 
En  1768,  le  roi  AdoIpLe-Frédéric 
ayant  résolu  de  se  démettre  du  gou- 
vernement, et  refusant  de  le  repren- 
dre si  le  sénat  ue  consentait  à  la  con- 
vocation de  la  diète,  ce  corps  fit  des 
difficultés;  et  il  y  eut  dans  les  affaires 
une  stagnation  qui  pouvait  avoir 
des  suites  fâcheuses.  Quelques  jours 
s'étaut  écoulés  en  pourparlers  et 
en  négociations ,  les  présidents  ou 
chefs  des  départements  se  concer- 
tèrent pour  faire  une  démarche 
auprès  du  sénat.  Le  président  Li- 
iienberg,  en  qualité  de  doyen,  se  mit 
à  la  tète  de  la  députation ,  et  pro- 
nonça devant  l'assemblée  du  sénat 
un  discours,  où  il  déclara  que  l'ordre 
et  la  sûreté  de  l'état  demandaient  une 
prompte  décision,  et  que  le  trône  ne 
pouvait  rester  vacant ,  parce  que  le 
sénat  n'était  point  autorisé  par  les 
lois  à  gouverner  sans  le  roi  ,  et  que 
les  autorités  se  trouveraient  dissou- 
tes. Cette  démarche  hardie  produisit 
l'effet  désiré;  le  sénat  consentit  à  la 
convocation  des  états,  et  le  roi  reprit 
les  rênes  du  gouvernement. Le  comte 
de  Lilieobcrg  aimait  les  sciraccs  et 


UL  493 

les  arU;  il  perfectionna  Tagriculiurt 
dans  ses  domaines ,  et  donna  des 
soins  à  l'administration  des  mines 
et  des  forges.  Les  améliorations  qui 
ont  eu  lieu  pendant  le  dernier  siè- 
cle, dans  celte  branche  im])ort.intc , 
sont  le  sujet  d'un  discours  qu'il  lut 
dans  une  assemblée  publique  de  l'a- 
cadémie des  sciences  de  Stockholm, 
dont  il  était  membre.  On  trouve  dans 
ce  discours  des  notions  exactes  et 
complètes  sur  le  produit  des  mines 
de  fer  et  de  cuivre  de  la  Suède.  —  Li- 
lienberg(  Eric-Gustave  baron  de  ), 
frère  du  précédent , colonel  en  France, 
él  lieutenant-général  en  Suède,  com- 
mença sa  carrière  militaire  sous  le 
maréchal  de  Saxe  ,  dont  il  fut  aide- 
de-camp  pendant  la  guerre  de  1 740. 
Il  prit  une  part  glorieuse  aux  ba- 
tailles de  Raucoux  et  Laufeld ,  ainsi 
qu'aux  sièges  de  Tournay  ,  d'Aude- 
narde  et  d'Ath  ,  et  mérita  une  pen- 
sion de  1200  liv.  Retournéen  Suède, 
il  fit  plusieurs  campagnes  en  Pomé- 
ranie  pendant  la  guerre  de  sept  ans. 
Il  mourut  en  1770,  sans  avoir  été' 
marié; et  son  frère  n'ayant  point  eu 
de  fils,  la  famille  Lilienberg  est 
éteinte.  C — au. 

LILIENTHAL  (  Michel),  sa- 
vant philologue  allemand ,  était  ne' 
en  1O86,  à  Liebstadt,  en  Prusse. 
Après  avoir  fait  ses  études  avec  beau- 
coup de  distinction  ,  il  fut  promu  au 
saint  ministère.  Quelque  temps  après 
il  reçut  une  vocation  pour  Kœnigs- 
berg  :  il  fut  ensuite  nommé  profes- 
seur de  théoloi^ie  à  l'université  de 
cette  ville ,  et  il  en  cumula  les  fonc- 
tions avec  celles  du  pastoral  jusqu'à 
sa  mort  arrivée  en  1750.  Lilienlhal 
était  membre  de  la  société  royale  de 
Berlin  et  de  l'académie  de  Pcters- 
bourg.  Il  fut  le  principal  rédacteur 
de  X Erleuterte  PreusseUf  jounial 
littéraire  fort  estimé,  publié  a  K'P" 


494 


LIL 


lùcjsberg  (le  17*^4  ^  '7^^?  4  vol. 
iA-B**.  Il  avait  pour  collaborateurs 
Th.  Bayer,  J.-J.  Rbod,  Volbreclit, 
Arnold  et  Seyler.  On  y  joignit,  en 
i^j/\'2j  un  cinquième  volume,  qui 
contient  des  suppléments  et  des 
corrections  pour  les  premières  par- 
ties. Ce  journal  attira  quelques  en- 
nemis à  Lilientlial  parmi  les  écri- 
vains que  chagrinait  sa  critique  fran- 
che et  parfois  maligne  j  mais  il  lui 
mérita  l'estime  de  tous  les  littéra- 
teurs impartiaux.  Il  en  a  publié  une 
espèce  de  continuation  sous  ce  litre: 
u^cta  B oints sica  (  en  allemand  )  , 
Kœnigsberg,  i73o-3*2,  3  vol.  iu-S*^. 
Chaque  volume  est  divisé  en  six  par- 
ties ,  avec  autant  de  portraits  d'au- 
teurs prussiens.  Ce  recueil  contient 
d'excellents  articles  sur  l'histoire  ec- 
clésiastique et  civile  de  la  Prusse  , 
les  vies  de  plusieurs  savants  ,  l'in- 
dication d'ouvrages  manuscrits  ou 
imprimés  peu  connus,  les  nouvelles 
littéraires,  et  différents  opuscules 
rares.  Outre  plusieurs  Dissertations 
insérées  dans  les  Mémoires  des  aca- 
démies de  Berlin  et  de  Pétersbourg , 
on  a  encore  de  Lilienthal  :  I.  De  his- 
torid  litterandcertœcujusdam  sen- 
tis scribendd  consultatio ,  Leipzig , 
1710,  in-8**.  Cest  le  plan  d'une  his- 
toire littéraire  de  la  Prusse  qu'il  avait 
le  projet  de  publier*  mais  il  l'avait 
conçue  d'une  manière  trop  vaste  ,  et 
l'exécution  en  eût  été  difficile.  II. 
De  machiavelismo  litterario,  Kœ- 
nigsberg ,  1 7 1 3 ,  in-8^.  :  il  y  dévoile 
les  manœuvres  et  les  intrigues  em- 
ployées par  quelques  littérateurs, 
pour  usurper  une  réputation  non 
méritée.  III.  Selecta  historica  et 
litterariay  ibid. ,  1 715-19,  1  vol. 
iu-S'*.  C'est  un  recueil  de  pièces  la 
plupart  inédites  et  intéressantes  ;  le 
premier  volume  contient  :  Fita 
Èalth,  Beckeri,  —  JdeaenuUlimo- 


LIL 

desti,  —  Catalogus  Codicum  raris' 
simorum  hiblioth.  Mediceœ  ex  Mss. 
Holstenii ,  avec  des  corrections  et 
des  additions.  —  De  libris  in  ana. 
—  De  Biblioiaphis.  —  De  H  alloue 
à  muribus  corroso.  —  De  vocalis  ab 
Adamo  aninialibuSj  et  enfin  De  So- 
lecismis  litterariis.  Le  second  :  De 
usuel  abasu philolhecarum.  —  De 
renim  Punicarum  scriptoribus  ma- 
nuscriptis  et  euulgalis. — De  Helend 
Menelai  ejusque  amatoribus.  Les 
trois  autres  pièces  renfermées  danj 
ce  volume  ont  pour  auteurs  Th| 
Bayer ,  Rhode  et  G.-H.  Rastius.  F 
Auserlesenes  Thalercabinet ,  etc. 
Kœnigsberg,  1 7^26,  in-8^.  ;  quatrièin 
édition^,  1 747  ^  in-8^.  C'est  une  des 
cription  des  principales  médaill 
modernes  et  des  thalers  ou  écu 
d'empire  frappés  depuis  Charles- 
Quint.  Sa  collection  de  pièces  de  ce 
genre  s'élevaità  800.V.  Lilienthalis- 
che  bibliotliek,  1739-43  ,  3  pari,  iu- 
8^^.  C'est  le  catalogue  raisonné  de 
sa  nombreuse  bibliothèque  :  l'ou- 
vrage devait  former  dix  petits  vo- 
lumes; mais  l'auteur  n'eut  le  temps  de 
publier  que  les  trois  premiers ,  qui 
ne  donnent  pas  même  en  entier  la 
partie  théologique.  YI.  Preussischs 
Bibliolhek,  ibid.,  1 74ij  in-S*'.  C'est 
une  notice  de  tous  les  auteurs  qui 
ont  écrit  sur  la  Prusse.  VII.  Bibli 
cher  Archiifarius ,  ibid. ,  1745-4 
'X  vol,  in-4*'.  C'est  l'indication 
tous  les  commentateurs  de  la  Bib 
classés  suivant  l'ordre  des  passages, 
verset  par  verset.  On  avait  déjà  pu- 
blié en  ce  genre ,  en  1 694  ,  un  tra- 
vail fort  étendu.  (  Voyez  Dorsgiie.) 
YIII.  Theologisch-homiletischer  U- 
bliolJiek,  ibid. ,  1749  ,  in'4^-  :  tra- 
vail du  même  genre  sur  toutes  les 
parties  de  la  théologie,  à  l'usage  des 
protestants.  Tous  ces  ouvrages  soni 
ctt  allemand.  IX.  Des  Additions  à  U 


pu 

i 


Uhîiotheca  historiœ  litterariiw  de 
I  is.  ;  V.  Ji  GLKR  et  Strivius.  ) 
.a  a  publie  la  vie  de  Mioh.  Li- 
culhal  dans  sa    Gelerte   Euopa. 
'-  T.ii.if  îfTUAL  (  Théodore -Cliris- 
,  tlicologicn ,  fils  du  prece- 
uc  À  Kœnigsljcrg ,  en  1717, 
lie:  T.  Une  Hisloii-e  critique 
.     .unie  Dorot/iee ,  protectrice  de 
ji  Prusse,   Daulzig,  1743,  in-4®. 
enalernand.  )  II.  Deux  Disserta- 
on^  latines  ,  sur  lu  lutte  de  Jacob 
ontre  un  ange,  Kœnigsbcrg,  1 744. 
H.  Des  Leçons  sur  ha  Biuls  (  en  aU 
ul  ),  1756-72.  Cet  ouvrage  se 
i)uait  par  cahier  à  des  époques 
rminécs  ;  l'auteur  y  refuie  soli- 
iit  les  objections  des  déistes  con- 
T l'ancien  elle  nouyeau Testament. 
V.  Comment  atio  criticasistensduo- 
um  codicum  Mss.  biblia  hebraïc  i 
ontinerUium    bibliotliecœ    Regio  - 
lontanœnotitiamcumprœcipuanim 
'oriantium  lectionum  sylloge,  Kœ- 
igsberg,  1770,  in-S''.  ;  et  environ 
oixante  autres  dissertations  ou  opiis- 
ules  académiques  dont  on  peut  voir 
î  détail  dans  Meusel.   Litientbal  a 
•ncore  fourni  de  nombreux  articles 
la  plupart  des  journaux  de  l'Alle- 
aagne.  W — s. 

LILTO  ;  Louis) ,  en  latin  Aloysius 
aUus^  est  devenu  fameux  par  la 
»art  qu'il  eut  à  la  réforme  du  ca- 
eudrier  Grégorien  (  F  oyez  Gré- 
.oiRE  XIII  ).  Il  était  né,  non  à 
Vérone  ,  comme  le  dit  Montucla  , 
jais  à  Ciro  ,  village  de  la  Calabre. 
1  pratiquoit  la  médecine ,  et  culti- 
aiten  même  temps  l'astronomie, 
cience  pour  laquelle  il  avait  un 
;oôt  liés-vif.  On  ignore  les  autres 
larticularités  de  sa  vie  ;  et  Lilio 
crait  toul-à-fail  inconnu  ,  s'il  n'eût 
ws  attaché  son  nom  à  l'importante 
no'ration  dont  ou  vient  de  parler, 
ca  sentait   k  nécessité  depuis 


I.ir.  4r>0 

long-tempt.  Le  véncraMn  BM« ,  d(f 
le  huilièmc  sièr.Ic ,  avait  remarqua 
ranticipation  des  ffquinoxcs;  et  Ro- 
ger Bacon  ,  cinq  siècles  plus  tard , 
siCTiala  les   iiniK'rfection.s    toujours 
plus  sensibles  du  calendiier  Julieu 
dont   on  continuait  à  se  servir.  Le 
projet  de  le  reformer  fut  encore  re- 
nouvelé dans  le  quinzième  siècle  par 
Pierre  d'Ailly  et  le  cardinal  de  Cu»a, 
qui  présentèrent  au  concile  de  Cons- 
tance, des  Mémoires  auxquels  il  ne 
fut  pas  donné  de  suite.  Cependant  It 
besoin  d'y  mettre  la   main  devenait 
de  jour  en  jour  plus  pressant.  Un 
grand  nombre  d'astronomes  du  siè- 
cle suivant   s'en    occupèrent    avec 
ardeur  ;  mais  il  était  réservé  à  Lilio 
d'exécuter  seul  un   projet  que  tant 
d'autres    auraient    essayé     inutile- 
ment (  I  ).  Il  n'inventa  pas  les  épac- 
tes,  dont  l'usage  était  connu  depuis 
long-temps.  (  Fojez  Ximenès,  In- 
trod.  ad  gnomon.  Florent.  )  :  il  lei 
appliqua  au  cycle  de  dix-neuf  ans,  et, 
eu  y  ajoutant  un   jour  à  la  (in  de 
chaque  cycle,  il  parvint  à  une  équa- 
tion approximative  des  années  so» 
laire  et  lunaire.  Lilio  venait  de  ter- 
miner son   travail,    lorsqu'il  mou- 
rut en    157G.    Son  frère  (  Antoine 
Lilio  )  présenta  son  projet  au  pape 
Grégoire,  qui  l'adjoignit  a  la  com- 
mission  chargée  de  l'examen    des 
mémoires    présentés  par   les  diffé- 
rents mathématiciens.  Celui  de  Lilio 
obtint  la  préférence  ;  et  le  pape  s'é- 
tant    assuré  du    consentement  des 
souverains,  donna,  en  i58i,  Ui  fa- 
meuse bulle  qui  abrogea  l'ancien  ca- 
lendrier et  lui  substitua  le  nouveau. 
Les  Tables  des  epic tes  dressées  par 
Lilio,  ont  été  insérées,  avec  des  ex- 
plications, dans  le  Calfndariuni  Ro- 

(0  -^otut  (Al.  tlrti.»  )perj.cii  foJ  .»«''• 
pi:  ■      iLa»»i  PtuacAt'twc'^.  > 


496  LIL 

manum  de  Clavius  ,  pag.  5  .et  suiv. 
(  F.  Chr,  Clavius.)  J.  Yitt.  Rossi  a 
consacré  im  article  dans  sa  Pinaco- 
thecUy  à  Lilio,  qu'il  nomme  un  méde- 
cin et  pliiloso])lie  très-docte.   W-s. 

LILIO  GIRA  LDI ,  Foj.  Giraldi. 

LILLE  (Christian  Everard  de), 
né  à  la  Haye,  en  1 724 ,  étudia  la  mé- 
decine à  Leyde,  où  il  fut  reçu  docteur 
en  17.56.  Il  remplaça  Camper  dans 
la  chaire  de  médecine  et  de  chirur- 
gie à  Groningue,  et  s'y  distingua  par 
son  instruction  et  ses  talents.  Ou  a 
de  lui  :  Tractatus  de  palpitatione 
cordis,  fjuem  p'^œcedit  prœcLa  cor- 
dis  historia  physiologica  ;  cuique 
pro  coronide  addita  sunt  monita 
qvœdam  generalla  de  arteriaruin 
pulsûs  intennissione ,  ZwoU,  1755  , 
in-S**.  II  a  joint  aux  remarques  phy- 
siologiques des  oi)seiTation«  intéres- 
santes sur  les  maladies  du  cœur. 
Voy. ,  sur  cet  ouvrage ,  V  Ilist.  pragm. 
de  la  médecine ,  par  Curt  Sprengel , 
5^  part.  ,no.  iio.  P  et  L. 

LILLO  (  George  ) ,  auteur  dra- 
matique, né  à  Londres  en  1693, 
e'iait  joaillier  de  profession,  et  d'une 
secte  de  dissenters.  On  ne  sait  rien 
sur  sa  vie  et  sur  sa  personne,  sinon 
qu'il  était  d'une  figure  agréable , 
bien  qu'il  fût  privé  d'un  œil.  Il 
mourut  en  1789.  Fielding  a  dit  , 
dans  le  Champion ,  que  Lillo  avait 
une  connaissance  profonde  de  la 
nature  humaine,  quoique  son  mé- 
pris pour  tous  les  moyens  vils  de 
faire  sa  cour,  qui  sont  iiiidispensablcs 
pour  se  répandre  dans  le  grand 
monde,  eût  renfermé  ses  liaisons 
dans  d'étroites  limites.  «  Son  ame 
»  était,  ajoute  Fielding,  celle  d'un 
i)  Romain,  jointe  à  l'innocence  d'un 
»  Chrétien  des  premiers  temps.  » 
En  elFet ,  ses  ouvrages,  remarquables 
par  l'art  d'émouvoir  et  d'inté- 
resser au  sort  de  simples  particu- 


LIL 

Hers  autant  qu'au  destin  des  ro 
et  des  héros ,  ont  tous  un  but  mori 
et  religieux.  Ses  sujets,  toujours  pr 
dans  les  malheurs  domestiques  et  h 
maux  qui  résultent  du  désordre  d( 
mœurs,  sont  bien  choisis;  ses  plai 
bien  combinés  :  son  style  est  énerg 
que  et  touchant,  quoiqu'on  lui  ait  r( 
proche  quelquefois  trop  d'élévalio 
relativement  au  rang  de  ses  ])ersoii 
nages.  Ses  drames  ou  tragédies,  qi 
ont  eu  le  plus  de  succès ,  sont ,  I 
Négociant  de  Londres,  ou  V Hi^ 
toi'-e  de  George  Barnwell,  1731 
imitée  en  français  pir  Saurin,  c 
dont  le  sujet  est  tiré  d'une  ancien  ~ 
ballade,  célèbre  en  Angleterre  j 
Curiosité  fatale  ,  1787  ,  et  Arc^ 
de  Feversham ,  1702.  Le  succès| 
ces  pièces  prouve  peut-être,  qui 
qu'en  ait  dit  Voltai  e ,  qu'on  ' 
s'intéresser  sur  le  théâtre  au  soi 
d'un  bourgeois.  Les  autres  pièce 
de  Lillo  sont  :  Sylvie ,  ou  les  Fum 
railles  de  campagne,  1780  ;  le  .^c 
ros  chrétien,  1784;  Marina,  1788 
Elmerick  ,  ou  la  Justice  tnaji 
phante ,  représentée  après  la  moi 
de  l'auteur,  et  imprimée  en  174C1 
Ses  œuvres  ont  été  publiées  par  T 
Davies,  en  1775,  2  vol.  in- 12.  Il 
mérité  les  éloges  de  Pope;  et  il  peu 
être  placé  au  premier  rang  parmi 
les  auteurs  dramatiques  anglais 
second  ordre.  Lj 

LILY(GuiLLAUME),né  en  i4( 
à  Odyham,  dans  le  Hampshire, 
ses  études  à  Oxford ,  et  alla  apprenc 
la  langue  d'Homère  et  de  Démosthè] 
ne,  sur  les  lieux  mêmes  que  ces  grand.-; 
hommesavaientillustrés.Sacuriositij 
religieusele  conduisit  plus  tarden  Pa . 
lestine  pour  visiter  Jérusalem.  Animii 
par  un  motif  semblable  à  celui  qu^ 
lui  avait  fait  entreprendre  le  voy ag< 
de  la  Grèce ,  il  se  rendit  à  Rome 
pour  étudier  la  langue  latine^  dans  V 


âlrie  de  Virgile  et  de  Ciccfron.  Dii- 

jour  dans  cclto  capitale, 
louons  de  Sulpicius  et  de 
Sabimis,  tous  deux  pro- 
iioinmcs  de  j^raminaire  et 
iUt'uce.  De  retour  à  Londres, 
lia  des  leçons  de  grammaire  , 
•sie,  de  rhétorivque,  et  devint, 
>r2,lc  premier  maître  de  la 
se  école  de  Saint-Paul ,  à  l'ë- 
de  sa  fondation.  (  Fojrez  Co- 
On  en  vit  bientôt  sortir  des 
^  qui  se  rendirent  très-célèbres, 
^titutcurfut  enlevé  parla  peste 
'  3.  On  a  de  lui  :  I.  Introduction 
\  in*^,  partie  du  Discours,  (que 
iies-uus  attribuent  au  docteur 
.et  d'autres  à  David Tolley.)  II. 
ruction  d^  la  viii'^.  partie  du 
urs.  [II.  Monitapœdagogica  , 
iinnen  de  moribus  ad  suos  dis- 
•>.  IV^  Breuissinia  institutio , 
Uio  grammatices  cognoscen- 
(d  omnium  puerorum  utilita- 
rœ script œ  ,  etc.  ;  revue  et  pu- 
,  en  i53o,  par  Jean  Rilewise. 
Inti-Bossicon.  C'est  un  poème 
.  contre  Robert  Wittington,  qui 
attaqué  l'auteur  sous  le  nom 
'tssus,  Londres,  i52i  ,  in-4**. 
Omnium  nominum  in  regulis 
^ntoruni  ,  tum  Iieteroclitorum , 
t'rhorum ,  interpretalio  aliqua, 
-  ces  traités  de  grammaire  furent 
s  et  publiés  à  Oxford,  en  1673, 
des  additions  par  Jean  Ritewise 
iiomas  Robertson.  Ils  sont  eu- 
OQ  usage  dans  les  écoles  d'An- 
I  rre.  VIL  Poémata  varia ,  im- 
iinc's  après  la  mort  de  l'auteur, 
l'Anti-Bossicon.  VIII.  De  lau- 
V  Deiparœ  virginis.  IX.  Apolo- 
(ul  Johannem  Skeltonum.  X. 
logia  ad  Bobertum  fVittingîf>- 
I.  —  George  Lily,  fds  du  pré- 
nt,  fut  élevé  comme  lui  dans  le 
j;e  de  la  Madelcne  d'Oxford. 
x\iv. 


BUBt  ntnë  sur  le  contitirnt,  il  •'in- 
<iiuua  aan.H  In  confiance  du  cardinal 


LIL  497 

EuBt 

siuua 

Polus,  dont  il  devint   le  rbape!ain. 
Le  rétablissement  <le  la  religion  ca- 
tlioli((ue  en    Angleterre,  à  l'avéne- 
inenl  de  la  reine  Marie,  le  ramena 
(iaus  son  pays ,  où  il  obtint  une  pré- 
bende à  (iaulorbéry  ,  et  un  cauoni- 
cat  à  Saint-Paul  dfe  Londres.  Sou 
premier  soin  fut  de  faire  élever  un 
monument  sur  la  tombe  de  son  père 
dont  les  cendres  reposaient  dans  celte 
cathédrale.  11  mourut  eu  i559.  ^^^X 
avait  des  comiaissances  étendues  en 
histoire  et  en  géographie,  comme 
l'attestent  les  ouvrages  qui  nous  res- 
tent de  lui  ;  savoir  :  I.   Angloninh 
regum  chron.  Epitome,\emsc^\  5^H; 
Francfort,   i565;Bâle,  1577.  II. 
Lancast.  et  Eborac.  de  régna  Cun- 
tentiones.  III.  Regum  Angliœ  ge- 
nealogia.Ccs  trois  écrits,  imprimés 
d'abord  séparément,  ont  été  depuis 
réunis  dans  un  même  volume.  IV. 
Elogia  virorum  illustrium.  V.  Co- 
talogus  sive  séries  pontijicum  ,  et 
cœsarum  romanorum.  VI.  f^ie  de 
Vévtque  Fislier,  en   anglais.    VII. 
Carte  géographique  de  la  Grande- 
Bretagne,  On  la  regarde  comme  la 
première    carte    imprimée    de    et 
pays. — LiLY  ou  plutôt  Lilly  (Wil- 
liam ) ,  astrologue  du  dix-septième 
siècle,  né  dans  une  classe  obscure , 
fut  d'abord  domestique,   et  com- 
mença à  se  faire  une  réputation  de 
divination  ,    en    publiant    l'horos- 
cope du   malheureux  Charles  l*^, 
au  moment  où  ce  prince  fut  cou- 
ronné   roi   d'Ecosse,  en   iG33.  Co 
])rince  le  fit  consulter  encore  dans 
plusieurs  occasions;  et  le  rusé  ma<|:i- 
eien  tira  grand  parti  de  la  crr•^  '' 
du  monarque.  Il  (ît  beaucoup 
ti  :rie  fortune  «  oii- 

*    une  terre    à 
Hursbam,  uù   il  ntouru?  en  1G81. 
3i 


498  LIM 

Parmi  un  grand  nombre  d'écrits  ri- 
dicules ,  dont  k  titre  indique  assez 
le  sujet,  nous  citerons  :  I.  Merlinus 
nn^licus  junior  ,  Londres,  i644> 
in-8«.(ro/.  Gadbury,  XVI,  233.) 
II.  Le  Messager  des  étoiles ,  i645. 
m.  Recueil  de  prophéties^  1646. 
T— D. 
LTMBORCH  (Philippe  Van), 
îlie'ologien  hollandais  de  la  coramu- 
i^ion  des  remontrants  ,  c'est-à-dire , 
des  partisans  de  la  doctrine  d'Ar- 
minins,  proscrite  au  synode  de  Dor- 
djrecht  en  1619,  naquit  à  Amster- 
dam ,  le  19  juin  iG33 ,  et  y  fit  ses 
premières  études  sous  d'excellents 
maîtres  ,  tels  que  Ge'rard-Jean  Vos- 
sius  ,  Gaspar  Barlaeus,  Arnold  Sen- 
gLierd  et  Etienne  de  Courcelles.  II 
les  perfectionna  pendant  un  séjour 
de  deux  ans  (  de  i652  à  i(3.'>4  ;  à 
l'académie  d'Utreclit,  et  n'accepta 
une  cliaire  de  pasteur  qu'en  1657 
à  Gouda  ,  d'où  il  fut  appelé  en  1668 
à  l'église  des  remontrants  d'Amster- 
dam. L'année  suivante ,  il  réunit 
aux  fonctions  pastorales  celles  de 
professeur  en  théologie  au  séminaire 
des  remontrants  ,  et  il  remplit  avec 
distinction  les  unes  et  les  autres  jus- 
qu'à sa  mort,  arrivée  le  3o  avril  17 12. 
On  a  de  lui  :  I.  Pr(Bstantium  ac 
eruditorum  vironim  epistolœ  ec- 
clesiasticœ  et  theologicœ  ,  Amster- 
dam ,  1660,  in-8".;  recueil  consi- 
dérablement augmenté  dans  les  deux 
éditions  de  1684,  et  de  1704,  in-fol. 
Ces  lettres  ont  trait  en  grande  par- 
tie à  l'histoire  de  l'Arminianisrae; 
et  elles  sont  sorties  r!ela  plume  d'Ar- 
miuius  et  de  ses  principaux  parti- 
sans,tels  que, Uitenbogaerd,Vossius, 
Grotius  ,  Episcopius.  II.  Theolo- 
gia  christ  iana  ,  ad  praxin  pie- 
tatis  ac  promotionem  pacis  chris- 
tianœ  unicè  directa  ,  Amsterdam  , 
1ÔB6,  m-4^.jla  cinquième  éditioû 


LIM 

est  d'Amsterdam  ,  1 73o ,  in-fol.  Ce?; 
le  premier  système  complet  qui  ai 
paru  de  la  théologie  des  remontrants 
Episcopius  et  Courcelles  n'ayant  pi 
acnever  les  leurs.  La  bonne-foi  c! 
l'amour  de  la  paix  ne  recomman- 
dent pas  moins  cet  ouvrage  que  l'or 
dre  et  la  clarté-  L'auteur  s'excuse  d«j 
l'étendue  des  détails  qu'il  a  consa-' 
crés  à  la  doctrine  de  la  prédestina- 
tion ,  sur  le  désir  qu'un  grand  nom 
bre  d'étrangers  lui  avaient  téraoignci 
de  connaître  à  fond  le  système  desa| 
communion  à  ce  sujet.  C'est  bien  àj 
tort    que  Paquot  reproche  à  cette' 
théologie  d'être  presque  toute  spécu 
lative.  La  morale  chrétienne  en  fait; 
une  partie  intégrante  :  elle   occupcj 
tout  le  cinquième  livre,  intitulé,  Dé^ 
prœceptis  Novi  Fœderis.  Il  a  85 
chapitres ,  et  va  de  la  page  870  à  h\ 
page  686.  III.  De  veritate  T^eligionii\ 
christianœ  arnica  collatio  cum  eru- 
dito  judœo.  Gouda,    1687,  in-4'' 
Le  juif   espagnol    Orobio ,  qui ,  é 
chappé  à  l'inquisition ,  s'était  établ 
médecin  à  Amsterdam ,  est ,  dan; 
cet  ouvrage ,  l'antagoniste  de  Lim 
borch,  qui  ne  le  convertit  pas ,  mai; 
le  réduisit  au  silence.  On  trouve  à  h 
suite  :    Urielis     Acosta  exemptât 
vitœ   humanœ,  cum  brevi  réfuta 
tione  argumentorum  quibus  Acos 
ta   omnem    religionem   revelatair 
impugnat.  (  Voyez  Acosta.  )  Um, 
jeune  personne  qui  voulait  apprïjBj 
dre  l'hébreu ,  ayant  suivi  les  leçoSB 
d'un  juif  d'Amsterdam ,  fut  sur  h 
point  de  se  laisser  convertir  par  sor 
maître,  à  la  religion  de  Moïse  ;  mai; 
Limborch,   consuUé   à   temps  paj 
la  mère  désolée  ,  réussit ,  non  san; 
peine,  à  prévenir  ce  scandale.  I 
rend  compte  de  celle  particularit( 
dans  une  lettre  à  Locke  ,  dont  Jeai 
de  Gœde  a    donné  le  précis  dani 
la  préface  de  la  traducûou  hollau- 


MM 

Aàsc  (le  Touvrage  d'Acosta  ,  17^3. 
*'  liistoria  intfuiàitioms  ,  cui  stib- 
Mur  liber  scnlentianun  inqui- 
JUS  TholosaniB  têb  an.  i3o']  ad 
^,  Ainstcrd.iin  ,  iG<)'i  ,  iii-fol. 
Le  manuscrit  original  des  sentences 
rapportées  dans  le  titre,  étant  tom- 
bé entre  les  mains  de  Limborch,  il 
en  prit  occasion  de  rechercher  To- 
ic  et  la  jurisprndence  de  Tiuqni- 
....un.  Paquot  ne  lui  pardonne  pas 
d'avoir  voulu  rendre  odieux  ce  tri- 
bunal redoute.  Marsollier  n'a  fait  que 
donner  la  quintessence  de  l'ouvrage 
de  Limborch  dans  son  fîistoire  de 
il'inquisition  et  de  sonorigine  y  i  vol. 
in-i2,  1693.  M.  Llorentc  vient  de 
laisser,  sur  cette  matière,  tous  ses  de- 
vanciers bien  en  arrière  de  lui.  V. 
Defensio  contra  Joannis  Fander 
ff  4lSj'en  iiùqiiam  criminatlonem  , 
Amst.  1699.  Limborch  prouve  qu'il 
n'a  pas  eu  tort  d'accuser  François 
Burman  d'avoir  ,  sans  jugement, 
pillé  Spinosa ;  et,  pour  se  justifier, 
il  imprime  en  colonnes  les  paroles 
de  l'un  et  de  l'autre.  VL  Instructions 
à  l'usage  des  mourants  ,  ou  Guide 
pour  les  préparer  à  la  mort  (en  hol- 
landais), Amsterdam,  1700,  in- 12. 
VIL  Comment arius  inActa  aposto- 
lorum  et  in  Epistolas  ad  Romanos 
et  //ei»r^05,  Rotterd. ,  17 1 1 ,  in-fol. 
VIIL  Courte  Réfutation  d'un  petit 
livre  publié  par  Jean  Scepenis  sur 
la  tolérance  mutuelle  ,  en  forme 
d'entretien  entre  un  remontrant  et 
un  contre-remontrant  (en  hollan- 
dais ),  16G1  ,  in- 12.  Cette  produc- 
tion a  été  la  première  de  celles  de 
Limborch.  D'un  bout  de  sa  carrière 
à  l'autre  ,  il  s'est  montré  l'avocat  de 
la  tolérance.  Locke ,  qui ,  proscrit 
»de  son  pays ,  et  réfugié  à  Amster- 
dam en  1G87,  y  ^"^  particulièrc- 
nipntlié  avec  Limborch  ,  lui  adressa 
1G89,  *^^  Epistola  de  toleran- 


un  4a> 

fi^j  qwi  fit  une  grandi*  sensaiiofi  , 
excita  une  vive  rrclam.iliou  ,  m 
suivie  de  deux  autres  lettres  jus;,, 
tivcs.  L'intitulé  de  la  prcmiire  poil<-: 
Epistola  adclarissimum  virum  T. 
A.  B.  P.  T.  O.  L  A.  script  a  a  P,  a\ 
P.  O.  J.  /.  A,,  c'est -à -Il  ire,  Théo, 
logiœ  apud  remonstrantcsprojesso" 
rem  y  t^runnidis  osorem  ,  Limbur- 
gum,  Amstelodamenscm  ,  sctipta 
a  pacis  amicOy  persecutivnis  omre, 
Johanne  l.ocKiu ,  Angle,  Gouda, 
1689  '  i'i-i.*.  I^c  recueil  iWs  Lt  fîi. 
familières  de  Locke  en  ollre 
qucs-uncs  de  Limborch ,  entre  autres 
sur  la  matière  de  la  liberté,  que,  se- 
lon Chaufepié,  ce  philosophe  anglais 
n  a  jamais  bien  comprise.  IX.  Lim- 
borch a  été  de  plus  éditeur  :  De  trois 
vol.  de  sermons  de  Simon  Kpiscopius 
(  en  hollandais  ) ,  lesquels  ont  été  re- 
cueillis dans  la  collection  complet* 
de  ses  Sermons^  publiée  à  Arasterd. 
lOgS  ,  in-fol.  ;  l'un  de  ces  volumes  , 
ainsi  que  la  collection  complète,  est 
précédé  d'une  Vie  d* Episcopiiis  , 
par  Limborch ,  qui  était  son  neveu 
du  coté  maternel  :  cette  vie  ,  traduite 
en  latin  sous  les  yeux  de  l'auteur, 
a  été  enrichie  par  lui  d'additions  in- 
téressantes ,  Amsterdam  ,  1701  ,  in- 
8°. — Dudeuxièmc  volume  des  Simo- 
nis  Episcopii  opéra  theologica.  Gou- 
da ,  iGGi  ,  in-fol.  Etienne  deCour- 
celles  avait  donné  le  premier  en 
iG5o  :  ce  volume  est  précédé  d'une 
apologie  de  la  doctrine  et  de  la  con- 
duite des  remontrants.  —  D'un  traite' 
polémique  du  même ,  intitulé  £'/n- 
faillibilité de  V Eglise  romaine  et  /' 
droit  qu  elle  s'attribue  de  pro:i  -  ** 
dans  les  corUrouerses  de  la  fi . 
cutés  entre  Simon  Episeojiui  <^t 
GuVlaume  Bom,  prêtre  cutholi mie 
(  en  hollandais  ) .  Rotterdnm  .1 
in-8*».  —  Enfin  de  Stepluini  Ci.'  > 
lad  opéra  theologîca  omma,  Ami- 

32.. 


5oo 


LÏM 


terdara  ,  1675  ,  in-fol.  Plusieurs  àes 
oiîvrages  de  Liraborcli  ont  ëte  tra- 
didts  Cil  hollandais,  en  anglais  ,  en 
allemand.  M — ois. 

LIMBORCH(Hendbtck.ou  Henri 
Van  ) ,  peintre  de  genre  ,  ne  à  la 
Haye,  en  i()8o,fut  éleA^e  de  Vander 
Werir.  Il  peignait  dans  le  goût  de 
son  m  aï  ire,  et  dessinait  correcte- 
ment ;  mais  son  ton  de  couleur  est 
plus  noir  et  moins  suave.  Cet  artiste 
«st  connu  par  deux,  tableaux  qu'a 
possèdes  le  Musée  du  Louvre,  dont 
l'un  représente  le  Repos  de  la  Ste- 
Famille  à  la  porte  (Vun  -palais , 
dont  le  maître ,  richement  vêtu , 
adresse  la  parole  à  la  Plerge ;  et 
l'autre,  les  Plaisirs  de  l'âge  d'or. 
Un  troisième  tableau  représentant 
les  Sept  œm^resde  miséricorde ,  que 
l'on  attribuait  à  ce  maître,  et  qui 
provenait  delà  galeriedeGassel,a  été 
rendu,  en  î8i5,  aux  commissaires 
du  landgrave.  Limborcli  est  connu  , 
comme  graveur ,  par  une  grande 
estampe  in-folio ,  gravée  au  burin  , 
en  1706,  dont  le  sujet  est  Hercule 
jetant  Lychas  à  la  mer.  Ce  peintre 
mourut  en  1758.  P — s. 

LIMIERS  (Henri-Philippe  de  ), 
l'un  des  plus  infatigables  écrivains 
de  son  temps,  était  né  en  Hollande , 
vers  la  fin  du  dix-septième  siècle,  de 
parents  français  réfugiés  pour  cause 
de  religion.  On  ignore  les  particu- 
larités de  sa  vie;  il  mourut  en 
I7'25,  à  Utrecht,  dans  un  âge  peu 
avancé.  Il  rédigeait  depuis  quelque 
temps  la  Gazette  de  cette  ville,  la 
plus  mauvaise  de  toutes  celles  qui 
paraissaient  en  Hollande;  et  ,  dit 
f  abbé  Lenglet,  il  reçut,  plus  d'une  fois 
des  réprimandes  des  Etats-généraux, 
jjour  quelques  impertinences  qu'il  y 
avait  insérées.  On  connaît  de  lui  : 
ï.  V Histoire  du  règne  de  Loids 
Xir^  où  Von  troui'e  uns  vecherclie 


LIM 

exacte  des  intrigues  de  cette  cour  ^ 
dans  les  principaux  étais  de  l'Eu- 
rope ^  Amsterdam,  1717,  7  vol.  in- 
i'2;  nouv.  édit.,  revue,  corrigée  et 
augmentée,  ibid.  1719,  i'2  vol.  in- 
i'2  •  (  Rouen  ) ,  17120,  1  vol.  in-4^ 
Ce  n'est  qu'une  mauvaise  compila- 
tion d'articles  de  gazettes.  Limiers 
se  vantait  de  n'avoir  mis  que  sept 
mois  à  composer  cet  ouvrage  :  cela  ne 
m'étoime  pas,  dit  Lenglet  ,il  faudrait 
encore  moins  de  temps  pour  en  faire 
un  pareil.  II.  Annales  de  l'histoire 
de  la  monarchie  de  France  y  depuis 
sonétablissement,A.msteràam,  1 7*2  ] 
in-foL,  fig.  III.  Abrégé  chronoloi 
que  de  V Histoire  de  France ,  poi 
les  règnes  de  Louis  XIII  et 
Louis  XIV,  Amsterdam,  1720 
vol.  in-i2;  ibid.,  17^4,  in-fol 
(  Trévoux  ),  1727,  2  vol.;  ibl( 
1 728,  3  vol.  in- 12, ou  un  vol.  in-4 
C'est  une  suite  de  l'abrégé  de 
l'Histoire  de  France,  par  Mezeray  ; 
et  le  "à^^^.  volume  contient  la  Fie 
de  cet  historien,  par  Larroque.  IV. 
Histoire  de  Charles  XII ,  roi  de 
Suède j  Amsterdam  ,  1721 ,  6  vol. 
in- 12.  V.  Histoire  de  l'Institut  des 
sciences  et  des  arts  établi  à  Bologne 
en  1 7 1 2  ,  Amsterdam ,  1728,  in-8". 
fig.  ^LUnaTraduction  des  comédies 
de  Plaute ,  Amsterdam ,  1 7 1 9  ,  10 
vol.  in- 12.  Il  a  eu  le  bon  esprit 
conserver  la  traduction  de  VAmpk 
trion,  de  V Epidicus  et  du  Buden 
par  madame  Dacier,  et  celle  des  Ca^ 
tifs,  par  Cosle.  La  version  d^s  seize 
autres  pièces  du  comique  latin, est  de 
Limiers:  quoique  plus  supportable 
que  celle  de  Gueudeville  (  Voyez 
ce  nom  ) ,  elle  n'en  est  pas  moins 
très-défectueuse,  et  ne  peut  que  faire 
sentir  la  nécessité  d'une  nouvelle 
version  ,  promise  et  attendue  depuis 
si  long-temps:  chnque  pièce  est  pré- 
cédée d'un  examen  et  accompagnée 


les 

I 


notes.  Le  dixième  volume  con- 
iit  les  frajjjmnits  de  Plante.  VII. 
•  trad.  de  l'ouvrage  lalin  de  Phi- 
i>.scl»  ,  iutilulc;  Pierres  an- 
j,ra\fèes  ,  sur  lesquelles  les 
s  ont  mis  leurs  noms ,  etc. 
lam,  17^4,  petit  in -fol.  fi  g. 
ie  est    pleine  de    contre-sens  et 
\plicationsal)surdcs.Prosj)erMar- 
nd  en  a   relevé'  quelques-unes 
•1  Dictionnaire  critique ,  art. 
iits,  tom.   l<^^  p.  5î).  VIII. 
^    y^tcs  et  des  remarques  pour 
f'elligcnce  du  poème  de  Téléma- 
aui^,  dans  les  cdilious  d'Ainslerdani, 
Hofhout,  1719, 17*25,  in- r2(i).«Ges 
!  (Muarques  sont  satiriques  ,  et  par 
elle  raison  elles  ont  été  réimpri- 
mées fort  souvent,  quoiqu'il  soit 
crtain  que  Fénclon  n'a  jamais  eu 
:  idée  de  faire  des  portraits  sati- 
riques dans  Tciémaque.  »  (  Voyez 
Y  Histoire  de  Fénélon  ,  par  M.  de 
I  Baussct,tora.ii,p.  1 83-84.) M.  Bar- 
bier dit  que  Limiers  eut  part  à  la 
grande   Bibliothèque    ecclésiastique 
{Ma^na  Bibliotlieca  ecclesiastica)  ^ 
dont  il  n'a  paru  qu'un  volume,  cora- 
'  prenant  la  lettre  A,  Cologne,  1734, 
•  in-fol.  (  Voy.  le  Dict,  des  anony- 
mes, n».  1 2355.  )  Enfin  il  a  laissé 
inscrit:  Histoire  du  temps  ,  ou 
-moires  de   diverses  Cours ,  sur 
!  Us  matières  les  plus  importantes  de 
la  politique,  0  vol.  in-4°.  Il  annon- 
,  çait  cet  ouvrage  comme  terminé,  en 
•-v"i.  W— s. 

LIMN^ECJS  (Jeaw ),  historien  et 
pjiilicisle  allemand  ,  né  à  léna  ,  le 
<)  janvier  1591,  alla  continuer  ses 
études  à  Weitnar ,  et ,  de  retour  dans 
*a  puric,  y  suivit  les  leçons  des  plus 


L  .....<'  i     attiibiitnt    c**    mto*   à     J*an 

'«niiiii  Boiif  dieu  ,  niiiiittr*  prulf  «tant  ,  qui 

'  .»ct«    liant    une     «Jition    ilw  TèlémaQue  , 

<  Loiii'.ivs  rn  1718.  (  Voy.  U    BiOgrapàt* 

hommtt  pip«ntt ,  art.  A*aT  ) 


LtM  5oi 

célèbres  nrofcsscurs.  Ajunt  eii  It 
malheur  de  perdre  son  père  ,  habile 
malhéinalicitn,dpftrlilen  \('t\\\ni\\T 
Altdorf,  où  il  remplit,  trois  ans,  les 
fonctionsdcrepefileur.il se  chargea, 
en  1G17,  d'accompagner  en  It«ilie 
deux  jeunes  cens  de  famille  :  mais 
la  crainte  de  l'inquisition  IV rapècha 
d'aller  jusqu'à  Rome  ;  et  il  passa 
avec  ses  élèves  en  France  où  il  de- 
meura deux  années.  Il  visita  < 
l'Angleterre  et  les  Pays-Iks,  e; 
eu  Allemagne  en  i  Cyio.  Leduc  •  i 
l'ayant  nommé,  en  iOu3,  ai 
d'un  régiment ,  il  jKîrdil  cet  cniplci 
au  bout  de  quelque  temps  ,  et  il  ac- 
cepta la  charge  d'instituteur  du  fiU 
du  chancelier  de  Gulcrabach.  Après 
avoir  terminé  cette  éducation ,  il  fil 
celle  du  margrave  d'Anspach.  Il 
revint  en  France ,  en  1 63v» ,  avec  leS 
jeunes  princes  de  Brandebourg  :  l'aî- 
né, Allx'rt,lui  témoigna  la  reconnais- 
sance de  ses  soins  eu  l'attachant  à  sa 
personne  ;  il  le  nomma  dans  la  suite 
chancelier  et  membre  du  conseil 
privé.  Limnœus  mourut  le  i3  mai 
i()(i5  ,  sans  avoir  été  marié.  On  a 
de  lui  :  1.  Tractatus  de  acatlemiis, 
Ahorf,  i6'2i  ,in-4''.  II.  De  jure  pu- 
hlico  imperii  Romano  -Germanici , 
Strasbourg,  i62()etann.suiv.,5vol. 
in-4".  La  meilleure  édition  dé  cet  im- 
portant ouvrage  est  celle  qu'à  donnée 
Scliilter.  Oldenbourg  eu  a  publié  un 
abrégé  sous  ce  litre  ;  Limnœus  enu- 
cleatus ,  Genève ,  1 67 o  ;  Nuremberg , 
167*2  ,  in-fol.  III.  Les  Capitulations 
desempereurs  d'^llemafçnedc  Char- 
les-Quint à  Ferdinand  III ,  avec  des 
notes  (  en  allemand  );  S' 
i(35i  ,  in-4**.;  avec  de^  , 

Leipzig,  iCxji'y  trad.  en  lalm,  Stras- 
bourg, i058,  iu-4°.  IV.  Observa- 
tiones  in  Builam  auream  CaroU  7/^, 
Strasbourg,  1CG2  ,  i(3(»G,  in-4'*. 
V .  J^'oliUa  rtgni  Gallia,libri  riiix 


561  Liivr 

ibid.,  i655,  Ci  vol.  iu-4**-  H  y  traite 
de  l'origine  des  Français  ,  de  leurs 
jaugae  ,  mœurs  et  coutumes;  de  la 
succession  à  la  couronne;  de  l'église 
gallicane  ;  de  la  noblesse  ,  du  tiers- 
étal  ,  des  universités;  et  enfin  des 
états-gcnéraux  ,  parlements  et  cours 
souveraines.  Il  y  a  beaucoup  de  re- 
cherches dans  cet  ouvrage  ;  mais 
Limnajus  n'a  pas  toujours  pu  re- 
moiiter  aux  sources  ,  et  il  cite  quel- 
quefois comme  autorités  des  auteurs 
peu  estimc's.  On  a  encore  de  lui  des 
Notes  sur  la  Dissertation  de  Daniel 
Otton  :  De  jure  piihlico  imperii  ro- 
mani, Witlemberg,  i658,  in-8^. 
W—s. 
LIMOJON  (  Alexandre  -  Tous- 
saint DE  ) ,  naquit  à  Avignon ,  vers 
i63o,  d'une  famille  noble  originaire 
du  Daupliine.  Quoique  son  aïeul  eût 
embrassé  le  commerce  ,  l'un  de  ses 
fils  ,  pbre  de  celui  qui  fait  le  sujet  de 
cet  article ,  épousa  la  fille  d'Esprit 
des  Blancs ,  co-seigneur  de  Venasque 
et  de  Saint  Didier.  Limojon,  second 
fruit  de  ce  mariage  ,  fut  écuyer  de 
Jean  -  Antoine  de  Mesrae  ,  comte 
d'Avaux ,  dont  il  devint  l'homme 
de  confiance  par  ses  talents  et  sa  pro- 
bité. Il  l'accompagna  au  congrès  de 
Nimègue  en  1672  ,  puis  dans  son 
ambassade  de  Hollande  en  1684. 
(  F".  AvAUx.  )  Le  comte  ayant  été 
nommé  ambassadeur  auprès  du  roi 
Jacques  II  qui  se  trouvait  alors  en  Ir- 
lande, Limojon  partit  encore  avec  lui 
en  1689.  Chargé  de  venir  rendre 
compte  a  Louis  XIV,  de  la  situation 
des  affaires  du  roi  Jacques,  il  périt 
la  même  année  dans  la  traversée.  Il 
e'tait  chevalier  du  Mont-Garmel ,  et 
de  St.-Lazare  de  Jérusalem.  On  a  de 
lui  des  écrits  qui  annoncent  une  pro- 
fonde connaissance  de  la  politique  : 
I.  Histoire  des  négociations  de  Nl- 
mègue,  Parisj   i68o;^in-i2.  IL  Lit 


UM 

ville  et  la  république  de  Venise , 
Amsterdam,  (  Elzevir  ),  i68o; 
Paris,  i685,  4*'.  édition;  la  Haye, 
i685  ,  in- 12.  III.  Le  Triomphe  her- 
métique, ou  la  Pierre  philosophais 
victorieuse,  Amsterdam  ,  i685  et 
et  1690,  in- 12.  Ce  petit  livre  de 
1 53  pages,  curieux  et  assez  esti- 
mé à  une  époque  où  la  chimie  était 
dans  son  enfance ,  est  devenu  ra* 
re  ;  mais  on  doit  peu  le  regretter. 
—  Limojon  (  Ignace-François  de  ), 
co  -  seigneur  de  Venasque  et  à 
Saint  -  Didier ,  hérita  de  ces  ti' 
très  par  son  père ,  Jean  -  Pier 
Splendien  ,  frère  aîné  du  précédent 
et  fut,  comme  son  oncle,  cheval 
de  N.  D.  du  Mont-Carmel  et  de  St.' 
Lazare.  Né  à  Avignon,  en  1669, 
cultiva  les  muses  provençales  av 
succès.  La  nouveauté  de  ses  expre 
sionslui  acquitta  réputation  d'un  des 
plus  beaux-esprits  du  comtat  Vénais- 
sin.  Il  avait  de  l'ijnagination;  et  avec 
un  peu  plus  de  goût ,  il  aurait  pu  se  fai- 
re un  nom  dans  la  poésie  française.  11 
avait  remporté  dans  sa  jeunesse  trois 
prix  à  l'académie  des  jeux  floraux  , 
lorsqu'il  publia  son  Vofage  au  Par- 
nasse ,  imprimé  à  Chartres,  sous  le 
nom  de  Rotterdam,  17 16,  in- 12. 
C'est  une  satire  en  prose  contre  les 
partisans  des  modernes.  On  y  trouve 
au  moins  une  pièce  de  chaque  gen 
de  poésie ,  et  même  un  chant  et  d 
mi  du  poème  de  Clovis.  Fontcnell 
Saurin  et  surtout  La  Motte  y  so 
fort  maltraités,  ainsi  que  dans  une 
tragi-comédie  en  trois  actes,  en  vers , 
intitulée  V Iliade^  qui  termine  cet 
ouvrage  assez  insipide ,  et  dont  la 
prose  est  aussi  froide  que  les  vers  de 
La  Motte.  Limojon  de  Saint-Didioi' 
fut  couronné  par  l'académie  françaist? 
en  17 '20  et  1721.  Enhardi  par  ce> 
triomphes  ,  il  crut  pouvoir  s'élever 


ve 

I 


jusqu  a  la  poésie  épique;  mais 


il  n'a 


LIM 

lonné  qiic  les  huit  premier»  chant* 
fe  Ciwis ,  Paris  ,  1 725  ,  in-^*.  Ce 
^)èmc ,  dont  le  plan  et  l'ensemble 
;ont  vicieux ,  fut  accueilli  froide- 
nent  y  et  il  est  oublie  aujourd'hui. 
)n  y  trouve  cependant  des  beautés 
\f  détail  ,  des  vers  heureux,  et  des 
riptions   poétiques,    telles  que 
.  s  des  Alpes  ,  du  trône  de  Dieu  , 
Je  l'FLufer  ,  etc.   C'est  à  tort  que 
ubatier  de  Castres  accuse  Voltaire 
ravoir ,  dans  sa  lleuriade  ,   copie' 
iimojou  ,  puisque  le  poème  de  la 
jiguc  parut  deux  ans  avant  celui  de 
!llovis.  Mécontent  du  silence  que  les 
lotirnaux  gardaient  snr  son  poème  , 
jmojon  s'avisa  d'en  publier  une  cs- 
>èced'^/oge,qui  donna  lieu  à  cinq 
ettres  critiques  ,  imprimées  peu  de 
cmps  après.  Le  Sage,  dans  l'opcra- 
;omique  du  Temple  de  Mémoire, 
•pprcsente  la  même  année  ,  désigne 
t-Didier,  par  le  nom  de  poète 
i-wù.  Limojon,  et   son    frère 
)utuè ,  capitaine  d'infanterie  et  che- 
valier de  Saint-Louis  ,  furent  tous 
Icux  réhabilités  dans  leur  noblesse  , 
;u  1738,  par  le  pape  Clément  XÏI. 
Le  premier,  marié  eu  1702,  mourut 
"'^    postérité,  le  i3   mai    1789, 
lit  plusieurs    poésies    macus- 
iiu;s  ,  entre  autres,  cinq  chants  de 
a  seconde  partie  de  Clovis ,  dont  on 
gnore  le  sort.  A — t. 

LIMON'  Geoffroi  marquis  de  ), 
liant  des  finances  du  duc  d'Or- 
,  a  joué  dans  la  révolution  un 
qui    n'est    pas    généralement 
iii,  mais  qui  fut  d'une  assez  gran- 
ie  importance.  Lors  des   élections 
lux  états-généraux  ,  en  1 789  ,  il  se 
rendit  dans  la  petite  ville  de  Crépy, 
wcc  le  prétexte  apparent  de  visiter 
imcnt  où  les  électeurs  se  trou- 
t  réunis ,  afin  d'y  ordonner  des 
(tions  au  nom  au  prince  à  qui 
ic  uutimeQt  appartenait.  Ce  fut  en- 


un  5oS 

vain  qu'on  lut  fit  obserrer  que  le» 
électeurs  du  tiers-état  y  ctairtit  î  il 
voulut  à  l'instant  mérac  y  pénétrer; 
et  après  s'être  occupe  un  instant  d« 
l'objet  apparent  de  sa  visite,  il  parlt 
aux  électeurs  de  l'importance  de  leurs 
fonction»  ,  leur  vanta  les  vertus  du 
duc  d'Orléans,  et  finit  par  les  déri- 
der à  le  nommer  député.  Le  marquis 
de  Limon  resta  encore  quelque  tcnTj>s 
attaché  à  ce  prince,  dans  les  pre- 
miers temps  de  la  révolution.  On  a 
prétendu  qu'il  avait  compté,  en  1790, 
cent  mille  francs,  à  un  certain  abbé 
Dubois,  qui  s'était,  dit-on,  charge 
d'aller  a  Turin,  pour  cmpoLsonner  le 
comte  d'Artois.  Ce  fait  n'a  pas  été 

frouvé  :  seulement  il  est  sûr  que 
abbé  Dubois  mourut  empoisonne 
à  Chambéri  ;  et  l'on  publia  dans  le 
temps ,  que  ceux  qui  l'avaient  charge' 
de  cette  terrible  mission  s'en  défirent 
de  cette  manière,  voyant  qu'il  hési- 
tait et  qu'il  allait  tout  révéler.  I^c 
marquis  de  Limon  parut  ensuitca  voir 
change  d'opinion  politique;  il  émi- 
gra  en  1 791,  et  se  fit  remarquer 
au  milieu  des  royalistes  les  plus  ar^ 
dents.  On  a  de  lui  une  Oraison  fw 
nèbre  de  Louis  XFI.  Il  mourut  eu 
Allemagne,  en  1799.  B — u. 

LIN  (  Saint  ),  pape,  fut  le  suc- 
cesseur immédiat  de  Saint-Pierre  , 
l'an  GT».  Il  était  fils  d'HercuJanus  , 
et  né  à  Volterra  en  Toscane.  On  croit 
qu'il  gouverna  l'Eglise  conjointe- 
ment avec  saint  Clet,  ou  .4naclet , 
et  saint  Clément.  D'autres  prétendent 
qu'il  avait  été  ordonné  par  saint 
Pierre,  soit  pour  gouverner  TEglise 
en  sou  absence  ,  soit  pour  bii  suc- 
céder. On  croit  qu'il  exerça  son  mi- 
nistère pendant  douze  ans,  qu'il 
mourut  eu  78,  et  reçut  la  couronne  du 
martyre  ,  sous  l'enipereiir  Néron  , 
qui  persécutait  alors  les  chrétiens. 
L'Eglise  reud  cet  hooncur  à  --•"• 


5o4  UN 

Lin,  dans  le  canon  de  la  messe,  où 
elle  le  met  au  nombre  de  ceux  qui 
ont  souffert  pour  le  maintien  de  la 
foi.  Les  actions  particulières  de  ce 
pape  sont  d'ailleurs  ignorées.  Ce  fut 
de  son  temps,  en  -jo  ,  que  Jérusalem 
fut  prise  et  détruite  par  les  Romains. 
Guill.  Malechaut  a  publié:  D.  Lini 
■pontificum  secundi,de  suiprœdeces- 
soris,  D.  Pétri  apostoli...passione 
lihelliis  ;  item  de  passions  D.  Pauli 
Ubellus  aller,  Paris  ,  Chaudière , 
1 566;  et  cet  ouvrage  apocryphe  a 
été  inse'rë  dans  la  ïiihlioiheca  Pa- 
trum  maxima,  tom.  '-i,  pag.  1-67. 
Saint  Lin  eut  pour  successeur,  saint 
Glet  ou  Anaclet ,  suivant  Fleury  et 
VArt  de  vérifier  les  t^^fe^.LcP.Pagi 
et  Lenglet  Dufresnoy,  placent  saint 
Clément  avant  saint  Clet.         D-s. 

LIN  (  Hans  Van  ) ,   peintre   de 
genre,  surnomme  Stilheid,  né  en 
Hollande,  florissait  vers  le  milieu 
du  xvii*^,  siècle.  11  excellait  dans  les 
tableaux  de  batailles; et  aucun  pein- 
tre hollandais ,  Wouwermans  excep- 
te, ne  peut  lui  être  compare'  pour  le 
talent  de  peindre   les  cbevaux.  Le 
seul  historien  qui  ait  parle  de  Van 
Lin ,  est   Houbraken.  Jl  en  fait  un 
gi.-and  ëloge  ;  mais  il  se  trompe  en 
l'appelant  Jan  Van  Lint.  Toils  les 
t  ibieaux  connus  de  cet  artiste  por- 
tciit  le  nom  de  HansVan  Lin.   Le 
Musée    du    Louvre  a   possédé   un 
de  ses  tableaux ,  représentant   une 
ISataille   dans    des    rochers  y    qui 
était  un  des  plus  beaux  ornements 
de  la  galerie  de   Brunswick  :   il  a 
été  repris  en  i8i5.  C.  F.  Boétius   a 
gravé  en  1 766,  d'après  Van  Lin,  une 
estampe  représentant   un  bâliment 
devant  lequel  sont  trois  mulets  et 
plusieurs  liomraes.  P — s. 

LINACRE  (  Thomas  ),  en  latin 
Linacer  ou  Ljnacriis ,  médecin  an- 
glais ,  naquit  à  Gantorbery,  en  1 460. 


LIN 

Au  sortir  de  l'université  d'Oxford  ; 
il  alla  voyager  sur  le  continent,  ( 
prit  le  degré  de  docteur  en  médecin  1 
dans  plusieurs  universités.  Il  s'ai 
rêta  quelque   temps  à  Rome  ;  ma 
son  plus  long  séjour  fut  à  Florenc( 
où  il  suivit  les  leçons  de  Demetriu 
Chalcondylc  ,    d'Ange  Pohtien  ,  ( 
d'Hermolaiis  Barbaro.  Il  fut  trait 
avec  beaucoup  de   distinction  pa 
Laurent  de  Médicis,  qui  l'associa  au 
études  de  ses  enfants  ,  afin  d'excitc 
leur  émulation.  A  son  retour  en  Aa 
gleterre  ,  il  donna  pendant  plusie 
années  des  leçons  gratuites  de  méi 
ciao  dans  la  ville  d'Oxford.  H 
VII  le  fit  venir  à  sa  cour  pour  ei 
gner  l'italien  au  prince  Arthus, 
fils  aîné.  Henri  VIII  le  nomma 
médecin   ordinaire.  Linacre  eut  1 
principale  part  à  la  fondation  du  co 
iége  des  médecins  de  Londres  ,  don 
il  fut  nommé  président.  A  l'exem 
pie  des  anciens  médecins  ,  il  voulu 
joindre  le  sacerdoce  à  l'art  de  guéj 
rir;  et,  quoique  dans  un  âge  avancé] 
il  entra  dans  les   ordres  ,  reçut  Ij 
prêtrise ,  fut  pourvu  de  la  dignitéd^ 
chantre  dans  l'église  d'York,  et  di 
plusieurs  autres  bénéfices.  Il  mouru 
en  i5'24.  Linacre  possédait  bien  le: 
langues  grecque  et  latine ,  et  écri 
vait  cette  dernière  dans  toute  sa  pu- 
reté. Les  savants  les  plus  distingués 
tels   que  Thomas   More,  Erasme! 
Latimer ,  Tunstal  ,  etc. ,  se  firen  1 
gloire  d'être  en  correspondance  aveci 
lui.  Voici  la  liste  de   ses  ouvrages  ; 
I.  Les  éléments  de  la  grammai- 
re, traduits  en  latin  par  George  Ru- 
çlianan,    sous  ce  titre:  Rudiniento 
grammatices,  Paris,  ï533  et  i55o 
in-B*^*.  IL  De  emendatd  structura 
lalini   sermonis,  lib.   vi ,   in-8*. . 
Paris,  i532-i55o;  Leipzig,  i545; 
et  Cologne,  i555;  revus   par  Joa- 
çhim  Camerarius,  Leipzig;,   i^gi 


LÎN 

ht-B".  lit.   I^  régime  de  la  dihe 

santé;  ouvrage  estime  tics 

.  l\^  De  temfwratiwrito ,  et 

temperie  ,  lib.  m,  Venise, 

ijiiil  du  grec  de  Galien.  V. 

)n  latine  de  ditreicnts  autres 

-  du  mcrac  auteur.  VI.  Pro- 

laclù  spfiœra  ,    traduit   du 

,  \tuise,  i5oo,  iu-fol.  Tontes 

traductions   sont   écrilcs   d'un 

'    •  ■  s-rlega;it.  T — d. 

\\T  (  Michel  ) ,  littcTateur  , 
i  ut  a  Louvicrs  (i),  en  1708,  fil 
vers  au  sortir  du  collège,  et  vint  à 
is,  avec  des  lettres  derecomman- 
ion  du  marquis  de  Cide^ille,  pour 
\  oltaire  ,  qui  le  fit  nommer  prccep- 
I  teur  du  fils  de  M"^^,  du  Châtelct,  et 
I  l'engagea  fortement  à  mettre  à  profit 
SCS  loisirs  pour  sa  propre  instruction. 
Itairc  écrivait  à  M.  de  Cideville , 
1733  :  «  Je  ne  sais  pas  encore  si 
Liuant  sera  un  grand  poète;  mais 
\c  crois  qu'il  sera  un  très-honnêlc 
■'  trcs-aimable  homme....  Il  n'est 
pas  bien  sûr  qu'il  ait  un  de  ces  ta- 
lents marques,  sans  quoi  la  poe- 
-t  un  bien  méchant  métier.... 
rtez-le  à  travailler  et  à  s'ins- 
'>  liuire  de  choses  qui  puissent  lui 
'  «'tre  utiles ,  quelque  parti  qu'il  em- 
brasse; il  voulait  être  précepteur, 
<  t  à  peine  sait-il  le  latin.  »  Linant , 
lurcllement  insouciant ,  et  préfé- 
:it  son  indépendance  à  la  forlunc, 
a  la  gloire  même,  ne  profita  point 
ces  sages  conseils.  »  Je  ne  suis 
nas  trop  content  de  Linant  ,  écri- 
vait encore  Voltaire  à  Cideville  ; 
il  ne  travaille  point,   il  ne  fait 
rien;   il  se  couche  à   sept   heu- 
r«^  du  soir,  pour  se  lever  à  mi- 
li  (a)...  Plein  de  goût ,  d'esprit  et 


'  )  Titoa  dn  Tillct  le  fait  naîtr*  ^r  erreur ,  A 

trn. 

)  Tnluire  lui  dtiait  J4111  nne  épîire: 
*oniai«ilc«tperaii*,raaiie'Mt*ur  JetUurîtrc. 


Lm 


5o! 


»  (Uimaninalion  ,  il  nU  rifT»  Ae  ce 
»  qu'il  tant,  ni  pour  brilt 
»  faire  fortune;  il  a  la  s<n 
»  qui  convient  à  un  homme  qui  au- 
»  rait  TÏngl   mille   livres  de   rcn- 
»  te.  »  (  Lett.  du  7  avril  1784.  )  Li- 
nant ne  tarda  pas  à  se  lasser  dm 
plaintes  et  des  remontrances  conti* 
nueiles  de  son  mccëne  :  il  témoigna 
assez  durement  que  le  séjour  de  Girey 
l'ennuyait;   et   il    revint  à  Paris  , 
où  il  fut  gouverneur  du  fils  de  M. 
He'bert,  introducteur  des  ambassa- 
deurs. Cet  emploi  modeste  suflisait 
à  ses  besoins  ,  et  il  nréférail  un  lo- 
gement peu  commode,  qu'il  part.i- 
geait  avec  !*a  mère ,  et  une  table  mal 
serne  ,  à  celle  des  grands  seigneur» 
qui    l'invitaient.    Sur  la   fin  de  sa 
vie ,  il  éprouva  des  regrets  de  n'a- 
voir pas  suivi  une  carrière  plus  lu- 
crative. Il  mourut  à  Paris,  le  1 1  dé- 
cembre 1749*  Linant  a  reroporti 
trois  fois  le  prix  de  poésie  à  l'aca- 
démie française  ,  et  obtenu  un  ar^ 
cessit  (  1  )  en  concurrence  avec  Mar» 
montel ,  qui  fut  couronné.  On  a ,  eu 
outre ,  de  lui ,  deux  tragédies  :  y//- 
zàide ,  représentée  en  174 5,  oft'n» 
quelques  beaux  endroits,  et  eut  plu- 
sieurs représentations;  randa,  reine 
de  Pologne,  pièce  romanesque  et 
mal  écrite,  ne  fut  jouée  qu'une  seul» 
fois,  en  1747?  ^^'*  elle  a  été  impri- 
mée ,  Paris,  1751  ,in-i2.  On  lui  at- 
tribue :  V/frmen  augure  delà  paix, 
scènes  héroïques  en  un  acte,  en  Tcrs, 
à  l'occasion  du  mariage  du  Dauphio, 
Paris ,  1745 ,  in-8".  Linant  a  donné 
l'édition  des  OEuwres  de  M.  de  FoU 


(r>  Voici  Ire  i5er»«    H«e 
couionnes  far  l'ar-)  '    —  - 
^w<"i<v»  ,   tout    Ir 
•  n  »-3o-  —  ^•**  ■■■ 

thti  " 


d«    I.inasl, 

/, 

■>- 


p0tp0Uié*  émné  /•  Jim*  «•»  tmme0*9w» 


5o6 


LÏN 


taire f  Amsterdam,  1738-39 ,  3  vo- 
lumes in-S*^.  :  en  tête  du  premier 
est  une  Préface  y  dans  laquelle  il 
témoigne  sa  reconnaissance  pour 
l'illustre  auteur.  On  a  encore  de 
lui  des  Odes,  des  Epîtres ,  et  des 
pièces  fugitives ,  parmi  lesquelles  on 
cite  ce  madiigal  qu'il  composa  pen- 
dant qu'il  habitait  le  château  de  M™«. 
du  Châlelet  : 

Un  voyageur  qui  ne  raentait  iamaïi  , 
l'as.»'-  à  Cirey,  ratlmirc,   le  contemple; 
Il  oroit  d'aboiilqiie  ce  n'est  qu'un  palais'; 
Mais  voyant  Emilie  ,  ali!  Jît  il ,  c'est  uu  temple. 

On  peut  consulter  la  Notice  que 
Titon  duïillet  a  consacre'e  à  Linant, 
dans  le  Second  supplément  du  Par- 
nasse français;  et  une  Lettre  de 
Tabbë  Yart,  en  réponse  à  l'article  des 
Trois  siècles  de  la  littérature  ^  in- 
se're'e  dans  le  Journal  Encyclopédi- 
que, mois  de  juin  1773.  —  Un  au- 
tre Linant  fut  pre'ccptcur  du  fils  de 
madame  d'Epinay;  et  c'est  à  lui  que 
sont  adressées  quelques  lettres  |qui 
-i'ont  parlie  de  la  Correspondance 
générale  de  Voltaire.  W-s. 

LIND  (  Jacques  ) ,  me'decin  an- 
glais ,  mort  le  18  juillet  1794  >  à 
Gosport ,  a  publie'  :  I.  Dissertation 
sur  les  maladies  vénériennes  lo  - 
cales  ,  Edimbourg  ,  1748 ,  in  -  4**. 
IL  Traité  sur  le  scorbut ,  Edim- 
bourg ,  1757,  in-8^.  ;  traduit  de 
de  l'anglais,  Paris,  17^6,  2  vol. 
in- 1 'i  :  c'est  dans  cet  ouvrage  ,  plu- 
sieurs fois  reimprime' ,  que  Lind 
combat  victorieusement  les  ide'es 
errone'es  que  Severin  Eugalen  ,  mé- 
decin hollandais,  avait  consignées 
dans  son  ouvrage  sur  la  maladie 
scorbutique.  II L  Essai  sur  les 
lï^oyens  de  conserver  la  santé  des 
marins ,  1707  ,  in  -  8*^.  ;  plusieurs 
fois  réimprimé.  IV.  Deux  Mémoires 
?:ir  les  fièvres  et  les  maladies  conta- 
'^jicHses,  1763,  iti-S^„  y.  Essai  sur 


LIN  I' 

les  maladies  auxquelles  les  Euro- 
péens sont  exposés  dans  les  pays 
chauds^  i768,in-8'^.  Lind  a  cher- 
ché à  déterminer  dans  cet  essai ,  qui 
a  eu  plusieurs  éditions  ,  et  qui  a  été 
traduit  en  plusieurs  langues  ,  com- 
bien de  temps  les  émanations  maré- 
cageuses pouvaient  rester  cachées 
dans  le  corps  humain,  sans  manifes- 
ter leur  existence  par  le  développe- 
ment de  la  fièvre.  VI.  Mémoire  sur 
l'efficacité  de  Véthersulfurique^pour 
déplacer  la  goutte  de  V estomac  ;  in- 
séré dans  le  Magasin  unis^ersel  de 
Londres ,  tom.  vi.  VIL  Remarqi 
sur  la  prétendue  influence  de 
lune  sur  les  fièi^res ,  ibid.  vol.  in-8* 
VIIL  Sur  l'efficacité  du  mercm 
dans  le  traitement  des  maladies  il 
Jlammatolres ,  et  de  la  djssenterit 
ibid.  vol.  in-S'*.  IX.  Observation  si 
des  hjdatides  traitées  avec  suça 
par  le  mercure,  ibid.  vol.  in-12. 
Proposition  pour  remédier  à 
privation  de  Veau  douce  en  mer , 
ibid.  nov.  1768.  P.  et  L. 

LINDANUS  (  Guillaume -Da- 
MASE  ),  l'un  des  plus  savants  contro- 
versistes  du  seizième  siècle ,  naquit 
en  i5'25,  à  Dordrecht ,  d'une  fa- 
mille très-distinguée,  qui  avait  pos- 
sédé la  seigneurie  de  Linda ,  bourg 
submergé  en  i4'i2.  Il  fit  ses  étu- 
des à  l'université  de  Louvain, 
désirant  se  perfectionner  dans 
connaissance  du  grec  et  de  l'hé- 
breu ,  il  se  rendit  à  Paris  ,  po 
suivre  les  leçons  de  Mercier  et 
Turncbe  ;  il  retourna  ensuite  à  Lou' 
vain ,  embrassa  l'état  ecclésiasti- 
que ,  et  reçut  ses  degrés  en  théo- 
logie en  i552.  Appelé  la  même  an- 
née à  Dillingen ,  il  y  expliqua  l'E-  1 
criture  sainte  pendant  trois  ans  ,  p 
obtint  différents  emplois  ,  et  fut 
enfin  nommé  inquisiteur  de  la  foi , 
pour  la  proviace  de  Frise  ;  charge  l 


MIT 

nTfrça  y  dit-on ,  avec  une  gran» 

\cvHc.  Lp  roi  d'Espaj^np,  Plii- 

11 ,  IVlcv.»  a  l'cvèchc  de  Ru- 

itlp  ,  lors  (le  la  crcalion   des 

<  m\    siècles    dans    les   Pays  - 

i5(rJi  );  mais  Liiulamis  ne 
Il  prendre  possession  que  sept 
|)rps.  Les  intprèts  de  la  religion 
gèrent  défaire  deux  voyages  à 
r  ;  et  il  y  reçut  un  accueil  dis- 

<  du  pape  Grégoire  XIII , 
•s  cardinaux.  Transfère  ,  en 
i ,   sur   le  siège  de   Gand  ,   il 

it  le  4  novembre  de  la  même 
,  et  fut  inhume  dans  le  lom- 
ilc  Corncl.  Jansc'nius,  son  pre- 
neur et  son  ami.  La    f^ie   de 
mus  a  ete  jiubliëe  en  latin ,  par 
1.  Arnold  Havensius  ,  à  la  suite  du 
vimentanns  de  erectione  novo- 
um  in  Belgio  episcopatuum  ,  Co- 
'^iif^,  1609, in-4".  Baronius  faisait 
I  ^  particulier  de  ce  prélat  ;  et  ce 
.V  .i  lui  seul  qu'il  communiqua  ses 
■oies  sur  le  Martrrolûgc^ ,  avant  de 
:s  publier.   Lindanus  a   laissé  un 
rand  nombre  d'ouvrages  ,  remplis 
iditiou,  et  d'un  style  assez  pur  , 
déparés  par  les  défauts  com- 
-  aux  auteurs  de  ce  siècle.  On  se 
iilera  de  citer:  I.  Deoptimo ne- 
mterpretandi  Scripturas,  Coio- 
1 558,  in-8'\  II.  PanopUa  evan- 
z ,  ibid.  i5G3,  in-fol.;  Paris  , 
-'4  ,et  réimprimé  plusieurs  fois  : 
•'est  le  plus  estimé  de  ses  écrits  ;  les 
tonlrovcrsistcs  modernes  y  ont  puisé 
plusieurs   arguments.   III.   Fsalte- 
ium  vêtus  à  mendis   DC.  repur- 
:;atum,  et  de  grœco  atqiie  liebraico 
*ontibus  illustratum ,  Anvers,  1 5G7. 
iV.Missa  apustolca  seu  lilurgia  S. 
■'•  ,  annotation,  et  apologià  il- 
. ,  Anvers  ,  1 588 ,  in-8<».  ;  Paris , 
' ,  et  insérée  dans  la  Maxim. 
LOth.   P<itni//i ,  lora.  2.  La  prc- 
nierc  cditioo  est  U  plus  recherclKC 


Mît  507 

des  cnricint  :  c'est  un  oxsfT»ffi  lop- 

posc  ,  et  toutes  les  raisons  de  Lin- 
danus pour  en  démontrer  Pautlicnli- 
cilé,  n'ont  pu  persua»ler  les  critiques. 
On  a  publiera  Dois-le-Duc  ,  i584  • 
in-8'\  ,  le  Catalogue  des  ouvrages 
imprimés  et  manuscrits  de  ce  prélat; 
et  on  en  trouve  U  liste  dansFoppens, 
Biblioth.  Belgica,  L-b-e  et  VV-s. 
LINDBLOM  (  Axel  ),  archevê- 
que d'Upsal,  né  en  17/47,  dan»  U 
province  d'Ostrogothie ,  reçut  de 
son  père,  pasteur  et  archidiarre,une 
éducation  soignée,  et  fit  ensuite  do 
très-bonnes  éludes  à  Upsal.  Le  sa- 
vant Jean  Ihre  fut  un  de  ses  maî- 
tres, cl  lui  donna  le  goût  de  la  criti- 
que et  des  langues  anciennes.  Après 
avoir  achevé  ses  cours  à  l'université, 
Axel  Lindblom  passa  en  Livonie,  où 
il  fut  chargé  d'une  éducation  parti- 
culière. Revenu  en  wS'iède ,  il  obtint 
à  Upsal  la  chaire  de  belles  -  lettres 
et  de  politique,  long-temps  occupée 
par  Jean  Ihre,  et  épousa  la  fille  de 
Berge  Frondin  ,  bibliothécaire  de 
l'université.  (  Foyez  Frondiw.  )  Ses 
cours  furent  très-suivis ,  et  il  s'an- 
pliqua  surtout  à  faire  connaître  la 
littérature  latine.  Un  Dictionnaire 
latin  et  suédois ,  qu'il  publia  dans 
ce  même  temps ,  fut  le  fniit  de  plu- 
sieurs années  de  recherches  cl  de 
méditations.  Vers  l'année  1789,  le 
professeur  Lindblom  prit  les  ordres 
ecclésiastiques  ;  et  peu  après  il  fut 
nommé ,  par  Gustave  III .  évêque  de 
Linkoeping,  dignité  qui  bii  donnait 
le  premier  rang  parmi  les  prélats  de 
Suède,  après  rarchevcquc  d'Upsal. 
Ce  siège  était  alors  occupé  par  Uno 
Troil,  connu  dans  le  monde  savant 
par  la  Relation  de  sou  voyage  eu 
Islande.  L'archevêque  s'étant  aJ»- 
.senlé  pour  quelque  temps  de  la  dièu- 
asseiuLlée  a  l'époque  orageuse  de 
1789,  Pévwpiç  de  Liukocpiug   l<» 


5oô 


UN 


remplaça  comme  orateur  de  l'ordrf 
du  cierge',  et  sigoa  ea  cette  qualité' 
L'acte  d'union  et  de  sûreté  qui 
augmentait  sous  plusieurs  rapports 
la  prérogative  royale.  Quelque  temps 
après,  le  siège  archiépiscopal  d'Up- 
sal  étant  devenu  vacant ,  l'évêque 
de  Linkoeping  obtint  la  première 
dignité'  ecclésiastique  du  royaume. 
Pendant  son  séjour  à  Linkoeping, 
Lindblom  avait  fait  imprimer  sous 
ses  auspices  un  Journal  théolo- 
gique ,  fort  remarquable  par  ses 
principes  de  tolérance.  Ce  fut  lui 
qui  reçut  à  Elscneur,  où  il  s'était 
rendu  par  ordre  du  roi  Charles 
XllI ,  la  profession  de  foi  luthé- 
rienne du  généi-al  Bcrnadotte ,  main- 
tenant roi  sous  le  nom  de  Charles- 
Jean,  qui  venait  d'être  élu  prince 
royal  par  les  Etats.  C'est  aussi  l'ar- 
chevêque Lindblom  qui  a  fait  le  sa- 
cre de  Charles- Jean  ,  à  Stockholm, 
au  mois  de  mai  1 8 1 {^.  Ce  prélat  avait 
épousé  en  secondes'  noces  une  per- 
sonne de  beaucoup  d'esprit,  qui  avait 
été  attachée  à  la  cour  de  la  reine  de 
iSiiède.  Ses  enfants  ont  été  anoblis 
sous  le  nom  de  Linderskoeld.  Il  est 
mort  au  commencement  de  l'année 
i8ig.  —  Un  de  ses  frères,  long- 
temps secrétaire  interprète  du  roi 
de  France ,  et  maintenant  vicc-sécre- 
taire  de  l'académie  de  Stockholm  ,  a 
traduit  en  français  le  Fojage  de 
Troïl,  en  Islande,  G — au. 

LLSDEBROG  (ERPOLD),en  latin 
Lindenhrogius ,  compilateur  estima- 
ble ,  né  à  Brème  vers  1 54o ,  embrassa 
l'étatecclésiastique,  et  fut  pourvud'un 
canonicat  au  chapitre  luthérien  de 
Hambourg.  Il  s'appliqua  surtout  à  la 
recherche  des  ouvrages  historiques , 
et  en  publia  plusieurs,  alors  inédits, 
avec  des  préfaces  et  des  additions. 
II  mourut  le  20  juin  1616,  laissant 
4eux  fils  qui  ont  acquis  une  réputa- 


LIN 

tlon  assez  étendue  par  leur  crur'itloi 
On  a  de  lui  :  1.  Chronique  des  gesti 
de  Charleinagne  (  en  allemand  ] 
Hambourg  ,  1 5g3  ,  in-4"'.   Ce  n'e 
qu'un  extrait  des  historiens  qui  avaiei 
déjà  écrit  le  même  règne;  mais  0 
reproche  à  l'éditeur  d'avoir  adopl 
les  fables  de  l'archevêque  Turpii 
II.  Historia   compendiosa   I/ani> 
regum ,  ah  incerto  aucAore  com 
cnpia,  Leyde,  1  Sç)^,  in-4^.  Lindebro 
a  continué  cette  histoire  juscju'au  rî 
gne  de  Christian  iv.  III.  Historia  a^ 
chiepiscoporum  Bremensium 
1 59.5,  in-4°.  C'est  l'histoire  ec« 
siastique d'Adam  de  Brème.  IV. 
tores  rerum  germanicarum  sept 
trionalium,  nempe  Saxonum, 
vonun  ,   Fandalorum  ,  Danorui 
Norwegiorum ,  Suedoruni ,   Ham 
bourg ,  1 595 ,  in-fol.  Cette  collcctio 
est  utile,  particulièrement  pour  l'hi.' 
toire  de  Danemark;  on  trouverai 
liste  des  auteurs  dont  elle  se  compos 
dans  le  catalogue  à  la  suite  de  la  Mt 
thode^owY  étudier  l'histoire  par  Ler 
glet  Dufresnoy  :  cette  collection aét| 
réimprimée  par  les  soins  de  J.  Alb 
Fabricius,avec  les  Origine  s  hambur 
genses,àt  P.  Lambecius,ibid.  17061 
in-fol.  —  Frédéric  Lindecrog  ,  fil 
cadet  du  précédent ,  naquit  à  Ham 
bourg,  le  28  décembre  1578  :  il  ail. 
faire  ses  études  en  Hollande,  où  il  s 
lia  particulièrement  avec  le  fameui 
Scaliger,  quilui  conseilla  de  se  livre 
à  la  critique  des  anciens  auteurs.  I 
visita  ensuite  la  France  ,  et ,  rcveni 
dans  sa  patrie,  étudia  la  iurispru 
dence,fut  pourvu  de  différents  em- 
plois ,  et  mourut  en  1647.  On  a  d( 
lui  :  I.  Des  Editions  de  VJppendii 
de  Virgile  (  Fof.  Jos.  Scaliger)  ;  — 
de  M.  ValeriusProbus,  De  Notis  an- 
tiquorwn  ,  sous  le  nom   latinisé  de 
C.  N.  F.  Tdiobroga; — des  Comédiet 
de  ïérence;  et  de  V Histoire  d'Am- 


I.LV 

jen  Marccllin  ,  avec  dr»  foinmcn- 

îri's  (lu-  H.  Valois  a  conserves  dans 

1  !,  1 1.  Des  Sûtes  sur  Tcrcn- 

inméntaii-e  de  Donat  ;  — 

r,  le  Ci  ris  ylcs  Ctitalectes 

;  —  sur  les  Priapees,  et 

r>  Elégies  de  l^edo  Albi- 

is.  Les  notes  sur  les   élégies 

te   imprimées  avec   celles    de 

ali<;cr    cl    de    Nicolas    Heiii- 

.    Ainslerdani ,    17^3,    in-8o. 

II.  Commentarius  de  ludis  vête- 

'■im,  Paris,  iGoj,  iu-4*^.  IV.  Coin- 

irius  in  legem  unicam  C.  Si 

imperatori  maledi.verit ,  cum 

brevioribus ,  etc.  Hambourg, 

I.  i II -8**.  ;  inséré  dans  le  tom. 

.1    Thésaurus  juris  Romani, 

:  -verard  Ottou.  V.  Diversaiim 

uni  historiée  antiquje  scripiores 

vi ,  Uamboiu'g  ,    iGii,  in-4®.  Ce 

olume  contient  les  chroniques  de 

I  ndès ,  d'Isidore  de  SevUlc  et  de 

Diacre  (  ou  Waruefrid  ),  avec 

marques  (;  ).  V I.  Codex  legum 

uarum ,    m    quo   continentur 

fFisigothorum ,   Burgundio- 

.  Alamannorum  ^  etc.  Franc- 

»6i3,  in-fol.  Celte  collection 

-.v^  cl   estimée  contient  des  mor- 

eaux  Irès-inléressants,  mais  dont 

l'iusieurs   ont  élé  réimprimés   plus 

orreclemenl  par  Baluze,  D.  Kouquet, 

'      ot  dans  le  Corpus  juris  germa- 

iTitiqui.  (  Voyez  Georgiscu  ). 

t  élé ,  en  outre ,  insérée  par  Paul 

ini,  dans  les  Barbarorum  /<?- 

intiquœ,  Venise,    1781-9'i,  5 

!n-iol.  VII.  P^ariarum  quTs- 

'.m  centuria  ;  dans  la  Biblioth. 

i,   de    Fabricius,  tom.   xiii , 


I  -<  •<  Biocrapf^es  lui  atiribuanl  cncor*  i 
.  9f />«'«•/«<•,  Lu  bel  k,  1611.  in  4") 
auiqite,  A,^t\l  la  pr«miéi*  é'Iitioo 
.  l'j^i,  in-4'. ,  ■  pour  «iit--Mr  Piarr* 
rt  r  t  catte  rilU  ,  en  1S9U,  «vaut 
••>i  «iiTras-  <  S"!  f"»  piilili<*  par 
..»  (Foy.aa  P»  -iJni  !••  A'i/«  ft.M- 


^n*) 


T.ÎIf 

p.  580-f5oo.  —  Tii<«nEiRoc 
frère  aiuédc  Frcdcrir,naquti  .^  u.im. 
bourg  ,fn  iS-^o  :  après  avoir  Icrmi. 
né  ses  études ,  il  visita  les  Pays-Bas,  U 
France  et  l'Italie,  pour  lii-r  connais- 
sauce  avec  les  savants  cl  iccurillir 
des  manuscrits.  Pendant  qu'il  rtait  à 
Paris,  il  lui  arriva  une  aventure  fort 
désagréable,  ra  pporlée  p.i  r  Ci )!u  rniès, 
qui  cite  pour  parant  Vossius:«  H.FJn. 
»  debrop ,  dit-il ,  allait  sotivent  à  U 
»  bibliothèque  de  Saint-Victor,  sous 
»  prétexte  d'y  étudier,  cl  y  dérobait 
»  toujours  quelques  manuscrits.  Qiiel- 
»  qu'un  s'élant  aperçu  de  ses  lar- 
»  cius,  on  alla  le  prendre  un  matin 
1)  en  bonnet  de  nuit  et  en  pantoufles, 
»  et  on  le  mena  ainsi  en  prison  ;  mais 
»  il  en  sortit  quelques  jours  après, 
»  par  le  crédit  du  savant  Dupiiy.  » 
(  Voy.  Colomesii opuscula , p,  l'ii.) 
Il  retourna  en  Allemaj;ne  ,  et  fut 
nommé  conservateur  de  la  bibliothè- 
que fondée  à  Gottorp,  par  le  duc  de 
Holstein ,  Jean-Adolphe.  On  a  de  lui  : 
JVotœ  in  Censorinum  de  die  nntali, 
Hambourg;  ,  iGij  ,  m-\°.  ;  Leyde  , 
i64'2,  in-8'*.;  — une  édil.  du  ^n/j- 
craticus,  deJ.de  Salisbury,  Leyde, 
i5t)5,  in-8**.,elc.  ^o^r.  sur  cette  fa- 
mille, Leben  tler  heruhmten  Linden- 
brogiontm  (Vies  des  fameux  Linde» 
brop; ). Hambourg,  i723,in-8^.  W-s. 
LINDEN  (  Jea:«-Antonide  Viiif 
DER  ) ,  savant  professeur  en  raéde- 
ciue  ,  naquit  à  Ënckhuisen,  ville  de 
la  Nord-Hollande ,  le  1 3  janner  i  G09. 
Il  était  fils  d'un  médecin  estimé,  rec- 
teur du  collège  d'Enrkhuisen  (  1  \  qui 
prit  soin  de  sa  première  éducation.  II 


(i)  Anini««  Hendriekoii  Hrnrici  P^OM-dfr  TJf 

J,n  .   w    «cri    .S-^.Jji.t    lO-I-Ff.».  .      -.«Alt   à 
>    >  I    M« 

!..  .,.t 

,,.,  .  I.l- 

•  util*  «1  1    :r.» .»«  1-. 

/)<•  X  ri  r  !-  •••I  ♦•'». 

'  oirti  /  .    -4  Pâf  •«(,  •!  >i^    . 


5io 


LIN 


alla  ensuite  étudier  à  Leyde ,  et ,  après 
avoir  termine  ses  cours  de  philoso- 
pliie,  s'appliqua  à  la  médecine  avec 
beaucoup  d'ardeur.  De  Leyde  il  se 
rendit  à  Franeker ,  où  il  reçut  le  doc- 
torat en  1 6^9.  Son  père ,  que  sa  ré- 
putation avait  fait  appeler  à  Ams- 
terdam, voulut  l'avoir  auprès  de  iui  ; 
et  ce  fut  sous  ses  yeux  qu'Anfonide 
commença  l'exercice  de  son  art.  Les 
succès  qu'il  obtint  dans  la  pratique, 
furent  si  grands  qu'on  lui  olFrit  la 
chaire  de  médecine  de  Franeker,  et 
il  la  remplit  pendant  l'i  ans  d'une 
manière  très-distinguëe.  Le  jardin  bo- 
tanique et  la  bibliothèque  de  l'acâdé- 
mie,dont  il  e'tait  le  conservateur,  du- 
rent à  ses  soins  beaucoup  d'ameiio- 
rations.  Les  universités  de  Leyde  e4; 
d'Utrecht  se  disputèrent  l'avantage 
de  posséder  ce  professeur  :  Yander 
Lindcn  donna  la  préférence  à  celle  de 
Leyde,  et  il  mouru  en  cette  ville  le  5 
mars  1G64.  Jean  Cocceius,  son  collè- 
gue, prononça  son  oraison  funèbre  ; 
cettepièce  a  été  imprimée.  Le  fameux 
Gui  Patin,  ami  de  Van  der  Linden , 
le  regardait  comme  un  homme  tiès- 
instruit ,  mais  mauvais  praticien,  et 
le  soupçonnait  d'être  entèîé  de  l'al- 
chimie et  de  la  pierre  phil  «sophale 
{  Voyez  les  Lettres  de  Patin ,  3 1  '2 
et  397  ).  On  a  de  ce  professeur  un 
assez  grand  nombre  d'ouvrages,  par- 
mi lesquels  on  distingue  :  L  JJescrip- 
tis  medicis  libri  duo  y  Amsterdam, 
1637  ,  i65i  et  1662  ,  in-B**.  C'est 
mie  Bibliographie  médicale,  très-in- 
complète ,  même  pour  le  temps  oii 
éileaparu,et  qui  n'est  point  exempte 
d'erreurs  (  Voyez  Ernst,  t.  Xïll, 
p.  1269  )  ;  mais  elle  n'en  a  pas  moins 
été  forï  utile  à  ceux  qui  ont  travail- 
lé depuis  sur  le  même  sujet.  A.  Merc- 
klin  l'a  publiée  avec  des  additions 
considérables  sous  ce  titre  :  Linde- 
nius  renovatus ,  sWe  de  seriptis  me- 


LIN 

dldSj  etc. ,  Nuremberg  ,  168G,  \t 
4°.;  et  J.-J.  Manget  a  inséré  cet  ci! 
vrage,  avec  de  nouvelles  addiliori 
dans  sa  Bihliotheca,  scriptor.  med 
cor.  (Voyez  Manget  et  Mercrlin 
II.  Medicîna  physiologica,  novdcu 
jatdquemethodo ,  ex  o-iliinis  (fuihu. 
que  auctoribus  contracta,  et  proprii 
o  servationibiis  locupletata  ,  Aras 
lerdara,   i653  ,  in-4^.  Suivant  Elo_ 
(  Dictionnaire  de  médecine  ) ,  Vai 
der  Linden  a  suivi  Vesale,  quoiqu'i 
le  contredise  assez  souvent; il  faitre 
monter  la  découverte  de  la  circnh 
tion  du  sang  jusqu'à  llippocrate;  e| 
soutient  que  la  substance  ducerve 
est  insensible.  La  description  qu| 
fait  de  l'oreille  et  des  muscles  est, 
scz  étendue  ;  il  rend  compte  aussi 
ses    observations    particulières 
l'organe  de  la  vue.  III.  Selectame^ 
dicaet  adea exercitaliones  Batavœ 
Leyde,  i656,in-4**.  C'est  un  recud 
de  seize  dissertations  dont  quelques- 
unes  sont  assez  curieuses.  IV.  Mêle- 
ternata  medicinœ  Hippocraticœ ,  ib. 
1660,  in-4'^  Vander  Linden  y  entre 
dans  de  grands  détails  sur  les  con- 
naissances  physiologiques   des  an-j 
cieus.  J.-J.  Dôbel  a  donné  un  abrégéj 
de  cet  ouvrage,  Francfort,  1672,} 
iu-4'*.  V.  Hippocrates  de  circuitw 
san^uinis ,  Leyde,   1661  ,  in-4^.  HI 
veut  prouverdans  cet  ouvragequ'Hip-  j 
pocrate  a  connu  la  circulation;  et] 
cependant  aucun    moderne,   avant! 
Harvey,  n'avait  soupçonné  que  Ici 
médecin  grec  en  eût  parlé.  On  doit 
encore  à  Van  der  Linden  de  bonnes 
éditions  des  OEuvres  d'Adrien  Spi- 
gel ,  Amsterd. ,  i645,  3  vol.  in-fol.  ; 
— du  traité  de  Cardan  :  De  utiîitate 
ex  adversis  capiendd  ;  — des  œuvres 
de  Celse,  Leyde,  1607  ,  i^^5  ,  in- 
19.  (i),  et  enfin  des  œuvres  d'Hip- 

(i)  Gtii-Patin  lui  avait  communiqué  des  exem- 
plaires tlo  Celse,  corrige»  d«  la  nia,iu  de  Fenitl 


pofratf  fn  grec,  avec  la  rcrsion  U- 
aine  de  Coniarins  ,  Lcydc  ,  Hifi"»,  a 
Yol.  in-8".  Cette  l)cllc  édition  d'IIi|)- 
jpocratc,  qui  fait  partie  delà  collec- 
tion dcîi  yarionimy  a  long-temps 
passe  pour  nne  des  plus  correctes  ; 
elle  a  d'ailleurs  cet  avantage  qu'elle 
répond  au\  meilleures  éditions  pré- 
cédentes par  le  moyen  des  chitlres 
^ui  sont  à  la  marge  et  qui  montrent 
àquellcpage  chaque  chose  s'y  trouve. 
.  le  Journal  des  savants  y  février 
•().  )  On  reproche  cependant  à 
Vân  der  Linden  d'avoir ,  en  voulant 
les  corriger ,  altéré  des  passages 
dont  le  sens  était  fort  clair.On  peut 
consulter,  pour  plus  de  détails ,  le 
Dictionnaire  de  I3ayle  et  les  Mémoi- 
r'»c  (le  Niceron  ,  tora.  m.   W — s. 

i  INDENER  (N.),  hollandaise, 
v.Miiiuc  sous  le  nom  de  ZoiUeland, 
<(ui  était  celui  de  son  premier  mari , 
usa  en  secondes  noces  Boisson, 
iiieur  du  roi.  Après  avoir  ipiitté 
le   calvinisme    pour   embrasser  la 
rcUgion  calholipic  ,  elle  puLlia  un 
ouvrage  intitulé  :  La  Bahylone  dé- 
masquée^ 1 727  , in-i 2.  C'est  un dia- 
(•  entre  deux  dames  sur  les  mo- 
|ui  doivent  engager  à  renoncer 
aux  sectes  séparées  de  la  commu- 
nion romaine.  M™*.  Lindener  a  aussi 
lit  les  Mémoires  de  Jean  de 
■'  -  f ,  1 7  09  ;  —  les  Mémoires  de  la 
fatnille  et  de  madame  de  *** ,  sur 
la  république  de  Hollande,  17 10  ; 
— la  P^ie  et  la  mort  des  deux  frères 
de  IFitt  ;  —  les  Foyages  du  nou- 
veau Monde;  — V Introduction  aux 
'  caments  de  Hollande,  de  Jean 
'•ivcrvyck.  T — d. 

LINDEAN'François-Balthasar 
DE  } ,  botaniste  allemand ,  naquit  en 


•  -'•  ^«lifer.    Oi»  reproche   à   V««  tl»rLiH()«n 
^lénoa  moiRt  hanii  <)an<  la  rcTiiien  <!«• 

-^  ,-pat.ral«. 


UN  5ii 

i^'i ,  il  Buxweiler,  en  AlsMe.  Après 
avoir    étudié    la   m^ecine  et  les 
sciences   naturrllos  aux  unÎTersitët 
de  Strasbourg  et  de  léna ,  il  Toyigeft 
en  Allemagne,  revint  en  r^o8ii  Stras- 
bourg ,  où  il  fut  reçu  aocteur  eo 
médecine  ,  et  s'y  consacra  à  la  via- 
tique de  cet  art ,  jusqu'à  l'époque  de 
sa  mort,  qui  eut  lieu  en  ij5j.  5e« 
principaux  ouvrages  sont  :  1.  Disser- 
tatio  inauguraJis  quœ  thcoremata 
quœdam  medica  miscellanea  sistit  , 
Strasbourg  ,    1708,  in-4".  II.  Sf}€- 
cuhim  !'enerisnoviteri<ditum  ,  etc. 
ou  Tableau  de  la  pluvart  des  mala- 
dies vénériennes,    ibidem,   1732, 
in-80.  :  ce  tableau  eut  4  éditions  ,  et 
fut  traduit  en  plusieurs  lanj^urs.  III. 
Medicinischer  Pas.^epartout,e\c.  ou 
Caractères  des   différentes  mala^ 
dies  du  corps  fmmain ,  en  allemand, 
1  vol.  in-80. ,  ibid,,  1 739.  IV.  Tcur- 
nefortius  alsaticus  cis  et  transrke- 
nanus ,   etc.  c'est-à-dire  ,   Tableau 
des  plantes  d'Alsace  ,  d'après  la 
méthode  de  Tournefort ,  un  petit 
vol.  in-8<». ,  ibid. ,  lyiS.  Il  en  ]:aiut 
en    1747    une    deuxième   édition, 
augmentée ,  sous  le  nom  de  Hortns 
alsaticus.  Cet  ouvrage  n'est  point 
une  Flore  proprement  dite,  comme 
le  titre  semble  l'annoncer ,  mais  un 
simple   catalogue    des   plantes  qui 
croissent  en  Alsace ,  disposées  par 
mois  ,  selon  l'époque  de  leur  florai- 
son ,  avec  les  noms  de  Gaspar  Bau- 
hin  et  les  phrases  de  Tourncfoit, 
ainsi  que  l'indication  des  figures  de 
Tabernaemontauus,  L'Écluse,  Mori- 
son ,  etc.  Le  tableau  s}'noptique  dont 
il  est  accompagné,  ne  présente  même 
pas  toutes  les  classes  de  Tournefort. 
Ce  catalogue  ne  peut  donc  être ,  par 
lui-même ,  d'aucun  usage  pour  l'c- 
tudc.  Il  est  d'ailleurs  fort  incomplet 
maintenant  ;  les  ouvrages  de  Nec- 
k«r  et  PoiUch^  et  U  Flore  française 


5 19.  Lm 

de  M.  de  Candolle,  contenant  un 
plus  grand  nombre  de  plantes  de 
cette  contrée  ,  et  offrant  des  rae'- 
lliodes  faciles  et  de  bonnes  descrip- 
tions. Allioni  a  consacre'  à  la  mé- 
moire de  Lindern  le  genre  Linder- 
nia  y  de  la  famille  des  Personées, 
dont  la  plante  de'crite  ,  pour  la  pre- 
mière fois,  dans  le  Tournefortiiis 
alsaticus ,  sous  le  nom  de  Pyxi- 
daria  ,  forme  la  première  espèce 
sous  le  nom  de  Lindernia  Pyxi- 
daria.  D — u. 

LINDSAY  ou   LY^^DSAY  (  Sir 
David),  poète  e'cossais,  naquit  en 
1 490,  d'une  famille  noble,à  Garmyl- 
ton  dans  le  Hadingtonshire.  Après 
avoir  termine  son  éducation  à  Fu- 
niversitë  de  Saint- André ,  il  fut  page 
d'honneur  de  Jacques  V,  alors  en- 
fant. En  i524,  les  intrigues  de  la 
reine  -  mère  forcèrent  -  Bellenden  , 
Lindsay    et  d'autres  serviteurs   du 
jsune  roi,  à  se  retirer,  maigre  l'at- 
tachement que    ce   souverain  leur 
portait,  et  qu'il  leur  conserva  toute 
sa  vie  :  il  le  leur  témoigna ,  autant 
qu'il  était  en  son  pouvoir,  en  leur 
accordant  une  pension.  Lindsay  fut 
ensuite  témoin  de  la  confusion  qui 
régnait  dans  l'état ,  et  de  l'oppres- 
sion que  les  Douglas  faisaient  peser 
sur  le  prince  et  sur  le  peuple.   En 
1 528 ,  le  roi ,  parvenu  à  l'âge  de  seize 
ans,  s'échappa  de  leurs  mains,  par 
son  adresse  et  sa  vigueur  ;  et  Lindsay 
eut  la  liberté  d'e£prit  nécessaire  pour 
se  livrer  au  cuite  dc3  Muses.  Vers  la 
fin  de  cette  même  année  ,  il  fit  pa- 
raître son  Rêve  ;  l'année  suivante  sa 
Complainte  aoi  roi  ;  et  enlin  ,  en  dé- 
cembre 1 53o ,  sa  Satire  sur  le  clergé , 
intitulée,  la  Complainte duFapijigo. 
Lindsay,  ayant  été  nommé  roi  d'ar- 
mes ,  fut  envoyé,  en   avril    i53i, 
avec  Campbel  et  Panter  à  Anvers  , 
pour  renouveler  l'ancien  traité  de 


LIN 

commerce  avec  les  Pays-Bas.  Le$ 
trois  négociateurs  furent  parfaitemciit  i 
accueilhs  par  Charles-Quint,  et  ter^ 
minèrent  heureusement  leur  mission. 
Peu  de  temps  après ,  Lindsay  retour- 
na en  Ecosse ,  et  s'y  maria  :  il  paraît 
que  l'union  qu'il  avait  contractée  ne 
fut  pas  heureuse,  et  qu'on  doit  at- 
tribuer    à     cette    circonstance    la 
manière  peu  flatteuse  dont  il  parle 
des  femmes  ,  surtout  dans  sa  satire 
des  Trois  Etats  ,  espèce  de  drame 
assez  bizarre.  Quelques  biographes 
ont  affecté  de  considérer  Lindsai 
comme  le  premier  auteur  de  dram< 
en  Ecosse  ;  mais  avant  qu'il  fût  né 
des   ouvrages  de  ce  genre  5  étaies 
très-commims  dans  ce  pays,  sous 
titre  de  moralités  {Moralities.  )  Ce 
probablement  en  i536  ,  qu'il  fit  pâ 
raître  sa  Réponse  to  the  kin^'sfy 
ting  ,  et  sa  complainte  de  Basche  , 
où  se  montre  toute  la  tristesse  de 
son  caractère.  Dans  le  même  temps , 
i535  ,  il  fut  envoyé  comme  hérault 
d'armes  y  avec  sir  John  Campbel  de 
Laudon  ,  vers  l'empereur ,  pour  de- 
mander en  mariage  une  des   prin- 
cesses de  sa  maison  :  mais  le  roi ,  peu 
satisfait  des  portraits  de  ces  prin- 
cesses ,  qui  lui  avaient  été  adressés  ,  ; 
ou  peut-être  ayant  pensé  qu'il  luiserait 
plus  utile  dese  lier  avec  la  France,  en- 
voya Lindsay ,  en  1 536,  dans  ce  der^ 
nier  pays ,  où  cet  envové  parut  av^ 
beaucoup  d'éclat  par  son  esprit  et 
courtoisie.  Le  roi  Jacques  y  vint  aus^ 
et  il  lit  choix  de  la  princesse  Mac' 
lène,  qui  mourut  après  deux  mois 
de  mariage  :  cette  perte  fut  le  sujet  ! 
d'un  nouveau  poème  de  Lindsay.  Le 
roi  se  remaria  en  1 538  ;  et  les  talents  | 
de  Lindsay  furent  employés  de  non-  | 
veau  à  cette  occasion ,  ainsi  que  pour 
la  naissance  du  prince.  Il    épousa 
la   cause  des  réformés   sous  la  ré- 
gence y  et,  après    l'assassinat    du 


ier^ 
aois  1 


LÎN 

I  ,  il  publi.i  une  Ir.i. 
.-  a  au^îucniiT  les  piv- 
iis  rentre  ce  prélat.  En  i54B, 
,v  rendit  auprès  de  rdiristian,  roi 
te  Danemark. ,  pour  demander  des 
aisseaux  destines   à    protéger    les 
ites  d'Ecosse  contre  les   Anglais  , 
ur  négocier  un  traite  de  coni- 
relatif  au\  grains  :  ce  dernier 
fut  seul  obtenu.  Lindsay  re- 
.1  dans  sa  patrie ,  où  il  publia 
plus  agréable  de  ses  poèmes,  in- 
lulc  :  Histoire   et    Testament  de 
ècujer    Meldrum.  Eu    i5")3  ,  il 
4iit  son  grand   ouvrage  ,  intitule, 
|.  Monarchie.  INI.  Chalmers  ,  son 
eruier    biographe  ,    pense    qu'on 
?ul   placer  Tcpoque   de    sa    raort 
îrs  1557  ;  d'autres  pre'tendeut  qu'il 
Ifcut  jusqu'en  1567.  Lindsay  entra , 
^cc  beaucoup  de  zèle  et  d  ardeur , 
ms  les  disputes  religieuses  de  so!i 
mps;  on  pense  qu'il  penchait  plutôt 
DUT  les  principes  de  Luther  :  ses 
tires  produisirent  un  grand  effet 
ir  l'esprit  des  peuples ,  eu  exage'rant 
$  vices  du  cierge'.  «  Dans  ses  ou- 
vrages ,  dit  M.  Èllis,  on  ne  trouve 
ni  la  diction  brillante  de  Dunbar  , 
ni  l'imagination  fertile  de  Gawin 
Douglas.  Le  Rêve  (  Dream  )  est  la 
seule  composition  qu'on  peut  citer 
comme  uuiforrae'ment  poétique  : 
mais  son  savoir  varié  ,  sa  parfaite 
connaissance  des  cours  et  du  mon- 
de, la  facilité  de  sa  versification  , 
son  talent   pour  adapter  ce  qu'il 
écrivait  au  caractère  de  ses  divers 
lecteurs ,  contribuèrent  beaucoup 
à  sa   popularité  ,  qu'il    dut ,   au 
reste  ,  à  ses  opinions  plus  qu'à  son 
mérite  poétique.  »  Une  édition  de 
s  œuvres  a  été  publiée  en  1 806 , 
,ir  George  Chalmers,  3  vol.  in-S".  ; 
Glossaire  mis  en  tcte,  est  fort  cs- 
né.  Lindsay  a  laissé  une  histoire 
''  osse,  en  3  vol.  ,  dont  I3  mamus- 
XXIV. 


r.m 


5i3 


^<  î  infla  hiblioth^tif 

tl<^"»  ■•• •■  ■•  *-«l»mbourj;.  —  Liî«o- 

SAY  (Robert  )  de  PeLscollie ,  contem- 
porain de  sir  David,  est  réputé  l'au- 
teur ou  l'éditeur  de  l'ouvrace  qui  a 
paru  depuis  ,  sous  le  litre  d'histoire 
d'Ecosse  ,  de  i43G  a  i565  :  nn« 
édition  récente  et  très-correcte  de  cet 
ouvrage  ,  a  été  donnée  par  Jean 
Graham  Dal yell ,  'X  vol.  in  8". ,  avec 
son  vrai  titre  de  Chronique  d' Ecosse, 
—  LiMDSAY  (  Jean  ) ,  savant  théolo- 
gien de  Saint-Mary-Hall,  à  Oxford, 
fut  pendant  plusieurs  années  minis- 
tre de  la  société  des  Non- Jurcurs 
qui  se  tenait  à  F^ondres ,  dans  la 
chapelle  de  la  Trinité.  Il  travailla 
quelque  temps  comme  correcteur 
d'imprimerie  ,  chez  Bowyer ,  et 
mourut  à  l'âge  de  quatre-vingt-deux 
ans  ,  le  l'i  juin  17O8.  Lindsay  a  pu- 
blié :  L  Histoire  abréf;ée  de  la  suC" 
cession  royale  (  Short  history  )  etc. , 
a\fec  des  Remarques  sur  les  écrits 
politiques  de  fVhiston  ,  1710,  in- 
8**.  :  elle  se  trouve  indiqiiée  dans  le 
catalogue  Bodiéien.  IL  Une  traduc- 
tion de  la  Défense  de  l'église  d'An- 
gleterre ,  par  Mason  ;  publiée  en 
1726,  et  réimprimée  en  17U7  et 
1728.  En  tête  de  l'édition  de  1727  , 
se  trouve  une  longue  préface  conte- 
nant des  détails  sur  tous  les  évéquei 
d'Angleterre, depuis  la  réforme. 
D — z — s, 
LINDSEY  (  TutoPHiLE  ) ,  pre- 
mier ministre  des  unitaires  à  Lon- 
dres, né  à  Middiewhich ,  dans  I9 
Cheshire  ,  en  17^3,  fit  ses  éftide» 
et  prit  ses  grades  au  ^  lint- 

Jean ,  à  Cambridge.  D  mi- 

nistère évangélique,  il  ne  l'embrassa 
néanmoins  ,  comme  il  en  a  fait  l'a- 
veu ,  que  de  sa  libre  volonté ,  et 
accepta  successivement  des  bénéfices 
à  Londres ,  dans  les  comtés  d'York 
et  de  Dorset.  L'amitié  et  des  liens 
33 


i4 


UN 


de  parenté  l'engagèrent  à  e'cliangcr 
le  dernier,  quoique  Irès-avantageux , 
contre    celui    de   Catterick  ,   dans 
l'Yorkshire  ,  où  il  ne  pensait  qu'à 
finir  ses  jours  au  milieu  de  ses  pa- 
roissiens qu'il  édifiait  par  ses  vertus, 
lorsque  îa  doctrine  et  les  cëre'monies 
de  l'église  anglicane  lui  ayant  fait 
naître  des  scrupules, il  se  joignit ,  en 
i-jn^i,   à   une  reunion  d'ecclësiasti- 
ques  de  difFërcnts  cultes  pour  re'cla- 
mer  auprès  du  parlement,  contre  la 
signature  des   trente-neuf  articles. 
Dès-lors,  il  se  sentit  oblige  par  sa 
conscience,  ainsi  qu'il  le  dit  ^  pag. 
239  de  son  Apologie,  et  par  son 
respect  pour  le  culte  du  seul  Dieu  et 
père  de  tous ,  de  résigner  son  bëné- 
iice,  quelque  sacrifice  qui  lui  en  cou- 
lât j   il  craignait  ,  ajoute-t-il ,  «  de 
»  perdre  la  paix  intérieure  et  l'es- 
»  poir  de  la  misëiicorde  de  Dieu.  » 
Alors  Lindsey  remercia  la  duchesse 
de  Norlhnniberland  qui  vou'ait  lui 
procurer  rem])loi  de  cliapelain  du 
duc  ,  son  mari  ,  devenu   vice -roi 
d'Irlande  ;  ce  qui  eût  ëtë  pour  lui  un 
acheminement  à  un  évêclië.  Il  poussa 
le  désintéressement   jusqu'à  refuser 
une  pension  qu'elle  lui  0  lirait  sur  les 
revenus  de  l'Irlande ,  et  vint  à  Lon- 
dres ,  où  il  fonda  une  congrégation 
d'Unitaires,  qui,  selon  ses  pieux de- 
£irs,  devait  professer  le  culte  du  seul 
Dieu  vërita])lc.  Cette  congrégation  , 
qui  se  rëunit  d'abord  dans  un  local 
provisoire  en  1774?  et  qui  fit  cons- 
truire, en  1778,  sa  chapelle  actuelle 
d'Essex -Street,  adopta  la  liturgie 
de  l'ëglise  anglicane,   telle  qu'elle  a 
ctë  reformée  par  le  docteur  Glarke. 
Lindsey  remplit  pendant  vingt  ans  , 
ses   nouvelles  fonctions  ,  estime  et 
chéri  d'un  auditoire  respectable  et 
d'un  grand  nombre  d'amis  du  pre- 
mier  rang.  Arrivé  à  sa  soixante- 
dixiimw>  année ,  il  quitta  son  minis- 


LIN 

tère  pour  vivre  dans  la  retraite.  L 
docteur  Disney,  son  beau-frère, qt' 
avait  ëtë  long-lemps  son  coUègm 
lui  succéda  immédiatement.  Un  ci 
ses  amis  en  mourant  lui  abandons 
sa  fortune ,  dont  il  fit  le  plus  nobl 
usage,  secandé  dans  la  distriLutio 
de  ses  bienfaits  par  sa  femme,  helh 
lilie  du  docteur  Blackburn, auteur d 
Confessionnal.  Il  mourut  âgé  de  f 
ans,  en    1808.    Les    Sociniens   ( 
nouveaux  Unitaires,  dont  Priestie 
fut  l'un  des  plus  ardents  défenseur; 
fondent  leur  croyance  «  sur  un  sei 
V  Dieu  ;  sur  la   mission  divine  d 
»  Christ,  dont  l'authenticité  est  dt 
»  montrée  par  les  signes  et  les 
»  veilles  que  Dieu  a  manifestés 
»  son  intermédiaire  ;  sur  la   ré 
»  reclion  de  Jésus  j  sur  un  état  fi 
»  dans  lequel  s'exercera  une  jusfîf 
»  distribulive.  »  l^es  principaux 
crits  de  Lindsey ,  tous  en  anglais 
sont  :  L  Apologie  pour  résigner  \ 
cure  de   Catterick,    1774?  i"-8' 
avec  une  Suite  ,  177^),  in-8°.  j  01 
vrage  plein  de  recherches  sur  la  ph 
lologie  sacrée ,  mais  qui  a  été  réfu 
d'une  manière  solide  par  J.  Burg 

(  P'of.  J.  BURGH    et  G.  BlNGUAM. 

II.  Liçre  de  prières  réformé  seU 
le  plan  du  docteur  S.  Clarke , 
Vusage  de  la  chapelle  d'Esse. 
Street  ,  auec  des  hj  mîtes ,  1774 
in-8^.  lïl.  Adresse  d'adieu  aux  pi 
rois  sien  s  de  Catterick^  ^ll'^  •>  i^^"^ 

IV.  Deux  Dissertations  sur  Véva\ 
gile  St. -Jean  et  sur  les  prières  adrt 
sées  à  Jésus-Christ ,   1 779  ?  in-8 

V.  Le  Catéchiste ,  ou  liecherch 
concernant  le  seul  vrai  Dieu 
l'objet  du  culte  ,  1781  ,  in-8°.  ^ 
Essai  historique  suri' état  de  la  dû 
trine  et  du  culte  des  Unitaire. 
1783  ,  in  -  8".  Lindsey,  dans  c 
écrit,  répond  aux  attaques  de  l'év 
que  Newton,  et  donne  des  notices  s 


LIN 

lUisicurs  unitaires.  VII.    Examen 
nrenves  alléguées  par  M.   Ho- 
'i ,  en  fas>eur  tic  la  divinité  de 
Christ,    178I,   in-80.  VIlî. 
iciie    PriestUanœ  ,    ou    deux 
s  ses  aux  ètiulians  d'Oxford 
•  Can bridge^  1788  et    1*790, 
\  part.,  i:i-8o.  IX.  Liste  de  leçons 
'f    d'interprétations    fausses    des 
'lires.  X.  Considérations  sur  la 
rLc^sité  de  réviser  la  Liturgie ,  par 
in  protestant  d'accord  avec   lui- 
'.  W.  Conversations  sur  Vido' 
chrétienne^    IVO'-*,    in-S". 
^11.  Conversations  sur  le  gouveme- 
'^ent  divin ,   montrant   que   toutes 
hases  viennent  de  Dieu  et  sont 
our  Dieu  en  faveur  de  tous ,  1 8o'2 , 
1-8'*.  XîII.  Sermons,  publics  peu 
'C  temps  après  la  mort  de  l'auteur, 
yol.  in-8^.  La  doctrine  des  Uui- 
iire"î  a  donne'  lieu  à  un  grand  nom- 
Ire  d'écrits  depuis  la  fin  du  xvIlI^ 
|ècle.   M.  T.    Bols  h  a  ?n  ,   frère  de 
hbtorien,  a  ])uLlie'  des  Mémoires 
ir  la  vie  et  les  écrits  de  Lindsej  ^ 
812,  in- 1  SX.  B.  j. 

LINGELBACK  (Jean),  peintre 
'c  genre  et  de  paysage,  ne' à  Franc- 
)rl  en  16*2.5,  passa  en  Hollande  à 
âge  de  quinze  ans,  pour  se  perfec- 
onner,  et  y  acquit  beaucoup  de  re- 
itation  rilvinten France,  en  \Q^i. 
titensuite  pour  Rome,  ouïes  an- 
ju.ies,  les  fontaines,  les  foires,  les 
larlatans ,  furent  les  sujets  de  ses 
"  aj^es.  De  retour  en  Hollande ,  en 
,   on   reconnut  facilement  les 
u^rf  s  qu'il  avait  faits  en  France  et 
i  Italie.  Ses  tableaux,  d'un  bon  ton 
î  couleur,  offraient  des  mines  anli- 
ies,des  animaux,  des  chariots  rem- 
is de  jolies  figures ,  et  si  vraies,  que 
'  nature  semblait  les  avoir  formées  ; 
les  embellissaient  un  paysage  ai- 
AAe  et  très-frais.  Ses  lointains  d'un 
^lair,  SCS  ciels  Ic'gèrement  nua- 


ItN  5i5 

gës,  inspiraient  la  gatt^,  et  faisaient 
valoir   les  plans  du  devant  ;  enfin 
rien  nVlait  mieux   entendu  pour  U 

Sra«lation  des  couleurs.  Le  Miisce 
u  Louvre  possède  de  ce  maître  un 
Marché  aux  herbes ,  dont  le  fond 
est  orné  de  monuments  de  sculpture 
et  d'architecture; — un  Port  de  mer 
enrichi  d'un  s^ani  nombre  de  figu- 
res, dont  queïijues-unes  dans  le  cos- 
tume grec  moderne.  Le  m.'  .  ^^ 
sée  a  posscfdé  six  autres  t.i! 
même  ,  savoir  :  VJrrivcc  de  la 
Jlotte  hollandaise  aux  Dunes  ;  un» 
Fête  publique  ;  les  Trois  Juifs  ;  une 
Sainte-Famille;  un  Port  de  mer  ; 
des  Paysans  ramassant  du  foin. 
Les  deux  premiers  provenaient  de 
la  collection  du  stathouder;  les  trois 
suivants,  de  la  galerie  de  Vienne,  et 
le  dernier,  de  la  collection  de  Meck- 
lenbourg-Schwerin  :  ils  ont  été  en- 
leve's,  en  181 5,  par  les  Pays-Bas , 
l'Autriche  et  la  Prusse.  Il  y  avait  ,' 
dans  la  galerie  de  Saiut-Cloud,  ua 
autre  tableau  de  Lingelback,  repré- 
sentant V Arrivée  des  voyageurs  à 
l'hôtellerie,  dont  la  gravure  fait 
partie  du  Musée-royal,  publié  par 
M.  H.  Laurent:  ce  tableau  a  été  volé 
de  nuit,  en  juillet  181 5.  On  a  aussi 
de  lui  quelques  Marines  et  des  Pa^^ 
sages  gravés  à  la  pointe,  d'un  goût 
très-spirituel.  Il  mourut  à  Amster- 
dam en  1687.  ijf — s. 

LINGELSHEIM  (  George -Mi- 
CHEL  )  ,  littérateur,  né  à  Strasbourg 
dans  le  sci/.ième  siècle ,  fut  précep- 
teur et  ensuite  conseiller  de  l'élec- 
teur Palatin.  C'était  un  homme  de 
beaucoup  de  mérite ,  et  d'un  com- 
merce sur.  Baudius  le  nomme  vit 
gravis  et  sapiens.  Lingelsheim  était 
fort  lié  avec  de  Tbou  ,  qui  lui  confia 
le  manuscrit  de  son  Histoire  pour 
la  revoir  cl  y  faire  les  corrections 
conveuableS;  avant  de  la  livrer  à 
33.. 


5i6 


LÎN 


J 'impression.  L'édition  revue  de 
cette  histoire  esl  celle  de  Genève  , 
1620,  4  vol.  in-fol.  Il  entretenait 
xme  correspondance  avec  Goldast  et 
Bongars;  et  l'on  a  publie,  long- 
temps après  sa  mort ,  dont  on  ne 
peut  fixer  l'époque  ,  un  recueil  de 
ses  lettres  et  de  celles  de  Bongars  : 
Bongarsii  et  Lingelshemii  epistolœ , 
vStrasbourg,  1660,  in-ri.  On  regarda 
Lingelsheim  comme  l'auteur  d'une 
critique  de  l'histoire  de  N.  D.  de 
Halle ,  par  Juste  Lipse  ,  publiée 
sous  ce  litre  :  Dissert aiio  de  idolo 
Hallensi  Justi  Lipsii  mangonio  et 
phaleris  ornato ,  Heidelberg,  ï6o5, 
in-4°.  Scaliger  lui  en  fit  compliment; 
mais  Lingelsheim  lui  apprit  par  sa 
réponse,  que  le  véritable  auteur  était 
Pierre  Denaisius  ,  assesseur  de  la 
chambre  impériale,  lequel  ne  voulait 
pas  être  connu  ,  par  la  crainte  des 
jésuites.  Goldast  avait  été  l'éditeur 
<^e  cette  satire  ,  et  les  soupçons  se 
dirigèrent  sur  lui;  Bongars  lui-même 
n'en  fut  pas  à  l'abri.  Le  P.  Anastase 
Cochlet ,  religieux  carme  ,  ne  les 
ménagea  guère  dans  un  livre  qu'il 
publia  pour  la  défense  de  Juste  Lipse: 
Falœstra  honoris  D.  virginis  HaU 
lensis  ,  pro  Justo  Lipsio  ;  mais  ils 
gardèrent  le  silence,  et  l'affaire  s'a- 
paisa. V.  le  Dict.  de  BajU.  W — s. 

LINGENDES  (  Jean  de  ),  poète 
français  ,  né  à  Moulins  vers  1 58o  , 
se  fit  d'autant  plus  facilement  une  ré- 
putation ,  qu'il  n'existait  encore  de 
modèle  dans  aucun  genre.  Il  fut  Tarai 
d'Hon.  d'Urfé  ,  de  Davity  ,  de  Ber- 
thelot ,  etc.,  qui  lui  rendirent  am- 
plement les  éloges  qu'il  leur  prodi- 
guait :  il  mourut  jeune,  en  1616. 
M^^^.  Scudery  dit  que  Lingendes  a, 
dans  ses  vers  ,  un  air  amoureux  et 
passionné,  qui  plaira  à  tous  ceux  qui 
auront  le  cœur  tendre.  On  a  de  lui  des 
Stances^  genre  de  poésie  dans  lequel 


LIN  } 

il  réusîit  mieux  que  la  plupart  de 
ses  contemporains,  mais  dont  il  a 
été  mal  à  propos  regardé  comme  l'in 
venteur; — des  Sonnets; — une  Ode  ,. 
la  reine  mère  de  Louis  XIII  ;  —  uv 
Elégie  pour  d'idem  imprimée  au- 
devant  de  la  tradnction  des  Méta- 
morphoses ,  par  Reuouard  ;  cette 
pièce  est  imitée  du  latin  de  Politicn  : 
Golletet  la  trouvait  supérieure  à  l'o- 
riginal ;  —  les  Changements  de  la 
bergère  Iris  ,  à  la  princesse  de 
Conti ,  Paris  ,  1618  ,  in-  12  ;  c'est 
la  seconde  édition.  Lingendes  man- 
que d'invention  ;  mais  ses  vers  01 
de  l'élégance  et  de  l'harmonie, 
cite  quelquefois  les  suivants  : 

Si  c'est  lin  crîme  de  l'aimer  , 
On  n'en  doit  justeinent  blâmer 
Que  les  bf^autés  qui  sont  cxi  dit 
La  faute  en  est  aiix  dieux 
Qui  la  firent  si  belle  ,  n 

Ù.I  non  pas  à  m«s  yeux. 

On  a  encore  de  Lingendes  une  traiînr 
tion  en  prose  des  Epîtres  d'Ovide 
qu'il  entreprit ,  dit-il  ,  pour  obéir 
à  deux  princesses  à  qui  il  lui  eût  ét« 
difficile  de  la  refuser  :  il  la  publia  , 
en  161 5  ,  in  -  8°.  Des  21  épître* 
que  renferment  ce  vol. ,  il  n'y  eu  a 
que  i3  traduites  par  Lingendes;  les 
autres  l'ont  été  par  Duperron  ,  Des- 
porles,  La  Brosse,  Hédelin  et  Golle- 
tet, dont  il  préféra  le  travail  au  sien. 
Cette  traduction,  quoique  médioc 
fut  réimprimée  en  1618,  et  pour, 
troisième  fois,  en  16-2 1.  Les  vers' 
Lingendes  sont  insérés  dans  la  pi 
part  des  Recueils  du  tem])s.  ïiton 
ïillet  lui  a  donné  une  place  sur  it 
Parnasse  français.  —  Linge-ndi 
(Jean  de  )  ,  évêque  de  Mâcou ,  n 
en  159.5  à  ?vïoulins,  fut  choisi  ^  ei. 
16 19,  pour  précepteur  du  comte  tit 
Moret ,  fils  naturel  de  Henri  IV  :  il 
perdit  cette  place  par  quelques  in- 
trigues ;  mais  il  y  fut  rétabli.  I' 
s'acquit  beaucoup  de  réputation  pat 


leii. 

I 


LIN 

,nii  inlent  pour  la  chaire  ,  cl  doxiiil 
iiunônierdc  Louis  XIII,  ({i>i  le  iiuni- 
eu  iir\'À,  à  rcvcchc  de  Sarlal  : 
;  transféré ,  en  i65o ,  à  Màron , 
jl  s  ap})li<fua  au  gouvernement  de 
<ondi(»rt'se,  avec  beaucoup  de  zMe  , 

>  statuts  synodaux  ,  et  (it 

>  fondations  pieuses.  Il  fut 
,1c,  en  i()55,  à  rasscmblée- 
iale  du  clergé  ,  et  mourut  à 
•n,  le  1  mai  i665.  Ce  prélat 

...:t  prononcé,  en  lôjS  ,  1*  Oraison 

funèbre  de  Louis  XIII,  à  Paris,  et  en 

■'  }  (>17, celle  de  Victor-Amédée  duc 

I  voie  :  ces  deux  pièces  sont  impri- 

iiit  (■>.  Son  portrait  a  été  gravé  par  de 

Loisy,  in-4**.  —  Li>-gendes(  Claude 

.  cousin  des  précédents ,  né  à 

lins    eu    i^qi  ,  entra  dans   la 

lé  de  Jésus  ,  fut  recteur  du  col- 

de  cette  ville ,  et  se  distingua 

>on  talent  pour  la  chaire  ,  d'où 

'Utribua  beaucoup  à  bannir  le 

ivais  goût,  les  pointes  et  les  tri- 

iités.  Ses  sermons  ont  été  publiés 

en  iGG6,  3  vol.  in-4°.  et  in-8<».  :  il 

I.  s  ^'omposait,  dit-dn,  en  latin,  quoi- 

i  les  prononçât  en  français  ;   et 

assure  que  ceux  qui  ont  paru  en 

çais,  sous  son  nom,  en  'i  vol. 

'.,  n'eu   sont  qu'une   imitation 

irfaite.   M.  Vauquelin  eu  a  fait 

'iiire  quelques-uns  pour  les  insé- 

■  lans  la  nouvelle  collection   in- 

li'C:  Les  orateurs  chrétiens.  On  a 

rc  du  P.  de  Lingendes  :  L  Con- 

^  pour  la  conduite  de  la  vie.  IL 

timm  monunientum  ah  urbe  Afo- 

linensi  Delphino  ohlatum,  in-4°.  H 

ninnrutle  i6avril  ifiGo.     W — s. 

1  IN  GUET  (  Simon -Nicolas - 

■  »r,>.Ri  ) ,  néà  Reims  en  17^6,  était 

> petit-fils  d'un  fermier  des  bords  de 

'    rivière  d'Aisne.  Son  père,  qu'on 

it  envoyé  à  Paris  pour  y  suivre 

'f's,   y  devint  professeur  de 

,  et  ensuite  sou»-priiicipal  au 


collège  de  Beanvais  ;    1 1 
dans  les  querelles  dn  j  1    m  I 

perdit  sa  place  par  suite  d'une  lettre 
de  cachet  qui  TexiLiit  à  3o  lieue*  de 
la  capitale,  et  vint  dès  ce  in 
fixera  Reims.  Après  y  av<  , 
la  (ille  d'un  procureur,  il  fui  uouiuié 
creilier  de  l'élection  ;  ce  qui  fil  dire  à 
liinguet  fils,  qu'il  était  né  sous  les 
auspices  d'une  lettre  de  cachet.  Son 
père  l'envoya  aussi  faire  ses  humani- 
tés dans  le  collège  de  Paris  où  lui- 
même  avait  professé.  Le  jeune  Liu- 
guet  s'y  distingua  de  la  manière  la 
plus  éclatante,  en   remportant  les 
troispremiers  prix  de  l'université,  au 
concours  de  i^Si.  Un  début  si  bril- 
lant fut  remarqué  par  le  duc  de  Deux- 
Ponts,  quis'altacha  le  jeune  homme , 
et  l'emmena  en  Pologne  ,  dans  le 
dessein  de  lui  procurer  de  Tavance- 
ment.  Des  raisons  particulières  sé- 
parèrent Linguet  de  ce  protecteur; 
et ,  à  son  retour  en  France ,  la  culture 
^cs  lettres  fixa  toute  son  attention. 
Il  ne  songeait  point  alors  à  suivre 
la  carrière  du  barreau.  A  l'époque  où 
la  Fiance  entreprit  la  guerre  de  Por- 
tugal ,  le  prince  de  Beauvau ,  à  qui  l« 
commandement  de  l'armée  fut  confie, 
détermina  Linguet  à  le  suivre  en  qua- 
lité de  secrétaire  ou  d'aide-<le-camp 
pour  la  partiedu  génie.  Le  i  '  l 

iVuit  que  le  jeune  auteur  r. 
ce  voyage,fut  d'apprendrcl  c.^pa^nol 
pendant  son  séjour  à  Madrid  ,  où  il 
publia  une  traduction  française  des 
principales  pièces  de  Caldéron  cl  d« 
Lopez  de  f  e^a.  Peu  de  temps  après 
sou  retour,  il  avait  dédié  au  roi  de 
Pologne  (  Stanislas  ) ,  son  Ilistoin: 
dn  siècle  d*  Alexandre  y  par  lanmll- 
il  débuta  dans  la  carrière  histo 
Parvenu  à  l'içc de a8 ans,  et  n'.it.  ..> 
point  d'état,  il  sentit  la  nécessité  de 

s'en  r  ■'  - ''^ 

vœui    . 


5i8 


LIN 


LIN 


le  barreau  (  t  ).  Il  fut  d'abord  lie  avec 
d'Alembert,  qui  ouvrait  et  fermait  à 
son  gre'  les  portes  de  l'acadëmie 
française.  On  lui  demanda  une  place 
pour  Liiiguet.  Il  exigea  quelques  con- 
ditions ,  dont  ce  dernier  ne  s'accom- 
moda point  ;  et  dès-lors  il  déclara  la 
guerre  à  d'Alembert,  à  l'acadëmie  et 
aux  philosophes.  On  sent  combien 
cet  événement  dut  changer  la  direc- 
tion des  idées  et  des  vues  de  Linguet. 
Académicien,  il  eût  pu  cultiver  la 
littérature  en  paix,  mûrir  ses  écrits 
dans  le  silence  du  cabinet,  mener 
une  vie  douce  et  paisible  au  milieu 
d'hommes  de  lettres,  tous  prêts  à 
encourager  ses  succès.  Refusé  à  l'a- 
cadémie ,  il  se  crut  obligé  de  com- 
battre les  hommes  qui  l'avaient  re- 
poussé de  leur  compagnie.  Ses  ou- 
vrages trouvèrent  partout  des  cen- 
seurs. Son  humeur  commença  dès- 
lors  à  s'aigrir  ;  et  il  sacrifia  bientôt 
à  des  discussions  polémiques  une 
partie  des  talents  qu'il  aurait  pu  em- 
ployer à  des  productions  plus  dura- 
bles. Au  lieu  de  mettre  de  l'adresse 
et  des  ménagements  dans  sa  conduite 
envers  ceux  qui  disposaient  de  la 
fortune  et  des  honneurs ,  Linguet , 
doué  d'un  géiiie  vif ,  impétueux , 
d'une  imagination  ardente  et  fécon- 
de, et  plein  du  sentiment  de  sa  su- 
périorité, brava  toutes  les  traverses, 
toutes  les  intrigues;  et  seul,  sans 
appui ,  sans  preneurs ,  il  osa  entrer 
dans  la  lice ,  et  mesurer  ses  forces  et 
ses  talents  avec  les  premiers  écri- 
vains de  son  temps.  On  conçoit  que 
cette  présomption  dut  lui  faire  une 
multitude  d'ennemis.  Cependant  il 
débuta  avec  le  plus  grand  éclat  de- 
vant les  tribunaux.  Mais  bientôt  en 


1 


(i)  Ployez  l'Annnair»  du  départ»-nietit  de  la 
Marne,  ChAlons,  18,1,  iu-ii  ,  et  la  Notice  in- 
■érée  dan»  le  Journal  de  ce  département,  du  i3 
«yril  i8ie  , article  Lingutt  ^  par  M.  G.  (Geri*zez). 


butte  aux  contradictions, et  peut-4 
à  l'envie,  les   revers  balancèrent  s 
renommée  ;  il  s'attira  des  disgrâce 
sans  nombre  par  la  hardiesse  de  so 
caractère  ,  par  un  esprit   novatei 
et  dominant ,  par  des  connaissance 
littéraires  plus  étendues  que  celk 
de  beaucoup  d'autres  avocats  ,  enfu 
par  une  diction  pleine  de  feu  et  d 
saillies,  qui  indisposa  plus  d'espril 
contre  lui^  qu'elle  ne  lui  valut  d'ad 
mirateurs.  Alliant  toujours  aux  de 
voirs  de  son  état,  la  culture  des  le 
très, en  moins  de  quatre  ans  il  pubh 
successivement  \  Histoire  des  liéé^ 
luttons  de  V Empire  Bomain 
du  seizième  siècle,  et  sa  Théorie 
lois  civiles,  ouvrage  qui  a  fait 
de  bruit,  et  qui  a  excité  tant  de  cla 
meurs.  Ce  fut  à  peu  près  dans  c 
temps-là  que  le  duc  d'Aigiiillon  1 
choisit  pour  son  défenseur.  li  puLliô 
pour  cet  ancien  commandant  de  1 
Bretagne,  un   mémoire  qui  eut  1 
plus  grand  succès.  S'il  ne  justifia  pa 
entièrement  son  client  ,   il  eut  l'c 
dresse  de  lier  sa  cause  avec  les  inU 
rets  du  gouvernement  ;  et  il  par  vin  j 
ainsi,  non-seulement  à  le  sauver! 
mais  encore  à  lui  ouvrir  la  route  d 
ministère ,  auquel  la  faveur  de  M™* 
Dubarry  le  fit  appeler  quelques  moi 
après.  Depuis  cette  époque,  il 
plaida   peu  de  causes  importai 
sans  qu'on  y  vît  figurer  Linguet.  1 
fut  surtout  dans  l'afTaire  crimini 
du  comte  de  Morangiés ,  contre 
Verrou  ,  qu'il  développa  toutes  lej 
ressources    de    son    éloquence.   L 
plaidait  toujours  de  vive  voix,  ets<| 
vantait  de  n'avoir  jamais  perdu  qu«| 
deux  procès.  «  Encore,  disait-il,  ai; 
»  je  bien  voulu  les  perdre.  »  Si  Lin-' 
guet  eût  été  assez  sage  et  assez  pru-| 
dent  pour  ne  pas  éveiller  l'amour- , 
propre  de  ses  rivaux,  s'il  ne  les  eul 
pas  provoqués  par  des  sarcasmes  ré 


lUOl 

i 


LIN 

^les  ,  por  de  violentes  diatribes ,  il 
ke  $c  scr.iit  pas  vu  force  de  lutter 
rtil  contre  une  foule  d'ennemis.  Les 
ïLs  le  rayèrent  de  leur  tableau  ; 
i  fut  interdit  de  se5  fonctions  par 
ju  arrèl  du  parlomcnt.  Ling'iet  lit 
•VlattT  les  plaintes  les  ]dus  amères; 

>  SCS  emportements  et  ses  vocife- 
ins  injurieuses  fmirent  par  lui 
lier  des  torts  réels.  Oblige  de  re- 
.  eraux  honoraires  du  barreau,  il 

cha  un  dédommagement  danslcs 
(ices  d'un  Journal  politique  , 
ont  un  grand  nombre  de  Icc- 
>;  mais  il  ne  fut  pas  long-temps 

>  indisposer  M.  de  Maurepas,  alors 
!iier  ministre  ,  et  son  journal  fut 
[)rim?.  Craignant  pour  sa  liberté, 

il   se   retira   en   Suisse  ,    passa    en 
Hollande  ,  et  ensuite  en  Angleterre  , 
ou  son  séjour  ne  fut  pas   de  lon- 
'-"•   durée;   car    n'ayant    pas  reçu 
Mieil    qu'il   croyait   mériter ,   il 
se   rendit  à  Bruxelles  ,  et  d  ne  pa- 
raissait pas  éloigne  de  vouloir  s'y 
:  :  mais  après  la  mort  de  M.  de 
1  repas  ,  il  obtint  du   comte  de 
Vcrgennes  la  permission  de  rentrer 
en  France..  Son  esprit  inquiet  et  re- 
int   lui  suscita  encore  des   dis- 
ses ;  et  bientôt ,  sur  de  nouvelles 
îites ,  il  fut  enfermé  à  la  Bastille, 
il  resta  plus  de  deux  ans.  Ayant 
promis   d'être   plus  circonspect,  il 
sortit  de   cette  prison  en  178'i  ,  et 
j  fut  exilé  à  Rethel.  Craignant  de  vc- 
.  gcter  dans  une  longue  retraite,  il  re- 
tourna à  Londres;  et  y  publia,  dès 
son  arrivée  ,  un  Mémoire  contre  le 
pouvoir  arbitraire,  comme  })our  se 
;  justifierd'enavoirfait  l'apologie  dans 
sa  Théorie!  de.;  Ins.  En  quittant  les 
bords  de  la  Tamise ,  Linguet  se  retira 

{jour  la  seconde  fois  à  Bruxelles,avec 
e  projfl  de  se  livrer  entièrement  a  la 
rédaclion  de  ses  Annales  poUli'jiies  ; 
et  ayaat  su  adresser ,  avec  beaucoup 


d*art  et  de  talent ,  det  loiiao|i;n  trrs. 
délicates  k  l'empereur  Jo^rph  ,  rc 
nrincc,  qui  avait  goûte  récrit  sur  la 
liberté  de  la  navigation  dr  rK>raul , 
permit  à  l'auteur  de  venir  à  Vienne, 
et  lui  accorda  des  lettres  de  oobles.se 
avec  une  gratiiiratioD de  mille  ducali. 
Mais  Linguet,  pousse  sans  cc»<c  par 
son  mauvais  génie,  ne  sut  pas  conser- 
ver cette  faveur;  il  prit  la  defcn.se  «le 
Van-der  Noot  et  des  insurgés  du  Bra- 
bant,  contre  l'empereur,  qui  lui  fit 
signifier  l'ordre  de  quitter  ses  Ktits. 
Il  reparut  à  Paris,  en    1791 ,  et  se 
présenta  à   la  barre  de  l'a.v.'semblrc 
constituante  ,    pour  y  défendre  les 
droits  de  l'assemblée  coloniale  d   S:.- 
Domingue,  et  attaquer  ce  qu'on  .ij»i)p- 
lait   alors  la    tyrannie  des    blancs. 
Lorsqu'il  vit  le  règne  de  la  terreur  se 
manifester  ,  il  voulut  y  échapper  en 
se  retirant  au  fond  d'une  campagne  ; 
mais  il  fut  bientôt  découvert  et  con- 
duit en  prison  :  il  y  resta  jnsqn^au 
9  messidor  (  27  juin  1794  ),  où  il 
fut  mis  en  jugement ,  à  sa  propre 
sollicitation ,    et  ,    sans   avoir    été 
admis  à  se  défendre,  condamne  à 
mort  par  le  tribunal  révolutionnaire 
pour  avoir  encensé  les  despotes  de 
rienne  et    de    Londres.   Il    subit 
la    mort    avec    courage.    On   doit 
regretter  que  cet  homme,  doué  de 
talents  su|>éiieurs   dans   yliis   d'un 
genre  ,    n'ait    jamais  su   maîtriser 
la  fougue  de  5e,s  passions.   I^es  re- 
proches auxquels  sa  mémoire  ne  peut 
échapper  ,    sont   d'avoir   répandu 
trop  d'aigreur  dans  ses  ccrits,d*avoir 
alternativement   servi  et  coml)attu 
les  partis  opposes  ,  de  s'être  permis 
de  tout  fromler  sans  aucune  retenue, 
enfin  d'avoir  quelipicfois  poussé  le 
paradoxe  à  un  tel  point  qu'on   eàt 
dit  qu'il  ne  le  cherrhail  que  comme 
uiic  occasion  de  faire    briller  son 
esprit.  Linguet  était  d'une  taille  né- 


530 


LIN 


diocre  ,  Irès-maigre  ,  marque  de  la 
petite  ve'role  :  sa  physionomie  n'an- 
nonçait nullement  ce  qu'il  était  ; 
mais,  lorsque  la  tribune  donnait 
l'essor  à  ses  moyens  oratoires ,  sa  fi- 
gure s'animait  tout-à-coup,  son  or- 
gane se  développait ,  et  bientôt  l'élo- 
quent orateur  entraînait  tout  l'audi- 
toire.Méfiant  et  soupçonneux, il  avait 
toujours  des  pistolets  sur  sa  table,  ne 
sortait  jamais  sans  être  armé  ,  et 
enfermait  ses  domestiques  sous  clef: 
il  était  de  plus  intéressé  ,  et  même 
avare.  Personne  ne  l'aidait  dans  ses 
travaux.  11  faisait  seul  ses  journaux, 
et  il  eut  quelque  temps  une  presse 
chez  lui.  ISous  ignorons  ce  qu'est  de- 
venue sa  bibliothèque  qu'on  dit  avoir 
été  très  -  considérable.  Ses  écrits 
aussi  nombreux  que  variés  sont  :  I. 
royale  au  labyrinthe  du  Jardin 
du  Roi  ,  1755,  in-  12.  II.  Les 
JFemmes-Filles ,  parodie  d' Hyper- 
vinestre ,  1759,  in- 1*2.  HT.  Fros- 
•pcctus  d'un  nouveau  spectacle  de 
musique,  i76'2 ,  in-i'i.  IV.  His- 
toire du  siècle  d  Alexandre ,  Amst. 
(Paris),  1762,  in- 12.  Il  était  dif- 
cile  de  renfermer  plus  d'érudition  et 
de  vraies  connaissances  dans  un  plus 
court  espace.  Le  style  en  est  élégant 
et  pur,  mais  trop  épigrammalique. 

V.  Mémoire  sur  un  objet  inté- 
ressant pour  la  province  de  Picar- 
die ,  ou  Projet  d^un  Canal  et  d'un 
Port  sur  ses  côtes,  1 764 ,  in-S*^.  — 

VI.  Le  Fanatisme  des  I^hiloso- 
fhes  y  1 764  ,  in-8<*.  ;  ouvrage  un 
peu  réchauffé  du  discours  de  Jean- 
Jacques  Rousseau  sur  le  danger  des 
sciences ,  mais  assez  plein  de  force 
€t  de  chaleur  pour  être  lu  avec  in- 
térêt,  môme  après  celui  du  célèbre 
Genevois.  VII.  Nécessité  d'une 
réforme  dans  l'administration  de 
la  justice  et  dans  les  lois  civiles  de 
Fiance,  1764,  iu-8^.  Ce  livre  est 


LIN 

bien  écrit ,  et  estimé  pour  les  vuf 
judicieuses  et  utiles  qu'il  renfermi 
L'auteur  l'a  fondu  depuis  en  grand 
partie  dans  ses  Annales.  VIII.  L 
Dime  royale  avec  tous  ses  avari 
tages ,    1764;   nouvelle    édition 
Londres   et  Paris  1787,  in-S».  I)s 
Lettre  du    mandarin   Hoeitchin 
à  son   ami    Hoeit-chajig  ,    1 76J 
Cette  brochure  a  rapport  aux  affaire 
des   Jésuites.    X.    Epitre  en  ver, 
d'un  G.  de  D.  à  un  de  ses  amîs\ 
supplément  aux  Mémoires  d'une  f  à 
meuse  académie,  Lié^e,  i764,in-r 
Celte  épître,  adressée  au  P.  Bertieï 
et  d'autres  petites  pièces  de  versai 
prouvent  qucLinguet  avait  du  taie 
pour    la     poésie.    XI.    Socratt 
tragédie  en  5  actes ,   1 764  ,  in-| 
Cette  pièce,  où  il  y  a  des  vers  h( 
reux  ,    n'eut    aucun   succès.    XI 
Supplément,   ou  Troisième  lettre 
Î7G5,  in-8<'.   XIIL    Histoire  de 
Révolutions  de  l' Empire   romain 
depuis  Auguste  jusqu'à  Constantin 
17GÔ,    deux  volumes   in-12  :  e!l<; 
ne   s'étend  que  jusqu'à  Trajan  in-! 
clusivement,  quoique  suivant  leplari 
de  l'auteur  elle  dût  compléter  leîj 
Révolutions  romaines  de  l'abbé  df! 
Vertot.  Ou  a  prétendu  que  Linguet  ' 
dans  cet  ouvrage  ,  s'attachait  à  jus-l 
tifier  les  tyrans  ,  et  à  déprécier  les 
plus  grands  hommes  de  l'antiquité: 
mais  pour  avoir  révoqué  en  doute 
les  récits  dramatiques  de  Tacite  et 
les  anecdotes  suspectes  de  Suétone , 
il  ne   méritait   pas   d'être   regardé 
comme  l'apologiste  de  la  tyrannie. 
Dureau  de  Lamalle ,  dans  son  excel- 
lent discours  préliminaire  de  la  tra- 
duction de  Tacite,  développant  avec- 
une  sagacité  peu  commune  tes  prin- 
cipes de  la  constitution  des  Romains 
sous  les  empereurs,  a,  bien  mieux 
que  Linguet,  justifié  ces  tyrans,  et  n'a 
Ifouve  aucun  contradicteur.  XIV» 


LIN 

C/trorfinnatU  ,  histoire  politi- 

.  traduite  de  Vallr- 

K'ur  Pan^loss  par  le 

'ii-meme  depuis  son  retour 

tant  utopie,    1766,    i  11-12; 

voile   dtliliou   augniculée  d'une 

ledii  même  auteur,  1767,111-1:1. 

a  le  quatrième  chapitre  de  Can- 

r  de  Voltaire,  qui  fit  naître  cet 

(.XV.   Théorie  des  lois  civiles, 

7  ,  in-i2,  et    1774  ,   3    vol. 

:  i.   Ce   livre    r<5uuit  au  coloris 

I  style  brillant,  des  métaphores 

lies  ,  et  quelques   opinions   ha- 

Ices  sur  le  despotisme  et  la  ser- 

Je  ;  mais  elles   ont  e'te  prises 

à  la  lettre  par  ses  détracteurs. 

1,  Histoire  impartiale  des  Je- 
'  V  ,  1768,  in-8^.  Ce  livre,  con- 
iiie'  à  être  brûlé,  ne  satisfit  ni  les 

ites  ,  ni  les  magistrats,  quoiqu'il 

«rme  ce  qu'on  a  pu  dire  de  mieux 

:  iveur  du  cor])s  célèbre  qu'il  dé- 

L    XVII.  L'aveu  suicère ,  ou 

ire  à  une  mère  sur  les  dangers 

court  la  jeunesse  en  se  livrant 
•i  goût  trop  vif  pour  la  littéra- 

,  Paris,  1768,  in-ii.  XVIII. 
t  re  sur  la  nouvelle  traduction  de 

ite  par  M.  L.  D.  L.  B.,  17G8, 

2.  Cette  lettre ,  remplie  d'une 
;ie  critique  ,  lit  tort  à  la  réputa- 
dont  commençait  à  jouir  la  tra- 
ion  de  la  Blelteric.   XIX.    La 

rre  philo sophale  ,  1768,  in-12. 

Tliedtre    espagnol,    17G8  , 

ol.  in-isi;  assez  estimé.   aXî. 

canaux  navi'^ables  pour  la  Pi- 

iie  et  pour  la  France ,  1769  , 

>..  XXÏÏ.  Continuation  de  ihis' 

universelle  de  Hardion ,  for- 

l  les  tomes  xix  et  xx,   1769, 

••  XXI  II.  Mémoire  pour  le  duc 

iguillon  ,    1770,  in-4°.  XXIV. 

'res  sur   la    Théorie   des  lois 

c     \î  i^trrdam  ,  1770,  in-ise. 

>^  aux  docteurs  mo- 


demes,  ou  ^polûgiadêtmttmirdê 
la  Tftéoric  des  lois  civiles ,  Londres, 
1771,  in-ia.  XXVL  Tfuforie  du 
liMle  ,  ou  VAn  de  calomnier  avec 
fruit ,  en  réponse  à  la  T/iéorie  du 
Paradoxe  de  Vàhhc  Morcllct ,  Ams- 
tenlam  ,  I77.'>,  in-iu.  La  rén.;  , 
de  Linguet  est  bien  inférieure  à  I  •  ' 
polémique  où  l'abbé  Morrllel  rov  \ 
ses  opinions  par  des  raisonnrii:  ; 
plcinsdeforceelparrironic.XXN  11. 
Mémoire  pour  le  comte  de  Moran 
giéi,  1772  ,  in-4".  Ce  plaidoyer  es* 
le  triomphe  de  Linguel  au  barreau , 
et  sans  contredit  lo  meilleur  de  ses 
écrits  judiciaires.  Dignité,  raison, 
mesure ,  style  noble  cl  sans  enflure, 
élégance  soutenue  ,  tout  s'y  ren- 
contre dans  l'accord  le  plus  itarfait. 
(  Essai  sur  la  vie  et  les  ouvrages 
de  Linguet ,  par  M.  Gardaz  ,  av<»- 
cat.  )  XXVÏII.  Du  plus  heureux 
gouvernement  j  ou  Parallèle  des 
constitutions  politiques  de  l'.^.sitt 
avec  celles  de  l'Europe,  1774  i-  '* 
yo\.'\n-\'i.\XW.RéJl€xionspourla 
comtesse  de  Bétluine,  et  Supplément, 
i775,in-4'*.  et  in- 15».  I^e  célèbre  avo- 
cat Gerbicr,  et  quelques-uns  de  ses 
confrères ,  y  furent  traités  sans  mé- 
nagement; ce  qui  provoqua  l'an  et 
du  II  février  1774,  par  lequel  Lin- 
guet  fut  rayé  du  tableau  des  avocate. 
XXX.  Requête  au  conseil  du  Roi 
contre  les  arrêts  des  29  mars  1771 
et  ^février  1775.  On  trouve  dans 
quelques  exemplaires  deux  lettres 
de  Linguet  au  auc  d'Aiguillon  ,  qui 
sont  remarquables  par  l'énergie  et 
la  vivacité  du  style.  XXXL  Plai- 
doyers divers  et  Discours  réunis 
dans  le  recueil  de  se3  mémoircN  ju- 
dirinircs,7vol.in-i2.XXX!l.y'///- 
nal politique  et  littéraire,  co nun n  1  - 
ce  eu  octobre   1774»  «t  continué 

i'usquVn   1776.  La  suite  est  de  î»- 
:arjie,  qui  a  repris  cr  journal  d( 


5'2i 


LIN 


le  1^  aoLit  1777  jusqu'en  mai  1778. 
XXXilï.  Piéjiexions  des  six  coips 
de  la  ville  de  Paris  sur  la  suppres- 
sion des  jurandes ,  1776.  XX\1V. 
Essai  philosophique  sur  le  inona- 
chisme,  1777,  in-S».  XXXV.  An- 
nales polit  i(pies,  civiles  et  littéraires 
du  dix-huitième  siècle ,  commencées 
en  1 777,inteiTompues  pendant  quel- 
que temps,  reprises  à  Paris  en  1790 
et    terminées   en    179a  :  elles  sont 
composées  de  179  numéros  qui  for- 
ment 19  vol.  in-S".  On  y  trouve  des 
morceaux  de  littérature  d'un   bon 
choix  :  elles  sont,  en  général ,  écrites 
avec  clialeur  ,  et  souvent  avec  goût  ; 
mais  l'auteur ,  toujours  tranchant , 
décide  de  tout  et  fronde  tout  sans 
mesure  :  plusieurs  cahiers  excitèrent 
de  vives  réclamations.(Voyez ,  De  la 
foi  publique  envers  les  créanciers  de 
l'Etat;  Lettre  à  M.  Linguet  sur  le 
1 16".  numéro  de  ses  annales ^in-S'^.' 
Arrêt  de  la  Cour  du  parlement  qui 
condamne  ce  i\(j^.  numéro  à  être 
brûlé,  et  Protestation  de  M.  Lin- 
guet  contre  les  arrêts  du  Parlement 
de  Paris,  des  2,5  et  'l'j  septembre 
1778.)  XXXVI.  Lettre  au  comte 
de  Fergennes,  Londres,  1777, in- 18. 
XXXVII.  Aiguilloniana, Londres, 
1 777,  in-S*^.  (  Voy.  le  Journal  de  la 
librairie, 1S16,  pag.  54.)XXXVIII. 
Appel  à   la  postérité ,  1779  ,   in- 
8«.  XXXIX.  Mémoires  sur  la  Bas- 
tille y  Londres,  1783,  in-S**.  Lin- 
guet  s'y  étend  principalement  sur  ce 
qui  lui  est  personnel ,  sur  ses  espé- 
rances futures ,  et  sur  la  crainte  pué- 
rile qu'il  avaitd'êtreempoisonnéaans 
cette  prison  d'état.  XL.  Mémoire 
au  Roi,  contenant  sa  réclamation 
actuollem3nt  pendante  au   Parle- 
ment de  Paris  ,  1 786  ,  in-8<*.  XLI. 
Réflexions  sur  la  lumière,  1787  , 
in-8^. ,  où  l'on  trouve  des  aperçus  et 
des  idées  très-remarquables.  XLII. 


LIN 

Considé  ations  sur  Vom'*rtu'e  d. 
l'Escaut,     1787  ,    '2   vol.    in-80 
XLIIL  Discours  sur  l'utilité  et  h 
prééminence  de  la  chirurgie  sur  le 
médecine,  Bruxelles  et  Paris,  1787 
in-8''.  XLI  V.  La  France  plus  qu'an 
glaise,    Bruxelles,    1788,   in-80 
XLV.   Onguent  pour  la  brûlure 
1788,  'm-S^,XL\I.  Examen  de, 
ouvrages  de    Voltaire ,  considén 
comme  poète ,   comme  prosateur 
comme  philosophe ,  Bruxelles,  1788 
in-8''.  C'est  une  des  bonnes  prodiic 
lions  littéraires  de  l'auteur  :  san; 
être  tout-à-fail  exempt  de  partialité 
il  s'y  montre  un  critique  exercé  dan: 
les  divers  genres  de  littérature.  Il  er 
a  paru  ,  en  1817  ,  une  nouvelle  édi 
tion ,  augmentée  de   courtes  notes,  1  si 
XLVII.  Poiîit  de  banque  route,  pluà 
d'emprunt,  et ,  si  Von  veut ,  bientôt 
plus  de  dettes, en  réduisant  les  impôts 
à  un  seul,  1789,  in-8«.  XLYIIl 
Lettre    à    Vempe  eur  Joseph    lï 
surla  révolution  du  Brabant,  1 789^ 
in-8''.  IL.    I^ettre  au  comité  pa^ 
triotiqiie  de  Bruxelles,   1789,  in- 
8°.     L.    Légitimité    du    divorce  J 
1789,  in-8'^.    LI.   Code   crim'nel\ 
de  Joseph   II,    1790,  in  8°.   LII.j 
La  Prophétie  vérijiée ,  ou  Lettresl 
au  comte  de  Trautmansdorjf,  Gand, 
1790  ,  in-8'\  LÎIL    Collection  des 
ouvrages  relatifs  à  la  révolution  du 
Brabant ,   1791 ,  in-8'*.  Linguet  eslj 
encore  auteur  d'un  Mémoire  ma^l 
nuscrit,  pour  le  département  de  la^ 
marins,  sur  les  moyens  d'établir 
des  signaux  par  la  lumière.  Ce  Mé- 
moire a  été  composé  en    1782,61 
envoyé  au  ministre  de  la  marine  :  il 
en   existe   des   copies  manuscrites. 
M.  Gardaz ,  avocat  à  Lyon  ,  a  pu- 
blié un  Essai  historique  sur  ht  vie  et 
les  ouvrages  de  Linguet, hy  on,  1 808, 
in-8^. ,  et  M.  L.  Alexandre  Devérité 
une  Notice  pour  servir  à  l'histoire  ds 


LIN 

î,t  i>ûf  et  iUis  écrits  de  S.-N.-H.  Lin- 
i  ,  ainsi  que  quelques  paniphlet.H 
(|ue   ceux-ci   :   Qu'est-ce  que 
^net?  1790,  in -8".  Qu'est-ce 
H. '/le  que  ce  train-là  ?  Il  règne  dans 
tous  ces  écrits  une  praiule  partialité. 
On  a  encore  Linguetiana,ou  Recueil 
ides  rcyarties  ingènieusi'S   et  bons 
mots  de  cet  auteur  ,  in- 18.  J — d. 
1     MNIl^.RE(  François  Payot  ot), 
le  satirique,  ne  a  Paris,  en  i();i8, 
le  famille  de  robe,  entra  fort  jeune 
rvice.Donëd'unefignrcagreahle, 
1  esprit  vif,  avec  des  manières  sc'- 
intes,  il  eut  beaucoup  de  succès 
1  es  des  femmes,  et  ne  se  piqua  pas 
'  instance.  De  retour  à  Paris,  il  rcus- 
lans  la  société  par  son  enjoue- 
it.  Les  éditeurs  des  Annales poe- 
:es  (  tome  xxvii  )  disent  qu'il 
il  madame  Deshoulicres  dans  les 
'  cts  de  la  poésie  ;  mais  cet  hon- 
r  est    ordinairement  attribué  à 
ii  iiaut.  Qiioi  qu'il  en  soit,  Linière 
iiaii  des  amis  de  cette  dame;  et  elle 
a  fait  de  lui  un  portrait  qui  ne  pa- 
raît pas  flatté  (  I  ).  Elle  cherche  ce- 
pendant à  le  justifier    du  reproche 
n  irréligion.  Linière  était  en  effet  ce 
on    nommait   déjà    un    aimable 


Voiri  quelque*  mn  de  cetlo  pifc»  compo- 
<n  i658.  Liuière  n'avait  alortqiie  tcent«  an*! 

irait  ingénu,  bon  et  (Ant  artiGce; 
«  «on  air  e»l  trompeur  ,  il  a  <i«  la  malîce; 
urne  la  «aliio  ,  et  croit  qu'il  fit  permis 
i'     TxiiUr  (oTtement  de  let  meilleurf  <iini«, 
1     ^  nier  en  il i»cri  lien»  ,  de  faire  dci  pro "»«••';§ , 
•  gncrdeicODtratspour  iourbei  tes  mattr-isei. 

:t  ftn«  tout  éroulét,  depuli  qui  Luxenihonrg 
y-  \itpour  Ini  I.t  mort  rriomp'ier  •!<•  rnnjoii'. 
1  vit  Pari»  a  Hien  ki  celle  tragique  liiiloire  t 
0  I  m  aditqu'elleeatvraie.elneTaus  paala  croirt. 

m  demande  maintenant  •!  madame  l>«altO«- 

-%  fait  iMi  gland  élog<*  de  Liniire,  al  •'il  con- 

\\t    de    dire  ,    comme    ra     f«it    Saint-Marc 

11»  •»•  Contmen/air"'  «wr  Boileaii  ),  q«>7* 

7jV  avoir  rl^  drslmt'e  à  prendra  parti  pour 

'    mwv<ii*  poètes    Kîlo  a  cherche  *    l'cacnaer 

.J    in  reproche  o.iiaii»  quelle  n«cro»ait  ^aa   f»»i. 

J.  ;    et  Saint -Marc    lui  en  fait    un    crime  !  Il 

'      prend  occaiion  de  {eUr  daa  doutea  «ur  aea 

ripra  relif;!eus  IC^tat  agir  «fM  aa«  Icgérvié 

.  ardeanakU. 


LÎTf 


5i(3 


débauché,  léger,  inconsi^iifoit ,  et 
trop   occupé  de  se»  pUisim  pour 
avoir  un  systèrac  arrêté;  mais  quel- 
ques couplets  trop  libres  sur  des  ob- 
jets respectables  ,  ne  paraissent  pas 
sudLsants  pour  lui  mériter  le  litre 
odieux  d'athée.  Il  composait  ses  ou- 
vrages avec  une  {grande  facilité,  et 
ne  retouchait  jamais  ses  vers:  il  vint 
cej>cndant  un  jour , dit-on, consulter 
(ihapelain,  sur  quelques-unes  de  se» 
dernières    productions.   Chapelain, 
après  en  avoir  écouté  la  lecture,  lui 
dit:  «M.lechevalier,vous  ave/,  beau- 
coup d'esprit,  et  de  bonnes  rentes  ; 
c'en  est  assez  ,  croyez-moi ,  ne  faites 
point  de  vers  :  le  titre  de  poète  est 
méprisable  d^us  mi  homme  de  qua- 
lité comme  vous.  »  Linière  sevenp;ea 
par  l'ingénicrsç  parodie  de  quelques 
scènes  du  Cid  (i),  et  par  des  épi - 
grammes  qui  couvrirent  de  ridimle 
le  malheureux  autr^ur  de  îa  Pucllr. 
Boileau  a  cité  lanière  dans  sa  ix*". 
satire, comme  un  critique  judicieux; 
mais  quelques  observations  dépla- 
cées qu'il   se  permit  contre  la  fa- 
meuse épître  sur  le  passage  du  Rhin, 
excitèrent   la  l)ile  de  Boileau,  qui 
depuis  n'en  parla  plus  qu'avec  mé- 
pris. Linière  dépensa  toute  sa  for- 
tune dans  des  parties  de  plaisir;  et, 
sur  la  fin  de  sa  vie,  il  fut  réduit  k 
emprunter  de  l'argent  à  ses  amis. 
Boileau  continua  toujours  de  lui  en 
prêter;  et  Linière  allait  souvent  du 
même  pas,  au  premier  cabaret, faire 
une  chanson  contre  son  crejincier. 
Il  habitait  une  maison  de  campagne 
près  de  Senlis  ;  et  c'est  pour  cette 
raison  qu'on  l'a  quelquefois  ncmnir 
l'athée  ou  l'idiot  de  Senlis.  Il  luou- 


tOUtr 

Uibu'  ■ 

l»-nt:rt  q-u  la  r^'clame  piur  L- 

Çurpmtûritits  t 


524 


LIN 


rut  en  1704.  Ses  chansons  et  ses 
epigrammes  sont  éparses  dans  les 
recueils  du  temps.  On  cite  encore  de 
lui  :  Poésies  diverses ,  ou  Dialogues 
en  forme  de  satire,  du  docteur  Mé- 
taphraste,  et  du  seigneur  Albert, 
sur  le  fait  du  mariage,  vol.  in-ioi 
de  46  pag. ,  sans  date  et  sans  indica- 
tion du  lieu  de  l'impression.   W-s. 

LINIERS  BREMONT  (Don  San- 
tiago), chef  d'escadre  espagnol,  ne 
à  Niort  vers  1760  ,  servit  d'abord 
dans  l'ordre  de  Malte  ,  entra  au  ser- 
vice d'Espagne,  avant  la  révolution , 
et  parvint  au  grade  de  capitaine  de 
vaisseau.  Envoyé'  en  mission  auprès 
du  dey  d'Alger,  il  reçut  en  présent 
VAX  damas  de  grand  prix ,  que  ce 
prince  poriait  lui-mcrae  à  son  cote. 
Ds  retour  en  Espagne ,  la  cour  lui 
confia  une  mission  plus  importante 
sur  le  continent  de  l'Amérique  méri- 
dionale. Le  roi  d'Espagne ,  alors 
allie  de  la  France  et  en  guerre  avec 
l'Angleterre  ,  crut,  pour  la  sûreté'  de 
ses  colonies  ,  devoir  e'tablir  sur 
leurs  côtes,  vers  l'embouchure  de  la 
Piata ,  un  certain  nombre  de  cha- 
loupes canonnières,  dont  il  donna  le 
commandement  au  chevalier  de  Li- 
niers ,  avec  le  grade  de  contre-ami- 
ral :  mais  ses  etForls  et  ceux  du  ca- 
pitaine-gënëral  ne  purent  empêcher 
B'-ienos-Ayres  de  tomber,  en  1806  , 
au  pouvoir  des  Anglais.  Retire'  à  la 
colonie  du  Saint-Sacrement,  Liniers 
t'ornia  le  projet  de  reconque'rir  Bue- 
nos-Ayres.  Il  se  rendit  d'abord  à 
Montevideo,  et  de  là  se  mit  en  mar- 
che à  la  tête  de  600  hommes,  s'em- 
barqua ensuite  sur  sa  flottille ,  de'- 
barqua  ses  troupes  ,  lut  renforce'  par 
d'autres  colonnes  d'attaque,  et,  s'a- 
vançant  vers  Buenos-Ayres  ,  somma 
le  général  Beresford  de  lui  remettre 
cette  capitale:  sur  son  refus  ,  le  com- 
bat s'engagea   d'abord   hors  de  la 


LIN 

ville ,  puis  dans  la  ville  même.  Eni 
fin,  à  la  suite  d'une  capitulation,  Li 
niers  resta  maître  de  Buenos-Ayres 
La  cour  d'Espagne  lui  confe'ra,  e: 
récompense ,  le  grade  de  capitaine 
ge'ne'ral  de  Rio  de  la  Plata.  En  180! 
Taltention  de  l'empereur  Napole'on 
se  porta  ,  dès  Baïonne,  sur  le  défen- 
seur de  Buenos-Ayres ,  qui  était  Fran- 
çais de  naissance  et  qui  avait  d'ail- 
leurs consenti  à  recevoir  les  décora- 
tions du  nouvel  empire  français,  pour 
la  défense  d'une  colonie  espagnolcyj 
On  ne  douta  point  que  son  influen 
ne  garantît  à  l'usurpateur  de  la  co 
ronne  d'Espagne  ,  la  possession 
l'Amérique  méridionale  espagnol 
Napoléon  lui  envoya  ,  le  ig  mai , 
sieur  Jeassenet,   à  bord  de  la  co 
vette  la  Consolation,  avec  des  dép 
ches  qui  lui  annoncèrent  la  révolu- 
lion  de  Baionne.  Peu  de  jours  aupa- 
ravant, Liniers  avait  reçu  d'Espagne 
l'avis  officiel  de  la  révolution  qui  a- 
vait  eu  lieu  à  Aranjuez  au  mois  de 
mars.  Se  trouvant  ainsi  placé  dans 
une  situation  embarrassante,  il  adop- 
ta une  marche  ambiguë  qui  déplut  aux 
Espagnols  d'Amérique  ;  et  il  publia, 
le  i5  août  1808  ,  une  proclamation 
équivoque.  Toutefois  sa  popularité 
et  son  influence  étaient  telles  ,  que  " 
commandement   provisoire   lui  fi 
conféré  par  le  tribunal  de  l'audien 
royale  qui  s'empara  de  l'autorité 
nom  de  Ferdinand  VIL  Cependant 
la  junte  de  Montevideo,  accusant  Li- 
niers d'être  dévoué  à  Napoléon  ,  se 
déclara  en  insurrection,  et  réussit  à 
soulever,  contre  lui,  trois  provinces: 
celles  de  la  Paz ,  de  Chuquisaca  et 
de  Guzco.  Mais  le  grand  plan  d'in- 
surrection qui  devait  éclater  à  Bue- 
nos-Ayres,  le    i^^.  janvier   1809, 
échoua,  Liniers  l'ayant  fait  avorter 
en  arrêtant  et  en  exilant  les  chefs  du 
complot.  Il  avait  rendu  au  gouver- 


ité 

I 


LIN 

.uulcc<|iii  s'rl.iit  |i.i  — 
il  recevoir  l'aj>|)roljaUoii  Je  sa  con- 
Huttc ,  quand  il  \it  arriver  un  uuu- 
^eaii  vice-roi ,  don  Cisneros ,  en- 
voyé' par  la  junte  centrale  qui  gou- 
vernail alors  l'Espagne.  Linicrs  ne 
!.iul  donner  aucun  ombrageuse 
ilducommandemcnt  provisoire, 
:l  lui  le  premier  à  faire  reconnaître 
le  nouveau  vice-roi  ,qui  lui  commu- 
niqua l'ordre  de  la  junte  de  retour- 
ner en  Europe.  Il  (il  des  représen- 
tations ,  et  oblint  l'autorisation  de  se 
iretirer  à  Cordova  ,  à    i  Go  lieues  de 
Ja  capitale ,  en  attendant  la  réponse 
d'Espagne.    Il  vivait    paisiblement 
dans  cette  retraite  ,  lorsque  le  bruit 
,dcs  nouvelles  insurrections  de  Bue- 
fnos-Ayres  arriva  jusqu'à  lui  :  les  indé- 
pendants venaient  de  chasseï*  le  vice- 
roi,  et  de  secouer  le  joug  de  la  mé- 
tropole. Liniers  embrassa  aussitôt  la 
cause  royale,  rassembla  un  corps  de 
troupes  ,  et  crut  pouvoir  opposer  le 
drapeau  royal  à  celui  des  indépen- 
dants. Ceux-ci  firent  marcher  des 
forces  contre  lui  ;  son  parti ,  trop 
faible,  fut  dissipé  :  lui-même  prit 
la  fuite,  et  fut  arrêté  le  6  août, à  5o 
lieues   de  Cordova,   ainsi   que   les 
principaux   chefs    du  parti  appelé 
.  anti-américain.  On  saisit   toute   la 
'  correspondance  de  Liniers  ,  où  l'on 
;  de'couvrit,  dit-on,  un  plan  combiné 
tendant  a    renverser  l'autorité  des 
indépendants ,  et  à  perj>étuer  celle 
^   anti-américains.  Le  capilaine- 
Tal,et  cinq  de  ses  compagnons 
d  infortune,    furent    condamnés    à 
mort.  Une  commission,  présidée  par 
i  un  membre  de  la  junte  de  Buenos- 
Ayres ,  alla  au-devant  de  lui  à  Co 
,  lieues  de  cette  capitale ,  dans  laquelle 
on  ne  crut  pas  prudent  de  faire  exé- 
■V  la  sentence.  Il  ne  lui  fut  ac- 
Jéque  trois  heures  pour  se  pré- 


LIN  595 

r.  Les  «oldaf^  rh.<r- 
^  r,  le   mancpiircîit  a 

cause  de  leur  exlrêun- a^il.ilitJii  ,rt 
de  leur  répugnance  à  mettre  a  uiort 
leur  ancien  général.  Liniers  leur 
cria  d'une  voix  ferme  :  a  Au  nom 
t)  de  Dieu ,  ayez  pitié  de  moi  ;  j« 
»  souffre  des  douleurs  atroces  :  ap- 
»  prochez-vous ,  et  ne  me  manquez 
»  pas.  M  On  assure  que  les  chefs  de 
l'insurrection  se  jetèrent  à  l'instant 
sur  ce  malheureux  ,  et  lui  tirrreni 
dix  coups  de  pistolet  à  bout  por- 
tant. Ainsi  périt  Liniers ,  victime 
d'une  faction  révolutionnaire,  le  iô 
août  1809.  Cette  cruelle  exc(  ulion  a- 
vait  surtout  pour  but  de  frapper  d« 
terreur  les  adversaires  de  rindéi>en- 
dance.  La  procédure  ne  fut  pas  ren- 
due publique.  Liniers  était  très-po- 
pulaire parmi  les  militaires  et  la 
basse  classe  du  jwuple.  Sa  mort  re- 
pandit la  tristessedansBuii 
où  l'on  rendait  la  plus  et  i 
lice  à  ses  vertus.  B — 1\ 

LINNÉ  (  Charles  Linhaus  ,  à 
qui,  suivant  l'usage  de  Suède,  on 
donna  lors  de  son  anoblissement,  le 
nom  DE  ) ,  de  tous  les  naturalistes 
du  xviii*^.  siècle ,  celui  dont  l'in- 
fluence a  été  la  plus  univc; 
naquit  à  Roeshult,  village  de  >ji' 
lande ,  en  Suède ,  de  N ils  ou  Nicolas 
Linnxus  ,  curé  de  ce  lieu  ,  le  u4  mai 
1707.  Comme  tant  d'autres  grand» 
hommes ,  il  reçut  d'abord  les  dure» 
leçons  de  l'adversité  ;  et  sa  vie  est 
même  l'une  de  celles  qui  oHVentà  la 
jeunesse  les  exemples  les  plus  mé- 
morables de  ce  que  peuvent  le  cou- 
rage et  une  volonté  ferme.  Envoyé 
à  l'.îge  de  dix  ans  dans  l.i  !  ? 

de  Vexioc  ,  pour  y  snivr»- 
tine,  il  était  déjà  lellenientcntrrtlué 
par  la  passion  des  plantes  ,  qu'il  né- 
gligeait ses  classes  pour  courir  dan> 
la  t.'JMMi."'i>»' •  et  syii   iK'i'e  put  uut 


5^6  LIN 

idée  si  fausse  de  ses  dispositions  , 
qu'en  17.^4  il  ^^  mit  en  apprenlis- 
sase  cliez  un  cordonnier.  Heuieuse- 
meut  pour  Linné,  et,  l'on  peut  le 
dire ,  pour  toutes  les  sciences  natu- 
relles,  un  médecin  nommé  Rolli- 
man  ,  ayant  eu  occasion  de  converser 
avec  ce   jeune  homme  ,   s'aperçut 
qu'il  e'iail  digne  d'une  aulre  destinée. 
11  lui  prêta  un  Tournefoit ,  clierclia 
à  le  réconcilier  avec  son  père ,  et  le 
plaça  chez  Kilian  Stobaeus  ,  profes- 
seur  d'histoire  naturelle ,  à  l'uni- 
versité de  Luhd.  Stobaeus  ,  pendant 
quelque  temps  ,  l'employa    comme 
copiste,  sans  se  douter  de  tout  ce 
qu'il  valait;  mais  l'ayant  surpris  à 
étudier  pendant  la  nuit ,  il  lui  donna 
plus  d'attention  ,  et  lui  permit  de  se 
servr  de  sa  biljliothcque.  Quelques 
libéralités  de   ce  maître  mirent  le 
jeuue  Linnaeus  en  état  de  se  rendre 
à  l'université  d'Upsal ,  où  il  devait 
trouver  plus  de  secours  pour   ses 
études  que  dans  celle  de  Lund.  Ce- 
pendaut  il  y  vécut  encore  dans  un 
état  voisin  de  l'indigence  j  il  ne  sub- 
sistait q'î'en  donnant  des  leçons  de 
latin  à  d'autres  écoliers,  bien  qu'il 
ne  le  sût  guère  lui  -  même  ;  et  l'on 
assure  qu'il  était  réduit  à  raccom- 
moder pour    son  usage   les   vieux 
souliers  de  ses  camarades.  Ce  fut 
encore  un  de  ses  maîtres  qui  le  tira 
de  cette  misérable  situation.  Olaiis 
Celsius  ,   professeur  de  théologie , 
travaillait  alors  à  son  Hiero-Bota- 
7MC071.  Jugeant  qu'un  jeune  homme 
déjà  instruit  eu  botanique ,  pourrait 
l'aider  utilement  dans  ses  recherches, 
il  donna  pendant  quelques  mois  à 
Linnœus  la  nourriture  et  le  loge- 
ment ;  il  le  recommanda  ensuite  au 
vieux  Olaiis  Rudbeck ,  qui  professait 
alors  la  botanique  à  Upsal.   Celui-ci 
confia  la  direction  du  jardin  à  Lin- 
ii.mis,   et   se  fit  quelquefois   rem- 


LÎN 

placer  par  lui  dans  ses  cours.  Dè»l 
qu'il  ne  lutta  plus  avec  la  misère  ,  I0 
génie  du  jeune  naturaliste  pritTessor}] 
et  ce  fut  à  l'âge  de  vingt-trois  ans  ,1 
et  en  travaillant  pour  Rudbeck  etj 
pour  Celsius,  que  fa  igné  du  désordr< 
et  de  l'irrégularité  qui  régnaient  aloi 
dans  les  méthodes  de  botanique  , 
surtout  dans  la  nomenclature  desij 
végétaux  ,  il  conçut  les  premièrei 
idées  delà  grande  réforme  qu'il  opéra 
par  la  suite.  On  voit  même  dans  un 
catalogue  qu'il  donna  en  i^Si  ,  du 
jardin  d'Upsal ,  les  premières  indi 
cations  de  la  méthode  sexuelle.  Il 
fit  assez   connaître  dès-lors  ,  poi 
être  envoyé  en  Laponie ,  aux  frai 
de    la  Société  royale  des  science 
d'Upsal ,  à  l'efTet  d'en  recueillir 
d'en  décrire  les  plantes.   Celsius 
père  avait  déjà  fait  un  voyage  bota-^ 
nique  dans  ce  pays  ,  en  1 695  ,  par 
ordre  du  roi  Charles  XI  ;  mais  il 
n'avait  publié  que  le  premier  volume 
de  ses  observations  :  les  six  autres , 
tous  rédigés  ,  avaient  été  consumé» 
lors   du   grand   incendie   d'Upsal, 
en    1702.  Linnœus ,  chargé  de  re- 
prendre ce  travail,  parcourut,  pen- 


782 


avec 


fatigues  incrovables 


dant    l'été   de 
peines  et  des 

les  cantons  les  plus  remarquables 
cette  alfreuse  contrée  :  il  en  sur 
la  prhicipale  chaîne  de  montagne! 
descendit  jusqu'au  bord  de  la  mi 
dans  la  Laponie   norvégienne,   el 
après  avoir  fait  le  tour  du  golfe 
Bothnie ,  revint  à  Upsal  par  la  Fil 
lande  et  les  îles  d'Aland.  11  vouli 
alors  donner  des  leçons  à  Upsa 
mais  un  professeur  nommé  Rosèn, 
à  qui  sa  renommée  inspirait   de  la 
jalousie  ,  lui  fit  éprouver  des  désa- 
gréments qui  l'engagèrent  à  se  retirer 
à  Fahlun  ,  ville  de  Dalécarlie  ,  célè- 
bre par  ses  mines  :  il  chercha ,  par 
quelque  pratique  de  la  médecine  et 


LIN 

par  (îes  leçons  de  minéralogie ,  à  y 
'  sistcr  chclivemcnt  ;  cl  |Hnit-èlrc 
it-il  demeure  dans  cette  position 
lire  ,  si  une  jeune  personne  dont 
.dirait  obtenir  la  main  ,  cl  qui 
pressentait    mieux  que  lui   tout   ce 
qu'il   pouvait  devenir  ,  n'eîil  e\i^e* 
qu'il  remît  leur  mariapje  à  trois  ans. 
J.iniia^ns  résolut  d'era])loyer  cet  in- 
len-alle  à  voyager  et  à  s'instruire  ; 
mais  à  peine  était-il  arrive  à  Ham- 
bourg ,   qu'il    trouva    ses    ressour- 
ces ]>écuuiaires  épuisées    :   cepen- 
dant il  réussit  encore  à  gagner  la 
Hollande ,  et  à  se  présenter  devant 
rilliistre    Boerhaave.    C'est   de    ce 
moment  que  la   fortune  commença 
véritablement  à  changer  pour  lui. 
Boerhaave  ne  fut  pas  moins  géné- 
reux,  pour  Linna}us  que  pour  tant 
d'autres   jeunes    gens    auxtjuels   ce 
grand  médecin  ouvrit  les  routes  de 
la  célébrité  ;  il  le  fit  connaître  à  un 
Iriche  propriétaire  ,  nommé  George 
ClitTort ,  qui  avait  la  passion  de  This- 
toire  naturelle,  et  qui  possédait  à  Ha  r- 
tecamp ,  entre  Leyde  et  Harlem ,  un 
jardin  ,  un  cabinet  et  une  bibliothè- 
.que  magnifiques.  Linnœus  demeura 
pendant   trois  ans  dans  la  maison 
de  cet  excellent  homme,  jouissant 
abondamment  de  tous  les  secours 
qui  pouvaient  étendre  ses  connais- 
sance et  favoriser  le  développement 
de  ses  idées  :  aussi  n'a-t-il  manqué 
aucune  occasion  de  publier  tout  ce 
qu'il  devait  à  GlifTort  ;  et  l'on   peut 
dire  qu'il  a  immortalisé  ce  bienfai- 
teur, par  les  ouvrages  qu'il  a  publiés 
chez  lui  (  Voyez  Cliffop.t  ) ,  VHor- 
tus   CUffortiamis  surtout  ,  Leyde , 
1736,  in-^".,  ouvrage  considérable 
et  orné  de  trente-deux  planches  qui 
'  n'avaieut  point  alors  d'égales  dans 
T  genre.  La  dissertation  intitulée , 
îrt  CUjD'ortiana  fConXxe'uX  la  des- 
V  ipiiou    d'au  banafiicr   qui  avait 


LIN  5^7 

fleuri  dans  les  serres  de  ClifTort , 
par  les  soins  et  les  procédés  »! 
nieux  de  Linna^iis.  (.est  aussi  .  ^ 
CUlfort  que  Linn«cus  comniGiiça  à 
donner  de  Tensemblc  à  ses  vues 
et  à  en  faire  les  premières  applira- 
ca lions  générales,  l/histoirr  naturelle 
avait  été  traitée  dès-lors  dans  des 
ouvrages  nombreux  et  savants  :  mais 
les  espèces  qui  font  l'objet  dénnitif 
de  celte  science ,  nVlaient  point  dis- 
tinguées nettement  les  unes  des  au- 
tres ;  on  n'avait  point  essaye  d'en 
donner  un  catalogue  complet  ;  leurs 
descriptions  n'étaient  point  rédigées 
sur  un  plan  uniforme  ,  ni  rendues 
par  des  termes   d'une  m  n 

précise^  les  méthodes  seluj  s 

on  les  avait  distribuées,  n'étaient  pas 
rigoureuses  ,  ni  tellement  assujéties 
dans  toutes  leurs  subdivisions  à  i\cs 
caractères   comparables,  que    l'on 
ne  put  jamais  hésiter  sur  la  place 
qui  devait  être  donnée  à  l'être  que 
l'on  étudiait  :  enfin  les  noms  que 
l'on  assignait  aux  espèces  variaient 
au  gré  de  chaque  auteur;  et  l'on 
était  souvent  réduit  à  se  servir  de 
phrases  descriptives  qu'aucune  mé- 
moire ne  pouvait  retenir.  Tels  fu- 
rent les  inconvénients  qui  frappèrent 
Linnaeus ,  et  auxquels  il  jugea  qu'il 
était  nécessaire  de   remédier  avant 
de  s'occuper    des   progrès    de    la 
science.  Pour   cet   effet,   il   f.ilî.iii 
imaginer  des  méthodes  de  di- 
lion  capables  d'embrasser  t^ 
êtres ,  fondées  sur   des    car., 
tranchés,  et  dont  les  subdi\ 
du  même  ordre  fussent  pris* 
des  organes   semblables  ,  aiin    uc 
pouvoir  toujours  être  mises  en  op- 
position; il  fallait  encore  iin 
des  termes  assez  nombreux  | 
diquer  les   prodigieuses  vanclo  Oc 
conformation  (fu'oii  observe  dans 
le»  êtres ,  et  d«liuii  ces  (eroics  avec 


5i8  UN 

assez  «le  précision  pour  que  l'em- 
ploi n'en  Fût  jamais  équivoque  :  en- 
fin il  était  nécessaire  de  faire  une 
revue  générale  de  tous  les  êtres  dé- 
crits dans  les  auteurs  précédents  ,  et 
de  tous  ceux  que  l'on  pourrait  re- 
cueillir dans  des  voyages  ou  ras- 
sembler dans  des  cabinets  ;  d'en 
dresser  un  catalogue  complet,  rangé 
d'après  la  méthode  convenue;  de 
les  décrire  d'après  la  terminologie 
établie  ,et  de  leur  imposer  des  noms 
commodes,  lesquels,  au  movcn  des 
précautions  indiquées,  deviendraient 
invariables.  La  première  ébauche 
de  cette  immense  entreprise  fut 
consignée  dans  deux  petits  écrits, 
qui  ont  été  les  germes  de  tout  ce 
que  Linnseus  a  fait  depuis  :  son 
System  A  Nature  ,  seu  Régna 
tria  naturœ  sjstematlcè  proposita  , 
per  classes  ,  ordines  ,  gênera  et 
species  ,  publié  en  1^35  ,  à  Leyde  , 
par  les  soins  de  Jean-François  Gro- 
novius  et  d'Isaac  Lawson ,  en  trois 
tableaux  d'une  feuille  chacun;  et  ses 

FUNDAMENTA  B  OTAN  ICA  qilCC  ma- 

jorum  operuni  prodromi  instar 
theoriojn  scientiœ  hotanicce  per 
brèves  aphorismos  tradunt ,  impri- 
més à  Amsterdam  en  1736,  un  petit 
volume  iii-8*^.  de  Si6  pages.  Ce  se- 
cond écrit ,  qui  aurait  pu  précéder 
l'autre ,  puisqu'il  en  est  en  quelque 
sorte  la  théorie^  était,  selon  l'au- 
teur, le  résultat  de  sept  années  d'é" 
tudcs  et  de  l'examen  de  huit  mille 
plantes.  Il  contient,  en  trois  cent 
soixante-cinq aphorismes,  toutes  les 
règles  qui  devaient  conduire  à  une 
botanique  plus  régulière  qu'il  n'en 
avait  existé  jusque-là.  L'esprit  émi- 
nemment méthodique  de  Linnseus 
s'y  applique  à  classer  les  auteurs , 
les  systèmes,  toutes  les  parties  des 
plantes  ,  et  surtout  celles  de  leur 
fructification;   à  y  faire  connaître 


i 


LIN 

leurs  sexes  et  le  mode  de  leur  fécoi 
dation  ;  à  tracer  les  règles  à  suivi 
dans  la  détermination  de  leurs  c, 
ractères ,  l'imposition  de  leurs  nom 
l'examen    de   leurs   différences ,  le 
rappel  des  variétés  à  leurs  espèces 
primitives  ,  le  choix  de  leurs  syno- 
nymes ,  la  manière  de  les  décrire , 
et  la  recherche  de  leurs  vertus.  L'au- 
teur étendit  la  première  partie  de 
celte  espèce  de  programme  dans  un 
ouvrage  intitulé  Bibliotheca  Bo- 
TAMCA  recensens  Ubros  plus  mille 
de  plantis  hue  usque  editos  secui 
dùîn  Systema  auctoris  naturalt 
Amsterdam,  i^Sô.  La  seconde  pai 
tie  de  ce  même  programme ,  ou  cel 
qui  regarde  l'histoire  des  système 
fut  développée  dans  les   Classi 
Plantarum^  seu  Sjstemata  pic 
tarum  umnia  à  fructifie  atione 
sumpta,  Leyde,  1738,  in-S**.  Tout 
ce  qui  a  rapport  aux  règles  à  suivre 
dans  le  clioix  et  la  création  des  noms 
fut  expliqué  en  détail  dans  la  Cri- 
tica   BoTANiCA   in    qud  nomina 
plantarum  generica  specifica  et  va- 
rianlia  examini  subjiciuntur ,  etc. , 
Leyde,  1737,  in-8°.  Ces  trois  ou- 
vrages commencèrent  la  grande  ré- 
forme de  la  botanique  ;  mais  quinze 
ans  après,  toute  la  doctrine  deLiu- 
nœus,  sur  ces  différents  sujets,  fut 
reproduitedans  son  ensemble,  cooi^ 
donnée  dans  ses  parties  ,  et  appui 
d'exemples   dans  la  Philosoph\ 
Bot  ATS  ICA  in  qud  explicantur  fu 
damentabotamca,  Stockholm,  17^ 
in- 8*^.  Cet  ouvrage  oii,  à  travel 
les  difficultés  d'un  langage  fort  d| 
férent  du  latin  ordinaire,  quelquefd 
obscur  par  sou  extrême  concision 
autant  que  par  les  allusions  et  les 
métaphores  dont  il  est  rempli ,  I'ob 
trouve  à  chaque  page  des  preuves  de 
la  finesse  d'esprit  la  plus  rare ,  et  de 
la  profondeur  d'observation  la  plus 


MX 

^tonnanté ,  a  joui  d'un  succès  dont 

|.<Mit  dire  qu'il  n'y  A\n\l  point  eu 
(inplc auparavant.  Il  est  devenu 
;a  quchpie  sorte  une  loi  fondamen- 
Ule,  reconnue  de  tous  les  holanis- 
et  à  lajjuelle  ils  se  conforment 
soin  ,    pour    leurs    drscrip- 
> ,  pour  remploi  de  leurs  ler- 
> ,  et  juscpic  dans  le  choix   des 
Moms  qu'ils  sont  sans  cesse  ohlij:;ès 
4c  créer  pour  tlesii^uer  les  plantes 
\ne  Linnœus  n'a  point  connues.  L'au- 
'^nfe  de  ce  livre  est  encore  en  pleine 
cur  sur  tous  les  points  ,  maigre 
indequantitede  végétaux  que  de 
ii»reux  voyapjcs  ont  procures  de- 
nus  sa  publication ,  et  quoique  des 
observateurs    habiles  aient    ajouté 
jiie  infinité  de  faits  à  ceux  qui  étaient 
'îonnus  à  cette  époque ,  principale- 
nent  sur  l'anatomic  végétale,  et  sur 
ia  structure  intérieure  des  fruits  et 
les  semences.  On  Ta  réimprimé  une 
jnultilude  de  fois  ,  et  il  en  existe  un 
tombre  prodigieux  de  conimentai- 
ics  ;  car  on  peut  dire  que  les  ouvra- 
ges élémentaires  de  botanique  n'ont 
;uère  été  que  des  abrégés  ou  des  ex- 
i)Ucations  du  Philosophia  Botanica, 
usqu'au  moment  où  les  travaux  de 
fl.deJussieu  ont  commencé  à  intro- 
luire   dans  ces  sortes  d'écrits   les 
«rincipes  de  la  méthode  naturelle.  Au 
'«",  la  doctrine  établie  dans  les 
uiamenta  Botanica ,  et  dans  les 
rages quileur  servent  de  dévclop- 
i«nt,  n'était  pas  applicable  seu- 
cnt  au  règne  végétal  ;  et  en  effet , 
HiEus  a  été  guidé  par  les  mêmes 
hs  dans  tout  ce  qu'il  a  écrit  sur 
loire  naturelle  :  peut-être  même 
tpplicatipns  qu'il  en  a  faites  au 
'  imal,  ont  elles  été  les  plus 
^.  Les  trois  feuilles  sur  lés- 
iez turent  d'aboixl  imprimés,  en 
>>,  les  premiers  iinéauieuts  du 
lema  nalurœ ,  ont  encore  plu» 
xviv. 


fructifié  que  Im  FumUm^ta  hotn- 

mV'a.  îiinn.^u.H  y  diitli  < 
SCS  principes,  les  tr.  ,  , 

natun*.  Le  règne  minerai  .  pi.irr  In 
premier  ,  se  divisait  en  |.i. n  ,s  . 
comprenant  les  sels,  les  - 
blés  et  les  métaux,  et  vu 
dans  lesquels  se  rangeaient  les  terres^ 
les  concrétions  et  les  p-lrificalions. 
Le  règne  végétal  y  était  divisé  d'a- 
près celte  autre  méthode  devenue  si 
célèbre  sous  le  nom  de  système 
sexuel ,  et  fondée  sur  la  position  re- 
lalive ,  sur  la  proportion ,  sur  U 
connexion  ou  ia  distinction  ,  et  enfin 
sur  le  nombre  des  étamines  et  de» 
pislils.  Enfin ,  le  fc  \  t\u\ 

terminait  cette  prenji  i .  se 

divisait  en  quadrupèdes  ,  oiseaux  , 
reptiles  ,  poissons,  insectes  et  vers. 
Les  cétacés  se  trouvaient  encore  par- 
mi les  poissons.  Les  genres  des  ani- 
maux étaient  déjà  distingués  par  des 
caractères  ,  mais  les  espèces  n'y 
étaient  que  nommées  ;  et ,  pour  les 
végétaux,  il  n'y  avait  encore  que 
des  noms  de  genres.  L'auteur  tra- 
vailla constamment ,  depuis  lors ,  à 
perfectionner  et  à  étendre  ce  pre- 
mier plan,  en  appli  r  de- 
grés à  tous  les  genn-  s  les 
espèces  qu'il  put  coniuilic  ,  il(s  r  < 
ractères  et  des  synonymes  ex  ut*;. 
L'ouvrage,  dans  sa  r  <t  en 
tantqu'd  offrait  l'eus^  frnjs 
règnes,  eut,  pendant  la  ^ 
naeus  ,  on/.c  autres  cditioi> 
vcs  :  mais  dans  ce  nombre  ,  il  n'en 
est  que  quatre,  toutes  imprimées  à 
Stockholm,  qui  aient  éprouvé  des 
changements;  les  autres  ne  sont  que 
des  réimpressions.  Ces  quatre  éili- 
tions  origii:  '  *  I  <,  -  i  ] - 
1740,  in-^' 

me  de  174^.  iii-b'\  de 
1.1  dixième  de  1 757,  en  3  ^ 
un  pour  chaque  r^ne;  et  la  duuîiw- 

3i 


53a  LIN 

me  de  t  766,611  quatre  volumes,  dont 
deux  pour  les  animaux.  La  quator- 
zième et  dernière  c'dition  ,  donnée 
par  Gmelin  ,  est  de  dix  forts  volu- 
mes in-8". ,  dont  sept  pour  les  ani- 
maux, et  deux  pour  les  plantes.  On 
Ta  réimprimée  à  Lyon  et  ailleurs. 
Tel  a  été  l'accroissement  prodigieux 
d'un  livre  compris  originairement  eu 
trois  feuilles.  Cependant  la  partie  bo- 
tanique du  Sfstema  naturœ  a  été  en- 
core particulièrement  développée 
dans  des  ouvrages  spéciaux.  Dès 
1787,  Linnaeus  donna  les  caractères 
des  genres  avec  étendue,  sous  le  ti- 
tre de  Gênera  Plant  4rum  se- 
ciindwn  numemm ,  figuram  ^  sitiim 
et  proportioiiem  omnium  fruclifica- 
tionis  partium  ,  Leyde  ,  1737,  in 
8°.  ;  livre  qui  a  été  réimprimé  cinq 
fois  de  son  vivant.  La  huitième  édi- 
tion ,  par  Scbreber  ,  est  en  deux  vo- 
lumes ,  Francfort,  1789  et  1791. 
Mais  cène  fut  qu'en  17.53,  qu'il 
donna  l'énumération  des  espèces , 
avec  les  synonymies,  dans  ses  Spe- 
ciesplantanim,  'i  vol.  in-S^. ,  Stock- 
holm, 1753;  ouvrage  qu'il  n'a  réim- 
primé qu'une  fois,  en  1763,  mais 
auquel  il  a  donné  deux  suppléments 
intitulés  Mantissa.  La  dernière  édi- 
tion ,  par  Wildenow,  a  déjà  huit  vo- 
lumes ,  sans  être  terminée.  La  for- 
tune des  diverses  parties  du  Syste- 
ma  naturœ  n'a  pas  été  la  même  à 
beaucoup  près.  Tout  le  monde  sait 
que  c'est  en  botanique  que  Linnœus  a 
obtenu  le  plus  de  succès  et  de  gloire. 
Sa  nomenclature  fut  promptement 
adoptée  ;  et  encore  aujourd'liui  c'est 
la  seule  que  l'on  suive  généralement. 
Dans  quelque  pays ,  si  éloigné  qu'il 
soit ,  où  il  existe  des  botanistes  ou 
même  des  jardiniers  un  peu  instruits, 
il  suffit  pour  se  faire  entendre  de  dé- 
signer une  plante  par  son  nom  Lin- 
mm,   Pwidaut    un   çrand   nombre 


LIN 

d'années  la  méthode  sexuelle  a  paf* 
tagé  la  vogue  de  celte  nomencla- 
ture j  et  même  de  nos  jours  on  n'eu 
suit  pas  d'autres  dans  divers  jar- 
dins ,  et  dans  beaucoup  d'ouvrages. 
Cependant ,  bien  qu'elle  soit  d'une 
application  facile  ,  elle  ne  surpasse 
point  sous  ce  rapport  les  méthodes 
qui  l'avaient  précédée  ;  et  à  d'autres 
égards,  elle  a  des  vices  que  l'on 
peut  méconnaître ,  particulièreme 
celui  de  rapprocher  souvent  les  pla 
tes,  contre  toutes  les  analogies 
leur  structure.  L'auteur  n'avait  p 
même  le  mérite  de  l'invention  :  no! 
seulement  il  n'avait  pas  découvert 
le  sexe  des  plantes ,  comme  une  sor- 
te d'opinion  ])opulaire  le  lui  attri- 
bue ;  cette  graude  découverte  due  k 
Millington,  professeur  d'Oxford,  fut 
prouvée  d'après  l'expérience,  par 
Bobart,en  1681  ;  soutenue  en  1682, 
par  Grew  ;  en  i686j  par  Rai;  et 
Vaillant  en  lit  ,  en  1718  ,  l'objet 
d'une  dissertation  particulière,  oiiil 
eut  le  tort  de  ne  mentionner  aucun 
de  ses  prédécesseurs.  Il  y  a  plus; 
un  médecin  de  Wolfenbuttel ,  no 
mé  Burckhard ,  avait  montré  ,  d 
1702,  dans  une  lettre  à  Leibnitî 
qu'il  serait  possible  de  fonder  ui 
méthode  botanique  sur  les  organ( 
sexuels  ,  et  il  avait  indiqué  dès-loi 
presque  toutes  les  considérations  don 
Linnasus  a  fait  usage  (  F^oyez  J.-H. 
Burckhard,  tom.  VI  ,  pag.  290). 
Ainsi  l'on  ne  doit  point  placer  la  mé- 
thode sexuelle  au  nombre  des  services 
que  Linné  a  rendus  à  la  science,  ni 
même  parmi  les  causes  qui  ont  con- 
tribué à  l'empire  que  cet  homme  cé- 
lèbre a  obtenu  en  botanique.  C'est, 
nous  le  répétons  ,  à  l'étude  distincte 
qu'il  a  faite  de  chaque  espèce ,  à  la 
régularité  et  au  détail  de  ses  carac- 
tères de  genres  ,  au  soin  qu'il  prit 
d'en  écarter  toutes  les  circonstances 


LIN 

Tanables,  telles  que  la  grandeur  et 
la  couleur ,  à  la  prerision  cuergique 
de  son  langage  lc(*hiiiqiie,el  surtout 
à  la  commodité  do  sa  nomenclature, 
qu'il  adûcetavantagc.  Cette  «lernière 
prérogative  tint  surtout  à  l'idée  heu- 
reuse qu'il  eut ,  dans  ses  Speciesplan' 
tanuiiy  et  ensuite  dans  la  dixième 
édition  du  S;}stcma  naturœ ,  de  dé- 
signer chaque  espèce  par  un  seul  nom 
ordinairement  adjectif,  qu'il  appe- 
lait nom  trivial,  et  qui,  s'ajoutant 
au  nom  du  genre,  tenait  lieu  de  ces 
longues  phrases  usitées  auparavant. 
La  mémoire  se  trouva  tellement  sou- 
lagée par  cet  artifice  si  simple, qu'on 
ne  voulut  plus  suivre  d'autre  auteur  j 
et  l'on  peut  dire  que  c'est  à  dater  de 
celte  époque ,  et  principalement  par 
ce  moyen ,  que  Linnaeus  parvint  a  é- 
clipser  les  autres  botanistes.  Dans  le 
règne  animal,  Linnaeus  avait,  outre 
cet  avantage  général ,  des  mérites 
particuliers  qui  auraient  pu  lui  don- 
ner, dès  le  commencement,  une  préé- 
minence non  moins  grande  que  celle 
dont  il  jouit  en  botanique.  Ses  divi- 
sions de  tous  les  ordres  étaient  beau- 
coup plus  conformes  aux  rapports 
naturels  :  il  classait  pour  la  première 
fois  un  grand  nombre  d'espèces  ;  et, 
pour  les  insectes  surtout ,  il  était  le 
premier  qui  fût  descendu  jusqu'à  ca- 
ractériser et  à  nommer  les  espèces 
particulières  :  mais  il  eut  dans  Buflfon, 
pour  les  quadrupèdes  et  pour  les  oi- 
seaux,  un  rival  doué  de  trop  de  ta- 

,  lents,  et  dont  les  ouvrages  étaient 
trop  étendus  et  trop  parfaits ,  pour 
que  ceux  de  Linnaeus  ne  tombassent 
pas  eu  seconde  ligne.  D'ailleurs  la 
zoologie ,  beaucouj)  moins  cultivée 
alors  que  la  botanique  ,  ne  pouvait 

•  lui  procurer  autant  de  sectateurs  ni 
une  célébrité  aussi  prompte.  Ce  n*est 

i  donc  que  petit  à  petit  que  le  mérite 
àt  SCS  travaux,  dans  cette  partie,  a 


LIN  53i 

ptJ  se  faire  jour  ,  et  qu'il  m  est  de- 
venu aussi  pour  quelque  temps  le  mo- 
dèle  et  le  législateur  :  mais  les  ou- 
vrages de  Pallas  et  de  Fabririus  ,  et 
ceux  de  Quelques  zoologistes  vivants, 
vinrent  bieutôi  donner  k  rhisloirc 
des  animaux  une  extension  telle,  que 
Linnwjs  resta  prompteraeni  en  ar- 
rière. Son  règne  minéral,  comme  il 
en  convient  lui-même,  ncluia  point 
donné  de  sujet  de  se  glorifier  :  quoi- 
qu'il ail  eu  le  mérite,  dans  sa  sixième 
édition  ,  de  faire  connaître  l'impor- 
tance des  formes  cristallines  ,  il  ne 
conréut  pas  les  caractères  essentiels  de 
ces  formes;  il  leur  soumit  si  despo« 
tiquement  les  minéraux  figurés,  qu'il 
rangea  dans  les  mêmes  genres  lou5 
ceux  qui  avaient  à-pcu-près  la  mêm« 
forme ,  quelle  que  fût  leur  composi- 
tion chimique.  Aucun  minéralogiste 
ne  voulut  se  soumettreà  une  méthode 
si  arbitraire;  et  son  contemporain 
et  compatriote,  Wallcrius  ,  di)mina 
dans  cette  partie ,  même  en  Suède. 
LeSj.stema  naturœ  a  été,  aussi  bien 
que  le  PfUlosophia  botanica  ,  réim  - 
primé  en  plusieurs  pays  ,  traduit 
en  diverses  langues,  et  commenté  par 
un  grand  nombre  de  naturalistes. 
On  a  fait  des  livres  cl  des  recucili 
de  gravures ,  uniquement  dans  la  vue 
d'en  faciliter  l'étude.  Il  nous  serait 
impossible  de  parler  en  détail  de 
tous  ces  ouvrages  :  c'est  même  asse« 
nous  occuper  de  Fourrage  primitif 
auquel  ils  se  rapportent ,  et  il  est 
temps  que  nous  revenions  à  l'.i 
Nous  l'avons  laissé  en  Hol 
chez  Cliffbrt.  Outre  tous  les  cirils 
dont  nous  venons  de  parler,  il  y  mit 
au  jour  les  résultats  botaniques  de 
son  voyage  en  Laponie.  din^  sa 
Flora  Laponira  ,  Ai 
i'j37,  in-8o.,  l'undes  pi 
écrits  de  ce  genre  qui  exL<tenl.  C« 
fat  encore  dans  ce  icmps-là ,  qu'il 
34.. 


532  LIN* 

rendit  à  la  mémoire  de  son  ami  et 
compatriote  Pierre  Artedi ,  qui  ve- 
nait de  se  noyer  dans  im  des  canaux 
d'Amsterdam ,  le  service  de  racheter 
des  mains  de  sou  liote   le  manus- 
crit de  son    Ichtj'ologie ,    et  d'en 
donner  l'édition  en  un  vol.  in-8*'.  , 
Leyde ,  1738,  ouvrage  où  la  main 
de  l'éditeur  se  fait  aisément  recon- 
naître, et  qui  contribua, de  son  cote', 
à  perfectionner  la  partie  du  Sjstema 
natww  qui  concerne  les  poissons. 
Linnasus   profita  de   son  séjour  en 
Hollande ,  pour  se  faire  recevoir  doc- 
teur en  médecine  dans  la  petite  uni- 
versité de  Harderwick,  en  Gueldre, 
qui  jusqu'à  sa  suppression  a  compte 
cet  événement  comme  un  de  ceux 
dont  elle  se  glorifiait  le  plus.  Il  se 
rendit  ensuite  en  Angleterre ,  ou  la 
réputation  de  ses  ouvrages  aurait  dû 
le  précéder ,  et  oi^i  les  recommanda- 
tions empressées  de  Boerliaave  au- 
raient pu  suiiire  pour  le  faire  bien 
traiter.  Cependant  Sloane  et  Dille- 
nius  ,  alors  les  plus  fameux  natura- 
listes du  pays  ,  le  reçurent  plus  que 
froidement  :  aussi  les  qnitta-t-il  bien- 
tôt pour  venir  à  Paris ,  où  il  éprouva 
un  accueil  plus  aimable  ,  et  se  lia 
pour  la  vie  d'une  amitié  tendre  avec 
Bernard  de  Jussieu.  11  aurait  pu  alors 
obtenir  de  l'emploi  à  Leyde  j  mais 
Adrien  Van  Roy  en,  qui  avait  succédé 
à  Boerliaave  ,  et  qui  baissait  son  pré- 
décesseur ,  y  mettait  pour  condition 
de    ranger  ,    d'après  la    méthode 
sexuelle  ,  les  plantes  du  jardin ;,  qui 
l'étaient  d'après  celle  de  Boerhaave. 
liinnœus  ne  voulut  pas    agir  avec 
cette  ingratitude  envers  la  mémoire 
de  son  iDienfaiteur ,  et  retourna  en 
Suède.  Sa  patrie  ne  le  reçut  pas  non 
plus  d'abord  ,  comme  il   semblait 
qu'elle  aurait  dû  le  faire  ;  et  il  au- 
rait peut-être  abandonné  les  sciences 
pour  la  pratique  de  la  médecine,  s'il 


LÎN 

avait  trouve  des  malades  :  mais  cette 
ressource  même  lui  manqua.  Cepen- 
dant il  obtint  enfin  de  l'appui,  et  il 
l'obtint  d'hommes  dignes  de  l'ap- 
précier ,  le  baron  Charles  de  Geer , 
maréchal  de  la  cour  de  la  reine,  à 
qui  nous  devons  sept  vohunes  d'ex- 
cellents mémoires  sur  l'Histoire  des 
Insectes ,  et  le  comte  de  ïessin  ,  sé- 
nateur du   royaume  et   gouverneur 
du  prince   royal.  Ce  dernier ,  sur- 
tout ,  se  montra  pendant  touSe  sa  vie 
un  mécène  affectueux   pour  Linné 
qui  lui  témoigna  une  reconnaissance 
constante  ,  en  lui  dédiant ,  avec  les 
expressions  du  plus  tendre  attache  • 
ment ,  les  éditions   successives  du 
Sjstema  naturœ.  Il  fut  nomme  par 
la  protection    de   ce  seigneur  ,   en 
1 738 ,  à  une  place  de  médecin  de  la 
flotte  ,  et  fut  chargé  d'enseigner  la 
botanique  dans  la  capitalej  emplois 
auxquels  il  joignit,  en  173g,  le  titre 
de  médecin  du  roi,  et  celui  de  prési- 
dent de  l'académie  des  sciences  qui 
venait  de  se  former  à  Stockholm. 
Enfin,  en  1 741,  il  fut  promu  à  la 
chaire  de  botanique  de  l'université, 
d'Upsal.  C'était-là  le  dernier  terra 
de  ses  désirs.  Les  chaires  d'Upsal 
aussi  honorées  que  bien   reniées 
sont  les  places  les  plus  considérable 
auxquels  un  homme  de  lettres  puiss< 
prétendre  en  Suède  Linné  a  occupé 
cette  chaire  pendant  trente-sept  ans , 
sans  cesse  entouré  d'élèves  dont  il 
se  faisait  autant  d'amis  zélés,  voyant 
de  jour  en  jour  s'accroître  sa  consi- 
dération ,  et  profitant  sans  relâche 
de  tous  les  moyens  qu'elle  lui  don- 
nait pour  perfectionner  ses  ouvrages 
et  pour  étendre  son  influence.  11  lit, 
par  ordre  des  états  du  royaume,  des 
voyages  en   diverses  provinces  de 
Suède ,  afin  d'en  recueillir  les  pro- 
ductions naturelles  ,  et  il  en  a  pu- 
blié des  relations  en  suédois  :  celui 


a 

\ 


LIN 

irOElaiid  et  de  Gotland,  fait  en 
174»  >   parut  en   1745  j  celui    de 
!    .Vcstrogothic  ,  fait    en    174^,  f»»t 
irapriinë  rannce  suivante,  et  celui 
de  Scanic  de  1749,  le  fut  en  1751. 
Ou  trouve  dans  ces  voyages,  outre 
les  observations  d'histoire  naturei- 
i     le,  des  remarques  inleressajiles  sur 
I     les  antiquités,  les  mœurs  des  ha- 
!     bitauts  et  leur  agriculture.  Les  ob- 
jets que  Linné  y  rassembla  ,  joints 
A  ceux  que  lui  avaient  déjà  fournis 
ses  voyages  en  Laponie  et  en  Dalé- 
I     carlie  ,  le  mirent  en  état  de  publier , 
en  1 7  46  ,   son  Fauna  suecica ,  ou 
Histoire  générale    des  animaux   de 
Suède,  qu'il  réimpriina,  augmentée  du 
I     douille  ,  en  1701;  et  de  donner,  en 
!     1755  ,  une  Flore  générale  du  même 
pays.  Mais  il  était  nécessaire,  pour 
1  oinplir  entièrement  ses  vues,  qu'il  se 
îMOcuràt  aussi  la  connaissante  des 
odiictions  étrangères;  et  c'est  pour 
il  qu'il  prit  la  peine  d'ordonner 
(le  décrire  les  grandes  collections 
qui  se  trouvaient  à  sa  portée.  Trois 
'■     de  ces  cabinets  ont  été  publiés  p.ir 
■   i  avec  étendue  :  le  cabinet  du  roi 
'  Suède  (  Musœuni  AdolyJù  Fre- 
ilcrici  ) ,  dont   le  premier  volume 
y  nul  in-folio,  avec  de  belles  figures 
iiîimaux,  en  1764  (  le  second  est 
>i6  manuscrit  )  ;  celui  de  la  rci/i« 
''fusceuni  Ludovicx  Udalricx  ) ,  i 
•l.  in-8^. ,  Stockholm ,  1 7G4  ;  celui 
1  comte  de  Tessin(  Musœiim  Tes- 
laianum  ),  i  vol.  in-folio,  Stock- 
iiolm  ,  1753.  Il  a  donné  aussi  des 
) lices  de   ceux  de  l'académie  de 
ockholm  ,  de  l'université  d'Up>al 
et  de  quelques  particuliers.  Il  dé- 
couvrit et  acheta   un  herbier,  rc- 
îcilli  autrefois  à  C-jylan  ,  par  Jean 
î.irmau,  et  le  publia  sons  le  litre 
de  Flora  Zejlanica  ,  Stockholm  , 
1747  ,  in-8".  :  mais  toutes  ces  res- 
sources uc  lui  i>uûirciit  poiol  ;  et 


tm  533 

Sont  les  dtendre,  il  tronra  movrn 
e  faire   placer  ses  élèves  « 
aumôniers  ou  comme  chirui 
sur  des  vaisseaux  ,  ou  même  de  leur 
faire  doincr  des   missions   comme 
naturalistes ,  pour  des  pays  lointains, 
comptant  assez  sur  leur  reconnais* 
sance  pour  être  assuré  qu'ils  lui  en- 
verraient ,  de  tous  côtés  ,  ce  qu'iU 
recueilleraient  de  plus  intéressant. 
Les   noms  de  quelques-uns  d'entre 
eux  sont  devenus  célèbres  par  les 
relations  qu'ils  ont  rédigées.  Kalm 
voyagea     en     Amérique  ;    Hassel- 
quist  en  Palestine  et    en  Egvplc; 
l'orén  aux  Indes;  Osbeck  en  Chine; 
Lœiling  en  Espagne;  Thnnberg  au 
Japon  ;  Forskal  en  Arabie  ;  Solander 
dans  la  mer  du  Sud  ;  Sparrmann  au 
cap  de  B)nne- Espérance.  On  peut 
dire  que  c'est  en  grande   partie  à 
leur  maître  qu'on  doit  les  nombreux 
matériaux  dont  leurs  voyages  ont 
enrichi  la  science.  Les  autres  ,  tclt 
cpieRohnder,  Ternstrœra,  Koehler, 
etc.  ,  n'ont  point  laissé  de  relation  ; 
mais  Liunaeus  a  eu  soin  de  consigner 
leurs  noms  dans  ses  ouvrages ,  de 
manière  qu'ils  ne  périront  p<ji«t.  Il 
avait  encore  un  aulrc  moyen  d'em- 
ployer les  talents  de  ses  élèves  :  au 
moment    où   ils   devaient   soutenir 
leurs  thèses,  il  les  faisait  travailler, 
sous  son  inspection ,  àdes  ixrcherches 
dont  il  leur  traçait  le  plan  ,  et  aui 
doim lient  lieu .  prc^ffue  toutes,  à  des 
dissertations  pleines  d'intérêt  ;  il  en 
a  rédigé  lui-même  un  nombre  sufli- 
sant  pour  remplir  six  volumes  ,  qui 
ont  été  jMibliés  sous  le  titre  d* -/mi»- 
Tiitates    acadeinicœ  ,  Slockholm  , 
1749  à  17 03  ;  et  Schrebcr  qui  les  a 
fait  réimpnmcr  à  Erlaug,  eu  17H5, 
y  a  réuni  troi^i  volumes  composée  de 
cellesquionl  '  !.<.élcvc» 

de  Liiiné  et  v  ^es  par 

lui.  U  exista  cerUiiwaicnt  dans  l«s 


534 


LIN 


sciences  bien  peu  de  recueils  aussi 
riches  en  idées  neuves  ;  la  phy»- 
siologie  végétale  ,  l'économie  des 
plantes  ,  celle  des  animaux ,  la  phi- 
losophie générale  de  l'histoire  na- 
turelle ,  y  trouvent  les  matériaux  les 
plus  précieux  ,  toujours  présentés 
d'une  manière  ingénieuse  ,  dans  un 
langage  singulier,  mais  attachant  par 
sa  singularité  même  :  jusqu'à  ses  titres 
offrent  des  locutions  figurées ,  mais  or- 
dinairement très-expressives.  Veut-il 
Î)arlerdes  moyens  divers  par  lesquels 
a  nature  assure  la  fécondation  des 
végétaux,  ce  sont  les  Noces  des  plan- 
tes; les  changements  de  position  de 
leurs  parties  pendant  la  nuit ,  cons- 
tituent le  sommeil  des  plantes;  les 
époques  où  elles  fleurissent  dans  l'an- 
née, forment  le  calendrier  de  Flore; 
Vhorloge  de  Flore  consiste  dans  les 
heures  où  s'ouvrent  où  se  ferment 
leurs  fleurs.  Celles  de  ses  disserta- 
lions  qui  ont  pour  litres  ,  Prolepsis 
plantarum  ,  Metamorphosis  plan- 
tarum ,  présentent  des  considéra- 
tions profondes  sur  les  phénomènes 
les  plus  obscurs  de  la  végétation  ,  et 
sur  la  facilité  de  toutes  les  parties 
végétales  a  se  changer  les  unes  dans 
les  autres.  Dans  celles  qu'il  intitule  , 
OEconomia  naturœ,  Politia  naiurœ, 
se  trouvent  des  vues  élevées  sur  les 
rapports  mutuels  de  tous  les  êtres 
et  sur  leur  concours  au  but  géné- 
ral de  l'univers.  L'espace  ne  nous 
permet  pas  de  rapporter  les  litres 
de  tous  ces  petits  écrits ,  ni  même 
de  choisir  parmi  eux  ceux  qui  mé- 
riteront toujours  d'être  lus.  Cepen- 
dant ,  tous  les  naturalistes  de  l'Eu- 
rope et  de  l'Amérique  s'empres- 
saient de  se  mettre  en  rapport  avec 
Linnaeus ,  et  de  lui  offrir  ce  qu'ils 
croyaient  digne  de  lui  :  ses  collec- 
tions s'enrichissaient,  et  enrichis- 
saient   ses    ouvrages  3   ses   systè  - 


LIN 

mes,  sa  nomenclature^  devenaient 
d'un  usage  générai;  et  la  facilité  que 
cette  nomenclature  donnait  à  l'his- 
toire naturelle  ,  en  rendait  le  goût 
presque  universel.  Des  gouverne- 
ments ,  de  riches  particuliers  de  tous 
les  pays ,  établissaient  des  cabinets  , 
des  jardins  à  grands  frais  ,  et  yj 
faisaient  venir  des  plantes  de  toutesi 
parts  ;  l'Autriche ,  la  Russie  ,  le] 
Danemark ,  à  l'imitation  de  la  Suède , 
faisaient  recueillir  les  productions  de| 
leurs  provinces ,  ou  envoyaient  des] 
naturalistes  dans  les  pays  éloi: 
La  science  prenait  un  essor  inouï: 
Linnaeus  sentait  qu'il  en  était  la  prin- 
cipale cause  ;  et  ce  sentiment  était 
pour  lui  une  ample  récompense  de 
ses  immenses  travaux.  Toutefois  les 
honneurs  ne  lui  manquèrent  point. 
Il  se  vit  associé  à  toutes  les  acadé- 
mies de  l'Europe;  les  princes  même 
lui  donnaient  des  marques  éclatantes 
de  considération.  Anol)li  ,  décoré 
de  l'ordre  de  l'étoile  polaire  (i)  par 
son  souverain  ,  il  fut  demandé  par 
le  roi  d'Espagne ,  par  le  roi  d'An- 
gleterre ;  Louis  XV  lui  envoyait  des 
graines  recueillies  de  sa  main  :  mais , 
dans  la  simplicité  de  sa  vie  ,  il  était 
peu  accessible  aux  honneurs  du 
monde.  Vivant  avec  ses  élèves  qu'il 
traitait  comme  ses  enfants  ,  quelque 
plante  singulière  ,  quelque  animal 
d'une  forme  peu  ordinaire ,  avaient 
seuls  le  droit  de  lui  procurer  de 
vraies  jouissances  :  il  n'était  nulle- 
ment troublé  par  les  attaques  de  ses 
antagonistes  ;  et  bien  qu'il  en  ait  eu 
de  fort  célèbres  ,  tels  que  Haller  , 
Buffon  elAdanson,  et  qu'ils  l'aient 


I 


(0  C'est  depuis  \c 


qu 


on  lui  donna  le  titre 


de  Che()aHer  von  TLinnè.  An  reste  ,  «es  lettre^ 
de  noblesse  ne  lui  furent  pas  accordées  en  consi- 
deiatioii  de  ses  nombreux  travaux  eu  botanique, 
mais  pour  avoir  découvert  u-a  moyen  de  fair* 
grossir  les  perle»  que  produlseat  certaine»  mou- 
le» de  Suède. 


SOUTcnt  traite  avec  injustice ,  il  ne 
prit  jamais  la  pf>inc  de  leur  repond rc , 
suivant  en  cela  un  conseil  que  Bocr- 
haave  lui  avait  donne  dans  sa  prc- 
!  mière  jeunesse.  Il  avait  épousé,  vers 
i'j4o,   mademoiselle  More,  cette 
'  jeune   personne  de  Fahlun  ,  dont 
nous   avons   parlé  ;    et   il  en  a  eu 
,  quatre  filles  (  i  ) ,  et  un  fils  ,  Charles 
Linné ,  qui   lui    a  succède   dans  sa 
chaire ,  et  qui  est  mort  sans  enfants , 
peu  de  temps  après  lui  (  en  i-^SJ  ). 
Il  était  petit  de  taille;  sou  visage 
,   e'tait  ouvert ,  son  œil  vif  et  gai.  Sa 
société  était  pleine  de  charmes  ;  et 
tous  ceux  qui  l'approchaient,  conce- 
vaient pour  lui  ufi  tendre  attache- 
ment. Sa  seule  faiblesse  paraît  avoir 
été  un  grand  amour  de  la  louange. 
Fort  attache  à  la  religion,  il  ne  par- 
lait de  la  Divinité  qu'avec  respect , 
et  saisissait  avec  un  plaisir  marqué  les 
occasions  nombreuses  que  lui  ottrait 
l'histoire  naturelle  de  faire  connaître 
la  sagesse  de  la  Providence.  Malgré 
son  infatigable  activité  ,   sa  santé 
s'était   assez  bien   soutenue  jusques 
en  1773,  où  un  affaiblissement  de  sa 
mémoire  lui   fit    prévoir    d'autres 
accidents.   Il  fut,  en  ellct,  frappé 
d'apoplexie ,  en  faisant  une  leçon  au 
commencement  de  mai  i774'  Une 
seconde  attaque,  en  juin  1776,  Ic 
priva  de  la  plus  grande  partie  de  ses 
fa-  ultés.    Il  mourut  enfin  d'une  hy- 
dropisie,le  10  janvier  17  78,  âgé  de 
soixante-onze  ans.  Il  est  inhumé  daus 
la  cathédrale  d'Upsal.  Gustave  III 
marqua  les  regrets  de  la  Suède  sur 
cette  perte  ,  dans  un  discours  pro- 
noncé devant  les  états  du  royaume. 
Ce  prince  composa  lui-même  l'orai- 


(i)C'e.tàr.ine  d«  «e.  fill.-»  (  KUwb«lh-rJinM 
lin»),  qii«  l'on  doit  1  obier»iiti»n  i n ler*»»* r. I« 
a.  l'ioflaramabilile  d«  U  »*p»i»r  irân»pité«  p«r 
aueique*  plaiiua,  ei  dv»  ctiiic«ile«  «l'Cinqu»» 
tirée»    ds   U  CApucine  ,  l«  wir  ,  p»i   »»  ««"»P« 


LW 


5S5 


son  funèbre  de  Linné ,  qu*il  fit  lire 
pulliquemcnt  à  Upsal  :  on  lui  a  fait 
depuis  ériger,  dans  le  jardin  de  cette 
université,  un  monument  avant  la 
forme  de  temple ,  dans  lequel  on 
doit  réunir  les  productions  de  la  na- 
ture. Deux  médailles  ont  été  frap- 
})ées  en  son  honneur.  On  trouve  sa 
Vie  et  le  catalogue  raisonné  de  se» 
ouvrages,  dans  u  Revue  générale 
des  écrits  de  Linné  ,  par  Richard 
Pultenejr ,  dont   on  a   une  traduc- 
tion française  par  Millin ,  a    vol. 
in-8**.  Gilibcrl  a  donné  aussi  sa  Vie 
en  latin  ,  dans  le  troisième  volume 
d'un  choix  de  ses  ouvrages  qu'il  a 
publié  en  1 787 ,  à  Lyon  ,  sous  ce 
titre  :  Car.  Linnœi  Fundainenta  bo- 
tanica.   Condorcel ,  Vicq-d'Aiyr  et 
Broussonnet  ont  inséré   son  éloge 
dans  les  mémoires  des  soaiélés  dont 
ils  étaient  secrétaires.  Ses  herbiers  et 
ses  manuscrits  ont  été  transportés 
en  Angleterre  par  le  docteur  Smith  , 
botaniste  célèbre  ,  qui  les  avait  ac- 
quis après  la  mort  de  Linné  le  fil». 
J.  F.  Gronovius  a  donné  le  nom  de 
Linnœa^en  l'honneur  de  cet  illustre 
botaniste  ,  à  un  genre  de  plantes  de 
la  famille   des  chevrc-feuilles. 
C— v~«. 
LINSCHOTEN  (Jeaî* -Huci/e» 
Van  ) ,  voyageur  hollandais ,  né  k 
Harlem   en   i5(i3,  s'eml»arqua   an 
Texel  le  6  décembre  1579,  pour 
aller  à  Sévillc ,  où  deux  de  ses  frères 
étaient  établis.  Il  se  rendit  ensuite  à 
Lisbonneavccun  V  "       '''^; 

entra  au  service  «i  '*"- 

scca,  nomm'  II' !      '  '^^ 

partit,cu  i5s  ).  y  ...  .  *<«♦ 

ou  il  resta  plusieurs  auuf«!.s ,  cl  où  il 
observa  les  mœurs  des  habitants 
et  les  protluctions  du  pays.  Aprrs 
la  mort  de  l'archcvccpie,  en  iUSt}. 
il  retourna  en  Portugal .  ptùs  «•" 
Hollande.  A   peine  y  avi«it-il  iche- 


136 


LÎN 


Te  la  relation  de  son  voyage  ,  et 
commencé  à  jouir  de  l'entrelien  do 
ses  amis,  qu'oti  le  choisit  pour  faire 
partie  de  l'expédition  que  les  Hol- 
landais envoyaient  pour  découvrir  un 
passage  à  la  Chine  parle  nord-est.  Il 
fut  nomme ,  deia  part  du  stathouder 
et  des  directeurs  de  l'en  treprise,  com- 
mis général  de  la  flotte.  «  Le  projet 
»  était  démon  goût,  dit-il  lui-même, 
5>  et  conforme  à  mon  inclination  : 
»  ainsi ,  sans  faire  attention  au  pë- 
»  ril  auquel  on  s'expose  dans  cette 
ty  navigation  parmi  les  glaces ,  je  l'cn- 
»  trcpris  pour  le  bien  de  ma  patrie 
5)  et  pour  ma  propre  satisfaction. 
>  Ma  fonction  était  de  tenir  un  jour- 
■»  nal  de  tout  j  et  je  m'en  suis  acquit- 
î)  te  aussi  exactement  qu'il  se  ])uisse, 
-a  ecrivant,jour  par  jour  et  heure  par 
7>  heure,  tout  ce  qui  nous  arrivait , 
5)  et  tout  ce  qui  s'est  passe  dans  le 
»  voyage ,  sans  preudre  parti  ni  pour 
5)  ni  contre.  »  La  flotte  de  trois  vais- 
seaux, sous  les  oi'dres  de  Nay, 
Brandt  et  Barentz  ,  partit  du  Texel 
le  5  juin  i594;  et  le  22  juillet ,  on 
était  au  détroit  de,  Waygats.  Ou 
navigua  le  long  de  la  nouvelle 
Zemble,  sans  trouver  ni  havre  ni 
passe  :  les  glaces  qui  empêchaient 
d'avancer,  s'élant  dispersées,  on  fit 
quarante  lieues  dans  la  nier  de  Tar- 
tarie  jusqu'à  l'embouchure  de  l'Oby. 
Les  Hollandais^  ayant  vu  la  mer 
à  -  peu  -  près  ouverte  ,  ])ensèrent 
qu'elle  devait  s'étendre  jusqu'à  la 
Chine ,  au  Japon  et  aux  pays  circon- 
voisins  ;  la  vue  de  la  côte  qui  fuyait 
au  sud-est ,  les  confirma  dans  celle 
îde'e.  ((  Cependant ,  ajoute  Liuscho- 
»  ten  ,  nous  n'avancions  pas  que  cela 
î)  fût  avec  la  dernière  certitude ,  le 
y>  vent  contraire  qui  nous  fit  prendi  e  le 
»  large,  nous  ayant  empêche  de  nous 
»  c'ciaircir  cl  avantagea)  Enfin, les  gros 
temps,  les  brumesplesglaces  forcèrent 


LIN 

à  rebrousser  chemin  le  11  août;  et 
le  i5  septembre,  Linschoten  revit 
Enckhuysen.  Il  fut  un  de  ceux  que 
l'on  chargea  d'aller  à  la  Haye  pré- 
senter au  stalhouder   et   à  Barne- 
veldt,  grand  pensionnaire,  le  rap- 
port du  voyage.  En  remettant  cette 
relation  avec  les  dessins  et  les  cartes , 
il  fit  entendre  qu'eu  e'gard  à  de  si 
heui-eux  commencements ,  le    pas- 
sage lui  paraissait  très-possi])le.  Exa^ 
meiï  fait  de  son  rapport ,  on  deci' 
une  nouvelle  j  expédition,  forte 
sept  bâtiments;  les  mêmes  chefs 
commandèrent,  et  Hcemskerk  leii 
fut   adjoint.  On  quitta  le  Texel 
'2    juillet    1595  ;    le    19  août,  l 
Hollandais  étaient  devant  le  de'lro: 
de  Waygatz,  encore  obstrue'  par  les 
glaces.   Ayant  reconnu  l'impossibi- 
lilë  de  les  franchir ,  ils  firent  voile 
le  1 5  septembre,  pour  la  Hollande, 
linschoten  fixa  son  se'jour  à  Enck- 
huysen,  et  mourut  en  i633.  On  a 
de  lui,  en  hollandais  :  I.  Itinéraire, 
Forage  ou  Navigalion  aux  Indes- 
Orientales  du  Portugal,  compre- 
nant une  Kelalion  abrégée  de  ces 
paj'S,  et  des  cotes  maritimes ,  etc. 
Amst. ,  1 596  ,  in-fol.  cart.  et  fig, 
ibid. ,  1614,  1623  ,  in-fol.  j  trad 
en    latin    par   l'auteur  ,    la  Hay 
1099,  in-fol.  j  Amsterdam,  161 
in-fol.  )   traduit   en   anglais ,  Lo 
dres  ,   1 598 ,  in-fol.  ;  et   en  fra 
çais ,  sous  ce  litre  ;  Histoire  de  la 
navigation  de  J.-H.  de  Linschoten, 
Hollandais^  aus;  Indes-  OricntaleSy 
contenant  diverses  descriptions  des 
lieux  jusques  à  présent  découverts 
par   les   Portugais  ;    Observations 
des. coutumes  et  singularités  de  de- 
là et  autres  déclarations ^  avec  an- 
notations de  B.  Paludanus ,  doc- 
teur en  médeciîie ,  sur  la  matier.^ 
des  plantes  et  épiceries ,  etc.,  Ams- 
terdam ,  1610  p  iii-fol.  ]  ibid.,  1G19- 


LIN 

^.  in-fol.  Toutes  ces  traductions 

;  «lomcnt  enrichies  de  cartes 

-jires  copiées  sur  Tcdilion  ori- 

(\'Hc-ci  ronticul  de  plus  :  1°. 

j'tion  de  la  côte  de  Guinée, 

'ri go ,  Angola  et  autres  pays  ma- 

imes  d'Afrique  y  etc. ,  suivie  d'une 

■  rscriptiondes  Indes- Orientales.  — 

■\  Le  grand  T{(utier  de  mer  ^  con- 

nant  une  instruction  des  routes  et 

urs  qu'il  convient  tenir  en  la  navi- 

lion  des  Imles- Orientales  ,  et  au 

'\yage  de  la  côte  du  Brésil  ^  des 

'milles,  etc. —  3".  Extrait  autJien- 

jue  et  Somme  de  toutes  les  rentes 

mairies ,  impôts ,  tributs,  di  i  ièmeSy 

r. ,  des  rois  d'Espagne  ,  par  tous 

>  rojaumes  ;  avec  une  bricve  dé- 

iration  de  la  puissance  et  origine 

v  rois  de  Portugal.  Le  long  se'- 

ur  de  Linscholcn  à  Goa,  et  ses 

pports  avec  des  hommes  en  place  , 

ec  des  savants  et  des  voyageurs  , 

avaient  rais  à   portée  de  se  pro- 

irer  des  renseignements  exacts  Sur 

s  mœurs  et  les  productions  des  In- 

.-Oricntales.  Quoique  son  livre  soit 

rien,  il  peut  encore  être  utile;  il 

"^Ve  le  tableau  fidèle  des  possessions 

)rtugaises  dans  les  Indes  à  la  fin 

i    seizième  siècle.  On    y  voit  les 

iiises  de    la   décadence    de     leur 

ipire  dans  l'Orient.  Quoiqu'il  n'ait 

iru  qu'après  le  de'part  de  la  pre- 

ière    e\[>edition    des    Hollandais 

iir  les  Indes  (  Fojez  Houtmaw  , 

m.  XX  ,  }>ag.  6'i3  ) ,  on  ne  peut 

uterque  sa  lecture  n'ait  contrihue 

leurcfi  faire  entreprendre  de  nou- 

lles;  et  il  est  très-possible  que  pen- 

n»t  que  l'auteur  mettait  ses  niaté- 

!  lux  en  ordre,  il  ait ,  par  ses  cntrc- 

•ns, favorisé  l'cxécntion  du  projet 

Houtman.  Le  Routier  des  Indes  a, 

ndant   long-temps ,   joui  du  plu* 

and  crédit   parmi  les  marins;  et 

s  ont  reconnu  que  j  pour  aller  de 


LtN  557 

Firando ,  dann  le  .T.mr^n    U  Hatâria , 
c'était  un  guide  cxt  sûr.  Il 

coniient  beaucoup  il ,  noTî^et 

des  extraits  de  voyages  ini- 1.  -  ,iiis. 
Ces  divers  morceaux  ,  à  iVxrrpdon 
de  la  description  de  la  Guinée ,  ne  se 
trouvent  pas  dans  la  prennère  ëdi- 
Irançaise ,  aiii 
est  souvent  inexarle  :  en   revanche 


tion  delà  traduction  française ,  qiii 


elle  offre  les  notes  de  Palud.iniis,que 
l'on  voit  aussi  dans  toutes  les  édi- 
tions subséquentes,  soit  de  Toriginal, 
soit  des  traductions.  La  traduction 
latine  contient  encore  un  abrégé  de» 
Voyages  de  Linscholcn  au  Nord.  II. 
Forage ,  ou  Navigation  au  IS'ord, 
le  long  de  la  Norvège  ^  du  Cap- 
Nord ,  de  la  Laponie,  du  Finn- 
land ,  de  la  Russie,  de  la  Mer  Blan^ 
du;  y  etc. ,  par  le  détroit  de  Nassau^ 
jusque  devant  le  fleuve  Ohjr  ,  dans 
les  années  i  'ï()4  cl  i  Sqî  ,  Frane- 
ker,  1601  ,  in-fol.  avec  fig.  Cette 
relation  n'offre  que  le  journal  dit 
navire  sur  lequel  Linscholen  était 
embarqué.  Gérard  de  Veer,  qui 
était  du  second  vovnî;e,  publia  le 
journal  *des  autn  >.  Lins- 

chotcn  donne  des  (1  lessanL* 

sur  les  mœurs  des  iSaraoiedcs,  sur  la 
Nouvelle  Zemble,  et  la  côte  du  con- 
tinent qui  lui  est  opposée.  On  Irourt 
son  journal  dans  le  premier  yolume 
du  Recueil  des  Foyages  au  Nord, 
Les  frères  l)e  Hry  ont  insère'  la  tota- 
lité de  l'ouvrage  de  Linschoten  sur 
les  Indes,  d»;      !  '      la  troi- 

sième Pt  U  qi  de»  Pe- 

tit^  r  ••gé 

ct('.  -ni 

fms  le  sit'H.  lis  ont  tn» 

eur  recueil ,  un  r\'  ;|»- 

tion  de  '     '  ur 

eût  mis!  tiu, 

ih  en  ont  fait  faire  une  nouvelle  ver- 
sion, à  laquelle  ils  ont  employé  drut 
traducteurs  qui  ont  qiid']uefois  mal 


538  LIN 

compris  le  texte,  et  d'antres  fois  s'en 
sont  trop  écartes.  De  plus  l'édition 
des  De  Bry  ,  est,  suivant  l'observa- 
tion de  Gimus,  gâtée  par  de  nom- 
breuses fautes  (l'impression.  E — s. 
LINSEISBAHRDÏ.  Foy.  Lenti- 

LIUS. 

LINT  (  Pierre  -  Van  )  ,  peintre 
d'iiistoire ,  né  à  Anvers,  en  1609, 
vs'adonna  de  bonne  heure  à  la  pein- 
ture ,  et  se  rendit  fort  jeune  en  Italie. 
Après  avoir  visité  Venise  ,  où  il 
étudia  les  ouvrages  de  Paul  Veronsse, 
il  vint  à  Rome ,  et  s'y  livra  à  son 
art  avec  une  nouvelle  ardeur.  Il  se 
fit  d'abord  connaître  par  quelques 
beaux  portraits  j  et  bientôt  son  talent 
lui  fit  confier  la  peinture  de  la  cha- 
pelle de  Sainte-Croix ,  dans  l'église 
de  la  Madona  del  Popolo.  Il  y  re- 
présenta Vlni^ention  et  V Exaltation 
de  la  Croix.  Ces  deux  tableaux  ont 
été  graA^^és  par  P.  de  Baillu.  Le  car-  . 
dinal  Ginnasi,  évêque  d'Ostie  ,  prit 
Van  Lint  sous  sa  protection ,  lui 
accorda  une  pension  considérable,  et 
voulut  qu'il  ne  travaillât  que  pour 
lui.  Cet  artiste  resta  pendent  sept 
ans  attaché  au  prélat  :  mais ,  après 
une  absence  de  dix  ans  ,  il  ne  put 
résister  au  désir  de  revoir  sa  patrie  ; 
et ,  en  1639,  '^  revint  à  Anvers ,  où  sa 
réputation  l'avait  devancé.  Elle  s'é- 
tendit bientôt  jusqu'en  Danemark,  où 
le  roi  Christian  IV ,  charmé  de  la 
beauté  de  ses  ouvrages  ,  lui  en  com- 
manda quelques-autres.  Quoique  ce 
peintre  fût  très  -  laborieux  ,  ses  ta- 
bleaux sont  rares ,  même  dans  son 
pays  :  il  en  existe  quelques-uns  à  An- 
vers. Ceux  qu'il  a  peints  pour  la  ville 
d'Ostie ,  passent  pour  les  meilleurs. 
Il  peignait  l'histoire  avec  un  égal 
succès  ,  en  grand  et  en  petit  :  son 
dessin  est  correct,  son  coloris  ferme 
et  vrai  5  ses  compositions  sont  une 
lieureuse  imitation  des  grands  maî- 


LÏO 

très  d'Italie.  P.  de  Baillu  a  grave* , 
d'après  lui  ,  deux  estampes ,  dont 
l'une  représente  le  Combat  du  vice 
et  de  la  vertu ,  in-4^.  ;  et  l'autre 
la  Fierté  assise  ^  avec  l'Enfant 
Jésus  sur  ses  genoux,  auquel  un 
ange  présente  la  croix ,  tandis  quun 
autre  ange  lui  offre  des  fruits.  On 
croit  que  Van  Lint  mourut  à  Anvers. 
—  Henri  Van  Lînt  ,  peintre  flamand, 
se  rendit  en  Italie,  vers  1710, 
reçut  le  surnom  de  Studio  dans 
bande  académique  de  Rome 
peignait  le  paysage  et  les  intérieurj 
ses  ouvra g(3S  ,  en  général ,  sentent  ' 
palette.  Le  Musée  du  Louvre  poss< 
dait  de  ce  maître  un  Intérieur  d' 
glise,  qui  a  été  enlevé  par  la  Prusse 
en  181 5.  Van  Lint  a  aussi  gravé  a 
l'eau-forte  avec  talent.  On  connaitde 
lui  une  très-belle  estampe  in-folio  , 
représentant  le  Temple  de  la  Sjbills 
à  Tivoli  ;  le  paysage  ,  qui  offre  un 
site  montagneux  et  boisé,  est  d'une 
composition   très  riche.       P — s. 

LIONNE  (  Artus  de  ) ,  évêque 
de  Gap,  né  en  cette  ville  vers  la 
fin  du  seizième  siècle  ,  s'est  éga- 
lement distingué  par  les  vertus  d'm 
prélat ,  et  par  les  talents  d'un  bol 
géomètre.  Après  avoir  terminé  s< 
études  d'une  manière  brillante, 
fut  pourvu  d'une  charge  de  coi 
seiller  au  parlement  de  Grenobh 
et  épousa  Isabelle,  sœurd'Abel  Sei 
vien,  sur-intendant  des  finances, 
eut  de  ce  mariage  un  fils  (  Hugue" 
de  Lionne  ),  qui  s'est  acquis  une 
juste  célébrité  dans  les  négocia  - 
lions.  Après  quelques  années  de 
mariage  ,  il  perdit  son  épouse ,  et , 
malgré  les  avantages  qu'on  lui  of- 
frait, il  refusa  de  contracter  un  nou- 
vel engagement.  L'amour  de  la  re- 
traite  lui  fit  embrasser  l  état  ec- 
clésiastique; et  il  fut  nommé,  en 
1637,  à  l'évcché  de  Gap.  Il  visita  son 


MO 

(èse,  malgré    la    difiicultë  des 
luins  et  la  rigueur  des  saisons  , 
cura  des  pasleurs,  à   ses  frais, 
V  paroisses  qui  en  étaient  privées  , 
Il  reconstruire  son  église  cathe- 
le,    ruinée   par  les    protesta nls. 
a  attachement  pour  le  troupeau 
qui  lui  était  confié ,  le  détermina  à 
refuser  le  riche  archevêché  d'Em- 
II  ;  mais  raffaiblissement  de  sa 
:o   l'obligea   de  se  démeltrc ,  en 
il.  Il  se  retira  à  Paris,  ne  conscr- 
t  d'autres  bénéfices  que  l'abbaye 
Solignac  ,  et  il  y  mourut  le    i8 
iii.u   i6(i3.  L'oraison  funèbre  de  ce 
prélat  fut  prononcée  à  Gap  ,  par  le 
prieur  de  Charmes;  et  elle  a  été  im- 
primée à   Grenoble,    1675,  in-4*». 
'  Al  lard  nous  apprend  (  Bibl.  du 
iphiné)  que  ]Aoniie  avait  laissé 
11  manuscrit  une  Histoire  des  évè- 
/'>  de  Gap ,  ses  prédécesseurs.  Ou 
ucore  de  lui  :  Amœnior  curvili- 
uni  contemplatio,  Lyon,  i654, 
I  '.  Le  P.  Leotaud,  son  compa- 
ii  lole  et  son  ami ,  fut  l'éditeur  de  cet 
ouvrage,  où  l'auteur  considère  prin- 
lemcnt  la  lunule  d'Hippocrate, 
mtres  formées  à  son  imitation , 
les  cercles  de  rapports  différents 
'lui  de  deux  à  un;  ainsi  que  di- 
espaces  circulaires  dont  il  dé- 
lineles  quadratures  absolues.  Il 
!o  premier  qui  ait   remarqué  la 
irabililé  absolue  des  deux  pai*- 
Ic  la  lunule  d'Hippocrate,  cou- 
par  une  ligne  parlant  du  centre 
lus  grand  cercle;  remarque  dont 
'ï.îiiis  fait, mal  à  propos, honneur  à 
PerLs  ou  Caswel.  (  f^.  Montucla  Hist. 
des  mathémaliques jtom.  11,  p.  76.) 
VV— s. 
LIONNE  (  Hugues  de  ),  ministre 
»*Tretaire  d'état,  fils  du  précédent, 
iit  à   Grenoble,  en   i()ii.  Son 
,  prit  soin  lui-même  de  sa  pre- 
aûcre  éducation,  cl  l'envoya  ensuite 


à  Abel  de  Servie n ,  »oii  oncle ,  iiii ,  lui 
trouvant  bc^nuoup  de  nialtiniéje 
nomma  son  premier  commis  ,  cl 
l'initia  dans  tous  les  scrrcls  de  U 
politique. Scrvien  ayant  cir  di^cr.irié 
(  ^'OJ.  A.  DE  ShRViEM  ),  le  r.i 

de  Richelieu  odril  à  Lionne  u-  i... 
conserver  son  emploi  ;  mais  celui-ci 
le  remercia,  et  partit  pour  ritaiic^cn 
i636.  Pendant  qu'il  cuit  à  Rome  , 
il  eut  de  fréquentes  occa.Niuns  de  voir 
le  cardinal  Mazariu,  dont  il  ne  pou* 
vait  cependant  pas  prévoir  la  pro- 
chaine élévation  :  Mazarin,  appelé  aa 
ministère,  se  souvint  de  Lionne  et  le 
recommanda  si  instamment  à  la  reine 
mère,  qu'elle  le  (il  son  secrétaire.  La 
reconnaissance  qu'il  devait  au  pre- 
mier ministre,  ne  l'erapcchait  pas  de 
combattre  son  avis  dans  le  cor.scil , 
quand  il  le  jugeait  nécessaire.  Il 
n'en  partagea  pas  moins  sa  dis- 
grâce ;  la  reine  fut  obligée  de  l'éloi- 
gner. On  reconnut  bicnlol  le  tort 
qu'on  avait  eu  de  se  priver  de  ses 
lumières  ;  il  fut  rap])clé,  et  parvint  à 
imposer  silence  à  ses  ennemis.  Lion- 
ne ,  pendant  son  voyage  en  Italie  , 
avait  été  chargé  de  terminer  les  dif- 
férends qui  existaient  entre  le  pajie 
et  le  duc  de  Parme;  ef  il  s'était 
acquitté  de  cette  n 
beaucoup  de  succès.  I  '^ 

qu'il  avait  acquise  des  ji  > 

})rinces  italiens  cl  du  car  c 

eurs  ministres  ,  fit  juger  que  per- 
sonne n'était  plus  propre  à  remplir 
les  fonctions  a 'ambassadeur  e\trat»r- 
dinaire  à  Rome  :  il  assista  en  cette 
qualité,  en  i6â5  ,  au  conclave  dont 
le  résultat  fut  l'élection  d'Alex.u.  *i  >■ 
VII  ,  et  parvint,  malgré  les  n 
gués  du  cardiiul  de  Rtt/. ,  à  l.u.i 
prononcer  le  nouveau  pap<*  jv^nr  !«^ 
uitércts  de  la  France.  Il  I 
envoyé  à  Madrid,  i)our  1 
paix  entre  les  deux  puis*-- «: 


54 o  LÎO 

le  mariage  de  Louis  XîV  avec  une 
infanie  :  mais'  il  ne  put  réussir  dans 
cette  double  négociation*  et  ce  ne 
fut  qu'en  déterminant  les  princes 
allemands  à  s'allier  à  la  France, 
qu'il  parvint  à  faire  craindre  à 
l'Espagne  une  guerre  funeste  ;,  et  à 
Famener  ainsi  à  conclure  une  paix 
TJvemcnt  désirée  par  le  cardinal 
Mazarin,  dont  elle  accroissait  la 
réputation.  (  Foy.  Louis  de  Haro 
et  Mazaiîtn.  )  Lionne  succéda ,  en 
1661  ,  à  Mazarin  ,  dans  la  place 
de  ministre  des  affaires  étrangères  : 
îe  cardinal  mourant  l'avait  désigné 
au  roi  comme  l'homme  le  plus  ca- 
pable de  la  bien  remplir  ;  il  montra 
beaucor.p  de  fermeté  dans  la  discus- 
^ion  qui  s'éleva  au  sujet  de  la  pré- 
tenîiou  de  Wateville  ,  ambassadeur 
crEspagne,pour  la  préséance (  Foy. 
d'Estrades  )  ,  et  amena  le  cabinet     des 


de  Madrid  à  déclarer  publiquement 
qu'il  désavouait  la  conduite  de  son 
ambassadeur.  Il  obtint  aussi  du  pape 
ime  réparation  de  l'insulte  faite  au 
due  de  Créqui  par  les  gardes-corses. 
Le  roi  le  récompensa  de  ses  ser- 
vices ;,  en  le  nommant  à  la  place  de 
secrétaire  d'état  ,  vacante  par  la 
démission  de  M.  de  Brienne.  Ce 
Ait  Lionne  qui  ménagea  l'acquisi- 
tion de  la  ville  do  Dunkerque.  Il 
mourut  à  Paris  ,  le  i«r.  septembre 
167 1  :  son  oraison  fnncbre  fut 
prononcée  par  Froraenlières ,  évê- 
que  d'Aire.  Ce  ministre,  dit  Voltaire, 
était  un  homme  aussi  laborieux  qu'ai- 
iTîable.  St.-Simon,  qui  paraît  avoir 
eu  en  vue  d'écrire  la  satire  plutôt  que 
Fliistoire  de  ses  contemporains , 
en  parle  néanmoins  d'une  manière 
-avantageuse  :  «  Lionne  ,  dit-il ,  était 
»  très-instruit  des  intérêts  des  prin- 
»  ces,  adroit  négociateur,  mais  trop 
»  connu  pour  tel  par  les  ministres 
se  dcTiaient   de 


LIO 

y>  lui  et  le  craignaient.  Il  ne  tra 
»  vaillait  ordinairement  que  press-i 
»  par  les  circonstances  ,  et  faiàai! 
»  tout  lui-même  avec  une  habileti 
»  et  une  supériorité  sans  égale  ;  d'ailj 


leurs ,   sacrifiant  ^   sans    ménage! 
ment ,  sa   fortune ,  sa  santé ,  e| 
»  jusqu'à  sa  paresse  ,  au  jeu 


»  bonne  chère  et  aux  autres  plaisirs 
On  a  de  Lionne   des  Mémoires  l 
roi ,  inlerceptés  en  1667  ,  far  C( 
de  la  garnison  de  Lille.  Ils  ont 
imprimés    (  en    Hollande  ) 
in-i'i  ,  avec  quelques  autres  pièci 
et  àcs  remarques  qu'on  attribu 
Lisola  :  ce  volume  ,  assez  rare 
partie  de  la  collection  des  elzevir 
français  :  ils    ont  reparu  dans  ui 
Recueil  de  pièces jwur  sentira  VUs 
toire ,   Cologne,   1668,  in-i2;e 
enfin  ,  ils  ont  été  réimprimés  ave 
additions  ,  sous  ce  titre  :  Mè 


moires  et  Instructions  pour  servi 
dans  les  négociations  et  aj[faire\ 
concernant  la  France,  Paris,  i68g| 
in-i2.  «  Rien  n'est  si  beau ,  dit  d'Arj 
»  genson,  que  les  réponses  de  M.  d 
»  Lionne  au  comte  d'Estrades  ,  qu 
))  ont  été  imprimées  avec  les  dépê- 
»  ches  de  cet  ambassadeur  en  Hol 
»  lande;  c'est  là  le  livre  que  les  g 
»  qui  se  destinent  à  la  politiq 
»  doivent  lire  ,  pour  se  former 
»  affaires  et  aux  négociations.  » 
peut  consulter  la  Fie  de  Lionm 
dans  les  Mélanges  curieux  ,  faisan 
suite  aux  œuvres  de  St,-Evremon(j 
(  à  qui  elle  avait  été  faussemen 
attribuée),  tom.  i^^'. ,  pag.  161 
et  les  Fies  des  hommes  illustre, 
de  France,  par  d'Auvigny,  tom.  v| 
Le  portrait  de  Lionne  a  été  gravij 
par  Larmessin  ,  Poilly  ,  etc.  W — s| 
LIONNE  (  Artus  de  ),  évêquedi' 
Rosalie^  fils  du  précédent,  naquit  i 
Rome,  en  i655,  pendant  que  sori 
pèi'c  y    remplissait  les    fonctionij 


Hol 

)nnd 

isanl 


MO 

uloiir.  Dt'siinc  à  la  {'.irricre 
s,  il  fiU  fi«il  chcvaliiT  »lc 
le;  mais  une   passion  niallicu- 
(    lui   inspira    toul-à-coup  une 
aversion  pour  le  niondo,  qu'il 
^ita  pas  à  y  renoncer.  Il  se  tint 
lie  quelque  temps  dans  une  mai- 
rcligieusc  ,  d'où  il  fit  connaître 
;i  père  sa  résolution  d'embrasser 
(I  ecclésiastique.  Il  fut  pourvu  de 
!)ayedc  Fecamp;  mais  après  l'a- 
re'signcc  à  Jules  de  Lionne,  son 
(• ,  il  partit  pour  lesmissions.de 
ient,  où  il  se  distingua  par  son 
pour  les  progrès  de  la  foi ,  et 
truisit  de  la  langue  et  des  usa- 
des   Indiens.  Il    accompagna , 
iG86,  les  ambassadeurs  que  le 
de  Siam  envoyait  à  Louis  XIV  j 
issa  dans  les  Indes   avec  eu\ , 
M   les  diffe'renles   provinces  du 
;e  empire  de  la  Chine,  et  revint 
ime,en  1708,  pour  les  intérêts 
il  religion.  Les  fatigues   avaient 
:  bli  sa  santé  ;  et  les  supc'rieurs- 
raux  des  missions  Tenvoycrent 
a  Paris ,  où  sa  présence  ne  pouvait 
qu'être  fort  utile  à  la  prospérité  de 
cet    e'tablissement.  Il   y  passa   les 
dernières  années  de  sa  vie  ,  et  mou- 
rut dans  la  maison  du  séminaire  des 
missions  étrangères,  le  2  août  1 7 1 3. 
\èque  de  Rosalie  a  eu  part  aux 
'  rents  Ecrits  des  missionnaires  , 
les  superstitions   des  Chinois, 
*c  (  iilte  des  ancêtres  f  etc.    W — s. 

LÏOTARD  (Jean-Etiewne),  sur- 
nommé le  Peintre  turc ,,  né  à  Ge- 
nève en  1702,  était  habile  dans  la 
miniature  ,  le  dessin  ,  la  perspective 
tt  la  peinture  en  émail.  Il  réussit 
à  un  tel  point  dans  ce  dernier 
genre,  que  le  célèbre  Petitot,  lui 
ayant  permis  de  copier  un  beau  por- 
trait qu'il  venait  de  terminer ,  ne 
sut  plus  distinguer  sou  ouvrage , 
«t  prit  la  copie  pour  Toriginal.  tu 


uo  541 

»  715,  Lit-  dit  à  Paris,  ri 

sylilconii  es  paMeU,  aeft 

rmau\  et  .ses  miniaiures.  Il  se  Ita 
avec  Lcinoinc  ;  niaii  il  ne  put  résis- 
ter au  désir  de  visiter  Tltalic,  rt  bt 
ce  voyage  a  la  suite  du  marquis 
de  Puysicux y  ambassadeur  de  Fian- 
ce près  la  cour  de  Napics.  Après  un 
sc)o)u-  de  quelques  mois  dans  cetU 
ville  il  se  rendit  à  Home,  où  se.s  por- 
traits lui  acquirent  beaucoup  de  ré- 
putation. Quelques  Anglais  do  sa 
connaissance  ayant  formé  le  proj  t 
de  se  rendre  a  Goustantinople,  le 
déterminèrent  à  les  5«iivre;ct  il  arri- 
va dans  celte  ville  au  mois  de  juiii 
173s.  Il  y  resta  quatre  ans,  ocniju- 
à  p{  iudie  les  costumes  et  les  u.s,i^.*s 
des  habitants.  Il  adopta  l'habit  le- 
vantin; et  dans  un  sé)our  de  diK 
mois  qu'il  Ht  en  Moldavie ,  il  se  lais- 
sa croître  entièrement  la  barl)e.  Il  s» 
rendit  alors  à  Vienne ,  où  l'erapcreur 
François  V^.  lui  fit  l'accueil  le  pltis 
distingué.  Il  fit  leportraitdecc  prince 
et  celui  de  Marie-Thérèse  dont  il  ob- 
tint une  protection  toute  particulière; 
et  l'empereur  lui  demanda  sou  pro- 
pre portrait,  pour  le  placer  dans  la. 
galerie  de  Florence  ,  parmi  ceux  des 
peintres  célèbres.  Après  un  sepiiir  de 
quelques  mois  en  Autriche  ,  Liotard 
vint  à  Paris,  où  il  fit  les  portraits 
de  toute  la  famille  royale  ;  de  là  il 
passa  eu  Angleterre ,  où  il  |>oiguit  U 
princesse  de  Galles.  A  son  retour  sur 
le  continent ,  il  débanjua  en  Hol- 
lande, où  il  peignit  le  stalhouJer  et 
sa  sœur  :  de  la  llayc  il  envoya  deux 
de  ses  plus  beaux  ouvrages  â  l'inipc- 
ratrice.  La  princesse,  charmée  de  ce 
présent,  lui  adressa  les  plus  vive* 
instances  pour  qu'il  revînt  à  Vienne  ; 
la  guerre  qui  éclata  vers  celte  e'po- 
que,  et  te  mariage  qu'il  contrarJA 
avec  Maiic  Fargues  ,  fille  d'uu  négo- 
ciant franraii  établi  à  AiostaJam, 


5ti  LIO 

rempèchèrent  de  se  rendre  à  cette  in- 
vitation. Cen'esl  que  depuis  son  ma- 
riage qu'il  se  rasa  ;  mais  il  conser- 
va toujours  l'IiaLit  levantin  qu'il  trou- 
vait pUis  commode  que  le  notre.  Il 
existe  dans  la  galerie  de  Dresde  plu- 
sieurs pastels  de  ce  peintre,  no- 
tamment un  Portrait  du  maréchal 
de  Saxe  ,  remarquable  par  une 
force  de  coloris ,  et  surtout  par 
une  précision  de  contours  et  de  tou- 
che ,  que  l'on  rencontre  bien  rare- 
ment dans  les  peintures  de  ce  genre. 
Il  a  tenté  de  donner  à  ses  portraits 
en  émail  des  dimensions  inusitées 
jusqu'alors;  et  l'on  connaît  de  lui 
des  éma^ix  hauts  de  près  d'un  pied 
et  demi  sur  plus  d'un  pied  de  large. 
Sur  la  fin  de  sa  vie  Liotard  s'était  re- 
tiré à  Genève  ;  il  y  peiguit  un  assez 
grand  nom])re  de  portraits  ,  et  mou- 
rut vers  1776.  Plusieurs  artistes  ont 
gravé  d'après  lui;  entre  autres,  Faldo- 
ni ,  Gaillard ,  Petit,  Liltret ,  Ardell , 
Wiile ,  etc.  Lui-même  a  gravé  à  l'eau- 
forle  :  I.  /.  Et,  Liotard,  avec  une 
lons^ue  barbe,  in-4".  II.  /?.  Hérault , 
lieutenant-s,énéral  de  police ,  in-f». 
III.  Une  dame  Franque  de  Fera, 
recevant  une  visite.  Cette  gravure  , 
dont  le  burin  est  de  Camerata ,  repré- 
sente les  portraits  de  Marie-Thérèse 
ctde  l'archiduchesse  Marie-Christine 
sa  fille.  IV.  Une  dame  Franque 
de  Galata ,  accompagnée  de  son 
esclave.  C'est  un  portrait  de  l'archi- 
duchesse Marie.  V.  Le  Chat  malade, 
avec  seize  vers  français  au  bas  ,  in- 
fol.  —  Jean-Michel  Liotard  ,  frère 
jumeau  du  précédent ,  fut  un  des 
meilleurs  élèves  de  Benoît  Audran. 
31  cultivait  avec  succès  la  gravure  à 
Paris,  lorsque  Jos.  Smith,  consul  an- 
dais  à  Venise,  amateur  distingué, 
1  appela  en  Italie  pour  graver  les 
sept  grands  carîons  que  Car.  Cigna- 
ni  avait  exécutés  pour  le  duc  de 


LIO 

Parme ,  ainsi  que  sept  grands  ta- 
bleaux  tirés  de    l'histoire    Sainte 
peints  à  Venise  par  Seb.  Ricci.  Ci 
gravures  ont  été  publiées  à  Venise 
sous  ce  titre  :  Opus  Sebast.  Rica 
Bellunensis     absolutissimum  ;    ab 
Joan.   Mich.   Liotard ,   Genevens. 
œre  expressum ,  1743,  grand  in-f^\ 
—    Car.    Cignani  Monochromata 
septem,  1 743,  in-fol.  Liotard ,  de  re- 
tour à  Paris,  continua  de  graver  av^ 
succès  d'après    différents    maître" 
Vers  1760  ,  il  revint  dans   sa  p| 
trie  ,  où  il  est  mort.  On  connaît  ei 
core  delui,  les  Comédiens  fane 
in-fol.  ,  d'après  Watlcau;  et  le^So 
meil  dangereux ,  grand  in-fol.  d""! 
près  le  même.  P — s, 

LIOTARD  (  Pierre  ) ,  botaniste 
né  à  Saint-Etienne  de  Crossey  près 
de  Grenoble,  en  1 7'.i9,  d'une  famille 
de  paysans  ,  travailla  à  la  terre  dans 
sajeuncsse,  s'engagea  ensuite  dans  un 
régiment  d'infanterie  ,  et  fit  les  cam- 
pagnes de  Porl-Mahon  ,  en  1756  , 
et  de  Corse,  en  17O4  :  ayant  été 
blessé  au  bras  ,  dans  celte  dernière 
guerre,  il  eut  sa  retraite  en  1765  , 
avec  la  paie  d'invalide.  Ce  fut  alors 
qu'il  vint  aider  un  de  ses  oncl 
herboriste  à  Grenoble  ,  et  qu'il  fi 
dans  les  montagnes  du  Dauphii 
différentes  courses  ,  qui  lui  inspi 
rent  un  goût  très-vif  pour  la  bota 
que.  Sachant  à  peine  sa  langue 
n'ayant  fait  aucune  espèce  d'études," 
il  connut  bientôt  toutes  les  plantes 
des  Alpes,  et  parvint  même  ,  sans  se- 
cours étranger,  à  entendre  le  latin  de 
Linné.  Bientôt  il  fut  indiqué  aux  voya- 
geurs comme  le  meilleur  Cicérone  des 
montagnes  ;  il  accompagna  Rousseau, 
Guettard  ,  Villa rs  ,  MM.  Faujas  de 
Saint.-Fond  ,  Desfontaines,  Toscan  , 
enfin  ,  tous  les  naturalistes  et  ama- 
teurs qui  visitèrent  ces  contrées  : 
il  deviut  l'ami  de  j^iusieurs ,  et  quel- 


i 


LK) 


tpifs-iins  se  souviennent  encore  de 
lui  avec  attendrissement.  Ses  rela- 
tions avec  J.-J.  Rousseau  méritent 
une  attention  particuliîrc.  Celui-ci 
Tint  le  trouver  ,  en  i-jOS  ,  sous  le 
nom  de  Renou  ,  et  le  pria  de  lui 
(apprendre  à  connaître  les  plantes. 
«  Vous  êtes  bien  vieux,  lui  dit  Lio- 
,»  lartl.  Je  travaillerai  d'autant  plus  , 
»  répondit  Rousseau.  ».Liotard  ,  sim- 
ple ,  franc  et  même  un  peu  grossier, 
convenait  beaucoup  à  Rousseau  ;  ils 
le  li  rent  intimement,  et,  après  leur 
léparation  ,  ils  restèrent  en  corres- 
pondance. Plusieurs  personnes  ont 
TU  les  lettres  de  Rousseau:  quelques- 
unes  étaient  relatives  à  des  commis- 
sions de  plantes  ;  mais  d'autres  of- 
fraient ,  sur  les  beautés  de  la  nature 
•t  sur  la  Providence,  des  pages  d'une 
éloquence  comparable  à  tout  ce  qu'il 
a  écrit  de  plus  remarquable  (i). 
G?lles  de  Liotard  étaient  simples 
comme  lui.  Un  jour  ,  poussé  par  un 
mauvais  démon  ,  il  emprunta  une 
plume  plus  exercée  pour  écrire  à 
Rousseau  ;  celui-ci  n'ayant  pas  ré- 
pondu ,  Liotard  ,  piqué  ,  bu  en  fit 
des  reproches  dans  son  ancien  style. 
«  Puisque  vous  êtes  redevenu  vous- 
»  même  ,  mon  cher  Liotard  ,  lui 
»  écrivit  Rousseau  ,  je  m'empresse 
»  de  vous  répondre.  »  Ses  rapports 
avec  Villars  ne  furent  pas  aussi  sa- 
tbfaisants  ;  ce  dernier  lui  eut  beau- 
coup d'obligations ,  et  il  faut  con- 
venir qu'il  ne  lui  rendit  pns  la  justice 
convenable  :  il  en  parle  légèrement 
dans  la  préface  de  V Histoire  des 
plantes  du  Dauphiné  ,  et  le  cite 
rarement  dans  le  cours  de  l'ouvra- 
ge. Un  jardin  botanique  ayant  été 
établi  à  Grenoble  en  ir83 ,  Liotard 
fut  charge  de  sa  culture.  11  passait 


i.ioUnl  )e«  confiait  <)a«1q>i«roit  •  •(•••m*- 
■  ,  «IIfi  tomb^rvnt  Jtug  A:»  BMliu*  iuit4l>i*«, 


LIP 

rhiver  h  meHrern  onlre  ]c%  pbnirs 
recueillies  pendant  IVtc;  il  en  com- 
posait des  colleriions  iwur  In  u- 
vants  de  la  capitale  cl  les  amateurs. 
Il  avait  de  la  rudesse  dans  les  mi« 
nières  ;  mais   il   était   bon  et  obli- 

Seant.  Etranger  h  tout  autre  gnire 
'instruction  qu'à  la  botanique  ,  il 
était  toutefois  susceptible  d'un  grand 
enthousiasme,  quand  il  se  trouvait  au 
milieu  des  scènes  magnifiques  des 
Alpes,  et  il  savait  l'inspirer  à  ses 
compagnons.  Un  décret  de  la  Con- 
vention nationale  lui  accorda  une 
gratification  de  i5oo  fr.  ,  en  1795; 
et  il  mourut  en  avril  1 796  ,  par  la 
chute  d'un  globe  de  pierre  à  la  porte 
de  son  jardin.  M.  Bcrriat  Saint-Prix 
a  donné  une  Notice  historique  sur 
P.  Liotard ,  dans  le  Magas.  encycL, 
4*.  ann.,  11,  5o4.  D — u. 

LIPENIUS  (Martipt),  savant 
bibliographe  allemand  ,  naquit  à 
Gortze  dans  le  Brandebourg, en  1  G3o, 
le  1 1  novembre ,  jour  de  la  fOle  de 
Saint-Martin,  dont  il  reçut  le  nom 
au  baptême.  Après  avoir  fait  5cs 
premières  études  dans  diflercntcj 
écoles  de  la  Marche  et  de  la  Poméra- 
nie,  il  alla,  en  1 65 1, suivre  un  cours 
de  théologie,  à  l'aradcraic  de  VVii- 
temberg  ;  il  y  acquit  en  fort  j^u  de 
temps  l'eslime  des  professeurs,  par 
son  application,  et  par  les  thcM^ 
qu'il  soutint  sur  plusieurs  ques- 
tions de  pliilosophie.  Dès  qu'il  eut 
pris  ses  grades,  on  lui  oftiit  drt 
emplois  assez  avantagei  -  î 

les  refusa  tous ,  voulant  > 
meurer  à  VViltemberj;  potii  riniiier. 
Il  accepta  enfin,  en  l'iîç).  la  plue 
de  co-recteur  du  gymnase  de  Malle, 
et  il  la  remplit  pendant  treize  ans. 
Il  passa  casuite  a  Stettin ,  pour  y  oc» 
cuper  la  double  charge  de  recfenr, 
et  de  professeur  d'i  j^ymnase  Ciro- 
liji;  et  en  1C7O;  il  fut  uoouiié  co- 


544  i^ïP 

recteur   de  Pacademie  de  Lubeck. 
L'excès  du  travail  altéra  sa  saiitë; 
et  il  mourut  en  cette  ville,   e'puisé 
de  fatigues ,  le  6  novembre  i  Ôç)'?.. 
On  a  de  Lipenius,  un  grand  nombre 
de  thèses,  de  programmes,  d'éloges 
funèbres ,  dont  on  trouvera  les  litres 
dans  les  Mémoires  de  Niceron,  tome 
XIX.  Nous  citerons  seulement  :  I.  jVa- 
^Igatio  Saloinonis  Ophiriiica  illus- 
trât a  j'Wiltemhcr^  ou  Halle,  1660, 
in-i2.  Celte  dissertation,  pleine  de 
recherches  curieuses ,  a  été'  insérée 
par  B.  Ugolini,  dans  le  tome  vu  du 
Thesaur.  antiquitat.  hehràlcaruin, 
II.  Integra  Strenarum  cwilium  his~ 
toria  à  prima  origine  ad  nostra  us~ 
que    t empara    deducta,   Leipzig  , 
1670,  in-4".;  insérée  par  Graevius, 
dans  le  tom.  xii  du  Thesaur.  anti- 
quitat.  Bomanar.  Lipenius  a  réuni 
sous  le  titre  de  Strenœ  ecclesiasticœ, 
les  recherches  qu'avaient  publiées  à 
cet  égard  Jacq.  Hessenschmidt  et  Jo- 
seph Stegman,  Leipzig,  1677,  "^■4°« 
L'objet  des  Etrennes  a  été  traité  de- 
puis par  Spon  (  F.  ce  nom  ) ,  et  par 
Je  P.  Tournemine,  dans  une  petite 
dissertation  imprimée  dans  \esMém. 
de  Trévoux  (  janvier  1704  ).  IIL 
jBibliotheca  realis  theologica^  Franc- 
fort, i685,  a  tom.  in-fol.  — juri- 
dica,  ibid.  1679  ,  in-fol.  —  philo- 
sophica,  ibid.  i68'i,  2  tom.  in-fol. 
—  me  die  a  /ûiià,  1679,  in-fol.  Celte 
bibliothèque    est   appellée   Réelle , 
parce  que  les  livres  y  sont  rangés 
dans  l'ordre  alphabétique  des  matiè- 
res^ et  non  sous  celui  des  noms  des 
auteurs  ;  elle  a  du  coûter  des  recher- 
ches immenses ,  et  cependant  elle  est 
très-incomplète  :  on  y  trouve  les  ti- 
tres d'une  foule  d'ouvrages  inconnus 
en  France*  et  les  noms  des  auteurs 
français  y  sont  presque  tous    défi- 
gurés. La  Bibliotheca  philosophica 
jpasse  pour  la  moins  mauvaise  de  ces 


nt 

I 


LIP 

compilations.  La  Bibliotheca  juri- 
dica  a  successivement  reçu  diffé- 
rentes améliora  lions.  (  Foy,  Ieni- 
cnE?f,XXI,  168.)  W— s. 

LÎPPERT  (  Philippe -Damel  ) , 
glyptographe  ,  naquit  à  Dresde  eu 
1703  de  parents  pauvres  ,  et  exerça 
d'abord  la  profession  de  vitrier  :  il 
s'appliqua  ensuite  aux  arts  du  dessin; 
et  ayant  résolu  d'acquérir, à  quelque 
prix  que  ce  fût ,  rinstruclion  dont 
il  sentait  le  besoin  ,  il  étudia  le  gn 
et  le  latin,  et  vint  à  bout  d'apprend 
ces  deux  langues,  en  assez  peu 
temj)s.  Il  fut  nommé  professeur 
dessin  des  pages  de  l'électeur  de  Sax 
roi  de  Pologne  ;  et  cette  place  l'ayan' 
mis  en  rapport  avec  plusieurs  hom- 
mes  en  crédit ,   il  profita  de  leur 
bienveillance  pour  augmenter  la  col- 
lection d'antiques  dont  il  s'occupait 
depuis  longtemps.  Il  était  parvenu, 
en  1753  ,  à  réunir  un  millier  d'em- 
preintes  de  verre   des   plus  belles 
})ierres  gravées  des  différents  cabi- 
nets de  l'Europe.  Il  en  offrit  aux  ama- 
teurs des  copies  d'une  composition  j 
blanche  et  brillante  ,  dont  il  avait  ' 
trouvé  le  secret ,  et  en  publia  le  ca- 
talogue sous  ce  litre  :  Gemmamm 
anaglyphicarum  et  diagljphicamml 
ex  prœcipuis  Europœ  musœis  seU 
tarum  ectfpa  M.  ex  vitro  obsidiar 
et  massd  quddam,  studio  P.  D.  Li 
pert  fusa  et  efficta,  Dresde,  ï7r 
in-4^.    Ce  catalogue  divisé  en  deux] 
parties,  l'une  pour  les  pierres  my-j 
thologiques,  l'autre  pour  les  pierres  | 
historiques,  est  imprimé  sur  quatre, 
colonnes  ,  lesquelles    indiquent    le 
sujet ,  la    qualité  de  la   pierre,  le 
possesseur  actuel ,  ^t  enfin  l'auteur i 
ou  l'ouvrage  qui  en  a  traité.  Lipperti 
se  trouva  bientôt  en  état  d'offrir  aux  | 
amateurs  un  second  millier  de  sesj 
empreintes.  La  publication  du  pre- 
mier l'avait  fait  connaître  de  plu- 


LIP 

jtieurs  antiquaires  ;  et  Jean-Frëd. 
Clirist,  professeur  des  beaux-arts  à 
I.cip/.ig  ,  lui  olîril  de  rédiger  ses  ca- 
talogues. Christ  publia  donc  une  nou- 
velle description  du  premier  millier, 
qui    fut   intitulée  :    Dactjliotftecœ 
un'n'ersalis    chilias   sive    scrinium 
liarium  primum ,  etc. ,  Leipzig , 
)  "»  ,  in-4°.  La   seconde   chiliade 
ut  eu  1756  ;  et  Christ  e'iant  mort 
la  même  année  (  Voyez  J.    Fred. 
!  Cbrist  ) ,  Lippert  la  fit  suivre  en 
17G3 ,    d'une   troisième,   dont    le 
catalogue  explicatif  fut  rédige  par 
le  célèbre  Heyne.   Lippert    forma  , 
bientôt  après  ,    le   projet   de   faire 
lui-même    uu  choix  dans    sa   col- 
lection ,   afin   de    procurer  aux  ar- 
tistes et  aux  savants  un  moyen  facile 
*^   peu  dispendieux    de   s'instruire 
I    l'étude  des  restes  précieux  de 
i  .tiitiquitéj  il  accompagna  ce  choix 
d'une   explication   en   langue  alle- 
mande ,  sous  ce  titre  :  Dactyliothè- 
que,  ou  Collection  de  deux  mille  em- 
preintes de  pierres  gavées  antiques  y 
etc. ,  Leipzig  ,  1 767 ,  in-4°.  La  pré- 
face de  ce  recueil  contient  des  re- 
marques excellentes  sur  les  arts  du 
sin  et  de  la  gravure,  et  tout  l'ou- 
r  ige  en  est  parsemé  :  chaque  ex- 
plication ,  exacte  ,  claire  et  précise , 
est  appuyée  de  citations  des  auteurs 
grecs  et  latins.  Oberlin  regrettait  que 
'  '  livre ,  vraiment  classique ,  n'eût 
>  été  répandu  par  des  traductions 
d'autres  langues  ,  et  surtout   en 
•  nçais.   Encouragé  par  les  éloges 
ûounés  à  son  ouvrage,  Lippert  con- 
tinua de  recueillir  de  nouvelles  era- 
'  In  tes  ;   et  les  amateurs   les  plus 
lingues  ,  les  princes  eux-mêmes  , 
tnpressèrent  à  Tenvi  de  lui  pro- 
irer  tout  ce  qu'ils  possédaient  de 
plus  parfait  en  ce    genre.  Lippert 
fît  un  choix  dans  ces  divers  objets  , 
le  publia  sous  le  titrt  à%  Sup- 


LIP  545 

pUinent  à  Ut  Dactjrliothèqnê ,  etc. 
(en  allemand),  Lripiig  ,  1-76, 
in-4*'.  Une  attaque  d'apoplexie  l'en- 
leva ,  à  Dresde,  le  iH  mars  178J,  k 
l'âge  de  8'i  ans.  Il  laissa  une  fille, 
qtii  continua  son  commerce  d'em- 
preintes. Outre  les  difTcrentcs  coller, 
lions  déjà  citées,  on  a  deLippri 
des  empreintes  de  plusieurs  suiIca  de 
médailles  ,  entre  autres  de  celles  de 
V  Histoire  Romaine  et  de  {'Histoire 
de  France  ,  par  les  Dassier ,  père  et 
fds,  de  VOEuvreàu  chevalier  Hed- 
linger,  etc.  C'était  un  homme  d'un 
caractère  vif,  mais  modeste,  bon, 
franc  et  loyal  ;  il  entretenait  une 
correspondance  suivie  avec  plusieurs 
savants,  parmi  lesquels  on  se  conten- 
tera de  citer  Oberlin  ,  qui  a  publie' 
une  .Vo/ice  intéressante  sur  sa  uacty- 
lioihhque  dans  le  Magasin  encyclo- 
pédique ^àcu-Lieme  année^an  v,  1 706), 
tom.  IV ,  p.  61  et  suiv.       W — s. 

LIPPI  (  Fra-Filippo  )  ,  peintre  , 
naquit  à  Florence  vers  Tan  14»^  : 
resté  orphelin  dès  l'âge  de  deux  ans, 
il  fut  recueilli ,  comme  par  charité  , 
chez  les  Carmes  de  Florence.  Ma- 
saccio  venait  de  terminer  la  chapelle 
de  ce  couvent.  Le  jeune  Lippi ,  sé- 
duit par  la  beauté  de  cette  pemture  , 
venait  chaque  jour  la  contempler;  et 
encouragé  par  les  bontés  du  prieur , 
il  se  joignit  aux  nombreux  jeunet 
cens  qui  venaient  la  copier  :  en  pc» 
de  temps  ,  il  surpassa  tous  ses 
émules,  et  sut  tellement  s'approprier 
la  manière  de  Masaccio,  qu'on  le 
regardait ,  universellement ,  comme 
le  successeur  cl  le  rival  de  ce 
maître.  Encouragé  par  ses  succès  , 
Lippi ,  qui  n'était  encore  que  norice, 
résolut  d'abandonner  son  couvent  et 
de  rentrer  daas  le  monde  ;  il  a%ait 
alors  dix-sept  ans  :  mais  il  fut  sur 
le  point  d'être  perdu  pour  les  «rtt. 
Uo  jour  que  ,  monté  sur  un  bateau 
35 


546 


LIP 


avec  plusieurs  de  ses  amis ,  il  s'était 
trop  avance' en  mer  ,  il  fut  pris  par  des 
corsaires  barbarcsques  et  conduit  en 
Africpie,  où  il  devint  esclave,  et  tomba 
en  partage  à  un  maître  qui  le  traitait 
avec  quelque  douceur  :  il  lui  prit  fan- 
taisie d'en  faire  le  portrait,  et;,  saisis- 
sant le  moment  où  cet  homme  était 
absent ,  il  le  dessina  au  charbon  sur 
un  mur  qui  venait  d'être  blanchi. 
Les  autres  esclaves  ,  e'merveilles  de 
cet  ouvrage  ,  car  la  peinture  e'tait 
ignorée  dans  ce  pays  ,  coururent  en 
instruire  leur  maître,  qui ,  charmé  à 
son  tour  du  talent  de  son  esclave,  lui 
accorda  la  liberté  dont  il  était  privé 
depuis  dix-huit  mois  :  Lippi,  recon- 
naissant d'un  tel  bienfait  ,  com- 
posa encore  quelques  tableaux  pour 
son  maître ,  qui  le  fît  conduire  en 
sûreté  à  Naples.  Arrivé  dans  cette 
ville  ,  il  peignit  un  tableau  en  dé- 
trempe dans  la  chapelle  du  châ- 
teau (  I  ),et  résolut  alors  de  retourner 
à  Florence,  où  il  fit ,  pour  le  maître- 
autel  de  l'église  de  Saint-Ambroise  , 
le  Couronnement  de  la  Kierge , 
belle  composition  enrichie  d'un  grand 
nombre  de  figures  :  l'auteur  s'y  est  re- 
présenté sous  le  personnage  d'un  ado- 
rateur- devant  lui  est  un  agneau  sou- 
tenant celte  inscription  :  Is  perfecit 
opus.  Ce  tableau  frappa  tellement 
Cosme  de  Médicis ,  qu'il  conçut  pour 
Lippi  une  estime  et  une  amitié  dont 
il  ne  cessa  de  lui  donner  des  preuves. 
Extrêmement  adonné  aux  femmes  , 
rien  ne  pouvait  retenir  Li^ipi  lorsque 
sa  passion  l'entraînait.  Cosme  lui 
avait  ordonné  un  ouvrage  :  craignant 
qu'il  n'en  fût  détourné  par  son  pen- 
chant ordinaire  ,  il  prit  le  parti  de 
l'enfermer  ,  et  le  peintre  resta  deux 
jours  privé  de  sa  liberté  ;  mais  nepou- 

(l)  Vaiari  dit  qiia  ce  fut  à  la  demaiule  du  roi 
Alphon»elu  Magnanime  ,  alors  duc  de  Calabre  , 
que  Lifpit;nuci.m  cetabla»»,  r«t«  raaaa*  «4^4. 


Tant  plus  résister  à  ses  habitudes ,  il  | 
déchira  en  lambeaux  les  draps  de  soa 
lit,  et  les  ayant  attachés  à  la  fenêtre,  il  I 
descendit  dans  la  rue,  au  risque  de  se  | 
tuer.  Cosme  ne  le  trouvant  plus,  le  fit 
chercher  partout ,  et  l'ayant  enfin 
ramené  au  travail ,  prit  le  parti  de 
lui  laisser  désormais  toute  sa  hberte'. 
Lippi  avait  été  chargé  par  les  reli- 
gieuses de  Sainte  -  Marguerite  de 
Prato  ,  près  Florence  ,  de  peind 
le  maître -autel  de  leur  éehse  ;  pe 
dant  qu  il  était  occupe  a  cet  ouvragi 
il  aperçut  la  fille  d'un  nommé  Bu 
de  Florence  ,  que  l'on  amenait  a 
couvent  pour  y  faire  profession  ;  la 
beauté  de  Lucrèce ,  c'était  le  nom 
la  jeune  fille ,  le  frappa  tellemeu 
qu'il  ne  cessa  de  solliciter  les  reli- 
gieuses jusqu'à  ce  qu'il  eût  obtenu 
de  pouvoir  la  peindre  sous  les  traits 
de  la  Vierge  qu'il  faisait  pour  leur 
monastère  :  son  amour  ne  fit  qu'aug- 
menter; il  sut  le  faire  partager  à 
Lucrèce  ,  et ,  il  l'enleva.  Obligés  de 
prendre  la  fruité ,  les  deux  amants 
errèrent  long-temps  en  Italie  ;  et  ce 
ne  fut  qu'après  plusieurs  années  de 
continuelles  alarmes  ,  qu'ils  obtin 
rent  une  dispense  du  pape  po 
s'épouser  :  mais,  par  une  suite 
l'inconstance  déplorable  de  son 
ractère,  Lippi  déclara  alors  qu 
renonçait  au  mariage  ;  et  Lucr 
s'estima  fort  heureuse  de  pouvo: 
retourner  dans  son  couvent.  Il  était 
né  de  cette  intrigue  un  fils  ,  que  Lip- 
pi nomma  comme  lui.  Cependant  la 
père  delà  jeune  personne  ne  put  ja- 
mais pardonner  au  peintre  l'injure 
qu'i  len  avait  reçue,  et,  pour  se  ven- 
ger, on  prétend  qu'il  l'empoisonna; 
d'autres  disent  que  Lippi  fut  victime 
d'une  nouvelle  aventure  que  lui  fit 
tenter  le  dérèglement  de  ses  mœurs. 
Il  avait  alors  cinquante-  sept  ans  , 
et  il  e'tait  occupé  à  peindre  la  tha- 


lie    du    (lomc    (le  Notre -ï)amc 
tic  Spolete  ,  conjointrincnl  aver  Frà 
T)i.nuaiite,  carme  avec  lp(|iiel  il  av.nt 
clevc,  et  auquel  ,  il  avait  inspire 
..    goût   de  la    peinture.   La   mort 
l'empccha  de  terminer  cet  ouvrage. 
I  Parmi  les   productions  de  cet  ar- 
tiste ,  on  doit  remarquer  deux  An- 
na atioiis    qu'il   (it  ,    l'une    pour 
:lise  de  Sainte-Marie  Primerano  , 
a  t  iesole ,  et  l'autre  pour   les  reli- 
gieuses dellc  Muratc,  que  l'on  y  voit 
encore   de   nos  jours  ,  et  dont  les 
figures  ont  quelque  chose  de  céleste. 
Marsuppini,  poète  illustre,  et   se- 
crétaire de  la  république  de  Floren- 
ce ,  ayant  demandé  un  tableau  pour 
la   chapelle  de   Saint  -  Bernard  de 
Monte  -  Oliveto  ,    l'artiste    peignit 
im   Couronnement  de  la   Fierté  , 
d'une  composition  riche  et  variée  , 
ou   il  a  introduit   le    portrait    de 
Marsuppiui ,  et  qui  est  placé  aujour- 
d'hui dans  le  réfectoire  du  couvent. 
11  est  peint  avec  tant   de  vigueur, 
'  d'éclat   et  de  franchise ,  qu'il  sem- 
ble encore   sorti  récemment  de  la 
main  du  peintre.  Lippi  a  aussi  en- 
richi de  ses  productions  les  églises 
de  Padoue ,  de  Spolète  ,  de  Florence 
et  des  environs  de  cette  ville.  Les 
intures  qu'il  exécuta  pour  la  cure 
Prato,  sont  dignes  des  plus  grands 
>ges  ;  on  y  distingue  surtout  une 
il  te  de  tableaux  tirés  de  la   Fie  de 
lint  Etienne,  dont  les  airs  de  tête  , 
rssion  ,  la  couleur  et  les  dra- 
étonnent  pour  le  temps  où  ces 
Lilcaux  ont  été  peints.  C'est  Lippi 
li,  le  premier,  en  introduisant  la 
anière   de  peindre  les  figures  plus 
andes   que   nature  ,    agrandit   en 
icme  temps  le  style  de  la  peinture, 
f   ouvrit  ainsi  la  route  dans  laquelle 
s  artistes,  venus  après  lui ,  se  sont 
illustrés.  Il  serait  trop  long  d'entrer 
dans  le  détail  de  tous  ses  auUes  la- 


Weaitx  :  on  ritrrn  ^mlrmrnt  nnr  5fi»- 
donr  'r 

IVgl,.  ... 
et  qui  tait  partie  du  Musée  du  Loit* 
vre  ;  Vasariet  Horghini  en  font  le  phM 
grand  éloge.  Le  Musée  du  Louvre 
possède  un  tableau  du  m<^mc  artiste  , 
peint  sur  bois  ,  et  placé  dans  la  ga- 
lerie d'Apollon:  il  représente  IcSl.- 
Esprit  présidant  à  la  naissance  i!<r 
Jésus-Christ»  Lippi ,  n'avant  jamais 
eu  d'autre  maître  que  lui  -  même  et 
d'autre  guide  (jue  quelques  ouvra'»cf 
de  Masaccio  ,  s'est  fait  une  maiurr» 
quiluiestprojv      ^  ru» 

grâce  et  uneliiK  nt 

pas  la  beauté.  Son  coloris  est  frais 
et  plein  d'éclat  :  dans  ses  draj>eries,  il 
adopte  des  plis   qui  tiennent  encore 
de  la  roideur  de  l'enfance  de  l'art , 
mais  qui  ne  laissent  pas  d'accuser  le 
nu.  Le  défaut  de  preraicrcs  études 
se  fait  surtout  sentir  dans  les  extré- 
mités ;  les  mains  de  ses  j>crsoiinage« 
sont  rarement  dessinées  d'une  ma- 
nière heureuse  :  aussi  prit-il  le  parti 
de  les  dérober  assez  généralement  k 
la  vue  ,  sous  les  vêtements  de  s<»s 
ligures.  Quoiqu'il  ait  donné  plus  de 
grandiose  à  ses  compositions  dans 
ses  tableaux  d'histoire  et  dans  ses 
fresques ,  c'est  surtout  dans  les  suiels 
de    petite   proportion  ,   qu'il    s  est 
surpassé.  CetartistemouruteR  i^^Oî 
les  habitants  de  Spolète  le  fir«it  en- 
terrer dans  l'église  qu'il  avait  ornée 
de  ses  ouvrages.  Sa  mort  fut  très-sen- 
sible à  Cosme  de  Médiris;  et  l^urent 
le  Magnifique  ayant  été  nomme,  à 
cette  époque,  ambassadeur  de  Flo- 
rence auprès  du  pape ,  vint  à  Spo- 
lète pour  demanîler  qu'on   lui  ac- 
cordât lecori      ■    T  '  '  \o*- 
lait  faire  inh  àm 
Sainte-Marie  dcl  liorc,  a  Florence. 
Cette  demande  lui  fut  refusa;  et 
Laurent  lui  fit  élever  un  toi 
35.. 


548 


LIP 


en  marbre,  sur  lequel  fut  gravée 
une  ëpitaphe  par  Ange  Politien. 
—  Filippino  ou  Filippo  Lippi  , 
$0n  fils  ,  naquit  à  Florence  en 
i46o  :  Lippi  père,  en  mourant, 
l'avait,  par  son  testament,  confie' 
aux  soins  de  Frà  Diamante,  son 
condisciple  et  son  ami  ;  il  lui  avait 
laisse  en  outre  une  somme  de  trois 
cents  ducats  d'or  pour  acheter  une 
petite  propriété'  au  jeune  Filippo 
à  peine  âge'  de  dix  ans.  Frà  Dia- 
mante,loin  de  répondreà  la  confiance 
de  sou  ami ,  acheta  bien  une  terre 
dans  les  environs  de  Florence,  mais 
la  garda  pour  lui.  Alors  Sandro  Botti- 
celii ,  peintre  renommé  qui  avait  ete 
lié  avec  Lippi  le  père ,  eut  pitié  du 
fils,  et  voulut  lui  enseigner  la  pein- 
ture. Lippi  ne  tarda  pas  à  manifes- 
ter les  dispositions  les  plus  extraor- 
dinaires. Quoique  doué  d'une  imagi- 
nation extraordinairement  vive  et 
féconde  ,  il  fut  le  premier  parmi  les 
peintres  modernes  qui  ramena  dans 
ses  tableaux,  l'exactitude  des  cos- 
tumes ,  des  usages  et  des  ornements, 
ïl  avait  appris  la  science  des  antiqui- 
tés, à  Rome,  en  étudiant  les  monu- 
ments que  renferme  cette  ville.  Il 
dessinait  lout  avec  la  plus  grande 
exactitude  ;  et  il  avait  formé  de  cette 
manière  deux  recueils  d'antiquités 
romaines  exécutées  avec  un  rare  ta- 
lent ,  et  que  Benvenuto  Cellini ,  qui 
les  avait  vus  dans  la  maison  d'un 
des  fds  de  Philippe ,  ne  pouvait  se 
lasser  d'admirer.  Lippi  était  encore 
très-jeune  lorsqu'il  fut  chargé  de 
terminer  la  chapelle  des  Bran- 
cacci,  chez  les  Carmes  de  Florence  ; 
il  peignit  encore  Saint  Pierre  et 
Saint  Paul  ressuscitant  le  neveu 
de  Vempermir,  et  y  fit  entrer  les 
portraits  des  hommes  les  plus  cé- 
lèbres de  son  temps,  tels  que  Tho- 
mas Sadenni,  Pierre  Guicciardiiii , 


LIP 

père  de  l'historien,  le  Pulci,  poète, 
Antoine  Pollajuolo ,  Sandro  Bolticel- 
li ,  son  maître  ,  le  Baggio  (i) ,  etc. 
Il  s'est  aussi  représenté  dans  ce  la  - 
bleau;  et  son  portrait  ne  se  trouve 
même  que  là.  Il  avait  peint,  dans  uu 
couvent  près  de  Florence ,  un  ta- 
bleau représentant  :  La  Fierge  en- 
tourée (V  Anges  apparaissant  à  saint 
Bernard  qui  écrit  dans  un  bois.  Lor» 
du  siège  de  Florence,  les  habitan 
de  cette  ville  firent  transporter 
tableau  dans  leurs  murs  ;  et  il  or 
ne  encore  aujourd'hui  l'une  d 
chapelles  de  l'abbaye  de  Florence 
il  passe  pour  un  des  plus  précieu 
que  renferme  celte  ville ,  et  il  est 
de  la  conservation  la  plus  parfaite. 
Les  ouvrages  de  Fiiippo  Lippi 
avaient  tellement  étendu  sa  réputa- 
tion, que  le  roi  de  Hongrie,  Ma- 
thiasCorvin,  voulut  l'attirer  dans  ses 
états  :  l'artiste  ne  \)\\t  se  résoudre  à 
quitter  sa  patrie  ;  mais  il  fit  pour  1« 
roi  deux  très-beaux  tableaux  qui  lui 
furent  envoyés.  Bientôt ,  à  la  prière 
de  Laurent  le  Magnifique ,  il  se  ren- 
dit à  Rome ,  et  y  peignit ,  dans  l'é- 
glise de  la  Minerve ,  pour  le  cardinal, 
Garaffa ,  une  chapelle  où  il  repré-^ 
senta  la  Fie  de  saint  Thomas  d'A- 
quin.  Ces  peintures  qui  ont  le  mérit 
de  l'invention  etdel'exécution ,  ayan 
souffert  par  l'injure  du  temps,  furen 
retouchées  par  unartiste  ignorant  qui 
lésa  gâtées.  Après  plusieurs  absences, 
Lippi  se  fixa  à  Florence,  où  il  peignit 
la  chapelle  des  Strozzi.  Cette  pein- 
ture est  de  la  conservation  la  plus 
parfaite,  et  le  talent  de  l'artiste  y 
brille  de  tout  son  éclat.  La  variété  et 


(i)  lie  Rftggio  est  connu  pour  avoir  sculpté  ea 
relief  ,  »ur  une  coquille  ,  tous  les  cercles  et  lc« 
(tirisions  de  l'£nfer  du  Dante,  conformément  A 
la  description  qu'en  fait  le  poète.  Il  y  avait  ri" 
présenté  dans  le  plus  grand  détail  les  divers  siip' 
plices  imaginés  par  le  poète;  et  cet  OHvrag*  pa»* 
sait  pour  uu«  m«i  veiiiu  de  l'art. 


xM\ 


LIP 

If  naturel  des  expressions  ,  la  grâce 
'il  dessin,  IVdat  du  coloris,  tout  y 
>t   également  remarquable.  Parmi 
A  nombreux  ouvrages  que  l'on  doit 
irore  à  Lipni ,  on  se  contentera  de 
i  itcr  un  double  tableau  peint  surbois, 
qu'il  avait  fait  pour  l'eglisc  suppri 
mec  de  Sainl-Thcodore,  à  (icnes. 
Le  premier  compartiment ,  de  forme 
ntréc,  représente  La  Vierge  of- 
(int  l'Enfant  Jésus  à  l'adoration 
'•  deux  An^es;  le  second,  Saint 
Sébastien  y  nu,  percé  de  jlèches  et 
attaché  à  une  colonne  au  milieu  de 
-'lines  désertes.  Ce  tableau  ,  dont 
isari   fait   un    éloge  mérité,    fut 
pnicvé  du   Musée  du   Louvre  ,  en 
i8i5,  par  les  commissaires  du  roi 
de    Sardaigne.    Lippi    ne   peignait 
pas  moins  bien  le   paysage;  mais 
c'est  dans  les  sujets   de  petite  di- 
mension qu'il  était  supérieur.  Fidèle 
imitateur  de  la  nature ,  il  laisse  dési- 
rer dans  ses  ouvrages  un  choix  de  for- 
rs  plus  relevé;  et  son  père  l'em- 
iiorte  sur  lui  par  l'idéal  et  la  grâce. 
Il  mourut  à  Florence,  le   i3  avril 
i5o5,   âgé   de  4^  ans.    Lorsqu'il 
fut  conduit  au  lieu  de  sa  sépulture, 
toutes  les  boutiques  furent  fermées 
dans  les  rues  oîi  passa  le  convoi ,  en 
signe  de    deuil,    et    comme  si    la 
république    eût   perdu   un    de  ses 
premiers  magistrats.  Lippi  eut  plu- 
sieurs disciples  dont  le  seul  qui  se 
soit   rendu    célèbre  est  RafTaellino 
del  Garbo.  —  Jacques  Lippi  ,  élc- 
▼e   de  Louis  Carra che  né  à   Bu  - 
drio,  château  voisin  de  Bologne, 
dans  le  seizième  siècle  ,  reçut   du 
lieu  de  sa  naissance  le  surnom  de 
Giacomone  da  Budrio.  11  cultiva 
tous   les  genres  de  peinture;  mais 
ce  fut  surtout  dans  les  fresques  du 
portique  de  TAnnonciade  ,   à   Bo- 
logne ,  qu'il  se  montra  digne  de  son 
naître.   Ce^iendant,   on   reconnaît 


dans  cet  omrrage  rbabiiude  d'un* 
grande  pratique  plutôt  qu'un  go^f 

sûr  et  uu  véritable  Calent.       P %, 

LIPPI  (  LoREifzo  ) .  peintre  et 
jioctc  célèbre ,  naquit  i  Florenre.en 
1606.  Sa  jeunesse  fut  consacrée  aux 
belles-lettres  ,  dans  lesquelles  il  fit 
des  progrès  extraordinaires.  Il  réus- 
sit également  dans  tous  les  exercices 
du  corps ,  tels  que  Tescrime,  la  danse 
et  le  manège.  Mais  après  avoir  ter- 
miné ses  études  ,  il  ne  put  rc:&ister 
au  i)enchant  qui  rentrainair  vers  U 
peinture ,  et  se  mit  sous  la  direction 
de  Mathieu  Hoselli.  Il  surpassa  bica- 
tôt  tous  ses  condisciples  ;  et  les  des- 
sins qu'il  exécuta  dcs-lors  méritent 
d*élrc  comparés  à  ceux  des  plus  habi- 
les maîtres.  S'il  ne  s'était  pas  attache' 
à  une  imitation  trop  ex.  cv  et  trop 
minutieuse  de  la  nature,  s'il  avait  un 
peu  plus  recherché  l'idéal ,  il  aurait 
occupé   paruii   les  grands   |)einties 
le  m(^ine  rang  qu'il  tient  parmi  le& 
dessinateurs.    Santi   di-Tito    fut  It 
modèle  qu'il  se  proposa.  Il  joignit  à 
l'habileté  dans  l'expression  ,  et  à  U 
pureté  de  dessin  de  ce  maître ,  un 
coloris  un  peu  plus  vigoureux;  et , 
dans  l'imitation  des   draperies,    il 
suivit  l'exemple  de  quelques  artis- 
tes lombards,  et  particulièrement  d« 
Baroche  ,  en  modelant  les  plis  avee 
du  papier ,  ce  qui  tev  doMM  ua  air 
de  carton  ;  mais  U  fincwt  da  taa 
inceau,  le  ton  vaporeux,  raccord  #1 
e  })on  goût  qui  régnent  dans  ses  ou- 
vrages ,  démontrent  a^ez  qu'il  avait 
le  sentiment  du  beau  à  nu  aussi  haut 
degré  qu'aucun   de  ses  contempo- 
rains. Roselli ,  son  maître,  fui  disait 
souvent:  fAturent ,  tu  dessines  mieux 
que  moi.  Il  lui  confu  l'exécution  do 
deux  tableaux  qui  lui  atlisBC  éttf 
demandés  pour  l'église  de  St-BC- 
cheUlegli-Anlcnori.  L'un  représente 
Vjénnoncialion  ;  Vêvln  U  FùU^ 


l 


5.5o 


TA? 


iion.  Tous  deux  sont  remarquables 
par  la  beauté  du  dessin ,  quoiqu'assez 
faiblement  colories.  Il  fit  encore  un 
grand  nombre  de  tableaux  pour  les 
églises  elles  particuliers  de  Florence. 
Un  des  plus  considérables  est  le  beau 
Saint-André j  qu'il  peignit  en  1689, 
pour  la  chapelle  degli  Eschini  à  San 
Friano.  Ce  fut  quelques  années  après 
qu'il  épousa  la  fille  de  Jean-François 
Susini ,  sculpteur  et  fondeur  habile. 
11  fut  alors  appelé  auprès  de  la  prin- 
cesse Claude,  archiduchesse  de  Ba- 
vière, qui  le  reçut  avec  une  extrême 
bienveillance  etFadmit  dans  son  inti- 
mité. San  esprit  facétieux  amusait  la 
princesse  ,  à  laquelle  il  lisait  la  pre- 
mière esquisse  de  son  poème  du  Mal- 
manlile racquistato ,  dont  le  titre,  à 
cette  époque  ,  était  :  Histoire  des 
Deux  Reines,  Il  profita  duloisir  dont 
il  jouissait  à  la  cour,  pour  terminer 
cet  ouvrage  ,  et  le  dédia  à  l'archidu- 
chesse.   Cette  princesse  étant  morte 
RU  bout  de  six  mois,  lippi  se  hâta 
^e  retourner  à  Florence,  et  reprit 
$es  travaux  avec  une  nouvelle  ar- 
deur. Parmi  les  nombreux  tableaux 
qu'il  exécuta ,   on  cite  un  Crucifix 
entouré  de  la  Fierge,  de  la  Ma- 
deUme  et    de   saint   Jean  ,  qu'il 
donna,  en  1647  >  ^  ^^  confrérie  de 
de  l'Archange  Raphaël ,  dont  il  était 
membre,  et  un  Martyre  de  saint 
Sébastien  ,  dont  l'expression  et  la 
composition  étaient  de  la  plus  grande 
beauté.  Mais  celui  de  ses  ouvrages 
qui  jouit  de  la  plus  grande  réputation 
est  le  Triomphe  de  David ,  qu'il  pei- 
gnit pour  Ange  Galli,  florentin.  Celui- 
ci  voulut  que  le  peintix;  représentât 
son  fds  aîné  sous  la  figure  de  David, 
et  seize  autres  de   ses  enfants  sous 
les  traits  des  jeunes  gens  et  des  jeunes 
filles  qui  viennent  féliciter  le  libérar 
teur  d'ïsraèl.  Lippi ,  dans  ce  tableau , 
put  se  U  vrer  à  sou  çare  talent  pour  Iç 


y 

it  ' 
ia 

I 


portrait,  et  y  mettre  celte  simplicité' 
de  style  toujours  voisine  de  la  na- 
ture, et  qui  dédaigne  les  embellisse- 
ments de  l'art  ;  il  avait  pour  maxime 
qu'il  faut  faire  les  vers  comme  on  par- 
le, et  peindre  comme  on  voit.  Parvenu 
a  l'âge  de  58  ans  ,  Lippi  fut  attaqué 
d'une  pleurésie,  qui  le  conduisit  au 
tombeau, en  1664.  Son  portrait,  peint 
,'par  lui-même  ,  se  voit  dans  la  ga 
lerie  de  Florence;  il  a  servi  demodèl 
à  tous  ceux  qui  se  trouvent  en  têt 
du  poème  de  cet  artiste.  Lippi  avait 
reçu  delà  nature  un  esprit  vif  et  plein 
d'originalité.  AlphonseParis  ,célèb 
architecte ,  son  parent ,  avait  uni 
maison  de  campagne  près  de  Fi 
rence  ,  et  à  un  mille  d'un  ancien  châ 
teau  ruiné,  nommé  Malmantile.  La 
vue  de  ces  débris  fournit  à  Lippi  l'i- 
dée de  son  poème.  Il  en  fait  la  capi- 
tale d'un  royaume  ,  dont  la  reine  est 
détrônée   par   une    courtisane    de 
Florence.  La  guerre  qui  éclate  pour 
remettre  sur  le  troue  la   légitime 
souveraine,  forme  le  fonds  de  l'ou- 
vrage. L'auteur  y  fait  entrer  plu- 
sieurs traditions  populaires  qu'il  con- 
te avec  une  grâce  singulière  dans  l'i 
diome  florentin  le  plus  pur.  Mais  0 
que  les  italiens  prisent  davantage  en 
coredansce  poème,  c'est  l'originali 
delà  composition, la  variété  des  ép 
sodés ,  le  sel  des  plaisanteries  et  1 
facilité  de  la  versilication.  On  y  ad 
mire  surtout  une  description  de  l'En- 
fer ,  qui  passe  pour  un  chef-d'œuvre 
de  comique  et  de  plaisanterie.    Le 
seul  reproche  qu'on  puisse  faire  à 
Fauteur,  est  d'avoir  employé  un  dia- 
lecte dont  les  italiens  eux-mêmes  n'enr 
tendent  pas  toutes  les  finesses.  Il  re- 
çut les  conseils  et  les  encouragement* 
d'Antoine  Malatesta,  poète  estimé;  el; 
Salvator  Rosa  ne  lui  fut  pas  moins 
utile,  enluifaisant  connaître  unliyrç 
intitulé  ;  Lo  Cunto  dç  li  Cunte  o 


LIP 

Trattenimenti  de  U  PiccerelU;  ou- 
vrage cil  dialecte  napolitain  ,  d*où 
Jjppi  lira  plusieurs  do  ses  épiso- 
des. Cet  ouvrage  ne  fut  imprime 
qu'après  sa  mort.  Voici  Tindicalion 
des  principales  éditions  :  //  Mal- 
'  mantile  racqidstato  ,  pnema  di 
Pierlone  Zipoli  (  Lorcnzo  Lippi  ) , 
con  note  di  Puccio  Lamoni  (  Paolo 
Minucci  ) ,  Florence,  1G7G  ,  in-4°. 

—  con  note  del  Lamoni  ed  altri  , 
ihiilem,  1G88,  in-4*''  —  f^gg^"^- 
*'  t'/  le  note  del  Salvini  e  Biscioni , 

idem,  1731,  1  vol.  in-4**. — 
c  olle  note  di  varj  ,  scelte  da 
Luigi  Porlirelli,  Milan ,  édition  des 
classiques   italiens  ,    i   vol.  in  -  8". 

—  La  nouvelle  édition  de  Prato , 
1814,  4  vol.in-4°.,  est  la  plus  com- 
plèle.  —  Un   autre   Laurent  Lippi 

îluisit  du  grec  en  latin  les  livres 
'  )ppien  de  Piscatu  et  de  Fena- 
le ,  Venise ,  Aide ,  1 5 1 7  ,  in-80, , 
Paris,  Morel,  i555,  in-4*'.  P-s. 
LIPPOMANI  (  Louis  ),  l'un  des 
^lus  savants  prélats  du  seizième  siè- 
cle, naquit  à  Venise ,  vers  Tan  1 5oo, 
d'une  ancienne  famille.  Il  s'appliqua 
de  bonne  heure  à  l'étude  des  lettres 
et  de  la  philosophie,  et  y  fit  de  grands 
progrès.  Ayant  embrassé  l'état  ec- 
clésiastique, son  seul  mérite  lui  ou- 
Trit  le  chemin  des  honneurs  ;  il  fut 
pourvu  successivement  des  évêchés 
de  Modon ,  de  Vérone  et  enfin  de 
Bcrgarae.  Sa  capacité  et  son  expé- 
rience des  affaires  le  firent  charger 
de  différentes  négociations  en  Portu- 
gal ,  en  Allemagne  (  1 548) ,  en  Polo- 
gne (  1 558) ,  et  il  s'acquitta  de  toutes 
avec  beaucoup  d'habileté.  Il  fut  l'un 
des  trois  prélats  chargés  de  présider 
le  concile  de  Trente,  et  il  se  montra 
dans  cette  assemblée  l'un  des  plus 
éloquents  défenseurs  de  la  foi  chré- 
tienne. U  devint,  en  1 556,  secrétaire 
de  Jules  III  j  et  mourut  à  Rome  le  i5 


aoAt  1 559.  De  Thou  dit  que  ce  prdâC 
a  fut  illustre  par  m  doctrine  et  par 
y>  riHnoccncc  de  m  vi#».  ■  On  lui  a  ce- 
pendant rcprochcl»  -  vrrMÏve 
dont  il  usa  envers  I  :  les  hé- 
rétiques pendant  sa  nouti.tturc  de 
Pologne.  Ses  ouvrages  les  plus  con- 
nus sont  :  I.  Dos  Commentaires  en 
latin  sur  la  Genèse ,  l'Exode  et  les 
psaumes:  il  y  étale  une  grande  éru- 
dition, mais  il  manque  de  critique 
et  de  méthode.  II.  FitteSanctoium, 
Venise,  i55i-58,  6  vol.  in-4°.  Lci 
deux  derniers  volumes  contiennent 
la  traduction  latine  des  Vies  des 
Saints  écrites  par  Siméon  Méta- 
phraste  (/''o/ffz  Métapiiraste}.!!!. 
Espositione  soprà  il  Simbolo  apos* 
tolico ,  il  Pâtre  wistro,  e  sopra  iduë 
precelti  délia  carità ,  Venise ,  1 554 , 
in-8«.  IV.  Des  Statuts  synodaux, 
des  Sermons  pour  les  fêtes  dts 
Saints ,  etc.  Tous  ces  ouvrages  sont 
rares ,  mais  peu  recherchés.  Maflci  a 
consacré  un  article  à  Lippomanidans 
sa  Ferona  illustrata ,  part.  2,  pag. 
i35.                    L-B-E.  et  W — s. 

LÎPSE  (Juste),  célèbre  philo- 
logue et  savant  polygraphe ,  naquit 
à  Isque  (  Overyssche  ) ,  village  k 
égale  distance  de  Bruxelles  et  de 
Louvain ,  le  18  octobre  i547*  Ses 
admirateurs  enthousiastes  ont  en- 
vironné son  berceau  de  présaçrs  et 
de  prodiges,  à  régal  de  celui  des 
héros  et  des  sages  dcr  antiquité  (/'or. 
BaïWct  y  Jugem.  des  sav.  ,  tom.  v  de 
l'éd.  in-40.,  pàg.  58  }.  Des  Tige  de 
six  ans  il  fut  mis  a  l'étude  du  latiA 
à  Bruxelles  ;  à  dix  ans  au  collège 
d'Alh  ,  deux  ans  plus  tard  à  celui  de 
Cologne.  Kn  changeant  de  maîtres,  il 
changeait  de  méthode  ,et  il  ne  fit  ainsi 
qu'apprendre  et  oublier.  Il  regrette 
dans  ses  Lettres  (cent,  i  ,ep.94;quey 
depuis  8  ans  jusqu'à  i3,  il  n'ait  rien 
ajoute  a  ses  cwmihbcw,  A  €ala« 


552 


LIP 


gne,  outre  le  latin  et  le  grec,  il  étu- 
dia l'histoire  et  la  philosophie,  dans 
le  collège  des  Jésuites.  H  fut  tente' 
d^entrer  dans  leur  compagnie  ;  mais 
ses  parents  ,  qui  avaient  d'autres 
vues  ,  se  hâtèrent  de  l'envoyer  à 
Louvain,  oii ,  en  continuant  ses  e'tu- 
des ,  il  prit  quelque  teinture  du  droit. 
Peu  de  temps  après ,  ayant  successi- 
vement perdu  son  père  et  sa  mère  , 
et  se  voyant ,  à  1 8  ans ,  libre  de  sui- 
vre ses  inclinations ,  il  songea  d'abord 
à  voyager  en  Italie ,  pour  y  étendre 
ses  connaissances  par  le  commerce 
des  savants  :  toutefois  ,  il  voulut 
auparavant  fonder  sa  réputation  lit- 
téraire ;  et,  à  l'âge  de  19  ans,  il 
publia  ses  Farianim  lectionum  li- 
bri  ni ,  dédiés  au  cardinal  de  Gran- 
velle  ,  Anvers  ,  1 569  ,  in-S».  Ce 
sont  principalement  des  remarques 
sur  Cicéron ,  Varron  et  Properce. 
Elles  eurent  un  succès  mérité  j  et 
Granvelle  ,  flatté  du  patronat  de 
cette  savante  production  ,  emmena 
l'auteur  à  Rome  ,  011  l'appelait  le 
conclave  qui  nomma  Pie  V ,  et  se 
rattacha  comme  secrétaire  pour  les 
lettres  latines.  Lipse  passa  deux  ans 
auprès  du  prélat,  et  profita  de  ce 
temps  pour  y  prendre  connaissance 
des  bibliothèques  et  des  manuscrits. 
Il  ne  demeura  pas  étranger  aux  sa- 
vants que  cette  grande  cité  renfer- 
mait ;  et  il  suivit  particulièrement 
Marc -Antoine  Muret ,  qui  y  ensei- 
gnait alors.  Un  an  après  son  retour 
à  Louvain  (année  qu'il  passa,  comme 
il  s'en  accuse  lui-même ,  dans  les 
plaisirs  et  la  frivolité  )  ,  il  entre- 
prit un  voyage  en  Allemagne  ,  en 
passant  par  la  Franche  -  Comté. 
A  Dole  ,  il  assista  à  la  promo- 
tion de  Victor  Giselin  au  doctorat; 
cette  cérémonie  fut  suivie,  selon 
l'usage  du  temps,  d'une  orgie  qui 
pensa  devenir  funeste  à  Lipse ,  par 


s 

I 


LIP 

la  maladie  grave  qu*elle  lui  occa- 
sionna. Rétabli,  il  se  rendit  à  Vienne 
en  Autriche ,  où  il  se  lia  avec  Bus- 
becq  ,  Craton  ,  Sambucus  ,  Pighius 
et  d'autres  érudits  qui  auraient  bien 
'V'^ulu  le  retenir  :  mais  sa  patrie 
lui  tenait  à  cœur  ;  en    y    retour- 
nant par  la  Thuringe ,  il  apprit  la 
fâcheuse  nouvelle  des  troubles  qui 
agitaient  les  Pays-Bas  ,  et  des  pertes 
qui  en  étaient  déjà  résultées  pour  lui. 
S'étant  arrêté  à  léna  ,  il  y  accepta 
une  chaire  d'éloquence  et  d'histoire 
qu'il  conserva  de  1572  à  i574-  Ses 
succès  excitèrent  la  jalousie  de  ses^ 
collègues  :  on  lui  disputa  le  droil 
d'être  élu  ,    à    son    tour  ,    doyen' 
de   la  faculté  des   sciences  ;  il  fut 
nommé  d'autorité  :  mais  ces  tracas- 
series   l'engagèrent  à   solliciter   sa 
démission  ,  et   la    cour    de  Saxe- 
Cobourglalui  accorda  de  la  manière 
la  plus  honorable.  Il  n'est  donc  pas 
vrai ,  comme  l'ont  avance  ses  enne- 
mis ,   qu'il  quitta    clandestinement 
léna  ,  et  que  son  nom  y  fut  rayé  de 
la  matricule  de  l'université.   Nous 
avons  tiré  ces  détails  d'une  lettre  de 
Lipse  à  Abraham  Ortelius  ,  et  de  la 
note  qui  l'accompagne  dans  la  Sjll. 
Epist.  Burm.  ,  tom.  i  ,  pag.  161  et 
i63.  De  léna ,  Lipse  vint  à  Cologne 
où  il  se  maria  ;  et  neuf  mois  après, 
il  emmena  sa  femme  à  Isque ,  lie 
sa  naissance.   Il  nourrissait  le  pro 
jet  de   s'y   dérober   aux   embarras'' 
des  affaires  et  à  la  célébrité  :  les 
nouveaux  troubles  survenus  dans  la 
Belgique  le  forcèrent  à  changer  de 
résolution.    Il  se   relira  d'abord  à 
Louvain;  et,  en    1679,  il   accepta 
une  chaire  de  professeur  d'histoire 
dans  l'université  de  Leyde ,  déjà  si 
illustrée  à  sa  naissance  ,  et  où  il  eut 
pour  collègues  Joseph-Juste  Scaliger 
et   tant   d'autres  coryphées    de  la 
science.  Il  y  resta  treize  ans ,  pro- 


i 


LIP 

I  fessant  la  religion  rdformëe ,  comme 
Ic'na  on  l'avait  vu  suivre  la  con- 
>sion  d'Augsbourg.  Il  se  racla  beau- 
ip  ,  à  Leyde  ,  d'affaires  ecclcsias 
[lies  ,    et  y  montra   même  assez 
peu  de  tolérance.  Ses  liaisons  avec 
le  parti  du  duc  de  Leicester  con- 
ibucrcnt  à  lui  alie'ner  les  hommes 
>  plus  distingues.  Burman ,  dans  les 
tes  qui  accompagnent  sa  Sj^Uoge 
i.l)istolaniJn y  lom.  i  ,pag.  iSoetail- 
liiirs,  lui  reproche  avec  amertume 
la  duplicité  et  la  mauvaise  foi  qu'il 
mit  dans  sa  conduite;  et  il  pose  en 
'  it  que,  dès   i584,  *ï  avait  formé 
projet  de  quitter  Leyde  et  de  re- 
tourner à    la    religion   catholique. 
Lipsc  ayant   publié  à  Anvers  ,  en 
1 589 ,  ses  Politicorum  lihri  vi  ,  où 
il  se  déclare  partisan  d'une  religion 
exclusive  ,   et  conseille  contre   les 
dissidents  l'horrible  remède  du  fer 
et  du  feu  :  ure  et  seca  ;  Cornhert 
'  y.  Cornhert  )  attaqua  cette  doc- 
i  lie  avec  une  juste  indignation.  Il 
dédia   son  ouvrage  aux  magistrats 
do  Leyde ,  qui ,  par  une  pusillanime 
déférence  pour  Lipse  ,  déclarèrent 
qu'ils  n'acceptaient  point  cette  dé- 
dicace ,  et  qu'ils    exhortaient    les 
lecteurs  de  Cornhert  à  lire  aussi  la 
réponse  de  Lipse,  l'objet  de  leur 
haute  considération.  Celte  réponse 
avait  paru  en  1 590,  à  Leyde ,  in-S**., 
s<Mis  ce  titre  :  De   und  religione  , 
I versus  dialogistam ,  Liber.  L  i  pse 
v  pallie  de  son  mieux  son  intolérant 
système.   Ure  et  seca  ne  devait  pas 
être  pris  à  la    lettre  ;  c'était   une 
mhrase  empruntée  de  la  médecine  où 
l'on  désigne  ainsi  certains  remèdes 
qui ,  dans  des  cas  urgents,  sont  sa 
dernière  ressource.  La  {)cinc  de  mort 
ne  doit  être  employée,  contre  les 
hérétiques  ,  que  rarement  et  secrè- 
tement :  les  confiscations ,  l'exil ,  la 
dcgradâtion  civique,  l'iufamic  su£&- 


sent  dans  les  c^t  ordinaires,  f^  po- 
sition de  Lipse  dcrenait  de  jour  rn 
jour  plus  fausse  et  plus  dcta^rcaUe 
à  Leyde.  Ayant  obtenu,  co  1 586  ^ 
un  congé  de  six  mois ,  sous  reogl- 
gemcnt  de  revenir  ,  il  se  dirigea  veff 
Cologne,  et  traita  dans  ce  voyage 
avec  ses  amis  de  la  Belgique,  et  spé- 
cialement avec   l'archevêque  d\\a- 
vers,  Lxvinus  Torrcntiuk,  par  l'in- 
termédiaire   du    chanoine    Nicolas 
Oudart ,  pour    être   nommé  à  nom 
chaire   à   Louvaiu.  (  SjU.   Epist, 
Burm.y  t.  1,  p.  'àSô^I'Ji  et  558.) 
Quelle  qu'ait  été  l'issue  de  celte  né- 
gociation ,  Lipse  prétexta  derechef, 
en  iSgi  ,  un  voyage  pour  raison  de 
santé ,  aux  eaux  de  5pa  y  méditant 
secrètement  de  s'éloigner  de  I^yde 
pour  toujours.  Il  ne  tarda  pas  à  no- 
tifier aux  magistrats  et  aux  cura- 
teurs ,  le  parti  qu'il  avait  pris ,  cl  ii 
solliciter  sa  démission ,  qu'il  n'obtint 
qu'après  d'itératives  instances  pour 
le  dissuader ,  tant  on  était  jaloux  de 
conserver  à  l'académie  un  homme 
de  sa  céle'brité.  {SjU.  Epist.  Burni, 
t.  1,  p.  557.  )  Pour  aller  à  Spa, 
Lipse,  accompagné  de  quelques  amii 
distingués  par  leur  amour  pour  les 
lettres ,  tels  que  Pierre  Bcrlius,  les 
deux  Ganter,  Roch  Honcrl  ,  etc., 
passa  par  Maicnce;  et  là  il  se  récon- 
cilia, par  le  ministère  des  jésiùles, 
avec  l  église  catholique.  11  demeura 
ensuite  près  de  deux  ans  à  Spa  et  à 
Liège ,  où  il  reçut  les  propositions 
les  plus  flatteuses  de  la  part  de  plu- 
sieurs princes,  qui  voulurent  l'attirer 
chez  eux.  Gémcnt  Y 111  à  Borne,  !• 
sénat  de  Venise,  Ferdinand  de  Médicu 
à  Florence ,  Henri  1 V  en  France  , 
se  mireut  sur  les  rangs ,  avec  un  asset 
grand  nombrcd'aulrescompétiteun  î 
mais  les  Eutsdc  Brabant  et  l'amour 
de  la  patrie  rera|)ortèrenl  ;   Lipi* 
accepta  une  chaire  d'histoire 


554  T.TP 

lîC)  à  Lonvain,  et  la  remplit  jusqu'à 
sa  mort  avec  non  moins  de  distinc- 
tion que  celle  de  Leyde.  Philippe  II, 
roi  d'Espagne ,  lui  conféra  le  litre 
de  son  historiographe.  L'archiduc 
Albert  le  nomma  membre  du  con- 
seil des  aiïaires  d'état.  Rentré  dans 
le  sein  de  l'église  catholique  ,  Lipse 
prit  la  plume  pour  juslilîer  la  dé- 
votion aux  images  appelées  mi  - 
raculeuses  ,  et  publia  :  I.  Diva 
mrgo  Ilallensis;  bénéficia  ejus  et 
miracula  fide  atque  ordine  des- 
cripta,  Anvers,  i6o4,  in-8^  II. 
Diva  virgo  Sichemiensis  sive  As- 
pricolUs  ;  noi^j,  ejus  bénéficia  et 
admiranda,  ibid.  i6o5,  in  -  4^.J 
ouvrages  qui  non-seulement  lui  fu- 
rent reprochés  par  les  protestants 
avec  amertume  et  dérision  (  Fo^yez 
LiNGESLUEiM  ) ,  mais  dans  lesquels  , 
selon  les  Mémoires  du  P.  Nice- 
ron  ,  t.  XXIV  ,  p.  i3i,  beaucoup 
de  catholiques  même  le  virent  avec 
peine  adopter  les  traditions  les  plus 
incertaines  ,  et  les  contes  les  plus 
puérils.  Le  24  mars  1G06  termina 
la  carrière  de  Juste  Lipse.  Deux  ans 
auparavant  il  avait  fait  en  neuf  vers 
hendécasyllabes  ,  plus  sentencieux 
qu'historiques,  son  épitaphe  latine, 
inscrite  sur  sa  tombe  dans  l'église  de 
Saint-François  à  Louvain.  Lipse  , 
d'une  taille  moyenne,  bien  prise  mais 
peu  forte,  surtout  vers  le  déclin  de 
ses  jours,  où  il  fut  très-affligé  d'une 
maladie  de  foie,  devenue  la  cause  de 
f>dL  mort,  avait  le  front  large  et  élevé, 
l'œil  vif:  il  ne  manquait  pas  d'une 
certaine  dignité,  et  pourtant,  à  tout 
prendre ,  ni  sa  tenue ,  ni  son  entre- 
tien ne  répondaient  à  l'idée  que  ,  sur 
sa  réputation,  l'on  se  faisait  de  lui. 
Doué  d'une  mémoire  prodigieuse,  il 
en  étalait  peu  les  richesses  dans  sa 
conversation.  Ses  cours  étaient  tres- 
sai vis,  et  les  pins  grands  personnages 


LIP 

les  honoraient  quelquefois  de  leuf 
présence.  Il  avait  le  talent  de  s'atta- 
cher singulièrement  ses  disciples  ,  et 
se  montra  toujours  du  plus  facile 
accès  pour  eux.  Les  Fariœ  Lee- 
tiojies ,  par  lesquelles  il  débuta  dans 
la  littérature,  se  ressentent  de  l'é- 
lude de  Cicéron ,  qu'il  se  proposait 
alors  pour  modèle.  Plus  tard  Tacit* 
et  Sc'nèque  gâtèrent  sa  latinité.  On 
peut  voir  à  ce  sujet  Baillet ,  Jugent»^ 
des  Sav.  t.  2  de  réd.in-4°.  p.  198  el 
sui V. ,  et  Morhof,  Poljhist.  1,6,  3  rt.j 
Il  ne  passe  pas  pour  avoir  été  fort  sur] 
le  grec,  mais  il  affectait  de  coupei 
de  grec  sa  phrase  latine  ,  pour  don-] 
nerle  change  à  cet  égard.  Ses  admi-j 
râleurs  outrés  lui  font  composer  un 
triumvirat  littéraire,  avec  Scaliger 
et  Gasaubon  j  mais ,  pour  le  grec  sur- 
tout, il  était  bien  loin  d'eux.  Parmi 
les  singularités  de  son  caractère,  on 
doit  placer  son  goût  pour  les  chiens: 
à  Louvain  ,  il  en  avait  trois  pour 
ses  compagnons  habituels  ,  Saphir , 
Mopsule  et  Mopse  ;  il  les  a  fait 
peindre  ,  il  les  a  chaulés  :  dans  ses 
vers  en  l'honneur  du  premier,  dont 
il  nous  a  aussi  laisse  l'épilaphe 
(  Deliciœ  Po'ét,  Belg.  tom.  3  ),  iîdi  ' 
que  ce  qui  rapproche  Saphir  dç 
l'homme  ,  c'est  qu'il  aime  le  viaj 
et  qu'il  est  sujet  à  la  goutte.  UneJ 
autre  passion  le  dominait  encore 
c'était  celle  des  fleurs  ,  dont  il  prit  le' 
goût  chez  un  illustre  fliorimane  de 
son  temps  ,  Charles  Langius  ,  cha- 
noine de  St-Lambert  à  Liège ,  qui  lui 
donna  un  asile,  lorsqu'en  1570,1! 
fuyait  les  troubles  des  Pays-Bas  (  F. 
Lange  ,  XXIII ,  349  ).  Les  tulipes 
étaient  surtout  ses  fleurs  favorites  j  et 
c'est  pour  cela  que  Rubens  en  a  placé 
derrière  son  portrait ,  dans  son  fa- 
meux tableau  des  cpialre  Philoso^ 
phes  ,  gravé  plusieurs  fois  ,  où  l'oa 
voit  aussi  le  chien  Saphir  aux  pied^ 


LIP 

son   maître.    Lipse    avait   nn<* 
iide  aiuipalhie  pour  la  musique  ; 
l 'est  pour  cela  ,  sans  doute  ,  que 
la  poésie  ne  fut  pas  la  partie  brillante 
^v  son  talent  :  il  paraît  l'avoir  senti  ; 
c'est  contre    son    intention   que 
Il  a  recueilli  ses  poésies  latines  ; 
v  déclare  positivement  son  inap- 
ir.dc  pour  la  poésie  flamande   ou 
hollandaise.  Lipse  a  écrit  un  grand 
lubre   d'ouvrages  sur  diflerentes 
.tières,  mais   principalement  de 
liiquc  ,  d'histoire,  d'archéologie  , 
philosophie  morale,  de  politique  : 
presque  tous  ont  eu  une  grande  vo- 
irie en  leur  temps  ,  et  ont  ëtc  re'im- 
iinés  plusieurs  fois ,  et  traduits  en 
iércntes  langues.    L'e'numëration 
iipuleuse  en  serait  trop  longue  ; 
11'  se  compose  de  5i  articles  dans 
>   Mémoires  de  Niceron.   Balllia- 
i  Moret  en    impnma  la  collec- 
)U  complète  avec  les  beaux  carac- 
res  de    Planlin  ,  6  vol.  in  -  fol.  , 
ivers ,  1G37.  Il  en  a  paru  une  nou- 
lle  ëdilion  à  Wesel  ,  4  volumes 
.  -  8".  ,    1G7  j   :   Niceron   la  dit 
filuj  ample  que  les  précédentes  ; 
nous  nous   bornerons  à   indiquer  , 
iTaprî-s  l'ëdilion  d'Anvers  ,  les  prin- 
cipaux articles   de  chacun  des  six 
lûmes  :  le  premier  a  trait  à  la  cri- 
[ue,  et  contient  Farianun  lectio- 
iim  libri  m  ;  —  Antiquarum  lec- 
iiomim  libri  v  ;  —  Epistolicarum 
(jiiœstionum  libri  y  ;  —  Electorum 
lihri  II  ;  — Notes  sur  Valère  Maxime, 
sur  Sënèque  le  tragique  ;  — Jiidicium 
nr  Consolât ione Ciceronis ;i\  déclare 
pocryphe  ce    traite  nouvellement 
découvert  ;  —  Satjra  Menippœa  , 
somnium  ;  il  y  tourne  en  ridicule 
rtains  littérateurs  de  son  temps , 
f  surtout  les  poètes  lauréats;  —  Cn 
Ualogue  sur  la  bonne  prononciation 
û('  la  lanque  latine.  =  l.e  second  vo- 
lume offre  la    correspondance   de 


IIP  55 î 

Juste -Lipse  :  Ceniwim  y  mUe^ 
laneop  ;  —  Centuria  sinjatUfis  md 
halos  et  Hispanos  ;  —  Centuria  ad 
Gcrmanos  et  Gallos  ; —  CerUurim 
m   ad  fk'lgas  ;  —  EpisloUca  InS' 
titutio.  Nous  observerons  rfue  P.  Bur- 
man  a  consacré  le  premier  vobime, 
et  une  bonne  partie  du  second  de 
sa  Srlloge  epistolantm  (  5  ^^lumen 
iu-4'^«  )  t  ^  Ia  correspondance,  es 
partie  inédite ,  de  Juste-Lipsc  :  dans 
une  des  lettres  de  ce  recueil ,  datée  da 
10  octobre  1587  ,  Lipse  donne  à  en- 
tendre qu'il  gardait  rarement  copie 
de  ses  lettres;  sur  quoi   Burman  le 
dément  dans  la  note  ,  et  assure  que 
deptiis  i58o,  il  n'y  manqua  point. 
Antoine   Brun  a  donné  ,  à  Lyon 
iG5o,iu-i'j  :  Choix  des/ép'.tres  dû 
Juste-Lipse^  trad.  en  franc.  =  Le 
troisième  volume  roule  sur  rhistoire 
sacrée  et  profane  et  les  antiquité 
romaines  :  De  Militid  romand  libri 
V  ;  —  Poliorcetieùt'»  ,  sive  De  ma- 
chinis  ,  tormcntis  ,  telis ,  libri  v  j 

—  Admiranda,  sive  de  magnitu- 
dine  romand,  libri  iv;  —  Sattima' 
Hum  sennonum ,  sive  de  ç^ladiatori' 
bus  ,  libri  11  ;  —  De  Amphitheatro  ; 
— De  Amphitheatris  extra  Romam: 

—  De  F  esta  et  f'estalibus  ;  —  De 
Bibliothecis  sjntagma.  M.  Pcignol 
a  traduit  ce  petit  traité  dans  son 
Manuel  bibliographique. — De  Cnice 
libri  III  ; — Diva  virgo  HaUensis  ;— 
Diva  virgo  Sic/temiensis  ;  —  A'H'tf- 
nium  sive  oppidi  et  academiœ  des» 
criptio.  =  Î/C  tome  1  v  ,  consacre  k  la 
philosophie  morale  et  a  la  |>olitique, 
contient  priiici|Kileinent  :  Politico» 
rum  ,  sive  civilis  doctrimr  ,  libri  iv. 
(Hiclques  inoU  contre  l'inquisition 
espagnole  ,  qui  se  trouvaient  daa« 
les  premières  éditions ,  ont  dispani 
dans  les  suivantes. />e  und  relipotte^ 
adversus  dialogistam.  Il  faii  suite 
j^u  précédent.  V  oyei  plus  haut  Oi 


556 


LIP 


ouvrage  a  etë  traduit  en  français  par 
Le  Ber,  sieur  de  Malassis,  Larochelle, 
iSgo  ,  in-8^.  —  Monita  et  exempla 
jfolitica  y  lihri  ii  ;  traduits  en  fran- 
çais ,  par  Nicolas  Pavillon  ,  Paris  , 
1606 ,  in-8^.  —  De  constantid ,  li- 
hri II.  François  Raulenghien  (^«^Ad?- 
lengius  ) ,  bon  juge  en  cette  matière , 
dit  que  dans  la  supposition  qu'elle 
leur  eût  survécu,  cette  production  de 
Juste-Lipse  .  inspirée  par  les  mal- 
heurs dont  il  voyait  sa  patrie  être 
l'affligeant  théâtre, l'aurait  consolé  de 
la  perte  de  toutes  les  autres:  c'est  une 
espèce  d'entretien  entre  Lipse  et 
Charles  Langius  ;  il  y  célèbre ,  entre 
autres ,  la  culture  des  Jardins ,  comme 
un  précieux  remède  à  la  mélancolie. 
Delà  Grange,  avocat  au  parlement,  en 
a  publié  une  traduction,àParis,i  741^ 
in- 12  :  il  en  existait  une  antérieure. 
Nous  connaissons  un  exemplaire  ex- 
trêmement curieux  de  ce  petit  traité. 
Guillaume  Barclay  (  Fofez  Bar- 
clay )  l'avait  fait  intercaler  de 
papier  blanc  ,  et  il  l'avait  converti 
en  son  Album  ainicorum.  Une  cin- 
quantaine d'hommes  distingués  , 
de  son  temps  ,  ont  honoré  cet  Album 
de  leur  signature  ;  nous  ne  nomme- 
rons que  Gasaubon  (  Isaac) ,  Delrio 
(  Martin  ),  Dousa  (  François  ),  Lipse 
(Juste),  Lemire  {Auhert) ,  Pute  anus 
(Ericius),  Rubens  (Philippe) ,  f^ou- 
weren  (Jean  de),  Moret  (Balthasar). 
Guillaume  Barclay  lui  -  même  rend 
compte  de  sa  détermination  en  tête 
du  volume.  M.  Barbier  possède  cette 
curiosité  littéraire. — Manuductio  ad 
philosophiam  stoïcam ,  libri  m.  — 
Physiologiœ  stoïcœ  libri  m.  La  Mo- 
rale des  stoïciens ,  que  Lipse  avait 
projetée,  n'a  pointparu.=:Letom.  v 
contient ,  le  Tacite  avec  le  commen- 
taire de  Juste-Lipse ,  qui  passe  pour 
être  son  chef-d'œuvre  ;  il  savait  cet 
Mstoiien  par  cœur ,  et  lui  avait  cou- 


UP 

sacré  une  grande  partie  de  son  temps 
pour  l'étudier  à  fond.  —  Notes  sur 
Felleius  Paterculus.  =?=ï=Le  tom.  vi 
renferme  les  œuvres  de  Sénèque  le 
philosophe,  dont  il  avait  fait  aussi 
une  étude  spéciale.  Plusieurs  des  5i 
articles  mentionnés  par  Niceron  , 
ne  se  trouvent  point  dans  le  recueil 
de  ses  œuvres  que  nous  avons  sous 
les  yeux  ;  tels  que  De  magistj'atibus 
populi  romani,^et  Deveteriscriptur 
romanorum ,  Amberg ,  1 608 ,  in- 1 2 
—  De  re  nummarid  breviarium 
publié  par  Jean  Rbodius  ,  Padouc 
1 648 ,  in-8".  — Ses  notes  sur  Martial 
sur  Florus ,  sur  Suétone ,  sur  Catulle, 
Tibulle  et  Properce ,  sur  le  Pervigi- 
lium  Feneris.  — Sa  Laus  elephantis; 
son  Auctarium  ad  Smetii  Inscrip- 
tiones  antiquas  ;  son  Episiola  de^ 
libéralisa  au  bellum  ,  pax  vel  in- 
duciœ  Hispano  in  Belgio  prœs  - 
tent,  Francfort,  1609,  in-8°.  ,  et 
Leyde,  Elzcvier,  i634,  in-i6;ses 
poésies  latines  posthumes  ,  recueil- 
lies contre  ses  ordres  ,  par  François 
Sweertius  ,  sous  le  titre  de  Muscs 
errantes,  xAnvers ,  161  o  ,  se  trou 
vent  aussi  dans  les  Deliciœ  po'é"^ 
tarum  Belgicorum ,  tom.  3 ,  p.  3o 
368.  Lipse  a  désavoué  les  Orationei 
VIII,  publiées  sous  son  nom  à  léna 
en  1607  ,  et  en  particulier  celle  Di 
duplici  concordid  litterarum  atq^ 
religionis.  Voyez,  Miscell.  Epist, 
centuria  iv  ,  cp.  68.  Il  n'est  guère 
possible  d'écrire  sur  tant  de  sujets  , 
et  de  ne  pas  se  rencontrer  quel- 
quefois avec  ceux  qui  nous  ont  de- 
vancés dans  la  carrière  ,  ou  qui  la 
parcourent  avec  nous.  Saint  Jérôme, 
sur  cet  endroit  del'Ecclésiaste ,  Nihil 
sub  sole  noi^um  ,  cite  ce  mot  ,  plus 
plaisant  que  charitable  ,  de  Douât  ; 
Pereant  qui  anle  nos  nostra  dixe- 
/^MMf  .^  Lipse  a  été  accusé  de  pi  agiat  par 
Muret,  par  Pierre  Fabcr,  etc.  U  faut 


LS 

Si    , 


>u- 
ia« 

i 


LIP 

ir  à  ce  sujel  Thomasius  dans  son 
tiailc  De  Pla^io  litterario  ;  el  Cre 
nius  ,  Animadv.pfùlol.  el  hiitoricœ  ^ 
fascic.  VII.  P.  Burma  M  .S)//,  epist. 
t.  I ,  p  03 1.  Lipse  orclohiia  par  son 
testament  ,  que  ,  hors  une  partie  de 
sa  correspondance  ,  on  n'imprimât 
aucun  de  ses  manuscrits  ;  et  en  effet, 
à  l'exception  de  ses  poésies  latines  , 
on  n'a  guère  publié  de  ses  œuvres 
posthumes.  Son  traité  De  re  tium- 
marid  se  garde  en  manuscrit  à  la 
bibliothèque  de  Besançon.  —  Nous 
ignorons  quel  rapport  a  pu  avoir 
Juste-Lipi>e  avec  David  Lipse  qui 
était  d'Isque ,  comme  lui ,  et  qui 
nous  a  laissé  un  traité  latin  sur 
l'hydropisie  ,  imprimé  à  léna  en 
i6'25  ,  in  -  8°.  ,  et  réimprimé  en 
16-78.  —  Uû  grand  oncle  de  Lipse , 
nommé  Martin  Lipse  ,  iiéà  BriixcUcs, 
fut  chanoine  de  Saint-Augustin  ,  et 
supérieur  d'un  couvent  de  religieuses 
près  d'Huy ,  dans  le  pays  de  Liège  : 
il  s'occupa  beaucoup  de  littérature 
tl  spécialement  de  littérature  sa- 
crée ;  et  l'on  croit  qu'il  se  rendit 
fort  utile,  parla  collation  des  manus- 
crits, aux  éditions  de  Saint-Hilaire  et 
de  Saint- Augustin, qui  se  firent  de  son 
temps.  On  lui  attribue  l'édition  des 
Srmjnachi  Epistolœ ,  publiée  chez 
Froben,  Baie,  1549,  i»-^°-;  ^on 
nom  n'y  paraît  cependant  que  dans 
la  dédicace  ,  qui  est  de  Sicismond 
Gelenius  ,  et  où  ce  savant  dit  avoir 
tenu  ces  Lettres  de  lui.  On  le  cite 
également  comme  ayant  travaillé  sur 
Macrobe ,  comme  avant  publié  Chro- 
mât ii  homiliœ ,  et  retouché  la  gram- 
maire de  Jean  Custos.  Il  était  en 
correspondance  avec  Erasme  ;  et 
dans  le  recueil  des  lettres  de  celui-ci, 
il  y  en  a  cinq  qui  lui  sont  adressées. 
Erasme  le  loue  de  son  zèle  pour  la 
littérature  sacrée.  Martin  Lipse  mou- 
rut en  i555.  Soaépitaplie,  rappor- 


léc  dans   Fop|)ciis  ,  détaille 


faslucuscracut  ses  titres  littcraires. 

LÏRIS  (   LeP.  UORABDDU  ), 

religieux  récollet,  né  k  Eynioufîrr« 
en  Pcrigord,  est  connu  p.ir  i . 
pute  qu'il  eut  avec  J.  B.  M 
touchant  la  manière  de  détn 
les  longitudes  en  mer.  Ayant  « 
ployé  dans  les  missions  du  Cjh  i  i  .  . 
il  prétendit  qfue  ,  durant  le  trajri,  il 
était  parvenu  à  déterminer  les  longi> 
Indes,  au  moyen  d'un  globoqu'il  nom- 
mait Globe  hauturier.  Cette  préten- 
tion était  très-mal  fondée  ;  mais  il 
disait ,  en  passant ,  quelques  réritës 
dures  à  Morin ,  qu'il  rangeait  dans 
la  classe  des  astronomes  pap^racès, 
c'est-à-dire,  qui  ne  font  de  l'astrono- 
mie que  sur  le  papier.  Après  s'être  iji- 
juriés  l'un  et  l'autre  dans  des  ouvra* 
ges  qu'on  ne  lit  plus.  Du  Liris  el 
Morin  finirent  par  se  réconcilier. 
(  Voyez  VHist.  des  mathématiques, 
t.  II,  p.  337.  )  On  connaît  du  P.  Du 
Liris  :  L  Le  secret  ou  la  théorie  des 
longitudes  y  etc.  Paris  ,  1647  ,  in-4**. 
Morin  publia  la  réfutation  de  cet  ou- 
vrage, et  n'eut  pas  de  peine  à  prou- 
ver que  le  P.  Du  Liris  éuit  un  peu 
neuf  dans  les  sciences  mathémati- 
ques. (  /^q^'.  J.  B.  MoRipf.  )  Dti  Liris 
lui  répondit  par  son  Apologie ,  etc. 
1G4B,  où  il  raisonne  un  peuplas 
exactement  que  dans  son  premier 
ouvrage.  Cette  apologie  mit  Morin 
eu  fureur ,  et  il  y  fit  une  réponse 
remplie  d'invectives  si  grossières 
qu'on  serait  tenté  de  croire  une  le  tort 
était  de  son  côté.  H.  Ejméméndm 
maritime,  pour  obser>cr  en  mer  U 
longitude  et  la  latitude; avec  un  nou- 
veau moyen  de  perpétuer  l'éphémé- 
ride  du  soleil ,  |>our  avoir  toujours 
sa  déclin  '  '«)55,in-fol. 

Il  s'y  ati .  ment  à  ont 

méthode  graphique  de  déterminer 


5^$ 


IJPv 


la  longilude  du  lieu  par  des  observa- 
tions de  la  lune,  sans  connaîlre  ni  la 
parallaxe  ni  la  réfraction  de  cet  as- 
tre. Cette  me'tliode  est  inj^enicuse; 
mais  la  pratique  en  est  diilicile  sur 
mer,  et  elle  a  le  défaut  de  toutes  hs 
méthodes  grapl]ic[ues,  qui  ne  sontsus- 
ceptibles  de  précision  qu'en  the'orie. 
(  F.  le  F'ojage de  Courtanvaux,  p. 
i3.  )  On  ignore  l'époque  de  la  mort 
du  P.  Du  Liris  ;  on  sait  seulement 
qu'après  avoir  prêché  pendant  quel- 
que temps ,  il  devint  gardien  du  cou- 
vent de  Saiut-Amand ,  en  Limousin. 
W— s. 
LIRON  (  DoM  Jean  ) ,  savant  be'- 
nédictin  de  la  congrégation  de  S.- 
Maur,  né  à  Chartres  en  i665  ; 
embrassa  la  vie  religieuse  à  l'âge 
d€  vingt  ans  ,  et  fut  appelé  à  Pa- 
ris ,  où  il  connut  D.  Lenourry  ,  qu'il 
aida  à  terminer  son  Apparatus  ad 
Biblioth.  SS.  Patriim.  (  Voy.  Le- 
nourry. )  Il  obtint  ensuite  la  per- 
mission de  fixer  sa  résidence  à  la 
célèbre  abbaye  de  Marmoutier,  dont 
il  mit  en  ordre  les  archives ,  précieu- 
ses par  la  quantité  de  pièces  origi- 
nales qu'elles  renfermaient  sur  no- 
tre histoire.  Il  passa  ensuite  au 
Mans ,  et  mourut  en  cette  ville ,  le 
ï^'\  juillet  1748.  On  a  de  lui  :  L 
Apologie  pour  les  Armoricains  et 
pour  les  églises  des  Gaules  ^  Paris, 
I70(S,  in-i^2.  Il  y  soutient ,  contre 
l'opinion  de  D.  Lobineau,  que  les 
Armoricains  ont  reçu  les  lumières 
de  l'Evangile  avant  la  descente 
des  Bretons  dans  leur  pays  ;  mais 
D.  Lobineau,  à  qui  il  communiqua 
son  ouvrage  avant  de  le  publier, 
fit  disparaître  de  son  Histoire  de 
Bretagne  les  passages  critiqués  par 
D.  Liron ,  et  l'accusa  de  mauvaise 
foi  dans  ses  citations.  La  ruse  de 
D.  Lobineau  fut  enfin  découverte  ;  et 
I'qh  conserve  encore,  dans  quelques 


LTH 

bibliothèques, des  exemplaires  dcsou 
histoire,  non  cartonnés  (  f^oj.  Lo- 
bineau ).   IL  Dissertation  sur  le 
temps  de  V établissement  des  Juifs 
en  France  )  où  l'on  examine  ce  que 
Basnage  a   écrit  sur  cette  matière, 
ibid.  ,  1708,  in-8^.  Basnage  lui  ré- 
pondit dans  la  préface  de  la  seconde 
édition  de  son  Histoire  des  juifs  ; 
mais  D.  Liron  ne  se  tint  pas   pour 
battu ,  et   il  lui   répliqua    par   ui 
nouvel  écrit ,  inséré  dans  le  tome 
des  Singularités  historiques ,  doiî 
on  parlera  tout  à  l'heure.  III.  Disi 
sertation  sur  Victor  de  Vite  ,  ave. 
une  nouvelle   vie    de  cet  évéquei 
Paris,  1708,  in-80.  IV.   Questii 
curieuse ,   si  l'Histoire   des    deu* 
Conquêtes  d'Espagne  ^  par    Abul- 
cacim    Tassis    Abentarique  est  un 
roman,   ibid. ,   1708,  in-S*^.  :  il  y 
soutient  l'affirmative.  V.  Les  Amé- 
nités de  la  critique  ,   ou  Disserta- 
tions et  Remarques  nouvelles  sur 
divers  points  de  l'antiquité  ecclé- 
siastique et  profane  ^  Paris ,  1 7 1 7  , 
'2  vol.  in- 1*2.    Cet  ouvrage  estime 
paraît  avoir  été  entrepris  pour  i*ele- 
ver  les  erreurs  échappées  à  Tilie-. 
mont  dans  ses  Mémoires.  VI.  Singu 
larités   historiques  et    littéraire s\ 
Paris,  1734-40  ,  4  vol.  in-i2.  C'ei 
encore  un  recueil  de  remarques 
d'observations  critiques  sur  un  granj 
nombre  de  points  de  l'histoire  civill 
ecclésiastique  et  littéraire  :  il  y  réfuf 
successivement ,  D.  Lenourry ,  qt 
voulait  enlever  à  Lactance  le  fameu^ 
traité  De  la  mort  des  Persécuteui\ 
Larrey  ,  D.  Calmet ,  Sirmond ,  Ba 
luze  ,   Leclerc  ,  Basnage,  Lacrozc, 
D.  Martène,  etc.  On  trouve  aussi 
dans   cet    ouvrage    des   renseigne- 
ments curieux  sur  des  savants  peu 
connus ,  du  moyen  âge.    VIL    La 
Bibliothèque  chartraine  ou  Traité 
des  auteurs  et  des  hommes  illustres 


Lia 

de  V ancien  MncèS  de  Chartres,  etc. 

!  I*aris,  1711),  in-4**.  U  avait  ir.jbord 

iulilule  cel  ouvrage  :  Bibliothapie 

générale  des  auteurs  de  Fratwe , 
ont  la  Hibliothèfjue  chartraine  [or- 
mail  le  livre  i«r.  ;  et  il  en  promet- 
tait une  suite,  qui  n'a  point  paru. 
Ce  volume ,  rédige  sur  un  plan  nul 
conçu  ,  contient  beaucoup  de  dé- 
tails inutiles  ;  et  la  plupart  des  ar- 
ticles sont  superficiels  et  inexacts  : 

.  été  critiqué  p.ir  D.  Lecerf ,  dans 
Bibliothèque  des  Ecrivains  de 
Congrég.  de  St.  Maur.  On  at- 
i.iljue  encore  à  D.  Liron  :  Disser- 
tation sur  un  passage  du  second 
livre  de  St.  Jérôme  contre  Jovinien, 
édtéédans  toutes  Us  éditions,  et 
(jui  est  rétabli  dans  sa  pureté  ori- 
ginale y  Paris  ,  1700  ,  in-8^.;  nouv. 
édit.  augmentée  d'une  Béponse  aux 
objections  de  D.  Martianay,  ibid. , 
1707,  même  format.  On  croit  que 
D.  Liron  est  un  des  principaux 
auteurs  des  premiers  volumes  de 
,  ï Histoire  littéraire  de  la  France , 
Paris,  1738  et  années  suiv.  W — s. 

LIRUTI(  Jean-Josepu  ),  anti- 
quaire ,  né  à  Villafreda  ,  dans  le 
Frioul,  au  commencement  du  iviii*^. 
siècle,  avait  de  la  fortune,  et  em- 
ploya la  plus  grande  partie  de  ses 
revenus  à  se  former  un  cabinet, 
l'un  des  plus  considérables  qu'un 
particulier  ait  possédé  en  Italie. 
La  société  Colombaire  de  Florenc» 
lui  ouvrit  ses  portes;  et  cet  exemple 
fut  suivi  par  les  autres  académies.  L'é- 
tude des  monuments ,  des  médailles , 
«t  les  recherches  littéraires,  partagè- 
rent tous  les  moments  de  sa  vie.  Il 
mouruten  1780  dans  un  âge  avancé. 
Onadelui;  1.  Délia  moneta propria 
e  forestière  ch'ebbe  corso  nel  diuato 
ai  Friuli  dalla  decadenza  delV  irn- 
perio  romane  sino  al  secolo  Xf^, 
Dissertazione ,  Veuist ,  vi-4°'  ûg-  / 


1749.  Arj»rlali  l'a  iits<frë  dan»  U 
Collect.  dissertat.de  mnneti s  Itnlur^ 
tom.  Il,  pag.  7i-iH:>.  II.  De  u-rvfj 
medii  œvi  in  foro  Julii  tJisseï  1 
Rome,  17 5i,  in  8".  Ilyabr.ii 
d'érudition  dans  crtle  pièrc.  (ion  l'a 
insérée  dans  les  Srmbol.  litterar. 
opuscul.  varia,  tom.  iv  de  la  se- 
conde décade.  III.  Notizie  délie 
vite  ed  opère  scritte  da  litterati 
del  Friuli,  \cmsc,  i^f>o-8o,  3  voL 
in-4°.  On  y  trouve  lieaucoup  d'a- 
necdotes et  de  recherches  curi<  n  .  ,. 
IV.  Notizie  di  Gemona  antica  .  ; 
del  Friuli ,  Venise,  1771  ,  lu-^o. 
Le  Diction,  historique  de  Rassano 
lui  attribue  une  Histoire  du  Frioul, 
eu  italien  ,  5  vol.  in-S**.      W — s. 

LISCOV  (  CoRÉTiErf- Louis  )  , 
satirique  allemand ,  naquit  dans  le 
Mecklenbourg,  au  commencement 
du  dix-huitième  siècle.  Après  avoir 
étudié  le  droit,  il  dirigea  1  éducalioa 
des  enfants  d'un  riche  habitant  de 
Lubcck,  et  fut  placé,  en  1738,  dans 
une  autre  maison  ,  en  qualité  de  se- 
crétaire. Il  vécut  aussi  à  Dresde  ; 
mais  quelques  épigrammes  contre 
des  f;ens  en  place,  l'eu  firent  exi- 
ler. Il  passa  en  Sdxe  ses  dcrnièrcJ 
années,  et  y  mourut  en  1760  ,  dans 
une  prison  ,  où  il  était  détenu  pour 
dettes.  Liscov  n'est  guère  connu  qut 

f)ar  ses  satires  :  elles  panircnt ,  pour 
a  première  fois,  en  1739,  à  Franc- 
fort, sous  le  titre  de  Becueil  d'écrits 
satiriques  et  sérieux  ,  dont  Muchlcr 
publia  une  secoode  édition  avec 
quelques  changements.  Ces  satires 
sont  dirigées  contre  des  ëcrivains 
fort  ridicules,  surtout  contre Sievcrs 
et  Philippi,  et  contre  les  sols  dt 
tous  les  genres  et  de  toutes  les  classes. 
L'auteur  excellait  dans  l'ironie  ;  et 
quelquefois  il  écrase  M  TÏctiroe  sous 
le  poids  de  son  sarcasme.  Ou  n'en 
peut  rien  inférer  contre  la  bont«  d« 


56o 


LIS 


son  caractère  ,  qui  était  suffisam- 
ment connue  ;  et  parmi  les  témoi- 
gnages qui  en  ont  été  recueillis ,  ou 
doit  citer  sa  générosité  à  l'égard  de 
Philippi ,  qui  avait  éprouvé  des  mal- 
heurs ,  et  auquel  il  fit  parvenir  des 
secours.  Liscov  a  été  souvent  com- 
paré à  Rabener.  Mais  plus  fécond  et 
plus  original ,  il  est  aussi  plus  mor- 
dant ,  et  a  un  esprit  plus  philoso- 
pLique.  Pour  avoir  une  idée  juste  du 
mérite  de  Liscov ,  comme  écrivain  , 
il  faut  se  reporter  à  l'époque  à  la- 
quelle il  commença  sa  carrière  lit- 
téraire. La  langue  allemande  était 
loin  d'être  fixée  j  et  l'on  ne  connais- 
sait même  pas  sa  richesse  et  l'étendue 
de  ses  ressources.  Le  latin  était  en- 
core le  principal  moyen  de  commu- 
nication entre  les  savants.  L'école 
de  Gottsched  commençait  ,  et  avec 
elle  le  progrès  de  la  langue  alle- 
mande ,  mais  en  même  temps  l'in- 
fluence trop  absolue  de  la  littérature 
française.  Liscov,  dès  1730,  sut 
donner  à  sa  langue  une  pureté  et 
une  correction  dont  on  n'avait  pas 
encore  l'idée  ,  et  qui  a  été  à  peine 
surpassée  par  les  écrivains  de  la 
brillante  époque.  Il  fut  pourtant 
bientôt  négligé  ,  et  son  nom  main- 
tenant n'est  prononcé  que  rarement 
dans  sa  patrie  ;  ce  qui  ne  peut  s'ex- 
pliquer que  par  la  nature  de  ses  tra- 
vaux ,  tous  en  prose,  et  roulant  sur 
des  sujets  qui  ont  perdu  leur  plus 
grand  intérêt.  D — u. 

LISLE  (  JeanTroins  de  ) ,  aven- 
turier provençal  ,  était  natif  de 
Sylassez,  près  de  Barjaumont.  On 
prétend  que ,  dans  sa  jeunesse  ,  il 
«uivit ,  en  qualité  de  domestique  ^  un 
alchimiste  qui ,  fuyant  la  persécu- 
tion ,  se  retirait  en  Suisse ,  et  qu'il 
assassina  son  maître  dans  les  mon- 
tagnes de  la  Savoie.  Ce  fut  vers 
Tau  1690;  et  DeLisle  pouvait  avoir 


la 

i 


LIS 

vingt-huit   ans.    if  s'empara  de  la 
cassette  du  pliilosophe,  dans  laquelle 
était  sa  poudre  transmutatoire  ,  et 
rentra  en  France,  déguisé  en  ermite. 
Il  passa  quelques  années  dans    un 
commerce  illicite  avec  une  femme 
de  Sisteron,  donl-il  eut  un  fils,  et 
commença,  verslafinde  1 70.5,  à  fixer 
l'attention  publique  ,  par  les  projec- 
tions qu'il  faisait  assez  indiscrète- 
ment. Il  demeurait  alors  au  château 
de  la  Palu.  On  trouvera  ,  dans  le 
second  volume  de  V Histoire  de  la 
■philosophie  hermétique ,  de  Lengl 
Dufresnoy  ,  les  nombreux  certificaj 
qui  constatent  la  réalité  de  ses  trar 
mutations.  C'étaient  du  mercure , 
plomb ,  des  clous  changés  en  or  ou 
en  argent ,  des  clous  ,  des  couteaux 
moitié  argent ,  moitié  fer.  De  Lisle 
ne  pouvait  travailler,  disait-il,  que 
pendant  quatre  mois    de  l'été  ;  et  \ 
quand  on  les  lui  otait,  on  lui  faisait 
tort  d'une  année  entière.  Quant  aux 
prétendues  recettes  que  l'on  trouve 
dans  le  même  ouvrage ,  et  aux  vertus 
merveilleuses  de  la  Lunaria,  il  suffit 
d'avoir    les  plus   légères   connais- 
sauces  en   chimie  pour  en  voir 
futilité.  Le  bruit  de  ses  opératio: 
étant  parvenu  à  la  cour  ,   il  reçi 
ordre  de  venir  à    Versailles  j  e 
comme   il   différait   de  s'y  rend 
sous    différents  prétextes  ,  l'évê 
de  Senez  (  Soanen  )  le  fit  enlever 
lettre  de  cachet,  en  171 1.  Les 
chers  qui  le  conduisaient,  persuad 
qu'il  portait  de  grandes  richess 
résolurent  de  le  tuer  :  pour  cet  effè 
ils  lui  donnèrent  occasion  de  s'évi 
der,  puis  tirèrent  sur  lui  ;  mais  ils  I 
cassèrent  seulement  une  cuisse.  Il  fi 
conduit  en  cet  état  à  la  Bastille, 
l'on  voulut  en  vain  le  faire  opéri 
Il  avoua  qu'il  ne  possédait  pas  le  sj 
cret  de  la  poudre  transmutatoire 
mourut  le  16  janvier  1 7 12^  des  suit 


1,1*5 

<,a  Mcssnrc,  qu'il  avait  lui  m^mc 
xeiiiniëc.  LVvèquc  de  Scne/.  qui 
vait  accompagne  à  Paris  ,  rt  qui 
\liorta  inutilement  à  recevoir  les 
ours  de  la  reiij^ion  et  à  dévoiler 
6on   procède  ,  était  persuade  qu'il 
,  avait  réellement  le  secret  tic  faire  de 
Ter ,  et  que  s'il  ne  réussit  pas  à  la 
Bastille ,  c'est  parce  qu'il  ne  voulut 
^  réussir.  (  P^ic  de  Jean  Sounen  , 
.    "io,  in-8° ,  pag.  60-C4.  )      D.  L. 
LISLE(De).  Foy.  DELISLE. 
LISLE  (  Jean-Baptiste  Isoard 
) ,  connu  aussi  sous  le  nom  de 
DcUsle  de  Sales  ^\\\n  des  écrivainsles 
plus  féconds  du  dix-luiiticmc  siècle, 
(juit  à  Lyon,  en  1743.  Entre  fort 
me  dans  la  congrégation  de  l'Ora- 
luire  ,  il  eu  sortit  au  bout  de  quel- 
ques années,  et  vint  à  Paris,  cultiver 
\  j  la  littérature  :  il  avait  déjà   pu])lié 
î    plusieurs  ouvrages,  qui ,  malgré  son 
désir  ardent  de  célébrité  ,  l'avaient 
fut  à  peine  connaître  hors  du  cercle 
ses  amis,  lorsqu'une  circonstance 
;>révue  fixa  tout-à-coup  sur  lui 
itention  publique.  Son  livre  inti- 
'  :  La  Philosophie  de  la  nature  , 
1  ulait  obscurément  depuis   plu- 
i  iirs  années ,  lorsqu'un   magistrat 
/lé  avant   eu   occasion  de   le  lire, 
l'ayant  trouvé  aussi  irreligieux 
1  mmoral ,  le  dénonça  au  Chàtelet , 
liime   renfermant    des   principes 
iigcreux.  L'auteur,   l'abbé  Chré- 
1     censeur  de  l'ouvrage) ,  l'im- 
iineur  et  le  libraire,  furent  aussitôt 
rétés  d'accusation.  De  Lisle  futar- 
•   et   condamné  au  bannissement 
péluel  :  il  se  rendit  appelant  de  ce 
L'mcut,  dont  ses  adversaires  eux- 
uics  blâmaient  la  sévérité  (i)  ,  et 
lit  la  permission  de  recevoir  dans 


"iiver»  d«i  patt'riil»ril'-i  int''iri»"«tit"i 
»  ,  liant  lc(  Méi'  oirfs  ti-i  fi  .  .  •'•  '« 
\t%  l'iirc»,  «t  Jan<  le*  A'.>.^h$  lu- 

XXIV. 


LIS  ';.;, 

»a  prison  la  visite  d«t  |)enf.r.i,f< 
qu'intéressait  sa    discrlrc.    ( 
pour  lui  roccasion  d*un  tr 
triomphe:  %^  chambre  rfut    .  .,1  v 
tamment  remplif  d«'5  [M-rsoi.iuN  1.  . 
plusdistir  I   leur  nai.v%an'r 

ou  par  l<  is;  el  comme  il 

n'était   pas   riche,  on    ouvrit  m  >:i 
faveur  une  souscription  (1)  :  m^i^  il 
^e  piqua  de  désintéressement,  1  - 1 1     , 
les  secours  qu'on  lui  offrit,  et  di  lu 
bua  aux  prisonniers  l'argent  qui  lui 
fut  adressé  sous  le  voile  de  l'anoi.y- 
me.  G?pendant  le  Parlemcfit  cassa  la 
sentence  du  Ch^tcfet,  sur  les  cmm  !  1 
sions  de  l'avocat  du  roi,  qui  v. 
tenta  d'inviter  De  J,isle  an 
plus   de   circons|>ection.   Il   (1 
aussitôt  à  Ferney   remercier    \  ol- 
laire  de  l'intérct  qu'il  lui  avait  té- 
moigné; et  le  philosojdic   lui  pro- 
posa de  se    retirer  à    la  cour  du 
roi  de  Prusse,  où  il  pourrait  écrire 
avec  plus  de  liberté.  De  Lisle.  a  pris 
avoir  visité  l'Allemagne ,  se  r.  liii 
eflcctivement  à  Berlin;  mais  il  pjr.*lt 
qu'il  n'y  fut  pas  accueilli  comme  il 
l'avait  espéré  ;  car  il  revint  bientôt  a 
Paris,  essayer  de  ramener  sur  lui 
l'attention  du  public.  Il  entrait  dans 
sa  destinée  de  ne  devoir  cette  cc1< 


brite  qu'il  ambitionnait  si  vivement, 
qu'à  des   circonstances    très  -  iiub 


irite  m 

u'à  a(  . 

pendantes    de    son   talent.    Ainsi  , 

pendant    près    de    qiiinn*    année*  . 

il  eut   la    facilité  d- 

obstacle ,  mais  sans 

dre   intérêt ,  des  r« 

des   romans  .  des   1 

pièces  de  ' 

pour  iiini 

àdev 

au  fil...:.  , .^.  ...--. 


1)   VoJ<«ii»   «Tait    «euvctit 


fr..    ,,è 


•  •«   :  «K'.uii 


36 


^'6î 


LIS 


Vauteur  de  la  Philosophie  de  la 
nature  ;  ou  s'obstinait  à  ne  point  les 
lire.  Il  mit  au  jour  ,  en  1791  , 
Ma  République  ,  conception  dont  il 
avait  sans  doute  une  très-haute  idée  , 
puisqu'il  en  fit  les  honneurs  à  Pla- 
ton, se  contentant  modestement  du 
titre  d'éditeur  ;  mais  le  nom  même 
du  philosophe  grec  ne  put  fixer  un 
instant  le  public.  De  Lisle  de  Sales 
voulut  faire  reimprimer  ,  en  i  -^93  , 
cette  nouvelle  Utopie,  dont  il  avait 
change'  le  titre  en  celui  à!Eponine  : 
il  n'était  pas  alors  sans  danger  de 
débiter  des  lieux  communs  de  tolé- 
rance, puisque  c'était  faire  la  criti- 
que des  hommes  qui  venaient  d'u- 
surper l'autorité.  Cette  considéra- 
tion ne  l'arrêta  point  j  et  il  fut  en- 
fermé à  Sainte-Pélagie ,  ou  il  eut 
tout  le  loisir ,  pendant  onze  mois  , 
de  regretter  le  temps  de  sa  prison 
au  Châtelet.  La  i-évolution  du  9  ther- 
midor lui  rendit  la  liberté;  et  il  se 
lia  ta  de  publier  la  Philosopliie  du 
bonheur j  ouvrage  qu'il  avait  composé 
pendant  sa  détention.  Il  fut  nommé 
membre  de  l'Institut,  lors  de  sa  for- 
mation^ et  il  communiqua  un  grand 
nombre  de  mémoires  à  la  classe  de 
morale  dont  il  faisait  partie  :  ils  fu- 
rent écoutés  par  ses  confrères  avec 
l'indulgence  que  commandaient  son 
âge  et  le  choix  des  sujets  (i).  De 
liisle  osa  seul ,  après  le  1 8  fructidor, 
prendre  la  défense  de  quatre  de  ses 
collègues  (MM.de  Fontanes,  Pasto- 
ret,Garnot  et  Sicard)  exclus  de  l'Ins- 
titut par  une  décision  du  directoire, 
et  il  réclama,  dans  plusieurs  écrits  , 
1  indépendance  des  corps  savants  : 
cet  acte  de  courage  lui  fait  honneur; 
et  il  faut  ajouter  à  sa  louange  ,   que 

(i)  Les  mémoires  his  par  De  Lisle,  à  rinstit.it, 
«e  sont  iiiséié»  dans  les  recueils  tlela  classe  que 
par  extraits  ,  qu'on  l'avuit  chargé  de  faire  lui- 
«lome  ,  aiiu  de  ménager  sa  susceptibilité. 


LIS 

malgré  les  aberrations ,  quelquefofî» 
un  peu  fortes ,  dans  lesquelles  il  est 
tombé,  il  manifesta  souvent  son  pen- 
chant pour  le  gouvernement  monar- 
chique, qu'd  regardait  comme  le  seul 
qui  pût  assurer  le  bonheur  de  la  PVaii- 
ce.  Retiré  dans  sa  famille ,  il  vivait 
entouré  de  livres  dont  il  avait  for- 
mé une  collection  plus  considérable 
que  ne  le  permettait  l'état  de  s* 
fortune  (  i  ).  La  lecture ,  et  la  socié- 
té de  quelques  amis  de  choix  , 
étaient  ses  seules  distractions.  A 
l'âge  de  soixante-douze  ans ,  il  s'a- 
visa de  se  remarier ,  et  épousa  la  fille 
de  l'espagnol  Badia  ,  connu  par  ses 
voyages  publiés  sous  le  nom  à'Jfli-^ 
Bej.  Il  écrivit  jusqu'au  dernier  mo- 
ment, et  mourut  à  Paris  ,  le  22  sep- 
tembre 1816.  Contre  l'usage,  aucuq 
membre  de  l'Institut  n'a  prononcé 
d'éloge  sur  sa  tombe.  De  Lisle  de 
Sales  n'était  dépourvu  ni  d'esprit , 
ni  d'instruction;  mais  il  fut  égaré 
par  la  manie  des  systèmes  et  par  unç 
imagination  trop  vive  :  aucun  de  ses 
nombreux  ouvrages  ne  paraît  des- 
tiné à  lui  survivre.  Il  avait  de  ses 
talents  l'opinion  la  plus  exagérée  ,  et 
il  en  parlait  souvent,  ainsi  que  de$ 
qualités ,  plus  réelles  ,  de  son  cœur  ; 
aimant  à  répéter  :  Ma  douce  phi- 

lantropie Mes  folies    du  bier^ 

public  à  la  Saint  -  Pierre.  .  .  ,  Ma 
boidiomie. . . .  Mes  innocentes  cari 


(i)  Sa  bibliothèque,  composé'»  d'environ  36,009 
Tolnmes,   occupait  quinïe  ou  seize  pièces  d'u 
maison,    dont    «es  revenus   ne  suffisaient    pa 
dit-on  ,   pour  payer   les  loyers.  Il  se   flattait  df 
la  vendre  çn  masse   à  quelque  prince  étranger 
et  avait  pour  cela  fait  paraître  en   i8io   et  iSii 
sous  le  titre  A^^nalyse  du  Catalogne:  ,  etc.  ,  ui 
aperçu  de  cette  collection  inestimable  ,    dont  il 
portait    modestement   la    valeur  à  environ  deul 
cent  mille    francs.    Il  avait  f.iit   imprimer   uji 
grand  nombre  de  titres  p.articulicrs,  pour  se  fair^ 
des  exemplairet  uniques,  et  réimprimer  quel 
ques  numéros  intronvables  de  certains  journaux 
Cette  collection ,    dont    il  faisait   d'ailleurs    ne 
^rand  mystère,  et   qu'il    ne   montrait  qu'à 
intimes  amis,  ne  produisit  à  sa  rente,  en  iSl^^ 
qu'euviron  trente  mille  francs. 


catures.  Celait  de  la  rafilleiire  fi)l 
du  monde  qu'il  se  playait  sur  U 
même  lijïne  que  les  plus  grands 
philosophes  de  rantiquifc.  On  sait 
qu'il  avait  dans  son  ap])artemenl  son 
buste  en  marbre  blanc  ,  avec  celle 
inscription  : 

Dieu,  riiomnic^U  mtiire  ,îl  a   tont  expliqué. 

t.*un  de  SCS  collèj^ucs  à  l'Institut  (on 
croit  que  c'est  M.  Andricux  ),  ayant 
découvert  cette  espèce  d'apotlieose , 
y  ajouta  ce  second  vers  : 

Mai»  personne  aTsiit  lui  ne  IVrail  remarqué. 

De  L.sle  lut  rcpigramme,eî,  au  lieu 
d'en  rire,  y  repondit  très-sc'rieuse- 
ment  :  sa  colère  amusa  un  instant  ; 
mais  plusieurs  années  après,  il  es- 
saya de  repousser  le  ridicule  auquel  il 
s'était  exposé  ,   en  déclarant  «  que 
»  son   buste  était   relégué   dans   le 
»  fond  de  sa  bibliothèque  ,  drapé  à 
»  l'antique  ,   n'otliant   à   l'œil  qui 
«  n'est  pas  inilié  ,  que  l'image  un 
»  peu  fantastique  d'un    Zenon    ou 
»  d'un  Anaxagore.  »  (  Essai  sur  le 
Journalisme ,  p.  2o5.  )  M.  Beuchot 
a  donné ,  avec  son  exactitude  ordi- 
naire ,  la  liste  des  ouvrages  de  De 
Lisle,dansle  journal  de  la  Librairie, 
année  iSi'],j). 'ii^et  2i8,  et  1818, 
p.  543.  )  Ou  y  renvoie  les  personnes 
qui  voudraient  connaître  toutes  les 
productions  de  ce  fécond  écrivain  ; 
et  l'on  se    contentera   de   citer  ici 
celles   qui  présentent  le  plus  d'in- 
térêt,  ou   qui  peuvent  donner  lieu 
à    quelques    remarques    critiques  : 
I.  La  Bardinade  ou   les  noces  de 
la  stupidité  y  poème  en  dix  chants  , 
Paris  ,  17G5  ,  in-8«.  De  Lisle  a  dé- 
savoué ce  poème  ;   mais  il  en  est 
Certainement    l'auteur  :   il    déclare 
qu'avant  de   le  commencer  ,   il  ne 
connaissait  pas  la  Dmiciade  de  Pope, 
i«t  que  de  tous  les  écrivains  vivants, 
fl  n'a  nommé  que  Fréron ,  qu'il  rc- 


.,JJ 


gnidaii  comme  t  -  ^  •, 

la  société.  Otoin 
dans  des  ititenliuis    1 
point  eu  de  sucrés.  II. 
historique  de  chasse 
ibid.  i7(k),  '2  vol.in-î 
des  articles  instrurfifs  e\ 
mais  un   Lien   plus  rrrand    , 
d'inutiles  ;  et  l'ouvrage  est  crrii  de 
ce  style  emplntiqne  ,  qtic  De  Li.sic  a 
conservé  dan-j   toutes   ses   produc- 
tions.   III.    La  Philosophie  de  la 
nature ,  ou  Traité  de  morale  pour 
l'espèce  h.-maine,  tiré  de  la  philoso- 
phie ,  et  fondé  sur  la  nature.  Cet 
ouvrage  ,  le  seul  dont  l'auteur  fût 
fier ,  et  le  seul  aussi  qui  ait  eu  une 
vogue  passagère,  n'était  dans  le  prin- 
cipe qu'un  embrj'on  ,  (pii  par  des 
améliorations  successives  s'est  accru 
d'une  manière  étonnante  :  la  dernière 
édition  ,  Paris  ,  1804,  est  de  10  vol. 
in  -  8".   Linguet ,  qui   a    apprécie 
cet  ouvrage  avec  impartialité  ,  dit , 
«  qu'on     y    reconnaît  partout   une 
»  ame  exaltée  ,  mais  honnête  ;  im 
»  style  vif ,  mais  peu  formé;  des  ré- 
^)  miuiscences  ,  des  idées  délayées, 
y>  et  trop  d'  dmiration  pour  ce  li- 
»  bertinage  d'esprit ,  f[\\c  l'on  appelle 
»  aujourd'hui  philosophie.  n[.4nnal, 
littèrair, ,  tora.  i  •••.  )  (  i  ;.  Si  l'on  en 
croit  De  Lisle,  cet  ouvrage  a  e'tc  tra- 
duit en  espagnol  par  Nunez  de  Ta- 
boada ,  et  imprimé  à  la    barl>e  du 
Saint-Office  ,  par  Ibarra,  en  180O, 
au  nombre  de  huit  mille  trois  ccnti 
exemplaires  qui  ont  été  distribués 
en  trèr-peu  de  mois.  IV.  //iitoire  des 
douze  Césars,  de  Suétone,  trad,  en 
franc. par  H.  Opheliot  de  la  P  aj«, 
suivie  de  M  élancée  5  philosophiques  , 
1771  ,4  vol.  in-S*.  Le  rédacteur  d« 


(|)L«  rni  a«  P: 


iui... 


»  ••m  iIrnT»  ém 


36. 


564  I^ÎS 

Y  Année  littéraire  met  cette  traduc- 
tion au-dessus  de  celle  de  Laharpe. 
(  f^.  ce  nom.  )  Cependant ,  il  repro- 
che à  De  Lisle  d'avoir  mulilë  l'histo- 
rien des  Césars  ,  et  rejeté'  dans  les 
notes  les  passages  qui  lui  paraissaient 
nuire  à  la  rapidité  de  la  narration. 
Quant  aux  Mélanges,  «  c'est,  de  Ta- 
»  veu  de  De  Lisle ,  l'imagination  de- 
»  pourvue  de  goût  qui  les  caractérise. 
Puis ,  il  ajoute  :  «  je  les  effacerais  de 
»  mon  sang,  si  je  ne  prenais  pas  le 
»  parti  plus  sage  de  les  effacer  avec 
»  ma  plume.  »  (  Hist.  dujourn.  p. 
S1187 .  )  V.  Essai  sur  la  tragédie,  par 
un  philosophe ,  1772  ,  in-S''.  ;  on  y 
trouve  des  idées  singulières ,  présen- 
tées avec  celte  emphase  si  naturelle 
à  l'auteur ,  et  quelques  vues  judicieu- 
ses sur  la  réforme  du  théâtre,  etc.  VI. 
Paradoxes^  par  un  citoyen,  Amst. 
17  75,*?.  parl.in-8°.;cerecueil  est  pré- 
cédé d'une  dédicace  à  M*"®,  la  com- 
tesse de  Vidampierre,  dont  plu- 
sieurs passages,  peu  faits  pour  flatter 
cette  dame,  annoncent  un  homme 
étranger  aux  bienséances.  Le  volume 
contient  trois  pièces  publiées  anté- 
rieurement :  la  Défense  de  la  philo- 
sophie de  la  nature  ,  un  Essai  sur 
la  liberté  de  la  presse ,  où  l'on  ne 
trouve  que  des  idées  vagues  sur  un 
objet  qui  a  occupé  depuis  ,  un  grand 
nombre  de  publicistes  ;  et  enfin  ,  la 
Lettre  de  Brutussurles  chars  anciens 
et  modernes ,  que  l'auteur  aurait  dû 
intituler  :  Requête  au  lieutenant  de 
police  ,  contre  les  cabriolets.  VIL 
Histoire  philosophique  du  monde 
primitif ,  quatrième  édition,  Paris, 
'79^  >  7  vol.  in-B*». ,  avec  un  atlas 
de  trente  planches.  Cet  ouvrage  qui 
servait  d'introduction  à  l'Histoire 
des  hommes,  en  a  été  détaché  par 
l'auteur,  et  augmenté  successivement 
de  plusieurs  chapitres  :  c'est  un 
•ystèiîi«.sur  la  formation  du  globe, 


LIS 

fondé  sur  les  faits  physiques ,  et  in« 
dépendamment  de  la  révélation, 
VÏII.  Ma  Bépuhlique  ,  auteur  Fla~ 
ton ,  éditeur  J.  de  Sales ,  ouvrage 
destiné  à  être  publié  en  1800,  Paris , 
1791  ,  12  vol.  in-18;  réimprimé 
sous  le  titre  à'Eponine,  1 798, 6  vo!. 
in-80.  IX.  Mémoire  en  faveur  de 
Dieu  ,  Paris  ,  1 802 ,  in-8°.  :  il  se 
proposait  d'y  réfuter  la  doctrine  fu- 
neste de  l'athéisme  :  mais  la  sin- 
gularité du  titre  parut  une  impiété  ; 
et  plusieurs  de  ses  propositions  , 
contraires  à  la  divinité  de  J.-Ch 
ont  été  réfutées  par  Lecoz.  X.  Diffés 
rentes  Biographies  spéciales  :  Ma 
lesherhes,  i8o3,  iu-8^.  —  Histoire 
d' Homère  et  d' Orjjhée,  1808,  in-S". 
— Les  Eloges  de  Lafontaine ,  de  Ca- 
mus ,  de  Montalembert  ,  de  Forbon* 
nais  et  de  Bailly.XI.  OEuvres drama- 
tiques et  littéraires,  Paris,  i8o4- 
1009 ,  18  V.  in-8".  :  il  y  a  rassemblé 
V Essai  sur  la  tragédie  ,  dont  on  a 
parlé  ;  le  Théâtre  d'un  sybarite ,  le* 
Eloges,  et  le  Fieux  de  la  Montagne, 
roman  oriental ,  dont  il  changea  le 
titre  en  celui  de  Tige  de  myrthe  et  13 
Bouton  de  rose.  XII.  Essai  sur  U 
journalisme,  Paris  ,  181 1 ,  in-8«.;— 
Défense  de  cet  essai,  ibid.  181 3^ 
in  -  8**.  Ce  n'est  pas  ,  comme  ou 
pourrait  le  croire  d'après  le  titre, 
une  histoire  des  journaux  littéraires, 
mais  une  défense  de  la  Philosophie 
de  la  nature ,  son  ouvrage  de  prêt 
dilection  ,  contre  les  attaques  des 
écrivains  périodiques  :  il  place  sur 
la  même  ligne  Laharpe  ,  Grirara , 
Geoffroy  et  les  principaux  rédac- 
teurs du  journal  des  Débats.  Sa  mau- 
vaise humeur  perce  malgré  lui  ;  et 
quoiqu'il  ne  le  dise  pas  ,  on  voit 
qu'il  regrette  vivement  de  n'avoir  pas 
obtenu  la  plus  légère  mention  dans 
le  rapport  de  l'Institut  pour  les  prix 
décennaux  :  il  recapitule  ses  nom- 


us 

breux  ouvrages, et  il  lespassf  enrrme 
aivec  une  complaisance  inexprimable: 
^  J'ai  travaille  ,  s'ecrie-t-il ,  non  pour 

mon  siècle,  mais  pour  les  siècles.  » 
pendant,  il  n'y  a  aucun  de  ses  écrits, 

iiit ,  qui  n'ait  trouve  beaucoup  de 
leurs  ;  Epomne  a  cte  traduite  en 

i  verses  langues  et  même  en  fla- 
mand ;  le  Fieux  de  la  Montagne  a  eu , 
selon  lui,  le  plus  brillant  des  succès, 
r!(\  Oncitera  cncoredecet  infatigable 
<  rivain  :  V Histoire  des  hommes^ 
f»  2  vol.  in-i  1 ,  avec  trois  atlas  iu-4".; 
<leuxième  édition  ,  53  vol.  in-8°.  , 
avec  cent  onze  gravures:  les  quarante- 
\d\  premiers  volumes  sont  de  De 
j.isle,  et  comprennent r///5toirean- 
aenne  ;  les  autres  ont  été  rédigés  par 
M.  Mayer  et  L.  S.  Mercier.  (  Foyez 
«ussi  LoAisEL  de  Tréogate.)De  Lisle 
a  continué  les  Eléments  de  Vhis- 
i  nre  de  France,  àeV Histoire  d*An- 
_  et  erre ,  et  de  V  Histoire  générale  , 
I>ir  l'abbé  Millot.  Le  Supplément  à 
L  histoire  de  France,  fut  saisi  en 

1 8o4 ,  et  tous  les  exemplaires  res- 

I  ints  eu  magasin  furent  brûlés.  Il 
d  également  continué  VHistçire  de 

I I  révolution  de  France ,  par  de  Ber- 
trand-Molcville,  depuis  le  onzième 
volume;  et  cette  continuation,  pu- 

'  iée  sous  le  nom  de  l'auteur  pri- 
Uiitif ,  sans  sa  participation,  a  été  dé- 
savouée. Il  est  l'éditeur  des  Mélanges 
di  poésie  et  de  prose  ,  par  M"»^.  de 
\  ida  m  pierre  ;  et  du  Recueil  des 
meilleures  pièces  de  théâtre,  faites 
en  France ,  depuis  Jiotrou  ,  Lyon  , 
i78o,8vol.in-8".  W-^s. 

LISOLA  (  Fbançois-Paul  baron 
DE  ) ,  publiciste  et  négociateur  célè- 
bre, était  né  à  Salins,  en  iOi3, 
d'iuic  famille  noble    i  ).  Après  avoir 

f,i)  Le  i>*r«  d«  1  îiola  -eiii  qii*lifi*  é<uyrr  «■ 
iit^.tie  aiir  ce  point,  pire»  qu«  !"•  Iil»cllulc» 
(«4iir..n  te  •ont  iittdch*»*  I.  i-p»»»»"»»'  ••"•'*'• 
•  I»  û»ri-ne    l.»  ba»-»  »'«lr«ct. on.  I/i»>it«'ir  d*  I  A- 

pii  «M  piéfdpotmrUi0ir«  étUti/ùêr,  i9a  aM<*^' 


US 


565 


termine  set  étuàm  et  prif  Mt  de- 
grés à  l'université  de  Dole ,  il 
s'établit  à  Besançon  ,  où  il  parUgra 
ses  loisirs  entre  la  culture  des  lettres 
et  la  profession  d'avocat  (  i  ).II  par- 
vint, en  i638,  à  se  faire  élire  mem- 
bre du  conseil  annuel ,  chargé  du 
gouvernement  de  la  ville  :  mais  son 
élection  fut  cassée ,  parce  qu'elle 
n'avait  point  été  faite  librement  ;  ef 
il  s'enfuit  en  AH'^magne  pour  «hap- 
)er  aux  poursuites  dirigées  contre 
ui.  Ses  talents  ne  tardèrent  pa5  à  le 
faire  connaître  d'ime  manière  avan- 
tageuse. H  n'avait  que  trente  ans , 
lorsque  l'empereur  Ferdinand  UI 
le  nomma  son  résident  à  la  cour 
d'Angleterre  ;  et  il  se  conduisit  dans 
ce  poste  difficile,  avec  une  prudence 
qu'on  aurait  à  peine  attendue  d'an 
bomme  consommé  dans  les  affaires. 
Il  fut  ensuite  envoyé  en  Polocne ,  et 
il  signa, en  i(i6o,le  traité d'CMi¥a( 2): 


Irtice  iMtola  {   e'«âi  oti«  t^ruUlîon  d«  U 
au  verjuj)  f  ta    fait   daatanilra    •\'\i>  c»bir«n«r, 
cl  ajoula  :  •   Quoi  qu«  voua    r  l>o«* 

'  B  tlé|»'iia^r    Tolia     uem  ,    et    t».  *•»• 

•  un    mot    italian  ,    an    *oua    *  '•» 

•  voua  demeurare»  Liaola  on  ".*«% 
>  i|iroti  ae  soii«i''i)<liâ  Ja  la  p'*  ** 
m  la  baaii  nom  qua  prraonna  n  «<                    ^»»fil 

•  Toii».  •  (  fmg  8.  Va  daa  ft^r.i  d»  l..io;«  •tail 
c).«ao<aa  da  la  catha.lr.la  da  Baaaa^an  .  digailé 
qui  ,f  »m  ccnférait  alora   qu'à   la  «•l>UaM. 

(  )  Dana  aa  iaulMaaa,  I.ia^U  rampoaaU  4«« 
Tar»  lian^ie  Ou  irauTa  daa  jltrtcn  d«  UI  •• 
d<rTaiit  da  la  Sytiutnirr  de  J  Mâu «t ,  »t  ««  tam» 
nri  k  la   louangr   du    f^nwd  !-••  -f  <• 

\  Entrée  de  la  rrinr-mére  éa  fl*i' 

Il  a  «n  outra  putlié    un    Jh'f  '  »•' 

la  mort  de  la  prjnreae    Clair<    t.-g*'^',     â»- 
i&3i  .  »•-••. 


faute  d'Eipagne,  X«»aa(««  ,  i434 

^•1    L)>irant  la    nmiioii  «n    T^\ 
d-   I 
J.l,> 

loi 

fa.'. 


!•    ^araa 


•I  aue  ce  i">.c«  i»»-  tf.x'ii  »  >  •'  ">  '  ■* '"V 
d-  ••courrr  la  roi  .IK«p-«"».  •"'  **^"^'î* 
Fra.M.rUh  .,.|f«»t.a    »»  ?•"••;«  "'^^V*  *^ 


a«ita  J»a«-C»a»- 

Ut. t.  Oxitlaawa  . 


566 


LIS 


mais  ses  intn;:^ues  ne  tardèrent  pas  à 
le  faire  éloigner.  L'empereur  Lëo- 
pold   l'ayant  nommé  son  ambassa- 
deur en  Espagne,  il  y  conclut  le  ma- 
riage de  son  souverain  avec  une  des 
infantes, et  détermina  Philippe  IV  à 
envoyer  en  Flandre  une  armée  desti- 
née à  s'opposer  aux  projets  d'agran- 
dissement de  la  France.  Il  joua  un 
rôle  dans  les  discussions  qui  s'élevè- 
rent au  sujet  des  prétentions  de  Louis 
XIV  sur  les  Pays-Bas  et  le  comté  de 
Bourgogne,  et  mit  au  jour,  à  cette  oc- 
casion, différents  écrits  qui  eurent  un 
grand  succès.  Tous  les  écrivains  aux 
gages  du  ministère  récurant  l'ordre 
de  le  réfuter.  Le  marquis  deLouvois, 
naturellement  violent ,  était  si  fort 
irrité  contre  Lisola,  qu'il  manda  au 
comte  d'Estrades  de  le  faire  arrêter 
à  son  départ  de  Liège ,  et  de  l'en- 
voyer pieds  et  poings  liés  à  Paris  , 
ou  de  le  tuer  s'il  faisait  résistance. 
(Voy.  VAnn.  litiér.,  1760  ,  tom.  i  , 
pag.  i85.  ) Lisola  signa, en  1668, le 
traité  avec  le  Portugal;  et  il  eut  part 
à  la  paix  d'Aix-la-Chapelle,  qui  fut 
conclue  la  même  année.  Il  fut  accusé 
d'avoir  conseillé  les  mesures  vio- 
lentes prises  à  l'égard  du  cardinal  de 
Furstemberg  ,  connu  par  son  atta- 
chement à  la  France  (  Vojez  Furs- 
temberg ,  XVI,   167  );  et  Tonne 
voit  pas  qu'il  ait  songé  à  se  discul])er 
de  ce  reproche  très-grave.  Ce  n'était 
pas  le  seul    que  lui  fissent  les  écri- 
vains français  ;  ils  le  représentaient 
comme  un  artisan  d'intrigues ,  habile 
à  semer  des  défiances ,  et  plus  propre 
a  reculer  la  conclusion  d'un   traité 
qu'à   l'avancer  ;  d'ailleurs   homme 
vénal ,  n'écrivant  ou  n'agissant  que 


U'-Olivn,  sons  iirétexte  que,  par  la  mort  (le  Cliar- 
les-Gustav  ,  airi.ce  1p  ati  février  lb6o  ,  les 
pleins  pouvoirs  des  ministres  Suedoisetaiei.tex- 
çiies,  mais  les  envoyés  piouvèrentqiie  c<ùs  pou- 
Tnirs  étaient  donné»  iion-seiilement  au  nom  du 
ïloi,  mais  ciicoïe  au  uoiu  du  loy^uiuc,  ij-»-^— ». 


LIS 

par  jalousie ,  et   ne  se  conduisant 
que  d'après  les  calculs  d'un  vil  inté- 
rêt. Lisola  se  détermina  enfin  à  re- 
pousser ces  injures  dans  le  Dénoue^ 
ment  des   intrigues  du  temps  ^  ou- 
vrage  dans  lequel  il  parle  de  lui  à 
la  troisième  personne  ,  et  avec  une 
modération  qui  prévient  en  sa  faveur» 
Il    y    soutient    qu'il   s'est    toujours 
exprimé  dans  des  termes  convenables 
sur  le  compte  du  roi ,  et  qu'il  a  cons- 
tamment rendu  justice  aux  qualités  et 
aux  vertus  de  la  nation  française  ;  - 
que  c'est  malgré  lui  qu'il  a  pris  la 
plume  ,  pour  répondre  à  des  libelles- 
injurieux  à  son  souverain;  qu'il  n'a 
jamais  été  guidé  par  des  motifs  de 
haine  ni  de  jalousie,  et  moins  encore 
par  son  intérêt  personnel ,  puisque, 
malgré  les   hautes   fonctions   qu'il 
remplit  depuis  si  long-temps  ,   sa 
fortune  est  si  médiocre,  qu'il  se  voit 
obligé  de  solliciter  une  petite  retraite 
où  il  puisse  passer  en  repos  le  reste 
de   ses   jours  ,  loin  du  tracas   des 
affaires.  Lisola  avait  été  créé  baron 
de  l'Empire,  et  il  aurait  sans  doute 
été  désigné  pour  assister  au  congrès 
de  Nimègue  ;  mais  il  mourut  avant 
l'ouverture  des  conférences.   11  est 
bien  étonnant  qu'on  ne  sache  point 
d'une  manière  ])récise  l'époque  de  l 
mort  d'un  personnage  aussi  distin- 
gué (t).  Aujourd'hui  qu'il  n'existe 
plus  de  préventions  contre  Lisola , 
on  doit  convenir  qu'il  avait  beau- 
coup d'esprit ,  de  facilité  ,  de  péné- 
tration et  d'adresse.  Pelisson  a  dit  : 


(1)  M.  Grappin  fixe  la  mort  de  Lisola  à  l'an^ 
née  ibrH.  {^Hisl.  abrégée  du  comté  de  Bourg.)-, 
les  auteurs  de  la  hiblioLhèinu  historique  du 
France  ,  en  1G73,  1676  ou  iG;?-  La  plupart  de» 
lexicographes  ont  adopté  cette  deriiièie  époqin.'} 
mais  il  paraît  certain  que  Lisola  était  mort  dans 
les  premiers  iours  de  l'année  ,675  (Voy.  la  Lellre 
de  Bayle  À  Minutoli  ,  du  ler.  mai  de  tett» 
même  année),  ou  à  la  fin  de  décembre  16,4.  Som 
testament  ,  (pi' il  fit  à  son  lit  de  mort  ,  est  dalé 
de  Vienne,  le  -zb  décembre  1674.  L«  P.  iJ»lt(it  a 
publié  ce  Teslameut ,  i(''i^ ,  iu-ia« 


! 


1 


us 

m  qii*il  avait  seul  conserve  dans  %ti 
»  ouvrages  l.i  vigueur  de  l'Espagne, 
V  morte  el  éteinte  partout  ailleurs.  » 
(  Histoire  de  la  Couqiœte  de  la 
Franche-Comté.  )  Baylc  lui  a  rendu 
plus   de  justice  que  ses  autres  con- 
temporains  (  I  )  ;  enfin  l'ablie  d'O- 
livct  l'appelle  un  homme  illustre  , 
et  propose  son  exemple  à  ses  compa- 
triotes. (  Voy.  Vllist.  de    l'acad. 
anc. ,  page  867  ^  tome  i ,  édition 
-12.  )  On  lui  a  attribue  un  grand 
nombre  de  libelles  ('2);  «  mais  ou 
»  lui  en  a  donne  plusieurs  qu'il  n'a- 
>♦  vait  pas  faits  ;  artifice  de  libraire 
»>  pour  donner  cours  à  une  méchante 
»  pièce.  »  (  Bayle  ,  art.    Lisola.  ) 
Vos  seuls  ouvrages  qu'on  croie  véri- 
l)lement  de  lui,  sont  :  I.  Bouclier 
liétat  et  de  justice  contre  le  des- 
sein  manifestement   décom>ert    de 
la  monarchie  universelle  ,  sous  le 
timin  prétexte  des  prétentions  de  la 
ine  de  France  ,  1667  ,  in- 12.  Il  y 
iitientque  cette  princesse, ense  ma- 
int, n'a  pu  conserver  aucun  droit 
ir  les  états  de  la  maison  d'Autriche; 
cet  ouvrage  a  eu  une  foule  d'e'di- 
nons  ,  et  il  a  été'  traduit  en  espa- 
lol  ,  en  italien  ,  en  allemand  et  en 
iglais.  11  fut  défendu  de  l'introduire 
1   France  sous  les  peines  les  plus 
M-vcres  (3)  j  et  l'arrêt  rendu  cou- 


(0  Bayle  «'cil  cependant  égayé  an  •xi]«i  de 
la  plume  it  LitoU,  qu'il  propoa**  d"appendr«  à 
la    Toùte    d'un  temple;   ••  ou  de    la    poier   arec 

•  grande  cérémonie  dam  le  trèinr  pour  la  inoii- 

•  trer  aux  curieux  ,  i  peu  pr*»  comme  l'oii  mon- 
»  tre  le  miroir  de  Virgile  et  l'ép'^e  de  RoUad  , 

•  dunt  le  trésor  de  St.-lleaia.  •  (  LtUre  à  Xiau. 
toli ,  déjà  cité».  ; 

^a)  •  Ila'ettdonnéla  joie  darépai' '  ' 

•  1  Europe,  loui  lei  nom»  cmpriu. 
»  de  BcAoraÉ  ,  de  l'ahbé  nF.K!<rixi. 
m  de    WoLpHAVo  I  «le»    lib>  '.; 

■  toitt«*    langues,    pour    dt 
«  (  rempriaoïiaement  du   c^- 

berg    )  .  {R/filali'        ' 
r>  autres  ont  cru  qur  1 
•    '!«  1"  nam  de  WA»i 

»«  la  Bihliolhrqtie  hi.fur.>,-r  „■ ,  «.>»i 

^3,Laa  Jùpagnala  »•  preuaiesl  f ••  Je«lM»«»*t       p»*»  < 


US  'iG'J 

tre  le  Mvant  Ch/  Paiin ,  fui  «i 
partie  fonde  sur  rr  qu'il  en  avait 
reçu  un  rxem?' ■i'^'-  ''"  |î,.m....i- 
U.  Suite  du  /A 

de  la   reine  trt  y-t  mrmunr  .     itKj- 

iu-ia  ;  avec  des  addil. ,  iGfîB.  C'est 
une  réfutation  du  Dialnmie  sur  les 
dntits  de  la  reine ,  elc,  ifïl.  I.e  Pth- 
litique  du  *  '        //• 

sur  les  m  . 

pour  servir d'introducl ion  à  lu  InpU 
alliance,  Charleville,  lO^iJu-ia; 
Coloçne,  1672,  in-12;  il  id.  franc. 
et  allemand,  1674.  in  \^.  IV.  Le 
Dénouement  des  in  temps, 

167'!,  in- ri  II  a  pi...  ., ...  aient  ea 
vue ,  dans  cet  ouvrage,  de  se  justifier 
des  reproches  dont  ses  cni)emt<i  ne 
cessaient  de  l'accabler;  il  y  parle 
avec  éloge  de  Louis  XIV  et  ac  ses 
ministres.  V.  La  Sauce  au  i^rjus 
(souslenomdcFR.WAiu  ';>- 

logne,  i674,in-i2  (i);î  >ïS 

réimprimée  séparément  ou  daui  des 
recueils.  C'est  une  réponse  l^^•-vive  à 
M.  de  Verjus,  ambassadeur  français. 
Parmi  les  autres  ouvrages  attribtir*  à 
Lisola  on  se  contenlcra  (1< 
Lettre  d'un  gentiUi<nntn>-  A 
à  MM,  de  Liège  ,    M  lut 

vendue  par  ordre  des  n:..^.....  de 
celte  ville:  —  La  Sucd^  redressée 
dans  son  véritable  intérêt  ;  —  V Eu- 
rope esclave  ;  —  V Empereur  et 
l  Empire  trahis  y  tic.         W — ». 


moins  acr^rra  «aur  e*<( 
llbaMaa  fiartrala.  On    a 

taii.'     —    ■'"  '        .. ..    ' 


de< 


$m 


us 


LISSOIR  (Remacle  ),  aLbë  de 
1 .1  Valdicu  ,  ordre  de  Pre'montrc , 
naquit  à  Bouillon ,  le  1 2  février  1780, 
et  fut  ëlevë  par  les  soins  du  prési- 
dent de  la  cour  souveraine  de  cette 
^  ille ,  qui  l'avait  pris  en  amitié.  Ses 
éludes  finies ,  il  entra  à  Tabbaye  de 
la  Valdieu ,  au  diocèse  de  Reiras  ,  et 
y  fil  profession  en  1749.  I^ès  qu'il 
fit  prêtre  ,  on  le  fit  maître  des  no- 
■\iccs,  et  successivement  professeur 
de  théologie,  prieur  et  enfin  abbé  en 
I  766.  Son  premier  soin  fut  d'aug- 
laenter  la  bibliothèque  du  couvent. 
31  mil  au  concours  les  cures  à  sa 
Piomination,  et  établit  une  phar- 
macie pour  distribuer  des  remèdes 
aux  pauvres  du  voisinage.  Dans  la 
même  année  qu'il  devint  abbé ,  il 
])ublia  un  livre  intitulé  :  De  Vétat 
lie  V Eglise  et  de  la  puissance  lé- 
gitime du  Pontife  romain  ,  Wurtz- 
i)ourg  (Bouillon),  1766,  1  vol. 
iu-i  "2.  C'est  un  abrégé  du  Fehronius 
de  Févêque  Honthciin  ,  que  Lissoir 
dans  son  Avertissement  qualifie  de 
second  Gerson  ,  aussi  orthodoxe , 
(tus  i  savant  ^  mais  peut-être  plus 
hardi  que  le  premier.  Lissoir  s'ap 
propria  l'ouvrage,  le  refondit,  et  le 
rendit  sien,  comme  il  le  dit  lui- 
même.  Il  assure  qu'il  a  adouci  des 
c  ipressions  trop  dures  et  qu'iU  omt^ 
enticrement  des  sorties  trop  vives 
contre  la  cour  de  Rome;  mais  il  n'a 
pas  porté  assez  loin  les  corrections 
cl  les  suppressions.  Ainsi  il  soutient 
avec  Hontheim  ,  contre  nos  auteurs 
Lançais  ,  que  le  pape  n'a  point  une 
juidiction  proprement  dite  sur 
toutes  les  églises;  que  la  convocalion 
des  conciles  généraux  ne  lui  est 
3 -oint  réservée  ;  qu'un  décret  du 
pape  accepté  par  le  plus  grand  nom- 
bre des  éveques  dispersés  ne  forme 
point  un  jugement  irréfragable  et 
Idnah  II  essaie  de  répondre  sur  ce 


LIS 

diîrnier  point  aux  arguments  deBos-^ 
5uet ,  et  ne  voit  pas  quelle  porte  il 
ouvre  par  -  là  aux  disputes  et  aux 
erreurs.  Dans  les  deux  derniers  cha-, 
pitres ,  il  expose  sérieusement  les 
moyens  les  plus  propres  à  produire 
un  schisme  dans  l'Eglise  :  le  tout  est 
accompagné  d'expressions  aigres  et 
offensantes  pour  la  cour  de  Rome.  Je 
le  dis  sérieusement ,  dit  -  il ,  dans 
son  Avertissement,  si  fêtais  théo- 
logien ultra-mont ain ,  je  n  oserais 
seulement  sourciller  en  présence  de 
l'auteur  d'Emile.  Lissoir  ne  man- 
quait d'ailleurs  ni  de  connaissances,, 
ni  de  talent. Il  fut  utile  à  son  ordre  , 
dont  les  chapitres  nationaux  l'a- 
vaient nommé  visiteur;  il  refondit  les 
livres  liturgiques  des  Prémontrés  , 
en  surveilla  la  réimpression,  et  com- 
posa, entre  autres,  l'office  de  la 
translation  de  saint  Norbert.  Privé 
de  son  abbaye  lors  de  la  révolution , 
il  desservit  la  cure  de  Charleville, 
sous  l'évêque  constitutionnel  des  Ar- 
dennes ,  fut  enfermé  pendant  la  ter- 
reur ,  et,  après  ces  temps  funestes, 
vint  dans  la  capitale ,  où  il  s'attacha 
au  Journal  de  Paris,  comme  rédac- 
teur. Il  assista  au  concile  des  cons  - 
titulionuels  ,  en  1797;  et  l'on  y 
voit  son  nom  comme  député  du 
presbytère  des  Ar  dennes.  On  lui  fit. 
même  l'honneur  de  l'élire  évêque  de 
Samana  ,  dans  l'île  de  Saint-Do-' 
minguc  :  mais,  soit  qu'il  sentît  le 
ridicule  de  cette  élection ,  soit  qu'il 
prévît  les  dangers  d'une  telle  mis- 
sion, il  ne  fut  point  sacré;  et  l'on  ne 
voit  point  son  nom  dans  la  liste  des 
membres  du  second  concile  des  cons- 
titutionnels ,  en  1801.  Après  le  con- 
cordat ,  il  obtint  une  place  d'aumo- 
nicr  des  Invalides,  et  il  en  exerça  les 
fonctions  jusqu'à  sa  mort,  qui  eut 
lieu  le  i3  mai  1806.  C'était  un 
homme  instruit ,  laborieux  j  attaché 


1 


t 

I 


s  devoirs ,  et  auquel  il  n*a  man- 
pcul-clrc  que  des   idées    plus 

t  tes  sur  1rs  règles  du  gouver- 
ueuieat  ecclésiastique.  —  Son  frère 
aUié  (Théodore),  bénédictin,  a 
donné  une  Tiil>le  géographique  du 
^fdîijwloge  romain,  Pa  is,  1776, 

1  2.  P— C— T. 

LISTER  (  MAnTI^  ) ,  médecin  et 
iiraliste  ,  naquit  à  KadcliOc,  dans 
comté    de    Buckingham  ,   vers 
\S.  Son  grand  oncle  sir  Martin 
:er,  médecin  ordinaire  deChar- 
^  h'»",  ^  commença  son  éducation  , 
qui  fut  achevée  au  collège  de  Saint- 
Jean  à  Cambridge.  Il  devint  membre 
o  •  ce  collège,  en   1660,  par   une 
.  I  lonnauce  de  Charles  II ,  et  voya- 
.  ensuite  en  France ,  pour  se  per- 
îionner  dans  les  sciences  médica- 
.  De  retour  dans  sa  patrie,  eu 
70,  il  se  fixadans  lecoratéd'York, 
,  ratiqua  la  médecine  avec  succès, 
CL  employa  ses  loisirs  à  l'étude  de 
l'histoire    naturelle  et  à  celle  des 
iquilés.  Afin  de   poursuivre  ses 
licrches  dans  ces  deux,  branches 
^  connaissances  humaines  ,  il  en- 
pr'a  plusieurs  voyages  dans  di- 
>es   parties   de  l'Angleterre,  et 
tout  dans  le  nord.  Ses  travaux  le 
eut  en  relation  avec  M.  Lloyd , 
ibcrvateur  du   Muséum  Asbmo- 
i  à  Oxford;  et  il  curichit  celte  col- 
:  (  lion  ,  de  médailles  ,  d'autels  an- 
"i  jiics,  et  d'un  grand  nombre  d'ob- 
-  d'histoire  naturelle.   Des  mé- 
ircs  et  des  observations  qu'il  fit 
venir  à  Lloyd  ,  furent  envoyés 
.    celui-ci  à  la  société  royale  de 
!   »ndres ,  q«ù  reçut  Lister  au  nombre 
ses  membres.  En  1G84  ,  il  s'cta- 
i  dans  cette  capitale ,  et  ifut  bientôt 
'  membre  du  collège  des  médecins, 
iiivit  le  comte  de  Poilland ,  qni, 
I  ^v  >8  ,  fut  envoyé  comme  ani- 
i4r  a  la  cour  de  France  , 


US  w., 

par  le  roi  Gutllaume.  En  1709  ,  il 
fut  nommé  mr«lc(in  rn  ji^oiid  dria 
reine  Aune,  ri  il  mourut  U*  1  fcvrirr 
171 1.  Il  a  public  :  I.  Htstonà  sive 
Sjnapsis  conchjiinrum  Uhn  1  v  , 
•À  vol.  in  -  folio  ,  iG85  -  93  ;  ou- 
vrage iniporlant  et  souvent  cité  \utT 
Linné  ,  qui  le  proclame  le  plus  ri- 
che (  ditissimus  )  des  concnyli  ' 
gistes  de  son  temps  :  cet  oin 
contient  les  figures  exactes  ci  nu 
grand  nombre  de  coquillr^,  qui 
toutes  furent  dessinées  son  \ 

de  l'auteur  par  sesd«i\ 
sanne  et  Anne  :  celti 
lion  est  très-rare  et  1 1  « 
elle  esl  complète.  M.  Bruuct . 
son  Manuel  du  Libraire^  a  li 
un  très-long  détail  de  toulcN  1,  >. 
planches  qu'elle  doit  renfermai  1  . 
M.  Huddesford  ,  conservateur  du 
Muséum  Ashmolécn  d'Oxfonl  ,  en 
publia  en  1770  une  seconde  éditiMii. 
qui  est  moins  recherchée  ,  quoique 
Ton  y  ait  joint  la  Synonymie  de 
Linné.  II.  Ilislonœ  arùmaUum  An- 
^Uœtres  traclalus ,  in-4".,  1078. 
Ces  trois  traités  sont:  i®.  sur  les 
araignées  ,  2°.  sur  les  coquilles  ter- 
restres et  fluvialiles  ,  3°.  sur  les 
coquilles  marines  qu'on  trouve  eu 
Angleterre,  avec  un  quatrième  traité 
sur  les  picrrres  ay.int  la  forme 
de  coquilles  ;  ils  sonl  excellents  ,  et 
raoulrenl  dans  leur  auteur  le  génie 
de  l'observation  porte  ii  un  très- 
haut  degré:  il  y  en  a  un  extrait 
dans  les  Transactions  plùlosophi' 
auc's,  N«.  139.  Ou  peut  hre,  p.  ix 
de  la  pj  éface  du  TabUau  d€s  Jra- 
ncn/<?A' (  Parb ,  in  8*». ,  1'  "  '• 
jugcincul  que  l'auteur  d(  - 

a  porté  sur  le  Traite  des 
Gujic  a   donne  de  ce    1 


(t^  L«  «•lu«>«  a*4t  atr*  (••«»•  • 


57*  LIS 

bonne  traduction  allemande  (  in-8<*. 
Quedlinburg,  1778;  — .ibid.  1792; 
le  titre  seul  a  été  change' ,  et  il  n'y  a 
pas  eu  de  seconde  édition  )  :  il  a 
aussi   été  traduit   en  anglais  dans 
i'ouvrage  de  Th.  Martyn  ,  intitulé 
Ai^aneï  y  in-4^. ,  1793,  et  a  été  in- 
séré presque  en  entier  dans  leTraité 
de  Rai  sur  les  insectes  (  Voy.^ki). 
Lister  a  fait  des  corrections  et  des 
additions  importantes  à  ces   trois 
traités  y  dans  l'ouvrage  suivant.  III. 
jT.   Goedartiits  de  Insectis  in  Me- 
ihodum    redactus  ,    etc.  ,    in-8^., 
i685  (  Voy.  GoEDARï  );  c*est  une 
seconde  édition  du  même  ouvrage, 
publié  en  anglais  ,  in-4^. ,  en  1682. 
\S  .Exercitatio  anatomica  inqud  de 
Cochleis  agitur,  1 694 ,  in-8''.  V.  Co- 
chlearumlimacum  Exercitatio  ana- 
tomica ;  accedit  de  Fariolis  exer- 
citatio,   1695,   '1  vol.   in-8^.    YI. 
Conchjliorum  hivalvium  utriusque 
aqitce  exercitatio  anatomica  tertia; 
hiiic  accedit  Dis  sert  atio  medicina- 
lis  de  Calculo   humano ,   1 695  ,  1 
vol.  in-S*^.  VII.  De  Fontibus  medi- 
catis  Angliœ j  York,  1682;  Leyde  , 
1686  ,  in  -  l'i  j  édition  augmentée. 
(  Voy.  des  extraits  de  cet  ouvrage 
dans  les  Transactions  philosophi- 
rfues ,  nos.  j 3^  ^  1/^3^  j  /^/^  et  i GG )  ; 
réimprimé  en  1G84  ,  avec  une  au- 
tre Dissertation.  VIII.  De  morhis 
chronicis  tractatus,  avec  les  œuvres 
de  Richard  Morton  ,  Leyde  ,  i  GgG , 
in-40.  IX.  Exercitationes  médicina- 
les y  1697,  in-8<'.  X.  Notœ  in  Api- 
cium  Cœlium  de  Arte  coquinarid , 
1705,  in-8*^.  ;  Amst.,   1709,  in-8^. 
XI.  Un  grand  nombre  de  Mémoires 
insérés  dans  les    Transactions  phi- 
losophiques. XII.  Voyage  à  Paris 
en  1698,  in-80.;  1699,  en  anglais  ; 
cet  ouvrage  est  accompagné  de  six. 
plarches.  Les  détails  minutieux  qu'il 
renferme,  donucrcut  lieu  au  docteur 


Lit 

King  de  tourner  l'auteur  en  ridicule,] 
en  publiant  une  sorte  de  parodie 
intitulé  Voyage  à  Londres  :  mail 
ces  détails  ,  qu'on  critiquait  à  tort 
celte  époque  ,  sont  précisément  ce 
qui  rend  aujourdliui  le  Voyage  de" 
Lister  très-intéressant ,  parce  qu'on 
ne  les  retrouve  point  ailleurs  ,  et 
qu'ils  font  connaître  les  hommes 
et  les  choses  de  ce  temps-là.  Ainsi, 
sans  Lister,  nous  eussions  ignoré 
qu'il  existait  de  son  temps  une  ma- 
nufacture de  porcelaine  à  Saiiit- 
Gloud  (  Voy.  p.  1 39)  ;  et  que  c'est  à 
tort  que  des  hommes  de  nos  jours 
se  sont  vantés  d'avoir  trouvé  le  se- 
cret de  cette  fabrication.  Un  éléphant' 
qu'il  vit  à  Paris,  et  qu'il  compara' 
avec  un  autre  qu'il  avait  vu  treize 
ans  auparavant,  lui  donna  occasion 
de  distinguer  par  des  caractères  bien 
tranchés  les  deux  espèces  de  ce 
genre  d'animaux.  Lister  a  montré , 
dans  ses  écrits  sur  la  médecine,  trop 
de  penchant  pour  les  hypothèses , 
et  trop  de  prédilection  pour  des)' 
doctrines  anciennes  et  erronées  : 
mais  ses  travaux  en  histoire  natu- 
relle et  en  anatomie  comparée,  sont 
avec  raison  très-estimés ,  parce  qu'il 
s'est  montré  observateur  exact, plein 
de  sagacité ,  et  qu'il  a  indiqué  avec 
précision  les  rapports  naturels  des 
animaux  qu'il  a  décrits.     W — R. 

LITHGOW  (Guillaume)  ,  voya- 
geur écossais ,  du  dix-septième  siècle, 
parcourut  une  partie  de  l'Europe, 
de  l'Asie  et  de  l'Afrique  :  il  revenait 
en  Angleterre  ,  lorsqu'il  fut  arrêté  à  | 
Malaga ,  comme  espion  et  hérétique,] 
appliqué  à  la  torture,  et  condamné 
par  l'inquisition.  Après  avoir  beau-  j 
coup  souffert ,  il  fut  relâché  :  il  était  ! 
dans  un  si  triste  état  en  arrivant  à 
Londres  ,   qu'on   fut    obligé   de   le 
transporter  sur  un  lit  d€  plumes  , 
pour  le  présenter   à  Jacques  l*""., 


I.TT 

fui  cfiie  ce  prince  put  voir  combien 

irps  de  Litht^ow  avait  élc  toiir- 

li:  ;  ce  n'et.iit  plus  qu'un  s<|«c- 

mulile.  Toute  la  cour  accourut 

I  contempler  ce  sjHîctaclede  mi- 

t  ir.  Le  roi  ordonna  que  l'on  prit 

,;i  de  lui ,  et   paya  deux  fois  les 

N  de  son   voyage  aux  eaux  <lc 

I.  Il   lui  avait  recoraraaudc  de 

;  mer  de  Gondemar,  ambassadeur 

.()aç;!ie,  la  restitution  de  l'argent 

t  des  autres  objets  dont  le  gouver- 

•deMalai^a  l'aAMit  dépouille,  et 

indemuilc  de  mille  livres  ster- 

L'ambassadeur  promit  de  faire 

t  aux  demandes  de  Lithgow;  mais 

ni  sur  le  point  de  quitter  l'Angle- 

■  sans  avoir  rempli  sa  promesse, 

[lie    le  voyageur   guéri    de   ses 

\  ,  le  rencontrant  dans  l'appar- 

ut  du  roi,  l'accusa  ,  devant  plu- 

1  s  personnes  de  la  cour ,  d'avoir 

[ue'à  sa  parole.   Gondemar  lui 

iidit,  et  la  querelle  s'enflamma 

ment,  qu'ils  se  battirent  à  coups 

liinp;.  Tout  en  donnant  des  élo- 

1  Lilhgovv  pour  sa  conduite cou- 

use,  on  l'envoya  en  prison  ,  où 

-la  neuf  mois.  Il  a  public  :  Voya- 

aits  par  terre  .  pendant  neuf 

.  iV Ecosse  en  Europe  ,  Asie  et 

que,  Londres,  i(ii4,  '  v^'-  ^'*" 

ivec  fig.;ce  livre  fut  réimprime 

jues  années  après  :  la  nouvelle 

>n  était  dédiée  à  Charles  I*'''.;  il 

larut  )Hie   trad.  en  hollandais  , 

f. ,  \Ci^i  ,   I  vol.   in  -  4**. ,  b*g. 

relation  est  assez  amusante;  on 

iive  beaucoup  de  détails  sur  les 

PS    et   les    usages.   Quelquefois 

»nne  dans   le   inervcilleux  :    il 

ine  son  livre  en  disant,  qu'indé- 

i.un ment  des  mers  et  des  rivières 

!  a   traversées  ,  ses  pieds  souf- 

is  ont  parcouru  plus  de  trente- 

uille  railles  ;  ce  qui ,  ajoute-t-il , 

rcs  de  trois  fois  la  circonfcreace 


ITT  571 

dnç^nlie.  Sadrtrriptioo  d«  ririaad* 
•igi^MifaiiMTenct; 
«>  daosdhrcrsrecwilt, 

avec  le  récit  de  sesfoo&anca.  L'oiH 
▼rage  de  Lithguw  a  été  réimprimé  M 
commencement  de  rc  siècle.  On  a 
encore  de  lui  une  Hclation  du  ti^ 
deBreda.en  1637.  E— #. 

LH  HOV  (  Gustave  ) ,  poète  la- 
tin ,  né  en  Suède  ,  co  1692  ,  avait 
f.iit  de  très-bonnes  études  é  Ûpsal , 
rt  se  proposait  d'entrer  dans  la  car- 
rière de.s  emplois  civils  ,  lorsque 
l'enthouMasmc  qu'inspiraient  les  ex- 
ploits de  Charles  XII,  lui  fit  pren- 
dre le  parli  de  suivre  ce  héros.  Il 
eut  pari  à  j)lusicurs  actions  brillantes, 
mais  en  relira  \\n\  de  fruit  pour  son 
avancement  ,  et  quilta  le  service  à  la 
mort  du  roi.  Il  se  livra  dans  sa  re- 
traite à  la  littérature ,  cl  cultiva  sur- 
tout la  poésie  latine.  Une  partie  de 
ses  poésies  parut  à  Stockholm  ,  en 
1734  ,  in-4°. ,  sous  le  titre  de  Poë- 
mata  herdico-tniscellanea.  Il  de- 
vait en  publier  un  second  recueil  ; 
mais  il  ne  j)ut  exécuter  ce  projet , 
et  remit  son  manuscrit  a  un  ami , 
qui  ne  trouva  pas  non  plus  l'occa- 
sion d'en  faire  part  an  public.  I.i- 
thov  mourut  en  x^Wà.  On  a  encore 
de  lui  :  Panc^yricus  erscquialis  in 
obitiwi  ia:oli  x\\  ,  Stockholm  , 
i7'io,in-4".dc  3a  p.,  et  réimprimé 
quelque  temps  après.  Ce  panégyri- 
que fit  une  grande  sensation  ru  Sui-de; 
on  en  trouve  des  extraits  dans  les 
Acta  Ulleraria  Stieciœ ,  lom.  1  ,  p. 
145.  Cs^hV, 

LITTLETON  (  Thomas  ).célèbr« 
magistrat  anglais  ,  d'  lenn<* 

famille,  était  le  (ils  <  mas 

WesTote  et  d'Eliwb  ion  , 

dont  il  prit  If  nom  .  i  vo- 

lonté '  jMii"  nuuniel. 

Il  na»!  .  dans  le  corolé 

de  W"!      Il    vers  le 


572  LIT 

ment  du  xv^  siècle ,  suivit  là  car- 
rière du  barreau  ,  et  s'y  distingua. 
Henri  VI  le  créa  juge  de  la  cour  du 
palais,  ou  maréchal  de  la  maison  du 
roi,  et  en  i455,  sergent  duroi  {king's 
àer/efl/?t),  charge  des  assises  du  nord. 
A  l'époque  de  la  révolution  qui 
iit  passer  la  couronne  de  la  maison 
<ie  Lancasler,  à  celle  d'York,  dans 
la  personne  d'Edouard  IV,  Litlleton, 
alors  sheriiï'du  comté  de  Worcester, 
fat  continué  dans  ses  fonctions  par 
ce  souverain,  qui  le  nomma,  en  1 466, 
l'un  des  juges  des  plaids  communs. 
La  même  année ,  il  obtint  un  writ 
adressé  aux  comjnissaires  des  doua- 
nes (  Customs)  de  Londres,  Bristol , 
et  Kingston  sur  Hull,  pour  leur 
enjoindre  de  lui  payer  annuellement 
110  marcs,  afm  qu'il  put  soutenir 
avec  honneur  sa  dignité,  i  o6  shelings 
II  sols,  pour  la  lourniture  d'une 
robe  fourrée ,  et  6  shelings  6  sols  , 
pour  une  autre  robe  appelée  Linura. 
Ijfut  fait  chevalier  du  Bain, en  i475, 
et  continua  de  jouir  de  l'estime  de 
son  souverain  et  de  la  nation ,  par 
hi  profonde  connaissance  des  lois 
anglaises,  jusqu'au  moment  de  sa 
mort,  arrivée  le  23  août  i48i.  Il 
fut  enterré  dans  l'église  cathédrale 
de  W^orcester ,  où  on  lui  érigea  un 
tombeau  de  marbre  blanc ,  décoré  de 
sa  statue.  Son  portrait  fut  placé  dans 
les  églises  de  Franckley  et  de  Hales- 
Owcn.  Thomas  Littleton  est  surtout 
connu  par  son  traité  des  Mouvances 
de  fief  s  (  Tenures  ) ,  qu'il  avait  com- 
posé pour  l'usage  de  Richard  son  se- 
cond fils.  Cet  ouvrage  a  eu  un  grand 
nombre  d'éditions  :  suivant  Midd- 
li3lon ,  la  première  fut  imprimée  à 
Londres ,  en  français ,  en  1 48 1  :  mais 
lord  Coke  suppose  que  l'édition  fran- 
çaise in-fol. ,  imprimée  sans  date  ,  à 
Rouen,  par  W.  Letailleur,  a  été  la 
première.  La  composiliou  originale 


LIT 

de  ce  célèbre  ouvrage  est  regardée 
comme  la  base  principale  sur  laque! 
le  repose  tout  l'édifice  des  lois  sur  h 
propiiété  dans  le  royaume-uni  ;  e 
l'excellent  commentaire  delord  Cok( 
est  considéré  comme  le  résumé  ei 
le  dépôt  de  ses  vastes  connaissance; 
sur  ce  sujet.  Une  réimpression  faiti 
en  1788  ,  in-fol. ,  iudépendammen 
des  annotations  précieuses  de  lort 
Haie  et  du  lord  chancelier  Nottin 
gham  ,  a  été  considérablement  araé 
iiorée  par  les  travaux  infatigable; 
de  M.  Hargrane  et  de  M.  Butler.  I 
existait,  sous  Edouard  III,  un  Hvri 
appelé  Anciennes  tenures,  qui  don 
nait  une  notice  des  différentes  mou 
vances  ou  tenures  dont  la  terre  étai 
tenue ,  de  la  nature  des  propriétés 
et  de  quelques  autres  objets  rela 
tifs  à  la  possession  des  terres.  Ce  pe 
tit  livre,  fort  sec  et  fort  aride,  n'; 
guère  d'autre  mérite  que  d'avoi 
donné  l'idée  des  Tenures  de  Little 
ton ,  ouvrage  qui  fut ,  suivant  Garni 
den ,  aussi  utile  au  droit  coutumie 
anglais,  que  le  code  de  Justinien  l'a 
vait  été  au  droit  civil.  La  subs 
tance  de  ce  grand  travail  a  été  re 
donnée  en  français  sous  ce  titre 
Anciennes  Lois  des  Français ,  con 
se  vées  dans  les  coutumes  anglai 
ses ,  recueillies  par  Littleton ,  avet 
des  observations  historiques  et  cri 
tiques  par  D.  Houard,  Rouen,  1779 
2  vol.  in-4<*.  D — z — s. 

LITTLETON  ou  LYTTELTO? 
(  Edouard  ,  lord  )  ,  garde  du  gran( 
sceau  d'Angleterre  ,  sous  le  règn 
de  Charles  I*^*".  ,  de  la  même  fa  mil  1 
que  le  précédent ,  était  fils  d'Edouar» 
Lii  tleton  ,  juge  du  pays  de  Galles 
nommé  au  parlement  ,  en  i(>'.i8 
après  avoir  exercé  la  professio) 
d'avocat ,  il  fut  chargé ,  avec  Edwan 
Coke  et  sir  Dudley  Digges,  de  pré 
sciitcA'  la  pétiliou  des  droits  (  ih 


Î.ÎT 

ition  nf  rioftis  ) ,  à  la  rlambre 
lords.  On  lui  confia  aussi  le  rap- 
1 1  à  faire  sur  l'arcusation  purtce 
itrc  le  duc  de  Buckingham  ,  rc- 
vement  à  la   mort  du  roi  Jar- 
S  et  il  s*ea  acquitta  avec  tant 
liesse ,  qu'il  fut  loue  par  tous  les 
lis  ,  quoiqu'il  eût  à  racuager  à  la 
-  la  jalousie  du  peuple  et  l'hon- 
ir  de  la  cour.  Liltleton  succéda  à 
1   père  dans  les  fonctions  déjuge 
pays  de  Galles  ;  il  fut  ensuite  élu 
sseur    à    Londres  ,  et  dans    le 
nie  temps,  conseiller  de  l'univcr- 
d'Oxford.  En  i()39. ,  il  fut  nom- 
premier  lecteur  d'inner-temple; 
^  solliciteur  général ,  lord  prési- 
t  des  plaids  communs  ,  et  enlin  , 
i64o  ,  lord  garde  du  sceau  à  la 
•  e  de  lord  Finch ,  qui  s*était  évadé 
ir  se  soustraire  au   ressentiment 
parlement.  A  cette  dignité  le  roi 
irles    I®»".   ajouta    celle   de    pair 
\iigleterre,  avec  le  titre  de  lord 
Litdeton,  baron  de  Mounslow.  Dans 
l'emploi  difficile  de  garde  du  sceau  , 
il  sut  conserver  quelque  temps  l'es- 
time de  tous  les  partis;  et  les  deux 
chambres  le  chargèrent  de  présenter 
en  leur  nom  ,  des  remercîments  au 
roi  ,  pour  le  bill  triennal   et  pour 
'   'li  des  subsides  :  mais  comme  il 
it  concouru, eu  i64i ,  à  faire  vo- 
it r  la  levée  d'une  armée  et  l'emploi 
actif  des  milices,  mesures  évidem- 
ment hostiles  pour  la  cause  rovale  , 
le  roi  envoya  d'York  l'ordre  de  lui 
retirer  le  sceau,  après  s'être  concerté 
pour  le  choix  d'un  successeur  avec 
Hyde  ,  depuis  comte  de  Clarendon. 
Hyde    qui   avait    toujours    eu    une 
cramle  considération  pour  le  garde 
du  sceau  ,  crut  devoir  auparavant 
lui  faire  une  visite ,  et  se  convainquit, 

Î>ar  la  conversation  qu'il  eut  a?ec 
ui ,  du  peu  de  fondement  des  craintes 
^u'ou  avait  suggérées  au  roi,  Littlo- 


ton  bii  prouva  qiie  son  birt  ioni- 
que ,  m  |>arai.^Mrit  agir  roiil^  la 
cour  ,  avait  été  d'ohlmir  U  con- 
fiance du  parti  qui  lui  ft«il  op|H>!(é, 
pour  pouvoir  conserver  le  scvah  ri 
le  remettre  au  roi    .  V 

désirerait  ;  il  ajouta '.  < 

joindre  S.  M. ,  avec  I"    '  t 

où   elle    l'ordouner.iii.    ! 
truisit  lord  Falkland  dr 
férence  ;    per«iuadé   que  \i  u 

sceau  tiendrait  sa  promesse,  il  pen^A 
qu'il  serait  bon  que  le  roi  lui  écrivît 
d'une  manière  flatteuse,  pour  Tnij;.!- 
geràserendreaYork:  l'avis  fut  a«l(»p- 
té; Littleton  envoya  lesceau à  York,  le 
2'Jt  mai  i(>4'i,etiesuivitle lendemain. 
Malgré  ce  service  important .  il  ne  put 
jamais  regagner  entièrement  la  con- 
fiance de  Charles  l'=^,  ou  plutôt  les 
sutlragesdu  parli  de  la  cour.  11  con- 
tinua cependant  de  remplir  ses  fonr- 
tioiis,  accompagna  le  roi  à  Oxford  , 
où  il  fut  reçu  docteur  ès-lois,  fut  fait 
membre  du  conseil  privé,  et  enfin,  co- 
lonel d'un  régiment  d'infanterie.  Il 
mourut  à  Oxford  le  a^  août  iG4'». 
En  iG83  un  monument  fut  érige  a 
sa  mémoire,  par  sa  fille  et  unique 
héritière  lady  Anne  Littleton  ;  et 
la  même  année  parurent  ses  Hap- 
ports.  Opndant ,  M.  Steven^ ,  dans 
son  introduction  aux  lettres  de  lonl 
Bacon  (  édition  de  170'!,  page  il  , 
pense  qu'ils  ne  sont  pas  de  lui;  beau- 
coup de  questions  étant  les  mômes 
que  dans  les  rapports  deHrthy.  Lord 
Clarendon  dit,  en  parUiil  de  Mf 
Edouanl  Littleton  ,  «  qnr  rViait  un 
»  homme  tition 

»  dans  la   1  pour 

»  \c  s.i\"ii  <■(  M-  .ni'  >  rfV^nt.<;:r« 
»  qui  (ii>tui;4'iriit  i.  s  iM.uimos  1rs 
»  pliu»  éini lient.*.  ■  Il  avaif  fait  , 
dans  la  partie  la  plu»  diliirile  et  l« 
moins  connue  de»  lois  ,  cWs  fe- 
cbercbei  •""-i  nmfpnd»*  .  que  dâOl 


574  I-IT 

celles  cVun  usage  liabituel.  Wite- 
locke  le  présente  comme  un  homme 
plein  «le  courage  ,  de  savoir  et  de 
sens.  Il  est  cependant  difficile  d'ex- 
cuser sa  faiLlcsse  et  son  irrésolution 
dans  quelques  circonstances;  quoi- 
Cfu'on  doive  avouer  qu'il  rendit  lui- 
Kiêrae  le  sceau  à  sou  infortune  sou- 
verain dès  l'instant  ou  il  s'aperçut 
qu'il  ne  pouvait  plus  le  retenir  d'une 
manière  utile,  et  qu'il  mourût  fer- 
mement attache  à  sa  cause.    D-z-s. 

LITÏLETON   (Adam),   savant 
anglais,  ne  en  1627,  àHales-Owen, 
dans  le  Shropshire,  exerça  les  fonc- 
tions de  ministre  del'ëgliseet  de  maî- 
tre d'école.  On  luiconfèra,  en  1670,  le 
degré  de  docteur  en  théologie  ,  sans 
qu'il  eût  pris  les  degrés  de  bachelier 
et  de  maître  ès-arts,  en  considération 
de  son  mérite  extraordinaire.  Il  pos- 
sédait, en  effet,  des  connaissances 
très-étendues  en  différents  genres ,  et 
contribua  particulièrement  à  mettre 
J'étude  de  la  langue  latine  en  hon- 
neur dans    son   pays.  Il  mourut   à 
Chelsea,  dont  il  était  pasteur,  le  i*^"^. 
juillet  1694,  après  avoir  été  maître 
de  l'école  de  Westminster ,  prében- 
dierdela  cathédrale  de  cette  ville, 
et  chapelain  de  Charles  II.   On  a  de 
lui ,  entre  autres  ouvrages  :   I.  Un 
Dictionnaire  latin ,   grec  y  hébreu  ^ 
anglais  ,   très  -  estimé  ,   Londres  , 
1679  ,   in-4**.    II.     Elementa  re- 
îigionis ,  sive  quatuor  capita  cate- 
chetica  totidem  linguis  descripta , 
in  usum  scholarum ,  1 658  ,  in-8°. 
m.  Soixante-un  Sermons ,  1 680  , 
in-8<*.  lY.  Préface  des  OEuvres  de 
Cicéron^  Londres,    1681  ,  2   vol. 
in-folio.  V.  La  traduction  de   l'ou- 
vrage de  Sclden ,  Jani  Anglorum 
faciès  altéra ,   avec  des  notes ,  pu- 
bliée sous  le  nom  de  Redman  West- 
lote,  i683,  in-folio.   —  Edouard 
LiTTLEToi»,  sous-maître  de  l'é- 


LIT 

coîe  d'Eton  ,  ministre  de  Ma 
Derham ,  dans  le  comté  d'Oxfo 
et  chapelain  de  leurs  majestés  , 
publié  quelques  petits  poèmes  pa; 
lesquels  on  cite  celui  qu'il  compi 
surune  araignée.  Il  mourut  en  1 73^ 
Un  recueil  de  ses  sermons  fut  i 
primé  après  sa  mort.  L. 

LITTLEÏON.     Fojez     LYT 
TELTON. 

LITïPiE  (Alexis),  médecin, 
membre  de  l'académie  des  scienceî 
de  Paris  ,  né  en  i658 ,  à  Cordes,  ei 
Albigeois ,  mourut  à  Paris  ,  le  3  fé 
vrier   179.5.  Il  manifesta  dès  l'eit 
fance  un  goût  passionné  pour  l'étude; 
et  s'y  livrait  avec  une  très-vive  appU< 
cation.  Sa  fortune  était  médiocre  ;  eJ 
tandis  qu'il  faisait  ses  humanités  ao 
collège  de  Villefranche,  il  répétait 
moyennant  une  légère  rétribution, , 
d'autres  écoliers  plus  riches  et  moins 
laborieux ,  ce  qu'on  venait  de  leui 
enseigner.  Dès  cette  époque,  il  se  sen- 
tit pour  l'art  de  guérir  cette  voca-' 
tion  qui  devait  un  jour  lui  faire  ob- 
tenir les  plus  brillants  succès  ;  et  il 
employait  le  temps  des  récréations 
et  des  ])romenades   à  suivre  un  mé- 
decin chez  ses  maladesj  au  retour, 
il  s'enfermait  pour  écrire  sur  ce  qu'iî 
avait  entendu.    Après  avoir  achevé  | 
ses   humanités,   il   alla  étudier   Ia| 
médecine    à     Montpellier  ,    y    fit 
encore  des  répétitions  aux  élèves  , 
et  économisa  de  quoi  se   rendre  à 
Paris.    De  toutes  les  parties  de  la 
science  ,  l'anatomie  était  celle  dont 
l'élude  avait  le  plus  d'attraits  pour 
lui.  A  cette  époque,  ce  sentiment  qui 
faisait  regarder  comme  une  sorte  de 
profanation ,  la  mutilation  des  cada- 
vres,  apportait  encore  de   grands 
obstacles  aux  travaux  anatomiques. 
Littre  éprouva  des  difficultés  infinies^ 
pour  satisfaire  son  goût.  Heureuse- 
ment pour  la  science  ;  il  se  lia  avec 


i.ir 

1  tlo  la  Silprtriere,  mii 
^position  tous  les  cada- 
s  de  l  hôpilal.  Ils  s'eufermrrenl 
Hinblc  pendant  l'hiver  tic  i(>8j  , 
i  11  fut  fort  long  et  très-froid  ;  et  ils 
<séquèrent  plus  de  aoo  cadavres. 
iitôt  sa  rcHommëe  s'eteiidil  parmi 
étudiants; et  un  très-j:;rand  nom- 
•  d'entre  eux  s'adressèrent  à  lui 
ir  eu  recevoir  des  leçons.  A  cette 
>>quc,  il  fallait  appartenir  à  une 
tporation  pour  avoir  le  droit  de 
rodes  cours  publics, et  Litlren'e- 
î  pas  docteur  :  les  chirurgiens  de 
is  lui  suscitèrent  un  procès  par- 
vant  le  lieutenant  de  police.  Il  fut 
Mtraint,pour  se  soustraire  à  cette 
ti  acasscrie,de  se  réfugierdans  l'asyle 
Il  Temple.  Le  grand-prieur  de  Yen- 
iiie  l'accueillit,  et  lui  donna  la  per- 
ssiou  de  disséquer  et  d'enseigner. 
tis  un  officier  subalterne  du  palais 
rmit  à  ses  ennemis  de  venir  le 
iibler  dans  ses  travaux.  Ilsenle- 
cnt  les  cadavres  qui  servaient  à 
démonstrations,  et  il  fallut  qu'il 
rabattît  sur  les  animaux  etprinci- 
I  ement  sur  les  chiens.  Tant  de  con- 
I  iétés  ne  firent  qu'exciter  son  zèle, 
iccroître  sa  réputation ,  comme  le 
ubre  de  ses  écoliers.  Tous  ses  ins- 
its  étaient  occupes   par  l'étude j 
n'allait  pas  même  à  la  pronie- 
le;  et  ne  fréquentait  aucune  so- 
!é  privée.  Il  assistait  aux  panse- 
iits  des  hôpitaux  ;  il  en  suivait  les 
lecins  dans  leurs  visites ,  et  aug- 
ritait  incessamment  ses  connais- 
ses. Enlin  il  fut  reçu  docteur  rc- 
if  de  la  faculté  de  médecine  de 
!  is.  Doué  d'une  grande  sagacité, 
tait  privé  de  cette  élw|ucnce  [>er- 
sive  si   nécessaire    au    médecin 
!S  l'exercice  de  ses  fonctions,  cl  il 
fallut  pas  moins  que  son  extrême 
l)ileté  pour   qu'il  réussît  dans  U 
ti-iiw.    Fm  t''>;>o,  il  fut  nomme, 


Lit  «75 

selon  V»%3tp  de  ctt  H»^  4è?t  à 
racadémitte  fcîtMti;  et  il  4tfMt 
successiveouBt  «itociéfli  numlwiéi 

celte  compagnie.  Nommé  méàmÀiàéê 
(piàlelct ,  cette  pbct  1« 
l'occ^siou  d'obscnrcr  des  a( 
rares,  et  de  se  livrer  aux  rechartlMt 
anatoniiques.  I.ittre  n'a  paspuUié 
d'ouvrages  particuliers;  mai»  il  a  en- 
richi le  Hccucil  de  l'acadëmie  des 
sciences  d'un  grand  nombre  de  Mé^ 
moires ,  presque  tous  rdatifi  à  l'a- 
uatomie  pathologique;  les  phis  re- 
marquables sont  :  I.  Observatimn 
sur  une  nouvelle  espèce  tU  kêrnim  t 
Mém.  de  Tacad.  des  sciences,  1700. 
II.  Description  de  l'urètre  deVhmn- 
me,  ib.  III.  Observations  sur  11 
tus  humain  monstrueu  r,  1701,  ii>èti. 
IV.  Observation  sur  les  ovaires  et 
les  trompes  d'une  femme,  et  sttrum 
fœtus  trouvé  dans  l'un  de  ses  ovairet , 
1701,  ibid.  V.  Obserpmion  mr 
un  fœtus  humain  trouvé  àai%s  Im 
t  rompe  gauclie  de  la  mntrice ,  1 7  o^ 
ibid.  Ces  deux  observations  sont  du 
plus  haut  intérêt;  la  » 

d'ime  manière  incoiii  r 

la  première  fois  ,  la  pos^  1* 

grossesse  fa^/ï/d.  VI.  ///  un 

fœtus  humcùn ,  tiré  du  ventre  de  sm 
mère,  par  le  fondement^  17»^, 
ibid.  Littre  fut  un  des  hommes  les 
pins  laborieux  qui  aient  cultivé  les 
sciences;  leur  étude  absorba  toute 
sa  vie  :  il  y  avait  quinze  ans  qu*fl 
cuit  à  Paris ,  et  qu'il  n'arail  |>a$  e« 
le  temps  d'écrire  à  ses  parents.  Il 
u'assista  jamais  à  aucun  spectacle,  cl 
il   III.  ire,  uniquement 

parr  :riais  le  loisir  <lc 

ftuime.  f^oyez  $01 
;  'riirllr.  F — T.. 


,575 


LÎU 


la  tutèle  d'Ausprand,  (J^oy.  ce  rom.) 
Raginbert  ,  cousin  de  Cimibert , 
profita  de  la  jeunesse  de  Liutbert 
pour  lui  disputer  le  trône;  il  rem- 
porta, en  701,  une  victoire  sur  Aus- 
praud,  et  mourut  peu  de  temps 
après.  Ausprand  s'enfuit  avec  son 
pupille  ,  et  bientôt  il  trouva  le 
moyen  de  rassembler  une  nouvelle 
armée,  avec  laquelle  il  vint  attaquer 
Aribert  II ,  fds  de  Raginbert.  Il  fut 
défait  une  seconde  fois  près  de  Pa- 
vie,  et  Liutbert  tomba  entre  les 
mains  du  vainqueur,  qui  le  fit  mou- 
rir dans  le  bain  ,  en  lui  ouvrant  les 
yeines.  S.  S — 1. 

IJUVA  I,  roi  des  Visigoths,  était 
en  56o  ,  gouverneur  de  la  Septima- 
nie  ou  Gaule  narbonnaise;  il  joignait 
à  une  grande  valeur,  des  qualite's 
pbis  rares  encore ,  et  qui  lui  frayè- 
rent le  chemin  du  trône.  Après  la 
mort  d'Athanagilde ,  il  fut  désigne' 
son  successeur ,  dans  une  assemblée 
des  grands  du  royaume;  et  son  élec- 
tion reçut  l'assentiment  des  Visi- 
goths  d'Espagne.  Il  avait  eu  d'un 
premier  mariage  avec  Théodosie  , 
fille  de  Severien,duc  ou  gouverneur 
de  Gartliagène,  deux  fils  :  saint  Her- 
ménigilde  et  Recarède.  Sa  femme 
étant  morte,  il  épousa  Gosuintlie, 
veuve  d'Athanagilde,  et  cette  union 
contribua  beaucoup  à  affermir  son 
autorité.  Cependant  Liuva  avait  à 
redouter  la  haine  de  quelques  sei 
gneurs ,  dont  les  droits  au  trône 
étaient  les  mêmes  que  les  siens ,  et 
qui ,  trompés  dans  leurs  espérances, 
pouvaient  essayer  de  le  renverser. 
Loin  de  paraître  craindre  leurs  pro- 
jets ,  il  les  rapprocha  de  sa  personne 
par  de  noiivelles  dignités ,  et  les 
combla  de  ses  faveurs.  Il  fixa  sa  ré- 
sidence à  Narbonne,  ville  qu'il  affec- 
tionnait ;  mais  celte  préférence  ac- 
cordée à  une  ville  de  îa  Septimauie, 


LIV 

servit  de  prétexte  aux  Visigothf 
d'Espagne  pour  se  révolter.  Il  en-^ 
voya  aussitôt  contre  eux,  son  frère 
Leuvigilde;  et  en  569  ,  il  l'associai 
au  trône,  lui  abandonnant  toute  la* 
partie  située  au-delà  des  Pyrénées. 
Liiiva  fit  fleurir  dans  ses  états  l'agri- 
culture et  l'industrie:  quoiqu'élevé 
dans  les  principes  de  l'arianisme,  i^ 
traita  toujours  avec  une  égale  bonté 
tous  ses  sujets, et  veilla  à  ce  que  \çs 
sièges  catholiques  ne  fussent  occupés* 
que  par  des  évêques  pieux  et  tolc-' 
rants.  Cet  excellent  prince  mourut  à 
IVarbonne ,  Tan  5^2.  Leuvigilde  réu- 
nit alors  la  Scptimanie  à  l'Espagne. 
—  Liuva  II ,  roi  des  Visigoths , 
était  petit-fils  de  Leuvigilde  ;  il  n'a- 
vait que  vingt  ans,  lorsque  son  père, 
Recarède,  mourut,  et  il  lui  succéda' 
sans  obstacle,  en  601.  Mais  Wileric^ 
oubliant  qu'il  devait  la  vie  à  Reca- 
rède, ne  tarda  pas  d'exciter  une  ré-, 
volte  contre  son  fils  ;  et  profitant  de 
l'inexpérience  de  ce  prince ,  il  l'at- 
tira dans  un  piège ,  et  se  saisit  de  sa 
personne.  Le  barbare  lui  coupa  la 
main  droite,  et  le  fit  mourir,  l'an 
Go3.  Liuva ,  pendant  un  règne  si 
court  et  si  déplorable,  ne  put  rien 
entreprendre  qui  méritât  de  fix( 
l'attention  de  la  postérité.  Mais  to 
les  historiens  espagnols  s'accord 
à  louer  les  belles  qualités  de  ce  ma 
heureux  prince.  W — s 

LIVE  (  La)  .    Foyez  Epinay 
Lalive. 

LIVERPOOL  (  Gharle 
Jeivrinson,  baron  Hawkesbury 
et  1  <^i'.  comte  de  ) ,  fik  du  colonel 
Charles  Jenkinson ,  naquit  le  10 
mai  1727  ,  dans  le  comté  d'Oxford. 
Il  commença  ses  études  à  l'école  de 
Burford  ,  et  vint  les  terminer  à 
Oxford  ,  où  il  reçut  les  premières 
influences  de  ses  opinions  politi- 
ques.   Ce   fut  pendant    son  séjour 


LIV 

l'université  ((ii'il  se  fit  connaître 

oiir  la  première  fois  pnr  des  vers  sur 
mort  (lu  prince  de  Galles.  En  i  ■-53 
quitta  Oxford  ;  et  bientôt  après  il 
Mira  dans  la  carrière  littéraire,  en 
tirnissaiit  des  articles  au  Monthljr 
nc^iew.    Il  parut    ensuite    comme 
écrivain   politique,   et    pidjlia  ,  en 
1  ;56,  une  Dissertation  sur  l'éta- 
lissement  d'urie  force   nationale 
t    constitutionnelle  indépendante 
une    armée  permanente  ;    cette 
loductiou  remplie  de   sentiments 
ilriotiques  a  ëtésouveut  citée  contre 
i-même  dans  la  chambre  des  pairs. 
'  iiis  ces  occasions  lord  Lirerpool , 
!ors   connu  sous  le  nom  de  Jen- 
inson ,  sans  désavouer  son  ouvrage, 
justifiait  par  son  extrême  jeunesse. 
Il  1 7^8  il  donna  au  public  un  Dis- 
ours  sur  la  conduite  du  gouveme- 
:  lient   de  la   Grande-Bretagne  à 
l'égard  des  puissances  neutres  pen- 
dant la  guerre  présente  (  i  ).  C'est  à 
<■  pamphlet  que  plusieurs  personnes 
ntatiribuérélëvationdeJenkinson: 
!i  le  cita, il  est  vrai,  comme  un  e'crlt 
estimable  ,    et    qui    annonçait   un 
homme  éclairé;  mais  il  ne  produisit 
is  pour  cela  un  grand  changement 
: ms  la  position  de  l'auteur  \'i).  Il 
irait  que  ce  fut  à  une  autre  cause 
ne  Jenkinson  dut  ses  premiers  suc- 
*s  politiques.  On  les  a  surtout  attri- 
bués à  la  protection  de  sir  Edward 


(H  Cet  onvrage  traduit  d^nt  touioi  let  Unf  u«f 
l'Europe  ,  avait  pour  but  de  jnitifier  lat  matu- 

I  arbitraire*  du  t>uuTeriiement  «uKlaif  enrera 
ic*  puitiancei  neuiiei ,  et  les  droits  qu'il  rarro- 
feait  sur  le  dom;iin*de  la  mer.  Il  fut  publié  en 
a7SS,rpoque  où  un  grand  nombre  J«  «aiiteaux 
liolland.<it  furent  iniiia  par  l'ordre  du  j(ouTerne- 
«lient  britannique.  M.  Gérard  de  R*^n-»«l  l'a 
r«f«t«  dans  aon  ouTra{{«  intitulé  De  la  liberté 
des  wers  , Paria,  iSii  . 

(a)  L'édition  anf^laiae  de  1779  cnnlient  n'en» 
■loin*  une  note  qui  ferait  crnira  que  ce  pamphlet 
^m<Tietiça   A  le    fnire    connaître  du    mioietère  , 

Ïuiaqii'nn  aiaure  qu'ik  «on  occasion  le  duc  de 
lewcastle,  alors  premier  ministre,  lui  atn^aa^ 
d'aprvt  \a  recomruandalien  de  Utd  llArcwiUl  t 
tna  penaion  de  aoo  lir.  «terlisg. 

XXIV. 


I.IV  -,;7 

Turner ,  qui  fut  t^îfemrrti  uiisfajt  de 
quelques  cou;  (»v«i  en  %on 

lionnrur  pir.î  "i  l'orr.isi,  ,i 

des 

sa  !!■  ■  ■  ■■■  ,  ^  . 
leur  a  lord  Bute,  ctforç.i,  en  quelque 
façon ,  celui-ci  de  le  prendre  pour 
son  secrétaire  particulier.  D'autrrt 
éci'vains  assurent  que  ce  fut  le  pre- 
mier comte  d'Harcourt ,  gouverneur 
de  George  III  ,  alors  prince  de 
Galles,  qui  présenta  Jenkinson  au 
roi.  Quoi  «pi'il  en  soit ,  lord  Bute  lui 
accorda  toute  sa  confiance  :  et  lors- 
qu'il devint  secrétaire  d'étal ,  eu 
mars  17G1  ,  il  le  choisit  pour 
sous-secrélaire,  emploi  qui  suppose 
upe  connaissance  parfaite  des  af- 
faires et  des  secrets  du  gouverne- 
ment (1).  Jenkinson  devint  alors 
un  champion  déclaré  du  parti  de 
l'hôtel  de  Leicester ,  et  ce  fut  par  l'in- 
fluence de  ce  parti  qu'à  l'élection  géné- 
rale de  176 1 ,  il  entra  au  parlement , 
où  il  représenta  le  bourg  de  Cocker- 
moulh,  à  la  recommandation  de  sir 
James  Lowthcr,  comte  de  Lonsdale, 
gendre  de  son  protecteur.  Jenkinson 
ne  resta  pas  long-temps  soiis-scrré- 
taire  d'état;  car  environ  quatorze 
mois  après  ,  il  fut  nommé  trésorier 
de  l'artillerie,  place  qu'il  al>andunna 
bientôt  pour  celle  de  secrétaire-ad- 
joint de  la  trésorerie.  Il  perdit  tous 
ses  emplois  en  1 7O5  ,.  lorsque  le 
marquis  de  Rockingham  fut  mis  à  la 
tête  (les  affaires.  Néanmoins .  dans  le 
courant  de  cette  même  année,  la  mère 
du  roi  se  l'attacha  ,  malgré  l'oppo* 


(.    T       •   T 
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p«r  lai  M«»réOT  Mat* 

M  Kmukmmtm. 

5:8  LIV 

sition  du  ministère^  en  îe  nommant 
«on  auditeur  des  comptes.  Cette 
circonstance  augmenta  encore  son 
intimité'  avec  le  ministre  disgracié  , 
et  éveilla  la  jalousie  de  ceux  qui 
«'appelaient  les  patriotes  :  il  était 
devenu  ,  suivant  eux,  Teulremet- 
teur(  The  go-between  )de  celte  prin- 
cesse auprès  du  trône.  Lorsque  Icrd 
Bute,  pour  s'éloigner  tout-à-fait  des 
îiffaires  publiques  ,  se  fut  relire  à  la 
campagne,  Jenkinson,  que  le  roi 
avait  toujours  distingué,  se  trouva  le 
chef  du  parti  qu'on  appelait  les  Jtinis 
du  roi,  composant  le  cabinet  secret , 
qui ,  selon  l'expression  de  lord  Clia- 
tham ,  était  un  personnage  derrière 
le  trône  plus  élevé  que  le  trône  mé- 
me{\).  Les  honneurs  et  les  emplois 
l'accablèrent  à  cctie  époque  :  lord 
de  l'arniraulé  en  1767,  il  avait  élé 
îiommé  en  i-jOG  secrétaire  de  la 
trésorerie  ,  place  qu'il  occupa  sous 
les  ministères  de  Grenville  et  de 
Graflou.  Elevé  en  177.*  à  l'emploi 
de  vice-trésorier  d'irlande  qui  don- 
nait entrée  au  conseil  privé,  il  ache- 
ta, de  Fox ,  en  177^,  la  place  de  clerc 
des  rôles  (  clerk  oj'pells  )  en  Irlande, 
qui  formait  une  partie  du  patrimoine 
'de  celui-ci  :  l'année  suivante  il  fut 
nommé  grand-maître  de  la  monnaie, 
à  la  place  de  lord  Gadogan.  En  1-^78, 
il  fut  appelé  au  poste  de  secrétaire  de 
la  guerre  ,  dans  lequel  il  se  trouvait 
encore  en  l'^Si  ,  défendant  avec  ta- 
lent les  intérêts  de  l'armée  à  la 
chambre  des  communes.  Le  débat 
devint  alors  fort  vif  entre  les  amis 
de  Jenkinson  et  les  membres  de  l'op- 
position :  la  majorité  qui  avait  jus- 
que-là voté  avec  le  ministère,  se 
partagea  ,  et  finit  par  l'abandonner  ; 
ce  qui  amena  sa  chute  en  1782.  Jen- 

(i)  0.1  disait  ct/in»  le  public  qit,:  Je  mante^iu 
politiauii  du  comte  de  Brte  était  fait  fttiir 
eousirir  lus  t'iia.ultt  ds  M,  Jen^cinton. 


LIV 

kinson,  rentré  dans  la  viepriyée,  con- 
sacra tous  ses  moments  à  compléter 
sa  Collection  de  traités  faits  depuis 
I G 48.  Mais  bientôt  un  aîitre  change- 
ment politique  le  ravit  à  ses  travaux 
littéraires  ;  Pitt  qui  venait  de  repren- 
dre les  rênes  du  gouvernement,  n'a- 
vait pas  oublié  que  Jenkinson  avait 
fortement  appuyé  ses  projets.  Il  lui 
en  témoigna  sa  reconnaissance  en  lui 
faisant  donner,  en  1786,  l'emploi  de 
chancelier  du  duché  de  Lancastre: 
peu  après  Jenkinson  fut  créé  baron 
Hawkesbury,  et  président  du  conseil 
de  commerce ,  place  que  son  grand 
âge  et  ses  infirmités  le  forcèrent  de  ré- 
signer en  1801 ,  pour  se  retirer  tout- 
à-fait  des  affaires  publiques.  Dans 
l'intervalle  ,  il  devint  baron  héré- 
ditaire par  la  mort  de  son  parent , 
sir  Banks  Jenkiii son,  et  il  fut  pourvu 
de  la  riche  sinécure  de  receveur  dea 
douanes  que  celui-ci  occupait.  Ele- 
vé à  la  dignité  de  pair  d'Angleler"* 
re ,  avec  le  titre  de  comte  de  Li- 
verpool,en  1796,  Jenkinson  fut 
autorisé  par  le  roi  à  écartcler  les 
armes  de  celte  ville  avec  celles 
de  sa  famille.  Tous  ces  honneurs 
étaient  sans  doute  bien  grands  ; 
et  la  devise  qu'il  prit  pour  son  écus- 
son  :  Palma  non  sinepuh'ej'e,]wouve 
qu'il  s'en  croyait  digne.  Lord  Liver- 
pool  est  mort  à  Londres  le  17  dé- 
cembre 1808,  laiisanl  un  fils  déjà, 
parvenu  aux  premiers  emplois  ,  et 
qui  a  succédé  à  ses  dignités.  Ce  mi- 
nistre partagea  long-temps  la  haino 
qui  s'attachait  aux  amis  de  lord  Bute, 
qu'on  accusait  de  gouverner  le  roi, 
et  de  disposer  de  toutes  les  places. 
L'animosité  du  peuple  fut  excessive^ 
et  le  célèbre  pamphlet  de  Burke  suf 
les  mécontentements  populaires, 
encouragea  la  nation.  Les  membre^ 
supposés  du  conseil  secret  devinrent 
les  objets  continuel  des  clameuis  de 


1  !V 


luuiîo,  (|iii  if.sarcMsaitiie  ia  se- 


iiatioii  des  colonies  amrricaiiics, 
toutes  les  fausses  n  lises 


le 


rouverneinciit. 


r'UX 


>uhats  qui  en  furent  la  suile.Lord 
verpool  était  souple, adroit;  quel- 
cs-uns  disent  même,  artificieux  cl 
;iij;ant.  II  est  juste  d'ajouter  que 
<  derniers    reJ)roclics   vinrent  de 
^position.  La  posleriié  qui  ne  le 
>li(iera   pas  sur  toutes  ces  accu- 
lions, n'oubliera  cependant  point 
t?  c'est  à  lui  que  l'Angleterre  a  dû 
i   traité  4^  commerce  avec  l'A- 
rique,  et  qu'il   ne   se  borna  pas 
indiquer,  mais  qu'il  créa  la  pêche 
la  baleine  dans  les  mers  du  Sud* 
mt  sou   élévation ,  le  comle  de 
verpool    parlait   fréquemment   à 
chambre  des  communes  ,  et  tou- 
iva  avec  un  grand  sens;  mais  il 
ne  se  leva   que  rarement  lorsqu'il 
fut  parvenu  aux  premiers  emplois. 
Cependant    on   l'écoutait   toujours 
avec  une  grande  attention.    On   a 
de  lui  :  I.   Collection  des  Traités 
de    i648  à  1783,  3  vol.,  ic^'». 
1785.  Eu  tête  de   cet  ouvrage  on 
a  réimprimé  son   discours  sur  la 
condidle  de  la   Grande-Bretagrie 
à  Vé^ard  des  Puissances  neutres, 
etc.  II.  Traité  sur  les  Monnaies 
du  royaume  j  dans  une  lettre  au  roi, 
i8o5 ,  in-4°.  D-z-s. 

LIVIE-DRUSÎLLE  (Livia  Dru- 

8ILLA  AUGUSTA  ,0U  JuUA  AuGUSTA), 

de  l'illustre  famille  Claudia  ,  na- 

2uit  l'an  de  Rome  C)C)5  ;  elle  était 
Ile  de  Livius  Drusillus  Claudianus, 
^i  défendit  la  cause  de  Brutus  et 
Cassius,etse  donna  la  mort  après  Ja 
Itataillc  de  Philippes.  Livie  épotlsa 
Tibère  Claudius  Néron ,  d'abord  pré- 
t«ur  et  ensuite  pontife ,  qui  se  décla- 
ra contre  les  triumvirs;  elleraccom- 
[lagna  dans  sa  fuite,  et  fut  accueillie 
"^~  les  Lacédéiaouieus  ,  qu'elle  r«- 


MV 

comj>rnsa  depuis  <! 
avaient  acror'Ir.   \ 
Livie  joignait 
cl  toutes  les    1 
relever  l'éclat.  A  »on  rei 
Auguste   en  devint   p  1 
amoureux, el  ladcni  1  il 


•n  inin, 


qui  n*osa  pas  la  lui  rclu;.  i  ;  il  répth* 
liia  sa  femme  Scribonie  ,  et  épousa 
Livie ,  déjà  mère  d'un  fils  cl  eoceinte 
de  six  mois  (1).  I^s  pontifes  con- 
sultés par  Auguste  ne  pensèrent  pas 
3ue  la  grossesse  de  Livie  dût  retar- 
er son  mariage.   Elle  avait   vingt 
ans  loi-squ'ellelut  appelée  a  partager 
l'empire  du  monde;  et  profitant  ha- 
bilement de  l'ascendant  qu'elle  av.iit 
pris  sur  Auguste ,  elle  s' 
lot  à  assurer  le  troue  à  1 

bère.  Elle  fut  ^  d'avoir  eu 

part  à  la  mort        i        m  us, qui  pou- 
vait  être  un  obstacle  a  ses  vues  amli- 
lieuses  ;  mais  on  doit  dire  que  nm 
ne  parait  justifier  cet  odieip 
çon.  (  royez  Marcellus.  )  L...  .  ..i 

bientôt  à  pleurer  elle-même  la  mort 
de  son  second  fds  (  Drusus  Gernia- 
nicus  )  ;  mais  elle  n'imita  point  Oc* 
tavie,  qui  avait  fatigué  Auguste  par 
l'excès  de  sa  douleur  :  elle  prêta  l'o- 
reille aux  cons«  '  ■ 
à  lui  donner  !     , 
cl  elle  parut  MiiiiLlc  aux  h*  j 
qu'Auguste  lui  drrernn  potjr   ! 
traire  de  sa  ti 
empêcher  son  i 
r  ictcre  sombre  coramen 
nifesler,  de  se  retirer  d 
Rhodes,  dont  le  séjour  lui  av.  / 
mais  elle  continua  de  veiller  s  .. 
intérêts.  Après  la  mort  prématurée 


Augiifl*   «U*  ■"•Ml    ^«Hm  ««U»*.    ^•i    ■•■•■• 


58o  LIV 

des  deux  fils  de  Julie,  elle  se  hâta  de 
le  faire  revenir  à  Rome ,  et  le  fît  a- 
dopter  par  Auguste,  en  même  temps 
qu'Agrippa  Posthume^  ïe  dernier  re- 
jeton de  la  famille  des  Césars,  Elle 
songea  pour  lors  à  écarter  Agrippa, 
et  le  peignit  à  Auguste  sous  des  cou- 
leurs tellement  odieuses  qu'il  se  déter- 
mina enfin  à  l'exclure  de  sa  succession. 
Après  avoir  comblé  tout  l'intervalle 
qui  séparait  son  fils  du  trône ,  il  ne 
lui  restait  plus  qu'à  l'y  faire  monter; 
et  quelques  historiens  l'accusent  d'a- 
voir hâté  la  mort  d'Auguste  ,  en  lui 
faisant  manger  des  figues  empoison- 
nées (  I  ).  Mais  ce  qui  est  plus  certain, 
c'est  qu'elle  se  rendit  maîtresse  des 
derniers  moments  de  l'empereur, et 
qu'elle  tint  sa  mort  cachée  jusqu'à 
l'arrivée  de  son  fils  alors  absent,  Au- 
guste expira   doucement  entre   ses 
braS;  en  lui  disant  :  «  Livie,  conser- 
»  vez  le  souvenir  d'un  époux  qui 
»  vous   a  tendrement  aimée;  adieu 
»  pour  jamais.  »  Livie  était  la  confi- 
dente des  plus  secrètes  pensées  de 
cet  empereur;  il  la  consultait  souvent, 
et  se  trouvait  bien  de  ses  avis  :  ce  fut 
elle  qui  lui  conseilla  d'user  de  clé- 
mence envers  Ginna  ;  et  Auguste  a- 
vouait  qu'il  lui  devait  une  partie  de 
l'éclat  de  son  règne.  Par  une  dispo- 
sition singulière  de  son  testament , 
il  adopta  Livie ,  lui  ordonna  de  pren- 
dre le  nom  de  Jiilia  Augusta ,  et 
l'institua  son  héritière  avec  Tibère. 
Livie  témoigna  la  plus  grande  dou- 
ieur  de  la  mort  d'Auguste  :  elle  pré- 
sida elle-même  à  la  cérémonie  de  son 
apothéose,  et  voulut  être  la  prétresse 
du  temple  érigé  au  nouveau  dieu, 


(i)  Aucun  de»  crimes  reprocha*  à  Livie  n'es» 
prouvé:  quant  à  raccusation  d'cmpoisonnemcHt 
renouvelle  contre  elle  à  la  mort  tl'A.uguste  ,  il 
eut  assez  simple  ,  dit  Dureau  de  L-amalle  ,  qu'ott 
meure  à  «oixante  e»  seize  an»,  sans  qu'il  soit 
wecessaire.pour  expliquer  cetto  mort,  4e  rçcfurif 
a  d.e«  cause»  eitraordiaiiirM. 


LIV 

dans  son  propre  palais.  Tibèr»  se 
montra  peu  reconnaissant  envers  sa 
mère  ;  il  s'opposa  à  ce  que  le  sénat 
lui  décernât  de  nouveaux  honneurs; 
et  ne  la  consulta  point  sur  les  affaires 
publiques  :  mais  ce  prince  dissimulé 
conservait  les  apparences ,  et  cachait 
son  ingratitude  sous  les  formes  du 
respect.  Un  jour  Livie  lui  ayant  de- 
mandé une  place  de  juge  pour  un  de 
ses   protégés  ,   Tibère  lui   répondit 
qu'il  l'accorderait  à  condition  qu'on 
inscrirait  au  registre  que  c'était  une 
faveur  qui  lui  avait  été  extorquée  par 
sa  mère.  Cette  réponse  indigna  Livie, 
et  s'étant  fait  apporter  sa  cassette  , 
elle  en  tira  un  billet  d'Auguste, qui  se 
plaignait  déjà  de  la  dureté  et  de  l'hu- 
meur intraitable  de  Tibère.  Dès  ce 
moment  il  ne  crut  plus 'devoir  user 
d'aucun  ménagement ,  et ,  rompant 
avec    sa  mère  ,  il   s'éloigna   d'elle 
pour  toujours.   Livie   mourut  l'an 
de  Rome  782,  29  [de  Jésus-Christ 
à  l'âge  de  86  ans.  Ses  funérailles 
se  firent  sans  aucune  espèce  de  pom 
pe.   Son   arrière-petit-fils ,    C.   Ga- 
ligula  ,  prononça  son  oraison  funè- 
bre, et  ce  fut  à-peu-près  le  seul  hon- 
neur rendu  à  sa  mémoire.  Son  tes- 
tament ne  fut  point  exécuté.  Claude, 
qu'elle  n'avait  jamais  aimé,  parve 
nu  à  l'empire ,  lui  fit  décerner  les 
honneurs  divins.  Livie,  que  Caligula 
nommait  un  Ulysse  en  jupe  (  Foy, 
Suétone  ) ,  avait  de  grandes   qua- 
lités. Dion-Cassius  raconte  que  quel- 
qu'un lui  ayant  demandé  par  quels 
moyens  elle  avait  acquis  tant  de  cré- 
dit sur    Auguste  ,    elle   répondit 
«  Mon  secret  est  bien  simple.  J' 
»  toujours  vécu  sage;  j'ai  étudié  to 
»  ce  qui  pouvait  lui  plaire;  je  n', 
»  jamais  témoigné  de  curiosité  in 
»  discrète  ,  ni  par  rapport  à  ses  af- 
»  faires ,  ni  par  rapport  à  ses  galan 
»  t«ries ,  que  j'ai  même  affecté  d'i 


'fl  »  giiorcr  (  I  ).  »  Tacite ,  qui  a  àceré- 

ilité,  ou  (lu  moins  qui  n'a  pas  chcr- 

lic  à  dissimuler  tous  les  reproches 

qu'on  a  faits  à  Livie  ,  reproches  uni- 

(]nemenl  fondes  sur  ses  vues  ambi- 

♦uMjses,  et  dont  aucun  n'est  prouve, 

*  fait  d'elle  ce  portrait:»  Elle  avait 

iiie  vertu  digne  des  premiers  temps, 

ivcc  plus  d'enjouement  qu'alors  on 

n'en  permettait  au\  femmes,  mère 

ii;ipërieuse  ,  épouse  complaisante, 

vaut  un  peu  de  la  dissimulation  de 

'»n  fils,  combinée  avec  toute  l'û- 

iressc  de  son  mari.  »  (  annales, 

liv. ,  V,  I ,  traduction  de  Bureau  de 

Lamalle.  )  W— s. 

LIVIE -LIVILLE  (  Livia  -Li- 
viLLA  ),  petite-fille  de  l'impératrice 
Livie  et  sœur  de  Germanicus ,  fut 
mariée  fort  jeune  à  Drusus  ,  son 
cousin  ,  fils  de  Tibère.  Dans  le 
temps  que  la  mort  de  Germanicus 
])longeait  dans  le  deuil  tous  les  ci- 
toyens ,  elle  accoucha  de  deux  en- 
f;mls  mâles.  Cet  événement  causa  à 
Tibère  une  joie  qui  ne  fut  point 
partagée  par  le  peuple  ,  livré  à  la 
tristesse.  Livie  se  laissa  corrom- 
])re  par  cet  infâme  Séjan  ,  dont 
le  nom,  justement  flétri,  rappelle 
le  souvenir  de  tous  les  crimes.  Il 
ut  lui  persuader  qu'épris  de  ses 
iiarmes,  il  n'avait  d'autre  ambition 
l'ic  de  l'épouser  pour  partager  avec 
'  ile  le  trône  du  monde  ;  et  la  nièce 
l'Auguste,  la  belle-fille  de  Tibère  , 
consentit  à  échanger  une  grandeur 
assurée  contre  une  élévation  future, 

}>leine  de  risques ,  et  qui  devait  être 
c  fruit  d'un  crime  odieux.  A  quel- 
l'ie  temps  de  là,  son  mari  Drusus 
'  lournt  d'un  poison  lent  (  f^orez 
DBUsus.t.  XII,   p.  5o);et  Livie 


i)Su^tone  ditquVIl*  poii«i«il  U  •nmplaitaura 
p«inl   4«  httiu  A>igii*le  ,    pTi«    d*   •"•   ■!•••• 

•   9    Liavrn  qut   Dion  incrl  Jam*  la  boiuiM  ii« 


UV  5«i 

s'abffiftSA  an  point  de  derenir  ta  com- 
pli'  Il   dans  rcxdctition  de 

se>  ,  ititff  If^  C\U  de  Germa- 

niciu,  Uoitt  I  |)f. 

tacle  à  son  *  ,,^9 

osa  bien  ..^e 

son  con-  I  j. 

vie.   Ce   prince  'li  nu 

son  refus  tous  les  m,  ...,^.  .... ..      jti'il 

mit  propres  à  l'adoucir;  mais  il 
commença  dès-lors  à  pcnirp  de  la 
confiance  qu'il  avait  dans  Sejan  ,  et 
il  finit  par  l'abandonner  à  ses  enne- 
mis (  Foy.  SÉJAPr  ).  Alors  seule- 
ment Tibère  apprit  que  Dnisns  était 
mort  empoisonné  :  il  fil  appliquer  à 
la  question  tous  ceux  qui  furent 
soupçonnés  d'avoir  pn<  p?rl  h  ce 
crime,  et  ils  pér-  ip- 

plices(ran  de  Koi  ,  uis 

J.  Ch.  ).  On  dit  que  Livie,  1 1^  •  « 
sa  mère  la  vertueuse  Anto'ii  1 ,  lut 
enfermée  par  ses  ordres  dans  un 
cachot ,  où  elle  mourut  de  faim.  I>e 
sénat  rendit  un  décret  qui  ordonnait 
d'abolir  ses  images.  —  Livic-Ore»* 
TiLhE{  Livia- Oreslilla  )  ,dame  ro- 
maine d'une  illustre  famille,  eut  le 
malheiur  de  plaire  à  l'empereur  Ga- 
ligula  ,  qui  la  ravit  à  Galpiimins* 
Pison,lc  jour  même  de  la  cérémonie 
de  son  man  i.inporte 

queCj»H?ul;i  .  >  facétie 

dn 
p, 

roeiiaçaiil  :  «  pi- 
mon  épouse  »;e» 

il  força  cette  infoi  ^  re. 

Le  lendemain,  il         ,  pi'il 

s'ctail  marie  à  la  manière  de  Honiu- 
lus  et  d'Auguste,  (^elques  jour» 
après ,  il  répudia  Oreslille  ;  et  avant 
appris  qu'elle  s'élait  réunie  à  sou 
nremicr  mari ,  il  les  exila  l'un  ec 
l'autre  dans  des  lieux  séparée .  pour 
leur  ôter  U  consoUtion  d*«-irr  tm- 
Miuble.  VN  — *. 


53a 


LIV 


LIVIUS-ANDRONIGUS.  roj^ez 
Andhoivicus. 

LIVIUS  (Titus).  r.TiiE-LivE. 
Ll  VON  ,  roi  d'Armeuie.  (  Vojez 

LÉON.  ) 

LIVONIERE  (  Claude  Poqueï 
DE  ),  hibile  jurisconsulte  ,  conseiller 
au  presidial  d'Angers  ,  sa  patrie , 
professeur  en  droit  français  dans  la 
même  ville  ,  mourut  à  Paris ,  où  il 
poursuivait  un  procès  ,  en  17^.6, 
dans  la  soixante-quatorzième  année 
de  son  âge.  Une  ex])Ci'iencc  de  plus 
de  cinquante  ans  ,  jointe  à  une 
etudo  assidue  de  la  coutume  ,  le 
faisaient  regarder  comme  l'oracle 
de  sa  province.  11  e'iait  d'une  grande 
modestie  ,  redoutant  la  qualité  d'au- 
teur ;  et  il  ne  se  servit  de  son  crédit 
«pie  pour  être  le  paci(i<-ateur  des  fa- 
milles. On  a  de  lui  :  I.  Un  hon  Be- 
cueildes  ccmmentaires  sur  la  coutu- 
me d'Anjou ,  Paris,  1 7.15,  '2  vol.  in- 
fol.  II.  Traité  des  fief  s,  \yx%'m-l\'^.^ 
spécialement  destine'  à  expliquer  ce 
qui  se  pratiquait  pour  les  fiefs  dans 
l'Anjou  et  le  Maine.  III.  Règles  du 
droit  français  ,  1780,  et  i7()8, 
in  -  12  ;  cet  ouvrage  ,  qu'il  regar- 
dait comme  le  plus  clie'ri  de  ses  en- 
fants ,  n*a  pour  objet  que  le  droit 
commun  des  pays  coutumiers.  On 
reproche  à  l'auteur  d'avoir  donné 
trop  d'étendue  à  certaines  règles  qui 
n'ont  d'applicatioug^tic  dans  des  cas 

Î)articuli(jis  ;  de  n'avoir  pas  marque' 
a  din'crcuce  entre  les  usages  du  par- 
lement de  Paris  et  ceux  des  autres 
ressorts  ,  et  de  n'avoir  pas  averti  du 
partage  de  sentiments  pirmi  les  ju- 
risconsultes sur  ccrt.iins  articles.  IV. 
Dissertation  sur  l'a  iciennelé  de 
V université  d'Angers ,  i^SG  ,  in-4'', 
T— D. 
LIVOY  (  Le  P.  TiMOTUEE  de  ), 
lillcratcur,  né  vers  1 7  1 5 ,  à  Pithi- 
"viers ,  prit  l'habit  religieux  dans  la 


LIV 

congrégation  des  Barnabites  ,  et 
fut  chargé  d'enseigner  les  huma- 
nités dans  différents  collèges.  Il 
visita  ensuite  l'Italie  ,  oii  il  reçut 
un  accueil  distingué  des  savants ,  et 
fut  agrégé  à  plusieurs  sociétés  litté- 
raires. De  retour  en  France,  il  fixa  son 
séjour  à  Paris,  où  il  mourut  le  27 
septembre  1777  ,  après  avoir  publié 
différents  ouvrages  dont  la  rédaction 
occupa  ses  dernières  années,  savoir: 
\. Dictionnaire  des  Sjnonjmesjran- 
çais ,  Paris ,  1 767 ,  in-8".  Beauzée  en 
a  donné  une  édition  plus  complète  , 
cl  corrigée ,  ibid. ,  1 7(S8 ,  in-B".  C'est 
un  ouvrage  utile,  particulièrement 
aux  versificateurs  ;  le  plan  en  est 
tout -à -fait  dilïérent  de  celui  des 
Synonymes  de  Girard  ou  de  Rou- 
baud,  dont  le  but  est  d'analyser  la 
signification  précise  des  mots ,  et 
d'exposer  les  nuances  délicates  qui 
distinguent  ceux  qu'on  serait  tenté 
d'employer  indifFércmment  l'un  pour 
l'autre. Le  P.  de  Livoy,  au  contraire, 
écartant  toute  discussion,  fournit,  à 
chaque  mot, un  ou  plusieurs  termes 
à-peu-prc^  équivalents  pour  l'écri- 
vain qui  ne  tient  pas  beaucoup  k 
n'employer  que  le  mot  propre,  mais 
qui  craint  surtout  de  répéter  un  mot 
déjà  employé.  IL  Lettre  à  M.  de 
S.  /?.  sur  les  Jiéjlexions  morales 
d'Amelot  de  la  Houssaye,  ib.  17G9, 
in-iQi.  III.  Le  P.  de  Livoy  a  traduit 
de  l'italien  de  Denina ,  Le  Tableau 
des  révolutions  de  la  littérature  an- 
cienne et  moderne  j  Paris,  1767, 
in- ri  ;  —  du  P.  Bartoli ,  L'homme 
de  lettres j  avec  une  préface  et  des 
notes  du  traducteur,ibid.  1 768,2  vol. 
in- 1 2  ;  —  du  P.  Gerdil  (  depuis  car- 
dinal ),  Exposition  abrégée  des  ca- 
r  artère  s  de  lai))  aie  religion,  ibid. 
1 7  7  o ,  in- 1 2  j  —  de  Muratori ,  Traité 
du  bonheur  public,  ibid.  1772,  2 
vol.  in- 1 2  j  —  et  enfin  du  P.  Norbert 


MV 

Ciyrae,  Fo^a^c  d'Espace,  fait 
en  1 7:)5 ,  avec  tics  notes  lu.Hturi<{ucs , 
jjeoj^iMpliiquos  et  criti<|ues  ,  et  uue 
ti"  l(St  ible.nixelaulrc» 

j  lrid,dc  l'Kseuri.jlcl 

d<'  SiUit-IKIei'ouse,  Paris  ,  177^,  a 
roi.  iii-i'2.  Le  voyage  du  P.  Cayme 
tv.ùl  paru  à  SaiiU-PelerNbourg,  1 765, 
4  v>l.  in-8^.  Le  traducteur  en  a  re- 
tranche beaucoup  de  longueurs  et 
d'inutilités  ,  et  y  a  joint  des  notes 
qui  prouvent  son  goût  et  son  juge- 
ment ;  mais  son  style  est  deponrvii 
dVle^ance.  C'est  sur  la  version  du  P. 
de  Livoy,  que  le  Fnyage  de  Cayme 
t  elë  triduit  en  allemand,  Leipzig, 
1774  ,  in-80.  W— s. 

LÎZKT  (  Pierre  ),  ne  dans  les 
montagnes  d'Auvergne,  au  diocèse  de 
Saint-Flour,e\'Tça  ,  vers  Tan  1 4B» , 
)a  profession  d'avocat  au  parlement 
de  Paris,  où  il  devint  conseiller  en 
1 5 1  > ,  avocat-gëueral  en  1 5 1 7  ,  et 
premier  piesitlent  en  i5?,«>  Ce  ma- 
gistrat eut  le  malheur  d'indisposer 
contre  lui  toute  la  maison  de  Lor- 
raine ,  pour  avoir  fait  refuser  au\ 
Guises,  dans  une  plaidoirie ,  le  ti- 
tre de  princes  ,  réserve  alors  ex- 
clusivement aux  princes  du  san^^. 
Le  cardinal  de  fi  )rraiue  présidant 
nn  jour  au  conseil  ,  Li/et  qui  s'y 
trouvait  ,  prétendit ,  nonobstant  la 
remontrance  de  l'impérieux  ministre, 
être  en  droit  d'opiner  assis  et  rou- 
Tert.  FjC  cardinal  saisit  celle  occasion 
pour  venger  sa  maison  de  l'outrage 
qu'il  prétendait  en  «voir  reçu  :  il 
intéressa  la  duchesse  de  Valenlinois 
dans  sa  querelle  ,  et  acctisa  Li/et 
d'avoir  parlé  insolemment  du  roi. Ce 
malheureux  vieillard,  etlrayé des me- 
■nres  du  cardinal  ministre,  et  mal 
frondé  p^ir  son  corps  ,  <pii  n'était 
pas  fâché  d'avoir  un  autre  chef  , 
alla  se  jeter  aux  pieds  de  son  en- 
nemi Cette  démarche,  q«ti)eTh«« 


II/, 


581 

II'**!»! 


appelle  vifiêpùoj'di 
aucun  sucrèii;rt  l 
avoir  un  uremier  , 
votion.  I,ir.ct  fut 
de  sed<^mettre  pi.i 
don.  Ou  lui  donna  .  m 
de  sa  pauvreté,  l'abbi 
Victor,  où  il  reçut  la  pictnse  en 
i553.  Il  mourut  le  7  juin  iS.î^. 
C'était  un  magistrat  éclairé ,  oc- 
cupé tout  entier  de  se»  fonctions  , 


.0, 

»r- 

lon 

luc- 


df. 

lui 

dtt 

U 

!é. 


ut 

VCC 


et   fti   det»in(éres9é ,    qu'en    ne 

pouillant   de  sa  rbar};;e,  iJ  ne 

serait  pas  resté  de  quoi  avoir 

pain  ,  sans  le  l)cncTif .    '     • 

pourvut  par  commiséi.i 

fauts  étairnl  un  niélani;c'  cl» 

et  de  faiiilesse  ,   nue  lofpt.i 

le  rendait   i' 

ridicule  ,  et  n 

les  protestants, qu 

une  excessive  sév«  i  ■    1  tnt' 

bre  ardente,  dont  il  fut  le  rrenieur, 

et  qu'il    présida    presque  toujoiirf* 

Cependant ,  il  ne  faut  |>as  adopter, 

à  cet  ëgard,  tout  ce  qu'en  rappor» 

tent  les  historiens  de   la  nouvelle 

secte ,  qui  ont  eiagéré  les  cniantri 

de  Lizct.II  s'occupa ,  dan*  sa  retraite, 

à  comp<jscr  des  livm< 

ouIJiés  aujourd'hui,  d  < 

reraarq  ; 

cipes,  Y 

sonnemt'iii.  I 

culo  ,  par  iwi 

séré  dans  l< 

viro'wn  (  V 

suppose  qu'" 

Pasiavanùu 

Tauiciir  ,  pour  « 

dirait    de  s«    ou.     ,,  ' 

compte  de  sa  commuMon.  C>  *«»ttl 

de»   traités  sur  diverses  matières  , 

qu'il  lit  imprimer  en  i%5i.  1  voL 

in-4'*-  ;  ^""  *^vl^  ^**  afn|NHilé,  «f  il 

se  sctit  du  xèlé  ankat  dont  l'aMc*» 

étaU  aoÛM  coMiv  li»b«rélifiit.  Oi 


■'ent 
nftk 

in* 
ni. 


58' 


IJZ 


peul  j'.ig^r  fîe  son  rlisccrnement  par 
oc  cfu'il  dit  contre  les  versions  de 
l'Ecriture  eu  langue  vulgaire  :  il  pré- 
tend que  quand  la  Bible  fut  traduite 
en  latin  ,  dans  les  premiers  siècles  , 
il  y  avait  deux  sortes  de  latin  ,  l'un 
pour  les  savants  ,  et  l'autre  pour  le 
peuple  ,  et  qu'ainsi  la  version  de 
l'Ecriture  ayant  ëte'  faite  dans  le 
premier  latin  ,  ce  n'était  pas  pro- 
prement une  traduction  en  kngue 
vulgaire.  Lizet  entendait  mieux  les 
matières  de  jurisprudence  ,  comme 
on  peut  en  juger  par  son  traite'  post- 
hume de  la  Manière  dç  procéder 
dans  les  causes  criminelles  et  ci- 
viles y  où  l'on  trouve  d'excellents 
préceptes  ,  et  où  l'on  voit  comment 
nos  ancêtres  instruisaient  les  proce'- 
dures.  L — b — e  et  T — d. 

LLHWYD  ou  LLOYD.  Voyez 
Llwyd. 

LLOYD  (Nicolas),  biographe  an- 
glais, naquit  en  1634 1  à  Holton  dans 
le  Flintshire.  Après  avoir  fait  ses 
premières  études  à  Wykeham,  près 
de  Wincliester,  il  fut  reçu  maître  ès- 
arts  à  Oxford,  en  i658.  Il  devint 
ensuite  chapelain  du  docteur  Bland- 
ford,  qui  ayant  été  nommé  évêqiie 
d'Oxford  ,  lui  donna  ,  en  1G71  ,  la 
cure  de  Newiuglon  dans  le  comté  de 
Surrey.  Il  y  mourut  en  ï68o ,  lais- 
sant la  réputation  d'un  ecclésiasti- 
que également  pieux  et  instruit.  On 
a  de  lui  :  Diclionnarium  historicum, 
geographicimi ,  poëticum,  gentiiim, 
hominum  y  deorum  gentilium  ^  re- 
giomwiy  etc.  Oxford,  1670,  in-fol. 
83o  pages.  C'est  une  réimpression 
du  dictionnaire  de  Charles  Es^enne, 
mais  avec  des  corrections  et  des  ad- 
ditions qui  en  font .  pour  ainsi  dire,. 
xui  ouvrage  nouveau  :  il  en  parut 
xme  seconde  édition  après  la  mort 
deLloyd,  Londres,  1686,  in-fol., 
avec  denouyelles  acldinons;  ctquoi- 


LLO 

que  ce  dictionnaire  ne  soit  pas. 
exempt  de  fautes,  il  conserve  encore 
des  partisans  en  Angleterre  ,  et  il 
n'est  pas  sans  utilité  pour  l'intelli- 
gence des  noms  qui  se  trouvent  dans 
Homère,  dans  Hérodote  et  dans 
Strabon.  W — s. 

LLOYD  (  David  ),  biographe  et 
historien  anglais  ,  né  dans  le  Merio- 
nethshire  ,  en  162.5 ,  occupa  succes- 
sivement divers  emplois  dans  le  mi- 
nistère de  l'église,  et  mourut  le  16 
février  i  G9 1  ,  dans  le  lieu  de  sa  nais- 
sance. On  a  de  lui ,  en  anglais  :  I. 
Politique  moderne  achevée,  ou  Les 
actions  et  les  conseils  publics  du  gé- 
néral Monk  y  Londres  ,  1 660  ,  in-8^. 
IL  Portrait  de  S.  M.  le  roi  Char- 
les //,ibid.,  1660,  in-80.  lU.r Om- 
bre de  la  comtesse  de  Bridgewater, 
ibid. ,  i663,  in-8*^.  Le  but  de  l'auteur 
avait  été  de  présenter  son  héroïne 
comme  exemple  à  toutes  les  femmes  ; 
mais  on  prétend  que  le  comte,  cho- 
qué de  ce  que  ce  panégyrique  était 
publié  sous  un  titre  si  bizarre,  et 
par  un  homme  obscur  qui  ne  ren- 
dait pas  à  son  épouse  la  justice  à  la- 
quelle elle  avait  des  droits  ,  intenta 
im  procès  à  Lloyd  ,  qui  fut  con- 
damné à  six  mois  de  prison.  Si  cet 
auteur ,  dont  les  intentions  étaient 

Î)ures ,  eût  composé  un  lilielle  contre 
a  comtesse,  il  n'eût  pas  été  puni 
plus  sévèrement.  IV.  Sur  les  Com- 
plots ,  etc. ,  ibid. ,  1 664 ,  in-4°.  ; 
publié  sous  le  nom  d'Olivier  Foulis. 
V.  Fies  des  HoTumes  illustres ,  ib., 
i655 ,  in-8°.  C'est  un  abrégé  de  Plu- 
tarqne.  VI.  Paroles  de  vie  des  mou- 
rants et  des  mots ,  ou  u-ivis  chari- 
table à  un  monde  étourdi,  ib. ,  1 6G5 
et  iQS'i ,  in- 13.  VIL  Les  Prestiges 
ne  sont  pas  des  Miracles ,'\h.  ,  i665, 
in-4°.  (  Foyez  Greatrakes  ,  tome 
XVIII, page  367.)  VIIL  Les  Homr 
mes  d'état  et  les  Fas'o  is  anglais , 


LÎ.O 

r Us  la  rè formation  f  ibitl. ,  i665 , 

)'*.  ;  réimprime  en  iG^o.  Il  en  a 

public  une  nouvelle  édition  par 

irlcsWitluvorth  ,  eu  1 7GC,  'i  vol. 

S  ".  ,avecdcs  additions  tirées  d'au- 

>  auteurs ,  pour  mieux  faire  res- 

I  tir  le  caractère  des  personnages. 

.  Mémoires  de  la  Fie  des  />e'- 

iies  qui  ont  soitffert  pour  UUr 

alisnie  durant  La  rébellion ,  ib. , 

'  18,  in-fol.  Gcsdeux  ouvragcs,amè- 

icnt  criliqués  par  quelques  ccri- 

iiis   contemporains  ,  contiennent 

■  les  personnages  dont  il  est  ques- 
n  ,  des  particularités  qui  ne  se 
i.ivcnt  pas  ailleurs.  On  doit  ne'an- 
.ins  convenir  que  Lloyd  est  trop 
"lin  à  louer  sans  restriction  les 
lumes  qui  partageaient  sa  façon 

penser.  Charles  Wilhworth  a , 
is  son  édition,  publie'e  en  17 06, 
vol.  in-S**. ,  mis  à  ces  éloges   des 
odiGcations  d'après  les  auteurs  ré- 
.l)licains.  E — s. 

LLOYD  (  Guillaume  ),  prélat 
j^lais,  était  né  dans  le  Berkshire, 
lôi'j.  Après    avoir  occupé  di- 
ts  emplois    dans  l'église,  il  fut 
ramé  curé  de  Saint-Martin-des- 
lamps,  à  Londres.  Déjà  il  avait 
Il  preuve  de  zèle  contre  le  calholi- 
-ine,  par   plusieurs  écrits,  lors- 
on  1O77  ,  il  publia  des  Considé- 

■  lions  sur  le  véritable  mojrende  dé- 
idre  le  papisme  dans  ce  lOfaume^ 
ce  une  notice  sur  l'histoire  de  la 
formation  en  Angleterre.  Il  y  pre- 
ssait de  tolérer  les  catholiques  qui 
nient  rinfaillibihté  du  pape  et  son 

•uvoir  de  déposer  les  rois ,  méthode 

iiployée  par  Elisabeth  et  Jacques 

>n  successeur  :  il  fut  soupçonné  de 

ivoriserlesdesseinsde  la  cour.  Cette 

ée  ayant  acquis  une  nouvelle  force 

rsqii'on  le  vit  élevé  k  l'évèché  dt 

>  tint-Asaph,  en  1680,  Lloyd  jugea 

qu'il  devait  se  justilier  :  mais  les  èvé- 


LLO  W'î 

nemenu  le  scr%'in»nt  enrore  m\nî\  4 
ce! égard  sous  le  règne  de  Jacqn 
car  il  fut  un  de»  six  preniicr> 
lats  emprisonné»  àla  Tour ,  rn  i()HH, 
pour  avoirrésisiéàronlrcduroiqiii 
enjoignait  de  distribuer  et  de  publier 
dans  toutes  leurs  églises  la  déc  l.ira- 
tion  rclativeàla  libcrlédeconsrirnre. 
(  Foyez  Jacques  II,  xxi,  3<i4.  ) 
Vers  la  fin  de  l'année ,  la  part  arlive 
qu'il  prit  à  la  révolution  ,  lui       '  * 
la  place  de  lonl  aumônier.  En 
il  fut  transféré  au  siège  de  Lirl 
et  Coventry  ,  et  en  i(K)f) ,  à  «  > 
Worcester.  S'étant  mêle  ,  ainsi  oui- 
son  fds ,  avec  trop  de  chaleur  ,  de» 
élections  du  comté  de  Worroîer,  il 
fut  dénoncé  à  la  chambr^^  drs  r»ri- 
munes ,   qui   prit  une   •' 
tendant  à  supplier  la  rti  , 

ver  l'évêquc  de  Worcester  de  sa 
place  d'aumônier  de  S.  M.  Anne  fit 
droit  à  cetteadressc.  Cependant  Llo\  d 
continua  de  venir  à  la  cour  :  mais 
l'âge  aflaiblit  ses  facultés  iiUelIcc- 
tuelles:  car  Swift  raconte  qu'un  jour 
ce  prélat  ,  plus  qu'octogénaire,  se 
présenta  devant  la  reine  pour  lui 
prouver  ,  d'apri*s  le  texte  précis  du 
prophète  Daniel  et  de  l'Apocalypfte, 
que  dans  quatre  ans  il  y  aurait  une 
guerre  de  religion,  que  le  roi  de 
France  se  ferait  protr'^lant.  et  que  U 
apauté  serait  ab'  imt  U 

^o  août  IJ17.  Ton  iienpo- 

rains  ont  tait  l'éloge  de  ses  bonne» 
qualités  et  de  son  vaste  savoir.  Sa 
conduite  envers  les  disudeot»  de  aon 
diocèse  fut  constammeot  aflectueude 
et  chariublc  ;  il  fournit  d'exoeUCBU 
matériaux  à  Biunet  pour  son  His- 
toire de  la  Ité/orme,  et  rooprr% 
à  plusieurs  ouvrage»  importanu. 
On  a  de  lui  :  I.  titstoirt  du  gou- 
vernement de  VEglUe  tel  cm  */ 
existait  dans  la  Grande- Bretagne 
et  f  Irlande ,  au  moment  oàUtc 


ï 


586 


LLO 


ligion  chrétienne  y  fut  introduite. 
Cet  ouvrage,  publie  en  1O84,  ren- 
ferme des  docuiuenls  précieux  sur 
l'histoire  de  l'Eglise  dans  les  îles 
Britanniques  ;  il  dut  son  ©rigine 
aux  disputes  qui  venaient  d'avoir 
lieu  sur  l'épiscopat  ,  et  surtout 
au  traité  de  Blondel ,  sur  le  même 
sujet.  Lloyd  avance  dans  cet  écrit 
que  l'on  doit  retrancher  de  l'his- 
toire d'Ecosse  48  ''^is  qu'il  re- 
garde comme  fabuleux;  ce  qui  lui- 
attira  une  attaque  violente  de  la 
part  de  George  Mackenzie  de  Ro- 
sehaugh  ,  avocat  de  Jacques  II , 
dans  sa  Défense  de  Vant'quité  de  la 
ligne  royale  d'Ecosse,  etc. ,  i685  , 
iu-B".  Cette  pièce  ayant  été  vue  en- 
core en  manuscrit  par  le  docteur 
Stillingfleet,  il  fil  une  réponse  dé- 
taillée en  forme  de  préface  à  ses 
Origines  Brilannicœ,  II.  P^isieiirs 
Opuscules ,  les  uns  eu  faveur  de 
l'église  anglicane  contre  l'église  ro- 
maine, les  autres  destinés  à  dé- 
fendre les  catholiques ,  ont  été  réu- 
nis en  I  vol.  in-4**.,  Londres,  i()3i). 
III.  Abrégé  chronologique  de  la  rie 
dePjthagore,  1699.  DaJwell,dont 
il  avait  attaqué  l'opinion  sur  le 
temps  011  vivait  ce  philosophe,  y 
répondit  par  une  dissertation  ,  en 
1706.  IV.  Des  Ouvrages  ascéliqies. 
V,  Des  Recherches  sur  divers  points 
d'histoire  et  de  chronologie.  Sa  Sé- 
ries chronologica  oljmpiad  im ,  etc. 
a  été  insérée  à  la  tête  du  Pindare  de 
West ,  1697,  iri-fo^-  '  <2t  réimprimée 
plus  correctement  en  1700,  Otford, 
in-fol.  D — z — s  et  FI— s. 

LLOYD  (  Robert  ) ,  littérateur 
anglais  du  xvin«.  siècle ,  se  fit  re- 
marquer dès  sa  première  jeunesse 
autant  par  son  inconduite  que  par 
son  talent  pour  la  poésie.  Ce  fut  à 
l'école  de  Westminster  ,  où  il  était 
instituteur,  qu'il  composa  le  plus 


LLO 

eonnu  de  ses  ouvrages  ,  V Acteur , 
imprimé  en  1768.  La  publication 
de  ce  poème  donna  à  Churchill  l'idée 
de  sa  Rosciade,  d'abord  attribuée  à 
Lloyd ,  honneur  trop  dangereux  pour 
lui  :  mais  l'auteur  véritable ,  en  se 
nommant  bientôt ,  se  présenta  cou- 
rageusement aux  traits  de  la  criti- 
que qu'il  avait  provoquée.  Lloyd  , 
ayant  quitté  son.  emploi  d'institu- 
teur ,  et  continuant  à  être  fort  dissi- 
pé ,  contracta  des  dettes  ,  pour  les- 
quelles il  fut  mis  en  prison.  Heureu- 
sement, il  trouva  un  bienfaiteur 
dans  Churchill,  mauvais  époux  et 
mauvais  citoyen ,  mais  qui  fut  ce- 
pendant capable  de  sentir  et  d'ins- 
pirer une  amitié  véritable  et  cons- 
tante. Celte  amitié  fut  telle,  que 
Churchill  étintmort  au  mois  de  1.0- 
vembre  1764,  Lloyd  en  conçut  un 
chagrin  qui  le  mil  au  tombeau  un  mois 
après.  (  f^oy.  Charles  Churchill.  ) 
Ou  a  de  lui  ànq  pièces  de  théâtre, 
médiocres,  enlre  autres  la  Nouvelle 
école  des  femmes ,  comédie ,  impri- 
mée dans  le  Saint- James" s  maga- 
zine ,  1 763,  la  Aïort  d'Adam  ,  tra- 
gédie ,  1 753 ,  les  Amants  capricieux, 
opéra-comi-pie ,  1 764  ,  et  des  poé- 
sies ,  dont  la  plupart  ont  été  impri- 
mées ensemble  par  le  D.  Keurick, 
1774,  '-i  vol.  iu-B''.  lloyd  est  re- 
g  irdé  comme  un  versificateur  har- 
monie ;x  ,  dont  le  talent  était  de 
donner  à  de  vieilles  idées  une  tour- 
nure Meuve  et  élégante.  L. 

LLOYD  (  Henri  )  ,  tacticien  ,  ne 
en  17*9,  dans  la  principauté  de 
G  dles,  était  lils  d'un  ptsteur  de  vil- 
lage ,  qui  lui  enseigna  les  belles- 
lettres ,  les  mathématiques  et  \es 
diiFérentes  langues.  Doue  d'un  esprit 
supérieur  ,  il  fit  dans  toutes  ces  ])ar- 
ties  des  progrès  sapiles,  et  dirigea 
surtout  ses  études  vers  la  guerre  et 
la  politique.  La  carrière  des  armes 


LLO 

lissait  la  plus  capable  cle  flatter 
■iinhition  :  mais  irétait  sans  for- 
;  et  la  vtMialite  des  einpluisdans 
lise,  ne  lui  pcrmettaut 
!cr  de  l'avancement , 
t  j  les  yeux  sur  le  service  des  au- 
puissanccs.  Dès  l'âge  de  dix-sept 
,  il  accompagna  les  deux  jeunes 
iimund  qui  se  rendaient  dans 
Pays-Bas ,  et  il  assista  avec  eux 
bataille  de  Fonlcnoy.  Il  voya- 
ensuite  en  Allemagne ,  et  y  ob- 
i  surtout  la  tenue  et  l'orgauisa- 
I  des  dilîiérentcs  arme'es.  On  croit 
1  était  dès-lors  cbargé  secrète- 
itde  missions  politiques;  et  il  se- 
en  eflbt  diilicile,  sans  cette  sup- 
ition  ,  d'expliquer  comment  il 
pu  sulFire  à  la  dépense  de  pareils 
)  ij^es.  Après  un  séjour  de  quelques 
innées  en  Autriche,  il  réussit  à  se 
(aire  nommer  aide-de-cam'p  du  gé- 
aeral  Lascy,  qui  était  alors  marc- 
hai-général des  logis  ;  et  ce  fut  en 
:c;te  qualité  qu'il  fit  ses  premières 
irmes,  en  i  -^S^,  dans  cette  guerre  de 
îept  ans ,  si  féconde  en  événements , 
l  si  remarquable  par  le  talent  des 
liommcs  qui  la  conduisirent  de  part 
ît  d'autre.  Cet  emploi ,  en  le  met- 
tant à  portée  d'être  bien  instruit ,  lui 
laissait  tout  le  temps  d'observer,  et 
le  préparer  les  écrits  qui  l'ont  rendu 
«lèbre.  Il  obtint  bientôt  le  grade  de 
^pitaine ,  ])uis  celui  de  lieutenaut- 
îolonel;  et  dans  la  campagne  de 
t^6o  ,  il  eut  le  commandement  d'un 
jTos  détachement  de  cavalerie  et 
l'infanterie,  avec  lequel  il  fut  charge 
l'observer  les  mouvements  de  l'ar- 
nse  prussienne.  Lloyd  s'acquitta  de 
tHie  mission  avec  l)eaucoup  d'habi- 
le^ et  de  succès  ;  mais  la  fierté  ua- 
Hl|"clle  de  son  caractère  ,  ou  piutôt 
Ml  esprit  inquiet  et  turbulent  qui  ne 
siKa  point  de  le  diriger  dans  tout  le 
MMirs  de  sa  yie ,  lui  fit  beaucoup 


LÎ.0  mi 

dVonemii ,  et  mtt  dei  nhrtifki  à 
sou  aviinr  rite  de  «jnd^Mt 

injustices ,  i.n  avec  .lierrur, 

et  donna  •> 
ccptéc ,  à  < 

pas  au  service  de  I*rus5e.  «  .! 
»  né  Anglais,  répondit -il  ;  mu. .  ,  ^^ 
»  suis  libre  de  donner  4  qui  je  vou- 
»  drai ,  mon  cpée  et  mon  ca'ur.  Ce- 
»  pendant ,  je  veux  bien  vous  «vcticr 
»  que  mon  intention  n*est  |^s  de  scr- 
»  vir  le  roi.  »  Maigre  celle  dédari- 
tion  ,  Lloyd  alla  se  rannr  anssitôc 
sous    les  drapeaux   de  la  ProMe; 
et  il  fit  les  deux  dernières  « 
pagnes  de  cette  guerre,  coinî! 
doHle-camp-géncral  du  |  ^ 
dinand  de  Brunswick.  Ai 
de  Hubcrlsbourg  ,  il  se  remit  a  voya- 
ger, s'occupanl  toujours  dr  zn.-ne 
et  de  diplomatie.  Il  conti 

coup  à  la  conclusion  du  i: ^     .c 

la  sœur  de  George  111  avec  le  pi  incc 
héréditaire  de  Brunswck  ;  et  i!  re- 
çut, pour  le  succès  de  ses  n&'^oi  \\~ 
lions  à  cet  égard ,  une  pension  de 
cinq  cents  livres  sterling.  Voyant  la 
guerre  allumée  entre  la  Rus^e  et  U 
Porte,  il  se  rendit  à  Péterai •oui^ , 
et  y  fut  très-bien  accueilli  par  Ciihc- 
rine  II ,  qui  lui  donna  le  grade  dt 
général-major, et  un  commaudemeut 
dans  son  armée;  il  s'y  diiliugua 
dans  plusieurs  occasions,  uol.unitifut 
au  siège  de  Silistria ,  en  i-^î  I  * 
plans  qu'il  fournit  pour  1  r 

de  cette  guerre ,  eurent  un 
ces;  et  on  le  destinait  au 
dément  d'une  armée  de  i!  e 

hommes  en  Fiidaude ,    '  « 

paix ,  qui  fui  conclue  ave 
vint  le  priver  d'une  oc<  ù 
ployer  se-.     '  ' 

fhélfre.  C 


t«re  ;  le  deleiuuaèiciit  ci^wrc  ià  ^l 


5BS 


LLO 


ter  !e  service  de  Russie,  et  à  s'éloi- 
gner de  cet  empire  où  il  avait  été  si 
bien  accueilli ,  et  où  les  étrangers 
ont  tant  de  moyens  de  succès  !  11  se 
retira ,  sans  pension  ni  retraite ,  ni 
aucune  marque  d'honneur.  Il  avait 
désiré   l'ordre  de  Sainte- Anne  ;  le 

Î)cu  d'élévation  de  sa  naissance  fut 
c  prétexte  dont  on  se  servit  pour  le 
lui  refuser  :  mais  il  paraît  que  dès- 
lors  on  avait  connaissance  du  rôle 
méprisable  qu'il  joua  longtemps  j  et 
il  est  probable  que  c'est  à  cette  cause 
qu'il  faut  attribuer  la  variation  de  ses 
services ,  l'inconstance  apparente  de 
sa  conduite  y  et  surtout  l'espèce  de 
voile  dont  semble  encore  être  cou- 
verte une  partie  de  son  existence  (  i  ). 
En  quittant  la  Russie,  Lloyd  reprit 
le  cours  de  ses  voyages ,  et  il  par- 
courut successivement  l'Italie ,  l'Es- 
pagne et  le  Portugal.  A  Gibraltar ,  il 
eut  de  longues  conversations  avec  le 
célèbre  Eliot  ;  et  il  lui  donna  des  avis 
utiles  pour  le  plan  de  défense  qui  de- 
vait bientôt  illustrer  ce  gouverneur. 
On  a  dit  que,  dans  l'admiration  où  il 
fut  de  son  savoir  ,  Eliot  voulut  le 
rendre  à  sa  patrie.  Ce  qu'il  y  a  de  sûr , 
c'est  que  ce  fut  vers  ce  temps-là  que 
Lloyd  retourna  en  Angleterre;  mais 
on  croit  que  ce  fut  sans  l'aveu  du  mi- 
nistère. Il  est  vrai  qu'il  parcourut  les 
côtes, elqu'il  examina  soigneusement 
les  points  d'attaque  et  les  moyens  de 
défense  ;  mais  on  dit  que  ce  fut  en 
secret  et  à  la  faveur  d'un  déguise- 
ment. Cependant  il  rédigea  un  mé- 
moire qui  fut  imprimé,  et  que  le  mi- 
nistère acheta  cinq  cents  livres  ster- 
ling,  en  défendant  à  l'auteur  de  le 
publier.  On  ne  sait    pas  pourquoi 


(i)  Il  est  à  remarquer  que  les  nuteurs  anglais 
roiUemporHJns  ,  et  iiiJnia  ceux  qui  ont  écrit  ni>rèî 
Isoyà  ,  OUI  à  peine  fait  nieiuiou  <Ib  lui.  AiiLim 
des  biographes  de  cette  nalicin  que  non»  avoua 
•»i>»ultti»  ,  119  lui  a  consaor»   dariiclc. 


LLO  l 

Lloyd  s'eloign.i  encore  une  fois  alors 
de  sa  patrie,   ni  pourquoi,  renon-i 
çant  tout-à-coup  à  ses  voyages  ctàj 
ses  projets  de  fortune,  il  vint  se  con-i 
fîner  dans  une  modeste  retraite  près! 
de  Huy,  sur  les  bords  de  la  Meuse. j 
Il    y  paraissait  uniquement  occupe' 
de  la  publication  de  ses  écrits,  lors- 
qu'il mourut  subitement,  le  19  juin., 
1783.  Dès  qu'il  eut  fermé  les  yeux  | 
un  émissaire  anglaisse  présenta  danî' 
sa  demeure  ,  sous  prétexte  de  quel- 
ques dettes  ;  et  il  enleva  divers  pa 
piers.   Cet  empressement   a   doniK 
lieu   de  soupçonner  que  ce  fut    h 
ministère  anglais  lui-même  qui  fi 
ainsi  retirer  jusqu'au  dernier  exem- 
])laire  du  mémoire  où  se  trouvaien 
indiqués  les  moyens  d'envahir  l'An 
gleterre;  et  il  est  probable  que  c'es 
à  celte   circonstance  qu'il   faut  at 
tribuer  non  -  seulement  la    dispari 
tion  de  ce  mémoire,  mais  encor 
celle  de  beaucoup  d'autres  écrits  an 
nonces  par  Lloyd, et  dont  la  rédac 
tion  devait  être  fort  avancée ,  tels  qu 
la  suite  de  la  guerre  de  sept  ans  ,  € 
tuie  histoire  complète  des  guerres  d 
Flandre.  La  perte  de  tels  ouvrage 
est  sans  doute  fort  regrettable  pou 
les  militaires  :  Lloyd  avait  beaucou 
vuiBt  beaucoup  observé;  ses  principe 
de  tactique  sont  en  général  vrais,  < 
souvent  établis  sur  des  preuves  m; 
thématiques.  Il  a  fait  école  parn 
nos  tacticiens  modernes  ;  et  l'on 
adopté  dans  beaucoup  de  nouveau i 
écrits  jusqu'à  son  ton  dogmatique  (j 
tranchant,  si   repoussant   lorsqu'j 
s'agit   des    vérités  les   mieux   étc'j 
blies  ,  si  ridicule  lorsqu'il  est  foEJ 
dé  sur    des   erreurs  î   On  ne  pei 
nier  que  celles  de  Lloyd  ne  soieii 
nombreuses;  et  il  les  aurait  sari 
doute  reconnues  lui-même ,  s'il  ei 
vécu  plus  longtemps.  L'espèce  f 
charlatanisme  dont  il  les  a  envelo| 


1,L0 

rs ,  a  fait  plus  de  dupes  tpi'on  ue 

j  ciisc.  Qui  sait,  par  exemple,  l'in- 

Ihicuccque  peut  avoir  eue  sur  le  plus 

aiul    événement    de    la    dernière 

i  rrc ,  cette  assertion  si  ëvidem- 

iiicut  fausse ,  que  l'on  trouve  dans 

•^(Hi  chapitre  des  fronlièresde  la  Kus- 

:  a  Moscou  étant  pris  ,  l'empire 

Ivusseest  renverse.  »  Ses  ouvrages 

ïinussont:  l.Inlroductionà  VlUs- 

•e  de  la,  guerre  en  Allemagne  y 

i  re  le  roi  de  Prusse  et  Vimpéra- 

u-e  reine,  etc.,  Londres,  1781, 

vol.  in-4**.  ;   traduit  eu  français 

I  le  chevalier  d'Estinianville ,  in- 
iiicur  au  service  de  Prusse,  Lon- 

s  ,  1784 ,  in-4".  Le  gênerai  prus- 

II  Tempclhof  en  a  publie  une  tra- 
iv  lion  allemande  avec  une  suite  et 
s  notes  de  sa  composition ,  Ber- 
1,1 783-94 ,  5  vol.  in-4'*.  Le  mar- 
is de  Mesmon  a  aussi  traduit  en 

mçais  ,  et  fait  imprimer  à  Bruxel- 
,  en  1 784 ,  le  premier  volume  de 

t  ouvrage  ;  dont  Tëdition  resta 
.- ms  son  château,  jusqu'en  1793, 
époque  à  laquelle  le  comité  révolu- 
tionnaire  de  Rhe'lel  l'envoya  au  co- 
mité de  salut  public  ,  qui  la  fit  dis- 
tribuer aux  généraux  de  ce  temps-là. 
Les  cuivres  sont  encore  au  dépôt  de 
la  guerre,  et  le  manuscrit  du  reste 
de  l'ouvrage  n'a  pu  être  retrouvé.  Ce 
premier  volume  a  été  réimprimé  en 
1801,  à  Paris ,  sous  le  titre  de  Mé- 
moirds  politiques  et  milita' res  du 
général  Llojd,  servant  d'introduc- 
tion ,  etc.  On  a  encore  publié  à  Bdlc 
(Cassel ,  ïourncisen  ),  1798,  in-S". 
Mémoires  politiques  et  militaires , 
ou  Histoire  de  la  guêtre  en  Alle- 
magne,  etc.  Enfin,  le  général  Jo- 
mini  s'est  servi  du  texte  de  Lloyd, 
et  de  Tempelhof ,  pour  son  Traité 
des  grandes  opérations  militaires. 
IL  De  la  composition  des  différentes 
armées  anciennes  et  modernes,  Ira- 


LLW  ÙSq 

duit  en  fran<  des  notes, 

par  un  uilicii  1    t  '      ... 

»^,  Paris,  iH    i    11  >. 

litique  et   militaire   ^ui   l  iuii:iioi\ 
et  la  défense  de  la  grandr  fi'rin 
gne y  traduit  sur  la  liii'? 
tion  ,  par  (i.  Iinbrj  f .  vi  ! 
ris,  180  .  ! 
dans  la  iii 

lions  sur  ce  dernier  uuvra{;e  ,  qui  fut 
souvent  consulté  à  l'occasiou  de  l'in- 
vasion de  r Angleterre  que  piojetait 
alors  le  gouvernement  français  ;  mats 
on  croit  qu'il  y  manque  la  |>artie  la 
plus  importante,  c'esl-à-<liic  celle 
qui  est  relative  à  la  pc^sibilitë  de 
cette  invasion.  Lloyd  a  encore  pu- 
blié des  Essais  politi<pies,  des  Es- 
sais suv  les  passions  et  sur  les  finan- 
ces, qui  n'ont  pas  été  traduits.  On  a 
publié  en  allemand  des  exlrails  de 
ses  ouvrages  militaires  sous  diflc- 
reuts  titres.  M — o.  i. 

LL\VYD,LHm'D,LLlIWYD  on 
LHOYD  (  HuMPUREY  ) ,  antiquaire 
anglais  ,  né  à  Denbigh  ,  mort  vers 
1570,  avait  étudié  à  runîversitë 
d'Oxford.  Camden  le  représente  com- 
me un  des  meilburs  antiquaires  de 
son  temps,  et  Daines  Barringtou  loue 
son  exactitude  sur  tout  ce  qui  con- 
cerne l'histoire  du  jwvs  de  Galles.  Il 
avait  du  goût  pour  les  beaux-arts  , 
particulièrement  pour  la  musique; 
c'est  lui  qui  a  cxérulé  la  carte  de 
l'Angleterre  pour  l'ouvrage  iuliliJe' 
Tfieatrum  Orbis.  Il  avait  rassemblé 
un  grand  nombre  de  livres  curieux  et 
utiles  pour  lonl  Luiulrv .  d-nt  il 
avait  épousé  la  sanir.   '  > , 

achetés  ensuite  par  Jac«i 
vinrent  le  fondt-inent  de  la 
thèque  royale ,  et  forment  "•  1 
une  partie  irès-eslimabb 
britannique.  Voici  les  i 
principaux  ouvrages  :  I.  ' 
rioU  iritannitœ  detcnfnn^rtnj'uf^- 


1 


%» 


LLW 


mentum  ,  Cologne,  1572  ;  réimpri- 
mé par  Moses  Williams ,  sous  ce 
tîLre  :  II.  Lhwyd ,  armigen ,  Bri- 
tannicœ  descriplionis  comment ario- 
îitm,  arec  les  deux,  ouvrages  sui- 
vants ,  Londres  ,1731,  in-4°. }  trad, 
en  anglais  par  Twyne ,  sous  ce  titre  : 
The  Bre^iaiy  of  Bntain,  Londres, 
1 7G8 ,  in-8^.  II.  De  Monci  Druidum 
insuld  antiquitati  suce  restitutd , 
et  une  lettre  à  Abraham  Ortelius  ,  5 
avril  i568.  III.  De  Armamentaiio 
romano ,  imprime'  ainsi  que  Tecrit 
pre'ce'dent,  à  la  fin  de  Hist.  Brit. 
Dej'ensio ,  par  sir  John  Priée,  Lon- 
dres ,  1673,  in-4'^.  IV.  Chronicon 
ïValliœ ,  à  rege  Cadwalladero , 
usqiie  iidann.  Dom.  1 294; Mss.  dans 
la  biblioth.  Goltonienne.  V.  Histoire 
de  Camhrie  y  maintenant  appelée 
pays  de  Galles  ,  d'après  Caradoc 
de  Lancaivan ,  les  registres  de 
Conway  et  de  Stratjleur ,  avec  une 
continuation  tirée  principalement  de 
Mathieu  Paris,  Nie.  Trivet ,  etc. 
Lhuyd  étant  mort  avant  d'avoir  ter- 
miné cet  ouvrage  ,  le  docteur  Dav. 
Powel  y  mit  ses  soins,  et  le  publia  à 
Londres,  i584,  in-40.  YI.  Le  Tré- 
sor de  la  Santé ,  traduit  de  P.  His- 
panus,  etc.,  Londres,  i585.  VIL  La 
Conhaissance  des  urines ,  Londres, 
i55i,in-8«.  L. 

LLWYD  ou  LHUYD  (  Edouard  ), 
antiquaire,  ne  en  1660,  dans  le  midi 
du  pays  de  Galles,  devint ,  en  1690 , 
conservateur  du  Muséum  ashmoléen, 
se  livra  à  l'étude  des  antiquités  de  son 
pays,  par  ses  lectures  et  voyages  dans 
diverses  parties  de  l'Angleterre ,  et 
mourut  en  1 709,  après  avoir  publié  : 
I.  Archœologïa  Britannica ,  où  l'on 
trouve  des  détails  sur  les  langues  , 
l'histoire  et  les  coutumes  des  premiers 
habitants  de  la  Grande-Bretagne  ,etc. 
i^-^'.  vol.  Glossographie j  Oxford, 
1707^  in-fol.  On  y  trouve  nn  ample 


LLY 

dictionnaire  du  dialecte  de  Gornwa?L 
une  réimpression  de  la  Grammaire 
et  du  Dictionnaire  armoricain 
père  Maunoir ,  etc.  IL  Lrthophj 
lacii  Britannicilconographia,  i6c 
in-8".  Cet  ouvrage  ,  qui  est  un  cat« 
logue  méthodique  des  fossiles  figuré 
du  Muséum  d'Ashmole  ,  et  composé 
de  T  766  articles  ,  fut  imprimé  aux 
frais  de  Newton  ,  de  sir  H.  Sîoane  , 
et  de  quelques  autres  savants,  amis 
de  l'auteur.  Comme  on  n'en  tira  que 
I  '10  exemplaires ,  M.  Huddesford  en 
donna,  en  1760,  une  nouvelle  édi- 
tion ,  augmentée  de  quelques  lettres 
de  Lhuyd,  et  d'une  introduction.  III. 
Rapport  sur  du  papier  fait  avec  de 
V amiante  trouvée dansV lie d' Angle- 
sey ,  et  seize  autres  notices  ou  petits 
Mémoires  insérés  dans  les  Transac^ 
tions  philosophiques  (  u9^.  1 66-3 3ô). 
Lhuyd  communiqua  des  observa- 
tions à  l'évêque  Gibson  ,  dont  l'édi- 
tion de  la  Britannia  fut  revue  par 
lui.  Il  a  laissé  plusieurs  ouvrages 
manuscrits  ,  dont  M.  Carte ,  entre 
autres ,  a  fait  des  extraits  historiques. 
(  F.  les  Mémoires  sur  la  Vie  d'Ed. 
Lhuyd,  à  la  fin  du  British  remains, 
Londres,  1777,  in-8".)  L. 

LLYWELIN  ,  LHEWELIN  ou 
LEWELYN  ,  seizième  prince  sou- 
verain du  pays  de  Galles  ,  descen- 
dait ,  par  sa  mère  ,  des  anciens  rois 
de  ce  pays.  Il  épousa  ,  en  998  , 
Angharat ,  fille  unique  de  Méredith  , 
qui  avait  régné  sur  le  pays  de  Galles 
méridional  j  et  il  attaqua  en  ioi5  , 
à  la  tète  d'une  armée ,  Aedan,  qui , 
en  ioo3  ,  s'était  emparé  du  trône  du 
pays  de  Galles  septentrional.  Il  le 
battit  ,  le  tua  ,  ainsi  que  ses  quatre 
fils  ,  et  prit  le  titre  et  l'autorité  de 
roi  de  Galles.  Les  habitants  furent 
heureux  pendant  son  règne  ,  quoi- 
qu'il eût  à  soutenir  plusieurs  guerres 
contre  les  princes  voisins.  Il  fut  as- 


me  en  loii  ,  et  laissa  un  fils 

inc  GrulîVth  ,  qui  ne  parvint  à  la 
;  i)niio(|uVii  io38.     D — 1 — 8. 
LYWEF.YN,  piiucc   souverain 
pays   de    Galles  ,   que  Mathieu 
i>  appelle  Leon-lc-Grand ,  elail 
f  (ils  d'Ow'eu  Gwncth  qui  atait 
e  sur  ce  pays.  Jo7.welh  Drwyn- 
1  ,   ou  Edouard   au  nez  cassé, 
de  IJywelyu  ,  quoique  l'aîné 
(Mifanls  d'Owon  Gwuelh  ,  ne  lui 
(da  pas  à  cause  de  sa  dillormilé  ; 
fut  Divid  son  frère  cadet ,  d'un 
e  lit  ,  qui  prit  les  rênes  du  gou- 
crncKt    en    1194    :   Lly  welyn , 
r  s'opposer  à  cette   usurpation, 
aibla  des  troupes ,  et  entra  dans 
lys  de  Galles  septentrional ,  dont 
li'empara  sans  etiusion  de  sang, 
ion  oncle  David  n'ayant  point  fait 
le  résistance  ,  et  les  habitants   s'é- 
lant   volontairement  soumis  à  son 
ibéissance.   Cependant  ,   trois   ans 
iprès  ,  David,  qui  avait  conservé  son 
lutorité  sur  une  partie  du  pays  de 
^lles  ,  vint  attaquer  son   neveu  ,  à 
â  tctc  d'uue  armée  composée  d'An- 
glais et  de  Gallois;  mais  il  fut  battu  et 
•it  prisonnier.  D'après  l'ordonnance 
Rodeiick-le-Grand  ,   et   les   lois 
le  Hohvel  Dlia,  prédécesseurs  de 
iJywelyn ,  tous  les  princes  et  sei- 
^eurs  gallois  étaient  tenus  de  rc- 
tonnaitrc  pour  leur  souTeraiu  celui 
(ui  régnait   sur  le  pays  de   Galles 
eptentrional ,  et  de  lui  prêter  foi  et 
lommâ^e  :  cependant  ces  lois  fon- 
iameulales  étaient  tombées  depuis 
lODg-temps  dans  une  telle  désuétude, 
î  la  plupart  de  ces  seigneurs  se 
onnaissaient  vassaux  du  roi  d'An- 
{leterre ,  tandis  que  les  autres  agis- 
saient  en   souverains   tout  -  à  -  fait 
odépcndunts.   Lîywelyn  conciât   le 
•rojel  de  faire  disparaître  ces  abus  ; 
l  cohvoqua  un  parlement  de   tous 
|cs  geigueurs   da  jiays  de  Galles  ; 


IXT  5y, 

pour  qu'ils  eussent  k  lui  pr^er  It 
serment  d"  "  o  ;  pretoac  Ions 

obéirent  :  1  l.s  irbellet  à  tt 

sou  met  Ire  par  la  lorrc  des  amcs. 
En  r>o4  ,  David  ,son  nnric  .  nnitid 
Llywrlyn  avait  acn  : 
ayant  essayé  de  nouT  n    , 

l'auturilé,  avec  le  secours  des  An- 
glais ,  fui  encore  défait  par  lui ,  et 
obligé  de  se  réfugier  en  Angleterre  où 
il  mourut  bientôt  après.  Le  roi  Jean 
(sans  Terre)  qui  déjà  avait  eu  quel, 
ques  démêlés  avec  Llynelyn  ,  quoi- 
qu'il lui  eût  donne  en  mariage  ta 
liLe  Jeanne,  prit ,  en  tai  1  ,  la  dé- 
fense de  plusieurs  seigneurs  gallois  , 
qui  avaient  à  se  plaindre  de  ce 
prince ,  et  joignit  k  leurs  f-Trei  une 
armée  considérable,  avec  I 

entra  dans  le  pays  de  G.  .» 

I.ly welyn  ,  après  avoir  appru\i- 
sionné   ses  châteaux  -  forts   et    ses 

F  laces  de  guerre,  se  replia  dans 
intérieur  du  pays ,  détnusant  loi^t 
derrière  lui;  ce  qui  força  Jean  à  se 
retirer  en  Angleterre.  Ce  prince  fut 
plus  heureux  Tannée  suivante;  car 
il  obligea  Lly  welyn  à  lui  prêter  foi 
et  hommage,  et  à  souffrir  des  prui 
sons  anglaises  dans  plusieur>  (le  ses 
châteaux  :  le  prince  gallois  se  délivra 
néanmoins  de  ses  hôtes  iurora modes, 
après  avoir  mis  tous  les  seigneur» 
dans  ses  intérêts  ,  et  avoir  ctc  deîié 
par  le  pajw  des  serments  qu'il  avait 
prêtés  à  Jean.  Ce  priure  s'elant  ar- 
rangé avec  le  pape,  Lly  welyn  et  les 
autres  ennemis  du  roi  d'.-^ngleterre 
furent  â  leur  tour  excommui  iA:  <c 
qui  n*em  pécha  pas  le  $01.' 
lois  de  lever  des  troupes,  i....  :_..« 
une  invasion  en  Angleterre,  en  1  ^  1 5  : 
il  ne  rentra  dans  ses  états  qu'après 
s'être  empare  de  plusieurs  villo  rt 
avoir  levé  de  T  *    ■        . 

Cependant  ,  L' 
France,  appelé  pAi  iu  baroju  aA^ 


^9'^ 


LLY 


glais  opposes  à  Jean,  ayant  débarque' 
en  Angleterre  ,  demanda  l'amitië  de 
Llywelyn:  celui-ci  ne  répondit  rien  , 
et  résista  e'galement  aux  attaques  de 
ce  prince.  Llywelyn  eut  à  combattre 
en  I  '2 1 7 ,  Reynal  de  Bruce  et  quelques 
autres  barons  qui  s'e'taient  arrangés , 
sans  l'en  prévenir ,  avec  Henri  III , 
qui  venait  d'être  reconnu  roi  d'An- 
gleterre j  il  les  battit  j  et  les  contrai- 
gnit à  se  soumettre  et  à  lui  payer 
des  sommes  considérables. En  i'2'ii, 
il  eut  des  discussions  avec  Grut- 
fytb ,  son  second  fils  ,  auquel  il  par- 
donna, après  l'avoir  vaincu  •  il  lui 
confia  même  ,  en  i223  ,  une  armée 
avec  laquelle  il  s'opposa  aux  progrès 
de  William  Marshall ,  qui,  venu  d'Ir- 
lande, était  entré  sur  ses  terres  avec 
une  troupe  considérable.  Llywelyn 
combattit,  en  1228,  Henri  ÎII,  roi 
d'Angleterre  :  après  quelques  escar- 
mouches insignifiantes  ,  la  paix  fut 
conclue,  et  il  eut  une  entrevue  avec 
le  roi  auquel  il  rendit  des  honneurs, 
mais  sans  se  reconnaître  son  vassal. 
En  I  Si3o ,  Llywelyn  ayant  surpris  sa 
femme  en  adliltère  avec  WiUiam 
^ruce,  fit  pendre  ce  dernier.  Henri 
III  qui  avait  plusieurs  fois  provoqué 
Llywelyn,  envoya  vers  lui,  en  i^Si, 
l'archevêque  de  Cantorbery  et  les 
évêques  de  Rochester  et  de  Chester  , 
pour  traiter  de  la  paix;  mais  ils  s'en 
retournèrent  sans  avoir  lien  conclu. 
En  1^37  ,  Llywelyn  appela  auprès 
de  lui  les  seigneurs  et  barons  du  pays 
de  Galles  ,  et  leur  fit  prêter  serment 
de  fidélité  à  David  son  fils.  Vers  ce 
temps ,  se  sentant  vieux  et  infirme , 
et  tourmenté  par  la  conduite  de  son 
fils  Gruffyth  ,  il  envoya  des  ambas- 
sadeurs à  Henri  III ,  pour  lui  faire 
connaître  son  désir  de  passer  le 
reste  de  ses  jours  en  paix  ,  en  lui 
offrant  de  se  soumettre  à  lui ,  et 
promettant  d'être  prêt  à  le  secourir 


LLY 

toutes   les  fois  qu'il  aurait   beso 
de  son  aide.  Un  traité    fut  conci 
en  conséquence  ,  parl'intermédiaji 
des  évêques  d'Hereford  et  de  Ghestc. 
Après  avoir  cédé  une  partie  de  so 
états  à  son  fils  David  ,   qu'il  av.; 
eu  de  Jeanne  fille  du  roi  Jean  d'Ai 
gleterre,  Llywelyn  mourut  en  1  si4o 
et   fut    enterré    dans    Tabbaye    d( 
Gonwcy.  C'est  un  des  princes  les  plu 
vaillants  qui  aient  régné  sur  le  pay, 
de  Galles  ,  qu'il  parvint   à  réduin 
tout  entier  sous  son  obéissance:  peD 
dant  cinquante-cinq  ans  de  règne  ,  i 
tut  presque  toujours  en  guerre  contre 
ses    vassaux  ,    ou    contre  les  roi 
d'Angleterre.  D — z — s. 

LLYWELYN,  dernier  prince  sou 
verain  du  pays  de  Galles,  petit-fils  di 
précédent ,  eut  pour  père  Gruffyth 
que  David ,  son  frère  aîné ,  tint  long 
temps  dans  une  dure  captivité.  Al 
mort  de  son  oncle ,  arrivée  en  1 246 
selon  Powel ,  ou  en  1263 ,  selon  Hu 
me,  Llywelyn  fut  reconnu  princ 
souverain  du  pays  de  Galles  ,  ave 
son  frère  Owen  Goch  ,  par  tous  le 
seigneurs  et  barons  assemblés,  quoi 
que  Roger  Mortimer  eût ,  suivan 
l'ordre  légal  ,  plus  de  droit  à  l 
succession.  Llywelyn  divisa  en  deu: 
parties  le  pays  de  Galles  ,  et  se  ré 
serva  le  Nord ,  laissant  le  Midi  à  so; 
frère  Owen.  Ce  dernier ,  peu  satisfai 
de  ce  partage,  prit  les  armes  en  1 254 
mais  il  fut  vaincu  et  fait  prisonnier 
ce  qui  laissa  Llywelyn  sans  compé 
titeur.  Pour  établir  et  assurer  soj 
indépendance  (i)  contre  les  entre 
prises  d'Henri  III,  il  crut  devoir  fc 
monter  des  discordes  dans  le  royau 
me  de  son  ennemi;  et  il  entra  dan 


(0  Hume  dit  qu'en  montant  sur  ^le  ti 
Llywelyn  fut  obligé  de  renouveler  au  roi  d 
gleterre  Henri  lll ,  l'hommage  arrache 
faiblesse  d»  son  grand-père,  et  que  l«s  An 
réclamaient  comme  un  droit  établi.  Le  JJ.  Powi 
historien  du  pays  de  Galles,  ae  pari»  pas  de 
«!r<.-ouit»uc«  itoportaiite. 


owS 


LLY 

(  onfcdrration  avec  le  comte  de 
ester.    Ayant    réuni   toutes  les 
-  s  de  sa  priutipaule,  il   (il  une 
^ion  en  Anglelcire,  à  la  tèle  de 
00  honnncs,  et  eomnienva  par 
'rava«;er  les  terres  de  Rof;er  de  Mor- 
linier  et  de  tous  les  barons  du  parti 
[ide  la  couronne.  Il  marcha  ensuite 
'.dans   le   Chesliire,   et   commit   de 
(Semblables  rav^tgcs  sur  les  terres  du 
iprinee  Edouard.  Ses  troupes  indis- 
iciplinees  mirent  tout  à  feu  et  à  sanj;; 
let  quoique  Mortinicr  fît  une  vigou- 
ircuse  résistance  ,  il  fallut  cependant 
<que  le   prince  Edouard  vînt  à  son 
secours  ,  à  la  tête  d'une  armée.  Lly- 
("Welyn  fut  repousse  ,  et  oblige  de  se 
icéfugier  dans  les  montagnes  du  nord 
idu  pays  de  Galles  :  les  troubles  sur- 
venus   en   Angleterre    empêchèrent 
Edouard  de  l'y  poursuivre.  Cette  in- 
vasion des  Gallois  fut  ,  pour  les  ba- 
rons mécontents,  le  signal  de  courir 
aux  armes  ;  Lly  welyii  leur  prêta  son 
appui,  et   entra   dans   toutes  leurs 
conspirations  contre  la  couronne  , 
jusqu'à  la    bataille  d'Evesham  (  4 
août  iuG5),  si  funeste  au  parti  des 
rebelles.  Lors  de  raccommodement 
géne'ral  qui  eut  lieu  avec  les  vaincus, 
jlywelyn  obtint  aussi  son  pardon(  \  ); 
mais  comme  il  était  le  vassal  le  plus 
Ôuissant,  et  par  conséquent  le  pJus 
aangereux,  il  craignit  })our  l'avenir 
|iÈS  elfets  de  la  jalousie  du  monarque 
tnglais,  et  crut  devoir,  pour  sa  sû- 
CCtcf,  conserver  une  correspondance 
^j  lebrctc  avec  ses  anciens  associés,  et 
^  iemander  en   mariage  une  (il le  du 
:,    eimtc  de   Lcicester    :   elle   lui   fut 


Powel  ne  fait  connaître  ni  l«  lî-«  i»! 
-  la  bataille  5  il  .lit  .eulemout  qu..  p«r 
llaira  J'OHohooua  ,  léj»*l  «J««  P"P«  ;  '■ 
...u  Ine  f.n  ia6H  ,  entre'  le  lol  llei.tl  et 
.  au  château  Ue  Montpo.tiniery.C»  Jrr- 
i.lÏRoao  paver  aii  roi  3o.o3o  warc»  ,  «t 
ir  dr  lui  une  chattr  qui  imp»i4if  foi  et 
>m..ge,  non  »eulem«nt  ■  Llrwelyri  |.ii-m*«e, 
.1*  entere  à  ton»  <•*  b*ron»  ,  uu  âeul  «ftCeft*. 

XXIV. 


accordée  ;  mais ,  arrêtée  à  non  pi- 
sage  près  des  Wrs  *\r  .Villy,   «rt»#» 
dame  ne  put  rejoindre*  I.I\u«I\ii    rt 
fut  retenue  à  lacouni 
Cet  incident  angmrni.i 
luclle  de  Llywplyn   <i    : 
quiavoitsucrcfdéâ  soiipù. x,  ■       -. 
CiC  dernier  exigea  que  le  nrinn-  «1  • 
Galles  vint  en  Angleterre  lui  prrtrr 
foi  et   hommage    :    LIv^Hvn    qui 
craignait  de  se  mettre  airiM 
mains  de  son  ennemi .  iiru  ! 

lui  fût  délivré  'n 
le  (ils  du  roi  et 
gueurslui  fussent  rt-nns  <  ; 
avant  tout  qu'on  rendit  la  I 
femme.  Edouard  n'ayant  nrn  ^ 
douter  de  ses  barons,  ne  fut  p  , 
elle  de  cette  occasion    pour  ^ 
guer  entièrement  la  principau:.    _ 
Galles.   U  se  refusa  donc  a  toutes 
les  demandes  du  prince  gallois .  ex- 
cepté à  celle  d'im  sauf-conduit  ,  lui 
enjoignit  de  nouveau  de  remplir  son 
devoir  de  vassal,   leva  une  armrr 
considérable,  et  marcha  contre  lui. 
Outre  la    grande  disproportion  dr 
forces,  les  circonstances  r.\  t 

encore  Edouard; car  les  i 
sensions  intestines  qui  .r 
affaibli  l'Angleterre,  c\l^• 
dans  le  |>ays  de  Galles  ,  ]  > 

la  famille  royale,  l)a^id  .1  ;    , 

frères  de  Llywclyn,  dépouille»  par 
lui  de  leurs  héritages ,  s'élaieot  ren» 
dus  auprès  d'EdouanI,  dont  ils  se- 
condèrent la  vengeauccBieutôl  Llv- 
>velyu  n'eut  d'autre  ressource  que  ^ 
se  réfugier  dans  les  monlagoes  ne 
Snowduu  ,  qui ,  pendant  tant  de 
siècles ,  avaient  déTeudu  ses  ancêtres 
contre  les  Saxons  et  les  Normands. 
Edouard  ,  entrant  par  le  nord  ,  pé- 
nétra dans  le  cœur  du  pays,  et  vint 


(1)  L«  D.  P«»«l  ptar»  c«l  *»»•■—»  *•  ••:!» 


594  LLY 

bloquer  l'armëe    galloise    dans    sa 
dernière  retraite.    Prives  de    leurs 
magasins ,  et  resserres  dans  un  coin 
e'troit  avec  leurs  troupeaux,  les  Gal- 
lois souffrirent  bientôt  toutes  les  hor- 
reurs de  la  disette;  et  Llywelyn  fut 
contraint  de  se  rendre  à. discrétion. 
Il   s'obligea   de  payer  au  roi  cin- 
quante mil'e  livres  sterling  pour  les 
frais  de  la  guerre,  de  faire  hommage 
de  sa   principauté   à    la   couronne 
d'Angleterre,  de  permettre  que  tous 
les  barons  du  pays  de  Galles  juras- 
sent lîdëlité  à  Edouard  j  de  lui  aban- 
donner le  pays  situé  entre  le  Ghes- 
hire  et  la  rivière  Gonway;  de  payer 
une  forte  pension,  à  chacun  de  ses 
frères ,  et  enlin  de  donner  dix  otages. 
Edouard  ,  d'après    l'exécution   des 
autres  articles ,  fit  remise  au  prince 
de  Galles    des    5o,ooo  livres  ster- 
ling ,  que  la  piuvreté  du  pays  ne 
lui   aurait  pas   permis   de    payer  , 
et  lui  rendit  Elianor  ,  fille  de  Simon- 
de  Montfort,  comte  de  Leicester, 
que  Llywelyn  épousa  en  1278.    Le 
roi  et  la   reine  d'Angleterre  assis- 
tèrent à  son  mariage  ,  avec  l'élite 
de  leur  noblesse.  Cependant  les  vio- 
lences commises  journellement  par 
les  Anglais  ,  leurs  vexations  conti- 
nuelles exaspérèrent  les  Gallois  ;  et 
des  conditions  plus  dures  furent  im- 
posées à  Llywelyn  lui-même  ^  qui 
s'engagea  formellement  à  ne  souffrir 
dans  sa  principauté  aucune  personne 
suspecte  au  roi  d'Angleterre.  D'au- 
tres   injures    encore    enflammèrent 
l'indignation  des  Gallois,  qui  aimè- 
rent  mieux  essayer  de  nouveau  le 
sort  des  armes  contre  un  ennemi  for- 
midable ,  que  de  supporter  l'oppres- 
sion de  leurs  orgueilleux  vainqueurs. 
Le  prince  David,  rempli  de  cet  esprit 
national ,  fit  la  paix  avec  son  frère  , 
et  promit  de  concourir  à  la  défense 
ÛQ  la  liberté  commune.  Les  Gid- 


LOA 

lois  coururent  tous  aux  armes;  <!t 
Edouard  ,  satisfait  de  l'occasion 
qu'ils  lui  présentaient  de  faire  la 
conquête  définitive  de  leur  pays  , 
assembla  son  armée,  et  y  pénétra. 
Les  Gallois  obtinrent  d'abord  quel- 
ques avantages  sur  Luke  de  Tany, 
l'un  des  capitaines  d'Edouard  ,  qui 
avait  passé  le  Menau  avec  un  déta- 
chement j  mais  bientôt  Llywelyn  , 
surpris  par  Mortimer  ,  fut  défait , 
et  tué  dans  une  action  qui  eut  lieu 
en  1277  ,  suivant  Hume,  et  en 
1282,  suivant  le  D.  Powel;  deux 
mille  de  ses  partisans  y  furent 
passés  au  fil  de  l'épée.  David ,  son 
frère,  lui  succéda  dans  sa  princi- 
pauté :  mais  il  ne  put  rassembler  une 
armée  capable  de  faire  face  aux  An- 
glais ,  qui  le  poursuivirent  de  mon- 
tagnes en  montagnes  ;  et ,  après  l'a- 
voir contraint  de  se  cacher  sous  di- 
vers déguisements ,  s'emparèrent  df 
sa  personne  par  trahison.  Edouard 
le  fit  traduire  devant  la  chambre  de; 
paii's  d'Angleterre,  et  ordonna  en 
suite  qu'il  fût  pendu  et  écartelé  com 
me  un  traître.  Toute  la  noblesse  gai 
loise  se  soumit  alors  au  vainqueur 
qui  établit  dans  ce  pays  les  lois  an- 
glaises ,  et  parvint  ainsi,  après  un< 
lutte  de  huit  siècles,  à  affermir  cett( 
importante  conquête.  (  /^.  Edouari 
p»-. ,  tom.  XII,  p.  492.  )  D— z— s 
LOAISEL  DE  TRÉOGATE  (  Jo 
sepii-Marie),  néau château  de  Beau 
vel  dans  la  Basse-Bretagne,  le  i^ 
août  1752,  fut  gendarme  de  la  gardi 
du  roi,  et  consacra  ses  loisirs  à  la  lit 
térature.  Il  n'y  acquit  ni  gloire,  n 
fortune  :  la  Convention  nationale  l 
comprit  au  nombre  des  gens  de  let 
très  à  qui  elle  accorda  des  secours 
en  1 795  ,  et  il  mourut  dans  l'obs 
curité,  en  octobre  18 12.  On  a  d( 
lui  :  I.  Des  romans  ou  nouvelles 
savoir  :  Falmore,  1776,  ia-8^ 


orello  ,  1776,  1  vol.  inS*.  :  ces 

i\  oiivr.»p;c.s  ont  cte  roi  m  primes  en 
1)5,  et  traduits  en  russe  ,  Moscou, 
M) i , i n- 1 'j  ;  —  les  Soirées  (U  la  me- 
iiolie,  1777,  iii-80. ;  —  la  Comtes- 
d'Ali^re  ou  le  Cri  du  sentiment  y 

I  78  ,   in-80.  ;  réimprimé  ,  sous  le 

II  ire  de  Louise  et  Milcourt  ou  le 

/  du  sentiment ,  1 793 ,  in- 1 2  ;  — 
Ibreuse ,  ou  V Homme  du  siècle 
nené  à   la   vérité  par  le  senti- 
rit   et  par  la  raison,   1788,  2 
!.  iii-8*^.  ;  170'2,  2  vol.  in- 18;  — 
nsi  finissent  les  grandes  passions, 
les  Dernières  Amours  du  cheva- 
r  de  .... ,  1 781) ,  2  vol.  in- 1 2  ; 
—  ralrose ,  ou  les  Oracles  de  VA- 
">ur,  1790'  ^  vol.  in- 12;  —  Hé- 
eet  Abeilard,  ouïes  Victimes  de 
jiiour ,  i8o3,  3  vol.  in-12.  Loai- 
!    n'est  qu'un  imilaleur  d'Arnaud 
ulard,  auteur  des  Epreuves  du 
ttiment.    Cependant  ,    quelques- 
>   de   ces   ouvrages  ont   été  tra- 
its en    allemand  ,    etc.    II.    Des 
\  rages  dramatiques  ,  dont  la  plu- 
1 1  n'ont  été  représentés  que  sur 
théâtres  du  Boulevard.  111.  Vflis- 
/v  de  Philippe  II ,  roi  d'Espar- 
'' ,   et  de  Louis  le  Débonnaire  ; 
;is  V Histoire  des  hommes ,  mr 
lisle  de  Sales  et  autres.  IV.  Des 
articles,  soit  en  prose  soit  en  vers  , 
'dans  le  Journal  encyclopédique ,  le 
^Mercure   français  ,    etc.   V.  Aux 
âmes  sensibles ,  élégies.  Ce  recueil , 
cité   par    plusieurs    bibliographes, 
mais  dont  aucun  ne  donne  la  date  , 
doit  être  rare  ,  s'il  existe.  Z. 

LOAYSA  (  Garcias  ) ,  cardinal 
çl)[>agnol ,  né  vers  l'an  i470  >  ^  ^^- 
^«rera  dans  la  Castille  neuve  ,  d'une 
ille  illustre  et  qui  a  produit  plu- 
rs  hommes  distingués  ,  entra 
jeune  dans  la  maison  des  Domi- 
ins  de  Salamanquc  ;  mais  la  dé- 
Hàtesse  de  sou  lempcrament  ayant 


I.OA  V/, 

fait  craindrf  qu'il  nr  MÔt  »iit>, ,,..#._ 
les  austérités  rjni  v 

ses  su|)érieurs  ren\.., ;  .,,,,, vrr 

son  noviciat  a  Pcnafirl.  Il  y  prit 
l'habit  religieux  m  •  '  "  cl  »e 
rendit  ensuite  au  «  Sainl- 

Grégoirc  à  ValladoliM,  "u  ii  termina 
ses  étudc5  de  la  manière  la  phn 
brillante  :  il  fut  d*  ,  rt-rn- 

plir   la   chaire  dr  dans 

ce  même  collf.  temps 

après  ,  il  en  d-  <  I,rs  ta- 

lents qu'il  montra  dans  lexercire  de 
cette  charge ,  accrurent  sa  réputa  • 
tion  ;  il  fut  nomme  définitcur  des 
maisons  de  son  ouïr»-  m  T'^pi- 
gne  ,  assista,  en  c  .  ,\ 

chapitres  tenus  à  >..j... .  t.,  i.>i3, 
à  Rome  en  i5i8,  et  fut  élu,  dans 
ce  dernier  ,  supérieur  général.  Il  fil' 
la  visite   des   maisons    de    l'ordre 
établies  dans  le  royaume  de  Napics 
et  en  Sicile;  et  ayant  obtenu  du  pape^ 
la  permission  d'ajourner  à  deux  ans 
la  visite  des  autres  provinces ,  il  re- 
vint  en  Espagne.  11  indiqua 
semblée  des  supérieurs  de  l'»  - 
Valladolid,  en  i523  ,  et  y  porta  la 
parole  avec  tant   d'<  Icaix-îK  c  .  nwc 
l'empereur  Charle> 
désiré  assister  à  c  ..   .^ 

choisit  pour  son  <  Il  se 

démit  quelques  moi>  .| -    -    iJi  gcD^ 
ralat  ,   et   fut   nommé    à    l'cvèch^ 
d'Osma  ,  qu'il  pouvait  admir     •  — 
sans  s'eloicner  de  la  cour.  Il 
le  ju . 
la  ni 
etfuld'.r, 


pire  :  m.u 

point.  L'  ,    ,  ^ 

Onint  à  Holo^ue  ,  avii^lu  au  cuiir*  n- 


iienirv» 

de  I. 


.1,. 


rf    f;,! 


.rc 


%6  LOA 

VII,  en  1 53o.  L'empereur  le  laissa  à 
Rome,  pour  veilierauxintérêls  de  ses 
peuples  ;  mais  l'attache  ment  de  Loay- 
sa  pour  sa  patrie,  lui  fit  désirer  de  re- 
voir l'Espagne,  et  il  y  revint  en  1 587. 
Il  fut  transfe'rë  ,  en  i538,  sur  le 
siège  de  Séville,  et  fut  nommé  grand- 
inquisiteur  ,  président  du  conseil 
royal  des  Indes  et  de  la  croisade.  Il 
mourut  à  Madrid ,\e  11  avril  1 546 : 
*on  corps  fut  transporte'  à  Taîavera  , 
et  inliumë  dans  l'église  des  Domini- 
cains ,  qu'il  y  avait  fondée  ,  et  où 
l'on  voit  encore  son  épitaplie.  On 
peut  consulter  ,  pour  le^  détails  , 
le  P.  Echard  ,  Bibl  script.  FF. 
Prœdicator.  et  les  Fies  des  hommes 
illustres  de  l'ordre  de  S aiiit- Domi- 
nique,  par  le  P.  Touron  ,  tom.  iv. 
Ceux  qui  ont  attribué  au  cardinal 
Loaysa  le  Recueil  des  conciles  d' Es- 
pagjie ,  l'ont  confondu  avec  Garcias 
de  Loaysa  ,  arclievequc  de  Tolède. 
(  Voyez  Giron.  )  W — s. 

LOBEL  (Maïhias  de  ),  botaniste 
et  médecin,  né  à  Lille,  en  i538, 
étudia  la  médecine  à  Monipellier, 
60US  Rondelet,  et  profita  de  son  sé- 
jour dans  le  midi ,  pour  faire  des 
excursions  botaniques ,  dans  l'une 
desquelles  il  connut  Pena ,  qui  de- 
vint par  la  suite  son  collaborateur. 
Il  voyagea  aussi  en  Suisse,  en  Alle- 
magne et  dans  le  nord  de  l'Italie. 
Après  avoir  pratiqué  la  médecine  à 
Anvers  et  à  Dcift,  il  fut  nommé  mé- 
d^ecin  du  prince  d'Oraugc;  et  à  la 
mort  du  stathouder ,  il  passa  au  ser- 
vice des  états-généraux.  Il  se  rendit 
çnsuile  en  Angleterre  ,  et  visita  plu  - 
sieurs  comtés  ,  accompagné  de  sa 
femme  ,  avec  laquelle  il  recueillit  un 
grand  nombre  de  plantes.  Attaché  à 
J  acques  Y^\ ,  en  qualité  de  botaniste, 
il  était  chargé  de  la  direction  du  beau 
jardin  de  lord  Zouche  ,  et  il  fit  avec 
<ie  prince  un  voyage  en  Danemark.  Il 


lOB 

mourut  à  Highgate,  près  de  Londre*^ 
le  3  mars  161 6.  Son  premier  ou- 
vrage botanique  parut  à  Londres  ^ 
en  1570,  sous  le  tilre  de  Stirpum 
adversaria  jiova,  perfacilis  investi- 
gatio  luculentaque  accessio  ad  pris- 
corum,prœsertimDioscoridis  et  re- 
centiorum  j  materiam  mediccnn  , 
authoribus  P,  Pena  et  M.  de  L(- 
hel^  medicis ^  in-4'^.  ,  avec  une  dé-, 
dicace  à  Elisabeth  et  un  privilège  de 
Charles  IX.  Il  est  probable  qu'on 
en  avait  tiré  un  grand  nombre, 
d'exemplaires;  car  il  reparut  sans  la 
dédicace  ,  et  sans  autre  changement 
que  celui  du  frontispice,  d'aliord  à 
Anvers  en  1076,  puis  à  Londres 
en  i6o5  ,  sous  le  tilre  de  Dilucidœ 
simplicium  medicamcntorum  ex- 
plicationes  et  siirpium  ad^ersaria, 
portant  les  noms  de  Pena  et  Lobcl  ; 
—  précédés  des  Fharmaceuiices 
officina  et  Diariuni  pharmaceuti^ 
cum  de  Rondelet ,  avec  des  correc- 
tions et  augmentations  ,  et  de  l'essai 
sur  les  Succédanées  f  imprimé  déjà 
dans  les  éditions  latine  et  flamande 
de  son  Histoire  des  Fiantes;  — ^ 
et  suivis  de  V Adversarionim  altéra 
pars ,  cum  prions  illustrationibus  , 
casligaiionibus  ,  auctariis  ,  etc.  ^ 
contenant  quelques  Graminées  et 
Liliacées  j  —  d'Observations  sur  la 
bière  et  d'autres  boissons ,  et  sur 
des  remèdes;  —  de  Balsami^  Opo- 
balsami ,  Carpobalsami ,  et  Xj  lo~ 
balsanii,  cum  suo  corlice  explana* 
iiones  et  collectanea  y  adressés  à 
Lécluse;  — Enfin,  d'un  petit  Traité 
inédit  sur  Vhjdropisie ,  par  Ronde- 
let. Tous  ces  ouvrages  portent  le 
nom  seuldeLobel.  Les  ^  divers  aria, 
tilre  qui  répond  à  celui  de  Me^ 
moires ,  donnent  la  description  dis. 
douze  ou  treize  cents  plantes  ,  dont 
un  grand  nombre  avaient  été  déç.0U7 
Yertes  par  Lobel  dans  ses  voyages^, 


T.OB 

-»  pHcs  sont  acrompaçiipcs  de  (Ir-iv 
lit   soixaiitCHlouzc   figures  ,   qui  , 
iir  la  plupart,  sont  fort  pplilcs  : 
(iilcur  y  discute  quehpiefdis  la  sy- 
nymic   des    anciens   et  des   mo- 
ines, et  relève  plusieurs  erreurs 
tic  commentateurs  de  Dioscoride, 
surtout    de    Mattioli  ,    qu'il    traite 
^ez    durement.     Il    emhrassc  les 
itres   rapports  des  plantes  ,  com- 
•  leurs  formes,  leurs  vertus  me- 
uinales  ,  leurs   dirtercnts   usages, 
î  lis  il  faut  convenir  qu'il  est  loin 
(•puiser  son  sujet  ,et  qu'il  est  moins 
rit  lie  que  Dalechamps,  Dodonee  et 
!  ''cluse,  pour  les  dernières  parties  , 
surtout  fort  inférieur  au  troisième 
•ur  le  style  et  pour  l'exactitude  des 
scriplions.  Comme  les  Adversaria 
atent  dans  toutes  les  éditions  les 
ins  de  Pena  et  de  Lobcl,  il  est  im- 
ssible  d'assigner  à  chacun  de  ces 
;  leurs  la  part  qui  lui  revient;  et  Ton 
t  surpris  avec  raison  que  Lobel  n'ait 
^  (S  lui-même  rendu  à  son  collabora- 
teur toiite  la  justice  qui  lui  apparle- 
nait.  Haller  et  quelques  autres  trou- 
vent dans  cet  ouvrage  des  éléments 
de  familles  naturelles  ;  mais  il  est 
clair  qu'il  n'a  réuni  que  les  plan- 
tes dont  l'analogie  se  présente  à  l'es- 
prit le  moins  clairvoyant;  et  plusieurs 
de  ces  réunions  avaient  été  déjà  opé- 
rées par  quelques-uns  de  ses  prédé- 
cesseurs.  Toutefois  il  est  juste  de 
dire  qu'aucun  d'eux  n'avait  encore 
séparé  d'une  manière  aussi  tranchée 
les  m onocotylédoues  d'avec  les  dyco- 
tylédoncs  ;  les  premières,  parlesqucl- 
les  commence  son  ouvrage, étant  pla- 
cées toutes  ensemble.  Les  diflercntes 
sections    sont    précédées    chacune 
d'un  tableau  synoptique,  tel  qu'il 
n'en  avait  point  encore  paru.  Celui 
des   Graminées  y   placé  en  Ictc  de 
VAdversarionim  altéra  pars ,  est  le 
f>\^ii  complet  q^u'gu  eût  aion.  Yuij;t- 


I.OB 


M 


MX     .^n^    .Tpir$   U    pITinirrr   fdltlOO 

dos  •IdvfirsnriaSi'  Baiihin ,  lun*  a- 
ter  LoIh'I  ,  suivit  le  mérac  or«T  > 
son  Phytnpinax ,  et  pl»!i  U\ 
son  Pitiajc  ;  cl  l'on  n  en  connut  pas 
d'antre  jusqu'à  Tourneforl.  Criui  de» 
OrclUdres ,  qu'il  tenait  de  son  ami 
Cornélius  Gemma ,  mérite cgalemciit 
des  éloges  ;  enfin ,  d'autres  lanilles, 
telles  que  les  Labiées ,  les  Pentmées, 
les  OinhelUfères ,  plus  lices  dans 
Casn.  BaiiKin,  présentent  de  suite 
la  plus  grande  partie  de  leurs  genres. 
Mais  le  Sceau  de  Salomortf  le 
Convallaria  bifolia ,  la  Sagittaire, 
les  Flûte aiLx ,  VOphrys  bifolia  et 
d'autres  sont  rejelés  hors  de  la  pre- 
mière section,  dans  laqii- *'  •  kI- 
rais  la  Nielle^  deut  M  f, 
et  V/folosteum  umbellatuin.  \\  uy 
a  aucune  famille  ,  excepté  celles  que 
nous  venons  de  citer ,  dont  les  diffé- 
rents genres  ne  soient  épars.  Lubfl 
trouve  des  rapports  entre  sa  pre- 
mière section  ,  etquclques  Crucifères 
qni  viennent  ensuite ,  et  surtout  les 
Trèfles  et  d'autres  légumineuses,  mie 
Doàonée  et  Léclusc  avaient  égale- 
ment rapprochées  des  Graminées, 
Il  est  donc  diflicile  de  penser  qu'il 
ait  été  conduit  aux  rapprochements 
naturels  par  un  autre  sentiment  mie 
celui  de  l'analogie  des  principuct 
formes  extérieures.  Il  est  accnstf 
pr  Ray  d'avoir  commis  plu5ietirs 
erreurs  /  pour  s'en   ctre  trop  rap- 

f>orté  à  sa  mémoire ,  surtout  dans 
es  localités, indiquant, roraracrroii- 
sanl  en  Angleterre,  des  plante*  qu'on 
ne  trouve  ni  «Lm».  <  <•  iti\>.  ni  d.ins 
aucun  autre,  f  nuiiet 

Plantarittnsi'i. ..  • ...  etc. 

cm  atlnexum  est  r.  ■  >- 

liimen,  Anvers,  i  V  i...llcr 

en  cite  unedeùxièin  - 1 5<>5. 

Cf     :     •  '  ■• 


598 


LOB 


cédanées,  lire  presque  enenlier  des 
cours  et  noies  de  Rondelet  ;  un  ap- 
pendix  donnant  la  description  et  les 
figures  de  trente-quatre  plantes  ;  quel- 
ques formules  de  Rondelet;  enfin  les 
Jtdversaria  qui  avaient  déjà  paru 
en  1570.  On  trouve  dans  le  Planta- 
rum  historia,  environ  quatorze  cent 
cinquante  figures,  avec  un  petit 
nombre  de  descriptions ,  mais  plus 
souvent  l'exposé  des  vertus  et  usages 
des  plantes,  tiré  des  auteurs  anciens. 
Souvent  l'auteur  ne  donne  que  la 
figure ,  renvoyant  pour  la  descrip- 
tion 3ii\^Adv  ers  aria,  dont  celivre  est 
comme  le  complément.  Ces  figures 
sont ,  pour  la  plupart ,  empruntées  de 
Dodonée ,  et  surtout  de  Lécluse  (  F, 
ces  noms),  \J Histoire  des  Plantes  et 
les  Adversaria  sont  peu  cités  mainte- 
nant, élant  inférieurs,  sous  plusieurs 
rapports, aux  ouvrages  des  contem- 
porains de  Lohel.  La  lecture  en  est 
d'ailleurs  très-fatigante,  les  descrip- 
tions étant  peu  caractéristiques,  et 
le  latin  dur  ,  sans  élégance  ni  cor- 
rection, défauts  rares  à  cette  époque 
bvillante  de  la  latinité  moderne.  Lo- 
bel  publia  lui-même  une  traduction 
flamande  de  ces  deux  ouvrages,  sous 
le  titre  Knij'dtsboeck,  etc. ,  Anvers, 
1 58 1 , 2  vol.  ih-fol. ,  à  laquelle  il  ajou- 
ta quelques  plantes  trouvées  en  Hol- 
lande. L'imprimeur  Plantin  les  ac- 
compagna d'un  nombre  de  figures 
plus  considérable  qu'aucun  ouvrage 
I)0tanique  n'en  avait  encore  contenu. 
L'ouvrage  de  Lobel  le  plus  cité  main- 
tenant, est  ï Icônes  Stirpium,  seii 
Plantarum  tam  exoticarum  quain 
indigenarunij  Anvers ,  1 58 1  et  i  Sg  i 
in  -  4^. ,  avec  un  index  en  sept 
langues.  Ce  n'est  qu'un  recueil  des 
figures  connues  jusqu'alors,  au  nom- 
bre d'environ  deux  mille,  et  qui  a- 
vaient  déjà  paru  dans  les  différents 
ouvrages  imprimés  par  Plantin.  Elles 


LOD 

sont  désignées  par  les  noms  latins  j, 
et  renvoient,  pour  les  descriptions, 
aux  pages  des  Adversaria ,  et  des 
éditions  latine  ou  flamande  del'^i^- 
toite.  Cet  ouvrage,  qui  est  consulté 
souvent ,  est  d'un  usage  fort  com- 
mode, en  ce  qu'il  comprend  à-peu- 
près  toutes  les  figures  connues  à 
cette  époque.  11  paraît  que  Lobel 
avait  conçu  le  projet  d'un  plus  grand 
ouvrage  qui  eût  porté  le  titre  de  Stir- 
pium illustratione..  Peu  de  temps 
après  sa  mort ,  W.  How  en  a  pu- 
blié un  fragment  sous  le  litre  de  Sur 
pium  illustrationes  ,  plurimas  éla- 
borantes plantas,  siibreptitiis Par- 
kinsonii  rapsodiis  (  ex  codice  ms.  in- 
salutato)sparsiin  gravatœ,  Londres, 
i655  ,  in-4°.  sans  lig. ,  contenant  en- 
viron deux  cent  quatre-vingts  plantes 
presque  toutes  inédites,  et  dont  quel- 
ques-unes étaient  fort  rares.  L'é- 
diteur revendique  pour  Lobel  la. 
découverte  de  plusieurs  plantes,  que- 
Parkinson  s'était  attribuée.  Plumier 
a  donné  le  nom  de  Lobelia  à  un; 
genre  de  plantes  de  la  famille  des 
Campanulacées.  D — u. 

LOBI^^EAU  (  Gui  -  Alexis  )  , 
savant  religieux  de  la  congrégation* 
de  Saint- Maur ,  né  à  Rennes  en  i  QQQ^ 
fit  profession  dans  l'abbaye  deSaint- 
Meîaine  de  cette  ville ,  à  l'âge  de  dix- 
sept  ans  :  ses  supérieurs  lui  ayant 
reconnu  de  l'application  au  travail , 
l'engagèrent  à  terminer  V Histoire  de 
Bretagne ,  commencée  par  D.  Le^ 
gallois  ,  et  il  en  publia  2  volumes  ea 
1707.  Il  cherche  à  y  établir  que  le» 
ducs  de  Bretagne  étaient  indépen* 
dants  :  cette  opinion  fut  réfutée  vie» 
torieusement  par  l'abbé  de  Vertol 
et  Claude  Dumolinet,  dans  plusieuK 
écrits   (i),  où  l'on   voit   que   cett© 


(1)  Lahbé  de  Vertot  publia  :  Traité  historîf 
que  de  la  mouvance  de  Bretagne,  Pari*,  i?'** 
ia.-i2}   Hiiloire   critique  de   l'éiablisiemf^ 


LOB 

province   relevait  de  la  couronne  » 

!>  s   les  premiers  tciups  de  la  mo- 

rchie.  Maigre  l'cvidcucc  des  prcu- 

^  ,   D.    Lonineau   essaya   de  fai- 

prevaloir  le  sentiment  qu'il  avait 

'ptc  ;  mais  D.  Liron  ,  ayant  rc- 

vo  l'erreur  dans  laqurllc  il  était 

iiilx»  au  sujet  de  Icpoque  où  la 

I  fut  prcchéc  en  Bretagne  ,  il  se 
iitcnta  de   supprimer   le  passage 

I I  sure,  et  soutint  que  D.  Liron  citait 
i.uix.  (  FcQ-ez  LiRON.  )  Il  avait  le 

•jet  de  continuer  son //wZotre  de 

ctagne;  et  il  publia  même  lepros- 

(7m^  de deuxnouveaux  volumes  qui 

\  aient  contenir  la  généalogie  des 

is  illustres  maisons  :  mais  il  aban- 

nua  cette  entreprise.  D.  Lobincau 

I  hargca  de  continuer  V Histoire  de 

(ris  y   laissée    imparfaite  par  D. 

<  bel  Felibicn  ,  et  il  la  publia  en 

"  >.j  (i).  Il  revint  ensuite  dans  sa 

»vince  ,  et  mourut  à  l'abbaye  de 

iut-Jagut  près  de  Saint- IVIalo  ,  le 

il  lin  172-^  :  c'était  un  bomme  très- 

oricux  ,  et  versé  dans  la  conuais- 

icc  des  langues  et  des   usages  de 

!)liquité.  On  a  de  lui:    I.   \jHis- 

e  de   Bretaç^ne  ,  composée  sur 

actes    et    auteurs   originaux  , 

lis  (  Rennes  ),  1707,  2  vol.  in- 

1 0.  Le  tome  premier  contient  l'bis- 

■  vc  (le  celte  province  ,  depuis  458 

[u'à  i53'2  ,  divisée  eu  xx  livres  : 

x'cond  renferme  les  preuves  ,  et  ii 

fort  estimé  ;  on  trouve  à  la  fin  un 

ssaire  pour  l'intelligence  des  mots 

liciles.  Cette  bistoire  a  été  sur- 

^  I  ^6ce  par  celle  de  D.  Morice.  (  Foy, 


B refont  dans  tes  Gaules  ,  et  de  leur  dé- 
*  tnce  det  roi»  de  France  et  des  due'  de 
-'rtartd/'e,  etc.  ,  Paria,  1710,  in  I»  ;  «t  C. 
noliiiel,  .  tlr>i«  )  Ditserta/iont  sur  la  ntou- 
''  de  Bretagne  ,  par  rapport  au  droit  qua 
duei  de  Nomanilie  jr  prèlentHrent ,  «U., 
)•,  1711,  in-ia. 

I  C'est  par  un*  erreur  tjrp©gr«j»lii^o«,  ^*4 
ici.  D.  Michel  FfUbien  (  XIV  ,  «61  )  •• 
'(  ^e  c«U«  liUt*ir«  avait  p«t««a  17S6. 


LOI  ^ 

ce  nom.  )  II.  Plusiaus  KeriH  m  ré- 
ponse aux  rriùqties  de  W\hé  dt 
Verlut ,  du  P.  Dumolind  ,  de  1).  li- 
ron ,  etc.  IIL  HiAioirt  des  Saints  de 
la  province  de  bretonne  ,  n  des 
persontirs  qui  s'jr  iont  distincuees 
par  une  éminente  piété  ,  Pnrii 
{  Rennes  ),  r-^-jt/^,  in-folio  :  ce  re- 
cueil a  son  utilitff<  IV.  Histoirt  de 
la  ville  lie  Paris  ,  ibid.  17^5,5 
vol.  in-folio;  les  deux  premiers  <»onl 
de  D.  Felibien  ;  les  trois  autres  ,  qui 
renferment  les  prcnvet  ,  ont  été  mis 
en  ordre  par  D.  Lobincau.  Il  a  tra- 
duit de  l'espagnol  de  Michel  de  l^nâ, 
V  Histoire  des  deux  compséut  dé 
l'Espagne  par  les  Maures  ,  Paris  , 
1708,  in-ia  :  c'est  im  tissu  de  fa- 
bles et  d'événements  romaiiesques.  11 
a  laissé  en  manuscrit  :  une  Histoire 
de  la  ville  de  Nantes  y  de  la  Cham- 
bre des  comptes  de  Bretmgne ,  dès 
Barons  et  des  dfoits  seignettrimix  dé 
cette  province  ;  —  la  Traduction  des 
Ruses  de  guerre  de  Polyen  ,  et  celle 
du  Théâtre  d'Aristophane.  La  tra- 
duction des  Ruses  de  Polven  a  éxé 
publiée  par  le  P.  Dcsraoîets ,  atec 
celle  des  Stratagèmes  àc  FrontÎB  nr 
Perrot  d'Ablanrourt,  Paris  ,  174^1 
2  vol.  in- 12;  elle  est  uèiéitimëe, 
et  les  notes  y  ajetileut  w  nottrean 
prix.  M.  Renouard pawklc «ne  copie 
du  texte  d'Aristophane  ,  par  D.  I..0- 
bineau  ,  et  le  manuscrit  onginal  de  la 
Traduction  du  méflM  antcur  (  1  ).  l^a 
copie  est  partaKët  ta  da«s  toImms 


(0  C«  fol  r.bW  Metcice 
■aava    c»t    <'  "•»    •"•     "    •  ' 
ia.:«iMkle.    f 
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M.  Il«»«warj  —    r.'.. 

la  Prt/mce  da  la  » 

• 

•a  Mr«i»aia0,  «u 

Ctui.dtu  Mai.  d^ 


6oo 


LOB 


111-4".  7  "on  chiffres.  «  L'argument 
»  de  chaque  pièce  ,  les  noms  des 
»  auteurs ,  et  la  plus  grande  partie 
))  des  noies  marginales  sont  enfran- 
»  çais  ;  le  reste  des  notes  est  en  latin 
î>  et  quelquefois  en  italien  ;  le  grec 
»  est  assez  bien  peint  ,  et  le  tout  est 
»  très-proprement  et  très-nettement 
r>  e'crit.  »  (  Mélanges  de  critique  , 
tom.  III,  pag.  178.  )  La  souscription 
nous  apprend  queD.  Lobineau  n'avait 
mis  que  deux  mois  à  transcrire  cet 
ouvrage  ;  elle  est  datée  de  l'an  1693, 
et  suivie  de  son  monogramme  et  de 
cette  double  anagramme  l'une  latine 
et  l'autre  française  :  Lux  Dei  vas 
nohile;  Beau  lion  (  i  ).  La  traduction 
forme  trois  volumes  in  -  8^. ,  et  est 
intitulée  :  V Ancienne  comédie  grec- 
que ou  le  Théâtre  athénien  d^ Aris- 
tophane ,   avec  des  notes   et    une 
Préface  historique  et  critique ,  ser- 
vant de  commentaire  général.  Cette 
I^réface,  qui  est  très-curieuse ,  a  ete' 
publiée  presque  en  entier,  par  Char- 
don de  la  Rochcttc,  dans  le  Magasin 
encyclopédique  ,  deuxième   année  , 
tome  premier ,  et  dans  ses  Mélanges 
de  critique  et  de  philologie ,  tome 
ïiï  ,  p.  178-260.  M.  Renouard  ,  de- 
venu possesseur  de  celte  traduction  , 
avait  d'abord  pense  à  la   mettre  au 
jour  ;  mais  il  en  a  été  detoinnë  par 
ia  raison  que  les  passages  graveleux 
y  sont    rendus  d'une  manière  peu 
de'cente  ;  et  que  le  tour  suranné'  d'un 
assez    grand  nombre   de    locutions 
aurait  nécessite'  des  corrections  qui 
l'auraient  dénaturée.  (  V.  Catal.  de 
la  hihliothèq.  d'un  amateur,  tom. 
II  ,  p.  217.  )  C'est  à  tort  qu'on  a  at- 
tribue à  D.  Lobineau,  les  Aventures 
de  Pomponius  _,  chevalier  romain  ; 
ce  roman  licencieux  ,  est  de  D.  La- 


i.. 


(i)   On  trouve  dans  ces  mots:  AtEXino»    Lo- 
y.iMf'U»,  Lux  dei   vas  nçhile ^    cl   (Iau»  Ltdti 


LOB 

badie  :  il  a  été'  publié  en  179.4  ;  et 
avec  des  additions  ,  par  l'abbé  Pré- 
vost ,  en  1 7  '28 ,  in- 1 2 ,  sous  la  rubri- 
que de  Rome.  Suivant  les  auteurs  de 
\di  Bibliijthaque  historique  de  Fran- 
ce ,  D.  Lobineau  a  eu  part  à  la 
nouvelle  édition  du  CAossuire  àe\ 
Ducange.  W — s. 

LOBKOWITZ.  roj.  Caramuel 
et  Hassenstein. 

LOBKOWITZ  (  George  -  Cure- 
tien,   prince  de),    général    autri- 
chien ,  né  en  1 702  ,  conclut  en  i  789 
la  capitulation  de  Messine ,  et  fut  en- 
suitenommé  gouverneur-général  delà 
Transylvanie.  Il  repoussa  les  Turcs 
sur  la  frontière  de  cette  province; 
mais  bientôt  il  fut  obligé  de  céder  au 
nombre.  En  1741  ,  la  reine  de  Hon- 
grie lui  donna  le  commandement  de 
son  armée  dans  la  Haute-Autriche. 
Les  maréchaux    de   Broglie   et  de 
Belle-Isie  lui  firent  essuyer  ,en  1 742, 
un  échec  à  Sahay.  Frédéric  II  dit 
malignement  à  ce  sujet  :  «  La  ba- 
))  taille  de  Pharsale  ne  fit  pas  plus 
»  de  bruit  à  Rome,  que  ce  petit  com- 
»  bat  n'en  fil  à  Paris.  »  Le  prince 
de  Lobkov^'itz  opéra  ensuite  sa  jonc- 
tion avec  le  prince  Charles  de  Lor- 
raine; et  ils  attaquèrent  le  maréchal 
de  Broglie, qui  fut  forcé  de  se  retirer! 
à  Braunau.  A  la  fin  de  la  même  année 
1742,  Lobkowitz  dirigea  le  blocus 
de  Prague,  où  le  maréchal  de  Belle- 
Isle  était  renfermé  avec  seize  mille 
hommes.  (  r,  Belle-Isle.  )Le  géné- 
ral autrichien  n'ayant  pas  assez  de 
monde  pour  serrer  la  place,  le  ma- 
réchal en  sortit,  et  exécuta,  au  mi- 
lieu d'un  hiver  rigoureux,  cette  re- 
traite qui ,  jusqu'à  ces  dernières  an- 
nées ,  avait  été  citée  comme  une  des 
plus  désastreuses  de  l'histoire  mo- 
derne. Piqué  de  la  sortie  de  Belle- 
Isle,    Lobko^^'itz    voulait    que   les 
Français  restés  dans  la  citadelle  se 


Lon 

rendissent  à  discrétion  ;  mai»  la  fcr- 
':Mc  (le  Chevcrt,  ([ui  les  coninian- 
it,  le  (il  renoncer  à  celte  préten- 
tion (  roj.Cuhvr.m  \Lol»ko>vil7.fnl 
]A\\s  heureux  en  Italie ,  où  ,  en  i  "43, 
il  chassa  de  Ri  mini  les  Es|w^noIs. 
T  ".ninëc  suivante,  il  fit  surprendre, 
nuit,  dans  Vellelri,  le  roi  de  Na- 
i'S  (  don  Carlos  )  et  le  duc  de  Mo- 
iie  ,  qui,  sans  l'alerte  qui  leur  fut 
nnëe  par  l'ambassadeur  de  Fran- 
•  ,  auraient   été  faits  prisonniers. 
niTS  celte  entreprise,  Lobkowit/., 
li    voyait    ses   troupes    s'aflaiblir 
I  irnellement  par  le    mauvais  air 
s  marais  Pontins,  fit  sa  retraite. 
>  loique  serre  de  près  par  une  armée 
-  ipérieure  ,  il  parvint,  sans  perte ,  à 
Jiimini.   Il    continua    de   comman- 
der, avec  des  succès  balmcés  en  Ita- 
lie (  P^oj.  Gagls),  jusqu'au  mois 
d'août  174G,  qu'il  partit  pour  pren- 
dre le    commandement  de  l'armée 
d'allemagne.   Il  ne  paraît  pas  qu'il 
8'y  soit  signalé  par  aucun  fait  im- 
poitaut.  H  mourut  à  Vienne  le  t)  oc- 
tobre i-jSS.  Cet  ofticier  était  remar- 
quable par  beaucoup  de  résolution  et 
un  esprit  entreprenant. — Son  fils,  le 
prince  Joseph  de  Lobkowitz,  né  le 
D  janvier  1  -^'ij, devint  général-major 
en  1 7 58,  se  signala  dans  la  guerre  de 
sept  ans  ,  et  fut  ambassadeur  à  Pé- 
tersbourg,   depuis    1704    jusqu'en 
1777  :  il  s'y  trouvait  lors  du  pre- 
mier démembrement  de  la  Pologne, 
et  contribua  beaucoup  à  faire  adju- 
ger à  la  maison  d'Autriche  la  Galli- 
cie  et  la  Lodomérie.  Joseph  II  le 
nomma  commandant  des  archers  de 
ia  girde  impériale  et  général  feld- 
maréchal.  Il  mourut  à  Vienue  le  G 
mars  i8o'2.  H— ry. 

LOBO  (Jérôme),  missionnaire 
portugais  ,  naquit  à  Lisbonne  ,  en 
l5r)3,  et  entra  dans  la  société  de 
icsus  en  iGo^.  U  «tait  prof«Mtur 


i.on 


rt/>i 


au  collège  de  Coimbrr  en  i()ii, 
lor.vpi'il  recul  l'ordre  d'aller  «ttx 
Indes.  La  Itolte  sur  laquelle  il 
s'cuibarcpia,  fui  obligée  de  revenir 
à  Lisbonne  aprè»  une  navigjitioo 
trcs-pcnible;  et  Lobo  ne  put  re- 
mettre en  nier  qu'au  mois  de  mjrs 
de  l'année  suivante.  Après  des  pé- 
rils sans  nombre,  il  anÎTa  enfin 
devant  Goa  au  mois  de  dëoemlnv, 
et  resta  un  an  d^us  celle  ville,  où 
il  acheva  sa  théologie.  En  janvier 
\Crx\^  il  voulut  {tasser  en  Abi&sinie. 
Débarqué  avec  tm  aulre  J ensuite  sur 
l'île  de  Paie  près  de  Moralwze,  il  ca- 
sa va  de  gagner  par  terre  le  lieu  de  sa 
destination.  Kn  ayant  reconnu  l'im- 
possibilité ,  il  j)artit  pour  Diu.  Le  3 
avril  iG>.5,  il  sortit  de  ce  port  avec 
Alpli.  Mendès^patriarche  d'Kthio- 
pie,ethuit  missionnaires;  ilsdelitaF- 
quèrentdaiLsIeport  de  Baylour,  sur 
la  mer  Ronge ,  et ,  le  17  juin ,  arrirè- 
rent  à  Maigoga,  lieu  de  leur  résidence. 
Lobo  fut  nommé  vicaire  -  général 
dans  le  royaume  deTigré.  Craignant 
avec  raison  les  embûches  du  vice- 
roi  ,  il  ))assa  dans  une  autre  pro- 
vince ,  se  rendit  ensuite  à  b  cour , 
et  allant  dans  le  royaume  de  Damot, 
traversa  le  Nil  à  deux  journées  de  sa 
source ,  puis   fut   rcu\  le 

Tigré.  L'empereur  qui  t  le» 

cathulitpies,  mourut;  et  une  violente 
prsccution  éclata  contre  eux.  Ixîs 
Portugais  qui  se  trouvaient  dan«  le 
pays,  furent  livrés  aux  Turc»,  qui  kà 
emmenèrent  prisonniers  k  Massom. 
Quant  a  Lo1k>  ,  comme  il  avait  U 
réputation  d'un  homme  détennioéf 
l'empereur  avait  donne  Tordre  d« 
le  saisir  et  de  l'envofcr  à  la  ca- 
jùtale  mort  ou  vif.  Il  fut  obligé 
de  rejoindre  ses  com|ieguoiis  d'in- 
fortune par  un  diemin  dëtooffntf. 
Echappe  a  ce  danger  ,el  enprisinné 
à  Massoua ,  puis  ii  SonaUn ,  ii  f^ 


0O*J 


LOB 


LOB 


çliargë  d'aller  dans  les  Indes exjioser 
le  Irisle  état  de  ses  confrères  ,  et 
demander  qu'on  payât  la  rançon 
exigée  par  le  bâcha.  Il  s'acquitta  de 
ce  devoir,  et  en  même  temps  enga- 
gea fortement  le  vice-roi  à  eypëdier 
une  flotte  dans  la  mer  R.ongc  ,  et  à 
former  un  e't  iLlissement  à  Massoua. 
Le  vice-roi  n'avait  ni  assez  de  forces, 
ni  un  pouvoir  assez  e'tendu  pour 
exe'cnter  ce  projet.  Il  fut  donc  con- 
venu que  Lobo  passerait  en  Europe. 
En  conséquence  il  s'embarqua  pour 
Lisbonne;  mais  jamais  navigation  ne 
fut  plus  malheureuse  que  la  sienne. 
Le  bâtiment  qui  le  portait,  toucha 
en  sortant  de  Goa ,  et  ensuite  se  brisa 
sur  la  cote  de  Natal.  On  resta  sept 
mois  dans  ce  désert,  où  l'on  construi- 
sit deux  chaloupes.  Une  d'elles  fut 
bientôt  engloutie  par  les  flots  :  celle 
où  e'tait  Lobo ,  doubla  le  cap  de 
Bonne-Espérance ,  et  attérit  devant 
Angole ,  après  quarante  jours  de  na- 
vigation. Lobo  monta  sur  un  vais- 
seau destiné  pour  le  Brésil.  Enani- 
vanl  sur  la  cote  ,  ce  bâtiment  fut 
pris  par  un  corsaire  hollandais,  qui 
mit  tout  l'équipage  dans  une  île  dé- 
serte. Heureusement  des  barques 
vinrent  de  terre ,  et  passèrent  Lobo 
sur  le  continent.  Accablé  de  faim 
et  de  fatigue ,  il  gagna  Carlhagène 
à  pied.  Après  un  repos  de  quinze 
joîu's ,  il  profita  de  l'occasion  de  la 
flotteqiipartait  pour  l'Europe:  en  ap- 
prochant du  Gap  Saint-Vincent,  elle 
fut  assaillie  par  une  tempête,  qui  la 
niit  à  deux  doigts  de  sa  perte.  Lobo 
se  tira  encore  de  ce  péril ,  descendit  à 
Cadix  ,  et  se  rendit  à  Séville ,  puis 
à  Lisbonne.  La  vice-reine  l'écouta 
favorablement,  mais  le  renvoya  au 
roi  d'Espagne.  De  Madrid ,  il  fallut 
qu'il  fit  le  voyage  de  Rome,  où  il 
essuya  beaucoup  de  contrariétés  de 
la  part  du  pape  et  des  cardinaux 


prévenus  contre  les  Jésuites  de 
mission  d'Ethiopie.  Son  zèle  n'en 
fut  pas  abattu  :  il  repassa  aux  Indes 
en  1(340,  fut  recteur  de  la  maison 
professe  de  Goa  ,  puis  provincial. 
Enfin  ,  il  revint  à  Lisbonne  vers 
i656  ,  et  y  mourut  en  1678.  Il 
publia  en  portugais  la  relation  de 
son  voyage  en  Abissinie,  sous  ce 
litre  :  Histoire  de  V Ethiopie  ^  Coïm- 
bre,  1659,  I  vol.  iu-fol.  L'abbé  Joa- 
chim  Lci^rand  la  traduisit  en  fran- 
çais ,  non  d  après  cette  édition ,  mais 
d'après  un  manuscrit  de  Lobo  ,  et  la 
fit  paraître  avec  d'autres  pièces , 
sous  le  titre  de  Relation  historique 
ctAhissinie,  Paris,  i7'^>8,  i  voh 
in-4**.  aA^ec  1  cartes;  Amsterdam-, 
1728,2  vol.  in-ia.  (  F.  Legrand, 
XX m  ,576.  )  Cette  traduction  mise 
en  anglais  ,  et  abrégée  par  Samuel 
Johnson,  parut  en  1784,  et  a  plu- 
sieurs fois  été  réimprimée.  L'auteur 
décrit  les  sources  du  Nil ,  de  la  même 
manière  que  Bruce  ;  mais  il  ne  dit 
pas  qu'il  les  ait  visitées  ,  commdî 
l'aflirment  quelques  écrivains.  Bruce 
s'est  quelquefois  exprimé  un  peu 
durement  sur  le  compte  de  Lobo  , 
et  a  mérité  ensuite  lui-même  qu'on 
lui  adressât  les  mêmes  reproches. 
On  trouve  dans  le  tome  11  du  re- 
cueil de  Thevenot  ,  une  Belation  du 
P.  Jeronjmo  Lobo ,  de  l'empire  des 
Ahissins ,  des  sources  du  iVil ,  de 
la  Licorne ,  etc.  Ce  morceau  ,  dit 
Legrand  ,  n'est  que  le  fruit  de  quel- 
ques conversations  que  M.  Sotwell , 
ambassadeur  d'Angleterre  ,  et  M. 
Toynard  ,  avaient  eues  avec  Lobo  , 
en  t666  et  1667.  A  cet  extrait  est 
jointe  une  petite  carte,  qui  offre  le 
plan  de  trois  ports  de  la  côte  ceci* 
dentale  de  la  mer  Rouge.  Quoi  qu'en 
dise  Legrand  ,  il  paraît  que  cette  re- 
lation ,  donnée  par  Thevenot ,  a  été 
traduiie  sur  un  manuscrit  portugaisf 


ui 


? 


LOB 

r  c'est  comme  telle  qu'elle  parut  en 
^lais  a  Lnudivs ,  précédée  d'une  <lc- 
oratiou  de  la  Société  royale,  qui  or- 
«I  onnait  qu'elleserail  publiée  jwr  son 
•  M  primeur,  en  1G88.  Cet  opuscule  fut 
mpriraé  sous  ce  titre  :  Relation 
lincte  du  fleuve  du  Nil,  de  sa 
irce  et  de  son  cours  y  de  son  dèbor- 
nent  dans  les  plaines  d'Egypte 
Mfu'à  son  embouchure   dans    la 
'  tlitenanee  ,   et  d'autes  curio- 
ns ;  écrite  par  un  témoin   ocu- 
•e,  qui  a  demeuré  plusieurs  an- 
■'S  dans  le  royaume  principal  de 
nipire    d'Ahissinie  ,    Londres  , 
-<)8  ,    I   vol.  in -8".  Les  éditeurs 
••nt  ,  dans  leur  préface  ,  que  l'au- 
II-  de  celte  relation  est  le  P.  Lobo  , 
ie  justifient  des  imputations  calom- 
uscs  de  Brure.  M.  Sait ,  le  voya- 
ur  européen  qui  a  le  plus  recem- 
"ut  visité  l'Abissinie,  rend  justice 
!>obo  :  «  Quoique  M.  Bruce,  dit-il, 
»)  eût  l'habitude  de  maltraiter  les  jé- 
»  suites  ,  il  ne  dédaignait  pas  de  leur 
faire  des  emprunts  assez  considé- 
rables ;  ce  dont  le  lecteur  peut  ju- 
»  ger  en  comparant  ses  écrits  avec 
ceux  de  Tellez  et  de  Lobo.  w  The- 
iiol  a  rais  à  la  suite  de  la  relation 
Lobo,  un  morceau  intitulé:  Dé- 
•iverte  de  quelques  pays  qui  sont 
i.re  l'emjiire  des  Abissins  et  la 
te  de  Melinde;  c'est  le  récit  du 
yage  du   P.   Antoine  Fernandez. 
/'o^tfc  FérnaiNDez  ,   tora.  XIV, 
.^.  383.  )  E— s. 

LOBO  (  Gerirdo  ) ,  poète  espa- 
ol ,  né  dans   la   vieille  Castille  , 
(Ut  sous  les  règnes  de  Philippe  III 
et  de  Philippe  IV.  Issu  d'une  famille 
illustre   dans   les   armes  ,  il  suivit 
i-même  cette  canière,où  il  se  dis- 
igua,  et  mérita  la  croix  de  Tonlre 
Saint- Jacques.    Il  avait  fait  de 
lunncs  études   à   l'université  d'Al- 
calà  •  et  son  talent  pour  la  poésie  le 


LOB 


f,o) 


fil  connaître  de  Philippe  ÎV  .  1  .  tr 
lui-même  ,  qui  le  nnromii 
homme  de  la  rbambre.  I^.l 
alors  au  nombre  des  beani-r^j  1. . 
comme  Calderon  ,  Rufo  de  MuIum  , 
Juan  de  la  No/.,  etr. ,  qui  form;iinit 
la  société  de  Philippe  IV.  Ce  mo- 
narque ,  tandis  qu  il  perdait  le  Por- 
tugal ,  le,s  Pavs-Ba»  et  la  Fr.inrlic- 
Comté,  se  plais..it  a  rompo^r  des 
comédies,  et  à  en  faire  jouer  d'auliYS 
à  sa  cour  ,  en  impromptu  ,  et  sur  un 
sujet  qu'il  proposait.  O»  pièces  de- 
vaient être  déclamées  en  vers  de 
dinérents  mètres,  parles  arleurs, 
tors  poètes  ,  et  parmi  lesquels  le  roi 
re  déd  lignait  {)as  de  jouer  un  rôle. 
Dans  ce  nombre,  Gerardo  Lol>o  se 
dis  inguait  le  plus  par  sa  fartiilé  i 
improviser  des  vers  ;  et  en  plusieurs 
occasions  il  se  chargeait  de  La  dé- 
clamation d'une  pièce  entièreen  trois 
actes  ,  qu'il  imaginait  el  romn«isait 
s»u'-le-champ.  Philip|>e  IV  obligeait 
souvent  ses  poètes  favoris  a  bii 
parler  en  vers  ,  même  dans  la 
conversation  la  plus  familière.  Lobo 
s'acquittait  avec  un  tel  succès  de 
cette  tache ,  qu'il  se  séparait  rare- 
ment du  roi ,  l'accompagnait  à  la 
chasse ,  assistait  à  ses  repas  ,  à  soa 
coucher,  et  le  rassasiait ,  pour  aifisi 
dire ,  de  poésie.  Quand  Philippe  en- 
voyait quelque  présent  à  la  reine , 
c'était  presque  toujours  Lobo  qu'il 
choisissait  pour  remplir  ce  message, 
afin  qu'il  lui  présentit  ses  compli- 
ments dans  des  vers  dont  il  loi 
prescrivait  la  ' 
contracté  une 

1er  en  vers,  qui  lantn» 

jour  entier ,  s..  mol  • 

prose,  qu'il  prétend jil  niciue  «voir 
oubliée.  Il  mourut  Ters  l'an  iCidO. 
Lobo  n*a  pas  écrit  d'ouvriflei  oe  wn» 
gue  haleine  ;  et  on  n'a  de  lui  que  dc^. 
Odes,  des  Swnets ,  des  Dixaint, 


poète  «Tiit 
'idedepar- 


6o4 


LOB 


des  Redondilles  (  strophes  de  quatpe 
ou  cinq  vers  de  huit  syllabes  ) ,  qu'on 
trouve  dans  les  recueils  ou  Cancio- 
neras  espagnols  du  xvii^.  siècle. 
Son.  slyle  est  correct,  et  sa  versifica- 
tion harmonieuse.  Il  excellait  sur- 
tout dans  le  genre  burlescfue.  B — s. 

LOBRA  (GuiLL.  DE  ).  F.  Camo. 

LOBSTEIN  (  Jean-Frédéric  ) , 
anatoniiste   et  chirurgie^i ,  naquit  à 
Lampelheim ,  près  de  Strasbourg , 
en    1736.  Après  s'être  livre'  à  une 
étude  aprofoudie  de  Tanatomie  ,  et 
de  la  chirurgie,  il  se  fit  recevoir 
docteur,  et   choisit   pour  sujet  de 
sa   dissertation  ,  la   description  du 
nerf    de    l'ëpinc.    JI  partit   ensuite 
pour   visiter    les    écoles   de  méde- 
cine les  plus  célèbres ,  et  revint  à 
Strasbourg ,  où  il  ouvrit  des  cours 
de   chirurgie  et  de  pathologie.    Il 
fut  nommé,  en  1764?  premier  dé- 
monstrateur d'anatomie;et  en  1768, 
il  occupa  la  chaire  d'anatomie  et  de 
cliirurgie,  devenue  vacante  par  la 
mort  du  professeur  Eisemann.  11  pra- 
tiqua la  htliotomie  et  l'extracùon  de 
la  cataracte  avec  succès  ;  et  il  inventa 
môme  pour  cette  dernière  maladie  , 
un  couteau  dont  nous  devons  la  des- 
cription à  J.  F.  Hcnkel.  Aussi  patient 
dans  ses  recherches,  que  scrupuleux 
dans  l'exposition  de  ses  découvertes, 
Lobstein  ne  pouvait  souffrir  qu'on  éle- 
vât le  moindre  doute  sur  leur  réalité; 
mais  s'il  était  sévère  pour  lui ,  il  re- 
poussait aussi  sans  ménagement  chez 
les  autres  ce  qui  n'avait  pas  le  cachet 
de  l'expérience  et  de  la  vérité.  «  Je 
»  sais,  disait-il  avec  humeur,  lors- 
»  qu'on  lui  reprochait  sa  dureté , 
»  qu'un  anatoniiste  doit  être  exact 
»  et  vrai  ;  mais  il  n'est  pas  aussi  né- 
»  cessaire  qu'il  soit  doux  et  poli  ;  et 
»  lorsque  je  prends  la  peine  de  l'être, 
»  ce  n'est  jamais  pour  des  menteurs.  » 
II  refusa  les  places  lucratives  que  lui 


LOG 

offrirenf  plusieurs  souverains  de  l'Ai* 
lemagne ,  et  préféra  rester  à  Stras- 
bourg ,  où  il  mourut  le  1 1  octobre 
1784»  avant  d'avoir  pu  terminer 
ses  Anatomicœ  Ijistitut iones ^  elsei 
Comment  aiiiphjsiologici^àemearés 
manuscrits.  Se^  ouvrages  imprimés 
sont  :  I.  Dissertatio  inau^i^uralis  de 
nejvo  spinale  ad  par  vagum  (  cces^ 
sorio  ,  in-4'^. ,  Strasbourg  ;,  1760. 
II.  Un  grand  aombre  de  thèses  sou- 
tenues sous  sa  présidence.  Nous  a- 
vons  deux  éloges  de  Lobstein;  !« 
premier  en  latin  par  le  docteur  J.  L. 
Schurer  ,  in-fol. ,  Strasbourg ,  1 785, 
et  le  second  par  Vicq-d'Azir,  Paris, 
i786,in-4o.  P.  et  L. 

LOCAÏELLI  (  Louis  ) ,  né  à  Ber- 
game,  se  fitimegiande  réputation  k 
Milan,  dans  le  xvii^.  siècle,  comme 
médeciu-chimiste,  et  donna  son  nom 
à  un  baume  ,  dont  on  trouve  la  com- 
position dans  son  ouvrage ,  p.  iio4» 
Il  parcourut  toute  l'Italie  ;  et  il 
avait  formé  le  projet  de  visiter  la 
France  et  l'Allemagne,  pour  voir 
opérer  les  médecins- chimistes  de 
celte  époque,  lorsque  la  guerre  vint 
y  mettre  obstacle.  Appelé  a  Gènes 
pour  y  traiter  une  maladie  conta- 
gieuse qui  faisait  de  grands  ravages, 
il  o])tint  d'abord  beaucoup  de  succè^l 
mais  il  ne  put  en  éviter  les  atteinte™ 
et  il  y  succomba  en  1687  ,  étant 
encore  à  la  fleur  de  son  âge.  Il  a 
laissé  :  Theatrum  arcanorum  clvy- 
micorum ,  sive  de  Ane  chemicO'^ 
medicd  Tract atus  exquisitissimus , 
Francfort ,  iG36,  in-8**.  :  traduit  en 
italien ,  sous  le  litre  de  Teatro  d'ar- 
cani  del  medico  L.  Locatelli ,  Ve- 
nise ,  1 644,  ï  ^67  ,  in-B».     P.  et  L. 

LOCAÏELLI  (  Pierre  ).  Fojez 

LUCATELLI. 

LOGATO  (  Humbert  )  ,  chroni- 
queur du  seizième  siècle ,  né  de  pa- 
rents obscurs  J  dans   un  bourg  du 


LOC 

isAnlin,  oiiira,  eu    i5ao,  dans 

.lie  (le  S.«inl-Doininiquc  à  Plai- 
re, et  acquit  eu  peu  de  temps  une 
iLiissance  aprotoiidie  du  l.itiu  et 
l'italien  :  il  suivait  cependant  les 
rs  de  philosophie  et  de  the'ulo- 
,  et  il  ne  faisait  pas  de  moindres 
.;rès  dans  la  vie  spirituelle  que 
is  les  sciences.  Sa  réputation  ne 
la  pas  à  franchir  les  niui*sde  sou 
vent  :  il  fut  uommë  inquisiteur 
la  foi  à  Pavic  ;  et  quelques  an- 
iH  (S après  il  revint  exercer  les  me- 
nus fonctions  à  Plaisance.  Eu  ijGfJ, 
papePieV  lenoinniacomraissairc- 
u  rai  de  l'inquisition  à  Rome,  et  le 
'isiten  mcuic  teni])s  pour  son  con- 
teur. Iluuibcrt  fut  eleve,  en  i568, 
:  le  siège  cpiscopal  de  Bagnarea;ct 
Il  assure  que  le  souverain  pontife 
Avait  l'intention  de  l'honorer  de  la 
n  iin-pre,  mais  qu'il  en  fut  détourne 
I  le  cardinal  Alexandre  Farnèse. 
it)i qu'il  en  soit,  Humbcrt  gouvcr- 
son  diocèse  avec  Lcaucoupde  sa- 
-se.  Etant  tombe  uialadc  à  Home 
<  royant  sa  fin  procbaiuc  ,  il  se  fit 
ver  un  tombeau  dans  l'ëglise  de 
intc-Sabine  ,  avec  une  inscription 
it    modeste.    Il   recouvra   cepeu- 
nt  la  santë;  mais  ue  se  sentant  pas 
c'tat   de  continuer  ses  fonctions 
^torales,  il  se  démit  de  son  cvcchc, 
se  relira  en  i58i  au  couvent  de 
!i  ordre  à  Plaisance,  où  il  passa  ses 
ruières  années  dans  la  retraite  et 
prière.  Il  y  mourut  le  1 7  octobre 
mS-j.  On  a  âe  ce  prélat:  l.DePla- 
ntinœ  urbis  origine,   succcssu  et 
ndibiis seriosa  narratioy  Crémone, 
>(i|,  in-4•^;  ibid. ,   i(ii4.  ^»ra^- 
is  a  insère  cet  ouvrage  dans  le  Tiie- 
iirus  anliquitatum  Italiœ ,  t.  m. 
niteur  l'avait  traduit  lui-même  en 
ilien.  Sa  Chronique  commence  à 
'U  70,  sous  le  règne  de  Vesjwsieu  : 
•lie  Cet  remplie  de  fables  ,  «l  de  dc- 


tails  i^i  peu  intërcsMiitf  ,  qtiVllc  m 
nuMiIc  plus  d'rlrr  rouAullec  defNti* 
qu'on  al //ofoirc  de  PbiMuce  par 
Poggiali.  II.  ItaUatravafiUala,rtc. 
Venise,  i57(),  iu-4«.  C'wl  une  his- 
toire des  guerres  dont  l'Italie  a  cté 
le  théâtre  depuis  la  descente  d'Koëe 
dans  le  Lalium  ,  jusqu'au  seizième 
siècle.  Cette  rompilatiun  ,  dit  Tira- 
boschi,  a  ])eude  lecteurs,  et  n'eu  mé- 
rite aucun  (  Islor.  litter. ,  lom.  \  it , 
pag.  8<)()  ).  III.  Opus  jutiiciale  tn- 
quisitoium  ex  dii'ersis  theoUtgis  rt 
jiiris  doctoribus  extructum ,  Borne , 
iSto;  Venise,  i583,in-4".  W-4. 

LOCCÉMUS  (  Jeaw  ),  historien 
et  pubiiciste,nceu  l 'ÎQf),  à  Ytichoe, 
eu  Ilolstein  .  commenta  ses  cttidrs 
au  collège  de  Hambourg,  et  Ir^ 
va  à  Relmslad ,  Kostock  et  I 
Eu  i6'25,il  fut  ap|)elèen  Suer 
Gustave- Adolphe ,  |K)ur  prii. 
Upsal,    l'histoire   et  la 
Christine  le  nomma   bi! 
de  Stockholm ,  et  hisloi  1 
royaume.  En   1671,  s<h;^  ic 

de  Charles  XI,  il  fut  pli.  <    1  l.<  uie 
d'une  institution  nouvel I 
dce,qui  avait  pour  but  i* 
les  monuments  de  l'hisluii  c  dt  5ucU« 
et  de   les   faire  connaître.  Il   rem- 
plit les  fonctions  de  cet t 
qu'à  sa  mort,  qui   arri\ 
Son  fils  aine  fut  an>>l  !i 
de  Tigerklou.  LordnuiN  «». 
latin  une  Histoire  de  Suéde,  de|nuf 
l'origine  de  la  monu»  hi.-     iuvin'au 
règne  de  Charles  X  '  j , 

in-80.:  ellca  été  iujjM....»'  |-.  rs 

fois;  et  Tëdilion  la  plus  c<»i;i|l  :.- 
est  celle  de  1O7G,  Franrf.  et  Uip- 
7.ig.  I/auteur  rounai^sait  les  sources, 
et  se  trouvait  à  portée  d'y  rccminr^ 
mais  il  n'eu  a  fus  fait  usAfre  AVii 
dis- 


vir  ' 
Daliu,  L. 


lUtîfOiAléaiUur 


6oÛ  LOC 

le  même  sujet.  Loccënius  a  puLlie  Je 
plus  :  Sjnopsis  juris  Siieco-gothici  , 
Stockholm,  1648.  —  Lexicon  jwis 
Sueco-gothici ,  i65o,  in-t'i  ^  iLid. 
i65i.  Heiiiecciiis  en  a  donne'  une 
bonne  édition,  Halle,  l 'j/^o,  in-40.  — 
J)e  jure  maritimo  /ihià.  i653.  — 
Erici  Olai  historia  Suecica  ciun  no- 
us, Stockholm,  1654.  — Antujui- 
tatum  Sueco-goth.  lihri  très  ,  ibid. 
1647,  in- 12.  —  Sueciœ  leges  pro- 
vinciales et  civiles  latine  ve'sœ  ,  ib. 
1672,  in-fol.  Lnnd,  i675,in-8°^  — 
Synopsis  juris  puhl.  Sueco-goth.  Go- 
theborg,  1673,  in-B*^.  —  Sjniagma 
dis  sert  ationiini  politicaîWn,  Ams- 
terdam ,  164  4  7  iu-r^.  —  De  Mi- 
gra! ionihus  gentiicTUy  in  specie  Go- 
thonim  iieonumque  ,  Stockholm  , 
i6'28,in-8''. — Epigrammata  saci  a 
et  mornlia  ,  etc.  —  Des  e'dilions  de 
Cornélius  Nepos,  de  Quinte-Curcc  , 
des  Epîtres  de  Ciceron.    C — au. 

LOGHER  (Jacques ),  surnommé 
Philomusus  f  né  en  1470  .à  Ehin- 
gen  ,  en  Souabe ,  fit  une  partie  de 
ses  études  en  Italie,  et,  enseigna  la 
poésie  et  la  rhétorique  à  Fribourg 
(  en  BrJsp;au  ),  à  Baie  et  à  Ingolstadt. 
George  Zingcl,  théologien  d'Ingol- 
stadt,  le  tracassa  pour  quelques  opi- 
nions qu'il  avait  manifestées,  et  par- 
vint à  le  faire  condamner,  et  même 
destituer  de  ses  fonctions.  Locher 
eut  encore  d'autres  querelles  avec 
Erasme  et  Wimpfeling.  Ce  ne  fut 
qu'après  la  mort  de  Ziugel ,  arrivée 
en  i5o8,  qu'il  jouit  d'une  existence 
plus  tranquille,  et  qu'il  se  vit  rétabli 
dans  son  ancienne  chaire.  Il  mourut 
à  Ingolstadt,  en  15^8.  L'empereur 
Maximilien  l^^.  l'avait  couronné 
poète  lauréat.  Conrad  Celtes  l'avait 
a<!fenis  dans  sa  société  Rhénane. 
(  Fofez  Celtes.  )  Le  conseiller 
Zapf  a  pul^lié  en  allemand  ,  k 
Nuremberg,  1802,  in-8'\  :  Locher 


LOC 

considéré  sous  les  rapports  hio  - 
graphique  et  littéraire;  et  l'on 
trouve  dans  une  lettre  de  Fischer  à 
Zapf ,  insérée  dans  les  Curiosités 
typographiques, cm({mhne\\VY3ihonj 
Nuremberg  ,  i8o4  ,  un  compte  dé- 
tai'lé  d'un  poème  dramatique  de 
Locher  ,  entremêlé  de  chœurs  en 
musique  ,  et  noté  ,  sous  ce  titre  : 
Historia  de  regeFrantie  (Franciae) , 
cum,  nonnullis  aliis  verAbu:  et 
elegiis.  Rotermund  énumère  jusqu'à 
42  productions  de  ce  poète,  et  il  en 
a  oublié  plus  d'une.  Nous  ne  croyons 
pas  qu'il  soit  nécessaire  de  les  rap- 
porter toutes.  Ce  sont ,  en  grande 
partie,  des  pièces  détachées  et  de  cir- 
constance. L'abJjé  de  Saint-Léger  , 
dans  ses  noticesinédiles  sur  les  poètes 
latins  du  moyen  âge,  dont  nous  possé- 
dons le  manuscrit ,  fait  mention  d'un 
poème  de  Locher  ,  qui  a  échappé  à 
Jœcher  et  à  Rotermund.  En  voici  le 
titre  :  I.  Jac.  Locher ,  Philomusi, 
heroïcum  carmen  de  Sanctd  Kathe- 
rind,  in-4*'.  de  six  feuillets ,  caractè- 
res ronds;  impr.  à  Baie,  chez  Jean 
Bergman  de  Olpe ,  i49^.  Locher 
qualifie  ce  poème  lahorum  primitiœ. 
lia  fiction  en  est  basée  sur  la  mytho- 
logie païenne  :  la  versification  en  est 
estimable  pour  le  temps.  11  est 
précédé  d'une  cpître  dédicatoire 
sans  date  à  Christophe  de  Schro- 
vestein.  11  n'a  pas  été  connu  de 
Maittaire.  IL  Une  autre  production 
de  Locher  ,  également  passée  sous 
silence  par  ces  lexicographes  ,  est  sa 
traduction  du  poème  moral  de  Pho- 
cylide ,  sous  le  titre  de  Poèma  Nou- 
theiicon  Phocjlidis ,  grœci  poétœ 
chrisiianissimi ,  à  Jacoho  Locher  , 
Fhilomuso  ^  ad  latinos  elegos  tra- 
ductum,  in  quo  morum  saluberrima 
documenta  ,  adversus  septem  mor-  1 
taliavicia,  cœterasque  vitœ  sordes^^ 
ad  instar  prœceptorum  Decalogi 


LOC 

itinentur  ,  ReinHngcn  ,    Mirlifl 
ylloii  ,  i5o4  ,  iu-/|0.  de  8  fcuil- 
s  ,    caraclcres    {^ollii(inrs.    Aide 
iv.dl  accompagiuf  d'une  traduction 
'  itiue  ,  de  mol  à  mol ,  l'cdilion  de 
ocylide  ;  et  le  volume  que  nous 
^ons  connaître  offre  une  pu'ce  de 
I  s  de  Locher  à  la  louange  de  ce 
libre    imprimeur  ,    piôce  qui   a 
iiappe  à  SCS  biographes.   Locher 
:  "imprime  Son   Phocyiide  à  Tu- 
ij;uc ,  en  1 5 1 3 ,  in-j»!  II i.  J^apj^- 
theca  ,  Augsbourg,  Miljcr,  iSi^  , 
\^.  Cesl  un  recueil  de  différentes 
es.    \\ ,    Théologien  emphasis  , 
.c'  dialogus  super  emineiilid  qua- 
tuor doclorum  ecclesiœ,  Gregorii, 
Ifieronymi  ,   Augustini  et  Ambro- 
,  Bàe,  J.Bergman  de  Olpe,  149C, 
fO.  Les  interioculeurs  de  ce  dia- 
^ lie  en  prose ,  sont  Locher  et  son 
.iiui   Ulrich  Zasius  ,  célèbre  juris- 
consulte fribourgcois.  V.  Libri  Pfd- 
nusi.  Panegjrici  ad  regem.  Tra- 
diade  Thurcis  et  Suldano.  Dia- 
:us  de  lleresiarchis  ^SlrAshour^, 
(iriininger,  1497  >  iïi-4°'  —  î^^* 
legyriques,  en  prose  et  en  vers, 
rbrent  Maxirailien  I ,  roi  des  Ro- 
ins.   La  trage'die  de   Thurcis  et 
ldano,']oucc  au  collège  de  Fri- 
ng,enmai  i497,  est  en  5  actes, 
ose  et  vers  ,  avec  argument  pour 
tquc  acte,  et  des  chœurs;  elle  est 
tout  point  digne  de  ces  temps-là 
ir   le  plan  et  rexëcution,  — Le 
dogue  en    prose  sur    les    he're'- 
iqties  est   encore   entre   l'auteur 
Ulrich    Zasius.    Une    des   gra- 
ves  en   bois  représente   Locher, 
ironnë  de  lauriers  ,  et  travaillant 
>n  bureau.  VI.  Ludicrum  drama 
(lutino  more  ficlum ,  desene  ama- 
''  ,filio  corruptore  et  dotatd  mu- 
re ,  in-4*'.  sans  date  ,  ni  noms  de 
lie  et  d'imprimeur;  cite  par  Mail- 
if,  Annal,  tjpog.  ,  lom.  a  ,  pag. 


O07 
53a.   Vil  ,im  Pariais    de 

porno  aur.'0  cl  iriuUct  hominum 
vità  ,  dii  tribus  draius  ,  yi/rt»  natis 
vilam  contempUui\'am ,  aciivam  ci 

voluptuariam  reprœscniattt  .r' 

illa  wn  iii  mcUor  tutivnpu . 
sans  date;  deux  pi". 
guise  de  comcdic.N 
golstatit  en  i5oi.  \iii.  i o  1. 
de  Lazao  memiico  ,  Di%nte  / 
rato  et  injemo  Charente,  1 
sans  date ,  avec  fig.  IX.  On 
Locher  une  édition  d'Horare ,  |m- 
blie'e  à  Strasbourg  ,   i4i>B,  in  fol. , 
sous  ce  titre  :   IforalU  Flacci  fe- 
nusini ,  poëtœ  Ijrici  ,  opéra ,  cum, 
(juibusdam    amwtationibus ,    ima- 
ginibusque  pulcherrimis ,   af'f'^'*"r 
ad  odarum  concentus  et   m 
tias.  X.  Il  est  également  cdii 
Pane'gyriquc  de  Pline  sur  1 1 
Nuremberg,  i5'2o,  in-^«.  ;  d<'  i  u. 
ratio Ciceronis pro  Milone;àc  8.  ho- 
liessur  la  même  h.ir  '      ' 

cours  pro  Aulo  Lit 
cello  ;  de  la  Mythologie  de   . 
Fulgenlius    Pianciudes  ,  a\- 
scholics  de  sa  façon  ,  AugNliuu:-  , 
i5'ii,   in -fol.    XL    CompctuLum 
Bhetorices  ex    TulUano  thjstiuro  ; 
Sjntaxis  de  componendd  oratione 
funebri  ;   Grammatica  nova  ^  miu 
lieu   d'impression,    i495,  in -4*. 
XII.  II  a  mis  en  vers  latins  Icporjut 
allemand  de  Scbai^icu  Brao*lt      > 
nu  sous  le  nom  de  Navis  stul 
Il  Ta    inf      ■ 
fectionis 

navis  ,   etc.  y   i4^-î  *  y- 
I  't8« ,    (    per  JaroN»   / 


tom.   V  . 
<  Locher,  j 

meut   eu  tête  ou  a  la 
«crits,  «tait  :  DU  bene 


M-0:t. 


6o8  LOC 

LOCHNER  (Migiiel-Frederic), 
médecin  et  naturaliste ,  ne  à  Furtli  , 
près  de  Nuremberg,  en  1 6G^i ,  fit  ses 
premières  études  dans  celte  ville  avec 
j3eaucoup  de  succès  ,  et  alla  ensuite 
ëludierlamédecineàl'universitéd'Al- 
tdorf;  mais  avant  de  prendre  ses  gra- 
des, ilvisita  les  principales  contrées  de 
l'Europe,  dans  l'unique  dessein  d'ac- 
quérir de  nouvelles  connaissances.  De 
retour  à  Altdorf ,  il  reçut  le  docto- 
rat en  ï684  ;  et  l'année  suivante  il 
fut  agrégé  au  collège  des  médecins 
de  Nuremberg.  Il  obtint ,  en  1712, 
la  place  de  médecin  de  l'hôpital  de 
cette  ville  ;  et  il  la  remplit  avec  la 
plus  grande  réputation  jusqu'à  sa 
mort ,  arrivée  le  i5  octobre  1720. 
Lochner  avait  été  admis  à  la  société 
des  curieux  de  la  nature  sous  le  nom 
de  Penander,  et  il  en  fut  élu  direc- 
teur en  1 7 1 1 .  Cet  habile  médecin  , 
que  ses  compatriotes  ont  surnommé 
VEsculape  de  Nuremberg ,  avait  des 
connaissances  très-étendues  en  his- 
toire naturelle  et  dans  la  science  des 
antiquités.  On  a  de  lui  :  I.  Papaver 
ex  omni  aniiquitate  erutum,  gem- 
mis,  munis ,  statuts  et  marniorihus 
œri  incisis  illustratum  ^'^nremhcr^, 
1718,  in-4°.  Lochner ,  atteint  d'une 
maladie  qui  avait  résisté  à  tous  les 
remèdes  ,  éprouva  enfin  du  soulage- 
ment d'une  émulsion  de  pavot;  et  ce 
fut  par  reconnaissance  qu'il  entreprit 
la  description  de  cette  plante  dont 
il  exalte  l'utilité.  II.  Mungos  ani- 
rnalculum  et  radix ,  ibid.,  i7i5, 
in-4°.  III.  Comment atio  de  ana- 
iiasd  sive  nuce  pined  indicd,  iml- 
go  VIN  H  AS ,  ibid. ,  1 7 16  ,  in-4°.  IV. 
Nerium  swe  lihododaphne  vete- 
nim  et  receiitionini  ^  qud  Nerei  et 
JYereïdum  mythologia ,  Amyci  lau- 
rus  ,  sacxharum  al  -  haschar ,  et 
Q)cntus  ac  planta  Badsamur,  aJia- 
cfiie   explicanlur  ^    ac   diversis    S, 


LOC 

Scripturœ  lacis  lux  ajjunditur  , 
etc. ,  Nuremberg,  171G,  in-4*^.  Oiii 
trouve,  dans  le  même  volume,  une 
dissertation  intitulée  :  Daphne  Cons- 
tantiniana  ,  où  Lochner  cherche  à 
expliquer  une  médaille  portant  ces 
deux  mots,  et  que  Patin  avait  décla- 
rée inexphcable.  Il  la  croit  frap])ée 
pour  perpétuer  le  souvenir  de  la  vic- 
toire remportée  sur  les  Golhs  par 
Constantin.  V.  Bellili iiidicum/ihid .^ 
1 7  1 7  ,  in-4*'.  VI.  De  novis  et  exoti- 
cis  thee  et  cafesuccedaneis,  etc.,ib., 
1 7 1 7 ,  in-4*'.  Ces  six  opuscules  ont  été 
réunis  sous  ce  litre  :  Jleptas  Pisser^ 
taiionum  variarwn  ad  historiam 
naturalem  conscriptarum  ,  ibid.  , 
1 7 1 7  ,  in-4"^.  VII.  De  Pareird  Bra- 
va, ibid. ,  ï  7 1  gj,  in-4**.  Lochner  avait 
un  fds ,  nommé  Jean-Henri ,  jeune 
homme  de  la  plus  grande  espérance, 
qui  mourut  à  Wittemberg  ,  le  2  jan- 
vier 1715,  laissant  en  manuscrit  la 
description  du  cabinet  de  Besler  :  le 
père  mit  en  ordre  cet  ouvrage  ,  et  le 
publia  sous  ce  titre:  Bariora  musei 
Besleriani  quœ  olim  Basilius  et  Mi- 
chael  Besleri  colle  gérant ,  œueisque 
tahulis  ad  vivum  incisa  evulgarunt) 
nunc  commentariolo  illustmta  à 
Joli.  Henr.  Lochnero,  Nuremberg , 
1716,  in-fol.  avec  quarante  planch 
de  médailles.  — Jean-Jérôme  Loc 
NER,  professeur  à  Nuremberg, né  prÀ 
de  cette  ville  en  1700  ,  mçrt  le  i 
avril  1769,  se  fît  connaître  surto 
par  sa  riche  collection  de  médaill 
modernes  ,  dont  il  publia  le  catalo* 
gue  raisonné  avec  figures  ,  en  8  vol, 
in-4^.,  de  1787  à  1744-  ^^  ^^  tête  de 
chaque  volume  se  trouve  la  Vie  de 
quelque  graveur  en  médailles.  On 
a  encore  de  ce  professeur  plusieurs 
ouvrages  sur  l'orthographe  et  la  lan- 
gue allemande,  et  une  Notice  sur  la 
Corse  ancienne  et  moderne ,  Nurem- 
berg, 1736,  in-40.  W— i. 


Î.OCKE  (  jEAijr  ),  l'un  des  prc- 
aiicrs  meta  |)li  y  siriciis  (le  rAiiglelcrre 
dix  -  scpiicmc  siècle  ,  uaquil  à 
Wrington  (I.U1S  le  comte  de  Bristol, 
le  ^9  août  i()'Vi,  et  eut  pour  père 
n  Locke ,  (le  Pensford  ,  qui ,  de 
gl^flier  d'une  justice  de  paix,  devint , 
mr  le  crédit  du  colonel  Alexandre 
POpham  ,  capitaine  dans  l'armée 
parlementaire.  Sous  les  mêmes  aus- 
pices ,  le  jeune  Locke  fut  reçu  au 
CoUcgedeWeslminster  ,d'où  il  passa, 
en  i6')2,à  l'université  d'Oxford. 
Il  y  prit  ses  degrés  de  bachelier  et 
de  maîlre-ès-arts ,  et  y  obtint  un 
bcnélicc  dans  le  collège  du  Christ. 
Malgré  les  brillants  progrès  qu'il  (it 
dans  ses  études ,  la  philosophie  sco- 
kstique  n'était  pas  de  son  goût.  Ce 
fut  eu  lisant  les  écrits  de  Descaries  , 
que  son  esprit  philosophique  se  dé- 
▼elopj)a  ,  quoique  porté  à  suivre  une 
roule  bien  diftérente.  Ne  avec  une 
complexion  faible ,  il  fit  ses  cours 
de  médecine,  moins  pour  en  exercer 
la  profession  ,  que  pour  en  tirer  des 
règles  de  santé.  Cependant  les  con- 
naissances qu'il  acquit  dans  cet  art, 
«eussent  pu  lui  faire  une  réputation 
^s'il  s'y  fût  livré.  Svdenham ,  dans 
son  traité  des  maladies  aiguës ,  se 
félicite  de  l'approbation  donnée  par 
JiOcke,  à  sa  méthode,  d'après  un 
examen  aprofondi ,  et  s'avoue  re- 
devaUc  en  grande  partie  à  ses  entre- 
liens du  talent  de  l'observation  qu'il 
portait  auprès  des  malades.  L'ana- 
tomic  ,  l'histoire  naturelle,  la  chi- 
mie ,  étaient,  pour  l'obsenateur- 
philosophe  ,  un  cours  d'analyse  et 
de  méthode.  Ses  connaissances  s*é- 
tendirent  par  les  voyages  qu'il  fil 
eo  accompagnant ,  comme  secre'- 
taire,  en  iC)i)\  ,  William  Swao,  à 
la  cour  de  Berlin,  et  il  v  prit  des 
notions  de  diplomatie  et  a'adminis- 
tion.  De  retour  en  Angleterre ,  il 

XXIV. 


LOC  6(19 

rcviui  suivre  à  Oxfonl  set  cour»  de 
philosophie  naturelle.  C«  fut  Cfi 
i<)G<)  qu'il  y  fit  la  coaiudiiaM»  d«i 
lord  Ashiey  ,  qui ,  au  lieu  de»  r  •  . 
luiuér  des  qu'il  venait  prendre  <  :. 
un  miMiccin  ,  reçut  la  visite  et  lc« 
conseils  du  philosophe,  goûu  son 
en  Ire  lien ,  dut  a  se»  soins  une  euro 
dilVicilc  ,  et  se  l'attacha  pour  la  TÎe. 
Ses  liaisons  avec  lord  Ashiey  l'in- 
troduisirent dans  la  société' des  uer- 
sonnages  le.s  plus  distineués,  auprès 
desquels  la  douceur  et  Vf^fn  i»  »«•■  1- 
vaient  seuls  faire  excuser  II 
des  procédés.  Un  jour  qut  j.  ..  ,  .,  > 
d'entre  eux  (  lord  Hahfax,  Huckinç- 
hain,  etc.  )  s'étaient  rasseinll  ^  , 
on  ap|)orta  des  cartes  ,  avant  <|  r 
eût  échangé  un  seul  mot  d'entrr  (11  . 
î^ocke  ayant  regarde  le  jeu  queiqii*^ 
instants  ,  prit  ses  tablettes  ,  sur  les- 
quelles il  se  mil  à  écrire  ,  avec  U 
plus  grande  attention.  L'np  s 

lui  ayant  demandé  ce  qu  1    .  : 

«Pour  répondre  ,  dit-il ,  4  i  hon- 
»  ueurque  me  fait  votre  société,  je 
»  m'occupe  de  consigner  sur  mes  ta- 
v  blettes  la  substance  de  tout  ce 
»  qu'elle  dit  depuis  une  heure.  » 
Chacun  rit  de  ce  mot  :  on  quitta  les 
cartes  ,  et  l'on  conversa  le  reste  de 
la  soirée.  En  iGOS,  Locke  accom- 
pagna en  France  le  comte  ella  corn» 
tesse  de  Northuinbcrlaud  ;  mais  il 
ne  put  y  prolonger  son  sr'jour  :  U 
mort  du  comte  le  ramena  dan^  Lon- 
dres,  d'où  il  faLsait  de  fréquents 
voyages  à  Oxford ,  pour  s'y  livrer 
plus  paisiblement  à  l'f  ntdo  rr  rf^- 
pirer  unair  plus  sal 
du  fils  aine  de  lord  ^ 
losophe  fut  encore  charge  de  lut 
choisir  une  épouse.  I*e  fruit  de  ce 
mariage  fui  le  lord  Shaftesbun, 
Tauleurdes  Caraclères,  dont  Lock- 
dirigea  ëgaJemeniréducaiion.  ri  qui, 
malgré  la  rtcoooaissance  qu'il  cou- 

3y 


Gio 


LOC 


ferva  toujours  pour  son  maître,  pre- 
fîta  trop  Ijien  de  ses  leçons ,  et  ap- 
prit à  traiter  un  peu  sévèrement  sa 
philosophie.  Ce  fut  vers  1670  que 
Locke  jeta  les  fondements  de  l'ou- 
vrage qui  l'a  rendu  célèbre.  Il  assis- 
tait un  jour  à  une  discussion  très- 
vive,  élevée  entre  plusieurs  savants  à 
Oxford.  Il  ne  se  mêla  point  à  leur 
contestation  j  mais  il  observa  leurs 
opinions  et  leur  langage  ;  et  il  s'a- 
perçut que  cette  dispute  dont  l'ob- 
jet leur  paraissait  très -important, 
n'était  qu'une  dispute  de  mots. 
Cette  réflexion  fut  le  germe  de  son 
livre  sur  l'entendement  humain. 
Sa  réputation  de  philosophe  ,  qui 
avait  engagé  les  propriétaires  de 
la  Caroline  à  lui  demander  une 
constitution  pour  cette  colonie  (  i  ) , 
l'avait  fait  recevoir  ,  en  1668 , 
membre  de  la  Société  royale.  Mais 
les  affaires  et  les  emplois  vinrent 
interrompre  le  cours  de  ses  occupa- 
tions littéraires.  Lord  Ashley ,  créé 
comte  de  Shaftcsbury  et  grand  chan- 
celier d'Angleterre  en  1672, lui  don- 
na l'emploi  de  secrétaire  des  présen- 
tations aux  bénéfices,  place  qui  lui 
fut  retirée,  lorsque  ce  lord  quitta 
les  sceaux,  en  1673.  Ami  par  prin- 
cipe et  par  goût  d'une  tolérance  sa- 
ge et  réglée,  Locke  avait  secondé 
ce  ministre  dans  ses  mesures  oppo- 


(1)  Lord  Ashley  était  Tun  ilts  liuit  seign^nr»qui, 
•n  i663,  obtinrent  de  Clmiles  II  la  pro|iriétéde  ce 
beau  pays,  Voltairu  vante,  en  pliisieur»  endroits, 
l'esprit  de  tolérance  de  cette  co.istitution  ,  dont 
I»  texte  «e  lit  dans  les  State  Tracts  ,  i6f'g  , 
tona.  t  ,  et  plus  exactement  au  tome  i  de  VHi.t- 
torical  Accouvt  of  Ihe  rixe  and  progress  oj 
Ihe  Colonies  oj south  Catolina  and  George  i, 
IjOndres.  1779,  a  vol.  in-S".  Ce  code,  purenit>at 
aristocratique,  fut  loin  néanmoins  de  répondre 
«ux  espérances  de»  fondateurs  :  pendant  If  s 
cinquante auncoa  que  dura  le  gouverneuient  pro- 
priétaire ,  les  colon»  furent  constamment  déchi- 
ré» de  dissensions  intestines  et  di;  querelles  de 
»-Bligion.  Fatigués  de  ces  trouble»  sans  cesse  re- 
naissants, ils  rétablirent  en  17IÇ  l'autorité  royal» 
(Picti-t,  Tableau  dtis  Etats-Unis,  d'aprè»J«U. 
.«Um.c,  i^yi»,  in-S?. ,  t»JM.  a,  p.  a3;). 


LOC 

sées  à  l'intolérance  et  au  pouvoir  tCi 
bitraire.  En  1674,  il  entreprit,  pouf 
sa  santé  ,  un  voyage  à  Montpellier , 
où  il  connut  lord   Herbert ,  depuis 
comte  de  Perabroke,  auquel  il  dédia 
dans  la  suite  son  Essai  sur  l'entende- 
ment humain.  De  là ,  il  vint  à  Paris  , 
011  des  savants  et  des  médecins  de  dis- 
tinction accueillirent  le  philosophe. 
En  1679  ,  le  comte  de  Shaftcsbury, 
ayant  été  nommé  président  du  con- 
seil ,  rappela  Locke  auprès  de  lui 
Mais  l'opposition  du  comte  aux  me- 
sures despotiques  de  la  cour  ,  lui  fil 
perdre  sa  place  ;  il  se  retira  en  Hol- 
lande, où  Locke  suivit  son  patror. 
malheureux  ,  qu'il  eut  la  douleur  d( 
perdre  eu  i683.  Dans  son  séjour  er 
Hollande ,  il  se  lia  particulièremen 
avec  Limborch  et  Leclerc;  et  ces 
liaisons  purent  le  rendre  suspect  i 
son  gouvernement.  On  l'accusa  d'a- 
voir composé  des  libelles,  qu'on  re 
connut  plus  tard  n'être  point  son  ou 
vrage  :  mais  ils  lui  firent  ôter  sj 
chaire  d'Oxford  ,  et  elle  ne  lui  fu 
point  restituée.  La  manœuvre  don 
on  se  servit  pour  épier  sa  conduite  c 
provoquer  sa  destitution  est  remar 
quable  :  «  J'ai  depuis  plusieurs  an 
»  nées  l'œil  sur  lui,  dit  le  doyen  me 
»  me  du  collège  d'Oxford  (  le  doc 
»  teur  Fell  )  au  secrétaire-d'état  j 
»  mais  il  s'observe  tellement  ,  qui 
w  je  puisaffirmerqu'iln'estpersonn 
»  dans  le  collège  qui  ait  entendu  d 
»  lui  un  seul  mot  relatif  aux  affai 
»  rcs  du  gouvernement....  J'ajouî 
»  qu'ayant ,  soit  en  public  ,  soit  e 
»  particulier,  tenu  et  fait  tenir  de 
»  vaut  lui  des  propos  contre  l'hon 
»  neur  de  son  patron  et  de  ses  par 
»  tisans  ,  il  n'a  laissé  échapper  1 
»  parole ,  ni  geste  qui  marquât  ] 
»  moindre  accord....  Il  possède  i< 
»  une  place  qui  ne  l'oblige  point 
»  résidence.  Je  l'ai  néanmoins  son- 


LOC 

■  me  de  revenir  daus  un  dëlii  pro- 
•>  clidiii.  S'il  refuse,  nous  l'expulsc- 

>  rons  :  s'il  «bcil,  il  sera  la  pourrc- 
noudre  de  sa  cuiiduile.  11  est  pro- 
Lalilc  que, s'il  raonlrcdcla  réserve 

>  eu  un  lieu  ou  il  soupçonne  d'être 
'  surveille,  il  se  livrera  aiséineut  k 

>  plus  d'abandon  à  Londres ,  où  l'on 
^  jouit  de  U  liberté  de  tout  dire.  » 
'    Ite   mesure  ,  employée    par    un 

omme  honnête,  mais  qui  l'élail  si 
j)cu  elle  -  mèiac  ,  n'ayant  pas  paru 
.issc7.  nroraptc,  min'arrant,  au  nom 
de  Charles   II,  fut   expédié,  sous 
il  date  du  ijl  novembre   iG84;  et 
L'  sajçe  Locke  fut,  comme  factieux, 
f  \pulsé  dii  collège  royal ,  sans  ju^e- 
lent ,  ni  enquête.  Après  la  luorl  de 
iiarles  II ,  le  célèbre  qu  kcr  Wil- 
iin  Pcnn  ,  qui  l'avait  connu  a  l'uni- 
iTsilé  d'0\ford,  lui  lit  offrir  d'ob- 
nir  sa  j;ràce  du  roi  Jacques.  Mais  le 
;  iiiiosophe  répondit  que,  «comme 
on  n'avait  ea  aucun  motif  pour  le 
)  croire  cojipable,  on  n'en  avait  au- 
cun pour   lui  pardonner.  »  Celte 
•ponse  qui  parut  être  de  l'orgueil, 
■A  qui  n'éîait  que  le  noble  sentiment 
de  sa  dignité ,  fut  uu  nouveau  pré- 
texte pour  l'envelopper  dans  la  cons- 
iralion  du  duc  de  Montraoulh  ;  et 
li  fut  compri,-,  dans  la  demande  d'ei- 
traditiond  un  grand  nombre  de  per- 
<nnes    suspectes  à  la   maison   des 
Mnarts  ,  quoique  le  caractère   loyal 
u  pliilosophe  ,  et  sa  timidité  natu- 
'  f'lle,le  rendissent  étranger  aux  inlri- 
_iies  comme  au\  agitations  politi- 
jiies.  L'estime  de  ses  savants  a.nis 
r   des    magistrats   hollandais  eux- 
iiêmes  lui  ménagea  une  retraite  sû- 
',  jusqu'à   ce  que,  son  innocence 
mt  reconnue,  il  lui  fût  permis  de 
•  paraître  en   public.   I.<es  amis  de 
l.ocke  formèrent  alors  avec  lui  une 
'ciélé  académique,  dont  il  rédigea 
ii:s  statuts  j  et  qui  s'ouvrit  »ous  U 


LpC  6,1 

pr^HÎdeiice  de  Ijmborrk.  Lé,  m  dit» 

entaient  les  matières  pkilotopiMfaig. 
L<^  priuripcs  de  U  lolërWM!» «f  fg 

haine  de  la  tvraniiie. 


,  .         iMtDif 

.imborrh  ,  riaient  proM((éiptr  Lt» 
derr.  Une  lettre  sur  fa  tolé-mnet, 
en  latin ,  «dreWe  a  Liiulx»rrh  (  Foj, 
ce  nom  ),fiit  le  premier  écrit  pq. 
Llié  par  Locke.  Poppic  W  Ir.i  lutte 
en  anglais.  L'auteur  pari  d'i  p.inrt* 
pe  ,  nue  le  choix  de  lun!.-  rr  i  jq^ 
est  libre  ;  qji'cn  rons«fjii  jij^ 

se  composant  d'hommi .  j...  ^i  n-a- 
nissent  volontairement  pour  rendre 
à  Dieu  un  culte ,  le  pouvoir  de  cha- 
que éciise  ne  conM^te  qiie  dans  le 
droit  d'exhorter  et  de  reprendre  tel 
membres  ,  mais  ne  s'éteM  à  •ocdD» 
autre  église.  11  fait  ainsi  de  la  tolë- 
rance  le  caractère  de  r<-i;lisc  chr^ 
tienne  :  cependant  elle  peut  être  re- 
fusée aux  intolérants ,  jiarmi  lesquels 
sa  sévérité  comprend  les  catholique! 
qui  excluent  les  autres  communions. 
Des  théologiens  du  collège  de  là 
Heine ,  à  Oxford ,  qui  se  crurent  in- 
culpés, attaquèrent  la  doctrine  de 
Locke.  Il  la  défendit  par  de  non- 
veaux  motifs.  V  Essai  sur  l'entende- 
ment  humain  fào*J\  Locke  avait  tra* 
ce  le  pi  m  en  Angleterre,  et  com- 
mencé l'exccuion  en  HolLndc,  fut 
enfin  achevé  après  vingt  années,  en 
1687;  m.iis  it  »e  contenta  dVn  don- 
ner aal>ord  comme le;^  ospectts  on 
l'extrait  abrégé  ,  que  son  ami  l«e- 
clerc  tradui«it ,  et  qi'il  ir»*frs  d»ns 
fiA  UiblioJi'que  un  » 

de  janvier  1O88.  1'  at» 

sur  divers  objets  d  utiuU'  p-niiq  it 
parurent  s.irccsMTcment  dans  It 
même  journal.  L«  révolution  qui  mit 
(•uillaumrlll  sur  le  trône .  en  ibtiQ, 
rétablit  Locke  dans  st\  droit*  poli- 
tiques ,  et  le  ramena  dnt«-  «^»  '^  '''•e, 
sur  le  vaisseau  qui  Ir  «  <« 

Augletorra  la  priiiccÂ>c    xyi.^u^t, 

3».. 


6l2 


LOG 


Il  songea  d'abord  à  recouvrer  son 
benëtice  de    Glirist-Chiirch  ,   pour 
riioniieur  de  la  justice  ,  et  pour  le 
sien  ;  mais  réfléchis  saut  que  la  dd- 
possessian  du  titulaire  actuel  ne  se- 
rait  utile  qu'a  lui-même  ,  il  sacrifia 
son  intérêt  à  celui  d'autrui  et  à  l'a- 
mour de  la  paix.  Libre  de  tout  soin  , 
il  publia  son  Essai  sur  l'entende- 
ment humain  f  eu  i6:)o.  La  marche 
i^e'ne'alogique  des  idées  ,  la  clarté', 
la   finesse  des  analyses  ,  la  simpli- 
cité, la  netteté  des  expressions,  mai- 
gre la  longueur  et  la  prolixité  des  dé- 
tails ,  annoncèrent  non-seulement  un 
art  d'e'crire  sur  les  matières  abstraites 
avec  la  méthode  et  le  style  propres 
au  sujet,  mais  une  philosophie  ,  si- 
non neuve  dans  le  principe,  du  moins 
nouvelle  dans  les  développements. 
Bacon  ,  regardant  avec  les  stoïciens 
l'entendement  comme  une  table  ra- 
se, avait  fondé  la  connaissance  sur 
l'observation.  Gassendi,  substituant 
la  méthode  analytique  à  la  marche 
synthétique  de  Descartes ,  et  partant 
de  i'axiomcdes  péripatéticieus,iV/7«7 
est  in  intelleclu  quod  prias  nonfuerit 
in  sensu,  avait  même  déterminé  pour 
bases  principales  des  opérations  in- 
tellectuelles ,  le  sens  et  la  réjlexion. 
(    Voyez  Gassendi.  )  Mais  la  théo- 
rie de  la   génération  et  de  la  iiîia- 
tion  des  idées  ,  n'en  appartient   pas 
moins  à  Locke  dans  son   ensemble 
et  dans  ses  deïails.  Il  montre  com- 
ment les  idées  se  forment  dans  i'e'i- 
tendement;  comment  les  sensations 
deviennent  des  notions  simples  par 
la  perception  ;  comment ,  par  l'at- 
tention et   la  réflexion,  les  notions 
se  composent  et  deviennent  des  idées 
complexes,  et  comment  enfin,  par 
l'abstraction,  les  noiions  répétées  et 
comparées  jiroduisent  les  idées  dis- 
tinctes ou  collectives  de  mode  ,   de 
substance  ;  les  idées  relatives  d'exis- 


LOC 

tence ,  de  temps  ,  de  lieu  ,  et  même 
les  relations  morales.  Les  rapports 
logiques  et  grammaticaux  qu'il  en 
déduit  avec  Gassendi,  sont  devenus 
les  bases  des  grammaires  générales, 
telles  que  celles  de  Port-Royal  et  de 
D:imarsais  ,  de  Harris  ,  et  de  Horne- 
Tooke  qui  voit  dans  l'ouvrage  de 
Locke  un  traité  de  grammaire,  tant 
l'auteur  détermine   avec  exactitude 
les  sig-nes  aussi  bien  que  les  idées. 
Quant  aux  notions   des  vérités  de 
l'ordreintellecluel  et  moral,  peut-cire 
Locke  va  t-il  trop  loin  lorsqu'il  don- 
ne la  même  origine  à  toutes  les  no- 
tions, lorsqu'il  les  fait  toutes  dériver 
de  la  convenance  des  idées  considé- 
rées en  elles-mêmes,  en  admettant 
néanmoins  l'accord  des  idées  avecles 
choses;  ce  qui  lui  a  fait  dire,  malgré 
ce  qu'il  nomme  la  connaissance  in- 
tuitive, qu'il  n'y  a  point  de  Jiotions 
innées ,  et  supposer  qu'il  ne  serait  pas 
impossible  que  la  matière  pensât,  en 
la  dépouillant  toutefois  deLé'endue. 
Leibnilz,  dans  ses  nouveaux  Essais 
sur  l'entendement ,  releva  l'espèce  de 
contradiction  que  la  première  propo- 
sition lui  paraissait  offrir; et  le  doc- 
teur Slillingfleel   attaqua  vivement 
en  chaire  la  seconde   proposition  , 
que  le  philosophe  modifia  en  l'ex- 
pliquant dans  SCS  Lettres  à  Vévéque 
de  f y orcester.  On  vit  même  l'élève 
de  Locke,  lord  Shaftesbury,  dans 
ses  Recherches  sur  la  veHu ,  faire  à 
la  doctrine  de  son  maître  le  reproche 
de  fonder  les  principes  ,  en  morale 
comme  en  métaphysique, non  sur  des 
sentiments  innés  ou  naturels ,  mais 
sur  des  notions  plus  ou  moins  varia- 
bles suivant  les  opinions  que  les  peu- 
ples s'en  forment  d'après  les  progrès 
de  leur  expérience.  C'est  cepeiîdant 
sur  des  liolious  de  droit  ou  de  mo- 
rale naturelle  ,  que  Locke  pose  les 
principes  de  sa  politique.  Dans  le 


Î.OC 

irniirant  de  la  iiumiic  aiiiicV  qu'il  don- 
!i  i  V Essai  sur  Venlcndeiiwnt   ha- 
uiin,  parut  son  Essai  sur  le  f^oti- 
rncment  c/V/7.  L'aulcnr  avait  en 
irlidilier  pour  objet  de  jusliiicr  la 
)nvclle  révolution,  en  établissant 
I  Ici^itiraite  sur  la  sanction  donnée 
la  constitution  actuelle  par  la  na- 
I  »n  anf;laise.  C'est  en  généralisant 
«    t  objet ,  et  en  prenant  un  milieu 
<  lire  la  doctrine  de  Sidneyetcellede 
I  lajjbcs,  qu'il  admet  en  principe  que 
pouvoir  administratif  et  judiciaire 
^t  dclcguc  par  la  socicle',  el  denieu- 
!  :  à  celui  qui  en  est  en  possession , 
tint    que  la    société    subsiste    telle 
qu'elle  a  e'ie  constituée.  Ainsi ,  fon- 
i  uit  le   gouvernement  légitime  sur 
'  s  droits   naturels  des  peuples  ,  on 
;i  "Ut  dire  que  c'est  en  partie  dans  ce 
livre  ,  qu'ont  été  puises  les  principes 
de  ce  Contrat  social  dont  on  a  vu 
l'inflnence  sur  la  révolution  françai- 
se. La  considération  qu'acquirent  à 
Locke  ces  deux  productions,  pouvait 
le  conduire  à  un  poste  aussi  hono- 
rable que  lucratif.  Il  se  contenta  de 
la  place  de  commissaire  aux  appels 
avec  un  traitement   de    200   bvres 
sterling.  Des  missions  diplomatiques 
dont  on  lui  laissa  le  choix,  lui  fu- 
rcîit   proposées  ;  il    les   refusa    en 
s*excusant  sur  sa  santé;  mais  il   pu- 
blia plusieurs  écrits  d'une  utilité  re- 
lative aux  circonstances.  Les  mon- 
naies en  Angleterre  avaient  éprouve 
mie  altération  d'un  tiers.  U  présenta 
au  gouvernement  des  Considérations 
sur  les  moyens  d'élever  la  valeur  des 
espèces,  et  de  diminuer  le  taux  des 
intérêts.  11  répondit  aux  objections 
auxquelles  elles  donurreut  lien;  ce 
qui  le  mit  en  relation  intime  avec  le 
comte  de  Pélerborough.  Le   séjour 
de  Londres  étant  devenu  contraire  à 
sa  santé ,  il  se  rendait  fréquemment 
dans  le  voisinage ,  à  la  maison  de 


TiOC  6i3 

rnmpap;np  du  comte.  Miif  ce  fol  à 
O.itr»  ,  «lans  I'^m^x  ,  cliei  le  rheva- 
lier  MaNham,  aii'il  f«irm«  le  projet 
de  se  retirer.  Il  y  lrouv;«ii  un  aT«ii- 
tagc  précieux  dans  ramiiiê  tendre  et 
la  religion  éclairée  de  lady  M.i«hamy 
fille  du  docteur  Ciidworth  ,  son  ami. 
Elle  (it  di.>|>user  pour  lui  wn  npp.ir- 
tement  où  il  pût  être  tout-a-l  r  i'* 
maître;  el  ce  qui  le  toucha  d.i>an- 
tage,  c'est  qu'elle  éleva  son  UU  uni- 
que d'après  les  Pemea  surl'educO' 
tion  ,  que  Locke  avait  ri'digce»  en 
forme  de  lettres  adressées  à  uo  ami. 
Le  succès  sanctionna  sa  uétho^lc.  Il 
la  piUii  en  lôf)?^  et  l'aiigmeolA 
beaucoup  p.ir  la  suite.  O^^H"**  eet 
ouvrage  pratique  soit  .<]  ux 

enfants  que  laulcur  av. •     ,  lie- 

rement  en  vue  dans  sa  nation  ,  il 
concerne  en  général  rédiiration  des 
enfants  de  tous  les  pays.  Il  les  elère 
d'après  des  règles  et  des  principes 
qui  découlent  partout  de  l'obserTi- 
tion  et  de  la  raison  ,  et  qu'il  déve- 
loppe par  degrés ,  soit  au  physique 
soit  au  moral ,  appuyant  ses  ieçow 
simples  et  claires  d'exemples  eoa- 
muns  et  familiers  ,  et  donnant  sans 
analyse  abstraite  ,  ce  qui  est  remar- 
quable ,  de  premières  notions  de  U 
verui  et  de  Dieu ,  déduites  des  idées 
d'ordre  et  de  famille  le  plus  à  U. 
portée  de  l'enfant.  (Vc>l  encore  une 
source  où  a  pui.sé  l'aiiletir  tï  Emile  ^ 
dans  ce  que  sa  théorie  ollVr  dr  vrai- 
ment utile  et  applicalle.  Locke  fut 
])ersonnellemcut  un  philosophe  chnv 
tien.  Guillaume  \\\  ayant  renouYelé 
le  plan  de  Jacques  II .  relatif  a  U 
réunion  des  sectes  dissidentes,  Ixicke 
composa  dans  celle  Yue,  et  mil  sa 
jour,  en  i(><}5.son  Christiamsmerm' 
^o'  .  -iclie à  montrer qat 
1..  i  nne,  telle  que  !'€•• 

s.  n*oflre  rtendccoa- 

U...      laquelle  s'socord» 


6i4 


LOG 


avec  la  foi  dnns  ce  qu'elle  explique , 
on  s'y  soumet  dans  ce  qui  lui  est  su- 
pe'rieur.  En  conséquence,  il  permet  à 
chaque  coinuiunion  une  créance  libre 
et  praîique ,  et  réduit  la  foi  néces- 
saire ,  pour  tout  mcinbre  des  églises 
cbretiennes  ,  à  ce  dogme  essentiel  : 
Jésus  est  le  Messie.  Mais  comme  il 
ne  déterminait  pas  jDrecisémeut , 
afin  de  ne  point  s'aliéner  les  soci- 
niens ,  si  celte  foi  avait  pour  objet 
l'homme-Dieu,  ou  simplement  ie  fils 
adoplif  de  Dieu  ,  sou  plan  ne  fut 
point  goûte,  quoique  ,  selon  Bayle, 
il  n'y  eût  aucun  socinien  qui  n'y 
souscrix  îl  :  aussi  In  doctrine  de  l'au- 
teur fut-elle  taxée  de  sociuianisme. 
Il  se  défendit  de  cette  inculpation. 
Mais  Toland  ,  ayant  emprunte  des 
écrits  de  Locke,  quelques  argiments 
à  l'appui  de  son  Chrisdanisme  sans 
mystère ,  l'évêque  de  Worcestcr ,  en 
le  combattant ,  attaqua  en  même 
temps  les  principes  de  Locke  favo- 
rables à  ce  système;  ce  qui  occision- 
na  entre  eux  une  nouvelle  contro- 
verse où  les  réponses  et  les  répliques 
de  part  et  d'autre, montrèrent  auîant 
de  vivacité  qae  de  science  dans  le 
pre'lat ,  et  beaucoup  de  inodéialian 
et  de  raison  chez  le  philosophe.  Mai- 
gre la  faiblesse  de  sa  poitrine,  outre 
ses  occupations  littéraires,  Locke, 
nommé  à  une  place  de  commissaire 
du  cominerce  et  des  colonies,  avec 
mille  livres  sterling  d'appointements, 
en  remplit  durant  six  années  les 
fonctions ,  qui  l'oljligeaient  fréquem- 
ment à  des  séjours  a  Londres  ;  et  il 
publia  même  de  nouvelles  Considé- 
rations sur  la  monnaie  et  le  com- 
merce. Mais  les  progrès  de  Tasthme 
dont  il  était  affecté,  le  forcèrent  de 
donner  la  démission  de  sa  place,  en 
l 'y  oo.  Le  roi  voulut  la  lui  conserver, 
en  le  déchargeant  de  tout  travail ,  et 
en  le  dispensant  d'assister  au  con- 


LOG 

seil.  Locke  représenta  que  sa  cons- 
cience ne  lui  permettait  pas  de  tou- 
cher le  traitement  d'un  emploi  qu'il 
ne  pouvait  remplir.  Sa  démission 
fut  acceptée  ;  et  il  ne  quitta  plus  la 
retraite  paisible  d'Oates.  En  conti- 
nuant de  se  distraire  dans  la  société 
de  madame  Masham  ,  il  s'appliqua 
surtout  a  l'étude  de  l'Ecrilure-Sainte. 
Sa  Paaphrase  des  Epitres  de  Saint- 
Paul  ,  qui  parut  aprv^s  sa  mort ,  en 
fut  le  fruit.  Eu  i-yoS  ,  les  attaques 
de  son  asthme  devenant  plus  fré- 
quentes et  plus  douloureuses  ,  et  se 
sentant  dépérir  par  degré ,  sans  que 
ses  facultés  en  fussent  altérées,  il  se 
prépara  par  des  actes  d'une  piété 
réfléchie,  à  sa  fin  prochaine,  dont 
il  s'entretenait  avec  calme.  En  se  li- 
vrant à  ses  sentiments  religieux  ,  il 
cherchait  à  les  répandre  dans  le 
cœur  de  ses  amis  ;  et  en  leur  faisant 
SCS  aveux  sincères,  il  leur  donnait 
encore  une  leçon  de  philosophie.  Il 
écrivit  d  uis  ces  derniers  moments  à 
son  ami  Collins ,  «  qu'il  ne  trouvait 
»  de  consolation  que  dans  le  bien 
»  qu'il  avait  fait;  que  deux  choses 
»  en  ce  monde  pouvaient  seules  don- 
»  ner  une  véritable  satisfaction  ;  le 
»  témoignage  d'une  bonne  conscicn- 
»  ce,  et  l'espoir  d'une  autre  vie.  » 
N'ayant  pu  dans  ses  souffrances! 
trouver  de  repos  sur  son  lit,  il  se] 
fit  porter  dans  son  cabinet  ;  et  ce  fut 
sur  son  fauteuil,  après  avoir  goûte' 
un  peu  de  sommeil  ,  et  prêté  une 
oreille  attentive  à  la  lecture  des 
Psaumes,  par  M*"®.  Masham,  qu'il 
expira,  le  '28  octobre  1704,  dans 
sa  soixante-treizième  année.  Nous 
allons  récapituler  la  liste  de  ses  ouvra- 
ges :  I.  Adversariown  methodus  : 
méthode  nouvelle  pour  dresser  des 
recueils ,  ou  ce  que  les  anglais  appel- 
lent Common-place  Book;  inséré  en 
juillet  1686,  dans  le  tome  11  (  pag. 


LOG 

Si5-54o  )  <1<^  Ia  Bibliothèque  um- 
•selle  et  Idstorique  de  J.  Lecltrc. 
lA't  opuscule,  qui  n'est ,  au  fond , 
que  la  manière  de  tracer  un  rc- 
jicrtoire  alphabétique ,  a  été  repro- 
duit ,  abrégé  et  perfectionne  par 
1  11.  P.  Berlin,  à  la  suilc  de  son  »Svi- 
ine  de  sténographie  ,  sous  le  titre 
lio  Tables  d'aihcrsaria  ou  recueil 
littéraire.  II.  Epistola  de  Toleran- 
tid,  etc.,  Gouda,  1G89,  in-ia;  sui- 
vie de  deux  autres  Lettres ,  i(>90  , 
}6()i.  III.  Essai  concernant  l'en- 
tendement humain,  Londres,  1690, 
fol.  (en  angl.)  Outre  l'abrcgé, public 
par  Lcclerc  en  1688,  Wyuwe, depuis 
f  vèqiic  de  Saint-Asaph ,  en  fit  un  au- 
tre  abrégée  en  anglais,  qui  fut  trad. 
Il  français  par  Bossel ,  Londres , 
i  -'io.  Le  grand  ouvrage  a  été  trad. 
en  français  par  Coste  (  in-4**. ,  1 700, 
1739,  174'^;  et  4  vol.  in-ia  ),  et  en 
latin  par  Burridg,  1701.  IV.  Traité 
sur  le  gouvernement  civil,  Londres, 
1(390,  in-S**.,  souvent  réimprimé,  et 
traduit  en  français.  V.  Some  consi- 
dérations,  etc.,  sur  les  suites  de  la 
diminution  de  l'intérêt  et  de  l'aug- 
mentation de  la  valeur  des  monnaies, 
ibid.,  i6()i,  in-8«.  ;  traduit  en  ita- 
lien ,  Florence,  1751 ,  in-4**.  Locke 
donna  encore  deux  autres  brochures 
sur  le  même  sujet.  VI.  Observations 
météorologiques  (  faites  à  Oxford, 
en  1666  et  1667  );  dans  Vl/istoire 
de  l'air,  de  R.  Boyle,  Londres, 
1692.  VII.  Pensées  sur  l'éducation 
des  enfants,  ibid.,  1693,  in-8*». 
Dans  Tédition  de  Londres  (  Paris, 
Servicrcs  ) ,  1783,  2  voL  in-ii  ,  de 
la  traduction  française,  parCoste,  on 
a  ajouté  les  méthodes obser\é^5  pour 
l'élucalion'  des  enfants  de  France. 
VIII.  Le  Christianisme  raisonna- 
ble, 1695  ,  in-8<».;  la  première  édi- 
tion de  la  traduction  française, 
donnée  par  Coste ,  la  même  année. 


LOC 


r,i5 


â  pour  lilre  ;  Qtte  la  rrlirinn  rh*^ 
titnne  est   très  -  raii>  lU 

quelle  est  représentée  «....  ^  .  i.inf- 
ture-Sainte.  IX.  Paraphrase  et  nth 
tes  sur  les  Epitres  de  Sa^nt-Pûtd 
aux  Galates,  aux  Hvmains  et  aux 
Ephésiens  ,  Londres,  1701 ,  publié 
par  P.  Kingct  AnI.  Coiiuis,  »r»fié- 
culeurs  testamentaires.  X.  Œuvres 
posthumes  f  Londres,  1706,  in-fi»,, 
contenant,  t°.  Direction  de  l mteit' 
dctnent  ;  c'est  prnbnHrmrnt  la  Ma- 
nière de  se  f  rf. 
che  de  la  vci  1  ^1  on- 
çait  (  Bibl,  chois. ,  tome  \t  )  coiume 
prête  à  voir  le  jour;  —  'i®.  Examen 
de  l'opinion  du  P.  ^falebranche ,  que 
nous  voyons  tout  en  Dieu  ;  —  3».  Dis- 
cours sur  les  miracles;  —  4*.  Frag- 
ment de  la  4*'  /'^"'^  sitr  la  toE^ 
rance  ;  —  5<».  Fie  tt^ini,  comte  da 
Shaftesbuy;  —  6*.  Àdversariomm 
me'thodus  (  n».  1 ,  ci-desM».  )  f<«clcre 
traduisit  en  français  1«  '  nde 
partie  de  ces  Œuvres  |  ^ ,  j 
joignit  V Eloge  de  Locke,  tiu'il  avait 
donné  dans  le  tome  vi  ne  sa  Bi' 
blioth,  choisie,  et  publia  le  tout  sous 
le  titre  à' OEuvres  diverses  de  /. 
Locke,  Rolerdam,  1710,  in- 11.  J. 
Fr.  Bernard  en  fit  paraître  une  édi- 
tion plus  ample,  Amsterdam,  173», 
1  vol.  in-i:i.  XI.  Uttres  familières, 
anglaises  et  latines,  Londres,  I7f»8, 
in-8«.  XII.  m  tri-  :'-  '  r  naviga- 
tion ,  trad .  en  fr.«  1  > ,  1 7  aa , 
îivoLin-ia(i).  Xlii.  nemenUdê 


(0  1- 


î 

om  Jomtf 
trau«*   • 

CI- 
•  '■ 
d' 

c  . 

r: -■ 


6i6 


LOÎ 


physique^  etc. ,  liaduils  en  français , 
ibid. ,  1757,  in- 12.  (  /^.  Gastillon, 
VII ,  342.  )  XIV.  Les  OEuvres  de 
Locke  ont  été'  recueillies  en  3  vol. 
in-foJ.  ,  Londres,  1714?  ^7*^^  ? 
1762;  en  4  vol.in-4**. ,  1768,  1777, 
1784,  par  les  soins  du  doct.  Law , 
ëvêque  de  Garlile  ,  qui  y  a  joint  une 
vie  de  l'auteur  j  en  10  vol.  in-8". , 
3  80 1 , 1  o^.  ëdil.,  c  est  la  plus  estimée. 
On  a  mal  à  propos  attribué  à  Locke 
un  traite  de  V Amour  do  Dioii ,  en 
anglais,  trad.  en  français,  par  Gostej 
il   est  de  Mn^^.  Masham.  (  Fojez 

CUDWORTII.  )  G CE. 

LOGKMAN.  F.  Lokman. 

LOGQUES  (  Nicolas  de  ),  clii- 
misledu  xyii»^.  siècle, publia  les  Bu- 
diments  de  la  Philosophie  natu- 
relle ,  Paris,  i6G5  ,  in-80. ,  ouvrage 
extrêmement  rare ,  où  l'on  trouve 
d'assez  bonnes  observations  à  côte' 
des  rêveries  de  l'alchimie.  Après  la 
mort  de  l'auteur,  on  fit  circuler  un 
ouvrage  qui  n'a  jamais  été  imprime, 
mais  dont  il  existe  quelques  co- 
pies dans  les  bibliothèques  des 
curieux.  G'est  une  sidte  de  travaux 
et  d'expériences  ,  la  plupart  sur  le 
zinc  ,  et  presque  tous  dans  les 
viiés  de  l'alchimie.  Il  y  a  cepen- 
dant un  assez  grand  nombre  de  faits 
positifs ,  aussi  curieux  qu'intéres- 
sants. Get  ouvrage  passe  pour  ap- 
partenir en  commun  à  Nicolas  de 
Locques  ,  qui  possédait  alors  la 
charge  de  médecin  spagirique  du  roi, 
et  à  Lebreton  ,  médecin  de  la  faculté 
de  Paris.  '         T— d. 

LOGUSTE,  fameuse  empoison- 
somleuse  ,  vivait  sous- le  règne  de 


sente  ce  te  collection  de  Voyae;e!i  à  ^université 
t!'0\ford.  Nous  voyons  dans  Nicliols  {Bo2i'jrer'sa- 
rerdotes,!.  i5i)  que  le  libraire  Awusliam  Cliiir- 
cliiil  ,  éditeur  de  cette  collection,  ét.ïit  ami  sie 
Locke  ,  dont  il  avait  fait  imprimerie»  premiers 
cents  théologique»;  et  que  ce  plnlosoplie  lui 
composa  la  préface  de  aa  colicclion. 


LOD 

Néron.  Elle  avait  d'abord  été  coii- 
damnée  pour  des  empoisonnements  : 
mais  ou  la  garda  coiiime  un  instru- 
ment dont  on  pourrait  avoir  besoiny 
et  ce  fut  à  elle  qu'Agrippine  eut  re- 
cours pour  faire  mourir  Giaude, 
afin  d'assurer  le  trône  à  Néron.  Quel- 
ques années  après  ,  Néron ,  devenu 
empereur  ,  conçut  de  la  jalousie 
contre  Britannicus,  fils  de  Claude, 
qui  était  eu  âge  de  régner.  Gomme 
il  n'osait  pas  le  faire  tuer  publique- 
ment, il  donna  ordre  à  Polliun  Julius, 
tribun  d'une  cohorte  prétorienne, 
de  le  faire  périr  par  le  poison.  Gelui- 
ci,  qui  avait  sous  sa  garde  celle  hor- 
rible femme,  la  chargea  de  préparer 
le  poison  qui  devait  enlever  à  l'empire 
Britannicus,  jeune  prince  de  si  grande 
espérance.  Le  breuvage  mortel  n'a- 
gissant point  assez  promptement  au 
gié  de  Néron  ,  il  menaça  le  tribun  , 
frappa  Locuste ,  et  ordonna  même 
son  supplice,  lui  reprochant  de  n'a- 
voir donné  qu'un  remède  à  Britan- 
nicus. Locuste  s'excusa  ,  en  disant 
qu'elle  avait  affaibli  la  dose  pour 
éviter  l'éclat.  Eh  I  penses  -  tu  ,  lui 
répliqua  Néron  ,  que  je  craigne  la  loi 
contre  les  empoisonnements  ?  Il  la 
força  de  répéter  son  opération  de- 
vant lui  dans  son  appartement.  Le 
breuvage  fut  ainsi  rendu  plus  actif; 
et  le  malheureux  prince  l'eut  à  peine 
avalé ,  qu'il  tomba  mort.  Néron,  vou- 
lant reconnaître  les  services  du  même 
genre  que  Locuste  lui  avait  rendus 
en  plusieurs  circonstances  la  combla 
de  bienfaits  ,  et  lui  donna  des  élèves 
afin  qu'elle  les  instruisît  dans  son 
horrible  métier.  Z. 

LODOLÏ  (Le  Père  Gharles  Gonti 
DE  )  ,  de  l'ordre  de  S  lint-François, 
né  à  Venise,  en  i(>90  ,  parcourut 
avec  des  succès  brillants  le  cours 
d'études  en  usage  dans  son  ordre  , 
d'abord    comme  disciple  ,  ensuite 


r.oT) 

unmc  maîlrp ,  cl  rUiMil  vlans  sa  ville 
aal<;uneccule  nalririeniu'd'oii  sont 
rlis'lessujclsd  I  pULSj»raiul  raciilc. 
i  se  distin;;ua  aussi  dans  Tcniplui 
roviscur ,  en  coiuposant,  pour 
iisapjedcs  réformateurs ,  tr-iis  »aU- 
^;ues  raisonnes  des  livres  suspects 
;  de  leurs   difTercnlcs  Cilitiuns  et 
1  r.iduclions.  Ses  plans  juJicien\  ser- 
\ lient  beaucoup  à  faire  fleurir  les 
.|>rimcrics  de  Venise;  mais   c'est 
itout   par    son    amour   sinj;ulier 
•  iir  les  beaux-arts  qu'il  s  est  rendu 
lèbre.  11  avait  fait  une  collection 
i  rieuse  des  divers  morceaux  d'ar- 
litecture,  de  peinture  ,  sculpture  et 
ivuie ,  dont  la  suite  mettait  sous 
-.  yeux  les  progrès  successifs  de 
iicun  de  ces  arts,  depuis  l'époque 
leur  renaissance  jusqu'à  celle  des 
raudes  écoles.  Un  accident  a  fait 
jjeïir  tous  ces  manuscrits  et  tous  ces 
dessins.  Les  principes  de  Lodoli  ont 
cte  développés  dans  un  ouvrage  ita- 
lien, intitulé  :  Eléments  de  Varchi- 
lecture lodjlienne ^Qlc.  Rome,  178G, 
in-4'^.ll  attaque  tous  les  édifices  an- 
ciens et  modernes,  et  dit  de  ceux  des 
Grecs  et  des  Romains,  d'après  les 
monuments  qui  nous  en  restent,  que, 
soit  pour  la  solidité  et  la  commodité, 
soit  pour  la  proportion  des  ordres  , 
en  y  trouve  trop  de  caprices  et  d'ir- 
régularités; d'où  il  conclut  que  l'é- 
tude de  ces  monuments  ne  peut  pres- 
que rien  nous  donner  de  certain  con- 
cernant les  vrais  principes  et  les  fon- 
dements de   l'art.    11  regardait  ,  en 
conséquence  ,  la  tliéorie  de  l'archi- 
tecture comme  ayant  été  jusqu'à  pré- 
sent incertaine  et  sans  consistance, 
et  l'art  comme  étant  encore  dans 
son  enfance.  Ces  asseyions  hardies 
furent   vivement   réfutées  dans   un 
écrit  publié  à  Bissano ,  en  1 787 ,  sous 
ce  titre  :  Apologhi  imniOfineUi  tfi- 
temporancamente ,  etc.      T — d. 


1,0D 

LODOVÎCÎ  (DoMiwiQi'r.; .  j  .  .r 
latin,  né  a  Napics  en  i&jfi,  fil  se» 
études  au  cullrge  des  jc»ui'r^  àe  cdle 
ville,  et .  après  les  avoir  Irrmioëet , 
fut  •  '  I  uii  ses  maîtres ,  chargé 

de  i  iient    l\t^    \\r\\r*..\rUf^ 

et  enNUih:  iiumnié  |  i 

<piilta  df  rp{  rm; 
tn- 

nid,; 

cices  de  pietc  et  la  < 
sic.  Il  mourut  eu  i  ^  |  ' 
de  Loduvici  ont  cte  publiées  par  se* 
confrères,  Naples,  1746»  î»  Tol. 
in-^**. ,  sous  ce  titre  :  D.  Ludwiei 
soc.  Jesu  carmina  et  inscriptiones. 
On  y  trouve  des  odes,  des  épitres, 
et  un  grand  nombre  de  fietites  piè- 
ces sur  des  sujets  pieux.  Ce  pôète 
ne  manque  ni  de  facilite,  ni  d  iiiu> 
gination;et  l'on  voit  aisément  qu*il 
s'était  formé  par  l'étude  des  bon* 
modèles  de  l'antiquité  grecque  cl  ro- 
maine. W-— ». 

LODOVISI  ou  LuDovisi  (Louis), 
cardinal,  naquit  à  Bologne  en  157S. 
Après  avoir  terminé  ses  études  ,  il 
embrassa  l'état  ecclésiastique ,  cl  alla 
joindre  à  Rdme,  son  oncle,  le  car- 
dinal Alexandre  ,  qui  l'aimait  uni* 
quement.  Ce  prélat  fut  élu  pajie  ,  au 
commencement  de  l'amiec  liyii  , 
sous  le  nom  de  Grégoire  XV  ;  il  ré- 
signa aussitôt  à  son  neveu  Tarrhe 
vèclié  de  Bologne ,  et  le  créa  cardi- 
nal ,  quelques  jours  après.  I^uvili 
eut  la  plu*  grand**  i  «- 

tes  les  décidions  cpu  n- 

dant  le  court  puntiiii.*l  di  m>;j     .    l- . 

il  se  retira  ensuite  dans  son  li -- 

où  il  passa  les  dernière*  anat^.\  d*» 
sa  vie  ,  parlageanl  ses  loi>irs  entre 
ses  devoirs  et  l'élude  :  il  av.iil  dr* 
revenus  très  -  considérables  ;  m  jus  d 
en  consacrait  la  plus  grande  |varlie 
au  soulagement  des  p.iuvrrM  il  f  <  îk!  « 
en  i6'i8,  et  dou  nchcmeui 


6i8 


LOD 


Icge  des  Irlandais  (i)  à  Rome.  Il  fit 
aussi  construire  ,  dans  cette  ville,  la 
première  église  dëdie'e  à  St.-Ignace , 
que  son  oncle  avait  canonisé  •  mais 
il  ne  la  vit  pas  terminer:  il  mourut 
à  Bologne,  le  i8  novembre  i63'i  , 
âgé  seulement  de  trente-sept  ans.  Son 
corps  fut  transporté  dans  l'église  de 
Saint-Ignace,  oii  les  jésuites  firent 
élever  un  tombeau  à  leur  bienfaiteur. 
Ce  prélat  a  publié  en  italien  des  Ré~ 
Jlexions  spirituelles  ;  —  des  Instruc- 
tions, adressées  aux  pasteurs  de  son 
diocèse  j  —  des  Sermons ^  et  un  Pa- 
négyrique de  saint  Ignace,  etc.  Il  a 
laissé,  manuscrits,  plusieurs  volumes 
de  Lettres  sur  des  matières  de  poli- 
tique. Michel  Giustiniani  en  a  inséré 
quelques-unes  dans  les  Lettere  me- 
morabili.  (  Voy.  Giustiniani,  tom. 
XVIÏ,p.  484.)  W— s. 

LOEFLING  (  Pierre  ),  botaniste 
du  roi  d'Espagne,  né  à  ToUfors- 
bruch,  le  3i  janvier  17*29,  fut  un 
des  élèves  de  Linné.  Ce  grand  homme, 
qui  en  faisait  beaucoup  de  cas  ,  di- 
rigea ses  études  avec  la  sollicitude 
d'un  père ,  et  le  logea  même  dans  sa 
maison  ,  pendant  plusieurs  années. 
En  1749?  le  jeune  botaniste  soutint 
une  thèse  de  Gemmis  arborum. 
Peu  de  temps  après ,  le  marquis  de 
Grimaldi,  ambassadeur  d'Espagne 
à  Stockholm  ,  fut  chargé  de  deman- 
der à  Linné  un  botaniste,  pour  être 
engagé  au  service  du  roi  d'Espagne. 
Le  choix  du  professeur  tomba  sur 
Lœfling,  qu'il  regardait  comme  le 
plus  propre  à  remplir  1  intention  des 
Espagnols  ,  et  à  tirer  parti  de  cette 
circonstance  pour  les  progrès  de  la 
botanique.  Lœfling  partit  de  Stock- 
holm, en  1701 ,  et  s'étant  rendu  en 
Portugal ,  il  eut  occasion  de  voir  ce 

(1)  Et  non  pas  d?8  Espagnols,  comme  oh  1« 
dit  dan»  le  JDieiio /inaire  uiiiptisel. 


LOE 

pays  avant  d'arriver  à  Madrid,  et  d'y 
observer  des  plantes  rares,  dont  il  en- 
voya la  description  à  Linné.  Il  trouva 
en  Espagne  plusieurs  botanistes  qui 
l'associèrent  à  leurs  travaux.  Après 
avoir  étudié  la  nature  pendant  deux 
années,  et  observé  1400  plantes 
aux  environs  de  Madrid  ,  il  fut 
nommé  pour  accompagner  dans  la 
nouvelle  Andalousie,  les  savants  que 
le  roi  envoyait  en  Amérique.  Charge 
de  toute  la  partie  de  l'histoire  natu- 
relle,il  eut  pour  adjoints  deux  jeunes 
médecins  espagnols.  L'expédition 
partit  de  Cadix  au  mois  de  février 
1754  ,  et  arriva  le  1 1  avril.  Le  na- 
turaliste suédois  parcourut  aussi- 
tôt les  districts  de  Cumana  et  de  la 
nouvelle  Barcelone ,  et  se  rendit  à 
San-Thomé  de  Guyana.  Il  avait  her- 
borisé pendant  trois  mois  aux  envi- 
rons de  cette  ville  ,  lors  qu'il  fut 
atteint  d'une  maladie  assez  grave.  Il 
se  remit  cependant ,  et  reprit  ses 
voyages  ;  mais  une  nouvelle  attaque 
lui  survint,  et  il  mourut  dans  la 
mission  de  Murerecuri ,  le  'l'i  février 
1756,  à  l'âge  de  27  ans.  La  mort  de 
cet  homme  savant  et  laborieux  fut 
une  très-grande  perte  pour  l'histoire 
naturelle  en  général ,  et  pour  la  bota- 
nique en  particulier.  Linné  en  fut 
vivement  affecté ,  et  il  exprima  ses 
regrets  avec  cette  franchise  et  celle  1 
candeur  qui  caractérisaient  son  ame. 
Rendant  justice  ta  son  élève  ,  il  dit 
que  l'occasion  ne  se  retrouverait 
peut-être  jamais  de  voir  la  science 
enrichie  d'autant  de  découvertes 
qu'eût  pu  en  faire  ce  génie  extraor- 
dinaire ,  conduit  sur  un  des  plus 
grands  théâtres  de  la  nature,  et  jouis- 
sant de  tous  les  secours  nécessaires. 
Lœfling  lui  avait  envoyé  d'Espagne 
la  description  de  plusieurs  plantes 
et  autres  productions  de  ce  pays. 
Les  manuscrits  qu'on  trouva   à  sa 


LOÊ 

>rt ,  furent  conserves  par  les  deux 
idjoints  que  lui  avait  donnes  le  gou- 
vernement espagnol.  On  a  de  lui  : 
L  Geinrnœ  arboium,  Upsal,  1749, 
iil-4*'.  ;  inséré  par  Linné  dans  ses 
AmœnitateSy  tora.  *i,  et  par  Gdi- 
bert,  dans  le  tome  i  du  \yslema 
plant  arum ,  de  Linuc.  11.  Descrip- 
tion de  deux  coraux  (  Acad.  de 
Slockliolm ,  lom.  xiii,  i^^'i  ).  111. 
Descriptiù  monoculi  cauddfoUaccd 
(  Acla  acad. ,  U  nsal ,  i  •;44-5o ,  pag. 
^^  ).  IV.  Itcr  hispaiiicum ,  Slork- 
ioîni,  17.58,  in-8**. ,  publie  eu  sué- 
dois par  Linné;  traduit  en  allemand, 
par  Al.  Bern.  Rolpin, Berlin,  1706, 
1776,  in-S*^.,  fig.;  enanglais,  par  J. 
V.  Forster,  1771 ,  in-S».  Linné  a 
ne  le  nom  de  LœjUngia  à  une 
j  îiitc  plante,  de  la  familie  des  Ca- 
'  ophyilées,  dont  une  espce  croît 
Espagne  et  l'autre  aux  Indes, 

C — AU. 

Ï.OESCHER    (  Valentin  -  Er- 
T  ) ,  philologue  saxon ,  né  a  Son- 
shauscn,  en  1G72  ,  a  mérité  une 
e  parmi  les  érudits  précoces.  A- 
^  avoir  terminé  ses  études  de  la 
îiièrc  la  plus  brillante,  il  fut  promu 
>aint  ministère  et  chargé  de  i'en- 
:nement  de  la  théologie  à  l'acadé- 
dc  Willemberg.  Il  s'acquitta  de 
emploi  avec  une  rare  distinction, 
dant   plusieurs   années  ;  mais  il 
:  démit  alin  de  pouvoir  se  livrer 
^  librement  à  l'étude,  et  à  la  ré- 
ion  des  ouvrages  qu'il  se  propo- 
de  publier.  Nommé  pasteur  de 
rbourg  et  de  Delitsch  ,   il   fui 
Il  élevé  à  la  place  de  surintendant 
églises  de  la  Misnic,et  mourut  à 
>ae,  le  8  février  i74î)'  Locschcr 
it   de   Tesprit,  du    jugement  et 
iicoup  d'érudition.  Il  commença, 
1 701 ,  à  Wiltemberg,  un  journal 
littérature  théologiqtie ,  en  alle- 
ad,  sur  un  plan  ircs-éleudu.  Cette 


feuille  publivc  tous  U%  t      •  . 

bord,  sous    le  tifrr  dr   ^ 

ciennes  et  nou^  ,, 

celui  de  Noti«  (V     1  ^       ,_    .j, 

chultU^e  Aachnchit  )  ,  obtint  tm 
grand  sucrés;  m«iis  Tautetir  a>ant 
eu  quelques  dillicullrs  avec  son  im- 
primeur, il  lit  paraître  »on  journal 
l'année  suivante,  à  I^iprig  ,  ri  maÛ 
crc  ses  nombreuses  ocmp lions  , 
n  le  continua  jus<ju'en  1 710  ,  qu'il 
en  abandonna  la  airectinn  a  Mi*  («l- 
Henri  Reinhard.  G'Iui (i  elaiti  un  it 
d'apoplexie,  en  i^3a.  Locs<h(r  re- 
prit alors  la  direction  du  journal  sous 
le  titre  de  Continuation; /o/Y^r^/zM 
Sammlung  ) ,  el  uc  la  quitta  qu'cB 
1746,  qu'il  la  céda  à  Jcau-Kinrst 
Kappius,  professeur  déloqtipprc  à 
Leipzig.  Parmi  les  ouvrages  de  hors- 
cher ,  on  se  contentera  d'indiquer  : 
I.  Exercitatiodenumnrum  vetcrum 
in  ikeologid  explicalione ,  S,  Scrip- 
turœ  et  eccle.ioituœ  antiquitaiis 
usa  ,  lena  ,  iOc)4 ,  in-4'*«  ï'-  J^is>cr' 
tatio  de  nwnariœ  lei  u  uinîù^torid 
eccleAasticd  ,  Wilteiubcrg.  iC^j't  , 
iu-4**.  III.  Disseriado  rei  tmm  viœ 
mils  in  exvîicatiotu:  sacrœ  antiqui' 
tatiSj  ibid.  i(xp  ,  in  -  4**-  IV.  /?#- 
blictheca  purpurnta^  seu  de  Se  ipiis 
principum  pro'serlim  Gerviani>rum 
Dissertatio /\\i\à.  iG<)8,  in  4".  V. 
Aicana  lilte  utia  iivc  triginta  li- 
brorum  edendorum  speàmen  ,  ibid. 
1700  ,  in-4'*.  ;  c'est  le  plan  et  l'an- 
uoQCcdes  nomLrrtix  ouvrages  qu'il 
se  proposait  de  publi-rr.  VI.  la  theo- 
logie  m  >  stiqtie  orifuJise  (  proliai- 
tante),  Francfort  et  î  rlj  i , 

in  8".  (  en  allematul  )  :  il  \  \ 

vraie  et  de  la  fausse  (\c\  ■  r 

combat  les  arguiueuls  iU>  li--  I  »- 
gicus  de  l'ep  isc  romaine  ,  foi.lr ;  U 
mysticité.  VII.  Jon.sit^e  vrifinuim 
Grœciœ  resl aurai antm  Idri  duo  , 
Leiprig,  1705  ,  iu-8».:  I^vcsclicr 


620 


LOE 


veut  prouver,  dans  cet  ouvrage,  que 
les  Grecs  descendent  de  Javan  ,  l'un 
des  tils  de  Japbelj  qu'ils  ont  d'abord 
été  nommes  Ion  ou  Ioniens  ,  et  ont 
eu  leur  premier  établissement  dans 
l'Asie  ;  enfin ,  qu'ils  étaient  déjà  très- 
puissants  lorsqu'ils  sont  venus  ha- 
biter la  partie  orientale  de  l'Europe 
que  l'on  regarde  comme  leur  ber- 
ceau. VIII.  De  caiisis  linguœ  ehreœ 
lib.i  t  es  y  ibid.  i7o() ,  in-4*^.  ,  ou- 
vrage estimé  et  plein  d'érudition  ; 
mais  on  y  trouve  bien  des  opinions 
liasardées.  IX.  Prœnoliones  theo- 
logicce  ,  Wittemberg  ,  1708  ,  in-4^. 

X.  Initia  academica  quibus  prO" 
gram.na  et  oralio  inauguralis ,  etc. 
continentur  y   ibid.    1708,  in  -  8°. 

XI.  Recueil  Aq  p  èces  intéressantes 
pour  servir  à  l'histoire  de  la  réforme 
évangélique  (  en  allemand  ),*Leipzig , 
1 7'2o,  tom.  I®".  XII.  Stromateus  seu 
Dissertaliones  sacri  et  litte-arii  ar- 
^unienti,  Wittemberg,  i7'24,in-4^. 
On  y  trouve  des  remarques  sur  les 
premières  productions  de  l'impri- 
merie, et  un  supplément  aux  Jtn- 
ndes  de  Mailtaire.  On  a  encore  de 
Loescher  plusieurs  Disseitations phi- 
losophiques dans  les  Miscellanea 
Groningana ,  et  dans  d'autres  re- 
cueils. Parmi  ses  manuscrits  ,  on 
cite  :  De  modo  dignoscendi  genuina 
"veteris  œvi  nwiiismata  à  suppo- 
sititiiSy  in-4*^.; — Historia  triginta , 
quos  vocant,  et  cœterorum  Romani 
orhis  tyrannorum  ex  nwnis  prœser- 
iim  et  marmovibus  illustrât  a, in- ^^.-^ 
cet  ouvrage  a  passé  de  la  bibliothè- 
que du  comte  de  Briihl  dans  la  bi- 
bliothèque électorale  de  Dresde.  Le 
Catalogue  des  médailles  du  cabinet 
de  Loescher  a  été  imprimé  à  Dresde, 
1752,  in  -  8«.  G.  Willi.  Goetten  a 
publié  sa  Vie  dans  la  Qelehrte  Eu- 
ropa  ,  part.  II.  —  Martin-Gotthelf 
Loescher,  frère  du  précédent  ,  pro- 


LOE 

fesseur  de  médecine  et  d'histoire  n* 
turelle  ,  se  fit  conmnlre  par  une  asseii 
grand  nombredcdissertationslalines 
peu  consultées  aujourd'hui  ,  et  mou 
rut  à  Wittemberg,  en  1 735.  —  Leui 
père ,  Gaspar  Loescher  ,  né  en  1 636 
à  Werda  dans  le  Vogtland  ,  fii 
surintendant  à  Zwickau  ,  puis  pro- 
fesseur de  théologie  à  Wittemberg 
et  eut  de  vifs  démêlés  avec  les  pié 
tistes  et  autres  novateurs:  il  mourii> 
en  1718,  après  avoir  publié  ut 
grand  nombre  d'écrits  polémiques 
presque  tous  en  latin,  et  dont  pei 
lui  ont  survécu  :  son  fils  Valentin- 
Ernest  en  a  donné  la  liste  dans  soi 
Conspectus  vit  ce  literatce  et  labo- 
rum  literariorum  D,  Casparis  Loes- 
chéri.  W — s. 

LOESEL  (  Jean  ) ,  médecin  el 
botaniste  ,  né  en  1607  ,  à  Brande- 
bourg, fit  ses  études  à  Wittemberg  el 
à  Kœnigsberg,  visita  la  France,  l'An- 
gleterre et  la  Hollande  ,  se  fit  rece- 
voir docteur  en  médecine  à  Kœnigs 
berg ,  où  il  fut  nommé  professeui 
d'anatomie  et  de  botanique  ,  et  y 
mourut  en  i656.  Il  mit  beaucoup  de 
soin  à  recueillir  les  plantes  indigènes 
de  la  Prusse ,  et  il  avait  le  projet  de 
publier  un  ouvrage  sur  ce  sujet.  Mais 
sa  mauvaise  santé  rempêcha  de  l'exé- 
cuter ;  et  il  en  chargea  son  fils,  qui 
fit  paraître  Catalogus  plautaruni  in 
Borussid  nascentium ,  Kœnigsberg  , 
1654,  iii-4**-En  1703,1.  Gottsched, 
qui  avait  acquis  les  manuscrits  et  les 
dessins  de  Loesel  père  ,  les  publia 
sous  le  titre  de  Flora  Frussica,  seu 
plantes  in  regno  Prussice  sponte 
nascentes,  etc. ,  Kœnigsberg,  in-4**. 
Cette  Flore  ,  une  des  premières  qui 
aient  paru,  contient  761  plantes, 
dont  quelques-unes  étaient  alors  fort 
rares,  avec  les  noms  ou  la  phrase  de 
Casp.  Bauhin  ou  de  quelque  antre,  et 
une  synonymie  assez  complète  des 


Î.OE 

irs  anricns  cl  modernes  ,  dans 
."lie  on  est  surpris  de  ne  point 
ivcr  la  nomenclature  de  Tourne- 
,  connue  alors  depuis  dix  ans. 
lieur  y  a  joint  souvent  l'indica- 

dc  l'usage  de  la  plante  en  mc- 
iiic  ,  quelquefois  même  des  cita- 
is de  vers  latins  qui  y  ont  quelque 
port.  C'est  dans  cette  partie  sur- 

quc  Goltsched  a  le  plus  ajoutd 
i  availdc  Loesel.  Mais  les  dcscrip- 
,s  y  sont  rares  ,  et  les  pl.mtes  sont 
.;ees  dans  Tordre  alpliabcliquc. 
;  ouvrage,  d'une  faible  utilité'  pour 
(  icnce  ,  puisqu'il  n'y  a  point  de 
>sirication,  n'est  donc  guère  plus 

ce  qu'il  était  sous  sa  première 
me ,  un  catalogue  qu'on  peut  con- 
ter pour  la  synonymie  et  les  lo- 
itc's.  11  est  accompagne  de  85 
iuhcs  en  cuivre,  d'une  exécution 
•7,  remarquable  pour  l'époque. 
Iwiga  publie  un  supplément  à  la 
>ra  Pmssica.  (  Voy.  Helwig.  ) 
:iie  a  donne'  le  nom  de  Loeselia 
ne  plante  placée  entre  les  Lise- 
is  et  les  Polemoines.  D — u. 
LOEWENDAHL.    Vojez   Lo- 

LOEWENHIELM  (  Gharles- 
sTAVE  comte  DE  ) ,  sénateur  de 
I  de, fut  chef  du  parÉdes  bonnets, 
, lit  la   révolution   de   ï77'^.  Son 
ili  ayant  triomphé  à  la  dièle  de 
-  ' )  ),  il  fut  placéà  la  tête  des  afl'nres 
res,  et   acquit  une   grande 
c  dans  le  sénat.  Parvenu  au 
liât    dont   il   jouissait,    par    ses 
iinissauces  et  ses  talents  ,  il  eut 
s   un  goût  décidé   pour   les 
>  et  les  letlrcs.   L'académie 
des  sciences  de  Stockholm  le  comj>- 
tait  parmi  ses  membres  les  plus  zé- 
lés ;  et  les  recueils  de  cette  sociéfé 
contiennent  pliLsieurs  discours  et  mé- 
moires de  cet  homme  d'é.al  éclairé. 
11  fut  aussi  associe  étranger  de  l'ins- 


l.n(;  (ht 

titut  de  G<rttingpn  ,  arec  leqnrl  il 
entretint  une  corr  •'•"'•■■' ■••"•  ...-  — 
liC  comte  de  I  ' 

en  17(58.  On  a  suu  i 
par  SchocnlM»rg ,  lu  • 
Stockholm  ,  et  qui  tut  u  1 

1773.  —  Le  fds  du  comte  • 
hielm    fut    employé  dans  ùi 
ambassades  :  ses  petite  fil»,  les  r<. 
Gustave  et  Charles,  sont  mim 
plénipotentitirr^df  SuMc,  Tuji .  •  . 
ris,raulr-  'W*^»     C— au. 

LOEVl  V.  yoxcz  Lr.u- 

WEWnOECR. 

LOEWENKLAU.  /Vn       . 

CLAVIUS.  ) 

LOGAN  (  Je AW  ) ,  litlératear  écos- 
sais ,  né  en  1748,  à  Soutra  ,  dans 
laprovince  de  Mid-Î  ''*••■"  '•••  «'-vë 
à  runiversitéd'Edini  ' 
à  lacarnèreecclésiasiij'M-;  n  imniuA 
de  bonne  heure  pour  la  poésie  un 
goiît  très-vif,  et  qui  se  fortifia  eiirort 
par  ses  liaisons  avec  Michel  Bruce , 
poète  écossais.  Après  la   mort  pré- 
maturée de  ce  dernier,  ses  ouvrages 
furent  publiés  en  1770,  par  I^gan, 
qui    fut   ensuite   précepteur   de  sir 
John  Sinclair  ,  prit  les  ordres  ,  sui- 
vant les  rites  écossais  ,  en  1773,  et 
se  rendît  bientôt  cé'èbrc  par  son  élo- 
quence. Des  leçons  sur  la  philoso- 
phie de  l'histoire,  ou'il  donna,  d« 
1779  a  1781  ,  à  Edimboun;,  ajou- 
tèrent à  sa  réputation.  Il  publia  ,  en 
17H1  ,  la  substance  de  celles  de  cei 
leçons  qui  avaient  l'histoire  anrteoiM 
pour  objet,  sous  le  litre  A* HUmmts 
de  la  piùlosophie  de  l'hiitniix,  vol. 
in-80.:  il  fil  imprii        "       léç  boh 
vante ,   une  de  sc^  sur  l«i 

moeurs  et  le  guuveruemcui  de  TAne, 
ainsi  qu'mi  volume  de  ses  poëtks  , 
qui  eut,  )>cu  de  temps  après,  une 
seconde  étiilion.  1^  suppression  , 
par  ordre  supérieur,  d'une  tragédie 
intitulée  :    Huimumede ,  qu'il  avili 


6.1'i 


LOG 


présentée  au  théâtre  ,  en  1783  ,  et 
qui  paraissait  offrir  quelques  allu- 
sions politiques ,  jointe  à  d'autres 
de'goûls  ,  le  plongèrent  dans  une 
profonde  mélancolie  ,  qui  influa  sur 
sa  conduite  d'une  manière  très-fà- 
cheuse  :  il  s'attira  la  haine  de  ses 
paroissiens  ,  et  se  vit  obligé  d'aban- 
donner sa  cure  ,  pour  leur  échapper. 
Cependant  celte  même  tragédie  fut 
jouée  avec  succès  à  Edimbourg.  Il 
se  rendit  alors  à  Londics,  où  il  tra- 
vailla à  un  journal,  et  mourut  le  28 
décembre  1788.  Ses  poésies  sont 
principalement  dans  le  genre  lyrique 
et  élégiaque.  On  y  trouve  de  la  force, 
de  l'élégance  et  de  la  simplicité.  L. 
LOGAU  (  Frédéric  ,  baron  de  ) , 
poêle  allemand ,  né  en  Silcsie  en 
1604,  passa  là  dernière  partie  de 
sa  vie  au  service  d'un  duc  de  Lig- 
nitz ,  et  mourut  dans  cette  ville  en 
i655.  On  ne  connaît  de  lui  que  des 
épigrammes  ,  dont  il  parut  un  pre- 
mier recueil  à  Breslau  ,  en  iG38, 
sous  le  nom  de  Salomon  de  Golaw. 
Cet  essai  ayant  été  bien  accueilli  , 
Logau  publia  également  à  Breslau  , 
en  1654  j  sous  le  même  nom  ,  une 
e'dilion  complète  ,  contenant  3.553 
épigrammes.  Il  paraît  qu'elle  eut 
peu  de  succès;  car  plus  tard  Morhof 
ne  connaissait  l'auteur  que  sous  le 
nom  de  Golan ,  et  Wernike  ne  con- 
naissait même  que  ses  épigrammes. 
Un  anonyme  les  fît  imprimer  de 
nouveau,  en  1702,  à  Francfort  et 
Leipzig,  sous  le  lilre  de  Poésies 
ressuscitées  de  Salomon  de  Golau. 
"Cette  édition ,  pleine  de  change- 
ments dictés  par  le  ]>lus  mauvais 
^oût ,  ne  fit  que  nuire  à  la  réputa- 
tion de  Logau.  Mais  Ramier  et  Les- 
sing  publièrent  les  épigrammes  de 
Logau  en  1 1  livres  ,  avec  des  re- 
marques,  etc. ,  Leipzig  ,  1759.  Ces 
éditeurs, voulant  montrer  Logau  sous 


LOG 

le  jour  le  plus  favorable ,  réduisirca 
à  1284   les  3553  épigrammes   d) 
deuxième    recueil.    Ramier    s'étai: 
chargé  de  faire  au  slyle  les  change 
ments  les  plus  nécessaires  ,  en  cote 
servant  la  couleur  de  l'original;  € 
Lessing  y  joignit  une  Fie  de  Logau 
et  une  espèce  de  glossaire  des  mot 
surannés.  Enfin,  Ramier  en  donm 
une  nouvelle   édition  ,    augmenté 
de  3  livres  ,   avec  des   remarques 
Leipzig,   1791.  II  conserva  la  vi 
de  Logau  par  Lessing;  mais  il  pens; 
que   le  glossaire  devait  faire  par 
tie  des  œuvres  de  ce  dernier.  Le 
épigrammes  de  Logau  ne  sont  pa 
toujours  ce  que  les  modernes  cora 
prennent  par  ce  mot ,  dans  un  sen. 
trop  restreint.  C'est  souvent,  commi 
dans  l'Anthologie  grecque  et  àa.m 
Martial ,  une  idée   morale  ou  un< 
image  poétique  ,    etc. ,  en  un  mot 
tout  autre  chosequ'un  trait  satirique 
Dans  ce  nombre  prodigieux  d'épi- 
grammes,  il  y  en  a  sans  doute  beau- 
COU])  de  médiocres,  pour  la  pensé» 
ou  l'expression ,  ou  même  de  répre'- 
heijsi:  les  sous  le  rapport  dos  mœurs 
mais  !a  plus  grande   partie  se  dis- 
tingue par  l'irouie,  le  pathétique  ei 
la  naiveté.  C'est  cette  grande  variété 
de  ton  qui  l'a/ait  comparer  par  Les 
sing  à  Martial ,  Catulle  et  Dionysiu 
Cal  on.  Des  critiques  postérieurs  ont 
modifié  cet  éloge  exagéré.   Si  Logai] 
a  souvent  la  concision  et  l'éucrcie  de 
Caton ,  la  finesse  et  le  mordant  de! 
Martial ,  il  est  loin  d'avoir  le  moel-j 
leux  de  Catulle  :  mais  il  gagne  beau-l 
coup   à   être    comparé  aux  auteurs! 
allemands  du  même  genre.     D — u.j 
LOGES  (  Marie  Bruine  au  ,  damei 
DES  ) ,  née  à  Sedan  ,  vers  i584  ■>  ^^^ 
élevée  dans  la  religion  calviniste.  Ses 
parents  la  marièrent,  en  1599  '  a^'^c 
Charles  de  Rechigncvois'n ,  seigneur 
des  Loges  ;  dont  le  père  avait  été 


I.OG 

'  iniMlin  du  duc d'Alcnçon,  cl  qui 
vint  ,  en  iGo3,  çcntilhunune  or- 
l'iiiùre  de  la  ( liainbre  du  roi.  M"*'. 
i!  vs  Lo^os  demeura  })cudaut  vingt-six 
s  a  Paris  et  à  la  cour  ,  et ,  durant 
ut  ce  temps,  fut  en  rapport  de  so- 
le avec   les  personnes  les    plus 
^tinguccs  par  leur  naissance  et  par 
ir  esprit.   Malherbe  ne  manquait 
s  de    lui   rendre  visite  de  deux 
irs  l'un.   Gaston,  duc  d'Anjou, 
Im  portait  une  estime  toute  parti- 
'  ulière ,  et  allait  souvent  chez  elle, 
paraît    que  madame  des  Loges  , 
iite  entiire  aux  intérêts  du  prince 
qui  l'honorait  de  son  amitié,  entra 
dans  ce  qu'on  appelait  alors  le  parti 
lies  mécontents ,  car  il  lui  fut  fait 
•l'fense  de  tenir  des  assemblées  chez 
le  :   prévoyant  sans  doute   qu'un 
l'iiis  long  séjour  à  Paris  ,  compro- 
mettrait sa  tranquillité  ,  elle  quitta 
Il   capitale,    en    1629.   Sa  maison 
jvait  été,  jusque-là,  une  sorte  d'aca- 
' -mie   ouverte    à  tous    les    beaux- 
f  ^prits;  et  un  manuscritdu  temps  (  i  ) 
nous   apprend  que   l'on  conservait 
dans  sa  famille  un  volume  qui  ren- 
rmail  un  grand  nombre  de  pièces 
sa  louange ,  à  la  tète  duquel  ou  li- 
ât ces  vers  de  Malherbe,  que  ce 
:and  poète  y  avait  écrits  lui-mcme: 

Co  lirre  e*C  comme  un  «acre  tempi* 
Où  chacun  doit  k  mon  ►•x«m|.l« 
Otirir  quelque  cl'Oio  d»  pril; 
C«tit:  odranil»  r«t  due  à  U  kIoîi* 
D  une  dame  que  Ton  doit  croire 
L'ornement  des  plut  beaux  eipriu. 

"ladame  des  Loges  était  en  corres- 

>ndance  avec  beaucoup  d'hommes 

'  lèbres  ;  on  voit  dans  B  dzac  plu- 

lours  lettres  que  celui-ci  lui  avait 

adressées  ,  et  dans  l'une  desquelles  il 

lui  disait  ;  «  Dieu  vous  a  élevée  au- 

»  dessus  de  votre  sexe  et  du  notre , 

'  et  n'a  rien  épargné  pour  achever 

»  son  ouvrage  :  vous  êtes   admirée 

r)  ._   _ 

iF"   le  >ui«nii«crit<;oi,  in-lol    ,  ton».- «,  p    l  l> 


»  fit  ta  mcillcurr  iMrlioderEitfore; 
»  en  ce  point  »'accorcltfil  let  Am\ 
»  religions  ,  et  le»  catholiqiiet  n'oi<| 
»  point  de  dispute  «vec  le»  ku|;iM>« 
»  nots.  »  Dans  une  autre  lettre  .  il 
l'engage  à  renoncer  aux  erreur»  àm 
Calvin  :  «  U  e»t  tri*»>Trai ,  lui  dil-il, 
»  an'un  si  beau  chaa^enent  ot  wm 
»  uc 


mes   plus   TtoUsts 
»  et  que  pour  vous  voir  dire  votre 
0  chapelet ,  je  voudrab  de  bon  cortir 
»  vous  en  avoir  donné  un  de  dia* 
»  niants.   »  On    regrette   qu'auctai 
écrit  de  Mn«.  des  Loges  n*«it  M 
conservé  :  a  Son  style  aussi  bien  «pM 
u  son  langage  ordinaire,  dit  l'autciir 
»  du  manuscrit  déjà  cite  ,  était   dct 
»  plus  poUs,saus  aneclatioo  aucimey 
*  et  accompagné  d'autant  «l**   i"^'»- 
»  lité  que  d'art;  mais  surtout 
»  estimer    son    humeur   agi<.ii>i<  ^ 
»  discrète  et    oflicieuse  envers   an 
u  chacun  ,  sa  conversation   ravis- 
»  santé  et  sa  dextérité  à  acquérir  des 
»  amis  et  à  les  servir  et  conserver , 
»  etc.   »  Depuis  qu*elle  eut  pri«  )• 
parti  de  la  retraite ,  elle  ne  rmnt  k 
Paris  qu'en    if)3(j,    pour  solliciler 
dans  un  procès  important  ;  et  ella 
mourut  le  l*^  juin    1641,  cher  sa 
fille  aînée,  au  château  de  U  Piéaa  en 
Limousin.  Ou  avait  attribua  à  M'**'. 
des  Loges  des  vers  en  réponse  à  um 
épigramme  de  Malherbe,  'fui  aa* 
raient  été  dépbces  dans  U  MoiadM 
d'une  femme;  mais  il  est  aujoar- 
d'hui  reconnu  que  répigramae  art 
de  Racan ,  et  la  réponse  de  Go»* 
baud.  (  f .  les  ObservaiUms  de  Më- 
nagc  sur  Malherbe,  pag.  557,  ^^ 
de  1 66(5.  )  M—,  des  Lo«f  pwdit  m 
(ils  en  i6io,  à  U  bataille  de  Prag»»» 
et  un  autre  en    H»W.  au  si^da 
Dréda.  Son  Gis  alnë  sa  laariae»  Ba?* 
lande,  et  par\  inl  an  crade  de  î;i*neri»» 
major  au  ser\ 
il ,/,,...;..{ ;.     . 


LOGOTHÈTP]  (  George    le  ). 
Voyez  AcROPOLiTE ,  t.  I,  p.  16.4. 

LOHxil A  (  Ibis  ) ,  ou  ,  comme  ïbii- 
Khilcan  prononce  ce  nom ,  Ibn-La- 
hia  ,  docteur  d'une  grande  autorité  , 
en  fait  de  traditions ,  parmi  les 
Egyptiens ,  se  nommait  ALou-Abd- 
Alrahman  Abd-Allah  ,  fils  d'Okba. 
Lobaia  était  le  nom  de  son  aïeul.  On 
lui  donne  les  surnoms  de  Hadhrami 
et  Misri ,  parce  qu'il  tirait  son  ori- 
gine de  la  province  de  Hadhramaut , 
et  que  sa  famille  était  établie  en 
Egypte.  Il  fut  nomme  kadbi  d'E- 
gypte au  commencement  do  l'anne'e 
1 55  (771  ),par  le  khalife  Abou-Dja- 
far  Almansour.  Ce  fut  la  première 
fois  que  le  khalife  nomma  directe- 
ment à  cette  place  :  jusque-là  les 
kadliis  ne  tenaient  leur  nomination 
que  du  gouverneur  de  celte  pro- 
vince. Ibn-Lohaïa  fut  aussi  le  pre- 
mier kadhi  qui  reçut  du  fisc  un  trai- 
tement: Almansour  lui  assigna  trente 
pièces  d'or  par  mois.  Eiilin  il  fut  le 
premier  kadhi  d'Egypte  qui  observa 
par  lui-même  l'appa*  ition  de  la  nou- 
velle lune  du  mois  de  ramadhan , 
pour  fixer  le  commencement  du 
jeûne.  Depuis  lui  les  kadhis  ont  tou- 
jours pris  part  à  cette  observation. 
Les  traditions  qui  ont  ètc  tnjnsmises 
sous  le  nom  d'Ibn-Lohaïa  sont  d'une 
grande  autorite:  ce  docteur  les  tenait 
principalement  d' Abd-Allah  ,  fils  de 
Hobaïra,  surnomme  ALou-Hobaïra 
Sëbai ,  et  oria;inaire  du  Hadhramaut, 
qui  mourut  en  l'année  i^G  (743-4), 
et  d'Abd  Alrahman  ,  fils  de  Ziad  et 
petit-fils  d'Anam  ,  surnommé  iSc/i<?£- 
bani  et  Aj'riki ,  qui  fut  kadhi  de  la 
province  d'Afrique,  et  néanmoins  est 
compté  parmi  les  mohaddithts  ou 
auteurs  de  traditions  ,  Egyptiens. 
Ce  dernier  mourut  en  l'année  i5G 
(772-3).  Ibn-Lohaïa  fut  destitué 
ett  l'année  1O4  (  7B0-1  ) ,  et  mourut 


LOH 

en  l'année  T74  (  790-1  ),  ou,  selort" 
un  autre  récit,  en  l'année  170  (786^ 
7  )  étant  âgé  de  81  ans.  Il  était  néua 
an  ou  deux  avant  Lcith ,  (ils  de 
Saad  (  Voyez  Leitu  ).  On  prétend 
que  Yézid  ,  fds  d'A'.ou-H  ibib  ,  mort 
en  l'an  127  ou  1*28,  lui  avait  prédit 
qu'il  serait  élevé  à  la  dignité  de 
kadhi.  Ibn-Lohaïa,  ainsi  qucLcilli , 
fds  de  Saad ,  et  quelqties-uns  de  leurs 
contemporains,  sont  les  canaux  par 
lesquels  les  faits  relatifs  à  la  con- 
quête de  l'Egyple  par  les  Arabes, 
ont  été  transmi)  aux  historiens  qui 
nous  en  ont  coriservé  la  ménic.ire  : 
car  ce  n'est  guère  qu'au  milieu  du 
second  siècle  de  1  hégire  que  les  Ara- 
bes Musulmans  ont  commencé  à  ré- 
diger l'histoire ,  et  en  général  à  re-^ 
cueillir  les  traditions,  et  à  écrire  sur 
les  divers  genres  de  connaissances 
dont  ils  s'occupaient.  C'est  un  fait 
qui  prouve  l'importance  des  tradi- 
tions historiques  du  premier  siècle  , 
et  qui  montre  en  même  temps  la  né- 
cessité de  connaître  et  d'aj)précicr 
les  personnages  par  qui  ces  traditions 
s'étaient  transuiises  et  conservées 
jusqu'à  cette  époque.  S.  de  S — y. 

LOHENSTEÏN  (  Damel  -  Gas- 
PAR  DE  )  ,  auteur  allemand ,  né  à 
Nimptsch  ,  petite  ville  de  Silésie  , 
en  i635  ,  après  avoir  fait  ses  pre- 
mières études  à  Breslau  ,  se  rendit 
successivement  aux  universités  de 
Leipzig  et  de  Tubingue  ,  pas  visiia 
les  ditïërentes  parties  de  rAllemagne 
et  plusieurs  autres  pays  de  l'Europe: 
eu  1666,  il  fut  nommé  conseiller 
irapéj'ial  et  premier  syndic  de  la 
ville  de  Breslau ,  et  occupa  cetta 
place  jusqu'à  sa  mort,  qui  eut  lieu 
en  i683.  Opitzet  ses  contemporains 
avaient  tiré  la  langue  allemande  de 
son  chaos  ;  mais  Hofmanswalkiau 
lui  avait  depuis  fait  faire  quelques 
pas    rétrogrades.    Lohenstein    alla 


I>OU 

s  loin  encore  :  ayant  eu  le  nial- 
r  tir  s'attacher  de  prcfeinif  ( 

I  que  ,  ainsi    qu'au  Marini  v\ 
^  autres  auteurs   italiens   de 

0,  il  iiuila   leurs  (leTauls  , 

\iï  6011  style  manière,  ampoule  , 

ivent  trivial  et  toujours  inej;al ,  il 

lui  -  mùnc  le  fondateur  d'une 
io  qui  arrêta  les  progrès  de  la 
;iic  allemande.  H  composa  d'a- 

l  dos  tragédies:  Ibrahim  /iassa, 
Mcmièie  de  toutes  ,  (pu*  Ijolien- 

II  lui-nicme  jugea  trop  faible  pour 
•  insérée  dans  l'édition  de  ses 
>  rcs  ;    Ag^rippine  ,   Epicharis  » 

>pdlre  ,  Sopliomshe  ,  IbraJiim 
tan.  Les  ditrérents  personnages 
es  pièces  y  parlent  toujours  Je 
me  langage  que  celui  de  l'auteur; 
V  signale  d'autres  défauts  égale- 
nt graves  :  aussi ,  quoique  les  tra- 
lies  de  Lohenstein  fussent  ses 
meilleurs  ouvrages  ,  il  ne  put  en 
faire  jouer  aucune.  Ses  autres  poé- 
sies sont  sur  des  sujets  tirés  du  Nou- 
veau Testament ,  des  liéroides  ,  des 
chants  funèbres  ;  et  chacune  de  ces 
divisions  porte  le  nom  d'une  fleur. 
Lohenstein  publia  ses  poésies  à  Bres- 
]au  ,  en  iGBo  ;  il  y  en  a  eu  plusieurs 
«ditions ,  dont  la  dernière  est  de 
1^33.  Parmi  ses  ouvrages  en  pro- 
*e.,  on  distingue  son  roman  hé- 
loique  à' Arminius  et  Thusnelda  , 
qui  ne  parut  qu'après  sa  mort  ,  à 
Leipzig  ,  en  1689  ^^  '^9^  >  '^  ^*°'' 
in-4°.;  mais  cet  ouvrage,  comme  les 
autres  en  prose  ,  offre  les  mêmes 
défauts  que  ses  poésies.  Moses  Men- 
delssohn  traite  son  Arminius  avec 
moins  de  sévérité,  et  trouve,  à  côté 
de  ses  défauts  ,  de  la  concision  ,  de 
la  vigueur  et  une  éloquence  qui  tient 
ijuelquefois  du  sublime.  Ensouscri- 
▼ant  à  une  partie  de  ce  jugement  » 
flous  pensons  que  d'autres  critiques 
i*«iit  loué  avec  eiagéralion  ,  surtout 

XXIV. 


en  prctendAnt  que  quelquet-um  dcf 

'  ^  alleinaïKia,  et  aine 

à  l«oketistein  le  nrv- 

'  do  leur  lalfTjt 

I  Ml*.''        T>  — f. 

L()1IUA6.",    qu..  ,! 

Perse  de  la  dvnnfir 
était  arrit  . 
fondateur  <. 

ce  nom,  tora.  XXll ,   |..i|». 
Kai-khosrou  qui  en  fui  le  Iroi.;.  ..,c 
monarqiu-,  n'ayant  point  d'enfants, 
déclara  Lnhrasp  son  successeur ,  et 
abdiqua  solennellement  en  stk  faveur. 
Les  autres  piincesdu  sanu  -       '    ,  t 
la  plupart  des  grands ,  fn: 
de  celte  préférence;  mats  la  r..: 
de  Lohrasp  justifia  d'abord  \c 
de  Kai-khosrou.  Sa  piété,  sa  ferme  te 
cl  son  zèle  pour  la  ju^tire  ,  impt-ir- 
rent  silence  à  l'envie.  Il  mena, 
grands  vassaux, et  surtout  la  f.. 
de  Zal ,  qui  s'était  le  plus  opposée  .1 
son  élévation  :  mais  il  ne  put  erapr- 
cher  qu'une  défiance  rériproqtie  en- 
tre les  deux  maisons  ne  dégénér.ît  en 
guerre  ouverte  soiis  le  règne  suivant. 
Cependant  Ardjasp,  nouveau  f'  ^  • 
Tourân  ,  loin  d'imiter  les  sent  1 
pacifiques  de  son   père,  anniiii-    it 
l'intention  de  secouer  'e  joug  d«  If. 
ràn  et  de  venger  la  mort  de  son  aicul 
Afracyab.  (  f'o^.  KAi-KAor<i .  lom. 
XXll,  pag.  aie.  )  Afin  <i  « 

couvert  ses  frontières  ori  1 
trc  les  dispositions  hostili-:^  i\e  ce 
prince ,   Lohrasp  quitta    PaHrimn*» 
résidence  d'Lstakhar,  et  lran>t' 
coura  Baikhdans  leKh>»raçaii. 
dis  qu'il  prodiguait  ses  trésor»  \Hiur 
agrandir  et  décorer  sa  nouve  le  ca- 
pitale, des  troubles  s'élevaient  dans 
les  provinces  d'Ocrilenl.  Lohru»|» 
déplovautuneju^leseverilr  contre  le» 
factieux ,  confirma ,  d.*ns  le  gouver- 
nement de  l'Irak- Adjrm  ,  Roharo. 
fils  et  tucceweur  de  Gowlcrt ,  Uà 
40 


6'iô 


LOH 


domia  plein  pouvoir  de  re'priracr  les 
àe'ditions  des  contre'es  voisines, et  lui 
ce'da ,  sous  le  titre  de  vasselage  et 
d'iicreditéjtoutes  les  conquêtes  qu'il 
l'autorisait  à  faire  sur  les  états  limi- 
trophes. Roham,  déjà  célèbre  par 
ses  exploits,  donna  carrière  à  son 
ambition  ,  subjugua  la  Ghalde'e  et  la 
Syrie ,  et  y  reçut  le  surnom  de  Nebu- 
Bel  -  Azar  (  Mercure ,   Jupiter    et 
Mars  )  (i).  Ces  concessions  impo- 
litiques  eurent  des   suites   funestes 
en  reveillant  la  jalousie  et  l'ambition 
des  grands.  Gusclitasb,ou  Kisclitasp, 
son  fds  aîné ,  osa  même  demander 
une  partie  du  royaume  :  mais  bien- 
tôt ,  alarme  des  mesures  de  rigueur 
que  le  roi  exerçait  contre  tous  ceux 
qui  lui  portaient  ombrage ,  il  sortit 
du  palais ,  sous  prétexte  d'une  par- 
tie de  chasse  ;  et  prit  la  route   de 
rindoustan.  Atteint   sur   le    terri- 
toire  de   Kaboul  ,   par    son   frère 
Zerir ,   et  ramené'  à   Balkh ,  il   se 
fie  moins  aux  conseils  paternels ,  à 
un  pardon  ge'nc'reux^  qu'aux  pre'dic- 
tions  de  ses  devins ,  et  s'évade  une 
seconde  fois.  Sous  lenom  de  Ferokli- 
zad ,  il  se  dirige   vers  l'Occident , 
échappe  à  toutes  les  recherches  des 
émissaires  de  son  père  ,  et  arrive  à 
Sarran  (  Sardes),  où  il  cache  soi- 
gneusement son  rang  et  sa  naissance. 
Le  hasard  et  mie  coutume  singulière 
du  pays  hii  ayant  fait  obtenir  la  main 
de  la  fille  du  roi  de  Lydie  malgré 
ce  prince ,  ce  ne  fut  que  par  sa  va- 
leur et  au  bout  de  plusieurs  années 
qu'il  parvint  à  fléchir  son  beau -père, 
à  gagner  sa  confiance  et  à  recouvrer 
les  droits  d'un  gendre.  Placé  à  la  tête 

(i)  Le  nom  de  ce  personnage,  ses  actions  ,  l'é- 
poque où  il  a  vécu  coriespouileiit  avec  les  règnes 
tl«  Nabopolassar  et  de  Nabiichodouosor;  ce  qui 
sumble  prouver  que  ces  rois  de  Babyloiie  ,  si  ta- 
TtiPiix  dans  la  Bible,  n'étaient  que  des  princes 
feuJataires  du  grand  roi  de-  l'Iran,  inconnu  aux 
Occidentaux,  parce  qu'il  résidait  dans  l«s  par- 
ties orieiiUU»  da  la  fcrao. 


LOH 

du  conseil  et  des  armées ,  il  réprima  il 
les  brigandages  des  Turcs  Khozars , 
établis  vers  le  Caucase ,  et  conquit 
leur  pays  à  la  suite  d'une  grande  vic- 
toire qui  mit  leur  prince  en  son  pou- 
voir. Le  bruit  de  ses  exploits  péné- 
tra jusqu'à  Balkh  et  troubla  Lohrasp. 
Depuis  vingt-cinq  ans  ,  ce  monarque 
pleurait  Guschtasb ,    qu'il    croyait 
mort  de  désespoir  et  de  misère.  Dans 
cet  intervalle  ses  états  avaient  été  dé- 
chirés par  des  dissensions  intestines; 
et  le  roi  de  Tourân,  secondé  par  un 
essaim  de  Scythes,  qui,  vers  ce  temps- 
là  ,  poussèrent  leurs  ravages  jusqucs 
aufond  de  la  Syrie,  venait  de  secouer 
le  joug  de  l'Iran,  et  de  dicter  la  loi 
à  Lohrasp.  La  conjoncture  parut  fa- 
vorable à  Ferokhzad  pour  engager 
le  roi  de  Lydie  à  s'affranchir  de  tout 
tribut,  et  même  à  exiger  des  subsides 
du  chah  de  Perse.  Un  ambassadeui 
arrive  à  Balkh  ,  expose  la  demandt 
de  son  maître,  et  fait  entendre  qu'ui 
refus  allumera  la  guerre  entre  le; 
deux  puissances.  Cependant  Lohras| 
réfléchissant    sur    l'agrandissemerj 
subit  de  la  Lydie  et  sur  la  hardiess( 
de  ses  prétentions,  questionne  l'am 
baséadeur  sur  ce  Ferokhzad,  dont  li 
génie  supérieur  avait  seul  opéré  celli 
révolution.  Quel  fut  son  étonnerac]! 
et  son  effroi  en  apprenant  que  le  h( 
ros  lydien  avait  une  ressemblanc 
frappante  avec  le  prince  Zerir  I  ^ 
doutant  plus  alors  que  Ferokhzad  u 
soit  son  fils  aîné ,  il  implore  les  lu 
mières  célestes ,  consulte  ses  astre 
logues,  et  son  ministre  Djamasp,  1 
plus  grand  philosophe  de  l'empire 
et  il  se  détermine  enfin  à  sacrifier  s 
gloire  et  son  ressentiment  aux  be 
soin  de  l'état.  Son  fils  Zerir ,  raiiii 
d'instructions  secrètes  ,  marche  à  I 
tête  d'une  armée  jusqu'aux  frontière 
de  Syrie,  d'oti  il  se  rend  à  Sarde 
avec  une  suite  peu  nombreuse,  sou 


LOfI 

prétexte  de  traiter  de  la  pai- 
plutôt  pour  s'assurer  si  Verokh?.{,d 
est  son  frère.  Il  le  reconnaît  crtccli- 
veincnt ,  rompt  les  ue'i^ociations ,  cl 
rejoint  son  armrie  près  d'Halep.  Les 
Lydiens  le  suiveiil  de  près  et  viennent 
camper  en  face  de  Tennemi.  Une  ac- 
tion allait  s*enga{»er  ,  lorsque  Zerir 
$*avançanl  vers  Fcrokhzad  ,  le  pro- 
clame souverain  de  l'Iran, sous  son 
vrai  nom  de  Gusclitasb,  et  lui  rend 
le  premier  ses  hommages.  Le  roi  de 
Lydie  vient  partager  l'aK^'j^rcsse  des 
deux  armées  ,  et  complimenter  son 
gendre,  qui,  après  lui  avoir  jure  une 
paix,  éternelle  ,  emmène  son  épouse 
en  traversant  la  Perse  au  milieu  des 
acclamations  publiques.  Lohrasp, 
suivi  de  toute  sa  cour ,  sort  à  la 
rencontre  de  son  fds ,  l'embrasse , 
en  pleurant  de  joie,  lui  pose  le  tadj 
sur  la  tète ,  le  bénit ,  et  se  renferme 
ensuite  dans  un  monastère  conligu 
au  grand  temple  qu'il  avait  fondé 
à  Balkh.  Là,  vctu  d'un  habit  gros- 
sier ,  il  consacra  le  reste  de  ses 
jours  aux  bonnes  œuvres  et  aux 
exercices  de  piété.  Long  -  temps 
après,  lesTouraniens  ayant  ravagé  le 
Khoraçan  et  pénétré  jusqu'à  Balkh  , 
Lohrasp ,  en  l'absence  de  son  (ils 
qui  avait  choisi  Istakhar  pour  sa  rcf- 
sidence, sortit  de  sa  retraite;  et,  mal- 
gré son  grand  âge,  il  se  mil  à  la  tête 
de  la  garnison,  et  périt  glorieusement 
en  défendant  ses  anciens  sujets.  Ce 

5 rince  ,  à  qui  les  annales  fabuleuses 
e  la  Perse  donnent  un  règne  de  cent 
vingt  ans,  est  regardé,  malgré  ses 
fautes  et  ses  malheurs ,  comme  un 
des  plus  vertueux  monarques  de  J'O- 
ricnt.  On  lui  attribue  plusieurs  rè- 
glements sages  sur  la  justice ,  les  fi- 
nances et  la  discipline  militaire.  Nous 
avons  négligé  quelques  dilTérences 
le'^ères  dans  les  écrits  des  auteurs 
orientaux  sur  l'histoire  de  Lohrasp; 


LOI  (h7 

'  nous  n*cnlreprcndron<  »*'>•»  -!#. 
cnncilivT  le»  divers:^    -  ,. 

plusieurs  savants  sur  -«  ■  » 

remarquerons   »cul<  t 

bien  diifirilc  de  retomi  i.rr  m  liii  je 
Cimbysc  des  Grec*  ,  avec  lequel  il 
nous  parait  n'avoir  auct:  ;  , 

tant  par  le  nom  ,  le  car.i 
actions  ,  que  pour  IVpoquc  et  U  du- 
rée de  son  règne.  A  — t. 

LOIR  (  Nicolas  I 
tre ,  ne  à  Paris  en    . 
dr  Bourdon  ,  et  préféra 
la  manière  du  Poussin  ,        ■    ■    >  • 
son  maître.  Il  parvint  même  à  co- 
pier  avec  une  rare  exadiiiide  les 
tableaux  de  ce  célèbre  aili.>te  ;  mais 
il  nes'assujétit  parlitulièreaicut  a  au- 
cune manière.  11  se  rendit  k  Ronie,eo 
i(î47,y  '•^  quelques  ouvrages  esti- 
mables ,  revint  en  France ,  fut  reçu 
académicien  en   iG(i3,  et  obtint  de 
Louis  XIV ,  dont  il  pci;;nit  a  Ver- 
sailles   l'histoire   nV 
l'emblème  du  Sob  i 
de  4ooo  fr.  Son  table 
tion  représentait  Z^.v  pr- 
peinture  et  de  la  sculptuiv  hm*  le 
r'gne  de  Louis  A'If.  Il  inounit  eu 

1G79,  laissant  dcujt  fils  qui  ne  pu- 
rent  suivre  ses  traces.  Loir  avait  de 
Iafacilité(  1  ),une  sorte  de  gràrc  et  de 
correction  :  aucune  di-s  parties  de 
l'art  ne  lui  était  étrangère;  mais  son 
talent  n'était  point  de  ce;»  ••••  •■'!!- 
cent  un  artiste  au  pr^ 
Parmi  ses  nombreuses  pruu 


fais  •••  «■ 
•  •fit  q-i'.... 
tatrf. 
p..    . 

d  •»«'  ■ 
taau,  puu 

t.  M.rnt    la 


cvavvfMtUa. 


6.i8  LOI 

on  remarquait  Saint-Paul  devant 
Sergius.  Le  laLlcau  de  Cléohis  et 
Blton,  tirant  le  char  de  leur  mère, 
passe  pour  son  ciief  -  d'auvre.  Il 
a  grave  à  l'eau-forte  environ  i5o 
pièces  de  divers  formais.  — Loir 
(  Alexis  ) ,  orfèvre  et  graveur ,  frère 
du  précèdent,  acquit  une  grande  ré- 
putation comme  graveur, snrtout  par 
ses  deux  os  lampes,  du  Massacre  des 
Innocents ,  d'après  Lebrun  ,  et  de  la 
Vescenie  de  C:-oix ,  d'après  Jouve- 
net:  on  fait  cas  aussi,  de  son  Moïse 
saiifé  des  eaux  ,  d'après  le  Poussin  ; 
de  la  Chute  des  Anges ,  d'après  Le- 
brun 5  de  Y  Education  de  Marie  de 
Médicis  j  de  la  galerie  de  Rubens  ; 
d'une  Adoration  des  rois,  et  d'une 
Présentation  au  temple  ,  d'après 
Jouvenet ,  ainsi  que  d'une  Fierté 
contemplant  le  Christ  zjiorf, d'après 
P.  Mignard.  On  a  encore  de  lui  des 
eaux-iortes,  dans  lesquelles  on  dési- 
rerait plus  de  goût  et  de  légèreté.  Il 
mourut  à  Paris,  en  1 7 1 3.    D^ — t. 

LOISEL  (  Antoine  ),  avocat  au 
parlement  de  Paris,  ne'  à  Beauvais 
en  i536,  fit  ses  études  à  Paris,  au 
collège  de  Prêles ,  dont  le  fameux 
ïlamus  était  principal.  Il  s'attira  tel- 
lement son  amitié ,  que  celui-ci  le 
nomma  son  exécuteur  testamentaire, 
et  lui  légua  le  quart  de  son  mobilier. 
En  sortant  du  collège,  Loisel  suivit 
les  cours  de  langues  grecque  et  la- 
tine. Il  voulait  étudier  la  médecine; 
mais  son  père  l'en  détourna ,  en  lui 
disant  quun  médecin  ne  pouvait 
jamais  être  quun  médecin ,  tandis 
qu'un  avocat  pouvait  devenir  prési- 
dent et  chancelier.  A  l'âge  de  dix- 
liuit  ans  ,  il  fut  envoyé  à  Toulouse , 
pour  y  étudier  en  droit  ;  et  il  y  fit 
connaissance  avec  Gujas,  qui  l'en- 
gagea à  ne  point  quitter  l'étude  du 
droit ,  dont  les  autres  professeurs  le 
dégoûtaient  par  leur  lûaftière  bar- 


LOT 

bare  d'enseigner.  Loisel  suivit  Cujas 
à  Caliors  ,  à  Bourges,  où  il  se  lia 
avec  Pierre  Pilhou,  puis  à  Paris  et 
à  Valence,  oii  Pithou,  Gujas  et  lui 
se  réunissaient  après    leur   souper 
dans  la  bibliothèque,  et  y  travail- 
laient jusqu'à  trois  heures  du  matin. 
De  \alence,  Loisel  alla  prendre  ses 
degrés   à  Bourges,   et  il   revint  à 
Beauvais,  puis   à  Paris,  où  il  fut 
reçu  avocat;  mais  personne  ne  l'em- 
ployait ,  quoiqu'il  lui  semblât,  di- 
sait-il, quil  eût  aussi  bien  fait  que 
beaucoup  d'autres.  Il  se  mit  chez 
un  procureur,  à  condition  que  celui- 
ci  lui  donnerait  des  causes.  A  peine 
en  ent-il  plaidé  quelques-unes ,  que 
l'avocat  du  roi,  Dumesnil, l'ayant  re- 
marqué, lui  donna  la  main  de  sa 
nièce,  dont  il  était  tuteur.  En  i564, 
Loisel  fut  nommé  substitut  du  pro- 
cureur-général; et  un  de  ses  beaux- 
frères  ,  ayant  voulu  se  défaire  de  sa 
charge  de  conseiller  au  trésor,  il 
la  prit,  et  la  garda  quatre  ans,  par 
le  seul  désir  qu'il  avait  de  s'instruire. 
En  1575,  il  fut  nommé  avocat  de 
Monsieur   frère  du  roi,  et  bientôt 
après  de  Catherine  de  Médicis,  de 
la   maison    de    Montmorenci  ,   du 
chapitre  de  Notre-Dame  de  Paris , 
et  du  duc  d'Anjou.  Lorsqu'il  fut  ques- 
tion  du  mariage  de  ce  prince  avec 
Elisabeth   d'Angleterre  ,  Loisel  fut 
chargé  d'examiner  les  articles   du 
contrat.  Ne  les  ayant  pas  trouvés 
avantageux  à  la  France,  il  conseilla 
de  ne  point  conclure.  Etant  à  Poi- 
tiers en  qualité  de  substitut,  il  com- 
posa son  petit  poème  intitulé  Pulex 
pictonicus ,   en  l'honneur  de  la  fa- 
meuse puce  de  madame  Desroches. 
Lorsque  Gujas  ajouta  au  Gode  Théo- 
dosien  ,  les   novelles   de   quelques 
empereurs  Romains ,  Loisel  lui  four- 
nit  celles   de   l'empereur  Majoriu. 
En  i58o,la  peste  ravag^cant  Paris ^ 


LOt 

il   se  relira   ilans  une  maison  qii'il 
avait  à  Ponloisc ,  où  il  fil  des  re- 
cherches sur  les  auliquite.s  de  cette 
Tille,  el  il  y  composa  un   rerucii  , 
qu'il  intitula  Ponloise,  Henri  lU  , 
avaut  accorde  aux  protestants  une 
chambre    de  justice    en    Guiennc, 
Loiscl  y  fut  nomme'  avocat  du  roi. 
Il  lit  imprimer  alors  un  vieux  poème 
français  (  Fojr.  Hélinand  ).  Il  pu- 
blia aussi  un  écrit  inlifulc  :  Amiiis- 
iie^  ou  De  V  Ouhliaiice  des  uuiux 
faits  et  reçus  pendant  les  trouldes, 
Paris,    iSgS,  iu-S»*.  Dans  un  âge 
très-avance,  il  fut  nommé  procureur- 
général  en  la  chanrfjre  de  justice  que 
le  roi  envoyait  à  Limoges;  mais  les 
alTaires  publiques  n'ayant  point  per- 
mis que  cette  chambre  exerçât  ses 
fonctions ,  la  nomination  demeura 
sans  effet.  Loiscl  mourut,  en  1G17, 
âgé  de  8 1  ans.  On  a  de  lui  :  L  Homo- 
lioce  ou  De  l'accord  et  union  des 
iujets  du  roi,  sous  son  obéissance, 
Paris  ,    i5g5  ,  i  vol.  in-12 ,  avec  le 
Féiigueuv,  ou  continuation  de  VJ/o- 
monoce.  Ce  dernier  ouvrage  contient 
deux  remontrances  ,   prononcées  à 
Périgucux,  Tune  à  l'ouverture  de  la 
chambre  de  justice  le  4  juillet  i583, 
et  l'autre  à  la  clôture  le   i  o  janvier 
I  ■)84.  IL  La  Gujenne ,  composée  de 
liait  harangues,  choisies  parmi  un 
grand  nombre,  qu'il  avait    pronon- 
cées, étant  avocat  du  roi,  à  la  cham- 
bre de  justice  de  celte  province,  avec 
celle  du  rétablissement  du  parlement, 
et  un  extrait  du  plaidoyer  de  l'univer- 
sité ,  Paris,  i6o5,  i  vol.  iu-8^  111. 
Mémoires  dts  pays ,  villes ,  comtés , 
év>cchés  et  évéques  de  Beau\^ais  et 
i?ea//i'<w5«,Paris,i6i7, 1  vol.in-4°. 
Ces  mémoires  sont  pleins  de  recher- 
ches très  -  curieuses.   IV.  Institutes 
coutumières ,  ou  Manuel  de  plu- 
sieurs et  dii^ersi'S  règles ,  sentences 
€t  provarhei  du  droit  coutumier  et 


LOI  (ho 

plui  ordinaire  de  In  Fmnce,  C/rt 
ouvrage  a  été  imprini<<  pour  U  pir- 
micrc  fois,  à  U  fin  dr  V Institution 
ati  droit  francdU  de  dm  (kHruilIr, 
en  1607,  I  vol.  in-4'*.  Loisel  f*fn 
était  occupe  pondant  quarante  an.i  : 
il  y  a  rassemblé  et  distribué  sous  dn 
titres  diOérens,  toutes  lc^  rr;;lr^  ;;r- 
uéraies  du  droit  français.  t 

répandues  et  dispersées  <i 
deUnances  de  nos  rois,  dans  nos  cou- 
tumes, dans  les  arn'ts,  dans  le»  an- 
ciens praticiens  et  dans  nos  histoires  ; 
l'on  y  trouve  la  décision  des  que»- 
lions  les  plus  douteuses  et  les  plus 
controversées  du  droit  français.  Cet 
ouvrage  a  eu  plusieurs  éditions  : 
Challine  en  a  aonué  une  avec  des 
observations ,  Paris,  iGjC,  în-8*».  ; 
Launay,  avec  un  coin  <-.  1688, 

in-8^.  ;  Eusèbe  de  1,  «ver  un 

commentaire,  1710,  17 
'2  vol.  in- 12.  Le  chancel. 
seau  recommande  la  lecture «i 
tilutes  de  Loiscl ,  dans  sa  qu. 
instruction,  ainsi  que  dont    M.ibiU 
Ion ,  dans  son    Traité   des   éludes 
monastiques.   V.    Livre   d'observa- 
tions ecclésiasiiques.W.  livre  d'où- 
servations  mêlées  ^   et   particuitè' 
rement  de  quc^ues  droits  du  roi 
et  de  la  couronne,  11  s*y  trouve  un 
traité  sur  la  loi  salique.  VU.  Livre 
d'observations  du  dnnt  rù'ii  rotmmn 
et  français.  MIL  /^s  ries  de  Bit' 
fus,  jurisconsulte  stoïcien,  de  DU' 
mcsnil ,  avocat  du  roi,  et  d^  Pitktm, 
avocat  au  parlement.  IX.  Pttstpti^r, 
ou  Dialogue  des  mvocats  du 
ment  dû  Paris,  Ce  dialocur  . 
la  liste  des  arocals 
et  iSgcj,  avec  un  1 
que  de  chacun  d'eux ,  e!  le*  pnno- 
pauxtrailsdeleurvie.M.Dtipi'i  >f*'< 
réimprimer  ce  dialogtie .  d. 
édition  des  lelIreideCamu*,!^  -. 
1818,  a  ToL  in-8».  Toi»  co  ou* 


3 


63o 


LOI 


vrages ,  depuis  le  n**.  V ,  avaient  ëte' 
réunis  en  un  vol.  in-4<*. ,  sous  le  tilre 
d' Opuscules  divers,  par  Claude  Joly, 
ancien  avocat  au  parlement  et  clia- 
noine  de    l'église  de  Paris,  qui    a 
mis  en  tête  la  vie  de  l'auteur ,  Paris , 
i652  et  i650.  C'est  la  même  e'di- 
tion   avec  un   nouveau  frontispice. 
Il  existe  lui  abrège  en  latin,  de  la  vie 
de  Loisel,  Paris  ,  i643,  in~8''.  X. 
Des  Poésies  latines  ,  recueillies  en 
I  vol.  ,  Paris,  iGio,  in-8o.  Ou  lui 
attribue   un  Traité  de  V Université 
de  Paris ,  et  quelle  est  plus  ec- 
clésiastique  que   séculière,  Paris  , 
1587,   in-80.   Un  de   ses  descen- 
dants, membre  de  la  Convention  na- 
tionale, ayant  demande,  en  1798, 
que  ses  restes  fussent  places  au  Pan- 
théon, un  autre  députe  fit  observer 
que  Loisel  avait,  le  premier,  publié 
cette  maxime  despotique ,  si  veut  le 
roi,  si  veut  la  loi,  et  la  proposition 
fut  unanimement  rejelêe.  — Charles 
LoiSEL ,  son  fils,  a  laissële  Trésor  de 
V Histoire  générale  de  notre  temps, 
depuis  1610  ,  jusqu'en  1628,  Paris, 
i63G,  I  vol.  in-80.     L-B-E  etD-c. 
LOISY ,   ou  Ve   Loisy  ,  famille 
de  graveurs ,  a  subsiste  honorable- 
ment à  Besançon  ,  pendant  plus  d'un 
siècle.  —  Pierre  de  Loisy  ,  dit  le 
n)ieux ,  est  le  premier  qui  ait  exerce' 
son  art  avec  quelque  distinction  dans 
le  comte'  de  Bourgogne.  Il  fut  nom- 
me'graveur  des  monnaies  à  Besançon, 
charge  qu'il  transmit  à  son  fils  j  on 
ne   connaît  de  lui  qu'une  estampe 
représentant  l'arc  de  triomphe ,  et 
quelques  petites  pièces  dans  le  Fe- 
sontio  civitas  imperialis.  (Voyez  J.J. 
CîiîFFLET.  )  —  Jean  de  Loisy  ;,  son 
fils  ,  a  gravé  les  estampes  de  l'ou- 
vrage  de  Jean    Terrier  ,  intitulé  : 
Portraits  des  S.  S.  vertus   de  la 
Fierge ,  Paris  ,  i635  ,  in-4^.  ;  Be- 
sançon, 1668;  et  quelques  autres  su- 


LOI 

jets  de  dévotion. — Pierre  de  Loisy, 
dit  le  jeune,  s'appliqua  particulière- 
ment à  la  gravure  des  médailles  ;il  ob- 
tint,en  i658,  des  gouverneurs  de  Be- 
sançon, le  privilège  exclusif  pour  en 
frapper  et  en  vendre  dans  l'étendue 
de  leur  juridiction.  On  a  de  cet  artiste 
un  Lii^re  d'emblèmes  ,  in- 4°.  (  1  )  J 
les  armoiries  des  chevaliers  de  l'il- 
lustre confrérie  de  Saint  -  George  ; 
des  portraits,  des  sujets  pieux ,  etc. 
—  Claude- Joseph  de  Loisy,  son 
fils ,  a  gravé  les  estampes  pour  le 
Bréviaire  de  l'archevêque  de  Besan- 
çon, et  quelques  portraits  d'une  belle 
exécution.  W — s. 

LOIZEROLLES  (Jean-Simow 
AvED  de)  ,  ancien  conseiller  du  roi  et 
lieutenant -général  du  bailliage  de 
l'artillerie  à  l'arsenal  de  Paris,  était 
né  dans  cette  ville  en  1733.  Arrêlé 
en  1 793  ,  il  fut  conduit  avec  son 
fils  à  Saint-Lazare.  Le  7  thermidor 
an  2«.  (  juillet  1 794  )  ,  deux  jours 
avant  la  chute  de  Robespierre  , 
l'huissier  du  tribunal  révolution- 
naire vient  à  cette  prison  avec  une 
liste  de  victimes  ;  et  il  appelle  Loi- 
zerolles  fils.  Le  jeune  homme  dor- 
mait :  son  père  ,  n'hésitant  pas  à 
faire  le  sacrifice  de  sa  vie  pour  le 
sauver,  se  présente,  est  conduit  à 
la  conciergerie ,  et  paraît  le  lende- 
main à  l'audience.  Le  greffier  ne 
voyant  qu'une  erreur  dans  la  diffé- 
rence d'âge ,  substitue  soixante  à 
vingt-deux  ans ,  change  les  prénoms , 
et  ajoute  à  l'acte  d'accusation  les 
anciennes  qualités  du  père,  qui  est 
ainsi  conduit  à  l'échafaud,  où  il 
consomme  ,  sans  rien  dire,  son  hé- 
roïque sacrifice,  et  son  fils  est  sauvé. 

Z. 


(i)  Le  seul  exemplaire  que  roii'connaisse  de  c« 
Livre  d'emblèmex,  paraît  être  défei-tiieux;  il  r* 
contient  que  quatre-vingt»  estampes  ,  et  cepea 
daiit  In  dernière  est  chiffré»  io5. 


LOJ 

LO  J  ARDI KRE ,  voyapieur  f  raiiç.i  is 
^tilta  sa  patrie  pour  cause  de  reli- 
|ion,  eu  î(>86,  à  l'aj^c  de  quatorze 
s.  Ses  parents  le  firent  embarquer 
à  Bordeaux  ,  pour  l'île  de  Madère, 
où  il  monta  en  seeret  sur  un  na- 
TÎre  anglais  qui   allait  dans  l'Inde. 
Lorsqu'il  eut  passe  la  Ligne,  des  cve'- 
uemcnts  forcèrent  le  bâliment  às'ap- 
procber  de  la  cote  occidentale  d'A- 
frique, et  d'envoyer  à  terre  un  canot 
avec  un  détachement  dont  il  faisait 
partie  :  après  une  absence  de  trois 
jours",  Lojardière  et  ses  compagnons 
n'ayant  pas  retrouvé  le  navire ,  cher- 
chèrent un  refuge  sur  la   côte  in- 
uuequi  s'olï'rait  à  eux.  Les  Ga- 
-  les  accueillirent  ;  mais  bientôt  un 
mal-entendu  coûta  laVie  aux  Euro- 
péens.   Lojardière  ,   échappé    seul 
comme  par  miracle ,  fut  l'objet  des 
soins  de  ce  peuple  barbare.  Il  ren- 
contra dans  cette  contrée  des  Anglais 
et  un  Hollandais  que  le  hasard  y 
avait  conduits.  Après  deux  tentati- 
ves infructueuses  pour  arriver  par 
terre  au  Cap,  une  cnaloupe  expédiée 
par  le  gouverneur  de  cette  colonie , 
vint  les  chercher.  Lojardière  quitta 
les  Macosses,  le  lo  février  1G88, 
et  il  réjoignit  sa  famdle  à  Dessau,  en 
i6i)o.  Il  entra  comme  capitaine  dans 
les  troupes  de  l'électeur  de  Brande- 
bourg, et  parvint  au  grade  de  colo- 
nel. Il  avait  écrit  en  français  la  rela- 
tion de  SCS  aventures ,  qui  n'a  jamais 
paru  dans  cette  langue  ;  elle  fut  tra- 
duite en  allemand  sur  le  manuscrit 
original,  et  publiée  sous  ce  titre  : 
Foja^e  en  Afrique ,  traduit  ai'ec 
des  observations  et  des  notes  rela- 
tives à  la  géofrraphie  et  à  VhiUoire 
naturelle  ,  Francfort  -  sur  -  l'Oder , 
1748  ,  I  vol.  in^>^.  Lojardière  est 
le  seul  Européen  qui  ait  écrit  comme 
témoin  oculaire ,  sur  le  pays  situe 
le  lonî;  de  la  côte  occideDlalc  d'-Afri- 


LOK  dSi 

que  ,  par  io«.  de  lalittide  Mitnlc  t 
il  était  si  iciinc  lorsqu'il  fut  jeté  sut 
cette  terre ,  que  «ta  remarqnca  iit 
sont  pas  profondes;  elles  ne 
nent  mie  les  mœurs  des 
et  de  ieiu*s  Toisios  ,  qui 
aux  Cafrcs  ,tels  que  noua  les  conoai*- 
sons  A  l'est  du  Gip.  E — s. 

LOKMAN,  célèbre  dans  l'histoire 
ancienne  de  l'Arabie  ,  ^tait    dr  la 
tribu  «rAd.On  dit  qu'euToyëà  la  Mec- 
que avec  quelques  autres  de  set  com- 
patriotes ,  pour  obtenir  de  Dica  de 
la  pluie  ,  dans  une  année  de  sccbr- 
resse,  il  échappa   à   la  fcngeanee 
céleste,  qui  extermina  toutt  la  triba 
d'Ad.    Apris  la  destruction  àt  M 
tribu,  Dieu  donna  le  chuii  à  I^lunan 
de  vivre  aussi  Ions- temps  qnese  con* 
serveraient  sent  tientrs  de  gaxellcs , 
dans  le  sein  a'une  montagne  de  dif- 
ficile accès  ,  où  elles  seraient  à  Tabri 
de  la  pluie;  ou  bien  autant  de  tempe 
que  durerait  la  vie  de  sept  vautours 
qui  se  succéderaient  sans  inlermp* 
tion.  Lokman  choisit  ce  denier  pÂr- 
ti.  On   distingue   ordinainaait  et 
personnage  d'avec  IjOKM an  somoBi- 
mé  le  sas,c ,  dont  il  est  parié  dans 
l'Alcoran ,  et  que  sa  s^çesse  a  reada 
très-célèbre  dans  rOneaC  :  forraBl 
l'opinion  la  plus  commune,  ce  der- 
nier vivait  vers  le  temps  de  David. 
Beaucoup  de  traits  de  soa  biilMft 
semblent  évidemment  enipnalét  dt 
la  vie  d'Esope;  et  les  FabUt  fM 
les  Arabes  lui  attribuent ,  m  smC 
autre  chose  qu'une  imitation  de  qjiMl- 
ques-ons  des  apologues  dont  oe  der- 
nier passe  pour  être  Tauiear  :  nm 
dans  ces  Fables  ne  porte  le  earac- 
icre  d'une  invention  artbe  (1);  ** 
le  style  dans  lequel  ellct  MBt  écri- 
tes, ne  permet  pis  BêoM  de  l(» 


1«V-»l«ré«»Mra« 
MU«àlti«w4»NailiM 


4ii*k 


63:3 


LOK 


faire  remonter  au  premier  siècle  de 
l'he'gire.  Si  elles  ont  cte'  mises  sous 
le  nom  de  Ijokraan  c'est  donc  uni- 
quement ,  parce  que  Lokman  était 
très-renomme'  par  sa  sagesse.  Mais 
ce  Lokman  surnomme  le  sa^e  ,  et 
dont  il  est  fait  mention  dans  l'Alco- 
ran  ,  est-il  véritablement  un  person- 
nage di  fièrent  de  Lokman  l'ancien? 
c'est  ce  qu'il  est  difficile  de  détermi- 
ner. Les  Orientaux  attribuent  à  Lok- 
man le  sa^e  une  grande  longévité,  et 
quelques  -  uns  lui  donnent  jusqu'à 
trois  cents  et  même  jusqu'à  mille  ans 
de  vie  ;  cette  circonstance  pourrait 
donner  lieu  de  penser  que  les  deux 
Lokman  ne  sont  qu'un  seul  et  même 
personnage, qui  a]q)ar tient  aux  temps 
anciens  de  l'Arabie  ,  mais  dont  on 
ne  saurait  fixer  Tagc  d'une  manière 
])robable.  Rien  ne  s'accorde  mieux 
avec  une  grande  réputation  de  sa- 
gesse dans  l'enfance  des  sociétés , 
qu'une  vie  poussée  au-delà  des  bornes 
ordinaires  ,  et  accompagnée  d'une 
longue  expérience.  Les  Fables  que 
nous  avons  sous  le  nom  de  Lok- 
man ,  sont  moins  répandues  dans 
l'Orient  qu'en  Europe  ,  où  depuis 
Erpenius  qui  les  fit  imprimer  pour 
la  première  fois  en  i6i5,  on  en  a 
donné  une  multitude  d'éditions.  Les 
manuscrits  en  sont  peu  communs  ; 
et  cela  vient  sans  doute  de  ce  que 
ces  apologues  très-courts  et  sans  au 
cun  ornement ,  ne  sont  pas  du  goût 
des  Orientaux.  Ces  Fables,  au  reste  , 
méritent  peu  ,  par  leur  rédaction  et 
leur  style  ,  la  faveur  dont  elles  ont 
joui*  et  il  faut  ajouter  que,  malgré  le 
grand  nombre  d'éditions  qu'elles  ont 
eues ,  il  n'en  existe  encore  aucune 
dont  le  texte  soit  exempt  de  fautes. 
Celle  que  M.  Marcel  a  pu})liée  au 
Caire  ,  sous  ce  titre  :  Les  fables  de 
Lokman  ,  etc.  ,  avec  une  traduction 
française  et  uue  notice  sur  ce  fabu- 


LOL 

liste  ,  an  viii  (  1799  ),  in-4^. ,  a  élé. 
réimprimée  à  Paris  ,  i8o3  ,  in- 1*2, 
augmentée  de  quatre  nouvelles  fa- 
bles. La  meilleure  édition  est  celle 
que  M.  Caussin  a  mise  au  jour  à  Paris, 
en  1818,  pour  l'usage  des  élèves  du' 
collège  royal  de  France.  On  ne  sait 
pourquoi  l'éditeur  de  la  Iraduclion 
faite  par  M.  Galland  ài\  Ilomajoun- 
Naméli,  ou  Fables  de  Bidpai,  a  inti- 
tulé cet  ouvrage  les  Contes  et  fables 
indiennes  de  Bidpai  et  de  Lokman^ 
Jamais  aucune  partie  de  ces  apo- 
logues n'a  été  attribuée  à  Lokman. 

S.   DE  s Y. 

LOLLABD  (  Walther  )  ,  héré- 
siarque ,  né  vers  la  fin  du  trei- 
zième, siècle  eu  Angleterre,  commen- 
çaàprêcher  ses  erreurs  en  Allemagne,' 
l'an  i3i5j  enseignant  que  les  an- 
ges rebelles  avaient  été  injustement 
cliassés  du  ciel  ,  et  que  leurs  adver- 
saires seraient  damnés  éternellement 
avec  tous  les  hommes  qui  oseraient 
prendre  leur  défense.  Il  méprisait 
les  cérémonies  de  l'Eglise,  rejetait 
l'intervention  des  saints  ,  l'utilité  des 
sacrements  ,  et  tournait  en  ridicule 
les  prêtres  et  les  évêques.  Le  mariage , 
selon  lui ,  n'était  qu'une  prostitution 
jurée  •  et  il  accordait  d'ailleurs  la 
plus  grande  liberté  aux  deux  sexes. 
Suivant  ïrithème  ,  le  nombre  de  ses 
disciples  ,  en  Allemagne ,  était  de 
plus  de  quatre -vingt  mille  :  il  en 
choisit  douze  ,  qu'il  nomma  ses  a])6- 
tres,  et  qu'il  chargea  de  parcourir  la 
Bohème  et  l'Autriche  pour  annoncer 
sa  doctrine.  Lollard  fut  arrêté  à 
Cologne  en  iZ'i'jf. ,  par  ordre  des  in- 
quisiteurs ,  et  condamné  à  mort  :  il 
alla  au  bûcher,  sans  témoigner  de 
frayeur  ni  de  repentir.  La  rigueur 
que  l'on  mit  à  poureuivre  ses  disci- 
ples, loin  d'en  diminuer  le  nombi-c, 
ne  fit  que  l'accroître  :  les  uns  s'en- 
fuirent en  Anglelerve,  oîi  ils  se  rcu* 


LOL 

iil  aux  ^^iclefîslcs ,  et  prrparcrcnl 
peuple  à  se  séparer  de  la  comiiiii- 
II  rumaine;  tandis  que  ceux  qui 
l'Ut  restes  en  Bohème,  disposi!- 
!  les  esprits  à  recevoir  les  erreurs 
ioau  lluss.  (  f^oy.  Huss.)  W — s. 
LOLLIA-PAULINA ,  impératrice 
i)aitie,pelite-filledecc  M.  Loliius 
abusa  de  son  crédit  et  de  ses 
jilois  pour  amasser  d'immenses 
i esses ,  fut  mariée   à    Memmius 
ulus  ,  pcrsonna{];c  consulaire  et 
vcrncur  de  la  Macédoine  ;  mais 
ii^nla,  ayant   entendu  vanter  ses 
cliarraes,  rappela  Memmius  à  Home, 
et  l'obi i;j;ca  de  répudier  sa  femme  , 
qu'il  épousa  lui  -  même  solennelle- 
""•nt^  l'an  -^89,  38  de  Jesus-Ohrist  ). 
vlrènie  beauté  de  LoUia  ne  put 
rCaligula:  il  ne  larda  pas  à  la  ren- 
;  er   sans   motifs  ,  et  lui  défendit 
(30  retourner  avec  Memmius,  comme 
aussi  de  contracter  aucun  nouvel  en- 
gagement. Lollia  soutint  cette  dis- 
grâce avec  une  apparente  fermeté, 
parut  chercher  à  s'étourdir  par 
^  fêtes  continuelles  où  elle  étalait 
un  luxe  et  une  magnificence  jusques 
alors   inconnus,  u  Je  l'ai  vue  ,  dit 
»  Pliue    l'ancien  ,    nou    pas    dans 
»  une  cérémonie  publique,  mais  à 
»  im souper  de  famille;  je  l'ai  vue, 
»  dis-je ,  couverte  d'émcraudes  et  de 
»  perles  que  leur   mélange  rendait 
(  ucore  plus  brillantes;   sa  tête, 
^cs  cheveux,  sa  gorge,  ses  oreilles, 
»  son  cou  ,  ses  bras  ,  ses  doigts  en 
»  étaient  chargés  ;  il  y  en  avait  pour 
»  quarante  millions  de  sesterces  (  en- 
•))  viron  neuf  millions  de  notre  mon- 
naie )  :  elle  n'aïuait  point  été  cm- 
l)arrassée  de  justifier  que  ces  ri- 
<  hesses  lui  appartenaient  ;  elles  ne 
les   devait  point  à  la  prodigalité 
»  de  l'empereur  ;  c'étaient  les  biens 
de  son   aïeul ,  ou  plutôt  les  dé- 
pouilles des  proviuccs.  »  (  Uist, 


î.or  mj 

nnl,  liv.  1^  ,  rh.   w  > ,.       ,|  "-  'r 
mort  de  Messiline  ,  I.ollia  o 

guer  le  dangereux    V  - 

venir  lV|>ousc  de  (.1 

l'emporta  par  le%inii 

et  ne  pardonna    p<  1 

elle  recourut  .î  •; 

Lollia  d'avoir  <  1 

moyens   pour    .scdiuic    i 

C'.laudc  Ini-nu^mc  fit  le   ; 

cette  affaire  au  sétut;  rt  !  % 

avoir  été  entendue  ,  fui  v\ 

pouillée  de  la  plus  grande  parti**  lio 

sa  fortune  :  mais  A::rii)i<ii:  •  .  <|  l'cn 

tel  jugement  ne  sati  .  f .  - 

voya  un  Iriijun  dan.-> i       1 

de  Lollia ,  avec  ordre  de  la  lur. 
800, 4î)  de  Jésus-(Jhrisl  ):  et  ^ 
fait  apporter  sa  léte,  ellercxaiKii  <  , 
dit-on  ,  curieusement ,  pour  s'a'*   ;  i  '  » 
quec'élaitbien  celle  de  son  eni..  ::.i  . 
ISéron  ,  dix  ans  après  ,  permit  qtic 
les  cendres  de  Lollia  fuvscnt   rap- 
portées dans  le  tombeau  de  ses  an- 
cêtres ,  et  qu'on  lui  rri^r^t  un  mo- 
nument :  la  co: 
été  extrèmcra*  I 

très  remarquable  dans  uu  m*  rlc  «iti^oi 
corrompu.  VV— ». 

LOLLIKN.  rcyez  LAEUti». 

LOLME  (  JtAw-Loti»  MX  ^. 
ccrivaiu  politique,  ne  à  Gt 
eu  I7'|0,  reçut  une  cducaliui. 
gnée,  et  embrassa  la  prufcs^ioii  d'a- 
vocat, au 'il  n'exerça  que  |>eu  de 
temps  dans  sa  ïwlrie.  U  y  joua 
néanmoii:'  *  "  " 

bic,  et  1( 
intitulé: 
de  drvil . 

De  I>olrac  cuii^u;  Ucuiui  le  piuî<t 
de  quitter  Genève  |>our  aller  oli»ef  • 
ver  les  routantes  et  les  cooftliliiUoai 
d'étals  plii>  |.1ii^N^pts.  \jC  |(MilUM- 
met  '  *f*W|^W*î 

il  n     X .  f  yttitiiBlift» 

et  le»  priiia|ic9  âfcc  «œ  AtlciilMm 


634  LOL 

particulière.  H  essaya  même,  dans  les 
ouvrages  qu'il  mit  au  jour,  après 
son  arrivée  en  Angleterre  ,  de  faire 
croire  à  ses  lecteurs  qu'il,  était  né 
dans  ce  pays.  L'un ,  écrit  en  anglais, 
parut  en  1772  ,  sous  le  titre  de  Pa- 
rallèle du  gouvernement  anglais  et 
de  V ancien  gouvernement  de  Suède, 
contenant  quelques  observations  sur 
la  dernière  révolution  anivée  dans 
ce  royaume,  et  un  examen  des  cau- 
ses qui  mettent  les  Anglais  en  sûreté 
contre  l'aristocratie  et  la  monarchie 
absolue,  A  cette  époque,  plusieurs 
Anglais  craignaient  que  la  constitu- 
tion de  leur  pays  pût  être  détruite 
comme  celle  de  Suède;  mais  de 
Lolrae ,  en  opposant  la  politique  de 
l'Angleterre  au  gouvernement  que 
Gustave  III  avait  renversé ,  démon- 
tra, d'une  manière  plausible,  que  ces 
craintes  étaient  mal  fondées.  Son  au- 
tre ouvrage,  qui  établit  sa  réputa- 
tion littéraire  et  politique,  est  intitulé 
la  Constitution  de  V Angleterre  ,  ou 
Etat  du  gouvernement  anglais  , 
dans  lequel  il  est  comparé  à  la  fois 
Avec  la  forme  républicaine  de  gou- 
vernement ,  et  avec  les  autres  mo- 
narchies de  V Europe.  Lorsqu'il  pa- 
rut pour  la  première  fois,  en  fran- 
çais (  Amsterdam  ,  1 77 1 ,  in-8''.  ) , 
ce  livre  fut  loué  comme  une  pro- 
duction très-ingénieuse  ,  réunissant 
l'originalité  des  pensées  et  Xa  justesse 
des  remarques ,  à  la  finesse  de  l'ex- 
pression. L'auteur  agrandit  ensuite , 
améliora  le  plan  qu'il  avait  d'abord 
conçu,  et  publia  la  première  édi- 
tion anglaise,  en  octobre  1775, 
in-S^.  On  supposa  qu'il  avait  tra- 
duit lui-même  du  français  son  propre 
ouvrage;  et  sa  connaissance  apro- 
fondie  de  la  langue  anglaise  devint 
le  sujet  de  grands  éloges.  Mais  si  le 
style  général  de  cette  production  re- 
marquable est  comparé  avec  celui 


l 


LOL 

de  la  dédicace,  qui  sort,  sans  con- 
tredit, d'une  pkime  étrangère,  on  en 
conclura  facilement  que  le  corps  de 
l'ouvrage  a  été  traduit  par  un  Anglais 
sous  les  yeux  de  l'auteur.  Il  paraît 
que  celui-ci  revint  à  Genève  vers 
cette  époque ,  car  Senebier  dit  qu'il 
y  fut  reçu  membre  du  conseil  des 
Deux  -  cents  ,  en  1775.  Il  fit  pa- 
raître ,  peu  de  temps  après  ,  son 
Histoire  des  Flagellants  ,  ou  Mé- 
moires sur  la  Superstition  humaine, 
777,  in-4'*.  (  en  anglais);  c'est  une 
araphrase  du  livre  de  l'abbé  Boi- 
eau  ;  le  style  n'en  est  pas  estimé  ; 
et  l'on  reproche  à  de  Lolme  de  n'a- 
voir pas  gardé  la  mesure  convena- 
ble. Son  attention  fut  ensuite  ap- 
pelée d'une  manière  plus  utile  sur 
l'union  législative  de  l'Angleterre  et 
de  l'Ecosse  :  il  forma  le  projet  de 
donner  une  seconde  édition  de  l'his- 
toire de  cette  mémorable  union  ;  et 
il  écrivit,  en  1787  ,un  essai  fort  ju- 
dicieux destiné  à  servir  d'introduc- 
tion à  l'ouvrage.  L'année  suivante  il 
publia  des  Observations  relatives 
aux  taxes  sur  les  fenêtres ,  les  bou- 
tiques ^  et  à  Vimpot  sur  les  merciers 
ambulants,  etc.  ;  elles  sont  pleines  de 
sens  et  de  jugement.  Lorsque  la 
question  de  la  régence  agita  les  es- 
prits ,  il  écrivit  en  1 789 ,  des  Obser- 
vations sur  l'embarras  national  et 
sur  la  manière  dont  le  parlement  a 
procédé  à  ce  sujet.  Il  émit ,  dans 
ce  pamphlet,  la  même  opinion  que 
Pitt;  opinion  qui  fut  adoptée  par  le 
parlement ,  et  partagée  par  la  grande 
majorité  de  la  nation.  On  croit  que 
ce  sont-là  tous  les  écrits  avoués  par 
de  Lolme;  mais  il  a  publié  dans  les 
journaux  plusieurs  lettres  ,  parmi 
lesquelles  nous  citerons  celle  qu'il 
écrivit  sur  la  question  de  savoir  si 
l'accusation  (  impeachment)  confre 
M.  Ilastings  était  annulée  par  la 


I.OL 

lution  du  parlement.  Dans  l'a- 
ivsomeiit  qui  |)recr<le  sa  Coristi" 
■a  de  V ^In^U'tcrre ,  il  a  dit  qu'il 
loposait  de  faire   paraître  une 
iHie  ue  George  lU  ;  mais  cet 
\^Q  n'a  pas  ete  publie.  On  igno- 
I      I  époque    précise  à     laquelle   il 
fjiitta  l'Angleterre;  mais  il  e>t  cer- 
qu'il  mourut  en  juillet  180G,  à 
n  sur  le  Uuftibcrg,  canton  de 
rSchwilz,  six  semaines  avant  l'ébou- 
lemcnt  qui  détruisit  ce  village.  Peu 
satisfait   d'un  aperçu  rapide  et  su- 
perficiel du  caractère  des  hommes 
et  des  affaires  des  états ,  De  Loi  me 
examinait  avec  un  esprit  philo- 
lique  et  un  œil  scrutateur  et  pe- 
ut irant.  Son  ouvrage  sur  la  Consti- 
tulion  d'Angleterre  (  i  )  lut  d'abord 
/.   froidement   accueilli  des  An- 
,  et  n'acquit  que   par  degrés  la 
rite  qui  l'a  placé  dans  les  mains 
us  ceux  qui  veulent  étudier  la 
politique  :  son  importance  s'est  en- 
core accrue  par  la  pente  de  l'esprit 
de  ce  siècle  vers  le  droit  public.  Son 
objet  était  de  faire  connaître  une  for- 
me de  gouvernement  alors  unique,  qui 
fixait  depuis  long- temps  l'attention 
de  l'Europe ,  et  sur  laquelle  on  avait 
des  idées  peu  précises.  D<i  Lolmc  re- 
recherche  d'abord  les  causes  de  la 
liberté  britannique  ;  et  pour  les  faire 
ressortir  avec  plus  de  force  dans  le 
tab'eau  qu'il  en  trace ,  il  compare 
le  gouvernement  des   Anglais  avec 
celui  des  Français  aux  principales 
époques  de  leur  histoire  :  il  établit 
ainsi  l'excellence  relative   du   gou- 
vernement britannique.  Après  une 
analyse  rapide  des  changeratnts  que 
de  longues  guerres  civiles,  les  riva- 
lités des  rois ,  des  hauts  barons  et 


1  oiiTr-ise  *\ir\»  conti'wvùon  A'  Angleterre^ 
t.  ..  trct-ioiiTent  réimprimé  l«nt  en  Fr«nc« 
^u'vii  Angleterre  et  en  Holl^^nHv.  Il  a  ili  Vt%AmXl 
•n   hollanja.'f  ,  Oordrtciitf   *''*t  in-S'. 


LOL  535 

du  |>euplc ,  et  la  confusion  drs  droiu 
des  uns  et  des  autres ,  «fairnl  f^it 
subir  à  la  forme  du  gouvrrnrmrnt , 
il  s'arrête  à  la  révolution  dr  lOHH 

3uifixalar.  riil  traite 

«•la  ïlivisi  ;  en  le^;i». 

latif  et  cxcfuiif,  de  huj*  rappgrts 
entre  eux ,  de  la  formation  de  l'un , 
de  l'étendue  et  des  limites  tic  l'autre, 
de  la  lil>crlé  individuelle  quant  aux 
droits  de  propriété,  de  sûreté  et  de 
locomotion;  enfin  delà  justice.  Dam 
l'examen  de  son  administration  m 
matière  civile  il  fait  entrer  celui  de 
l'oiganisalien  des  tribunaux,  et  par- 
ticulièrement de  la  cour  d'équité.  I«a 
procédure  criminelle  amène  le  de- 
veloppcment  du  jury  ,  de  son  ori- 
gine ,  de  son  existence  actuelle ,  de 
la  faculté  qu'ont  les  accusés  d'exercer 
un  çrand  nombre  de  récusations  , 
des  lois  sur  l'emprisonnement  ,  el 
enfin  des  princijies  qui  serrent  de 
base  à  l'acte  llabcns  coqnu.  Ton» 
ces  objets  sont  clairement  discutés 
par  de  Lolme;  mais  i^cut-èire  n'a- 
t-il  pas  assez  fait  sentir  les  imper- 
fections qu'on  reproche  encore  au 
jury  y  et  que  M.  liubicbon  a  relevés 
d'une  manière  si  piquante  et  si  ori- 
ginale. Après  avoir  ainsi  décrit  les 
diverses  parties  de  la  constitution , 
la  manière  dont  elles  se  balancent , 
et  comment  la  liberté  générale^  U 
stabilité  de  l'état  et  le  bonheur  des 
sujets  résultent  de  leur  réaction  réci- 
proque el  continuelle  »  l'auteur  exa- 
mine les  avantages  qui  lui  sont  par- 
ticuliers ;  et  il  les  trouve  dans  U 
divi.sion  des  trois  |>o»ivoirs  ,  dans  le 
droit  qu'a  le  |K>uple  de  proposer  le» 
lois  qu'il  juge  convenables ,  dans  U 
nécessité  qu  d  intervienne i'  "~ 

qu'il  ne  propose  pas  , 
même  intenrcntioii  pir  it_ 
plutôt  qu'en  iiiasae ,  et  à  et  MJiA  il 
traite  des  dectioM  et  àm  dfoU  4t 


636  LOL 

résistance.  Il  les  trouve  encore  dans 
la  liberté  illimitée  de  tout  dire  et  de 
tout  écrire ,  dans  celle  des  débats  du 
corps  législatif,  dans  celle  qu'ont 
tous  les  citoyens  de  prendre  une  part 
active  au  gouvernement  ;  dans  l'obli- 
gation où  est  le  pouvoir  exe'cutif  de 
suivre  la  lettre  de  la  loi,  et  enfin  dans 
l'inutilité  d'une  armc'e  permanente. 
Lorsqu'il  examine  le  gouvernement 
anglais  successivement  sous  sa  triple 
forme  monarchique,  aristocratique 
et  populaire,  il  le  compare  toujours 
aux  autres  gouvernements  anciens 
et  modernes  connus  et  constilue's 
selon  ces  diverses  formes.  Il  semble 
vouloir  faire  re'sulter  de  ces  paral- 
lèles, non-seulement  que  la  supério- 
rité relative  de  la  constitution  qu'il 
examine  est  incontestable  ,  mais 
encore  qu'elle  possède  tous  les  avan- 
tages des  autres  sans  en  avoir  les 
vices.  Tels  sont  les  objets  et  l'ordre 
dans  lequel  de  Lolme  les  discute  et 
les  expose  avec  une  haute  supe'riorite' 
d'idées  et  de  vues  nouvelles.  Son 
ouvrage  séduit  d'abord  •  et  il  semble 
qu'il  est  complet  et  irréprochable. 
Mais  on  sent  bientôt  que  l'auteur 
s'est  plus  attaché  à  démontrer  les 
avantages  que  les  inconvéniens  de 
la  constitution  dont  il  admirait  l'ex- 
cellence théorique.  On  chercherait 
envain  dans  son  écrit ,  les  obstacles 
qu'elle  rencontre  dans  les  mœurs  et 
l'esprit  de  la  nation,  et  les  moyens 
illicites  ,  mais  cachés  ,  qui  sont  em- 
ployés pour  en  éluder  l'exécution 
dans  beaucoup  d'occasions  impor- 
tantes ,  tels,  par  exemple  ,  que  dans 
l'institution  des  jurys  ,  dans  les 
élections  toujours  influencées  par  la 
corruption  ;  et  enfin  ,  dans  la  véna- 
lité trop  notoire  qui ,  en  assurant 
au  ministère  une  majorité  constante 
dans  le  parlement ,  semble  aussi 
pouvoir  seule  assurer  la  stabilité  de 


LOL 

l'édifice  politique.  Quoi  qu'il  en  soit, 
l'ouvrage  de   De  Lolme   est    très- 
estimé  des  Anglais.  Cependant  lei 
Whigs  lui  reprochent  de  prendre  ce 
qui  devrait  être  ,  ou  ce  qui  est  censé 
être,  pour  ce  qui  est.  Plusieurs  juris- 
consultes anglais  très-versés  dans  la 
connaissance  des  lois  de  leur  pays  , 
sont  loin  d'ailleurs  de  partager  toutes 
SCS  opinions.  L'éditeur  du  Tableau 
de  la  Constitution  dur ojaumecV  An 
gletâire,  par  Gustance,  après  avoir 
cité  De  Lolme  comme  l'un  des  écri- 
vains qui  ont  développé ,  avec  non 
moins  de  lumières  que  de  raison, 
les  principes  généraux  du  gouverne- 
ment ,  et  embrassé  dans  son  ensem- 
ble l'économie  entière  de  la  consti- 
tution britannique,  ne  le  croit  pas 
cependant  propre  à  rendre  populaire 
la  connaissance  de  ces  matières  (i). 
De  Lolme  montrait  en  société  un  es- 
prit gai ,  hardi,  d'une  fécondité  iné- 
puisable. Peu  d'hommes  étaient  aussi 
favorisés  de  la  nature;  mais  il  avait 
tout  fait  contre  lui-même.  Sa  vie  pri- 
vée est  rem])lie  de  singularités  ,  par^- 
mi  lesquelles  on  peut  citer  celle  de| 
n'avoir  jamais  voulu  assister  à  au- 
cune séance  du  parlement ,  pendant  | 
son  long  séjour  à  Londres:  lui-même | 
en  fait   l'aveu.  Il  était  presque  sans  j 
moyens  d'existence;  et  sa  fierté  l'em-j 
pécha  toujours  de  solliciter  pour  en  j 
obtenir.  Lorsqu'enfin  des  personna- 
ges éminents  tirent  des  récherches  , 
dont  le  but  était  probablement  de  le 
secourir,  il  fut  impossible  de  décou- 
vrir son  domicile  ,  parce  qu'il   en 
changeait  fréquemment,  et  qu'il  chan- 
geait aussi  souvent  de  nom.  Il  vivait 


(i)  De  Lolme  a  été  vivement  critiqué  parTau- 
tisur  (le  rEïamen  «lu  gouvernement  d'Angl<J- 
terre  comparé  aux  Coistitutiotis  des  Etats-Unis, 
qu'on  croit  être  M.  Livin<î<;toii  ,  et  surtout  dans, 
lus  tiofa  ajoutées  par  ixJiteur.  Oii  ne  peut  s» 
dissimuler  que  plusieurs  des  reproche»  (\\\'il  lu» 
t".:!t  ne  saient  foodé». 


î.or. 

Mi;  cl  son  exlerinir ,  ainsi  que 
ii.ibitudcs,  étaient  devenus  pres- 

repoussants.  Un  amour  extrc- 

1.1.    trindopcndance  ,    une  passion 

(liK  ;;lee  pour  le  plaisir  cl  le  )eu,  un 

t  décide   pour  une  sociele  infc'- 

(î ,  où  il  avait  le  plaisir  de  dotui- 
lA  i .  rarrètcrent  dans  sa  carrière  lil- 
î  'lire,  et  lui   firent  passer  une  vie 

(lise  entre  la  pénurie  et  des  Ira- 
\  peu  digues  de  lui.  Il  avait  tra- 
vaille pour  les  papiers  publics  :  c'e- 
!    ;  sa  ressource  ordinaire,  surtout 

|u'il  était  poursuivi  par  les  bail- 
.  et  condamne  a  garder  la  eham- 
.   Avant  de  quitter  l'Angleterre, 

ssurc  qu'il  reçut  quelques  secours 
!  i   société  des  fonds  littéraires 

rary  fund).  M.  d'Israeli  a  paye' 

I  ibut  d'éloges  plein  de  sentiment 

mémoire  de  De  Lolme  dans  ses 
-  dinités  des  auteurs.  D — z — s. 
LO-LOOZ  (  Le  chevalier  Robert 
DE  ) ,  né  dans  le  pays  de  Liège ,  vers 
i'j3o,fit  ses  premières  armes  au 
service  de  Suède ,  où  il  devint  colo- 
nel ;  passa  ensuite  à  celui  de  France , 
et  se  fixa  dans  ce  pays,  malgré  les 
offres  qui  lui  furent  faites  jiar  d'au- 
V   -    puissances.    Après   avoir   été 

^é  grièvement  au  siège  de  Berg- 
oji-Zoom ,  il  fut  presque  enseveli 
avec  une  grande  partie  de  son  dé- 
tacbement,  dans  une  fougasse  au 
chemin  couvert  de  Maestrichl;  fut 
tlessé  de  nouveau  à  l'expédiliou 
de  Ham ,  en  Westphalic ,  et  reçut 
la  croix  de  Saint-Louis,  au  siège 
de  Mcppen.  La  guerre  terminée,  il 
•'occupa  de  recherches  sur  la  tac- 
tique ancienne  et  moderne  :  mais 
les  désagréments  qu'il  essuya  l'ayant 
fait  renoncer  à  toute  idée  de  se  dis- 
tinguer dans  Tart  de  la  guerre ,  il  se 
livra  tout  entier  à  l'étude  de  la  phi- 
losophie. Lolooz  mourut  à  Paris, le 
lOavril  i786.0ttad€lui:l.-Rec/i^r- 


ches  sur  V^n  miUi. 

17O7,  in-S".  II.  Ui  M^,: 

delà  du  Garif^f,  11*^0 ^•i\ 

111.  Recherches  d  anliquan   mm  • 

taires, avec  une  défense  du  chcr^tii  r 

de  Folard  ,  Parii ,  1  ^70,  in-^'».  IV. 

Défense  du  chevalier  de  Fulanî  ^ 

15ouil!on,i77G,in.8".(r.  I 

(jliscMMrnT.    >   V.    Prrh. 

les  in  ' 

explii|M 

contre  les  syslèii 

Newton; — surli       , ^ 

du  magnétisme  universel ,  et  sur  le 
magnétisme  animal,  que  l'auteur 
trouve  pratique  de  temps  immémo- 
rial à  la  Chine;  —  sur  C instrument 
dit  héliopt,  inventé  par  de  Soniav 

f)our  donner  astronomiquement'la 
ongilude  en  mer ,  p.ir  le  soleil ,  au 
méridien, contre  les»  ^•  I.a- 

lande;  —  enfin  ,  sur  .  ■  rns, 

déduits  de  faits  historiques  et  d'ana- 
logies physiques  pour  puiser,  en 
pleine  mer,  de  l'eau  douce  et  pota- 
ble, 4  parties  en  un  vol.  in-8<».,  1 783. 
Lesdeux  dernières  parties  sont  moinf 
systématiques  par  leur  oh)«f  (in.- 1rs 
deux  premières  ,  traitées  I 

quement  et  conçues  dans  i, * 

d'une  métaphysique  qui  fait  tort  aux 
notions  de  piiysique,  mcices  aui 
idées  de  cosmologie  ancienne  dont 
l'auteur  s'appuie.  M — d  j. 

LOMAZZO  (  Jeatï-Piui.  \  pein- 
tre, et  savant  iulien ,  ne*  .1  *'  '       *  - 
36  avril  i538,  d'une  fan  1 
gucedubt»  ' 

Cômc,  np; 
telicr 
deG.i 

et  G  AUDE  ^ 

tudedes  b<  i 

imagination  vire  et  i 

tivait  en  même  tem; 

b  peinture:  mais  p^i - 

véritc  si  bito  mise  en  \n,u^^  •.  — ^ 


63S  LOM 

Tëcole  lombarde  par  Léonard  de 
Vinci ,  que  la  connaissance  de  l'iiis- 
toife,  des  mœurs  et  des  costumes  de 
tous  les  peuples  anciens  et  modernes 
est  nécessaire  aux  peintres  ,  il  F  étu- 
dia avec  une  sorte  de  profondeur , 
et  joignit  à  celte  étude  celle  de  la 
géométrie  et  de  la  physique ,  prin- 
cipalement en  ce  qui  concerne  Top- 
tiquc.  Pour  compléter  ses  études 
dans  tout  ce  qui  appartient  à  un  vé- 
ritable artiste,  il  parcourut  l'Italie, 
et  en  rapporta  une  grande  connais- 
sance de  la  manière  des  différents 
maîtres ,  avec  un  accroissement  d'é- 
rudition ,  et  un  goût  encore  plus 
décidé  pour  les  belles-lettres.  Tantôt 
on  le  voyait  peindre  à  Milan  j  et 
tantôt  il  présidait  une  académie  de 
savants  et  de  beaux-esprits ,  qui  s'é- 
tait formée  dans  le  Val  de  Bregno , 
près  du  lac  de  Come.  Il  fut  un  de 
ceux  qui  ,  par  leurs  compositions 
poétiques ,  donnèrent  le  plus  de  cé- 
lébrité à  cette  académie.  Ses  talents 
en  peinture,  et  la  justesse  avec  la- 
quelle il  aj^préciait  les  productions 
des  autres  artistes,  le  firent  appeler 
à  Florence  par  Gosme  de  Médicis, 
qui  l'établit  gardien  d'une  galerie 
dans  laquelle  il  y  avait  plus  de  qua- 
tre mille  tableaux ,  suivant  le  témoi- 
gnage de  Lomazzo  lui-même  ;  ce 
qui  contribua  beaucoup  à  lui  proci- 
rer  cette  vaste  connaissance  des  ou- 
vrages de  tous  les  peintres ,  qui  ca- 
ractérise ses  écrits.  Jérôme  Cardan 
avait  cru  voir ,  dans  ses  calculs  d'as- 
trologie, que  Lomazzo  deviendrait 
aveugle  :  et  pour  cette  fois  les  pré- 
dictions de  l'astrologue  ne  furent 
point  en  défaut;  car  Lomazzo  perdit 
réellement  la  vue  k  l'âge  de  33  ans^ 
si  l'on  en  croit  Argelati  (  De  Script. 
Mediol.  ) ,  Bianconi  (  Guida  di  Mi- 
îano  ) ,  et  Tabbé  Lanzi,  qui  n'a  parlé 
que  d'après  eux.  Cependant  Orlandi 


LOM 

(  Ahscsdario  pittorico  ) ,  dans  Tédit 
même  de  1763,  corrigée  et  aiigmeiii 
léc  par  P.  Guaricnti ,  prétend  qut 
Lomaz/.o  ne  devint  aveugle  qu'à  lu 
âge  très-avance  ,  et  peu  d'années  a* 
vaut  sa  mort.  Mais  comme  Orland 
s'est  trompé  d'ailleurs  sur  l'époqui 
de  la  naissance  de  Lomazzo ,  qu'i 
fixe  à  )  558  ,  on  est  fondé  à  le  croin 
aussi  peu  exact  sur  celle  de  la  cécit( 
de  cet  artiste.  Lue  médaille  frappét 
en  son  honneur,  en  i56o,  et  qu'Ar 
gelati  a  vue  dans  !e  Musée  du  collég( 
de  Créra  de  Milan  ,  portait  que  Lo- 
mazzo avait  alors  23  ans  :  Mtati. 
ann.  xxiii ,  MDLX.  Sur  le  reverj 
on  voyait  une  colonne  que  les  flotî 
d'une  mer  orageuse  ne  pouvaient 
ébranler ,  et  cette  légende  :  FirtUi 
fulmina  avaritiœ  coniemnit.  Il  ve- 
nait de  peindre  à  fresque  dans  le  re* 
fectoire  des  religieux  observantins 
de  i5.  Maria  délia  Pace,  à  Milan 
une  copie  de  la  cène  de  Léonard 
de  Vinci  ;  et  la  devise  avec  l'emblè- 
me semblerait  indiquer  des  persé- 
cutions occasionnées  par  l'avarice 
de  ceux  pour  lesquels  il  avait  fait 
cette  peinture.  On  pourrait  encore 
penser  que  son  père,  nommé  An- 
toine ,  désapprouvant  le  parti  qu'il 
avait  pris  ,  et ,  se  montrant  plus  que 
parcimonieux  à  son  égard  ,  lui  sus- 
citP.it  de  fâcheuses  tracasseries.  Au 
surplus,  Lomazzo  en  était  dédom- 
magé par  l'estime  publique.  Une  au- 
tre médaille  lui  fut  décernée;  et  on  la 
voyait  encore  ,  en  1  ^45  ,  thez  le  sa- 
vant biographe  Mazzuchelli.  Enfin 
il  reçut  de  ses  contemporains  des  té- 
moignages d'estime  et  d'admiration 
de  tous  les  genres.  Les  plus  illustres 
poètes  le  célébrèrent  dans  leurs  vers. 
Sigismond  Foîiani  fit  en  son  honneur 
un  poème  latin;  Bernard  Rainoldi 
et  J.  B.  Visconti  lui  en  consacrèrent 
chacun  un  en  italien;  Laurent  Tos- 


LOM 

i  can  y  Loui5  Gandini ,  Françoix  Biit« 
tinoiii,  J.  F.  Visconti ,  Bernard  Bal- 
dini ,  Scipion  All^mi ,  etc. ,  de.  ,  Je 
^hanl^rcnl  également  dans  leurs  poé- 
sies. Ces  éloges  étaient  si  peu  le  rc- 
I  sultat  d'un  entliousiasmcdc  circons- 
,   tance,  que,  dans  les  siècles  suivants, 
I  ils  furent  renouvelés  par  des  écri- 
I   vains  trcs-judicicux,  tels  que  Fonta- 
,   mm{DelVeloquen^aitaliana)yCres- 
I  cirabeni  (  Délia  volgar  Poesia,  vol. 
I   VII ,  1.  2  ,  c.   3i  ) ,  Moriggia  (  De 
I    Nobil.  Mediol.  ),  Gl.il  i  no  (  Teatro , 
;  part.  //  )  ,  P.  Bosca  (  De   Ori^.  et 
statu   Biblioth.  Jmhros.  )  ,  Pinelli 
(  Athenœiim),  et  par  tous  les  Ita- 
liens qui  ont  publié  des  Vies  de  pein- 
tres. La  brillante  imagination  ,  cette 
admirable  perspicacité ,  ce  charme 
de    langage  ,  que   Baldini  trouvait 
dans  Lomazzo  déjà  aveugle ,  attes- 
tent qu'il  était  alors  dans  tjule  la 
vigueur  de  son  génie  ,  et  par  consé- 
quent à  la  fleur  de  l'âge.  Il  supporta 
son  infirmité  avec  résignation  ,  et  la 
rendit  même  plus  utile  ^u^  progrès 
de  l'art  que  ne  l'aurait  été  son  pin- 
ceau. Recueillant  en  son  esjnit  tout 
ce  qu'il  avait  acquis  de  lumières  par 
l'étude  de  l'histoire  et  des  sciences 
relatives  à  son  art,  et  par  l'examen 
réfléchi  et  comparé  des  œuvres  de 
tous  les  peintres,  il  dicta  le  Traité 
de  Peinture  le  plus  important  et  le 
plus  complet  qui  ait  paru  jusqu'à  ce 
jour,  sans  en  excepter  ce  recueil  de 
fragments  de  Léonard  de  Vinci  que 
Trichet  du   Fresne   publia  le  pre- 
mier à  Paris,  en  i65i,  in-fol.,  com- 
me un  véritable  traité  de  ce  grand 
maître  (  Voyez  Vinci  ).  Celui  de  Lo- 
mazzo, protégé  dans  toute  la  chré- 
tienté par  un  bref  de  Grégoire  XIII, 
et  par  un  privilège  du  roi  d'Espa- 
gne, se  compose  de  sept  livres.  Le 
Sremicr  traite  des  proportions  consi* 
crées  Don  seulement  dans  les  hom- 


LOM 


«3o 


MM,  Mats  Wirorrdi»n<  l*»4  rh^rattt, 

cl  dans  les 

cUitecturr. 

tcur    s*o« 

comme  r\i  >> 

l'amc;  la  dilln  «• 

manifestent,  n 

suivant  les 

est  déliiilliv:  ..,,,. 

cisiou.  Les  coul(:ur> 

trc  elles  sous  le  rap|«>ii  •  imi,  <|  .^ 

et  dans  leur  emploi  5nu5un  rdip;Nir( 

moral  et  i'   '         '  '  !- 

sujet  du  II 

ses  eflèts  du  et  Is  ou  kIIi 

diflcrents  corps,  ri  U  m 
elle  doit  être  «li 
sont  exjïosés  n 
Iructive,  au  quatrième  \\\ 
quième,  consacre  à  la  {) 
fait    admirablement   sentir  ( 
gagnent  ou  perdent  les  ray< 
suels,  suivant  les  distances  cl  1 
férents  points  de  vue.  Là,  cxpi 
son  indignation  contrecctixq  : 
positaires  de    quelques    t"^- 
d'autnii ,  s'attribuent  c< 
sent,  il  publie  comme  étani  ir 
mante  ceux  qu'il  a  de  lui  s 
trois  modes  de  jKTsjjective.  1  ■ 
sixième  il  examine  l'art  d»*  1* 
position  en  peinture,  cl  " 
donuance  des  choses  :  n-  -» 

riche  en  excellentes  dorini.«'>.  An 
septième,  entrant  dan»  le  drtail  <icf 
compositions  historiques  et  aytli** 
logiques,  et  considcrant  tout  Ici  lli«i 
qui  peuvent  entrer  d 
sition ,  il  indique  d*i 
comment  chacun  d'eux  doit  éUne  re- 
présenté. Partout  les  eienpIetTMi- 
nent  à  l'appui  des  préceptes;  et  tm 
exemples  sont  tires  des  uvviifp  <k 
4i5  artistes  en  tout  mre,ciléicl 
jugés  dans  le  cours  de  l'oomiJ^eOl 
»  y  trouve,  dit  Laii£i,d*cs 
»  théories,  des  notices  ^' 


64o  LOM 

»  fort  intéressantes,  de  jutlicienses 
»  observations  sur  la  pratique  des 
»  meilleurs  maîtres, beaucoup  d'éru- 
î)  diîion  sur  la  mythologie, sur  l'his- 
•>■)  toire,  les  mœurs,  les  costumes.  » 
Comme  cet  ouvrage,  trop  sa  vaut,  trop 
substantiel  pour  de  jeunes  élèves  , 
pourrait  les  de'courager ,  Lanzi  ne 
leur  en  conseiiie  pas  la  lecture.  «  IMais, 
î>  conlinue-l-i]  ,  les  maîtres  avancés 
»  dans  l'art  ne  peuvent  se  dispenser 
■»  de  le  méditer  ;  et  ils  doivent  en 
»  faire  lire  les  meilleurs  chapitres  à 
»  ceux  de  letirs  disciples  qui  ont  le 
»  ])his  de  pratique  et  qui  paraissent 
»  véritablement  inspirés  par  le  gé- 
»  nie  de  la  peinture,  parce  qu'il  n'est 
î)  pas  de  livre  plus  propre  à  fécon- 
»  der  l'esprit  des  jeunes  gens  en  idées 
To  de  peinture  pour  chaque  sujet,  à 
»  les  inspirer  plus  heureusement, 
»  à  les  instruire  de  ce  qu'ils  doivent 

))  savoir »  Loin  de  ressembler 

aux  maîtres  qui  mettent  une  si  ridi- 
cule imj)ortance  à  se  faire  copier 
par- leurs  élèves, Lomazzo  avait  pour 
maxime  qu'un  jeune  artiste  court  le 
risque  de  perdre  ou  de  détériorer 
son  talent  en  imitant  les  peintures 
d'autrui,  soit  par  des  copies,  soit  par 
des  calques.  Il  veut  que  le  peintre 
vise  à  être  original,  en  créant,  à  lui 
seul,  dans  son  esprit,  toutes  ses  com- 
positions, et  qu'il  ne  se  permette  de 
copier  que  les  objets  de  détail.  Il 
avait  senti  le  prix  de  l'originalité,  dès 
l'âge  de  vingt-deux  ans,  lors  même 
qu'il  peignait  sa  copie  de  la  Gène  de 
Léonard  j  car  en  respectant  les  per- 
sonnages, il  s'était  permis  des  varian- 
tes singulières  dans  tout  le  reste  (  i). 
Ses  co?iipositions,  bien  conçues,  at- 
taclieiit  par  la  nouveauté  même  bi- 


(i)  La  (k'soiiption  (îe  c-'ttu  copie  comparée  à 
l'original  03  ii;  n  II  page  19^1  de  VFs.scr/  histo- 
rique ,  /'SycoIogig//f!,  sur  le  cénaclf.  rie  Léo- 
nard de  Vinci)  Milan  ,  ùhi,  vol.  iii-!j". 


LOM  1] 

zarre  de  ses  idées.  Telle  est  sa  g'rancîo 
fresque ,  représentant  un  Repas  en 
maigre,  dans  le  réfectoire  des  Augus- 
tius  a  Parme,  et  1'  Ojfrande  de  Mel- 
chisedech  chezles  chanoines  réguliers 
de  Santa  Maria  délia  Passione,  a  Mi- 
lan :  la  beauté  de  ce  dernier  morceau 
avait  décidé  ces  religieux  à  conver- 
tir le  réfectoire  en  bibliothèque  ; 
mais ,  depuis  leur  suj^pression  ,  ce 
local  est  devenu  un  collège  de  danse 
et  de  musique.  Les  autres  tableaux 
du  môme  artiste  les  mieux  conser- 
vés, sont  le  Christ  au  jardin  des  OU- 
ncrs ,  dans  l'église  paroissiale  de  S. 
Maria  de'  Servi,  à  Milan  ;  et,  dans 
celle  de  St.-Marc  de  la  même  vil'e  , 
ime  Vierge  tenant  sur  son  sein 
V Enfant-Jésus  qui  tend  les  clefs  à 
saint  Pierre.  Les  autres  peintures  de 
Lomazzo  nesont  plus  connues  que  par 
la  notice  qu'il  en  a  donnée  dans  ses 
poésies  intitulées:  Groteschi.  Sa  vie 
qu'il  écrivit  lui-même  en  vers  .yc/oZit/, 
autoriserait  à  croire  qu'il  parvint  à 
un  âge  avancé  ;  mais  on  ne  connaît 
pas  l'époque  de  sa  mort.  On  voit  ])ar 
une  édition  de  ses  écrits  dirigée  par 
lui-même,  qu'il  vivait  en  i5r)i;  et 
tout  indique  qu'il  mourut  à  la  lin  du 
seizième  siècle  :  il  était  encore  en 
réputation  vers  le  milieu  du  dix-hui- 
tième ,  dans  la  galerie  des  grands 
ducs  de  Toscane,  oii  l'on  montrait 
un  très-beau  portrait  de  lui ,  peint 
par  lui-même.  Ses  productions  litté- 
raires sont  :  I.  Trattato  délia  Pittu- 
ra  diviso  in  sette  Z/Z/n,  Milan,  i584, 
in-4*^.  •  réimprimé,  en  i585,  en 
iSgo ,  dans  la  même  ville  ,  avec  ce 
titre  :  Trattato  delV  arte  délia  pit- 
tura^  scultura  ed  architettura  libri 
VII,  volume  in-4^.  de  700  pages  :  les 
deux  dernières  éditions  contiennent 
quelques  augmentations  •  et  l'on 
trouve,  dans  un  manuscrit  de  la  bi- 
bliothèque de  Smith  ,  à  YcnisCy  ua 


tliapitre  de  plus,  qui  n'exUttâàiiê 
aiu  une  des  éditions  connues.  L'ou- 
vrage a   ctc  traduit  en  anglais  |)ar 
Ha) dock,  Londres,  iSqS,  in-fol.  Le 
premier  livre  a  été  trad.  en  français  , 
et  publie  par  Hilaire  Pader ,  sous  ce 
litre  :  Traité  d<'  la  proportion  na- 
turelle  et   artificielle   des  cfioses  , 
Toulouse,  1649,  in-fol.  avec  figures: 
les   autres   livres   n'ont   jamais  été 
traduits  ;  et ,  à  mesure  que  la  pein* 
ture  a  dégénère  ,   les  peintres  ,  par 
intérêt  d'amour-propre,  ont  repousse 
de  plus  en  plus  dans  l'oubli  le  traite' 
de  Loraazzo.  Cependant ,  tout  ce  qui 
a  été  dit  de  mieux,  sur  le  moral  de 
l'art ,  par  Lairesse  et  autres  artistes 
qui  ont  écrit  sur  la  peinture  ,  est  un 
emprunt  clandestinement  fait  à  cet 
ouvrage.   IL  Rime  varie  dinse  in 
sette  libri ,  Milan  ,   1687  »  ^^'^°'  > 
c'est  là  que  l'auleur  ,  imitant  dans  sa 
poésie  ce  que  les  peintres  appellent 
groteschi  y  a   peint   en   vers   beau- 
coup de  choses  en  l'honneur  de  Dieu , 
des  objets  sacrés  ,  des  princes  ,  des 
littérateurs  ,  des  peintres  ,  des  sculp- 
teurs et  des  architectes.  IIL  Fita  di 
lui  stesso  scritia  in  versi  sciolti , 
réunie   avec   les  Bime  varie,   etc. 
IV.  Délia  forma  délie  Muse ,  Mi- 
lan ,  iSgi  ,  in-4**.  ;  ouvrage  tiré  des 
auteurs  grecs  et  latins  ,  et  dédié  à 
Ferdinand  de  Médicis.  V.  Idea  del 
tempio  delta  pittura  ,  Milan  ,  1 584, 
în-4°.  ;  réimprimée  dans  la  même 
ville  ,  en  1 591  ,  même  format.  VI. 
Balnsch  ,  rime  in  Ungua  milanese  , 
«ous  le  nom  de  Compà  Zavargna 
Nabat  dra  val  de   Bregn  (  par  le 
compère Zavargna  Nabat  près  du  val 
de  Bregno  ) ,  divisé  en  deux  parties, 
dédié    au  comte  Visconti  -  Borro- 
raée ,  in-4°. ,  Milan,  1 585  et  1 589  : 
réimprimé   in-ia  ,   dans  la   même 
ville  ,  en    1627.  VIT.   Jccademia 
'délia  valle   di  Bregno  ,   oii  soûl 


Lu>l 

plosîeuri  po^tQf^  en  .tlalerfr 

nais  usité  d.in^ 

Ion  que  l'aMur^  .  .     .. 

connaitre  cet  ouvr.igc  ri  i 

sans  dire  ni  le  lieu  ,   ni   l 

leur  impression.  Vlll.  /   ; 

sopra  il   trattato    (^■'•'  <, 

pittura.  hAijkTe'K\\^\  1     >. 

CoTTA  )  ,  dans  ses   .iiini 

tées  manuscrites,   à  sc'it  i 

NfHfariense,  dit  qu'il   possédait    un 

cahier  de  pocnios  de  LomajLto  ,   en 

latin  et  en  italien  ,  également   inr- 

dits.  G— M. 

LOMBARD  :  PiKUBE),  lurnommé 
le  Maître  des  sentences  ,  était  né 
au  douzième  siècle,  de  parents  pau- 
vres et  obscurs,  dans  an  bour?  il.* 
la  Lombardie  près  de  Novar' 

heureuses  dispositions  lui  ineni 

un  protecteur  ,  et  on  l'envoya  faire 
ses  premières  études  k  Bologne  :  il 
passa  oisuite  en  France  ,  avec  une 
lettre  de  recommandation  de  IVv^ 
que  de  Lucques.  Place  à  l'école  de 
Reims  ,  par  saint  Bernard  ,1' 
de  grands  progrès  dans  les  >• 
qu'on  cultivait  à  cette  époque.  De  J4 , 
il  se  rendit  à  Paris  ,  attiré  par  U 
célébrité  des  professeurs  de  l'univer- 
sité :  il  se  pro(>osait  d'y  passer  quel- 
ques mois  seule :ncnt  ;  mais  le  plai»ir 
qu'il  goûtait  avec  des  condiiiiplrt  , 
animes  de  la  même  ardrur  p<»ur 
l'étude,  le  déterrai n.i  j  s'\  fi\rr.  Ou 
croit  qu'il  est  le  pr.  t  rrvu, 

à  rumversitc  da  1'.*..  .  n--^^^^  ^^ 
docteur.  H  fut  pourvu  d'une  chaire 
de  théologie,  ou'il  r-"--'-'  "'."■"•-* 
années,  avec  beau' 
enfin  ,  il  succéda  ,  eu  1 1  mj  .  j  i  m- 
baut  ,  évéque  de  Paris  ;  et ,  pendant 
le  peu  de  temps  qu'il  occupa  ce 
siège  important,  il  se  conduisit  jtcc 
l)eaucoup  de  sagesse  cl  de  modestie 
11  mourut  le  y  juillet  1 160  ,  et  fat 
inhuoié  dans  It  ohonir  dt  l^'é^/^  éê 

4> 


^i1 


LOM 


Saint-Marcel ,  où  l'on  voyait ,  il  y  a 
quelques  années,  son  tombeau  de'core' 
d'une  ëpitaphe  très-honorable  (i). 
La  faculté  de  théologie  a  toujours  eu 
en  vénération  la  mémoire  de  ce  sa- 
vant prélat  ;  et  chaque  année  elle 
faisait  célébrer  une  messe  le  jour 
anniversaire  de  sa  mort.  On  a  de 
lui  :  I.  Un  Cours  de  théologie  sous 
le  titre  de  Sententiai^m  libri  iv  , 
Nuremberg,  i474  (^)j  Venise,  i^'j'], 
1 480 ,  1 4B6  ,  in-folio  :  les  premières 
éditions  sont  encore  recherchées. 
Malgré  les  erreurs  qu'il  contient  (3), 
cet  ouvrage  a  joui  long-temps  de  la 
plus  grande  vogue  dans  les  écoles  j 
il  serait  impossible  de  citer  toutes  les 
éditions  qui  en  ont  paru  dans  le  xvi®. 
siècle  (4)  :  le  nombre  des  commenta- 
teurs qu'il  a  eus  est  immense.  J.  Pits 
ouPitseus  en  comptait  cent  soixante, 
parmi  les  Anglais  seuls  ;  l'abbéRacine, 
deux  cent  quarante-quatre,  en  tout,  et 
le  comte  San-Raphaëlpresqueuuefois 
autant.  T^es  deux  plus  célèbres  sont 


(i)  Cette  épitAphe  porte  que  P.  Lombard  mou- 
rut le  XIII  lies  kalende&  d',ioùt  (  20  iiiillet)  1164  } 
mais  ou  sait  que  Muiiricfî  de  Sully  l'ut  élu  évoque 
de  Pari»  ,  en  1160  •  et  la  plupart  dp«  critiques  en 
ont  conclu  que  la  date  de  11G4  avait  été  ajoutée 
h  l'épitaphf.  Cependant  les  rédacteurs  de»  Mé- 
moires de  Trévoux  fournissent  un  autre  moyen 
de  résoudre  cette  difficulté.  «  Ne  pourvait-il  pas 
»  être,  disent-ils,  que  P.  Lombar<l  eût  quitté 
»  l'episcopat ,  en  n6o  ;  qu'alors  Maurice  de  SuL 
»  ly  lui  eût  succédé,  et  que  Pierre  s'étant  retiié 
•>  au  faubourg  Saint-TMarcel,  y  soit  mort  en  1164? 
n  Ne  serait-ce  point  même  par  cette  raison  qu'il 
»  a  été  enterré  dans  l'église  de  Saint-Marcel  7  « 
{Mémoires  de  Tréuoiix  ,   nov.  ir^i,  p-  124».) 

(2)  Cette  édition  est  citée  nonseultroent  par 
Maittaire  ,  mais  par  Sauherl  même,  Historia 
Bibliothecœ  Noi-îlerg^nsis  ,  Nuremberg, 
4643,  in-24,  pag.  ia&. 

{Vj  L'abbéRacine,  dans  son  abrégé  de  î'  his- 
toire eccléfiaslique  (  lom.  v  )  ,  lui  reprodi» 
jusqu'à  vingt-six  erreurs;  Jean  de  Cornouailles, 
«on  disciple  ,  ni  l'abbé  Joachira,  n'en  avaient  pas 
tant  reniarqui^.  Dans  un  endroit  ,  P.  Lombard 
«xaininesi  Jéa.-Chr. ,  comme  hvmme,  était  une 
personne  ou  quelque  chose  ,  et  il  décide  qTio  ce 
n'était  pas  quelque  chose  (  non  est  aliquid). 
Cette  singulière  conclusion  fut  condamnée  par 
je  concile  de  Tour»,  en  ii63,  et  par  le  pape 
AUxaudre  lll. 

(4)  Cet  ouvrage  fut  encore  réimprimé  plusieurs 
foi»  dans  le  dix-septième  siècle.  La  dernière  éUi- 
tion  parait  être  4«lUd«  r.sueD  ,  iG'»;,  iii.4^. 


LOM 

Saint-Thomas  d'Aquin  et  Estîus.  On 
trouvera  une  analyse  très- étendue  de 
cet  ouvrage  dans  Vffist.  littér.  dg 
France^  tom.  xii ,  et  dans  Vffist.  des 
auteurs  ecclésiasticf,, i^arD.  Ceillier, 
tom.  XXIII.  Pierre  Baudin  ou  Bau- 
dintis ,  contemporain  de  P.  Lombard , 
en  avait  fait  un  Abrégé ,  qui  est 
resté  long-temps  inconnu  ^  Chélido- 
niiis  ,  abbé  des  bénédictins  écossais 
à  Vienne  ,  en  ayant  retrouvé  un«? 
ancienne  copie  ,  fit  imprimer  cet 
ouvrage  en  1 5 1 9  ,  in-folio  ,  avec  une 
dédicace  à  l'empereur  Maxi milieu  , 
dans  laquelle  il  accuse  P.  Lombard 
de  plagiat  ;  mais  l'erreur  où  était 
Chélidonius  a  été  reconnue  depuis, 
et  P.  Lombard  justifié.  IL  Glossa 
in  psalterium  Dwidis,  Nuremberg , 
1478,  in  -  folio  ,  première  édition 
très-rare;  Paris,  i533,  iSSy,  i54i, 
in-folio  :  l'auteur  a  inséré  dans  ce 
commentaire  la  Glose  interlinéaire 
d'Anselme  de  Laon.  IlI.  Commen- 
taire  sur  la  Concorde  évangélique , 
1 4B3  et  1 56 1  ,  deux  éditions  citées 
dans  Vffist.  littéraire  de  France, 
IV.  Collectanea  in  omnes  D.  Pauli 
epistolas f  etc.,  Vsiris  y  i535,  i537  , 
in-fol.  _,  et  réimprimé  plusieurs  fois 
in  -  8".  Les  ouvrages  suivants  sont 
restes  manuscrits:  Glose  sur  le  livre 
de  Job  ;  Sermons  pour  les  di- 
manches '-  les  fêtes  de  Vannée  ; 
—  Deux  Lettres  ;  —  une  Méthode 
de  théologie  ;  —  et  enfin ,  son  ApO"' 
logie,  pour  se  justifier  de  l'accusation 
de  nihilisme ,  portée  contre  lui  par 
Jean  de  Cornouailles  ,  l'un  de  ses 
disciples,  qui  parvint  à  le  faire  con- 
damner par  le  concile  de  Tours.  On 
peut  consulter,  pour  plus  de  détails, 
Tiraboschi  Istor.  letter. ,  tom.  in  ,^ 
p.  3oi  et  suiv.  ,  et  les  Piémont esi 
illustri,  tom.  i^r.  W—s. 

LOMBARD  (  Jean- Louis  ) ,  sa- 
vant professeur  d'artillerie^  naquit 


A  Strasbourg  en  1 7  i3.  Avide  de  toute 
espèce  de  connaissances, il  fut,  à  18 
ans ,  reçu  docteur  en  philosophie  à 
I  l'université  de  Strasbourg  :  il  réunis- 
sait à  la  cullure  des  sciences  inathé- 
maticfiies  et  physiques ,   celle  de  la 

SInpart  des  langues  anciennes  et  mo- 
crues,  de  l'archéologie  même  et  de 
la  jurisprudence.  Reçu  ,  vers  174^  , 
avocat    au  conseil  souverain  d'Al- 
,    sace,  il  partit  pour  Paris,  où  il  em- 
I    ploya  quatre  années  à  se  perfection- 
!    ner  dans    les    connaissances  qu'il 
j     avait  acquises  :  ce  fut  au  bout  de  ce 
terme,  en  1747»  qu'il   se  fit  rece- 
voir avocat  au  parlement  de  Metz  , 
devant    lequel    il   plaida    plusieurs 
I    causes  avec  quelque   distinction.  Il 
I    avait  fait  à  Metz  connaissance  avec 
I    Robillard,  savant  professeur  à  l'é- 
j    cole    d'artillerie    de   cette  ville;  il 
obtint  la  main  de  sa  fille,  et  la  rési- 
gnation  de  sa  place ,  à  laquelle  il 
fut  nomme  ec   1748.  Ce  fut  alors 
qu'il  entreprit  la  traduction  des  Nou- 
veaux Principes  d* artillerie  de  Ben- 
jamin Robins,  bon  ouvrage  que  Léo- 
nard E'iler  avait  commenté ,  et  qui 
n'était  pas  connu  en   France  (  i  ). 
Cet  ouvrage  parut  en  1783,  sous  ce 
titre:  Nouveaux  Principes d' artille- 
rie, etc.,  traduits  de  l'allemand,  avec 
des  notes, Dijon  et  Paris,  Jombert, 
in-8°. ,  fig.  Cette  traduction  parut  si 
bonne  à  Keralio ,  qui  avait  aussi  en- 
trepris de  faire  passer  dans  notre 
langue  le  travail  de  Robins  et  d'Eu- 
ler,  qu'il  abandonna   son  ouvrage. 
Au    surplus ,    Lombard    ajouta    au 
«ien  la  traduction  des  Nouvelles  ex- 
-périences    faites    à    fVolwich   {1) 
pour  connaître  les  vitesses  initiales 

(t)  Leroy,  et  «a  17x1 ,  Diipiii*  (ilt,  a*ai«*t  d«ià 
donné  chacun  une  tiaJiiition  de  l'uuTraf*  <!• 
Kobtnt;  mai*  CM  traJiiciiont  n't-iaient  pa*  ac» 
Otmpagnéei  du   commentaira  U'^iilrr. 

(«)  Tirée*  d«s  TfSsMCtioiu  pbiU«opbiqaf«  , 


LOM  6{3 

des  boulets ,  et  rHIe  d'un  ntraic  d« 
la  Dissertation  tV EuUr  sur  l'ex  U' 
cation  des  phénomènes  del'eir'  i  )/ 
il  y  joiçnit  auMÏ  d'etcrlltnle»  notai. 
En  1 7  K).  lors"  li«Mnetild« 

l'école  d'artilli  ««one,  IjO»« 

bardyfut  cnvuvo  |H>ur  y  occuperMOt 
chaire  de  profoseur; pfjre(|«  itreon 
plit  avec  distinction,  jusqu'il.)  im  ir. 
arrivée  le  r^.  avril  1794.  <.'t*il 
pour  donner  à  ces  écoles  un  f  oum  d« 
mathématiques ,  supérieur  à  relui  de 
Camus,  que,  d'après  lcde!^ir  du  gou- 
vernemenl ,  Lombard  .»•  "•  •  «n- 
^Oiéxxn  Traité  tle  f^éom,  ,| 

restéinédil,  lecours''    !  ,t 

été  agréé.  Il  fut  chu  >. 

tère  de  se  réunir,  en  1 7»  »*  > 
frère  Brackenhull'er .  de  > 
pour  substituer  au  < 
en   ce  qui   conceru 
applications  relalivo  a  V^t\ 
Quoiqu'un  tel    livre  fût  fort 
Ëezout  intervint  pour  proté^ 
ouvrage;  et  Loml>ard,  après 
vail   infructueux  de   plus  d'un  an, 
eut  le  désagrément  d'avoir  mn  .»n- 
tenté  Bezout,  et  d'être  al'  i 

ministre.  Revenu  ,1  >.i  .1  ..  ...it 

à  profit  son  e\  s  con- 

naissances prol;>.....  • ,  ..  |....mm  ,  etk 
1 787 ,  en  un  vol.  iinS». ,  det  TabUi 
du  tir  des  canons  et  des  ohmn§rt  t 
on  trouve  dans  cet  ouvra|{0  artilé 
le  résultat  des  épreuves  failei  k  !*#• 
cole  d' Auionne ,  en  1786.  sur  1« 
tir  des  bombes  ave<  ' 
les  portées  desmo; 
professeur,  ayant  twXa^Mc  U  jurti 
de  la  révolution,  vonltif  1^  werfxt 
pr  un   ouvrage  q  "^  tri». 

utde:  il  fil  imphno  .i.poor 

le  service  des  caocmuers' 
une  Instruction  sur  la 


(t    Fttrad  Jm  M^«i*ir»t4*  i' 

4'. 


644  i^OM 

le  tir  du  canon  de  bataille  ^  Dole  , 
in-B'*.  lig.  Ce  fut  au  milieu  de  ses 
travaux  que  Lombard  termina  sa 
carrière,  à  Auxomie,  occupe' de  l'im- 
pression de  son  Traité  dumouvement 
des  projectiles  ^  applifjué  au  tir  des 
bouches  à  feu;  cet  ouvrage  ne  parut 
qu'en  Tan  V,  à  Dijon,  i  vol.  in-S^. , 
fis;.  Lombard  ,  très  -  savant  dans  les 
mathématiques  et  dans  tout  ce  qui 
concernait  son  ëtat ,  réunissait  plu- 
sieurs connaissances  très  -  variées  , 
parlait  plusieurs  langues  ,  écrivait 
elégammentjs'exprimaitavec  facilite', 
et  n'était  étranger  ni  «à  la  littérature, 
ni  au  dessin,  ni  à  la  musique.  M.  A- 
manton,  membre  de  l'académie  de 
Dijon,  publia,  en  1802,  des  Recher- 
ches biographiques  sur  Lombard, 
in-8". ,  de  48  pages.       D — b — s. 

LOMBARD  (  Cl  AUDE- Antoine  ), 
chirurgien,  naquit  à  Dole  en  Fran- 
che-Comté, en  i74i'  Ses  parents, 
quoique  peu  riches ,  lui  firent  faire 
quelques  études  ,  après  lesquelles  ils 
le  mirent  chez  un  chirurgien  de  la 
ville ,  pour  apprendre  un  art  qu'il 
devait  un  jour  exercer  avec  tant  de 
distinction.  Il  fut  bientôt  en  état  de 
se  présenter  pour  faire  partie  de  la 
communauté  des  maîtres  de  Dole  ; 
mais  ceux-ci ,  effrayés  peut-être  de 
l'ascendant  qu'il  ne  manquerait  pas 
de  prendre  sur  eux  par  des  talents  et 
par  une  activité  qu'ils  ne  pourraient 
égaler,  mirent  à  sa  réception  tant 
d'obstacles ,  et  lui  suscitèrent  dans 
le  cours  de  ses  épreuves  tant  de  dif- 
ficultés ,  qu'il  les  récusa  tous,  et  alla 
se  faire  examiner  à  Besançon  ,  oii  il 
trouva  des  juges  éclairés  ,  exempts 
de  passion  et  d'intérêt ,  qui ,  après 
des  actes  publics  sévères, l'admirent 
à  l'unanimité.  Il  devint  ensiùte  chi- 
rurgien eu  chef  de  l'hospice  civil  de 
Dole.  Lombard  concourut,  en  1776, 
À  l'académie  royale  de  chirurgie,  et 


LOM 

obtint  l'accessit.  La  question  était 
celle-ci  :  a  Comment  Vair  par  ses 
»  diverses  qualités ,  peut-il  injluer 
»  dans  les  maladies  chirurgicales , 
»  et  quels  sont  les  mojens  de  le 
»  rendre  salutaire  dans  leur  traite- 
V  ment  ?  »  En  1779,  il  remporta  le 
premier  prix  sur  ce  sujet  :  a  Expo- 
»  ser  les  effets  du  mouvement  et  du 
»  repos,  et  les  indications  suivant 
»  lesquelles  on  doit  en  prescrire  l'u- 
»  sage  dans  la  cure  des  maladies 
»  chirurgicales.  »  Cette  savante  com- 
pagnie le  nomma  ,  en  1 780 ,  l'un  de 
ses  correspondants  ^  et  il  en  devint 
associé  regnicole  peu  d'années  après. 
Des  troupes  ayant  été  rassemblées 
sur  les  côtes  de  Normandie,  Lom- 
bard fut  nommé  chirurgien  en  chef 
de  cette  petite  armée;  et ,  après  sa 
dislocation,  on  lui  conféra  le  titre  d« 
chirurgien-major  de  l'hôpital  mili- 
taire de  Strasbourg.  Il  y  débuta  par 
sa  Dissertation  sur  {'Importance  des 
évacuants  dans  la  cure  des  plaies  ré- 
centes, suivie  d' Observations  sur  la 
complication  du  vice  vénérien  et 
scorbutique  ,  in-S".  ,  Strasbourg, 
1 782.  Cet  écrit,  le  premier  qu'eût  fait 
imprimer  Lombard,  fut  censuré  par 
le  docteur  Dehorne ,  rédacteur  du 
journal  de  médecine  militaire  ,  le- 
quel, vain  et  prétentieux  lui-même,, 
iît;  sut  pas  assez  ménager  celte  dou- 
ble faiblesse  chez  l'auteur ,  qui  lui 
déclara  la  guerre ,  et  ne  lui  épargna 
ni  les  reproches  de  toute  espèce, 
ni  même  les  personnalités  ;  car  Lom- 
bard était  violent,  irascible,  et  ne 
convenait  jamais  de  ses  torts ;,  ni  de 
ses  erreurs.  Cette  critique  hâta  la 
publication  d'une  autre  dissertation 
faisant  suite  à  la  première,  sur  l'U- 
tilité de  s  évacuants  dans  la  cure  des 
tumeurs ,  plaies  anciennes,  ulcères , 
etc.,  Strasbourg,  1783,  in-8^.  de 
a4o pages.  Ce  second  ouvrage  échap- 


LOM 

pi  n\\\  «tt.iqiics  de  Dcïiornr,  qiioi- 
I     qu'il  uc  fût  pas  exempt  de  défauts; 
i     mais  ce  critique  craignit  de  renouve- 
ler une  lulte  dans  laquelle  son  irré- 
.  conciliablc  adversaire  l'eût  de  nou- 
veau réduit  au  silence.   Lombard, 
I    dans  ce  genre  d'escrime  ,  e'tait  re- 
I     doutable  par  son  opiniâtreté,   son 
I    scepticisme,   et    la   fertilité   de   sa 
plume.  Il  eut  de  longues  et  de  vives 
querelles   littéraires,  judiciaires  et 
autres ,  avec  les  médecins  et  les  chi- 
rurgiens les  plus  estimés  de  Stras- 
bourg; et  son  animosité  était  exci- 
tée et  entretenue  par  un  médecin  ap- 
pelé Laurent ,  encore  plus  irritable 
et  plus  intolérant  que  lui.  Ce  scan- 
dale dura  plusieurs  années,  et  fut 
cause  que  Lombard,  aux  talents  du- 

?[uel  ou  rendit  toutefois  justice,  ne 
ut  que  rarement  appelé  par  les  Al- 
saciens pour  les  traiter  ,  et  qu'il 
resta  confiné  dans  son  hôpital ,  et 
parmi  les  militaires  de  la  garnison. 
Il  publia,  en  1786,  in-8°.,  un  écrit 
sur  V  Utilité  et  Vabus  de  la  com- 
pression et  les  propriétés  de  Veaii 
froide  et  chaude  dans  les  maladies 
chimrgicales.  En  1 790  ,  il  mit  au 
jour  son  Cours  de  chirurgie  pratique 
sur  la  maladie  vénérienne ,  1  vol. 
in-8<>.  C'est  dans  cet  ouvrage  qu'on 
peut  voir  avec  quelle  âpreté  il  trai- 
tait ceux  qui  n'étaient  pas  de  son 
avis.  Mais  il  faut  convenir  qu'il  avait 
à  faire  à  des  hommes  qui  n'avaient 
ni  sa  franchise  ni  ses  lumières.  Cet 
ouvrage  est  peu  connu ,  et  il  en  est  de 
même  de  ceux  qui  le  suivirent,  quoi- 
que dans  tous  il  y  ail  des  choses 
utiles.  En  i-^cp,  Lombard  fut  nom- 
mé chirurgien  en  chef  de  l'armée  du 
Rhin ,  où  il  ne  fit  que  peu  de  cam- 
pagnes, à  cause  de  sa  santé  devenue 
très-chancelante.  Il  rentra  dans  son 
hôpital;  et  rendu  à  sa  bibliothèque 
et  à  SCS  occupations  favorites ,  il  se 


LOM 

'797  '     '"        ^        '  '  '     ^'"n/ntttr** 

sur  l  (Url  di*s  pans*  n,,  nl^,  ,1  imn;:0 
drs  étufiinnfs  en  rhn  /'     ,•  //      h  'p- 
tant 
ctl'ii 

(jue  chirurç^icnlc  rd 
pour  faire  suite  au  1: 
in-8°.  Les  productions  d-  î 

sont  remarquables  par  I.1  i 

pographique.  Elles  n'ont   point   .! 

recherchées  avec  a«î"  •  '" 

ment;  et  à  peine  quri 
rains  les  connaivsent-ns  .1 
quoiqu'on  ne  puisse  leur 
mérite  de  preV"    '      ' 
ves,  et  de  rrj  i  < 

saines  et  limiincuscs.  Api 
suyé  plusieurs  attamies  d'  • 
il  ne  fit  plus  aue  languir  muji  mé- 
moire et  sans  idées,  et  mounil  le  i5 
avril  181 1  ,  dans  une  maison  de 
campagne  près  de  Paris.  P.  et  L. 
LOMBARD  (jEAN-GuiLLAUiir.  ). 
conseiller  de  cabinet  prussien  ,  né 
à  Berlin  vers  1 767  ,  d'une  famille  de 
réfugiés  français  ,  pauvre  et  obs- 
cure ,  reçut  néanmoins  une  éduca- 
tion assez  soignée.  Il  cultiva  la  poé- 
sie française  ,  et  fil  ,  dans  sa  jeu- 
nesse, des  traductions  assez  heti- 
reusos  de  quelques  morceaux  d'Os- 
sian  et  de  Virgile.  Ce  faible  mé- 
rite lui  valut  un  emploi  MiK4ltrm« 
dans  le  cabinet  par*!  ' 

déric-lr-Craiid ,  aïKju 
se  quelques  épîlrc*.  Si  1«  >  iiiu.t^lir^ 
furent  yen  de  chose  sou*  ce  priiire, 
on  doit  j>enser  (pi'un  r«»raini*.  dont 
toute  l'occupation  fiait  dr  Iranvnr^ 
des  lettres  et  drs  piccr*  de  rbanrrl- 
Icrie,  ne  pouvait  êlrr  un  p<T»on- 
nage  iniiH)rtanl.  OprndanI  rr  fut 
dan*  celte  place  que  LomUinl  pnf  !e 
goût  cl  la  connaissance  àr^  "tmwUx 
anjire-i.Aprè-^b  morldeFretl^-r-  " 
un  esprit  agréable  cl  unr  gra». 


646  LOM 

cil i le  de  mœurs ,  joints  à  des  con- 
naissances en  politique,  qu'il  avait 
le  talent  de  faire  Lien  valoir ,  atti- 
rèrent sur  lui  l'attention  de  Frëdë- 
ric-Guillaume  II  ,  prince  ennemi 
du  travail ,  et  qui  aimait  pardessus 
tout  à  recevoir  des  opinions  toutes 
faites.  Lombard  devint,  corrîme  il 
le  dit  lui-même  dans  un  de  ses 
ouvrages,  un  demi-fuvori ,  et  fut 
nomme'  secrétaire  du  cabinet.  Dans 
ce  poste  important,  loin  de  se  péné- 
trer des  obligations  nouvelles  qui 
lui  étaient  imposées ,  il  ne  cessa  pas 
de  faire  des  vers  qui  couraient  les 
salons,  et  d'écrire  des  lettres  rimées 
au  roi  et  aux  ministres.  x\dmis  aux 
plaisirs  et  aux  intrigues  de  Rietz  et 
de  la  comtesse  de  Lichlenau ,  il  en 
contracta  les  goûts  et  les  habitudes. 
Enfin  la  mort  de  Frédéric  -Guil- 
laume II,  et  la  disgrâce  de  la  com- 
tesse ,  vinrent  renverser  sa  fortune. 
Le  nouveau  roi  l'éloig^na  des  affaires , 
et  le  soumit  a  des  épreuves  sévères  ; 
mais  celte  disgrâce  dura  peu  :  la  dis- 
crétion de  Lombard,  son  dé  oue- 
ment,  et  plus  encore  peut-être  ses  rap- 
ports avec  Haugwitz  (i),  triomphè- 
rent de  tout,  et  il  finit  par  obtenir  la 
confiance  entière  de  son  jeune  maître 
(le  roi  actuel),  qui  Téleva  à  la  place 
de  conseiller-privé.  Lombard  avait, 
dans  le  cabinet ,  la  partie  des  affaires 
étrangères ,  c'est-à-dire  qu'il  était 
chargéde mettre  sous  les  yeux  du  mo- 
narque tout  ce  qui  tient  à  la  politique 
extérieure.  Elevé  dans  la  doctrine 
que  la  Prusse  ne  doit  jamais  combat- 
tre sous  des  drapeaux  opposés  à  la 
France ,  il  subordonna  toute  sa  poli- 
tique à  ce  système-  et  c'est  ce  qui  l'a 
fait  considérer  comme  un  des  plus 
ardents    jrromoteurs  de  la  longue 

(i)  Lombard  prouva  sa  retoanaissance  à 
Ilaiigwitz  ,  en  le  faisant  rappeler  de  sa  retraite 
en  i8o5,  pour  loppos»!  au  prince  de  Hardenberg, 


LOM 

neutralité  dans  laquelle  la  Piiisse 
persista  jusqu'à  la  fin  de  i8o6,  mal- 
gré le  parti  des  femmes  et  de  la  jeu- 
nesse qui  voulait  la  guerre.  Ses  en- 
nemis ont  poussé  l'animosité  jusqu'à 
dire  qu'il  s'était  vendu  à  la  France. 
Quoi  qu'il  en  soit ,  la  guerre  fut  ré- 
solue malgré  les  conseils  de  Lom- 
bard. Lorsque  les  désastres  de  l'ar- 
mée Prussienne  l'obligèrent  à  s'éloi- 
gner ,  il  se  vit  en  butte  à  la  fureur 
populaire,  dans  plusieurs  villes  où  il 
passa:  à  Stettin, la  populace  lecouvrit 
de  boue  ,  et  on  le  traîna  en  prison 
par  ordre  de  la  reine  ;  mais  le  roi  le 
fit  mettre  en  liberté.  Depuis  cette  épo- 
que il  n'eut  pins  aucune  part  aux 
affaires  :  après  la  paix  de  ïilsitt ,  il 
fut  nommé  secrétaire-perpétuel  de 
l'académie  de  Berlin  ,  dont  il  était 
membre  depuis  plusieurs  années.  Né 
avec  une  constitution  faible  qu'il  ne 
ménageait ,  ni  dans  le  travail ,  ni  dans 
les  plaisirs,  il  atteignit  de  bonne 
heure  le  terme  de  sa  vie.  L'affection 
de  poitrine  dont  il  était  attaqué  ,  fit , 
dans  l'année  i8ii,  des  progrès  si 
rapides,  que  les  médecins  lui  con- 
seillèrent de  quitter  le  ciel  rigoureux 
de  Berlin.  Après  avoir  séjourné  quel- 
que temps  à  Montpellier,  il  vint  à 
Nice,  où  il  mourut  le  28  avril  181 2. 
L'auteur  de  la  Galerie  des  carac- 
tères prussiens  (vol.  in- 12,  Paris, 
1808  )  trace  de  lui  le  portrait  sui- 
vant qu'il  dit  extrait  d'un  mémoire 
particulier.  «  Le  conseiller  du  cabi- 
»  net.  Lombard,  est  physiquement 
»  et  moralement  énervé.  Ses  connais- 
»  sauces  se  bornent  a  la  littérature 
»  française  ;  les  sciences  plus  solides 
))  étudiées  par  l'homme  d'état  et  par 
»  le  savant,  n'ont  jamais  occupé  cet 
»  homme  frivole.  Initié  de  bonne 
»  heure  aux  orgies  de  Rietz  et  de  la 
»  comtesse  de  Lichtenau  ,  il  prit 
»  part  à  leurs  dél^auches,  qui  étouf- 


LOM 

»  fërent  sa  moralité ,  à  la  place  de 
»  laquelle  elles  mirent  une  parfaite 
»  indiflercnc.e  pour  le  bien  et  pour 
»  le  mal.  C'est  dans  les  mains  faibles 
»  et  iiupures  d'un  bel-esprit  tic  basse 
»  extraction ,  dont  le  père  fut  perni- 
»  quier;  d'un  roue,  qui  joint  à  la 
»  perversion  morale,  le  délabrement 
»  physique;  d'un  hebéîc,  qui  perd 
V  son  temps  au  jeu,  dans  des  socic- 
»  tes  insipides  et  insignifiantes:  c'est 
»  dans  les  mains  d'un  homme  pareil 
»  que  se  trouve  le  maniement  des  af- 
»  faires  étrangères  de  la  Prusse  ,  dans 
»  une  période  qui  est  sans  exemple 
»  dans  l'histoire  moderne.  »  Ce  por- 
trait ,  sans  doute  exagère ,  doit  être 
attribue  à  l'irritation  qu'avait  pro- 
duite en  Prusse ,  à  l'époque  oîi  il  pa- 
rut, la  position  pénible  de  ce  pays; 
position  dont  on  croyait  que  les  mau- 
vais conseils  de  Lombard  étaient  une 
des  principales  causes.  D'Entraigues 
a  aussi  parlé  fort  mal  de  lui ,  dans  son 
Fragment  d'un  chapitre  de  Polybe 
trouvé  sur  le  mont  Athos ,  i8o5. 
Lu  seul  auteur  l'a  traité  avec  égard , 
c'est  celui  d'un  ouvrage  intitulé  : 
Matériaux  pour  servir  à  l'his- 
toire des  années  i8o5,  1806  et 
1807  ,  dédiés  aux  Prussiens  par  un 
ancien  compatriote ,  Paris,  1808, 
in  -  I  i.  Mais  ,  malheureusement 
pour  la  mémoire  du  conseiller  prus- 
sien ,  on  croit,  avec  beaucoup  de 
raison  ,  que  cet  ouvrage  est  de  Lom- 
bard lui-même.  Ce  qu'il  y  a  de  sûr, 
c'est  qu'il  fut  imprimé  à  Paris  par 
les  ordres  et  aux  frais  du  gouvernc- 
raent  de  ce  temps-là.      D — 7. — s. 

LOiMBARDI  (  JÉRÔME  ) ,  philolo- 
gue italien,  né  à  Vérone  en  1^07, 
fut  admis  chez  les  jésuites ,  et  pro- 
fessa les  humanités  dans  diUcrents 
collèges.  Ses  talents  lui  uiérit»r(nl 
l'estime  de  la  ]>lupart  des  hommes 
éclairés  de  l'Italie,  arec  lesqucb  il 


entreteoait  om  tùrfft^mAmf  tmt 
des  objet*  de  littiTétlurf  et  dVm* 
dation.  Il  eut  aussi  l'âTâoUfie  d'être 
remarque  du  jmm  Bcaoll  XIV  ;  et 
ce  poniifc ,  qui  cwiinût  lui-ttiéaie  \m 
lettres  d'une  naiiièft  li  brinaait ,« 
plut  à  rcnconranr.  Aprfs  U  t«p- 
pression  de  la  Sxâ^,  Lombnftli 
coBtiniM  d'habiter  11  ■âitoiijprofHM 
d«B  jéniitet  à  Veoise,  doM  U  ¥lMlb 
bibliothécaire  ;  et  il  y  moiirvt  le  9 
mars  179:1.  On  lui  attrihae:  1.  Aofi* 
zie  spettanti  al  capitolo  di  f^ertmm, 
Rome ,  inSi.  II.  f  «/«  delU  B. 
yingela  Merici  di  BreicUk ,  fomàm 
triée  dcUacompafiniadiSUL  OrsoU^ 
Venise,  1781.  III.  Hta  detU  B, 
Giovanna  Bonomo,  monaca  Bme- 
dittina ,  Rassano ,  i^83.  Oo  doit 
encore  au  P.  Lombardi  des  éditions , 
i®.  de  deux  Dissertations  du  P.  J. 
Luc  Zuzzeri ,  l'une  sur  une  médaille 
d'Atule  Philadelphe.  et  l'autre  sur 
une  médaille  de  F'  '         '', 

i74T,in-4«».;—  ie 

ad  diverses  f  ynT  ijcui 
évêque  de  Ijanbarh  ,  V- 
— .  3'\  de  la  r 
Louis  Alamai 
du  Can'inedu  p«  ; 
1764;— 5«.  et  . 
tions^  extraites  (!• 
noîlXIV,Pr('ci 
<oru/n.  Le  P.Lonil 
nuscril  des  correct,  i,^  . 
tiens  iraportintes  pour  le  graad  Dic- 
tionnaire de  la  Crusca,     W — - 

LOMBART(PiEWiE),f. 
né  k  Paris  en  i6i!i,  élm^  ir  ur»- 
sin  à  VécoU  de  Vonef  :  apria  a^v^ 
exercé  '  capiuli  le  U\mA 

de  la   ^  !  «e  reiMfit  à  La- 

dres, ou  àl  U4\  ailla  d*a]iotil  |>0W 
les  libraires  ;  mais  U  a  surtout  tfè*- 
bien  çc^^é  le  portraÎL  S<Mi  baffilf  fit 
vigoureux, et  son  dcaiin  eorrect.  Sa» 
portrait  éqoaitrt  da  ChsirUs  l*-. 


ib. 
deBe. 


rfima- 


648 


LOM 


d'après  Van  Dyck,  est  fort  rare,  et  se 
vend  fert  cher,  l'artiste  ayant  subs- 
titué, lors  de  la  fm  tragique  de  ce 
prince ,  la  tête  de  Cromwell  à  celle 
du  roi.  On  a  de  Lombart  une  Suite 
de  19.  Portraits,  d'après  Van  Dyck, 
assez  estimes ,  dont  deux  d'hommes , 
et  dix  de  femmes  ,  connus  sous  le 
nom  des  comtesses  de  Van  Dyck;  un 
second  Portrait  du  F roteeteiir^  avec 
son  page ,  d'après  Walker ,  ainsi  que 
le  Portrait  de  ce  peintre  ,  celui  de 
Lajond,  gazelier  de  Hollande  ,  ceux 
de  la  duchesse  à\Yorh  et  'de  Samuel 
3ïoreland,  tous,  deux  d'après  Lely. 
Cet  artiste  a  gravé  aussi  plusieurs  su- 
jets d'histoire,  parmi  lesquels  nous 
citerons  ,  la   Cène,  et  la  Natunté , 
d'après  le  Poussin,  le  Saint  Michel, 
d'après  Raphaël,  la   Fierté  assise 
sur  un  trône ,  d'après  Ann.  Carra- 
che,  etc.  Après  un  long  séjour  en 
Angleterre,  il  revint  à  Paris  ,  où  il 
mourut  en  1683.  P — s. 

LOMBERT(Pierre),  traducteur, 
né  à  Paris,  s'était  appliqué  à  Tctude 
delà  jurisprudence,  et  avait  été  reçu 
avocat  au  parlement  ;  mais  il  ne  fre- 
queutapoiut  le  barreau,  et  se  contenta 
d'aider  de  ses  avis  les  personnes  qui  le 
consultaient.  Son  goûtpourla  retraite 
se  fortifia  encore  par  ses  liaisons  avec 
les  pieux  soUtaires  de  Port-Royal. 
Il  renonça  aux  sciences  profanes , 
pour  se  livrer  entièrement  à  l'étude 
des  Saints-Pères  ;  et  il  entreprit  de 
donner  de  meilleures  traductions  de 
leurs  principaux  ouvrages.  Ce  fut 
dans  celte  utile  occupation  qu'il  passa 
le  reste  de  sa  vie  ;  il  mourut  à 
Paris  vers  1710.  Les  traductions 
qu'on  acie  lui  sont:  I.  U Explication 
des  premiers  chapitres  du  Cantique 
des  Cantiques.,  par  saint  Bernard^ 
Paris,  i67o,in-8o.  II.  Les  OEwres 
de  sa i ht  Cyprien,  ibid.,  1673,  2  vol. 
in-4'^..j  Rouen,  1716,  même  for- 


LOM 

mat.  Lombert  y  a  joint  une  vie  du 
saint  martyr ,  assez  exacte  ,  et  des  \ 
remarques  instructives.  La  chrono- 
logie des  lettres  est  due  en  partie  à 
Ant.  Lemaitre.TII.  LaCite^e  Dieu, 
de  saint  Augustin,  Paris,  1675, 
1693 ,  '1  vol.  in-8°. ,  avec  des  notes. 
L'abbé  Goujeten  a  donné  une  édition 
avec  des  remarques  et  la  vie  du  tra- 
ducteur ,  Paris  ,  1787,4  vol.  in-i  -2. 
IV.  Les  Principes  de  la  vie  chré- 
tienne, par  le  cardinal  Bona ,  Paris  , 
168 1 .  V.  Les  Commentaires  de  St.- 
Augustin,  sur  le  sermon  de  la  Mon- 
tagne ,  Paris,  i683  ;  ibid. ,  1701  , 
in- 18.  Toutes  ces  traductions  sont 
estimées.  Cependant  Baillet  (Jugem, 
des  savants  )  reproche  à  Lombert 
d'être  tombé  dans  le  défaut  d' Ablan- 
court,  qui  prête  quelquefois  ses  pen- 
sées aux  auteurs  qu'il  traduit,  et 
s'applique  seulement  à  les  faire  par- 
ler français.  W — s. 

.  LOMEIER  (  Jean  ) ,  philologue 
hollandais  ,  né  en  i636  à  Zutphen, 
où  son  père  remplissait  les  fonctions 
du  saint  ministère  ,  suivit  les  leçons 
des  plus  célèbres  professeurs  d'Al- 
lemag^ne  et  de  Hollande,  et  se  dis- 
tingua dans  tous  ces  cours  par  son 
assiduité  et  sa  pénétration.  H  reçut 
,  ensuite  les  ordres  sacrés  ,  exerça  le 
pastorat  à  Deutschan ,  et  fut  rappelé 
en  1674  à  Zutphen,  pour  en  diriger 
l'égUse.  Les  curateurs  de  l'académie 
de  cette  ville  le  nommèrent, en  1686, 
à  la  chaire  de  belles -lettres  et  de 
philosophie,  qu'il  occupa  avec  beau- 
coup de  distinction  ,  et  sans  cesser 
de  veiller  aux  intérêts  de  son  trou- 
peau. Lomeier  mourut  à  Zutphen  , 
le  2  déc.  1699.  On  a  de  lui  :  I.  De 
Bibliothecis  liber  singularis  ,  Zut- 
phen, i6(>9;  2«.  édition  augmentée, 
Utrecht,  1G80,  i  vol.  in-8".  Jean- 
André  Schraidt  l'a  réimprimé  à  la 
suite  du  livre  de  Mader  :  De  Bi- 


LOM 

thécis  atqite  archwis,  (Voy.  J.  J. 
DER.  )  Ccl  ouvrage  est  divise  en 
n/.c  chapitres,  dans  lesquels  l'au- 
!  traite  de  l'origine  des  biblio> 
ijues;  des  moyens  cmploye'savant 
se  pour  conserver  la  mémoire 

faits  importants;    des  biblio- 

liitijucsdes  Hébreux, des Cbaldcens, 

>  Arabes  ,  des  Phéniciens  et  des 

\  ptiens  ;  de  celles  des  Grecs,  des 

nains  ;  des    Chrétiens  ,  avant  , 

liant  et  après  les  siècles  de  bar- 

le  ;  des  bibliothèques  les  plus  cc- 

I  es  de  l'Europe  ,  et  des  autres 

lies  du  monde  ;  de  certains  ou- 

.i;es  dont  ou  ne  connaît  qu'un  seul 

iiiplaire  ;  des  talents  et  des  de- 

is  d'un  bibliothécaire  ;  de  la  si- 

tion  ,  de  la  disposition  et  des  or- 

fients  d'une  bibliotlicque  ;  et  enfin 

-  insectes  qui  rongent  les  livres  et 

manuscrits.  La  partie  de  cet  ou- 

i;^equi  concerne  les  bibliothèques 

anciens  ,  est  la  plus  curieuse. 
Gallois  a  tire'  du  livre  de  Lomeier 
Traité  des  plus  belles  hiblio- 
(jues  de  l'Europe  ,  mais  sans  le 
iiimer  une  seule  fois.  (  Voyez 
LLois.  )  II.  Epimenides  sive  de 
crum  gentilium  lustralionibus 
ftagma ,  Utrecht,  i(i8i  ,  in^^  ; 
ixièmc  édition  ,  corrigée  et  aug- 
iitée  ,  Zutphen  ,    1700,  in-4°. , 

Cet  ouvrage  est  plein  de  re- 
iches  curieuses  et  intéressantes. 
i .  Dierum  f^erdaliuni  she  disser- 
^  philologicarum  décades  duœ  , 
venter,  1694  et  iG()6,  a  vol. 
S**.  Les  trois  premiers  chapitres 
'  premier  volume  contiennent  des 
>sertations  sur  la  philosophie  des 
'  iens  Scjlhes;  —  sur  les  qjiatrc 
mdes  monarchies  :  Lomeier  s'é- 
iguc   de  l'opinion   commune  àf% 

ologiens  ,  des  historiens  et  des 
.  1  onologistes  ;  —  sur  une  |)elilc 
,ure  d'Harpocrate,  conservée  dan» 


LOM  ^^ 

1^  r^binH  de  J.  Smetius  ;  —  Mr 
I  <e  du  nom  de  TévMt  Cl 

I     ^  '.iges  les  plus  c^tiirci  q«i 

l'ont  |)ortë  chex  les  Romains  ;  — 
sur  les  sept  sages  de  la  Grèce  ;  —  sur 
les  diverses  manières  de  prier ,  indi- 
quées par  *•*  in»  P.nl  rfi .  L«  qiia> 
iricrae   cIi  .    des  re- 


nia ri  pies  ci 


Il    l«    .' u 


u  veau  Tes- 


tament grec  d'Etienne  Gourcelles. 

Dans  le  cinquième,  Lomeifi    '       * '^ 

à  concilier  les  pssages  des 

de  saint  Marc  et  de  v 

l'heure  à  laquelle  \o  .s 

et ,  dans  1- 

passage  di 

où  les  apôtres  sont  .ij 

la  terre.  Les  Divserf 

ferme  le  second  voh  i  :  U 

première,  sur  la  vil'  '"îi  : 

la  seconde  intitulée ,  i^hil* 

l'amour  de  la  patrie,  et  li .    .  s 

qui  se  sont  honores  par  leur  dévoïK- 

ment   pour  leur  pays  :  l'auteur  y 

examine  différentes  (jiiestions  q  i   • 

rattachent   à  son   sujet,  telles  ,  <• 

l'ingratitude  des  anciennes  rr|H.:  ! 

ques,  l'ostraci^i 

J.-C,  que  nul    1 

son  pays,  etc.  La  s< 

des  rorhrrrhM  sur   ' 

juifs   ' 

fîtes 

des  stigmates,  et  la  w 

scribes.  On  doit  encore  ..  1 

une  édition  AtVJ^om  t*  ''  »"'  '' 

Jacqiv-    î^.ï-"'^      7,!,I-.n.    i;-", 

in-r  W— s. 

L(>u^>.i.      »-  '^^  '     ■^••- 

gncurde  U  Villeauv  i 
,"    'T       ,1  de  I^mt 
li  fui  tu^  .4 


Lométue  »'ac<iuitu  iou|oui*   arw 


65  o 


LOM 


zcle  et  talent  des  missions  qui  lui 
furent  confiées ,  et  il  mourut ,  en 
i638,  à  l'âge  de  78  ans.  Il  légua  à 
la  bibliotlièque  du  Roi  34o  volumes 
de  manuscrits ,  qui  forment  nu  re- 
cueil précieux  de  pièces  historiques  , 
connu  sous  le  nom  de  Manuscrits 
de  Brienne.  Tj. 

LOMÉNIE  (Henrt-Auguste  de), 
comte  de  Brienne  ,  fds  du  précé- 
dent,  naquit  à  Paris  en  iSg^:  il 
obtint  ,  dès  l'âge  de  vingt  ans  ,  la 
survivance  de  la  charge  de  secrétaire 
d'état  ,  que  remplissait  son  père.  En 
ib'i'i,  il  fut  nommé  par  Louis  XIIT , 
capitaine  du  château  des  Tuileries  ; 
et ,  deux  ans  après  ,  il  fut  envoyé  en 
Angleterre,  pour  dresser  les  articles 
du  mariage  de  Henriette  de  France 
avec  le  prince  de  Galles.  Il  accompa- 
gna ensuite  le  roi  au  siège  de  la  Ro- 
chelle ,  et  dans  ses  voyages  d'Italie 
et  de  Languedoc.  Après  la  fameuse 
journée  des  dupes,  en  i63o  ,  il  fut 
chargé  de  persuader  à  la  reine  mère 
(  Marie  de  Médicis  )  de  ne  point 
s'abandonner  à  son  ressentiment  ;  et 
elle  se  repentit ,  mais  trop  tard  ,  de 
n'avoir  pas  écouté  ce  sage  conseil. 
Le  comte  de  Brienne  ,  cédant  à  ses 
ennemis  ,  se  démit ,  en  i643  ,  de  sa 
charge-de  secrétaire-d'élat  ;  mais  il 
ne  tarda  pas  d'être  replacé  avec  le 
même  titre  à  la  tête  du  département 
des  affaires  étrangères.  Il  se  con- 
duisit avec  prudence  et  fermeté  pen- 
dant les  troubles  de  la  minorité; 
obtint  ,  en  1661  ,  la  permission  de 
résigner  sa  charge  à  son  fds  aîné 
(  Louis-Henri  de  Loménie  ) ,  et  mou- 
rut en  1666.  Son  Oraison  funeb  e , 
prononcée  parleP.  Sénault  de  l'Ora- 
toire, a  été  imprimée.  Le  comte  de 
Brienne  a  laisse  des  Mémoires  conte- 
nant les  événements  les  plus  remar- 
quables des  règnes  de  Louis  XIII  et 
de  Louis  XIV,  jusqu'à  la  mort  du 


LOM 

cardinal  Mazariu  (  i6(îi  ) ,  in-fol.j 
c'est  de  ce  recueil  qu'on  a  extrait  lei 
Mémoires  du  comte  de  Brienne , 
pour  servir  à  l'instruction  de  set 
enfants,  Amsterdam,  17 19,  17^3.. 
3  vol.  in-12.  On  y  trouve  un  gran^ 
nombre  d'anecdotes  et  de  faits  cu- 
rieux ,  racontés  avec  beaucoup  d( 
franchise.  L'éditeur  y  a  fait  des  ad- 
ditions qui  remplissent  le  troisième 
volume,  et  l'étendent  jusqu'à  l'année 
168 T.  On  a  encore  du  comte  de 
Brienne  ;  Béponse  aux  Mémoires 
du  comte  de  la  Châtre  ;  elle  a  été 
insérée  dans  le  Recueil  de  diverse, 
pièces  curieuses  ,  etc.  ,  Cologne 
(  Elzevir),  1664  ,  in- 12  ,  et  dans  \(l 
Conservateur ,  juillet  1760  :  c'esi 
une  apologie  de  la  reine-mère ,  el 
la  justification  de  plusieurs  repro- 
ches que  la  Châtre  avait  adressés  au 
comte  de  Brienne.  On  conserve  à  la 
bibliothèque  du  Roi ,  ses  Lettres  ei 
Négociations.  W — s. 

LOMENIE  (Louis-Henri  de  ). 
comte  de  Brienne  ,  fils  aîné  du  précé- 
dent ,  né  en  i635  ,  eut ,  à  l'âge  de 
seize  ans,  la  survivance  delà  charge 
de  secrétaire  d'état  au  département 
des  affaires  étrangères  que  possédait 
son  père ,  et  fut  fait  conseiller  d'état 
la  même  année.  Désirant  connaître 
les  mœurs  des  peuples  et  le  caractère 
des  ministres  avec  lesquels  il  aurait 
un  jour  à  traiter ,  il  se  mit  à  voya- 
ger dans  les  différentes  cours  de 
l'Europe.  Il  apprit  la  langue  alle- 
mande à  Maïence ,  et  parcourut  la 
Hollande ,  le  Danemark  et  la  Suède. 
Il  fut  chargé,  dans  ce  dernier  pays, 
de  complimenter,  au  nom  du  roi  de 
France  ,  Charles  Gustave ,  sur  son 
mariage  avec  la  princesse  de  Hol- 
stein.  11  poussa  ses  courses  jusqu'en 
Laponic  et  en  Finlande  ,  d'où  il  se 
rendit  en  Pologne,  et  alla  visiter 
plusiem^s  souverains  de  l'AUemagne 


LOM 

^  ritalic.  De  retour  dans  sa  pa- 
apiTS  «me  ahscnrc  de  plus  de 
ans ,  il  reparut  à  la  cour  de 
is  XIV  ,  avec  une  grande  variété 
lonnaissances  très-propres  à  le 
lire  intéressant.  Le  roi  l'emmena 
r  lui  à  Fontarabie,  où  il  remplit 
l\>nctions  de  secrétaire  d'état  au 
iage  de  ce  prince.  ].e  comte  de 
une,  son  porc ,  accablé  d'années 
inlirnii  les,  obtint,  trois  ans  a  près, 
Mormission  de  se  diMucltre  de  sa 
>^e  de  secrétaire  d'état ,  en  fa- 
:  du  jeune  Lonionic  qui  ne  l'exer- 
ça ipie  queUpies  mois.  Sur  la  (in  de  la 
même  année,  toute  la  cour  fut  exlrê- 
inement  étonnée  de  le  voir  descendre 
4'un  si  haut  rang,  pour  se  retirer 
dans  la  congrégation  de  l'Oratoire. 
Cet  événement  fut  diversement  in- 
terprété dans  le  monde.  Les  uns 
l'attribuèrent  à  la  profonde  douleur 
qu'il  ressentit  de  la  mort  de  sa 
femme,  fille  de  M.  de  Ghavigny, 
secrétaire  d'état  sOus  Louis  XIIÎ ,  et 
qu'il  aimait  éperduraent;  les  autres, 
à  quelques  aventures  de  jeu  ,  où  sa 
délicatesse  s'était  trouvée  compro- 
mise ,  ce  qui  avait  porté  le  roi  à  lui 
faire  dire  secrètement  de  se  dé- 
mettre de  sa  charge.  C'est  à  quoi  il 
fait  allusion  dans  ses  Mémoires  où 
il  dit  ,  (i  que  M.  de  Péréûxc,  raau- 
»  vais  joueur  jusqu'à  briser  tous  les 
»  meubles  quand  il  perdait,  l'avait 
•  accusé,  lui  comte  de  Bricnne, 
»  d'être  un  ipe.n  filou.  »  Quoi  qu'il  en 
Spit  de  la  vérité  de  cette  anecdote , 
on  peut  regarder  la  vie  édifiante 
qu'il  mena  dans  l'Oratoire,  depuis 
l663  jusqu'en  1670,  comme  une 
expiation  de  sa  faute.  U  reçut  le 
9ous-diaconat ,  s'appliqua  sériouse- 
ment  à  l'étude  de  l'Éx  riture-Sauïtc , 
et  de  toutes  les  parties  de  la  science  ' 
ecclésiastique,  sous  les  habiles  pro-  ' 
fesscurs  du  «cminaire  de  Saint-Ma-    apré»  ton 


gloire ,  où  il  avait  dxi  u  1 
Sa  ferveur,  rpii  s'etail 
dant  plusieurs  améM,  M  Yeirôidtt 
enfin  ;  et  elle  fut  remplacée  par  UM 
passion  toute  profane  dont  il  m  sm- 
tit  épris  pour  une  certaim-  dame  qot, 
dans  l'histoire  ^p"^*»  •  '■  •  tn»rniaai^ 
il  appelle  ii/i«  tli  ,S4^  ,  ^Umi 

Hélait  fou,  et finiif ,..  '  ^019^ 

des  vers  de  galanîen  ,  swm 

le  jeta  dans  un  tel  •!  '*t 

commettre  tant  d'pxî 
le  régime  de  l'Oratoin  m'  vii  fu  «c, 
au  commencement  de  1O70,  de  lui 
signifier  l'ordre  de  sortir  de  la  con- 
grégation, à  cause  de  sa  mauvaise 
conduite.  Peu  de  temps  aprè*,  il  re- 
prit le  goût  des  voyages,  et  se  !aivia 
entraîner  à  de  nouvelles  folie%.  Il 
s'enflamma,  dit  on, pour  la  prinrr^^e 
de  Mecklembourg, et  eut  la  témrrilé 
de  lui  déclarer  .sa  passion.  !.<"i\ 
XIV  ,à  qui  cette  princesse  en  [  ?i 
ses  plaintes,  enjoignit  à  Xa^v  '^ 
de  revenir  à  Paris.  Ou  l'enfermi 
bord  dans  deux  maisons  de  \\*vr- 
dictins,  successivement,  sans  qu'il 
devint  plus  sage.  U  fallut  alors  le 
confiner  a  Saint-F^awre.  Pen<lant  son 
séjour  dans  celte  prison ,  l'anlnir 
avec  laquelle  il  se  livra  aux  fiur^iinnt 
du  jansénisme  ,  acheva  de  lui 
perdre  la  Ictc.  La  raison  ne  b  >  1 
vint  qu'au  bout  d'un  grand  nombre 
d'années,  d-  ii  i.iî.liss(  nirni  «iiii  con- 
trariait le^  '^ 
le  rendit  j»  '  '  > 
paraissait  ii(  i  * 
jours  parmi  !*•-'>  Umi^  .1.  ■ .  ; 
mais  ayant  recouvré  sa  li  ^ 
dix-1.'  '  •  -  • 
usap'  ** 
au  roi  Cl 
dr  MK  p ,                                            t 


^il  airac, 


(55a  LOM 

l'obligea  de  vivre  dans  la  retraite.  Il 
finit  par  se  retirer,  en  1696,  dans 
l'abbaye  deGhâteau-Landon,dont  un 
de  ses  parents  e'iait  abbe,  pour  y 
passer  chre'tiennement  le  reste  de  ses 
jours  j  et  il  y  mourut  le  17  avril 
1698.  Les  ouvrages  imprime's  du 
comte  de  Lomenie ,  sont  :  I.  Ludo- 
mci  Henrici  Lomenii  Briennœ  co- 
mitis  régi  à  consiliis,  actis  et  epis- 
tolis  itinerarium  ;  Paris  ,  1 660  , 
in- 1 2.  ;  I ijÇt'i ,  in-S". ,  e'dition  revue 
par  Charles  Patin,  augmente'e ,  et 
ornée  d'une  carte  gëograpliique  faite 
par  Sanson.  Cette  relation  de  son 
premier  voyage  est  e'crite  d'un  style 
vif,  laconique,  pur  et  élégant.  II.  De 
Pinacothecd  sud,  Paris,  1662, 
in-80.  C'est  une  description  en  vers 
et  en  prose  de  sa  galerie  de  tableaux, 
adressée  en  forme  de  lettres  à  l'am- 
bassadeur du  prince  d'Orange.  Le 
style  de  cette  description  a  les  mê- 
mes qualités  que  celui  de  l'ouvrage 
précédent.  lïl.  Recueil  de  Poésies 
chrétiennes  et  diverses  (  de  divers 
auteurs  ) ,  Paris  ,  167 1 ,  3  vol.  in-12. 
Ce  recueil  formé  par  M.  de  Lomenie 
fut  attribué  à  Lafontaine  qui  en  avait 
fait  l'épître  dédicatoire  au  prince  de 
Conti,  à  la  prière  duquel  Brienne  en 
composa  aussi  l'avertissement.  IV. 
Les  Institutions  de  Tanière ,  tra- 
duites en  français,  Paris,  i665, 
in.i2  ;  1608,  in-8«.  V.  La  Fie  et 
les  Révélations  de  Sainte  Gertrude, 
etc.,  Paris,  1673,  in-8**. ,  sous  le 
nom  du  P.  Mege.  La  préface  et  le 
cinquième  livre  sont  deBulteau.  VI. 
Poésies  diverses,  latines  et  françai- 
ses. Ce  recueil,  publié  par  Gomber- 
ville,  contient  quelques  pièces  d'un 
très-bon  goût.  C'est  sans  fondement 
que  Chapelain  avance  que  Benjamin 
Priolo  et  le  P.  Cossart  y  avaient  la 
meilleure  part.  Yll.  Remarques  sur 
les  règles  de  Id  Poésie  française , 


LOM 

qu*on  trouve  à  la  suite  de  k  Now^ 
velle  Méthode  latine  de  PoH-Ro^àfy 
septième  édition  in-8°.  Châlon  a  in- 
séré ces  remarques  presque  entières 
dans  son  Traité  des  règles  de  la 
Poésie  française  ,  sans  dire  où  il 
les  avait  puisées.  On  a  conserve 
quelques-uns  des  manuscrits  deM.de 
Brienne  :  i  ^.  Relation  de  ce  qui  se 
■passa  au  mariage  de  Louis  XIV ^  à 
Fontarabie ,  in-folio,  annoncée  dans 
le  catalogue  des  livres  de  Bois- 
sier.  'i*^.  Commentaires  sur  le  N.  T,, 
avec  des  Explications  morales  en 
français,  2  vol.  in-fol. ,  qui  étaient 
dans  le  cabinet  de  Martin  Billet 
de  Panières.  3«.  Vie  de  N.  S.  J.-C. , 
tirée  du  Nouveau  Testament ,  ibid. 
4**.  Remarques  sur  l'Histoire  critique 
du  vieux  Testament  de  R,  Simon, 
ibid.  Ces  trois  ouvrages  furent  le 
fruit  de  sa  retraite  à  Saint-Magloire. 
5^^.  Mémoires  de  L,  If.  de  Lomenie, 
comte  de  Rrienne ,  ci-devant  pri- 
sonnier d'état ,  et  maintejiajit  pri-» 
sonnierà  Saint-Lazare ,  contenant 
plusieurs  particularités  import  antes 
et  curieuses ,  tant  des  affaires  et 
négociations  étrangères  que  dans  le 
royaume  ,  qui  ont  passé  par  ses 
mains ,  aussi  bien  que  des  intrigues 
secrètes  du  cabinet  dont  il  a  eu  con- 
naissance depuis  Van  i643  juS' 
qu  en  j  681  inclusivement,  in-fol, 
6°.  Poème  sur  les  fous  qui  étaient 
enfermés  à  Saint-Lazare  (  dans  le- 
quel il  ne  s'est  pas  oublié  lui-même)i 
Pendant  le  séjour  que  le  comte  de 
Brienne  fit  à  Saint-Magloire  et  à 
Saint-Lazare,  ce  qui  comprend  un 
espace  de  vingt-cinq  ans ,  il  s'était 
occupé  à  ^'ecueillir  des  extraits  rai- 
sonnés  des  anciens  Pères  ,  des  Anna- 
les de  Baronius  et  du  Corps  du  droit 
canon,  à  traduire  en  français  divers 
poètes  et  historiens  latins  ,  et  à  con:  - 
poser  des  traités  sur  différentes  ma- 


LOM 

(S.  Tous  ses  manuscrits   furrnt 
'(■i-$e«  à  sa  mort.  11  ne  s'en  est 
mtvc  que  des  fragracnLs  plus  ou 
us  étendus  dans  les  cabinets  des 
"ux.  Le  plus  singulier  est  V His- 
■  ''  secrète  du  jansénisme  ,  qu'il 
it entreprise  avec  l'abbé (.assagnc, 
camarade  de    prison   à  Saint- 
ire.   Cet  abbé  étant  mort  lors- 
rette  histoire  n'en  était  encore 
i  la  fin  du  troisième  livre  ,  M.  de 
luie  la  refondit ,  la  continua  en 
le  de  dialogue,  sur  un  ton  plai- 
'   et  satirique  ,    afin  ,    disait-il , 
.  lyer  ses   lecteurs  que  la  séclie- 
■  des  matières  aurait  pu  dégoû- 
Le  dialogue  entre  le  duc  de 
lies  qui  veut  se  retirer  à  Port- 
d  ,  et  Lancelol  qui  l'instruit  sur 
•uduite  qu'il  doit  y  tenir  ,  est  le 
piquant.  Il  est  bien   écrit  ;  la 
luire  en  est  très-délicate.  C'est 
tnl  endroit  de  l'ouvrage  qui  ait 
ii  suite;   les  caractères  y  sont 
-parfaitement  soutenus  ;  tout  le  reste 
Dorte  l'empreinte  d'une  imagination 
déréglée.  On  y  trouve  quelques  anec- 
dotes curieuses  sur  les  chefs  de  cette 
école  célèbre,  avec  lesquels  il  avait 
eu   beaucoup  de   liaisons.   On  voit 
dans  tout  ce  qu'il  a  écrit ,  qu'il  avait 
beaucoup  d'esprit  et  de  talent;  mais 
que  la  bizarrerie  cl  l'inconstance  de 
•on  caractère  lui  rendirent  ces  dons 
funestes.  T — d. 

LOMÉNIE  DE  BRIENNE 
(Etienne-Cuarles  de  ),  cardinal , 
f  à  Paris  ,  en  l'^'J^'j  ,  fit  ses  études 
AU'  collège  d'Harcourt.  Ayant  cédé 
son  frère  son  droit  d'aînesse  , 
il  embrassa  l'état  ecclésiastique ,  et 
loutint,  en  Sorbonne  ,  le  3o  octobre 
i^5i  ,  une  thèse  que  celle  de  l'abbé 
àe  Prades  fit  oublier ,  mais  dans  la- 
quelle l'abbé  Mey  signala  plusieurs 
propositions  hasardées.  Toutefois 
l'abbé  de  Briciiûc  fut   fait  prêtre, 


LOM  6S3 

et  il  reçut  Ir  bonnet  de  docteur 
le  8  mars  17'ii  ;  rarchrvrvpir  d« 
Uouen  lui  donna  des  Irttrn  lU 
grand-vicaire.   On  croit  -, 

f;ea  ,  avec  Turgol,  qui  p<>i 
e  petit  collet,  récrit  iniiuk  La 
Conciliateur  ou  Lettres  d'un  ec» 
clésiaslique  à  un  magistral,  1744» 
écrit  qui  roulait  sur  Ir^  diffriends 
entre  le  clergé  et  Ir  '  ,  et 

dont  Naigeou  ,  Condo;  1    ipoot 

de  Nemours  ont  donne  sacccssirc* 
ment  des  éditions.  L'abbé  de  Bneno* 
était  aussi  fort  lié  avec  Morellet ,  et 
même  avec  d'Alembcrl.  En  1758, 
il  fit  le  voyage  de  Rome  ,  et  fut  con- 
claviste  du  cardinal  de  Luvnes  ,  lor» 
de  l'élection  de  Clément  XllL  Le  17 
août  1760  ,  il  fut  nommé  évcque  de 
Condom.  Il  occupi  }>eu  de  trmj»  ce 
siège,  et  remplaça  M.  DUlun .  a  f  ou- 
louse,  le  2  février  1 7G3.  M.  de  Hrirn- 
ne  avait  la  réputation  <i" 
trateur,eton  loue  sor- 
sous  le  r.i)  cpi- 

zootie  arri\  .  en 


1774 


lui  donna  occ.i 


sa  générosité,  et  en  iiK  .^  ^"^^ 

soins  pour  exciter  les  largesses  de» 
personnes  opulentes.  En  1776,  il 
ouvrit  à  Lévignac  une  maison  oii 
les  filles  de  parents  noM""  •"  ti- 
rent une  éducation  C( 
Ce  fut  à  lui   que  T' •■''  .,  „<• 

profiter,  pour  le   ti  >  m» 

marchandises  ,  du  can.ii  r       1  i.in  . 
auquel  il  réunit  la  Garoniic  .i\  <i  t    1 
sortie  de  la  ville,  p-n 
conserve  encore  le  ne 
Par  lui  tous  les 
ressource  assure 
de  coton  qu'il  avait  1 
direction  des  sœwrs 
L'hôpital  fut  do: 
fondés  par  ses  la  r. 
l'école  militaire,  les   ; 
cation  d'iui  grand  uli. 


65i  LOM 

Son   administration  spirituelle  fut 
mêie'e  de  bien  et  de  mal.  Il  rétablit 
dans  son  diocèse,  en  l'jôS    l'usage 
des  conférences  ecclési.isques;  on  n'en 
put  tenir,  il  est  vrai,  qu'un  petit  nom- 
tre,  et  l'arclicvêque  n'y  parut  pas.  Il 
condam  a  par  un  mandement  du  'lô 
août  1770  ,  un  livre  publié  à  Tou- 
louse par  l'abbé  Audras  ,  sous  le 
titre  d'Histoire  générale  à  V usage 
des  collèges  ,  livre  qai  n'était  guère 
qu'un  abrégé  de  V Es  ai  sur  V  His- 
toire générale  de  Voltaire.  On  voit 
par  sa  Correspondance  combien  ce 
dernier  fut  mécontent'  de  cette  con- 
damnation :  mais  d'Alembert  prit, 
auprès  de  lui ,  le  parti  du  prélat  ;  et 
dans  ses  lettres  des  4  et  '2 1  décembre 
1770  ,  il  dit  que  l'arcbevêque  a  fait 
tout  ce  qui  était  en  lui  pour  éviter 
cet  éclat,  mais  qu'on  lui  a  forcé  la 
main  ,  et  que  dans  sa  place  il  nesi 
pas  le  maître  de  s' abandonner  tout- 
à-fait  à  son  caractère  et  à  ses  prin- 
cipes. M.  de  Briennç  établit  à  Tou- 
louse un  petit  séminaire;  le  5  no- 
vembre   T78'i,  il  tint  son   synode 
diocésain, où  l'on  s'occupa  principa- 
lement des   portions  congrues  ,   et 
des  secours  à  accorder  aux  ecclé- 
siastiques vieux  et  infirmes.  On  prit 
sur  ces  deux  objets  des  mesures  qui 
paraissent  bien  entendues.  L'arche- 
vêque fit  aussi  des  règlements  sur 
quelques  autres  matières.  Si  de  son 
diocèse  nous  le  suivons  sur  un  plus 
grand  théâtre  ,    nous   le    trouvons 
employé  dans  les   affaires  les  plus 
importantes  de  son  temps.  Il  eut  le 
secret  de  se  faire  nommer  de  toutes 
les   assemblées  du  clergé ,  y  acquit 
même  de  l'influence  ,  et  fut,   dans 
celles  dei7G5,  de  1770  et  de  1775, 
chef  du  bureau  de  juridiction.  Char- 
gé ,  en  conséquence  ,  des  mesures  à 
prendre  ou  à  solliciter  pour  le  sou- 
tien de  la  religion  contre  des  atta- 


LOM 

ques  sans  cesse  renaissantes  ,  il  parut 
plus  occupé  d'arrêter  le  zèle  de  sel 
collègues  que  de  provoquer  de  sages 
règlements.  C'est  sans  doute  à  son 
sujet  que  d'Alembert  écrivait  à  Vol- 
taire ,  le  1 5  août  1775  :  Ze  clergé 
ferait  bien  des  sottises  si  quelques 
éi>éques    raisonnables    ne    l'empê- 
chaient. On  eut  un  exemple  de  la 
légèreté  avec  laquelle  ce  prélat  trai- 
tait les  affaires ,  dans  le  rapport  qu'il 
fît  le  25  mai  1766,  sur  le  concile 
d'Utrecht;  rapport  plein   d'inexac- 
titudes manifestes  sur  les  faits  ,  et 
qui  donna  lieu   aux  partisans    du 
concile  d'attaquer  l'auteur  avec  avan- 
tage. En  1770  ,  il  fut  reçu  à  l'Aca- 
démie française;  et  Voltaire  écrivait 
à  cette  occasion  le  1 1   juin  à  d'A- 
lembert :  On  dit  qm  vous  nous  don- 
nez pour  covfrère  l'archevêque  de 
Toulouse,  qui  passe  pour  une  bête 
de  votre  façon ,  très-bien  disci  linée 
par  vous.  A  la  mort  de  M.  de  Beau- 
mont  ,  archevêque  de  Paris  ,   il  fut, 
question  de  lui  donner  M.  de  Brienne 
pour  successeur:  un  parti  nombreux 
le    portait  à  cette  place;  mais   les 
répugna]ices  du  roi  et  les  représen- 
tations  des  personnes  pieuses  de  la 
cour  prévinrent  ce  coup.  (  i  )  Un  ar- 
rêt du  conseil   l'ayant  nommé ,  eii 
1766,  membre  d'une  commission 
pour  la  réforme  des  ordres  religieux, 
il  en  devint  bientôt  le  principal  /kî- 
seur.  On  l'accuse  d'avoir  excité  des 
divisions  dans  les  monastères,  d'y 
avoir  souflé  l'esprit  d'insubordina- 
tion ,  et    d'avoir   contribué   à    dé-'' 
goûter  de  leur  état  des  hommes  que 
l'espàt  du  siècle  en  éloignait  de  plus 
en   plus.    Beaucoup  de  monastères 


(\)  Voyez,  les  Tjetlrrs  scrrèlp.t  sur  Vètal  actuel 
de  la  reUgi'on  et  dit  clergé  de  France,  aitribuée* 
aux  al)b(^s  de  Boismont  et  Maiiry,  1781  .•  l'arche- 
rêque  de  Toulouse  y  est  Uésigné  sou»  le  nom  Jt 


LOM 

furent  supprimes  successiTcracnl ,  cl 
If  des  corps  entiers  disparurent, 
hevètpic  avait  le  secret  du  ini- 
uiilt  re  et  celui  de  la  philosophie  ; 
il    suivait  son    plan   avec  persevc- 
fance  ;   les  religieux  les  plus  ze'lcs 
étaient  fatigues  par  des  changements 
Dultiphes;  les  plus  reh^chcs  étaient 
favorisés  de  grâces  et  d'emplois,  et 
me  foule  de  lettres  de  cachet  étaient 
iistribuées  pour  autoriser  des  règle- 
ments arbitraires ,  et  pour  saper  à 
>ctit  bruit   l'état  monastique.    Les 
issemblées  du  clergé  de  1772,  de 
1775  et  de  1780  ,  se  plaignirent  de 
;es  elTorts  sourds  j  et  quelques  par- 
lements   même   reprochèrent    à   la 
commission  de  s'arroger  une  auto- 
rité excessive ,  et  de  n'avoir  su  que 
iétruire  ,   tandis   qu'elle   avait  été 
créée  pour  conserver.   On  peut  voir 
i   cet  égard    les   remontrances  du 
parlement  de  Paris  ,  du  10  février 
1784,  et  le  réquisitoire  de  M.  Du- 
iun  ,  procureur- général  au  parle- 
ment de  Bordeaux ,  du  premier  mars 
1780.     L'archevêque   de  Toulouse 
wépara  ainsi  insensiblement  le  coup 
iéfinilif  porté  aux  ordres  religieux 
aar  la   révolution.    Sa    (pialité    de 
nembre  de  la  commission  était  pour 
ui  une  sorte  de  ministère  qu'il  re- 
gardait comme    un   échelon   pour 
irriver    plus  haut.     Mais  tout   en 
âctruisant  les  abbayes  ,  il  s'en  ré- 
«rvait  pour  lui-même ,  et  se  fit  dou- 
ter successivement  celles  de  Basse- 
'ontaine ,  de  Moissac ,  de  Moreilles, 
le  Saint-Vandrille  ,  de  Saint- Ouen 
t  de  Corbie.  La  première  était  con- 
uc  à  son  parc  ;  il  la  fit  supprimer, 
l'enclos   servit  à   augmenter  les 
iépendances  de  sou  château.  Cepen- 
Uîit  mille  bouches  célel^raicnt  les 
Alents  du  prélat.    Son  esprit  ,  sa 
îOnversation  facile  et  brillante,  son 
QÛt  pour  les  lettre» ,  ses  manières 


LOM 


6:j 


t  n« 


nobles  et  ^encreuses ,  les  Ibiftooi 

avei^dcsamis  prompts  à  l'exallrr,  Itii 
avaient  donné  une  grande  rcIcLnté, 
On  le  citait  comme  nncvcquc  admi- 
nistrateur ,  sorte  de  mérite  doni  on 
commençait  à  f.iire  nlu^  de  ras  que 
des  verlus  propres  tl'un  rvr  .ur.  Oti 
vantait  l'ordre  qu'il  a  \ 
son  diocèse  où  il  ne  r<  ^  ^ 

rigoureusement.  A  chaque  chauge- 
racnt  de  ministère,  un  parti  uum- 
brcux  lepoussait  a  la  lêtcdcs  affaire». 
L'assemblée  des  notables  lui  foiirLÎt 
l'occasion  de  satisfaire  son  ambition. 
Il  y  siégeait  dans  le  bureau  de  BIoo- 
sieur ,  et  fut  un  des  plus  ardeots  à  se 
plaindre  des  dissipations  et  ! 
et  à  crier  contre  radraini  ! 
Caloime.  Ce  contrôh' 
congédié;  el^près  (j 
tions  du  roi,  qui  pcrs< 
goûtait   pas   l'archcN.  ,  I  .i-ci 

fut  déclaré  chef  du  conseil  des 
finances.  Son  frère,  le  comte  de 
Brienne  ,  fut  fait  ministre  de  la 
guerre.  C'était  au  commencement  dt 
mai  1 787.  On  aurait  pu  croire  qu'un 

homme  qui  aspirait  .!•"■-    •  ' - 

temps  au  ministère, 

à  s'y  préparer  ,  et  qu  n  % 

des  plans  ,  des  vues  et  J' 

L'archevêque ,    > 

bientôt  voir  sa  I 

sance  et  son  emlwri.. 

grave   vint  ajouter 

de  sa  position  ; 

se  guérir  à  des  1 

vifs ,  et  bien  d> 

sa  tête  en  avait  • 

est  certain ,  c'est  qu'il  1 

point,  pendant  son   mit>: 

talents  qu'on  avait  cru  m; 

lui.  Indécis  et  pusillanime 

tait  sans  dessein ,  avançait  sans  pr»- 


fau^^ti  Utuiartho.  cl  ciui^n  •»utn 


656 


LOM 


la  fermentation  des  esprits.  Aux 
débats  de  l'assemblée  des  notables 
succédèrent  ceux  du  parlement. 
Les  magistrats  demandent  la  com- 
munication des  comptes  du  trésor 
et  les  étals  -  généraux  ;  les  esprits 
s'échauffent;  le  6  août  1787  ,  le 
roi  lient  un  lit  de  justice  pour  l'en- 
registrement des  édits  du  timbre  et 
de  la  subvention  territoriale  :  le 
parlement  proteste  ;  le  i3  août  il 
s'oublie  ,  dit  M.  Sallier  (  i  ) ,  et  dé- 
clare que  les  édits  ne  sauraient  priver 
la  nation  de  ses  droits.  Dans  la  nuit 
du  i4  au  i5,  les  magistrats  sont 
exilés  à  Troyes.  Les  autres  cours 
montraient  le  même  esprit  dans  leurs 
délibérations  ;  la  même  fermentation 
les  environnait  au  dehors.  Le  27 
août ,  le  parlement,  réuni  à  Troyes, 
réitéra  la  demande  àés  étals-géné- 
raux ,  en  déclarant  que  la  conduite 
du  ministère  tendait  à  réduire  la 
monarchie  en  despotisme.  Ce  mi- 
nistère taxé  de  despotisme  recula 
bientôt  ;  il  abandonna  ses  édits  ,  et 
le  parlement  revint  avec  les  hon- 
neurs du  triomphe.  La  séance  royale 
du  24  novembre  1787  ne  fut  pas 
moins  funeste  aux  intérêts  de  la 
cour.  Le  roi  y  porta  deux  édits , 
l'un  qui  créait  un  emprunt  de  4^0 
millions ,  l'autre  qui  réglait  l'état 
civil  des  protestants.  La  dignité 
royale  reçut  plus  d'une  atteinte  dans 
cette  séance.  Le  duc  d'Orléans  pro- 
testa ,  et  fut  exilé  ;  les  conseillers 
Fréteau  etSabbatier  furent  mis  dans 
une  prison  d'état.  Le  parlement  pro- 
testa contre  l'enregistrement  forcé  j 
cependant  il  accueillit  l'édit  sur  les 
protestants ,  qui  leur  accordait  l'exer- 
cice des  droits  communs  à  tous  les 
autres  sujets ,  et  qui  prescrivait  les 


(1)  ^imalcx  françaises  depuis  le  côntwenre- 
mnnt  du  règne  de  Loriis  XVI  jusqu'aux 
Eiats-Génèraux ,  i!Ji3  ,  in  »•*. 


LOM 

formes  à  suivre  pour  constater  lcur|l 
décès.  Le  4  janvier  1 788  ,  le  par- 
lement   prit  un  arrêté  hardi:  son 
exil  fut  décidé  ,  mais  les  lettres  de 
cachet  furent  révoquées.   Trois  re- 
montrances, présentées  successive- 
ment ,  ne  furent  que  le  prélude  de 
la  séance  et  de  l'arrêté  du  3  mai , 
où  le  parlement  rappelait  ce  qu'il 
appelait    les    principes    fondamen- 
taux de  la  monarchie  ,  ou  plutôt  des 
prétentions  aussi  nouvelles  qu'exa- 
gérées. L'exaltation  des  magistrats 
était  extrême;  deux  d'entre  eux  sont 
arrêtés  dans  le  palais  même.  Le  8 
mai ,  lit  de  justice  pour  publier  six 
lois  différentes.  On  créait  de  grands 
bailliages  ,  et  l'on  réduisait  le  parle- 
ment à  une  grand'  chambre  et  à  une 
chambre  des  enquêtes.    Une   cour 
plénière  était  établie ,  et  tint ,  dès 
le  lendemain  ,  sa  première  séance* 
Mais  les  protestations  se  succédè- 
rent >  la  justice  n'était  plus  rendue, 
les   parlements   de  provinces   imi- 
taient celui  de  la  capitale,  la  no- 
blesse   les    secondait  ,    Xfs   gentils- 
hommes   bretons   dénonçaient    les 
ministres  ,  des  émeutes    éclataient 
en  plusieurs  endroits  ,  le  soulève- 
ment des  esprits  était  extrême.  Dsns 
cet  état  universel  d'agitation ,  l'ar-j 
chevêque  de  Toulouse  s'était    fait 
donner  le  titre  de  ministre  principal 
comme  pour  suppléer  par  un  nom  im-  j 
posant  à  la  faiblesse  de  ses  moyens. 
Il  fut  nommé  dans  le  même  temps  à 
l'archevêché  de  Sens ,  vacant  par  la 
mort  du  cardinal  de  Luynes  (  i  ).  Le 
i5  juillet  1788,  il  fit  rendre  un  ar- 

(i)  n  obtint  pour' coadjiiteur  ,  son  neveu, 
Pierre-François-Marcel  de  Loniénie  île  Brieiiii«, 
jic  en  176'i ,  préconisé  à  Rome,  le  i5  déceiTilira 
ir88,  »oiis  le  titre  darclievêqiie  de  Trajanoplc, 
anêlé  avec  son  oncle  sous  la  terreur,  et  eonJa"!!* 
né  A  mort  par  le  tribunal  révolutionnaire  do 
Paris,  le  lo  mai  i7';4  »  1^  môme  jour  que  Ma- 
dame Elisabeth.  l,e  comte  de  Uriunne  ,  fi^ie  d« 
l'^ichevèque,  deux  autres  de  ses  fils,  et  Mad.  «i* 
Cauisy  ta.  iiUe  ,  pei'ireut  eu  uièiue  temps* 


LOM 

rét  du  conseil,  par  lequel,   «prrs 
il    annonce    les  e'iats  -  ^encraux 
le  mois  de  mai  suivant,  il  invi 
!i\s  corps  et  les  particuliers  à  pre- 
■V  des  rcnscij];ncmcnts  sur  leur 
alion.  Cet  appel  imprudent  ne 
r  provoqucrde  nombreux  c'crils, 
plans,  des  systèmes  et  des  déli- 
rions. Le  8  août,   un   nouvel 
.iii(t  du  conseil  abandonna  la  cour 
pliiiièrc  ,  en  maintenant  les  grands 
Lailliages ,    et    annonça    de  rechef 
les  états  -  généraux.  Le    i(3,   l'état 
du  trésor  obligea  de  suspendre  les 
paiements.  Le  principal  ministre  ne 
put  tenir  plus  long-temps  contre  les 
plaintes  qui  s'élevaient    de    toutes 
parts  ;  il  fut  renvoyé  le  ^4  août ,  et 
céda  la  place  à  Neeker.  La  joie  po- 
aire  éclata  dans  la  capitale  par 
es  démonstrations  les  plus  morti- 
tantcs  pour  l'archevêque.  Afin  de 
c  consoler ,  la  cour  le  combla  de 
'races  :  on  lui  donna  des  abbayes;  le 
oi  demanda  pour  lui  le  chapeau  de 
•ordinal.  Pie  VI  réjMignait  à  revêtir 
le  la  pourpre  im  homme  dont  la  re- 
igion  n'avait  pas  eu  beaucoup  à  se 
ouer.  Louis  XVI  insista  par  un  sen- 
ment  de  générosité  conforme  à  la 
•onté  de  son  caractère;  et  le  i5  dé- 
embre,  l'archevêque  de  Sens  obtint 
e  chapeau.  Il  en  apprit  la  nouvelle 
Nice  où  il  se  trouvait ,  ayant  pris 
i  route  d'Italie  à  sa  sortie  du  rai- 
istère.  Il  voyagea  dans  ce  pays; 
lais  il  s'abstint  d'aller  à  Rome.  Il 
e  revint  en  France  que  vers  le  mi- 
en de  1 790  ,  et  s'occupa  de  payer 
s  dettes  qui  étaient  considérables, 
lalgré  le  nombre  de  ses  bénéfices, 
sacrifia  pour  cela  une  partie  de  la 
elle  bibliothèque  qu'il  avait  formée 
grands  frais  (/^oj.   Laire  ).    La 
institution  civile  du  clergé ,  publiée 
cette  époque,  aurait  ])u  fournir  au 
trdiual  de  Lomcaic  l'occasion  de 

XXIV. 


Lo^r 


«'7 


i.'ii.!  .it 


reparer  un  pni  ^n  rrptttitlnn 

il  se  sr'para  dan 

ses  collègues,  I  I 

ne  prit  plus  nur  ic  ii' 

département  de  l'Yoi 

refusé  l'évêrhé  mcli 

Haute-Garonne  ,  qui 

par  les  électeurs  de  < 

Cependant  deu\    ' 

quesconslitutioi; 

à  lui  pour  avoir  1  n 

nique  ,  il   ne  voulut  ; 

à  cet  acte  de  schisme.  11 

pape  le  i3  novembre   1  - 

3o  janvier  suivant,  afin  d*.  .   . 

justifier  sa  conduite;  son    n 

ment  du  carême  de  IJ91  , 

au  même  but.   Pie  VI  lui  »!     im   I   , 

conseils  salutaires  dans  li  1 

Si3  février  1791  ,  dont  la   1 

tion  blessa  beaucoup  le  cardinal.  \^ 
•j>(3  mars  suivant  il  écrivit  a»  souve- 
rain pontife  pour  donner  sa  drmi^ 
siou  du  cardinalat  ;  et  il  annonça 
cette  résolution  |)ar  une  lettre  publi- 
que à  M.  de  Montmorin  ,  un  dcK 
ministres  du  roi.  \j*  pap*»  arrepii 
sa  démission  dans  l<-  < 

26  septembre,  le  d( 
sa  dignité,  et  de  plus 
de  sou  serment  et  «i< 
avait  prise  au  schisme    / 
locution  du  pape  à  ce  suj.  ' 
collection  de  ses  brefs  )  : 
duile  de  M.  de  Brienne  ne 
point  des  fureurs  révolu: 
Il  fut  arrêté  à  S  -  '•  - 
1-^93,  cl  mis  < 
cette  ville;  il  obi  un 
ter   cher.   lui.    Un    |  » 

on  vint  l'arrêter  de 
lendemain  on  I*»  «r.. 
son  lit;  ce  1; 
hâté  lui-ni. 

en  prenant  du  pu^M>B.  Mai»  cet 
cvcncraent  s'explupie  suffiManest 
par  le  détail  dtJ  cuxuiUtiMM  l^$ 


{u'davûit 
.et  jouri 


658 


LOM 


soldats  qui  vinrent  pour  l'arrêter, 
lui  ayant  donne'  jusqu'au  lendemain 
pour  le  conduire  en  prison ,  passè- 
rent la  nuit  chez  lui  à  boire  :  ecliauf- 
fës  par  le  vin ,  il  leur  prit  envie  d'al- 
ler réveiller  le  cardinal ,  et  de  le 
forcer  à  manger  avec  eux.  Il  leur 
repre'senta  vainement  qu'il  ne  sou- 
pait  point;  ils  le  contraignirent  à 
prendre  son  repas ,  puis  le  maltrai- 
tèrent. La  peur  et  les  coups  qu'il 
avait  reçus,  joints  au  travail  d'une 
digestion  pénible  ,  lui  occasionnè- 
rent une  attaque  d'apoplexie  fou- 
droyante. C'était  le  1 6  février  1794. 
Telle  fut  la  fin  d'un  prélat  qui  avait 
reçu  en  partage  de  l'esprit ,  des  ta- 
lents et  des  qualités.  Son  malheur 
fut  d'être  entré  dans  un  état  pour 
lequel  il  n'était  pas  fait,  et  de  s'être 
lié  avec  des  hommes  dçnt  les  prin- 
cipes devaient  lui  être  suspects.  Ou- 
tre ses  rapports  et  discours  insérés 
dans  les  procès-verbaux  des  assem- 
blées du  clergé  ,  il  a  publié  une 
Oraisonfunèbre  du  Dauphin^  1 7^6^ 
in- 4^.  —  Son  frère  cadet  Alha- 
nase  -  Louis  -  Marie  de  Lomejvie, 
comte  de  Brienne ,  lieutenant-géné- 
ral ,  devint  ministre  de  la  guerre  en 
1787.  C'était  un  militaire  sans 
expérience  et  un  administrateur  mé- 
diocre. Il  forma  cependant  un  con- 
seil composé  d'officiers  distingués, 
et  d'où  il  sortit  d'assez  bons  règle- 
ments. Le  crédit  de  son  frère  qui  l'a - 
tait  porté  au  ministère  ayant  cessé , 
il  fat  remplacé  par  M.  de  la  Tour- 
du-Pin,  resta  en  France  après  la 
chute  du  trône,  et  périt  en  1 79.4  sous 
le  fer  des  bourreaux  révolutionnai- 
res ,  à  l'âge  de  soixante-quatre  ans. 
—  Un  autre  frère,  le  marquis  de 
B:ii£]NNE ,  colonel  du  régiment  d'Ar- 
tois, avait  été  tué  à  l'attaque  du  Col 
de  l'Assiète,  le  19  juillet  1747.  (  ^. 

BsiLLÏÏ-lSLE,  IV,  107.  )    P G — ï. 


LOM 

LOMI  (  Baccio  ) ,  peintre  ,  né  à 
Pisc ,   vers   le   milieu   du  seizième 
siècle ,  fut  le  chef  d'une  école  dont 
sa  famille  a  produit  les  maîtres  les 
plus  distingués.  C'est  à  Rome  et  dans 
l'école  de   ïaddée  Zuccheri,  qu'il 
apprit  la  peinture  :  il  fut  chargé  de 
terminer  V Histoire  d'Esther ,  que 
Augustin  Ghirlando  avait  commen- 
cée dans  le  Campo-Santo  de  Pise.  Le 
Couronnement   de   la    Vierge   que 
l'on  voit  chez  les  chanoines  de  la 
primatiale ,  est  peint  avec  un  peu 
de    sécheresse.   C'est  le  tableau  du 
maître -autel  de  Saint  -  Laurent   de 
Pise ,  qui  l'a  mis  au  rang  des  meil- 
leurs artistes.  On  reconnaît,  dans  tout 
ce  qui  reste  de  lui ,  la  manière  de  son 
maître  ,  et  celle  de  Santi  di  Tito 
dont  il   avait  beaucoup   étudié  les 
ouvrages.  —  Aurelio  Lomï  ,  neveu 
du  précédent ,  et  son  élève  ,  naquit 
à   Pise,   en    i556  :   s'étant   rendi 
fort  jeune    à    Florence ,   il    suivi 
les  leçons  du  Bronzino  ,  et  peignit 
à  la  manière  de  ce   maître  ,   deu^ 
grands    tableaux   qui    se    trouven 
encore  dans  la  primatiale  de  Pise 
et  qui  représentent,  l'un,  la  Nati 
vite    de    Jésus  -  Christ  ,    l'autre 
V Adoration   des   Mages.   Quoiqm 
Gènes  ne  manquât  pas  de  peintre 
habiles  à  cette  époque,  Lomi   fu 
appelé  dans  cette  ville,  et  charg 
de   plusieurs   travaux  importants 
parmi  lesquels  on  cite  la  Descent 
de  Croix  qu'il   lit  pour  le  maître 
autel  de  Sainte-Marie  de  la  Passion 
ainsi  que  la  Résurrection  et  le  Jugt 
gemeiit  dernier,  pour  Notre-Dam 
de  Carignan.  Après  son  retour  à  R( 
me  ,  il  y  peignit  les-fresques  de  I 
chapelle  de  Sainte-Marie  m  Fallicei 
la,  ainsi  qu'un  fort  beau  tableau  d 
V  Assomption.  A  Bologne,  à  Lucquei 
à  Florence  ,  il   laissa  de  nouvelle 
preuves  de  $on  habileté  ;  mais  c'ei 


LOM 

lit  dans  sa  ville  natale,  quM 

la  son  talent.  11  peignit  à  frcs- 
ians le  (lampo-Sanlo , une  partie 
ffistoire  d\-issnériis  ,  avec  des 
iicnts  et  des  bas-reliefs  en  clair- 
ir.  Dans  l'église  du  Dôme  ,  il 
il  trois  tableaux  à  l'builc  :  celui 
lailre   autel  ,   représentant   la 
iun  rison  de  Vavcu^le-né,  une  Cir- 
concision, et  un  autre  trait  de  la  vie 
de  Jésus  -Christ.  Le  Saint-Jérôme 
qu'il  a  peint  au  Campo-Santo  ,  est 
nnc  de  ses  meilleures  productions. 
On  le  regarde  comme  un  des  chefs 
de  l'école  de  Pisc.  Il  mourut  dans 
celte   ville  ,    en    162*2.   —  Orazio 
Lo  MI ,  frère  du  précédent,  fut  surnom- 
mé Gentileschi   (i).   (  Foyez  ce 
nom  ,  tom.  XVII,  pag.  io3.  ) — Ar- 
tcinise  Lomi  ,  fille  d'Horace  Genti- 
lcsrhi,naqaitàPise,en  iSqo,  et  fut 
d'abord  élève  de  son  père.  C'est  sur- 
tout dans  le  portrait  qu'elle  se  distin- 
gua :  elle  y  a  même  surpassé  Gentiles- 
ch  i  ;  mais  elle  ne  négligea  point  l'his- 
loiic,  et  l'on  a  d'elle  plusieurs  très- 
bons  morceaux  en  ce  genre.  Elle  re- 
çut des  leçons  du  Guide ,  et  fit  une 
étude  particulière  du  Dominiquin. 
Ou  reconnaît  dans  tous  ses  ouvrages 
me  heureuse  imitation  de  ces  deux 
grands  maîtres  :  on  estime  surtout 
beaucoup  un  Saint-Jean-Baptiste  en- 
dormi ,  qu'elle  composa  pour  le  duc 
lella-Torre,  à  Naples,  et  un  Mar- 
'yre  de  saint  Jam^ier  exposé  aux  bé- 
'es ,  qu'elle  peignit  pour  la  cathédrale 
ic  Pouzzoles.  On  voit  dans  la  galerie 


le  Florence  un 

de  ses  tableaux,  qui 

, 

(iiQuoiqua  iréredc  Loroi,   Horace 

prit  lie  la 

amille  (Icta  mère, 

•  nom  Je  Gentil 

esclii,  qui 
Uhtc.   Li 

ni  c<t  rr»t.-   p  >Mr  le 

.littlnt;  .n  >Ir    .... 

!o  artiste. 

ar  Befte- 

loi. 

,',  publié 

mr  M      M     l.a„rer.t 

:    ce  t,.bleiu  ,    rr 

rnarqiiable 

>at  la  gricc  de  la  compoaitinn  ,  le  charma  et  la 

Uuc -iir  tlu  coloria  , 
lait  Je  U    Toscane 

la  liii'-aae  du  dos 

lin  .  proTe- 

,  il   a  ét4  eaUvé  c 

•««•mraiiaajrcf  da 

jraud-duc. 

lOM  659 

représente  la  Mort  d'/folo^htmê  t 
i\  est  remanjiiiblc  p;ir  Ir  n^litrrt 
de  la  composition,  t.i  fni.r  .Ir  I'.  i. 
pression  ,et  la  bcaui. 

Enfin,  r. /arontf  qu'il  1 ;  j.,.,.^ 

pour  la  famille  Arrighrfti,  dr  Flo- 
rence, est  un  de      •    •         '        T 
vrages.   Elle  pn 
tion  les  fleurs  »  1  1 
n'était  pas  moitl^   ' 
charmes  de  s-»  li 
épousa  P.  An  t.  > 
conserva  le  nom  .nou 
tait  fait  connaître,  tt 
pies  ,  vers  lOi  >.  P — 4. 

LOMMIUS  (  Jossr  )  ,  l'un  dr« 
plus  habiles  méderiii.s  du  seizirme 
siècle,  était  né  à  Buren,  Im.mfj  du 
duché  de  Gueldre.  Son  1 

Lomm(car  le  nom  de  Loju ;  t 

une  latinisation  f  selon  l'usage   de 

ces   temps  ),  était   grefli"-     *"  •- 

bourg  ;    il  fit    faire    d'r 

études  à  Josse,  qui  devii-  i 

dans  la  connaissance  du  „  1 

latin ,  et  qui  alla  étudier  la  i: 

à  Paris,  où  il  se  fit  reni.ir;,  r    i» 

son  maître,  le  grand    K<  1 

devint  son  ami.  Il  alla  < 

tablir  à    Tournai  ,   où   il    .s^^cput 

une  haute  renommée  mrntn'-  priti- 

cien,  et  fut  nommé  ] 

cette  ville;  maisapp'  ' 

par  les  malades  ,  et  ne  p" 

lire   aux   v..v.j  -es  mw  L 

Subli([ue  1 
'entrcprci. .  < 

Bruxelles,  vers  i557.  ^'^  ' 
aussi  remarquable*  sous  i 
des  principes ,  que  sous 
style  élégant  et  précis,  el  d  un. 


ni  lé  dont  la  pureté  l'a  bit  comj 
à  Celse.  1.  Cof» 


de  turntta. 
utn  de  Re 


samtaf*' .  m  ;•' 

medii  ' 


66o  LOM 

Anvers,  i5Go.  On  ne  trouve  nulle 
part  de'crit  avec  autant  de  laco- 
nisme et  d'exactitude  ,  un  [aussi 
grand  nombre  de  maladies  :  ce  talent 
rare  a  valu  à  Lommius  le  surnom  de 
Peintre  des  maladies.  Il  excellait 
sous  le  rapport  du  diagnostic.  Ce 
dernier  ouvrage  a  eu  plus  de  douze 
éditions  ,  soit  en  Hollande  ,  soit 
€n  Allemagne  ;,  soit  eu  France,  soit 
en  Angleterre.  Il  a  ëte'  traduit  eu 
français  sous  le  titre  de  Tableau 
des  maladies  y  oii  Von  découvre 
leurs  signes  et  leurs  événements  ^ 
Paris,  171'^,  in-Ki ,  par  J.  B.  Le 
Berthou.  Cette  traduction  ,  fort  bien 
écrite,  est  estimée  et  recherchée. 
(  F.  aussi  Lemascrier.  )  III.  De 
curandis  fehrihus  cojitinuis,  liber  , 
Anvers  ,  1 563  ,  in-8'\  On  a  réuni 
tous  les  ouvrages  de  Lommius  sous 
le  titre  à' Opéra  omnla ,  Amster- 
dam, 1745,  '1  vol.  in- 12.        F-R. 

LOMONOSOFF  (  Micuel-Vassi- 
LTEViTCu  )  ,  célèbre  poète  russe  , 
professeur  de  belles-lettres  ,  mem- 
I)re  de  l'académie  de  Saint-Péters- 
bourg, honoraire  de  celle  de  Stock- 
bolm  et  de  l'institut  de  Bologne,  na- 
quit eu  1 7  1 1 ,  d'un  simple  pécheur, 
à  Kolmogory.  Il  passa  les  prejnières 
années  de  son  enfance  â  aider  son 
père  dans  son  métier ,  qui  seul  four- 
nissait à  l'entretien  de  toute  la  fa- 
mille. Dès  qu'il  sut  lire  et  écrire, 
avantage  qu'il  n'acquit  pas  sans  d'as- 
sez grandes  diiïicultés,  il  prit  un  goût 
vif  pour  les  livres  :  à  peine  eut-il  en- 
tendu chanter  dans  une  église  les 
psaumes  de  David ,  qu'il  fut  saisi  de 
la  plus  vive  admiration  pour  les 
grandes  images  dont  ils  sont  rem- 
plis ;  leur  poésie ,  si  souvent  sublime, 
iui  fit  découvrir  qu'il  était  né  poète 
lui-même.  Il  lut  la  Bible  plusieurs 
fois  avec  enthousiasme,  et  conçut 
la  désir  de  pouvoir  célébrer ,  k  àoii 


LOM 

tour,  les  merveilles  delà  création. 
Il  voulait   aussi  retracer  les  hauts 
faits  de  Pierre-le-Grand ,  qui  avaient , 
dans  ce  même  temps ,  produit  sur 
lui  une  très-forte  impression:  il  cher- 
cha donc  à  connaître  les  règles  de 
l'art   des    vers.  Ayant  appris  qu'il 
existait  à  Moscou  un  établissement 
oii  l'on  enseignait  les  langues  grecque, 
latine,  allemande,  française  ,  et  les 
belles-lettres, il  déserta  la  maison  pa- 
ternelle ,    résolu   d'aller  demander 
dans  cette  ville  l'instruction  dont  il 
éprouvait  un  besoin  impérieux.  En 
1734,  on  le  fît  sortir  de  l'école  de 
Zaikonospask ,  pour  le  placer  plus 
avantageusement    à   l'académie  des 
belles-lettres*  et  deux  ans  après,  on 
l'envoya   en  Allemagne  achever  ses 
éludes.  De  Marbourg,  ville  considé- 
rable de  la  He"ssc,où  il  avait,  pendant 
quatre  ans,  travaillé- avec  ardeur, 
chez  le  baron  deWolff,  à  la  chimie, 
à  la  lithologie,  à  la  minéralogie 
etc. ,  il  passa  en  Saxe;  et  là,  sous  la 
direction  de  Henckel,  il  vit  les  fouil- 
les qu'on  faisait  dans  les  mines  du 
Ilartz ,  et  du  pays  de  Brunswick 
etc.  En  1 741,  il  se  rendit  à  Saint- 
Pétersbourg.  Quoique  livré  essentiel 
lement  à  son  goût  pour  les  sciences i 
et  les  langues ,  il  ne  négligeait  pas  U\ 
poésie.  Ce  fut  à  cette  époque  qu'il 
composa  sa  première  ode  sur  la  vie- 
toiredePultava  :  quelque  temps  après 
il  en  publia  plusieurs  autres  avec  ur 
égal  succès.  Admis  à  partager  les  tra- 
vaux de  l'académie ,  il  fut  nomms 
directeur  du  cabinet  minéralogiquc 
et ,  l'année  suivante ,  adjoint  de  l'aca 
dén^ie  pour  les  sciences  chimiques  ei 
minéralogiques.  En  1745  ,  il  fut  ap- 
pelé ,  par  un  oukase  du  sénat ,  au!! 
fonctions  de  professeur  de  chimie 
six  ans  après  ,  l'impératrice  Elisa- 
beth lui  donna  le  rang  de  conseillei 
de  collège.  En  1752  ,  il  reçut  le  pri- 


T.OM 

^f  exclusif  de  monter  une  fnbri- 
ile  verreries  en  tout  genre,  mais 
j)i  iiu  ipalemenl  en  grains  de  verre  et 
ob)(  t>  scmlilahlcs.  Lumunosofinyant 
eto  !('  premier  à  faire  dans  son  pays 
des  figures  en  mosaïque,  on  le  cliar- 
gea  d'exécuter  un  grand  tal)lenu  des- 
tine à  rappeler  les  actions  célèbres 
de  Picrre-lc-Graud.  Il  n'y  employa 
]uc  des  matériaux  et  des  ouvriers 
russes,  inventant,  pour  mettre  à  exé- 
cution ce  tableau  ,  des  compositions 
chimiques,  ainsi  que  dilTercntes  ma- 
chines d'une  si  énorme  dimension  , 
qu'on  n'en  avait  jamais  vu  de  sem- 
lilables.  Le  1 3  février  175 1,  l'aca- 
démie lui  ouvrit  ses  portes  avec  ac- 
clamation :  le  i4  février  17O0,  il 
fut  rlu  directeur  général  du  gymnase 
et  de  l'université.  Sans  naissance , 
sans  fortune  et  sans  appui,  Lomo- 
nosoirne  dut  qu'à  son  génie  et  à  son 
savoir,  les  distinctions  et  les  hon- 
neurs de  toute  espèce  qui  lui  furent 
dévolus.  Sa  passion  pour  les  scien- 
ces lui  avait  fait  éprouver  ,  en  Alle- 
magne ,  toutes  sortes  de  privations  : 
pris  par  des  enrôlcurs  sur  les  fron- 
lii  res  de  la  Saxe,  il  était  devenu 
soldat  malgré  lui,  avait  couru  plus 
l'une  fois  le  risque  d'être  fusillé  , 
ît  uc  s'était  sauvé  qu'à  travers  mille 
langers.  Il  finit  par  être  créé  con- 
5?"iller  d'état,  en  17O4  ,  et  mourut 
i'Kj  mois  après,  le  4  avril  1765. Son 
ouvoi  funèbre  se  lit  avec  la  plus 
grande  magnificence,  et  il  fut  enterré 
iu  couvent  de  St.- Alexandre  Newsky, 
iu\.  frais  de  Catherine  II.  Ajou- 
aut  à  toutes  ses  connaissances  celle 
les  langues  mortes  et  vivantes ,  il 
radiiisit  en  russe  divers  ouvrages  , 
'litre autres,  plusieurs  sur  la  physique 
^xj>érimentale:  il  entreprit  aussi  d  é- 
riro  l'histoire  ancienne  de  sa  na- 
iou  ;  et  le  volume  qu'il  ;  " 
isultat  de  recherches  proi 


lui  fît  1-  t'^'"  ••'  '"  ' 

regai.f 

un  g<-iii.  . 

de  la  poi^ 

mier   la  r.ji  rn  ir  ,  1, 

luie  langue  qui  p.it. 

ingrates   pour   I 

rendit   cPltf*    \.v 

plus  richr  1 

de  l'éclat  1 

lui  deux  \ 

profanes ,  <; 

estime ,  mais  où  il  parail  qu'il   « 

quelquefois  outré  les   qualt- .  ...  L  . 

défauts  du  genre.  Il  a  coi 

cantiques,  H--  ;--..■■«-      ■ 

et  d'aulro 

de  la  Pctreidc  ,  vu  (kux 

un  de  ses  plus  beaux  titre 

11  a  encore  publié  une  ' 

Grammaire  russe  ;   un 

rhétorique  à  Viisa^e  de^ 

un  Essai  ahrèç^r  dcph 

viétaUiir^e  ;  c\  / 

mireetSélifii, 

duites    par    Pa; 

Théâtre  de  Su  .^ 

qu'on  appelle  le   Racine  tîu   A 

ciait  j-.»  -v-t..  1.  .....m  .1, ..,, 

mon< 

le;  il  tiici  (  ji.Mt  it>nir>  i«  >  '•'  ' 
de  le  rabaisser,  cl  ce  fut  un  l 
trionii  '  '        '  ' 

faire  1 

A 


parti- 
sa  C' 
gt^ede  Hii 


la  aramlear  de  Pieu  ,  ot 


662 


LOM 


se ,  fut  traduit  par  lui-lïiême  en  latin. 
Lomonosoff  était  en  correspondance 
avec  presque  tous  les  savants  de 
l'Europe ,  ses  contemporains.  Sa  bi- 
bliothèque et  ses  manuscrits  furent 
achetés  ,  à  sa  mort ,  par  le  prince 
Gre'goire  Orloff.  L'amiral  SchichkofT 
a  écrit  un  précis  de  la  \'ie  de  cet 
homme  extraordinaire  ;  qui  suffirait 
lui  seul  (  dit  Lévêque  )  pour  illustrer 
un  siècle  entier.  L — p — e. 

LONG  (  Thomas)  ,  théologien  an- 
glican ,  né  à  Exeler  en  i6'2i ,  après 
avoir  été  pasteur  de  village,  obtint,  à 
la  restauration,  une  prébende  dans  la 
cathédrale  ,  et  la  perdit  à  la  révolu- 
tion de  1688  ,  parce  qu'il  refusa  de 
prêter  serment  au  nouveau  gouver- 
nement. Il  mourut  en  1 700.  On  a  de 
lui  grand  nombre  d'ouvrages  de  con- 
troverse théologique ,  et  quelques  li- 
vres historiques;  voici  les  principaux  : 
I,  Essai  surVusage  de  V  Oraison  do- 
minicale ,  dans  le  culte  public  , 
Londres ,  i658,  in-8°.  IL  Défense 
des  premiers  chrétiens  relati\>ement 
à  V obéissance  à  leur  prince ^  contre 
les  calomnies  d'un  livre  intitulé  Fie 
de  Julien  V apostat,  Londres ,  1 683, 
in-8".  III.  Histoire  de  tous  les  com- 
plots papistes  et  fanatiques  ,  etc. 
contre  la  religion  établie  et  le  gou- 
vernement,  ibid.  1684,  in-8°.  IV. 
Recherches  exactes  ,  modestes  et 
fidèles  du  docteur  ffalker  ,  sur 
l'auteur  de  Z^Eikon  Basiliké  ,  etc. , 
prouvant  que  cet  ouvrage  est  sorti 
de  la  plume  de  Charles  1®^.     E — s. 

LONG  (  Roger  ),  astronome  an- 
glais, né  le  1  février  i68o,  mort  le 
16  décembre  1770,^11  maître  du 
collège  de  Pembroke  ,  professeur 
d'astronomie  à  l'université  de  Cam- 
bridge ,  et  recteur  de  Cherryhinton 
et  de  Bradwell.  C'était  un  homme 
d'esprit,  de  savoir ,  et  singulièrement 
industrieux.  Il  avait  construit,  eu 


LON 

1 765 ,  dans  une  des  salles  du  collég< 
de  Pembroke ,  une  sphère  ou  plu- 
tôt un  globe  céleste  de  dix-huit  pieds 
de  diamètre,,  dans  lequel  plus  de 
trente  personnes  pouvaient  être  as- 
sises commodément.  Il  a  donné  lui- 
même  la  description  decette  machiu( 
011  les  constellations  visibles  à  l'ho- 
rizon de  Cambridge  sont  dessinée: 
dans  l'intérieur;  on  y  voit  le  zodia 
que,  les  orbites  des  planètes,  etc. 
le  tout  se  meut  au  moyen  d'une  ma- 
nivelle. Il  paraît  que  c'est  la  plu; 
grande  machine  de  ce  genre  qu'oi 
ait  exécutée  en  Europe  :  les  globes  d^ 
Gottorp  n'avaient  que  onze  pieds  e 
ceux  de  Coroneili  douze.  (  Foje. 
Lalande,  Bibliogr.  astr..  p.  35 o. 
On  lui  doit  aussi  im  gros  traité  d'as 
tronomie  et  quelques  opuscules.  L. 
LONG  (  Edouard)  ,  historien  an 
glais,  naquit  en  1 734,  à  Saint-Biaise 
en  Cornouailles.  Etant  allé  à  la  Je 
maique  ,  en  1757  ,  pour  recueillir  1 
succession  de  son  père ,  le  gouver 
neur  de  cette  colonie  ,  qui  était  so 
beau-frère ,  le  prit  pour  secrétaire 
Il  fut  ensuite  nommé  juge  de  la  cou 
d'amirauté  :  sa  mauvaise  santé  1 
força  de  quitter  l'île  eu  1769;  et 
mourut  le  1 3  mars  1 8 1 3 ,  au  châtea 
d'Arundel  Park  en  Sussex.  On  a  d 
lui  :  I.  Histoire  de  la  Jamaïqm 
Londres,  1774?  3  vol.  in-4^.  I 
séjour  de  l'auteur  dans  cette  colc 
nie  ,  et  les  emplois  qu'il  y  ava 
occupés ,  l'avaient  mis  à  même  c 
se  procurer  des  matériaux  abor 
dants.  IL  Des  Romajis  et  autre 
écrits  d'un  genre  léger.  III.  Lettn 
sur  les  Colonies  ,  1775,  in  -  8°. 
et  autres  brochures  politiques  si 
l'esclavage  des  nègres  et  le  coni 
merce  du  sucre.  Il  fut  éditeur  d( 
Mémoires  du  règne  de  Bassa-Ahad 
roi  de  Dahomey ,  avec  une  notic 
succincte  sur  la  traite  des  nègres,  p^ 


LON 

iris,  Lomlros,  1789,  i  vol.  in- 
.  ,  traduit  en  français.  —  Jean 
ofG  ,  voyageur  anglais  ,  s'cmbiàr- 
»  ,  en  17(^8  ,  pour  le  Canada  ,  et 
-ta  sept  ans  chez  un  marchand 
Montréal  pour  y  apprendre  le 
tiiçais  et  la  langue  des  sauvages, 
connaissance  indispensable  à  cpii- 
conque  entreprend  la  traite  i\es 
j)clleteries.  Au  commencement  des 
îiostilitas  avec  les  Américains  des 
l^lats-Unis  ,  eu  17^5  ,  il  entra  com- 
me volontaire  dans  un  parti  d'In- 
diens ,  et  passa  ensuite  dans  un  régi- 
ment anglais.  Cette  situation  l'ennuya 
bientôt  ;  il  partit  pour  la  traite  au- 
delà  des  lacs,  en  i77'],etfut  adopte' 
comme  frère  par  une  tribu  de  Tcliij)- 
piouans ,  qui  lui  donna  le  nom  de  Cas- 
tor. Après  avoir  passe,  à  différentes 
re})rises ,  six  ans  dans  les  pays  si- 
tués autour  du  lac  supçriem- ,  il  re- 
vint en  Angleterre  en  17  83.  L'année 
suivante ,  il  retourna  au  Canada , 
échoua  dans  ses  entreprises ,  et  après 
beaucoup  d'aventures  revit  sa  patrie 
en  1787,  n'ayant  rapporté  de  ses 
longues  courses  que  le  souvenir  qu'il 
en  consigna  dans  ses  Voyages  d'un 
interprète  et  commerçant  indien  ^ 
décrivant  les  mœurs  et  les  coutumes 
des  Indiens  de  V Amérique  septen- 
trionale^ Londres,  1791 ,  1  vol  in- 
4"-  Zimmermann  les  traduisit  en  al- 
lemand ,  et  y  ajouta  une  inlroduclion 
relative  au  Canada  ,  Brunswick , 
1791  ,  I  vol.  in  8«. ,  cartes.  M.  Bil- 
lecuq  eu  a  donné  une  traduction 
sous  ce  titre  ;  Vojages  cliez  fli/Jé- 
renîes  nations  sauvages  de  V Amé- 
rique septentrionale  ,  Paris,  an  2 
('794)>  ï  voLin-8**.  avec  une  c^rtc. 
^  ^-y  détails  donnes  par  Long  sur  les 
I  plades  indiennes  ne  sont  pas  aussi 
t  uijiplels  que  ceu\  des  voyageurs 
I  français;  ses  courses  ne  se  sont  pas 
I   étendues  aussi  loin;  mais  sa  rcla- 


lion,  <^fan!  asset  nfcroK» ,  fAÎt  con- 
naître l'éf  *•  n  "«mcdcm  peunlj. 
de»,  biei.  ,  de  ce  qu'elles 

étaient  «..iniu.s.  |«et  Tocâlwlâirri 
qu'il  donne  de  leurs  dÎTer»  dùilectct 
sont  pré<ieu\,  et  il  rsi  k  Ttf/ttUtf 
qu'on  ne  1rs  .lit  p.i%  inseri^  <{||fH  U 
traduction  fi  .  1 

LONCiJv 

LONGCIIA  .R;,d, 

Tacadéniie   di  iMMuif 

f)robabteinent  dan^  -  ^  ireri 

e  milieu  du  di\-ii  «le  :  il 

embrassa    l'état  c»  c  ,  oa 

prit  du  moins  le   i..;.  '"     •• 

vécut   toujours  dans    l* 
lé.   Pendant  la  révolu li 
étranger  aux  affaires  j- 
mourut  â  Paris  ,  le  au  aM,i 
On  a  de  lui  :  I.  Mala^rida^  n 
en  trois  actes  ,   1 7(33  ,  in  -  i  u  ;  ce 
drame  ,  assez  mal  ourdi  .  r^t  a**#^- 
bien  versifié  :  l'auteur   ■ 
mis  son  nom  à  sa  pièrr . 
parce  qu'il  portait  I 
tique  ;  car  il  n'y  .. 
danger  à  déclamer 

tes  qui  venaient  Ùl.:.     

France.   IL  Aventures  d'un  jeune 
homme  ,  pour  sentir  à  Vhistoi  -   '- 
V Amour  y   1768,  in -12.  III 
moires    d'une    religieuse  ,    1 
2    vol.  in- ri.  IV.    Tableau 
rique  des  gens  de  Ltlns  ,  on 
chrurwlou^iqiie  cl  nitiquf  lî 
toire  de  la  lit  ter  i' 
considérée  dans  .\- 
lutions ,  '' 
dix-luiiti' 
G  vol.  in-ia.  Ce  n  - 

de  V Histoire  Ullén: 

par  les  1» 

clic  n'y  <      ] 

Long'  'i  :;.'i -  r  >i' 

d*iodiqt<'i  ,  I' 

ces  ou  autorii 

il  a  pour  cela    co^tio   i  • 


6G4 


LON 


faites  dans  l'ouvrap;e  des  bénédic- 
tins j  et  comme  ces  savants  religieux 
ne  sont  pas  allés  au-delà  du  trei- 
zième siècle  ,  c'est  aussi  là  que  s'ar- 
rête Longcharaps.  Son  travail  ne 
convient  pas  aux  gens  du  monde ,  et 
ne  suffit  pas  aux  gens  de  lettres,  V. 
Elégies  de  Properce,  traduites,  1772, 
in-S*^.;  cette  traduction  du  plus  pas- 
sionne' des  e'iegiaques  latins  ,  est  en 
prose  :  dans  le  temps  que  l'ahbe' 
Longchamps  travaillait  à  Paris  à 
la  traduction  de  Projierce ,  son  frère 
s'en  occupait  ailleurs.  Le  sort  les 
ayant  réunis  ,  leur  surprise  fut  ex- 
trême de  voir  que,  sans  s'être  corn 
munique  leurs  projets  ,  ils  avaient 
forme'  la  même  entreprise  :  ils  mi- 
rent leur  travail  en  commun  ,  et 
convinrent  ce})endant  de  ne  nommer 
qu'un  traducteur.  L'abbë  Long- 
champs  avait  laisse  en  blanc  quel- 
ques passages  qu'il  de'sespe'rait  de 
pouvoir  rendre ,  entre  autres  ,  le 
commencement  de  l'ëlégie  xv  du  11^. 
livre  (  O  me  felicem!  nox  6  mihi 
candida!  etc.  )  Encourage'  par  le 
succès  de  son  travail  ,  il  traduisit 
tout  sans  exception  ,  dans  la  nou- 
velle e'dition  qa'il  donna  sous  ce 
litre  :  Elégies  de  Properce ,  tra- 
duites dans  toute  leur  intégîiié, 
avec  des  notes  interprétatives  du 
texte  et  de  la  mrthologie  de  V au- 
teur^ 1802,  2  vol.  in-8^.  Cet  ouvrage 
est  sans  contredit  le  plus  beau  titre 
litte'raire  de  l'auteur  :  les  additions  , 
notes  et  corrections  nécessaires  au 
comple'ment  de  la  seconde  édition  , 
sont  de  l'abbc  Longchamps  seul  ; 
mais  dans  plusieurs  endroits  il  faut 
convenir  que  Properce  est  loin  d'a- 
voir été  rendu.  VL  Elégies  de  Ti~ 
huile  ,  traduites  en  prose,  1776, 
ia-8<».  VIL  Histoire  impartiale  des 
éi^énéments  rnUitaii^es  et  politiques 
de  la  deniière  guerre  dana  les  t^ua- 


LON 

tre  parties  du  monde ,  1 785,  3  voL 
in- 12  ,  réimprimés  en  1786,  et  en- 
core en  1787  ,  si  toutefois  les  exem-- 
plaires ,  sous  ces  trois  dates ,  ne  sont 
pas  la  même  édition  avec  des  fron- 
tispices différents.  Ce  livre  est  oublié 
depuis  long  temps.  Longcharaps  a 
aussi  travaillé  à  la  Nouvelle  biblio- 
thèque de  campagne,  —  Un  autre 
Longchamps  ,  son  contemporain  , 
fut  secrétaire  de  Voltaire  ,  avant 
1752,  et  mourut  vers  1792.  Il  a 
laissé  des  notes  ou  mémoires  sur  la 
vie  littéraire  et  privée  de  l'auteur 
à'Alzire.  Ces  notes  ,  mises  en  ordre 
et  rédigées  par  M.  Dccroix ,  n'ont 
point  encore  été  publiées ,  mais  le 
seront  prochainement.  —  Moulier 
DE  Longchamps,  mit  en  vers  la 
Cénie  de  Madame  de  Graffigny , 
1751,  in- 12.  A.   B — T. 

LONGEPIERRE  (  Hilaire-Ber- 
NARD  DE  Requeleyne  ,  baron  de  ) , 
né  à  Dijon  en  1659  •>  ^^^  ^^  bonne 
heure  ,  pour  l'étude  ,  une  passion 
très-vive,  que  son  père  se  plut  à 
seconder;  ce  fut  lui  ,  dit  -  on  ,  qui 
l'engagea  à  traduire  en  vers  fran- 
çais quelques  -  uns  de  ces  poètes 
grecs  qu'il  s'était  rendus  familiers. 
Très  -  jeune  encore  ,  il  publia  des 
traductioJiS  d'Anacréon  ,  de  Sapho  , 
de  Théocrite  ,  de  Rion  et  de  Mos- 
ch:!S ,  qui  prouvaient  plus  d'amour 
pour  les  anciens  que  de  talent  pour 
imiter  leurs  beautés  ,  et  attirèrent 
à  l'auteur  une  épigramme  de  J.-B. 
Rousseau  ^  011  il  était  coroparé  à  ces 
premiers  fidèles  , 

Qui  combattaient  jusqu'au  trépas 
Pour  des  vériiéa  immortelles 
Qu'eux-niêinej  ne  côoipréuaieiit  pas. 

L'épigramme  est  injuste  :  les  notes 
dont  ces  traductions  sont  accompa- 
gnées ^  prouvent  que  Longepicrre 
comprenait  et  sentait  assez  bien  ses 
auteurs.  Obi  en  trouve  une  nouvelle 


I.ON 

preuve  dans  ini  Discours  qu'il  pu- 
l.lia  sur  les  Ancietis ,  Paris,  1O87, 
iii-i'Ji.  Ayant  traduit  les  bucoli- 
q'.îos  ç^rccs,  il  voulut  composer  lui- 
jiu'nic  dans  ce  p;cnre  ,  et  donna  en 
i()()o,  un  Recueil  d'idylles  j  (pu  eut 
iMcorc  moins  de  succès  que  ses  inii- 
tJtions.  De  là  il  passa  au  genre  dra- 
ina tique,  ce  qui  fit  dire  encore  à  J.-B. 
Rousseau  : 


Sî  le  «tyle  bttroliqn* 

Il  veut,  par  le  dramatique, 
Etre  tiré 


Dura 


tuteur*  abject*. 


Viîcnt le»  Gicci. 

Il  donna  au  théâtre  Médée  ,  Sésos- 
tris  et  Electre  :  Médée  seule  y  est 
restée  maigre  ses  nombreux  défauts  , 
jiaicequc  le  rôle  principal  est  bril- 
la ut  ,  et  propre  à  faire  valoir  les 
moyens  naturels  d'une  actrice  eu  re*- 
putation.  Sésostris  tom])adès  la  pre- 
mière représentation  ,  comme  le  té- 
moigne une  cpigramrae  de  Racine  , 
qui  devait  peut-être  plus  de  racnage- 
mcnt  à  l'auteur  ,  pour  avoir  e'te  mis 
par  lui  au-dessus  de  Corneille,  dans 
nu  Parallèle  entre  ces  deux  îragiqucs. 
«  Lon'j;epierre  ,  dit  Voltaire ,  imita 
»  les  poètes  grecs  dans  ses  tragédies, 
>»  eu  ne  mêlant  point  l'amour  à  ses 
»  sujets  sévères  et  terribles  ;  mais 
»  aussi ,  il  les  imita  dans  la  prolixité 
»  des  lieux  communs  ,  et  dans  le 
»  vide  d'action  et  d'intrigue  ,  et  ne 
>»  les  égala  point  dans  la  beauté 
»  de  l'élocution ,  qui  fait  le  grand 
y  méiite  des  poètes.  »  Longcpierrc 
mourut  à  Paris  ,  le  3i  mars  i']'i\  , 
ayant  joui  d'une  assez  grande  fortune 
et  d'une  considération  personnelle 
j»lus  grande  encore  :  il  avait  été 
proVcpieur  du  comte  de  Toulouse, 
et  du  duc  de  Charires  ,  depiis  ré- 
gent ,  enfin  secrétaire  des  comman- 
dements et  gentilhomme  ordinaire 
de  ce  dernier  prince;,  aprèf  avoir 


rcmpliU  prwnicredt  c«  plar* 
Jcdn  ,.  A— o-^ 

l  \'Vr  ^ ,  printrr  .  nr  \ 

Ravt'uiH- 
porlrnil.  ' 
<liri. 
n'ait  \^    . 
aurait  p'i 

venir  un  .«.  .i.-i,   u 
On  Voit  par  les  ou\ 
qu'il  a  faits  p.       ' 
ne,  ou  «ju'il  .1  - 

de   S         :■ 
l'alu 

sitiou  a  ciiCuic  (pit  i 
manière  an!i'»T»e  ;  < 
rapp 
den:! 

attribue  ces  progrès  a  ' 
rien  n'y  ressemble  au  1 
maître.  Dans  tous  ou  trouve  une 
Vierge  et  i'Enfanf-.T' •^"^     i<  •  ..m., .. 
gués  de  plusieurs 
Ange  d'une  l)eauté  »  i  mm,,  h 
le  \x  août  i58o.  —  Harb*»  I, 
sa  fille,  eî    r  ' 

de  celte  t' 
lement  à  la 
moins  de  suce  < 
d'une  autre   fauiiilu,  i< 
en    i''o'>, ,  U\\  rV^vT'  fl'- 
do  ( 

takh:         , 

de    Mascanides   et  dr 
lions  ^  et  dans   les  /'rr 
il  a  orné  la  nlupart  dt^ 
Venise.  —  Alexaufl-  •  • 
fils,  né  en  1-33,  s 
le   p  '   ' 

fort 

fut  emp! 
bics  de    '■ 
traits.  Il  cuiliva  411 
gravure  :  et .  rn  i  '  ' 
volir 
des     ,    .    L 

Véuitîenae  àm  ftou 


66(5 


LON 


portraits  graves  à  Teau-forte.  Les 
notices  sont  rédigées  avec  séclie- 
resse;  et  on  l'accuse  même  d'avoir, 
par  un  motif  de  jalousie  ,  omis 
celles  de  plusieurs  artistes  distin- 
gués :  il  n'a  point  oublié  d'y  mettre 
son  propre  portrait ,  ni  d'y  parler 
de  lui  d'une  manière  fort  avanta- 
geuse. Longhi  a  gravé  d'après  son 
père  quelques  sujets  de  genre.    P-s. 

LONGIN ,  nommé  par  les  anciens 
auteurs  Cassius  Longinus,  et  Lon- 
gimis  Cassius  ,  était  neveu  du  rhé- 
teur Phronton  d' Eraèse ,  que  quelques 
critiques  ont  mal  à  propos  confondu 
avec  Cornélius  Fronton,  célèbre  ora- 
teur latin  ,  et  l'un  des  précepteurs 
de  l'empereur  Marc-Aurèle.  On  ne 
sait  ni  en  quelle  ville ,  ni  en  quelle 
année  Longin  vit  le  jour.  Les  uns  ont 
cru  qu'il  était  syrien  ,  parce  que  son 
oncle  était  syrien  ;  les  autres  ,  qu'il 
était  né  dans  Athènes,  parce  que  son 
oncle  y  enseignait  la  rhétorique  et  la 
grammaire.  Ces  deux  opinions  sont 
incertaines  :  s'il  fallait  opter  ,  nous 
choisirions  la  première.  Quant  à 
l'époque  à  laquelle  il  appartient,  les 
circonstances  de  sa  vie  la  déterminent 
clairement;  et  l'on  peut,  sans  craindre 
de  se  tromper  ,  placer  sa  naissance 
vers  le  commencement  du  troisième 
siècle.  Il  nous  apprend  lui-même  que, 
dans  sa  première  jeunesse ,  il  accom- 
pagna ses  parents  dans  de  longs 
voyages ,  ou  il  trouva  l'occasion 
de  visiter  tous  les  hommes  qui  s'é- 
taient fait  un  nom  dans  la  philoso- 
phie. Il  s'attacha  particulièrement  à 
Origène  et  Ammonius  Saccas  ,  qui 
étaient  alors  les  chefs  du  platonisme, 
et  il  écouta  long -temps  kurs  leçons. 
Quand  il  crut  son  éducation  achevée , 
il  partit  pour  Athènes  ,  où  il  ouvrit 
une  école  de  philosophie  ,  selon  les 
uns ,  et  c'est  le  sentiment  le  plus  pro- 
bable; d'autres  disent  de  grammaire^ 


LON 

et  ce  root  alors  comprenait  les  belles- 
lettres  et  la  critique.  Jean  de  Sicile  , 
dans  ses  notes  sur  Hermogène  ,  dit 
que  Longin  ,  tout  entier  à  ses  élèves, 
n'avait  pas  le  loisir  de  perfectionner 
ses  ouvrages;  qu'habile  juge  des 
formes  du  style,  il  avait  lui-même 
peu  de  talent  pour  bien  écrire  ;  et  il 
le  compare  à  cet  oiseau,  dont  il  est 
parlé  dans  l'Iliade ,  qui , 

«  Pour  se»  petits  encore  sans  p1umag;e  , 
«  Va  cliercher  la  pâture,   et  supporte  la  faim.  « 

Cette  assertion  manque  peut-être 
d'exactitude.  Les  titres  nombreux 
des  écrits  de  Lgngin  prouvent 
au  moins  que  ce  n'est  pas  le  temps 
qui  lui  manquait.  Dominé  sans  doute 
par  une  extrême  facilité,  et  pressé  du 
besoin  de  produire,  il  ne  pouvait 
s'assujétir  au  travail  lent ,  pénible 
etfroidde  la  correction.  Cependant, 
si  le  Traité  du  Sublime  est  sorti  de 
sa  plume ,  on  voit  qu'il  savait 
quelquefois  se  soumettre  au  soin  de 
perfectionner  un  écrit  dont  le  sujet 
le  charmait.  Mais  Jean  de  Sicile  , 
ainsi  que  toute  l'antiquité  ,  paraît 
avoir  ignoré  que  Longin  fût  l'auteur 
de  cette  brillante  production.  On  lui 
attribue  généralement ,  et  sans  con-  ! 
testation  ,les  Philologues,  vaste  re-  i 
cueil  d'observations  mêlées  de  litté-  | 
rature  et  de  critique;  —  des  Problè-  I 
mes  et  solutions  homériques  en  deux 
livres  ;  —  quatre  Livres  des  mois  qui  ^ 
dans  Homère ,  ont  plusieurs  signifi- 
cations; —  deux  Recueils  alphabéti- 
ques des  mots  du  dialecte  atlique;— 
un  Lexique  des  mots  d' Antimaque  et 
d'Héracléon  (  cet  Héracléon  était 
sans  doute  quelque  poète  difficile  et 
obscur  );  —  des  Scholies  sur  le  ma- 
nuel métrique  d'Héphestion;  —  une 
Rhétorique;  —  des  Remarques  sur  la 
rhétorique  d'Hermogène;  —  une  Col- 
lection des  noms  des  peuples;  — 
des  Observations  sur  le  discours  de 


LON 

Dv'inostlirncs  contre  Mûlias;  —  une 
Di>>«Mlalion  sur  celle  mu\sliou  : 
<(  llomcTc  est-il  pliilosoplie  ?  »  — 
dos  (A)nnncntnircs  sur  la  préface 
du  Timëe  de  Platon  et  sur  le  Phc- 
don  j  —  diflerents  Traites  sur  les 
principes  ,  la  fin  des  biens  et  des 
maux,  la  justice  selon  Platon ,  l'amc , 
les  idées  ,  riuslinct  naturel  ;  — une 
longue  Lettre  à  Amelius  sur  la  plii- 
losopliic  de  Plotin  ;  —  un  Discours 
intitule  Odénat ,  et  qui ,  probable- 
ment contenait  ou  la  vie  ou  IVIoge 
d'Odënat  ,  roi  de  Palrayrc  ,  et  mari 
de  la  célèbre  Ze'nobie.  De  tant  d'é- 
crits et  de  plusieurs  autres,  sans 
doute  ,  dont  les  titres  ne  nous  ont 
pas  etë  conser\  es  ,  il  ne  nous  reste 
que  quelques  fragments  des  Scholies 
sur  Hëpheslion  ;  la  pre'face  du  traite 
des  Fins  ;  quelques  endroits  de  la 
Rhétorique  enfouis  dans  celle  d'Ap- 
sine  ;  un  passage  du  livre  de  l'ame  , 
et  une  portion  de  lettre  à  Porphyre. 
C'est  aujouid'hui  une  question  de 
savoir  s'il  faut  ajouter  à  celte  liste 
le  Traite'  du  Sublime  oratoire,  que 
les  éditeurs  modernes  ont  publié 
sous  le  nom  de  Venys  Loiigin  : 
«  chef-d'œuvre  de  bon  sens,  d'cru- 
))  dition  et  d'éloquence  »  ,  selon 
l'expression  de  Boilcau ,  qui  en  a  fait 
une  traduction,  excellente  en  quel- 
ques parties  ,  et  le  plus  souvent  fort 
négligée.  «  Longin  ,  dil-il ,  ne  s'est 
»  pas  contenté  de  noit^' donner  des 
»  préceptes  tout  secs  et  dépouilles 
»  d'ornements.  En  traitant  des  l)cau- 
»  tés  de  l'élocution  ,  il  a  employé 
w  toutes  les  finesses  de  l'cloc  iiîion, 
M  et,  en  parlant  du  sublime,  il  est 

»  lui  -  même   très-sublime Ca- 

»  saubou  appelle  ce  livre  un  livre 
»  d'or.  »  Les  meilleures  éditions 
de  ce  livre  précieux  sont  celles  de 
Tollius  (  1694  ) ,  de  Pearce  (  1 724  ) , 
de  Morus(  1 769),  de  Toup  (  177B), 


1  ' ,  s 
avec  d'cxrell' 

kcni 

iH 

de  IMu. ., 

tioude  I 

de  celles  -  l«i . 

diocre),quelii 

de  M.  Bast,  des  ' 

utile  collection  i] 

mi  ces  variantes.  1 

l'importance  est  c\ii.  ..i,.  i, 

manuscrit  de  Parts,  qui,  t! 

ceux  que  Ton  connaît ,     *   ' 

coup  le  plus  anrirn ,  . 

manuscrit  du  Vatican , 

nettement  ces  mot<  ; 

AorriNov,  c*< 

deLon^w;Q{\ 

par  le  manuscrit  n 

porte  ni  l'un  ni  1 

ANnNVMOr  HEPI  ïHOTi 

Du  Sufjlime,  par  un  a 
premiers  éditeurs  ont  - 
ment  par  une  néglip'^'" 
le  petit  mot  inlcrn 
fait  ralliance  peu  . 
noms  propres ,  D" 
Dans  une  not(  ' 
ke,  M.  Ami: 
variante  cl  de  lu  \n, 
ce  nom ,  veut  qu( 
blime  soit,  ou   «i 
c^irnasse ,  ou  de  1, 
plutôt  que  de  L' 
pas  qu'au  si ccled 
avec  tant  de  goût 
style  si  IV ^^'^''  '•«  -• 
Cccili^l^ 
dî;!    ■ 
d  !. 
b.V 


Un 

11. 

d. 

tru  ^  ■ 

'que  Quiutiiien  utc  «uiiveuî  ew 


,«aU« 


668 


LON 


Geci'ius  etDenys;  queTaïUeiir  n'em- 
ploie le  lemoignage  craiicun  écrivain 
postérieur  au  siècle  d'Auguste.  Il 
insiste  beaucoup  sur  ce  que  ,  vers  la 
fia  de  l'ouvrage  ,  l'auteur  a  introduit 
un  philosoplie  rëel  ou  imaginaire 
qui  regrette  la  liberté'  perdue, avec 
une  sensibilité'  si  profonde,  que  ce 
morceau  n'a  pu  être  écrit  que  par  un 
liomme  qui  avait  vécu  dans  un  état 
libre ,  ou  qui  au  moins  avait  vu  quel- 
que ombre  de  liberté  :  circonstances 
qui  ne  conviennent  en  aucune  façon 
à  Longin,  contemporain d'Aurelien, 
mais  qui  peuvent  convenir  à  Denys 
contera  porain  d'Auguste.  Il  dit  encore 
que  Suidas  ,  dans  sa  liste  des  pro- 
ductions de  Longin,  ne  parle  pas  du 
traite  du  Sublime;  que  l'auteur  cite 
deux  livres  de  sa  façon  sur  la  com- 
position des  mots ,  et  que  nous  en 
avons  un  sous  ce  titre  parmi  les  œu- 
vres de  Denys  ;  que  cette  disjonctive 
ou  indique  peut-être  que  Longin  fit 
un  abrège  de  l'ouvrage  de  Denys  , 
et  que  c'est  ainsi  que  l'on  trouve 
dans  les  manuscrits ,  par  un  ano- 
njme  ou  par  Zosime ,  par  Dion 
ou  par  Xiphilln ,  par  Cornélius  Né~ 
pos  ou  par  Frohus.  M.  Weiske  est 
fort  ébranlé  par  ces  arguments.  En 
cdet ,  il  ne  conçoit  pas  que  l'auteur 
capable  d'écrire  un  si  noble  traite, 
ait  pu  s'abaisser  à  faire  des  scholies 
surHéphesîion,ou  à  recueillir  s-che- 
ment  des  noms  de  peuples  ,  ni  ad- 
mirer, comme  il  le  fait  quelque  part , 
le  style  et  la  gravité  de  Plolin.  Pour- 
tant il  ne  peut  croire  avec  M.  Amati 
que  Denys  d'Halicarnasse  soit  l'au- 
teur de  ce  livre  :  son  style  ,  sa  ma- 
nière de  composer,  n'ont  rien  de  la 
verve ,  de  l'éclat  qui  brille  dans  le 
Traité  du  sublime.  11  aime  mieux 
l'attribuer  à  un  Denys  de  Pergame  , 
contemporain  d'Auguste  ,  et  dont 
Strabon  a    loué  le   talent    conime 


LON 

rbéteur  et  comme  écrivain.  Nous  ^ 
devons  convenir  qu'il  est  désormais 
absolument  impossible  d'affirmer  ^ 
que  le  Traité  du  sublime  soit  de  Lon- 
gin :  toutefois  il  semble  peu  naturel 
de  le  donner  à  Denys  d'Halicarnasse, 
ou  à  Denys  de  Pergame,  ou  à  tout  autre 
écrivain  du  siècle  d'Auguste.  On 
trouve  dans  le  chapitre  septième  ce 
passage  fort  remarquable ,  que  nous 
transcrirons  d'après  la  traduction 
très-fidèle  de  Boileau  :  «  Le  législa- 
»  teur  des  Juifs  ,  qui  n'était  pas  un 
y>  liomme  ordinaire  ,  ayant  fort  bien 
»  conçu  la  grandeur  et  la  puissance 
»  de  Dieu  ,  l'a  exprimée  dans  toute 
»  sa  dignité,  au  commencement  de 
»  ses  lois  ,  par  ces  paroles  :  Dieu 
»  dit  :  Que  la  lumière  se  fasse  ,  et 
»  la  lumière  fut  faite  :  Que  la  terre 
»  se  fasse ,  et  la  terre  fut  faite.  » 
Boiicau  a  soutenu  la  sublimité  de  ce 
passage  contre  Huel  et  Leclerc:  mais 
ce  n'est  pas  ici  ce  qui  nous  intéresse. 
Nous  demanderons  à  M.  Amati  s'il 
croit  sérieusement  que  les  livres  juifs 
fussent ,  au  temps  de  Denys  ,  assez 
connus ,  assez  répandus,  pour  qu'un 
rhéteur  gre<"  y  allât  puiser  des  exem- 
ples. Mais  Longin,  au  siècle  d'Auré- 
lien,  a  pu  citer  Moisc  :  il  vivait  dans 
un  temps  où  les  philosophes  païens , 
fréquemment  aux  prises  avec  les 
docteurs  du  christianisme  ,  étaient 
forcés  de  lire  et  d'étudier  les  li- 
vres de  cette  religion  nouvelle  dont 
les  progrès  devenaient,  de  jour  en 
jour  ,  plus  alarmants  pour  eux.  On 
pourra  objecter  que  ce  passage  a  été 
interpolé  :  mais  il  l'aurait  été  sans 
doute  par  un  chrétien  ;  et  un  cliré- 
tien  n'eût-il  donné  à  Moïse  que  le 
faible  éloge  de  n'être  pas  un  homme 
ordinaire?  Il  n'eût  pas,  non  plus , dé- 
signé la  Genèse  par  le  titre  inexact  de 
lois  de  Moïse.  Leclerc  a  pensé  que 
le  passage  a  été  ajouté  après  coup  , 


I/)N 

mais  par  î-on<j;ln  lui-ra<*nir  ^  qui  , 
s'clant  allache  vers  la  fin  tle  sa  \-ie 
à  la  rcincile  Palinyre, voulut ,  pour 
lui  être  aj;rcable,ciler  un  passage  de 
Moise  :  car  Zënobic  était  juive  (  i  ) , 
s'il  faut  admettre  le  témoignage  de 
quelques  Pères  ,  qui  pourraient  bien 
n'avoir  pas  été  très-éclairés ,  et  que 
l'on  a  même  accusés  d'avoir  en  ceci 
manqué  de  sincérité.  Au  reste  ,  cette 
réponse  ne  satisfait  pas  à  toutes  I  es  dif- 
ficultés ,  ne  répond  pas  à  toutes  les 
objections  ;  il  en  est  une  qui  nous 
jtaraît  de  la  plus  grande  force  :  c'est 
qu'on  ne  trouve  dans  ce  traité  le  nom 
d'aucun  écrivain  postérieur  à  Au- 
guste. Comment  concevoir  que  Lon- 
gin,  ce  grand  littérateur,  ce  philo- 
logue éminent  ,  dont  Eunape  a  dit 
livperboliquement  ,  qu'il  était  une 
hihliotlièque  vivante  et  un  musée 
ambulant  ,  ait  négligé  do  montrer 
un  peu  d'érudition  et  de  lecture 
dans  un  sujet  si  fécond  ?  Peut-être 
que  la  sévérité  excessive  de  son  goût 
ne  lui  offrait  pas  un  seul  exemple 
de  véritable  sublime  hors  des  pages 
classiques  de  la  haute  littérature: 
mais  parmi  les  poètes  et  les  orateurs 
mal  inspirés  des  écoles  récentes  de  la 
Grèce  et  de  l'Asie,  ne  pouvait-il  pas 
trouver  des  modèles  frappants  d'en- 
flure, de  recherche  et  d'aflectation  ? 
Cette  dilTiculté  nous  semble  considé- 
rable.Quoi  qu'il  en  puisse  être ,  main- 
tenant que  les  manuscrits  ,  lus  avec 
plus  d'attention,  nous  ont  jetés  dans 
urje  complète  incertitude  sur  le  vé- 
ritable nom  de  l'auteur ,  on  pourra 
disputer  pour  Dcnys  ou  pour  Lon- 
gin ,  sans  jamais  arriver  à  un  résultat 
positif,  à  moins  que  d'autres  ma- 
nuscrits ou  quelques  témoignages  ne 
\iennent  éclairer  et  fixer  la  question. 


)  V«y     lA;clerc,    Bibt.   artc.,X.     Xllll,     P    W» 

Jf.iïe.   Hiu.   de   Zinotlr,    i<.  ai4i   KithukcD, 


J^^if.  d»  I.tngwig  ,  pat  H 


D'ici  là  1 

ront  le  I 

eu  boni). 

dans  Iciii   ..<.,.  ^ 

lAtngin.  Au  reste  .  ' 

ccrtiludf  ' 

gin  à  r.(r 

comme  (.nti'j 

sa  vie  poliiifji;   . 

nuage  ne  s'élève  ,  ^ 

sacrer  sa  mémoirr. 

de  longues  am 

publié  les  nnn 

nous  avons  indiques ,  il  I 

en  Orient,  oi»  il  était  aj^., ..  ,....  .. 

nobie  ,  reine  de  Palmvrc ,  qui  ,  cu- 
rieuse   d'apprendre    la    littérature 
grecque ,  voulut  avoir  pour  maître 
le  premier  critique  de  ^ 
l'homme  qui ,  de  l'aveu 
sait  pour  l'oracle  infaillilj'c 
Après  la    mort  d'Odenat  ,    i 
devint   le  principal   mi'  ■  " 
reine,  et  l'aida  (le  ses  ( 
la  lutte  glorieuse  qu'«  1  <it 

contre  les  armées  d'An  .  > 

de  longs  eflorts,  c 
vint  à  se  rendre  mûiii-    .    :.::       , 
et  il  déshonora  sa  victoire  par  le 
supplice  de  Longin  ,  qu'il  .ir-  ".i;» 
d'avoir  dicté  k  la  reine  une  1' 
solente.  Celle  lettre  que  l'on  |)t 
dans  Vopiscus,  ou  dans  la 
de  Boilcau ,  est  noble ,  ( 
d'une  reine.   Si  Aiirtli»  i 
ennemi  généreux,  bien  loin  il 
nir,  il  aurait  dû  admirer  \r  i 
courageux  qui  avar 
souveraine  ce  l.mc 
té.  Longin  si 
grande  iutré}!.: 
tne  ses  amis  qui  ] 
destinée  si  lri>tc  i 
Rien  ne  parut  abat! 
pas  même  l  ingrat  r 
(pli ,  pour  se  cou 
du  vainqueur,  et  taire 


670 


LON 


innocence  ,  avait  rejeté  sur  ses  plus 
fidèles  serviteurs  ,  et  particulière- 
ment sur  Longiii ,  tout  l'odieux  de 
la  guerre  qu'elle  avait  ose  soutenir 
contre  les  armes  romaines.  Ainsi 
périt  ce  grand  homme,  en  l'an  278 
de  J.  G.  B — ss. 

LONGÏN  (Flavius  Longinus)  , 
d'une  famille  patricienne,  fut  envoyé 
par  l'empereur  Justin  le  jeune ,  pour 
remplacer  INarsès  dans  le  gouverne- 
ment de  l'Italie.  Ayant  débarque'  à Ra- 
venne,  au  commencement  de  l'année 
5(38  ,  il  fixa  sa  résidence  en  cette 
ville  ;,  pour  être  plus  à  portée  de 
recevoir  des  secours  de  Constanti- 
nople,  en  cas  d'invasion  des  Bar- 
bares. Il  affecta  de  s'éloigner  en  tout 
de  la  conduite  de  son  prédécesseur  , 
prit  le  tilre  à'cxarque  ,  réservé 
ju.squ'alors  aux  gouverneurs  d'Afri- 
que, supprima  les  anciennes  charges, 
et  en  créa  de  correspondantes  avec 
des  titres  différents  ,  éloigna  des  af- 
faires publiques  tous  ceux  qui  avaient 
eu  part  à  la  conliance  de  Narscs,  en 
un  mot  n'épargna  rien  pour  élendre 
et  affermir  son  autorité  (  i  ).  Longin  , 
à  peine  arrivé,  eut  à  se  garantir  des 
attaques  des  Lombards  ;  en  consé- 
quence ,  il  fit  fortifier  Ravenne  et 
quelques  autres  villes  de  la  Vénétie, 
où  il  plaça  des  garnisons  :  mais  Al- 
bo'in  ,  chef  des  Lombards  ,  traverse 
les  Alpes  ,  dont  Longin  n'avait  pu 
faire  garder  les  déiilés ,  pénètre  dans 
l'Italie  ,    s'empare    d'Aquiîée  ,    de 


(1)  Elle  était  presque  illimitée,  et  ses  siuccs- 
«eiirs  raccriirent  encore.  La  condition  des  exar- 
que», dit  Saint-Blaïc,  fut  celle  des  salrnpes 
sens  le»  rois  de  Perse  :  mais  ils  étaient  triliutai- 
Ves 
de 


LON 

Vicence,  et  de  plusieurs  autres  places 
laissées  à  la  garde  de  leurs  habitants; 
il  partage  à  ses  soldats  le  pays  qu'ils 
venaient  de  conquérir  ,  et  met  à  leur 
tête  son  neveu  Gisulf ,  qui  prend  le 
titre  de  duc  de  Frioul.  Longin  , 
enfermé  dans  Ravenne  avec  quelques 
soldats,  se  bornait  à  garantir  cette 
province  et  le  duché  de  Rome, 
d'une  invasion.  Gependant  le  roi 
des  Lombards ,  au  milieu  de  ses 
conquêtes  ,  tombe  sous  les  coups 
d'un  assassin ,  que  sa  femme  Ros- 
monde  avait  elle-même  armé.  (  Voy. 
Alboïn.  )  Rosmonde  ,  craignant  la 
vengeance  des  Lombards,  deman- 
de un  asile  à  Longin ,  et  se  retire 
auprès  de  lui  ,  emmenant  Almi- 
childe,  son  nouvel  époux  ,  et  tous 
les  trésors  d'Alboin.  Longin  ,  épris 
des  charmes  de  Rosmonde  ,  lui  pro- 
pose sa  ipain  et  le  tronc  de  l'Italie  : 
cette  femme  ambitieuse  et  perfide 
présente  à  Almichilde  une  coupe 
empoisonnée  ;  mais  celui-ci ,  ayant 
ressenti  aussitôt  les  effets  du  poison  , 
force  Rosmonde  d'avaler  le  reste  de 
la  liqueur,  et  ils  expirent  tous  deux. 
Longin  s'empare  des  trésors  d'Al- 
boin, et  les  envoie  à  l'empereur,  qui 
lui  témoigna  sa  reconnaissance  en 
augmentant  ses  revenus  et  son  au- 
torité. Cependant  l'exarque,  ne  rece- 
vant point  de  secours  de  Conslanti- 
nople  ,  ne  pouvait  s'opposer  aux 
Lombards,  dont  la  puissance  s'affer- 
missait chaque  jour.  L'empereur 
Maurice  le  rappela  en  584,  ^^  nom- 
ma en  sa  place  Sibaragde,  qui  avait 
la  réputation  d'être  plus  guerrier. 
Depuis  cette  époque  l'histoire  cesse 


,    Ft   T>ouT-aieiitôtre  révoqués.  (  Abr,   chron.        i  i  i       t  •  iir 

î'Uist,  dHaUe,i,^.bà.)  déparier  de  Longin.         W — s 


FIN    DU    VINGT-QUATRIEME    VOLUME. 


0    ' 


r 


CT     Biographie  universelle^ 
H3       ancienne  et  nodeme 

M5 
t. 2^ 


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